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Version finale

40e législature, 1re session
(30 octobre 2012 au 5 mars 2014)

Le mercredi 27 novembre 2013 - Vol. 43 N° 34

Consultations particulières et auditions publiques en vue d’étudier l’acceptabilité pour le Québec du projet proposé par Enbridge Pipelines inc. sur le renversement vers l’est du flux de l’oléoduc 9B situé entre North Westover et Montréal décrit notamment dans le document intitulé « Inversion du flux de l’oléoduc 9B d’Enbridge »


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Table des matières

Auditions (suite)

Énergie Valero inc.

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Association industrielle de l'est de Montréal (AIEM)

Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ)

Chambre de commerce de l'est de Montréal

Chambre de commerce de Lévis

M. Pierre-Olivier Pineau

Autres intervenants

Mme Marie Bouillé, présidente

Mme Élaine Zakaïb

M. Scott McKay

M. Luc Trudel

M. Gerry Sklavounos

M. Sam Hamad

M. Donald Martel

M. Amir Khadir

M. Alain Therrien

M. Denis Trottier

*          M. Ross R. Bayus, Énergie Valero inc.

*          Mme Norma Kozhaya, CPQ

*          Mme Françoise Bertrand, FCCQ

*          M. François-William Simard, idem

*          M. Dimitri Tsingakis, AIEM

*          M. Simon Prévost, MEQ

*          M. Denis Risler, Chambre de commerce de l'est de Montréal

*          Mme Isabelle Foisy, idem

*          M. Jérôme Jolicoeur, Chambre de commerce de Lévis

*          M. Daniel Beaudoin, idem

*          M. Jérôme Gaudreault, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures quarante-six minutes)

La Présidente (Mme Bouillé) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'alimentation... de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie aujourd'hui afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques en vue d'étudier l'acceptabilité pour le Québec du projet proposé par Enbridge Pipelines sur le renversement vers l'est du flux de l'oléoduc 9B situé entre North Westover et Montréal décrit notamment dans le document intitulé Inversion du flux de l'oléoduc 9B d'Enbridge.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Goyer (Deux-Montagnes) est remplacé par M. Therrien (Sanguinet); M. Billette (Huntingdon), par M. Hamad (Louis-Hébert); M. Morin (Côte-du-Sud), par Mme Boulet (Laviolette); M. Paradis (Brome-Missisquoi), par M. Sklavounos (Laurier-Dorion).

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. Je veux aviser les membres de la commission que la compagnie Enbridge souhaite le dépôt d'un document concernant ce qui a été discuté hier, en particulier lorsqu'il y a une urgence, le modus operandi, disons, de la compagnie, en cas de...

Une voix : Consentement.

La Présidente (Mme Bouillé) : Oui, mais c'est la présidente qui accepte ou refuse le document, M. le député. Donc, ce document-là, j'accepte de le déposer à la commission. Il sera mis sur le site Internet, et vous recevrez une copie, chaque membre de la commission, par rapport au document intitulé Renseignements importants en matière de sécurité à l'intention des intervenants en cas d'urgence, Pipelines Enbridge. Voilà.

Auditions (suite)

Ce matin, nous entendrons les représentants d'Énergie Valero ainsi que du Conseil du patronat du Québec. Je souhaite donc la bienvenue aux représentants d'Énergie Valero. Messieurs, vous disposez d'une période de 10 minutes pour votre exposé, qui sera suivie d'un échange. À vous la parole.

Énergie Valero inc.

M. Bayus (Ross R.) : Merci beaucoup. Bonjour, Mme la Présidente, Mme la ministre et MM. et Mmes les membres de la commission.

C'est avec grand intérêt que nous avons pris connaissance du document de consultation déposé le 13 novembre par le gouvernement du Québec portant sur le projet d'inversion du flux de l'oléoduc 9B d'Enbridge. Nous souhaitons apporter notre perspective dans cet important dossier, ce qui, nous l'espérons, permettra d'éclairer les travaux des membres de la commission.

Je tenais à venir en personne aujourd'hui en raison de l'importance de ce projet pour nos activités, l'ensemble de l'industrie de raffinage et les secteurs connexes au Québec. Je suis Ross Bayus. Je suis le président des activités canadiennes pour la compagnie Valero Energy Inc., Énergie Valero inc., dans le bon français. Je suis, pour l'occasion, accompagné de M. Louis Bergeron, à ma gauche, vice-président, Gestion des terminaux et Pipeline Saint-Laurent, et de M. Michel Martin, qui est directeur principal des affaires publiques et gouvernementales.

Énergie Valero, autrefois connue au Canada sous le nom d'Ultramar ltée, est depuis 2001 une filiale en propriété exclusive de Valero Energy Corporation. Par ailleurs, nous sommes une entreprise aux activités industrielles et commerciales implantée ici depuis plusieurs décennies.

• (11 h 50) •

Valero est un des plus grands raffineurs indépendants du monde avec 16 usines d'une capacité totale de raffinage de près de 3 millions de barils de pétrole brut par jour. L'an dernier, notre société a investi environ 3 milliards de dollars dans l'ensemble de ses installations. Les revenus de Valero étaient de 139 milliards en 2012, et la compagnie est classée neuvième dans la «Fortune 500», la Fortune 500, avec une capitalisation boursière de 20 milliards. Je crois, aujourd'hui, que c'est rendu à 24 milliards, parce que l'action vient de monter un petit peu.

Valero occupe une place importante dans l'économie de l'Est du Canada et particulièrement dans les secteurs du raffinage et de la distribution de produits pétroliers. L'entreprise fournit les combustibles et carburants à de nombreux commerces, institutions et usines ainsi qu'à d'importants acteurs dans les domaines du transport aérien, maritime, ferroviaire et routier. Elle approvisionne de nombreuses entreprises actives dans le secteur de vente au détail, dont le réseau exploité sous la marque Ultramar. La capacité nominale de raffinage est de 265 000 barils par jour à Lévis, ce qui représente environ les deux tiers de la capacité de production du Québec et près de 30 % de la capacité combinée des sept usines du Québec et de l'Ontario. Nous sommes très conscients de cette importante responsabilité que nous avons.

Les dépenses d'exploitation et les investissements de Valero au Canada, en excluant les coûts d'acquisition du pétrole brut, dépassent 600 millions par année, dont l'essentiel est dépensé au Québec. D'ailleurs, les investissements en immobilisations de Valero au Canada ont dépassé 3 milliards de dollars depuis 2001, encore une fois surtout au Québec.

En ce qui concerne ses infrastructures québécoises, Valero exploite, à Montréal-Est, le plus important terminal pétrolier du genre au Canada. Celui-ci procure des emplois à une cinquantaine de personnes, et son débit annuel a augmenté de près de 50 % au cours de la dernière décennie, suite à des investissements d'environ 80 millions de dollars durant cette période. À la fin 2012, l'entreprise a également mis en service le Pipeline Saint-Laurent, que vous connaissez. Construit au coût de près de 400 millions, ce pipeline sert dorénavant de véritable lien logistique stratégique permettant d'alimenter de façon continue et sécuritaire notre terminal pétrolier de Montréal-Est.

Valero possède, au Québec, une usine de calibre mondial — et ce n'est pas juste parce que c'est notre raffinerie, c'est connu à travers l'Amérique du Nord : la raffinerie Jean-Gaulin de Lévis, un chef de file dans le domaine de la transformation. Elle compte 500 employés permanents, plusieurs centaines de contractuels et génère des milliers d'emplois indirects. D'importants investissements successifs ont forgé la renommée de la raffinerie. Effectués particulièrement au cours de la dernière décennie, ces investissements ont été réalisés afin d'en accroître la capacité de production ici, mais également d'en améliorer le rendement et la fiabilité. En tout, ce sont plus de 2 milliards de dollars qui ont été investis à Lévis depuis 2001. Ces investissements majeurs ont rendu la raffinerie Jean-Gaulin très efficace, en particulier en matière d'intensité des émissions de gaz à effet de serre, ce qui la place d'ailleurs loin en tête de peloton à l'échelle canadienne. Il n'y a pas une autre raffinerie qui nous approche en termes d'efficacité gaz à effet de serre.

Implantée au Québec depuis 1971, la raffinerie Jean-Gaulin est tout de même une jeune raffinerie, une jeune usine, lorsqu'on considère qu'aucune nouvelle raffinerie de pétrole ne s'est construite au Canada ni aux États-Unis au cours du dernier quart de siècle. En fait, ce sont six raffineries qui ont annoncé leur fermeture depuis 2008 dans le nord-est de l'Amérique du Nord, y compris une à Montréal-Est en 2009, et, plus récemment, celle à Dartmouth en Nouvelle-Écosse, confirmée il y a quelques mois seulement. De plus, les propriétaires de la raffinerie Come By Chance à Terre-Neuve ont récemment annoncé sa mise en vente.

La réglementation plus stricte sur les produits, qui nécessite des investissements massifs, combinée à la récession récente et l'incertitude concernant les marges disponibles dans le marché ont été les facteurs qui ont causé la fermeture de ces raffineries et plusieurs autres qui étaient reconnues comme les plus vulnérables. La portion des biocarburants aussi a affecté un peu l'incertitude pour le futur et déplacé les hydrocarbures.

Notre défi, pour nous, c'est de nous adapter et même de prendre les devants, sinon nous risquons d'être marginalisés et devenir non concurrentiels. Nous avons traité plus de 25 types de pétroles bruts différents à Lévis depuis 10 ans. C'est une activité en continu pour nous. Ce sont là des actions nécessaires pour garantir notre compétitivité, et c'est une façon de s'adapter aux marchés mondiaux, qui évoluent aussi de façon continue.

Le document de consultation résume clairement les importants changements en cours concernant l'approvisionnement mondial en pétrole brut. Les transformations majeures observées depuis quelques années concernant les conditions d'approvisionnement du marché ont eu des répercussions majeures sur le prix du pétrole brut.

J'essaie d'aller plus vite pour rester dans mon temps.

Pour Valero, qui exploite à Lévis une raffinerie de classe mondiale, cette nouvelle réalité est fondamentale, compte tenu de la responsabilité que nous assumons en matière d'approvisionnement. En effet, pour une usine comme la raffinerie Jean-Gaulin, le coût d'acquisition de la matière première représente, en 2012, 90 % à 95 % de tous les frais d'exploitation. Même un écart de prix de 1 $ le baril de pétrole brut a des conséquences importantes pour sa compétitivité, surtout lorsque l'on sait que la marge bénéficiaire nette moyenne du secteur pétrolier aval canadien — ça veut dire, «aval», le raffinage et marketing — est d'environ 0,02 $ par litre net. Or, nous prévoyons que l'écart de prix favorisant le pétrole de l'Ouest restera attrayant pour les années à venir.

L'enjeu le plus pressant pour s'assurer que les raffineurs québécois puissent continuer de fabriquer ici des produits pétroliers consommés localement, c'est l'accès au pétrole brut léger, compatible avec nos activités et le moins cher possible. L'inversion du pipeline 9B d'Enbridge, pour nous, est devenue une nécessité.

Ce brut de l'Ouest a déjà commencé à être envoyé par wagons, navires et pipelines, nouveaux et redirigés, vers des centres de raffinage partout en Amérique du Nord. Ne pas utiliser ce brut compromettrait notre position concurrentielle et exposerait ce qu'il reste de nos activités de raffinage et de pétrochimie au Québec à des risques inutiles.

La configuration de la raffinerie Jean-Gaulin de Valero de Lévis ne permet pas d'y traiter des pétroles lourds. Nous prévoyons ainsi que les pétroles bruts synthétiques valorisés, de schistes ou d'autres types de bruts légers, que nous utiliserons d'abord en petites quantités par le transport ferroviaire déjà amorcé, mais en proportion beaucoup plus importante dans l'éventualité de l'inversion de la canalisation 9B, amélioreraient le bilan environnemental de notre raffinerie. En fait, c'est un pétrole qui est plus léger que le pétrole qu'on utilise aujourd'hui. On produit encore une meilleure qualité de produit.

Le projet d'inversion du pipeline 9B entraînerait un investissement total de près de 200 millions de dollars pour Valero, dont la plus grande partie serait consacrée à nos installations de Montréal-Est. Valero a pris des engagements substantiels reliés à ce pipeline, et ceci représente environ 50 %, seulement 50 % de nos besoins actuels en pétrole brut. Ça veut dire que notre appétit est beaucoup plus large que simplement la capacité que nous avons sur la ligne 9.

Nous comptons recevoir, par l'entremise du pipeline 9B inversé, les bruts de l'Alberta, Saskatchewan ou Dakota du Nord. Ce sont tous des bruts légers semblables à ceux que nous raffinons actuellement, mais plus propres, étant donné qu'ils contiennent moins d'impuretés.

Du total de 200 millions de dollars investi, 140 millions de ce 200 millions de dollars sont nécessaires pour nous préparer à recevoir ces bruts à nos parcs de réservoirs, nos quais et nos installations de chargement, surtout à notre terminal de Montréal-Est. Ceci amènerait une création d'environ 200 emplois pendant la période de construction.

Nous devrons acheter deux navires de grandeur Panamax à la fine pointe de la technologie pour transporter ces pétroles bruts de notre terminal de Montréal-Est jusqu'à la raffinerie de Lévis, en partenariat, nous espérons, toujours avec un exploitant maritime local. Et ça va créer certainement environ 100 — ou si ce n'est pas un peu plus que 100 — nouveaux emplois.

En conclusion, la société québécoise doit s'assurer qu'elle demeure compétitive, prospère et se dote de sources d'approvisionnement sécurisées. Dans le cadre d'une stratégie énergétique équilibrée, l'offre de carburants du futur sera plus diversifiée. Les biocarburants, le gaz naturel, l'électricité, l'hydrogène et les produits pétroliers auront tous un rôle à jouer. Chacun trouvera finalement sa niche.

Pour qu'une industrie locale de raffinage puisse rester concurrentielle et efficace, l'environnement économique doit favoriser l'investissement et les croissances. L'écart de prix entre les pétroles joue en notre défaveur depuis déjà trois ans. Les raffineries d'ici ne pourront pas subir de telles conditions indéfiniment. La réalisation du projet d'inversion de l'oléoduc 9B permettrait d'avoir enfin accès à une matière première de qualité à un coût d'acquisition qui assurerait la compétitivité des raffineries québécoises. Nous sommes chanceux — d'après moi, nous sommes très chanceux — de pouvoir compter sur l'option que constitue le pipeline 9B comme solution immédiate et sécuritaire. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant procéder à la période de questions et échange avec les parlementaires, en commençant par la partie gouvernementale. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Je tiens d'abord à saluer mes collègues de l'Assemblée nationale, messieurs de Valero.

Hier, certaines questions ont été posées à Enbridge, et je me suis rendu compte que peut-être la question devrait vous être posée à vous. Parce qu'Enbridge, ce qu'il fait, c'est transporter du pétrole. Vous allez être le client ultime... un des deux clients ultimes de ce pétrole qui, si renversement il y a, proviendrait de l'Ouest. Parce que présentement il y a du pétrole qui voyage dans le pipeline qui part de l'est vers l'ouest.

Ma première question : Quelle est la différence entre le pétrole qui voyage présentement dans ce pipeline, donc de l'est vers l'ouest, et celui qui partirait de l'ouest pour s'en venir vers l'est? Vu que vous êtes l'acheteur, vous allez me dire ce que vous allez acheter, finalement, comme pétrole.

• (12 heures) •

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de Valero, Énergie Valero.

M. Bayus (Ross R.) : Merci. Nous ne sommes pas participants sur le pipeline qui transporte le pétrole de l'est vers l'ouest. Ce pipeline-là dessert la raffinerie à Montréal plus les raffineries qui sont dans l'ouest de l'Ontario. Puis aujourd'hui il y a de moins en moins de pétrole dans ce pipeline-là. C'est quasiment vide, à ce point-ci, à partir de Montréal vers Toronto. Je ne peux pas parler pour la qualité des genres de brut qui sont mis dans ce pipeline, vu qu'on n'est pas acheteurs. Tous nos produits viennent par bateaux, des gros bateaux, d'outre-mer, pour arriver directement à notre quai à Lévis. Mais je présume que, dans le pipeline qui existe aujourd'hui, ce qu'on appelle le Portland Pipe Line, il y a toutes sortes de différents bruts qui ont été commandés par les différentes raffineries dans le passé. Je crois que peut-être les compagnies à Montréal seront plus capables de vous répondre exactement à cette question-là.

Mais je peux peut-être élaborer un peu plus en disant que le pétrole que nous prévoyons faire parvenir de l'Ouest Canada, pour nous, est une qualité de produit, en moyenne, qui est supérieure au produit que nous sommes capables d'acheter aujourd'hui dans ce qu'on appelle le bassin atlantique. Le produit est plus propre, il a moins de soufre, moins de contaminants, et on en produit beaucoup moins, de mazout lourd, dans le procédé de raffinage. Comme ça, pour nous, en termes de qualité de produit, nous trouvons que ça va nous mettre dans une meilleure position sur le bilan énergétique au Québec vis-à-vis ce genre de produit là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Des personnes ou des groupes prétendent que le pétrole qui proviendrait de l'ouest vers l'est serait plus corrosif et que ce pétrole-là proviendrait... et/ou, là, que ce pétrole-là proviendrait des sables bitumineux. Qu'avez-vous à répondre à cette question-là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants d'Énergie Valero?

M. Bayus (Ross R.) : Merci. Je crois que les gens font référence au pétrole qui n'est pas traité, c'est le pétrole lourd. Puis nous, nous allons acheter que du pétrole léger pour mettre dans le pipeline d'Enbridge. Il y a une possibilité que quelqu'un peut choisir de mettre une petite portion de pétrole lourd dans le pipeline Enbridge, mais on se fie beaucoup à des études scientifiques, pour nous, et des preuves qui ont été mises en place dans l'Ouest canadien depuis 30 ans. Puis tous les résultats que nous avons dans les études scientifiques nous indiquent qu'il n'y a pas plus de corrosion avec les produits qui viennent de l'Ouest Canada dans les pipelines versus un autre type de brut. Ce n'est simplement pas le cas.

La Présidente (Mme Bouillé) : Mme la ministre.

Mme Zakaïb : J'ai une dernière question puis après je vais passer la parole à mes collègues. Vous prétendez qu'il y a un avantage concurrentiel important dû au prix du pétrole qui provient de l'Ouest. Est-ce que ce prix-là ou cet avantage est durable, selon vous, ou, maintenant que le pétrole de l'Ouest va avoir trouvé un débouché, on ne va pas se retrouver, à un moment donné, avec les prix à parité? Et, si oui, quelle est la longueur de temps, l'échéance, selon vous, pour que ce prix atteigne la parité?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Bayus (Ross R.) : Merci. Nos prévisions nous indiquent que le différentiel entre l'ouest du milieu du continent versus le bassin atlantique va demeurer en place pour plusieurs années à venir. Puis c'est basé sur l'utilisation de brut dans le bassin atlantique par le continent asiatique et versus la croissance de production dans l'Ouest Canada et aussi dans les champs à Bakken dans le mi-continent. Puis nous sommes prêts à inverser parce que nous croyons que le différentiel va demeurer en place.

Éventuellement, dans un monde parfait, c'est vrai que les bruts vont trouver un certain équilibre à un moment donné. On est très loin de cet équilibre aujourd'hui. Puis nous autres, on fait face, aujourd'hui, à des conditions très immédiates, pour nous. On veut régler la situation aujourd'hui pour les prochains trois à cinq ans pour les consommateurs de Québec. C'est important d'agir rapidement.

Puis je peux vous donner peut-être un petit exemple pour vous informer, en plus, de qu'est-ce qui se passe à l'extérieur de Québec. C'est que, même à Texas, il y a une grande production... croissance de production d'huile de schiste, énormément, qui repousse beaucoup les barils qui viennent de la «Mediterranean», hein? Comme ça, on repousse le «Saharan», tous les légers, on les repousse vers l'Europe et vers l'Asie. Et ça persiste déjà depuis un an ou plus. Et, encore, le différentiel entre ce qu'on appelle le WTI et le brent persiste. Ça veut dire que nos changements ici, au Québec, c'est une petite goutte dans l'océan de pétrole. Même dans le U.S. Gulf Coast, ils ne sont pas capables, aujourd'hui, avec tout le déplacement de ce produit de l'Europe, de changer le différentiel. Ça nous indique que ça va durer encore une secousse.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Repentigny.

M. McKay : Oui, merci. Bonjour. Avec ce que vous venez de nous dire, je pense que vous venez de déboulonner, là, un certain mythe ou une croyance qui a été perpétuée par certaines personnes, comme quoi ce renversement de pipeline servirait essentiellement à transporter du pétrole lourd des sables bitumineux, alors que ce qu'on semble plutôt constater, c'est que, dans le fond, au Québec et, disons, dans le nord-est de l'Amérique, se concentrent maintenant les seules raffineries qui sont équipées pour traiter du brut léger, si j'ai bien compris ce que vous nous dites.

Donc, on se retrouve, d'une certaine façon, dans une situation géoéconomique un peu unique puis un peu... peut-être... J'aimerais savoir si vous... Bien, probablement, si vous êtes dans ce créneau-là, que vous y voyez des avantages au niveau économique. Moi, je veux voir aussi au niveau environnemental. Vous êtes déjà la raffinerie qui a l'intensité d'émission de gaz à effet de serre la plus basse, avec, donc, ce nouveau brut léger. Est-ce que vous prévoyez encore améliorer votre efficacité? Puis est-ce que vous êtes d'accord que, dans le fond, l'oléoduc 9B d'Enbridge pourrait... devrait servir de façon prioritaire à alimenter le Québec en pétrole léger? Bon, on sait, vous avez mentionné les sources de Bakken, il y a du léger synthétique d'Alberta, puis aussi du léger qui vient de Saskatchewan, puis on parle même, aux États-Unis, de Eagle Ford. Est-ce que ce serait exact?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de...

M. McKay : ...

La Présidente (Mme Bouillé) : Est-ce que votre... M. le député?

M. McKay : Oui. Donc, est-ce qu'on va améliorer les émissions de gaz à effet de serre de votre raffinerie? Puis est-ce que, donc, on peut conclure que cet oléoduc-là, ce renversement-là va servir en très grande majorité ou de façon prioritaire à alimenter le Nord-est américain en brut léger?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs d'Énergie Valero.

M. Bayus (Ross R.) : Merci. Oui, c'est vrai. Le pipeline, en ce qui concerne notre volume, sera complètement des pétroles légers. Vous savez, dans la province de Québec, il faut mettre de l'asphalte, il faut paver des rues de temps en temps, comme ça il y a peut-être certains acteurs qui vont vouloir quelques barils de plus lourd pour servir à produire un peu de bitume pour qu'on soit capables de réparer nos infrastructures. Mais, principalement, ça va être un produit léger qui sera injecté dans le pipeline, de différentes sources.

En ce qui concerne les gaz à effet de serre, ce n'est pas seulement la valeur de ce produit qui va différencier davantage notre raffinerie en termes de gaz à effet de serre, c'est aussi le transport. Il faut considérer le cycle de vie complet d'un produit de matière première. Juste pour vous donner un petit portrait, nous achetons du pétrole brut qui vient du Kazakhstan. Il faut que ça passe dans un train, dans une voie ferrée jusqu'à la mer Noire, c'est mis dans un bateau, le bateau arrive à Québec, c'est transporté à Montréal après. C'est beaucoup, beaucoup de manutention, en ce qui concerne les gaz à effet de serre. Le pipeline, c'est beaucoup plus efficace en termes de qualité de gaz à effet de serre... les émissions de gaz à effet de serre. Comme ça, il n'y a pas seulement la valeur du produit, mais aussi la qualité qui parvient du changement de logistique en termes de la façon qu'on arrive ici, au Québec, avec le produit. Comme ça, je pense que le bilan doit apporter une certaine amélioration, en général, oui. Est-ce que j'ai bien répondu à vos...

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci, merci.

M. McKay : Certainement. Puis éventuellement...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Repentigny!

M. McKay : Excusez.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Saint-Maurice, en moins d'une minute.

• (12 h 10) •

M. McKay : Il serait peut-être intéressant de le documenter.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Repentigny, s'il vous plaît!

M. Trudel : Moins d'une minute. Deux thèmes quand même importants. Tout d'abord, vous opérez déjà des oléoducs, vous avez une expertise dans tout le domaine de la sécurité, et je crois que vous avez été appelés à jouer un rôle important, cet été, dans le cadre des opérations, là, qui sont arrivées au Lac-Mégantic. J'aimerais vous parler un peu de votre expertise dans le domaine de la sécurité, comparer un peu le niveau de sécurité parmi les différents modes de transport. Puis, bon, probablement il n'aura pas le temps pour d'autre chose. On correspondra.

La Présidente (Mme Bouillé) : Il reste 15 secondes.

M. Bayus (Ross R.) : Oui…

La Présidente (Mme Bouillé) : En 10 secondes. Je m'excuse, mais en…

M. Bayus (Ross R.) : Bien, oui, nous avons notre expérience avec notre Pipeline Saint-Laurent, beaucoup d'inspections, on est très confiants. On voit quasiment un miroir, en termes des activités d'Enbridge vis-à-vis les technologies.

Lac-Mégantic, oui, nous avons joué un rôle assez important pour éteindre le feu et pour nettoyer après. Puis on n'a pas le temps ici, mais c'est important que les gens au Québec savent qu'il y a déjà des mesures dans le marché.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec les représentants de l'opposition officielle. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de saluer et de souhaiter la bienvenue aux représentants de Valero. Je vais être assez bref. Je vais poser une question et par la suite je vais céder le temps à mon collègue, qui est représentant, qui est notre responsable de la Capitale-Nationale, le député de Louis-Hébert.

Je lisais attentivement dans votre mémoire que, du total des 200 millions investis, 140 millions étaient nécessaires ou sont nécessaires pour préparer à la réception de ces bruts dans vos parcs, de recevoir... réservoirs, quais et installations de chargement, surtout à Montréal-Est.

J'aimerais savoir, rapidement, à ce niveau-là, il y a des modifications qui ont été nécessaires. Pouvez-vous nous expliquer, au niveau de la sécurité, pour assurer que ces modifications ont été faites de façon sécuritaire? Je sais, c'est une question qui se pose. Pourriez-vous nous dire deux mots là-dessus, sur les modifications qui ont été faites et de quelle façon vous vous êtes assurés que les modifications ont été examinées pour assurer que la sécurité est à son maximum?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de Valero.

M. Bayus (Ross R.) : Oui. 140 millions à Montréal-Est, effectivement, pour préparer les réservoirs, parce que les réservoirs, aujourd'hui, sont en pétrole léger, raffiné; il faut convertir ces réservoirs-là pour le service de pétrole lourd... Il faut installer des pipelines…

Une voix :

M. Bayus (Ross R.) : Pétrole brut, excusez, pétrole brut. Puis il faut installer des pipelines aux quais puis toutes les installations. Il y a des bras de chargement assez impressionnants de faire installer aux quais pour charger les navires.

Nous avons, chez nous, à Valero, un processus interne de préparation des travaux. Puis la grande partie de ces travaux-là n'a pas été commencée encore, on va les aborder bientôt. Mais nous avons un processus, chez Valero, de prévention et beaucoup d'inspections après le fait, mais la grande partie, c'est la prévention. Il y a tout un processus de planification, toute l'exécution du projet, de chaque changement. Chaque changement, même si c'est petit, est étudié en détail, de chaque étape. C'est comme ça que ça se passe chez nous. Avec 16 raffineries, vous pouvez imaginer qu'on est devenus chef de file dans le procès de... ou dans les processus sécuritaires pour effectuer des investissements. Tous ces changements-là sont faits à l'intérieur de nos terrains ou sur les terrains de port de Montréal. Puis même le port de Montréal exige un certain niveau de sécurité et contrôle. Comme ça, je n'ai aucune crainte en ce qui concerne nos travaux chez nous, du tout.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Rapidement, je me souviens, quand j'étais ministre des Ressources naturelles, en 2003, vous transportez votre pétrole de la raffinerie par train à Montréal. Et je me souviens des premiers dossiers. Il y avait quelques accidents qui arrivaient de temps en temps. Et, finalement, une des décisions que vous avez prises, c'est faire le pipeline de Québec-Montréal, qui était mis en opération 2012... fin 2012, je pense.

Alors, dites-nous : Est-ce que le transport pipeline est beaucoup plus sécuritaire que le train, premièrement? Et, deuxièmement, est-ce que vous considérez que vous avez mis toutes les mesures... évidemment, oui, vous allez me dire oui, mais ce que je veux dire : Quelles sont les mesures de sécurité que vous avez mises en place pour s'assurer que votre pipeline est sécuritaire et pas de problème?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Bayus (Ross R.) : Oui, le changement de... ou la décision de faire construire le Pipeline Saint-Laurent était suite à un investissement à la raffinerie pour croître la capacité de production. Puis nous avons décidé que c'était trop large ou trop gros pour présenter plus de trains sur les voies ferrées. La décision a été prise de changer notre mode d'opération.

Nous, on considère que tous les modes d'opération qu'on utilise, logistiques, sont sécuritaires. Même si on parle de voie maritime, il y a tout un processus avec nous, chez nous, avant que vous arriviez à notre quai. Tu sais, on refuse beaucoup de bateaux, par exemple. Pour les voies ferrées, on fait affaire strictement avec les compagnies qui sont renommées, qui ont fait preuve de leur sécurité et leur façon d'opérer.

Puis on sait que, dans toutes les formes de transport, on bouge des biens d'une place à l'autre. Il y a toujours un élément de risque. On ne peut pas dire qu'il n'y a pas de risque; il y a toujours un risque. La chose importante, c'est que les transporteurs apprennent de leurs erreurs, puis on corrige pour le futur, sérieusement. Puis c'est ça que nous avons constaté, si on avait, dans le passé, certains accidents qui sont arrivés.

En ce qui concerne notre pipeline, c'est un pipeline qui a été bâti très moderne, avec les systèmes de contrôle à Montréal très, très définis, avec des opérateurs 24 heures par sept... sept jours par semaine, 24 heures par jour. Il y a des «sensors» partout. C'est vraiment haut de gamme en termes d'opération. Nous avons même des inspections aériennes, des inspections physiques et nous avons des comités de liaison avec les communautés aussi où passe le pipeline.

Comme ça, nous pensons que notre système de sécurité et de surveillance de notre pipeline est toujours jeune, mais il faut quand même adopter des habitudes qui sont les plus... comment je peux dire, les plus sécuritaires, les meilleures pratiques. Puis je pense qu'on est rendus là.

M. Hamad : Vous recevez beaucoup...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert...

M. Hamad : Oui. Merci.

La Présidente (Mme Bouillé) : Je vous rappelle que c'est la présidence qui donne les droits de parole. Vous avez la parole.

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente, pour votre pouvoir de me donner le droit de parole. Alors, est-ce que c'est... Vous, vous avez beaucoup de bateaux qui viennent à Lévis pour faire le déchargement, et, à ma connaissance, depuis peut-être 30 ans, à Québec, on n'a jamais entendu d'un accident. Il peut arriver peut-être un que j'ai oublié, mais ça a toujours été des opérations sécuritaires. Et vos bateaux traversent le fleuve Saint-Laurent. Est-ce que vous avez eu... Est-ce que vos bateaux ont-u frappé des baleines ou des bélugas dans le fleuve Saint-Laurent?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs d'Énergie Valero.

M. Bayus (Ross R.) : Merci. Je n'ai pas de mémoire d'avoir traîné des baleines avec nos bateaux. Mais c'est vrai que les opérations sont très sécuritaires. Puis, même si vous regardez dans la voie maritime du Saint-Laurent, il faut reculer très, très loin en arrière pour voir un accident, plus que 25 ou 27 ans, je ne suis pas sûr exactement c'est quoi. Mais c'est très sécuritaire. Puis nos activités à notre quai sont très sécuritaires.

Je peux vous avancer qu'on a été la compagnie, la première compagnie d'adopter les doubles coques, même quand le règlement n'était pas en place. Et on a été la première compagnie à adopter des pilotes pour aider ou être présents pendant l'accostage de nos bateaux, même si ça n'a pas été le règlement. Aujourd'hui, c'est des règlements, mais nous sommes un peu des pionniers des règlements qui sont en place.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci. Sur le plan économique, finalement, le projet d'Enbridge vous permet... en fait, ça va vous... pas vous aider, mais le fait d'avoir ce projet-là, vous allez investir 140 millions pour vos installations... création d'emplois, 200 emplois, donc le projet d'Enbridge, pour vous, c'est un renforcement de votre raffinerie à Montréal-Est, puisque vous allez mettre l'argent aussi. Et donc vous pensez que c'est un bon projet pour le Québec et pour l'indépendance énergétique du Québec en Amérique du Nord et c'est un bon projet pour l'économie de Montréal. Et est-ce qu'il y a des retombées à Québec en même temps?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs les représentants de Valero.

M. Bayus (Ross R.) : C'est un excellent projet. Et, comme j'ai mentionné, nous avons essayé 25 bruts différents depuis les derniers 10 ans. C'est très important qu'on soit très libres d'aller chercher les matières premières qui conforment à notre raffinerie et qui sont compétitives. Sans être capables d'être concurrentiels, on ne sera pas capables de supporter les investissements futurs. Les investissements futurs vont garantir les emplois non seulement de nos employés, mais tous les employés qui sont connexes avec nos activités indirectes. Les retombées, d'après moi, sont très importantes. Même les transports avec les bateaux entre Montréal et Lévis vont produire 100 postes... 100 nouveaux emplois permanents pour les équipages de transport. C'est deux bateaux, comme ça, il faut engager des gens, il faut engager des pilotes, il faut engager toutes sortes de personnes pour supporter l'activité. Et très avantageux pour le port de Montréal, en termes d'activité. Je préfère investir dans le port de Montréal que d'investir au Kazakhstan ou en Algérie.

• (12 h 20) •

M. Hamad : ...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert, pour la troisième fois, je vous demande votre habituelle collaboration, s'il vous plaît. Donc, oui, vous avez la parole.

M. Hamad : Si je comprends bien, là, ce que vous n'avez pas dit dans votre mémoire, là, quand même, il y a d'autres retombées dans ce projet-là, les retombées... une centaine d'emplois additionnels que vous allez créer pour les bateaux. Et je comprends que, si vous avez deux bateaux additionnels qui vont venir à Québec, donc il y a d'autres emplois qui vont être créés à Québec, il y a d'autres emplois qui vont être créés à Montréal.

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Bayus (Ross R.) : Certainement. Puis c'est mentionné dans le dossier, c'est mentionné, les 100 emplois. Mais, oui, ça va générer encore des emplois pour les gens qui prennent soin des bateaux, la maintenance puis tout ce qui est associé avec ce genre d'activité là. Mais aussi, durant la période de construction, il y a l'achat des équipements, puis il y a beaucoup, beaucoup d'ouvriers qui vont travailler chez nous, puis de... en profiter et continuer, comme nous avons fait avec notre Pipeline Saint-Laurent, c'est de développer, continuer de développer les expertises ici pour les gens de Québec.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Est-ce que, l'entretien des Paramax, vous allez faire affaire à des chantiers québécois?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs, en 45 secondes.

M. Bayus (Ross R.) : On ne les a même pas en main encore. Souvent, les bateaux viennent avec une certaine... c'est comme une voiture, des fois ça arrive avec une garantie puis des maintenances, des programmes de maintenance. Comme ça, c'est très tôt pour prévenir tout ça, mais soyez assurés que nous allons encourager le plus possible, comme nous faisons avec notre partenaire de transport maritime, que ce soit quelqu'un local et des gens locaux qui peuvent participer.

M. Hamad : ...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert!

M. Hamad : ...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert! Je donne les droits de parole. Le temps est écoulé, donc la parole est maintenant au député de Nicolet-Bécancour. Merci.

M. Martel : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, vous trois, très content de vous rencontrer ce matin.

Moi, je cherche la personne qui va nous dire que le contribuable va être gagnant au terme de l'opération. Tout le monde convient que le prix que vous allez acheter va être meilleur marché que le prix actuel. On a interrogé les gens d'Enbridge, puis eux, ils nous disaient : Bien, ce n'est pas nous qui allons réaliser nécessairement des économies. On a questionné les deux ministres pour s'assurer qu'ils ne profiteront pas de ce nouveau prix d'achat là pour augmenter les taxes, mais je pense tout le monde convient que la marge de profit, c'est vraiment des raffineries qui vont l'avoir. On a vu, dans le passé, qu'il y a eu des fluctuations assez importantes des prix du pétrole brut, et il n'y a pas nécessairement eu des répercussions sur le prix à la pompe.

Donc, moi, j'aimerais ça savoir si vous pouvez donner l'assurance qu'en bout de ligne le contribuable québécois va profiter des économies du nouveau pétrole.

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs d'Énergie Valero.

M. Bayus (Ross R.) : Merci, Mme la Présidente. Je peux vous donner des assurances en ce qui concerne les retombées pour notre projet, pour ce projet. Je pense qu'elles sont assez faciles à deviner en ce qui concerne la main-d'oeuvre puis l'économie en général. Puis ce n'est pas parce que je ne veux pas répondre à votre question directement, mais vous savez que la Loi de la concurrence me prévient d'indiquer n'importe quelle direction future de nos opérations en ce qui concerne les prix. Une chose que je peux vous dire, c'est que nous avons vécu des fermetures, ici, des fermetures d'usines, de raffineries. Ça veut dire que, oui, il y a souvent de l'argent à faire dans le business, c'est important de...

La Présidente (Mme Bouillé) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Bayus (Ross R.) : ...de faire de l'argent, mais il y a toujours des risques. Puis on est dans une concurrence mondiale. Le marché efficace va toujours être efficace. Puis, sur l'Est du Canada, nous avons un marché très efficace.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. M. le député de Mercier.

M. Khadir : Ah! On vient de me dire que je n'aurais pas le temps de poser des questions.

La Présidente (Mme Bouillé) : Bien, vous venez d'arriver, M. le député de Mercier.

M. Khadir : Bien, merveilleux.

La Présidente (Mme Bouillé) : C'est votre choix, là, si vous...

M. Khadir : Je vous remercie énormément. J'ai suivi en partie le débat.

La Présidente (Mme Bouillé) : Vous avez deux minutes, M. le député de Mercier.

M. Khadir : Oui. Merci de vous être prêtés à cet exercice. Est-ce que vous avez des problèmes d'approvisionnement actuellement pour les raffineries de l'est de Montréal?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Bayus (Ross R.) : Non.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier.

M. Khadir : Est-ce que, s'il n'y a pas de bitume dilué en provenance des sables bitumineux de l'Ouest canadien qui arrive au Québec, vous allez rencontrer un problème à raffiner le pétrole et à subvenir aux besoins du Québec?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs d'Énergie Valero.

M. Bayus (Ross R.) : Le produit de l'Ouest canadien... le pétrole brut que nous prévoyons faire venir de l'Ouest canadien n'est pas le pétrole lourd ou le... de sable...

M. Khadir : ...

M. Bayus (Ross R.) : ...bitume, c'est ça. C'est tout du léger ou ça va être le produit qui vient de Bakken ou de Saskatchewan. C'est tout du léger. On n'est pas capables de raffiner du lourd.

M. Khadir : Oui, mais…

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier.

M. Khadir : Mme la Présidente, est-ce vous pourriez transmettre ma question... que je transmette mes avis par... à travers vous…

La Présidente (Mme Bouillé) : Allez-y.

M. Khadir : Est-ce qu'Enbridge ou d'autres transporteurs vous ont donné un document garantissant que ce qu'ils vont transporter dans leur oléoduc, ça va être juste le pétrole que vous pouvez raffiner et non pas du bitume lourd que vous ne pouvez pas raffiner?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de Valero.

M. Bayus (Ross R.) : Les seuls besoins que nous avons d'Enbridge, que nous avons reçus, c'est que notre engagement commercial avec eux est clair et c'est pour le pétrole léger, puis ils ont garanti que nous allons recevoir et transporter notre produit.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier, 15 secondes.

M. Khadir : Et, les énormes économies que vous allez faire, est-ce que les citoyens du Québec vont en bénéficier?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Bayus (Ross R.) : Je suis convaincu que les Québécois vont bénéficier de tous les investissements à venir dans ce genre de projet.

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : Non. M. le député de Mercier, je m'excuse. Merci beaucoup de vous conformer aux directives de la présidence.

Je vous remercie beaucoup, messieurs, et j'invite le prochain groupe à prendre place, et je suspends une minute.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

(Reprise à 12 h 29)

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Sur ce, la commission reprend ses travaux en accueillant le Conseil du patronat du Québec.

Mme Kozhaya, bienvenue, M. Lazure. Vous avez 10 minutes pour faire votre exposé, qui sera suivi d'une période d'échange après avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

Mme Kozhaya (Norma) : Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, mesdames messieurs, bonjour. Merci beaucoup de nous recevoir et de permettre au Conseil du patronat d'exprimer ses commentaires sur le projet d'inversion de la canalisation 9B d'Enbridge. Est-ce que vous entendez? Le Conseil du patronat…

Une voix :

• (12 h 30) •

Mme Kozhaya (Norma) : Parfait. Donc, ça ne vous étonnerait pas si je vous dis que le Conseil du patronat propose la vision d'une société plus prospère au sein de laquelle l'entrepreneuriat, la création de richesse et le développement durable sont les conditions nécessaires pour l'accroissement du niveau de vie de l'ensemble des Québécois. Dans ce cadre, le Conseil du patronat cherche à créer des conditions propices à l'investissement dans différents secteurs industriels, et ce, dans le respect des normes environnementales et de la sécurité des personnes.

Donc, je vais me concentrer dans ce qui suit sur les points, donc, qui ont rapport avec cette vision-là. Donc, comme partisans du développement économique durable, nous analysons les impacts du projet selon ses impacts tant sur l'industrie pétrochimique du Québec en particulier, qui est établie notamment dans l'est de Montréal, que sur l'ensemble des consommateurs de carburant. Et donc on va analyser l'impact notamment sur la sécurité de l'approvisionnement en produits pétroliers à prix concurrentiels. Sur ces bases, pour nous, le projet est non seulement souhaitable, mais nécessaire et même essentiel.

Certains des éléments que je présenterai aujourd'hui figurent d'ailleurs dans le document de consultation du gouvernement. Et je tiens à souligner la rigueur et le caractère factuel de ce document. Et, bien, nous partageons plusieurs des constats qui sont faits là-dedans. Et donc je vais essayer d'amener des éléments qui sont un peu différents ou qui ont été abordés d'une autre façon. Bien sûr, je ne traiterai pas des effets sur l'environnement ni sur la sécurité pour la simple raison que nous n'avons pas l'expertise sur ces sujets.

Donc, l'élément essentiel tient à la question de sécurité énergétique. Bien sûr, il en a été question ici. Mais, si on regarde ça de façon un peu plus approfondie, on sait qu'une chaîne d'approvisionnement fournit des produits — dans ce cas, pétroliers — en réponse à la demande finale des consommateurs, que ce soit pour des produits raffinés ou transformés. Et donc on peut définir la sécurité énergétique comme la capacité de cette chaîne d'approvisionnement de répondre de manière continue à la demande finale des consommateurs en temps normal. Ce concept prend tout son sens aussi en évoquant des situations exceptionnelles, comme par exemple un conflit commercial, politique ou militaire, un accident, une catastrophe naturelle; des événements qui se produisent à l'occasion à travers la planète. Donc, ces événements sont susceptibles de perturber l'approvisionnement des consommateurs.

Nous notons que le pétrole brut raffiné au Québec provient, en premier lieu, d'Afrique, notamment l'Algérie, l'Angola, alors qu'auparavant c'était l'Europe qui était la principale région de provenance. Les importations, donc, aujourd'hui, en provenance d'Afrique comptent pour près de 50 % du total. On dit que c'est des pays qui sont instables géopolitiquement. Et, pour le prouver davantage, The EconomistIntelligence Unit, qui classe un peu les pays selon un indice d'instabilité politique sur l'échelle de plus stables à plus instables… donc, deux des trois pays africains sources du pétrole importé au Québec figurent dans la catégorie «risques très élevés»; l'Algérie figure dans la catégorie «risques élevés»; alors que, bien sûr, le Canada se classe parmi les plus stables, en troisième position. Donc, ce risque menace notre sécurité d'approvisionnement. Le projet aurait essentiellement pour effet de remplacer le pétrole brut importé de ces pays par du pétrole en provenance du Canada.

Cet examen de la sécurité énergétique doit bien sûr tenir compte aussi des prévisions de la demande. Bien que la réduction de la demande de produits pétroliers en tant que carburants soit souhaitable et que nous sommes tout à fait en accord avec cet objectif, il faut reconnaître que c'est un objectif qui requiert plusieurs années, voire des décennies pour être atteint et ne peut constituer une solution de rechange à ce projet ou à d'autres projets de transport ou de développement du pétrole à court ou à moyen terme. Je vous rappelle que le Québec dépend des hydrocarbures encore pour 50 % de ses besoins, 40 %, donc, le pétrole.

Pour ce qui est des prévisions, il y a différents scénarios, ceux basés sur juste les conditions passées, ceux basés sur des objectifs de réduction, mais force est d'admettre que nos besoins en pétrole vont être encore considérables pour plusieurs décennies. Et donc l'argument selon lequel ce projet n'est pas nécessaire en raison de la volonté de s'affranchir du pétrole ne nous semble pas basé.

Les raffineries de l'Est du Canada, donc, dont celles au Québec, opèrent présentement dans un environnement économique très difficile. Elles font concurrence à d'autres raffineries qui, elles, peuvent s'approvisionner à des prix qui sont plus faibles, et cette concurrence menace sérieusement leur survie. J'y reviendrai tout à l'heure. Imaginons seulement que l'une des deux raffineries ferme, donc on va se retrouver avec une seule raffinerie au Québec. Si cette raffinerie restante, à cause d'un accident par exemple, doit suspendre ses opérations et sa production pour une durée plus ou moins longue, on peut imaginer c'est quoi, l'impact sur l'économie du Québec.

La pérennité des raffineries nécessite bien sûr des investissements réguliers — vous l'avez entendu aussi tout à l'heure — pour les maintenir, pour accroître leur efficience et pour se conformer aux exigences; et, pour investir, ça prend une rentabilité. En ce moment, la rentabilité de nos raffineries est comprimée par le coût d'approvisionnement en pétrole brut. Et d'ailleurs le ministère des Ressources naturelles du Canada montre que la marge d'exploitation des raffineries de l'Est du Canada est presque la moitié de celle des raffineries de l'Ouest du Canada, notamment à cause de l'impact de la source d'approvisionnement en pétrole.

Pour ce qui est des autres effets socioéconomiques, donc, rappelons que Suncor est un établissement industriel majeur dans l'est de Montréal, zone qui a connu et connaît encore des difficultés économiques. Cette raffinerie emploie à elle seule environ 450 employés salariés. Aussi, je vous rappelle que l'industrie du raffinage possède une main-d'oeuvre qui est hautement qualifiée, qui est bien rémunérée. La rémunération moyenne est de deux tiers supérieure à celle de la moyenne canadienne, donc, en général, et le cinquième des travailleurs de l'industrie du raffinage mentionne sciences naturelles et appliquées comme leur principal domaine d'activité.

Bien sûr, à part les raffineries, un enjeu majeur est la survie de l'industrie pétrochimique au Québec. Cette industrie, qui compte quelque 26 000 travailleurs, dont les trois quarts dans la région de Montréal, comprend notamment la chaîne de polyester, dont vous avez entendu parler et que vous allez sûrement encore en entendre parler, qui est unique en Amérique du Nord. Donc, si Montréal devait perdre les activités de raffinage, il faudrait s'attendre en plus à perdre une bonne partie de l'industrie pétrochimique du Québec. Je ne pense pas que ce soit souhaitable.

De plus, comme ça a été mentionné, donc, les deux raffineries du Québec envisagent des investissements importants aussi, conditionnels à l'autorisation du projet. La semaine passée, Suncor a annoncé des investissements de 220 millions au Québec. Valero, bon, on vous a aussi parlé de ces investissements prévus, d'environ 200 millions de dollars également, et des emplois que ça va créer.

Finalement, le projet aura un impact considérable sur la balance commerciale. Donc, on a parlé de réduction des importations, de près de trois quarts des importations actuelles de brut du Québec, donc environ 10 milliards de dollars, et donc avec un effet positif sur la balance commerciale aussi du Canada.

En résumé, pour le Conseil du patronat, tout projet susceptible d'accroître le développement économique de Montréal, du Québec et du Canada aussi… en mesure de créer des conditions pouvant le favoriser s'avère essentiel non seulement pour les employeurs touchés, mais aussi pour ceux qui ont des liens d'affaires avec eux et pour la population en général.

Bien sûr, l'entreprise a la responsabilité de fournir toutes les garanties nécessaires pour démontrer le caractère efficace et sécuritaire de son projet. Donc, pour nous, donc, c'est une occasion qu'il faut saisir. C'est un projet qui nous apparaît encore une fois souhaitable, et rentable, et essentiel pour notre sécurité énergétique et pour la survie d'un nombre important d'industries. Donc, nous réaffirmons notre appui à ce projet.

La Présidente (Mme Bouillé) : …beaucoup. Nous allons procéder à la période des questions, en commençant par Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, madame, monsieur. Ma première question… En fait, j'aurai une seule question, et après mes collègues prendront la relève. En quoi le projet Enbridge est-il si important pour la filière pétrochimique québécoise? On pourrait le dire : De toute façon, on importe du pétrole, cette filière-là existe, elle a réussi à maintenir 51 000 emplois. Pourquoi est-ce important que ce dossier, que ce projet… qu'on puisse renverser le pipeline? Pourquoi est-ce si important pour la filière pétrochimique québécoise?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, messieurs du Conseil du patronat.

• (12 h 40) •

Mme Kozhaya (Norma) : C'est que, si les raffineries… Comme on a vu, leur survie, leur compétitivité, elle est vraiment menacée et leur survie est menacée. Donc, si l'une des raffineries fermait, l'industrie pétrochimique, c'est sûr qu'elle va continuer, qu'elle pourra continuer à avoir accès à du pétrole provenant d'ailleurs, mais c'est sûr que ça ne sera pas aux mêmes coûts. Donc, la compétitivité de cette industrie est par conséquent aussi affectée par la compétitivité des raffineries, et surtout de leur survie. Et donc, pour qu'elle puisse se maintenir et maintenir les emplois, maintenir sa compétitivité et son caractère un peu unique, dans certains cas, au Canada, en Amérique du Nord, ça lui prend de l'approvisionnement de produits pétroliers à un coût concurrentiel.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue. Merci de votre présence. Écoutez, très rapidement, là. Vous parlez des investissements réguliers, et, pour qu'on ait ces investissements-là, il faut qu'on ait une rentabilité, là, pour justement, là, justifier les investissements. Vous dites que les marges bénéficiaires des raffineries de l'Est du Canada, dont on fait partie, c'est la moitié de ce qui se passe dans le reste du Canada. C'est bien ça?

Mme Kozhaya (Norma) : Oui.

M. Therrien : O.K. Qu'est-ce qui peut expliquer ça, d'après vous, là? Je ne sais pas, je vous pose la question. Qu'est-ce qui peut expliquer ça? Je vais vous laisser répondre à cette question-là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants du Conseil du patronat.

Mme Kozhaya (Norma) : C'est qu'en partie les prix à la pompe sont plus ou moins similaires, se ressemblent beaucoup. Donc, selon les documents, et autant du ministère des Ressources naturelles du Canada que le document de la Commission sur les enjeux énergétiques qui a eu lieu récemment, on explique notamment cet écart-là par le coût d'approvisionnement en pétrole, qui n'est pas le même pour les raffineries de l'Est et pour celles de l'Ouest du Canada, en particulier.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, Mme la Présidente. Donc, vous dites que cette marge-là… Est-ce qu'elle est constante? Je ne sais pas comment vous avez vérifié ça. Est-ce qu'elle est constante, historiquement, depuis quelques années, ou ça varie? Je voudrais savoir ça, là. Cette marge-là que vous avez analysée, là, est-ce qu'elle est toujours la même ou des fois elle va tendre à diminuer, ou augmenter, ou…

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Les chiffres que nous avons sont des chiffres de 2012. Malheureusement, je n'ai pas reculé beaucoup en arrière pour avoir d'autres chiffres. On sait qu'en 2012 l'écart des prix entre le brut canadien et le brent, par exemple, qui est plus le prix auquel on achète actuellement, était peut-être plus élevé, mais ça serait intéressant de valider. Probablement que l'écart n'était pas aussi important il y a cinq ans, par exemple.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci. Donc, ce que vous me dites, c'est que vous avez fait une analyse statique, là, à un moment donné, à un point quelconque, et la marge était à moitié. Mais vous n'avez pas fait d'analyse dynamique pour voir s'il y avait une corrélation entre les variations des prix et la variation de la marge de profit. O.K., ça va. Non, je voulais me… Parce que, moi, ça m'inquiète un peu. Puis je vais vous laisser… Après, je vais laisser la place à mon collègue, là.

Juste une dernière petite question. Par rapport aux prévisions que vous pouvez faire, à l'écart des prix du brent puis du WTI, là, est-ce que vous avez fait des analyses là-dessus, regardé, voir si ça tendait à augmenter, diminuer, disparaître? Est-ce que vous avez regardé ça? Vous êtes économistes. J'imagine que vous avez peut-être été tentés par l'expérience.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur du Conseil du patronat.

Mme Kozhaya (Norma) : Nous avons regardé un peu ce que certains autres analystes ont fait. Par exemple, la Banque TD avait fait une analyse là-dessus, d'autres ont fait un écart. Évidemment, cet écart-là a fluctué beaucoup au cours des dernières années. Je crois qu'il y a eu un genre de maximum, d'environ 24 $ à un moment donné. Il y a d'autres années… Et, dans notre mémoire, nous avons un peu plus de détails par rapport à la situation. Donc, il y a eu des moments où l'écart était de l'ordre de 4 % seulement, d'autres, aussi, c'était davantage de l'ordre de 20 %. Et donc c'est sûr que c'est difficile de projeter beaucoup en avance. Ça dépend de différents facteurs. Bon, entre autres, par exemple, la disponibilité du pétrole, la possibilité du transport du pétrole de l'Ouest canadien, mais aussi des facteurs par rapport aux anticipations, à la spéculation. Et donc, sur cette base-là, certains s'attendent à ce que l'écart va se maintenir pour au moins encore quelques années, pour plusieurs années, et que, peut-être, à plus long terme, ça va s'estomper. Mais ça demeure très incertain.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Roberval.

M. Trottier : Oui. Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs, mesdames. Vous dites, à la page 36, sur la question des effets environnementaux et socioéconomiques, que le Conseil du patronat ne traitera pas des questions d'environnement parce que vous ne possédez pas une expertise particulière à ce sujet. Je comprends que ça n'a pas été votre principale préoccupation dans les dernières années. Mais est-ce que le Conseil du patronat compte développer une expertise dans l'avenir ou s'associer avec des groupes qui ont cette expertise-là pour qu'à ce moment-là le Conseil du patronat s'inscrive véritablement dans une perspective de développement durable?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants du Conseil du patronat.

Mme Kozhaya (Norma) : Merci beaucoup pour la question. Effectivement, à l'origine, le Conseil du patronat avait créé un satellite qui était le Conseil patronal en environnement, que, je crois, vous allez entendre ou avez entendu. Mais merci pour la suggestion. Je crois que, dans le contexte actuel, ça serait intéressant si on avait plus de ressources, de nous consacrer davantage à ces questions. Nous, c'est davantage les questions économiques. Parce qu'on se dit qu'il y a un autre organisme, que, lui, son expertise, c'est l'environnement. Mais c'est clair pour nous que c'est complémentaire. Et c'est de plus en plus le cas.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Roberval.

M. Trottier : Oui. Est-ce que vous connaissez, on pourrait dire, soit des expériences ou en tout cas des faits qui ont été notés par rapport à la responsabilité des gens qui font transporter un produit par d'autres? Parce que, d'après mes connaissances, c'est que la responsabilité incombe présentement à celui qui transporte le produit. Tant qu'il n'est pas rentré dans la cour du propriétaire de la ressource, ça ne compte pas. Mais est-ce que vous pensez qu'on devrait réfléchir à cet aspect-là, que le client qui fait transporter un produit par un autre puisse avoir une responsabilité en cas, on pourrait dire, de problème de pollution ou autrement? Est-ce qu'il y a déjà eu, on pourrait dire, des expériences ou en tout cas des faits qui vont dans ce sens-là? Est-ce qu'on peut penser que le client, dans le cadre d'une perspective de développement durable, ait une responsabilité quant au transport du produit qui est fait par une autre entreprise?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Je n'ai pas en ce moment d'exemple qui me vient à l'esprit. Je crois que les deux parties peuvent s'entendre sur la responsabilité et la responsabilité de qui… Malheureusement, bon, chacun a une responsabilité, mais je crois aussi que finalement les parties peuvent s'entendre. Et puis, tant que les règlements et les normes sont respectés et qu'il n'y a pas de faute claire, je crois que c'est des ententes qui peuvent prévaloir. Mais, malheureusement, je ne suis pas plus équipée pour mieux répondre à cette question.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Sanguinet, en 1 min 30 s.

M. Therrien : …dans cette perspective-là. Écoutez, j'imagine que vous pouvez répondre pendant une heure, là, mais il ne nous reste pas grand temps, n'est-ce pas? Je vais vous poser la question simplement. Vous avez parlé de développement durable au début, vous avez insisté sur le terme «développement durable». En quoi le projet d'aujourd'hui est favorable pour le développement durable?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Encore une fois, donc, pour nous, le développement durable, pas juste pour nous, mais pour le gouvernement, je crois, également, c'est trois composantes : l'aspect économique, l'aspect environnemental, l'aspect social. Bon, dans ce cas aussi, il y a la question de sécurité qui doit s'appliquer de toute façon à tous les projets. Donc, pour nous, vu que c'est un pipeline qui existe déjà, qui transporte déjà du pétrole et que, bon, vous allez… D'autres experts vont vous montrer qu'il n'y aura pas d'impact, peut-être, environnemental et que les normes de sécurité vont être respectées. Pour nous, les bénéfices économiques sont très présents, et que… Si on s'assure qu'il n'y a pas de perturbation considérable à l'environnement, qu'il n'y a pas de perturbation considérable pour les communautés et que la question de sécurité… que toutes les meilleures pratiques et toute la réglementation est là pour encadrer ces questions-là, pour nous, le bénéfice économique, qui est considérable, nous permet de dire que, dans le contexte de développement durable, c'est un projet qui va dans cette direction-là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Je vous remercie beaucoup. Nous allons maintenant passer à la période d'échange avec l'opposition officielle. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors, à notre tour de souhaiter la bienvenue au Conseil du patronat, vous remercier, Mme Kozhaya et M. Lazure, pour votre présentation et vos remarques.

Une question, par la suite je céderai la parole à mon collègue de Louis-Hébert. Vous, vous êtes allés devant l'Office national de l'énergie pour vous prononcer sur le projet?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, messieurs… monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Oui, exactement. Et le mémoire que nous vous avons soumis, c'est exactement le mémoire qu'on avait soumis à l'Office national de l'énergie.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : À quelle date vous êtes allés devant l'Office national de l'énergie?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants du Conseil du patronat.

Mme Kozhaya (Norma) : Les audiences, qui ont eu lieu à Montréal, je crois que c'était du 8 au 10 octobre. Je ne me rappelle plus la date exacte où moi, j'ai passé.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Vous avez eu combien de temps pour présenter devant l'Office national de l'énergie?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Notre comparution?

M. Sklavounos : Oui.

Mme Kozhaya (Norma) : Nous avions eu 30 minutes.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Pourriez-vous nous expliquer pourquoi la décision a été prise par le Conseil du patronat d'aller devant l'Office national de l'énergie?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur du Conseil du patronat.

• (12 h 50) •

Mme Kozhaya (Norma) : C'est les mêmes raisons qui nous poussent dans nos interventions, donc notre souci pour encourager des projets économiques que nous pensons dans l'intérêt du Québec et dans l'intérêt de la population du Québec. Et donc, comme c'est un projet que nous pensions que les retombées pour l'économie du Québec étaient importantes et considérables et qu'on faisait partie des groupes qui pouvaient être entendus, donc on voulait… Puisque la mission, un peu, de l'Office national de l'énergie, c'est de s'assurer qu'un projet est dans l'intérêt public du Canada en général, et donc, bien sûr, le Québec, où aboutit ce pipeline, fait partie de l'équation, donc c'était la raison pour laquelle on est intervenus.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Je comprends bien. C'était la position que vous épousez et que vous avez défendue devant l'Office national de l'énergie. Mais pourquoi avez-vous choisi, comme organisme, d'aller devant cette tribune en particulier, l'Office national de l'énergie?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants du Conseil du patronat.

Mme Kozhaya (Norma) : Bien sûr, c'est l'office — je crois que c'est un peu le sens de votre question — qui a la compétence pour autoriser le projet.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Alors, si je comprends bien, vous êtes allé, comme Conseil du patronat, devant l'Office national de l'énergie parce que vous compreniez que c'est l'Office national de l'énergie qui prendrait la décision qui serait exécutoire ou qui serait légalement celle qui lie les acteurs dans le dossier.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Effectivement.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Comme Conseil du patronat du Québec, est-ce que vous avez une position exprimée sur le fait que le gouvernement du Québec n'a pas cru nécessaire d'être devant l'Office national de l'énergie alors qu'il y avait d'autres gouvernements… Je sais que vous êtes bien au fait que le gouvernement de l'Ontario était là. Est-ce que vous avez une opinion exprimée sur le fait que le gouvernement — alors que vous, vous êtes allés comme acteurs, représentants du patronat devant l'Office national de l'énergie — du Québec était absent?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur du Conseil du patronat du Québec.

Mme Kozhaya (Norma) : Nous n'avons pas de position par rapport à cette question. Je crois que c'est le choix du gouvernement.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert, vous avez la parole.

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente. Dans votre conclusion, à la dernière page, vous parlez que le déficit commercial, en fait, du Canada, en biens et services, diminuera du quart. Ça, c'est votre dernière page, 45. Là, vous avez calculé le déficit commercial basé sur les biens et services, qui donne 36 milliards. Mais le déficit commercial du Canada, c'est 62 milliards, total. Mais, si on prend le déficit du Québec, commercial, c'est 24 milliards, et là 10 milliards, c'est encore plus important pour le Québec. C'est-à-dire, 10 milliards sur 24, c'est presque 50 % du déficit commercial du Québec. Et je pense que c'est plus important que…

Une voix :

M. Hamad : Non, 10 milliards au Québec. 10 milliards, c'est l'achat au Québec. Est-ce que, pour vous, les retombées de ce projet-là, c'est un élément positif pour l'industrie pétrochimie à Montréal?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants du Conseil du patronat.

Mme Kozhaya (Norma) : Oui. Pour nous, c'est clair que ce projet a des retombées positives pour l'industrie pétrochimique à Montréal et pour aussi tout ce qui gravite autour de cette industrie, de même que pour les raffineries.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci. On a entendu, juste avant vous, Valero, où ils disaient qu'ils veulent investir 140 millions, plus l'achat des Panamax, plus l'équipage, l'entretien, etc. Donc, il y avait des retombées partout au Québec. Alors, pour… je ne vais pas dire les sceptiques, là, mais, pour les groupes qui ne croient pas au projet, qu'est-ce que vous pouvez dire, comme représentants du patronat?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Donc, encore une fois, pour nous, le Québec ne peut pas se permettre de laisser tomber des investissements et des opportunités de développement dans tous les domaines, dans tous les secteurs. Et donc ça, c'est un des projets que, pour nous, c'est important que ça aille de l'avant parce que c'est une possibilité tant de maintien des emplois, de maintien de compétitivité, de maintien d'expertise, de maintien de raffineries. Mais aussi je crois que, pour l'ensemble des Québécois, la question de sécurité énergétique, elle n'est pas non plus à négliger, donc, et ça, c'est dans l'intérêt… Il y avait une question tout à l'heure… Donc, ça, c'est vraiment dans l'intérêt de tous les Québécois. Et, pour nous, donc, chaque projet est important, chaque projet qui nous permet de développer nos ressources, de créer des emplois, de créer de l'investissement, et donc éventuellement de financer nos services publics. C'est des projets qu'on défend et pour lesquels on va se présenter.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Le facteur important pour les citoyens, là, c'est la sécurité. Et évidemment la sécurité, ça veut dire la fiabilité, l'intégrité des infrastructures, le système de détection, l'environnement, protection de l'environnement, le suivi, etc. Vous, est-ce que les patrons pensent que c'est un projet qui va répondre à ces critères-là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : C'est ce qu'on pense, que ça devrait être le cas. Encore une fois, malheureusement, nous n'avons pas d'expertise. On sait que l'Office national de l'énergie a l'expertise, qu'Enbridge a l'expertise. Il y a des experts qui vont s'assurer que la sécurité va être là. D'ailleurs, bon, on sait que, dans 99,99 % des cas, le transport se fait de façon sécuritaire. Les citoyens, c'est normal, ils ont raison de s'inquiéter quand ils voient un accident. C'est une réaction normale, sauf qu'il faut se rappeler que, dans 99,99 % des cas, il n'y a pas d'accident. Les opérations se font de façon sécuritaire. Ce n'est pas dans l'intérêt de n'importe quelle entreprise de subir un accident, ni pour sa rentabilité, d'un point de vue strictement économique, ni pour son image, ni pour son avenir. Et donc je crois que les grandes entreprises qui veulent survivre ont tout intérêt à assurer des opérations sécuritaires.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Oui. Est-ce que le fait de… Puis ça, ça doit l'intéresser, le député de Mercier, les moyens de… La majorité des travailleurs, 51 000, sont des syndiqués. Et la moyenne des salaires, ces gens-là, c'est à peu près à combien?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Effectivement, la majorité sont syndiqués. Et les chiffres que j'avais du Conference Board, c'est que le salaire moyen dans cette industrie est de deux tiers supérieur au salaire moyen dans l'économie en général.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Oui. Est-ce qu'on peut dire… Ça, ça l'intéresse, le député de Mercier, probablement. Ce qu'on va faire, par ce projet-là, on va créer davantage des emplois. Ces emplois-là sont syndiqués, à un salaire qui est plus haut que la moyenne, et plus, beaucoup plus que des emplois à l'extérieur du Canada qui ne sont pas syndiqués et ne sont pas bien payés.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Kozhaya (Norma) : Oui, tout à fait. Je crois que la réponse est claire.

M. Hamad : Donc…

La Présidente (Mme Bouillé) : Non, M. le député de Louis-Hébert! Ça va bien, là, on continue! La parole est maintenant au député de Mercier.

M. Khadir : Mme Kozhaya, M. Lazure, vous savez à quel point le Conseil du patronat est toujours bienvenu à l'Assemblée nationale. C'est sans doute l'intervenant social qui est le plus souvent présent dans toutes les commissions. Et tous les députés, en fait, sauf, là, quelques rares exceptions…

Des voix : Presque.

M. Khadir : Presque tous les députés — c'est ça, merci — sont très contents et en faveur, tellement et si bien que, depuis 30 ans, on a suivi la plupart de vos prescriptions pour la prospérité, par exemple. Mais malheureusement je crois qu'il faut être un peu prudent dans ces prescriptions parce que, là, depuis 25 ans, le salaire et le revenu moyen disponible, en dollars constants, de la famille moyenne, de la grande majorité des Québécois, comme ailleurs en Occident, a stagné alors que les profits des entreprises ont explosé.

Mais je vous suis reconnaissant quand même parce qu'à la page 26 vous avez cité amplement, dans votre document, Pierre-Olivier Pineau, professeur aux HEC, spécialiste en politique énergétique. Vous l'avez cité abondamment, en vous associant à ses propos, et vous dites : «…traiter à Montréal le pétrole des sables bitumineux que Suncor extrait en Alberta permettrait à la pétrolière d'augmenter ses marges de profit en poursuivant l'intégration de ses activités de production à ses activités de raffinage et de distribution…» Donc, ça veut dire que vous confirmez que, en tout cas pour Suncor, le but, c'est de raffiner le pétrole bitumineux, là, qui vient des sables bitumineux d'Alberta, dans ses raffineries.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur du Conseil du patronat, en 15 secondes.

Mme Kozhaya (Norma) : À ma compréhension, c'est qu'en ce moment les raffineries ne sont pas nécessairement équipées pour raffiner le pétrole du sable bitumineux, mais ça n'empêche pas qu'éventuellement ça puisse être le cas.

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier, je suis vraiment désolée, mais…

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : Je suis désolée. On doit libérer la salle pour 13 heures, comme vous pouvez le constater en arrière, là, où le repas est pour un autre groupe.

Donc, je vous remercie. Sur ce, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 12)

La Présidente (Mme Bouillé) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Cet après-midi, nous entendrons la Fédération des chambres de commerce du Québec, l'Association industrielle de l'est de Montréal, les Manufacturiers et exportateurs du Québec ainsi que la Chambre de commerce de l'est de Montréal.

Avant de débuter l'audition de la fédération, je veux indiquer aux membres que le document d'Enbridge auquel j'ai référé ce matin sera pour l'usage des membres de cette commission seulement. Il vous sera distribué dès que nous aurons des copies pour tous. Merci beaucoup.

Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la fédération. Vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Bienvenue, Mme Bertrand.

Fédération des chambres de
commerce du Québec (FCCQ)

Mme Bertrand (Françoise) : Bonjour, Mme la Présidente. Mme la ministre, MM., Mmes les députés, merci de nous recevoir, on apprécie énormément. Je suis accompagnée de François-William Simard, directeur Stratégie et affaires économiques à la fédération, mais qui aussi accompagne les comités mines, développement du Nord pour tous, et aussi le comité énergie, donc est tout à fait habilité à m'accompagner pour répondre à vos questions suite à notre présentation.

La fédération, on vous le dit à chaque fois : 147 chambres de commerce à travers le Québec, 1 200 entreprises membres directement de la fédération, mais, par le réseau, nous représentons plus de 60 000 entreprises, 150 000 gens d'affaires.

Alors, pourquoi sommes-nous si intéressés aux questions d'inversion du pipeline Enbridge? Bien, en fait, c'est que nous sommes intéressés aux ressources naturelles de façon générale et particulièrement sur les hydrocarbures. Nous avons toujours dit qu'il était important, dans le portefeuille pluriel en matière énergétique, de vraiment faire une place encore aux hydrocarbures. Peut-être, un jour, dans quelques siècles, n'aurons-nous plus besoin des hydrocarbures, mais on a le temps de pouvoir avancer avec la possibilité de recourir aux ressources disponibles plutôt qu'évidemment déséquilibrer la balance commerciale du Québec et du Canada. Et, si on pouvait avoir du pétrole qui provient d'autres provinces — éventuellement, un jour, même le pétrole de chez nous — nous pensons que nous serions mieux équipés.

Nous avons donc, dans notre Vision économique 2012-2020, directement mentionné l'importance des hydrocarbures. Nous avons travaillé de façon active, bien sûr, dans la coalition pour l'inversion du pipeline, mais nous avons travaillé de concert avec la Chambre de commerce de Lévis, la chambre de commerce du Montréal-Est et la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et ainsi que celle de Québec.

Nous sommes tout à fait heureux de constater la démarche qu'a faite le gouvernement du Québec. Et le document qui a été présenté, selon nous — on veut le mentionner parce que c'est important — il y a beaucoup de place pour les données économiques. Et la fédération, vous le remarquerez, très souvent, on revient sur l'importance des données économiques. On a même, à certains moments et encore dernièrement, redit l'importance de peut-être créer une agence d'analyse économique qui amènerait, dans le débat public, les données économiques. Bien, le document qui nous est présenté, sur lequel on se présente aujourd'hui, est un document factuel avec des données économiques qui vraiment nous permet de travailler et d'informer la population, ce qui nous apparaît extrêmement important.

Alors, pour nous, évidemment, il y a eu beaucoup d'encre et beaucoup de paroles dites sur l'inversion de ce pipeline. Pour nous, il s'agit vraiment d'un projet qui est assez simple. Il ne s'agit pas de construire un nouvel oléoduc — il existe — il s'agit d'inverser le flux du pipeline de la ligne 9. En termes clairs, il y a déjà du pétrole qui circule dans le pipeline puis il circule vers l'ouest. Avec le projet, il viendra plutôt vers l'est, et, pour nous, ce n'est pas compliqué, et on aimerait vraiment que nous puissions aller de l'avant tout comme, je pense, beaucoup d'acteurs qui sont venus devant vous pendant ces audiences-là.

Je laisse la parole, sur les retombées économiques directes que nous voulons mettre en valeur… François-William.

M. Simard (François-William) : Merci, Mme Bertrand. Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires, M. le député de Roberval, avec qui j'ai passé quelques jours la semaine dernière dans la forêt québécoise…

La fédération, vous l'aurez deviné il y a quelques instants, appuie le projet d'inversion du flux du pipeline de la ligne 9 depuis ses premiers balbutiements parce qu'il y aura d'importantes retombées économiques pour le Québec. En effet, selon une étude réalisée par Demke Management en 2012, 700 millions de dollars seront injectés dans l'économie québécoise au cours des trois prochaines décennies. De plus, pendant la phase de construction du projet, ce seront environ 270 années-personnes en emplois directs qui seront créées au Canada, dont une partie significative au Québec. Il s'agit de retombées économiques directes majeures pour un projet qui, faut-il le rappeler, ne consiste pas en de nouvelles constructions à proprement parler.

      Mais, Mme la Présidente, s'arrêter aux retombées économiques directes constituerait une erreur pour nous et ne traduirait pas à sa juste valeur l'importance du projet. Pour bien en saisir toute la portée, il faut regarder la situation de façon plus large et, pour ce faire, il faut se rappeler que l'industrie de la pétrochimie a connu un déclin significatif dans les dernières décennies. Cinq raffineries ont fermé leurs portes au Québec. Il n'en reste plus que deux, soit une à Montréal et une à Lévis. Le nombre d'établissements dans ce secteur a diminué de 20 % de 2004 à 2008 et le nombre d'employés, de près de 4 % entre 2005 et 2007 seulement. Tout cela n'inclut même pas l'impact résultant de la fermeture de la raffinerie Shell dans l'est de Montréal en 2010, alors que 800 emplois directs hautement rémunérés ont été perdus dans l'est de Montréal. La perte de la raffinerie Shell s'est ajoutée à plusieurs autres fermetures récentes dans le secteur pétrochimique, dont celle de Basell, Pétromont, Tuyaux Wolverine, Cari-All, Nova-Chimie ainsi que PTT Poly Canada. L'industrie demeure importante, certes, mais elle est beaucoup moins solide qu'avant et elle est plus vulnérable aux restructurations en cours mondialement dans le secteur. Nous ne pouvons donc pas rester les bras croisés face à cette situation.

      Alors, Mme la Présidente, pour contribuer à freiner ce déclin, nous devons permettre aux raffineries de compter sur un approvisionnement plus compétitif, et, pour ce faire, elles doivent avoir accès au pétrole albertain, ce que rendra possible l'inversion du flux de la ligne 9. Nos deux dernières raffineries, Suncor et Valero, sont catégoriques : elles ont urgemment besoin de pouvoir s'approvisionner avec d'autres sources de pétrole pour pouvoir justifier des investissements dans leurs raffineries respectives, condition essentielle à la poursuite de leurs activités à moyen et long terme. Voilà comment, indirectement, le projet d'Enbridge consoliderait des milliers d'emplois au Québec, des milliers d'emplois parce que ce n'est pas seulement de nos deux raffineries dont il est question ici; c'est tout le secteur de la pétrochimie de l'est de Montréal. Si les raffineries ne sont pas compétitives, c'est tout le secteur de la pétrochimie et sa chaîne du polyester qui en souffrent. Le fonctionnement d'ailleurs de cette chaîne du polyester vous sera sans doute brillamment expliqué par l'Association industrielle de l'est de Montréal, qui suivra notre présentation. Par ailleurs, Valero a annoncé des investissements à venir qui avoisineraient les 200 millions de dollars, à condition que le projet d'inversion d'Enbridge se réalise. Il s'agit incontestablement d'une autre retombée économique majeure du projet.

Mme la Présidente, parmi les autres avantages que nous devons considérer, il y a celui de la réduction du déficit commercial du Québec qui se chiffrait, en 2011, à 29 milliards de dollars. Le pétrole représentait 11 milliards de ce déficit, soit 38 %, ce qui est majeur. Le projet d'inversion du pipeline viendrait soulager en partie notre déficit commercial.

• (15 h 20) •

L'exploration et l'exploitation projetées du pétrole en sol québécois, avec les gisements potentiels à l'île d'Anticosti, d'Old Harry notamment, est un autre facteur qui nous amène à appuyer l'inversion du pipeline de la ligne 9. Nous croyons qu'il serait paradoxal d'en venir un jour au Québec à exploiter notre pétrole, mais que nous n'ayons plus les installations et l'expertise nécessaires pour en assurer le traitement. C'est pourquoi nous devons tout mettre en oeuvre pour garder les emplois du secteur pétrochimique ici, au Québec.

Certains groupes qui s'opposent à la réalisation du projet soulignent que le Québec doit se sortir de sa dépendance au pétrole, que les hydrocarbures sont une industrie du dernier siècle et que nous n'en avons plus vraiment besoin.

Certes, Mme la Présidente, la Fédération des chambres de commerce appuie les efforts pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, pour trouver de nouvelles solutions plus vertes. Mais nous ne devons pas rêver en couleurs, nous devons être réalistes et pragmatiques. Du pétrole, nous en avons besoin et nous en aurons besoin pour encore plusieurs décennies. La consommation de pétrole est d'ailleurs en croissance au Québec. Il ne faut donc pas fermer la porte à un projet qui réduirait notre dépendance au pétrole étranger et qui ferait en sorte de cesser d'envoyer environ 14 milliards de dollars annuellement en Afrique et au Moyen-Orient.

Un dernier élément à prendre en considération est celui de l'impact de la production pétrolière de l'Ouest canadien sur le Québec. Il y a trois semaines, nous avons publié une étude réalisée par la firme KPMG, qui évaluait les retombées économiques associées à la production pétrolière de l'Ouest canadien. Les résultats sont très éloquents. C'est 1 milliard de dollars en retombées économiques et plus de 10 000 emplois directs et indirects au Québec qui dépendent de cette industrie, sans compter l'impact sur les calculs de péréquations pour la province. C'est aussi près de 70 millions de dollars qui se retrouvent dans les coffres du gouvernement québécois grâce à cette production pétrolière. Cela nous fait dire que des projets qui visent à assurer le maintien ou la croissance de l'industrie pétrolière canadienne amènent d'importantes retombées économiques au Québec. Lorsque l'industrie canadienne croît, le Québec en reçoit davantage.

Mme Bertrand (Françoise) : Mme la Présidente, les projets de développement ne peuvent plus être réalisés comme avant, quand les décideurs publics… que les entreprises reconnaissent que la réalisation d'un projet ne peut plus se faire comme il y a 20 ans, 10 ans, voire cinq ans. L'acceptabilité sociale est devenue une condition plus que souhaitable lorsqu'une entreprise va de l'avant avec un projet, et c'est tant mieux.

Toutefois, aucun projet ne peut faire l'unanimité. Des gens en désaccord avec un projet, il y en a aura toujours. C'est donc l'acceptabilité sociale qu'on doit viser et non l'unanimité sociale. Au cours de la dernière année, nous avons publié deux sondages CROP qui ont démontré un fort appui de la population, de 71 % et de 60 %, au projet d'inversion du flot de l'oléoduc. Ils ont aussi démontré que les gens préféraient dans de larges proportions, soient 76 % et 73 %, le pétrole provenant de l'Alberta à celui d'outre-mer transporté par bateau. Nous ne pouvons évidemment conclure qu'il y a acceptabilité sociale exclusivement à partir d'un outil comme le sondage, mais il s'agit quand même d'un puissant indicateur de l'appui des citoyens au projet d'inversion du flux de la ligne 9.

En terminant, Mme la Présidente, nous rappelons qu'un projet de développement qui a zéro impact sur l'environnement, ça n'existe tout simplement pas. Devant ce constat, les entreprises promotrices de projets ont la responsabilité de démontrer que leur projet est sécuritaire pour la population et qu'il minimise les risques pour l'environnement. Je crois que la présentation faite hier par Enbridge a démontré que l'entreprise avait ce souci et qu'elle avait la volonté d'assurer l'intégrité et la sécurité du pipeline.

Quant à notre témoignage, nous espérons vous avoir démontré, Mme la Présidente, que le projet amènera d'importantes retombées économiques et nous rappelons l'importance que ce projet a pour les Québécois, ne serait-ce que pour notre réduction… au pétrole étranger. Nous espérons que ce témoignage vous aidera, Mme la Présidente et Mmes, MM. les parlementaires, à produire votre rapport, évidemment positif. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci, Mme Bertrand, merci, M. Simard. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec les parlementaires en commençant par la ministre. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Mme Bertrand, monsieur, bienvenue. Merci de vous être déplacés, de vous être prêtés à l'exercice.

Je sais que vous parliez, dans votre... vous nous avez dit que vous laisseriez les gens de la chambre de commerce de l'est de la ville nous parler de la filière pétrochimique et de son impact sur l'économie du Québec. Mais, selon vous, est-ce que cette filière pourrait maintenir son niveau de concurrence avec du pétrole importé comme c'est le cas aujourd'hui? En quoi le fait d'avoir du pétrole qui proviendrait de l'Ouest canadien, pour cette filière, ça serait un avantage qui la maintiendrait, qui lui donnerait un avantage concurrentiel?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, messieurs de la Fédération des chambres de commerce.

M. Simard (François-William) : Oui. Bien, merci, Mme la ministre, pour cette question. La première chose qu'il faut prendre en considération… le pétrole, actuellement, lorsqu'on regarde les prix actuels ou, à tout le moins, en moyenne, dans la dernière année, le pétrole avec lequel nos raffineries s'approvisionnaient coûtait environ 20 $ de plus le baril. Donc, c'est du pétrole qui provient majoritairement d'Afrique, donc d'Afrique, du Moyen-Orient, un petit peu de la Norvège mais pas beaucoup, donc, c'est du pétrole qui coûte plus cher. Et la plupart des raffineries en Amérique du Nord s'approvisionnent à partir de pétrole qui est produit ici, soit au Canada ou également aux États-Unis, et ce pétrole-là, donc, coûte environ 20 $ moins cher.

Qu'est-ce que ça veut dire, concrètement? On sait qu'il y a une restructuration qui est en cours, qui dure depuis quelques années dans le monde de la pétrochimie, et qui est toujours en cours, et qui va se poursuivre, donc, dans les prochaines années. Il y aura probablement, selon ce que les experts disent, des raffineries qui devront fermer leurs portes, encore, en Amérique du Nord. Le choix que le Québec a à faire, s'il ne veut pas que ses raffineries soient celles qui, justement, ferment leurs portes : il doit permettre à ses raffineries d'être plus compétitives. Et la solution qu'on a devant nous, celle qui est possible, c'est donc d'avoir accès au pétrole albertain, parce qu'actuellement cet accès-là, il est à peu près inexistant. Donc, c'est exactement ce que va permettre le projet de pipeline d'Enbridge.

La Présidente (Mme Bouillé) : Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Certains groupes prétendent que l'avantage au niveau du prix va être de très courte durée, que cet avantage va… dès que le pétrole de l'Ouest va avoir accès à des marchés, que ce pétrole va rencontrer le prix du pétrole international, donc que cet avantage serait se très courte durée. Qu'en pensez-vous?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la fédération.

M. Simard (François-William) : C'est vrai que, dans le temps, ça fluctue. Ce sont des prix qui fluctuent, puis c'est d'ailleurs la raison pourquoi qu'à l'époque, en 1998 ou 1999, le sens du pipeline avait d'ailleurs été inversé. Mais le problème, c'est qu'on ne peut pas juste se limiter à cet avantage-là pour déterminer si le projet, il est bon ou non. Il y a cet avantage-là qui, sans faire de projection, si on regarde maintenant, il est valable, cet avantage-là. Mais il y a également… On a le choix. Le choix, il est très simple : on a du pétrole qui provient de l'extérieur, d'outre-mer, qui est transporté par bateau, ou encore, on a du pétrole ici, au Canada, qui est disponible et qui, lorsqu'évidemment l'industrie pétrolière canadienne croît… ça profite au Québec. On a le choix entre ces deux sources de pétrole là. Je pense que, pour les Québécois, pour la réduction de notre déficit commercial entre autres, on a tout intérêt, tout avantage à prioriser le pétrole albertain.

Donc, de tenir compte seulement que du prix du baril du pétrole, pour moi, c'est un avantage qui est très valable, et il faut absolument insister là-dessus, mais il y a plusieurs autres avantages également. Puis il faut se rappeler également que, sur la façon dont est produit le pétrole à l'heure actuelle, en Afrique, au Moyen-Orient… je sais que nous n'avons pas de contrôle là-dessus. Par contre, on est dans un pays qui est le Canada évidemment… Il y a du pétrole qui est produit ici, on a un contrôle sur les méthodes de production par le biais du gouvernement fédéral. Donc, je pense qu'également d'un point de vue du respect de l'environnement, on est, de loin, beaucoup mieux de favoriser celui du Canada.

Mme Bertrand (Françoise) : J'ajouterais, si vous le permettez…

La Présidente (Mme Bouillé) : Tout à fait.

Mme Bertrand (Françoise) : …Mme la ministre, la question de la concurrence. On le sait, on… Et c'est pour ça d'ailleurs que la fédération promeut un portefeuille pluriel en matière d'énergie. Alors, si on est strictement dépendants du pétrole qui vient de l'étranger, bien, ce n'est pas la même chose que de pouvoir avoir justement cette comparaison de prix avec l'Ouest. Est-ce que ça va fluctuer? Peut-être. Mais, à tout le moins, nous aurons la possibilité de faire des choix. Merci.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame… M. le député de Roberval.

M. Trottier : Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs, mesdames de la chambre de commerce. Vous avez mentionné que la part du pétrole de l'Ouest pourrait aider à diminuer notre balance commerciale. Est-ce que vous pourriez expliquer un peu plus, là, pourquoi vous arrivez à cette conclusion-là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

M. Simard (François-William) : Bien… Oui.

• (15 h 30) •

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, c'est assez simple. C'est que présentement on importe complètement notre pétrole. Et, dépendant des années… On parle, dans l'année témoin que nous prenions, là, dans notre document, on parle de 11 milliards cette année-là; dans notre document de vision économique, notre référence est à 12 milliards, puis on parle que, facilement, si la tendance se maintient, nous serons à probablement 14 milliards avant longtemps... Alors, on importe 14 milliards, donc, dans l'équilibre, dans la balance commerciale, forcément, il faut qu'on exporte l'équivalent. Ce n'est pas évident qu'on va exporter… On n'exporte plus de la même façon. Bien sûr, il y a la possibilité du marché européen avec le libre-échange, mais, avant qu'on puisse rattraper ce 14 milliards là, c'est sûr que ce serait extrêmement difficile.

Alors, nous pensons que, si on est capables de travailler avec un pétrole canadien, puis, un jour, éventuellement, même québécois, nous sommes avantagés d'un point de vue de la balance commerciale.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Roberval.

M. Trottier : Merci, Mme la Présidente. Mais est-ce que ce n'est pas la diminution de la balance commerciale du Canada davantage que celle du Québec? Parce que, dans le fond, à partir du moment où ça sort du Québec…

Mme Bertrand (Françoise) : C'est la portion…

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur de la Fédération des chambres de commerce.

Mme Bertrand (Françoise) :

La Présidente (Mme Bouillé) : De rien, Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise) : Je suis vraiment indisciplinée. Je m'en excuse, Mme la Présidente. Non, c'est la portion utilisée par le Québec.

M. Simard (François-William) : Et, si vous me permettez de compléter, puis je vais en profiter pour passer un petit message également, c'est certain que, si on peut viser l'exploitation du pétrole au Québec, qui va également contribuer à la réduction du déficit commercial, on va en être très, très heureux également.

La Présidente (Mme Bouillé) : Parfait. M. le député de Roberval.

M. Trottier : Sur les questions économiques, je pense que la plupart des gens au Québec conviennent que c'est une bonne affaire parce que ça va… il y a des possibilités de maintenir des emplois à court terme, à moyen terme puis à plus long terme. Mais ce qui inquiète vraiment les gens, c'est plus l'aspect environnemental, la sécurité. Quelles sont vos préoccupations, en dehors du fait de dire qu'il faut que ce soit sécuritaire? Est-ce qu'il y a des suggestions que vous avez à nous faire pour garantir cette sécurité-là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la Fédération des chambres de commerce.

Mme Bertrand (Françoise) : Oui, Mme la Présidente. Alors, écoutez, nous, on n'a aucune prétention. On est vraiment un organisme de défense économique. Il est évident que, face à des projets, nous voulons nous assurer que les entreprises ou les gens qui font la promotion de certains projets ou de certaines initiatives prennent tous les moyens… Mais on n'est pas des experts. Mais certainement que ce que nous avons eu comme échange avec l'entreprise qui est Enbridge nous rassure sur toutes les mesures qui ont été prises.

Et certains vont évidemment invoquer le fait qu'il y a eu déjà des dégâts qui ont été causés, et, à juste titre, je pense que c'est vrai, il y en a eu. Maintenant, on nous dit de façon très marquée qu'il n'y a eu aucune altération de l'eau potable dans tout incident qui a pu survenir. Et, d'autre part, justement parce qu'il y a eu des incidents, il y a, comment dire, donc une éducation de l'entreprise qui s'est faite parce qu'on apprend à être davantage sécuritaires, recourir à des technologies et à des approches qui vont être encore plus respectueuses de la santé des citoyens et de l'environnement.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Roberval? Je ne vous vois pas. Oui, merci. C'est beau? Est-ce que, du côté… Ça va? Avez-vous… Merci. Nous allons maintenant procéder à l'échange avec les membres de l'opposition officielle. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue aux représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Il fait plaisir de vous recevoir et d'entendre votre point de vue.

Si j'ai bien compris, pour résumer un petit peu votre pensée, peu importent les fluctuations, le fait qu'on puisse avoir du pétrole qui provient de chez nous, sur lequel on a évidemment des contrôles via le fédéral — la réglementation, etc. — et les normes que nous considérons quand même comme étant meilleures chez nous — il y a plus de surveillance chez nous, etc. — ce sera toujours un avantage pour le Québec, il me semble, assez clair, si j'ai bien compris ce que vous avez dit.

J'aimerais vous poser une autre question. J'imagine… Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de présenter votre point de vue devant l'Office national de l'énergie.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Bertrand (Françoise) : Oui, bien sûr, nous l'avons fait. C'est d'ailleurs François-William qui est allé devant l'Office national de l'énergie, absolument. Nous avons pris la parole sur ce sujet à toutes les occasions possibles. Nous sommes vraiment en faveur du projet. Donc, autant l'office qu'un membre de la coalition… Puis, quand nous sommes demandés par les médias, nous prenons la parole pour défendre le projet, bien sûr.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : À quelle date avez-vous fait votre présentation? J'imagine que la présentation ressemble beaucoup à ce que vous avez dit ici. À quelle date avez-vous fait cette présentation devant l'Office national de l'énergie?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur de la Fédération des chambres de commerce.

Mme Bertrand (Françoise) : Le 9 octobre, nous étions devant l'office.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Et c'était une présentation de combien de temps? Combien de temps de parole avez-vous eu?

M. Simard (François-William) :

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la fédération.

M. Simard (François-William) : Excusez-moi également. On était accompagnés à ce moment-là de la Chambre de commerce de Lévis, parce que, comme Mme Bertrand le mentionnait tout à l'heure, on a travaillé très étroitement avec trois ou quatre de nos chambres de commerce qui sont membres chez nous. Et, à nous deux, je dirais qu'on a pris un bon 30 à 35 minutes de présentation, effectivement. Donc, oui, on a un petit peu répété ce qui a été dit, mais on a beaucoup raccourci la longueur de notre présentation.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Pourriez-vous expliquer pour les membres de la commission pourquoi vous avez pris la décision d'aller devant l'Office national de l'énergie? Évidemment, je comprends votre position. Vous êtes en faveur du projet. Mais pourquoi avoir été devant l'Office national de l'énergie comme tel, comme tribune, comme forum pour exprimer cette opinion ?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Bertrand (Françoise) : Mme la Présidente, je pourrais… J'apprends, hein? Je m'améliore.

La Présidente (Mme Bouillé) : C'est beau, Mme Bertrand.

Mme Bertrand (Françoise) : M. le député, je le répète, nous avons pris toutes les occasions possibles. Et nous avons appris, à travers le temps, qu'être en faveur d'un projet puis envoyer une lettre d'appui ou un communiqué ce n'est pas suffisant. Il faut revenir à la charge. Et toutes les tribunes qui nous sont offertes, nous prenons l'opportunité d'y aller. Or, dans le domaine de l'énergie, l'Office national de l'énergie, au Canada, c'est un office qui a quand même une expertise réputée. C'est un organisme sérieux. Alors, s'il y a un lieu où il nous apparaissait important d'être présents, c'est bien celui-là. S'il y a quelque chose, on salue le document qui a été préparé par Mme la ministre et puis son équipe. Mais, pour nous, la démarche qui était vers l'office était une démarche tout à fait sérieuse et à laquelle on était tout à fait heureux de participer.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : À part le fait qu'ils ont l'expertise, évidemment, vous êtes d'accord avec moi qu'ils ont aussi la compétence en la matière. C'est l'instance qui est exécutoire en matière d'énergie. Alors, vous êtes d'accord avec moi?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur de la Fédération des chambres de commerce.

Mme Bertrand (Françoise) : Il faut que vous ayez en tête que je suis l'ancienne présidente du CRTC. Donc, je reconnais qu'il y a des organismes fédéraux qui ont des grandes expertises et compétences. C'est le cas de l'Office national de l'énergie, bien sûr.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Vous êtes aussi évidemment au courant que le gouvernement ontarien s'est présenté devant l'Office national de l'énergie, dans le dossier, afin de faire valoir sa position. Je ne sais pas si vous étiez au courant.

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la fédération.

Mme Bertrand (Françoise) : Oui, probablement, M. le député. J'ignore exactement, là, la liste de tous ceux qui se sont présentés. Mais oui, c'est très possible.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Et aussi vous êtes au courant que le gouvernement du Québec a fait le choix de ne pas aller devant l'Office national de l'énergie afin de faire une présentation. Je présume que vous êtes au courant de ce fait-là également?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Bertrand (Françoise) : Oui, je suis au courant.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Si j'étais pour vous demander votre point de vue là-dessus, comment vous vous exprimeriez, à ce sujet-là, que le gouvernement du Québec n'était pas devant l'Office national de l'énergie pour un dossier que vous appelez, évidemment, un dossier structurant, important pour l'économie, des bonnes raisons pour l'industrie pétrochimique, pour lequel il y a quand même un consensus qui semble assez fort autour de la table? Comment exprimerez-vous… sur cette non-participation?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur de la fédération.

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, écoutez, je pense que c'est à Mme la ministre de se prononcer sur le sujet et au gouvernement. Je pense que c'est un lieu, je le répète, avec une grande expertise, une compétence, et ils avaient la compétence. Le gouvernement a certainement ses raisons, probablement politiques, mais ce n'est pas à moi d'en juger.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Oui. Bienvenue, Mme Bertrand. Bienvenue ici, à l'Assemblée. Je trouve ça très intéressant, l'étude qui a été faite, Retombées économiques de l'industrie pétrolière de l'Ouest canadien. Je ne sais pas, ça m'a rendu curieux. Vous savez qu'il y a aussi l'impact sur la péréquation pour le Québec, le fait que ces provinces-là s'enrichissent avec les ressources naturelles, contrairement à nous. Et ça amène de la richesse qui s'en va. Et après ça on la partage avec le Québec. Et je sais que l'uranium de l'Ouest nous permet de recevoir la péréquation, au Québec, pendant qu'ici, bien, on n'en veut pas pour le moment. Est-ce qu'il y a eu une analyse des retombées aussi sur la péréquation qu'on reçoit ici?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la fédération.

• (15 h 40) •

Mme Bertrand (Françoise) : M. le député, nous n'avons pas fait justement ce choix-là. Nous voulions démontrer qu'au-delà de la péréquation il y a une richesse liée à des fournisseurs qui sont tant au moment de l'exploration, de la construction et de l'exploitation. Évidemment, la question de la péréquation…

Nous aimons aussi donner très souvent l'exemple de la Norvège, la Norvège qui, vraiment, exploite ses ressources correctement. Puis, on le sait, la Scandinavie, les pays de la Scandinavie sont souvent donnés comme des exemples vraiment exemplaires. Alors, pour nous, c'est certain que c'est une raison fondamentale pourquoi nous appuyons l'exploitation des ressources naturelles au Québec.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Ça serait intéressant de savoir aussi que la richesse de nos provinces voisines peut nous amener aussi une richesse, hein?

L'autre élément, ce que j'ai trouvé… agréablement surpris, c'est à peu près autour de 1 milliard, la valeur ajoutée des retombées économiques du pétrole de l'Ouest sur l'économie du Québec. C'est 0,3 % sur le PIB puis 10 400 emplois. C'est énorme! Puis les revenus de l'État du Québec, c'est 68 millions, les recettes fiscales. «Revenus des gouvernements provinciaux», ça doit être recettes fiscales.

Mme Bertrand (Françoise) : Oui, tout à fait. C'est ce qui nous intéressait pour justement… Parce que ce dont on parle souvent, c'est la question du fonds patrimonial qui a été créé en Alberta puis la question de la péréquation. Mais est-ce qu'il y a d'autres avantages? Puis vous avez vu dans le document qu'il y en a aussi dans l'ensemble des provinces canadiennes. Mais, au Québec, ça veut donc dire qu'il y a des entreprises qui fournissent de l'équipement, qui sont fournisseuses des grandes entreprises de pétrole. Et c'est quand même énorme, 10 000 emplois, et 10 000 emplois aussi à haut niveau. Et c'est pourquoi aussi c'est une expertise qu'on pourra utiliser éventuellement au Québec pour d'autres exploitants. Et ça aussi, c'est une bonne nouvelle.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Simard.

M. Simard (François-William) : Et, écoutez, si vous me permettez également, j'ajouterais… Parce que ce sont des retombées économiques qu'on juge très intéressantes, effectivement. Vous les avez citées. Mais c'est important de mentionner que l'étude ne portait que sur la partie production pétrolière dans l'Ouest canadien. Donc, tout ce qui est distribution et transformation — donc transformation, c'est, entre autres, le raffinage — on n'a pas inclus ça dans l'étude. Donc, sans doute que les retombées économiques auraient été beaucoup plus élevées si ça avait été tenu ou pris en considération dans l'étude.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci. L'Ontario : 3,4 milliards. Ça vient d'où, la différence, si on parle juste de l'exploitation? Ça veut dire que les Ontariens sont plus présents là-bas? C'est quoi?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la fédération.

Mme Bertrand (Françoise) : C'est un tissu manufacturier plus important. Parce que, comme le dit François-William, les coûts considérés indirects, ce sont les coûts afférents à l'exploration, l'exploitation et la construction, alors tout simplement liés probablement à une population plus importante et donc une contribution plus importante. Je ne me rappelle pas, dans les catégories, la différenciation des catégories, qu'il y avait beaucoup plus…

M. Hamad :

Mme Bertrand (Françoise) : Oui. Sur les…

M. Hamad :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert, la parole est aux représentants.

Mme Bertrand (Françoise) : Alors, je ne me rappelle pas quelle était la proportion, dans ce type de travaux là, la différence entre le Québec et l'Ontario. Est-ce que c'est beaucoup plus en Ontario, tout simplement parce que leur population est plus importante? C'est peut-être tout simplement ça.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député…

Mme Bertrand (Françoise) : Mais 1 milliard, c'est encore important de toute manière.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Oui. J'ai encore le temps?

La Présidente (Mme Bouillé) : Bien oui!

M. Hamad : Oui. O.K. Mais, quand vous dites «merci», ça veut dire que c'est fini, mais là «merci» pour parler. C'est ça? O.K.

La Présidente (Mme Bouillé) : Quand je vous nomme, vous avez la parole.

M. Hamad : C'est bien. Merci beaucoup. Mais en fait… Parce que ce n'est pas une question de raffineries, en Ontario, c'est plutôt le… Quand je regarde les composantes, là, c'est le génie, c'est les machineries et matériels, c'est l'installation, c'est autres travaux de génie. En tout cas, le génie, c'est 50 %; puis 22 %, machinerie et matériel puis installation. Qu'est-ce qu'on peut, au Québec, faire de plus pour tirer profit de la situation là-bas? C'est ça, le but de ma question, en fait.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

Mme Bertrand (Françoise) : Tout ce dont il est question ici, je le répète, c'est l'exploration. Donc, tout ce qui est génie, probablement la construction — donc, encore là, le génie puis les compagnies de construction — puis, troisièmement, c'est l'exploitation. Dans l'exploitation, il y a des grands équipements pour lesquels, probablement, il y a des manufacturiers ontariens qui sont plus nombreux que les nôtres, tout simplement. Parce qu'en termes d'expertise de génie je pense qu'on a vraiment de grandes expertises au Québec. La question d'exploration, je ne vois pas qu'il y a vraiment une différence importante. Ça doit être tout simplement le volume de manufacturiers impliqués dans l'exploitation comme telle, des pièces dans les grands équipements.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Trouvez-vous que ce serait une bonne idée de parler à la table de pétrochimie puis voir comment on peut augmenter la part du Québec en Alberta ou en… bien, particulièrement en Alberta? Parce que c'est trois fois, l'Ontario, 3 milliards, l'Ontario, les retombées; c'est 1 milliard ici. Puis normalement, proportionnellement en population et économie, c'est deux fois, mettons une fois et demi, une fois trois quarts. Là, c'est trois fois. Il y a quelque chose qui marche en Ontario qu'on ne fait pas ici. Ça ne veut pas dire qu'on n'est pas bons, là. Mais je pense que, vous, les gens d'affaires, il me semble qu'on devrait regarder ça davantage puis voir c'est quoi, qu'est-ce qu'il y a là-bas qu'on n'a pas, en Ontario.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur, en 45 secondes.

Mme Bertrand (Françoise) : Bien, je pense bien que, les manufacturiers et exportateurs, on pourra parler avec eux pour voir comment on peut développer davantage.

La Présidente (Mme Bouillé) : Je vous remercie beaucoup. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec la deuxième opposition. M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Merci, Mme la Présidente. Bien, bonjour à vous deux. Très bonne présentation, très intéressant. J'avais une question. Je vais y revenir. Mais je voudrais faire un petit peu de pouce sur mon collègue de Laurier-Dorion. Parce qu'on est habitués… La fédération, elle donne son opinion, puis, si elle n'est pas d'accord avec le gouvernement, normalement, elle le dit. Je ne comprends pas le malaise de… Quand on vous a demandé si le gouvernement aurait dû participer aux audiences, vous avez dit : Ce n'est pas à moi à juger ça. J'aurais aimé ça comprendre un peu votre malaise.

Puis l'autre chose que je voulais mentionner, qui est complètement différente, c'est qu'on comprend beaucoup les vertus, là, de ce changement d'inversion là au niveau de l'oléoduc. Mais moi, je voudrais… Ce que je me questionne depuis le début, c'est comment faire pour faire en sorte que le contribuable, qui accepte, hein, ce genre de risque là puisse récolter des fruits de ça? Ce matin, on nous a confirmé que le prix d'achat, c'est pour plusieurs années qu'il va être beaucoup moins cher en provenance de l'Alberta que… Ça fait que comment faire pour que le contribuable ait un gain par rapport à ça?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur de la Fédération des chambres de commerce.

Mme Bertrand (Françoise) : Alors, sur la première question, M. le député, sur l'argument politique, nous, on ne veut pas intervenir. S'il y avait eu quelque chose, on aurait dit tout simplement : Il y aurait dû avoir un seul arrêt, c'était l'office national. Maintenant, on est ici, ça démontre qu'on accorde quand même de l'importance, et que le gouvernement a choisi de faire une autre étape. Et, voilà, on s'est pliés au processus qui nous est soumis. C'est ainsi. Ce n'est pas nous qui faisons ça.

D'autre part, sur la question du prix pour le consommateur… Parce que le contribuable, il va en avoir des bienfaits. Le jour où on a une économie plus favorable, c'est évident que le contribuable, dans la mesure où les coffres du gouvernement s'emplissent parce qu'il y a une activité économique plus importante, bien, va être appelé à moins contribuer, peut-être, en compensation de revenus qui ne sont pas au rendez-vous. Puis on va le voir demain, à l'énoncé budgétaire, que les revenus, c'est tout aussi important que les dépenses que nous faisons, n'est-ce pas? Alors, nous pensons, nous, que le contribuable va déjà y gagner.

Est-ce que le consommateur comme tel va pouvoir avoir accès à une concurrence du prix meilleure qui amènerait évidemment à une baisse du prix à la pompe? C'est à ça que vous pensez sûrement. Il n'y a aucune promesse à cet effet-là, et ce n'est pas ce qui nous a animés. Nous, on l'a fait dans une perspective beaucoup plus macro. Dire qu'on n'espère pas, comme consommateurs, nous-mêmes, que ça puisse avoir une influence… on l'espère, mais ils ne nous l'ont pas garanti, puis je pense qu'il faut être assez réalistes là-dessus. L'avantage, pour les contribuables, pour les citoyens, c'est vraiment le fait qu'il y aura une activité économique.

Écoutez, la question des salaires, on l'a vu dans les raffineries, on en a perdu cinq. On ne veut pas, hein, perdre les deux dernières que nous avons. On le sait, comment il y a eu un mouvement d'appui pour ne pas que Shell parte, à l'époque. Bien, on ne voudrait pas perdre les deux autres. On parle de quand même une rémunération importante, c'est 2 000 emplois. Alors, pour nous, ça justifie entièrement que nous appuyions ce projet-là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup, Mme Bertrand, M. Simard. Oui, c'est fini. Fort intéressant, mais c'est fini. J'invite maintenant l'Association industrielle de l'est de Montréal de venir à la table des témoins.

Et je suspends pour une minute.

(Suspension de la séance à 15 h 50)

(Reprise à 15 h 51)

La Présidente (Mme Bouillé) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons les travaux de la…

Des voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons les travaux de la commission. Bienvenue, M. Tsingakis, pour l'Association industrielle de l'est de Montréal. Vous avez 10 minutes pour faire votre exposé.

Association industrielle de
l'est de Montréal (AIEM)

M. Tsingakis (Dimitri) : Merci, Mme la Présidente, messieurs les députés. Nous aimerions tout d'abord remercier cette commission de nous avoir invités à venir présenter les raisons pour lesquelles l'AIEM appuie le projet de rérenversement de la ligne 9B. Mon nom est Dimitri Tsingakis. Je suis directeur général de l'Association industrielle de l'est de Montréal.

Comme le document de consultation en fait longuement état, les incitatifs économiques en faveur du projet sont incontestables. Par ailleurs, plusieurs participants comme mes prédécesseurs viendront vous exposer les raisons économiques qui justifient le projet. Ainsi, je n'insisterai davantage sur cet aspect, autrement que de vous dire que l'AIEM est en accord avec les arguments économiques évoqués dans le document de consultation, qui, selon nous, milite en faveur du rérenversement.

Notre présentation traitera davantage du volet environnemental et social, et plus particulièrement de la qualité de l'air, de sécurité et de relations avec la communauté. Ce sont là les éléments de base qui fondent la mission de notre organisme. Nous commencerons par vous présenter brièvement l'AIEM, son évolution, ses valeurs et les résultats significatifs obtenus. Nous espérons qu'à la fin de notre présentation vous serez en accord avec nous pour dire que les membres de l'association sont des chefs de file en matière de développement industriel durable.

Notre organisation regroupe 13 membres qui opèrent des établissements industriels dans l'est de l'île de Montréal. Ces compagnies oeuvrent dans les secteurs d'activité variés du raffinage du pétrole, de la métallurgie, en passant par la chimie, la pétrochimie et le gaz naturel. Nos membres sont constitués en véritables écosystèmes industriels dont les synergies permettent de réduire la consommation d'énergie et l'optimisation des ressources. Cela représente plusieurs avantages puisque la proximité des usines réduit le besoin de transport et le besoin de maintenir des inventaires, améliorant ainsi la rentabilité et réduisant l'impact environnemental.

L'AIEM a été fondée en 1960, lorsque 16 dirigeants d'usines, aux prises avec des enjeux liés à la qualité de l'air et la qualité des eaux de la région, ont décidé de fonder un organisme pour adresser ces problématiques rencontrées, une première en environnement au Québec. Précurseure dans le domaine, l'association s'équipa d'un laboratoire et mit sur pied un réseau d'échantillonnage de la qualité de l'air. Les ministères de l'environnement du Canada, du Québec ainsi que la ville de Montréal ont pris le relais depuis.

Les efforts de réductions des émissions se poursuivent encore aujourd'hui. Ils ont eu un impact positif significatif sur la qualité de l'air de l'est de Montréal. À ce titre, nous aimerions profiter de cette tribune pour rectifier la perception qui demeure encore fortement ancrée dans l'esprit de beaucoup de gens que la qualité de l'air de la Pointe-de-l'Île est pire qu'ailleurs à Montréal. En effet, selon le rapport du Réseau de surveillance de la qualité de l'air de la ville de Montréal, les concentrations de polluants, tels que l'ozone, l'oxyde d'azote et les particules fines, sont légèrement inférieures ou égales à celles mesurées dans les autres stations du réseau.

Par ailleurs, les efforts du secteur industriel ont permis de réduire les concentrations de plusieurs polluants de 40 % à 80 % entre 2000 et 2012, tel qu'illustré dans les tableaux que vous avez dans le document. Ce ne sont là que quelques exemples de résultats obtenus par les membres de l'association au cours des dernières années.

Qu'en est-il maintenant du lien entre les émissions industrielles et la santé respiratoire si souvent invoqué par certains? Depuis 2001, plus de 13 études en lien avec la santé respiratoire dans l'Est de Montréal ont été publiées. Les études ont jusqu'à présent démontré que le problème de maladies respiratoires est un problème multifactoriel et qu'il n'est pas possible d'identifier la cause principale. L'allaitement, le tabagisme, la forte présence de foyers au bois, les moisissures et la proximité d'importants axes routiers sont également des facteurs en cause. Notons en particulier l'étude du Dr Kosatsky qui conclut que l'exposition journalière aux émissions du secteur industriel de l'est de Montréal est faiblement associée aux consultations et hospitalisations d'enfants pour diagnostic respiratoire.

Comme vous êtes en mesure de le constater, la protection de l'environnement fait partie de la mission première de l'AIEM, et, par le biais d'échange des bonnes pratiques et de l'influence des pairs, nous continuerons nos efforts à améliorer notre performance environnementale.

En termes de sécurité, dans les années 80, l'accident de Bhopal en Inde et une série d'accidents industriels majeurs à travers le monde forcent les membres à se questionner sur l'impact que pourrait avoir un accident industriel grave à Montréal. Dès lors, l'association s'engage dans une démarche qui la guidera vers des liens plus soutenus avec ses voisins et qui débute avec la mise sur pied du comité des Mesures d'urgence pour l'est de Montréal. Cette collaboration se poursuit en 1995 avec la fondation et la création, de façon volontaire, avec la ville de Montréal, du comité mixte municipalité et industries sur la gestion des risques. Encore une fois, il s'agit d'une première au Québec. Ce processus de concertation en gestion des risques fait maintenant office de meilleure pratique en matière… au Québec.

Au fil des ans, les membres de l'association ont mis de l'avant une série d'actions qui ont permis de réduire les risques d'accidents industriels. Par exemple, des substances dangereuses ont été remplacées, lorsque possible, par des substances plus sécuritaires. Nos membres, comme Enbridge, par exemple, participent activement aux travaux du CMMI de l'Est de Montréal. Ils font preuve de transparence et n'hésitent pas à s'entraider lorsqu'il est question de mesures d'urgence. Ils fournissent également, au besoin, un soutien aux autres équipes d'intervention et de sécurité incendie. Bâtir la confiance au niveau local ne peut exister que par un contact durable entre les partenaires locaux. Et c'est précisément en se basant sur des valeurs de transparence et de collaboration que les membres de l'association, comme Enbridge, continueront à jouer un rôle de leader.

En termes de relations avec la communauté, dans les années 90, l'AIEM met sur pied un comité de gestion des plaintes afin d'adresser des problématiques de nuisance, de bruit et d'odeurs. Cette collaboration basée sur l'ouverture et le partage se poursuit dans les années 2000 avec la mise sur pied du Comité de liaison industrie et communauté, communément appelé le CLIC. Des résidents et des intervenants locaux ont désormais la possibilité de s'informer et d'échanger régulièrement avec les membres de l'association. Cette pratique sociale contribue à la qualité de la cohabitation entre l'industrie et son milieu et encourage les meilleures pratiques. Aujourd'hui, la communauté n'est plus simplement informée, mais elle tient un rôle d'influence dans l'évolution de l'AIEM.

Maintenant, au niveau de l'importance d'avoir des matières premières, qui est un peu le mandat d'aujourd'hui, plusieurs raffineurs aux États-Unis ont déjà accès à du pétrole de l'Ouest. Comme le marché nord-américain des carburants est un marché mature, nous croyons que celui-ci subira d'autres contractions et consolidations. On note que, depuis la fermeture de Shell à Montréal, au moins quatre autres raffineries ont fermé leurs portes. Si nous voulons maintenir nos actifs de raffinage et de pétrochimie dans l'Est de Montréal, nous devons avoir accès à une matière à prix compétitif. Si vous me permettez une image, le premier maillon qui nous permet d'ancrer la chaîne de valeur ajoutée dans l'est de Montréal, c'est la matière première à prix compétitif.

Plus tôt cette année, l'AIEM, avec des partenaires de l'est de Montréal ainsi que le gouvernement du Québec, a entrepris, avec l'aide de l'École polytechnique de Montréal, une réflexion sur leur vision quant au futur industriel de l'est. Cette vision s'articule autour du concept d'écologie industrielle. Nous sommes convaincus que l'est de Montréal peut être cette terre d'accueil de projets d'avenir et structurants. Ceux-ci profiteraient des infrastructures existantes pour supporter et favoriser la recherche, le développement et les technologies innovantes.

Nous sommes conscients que le marché est en évolution et que nous devons collectivement revoir notre utilisation des combustibles fossiles. Il faut travailler sur cette transition. Mais, tant que nous ferons le choix de consommer un produit, il vaut mieux le fabriquer localement selon les meilleures pratiques plutôt que d'offrir à quelqu'un d'autre, ailleurs, de le faire à notre place. Pour ce faire, il faut avoir accès à de la matière première compétitive, car on aura beau avoir les meilleures usines, les règles de fonctionnement les plus strictes, les gens compétents, si nous n'avons pas accès à cette matière première de façon compétitive, nos chances de succès sont compromises.

L'AIEM respecte le processus actuel et demande humblement au gouvernement de permettre le rérenversement de la ligne 9B, ce qui nous permettra, de par nos actions, tant sur le plan de la sécurité, de la fiabilité et de l'écologie industrielle, de demeurer des chefs de file en développement industriel durable.

Merci infiniment de l'opportunité que vous nous avez offerte aujourd'hui.

• (16 heures) •

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec les parlementaires, en commençant par la partie gouvernementale. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Merci monsieur, bienvenue à l'Assemblée nationale. Quel est l'impact, sur la vie économique de l'Est de l'île de Montréal, de la seule raffinerie qui reste, celle de Suncor, et de toute la filière pétrochimique?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Tsingakis.

M. Tsingakis (Dimitri) : Oui, Mme la Présidente. Je vous dirais qu'il est difficile pour moi de quantifier l'impact économique. Ce que je peux par contre vous dire, c'est que l'est de Montréal... ou les entreprises qui sont situées dans l'est de Montréal sont fortement intégrées les unes des autres, donc ce qui fait en sorte... c'est que, collectivement, elles ont besoin les unes des autres, et, à partir du moment où on commence à perdre des maillons de cette chaîne-là, bien, ça fragilise l'ensemble du secteur.

Donc, je vous dirais, en termes de retombées économiques locales, c'est sûr qu'elles sont très importantes. Je n'ai pas de chiffre à vous donner spécifiquement. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est qu'en discutant avec les commerçants locaux... Puis on l'a vu à plusieurs reprises lors de conflits de travail ou lors de fermetures… Nous-mêmes, à l'association, nous avons subi des compressions suite à des fermetures de... ou la perte de plusieurs membres. Et je vous dirais, donc, que l'impact économique au niveau local est très, très important pour l'est de Montréal. Et, en plus d'être fortement intégrée, elle est importante aussi sur l'ensemble des partenaires économiques.

La Présidente (Mme Bouillé) : Mme la ministre.

Mme Zakaïb : M. le député de Repentigny.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Repentigny.

M. McKay : Oui, merci. Bonjour, M. Tsingakis. Ça me fait plaisir de vous rencontrer aujourd'hui, d'autant plus que... bien, j'ai eu l'occasion, dans des vies antérieures, de travailler en collaboration avec l'Association industrielle de l'est de Montréal et votre prédécesseur, dont on vous parle sûrement encore souvent, M. Frattolillo. D'ailleurs, je voyais qu'il a reçu un prix de la Sécurité publique, là, je crois, pas plus tard que l'an dernier. Ce prix-là, naturellement, c'est tout à son honneur, mais je pense que ça rejaillit aussi sur l'ensemble de votre organisation.

C'est vrai que la qualité de l'air s'est énormément améliorée dans l'est de Montréal. Moi, c'est là où je suis né puis où j'ai grandi. J'ai des histoires où, à l'époque, même, quand on passait à travers Montréal-Est... Il y avait des drôles d'idées dans ce temps-là. Des fois, les... ce n'était pas le cas de chez nous, mais il y avait les histoires de gens qui baissaient les vitres des voitures quand ils passaient à Montréal-Est parce qu'ils pensaient que c'était vivifiant, ces émanations notamment de soufre.

Mais, en tout cas, on a dépassé ce stade-là depuis bien longtemps. Puis je vous remercie d'avoir amené des statistiques qui sont tout à fait éloquentes sur la qualité de l'air dans l'est de Montréal. Puis c'est un peu le même air que mes concitoyens et concitoyennes de Repentigny respirent aussi, puisque les vents dominants sont vers l'est. Puis il y a aussi beaucoup de mes concitoyens, mes concitoyennes, qui travaillent ou ont travaillé dans l'est de l'île de Montréal.

Le concept dont vous nous parlez maintenant, qui semble être un peu votre nouvelle orientation, mais... J'aimerais ça que vous en parliez un peu, du concept d'écologie industrielle. Je vais en profiter encore pour ploguer mon livre, mais, justement, j'en parle dans une parution récente — vous voyez le député de Roberval, là, qui est un lecteur assidu — Pour un Québec vert et bleu. Mais on parle notamment du concept de l'écologie industrielle puis des exemples patents à travers le monde. Je pense que c'est vraiment la synergie entre les entreprises. Faire en sorte que le déchet ou les pertes d'énergie d'une entreprise deviennent de la matière première ou une source d'énergie pour une autre, c'est effectivement une voie d'avenir. J'aimerais ça que vous nous en parliez un petit peu. C'est sûr que, là, on parle d'Enbridge. Peut-être voir aussi comment… si, à votre sens, Enbridge… parce que je ne crois pas qu'ils sont membres chez vous à l'heure actuelle... Est-ce qu'ils sont membres?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Tsingakis (Dimitri) : Oui.

Une voix : C'est ça, la question?

La Présidente (Mme Bouillé) : Oui. Est-ce que c'était la question, M. le député de Repentigny?

M. McKay : C'est une vraie question. Non, c'est parce qu'à quelque part ce n'était pas clair. O.K., oui, je le vois, O.K., dans le… Bon, alors, juste… Puis, dans votre réponse, peut-être, essayez de nous indiquer un peu comment Enbridge peut bénéficier de l'expérience que vous avez — qui date quand même des années 60 — de collaboration. Puis je vois ici la députée de Pointe-aux-Trembles, qui connaît très, très bien vos activités. Je pense que c'est un modèle de collaboration, justement, entre l'industrie, les municipalités puis les citoyens. Comment Enbridge peut en bénéficier?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur, vous avez la parole.

M. Tsingakis (Dimitri) : Bon, merci, Mme la Présidente. Et effectivement il y a plusieurs éléments à votre question, et je tenterai d'y répondre, à l'ensemble. La première, effectivement, M. Frattolillo a été honoré du prix du Mérite hommage de la Sécurité civile, justement, pour tout le travail qui a été accompli au cours des 15 dernières années, justement, pour favoriser la sécurité et le rapprochement entre l'industrie et la communauté. Et je vous dirais qu'on continue, on maintient cette orientation-là en travaillant en étroite collaboration avec l'ensemble des partenaires de la communauté.

Maintenant, au niveau de l'écologie industrielle, effectivement, c'est un concept qui date quand même d'un certain nombre d'années et qui vise à réduire l'empreinte environnementale d'un ensemble d'entreprises en bouclant ce qu'on appelle les flux de matière et d'énergie, donc, ce qui vise à trouver des débouchés afin de récupérer… Quand on parle de symbiose, de substitution, donc, on remplace la matière première par de la matière recyclée ou de la matière revalorisée. Et donc l'idée, c'est de trouver des débouchés intéressants pour ces matières-là et d'essayer de les réutiliser au maximum.

On peut également parler de symbiose… de mutualisation, où plusieurs entreprises mettent ensemble certains services ou certains produits de façon à réduire le besoin d'avoir à maintenir de gros inventaires ou d'avoir à maintenir… Et, je vous dirais, l'association est un exemple concret de ça, où on offrait, jusqu'à tout récemment, un service de laboratoire d'analyse pour l'ensemble des membres de l'association. Donc, plutôt que chacune des entreprises ait son propre service de surveillance, bien, l'AIEM le faisait pour eux.

Et je vous dirais qu'évidemment pour nous, en termes de vision d'avenir, en termes de vision, ce qui nous interpelle, c'est d'essayer de profiter des actifs existants dans l'est de Montréal. Et, souvent, une raffinerie qui permet de séparer les produits d'hydrocarbures en différents sous-produits, qui permet de réutiliser certains sous-produits… Et le premier maillon d'une synergie, que ça soit au Danemark ou ailleurs… Souvent, une raffinerie fait partie, est un élément essentiel d'une symbiose industrielle.

Et, je vous dirais, en ce qui nous concerne, on a fait une étude avec l'École polytechnique, dont les résultats devraient sortir très prochainement. Et l'idée, c'est d'essayer de trouver, en combinant les technologies d'avenir — technologies vertes, par exemple — comment les intégrer de façon intéressante au sein du tissu industriel actuel. Et Enbridge vient s'intégrer là-dedans dans la mesure où il permet de maintenir les actifs de raffinage dans l'est de Montréal en les approvisionnant en matière première compétitive. Donc, l'idée de… comment le projet d'Enbridge vient impacter l'Est de Montréal, c'est que ça permet de maintenir le tissu industriel actuel, et ce qui va nous permettre, ultimement, d'y ajouter, d'y intégrer des nouvelles technologies, des technologies vertes pour évidemment aller vers du développement industriel durable, là, à moyen et long termes.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Oui. Bien, c'est un petit peu…

M. McKay : C'est très bien fait, bien ramassé, tout ça.

M. Trudel : C'est parce que c'est un peu…

M. McKay : Pardon?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député!

• (16 h 10) •

M. Trudel : C'est un peu là-dessus que je voulais discuter. Vous savez, l'est de Montréal a vécu des moments difficiles, il y a quelque temps, avec la fermeture de la raffinerie Shell, et puis… Je vois ma collègue ici qui nous renseignait là-dessus, là, constamment, mais pas juste le caucus des députés, l'ensemble de la population québécoise, et puis c'était une ardente défenseure de ce dossier-là. Il y avait eu un mandat d'initiative qui avait été mis en place par la commission. Malheureusement, l'ancien gouvernement n'avait pas attendu le rapport de la commission pour permettre le démantèlement des équipements de la raffinerie Shell.

J'aimerais que vous compariez un petit peu, là, la situation dans les deux cas, l'impact que ça a provoqué chez vous, à ce moment-là, la fermeture de la raffinerie Shell sur le tissu social et industriel de l'est de l'île de Montréal, puis, en même temps, mettre en lumière un peu ce que le projet d'Enbridge, là, peut représenter comme planche de salut pour vous, là, peut-être un peu dans la même lignée de ce que vous disiez, là, précédemment.

La Présidente (Mme Bouillé) :

M. Tsingakis (Dimitri) : Je peux y aller, oui?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur... Oui, excusez-moi, là.

M. Tsingakis (Dimitri) : Non, non, ça va. En fait, je vous dirais que Shell était légèrement ou, en tout cas, un petit peu moins intégrée dans le tissu industriel que l'est Suncor, par exemple. Suncor est le premier maillon de ce qu'on appelle la chaîne du polyester, et d'autres de mes collègues viendront vous en parler un peu plus tard, là, lors des séances. Mais évidemment Suncor est important pour l'ensemble des maillons pétrochimiques, puisque c'est lui qui approvisionne une bonne partie, là, du secteur pétrochimique de l'est de Montréal. Donc, je vous dirais, dans une éventualité où il y aurait une fermeture ou une perte au niveau de Suncor, bien, l'impact serait beaucoup plus grand, je vous dirais, que la perte l'a été de Shell.

C'est sûr qu'on déplore toujours la perte d'un membre de l'association parce que ça a des impacts. J'en suis le premier témoin à l'association. Évidemment, on avait des actifs au niveau du laboratoire et, malheureusement, avec la perte de Shell et de Pétromont, hein… On oublie souvent qu'avant Shell il y a eu Pétromont, qui employait… près de 350 à 400 emplois dans l'est de Montréal, qui avait également, à Varennes, des installations. Avec la perte de ces deux membres là, bien, il a fallu réduire un peu nos effectifs, et plusieurs gens de l'est de Montréal nous ont dit qu'évidemment la perte d'une raffinerie est un impact majeur. Mais, je vous dirais, Suncor, étant donné les ramifications qu'il a au niveau de la pétrochimie, pourrait représenter des impacts plus importants, et l'apport d'un approvisionnement compétitif serait toujours plus intéressant, là, pour nous.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Oui, effectivement. Êtes-vous capables de quantifier ou d'expliquer un peu l'impact de la fermeture Shell, qu'est-ce que ça a représenté comme… chez vous, et puis mettre un peu en parallèle des chiffres, là, sur le nombre d'emplois qui est vraiment, là… dérivés de la raffinerie de Suncor, puis de quelle façon spécifiquement, là, vous pensez que ça peut venir en aide, là, le projet d'Enbridge, là?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Tsingakis.

M. Tsingakis (Dimitri) : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je n'ai pas les chiffres exacts, là. J'ai des ordres de grandeur que je pourrais vous donner. Je sais que la raffinerie Shell, par exemple, employait de l'ordre de 500 personnes, ce qui est à peu près le même ordre de grandeur, là, peut-être 450 au niveau de Suncor. Donc, en termes d'impact économique local, je vous dirais, que ce soit l'une ou l'autre, là, l'impact est à peu près le même.

M. Trudel : …ça, c'est des emplois directs ou indirects sur toute la filière industrielle?

M. Tsingakis (Dimitri) : C'est difficile de quantifier, là. Malheureusement, je n'ai pas d'information au niveau d'impacts indirects. Ce qu'on sait à l'association, c'est que souvent on a estimé que, pour chaque emploi d'un membre à l'association, ça représente une à deux fois en termes d'emplois indirects au niveau local. Donc, à partir de ce moment-là, on peut parler de quand même plusieurs centaines, si ce n'est pas de milliers d'emplois, là, au niveau local.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : O.K. Maintenant, j'aimerais vous parler… Combien d'emplois chez vous juste pour l'est de Montréal, là? Parce que c'est un projet qui viendrait clairement consolider les emplois que vous avez là. On parle de combien de personnes? De quelle façon c'est distribué sur l'est de l'île?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Tsingakis (Dimitri) : Au niveau de l'association industrielle, les derniers chiffres que j'avais datent quand même d'un certain temps, je vous dirais. On avait fait une étude socioéconomique en 2006‑2007. On parlait, dans le temps, de 3 600 emplois au niveau des membres de l'association. Évidemment, de ça il faut retirer ce qu'on a perdu avec Pétromont et Shell. Donc, au niveau des membres de l'association, là, on parle de facilement 2 500 à peut-être 3 000 emplois, là, au niveau de l'est de Montréal.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Nous allons maintenant procéder à l'échange avec les membres de l'opposition officielle. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue à M. Tsingakis. Bonjour, merci de votre présentation et votre présence ici aujourd'hui. Je dois vous dire tout d'abord à quel point je suis impressionné par le fait que votre mémoire, malgré le fait que vous représentez évidemment une association qui est plutôt de nature économique, fait une grande place à la santé publique, à la sécurité, à l'environnement. Je trouve ça tout à votre honneur de vous concentrer et d'ajouter ces éléments-là à votre réflexion.

Également vous dire à quel point je trouve ça prometteur, votre dernière section, Transition vers le futur, et ce que vous mentionniez — vous avez élaboré quelque peu avec mon collègue de Repentigny — sur l'écologie industrielle. Alors, je trouve que c'est un mémoire qui est équilibré, si vous voulez, pour un organisme qui, évidemment, de première vue, en est un avec une vocation plutôt économique et industrielle, évidemment, comme le nom l'indique.

J'aimerais savoir tout d'abord : Est-ce que vous aussi, vous avez été devant l'Office national de l'énergie afin de défendre le projet?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Tsingakis (Dimitri) : Si vous me permettez, juste pour rectifier. Tout d'abord, pour répondre à votre question, oui, nous avons présenté devant l'Office national de l'énergie. Toutefois, je dois peut-être juste rectifier que notre mission première, elle est une mission à vocation environnementale, je dirais, surtout. Lors de notre fondation, on avait une vocation environnementale... qui s'est ajouté le volet sécurité. Le volet économique a été ajouté quand on commence à parler de développement durable. Donc, on n'est pas nécessairement une association qui défend les intérêts de ses membres de façon… au niveau de faire des représentations à l'externe, mais bien de travailler collectivement pour le bénéfice des membres et de la communauté locale.

La Présidente (Mme Bouillé) : Parfait. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Parfait. Alors, formidable. Ça explique beaucoup l'enlignement, là, de votre mémoire également, que je trouve très, très bien.

Vous connaissez évidemment bien ce secteur de Montréal. Au niveau de l'industrie de pétrochimie... Évidemment, nous sommes… Vous parlez, à l'intérieur de votre mémoire, dans votre mémoire — et nous avons entendu d'autres parler — de se donner des options au niveau de la matière première, se donner des options et pouvoir… malgré le fait que c'est très difficile de prévoir, on n'a pas de boule de cristal, plusieurs ont employé même cette expression-là… pour prévoir les fluctuations au niveau du prix, etc. On sait à quel point ça pourrait être périlleux comme exercice. Le fait d'ajouter des options est toujours, je crois, le bienvenu de la part des acteurs qui sont économiques, et d'autres.

En même temps, nous avons entendu avant vous la Fédération des chambres de commerce du Québec, qui nous disent qu'évidemment, lorsqu'on peut avoir notre matière première venant du Canada — qui est une juridiction, évidemment, dont nous faisons partie, et dont nous avons notre mot à dire, parce que nous élisons aussi des représentants au gouvernement fédéral, et des organismes nous appartiennent autant que n'importe quelle autre province du Canada — on a des assurances au moins que le pétrole et les standards, au niveau écologique et environnemental, sont au niveau auquel nous pouvons faire confiance.

Au niveau de l'industrie pétrochimique, par exemple, j'aimerais savoir : Est-ce que vous ressentez un impact du fait de la provenance de la matière première? Je comprends, évidemment, il y a une question de marge, une question de bénéfice, une question qui est peut-être même conjoncturelle et qui pourrait changer. Mais quel est cet impact, là, qu'on pourrait quantifier, en quelque sorte, au niveau de l'industrie pétrochimique, de pouvoir avoir cette option? Ou est-ce qu'il n'y a pas d'impact : peu importe d'où viendrait le pétrole et comment qu'il viendrait, l'industrie pétrochimique s'adapterait? Ou est-ce qu'on peut dire que le bénéfice, au niveau du point d'entrée, est quelque chose qui peut bénéficier, qui continue sur la chaîne, évidemment, industrielle et peut bénéficier l'industrie pétrochimique environnante?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Tsingakis.

• (16 h 20) •

M. Tsingakis (Dimitri) : Il est difficile pour moi de… Comme j'expliquais tout à l'heure, on a sûrement… certainement une vocation beaucoup plus environnementale et sociale dans notre mission. Je pourrais simplement répondre à votre question pour dire : Ce qui est important pour les membres de l'association, c'est surtout la flexibilité d'approvisionnement. Ce n'est pas autant…

Je vous dirais, ce qui est important pour un industriel ou pour une entreprise de l'est de Montréal, c'est de lui permettre d'avoir accès à diverses sources au niveau de sa matière première. Les conditions de marché fluctuent rapidement, évoluent, et ce qui fait en sorte… C'est qu'une entreprise doit être en mesure de rapidement pouvoir trouver les sources d'approvisionnement les plus compétitives. Donc, à partir du moment où on limite, où on réduit l'accessibilité à la matière première, pour quelque raison que ce soit — que ce soit, par exemple, une catastrophe, ou de la législation, ou autre — bien, évidemment, on réduit sa capacité de réagir au niveau du marché. Si vous me permettez une analogie, c'est comme si on attachait les deux bottines ensemble, là : ça nous laisse un petit peu moins de marge de manoeuvre. Donc, à ce niveau-là, je vous dirais, c'est au niveau de la flexibilité, ce qui est important pour nous.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Si j'étais aussi… vous dire : Évidemment, vous avez brossé un portrait plutôt… une opinion plutôt favorable, évidemment, au projet, vu votre vocation plutôt environnementale, comme vous dites. Est-ce que vous avez néanmoins reçu des commentaires, des préoccupations au niveau de l'environnement provenant de vos membres ou des gens qui ont eu contact avec vous? Évidemment, si je vous dirais qu'on entend beaucoup de choses dans les médias, est-ce que vous, vous avez eu le même écho, le même son de cloche dans votre secteur ou sur ce territoire-là? Ou est-ce qu'on dirait que les gens ont une compréhension, une information qui est différente, qui fait en sorte qu'ils sont peut-être moins susceptibles parce ce qu'ils pourront lire dans les médias ou ailleurs? J'aimerais savoir si vous avez reçu des commentaires ou des préoccupations, au niveau environnemental, des gens qui ont eu contact avec vous, qui font partie de votre membership.

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Tsingakis (Dimitri) : Mme la Présidente. Et je regarde ma députée de Pointe-aux-Trembles qui sourit. Je vous dirais que, de façon générale, il va toujours y avoir des gens qui vont se prononcer contre un projet. Mais je vous dirais que, dans l'est de Montréal, ce qu'on a noté, c'est qu'à partir du moment où on explique aux gens les bénéfices, on décrit le projet, on leur donne l'information de façon transparente — et, encore une fois, je reviens sur ce mot-là parce que, pour nous, c'est un élément important — quand on explique la teneur d'un projet, les gens comprennent et les gens supportent, de façon générale, le projet.

Comme j'ai mentionné, il va toujours avoir des gens qui vont se prononcer contre un projet, mais, je dirais, de façon générale… en tout cas, moi, ce qui m'a été permis de témoigner au niveau local, c'est que les gens comprennent l'impact que ce projet-là a au niveau du tissu industriel de l'est de Montréal et au niveau de l'impact économique au niveau de l'est de Montréal.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Mais, malgré cette compréhension… Parce qu'évidemment l'impact économique se ressent beaucoup plus chez vous, si vous voulez, que plus loin, là. Évidemment, c'est plus direct encore pour vous que pour d'autres. À part cette compréhension du bénéfice économique, est-ce que votre sentiment, c'est que la population locale, au niveau de l'environnement, est rassurée par ce qu'elle a appris, ce qu'elle a été en mesure d'apprendre, d'entendre dans les médias des représentants d'Enbridge, etc.? Est-ce que vous sentez que la population, malgré ça, est rassurée au niveau environnemental?

Je comprends très bien le bénéfice économique, c'est assez clair. C'est très, très clair que ces familles-là voient là-dedans une façon de gagner leur pain, puis c'est très normal. Mais est-ce que vous trouvez que la population est rassurée par ce qu'elle entend ce qui a été expliqué à date comme mesures de précaution, ce qu'Enbridge a fait, les changements qu'Enbridge a apportés au niveau de ses façons de faire suite aux déversements — l'accident qu'il y avait eu à Kalamazoo, par exemple — puis on a entendu le représentant d'Enbridge nous dire : C'est une nouvelle compagnie… Est-ce que vous, votre population locale achète ça, pour m'exprimer ainsi?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Tsingakis.

M. Tsingakis (Dimitri) : Merci, Mme la Présidente. Je vous dirais que les gens que j'ai eu l'opportunité de consulter ou les gens avec lesquels j'ai eu la chance d'échanger au niveau de nos comités de liaison… Évidemment, comprendre et être en accord avec un projet, ça ne veut pas nécessairement dire accepter de façon unilatérale. Les gens nous posent des questions, les gens veulent savoir quels sont les moyens qu'on met en place pour assurer leur sécurité, et, je vous dirais, les entreprises de l'est de Montréal font preuve de cette transparence, expliquent…

On a des moyens pour faire face à différentes situations d'urgence, on l'a démontré à plusieurs reprises. Juste pour vous donner un exemple, il est arrivé un incident, il y a quelques années, dans un Canadian Tire à Pointe-aux-Trembles, et les gens de Suncor, de la raffinerie tout près, sont allés donner un coup de main au service d'incendie, parce qu'ils ont l'expertise pour intervenir dans ces situations-là. Et ça, je vous dirais, les gens qui nous côtoient, les gens de la communauté avec qui on intervient, le comprennent et réalisent et, à partir de ce moment-là, se sentent plus rassurés parce qu'ils sont en mesure de témoigner de la rigueur et du processus que l'on met en place pour assurer leur sécurité.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : J'aimerais entendre davantage sur le concept d'écologie industrielle. Je sais que mon collègue vous a demandé d'élaborer un petit peu le concept. Je trouve ça intéressant, mais il y a très peu de place qui y est donnée dans le mémoire. J'imagine qu'on ne pourrait pas faire une thèse là-dessus dans un mémoire, vous savez que nous en recevons beaucoup. Mais j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que je trouve ça au moins prometteur, mais je ne suis pas très familier avec ça. Est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots, prendre l'occasion ici de nous dire quelques mots de plus là-dessus?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Tsingakis (Dimitri) : Merci, Mme la Présidente. Bien, en fait, le concept d'écologie industrielle existe depuis maintenant… je vous dirais, là, depuis quelques dizaines d'années, et l'idée, comme j'expliquais tout à l'heure, c'est d'essayer de voir de quelle façon on peut boucler des flux de matière et d'énergie, donc trouver des débouchés intéressants, par exemple, pour ce qui pourrait être des résidus d'une entreprise.

Je peux vous donner un exemple intéressant qu'on a commenté lors des audiences de l'Office de consultation publique de la ville de Montréal, qui souhaitait installer une usine de biométhanisation dans l'est. On a une entreprise dans l'est de Montréal qui a de la vapeur basse pression, qui présentement ne trouve pas de débouché intéressant pour cette vapeur-là. Bien, ce qu'on a suggéré, c'est de dire : Bien, est-ce qu'on ne pourrait pas utiliser, par exemple, cette vapeur-là pour faire de la préchauffe de matière, en amont du processus de biométhanisation? Donc, une façon de réutiliser certains flux de matière et d'énergie de façon à réduire les impacts de l'ensemble.

Donc, l'idée, c'est d'essayer d'identifier quels seraient les créneaux les plus intéressants à développer qui viendraient s'intégrer aux différents maillons que nous avons déjà : raffinerie, pétrochimie, métallurgie également. On a des recycleurs de métaux, on a une affinerie de métallurgie, une affinerie de cuivre qui peut utiliser une partie de ces substances-là. Donc, l'idée, c'est d'essayer d'identifier quelles technologies nous permettent de fermer les échanges de matière entre les entreprises.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Il y a une expression magnifique en anglais : «Waste not, want not», qui s'applique exactement à ce concept-là, je crois.

J'aimerais tester quelque chose sur vous, vu que vous êtes ici et que vous avez une certaine expertise, si vous voulez. Vous avez l'oreille sur la population, sur les acteurs dans ce dossier-là. Nous avons proposé, l'opposition officielle, au début de ces auditions — et nous avons lancé cette idée-là à Enbridge et à nos collègues du gouvernement — la création d'une unité de vigilance, qui pourrait inclure les représentants du ministère des Ressources naturelles, du ministère de l'Environnement, d'Enbridge, également de l'Office national de l'énergie, qui a évidemment le bâton, comme j'aime dire, dans ce dossier-là, qui pourrait agir comme endroit ou comme organisme afin de partager les renseignements avec la communauté locale, assurer qu'il y a un échange d'information et que la population soit informée. Est-ce que vous verrez ce type d'unité d'un bon oeil? Est-ce que vous pourriez peut-être... J'aimerais juste profiter de votre expérience.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Tsingakis, en une minute.

M. Tsingakis (Dimitri) : O.K. Bien, il est difficile pour moi de peut-être me prononcer sur cette unité-là, ne connaissant pas nécessairement son mode de fonctionnement ni... Bon, vous avez parlé un peu de sa composition. Mais je vous dirais que, dans l'est de Montréal, on a déjà des organismes ou des organisations, qui sont les CMMI, qui regroupent la municipalité, les industries, et les intervenants locaux, et des citoyens autour d'une table, justement, qui ont pour mandat ou qui ont comme objectif de regarder, d'examiner la gestion des risques d'accidents industriels reliés à la gestion des matières dangereuses. Donc, on a déjà des instances au niveau local qui oeuvrent dans ce domaine-là. Et, je vous dirais, à ce moment-là, il faudrait voir, là, comment cette unité-là peut s'intégrer, comment elle peut intervenir au niveau local. C'est quelque chose qu'on pourra certainement regarder puis vous supporter à ce niveau-là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Nicolet-Bécancour.

• (16 h 30) •

M. Martel : Merci, Mme la Présidente. Je ne peux pas m'empêcher de répliquer à mon collègue de Repentigny. J'aurais aimé ça brandir de nouveau un excellent livre, moi aussi, sauf que je ne l'ai pas avec moi, la raison étant que ça fait longtemps que je l'ai lu, tellement intéressant que je l'ai prêté à de la famille pour qu'ils en fassent une lecture aussi.

Farce à part, je n'ai pas vraiment de question précise. Ce que je voulais peut-être clarifier avec vous : dans le fond, ce que vous dites, c'est que l'oléoduc devrait être inversé jusqu'en Ontario, advenant qu'au Québec on n'accepterait pas puis que ça ne se ferait pas ici, et l'Ontario s'approvisionnerait de pétrole venant de l'Ouest. Ils paieraient 20 $ de moins que les raffineries du Québec qui s'approvisionneraient, eux, de la TransAtlantic. Donc, à court terme, inévitablement, les raffineries du Québec ne pourraient pas concurrencer, par exemple, celles de l'Ontario. Je comprends-tu bien?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Tsingakis (Dimitri) : Écoutez, je ne suis pas en mesure de me prononcer au niveau de la compétitivité des raffineries et de quelle façon ils entrevoient leur avenir. Je dirais simplement, encore une fois, puis je reviens à mes propos de tout à l'heure : Pour nous, pour les membres de l'association, ce qui est important, c'est d'avoir une flexibilité d'approvisionnement, donc avoir accès à de la matière première à prix compétitif. Actuellement, les raffineurs de l'Ouest sont avantagés, et ceux de l'Ontario notamment parce qu'ils sont capables de s'approvisionner soit de l'est, soit de l'ouest, donc ils ont cette flexibilité-là. Actuellement, à Montréal, nous n'avons pas cette flexibilité-là, et on souhaiterait l'avoir. Donc, l'idée de supporter le renversement, justement, c'est d'offrir l'opportunité aux raffineries de Montréal et du Québec d'avoir une flexibilité d'approvisionnement.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : C'est tout.

La Présidente (Mme Bouillé) : Nous vous remercions, monsieur. Et j'invite maintenant les représentants des Manufacturiers et exportateurs du Québec à prendre place à la table des témoins.

Et je suspends pour une minute.

(Suspension de la séance à 16 h 32)

(Reprise à 16 h 34)

La Présidente (Mme Bouillé) : Nous accueillons maintenant le représentant des Manufacturiers et exportateurs du Québec.

Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre exposé, qui sera suivi d'un échange avec les parlementaires par la suite. À vous la parole.

Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ)

M. Prévost (Simon) : Merci, Mme la Présidente. Alors, mon nom est Simon Prévost. Je suis président de Manufacturiers et exportateurs du Québec. Nous représentons des entreprises, comme notre nom l'indique, manufacturières et exportatrices sur l'ensemble du territoire du Québec dans l'ensemble des secteurs économiques. Et, bien entendu, soi dit en passant, notre mission, évidemment, est de défendre les intérêts de nos membres, s'assurer de leur donner les outils pour être plus concurrentiels et compétitifs sur les marchés locaux et internationaux, et c'est dans cette optique-là que nous sommes évidemment interpellés par toutes les questions associées à l'énergie, et c'est pourquoi nous vous remercions de nous accueillir aujourd'hui.

Donc, Mme la Présidente, pour commencer, j'aimerais souligner l'immense complexité, comme vous le savez, du marché de l'énergie et mentionner que, si l'énergie est souvent décrite comme un atout au Québec, notamment du côté électricité, notre économie n'est pas moins soumise à cette grande nécessité qu'est celle d'assurer d'une sécurité nos approvisionnements et aussi la nécessité de construire cette sécurité dans une vision de long terme, voire même de très long terme.

Comment ça se fait? Ça se fait en combinant, d'une part, les aspects industriels et économiques, mais aussi sociaux et environnementaux. Le tout, soit dit en passant, est tout à fait attaché à une réalité géopolitique et mondiale complexe dans le domaine de l'énergie. Il faut donc traiter le projet qui nous intéresse aujourd'hui en allant au-delà des questions environnementales. Et je le mentionne, Mme la Présidente, parce que c'est, en réalité, la principale question qui clôture le document de consultation qui nous a été remis.

La question environnementale, malgré son importance, et on ne veut pas la minimiser, n'est pas supérieure à la question économique. Notre prospérité économique a un impact direct sur notre capacité à construire notre prospérité sociale. On ne sera pas plus vert que vert en négligeant l'importance d'un meilleur approvisionnement pétrolier. En ce sens, Mme la Présidente, je tiens à dire devant la commission qu'après tout ce qui a été déclaré par les défenseurs du projet d'inversement de la ligne 9B et après toutes les démonstrations de la compagnie Enbridge sur leur engagement à minimiser les risques, après toutes les réflexions qui ont été conduites au Québec, notamment récemment dans le cadre des consultations sur les enjeux énergétiques, nous considérons que la responsabilité du gouvernement aujourd'hui est d'exercer son leadership en soutenant le projet de manière déclarée et non pas de prolonger l'incertitude des milieux économiques. Je souligne en passant aussi qu'il n'y a pas juste les entreprises que ça intéresse, cette stabilité et cette certitude, les travailleurs aussi, de l'industrie, veulent cette certitude.

Donc, de quoi il s'agit? Il s'agit d'inverser le flux d'un oléoduc. Et je dois vous avouer, Mme la Présidente, que, devant le fond et la forme des contestations autour de ce projet, nous sommes forcément inquiets, inquiets devant le ton utilisé au Québec souvent avec lequel on dit non aux projets de développement économique. Alors, ces consultations sont, pour nous, une excellente opportunité de dire que, si le gouvernement veut être cohérent avec les objectifs de sa nouvelle politique économique, en particulier la politique industrielle, il doit reconnaître le projet d'inversement de la ligne 9B comme une nécessité à la relance du secteur manufacturier. Le projet d'Enbridge évidemment ne porte pas à lui seul toute la prospérité du Québec, mais est un maillon de cette réussite économique à laquelle on aspire. Ce projet participe à l'augmentation de notre potentiel économique. Et, étant donné le temps qui m'est accordé, je ne développerai pas davantage sur le contexte économique et démographique qui nécessite que nous augmentions notre potentiel économique.

Je vais donc réitérer, pour les quelques minutes qu'il me reste, les différents éléments que MEQ a énoncés devant l'Office national de l'énergie il y a quelques semaines.

D'abord, sur l'impact économique, au-delà des chiffres en termes de PIB, d'emploi ou encore en termes de retombées fiscales, j'aimerais insister sur l'intérêt économique de ce projet sur le plan plus qualitatif en soulignant l'importance hautement stratégique du secteur énergétique. L'énergie a un caractère absolument fondamental dans la vie des individus comme dans le fonctionnement des entreprises. Et, plus concrètement, nous avons devant nous, à la portée de main, l'opportunité d'un approvisionnement facilité et plus compétitif en pétrole, un intrant qui est et restera important pour toutes les industries manufacturières et d'ailleurs pour l'ensemble de la société au cours des quelques dizaines d'années à venir.

Évidemment, la commission parlementaire à laquelle nous sommes conviés aujourd'hui n'a pas pour but de faire le procès de l'utilisation du pétrole versus des sources alternatives. C'est un fait, nous allons continuer à utiliser du pétrole au cours des prochaines années. Alors, lequel et comment? Là est la question.

Une des questions, donc, c'est la sécurité des approvisionnements en pétrole, et ça dépasse les intérêts commerciaux. Il y a bien sûr des interférences de nature géopolitique sur l'échiquier mondial, et cela suggère fortement de se prémunir des instabilités du secteur de l'énergie. Et le fait que le Canada peut valoriser dans toutes ses provinces ses ressources pétrolières est une opportunité qu'il serait malvenu de laisser passer.

L'inversement de la ligne 9B contribuera au renforcement global de l'économie grâce à une meilleure intégration des économies provinciales, à une valorisation multiple des ressources et à un approvisionnement plus sécuritaire qui, de facto, améliore les conditions d'affaires et d'investissement. Il faut aussi considérer ce projet en reconnaissant que le Canada est maintenant une nouvelle puissance pétrolière. Les réserves de pétrole au Canada ont constamment augmenté au cours des 20 dernières années. Par exemple, en 1992, ces réserves étaient évaluées à 40 millions de barils de pétrole. Maintenant, elles sont évaluées à 174 millions de barils de pétrole. Je souhaite simplement, par cette statistique, rappeler la manne pétrolière dont bénéficie le Canada et les possibilités pour le Québec de participer à la valorisation de ce potentiel énorme.

Indépendamment de l'opportunité que constitue la manne pétrolière du Canada, il y a aussi la nécessité de l'industrie de sécuriser ses approvisionnements en pétrole, particulièrement pour le transport de marchandises. La concurrence des pays émergents et l'appréciation de la devise canadienne ont nettement fragilisé le secteur manufacturier au cours des dernières années. Les entreprises sont maintenant à la recherche de gains de productivité et sont particulièrement attentives à l'évolution des coûts des intrants, notamment les coûts en pétrole et en énergie.

• (16 h 40) •

Le pétrole nous coûtera moins cher. Les effets sur la compétitivité de notre économie et sur la balance commerciale sont évidents. Je suis convaincu que les membres de la commission, d'ailleurs, en sont déjà informés, si je me fie aux échanges plus tôt aujourd'hui. De manière plus particulière, au sujet des industries du raffinage et de la pétrochimie, nous considérons que le renforcement des capacités de raffinage constitue une réelle nécessité pour l'économie du Québec. La diversification des sources d'approvisionnement et la réduction de leur coût, notamment, contribuent à leur sécurisation et donc à la stabilité de l'environnement d'affaires des raffineries québécoises. Cela est également favorable à la prévisibilité des plans d'investissement, ce qui est d'autant plus souhaitable que les capacités de raffinage ont été réduites de manière draconienne au Québec avec la fermeture de quatre raffineries dans les années 80 et d'une cinquième en 2010.

Le Québec occupe maintenant une proportion de 12 % des capacités canadiennes de raffinage, alors que c'était 26 % en 1981. Il est donc impératif que les deux raffineries en activité encore au Québec renforcent leur compétitivité pour la performance de l'industrie même du raffinage, mais aussi pour toutes les activités pétrochimiques et manufacturières. L'industrie québécoise du raffinage a enregistré, en 2012, des exportations pour une valeur de 2,9 milliards de dollars, en hausse très nette par rapport à un montant de 596 millions en 2003. Malgré les difficultés des deux dernières décennies, force est de constater que l'industrie du raffinage a montré une certaine résilience qu'il convient maintenant, aujourd'hui, d'encourager et non pas de décourager.

En ce qui concerne l'industrie pétrochimique, sa contribution aux exportations québécoises s'établit à 146 millions de dollars en 2012, un volume nettement moindre que 324 millions qu'on a connu en 2007. Ce secteur doit retrouver une marge de compétitivité avec des intrants à moindre coût et éventuellement de trouver des possibilités d'une diversification de produit et de création de valeur ajoutée. Le projet d'Enbridge est une des réponses aux problèmes de ce secteur.

Pour notre association, plus d'indépendance énergétique, c'est aussi une question d'équilibre macroéconomique. Les importations de pétrole contribuent à une lourde part de notre déficit commercial au Québec. Il est essentiel de réduire ce déficit commercial. Alors, évidemment, vous avez entendu toutes sortes de chiffres aujourd'hui, je ne veux pas trop m'attarder là-dessus, mais, en 2012, ce déficit, juste sur le plan pétrolier, c'est 13,7 milliards de dollars. On importe, au Québec, 46 % du total canadien d'importation en pétrole brut classique. Le recours au pétrole de l'Ouest canadien peut contribuer à des économies substantielles pour le Québec et au rétablissement ou à une partie du rétablissement indispensable de son équilibre macroéconomique à travers un nouveau statut d'exportateur net qu'on recherche. Le projet d'Enbridge est une des réponses au problème de déficit commercial du Québec.

Mme la Présidente, par ailleurs, sur le plan de l'environnement — je vais quand même en glisser quelques mots — les différents avantages économiques de l'inversion de la ligne 9 et la diversification des sources d'approvisionnement ne nuiront pas à la capacité du Québec de poursuivre ses ambitions en matière environnementale. Il s'agit avant tout de permettre une diversification des sources d'approvisionnement avec l'accès à un pétrole léger de l'Ouest. La bourse du carbone, par ailleurs, introduite récemment au Québec, a mis en place des mécanismes permettant l'évolution progressive de l'économie vers une économie plus verte. Évidemment, le plein impact d'un tel mécanisme de marché ne se fera sentir seulement à moyen ou à long terme, mais il encourage déjà les entreprises à concevoir leur plan d'investissement dans une perspective de la réduction des émissions de GES. N'est-ce pas l'objectif final, en définitive? L'inversion de la ligne 9 va-t-elle à l'encontre de cet objectif? Non. L'inversion permet tout simplement de diversifier nos sources d'approvisionnement et ne vise pas une augmentation de nos émissions de GES ni une augmentation de notre utilisation du pétrole.

Comme d'autres l'ont déjà dit devant vous aujourd'hui, si l'exploitation des ressources naturelles ne peut se faire avec zéro risque sur le plan environnemental, les avancées qui sont faites actuellement sur le plan des technologies vertes sont réelles, et la production de pétrole et l'exploitation de ressources naturelles en général se font aujourd'hui avec une attention pour le respect de l'environnement qui doit être reconnue pour pouvoir être toujours mieux et plus partagée. C'est aussi pour ça que le projet Enbridge doit être vu comme un maillon du développement durable au Québec, dont le Québec a besoin, et MEQ demande donc aujourd'hui — et ce sera ma conclusion, Mme la Présidente — au gouvernement, par son approbation, de participer à ce développement durable. Merci.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup, M. Prévost. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec les parlementaires, en débutant avec la ministre. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Prévost. Ça nous fait plaisir de vous avoir avec nous à l'Assemblée nationale. J'ai deux questions. Je vais vous les poser d'entrée de jeu, d'emblée. Je sais que vous êtes capable de les prendre en note puis d'y répondre après. Puis ensuite je vais céder la parole à mes collègues.

L'industrie pétrochimique représente à peu près 51 000 emplois au Québec. Certains pourraient prétendre que cette industrie a réussi à être ce qu'elle est, à se développer avec du pétrole importé. Pourquoi donc faire venir du pétrole de l'Ouest par un pipeline? Alors, j'aimerais que vous nous donniez votre opinion là-dessus. En quoi c'est nécessaire d'utiliser du pétrole de l'Ouest pour maintenir ou pour augmenter la compétitivité de cette filière pétrochimique québécoise?

La deuxième : Selon vous, est-ce qu'Enbridge offre les garanties environnementales nécessaires pour permettre ce projet-là, et... garanties environnementales et également pour la sécurité de ses installations? Voilà. Ce seront mes deux questions.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Prévost.

M. Prévost (Simon) : Merci, Mme la Présidente. Alors, je vais remercier d'abord la ministre pour ses questions et je la salue. Très heureux d'être ici avec vous, aussi, aujourd'hui.

Alors, sur le développement de l'industrie pétrochimique, Mme la ministre mentionnait que cette industrie a réussi quand même à se développer en important du pétrole notamment d'Afrique du Nord et d'autres pays et en quoi est-ce nécessaire de faire venir du pétrole de l'Ouest. Donc, moi, je dirais... je modifierais un peu la phrase de... l'énoncé de la ministre. C'est que cette industrie-là a réussi à se développer malgré le fait qu'elle importait un pétrole de l'extérieur du Canada, donc avec un coût d'intrant plus élevé. C'est une industrie qui a dû évidemment travailler dans un contexte qui est beaucoup plus difficile. Donc, la question qui se pose, c'est : Est-ce que ces 51 000 emplois ne seraient pas 75 000 ou 80 000 emplois si on avait pu bénéficier d'une ressource à meilleur coût? Alors, évidemment on n'aura pas la réponse à ça, puisqu'on ne peut pas réécrire l'histoire.

Mais ce qui est certain, c'est que n'importe quelle industrie, une industrie qui, soit dit en passant, a déjà connu des heures de gloire plus importantes et une industrie qui, comme je l'ai mentionné dans mes données, exporte moins maintenant qu'elle exportait il y a six ans, cette industrie-là a besoin d'un coup de pouce pour se développer. Et c'est pourquoi, d'entrée de jeu, nous, nous croyons que, d'une part, l'accès à une ressource moins coûteuse va permettre non seulement de maintenir les emplois qui sont actuellement présents dans cette industrie-là, mais va permettre aussi, éventuellement, de donner un second souffle aux industries pétrochimiques et leur permettre d'imaginer peut-être des projets d'investissement et de nouveaux développements qui leur permettraient, à terme, pas demain matin, pas après-demain matin, mais à terme, d'être une industrie de nouveau florissante au Québec.

Pour ce qui est de la deuxième question, sur les garanties environnementales d'Enbridge, bon, évidemment il y a toutes sortes d'informations qui ont circulé. L'information que nous, on a reçue de la compagnie, c'est que depuis, par exemple, les événements qui ont eu lieu en 2010, qui n'étaient pas au Québec, soit dit en passant, ni même au Canada, qu'ils ont revu leurs pratiques et qu'ils ont maintenant un système, donc, suffisamment sécuritaire.

Soit dit en passant, ce n'est pas comme si on venait d'inventer la ligne 9B, hein? Il y a du pétrole qui coule à tous les jours dans la ligne 9B sans, à ce que je sache, de problèmes environnementaux. Et, soit dit en passant, il coulait dans l'autre sens aussi avant, hein? Donc, ça fait quand même un bon bout de temps que ce pipeline-là existe, qu'il fonctionne sans problème particulier. Et nous, on a toutes les assurances, et on n'a pas lieu de croire que, tout d'un coup, ça va causer un gros problème à cet égard-là.

Maintenant, évidemment, dans toute circonstance, nous, on désire un développement de ressources et un développement énergétique au Québec qui se fasse selon les règles les plus strictes du respect de l'environnement, mais il n'y a rien qui permet de croire, à l'heure actuelle, que ce projet-là ne satisfait pas à toutes les exigences du gouvernement et aussi de la population.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Repentigny.

M. McKay : Je pense qu'il y avait le député de Roberval qui voulait prendre la parole. Pardon, madame.

La Présidente (Mme Bouillé) : Ah! Excusez-moi. M. le député de Roberval.

M. Trottier : Oui. Merci, Mme la Présidente, merci, M. Prévost. On vous sollicite régulièrement pour vos avis, c'est toujours très intéressant.

Vous dites que, si on avait eu un meilleur approvisionnement dans le passé, peut-être qu'on aurait pu développer la filière. On ne peut pas refaire le passé, je suis d'accord avec vous. Mais qu'est-ce qui pourrait nous amener à penser qu'on pourrait développer d'autres types de produits? Puis quels types de produits on peut penser qu'on pourrait faire… on pourrait agrandir la grappe éventuellement, là, dans le futur? Quels sont les produits que vous pensez qui seraient peut-être développables?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Prévost (Simon) : Merci, Mme la Présidente. Alors, je vais répondre de manière plutôt générale au député de Roberval, tout simplement parce que je ne suis pas un ingénieur chimique ni pétrochimique. Mais il reste que le contexte, c'est le contexte d'affaires, le contexte d'affaires qui s'applique d'ailleurs à toutes sortes d'industries, un contexte où on a très peu de marge bénéficiaire, un contexte où, entre guillemets, on a de la concurrence qui est vive, qu'on doit concurrencer les entreprises d'ici et d'ailleurs — d'«ici», je parle d'ailleurs au Canada, mais dans d'autres pays — alors qu'on est à un désavantage compétitif évident du fait qu'on paie notre ressource plus cher. Ce que ça veut dire, ça, c'est : concrètement, dans une entreprise, il y a peu de projets de développement qui… donc, on se concentre d'essayer de faire ce qu'on fait déjà relativement bien et de survivre dans ce contexte-là. Je laisserai le soin, par exemple, aux gens de l'industrie d'expliquer quels sont les projets qui peuvent être dans leurs cartons à l'heure actuelle.

Mais ce qui est certain, c'est que notre objectif, nous, d'ailleurs, dans un premier temps, c'est beaucoup plus de sécuriser les emplois actuels en soutenant ce projet-là. Ça, c'est ce qu'on sait qui va se produire si on est capables de donner de l'air à ces industries-là qui ont souffert au cours des dernières années.

Après ça, sur les développements potentiels, je me fie là-dessus simplement sur, comment je dirais, ce qu'on sait en discutant avec nos membres, à savoir que, pour pouvoir investir, il faut avoir une prévisibilité sur la qualité de nos approvisionnements et sur leurs coûts, et ça nous donne à ce moment-là… Disons que, quand on est moins en train de regarder à tous les jours les flux de trésorerie, disons que ça nous laisse l'imagination pour imaginer peut-être de nouveaux produits et de nouvelles choses qu'on peut faire avec des investissements éventuels. Ceci étant dit, à l'heure actuelle, ce qui est important, c'est de maintenir les emplois dans l'est de Montréal et de maintenir ce secteur en santé. Et, avec tous les soubresauts qu'on connaît dans le milieu de l'énergie, je pense que ça arrive à point nommé de pouvoir au moins avoir, comme on dit, un break sur le coût des intrants. Et c'est en ce sens-là qu'on supporte le projet qui... dans un deuxième temps, on est à peu près certains, parce que c'est comme que ça fonctionne dans les entreprises, qu'à partir du moment où on a une capacité d'investir parce qu'on a un peu plus de marge de manoeuvre, bien les idées viennent.

Les entreprises, d'ailleurs, au Québec, manufacturières sont toutes des entreprises qui doivent innover, parce que les conditions générales, que ce soit le coût de la main-d'oeuvre, la fiscalité, etc., font en sorte qu'on doit exceller, on doit avoir des produits à valeur ajoutée très… disons bien positionnés dans le marché pour pouvoir survivre. Et il ne fait nul doute dans mon esprit que l'industrie pétrochimique va savoir se développer dans ce sens-là.

• (16 h 50) •

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Repentigny.

M. McKay : Oui, merci. Alors, bonjour. Vous avez mentionné que vous considérez que les avantages économiques d'inversion de la ligne 9 ne nuiront pas à la capacité du Québec de poursuivre ses ambitions environnementales. Alors, je pense que vous avez mentionné que ça n'amènera pas d'augmentation d'émissions de gaz à effet de serre au Québec. Ça n'augmenterait pas non plus la consommation de produits pétroliers au Québec. Maintenant, je voudrais savoir, dans un premier temps, à votre avis, notre commission, qu'est-ce qu'elle pourrait recommander au gouvernement pour s'assurer d'avoir des garanties de ce point de vue là ou de se mettre des conditions, disons, soit à l'entreprise ou à nous-mêmes?

Et, deuxièmement, certaines personnes affirment que, comme c'est du pétrole de l'Ouest qui viendrait approvisionner les raffineries au Québec, que ça aurait un impact sur le développement des sables bitumineux au Canada, et donc que ça, ça aurait un impact sur l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre du Canada et, je vous dirais, peut-être un impact aussi négatif pour les exportateurs québécois. Parce que, si effectivement il y a une augmentation de la production des sables bitumineux dans l'Ouest canadien, ça peut avoir un impact sur la valeur du dollar et donc nuire à nos exportations. Je ne sais pas qu'est-ce que vous auriez à répondre à ça.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Prévost.

M. Prévost (Simon) : Merci, Mme la Présidente. Alors, je vais essayer d'aller dans l'ordre pour répondre aux questions du député de Repentigny.

D'abord, sur la question de savoir qu'est-ce que la commission pourrait recommander pour éviter que le projet d'inversement amène une augmentation des GES, je répondrais très simplement : Rien du tout, parce que ce n'est pas l'objet de la commission à l'heure actuelle. Alors, ma question, c'est de savoir : Est-ce qu'on doit, ou peut, ou est-ce que c'est intéressant d'inverser un pipeline qui, à l'heure actuelle, coule vers l'ouest pour le ramener vers l'est? Alors, c'est parce que… Ce qu'il faut savoir, c'est qu'Enbridge, qu'est-ce que fait cette compagnie, elle ne produit pas de pétrole. C'est une compagnie qui transporte du pétrole au Québec pour notre usage. À très court terme, ce que ça va amener, ça va amener que la consommation… que l'utilisation du pétrole par les raffineries du Québec et par le secteur pétrochimique va être sécurisée et qu'un approvisionnement qui, effectivement, tu sais, est soumis à moins d'aléas géopolitiques, à un coût moindre… Donc, c'est ce dont on parle à l'heure actuelle.

Quand on dit, nous, que ça n'a pas d'impact sur les ambitions environnementales, c'est que… ça reviendrait à avoir une discussion sur : Est-ce qu'on doit ou pas consommer du pétrole, puis comment on consomme du pétrole au Québec? Alors, ça, il se peut que le gouvernement ait des visées là-dessus, ait une vue là-dessus, ait une position là-dessus, et c'est parfait, mais c'est deux choses distinctes complètement. Alors, si on veut convaincre la population et les entreprises de se transformer sur le plan industriel, c'est une chose, mais je ne pense pas que ce soit l'objet de la commission, et… ferait l'objet de tout un autre débat.

Ceci étant dit, à l'heure actuelle, il y a une consommation de pétrole qu'on fait au Québec. Ce pétrole-là est importé. Ce pétrole-là est importé... D'ailleurs, les GES, c'est intéressant, là, c'est parce que ça n'a pas de frontière, ces affaires-là, hein? Et donc qu'est-ce qu'on connaît de l'impact environnemental de l'exploitation pétrolière des endroits où on s'approvisionne? On n'en sait rien, en réalité.

Et, d'autre part, ce qu'il faut savoir aussi, c'est que le pétrole, la demande... On peut faire toutes sortes d'hypothèses, là, sur l'augmentation de la demande pour le pétrole qui viendrait des sables bitumineux, parce qu'on inverse l'essence du pipeline. Et, une de ces hypothèses-là, c'est que, de toute façon, ce pétrole-là va être produit et va être vendu ailleurs. Alors, est-ce qu'on veut qu'il soit vendu... exporté? Parce que le Canada est un exportateur net de pétrole. Il y a fort à parier que ce pétrole-là, qui viendrait au Québec, serait, de toute façon, exporté ailleurs. Est-ce qu'on peut, nous, en bénéficier puis l'avoir au coût qui serait ce coût-là pour plusieurs années? Évidemment, éventuellement, le marché du pétrole, c'est un marché mondial, et il se pourrait que, s'il y a d'autres projets de pipeline qui désenclavent considérablement le pétrole de l'Ouest, il y a un équilibre dans les prix, mais disons que, pour les cinq à 10 prochaines années, c'est clair qu'il y a un avantage concurrentiel dont on voudrait profiter ici.

Donc, en réalité, je pense que les préoccupations du député de Repentigny, Mme la Présidente, sont extrêmement importantes, débordent largement le cadre de la commission ici et touchent donc au positionnement, disons, carrément au développement, disons... un positionnement sur le plan de ce que j'appellerais le portefeuille énergétique du Québec, et ça, ça se fait dans le cadre des consultations sur la politique énergétique du Québec. Et je pense qu'il y a peut-être un lien à faire entre les deux, mais comme tel, quand on doit explorer un projet qui est le projet très spécifique d'utiliser le pétrole... un pipeline qui va dans un sens puis l'amener dans l'autre sens, avec les impacts économiques qu'on peut avoir ici, nous, on pense que c'est deux choses qui sont distinctes, et ce débat-là très important devrait plutôt se faire dans le cadre des consultations sur les enjeux énergétiques du Québec.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci, M. Prévost. Je veux juste vous dire, le cadre, ici, de cette commission, est très, très large. Donc, M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Oui. Bonjour. Moi, ce qu'il m'intéresse de voir, parce qu'on parle beaucoup des impacts sur la filière pétrochimique ou sur l'est de Montréal, mais vous avez des membres à la grandeur du Québec. Tout le monde sait que le coût de l'énergie souvent est un des intrants importants, là, dans la structure de coûts des entreprises manufacturières du Québec, que les coûts de transport sont souvent liés aux coûts du pétrole. Même si beaucoup d'entreprises utilisent l'hydroélectricité, le pétrole est toujours important sous différentes formes, là, soit pour le chauffage, le transport, ainsi de suite.

J'aimerais connaître de votre part, là, votre opinion sur le rôle et l'importance que la filière québécoise pétrochimique a sur les autres secteurs d'activité. Est-ce que c'est un rôle stratégique? Est-ce que, s'il y avait un déclin supplémentaire de cette industrie-là, il y aurait un impact sur les autres secteurs d'activité, ou c'est un rôle qui est mitigé parce qu'il y a beaucoup de clients, d'autres fournisseurs dans le domaine?

La Présidente (Mme Bouillé) : En une minute.

M. Prévost (Simon) : En une minute? Bien, écoutez, les impacts sont majeurs. Donc, effectivement, déjà, si on prenait… On va y aller très, très simplement, là. Juste pour ce secteur-là en particulier, c'est 10 % des emplois manufacturiers... en fait, c'est plus que 10 % des emplois manufacturiers au Québec. Et ça, ça veut dire que, pour les 51 000 emplois qu'on a dans le secteur, là, on en a à peu près, grosso modo, là, un autre 30 000 induit dans les autres secteurs de l'économie. Donc, l'impact est majeur, ne serait-ce que juste ce secteur-là.

Maintenant, évidemment, il y a les coûts de transport et tout ça. À l'heure actuelle, on ne peut pas se… Ce qui nous intéresse, nous, c'est d'assurer le développement de cette filière-là, et ses impacts, ses effets indus sur le reste de l'économie, et d'avoir une économie qui est la plus diversifiée possible. Donc, ça, c'est ce qu'on cherche à faire.

Maintenant, sur les coûts de transport, par exemple, pour les autres secteurs manufacturiers, à terme, il y a plusieurs facteurs qui influent sur le coût du pétrole, notamment pour l'essence ou les autres produits pétroliers qui sont utilisés dans l'industrie, et nous, on pense que ça peut nous amener un effet indu, mais il y a tellement d'autres facteurs qui influent sur le prix, que ce soit à la pompe ou carrément la rampe de chargement pour l'utilisation industrielle, bon, que là-dessus, on va se garder une petite gêne sur l'impact éventuel. C'est certain que…

La Présidente (Mme Bouillé) : En terminant, s'il vous plaît.

M. Prévost (Simon) : Voilà. Ma minute est terminée. Voilà, c'est tout.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue à M. Prévost. Merci pour votre présence ici aujourd'hui, vos opinions émises, votre disponibilité.

Rapidement, juste confirmer. Je vous ai entendu bien, vous êtes allé devant l'Office national de l'énergie également faire une présentation?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Prévost (Simon) : Oui, effectivement.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Rapidement, vous avez parlé, d'entrée de jeu, d'incertitude autour du projet, qu'il faudrait mettre fin à l'incertitude. J'aimerais savoir : Est-ce que vous avez mentionné l'incertitude à cause du fait que le gouvernement n'était pas présent à l'Office national de l'énergie, dû au fait que les consultations ont tardé un petit peu à avoir lieu? Pourquoi vous avez mentionné le fait qu'il existe une incertitude autour du projet et qu'il fallait mettre fin à cette incertitude? Je me suis aventuré avec quelques hypothèses, là, mais je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, je veux que votre réponse soit la vôtre, évidemment.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Prévost.

• (17 heures) •

M. Prévost (Simon) : Bien, vous savez, Mme la Présidente, du côté des entreprises, on est toujours un petit peu pressés de faire avancer les choses, hein? Donc, c'est certain qu'on aurait préféré peut-être un positionnement un peu plus rapide du gouvernement.

Maintenant, on est bien conscients aussi des contingences reliées à l'exercice de ce gouvernement-là. Donc, les consultations ont lieu en ce moment. Le gouvernement, c'est la voie qu'il a choisie pour se faire une tête, si vous voulez, et pour évaluer le projet. Ce n'est pas à moi d'évaluer s'il aurait dû ou pas être à l'Office national de l'énergie. Ça, vraiment, ça leur appartient.

Mais, ceci étant dit, quand on parle d'incertitude, effectivement, peut-être que c'est une façon pour moi de souhaiter très officiellement que ça ne tarde pas trop, une fois que les consultations sont terminées, pour qu'on ait donc le point de vue, le rapport de la commission et qu'Enbridge puisse, dans le fond, en prendre acte parce qu'effectivement il s'agit essentiellement, comme chacun le sait, d'un exercice où le gouvernement du Québec va pouvoir éventuellement suggérer des améliorations au projet. Mais, bien entendu, ça reste et ça demeure du ressort de l'Office national de l'énergie sur les aspects plus réglementaires, si vous voulez.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Vous avez également dit qu'il fallait maintenir une certaine cohérence dans la politique énergétique. Vous avez dit que le projet est une nécessité afin de favoriser la réussite. Lorsque vous parlez de cohérence — mais j'aimerais vous entendre là-dessus — est-ce que c'est aussi simple que de dire : Écoutez, nous avons des raffineries, ça fait travailler du monde d'ici? Ils ont une option d'aller chercher des intrants à un prix plus avantageux, au moins pour une certaine période, donc la position cohérente, c'était de favoriser ce type d'option, ou y as-tu d'autre chose? Je veux juste comprendre exactement ce que vous vouliez dire lorsque vous avez dit vouloir prendre position pour une cohérence dans la politique.

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Prévost (Simon) : Alors, Mme la Présidente, je voudrais justement préciser ma pensée. Merci pour la question, d'ailleurs, parce que je ne veux pas que ça porte à interprétation. Dans le fond, ce qu'on dit, c'est que ce qui est devant nous, c'est un projet qui concourt au développement économique, qui est un projet relativement simple, à notre avis. Évidemment, il faut tout faire ça dans les règles de l'art et dans le respect de l'environnement, etc., je l'ai déjà mentionné. Mais, quand je parle de cohérence, c'est que, dans le fond, on a, dans le fond, le cadre de politique économique au gouvernement, qu'on a salué d'ailleurs quand il a été présenté, et on a ici un autre projet de nature économique qui pourrait être favorable, et on pense que ça va ensemble et qu'il faut s'assurer qu'on ne prenne pas des décisions éventuellement qui amèneraient une certaine incohérence.

Ceci étant dit, je voudrais rassurer le député de Laurier-Dorion. À notre avis, ce qu'on constate, à l'heure actuelle, c'est un gouvernement qui a aussi, autant que nous, envie de cohérence, donc on n'est pas très inquiets quand même là-dessus. Mais, comme lobbyistes, on n'a pas pu s'empêcher de leur demander pour s'assurer que cette cohérence soit au rendez-vous.

M. Sklavounos : Si...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Vous avez également évoqué un petit peu l'industrie pétrochimique. Est-ce que vous trouvez... Si vous étiez pour expliquer de quelle façon elle serait avantagée, en l'occurrence en pouvant diversifier, si vous voulez, la provenance des intrants, est-ce que... Si quelqu'un… vous diriez : Écoutez, peu importe d'où vient le pétrole, le pétrole vient de l'industrie pétrochimique, comme la ministre semblait dire… a pu se développer, a su se développer. Est-ce que vous pourriez offrir une réponse en disant de quelle façon ou comment vous voyez qu'elle serait favorisée ou avantagée en donnant cette marge-là à notre industrie québécoise?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Prévost.

M. Prévost (Simon) : Écoutez, dans toute l'industrie manufacturière et particulièrement dans le cas de l'industrie pétrochimique, qui sont des industries, dans le fond, de première et deuxième transformation beaucoup, en tout cas dans un premier temps, l'accès à la ressource est le nerf de la guerre. C'est vrai dans la forêt — d'ailleurs, on vient de discuter de ça dans les rendez-vous de la forêt — c'est vrai dans d'autres secteurs. L'accès à la ressource, et à un bon prix, et à un prix correct est le nerf de la guerre pour les entreprises qui sont dans ce secteur-là.

Donc, il coule de source, pour nous, qu'un accès à cette ressource qui est à moindre coût pour une assez bonne période à l'avenir va permettre à l'industrie de maintenir son activité économique, voire même éventuellement de la diversifier et de l'augmenter. Et donc ce n'est pas plus sorcier que ça, dans un certain sens, puisque c'est assez fondamental et c'est au coeur même de leurs activités, d'avoir un intrant et de trouver un intrant qui est stable aussi dans l'approvisionnement parce qu'il y a quand même aussi une question de stabilité et de sécurité des approvisionnements, pas juste le coût. Tout ça, évidemment, amène de la stabilité, de la prévisibilité qui est plus favorable aux investissements que l'inverse. Donc, c'est en ce sens-là qu'on croit que ça va amener l'industrie à se développer davantage.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : …temps qu'il me reste?

La Présidente (Mme Bouillé) : Six minutes.

M. Sklavounos : Six minutes. Peut-être poser une dernière question et, après ça, je vais donner l'occasion à mon collègue de Louis-Hébert... Vous avez entendu, évidemment, certains qui sont de l'opinion que le fait d'accroître, d'aller dans cette direction afin de diversifier la provenance de nos intrants du pétrole est en opposition avec notre capacité, notre volonté, notre ouverture à développer d'autres technologies, des technologies vertes et d'autres façons de produire de l'énergie. Vous avez certainement entendu certains, mais j'ai l'impression que vous allez le réentendre avant la fin de ces audiences…

J'aimerais savoir, pour vous, est-ce que… Vous avez parlé évidemment de la transition. Nous sommes dans une période de transition évidemment, on ne peut pas faire ça du jour au lendemain. Ça prend du temps, faire ça, puis ce serait… nous avons entendu le ministre à quelques reprises dire le fait que, de toute façon, ce n'est pas pour demain qu'on n'aura pas besoin de pétrole. Mais est-ce que vous, vous êtes du point de vue qu'on peut… ces deux approches peuvent coexister? Premièrement, travailler vers une certaine autosuffisance, si vous voulez, ou certain nationalisme économique qui ferait en sorte qu'on achèterait de chez nous et on n'ira pas à l'étranger. On continuerait quand même de bénéficier de nos ressources, mais, en même temps, en développant d'autres industries, d'autres technologies plus vertes. Est-ce que vous trouvez que c'est contradictoire? Est-ce que vous trouvez, vous, de votre expertise, que c'est des approches qui peuvent coexister et qui, veux veux pas, doivent obligatoirement coexister vu la situation, vu cette période de transition qui est devant nous?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Prévost (Simon) : Écoutez, à l'heure actuelle, on utilise une certaine quantité de pétrole à tous les jours au Québec. On peut souhaiter que ce soit beaucoup moins, on peut souhaiter qu'on n'utilise plus de pétrole. Ce qui est certain, c'est que ça ne se fera pas du jour au lendemain. Ce qui est certain aussi, c'est que les entreprises, de plus en plus, et depuis 20 ans même, depuis Kyoto, dans le secteur manufacturier, notamment dans le domaine des pâtes et papiers, dans le domaine de l'aluminium, il y a une réduction importante des GES. Il y a beaucoup de travail qui a déjà été fait, il y a encore beaucoup de travail à faire, bien entendu, mais la question n'est plus tellement industrielle, elle est beaucoup plus du point de vue du transport, notamment le transport des particuliers, là. Donc, on peut souhaiter tout ça, et c'est très bien.

Le 300 000 barils ou à peu près qui va transiter, à la limite, on pourrait espérer que ce soit le seul 300 000 barils qu'on va consommer au Québec et, à ce moment-là, on aura réduit l'empreinte environnementale. Nous, ce qu'on dit, c'est que ce sont deux choses distinctes et ce n'est pas contradictoire. Et ce n'est pas parce que, tout d'un coup, on va payer… on va pouvoir assurer la survie de l'industrie et s'assurer qu'on a un coût d'intrant, dans le fond, qui nous permet non pas d'avoir la ressource à rabais ou, tout d'un coup, là, c'est gratuit, mais qui nous permet de concurrencer avec les concurrents de cette industrie-là parce qu'eux ont accès à ce pétrole-là à moindre coût. C'est simplement une vision économique — assez simple, en vérité — qui nous permet de maintenir un secteur.

Et, pour ce qui est des politiques qui pourraient nous amener à réduire de manière plus globale les GES, les entreprises sont déjà là, les entreprises sont vraiment de plus en plus abonnées au développement durable. On travaille, nous, par exemple, très étroitement avec la grappe des technologies vertes. Donc, il y a plusieurs choses qui se font, et je pense que ça peut se faire de manière concurrente. Mais, de toute façon, d'imaginer qu'il n'y aura plus de pétrole consommé au Québec demain matin, c'est se mettre la tête dans le sable. Donc, en attendant, est-ce qu'on peut prendre le pétrole dont l'approvisionnement est sécurisé et dont le coût est moindre? Bien, pourquoi pas? C'est ce qu'on dit.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente. J'ai compris qu'on a deux minutes? O.K. Alors, ça va être très rapide. Bienvenue, M. Prévost. Et je vous connais depuis des années, je sais que vous êtes un homme compétent, sur le plan économique aussi, vous avez des bonnes connaissances et vous représentez une bonne association.

Question simple, mais prenez le temps pour répondre. En fait, vous savez, des groupes comme Greenpeace, comme Équiterre, c'est des groupes sérieux, des groupes compétents, des groupes qui ont des connaissances très crédibles et sont des groupes, je pense, qui sont jugés défavorables actuellement. Quel est votre message à ces groupes-là, comme représentant des exportateurs du Québec?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Prévost (Simon) : En fait, effectivement, ce que vous avez dit de ces groupes-là, tout ça est très vrai. Là, ce que je constate, c'est que c'est, à l'heure actuelle, souvent un dialogue de sourds. Et ce que je pense, moi, c'est que je leur dirais : Il faut évaluer le projet à son mérite et il faut laisser le soin aux autorités compétentes d'analyser les composantes environnementales et aux autres autorités réglementaires d'analyser les autres composantes plus, par exemple, économiques, et qu'à ce moment-là, dans le fond, on aura une décision qui va être éclairée. Et je pense qu'on a… Et ce que je leur dirais, en fait, c'est que je crois, moi, qu'on a ici, autant avec les processus qu'on a aujourd'hui ici qu'avec l'Office national de l'énergie, toutes les assurances que, si le projet va de l'avant, ce sera un projet qui ne se fera pas au détriment de l'environnement.

M. Hamad : Merci.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. M. le député de Nicolet-Bécancour.

• (17 h 10) •

M. Martel : Merci, Mme la Présidente. Deux petites questions, puis ce n'est pas un concours Génies en herbe, là. Tantôt, vous avez parlé qu'on effectuait 12 % du raffinage au Québec, là, sur l'ensemble du Canada. On en consomme combien?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Prévost.

M. Prévost (Simon) : Bien, à l'heure actuelle au Québec, on en… bien, écoutez, je n'ai pas le chiffre exact, mais ça tourne autour de 20 %, 21 %, dans ces eaux-là, c'est-à-dire que, si on regarde ça, c'est simplement… Au Québec, on est… En fait, c'est probablement un peu moins que ça, en réalité, parce qu'on est un petit peu moins intensifs en pétrole à cause de notre accès à l'électricité à un coût raisonnable, là, mais ça ressemble pas mal à notre pourcentage dans l'économie du Canada. Donc, c'est autour de 20 %, mais probablement un peu inférieur.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Merci. Dernière question. Est-ce que vous croyez qu'avec le projet d'Enbridge, l'Ouest, là, l'Alberta, les producteurs de pétrole vont produire plus ou c'est vraiment un déplacement de production?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Prévost (Simon) : Écoutez, ça, ça prendrait… Comment je dirais? Il y a tellement de facteurs qui influent sur la production et sur la demande mondiale de pétrole. Nous, ce qu'on croit, à l'heure actuelle et jusqu'à preuve du contraire, c'est que ce pétrole-là va aller à l'exportation de toute façon. Alors, l'Alberta l'exporte, entre guillemets, vers le Québec ou il l'envoie ailleurs, mais il devrait être produit de toute manière, à moins qu'il n'y ait une chute dramatique de la demande de pétrole, et ce n'est pas ce qu'on voit, nous, à l'heure actuelle. Donc, à notre avis, c'est plutôt d'attirer chez nous un pétrole qui irait ailleurs, et, dans ce sens-là, c'est la réponse que je donnais précédemment, Mme la Présidente, à un autre député : On ne croit pas que ça soit spécifiquement problématique, à cet effet-là, en termes d'impact environnemental, sur une production plus grande de pétrole.

M. Martel : Merci.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Ma question, c'était plus : Est-ce qu'ils vont produire plus? Je comprends qu'ils vont l'envoyer à quelque part — ils ne le consommeront pas tout — ils vont en envoyer aux États-Unis. Peut-être qu'ils vont en envoyer plus, mais est-ce qu'ils vont en produire plus?

M. Prévost (Simon) : J'avais bien compris votre question, mais, je m'excuse, j'ai mal répondu. Là, je vais préciser ma pensée.

La Présidente (Mme Bouillé) : 45 secondes.

M. Prévost (Simon) : Je vais vous faire ça en 15 secondes. Non, je ne pense pas qu'ils vont produire plus, donc, ce qu'ils vont nous envoyer ici, ils ne l'enverront pas ailleurs, mais ils vont produire la même quantité.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci.

M. Prévost (Simon) : Oui. Et, si je peux, un petit complément de réponse là-dessus, si vous me permettez.

La Présidente (Mme Bouillé) : Allez-y.

M. Prévost (Simon) : Je n'avais pas pris mon 45 secondes. Mais évidemment c'est un point de vue qu'il reste à valider parce que, comme je le disais, il y a tellement de variables que ça pourrait changer éventuellement. Mais, nous, ce qu'on constate aussi, c'est qu'il y a eu une augmentation considérable des efforts qui sont faits sur le plan de la gestion environnementale de cette production-là, donc… Et, comme je le mentionnais aussi, pour terminer en 10 secondes, de toute façon, sur l'aspect environnemental, on connaît très peu aussi du respect de l'environnement, de la production qu'on importe, de toute manière.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier.

M. Khadir : Merci, Mme la Présidente. M. Prévost, bienvenue. Vous savez que l'empire Desmarais, Power Corporation, a d'importants intérêts dans le développement des sables bitumineux de l'Alberta, et, avec tous les autres acteurs, y compris le gouvernement canadien, il y a une énorme mobilisation des secteurs d'affaires pour développer les sables bitumineux de l'Alberta encore davantage. D'accord? Mais, pour le faire, tout le monde s'accorde, tous les observateurs, que ça a besoin d'être désenclavé, donc envoyé le plus possible vers des ports pour être mis dans des bateaux et envoyé partout dans le monde. Ça a été dit d'ailleurs, ici, par Michael Binnion. Donc, c'est pour vous informer parce que vous avez dit que vous n'êtes pas sûr. Je crois que vous devriez vous informer un peu mieux.

Vous êtes en faveur d'Enbridge. Êtes-vous aussi en faveur de TransCanada Énergie?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Prévost.

M. Prévost (Simon) : D'abord, merci de la question du député de Mercier. J'étais inquiet tantôt, je pensais qu'il n'aurait pas été là et je suis content que vous soyez arrivé parce que ça va me permettre de préciser ma pensée un peu plus.

D'abord, sur ce que j'ai dit, ce n'est pas qu'il n'y aura pas de développement des gaz de… pardon, des…

M. Khadir :

M. Prévost (Simon) : Excusez-moi.

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier, un instant. M. le député de Mercier… M. Prévost, allez-y.

M. Prévost (Simon) : Bien, oui. Merci beaucoup. Alors, oui, excusez-moi. Mais c'est intéressant, on pourra partir le débat sur le gaz un autre tantôt.

Sur les sables bitumineux, ce que j'ai dit, c'est que : Est-ce que le projet québécois va nécessiter une plus grande production? Je n'ai pas mentionné que je croyais que l'Alberta n'allait pas vouloir développer davantage son secteur. Ça, c'est deux choses complètement distinctes. Je vous parle du projet d'amener du gaz qui est probablement déjà produit à l'heure actuelle et l'amener ici. Est-ce que ça veut dire que, demain matin, il faut qu'ils en produisent plus? Je ne pense pas que ça ait d'incidence. Et, deuxièmement, je pense qu'on n'embarquera pas dans la question de savoir qui s'informe, et où, et comment, et qui s'informe correctement, là.

Ceci étant dit, la question d'Énergie Est, pour moi, participe à toute notre réflexion sur la question des dangers énergétiques, mais, à l'heure actuelle, je pense que c'est une question qui devrait être débattue. Et je m'excuse si j'essaie, encore une fois, de restreindre le mandat de la commission, mais je ne pense pas que ce soit l'objet de la discussion d'aujourd'hui. Ceci dit, je pense que c'est une bonne question, puis il faut y réfléchir aussi.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier.

M. Khadir : Le plan d'affaires du sable bitumineux sera possible seulement si c'est désenclavé. On compte doubler, même tripler la production. Ce que ça fait, on le sait depuis 10 ans : ça augmente, ça crée une pression à la hausse du coût du dollar. Pourriez-vous nous parler des conséquences sur l'exportation, par exemple, du bois du Québec?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Prévost, en 15 secondes.

M. Prévost (Simon) : En 15 secondes, ça va être compliqué de parler de la maladie hollandaise à laquelle fait référence le député de Mercier, en 15 secondes, mais...

M. Khadir : ...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier, il y a une seule personne qui a la parole en ce moment, c'est M. Prévost.

M. Prévost (Simon) : Ah! C'est bien ce qu'il me semblait aussi. À l'heure actuelle, ce que, nous, on constate, c'est que l'évidence de ce qu'on a appelé à l'époque la maladie hollandaise est assez peu concluante pour le moment au Canada. Donc, c'est ce que je peux vous dire à l'heure actuelle.

Ceci étant dit, il y a toutes sortes d'autres facteurs qui influent sur la valeur de la devise, et le fait est qu'il y a de la richesse à développer au Québec dans ce secteur, c'est-à-dire, à développer au Canada. Je veux dire, je pense que le secteur manufacturier à l'heure actuelle est en mesure de répondre aux enjeux liés à la valeur de la devise.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci, M. Prévost. Je vous remercie pour votre présentation et l'échange. J'invite maintenant les représentants de la Chambre de commerce de l'est de Montréal à prendre place à la table des témoins.

Et je suspends pendant une minute.

(Suspension de la séance à 17 h 17)

(Reprise à 17 h 19)

La Présidente (Mme Bouillé) : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Chambre de commerce de l'est de Montréal. Donc, vous avez 10 minutes pour présenter votre exposé, qui sera suivi d'un échange avec les parlementaires. À vous la parole.

Chambre de commerce de l'est de Montréal

M. Risler (Denis) : Bonjour à tous. Mon nom est Denis Risler, président de la Chambre de commerce de l'est de Montréal. Je suis également président d'une PME d'une vingtaine d'employés, qui oeuvre dans Anjou et depuis une vingtaine d'années.

• (17 h 20) •

Je suis accompagné d'Isabelle Foisy, la directrice générale de la Chambre de commerce de l'est de Montréal.

Mmes, MM. les députés et membres de la commission, tout d'abord, j'aimerais remercier la commission de nous avoir invités à participer à ses travaux. Le projet de renversement de la canalisation 9B est un enjeu majeur pour l'est de Montréal, et nous sommes heureux d'avoir l'opportunité de faire entendre notre voix devant vous ce soir.

La Chambre de commerce de l'est de Montréal est le plus important regroupement de gens d'affaires de l'est de Montréal. Elle compte 1 200 membres provenant de plus de 500 entreprises et couvre un très vaste territoire qui s'étend à l'est du boulevard Saint-Laurent jusqu'à la Pointe-de-l'Île, de la rivière des Prairies au fleuve Saint-Laurent.

La Chambre de commerce de l'est de Montréal a été fondée en 1995, suite à la fusion de la Chambre de commerce d'Anjou et de la Chambre de commerce de l'est du Grand Montréal. Elle se penche sur plusieurs enjeux qui touchent ses membres. Pensons par exemple à la relance et à la revitalisation du Parc olympique, à la modernisation de la rue Notre-Dame ou au prolongement du métro vers l'est. Elle s'active aussi, bien sûr, à faire rayonner ses PME et à promouvoir ce que l'on appelle la chaîne du polyester, dont je vous reparlerai dans quelques instants. Vous pourrez alors constater que cette chaîne, unique au Canada et l'une des plus grandes fiertés de l'est de Montréal, sera directement affectée par le projet de renversement de la canalisation 9B.

La Chambre de commerce de l'est de Montréal est favorable au projet, à condition, bien sûr, qu'il se fasse dans le respect des directives imposées par l'Office national de l'énergie et des lois et règlements imposés par les différents paliers de gouvernement. La protection des communautés et de l'environnement devra également être une priorité. Une fois ces conditions respectées, la Chambre de commerce de l'est de Montréal estime que ce projet est un projet porteur, dont le Québec ne peut se passer. Le renversement de la canalisation 9B constitue pour tout le secteur un enjeu stratégique et vital. Il permettra notamment la rétention de grandes entreprises dans l'est de Montréal. Il est également important pour l'essor économique de l'est de Montréal puisqu'il assurera la vitalité de l'industrie pétrochimique du Québec de par un approvisionnement plus compétitif.

Depuis la fermeture de la raffinerie Shell en 2008, qui s'est traduite par une perte d'environ 500 emplois directs dans l'est de Montréal, on ne compte désormais que deux raffineries au Québec : celle de Suncor à Montréal et la raffinerie Jean-Gaulin à Lévis, opérée par Valero Ultramar. Leur capacité de raffinage, au total, atteint les 402 000 barils par jour, et 48 sociétés pétrochimiques comptent sur leurs produits.

Comme je vous mentionnais il y a quelques instants, on retrouve, dans l'est de Montréal, ce que l'on appelle la chaîne du polyester, une collaboration entre quatre entreprises qui permet de transformer localement le pétrole, donc de le faire dans le respect des normes d'ici, au bénéfice d'ici. La raffinerie Suncor fournit à Parachem du xylène. Parachem transforme le xylène en paraxylène et purifie le paraxylène fourni par Suncor pour ensuite l'acheminer à CEPSA Chimie Montréal, entreprise qui produit à son tour de l'acide téréphtalique purifié, aussi appelé PTA. Puis, Selenis Canada transforme à son tour le produit pour en faire un plastique recyclable que l'on utilise tant pour la fabrication de bouteilles que pour les fibres textiles, les emballages ou les résines pour la peinture, par exemple, car n'oublions pas que les produits pétroliers ne servent pas uniquement de carburant. La plupart des articles que nous utilisons dans la vie de tous les jours en contiennent. La chaîne du polyester qui est basée dans l'est de Montréal est unique au Canada, et elle est un exemple extraordinaire de transformation locale.

Comme je vous le mentionnais un peu plus tôt, ce sont 48 sociétés pétrochimiques qui dépendent des raffineries d'ici. Au Québec, 7 500 emplois directs et indirects dépendent aussi de l'industrie du raffinage et de la pétrochimie. Ces emplois sont en grande partie situés dans l'est de Montréal. L'absence d'une telle inversion entraînerait également une diminution de 1 % du PIB réel du Québec. La fermeture de la raffinerie Shell a eu un impact majeur pour le Québec, mais aussi dans la vie de milliers de personnes. Le Québec ne peut se permettre de voir une autre de ses raffineries et encore moins les deux fermer leurs portes.

Mais, pour éviter que pareille situation ne se reproduise, il faut aider les raffineries du Québec à rester compétitives. C'est d'ailleurs dans cette optique que la canalisation 9B avait été inversée une première fois, en 1999, pour leur permettre d'avoir accès à du pétrole à un prix plus compétitif.

En renversant de nouveau la canalisation 9B, nous soutenons la compétitivité de nos raffineries, nous assurons la vitalité des industries chimique et pétrochimique québécoises. Mais, plus encore, nous maintenons des milliers d'emplois de qualité ici, chez nous, au Québec, à Montréal. Puisque ces emplois bien rémunérés sont très spécialisés et difficilement transférables d'une industrie à une autre, s'il advenait qu'ils étaient un jour abolis, ce seraient de nombreux employés spécialisés que nous verrions aller travailler à l'extérieur. Nous perdrions, par la même occasion, l'expertise pétrochimique québécoise. Évidemment, ceci est sans parler des emplois directs, car, au-delà des industries connexes, qui dit emplois dit travailleurs, qui dit travailleurs dit familles, des familles dont les enfants fréquentent l'école, des familles qui font leur marché, des familles qui vont skier, qui font rouler l'économie d'ici. En maintenant ces emplois, nous n'assurons pas seulement la vitalité économique de notre territoire, mais aussi son avenir.

C'est pourquoi la Chambre de commerce de l'est de Montréal, considérant l'importance du projet pour ses membres, pour l'est de Montréal et pour le Québec, a décidé de se joindre à la coalition en faveur du projet formée au printemps 2013. Cette coalition compte dans ses rangs la Fédération des chambres de commerce du Québec, le Conseil du patronat du Québec, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, l'Association industrielle de l'est de Montréal, la Chambre de commerce de Lévis et Manufacturiers et exportateurs du Québec, en plus du syndicat Unifor.

Les produits pétroliers consommés par les industries chimiques et pétrochimiques de l'est de Montréal arrivent actuellement par voie maritime. Le renversement de la canalisation 9B permettrait à ces industries de s'approvisionner entre autres par le biais d'un oléoduc. Il me semble également pertinent de mentionner, même si d'autres l'ont probablement fait avant moi, que, ce faisant, en important désormais du pétrole de l'Ouest canadien, le Québec aurait l'opportunité de s'affranchir du pétrole venu d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Europe.

Bien sûr, il va sans dire que, dans un monde idéal, nous pourrions réduire à zéro notre consommation de pétrole, à notre guise. Malheureusement, le fait est que, dans la société dans laquelle nous vivons aujourd'hui, le pétrole nous est encore indispensable. Ainsi, aussi bien se tourner vers le pétrole d'ici puis en profiter pour le transformer ici également.

En conclusion, c'est tout un pan de l'industrie de notre secteur qui dépend de l'approvisionnement en pétrole. L'est de Montréal est, par tradition, le siège d'une industrie pétrochimique innovante et à la fine pointe de la technologie. Ce secteur d'activité génère des milliers d'emplois, et la rétention de ces entreprises représente un enjeu vital. La Chambre de commerce de l'est de Montréal et ses membres sont d'avis que le projet de renversement de la canalisation 9B est un projet de grande importance, tant pour l'est de Montréal que pour le Québec, et que tous auraient avantage à ce qu'il aille de l'avant dans le respect le plus strict des normes, des lois et des règlements. Car inverser la canalisation 9B, c'est miser sur l'avenir de notre territoire et des familles qui y vivent et qui y travaillent. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Bouillé) : Nous vous remercions beaucoup. Nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec les parlementaires. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, madame, bonjour, monsieur. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Vous avez parlé de la filière du polyester. Pouvez-vous nous expliquer un peu plus comment ça fonctionne? Si vous pouvez nous dire quel est le nombre d'entreprises qui est impliqué, combien d'entreprises sont impliquées, combien d'emplois, ça représente quoi, et en quoi le renversement du pipeline est important pour soutenir cette filière-là, s'il vous plaît…

M. Risler (Denis) : Encore, la chaîne du polyester regroupe quatre entreprises dont je vous ai mentionnées, qui emploient directement environ 400 à 500 personnes. Mais ce qui est important pour la chaîne du polyester… le renversement, pourquoi il est important, c'est la vitalité de la raffinerie Suncor. Le renversement va permettre à la raffinerie Suncor de s'approvisionner à un prix plus compétitif. Actuellement, la raffinerie paie son pétrole plus cher que toutes les autres raffineries — j'exclus Ultramar — nord-américaines. Dans une perspective à moyen terme et à long terme, on parle de la survie, de l'existence même de Suncor. Suncor est là, elle va être là l'année prochaine, mais nous autres, on veut s'assurer que Suncor va être encore là dans cinq ans et dans 10 ans pour maintenir la capacité de raffinage qu'on a dans l'est de Montréal et maintenir la chaîne du polyester, et toutes les industries connexes qui sont reliées à ça.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Qu'est-ce que vous appelez les industries connexes? Vous voulez dire quoi exactement?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

M. Risler (Denis) : Pardon?

La Présidente (Mme Bouillé) : Non, mais, madame ou monsieur.

• (17 h 30) •

M. Risler (Denis) : En fait, je parle essentiellement des quatre industries de la chaîne polyester. Mais, au Québec, il y a quand même 58 industries qui dépendent directement des produits pétrochimiques qui viennent de nos raffineries.

La Présidente (Mme Bouillé) : Mme la ministre.

Mme Zakaïb : 58 industries qui dépendent de l'industrie pétrochimique?

M. Risler (Denis) : C'est ce que je lis même dans le document qui a été déposé par le gouvernement.

Mme Zakaïb : O.K. Merci. C'est tout, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Roberval.

M. Trottier : Merci, Mme la Présidente. Merci, monsieur, mesdames de la Chambre de commerce de l'est de Montréal. Des fois, quand j'écoute mes collègues de l'opposition, je me demande s'ils pensent que c'est important que vous veniez témoigner. Pourquoi est-ce que vous êtes venus témoigner à la commission? Pourquoi est-ce que vous avez pris le temps de rédiger un mémoire, de venir vous asseoir ici? Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi c'est important pour vous d'être ici aujourd'hui?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la chambre de commerce.

M. Risler (Denis) : Oui. Je suis président de la chambre de commerce. Ce n'est pas à titre personnel que je suis ici parce que j'ai une entreprise qui est dans les télécoms. Mais je pense que c'est important pour nos 1 200 membres, c'est important pour la vitalité de l'est de Montréal. La raffinerie Suncor et toutes les industries qui gravitent autour ont un impact majeur.

Déjà, on a vécu la fermeture de plusieurs raffineries dans l'est. La dernière, ça a été Shell. Avec Shell, on a perdu 500 emplois directs. Donc, on ne voudrait pas que ça arrive de nouveau, et, pour nous, c'est très important. Il nous reste une raffinerie dans l'est de Montréal, et c'est important, pour nous, qu'elle puisse s'approvisionner à des taux compétitifs pour assurer la pérennité.

Je ne sais pas, Isabelle, si tu as des choses à rajouter.

Mme Foisy (Isabelle) : Bien, en fait, oui. J'aimerais rajouter, en fait, quand on est dans l'est puis qu'on regarde, là, l'ensemble des 1 200 membres à la chambre, il y a une partie de ces entreprises-là qui sont directement touchées. L'Association industrielle de l'est de Montréal est d'ailleurs membre à la chambre, et plusieurs entreprises qui font partie de l'association sont également membres.

Puis, moi, ce qui me touche davantage, c'est l'ensemble de l'économie : pas seulement que les gens qui travaillent dans le domaine de la pétrochimie, mais toutes les autres entreprises, qu'on pense aux écoles, on parlait des familles tantôt. Mais c'est tout un pan de notre territoire qui est touché par la vitalité… et de s'assurer que cette industrie pétrochimique là demeure dans l'est. Je pense aux cafétérias, je pense aux gens qui travaillent dans le ménage, et tous ces gens-là veulent que ça continue, parce que c'est leurs voisins, c'est leurs cousins, c'est leurs cousines. Tout le monde connaît quelqu'un qui travaille dans cette industrie-là.

Et, dans l'est de Montréal, historiquement, l'industrie pétrochimique y a toujours été. C'est un milieu qui est extrêmement compétitif. On parle, là, que, depuis plusieurs années, il y a eu de moins en moins de raffineries qui existent. Et donc il est important qu'on maintienne celle-là pour l'ensemble du restant des industries qui s'y rattachent.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Roberval.

M. Trottier : Oui. Je comprends qu'à ce moment-là vous croyez que, pour vous autres, c'est extrêmement important que le gouvernement du Québec se préoccupe de cet aspect-là. Dans le fond, si je comparais ça à chez nous, c'est que l'industrie pétrochimique est chez vous ce que la forêt est chez nous. Ça a le même type d'importance, là.

Vous avez mentionné que vous êtes à l'intérieur d'une coalition. Vous avez nommé un certain nombre de membres. Est-ce que ça a été difficile de rallier ces gens-là? Est-ce que ça s'est fait rapidement? Est-ce que vous pourriez nous expliquer pourquoi c'est important pour vous autres de faire une coalition puis de dire : On se présente comme un groupe, là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la chambre de commerce.

Mme Foisy (Isabelle) : Alors, en fait, on est fiers d'avoir été un des instigateurs d'aller chercher la Fédération des chambres de commerce du Québec, la Chambre de commerce du Montréal métro. On travaille vraiment en collaboration avec d'autres organisations. Et donc, pour nous, ça a été… Le premier souffle est venu de la Chambre de commerce de l'est et, je pense, aussi de mes collègues de la Chambre de commerce de Lévis, qui vont vous parler un peu plus tard. Il était facile de parler de ce que ça voulait dire concrètement localement. Mais, dans ce contexte-ci, ce n'est pas que des questions locales. Nous, on va vous parler plus de ce que ça représente localement, mais il y a un impact pour tout le Québec.

Et donc, quand on a parlé à Manufacturiers et exportateurs, à la Fédération des chambres de commerce, à la Chambre de commerce du Montréal métro… Ce n'est pas un enjeu local. Nous, on est ici pour vous parler localement, ce que ça représente. Mais certainement qu'on comprend que l'impact, il est beaucoup plus grand que ce qui ne peut toucher que l'est de Montréal.

Et donc oui, facilement, on est en mesure de discuter, d'amener les gens alentour de la table pour pouvoir élaborer les différents points de vue, et s'assurer qu'on travaille, oui, de façon économique, mais qu'également on pense… Moi, pour moi, là, ce qui est… Bien, en fait, pour l'ensemble de la coalition, ce qui est important de voir, c'est que ce n'est pas deux chemins qui ne se croisent pas, de travailler en sécurité, en collaboration avec le développement durable et le milieu économique. Pour nous, il est important qu'on travaille en parallèle sur ces deux dossiers-là. Et on n'aurait pas été pour si ce milieu-là de vie n'était pas également considéré dans notre position.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Roberval.

M. Trottier : Je comprends de vos propos que vous faites partie de ceux qui disent qu'il ne faut pas choisir entre l'économie et l'écologie. C'est qu'il faut s'arranger pour que les deux fonctionnent ensemble, puis d'autant plus, comme vous dites, que vous êtes prêts. Ça veut dire que, si jamais il arrivait des problèmes, bien, vous seriez en partie victimes de ça, puis qu'il n'est pas question de lésiner, on pourrait dire, sur les questions de sécurité par rapport à ça. Moi, j'ai toujours pensé que, dans le monde d'aujourd'hui, ce qui n'était pas écologique n'était pas économique non plus. Je pense qu'il faut que ça aille ensemble. Je pense qu'on est rendus là.

Mais est-ce que vous croyez que le gouvernement du Québec peut être un joueur important dans ce dossier-là? Est-ce que c'est pour ça que vous êtes ici?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

M. Risler (Denis) : En fait, vous posez la question… Il y a une commission parlementaire, donc on vient s'exprimer puis on vient faire valoir notre point de vue. Mais le gouvernement du Québec va certainement faire des recommandations qui vont certainement être suivies par Enbridge.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Selon vous, quel doit être… Quel rôle vous attendez du gouvernement du Québec dans un dossier comme ça et aussi également par rapport à la coordination de l'action dans la filière pétrochimique au Québec?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur de la Chambre de commerce de l'est de Montréal.

Mme Foisy (Isabelle) : Bien, en fait, le rôle du gouvernement, comme il l'a toujours été, c'est de s'assurer que les entreprises qui travaillent puis qui oeuvrent dans l'est — nommons Enbridge, par exemple — vont faire les choses de façon sécuritaire. Ils l'ont fait dans les dernières années. Ce pipeline-là existe depuis de nombreuses années. Le gouvernement québécois... Le gouvernement canadien a toujours été à la hauteur pour s'assurer du respect des normes. Et on ne s'attend à rien de moins du gouvernement que vous soyez en mesure de nous aider, nous qui vivons et qui travaillons dans l'est, de respecter ces normes-là. Et on s'attend à ça du gouvernement, que vous soyez solidaires puis que vous soyez en mesure de vous assurer de la sécurité et que les entreprises qui y travaillent maintiennent leur réglementation.

M. Trudel : Ça va pour moi. Merci.

La Présidente (Mme Bouillé) : Est-ce qu'il y a d'autres questions de la part de la partie gouvernementale? M. le député de Repentigny.

M. McKay : Oui. Bonjour. Bien, premièrement, je constate avec plaisir que la chambre de commerce, depuis l'époque où… Moi, je ne pense pas avoir été membre, mais j'ai été conseiller municipal dans l'est de Montréal il y a quelques années déjà et je vois avec plaisir que votre organisation a pris de l'expansion puis continue à être un acteur important au niveau économique, et social, et environnemental dans l'est de Montréal.

Notre commission parlementaire, l'objet, comme vous le savez, c'est l'acceptation sociale, l'acceptation sociale de ce projet-là de pipeline, l'inversion du pipeline. Comme organisation, c'est quoi, votre contribution… ou comment vous voyez votre contribution et la contribution de la commission parlementaire du gouvernement du Québec éventuellement dans cette question d'acceptabilité sociale? Je ne sais pas si je suis trop général, là, mais…

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la chambre de commerce.

M. Risler (Denis) : En fait, je vois ça… Nous autres, on est proches de nos membres. Donc, quand est arrivé le projet du renversement du pipeline, on s'est renseignés. Nous, on s'est renseignés puis on a vulgarisé ça à notre membership. Puis à un moment donné on a dit : Voici la position qu'on compte prendre. Et donc on a joué un rôle de diffuseur de l'information auprès de nos membres puis auprès de la communauté avec les communiqués de presse qu'on a sortis puis les interventions publiques qu'on fait.

Donc, à un moment donné, la communauté d'affaires de l'est de Montréal est au courant qu'il y a un projet d'inversement d'un pipeline et est au courant des tenants et aboutissants, est au courant de la position de la chambre, qui est pour le renversement pour avoir des prix compétitifs, en respectant l'environnement puis en respectant la sécurité. Donc, c'est un peu l'apport de notre chambre de commerce.

Mme Foisy (Isabelle) : Est-ce que je peux ajouter ou je n'ai pas le temps?

La Présidente (Mme Bouillé) : Bien sûr! Allez-y.

• (17 h 40) •

Mme Foisy (Isabelle) : Peut-être que… Si vous me permettez… En fait, à la chambre, on a un comité qui s'appelle le comité des enjeux socioéconomiques. Donc, bien évidemment que le renversement du pipeline n° 9 est un des enjeux sur lesquels on travaille. Mais on a quand même une vigie qu'on fait sur plusieurs autres dossiers. Et donc, pour nous, ce comité-là, c'est un comité aviseur qui nous permet aussi d'échanger avec nos membres pour s'assurer que les positions qu'on va prendre sont en respect de ce que les membres pensent. Et donc notre rôle de porte-parole ou notre rôle de — quel mot je cherche, là? — prise de position, si vous voulez, est bien représenté par rapport à ce que nos membres nous disent et ce que ce comité-là, aviseur, est en mesure de faire. D'ailleurs, ce comité aviseur là siège sur un autre comité qui est plus grand, qui s'appelle le Comité de développement de l'est de Montréal, sur lequel préside Mme Léger, députée de Pointe-aux-Trembles. Et on participe, la chambre, à ce comité-là de façon active pour pouvoir aussi parler à plus large, pour mentionner quelles sont nos positions, et bien évidemment qu'on a ces discussions-là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Saint-Maurice, 1 min 30 s.

M. Trudel : Je veux juste vous remercier pour votre participation puis le contenu de votre allocution, de votre présentation ici, puis vous souligner que, bien, nous, de l'oeil gouvernemental, on est très actifs dans cette cause-là. On souhaite pouvoir collaborer avec vous. C'est pour ça qu'on est ici, nombreux, là, à vous écouter et vous entendre. Et on sera là pour vous appuyer par la suite. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue à M. Risler, Mme Foisy, vous remercier de votre participation, votre présence ici. Et oui, je considère que c'est très important que vous soyez ici, à l'Assemblée nationale, votre Assemblée nationale, pour vous prononcer et faire valoir votre point de vue.

Nous sommes d'avis, à l'opposition officielle, je pense que c'est partagé par plusieurs, que la politique de la chaise vide n'est jamais une bonne politique, là, et c'est pour cette raison-là que, malheureusement, nous étions extrêmement déçus lorsque le gouvernement du Québec a cru nécessaire ou a décidé de ne pas se présenter devant l'Office national de l'énergie. Parce que, vous savez, vous êtes ici aujourd'hui afin de faire valoir votre point de vue, et évidemment tout le monde veut vous appuyer. Vous représentez des travailleurs, des familles, que vous avez mentionnés dans votre mémoire. Donc, l'occasion idéale, là, et l'occasion principale et primordiale, là, pour vous représenter, si on a vraiment vos intérêts à coeur, c'est d'aller devant l'instance qui est celle qui prend la décision finale, la vraie décision en l'occurrence, qui a la compétence pour le faire, et c'est l'Office national de l'énergie. Alors, c'est pour cette raison qu'on a été passablement déçus, de la part du gouvernement… Et nous avons trouvé que c'était une occasion ratée d'aller vous représenter, vous, vous et d'autres que vous représentez, devant l'Office national de l'énergie.

Alors, moi, je trouve intéressant ce que vous êtes venus nous dire, évidemment, sur l'industrie, la chaîne de polyester, comme vous l'appelez. Évidemment, c'est aussi une question, si vous voulez… On a entendu la Fédération des chambres de commerce du Québec et d'autres qui nous ont dit : Écoutez, si on a la chance, l'occasion de nous approvisionner chez nous, c'est une question non seulement de logique… Et vous l'avez soulevé, Mme Foisy, en disant : Écoutez, s'approvisionner du Canada alors que nous avons notre mot à dire sur comment ça se fait, la réglementation — nous élisons des députés, nous avons notre mot à dire à l'intérieur de ces institutions — c'est toujours mieux que d'importer du pétrole qui vient d'ailleurs, de l'Afrique du Nord ou ailleurs, où nous n'avons absolument aucun mot à dire, aucune façon de surveiller, aucune façon de savoir, si vous voulez. Et je sais que ça ferait plaisir, mais c'est aussi une question de souveraineté, si vous voulez, de pouvoir nous procurer ou nous approvisionner nous-mêmes nos propres ressources. Pourquoi donner ce pouvoir à un gouvernement étranger qui pourrait nous influencer lorsqu'ils deviennent absolument essentiels pour nous en nous fournissant des intrants pour nos industries qui sont essentielles? Alors, juste d'un point de vue logique, je vous comprends très bien. Et nous sommes très contents que vous êtes ici avec nous.

J'aimerais savoir, au niveau de l'industrie pétrochimique et du potentiel qui existe… Je comprends que vos remarques sont pour les protéger, maintenir les gens qui sont en poste. Je sais aussi, par contre, que vous êtes… évidemment, votre mandat est plus large que juste cette industrie-là. Vous êtes la Chambre de commerce de l'est de Montréal, ce qui veut dire que vous appuyez n'importe quelle initiative qui vise à faire rouler l'économie, à créer de l'emploi, à créer un certain mouvement dans l'économie et créer de la richesse.

Parce que certains me disent, évidemment, qu'aller dans le sens d'inverser le flux, continuer, en quelque sorte, de favoriser notre dépendance sur le pétrole constituerait comme un obstacle, constituerait un obstacle au développement d'autres technologies vertes, d'autres industries qui ne sont pas nécessairement dépendantes du pétrole. Et j'ai posé la question également aux représentants des Manufacturiers et exportateurs du Québec. Est-ce que vous, vous voyez que c'est une contradiction ou est-ce que vous êtes d'accord avec ce que d'autres ont dit, comme quoi ce n'est pas nécessairement contradictoire?

Nous sommes dans la situation où nous sommes. Nous avons une période de transition. Nous avons besoin de ce pétrole et, en même temps, évidemment, si c'est le dernier pétrole qu'on utilise, tant mieux. Mais ce n'est pas contradictoire puis ça ne cause pas un obstacle. Ça ne pose pas d'obstacle au développement, à d'autres moyens de créer de l'énergie et d'autres types de technologies vertes. J'aimerais vous entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

M. Risler (Denis) : Ce n'est pas contradictoire du tout, effectivement. Là, actuellement, on est dans une situation où on consomme du pétrole, donc on est aussi bien de le raffiner ici que de l'importer raffiné. Mais entre-temps… Puis il y a des efforts qui sont faits pour, exemple, électrifier le transport. Donc, toutes les nouvelles sources d'énergie qu'on peut trouver, on doit travailler activement à ça. Donc, je ne vois aucune contradiction.

Mme Foisy (Isabelle) : Puis je rajouterais même que les entreprises qui travaillent dans le domaine pétrolier sont des entreprises qui sont innovantes, qui mettent déjà de l'énergie tant au niveau de la recherche et du développement. Et je siège également sur un autre comité où on parle du futur industriel de l'est de Montréal. Je n'ai pas entendu le discours de mon collègue, Dimitri Tsingakis, mais certainement que cette étude-là va également nous amener à se poser des questions sur comment on peut encore mieux travailler, collectivement, ensemble. Et donc je pense qu'effectivement ça se travaille en parallèle. Il ne faut pas arrêter d'être innovants. Il ne faut pas arrêter d'apporter des différentes solutions, et pendant le temps qu'on utilise du pétrole, pour plusieurs années encore.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors, si je vous entends bien également, le fait de diversifier, c'est une bonne chose. Évidemment, vous représentez un territoire, vous représentez les gens d'affaires. Diversifier l'économie, les industries qui sont présentes dans le coin, ce n'est pas une mauvaise chose; c'est, au contraire, une bonne chose. Alors, si je vous entends bien, vous êtes en train de nous dire que ce n'est pas de nature à rendre paresseuse l'innovation ou à freiner l'innovation. Au contraire, vous vous rendez compte qu'évidemment la diversification de l'industrie et du potentiel économique de votre coin, évidemment, est nécessaire et vous favorisez ça. Et donc vous ne voyez pas ça comme un obstacle. Je suis content de vous entendre là-dessus.

Dites-moi également, au niveau… Expliquez-nous, au niveau de la chaîne du polyester dont vous avez parlé, là, est-ce que nous avons atteint notre potentiel? Est-ce que nous pouvons espérer donner un élan qui augmenterait notre capacité, qui irait plus loin ou est-ce qu'on est vraiment ici… Vous connaissez bien mieux que moi cette industrie puis cette grappe, si vous voulez. Est-ce que nous sommes dans une situation où nous pouvons espérer donner un élan qui ferait en sorte que nous augmenterons notre capacité à l'avenir ou est-ce que nous sommes simplement dans la préservation des acquis en ce moment, selon vous?

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur de la chambre de commerce.

Mme Foisy (Isabelle) : En fait, il faudrait poser la question aux gens qui travaillent à la chaîne, là, de façon quotidienne. Je ne peux pas vous répondre s'ils sont en augmentation ou en diminution. Je ne pourrais pas vous commenter, là, sur ce sujet-là. Ce que je peux vous dire, c'est qu'ils travaillent en collaboration, un avec l'autre, que cette chaîne-là, elle est unique en Amérique du Nord, puis c'est dans l'est de Montréal. Donc, c'est une fierté d'avoir cette chaîne-là chez nous. Mais, de la façon dont ils travaillent et leurs prévisions pour les cinq, 10 prochaines années, je ne le sais pas.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sklavounos : Il reste combien de temps, madame la…

La Présidente (Mme Bouillé) : Il reste cinq minutes.

M. Sklavounos : Parfait. Cinq minutes.

La Présidente (Mme Bouillé) : Six minutes.

M. Sklavounos : Au niveau de la sécurité de l'installation, évidemment, c'est une installation qui est déjà existante, ce n'est pas une nouvelle installation. Ce qui est proposé, c'est de changer la direction puis changer également la provenance. Mais évidemment il y a certains qui ont exprimé différentes préoccupations concernant la sécurité et l'environnement. Est-ce que vous, à votre niveau, vous avez sondé les membres sur cet aspect-là? Je comprends qu'évidemment l'emphase et l'accent, dans votre mémoire, sont mis sur évidemment l'industrie. Mais j'ai bien lu, à au moins un endroit… où vous dites évidemment : La protection des communautés et de l'environnement devra également être une priorité à avoir. Alors, vous le dites clairement. Est-ce que vous percevez, sur le terrain, dans vos échanges avec les gens, que les gens sont rassurés par ce qu'ils entendent?

Évidemment, je sais qu'Enbridge, ce n'est pas devant nous qu'ils se sont prononcés pour la première fois. Ils se sont déjà prononcés. Ils sont allés devant l'Office national de l'énergie. Je sais qu'il y a eu des communications. M. Prud'Homme, qui était devant nous, a été devant plusieurs médias, en entrevue. Est-ce que votre population semble rassurée par ce qui est entendu? Nous avons entendu Enbridge dire à plusieurs reprises que c'est une entreprise différente, qu'ils ont appris de certaines erreurs du passé, si vous voulez. Est-ce que votre population, de ce que vos membres… votre population semble rassurée? Je comprends qu'il y a l'aspect économique, et on est pour ça. Je pense qu'il y a pas mal de consensus autour de la table. Mais, vous, sur le terrain, les gens qui sont plus directement touchés, si vous voulez, est-ce qu'ils sont rassurés par les explications, à date, ce qu'ils entendent?

• (17 h 50) •

La Présidente (Mme Bouillé) : Madame, monsieur.

M. Risler (Denis) : Je vous dirais que oui. Il y a eu beaucoup d'informations qui ont circulé. Et les gens, évidemment, sur le facteur économique, je pense que tout le monde s'entend que ça fait beaucoup de sens. Mais ce qui revient régulièrement, on entend les gens : Oui, ça fait du sens, mais il faut que ça soit fait selon des normes, pour la sécurité des gens puis la sécurité de l'environnement. Puis je pense qu'il y a… On apprend. Ce qui se faisait il y a 10 ans puis il y a 20 ans, ce n'est plus des choses qui se font aujourd'hui. Donc, on a appris. Puis je pense qu'Enbridge, comme toutes les entreprises qui sont dans la pétrochimie ont grandement amélioré leurs processus au point de vue de la sécurité des gens puis au point de vue de l'environnement.

Et je peux vous mentionner que moi, j'habite dans l'est, je suis né dans l'est, je demeure dans l'est depuis toujours puis je travaille dans l'est. Et l'est, il y a 30, 40 ans, c'était de la grosse boucane noire puis ça sentait mauvais. C'était ça, l'industrie chimique, la pétrochimie, il y a 30 ou 40 ans. Et aujourd'hui c'est un beau ciel bleu, ça ne sent plus rien. Puis, quand vous visitez les industries, là, c'est du «stainless steel», c'est comme des industries pharmaceutiques. Donc, ça a beaucoup évolué. Donc, ça me rend très, très confortable. Moi, je suis à l'aise puis j'ai bien confiance en ces industries-là pour ce qui est de la sécurité puis pour l'environnement.

Je ne sais pas, Isabelle, si tu veux rajouter…

Mme Foisy (Isabelle) : Bien, en fait, vous savez, ces entreprises-là, c'est le tissu historique de l'est de Montréal. Donc, ces gens-là, quand vous êtes sur le terrain, ils sont présents. On les voit, les gens de Suncor, on les voit, les gens d'Enbridge, on les voit, les gens de chez Selenis. On a le privilège de les côtoyer à tous les jours. On en parle plus maintenant, mais, depuis de nombreuses années, ils font partie de la communauté. Donc, ils se sont investis et partagent leurs messages. Donc, quand vous nous demandez : Est-ce que nos gens sont inquiets au niveau de la sécurité?, je pense que ces gens-là, dans ces différentes entreprises là, prennent le temps de nous informer, de nous amener ailleurs et de nous démontrer la sécurité qu'ils y mettent.

D'ailleurs, j'ai eu le privilège de descendre à Mirabel il n'y a pas très longtemps pour qu'on me montre la canalisation et que je voie ce que ça veut dire, un incident sur une canalisation. Vous seriez tellement surpris de voir la petite indentation, c'est à peine… Tu sais, c'est un petit croche qui a été détecté. Ils ont déterré la canalisation. De le voir de nos yeux vu, là, ça démontre le souci qui y est porté. Et j'ai été impressionnée de voir tous les gens qui y travaillaient pour s'assurer de la sécurité.

Et donc ce genre de forum d'information là est disponible à la communauté des affaires, mais est également disponible avec des portes ouvertes qu'ils font sur le terrain. Et je pense que, donc, les citoyens et les gens d'affaires ont vraiment, là, accès à ces gens-là qui sont proches de nous.

La Présidente (Mme Bouillé) : Une minute, M. le député.

M. Sklavounos : Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de l'entendre, mais l'opposition officielle a proposé au gouvernement une unité de vigilance, parce que nous savons que l'information se transfère bien chez vous, mais ce n'est pas peut-être pas la même chose partout au Québec. L'unité de vigilance qu'on propose inclurait le ministère des Ressources naturelles, le ministère de l'Environnement, l'Office national de l'énergie et Enbridge afin de favoriser ce transfert d'information, qui se fait peut-être naturellement chez vous parce que vous avez cet historique, mais peut-être qu'il ne se fait pas ailleurs. Est-ce que vous verriez d'un bon oeil la constitution de ce type d'organisme? Ça ne vous engage à rien, votre réponse, mais simplement pour accroître le transfert et le partage d'information entre les sociétés et la population locale, là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Une réponse très courte, madame, monsieur.

M. Risler (Denis) : En fait, tout ce qui favorise le transfert d'information, l'échange d'information, là, on ne peut pas être contre la vertu.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Merci, Mme la Présidente. Bien, bonjour à vous deux. Très content de vous voir là en cette fin d'après-midi. Je ne sais pas si vous avez suivi les travaux de la commission. Moi, j'ai assisté à beaucoup de gens qui sont venus faire des présentations. Puis vous avez peut-être remarqué que les trois partis, à l'exception de mon collègue de Québec solidaire, on est pas mal tous favorables au projet. Puis tous les gens, chambre de commerce, tous ceux qui sont venus, ils partagent… On voit la logique économique de ce projet-là.

La seule chose, moi, qui — comment je pourrais dire ça? — pique ma curiosité, c'est que, quand on regarde… Il peut se raffiner environ 300 000 barils par jour. Il y a un potentiel d'économie de 20 $ du baril. Ça fait 6 millions par jour. On transpose ça sur le nombre d'années de production, c'est beaucoup d'argent qui peut être économisé. Moi, je ne comprends pas comment ça se fait qu'il n'y a personne dans… des gens qui sont venus dire… pour défendre le point de vue du consommateur. Comment ça se fait que le consommateur ne pourrait pas avoir une part de bénéfices dans tout cet exercice-là? Je ne sais pas ce que vous en pensez de votre côté.

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la chambre de commerce.

Mme Foisy (Isabelle) : En fait, moi, je laisserais les industries pétrolières vous dire un peu comment eux, ils mesurent ça puis comment ils arrivent à leurs profits. Juste par une personne d'affaires que je suis, j'irais à l'inverse de ce que vous me dites ici : c'est 6 millions de sauvés quand ça fonctionnera. Je me questionne depuis les dernières années. Le 6 millions par jour qu'ils ont perdu, j'imagine qu'il va falloir qu'ils se rattrapent. Alors, je ne sais pas la réponse à cette question-là. Mais certainement que Suncor et Valero pourront vous dire comment ils déterminent le prix à la pompe. Malheureusement, je ne suis pas spécialiste. Et j'ose espérer que ces calculs-là vont se faire et puis que ça va nous revenir.

M. Martel : Juste un commentaire?

La Présidente (Mme Bouillé) : Allez-y, M. le député.

M. Martel : Ils n'ont certainement pas perdu d'argent parce qu'ils ne seraient plus en opération. Mais je trouve ça quand même triste qu'on n'examine pas ce point… Moi, il me semble qu'il y a une logique quand on dit : Bon, bien, O.K., on va le payer moins cher, on le prend au Canada. À la fin, il faut que ça profite aux contribuables, il faut que ça profite aux consommateurs. Puis moi, j'aimerais ça entendre des gens défendre ce point de vue là. C'est tout.

La Présidente (Mme Bouillé) : C'est tout, M. le député? Merci. Merci, donc, pour votre présentation et l'échange.

Sur ce, la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 17 h 57)

(Reprise à 19 h 34)

La Présidente (Mme Bouillé) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Ce soir, nous entendrons la Chambre de commerce de Lévis ainsi que M. Pierre-Olivier Pineau du HEC de Montréal. Je vous souhaite donc à nouveau la bienvenue, les représentants de la Chambre de commerce de Lévis, vous disposez d'une période de 10 minutes pour votre exposé, qui sera suivie d'une période d'échange, et je vous demanderais, en commençant, de vous présenter.

Chambre de commerce de Lévis

M. Jolicoeur (Jérôme) : Oui. Bien, bonsoir, madame la présidence, bonsoir à vous tous. Au nom de la Chambre de commerce de Lévis, premièrement, je vous remercie de nous accorder la parole. Je me présente : Jérôme Jolicoeur, je suis président de la chambre de commerce et aussi directeur Développement et affaires juridiques au groupe AMT, qui oeuvre dans l'immobilier commercial. Je suis accompagné, à ma droite, par Jérôme Gaudreault, directeur général de la Chambre de commerce de Lévis et, à ma gauche, par M. Daniel Beaudoin, président de la compagnie Descimco.

La Chambre de commerce de Lévis est le plus important réseau de gens d'affaires de la région de Chaudière-Appalaches. Fondée en 1872, elle représente aujourd'hui plus de 1 200 gens d'affaires, et sa mission consiste à participer activement au développement économique de la région. Elle s'intéresse particulièrement aux dossiers socioéconomiques touchant de près le développement de Lévis, évidemment.

La ville de Lévis est évidemment située sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent, en face de la ville de Québec. Forte de ses quelque 141 000 résidentes et résidents, Lévis agit sans contredit comme une métropole régionale et comme principal pôle urbain, économique et institutionnel de la région de Chaudière-Appalaches, dont elle représente plus du tiers de la population et de l'activité économique.

Lévis est également un pôle pour le secteur manufacturier. Celui-ci s'est grandement diversifié au cours des dernières années, permettant aux nombreux fabricants de se démarquer dans les niches spécifiques et de mieux relever les défis posés par une économie mondialisée. Aujourd'hui, c'est plus de 200 entreprises manufacturières qui opèrent à Lévis et qui emploient autour de 7 000 travailleurs. Plusieurs jouissent d'une renommée internationale, dont quelques-unes : Pharmalab, Honco, OmegaChem, PH Tech ou Teknion. La présence de grands donneurs d'ordres constitue un atout pour les nombreux fournisseurs présents sur le territoire lévisien, mais aussi pour ceux situés dans les MRC périphériques.

C'est également à Lévis qu'est située la raffinerie Jean-Gaulin de la compagnie Valero, autrefois Ultramar. Implantée sur le territoire depuis 1971, celle-ci se présente comme une raffinerie moderne et efficace grâce aux mises à niveau constantes depuis sa mise en service. À cet effet, plus de 2 milliards d'investissement ont été effectués sur le site lévisien depuis 10 ans afin notamment d'augmenter sa capacité de production, augmenter la capacité de chargement des camions-citernes et la modernisation des installations de traitement des eaux usées. À cela s'ajoute la construction au coût de 400 millions et la mise en service à la fin 2012 du Pipeline Saint-Laurent, permettant ainsi d'alimenter le terminal de Valero situé à Montréal-Est à raison de 170 000 barils par jour à capacité maximale.

La raffinerie a également été adaptée de façon à ce qu'elle soit en mesure de traiter une plus vaste gamme de pétroles bruts, mais aussi dans la volonté d'orienter des économies d'énergie à un meilleur rendement. Les améliorations continues apportées à la raffinerie Jean-Gaulin dans les dernières décennies ont représenté au total une réduction de 145 000 tonnes métriques de gaz à effet de serre par année. Cette excellente performance en matière d'intensité des émissions de gaz à effet de serre place la raffinerie Jean-Gaulin loin en tête de peloton à l'échelle canadienne.

L'emplacement de la raffinerie et de son quai en eau profonde sur le fleuve Saint-Laurent lui permet d'accueillir à longueur d'année des pétroliers à fort tonnage pour des livraisons de pétrole brut. La capacité de la raffinerie à recevoir des cargaisons allant jusqu'à 1 million de barils de pétrole lui confère un avantage net par rapport aux autres raffineries. Situées en amont, ces dernières sont désavantagées, car elles doivent s'en remettre au transport par pipeline ou par navire de tonnage moindre. De plus, la raffinerie Jean-Gaulin affrète de gros pétroliers à double paroi et à double coque, résistants aux glaces, qui peuvent naviguer en toute sécurité sur le fleuve durant l'hiver.

La raffinerie traite du pétrole brut d'outre-mer acheminé par pétrolier à son port en eau profonde sur le fleuve Saint-Laurent. D'une capacité de stockage de 8,7 millions de barils de brut, de produits intermédiaires et raffinés, la raffinerie peut aussi entreposer du gaz de pétrole liquéfié. Sa capacité nominale de raffinage de 265 000 barils par jour représente environ les deux tiers de la capacité de production du Québec et près de 30 % de la capacité combinée des sept usines du Québec et de l'Ontario. C'est donc très important. La présence de la raffinerie Jean-Gaulin amène évidemment son lot de retombées économiques dans la région. Elle embauche plus de 700 travailleurs, dont 500 permanents et 200 contractuels. L'activité économique qu'elle génère sur notre territoire seulement s'élève à 450 millions annuellement, permettant le maintien de plus de 1 500 emplois indirects dans les entreprises de services locales.

La Chambre de commerce de Lévis appuie sans réserve le projet de renversement de la ligne 9B. D'importants changements sont en cours concernant l'approvisionnement mondial en pétrole brut, vous le savez, c'est évident. Les gisements de brut du bassin de l'Atlantique déclinent, tandis que la demande croissante des économies asiatiques rivalise avec les économies occidentales pour l'accès à la même ressource. Ceci, combiné à la montée en flèche de la production de pétrole brut du centre du continent nord-américain, est en voie de redessiner la carte de l'approvisionnement en pétrole.

• (19 h 40) •

La récession récente, et l'introduction des biocarburants, ainsi qu'une réglementation plus stricte sur les produits qui nécessitent des investissements massifs, ont causé la fermeture de nombreuses raffineries plus vulnérables de la côte Est et de l'Europe, y compris à Montréal-Est, Shell. Ces fermetures sont l'inexorable, destin des usines devenues non concurrentielles par manque d'investissement. L'Agence internationale de l'énergie prévoit que les États-Unis seront autosuffisants en pétrole d'ici 2030 et que leur production dépassera celle de l'Arabie saoudite d'ici 2020 grâce au recours aux technologies améliorées d'extraction de brut conventionnel et du brut non conventionnel. Les conséquences sur l'économie des États-Unis sont énormes, alors que les importations de brut, elles, seront en déclin.

Au Canada, l'ensemble des raffineries consomme 1,8 million de barils de pétrole par jour de brut. La production de pétrole brut dans l'ouest du Canada passera de 2,7 millions de barils par jour, qu'elle était au début de l'an passé, à 4,5 millions de barils par jour d'ici 2020. Ceci correspond à deux fois et demie les besoins actuels du Canada et à plus de sept fois la demande de brut raffiné dans l'Ouest du Canada. Incontestablement, le pétrole devra se retrouver quelque part.

Pour une usine comme la raffinerie Jean-Gaulin, le coût d'acquisition de la matière première représentait, en 2012, de 90 % à 95 % de tous ses frais d'exploitation. Avec une capacité de 265 000 barils par jour, on peut donc évaluer les coûts d'acquisition de la matière première à plusieurs milliards de dollars à chaque année.

Comme on le constate depuis maintenant deux ans, l'écart du prix au baril entre le brent typique extrait de la mer du Nord acquis par les raffineurs québécois par rapport à un brut canadien du centre du continent acquis par les raffineurs ontariens a beaucoup augmenté. Dans la dernière année, on parle d'un écart moyen de 17,54 $ du baril de pétrole.

Cet écart par baril de pétrole brut a donc un impact significatif sur la compétitivité des raffineries du Québec, surtout lorsque l'on sait que la marge bénéficiaire nette moyenne du secteur pétrolier aval canadien est de moins de 0,02 $ par litre, moyenne de 10 ans, tous produits confondus.

Y donner accès leur permettra donc de demeurer très compétitives vis-à-vis leurs concurrents nord-américains; c'est très important. Au contraire, ne pas faciliter l'accès du pétrole canadien au Québec les place dans une situation très précaire.

De plus, Valero prévoit également que le pétrole brut synthétique valorisé ou d'autres pétroles légers amenés à Lévis par le pipeline 9B amélioreraient davantage le bilan environnemental de la raffinerie. Ces pétroles sont généralement plus faibles en soufre et génèrent très peu de résidus de pétrole lourd.

La ligne 9, inversée une première fois en 1998 vers Sarnia, se trouve maintenant dans la situation contraire. Ainsi, la logique économique suggère de le restaurer à son état d'origine avec un écoulement de l'ouest vers l'est. Ce brut a déjà commencé à être envoyé par wagon, navire et pipeline, nouveaux ou redirigés, vers des centres de raffinage partout en Amérique du Nord. Ne pas utiliser ce brut risque fortement de compromettre la position concurrentielle de l'industrie du raffinage à Lévis et exposerait les activités de raffinage et de pétrochimie restantes au Québec à des risques inutiles.

Le scénario qui prévaut à l'heure actuelle ne tient plus la route pour assurer le maintien à long terme des raffineries québécoises. La saignée dans l'industrie québécoise du raffinage et de la pétrochimie a été très dure dans les dernières années, et on doit protéger ce qu'il nous reste actuellement en permettant le renversement de la ligne 9B. Il s'agit d'une solution relativement simple et tout à fait logique.

Il nous reste encore quelques minutes. Je cède donc la parole à monsieur Daniel Beaudoin de la compagnie Descimco, spécialisée dans la tuyauterie industrielle, afin qu'il vous exprime encore plus concrètement les impacts de la présence des raffineries au Québec pour son entreprise.

Merci de votre écoute, Mme la Présidente et tous les membres de la commission parlementaire.

La Présidente (Mme Bouillé) : ...en 1 min 30 s.

M. Beaudoin (Daniel) : Bonjour, Mme la Présidente. Daniel Beaudoin. Je suis le président de Descimco. On est entrepreneurs en mécanique et tuyauterie industrielle. Chez nous, Valero est un client et un partenaire important dans notre entreprise. Ça représente 50 % de notre chiffre d'affaires. On est un entrepreneur, en passant, aussi de la région de Québec. On a environ 150 travailleurs, en moyenne. On a eu un «peak» de 250 hommes ce printemps. C'est un client vraiment important. Et je suis aussi président de Qualifab, qui est un atelier de fabrication à Lévis, qui fait la préfabrication de tuyauterie pour Valero aussi. Ça fait que, pour nous, ce projet était d'une importance capitale, considérant que c'est... il nous reste deux industries importantes dans l'industrie lourd au Québec, c'est les deux raffineries de pétrole que nous avons.

Vous savez tous que, dans le passé, les pâtes et papiers étaient un secteur florissant qui aujourd'hui bat de l'aile, le secteur des mines qui a aussi piqué beaucoup du nez dans les derniers temps, les alumineries qui ont du mal aussi, actuellement, que je peux vous assurer que, pour nous, c'est extrêmement important d'assurer la survie de nos deux raffineries au Québec pour les emplois de la construction industrielle. Merci.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. Vous êtes tout à fait dans votre temps. Bravo. Et nous allons maintenant procéder à la période d'échange avec les parlementaires. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Bonsoir, messieurs, bienvenue à l'Assemblée nationale.

J'attire votre attention sur l'avant-dernier paragraphe de votre présentation. Je vous cite : «Le scénario qui prévaut à l'heure actuelle ne tient plus la route pour assurer le maintien à long terme des raffineries québécoises.» Pourquoi?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

Une voix : Je laisse la parole à mon directeur général pour celle-ci.

M. Gaudreault (Jérôme) : Oui, merci, Mme la Présidente. En fait, c'est surtout dans un contexte de compétitivité dans un secteur qui est extrêmement compétitif. Quand on parle des coûts d'acquisition de la matière première, par exemple, pour Valero, où on parle de plusieurs milliards de dollars par année, si votre coût d'acquisition par rapport aux compétiteurs est de 10 % à 15 % plus élevé, bien c'est sûr et certain que ça vous place dans une position précaire. Donc, dans ce cadre-là, quand les investisseurs... quand les propriétaires de ces équipements-là décident de favoriser un secteur par rapport à un autre, bien, à ce moment-là, les risques sont peut-être plus importants qu'ils se retrouvent ailleurs... que l'argent se retrouve ailleurs, parce que les coûts d'acquisition de la matière première vont être beaucoup moins élevés et faire en sorte que la rentabilité va être plus intéressante.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Donc, je comprends que, selon vous, le prix plus bas du pétrole qui provient de l'Ouest canadien va être quelque chose qui va durer. En fait, c'est, selon vous, un avantage comparatif à long terme.

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de la Chambre de commerce de Lévis.

M. Gaudreault (Jérôme) : En fait, Mme la Présidente, c'est sûr et certain que les prix fluctuent, et on peut difficilement prédire quels vont être les coûts de la matière première dans le futur. Par contre, ce qu'on sait, c'est que les acheteurs de la matière première, c'est-à-dire les raffineurs, vont s'entendre avec les producteurs sur plusieurs années pour geler le prix de façon à ce qu'au moins ils puissent bénéficier de cet avantage-là pendant quelques années. C'est sûr et certain qu'il y a plusieurs facteurs autres que le coût de la matière première qui viennent influencer dans les prix puis dans le coût du marché, mais c'est sûr qu'au moins pour quelques années ça peut garantir et donner un avantage intéressant.

M. Jolicoeur (Jérôme) : Si je peux compléter, Mme la Présidente, c'est aussi qu'il y a un développement fort présentement dans le Midwest américain et au niveau de l'Ouest canadien, au niveau du développement, au niveau de l'exploitation. Donc, beaucoup de ressources qu'on n'avait pas accès avant, compte tenu des améliorations technologiques, qui maintenant sont disponibles.

Donc, on s'attend, comme on dit dans notre mémoire... puis ce n'est pas nous qui le disions, là, c'est l'Agence internationale de l'énergie qui dit que les Américains deviendront indépendants au niveau du pétrole, donc de la production pétrole prochainement, ce qui fait en sorte qu'on s'attend à ce qu'effectivement le produit qui provient de l'Ouest demeure à bas prix, là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Je vais passer la parole au député de Sanguinet, je crois.

La Présidente (Mme Bouillé) : Oui. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Très rapidement, ensuite je vais laisser la parole à mes collègues. J'ai entendu votre petit mot d'une minute pour nous convaincre, là, que vous étiez un peu dépendants de cette entreprise-là, avec raison. Est-ce que vous avez un peu de pétrochimie chez vous, autour de cette raffinerie-là? C'est une question comme ça que je me pose, là, vu que vous êtes de la chambre...

Une voix :

M. Therrien : Vous n'en avez pas? O.K., ce n'est pas grave, là. C'est juste que je voulais me renseigner, là, si ça avait permis l'émergence, là, de la pétrochimie. O.K.

Deuxième chose, vous avez l'air au courant, là, des coûts de production. En tout cas, vous êtes...je ne sais pas, j'en ai manqué quelques-uns cet après-midi, mais, depuis que je suis ici, là, vous êtes pas mal les plus précis dans les coûts de production pour nous proposer, là... pour nous décortiquer ça, là. Il y a des usines qui ont fermé dans l'Est du Canada, là, il y en a trois, là, dont deux qui ont fermé puis une qui est sur la voie de fermer, là. Est-ce que vous avez entendu parler, chez votre raffineur, qu'il y avait des problèmes dans ce genre-là qui menaçaient de fermeture? Est-ce qu'ils ont déjà évoqué la menace de fermeture? Ça, ça serait me première question. Puis ma seconde question, c'est : Est-ce que l'utilisation du pétrole de l'Ouest du Canada avec des prix... comme vous avez expliqué, là, et c'est un peu inférieur au brent, est-ce que ça serait suffisant pour sécuriser cette entreprise-là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la chambre de commerce.

M. Gaudreault (Jérôme) : ...difficilement répondre au nom du raffineur, qui est Valero. En fait, et puis je tiens à être précis, ils n'ont jamais mentionné ou évoqué une quelconque menace de fermeture de la raffinerie. On ne veut surtout pas être alarmistes. Mais, évidemment, comme je disais tout à l'heure, tout est une question de compétition et de coûts. Donc, si la raffinerie devient moins rentable parce qu'elle n'a pas accès à un certain marché auquel ses compétiteurs ont accès, bien là, à ce moment-là, ça devient dangereux quand vient le temps de moderniser la raffinerie. Peut-être que l'argent va être envoyé, à ce moment-là, dans les endroits où il va être, comme je disais tout à l'heure, plus rentable.

Donc, point de vue... il ne faut pas être alarmiste, mais, évidemment, d'avoir accès au marché canadien permettrait de sécuriser à plus long terme l'avenir de la raffinerie sur le territoire de la ville de Lévis.

Pour répondre aux aspects de la pétrochimie, il n'y a pas de filière pétrochimique à Lévis pour des décisions... pour des raisons, là, que je peux difficilement expliquer. Mais je pense que le fait qu'il y ait une seule raffinerie et non pas plusieurs, comme il y avait à Montréal, fait en sorte que c'est peut-être moins intéressant pour des entreprises de la filière de venir s'installer sur le territoire de la ville de Lévis, mais c'est une impression personnelle. Par contre, ça a un impact très important au point de vue des entreprises de services, tout ce qui est dans le domaine de la construction, l'ingénierie, des services, les équipements, la manutention. Évidemment, il y a autour... je pense, c'est entre 200 et 250 entreprises fournisseurs sur le site de la raffinerie Jean-Gaulin à Lévis. Donc, ça a un impact quand même extrêmement important.

• (19 h 50) •

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Je veux juste vous dire que je n'en doutais pas, c'est juste une question que je me posais comme ça. Parce que, vu qu'il y a seulement deux raffineries, je me demandais s'ils n'avaient pas eu l'occasion, de certaines entreprises, d'en profiter, là. Mais je laisserais la parole à mon collègue.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Je vous ai entendu prononcer les mots que, sans accès au pétrole qui serait fourni par le pipeline d'Enbridge, ça mettrait la situation de Valero ou de la filière chez vous, là, dans un statut précaire ou dans une situation précaire. Je ne suis pas un grand économiste comme mon collègue de Sanguinet, mais, vous savez, dans mes cours, on m'a présenté les réflexions d'un certain Michael Porter, qui, lui, est vraiment un grand économiste américain mondial. Par contre, par contre, dans son modèle d'analyse de la compétitivité, il y avait cinq variables. Un, c'est les fournisseurs. Puis, en fait, pour une entreprise, on essaie de voir s'il y a de nombreux fournisseurs ou un fournisseur seulement pour vérifier si vraiment, là, ça serait vraiment… comme vous l'avez dit, vous parlez d'un statut précaire. Êtes-vous capables de me définir un peu l'impact que peut avoir l'arrivée de ce nouveau joueur sur le marché pour votre secteur, c'est-à-dire la raffinerie de Lévis, et tout le secteur d'activité chez vous?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Jolicoeur (Jérôme) : En fait, c'est tout simplement une question d'accessibilité à la ressource. Évidemment, l'économie, comme vous le mentionnez — je parle à Mme la Présidente, évidemment — plus on est capables de multiplier les sources d'approvisionnement, plus on est compétitifs. C'est exactement ce qui se passe ici.

Pendant un certain temps, la raffinerie Jean-Gaulin était extrêmement compétitive parce que le prix du pétrole provenant de l'Atlantique et de l'Afrique était un bon prix. Présentement, on voit un revirement de la situation. Le prix du pétrole est beaucoup plus bas dans l'Ouest canadien qu'il l'est présentement en approvisionnement de l'Atlantique, ce qui fait en sorte que, bien qu'il y a un certain temps on était très compétitifs à Lévis, présentement on voit l'avenir s'approcher à grands pas et on s'attend à ce que les raffineries de l'Ouest deviennent plus compétitives que celles de Lévis par manque d'approvisionnement du pétrole de l'Ouest.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Est-ce que le pipeline dont il est question ici, en commission parlementaire, deviendrait un apport important significatif dans le marché ou ce n'est qu'un petit fournisseur avec une contribution marginale?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Gaudreault (Jérôme) : De mémoire... il faudrait que je revérifie les chiffres, mais, oui, ça devient un contributeur extrêmement important. Il réduirait… là, j'y vais de mémoire, mais il réduirait les exportations de pétrole étranger de 80 %, si je ne me trompe pas. Donc, à ce moment-là, ça veut dire que la contrepartie proviendrait du pétrole de l'Ouest canadien. Donc, effectivement, c'est déjà… ça a un très grand écart. Et il y a déjà du pétrole canadien qui est traité à Lévis, on en reçoit quelques dizaines de milliers de barils de pétrole par jour par train. Malgré les coûts, que ça coûte beaucoup plus cher de faire voyager par train, c'est quand même très avantageux pour la raffinerie de s'approvisionner en pétrole canadien à l'heure actuelle. Donc, par pipeline viendrait évidemment augmenter significativement la quantité de produit qui viendrait ici, à Lévis.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Maintenant, peut-être, là, quelques questions en rafale. Tout d'abord, je voudrais vous demander : Pour vous, quelle est l'importance, là, de venir participer à cette commission parlementaire là? Qu'est-ce que ça signifie pour vous?

M. Jolicoeur (Jérôme) : Bien, pour nous, honnêtement, c'est un appui à la position de Valero dans le dossier et aussi d'Enbridge indirectement, mais certainement Valero. C'est un citoyen corporatif extraordinaire. Nous, dans le secteur, à Lévis, dans la région de Chaudière-Appalaches, c'est un citoyen qui participe à beaucoup d'activités, tu sais, a à coeur la responsabilité sociale des entreprises et aussi le développement durable dans la mesure où c'est possible pour lui. C'est 1 500 emplois indirects, 500 emplois à la raffinerie directement puis c'est des emplois très, très bien rémunérés, qualité de vie extraordinaire. Donc, pour nous, c'est fondamental.

M. Gaudreault (Jérôme) : Ça fait vivre plusieurs entreprises, comme je disais tout à l'heure. Donc, pour nous, c'est important de témoigner au gouvernement l'importance que cette industrie-là peut avoir sur l'économie lévisienne.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Maintenant, pour vous, quel doit être le rôle ou l'impact, l'importance que le gouvernement et l'Assemblée nationale du Québec peuvent avoir dans tout le traitement de la filière pétrolière au Québec?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de la Chambre de commerce de Lévis.

M. Gaudreault (Jérôme) : C'est certain que le gouvernement doit s'assurer du respect des lois et des normes en vigueur sur son territoire. Donc, c'est sûr et certain que le gouvernement a ce rôle-là, s'assurer que le projet va avoir un impact social, économique et environnemental qui est acceptable. Donc, je pense que, par rapport au… le rôle du gouvernement, c'est celui-là, mais aussi accompagner et soutenir le développement économique de son territoire.

M. Jolicoeur (Jérôme) :

La Présidente (Mme Bouillé) : Oui. Allez-y, monsieur...

M. Jolicoeur (Jérôme) : Pardon, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bouillé) : Non, non. Allez-y.

M. Jolicoeur (Jérôme) : C'est tout simplement : lorsqu'il y a un projet économique comme celui-là, qu'il y a une importance économique, que ça soit à Suncor à Montréal ou que ce soit à Valero à Québec, permettre la capacité des approvisionnements, ça joue sur le développement économique. Puis je pense que le gouvernement a son mot à dire là-dedans en appuyant les projets à valeur économique ajoutée comme celui-là. Je pense que c'est une bonne nouvelle d'avoir un appui du gouvernement.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. Monsieur le…

M. Trudel : Oui, rapidement, juste conclure.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Saint-Maurice, M. le député de Roberval avait demandé la parole. M. le député de Roberval, allez-y.

M. Trottier : Merci, Mme la Présidente. Moi, c'est une question pour M. Beaudoin. Vous êtes spécialisé dans la tuyauterie. Vous savez qu'une des questions qui interpelle beaucoup les gens, c'est la question de la sécurité. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que vous pensez de… c'est sûr que c'est des gros tuyaux, à ce moment-là, ce n'est plus le même genre de tuyau, mais est-ce qu'on peut penser qu'on peut avoir confiance dans la tuyauterie qui a 38 ans d'un tel projet?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs les représentants de la chambre de commerce.

M. Jolicoeur (Jérôme) : Je laisserais la parole à M. Beaudoin, Mme la Présidente.

M. Beaudoin (Daniel) : Mme la Présidente, je crois qu'il avait adressé la question à moi. Je ne suis pas un spécialiste en pipeline, parce que le pipeline est une spécialité en soi, mais j'ai quand même certaines connaissances, effectivement, en tuyauterie, et tous les essais maintenant non destructifs pour vérifier la qualité et la solidité de la tuyauterie, il y a de nombreuses firmes spécialisées là-dedans qui ont les équipements et les connaissances pour vraiment s'assurer que la tuyauterie est en bon état. Moi, je suis en pleine confiance à ce niveau-là, oui.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Roberval.

M. Trottier : C'est tout.

La Présidente (Mme Bouillé) : C'est beau. M. le député de Saint-Maurice.

M. Trudel : Bon, je vais tenter de retrouver mon inspiration. C'est ça, mais ce que je voulais vous dire…

La Présidente (Mme Bouillé) : Désolée, M. le député de Saint-Maurice, de vous avoir… Allez-y. Êtes-vous désarmé?

M. Trudel : Ah, non, non! Je pensais que vous me retiriez la parole. Je m'excuse.

La Présidente (Mme Bouillé) : Allez-y, allez-y.

M. Trudel : Il reste combien de temps environ?

La Présidente (Mme Bouillé) : Bien là, le temps roule, là... Trois minutes.

M. Trudel : O.K. C'est ça. Ce que je veux donc savoir, à partir des échanges qu'on avait déjà, là... On parlait du rôle que le gouvernement du Québec doit jouer, doit assumer là-dedans. Maintenant, pour ce qui est… Parce que c'est un critère qui est quand même important, l'acceptabilité sociale. Comment le gouvernement, selon vous, peut devenir un leader pour s'assurer de rassembler les partenaires pour, d'une part, s'assurer de l'adhésion de la population, pas juste de la communauté des affaires, mais l'ensemble de la population à un projet tel?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Jolicoeur (Jérôme) : Je peux commencer, Mme la Présidente. Je pense qu'en insistant sur les faibles risques d'un projet comme celui-là, compte tenu que le pipeline existe déjà, premièrement, que la compagnie — je parle d'Enbridge — avait le fardeau de la preuve de vous démontrer que le projet était sécuritaire en aval et en amont, c'est-à-dire que, s'il arrive un incident aussi, qu'ils doivent... qu'ils ont le fardeau de corriger les erreurs. Je pense que ça a été fait.

Le gouvernement aussi peut insister sur le fait que, côté développement économique, c'est un projet qui est porteur pour l'avenir. C'est juste une inversion de flux aussi, hein? Donc, je pense qu'Enbridge... la compagnie a réussi à vous démontrer que c'est un projet qui était sécuritaire, qui était logique. Maintenant c'est au gouvernement de l'appuyer, à notre avis.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Gaudreault… M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Tantôt, vous avez parlé, si je résume, coût de transport plus faible par pipeline; le pétrole de l'Ouest est un meilleur pétrole que le brent puis plus léger; vous avez parlé de meilleur prix à cause d'une demande… d'une offre qui est plus élevée.

Moi, je vous demanderais votre opinion là-dessus : Si on arrive avec une structure de pipeline qui permet justement d'évacuer ce pétrole qui est enclavé, est-ce qu'il n'y a pas, par rapport à... mettons vers l'ouest, vers le sud, vers l'est, est-ce qu'il n'y a pas une crainte, d'après vous, que la demande va, à un moment donné, combler l'excès d'offre puis commencer à monter les prix et perdre cet avantage concurrentiel là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs, en une minute.

• (20 heures) •

M. Jolicoeur (Jérôme) : Bonne question. Je pense qu'il y a des autorités gouvernementales qui sont aussi présentes pour gérer de tels types… vous me corrigerez, MM. et Mme les participants à la commission parlementaire, mais il y a de la compétition dans tous les secteurs, dont celui-là, dans les pipelines.

Évidemment, il y a plusieurs façons de transporter le pétrole aussi. Si le pétrole transporté par pipeline n'est plus rentable, même si la demande est très élevée, comme vous le dites, il y aura toujours des alternatives de transport. C'est là-dessus qu'honnêtement nous, comme chambre de commerce, au niveau de la compétition, on fait confiance quand même au marché, que ce soit dans n'importe quel secteur, dont celui du transport d'énergie.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente. Je vais souhaiter la bienvenue à M. Jolicoeur, M. Gaudreault, M. Beaudoin. Merci d'être là, et je veux vous féliciter comme ancien président de la Chambre de commerce de Québec, votre partenaire depuis des années. Vous avez bien fait ça, et je suis fier de vous aujourd'hui, de votre présentation. Et je sens que vous défendez l'intérêt des gens d'affaires à Lévis puis je pense que c'est important. Et vous avez raison parce que Valero, à Lévis, c'est très important. On va l'appeler Ultramar parce que nous, on la connaît comme Ultramar. Alors, c'est très important, son rôle sur l'économie.

En passant, mon opinion personnelle, là, c'est… On l'a entendu souvent, là, les gens pensent que le prix est plus bas dans l'Ouest, puis le prix est plus haut dans l'Est; finalement, le prix va baisser. Il faut être prudents là-dedans, je pense. C'est une opinion personnelle. Je ne suis pas un économiste, ça vaut ce que ça vaut, mais il ne faut pas trop monter d'espoir que, demain matin, le prix du pétrole va baisser parce que, la vraie vie, ça n'arrive pas toujours à la baisse. Et ce n'est pas comme… Enfin.

Mais, le point, est-ce que… Parce qu'Ultramar sont venus présenter leur mémoire puis ils ont parlé beaucoup plus de Montréal, l'importance… et on a parlé de Québec aussi. Mais dites-moi c'est quoi le lien direct avec le pipeline puis Ultramar à Lévis.

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la chambre de commerce.

M. Gaudreault (Jérôme) : Bien, savoir que la raffinerie Jean-Gaulin raffine le pétrole, donc, à ce moment-là, le pétrole serait transporté par pipeline jusqu'à Montréal, jusqu'au port de transbordement à cet endroit-là, puis, ensuite, par bateau vers le quai d'Ultramar à Saint-Romuald. On parle de trois bateaux par semaine, donc un bateau aux deux jours environ. Donc, ça va demander plusieurs centaines de millions d'investissements pour Valero, plus à Montréal qu'à Lévis. Honnêtement, il n'y aura pas… je pense, c'est 30 millions à Lévis qui vont être investis pour de l'équipement, plus pour la manutention, la logistique. Il n'y aura pas aucun investissement qui va se faire relativement au procédé de raffinage. Donc, c'est comme ça que le lien va se faire. Puis, ensuite, ça va retourner vers Montréal par le Pipeline Saint-Laurent, qui a été mis en opération l'année dernière.

<1273 M. Hamad : Je n'ai pas compris ça ce matin.

>155 LaPrésidente(Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Oui, Mme la Présidente. Je n'ai pas compris ça ce matin, qu'il y avait eu des travaux à Lévis, mais là je suis content de savoir qu'il va y avoir des… On a compris qu'il va y avoir deux Panamax qui vont être achetés par Valero. Évidemment, ça prend de l'équipage, ça prend quelques investissements, mais je ne pensais pas qu'il y a 30 millions à Lévis.

M. Gaudreault (Jérôme) : C'est une petite partie de l'ensemble des investissements, là. Je me trompe peut-être sur le chiffre, mais…

M. Hamad : Oui, mais, quand même, 30 millions, c'est beaucoup d'argent. C'est très bien.

Vous avez dit… M. Beaudoin, vous avez parlé que ça ralentit un peu au niveau des alumineries ces temps-ci.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Beaudoin.

M. Beaudoin (Daniel) : Oui. Oui, bonjour, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bouillé) : Bonjour.

M. Beaudoin (Daniel) : Oui, effectivement, au niveau des alumineries actuellement, il n'y aucun projet. Il y avait des projets d'investissement, il y a deux ans, qui devaient démarrer cette année, et tous les projets d'aluminerie… La première était Baie-Comeau; la seconde, Alouette à Sept-Îles; et il y avait des projets mêmes d'annoncés, ici, à Deschambault, dans la région de Québec. Et, dans la dernière année, avec l'effondrement des métaux, incluant l'aluminium, tous ces projets-là ont arrêté, comme tous les projets du Plan Nord aussi ont arrêté.

M. Hamad : Le…

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur…

M. Hamad : Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert, je sollicite à nouveau votre habituelle collaboration pour le bon déroulement de nos travaux, donc vous allez attendre que je vous donne la parole. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci. Donc, ce qu'on a entendu récemment, la menace d'Alcoa de fermer, alors c'est une mauvaise nouvelle pour vous, là, et pour la région. Puisque Deschambault est dans la région, c'est important pour vous.

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de la Chambre de commerce de Lévis.

M. Jolicoeur (Jérôme) : On aurait… Je donne la parole à M. Beaudoin.

M. Hamad : Oui, oui, c'est M. Beaudoin. C'est lui…

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert…

M. Beaudoin (Daniel) : Bonjour. Oui, Mme la Présidente. Effectivement, à chaque fois qu'on entend des gens de grosses industries au Québec qui font des menaces comme ça, ce n'est vraiment pas rassurant. Raison de plus pour sécuriser nos deux raffineries de pétrole parce qu'actuellement les deux raffineries au Québec, c'est vraiment le plus gros moteur économique au niveau construction industrielle pour les travailleurs de la construction. Le fait de sécuriser ces deux raffineries-là au niveau approvisionnement, ça va de soi, pour moi, pour assurer cette industrie à long terme, pour venir compenser, effectivement, d'autres industries, actuellement, qui battent de l'aile au Québec.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Bien, ça sera une bonne chose, que le gouvernement règle les tarifs rapidement avec Alcoa, parce que ça donne au moins une sécurité quelque part.

Une voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : S'il vous plaît! Non, non! Non, non! Il n'y a pas de discussion entre membres de la commission.

M. le député de Louis-Hébert, vous avez la parole.

M. Hamad : Oui, j'ai... Donc, ce que je disais : Ça serait bon que le gouvernement règle rapidement avec Alcoa pour vous donner une sécurité quand même.

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Beaudoin (Daniel) : Moi, ça sort de mon domaine d'expertise, cette question-là. Mais ce qui est important, c'est que le gouvernement du Québec favorise l'économie du Québec et l'industriel au Québec, peu importe les domaines, autant au niveau des mines, que de l'aluminerie, que du pétrole. Dans tous les secteurs d'activité, c'est important que le gouvernement supporte notre économie du Québec, parce que notre richesse, c'est l'économie, c'est l'industrie.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Très bien. Merci. Combien d'emplois vont être créés, selon vous, à Lévis avec le projet d'Enbridge?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de la Chambre de commerce de Lévis.

M. Gaudreault (Jérôme) : À part pour les travaux de construction, je n'ai pas le chiffre exact. Il y aura quelques emplois pendant la construction, mais je ne pense pas qu'il y ait création d'emplois permanents à cause de ça. En fait, c'est que le produit, qu'il vienne d'un côté ou de l'autre, il va continuer à se faire raffiner, là.

M. Jolicoeur (Jérôme) : C'est ça. Dans le fond, c'est un contrat d'approvisionnement, hein? Ce n'est pas du développement nécessairement, ce n'est pas de l'investissement. C'est bien une source d'approvisionnement supplémentaire qui se rajoute.

La Présidente (Mme Bouillé) : O.K. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : En terminant, parce qu'il ne reste pas beaucoup de temps… Mon collègue député de Sanguinet a posé une bonne question : Pourquoi qu'on n'a pas développé à Lévis d'autres autour de la raffinerie, comme on a fait à Montréal, dans l'est de Montréal? Avez-vous une idée pourquoi?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Gaudreault (Jérôme) : En fait, comme je disais tout à l'heure, c'est une interprétation personnelle, mais le fait qu'il y ait moins de... en fait, que la raffinerie soit seule sur le territoire, comparativement à l'est de Montréal, où il y a un tissu industriel beaucoup plus important, fait peut-être en sorte que l'industrie pétrochimique est allée se concentré a Montréal plutôt qu'à Lévis.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Comment ça va à MIL Davie?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Gaudreault (Jérôme) : Ça va assez bien présentement, on est assez contents. On a pu, justement, participer au démarrage du lancement du premier navire SEACON, qui a été lancé il y a quelques semaines. Alors, c'est des très, très bonnes nouvelles, et l'activité est revenue sur le chantier, et puis ça paraît.

M. Jolicoeur (Jérôme) : On pense que la compagnie a une bonne attitude... Pour eux, présentement... Ils sont en dehors des projecteurs, ils sont un petit peu dans l'ombre, ils attendent d'avoir du rendement avant de sortir publiquement. Je pense que les derniers investissements, là, sont porteurs, puis ça va bien aller.

M. Hamad : ...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert...

M. Hamad : Vous n'avez pas invité...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert, vous avez la parole.

M. Hamad : Bien, je répondrai à la ministre, là, qui me posait la...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert, il n'y a pas d'échange. On a des invités qui s'attendent à pouvoir échanger avec vous. Donc, procédez, s'il vous plaît.

M. Hamad : Est-ce qu'il y a des projets d'expansion, Ultramar?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Gaudreault (Jérôme) : Je ne crois pas qu'il y ait des... Je sais qu'il y a des projets qui ont été mis un peu sur la glace, là, en 2008, là, pour augmenter la capacité de la raffinerie. Mais il y a eu déjà 2 milliards d'investissements dans les 10 dernières années; plus récemment, le «shutdown», en bon français, qui s'est fait l'année dernière sur la raffinerie. Il y en a aura un deuxième au printemps, un plus petit. Donc, ça a été plus une mise à jour de l'équipement pour assurer une meilleure performance.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Le port méthanier à Lévis, où… je me souviens, si ma mémoire est bonne, la chambre, elle a bien accueilli ce projet-là. Il n'y a pas longtemps, le gouvernement a tout mis... a cancellé tout ça. Donc, vous avez vécu une période d'acceptabilité des citoyens, acceptabilité sociale des projets, surtout un projet très majeur qui était à Lévis. C'est quoi, votre message, pour les groupes qui ne croient pas au projet?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de la Chambre de commerce de Lévis.

• (20 h 10) •

M. Gaudreault (Jérôme) : En fait, la difficulté, souvent, dans ces dossiers-là — on prend le cas Rabaska, c'en est un — il y a souvent un antagoniste puis une opposition des points de vue sur la nature même du projet.

Notre point de vue par rapport à l'acceptabilité sociale fait en sorte qu'il n'y a pas... Il faut travailler en complémentarité, je pense que c'est important. Le rôle des opposants est quand même important, parce qu'ils viennent forcer les promoteurs des projets à faire plus blanc que blanc et de faire en sorte que leurs projets soient les plus acceptables, socialement, possible. On parle de protection de l'environnement, on parle de retombées dans la communauté. Donc, c'est sûr et certain qu'il faut travailler en complémentarité. Donc, il faut faire valoir aussi qu'il y a des… La question de la protection de l'environnement est très importante, mais il y a aussi des avantages économiques très importants reliés à la mise en… la réalisation de ces projets-là. Donc, c'est sûr et certain qu'il ne faut pas travailler en opposition, mais, au contraire, travailler main dans la main pour faire en sorte que les projets soient acceptables.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Mon collègue a suggéré l'idée d'avoir une unité de vigilance où il y a… les ministères au gouvernement travaillent avec le fédéral pour s'assurer… transparence ou transmettre l'information, échanger avec les citoyens. Comment vous trouvez ça?

La Présidente (Mme Bouillé) : Les représentants de la chambre de commerce.

M. Gaudreault (Jérôme) : Il existe déjà des processus — le BAPE en est un — donc où on récolte l'information puis on s'assure que tout peut être dit puis tout peut être disponible comme information. Il y a aussi des initiatives qui sont d'ordre plus privé. Donc, je prends exemple de Valero, où il y a un comité de relation avec les milieux sur lequel la chambre de commerce siège, mais les citoyens sont également présents, donc, qui fait en sorte qu'ils viennent aviser la compagnie relativement aux impacts qu'elles peuvent avoir dans la communauté. Vous avez entendu la fédération des chambres, probablement, vous parler de l'agence sur le développement économique, dont elle fait la promotion depuis quelques années. Donc, effectivement, ce qui est important, c'est qu'on puisse partager l'information, que les publics soient là pour ça.

M. Hamad : Comment ça se passe…

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Comment ça se passe, votre comité de vigilance, c'est quoi? Il y a-tu rencontre avec les citoyens? La compagnie présente ses projets futurs, ou l'état de la situation, ou les citoyens amènent des projets?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Gaudreault (Jérôme) : C'est exactement ça, en fait. Donc, c'est vraiment un dialogue qui se fait entre la compagnie et l'ensemble de la communauté. Donc, il y a autant les représentants du milieu des affaires comme nous, il y a les représentants du secteur des transports, il y a des citoyens, des résidents du secteur qui sont là. Donc, que ce soit d'un côté… quand Valero arrive avec un projet, bien, à ce moment-là, va aller tester, va aller chercher le pouls de son comité, et vice versa. S'il y a des préoccupations de la part des citoyens, bien, à ce moment-là, elles peuvent être amenées par cette entremise-là vers la compagnie, donc ce qui favorise le dialogue et qui améliore la qualité des projets, au bout du compte.

Donc, tout ce qu'on parle… Par exemple — je vais vous donner un exemple très concret — tout ce qui est le secteur du port, qui est situé, là, sur le bord du fleuve, il y a des citernes qui sont là, donc le comité a demandé à ce qu'il y ait de l'aménagement qui soit fait pour assurer qu'il n'y ait pas trop d'impact visuel, puis que ça soit quand même convivial comme secteur. Donc, ça, c'est le genre d'initiative qui fait en sorte que la compagnie peut améliorer ses façons de faire.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Donc, c'est un bon citoyen. Si vous avez une recommandation à faire à Enbridge, quelle sera votre recommandation?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de la Chambre de commerce de Lévis.

M. Jolicoeur (Jérôme) : Moi, je dirais de s'assurer que les représentations qu'ils ont faites sont véritables, ce qu'on croit qui est vrai aussi. Parce que nous autres, on maintient que le projet doit être sécuritaire, ce qu'on pense qu'il est, puis de continuer dans cette veine-là. Enbridge, bien qu'ils ont des buts lucratifs, en bout de ligne, je pense qu'on peut quand même prendre pour acquis que la situation, la sécurité des citoyens canadiens, c'est quand même une de leurs priorités. Des fois, on tend à oublier ça, on pense qu'une compagnie c'est une entité, une personne morale qui n'existe pas vraiment, mais il y a des gens derrière ça, puis je pense qu'eux ils ont à coeur aussi le projet puis la sécurité des citoyens.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Alors, M. Beaudoin, vous êtes dans le domaine de construction des tuyaux puis mécanique industrielle. En fait, la technique dans les tuyaux, un pipeline, ce n'est pas compliqué, là. Il y a les soudures, il y a des connexions, puis on mesure la pression dans le tuyau, grosso modo, là. Et aujourd'hui, pensez-vous, les techniques de repérage, de contrôle, de surveillance se sont nettement améliorées depuis 10 ans?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Beaudoin.

M. Beaudoin (Daniel) : Mme la Présidente, définitivement, la technologie se renforcit toujours dans les moyens d'inspection. Et effectivement les moyens qu'on a aujourd'hui pour vérifier de la tuyauterie sont nettement supérieurs à ce qui existait, là, 20 ou 30 ans, ça, c'est définitif.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Donc, je dois comprendre, par votre expérience, que la construction d'aujourd'hui, elle va être nettement sécuritaire à ce qu'on avait il y a 10 ans, ou cinq ans, ou comme, par exemple, le cas des tuyaux qui étaient à Michigan, ou ce qu'on a vécu comme…

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Beaudoin (Daniel) : Mme la Présidente, elle a toujours été sécuritaire, mais elle l'est encore davantage aujourd'hui.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Aujourd'hui, avec l'automatisation puis l'information, le contrôle, on peut contrôler ça à distance si comme on était sur place, puis on peut avoir un suivi très détaillé, et on peut réagir rapidement en cas de problème?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs.

M. Beaudoin (Daniel) : Mme la Présidente, oui, effectivement, je le crois, n'étant pas quand même un spécialiste dans le domaine. Mais, oui, effectivement, les technologies maintenant sont beaucoup plus performantes qu'elles ne l'étaient dans le passé.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Donc, quand la compagnie Enbridge nous disait qu'elle va avoir un système de contrôle et d'intégrité de classe mondiale, je pense que… On les croit?

M. Beaudoin (Daniel) : Moi, j'y crois, Mme la Présidente. Oui, moi, j'y crois personnellement.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci, M. Beaudoin.

M. Hamad : Alors donc, vous croyez que le système...

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert, 12 secondes.

M. Hamad : Ça va vite, hein? Alors donc, vous croyez que le système d'Enbridge va être un système sécuritaire? En tout cas, les moyens vont être là pour s'assurer la sécurité sur tout et l'intégrité du système?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Bouillé) : Je suis désolée. Vous pourrez peut-être compléter dans votre prochaine réponse. C'est le tour de parole pour le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Merci, Mme la Présidente. Bien, bonsoir à vous trois, très heureux de vous rencontrer. Vous ne le savez peut-être pas, je suis député de Nicolet-Bécancour. On a assisté à la fermeture de la centrale nucléaire chez nous, l'annonce du gouvernement qui a entraîné la perte de 850 emplois, 150 ingénieurs, tout ce qui a entraîné au niveau des sous-contractants, au niveau des commerces. Moi, j'aimerais ça que vous nous disiez : Un partenaire comme la raffinerie chez vous, qu'est-ce que ça apporte au niveau économique, au niveau des sous-contractants, au niveau de tout l'aspect commercial, hôtellerie, etc.? C'est quoi, l'impact économique d'un gros joueur comme ça chez vous?

La Présidente (Mme Bouillé) : Messieurs de la Chambre de commerce de Lévis.

M. Gaudreault (Jérôme) : Je vais me permettre un début de réponse. Peut-être que M. Beaudoin pourra compléter concrètement pour son entreprise. Évidemment, on parle environ entre 200 et 250 fournisseurs d'entreprises qui ont des contrats avec la raffinerie Jean-Gaulin, donc qui interviennent auprès de la compagnie. On parle de 1 500 emplois indirects plus 700 emplois directs, donc, sur la raffinerie.

Pour ce qui est des emplois de la raffinerie, on parle de salaires moyens d'environ 100 000 $. Donc, ces gens-là habitent sur le territoire de la ville de Lévis, consomment sur le territoire de la ville de Lévis, les enfants vont à l'école, les familles sont dans la communauté. Donc, à ce moment-là, ça a un impact direct sur toute l'économie locale, ça, c'est sûr et certain. Les compagnies qui font affaire sont dans le domaine de la construction industrielle, comme… M. Beaudoin, ça va être dans l'électricité, l'ingénierie, la construction, la sécurité dans les vêtements, dans l'équipement, dans la signalisation, les architectes. Donc, il y a vraiment beaucoup de secteurs économiques qui dépendent de la présence de la raffinerie. Donc, c'est sûr et certain que l'impact est majeur pour l'économie locale.

M. Jolicoeur (Jérôme) : …foncière des immobilisations qu'il y a ici, là, donc pour la ville de Lévis, là, c'est majeur. Donc, tout ce qu'il y a de parcs, écoles, etc., ça a un impact directement sur ces institutions-là, donc. Puis, en bout de ligne, c'est le citoyen qui en bénéficie.

Complétez, peut-être, M. Beaudoin, sur...

M. Beaudoin (Daniel) : Oui. Mme la Présidente, bien, plus concrètement, effectivement, nous, étant un fournisseur, on a aussi beaucoup de fournisseurs attachés à notre entreprise pour fournir à nos travailleurs de la construction... Bien, effectivement, ça prend des vêtements, ça prend des outils, ça prend des équipements de construction, des grues, des nacelles. Il y a une panoplie effectivement d'indirects même à l'intérieur de notre industrie.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Bien, vous comprenez l'impact que ça peut avoir, la fermeture d'une centrale comme on a eu chez nous. Si on avait un parallèle comme ça chez vous, ça serait assez catastrophique, là?

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. Oups! Je pense que le député de Nicolet-Bécancour attend une réponse de votre part.

M. Martel : Bien, c'est juste que je n'ai pas entendu la réponse.

La Présidente (Mme Bouillé) : Donc, messieurs.

M. Jolicoeur (Jérôme) : Bien, effectivement, ça aurait une importance majeure. Donc, c'est sûr que, si, demain matin, Valero n'est plus sur le territoire de Lévis, il y a un trou dans le paysage.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. Nous vous remercions pour votre présentation, la qualité de l'échange.

Et j'invite maintenant M. Pierre-Oliver Pineau, d'HEC Montréal, à prendre place à la table des témoins.

Et je vais suspendre les travaux une minute.

(Suspension de la séance à 20 h 19)

(Reprise à 20 h 21)

La Présidente (Mme Bouillé) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux.

Bienvenue, M. Pierre-Olivier Pineau. Vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre exposé, suivi d'une période d'échange avec les parlementaires.

M. Pierre-Olivier Pineau

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Parfait, merci beaucoup. Merci de l'invitation. Pendant les 10 minutes qui me sont accordées, Mme la Présidente, je vais d'abord me présenter brièvement, ensuite parler du contexte global du raffinage à l'échelle planétaire, mais très rapidement converger sur le projet, la logique du projet, les logiques parallèles qui entourent les discussions autour de ce projet-là.

Donc, je suis professeur titulaire à HEC Montréal depuis 2006. Auparavant, j'étais à l'Université de Victoria, en Colombie-Britannique, pendant cinq ans. Mais ma spécialité est vraiment les politiques énergétiques. Je travaille spécifiquement sur l'intégration des marchés de l'énergie en électricité, mais aussi dans d'autres secteurs : le gaz naturel, pétrole.

J'enseigne des cours à HEC Montréal, au MBA en énergie, à la M. Sc., à la maîtrise en gestion des affaires en énergie aussi. Et, régulièrement, HEC Montréal a des partenariats avec d'autres pays, et j'ai été en Algérie enseigner des cours sur le secteur de l'énergie pour la Sonatrach, la compagnie de pétrole algérienne, à deux reprises, à Alger. Cet automne, j'étais à Bogota pour la compagnie Eco Pétrole, de Colombie, pour laquelle, avec un partenariat d'une université colombienne, on offre aussi des séminaires là-bas.

Donc, HEC Montréal a quand même un rayonnement dans le secteur de l'énergie, souvent, qui n'est pas très connu, parce que, malheureusement, au Québec et au Canada, il y a, dans le secteur de l'économie et de la gestion, un manque de professeurs qui offrent un regard indépendant. Et c'est en partie pour cette raison-là que je suis régulièrement sollicité par les médias pour offrir des commentaires sur les enjeux énergétiques.

Je suis membre de différents groupes de recherche en développement durable, en éthique, sur le campus des HEC Montréal. Et, à titre de transparence pour la commission parlementaire, je suis sur le point d'annoncer, avec des partenaires industriels, la création d'une chaire de recherche en énergie. Il y a neuf partenaires du secteur de l'énergie qui vont soutenir ma chaire de recherche en énergie. Ça va être une chaire indépendante. Ces partenaires sont Gaz Métro, Boralex, Valero, McCarthy Tétrault, PwC, BMO, Golder, Pétrolia et Enbridge. C'est une chaire de recherche indépendante, dans le sens où ces compagnies n'ont pas de droit de regard sur mes travaux, mais je le mentionne simplement à titre de divulgation d'un éventuel conflit d'intérêts qui pourrait être perçu par certains. C'est une chaire unique au Canada, on a très peu de... malheureusement, trop peu de ce genre de situation.

Le contexte mondial du raffinage. Le Québec, même après la fermeture des raffineries qu'il y a eu au Québec ces dernières années, reste dans une position enviable au niveau du raffinage. Quand on regarde chez nos voisins, par exemple, en Nouvelle-Angleterre, il n'y a aucune raffinerie; dans l'État de New York, il n'y a pas de raffinerie; en Colombie-Britannique, il y a une petite raffinerie, qui ne couvre pas les besoins. On a, au Québec, réussi, malgré les difficultés, à conserver un secteur du raffinage dynamique, et c'est certainement un atout pour le Québec, d'autant plus que beaucoup se préoccupent de la sécurité énergétique du Québec et qu'on a, à travers ça, un approvisionnement en produits pétroliers raffinés local. Et c'est, à mon sens, un élément, surtout pour ceux qui s'intéressent à la sécurité énergétique et à l'indépendance énergétique. On produit une énergie au Québec, évidemment, de pétrole importé, mais on le consomme et on consomme un produit qui est fait localement. C'est souvent un élément, par exemple, en Alberta, que les Albertains disent qui manque à leur industrie : c'est davantage de capacité de raffinage pour avoir un élément de la chaîne de valeur qui leur appartient.

Au niveau mondial, il y a actuellement une surcapacité de raffinage. On a, au niveau mondial, environ 87 millions de barils par jour de capacité de raffinage pour une demande qui atteint presque 90 millions de barils par jour. Je mentionne ceci parce qu'on est dans un contexte où, à l'échelle internationale, il y a une surcapacité. En Europe et en Amérique du Nord, il y a un changement dans la logique de la consommation. On est en... consommation en déclin, léger déclin en Amérique du Nord et en Europe, ce qui veut dire que la croissance se fait ailleurs. Et il y a une réelle menace à l'échelle internationale pour se dire que les raffineries québécoises ne seront pas prioritaires parce qu'elles ne desservent pas des marchés particulièrement porteurs dans les années à venir. Parce que le marché est en décroissance. On le sait, au Québec, le marché sera en forte décroissance, le marché de la consommation de produits pétroliers, grâce aux politiques de réduction de la consommation de pétrole.

Donc, ce ne sont pas des raffineries qui sont en situation… même si elles sont en bonne position aujourd'hui, leur avenir est précaire parce qu'il y a différentes forces internationales et, particulièrement, locales qui leur mettent certains bâtons dans les roues. Mais, comme on l'a entendu de la part de différents intervenants, il y a un apport, en termes économiques, qu'il est important de prendre en compte parce que c'est un apport qui aujourd'hui est important pour l'économie québécoise.

Arrivons maintenant à la logique du projet d'Enbridge et les logiques parallèles qui entourent. C'est évident que, du point de vue des producteurs de pétrole de l'Ouest canadien, ils veulent avoir accès à un marché qui leur permet de vendre leur pétrole plus cher que le prix auquel ils ont actuellement accès. Et le président d'Enbridge, qui était à Montréal lundi dernier, l'a clairement dit : La logique de ce projet-là, comme d'autres logiques, c'est de sortir le pétrole et de le vendre plus cher. Et il se trouve que la logique de nos raffineries, c'est d'avoir accès à un pétrole moins cher. C'est des questions qui ont déjà été soulevées. Il se trouve qu'il y a un intérêt convergent; au moins, à court terme, court et moyen termes, ils vont pouvoir, les producteurs, vendre plus cher que le prix qu'ils ont accès actuellement, et nos acheteurs locaux ici, accéder à un pétrole qui leur coûte moins cher.

Ultimement, si tous les projets de pipeline et d'exportation voient le jour — ça a été mentionné — le différentiel de prix va s'amenuiser et va disparaître, et l'avantage concurrentiel du pétrole de l'Ouest pourrait disparaître pour les raffineries. Mais, à moyen terme — et on est quand même dans des entreprises… dans des logiques de court et de moyen terme — quand on regarde ces contrats d'approvisionnement, eh bien, il y a un avantage certain qu'il serait, à mon sens, un peu bête de ne pas prendre pour les raffineries. Pour les consommateurs québécois, c'est évident qu'il n'y aura aucune différence, les marges de raffinerie vont être capturées par les raffineurs, et le marché des produits pétroliers au détail ne va pas être affecté par ça. Donc, il ne faut pas du tout présenter le projet comme étant un projet qui aura un impact pour les consommateurs.

Il y a un aspect de sécurité des opérations dans ce projet de pipeline. Cet aspect de sécurité d'opérations, à mon sens, n'est pas un aspect nouveau, parce qu'on s'approvisionne, au Québec, en pétrole à travers des pipelines, on exporte à travers des pipelines et on a des produits qui transigent déjà la ligne 9A d'Enbridge, et son sens a déjà été inversé, et donc on a déjà des indications. Il n'y a pas de nouveauté au niveau de l'opération.

Ce qu'il y a de neuf et ce qui pose problème dans ce projet-là, c'est qu'on a accès à un pétrole en partie... Même si, à court terme, ça sera du pétrole léger, on se dirige vers... Au moins, à court terme, c'est ça, une certaine proportion sera du pétrole lourd, donc issu des sables bitumineux, et peut-être, à long terme, on aurait des proportions croissantes de sables bitumineux. Et c'est là qu'on arrive, à mon sens, au coeur du véritable problème, à une question éthique d'un... Est-ce qu'on doit catégoriquement refuser ce type de pétrole? Et là on sort des considérations économiques et d'indépendance énergétique que j'ai mentionnées jusqu'à maintenant. Est-ce qu'on sort de ce… est-ce qu'on fait un refus catégorique pour des questions éthiques ou alors on adopte une attitude de gestion avertie de nos approvisionnements en pétrole?

Alors, le refus catégorique, dans mon analyse, je le mets de côté pour la raison suivante : je ne pense pas que la prohibition soit la bonne approche à la sobriété. Et, donc, je me dis : Si on adopte ce type d'attitude là, malheureusement, ce qu'on fait, on déplace le problème. Alors, on pourrait, jusqu'à un certain point, interdire de l'importation de pétrole albertain, même s'il y a des voies détournées comme le train, et c'est ce qui arrive. Mais on déplacerait le problème des approvisionnements — merci, Mme la Présidente — et on s'approvisionne d'Angola, du Nigéria, de sources qui, en bout de ligne, ne sont pas plus propres ni meilleures que le pétrole albertain. Et, en plus, ce type d'interdiction, de prohibition ne règle en rien notre problème de consommation. Le problème de la consommation de pétrole est un problème réel.

Et donc c'est pour ça que je préconise une gestion avertie de ce type de situation à travers une vigilance réglementaire, et c'est ce que j'appelle le gouvernement québécois à pousser : une vigilance réglementaire accrue. C'est ce que l'Office national de l'énergie, au niveau fédéral, à mon sens, va chercher à obtenir, une vigilance accrue de cette situation. Étonnamment, l'Ontario a suffisamment conscience d'un processus réglementaire pour ne pas demander un processus similaire à celui qu'on a entamé au Québec alors que, si on regarde le pipeline, on a 600 kilomètres, 500 kilomètres se trouvent en Ontario. Si une province devrait être particulièrement préoccupée, c'est bien celle de l'Ontario. Alors, je félicite le gouvernement québécois d'avoir cette vigilance supplémentaire, mais, jusqu'à un certain point, ce n'est pas forcément le plus important.

Ce qui est plus important, en une minute, c'est de réussir notre sortie du pétrole, une sortie que j'espère rapide, mais qui ne pourra pas être instantanée. On s'est donné, au Québec, des ambitions majeures, d'ici 2020, de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 20 % ou 25 %. Ça, ça veut dire, de manière concrète, qu'au moins dans le secteur du transport et dans le secteur de la consommation de produits pétroliers on réduit de 20 %. Et, à mon sens, c'est ça, le défi majeur. Et j'appelle véritablement le gouvernement du Québec à redoubler d'efforts sur le véritable défi de la consommation et à se détourner des défis qui, à mon sens, sont secondaires, qui sont : D'où vient ce pétrole? Si on est des leaders en termes de consommation et de décroissance de notre consommation, eh bien, nous allons véritablement…

• (20 h 30) •

Une voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci, parfait. Excusez-moi, M. Pineau, mais… Oui, allez.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Donc, en terminant, et c'est simplement le message… ma conclusion principale, c'est de dire : Notre problème, qui est le problème de l'Occident, mais de l'humanité entière, c'est cette consommation de pétrole. C'est un défi majeur. Il y a des manières de se sortir de la consommation. Le Québec, d'ici 2020, veut réduire de 20 % ou 25 %. Quand on regarde l'ampleur du défi, c'est un défi historique sans précédent. Aucune société occidentale n'a réussi à faire ça.

Et personnellement je suis extrêmement préoccupé du fait qu'on s'inquiète fortement de questions de charte des valeurs ou de questions de pipeline, sur d'où vient le pétrole, alors que le coeur du défi, c'est la consommation. On a eu en septembre un déversement de 3 000 barils de pétrole à Sept-Îles, qui est un problème de consommation qui n'a rien à voir avec la provenance du pétrole. On a des problèmes de… Les émissions de gaz à effet de serre viennent véritablement de la consommation du pétrole et bien moins de la production. Alors, à la marge, on peut évidemment avoir un certain impact, mais il est bien plus important de réduire sa consommation que de chercher à exclure des producteurs d'un endroit ou d'un autre endroit.

Je vous remercie beaucoup de votre attention et je suis disponible, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup, M. Pineau. Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. En fait, est-ce que c'est possible d'avoir une transcription? Avez-vous un rapport écrit ou…

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Alors, malheureusement, la commission a été annoncée dans des délais très brefs. Mme la Présidente…

La Présidente (Mme Bouillé) : Je vais vous aider, M. Pineau. Nous allons avoir, dans la transcription des débats… Donc, ce sera disponible.

Mme Zakaïb : C'était très intéressant, votre exposé. Vous nous avez dit qu'il y a un avenir précaire aux raffineries du Québec. Vous avez expliqué pourquoi. Votre analyse se base sur le fait que, si ces raffineries ont accès à du pétrole moins cher, elles vont être plus compétitives. Moi, je m'inquiète sur la durée de cet avantage concurrentiel ou comparatif qui… C'est-à-dire, le prix, il y a des gens qui pourraient prétendre que ce prix-là, un jour, va être à l'équilibre, qu'en permettant au pétrole de l'Ouest canadien d'avoir accès à des marchés… parce que présentement il est enclavé, qu'un jour… et là ce qui est difficile à savoir, c'est dans combien de temps, mais qu'un jour ce pétrole-là va être au même prix. Donc, que nos raffineries, on leur permet d'être compétitives, elles ont un avenir précaire, et peut-être que, là, on est en train de leur donner cinq ans de plus. Qu'est-ce que vous répondez à ça?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente, en fait, la réalité, c'est que c'est un problème dont je ne me soucie pas vraiment. Parce que, le jour où elles perdront l'avantage compétitif d'avoir un approvisionnement de l'Ouest canadien, les autres raffineries nord-américaines auront aussi perdu cet avantage compétitif, donc on aura atteint un équilibre. Les raffineries québécoises ne seront plus à un désavantage par rapport à leurs compétitrices plus continentales qui ont un approvisionnement. Donc là, aujourd'hui, elles sont à un certain désavantage. Eh bien, elles vont gagner un certain avantage. Elles sont profitables aujourd'hui. Si elles n'étaient pas profitables, je pense qu'elles auraient fermé.

Donc, elles sont profitables. Mais, à court terme, si on leur bloque cet accès-là, hé bien, on va un peu aller vers une fermeture prématurée de cette industrie-là, qui, étant donné l'ampleur des défis que se donne le Québec, à mon avis, est problématique, hein, dans le sens où pourquoi… On a des ambitions et, si, en plus, on se tire dans le pied pour atteindre nos ambitions, eh bien, on est en train d'aller dans toutes les directions, et ça serait très dommageable, ça serait vraiment nous handicaper davantage alors qu'on s'est donné des défis importants.

La Présidente (Mme Bouillé) : Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Merci, Mme la Présidente. Vous avez parlé de sécurité d'approvisionnement. Je ne sais pas si c'est dans vos compétences, là, mais pouvez-vous nous dire quels sont les moyens de transport les plus sécuritaires pour le pétrole? Est-ce que vous pouvez nous répondre à ça?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Pineau.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Oui, merci, Mme la Présidente. Je ne suis pas un expert en tant que tel de la sécurité des modes de transport. Ce qui est certain, c'est que, si on peut transporter par… Bien, sur les grandes distances, c'est des grands pétroliers qui vont être le plus rentables à fin et qui sont sécuritaires, même s'il n'y a aucun mode de transport qui est sécuritaire. La voiture n'est pas sécuritaire dans la mesure où il y a des accidents de la route. Le vélo n'est pas sécuritaire dans la mesure où il y a des accidents de vélo. Alors, il y a, globalement, des catastrophes qui marquent les esprits et qui nous font réagir fortement, mais, globalement, tous les modes de transport de pétrole sont relativement sécuritaires.

Ces dernières années, on a, malgré le fait qu'on puisse déplorer une amélioration trop peu rapide… mais il y a, au niveau des grands pétroliers, une amélioration des grands pétroliers. Au niveau des pipelines, il y a, malgré tout, malgré les accidents, une sécurité accrue, une vigilance accrue auprès des organismes réglementaires. En train, on a eu des accidents très malheureux. Et là on est en retard, mais pourquoi? Parce qu'il y avait très peu de transport par train et l'industrie s'est développée plus vite que nos organismes réglementaires. Alors, ça, c'est un problème de surveillance, de réglementation. Mais on a un niveau de sécurité qui, à mon sens, est toujours perfectible, mais qui est bon.

La Présidente (Mme Bouillé) : Mme la ministre.

Mme Zakaïb : Sur ce point-là, et ce sera ma dernière question, vous avez parlé de vigilance réglementaire accrue. Qu'est-ce que vous nous nous suggéreriez? J'imagine que vous avez une idée, comme… De quelle façon… Si vous étiez à notre place au gouvernement, qu'est-ce que vous introduiriez comme réglementation accrue?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : En fait, on rentre, Mme la Présidente, dans des situations où je pense que le rôle du Québec, du gouvernement québécois, ici, est de s'assurer que le gouvernement fédéral fait bien son travail. Et, pour l'instant, c'est une compétence fédérale. Et donc c'est peut-être de talonner : non pas de faire des commissions parlementaires pour regarder, retourner les mêmes roches que l'Office national de l'énergie a retournées, mais de s'assurer et de critiquer le travail. Je n'ai pas entendu de critiques spécifiques sur en quoi est-ce que l'Office national de l'énergie ne faisait pas son travail correctement pour justifier qu'on regarde la question sous un autre angle.

Donc, moi, j'inviterais le gouvernement québécois à essayer de voir quelles sont les lacunes au gouvernement fédéral, à l'Office national de l'énergie. Et, à l'Office national de l'énergie, je l'inviterais à s'assurer d'avoir assez de personnel pour aller faire des contre-expertises et du suivi des projets qui sont entamés et des surveillances qui sont faites par les compagnies de pipelines. Donc, c'est véritablement au niveau de la surveillance des projets et de la contre-expertise qu'il faut avoir du personnel.

Et je ne me suis pas personnellement penché sur cette question-là. Au Canada, on a malgré tout plutôt des bons résultats et une bonne performance de l'industrie de pipelines. Mais, comme on a des produits nouveaux et qu'on a, en cas de déversement, des problèmes nouveaux avec les nouveaux types de pétroles, eh bien, c'est là où il faut qu'on ait une vigilance accrue, au niveau de la réglementation, de quels sont les produits et de s'assurer qu'il n'y ait pas de bris de pipelines, parce qu'en cas de bris les dommages peuvent être beaucoup plus dommageables que par le passé.

La Présidente (Mme Bouillé) : Mme la ministre.

Mme Zakaïb : J'aurais une question de plus. En fait, c'est un complément d'information. Vous me dites : Regardez ce que l'Office de l'énergie va suggérer, puis, s'il manque quelque chose, suggérez-leur ce quelque chose. Maintenant, je vous dis : Qu'est-ce qu'il devrait y avoir, alors, dans ce quelque chose? Qu'est-ce qu'il devrait être pour que je puisse le surveiller comme il le faut? Qu'est-ce que vous suggéreriez que l'Office national de l'énergie mette comme réglementation additionnelle?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Pineau.

• (20 h 40) •

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente, je n'ai pas de suggestion spécifique. Dans ma lecture des choses, l'Office national de l'énergie, même après les changements que le gouvernement fédéral lui a imposés, va véritablement dans le fond des choses et regarde, et s'assure de la sécurité des personnes autour. L'Office national de l'énergie n'a pas le mandat de regarder la question des gaz à effet de serre. Et le gouvernement fédéral canadien, malheureusement, n'offre aucune plateforme à la population canadienne pour réfléchir les gaz à effet de serre de manière cohérente. Alors, c'est déplorable. Mais, en ce qui concerne les pipelines, je suis personnellement… je me sens en sécurité avec ce qu'on a au Canada et avec ce qu'on aurait si ce projet était accepté.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Repentigny.

M. McKay : Oui, merci, Mme la Présidente. Bonsoir, M. Pineau. Enfin, je ne peux qu'être d'accord avec vous quand vous dites, en ce qui concerne la réduction de la consommation du pétrole… on parle de se libérer du pétrole, là. Mais, au-delà des slogans creux, si on veut le faire vraiment… C'est vrai que — vous avez utilisé le terme — c'est un défi historique sans précédent. Je ne sais pas quelle analogie on pourrait trouver pour faire un lien avec, effectivement, un autre défi aussi important. Mais c'est ce qui me fait dire, moi, qu'il faut aller au-delà des clivages partisans et des clivages droite-gauche pour vraiment mobiliser l'ensemble de la population autour d'un tel enjeu.

Ça va quasiment devenir un «running bag», mais je fais référence à mon bouquin qui vient de sortir, Pour un Québec vert et bleu, parce que ça me tient vraiment à coeur…

La Présidente (Mme Bouillé) : Vous allez passer à Infoman, vous.

M. McKay : Non, mais la question de la transition écologique de nos sources énergétiques et notre économie est très…

Une voix :

M. McKay : Pardon?

Une voix : On veut l'acheter, mais…

M. McKay : Oui. Je ne le déposerai pas, non. Par contre, vous avez pu lire, peut-être, un extrait, dans le journal Le Devoir, qui a été titré Le casse-tête pétrolier. Je ne sais pas si vous…

M. Pineau (Pierre-Olivier) :

M. McKay : Bon, bien, je vous ferai parvenir ça. Mais moi, j'ai lu un de vos articles, par contre, qui parlait du fait que l'opposition au pipeline était une diversion par rapport à, donc, ce grand objectif-là qui doit nous mobiliser. Est-ce que vous pouvez nous l'expliquer un peu?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Pineau.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente, merci.

La Présidente (Mme Bouillé) :

M. Pineau (Pierre-Olivier) : En deux minutes? C'est un peu la conclusion que je vous ai donnée, c'est ce défi de réduction de notre consommation de pétrole étant tel. Et, étant donné que l'impact environnemental le plus grand de la consommation de pétrole est au niveau de la consommation, non pas du raffinage et encore moins de la production, toute l'attention médiatique qui est amenée sur la source du pétrole et la manière dont il est transporté est, à mon sens, une grande distraction qui nous éloigne de l'endroit où les efforts devraient être donnés, qui est vraiment sur nos modes de transport : nous sortir de l'auto solo, nous sortir de gros véhicules et nous amener vers les transports en commun, le transport actif, le covoiturage. Et ça, ça demande des éléments majeurs de transition.

Et je comprends que c'est la stratégie de certains groupes ou de certains intérêts d'amener là-dessus parce que ça frappe l'imaginaire. Ce que je propose, ce que je dis, sur le changement des attitudes en transport, ne frappe pas l'imaginaire et, d'un point de vue électoral ou d'un point de vue de communication, ce n'est pas une bonne stratégie pour attirer l'attention. Par contre, s'opposer aux — entre guillemets — méchants producteurs ou méchants ceci, bien, ça, ça semble attirer et être médiatiquement gagnant. Alors, c'est une attitude qu'on adopte trop souvent. Et malheureusement ça nous distrait et ça nous éloigne du vrai enjeu. Et le Québec… on a la chance au Québec d'avoir unanimité politique sur la réduction des gaz à effet de serre, chose qui est complètement inhabituelle en Amérique du Nord. Et je souhaiterais, en tant que citoyen et en tant qu'expert en politique énergétique, qu'on aille vraiment vers cette transition pour enrichir la société, parce que ça nous enrichirait.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup.

M. McKay :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Repentigny, c'est terminé.

M. McKay :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Repentigny! M. le député de Louis-Hébert, la parole est à vous.

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue. Merci, M. Pineau. C'est très intéressant. Merci de prendre le temps de venir présenter ça. Mon collègue le député de Mercier m'a donné un document. C'est une étude, en fait, faite par le Pembina Institute. Le titre, c'est… En tout cas, je vais vous poser les questions. Si vous n'êtes pas habilité à répondre, ce n'est pas grave, là. C'est juste pour aider mon collègue le député de Mercier. L'étude a été faite… en fait : In the Shadow of the Boom – How oilsands development is reshaping Canada's economy.

Alors, en fait, une des recommandations… Il y a plusieurs recommandations. Ils prennent le modèle norvégien pour créer un fonds pour le futur, etc. Mais une des choses qu'ils disaient là-dedans, c'est que le dollar américain, le dollar canadien, ils suivaient un peu le prix du pétrole. Et donc plus qu'on produit de pétrole, plus que le prix monte. Le prix du dollar canadien monte et il nuit en même temps à d'autres industries, comme la forêt, comme d'autres. Et, vous savez, un dollar à 1-1, c'est très nuisible pour notre économie, l'exportation.

Alors, vous, qu'est-ce que vous en pensez? Évidemment, ça, c'est des chercheurs… L'étude a été faite en mai 2012.

Une voix :

M. Hamad : Pardon?

Une voix :

M. Hamad : Oui. Non, c'est correct, c'est constructif, là. J'accepte ça. C'est bon, ça. C'est bon. Alors…

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert, posez votre question.

M. Hamad : Oui. Alors, qu'est-ce que vous en pensez, de ça?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Pineau.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente. Je crois que c'est un fait que la force du dollar canadien est liée en grande partie aux exportations de pétrole et qu'effectivement ça a nui particulièrement à l'industrie manufacturière du Québec et aux exportations québécoises de différents types, comme à l'Ontario. C'est un sujet qui, en fait, dépasse complètement le sujet de cette commission. Le pipeline d'Enbridge… le renversement du flot n'aurait qu'un impact marginal.

J'ai essayé de réfléchir un petit peu à quel genre d'impact puis, en fait, dans ma tête, c'est mitigé. Comme, en fait, on importerait moins de pétrole de l'étranger, il y aurait plus de dollars canadiens qui resteraient ici. Donc, en fait, il y aurait un… Mais, globalement, ça n'aurait aucun impact sur la force du dollar canadien. C'est ma conclusion personnelle. Dans le meilleur des cas… Bien, en fait, dans le pire des cas, ça aurait un impact tellement marginal qu'on n'en verrait pas le problème, alors… que cette question du mal hollandais, elle est bien plus grande que ce questionnement-là.

Alors, on pourrait en discuter après, quelles sont les conclusions à tirer. On ne peut pas empêcher l'Alberta de produire du pétrole. Alors, c'est un peu une réalité à laquelle on doit faire face et essayer de s'en tirer au mieux avec nos atouts.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Évidemment, sans oublier que le pétrole canadien, il nous amène la péréquation, ce qu'on… Un jour, on souhaite de ne pas l'avoir puis être assez riches au Québec, d'être indépendants là-dessus. Mais, quand même, c'est, cette richesse-là, avec le prix qui est là, quand même une compensation. Si on regarde les transferts canadiens, on parle de 16 milliards, si ma mémoire est bonne, là. Ça augmente à chaque année. Alors, c'est quand même beaucoup d'argent que le Québec reçoit grâce au pétrole. Ça peut compenser, quand même, si jamais le mal hollandais affecte… Mais je comprends de votre réponse que cette question-là n'est pas reliée au projet. Je suis d'accord avec vous. Mais je voulais juste que vous le dites pour donner plus de temps à mon collègue, le député de Mercier, là-dessus.

Donc, en fait, je suis content d'entendre votre opinion aussi sur le prix parce que je suis à la même place que vous, là. Je ne suis pas l'optimiste qui, demain matin, pense que le prix va baisser de 20 $ au Québec. On est loin de ça. Mais le marché va finir par se stabiliser, avec un équilibre, quelque part.

Mais il y a une chose qu'on n'a pas dite à date, dans la commission, puis on parle toujours du prix de l'Ouest, mais c'est clair qu'un jour il va y avoir une réaction dans l'Est parce que le monde a intérêt à vendre le pétrole au meilleur prix. Alors, quand la compétition est forte, tout le monde veut essayer de vendre. Et, comme vous le savez, le pétrole, on l'achète dans le bateau déjà, on ne l'achète pas au fabricant. On l'achète déjà quand il est déjà commencé à être transporté.

Alors, vous pensez que ce tuyau-là va mettre de la pression quand même sur le marché de l'Est, là, le brent?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente, c'est un projet de 300 000 barils par jour. Dans un marché mondial, ça ne va pas faire chavirer ultimement le prix et le différentiel. Uniquement, ce projet-là ne va pas faire changer le différentiel. Et, étant donné l'ensemble des projets que l'Alberta a et qu'on a, dans le Dakota du Nord et dans d'autres régions américaines, il y aurait une production croissante aux États-Unis et au Canada. Et la consommation, comme ça a été dit à maintes reprises, a tendance à décliner légèrement en Amérique du Nord, ce qui amène cette espèce de suroffre qui fait que le prix du WTI est plus bas.

Ultimement, si les projets de pipelines autres que celui-là se réalisent, eh bien, on va avoir une convergence des prix. C'est ce que souhaitent les producteurs de l'Alberta, cette convergence des prix. Enfin, ils ne souhaitent pas tant la convergence de prix qu'eux convergent aux prix supérieurs, et c'est ultimement ce qu'on pourrait avoir. Mais ça ne sera pas du jour au lendemain, quoique même cet été on a eu une convergence temporaire des prix pendant quelques jours. Ça peut survenir. Ça peut arriver rapidement ou moins rapidement.

Mais, durant ce laps de temps, pour notre industrie du raffinage québécoise, je trouverais un petit peu aberrant qu'on l'empêche de profiter d'une source d'approvisionnement plus concurrentielle, surtout — et ça, c'est le point essentiel — si le gouvernement et la société québécoise font les efforts pour réduire de 20 % à 25 % d'ici 2020. C'est évident que, si on se complaisait dans simplement… on a… concurrentiel et, par ailleurs, on ne fait pas nos devoirs et on n'atteint pas nos objectifs qu'on s'est donnés, bien là ça serait un petit peu désolant. Ce ne serait pas juste un petit peu désolant, ce serait extrêmement désolant. Et c'est un petit peu ce qui me…

Mais ce qui me préoccupe le plus, c'est ce deuxième aspect. Mais le premier aspect, qu'ils aient accès à du pétrole moins cher, bien, je le souhaite de tout coeur.

• (20 h 50) •

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Vous avez dit, à un moment donné, je trouve ça intéressant aussi, peut-être pour le député de Mercier aussi… c'est qu'au moins le pétrole canadien vient d'un pays où on sait qu'il y a des règles, il y a des respects, il y a des droits d'homme, il y a des éléments… Et ça fait partie de notre pays, contrairement à d'autres pays, je ne sais pas, moi, Kazakhstan, l'Angola, et des pays que je ne pense pas que là-bas il y a beaucoup des… En tout cas, on… Alors, comparativement au Canada, ce n'est pas comparable. Donc, c'est un avantage, quand même, d'utiliser un pétrole canadien et, en même temps, ça crée de la richesse au Canada, que le Québec profite.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Pineau.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente, oui, je suis d'accord avec ça, dans le sens où on a plus de contrôle sur la réglementation canadienne qu'on en a sur la réglementation algérienne, ou angolaise, ou nigérienne. Quand on regarde ce qui se passe, les études environnementales sur le pétrole nigérien et angolais, pétrole qu'on importe aujourd'hui et qui malheureusement est pire ou équivalent, en termes de gaz à effet de serre et de dommages environnementaux, que le pétrole issu des sables bitumineux, eh bien, je me désole qu'on ne se focusse pas là-dessus et qu'on identifie, qu'on isole une seule source qui… c'est la source canadienne. Non pas qu'il faut être complaisant et accepter sans critique la source canadienne, mais il faut, à mon avis, être cohérent. Et, si on veut aller vers ce genre de regard là, sur des approvisionnements plus équitables, eh bien, avec des respects de normes sociales et environnementales, bien, qu'on applique ces critères-là à l'ensemble des sources d'approvisionnement.

Et donc je pense que nous pourrions faire des efforts là-dessus, efforts qui, ultimement, s'avéreraient — et, j'espère, s'avéreront — être un peu inutiles si, à moyen terme, on se libère de notre consommation de pétrole.

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Et, dans le même sens, je me souviens de nos discussions avec le député de Mercier lorsqu'on a fait adopter la loi spéciale pour le métro de Montréal. Puis d'ailleurs le député de Mercier avait raison. Ce que la loi spéciale sur le métro de Montréal… l'argument qu'on utilisait, tout le monde ici, dans l'Assemblée nationale, c'est qu'on voulait faire travailler des travailleurs québécois, et, évidemment, dans ces travailleurs-là, il peut y avoir des travailleurs syndiqués. Si on n'avait pas fait ça, ça se peut… très possible que quelqu'un qui fabrique le métro à l'extérieur… qui ne sont pas nécessairement des travailleurs syndiqués. Puis, je pense, là-dessus, le député de Mercier trouvait que c'était un bon argument, je pense, dans ce temps-là, il y a un an à peu près. C'était le 7 octobre 2010 qu'on a adopté ce projet de loi.

Et donc c'est le même principe qui s'applique aussi à ce pétrole-là. Lorsqu'on l'amène ici, c'est le même principe : c'est des lois, des… Et, quand on a appris que… On sait, dans les documents du gouvernement, il y a 51 000 travailleurs dans le domaine de pétrochimie à Montréal et au Québec et la majorité sont syndiqués. Donc, ce qu'on est en train de faire, c'est développer une industrie au Québec pour des travailleurs québécois. Et, évidemment, si j'étais un syndicaliste, bien, je vois aussi qu'il y a un avantage pour le syndicat au Québec. Est-ce que je me trompe?

La Présidente (Mme Bouillé) : M. Pineau.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente. Donc, je pense que le plus important dans ces questions-là, c'est que, d'un point de vue global, il faut que des normes sur le travail soient respectées à l'échelle mondiale. Personnellement, en tant qu'individu et qu'économiste, c'est ça qui m'intéresse. Je suis pour le libre-échange en autant qu'on a des normes qui soient similaires dans les différents pays. Je crois aux vertus du libre-échange, mais entre partenaires qui sont à des niveaux équivalents. Et je crois que le plus important pour l'humanité, c'est d'avoir des normes de travail et des droits humains qui soient respectés dans l'ensemble des pays. Alors, évidemment, on doit être vigilants pour nos institutions et nos travailleurs. Mais ultimement on doit se préoccuper de l'entièreté des conditions de travail… dans la mesure où on peut avoir une influence.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci beaucoup. M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Martel : Merci, Mme la Présidente. Bien, bonjour, monsieur. Merci de votre présence.

Moi, je vous demanderais peut-être de développer, là, compte tenu de votre expertise… Quand on prend en considération la dette du Québec — 260 milliards — quand on regarde le rendement qu'on a avec l'électricité : on la vend de plus en plus à perte aux États-Unis, on finance des projets éoliens un peu déficitaires… Moi, je suis d'accord avec vous, là, que, par rapport au pétrole… il faut réduire notre dépendance au pétrole. Mais qu'est-ce que vous nous diriez ou c'est quoi, votre opinion par rapport à toute l'alternative au niveau de l'électricité, par exemple?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente, là, on sort vraiment de la question du pipeline. Au niveau de l'électricité, notre électricité, le bloc patrimonial, il est produit à un coût extrêmement faible : moins de 0,02 $ le kilowattheure. Donc, même au prix actuel, on fait de l'argent dans nos exportations. Les gouvernements actuels et précédents du Québec ont fait le choix d'investir dans de l'éolien alors que ça ne déplaçait pas des énergies fossiles et qu'on avait déjà des efforts d'efficacité énergétique qu'on pourrait faire au niveau de la consommation d'électricité. Donc, on a fait un choix — à mon sens, électoraliste et de développement régional — d'imposer des éoliennes parce que, dans l'imaginaire collectif, une éolienne, c'est beau sur des images de pamphlets publicitaires et que ça… Mais ce n'était pas un besoin énergétique qu'on avait. Donc, on a imposé ça à la population québécoise, qui, sur le coup, l'a bien accepté, mais qui, à long terme, bien, paie, comme vous le dites, un prix plus élevé, sans que ça ne déplace des hydrocarbures pour la production d'électricité parce qu'on a la chance au Québec d'avoir un patrimoine hydroélectrique très grand.

À moyen terme, les prix d'électricité vont reprendre. Alors, j'ai très confiance que, notre patrimoine hydroélectrique et énergétique renouvelable, on puisse le valoriser à bien meilleur prix. Je pense qu'au niveau québécois on aurait intérêt à augmenter les prix comme la Colombie-Britannique vient de l'annoncer cette semaine : 30 % d'augmentation du prix d'électricité en cinq ans. C'était le gouvernement de la Colombie-Britannique qui l'a annoncé. Je pense que c'est une voie à suivre pour le Québec parce que ça nous enrichirait et ça nous amènerait vers la voie de l'efficacité énergétique. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bouillé) : Non, vous pouvez continuer.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mais c'est un sujet sur lequel on pourrait véritablement aller beaucoup plus… Et, à moins qu'on ne m'y invite, je m'arrêterai là.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci. M. le député de Mercier.

M. Khadir : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Pineau, pour l'honnêteté que vous avez eue de révéler, disons, vos conflits d'intérêts, de révéler le fait que les compagnies pétrolières…

Une voix :

M. Khadir : Non, mais c'est comme ça.

Une voix :

M. Khadir : Bien non! Ça s'appelle comme ça. Quand quelqu'un vient présenter sur un sujet…

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier, continuez votre question.

M. Khadir : Très bien. Alors, merci d'avoir révélé vos conflits d'intérêts. Je vous crois sincère. Mais je comprends très bien pourquoi les compagnies pétrolières financent éventuellement vos… vont financer votre chaire de recherche, parce que l'angle que vous prenez m'apparaît un peu contradictoire. Alors, je vais vous poser la question pour peut-être réfléchir ensemble à ça. Vous dites donc que de faire transiter… de faire inverser le flux du pétrole, qui va permettre à terme, et assez court terme, vous l'avez dit, le pétrole de l'Alberta… Parce qu'il n'y aura pas juste Enbridge. Quand Enbridge va être inversé, il y a une dynamique politique qui va s'installer, qui va faciliter aussi TransCanada, qui va faciliter les promoteurs pour les autres projets — Northern Gateway — pour dire : Regardez, partout, d'autres législations ont accepté. Donc, ça facilite le projet politique de désenclaver complètement le pétrole de l'Alberta.

Or, ce qui empêche que votre souhait se réalise, que nos politiciens se détachent du pétrole puis qu'on réfléchisse sur les problèmes de consommation de fond que vous soulevez à juste titre, c'est le lobby du pétrole. Tout le monde en convient, c'est le lobby le plus puissant à toutes les échelles : au niveau planétaire, au niveau du Canada et des États-Unis aussi. Comment voulez-vous alors qu'en renforçant une industrie, le sable du pétrole, en renforçant ce secteur-là, en lui donnant plus de puissance économique, on puisse faciliter le fait que politiquement on s'en détache? Comment voulez-vous… Êtes-vous naïf à ce point?

La Présidente (Mme Bouillé) : Monsieur…

Une voix :

M. Khadir : Non, mais, je pense, c'est une question…

La Présidente (Mme Bouillé) : Est-ce que c'est un point d'ordre?

Des voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : Je m'excuse…

Une voix : Je fais appel à l'article 35.7, les propos injurieux.

M. Khadir : Écoutez, M. Pineau est capable de se défendre.

Une voix : Bien non! Mais à un moment donné…

La Présidente (Mme Bouillé) : S'il vous plaît! Je n'en prends…

Des voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : Non, non! Là, on arrête ça! La parole est au député de Mercier.

Des voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : S'il vous plaît! Est-ce que vous voulez suspendre, là? Merci. On se calme. Merci. M. Pineau.

• (21 heures) •

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Mme la Présidente. Je pense, ça fait environ une quinzaine d'années que je suis professeur dans le milieu universitaire, que je côtoie des personnes du milieu environnemental et des gens de la réglementation et de l'industrie. Je pense qu'il y a, comme dans tout secteur, des lobbys et je pense qu'on surestime grandement l'importance du lobby pétrolier. Et je pense que le lobby des consommateurs… Quand je regarde mes voisins, mes amis, ma famille, ils aiment acheter des voitures, et des grosses voitures. Et ça, ce n'est pas le lobby pétrolier qui les a endoctrinés en leur disant : Vous allez acheter une grosse voiture. Il y a une part de libre arbitre. Il y a de la publicité dans les médias. Il y a une dynamique sociale qui fait…

Une voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier, la parole est…

Une voix : Mme la Présidente, est-ce qu'on pourrait le laisser terminer…

La Présidente (Mme Bouillé) : Oui. C'est d'ailleurs ce que je demande au député de Mercier. Continuez, M. Pineau.

M. Pineau (Pierre-Olivier) : Alors, il y a un ensemble de… La publicité est une sorte d'endoctrinement, mais je ne pense pas que… je ne suis pas arrivé à la conclusion que chaque individu a perdu son libre arbitre au point de ne pas réaliser que c'est son choix individuel.

Alors, oui, il y a des forces qui nous amènent à acheter différentes choses et il y a des choix politiques. Mais, quand ils vont voter, quand les électeurs de Mercier vous ont élu, est-ce qu'ils n'étaient pas autant soumis à des pressions et à de l'endoctrinement de droite à gauche? Mais alors les électeurs... Je crois à notre démocratie jusqu'au point où il y a des gouvernements qui se font élire, ils reflètent le désir de la population. La population est… Évidemment, je suis dans le secteur de l'éducation, si je dis que la population n'est peut-être pas assez éduquée, vous allez m'accuser d'être pour le lobby de l'éducation. Mais je pense qu'il y a de l'éducation à faire, je pense qu'il faut le faire. Et je pense que c'est... oui, il y a des lobbys, mais il y a aussi des choix individuels et qu'on peut travailler malgré le fait que ces lobbys existent dans tous les secteurs.

La Présidente (Mme Bouillé) : Merci.

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier! Merci beaucoup, M. Pineau. M. le député de Mercier!

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : Non, je vous… Non, je m'excuse, mais la présidence s'adresse à vous. Je vous demande, s'il vous plaît, de faire attention à ne pas utiliser un langage qui peut être blessant pour les personnes qui sont invitées. Ceci…

Une voix :

La Présidente (Mme Bouillé) : S'il vous plaît! Ceci étant dit, je lève maintenant la…

M. Khadir : …est-ce que je peux répliquer, juste une seconde?

La Présidente (Mme Bouillé) : Répliquer à qui?

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : Non. Non, M. le député.

M. Khadir :

La Présidente (Mme Bouillé) : M. le député de Mercier, c'est fini.

Je lève la séance de la commission et j'ajourne les travaux jusqu'au jeudi 28 novembre, à 13 heures. Merci.

(Fin de la séance à 21 h 2)

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