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(Seize heures quarante minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation est réunie pour étudier
article par article le projet de loi 48, Loi sur les pêcheries et
l'aquaculture commerciales et modifiant d'autres dispositions
législatives.
Les membres de la commission sont: M. Baril (Arthabaska), M. Beaumier
(Nicolet), M. LeMay (Gaspé), M. Dupré (Saint-Hyacinthe), M.
Blouin (Rousseau), M. Garon (Lévis), M. Houde (Berthier), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Lincoln (Nelligan), M.
Ciac-cia (Mont-Royal), M. Côté (Charlesbourg).
Les intervenants sont: M. Maciocia (Viger), M. Bisaillon (Sainte-Marie),
M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Gagnon (Champlain), M. Dubois
(Huntingdon), Mme Juneau (Johnson), M. Lachance (Bellechasse), M. La-plante
(Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), M. Picotte (Maskinongé).
Il faudrait d'abord désigner un rapporteur de la commission. Une
proposition, s'il vous plaît.
M. Marquis: Je proposerais le député de
Gaspé.
Le Président (M. Desbiens): Le député de
Gaspé est proposé. Est-ce que tout le monde est d'accord?
M. Lincoln: ...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gaspé, vous allez agir comme rapporteur de la commission. M. le
ministre, vous avez des remarques préliminaires?
M. Garon: Non.
Le Président (M. Desbiens): Non.
M. Garon: On peut commencer.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nelligan.
Remarques préliminaires M. Clifford
Lincoln
M. Lincoln: Brièvement, M. le Président, nous
voudrions rappeler au ministre que notre position sur ce projet de loi
était que cela va créer des problèmes de premier ordre de
la part de... Cela va créer des discussions interminables presque tout
de suite entre le provincial et le fédéral. Cela va nous amener
dans une situation où ce genre de projet de loi va finir par une
discussion et des contestations en cour. Les seules gens qui vont perdre
là-dedans sont les mêmes qu'on est supposé protéger,
c'est-à-dire les pêcheurs, le milieu, les travailleurs d'usine,
les producteurs.
En plus, depuis que j'ai parlé en Chambre, j'ai eu l'occasion de
parler aux gens du domaine de la pisciculture qui sont très craintifs au
sujet de ce projet de loi. Les trois ou quatre à qui j'ai parlé
sont très représentatifs de l'industrie, ce sont des gens qui
sont en charge de cette industrie. Ils m'ont exprimé leur grande
inquiétude face à un projet de loi qui apporte des
problèmes constitutionnels, une espèce d'affrontement
constitutionnel, qui crée des problèmes interministériels.
Ils m'ont dit que le milieu lui-même n'a pas du tout été
consulté et ils se sont aussi posé beaucoup de questions sur la
rapidité avec laquelle le ministre a introduit ce projet de loi qui a
des implications et des conséquences très sérieuses
soulignées par tous les intervenants de notre côté en
Chambre, dans l'espace de sept jours.
Je sais que le député de Gaspé a dit que
c'était passablement de temps pour étudier un tel projet de loi.
En tout cas, ce que je veux lui dire, c'est que des conseillers juridiques de
l'UPA se penchent toujours là-dessus et ils n'ont pas trouvé que
c'était bien long, une semaine, pour étudier un projet de loi qui
a des connotations très sérieuses dans le domaine
constitutionnel. C'est certainement la constatation qu'ont fait des gens qui
ont une expertise beaucoup plus grande que la mienne dans ce domaine, qui se
spécialisent dans ce domaine. Ces derniers nous disent que c'est aller
certainement dans une contestation juridique qui ne va pas manquer de
créer encore des difficultés dans un milieu qui est
déjà tellement bouleversé par toutes les bagarres, les
querelles qui ne cessent de jour en jour.
Je vous demande, M. le ministre, comme je l'ai demandé en
Chambre, de convoquer - au lieu de venir étudier un projet de loi
à la vapeur, dans l'espace de quelques jours, qui est sûr de
créer des conflits - une commission parlementaire.
Nous avons demandé cela tout à fait spécifiquement,
officiellement, au cours de nos interventions. Je vous demande de convoquer une
commission parlementaire, de laisser votre projet sur la tablette durant deux,
trois ou quatre semaines, et rien ne changera. Vous l'avez admis
vous-même hier en Chambre, le projet sera mis en vigueur seulement
à la date que vous choisirez vous-même pour le promulguer. Vous
n'avez aucunement l'intention de le faire promulguer demain matin,
j'espère. Il y a cette latitude de convoquer une commission
parlementaire qui écoutera l'industrie piscicole, car elle dit qu'elle
n'a pas été consultée du tout. Je vais vous citer les gens
qui me l'ont dit. L'industrie de la pêche exprime les mêmes
hésitations devant ce projet de loi.
Pourquoi ne donnez-vous pas une chance à ces gens de se faire
entendre, de se faire écouter, de nous dire quelles sont leurs
contraintes, leurs anxiétés, de nous dire eux-mêmes ce
qu'ils veulent? Tout ce qu'on apprend, c'est de votre bouche. Vous nous dites
que tous les gens sont contents. De l'autre côté, nous avons M. De
Bané qui nous dit que tous les gens sont contents. Les gens à qui
nous en parlons nous disent qu'ils ont beaucoup d'hésitation et de
crainte.
Si votre dossier est tellement clair, si vous êtes tellement
satisfait de ce qui se passe dans le milieu des pêches, ce sera pour
vous-même une façon de vous grandir d'entendre les pêcheurs
dire quel travail formidable vous faites.
Je ne vois justement pas ce qui vous empêche de convoquer une
commission parlementaire. Pour la première fois depuis des temps et des
temps, on aurait une chance d'écouter officiellement les pêcheurs,
les exploitants d'usine, les travailleurs, les pisciculteurs, les syndicats,
les coopératives, afin de savoir ce qu'ils pensent de votre projet de
loi pour savoir s'ils sont d'accord avec vous pour dire que ce sera un
développement très positif pour le Québec plutôt que
ce que nous pensons - et eux le pensent beaucoup - c'est-à-dire que cela
créera des problèmes qui auront pour conséquence directe
de faire d'eux, les plus impliqués, les perdants. Vous n'avez rien
à perdre; vous faites des projets de loi. Vous continuez, vous
êtes toujours ministre; vous circulez, vous faites des discours, mais,
pour les gens qui gagnent leur vie, c'est bien différent. Eux sont
affectés.
On vous pose des questions. Il y a les pêcheurs de Terre-Neuve
qui, historiquement, ont pêché dans les environs de Blanc-Sablon.
Est-ce qu'ils n'y pêcheront plus parce qu'ils n'auront pas le permis du
Québec ou si les pêcheurs du Québec, qui les côtoient
tous les jours, auront un double permis pendant que les autres auront un permis
simple? C'est la même chose pour les gens du Nouveau-Brunswick qui
viennent pêcher dans la baie des Chaleurs et ailleurs. Est-ce qu'il y
aura des conflits parce que vous aurez la juridiction sur ces pêcheurs
qui viennent d'autres provinces? Est-ce que nos pêcheurs auront à
avoir le double permis pendant qu'eux pêcheront avec un simple permis?
Est-ce que vous avez pensé aux conséquences? Est-ce que vous avez
pensé que cela causera des frictions entre les provinces, une friction
automatique - c'est sûr - avec le fédéral?
Que le fédéral ait tort ou raison, que vous ayez tort ou
raison, la façon de résoudre ces problèmes n'est pas par
des projets de loi. Des projets de loi, c'est très beau; on écrit
cela; on fait adopter cela. Vous avez une grosse majorité, vous allez
adopter tous les articles. Vous aurez une ovation de vos collègues,
à l'Assemblée nationale, et 90% d'entre eux se fichent pas mal de
ce qui va se passer après. Ce ne sont pas eux qui vont se tracasser si
cela porte préjudice à la saison de pêche. Ce ne sont pas
eux qui vont aller régler tous ces problèmes-là.
Il est sûr que c'est une industrie - il faut le constater - qui
est en état de flux, qui est en état de déstabilisation
dans tous les coins du Canada. Vous allez apporter une solution tout à
fait négative. Vous allez envenimer les choses. On vous demande encore
une fois, M. le ministre, de prendre... Peut-être seriez-vous mieux, au
lieu d'étudier ce projet de loi article par article aujourd'hui, de
prendre un peu plus de temps pour convoquer une commission parlementaire, afin
d'entendre les gens du milieu, pour savoir vraiment ce qu'ils pensent de tout
cela. Cela aurait été bon pour vous. Je vous demande
formellement, encore une fois, si vous avez des objections à convoquer
une commission parlementaire avant qu'on en finisse avec ce projet de loi.
Est-ce que vous pouvez nous donner un peu plus de temps pour laisser les
intervenants nous faire savoir ce qu'ils pensent de cela? Est-ce que vous
pouvez nous dire vos raisons pour ne pas accepter une commission parlementaire?
Est-ce que c'est tellement urgent de faire cela maintenant, cette semaine?
Pourquoi n'attendrait-on pas trois, quatre ou cinq semaines pour que le milieu
puisse s'exprimer à ce sujet? C'est la question que je vous pose. Je me
demande si on n'aurait pas pu décaler ce projet de loi de trois ou
quatre semaines pour donner l'occasion au milieu intéressé de se
faire entendre en commission parlementaire.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Jean Garon
M. Garon: Je pense que le débat est fait là-dessus.
Cela a été le thème du
discours du député de Nelligan, tenir une commission
parlementaire. Au fond, je ne saurais pas qui rencontrer exactement. Des
experts en droit constitutionnel là-dessus, il n'y en a pas tant que
cela. Je suis persuadé que les deux ou trois pisciculteurs qu'il dit
avoir rencontrés n'étaient pas des experts en droit
constitutionnel. Je ne vois pas en quoi les piscicultures vont avoir des
problèmes avec ce projet de loi. C'est clair comme de l'eau de
source.
Deuxièmement, quand il parle de l'UPA, des élevages... Il
a été question d'aquaculture. Au point de départ, quand on
a donné les crédits agricoles aux pisciculteurs, c'étaient
essentiellement des éleveurs de truite, de truite arc-en-ciel, et on n'a
pas l'intention de créer un réseau agricole pour l'élevage
des poissons dans le territoire maritime. Il n'en est pas question. J'ai dit,
au contraire, qu'on peut considérer, à la rigueur, la truite
arc-en-ciel, peut-être la truite mouchetée, comme un
élevage fermier. Mais, pour le reste des poissons, cela relève du
territoire maritime. On ne va pas passer à travers le réseau
maritime. Il n'est pas question de faire passer le saumon ou les moules par
l'UPA. Il n'en est pas question.
Je voudrais qu'on soit un peu réaliste et un peu sérieux.
Quand on parle du territoire maritime, il y a un réseau d'entreprises
qui font de la transformation dans le territoire maritime et c'est par
là que les espèces qui vont être produites vont passer. Il
ne faut pas susciter de faux débats. Je comprends que l'UPA voudrait
avoir le plus de membres possible, mais de là à dire que, parce
qu'on a donné accès au crédit agricole pour les
poissons... On n'a pas l'intention de faire passer par le réseau
agricole l'ensemble des produits marins. Il n'est pas question de cela. Tout au
plus la truite arc-en-ciel, parce que c'est véritablement un produit
d'élevage qui n'est même pas dans le milieu indigène, qui
n'est pas relié véritablement au milieu des pêches
puisqu'il était surtout en étangs de ferme. Les gens allaient
pêcher dans les petits étangs de ferme.
Maintenant, je comprends qu'actuellement, par ces deux projets de loi,
celui sur la conservation de la faune et ce projet-ci, on divise en deux les
piscicultures: les piscicultures pour la pêche sportive dans les
étangs de ferme et les piscicultures à des fins de vente sur le
marché de la consommation. Il s'agit de deux réseaux
complètement différents. Il est absolument nécessaire de
rationaliser les réseaux de commercialisation. L'une des raisons pour
lesquelles dans le passé l'élevage du poisson n'a pas
fonctionné, c'est que les juridictions étaient toutes
mêlées. Ces projets de loi ont pour but de faire en sorte qu'elles
le soient moins - je ne dis pas qu'elles soient entièrement
démêlées, mais qu'elles soient moins mêlées
qu'elles ne l'étaient auparavant - et qu'il soit possible, à
travers toutes les contraintes des empires passés, à des gens de
gagner leur vie dans l'élevage du poisson à des fins de
consommation humaine, dans le réseau de distribution des produits
marins. C'est ce que nous visons par ce projet de loi, de permettre ce genre de
pisciculture.
Pour les pêches commerciales, il y a deux genres
d'activité: les pêches commerciales dans les eaux sans
marée et les pêches commerciales dans les eaux avec marée,
puisqu'il s'agit d'un régime juridique différent. Tout cela est
très distinct et, à mon avis, très clair dans le projet de
loi, et je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas procéder, parce qu'il
s'agit essentiellement de vieilles demandes du milieu dans ces questions. On
veut essentiellement développer, pouvoir développer... Il n'y a
pas de question constitutionnelle sur cela parce que, si vous vous
référez à la constitution, elle dit qui a juridiction sur
la pêche; le gouvernement fédéral n'a pas juridiction sur
l'élevage en pisciculture, d'aucune façon. Ce n'est pas de la
pêche, c'est de l'élevage, tandis que la pêche est une
activité de capture de poisson libre. Quand on fait de l'élevage
dans un enclos d'espèces marines, il ne s'agit pas de pêche, mais
d'élevage ou de culture. On dit aquaculture ou pisciculture et c'est de
juridiction provinciale, il n'y a aucun doute sur cela.
J'aimerais que vous me citiez des auteurs, à part dire que vous
avez rencontré une couple de personnes, dont vous ne vous souvenez
peut-être même pas des noms, qui vous auraient dit qu'il y avait
des problèmes constitutionnels. Aucun avocat ne nous a dit qu'il y avait
des problèmes constitutionnels à ce point de vue. Cela ne veut
pas dire que, parce que, dans le passé, ce n'était pas clair dans
la législation du Québec, parce que des lois ont
été abrogées en 1969, parce que la loi de 1969, qui a
été abrogée dans le temps de l'Union Nationale et
confirmée par la mise en vigueur de cette loi du temps des
libéraux, était une erreur juridique, il faut rester dans
l'erreur juridique que nos vieux partis ont faite en 1969-1970.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nelligan.
M. Lincoln: Brièvement, M. le Président, tout
d'abord, je pense que le ministre a bien mal compris ce qu'on voulait lui dire
au sujet d'une commission parlementaire. On ne veut pas une commission
parlementaire pour aller écouter les experts constitutionnels. C'est la
dernière chose qu'on voudrait faire. Ce n'est pas cela qu'on a dit, du
tout. Je pense que notre message était très clair.
Ceux qu'on veut écouter, ce sont les gens du milieu, les
intervenants du milieu,
les pêcheurs, les gens d'usine, les producteurs, les
pisciculteurs. Ce sont eux qu'on veut écouter, les gens qui s'occupent
d'eux, les syndicats, les chefs de syndicat, les chefs de coopérative.
On ne veut pas avoir ici des gens qui vont venir discuter de la constitution,
où l'un va nous dire oui et l'autre, non. C'est justement ce qu'on veut
éviter.
Ce qu'on veut chercher, nous, c'est entendre les gens du milieu pour
savoir ce qu'ils pensent du principe même du projet de loi, si c'est cela
qu'ils cherchent. C'est la question qu'on vous a posée: Est-ce cela que
les pêcheurs cherchent aujourd'hui? Est-ce cela que votre projet de loi
48, même s'il y avait la moindre petite... Vous allez être
tellement clairs sur la question constitutionnelle qu'il n'y aura aucun doute
là-dedans.
En tout cas, M. Lévesque, M. Ryan, Mme Lavoie-Roux ont bien
situé les différents auteurs qui, eux, pensent qu'il y aura des
questions là-dedans qui sont beaucoup plus floues que vous ne le croyez.
Certainement, le gouvernement fédéral verra cela d'un autre oeil
que vous. Toutes ces questions finissent toujours en cour.
M. Lévesque a cité aujourd'hui le professeur Brun. Il a
même cité M. Jacques-Yvan Morin, ministre des Affaires
intergouvernementales, qui dit que l'affaire n'est pas claire du tout.
Même M. Marx, dans son traité, a deux opinions qui laissent la
question tout à fait non catégorique. Ce n'est pas une question
qui se décidera comme cela parce que vous dites qu'il n'y a aucun doute.
Il y a certainement beaucoup de doutes sur le sujet. Le fait est que, quand je
vous ai cité les pisciculteurs, j'ai dit que j'avais parlé
à trois personnes. Je vais revenir là-dessus lorsqu'on discutera
de cela article par article. Ce ne sont pas des imbéciles, les gens
à qui j'ai parlé. J'ai parlé à un président
de syndicat, à un chef de coopérative, à un
président-directeur général; ce ne sont pas des
imbéciles. Ils m'ont dit que leurs avocats se posent beaucoup de
questions sur la question constitutionnelle, qu'ils ont fait une étude
là-dessus. Ce ne sont pas des idiots. Il ne faut pas dire...
M. Garon: Sur quel point?
M. Lincoln; Pardon?
M. Garon: Sur quel point?
M. Lincoln: On va revenir là-dessus à
l'étude article par article. J'ai plusieurs notes qu'ils m'ont
données. Tout ce que je veux vous dire, c'est que cette
question-là n'est pas une question qui se tranche tellement facilement.
Si cela était si facile, à ce moment-là, cela aurait
été tranché depuis longtemps. Vous-mêmes, vous avez
expliqué que, depuis 1922, on se bat sur la question constitutionnelle
et les juridictions sur la pêche.
Le fait demeure que, dans la constitution canadienne, les pêches
sont du domaine fédéral. Le gouvernement fédéral ne
voudra pas qu'il y ait un empiétement sur la question des permis.
Sûrement qu'il va essayer de faire une vérification de cette
question en cour si, par exemple, il y a une bagarre de juridiction sur les
permis de pêche au crabe et autres. Alors, que va-t-il arriver s'il y a
une bagarre en cour? C'est ce qu'on vous a demandé. Si, par exemple, il
vous arrivait de perdre. Je sais que vous pensez toujours gagner et que la
question est tout à fait claire pour vous, mais si ce n'était pas
aussi clair et qu'il vous arrivait de perdre en cour, comme cela a
été le cas, comme M. Lévesque l'a souligné, pour le
droit du veto du Québec, qu'arriverait-il?
À l'heure actuelle, nous avons une espèce de pouvoir
politique de négociation parce que la question n'a pas été
tranchée en cour. Une fois que l'on va en cour, comme la Colombie
britannique l'a fait en 1967, pour remettre en question les gisements
souterrains pétrolifères et minéraux, c'est
tranché. Dans ce cas, cela a été tranché en faveur
du gouvernement fédéral. Peut-être que la Colombie
britannique était aussi catégorique que vous, mais le fait est
que cela a été tranché en faveur du gouvernement
fédéral. Si cela va jusqu'à la Cour suprême et que
cette question est tranchée contre vous et pour le gouvernement
fédéral, qu'arrivera-t-il? C'est la question que l'on vous a
posée. Quelles seront les conséquences parallèles de cela
dans le secteur minier et dans le secteur pétrolifère au
Québec?
Tout ce que l'on vous demande, c'est de réfléchir, c'est
de ne pas dire: Ah oui! il n'y a aucun problème; j'ai
étudié cela, donc c'est clair. Peut-être que vos experts
trouvent que c'est clair, mais il y a d'autres experts qui ne trouvent pas cela
clair. Je vous ai dit ce matin que des gens m'ont même dit que la
question était à l'étude et qu'ils se posaient beaucoup de
questions concernant le domaine constitutionnel. J'en ai parlé à
M. Marx et à M. Ryan, qui ont étudié cette question
à fond. Tous se posent des questions. Ce n'est pas tellement clair, ce
que vous dites. Alors, si, par exemple, il y a des doutes, tout ce que l'on
vous demande, c'est peut-être de réfléchir un peu plus.
Entre-temps, qu'est-ce qui vous presse tellement à adopter ce
projet de loi cette semaine? Qu'est-ce qui presse tellement? Si vous attendiez
deux, trois ou quatre semaines, les pêches vont-elles sombrer? La saison
de la pêche est finie pour cette année. Est-ce que cela
n'aurait pas été mieux de prendre un peu plus de recul,
d'étudier la question plus à fond, d'organiser une
commission parlementaire non pas pour écouter les experts
constitutionnels - c'est la dernière chose que l'on veut - mais pour
écouter les gens du milieu, écouter ce qu'ils ont à dire,
savoir si c'est vraiment l'approche qu'ils cherchent dans une loi 48 et une loi
49. Ce ne sont pas des lois qu'ils cherchent. Ce qu'ils cherchent, ce sont des
solutions pratiques. Ce qu'ils cherchent surtout et avant tout, c'est que vous
et M. De Bané puissiez vous entendre. Peut-être pourriez-vous vous
entendre avec quelqu'un d'autre, comme M. LeBlanc, le ministre des
Pêches. Ce qui arrive, c'est que vous deux, vous ne pouvez pas vous
entendre. Vous vous engueulez. Un traite l'autre de menteur, car j'ai entendu
dans votre discours, plusieurs fois, des références à
"menteur". (17 heures)
Comment voulez-vous en arriver à une solution dans un domaine
où, à tort ou à raison, le gouvernement
fédéral est impliqué d'une façon tout à fait
absolue dans la constitution? Tant que l'on fera partie du Canada, ce sera
comme cela. Alors, si vous ne vous entendez pas avec lui, comment ce projet de
loi 48 va-t-il vous aider à mieux vous entendre? Il est sûr que
cela vous aidera à moins vous entendre. Si, déjà, cela va
mal entre vous, est-ce que vous croyez que le projet 48 va aider les choses?
C'est cela qu'on dit. On vous dit de prendre un peu de recul. Écoutez ce
que les gens du milieu ont à dire. Prenez trois ou quatre semaines,
réfléchissez encore un peu, mais la solution, selon nous, n'est
pas le projet de loi 48. Cela ne réglera rien. Cela ne fait qu'envenimer
les choses. Mais si vous voulez aller de l'avant malgré tout et si vous
croyez que vous avez la science infuse et que tout est clair,
réglé, on va passer par le processus. Vous allez tous voter et on
votera votre affaire à la vapeur, rien ne sera changé parce que
ce sera pire qu'avant. C'est cela qu'on vous dit.
Si vous ne croyez pas qu'on a des contacts et qu'on parle avec des gens,
peut-être que vous allez attendre la version des syndicats, des
pisciculteurs, les gens affiliés à l'UPA, ce qu'ils pensent de
toutes ces choses. Ils vont vous le dire parce qu'ils sont en train
d'étudier ces questions et ils se posent beaucoup de questions comme
beaucoup de gens dans le milieu de la pêche se posent des questions,
aujourd'hui.
Étude article par article
Le Président (M. Desbiens): J'appelle l'article 1. Est-ce
que l'article 1 est adopté?
M. Lincoln: Non.
M. Garon: II n'est pas rendu à l'article 1. On commence
à l'article 1?
Le Président (M. Desbiens): Oui.
M. Garon: Commençons à l'article 1. On n'avait pas
encore dit article 1.
Le Président (M. Desbiens): Oui, j'ai appelé
l'article 1.
M. Lincoln: Je voudrais poser une question au ministre à
propos de l'article 1.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nelligan.
Pêcheries commerciales
M. Lincoln: Ce programme indique les espèces de poissons,
d'amphibiens, etc., pour lesquelles un droit de pêche peut être
concédé à des fins commerciales. Est-ce que vous voulez
dire que vous prenez une juridiction sur les quotas, sur les contingentements
des espèces? Comment allez-vous vous octroyer ce genre de contrôle
dans votre programme? Vous élaborez, à chaque année, un
programme favorisant le développement des pêcheries commerciales,
le commerce des produits aquatiques pêchés dans les eaux sans
marée. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, en tenant compte du plan de gestion de la pêche, indique
les espèces de poissons pour lesquels il y a un droit de pêche.
Comment faites-vous le rapport entre ce droit de pêche que vous donnez?
Est-ce que vous cherchez dans cela une espèce de quota sur les
espèces? Pouvez-vous m'expliquer cela davantage?
M. Garon: On est dans les eaux sans marée ici. Dans les
eaux sans marée, on dit: pour lesquelles un droit de pêche peut
être concédé à des fins commerciales - il y a un
plan de gestion puisque, en vertu des ententes qu'il y a entre la partie que le
gouvernement fédéral allègue, laisse à
l'administration du gouvernement du Québec, dans les eaux sans
marée, il n'y a pas de contestation là-dessus. Jusqu'à
maintenant, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a
donné les permis de pêche à des fins sportives et à
des fins commerciales.
Ce que le projet de loi apporte, c'est une démarcation entre les
fins sportives et les fins commerciales, en disant que, pour les fins
commerciales, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation va préparer un programme de pêche qui va s'inscrire
dans le cadre d'un plan de pêche d'ensemble qui va être
approuvé par règlement par le gouvernement du Québec, mais
il s'agit ici des eaux sans marée.
M. Lincoln: Est-ce que vous réclamez une juridiction
exclusive sur la pêche dans
les eaux sans marée dans le domaine public? M. Garon:
Personne ne parle de cela.
M. Lincoln: C'est ce que je vous demande. Je vous demande si vous
réclamez une juridiction exclusive.
M. Garon: Non. Ce programme de pêche à des fins
commerciales dans les eaux sans marée indique des espèces de
poissons, d'amphibiens, d'échinodermes, de crustacés ou de
mollusques pour lesquelles un droit de pêche peut être
concédé à des fins commerciales. Quand il s'agit d'un
droit de pêche qui peut être donné à des fins
commerciales, là, il s'agit de déterminer des quotas. Nous allons
proposer un quota de pêche commerciale dans le cadre d'un quota
d'ensemble.
Si on regarde la Loi sur la conservation de la faune, il y a quatre
types de pêche qui sont reconnus dans un plan de pêche: 1° la
reproduction, la pêche pour les fins de reproduction par des oeufs.
2° la pêche de subsistance pour les Indiens; 3° la pêche
sportive; 4° la pêche commerciale.
À ce moment, ce que nous allons préparer est un programme
de pêche commerciale qui va s'inscrire dans le cadre d'un plan de
pêche générale, dans les eaux sans marée. Nous ne
donnons pas des droits de pêche comme tels.
M. Lincoln: C'est ce que vous dites.
M. Garon: Non, non. Ce n'est pas ce qu'on dit. On dit qu'on ne
réglemente pas la pêche. C'est le fédéral qui
réglemente la manière de pêcher. Ce que nous allons
établir, c'est un programme en vertu du fond du lit des cours d'eau.
M. Lincoln: M. le ministre, j'ai envie de... Peut-être que
je suis bien naïf dans ces choses. Vous avez dit vous-même que le
fédéral réglemente le droit de pêche. Vous l'avez
dit. D'accord. Là, vous contrôlez le lit.
M. Garon: Le fédéral ne réglemente pas le
droit de pêche.
M. Lincoln: Mais c'est ce que vous venez de me dire.
M. Garon: La manière de pêcher.
M. Lincoln: Ah bon! La manière de pêcher. Le
fédéral réglemente la manière de pêcher.
M. Garon: Dans les eaux sans marée. On est dans les eaux
sans marée dans l'article 1.
M. Lincoln: Oui, oui. Dans les eaux sans marée. Le
fédéral réglemente la manière de pêcher. Ne
pensez-vous pas qu'il y a un conflit entre le fait de réglementer la
manière de pêcher et aussi, s'il réglemente la
manière de pêcher, sûrement qu'il a droit de regard sur les
espèces, sur les quotas, sur les contingentements.
M. Garon: Non.
M. Lincoln: Comment alors... Pourquoi, à ce moment, si
c'est tellement clair, avez-vous besoin de cela?
M. Garon: Ce que nous voulons établir, c'est un programme
d'attribution de concessions pour des fins de pêche.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez besoin d'une loi pour dire que
vous allez établir un programme annuel? Si vous avez ce droit
d'établir un programme annuel, pourquoi l'inclure comme le premier
article de votre loi?
M. Garon: II y a une loi qui a été abrogée
en 1969 par l'Union Nationale et qui n'aurait jamais dû l'être.
C'était la Loi sur la pêche, qui couvrait ces sujets. Elle a
été abrogée par erreur ou... Si vous regardez, le ministre
du temps n'a pas dit grand-chose en vertu de la Loi sur la conservation de la
faune. Quand il a fait la Loi sur la conservation de la faune, qui a
remplacé la Loi sur la pêche, il n'a pas reproduit les articles
qui parlaient du droit de pêche. Depuis ce temps, on a agi par
délégation fédérale alors qu'avant 1969, on
agissait en vertu de nos propres lois dans les eaux sans marée, parce
qu'il faut distinguer les eaux sans marée et les eaux avec
marée.
M. Lincoln: D'accord, on parle d'eaux sans marée. Vous
agissez par délégation fédérale, n'est-ce pas?
C'est-à-dire que tout... Disons que le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche fait aujourd'hui un règlement, est-ce que ce
n'est pas une obligation qu'il soit homologué par le
fédéral?
M. Garon: Oui.
M. Lincoln: Oui. D'accord. D'après votre loi ici, si vous
adoptez votre loi, est-ce que cela sera nécessaire de continuer à
l'homologuer ou non? C'est ce que j'ai envie de savoir.
M. Garon: Le gouvernement fédéral établit
des saisons de pêche, des quotas et des choses comme
celles-là.
M. Lincoln: On ne parle pas des quotas, mais on parle des eaux
sans marée. C'est ce
que je veux savoir et ce que je vous demande. Vous voyez la confusion
dans laquelle vous êtes vous-même car vous n'avez pas l'air d'avoir
les réponses.
M. Garon: Oui, c'est parce que le gouvernement
fédéral pourrait actuellement le faire et il ne le fait pas, car
il le délègue aux provinces. La partie que M. De Bané,
quand est arrivé le 11 juillet dernier...
M. Lincoln: Vous allez oublier M. De Bané pour cette
saison-ci. On fait la loi...
M. Garon: Ne jouons pas aux enfants. Si vous le voulez, on va
vous acheter des marbres, on va vous laisser jouer et, après cela, on
reviendra ici. Je vous dis une chose, c'est que M. De Bané, le 11
juillet, a dit: Dans les eaux sans marée, je vous délègue
l'administration des pêches. Dans les eaux avec marée, je vous
laisse les anadromes et les catadromes. Pour mettre tout cela en oeuvre, et en
tenant compte des droits du Québec sur le fond marin, on adopte une loi
qui nous permet de répartir le fonctionnement de tout cela entre la
conservation de la faune du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche pour les fins sportives et la partie commerciale, qui sera
confiée au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Ciaccia: Peut-être que les intentions que vous avez ne
se reflètent pas dans le projet de loi que vous présentez
aujourd'hui ici. Quand vous dites que le programme indique notamment les
espèces de poissons, etc., pour lesquelles un droit de pêche
peut-être concédé à des fins commerciales, on peut
conclure de cela que vous vous attribuez une juridiction exclusive sur la
pêche. Pour donner un droit de pêche, il faut que vous ayez une
juridiction exclusive; autrement comment pouvez-vous accorder ce droit de
pêche pour des fins commerciales? On parle de la pêche dans les
eaux sans marée.
M. Garon: Où est le problème?
M. Ciaccia: Est-ce que vous réclamez une juridiction
exclusive?
M. Garon: Exclusive par rapport à quoi, par rapport
à qui?
M. Ciaccia: Par rapport au fédéral.
M. Garon: Voyez-vous, le gouvernement fédéral peut
réglementer la manière de pêcher, mais il ne peut pas
réglementer véritablement la pêche dans les eaux sans
marée parce que c'est plus un accessoire du fond, de la
propriété. C'est pour cela que, même s'il y a une
juridiction constitution- nelle, l'application en est certainement impossible
à faire, puisqu'il l'a toujours concédée à la
province. Je ne sais pas ce qu'il fait dans les autres provinces. En vertu de
la constitution, le droit de propriété sur le fond l'emporte,
quand on est dans des territoires sans marée. Il ne serait pas
véritablement capable à ce moment-là de régir la
pêche uniquement avec le droit constitutionnel qu'il a. C'est pour cela
qu'il le délègue à la province, parce qu'il estime que la
province a reçu les autres droits qu'a le Québec sur la
propriété et qu'il est plus en mesure d'administrer les deux
ensemble.
M. Ciaccia: Si je vous comprends bien, s'il n'a pas le droit, il
n'a pas besoin de le déléguer. Il va vous déléguer
quelque chose sur lequel il a des droits. Vous dites que le gouvernement
fédéral ne peut pas exercer ce droit d'après la
constitution, si je vous comprends bien, parce que le fond appartient à
la province, au Québec. Il vous le délègue, mais, s'il n'a
pas...
M. Garon: II fait des règlements pour le Québec. Il
nous délègue l'administration des règlements qu'il fait,
mais ces règlements ne couvrent pas tout.
M. Ciaccia: Alors, ce droit de pêche que vous allez
concéder va être soumis au règlement du gouvernement
fédéral. (17 h 15)
M. Garon: Cela ne s'interprétera pas en allant
au-delà du règlement fédéral, mais avec le
règlement fédéral.
M. Ciaccia: Mais le projet de loi n'est pas clair, parce qu'un
droit de pêche peut inclure les règlements. Vous ne nous donnez
pas une exclusion. Vous ne dites pas: Un droit de pêche peut être
concédé à des fins commerciales, selon la
réglementation du gouvernement fédéral. Ce n'est pas ce
que vous dites. Il peut y avoir un doute dans l'interprétation.
Quelqu'un peut dire: Le projet de loi m'accorde ce droit de pêche et je
n'ai rien à faire avec les règlements du gouvernement
fédéral. Si c'est votre intention que ce droit de pêche qui
est concédé pour des fins commerciales dépende du
gouvernement fédéral, pourquoi n'ajoutez-vous pas "sujet aux
règlements du gouvernement fédéral"?
M. Garon: C'est évident, on n'a pas besoin de le dire.
M. Ciaccia: Je ne peux pas mettre des mots dans la bouche de
votre sous-ministre, mais, quand je soulevais la question, il ne semblait pas
que, pour lui, cela fût aussi évident.
M. Garon: Pourquoi?
M. Ciaccia: À cause de la façon dont c'est
écrit, ce droit de pêche est "sujet aux règlements du
gouvernement fédéral". Pour enlever des ambiguïtés,
je pourrais vous suggérer d'écrire: "sujet aux
règlements..."
M. Lincoln: M. le ministre, pour ce qui est de la
délégation de pouvoirs, vous me dites que le ministre...
M. Garon: La question du pouvoir dans le domaine des eaux sans
marée est entière.
M. Lincoln: Admettons...
M. Garon: C'est une gestion complète qui...
M. Lincoln: Vous avez dit, en juillet, que M. De Bané
avait dit que ce qui l'intéressait, c'étaient les eaux avec
marée et que les eaux sans marée étaient
déléguées au Québec. Est-ce que c'est
homologué officiellement par écrit dans une entente quelconque?
Est-ce qu'il est écrit que les eaux sans marée et la
réglementation vous étaient déléguées
complètement?
M. Garon: Par le règlement fédéral. Il y a
un règlement fédéral là-dessus.
M. Lincoln: Si le règlement fédéral vous
donne déjà ce droit, de quoi a-t-on besoin ici? C'est pour cela
qu'on ne comprend rien. S'il y a déjà un règlement qui
vous donne ce droit, pourquoi a-t-on besoin de cela, si c'est tellement
clair?
M. Garon: Dans le règlement concernant la pêche dans
la province de Québec, on indique différents agrès: dards,
carrelets - il parle des eaux à marée -engins mobiles,
épuisettes, etc. Quand il parle du ministre, qu'est-ce qu'il dit? Le
ministre désigne: a) en ce qui a trait à la pêche
commerciale... J'aimerais bien que vous écoutiez pendant que je vous le
lis pour ne pas être obligé de vous le répéter. Vous
avez assez de difficulté...
M. Lincoln: On vous écoute.
M. Garon: Le ministre désigne: a) en ce qui a trait
à la pêche commerciale et sportive dans les eaux à
marée, sauf la pêche des espèces anadromes et catadromes,
le ministre des Pêches et des Océans du Canada... Quand il s'agit
de pêche commerciale et sportive dans les eaux à marée,
c'est le ministre, sauf pour les espèces anadromes et catadromes; b)
Dans tous les autres cas, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche du Québec ou le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, selon le cas. Il ne
détermine pas le cas; il laisse au Québec le soin de le
déterminer.
M. Ciaccia: Quand vous vous donnez, par le projet de loi, le
droit d'établir des quantités maximales, est-ce que le droit de
propriété de la ressource vous donne le droit de fixer le volume
des prises?
M. Garon: Oui, parce qu'il nous le confie.
M. Ciaccia: Alors...
M. Garon: C'est pour cela qu'on dit, nous,
là-dedans...
M. Ciaccia: ... le règlement...
M. Garon: Je ne me donne pas ce droit non plus. Ce droit est
dans...
M. Ciaccia: Bien non.
M. Garon: C'est le plan de pêche du gouvernement qui va le
déterminer en vertu de la Loi sur la conservation et la mise en valeur
de la faune.
M. Ciaccia: Dans le paragraphe 3, vous ne vous donnez pas ce
droit-là: le nombre maximum de concessions qui peuvent être
octroyées et la quantité maximale de produits aquatiques de
chaque espèce qui peuvent y être pêchés? Alors, vous
vous donnez ce droit-là.
M. Garon: Oui, mais c'est dans le plan de pêche du
gouvernement. Moi, ce que je peux faire, c'est de proposer un programme de
pêche commerciale qui va inclure cela. Mais le gouvernement va
établir le plan de pêche d'ensemble où il y aura quatre
éléments: la pêche pour des fins de reproduction, la
pêche de subsistance, la pêche sportive et la pêche
commerciale. Comme on veut que la pêche commerciale au Québec -
l'aquaculture commerciale - soit administrée par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec,
à ce moment-là, on dit: Ce que vous voulez faire au point de vue
de la pêche commerciale, on donne l'occasion au ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de le proposer au
gouvernement. Et le gouvernement va adopter, normalement, un plan de
pêche complet comprenant, en quatrième lieu, une partie
commerciale. Mais le programme commercial a été proposé
par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Prenons le lac Témiscamingue, par exemple, qui est un plan d'eau.
Je ne connais pas toutes les espèces qu'il y a dans le lac
Témiscamingue, mais supposons qu'il y ait de la truite et qu'on dise:
Dans le lac
Témiscamingue, on pourra prendre tant de truites pour la
pêche sportive. On va dire, par exemple: On pourra prendre 10 000 ou 20
000 livres d'esturgeon pour la pêche commerciale, parce que l'esturgeon
n'est pas une espèce sportive. Un plan de pêche va
déterminer l'ensemble des espèces dans des plans d'eau, avec les
quantités et les parties attribuées à différents
types de pêche. Quand il va s'agir de la partie commerciale, cela va
être administré par le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation qui va émettre les permis, lui,
pour les deux fins, dans un seul permis à l'individu qui va faire de la
pêche commerciale.
M. Ciaccia: À l'article 1, si je comprends bien, vous
indiquez le programme que vous proposez?
M. Garon: Au gouvernement.
M. Ciaccia: Mais cela ne veut pas dire que vous vous accordez les
pouvoirs qui sont dans ce programme-là? C'est seulement le programme qui
va contenir ces choses-là?
M. Garon: Oui.
M. Ciaccia: Alors, vous ne vous attribuez pas les pouvoirs qui
sont inclus dans ce programme? Vous nous dites à l'article 1 que, chaque
année, vous allez établir un programme et que celui-ci va
contenir X, Y, Z.
M. Garon: C'est ni plus ni moins que chaque année... C'est
cela. On va faire une proposition au gouvernement qui va s'appeler un programme
de pêche commerciale dans les eaux sans marée.
M. Ciaccia: Alors...
M. Garon: Et le gouvernement va adopter un plan de pêche en
vertu de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune qui va
comprendre tous les éléments.
M. Ciaccia: Ce serait intéressant de savoir si vous vous
donnez les pouvoirs qui sont inclus dans ce programme-là ou si c'est
seulement le programme que vous allez proposer. Si vous vous donnez les
pouvoirs qui sont inclus dans ce programme, je vous souligne que le genre de
pouvoirs que vous vous attribuez n'est pas clair et qu'il peut y avoir un
conflit avec le gouvernement fédéral. Si c'est seulement le
contenu d'un programme, évidemment, vous avez le droit de proposer ce
programme-là. Mais le problème qu'on a, c'est que cela ne devrait
pas être inclus dans un projet de loi. Vous auriez le droit de soumettre
au gouver- nement n'importe quel programme comme ministre de l'Agriculture sans
qu'il y ait nécessité de faire un projet de loi. Alors, il semble
y avoir une petite contradiction.
Premièrement, si cela vous donne les pouvoirs qui sont inclus
dans le programme... Je pense que ce n'est pas votre intention parce que vous
admettez que, dans ce programme que vous allez proposer, il y a certains
aspects où c'est le gouvernement fédéral qui a le pouvoir;
d'autres où l'administration est confiée au gouvernement du
Québec. La question, par exemple, de fixer les volumes de prises, etc.
Alors, vous ne vous donnez pas le pouvoir. Mais vous avez le droit de proposer
ce programme.
Comme avocat qui regarde la loi, je dis que ce n'est pas clair...
M. Garon: II faut...
M. Ciaccia: ...parce que, si vous vous donnez un droit, je pense
que vous allez plus loin que le droit que vous devez vous donner. Si vous ne
vous donnez pas un droit et que c'est seulement un programme que vous proposez,
vous n'avez pas besoin d'un projet de loi pour vous dire que vous avez le droit
de proposer un programme.
M. Garon: II faut lire les deux lois, la Loi sur la conservation
de la faune et la Loi sur les pêcheries et l'aquaculture commerciale. Il
faut lire les deux ensemble.
L'article 6 dit: "Le ministre peut, dans les limites et pour chaque
endroit indiqué dans le programme approuvé par le gouvernement,
octroyer le nombre de concessions qu'il fixe et déterminer, pour chaque
concession, les espèces et la quantité de produits aquatiques qui
peuvent être pêchés."
M. Ciaccia: Vous citez la loi. Quelle loi citez-vous?
M. Garon: La même loi.
M. Ciaccia: Celle-ci, l'article 6.
M. Garon: Oui. À l'article 1, tout ce qu'on dit, c'est que
le ministre va faire un programme de pêche commerciale dans le cadre du
plan de pêche. Il est évident que, concrètement - ce n'est
pas marqué comme cela dans la loi - le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation et le ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche s'entendront. Ils vont s'entendre pour le même quota de
pêche commerciale ou ils ne s'entendront pas et le Conseil des ministres
va trancher, mais il va y avoir un plan de pêche pour l'ensemble du
territoire sans marée. Je vous donne un exemple.
Dans la plupart des endroits, il n'y aura
pas de pêche commerciale. Dans un grand nombre d'endroits au
Québec, il n'y aura pas de pêche commerciale. Ce sera uniquement
de la pêche sportive ou de la pêche de reproduction, mais surtout
de la pêche sportive. Dans l'ensemble des plans d'eau, c'est la
pêche sportive. Il y aura un certain nombre de plans d'eau où il y
aura de la pêche commerciale, par exemple au lac Saint-Pierre, au lac
Témiscamingue, possiblement au lac Saint-Jean et au lac Saint-Louis. Ce
sont de grands plans d'eau où il pourra y avoir un peu de pêche
commerciale, mais il y a peu de pêche commerciale actuellement dans les
eaux sans marée.
Jusqu'à maintenant, c'était géré, au
Québec, par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche; maintenant, le gouvernement dit: La partie commerciale va aller au
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
tout ce qui regarde la pêche ou l'élevage commercial du
poisson.
M. Ciaccia: Si vous me référez à l'article
6, je vous dirai: Très bien, on va discuter l'article 6 lorsqu'on y
arrivera. Cela vous donne certains droits qu'on va discuter, mais votre article
1 entrerait vraiment dans les notes explicatives du projet de loi et ne
s'intitulerait pas l'article 1. À l'article 1, vous dites: On va faire
un programme et, dans ce programme, on pourra dire toutes sortes de choses. Cet
aspect n'entre pas dans le projet de loi. Vous pouvez l'expliquer. Cela
pourrait entrer dans un document d'explications que vous enverriez aux
pêcheurs en leur disant que vous allez faire ceci ou cela. On va avoir
des programmes. Et, tous les ans, vous pourriez changer vos programmes, y
ajouter et y soustraire certains éléments, mais le fait de dire
dans l'article que vous allez avoir des programmes, je ne pense pas que cela
appartienne vraiment... Vous ne vous donnez pas de droits à l'article 1.
L'article 1 dit que vous allez préparer des programmes. Vous n'avez pas
besoin d'un projet de loi pour dire cela; vous pouvez le faire à
n'importe quel temps.
M. Garon: II faut que vous lisiez aussi l'article 2 et l'article
6. Il faut regarder tout cela. L'article 1 est limitatif; il limite dans le
cadre du plan de pêche.
M. Ciaccia: ...des programmes.
M. Garon: Cela limite l'application de la loi. La pêche
commerciale va être administrée par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et la pêche
sportive par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Cela va les obliger à s'entendre au moins ou, s'ils ne s'entendent pas
sur les quotas attribués à chaque espèce, le gouvernement
sera obligé de trancher. (17 h 30)
M. Ciaccia: M. le Président, je ne veux pas faire un long
débat ou un "filibuster" sur l'article 1. Je conclurai seulement par ces
remarques sur l'article 1. L'article 1 n'entre pas vraiment dans le projet de
loi. Si cela ne vous donne pas de droits - c'est vrai, les droits vous sont
accordés à l'article 6 et à d'autres articles - si cela ne
vous donne pas de droits... Parce qu'on devrait se limiter, dans un projet de
loi, à décrire les pouvoirs requis pour atteindre les fins du
projet de loi. L'article 1 ne le fait pas. Il peut même être
interprété et cela peut soulever des ambiguïtés quand
vous vous référez à l'autre loi, la Loi sur le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, cela peut
même venir en... Il n'y a pas de référence à cela du
tout dans l'article 1. Si cela est interprété comme vous donnant
des pouvoirs, cela pourrait même être interprété
comme venant en contradiction avec les lois fédérales.
En ce qui me concerne, je pense que l'article 1 n'appartient pas au
projet de loi.
M. Garon: C'est que l'article 1 vient établir un cadre
limitatif. S'il n'était pas là, il y aurait une marge de
manoeuvre beaucoup plus grande.
M. Lincoln: Pourquoi alors essayez-vous de restreindre votre
marge de manoeuvre?
M. Garon: C'est parce qu'au Québec, traditionnellement, on
fait primer la pêche sportive sur la pêche commerciale dans les
endroits habités. Il va s'agir de déterminer, pour les fins de la
loi, quel est le potentiel de pêche dans un plan d'eau et d'attribuer un
montant ou un contingentement à la partie sportive et à la partie
commerciale. Cela va forcer un peu.
M. Lincoln: Si, par exemple, vous prenez le deuxième
paragraphe de l'article 1, où vous dites: "Les endroits où un
droit de pêche peut être concédé à des fins
commerciales", d'après ce que je comprends, c'est le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui a le contrôle des
étangs de pêche...
M. Garon: Oui.
M. Lincoln: ...des lacs de pêche.
M. Garon: Non, là, c'est de la pêche commerciale, ce
ne sont pas des étangs.
M. Lincoln: Je sais que c'est de la pêche commerciale. Si
les étangs servent pour le peuplement, par exemple, de la
truite arc-en-ciel, est-ce que cela n'a pas été mis
en...
M. Garon: Ce n'est pas ici.
M. Lincoln: Qu'est-ce qui dit cela?
M. Garon: Parce que ce n'est pas là que c'est couvert.
Quand on parlera de l'élevage du poisson dans les étangs, cela va
au chapitre II, celui de l'aquaculture commerciale. L'aquaculture, comme on le
verra tout à l'heure, quand il s'agit d'étangs de ferme, on
laisse cela au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche,
parce qu'il s'agit de pêche pour des fins sportives, alors que, lorsque
la truite sortira de l'étang pour aller vers les marchés de
consommation, ce sera de l'aquaculture commerciale. Si on va la pêcher
sur place, un dimanche après-midi, on laisse cela au ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche. On fait une démarcation en
fonction des marchés.
M. Lincoln: En fait, il n'y a aucune description de ces
termes-là dans la loi, à part de dire que le mot "aquaculture",
c'est le chapitre II, vous le situez comme cela. Mais, est-ce qu'il n'y a pas
des possibilités que cela crée une confusion? Par exemple, la
truite arc-en-ciel a été introduite commercialement par le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Garon: Non, parce que celui qui va aller pêcher dans un
étang ne pêchera pas à des fins commerciales. Si vous allez
pêcher dans un étang, au prix où cela est rendu, c'est un
prix épouvantable. Au fond, si vous allez pêcher, c'est pour vous
amuser, pour prendre dix truites. Vous n'allez pas pêcher en vue de
revendre les truites.
M. Lincoln: Pourquoi n'a-t-on pas clarifié cela pour bien
le situer, ne parle-ton pas du tout de cette possibilité?
M. Garon: Ce n'est pas un droit de pêche. Vous n'aurez pas
un droit de pêche pour aller pêcher dans un étang. Si vous
allez pêcher dans un étang, vous allez payer le
propriétaire de l'étang de pêche, de l'étang
artificiel où on fait l'élevage du poisson et où vous
allez pêcher avec une canne à pêche.
M. Lincoln: Quand vous parlez aussi des concessions de l'octroi
de concessions dans chacun de ces endroits, est-ce que vous ne parlez pas du
tout des pisciculteurs, est-ce que cela ne peut pas créer des confusions
avec les pisciculteurs?
M. Garon: Dans le chapitre I, on ne touche aux pisciculteurs
d'aucune façon. Il ne s'agit pas de l'élevage du poisson; il
s'agit de la pêche du poisson qui s'élève tout seul, en
milieu naturel. On n'est pas dans l'élevage du poisson, au chapitre I.
On est dans la pêche...
M. Lincoln: Quand vous parlez, nous...
M. Garon: ...dans les eaux sans marée, dans les eaux
douces.
M. Lincoln: Oui, mais cela aussi, ce sont des eaux sans
marée, ce dont on parle. Quand vous parlez du commerce...
M. Garon: C'est compliqué. Cela nous a pris trois mois
à travailler là-dessus. C'est compliqué.
M. Lincoln: Justement; Une telle loi devrait éclaircir les
choses. On parle du commerce des produits aquatiques. Par exemple, cela peut
être un produit aquatique des eaux à marée, cela peut
être un lac. Je vous dis que...
M. Garon: Oui, mais où est le problème?
M. Lincoln: Le problème, c'est qu'il y a une confusion
possible entre l'article 1 et l'autre partie qui a trait spécifiquement
à l'aquaculture.
M. Garon: Non. Ici, on dit bien qu'on est dans la pêche
commerciale, le commerce des produits aquatiques pêchés dans les
eaux sans marée du domaine public. C'est ce que l'on dit. Au chapitre I,
c'est dans ce cadre-là que l'on est, c'est-à-dire les
pêcheries commerciales dans les eaux sans marée du domaine public.
Essentiellement, il s'agit des lacs et des rivières en amont du pont de
Trois-Rivières. En aval du pont de Trois-Rivières, on
considère qu'on est dans les eaux à marée du fleuve
Saint-Laurent. Il s'agit essentiellement des lacs et des rivières et...
Je pense que la rivière Saguenay est à marée... Elle est
à marée un bout, n'est-ce pas?
Une voix: Oui, jusqu'au pont de Chicoutimi.
M. Garon: La rivière Saguenay, elle, est à
marée.
M. Ciaccia: M. le ministre, est-on d'accord que l'article 1 ne
confère aucun droit au gouvernement ou au ministère...
M. Garon: Oui.
M. Ciaccia: ...et que ce n'est qu'un article disant que l'on va
établir un programme annuel et qu'on fige la structure de votre
programme? Mais cela ne...
M. Garon: Cela ne me donne pas de droits.
M. Ciaccia: ...vous donne pas de droits. Vous êtes d'accord
avec cela?
M. Garon: Cela limite les droits.
M. Ciaccia: Non, cela ne limite pas les droits, cela limite le
programme...
M. Garon: Par rapport à l'article 6.
M. Ciaccia: Si cela ne vous donne pas le droit, cela limite le
programme que vous allez soumettre au gouvernement. L'article 1 ne vous donne
pas de droits. Cela limite le programme. Cela fige... N'utilisons pas le mot
"fige", cela décrit le programme que vous allez soumettre au
gouvernement.
M. Garon: Vous êtes avocat? M. Ciaccia: Des fois,
oui.
M. Garon: Je dirais, à ce moment, que, si on disait que
les- définitions au début d'une loi ne donnent pas de droit,
elles sont utiles pour la compréhension de la loi. On s'y
réfère.
M. Ciaccia: Oui.
M. Garon: Alors, la définition, souvent, peut être
le facteur limitatif dans la loi. Ici, le facteur limitatif dans cette loi...
Remarquez bien que ce n'est pas parce que j'aime outre mesure l'article 1,
c'est ce qui va nous obliger à avoir des quotas plus restreints de
pêche commerciale. C'est l'article qui vient limiter.
M. Ciaccia: Oui. Parce que, si on interprète l'article 1
strictement comme étant le contenu d'un programme que vous allez
soumettre au gouvernement, je ne vois pas vraiment de problème dans ce
sens-là du point de vue juridique, parce que cela ne vous confère
pas le droit. On ne peut pas dire: Eh bien, il va y avoir des conflits avec le
gouvernement fédéral et avec d'autres lois, parce que c'est
strictement le programme que vous allez soumettre au gouvernement. Alors, dans
ce sens-là, ce n'est pas nécessaire de l'inclure, d'après
moi, comme article parce que cela soulève des ambiguïtés. Ce
ne sont pas que des avocats qui vont lire ce projet de loi. Ils peuvent
interpréter que cela vous donne certains droits.
M. Lincoln: M. le ministre, j'ai envie de vous poser...
M. Garon: J'aurais un amendement à vous proposer.
M. Lincoln: ...une question, pour revenir à celle dont on
discutait. Prenez le communiqué de presse que vous avez émis.
Vous expliquez, en fait, ce qui est dans le projet de loi.
M. Garon: Je ne l'ai pas.
M. Lincoln: Je vais vous le lire. Je vais vous le passer pour
être sûr que... "Le plan de pêche annuel qui sera
élaboré par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche constitue la clé de voûte de la mise en valeur des
ressources biologiques dans les eaux intérieures. Dans ce plan, la
priorité sera accordée aux besoins de l'espèce
visée pour sa reproduction, à la pêche de subsistance,
à la pêche sportive et à la pêche commerciale."
M. Garon: Quatrièmement.
M. Lincoln: Oui. N'est-ce pas cela même qui crée
des... Cela parle de pêche commerciale ici. Pourquoi cet article 1?
Est-ce que cela ne cause pas de confusion dans l'esprit des gens que l'article
1...
M. Garon: Non. Si on laissait faire...
M. Ciaccia: Voulez-vous que je vous dise ce que l'article vous
permet de dire? Je vais vous dire mon idée.
M. Garon: Oui.
M. Ciaccia: L'article 1 vous permet de dire: Vu qu'on
réclame juridiction là-dessus, c'est à nous. Si vous
voulez le dire pour des fins politiques et constitutionnelles juridiques, vous
pouvez dire: Non, non, on ne se donne pas le droit, c'est strictement le
contenu de notre programme qu'on soumet au gouvernement. Cela vous permet de
jouer sur les deux tableaux.
M. Garon: Ce n'est pas cela.
M. Ciaccia: Peut-être que ce n'est pas votre intention, je
ne le dis pas, mais cela permettrait une interprétation de ce genre, en
disant: Écoutez...
M. Garon: J'aurais aimé que vous soyez un petit oiseau
pour entendre tous les débats qu'il y a eu là-dessus. Vous
verriez que ce n'est pas cela.
Je peux bien aller plus loin et révéler certaines choses,
même si je blesse certaines susceptibilités. Développer la
pêche commerciale n'a jamais été véritablement une
grande préoccupation de la part des gens du ministère du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche. Ces derniers s'intéressent davantage
à la pêche sportive ou au loisir. À juste titre; c'est leur
vocation.
Nous voulons développer la pêche commerciale. J'ai
demandé ceci au gouvernement: Donnez le pouvoir de présenter un
programme de pêche commerciale par les gens qui veulent développer
la pêche commerciale. Et si ne s'entendent pas entre eux les gens de la
pêche commerciale et ceux de la pêche sportive, le gouvernement
arbitrera. C'est évident qu'on va essayer de s'entendre. Cela va
créer une pression pour s'entendre, nous voulant en faire et eux voulant
en faire pour la pêche sportive. Sauf, par exemple si ces gens
établissent un quota de pêche sportive dans un lac à 60 000
livres ou à 40 000 livres, et les sportifs en ont pris seulement 10 000;
ils vont dire que les pêcheurs sportifs ne sont pas
intéressés à prendre tout le potentiel de ce lac. Je
voudrais permettre à un ou deux pêcheurs commerciaux d'aller
prendre l'excédent que les pêcheurs sportifs ne prennent pas.
M. Ciaccia: Vous venez de soulever d'autres problèmes
auxquels on n'avait même pas pensé. Si je voulais être
malin, je pourrais dire que vous utilisez le projet de loi pour essayer de
résoudre les problèmes entre les ministères, dans un
certain sens, parce qu'il peut y avoir un conflit entre le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche et le ministère...
M. Garon: Oui, sauf que l'article 2...
M. Ciaccia: ...de l'Environnement; c'est beaucoup plus
global.
M. Garon: ...dit: "Le programme est soumis à l'approbation
du gouvernement qui peut le modifier." Le programme commercial.
Concrètement, ce que le gouvernement souhaite, c'est que les deux
s'entendent sur un programme. On dit que, dans le lac Témiscaminque, le
programme de la pêche commerciale est tant de pêche de telle
espèce et que, dans le plan de pêche, ça se retrouve tel
quel, parce qu'on se sera entendu ensemble. Si on ne s'est pas entendu, il y
aura arbitrage.
M. Ciaccia: C'est seulement un problème additionnel, en
plus du problème constitutionnel, en plus du problème
limitatif.
M. Garon: Ces choses sont importantes parce que notre rôle
dans le secteur des pêches est le développement de la ressource
pour des fins commerciales. Tandis que le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche veut faire un développement de la ressource
pour des fins de loisir. Alors, on a intérêt à s'entendre
ensemble en déterminant quel quota on va attribuer à chaque
fin.
M. Lincoln: Parlons donc de la truite. Vous dites que vous allez
commercialiser la truite mouchetée, n'est-ce pas?
M. Garon: Ce n'est pas là-dedans.
M. Lincoln: Ce n'est pas là-dedans, mais vous en avez
parlé dans des communiqués. J'ai lu cela dans les journaux.
M. Garon: C'est dans le projet de loi 49.
M. Lincoln: D'accord, c'est votre intention. C'est ce que je
voulais dire. Mais la truite arc-en-ciel...
M. Garon: Mon intention, c'est de tout commercialiser.
M. Lincoln: D'accord. La truite arc-en-ciel n'est-elle pas
commercialisée par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche en ce moment?
M. Garon: Non, développer les ressources. J'ai
présentement un projet. Quelqu'un veut produire de l'achigan. Pourquoi
pas? Pourquoi ne vendrions-nous pas de l'achigan? Quelqu'un qui aime l'achigan
et qui n'aime pas aller à la pêche à l'achigan doit en
acheter dans une épicerie pour le manger chez lui. Pourquoi ne
pourrait-on pas manger du brochet élevé? Pourquoi ne pourrait-on
pas manger du doré?
M. LeMay: Le caviar du lac Abitibi.
M. Garon: De l'esturgeon, toutes les espèces. Mon
idéal serait d'élever même des écrevisses.
M. LeMay: Des cuisses de grenouilles.
M. Garon: Un restaurateur me disait qu'il avait eu des
écrevisses. Il ne m'a pas dit si elles avait été
pêchées sportivement ou commercialement dans un endroit où,
apparemment, au Québec, on a de belles grosses écrevisses. Les
restaurants en France ou ailleurs, dans d'autres pays, apprêtent les
écrevisses. Les sportifs ne pêchent pas vraiment les
écrevisses. Pourquoi n'y aurait-il pas une pêche aux
écrevisses et ne pourrait-on pas manger des écrevisses au
Québec? Une belle assiette d'écrevisses. Cela prend quelqu'un de
patient, par exemple.
M. Ciaccia: On est en train de changer le débat un peu.
(17 h 45)
M. Lincoln: Une dernière question sur l'article 1. On va
laisser un petit peu les écrevisses. Je regardais les résolutions
du sommet économique de la région de la capitale, Québec,
qui s'est tenu en octobre. On disait qu'une des résolutions était
que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation reconnaisse officiellement le syndicat des
pisciculteurs, que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation permette à la Régie des marchés agricoles
de rendre des décisions en conformité avec les demandes
légitimes des producteurs et que le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche légalise la commercialisation de la truite
mouchetée d'élevage.
Ce que vous dites maintenant, c'est que tout ce qui va être de la
commercialisation va dépendre de vous. Est-ce que vous pourriez nous
dire si votre collègue du ministère du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche est d'accord là-dessus?
M. Garon: Oui.
M. Lincoln: Alors, ce sera la juridiction. Il va s'occuper
purement de l'élevage et de la pêche sportive et vous, de tout ce
qui a trait à la commercialisation des produits dans tous les
domaines.
M. Garon: Non. Les produits de la pêche commerciale ou de
l'aquaculture commerciale.
M. Lincoln: C'est-à-dire que tous les programmes
commerciaux qui ont déjà été établis,
commencés par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche vont cesser à partir de ces lois 48 et 49.
M. Garon: Pour le renouvellement des permis l'an prochain, mais
les permis de pêche commerciale dans les eaux sans marée vont
être émis par le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. Les gens vont nous passer leurs listes et
on va... Écoutez, par ces deux lois, on va être appelés
à travailler beaucoup plus ensemble que dans le passé.
M. Lincoln: Qu'arrive-t-il avec les plans conjoints de votre
ministère qui sont cédés? Par exemple, toute la gestion de
leurs propres ressources est cédée à des organisations
spécialisées comme, par exemple, les pisciculteurs. Est-ce qu'il
y a conflit par cette loi, vu que vous avez un droit de contrôle sur la
gestion des ressources et tout? Est-ce que cela aussi n'apporte pas une nette
situation de conflit possible?
M. Garon: C'est-à-dire que s'il s'agit de plans de ferme,
ce sera le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. S'il s'agit
d'élevage du poisson, pour mettre la truite sur le marché, par
exemple, et si c'est autorisé par un règlement du gouvernement en
vertu de la loi 49, ce sera nous qui allons nous en occuper. Ce ne sera pas
automatique. Cela prendra un règlement du gouvernement.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, j'avais
compris que vous aviez un amendement à proposer à l'article
1.
M. Garon: L'article 1 sera modifié par le remplacement,
dans la deuxième ligne du paragraphe troisième, du chiffre "2"
par le chiffre "3". En bas. C'est inscrit: En vertu de l'article 2. Cela va se
lire: En vertu de l'article 3.
M. Ciaccia: Vous changez l'article 2 par l'article 3.
Le Président (M. Desbiens): Changer le chiffre 2 par le
chiffre 3. C'est cela.
M. Ciaccia: Un gros changement. On va recommencer le
débat.
M. Garon: Je ne sais pas si c'est une erreur d'écriture ou
non.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Lincoln: Un instant.
M. Garon: Je lis encore. L'article 1 est modifié par le
remplacement, dans la deuxième ligne du paragraphe 3, du chiffre 2 par
le chiffre 3.
Le Président (M. Desbiens): Vous n'avez pas de texte.
M. Ciaccia: C'est l'article 3 qui donne au ministre le droit de
concéder le droit de pêche à des fins commerciales. C'est
pour cela que vous avez fait ce changement. C'est une erreur franchement, la
référence à l'article 2. L'article 2 dit strictement que
le programme est soumis à l'approbation du gouvernement qui peut le
modifier. C'était une mauvaise référence, une
référence erronée.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'amendement est
adopté? M. le député de Nelligan.
M. Lincoln: Avant de voter sur l'amendement, on voudrait poser
une autre question au ministre. Je reviens à cette question de vos
ententes ou des conflits possibles avec le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche. Si vous regardez à l'article 1, vous dites:
"Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en
tenant compte du plan de gestion de la pêche établi en vertu de la
Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune..." Ce plan
dépend de l'autre ministère. Qu'est-ce qui va arriver si, par
exemple c'est une question
subjective, d'opinion - vous allez, selon les critères de votre
collègue, au-delà de cette loi? Est-ce que ce n'est pas
créer une situation de conflit? Il administre la Loi sur la conservation
et la mise en valeur de la faune. Du fait même que vous parliez de cela,
ne revenez-vous pas à toute la question de la juridiction du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche?
M. Garon: En tenant compte du plan et qu'il doit y en avoir un,
en voulant dire: Tu fais ton programme, cela va s'inscrire là-dedans,
c'est évident que cela peut être conflictuel, mais que
voulez-vous? Cela ne peut pas l'être plus que ça ne l'est dans le
moment.
M. Ciaccia: Excepté que là vous légalisez le
conflit.
M. Garon: Non.
M. Ciaccia: Vous rendez évident qu'il y a un conflit parce
qu'il faut que vous incluiez dans le... L'article 1 est superfétatoire,
vous n'en aviez pas besoin. Vous pouviez préparer les programmes que
vous vouliez et les soumettre au gouvernement; il n'y a rien qui vous
empêche de faire cela. L'article 1 ne vous donne pas plus de droits.
Chaque ministre peut faire, dans son ministère, des programmes, peut
suggérer toutes sortes de programmes au gouvernement. Vous dites
même, à l'article 2, qu'il peut modifier... Évidemment que
le gouvernement va pouvoir modifier votre programme.
J'ai l'impression que ces deux articles ont été mis
là pour d'autres fins. Il doit y avoir des conflits réels et on
dirait qu'on les concrétise, qu'on les rend plus évidents en
incluant les articles 1 et 2 dans votre projet de loi.
M. Garon: Quand on était étudiant, on avait des
cours sur la philosophie du droit. Qu'est-ce que le droit? Il y a des gens qui
disent que le droit doit être éducatif pour montrer la voie. Ici,
je pense que le projet de loi indique en même temps, dans le cadre des
différentes juridictions, de quelle façon le gouvernement voit
les aménagements de juridiction les uns par rapport aux autres, en
tenant compte aussi du gouvernement fédéral. D'autre part, il y a
la juridiction du Québec et sa répartition entre plusieurs
unités administratives.
Plutôt que d'avoir des choses dans des directives, des choses
internes que les gens ne comprendraient pas mieux, ici cela indique le
cheminement de tout cela. Le programme - c'est un véritable programme
-de pêche commerciale sera soumis à l'approbation du gouvernement,
à l'article 2. Celui-ci pourra le modifier ou refuser le programme. On
dit qu'il peut le modifier. Il est évident qu'on doit comprendre que, si
le programme de pêche commerciale présenté par le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est identique
à la partie commerciale du programme qu'on trouve dans le plan de
pêche, il n'y aura pas de problème. Par ailleurs, s'il arrivait
qu'il n'y ait pas entente là-dessus, le gouvernement pourra trancher et
le modifier.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Nicolet a demandé la parole depuis un moment.
M. Beaumier: En fait, dans ce dossier, on parle de conflits
éventuels, mais actuellement, avant qu'il y ait des conflits, il y a des
problèmes. Je pense, par exemple, aux pêcheurs commerciaux du lac
Saint-Pierre. Ils sont 42; il y a 42 permis de pêche qui relèvent
du ministère pour l'instant. Avant cette loi-là, ils relevaient
du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Les
pêcheurs commerciaux, parce qu'ils sont en haut du pont de
Trois-Rivières, c'est-à-dire du pont de Trois-Rivières en
montant jusqu'à Montréal et plus haut, cela relève du
MLCP. Or, cela relève actuellement... Même la pêche sportive
relève du même ministère et il y a problème, il y a
conflit, c'est-à-dire qu'il faut décider quand même parce
que ce que demandent les pêcheurs commerciaux du lac Saint-Pierre, c'est
effectivement d'avoir un plan de pêche qui les sécurisera d'une
année à l'autre.
En ce sens-là, si j'ai bien compris le projet de loi qui est
excellent de ce côté-là, c'est le ministère de
l'Agriculture qui va établir ce plan de pêche. Cela correspond
exactement aux besoins et aux demandes des pêcheurs commerciaux. Par la
suite, il y a évidemment les pêcheurs touristiques, les
pêcheurs sportifs. Or, le problème existe actuellement. Donc, ce
n'est pas un conflit qui va être créé. Il y a
déjà des choix à faire à l'intérieur d'un
même ministère. Mais que ce soit le ministère de
l'Agriculture ou le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, cela peut régler davantage et mieux le problème,
parce que les pêcheurs commerciaux seront assujettis à un plan de
pêche qui leur assurera, d'une année à l'autre - j'allais
dire quasiment de génération en génération, parce
que ce sont des permis fermés - la sécurité de pouvoir
exercer leur métier d'une façon rentable. Alors, c'est un
problème qui existe déjà et on aura de meilleures chances
de le régler de cette façon.
M. Lincoln: Je conçois avec le député qu'il
y aura toujours un problème de juridiction interministérielle.
Cela se passe dans tous les gouvernements. Or, nous, nous
avons vécu, mon collègue et moi, les problèmes
entre les ministères économiques: le ministère de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, le ministère du Commerce
extérieur, le ministère des Affaires intergouvernementales. Ils
ont résolu ces choses-là par des protocoles d'entente, dans
certains cas, qui situent exactement les...
Ce que je ne comprends pas, je le demande au ministre: Que fait cet
article 1 que vous n'aviez pas avant? Vous nous avez cité le
règlement fédéral, qui vous donne des pouvoirs
délégués. Vous nous dites même qu'en mettant dans la
loi le sous-paragraphe 1, cela restreint même votre marge de manoeuvre.
Selon ce que vous nous avez dit, vous faites cela de façon
délibérée.
Deuxièmement, vous admettez qu'il y a ce problème
conflictuel possible avec le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche. Vous dites, en tenant compte de sa loi, qu'il a toujours
juridiction sur sa loi de la faune. Est-ce réellement la façon de
décider cela? Parce que tout ce que vous faites ici, c'est de parler de
l'élaboration d'un programme. Est-ce que ce n'est pas bien mieux fait
dans des documents comme le protocole d'entente, où se situent
exactement les limitations de votre gestion et de sa gestion. Cet article de
loi ne change rien fondamentalement aux lois constitutives, cela ne change rien
aux pouvoirs que vous avez ou n'avez pas.
M. Garon: Actuellement, dans les pêches commerciales dans
les eaux sans marée, nous n'y sommes pas du tout.
M. Ciaccia: Mais ce n'est pas l'article 1 qui vous met dedans.
Peut-être l'article 3, l'article 5, l'article 6 et les autres, mais pas
l'article 1.
Je voudrais seulement soulever une autre question pour la
réflexion du ministre, parce que nous devons suspendre nos travaux
bientôt. M. le ministre, vous parlez ici de tenir compte du plan de
gestion de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Il y a
aussi une autre entente et une autre loi qui est la loi de la Baie-James.
On a reçu aujourd'hui une copie d'un télégramme qui
était adressé au premier ministre, au ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche ainsi qu'à moi-même
spécifiquement sur les conflits que les autochtones pensent susceptibles
de se produire entre la loi sur la faune qui sera adoptée soi-disant
demain et leurs droits de chasse et de pêche. (18 heures)
M. Garon: En deuxième lecture.
M. Ciaccia: Oui, en deuxième lecture. On pourrait
peut-être clarifier cela en commission parlementaire. Je voulais porter
à votre attention que vous pourriez peut-être faire
vérifier cela par vos conseillers. Est-ce que vous ne deviez pas aussi
tenir compte de la convention de la Baie James? Dans cette convention... C'est
plus que d'en tenir compte, parce que, dans ce cas-ci, il y a des droits
spécifiques qui sont accordés. Ce sont des droits de pêche
commerciale, de pourvoirie...
M. Garon: Pour la pêche commerciale.
M. Ciaccia: ...mais il y a des droits de pêche dans la
convention de la Baie James. Peut-être que demain, quand on continuera de
discuter du projet de loi, vos conseillers pourraient nous...
M. Garon: Actuellement, on a un projet de recherche très
important dans le Grand-Nord avec les autochtones, de 600 000 $ ou 700 000 $,
avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation et Makivik...
M. Ciaccia: Oui, Makivik, c'est possible.
M. Garon: ...pour le développement de la pêche
commerciale. Cela est dans le respect de ces cadres-là.
M. Ciaccia: Je soulevais le problème, parce que, quand
vous vous référez à la loi sur la faune, vous ne parlez
pas des lois qui ont été adoptées par l'Assemblée
nationale sur la convention de la Baie James qui, elle aussi, se
réfère aux droits de pêche des autochtones.
Peut-être que vos conseillers pourraient regarder cela et qu'on
pourrait en discuter demain?
Le Président (M. Desbiens): Avez-vous l'intention
d'adopter l'article 1 ce soir?
M. Lincoln: Non, je crois qu'on va laisser faire.
M. Ciaccia: On va continuer demain.
Le Président (M. Desbiens): II est 18 heures. La
commission élue permanente de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 02)