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(Dix heures vingt-cinq minutes)
Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous
plaît;
La commission permanente de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation reprend ses travaux dans le but d'étudier les
crédits budgétaires pour l'année 1983-1984.
Les membres de la commission sont: M. Baril (Arthabaska), M. Beaumier
(Nicolet), M. Beauséjour (Iberville), M. Dupré (Saint-Hyacinthe),
M. Gagnon (Champlain), M. Garon (Lévis), M. Houde (Berthier), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Lincoln (Nelligan), M.
Mathieu (Beauce-Sud), M. Vallières (Richmond).
Les intervenants sont: Mme Bacon (Chomedey), M. Bisaillon
(Sainte-Marie), M. Blouin (Rousseau), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M.
Dubois (Huntingdon), Mme Juneau (Johnson), M. Lachance (Bellechasse), M. LeMay
(Gaspé), M. Middlemiss (Pontiac) et M. Picotte (Maskinongé).
Lorsque nous avons ajourné nos travaux, hier, la parole
était à vous, M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Garon: Je m'excuse d'être en retard un peu ce matin;
j'avais des appels téléphoniques urgents à faire. C'est un
peu la cause de ces quelques minutes de retard. On avait convenu hier de
commencer avec la Commission de protection du territoire agricole parce que M.
Blain doit siéger aujourd'hui. Nous pourrons étudier cette partie
immédiatement. Habituellement, ce n'est pas trop long. Je dirai tout
simplement un mot d'introduction qui pourra intéresser les gens de la
commission.
M. Mathieu: Avant l'introduction, M. le Président, si vous
permettez.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Je voudrais juste dire qu'on se réserve le
droit de revenir à notre échange d'hier soir parce que je vous ai
posé beaucoup de questions.
M. Garon: D'accord.
M. Mathieu: Ce matin, cela me fait plaisir de rendre service
à M. Blain et peut-être aussi à M. Lavigne et à M.
Moreau, on verra. Il est entendu qu'on reviendra à nos propos plus
tard.
M. Garon: À nos propos, oui, j'avais oublié.
M. Mathieu: C'est-à-dire que je ne veux pas qu'on commence
par cela ce matin, mais je veux me garder le privilège qu'on y
revienne.
M. Garon: On reviendra à nos propos.
M. Mathieu: S'il vous faut deux nuits, on va vous en laisser
deux.
M. Garon: Les propos sont là.
Le Président (M. Paré): Donc, nous
commençons avec la Commission de protection du territoire agricole.
Commission de protection du territoire
agricole
M. Garon: Je pense qu'un phénomène marquant qu'il
est important de signaler, c'est qu'il nous reste moins d'une dizaine de
municipalités avec lesquelles on doit terminer les négociations
pour le décret. Dans l'ensemble des municipalités, les
négociations sont terminées. On n'a pas encore fait de bilan,
mais on en fera possiblement un au printemps, au cours du mois de juin
peut-être, pour indiquer dans combien de municipalités les
négociations sont terminées, le nombre d'ententes, le pourcentage
des zones agricoles et non agricoles, la quantité de population qui peut
demeurer dans les zones blanches, et faire un bilan du travail qui a
été effectué jusqu'à maintenant par la
commission.
Je pense que c'est le fait marquant de la commission à ce
moment-ci, qui a fait un travail un peu exceptionnel et qui fait l'envie de
plusieurs pays dans le monde. Vous seriez surpris du nombre de pays qui nous
demandent des informations sur la commission et qui envient le Québec
d'avoir pu réaliser une protection du territoire agricole aussi
efficace. La seule chose qu'on déplore, nous, c'est que, si cela avait
été fait dix ou quinze ans auparavant, au début des
années soixante, une grande partie des
meilleurs sols agricoles du Québec qui a été
détériorée ne l'aurait pas été et serait en
culture, près des grands centres urbains, maintenant recouverts
d'asphalte. C'étaient nos meilleurs sols.
Si vous regardez les budgets 1982-1983 et 1983-1984, il y a une baisse,
du budget de 26 000 000 $ à 23 000 000 $. Vous constatez qu'au programme
gestion du territoire agricole, la grande partie du budget va au remboursement
de taxes foncières qui seront de 17 000 000 $. La commission
elle-même voit ses dépenses de fonctionnement diminuer de 5 356
000 $ à 4 720 000 $. C'est que le nombre de fonctionnaires va diminuer,
malgré les augmentations de salaire en cours d'année. Le nombre
va diminuer, parce que le travail de négociation avec les
municipalités est terminé et qu'il va rester maintenant la mise
à jour et possiblement les discussions avec les MRC lors de leurs plans
d'aménagement. Il est possible que les MRC souhaitent que plusieurs
terres qui sont dans la zone blanche deviennent zonées pour
l'agriculture, pour concentrer davantage leur développement.
Je disais tout à l'heure qu'il y avait des zones blanches qui
étaient assez grandes, que plusieurs municipalités dans leurs
négociations ont souhaité conserver des poumons, comme il les
appelaient. Je ne sais pas si ce sont des poumons ou autre chose, mais il
s'agit d'une place pour l'expansion et, connaissant l'accroisssement de la
population au cours des prochaines années au Québec, qui est
à peu près nulle - si on atteint 7 000 000 d'ici l'an 2000, cela
va être tout - d'après des démographes, cela veut dire 600
000 de population et cela ne prend pas beaucoup de terrain pour loger cette
population. Alors, on aura moins besoin d'expansion territoriale que plusieurs
municipalités l'avaient prévu initialement. Si on additionnait
les prévisions de chacune des municipalités du Québec
concernant leur population en l'an 2000, on se retrouverait avec une population
qui frôlerait les 20 000 000 de personnes. C'est pour cela qu'au fond, la
protection du territoire agricole vient, d'une façon plus
réaliste, forcer un peu à établir d'une façon plus
précise les besoins réels d'expansion territoriale.
Je ne veux pas prendre plus de temps. Vous remarquerez dans le budget
qu'on aura à voter, au programme 7, que la commission diminue ses
crédits en 1983 par rapport à 1982 parce qu'il y a moins de
personnes qui vont travailler à la commission. La protection du
territoire agricole aussi, qui avait une équipe qui travaillait dans la
négociation où des avis étaient donnés -surtout la
partie cartographie des zones, des plans provisoires - ce personnel va
être affecté davantage maintenant à l'expertise où
vous retrouvez des localisations pour ceux qui demandent des conseils pour
avoir une meilleure localisation, soit pour les routes, soit pour les lignes
d'Hydro-Québec, soit pour les gazoducs, soit pour l'implantation
d'industries importantes, et à la rencontre des gens de la direction de
la protection du territoire agricole pour parler avec eux, trouver de meilleurs
emplacements; et aussi ils pourront travailler conjointement, de plus en plus,
dans des problèmes d'environnement. De quelle façon mieux
protéger le territoire agricole et également mieux
protéger l'environnement? C'est le même service qu'on appelle
protection du territoire agricole, puisque protéger le territoire et
protéger l'environnement, pour nous, cela fait partie des mêmes
objectifs.
Enfin, troisièmement, vous voyez qu'il y a une diminution du
remboursement des taxes foncières qui va passer de 18 900 000 $ à
17 000 000 $ et l'une des principales raisons, c'est que l'augmentation de 1000
$ à 3000 $ pour les agriculteurs qui sont reconnus par la loi fait qu'il
y a des remboursements qui ne sont pas effectués à des gens qui
ont plutôt un grand jardin qu'une ferme. Cela économisera des
remboursements de taxes foncières.
On se prépare aussi, au cours de cette année, à
réviser la question de l'évaluation foncière, le
remboursement des taxes foncières pour que cette mesure soit plus
efficace et plus incitatrice à la culture et qu'elle serve à
rembourser ceux qui pratiquent véritablement l'agriculture plutôt
que ceux qui achètent des terres pour y faire couper le foin de temps en
temps. On veut utiliser ces sommes importantes - quand on parle de 17 000 00 $
ou 18 000 000 $, c'est beaucoup d'argent - pour inciter à l'agriculture
et pour apporter des changements.
Nous avons fait des enquêtes et des études à ce
sujet et il semble que cette législation concernant le remboursement des
taxes foncières, municipales et scolaires aux fermes pourrait être
plus efficace.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Mathieu: M. le Président, puis-je d'abord vous
mentionner que j'adhère totalement à l'esprit d'une loi de la
protection du territoire agricole? Je pense que c'est une chose
nécessaire. Je suis d'accord avec le ministre quand il dit que cela
aurait dû être fait avant. J'adhère également
totalement à une déclaration du ministre, rapportée dans
le journal Le Devoir du 20 juin 1981, dont je lis la manchette: "Québec
envisage d'assouplir et de régionaliser l'application de la loi sur le
zonage agricole." L'année dernière, nous avons eu une
modification et le ministre n'a ni assoupli ni régionalisé sa
loi. Il disait: "II
était un peu absurde de vouloir appliquer la loi exactement de la
même façon en Abitibi et à Saint-Hyacinthe."
M. le Président, cela est rapporté par M. Jean-Claude
Picard dans le Devoir du 20 juin 1981. Je n'ai pas de présomption...
M. Garon: Je n'ai pas dit "il était". Il peut y avoir des
mots...
M. Mathieu: "II était un peu absurde... Une voix:
II était mal cité.
M. Mathieu: ...de vouloir appliquer la loi..." Vous commencez
à être mal cité, cela devrait vous inquiéter, M. le
ministre.
Là-dessus, je voudrais vous dire que j'adhère à
cette déclaration qu'il est absurde d'appliquer la loi exactement de la
même façon en Abitibi et à Saint-Hyacinthe. Dans mon
comté, il y a une paroisse qui s'appelle Saint-René où il
y a un agriculteur. Après le zonage, il n'y en aura pas 40, il n'y en
aura qu'un et celui-là ne peut pas prendre de l'expansion, il a un quota
dans tout.
M. Garon: Qu'est-ce qu'il produit?
M. Mathieu: II produit du lait. Qu'est-ce que vous
protégez à Saint-René? Vous protégez des friches et
on voit un phénomène de retour à la terre en friche. Dans
une petite paroisse comme celle-là, je voudrais vous sensibiliser
à ce point parce que je trouve cela injuste. Les gens viennent d'obtenir
un chemin en asphalte il y a quatre ou cinq ans, sept ou huit ans, à
force de se battre. Ils ont les services d'électricité et de
téléphone.
Une voix: ...
M. Mathieu: Vers 1975. Ce n'est pas vous autres.
M. Garon: II a dit quatre ou cinq ans et il s'est
dépêché de se reprendre et de dire sept ou huit ans.
M. Mathieu: C'est sous M. Mailloux, M. le Président. Il y
a tellement longtemps que vous êtes là qu'on penserait que cela
fait 30 ans.
Une voix: M. Mailloux...
M. Garon: Ce n'est pas le chemin qu'on a inauguré en
1979?
M. Mathieu: Non, non, ce n'est pas cela, il a été
inauguré bien avant vous autres.
Les gens qui possèdent ces lots aimeraient donner à leurs
enfants une parcelle de terrain. La terre est inculte, il n'y a pas
d'agriculteur qui cultive. Les gens sont à huit ou dix milles de
Saint-Georges. Si on bâtit trois, quatre ou cinq nouvelles
résidences par année, après 20 ans, cela en fait 60, cela
renforce la municipalité et cela assure une relève.
Dans un cas semblable, je suis d'accord. Dans les grands centres ruraux
comme Saint-Hyacinthe, L'Assomption, Richelieu et même dans la
vallée de la Chaudière, dans le bassin, il faut être plus
exigeant, mais, quand vous arrivez dans les terres qui ne sont pas
cultivées parce qu'elles ne sont pas cultivables, vous protégez
des friches.
Quand vous dites qu'il est absurde de vouloir appliquer la loi
exactement de la même façon en Abitibi qu'à
Saint-Hyacinthe, je suis d'accord avec vous et quand vous dites que vous voulez
régionaliser l'application de la loi, je suis d'accord avec vous, mais
pour livrer la marchandise vous avez dit: On nommera des commissaires qui
viennent des régions, mais ils siégeront quand même
à Québec. Il me semble qu'il y aurait moyen de
décentraliser...
M. Garon: On va engager des cowboys...
M. Mathieu: ...sur ce sujet-là. C'est très bon, M.
le Président. C'est un très bon recherchiste. Il y aurait moyen
d'en arriver à une certaine régionalisation...
M. Garon: II faudrait qu'il soit recherchiste dans l'Ouest.
M. Mathieu: La première question que je voudrais vous
poser...
M. Garon: II lui manque les éperons et la cravache.
M. Mathieu: La première question. Est-ce que vous
songez... Je prends une autre déclaration du ministre - c'est mon
recherchiste qui me fournit cela, il fait du bon travail; vous avez trop
parlé, M. le ministre - du 2 octobre 1978, lors d'une conférence
de presse. Avez-vous compté combien vous en aviez de faites?
M. Garon: Mais là, voyez-vous, je n'en fais plus à
Québec et ils se plaignent. M. Laplante se plaint que je n'en fais pas
assez.
M. Mathieu: Oui. En tout cas, vous pouvez toujours en venir
à les satisfaire. Je cite: "II va y avoir un droit d'appel. Le zonage ne
sera pas pour l'éternité. Ce sera pour une période de
temps." C'est vous qui disiez cela. "Il va être fait d'une façon
permanente, mais susceptible d'être modifié selon les besoins.
Cela ne sera pas figé dans le ciment indéfiniment. Je pense que
la protection des terres agricoles va amener
une augmentation de la valeur des terres et possiblement aussi d'autres
terres qui seront utilisées pour des fins non agricoles, ce qui baisse
la valeur du sol. Au fond, ce sont les risques encourus par le sol."
M. Garon: Montrez-moi donc, pour voir. C'était à
quelle date?
M. Mathieu: C'était le 2 octobre 1978. Dans un des
nombreux volets où on parle de vous à la bibliothèque et
que je vous exhibe. Il y a trois volumes d'à peu près deux pouces
d'épaisseur. Ils s'intitulent: Discours, conférences de presse et
communiqués d'hommes politiques québécois.
M. Garon: Oui, mais j'aimerais savoir qui a dit cela parce que
cela ne correspond pas du tout. Ce n'est pas le genre de paroles que je
tenais.
M. Mathieu: M. le Président, hier, il me disait qu'il
reniait ses propos...
M. Garon: Non, non, ce n'est pas cela.
M. Mathieu: ...et il les renie encore ce matin.
M. Garon: Ce n'est pas cela, mais j'aimerais connaître la
source. Vous ne marquez jamais la source!
M. Mathieu: Mais c'est la source: Discours, conférences de
presse et communiqués d'hommes politiques québécois. Je
vous donne le numéro de la fiche à la bibliothèque...
M. Garon: Je comprends, mais...
M. Mathieu: ...354.7140008D611, Garon, Volume I.
M. Garon: Oui, mais j'aimerais voir... Au fond, je vais vous dire
que cela fait plutôt appel, enfin, je pense, quand vous vous
référez à cela, qu'on parlait plutôt du zonage,
puisqu'il y a deux zonages, soit les plans provisoires et les plans permanents.
Alors, quand je dis que le zonage ne sera pas pour l'éternité,
que ce sera pour une période de temps, je parle du plan provisoire. Il
va être fait d'une façon permanente après, mais il est
susceptible d'être modifié selon les besoins. Il peut y avoir des
demandes individuelles.
M. Mathieu: En tout cas, êtes-vous d'accord...
M. Garon: C'est cela, mais je le prends dans le contexte. Vous me
sortez une phrase...
M. Mathieu: Je prends vos propos. Êtes-vous d'accord que
c'est absurde?
M. Garon: Quoi?
M. Mathieu: De zoner de la même manière le sol en
Abitibi et à Saint-Hyacinthe? Vous l'avez dit. Maintenez-vous cet
énoncé?
M. Garon: Ce n'est pas ce que je dis. Je dis que le bon sol de
Saint-Hyacinthe et celui d'Abitibi vont être protégés de la
même façon.
M. Mathieu: Oui, mais le sol inculte?
M. Garon: Le sol inculte, on n'a pas à le protéger
plus à Saint-Hyacinthe qu'en Abitibi.
M. Mathieu: Oui, mais quand vous disiez...
M. Garon: Voulez-vous dire que la Beauce, c'est inculte?
M. Mathieu: II y a des régions incultes et il y a des
régions prospères. Mais quand vous disiez: "II est absurde de
vouloir appliquer la loi exactement de la même façon en Abitibi et
à Saint-Hyacinthe." Qu'est-ce que vous vouliez dire?
M. Garon: Essentiellement, ce que je veux dire c'est que, dans un
rang à Saint-Hyacinthe, on a tendance à vouloir en faire une rue.
Un rang, c'est un rang. Ce n'est pas une rue. Tandis qu'en Abitibi, on peut
avoir un rang où il manque de monde parce que la population a
diminué et, même si quelqu'un se bâtissait là, il va
simplement ajouter un peu de vie sociale. Alors, ce n'est pas le même
problème. En Abitibi, ce que je veux dire dans ce sens-là, c'est
que, dans les rangs, si vous parlez des paroisses comme Saint-Denis,
Saint-Dominique, Saint-Pie, dans ce coin-là, vous remarquez que les gens
ont tendance à vouloir s'établir dans les rangs et les rangs
deviennent des rues. C'est mauvais, cela.
M. Mathieu: D'accord avec vous.
M. Garon: Dans les régions périphériques,
souvent les gens, surtout avec la consolidation des fermes, il y en a qui s'en
vont; alors, même si quelqu'un allait s'établir dans le rang, cela
peut, selon les circonstances, ne pas causer de problèmes et, au
contraire, ajouter un peu de vie sociale.
M. Mathieu: Alors, pourquoi ne les autorisez-vous pas?
M. Garon: Bien oui. Cela peut être
autorisé.
M. Mathieu: Cela peut être autorisé, mais je pense
que cela ne l'est pas gros. Écoutez, je ne veux pas passer trop de temps
là-dessus car je voudrais également citer un article de votre
ministre délégué aux Relations avec les citoyens, M.
Lazure, où il disait, le mercredi 30 mars 1983: "L'État traite
mal ceux qu'il dessert."
M. Garon: Oui. (10 h 45)
M. Mathieu: Par exemple, il disait: "La Commission de protection
du territoire agricole souffre de lenteur administrative, de la centralisation
des décisions à Québec". Ce n'est pas blâmer le
personnel de la boîte que de dire qu'il y a un défaut dans le
système. Pourquoi le requérant de l'Abitibi, celui de la
Gaspésie et celui de la Beauce doivent-ils passer par le même
goulot d'étranglement? Avez-vous une réponse à cela?
Qu'est-ce que vous avez dit à M. Lazure, votre collègue du
Conseil des ministres?
M. Garon: Je n'ai pas lu la déclaration.
M. Mathieu: Vous n'avez pas lu cela? C'était le 30 mars
1983.
M. Garon: Dans quel journal?
M. Mathieu: Dans le journal Le Soleil. Le ministre Lazure a
convoqué une conférence de presse ou émis un
communiqué.
M. Garon: Je peux vous dire une chose. Ce qu'il serait
intéressant de faire, c'est une véritable étude de la
vitesse d'administration des tribunaux. Je suis prêt à prendre une
gageure avec vous et avec le Dr Lazure aussi. On va prendre toutes les
régies administratives du gouvernement: les tribunaux, la Cour
supérieure, la Cour provinciale, la Cour des sessions de la paix...
M. Mathieu: Vous déplacez le problème.
M. Garon: Non, attendez un peu. ...Entre le moment de la demande
et la décision, je peux vous dire à l'avance que je suis
persuadé que la Commission de protection du territoire agricole est
celle où on trouve les délais les plus courts. Mais il peut
arriver des cas particuliers où des documents n'ont pas
été fournis, où il y a des imbroglios. Cela arrive dans
beaucoup de cas, j'en connais beaucoup...
M. Mathieu: Je comprends, mais la loi le favorise. Les
fonctionnaires et les employés n'ont pas le choix de faire autrement que
de l'appliquer. Ici, on parle de "lenteur administrative, de la centralisation
des décisions à Québec". Ne songez-vous pas à
décentraliser cela en région comme vous l'avez promis?
M. Garon: C'est commencé.
M. Mathieu: De quelle manière? Par la nomination de
commissaires régionaux?
M. Garon: C'est commencé.
M. Mathieu: La décision se prend-elle en région ou
à Québec?
M. Garon: En région. La commission fait le tour des
régions.
M. Mathieu: Vous n'augmentez pas le nombre des commissaires.
L'année passée, le nombre n'a été augmenté
que de deux.
M. Garon: Oui.
M. Mathieu: Ils n'en feront pas plus...
M. Garon: On va nommer d'autres commissaires. C'est parce qu'on
prend notre temps pour bien les choisir. Tous les commissaires qui font partie
de la commission, sur le plan de l'intégrité et sur le plan du
bon jugement, ont une réputation infaillible. Je dis infaillible, c'est
peut-être fort un peu, mais une réputation enviable.
M. Mathieu: Infaillible? Ah! Ah! Ah!
M. Garon: Je ne voulais pas dire infaillible, mais enviable.
M. Mathieu: S'il me restait assez d'énergie...
M. Garon: Je pense que personne ne va contester l'autorité
morale des gens de la commission. J'aime autant les nommer moins vite et avoir
de bons commissaires.
M. Mathieu: Ce n'est pas là-dessus qu'on en est.
Même s'il y a une audience qui se tient à Sherbrooke, le personnel
de soutien, de bureau, les sténographes, tout cela est à
Québec. Donc, je n'appelle pas cela prendre des décisions en
région, même si l'audience a lieu en région. Prenez
l'administration d'autres lois; pour la Loi sur les coroners, par exemple, il y
en a vingt ou trente dans la province et la décision est prise en
région.
M. Dupré: Ils ne sont pas obligés d'aller entendre
la cause sur la terre, sur la ferme pour que ce soit bon et valable. Ils
connaissent tout de même les régions.
M. Mathieu: Comme cela, à la suite de
ce qu'a dit le ministre...
M. Garon: II y a un mythe au Québec, celui de la
décentralisation. On n'est pas aux États-Unis avec 240 000 000 de
population, nous autres, au Québec; on est 6 500 000 de population. On a
trop de personnes qui ont étudié en France et qui voudraient
copier les modèles français.
M. Mathieu: Ah, vous vous en apercevez!
M. Garon: En France, il y a 55 000 000 de population.
M. Mathieu: II s'en aperçoit!
M. Garon: On ne peut pas avoir les instances régionales de
la France au Québec, on a 6 000 000 de population. Quand vous parlez des
territoires de certaines régions au Québec, regardez la
population: parfois, elle est de 200 000 et de 300 000. C'est évident
qu'on ne peut avoir, dans chacune des régions du Québec, des
instances comme si c'était un pays autonome.
M. Mathieu: M. le Président...
M. Garon: II faut garder les pieds sur terre.
M. Mathieu: ...je suis content d'avoir sensibilisé le
ministre à la déclaration du ministre Lazure du 30 mars 1983. Il
n'en avait pas pris connaissance encore, ce qui m'étonne
énormément. Il y a quelque chose qui manque à vos
communications. Le ministre Lazure se plaint...
M. Garon: J'ai parlé avec le Dr Lazure...
M. Mathieu: Ah, vous lui avez parlé? Tantôt, vous ne
lui aviez pas parlé!
M. Garon: C'est évident, devant la commission. Je vais
vous dire une chose. Le pourcentage est à peu près le même,
50-50. Pour la commission, en gros, il y a à peu près 50% des
demandes qui obtiennent un oui et 50% des demandes qui obtiennent un non. Ceux
qui ont un oui ne rencontrent pas le Dr Lazure, n'est-ce pas? C'est un peu
comme vous; je n'entends pas parler de votre ménage; il doit marcher
correctement. Si vous tuez votre femme demain matin, on va en entendre parler.
C'est la même chose dans les cas où les gens qui vont devant la
commission...
Une voix: Belle comparaison.
M. Garon: Les gens qui vont devant la commission, ceux qui
parlent, ce sont ceux à qui on a dit non.
M. Mathieu: C'est de la provocation à la violence qui se
fait là.
M. Garon: Aussi, il y a des gens qui reviennent devant la
commission, de nombreuses fois. Quand une personne vient devant la commission
quatre, cinq et six fois, et que la commission dit non à chacune des
fois, parce qu'elle considère que ce serait ne pas protéger le
territoire agricole que d'accepter la demande, c'est évident que la
personne, dans ces cas-là, n'est pas contente. Des gens ont
acheté des terres en pensant qu'après ils auraient le droit de
construire. Je leur ai dit: Voyons donc! La loi est adoptée; vous saviez
que vous n'aviez pas le droit. Ils disaient: J'ai couru un risque. Vous avez
couru un risque et vous n'avez pas gagné. Qu'est-ce que vous voulez que
je fasse?
M. Mathieu: M. le Président.
M. Garon: C'est comme un gars qui achète un billet de
loterie. Tous ceux qui ne gagnent pas à la loterie pourraient dire au Dr
Lazure: Je ne suis pas content; j'ai acheté un billet et je ne gagne
pas. Qu'est-ce que vous voulez?
M. Mathieu: M. le Président, si vous me le permettez. Je
voudrais, étant donné que M. Blain est avec nous, parler de
l'harmonisation des lois 125 et 90, c'est-à-dire la Loi sur la
protection du territoire agricole et la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme.
Nous constatons qu'il survient des problèmes d'harmonisation,
c'est-à-dire que le droit acquis que la loi 90 reconnaissait à
certains propriétaires de se bâtir, soit s'il y avait une
résidence ou non ou encore si le titre d'acquisition était
enregistré avant le zonage; ils avaient alors jusqu'au 31
décembre 1986 pour se bâtir. On s'aperçoit, à
l'usage, que la loi 125, par l'avènement des MRC et par l'imposition du
contrôle intérimaire, etc., vient neutraliser le droit qu'avait
l'individu de se bâtir. Par exemple, un individu - j'ai un cas -
possédait un emplacement de 15 000 pieds carrés avant le zonage
agricole. Il a, en théorie, jusqu'au 31 décembre 1986 pour se
construire.
M. Garon: Oui.
M. Mathieu: II va faire une demande de permis de construction
pour bénéficier des avantages des 3000 $ de la loi
fédérale avant le 30 avril et, par la loi 125 et l'imposition du
règlement de contrôle intérimaire, on lui dit: Pour te
donner un permis de construction, il faut que tu aies un emplacement de 32 000
pieds carrés; or,
comme tu as un emplacement de 15 000 pieds carrés seulement, on
ne te permet pas de construire. Je ne sais pas si c'est
prémédité par le gouvernement, ce qui se passe
là-dedans, mais on vient, d'une manière un peu subtile,
neutraliser, par l'application de la loi 125, le droit qu'avait une personne,
par la loi 90, de se construire.
M. Garon: Pourquoi vous vous plaignez? L'année de la
décentralisation des MRC... Il y en a qui disent 10 000 pieds; d'autres,
15 000 pieds; d'autres, 25 000 pieds; d'autres, 30 000 pieds. Une MRC dit: Nous
autres, cela prend un terrain de 30 000 pieds. Une autre dit: Un terrain de 15
000 pieds.
M. Mathieu: Ce n'est pas vrai, M. le Président. Vous savez
que le ministre des Affaires municipales, à Québec,
contrôle le règlement et c'est lui qui impose la norme de 32 000
pieds, sur aucune assise légale. On demande au ministre des Affaires
municipales: En vertu de quoi vous étudiez les règlements de
toutes les MRC, vous les passez au peigne fin et vous les annulez? Vous voulez
désavouer. En vertu de quoi? Est-ce en vertu d'une loi, d'une
réglementation? Non. Il dit que c'est en vertu d'une espèce
de...
M. Garon: Vous savez, il ne faut pas...
M. Mathieu: C'est une décision arbitraire du ministre des
Affaires municipales. Ce n'est pas vrai quand vous dites que les MRC ont le
choix de dire 15 000 pieds, 18 000 pieds ou 32 000 pieds. Ce n'est pas vrai.
C'est le ministre des Affaires municipales qui impose 32 000 pieds, venant
ainsi enlever les droits aux individus qui en avaient par la loi 90.
M. Garon: Ce n'est pas de cette façon qu'il faut voir
cela. La loi 90 dit: On va permettre à ceux qui avaient un terrain, au
moment du dépôt de la loi... On a fait un choix. On a
présumé que les gens qui, au dépôt de la loi,
avaient un terrain n'étaient pas des spéculateurs. On ne
présumera pas qu'ils étaient des spéculateurs. Ils avaient
acheté un terrain pour se bâtir. Alors, on leur a donné un
délai pour le faire. On leur a donné un délai de cinq ans
et on l'a augmenté à huit ans. Quelqu'un qui a acheté un
terrain pour se bâtir, s'il ne s'est pas bâti en huit ans, il n'a
pas dû acheter le terrain pour se bâtir. Il doit l'avoir
acheté pour d'autres fins, peut-être des fins spéculatives.
Il n'y a aucun droit au monde qui protège la spéculation. Quand
vous spéculez, vous courez un risque. C'est dans ce sens qu'on a mis un
genre de période transitoire pour permettre à des gens qui
avaient acquis des terrains pour les fins de se construire, alors qu'il n'y
avait pas de protection du territoire agricole, de le faire. Il y aura un
délai pour cela et après ce sera terminé. Comme on n'a pas
pu faire le zonage en même temps et que partout au Québec, en
même temps, il y a eu une période de délai, il y en a qui
auraient eu huit ans, d'autres cinq ans, on a décidé
d'uniformiser lors de la révision de la loi pour donner le même
droit sur la même période d'années à tout le monde.
C'est pour cela qu'on a dit le 31 décembre 1986...
M. Mathieu: Ce n'est pas là le problème.
M. Garon: Non, je sais. Attendez un peu, je n'ai pas fini. Qu'il
y ait d'autres réglementations, que la loi dise qu'au point de vue du
zonage agricole, vous avez le droit de vous bâtir et que l'Environnement
dise qu'à tel endroit vous n'avez pas le droit parce que c'est dangereux
pour telles fins... À certains endroits, on va dire que vous ne pouvez
pas parce qu'il n'y a pas de capacité portante de toute façon; ou
encore, c'est parce que ce sont des inondations. C'est une autre affaire. On
n'a pas affaire à cela. Vous êtes souvent soumis à
plusieurs réglementations, à plusieurs choses quand vous faites
un acte, quand vous posez un acte légal. Vous le savez comme
notaire.
M. Mathieu: Un notaire de campagne, cela ne connaît pas
grand-chose.
M. Garon: Ils ont des formules pour les aider. Ils remplissent
les formules.
M. Mathieu: Ah oui, une chance.
M. Garon: Enfin, vous savez, comme notaire, que, quand vous
passez un contrat, je vous le dis sans boutade, vous avez à tenir compte
de plusieurs lois, le Code civil, . le Code municipal, la réglementation
municipale, la réglementation sur l'environnement, la protection du
territoire agricole.
M. Mathieu: Surtout depuis que vous êtes là.
M. Garon: Je vais vous dire une chose. Si vous vous promenez un
peu ailleurs, vous regardez... Moi, je regarde. Dans le domaine alimentaire, au
Québec, ce qui nous a nui, c'était notre manque de
réglementation. Il y a des pays qui ont avancé parce qu'ils ont
eu de la réglementation bien faite. Au Québec, dans bien des
domaines, on n'avait pas de réglementation. Cela nous a nui. Dans les
pêches, il y avait une loi avec un seul article. Cela nous a nui.
Aujourd'hui, il y a de la réglementation, les gens savent quoi faire,
ils savent où est l'orientation, ils
savent sur quoi se baser. Ils savent que ce ne sera pas l'arbitraire. Je
vais vous donner un exemple, entre autres, des normes canadiennes pour
l'importation des fleurs, des choses comme cela. Il y a une
réglementation très floue de sorte que les gens ne savent jamais
si cela passera aux douanes. C'est le fonctionnaire qui décide
arbitrairement. Est-ce que la norme floue, pas vraiment
réglementée, aide les gens? Non, elle leur nuit. Vous savez, un
règlement bien fait est utile. Un règlement qui est trop vague
peut être nuisible.
C'est pour cela qu'ayant une bonne réglementation, à ce
point de vue, je ne dis pas que les réglementations sont toutes bonnes,
il y a des vieilles réglementations quelquefois qui ne sont pas
révisées et qui sont désuètes. Une bonne
réglementation qui établit un cadre de vie normal dans un pays
civilisé, ce n'est pas mauvais. Si vous regardez ailleurs, si vous vous
promenez sur les routes aux États-Unis, sur les routes en Europe, vous
n'avez pas les folies qu'on a vues au Québec. Quand on a fait une
autoroute au Québec, on a fait une autoroute et on a mis un chemin de
desserte à côté parce qu'on n'a pas été
capable de se brancher pour une autoroute ou non. Allez voir aux Etats-Unis,
vous avez une autoroute, c'est une autoroute. On n'essaie pas de mettre le long
de l'autoroute toutes sortes de "stands" à patates frites et toutes
sortes de choses, comprenez-vous? Parce que là, au Québec, on a
toujours de la misère à se brancher. Quand on fait une autoroute,
on fait une autoroute. Quand on fait une route, on fait une route. Le
problème de la commission, c'était quoi? Il y avait une rue
principale pleine de maisons et on dit, après cela, que cela prend une
voie de contournement. Cela ne passe pas. C'est trop long dans le village.
On fait la voie de contournement et la municipalité veut
recommencer le même scénario de bâtir le long de la voie de
contournement pour faire une route. Cela veut dire que, dans dix ans, il faudra
une troisième voie de contournement parce qu'on n'a pas
été capable de se brancher. Il y a un minimum de discipline. Dans
les premiers temps des Français, on était des coureurs des bois,
on pouvait aller dans le bois, il n'y avait pas de problème, il y avait
de la place. Aujourd'hui, en 1983, il faut avoir une certaine norme de vie.
Quand on vit en société et qu'on est nombreux, il faut avoir
certaines règles de vie en société. Autrement, l'absence
de réglementation peut avoir pour effet de nuire aux autres. (Il
heures)
M. Mathieu: En conclusion, je déplore le fait que le
ministre n'ait rien à nous annoncer en ce qui concerne l'harmonisation
des lois 125 et 90. Je fais une réflexion; c'est qu'il nous dit qu'ils
ont des règlements.
Oui depuis que vous êtes là, vous en avez des
règlements. Savez-vous à quoi cela me fait penser? Avant, avec
les vieux régimes, on passait dans le tordeur. Quand on sort du tordeur,
on a tous nos morceaux, avec nos aspirations, notre ambition et tout cela. Avec
vous, on passe dans le planeur. Le patron ajuste le planeur pour qu'il prenne
des deux par quatre. Peu importent les aspirations et les besoins de la
population, envoie! cela me prend des deux par quatre. Passe dans le planeur,
mais, quand tu sors du planeur, tu n'es plus jamais toi-même. Tu ne
reviens plus comme tu étais avant. Tu es ce que l'autorité veut
que tu sois. C'est cela, cette philosophie autoritariste qui ne tient pas
compte des aspirations de la population.
M. Garon: Pas du tout. Pas du tout. Pas du tout. Vouloir tout
harmoniser, c'est facile. Ce sont de beaux mots qu'on emploie, comme
l'harmonisation. C'est un peu comme le fédéralisme
coopératif. Cela veut dire: Je vais coopérer. Qui est contre la
coopération? Qui est contre l'harmonisation? C'est beau, mais cela veut
dire quoi, ces mots-là? Souvent, cela n'abrite aucune
réalité dans le fond. J'ai toujours dit - et je dis encore -que
le cheminement parallèle de la loi 125 et de la loi 90 - la protection
du territoire agricole et l'aménagement et l'urbanisme -c'est ce qui
peut arriver de mieux, parce que les gens peuvent discuter ensemble sans
essayer d'éviter les problèmes. Le problème, c'est qu'on
pense parfois qu'on va escamoter les problèmes. Quand quelqu'un est zone
et ne veut pas l'être, on peut trouver l'harmonisation qu'on voudra.
Veut-on le zoner ou si on ne veut pas qu'il soit zone? C'est cela, la question
fondamentale. Les gens disent, au fond: La Commission de protection du
territoire agricole, ce n'est pas une commission de dézonage, c'est une
commission de protection du territoire agricole. On dit: Si on pouvait
harmoniser cela de sorte qu'on pourrait dézoner plus, c'est
évident. Ce n'est pas le but de la loi. Le but de la loi est de
protéger les terres pour l'agriculture. J'ai l'impression très
nette, depuis novembre 1978, en voyant le fonctionnement de la loi - cela va
faire cinq ans à l'automne - que les municipalités, les MRC, les
gens de l'aménagement et les gens de la commission ont appris à
vivre ensemble beaucoup plus harmonieusement et que vouloir essayer de fondre
dans un même organisme l'environnement, l'aménagement et la
protection des terres agricoles, c'est du rêve en plein jour. J'en suis
convaincu. Cela vise des fins et il y a des contraintes qui ne sont pas les
mêmes.
Quand nous discutons avec l'Environnement - ce sont eux qui sont
responsables de l'environnement - parfois, on les trouve achalants, mais je
vais vous dire une chose: Au Québec, si on a les problèmes
d'environnement qu'on a aujourd'hui, c'est peut-être parce qu'on
n'a pas assez protégé l'environnement. On a trop chialé et
on ne s'est pas assez occupé de l'environnement. On lisait encore, dans
le journal hier, qu'il y avait onze rivières contaminées par les
BCP. À un moment, vous arrivez avec l'anguille qui a trop de mirex; elle
est polluée par le mirex que les poissons ont mangé dans l'eau.
Je vais vous dire une affaire. Je ne suis un spécialiste dans aucune des
ces affaires-là, mais, quand je vois des poissons malades, parce qu'ils
ont bu l'eau de nos rivières - je bois de l'eau de la rivière
aussi chez nous -je me dis: Si le poisson est malade, cela peut ne pas
être bien bon pour les hommes et les femmes qui boivent de cette eau.
Quand on parle de protéger l'environnement comme si
c'était quelque chose de négligeable, regardons notre eau. En
Gaspésie, par exemple, le gouvernement fédéral - je ne le
blâme pas de le faire, ne considérez pas cela comme une critique -
dit qu'on ne peut plus ramasser du foie de morue dans certaines régions
parce qu'il est contaminé. Les gens du domaine alimentaire vous diront
que la première chose qui se contamine dans un être vivant, c'est
le foie qui est un filtre. Quand le foie est contaminé ou commence
à avoir de la contamination, le reste peut venir rapidement. On a
déjà un niveau de pollution dans l'eau qui est trop
élevé. Quand c'est rendu dans les mers... La morue ne vit pas
dans le lac Saint-Charles. Elle vit dans la mer. On dit déjà que
le foie, dans certaines régions, est contaminé. Quand vous
regardez l'anguille qui vit ici, qui vient du lac Ontario et qui est
contaminée, cela veut dire qu'elle a ingurgité des produits
qu'elle a trouvés dans l'eau. C'est cette eau que nous buvons. Il n'y a
pas de traitement tertiaire au Québec actuellement, que je sache - il y
a du traitement primaire - pour enlever la merde qu'il y a dans l'eau. On n'a
pas de traitement actuellement pour enlever les produits chimiques qu'il y a
dans l'eau. Je pense que sur ces questions, de la même façon qu'il
faut protéger les sols agricoles avec toute la vigueur qu'on peut
déployer, parce que les sols, avec la population qui va augmenter de 50%
d'ici les 30 ou 40 prochaines années, on n'aura plus... On va avoir - je
dis 40%, ce n'est pas cela, c'est 50% - d'ici l'an 2000, 6 000 000 000 de
population. Pour l'an 2020, on parle de 8 000 000 000 de population, sans doute
le double. Cela veut dire un étalement, de plus en plus, de la
population avec de moins en moins de terres agricoles. Je pense qu'il faut
protéger nos terres pour nourrir les gens. Il faut aussi protéger
l'environnement. Essayer de dire: Au fond, on harmonisera tout cela de sorte
qu'on assouplira les contraintes, je n'y crois pas. Pour cela, il faut voir les
choses en face. Au fond, dans le passé, on n'a pas protégé
nos terres assez et la commission fait un bon travail de protection. Cela pose
des contraintes et il y a des gens qui ne sont pas contents parce qu'ils ne
sont pas dézonés. C'est là le but de la commission, de
garder les terres pour l'agriculture. Je suis un farouche partisan de la
protection de l'environnement parce que je regarde les désastres qu'on a
causés chez nous alors qu'on avait une nature extraordinaire; on a
réussi à gâter tout cela. Les rivières sont pleines
de produits chimiques et on ne les a pas protégées
suffisamment.
Le Président (M. Paré): M. le député
d'Huntingdon.
M. Dubois: M. le Président, je voudrais revenir sur la
question du député de Beauce-Sud en ce qui a trait au
contrôle intérimaire et au droit acquis de 53 000 pieds
carrés, tel que stipulé dans la loi 90. Les règlements
intérimaires des MRC ne sont pas acceptés si ce n'est 64 000
pieds carrés pour deux résidences ou 32 000 pieds carrés
pour une résidence. Actuellement, je connais des MRC dont les
règlements de contrôle intérimaire ont été
refusés, parce que la MRC demandait 25 000 au lieu de 32 000. D'une
part, on reconnaît qu'il y a un droit acquis de 53 000 pieds
carrés pour un fermier sur le site de sa résidence où il
pourrait se bâtir une deuxième maison. C'est là qu'il y a
peut-être une contradiction ou bien un manque d'explication. Il
semblerait que le producteur agricole ne pourra pas construire une
deuxième maison sur ses 53 000 pieds carrés de droits acquis
à cause de la réglementation du contrôle intérimaire
des MRC qui exige 64 000 pieds carrés. Je ne sais pas si vous avez une
réponse dans ce sens. C'est une inquiétude qui existe dans le
secteur rural. Je pense que cela prendrait une réponse tout de
même. Peut-être que le problème n'existe pas ou
peut-être que c'est mal compris par les municipalités ou les MRC,
mais ce sont des questions qui sont soulevées généralement
de ce temps-ci. Je ne sais pas si le président de la commission a une
réponse à ce sujet.
M. Garon: II faudrait peut-être revenir à la source.
Le concept de la loi, c'est de reconnaître à quelqu'un qui a une
maison... Autour de la maison, il peut faire d'autres choses que de
l'agriculture sans que les inspecteurs de la commission aillent mesurer.
À la base des droits acquis, en matière de zonage, c'est
l'emplacement exact qui était utilisé à une fin
dérogatoire aux règlements. S'il avait fallu, au début de
la loi, aller mesurer autour de toutes les maisons à la campagne quelles
parties étaient utilisées à des fins résidentielles
et dire, l'année d'après: Vous n'avez pas le droit de tasser
votre clôture pour y mettre votre camion supplémentaire,
cela n'aurait pas de bon sens. Pour tirer la ligne, la loi a dit: Autour d'une
maison, vous pouvez faire autres choses que de l'agriculture sur un
demi-hectare. C'était le premier objectif de tirer une ligne qui
paraissait au-delà de toutes les normes de ce moment-là, en
disant, sur un demi-hectare, on fait une croix sur l'agriculture, faites ce que
vous voulez, on n'ira pas mesurer. Il n'y avait pas beaucoup de terrains qui
avaient plus qu'un demi-hectare.
Le deuxième objectif, c'était le marché
traditionnel de consolidation des fermes. On a écrit dans la loi que
quelqu'un qui vend sa ferme peut garder sa maison et, en gardant sa maison, il
peut se garder un demi-hectare. Sauf que, dans la loi où les
règlements, vous ne trouverez jamais une disposition qui dit: Là
où vous avez une maison, vous pouvez en mettre huit, où,
là où vous avez une maison, la loi vous accorde le droit d'en
bâtir deux autres. Premièrement, parce que ce n'est pas l'affaire
de la commission que de bâtir des maisons, ce n'est pas de sa
juridiction. Cela n'a jamais été prévu ni conçu
pour cela. Une des conséquences indirectes de l'emplacement de droits
acquis d'un demi-hectare, c'est que celui qui, a cet emplacement peut vendre un
bout de son terrain de droits acquis à son fils pour bâtir une
maison. C'est une conséquence indirecte qui devrait être
réglementée par les règlements municipaux, les
règlements de la MRC qui devraient déterminer quelle grandeur de
terrain cela prend pour mettre une maison à la campagne. Quand la loi a
été déposée, on savait, et on le sait mieux
maintenant, que peut-être la moitié au moins des terrains vacants
ou des terrains autour des maisons étaient bien plus petits qu'un
demi-hectare, à la fois les terrains vacants et les terrains où
il y avait déjà des maisons.
Pour les terrains où il y avait une maison, il y en a qui avaient
juste cela, 5000 pieds et un chalet. Ils n'avaient pas d'autres terrains, ils
ne peuvent pas agrandir, ce n'est pas à eux autour. Il y en a d'autres
qui avaient seulement 5000 pieds vacants, mais, au moment de la loi, le
règlement municipal chez eux disait que cela prenait 15 000 pieds. Ce
n'est pas parce que la loi dit: Vous pouvez faire autre chose que de
l'agriculture qu'ils peuvent bâtir une maison sur 5000 pieds,
malgré le règlement de la construction qui déjà,
depuis 1976, disait: Vous ne pouvez plus bâtir parce que votre terrain
est trop petit. Ce n'est pas de la juridiction de la commission.
L'idéal serait que tous les règlements municipaux dans les
zones agricoles disent: Cela prend une maison par demi-hectare. Cela
réglerait le problème. Mais il n'y a personne qui a un droit
acquis pour se garantir contre les changements ou les évolutions de
règlement ou de loi, surtout quand il n'a rien fait avec le terrain. Il
arrive que ceux qui toléraient de mettre deux maisons de plus à
côté de la maison de ferme, en pratique, ce que cela donnait,
c'est qu'on disait: Ils ont des droits acquis, on ne peut rien faire. En
étirant la notion de droit acquis, il peut faire des petits. Cela n'a
pas été prévu pour cela. À côté de sa
grange, de ses silos et de sa maison, il peut mettre une deuxième maison
au nom de son fils et une troisième maison au nom de son deuxième
fils. Le lendemain matin, il a toute la ferme, sauf les deux terrains et les
deux maisons, et sa grange est à 150 pieds de là. Il pense que
c'est une manière de mettre en valeur la grange, le tas de fumier et ses
exploitations.
Si le règlement municipal dit aujourd'hui que cela prend 32 000
pieds, c'est sûr qu'il ne peut pas, avec ses droits acquis, finir par
faire deux maisons; cela n'a jamais été prévu pour
cela.
M. Dubois: Mais ce n'est pas le règlement municipal qui le
dit. C'est le ministère des Affaires municipales qui force cette
réglementation.
M. Caron: C'est le règlement de lotissement.
M. Dubois: Oui.
M. Garon: II s'agit de trouver la norme qui a du bon sens en
1983. On n'est plus en 1933.
M. Dubois: Je suis d'accord, mais...
M. Garon: Quelle grandeur de terrain cela prend-il pour s'assurer
qu'à un moment donné, les champs d'épuration ne seront pas
dans le puits du gars, entre autres, à la campagne? Quelle grandeur de
terrain raisonnable cela prend-il pour se garantir qu'il ne faudra pas des
subsides pour amener l'aqueduc et l'égout parce que les terrains sont
tous trop petits et les gens sont empoisonnés par ces champs
d'épuration?
Si les MRC disent: Aujourd'hui, cela prendrait 32 000 pieds. On
connaît mieux qu'avant. Selon nos normes de 15 000 pieds, c'était
trop petit, etc. Ce n'est pas de nos affaires, mais le gars n'avait pas un
droit acquis de mettre six maisons autour de la sienne à cause du zonage
agricole. Il avait un droit acquis d'utiliser un demi-hectare à d'autres
fins qu'à l'agriculture. Il ne l'a pas fait, par exemple, avant que le
règlement de 32 000 pieds soit en vigueur.
Si, aujourd'hui, cela prend 32 000 pieds par terrain, il ne peut pas en
faire quatre avec cela sur 53 820 pieds carrés.
M. Dubois: Mais les 32 000 pieds
deviennent...
M. Garon: Tout cela, c'est une déviation de la notion de
droits acquis qui est dans la loi, qui recherche, sous prétexte de
droits acquis, à mettre des maisons à côté des
granges et des tas de fumier à la campagne, comme avant, comme s'il n'y
avait pas de loi.
M. Dubois: II faut quand même accepter le fait que la
décision est arbitraire, dans le sens qu'elle est imposée par le
ministère des Affaires municipales et non voulue. Cela, c'est
général dans toutes les MRC de secteurs ruraux. Ce n'était
pas une décision qui était voulue par les municipalités
formant les MRC, c'était une décision arbitraire du ministre des
Affaires municipales.
J'ai un cas patent où les règlements intérimaires
ont été désavoués par le ministre des Affaires
municipales strictement sur ce point parce que, dans l'esprit des gens, la loi
90 permettait au père de donner ou de vendre un terrain à son
fils et de le laisser bâtir une maison. Je ne parle pas de huit ou de six
maisons sur 53 000 pieds carrés, mais d'une deuxième maison sur
les 53 000 pieds carrés. Dans l'esprit des gens, c'était un droit
acquis.
Ce droit acquis n'existerait plus, selon l'imposition du ministre des
Affaires municipales envers les MRC.
M. Garon: D'accord. En matière de zonage ou
d'aménagement, tout le monde dirait la même chose. Personne ne
peut prétendre à des droits acquis à faire aujourd'hui ce
qu'on ne peut plus faire et qu'on n'a pas fait dans le temps où on avait
le droit de le faire. Autrement dit, on n'a pas un droit acquis à faire
ce qu'on n'a même pas commencé à faire en matière de
zonage. Cela n'existe pas. Sans cela, on aurait un droit acquis pour se
garantir de tous les changements de règlement de zonage municipal. Le
matin, le gars est zone commercial puis un jour, dans un autre plan de zonage,
il est zoné résidentiel. Il dit: Dans le temps, j'avais un droit
de me bâtir une station-service et je veux encore la bâtir. Mais il
ne peut plus.
M. Vaillancourt (Orford): II perd son droit.
M. Garon: C'est pour cela qu'il ne faut pas mélanger les
droits. Un droit acquis, c'est celui qui utilise un vrai usage
dérogatoire avec un permis municipal qui devient non conforme au
règlement de zonage du moment, mais le non-usage, cela ne donne pas un
droit acquis. Quelqu'un qui a un lot vacant et qui n'a jamais rien fait avec il
n'a pas de droit acquis contre les règlements municipaux de
construction, de zonage et de lotissement. Il fallait qu'il le fasse du temps
qu'il pouvait le faire légalement.
M. Dubois: Je comprends bien cela.
M. Garon: Mais les gens disent: J'ai des droits acquis parce que
j'avais acheté cela pour me bâtir et, quand j'avais cela, un bout
de temps, dans la loi 90, j'aurais pu, à cause des règlements
municipaux qui n'existaient pas, mettre trois maisons et aujourd'hui, c'est
changé, je ne peux plus mettre trois maisons. Est-ce qu'il faut garantir
les gens contre cela en plus et appeler cela des droits acquis? Il n'y a
personne qui va faire des règlements de zonage. (Il h 15)
M. Dubois: II y a une chose qui est certaine dans les secteurs
ruraux, c'est que les maires, qui forment les conseils des MRC, voulaient
très majoritairement conserver ce droit acquis, à savoir d'exiger
25 000 ou 26 000 pieds carrés par terrain au lieu de 32 000 pieds
carrés pour pouvoir s'intégrer dans le cadre de la loi 90 qui
donnait un droit acquis de 53 000 pieds carrés. Cela n'a pas a
été accepté par le ministre des Affaires muncipales. Quand
on parle d'harmonisation des lois 90 et 125, je pense que cela aurait dû
être considéré par le ministre des Affaires municipales,
étant donné que cela existait déjà. 25 000 pieds
carrés, c'est quand même une superficie assez respectable en
secteur rural. Je ne parle pas du côté d'une rivière
où il faut peut-être se distancer plus. Mais, dans un terrain
normal, 25 000 ou 26 000 pieds carrés sont quand même des
grandeurs assez respectables. La demande en ce sens a été faite
par les MRC. Elles ont toutes été désavouées sur la
superficie des terrains que le ministre acceptait. Je me dis que, s'il y avait
eu une meilleure harmonisation des deux lois, ce problème n'arriverait
pas aujourd'hui.
M. Garon: C'est peut-être nous qui avons été
trop généreux. En novembre 1978, quand on parlait d'un
demi-hectare, on aurait peut-être dû parler d'un quart
d'hectare.
M. Dubois: De toute façon, je pense qu'il y a un manque
d'explications aux municipalités sur ce sujet particulier. Ce sont des
questions qui sont posées par des maires. Est-ce qu'il y a
possibilité d'avoir une certaine harmonisation entre les deux lois? Je
ne vous dis pas que c'est à vous de le faire, que c'est à votre
ministère de le faire, M. le ministre. Mais, que ce soit au
ministère des Affaires municipales ou au ministère de
l'Agriculture de le faire, je pense que les maires et les conseils municipaux
ont besoin de renseignements à
ce sujet, parce que c'est une question qui est soulevée assez
souvent.
Sur un autre sujet, quand on parle de contribution aux taxes
foncières, est-ce que vous avez une indication du montant de vos
contributions globales, remboursement de taxes foncières, qui irait vers
des taxes spéciales pour fins de creusage de cours d'eau ou de
rectification de cours d'eau? Parce qu'il y a eu des interventions municipales,
dans certains cours d'eau, où une taxe spéciale a
été imposée au passeur d'eau. Cette taxe était
sujette à un remboursement de 70%. J'aimerais savoir s'il y a une
évolution dans ce dossier. De plus en plus, les agriculteurs vont voir
leur conseil et lui disent: C'est un travail de 5000 $, 10 000 $, faites-le
donc, facturez-le au passeur d'eau, nous recevrons 70% de remboursement. Cela
permet une intervention rapide dans certains projets mineurs. Je pense que
c'est important, parce que, souvent, un projet peut être bloqué
pour trois ou quatre ans. Le producteur agricole perd des revenus et ne peut
pas avancer à cause de cela. Une intervention rapide d'un conseil
municipal en imposant une taxe spéciale au passeur d'eau peut être
rentable pour certains travaux mineurs. Je ne sais pas si...
M. Garon: On a pensé cela, nous aussi. On a même
changé le programme Sol-Plus pour le permettre, pour le favoriser. On
pensait que les municipalités s'impliqueraient; on doit dire qu'elles ne
se sont pas impliquées. Il y a une ou deux municipalités qui
l'ont fait.
M. Dubois: Mais est-ce que vous favorisez ce genre
d'implication?
M. Garon: Oui, on l'a favorisée. On l'a souhaitée.
Je me rappelle, dans le temps, quand je pensais comme vous le dites, on a mis
cela dans le programme. On a pensé que les municipalités
s'impliqueraient. Je ne dis pas que je le pensais, je dis qu'il y a des gens
qui pensaient que les municipalités voudraient s'impliquer. Je trouvais
souhaitable que les municipalités veuillent s'impliquer. On a
changé le programme pour le favoriser. Il y a eu une ou deux
municipalités qui l'ont fait.
Vous savez, quand les municipalités peuvent avoir quelque chose
gratuitement du gouvernement, elles n'ont pas tendance à s'impliquer
beaucoup quand elles pensent que le gouvernement peut payer à leur
place. Il faut être réaliste.
Deuxièmement, les agriculteurs ne sont pas majoritaires dans la
plupart des municipalités. Comme il faut avoir l'accord de plusieurs
personnes... Si le gouvernement ne paie pas, je ne pense pas que les cours
d'eau se feront. Je parle par expérience.
Quand le gouvernement paie, les gens sont prêts à donner un
accord qu'ils ne donneraient pas facilement s'ils avaient à payer par
des taxes. Comme les cultivateurs ne sont pas majoritaires dans les
municipalités, il n'y aurait pas beaucoup de cours d'eau qui se
feraient. On a essayé de le faire. On a souhaité que cela se
fasse, mais les municipalités ne se sont pas impliquées.
M. Dubois: Je me suis aperçu, M. le ministre, il y a
exactement deux ans, lors d'une rencontre avec les maires du comté,
qu'aucun ne savait qu'il pouvait intervenir dans un cours d'eau et imposer
à ses passeurs d'eau une taxe spéciale. Ils ne le savaient pas.
Je sais qu'il y a passablement d'agriculteurs dans la région que je
représente qui seraient intéressés à ce que le
conseil municipal puisse intervenir rapidement dans de légers travaux de
correction de cours d'eau. Je ne sais pas s'il n'y aurait pas lieu, sans faire
de publicité, d'aviser les conseils municipaux que ce genre
d'intervention pour des travaux mineurs serait souhaitable. Je pense que cela
pourrait aussi être sain pour le développement de l'agriculture.
Il y a souvent des champs et des fermes qui ne peuvent pas être
ensemencés rapidement au printemps, parce que la pression du cours d'eau
n'est pas faite sur une longueur d'un quart de mille et c'est une intervention
de 2000 $, 3000 $, 4000 $ ou 5000 $.
Je pense que ce serait passablement intéressant, sur le plan du
développement de l'agriculture, si l'on pouvait favoriser ce genre
d'intervention par les municipalités, mais pour autant que les
municipalités sachent qu'elles ont le droit d'intervenir, que les 70%
vont leur être remboursés. Je le verrais d'un angle assez
intéressant sur le plan du développement de l'agriculture.
M. Garon: On me dit que certaines municipalités peuvent le
faire, mais qu'on n'est pas au courant; cela veut dire qu'elles imposent une
taxe spéciale ou peuvent l'inclure dans le rôle
générale de taxes, mais il n'y a pas moyen pour nous de le
savoir. On dit que c'est possible que certaines le fassent. On a pensé
faire un programme déjà, et on a eu seulement une demande. Je
pensais que c'était deux, mais cela a été une
seulement.
M. Dubois: Vous n'êtes pas nécessairement au courant
de toutes les interventions qui furent faites.
M. Garon: Non, il peut y en avoir et qu'on ne soit pas au
courant.
M. Dubois: Cela répond à ma question.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Orford.
Bancs de gravier
M. Vaillancourt (Orford): J'aurais une question à poser au
ministre ou au président. En ce qui concerne les bancs de gravier, il y
a plusieurs demandes de permis de certains propriétaires de bancs de
gravier pour des agrandissements. Quelle est la politique exacte? Comment cela
fonctionne? Je sais que certains ont des droits acquis pour une certaine
dimension. Lorsque le banc de gravier est épuisé là
où ils avaient un droit acquis et qu'il y a un besoin de gravier, de la
façon que j'ai pu le voir d'après les dossiers qui me sont
passés dans les mains, on refuse de donner un permis; comment feront-ils
pour s'agrandir pour les besoins d'une région donnée? Est-ce que
cela veut dire qu'il va falloir transporter du gravier à des distances
considérables? Ils demandent un permis. On leur refuse. Les personnes
qui ont besoin de gravier dans certaines régions sont obligées
d'aller à cinq milles ou à dix milles plus loin. Est-ce que vous
avez pensé à amender le règlement s'il ne vous le permet
pas?
M. Garon: II n'y a pas de règlement là-dessus et il
n'y a pas de norme non plus. La norme, c'est la protection du territoire
agricole et les critères qui sont dans la loi. À notre
connaissance, des bancs de gravier ouverts, des "pit" de gravier, il y en a des
milliers au Québec dont la majorité est inopérante
d'ailleurs. Il y en a beaucoup, beaucoup. Partout, n'importe où, selon
le premier coin qui était accessible aux camions, puis le moins proche
possible de cette route qui était à être rechargée
de gravier.
Ceux qui ont des carrières exploitables ont des droits acquis sur
un hectare, soit à peux près 107 000 pieds carrés. Des
fois, ils veulent agrandir. Il faut qu'ils fassent une demande d'autorisation
pour utiliser un autre bout du territoire agricole comme banc de gravier. Plus
souvent qu'autrement, les bancs de gravier sont dans des potentiels qui ne sont
pas très bons. À ma connaissance, souvent on accorde
l'autorisation d'agrandir. On dit: Vous avez besoin de combien de gravier, pour
combien de temps? On tient compte de quoi comme preuve? De tous les
éléments pertinents y compris du fait qu'il n'y en a pas à
dix milles à la ronde. La municipalité dans sa recommandation
peut dire: Même nous, on en achète; si on ne l'achète pas
là on va l'acheter à douze milles et il va coûter
passablement plus cher. Il en faut du gravier.
D'autres fois, on tient compte d'éléments
complètement . contraires à cela. Le maire de la
municipalité alors nous dit:
Écoutez, nous, on s'oppose de toute façon. Lui, il
exploite une carrière de gravier et il y en a à peu près
quatorze; du gravier, on en a amplement, puis on ne veut pas ouvrir d'autres
trous. Des trous, on en a fait au Québec. Tout ce que je peux dire,
c'est qu'on tente de juger chaque cas à son mérite, en tenant
pour acquis certains principes comme les suivants: d'abord, il en faut du
gravier, nous ne sommes pas pour le transporter à 200 milles en camion.
Il faut trouver la plus mauvaise place pour l'agriculture pour trouver du
gravier. D'habitude, cela correspond aussi à des terres qui ne sont pas
trop bonnes et c'est mieux de faire un grand trou bien exploité dans la
région, mettons à cinq, dix ou quinze milles de rayon, que de
faire 182 petits trous un peu partout sur des terres et de les laisser comme
cela et sacrer son camp. C'est ce qui arrivait avant. Mais, à chaque
région, à chaque demande... Je pense en tout cas que notre propre
bilan, c'est qu'on ne manque pas de gravier, il y a des carrières en
activité; il y en a encore qui sont illégales d'ailleurs. Il
arrive de temps en temps qu'on les attrappe et, quand on les attrappe...
M. Vaillancourt (Orford): Quelles sont les conséquences
quand vous les attrappez?
M. Garon: II y a eu une ordonnance; il y en a qui ont payé
l'amende; il y en a qui sont aux prises avec des problèmes et qui
courent après les difficultés, comme en termes
d'aménagement ou d'environnement. Il y a un règlement
là-dessus publié le 1er juin 1975 et en vigueur, la Loi sur la
qualité de l'environnement. Il y en a qui ont commencé des
carrières de gravier hier dans une zone agricole et ils ne savent
même pas qu'il faut un permis du ministère de l'Environnement en
plus. Il faut "se policer" un peu en matière d'aménagement.
M. Vaillancourt (Orford): Si je comprends bien votre
réponse, là où il y a un besoin, vous accordez un
permis.
M. Garon: On tient compte du besoin.
M. Vaillancourt (Orford): S'il n'y en a pas...
M. Garon: C'est bien sûr. Cela fait partie de la preuve. On
tient compte aussi de l'existence du trou. On a pour principe que c'est mieux
d'agrandir un trou que d'en faire huit autres. Il y a huit rangs, on voudrait
faire une carrière à chaque rang parce que c'est moins loin pour
le camion. On dit: Agrandis ton gros trou et voyage un peu plus loin avec le
camion. Peut-être qu'il y a moins d'impact à faire une grosse
carrière de gravier que d'en faire une à
chaque rang.
M. Vaillancourt (Orford): Ce que vous appelez...
M. Garon: Mais on prend chaque demande à son mérite
selon les circonstances. Vous savez que le pays est bien variable et que, dans
le fond, on n'a pas de score. Tout ce qu'on sait, c'est qu'il y a du gravier en
disponibilité pour tout le monde dans les régions et il ne faut
pas faire 100 milles pour aller en chercher.
M. Vaillancourt (Orford): Ce que vous appelez "un peu plus loin",
est-ce que vous avez de normes ou si vous pouvez obliger ceux qui ont besoin du
gravier d'aller à dix milles au lieu de cinq milles ou quelque chose
comme cela?
M. Garon: Là-dessus, on a eu beaucoup d'auditions
publiques avec des ingénieurs, des gens du ministère des
Transports, etc. Disons que, généralement, on a
épousé les normes reconnues en matière de sous-contrats,
de soumissions au ministère des Transports, etc. Il y a même des
taux qui ont été déposés à la Commission des
transports sur le millage et les coûts afférents à cela; en
général, cela varie entre 0 mille et 12 ou 15 milles environ,
distance qui est raisonnable pour s'approvisionner de gravier. Si vous demandez
à celui qui veut vendre du gravier, parce qu'il soumissionne à la
tonne, il vous dira que le moins loin est toujours le mieux, c'est bien
sûr, parce qu'il n'est pas payé au millage. Si vous demandez au
ministère des Transports, on vous dira qu'au-delà de tel millage,
il ne paie plus; il n'y a plus de surprime. Il y a une prime au millage, mais
il ne peut pas aller le chercher à 100 milles pour augmenter sa prime.
Passé cela, il faut qu'il y ait un banc dans le région. Si vous
êtes familier avec les problèmes de bancs de gravier, en
général, on ne manque pas de gravier. S'il y a quelque chose, on
a fait beaucoup trop de carrières un peu partout, n'importe comment.
M. Vaillancourt (Orford): Oui, je suis d'accord avec vous sur
cela. Mais le ministère des Transports n'est pas contrôlé
par la Loi sur la protection du territoire agricole. Ils peuvent aller
s'approvisionner dans un banc de gravier, lorsqu'ils construisent une route,
s'ils sont pour économiser des centaines de milliers de dollars...
M. Garon: Non. Si vous posez cela comme cela...
M. Vaillancourt (Orford): ...en transport.
M. Garon: ...le ministère des Transports a, par exemple,
des options de gravier ou des contrats sur des bancs de gravier
identifiés, en disant: Si on bâtit une route un jour dans le coin,
on dira à nos entrepreneurs dans nos soumissions que nous avons
déjà sous option ou sous bail des terrains où il y a du
gravier en disponibilité, d'emprunt A ou d'emprunt B. Vous pouvez vous
approvisionner à ces endroits, ou vous approvisionner dans votre
carrière privée. Cela est dans les normes. Mais si le
ministère des Transports lui-même ou, par son sous-traitant, veut
ouvrir un banc de gravier dans un belle prairie à boeufs où tout
est cultivé et en foin, il a le même problème que les
autres. On dit: Est-ce qu'il y a des carrières ailleurs? Est-ce qu'il y
a des endroits qui "maganent" moins l'agriculture que celui-là? Il est
soumis à la loi comme tout le monde là-dessus.
M. Vaillancourt (Orford): Ah! Il est aussi soumis à la
loi.
M. Garon: Bien oui. Sauf que, dans toutes les carrières en
activité et existantes, sur la grandeur du trou, il y a des droits
acquis à creuser le trou, mais, à un moment donné, il n'y
a plus de gravier.
M. Vaillancourt (Orford): Ma question est: À l'endroit
où il y a un banc de gravier, le droit acquis est d'un hectare, le
gravier est épuisé, le ministère des Transports peut
s'approvisionner dans le même banc de gravier sans vous demander la
permission. (Il h 30)
M. Garon: Non. Comme les autres, il lui faut une autorisation
pour agrandir son banc de gravier. Il peut arriver que l'autorisation ait
été accordée parce que c'est raisonnable et que, compte
tenu de la preuve, c'est sans impact majeur sur l'agriculture. Il peut
même arriver que le ministère des Transports, à contrat
avec quelqu'un qui lui avait donné un droit d'exploiter du gravier au
mérite, a commencé à faire un banc de gravier à
travers les pattes des vaches en plein milieu du champ. Ce n'est pas plus
drôle pour lui que pour d'autres et on dit: N'agrandissez pas là,
allez prendre votre gravier ailleurs. Il est arrivé des cas comme cela,
mais il faut les regarder au mérite. Vous avez vu le terrain chez vous
et dans votre pays. D'habitude, on le fait où cela a été
fauché, où il n'y a même pas un arbre à couper,
où c'est facile de rentrer avec le camion et qu'il y a du gravier pas
loin de la route.
M. Vaillancourt (Orford): Je sais. Je sais qu'il y a des bancs de
gravier en quantité chez nous. Il y a certaines sections du comté
où il y en a moins, mais, en général, on a du gravier pour
les besoins de la population environnante.
Je n'ai pas d'autres questions.
Le Président (M. Paré): Oui. Avant, c'est M. le
député d'Arthabaska.
Largeur des routes rurales
M. Baril (Arthabaska): Oui, M. le Président. J'aimerais
demander au président de la Commission de protection du territoire
agricole s'il y a une sorte d'entente entre la commission et le
ministère des Transports sur l'élargissement de nos routes
rurales. Je ne voudrais pas faire de cas particulier, mais, dans le
comté, dernièrement, le ministère des Transports a
demandé l'élargissement d'un rang qui est demandé par les
citoyens depuis je ne sais combien d'années. Tous et chacun ont
signé pour donner le terrain, selon la nouvelle formule ou l'entente
avec le ministère des Transports, et le ministère des Transports
a acheminé la demande chez vous. On demandait d'élargir à
60 pieds ou 20 mètres et leur demande a été refusée
en leur disant qu'ils s'en tiennent à 15 mètres, soit 45 pieds.
Je trouve que cela n'a pas de bon sens qu'on construise une route, un rang
double en plus, à seulement 45 pieds de largeur. Qu'est-ce que vous
voulez faire? C'est bien beau de dire: Si vous calculez qu'il y a 20 à
22 pieds d'asphalte, vous mettez seulement 3 pieds d'accotement de chaque
côté. Il faut quand même un peu d'espace pour planter la
clôture et creuser le fossé. Ce qui revient souvent en question,
c'est la norme du fossé, du deux dans un ou du trois dans un, mais cette
norme ne peut pas être appliquée sur toute la longueur de la route
ou du rang. On a souvent construit des rangs à 60 pieds - non pas parce
que j'en demande plus - et, à mon avis - je ne suis pas ingénieur
- c'est le strict minimum parce que l'accotement déboule, le
côté du champ déboule dans le fossé aussi, cela se
remplit et les agriculteurs sont les premiers à demander au
ministère des Transports de creuser à nouveau le fossé
pour égoutter leur terre. Cela coûte de l'argent au
ministère des Transports et souvent également cela prive les
agriculteurs d'un égouttement convenable.
Je pense que le ministère des Transports a fait l'effort qu'il
devait faire parce que 80 pieds, c'était trop large effectivement et
c'est une place pour faire pousser les branches, toutes sortes de choses. De
là à les réduire à 45 pieds... Je me demande s'il y
aurait une entente possible entre le ministère des Transports et la
commission pour qu'au moins on accepte une norme d'environ 60 pieds - en
mètres, c'est 20 - et qu'on n'oblige pas le ministère des
Transports à revenir en demandes d'accords, puis des délais. Chez
nous, c'est évident que le député est toujours
tiraillé là-dedans; les citoyens ont concédé une
partie du terrain gratuitement, ont demandé pendant tant d'années
la construction d'un rang et souvent le retard que cela peut occasionner peut
amener que la construction soit remise à l'année d'ensuite.
Je ne sais pas s'il pourrait y avoir une entente entre la commission et
le ministère des Transports quand une demande est faite; il me semble
que c'est raisonnable, 60 pieds. Je ne sais pas comment le ministère des
Transports a défendu sa cause, mais la réponse de la commission
a-t-elle été à peu près celle-ci: Le
ministère des Transports n'a pu prouver qu'il avait besoin de 60 pieds
de largeur pour construire le rang et cela nuisait à l'agriculture de
toute façon?
M. Garon: Oui. C'est peut-être légaliste, mais je
pense que je comprends ce que vous voulez dire. Ce n'est pas arrivé
souvent que la commission refuse des chemins en disant: 45 pieds, c'est assez,
ou 50 pieds, c'est assez. C'est arrivé quelquefois seulement. On a
refusé des chemins de 120 pieds à la campagne, vous le savez.
M. Baril (Arthabaska): Vous avez bien raison.
M. Garon: 120 pieds de largeur. Ils voulaient 120 pieds de
largeur de chemin de gravier. Sauf que, comme commission, je pense qu'on est
tenu de motiver une décision et de le faire avec les
éléments de preuve qui sont disponibles. Or il est arrivé
que le ministère des Transports nous dise: Ces deux milles dans ce coin,
compte tenu de la nature du fond de terrain, de la hauteur de la route en
surplomb par rapport aux champs, de la profondeur des fossés et des
pentes nécessaires et même de la sorte de sol, pour savoir si cela
va trop débouler dans le fossé ou pas... Avec 45 pieds, on met de
l'asphalte et tout est correct et, ailleurs, avec 70 pieds, il n'y en a pas
assez, parce que le chemin est très haut et qu'il faut des fossés
très profonds, des pentes très différentes. Dans ce
coin-là, on voudrait 75 pieds. Voici ce qu'on dit au ministère
des Transports: Écoutez, ne faites pas une demande en disant que c'est
60 pieds parce que les normes sont à 60 pieds. Y a-t-il quelqu'un parmi
vous autres qui est allé voir si, dans ce coin-là, 50 pieds
seraient assez parce que vous allez prendre 10 pieds du champ de
blé-d'Inde à cette personne-là, tout le long de sa terre?
L'individu s'oppose et il y a des agriculteurs qui sont venus nous voir dans la
Beauce - il y en a eu, et il y en a eu partout ailleurs - en disant: Je ne
comprends pas, notre chemin a 40 pieds et tout ce qu'on veut, c'est d'arranger
les fossés. On veut prendre 75 pieds à travers nos champs. Je
trouve que c'est bien assez de 50 pieds. Les gens du ministère des
Transports nous disent: Écoutez, ce sont les normes, 20
mètres, ce sont les normes. Mais oui, mais, à part les normes, au
mérite, dans le champ, avez-vous besoin de 70 pieds? Bien non, c'est
à cause des normes. Il y a donc des gens qui s'opposent.
M. Vaillancourt (Orford): Les normes sont de 60 pieds.
M. Garon: Mais, en matière de mérite agricole, si
on veut protéger du sol agricole, il ne s'agit pas seulement d'appliquer
des normes. Dans ce coin-là, on dit: Pouvez-vous mettre de l'asphalte,
laisser les vieux arbres là? Les gens vont aller un petit peu moins
vite, faites rouler les gens à 35 milles à l'heure, c'est une
zone de campagne. C'est cela que tout le monde veut. Les gens veulent de
l'asphalte, ils ne veulent plus de poussière, ils veulent que les
fossés soient nettoyés. Ils ne veulent pas de gros boulevards
où on circule à 60 milles à l'heure pour écraser
les vaches et où ils sont incapables de traverser ou incapables de
monter avec le tracteur, parce que la route est tellement haute que le
cultivateur éclaire le ciel le soir, avec son tracteur, quand il monte
sur la route. Il ne veut pas de cela. Les gens interviennent et disent: Faites
donc 45 pieds, arrangez le chemin et, si les fossés fonctionnent,
laissez faire les normes. Vous prenez mon champ, vous coupez mes drains
souterrains à part cela. C'est cela qu'il faut, regarder au
mérite.
Parfois, on dit au ministère des Transports: Écoutez, on
n'a aucune preuve selon laquelle vous avez besoin de 60 pieds et vous nous
dites que c'est à cause des normes. Au mérite, dites-nous, dans
ce bout-là: On a besoin de 70 pieds; dans ce bout-là, de 45 et,
dans ce bout-là, on ne le refait pas du tout.
Pour ce qui est du deuxième aspect de votre question, on a
procédé à la refonte -il y a déjà quatre ans
- de tous les règlements de la commission. À l'article 41, il y a
un règlement qui pourrait prévoir que certains aspects des
travaux publics seraient exclus. Il y a une disposition pour les chemins et il
y a une norme. Espérons que, malgré cela, le ministère des
Transports ne s'amusera pas à défaire des clôtures à
vaches, à prendre des champs labourés pour le plaisir de rendre
tous les chemins conformes aux normes, pour que le cultivateur qui passe la
charrue ne casse pas les boîtes à malle ou que l'autre soit plus
content parce que ça roule mieux là-dessus. Parfois, les normes
ne sont que cela. D'autres fois, cela est nécessaire. Parfois, cela ne
l'est pas.
M. Baril (Arthasbaska): Je vous comprends. Je comprends
très bien votre point de vue et je l'endosse, mais je vous dis que, dans
le cas qui me concerne, avoir refusé les 60 pieds, je n'accepte pas la
décision de la commission, parce que je considère que cela n'a
pas de bon sens. Également, il y a la réalité...
M. Garon: Qu'est-ce qui empêche le ministère des
Transports - il l'a d'ailleurs déjà fait à plusieurs
reprises - de refaire une demande...
M. Baril (Arthabaska): C'est cela.
M. Garon: ...parce qu'il va devoir le faire avec un citoyen pour
justifier qu'il a besoin de reculer sa grange et de tasser tout cela parce
qu'il faut mettre cela à 60 pieds?
M. Baril (Arthabaska): Écoutez, je vous dis...
M. Garon: ...au mérite, cela est nécessaire. Si
tout le monde est convaincu que cela est nécessaire, il n'y a pas besoin
de faire...
M. Baril (Arthabaska): ...que, chez nous, le ministère des
Transports - je ne peux pas parler de l'ensemble du Québec, parce que je
ne suis pas partout - a fait un effort parce qu'avant il construisait à
80 pieds et c'était impossible, impensable de faire quelque chose
à moins de 80 pieds. Il a réduit ses normes à 60 pieds et
il fait même des efforts pour tasser le moins possible de granges et de
maisons.
M. Garon: Quand les normes étaient à 80 pieds,
c'était un évangile, c'était sacramentel. Aujourd'hui,
elles sont à 60 pieds et c'est un nouvel évangile, c'est
sacramentel. On pense qu'on n'a pas le droit d'avoir un évangile.
Qu'est-ce qu'il faut pour avoir un bon chemin, bien fait, qui se draine bien et
qui est bien nettoyé? Allez donc voir et allez donc discuter avec les
agriculteurs qui interviennent et qui s'opposent parfois à
l'élargissement du chemin qui défait tout leur champ.
L'agriculteur pense - il a peut-être tort - que le ministère n'a
pas besoin de cela. Il y en a même qui s'opposent devant...
M. Baril (Arthabaska): Je suis d'accord...
M. Garon: ...je ne veux pas de boulevard comme cela devant ma
porte.
M. Baril (Arthabaska): ...mais ce que je veux vous dire, c'est
que, dans le cas présent, l'ensemble des agriculteurs avaient
donné le terrain, ils avaient tous signé pour céder le
terrain gratuitement.
M. Garon: Vous savez comment cela
marche. On vous dit: Vous donnez le terrain parce que, sans cela, on ne
peut pas se débrouiller pour refaire un chemin assez bon pour que vous
puissiez y passer tout le temps, quand il pleut au printemps. Ils viennent nous
dire: J'ai tout cédé, j'ai tout signé. Ils m'ont dit: Si
tu ne signes pas cela et si tu ne veux pas céder ton terrain à la
municipalité, ton chemin, tu te débrouilleras pour passer et tu
prendras ton tracteur pour sortir ton automobile.
M. Baril (Arthabaska); En tout cas...
M. Garon: Je vais signer. Tout ce que je veux, c'est un bon
chemin, je ne veux pas 60 pieds, je veux un chemin qui "marche".
M. Baril (Arthabaska): Oui, mais il y a aussi la
réalité des faits dont il faut tenir compte. Si le voisin donne
dix pieds et que je n'ai pas besoin d'en donner, parce que je ne veux pas en
donner, le chemin aura 45 ou 50 pieds à cet endroit. On va dire: Comment
cela se fait-il que le voisin donne dix pieds et que l'autre n'est pas capable
de le faire?
M. Garon: Vous entrez là dans le vif du sujet. C'est des
plus complexes. Il y a quinze et des fois quarante individus qui viennent
à une audition publique. Il y en a trois qui sont prêts à
céder leur terrain, il y en a dix qui ne veulent pas, il y en a une
"gang" qui dit de passer à gauche et l'autre "gang" dit: Non, passez
à droite. Le ministère des Transports dit: On va passer dans le
champ d'avoine tout le long parce que de l'autre côté, il y a
quatre ou cinq maisons et des chalets. Les gars ne veulent pas manger leur
gazon. L'agriculteur de l'autre côté dit: Pourquoi prendre mon
champ d'avoine? Prenez leur gazon. La chicane commence. On dit: Faites-nous un
dossier au mérite. À quelle place allez-vous passer? Ce n'est pas
facile.
M. Baril (Arthabaska): Non, je sais que ce n'est pas facile.
M. Garon: On nous dit: C'est 60 pieds quelque part. On ne vous
dit pas où, ni à gauche, ni à droite, à cause des
normes. On dit: II y a des intervenants devant nous.
M. Baril (Arthabaska): Ma question s'adresse au ministre. M. le
ministre, avez-vous l'intention, dans des délais raisonnables, de
réglementer l'article 41, qui pourrait autoriser le ministère des
Transports, certains ministères ou certaines municipalités
à faire des travaux sur des territoires agricoles sans qu'il y ait
besoin de demander l'autorisation à la commission?
M. Mathieu: C'est une question plantée!
M. Garon: Pas vraiment, parce que...
M. Baril (Arthabaska): Je viens de l'expliquer.
M. Mathieu: Aimez-vous mieux les planter?
M. Baril (Arthabaska): Ce n'est pas planté, c'est dans la
loi.
M. Garon: Je n'étais pas au courant. Le
député d'Arthabaska est assez grand pour poser ses questions tout
seul. Je le connais depuis longtemps et il n'a pas besoin de mon inspiration
pour décider de ses questions. C'est un sujet qu'on pourrait
réglementer pour donner, dans tel cadre, le feu vert au ministère
des Transports. Au fond, c'est une question de choix. Il n'y a pas de
décision de prise, mais ce n'est pas impossible qu'on le fasse. À
ce moment-là, le débat va se faire avec les agriculteurs. La
commission joue souvent un rôle avec des organismes gouvernementaux
à ce point de vue pour essayer de trouver la meilleure solution au
problème, en consultation avec les agriculteurs. Si on
réglemente, c'est là le dilemme, pour dire que, dans tel cas,
c'est automatique, le ministère des Transports peut, le débat va
se faire avec les cultivateurs. Vont-ils sentir qu'ils seront mieux
protégés s'ils discutent eux-mêmes directement avec le
ministère des Transports ou si le débat se fait entre le
ministère des Transports et la Commission de protection des terres
agricoles en consultation avec les agriculteurs? C'est là le
débat.
Pour être bien franc, si les cultivateurs me disaient: On aime
mieux négocier directement avec le ministère des Transports sans
la commission, je n'aurais aucune objection. Mais je ne suis pas convaincu. Je
regarde des exemples de travaux, comme le gazoduc ou des choses comme
celles-là. La Direction de la protection du territoire agricole au
ministère a véritablement apporté une contribution, parce
que c'est bien simple, au fond, les fonctionnaires qui travaillent dans ces
organismes au ministère ont une grande crédibilité chez
les agriculteurs. Les gens savent que nos fonctionnaires ne sont pas là
pour leur nuire; ils sont là pour faire quelque chose pour les aider.
Quand on a travaillé dans le gazoduc, par exemple, on a travaillé
avec les agriculteurs pour trouver le meilleur endroit possible pour passer le
gazoduc, celui qui nuirait le moins à l'agriculture. Il n'y a pas un
endroit, dans des endroits aussi populeux... C'était facile de passer
dans le nord de l'Ontario et dans l'Ouest, il n'y avait pas de monde. Pour
passer au Québec, dans des territoires vraiment habités,
où il y avait des agriculteurs, il y a eu un excellent travail de
fait.
Le problème, le président de la commission l'a
mentionné dans son exposé, et j'ai un cas comme cela dans mon
comté qui dure depuis cinq ans à peu près. Pourquoi? Parce
que ce que vient de dire le président de la commission, M. Blain, c'est
que les normes minimales de la construction des routes sont que ce sont des
routes plus larges qu'ils ne le souhaitent. M. Blain disait: . J'ai vu
plusieurs cas où les cultivateurs voulaient une route pas
nécessairement large, même pas dans la norme minimale d'environ 60
pieds de largeur, moins que cela, mais alsphaltée. Ils ne souhaitent pas
qu'il y ait une circulation considérable. Par exemple, dans mon
comté, des cultivateurs me disent: Si on laisse faire le
ministère des Transports, cela va devenir un boulevard. Au lieu de
passer 1000 automobiles, il va passer 3000 ou 4000 automobiles. Pour nous, ce
ne sera pas vivable. C'est cela le dilemme. (Il h 45)
Je me demande si - politiquement, ce n'est peut-être pas bon de le
dire comme cela, mais je le dis franchement, comme je le pense - on ne pourrait
pas avoir une norme de routes rurales qui correspondrait davantage à ce
que souhaite le monde agricole. Si on pouvait arriver à quelque chose
qui dirait: Cela, c'est une route pour un rang, il ne faudrait pas que les
ingénieurs du ministère des Transports considèrent qu'ils
se diminuent en travaillant sur une route qui est un rang. Je sais bien que
l'ingénieur trouve toujours cela plus beau lorsqu'il fait un
trèfle pour le pont de Québec. En plus de cela, j'ai l'impression
qu'il est assez mal fait. Je n'ai jamais vu un trèfle mal fait comme
cela. N'est-ce pas que c'est un vrai casse-gueule?
Quand on travaille dans la voirie rurale, il faut avoir les deux pieds
par terre. C'est pour cela que, dans le nouveau programme où on parle de
la voirie rurale avec les municipalités, je pense qu'on aura de la
voirie rurale qui correspondra davantage à ce que souhaitent les gens,
une voirie axée sur les besoins locaux des gens.
Quand on avait le programme des chemins municipaux à vocation
agricole, on faisait des routes qui correspondaient davantage aux besoins des
gens. Tandis que, quand le ministère des Transports fait ses routes
qu'il appelle "numérotées", ce sont des routes qui sont plus
larges que ce que souhaite le monde agricole. Je ne sais pas si c'est votre
avis.
M. Baril (Arthabaska): Je comprends, M. le ministre. C'est que,
dans certains districts, le mien entre autres, toute l'équipe
d'ingénieurs qui était là a été
changée et ceux qui étaient là avant, ceux à qui il
fallait des boulevards partout sont heureusement partis. Je ne sais pas
où ils sont rendus, mais, en tout cas, ils ne sont plus chez nous. La
nouvelle équipe ... M. Garon: ...
M. Baril (Arthabaska): Je ne sais pas où ils sont, mais je
suis bien content qu'ils ne soient plus chez nous. Maintenant, c'est une
nouvelle équipe qui, je pense, tient compte du fait de protéger
les terres agricoles et demande le strict minimum. Mon intervention
était dans le sens d'essayer que nous -puisqu'ils ont fait
déjà fait un effort - nous fassions notre propre effort.
Je reviens à ma question concernant l'article 41. C'est
évident que, lorsqu'une société d'État ou un
ministère quelconque fait une nouvelle construction, ce n'est pas la
même chose. Pour une nouvelle construction, il doit faire une demande
devant la commission, que ce soit Hydro-Québec ou d'autres, ce n'est pas
la même chose. Mais lorsqu'on demande seulement d'élargir un rang
et qu'on ne dérange pas l'assiette du chemin, ce n'est absolument pas la
même chose. C'est sûr que, si on veut redresser une courbe, que
l'on coupe un champ de luzerne et qu'on laisse une pointe qui n'est pas
cultivée et toutes sortes de choses comme cela, ce n'est pas la
même chose. Mais quand on ne change pas l'assiette du chemin, il me
semble qu'il serait assez facile de réglementer l'article 41 pour
autoriser le ministère à agir. Je ne peux pas le définir
exactement ou techniquement. C'est rare que je demande de réglementer
quelque chose, parce que je suis "antirèglement". Plus il y a de
règlements, plus cela prend de gens pour faire appliquer ces
règlements et plus cela embête les gens. Au moins, si on
réglementait l'article 41, cela réglerait certaines choses.
Une voix: ...
M. Baril (Arthabaska): Ce n'est pas toujours bon.
Le Président (M. Paré): Est-ce que vous avez
terminé?
M. Baril (Arthabaska): Si le ministre...
Le Président (M. Paré): M. le député
de Pontiac.
Droits acquis en matière de zonage
M. Middlemiss: Oui, ma question concerne les individus qui ont un
droit acquis pour construire une maison unifamiliale. J'aimerais savoir quelles
sont les raisons qui ont amené à donner ce droit acquis, parce
que ces gens l'avaient avant la mise en vigueur. Quelles sont les raisons qui
ont justifié cela?
M. Garon: D'abord, c'est tout l'état de la loi, de la
jurisprudence ou du droit en matière de zonage. C'est une
réglementation de zonage, la loi 90. Tout le monde reconnaîtra que
ceux qui faisaient autre chose avant une réglementation de zonage que
l'usage permis ont un droit acquis. Un chalet, par exemple, ou un endroit de
villégiature, ce n'est pas de l'agriculture. Si la loi n'avait rien dit
sur les droits acquis, on se serait référé aux normes de
droit et à la jurisprudence en matière de zonage. Celui qui avait
une maison aurait dit: Moi, j'avais une maison ou un chalet dans la zone
agricole avant la loi; j'ai le droit de continuer mon usage dérogatoire
tant que je l'utilise comme cela. Or, il était cependant restreint au
droit ou à la jurisprudence. Il avait le droit de continuer l'usage
qu'il en faisait auparavant, qui était dérogatoire, mais non de
le changer pour un autre. Il avait le droit de continuer à utiliser le
terrain qu'il utilisait pour son chalet, mais non une plus grande
étendue de ce terrain.
M. Middlemiss: Je parle de celui dont le terrain était
vacant. Lui, il avait le droit acquis de construire?
M. Garon: Non. Tous ceux qui faisaient activement autre chose que
de l'agriculture avant, ont de vrais droits acquis. Le gars qui avait un
restaurant dans la zone agricole a le droit de continuer à avoir un
restaurant. Si on applique le droit commun, si son restaurant passe au feu, il
est fini, il ne peut pas le rebâtir, etc. Or, la loi lui dit: Vous avez
un an sous couverture végétale; vous pouvez même agrandir
jusqu'à un demi-hectare. C'est plus large que le droit commun et c'est
plus souple aussi. Il n'y a aucune loi, aucune jurisprudence et aucune
tradition de droit qui reconnaît des droits acquis à des lots
vacants. C'est bien clair. Il n'y avait pas d'usage. Ce qui donne un droit
acquis, ce n'est pas d'avoir un terrain, c'est d'avoir utilisé le
terrain à une fin qui devient contraire aux règlements de zonage.
Le meilleur exemple, on le trouve chez celui qui avait un dépanneur ou
un restaurant dans une zone qui devient zonée résidentielle
unifamiliale. Lui, il invoque un droit acquis parce qu'il avait un restaurant
avant que ce territoire soit zone unifamilial.
M. Middlemiss: Mais, s'il passe au feu...
M. Garon: Mais s'il avait un lot vacant, il n'a pas de droits
acquis.
M. Middlemiss: Mais son lot était cadastré...
M. Garon: II n'y a personne qui, avec un lot vacant,
possède des droits acquis dans les législations connues de zonage
en
Amérique du Nord, en Angleterre et en Europe. Il n'y en a pas. Le
seul droit qui pourrait peut-être exister, c'est au lotissement, parce
qu'il est déjà fait. Il l'a déjà, son petit
terrain. Mais, s'il n'a encore rien fait sur son lot vacant et si, le
lendemain, c'est zone industriel, tout ce qu'il peut faire, c'est de lancer une
industrie. Si, le lendemain, c'est zone agricole, tout ce qu'il peut faire,
c'est de l'agriculture. C'est pour cela que le droit de bâtir une maison
sur un lot vacant, dans la loi, ce n'est pas au chapitre des droits acquis.
C'est un privilège dérogatoire aux restrictions de la loi. On
dit: Malgré le fait que vous ne pouvez faire que de l'agriculture, vous
avez un privilège personnel - temporaire, à part cela - de vous
bâtir une maison, en présumant que vous avez acheté le
terrain pour cela, mais cela va prendre fin à telle date. Aujourd'hui,
cela finit le 31 décembre 1986. Mais le droit sur le terrain, c'est de
faire de l'agriculture. Le propriétaire a un privilège de se
bâtir; c'est un droit dérogatoire consacré par la loi. Il y
a des règlements de zonage qui disent la même chose. Malgré
le règlement, ceux qui ont un terrain ont six mois pour faire telle
chose. Après cela, ils ne peuvent plus. Ce n'est pas un droit acquis,
cela. Celui qui a un lot vacant et qui se dit: Moi, j'avais un droit de me
bâtir. Il n'avait pas le droit de se bâtir. Il n'avait pas le droit
de se garantir que son terrain serait toujours zone pour faire n'importe
quoi...
M. Middlemiss: Non, mais la commission...
M. Garon: ...parce qu'il n'avait jamais rien fait avec ce
terrain.
M. Middlemiss: Dans les cas dont je vous parle, la commission a
reconnu que l'individu aurait pu construire.
M. Garon: C'est la loi qui dit cela, ce n'est pas la
commission.
M. Middlemiss: Oui, il s'est adressé à la
commission qui a dit: Oui, on reconnaît que vous...
M. Garon: Oui.
M. Middlemiss: ...pouvez construire...
M. Garon: Oui.
M. Middlemiss: ...avant telle date.
M. Garon: Oui.
M. Middlemiss: L'individu ne peut pas vendre...
M. Garon: II peut vendre.
M. Middlemiss: ...si, pour une raison, il est
transféré.
M. Garon: II peut vendre...
M. Middlemiss: II ne peut pas vendre à quelqu'un d'autre
pour...
M. Garon: II peut vendre, mais son acheteur, comme lui, tout ce
qu'il peut faire, c'est de l'agriculture. Mais, ce que la loi dit...
M. Middlemiss: Oui, mais...
M. Garon: ...c'est que celui qui avait acheté un terrain
de bonne foi - on va présumer la bonne foi, surtout entre le 9 novembre
1978 et les décrets ultérieurs, on se comprend - il avait
acheté cela sans savoir que ce serait zone agricole; il avait
acheté ce terrain pour se bâtir une maison. Il a un délai
pour bâtir la maison qu'il est présumé avoir voulu
bâtir quand il a acheté. Mais il n'y a aucune disposition dans la
loi qui lui permet de revendre son terrain en 1983, en plein champ, dans la
zone agricole, à un gars de la ville qui dit: Moi, je vais prendre le
privilège de l'autre et je vais me bâtir à sa place.
M. Middlemiss: Non, ce n'est pas en plein champ. Dans les cas
précis dont je vous parle, il y a déjà trois ou quatre
maisons construites alentour.
M. Garon: II y a des terrains...
M. Middlemiss: Lui, il aurait le droit de construire.
M. Garon: II y a des terrains comme cela où le
propriétaire nous dit: Moi, j'avais acheté cela, mais je suis
vieux, je suis malade, ou j'ai changé d'idée, et je ne veux pas
me bâtir; je veux vendre mon terrain. Autorisez-vous mon acheteur
à se bâtir? C'est exactement comme partout ailleurs au
Québec: c'est au mérite qu'on regarde cela et on dit:
Écoutez, il y a quatorze maisons tout le tour; il reste deux terrains;
même si on en mettait deux, à travers les quatorze, au milieu,
cela ne change rien au mérite. Il y en a d'autres dont le terrain est
juste sur le bord du champ, à côté de la grange, et il veut
le revendre à un gars de la ville qui veut se bâtir une maison.
Alors, c'est au mérite. Nous, on n'a pas d'autorisation pour changer la
loi. On dit, dans un cas: Cela n'a pas de bon sens en agriculture et, dans un
autre cas: Cela ne nuit pas du tout. Mais ceux qui avaient des lots vacants
n'ont pas de droits acquis à revendre des terrains dont les acheteurs,
en 1983, vont se bâtir à la campagne dans des zones agricoles.
M. Middlemiss: Je parle de l'individu qui avait un lot
spécifiquement pour construire. Disons que son employeur l'envoie
à l'extérieur. Il est pris avec un morceau de terrain qu'il ne
peut vendre à personne pour fins de construction et qui n'est pas
utilisé à des fins agricoles.
M. Garon: Son acheteur peut demander l'autorisation de se
bâtir, comme s'il achetait, en neuf, un terrain...
M. Middlemiss: Dans tous les cas que je connais, il y a toujours
eu refus.
M. Garon: Bien, probablement qu'au mérite, la commission a
du dire: Écoutez, l'acheteur avait un privilège provisoire de se
bâtir. C'est la loi qui lui accorde cela. Mais s'il l'avait
demandé à la commission, on ne lui aurait pas accordé ce
droit parce que ce n'est pas la place et que cela n'a pas de bon sens.
Là, il nous demande qu'un autre gars, en 1983, ait l'autorisation de se
bâtir. Cela n'a pas plus d'allure pour lui, mais on ne peut pas
l'empêcher d'utiliser son droit à lui. Il ne faut pas
présumer que tous ceux qui ont des terrains vacants vont se bâtir
une maison au Québec, parce qu'il va y avoir des maisons pour à
peu près trois fois la population actuelle.
M. Middlemiss: Non, mais vous pouvez l'encourager à se
construire. Vous pouvez contourner la loi en le laissant se construire et
vendre à quelqu'un d'autre six mois après.
M. Garon: En droit, cela s'appelle un moyen
détourné et indirect de faire une contravention. On en a pris
deux ou trois de façon tellement claire que c'est l'acheteur qui a
choisi la maison, que c'est lui qui l'a payée, etc.; ils ont une
ordonnance, ils ont un problème, parce qu'ils avaient demandé
l'autorisation de vendre un terrain à un gars, qu'ils bâtiraient
à sa place et cela a été refusé. Après cela,
il s'est quand même trouvé un acheteur et il a dit qu'il allait
faire émettre le permis de construction en son nom, mais, au fond, la
veille, c'est l'acheteur qui avait commencé à bâtir. Il n'a
jamais voulu bâtir, ce n'est jamais lui qui a bâti et tout le monde
le sait. Tous ceux qui ont fait les contrats le savaient, etc. Cela s'appelle
trouver un truc illégal qui a l'air légal pour contourner la loi.
Eh bien!, c'est arrivé quelquefois. On ne peut pas changer la loi. Lui,
il a le droit de se bâtir, mais pas d'autres.
M. Middlemiss: Et les droits de l'individu? Prenons le cas de
gens qui sont sincères et qui perdent avec cela. Qui va acheter? Il n'y
a pas d'utilisation agricole.
Alors, ces gens sont pris avec des parties de terrain sur lesquelles ils
sont obligés de payer des taxes et que personne n'achètera.
M. Garon: Écoutez, non, non.
M. Middlemiss: L'individu n'a pas le droit.
M. Garon: Quelqu'un qui avait acheté un terrain pour le
vendre à une compagnie de pétrole - je ne veux nommer personne
-pour bâtir une station-service sur un coin de rue, parce que c'est un
beau coin...
M. Middlemiss: Non, je ne parle pas d'une affaire commerciale, je
parle de l'individu.
M. Garon: Non, mais je donne un exemple qu'on connaît bien
en matière de zonage. Après cela, cela devient zone
résidentiel, unifamilial. Il peut vendre son terrain à quelqu'un
qui veut en faire un usage avec un permis résidentiel, unifamilial. Mais
il ne peut plus vendre son terrain à une station-service pour
bâtir une station-service. Mais celui qui a un terrain vacant, qui
n'utilise pas à temps le droit qu'il a de faire quelque chose qui peut
être dérogatoire ne peut pas trouver un truc pour que l'acheteur
ait un "bypass" au règlement de zonage.
M. Middlemiss: Mais, pour celui qui a un terrain qui est zone
commercial, le zonage se fait suivant le plan de la ville, il a le moyen de
faire ses représentations pour que cela ne soit pas changé. Dans
le cas du zonage agricole, cela n'a pas été le cas.
M. Garon: Qu'est-ce que vous voulez dire par là?
M. Middlemiss: C'est que, dans le cas de l'individu qui a un
terrain zone commercial, c'est la ville qui peut changer le zonage.
M. Garon: Tout ce qu'il peut faire, c'est de demander un
amendement à la municipalité. On se comprend bien?
M. Middlemiss: Non, c'est que la ville a été
obligée de faire accepter auparavant son changement de zonage. Elle a
été obligée de consulter la population. Il peut même
y avoir un référendum.
M. Garon: Oui.
M. Middlemiss: Donc, il a un droit qui est protégé.
Dans le zonage agricole, cela n'a pas été le cas. Cela a
été imposé.
M. Garon: Dans le cas du zonage agricole, c'est beaucoup plus
souple que dans la réglementation municipale.
M. Middlemiss: Non, c'est que le moment de la
décision...
M. Garon: II peut faire une demande d'autorisation au
mérite; d'accord? Si, au mérite, il demande au maire et au
conseil de changer le zonage, pour lui, afin de mettre une "scrap-yard" dans
une zone résidentielle, peut-être que le maire et le conseil lui
diront non tout de suite ou qu'il n'y aura même pas besoin de
référendum, parce que cela n'a pas de bon sens.
M. Middlemiss: D'accord.
M. Garon: Mais cela prend tout le processus de l'amendement et
d'un "spot zoning" au règlement de zonage pour permettre à un
gars de bâtir un immeuble à logements multiples dans une zone
unifamiliale. Vous avez une jurisprudence dans la région de l'Outaouais
à ce sujet. Dans le zonage agricole, c'est au mérite. C'est
beaucoup plus souple et beaucoup plus rapide. On ne demande pas:
Écoutez, moi, dans mon cas, c'est zone résidentiel... On ne
demande pas, au mérite, dis-je, au conseil s'il permet de bâtir
quand même un restaurant. Le conseil pourrait décider cela sans
référendum. Bien non! Alors, c'est beaucoup plus rapide et plus
souple dans la loi sur le zonage agricole pour tenir compte du
mérite.
M. Middlemiss: Mais qu'arrive-t-il à l'individu qui
possède ce terrain-là et qui ne peut pas le vendre aux fins pour
lesquelles il voulait lui-même l'utiliser? Il a payé un certain
montant. Croyez-vous qu'il va récupérer l'argent qu'il a investi
là-dedans si personne ne veut l'acheter?
M. Garon: Non.
M. Middlemiss: Donc, ses droits à lui...
M. Garon: S'il l'a acheté au pied carré pour fins
de développement résidentiel...
M. Middlemiss: C'est un lot.
M. Garon: ...et qu'au mérite, finalement, il est zone
agricole, tout ce qu'il peut faire, c'est de le revendre agricole. Cela va?
M. Middlemiss: Oui.
M. Garon: II va le revendre à sa valeur agricole. Mais
c'est l'effet de tous les terrains zones. Celui qui avait acheté en vue
d'un gros développement commercial, s'il est zone unifamilial, va le
vendre sur le marché unifamilial. Sa valeur suit la valeur du
terrain en fonction du zonage municipal chaque fois que le zonage
change, aussi longtemps qu'il n'a pas fait quelque chose avec son terrain.
C'est partout, dans toutes les sortes de zonage.
M. Middlemiss: Mais cela ne crée pas un préjudice
à cet individu, parce que vous lui auriez donné la permission de
construire. (12 heures)
M. Garon: En matière de zonage, tous les juristes diraient
qu'il n'y a pas de préjudice à ce que quelqu'un perde, dans sa
tête, la valeur que n'a pas encore son terrain. Autrement dit, quelqu'un
dit: Mon terrain vaut 3 $ le pied, parce que je le vendrais à une
station-service. Le lendemain, c'est zone résidentiel et il va le vendre
un dollar le pied. Est-ce qu'il dit au maire de la municipalité qu'il
lui a volé 2 $ le pied?
M. Middlemiss: Ce n'est pas dans le même contexte.
M. Garon: C'est la même disposition en matière de
zonage.
M. Middlemiss: Là, il dit: J'aurais le droit de
construire... Je vous donnerai le cas spécifique où il a eu le
droit de construire, mais il a décidé qu'il ne voulait pas
construire pour des raisons valables. Il a tenté de le vendre...
M. Garon: Oui.
M. Middlemiss: ...et on lui a refusé de vendre le
terrain.
M. Garon: Écoutez, c'est possible, c'est probablement
parce que, sur son terrain, sauf le droit qu'il a, lui, de se bâtir, qui
est concédé par la loi, au mérite, la commission ne voit
pas le moyen de l'autoriser à mettre une maison là, à la
campagne, comme cela...
M. Middlemiss: II y en a déjà deux ou trois aux
alentours.
M. Garon: ...entre autres, sans autoriser tous les autres du
même rang à vendre leurs lots vacants pour que de nouvelles
personnes viennent bâtir à leur place, et faire cela dans toute la
paroisse, tout le canton et toute la province.
M. Middlemiss: C'était le lot qui était
déjà...
M. Garon: Des fois, vous avez ce problème aussi que s'il
se bâtit des maisons sur tous les lots vacants, il va y avoir beaucoup de
maisons vacantes.
Le Président (M. Paré): M. le député
d'Orford.
M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, j'ai quelques
questions. Selon ce que j'ai cru comprendre, si quelqu'un qui a un commerce le
long d'une grande route, soit un restaurant, soit un petit commerce, passe au
feu, est-ce qu'il conserve son droit acquis pour reconstruire ou s'il le
perd?
M. Garon: Bon, en droit commun, il le perd. Dans la loi sur le
zonage agricole, il ne le perd que si son terrain redevient sous couverture
végétale pendant plus de douze mois. Autrement dit, la
prescription de l'usage dérogatoire est beaucoup plus large dans le
zonage agricole que dans le droit commun en matière de zonage. Pour se
référer à la perte de l'usage dérogatoire en
matière de zonage urbain ou de zonage commun, il faut regarder le
règlement. Il y a certains règlements qui prévoient
comment pourrait se conserver un droit acquis ou un usage dérogatoire.
C'est constant qu'en droit de zonage standard, urbain, non agricole, l'usage
dérogatoire est réglementé plus sévèrement
que dans le zonage agricole.
M. Vaillancourt (Orford): Mais, tout de même, on voit
à bien des endroits qu'il y a des dépanneurs, des restaurants ou
de petits commerces, qui passent au feu...
M. Garon: Le moindrement qu'on devient...
M. Vaillancourt (Orford): ...ils ont douze mois, d'après
le zonage agricole...
M. Garon: Oui.
M. Vaillancourt (Orford): ...pour reconstruire.
M. Garon: Non. C'est même plus large que cela.
M. Vaillancourt (Orford): Mais pour garder leurs droits
acquis?
M. Garon: II ne faut pas qu'on laisse son terrain sous couverture
végétale pendant plus de douze mois. Cela peut être plus
loin que douze mois. Il peut rester sur sa "footing", sur les débris,
pendant un bout de temps, avant que la fardoche se mette dans cela. C'est une
loi. Il peut arriver que, s'il a le droit de se rebâtir dans la zone
agricole en vertu de la Loi sur la protection du territoire agricole, il
était déjà dérogatoire au règlement
municipal et, en vertu du règlement municipal, il ne peut pas se
rebâtir du tout.
M. Vaillancourt (Orford): Oui, là où il y en a,
mais il y a certaines municipalités qui n'avaient pas de
règlement municipal.
M. Garon: C'est exact.
M. Vaillancourt (Orford): Et il y en a encore. Est-ce que cela
veut dire que quelqu'un qui passe au feu, s'il ne nettoie pas les débris
après l'incendie, peut avoir plus de douze mois? S'il nettoie les
débris, s'il ne construit pas, cela devient cultivable...
M. Garon: Je ne peux pas répondre à cela. On ne va
pas compter le nombre de touffes de verdure qui poussent à travers une
vieille "footing" pour savoir si c'est devenu aujourd'hui sous couverture
végétale et, avec un "meter", compter douze mois. La loi est
très large dans le cas d'un terrain où il y a un usage
dérogatoire, comme pour les dépanneurs, comme vous dites. Il y a
des droits acquis à faire autre chose que de l'agriculture, comme un
dépanneur, ou n'importe quoi d'autre qui n'est pas agricole, selon les
règlements municipaux, selon ce qui est permis au niveau de la
municipalité. Mais il peut perdre son droit acquis si son terrain
redevient sous couverture végétale pendant plus de douze mois. Je
pense qu'en pratique il faut le faire exprès. Il faut qu'il passe le
bulldozer, qu'il nettoie toute la "footing" et qu'il laisse pousser la
fardoche. Si cela fait trois ans que cela pousse, il ne viendra pas nous dire,
si c'est en fardoche et que le foin pousse partout, qu'il a encore des droits
acquis. C'est tout ce que dit la loi 90. Mais, en pratique, c'est au sujet de
la réglementation municipale. Quelqu'un qui passe au feu, dès le
lendemain, il va faire quelque chose, avant au moins que cela fasse un an et
que cela soit en fardoche.
M. Vaillancourt (Orford): Mais, en pratique et d'après la
loi, il maintient ses droits acquis. Le type passe au feu, il dit: Je
reconstruis tout de suite ma bâtisse, il a ce droit.
M. Garon: Au minimum, il le maintient pour douze mois, en
présumant que, le lendemain de l'incendie, cela commence
déjà à pousser en fardoche, ce qui est improbable.
M. Vaillancourt (Orford): Voici le point que je voudrais
éclaircir. Quand un type a un dépanneur ou un petit commerce,
comme un restaurant, et qu'il passe au feu, son terrain devient vacant.
M. Garon: II devient vacant au sens municipal.
M. Vaillancourt (Orford): Si la loi municipale lui permet de
reconstruire, ordinairement, on lui permet de reconstruire dans la zone
où il est. Il a un droit acquis. Mais, en ce qui concerne la Loi sur la
protection du territoire agricole, est-il obligé de demander un permis
ou si vous...
M. Garon: Non, non. Pas du tout.
M. Vaillancourt (Orford): II n'a pas à demander de
permis.
M. Garon: Non, non. S'il a un droit acquis, il l'utilise.
M. Vaillancourt (Orford): II ne demande pas un permis.
M. Garon: Écoutez! En pratique, ce qui va arriver, c'est
ceci: on fait les inspections au moins une ou deux fois par
municipalité, par année, avec les inspecteurs et on fait le
relevé de tous les permis émis, des droits acquis, etc. Si, pour
une année, on a comme rapport que tel terrain est tout démoli et
nettoyé, que cela commence à pousser en fardoche et que,
l'été d'ensuite, le foin pousse tout le temps, on a des chances
de dire: Dans ce dossier, on pense que c'est prescrit. Ce n'est pas
arrivé souvent à ce jour et ce n'est pas un problème
majeur pour nous, mais cela peut en être un au niveau municipal.
Le Président (M. Paré): Oui, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: M. le Président, merci. Je voudrais
compléter brièvement. Je voudrais demander à M. le
président de la commission: Est-ce que vous publiez les décisions
de la commission?
M. Garon: Pas encore, malheureusement. On a sur le chantier
actuellement, ce qui devrait être prêt pour l'été,
une publication de la commission qui refondrait la loi avec ses amendements,
avec des notes explicatives, les règlements refondus, si tout est fait
à ce moment, et une remise à jour de la jurisprudence. Le projet
que nous avions, qui n'est pas encore prêt parce qu'on n'a pas eu le
temps et qu'on a eu du travail - les juristes aussi, on n'est pas si nombreux -
c'est de publier de deux à quatre fois par année une brochure
représentant l'état le meilleur de la jurisprudence ou de
l'évolution de la jurisprudence. Il ne s'agit pas de publier 2000
décisions, mais de faire le résumé des questions pouvant
être litigieuses, pouvant donner lieu ou avoir donné lieu à
de l'interprétation, par nous, mais aussi par les tribunaux, parce que
maintenant il y a pas mal de décisions qui sont rendues par la Cour
supérieure dans certains cas, et de les compiler de façon
digestible pour les praticiens et les professionnels, etc.
M. Mathieu: À qui transmettrez-vous ces publications?
M. Garon: Ce serait publié par l'Éditeur officiel
du Québec, ce serait disponible à tous les professionnels et
à tout le monde. Je pense que ce ne serait pas très
coûteux. Le programme est accepté.
M. Mathieu: Est-ce que cela l'est dans le moment?
M. Garon: II s'agit pour nous d'avoir le temps de le
rédiger et...
M. Mathieu: Non, mais les compilations dont vous avez
parlé et que vous faites trois ou quatre fois par année.
M. Garon: On les a administrativement, je dirais. À la
commission, pour quelqu'un qui nous le demande, on a une compilation
administrative des décisions les plus typiques, mais ce sont des briques
très épaisses, ce sont des décisions au long et
complètes. C'est fastidieux de travailler là-dedans. Les juristes
sont habitués parce qu'ils travaillent tous les jours dans cela, mais,
pour un praticien qui demanderait cela, vraiment ce n'est pas tellement
digestible.
M. Mathieu: Si je vous demande cela, c'est parce qu'il arrive des
décisions qui sont contradictoires dans le même secteur et rendues
par les mêmes commissaires. Alors, les gens se demandent ce qui se passe.
Seulement pour les fins de la discussion, je vous en cite une: Le dossier
31573-2309, Herman Gilbert, Saint-Côme, Linière. Je sais que vous
n'avez pas cela ici en main, mais...
M. Garon: J'aimerais avoir le numéro.
M. Mathieu: 31573-2309. Il avait fait une demande de
révision et il disait notamment, dans ses motifs de révision, que
M. Roger Veilleux, dossier 2309-025202, avait eu la permission d'utiliser un
terrain qu'il avait acquis le 30 mai 1980 à des fins autres
qu'agricoles, considérant que son terrain était composé
d'une zone de crans d'affleurements rocheux où le potentiel agricole est
très faible et considérant que le secteur de son terrain faisait
partie d'un développement résidentiel existant depuis plus de
huit ans. Alors que, dans le cas de M. Gilbert, la demande a été
refusée considérant qu'à l'exception de très rares
résidences de non-agriculteurs, le terrain se situe dans un milieu
exclusivement agricole. Or, le terrain de M. Gilbert est situé seulement
à 160 pieds du terrain de M. Roger Veilleux et M. Gilbert l'avait acquis
le 12 octobre 1976, bien avant la loi. Il se demande comment il se fait que,
dans un cas, le potentiel agricole est très faible et, dans l'autre cas,
il s'agit d'un milieu exclusivement agricole. Ce sont des décisions
rendues par les mêmes commissaires. Les types disent... Je ne sais pas si
c'est une question d'analyse. Je comprends que le commissaire ne soit pas
allé lui-même sur le terrain. C'est peut-être un analyste
différent ou un autre fonctionnaire qui s'est rendu sur les lieux, je ne
sais trop, mais, quoi qu'il en soit, les gens se demandent ce que cela veut
dire que, dans le même secteur, dans un cas, ce soit agricole et, dans
l'autre, résidentiel.
M. Garon: Cela peut arriver. Vous connaissez bien la loi et, sur
7000, 8000 décisions par année, cela peut certainement arriver.
Ce qui est intéressant, c'est de regarder le mérite de chaque
dossier, plus parfois, et même malheureusement, je le dis, que ce que dit
la décision. La décision tient en deux ou trois pages, c'est un
résumé des éléments essentiels du dossier. Cela
n'est pas suffisant. Vous venez de lire des extraits de la décision. Il
peut arriver à la même place qu'on dise: Écoutez, ajouter
une maison, parce qu'il a acheté son terrain le 30 mai 1980 - c'est deux
semaines après le décret, dans votre coin - et il y a un trou
à l'intérieur des sept ou huit maisons, cela n'a pas d'impact.
C'est bizarre, mais cela peut arriver régulièrement qu'on dise
cela. Et, inversement, on peut dire: À l'extérieur de ce
développement-là - en aval ou en amont -en ajouter une tous les
six mois, pour se rendre jusqu'au village, le long du rang.
M. Mathieu: Là, ce n'est pas le cas.
M. Garon: II peut arriver qu'à 200 pieds à
côté, on dise qu'il faut arrêter quelque part; mettre une
maison de plus à l'intérieur des huit maisons, ce n'est pas
grave, mais en ajouter une au bout des huit autres, il faut arrêter. Je
ne le sais pas. Il faudrait regarder le mérite de... J'ai pris note des
numéros que vous avez cités.
M. Mathieu: Ce n'est pas une demande de révision que je
fais. C'est juste pour qu'on ne dise pas qu'il s'agit de cas fictifs. Ce n'est
pas une demande de révision. Je voudrais vous demander une
précision. L'an dernier, il y a une nouvelle qui a circulé selon
laquelle la commission avait engagé une équipe de 20 agents de la
Sûreté du Québec spécialisés dans les fraudes
économiques pour vérifier dans les bureaux d'enregistrement.
Est-ce que cette nouvelle-là est fondée? Elle n'a jamais
été démentie.
M. Garon: C'est tellement ridicule que la commission n'a
sûrement pas eu besoin de démentir cela. On n'a jamais
engagé d'escouade spéciale de la Sûreté du
Québec...
M. Mathieu: Pardon, d'anciens policiers.
M. Garon: Parmi les enquêteurs de la commission, on a
cherché - au début et
encore maintenant - des gens intègres, des gens qui ont
l'expérience des enquêtes, d'un travail comme celui-là et
on a comme permanents ou comme occasionnels certains employés qui
étaient antérieurement des policiers, qui ont pris leur retraite
et qui ont l'âge de faire d'excellents inspecteurs. Ils ont
l'expérience de cela et ils ne se font pas trop influencer sur le bout
de la galerie.
M. Mathieu: Combien avez-vous d'inspecteurs?
M. Garon: Huit à Montréal et six à
Québec.
M. Mathieu: Des permanents, des occasionnels, des
contractuels.
M. Garon: Je pense qu'il s'agit de huit permanents et de six
occasionnels actuellement.
M. Mathieu: Cela ferait quatorze plus quatorze?
M. Garon: Non, non, non.
M. Mathieu: Non.
M. Garon: Quatorze, quatorze.
M. Mathieu: Quatorze en tout. D'accord. Parmi ces quatorze,
combien y en a-t-il qui viennent de la Sûreté du Québec ou
d'un corps policier quelconque?
M. Garon: À ma connaissance, il y a un ancien lieutenant
ou officier de la Sûreté du Québec. Il y en trois qui sont
des retraités de la GRC, dont deux étaient...
M. Mathieu: De la GRC, le ministre ne doit pas savoir cela.
M. Garon: ...spécialisés comme enquêteurs sur
les affaires immobilières. Ils sont à leur retraite, ont
demandé un poste chez nous et ont été engagés parmi
un groupe, selon leur curriculum vitae, leur expérience, leur
compétence et ils sont payés selon leurs qualifications. Il y en
a trois qui viennent de la GRC et un de la Sûreté du
Québec...
M. Mathieu: J'aurais une dernière...
M. Garon: ...d'autres du ministère de l'Agriculture,
d'autres d'un peu partout.
M. Mathieu: J'aurais une dernière question pour le
ministre.
M. Garon: II y en a un de la police de Montréal, je pense.
Il est occasionnel. Il est aussi retraité, c'est un ancien lieutenant
à la ville de Montréal. C'est un enquêteur qu'on a
engagé.
M. Mathieu: J'aurais une dernière question pour le
ministre. Vous dites toujours que vous voulez régionaliser la loi. Vous
ne l'avez pas fait l'an dernier...
M. Garon: Je n'ai jamais dit cela.
M. Mathieu: Voyons, vous n'avez jamais dit cela.
M. Garon: Régionaliser une loi. Comment voulez-vous
régionaliser une loi?
M. Mathieu: Vous voulez régionaliser l'administration de
la loi.
M. Garon: Ah!
M. Mathieu: Je veux savoir, dans les faits, comment cela va se
concrétiser. Je ne voudrais pas une homélie de quinze minutes.
Vous êtes assez intelligent pour mettre cela en trois mots.
M. Garon: Trois mots, c'est court, trois mots. Je vous disais
qu'on avait deux approches possibles concernant la commission, la façon
d'appliquer des principes et la façon dont la commission prend les
décisions. On a eu de longues discussions sur ce sujet, et M. Blain se
le rappelle. On pouvait choisir de faire une réglementation qui aurait
prévu tous les cas, un peu comme l'impôt. On aurait eu des
centaines de pages et, à un moment donné, personne ne se serait
retrouvé là-dedans et les gens auraient dit: Regardez les
règlements. On a choisi l'autre approche, c'est-à-dire qu'on va
mettre les grands principes dans la loi. On va essayer de nommer des gens de
bon jugement à la commission et ils décideront des cas en
fonction des principes qui sont dans la loi. Il est impossible de
prévoir tous les cas.
M. Mathieu: Ce n'est pas ma question. (12 h 15)
M. Garon: Ce qu'on a décidé, dans un
deuxième temps, ce sont les amendements qui ont été
apportés à la loi, c'est qu'il y aurait des commissaires
régionaux qui siégeraient avec des commissaires nationaux.
Le commissaire régional apporterait une approche de personnes du
milieu au tribunal que constitue la Commission de protection du territoire
agricole. On a, par exemple, un premier commissaire régional qui a
été nommé pour la Gaspésie. J'ai attendu
volontairement avant de nommer les autres commissaires pour voir comment se
ferait le fonctionnement avant d'en nommer d'autres, afin d'avoir une certaine
expérience. Si l'approche donnait des résultats et si le type de
personne qui pouvait être commissaire
régional... Il fallait quand même un certain temps pour que
le commissaire régional et le commissaire national puissent
siéger ensemble avant de faire un bilan de cela et dire: Voici, pour la
nomination des prochains commissaires régionaux, quel type de
commissaire il faudrait nommer. C'est pour cela qu'on n'en a nommé qu'un
jusqu'à maintenant, mais, dans les prochaines semaines, on devrait en
nommer d'autres.
M. Mathieu: Ce n'est pas ce que j'entends par
régionaliser, de nommer un commissaire régional qui vient
siéger à Québec. Je voudrais que vous
évitiez...
M. Garon: II ne vient pas siéger à Québec.
Il siège dans la région.
M. Mathieu: Ont-ils tout le soutien administratif, les personnes
de bureau, les sténodactylos et tout? Ce que je veux éviter,
c'est d'embarquer dans ce goulot d'étranglement et que toute la province
vienne s'étrangler ici à Québec.
M. Garon: II n'y a pas de goulot d'étranglement. La
commission siégera dans les différentes régions. Par
exemple, elle siégera dans le Bas-Saint-Laurent, à Rimouski,
à Sherbrooke, à Rouyn, à Alma...
M. Mathieu: Ce n'est pas cela qui améliorera...
M. Garon: Oui, les gens peuvent venir se faire entendre en
région. De plus, il y a un des deux commissaires qui vient de la
région.
M. Mathieu: Oui, mais la décision se prend à
Québec.
M. Garon: À ce moment-là, elle se prendra en
région où on siège...
M. Mathieu: Voyons, voyons. Le lieu où on tient
l'audience, cela n'a rien à voir avec la régionalisation. En
droit administratif... Je ne commencerai pas à vous faire un cours, vous
en savez bien plus que moi.
M. Garon: Non, mais, essentiellement, la décision est
prise par la commission qui siège dans la région avec deux
commissaires, un commissaire régional et un commissaire national.
M. Mathieu: Ce qu'on entend par régionaliser, ce serait
que, dans chaque district judiciaire ou région administrative, il y ait
une entité, une équipe qui soit en mesure de recevoir les cas de
la région et de décider en région, comme on fait dans
d'autres secteurs.
M. Garon: Oui, mais c'est ce que je disais tantôt...
M. Mathieu: Comme la Régie des loyers le fait.
M. Garon: La Régie des loyers, on ne pourra pas, en termes
de demandes, justifier ces questions, selon le nombre de personnes. Dans
différentes régions, il n'y a pas autant de demandes que cela. La
concentration des demandes se fait à Montréal et à
Québec.
M. Mathieu: Votre bureau est là.
M. Garon: Non, non, ce n'est pas ça. C'est parce que
là où il y a vraiment des demandes considérables, c'est
dans ces régions. Combien y a-t-il de demandes par année dans la
région de l'Abitibi?
On siège une fois par mois. On fait des rôles de huit
à dix causes à peu près par mois. Il y a des mois qu'on
passe parce qu'il n'y a pas de dossier en audition. Il n'y a rien de
particulier en Abitibi ou au Lac-Saint-Jean: 200 à 300 demandes par
année. Dans le Bas-du-Fleuve, ce sont 400 à 500 demandes. On
siège une ou deux journées par mois avec le commissaire
régional. Il y a un analyste de Québec qui est
spécialement chargé de la région. L'inspecteur va faire sa
tournée dans ce coin, prépare les dossiers en fonction de cela et
il les envoie au commissaire régional avant qu'on aille siéger;
il les étudie et il siège avec lui là-bas. Est-ce qu'il
faut nommer une téléphoniste, un bureau avec un "kit", toute
l'affaire, nommer du personnel avec, finalement, douze personnes pour
siéger une fois par mois à Rouyn? C'est un autre
problème.
M. Mathieu: II y a des soutiens administratifs. La Régie
des loyers n'a pas cela dans toutes les régions. Elle vient
siéger dans la Beauce, il n'y a pas de personnel, elle se tient au
palais de justice.
M. Garon: C'est exactement ce qu'on fait. Quand on va
là-bas, l'analyste vient avec nous et le juriste qui vient avec nous,
là-bas, a une téléphoniste et un agent d'information. On
prend une salle pour siéger et physiquement, effectivement, qu'on
travaille chez nous, dans le bureau ou n'importe où pour rendre la
décision, on finit par la rendre. On essaie de prendre tous les dossiers
de la région et de les "pooler" dans un rôle. Il y a un analyste
qui est particulièrement affecté à ce rôle dans
cette région parce qu'il est plus compétent dans ce coin.
Dans le fond, la coloration qu'on a pour rendre la décision est
également régionale. Quelqu'un qui veut bâtir une maison
dans un rang derrière Barraute en Abitibi ou dans un rang de la
vallée du Richelieu, on n'a quand
même pas tout à fait la même réaction. Ce
qu'il faut protéger, ce sont les terres et l'agriculture. L'impact n'est
pas le même, les sols ne sont pas les mêmes et les conditions ne
sont pas les mêmes.
M. Mathieu: C'est tout, M. le Président.
M. Garon: Va-t-on créer cinq ou six commissions avec des
bureaux et bien des fonctionnaires? C'est un autre problème.
M. Dupré: En ce qui a trait à la Régie du
logement, je vous ferai remarquer que, pour les causes qui sont entendues
à Saint-Hyacinthe, la décision n'est pas rédigée
à Saint-Hyacinthe, elle est rédigée à Longueuil.
J'ai été directeur régional et j'ai entendu des causes en
même temps. Les décisions étaient rendues à
Longueuil, étaient dactylographiées et partaient de Longueuil. Il
ne faut pas avoir du personnel dans chaque petit bureau pour la fois ou les
deux fois par semaine où on entend des causes.
M. Garon: On peut avoir à approfondir un certain nombre ou
un certain genre de causes, je ne dis pas que vous ne pouvez pas avoir un cas.
Vous dites: À la place de la commission, je n'aurais peut-être pas
fait cela comme cela. Sur le nombre de décisions, c'est possible. Il y a
une question d'appréciation des faits. J'ai eu de nombreuses lettres de
gens. J'ai vérifié, et je pense que je ne mentirais pas en disant
que j'ai eu des centaines de cas. Depuis cinq ans, j'ai eu des centaines de cas
que j'ai vérifiés personnellement. Je peux vous dire -je vous le
dis personnellement - qu'éventuellement, des gens se pencheront
là-dessus et analyseront des décisions de la commission; des
étudiants qui feront des thèses de doctorat étudieront
cela, mais je prétends que cette commission a fait un travail
exceptionnel.
J'ai vu des gens au gouvernement, quelquefois...
M. Mathieu: Ce n'est pas là le problème.
M. Garon: Non, attendez un peu. J'ai vu des gens au gouvernement
qui ont eu des plaintes, à un moment donné, et qui ont
étudié les cas. On leur a passé les dossiers et on a dit:
Regardez-les. Si vous voyez autre chose, vous nous le direz. Je peux
évoquer le témoignage des gens, de tous bords et de tous
côtés, qui ont travaillé là-dessus pour analyser des
décisions de la commission pour savoir si elle avait fait une erreur ou
une maladresse. De façon générale, à 99,9%, tous
les gens qui ont suivi de près le travail que fait la commission sont
enthousiasmés par la qualité du travail qui a été
fait par la commission et surtout par le bon jugement de la commission. Ma
tâche est de trouver des gens - je ne nomme pas des gens à la
course - qui ont un bon jugement. Je pense que c'est une caractéristique
des gens de la commission. Ce sont des gens qui ont un jugement exceptionnel.
Ils connaissent le milieu d'une façon exceptionnelle.
Il y a des commissaires - comme M. Blain le disait - qui apportent des
dossiers en fin de semaine et qui vont visiter des endroits pour voir
eux-mêmes ce qui se passe avant de rendre leur décision la semaine
suivante. Ils savent qu'ils vont avoir tel ou tel dossier. Il y a des cas
qu'ils connaissent moins dans telle région. La fin de semaine, ils y
vont en automobile pour voir véritablement l'endroit avant de prendre
une décision.
M. Mathieu: Ce n'est pas cela le problème. Ce n'est pas
normal qu'on n'ait pas un droit d'appel devant des tribunaux de droit
commun.
M. Garon: Ce serait ridicule d'avoir un droit d'appel devant un
tribunal de droit commun.
M. Mathieu: Non.
M. Garon: Devant un juge qui ne connaît rien
là-dedans?
Cette question est intéressante, et elle nous a été
posée souvent. Moi, comme juriste, je ne connais aucune
réglementation de zonage en Amérique du Nord, aucune, par
laquelle, contre une décision au mérite pour savoir si c'est zone
agricole, commercial, résidentiel ou institutionnel, on ait un droit
d'appel devant un tribunal pour décider si le conseil municipal a bien
fait de zoner cela résidentiel ou commercial. On se comprend? Cela
n'existe nulle part. Nulle part une décision au mérite de zoner
un terrain pour tel usage plutôt que tel usage n'est soumise à la
révision au mérite par un juge de la Cour supérieure qui
déciderait, par exemple, que c'est mieux de décréter cela
commercial que de rendre cela institutionnel dans ce coin-là. Un appel
de la commission, c'est cela que cela veut dire.
Le travail qu'on fait est le même que celui au conseil d'une MRC,
c'est de zoner agricole. Là, on nous demande, plutôt que
d'amender, de décider au mérite si tel usage qui n'est pas
agricole permettrait quand même de faire de l'agriculture d'une
manière harmonieuse ou compatible. C'est cela, les usages
dérogatoires ou les autorisations qu'on accorde. Le conseil municipal
amendera son règlement pour faire cela. C'est bien compliqué,
c'est bien long, cela coûte cher et cela fait bien du zigonnage et des
petits "spot zoning" à la fin. Au bout de cinq ans,
on ne se reconnaît plus, parce qu'il y a de petites zones, des
microzones, des amendements à la zone, etc.
Il n'y a personne qui va voir un juge pour changer la décision du
conseil municipal en matière de zonage, mais, bien souvent, les gens
reviennent voir le conseil une deuxième fois ou le nouveau conseil,
lorsqu'il a changé, pour s'essayer une troisième fois. C'est ce
que les gens font devant nous. Ils font une révision, quelquefois trois
fois, et recommencent une quatrième fois. C'est bien mieux qu'une
décision et un jugement de la Cour supérieure, parce que, dans ce
cas, c'est prescriptible pour trente ans, c'est une chose jugée, vous
êtes mort et cela ne changera plus jamais. C'est bien mieux de
réviser constamment devant le même conseil, au mérite, que
d'aller voir un juge de la Cour supérieure et risquer même de se
faire dire: Non, je ne change pas cela. Qu'est-ce qu'il fera avec cela? Est-ce
que le juge prendra son automobile, comme nous, la fin de semaine, avec un
analyste, ira voir le tas de fumier et dira si cela a du bon sens ou pas de
mettre une maison à côté? En quoi le juge de la Cour
supérieure, en appel, est-il compétent pour décider du
mérite du zonage?
M. Mathieu: C'est une question de principe, une question
fondamentale et une question de respect des droits des citoyens.
M. Garon: Voulez-vous qu'en matière de zonage
municipal...
M. Mathieu: Pourquoi les tribunaux ont-ils été
inventés? Pourquoi a-t-on fait la séparation des pouvoirs
législatif, exécutif et judiciaire?
M. Garon: D'accord. Les tribunaux...
M. Mathieu: C'est pour assurer que les justiciables obtiennent
justice...
M. Garon: Bon. Les tribunaux sont inventés pour...
M. Mathieu: ...devant une personne impartiale à tous les
niveaux.
M. Garon: D'accord. Les tribunaux sont là pour s'assurer
que la loi est respectée par tout le monde d'une manière
égale, y compris par la commission, c'est-à-dire qu'elle a bien
fait son travail, qui est de décider au mérite sur des demandes
et qu'elle n'a pas excédé sa juridiction. S'il se fait des folies
qui équivalent à une fraude, à une injustice grave, etc.,
c'est tout prévu dans le Code de procédure civile, on prend un
bref d'évocation pour casser la décision de la commission. Mais,
est-ce que le juge va dire: À mon avis, on aurait dû permettre
à ce gars-là de se bâtir et à l'autre, on aurait
dû dire non, parce que lui, je ne l'aime pas? Est-ce qu'il va faire cela,
ou est-ce qu'il a le personnel et l'organisation pour décider au
mérite à la place de la commission? C'est cela, le
problème.
Il y a une autre chose. Quand vous parlez d'un tribunal impartial, je
vous dirai que la commission n'est pas un tribunal impartial. C'est un tribunal
qui a le mandat de protéger les terres. Elle n'est pas là pour
dire: Bâtis-toi, ne te bâtis pas, ce n'est pas grave. Son mandat,
de par la loi, c'est un mandat pour la protection des terres. Elle est
là pour voir à ce que les terres soient protégées.
C'est son rôle. Comment voulez-vous après cela, quand cela arrive
devant un juge qui, lui, est indifférent à tout cela...
M. Mathieu: Je ne veux pas allonger le débat, mais je vous
dis que j'ai, dans ma région, dans ma paroisse, des personnes qui sont
lésées. Ce sont des dénis de justice où une demande
qui saute aux yeux n'a pas été accordée. Si on avait pu
faire vérifier par un juge de la Cour supérieure... Je ne pense
pas qu'ils soient tous insignifiants, il n'est pas besoin d'être
commissaire à la Commission de protection du territoire agricole pour
être infaillible, comme vous le disiez tantôt; ce ne sont pas tous
des insignifiants, les juges de la Cour supérieure, de la Cour d'appel
et de la Cour suprême. J'ai vu des cas où des gens subissaient des
injustices considérables et on est pris dans le cercle vicieux de la
petite commission et on ne peut en sortir. C'est pour cela que je pense que,
pour ces cas-là, s'il y avait moyen de faire appel quelque part, devant
une personne impartiale, justice se ferait.
M. Garon: Vous savez comme moi que, tantôt, je n'ai pas
parlé d'infaillible. C'est un lapsus que j'ai rattrapé en disant
"une réputation enviable"...
M. Mathieu: Une chance...
M. Garon: ...et non une "réputation infaillible". J'ai
commis un lapsus et je l'ai dit. Alors, n'essayez pas de dire... Je comprends
que votre recherchiste va envoyer cela à l'Université Laval.
L'Université Laval va compiler cela et elle va dire que ce sont des
juges infaillibles. Mais, ce n'est pas cela que j'ai dit.
Une voix: Son auréole va trop le serrer!
M. Garon: Sauf que, dans les tribunaux, on est devant un tribunal
administratif qui a un mandat. Dans les tribunaux administratifs, vous pouvez
aller en appel, mais sur des questions de droit et non sur des questions de
fait. Le tribunal juge sur des questions de fait. Si ce sont des questions de
droit, il n'y
a aucun problème: vous avez un droit d'appel devant les
tribunaux, un droit de révision, en vertu de l'article 33 du Code de
procédure civile. Cela fait un bout de temps que je n'ai pas
taponné là-dedans. Mais, en vertu de l'article 33 du Code de
procédure civile, il y a un droit de révision. La Cour
supérieure...
M. Mathieu: En tout cas, je ne veux pas allonger le débat,
parce qu'il est 12 h 30.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Orford.
M. Vaillancourt (Orford): J'ai seulement une question.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Orford.
M. Garon: C'est toujours le tribunal administratif qui
apprécie les faits. N'oublions jamais cela: c'est le tribunal
administratif qui apprécie les faits. S'il y avait un droit d'appel, il
y aurait un droit d'appel uniquement sur le droit qui figerait dans le ciment
la décision de la commission au point de vue des faits. Qu'est-ce que
vous auriez après? Les gens ne pourraient plus revenir devant la
commission. Cela serait chose jugée. Au contraire, je suis convaincu que
la façon la plus avantageuse de faire cela pour les gens, pour qu'il n'y
ait pas de déni de justice et pour que les gens puissent vraiment
expliquer leur affaire, c'est la façon dont c'est fait actuellement. Je
suis convaincu de cela.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Orford. (12 h 30)
M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, j'aimerais
demander au président de la régie si vous avez une brochure ou un
organigramme avec la structure de chaque région. Nous, dans la
région de l'Estrie, on doit avoir un analyste, quelqu'un qui s'occupe
des cultivateurs qui font des demandes de "dézonage". Est-ce que vous
auriez un organigramme qui permettrait aux députés de renseigner
les personnes qui viennent nous voir et de les appeler si on a besoin de les
appeler?
M. Garon: On peut les appeler... On le fait autrement. La
commission l'a et je pourrais même répondre que même
l'analyste ne sait pas qui est l'analyste permanent de cette région.
À chaque dossier, il y a un accusé de réception qui est
personnalisé au citoyen qui fait la demande. L'analyste lui écrit
en disant: C'est moi le professionnel chargé de vous faire tout le
résumé, toute l'analyse et toute l'étude de votre dossier
pour la commission. Après cela, ce sera tel juriste qui sera
chargé de présenter cela aux commissaires et de préparer
votre décision. Alors, il sait qu'il peut joindre ou cet analyste ou le
juriste qui va préparer sa décision.
Mais la semaine d'après, pour des raisons que tout le monde
comprendra, cela peut être un autre analyste. Par exemple, la semaine
prochaine, cela peut être tel ou tel commissaire qui va siéger
à Sherbrooke. Le mois d'après, cela peut être un autre. Ce
que les gens nous demandent constamment, c'est qui est le gars de la
région chargé de cela. Qui est votre inspecteur? Peux-tu venir
faire un tour chez nous? On va s'arranger avec lui. On dit que nos gens n'ont
pas de mandat pour s'arranger avec quelqu'un dans le champ. C'est une vieille
tradition qu'on a en matière de zonage ou d'inspection au
Québec.
Alors, à votre question, je vous dis: II n'y a rien de disponible
pour vous dire que le parrain régional de telle place est M. Untel.
Parce que, si on avait cela, le lendemain, il ne serait plus le parrain.
M. Vaillancourt (Orford): C'est mêlant, votre affaire.
M. Garon: Non, c'est clair. Il ne faut pas qu'il y ait
d'influence...
M. Vaillancourt (Orford): Mais cela veut dire qu'on ne peut pas
s'adresser à personne de notre région; il faut que les demandes
soient acheminées directement...
M. Garon: Autrement dit, pour chaque demande, à 24 heures
près de son entrée au bureau de la commission, on peut vous dire
que ce dossier sera affecté à M. Untel, c'est lui qui s'en
occupe. Tout le temps, chaque dossier est personnalisé, c'est tel
analyste qui s'en occupe. Il va mourir avec, jusqu'à ce que son rapport
soit au contentieux. Le juriste va aussi mourir avec aussi longtemps que sa
décision ne sera pas adressée au citoyen. C'est lui qui est
responsable de cela. Il ne cherchera pas douze fonctionnaires pour savoir qui a
son dossier. Il sait que c'est tel analyste qui travaille dessus. S'il est en
vacances, il y en aura un autre pour le remplacer, mais...
M. Vaillancourt (Orford): Et où sont les analystes?
À Québec ou dans les régions?
M. Garon: Ils sont à Longueuil et à Québec.
Il n'y en a pas dans les régions.
M. Vaillancourt (Orford): Ah! II n'y en a pas dans les
régions.
M. Garon: S'il y en avait en région, ils travailleraient
quatre jours par mois et le reste du temps, ils attendraient les demandes
et ils recevraient quand même leur salaire. C'est ce que cela veut
dire.
M. Vfillancourt (Orford): Mais, dans la région de
l'Estrie, est-ce que vous avez du personnel?
M. Garon: Dans la région de l'Estrie, ce sont les gens de
Montréal qui y travaillent, jusqu'à la limite de Mégantic
à peu près. Pour le reste, ce sont les analystes de
Québec. Les rôles sont distribués au fur et à mesure
qu'ils entrent, selon leur rang et selon leur date. Ils sont regroupés
par région. Pour cette semaine-là, cela peut être un
analyste qui connaît davantage le coin qui va analyser les dossiers. Mais
il va le dire au citoyen...
Mais si vous voulez savoir, pour le mois prochain, quel analyste
s'occupera de telle demande qui n'est pas encore arrivée à la
commission pour telle municipalité dans l'Estrie, il n'y a personne qui
va vous répondre. Parce que l'analyste lui-même ne le sait
pas.
M. Vaillancourt (Orford): II ne le sait pas lui-même. Mais
cela veut dire que ce que nous devons dire aux personnes qui font une demande
de zonage ou de "dézonage", c'est qu'il faut que cela soit envoyé
directement soit à Québec ou à Montréal, ou bien
seulement à Québec.
M. Garon: En fait, ce n'est pas ainsi que cela fonctionne. Toute
demande doit être adressée directement à la
municipalité qui, elle, nous dit d'abord, dans sa recommandation, si
c'est conforme ou non à ses règlements, si elle la recommande ou
non. Parfois, la municipalité nous dit: N'accordez pas cela, c'est
contraire à nos propres règlements. Alors, cela règle le
problème à la source. Ce sont les municipalités qui nous
adressent les demandes.
M. Vaillancourt (Orford): Je veux dire les demandes de
révision. La municipalité a terminé son travail. Le type
est refusé et dit qu'il n'est pas satisfait. Il a des renseignements
additionnels à donner et il pense qu'on pourrait peut-être rendre
un jugement favorable à sa demande. Alors, là, il ne repasse plus
par la municipalité.
M. Garon: Non, il s'adresse...
M. Vaillancourt (Orford): II faut que cela soit envoyé
directement où et à qui?
M. Garon: II adresse sa demande de révision directement
à la commission, à l'attention du greffier. Il l'adresse ou
à Longueuil ou à Québec, à l'un des deux bureaux de
la commission.
M. Vaillancourt (Orford): À une place ou l'autre?
M. Garon: Oui, oui, directement.
M. Vaillancourt (Orford): Bon. D'accord.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. J'aimerais faire
quelques remarques pour souligner qu'il y a des choses qui sont correctes.
Lorsque je parle des employés à l'intérieur de la
commission, il y en a avec qui j'ai fait affaires et dont je n'ai pas un mot
à dire. Cela va très bien. Cela ne veut pas dire que je critique
les autres, ce n'est pas là la question.
Deuxième point. Au moment où la demande est faite et que
la réponse est donnée, cela prend encore énormément
de temps. Je n'ai pas les lettres parce qu'elles sont dans mon bureau, je
craignais que vous partiez. J'ai encore deux lettres qui sont arrivées
lundi dernier dont les demandes ont été faites au mois de
novembre, l'an passé. Ils viennent de recevoir la réponse, il y a
dix jours. Deux, entre autres, et peut-être que vous connaissez les
noms.
Aussi, dans certains cas où les décisions sont rendues,
d'après moi, c'est inacceptable. Je vais avoir les réponses
bientôt parce que j'ai eu la chance de rencontrer une personne qui est
venue sur les lieux avec moi. Je lui ai demandé de venir. J'étais
bien content de voir les six cas dans mon comté avec lui. Il est
très bien, le monsieur. Je ne donnerai pas son nom.
M. Garon: Avec qui? M. Houde: Pardon? M. Garon:
Avec qui?
M. Houde: Avec un type qui travaille pour la protection du
territoire - je peux vous dire le nom en dehors de cela, mais je ne veux nommer
personne - pour aller voir des cas sur les lieux mêmes. J'aimerais que le
ministre entende ceci. L'autre chose que je voulais vous mentionner ici, en
passant, sans être trop malin - je ne voudrais pas froisser le
président - c'est qu'il y a de la politique encore dans cela.
M. Garon: Pardon?
M. Houde: II y a encore de la politique dans cela.
M. Garon: Comment cela?
M. Houde: Non, non, je n'irai pas plus loin.
M. Dupré: Si quelqu'un peut prouver cela, c'est une
accusation grave.
M. Houde: Ne vous fatiguez pas, M. le député de
Saint-Hyacinthe, il y a encore de la politique dans cela. Je vais vous donner
les paroles que des personnes m'ont dites. Cela fait il n'y a pas plus tard
qu'un an que les gars ont obtenu gain de cause. Ils m'ont dit encore, il n'y a
pas tellement longtemps: Écoute, Albert, s'il faut passer encore par la
politique pour être capable d'avoir gain de cause, cela va coûter
de l'argent, mais on va l'avoir. J'ai dit: Vas-y. Ne me nomme pas du tout parce
que tu nuis à ton dossier quand tu me nommes. Cela n'est pas dans mon
comté.
M. Garon: Pourquoi essayez-vous d'aller faire le tour avec des
analystes?
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. Houde:
Laissez-moi finir.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le
député de Berthier.
M. Houde: Écoutez, je vous dis ce qui est bon et ce qui
n'est pas bon, M. le ministre. Acceptez donc les reproches et acceptez les
félicitations en même temps. Quand je fais quelque chose de pas
correct, j'aime qu'on me le dise, j'essaie alors de faire mieux; quand il y a
quelque chose que je fais correctement, dites-le-moi, je vais continuer dans le
même sens.
M. Dupré: C'est grave, M. le député de
Berthier.
M. Houde: M. le Président, qu'a-t-il à parler, lui,
de l'autre côté?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Berthier, vous avez la parole.
M. Dupré: C'est très grave, l'accusation au
tribunal.
M. Houde: Je veux dire au ministre ce que les personnes m'ont
dit: Écoute, d'abord, il va falloir encore passer par la même
filière par laquelle on a déjà passé - ce n'est pas
dans mon comté, pour mieux vous situer, pour ne pas faire enquête
pour aller taper sur une personne en particulier -qu'elles pouvaient encore
passer par là et qu'elles avaient des chances de pouvoir avoir - parce
qu'elles ont eu ces choses avant -ce qu'elles veulent. C'est ce que je voulais
vous dire.
M. Dupré: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Dupré: Le député de Berthier accuse la
commission ni plus ni moins de patronage. S'il a des noms, qu'il les mette sur
la table. Ils sont habitués de demander des commissions parlementaires.
Qu'il en demande une, mais qu'il ne lance pas des accusations à travers
son chapeau ou à travers son "hood". Il y a toujours des limites.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le
député de Berthier, avez-vous terminé?
M. Houde: Je vous remercie de m'avoir entendu. Je vais vous dire
une chose avant de finir pour répondre à l'autre
député qui n'a pas d'affaire à intervenir dans ce sujet.
Je suis toujours honnête et des mensonges, je n'en conte pas. Ce que je
dis, c'est la vérité.
M. Dupré: Une question de directive.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le
ministre, vous avez demandé la parole.
M. Garon: Le député de Berthier a fait des
accusations graves et je pense qu'il devrait les justifier. On ne peut pas
accuser un tribunal de prendre des décisions par influence politique
sans les préciser. Ce serait un acte de lâcheté
épouvantable de votre part. Je pense que c'est très grave ce que
vous faites. Vous n'en êtes peut-être pas conscient...
M. Houde: Je suis conscient, M. le ministre, de ce que je
dis.
M. Garon: Si vous avez des cas, quand vous parlez de
filières ou de quelque chose comme cela, j'aimerais que vous le disiez
explicitement et que vous donniez les noms. S'il y a quelque chose qui s'est
passé de pas correct, vous pouvez être certain qu'on va le
vérifier et le président de la commission sera bien content de
remédier à cela. Sauf qu'actuellement, vous ne dites rien, vous
faites des accusations sans mentionner personne et cela est trop facile. Vous
devriez avoir le courage de porter des accusations complètes pour que la
situation puisse être corrigée si elle est exacte, si ce que vous
dites dans votre esprit est exact. Mais si vous n'avez pas le courage de le
faire, je pense qu'à ce moment, vos propos ne sont pas dignes d'un
député responsable.
M. Dupré: Je demande d'avoir...
M. Houde: J'ai demandé la parole avant toi.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Berthier et M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Houde: M. le Président, il a parlé tout à
l'heure. Parle d'abord. Vas-y!
M. Dupré: Une question de règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Saint-Hyacinthe sur une question de règlement.
M. Dupré: Je demande au député de Berthier
de retirer ses paroles ou de porter des accusations. C'est trop facile. Ce sont
des accusations très graves qu'il porte à l'endroit de la
commission. On ne peut pas laisser passer une chose semblable. Officiellement,
je demande au député de Berthier de retirer ses paroles ou de
donner des noms et de porter des accusations précises.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Berthier.
M. Houde: Je ne peux pas blâmer, par exemple; bien entendu,
je dois m'expliquer. Est-ce que c'est le président, est-ce que c'est le
ministre, est-ce que c'est un autre à l'intérieur de la
boîte? Cela, je ne peux pas vous le dire. Mais cela regarde la commission
comme telle.
Une voix: Hypocrite.
M. Houde: Je ne retirerai pas mes paroles. Elles sont dites.
M. Garon: C'est plutôt vous qui avez essayé de faire
ce rôle en invitant quelqu'un de la commission à rencontrer les
agriculteurs et ensuite à essayer de faire des cas individuels avec
lui.
M. Houde: Cela ne regarde même pas les derniers cas qu'on a
visités avec le monsieur en question. Pas du tout. Pas du tout.
M. Garon: Ce n'est pas normal, n'est-ce-pas? Vous savez que vous
avez une conduite répréhensible comme député si
vous intervenez de cette façon auprès des organismes
administratifs qui sont quasi judiciaires. Je suis étonné que
vous ne fassiez pas ces distinctions. Je peux vous dire une chose: Que vous
ayez essayé d'influencer indûment des dirigeants de la commission,
je pense que...
M. Houde: M. le Président, je n'étais même
pas dans le dossier en question. Je n'ai pas influencé, je n'ai pas fait
d'appels téléphoniques pour les messieurs en question, je
n'étais même pas dans le dossier lorsqu'on parle du premier
dossier de l'an passé. Je veux être bien précis. Je l'ai su
par d'autres qui étaient...
M. Garon: Sauf que vous avez invité un employé de
la commission.
M. Houde: Oui.
M. Garon: Pour aller donner des renseignements à des
agriculteurs.
M. Houde: C'est vrai.
M. Garon: Et, rendu sur place, vous avez plutôt
essayé de l'amener voir des cas individuels en visitant des terrains
individuels.
M. Houde: Je n'ai pas visité les cas que je mentionne du
tout. Ce sont d'autres cas complètement différents. J'ai
pensé que cela ne donnerait rien en... Tu es bien achalant, toi.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Garon: Non, mais je pense... M. le Président, je ne
suis pas convaincu, je ne suis pas assez familier avec la procédure,
mais est-ce qu'un député peut accuser un tribunal quasi
judiciaire de la façon qu'il vient de le faire, sans apporter de preuves
de ce qu'il dit? C'est plus grave qu'on ne le pense...
Une voix: On va faire une commission parlementaire.
M. Houde: C'est cela, une commission parlementaire.
M. Garon: ...et on ne peut pas accuser. De la même
façon, je ne peux pas dire, par exemple, qu'un juge de la Cour
supérieure rend des décisions sous des influences politiques sans
le prouver. La Commission de protection du territoire agricole est un organisme
quasi judiciaire au sens de la loi, au sens de l'article 33 du Code de
procédure civile. Je pense que ce que vous faites est très grave
et on ne peut laisser passer cela sous silence.
M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, ce qui arrive
assez souvent...
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Orford sur le même sujet.
M. Vaillancourt (Orford): Oui, sur le même sujet. C'est
qu'il y en a qui viennent nous voir, les députés, et disons
qu'ils nous font voyager un peu.
M. Dupré: M. le Président, ce n'est pas sur le
même sujet.
M. Vaillancourt (Orford): Cela arrive assez souvent, mais je ne
suis pas prêt à dire que la commission ne rend pas ses jugements
selon la loi. Mais il arrive assez souvent, cela m'arrive des fois, qu'il y en
a qui viennent; ce sont des fins filous qui veulent nous faire marcher. Ils
nous disent: Untel a obtenu cela par l'entremise de pressions politiques. Je
leur dis: Écoutez, si vous avez des filons pour obtenir gain de cause
dans votre dossier, allez les voir. Moi, je transmets les dossiers à la
commission et c'est elle qui décide.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: Sur la question de règlement de tout à
l'heure, M. le Président. Je voudrais seulement dire: Écoutez, je
ne pense pas que le député de Berthier ait eu l'intention de
porter des accusations à l'endroit de la commission. Je pense qu'il a
dit quelque chose que quelqu'un lui avait dit. Vous allez me dire que ce n'est
peut-être pas admissible en preuve; je conviens qu'on est loin de la loi
de la preuve, mais je ne voudrais pas faire une tempête dans un verre
d'eau. Je pense que le député est bien intentionné
et...
M. Garon: Non, mais les mots ont un sens.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Garon: Si le député ne comprend pas les mots
qu'il utilise, il y a quelque chose qui ne va pas. À ce moment, je pense
que, si ses paroles ont dépassé sa pensée, il devrait les
retirer, mais, s'il maintient les propos qu'il a enregistrés - c'est
enregistré au journal des Débats maintenant - je pense que cela
ne peut en rester là.
M. Mathieu: Mais le député n'est pas un juriste, M.
le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Bertier, sur l'intervention du ministre.
M. Houde: M. le Président, j'ai toujours dit: Selon les
informations que j'ai eues. Il est bien entendu que je n'étais pas
témoin de la personne qui a fait le lien...
M. Dupré: ...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Houde: Merci beaucoup, M. le Président, de faire taire
le député de Saint-Hyacinthe. C'est à la suite des
demandes qui m'ont été faites, à la suite de ce qui
s'était déjà passé, à savoir qu'il n'avait
pas eu gain de cause les premières fois et qu'à un moment
donné, il a dit: J'ai pris d'autres moyens et j'ai obtenu gain de cause.
C'est dans ce sens que je l'ai dit parce que je n'ai pas
téléphoné pour faire la demande et pour dire: Tu as mal
fait ou tu as bien fait. La seule chose, continue encore, mais ne viens pas me
le demander. C'est tout simplement cela.
Le Président (M. Desbiens): Excusez. M. le
député de Saint-Hyacinthe avait demandé la parole.
M. Dupré: M. le Président, on peut donner une
dernière chance au député de Berthier. Il n'a qu'à
retirer les paroles qu'il a dites tantôt parce que c'est
enregistré et je maintiens que ce sont des paroles très graves.
(12 h 45)
Le Président (M. Desbiens): Ce que j'ai compris de
l'intervention que vient de faire le député de Berthier, sans le
dire directement, en expliquant ce qui s'était passé, cela
équivaut à un retrait de la formule qu'il a employée.
M. Houde: Écoutez, je n'ai pas été entre les
deux pour les écouter parler, les deux personnes interposées;
c'est ce que j'ai voulu dire dans ce que j'ai dit tout à l'heure.
Une voix: Des ouï-dire.
Le Président (M. Desbiens): Vous avez parlé de
ouï-dire.
M. Houde: Oui, oui, toujours. Je n'étais pas
témoin, je l'ai bien dit.
M. Dupré: Du ouï-dire, c'est du placotage pour nous
autres.
Le Président (M. Desbiens): Alors, à l'ordre, s'il
vous plaît! Est-ce que le programme 7 est adopté?
Une voix: T'es fatigant, toi!
M. Mathieu: Adopté, M. le Président.
Une voix: Disons que l'incident est clos.
Le Président (M. Desbiens): L'incident est clos. Vous
aviez une entente pour discuter...
M. Houde: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): Excusez.
M. Houde: ...je pense que, pour les fins du journal des
Débats, je vais d'abord retirer ce que j'ai dit. Cela va clore
l'affaire.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie, M. le
député de Berthier. Comme on dit, l'incident est clos...
M. Garon: Je pense que c'est important que le
député retire ses paroles parce que je vais vous dire une chose.
Si je savais qu'un organisme comme la commission agissait par influence
politique, il aurait des comptes à rendre. Jusqu'à maintenant,
s'il y a une chose à laquelle on a tenu, c'est que ce tribunal quasi
judiciaire qu'est la commission rende des décisions correctes et qu'elle
ne souffre pas d'influence indue. J'ai demandé souvent au
président s'il y avait des influences. On m'a dit que des
députés intervenaient, parfois venaient avec des clients, mais
plus pour leur aider devant la commission. Je sais que le député
de Beauce-Sud est allé quelquefois avec des clients, des clients ou des
électeurs, je ne le sais pas.
M. Mathieu: Je suis allé comme procureur...
M. Garon: Comme procureur... M. Mathieu: ...pas comme
député.
M. Garon: ...comme procureur, mettons. Là-dessus, faire
des représentations lorsque la commission siège et faire des
représentations indues par en arrière, c'est une autre affaire.
Je n'ai aucune raison de croire qu'il y ait eu quelque influence politique, de
quelque côté que ce soit. Je sais qu'il a des
députés des deux côtés de la Chambre qui appellent
pour avoir des renseignements ou parfois...
M. Vaillancourt (Orford): Cela est normal.
M. Garon: Je n'ai jamais dit un mot là-dessus. J'ai
demandé à la commission à plusieurs reprises - c'est
également la façon de penser de Me Blain - de ne pas
tolérer de la part de qui que ce soit, par exemple un membre de
l'Assemblée nationale, des influences indues sur la commission. Je ne
pense pas que ce soit dans sa mentalité non plus. Il a plutôt la
réputation d'avoir des principes. Je sais que différents
ministères, parfois, aimeraient bien que les décisions soient
différentes. Ils apprennent à leurs dépens que la
Commission de protection du territoire agricole décide les choses comme
elle pense que les choses devraient être décidées. Si vous
regardez les membres de la commission, il n'y a pas beaucoup de suiveux
là-dedans.
Le Président (M. Desbiens): Alors, le programme 7 et ses
éléments sont adoptés? Vous avez une entente selon
laquelle vous deviez avoir une discussion générale...
M. Mathieu: On avait dit qu'on entendrait M. Lavigne.
Le Président (M. Desbiens): ...après l'étude
du programme 7.
M. Dubois: On pourrait peut-être terminer avec M. Lavigne
et le libérer à 13 heures.
Le Président (M. Desbiens): Quel programme est-ce, M.
Lavigne?
M. Mathieu: Le programme 6, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Le programme 6. Le programme 6
n'avait pas été adopté.
M. Dubois: En le libérant pour 13 heures...
Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'on l'avait
commencé?
Une voix: Non, non.
Le Président (M. Desbiens): Programme 6, Régie des
marchés agricoles du Québec. M. le ministre, avez-vous des
remarques préliminaires?
Régie des marchés agricoles du
Québec
M. Garon: Non, je ne ferai pas de remarques préliminaires.
La régie dépose annuellement un rapport qui donne des
renseignements sur ce qui se passe à la régie au cours de
l'année. Je pense bien que tous les députés membres de
cette commission parlementaire sont familiers avec la Régie des
marchés agricoles du Québec.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: Juste quelques brèves remarques.
L'année qui s'est écoulée a certainement laissé ses
marques à la régie, en ce sens qu'il y a eu deux renversements
des décisions de la régie par le gouvernement. La seule chose que
je me demande, c'est que je ne sais pas quel est le climat qui existe à
la régie depuis ce temps. Je ne vais pas parler du bien-fondé de
la décision ou de son renversement. Cela se
soutient, l'un ou l'autre, mais je me posais naïvement la question:
Est-ce que cela peut handicaper la marche de la régie et créer un
climat qui soit plus difficile?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Garon: II faut bien distinguer: il y a un droit de
révision du Conseil des ministres en vertu, si ma mémoire est
bonne, de l'article 13 de la Loi sur la Régie des marchés
agricoles. Si le droit de révision est là, c'est qu'il peut
être exercé. Tantôt, le député de Beauce-Sud
plaidait pour qu'il y ait des droits d'appel; j'imagine que, s'il plaidait pour
des droits d'appel, c'est qu'il pense qu'en appel les décisions peuvent
être changées; autrement, le droit d'appel serait
complètement inutile.
Dans le cas des décisions de la régie, on n'est pas
uniquement en droit. C'est là que c'est plus délicat. Il y a des
décisions qui sont des décisions qui portent sur
l'opportunité de faire des choses. Je prends la dernière
décision de la régie. C'est pour cela que je l'ai
mentionné dans mon communiqué de presse et dans ma
déclaration en Chambre. Cela n'a pas été
précisément une décision pour dire que celle de la
régie était mauvaise, mais c'était beaucoup plus une
décision sur l'opportunité dans le temps. J'ai été
assez clair en Chambre et dans les communiqués de presse pour dire que,
lorsque la décision a été prise, le Conseil des ministres
a décidé, pour un ensemble de raisons, de ne pas renverser la
décision de la régie, parce qu'il n'y a pas de marge de manoeuvre
très forte au Conseil des ministres: il peut la confirmer ou la
renverser, il ne peut pas jouer dedans, il ne peut pas la modifier
partiellement. Il y a des parties de la décision, je l'ai bien
mentionné, par exemple, concernant la UHT, où on aurait pu
diviser la décision, mais on n'aurait pas pu changer la
décision.
Concernant l'opportunité, on a pensé que, vis-à-vis
des laiteries régionales, les gens n'étaient pas encore
prêts pour une telle décision, à tort ou à raison,
et qu'à cause des ristournes qui ont été versées,
semble-t-il, par plusieurs intervenants, il faudrait faire des plaintes et des
poursuites dans chacun des cas. Ce n'est pas toujours facile pour la
régie de surveiller toutes ces choses et surtout de faire des preuves
devant les tribunaux. Il y avait aussi, je ne dirais pas un consensus social,
mais, en tout cas, une forte opinion publique qui disait: s'il y a eu des
ristournes de versées, cela serait peut-être bon de geler le prix
du lait pendant un certain temps.
Il y a aussi la question des usines régionales. Cela aurait fait
disparaître des usines régionales, si le prix avait
été fixé de la façon que la régie avait
décidé de le fixer.
Personnellement, je ne suis pas convaincu que cela nuirait aux laiteries
régionales. En Ontario, il n'y a pas eu de prix fixe; au Québec
il y a eu un prix fixe au cours des dernières années et le nombre
des laiteries régionales a diminué plus rapidement au
Québec qu'en Ontario. Cependant, l'opinion publique, les gens
n'étaient pas prêt à accepter une telle décision
immédiatement et peut-être qu'un travail additionnel... La
régie elle-même suggérait dans sa décision un
comité consultatif qui pourrait travailler avec les intervenants pendant
un certain temps. C'est dans ce sens que le Conseil des ministres a pris sa
décision sans aucunement mettre en cause la crédibilité de
la régie. Dans son esprit, il n'y avait pas de lien entre les deux.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Huntingdon.
M. Dubois: II ne fait pas de doute, je pense, que la régie
a pris sa décision d'augmenter le prix du lait en relation avec les
coûts des producteurs de lait, les coûts à la production.
J'imagine que c'est dans ce sens que vous prenez vos décisions à
la régie. Après qu'on vous a soumis une augmentation du
coût de production du lait et qu'on vous a demandé...
M. Garon: Ce sont des facteurs, pas nécessairement les
seuls.
M. Dubois: Est-ce que vous analysez les deux côtés?
J'imagine que vous analysez le consommateur aussi bien que le producteur de
lait. Il reste quand même que l'augmentation des coûts a
été constante depuis un certain nombre d'années. C'est
sûr que la Fédération des producteurs de lait, sans doute,
demande l'augmentation correspondante.
M. Garon: Dans son cas, elle l'a eue. Les producteurs l'ont
eue.
M. Dubois: Ils ont eu une augmentation qui n'était
peut-être pas celle qu'ils ont demandée.
M. Garon: C'était payé par les laiteries, en
fait.
M. Dubois: C'est normal qu'ils en demandent plus que ce que vous
allez concéder. C'est au consommateur de bénéficier d'un
prix stable au lieu d'une augmentation. C'est le grossiste et la laiterie qui
ont été pénalisés par cet écart. À
présent, est-ce que les laiteries peuvent soutenir qu'elles ont besoin
d'une marge plus grande? J'imagine que vous avez aussi des
demandes de la part des laiteries pour intervenir dans le dossier.
M. Garon: C'est peut-être un des effets secondaires - comme
je les appelle - de la décision du cabinet. Je pense qu'il y a des
conséquences qui n'ont pas été mesurées. Les
laiteries, en fait, clamaient qu'elles avaient besoin de 0,045 $ en novembre;
elles ne les ont pas eus, parce qu'on a gelé leur marge en attendant
d'aviser sur les contrôles. Elles sont revenues avec 0,065 $ en janvier.
Sur la même base, disons que le ministère mesure les coûts
de production pour des fins de stabilisation, etc., sur un même type de
comptabilité, disons. De ce chiffre, elles n'ont rien eu. Elles ont
été obligées de payer les 0,02 $ aux producteurs.
Par ailleurs, elles ont la marge. Les laiteries n'ont jamais
utilisé la marge. Il y a un prix minimal et un prix maximal dans la
marge. Elles vendent plutôt au prix minimal, de sorte qu'il y a de la
marge pour tenir compte de l'augmentation des coûts de production. Si
elles pensent que, au niveau inférieur, les prix ne sont pas assez
élevés, elles peuvent aller jusqu'à une différence
de 0,04 $. Cela peut aller jusqu'à 0,05 $.
M. Dubois: Une marge dont elles peuvent se servir sans
nécessairement revenir devant la régie.
M. Garon: II y a un prix minimal et un prix maximal qui sont
fixés. Elles peuvent aller jusqu'au prix maximal. Mais elles n'ont pas
pris le prix maximal.
M. Dubois: Oui, d'accord.
M. Garon: Elles ont considéré jusqu'à
maintenant, je dirais, que, quand le gouvernement fixait le prix minimal et le
prix maximal, c'était un peu une fixation du prix au niveau minimal.
Mais la marge peut être utilisée. C'est-à-dire qu'elles
peuvent augmenter les prix jusqu'au prix maximal. Mais il y a beaucoup de
concurrence dans le lait, alors les prix ont du rester au niveau minimal.
M. Dubois: En principe, on pourrait dire qu'il pourrait exister
un prix fixe, sans marge, parce qu'on s'aperçoit qu'il demeure toujours
au prix minimal de fixation. Les laiteries demeurent toujours au prix minimal,
de cette façon, parce qu'elles ne peuvent pas, à cause de la
compétition, augmenter ou aller plus loin. En fait, si une laiterie
augmente et que l'autre n'augmente pas, finalement, cela ne fait pas une
compétition qui se tient.
M. Garon: C'est là le problème des ristournes.
Quand vous avez un prix minimal, vous pouvez demander plus cher. Vous avez une
marge. Mais vous ne pouvez pas demander moins cher. Mais, quand on a dit que
certaines avaient versé des ristournes, c'est parce que, dans le fond,
certaines devaient être prêtes à vendre meilleur
marché, si elles ont versé des ristournes.
M. Dubois: Les accusations qui devaient être
portées...
M. Garon: Pardon?
M. Dubois: Les accusations qui devaient être portées
concernant les ristournes...
M. Garon: II y en a eu. Il y a 32 causes.
M. Dubois: Elles sont pendantes devant les tribunaux?
M. Garon: II y en a une dizaine qui ont plus de six mois. Aucune
n'a été jugée jusqu'à maintenant. Des comparutions
se sont produites, mais avec des remises. On ne croit pas avoir de jugement
d'ici à -remarquez bien que c'est une estimation, on n'a rien à
voir avec le calendrier des cours -encore six mois.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 6 est
adopté?
M. Mathieu: Je voudrais seulement poser une dernière
question, M. le Président, rapidement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: Dans les plans conjoints en marge,
c'est-à-dire acceptés par la régie, mais pas encore
votés, il y a le sirop d'érable, si je ne me trompe pas?
M. Garon: II y a le sirop d'érable.
M. Mathieu: Est-ce qu'il y en a d'autres?
M. Garon: II y en avait un qui a été défait
il y a quinze jours, le plan des apiculteurs.
M. Mathieu: Le vote a été pris et il a
été défait. Alors, il n'y en a qu'un?
M. Garon: La seule cause pendante, actuellement, devant la
régie, est celle des produits de l'érable dans toute la
province.
M. Mathieu: Est-ce que vous avez une idée de la date
où sera pris le vote?
M. Garon: Justement, l'une des conséquences secondaires,
c'est qu'on aura
une demande en révision avant que le lieutenant-gouverneur se
penche sur cette nouvelle décision. Elle est pendante devant nous. Elle
sera entendue le 7 juin.
M. Mathieu: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 6 est
adopté?
M. Mathieu: Adopté.
Le Président (M. Desbiens): Le programme 6 est
adopté. La commission élue permanente de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation ajourne ses travaux sine die. Je ne sais
pas s'il y aura une...
M. Mathieu: Ce pourrait être après la période
des questions.
Le Président (M. Desbiens): Après la période
des questions. Mais je ne sais pas... Le ministre n'a-t-il pas une motion
à présenter, cet après-midi, où il est
impliqué?
Non, après la période des questions, le leader va annoncer
s'il y a commission ou non, vers 16 heures, 16 h 30.
M. Garon: Nous, ça va à demain?
Le Président (M. Desbiens): Je ne sais pas. Quelle est
l'entente avec le leader?
M. Garon: Non, il n'y en a pas cet après-midi. Il y a un
discours sur la raffinerie de sucre.
M. Mathieu: Avec un mini-débat. M. Garon: Certainement,
certainement!
(Fin de la séance à 13 h 01)