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(Dix heures quatre minutes)
Le Président (M. Richard): Je déclare la commission
de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte. Je vous
rappelle le mandat de notre commission ce matin. Pour cette séance,
c'est de procéder à l'interpellation adressée au ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation par le
député d'Arthabaska sur le sujet suivant: Les négociations
du GATT et l'agriculture.
M. le secrétaire, il n'y a aucun remplacement ce matin?
Le Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Je me permets de vous rappeler
brièvement le déroulement d'une séance d'interpellation.
Dans un premier temps, M. le député d'Arthabaska, qui a
demandé l'interpellation, aura un temps de parole de 10 minutes, suivi
du ministre pour également 10 minutes. Par la suite, des périodes
de 5 minutes seront allouées selon l'ordre suivant: un
député de l'Opposition, M. le ministre et un député
ministériel. Vous comprendrez qu'à la fin, les 20
dernières minutes, j'accorderai une période de 10 minutes de
conclusions à M. le ministre et un temps équivalent à M.
le député d'Arthabaska. Sur ce, M. le député
d'Arthabaska, vous avez la parole pour les 10 prochaines minutes.
Exposé du sujet M. Jacques Baril
M. Baril: Je vous remercie, M. le Président. D'abord, le
but de l'interpellation, c'est de faire le point sur la position du
gouvernement du Québec par rapport aux négociations du GATT.
Également, le ministre nous a déjà dit que son
ministère évaluait différents scénarios pour
l'après-GATT; donc, on voulait connaître aussi ces
scénarios possibles que le ministre ou son ministère
étudie suite aux négociations du GATT.
Depuis plus de deux ans, la population entend parler des
négociations du GATT. Pour le bénéfice des personnes qui
nous écoutent, le GATT, c'est un groupement de 108 pays qui
négocient, à tous les cinq ans, les méthodes du commerce
international. Cette année, les pays ont plus de difficultés
à s'entendre, puisque c'est la première fois depuis la
création de cet organisme, en 1948, que l'on discute des politiques
agricoles. Avant, les pays n'ont jamais voulu discuter des politiques
agricoles, puisque tous les pays considéraient que l'agriculture
était un secteur particulier et qu'elle devait être
protégée.
Maintenant, qu'est-ce qui a amené les pays à
renégocier cette entente cette année? Le développement de
l'agriculture à travers le monde a fait que des pays comme l'Argentine
et la Chine, entre autres, qui étaient de gros pays importateurs de
céréales dans le passé, sont devenus des exportateurs, ce
qui a créé un surplus de céréales aux
États-Unis, en Europe - en France, entre autres - et, évidemment,
au Canada. Pour se débarrasser des surplus, ces pays se font une guerre
de prix sur le marché mondial. Cette guerre de prix a
coûté, l'an passé, aux Etats-Unis, 238 000 000 000 $,
à la France, 135 000 000 000 $ et, au Canada, plus de 4 000 000 000 $.
Donc, comme les pays ne veulent plus supporter cette vente à rabais, ils
chambardent tout le système pour régler le problème d'une
production.
Au Québec, les producteurs bénéficient d'un
système de contrôle de la production dans le lait, les oeufs, la
volaille et le dindon. Ces contrôles ne coûtent rien à
l'État. Je le répète: Ça ne coûte rien
à l'État, les offices de commercialisation ou nos systèmes
de quotas. Si la consommation diminue, les producteurs et les productrices se
voient obligés de produire moins. Ils ont une coupure de quotas qui est
supportée entièrement par les producteurs et les productrices.
Ils sont coupés sans indemnisation aucune. Ce système a fait ses
preuves et commence à être imité ailleurs.
J'ai été surpris de prendre connaissance, il y a à
peu près 15 jours, que les producteurs laitiers américains sont
en train d'organiser des offices de commercialisation. Ils sont en train de se
regrouper entre producteurs pour imiter notre syndicalisme agricole pour se
donner des plans conjoints justement pour prévoir les
inconvénients qu'il pourrait y avoir au GATT. Malheureusement, ils sont
au moins 30 ans en retard. Mais on dit qu'il n'est jamais trop tard pour bien
faire. Pour implanter ce système, les producteurs et les productrices se
sont prévalus de l'article XI du GATT qui permet à un pays de
contrôler les importations si lui-même contrôle sa production
et ne crée pas de surplus sur le marché mondial. On entend parler
souvent par les spécialistes de distorsion des marchés au niveau
international.
Dans les négociations actuelles, c'est ça qui fait
problème. Dans le rapport que M. Dunkel, directeur des
négociations du GATT, a soumis aux pays membres, pour arriver à
un accord, l'article XI n'existe plus, ce qui veut dire que tous les
producteurs et les productrices qui se
sont disciplinés pour ne pas encombrer les marchés
mondiaux seraient pénalisés pour tous ceux et celles qui n'ont
jamais voulu s'organiser pour limiter ou diversifier leur production, entre
autres, les céréaliculteurs. Ce que je viens de dire, c'est une
partie du problème, puisque d'autres outils de développement de
l'agriculture sont menacés à l'intérieur du rapport de M.
Dunkel, soit l'assurance-stabilisation, l'assurance agricole et le financement
agricole. (10 h 10)
Maintenant, il faut démontrer la volonté que nos
gouvernements ont déployée pour préserver les piliers de
notre agriculture. Suite à de nombreuses pressions faites par le milieu
agricole, l'Assemblée nationale pressait le gouvernement
fédéral par une motion adoptée à l'unanimité
pour défendre nos piliers. Ça, on se retrouve, M. le
Président, le 8 décembre 1989, et je lis cette motion qui a
été adoptée ici même en cette Chambre. «Que
l'Assemblée nationale demande unanimement au gouvernement du Canada
qu'il donne suite, dans le cadre des négociations commerciales
multilatérales, à l'engagement qu'il a pris de renforcer et de
clarifier l'article XI 2c de l'accord du GATT, ceci afin d'assurer le maintien
et le bon fonctionnement du système de gestion des approvisionnements et
qu'il respecte également ses engagements envers le Québec
concernant sa capacité d'intervenir dans le secteur agricole par des
programmes de stabilisation des revenus, de financement agricole et autres
programmes d'aide à la production. «Ces engagements doivent se
réaliser, non seulement dans le cadre des négociations du GATT,
mais aussi dans le cadre du processus de révision des politiques
agricoles du Canada.»
Ce qui m'a amené à demander cette interpellation, c'est la
déclaration du sous-ministre adjoint aux affaires économiques
lors d'une conférence de presse donnée, à la fin de
février 1992, sur les perspectives économiques pour 1992. Dans sa
déclaration, le sous-ministre, M. Lavoie, disait: Rapport Dunkel ou pas,
«il y aura une remise en question des quotas qui viendra de
l'intérieur». Elle proviendra des jeunes agriculteurs et
agricultrices et des consommateurs, qui ont l'impression, à tort ou
à raison, que le prix du lait, des oeufs et du poulet est plus
élevé ici qu'aux États-Unis à cause des
quotas.» Et M. Lavoie continue en rappelant que le MAPAQ a
déjà fait savoir, il y a deux ans, à l'Union des
producteurs agricoles et à son président, M. Jacques Proulx, que
le gouvernement du Québec va exprimer son appui au nouvel accord du
GATT, même si n'y figurent pas les quatre piliers que sont la gestion de
l'offre, l'assurance-stabilisation, l'assurance-récolte et le
financement agricole.
Donc, déjà, en 1990, le gouvernement, tout en affirmant
publiquement qu'il défendait une chose, en cachette, par en
arrière, indiquait son intention d'appuyer un accord qui ne
protégeait pas les quatre piliers de notre agriculture
québécoise. Ici, je me demande bien pourquoi, M. le
Président, l'Union des producteurs agricoles, par son président,
n'a pas dénoncé cette déclaration.
On se rend compte aujourd'hui que l'appui du gouvernement du
Québec aux agricultrices et aux agriculteurs québécois
n'était pas sérieux et que le gouvernement libéral y
accordait peu de valeur. Le gouvernement fédéral, étant
sans doute informé de l'intention du gouvernement du Québec, n'a
jamais véritablement défendu les intérêts des
agriculteurs québécois aux négociations du GATT. Je l'ai
d'ailleurs démontré à plusieurs reprises.
Entre autres, quand le gouvernement fédéral a fait
connaître ses offres constitutionnelles en septembre 1991, on disait que
le gouvernement fédéral évaluait que nos offices de
commercialisation étaient des entraves à la libre circulation des
biens et des marchandises et qu'ils devraient être abolis. Dans une
déclaration également, le ministre fédéral Wilson,
lors de son passage à Québec en janvier ou février dernier
devant la Chambre de commerce, a dit que le gouvernement fédéral
aurait un choix à faire entre les producteurs de l'Ouest et les
producteurs de l'Est. Évidemment, on peut aussi mentionner la position
du gouvernement fédéral qui a été
dénoncée par M. Dunkel lui-même, qui a dit que
c'était une position indéfendable, puisqu'il défendait
deux choses en même temps. Aussi, il y a le chef du Parti libéral
allemand qui a dit la même chose, que le gouvernement
fédéral avait une position indéfendable,
injustifiable.
D'ailleurs, depuis deux ans, l'UPA et le gouvernement du Québec
tiennent un langage déroutant et démobilisant pour la classe
agricole. Son sous-ministre, M. Jean-Yves Lavoie, a dit - et je pense que c'est
la cerise sur le sundae: «L'industrie laitière subsisterait
à long terme, mais il devrait y avoir à court terme des
ajustements importants». Pour ce qui est des autres productions
contingentées, le poulet, le dindon, les oeufs, le sous-ministre ne
pouvait être plus clair: «elles seraient lavées», M.
le Président.
Donc, sur ce, pourquoi le ministre n'a-t-il pas soufflé mot sur
les déclarations de son sous-ministre? Pourquoi le ministre n'a pas
soufflé mot sur les déclarations des éditorialistes Alain
Dubuc et Jean-Robert Sansfaçon, de la déclaration du
président de Steinberg, qui disait que les offices de commercialisation
étaient une entrave aux prix et un ennui pour les consommateurs? Le
gouvernement n'a-t-il pas trahi les agriculteurs québécois en
appuyant une résolution qui disait de les défendre, alors qu'en
même temps il informait l'UPA que le gouvernement du Québec
appuierait un accord à Genève qui ne protégeait pas les
quatre piliers de notre agriculture? En agissant ainsi, le gouvernement du
Québec n'a-t-
il pas affaibli la position des agriculteurs québécois
auprès du gouvernement fédéral qui savait qu'il pouvait
compter sur l'appui du gouvernement du Québec quoi qu'il arrive au GATT?
Quels sont les autres scénarios étudiés par le MAPAQ? Sur
quoi le sous-ministre se base-t-il pour affirmer que trois productions
contingentées sur quatre au Québec seraient lavées si le
système de gestion de l'offre disparaissait? Mon temps étant
épuisé, je reviendrai dans les blocs de cinq minutes, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Arthabaska. Je cède maintenant la parole à
M. ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M.
Picotte, vous avez la parole.
Réponse du ministre M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je pense bien que je
ne répondrai pas aux questions du député d'Arthabaska dans
cette première partie-là. J'aurai l'occasion, moi aussi, dans les
cinq minutes qui me sont allouées, selon la tradition parlementaire, d'y
revenir sur plusieurs points. Je voudrais également à mon tour
brosser le tableau de ce que sont les négociations du GATT, puisque
c'est important qu'on se dise exactement comment ça fonctionne.
La première chose qu'il est important de souligner et qui va
peut-être répondre à certaines interrogations de mon
collègue, c'est de dire qu'il y a une coalition qui existe, M. le
Président, dont font partie le gouvernement du Québec, l'Union
des producteurs agricoles et la Fédérée. Donc, c'est bien
sûr que toutes les fois que mon collègue d'Arthabaska se demande
pourquoi il y a des gens qui ne répliquent pas, c'est parce qu'on
défend la même chose, c'est parce qu'on prépare les papiers
ensemble, c'est parce qu'on fait toutes ces préparations-là
ensemble. Tout le monde est consulté et assis à la même
table de discussion. C'est bien évident que, quand on en arrive à
un consensus, si on commence à se contester les uns les autres
après avoir fait un consensus et des discussions... C'est sûr que
là ça tombe sous le sens, M. le Président: bien sûr
que l'UPA ne contestera pas, bien sûr que la Coopérative ne
conteste pas; nos papiers sont préparés avec eux autres.
À partir de ce moment-là, évidemment, je crois
déceler dans ce que me dit mon collègue d'Arthabaska qu'il ne
semble pas avoir une parfaite confiance envers l'Union des producteurs
agricoles dans ce domaine-là, en particulier - parce que je ne veux pas
mal l'interpréter -puisqu'il se demande pourquoi l'UPA ne contredit pas,
ne conteste pas, etc. Mais nous faisons partie, M. le Président, de la
coalition et, à venir jusqu'à date, moi, je pense que l'UPA est
l'or- ganisme qui parte au nom des agriculteurs. Et si on a des indications
à l'effet que ça ne doit pas être ça, s'il faut
faire une coalition avec d'autres organismes, il faudra nous le dire. À
ce moment-là, on évaluera ça chez nous. Mais, à
date, voilà une des réponses que je voulais donner
immédiatement.
Depuis la Deuxième Guerre mondiale, M. le Président, on
assiste à une mondialisation de l'économie et, par le fait
même, à une mondialisation des marchés. Cette
mondialisation de l'économie se traduit par une intensification des
échanges en marchandise, en services, en technologies et en capitaux.
Non seulement les échanges globaux augmentent, mais leur nature se
modifie également.
Aussi le commerce international des produits en matières
premières perd de l'importance aux dépens du commerce des
produits transformés et fabriqués. De même, le commerce
international des services s'accroît progressivement au fur et à
mesure que se développe l'économie des services des pays
occidentaux. Enfin, l'évolution des échanges mondiaux suit la
même tendance que connaît l'économie nationale:
déclin des secteurs primaires et de l'activité de transformation
des ressources et croissance des industries de fabrication et des services, qui
accapare 70 % de l'emploi au Canada.
Aujourd'hui, le commerce mondial des marchandises totalise environ 3 000
000 000 $ alors que le commerce des services se chiffre à 700 000 000
000 $. On voit tout de suite le changement et la proportion. Donc, pourquoi les
gens s'attaquent à ça? C'est, bien sûr, parce que tout est
en évolution. On fait ça normalement partout, on s'ajuste
partout. On s'ajuste dans tous les domaines. On s'ajuste parce qu'il y a une
évolution et il y a un changement de cap complètement.
Parallèlement à la mondialisation de l'économie, il
se produit une deuxième tendance lourde, complémentaire à
la première, il s'agit de la formation de blocs économiques
régionaux ou continentaux. La constitution de ces blocs régionaux
s'inscrit dans un processus graduel d'intégration économique
impliquant deux ou plusieurs pays. Là, je pense qu'on n'a pas besoin -
ça tombe encore sous le sens - de faire beaucoup de discours et beaucoup
de phrases pour mentionner que c'est des blocs régionaux, maintenant: ce
n'est plus une entité qui défend son entité et son
territoire. (10 h 20)
II n'y a qu'à regarder ce qui se passe du côté des
pays de l'Europe, il n'y a qu'à regarder ce qui se passe du côte
de l'Union soviétique, avec des pays qui s'allient, des pays qui se
mettent ensemble. C'est un petit peu... Entre guillemets, on se
fédéralise partout. Il y a à peu près juste nous
autres qui parlent de ne plus se fédéraliser, mais on se
fédéralise partout. Les gens se regroupent partout pour se donner
une
force. Nous, on est déjà regroupés et on parle
peut-être d'autre chose, mais, ça, c'est un autre sujet, M. le
Président, qu'on abordera plus tard. On se fédéralise
partout pour se donner de la force, pour être en mesure de
défendre des choses, peut-être pas de la même façon
que, nous, on le fait, mais, ça, il y a plusieurs façons de le
faire.
Je vous dis que, ça, c'est un autre constat qu'on fait et ce
n'est pas sorcier: à partir du moment où on devient quelque 300
000 000 de personnes dans la Communauté économique
européenne, bien, on a la force de quelque 300 000 000 de personnes avec
la Communauté européenne, on a la force de 250 000 000 de
personnes aux États-Unis, on a notre force à nous, au Canada, et
on est obligés, même au Canada, de faire des alliances avec
d'autres, si possible, qui ont les mêmes raisons de croire et de
défendre les points de vue qu'on défend pour se donner un peu de
force.
Alors, c'est évident, M. le Président, que c'est cette
nouvelle conjoncture-là qui fait en sorte que ça change
complètement les discussions. Ça change à un point tel que
même la Communauté économique européenne est une
force relativement importante, au moment où on se parle, à cause
justement de son poids maintenant beaucoup plus important aussi que les
États-Unis. On a aussi l'autre partie qui fait qu'avec l'URSS et ses
composantes on a un potentiel de quelque 500 000 000 de personnes,
tantôt, qui vont s'allier dans le monde de l'Europe pour faire des
affaires, pour faire des échanges, pour faire de la transformation, pour
expédier des produits, pour en recevoir, pour en acheter, pour en
vendre, etc. Voyez-vous que ce n'est plus la même affaire? Donc, les
unions économiques sont des unions, évidemment, qui changent
complètement la philosophie de discussion au niveau du GATT.
En adhérant, M. le Président, au GATT, en 1986, et en
s'engageant sur la voie de l'association économique avec le Canada et
les États-Unis, le Mexique poursuit lui aussi un double processus
d'intégration économique à l'économie mondiale et
à l'économie continentale. Sous l'influence croissante des firmes
multinationales, les activités industrielles et les services de pointe
s'étendent à tous les continents, car la mobilité des
ressources en capitaux et en technologies est de plus en plus facilitée.
Les méthodes de gestion et de production se standardisent
progressivement, ce qui permet d'uniformiser la compétitivité du
travail, des revenus, des modes de vie des différentes nations.
L'amélioration des revenus se traduit partout par une demande
accrue des biens de consommation, dont particulièrement les produits
alimentaires, et la consommation des produits animaux, les viandes, les oeufs,
les produits laitiers, s'accroît aux dépens des
céréales traditionnelles. De même, la demande interne et
internationale des produits transformés progresse plus rapidement que
celle des produits peu transformés. L'apparition des pays nouvellement
industrialisés ainsi que la transition des anciens pays communistes de
l'Est vers le système économique libéral vont
accroître la concurrence internationale et possiblement augmenter les
conflits commerciaux entre les différents pays, M. le
Président.
En agriculture, on le sait, mon collègue a fait un
résumé assez bien des discussions du GATT, historiquement,
qu'avant on n'avait pas pris en compte tout ce domaine-là de
l'agriculture. J'ai donné une partie des réponses pourquoi on en
tient compte maintenant: à cause de la différence et du
changement. On a parlé de 3 000 000 000 $ comme chiffre d'affaires dans
un domaine bien précis alors que, dans les services et les objets
transformés et le commerce d'objets de transformation, on est rendus
à 700 000 000 000 $. Vous voyez la différence.
Alors, depuis leur lancement les négociations du GATT ont
été polarisées autour des préoccupations
intéressant principalement deux grandes puissances agricoles mondiales:
les États-Unis et la Communauté européenne. Bien
sûr, ce sont d'ailleurs ces deux premiers exportateurs mondiaux qui se
livrent, à coups de milliards de dollars - et non pas nous mais eux -
une concurrence acharnée sur leur propre marché et sur les
marchés des autres pays. Le Canada et le Québec peuvent
difficilement supporter cette concurrence déloyale car les
capacités budgétaires sont limitées par rapport aux
États-Unis et à la CEE.
Il y a un avantage aussi, M. le Président, à limiter ce
que font les gouvernements. Je pense que ce n'est pas sorcier, il faut se le
dire. Demain matin, si on faisait une bataille à coups de milliards, je
pense bien que la CEE et les États-Unis pourraient mettre quelques
milliards de plus. Et, à quelques milliards de plus, on ne pourrait pas
les suivre, nous, et on serait complètement anéantis de toute
façon.
Alors, je pense que c'est important qu'on souligne ça. C'est
Important de vous dire, M. le Président, finalement, que les
négociations du GATT se déroulent présentement. Donc, je
vais résister à la tentation de mettre nos plans sur la table
aussi parce qu'on est en négociations. Donc, est-ce qu'on veut qu'on
fasse la publication de nos négociations, qu'on dise ce qu'on veut
faire, où on veut aller, ce qu'on suggère, etc., pour que les
autres l'apprennent et, finalement, soient plus en mesure de nous combattre?
Une négociation, c'est une négociation, M. le
Président.
Je pense qu'il s'agit de sauvegarder et de répéter qu'on
sauvegarde les systèmes de gestion de l'offre par le renforcement de
l'article XI, c'est clair, ça. On veut garder nos produits verts, on
veut le renforcement de l'article XI. On veut sauvegarder les systèmes
de gestion de
l'offre et, à date, personnellement, ce que j'ai compris du
gouvernement fédéral qui négocie pour nous, parce que
c'est le gouvernement fédéral qui négocie, M. le
Président, c'est qu'on défend exactement la résolution
qu'on a passée ici, à l'Assemblée nationale, les revenus,
la stabilisation, l'assurance-récolte, le financement agricole et la
gestion de l'offre.
Donc, tant et aussi longtemps que c'est ça qui est
défendu, M. le Président, ça nous satisfait et on ne se
mettra pas à crier au loup et à se tirer en l'air parce que la
position est bel et bien défendue. Comptez sur moi, si la position n'est
pas bien défendue, on pourra être en mesure de crier à ce
moment-là, mais c'est à ce moment-là qu'on devrait crier
tout simplement.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je
cède la parole à M. le député d'Arthabaska, M.
Baril, pour les cinq prochaines minutes.
Argumentation M. Jacques Baril
M. Baril: M. le Président, merci. J'ai juste deux petits
points que j'aimerais rectifier d'abord. Le ministre dit que le
député d'Arthabaska ne semble pas avoir confiance à
l'Union des producteurs agricoles. Je vais vous dire que j'ai beaucoup plus
confiance à l'Union des producteurs agricoles que j'ai confiance au
ministre parce qu'avec toutes les démarches que l'Union des producteurs
agricoles a faites à travers le monde... Elle a fait un travail qui,
normalement, aurait dû être fait par le gouvernement. Elle a fait
la job du gouvernement, que le gouvernement n'a pas faite.
La seule interrogation que je me suis posée tout à
l'heure, c'est: Pourquoi l'Union des producteurs agricoles n'a pas dit ou n'a
pas démenti, si ce n'est pas vrai, l'affirmation à l'effet
qu'advienne que pourra - et ça, c'est immédiatement après
avoir voté la motion ici, à l'Assemblée nationale, que le
gouvernement aurait dit ça à l'Union des producteurs agricoles,
à son président - au GATT, que nos piliers de l'agriculture
soient protégés ou pas, nous autres, on va continuer à
appuyer le gouvernement fédéral? C'est juste le reproche que j'ai
fait à l'UPA; ça n'enlève pas ma confiance envers cet
organisme qui a pris la place du gouvernement pour défendre nos
politiques à l'étranger.
L'autre affaire, dans l'affirmation, c'est quand le ministre dit
qu'à travers le monde on essaie de se fédéraliser pour
mieux survivre et que, nous autres, on parle de se séparer. Il ne
faudrait pas que le ministre aille trop loin là-dedans parce que,
ailleurs, on essaie de se fédéraliser au point de vue
économique, de faire des échanges économiques, et c'est
toujours ce que, nous, du Parti québécois, nous avons
défendu, une souveraineté politique dans une association
économique. Si, actuellement, au GATT, c'était une
fédération, comme le ministre en fait mention là, il n'y
aurait pas de discussion. Les 108 pays, il y aurait un gouvernement qui
mènerait ça, ces pays-là, et il déciderait. Il
dirait: Demain matin, c'est ça. C'est quoi qui fait le problème
au GATT? Il y a 108 pays et chaque pays qui est représenté est
autonome politiquement. Ils sont indépendants politiquement et c'est
ça qui achoppe au niveau des négociations, comprenez-vous? Et au
niveau de l'association économique, bien, c'est ça, ils essaient
de s'entendre. Donc, qu'on ne vienne pas dire que, pendant que les autres se
fédéralisent, nous autres, on essaie de se diviser, c'est
complètement faux.
Mais ce sur quoi je veux revenir, M. le Président, c'est sur la
dernière phrase par quoi le ministre a terminé. Il a dit: On a
voté une résolution et on continue à la défendre
à tour de bras. Suite à cette motion qui a été
votée ici, à l'Assemblée nationale, comment le ministre
explique-t-il la déclaration de son sous-ministre qui dit: Advienne que
pourra, on va appuyer toujours le gouvernement fédéral dans ses
négociations? J'ai donné la démonstration tout à
l'heure que le gouvernement fédéral ne les défend pas, il
ne les a jamais défendues concrètement, la position du
gouvernement du Québec, la position de l'Union des producteurs agricoles
et la position de la Coopérative fédérée de
Québec.
C'est là qu'est mon point d'interrogation, et le ministre n'a pas
répondu à cette question-là. C'était en plein dans
le moment crucial des négociations où tout le monde en discutait
et chaque pays faisait connaître sa volonté de défendre ses
piliers. Ça, c'était il y a deux ans, en 1990. En plein dans
cette période-là, le gouvernement, par le biais de la bouche de
son sous-ministre, s'en va déclarer que, nous autres, advienne que
pourra, ce n'est pas grave, on va appuyer le gouvernement
fédéral. Il faut quand même, M. le Président,
être en mesure de juger des conséquences d'une telle
déclaration. (10 h 30)
Cette information-là, elle est venue à Ottawa. Elle est
allée aussi à la table des autres pays négociateurs. C'est
le Québec, c'est nous qui allons être les plus touchés, les
plus affectés par l'abolition de l'article XI du GATT. Tous les autres
pays ont appris en même temps que ça ne nous ferait pas
grand-chose. Même si c'était enlevé, ça ne nous
ferait pas grand-chose. C'est grave, M. le Président, cette
déclaration-là, et le ministre n'a pas répondu à
ça. Comment ça se fait qu'en pleine phase cruciale le
gouvernement fait connaître son intention? Il vient de dire tout à
l'heure: On est en pleines négociations, il ne faut pas trop faire
connaître nos affaires. Ça fait deux ans que les autres pays
connaissent que le gouvernement du Québec s'en fout des
piliers de l'agriculture québécoise. Il s'en fout,
ça a été dit par la bouche de son sous-ministre.
Probablement que l'UPA ne l'a pas répété ou ne l'a pas
dénoncé, connaissant la gravité du geste, des paroles de
ce sous-ministre-là, que ça irait à d'autres tables de
négociation et que déjà on affaiblirait notre
position.
Donc, le ministre, je l'invite à répondre pourquoi, si
c'est crucial actuellement, ce n'était pas si crucial que ça.
Quand il est allé, en février dernier, faire une petite
tournée, à la sauvette, en Europe pour défendre nos
piliers, comment il a été reçu? Comment il a
été perçu? Quel discours il a tenu? À son retour,
on regardait, il y avait deux versions. Le ministre a dit: Ce n'est pas pire,
on a marqué des pas, on a marqué des points, je pense qu'on va
avoir été compris. On lisait d'autres journaux d'autres
organismes gouvernementaux et ils disaient: Ils n'ont rien à faire
là, les Allemands et d'autres pays, entre autres, les
États-Unis... Dunkel lui-même, le directeur général,
il ne veut rien savoir. C'est du temps perdu, ce qu'on a fait là. Et le
ministre, lui, il était optimiste tout en sachant que ces pays-là
savaient la position de son gouvernement.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Arthabaska. M. le ministre, vous avez la parole pour les
cinq prochaines minutes.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, moi, écoutez, je ne
ferai pas de chicane, ce matin, avec le député d'Arthabaska. Je
sais jusqu'à quel point il est prime. La minute que tu dis une phrase
que lui ne souhaiterait pas entendre, ça le fait sauter par-dessus le
bâtiment. Moi, je répète et je dis que le gouvernement du
Québec défend toujours la même position et va toujours
continuer de défendre la même position. Je le ramène
à toutes les autres discussions et à toutes les autres
déclarations qui ont pu se faire. A ce moment-là, comment
interpréter, M. le Président, ce qu'a dit le président de
l'UPA, à l'émission, «Le Point»? Il n'a pas
passé à la télévision communautaire quelque part,
là. Il a dit à la télévision, au
«Point», au vu et au su de tout le monde - peut-être qu'on ne
l'a pas regardé ce soir-là pour quelques-uns, mais on peut
toujours aller chercher la référence - que, évidemment, le
statu quo ne serait pas souhaitable et ne serait pas respectable non plus de
notre part, parce que ça nous fait mal; ça nous ferait encore
plus mal. Il a dit: Oui, c'est évident, il n'y a pas une personne le
moindrement sensée qui pourrait affirmer qu'il ne faut pas signer
l'accord du GATT. L'accord du GATT va arriver, à un moment donné
dans le temps, après une négociation de tout le monde. Ce que,
nous autres, on dit, c'est: II faut prévoir que si ça n'arrive
pas tout à fait à notre goût, il faut être
prêts à faire face à n'importe quelle
éventualité. Et ça, M. le Président, il ne faut pas
«paranoïer», puis il ne faut pas penser que prévoir des
choses dans la vie... Le député d'Arthabaska l'a fait, puis, moi,
je le fais, puis tout citoyen intelligent le fait. Prévoir son emprunt
de maison, puis prévoir tout ce qui peut nous arriver plus tard, ce
n'est pas un signe de faiblesse, ça. Ce n'est pas un signe de faiblesse.
Non, c'est un signe d'intelligence.
Donc, on ne tirera pas sur tout ce qui bouge. De toute façon,
pour l'information du député d'Arthabaska, je trouve ça un
petit peu curieux qu'on nous reproche d'avoir été essayer de
défendre des choses au GATT, puis que, pas longtemps après, c'est
l'UPA qui est partie et qui est allée faire la même tournée
européenne que la nôtre pour tâcher d'aller essayer de
vendre et consolider nos positions. Il n'y a que les gens qui ne se sont pas
déplacés qui peuvent reprocher aux gens de s'être
déplacés pour aller défendre la position, parce que c'est
ça, la réalité. On est en négociations. On a des
gens à convaincre. On a des gens à convaincre et, bien sûr,
nous sommes allés les convaincre, puis on est revenus de là en
disant qu'il y avait une certaine ouverture, bien sûr, parce qu'à
l'article XI il n'y avait même pas d'ouverture là-dessus de
personne. Là, au moins, il y a une ouverture du côté de la
mesure de sauvegarde.
Maintenant, M. le Président, on n'inventera rien non plus, puis
le député d'Arthabaska a dû l'entendre dans son milieu
comme, moi, je l'entends régulièrement dans leur milieu. Les
agriculteurs, ils n'ont pas seulement peur du GATT. Les agriculteurs, ils sont
profondément... Quand mon sous-ministre le souligne, il ne souligne pas
ça à tort mais à raison. Il ne souligne pas ça
à tort. Il souligne ça, parce que c'est ce qu'on entend
régulièrement. Les agriculteurs, ils ont peur de la diminution
des quotas tous les ans, puis, des fois, deux fois par année. Ça
aussi, ça fait mal. Ils se requestionnent, eux autres aussi, sur
l'histoire des quotas. Ils se requestionnent sur l'histoire des quotas:
Jusqu'à quel point ils vont pouvoir continuer d'en perdre, des quotas,
puis à quel pourcentage?
Ça fait que, ça, ce n'est pas un questionnement du
sous-ministre adjoint de l'Agriculture. C'est un questionnement de l'UPA. C'est
un questionnement des agriculteurs, puis c'est un questionnement de tout le
monde, M. le Président. Et, moi, je regrette, je ne discuterai pas
là-dessus d'aucune façon, parce que le député
d'Arthabaska devrait bien savoir qu'il y aura à préparer, peu
importe où on se situe, un après-GATT que nous souhaitons signer
à la volonté de la défense qu'on fait de notre
position.
Donc, la défense qu'on fait de notre position - ai-je besoin de
le répéter? - c'est le renforcement de l'article XI. C'est la
protection de nos programmes verts, l'assurance-stabilisa-tion,
l'assurance-récolte, le crédit agricole, nos
piliers, finalement. Nous souhaitons, que les négociations du
GATT se terminent en signant ça. Et, pour nous, ça va nous
satisfaire amplement. Maintenant, il y aura un après-GATT, comme je l'ai
dit. Il faudra vivre avec l'après-GATT. Et, pour vivre avec
l'après-GATT, on s'y prépare de toutes les façons.
Alors, il n'y a personne qui va empêcher qui que ce soit de
travailler, face à la mondialisation des marchés, sur des
formules qui vont diminuer l'inquiétude quant à la diminution des
quotas que les agriculteurs ont sur le terrain, les inquiétudes du GATT
et les inquiétudes du résultat de l'après-GATT, M. le
Président. Donc, nous travaillons. Nous faisons notre devoir et l'UPA le
fait aussi. Elle est allée elle-même en Europe, et je soulignerai,
M. le Président, qu'avant de partir pour l'Europe l'UPA et mon
sous-ministre aux affaires économiques ont revérifié le
message et les papiers pour être bien sûrs que ça
n'altère pas cette discussion-là, et les messages et les papiers
que véhicule l'UPA n'altèrent en rien la position que nous avons
au GATT. Ça a été vérifié, ça.
Ça a été vérifié avec M. Jacques Proulx,
avant de partir, et avec M. Loubier. Ils ont travaillé ensemble.
Donc, que le député d'Arthabaska veuille tirer sur
quelqu'un en particulier, c'est son droit, mais, moi, je regrette, mais on est
là, nous, pour faire une job et on va continuer de la faire. La minute
où on sentira que quelqu'un faiblit en faisant cette job-là,
bien, je regrette, mais on le dira. J'ai eu l'occasion de le dire quand je suis
allé à la conférence fédérale-provinciale et
ça a provoqué un voyage, par la suite, pour aller défendre
nos positions. Tant mieux. Si ça revient, je le dirai aussi, et je ne
suis pas gêné pour le dire.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je
cède donc la parole, pour les cinq prochaines minutes, à M. le
député de Berthier, M. Houde.
M. Albert Houde
M. Houde: Merci, M. le Président. Les négociations
du GATT auront fait couler beaucoup d'encre, M. le Président. Il faut
admettre que les médias ont consacré beaucoup d'espace à
ce sujet, mais il faut avouer que cette attention est méritée,
car les résultats de ces négociations auront sûrement un
impact sur la vie économique de notre province.
J'aimerais, M. le Président, vous souligner le travail qui s'est
fait dans ma région - l'une des plus belles régions de la
province, la région de Lanaudière - en agriculture, par le
comité qui a été mis en place, la coalition qui a
été formée avec le monde agro-alimentaire et les gens du
milieu. Nous avons mis sur pied ce comité pour être capables de
sensibiliser le premier ministre, M. Brian Mulroney, et nous lui avons fait
parvenir, en date du 3 février 1992, une lettre lui demandant de faire
tout en son possible pour pouvoir respecter notre agriculture au Québec
et également au Canada. (10 h 40)
Toutefois, l'accent placé sur ce sujet a fait passer sous silence
la performance de l'agriculture québécoise au niveau du revenu
net au Canada. Pour la troisième fois consécutive, le
Québec s'est hissé au premier rang des provinces pour le revenu
net total et aussi pour le revenu net par ferme. Je dirais même que,
depuis 1985, c'est quatre années qu'il s'est hissé au premier
rang. En 1991, le revenu net des agriculteurs québécois s'est
situé à environ 24 000 $ par ferme, soit deux fois la moyenne
canadienne. M. le Président, à titre de référence,
les producteurs ontariens ont bénéficié d'un revenu net de
11 168 $ par ferme. Enfin, soulignons qu'avec 17,2 % des recettes agricoles le
Québec dispose de 30,4 % du revenu net enregistré au Canada.
Cette performance est due, bien entendu, à l'excellence des
productrices et des producteurs québécois. Cela démontre
qu'ils sont capables de produire efficacement et de relever le défi de
la concurrence, mais cette performance est aussi due à certains
programmes agricoles offerts par le gouvernement. Ces programmes que l'on se
plaît à nommer nos piliers du développement et de
l'agriculture sont constitués des programmes de gestion de l'offre, du
crédit agricole, de l'assurance-stabilisation des revenus et de
l'assu-rance-récolte. Ce sont des programmes qui supportent à la
fois le revenu agricole des individus engagés dans ce secteur
économique et aident à procurer le financement nécessaire
à développer la production agricole.
Ils sont importants, ces programmes, M. le Président. Voici
l'impact qu'ils représentent: gestion de l'offre, 1 600 000 000 $ de
recettes monétaires, soit 45 % des recettes monétaires agricoles
du Québec; assurance-stabilisation du revenu disponible dans les
productions comme le boeuf, les céréales et ovins, porc et pommes
de terre représentant 30 % des recettes monétaires agricoles ou 1
000 000 000 $, si vous voulez. Donc, les programmes d'ASRA et de gestion de
l'offre touchent des productions comptant pour près de 75 % des recettes
monétaires en agriculture au Québec. Au niveau du crédit
agricole, il faut souligner que l'Office du crédit agricole garantit
près de 2 000 000 000 $ de prêts à nos agriculteurs et
agricultrices du Québec. Enfin, l'assurance-récolte
protège le revenu des agriculteurs contre les pertes découlant
des caprices de la température. Les producteurs sont les premiers
à comprendre leur importance; il ne faut pas s'étonner qu'ils
défendent ces piliers avec autant d'acharnement.
Dès le début de ces négociations, le gouvernement
du Québec s'est associé aux producteurs agricoles pour
élaborer une position pouvant assurer le développement de
l'agriculture
québécoise. Cette position a été
répétée à maintes reprises et il me fera plaisir de
la répéter de nouveau. La voici: le renforcement de l'article XI
du GATT afin de permettre l'application de la gestion de l'offre; la
classification des programmes d'assurance-stabilisation des revenus,
d'assurance-récolte, de crédit agricole dans la catégorie
des programmes verts, c'est-à-dire non sujette à la
réduction du budget ou à l'imposition des droits compensatoires.
C'est cette position que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation et le ministre du Commerce extérieur ont le mandat de
défendre. Et c'est ce qu'ils ont fait. D'ailleurs, cette position se
retrouve dans la proposition canadienne aux négociations du GATT.
M. le Président, les négociations du GATT sont
entrées dans une phase cruciale; plusieurs disent même dans une
phase terminale. Dans ces négociations, il n'y a pas que l'agriculture
qui est en cause. Malgré les différents intérêts qui
sont représentés dans ce débat, malgré tout ce que
l'on peut dire, la position du Québec demeure inchangée. Cela
démontre bien, M. le Président, la volonté du gouvernement
du Québec de défendre jusqu'à l'ultime limite de ses
moyens les intérêts des agriculteurs et agricultrices du
Québec.
M. le Président, le Québec souhaite que ces
négociations aboutissent. Il faut en arriver à un accord au GATT
afin de régulariser les relations commerciales internationales.
Rappelons que le Québec exporte près de 40 % de sa production
nationale brute. Il est également nécessaire qu'une entente
intervienne au GATT afin d'obtenir le renforcement de l'article XI. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Richard): Je cède la parole au
député d'Arthabaska, M. Baril.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. Je ne sais pas si le
député de Berthier s'est trouvé encouragé comme
ancien producteur de poulet ou d'oeufs... C'était le poulet, je
crois...
M. Houde: Les deux, oui.
M. Baril: ...les oeufs et le poulet. Je ne sais pas si le
député de Berthier s'est senti encouragé suite à la
déclaration du sous-ministre adjoint à l'Agriculture quand ce
dernier a dit que, si le rapport Dunkel était approuvé tel quel
ou signé tel quel... Et je le lis parce que c'est important. Je ne
voudrais pas qu'on pense que je dis n'importe quoi. On dit bien ici:
«L'industrie laitière subsisterait à long terme, mais il
devrait y avoir à court terme des ajustements importants». Pour ce
qui est des autres productions contingentées - il les nomme - dans le
poulet, le dindon et les oeufs, le sous-ministre ne pouvait être plus
clair: «elles seraient lavées». Ça vous a bien
encouragé d'entendre ça?
M. Houde: Le ministre m'a encouragé dans la
déclaration qu'il a faite tantôt.
M. Baril: Vous qui êtes dans une région où il
y a des producteurs dynamiques, justement, d'oeufs, de poulet, est-ce que ces
producteurs-là se sont sentis emballés, encouragés par une
telle déclaration? Cela a un impact économique de plus de 400 000
000 $ sur l'agriculture québécoise, et le sous-ministre qui est
responsable des affaires économiques - ce n'est pas le sous-ministre
responsable des affaires sociales, c'est des affaires économiques au
ministère de l'Agriculture - il vous a dit que vous seriez lavés.
Vous n'avez pas dit un mot. Je ne vous ai pas entendu. Si vous avez fait une
déclaration dans un journal ou quelque part, faites-la-moi parvenir.
J'aime toujours ça m'informer. Mais je ne vous ai pas entendu dire un
mot. Le ministre non plus. Ça m'a étonné davantage quand,
lors d'une question que je lui posais en Chambre, il a même
approuvé ce que son sous-ministre avait affirmé, que des
productions agricoles au Québec seraient lavées suite à
ça.
Je ne sais pas si c'est ça qui est une politique dé
motivation face aux agriculteurs. Il y a un bout du discours ou de la lecture
que le député de Berthier a fait qui était bon. C'est
correct. Je vous félicite d'encourager les producteurs, de dire que les
producteurs au Québec sont dynamiques et sont capables. Il s'agit de le
faire. Ça fait deux ans que le ministre est là et je ne l'ai
jamais entendu dire ça. Tout ce que je l'ai entendu dire, c'est de -
démobiliser plutôt les agriculteurs.
Sur ce que le ministre a dit tout à l'heure, quand il dit qu'on
continue à défendre toujours la même politique, qu'on
défend nos quatre piliers et qu'on est allés dans les autres pays
et qu'on leur a démontré l'importance et la
nécessité... J'ai déjà dit, M. le ministre, que,
pour être convaincant, il faut d'abord être convaincu. Je ne suis
pas sûr que les autres pays vous prennent au sérieux quand ils ont
pris connaissance de la déclaration, encore une fois, de votre
sous-ministre qui a dit: Peu importe ce qui arrive au GATT, on va appuyer le
gouvernement fédéral pareil. Je ne sais pas si ça
démontre qu'on est convaincu de la nécessité de nos
offices de commercialisation. Depuis un mois ou deux, n'importe qui au
Québec a charrié là-dessus, sur nos offices de
commercialisation. Je les ai nommés tout à l'heure. Ça m'a
étonné. D'habitude Alain Dubuc fouille plus ses affaires que
ça. C'est l'éditorialiste de La Presse, je pense, Alain
Dubuc. D'habitude il fouille plus ses affaires que ça. J'ai
été renversé de l'édito-rial - je ne dirai pas le
terme - qu'il a écrit en dénonçant les offices de
commercialisation au Québec. Jean-Robert Sansfaçon, du journal
Le
Devoir, un éditorialiste fou comme... Vous savez, M. le
ministre, le mot qu'on pourrait dire. Ça n'a pas de bon sens, un
éditorialiste... Comme si quelqu'un m'avait demandé, à
moi, d'écrire un article sur l'opération à coeur ouvert et
que j'avais dit: Je vais le faire. C'était aussi fou que ça,
comprenez-vous?
Quand Michel Gaucher, le président de Steinberg, a dit devant
l'Economie Club ou je ne sais pas quelle grosse association que ça
serait plus profitable à lui s'il achetait tous ses produits aux
États-Unis... Pour un gars qui est dans l'alimentation, c'est
inconcevable de dire des conneries semblables, comprenez-vous? Je n'ai jamais
entendu le ministre s'objecter à ça, dénoncer ces
personnes-là.
J'ai écrit un texte que j'ai envoyé à ces
mêmes journaux-là. Le titre, c'était: «Les
producteurs agricoles ne sont pas des profiteurs», parce que
c'était de ça qu'on les accusait. Mais ça n'a pas
passé. Je comprends que, pour un éditorialiste, recevoir un
article de journal et se faire reprendre par un agriculteur... Je crois bien
que je ne suis pas assez haut pour eux autres là, surtout qu'il y avait
eu du mépris pour ce monde-là. Mes articles n'ont pas
passé, ni dans Le Devoir, ni dans La Presse. J'aurais cru
que le ministre prendrait la défense des offices de commercialisation
s'il était au courant, s'il y croit et s'il est convaincu de la
nécessité, de l'importance de ces offices-là. Le ministre
n'a pas dit un mot. Je le répète: Si le ministre est convaincu de
tout ça, pourquoi il n'a pas défendu les agriculteurs et les
agricultrices? Pourquoi le ministre n'a pas dénoncé la
démarche ou les paroles irresponsables de son sous-ministre qui disait:
Des productions vont être lavées? Sur quoi - le ministre doit
savoir ça, c'est son sous-ministre - son sous-ministre s'est basé
pour dire qu'on n'est pas compétitifs dans ces productions-là et
qu'on serait lavés? J'aimerais ça que le ministre nous dise sur
quoi. (10 h 50)
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Arthabaska. M. le ministre.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, le député
d'Arthabaska se fâchera s'il veut, il sautera pardessus le parlement,
ça ne me dérange pas, mais je vais être obligé de le
rappeler un petit peu à la logique et de lui dire que c'est un
démagogue. Là, ce que le député d'Arthabaska est en
train d'essayer de faire, et il n'y a personne qui croit ça... Il n'y a
personne qui croit ça dans l'UPA, il n'y a personne qui croit ça
nulle part, y compris ceux qui nous entendent, et c'est peut-être pour
ça... Ce genre de charriage là fait en sorte, peut-être
bien, d'influencer des éditorialistes à écrire autre chose
et à aller dans l'autre sens, il ne rend justement pas service à
la classe agricole quand il tient ce genre de discours là. Il veut
savoir l'explication, je vais la lui donner. Je vais la lui donner
immédiatement. Quand on tente de faire croire que ces
déclarations-là viennent du sous-ministre, M. le
Président, on est démagogue, on est ignorant ou bien on essaie de
tromper la population. Le sous-ministre n'a rien fait d'autre que prendre le
rapport Dunkel et dire: Si Dunkel était appliqué comme ça,
ça serait ça que ça donnerait comme résultat.
Moi, je regrette, je n'embarquerai pas dans la philosophie qui veut
qu'on trompe les gens et qu'on leur conte des menteries et des broues. J'ai
connu ça sous d'autres paliers de gouvernement et il y en a même,
des menteurs, dans tous les gouvernements. Moi, je n'ai pas envie de me
comporter comme ça. Je n'ai pas envie de dire aux agriculteurs: Dunkel a
dit ça, mais dormez tranquilles parce que, si ça passe, ce n'est
pas si pire que ça. Ça, c'est parler des deux côtés
de la bouche en même temps, c'est se cracher dans le dos en même
temps et c'est cracher dans la face des agriculteurs.
Je dis que le rapport Dunkel, tel qu'écrit, je suis obligé
de vivre avec. Je ne l'ai pas nommé, Dunkel, moi; ce n'est pas un de mes
employés, Dunkel. Je n'ai pas nommé Dunkel. Dunkel, tel qu'il
écrit ses papiers, c'est mauvais pour l'agriculture et je pense qu'on a
le droit de le dire et mon sous-ministre a bien fait de le dire. À moins
que le député d'Arthabaska me dise, lui... Avec les tarifs
proposés par Dunkel, entre 61 % et 86 %, est-ce que le
député d'Arthabaska peut dire aux agriculteurs qu'ils sont en
sécurité? Il voudrait qu'on dise aux agriculteurs: Vous
êtes en sécurité! On ne dira pas aux agriculteurs: Vous
êtes en sécurité avec le papier de Dunkel. Ce n'est pas le
papier de Jean-Yves Lavoie qui est déposé, ce n'est pas le papier
d'Yvon Picotte, ce n'est pas le papier du député d'Arthabaska;
c'est le papier de Dunkel. On dit: Dunkel, tel qu'écrit, c'est mauvais,
ce n'est pas bon, et on le dit aux agriculteurs. On espère qu'en leur
disant ça ils vont encore travailler plus fort pour nous aider à
nous protéger. C'est ça que ça veut dire. Ça, c'est
la différence entre ça et les endormir.
Ce qu'est en train de faire le député d'Arthabaska - et il
ne rend pas service aux agriculteurs - il essaie de les endormir en disant que
c'est mon sous-ministre. Ne vous trompez pas, ce n'est pas mon sous-ministre
qui a dit ça. Mon sous-ministre a bien fait de dire: Né vous
endormez pas parce que Dunkel, ce n'est pas bon pour nous. On commente un
papier officiel, M. le Président, c'est ça qu'on fait. C'est un
papier officiel qui a été déposé. Ce n'est pas une
foire internationale, ces discussions-là, c'est mieux organisé
que le député d'Arthabaska le pense. Dunkel, c'est le
négociateur, il n'y a personne qui l'a changé, il dépose
un papier et on nous dit: Ne le prenez pas au sérieux et ne le commentez
pas! Je regrette, ce n'est pas le genre de langage que je vais tenir, moi,
devant la classe
agricole.
Moi, je suis un petit peu plus prudent et, avant de regarder mon
sous-ministre, vous allez regarder dans votre cour. Vous irez regarder ce que
dit Landry, vous regarderez ce qu'a dit votre chef pas plus tard qu'hier sur le
libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Lui,
il a dit qu'il faut être prudent, mais il faut que ça se signe.
Bien oui! Moi, savez-vous ce que je dis? J'espère que ça ne se
signera pas parce qu'on n'a pas assez de garanties que ça ne nous nuira
pas. Vous voulez savoir, moi, ce que je dis et ce que votre chef dit. Vous
allez commencer à regarder un peu dans votre cour, alentour, et vous
allez dire à des gars comme Landry et à des gars comme Parizeau
et à des gars comme bien d'autres dans votre entourage... Commencez par
convaincre ces gens-là, mais ne nous faites pas mentir sur ce que Dunkel
peut dire et sur ce qui est dangereux.
Je le répète: Dunkel est dangereux, il est inacceptable et
on dit aux agriculteurs: Méfiez-vous et faites toutes les pressions
qu'il faut. Et c'est pour ça que l'UPA est partie pour retourner en
Europe, même s'ils ne croyaient pas, à l'UPA, dans le temps, quand
on y est allés, que ça donnerait grand-chose. Ils n'y croyaient
pas, mais, trois semaines après, ils ont décidé de se
payer un voyage pour y aller, alors que, s'ils avaient embarqué dans
l'avion gouvernemental avec nous, ils auraient au moins sauvé ça
à l'Union des producteurs agricoles. Mais, ce n'est pas grave, parce
qu'ils font leur devoir et, eux aussi, ils sont sûrs que Dunkel, c'est
dangereux.
Mais je ne dirai, M. le Président, à personne que c'est
mon sous-ministre qui trouve ça dangereux. Mon sous-ministre, il dit:
C'est dangereux, Dunkel. Moi, je n'ai pas la prétention de vouloir
fourrer les agriculteurs et de leur mentir en pleine face et de les endormir.
Je ne les endormirai pas non plus. Dunkel, il est inacceptable et je dis
à mon sous-ministre: Continuez de dire que c'est inacceptable. Continuez
de faire en sorte que les forces vives du milieu, les gens qui sont dans la
volaille, les gens qui sont dans les oeufs, dans les produits laitiers, les
agriculteurs, le gouvernement du Québec, la coalition et le gouvernement
fédéral défendent avec acharnement cette
position-là.
Alors, ne dévions pas la discussion, M. le Président. Moi,
je ne suis pas un de ceux qui vont faire dévier la discussion sur mon
sous-ministre pour qu'on oublie que Dunkel est en train de préparer
quelque chose qui pourrait nous faire mal. Alors, moi, je ne veux pas faire
d'électoralisme avec ça. Peut-être qu'eux autres pensent
qu'en faisant dévier la discussion sur le sous-ministre, M. le
Président... Ils seraient peut-être heureux, eux autres, si
ça passait, l'affaire Dunkel, de dire qu'on n'a pas défendu...
pour vouloir prendre le pouvoir.
Moi, M. le Président, je ne ferai pas ce genre de discussion
là et libre à ceux qui veulent le faire, mais vous ne me
charrierez pas en me disant que c'est mon sous-ministre qui fait des
déclarations quand, nous autres, on prend le papier de Dunkel, on
l'analyse et on le rend public. Il est public, ce papier-là! Et, au cas
où les gens n'auraient pas vu tout ce qu'il y avait de mauvais et de
méchant là-dedans, on va le dire et il n'y a personne qui va nous
empêcher de le dire. M. le Président, c'est mauvais, le papier de
Dunkel, et il ne faut pas que ça nous arrive parce que, si ça
nous arrive tel quel, c'est dangereux pour l'agriculture. «C'est-u»
assez clair là? Ce n'est pas mon sous-ministre que je défends et
ce n'est pas Dunkel. J'essaie de planter Dunkel pour que tout le monde se
réveille pour tâcher de faire en sorte que ça
fonctionne.
Donc, M. le Président, moi, je n'embarquerai pas dans du
charriage inutile et j'espère que cette mise au point là est
assez claire. Si jamais il prétend que ce n'est pas assez clair, il a
juste à prendre ma déclaration, à la relire et il va
trouver si c'est clair ce qu'on défend ou ce qu'on ne défend
pas.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je
cède la parole à M. le député de d'Iberville. M.
Lafrance, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.
M. Yvon Lafrance
M. Lafrance: Merci, M. le Président. M. le
Président, au cours des derniers mois, j'ai eu l'occasion de converser,
à plusieurs reprises, avec des agriculteurs et des agricultrices du
comté d'Iberville à propos des négociations du GATT. Bien
sûr, ceux-ci m'ont fait part de leurs inquiétudes, mais ils m'ont
aussi communiqué leur satisfaction vis-à-vis de la position qu'a
adoptée le gouvernement du Québec dans ce dossier. Ils se
montrent satisfaits des actions posées par le ministre de l'Agriculture,
M. Yvon Picotte, et le ministre des Affaires internationales, M. John Ciaccia,
pour la défense des intérêts des agriculteurs.
Nous sommes forcés d'admettre, M. le Président, que le
gouvernement du Québec n'a pas ménagé ses efforts pour
faire valoir son point de vue dans ces négociations. Dans un premier
temps, j'aimerais souligner la collaboration constante du ministère de
l'Agriculture avec le ministère des Affaires internationales à
travers un groupe de coordination et un comité technique
interministériel. Cette collaboration entre ces ministères est
essentielle afin d'assurer une bonne défense des intérêts
québécois, comme vient de le mentionner M. le ministre de
l'Agriculture. D'ailleurs, cette approche de collaboration s'est aussi
prolongée au niveau des intervenants agricoles québécois.
Dès le début, l'UPA et la Coopérative
fédérée de Québec ont été
consultées pour définir la position québécoise
dans ce dossier. Dès le départ, notre gouvernement a
cherché à regrouper les intervenants et à
développer une position qui serait acceptée et défendue
par tous, conscient que l'union serait notre force.
Quand j'ai dit que le Québec n'a pas ménagé ses
efforts, M. le Président, pour protéger les intérêts
des agriculteurs, je n'exagère pas. Premièrement, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et celui, aussi, des
Affaires internationales ont été autorisés à
participer aux réunions fédérales-provinciales de leur
secteur respectif lorsque le GATT était à l'ordre du jour. On
sait que ces conférences représentent un moyen
privilégié de faire valoir notre position et c'est ce que les
ministres ont fait.
Dans le contexte constitutionnel actuel et vu la position adoptée
par le gouvernement du Québec vis-à-vis sa participation à
ces conférences, le fait que les ministres de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation et des Affaires internationales assistent
à ces conférences démontre, hors de tout doute, que le
gouvernement du Québec a fait de la défense des
intérêts de son industrie agro-alimentaire une
prioriété de plus haut niveau. (11 heures)
Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
et député de Maskinongé m'a fait part, ce matin, que son
premier geste comme titulaire de ce ministère fut d'écrire
à son homologue fédéral pour réitérer la
position québécoise. Ce fut le premier geste posé par M.
le ministre et, depuis lors, le dialogue n'a cessé. De plus, le ministre
a participé à deux missions à l'étranger, comme on
vient de le mentionner, toujours pour suivre l'évolution des discussions
et s'assurer que les intérêts du Québec étaient bien
défendus. Ainsi, en décembre 1990, en compagnie du ministre des
Affaires internationales, le ministre de l'Agriculture s'est rendu à
Bruxelles lors d'une ronde intensive de négociations. Tout
dernièrement, le ministre de l'Agriculture s'est rendu en Europe avec
une délégation formée de ministres fédéraux
et de représentants canadiens de l'agriculture. Ce voyage aura permis au
ministre de rencontrer des représentants de la Communauté
économique européenne, de l'Allemagne, de la Suisse, du Japon,
des États-Unis, de l'Australie, d'Israël et de quelques autres
pays.
Parmi les gestes posés par notre gouvernement, M. le
Président, pour défendre la position du Québec, il faut
souligner la création d'une coalition du ministère de
l'Agriculture, du ministère des Affaires internationales, avec l'UPA et
la Coopérative fédérée. Se sont aussi
ajoutés à ce groupe des intervenants comme le Mouvement
Desjardins et l'Université Laval, un geste, vous en conviendrez, en
conclusion, M. le Président, qui voulait démontrer la
volonté du gouvernement du Québec de défendre ces quatre
piliers de la politique agricole québécoise.
M. le Président, je réalise que mon temps est
terminé et j'aimerais conclure en disant que j'ai senti, moi, que les
agriculteurs de la circonscription électorale d'ibervllle, que j'ai
l'honneur de représenter ici, à l'Assemblée nationale,
étaient satisfaits de la façon dont leurs intérêts
ont été défendus dans ce dossier. L'avenir nous dira si
ces efforts seront récompensés à 100 %, à 80 % ou
à 60 %. Mais chacun sait que nous défendons notre position
jusqu'à l'extrême limite. Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Iberville. Je cède la parole maintenant à
M. le député d'Arthabaska, M. Baril.
M. Jacques Baril
M. Baril: D'abord, je vais juste souligner au début, au
départ, au ministre que tout à l'heure... Ça fait deux,
trois fois qu'il me dit: Je connais le député d'Arthabaska et il
va sauter par-dessus les brancards, sauter par-dessus le parc ou je ne sais pas
trop ce qu'il va faire de mes propos, mais là je constate, M. le
Président, qu'il faudrait que je relance la même chose au ministre
parce que, moi, je n'ai encore rien sauté. Il me semble que je me trouve
bien calme ce matin comprends-tu? Oui, oui, ce matin, je le dis, je me suis
conditionné. Mais, là, ça fait une couple de fois qu'il
passe, qu'il manque de sauter par-dessus son bureau, comprends-tu? Alors, il
faudrait regarder un peu où sont les malaises ce matin, hein?
Tout à l'heure, le ministre a mentionné aussi que le chef
du Parti québécois a fait une déclaration hier ou
avant-hier, je ne sais pas trop, hier, à l'effet que le
libre-échange avec le Mexique, oui, il faut y aller à tout prix
et toutes sortes d'affaires de même. On va faire une petite nuance.
Là, il a parlé de Bernard Landry, j'y reviendrai tout à
l'heure. Mais, au niveau de M. Parizeau, il a dit: Oui au libre-échange
à trois, c'est inévitable, hein? Mais il ne doit pas se faire
n'importe comment comme, vous autres, vous avez fait dans le
libre-échange avec les États-Unis.
Il y avait des conditions qui se rattachaient à ça, le
traité de libre-échange avec les États-Unis, comprends-tu?
Ça fait trois ans qu'il s'applique. Vous n'avez rien fait, autant vous
autres que le gouvernement fédéral n'a rien fait, comprends-tu?,
pour répondre, pour appliquer ces conditions-là. Au niveau du
Canada, on est rendu à 400 000 emplois perdus à cause de ce
traité avec les États-Unis qui est mal appliqué. Gordon
Ritchie, l'un des négociateurs de ce traité de
libre-échange, l'a dit lui-même que ce traité a
été mal préparé et non seulement a
été mal préparé, mais maintenant il est mal
appliqué parce qu'il n'est pas appliqué pantoute.
Qu'est-ce que votre gouvernement fait pour
rappeler le fédéral à l'ordre et l'appliquer? Il y
avait des conditions qui se rattachaient à ça et les conditions,
M. Parizeau aussi les rattache au traité de libre-échange avec le
Mexique. Il dit: améliorer notre capacité à exporter.
Mais, pour cela, il faut d'abord répondre à plusieurs exigences,
énumère-t-il: une éducation de qualité, une
réforme complète de la formation professionnelle - c'en
était une condition, ça, dans le traité de
libre-échange avec les États-Unis - l'introduction de nouvelles
technologies dans les entreprises - c'en était une autre condition,
ça, dans le traité de libre-échange avec les
États-Unis pour qu'on devienne concurrentiels pour qu'il soit au moins
profitable pour nous autres - accent sur la pénétration des
marchés étrangers, innovation, capitalisation satisfaisante des
entreprises. C'en est des conditions, ça, qui n'ont pas
été respectées. Je n'ai jamais vu personne de votre
gouvernement dénoncer l'inertie du gouvernement fédéral
dans l'application du traité de libre-échange.
Je comprends un peu cette inertie de votre gouvernement quand votre
chef, lors du discours inaugural, s'est pratiquement sacré à
genoux devant le gouvernement fédéral, l'implorant de nous faire
des offres, qu'il voulait rentrer dans la Constitution à tout prix.
Ça fait qu'imaginez-vous, là, il ne faut pas faire de bruit, il
ne faut rien faire. On est en train de sacrifier l'économie
québécoise pour qu'on nous réinclue dans cet ordre
constitutionnel qui a toujours désavantagé le Québec.
Ça fait qu'avant de dire que M. Parizeau conduit le parti ou conduit le
gouvernement dans n'importe quelle affaire avec le traité de
libre-échange avec les États-Unis, je me charge, M. le ministre,
de vous rappeler ces conditions-là qui sont essentielles à une
négociation et à la survie de l'économie
québécoise dans un traité de libre-échange à
trois.
Je reviens quand même sur la déclaration irresponsable,
vous me permettrez de le dire, là... Qu'il me dise que je suis
démagogue ou n'importe quoi, je considère que c'est une
déclaration irresponsable de son sous-ministre que d'envoyer ça
de même en l'air, qu'il y a trois productions, au Québec, qui vont
être lavées. Moi, je ne le crois pas. Je vous ai demandé
tout à l'heure sur quels chiffres II s'était basé pour
dire ça, qu'elles vont être lavées, ces
productions-là. Sur quoi il s'est basé pour dire ça?
Est-ce que le ministre a pris connaissance, d'abord, du coût de
production, au Québec et aux États-Unis, au niveau du poulet? Si
on regarde entre 1971 et 1975, il y avait un écart de 0,54 $ le kilo
entre le coût de production américain et ici. Aujourd'hui, on
retrouve un écart seulement de 0,17 $ le kilo. Est-ce que le ministre a
pris connaissance d'une autre étude qui vient d'être
publiée? Moi, par cette étude-là, M. le Président,
j'ai été renversé de connaître combien l'agriculture
américaine est subventionnée à tour de bras, hein!
À tour de bras! C'est une étude du gouver- nement
fédéral; donc, le ministre, lui qui est
fédéraliste, il ne peut pas nier ça, c'est une
étude du gouvernement fédéral. Ils ont
étudié dans 7 États américains seulement et ils ont
relevé plus de 9 000 000 000 $ de subventions. Dans 7 États
seulement, 9 000 000 000 $ de subventions à l'agriculture et à la
transformation. Comment son sous-ministre peut-il arriver et dire... Est-ce
qu'il en a pris connaissance de cette étude-là, lui: comment
est-ce qu'elle est subventionnée, l'agriculture américaine, pour
dire à nos producteurs: On n'est pas productifs et on va être
lavés? Est-ce qu'il a pris connaissance de cette étude?
Là, sans parler de la qualité des produits. Le ministre le
sait, au Québec, on a les normes de qualité et de
salubrité les meilleures en Amérique du Nord. Nos producteurs se
sont habitués à produire des produits, des aliments de
qualité, comprends-tu? et ça coûte quelque chose, la
qualité. Les Québécois et les Québécoises
courent de plus en plus après cette qualité-là, et le
ministre n'est pas sans savoir... On me dit que le poulet américain est
rempli de salmonellose. Nous autres ici, au Québec, si tu trouves une
poule ou un poulet dans un poulailler qui a la salmonellose, on va faire
brûler le poulailler, comprends-tu? C'est des pertes, ça, pour les
producteurs. Là-bas, ils ne se préoccupent même pas de
ça. Aux États-Unis, on engraisse encore tant la volaille que le
boeuf avec des hormones de croissance. C'est défendu ici, au
Québec. C'est des coûts supplémentaires, ça, au
niveau du producteur agricole. Est-ce que le ministre sait que, dans l'entente
du libre-échange, justement, le gouvernement du Canada, s'il se tient
debout, il est capable d'imposer des droits compensateurs si les produits qui
viennent de l'étranger ne sont pas conformes à nos normes de
qualité?
C'est ça que je dis: Comment se fait-il que son sous-ministre,
d'une façon irresponsable, dise aux producteurs de poule, de dindon et
d'oeufs: Vous allez être lavés, c'est fini pour vous autres?
J'aimerais ça savoir si le ministre connaissait ou s'il a
rencontré - ou le député de Berthier - des producteurs de
poulet dans ces catégories-là qui détiennent des quotas.
J'en connais des jeunes, moi, qui, suite à cette déclaration,
sont désarmés. Ils sont poignes avec leurs quotas, Ils ont des
Investissements à faire, ils sont productifs, ils veulent vivre de leur
production. Là, ils disent: Qu'est-ce qu'on va faire?
«C'est-u» vrai, M. Baril, qu'on va être lavés
là-dedans? (11 h 10)
Contrairement à ce que le ministre dit, je les mobilise, les
agriculteurs et les agricultrices. Je leur dis: On a fait face à
d'autres défis, on est capables de faire face à ce
défi-là. Quand je leur parie d'études américaines -
je ne charrie pas, là - d'études canadiennes qui ont
été faites sur l'agriculture américaine, les gens sont
étonnés, ils sont étonnés de voir comment
l'agriculture américaine est supportée, puis, ici, au
Québec, il y en a encore qui prêchent pour dire que l'agriculture
québécoise est trop subventionnée, puis que les
producteurs, ça n'a pas de bon sens. Est-ce que le ministre sait qu'au
niveau du yogourt un paquet de yogourt coûte 0,99 $, puis, dans ce
même contenant de yogourt, il y a seulement 0,08 $ de yogourt? Le reste,
c'est pour la mise en marché, le contenant, etc. Une boîte de
fèves, une boîte de bines, entre nous autres, qui se vend 0,71 $,
est-ce que le ministre sait qu'il y a seulement pour 0,6 $ de bines dedans? Ce
n'est pas le producteur qui ramasse la balance. C'est tout le reste de la
chaîne qui la ramasse. Qu'est-ce que ça coûte au
consommateur, hein?
Au niveau de son progamme Lait-école, j'ai été
étonné... D'abord, c'est son sous-ministre qui a annoncé
l'abolition du programme. Ça coûtait 13 000 000 $ et, quelque
chose. Il y avait pour 4 000 000 $ de contenu; ça coûtait 4 000
000 $ de lait, l'achat du lait comme tel. Le reste, c'était le
contenant, puis la livraison, la distribution et je ne sais pas quoi. On vient
encore dire que c'est à cause que le lait est trop cher. Le lait est
trop cher et c'est pour ça qu'il faut couper le programme.
Une voix: Franchement!
M. Baril: II n'y a pas de franchement! C'est ça, les
chiffres. Le ministre me dénoncera, il me dira si ce n'est pas vrai.
L'achat du lait était de 4 000 000 $. Je pourrais la sortir, c'est la
déclaration de son sous-ministre, à moins qu'il se soit
trompé une autre fois. Le coût total du programme était de
13 000 000 $ et quelque. Est-ce que le ministre est informé aussi que,
sur un achat alimentaire de 100 $... Quelqu'un qui achète pour 100 $
d'alimentation, il y a seulement 2,36 $ qui vient au producteur agricole. Il y
a 51,76 % qui vont aux grossistes détaillants comme Michel Gaucher qui
dit que c'est les producteurs agricoles qui lui coûtent trop cher. Il y a
52 % juste pour lui. Qu'il commence donc par regarder dans sa cour combien il
se prend de marge pour vendre ces produits.
C'est ça que je me demande, comment ça se fait que le
ministre n'ait pas tout dénoncé ces choses-là. Il pourrait
en relever des affaires de Sansfaçon puis d'Alain Dubuc. C'est le
même langage qu'ils tenaient. Comment ça se fait que, si le
ministre croit aux offices de commercialisation, s'il croit et il dit qu'il est
convaincu ou s'il veut aller convaincre les autres que nos offices de
commercialisation, c'est bon pour nous autres puis on veut les conserver, il
n'ait pas dénoncé ça? Les producteurs agricoles sont
menacés de partout. Celui qui serait là pour les défendre,
il ne parle pas, il ne dit rien. «Qui ne dit mot consent.»
Ça fait plus d'un mois, un mois et demi, entre autres, que je
dénonce ces choses-là, partout où je vais. J'encourage le
producteur agricole. Je ne dis pas: Tu es un pas bon. Quand tu sors ces
chiffres-là, les producteurs agricoles, eux autres mêmes, ils sont
étonnés de ce qu'ils produisent à bon marché. Mais
c'est le reste de la chaîne qui est chère, qui est
dispendieuse.
Je vais répéter ma question, c'est la troisième
fois: Sur quoi son sous-ministre s'est-il basé pour dire que les
productions de volaille, d'oeufs et de dindon seraient lavées au
Québec, suite au pire scénario du rapport Dunkel? Sur quoi
s'est-il basé? Est-ce qu'il a tenu compte des chiffres que je viens de
lui donner? Est-ce qu'il a tenu compte des études américaines?
Est-ce qu'il a tenu compte qu'il n'y a pas juste le producteur? Imaginez-vous,
2,36 $ qui revient au producteur, puis on dit: C'est encore toi qu'il va
falloir baisser, parce que le consommateur paie plus cher. C'est parce que
c'est toi qui coûte trop cher: 2,36 $! Il y en a pour 98 $, 97 $ et
quelque chose à compresser ailleurs. Mais, eux autres, ils sont toujours
au bout de la chaîne. On n'en parle jamais. Comment se fait-il que le
ministre n'ait pas dénoncé ça? Où son sous-ministre
a-t-il pris les chiffres? Comment a-t-il fait pour arriver au résultat
qu'il a annoncé?
Après ça, on reviendra sur le libre-échange, juste
au niveau de Bernard Landry. Si le ministre ne croit pas Bernard Landry tant
que ça, pourquoi est-ce que c'est lui-même ou son ministère
qui l'engage pour donner des conférences? L'autre jour, il m'a repris
ici quand Bernard Landry a passé à Trois-Rivières. C'est
son propre ministère qui l'avait engagé, il l'a payé pour
aller donner une conférence. Le discours que Bernard Landry tient au
niveau du libre-échange, M. le ministre, il faudrait quand même le
regarder Bernard Landry, il défend le libre-échange comme si
c'était lui qui l'avait assigné, puis comme si c'était lui
qui l'appliquait maintenant.
Je n'ai rien contre le libre-échange. Je l'ai dit, puis je le
répète. C'est contre son application. C'est contre son
application du traité de libre-échange. C'est là que
ça fait problème. D'ailleurs, 73 % des manufacturiers, des
entreprises, des entrepreneurs canadiens, eux autres mêmes,
dénoncent actuellement, sont insatisfaits du traité de
libre-échange. Au niveau du libre-échange, je défends la
population que je représente. J'ai été élu pour
ça et je le fais. Je ne suis peut-être pas un économiste,
mais je suis un agriculteur qui voit clair et j'ai déjà
additionné, moi aussi, une colonne de chiffres. Quand tu
t'aperçois que tu as 400 000 emplois de perdus à cause de ce
traité-là, il y a un problème à quelque part. Au
lieu de continuer à dire: II faut signer n'importe quoi, n'importe
comment, n'importe où, il y a des applications qui se font quelque part
et c'est là la sévérité du gouvernement d'Ottawa
qui n'applique pas ce traité tel qu'il a été fait et la
faiblesse du gouvernement du Québec de ne pas exiger du gouvernement
fédéral l'application de ce traité.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Arthabaska. M. le ministre, vous savez que je suis un
petit peu élastique sur le temps. On composera en finale, si vous n'avez
pas d'objection.
M. Picotte: J'ai cru remarquer ça, M. le
Président.
M. Baril: C'est parce que j'attendais qu'on me signale 30
secondes, mais je ne l'ai pas vu.
M. Picotte: Ah! Ça fait trois minutes et demie qu'il vous
a signalé 30 secondes.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Richard): II n'y a aucun problème.
Ça va.
M. Baril: J'étais emballé.
Le Président (M. Richard): Alors, M. le ministre, en
réplique.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, je pense que ce qu'a dit le
député d'Arthabaska, quand il dit que mon ministère a
engagé Bernard Landry, ça démontre, d'abord, la
non-partisanerie de celui qui vous parle. Et c'est ce que j'ai cru dire au
député d'Arthabaska. Il ne l'a peut-être pas compris la
fois de la réponse à sa question, mais je vais le lui
répéter. Ce qu'on dit, nous autres, Bernard Landry dit la
même chose. Bernard Landry dit la même affaire que nous autres et
Jacques Proulx dit la même affaire que nous autres. C'est ça que
j'ai tenté de lui montrer, l'autre fois, et il dit: Qu'est-ce que vous
avez contre Bernard Landry? Au contraire, j'ai dit: Lui, qu'est-ce qu'il a
contre Bernard Landry pour dire des choses contraires à ce que Landry
dit? Ça fait que c'est ça, là. Je pense qu'il y a un petit
bout qu'il n'a pas compris, qu'il serait mieux de relire. Bernard Landry, le
ministre de l'Agriculture, le sous-ministre de l'Agriculture, le sous-ministre
adjoint et Jacques Proulx ont dit essentiellement la même chose, et j'ai
lu les documents en Chambre. Lui, il me dit: Qu'est-ce que vous avez contre
Bernard Landry? C'est vous! Qu'est-ce que vous avez contre Bernard Landry? Vous
nous dites des choses, ce matin, qui vont à rencontre de ce que, nous,
on dit tous les trois. Voyons donc! Franchement! Je sais que vous savez
additionner des colonnes de chiffres, que vous savez lire, mais relisez comme
il faut. C'est ça qu'on a tenté de vous dire. On défend la
même chose, M. le Président.
Maintenant, pour vous démontrer le non-sérieux du
député d'Arthabaska quand il me parle du lait et des produits...
On sait tout ça, voyons donc. Qui ne sait pas que le lait coûte un
prix et que le contenant coûte tel autre prix, puis que les bines, il y
en a rien que pour 0,06 $ dans un pot de bines? M. le Président, je ne
vois pas le député d'Arthabaska se promener avec ses bines dans
ses poches et son lait dans sa cravate, hein! On n'est toujours bien pas pour
amener les vaches dans ia cour de l'école pour tâcher de faire
boire les enfants après les vaches. Voyons donc, M. le Président!
Vous voyez le non-sérieux de ça. C'est comme si on était
obligés, nous autres, quand on paie, de dissocier le lait et de dire: On
va l'envoyer comment? Bien, oui. On vous dit: Ça nous coûte 13 000
000 $ pour faire boire les enfants à l'école. C'est bien
sûr que du lait, M. le Président, il faut que ça se mette
dans un contenant. Ils ne peuvent pas partir avec ça dans les petites
poches d'habit, et les bines non plus. Voyons donc! Qu'est-ce que c'est, cette
discussion-là? Vous voyez jusqu'à quel point on peut être
complètement de travers.
M. le Président, ce qui manque au député
d'Arthabaska, c'est de la mémoire. J'ai l'ai dit - allez relire, je suis
prêt à suspendre les débats pour qu'on regarde ça,
vous lirez mes 10 premières minutes: On ne pourra pas rivaliser à
cause des milliards que mettent les États-Unis et la Communauté
européenne dans l'agriculture. Il dit: Est-ce que le ministre sait, M.
le Président, qu'il y a des milliards? C'est son étude, chez lui.
C'est ce que j'ai dit avant qu'il ne parle, avant qu'il ne pose la question.
Bien, coudon, vous n'avez pas de mémoire ou vous n'écoutez pas ce
qu'on dit. On n'est pas capables de rivaliser avec les milliards que ces pays
mettent là-dedans. C'est pour ça qu'il faut qu'il s'y mette de
l'ordre, M. le Président. Il me demande si je sais ça.
Imaginez-vous! Quelle philosophie!
M. le Président, le député d'Arthabaska, non
seulement il n'a pas de mémoire sur ce qui vient d'être dit, mais
il n'a même pas de mémoire... Il me parle du libre-échange,
que c'est épouvantable, ce qu'on a fait et ce qu'on n'a pas fait, M. le
Président. Il a donc bien la mémoire courte, le
député d'Arthabaska. Qu'est-ce qu'il a contre les producteurs de
porc du Québec, lui, le député d'Arthabaska? Oui, oui, le
porc. Farce à part, là, où étiez-vous quand on a
défendu les producteurs de porc et qu'on est allés avec eux pour
les défendre quand on a voulu imposer un tarif avec le
libre-échange? Où étiez-vous, vous? Le gouvernement du
Québec n'a rien fait? Il est allé protéger et on a fait
appliquer le libre-échange, M. le Président. C'est nous autres
qui avons soutenu ça, et ce sont les producteurs qui se sont
défendus.
Vous me parliez de l'industrie des pâtes et papiers dans ce
temps-là. Tenez-vous-en donc à votre domaine, c'est
déjà en masse. Bien non. On ignore que le gouvernement du
Québec a fait quelque chose pour les producteurs de porc et qu'on a
gagné. On oublie de dire aussi qu'on a gagné, parce que,
là, ce serait féliciter du monde qui a fait du travail, mais
sautons sur quelque
chose qui n'est pas encore réalisé. Pourquoi il ne nous
dit pas qu'on travaille dans l'histoire du lait UHT, puis que c'est
peut-être l'histoire du libre-échange qui va faire qu'on va gagner
ça pour tâcher de continuer d'en vendre? Pourquoi il ne nous
félicite pas pour le travail qu'on fait? Bien non, il dit: Vous ne
faites rien, vous n'êtes pas là. (11 h 20)
C'est par ces affirmations gratuites là du député
d'Arthabaska qu'il est irresponsable. Soit qu'il manque de mémoire ou
qu'il le fait sciemment pour sa cause politique. Donc, manquer de
mémoire, ce n'est pas grave, parce que ça m'est arrivé,
à moi aussi, et je ne veux pas lui reprocher, mais, s'il le fait pour
une cause politique, M. le Président, c'est indécent de ne pas se
rappeler ça sous prétexte que, nous autres, on veut aller gagner
des votes. C'est indécent.
Alors, où se base mon sous-ministre, M. le Président? Je
vais prendre quelques secondes de plus. Moi aussi, je n'ai pas vu les 30
secondes qu'on vient de me mentionner. Sur quoi se base mon sous-ministre, M.
le Président, pour faire ça? Ce n'est pas bien compliqué,
M. le Président. Quand on regarde ce que Dunkel propose dans le poulet,
le prix intérieur du poulet en 1992 est de 2,40 $. Le poulet, on parle
d'un tarif de 85,8 %. En 1993, ce serait 2,64 $, prix à la
frontière, puis en 1998, au bout de cinq ans, ce serait 2,46 $.
Voyez-vous qu'entre 1992 et 1998 - parce qu'il faut regarder l'avenir, on ne
regarde pas rien que pour l'année prochaine, puis au bout de notre nez -
le prix à la frontière serait à peu près identique
au prix intérieur chez nous? Pensez-vous que le consommateur fait
beaucoup de différence quand il achète un poulet? Pensez-vous que
la salmonellose... C'est vrai qu'on a les plus beaux services de
qualité. Oui, c'est vrai, puis on est heureux de ça. Est-ce que
le député d'Arthabaska me demande de diminuer sur la
qualité, puis de laisser courir la salmonellose dans les poulets pour
tâcher d'être concurrentiels? C'est ça qu'il me demande?
M. Baril: Ce n'est pas ça que je demande.
M. Picotte: bien non, si ce n'est pas ça, suivez donc les
chiffres comme il faut, parce que, avec les chiffres de 1985, la
différence du prix n'est tellement pas énorme entre les
années qu'on risque d'être anéantis. c'est ça que
ça veut dire. si mon sous-ministre le mentionne et que ça oblige
les pays à monter le tarif à 300 % et 400 %, c'est là que
ça va nous donner une chance. dans le lait, si c'était un petit
peu moins dangereux, m. le président... c'est parce qu'il y a des tarifs
dans le beurre de 292 %, dans la poudre de lait, 192 % et dans le fromage
cheddar, 242 %. si mon sous-ministre a pu réveiller du monde pour qu'il
passe le tarif, qui est à 65 % dans le dindon, à 61 % dans les
oeufs de consommation et à 85 % dans le poulet, à 300%, ça
va juste nous garantir de façon additionnelle. C'est là-dessus
qu'on se base, M. le Président.
Le député d'Arthabaska ne m'apprend rien quand il me dit
que les Américains et la CEE mettent des milliards là-dedans.
C'est ce que j'ai dit dans les premières minutes de mon discours. Donc,
qu'il ne s'imagine pas qu'aujourd'hui il m'invente quelque chose. Il n'a rien
inventé non plus pour mon sous-ministre. Ce qu'on dit ici, c'est que les
tarifs de Dunkel dans le poulet, dans le dindon, puis dans les oeufs, en bas de
100 %, c'est nous mener dans des conditions où on ne sera pas capables
de concurrencer. Qu'on les monte au moins à 292 % comme on le fait dans
le beurre et à 242 % comme on le fait dans le cheddar pour nous
protéger davantage. Si la discussion de mon sous-ministre apporte
ça, de remonter les tarifs, ça va être déjà
pas si pire si jamais la négociation aboutit là. C'est juste
ça qu'on dit, M. le Président.
Ne vous en faites pas, je vous le dis et je vous le
répète: Amenez toutes les subtilités que vous voudrez, ce
que dit Bernard Landry, ce que dit le président de l'UPA et ce que nous
disons, c'est la même affaire et on défend les mêmes choses.
Ça fait qu'on n'a rien contre eux autres. Il n'y a qu'une affaire
cependant, c'est qu'on aimerait que ceux qui sont leurs propres
collègues s'ajustent au même discours aussi de temps en temps. Ce
ne serait pas méchant, ça non plus. Ça aurait l'air
peut-être un petit peu moins disparate. C'est le moins qu'on puisse dire.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je
cède la parole à Mme la députée de Bellechasse, Mme
Bégin.
Mme Louise Bégin
Mme Bégin: Merci, M. le Président. On assiste
à une certaine psychose du GATT dans nos régions rurales du
Québec. Bien sûr, les agriculteurs sont inquiets, principalement
les producteurs visés par la gestion de l'offre. Ceux-ci se demandent ce
qu'il va leur arriver, quelle sera la valeur de leur investissement si
l'entente du GATT ne rencontre pas leurs ententes? Quelle sera la valeur de
leurs quotas? Leur entreprise sera-t-elle compétitive?
Cette crainte, M. le Président, n'est pas unique aux producteurs
québécois et canadiens; elle est aussi partagée par les
producteurs européens, comme en font foi les nombreuses
démonstrations d'agriculteurs tenues dans les pays de la CEE. Tout comme
nous, les producteurs européens tiennent à ce qu'une entente
intervienne au GATT afin de clarifier des situations laissant planer des
incertitudes quant à certaines productions. Ici au Québec, la
conclusion d'un accord du GATT est essentielle afin d'empêcher
l'introduction du yogourt et de la
crème glacée importés. L'arrivée de ces
produits sur les tablettes de nos supermarchés ainsi que la
possibilité que l'on s'attaque également au marché du
fromage rend dangereux pour l'industrie laitière le maintien du statu
quo.
On se souvient qu'un panel du GATT a décidé que l'article
XI, permettant d'imposer des quotas d'importation lorsqu'un pays pratique une
gestion de l'offre, ne s'applique pas aux produits frais ne faisant l'objet que
de peu de transformation. Pour mon comté, la conclusion des discussions
du GATT pourrait permettre au groupe Lactel de reprendre les exportations de
lait UHT à Porto Rico. On sait que Porto Rico invoque les facteurs
sanitaires pour empêcher notre lait d'entrer sur leur marché.
Vous savez également, M. le Président, que le
développement de notre entreprise porcine est largement tributaire de
ces exportations. La viande de porc produite et transformée au
Québec jouit d'une excellente réputation sur les marchés
internationaux. Nos producteurs et nos transformateurs sont capables de
rivaliser au niveau de la qualité et du prix sur ces marchés. On
a toute fraîche à la mémoire l'imposition par les
États-Unis d'un droit compensateur à l'entrée dans ce pays
de la viande de porc en provenance du Canada ainsi que la victoire, comme le
mentionnait M. le ministre tantôt, que nos producteurs ont
enregistrée dans ce domaine. Un accord du GATT permettrait de mieux
définir les règles du jeu et empêcherait l'imposition de
droits compensateurs à tort et à travers.
Il y a également le secteur des céréales qui
bénéficierait de l'arrêt de la guerre des subventions que
se livrent la CEE et les États-Unis. Cette guerre de prix a fait baisser
les prix à un niveau jamais vu, entraînant le compte de
stabilisation du revenu de cette production vers un déficit sans
précédent.
Le statu quo pourrait donc être néfaste autant pour les
producteurs de lait, de céréales ou de porc. Les producteurs
européens comme les producteurs québécois tiennent
à la protection de leurs revenus. Cet élément se traduit
au Québec par la position adoptée par notre gouvernement
vis-à-vis de la protection des quatre piliers de développement de
l'agriculture québécoise. Chaque pays a son ou ses piliers.
Chacun cherche à les préserver dans une négociation. C'est
tout à fait légitime. Mais, devant ces incertitudes qui, pour un
bon nombre, se transforment en inquiétudes, il faut éviter
d'entretenir un pessimisme que je qualifierais d'inacceptable.
Il faut relever le défi de la compétitivité. Dans
un contexte d'incertitude, il faut se préparer au pire et, si le pire ne
se réalise pas, alors c'est tant mieux, car, le cas
échéant, on dispose d'un coussin, d'une marge de manoeuvre. Peu
importe ce qui se passera au GATT, l'agriculture au Québec a toujours
existé et existera toujours. Les agriculteurs québécois
possèdent indéniablement une bonne expertise technique.
Nos éleveurs laitiers réussissent, performent lors
d'expositions d'envergure internationale. Notre cheptel est en demande dans de
nombreux pays. C'est là un indice de l'expertise et des qualifications
de nos agriculteurs.
Les ressources financières et humaines sont disponibles pour
assurer le développement de l'agriculture. Au chapitre de la
transformation, nous disposons d'entreprises de taille, comme Olymel pour le
porc, Bexel dans la viande, Agropur, Natrel et Lactel dans le lait. Au niveau
technique, le Centre d'insémination artificielle du Québec et le
Centre d'insémination porcine constituent des leaders dans leurs champs
d'activité.
Au cours des derniers mois, le gouvernement du Québec s'est
affairé à rendre son économie plus compétitive.
C'est le cas avec la mise de l'avant du concept de grappes industrielles, d'une
nouvelle politique de développement régional initiée par
le ministre des affaires régionales, qui, en même temps, est le
titulaire du MAPAQ, et aussi par la création de la Société
de la main-d'oeuvre québécoise. Dans ce contexte, le MAPAQ a
lancé une nouvelle politique de développement industriel et
commercial. Cette stratégie insiste sur les interrelations industrielles
et commerciales qui existent entre les industries et les acteurs du même
secteur. Elle insiste pour renforcer ses liens afin de bénéficier
d'une utilisation optimale de son potentiel au bénéfice du
développement de ce secteur et de sa compétitivité au plan
international. (11 h 30)
Cette approche nécessite une étroite concertation entre
les acteurs d'un secteur. La réalisation d'un plan de
développement de la production porcine constitue un exemple frappant de
la réussite de ce dialogue. Assis à la même table,
producteurs, transformateurs, distributeurs et même les syndicats
ouvriers ont échangé pour identifier les objectifs à
réaliser et les moyens à prendre pour rendre leur secteur
économique plus compétitif. Un plan identique est
présentement en voie d'élaboration pour la production
laitière. D'autres productions suivront le même chemin, je
l'espère.
Bref, le Québec dispose d'avantages et d'outils capables de
l'aider à relever les défis de la mondialisation des
marchés. Je crois que personne ne souhaite que certains scénarios
évoqués se réalisent. Nous voulons tous et espérons
tous que les objectifs du Québec dans ces négociations seront
réalisés. Toutefois, si les revendications du Québec ne
pouvaient être satisfaites, il ne faudrait pas sombrer dans le
défaitisme, il faudrait se relever les manches et travailler pour faire
sa place au soleil, et ça, les Québécois connaissent
ça. Il faut, toutefois, commencer à se le dire maintenant, afin
que, si ça devait se produire, on soit prêts à se servir de
tous nos atouts. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): merci, mme la
députée de bellechasse, mme bégin. je cède la
parole à m. le député d'arthabaska pour les cinq
prochaines minutes.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. Je reviens sur ce que le
ministre disait tout à l'heure. C'est grave, ce qu'il a dit, parce qu'il
nous a dit qu'il reconnaissait que les autres pays allaient être
subventionnés, pourraient continuer à être
subventionnés - ils le sont, en tout cas, ils sont subventionnés
- mais, que nous autres, en retour, il faudrait que nos offices de
commercialisation soient abolis parce que, au niveau du GATT, on n'aurait plus
le droit de faire ça.
C'est grave, ce que le ministre dit là. Ca veut dire qu'il ne
défend pas nos offices de commercialisation, il ne croit pas à
ça. Il va accepter que, nous autres, nos programmes, nos plans soient
démolis, ne soient plus admissibles dans les échanges
commerciaux; par contre, les autres vont pouvoir, de la manière qu'ils
subventionnent, continuer à subventionner ça. C'est bien
évident que l'ensemble de nos productions québécoises vont
être lavées si les autres sont capables de subventionner à
tour de bras et que, nous autres, on n'est capables de faire aucune protection,
à nulle part. Ça n'a pas de bon sens.
Dans le dernier rapport de la Banque Royale que j'ai reçu, le
mois de mars 1992 - j'ai reçu ça avant-hier - on dit, ici,
«que l'aide du gouvernement américain équivaut à 30
% ou 40 % du prix du lait», des subventions, de l'aide indirecte. Je ne
lirai pas tout le paragraphe, mais ça serait intéressant, le
ministre devrait le lire. C'est M. Balcaen qui dit ça, le
président de la Fédération des agriculteurs du Canada:
«Ils pourront - en parlant des États-Unis - conserver leur
programme de retrait des excédents laitiers parce qu'il est
orienté, en grande partie, vers l'aide alimentaire. Notre propre
programme de retrait des excédents finance par les agriculteurs a
été jugé inacceptable.»
C'est ça que le ministre vient de nous dire, qu'il accepte
ça, que les autres vont continuer à subventionner et, à
cause que les autres peuvent subventionner à tour de bras, là, on
n'est plus compétitifs, nous autres. Là, il ne fait aucune
défense au niveau de nos offices de commercialisation. C'est grave!
Après ça, il vient nous dire qu'il essaie et que, par toutes
sortes de moyens, il défend nos offices de commercialisation. Ces
chiffres ou ces paroles ne me disent rien de bon pour me convaincre que le
ministre fait sa job en défendant nos offices de commercialisation.
Tout à l'heure, il commençait à charrier et je
dirais que le ministre répand son fiel et c'est du mépris qu'il a
à mon endroit. Il parlait comme: Le député d'Arthabaska ne
connaît rien et il ne sait rien. C'est un nono, c'est un cave.
Tout ce que je dis là, je le dis parce que je me documente, M. le
Président. Je me documente avec différents papiers qui sont
à notre disposition et ceux que je n'ai pas, on les fait venir
d'ailleurs. Quand il dit que je n'ai pas de mémoire, c'est vrai que je
n'ai pas de mémoire et c'est pour ça que j'ai toujours un tas de
papiers en avant de moi parce que ce sont mes aide-mémoire. Ça
fait que quand on vient dire-Tout à l'heure, il a essayé de me
ridiculiser, il a dit: Le député d'Arthabaska devrait savoir que
du lait, il ne peut pas accrocher ça après sa cravate. C'est nono
de dire ça, M. le Président, ça part de lui-même.
C'est ça que je dis, c'est du mépris, comprends-tu? Je ne peux
pas traîner les bines dans mes poches. Voir si, moi, je ne savais pas que
ça prenait un contenant pour traîner ça. Voyons donc! Si le
ministre essaie de faire du millage avec ça, je vais vous dire qu'il
n'ira pas loin; il est loin de faire du millage avec ça.
C'est pour ça, M. le Président, que je trouve que le
ministre a un mépris envers moi et qu'il a un mépris envers la
classe agricole, en général, parce qu'il passe son temps à
taper dessus au lieu de les défendre et de leur dire qu'ils sont
capables de fonctionner, qu'ils sont capables de faire des choses. Il dit:
À cause qu'il y a de la salmonellose au Québec, le
député va me dire: Arrête l'inspection chez nous et on va
laisser rentrer la salmonellose chez nous. Je n'ai jamais dit ça.
Écoutez bien, j'ai pris la peine de dire que, dans le traité de
libre-échange, il y a un article qui dit que, si un pays rentre un
produit qui ne répond pas aux normes de qualité de ce
pays-là, ce même pays-là va avoir le droit de
l'empêcher de rentrer chez lui. C'est ça que j'ai dit. Mais le
ministre, ce n'est pas ça qu'il a dit tout à l'heure. Ce n'est
pas ça pantoute. Il a dit: Le député d'Arthabaska m'a dit
d'abolir nos normes de qualité et de laisser rentrer la salmonellose
chez nous. Il déforme mes paroles parce que c'est son moyen de
défense. Quand il n'a pas d'autre chose à dire, il dit n'importe
quoi.
Après ça, quand on regarde dans le rapport... C'est pour
ça que je dis qu'il ne les défend pas, les agriculteurs, parce
qu'il laisse l'impression... Il dit toujours que le panier de provisions
coûte trop cher, que ça soit le lait, la volaille ou autre chose.
Il nous a donné des chiffres tout à l'heure: 2,40 $ le prix
intérieur et 2,64 $ en 1993 et 2,46 $ à la frontière, je
ne sais pas quoi. Bon. Qu'il regarde donc notre coût de production, qu'il
regarde le prix du détaillant. Si les agriculteurs ont fait des efforts
et sont encore capables d'en faire, il va falloir que toute fa chaîne,
tout le réseau, tant de la transformation que de la distribution, eux
autres aussi, ils en fassent, des efforts.
Quand est-ce que le ministre a dit ça? Quand est-ce que le
ministre a invité tout le monde à s'asseoir autour d'une table
pour dire:
Écoutez, un instant... Ah non, non, là, je le vois sauter.
Il va me dire: J'ai fait un sommet. J'ai organisé un sommet où on
va tous se parler de ça et on va tous discuter de ça. Avant ce
qui va se passer au mois de juin, ça fait deux, trois ans, qu'est-ce que
vous avez fait pour réunir tout ce secteur-là, tout ce
monde-là autour de la table? Vous êtes là, vous allez me
dire: II y a une loi qui a été votée. Le ministre
Pagé a voté ça, une loi sur les chambres de coordination.
Ah, ça, c'est efficace! C'est bien plutôt pour siroter un
café alentour de petits biscuits ou de croque... que pour être
efficace.
Si on regarde ici, et je finis là-dessus, M. le Président,
encore dans le tableau fourni par la Banque Royale, on nous dit ici le prix du
porc, les augmentations entre 1980 et 1989 au niveau de la consommation. Il y a
39 % d'augmentation au détail et, sur ces 39 % là, il y a 6 %
à la ferme. Au niveau du maïs, il y a eu une augmentation de 94 %
et à la ferme il y a eu une perte de 13 %. Au niveau du beurre, il y a
eu 66 % d'augmentation au détail et il y en a eu 51 % d'augmentation
à la ferme. Au niveau du lait, 89,3 % d'augmentation du prix au
détail et le prix à la ferme a augmenté de 44 %,
même pas de la moitié. Au niveau du cheddar, c'est 86 % au niveau
du prix de détail et 49 %, le prix à la ferme. Au niveau du
poulet, c'est de 72 % que le prix au détail a augmenté et le prix
à la ferme a augmenté de 30,9 %. Quand est-ce que le ministre se
lève et qu'il dit qu'il n'y a pas juste les producteurs qui
coûtent cher, pas juste la production, que l'ensemble de la chaîne
va le faire? Après ça il viendra me dire qu'il défend les
offices de producteurs quand les gens disent que c'est à cause des
offices que les prix augmentent à la consommation. Ça n'a aucun
rapport. Je ne l'ai jamais entendu défendre ça.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Arthabaska. M. le ministre.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, heureusement que je ne suis
pas aussi frileux que le député d'Arthabaska. D'abord, je vais
lui dire tout de suite au point de départ, et je ne sais pas quelle
perception il peut avoir, mais je veux qu'il se sente bien à l'aise: Mes
interventions ne sont jamais ciblées en fonction de lui; elles sont
ciblées en fonction de ce qu'il me dit. Moi, je veux bien - et s'il le
disait comme ça, M. ie Président, j'embarquerais là-dedans
- qu'on dise qu'il y a juste 4 000 000 $ de lait dans le Lait-école, que
ça coûte pour le lait; ça, je veux bien ça. Je ne
veux pas qu'il reproche à mon sous-ministre de dire que ça nous
coûte 13 000 000 $ au ministère, par exemple, parce qu'il serait
peut-être mieux de regarder ses phrases aussi à lui, là.
C'est bien beau de nous donner un petit peu de leçons, mais je voudrais
qu'il regarde ses propres phrases, lui aussi. Il est un petit peu comme moi, il
parle sans discours, lui. Il parle comme ça. Alors, s'il analysait ses
phrases, il verrait qu'il nous a dit que, nous autres...
I! nous reproche d'enlever le lait parce qu'on dit que ça
coûte 13 000 000 $. Bien oui, ça nous coûte 13 000 000 $.
Qu'est-ce que vous voulez, moi, je ne suis pas capable de faire abstraction de
ça? Mais je vais être d'accord avec lui, par exemple. Si on nous
pose la question: Combien y a-t-il d'argent qui va dans le lait quand on vend
du Lait-école? Ah! Là, il y a à peu près 4 000 000
$ à 5 000 000 $ que ça coûte en lait. Mais, bien sûr,
il y a les berlingots, bien sûr, i! y a le transport, bien sûr, il
y a la transformation. Bien oui, mais ça, qu'il ne nous reproche pas
ça à nous autres, M. le Président. Lui aussi, il devrait
se regarder et relire ses phrases. Il nous reproche ça à nous. Il
nous reproche ça à nous. On ne doit pas être responsables
de ça, j'imagine.
M. le Président, j'entends le député d'Arthabaska
nous dire en plus: Mais qu'est-ce que le ministre a fait? M. le
député d'Arthabaska, bien amicalement, là, je
«peux-tu» vous demander d'aller consulter et d'aller regarder les
producteurs de porc? On a mis une table pour asseoir tout le monde ensemble
pour faire ce que vous me dites que je n'ai jamais fait et que je vais parler
rien qu'au sommet. Et ça a débouché sur une
réponse. (11 h 40)
Je «peux-tu» vous dire d'aller voir dans les légumes,
mon cher collègue? Ça, je pense bien que vous ne le prenez pas
personnellement, quand je vous dis ça. Dans les légumes, dans le
porc, les tables sont faites, tout le monde s'est assis ensemble. Quand il me
dit qu'il faut ajuster les transformateurs et tout le monde ensemble, il y a
des tables de complétées. Légumes et porc, c'est fait. On
a des stratégies... Ça fait quatre fois que je passe à la
télévision avec les gens du porc. La dernière a
été enregistrée hier pour passer au Dr Lapointe pour
sensibiliser les gens à ce qu'on a fait, moi et la
Fédération des producteurs de porc, M. le Président. Que
le député d'Arthabaska ne vienne pas me dire dans ses phrases
que, moi, je ne défends pas ça, M. le Président, parce que
je suis obligé de réagir. Là, évidemment, il trouve
que je !e pointe. Bien, je ne suis toujours bien pas pour parler à la
chatte dans la cuisine, M. le Président. On est ici et c'est lui qui me
reproche des choses que j'ai faites.
Allez donc demander aux gens du lait, c'est votre domaine, les gens du
lait, lis ont deux réunions de faites à la suite de ce que j'ai
mis sur pied. Les gens du lait ont deux réunions de faites. Le
député d'Arthabaska me dit qu'on n'a pas pensé à
ça, M. le Président. Une chance que je n'ai pas les
épaules aussi frileuses que lui.
En ce qui concerne les subventions, M. le Président, pour bien se
comprendre - je pense
que c'est important et j'aimerais qu'il im'écoute 32 secondes
pour être bien sûr qu'on puisse bien saisir qu'on dit la même
chose probablement tous les deux, M. le Président - nous autres, on dit:
Les offices de commercialisation, ce n'est pas des subventions, c'est pour
ça qu'on veut les protéger. On ne calcule pas que c'est des
subventions. Tout ce qu'on appelle subventions cachées, M. le
Président, c'est à l'exportation. On n'en a pas, nous autres.
C'est pour ça qu'on veut protéger nos offices de
commercialisation. Donc, ce n'est pas une question de subventions. On dit la
même affaire, M. le Président, je ne sais pas pourquoi on ne
s'entend pas. Ce que le député d'Arthabaska dit et ce que, moi,
je dis, c'est pareil. Les offices de commercialisation, M. le Président,
ce n'en est pas.
Alors, je pense qu'il faut rétablir les faits et je dis, en
terminant, M. le Président, au député d'Arthabaska: Moi,
je veux qu'on reste ensemble de bons amis parce que jamais je ne reprocherai...
Parce que le député d'Arthabaska fait très bien sa job
dans le domaine de la production. Je le connais et il fait sa job qu'il doit
faire ici, au Parlement; je ne le lui reproche pas et je le laisse faire et je
l'incite à continuer de le faire. M. le Président, je pense bien
qu'il ne faut pas voir ça du tout de la façon dont le
député d'Arthabaska l'a décrit tantôt.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je
cède la parole à M. le député d'Iberville, M.
Lafrance, et, par la suite, nous viendrons au message final: 10 minutes, M. le
ministre; 10 minutes, M. le député d'Arthabaska et, si vous
permettez, on dépassera le temps de midi de quelques minutes seulement.
Vous êtes d'accord de part et d'autre?
M. Picotte: Oui, oui.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le
député d'Iberville, M. Lafrance.
M. Yvon Lafrance
M. Lafrance: Oui, merci, M. le Président. Je
réalise que nous avons un petit problème de coordination pour ce
qui est du temps; alors, je vais abréger pour prendre seulement une
couple de minutes.
J'aimerais dire, en terminant, pour ma part du moins, que je suis
surpris et déçu de constater la qualité du débat.
Je ne sais pas pourquoi, mais depuis quelque temps le député
d'Arthabaska s'acharne sur les fonctionnaires du MAPAQ et tente de prouver je
ne sais quel complot dans ce dossier qui, comme on le sait, est si
important.
J'aimerais toucher un point ici. Lorsqu'il tente d'excuser son
vice-président, le député d'Arthabaska dit que M. Landry
vise les 800 000 000 $ donnés en aide spéciale aux producteurs
de. céréales de l'Ouest. M. le Président, en
dénonçant cette aide, le député d'Arthabaska
dénonce en même temps l'aide reçue par nos producteurs de
céréales au Québec. Ignore-t-il que ces derniers
reçoivent une aide identique par tonne produite à celle
reçue par un producteur de céréales de l'Ouest? Le
député d'Arthabaska devrait le savoir, c'est tellement important.
Il devrait savoir que, depuis quelques années, ces sommes d'aide
spéciale versées aux producteurs de céréales sont
transférées du gouvernement fédéral au fonds
d'assurance-stabilisation des revenus, réduisant ainsi les primes
payées par les producteurs de céréales, producteurs aussi
d'oléagineux et, aussi, de maïs-grain du Québec. C'est
là, je pense, un point très important. En dénonçant
les subventions de l'Ouest, il oublie que nos producteurs reçoivent
cette aide spéciale plus les contributions d'assurance-stabilisation.
Donc, M. le Président, c'est le point sur lequel je vais me limiter. En
dénonçant l'aide financière aux producteurs, il
dénonce nos piliers que l'on tente, nous du gouvernement, de
préserver. Je vous remercie.
Le Président (M. Richard): merci, m. le
député d'iberville, m. lafrance. je cède la parole
maintenant, pour son message final, à m. le ministre. m. picotte.
Conclusions M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Quand on regarde
ça comme il se doit, on se rend compte, M. le Président, qu'il
n'y a pas beaucoup de différence entre ce que dit le
député d'Arthabaska et ce que dit le gouvernement du
Québec. Les offices de commercialisation, comme je le disais
tantôt, pour nous autres, ce n'est pas considéré comme des
subventions. Donc, il faut éliminer ça. C'est pour ça
qu'on parle de ne pas toucher aux offices de commercialisation. On ne
dérange rien sur le marché international. Ce que veut faire le
GATT, c'est éliminer les subventions pour l'exportation. Alors, pour
nous, on n'est pas à l'exportation avec nos offices de
commercialisation, on ne dérange pas le marché international.
C'est pour ça, M. le Président, qu'on veut défendre les
offices de commercialisation, parce que ce n'est pas considéré
comme des subventions, et qu'on veut éliminer avec une entente du GATT
les milliards de subventions à l'exportation que se fait la CEE, que se
font les États-Unis. Si on réussissait ça, M. le
Président, vous verriez que, finalement, on protégerait ce qu'on
a à protéger, on ne changerait pas l'échiquier
international et on aurait une protection pour tous nos programmes.
C'est ça la réalité, et c'est ça que
défend le député d'Arthabaska, et je ne sais pas pourquoi,
dans toute cette conjoncture-là, on ne se
comprend pas, mais c'est la même dialectique, M. le
Président. C'est la même dialectique. J'espère que ce n'est
pas moi qui ai fait comprendre ou fait croire que les offices de
commercialisation, c'étaient des subventions, parce que je
m'évertue à dire le contraire depuis le début.
Donc, à partir de ce moment-là, je pense, M. le
Président... C'est pour ça que nous sommes dans la coalition,
c'est pour ça que l'UPA, et la Fédérée y sont.
C'est pour ça que le député d'Arthabaska, par ricochet, M.
le Président, devrait être satisfait de ça, à cause
de ces choses-là, parce que, finalement, l'UPA ne resterait pas dans la
coalition avec nous autres si on lui avait dit et si on disait: Notre
philosophie de base, c'est de prendre les offices de commercialisation comme
étant des choses subventionnées. L'UPA serait sortie depuis
longtemps. Il le sait très bien, d'ailleurs. On le sait très
bien. Alors, c'est pour ça qu'il faut mettre ça à
côté, tout simplement.
Maintenant, quelles sont les actions que le gouvernement a faites? Je
pense que c'est important qu'on se le dise: conférences
fédérales-provinciales des ministres de l'Agriculture, M. le
Président. Vous le savez très bien, le gouvernement ne participe
pas aux conférences fédérales-provinciales depuis
l'échec de l'accord du lac Meech. On ne participe pas. On a fait
quelques rares exceptions. Vous savez lesquelles, ces exceptions-là?
C'est pour les ministres de l'Agriculture, quand on a à discuter du
GATT; pas des autres problèmes en agriculture, mais du GATT. Donc, M. le
Président, je pense que c'est vous démontrer là que nous
voulons protéger l'agriculture québécoise comme nous la
vivons et la connaissons. Sinon, on ne serait pas allés, on aurait dit:
On fait ce qu'on fait dans tous les domaines.
Lors des conférences fédérales-provinciales du
commerce extérieur, toutes les fois où il a été
question du GATT, mon collègue, M. Ciaccia, non seulement est
allé à ces rencontres-là, mais il est arrivé une
fois où il m'a invité et, l'autre fois d'après, il a
amené mon sous-ministre adjoint, M. le Président, pour être
bien certain qu'on protège ces choses-là. Donc, encore là,
on ne participe pas aux conférences
fédérales-provinciales, mais, comme il pouvait en être
question au niveau du commerce extérieur, on y a participé. Lors
des réunions fédérales-provinciales des sous-ministres de
l'Agriculture, qui se réunissent à tous les deux mois, nous ne
manquons pas de répéter notre position, de promouvoir nos
intérêts, parce qu'on veut être certains que les offices de
commercialisation, ce n'est pas des subventions.
Lors des réunions du comité
fédéral-provincial des négociations multilatérales
une à deux fois par mois, les fonctionnaires de haut niveau font
entendre la voix du Québec dans ce domaine. Les communications sont
suivies avec le bureau de négociations commerciales du GATT à
Ottawa, responsable des négociations. Il y a eu une collaboration
constante du MAPAQ avec le ministère des Affaires internationales
à travers le groupe restreint de coordination et le comité
technique interministériel. Missions d'observateurs
québécois à Genève pour rencontrer d'autres
délégations et représentants américains,
européens, danois, hollandais, coréens, suisses. C'est les
discussions qu'on a eues. Je ne sais pas pourquoi on veut nous donner
l'impression qu'on ne défend pas la position. On a fait ces
démarches-là. Enfin, le MAPAQ et le MAI sont membres de la
coalition québécoise, qui comprend l'UPA et la Coopérative
fédérée, formée dans le but de défendre les
piliers agricoles et puis la production agricole.
Il y a eu deux missions spéciales à Genève pour
défendre l'article XI. Le 20 février et le 21 février, je
me suis moi-même rendu en Europe avec des fonctionnaires du gouvernement
du Québec, avec des fonctionnaires du gouvernement d'Ottawa, puis des
ministres d'Ottawa et des présidents de groupes agricoles canadiens. On
s'est rendus là pour défendre et expliquer notre position sur
l'article XI, pour défendre nos offices de commercialisation, pour
rencontrer les délégations des pays européens. (11 h
50)
J'ai rencontré, entre autres, personnellement, avec d'autres,
Arthur Dunkel lui-même et j'ai eu l'occasion de lui parler
personnellement aussi de nos appréhensions, M. le Président. Je
suis allé rencontrer le gars qui écrit les papiers. On persiste
à me dire qu'on ne défend pas les intérêts de
l'agriculture. Je ne suis pas allé là en visite de courtoisie. Je
ne suis pas allé là en touriste. On a fait cinq ou six
rencontres, on est allés dans trois pays, puis on a fait quatre
conférences de presse en 60 heures, y compris le décalage.
J'espère que personne n'ose prétendre qu'on est allés
s'amuser. M. le Président, on n'a même pas eu le temps de se
coucher. Ce n'est pas grave, on n'attire pas la pitié! Mais, vous savez,
quand on prend le détour trop court de nous dire: Vous ne nous
défendez pas, on «peut-u» au moins dire qu'en 60 heures on a
fait tout ça? J'ai rencontré Arthur Dunkel. Je n'ai pas
rencontré l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours!
J'ai vu l'ours, M. le Président! J'ai vu l'ours!
On a rencontré les commissaires agricoles de la Communauté
européenne. On a rencontré des collègues d'autres pays. On
a rencontré les ambassadeurs des pays que je vous ai nommés
tantôt pour être bien sûrs, pour les inciter à nous
comprendre, pour mieux leur expliquer. Les Américains, les
Européens, les Danois, les Hollandais, les Coréens et les
Suisses, c'est des gens qui ne comprennent pas. On est allés leur dire:
Nos offices de commercialisation, ce n'est pas des subventions, oubliez
ça. Voyez-vous comme ma position, avec celle du député
d'Arthabaska, est la même. Les offices de commer-
cialisation... C'est ça qu'on est allés dire aux
Américains, aux Européens, aux Danois, aux Hollandais, aux
Coréens, aux Suisses et aux Japonais durant la période de 60
heures , des gens qui ne comprenaient pas nécessairement notre affaire.
On est allés leur dire ce que le député d'Artha-baska me
rappelle et ce que, moi, je dis. Alors, voyez-vous, on n'est pas si loin que
ça.
C'est ça, la réalité. Je vais être
entièrement d'accord avec ce qu'a dit le député
d'Arthabaska. C'est ce que je fais depuis déjà un certain temps,
soit dire aux gens de la transformation, aux gens du secteur primaire, aux
agriculteurs, aux agricultrices, aux producteurs, aux productrices, aux gens
qui détaillent, qui vendent le produit: Vous devez travailler ensemble.
Je le dis et je le répète, je l'ai dit en conférence de
presse dans la Beauce il y a 15 jours, M. le Président, c'est
verifiable. Je l'ai dit dans mes tournées régionales, dans au
moins trois régions, c'est verifiable.
Quand les gens disent que d'aider nos agriculteurs et nos agricultrices,
quand les gens disent que de soutenir nos offices de commercialisation, c'est
donner de l'argent de façon inutile, je les condamne publiquement, parce
que tous ceux et celles qui veulent manger un bon steak ce midi, du porc, de la
volaille, des oeufs, ils doivent dire merci aux offices de commercialisation et
ils doivent dire merci au gouvernement de soutenir, par le biais des offices de
commercialisation, ces produits-là, parce qu'ils ne gagneraient pas
suffisamment cher pour s'en payer dans leur assiette si on ne soutenait pas
ça. Qu'on arrête de blâmer la classe agricole, parce que ce
n'est pas la classe agricole qu'on aide quand on fait ça, on aide le
consommateur et le bouffeur de lunch. C'est ça qu'on dit.
«C'est-u» assez français et assez clair pour que je le dise?
Je suis certain que le député d'Arthabaska pense la même
affaire que moi.
M. le Président, le ministre de l'Agriculture, à toutes
les fois qu'un gars fait une déclaration gauche, que quelqu'un fait une
déclaration insipide, incolore, inodore et sans saveur, il ne peut pas
toujours se permettre de reprendre ça. Savez-vous pourquoi, M. le
Président? Il le sait très bien. Il va me le dire. Il va
être d'accord avec moi. Toutes les fois qu'on reprend quelqu'un qui fait
une déclaration insipide, c'est lui donner l'importance qu'il n'a pas.
Ignorer ces personnes-là qui agissent de façon insipide, c'est
bien plus leur donner l'importance qu'elles possèdent plutôt que
de les mettre en évidence, mais il ne faut pas que je sois
blâmé à toutes les fois que quelqu'un fait une
déclaration insipide et que je ne relève pas ça, M. le
Président. Ça ne vaut pas la peine d'être relevé.
C'est lui donner trop d'importance pour ce qu'il connaît, M. le
Président.
J'espère que ma situation est claire. Je le dis et je le
répète: Ce que pense de l'agriculture le député
d'Arthabaska, ce que le ministre de l'Agriculture et député de
Maskinongé pense de l'agriculture, M. le Président, on a
l'occasion de se le dire souvent, on n'est pas si loin que ça l'un de
l'autre dans la défense de ce qu'on fait. Je ne voudrais à tout
prix pas que mes interventions, si c'est le cas, laissent prétendre que
le député d'Arthabaska est en dehors de ça. Au contraire,
j'ai beaucoup de plaisir à travailler avec lui parce que, justement, il
connaît le domaine, M. le Président. Je ne voudrais surtout pas
que les gens pensent que je dis le contraire de ça. Je veux être
bien clair, M. le Président, c'est ça, la réalité.
Il n'y en a pas d'autre. Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre.
Maintenant, pour son message final, M. le député d'Arthabaska. M.
Baril.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. D'abord, suite à
l'exposé de tout à l'heure de M. Lafran-ce, le
député d'Iberville, qui dit que je m'en prends ou que j'en veux
à tous les fonctionnaires qui bougent quelque part, ce n'est pas
ça. Ce n'est pas parce que j'en veux à un plus qu'à
l'autre. Simplement ce que j'ai dit, c'est que j'ai voulu savoir, de la part du
ministre, pourquoi son sous-ministre a dit, il y a deux ans, en pleine
période cruciale des négociations du GATT, que son gouvernement
serait prêt à appuyer n'importe quoi, même si les offices de
commercialisation ou les quatre piliers de l'agriculture
québécoise ne faisaient pas partie des négociations du
GATT. C'est ce que j'ai demandé. Je n'ai pas dit: J'en veux au
sous-ministre Lavoie d'avoir dit ça; j'ai demandé pourquoi il a
dit ça. Qu'est-ce qui est arrivé? Pourquoi le sous-ministre a dit
ça s'il croit aux offices de commercialisation, si son gouvernement
croit aux offices de commercialisation? Pourquoi a-t-il laissé le
sous-ministre dire ça sans relever ça d'aucune façon?
Est-ce que ça n'enlevait pas toute la crédibilité du
gouvernement face à la défense de nos piliers de l'agriculture
québécoise?
Ce que je reproche au gouvernement, c'est que ses paroles ne
correspondent pas aux gestes qu'il pose. Il a beau dire partout - je le sais,
je l'ai entendu: On les défend, on les appuie, puis on va se battre
jusqu'à la mort, jusqu'au dernier souffle, pour utiliser l'expression
que le ministre a utilisée, pour les défendre. Mais après
que tu as dit ça, quand ton sous-ministre a dit officiellement: On va
signer n'importe quoi, même si ce n'est pas là-dedans, c'est
là que ça ne correspond pas. C'est sur ça que j'ai voulu
avoir des explications lors de ce débat-là. Le seul reproche que
je fais au sous-ministre, puis je ne m'en cache pas, je le refais, je le trouve
irresponsable d'avoir été dire, sans explication aucune, que, si
le rapport Dunkel était approuvé
tel quel, il y aurait trois productions au Québec qui seraient
lavées. Il a dit: Si la gestion de l'offre disparaît, ces trois
productions-là vont être lavées. Ça, là, je
ne peux pas comprendre le sous-ministre. J'espère aujourd'hui qu'il peut
être conscient des paroles qu'il a prononcées, de l'impact sur ces
producteurs-là visés, le ressentiment qu'ils ont eu. Ça
n'a pas de bon sens. C'est pour ça que - si je peux utiliser
l'expression - j'en veux au sous-ministre d'avoir dit ça, d'avoir
prononcé des paroles totalement irresponsables.
Quand je dis que le discours du gouvernement sur la défense de
nos offices de commercialisation est contraire aux gestes, c'est justement
parce qu'il a dit qu'il appuyait le Canada, peu importe ce qui arriverait, et
que le ministre vient de dire qu'il reconnaît que les autres États
membres du GATT vont pouvoir continuer à garder leurs programmes de
subvention, mais que, nous autres, par contre, on va perdre nos offices de
commercialisation qui ne coûtent rien à l'État.
C'est ça qui est insultant parce que les États-Unis - on
les connaît, entre autres - vont garder tous leurs programmes de
subvention, ils subventionnent ça à tour de bras. Juste
l'État de New York, 1 000 000 000 $. Je pourrais tous les passer, il y
en a sept États. Eux autres, ils vont être conformes et, nous
autres, nos offices de commercialisation, on laisse sauter ça. On a beau
dire: On va défendre ça, mais ça ne se représente
pas, tu ne vois pas ça dans des gestes concrets que le gouvernement
pose. C'est ça qui manque. (12 heures)
Le ministre peut dire: Je suis allé en Europe. J'ai passé
là, j'ai rencontré Dunkel lui-même, j'en ai
rencontré d'autres. Mais ces gens-là, ils savent bien la position
du gouvernement du Québec par le biais de son sous-ministre qui a dit:
On va signer n'importe quoi. Ils savent bien, je l'ai cité au
début, que le directeur Dunkel lui-même a dit que la position du
gouvernement canadien était ambiguë. Parce que le gouvernement
canadien a deux productions à défendre: la production de l'Ouest
qui lui coûte une fortune et la production de l'Est qui ne lui
coûte à peu près rien. Il va regarder juste au niveau,
même pas économique mais au niveau finances, celle qui lui
coûte le plus cher et il va mettre un x dessus. C'est ça que je
n'approuve pas. Je pensais que le ministre nous arriverait avec d'autres
scénarios puisqu'il a dit que son sous-ministre étudie des
scénarios.
Un autre document, juste pour concrétiser davantage ce que je
dis, M. le Président, comment ça va bizarrement à ce
ministère-là. Il y a deux documents du ministère de
l'Agriculture qui posent de sérieuses questions. «En plus de
favoriser la concentration, le système actuel de gestion de l'offre ne
stimule pas le développement de productions différenciées
ou le développement de nouveaux marchés.» Ça, ce
commentaire-là est tiré du document récent de la
Direction du développement des marchés du MAPAQ,
intitulé «Stratégie commerciale pour le
bioalimentaire.» Dans un autre document, qui, lui, a été
publié par la Direction du développement des entreprises du
même ministère, on dit, cette fois: «Sur la stratégie
dite industrielle, on estime que la concentration des entreprises de
conditionnement est favorable au développement des
marchés.» Dans un document, on dit que ce n'est pas favorable, que
la gestion de l'offre ne stimule pas le développement de la production
ou le développement de nouveaux marchés et, dans un autre
document du même ministère, on dit que «la concentration des
entreprises de conditionnement est favorable au développement des
marchés».
Voyez-vous, dans les gestes qui sont posés à
l'intérieur de son propre ministère, il y a quelqu'un qui ne
parle pas en quelque part ou il n'y a pas de boss en quelque part. Les
documents sont contradictoires dans son propre ministère. Après
ça, on s'en vient accuser le député d'Arthabaska,
comprenez-vous, qui, lui, travaille à partir d'informations que tu peux
glaner ici et là, et on dit qu'il n'est pas informé. Au lieu
d'encourager la production, d'encourager les producteurs, au lieu de dire qu'on
va être capables de s'en sortir au niveau des négociations du GATT
en appliquant convenablement le traité de libre-échange...
Si les autres continuent à subventionner l'agriculture, il y aura
des tarifs qui seront établis. Ces tarifs-là, c'est vrai que
ça va être compliqué de les établir. Ça va
nous prendre une armée de personnes pour être capables de
découvrir, de détecter combien les autres - les
États-Unis, entre autres, parce que c'est notre principal rival -
supportent leur agriculture. Si on peut les découvrir - et on a
déjà un bon aperçu dans ce document-là, ici - on
pourra imposer des droits compensateurs qui vont arriver avant que le produit
s'en vienne chez nous. Si les autres sont capables d'empêcher nos
produits et qu'on ne pourra plus subventionner l'agriculture de la façon
dont on supporte l'agriculture actuellement, ça veut dire qu'on va avoir
des moyens aussi, si on le veut bien, d'empêcher les autres de le faire,
de leur imposer une douane, une taxe pour que le produit qui rentre chez nous
soit compétitif à nous, ici.
Ça, M. le Président, c'est un discours positif. Ce n'est
pas de dire: Vous autres, vous allez être lavés. C'est ça
que je trouve épouvantable. J'ai rencontré des jeunes producteurs
dans les oeufs et dans la volaille qui étaient découragés
de telles paroles.
Je vais finir là-dessus en disant qu'on a toujours misé
sur la qualité. Actuellement, il y a un regroupement d'entreprises
québécoises, tant laitières que dans le domaine de la
volaille, entre autres, justement, qui se prépare... L'entreprise
privée et le mouvement coopératif se préparent
à
faire face à la mondialisation des marchés. Si pour ces
laiteries-là ou ces usines de transformation là en pleine
préparation, on décourage les producteurs et on leur dit: Vous ne
serez pas capables, parce qu'on ne sera pas compétitifs, où vont
s'alimenter ces compagnies-là tout à l'heure?
Il faut regarder ça dans l'ensemble. Si l'ensemble des
Québécois et des Québécoises ne sont pas assez
sensibilisés sur toutes les conséquences du marché, il n'y
a pas juste les agriculteurs qui vont être pénalisés, c'est
l'ensemble de la population. Il faut se souvenir d'une chose: les
Américains quand ils viennent nous vendre un produit ici, c'est un
produit fini. Ils ne nous apportent pas leur matière première
pour la transformer ici. C'est un produit fini qu'ils viennent nous porter ici.
C'est pour ça que, si, pour toutes sortes de raisons, on ne continue pas
à défendre et à encourager nos agriculteurs et nos
agricultrices en leur disant qu'on est capables, on a déjà
produit un produit de très haute qualité, on est efficaces, on a
une capacité concurrentielle, les gens vont arrêter de produire.
Ça se voit déjà. On a juste à regarder au niveau
des établissements à la ferme cette année, ça a
coupé en deux. C'est évident que ce n'est pas encourageant plus
qu'il faut.
En terminant, je vais vous dire, M. le Président, j'aurais cru...
J'étais venu ici d'une façon tout à fait objective et
positive et j'aurais aimé que le ministre nous fasse connaître les
autres scénarios que son ministère est en train d'étudier
- parce que ça fait plusieurs fois qu'il nous le répète -
pour encourager justement la classe agricole vers l'avenir, pour lui dire qu'on
est capables de continuer, qu'il y aura toujours de la place pour ces hommes et
ces femmes, au Québec, qui veulent nourrir le monde. Mais on n'en a pas
entendu parler. On ne nous a rien dit. Donc, je doute fort que, effectivement,
il y ait d'autres scénarios au ministère de l'Agriculture qui
soient en train d'être étudiés pour maintenir notre
agriculture québécoise.
Le Président (M. Richard): Mesdames, messieurs, ça
met donc fin à l'interpellation de ce matin. Puisque nous avons accompli
notre mandat, nous ajournons donc sine die.
(Fin de la séance à 12 h 6)