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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le vendredi 10 avril 1992 - Vol. 32 N° 1

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation : Les négociations du GATT et l'agriculture


Journal des débats

 

(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Richard): Je déclare la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte. Je vous rappelle le mandat de notre commission ce matin. Pour cette séance, c'est de procéder à l'interpellation adressée au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation par le député d'Arthabaska sur le sujet suivant: Les négociations du GATT et l'agriculture.

M. le secrétaire, il n'y a aucun remplacement ce matin?

Le Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Je me permets de vous rappeler brièvement le déroulement d'une séance d'interpellation. Dans un premier temps, M. le député d'Arthabaska, qui a demandé l'interpellation, aura un temps de parole de 10 minutes, suivi du ministre pour également 10 minutes. Par la suite, des périodes de 5 minutes seront allouées selon l'ordre suivant: un député de l'Opposition, M. le ministre et un député ministériel. Vous comprendrez qu'à la fin, les 20 dernières minutes, j'accorderai une période de 10 minutes de conclusions à M. le ministre et un temps équivalent à M. le député d'Arthabaska. Sur ce, M. le député d'Arthabaska, vous avez la parole pour les 10 prochaines minutes.

Exposé du sujet M. Jacques Baril

M. Baril: Je vous remercie, M. le Président. D'abord, le but de l'interpellation, c'est de faire le point sur la position du gouvernement du Québec par rapport aux négociations du GATT. Également, le ministre nous a déjà dit que son ministère évaluait différents scénarios pour l'après-GATT; donc, on voulait connaître aussi ces scénarios possibles que le ministre ou son ministère étudie suite aux négociations du GATT.

Depuis plus de deux ans, la population entend parler des négociations du GATT. Pour le bénéfice des personnes qui nous écoutent, le GATT, c'est un groupement de 108 pays qui négocient, à tous les cinq ans, les méthodes du commerce international. Cette année, les pays ont plus de difficultés à s'entendre, puisque c'est la première fois depuis la création de cet organisme, en 1948, que l'on discute des politiques agricoles. Avant, les pays n'ont jamais voulu discuter des politiques agricoles, puisque tous les pays considéraient que l'agriculture était un secteur particulier et qu'elle devait être protégée.

Maintenant, qu'est-ce qui a amené les pays à renégocier cette entente cette année? Le développement de l'agriculture à travers le monde a fait que des pays comme l'Argentine et la Chine, entre autres, qui étaient de gros pays importateurs de céréales dans le passé, sont devenus des exportateurs, ce qui a créé un surplus de céréales aux États-Unis, en Europe - en France, entre autres - et, évidemment, au Canada. Pour se débarrasser des surplus, ces pays se font une guerre de prix sur le marché mondial. Cette guerre de prix a coûté, l'an passé, aux Etats-Unis, 238 000 000 000 $, à la France, 135 000 000 000 $ et, au Canada, plus de 4 000 000 000 $. Donc, comme les pays ne veulent plus supporter cette vente à rabais, ils chambardent tout le système pour régler le problème d'une production.

Au Québec, les producteurs bénéficient d'un système de contrôle de la production dans le lait, les oeufs, la volaille et le dindon. Ces contrôles ne coûtent rien à l'État. Je le répète: Ça ne coûte rien à l'État, les offices de commercialisation ou nos systèmes de quotas. Si la consommation diminue, les producteurs et les productrices se voient obligés de produire moins. Ils ont une coupure de quotas qui est supportée entièrement par les producteurs et les productrices. Ils sont coupés sans indemnisation aucune. Ce système a fait ses preuves et commence à être imité ailleurs.

J'ai été surpris de prendre connaissance, il y a à peu près 15 jours, que les producteurs laitiers américains sont en train d'organiser des offices de commercialisation. Ils sont en train de se regrouper entre producteurs pour imiter notre syndicalisme agricole pour se donner des plans conjoints justement pour prévoir les inconvénients qu'il pourrait y avoir au GATT. Malheureusement, ils sont au moins 30 ans en retard. Mais on dit qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire. Pour implanter ce système, les producteurs et les productrices se sont prévalus de l'article XI du GATT qui permet à un pays de contrôler les importations si lui-même contrôle sa production et ne crée pas de surplus sur le marché mondial. On entend parler souvent par les spécialistes de distorsion des marchés au niveau international.

Dans les négociations actuelles, c'est ça qui fait problème. Dans le rapport que M. Dunkel, directeur des négociations du GATT, a soumis aux pays membres, pour arriver à un accord, l'article XI n'existe plus, ce qui veut dire que tous les producteurs et les productrices qui se

sont disciplinés pour ne pas encombrer les marchés mondiaux seraient pénalisés pour tous ceux et celles qui n'ont jamais voulu s'organiser pour limiter ou diversifier leur production, entre autres, les céréaliculteurs. Ce que je viens de dire, c'est une partie du problème, puisque d'autres outils de développement de l'agriculture sont menacés à l'intérieur du rapport de M. Dunkel, soit l'assurance-stabilisation, l'assurance agricole et le financement agricole. (10 h 10)

Maintenant, il faut démontrer la volonté que nos gouvernements ont déployée pour préserver les piliers de notre agriculture. Suite à de nombreuses pressions faites par le milieu agricole, l'Assemblée nationale pressait le gouvernement fédéral par une motion adoptée à l'unanimité pour défendre nos piliers. Ça, on se retrouve, M. le Président, le 8 décembre 1989, et je lis cette motion qui a été adoptée ici même en cette Chambre. «Que l'Assemblée nationale demande unanimement au gouvernement du Canada qu'il donne suite, dans le cadre des négociations commerciales multilatérales, à l'engagement qu'il a pris de renforcer et de clarifier l'article XI 2c de l'accord du GATT, ceci afin d'assurer le maintien et le bon fonctionnement du système de gestion des approvisionnements et qu'il respecte également ses engagements envers le Québec concernant sa capacité d'intervenir dans le secteur agricole par des programmes de stabilisation des revenus, de financement agricole et autres programmes d'aide à la production. «Ces engagements doivent se réaliser, non seulement dans le cadre des négociations du GATT, mais aussi dans le cadre du processus de révision des politiques agricoles du Canada.»

Ce qui m'a amené à demander cette interpellation, c'est la déclaration du sous-ministre adjoint aux affaires économiques lors d'une conférence de presse donnée, à la fin de février 1992, sur les perspectives économiques pour 1992. Dans sa déclaration, le sous-ministre, M. Lavoie, disait: Rapport Dunkel ou pas, «il y aura une remise en question des quotas qui viendra de l'intérieur». Elle proviendra des jeunes agriculteurs et agricultrices et des consommateurs, qui ont l'impression, à tort ou à raison, que le prix du lait, des oeufs et du poulet est plus élevé ici qu'aux États-Unis à cause des quotas.» Et M. Lavoie continue en rappelant que le MAPAQ a déjà fait savoir, il y a deux ans, à l'Union des producteurs agricoles et à son président, M. Jacques Proulx, que le gouvernement du Québec va exprimer son appui au nouvel accord du GATT, même si n'y figurent pas les quatre piliers que sont la gestion de l'offre, l'assurance-stabilisation, l'assurance-récolte et le financement agricole.

Donc, déjà, en 1990, le gouvernement, tout en affirmant publiquement qu'il défendait une chose, en cachette, par en arrière, indiquait son intention d'appuyer un accord qui ne protégeait pas les quatre piliers de notre agriculture québécoise. Ici, je me demande bien pourquoi, M. le Président, l'Union des producteurs agricoles, par son président, n'a pas dénoncé cette déclaration.

On se rend compte aujourd'hui que l'appui du gouvernement du Québec aux agricultrices et aux agriculteurs québécois n'était pas sérieux et que le gouvernement libéral y accordait peu de valeur. Le gouvernement fédéral, étant sans doute informé de l'intention du gouvernement du Québec, n'a jamais véritablement défendu les intérêts des agriculteurs québécois aux négociations du GATT. Je l'ai d'ailleurs démontré à plusieurs reprises.

Entre autres, quand le gouvernement fédéral a fait connaître ses offres constitutionnelles en septembre 1991, on disait que le gouvernement fédéral évaluait que nos offices de commercialisation étaient des entraves à la libre circulation des biens et des marchandises et qu'ils devraient être abolis. Dans une déclaration également, le ministre fédéral Wilson, lors de son passage à Québec en janvier ou février dernier devant la Chambre de commerce, a dit que le gouvernement fédéral aurait un choix à faire entre les producteurs de l'Ouest et les producteurs de l'Est. Évidemment, on peut aussi mentionner la position du gouvernement fédéral qui a été dénoncée par M. Dunkel lui-même, qui a dit que c'était une position indéfendable, puisqu'il défendait deux choses en même temps. Aussi, il y a le chef du Parti libéral allemand qui a dit la même chose, que le gouvernement fédéral avait une position indéfendable, injustifiable.

D'ailleurs, depuis deux ans, l'UPA et le gouvernement du Québec tiennent un langage déroutant et démobilisant pour la classe agricole. Son sous-ministre, M. Jean-Yves Lavoie, a dit - et je pense que c'est la cerise sur le sundae: «L'industrie laitière subsisterait à long terme, mais il devrait y avoir à court terme des ajustements importants». Pour ce qui est des autres productions contingentées, le poulet, le dindon, les oeufs, le sous-ministre ne pouvait être plus clair: «elles seraient lavées», M. le Président.

Donc, sur ce, pourquoi le ministre n'a-t-il pas soufflé mot sur les déclarations de son sous-ministre? Pourquoi le ministre n'a pas soufflé mot sur les déclarations des éditorialistes Alain Dubuc et Jean-Robert Sansfaçon, de la déclaration du président de Steinberg, qui disait que les offices de commercialisation étaient une entrave aux prix et un ennui pour les consommateurs? Le gouvernement n'a-t-il pas trahi les agriculteurs québécois en appuyant une résolution qui disait de les défendre, alors qu'en même temps il informait l'UPA que le gouvernement du Québec appuierait un accord à Genève qui ne protégeait pas les quatre piliers de notre agriculture? En agissant ainsi, le gouvernement du Québec n'a-t-

il pas affaibli la position des agriculteurs québécois auprès du gouvernement fédéral qui savait qu'il pouvait compter sur l'appui du gouvernement du Québec quoi qu'il arrive au GATT? Quels sont les autres scénarios étudiés par le MAPAQ? Sur quoi le sous-ministre se base-t-il pour affirmer que trois productions contingentées sur quatre au Québec seraient lavées si le système de gestion de l'offre disparaissait? Mon temps étant épuisé, je reviendrai dans les blocs de cinq minutes, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député d'Arthabaska. Je cède maintenant la parole à M. ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. Picotte, vous avez la parole.

Réponse du ministre M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. Je pense bien que je ne répondrai pas aux questions du député d'Arthabaska dans cette première partie-là. J'aurai l'occasion, moi aussi, dans les cinq minutes qui me sont allouées, selon la tradition parlementaire, d'y revenir sur plusieurs points. Je voudrais également à mon tour brosser le tableau de ce que sont les négociations du GATT, puisque c'est important qu'on se dise exactement comment ça fonctionne.

La première chose qu'il est important de souligner et qui va peut-être répondre à certaines interrogations de mon collègue, c'est de dire qu'il y a une coalition qui existe, M. le Président, dont font partie le gouvernement du Québec, l'Union des producteurs agricoles et la Fédérée. Donc, c'est bien sûr que toutes les fois que mon collègue d'Arthabaska se demande pourquoi il y a des gens qui ne répliquent pas, c'est parce qu'on défend la même chose, c'est parce qu'on prépare les papiers ensemble, c'est parce qu'on fait toutes ces préparations-là ensemble. Tout le monde est consulté et assis à la même table de discussion. C'est bien évident que, quand on en arrive à un consensus, si on commence à se contester les uns les autres après avoir fait un consensus et des discussions... C'est sûr que là ça tombe sous le sens, M. le Président: bien sûr que l'UPA ne contestera pas, bien sûr que la Coopérative ne conteste pas; nos papiers sont préparés avec eux autres.

À partir de ce moment-là, évidemment, je crois déceler dans ce que me dit mon collègue d'Arthabaska qu'il ne semble pas avoir une parfaite confiance envers l'Union des producteurs agricoles dans ce domaine-là, en particulier - parce que je ne veux pas mal l'interpréter -puisqu'il se demande pourquoi l'UPA ne contredit pas, ne conteste pas, etc. Mais nous faisons partie, M. le Président, de la coalition et, à venir jusqu'à date, moi, je pense que l'UPA est l'or- ganisme qui parte au nom des agriculteurs. Et si on a des indications à l'effet que ça ne doit pas être ça, s'il faut faire une coalition avec d'autres organismes, il faudra nous le dire. À ce moment-là, on évaluera ça chez nous. Mais, à date, voilà une des réponses que je voulais donner immédiatement.

Depuis la Deuxième Guerre mondiale, M. le Président, on assiste à une mondialisation de l'économie et, par le fait même, à une mondialisation des marchés. Cette mondialisation de l'économie se traduit par une intensification des échanges en marchandise, en services, en technologies et en capitaux. Non seulement les échanges globaux augmentent, mais leur nature se modifie également.

Aussi le commerce international des produits en matières premières perd de l'importance aux dépens du commerce des produits transformés et fabriqués. De même, le commerce international des services s'accroît progressivement au fur et à mesure que se développe l'économie des services des pays occidentaux. Enfin, l'évolution des échanges mondiaux suit la même tendance que connaît l'économie nationale: déclin des secteurs primaires et de l'activité de transformation des ressources et croissance des industries de fabrication et des services, qui accapare 70 % de l'emploi au Canada.

Aujourd'hui, le commerce mondial des marchandises totalise environ 3 000 000 000 $ alors que le commerce des services se chiffre à 700 000 000 000 $. On voit tout de suite le changement et la proportion. Donc, pourquoi les gens s'attaquent à ça? C'est, bien sûr, parce que tout est en évolution. On fait ça normalement partout, on s'ajuste partout. On s'ajuste dans tous les domaines. On s'ajuste parce qu'il y a une évolution et il y a un changement de cap complètement.

Parallèlement à la mondialisation de l'économie, il se produit une deuxième tendance lourde, complémentaire à la première, il s'agit de la formation de blocs économiques régionaux ou continentaux. La constitution de ces blocs régionaux s'inscrit dans un processus graduel d'intégration économique impliquant deux ou plusieurs pays. Là, je pense qu'on n'a pas besoin - ça tombe encore sous le sens - de faire beaucoup de discours et beaucoup de phrases pour mentionner que c'est des blocs régionaux, maintenant: ce n'est plus une entité qui défend son entité et son territoire. (10 h 20)

II n'y a qu'à regarder ce qui se passe du côté des pays de l'Europe, il n'y a qu'à regarder ce qui se passe du côte de l'Union soviétique, avec des pays qui s'allient, des pays qui se mettent ensemble. C'est un petit peu... Entre guillemets, on se fédéralise partout. Il y a à peu près juste nous autres qui parlent de ne plus se fédéraliser, mais on se fédéralise partout. Les gens se regroupent partout pour se donner une

force. Nous, on est déjà regroupés et on parle peut-être d'autre chose, mais, ça, c'est un autre sujet, M. le Président, qu'on abordera plus tard. On se fédéralise partout pour se donner de la force, pour être en mesure de défendre des choses, peut-être pas de la même façon que, nous, on le fait, mais, ça, il y a plusieurs façons de le faire.

Je vous dis que, ça, c'est un autre constat qu'on fait et ce n'est pas sorcier: à partir du moment où on devient quelque 300 000 000 de personnes dans la Communauté économique européenne, bien, on a la force de quelque 300 000 000 de personnes avec la Communauté européenne, on a la force de 250 000 000 de personnes aux États-Unis, on a notre force à nous, au Canada, et on est obligés, même au Canada, de faire des alliances avec d'autres, si possible, qui ont les mêmes raisons de croire et de défendre les points de vue qu'on défend pour se donner un peu de force.

Alors, c'est évident, M. le Président, que c'est cette nouvelle conjoncture-là qui fait en sorte que ça change complètement les discussions. Ça change à un point tel que même la Communauté économique européenne est une force relativement importante, au moment où on se parle, à cause justement de son poids maintenant beaucoup plus important aussi que les États-Unis. On a aussi l'autre partie qui fait qu'avec l'URSS et ses composantes on a un potentiel de quelque 500 000 000 de personnes, tantôt, qui vont s'allier dans le monde de l'Europe pour faire des affaires, pour faire des échanges, pour faire de la transformation, pour expédier des produits, pour en recevoir, pour en acheter, pour en vendre, etc. Voyez-vous que ce n'est plus la même affaire? Donc, les unions économiques sont des unions, évidemment, qui changent complètement la philosophie de discussion au niveau du GATT.

En adhérant, M. le Président, au GATT, en 1986, et en s'engageant sur la voie de l'association économique avec le Canada et les États-Unis, le Mexique poursuit lui aussi un double processus d'intégration économique à l'économie mondiale et à l'économie continentale. Sous l'influence croissante des firmes multinationales, les activités industrielles et les services de pointe s'étendent à tous les continents, car la mobilité des ressources en capitaux et en technologies est de plus en plus facilitée. Les méthodes de gestion et de production se standardisent progressivement, ce qui permet d'uniformiser la compétitivité du travail, des revenus, des modes de vie des différentes nations.

L'amélioration des revenus se traduit partout par une demande accrue des biens de consommation, dont particulièrement les produits alimentaires, et la consommation des produits animaux, les viandes, les oeufs, les produits laitiers, s'accroît aux dépens des céréales traditionnelles. De même, la demande interne et internationale des produits transformés progresse plus rapidement que celle des produits peu transformés. L'apparition des pays nouvellement industrialisés ainsi que la transition des anciens pays communistes de l'Est vers le système économique libéral vont accroître la concurrence internationale et possiblement augmenter les conflits commerciaux entre les différents pays, M. le Président.

En agriculture, on le sait, mon collègue a fait un résumé assez bien des discussions du GATT, historiquement, qu'avant on n'avait pas pris en compte tout ce domaine-là de l'agriculture. J'ai donné une partie des réponses pourquoi on en tient compte maintenant: à cause de la différence et du changement. On a parlé de 3 000 000 000 $ comme chiffre d'affaires dans un domaine bien précis alors que, dans les services et les objets transformés et le commerce d'objets de transformation, on est rendus à 700 000 000 000 $. Vous voyez la différence.

Alors, depuis leur lancement les négociations du GATT ont été polarisées autour des préoccupations intéressant principalement deux grandes puissances agricoles mondiales: les États-Unis et la Communauté européenne. Bien sûr, ce sont d'ailleurs ces deux premiers exportateurs mondiaux qui se livrent, à coups de milliards de dollars - et non pas nous mais eux - une concurrence acharnée sur leur propre marché et sur les marchés des autres pays. Le Canada et le Québec peuvent difficilement supporter cette concurrence déloyale car les capacités budgétaires sont limitées par rapport aux États-Unis et à la CEE.

Il y a un avantage aussi, M. le Président, à limiter ce que font les gouvernements. Je pense que ce n'est pas sorcier, il faut se le dire. Demain matin, si on faisait une bataille à coups de milliards, je pense bien que la CEE et les États-Unis pourraient mettre quelques milliards de plus. Et, à quelques milliards de plus, on ne pourrait pas les suivre, nous, et on serait complètement anéantis de toute façon.

Alors, je pense que c'est important qu'on souligne ça. C'est Important de vous dire, M. le Président, finalement, que les négociations du GATT se déroulent présentement. Donc, je vais résister à la tentation de mettre nos plans sur la table aussi parce qu'on est en négociations. Donc, est-ce qu'on veut qu'on fasse la publication de nos négociations, qu'on dise ce qu'on veut faire, où on veut aller, ce qu'on suggère, etc., pour que les autres l'apprennent et, finalement, soient plus en mesure de nous combattre? Une négociation, c'est une négociation, M. le Président.

Je pense qu'il s'agit de sauvegarder et de répéter qu'on sauvegarde les systèmes de gestion de l'offre par le renforcement de l'article XI, c'est clair, ça. On veut garder nos produits verts, on veut le renforcement de l'article XI. On veut sauvegarder les systèmes de gestion de

l'offre et, à date, personnellement, ce que j'ai compris du gouvernement fédéral qui négocie pour nous, parce que c'est le gouvernement fédéral qui négocie, M. le Président, c'est qu'on défend exactement la résolution qu'on a passée ici, à l'Assemblée nationale, les revenus, la stabilisation, l'assurance-récolte, le financement agricole et la gestion de l'offre.

Donc, tant et aussi longtemps que c'est ça qui est défendu, M. le Président, ça nous satisfait et on ne se mettra pas à crier au loup et à se tirer en l'air parce que la position est bel et bien défendue. Comptez sur moi, si la position n'est pas bien défendue, on pourra être en mesure de crier à ce moment-là, mais c'est à ce moment-là qu'on devrait crier tout simplement.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je cède la parole à M. le député d'Arthabaska, M. Baril, pour les cinq prochaines minutes.

Argumentation M. Jacques Baril

M. Baril: M. le Président, merci. J'ai juste deux petits points que j'aimerais rectifier d'abord. Le ministre dit que le député d'Arthabaska ne semble pas avoir confiance à l'Union des producteurs agricoles. Je vais vous dire que j'ai beaucoup plus confiance à l'Union des producteurs agricoles que j'ai confiance au ministre parce qu'avec toutes les démarches que l'Union des producteurs agricoles a faites à travers le monde... Elle a fait un travail qui, normalement, aurait dû être fait par le gouvernement. Elle a fait la job du gouvernement, que le gouvernement n'a pas faite.

La seule interrogation que je me suis posée tout à l'heure, c'est: Pourquoi l'Union des producteurs agricoles n'a pas dit ou n'a pas démenti, si ce n'est pas vrai, l'affirmation à l'effet qu'advienne que pourra - et ça, c'est immédiatement après avoir voté la motion ici, à l'Assemblée nationale, que le gouvernement aurait dit ça à l'Union des producteurs agricoles, à son président - au GATT, que nos piliers de l'agriculture soient protégés ou pas, nous autres, on va continuer à appuyer le gouvernement fédéral? C'est juste le reproche que j'ai fait à l'UPA; ça n'enlève pas ma confiance envers cet organisme qui a pris la place du gouvernement pour défendre nos politiques à l'étranger.

L'autre affaire, dans l'affirmation, c'est quand le ministre dit qu'à travers le monde on essaie de se fédéraliser pour mieux survivre et que, nous autres, on parle de se séparer. Il ne faudrait pas que le ministre aille trop loin là-dedans parce que, ailleurs, on essaie de se fédéraliser au point de vue économique, de faire des échanges économiques, et c'est toujours ce que, nous, du Parti québécois, nous avons défendu, une souveraineté politique dans une association économique. Si, actuellement, au GATT, c'était une fédération, comme le ministre en fait mention là, il n'y aurait pas de discussion. Les 108 pays, il y aurait un gouvernement qui mènerait ça, ces pays-là, et il déciderait. Il dirait: Demain matin, c'est ça. C'est quoi qui fait le problème au GATT? Il y a 108 pays et chaque pays qui est représenté est autonome politiquement. Ils sont indépendants politiquement et c'est ça qui achoppe au niveau des négociations, comprenez-vous? Et au niveau de l'association économique, bien, c'est ça, ils essaient de s'entendre. Donc, qu'on ne vienne pas dire que, pendant que les autres se fédéralisent, nous autres, on essaie de se diviser, c'est complètement faux.

Mais ce sur quoi je veux revenir, M. le Président, c'est sur la dernière phrase par quoi le ministre a terminé. Il a dit: On a voté une résolution et on continue à la défendre à tour de bras. Suite à cette motion qui a été votée ici, à l'Assemblée nationale, comment le ministre explique-t-il la déclaration de son sous-ministre qui dit: Advienne que pourra, on va appuyer toujours le gouvernement fédéral dans ses négociations? J'ai donné la démonstration tout à l'heure que le gouvernement fédéral ne les défend pas, il ne les a jamais défendues concrètement, la position du gouvernement du Québec, la position de l'Union des producteurs agricoles et la position de la Coopérative fédérée de Québec.

C'est là qu'est mon point d'interrogation, et le ministre n'a pas répondu à cette question-là. C'était en plein dans le moment crucial des négociations où tout le monde en discutait et chaque pays faisait connaître sa volonté de défendre ses piliers. Ça, c'était il y a deux ans, en 1990. En plein dans cette période-là, le gouvernement, par le biais de la bouche de son sous-ministre, s'en va déclarer que, nous autres, advienne que pourra, ce n'est pas grave, on va appuyer le gouvernement fédéral. Il faut quand même, M. le Président, être en mesure de juger des conséquences d'une telle déclaration. (10 h 30)

Cette information-là, elle est venue à Ottawa. Elle est allée aussi à la table des autres pays négociateurs. C'est le Québec, c'est nous qui allons être les plus touchés, les plus affectés par l'abolition de l'article XI du GATT. Tous les autres pays ont appris en même temps que ça ne nous ferait pas grand-chose. Même si c'était enlevé, ça ne nous ferait pas grand-chose. C'est grave, M. le Président, cette déclaration-là, et le ministre n'a pas répondu à ça. Comment ça se fait qu'en pleine phase cruciale le gouvernement fait connaître son intention? Il vient de dire tout à l'heure: On est en pleines négociations, il ne faut pas trop faire connaître nos affaires. Ça fait deux ans que les autres pays connaissent que le gouvernement du Québec s'en fout des

piliers de l'agriculture québécoise. Il s'en fout, ça a été dit par la bouche de son sous-ministre. Probablement que l'UPA ne l'a pas répété ou ne l'a pas dénoncé, connaissant la gravité du geste, des paroles de ce sous-ministre-là, que ça irait à d'autres tables de négociation et que déjà on affaiblirait notre position.

Donc, le ministre, je l'invite à répondre pourquoi, si c'est crucial actuellement, ce n'était pas si crucial que ça. Quand il est allé, en février dernier, faire une petite tournée, à la sauvette, en Europe pour défendre nos piliers, comment il a été reçu? Comment il a été perçu? Quel discours il a tenu? À son retour, on regardait, il y avait deux versions. Le ministre a dit: Ce n'est pas pire, on a marqué des pas, on a marqué des points, je pense qu'on va avoir été compris. On lisait d'autres journaux d'autres organismes gouvernementaux et ils disaient: Ils n'ont rien à faire là, les Allemands et d'autres pays, entre autres, les États-Unis... Dunkel lui-même, le directeur général, il ne veut rien savoir. C'est du temps perdu, ce qu'on a fait là. Et le ministre, lui, il était optimiste tout en sachant que ces pays-là savaient la position de son gouvernement.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député d'Arthabaska. M. le ministre, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, moi, écoutez, je ne ferai pas de chicane, ce matin, avec le député d'Arthabaska. Je sais jusqu'à quel point il est prime. La minute que tu dis une phrase que lui ne souhaiterait pas entendre, ça le fait sauter par-dessus le bâtiment. Moi, je répète et je dis que le gouvernement du Québec défend toujours la même position et va toujours continuer de défendre la même position. Je le ramène à toutes les autres discussions et à toutes les autres déclarations qui ont pu se faire. A ce moment-là, comment interpréter, M. le Président, ce qu'a dit le président de l'UPA, à l'émission, «Le Point»? Il n'a pas passé à la télévision communautaire quelque part, là. Il a dit à la télévision, au «Point», au vu et au su de tout le monde - peut-être qu'on ne l'a pas regardé ce soir-là pour quelques-uns, mais on peut toujours aller chercher la référence - que, évidemment, le statu quo ne serait pas souhaitable et ne serait pas respectable non plus de notre part, parce que ça nous fait mal; ça nous ferait encore plus mal. Il a dit: Oui, c'est évident, il n'y a pas une personne le moindrement sensée qui pourrait affirmer qu'il ne faut pas signer l'accord du GATT. L'accord du GATT va arriver, à un moment donné dans le temps, après une négociation de tout le monde. Ce que, nous autres, on dit, c'est: II faut prévoir que si ça n'arrive pas tout à fait à notre goût, il faut être prêts à faire face à n'importe quelle éventualité. Et ça, M. le Président, il ne faut pas «paranoïer», puis il ne faut pas penser que prévoir des choses dans la vie... Le député d'Arthabaska l'a fait, puis, moi, je le fais, puis tout citoyen intelligent le fait. Prévoir son emprunt de maison, puis prévoir tout ce qui peut nous arriver plus tard, ce n'est pas un signe de faiblesse, ça. Ce n'est pas un signe de faiblesse. Non, c'est un signe d'intelligence.

Donc, on ne tirera pas sur tout ce qui bouge. De toute façon, pour l'information du député d'Arthabaska, je trouve ça un petit peu curieux qu'on nous reproche d'avoir été essayer de défendre des choses au GATT, puis que, pas longtemps après, c'est l'UPA qui est partie et qui est allée faire la même tournée européenne que la nôtre pour tâcher d'aller essayer de vendre et consolider nos positions. Il n'y a que les gens qui ne se sont pas déplacés qui peuvent reprocher aux gens de s'être déplacés pour aller défendre la position, parce que c'est ça, la réalité. On est en négociations. On a des gens à convaincre. On a des gens à convaincre et, bien sûr, nous sommes allés les convaincre, puis on est revenus de là en disant qu'il y avait une certaine ouverture, bien sûr, parce qu'à l'article XI il n'y avait même pas d'ouverture là-dessus de personne. Là, au moins, il y a une ouverture du côté de la mesure de sauvegarde.

Maintenant, M. le Président, on n'inventera rien non plus, puis le député d'Arthabaska a dû l'entendre dans son milieu comme, moi, je l'entends régulièrement dans leur milieu. Les agriculteurs, ils n'ont pas seulement peur du GATT. Les agriculteurs, ils sont profondément... Quand mon sous-ministre le souligne, il ne souligne pas ça à tort mais à raison. Il ne souligne pas ça à tort. Il souligne ça, parce que c'est ce qu'on entend régulièrement. Les agriculteurs, ils ont peur de la diminution des quotas tous les ans, puis, des fois, deux fois par année. Ça aussi, ça fait mal. Ils se requestionnent, eux autres aussi, sur l'histoire des quotas. Ils se requestionnent sur l'histoire des quotas: Jusqu'à quel point ils vont pouvoir continuer d'en perdre, des quotas, puis à quel pourcentage?

Ça fait que, ça, ce n'est pas un questionnement du sous-ministre adjoint de l'Agriculture. C'est un questionnement de l'UPA. C'est un questionnement des agriculteurs, puis c'est un questionnement de tout le monde, M. le Président. Et, moi, je regrette, je ne discuterai pas là-dessus d'aucune façon, parce que le député d'Arthabaska devrait bien savoir qu'il y aura à préparer, peu importe où on se situe, un après-GATT que nous souhaitons signer à la volonté de la défense qu'on fait de notre position.

Donc, la défense qu'on fait de notre position - ai-je besoin de le répéter? - c'est le renforcement de l'article XI. C'est la protection de nos programmes verts, l'assurance-stabilisa-tion, l'assurance-récolte, le crédit agricole, nos

piliers, finalement. Nous souhaitons, que les négociations du GATT se terminent en signant ça. Et, pour nous, ça va nous satisfaire amplement. Maintenant, il y aura un après-GATT, comme je l'ai dit. Il faudra vivre avec l'après-GATT. Et, pour vivre avec l'après-GATT, on s'y prépare de toutes les façons.

Alors, il n'y a personne qui va empêcher qui que ce soit de travailler, face à la mondialisation des marchés, sur des formules qui vont diminuer l'inquiétude quant à la diminution des quotas que les agriculteurs ont sur le terrain, les inquiétudes du GATT et les inquiétudes du résultat de l'après-GATT, M. le Président. Donc, nous travaillons. Nous faisons notre devoir et l'UPA le fait aussi. Elle est allée elle-même en Europe, et je soulignerai, M. le Président, qu'avant de partir pour l'Europe l'UPA et mon sous-ministre aux affaires économiques ont revérifié le message et les papiers pour être bien sûrs que ça n'altère pas cette discussion-là, et les messages et les papiers que véhicule l'UPA n'altèrent en rien la position que nous avons au GATT. Ça a été vérifié, ça. Ça a été vérifié avec M. Jacques Proulx, avant de partir, et avec M. Loubier. Ils ont travaillé ensemble.

Donc, que le député d'Arthabaska veuille tirer sur quelqu'un en particulier, c'est son droit, mais, moi, je regrette, mais on est là, nous, pour faire une job et on va continuer de la faire. La minute où on sentira que quelqu'un faiblit en faisant cette job-là, bien, je regrette, mais on le dira. J'ai eu l'occasion de le dire quand je suis allé à la conférence fédérale-provinciale et ça a provoqué un voyage, par la suite, pour aller défendre nos positions. Tant mieux. Si ça revient, je le dirai aussi, et je ne suis pas gêné pour le dire.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je cède donc la parole, pour les cinq prochaines minutes, à M. le député de Berthier, M. Houde.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. Les négociations du GATT auront fait couler beaucoup d'encre, M. le Président. Il faut admettre que les médias ont consacré beaucoup d'espace à ce sujet, mais il faut avouer que cette attention est méritée, car les résultats de ces négociations auront sûrement un impact sur la vie économique de notre province.

J'aimerais, M. le Président, vous souligner le travail qui s'est fait dans ma région - l'une des plus belles régions de la province, la région de Lanaudière - en agriculture, par le comité qui a été mis en place, la coalition qui a été formée avec le monde agro-alimentaire et les gens du milieu. Nous avons mis sur pied ce comité pour être capables de sensibiliser le premier ministre, M. Brian Mulroney, et nous lui avons fait parvenir, en date du 3 février 1992, une lettre lui demandant de faire tout en son possible pour pouvoir respecter notre agriculture au Québec et également au Canada. (10 h 40)

Toutefois, l'accent placé sur ce sujet a fait passer sous silence la performance de l'agriculture québécoise au niveau du revenu net au Canada. Pour la troisième fois consécutive, le Québec s'est hissé au premier rang des provinces pour le revenu net total et aussi pour le revenu net par ferme. Je dirais même que, depuis 1985, c'est quatre années qu'il s'est hissé au premier rang. En 1991, le revenu net des agriculteurs québécois s'est situé à environ 24 000 $ par ferme, soit deux fois la moyenne canadienne. M. le Président, à titre de référence, les producteurs ontariens ont bénéficié d'un revenu net de 11 168 $ par ferme. Enfin, soulignons qu'avec 17,2 % des recettes agricoles le Québec dispose de 30,4 % du revenu net enregistré au Canada.

Cette performance est due, bien entendu, à l'excellence des productrices et des producteurs québécois. Cela démontre qu'ils sont capables de produire efficacement et de relever le défi de la concurrence, mais cette performance est aussi due à certains programmes agricoles offerts par le gouvernement. Ces programmes que l'on se plaît à nommer nos piliers du développement et de l'agriculture sont constitués des programmes de gestion de l'offre, du crédit agricole, de l'assurance-stabilisation des revenus et de l'assu-rance-récolte. Ce sont des programmes qui supportent à la fois le revenu agricole des individus engagés dans ce secteur économique et aident à procurer le financement nécessaire à développer la production agricole.

Ils sont importants, ces programmes, M. le Président. Voici l'impact qu'ils représentent: gestion de l'offre, 1 600 000 000 $ de recettes monétaires, soit 45 % des recettes monétaires agricoles du Québec; assurance-stabilisation du revenu disponible dans les productions comme le boeuf, les céréales et ovins, porc et pommes de terre représentant 30 % des recettes monétaires agricoles ou 1 000 000 000 $, si vous voulez. Donc, les programmes d'ASRA et de gestion de l'offre touchent des productions comptant pour près de 75 % des recettes monétaires en agriculture au Québec. Au niveau du crédit agricole, il faut souligner que l'Office du crédit agricole garantit près de 2 000 000 000 $ de prêts à nos agriculteurs et agricultrices du Québec. Enfin, l'assurance-récolte protège le revenu des agriculteurs contre les pertes découlant des caprices de la température. Les producteurs sont les premiers à comprendre leur importance; il ne faut pas s'étonner qu'ils défendent ces piliers avec autant d'acharnement.

Dès le début de ces négociations, le gouvernement du Québec s'est associé aux producteurs agricoles pour élaborer une position pouvant assurer le développement de l'agriculture

québécoise. Cette position a été répétée à maintes reprises et il me fera plaisir de la répéter de nouveau. La voici: le renforcement de l'article XI du GATT afin de permettre l'application de la gestion de l'offre; la classification des programmes d'assurance-stabilisation des revenus, d'assurance-récolte, de crédit agricole dans la catégorie des programmes verts, c'est-à-dire non sujette à la réduction du budget ou à l'imposition des droits compensatoires. C'est cette position que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et le ministre du Commerce extérieur ont le mandat de défendre. Et c'est ce qu'ils ont fait. D'ailleurs, cette position se retrouve dans la proposition canadienne aux négociations du GATT.

M. le Président, les négociations du GATT sont entrées dans une phase cruciale; plusieurs disent même dans une phase terminale. Dans ces négociations, il n'y a pas que l'agriculture qui est en cause. Malgré les différents intérêts qui sont représentés dans ce débat, malgré tout ce que l'on peut dire, la position du Québec demeure inchangée. Cela démontre bien, M. le Président, la volonté du gouvernement du Québec de défendre jusqu'à l'ultime limite de ses moyens les intérêts des agriculteurs et agricultrices du Québec.

M. le Président, le Québec souhaite que ces négociations aboutissent. Il faut en arriver à un accord au GATT afin de régulariser les relations commerciales internationales. Rappelons que le Québec exporte près de 40 % de sa production nationale brute. Il est également nécessaire qu'une entente intervienne au GATT afin d'obtenir le renforcement de l'article XI. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Je cède la parole au député d'Arthabaska, M. Baril.

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président. Je ne sais pas si le député de Berthier s'est trouvé encouragé comme ancien producteur de poulet ou d'oeufs... C'était le poulet, je crois...

M. Houde: Les deux, oui.

M. Baril: ...les oeufs et le poulet. Je ne sais pas si le député de Berthier s'est senti encouragé suite à la déclaration du sous-ministre adjoint à l'Agriculture quand ce dernier a dit que, si le rapport Dunkel était approuvé tel quel ou signé tel quel... Et je le lis parce que c'est important. Je ne voudrais pas qu'on pense que je dis n'importe quoi. On dit bien ici: «L'industrie laitière subsisterait à long terme, mais il devrait y avoir à court terme des ajustements importants». Pour ce qui est des autres productions contingentées - il les nomme - dans le poulet, le dindon et les oeufs, le sous-ministre ne pouvait être plus clair: «elles seraient lavées». Ça vous a bien encouragé d'entendre ça?

M. Houde: Le ministre m'a encouragé dans la déclaration qu'il a faite tantôt.

M. Baril: Vous qui êtes dans une région où il y a des producteurs dynamiques, justement, d'oeufs, de poulet, est-ce que ces producteurs-là se sont sentis emballés, encouragés par une telle déclaration? Cela a un impact économique de plus de 400 000 000 $ sur l'agriculture québécoise, et le sous-ministre qui est responsable des affaires économiques - ce n'est pas le sous-ministre responsable des affaires sociales, c'est des affaires économiques au ministère de l'Agriculture - il vous a dit que vous seriez lavés. Vous n'avez pas dit un mot. Je ne vous ai pas entendu. Si vous avez fait une déclaration dans un journal ou quelque part, faites-la-moi parvenir. J'aime toujours ça m'informer. Mais je ne vous ai pas entendu dire un mot. Le ministre non plus. Ça m'a étonné davantage quand, lors d'une question que je lui posais en Chambre, il a même approuvé ce que son sous-ministre avait affirmé, que des productions agricoles au Québec seraient lavées suite à ça.

Je ne sais pas si c'est ça qui est une politique dé motivation face aux agriculteurs. Il y a un bout du discours ou de la lecture que le député de Berthier a fait qui était bon. C'est correct. Je vous félicite d'encourager les producteurs, de dire que les producteurs au Québec sont dynamiques et sont capables. Il s'agit de le faire. Ça fait deux ans que le ministre est là et je ne l'ai jamais entendu dire ça. Tout ce que je l'ai entendu dire, c'est de - démobiliser plutôt les agriculteurs.

Sur ce que le ministre a dit tout à l'heure, quand il dit qu'on continue à défendre toujours la même politique, qu'on défend nos quatre piliers et qu'on est allés dans les autres pays et qu'on leur a démontré l'importance et la nécessité... J'ai déjà dit, M. le ministre, que, pour être convaincant, il faut d'abord être convaincu. Je ne suis pas sûr que les autres pays vous prennent au sérieux quand ils ont pris connaissance de la déclaration, encore une fois, de votre sous-ministre qui a dit: Peu importe ce qui arrive au GATT, on va appuyer le gouvernement fédéral pareil. Je ne sais pas si ça démontre qu'on est convaincu de la nécessité de nos offices de commercialisation. Depuis un mois ou deux, n'importe qui au Québec a charrié là-dessus, sur nos offices de commercialisation. Je les ai nommés tout à l'heure. Ça m'a étonné. D'habitude Alain Dubuc fouille plus ses affaires que ça. C'est l'éditorialiste de La Presse, je pense, Alain Dubuc. D'habitude il fouille plus ses affaires que ça. J'ai été renversé de l'édito-rial - je ne dirai pas le terme - qu'il a écrit en dénonçant les offices de commercialisation au Québec. Jean-Robert Sansfaçon, du journal Le

Devoir, un éditorialiste fou comme... Vous savez, M. le ministre, le mot qu'on pourrait dire. Ça n'a pas de bon sens, un éditorialiste... Comme si quelqu'un m'avait demandé, à moi, d'écrire un article sur l'opération à coeur ouvert et que j'avais dit: Je vais le faire. C'était aussi fou que ça, comprenez-vous?

Quand Michel Gaucher, le président de Steinberg, a dit devant l'Economie Club ou je ne sais pas quelle grosse association que ça serait plus profitable à lui s'il achetait tous ses produits aux États-Unis... Pour un gars qui est dans l'alimentation, c'est inconcevable de dire des conneries semblables, comprenez-vous? Je n'ai jamais entendu le ministre s'objecter à ça, dénoncer ces personnes-là.

J'ai écrit un texte que j'ai envoyé à ces mêmes journaux-là. Le titre, c'était: «Les producteurs agricoles ne sont pas des profiteurs», parce que c'était de ça qu'on les accusait. Mais ça n'a pas passé. Je comprends que, pour un éditorialiste, recevoir un article de journal et se faire reprendre par un agriculteur... Je crois bien que je ne suis pas assez haut pour eux autres là, surtout qu'il y avait eu du mépris pour ce monde-là. Mes articles n'ont pas passé, ni dans Le Devoir, ni dans La Presse. J'aurais cru que le ministre prendrait la défense des offices de commercialisation s'il était au courant, s'il y croit et s'il est convaincu de la nécessité, de l'importance de ces offices-là. Le ministre n'a pas dit un mot. Je le répète: Si le ministre est convaincu de tout ça, pourquoi il n'a pas défendu les agriculteurs et les agricultrices? Pourquoi le ministre n'a pas dénoncé la démarche ou les paroles irresponsables de son sous-ministre qui disait: Des productions vont être lavées? Sur quoi - le ministre doit savoir ça, c'est son sous-ministre - son sous-ministre s'est basé pour dire qu'on n'est pas compétitifs dans ces productions-là et qu'on serait lavés? J'aimerais ça que le ministre nous dise sur quoi. (10 h 50)

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député d'Arthabaska. M. le ministre.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, le député d'Arthabaska se fâchera s'il veut, il sautera pardessus le parlement, ça ne me dérange pas, mais je vais être obligé de le rappeler un petit peu à la logique et de lui dire que c'est un démagogue. Là, ce que le député d'Arthabaska est en train d'essayer de faire, et il n'y a personne qui croit ça... Il n'y a personne qui croit ça dans l'UPA, il n'y a personne qui croit ça nulle part, y compris ceux qui nous entendent, et c'est peut-être pour ça... Ce genre de charriage là fait en sorte, peut-être bien, d'influencer des éditorialistes à écrire autre chose et à aller dans l'autre sens, il ne rend justement pas service à la classe agricole quand il tient ce genre de discours là. Il veut savoir l'explication, je vais la lui donner. Je vais la lui donner immédiatement. Quand on tente de faire croire que ces déclarations-là viennent du sous-ministre, M. le Président, on est démagogue, on est ignorant ou bien on essaie de tromper la population. Le sous-ministre n'a rien fait d'autre que prendre le rapport Dunkel et dire: Si Dunkel était appliqué comme ça, ça serait ça que ça donnerait comme résultat.

Moi, je regrette, je n'embarquerai pas dans la philosophie qui veut qu'on trompe les gens et qu'on leur conte des menteries et des broues. J'ai connu ça sous d'autres paliers de gouvernement et il y en a même, des menteurs, dans tous les gouvernements. Moi, je n'ai pas envie de me comporter comme ça. Je n'ai pas envie de dire aux agriculteurs: Dunkel a dit ça, mais dormez tranquilles parce que, si ça passe, ce n'est pas si pire que ça. Ça, c'est parler des deux côtés de la bouche en même temps, c'est se cracher dans le dos en même temps et c'est cracher dans la face des agriculteurs.

Je dis que le rapport Dunkel, tel qu'écrit, je suis obligé de vivre avec. Je ne l'ai pas nommé, Dunkel, moi; ce n'est pas un de mes employés, Dunkel. Je n'ai pas nommé Dunkel. Dunkel, tel qu'il écrit ses papiers, c'est mauvais pour l'agriculture et je pense qu'on a le droit de le dire et mon sous-ministre a bien fait de le dire. À moins que le député d'Arthabaska me dise, lui... Avec les tarifs proposés par Dunkel, entre 61 % et 86 %, est-ce que le député d'Arthabaska peut dire aux agriculteurs qu'ils sont en sécurité? Il voudrait qu'on dise aux agriculteurs: Vous êtes en sécurité! On ne dira pas aux agriculteurs: Vous êtes en sécurité avec le papier de Dunkel. Ce n'est pas le papier de Jean-Yves Lavoie qui est déposé, ce n'est pas le papier d'Yvon Picotte, ce n'est pas le papier du député d'Arthabaska; c'est le papier de Dunkel. On dit: Dunkel, tel qu'écrit, c'est mauvais, ce n'est pas bon, et on le dit aux agriculteurs. On espère qu'en leur disant ça ils vont encore travailler plus fort pour nous aider à nous protéger. C'est ça que ça veut dire. Ça, c'est la différence entre ça et les endormir.

Ce qu'est en train de faire le député d'Arthabaska - et il ne rend pas service aux agriculteurs - il essaie de les endormir en disant que c'est mon sous-ministre. Ne vous trompez pas, ce n'est pas mon sous-ministre qui a dit ça. Mon sous-ministre a bien fait de dire: Né vous endormez pas parce que Dunkel, ce n'est pas bon pour nous. On commente un papier officiel, M. le Président, c'est ça qu'on fait. C'est un papier officiel qui a été déposé. Ce n'est pas une foire internationale, ces discussions-là, c'est mieux organisé que le député d'Arthabaska le pense. Dunkel, c'est le négociateur, il n'y a personne qui l'a changé, il dépose un papier et on nous dit: Ne le prenez pas au sérieux et ne le commentez pas! Je regrette, ce n'est pas le genre de langage que je vais tenir, moi, devant la classe

agricole.

Moi, je suis un petit peu plus prudent et, avant de regarder mon sous-ministre, vous allez regarder dans votre cour. Vous irez regarder ce que dit Landry, vous regarderez ce qu'a dit votre chef pas plus tard qu'hier sur le libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Lui, il a dit qu'il faut être prudent, mais il faut que ça se signe. Bien oui! Moi, savez-vous ce que je dis? J'espère que ça ne se signera pas parce qu'on n'a pas assez de garanties que ça ne nous nuira pas. Vous voulez savoir, moi, ce que je dis et ce que votre chef dit. Vous allez commencer à regarder un peu dans votre cour, alentour, et vous allez dire à des gars comme Landry et à des gars comme Parizeau et à des gars comme bien d'autres dans votre entourage... Commencez par convaincre ces gens-là, mais ne nous faites pas mentir sur ce que Dunkel peut dire et sur ce qui est dangereux.

Je le répète: Dunkel est dangereux, il est inacceptable et on dit aux agriculteurs: Méfiez-vous et faites toutes les pressions qu'il faut. Et c'est pour ça que l'UPA est partie pour retourner en Europe, même s'ils ne croyaient pas, à l'UPA, dans le temps, quand on y est allés, que ça donnerait grand-chose. Ils n'y croyaient pas, mais, trois semaines après, ils ont décidé de se payer un voyage pour y aller, alors que, s'ils avaient embarqué dans l'avion gouvernemental avec nous, ils auraient au moins sauvé ça à l'Union des producteurs agricoles. Mais, ce n'est pas grave, parce qu'ils font leur devoir et, eux aussi, ils sont sûrs que Dunkel, c'est dangereux.

Mais je ne dirai, M. le Président, à personne que c'est mon sous-ministre qui trouve ça dangereux. Mon sous-ministre, il dit: C'est dangereux, Dunkel. Moi, je n'ai pas la prétention de vouloir fourrer les agriculteurs et de leur mentir en pleine face et de les endormir. Je ne les endormirai pas non plus. Dunkel, il est inacceptable et je dis à mon sous-ministre: Continuez de dire que c'est inacceptable. Continuez de faire en sorte que les forces vives du milieu, les gens qui sont dans la volaille, les gens qui sont dans les oeufs, dans les produits laitiers, les agriculteurs, le gouvernement du Québec, la coalition et le gouvernement fédéral défendent avec acharnement cette position-là.

Alors, ne dévions pas la discussion, M. le Président. Moi, je ne suis pas un de ceux qui vont faire dévier la discussion sur mon sous-ministre pour qu'on oublie que Dunkel est en train de préparer quelque chose qui pourrait nous faire mal. Alors, moi, je ne veux pas faire d'électoralisme avec ça. Peut-être qu'eux autres pensent qu'en faisant dévier la discussion sur le sous-ministre, M. le Président... Ils seraient peut-être heureux, eux autres, si ça passait, l'affaire Dunkel, de dire qu'on n'a pas défendu... pour vouloir prendre le pouvoir.

Moi, M. le Président, je ne ferai pas ce genre de discussion là et libre à ceux qui veulent le faire, mais vous ne me charrierez pas en me disant que c'est mon sous-ministre qui fait des déclarations quand, nous autres, on prend le papier de Dunkel, on l'analyse et on le rend public. Il est public, ce papier-là! Et, au cas où les gens n'auraient pas vu tout ce qu'il y avait de mauvais et de méchant là-dedans, on va le dire et il n'y a personne qui va nous empêcher de le dire. M. le Président, c'est mauvais, le papier de Dunkel, et il ne faut pas que ça nous arrive parce que, si ça nous arrive tel quel, c'est dangereux pour l'agriculture. «C'est-u» assez clair là? Ce n'est pas mon sous-ministre que je défends et ce n'est pas Dunkel. J'essaie de planter Dunkel pour que tout le monde se réveille pour tâcher de faire en sorte que ça fonctionne.

Donc, M. le Président, moi, je n'embarquerai pas dans du charriage inutile et j'espère que cette mise au point là est assez claire. Si jamais il prétend que ce n'est pas assez clair, il a juste à prendre ma déclaration, à la relire et il va trouver si c'est clair ce qu'on défend ou ce qu'on ne défend pas.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je cède la parole à M. le député de d'Iberville. M. Lafrance, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.

M. Yvon Lafrance

M. Lafrance: Merci, M. le Président. M. le Président, au cours des derniers mois, j'ai eu l'occasion de converser, à plusieurs reprises, avec des agriculteurs et des agricultrices du comté d'Iberville à propos des négociations du GATT. Bien sûr, ceux-ci m'ont fait part de leurs inquiétudes, mais ils m'ont aussi communiqué leur satisfaction vis-à-vis de la position qu'a adoptée le gouvernement du Québec dans ce dossier. Ils se montrent satisfaits des actions posées par le ministre de l'Agriculture, M. Yvon Picotte, et le ministre des Affaires internationales, M. John Ciaccia, pour la défense des intérêts des agriculteurs.

Nous sommes forcés d'admettre, M. le Président, que le gouvernement du Québec n'a pas ménagé ses efforts pour faire valoir son point de vue dans ces négociations. Dans un premier temps, j'aimerais souligner la collaboration constante du ministère de l'Agriculture avec le ministère des Affaires internationales à travers un groupe de coordination et un comité technique interministériel. Cette collaboration entre ces ministères est essentielle afin d'assurer une bonne défense des intérêts québécois, comme vient de le mentionner M. le ministre de l'Agriculture. D'ailleurs, cette approche de collaboration s'est aussi prolongée au niveau des intervenants agricoles québécois. Dès le début, l'UPA et la Coopérative fédérée de Québec ont été consultées pour définir la position québécoise

dans ce dossier. Dès le départ, notre gouvernement a cherché à regrouper les intervenants et à développer une position qui serait acceptée et défendue par tous, conscient que l'union serait notre force.

Quand j'ai dit que le Québec n'a pas ménagé ses efforts, M. le Président, pour protéger les intérêts des agriculteurs, je n'exagère pas. Premièrement, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et celui, aussi, des Affaires internationales ont été autorisés à participer aux réunions fédérales-provinciales de leur secteur respectif lorsque le GATT était à l'ordre du jour. On sait que ces conférences représentent un moyen privilégié de faire valoir notre position et c'est ce que les ministres ont fait.

Dans le contexte constitutionnel actuel et vu la position adoptée par le gouvernement du Québec vis-à-vis sa participation à ces conférences, le fait que les ministres de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et des Affaires internationales assistent à ces conférences démontre, hors de tout doute, que le gouvernement du Québec a fait de la défense des intérêts de son industrie agro-alimentaire une prioriété de plus haut niveau. (11 heures)

Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et député de Maskinongé m'a fait part, ce matin, que son premier geste comme titulaire de ce ministère fut d'écrire à son homologue fédéral pour réitérer la position québécoise. Ce fut le premier geste posé par M. le ministre et, depuis lors, le dialogue n'a cessé. De plus, le ministre a participé à deux missions à l'étranger, comme on vient de le mentionner, toujours pour suivre l'évolution des discussions et s'assurer que les intérêts du Québec étaient bien défendus. Ainsi, en décembre 1990, en compagnie du ministre des Affaires internationales, le ministre de l'Agriculture s'est rendu à Bruxelles lors d'une ronde intensive de négociations. Tout dernièrement, le ministre de l'Agriculture s'est rendu en Europe avec une délégation formée de ministres fédéraux et de représentants canadiens de l'agriculture. Ce voyage aura permis au ministre de rencontrer des représentants de la Communauté économique européenne, de l'Allemagne, de la Suisse, du Japon, des États-Unis, de l'Australie, d'Israël et de quelques autres pays.

Parmi les gestes posés par notre gouvernement, M. le Président, pour défendre la position du Québec, il faut souligner la création d'une coalition du ministère de l'Agriculture, du ministère des Affaires internationales, avec l'UPA et la Coopérative fédérée. Se sont aussi ajoutés à ce groupe des intervenants comme le Mouvement Desjardins et l'Université Laval, un geste, vous en conviendrez, en conclusion, M. le Président, qui voulait démontrer la volonté du gouvernement du Québec de défendre ces quatre piliers de la politique agricole québécoise.

M. le Président, je réalise que mon temps est terminé et j'aimerais conclure en disant que j'ai senti, moi, que les agriculteurs de la circonscription électorale d'ibervllle, que j'ai l'honneur de représenter ici, à l'Assemblée nationale, étaient satisfaits de la façon dont leurs intérêts ont été défendus dans ce dossier. L'avenir nous dira si ces efforts seront récompensés à 100 %, à 80 % ou à 60 %. Mais chacun sait que nous défendons notre position jusqu'à l'extrême limite. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député d'Iberville. Je cède la parole maintenant à M. le député d'Arthabaska, M. Baril.

M. Jacques Baril

M. Baril: D'abord, je vais juste souligner au début, au départ, au ministre que tout à l'heure... Ça fait deux, trois fois qu'il me dit: Je connais le député d'Arthabaska et il va sauter par-dessus les brancards, sauter par-dessus le parc ou je ne sais pas trop ce qu'il va faire de mes propos, mais là je constate, M. le Président, qu'il faudrait que je relance la même chose au ministre parce que, moi, je n'ai encore rien sauté. Il me semble que je me trouve bien calme ce matin comprends-tu? Oui, oui, ce matin, je le dis, je me suis conditionné. Mais, là, ça fait une couple de fois qu'il passe, qu'il manque de sauter par-dessus son bureau, comprends-tu? Alors, il faudrait regarder un peu où sont les malaises ce matin, hein?

Tout à l'heure, le ministre a mentionné aussi que le chef du Parti québécois a fait une déclaration hier ou avant-hier, je ne sais pas trop, hier, à l'effet que le libre-échange avec le Mexique, oui, il faut y aller à tout prix et toutes sortes d'affaires de même. On va faire une petite nuance. Là, il a parlé de Bernard Landry, j'y reviendrai tout à l'heure. Mais, au niveau de M. Parizeau, il a dit: Oui au libre-échange à trois, c'est inévitable, hein? Mais il ne doit pas se faire n'importe comment comme, vous autres, vous avez fait dans le libre-échange avec les États-Unis.

Il y avait des conditions qui se rattachaient à ça, le traité de libre-échange avec les États-Unis, comprends-tu? Ça fait trois ans qu'il s'applique. Vous n'avez rien fait, autant vous autres que le gouvernement fédéral n'a rien fait, comprends-tu?, pour répondre, pour appliquer ces conditions-là. Au niveau du Canada, on est rendu à 400 000 emplois perdus à cause de ce traité avec les États-Unis qui est mal appliqué. Gordon Ritchie, l'un des négociateurs de ce traité de libre-échange, l'a dit lui-même que ce traité a été mal préparé et non seulement a été mal préparé, mais maintenant il est mal appliqué parce qu'il n'est pas appliqué pantoute.

Qu'est-ce que votre gouvernement fait pour

rappeler le fédéral à l'ordre et l'appliquer? Il y avait des conditions qui se rattachaient à ça et les conditions, M. Parizeau aussi les rattache au traité de libre-échange avec le Mexique. Il dit: améliorer notre capacité à exporter. Mais, pour cela, il faut d'abord répondre à plusieurs exigences, énumère-t-il: une éducation de qualité, une réforme complète de la formation professionnelle - c'en était une condition, ça, dans le traité de libre-échange avec les États-Unis - l'introduction de nouvelles technologies dans les entreprises - c'en était une autre condition, ça, dans le traité de libre-échange avec les États-Unis pour qu'on devienne concurrentiels pour qu'il soit au moins profitable pour nous autres - accent sur la pénétration des marchés étrangers, innovation, capitalisation satisfaisante des entreprises. C'en est des conditions, ça, qui n'ont pas été respectées. Je n'ai jamais vu personne de votre gouvernement dénoncer l'inertie du gouvernement fédéral dans l'application du traité de libre-échange.

Je comprends un peu cette inertie de votre gouvernement quand votre chef, lors du discours inaugural, s'est pratiquement sacré à genoux devant le gouvernement fédéral, l'implorant de nous faire des offres, qu'il voulait rentrer dans la Constitution à tout prix. Ça fait qu'imaginez-vous, là, il ne faut pas faire de bruit, il ne faut rien faire. On est en train de sacrifier l'économie québécoise pour qu'on nous réinclue dans cet ordre constitutionnel qui a toujours désavantagé le Québec. Ça fait qu'avant de dire que M. Parizeau conduit le parti ou conduit le gouvernement dans n'importe quelle affaire avec le traité de libre-échange avec les États-Unis, je me charge, M. le ministre, de vous rappeler ces conditions-là qui sont essentielles à une négociation et à la survie de l'économie québécoise dans un traité de libre-échange à trois.

Je reviens quand même sur la déclaration irresponsable, vous me permettrez de le dire, là... Qu'il me dise que je suis démagogue ou n'importe quoi, je considère que c'est une déclaration irresponsable de son sous-ministre que d'envoyer ça de même en l'air, qu'il y a trois productions, au Québec, qui vont être lavées. Moi, je ne le crois pas. Je vous ai demandé tout à l'heure sur quels chiffres II s'était basé pour dire ça, qu'elles vont être lavées, ces productions-là. Sur quoi il s'est basé pour dire ça?

Est-ce que le ministre a pris connaissance, d'abord, du coût de production, au Québec et aux États-Unis, au niveau du poulet? Si on regarde entre 1971 et 1975, il y avait un écart de 0,54 $ le kilo entre le coût de production américain et ici. Aujourd'hui, on retrouve un écart seulement de 0,17 $ le kilo. Est-ce que le ministre a pris connaissance d'une autre étude qui vient d'être publiée? Moi, par cette étude-là, M. le Président, j'ai été renversé de connaître combien l'agriculture américaine est subventionnée à tour de bras, hein! À tour de bras! C'est une étude du gouver- nement fédéral; donc, le ministre, lui qui est fédéraliste, il ne peut pas nier ça, c'est une étude du gouvernement fédéral. Ils ont étudié dans 7 États américains seulement et ils ont relevé plus de 9 000 000 000 $ de subventions. Dans 7 États seulement, 9 000 000 000 $ de subventions à l'agriculture et à la transformation. Comment son sous-ministre peut-il arriver et dire... Est-ce qu'il en a pris connaissance de cette étude-là, lui: comment est-ce qu'elle est subventionnée, l'agriculture américaine, pour dire à nos producteurs: On n'est pas productifs et on va être lavés? Est-ce qu'il a pris connaissance de cette étude?

Là, sans parler de la qualité des produits. Le ministre le sait, au Québec, on a les normes de qualité et de salubrité les meilleures en Amérique du Nord. Nos producteurs se sont habitués à produire des produits, des aliments de qualité, comprends-tu? et ça coûte quelque chose, la qualité. Les Québécois et les Québécoises courent de plus en plus après cette qualité-là, et le ministre n'est pas sans savoir... On me dit que le poulet américain est rempli de salmonellose. Nous autres ici, au Québec, si tu trouves une poule ou un poulet dans un poulailler qui a la salmonellose, on va faire brûler le poulailler, comprends-tu? C'est des pertes, ça, pour les producteurs. Là-bas, ils ne se préoccupent même pas de ça. Aux États-Unis, on engraisse encore tant la volaille que le boeuf avec des hormones de croissance. C'est défendu ici, au Québec. C'est des coûts supplémentaires, ça, au niveau du producteur agricole. Est-ce que le ministre sait que, dans l'entente du libre-échange, justement, le gouvernement du Canada, s'il se tient debout, il est capable d'imposer des droits compensateurs si les produits qui viennent de l'étranger ne sont pas conformes à nos normes de qualité?

C'est ça que je dis: Comment se fait-il que son sous-ministre, d'une façon irresponsable, dise aux producteurs de poule, de dindon et d'oeufs: Vous allez être lavés, c'est fini pour vous autres? J'aimerais ça savoir si le ministre connaissait ou s'il a rencontré - ou le député de Berthier - des producteurs de poulet dans ces catégories-là qui détiennent des quotas. J'en connais des jeunes, moi, qui, suite à cette déclaration, sont désarmés. Ils sont poignes avec leurs quotas, Ils ont des Investissements à faire, ils sont productifs, ils veulent vivre de leur production. Là, ils disent: Qu'est-ce qu'on va faire? «C'est-u» vrai, M. Baril, qu'on va être lavés là-dedans? (11 h 10)

Contrairement à ce que le ministre dit, je les mobilise, les agriculteurs et les agricultrices. Je leur dis: On a fait face à d'autres défis, on est capables de faire face à ce défi-là. Quand je leur parie d'études américaines - je ne charrie pas, là - d'études canadiennes qui ont été faites sur l'agriculture américaine, les gens sont étonnés, ils sont étonnés de voir comment

l'agriculture américaine est supportée, puis, ici, au Québec, il y en a encore qui prêchent pour dire que l'agriculture québécoise est trop subventionnée, puis que les producteurs, ça n'a pas de bon sens. Est-ce que le ministre sait qu'au niveau du yogourt un paquet de yogourt coûte 0,99 $, puis, dans ce même contenant de yogourt, il y a seulement 0,08 $ de yogourt? Le reste, c'est pour la mise en marché, le contenant, etc. Une boîte de fèves, une boîte de bines, entre nous autres, qui se vend 0,71 $, est-ce que le ministre sait qu'il y a seulement pour 0,6 $ de bines dedans? Ce n'est pas le producteur qui ramasse la balance. C'est tout le reste de la chaîne qui la ramasse. Qu'est-ce que ça coûte au consommateur, hein?

Au niveau de son progamme Lait-école, j'ai été étonné... D'abord, c'est son sous-ministre qui a annoncé l'abolition du programme. Ça coûtait 13 000 000 $ et, quelque chose. Il y avait pour 4 000 000 $ de contenu; ça coûtait 4 000 000 $ de lait, l'achat du lait comme tel. Le reste, c'était le contenant, puis la livraison, la distribution et je ne sais pas quoi. On vient encore dire que c'est à cause que le lait est trop cher. Le lait est trop cher et c'est pour ça qu'il faut couper le programme.

Une voix: Franchement!

M. Baril: II n'y a pas de franchement! C'est ça, les chiffres. Le ministre me dénoncera, il me dira si ce n'est pas vrai. L'achat du lait était de 4 000 000 $. Je pourrais la sortir, c'est la déclaration de son sous-ministre, à moins qu'il se soit trompé une autre fois. Le coût total du programme était de 13 000 000 $ et quelque. Est-ce que le ministre est informé aussi que, sur un achat alimentaire de 100 $... Quelqu'un qui achète pour 100 $ d'alimentation, il y a seulement 2,36 $ qui vient au producteur agricole. Il y a 51,76 % qui vont aux grossistes détaillants comme Michel Gaucher qui dit que c'est les producteurs agricoles qui lui coûtent trop cher. Il y a 52 % juste pour lui. Qu'il commence donc par regarder dans sa cour combien il se prend de marge pour vendre ces produits.

C'est ça que je me demande, comment ça se fait que le ministre n'ait pas tout dénoncé ces choses-là. Il pourrait en relever des affaires de Sansfaçon puis d'Alain Dubuc. C'est le même langage qu'ils tenaient. Comment ça se fait que, si le ministre croit aux offices de commercialisation, s'il croit et il dit qu'il est convaincu ou s'il veut aller convaincre les autres que nos offices de commercialisation, c'est bon pour nous autres puis on veut les conserver, il n'ait pas dénoncé ça? Les producteurs agricoles sont menacés de partout. Celui qui serait là pour les défendre, il ne parle pas, il ne dit rien. «Qui ne dit mot consent.»

Ça fait plus d'un mois, un mois et demi, entre autres, que je dénonce ces choses-là, partout où je vais. J'encourage le producteur agricole. Je ne dis pas: Tu es un pas bon. Quand tu sors ces chiffres-là, les producteurs agricoles, eux autres mêmes, ils sont étonnés de ce qu'ils produisent à bon marché. Mais c'est le reste de la chaîne qui est chère, qui est dispendieuse.

Je vais répéter ma question, c'est la troisième fois: Sur quoi son sous-ministre s'est-il basé pour dire que les productions de volaille, d'oeufs et de dindon seraient lavées au Québec, suite au pire scénario du rapport Dunkel? Sur quoi s'est-il basé? Est-ce qu'il a tenu compte des chiffres que je viens de lui donner? Est-ce qu'il a tenu compte des études américaines? Est-ce qu'il a tenu compte qu'il n'y a pas juste le producteur? Imaginez-vous, 2,36 $ qui revient au producteur, puis on dit: C'est encore toi qu'il va falloir baisser, parce que le consommateur paie plus cher. C'est parce que c'est toi qui coûte trop cher: 2,36 $! Il y en a pour 98 $, 97 $ et quelque chose à compresser ailleurs. Mais, eux autres, ils sont toujours au bout de la chaîne. On n'en parle jamais. Comment se fait-il que le ministre n'ait pas dénoncé ça? Où son sous-ministre a-t-il pris les chiffres? Comment a-t-il fait pour arriver au résultat qu'il a annoncé?

Après ça, on reviendra sur le libre-échange, juste au niveau de Bernard Landry. Si le ministre ne croit pas Bernard Landry tant que ça, pourquoi est-ce que c'est lui-même ou son ministère qui l'engage pour donner des conférences? L'autre jour, il m'a repris ici quand Bernard Landry a passé à Trois-Rivières. C'est son propre ministère qui l'avait engagé, il l'a payé pour aller donner une conférence. Le discours que Bernard Landry tient au niveau du libre-échange, M. le ministre, il faudrait quand même le regarder Bernard Landry, il défend le libre-échange comme si c'était lui qui l'avait assigné, puis comme si c'était lui qui l'appliquait maintenant.

Je n'ai rien contre le libre-échange. Je l'ai dit, puis je le répète. C'est contre son application. C'est contre son application du traité de libre-échange. C'est là que ça fait problème. D'ailleurs, 73 % des manufacturiers, des entreprises, des entrepreneurs canadiens, eux autres mêmes, dénoncent actuellement, sont insatisfaits du traité de libre-échange. Au niveau du libre-échange, je défends la population que je représente. J'ai été élu pour ça et je le fais. Je ne suis peut-être pas un économiste, mais je suis un agriculteur qui voit clair et j'ai déjà additionné, moi aussi, une colonne de chiffres. Quand tu t'aperçois que tu as 400 000 emplois de perdus à cause de ce traité-là, il y a un problème à quelque part. Au lieu de continuer à dire: II faut signer n'importe quoi, n'importe comment, n'importe où, il y a des applications qui se font quelque part et c'est là la sévérité du gouvernement d'Ottawa qui n'applique pas ce traité tel qu'il a été fait et la faiblesse du gouvernement du Québec de ne pas exiger du gouvernement fédéral l'application de ce traité.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député d'Arthabaska. M. le ministre, vous savez que je suis un petit peu élastique sur le temps. On composera en finale, si vous n'avez pas d'objection.

M. Picotte: J'ai cru remarquer ça, M. le Président.

M. Baril: C'est parce que j'attendais qu'on me signale 30 secondes, mais je ne l'ai pas vu.

M. Picotte: Ah! Ça fait trois minutes et demie qu'il vous a signalé 30 secondes.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Richard): II n'y a aucun problème. Ça va.

M. Baril: J'étais emballé.

Le Président (M. Richard): Alors, M. le ministre, en réplique.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, je pense que ce qu'a dit le député d'Arthabaska, quand il dit que mon ministère a engagé Bernard Landry, ça démontre, d'abord, la non-partisanerie de celui qui vous parle. Et c'est ce que j'ai cru dire au député d'Arthabaska. Il ne l'a peut-être pas compris la fois de la réponse à sa question, mais je vais le lui répéter. Ce qu'on dit, nous autres, Bernard Landry dit la même chose. Bernard Landry dit la même affaire que nous autres et Jacques Proulx dit la même affaire que nous autres. C'est ça que j'ai tenté de lui montrer, l'autre fois, et il dit: Qu'est-ce que vous avez contre Bernard Landry? Au contraire, j'ai dit: Lui, qu'est-ce qu'il a contre Bernard Landry pour dire des choses contraires à ce que Landry dit? Ça fait que c'est ça, là. Je pense qu'il y a un petit bout qu'il n'a pas compris, qu'il serait mieux de relire. Bernard Landry, le ministre de l'Agriculture, le sous-ministre de l'Agriculture, le sous-ministre adjoint et Jacques Proulx ont dit essentiellement la même chose, et j'ai lu les documents en Chambre. Lui, il me dit: Qu'est-ce que vous avez contre Bernard Landry? C'est vous! Qu'est-ce que vous avez contre Bernard Landry? Vous nous dites des choses, ce matin, qui vont à rencontre de ce que, nous, on dit tous les trois. Voyons donc! Franchement! Je sais que vous savez additionner des colonnes de chiffres, que vous savez lire, mais relisez comme il faut. C'est ça qu'on a tenté de vous dire. On défend la même chose, M. le Président.

Maintenant, pour vous démontrer le non-sérieux du député d'Arthabaska quand il me parle du lait et des produits... On sait tout ça, voyons donc. Qui ne sait pas que le lait coûte un prix et que le contenant coûte tel autre prix, puis que les bines, il y en a rien que pour 0,06 $ dans un pot de bines? M. le Président, je ne vois pas le député d'Arthabaska se promener avec ses bines dans ses poches et son lait dans sa cravate, hein! On n'est toujours bien pas pour amener les vaches dans ia cour de l'école pour tâcher de faire boire les enfants après les vaches. Voyons donc, M. le Président! Vous voyez le non-sérieux de ça. C'est comme si on était obligés, nous autres, quand on paie, de dissocier le lait et de dire: On va l'envoyer comment? Bien, oui. On vous dit: Ça nous coûte 13 000 000 $ pour faire boire les enfants à l'école. C'est bien sûr que du lait, M. le Président, il faut que ça se mette dans un contenant. Ils ne peuvent pas partir avec ça dans les petites poches d'habit, et les bines non plus. Voyons donc! Qu'est-ce que c'est, cette discussion-là? Vous voyez jusqu'à quel point on peut être complètement de travers.

M. le Président, ce qui manque au député d'Arthabaska, c'est de la mémoire. J'ai l'ai dit - allez relire, je suis prêt à suspendre les débats pour qu'on regarde ça, vous lirez mes 10 premières minutes: On ne pourra pas rivaliser à cause des milliards que mettent les États-Unis et la Communauté européenne dans l'agriculture. Il dit: Est-ce que le ministre sait, M. le Président, qu'il y a des milliards? C'est son étude, chez lui. C'est ce que j'ai dit avant qu'il ne parle, avant qu'il ne pose la question. Bien, coudon, vous n'avez pas de mémoire ou vous n'écoutez pas ce qu'on dit. On n'est pas capables de rivaliser avec les milliards que ces pays mettent là-dedans. C'est pour ça qu'il faut qu'il s'y mette de l'ordre, M. le Président. Il me demande si je sais ça. Imaginez-vous! Quelle philosophie!

M. le Président, le député d'Arthabaska, non seulement il n'a pas de mémoire sur ce qui vient d'être dit, mais il n'a même pas de mémoire... Il me parle du libre-échange, que c'est épouvantable, ce qu'on a fait et ce qu'on n'a pas fait, M. le Président. Il a donc bien la mémoire courte, le député d'Arthabaska. Qu'est-ce qu'il a contre les producteurs de porc du Québec, lui, le député d'Arthabaska? Oui, oui, le porc. Farce à part, là, où étiez-vous quand on a défendu les producteurs de porc et qu'on est allés avec eux pour les défendre quand on a voulu imposer un tarif avec le libre-échange? Où étiez-vous, vous? Le gouvernement du Québec n'a rien fait? Il est allé protéger et on a fait appliquer le libre-échange, M. le Président. C'est nous autres qui avons soutenu ça, et ce sont les producteurs qui se sont défendus.

Vous me parliez de l'industrie des pâtes et papiers dans ce temps-là. Tenez-vous-en donc à votre domaine, c'est déjà en masse. Bien non. On ignore que le gouvernement du Québec a fait quelque chose pour les producteurs de porc et qu'on a gagné. On oublie de dire aussi qu'on a gagné, parce que, là, ce serait féliciter du monde qui a fait du travail, mais sautons sur quelque

chose qui n'est pas encore réalisé. Pourquoi il ne nous dit pas qu'on travaille dans l'histoire du lait UHT, puis que c'est peut-être l'histoire du libre-échange qui va faire qu'on va gagner ça pour tâcher de continuer d'en vendre? Pourquoi il ne nous félicite pas pour le travail qu'on fait? Bien non, il dit: Vous ne faites rien, vous n'êtes pas là. (11 h 20)

C'est par ces affirmations gratuites là du député d'Arthabaska qu'il est irresponsable. Soit qu'il manque de mémoire ou qu'il le fait sciemment pour sa cause politique. Donc, manquer de mémoire, ce n'est pas grave, parce que ça m'est arrivé, à moi aussi, et je ne veux pas lui reprocher, mais, s'il le fait pour une cause politique, M. le Président, c'est indécent de ne pas se rappeler ça sous prétexte que, nous autres, on veut aller gagner des votes. C'est indécent.

Alors, où se base mon sous-ministre, M. le Président? Je vais prendre quelques secondes de plus. Moi aussi, je n'ai pas vu les 30 secondes qu'on vient de me mentionner. Sur quoi se base mon sous-ministre, M. le Président, pour faire ça? Ce n'est pas bien compliqué, M. le Président. Quand on regarde ce que Dunkel propose dans le poulet, le prix intérieur du poulet en 1992 est de 2,40 $. Le poulet, on parle d'un tarif de 85,8 %. En 1993, ce serait 2,64 $, prix à la frontière, puis en 1998, au bout de cinq ans, ce serait 2,46 $. Voyez-vous qu'entre 1992 et 1998 - parce qu'il faut regarder l'avenir, on ne regarde pas rien que pour l'année prochaine, puis au bout de notre nez - le prix à la frontière serait à peu près identique au prix intérieur chez nous? Pensez-vous que le consommateur fait beaucoup de différence quand il achète un poulet? Pensez-vous que la salmonellose... C'est vrai qu'on a les plus beaux services de qualité. Oui, c'est vrai, puis on est heureux de ça. Est-ce que le député d'Arthabaska me demande de diminuer sur la qualité, puis de laisser courir la salmonellose dans les poulets pour tâcher d'être concurrentiels? C'est ça qu'il me demande?

M. Baril: Ce n'est pas ça que je demande.

M. Picotte: bien non, si ce n'est pas ça, suivez donc les chiffres comme il faut, parce que, avec les chiffres de 1985, la différence du prix n'est tellement pas énorme entre les années qu'on risque d'être anéantis. c'est ça que ça veut dire. si mon sous-ministre le mentionne et que ça oblige les pays à monter le tarif à 300 % et 400 %, c'est là que ça va nous donner une chance. dans le lait, si c'était un petit peu moins dangereux, m. le président... c'est parce qu'il y a des tarifs dans le beurre de 292 %, dans la poudre de lait, 192 % et dans le fromage cheddar, 242 %. si mon sous-ministre a pu réveiller du monde pour qu'il passe le tarif, qui est à 65 % dans le dindon, à 61 % dans les oeufs de consommation et à 85 % dans le poulet, à 300%, ça va juste nous garantir de façon additionnelle. C'est là-dessus qu'on se base, M. le Président.

Le député d'Arthabaska ne m'apprend rien quand il me dit que les Américains et la CEE mettent des milliards là-dedans. C'est ce que j'ai dit dans les premières minutes de mon discours. Donc, qu'il ne s'imagine pas qu'aujourd'hui il m'invente quelque chose. Il n'a rien inventé non plus pour mon sous-ministre. Ce qu'on dit ici, c'est que les tarifs de Dunkel dans le poulet, dans le dindon, puis dans les oeufs, en bas de 100 %, c'est nous mener dans des conditions où on ne sera pas capables de concurrencer. Qu'on les monte au moins à 292 % comme on le fait dans le beurre et à 242 % comme on le fait dans le cheddar pour nous protéger davantage. Si la discussion de mon sous-ministre apporte ça, de remonter les tarifs, ça va être déjà pas si pire si jamais la négociation aboutit là. C'est juste ça qu'on dit, M. le Président.

Ne vous en faites pas, je vous le dis et je vous le répète: Amenez toutes les subtilités que vous voudrez, ce que dit Bernard Landry, ce que dit le président de l'UPA et ce que nous disons, c'est la même affaire et on défend les mêmes choses. Ça fait qu'on n'a rien contre eux autres. Il n'y a qu'une affaire cependant, c'est qu'on aimerait que ceux qui sont leurs propres collègues s'ajustent au même discours aussi de temps en temps. Ce ne serait pas méchant, ça non plus. Ça aurait l'air peut-être un petit peu moins disparate. C'est le moins qu'on puisse dire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je cède la parole à Mme la députée de Bellechasse, Mme Bégin.

Mme Louise Bégin

Mme Bégin: Merci, M. le Président. On assiste à une certaine psychose du GATT dans nos régions rurales du Québec. Bien sûr, les agriculteurs sont inquiets, principalement les producteurs visés par la gestion de l'offre. Ceux-ci se demandent ce qu'il va leur arriver, quelle sera la valeur de leur investissement si l'entente du GATT ne rencontre pas leurs ententes? Quelle sera la valeur de leurs quotas? Leur entreprise sera-t-elle compétitive?

Cette crainte, M. le Président, n'est pas unique aux producteurs québécois et canadiens; elle est aussi partagée par les producteurs européens, comme en font foi les nombreuses démonstrations d'agriculteurs tenues dans les pays de la CEE. Tout comme nous, les producteurs européens tiennent à ce qu'une entente intervienne au GATT afin de clarifier des situations laissant planer des incertitudes quant à certaines productions. Ici au Québec, la conclusion d'un accord du GATT est essentielle afin d'empêcher l'introduction du yogourt et de la

crème glacée importés. L'arrivée de ces produits sur les tablettes de nos supermarchés ainsi que la possibilité que l'on s'attaque également au marché du fromage rend dangereux pour l'industrie laitière le maintien du statu quo.

On se souvient qu'un panel du GATT a décidé que l'article XI, permettant d'imposer des quotas d'importation lorsqu'un pays pratique une gestion de l'offre, ne s'applique pas aux produits frais ne faisant l'objet que de peu de transformation. Pour mon comté, la conclusion des discussions du GATT pourrait permettre au groupe Lactel de reprendre les exportations de lait UHT à Porto Rico. On sait que Porto Rico invoque les facteurs sanitaires pour empêcher notre lait d'entrer sur leur marché.

Vous savez également, M. le Président, que le développement de notre entreprise porcine est largement tributaire de ces exportations. La viande de porc produite et transformée au Québec jouit d'une excellente réputation sur les marchés internationaux. Nos producteurs et nos transformateurs sont capables de rivaliser au niveau de la qualité et du prix sur ces marchés. On a toute fraîche à la mémoire l'imposition par les États-Unis d'un droit compensateur à l'entrée dans ce pays de la viande de porc en provenance du Canada ainsi que la victoire, comme le mentionnait M. le ministre tantôt, que nos producteurs ont enregistrée dans ce domaine. Un accord du GATT permettrait de mieux définir les règles du jeu et empêcherait l'imposition de droits compensateurs à tort et à travers.

Il y a également le secteur des céréales qui bénéficierait de l'arrêt de la guerre des subventions que se livrent la CEE et les États-Unis. Cette guerre de prix a fait baisser les prix à un niveau jamais vu, entraînant le compte de stabilisation du revenu de cette production vers un déficit sans précédent.

Le statu quo pourrait donc être néfaste autant pour les producteurs de lait, de céréales ou de porc. Les producteurs européens comme les producteurs québécois tiennent à la protection de leurs revenus. Cet élément se traduit au Québec par la position adoptée par notre gouvernement vis-à-vis de la protection des quatre piliers de développement de l'agriculture québécoise. Chaque pays a son ou ses piliers. Chacun cherche à les préserver dans une négociation. C'est tout à fait légitime. Mais, devant ces incertitudes qui, pour un bon nombre, se transforment en inquiétudes, il faut éviter d'entretenir un pessimisme que je qualifierais d'inacceptable.

Il faut relever le défi de la compétitivité. Dans un contexte d'incertitude, il faut se préparer au pire et, si le pire ne se réalise pas, alors c'est tant mieux, car, le cas échéant, on dispose d'un coussin, d'une marge de manoeuvre. Peu importe ce qui se passera au GATT, l'agriculture au Québec a toujours existé et existera toujours. Les agriculteurs québécois possèdent indéniablement une bonne expertise technique.

Nos éleveurs laitiers réussissent, performent lors d'expositions d'envergure internationale. Notre cheptel est en demande dans de nombreux pays. C'est là un indice de l'expertise et des qualifications de nos agriculteurs.

Les ressources financières et humaines sont disponibles pour assurer le développement de l'agriculture. Au chapitre de la transformation, nous disposons d'entreprises de taille, comme Olymel pour le porc, Bexel dans la viande, Agropur, Natrel et Lactel dans le lait. Au niveau technique, le Centre d'insémination artificielle du Québec et le Centre d'insémination porcine constituent des leaders dans leurs champs d'activité.

Au cours des derniers mois, le gouvernement du Québec s'est affairé à rendre son économie plus compétitive. C'est le cas avec la mise de l'avant du concept de grappes industrielles, d'une nouvelle politique de développement régional initiée par le ministre des affaires régionales, qui, en même temps, est le titulaire du MAPAQ, et aussi par la création de la Société de la main-d'oeuvre québécoise. Dans ce contexte, le MAPAQ a lancé une nouvelle politique de développement industriel et commercial. Cette stratégie insiste sur les interrelations industrielles et commerciales qui existent entre les industries et les acteurs du même secteur. Elle insiste pour renforcer ses liens afin de bénéficier d'une utilisation optimale de son potentiel au bénéfice du développement de ce secteur et de sa compétitivité au plan international. (11 h 30)

Cette approche nécessite une étroite concertation entre les acteurs d'un secteur. La réalisation d'un plan de développement de la production porcine constitue un exemple frappant de la réussite de ce dialogue. Assis à la même table, producteurs, transformateurs, distributeurs et même les syndicats ouvriers ont échangé pour identifier les objectifs à réaliser et les moyens à prendre pour rendre leur secteur économique plus compétitif. Un plan identique est présentement en voie d'élaboration pour la production laitière. D'autres productions suivront le même chemin, je l'espère.

Bref, le Québec dispose d'avantages et d'outils capables de l'aider à relever les défis de la mondialisation des marchés. Je crois que personne ne souhaite que certains scénarios évoqués se réalisent. Nous voulons tous et espérons tous que les objectifs du Québec dans ces négociations seront réalisés. Toutefois, si les revendications du Québec ne pouvaient être satisfaites, il ne faudrait pas sombrer dans le défaitisme, il faudrait se relever les manches et travailler pour faire sa place au soleil, et ça, les Québécois connaissent ça. Il faut, toutefois, commencer à se le dire maintenant, afin que, si ça devait se produire, on soit prêts à se servir de tous nos atouts. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Richard): merci, mme la députée de bellechasse, mme bégin. je cède la parole à m. le député d'arthabaska pour les cinq prochaines minutes.

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président. Je reviens sur ce que le ministre disait tout à l'heure. C'est grave, ce qu'il a dit, parce qu'il nous a dit qu'il reconnaissait que les autres pays allaient être subventionnés, pourraient continuer à être subventionnés - ils le sont, en tout cas, ils sont subventionnés - mais, que nous autres, en retour, il faudrait que nos offices de commercialisation soient abolis parce que, au niveau du GATT, on n'aurait plus le droit de faire ça.

C'est grave, ce que le ministre dit là. Ca veut dire qu'il ne défend pas nos offices de commercialisation, il ne croit pas à ça. Il va accepter que, nous autres, nos programmes, nos plans soient démolis, ne soient plus admissibles dans les échanges commerciaux; par contre, les autres vont pouvoir, de la manière qu'ils subventionnent, continuer à subventionner ça. C'est bien évident que l'ensemble de nos productions québécoises vont être lavées si les autres sont capables de subventionner à tour de bras et que, nous autres, on n'est capables de faire aucune protection, à nulle part. Ça n'a pas de bon sens.

Dans le dernier rapport de la Banque Royale que j'ai reçu, le mois de mars 1992 - j'ai reçu ça avant-hier - on dit, ici, «que l'aide du gouvernement américain équivaut à 30 % ou 40 % du prix du lait», des subventions, de l'aide indirecte. Je ne lirai pas tout le paragraphe, mais ça serait intéressant, le ministre devrait le lire. C'est M. Balcaen qui dit ça, le président de la Fédération des agriculteurs du Canada: «Ils pourront - en parlant des États-Unis - conserver leur programme de retrait des excédents laitiers parce qu'il est orienté, en grande partie, vers l'aide alimentaire. Notre propre programme de retrait des excédents finance par les agriculteurs a été jugé inacceptable.»

C'est ça que le ministre vient de nous dire, qu'il accepte ça, que les autres vont continuer à subventionner et, à cause que les autres peuvent subventionner à tour de bras, là, on n'est plus compétitifs, nous autres. Là, il ne fait aucune défense au niveau de nos offices de commercialisation. C'est grave! Après ça, il vient nous dire qu'il essaie et que, par toutes sortes de moyens, il défend nos offices de commercialisation. Ces chiffres ou ces paroles ne me disent rien de bon pour me convaincre que le ministre fait sa job en défendant nos offices de commercialisation.

Tout à l'heure, il commençait à charrier et je dirais que le ministre répand son fiel et c'est du mépris qu'il a à mon endroit. Il parlait comme: Le député d'Arthabaska ne connaît rien et il ne sait rien. C'est un nono, c'est un cave.

Tout ce que je dis là, je le dis parce que je me documente, M. le Président. Je me documente avec différents papiers qui sont à notre disposition et ceux que je n'ai pas, on les fait venir d'ailleurs. Quand il dit que je n'ai pas de mémoire, c'est vrai que je n'ai pas de mémoire et c'est pour ça que j'ai toujours un tas de papiers en avant de moi parce que ce sont mes aide-mémoire. Ça fait que quand on vient dire-Tout à l'heure, il a essayé de me ridiculiser, il a dit: Le député d'Arthabaska devrait savoir que du lait, il ne peut pas accrocher ça après sa cravate. C'est nono de dire ça, M. le Président, ça part de lui-même. C'est ça que je dis, c'est du mépris, comprends-tu? Je ne peux pas traîner les bines dans mes poches. Voir si, moi, je ne savais pas que ça prenait un contenant pour traîner ça. Voyons donc! Si le ministre essaie de faire du millage avec ça, je vais vous dire qu'il n'ira pas loin; il est loin de faire du millage avec ça.

C'est pour ça, M. le Président, que je trouve que le ministre a un mépris envers moi et qu'il a un mépris envers la classe agricole, en général, parce qu'il passe son temps à taper dessus au lieu de les défendre et de leur dire qu'ils sont capables de fonctionner, qu'ils sont capables de faire des choses. Il dit: À cause qu'il y a de la salmonellose au Québec, le député va me dire: Arrête l'inspection chez nous et on va laisser rentrer la salmonellose chez nous. Je n'ai jamais dit ça. Écoutez bien, j'ai pris la peine de dire que, dans le traité de libre-échange, il y a un article qui dit que, si un pays rentre un produit qui ne répond pas aux normes de qualité de ce pays-là, ce même pays-là va avoir le droit de l'empêcher de rentrer chez lui. C'est ça que j'ai dit. Mais le ministre, ce n'est pas ça qu'il a dit tout à l'heure. Ce n'est pas ça pantoute. Il a dit: Le député d'Arthabaska m'a dit d'abolir nos normes de qualité et de laisser rentrer la salmonellose chez nous. Il déforme mes paroles parce que c'est son moyen de défense. Quand il n'a pas d'autre chose à dire, il dit n'importe quoi.

Après ça, quand on regarde dans le rapport... C'est pour ça que je dis qu'il ne les défend pas, les agriculteurs, parce qu'il laisse l'impression... Il dit toujours que le panier de provisions coûte trop cher, que ça soit le lait, la volaille ou autre chose. Il nous a donné des chiffres tout à l'heure: 2,40 $ le prix intérieur et 2,64 $ en 1993 et 2,46 $ à la frontière, je ne sais pas quoi. Bon. Qu'il regarde donc notre coût de production, qu'il regarde le prix du détaillant. Si les agriculteurs ont fait des efforts et sont encore capables d'en faire, il va falloir que toute fa chaîne, tout le réseau, tant de la transformation que de la distribution, eux autres aussi, ils en fassent, des efforts.

Quand est-ce que le ministre a dit ça? Quand est-ce que le ministre a invité tout le monde à s'asseoir autour d'une table pour dire:

Écoutez, un instant... Ah non, non, là, je le vois sauter. Il va me dire: J'ai fait un sommet. J'ai organisé un sommet où on va tous se parler de ça et on va tous discuter de ça. Avant ce qui va se passer au mois de juin, ça fait deux, trois ans, qu'est-ce que vous avez fait pour réunir tout ce secteur-là, tout ce monde-là autour de la table? Vous êtes là, vous allez me dire: II y a une loi qui a été votée. Le ministre Pagé a voté ça, une loi sur les chambres de coordination. Ah, ça, c'est efficace! C'est bien plutôt pour siroter un café alentour de petits biscuits ou de croque... que pour être efficace.

Si on regarde ici, et je finis là-dessus, M. le Président, encore dans le tableau fourni par la Banque Royale, on nous dit ici le prix du porc, les augmentations entre 1980 et 1989 au niveau de la consommation. Il y a 39 % d'augmentation au détail et, sur ces 39 % là, il y a 6 % à la ferme. Au niveau du maïs, il y a eu une augmentation de 94 % et à la ferme il y a eu une perte de 13 %. Au niveau du beurre, il y a eu 66 % d'augmentation au détail et il y en a eu 51 % d'augmentation à la ferme. Au niveau du lait, 89,3 % d'augmentation du prix au détail et le prix à la ferme a augmenté de 44 %, même pas de la moitié. Au niveau du cheddar, c'est 86 % au niveau du prix de détail et 49 %, le prix à la ferme. Au niveau du poulet, c'est de 72 % que le prix au détail a augmenté et le prix à la ferme a augmenté de 30,9 %. Quand est-ce que le ministre se lève et qu'il dit qu'il n'y a pas juste les producteurs qui coûtent cher, pas juste la production, que l'ensemble de la chaîne va le faire? Après ça il viendra me dire qu'il défend les offices de producteurs quand les gens disent que c'est à cause des offices que les prix augmentent à la consommation. Ça n'a aucun rapport. Je ne l'ai jamais entendu défendre ça.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député d'Arthabaska. M. le ministre.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, heureusement que je ne suis pas aussi frileux que le député d'Arthabaska. D'abord, je vais lui dire tout de suite au point de départ, et je ne sais pas quelle perception il peut avoir, mais je veux qu'il se sente bien à l'aise: Mes interventions ne sont jamais ciblées en fonction de lui; elles sont ciblées en fonction de ce qu'il me dit. Moi, je veux bien - et s'il le disait comme ça, M. ie Président, j'embarquerais là-dedans - qu'on dise qu'il y a juste 4 000 000 $ de lait dans le Lait-école, que ça coûte pour le lait; ça, je veux bien ça. Je ne veux pas qu'il reproche à mon sous-ministre de dire que ça nous coûte 13 000 000 $ au ministère, par exemple, parce qu'il serait peut-être mieux de regarder ses phrases aussi à lui, là. C'est bien beau de nous donner un petit peu de leçons, mais je voudrais qu'il regarde ses propres phrases, lui aussi. Il est un petit peu comme moi, il parle sans discours, lui. Il parle comme ça. Alors, s'il analysait ses phrases, il verrait qu'il nous a dit que, nous autres...

I! nous reproche d'enlever le lait parce qu'on dit que ça coûte 13 000 000 $. Bien oui, ça nous coûte 13 000 000 $. Qu'est-ce que vous voulez, moi, je ne suis pas capable de faire abstraction de ça? Mais je vais être d'accord avec lui, par exemple. Si on nous pose la question: Combien y a-t-il d'argent qui va dans le lait quand on vend du Lait-école? Ah! Là, il y a à peu près 4 000 000 $ à 5 000 000 $ que ça coûte en lait. Mais, bien sûr, il y a les berlingots, bien sûr, i! y a le transport, bien sûr, il y a la transformation. Bien oui, mais ça, qu'il ne nous reproche pas ça à nous autres, M. le Président. Lui aussi, il devrait se regarder et relire ses phrases. Il nous reproche ça à nous. Il nous reproche ça à nous. On ne doit pas être responsables de ça, j'imagine.

M. le Président, j'entends le député d'Arthabaska nous dire en plus: Mais qu'est-ce que le ministre a fait? M. le député d'Arthabaska, bien amicalement, là, je «peux-tu» vous demander d'aller consulter et d'aller regarder les producteurs de porc? On a mis une table pour asseoir tout le monde ensemble pour faire ce que vous me dites que je n'ai jamais fait et que je vais parler rien qu'au sommet. Et ça a débouché sur une réponse. (11 h 40)

Je «peux-tu» vous dire d'aller voir dans les légumes, mon cher collègue? Ça, je pense bien que vous ne le prenez pas personnellement, quand je vous dis ça. Dans les légumes, dans le porc, les tables sont faites, tout le monde s'est assis ensemble. Quand il me dit qu'il faut ajuster les transformateurs et tout le monde ensemble, il y a des tables de complétées. Légumes et porc, c'est fait. On a des stratégies... Ça fait quatre fois que je passe à la télévision avec les gens du porc. La dernière a été enregistrée hier pour passer au Dr Lapointe pour sensibiliser les gens à ce qu'on a fait, moi et la Fédération des producteurs de porc, M. le Président. Que le député d'Arthabaska ne vienne pas me dire dans ses phrases que, moi, je ne défends pas ça, M. le Président, parce que je suis obligé de réagir. Là, évidemment, il trouve que je !e pointe. Bien, je ne suis toujours bien pas pour parler à la chatte dans la cuisine, M. le Président. On est ici et c'est lui qui me reproche des choses que j'ai faites.

Allez donc demander aux gens du lait, c'est votre domaine, les gens du lait, lis ont deux réunions de faites à la suite de ce que j'ai mis sur pied. Les gens du lait ont deux réunions de faites. Le député d'Arthabaska me dit qu'on n'a pas pensé à ça, M. le Président. Une chance que je n'ai pas les épaules aussi frileuses que lui.

En ce qui concerne les subventions, M. le Président, pour bien se comprendre - je pense

que c'est important et j'aimerais qu'il im'écoute 32 secondes pour être bien sûr qu'on puisse bien saisir qu'on dit la même chose probablement tous les deux, M. le Président - nous autres, on dit: Les offices de commercialisation, ce n'est pas des subventions, c'est pour ça qu'on veut les protéger. On ne calcule pas que c'est des subventions. Tout ce qu'on appelle subventions cachées, M. le Président, c'est à l'exportation. On n'en a pas, nous autres. C'est pour ça qu'on veut protéger nos offices de commercialisation. Donc, ce n'est pas une question de subventions. On dit la même affaire, M. le Président, je ne sais pas pourquoi on ne s'entend pas. Ce que le député d'Arthabaska dit et ce que, moi, je dis, c'est pareil. Les offices de commercialisation, M. le Président, ce n'en est pas.

Alors, je pense qu'il faut rétablir les faits et je dis, en terminant, M. le Président, au député d'Arthabaska: Moi, je veux qu'on reste ensemble de bons amis parce que jamais je ne reprocherai... Parce que le député d'Arthabaska fait très bien sa job dans le domaine de la production. Je le connais et il fait sa job qu'il doit faire ici, au Parlement; je ne le lui reproche pas et je le laisse faire et je l'incite à continuer de le faire. M. le Président, je pense bien qu'il ne faut pas voir ça du tout de la façon dont le député d'Arthabaska l'a décrit tantôt.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Je cède la parole à M. le député d'Iberville, M. Lafrance, et, par la suite, nous viendrons au message final: 10 minutes, M. le ministre; 10 minutes, M. le député d'Arthabaska et, si vous permettez, on dépassera le temps de midi de quelques minutes seulement. Vous êtes d'accord de part et d'autre?

M. Picotte: Oui, oui.

Le Président (M. Richard): Merci. M. le député d'Iberville, M. Lafrance.

M. Yvon Lafrance

M. Lafrance: Oui, merci, M. le Président. Je réalise que nous avons un petit problème de coordination pour ce qui est du temps; alors, je vais abréger pour prendre seulement une couple de minutes.

J'aimerais dire, en terminant, pour ma part du moins, que je suis surpris et déçu de constater la qualité du débat. Je ne sais pas pourquoi, mais depuis quelque temps le député d'Arthabaska s'acharne sur les fonctionnaires du MAPAQ et tente de prouver je ne sais quel complot dans ce dossier qui, comme on le sait, est si important.

J'aimerais toucher un point ici. Lorsqu'il tente d'excuser son vice-président, le député d'Arthabaska dit que M. Landry vise les 800 000 000 $ donnés en aide spéciale aux producteurs de. céréales de l'Ouest. M. le Président, en dénonçant cette aide, le député d'Arthabaska dénonce en même temps l'aide reçue par nos producteurs de céréales au Québec. Ignore-t-il que ces derniers reçoivent une aide identique par tonne produite à celle reçue par un producteur de céréales de l'Ouest? Le député d'Arthabaska devrait le savoir, c'est tellement important. Il devrait savoir que, depuis quelques années, ces sommes d'aide spéciale versées aux producteurs de céréales sont transférées du gouvernement fédéral au fonds d'assurance-stabilisation des revenus, réduisant ainsi les primes payées par les producteurs de céréales, producteurs aussi d'oléagineux et, aussi, de maïs-grain du Québec. C'est là, je pense, un point très important. En dénonçant les subventions de l'Ouest, il oublie que nos producteurs reçoivent cette aide spéciale plus les contributions d'assurance-stabilisation. Donc, M. le Président, c'est le point sur lequel je vais me limiter. En dénonçant l'aide financière aux producteurs, il dénonce nos piliers que l'on tente, nous du gouvernement, de préserver. Je vous remercie.

Le Président (M. Richard): merci, m. le député d'iberville, m. lafrance. je cède la parole maintenant, pour son message final, à m. le ministre. m. picotte.

Conclusions M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. Quand on regarde ça comme il se doit, on se rend compte, M. le Président, qu'il n'y a pas beaucoup de différence entre ce que dit le député d'Arthabaska et ce que dit le gouvernement du Québec. Les offices de commercialisation, comme je le disais tantôt, pour nous autres, ce n'est pas considéré comme des subventions. Donc, il faut éliminer ça. C'est pour ça qu'on parle de ne pas toucher aux offices de commercialisation. On ne dérange rien sur le marché international. Ce que veut faire le GATT, c'est éliminer les subventions pour l'exportation. Alors, pour nous, on n'est pas à l'exportation avec nos offices de commercialisation, on ne dérange pas le marché international. C'est pour ça, M. le Président, qu'on veut défendre les offices de commercialisation, parce que ce n'est pas considéré comme des subventions, et qu'on veut éliminer avec une entente du GATT les milliards de subventions à l'exportation que se fait la CEE, que se font les États-Unis. Si on réussissait ça, M. le Président, vous verriez que, finalement, on protégerait ce qu'on a à protéger, on ne changerait pas l'échiquier international et on aurait une protection pour tous nos programmes.

C'est ça la réalité, et c'est ça que défend le député d'Arthabaska, et je ne sais pas pourquoi, dans toute cette conjoncture-là, on ne se

comprend pas, mais c'est la même dialectique, M. le Président. C'est la même dialectique. J'espère que ce n'est pas moi qui ai fait comprendre ou fait croire que les offices de commercialisation, c'étaient des subventions, parce que je m'évertue à dire le contraire depuis le début.

Donc, à partir de ce moment-là, je pense, M. le Président... C'est pour ça que nous sommes dans la coalition, c'est pour ça que l'UPA, et la Fédérée y sont. C'est pour ça que le député d'Arthabaska, par ricochet, M. le Président, devrait être satisfait de ça, à cause de ces choses-là, parce que, finalement, l'UPA ne resterait pas dans la coalition avec nous autres si on lui avait dit et si on disait: Notre philosophie de base, c'est de prendre les offices de commercialisation comme étant des choses subventionnées. L'UPA serait sortie depuis longtemps. Il le sait très bien, d'ailleurs. On le sait très bien. Alors, c'est pour ça qu'il faut mettre ça à côté, tout simplement.

Maintenant, quelles sont les actions que le gouvernement a faites? Je pense que c'est important qu'on se le dise: conférences fédérales-provinciales des ministres de l'Agriculture, M. le Président. Vous le savez très bien, le gouvernement ne participe pas aux conférences fédérales-provinciales depuis l'échec de l'accord du lac Meech. On ne participe pas. On a fait quelques rares exceptions. Vous savez lesquelles, ces exceptions-là? C'est pour les ministres de l'Agriculture, quand on a à discuter du GATT; pas des autres problèmes en agriculture, mais du GATT. Donc, M. le Président, je pense que c'est vous démontrer là que nous voulons protéger l'agriculture québécoise comme nous la vivons et la connaissons. Sinon, on ne serait pas allés, on aurait dit: On fait ce qu'on fait dans tous les domaines.

Lors des conférences fédérales-provinciales du commerce extérieur, toutes les fois où il a été question du GATT, mon collègue, M. Ciaccia, non seulement est allé à ces rencontres-là, mais il est arrivé une fois où il m'a invité et, l'autre fois d'après, il a amené mon sous-ministre adjoint, M. le Président, pour être bien certain qu'on protège ces choses-là. Donc, encore là, on ne participe pas aux conférences fédérales-provinciales, mais, comme il pouvait en être question au niveau du commerce extérieur, on y a participé. Lors des réunions fédérales-provinciales des sous-ministres de l'Agriculture, qui se réunissent à tous les deux mois, nous ne manquons pas de répéter notre position, de promouvoir nos intérêts, parce qu'on veut être certains que les offices de commercialisation, ce n'est pas des subventions.

Lors des réunions du comité fédéral-provincial des négociations multilatérales une à deux fois par mois, les fonctionnaires de haut niveau font entendre la voix du Québec dans ce domaine. Les communications sont suivies avec le bureau de négociations commerciales du GATT à

Ottawa, responsable des négociations. Il y a eu une collaboration constante du MAPAQ avec le ministère des Affaires internationales à travers le groupe restreint de coordination et le comité technique interministériel. Missions d'observateurs québécois à Genève pour rencontrer d'autres délégations et représentants américains, européens, danois, hollandais, coréens, suisses. C'est les discussions qu'on a eues. Je ne sais pas pourquoi on veut nous donner l'impression qu'on ne défend pas la position. On a fait ces démarches-là. Enfin, le MAPAQ et le MAI sont membres de la coalition québécoise, qui comprend l'UPA et la Coopérative fédérée, formée dans le but de défendre les piliers agricoles et puis la production agricole.

Il y a eu deux missions spéciales à Genève pour défendre l'article XI. Le 20 février et le 21 février, je me suis moi-même rendu en Europe avec des fonctionnaires du gouvernement du Québec, avec des fonctionnaires du gouvernement d'Ottawa, puis des ministres d'Ottawa et des présidents de groupes agricoles canadiens. On s'est rendus là pour défendre et expliquer notre position sur l'article XI, pour défendre nos offices de commercialisation, pour rencontrer les délégations des pays européens. (11 h 50)

J'ai rencontré, entre autres, personnellement, avec d'autres, Arthur Dunkel lui-même et j'ai eu l'occasion de lui parler personnellement aussi de nos appréhensions, M. le Président. Je suis allé rencontrer le gars qui écrit les papiers. On persiste à me dire qu'on ne défend pas les intérêts de l'agriculture. Je ne suis pas allé là en visite de courtoisie. Je ne suis pas allé là en touriste. On a fait cinq ou six rencontres, on est allés dans trois pays, puis on a fait quatre conférences de presse en 60 heures, y compris le décalage. J'espère que personne n'ose prétendre qu'on est allés s'amuser. M. le Président, on n'a même pas eu le temps de se coucher. Ce n'est pas grave, on n'attire pas la pitié! Mais, vous savez, quand on prend le détour trop court de nous dire: Vous ne nous défendez pas, on «peut-u» au moins dire qu'en 60 heures on a fait tout ça? J'ai rencontré Arthur Dunkel. Je n'ai pas rencontré l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours! J'ai vu l'ours, M. le Président! J'ai vu l'ours!

On a rencontré les commissaires agricoles de la Communauté européenne. On a rencontré des collègues d'autres pays. On a rencontré les ambassadeurs des pays que je vous ai nommés tantôt pour être bien sûrs, pour les inciter à nous comprendre, pour mieux leur expliquer. Les Américains, les Européens, les Danois, les Hollandais, les Coréens et les Suisses, c'est des gens qui ne comprennent pas. On est allés leur dire: Nos offices de commercialisation, ce n'est pas des subventions, oubliez ça. Voyez-vous comme ma position, avec celle du député d'Arthabaska, est la même. Les offices de commer-

cialisation... C'est ça qu'on est allés dire aux Américains, aux Européens, aux Danois, aux Hollandais, aux Coréens, aux Suisses et aux Japonais durant la période de 60 heures , des gens qui ne comprenaient pas nécessairement notre affaire. On est allés leur dire ce que le député d'Artha-baska me rappelle et ce que, moi, je dis. Alors, voyez-vous, on n'est pas si loin que ça.

C'est ça, la réalité. Je vais être entièrement d'accord avec ce qu'a dit le député d'Arthabaska. C'est ce que je fais depuis déjà un certain temps, soit dire aux gens de la transformation, aux gens du secteur primaire, aux agriculteurs, aux agricultrices, aux producteurs, aux productrices, aux gens qui détaillent, qui vendent le produit: Vous devez travailler ensemble. Je le dis et je le répète, je l'ai dit en conférence de presse dans la Beauce il y a 15 jours, M. le Président, c'est verifiable. Je l'ai dit dans mes tournées régionales, dans au moins trois régions, c'est verifiable.

Quand les gens disent que d'aider nos agriculteurs et nos agricultrices, quand les gens disent que de soutenir nos offices de commercialisation, c'est donner de l'argent de façon inutile, je les condamne publiquement, parce que tous ceux et celles qui veulent manger un bon steak ce midi, du porc, de la volaille, des oeufs, ils doivent dire merci aux offices de commercialisation et ils doivent dire merci au gouvernement de soutenir, par le biais des offices de commercialisation, ces produits-là, parce qu'ils ne gagneraient pas suffisamment cher pour s'en payer dans leur assiette si on ne soutenait pas ça. Qu'on arrête de blâmer la classe agricole, parce que ce n'est pas la classe agricole qu'on aide quand on fait ça, on aide le consommateur et le bouffeur de lunch. C'est ça qu'on dit. «C'est-u» assez français et assez clair pour que je le dise? Je suis certain que le député d'Arthabaska pense la même affaire que moi.

M. le Président, le ministre de l'Agriculture, à toutes les fois qu'un gars fait une déclaration gauche, que quelqu'un fait une déclaration insipide, incolore, inodore et sans saveur, il ne peut pas toujours se permettre de reprendre ça. Savez-vous pourquoi, M. le Président? Il le sait très bien. Il va me le dire. Il va être d'accord avec moi. Toutes les fois qu'on reprend quelqu'un qui fait une déclaration insipide, c'est lui donner l'importance qu'il n'a pas. Ignorer ces personnes-là qui agissent de façon insipide, c'est bien plus leur donner l'importance qu'elles possèdent plutôt que de les mettre en évidence, mais il ne faut pas que je sois blâmé à toutes les fois que quelqu'un fait une déclaration insipide et que je ne relève pas ça, M. le Président. Ça ne vaut pas la peine d'être relevé. C'est lui donner trop d'importance pour ce qu'il connaît, M. le Président.

J'espère que ma situation est claire. Je le dis et je le répète: Ce que pense de l'agriculture le député d'Arthabaska, ce que le ministre de l'Agriculture et député de Maskinongé pense de l'agriculture, M. le Président, on a l'occasion de se le dire souvent, on n'est pas si loin que ça l'un de l'autre dans la défense de ce qu'on fait. Je ne voudrais à tout prix pas que mes interventions, si c'est le cas, laissent prétendre que le député d'Arthabaska est en dehors de ça. Au contraire, j'ai beaucoup de plaisir à travailler avec lui parce que, justement, il connaît le domaine, M. le Président. Je ne voudrais surtout pas que les gens pensent que je dis le contraire de ça. Je veux être bien clair, M. le Président, c'est ça, la réalité. Il n'y en a pas d'autre. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Maintenant, pour son message final, M. le député d'Arthabaska. M. Baril.

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président. D'abord, suite à l'exposé de tout à l'heure de M. Lafran-ce, le député d'Iberville, qui dit que je m'en prends ou que j'en veux à tous les fonctionnaires qui bougent quelque part, ce n'est pas ça. Ce n'est pas parce que j'en veux à un plus qu'à l'autre. Simplement ce que j'ai dit, c'est que j'ai voulu savoir, de la part du ministre, pourquoi son sous-ministre a dit, il y a deux ans, en pleine période cruciale des négociations du GATT, que son gouvernement serait prêt à appuyer n'importe quoi, même si les offices de commercialisation ou les quatre piliers de l'agriculture québécoise ne faisaient pas partie des négociations du GATT. C'est ce que j'ai demandé. Je n'ai pas dit: J'en veux au sous-ministre Lavoie d'avoir dit ça; j'ai demandé pourquoi il a dit ça. Qu'est-ce qui est arrivé? Pourquoi le sous-ministre a dit ça s'il croit aux offices de commercialisation, si son gouvernement croit aux offices de commercialisation? Pourquoi a-t-il laissé le sous-ministre dire ça sans relever ça d'aucune façon? Est-ce que ça n'enlevait pas toute la crédibilité du gouvernement face à la défense de nos piliers de l'agriculture québécoise?

Ce que je reproche au gouvernement, c'est que ses paroles ne correspondent pas aux gestes qu'il pose. Il a beau dire partout - je le sais, je l'ai entendu: On les défend, on les appuie, puis on va se battre jusqu'à la mort, jusqu'au dernier souffle, pour utiliser l'expression que le ministre a utilisée, pour les défendre. Mais après que tu as dit ça, quand ton sous-ministre a dit officiellement: On va signer n'importe quoi, même si ce n'est pas là-dedans, c'est là que ça ne correspond pas. C'est sur ça que j'ai voulu avoir des explications lors de ce débat-là. Le seul reproche que je fais au sous-ministre, puis je ne m'en cache pas, je le refais, je le trouve irresponsable d'avoir été dire, sans explication aucune, que, si le rapport Dunkel était approuvé

tel quel, il y aurait trois productions au Québec qui seraient lavées. Il a dit: Si la gestion de l'offre disparaît, ces trois productions-là vont être lavées. Ça, là, je ne peux pas comprendre le sous-ministre. J'espère aujourd'hui qu'il peut être conscient des paroles qu'il a prononcées, de l'impact sur ces producteurs-là visés, le ressentiment qu'ils ont eu. Ça n'a pas de bon sens. C'est pour ça que - si je peux utiliser l'expression - j'en veux au sous-ministre d'avoir dit ça, d'avoir prononcé des paroles totalement irresponsables.

Quand je dis que le discours du gouvernement sur la défense de nos offices de commercialisation est contraire aux gestes, c'est justement parce qu'il a dit qu'il appuyait le Canada, peu importe ce qui arriverait, et que le ministre vient de dire qu'il reconnaît que les autres États membres du GATT vont pouvoir continuer à garder leurs programmes de subvention, mais que, nous autres, par contre, on va perdre nos offices de commercialisation qui ne coûtent rien à l'État.

C'est ça qui est insultant parce que les États-Unis - on les connaît, entre autres - vont garder tous leurs programmes de subvention, ils subventionnent ça à tour de bras. Juste l'État de New York, 1 000 000 000 $. Je pourrais tous les passer, il y en a sept États. Eux autres, ils vont être conformes et, nous autres, nos offices de commercialisation, on laisse sauter ça. On a beau dire: On va défendre ça, mais ça ne se représente pas, tu ne vois pas ça dans des gestes concrets que le gouvernement pose. C'est ça qui manque. (12 heures)

Le ministre peut dire: Je suis allé en Europe. J'ai passé là, j'ai rencontré Dunkel lui-même, j'en ai rencontré d'autres. Mais ces gens-là, ils savent bien la position du gouvernement du Québec par le biais de son sous-ministre qui a dit: On va signer n'importe quoi. Ils savent bien, je l'ai cité au début, que le directeur Dunkel lui-même a dit que la position du gouvernement canadien était ambiguë. Parce que le gouvernement canadien a deux productions à défendre: la production de l'Ouest qui lui coûte une fortune et la production de l'Est qui ne lui coûte à peu près rien. Il va regarder juste au niveau, même pas économique mais au niveau finances, celle qui lui coûte le plus cher et il va mettre un x dessus. C'est ça que je n'approuve pas. Je pensais que le ministre nous arriverait avec d'autres scénarios puisqu'il a dit que son sous-ministre étudie des scénarios.

Un autre document, juste pour concrétiser davantage ce que je dis, M. le Président, comment ça va bizarrement à ce ministère-là. Il y a deux documents du ministère de l'Agriculture qui posent de sérieuses questions. «En plus de favoriser la concentration, le système actuel de gestion de l'offre ne stimule pas le développement de productions différenciées ou le développement de nouveaux marchés.» Ça, ce commentaire-là est tiré du document récent de la

Direction du développement des marchés du MAPAQ, intitulé «Stratégie commerciale pour le bioalimentaire.» Dans un autre document, qui, lui, a été publié par la Direction du développement des entreprises du même ministère, on dit, cette fois: «Sur la stratégie dite industrielle, on estime que la concentration des entreprises de conditionnement est favorable au développement des marchés.» Dans un document, on dit que ce n'est pas favorable, que la gestion de l'offre ne stimule pas le développement de la production ou le développement de nouveaux marchés et, dans un autre document du même ministère, on dit que «la concentration des entreprises de conditionnement est favorable au développement des marchés».

Voyez-vous, dans les gestes qui sont posés à l'intérieur de son propre ministère, il y a quelqu'un qui ne parle pas en quelque part ou il n'y a pas de boss en quelque part. Les documents sont contradictoires dans son propre ministère. Après ça, on s'en vient accuser le député d'Arthabaska, comprenez-vous, qui, lui, travaille à partir d'informations que tu peux glaner ici et là, et on dit qu'il n'est pas informé. Au lieu d'encourager la production, d'encourager les producteurs, au lieu de dire qu'on va être capables de s'en sortir au niveau des négociations du GATT en appliquant convenablement le traité de libre-échange...

Si les autres continuent à subventionner l'agriculture, il y aura des tarifs qui seront établis. Ces tarifs-là, c'est vrai que ça va être compliqué de les établir. Ça va nous prendre une armée de personnes pour être capables de découvrir, de détecter combien les autres - les États-Unis, entre autres, parce que c'est notre principal rival - supportent leur agriculture. Si on peut les découvrir - et on a déjà un bon aperçu dans ce document-là, ici - on pourra imposer des droits compensateurs qui vont arriver avant que le produit s'en vienne chez nous. Si les autres sont capables d'empêcher nos produits et qu'on ne pourra plus subventionner l'agriculture de la façon dont on supporte l'agriculture actuellement, ça veut dire qu'on va avoir des moyens aussi, si on le veut bien, d'empêcher les autres de le faire, de leur imposer une douane, une taxe pour que le produit qui rentre chez nous soit compétitif à nous, ici.

Ça, M. le Président, c'est un discours positif. Ce n'est pas de dire: Vous autres, vous allez être lavés. C'est ça que je trouve épouvantable. J'ai rencontré des jeunes producteurs dans les oeufs et dans la volaille qui étaient découragés de telles paroles.

Je vais finir là-dessus en disant qu'on a toujours misé sur la qualité. Actuellement, il y a un regroupement d'entreprises québécoises, tant laitières que dans le domaine de la volaille, entre autres, justement, qui se prépare... L'entreprise privée et le mouvement coopératif se préparent à

faire face à la mondialisation des marchés. Si pour ces laiteries-là ou ces usines de transformation là en pleine préparation, on décourage les producteurs et on leur dit: Vous ne serez pas capables, parce qu'on ne sera pas compétitifs, où vont s'alimenter ces compagnies-là tout à l'heure?

Il faut regarder ça dans l'ensemble. Si l'ensemble des Québécois et des Québécoises ne sont pas assez sensibilisés sur toutes les conséquences du marché, il n'y a pas juste les agriculteurs qui vont être pénalisés, c'est l'ensemble de la population. Il faut se souvenir d'une chose: les Américains quand ils viennent nous vendre un produit ici, c'est un produit fini. Ils ne nous apportent pas leur matière première pour la transformer ici. C'est un produit fini qu'ils viennent nous porter ici. C'est pour ça que, si, pour toutes sortes de raisons, on ne continue pas à défendre et à encourager nos agriculteurs et nos agricultrices en leur disant qu'on est capables, on a déjà produit un produit de très haute qualité, on est efficaces, on a une capacité concurrentielle, les gens vont arrêter de produire. Ça se voit déjà. On a juste à regarder au niveau des établissements à la ferme cette année, ça a coupé en deux. C'est évident que ce n'est pas encourageant plus qu'il faut.

En terminant, je vais vous dire, M. le Président, j'aurais cru... J'étais venu ici d'une façon tout à fait objective et positive et j'aurais aimé que le ministre nous fasse connaître les autres scénarios que son ministère est en train d'étudier - parce que ça fait plusieurs fois qu'il nous le répète - pour encourager justement la classe agricole vers l'avenir, pour lui dire qu'on est capables de continuer, qu'il y aura toujours de la place pour ces hommes et ces femmes, au Québec, qui veulent nourrir le monde. Mais on n'en a pas entendu parler. On ne nous a rien dit. Donc, je doute fort que, effectivement, il y ait d'autres scénarios au ministère de l'Agriculture qui soient en train d'être étudiés pour maintenir notre agriculture québécoise.

Le Président (M. Richard): Mesdames, messieurs, ça met donc fin à l'interpellation de ce matin. Puisque nous avons accompli notre mandat, nous ajournons donc sine die.

(Fin de la séance à 12 h 6)

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