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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 4 avril 1990 - Vol. 31 N° 8

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 15, Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Onze heures douze minutes)

Le Président (M. Richard): Alors, mesdames et messieurs, je déclare donc la séance ouverte. Je vous rappelle à nouveau le mandat de la commission, qui est de tenir une consultation générale dans le cadre de l'étude du projet de loi 15, Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres dispositions législatives. M. le secrétaire, M. Comeau, est-ce que nous avons des remplacements, ce matin?

Le Secrétaire: Aucun remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Je donne donc l'horaire de la journée. Il y a eu une inversion, ce matin - n'y voyez pas un caractère négatif. C'est que le premier groupe que nous allons recevoir, et qui est en place actuellement, ce sont les représentants de l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec. Ce groupe sera suivi de la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec, et après les affaires courantes, en après-midi, ce sera au tour de l'Association québécoise de l'industrie de la pêche. Sur ce, immédiatement, messieurs, vous connaissez notre méthode de fonctionnement: vous avez 20 minutes, maximum, pour la présentation de votre opinion ou de votre mémoire. La personne qui intervient en premier se présente d'abord et présente ses collègues par la suite. Vous avez la parole.

Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec

M. Poirier (Clovis): Bonjour, M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, mesdames et messieurs. Je vais d'abord me présenter, comme vous le dites. Mon nom, c'est Clovis Poirier, président de l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec. À ma droite, M. Alain Dugas, président du Regroupement des associations de pêcheurs côtiers de la Gaspésie; M. Léonard Poirier, représentant des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine; M. François Poulin, directeur général de l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec.

Le Président (M. Richard): M. Poirier.

M. Poirier (Clovis): Merci. Premièrement, je dois vous dire que pour nous, pêcheurs commerciaux du Québec, c'est une grande journée. C'est une journée... On attend cette journée depuis au moins trois ans. Il ne faut pas se le cacher, depuis les premières minutes où l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec a vu le jour, on rêvait de cette journée. Cette journée étant arrivée, je pense qu'on a des choses à vous dire. On veut s'inscrire sur la loi des marchés, on veut faire partie d'un système qui existe. Présentement, au niveau des pêches, on n'a aucun système, c'est l'anarchie complète, on ne sait pas où on va; on sait d'où on vient, mais on ne sait pas où on va. Ça fait que...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Poirier (Clovis): C'est déjà ça. On a entrepris une consultation à travers tous les ports de pêche du Québec, y compris la Basse-Côte-Nord, les îles, la Gaspésie. Tous les ports, les petits ports et les grands ports, ont été visités. On a entrepris une consultation de tous les pêcheurs du Québec. L'accueil a été favorable et unanime - on peut dire presque unanime - partout. Les pêcheurs veulent une structure. On veut être structurés. On veut avoir des outils pour pouvoir travailler. On veut une stabilisation. On veut une rationalisation. On veut faire partie d'un système qui, je pense, a fait ses preuves et qui fonctionne, présentement.

Je pense que je n'irai pas beaucoup plus loin sur ce sujet. On a préparé un document. Le résultat de notre consultation est ici, on va vous le déposer tout à l'heure. Il y a 50 associations de pêcheurs à travers le Québec qui ont signé. C'est-à-dire, les 50 présidents. La majorité des pêcheurs commerciaux, des pêcheurs actifs, ont adhéré. Les signatures font partie du document. Je pense que c'est beaucoup pour une première consultation qu'on a faite auprès des pêcheurs. On a fait ça l'automne passé. Avant la rencontre qu'on a eue avec M. le ministre, à Gaspé, on avait débuté. Ça s'est terminé par après. Je pense que c'est bien positif. C'est bien encourageant.

Je voudrais peut-être vous faire un peu état de la situation qu'on vit présentement, pourquoi on veut se donner des mécanismes, des outils de travail. Présentement, l'ensemble des crevettiers du Québec sont attachés au quai. La pêche a débuté. Elle a duré deux ou trois jours, maximum. Les crevettiers sont attachés au quai à cause d'une baisse des prix. Les usines offrent une baisse de prix, au niveau de la crevette. L'ensemble des crevettiers ont fait des calculs, et ils sont mieux de rester attachés au quai que d'aller en mer et accumuler des déficits de jour en jour. On n'a aucun pouvoir de négociation. On n'a aucun mécanisme de négociation. Quand est-

ce que ça va finir? On sait que ça a commencé. Mais quand ça va finir et comment ça va finir, on ne le sait pas. Les gens ne se partent pas, ou presque pas. Il n'y a personne qui peut parler au nom de quelqu'un. On n'est pas structurés pour le faire. C'est la situation qu'on vit, au niveau des crevettiers.

La pêche au crabe, en Côte-Nord, va débuter vendredi prochain, vendredi qui s'en vient. Les bateaux partent pour la pêche sans aucun prix, aucun prix fixé à l'avance. On va pêcher deux jours? On va pêcher deux semaines? On ne le sait pas. Si les prix au débarquement ne couvrent pas les frais, c'est inutile de continuer. J'espère que les prix vont au moins couvrir les frais. On n'a pas de mécanisme, on n'a pas douta qui nous dit qu'on est payés justement pour les produits qu'on débarque. Ce sont toutes ces choses-là qui font qu'en réalité on se retrouve ici, ce matin.

C'est un peu ce que j'avais à vous dire. Je pense qu'on va vous déposer le document, ou François va continuer...

Le Président (M. Richard): Alors, votre document nous le... M. Comeau, le secrétaire de la commission, va en prendre connaissance. Vous en avez quelques copies, et on en fera des copies additionnelles pour les membres de la commission.

M. Poirier (Clovis): Ce sont tes originaux.

Le Président (M. Richard): Ce sont les originaux?

M. Poirier (Clovis): Oui.

Le Président (M. Richard): Parfait. Nous recevons le dépôt du document et nous allons en faire une distribution à l'ensemble des membres de la commission. Continuez, monsieur.

M. Poirier (Clovis): Maintenant, je vais passer la parole à M. François Poulin, notre directeur général.

Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. Poulin.

M. Poulin (François): M. le ministre, M. le Président, j'aimerais résumer rapidement le mémoire que l'Alliance vous a déposé; je pense que vous avez eu l'occasion de le lire. Essentiellement, c'est que dans ce mémoire on fait état de l'importance de la pêche dans le développement économique des régions maritimes du Québec. On sait que les îles, la Basse-Côte-Nord, plusieurs zones de la Gaspésie, s'il n'y avait pas de pêche, seraient, à toutes fins pratiques, fermés. La pêche représente, pour une région comme la Gaspésie - qui a le record canadien de taux de chômage, 26 % - une source d'emplois permanente et stable, qui a des effets multiplicateurs importants. Pour les pêcheurs, cette réalité-là est très importante. Les pêcheurs ont de plus en plus conscience qu'ils représentent un actif majeur, important dans le développement économique des régions.

Grosso modo, la pêche représente, depuis quatre ou cinq ans, environ 100 000 000 $ de débarquements par année. Ça varie beaucoup selon les prix et les captures. Ça peut aller de 57 000 000 $, en 1984, à 126 000 000 $, en 1987, pour retomber à à peu près 80 000 000 $ l'année dernière. Donc, des fluctuations considérables. C'est un secteur qui est instable, parce qu'il dépend beaucoup de l'exportation. Environ 80 % de la production est exportée, donc nos prix sont souvent déterminés de l'extérieur. Il faut donc s'ajuster aux prix extérieurs.

Comme le disait tout à l'heure notre président, nous n'avons pas de système qui gère l'interface entre le pêcheur qui vend son poisson et les usines qui achètent le poisson pour le transformer. Il n'y a absolument aucun système qui existe, sinon le système traditionnel où chaque propriétaire d'usine essaie de s'attacher un certain nombre de pêcheurs qui vont venir livrer leurs produits chez eux. Cette situation fait que le pêcheur doit, à toutes fins pratiques, prendre le prix qui est fixé par l'usine. Il n'a, à toutes fins pratiques, aucun pouvoir de négociation. Dans ce système-là, le pêcheur se trouve à avoir un prix résiduel, c'est-à-dire que tous les intervenants dans la chaîne se paient et, en bout de course, le pêcheur reçoit ce qu'il reste. Ce qui explique les grandes variations de prix que le pêcheur va recevoir d'une année à l'autre. Un petit exemple, le turbot, en 1987, se vendait... Le turbot, en 1987?

Une voix: Jusqu'à 0, 82 $.

M. Poulin (François): Jusqu'à 0, 82 $; et, l'an dernier, il était à 0, 35 $. Donc, le pêcheur doit faire face à des fluctuations considérables. On n'a aucun mécanisme pour tenter de gérer cette question-là.

Le système actuel crée beaucoup d'insatisfaction chez le pêcheur. Il crée de l'incertitude au niveau des usines. Les usines ne peuvent pas avoir de garantie véritable d'approvisionnement, c'est-à-dire que les pêcheurs peuvent changer d'usine en cours d'année, s'ils peuvent avoir 0, 01 $ ou 0, 02 $ la livre à l'usine d'à côté. De sorte que ça crée une instabilité profonde dans le secteur de la transformation, ce qui rend la planification difficile pour les usines.

Ce que l'on propose, en définitive, c'est un modèle d'organisation plus semblable à celui qui existe en agriculture et en forêt, c'est-à-dire que, d'un côté, on a des PME de production - des petites entreprises de pêche - et, de l'autre côté, on a des usines de transformation. On veut une table où les deux intervenants

peuvent discuter et s'entendre sur les prix, sur la qualité des produits et sur les exigences. Et s'entendre, aussi, pour s'attaquer à des commercialisations à l'étranger. On sait que les prix sont fixés à l'étranger mais, à l'étranger, il existe plusieurs prix différents. Il y a un prix dominant sur le marché de Boston, évidemment, mais il y a aussi des marchés en Europe et au Japon; par une action dynamique au niveau de la commercialisation, il y a possibilité d'aller chercher des prix parfois plus intéressants que ceux qui sont obtenus actuellement.

Ce qui a amené les pêcheurs à se dire: Nous sommes dans une situation assez semblable à nos confrères les agriculteurs et les forestiers, nous vivons d'un secteur de ressources naturelles, nous sommes une multiplicité de petites entreprises face à un petit nombre d'acheteurs et nous vivons de la nature. Donc, il nous apparaît qu'il serait juste et correct que les mécanismes qui ont été mis en place au Québec depuis 15 ou 20 ans - entre autres, la loi des lois, comme disait le président de l'UPA, la Loi sur la mise en marché des produits agricoles - puissent s'appliquer aux produits de la pêche.

Si on se compare aux autres provinces maritimes, où on retrouve beaucoup d'activités de pêche, ces provinces n'ont pas non plus ce mécanisme-là, mais elles le recherchent éperdu-ment. Bien qu'elles aient des associations de pêcheurs beaucoup plus vieilles que les nôtres, elles recherchent éperdument, par des législations spéciales, un mécanisme pour essayer de résoudre le problème de l'interface entre les pêcheurs et les usines. Au Québec, on en a un qui est là, disponible, qui a une expérience accumulée depuis de nombreuses années dans les secteurs agricole et forestier; donc, les pêcheurs aimeraient pouvoir bénéficier de cette expertise et de cette expérience-là. En somme, on veut pouvoir avoir accès à l'ensemble des pouvoirs qui sont inscrits dans la loi et à l'ensemble des mécanismes, comme les plans conjoints, les offices de producteurs et les chambres de coordination et de développement.

Voilà, en résumé, M. le Président, la demande de l'Alliance des pêcheurs.

Le Président (M. Richard): Merci, M. Poulin. M. le ministre, vous avez votre premier bloc de 10 minutes de questionnement, s'il vous plaît.

M. Pagé: M. le Président, je vous remercie. Je voudrais souhaiter la bienvenue ici, à l'Assemblée nationale du Québec, à mes bons amis, MM. Poirier, Clovis et Léonard; à M. Dugas, M. Poulin, aussi, qui représentent l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec.

M. le Président, je crois que les collègues auront été à même de prendre acte d'un témoignage très éloquent, ce matin, de la part des représentants des pêcheurs commerciaux, des pêcheurs côtiers particulièrement, de l'ensemble du territoire maritime du Québec, que ce soit autant de la Gaspésie, de la Côte-Nord que des Îles-de-la-Madeleine. Ils sont essentiellement venus nous dire qu'ils souhaitaient voir incluses dans la loi les dispositions auxquelles j'ai d'ailleurs référé avec votre Alliance.

Je dois dire, M. le Président, que je peux donner une réponse immédiate, d'emblée, tel que je vous l'avais indiqué préalablement. Et formellement, ici en commission parlementaire, ce matin, je vous confirme que les dispositions législatives nécessaires seront ajoutées au projet de loi au moment de l'étude du projet de loi article par article. D'ailleurs, depuis nos rencontres du 9 et du 10 décembre dernier, suivies par nos rencontres de janvier, les avocats du contentieux du ministère et de la Régie des marchés agricoles travaillent à la rédaction des textes nécessaires à ce que vous demandez. On avait deux hypothèses. La première, c'était de modifier plusieurs articles de loi pour faire en sorte que vous soyez considérés comme l'agriculture, ça va de soi. Sauf qu'on a choisi une autre voie: on aura une section, un chapitre d'une lecture tout à fait nouvelle, dans la loi, qui couvrira le secteur des pêches. Et, essentiellement, ce qu'on fait, l'intention du gouvernement - je suis heureux de la livrer ce matin devant mes collègues, même si j'ai eu l'opportunité de le faire en région maritime à quelques reprises - l'intention du ministre des Pêcheries, c'est de faire en sorte que vous ayez les outils disponibles pour regrouper l'offre du produit, c'est-à-dire qu'une ou des associations, une association comme l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec... Ça pourrait aussi être des associations plus spécifiques. Un exemple concret: l'assocation des pêcheurs capitaines; ça pourrait aussi être l'association des crabiers... Ce n'est pas au gouvernement de dire qui doit représenter qui, sauf que la responsabilité du gouvernement, dans un secteur aussi important que celui des pêches... Il y a 6000 personnes soit comme employés, soit comme pêcheurs, qui oeuvrent au Québec. Le temps est venu... D'ailleurs, ça avait été l'une de mes grandes surprises, M. Poirier - je vous l'ai dit à quelques reprises - de constater qu'un secteur aussi important s'appuie sur une offre qui n'est pas nécessairement constante, soit en raison du volume de produits, soit en raison des périodes de pêche, soit en raison des quotas, etc. Et, de voir des entreprises qui, elles, d'un autre côté - comme le disait tout à l'heure M. le directeur général - se retrouvent en position de faiblesse parce qu'elles ne peuvent pas avoir de garantie d'approvisionnement, etc. (11 h 30)

Or, les dispositions de la loi vont vous donner les outils. Ce n'est pas le gouvernement qui va le faire à votre place, mais, enfin, vous aurez les outils qui vous permettront de présenter... Un exemple concret: des outils qui vont

permettre à l'Alliance des pêcheurs de présenter une requête à la Régie des marchés agricoles et des produits marins du Québec, dépendamment du nom final qu'on lui donnera. Vous serez appelés à présenter une requête vous habilitant, confirmant votre représentativité des pêcheurs du Québec. Je vais demander la même chose à l'AQIP cet après-midi. L'AQIP vient nous rencontrer; Je leur al déjà fait part de se préparer. Vous serez en mesure de négocier les prix, d'établir peut-être éventuellement des régies de prix en fonction de la qualité - et là je le dis comme je le pense: Ce ne sera pas à nous de le faire, ce sera à vous - en fonction, par exemple, du type d'équipement pour la conservation des poissons ou des crustacés sur vos bateaux, que vous pourrez négocier chaque année, etc. Et très probablement, dans mon esprit, si nous avions, en termes d'échéancier... On entend conduire le débat en deuxième lecture, probablement la semaine prochaine. Nous amorcerions l'étude du projet de loi article par article - après l'analyse et l'étude des crédits de chacun des ministères - vers le 23 mai, à peu près. Je prévois d'ailleurs déposer, au bénéfice de mes collègues ici, tous les amendements au moins une semaine à l'avance, autant sur la section des produits marins que sur les autres dispositions, avant l'étude article par article. Parce que c'est assez difficile de déposer les amendements une semaine à l'avance si on commence la semaine prochaine...

M. Baril: Je sais bien, mais c'est pour ça que...

M. Pagé: On va le faire une semaine à l'avance, avant l'étude article par article. L'objectif, c'est l'adoption de la loi pour ou vers le 21 juin prochain, et la date d'entrée en vigueur que j'entrevois serait le 1er août prochain. Ce qui veut donc dire que pour la saison, en principe, selon les intentions du ministre et du gouvernement, vous aurez les outils en main, à partir du 1er août prochain, pour bâtir les structures de représentation dans l'industrie des pêches au Québec, de façon à ce que les structures soient mises en place, dans mon esprit, à l'automne 1990 et applicables pour la saison de pêche 1991, tant et si bien que des situations comme celles qu'on a vécues et comme celles qu'on vit présentement... J'ai été informé, il y a quelques jours, de la situation entre les crevet-tiers et les entreprises qui reçoivent les crevettes - elles sont au nombre de sept ou huit - qu'il y avait un différend sur les prix. C'est un exemple très éloquent comme quoi un mécanisme comme celui que vous demandez - qu'on accepte, comme on vous le confirme ce matin, va permettre, premièrement, d'établir un mécanisme ouvert et public pour l'établissement des prix; deuxièmement, c'est très certainement susceptible d'ajouter à la solidarité entre les pêcheurs, aussi. m. le directeur général disait tantôt que souyentefois le pêcheur s'était engagé avec une entreprise, mais il suffisait qu'une autre lui offre 0,01 $ ou 0,02 $ de plus la livre et hop! le bateau changeait de cap. et ça créait des problèmes dans l'entreprise.

Les entreprises, aussi, ne pouvaient pas être sécurisées à l'égard de la fidélité de leurs pêcheurs pour y amener leurs produits. Je pense que c'est un geste positif qui, ajouté à d'autres auxquels j'ai eu l'occasion de faire référence avec vous, sera très certainement susceptible de dynamiser et de renforcer l'industrie des pêches.

L'autre élément qui est intéressant dans la loi... Je comprends que ce matin, le temps étant écourté... Bref, je vous invite d'ores et déjà à réfléchir à ce que pourraient être votre représentation et vos objectifs dans nos chambres de coordination et de développement. Vous savez, dans le plan de développement de l'industrie des pêches que nous sommes en train de bâtir et qui devrait être rendu public assez rapidement, on se réfère non seulement à la production, mais à la recherche. On va investir des sommes importantes dans la recherche. Nous voulons travailler au niveau de la deuxième et de la troisième transformation. Nous devons travailler, et nous aurons à déployer beaucoup d'efforts, au cours des prochaines années, dans le développement des marchés. Le secteur de la pêche au Québec est un exemple très clair. On s'est sentis trop confortables pendant longtemps avec nos marchés traditionnels, tant et si bien qu'aujourd'hui on perd des marchés. Et, quand on perd des marchés, c'est l'état de panique qui s'installe.

Merci de votre présentation. Si vous avez d'autres commentaires à faire, profitez de l'opportunité que vous avez ce matin. Vous êtes les bienvenus, vous êtes chez vous, ici. Vous pouvez dire à vos membres que c'est accepté, confirmé en commission parlementaire.

M. Poirier (Clovis): Je vous remercie. Je voudrais juste ajouter quelque chose. Ce que vous avez dit, on l'a tous bien pris, on l'a bien compris et on l'apprécie beaucoup. Je peux le dire au nom de mes collègues et au nom des pêcheurs du Québec. On l'apprécie beaucoup. Je pense qu'on a encore une année de misère; on n'a pas le choix, organisés comme on est organises. On n'est pas organisés et on a une année de misère, mais on est bien optimistes sur les années à venir. Juste le fait de voir la majorité de nos produits s'en aller à l'extérieur du Québec, à l'extérieur du Canada, et nous revenir transformés... Là, on parle de la deuxième et de la troisième transformation: c'est important de le faire chez nous. Il faut le faire, c'est très important. Ils nous reviennent transformés avec des valeurs ajoutées. Pourquoi ne pas garder nos valeurs chez nous et faire travailler notre monde chez nous, en région? On a des usines qui vont fermer à cause d'un

manque d'approvisionnement. Ça pourrait être des usines, je pense, qui pourraient se diriger vers ça. Je pense que c'est très important, parce qu'on pourrait garder les emplois chez nous.

Je voudrais aussi vous assurer, M. le ministre... Dans vos représentations, il y a une partie fédérale qui doit se faire, au niveau contingent, au niveau approvisionnement. Soyez assuré de notre entière collaboration. On va communiquer souvent avec les gens de votre ministère, et soyez assuré de notre entière collaboration et de nos pressions au niveau du fédéral pour aller chercher les contingents que ça nous prend, et les approvisionnements pour nos usines et pour nos entreprises de pêche, aussi. Merci beaucoup.

M. Pagé: Merci, M. Poirier. On en aura besoin, parce que dans le crabe ce n'est pas drôle, ce qu'ils viennent de nous faire. Ce n'est pas drôle, ça commence mal les relations entre mon homologue Valcourt et moi. On a eu des rencontres intéressantes, et le gouvernement canadien s'est montré très favorable à une participation appréciable dans notre programme de rationalisation. Sauf que, quelques jours après, ils nous ont annoncé une baisse assez subitement merci, sans consultation, sans rencontre préalable des ministres des pêches. On peut dire que M. Valcourt amorce très mal son mandat de ministre des Pêches au Canada.

J'étais en communication, en fin de soirée, hier, avec le ministre des Pêches du Nouveau-Brunswick; il est du même avis que moi. La baisse des quotas dans le crabe au Québec, sans consultation, sans préavis, impliquera des pertes de 2 000 000 $ de revenus aux crabiers, en moyenne 53 000 $ de moins, en revenu brut, par bateau; en usine, l'équivalent de 100 travailleurs pendant 10 semaines, à 36 heures par semaine de moins. Le tout s'est fait de façon cavalière, sans aucune consultation; lorsque M. Siddon était ministre des Pêches, au moins, il y avait des consultations avant. Ce qui est encore davantage inacceptable, c'est que la diminution des quotas de 897 tonnes de crabe s'applique uniquement au Québec, la province du Nouveau-Brunswick, d'où origine le ministre, ne subissent aucune diminution de quota. Ça donne un peu l'impression de certains jours vécus, il y a plusieurs décennies, au Québec. On appelle ça se servir à même l'assiette au beurre. Mon homologue, M. Valcourt, donne l'impression de se servir à même le plat de crabe. Alors, j'ai demandé - et ça, vous pourrez le dire à vos membres - premièrement, que le fédéral nous indemnise pour les pertes d'emplois et les pertes de revenus. Je dois d'ailleurs rencontrer M. Valcourt la semaine prochaine. Normalement, il doit être ici, au Québec. On va voir jusqu'où il est sérieux quand il parle d'une approche rationnelle pour l'industrie des pêches. En jargon de dualité, on va voir ce qu'il a dans le ventre. Merci, M. Poirier.

Bienvenue chez nous et soyez confiant.

M. Poirier (Clovis): M. Valcourt se propose une consultation en région maritime...

M. Pagé: Oui, je sais.

M. Poirier (Clovis): ...dans les jours qui viennent. Mais, pour notre part, du côté des pêcheurs, on pense que c'est un bon côté d'aller voir les pêches, mais que ce n'est pas en été qu'il faut faire ça, mais plutôt en hiver, pour que lés pêcheurs ne soient pas en mer et pris avec leurs problèmes de pêche, pour que les pêcheurs soient à terre pour pouvoir parier. C'est ce que vous avez fait, l'hiver passé. Vous avez rencontré tout le monde: les gens représentatifs, vous les avez rencontrés. Mais le ministre Valcourt, en période de pêche, c'est peut-être pour aller se promener. Peut-être qu'il le sait très bien, mais ce n'est pas vraiment le temps de le faire, parce que les vrais intervenants sont en mer et ils ont leurs problèmes de survie. C'est ce que M. Valcourt se prépare à faire, parfait, mais je pense que ce n'est pas... On aurait préféré que ce soit en hiver. J'espère qu'il va aussi en faire une en hiver, pour qu'on soit préparés. Je vous remercie beaucoup.

M. Pagé: Je pense que vous allez bien lui rappeler que le porte-à-porte auprès des pêcheurs, en période de pêche, c'est bien dur à faire, même pour un ministre fédéral.

Le Président (M. Richard): M. le député de Duplessis, M. Perron, vous avez la parole.

M. Perron: Merci, M. le Président. Vous me permettrez sûrement, tout comme l'a fait le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, de souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec.

Je profite d'une petite parenthèse aussi pour remercier Mme Pilon, la présidente de la Fédération des associations de consommateurs du Québec, pour avoir accepté d'intervertir les rôles, aujourd'hui, devant cette commission parlementaire, puisque c'a permis à l'Alliance et à son président, en particulier, de demeurer sur place pour les activités que nous avons à cette commission parlementaire. Alors, au nom de mes collègues, Mme Pilon, on vous remercie. Je pense que c'a rendu un fier service au président de l'Alliance, M. Poirier, qui est un pêcheur professionnel dans le domaine du crabe. Comme aujourd'hui il doit avoir une heure fixe pour mettre son bateau à l'eau pour se préparer pour la pêche de vendredi, qui n'est pas tellement loin, à ce moment-là, je pense que ça lui donne une chance qui est énorme.

M. le Président, je suis particulièrement heureux de voir l'ouverture du ministre, qui

l'avait d'ailleurs annoncé, en quelque sorte, lors de la septième table de concertation qui a eu lieu à Sept-îles tout dernièrement. Ce qui m'intéresse, c'est de voir cette ouverture se concrétiser à l'intérieur d'un projet de loi, soit en parallèle... Mais, comme le ministre l'a annoncé, je crois que ça va être des amendements qui vont être apportés au projet de loi actuel et qui vont être déposés incessamment. Ce dont on peut assurer l'Alliance, en tant que membres de l'Opposition, c'est que nous allons étudier le libellé des amendements que le ministre va apporter, pour s'assurer que le projet de loi va être conforme à l'annonce que vient de faire le ministre et aux voeux de l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec.

Si on regarde, par exemple, pour en faire état, c'est qu'à l'article 3, lorsqu'on parle des produits agricoles, moi j'ai bien compris le sens que... Comme les produits marins ne sont pas inclus dans cet article, à ce moment-là, il y aura un amendement qui sera apporté pour inclure les produits marins, et ainsi de suite dans l'ensemble du projet de loi. Ça, je pense que c'est nettement une chose importante pour les pêcheurs commerciaux du Québec et, en particulier, pour l'Alliance qui, elle, a défendu l'ensemble de ce dossier depuis maintenant au moins trois ans. Je me rappelle très bien, M. Poirier, puisque vous restez dans le comté de Duplessis, qu'on a discuté de plusieurs problèmes des pêcheurs commerciaux au cours des dernières années. On peut se rendre compte que, dans l'article 3, le produit des pêches commerciales est présentement exclu du projet de loi 15. Bien sûr que dans un avenir très rapproché on va pouvoir discuter ensemble, à nouveau, pour s'assurer, je dis bien pour s'assurer, que les voeux exprimés par l'Alliance seront concrétisés article par article dans le projet de loi. Tout le monde sait qu'au cours des prochaines semaines nous aurons l'occasion de revenir avec un projet de loi modifié. Nous aurons l'occasion, en tant que membres de l'Opposition officielle et membres du gouvernement, de discuter ensemble, article par article, pour que ce projet de loi soit le plus potable possible pour l'ensemble des opérations, non seulement agricoles, aquicoles ou autres du Québec, mais aussi pour les opérations de pêche. (11 h 45)

L'Alliance des pêcheurs souhaite que le modèle d'organisation dans les secteurs agricole et forestier soit adapté et appliqué au domaine des pêcheries. Et vous le mentionnez d'ailleurs aux pages 9 et 10 de votre document: "II faut donc une structure organisationnelle qui permette l'implantation de ce modèle, c'est-à-dire un regroupement de la majorité des pêcheurs et un regroupement des principaux acheteurs."

Ça me fait un peu penser à ce vous dites par rapport à ce qui existe actuellement en Islande, avec la Corporation de mise en marché qui est formée depuis maintenant plus de 40 ans.

On voit un petit pays de 230 000 habitants, 240 000 habitants, avoir un contrôle presque exclusif sur le marché international, lorsqu'on sait que 80 % des prises de l'Islande sont vendues sur le marché international et 60 % des prises globales sont vendues sur le marché américain. Et pour expliquer un peu la situation, c'est que cette Corporation - et ça, c'est pour le bénéfice des ministériels et aussi pour le bénéfice des personnes qui nous écoutent - elle est formée par les producteurs, par les transformateurs ainsi que par le milieu gouvernemental, qui agit à titre d'observateur. Tout ce qui sort de l'Islande porte une marque commune qui s'appelle Icelandic. Et tout ce qui reste en Islande, c'est de la responsabilité des transformateurs de le mettre en marché, à sa façon, comme elle le veut. Donc, par exemple, on n'a pas le droit de jouer avec les prix des produits qui s'en vont sur le marché international. C'est pour ça qu'ils sont si forts sur le marché, de toute façon, et j'espère que, dans un avenir assez proche, on va voir ce système ou un système presque identique établi au Québec pour justement aider, non seulement les pêcheurs, mais aussi les transformateurs. Et les travailleurs, travailleuses en usine, à ce moment-là, vont pouvoir se permettre beaucoup plus de sécurité dans le domaine des emplois.

J'aurais quelques questions à poser, puisque le ministre a démontré une ouverture assez large, en ce qui a trait aux modifications à la loi. Est-ce que quelqu'un de l'Alliance pourrait nous dire de quelle façon elle entrevoit l'application de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles au secteur des pêches commerciales? C'est-à-dire, est-ce par la création d'un office des producteurs qui s'appliquerait à tous les pêcheurs sans exception, ou seulement aux pêcheurs qui sont membres de l'Alliance ou membres d'une association étant membre de l'Alliance? Est-ce qu'on devrait, à ce moment-là, s'occuper de la réglementation, de l'application des quotas et de la négociation des prix des produits de la pêche? En gros, c'est ça, la question. C'est une question assez large, mais qui va aussi vous permettre de donner un ensemble de plusieurs réponses qui pourraient se concrétiser éventuellement dans un projet de loi.

M. Poulin (François): Je dois vous dire que nous sommes encore en état de réflexion sur la formule précise qu'on pourrait adopter pour les mécanismes de mises en marché tels que prévu par la loi. Une des hypothèses qui sont analysées actuellement, c'est qu'il y ait un plan commun pour chaque espèce principale: homards, crevettes, crabes, poissons de fond. Pour les poissons de fond, c'est moins clair, il y a différentes hypothèses possibles. Une autre formule possible, ce serait d'avoir des plans conjoints par région avec des comités par espèce; c'est une autre formule possible, compte tenu que les acheteurs

des régions sont quand même assez éloignés, et qu'il y a des acheteurs différents. On n'a pas encore d'idées prédéterminées, exactement. Il y a encore un cheminement, à faire au niveau de la réflexion là-dessus, et il va se faire dans les prochaines semaines.

Essentiellement, on arriverait à des offices de producteurs, soit au niveau de l'espèce, au niveau de régions, qui viseraient, comme objectif principal, à s'asseoir avec les acheteurs pour déterminer les conditions d'approvisionnement, les qualités, les prix; donc, la fourniture du poisson aux acheteurs. Essentiellement, ce serait l'objectif... Dans un premier temps, au moins durant les premières années, ce serait la priorité principale. Ensuite, au niveau de la commercialisation, nous on croit que les pêcheurs doivent s'impliquer, sont intéressés à s'impliquer dans la commercialisation. On voit la crise du homard, qu'on vit actuellement, où à cause du boycottage américain l'ensemble de l'Atlantique va être collé avec 25 000 000 de livres de homards, qui autrefois étaient vendues aux États-Unis. Alors qu'est-ce qui va arriver à ce moment-là? Sur quel marché va-t-il aller? Une chambre de coordination et de développement aurait été très intéressante dans un contexte comme ça, où pêcheurs et transformateurs auraient pu s'asseoir et développer une stratégie pour aller, par exemple, récupérer des marchés que les Américains vont abandonner en Europe, ou pour développer de façon spécifique notre marché québécois, par rapport à des mesures spéciales. Il y a un projet de promotion, mais il y a toutes sortes de difficultés à le mettre en oeuvre, parce que le secteur n'est pas organisé.

M. Perron: Donc, si je comprends bien, au niveau des offices concernés, c'est que vous n'avez pas de recommandations à faire encore pour qu'on puisse s'orienter sur ce type d'office. Est-ce que ça va être par type de produit, de permis ou par espèce ou sans subdivision? Vous n'avez pas encore d'idée fixe là-dessus? Parce que, si vous avez une idée fixe là-dessus, ça serait peut-être bon de la faire connaître immédiatement, comme le ministre s'en vient avec des amendements à la loi.

M. Poulin (François): Je pense que l'idée la plus réaliste, l'idée qui domine actuellement c'est d'avoir des plans conjoints par espèce. C'est ce qui est vécu en agriculture, c'est par type de production qu'on a des plans conjoints. Donc on retrouve une homogénéité qui rend plus facile l'adhésion du groupe et on a un produit qui est relativement homogène qu'on peut mettre sur le marché, qu'on peut donc négocier. Par exemple, on sait très bien que la pêche principale aux îles c'est le homard. Il y a 325 pêcheurs de homards qui sortent à peu près 5 000 000 de livres qui donnent une valeur de 15 000 000 $ au débarquement, au quai. Ces pêcheurs-là font déjà partie de l'Association des pêcheurs-propriétaires des îles, à 99 %, ils sont tous membres. Ils payent déjà une cotisation de 175 $ à leur association. Cette association-là a déjà un permanent professionnel compétent. Donc, il y a là tous les mécanismes qui sont prêts pour appliquer les outils que la loi rendrait disponibles.

M. Perron: Une autre question qui est extrêmement importante. C'est toujours face à l'ouverture qui a été faite par le ministre et par rapport aux voeux que vous avez en tant qu'Alliance qui représente en fait la grande majorité des pêcheurs commerciaux du Québec, peu importent les espèces. Est-ce que vous voyez un office strictement créé pour les espèces concernées par les pêcheurs ou si vous voyez plutôt une inclusion du secteur des pêches dans un autre office?

M. Poulin (François): Je comprends mal votre question.

M. Perron: Bon. Actuellement vous avez plusieurs offices qui sont sous une certaine juridiction de la Régie des marchés agricoles; est-ce que vous voulez que les pêcheurs commerciaux du Québec aient leur propre office ou si vous seriez d'accord à ce que la section des produits de la pêche soit incluse à l'intérieur d'un office déjà existant? C'est important.

M. Poulin (François): Un office déjà existant dans le secteur agricole?

M. Perron: Oui. Ce que je veux savoir c'est est-ce que vous voudriez votre propre office pour la mise en marché des produits de la pêche ou si vous avez une objection à être indus dans un autre office déjà existant? C'est ça que je veux dire.

M. Poulin (François): Je ne nous vois pas dans l'Office des producteurs de lait ou des producteurs de boeuf. Ce sont des offices très spécialisés, de la façon que je comprends le secteur agricole. Dans cette optique, dans notre esprit, il faut des offices au niveau des pêches pour les différentes spécialités, les différentes espèces.

M. Perron: O.K. Là, si je comprends bien c'est un office qui appartient à vous autres.

M. Poulin (François): Oui.

M. Perron: C'est là-dessus qu'il fallait... Je voulais avoir une réponse claire. Je pense que vous venez de la donner.

Une autre question que je voudrais vous poser. Vous connaissez très bien les réticences de l'Association québécoise de l'industrie de la pêche face à la création d'un tel office. Compte

tenu de la contrainte exercée par les prix qui sont fixés sur les marchés internationaux, ce qui entraîne que tous les gains qui peuvent être faits par les pécheurs ne peuvent l'être qu'au détriment des transformateurs - ça, ce sont les dires de l'AQIP - est-ce que je peux connaître votre opinion par rapport justement à l'opinion de l'AQIP? Parce que là on va rencontrer l'AQIP, je crois, cet après-midi et il est assuré qu'on va savoir exactement quels sont les voeux de l'Association québécoise de l'industrie de la pêche par rapport à cette ouverture que vient de faire le ministre, face aux demandes répétées que vous faites depuis plusieurs années.

M. Poulin (François): Nous croyons que le fait que les produits de transformation, les produits transformés du poisson soient exportés n'est pas un facteur limitatif qui interdirait l'application de plans conjoints, c'est-à-dire la négociation de prix. Si on regarde dans le secteur forestier, les produits de transformation du bois - c'est le papier, essentiellement - sont exportés en grande partie, sinon presque totalement, hors du Québec et hors du pays. Donc, on se trouve un peu dans la même situation que les producteurs de bois qui exploitent une ressource qui est transformée en produit exporté. C'est la situation.

Les prix qui sont obtenus sur les marchés... On comprend très bien qu'un petit producteur ne peut pas influencer le prix qu'il obtient pour son produit à Boston. Il est obligé de prendre le prix qu'il y a à Boston. Par ailleurs, on pourra lui suggérer d'aller voir sur d'autres marchés, ce que certains transformateurs commencent à faire. Mais ce qu'on veut, c'est d'obtenir par négociation un juste prix. C'est-à-dire que le différentiel entre le prix obtenu sur le marché d'exportation pour les produits du poisson, une fois qu'on a enlevé les différents coûts de transport, de courtage, de transformation, ce qui reste au pêcheur, on veut que ce soit un juste prix. On veut qu'il soit en position d'aller chercher sa juste part là-dedans. Donc, même si le prix est fixé à l'extérieur, il reste de la place pour une négociation, pour la valeur ajoutée, si on peut dire, entre le poisson qui sort de l'eau et le produit qui traverse la frontière. Il y a une discussion entre les intervenants pour que chacun ait sa juste part. Essentiellement, c'est ça. Pour nous, ce n'est d'aucune façon une objection que le produit soit exporté.

M. Perron: Si je vous ai posé la question, c'est justement dû au fait que dans votre document, à la page 11, le dernier paragraphe de votre document, c'est écrit ceci et je pense que ça vaut la peine de le dire textuellement: "Cette mesure - en parlant de l'Office - aurait de nombreux effets bénéfiques pour les pêcheurs. De plus, les effets seraient avantageux pour les transformateurs car elle permettrait une régula- rité des approvisionnements et une réduction des coûts de transaction. Pour le gouvernement, une telle mesure réduit son intervention au minimum; son rôle principal devient un rôle de contrôle et de surveillance. " Ça, c'est frappant. Mais ce que je voulais, c'est que vous l'expliquiez pourquoi vous écriviez un tel paragraphe, face à votre demande et à la position de l'AQIP qu'on va rencontrer cet après-midi.

M. Poirier (Clovis): On peut prendre un exemple concret, le rôle de surveillance, quand on parle de rôle de surveillance. Justement les prix du crabe, on va commencer à pêcher. L'année passée, le prix moyen du crabe payé au pêcheur était 1, 50 $ la livre. Cette année, nos transformateurs nous arrivent avec des prix de 0, 75 $. On a dit: Où avez-vous pris 0, 75 $? C'est ridicule, c'est la moitié de l'an passé. On nous a dit: Le yen a perdu 20 %. Le yen a eu une baisse, au niveau de l'argent américain, de 20 %. Mais 20 %, ce n'est pas 100 %. 0, 75 $ vis-à-vis 1, 50 $, ce n'est pas 20 %. On n'a aucun mécanisme de surveillance, de négociation avec ces choses-là. C'est pour ça que le dernier paragraphe le dit bien clairement.

M. Poulin (François): Je pourrais aussi là-dessus vous donner un exemple. C'est qu'à Terre-Neuve les pêcheurs sont organisés dans un syndicat, genre syndicat ouvrier, et négocient un prix pour le homard. Tout le homard de Terre-Neuve, à toutes fins pratiques, est exporté aux États-Unis. Ils s'entendent sur une formule de prix qui donne au pêcheur un pourcentage du prix obtenu sur le marché américain. Si tu obtiens 3 $ sur le marché américain, ou 4 $, le pêcheur a 70 %, ou 72 %, ou 73 % de la valeur obtenue sur le marché américain, dans le cas du homard vivant. (12 heures)

M. Perron: D'accord. Maintenant, M. le Président, si vous permettez... Ça ne concerne pas directement le projet de loi, mais il est possible qu'éventuellement ça puisse toucher un autre projet de loi, dépendamment des vues du gouvernement. Lors de la septième table de concertation qu'il y a eu sur la Côte-Nord, il a été question d'une assurance-stabilisation qui est demandée actuellement par les pêcheurs ou par l'Alliance. Puisque vous n'avez pas l'occasion de vous présenter régulièrement devant une commission parlementaire, est-ce qu'on pourrait connaître, sur le fond, votre opinion face à une telle assurance-stabilisation qui existe actuellement dans d'autres marchés?

M. Poulin (François): Dans la consultation qu'on a faite dans tous les havres de pêche, on a rencontré une majorité de pêcheurs, on a discuté avec eux de cette idée d'assurance-stabilisation. Et unanimement, ils sont d'accord pour qu'une forme d'assurance-stabilisation soit

implantée. Évidemment, reste à déterminer les modalités d'une assurance comme ça. Ils sont conscients qu'ils doivent payer une partie de prime et que l'autre partie, selon le modèle qui existe en agriculture, serait payée par l'État, soit provincial, soit fédéral-provincial, selon les formules. Alors, actuellement, on étudie, grâce à l'appui du ministre, qui nous a dit, à Sept-îles, qu'il était d'accord pour étudier la question, mais qu'il n'était pas d'accord pour donner son accord tout de suite. Grâce à son appui, on a pu établir des contacts avec la Régie des assurances agricoles où on retrouve des spécialistes en la matière pour examiner les différentes formules. Actuellement, on sait qu'à cause du libre-échange les formules existantes sont remises en question. Alors, c'est dans un contexte à ce niveau-là qu'il faut examiner la question. On travaille là-dessus intensément.

M. Perron: D'ailleurs, si vous me permettez, M. le Président... Là-dessus, ce que je peux vous dire, c'est que je suis critique en matière de pêcheries depuis un certain nombre d'années et il y a une chose qui est remarquable, c'est de voir que, du côté ministériel, le ministre qui a été le plus ouvert à date, ça a été, justement, le ministre qui est en place au niveau des pêcheries, actuellement. Et j'en suis très heureux parce que ça démontre, premièrement, qu'il a de l'intérêt pour le domaine des pêches, deuxièmement, qu'il veut régler certains problèmes et, troisièmement, ça démontre aussi, puisque je suis d'accord avec lui, que l'Opposition a l'intention de suivre ce dossier de très près, pour s'assurer, justement, que les engagements qui sont pris par le gouvernement, par le ministre vont être respectés. Jusqu'à date, dans le domaine des pêcheries, je n'ai pas eu trop de problème avec le ministre qui est là. On peut s'entendre là-dessus.

Le Président (M. Richard): C'est quasiment trop beau pour être vrai.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Richard): N'empêche que c'est ça, il arrive des miracles, vous savez.

M. Perron: M. le Président, vous qui me connaissez depuis quelques années, vous savez très bien que, lorsque j'ai quelque chose à dire...

Le Président (M. Richard): Oui, tout à fait. M. Perron: ...je le dis, quand même que...

Le Président (M. Richard): Tout à fait, et je vous en félicite, d'ailleurs.

M. Perron: Quand je ne suis pas d'accord, je ne suis pas d'accord, mais, quand je suis d'accord, je suis d'accord.

Le Président (M. Richard): Oui, c'est ça.

M. Perron: Comme le ministre fait bien son travail, je ne suis pas pour dire qu'il le fait mal.

Le Président (M. Richard): Oui, vous avez raison.

M. Perron: Mais, s'il peut aller plus loin encore, j'aimerais encore mieux ça pour le bénéfice des pêcheurs.

M. Pagé: Je pense que ce que vient de dire le député de Duplessis, je suis trop modeste pour me prononcer sur le fond, ça va de soi, dire s'il a raison ou non.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pagé: Sauf qu'on constatera qu'il fait passer les intérêts de ses pêcheurs, de son industrie, dans sa région, dans son comté, avant tout intérêt partisan, et c'est ce qui, je pense, constitue la meilleure garantie du maintien d'un niveau de rapports très étroits entre l'ensemble des députés, dont les députés de l'Opposition qui seront intimement associés à notre démarche de rationalisation. Et je retiens de plus que le député a semblé surpris. En dedans d'une semaine après ma visite à Sept-îles, déjà, les contacts étaient établis avec la Régie des assurances agricoles.

M. Perron: Justement, c'est ce que je disais. Je ne voulais pas tout dire, ne pas en mettre trop, écoutez.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pagé: J'ai noté, pour votre bénéfice, alors que vous vous adressiez aux pêcheurs et que vous les regardiez, que votre collègue semblait vouloir tirer les cordeaux.

M. Morin: Simplement parce que je commençais à me sentir mal entre vos propos.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin: J'ai dit: Si on les dérange, on va s'abstenir, on va s'en aller.

M. Perron: Écoutez, je me suis déjà fait dire par un député du Parti libéral que j'étais tellement d'accord avec lui qu'il fallait que je change de bord. Ne vous attendez pas à ça, il n'en est pas question.

Le Président (M. Richard): Ce n'est pas encore rendu là.

M. Perron: Non, ce n'est pas encore rendu là. Ce n'est pas rendu là. Une autre question que j'aimerais poser aux représentants de l'Alliance et ça a rapport à une question de marché, aussi. On sait qu'actuellement... Parce que moi j'ai toujours dit que le fédéralisme était rentable pour ceux qui le pratiquaient, c'est-à-dire les gens d'Ottawa, que ce n'était pas rentable pour le secteur des pêches en particulier à cause de certaines provinces de l'Est qui viennent gruger régulièrement sur les quotas qui devraient appartenir à des pêcheurs québécois. On voit ce qui se passe actuellement avec la question du crabe. On voit ce qui s'est passé par rapport à la zone de 200 milles où il n'y a pas un maudit permis québécois qui est émis dans la zone de 200 milles, pendant qu'il y a une surpêche qui est faite par la CEE, quatre fois ce qu'ils ont le droit de pêcher selon les ententes internationales. C'est complètement fou raide, en passant. Parce qu'à ce moment-là c'est que ça ne rentre pas dans le golfe, ça ne rentre pas dans le fleuve. Et on sait ce que c'est, ce que ça donne.

Il y a quelque chose qui se passe au niveau du homard. D'ailleurs, les pêcheurs et les industriels des Îles-de-la-Madeleine ont demandé au ministre de l'Agriculture, il n'y a pas tellement longtemps, de faire des pressions auprès du fédérai pour uniformiser la longueur du homard qui est sorti de l'eau. Il y a des endroits c'est 3 pouces 3/16. À d'autres endroits c'est 3 pouces 1/2. D'autres endroits que c'est 3 pouces 1/8. Est-ce qu'il ne serait pas possible... Votre position, là-dessus, elle est quoi? Est-ce que vous voulez avoir l'uniformité de cette longueur, peu importe la province de l'Est? Ou si vous vous accotez seulement sur la proposition des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine qui disent: 3 pouces en ce qui nous concerne? Mais, à ce moment-là, c'est que ça ne changerait rien à Terre-Neuve où on dit 3 pouces 3/16. Ça tire à la va comme je te pousse là-dedans. Une province a une longueur. Une autre province a une autre longueur. Une autre province... C'est rendu qu'il y a quatre longueurs de homard actuellement, trois ou quatre. Donc ça arrive sur le marché américain, ça fait quoi?

Le Président (M. Richard): M. Poirier, vous vouliez répondre sur la longueur, vous?

M. Poirier (Léonard): Je vais tenter de répondre. Je ne suis pas un expert dans la question des homards sauf que je représente quand même les homardiers des îles. La question a deux volets. Il y a la taille légale, c'est-à-dire le point de vue biologique, et il y a la taille commerciale. Il y a deux volets à cette question-là. La taille biologique c'est une chose. Là-dessus on ne peut pas jouer, c'est-à-dire qu'on ne peut pas uniformiser à travers le golfe à cause des différentes températures qu'il y a dans le golfe et, à ce moment-là, le homard ne vient pas à maturité au même lieu. Ça c'est une question qu'il faut dissocier.

La question réfère plutôt à la pratique commerciale. En tout cas, suite à la décision des États-Unis d'imposer une taille commerciale, une taille limite commerciale, qu'eux autres mêmes justifiaient sur la base biologique mais, nous autres, on n'y croit pas... D'après nous, c'est contraire à l'esprit du libre-échange. Donc, suite aux États-Unis, Terre-Neuve a demandé, comme le mentionne M. le député, un amendement, finalement, à la loi fédérale dans le même sens. Effectivement, nous avons demandé aussi au gouvernement fédéral les mêmes avantages. Ce que je peux en savoir de nos démarches à nous autres... En tout cas, je laisse finalement peut-être le ministre répondre du point de vue de la position provinciale. Mais ce que j'en sais, tout dernièrement, c'est que le fédéral ne semblait pas chaud, finalement, à cette idée-là, en tout cas, de donner suite à notre demande même s'il s'était déjà avancé avec Terre-Neuve.

On justifie ça par le fait qu'on est actuellement en arbitrage. On est en processus d'arbitrage avec les Etats-Unis et on ne voudrait pas leur donner d'arguments pour démonter justement notre position du côté de l'arbitrage. Sauf qu'il y a quand même un précédent, comme vous dites, qui a été créé avec Terre-Neuve. Je pense que là-dessus il va falloir... Je pense que ça sera probablement l'occasion, lors de la visite de M. Valcourt, puisqu'il y a eu un changement de ministre entre-temps, ça sera probablement l'occasion de revenir à la charge, en tout cas, et de faire préciser cette position-là.

M. Pagé:... M. le Président, pour le bénéfice du député et des collègues, ce matin. Le problème est à la fois simple et complexe. Les normes de commercialisation du homard ne sont pas les mêmes d'une province à l'autre. Quand on réfère à 3 pouces 1/8 ou 3 pouces 3/8, ça c'est entre la tête et la queue. Ce que les États-Unis ont fait, comme vous l'indiquez, M. Poirier, les États-Unis ont établi, en vertu de l'amendement Mitchell à leur loi, une règle d'application générale sur le homard consommé chez eux, comme quoi ce homard qui, traditionnellement, entrait en deçà de la norme, ne pourra plus entrer à l'avenir. L'impact de ça dans l'immédiat pour le Québec est le suivant: On n'en commercialisait pas de cette taille-là, nous, là-bas, sauf que la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick, qui en commercialisaient beaucoup là-bas, aux États-Unis, sont susceptibles, maintenant que ce marché est fermé, de pénétrer et de tenter d'envahir le marché de Montréal et le marché de Québec où, par exemple, on pourrait facilement, dans la restauration, servir deux petits homards de trois pouces 1/8 plutôt qu'un beau gros homard du Québec et des îles. C'est le problème.

Partant de là, la position du Québec est très simple. C'est que le gouvernement canadien

adopte une mesure uniforme partout s'appliquant à l'ensemble du Canada. C'est que les règles du jeu soient les mêmes pour la partie dans chacune des provinces et qu'il oblige les provinces de l'Est du Canada à respecter les mêmes normes et à se conformer, à s'enligner avec les normes américaines, et là ce serait un moyen certainement très utile de voir si la réglementation américaine s'appuie sur un souci de préservation et de conservation de la ressource ou si c'est une espèce de barrière non tarifaire au commerce entre le Canada et les États-Unis.

Premièrement, c'est la position du Québec. Deuxièmement, j'ai sensibilisé les ministres des autres provinces à cette position et, troisièmement, ça va être discuté entre M. Valcourt et moi la semaine prochaine, lorsqu'on se verra ici, au Québec. J'ai demandé que ce soit inscrit comme sujet prioritaire à la Conférence des ministres des Pêches qui est prévue pour juillet. Entre-temps, je rencontre l'ambassadeur des États-Unis lundi prochain, à Ottawa, et ça fait partie de la liste des sujets qui sont inscrits comme devant être discutés entre moi, au nom du gouvernement du Québec, et lui. Ça va impliquer, par contre, une campagne de promotion, comme j'avais l'occasion de l'indiquer aux gens de la Gaspésie. Le Québec va investir des sommes beaucoup plus importantes au niveau de la promotion, cette année, pour contrer cette possibilité d'envahissement par le homard de plus faibles grosseurs provenant des provinces maritimes.

Le Président (M. Richard): Si vous le permettez, ça prendrait la permission parce qu'il n'est pas membre de la commission, à M. Farrah, député des Îles-de-la-Madeleine, pour poser une question. Est-ce que vous seriez d'accord?

M. Pagé: Oui, d'autant plus que, même s'il n'est pas membre de la commission, il vient régulièrement à nos séances et il est membre de notre comité sur la rationalisation. Georges, tout le monde va te...

Le Président (M. Richard): Vous êtes d'accord?

M. Perron: Je n'ai aucune objection, surtout qu'il est assis sur notre bord.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Richard): Alors, M. Farrah, député des Îles-de-la-Madeleine, vous avez votre période pour la question.

M. Farrah: Merci, M. le Président. Tout d'abord, même si je suis assis à la gauche du président, ce n'est pas que je sois membre de l'Opposition, même si l'honorable député de Duplessis a des commentaires élogieux à l'endroit du ministre. Non, à mon tour j'aimerais vous souhaiter la plus cordiale des bienvenues en commission parlementaire. Ça fait toujours plaisir de parler de pêches au niveau du gouvernement du Québec compte tenu de la préoccupation pour nous, des comtés maritimes, à l'égard des pêches pour le Québec. J'aimerais souhaiter peut-être une bienvenue plus particulière à M. Léonard Poirier qui est le directeur général de l'Association des pêcheurs-propriétaires des Îles-de-la-Madeleine et également aussi à l'ensemble des intervenants.

Ma question sera très brève et toute simple. Face à vos attentes par rapport à la Régie des marchés agricoles et peut-être suite aux discussions ou à ce qui a été véhiculé au niveau de l'AQIP, au niveau des producteurs, est-ce que les attentes des deux groupes sont les mêmes face à la Régie? Le problème dans le domaine des pêches que le ministre a souligné à maintes reprises, c'est un problème d'individualisme aussi, un peu de l'incohérence, un manque de cohésion. Alors, dans ce sens-là et selon ce que vous avez entendu, et le député de Duplessis en a parlé brièvement tantôt, est-ce que vos attentes face à la Régie sont les mêmes que celles des producteurs? Il y aura quand même une complicité qui devra avoir lieu au fil des ans.

M. Poirier (Clovis): Je pense que nos attentes sont à peu près les mêmes. Elles sont les mêmes. Chacun, de notre côté, on se rend compte que ça ne fonctionne pas. Les usines nous disent qu'elles accumulent des déficits. On voit qu'il y a un manque d'organisation. Elles ne sont pas bien regroupées. La commercialisation ne se fait pas bien. Chacun s'en va avec sa petite serviette et son petit volume de poisson à Boston. Ils travaillent pas mal un contre l'autre, et les Américains s'en rendent compte et les Japonais ne sont pas fous non plus. Ça fait que, nous, en bout de ligne, on subit les conséquences de tout ça. On les a rencontrés, on a rencontré l'exécutif de l'AQIP; ça été un moment historique. C'est la première fois que l'Alliance rencontrait l'AQIP parce que... Au début, les gens nous voyaient comme deux groupes vraiment opposés mais on s'est rendu compte qu'on est dans le même bateau, on a les mêmes problèmes, il faut s'en sortir. Je ne sais pas exactement les arguments de l'AQIP, en après-midi. Malheureusement, je ne serai pas ici, mais mes collègues y seront. Je vois mal l'AQIP voir d'un mauvais oeil ce vers quoi on s'en va.

M. Farrah: Parce que l'avenir de l'industrie est lié nécessairement à une plus grande unité, une plus grande complicité entre les différents intervenants dans le domaine des pêches. Je pense que ça été un problème majeur, dans le passé.

M. Poulin (François): J'ajouterais, là-dessus,

dans le sens dont vous venez de parier... Je pense que l'AQIP est d'accord sur le principe qu'il faut se regrouper, s'unir, se mettre autour d'une même table et qu'il faut discuter. C'est sur les modalités et le type de table, la forme de la table, à toutes fins pratiques, où il peut y avoir des désaccords. Mais, sur le principe, l'AQIP est d'accord. Je pense que son mémoire est très clair là-dessus, d'ailleurs.

M. Farrah: Alors, merci de votre présence, et on va surveiller vos intérêts.

Le Président (M. Richard): Merci. Maintenant, je céderai la parole à M. Perron, député de Duplessis, pour son message final, s'il vous plaît.

M. Perron: M. le Président, comme il est 12 h 15, je voudrais remercier les représentants de l'Alliance pour leurs réponses, lors de cette commission parlementaire où nous faisons une consultation particulière sur le projet de loi 15, et je peux vous dire, dès aujourd'hui, et rassurer l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec qu'en ce qui me concerne j'attends avec beaucoup d'impatience les amendements qui vont être apportés par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, pour pouvoir en étudier le libellé. Et, c'est assuré que, de ma part, vous allez sûrement entendre parier de ce libellé et de ce contenu pour qu'on puisse regarder ensemble les possibilités, à savoir si vous êtes d'accord ou non, et les possibilités d'amendement à ce qui va être présenté, article par article, lors d'une prochaine commission parlementaire. Je suis très heureux de votre présence ici. Quant à moi, c'est une première de voir l'Alliance s'impliquer de façon concrète dans le domaine de la législation et bien sûr qu'à ce moment-là ça nous donne une ouverture qui est beaucoup plus grande dans le domaine des pêches. Je vous souhaite toutes les chances du monde dans cette saison de pêche 1990, tout en sachant qu'elle ne sera pas rosé, surtout de la façon dont le fédéral s'oriente actuellement. Il est assuré que toutes les pressions qu'on devra faire pour protéger le secteur des pêches du Québec, on les fera et on se servira de tous les moyens à notre disposition pour arriver à protéger ce secteur d'activité pour l'Est du Québec.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député de Duplessis. M. le ministre, votre message.

M. Pagé: M. le Président, je veux remercier nos honorables visiteurs de ce matin. Merci d'être venus. Ça été très positif de part et d'autre. Le tout va se concrétiser selon les échéanciers formulés, premièrement. Deuxièmement, on aura l'occasion d'échanger à nouveau ensemble assez rapidement concernant le plan de dynamisation. On va très certainement se revoir sur les quais au cours de la prochaine saison estivale, que ce soit en Gaspésie, sur la Côte-Nord, aux îles. Bonne saison de pêche. Que ça aille bien. Merci.

M. Poirier (Clovis): Vous permettez... Je voudrais remercier les gens ici présents de nous avoir si bien reçus et je suis confiant qu'avec la volonté politique et la volonté des pêcheurs qu'on a présentement au Québec le Québec va être la province qui va se sortir le plus vite de la crise au niveau de l'Atlantique. Ça, j'en suis sûr. Si on peut se revoir dans quelques années, je pense que ça va être une chose faite.

Le Président (M. Richard): Merci, monsieur, et merci à l'Alliance des pêcheurs commerciaux du Québec. Nous demanderions à la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec de prendre place, s'il vous plaît, tout en les remerciant, au nom de la commission, d'avoir cédé leur tour, tout à l'heure, pour des fins pratiques.

Nous suspendons deux minutes et demie.

(Suspension de la séance à 12 h 19)

(Reprise à 12 h 27)

Le Président (M. Richard): Nous recevons la Fédération. nationale des associations de consommateurs du Québec. Vous étiez là tout à l'heure, donc vous savez la méthode de fonctionnement. Alors, vous vous identifiez d'abord; par la suite, vous présentez vos collègues et vous avez la parole pour la présentation de votre opinion ou de votre mémoire. Vous avez la parole.

Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec

M. Beaudoin (Roger): Bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. Il nous fait plaisir, la FNACQ, d'avoir été invitée à cette commission pour discuter du projet de loi 15. Dans un premier temps, je vais vous présenter les intervenants qui vont prendre la parole à ma suite: à l'extrême droite, M. Richard Dagenais, recherchiste pour notre Fédération et également membre bénévole, depuis plusieurs années, du comité agro-alimentaire de notre Fédération; au centre, Mme Lise Pilon, présidente de la FNACQ et également membre bénévole du comité agro-alimentaire de la FNACQ et aussi de l'ACEF de Québec depuis plusieurs années; et moi je suis Roger Beaudoin, coordonnateur de l'ACEF de Québec et responsable pour notre Fédération de la question de la réglementation du prix du pain et de la farine et de la réglementation du prix des aliments de base.

Dans un premier temps, une petite note technique avant de céder la parole à notre présidente. Ici, j'ai des documents supplémentaires... nous avons cinq copies d'une étude, qui est l'étude dont on va parler tantôt, dont vous avez un résumé à l'intérieur de notre mémoire, un résumé d'une quinzaine de pages...

Le Président (M. Richard): Seulement un instant, s'il vous plaît. Vous déposez ce document-là?

M. Beaudoin: Nous déposons ce document-là. On en a déjà envoyé copie au ministre ainsi qu'au leader de l'Opposition dans le même domaine, mais on s'est dit que peut-être quelques autres copies pourraient circuler.

Le Président (M. Richard): Alors, si monsieur peut aller chercher le document.

M. Beaudoin: D'accord, de même qu'une feuille qui est un addendum en page 15.1, on en a des photocopies pour le mémoire en tant que tel - il y a des photocopies mais peut-être pas assez de copies - et une liste de nos appuis au niveau de la campagne en faveur de la réglementation du prix du pain - celle-ci, malheureusement, on a omis d'en faire des photocopies. Ce seront des pièces à verser en annexe, si vous voulez.

Le Président (M. Richard): Ne vous inquiétez pas, il y a une chose qui fonctionne ici rapidement, ce sont les photocopieuses.

M. Beaudoin: Bon, c'est bien parfait.

Le Président (M. Richard): II n'y pas d'erreur là-dessus. Merci, on reçoit ces documents-là avec vous.

M. Beaudoin: D'accord. J'aimerais souligner que le document, qui est assez épais, circule depuis déjà un certain temps dans les services de recherche un peu partout au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Alors maintenant, je vais céder la parole à Mme Lise Pilon, notre présidente.

Mme Pilon (Lise): La Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec est une fédération d'organismes voués à la défense et à la promotion des intérêts des consommateurs et consommatrices, plus particulièrement ceux à faible revenu. La FNACQ a été fondée en 1978 et, depuis 1984, elle a élargi son membership en intégrant d'autres groupes de consommateurs ainsi que des groupes spécialisés sur des dossiers précis en consommation. Aujourd'hui, la Fédération compte neuf organismes membres qui l'amènent à se prononcer sur différents aspects, tels: l'agro-alimentation, la téléphonie, l'électri- cité, l'essence, l'endettement, le crédit, la santé, les services professionnels, le libre-échange et les pré-arrangements funéraires ainsi que différents dossiers d'actualité qui touchent de près les intérêts des consommateurs et consommatrices.

La FNACQ regroupe actuellement neuf associations de consommateurs du Québec, dont vous avez la liste à la page 4 de notre mémoire: l'Association coopérative d'économie familiale de l'Estrie, de Granby, de Québec; l'ACEF rive sud; Auto-Psy région de Québec; l'Association pour la protection des intérêts des consommateurs de la Côte-Nord et de Port-Cartier de même que le Centre de recherche et d'information en consommation de Port-Cartier et de Sept-îles et le Mouvement pour l'agriculture biologique.

La FNACQ entretient aussi des contacts réguliers avec les autres organisations de consommateurs du Québec. Les associations membres de la FNACQ ont un membership individuel ou de groupe ou encore les deux à la fois, ce qui représente au total environ 125 000 membres.

Au niveau de l'agro-alimentation, c'est un secteur important d'intervention de la FNACQ et la majorité des groupes membres participent aux interventions de la FNACQ.

Parmi les activités et actions de notre fédération dans ce domaine, citons brièvement: la campagne pour la réglementation des aliments de base; les interventions aux audiences de la Régie des marchés agricoles du Québec; la participation à certains comités consultatifs, tel celui du MAPAQ sur les normes relatives au réseau de commercialisation des viandes; les interventions sur les heures d'ouverture des magasins d'alimentation; les études et prises de position publiques sur différents sujets d'actualité comme l'irradiation des aliments, l'agriculture biologique, l'inspection des viandes, la protection de l'environnement et l'étiquetage des produits alimentaires.

Aujourd'hui, la FNACQ demande au gouvernement provincial de modifier fortement le mandat de la Régie des marchés agricoles du Québec pour en faire un instrument public fortement orienté vers la défense des intérêts des consommateurs et consommatrices dans le domaine agro-alimentaire. Depuis plus de 10 ans, notre fédération s'intéresse à l'organisation économique du secteur agro-alimentaire au Québec. L'une des manifestations concrètes de cet intérêt aura été notre présence active à la Régie des marchés agricoles à propos des demandes d'augmentation du prix du lait. Enfin, à partir de 1981, nous avons concentré nos activités dans le champ de la réglementation des prix. Le point culminant aura été, en 1984-1985, notre présence au comité consultatif de la Régie qui avait pour but de faire le point sur la pertinence du maintien des contrôles du prix du lait. Point culminant puisque nous avons, à cette occasion, constaté qu'il était maintenant dans

l'intérêt des consommateurs que le système de contrôle des prix du lait soit maintenu.

Le marché agro-alimentaire s'est concentré depuis 30 ans au Québec. Dans plusieurs domaines, la concurrence a été réduite; dans d'autres, elle est inexistante et les consommateurs font les frais, dans certains cas, d'un contrôle privé des prix. Aujourd'hui, la loi du marché signifie la loi de l'entreprise dominante. La Régie doit s'ajuster à cette nouvelle réalité. Nous avons constaté, depuis un certain temps, que la Régie des marchés agricoles avait besoin d'un rajeunissement lui permettant d'intervenir d'une façon plus souple, efficace et économique pour solutionner des problèmes issus de situations nouvelles qui préoccupent grandement les consommateurs. Même si cette approche de la réforme de la Régie peut sembler pragmatique, la FNAGQ tient à souligner les objectifs qu'elle poursuit dans le domaine agro-alimentaire, ce qui permettra, en fait, de mieux souligner un champ d'intérêt contradictoire ou complémentaire.

Les consommateurs ont un besoin urgent d'un organisme comme la Régie pour voir à la protection de l'intérêt public, c'est-à-dire, dans notre esprit, l'intérêt des consommateurs. Dans le cadre d'un marché agro-alimentaire tel que nous l'avons très brièvement décrit, voici quel devrait être le mandat de la Régie des marchés agricoles. La Régie des marchés agricoles devrait voir au développement de la concurrence là où elle existe encore; elle devrait avoir aussi le pouvoir d'enquêter sur la formation des prix des aliments afin de déterminer s'il existe une ou des manipulations possibles des prix par quelques entreprises; la Régie des marchés agricoles devrait aussi pouvoir fixer les prix lorsqu'elle découvre qu'il n'y a pas de concurrence suffisante afin d'assurer aux consommateurs les meilleurs prix possible; quatrièmement, la Régie devrait pouvoir intervenir sous forme d'enquête et de réglementation à propos de tous les prix des aliments à condition qu'elle respecte la juridiction du Québec. Elle devrait privilégier, dans un premier temps, l'étude des marchés des aliments de base et la réglementation du prix de ceux-ci afin d'en favoriser l'accessibilité aux personnes et familles à faible revenu; cinquièmement, la Régie devrait pouvoir intervenir lorsqu'il y a des pratiques déloyales ou anticoncurrentielles dans le domaine agro-alimentaire; sixièmement, dans l'immédiat, la Régie devrait intervenir dans le marché du pain et de la farine et fixer le prix de sept types de pain et de farine vendus aux consommateurs. Ainsi, la Régie des marchés agricoles verrait son rôle de protection des intérêts des consommateurs renforcé et élargi, tout en soutenant le développement d'une saine concurrence et en exerçant une surveillance et/ou un contrôle des prix lorsqu'il n'existe pas suffisamment de concurrence dans certains marchés.

Bref, l'ACEF de Québec et la FNACQ attendent du gouvernement qu'il développe le rôle de la Régie des marchés agricoles dans le sens des intérêts des consommateurs et consommatrices du Québec; qu'elle joue un rôle actif dans ce sens pour l'ensemble du secteur de l'agro-alimentation et pas seulement dans le cadre de la réglementation du prix du lait. C'est une forme d'élargissement de mandat que nous désirons. Je vais maintenant passer la parole...

M. Beaudoin: Richard va nous faire un peu une explication brève sur la situation du marché du pain et de la farine au Québec. Il va sans doute vous référer parfois à des tableaux ou à des données qui sont dans votre mémoire, de la page 12 à la page 20.

M. Dagenais (Richard): Le cas du pain et de la farine au Québec constitue un exemple qui, d'après nous, cause problème pour les consommateurs. À partir d'une analyse de la situation, on se pose la question: Quelles sont les solutions à apporter pour que les consommateurs puissent avoir des prix plus justes, pour que les biens soient abordables? Parce qu'on considère que ce sont des biens essentiels de consommation.

D'une part, au niveau de la farine, par exemple, il y a une concentration assez forte au niveau du Québec. Pour la production minotière de la farine, il y a trois entreprises: Maple Leaf, Ogilvie et Robin Hood qui contrôlent 90 % de la production de farine. Au niveau de la fabrication du pain, il y a deux entreprises: Multimarques qui contrôle 65 % du marché - ici, j'entends la production industrielle de pain - et Weston qui contrôle 18 %. Alors, à deux, ça fait 83 % du marché.

Au niveau de la distribution, il y a trois entreprises: Provigo, Métro et Steinberg qui contrôlent dans l'ordre de 85 % la mise en marché au détail de l'alimentation. C'est une concentration donc à plusieurs niveaux et on se pose la question: Quel impact ça a-t-il pour les consommateurs, ce niveau de concentration? Dans le cas du pain, on a poursuivi une étude, en 1988-1989, qu'on a soumise au bureau de la politique de la concurrence pour leur demander leur avis et quelle solution on pourrait apporter dans le cas présent au Québec. On n'a pas eu de réponse depuis un an et, personnellement, on n'anticipe pas de solution de ce côté-là. La solution qu'on a vue, somme toute, c'est d'établir une réglementation du pain. Depuis 1973, il y a une loi qui vise à protéger l'industrie de la boulangerie au Québec. On a fixé, à ce moment-là, un prix minimum pour différents pains, les plus consommés, et on a interdit, entre autres, la publicité en dehors des magasins. Cette loi-là, quant à nous, a protégé l'industrie et elle a permis de structurer l'industrie québécoise et de percer sur le marché. Par contre, notre façon d'interpréter les choses, c'est que le consommateur n'a pas été protégé par une loi qui fixait

uniquement un prix minimum pour empêcher la guerre de prix qui persistait à ce moment-là, au début des années soixante-dix et à la fin des années soixante.

Alors, vous avez, en page 12, des données de prix: entre le Québec et l'Ontario, par exemple, en 1986, l'écart était de 25 % au niveau du pain qui se vendait, en moyenne, 1,87 $ le kilo, alors qu'il se vendait en Ontario 1,50 $. En 1974, les données nous indiquent que le prix était comparable entre le Québec et l'Ontario et, graduellement, avec les années le prix se distend par rapport au prix ontarien. Notre façon d'interpréter les résultats, c'est qu'il y a eu l'impact de la loi qui a joué pour stabiliser les prix et les faire augmenter graduellement. Il y a aussi une concentration accrue sur le marché avec le programme, entre autres, de regroupement des entreprises auquel le gouvernement du Québec a participé.

Vous avez un graphique, en page 13, qui montre l'évolution du prix du pain. C'est un pain blanc de 75 grammes. Ce sont des données de Statistique Canada de prix au détail et qui vous indiquent, finalement, l'écart qu'il peut y avoir entre le prix du pain au Québec et en Ontario. Donc, l'évolution s'est accrue, en termes d'écart, par rapport à l'Ontario.

Vous avez des données sur les autres villes, alors je vous laisserai consulter ces données-là. L'étude a tenu compte de l'évolution des prix, a tenu compte aussi des coûts dans l'industrie, de révolution des coûts et, effectivement, depuis 1974, on observe que les coûts ont évolué différemment entre le Québec et l'Ontario; entre autres au niveau du prix de gros, par exemple, les prix se sont distancés aussi entre le Québec et l'Ontario.

L'étude a regardé aussi les marges qu'il pouvait y avoir au niveau des entreprises de distribution, au niveau des institutions. Il nous paraît, finalement, que le consommateur est désavantagé dans les structures de marché actuelles.

Quelles solutions apporter à cela? Nous avons vu que du côté de la loi sur la concurrence, par exemple, nous n'avions pas d'attente de ce côté-là. Il nous semble que dans l'état du marché, avec les concentrations au niveau de la boulangerie, la façon la plus acceptable pour le consommateur d'être protégé, c'est d'avoir une loi qui régirait les prix au niveau du gros et du détail. L'organisme demande aussi qu'il y ait une réglementation au niveau du prix de la farine parce qu'on observe aussi, de ce côté-là, une différence marquée, par exemple, entre le Québec et l'Ouest qui produit la farine et des différences qui ne sont pas du tout justifiées par les différences amenées par les coûts de transport. Pour nous, c'est la concentration au niveau des minoteries qui amène ce coût plus élevé pour les consommateurs au niveau de la farine.

Je vais arrêter ici ma présentation.

M. Beaudoin: Dès le moment où on a considéré qu'il y avait un problème dans le marché du pain et de la farine et qu'il y a une trop grande concentration, c'est que la loi de la concurrence ne permet pas d'agir efficacement là-dedans. Dès le moment où on propose une réglementation, comment est-ce qu'elle pourrait se faire concrètement?

M. le Président, juste au niveau technique, combien de temps nous reste-t-il, environ, pour la présentation?

Le Président (M. Richard): II n'y a pas de problème à ce niveau-ci, cinq minutes.

M. Beaudoin: Cinq minutes, environ? D'accord.

Le Président (M. Richard): Maximum. Mais vous n'êtes pas obligé de les prendre, en fait...

M. Beaudoin: On va les prendre parce qu'on a beaucoup de choses à dire.

Le Président (M. Richard): L'important, c'est effectivement que vous nous passiez votre message.

M. Beaudoin: D'accord. Grosso modo, au fond, nous, on s'inspire beaucoup du modèle au niveau de la réglementation du prix du lait. Pour nous, évidemment, le blé est déjà réglementé par la Commission canadienne du blé, donc la réglementation de la RMAQ qu'on espère s'appliquerait d'abord aux minoteries au niveau de deux types de farine: celle destinée aux boulangeries et celle aux détaillants. Au niveau des boulangeries, ce serait la réglementation des pains livrés aux détaillants et à domicile; des détaillants, ce serait la réglementation des pains vendus au comptoir dans les grandes épiceries comme dans les dépanneurs.

La fixation des prix se ferait véritablement sur la basé de fourchettes de prix miminum et maximum et ça devrait être fixé d'après une étude critique des coûts de production et de distribution déposée lors d'audiences publiques prévues à cette fin auxquelles pourraient participer les différents acteurs économiques; évidemment, les producteurs, les intermédiaires, etc., mais également les consommateurs et consommatrices.

Évidemment, quand on parle de réglementation, on ne parle pas de ne pas tenir compte de l'économie et de comment elle fonctionne. Évidemment, il y a une marge raisonnable de profit qui est accordée aux différents intervenants sauf que, actuellement, probablement que, dans le domaine du pain, selon nous, il y a des profits ou des marges de profit supérieures à beaucoup d'autres produits alimentaires, compte tenu de la concentration.

Je ne vous dirai pas tout ce qu'il y a dans

notre mémoire, vous pourrez le lire. On parle un peu de publicité, les spéciaux seraient abolis, à ce moment-là, mais, selon nous, les consommateurs, au fond, seraient avantagés à moyen terme sur l'ensemble de ce qu'ils dépensent au niveau de l'année par rapport à leur pain mais aussi par rapport à leur épicerie en général.

Les types de pain à réglementer, selon nous, ce sont les pains à production industrielle les plus consommés actuellement, ce seraient les pains blancs, les pains blancs tranchés, sandwich, réguliers, enrichis, les pains au lait, les pains de blé entier tranchés, à l'exception des pains fabriqués avec du blé biologique certifié parce que, actuellement, il n'y a pas un niveau de production industrielle assez développé pour qu'on l'inclue pour tout de suite, ce qui ne serait pas exclu par la suite, et les pains divers comme les pains à hamburger et les pains de sole.

D'autre part, aussi, on considère que la farine devrait être réglementée au niveau du prix. Ce serait la farine tout usage, la farine pâtissière et la farine de blé entier. Encore là, l'exception, pour le moment, pour peut-être quelques années encore, le produit fabriqué avec du blé biologique certifié.

Cela dit, ces choix-là sont basés sur ce qu'on sait des habitudes alimentaires, actuellement, et de la production industrielle, elles pourraient être réévaluées après quelques années. Pour nous, la Régie des marchés agricoles du Québec serait la meilleure institution qui pourrait vraiment faire ça de façon efficace, compte tenu de son expérience dans le domaine du lait. D'autre part, selon nous, la réglementation en termes de coûts serait tout à fait raisonnable par rapport à l'ensemble du marché, par rapport au chiffre d'affaires, par exemple. Donc, nous, on parle de réglementation. On n'est peut-être pas à la mode en parlant de réglementation, mais on pense qu'il y a certaines réglementations qui doivent disparaître possiblement. Il y a des réglementations, par contre, qui doivent être maintenues et, dans certains cas, dans certains types de problèmes, on ne doit pas hésiter à aller de l'avant dans le sens d'une réglementation publique. (12 h 45)

On ne voudrait pas que... Quand on parie beaucoup du pain et de la farine, on voudrait revenir à dire: Oui, pour le moment, c'est ça qu'on voudrait que la RMAQ fasse, mais on voudrait aussi que la RMAQ, comme on le dit au début de notre présentation, ait un rôle plus large que ça et qu'elle-même fasse des études, des recherches, des enquêtes, etc., surtout sur les marchés des aliments de base, parce que c'est ça qui nous intéresse d'abord et avant tout et surtout.

Une dernière chose, parce que je pense que mon temps est presque écoulé. En page 27, sur l'article 7, nous, on souhaiterait qu'au niveau de la composition de la Régie ce soit précisé de quels milieux doivent provenir les régisseurs et nous tenons à ce qu'un régisseur, sinon deux régisseurs proviennent du milieu des associations de consommateurs ou, encore, soient proposés par eux sur une liste. Parce que, évidemment, selon nous, les intérêts des consommateurs et des consommatrices seraient mieux défendus s'il y avait des représentants au niveau de la Régie et si ces gens-là n'étaient pas des gens péchés un peu partout, un peu nulle part. Ce sont des gens qui ont un lien quelconque avec une pratique de défense des consommateurs sans, nécessairement, représenter une association particulièrement.

Il y a d'autres suggestions ou critiques par rapport à des points plus techniques, dans notre mémoire, mais nous avons vraiment voulu concentrer notre présentation sur ce qu'on estime être les intérêts des consommateurs, c'est-à-dire vraiment une RMAAQ pour les consommateurs et consommatrices. On n'a aucune objection à rajouter "alimentaires" après "agricoles". Alors, je vous remercie de votre attention. Évidemment, on est prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Richard): Merci, madame et messieurs. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Pagé: Merci, M. le Président. D'abord, je tiens à remercier la Fédération nationale des associations de consommateurs d'être avec nous, ce matin, et la remercier aussi du mandat qu'elle remplit pleinement sur une perspective de défense des intérêts des consommateurs du Québec, particulièrement, aussi, d'information, de sensibilisation, etc.

Nous recevons votre mémoire avec beaucoup d'intérêt. D'ailleurs, je ne sais pas si vos représentants étaient ici au moment de l'ouverture de nos travaux, mardi de la semaine dernière. J'ai très clairement indiqué, à ce moment-là, que la volonté du gouvernement qui présente cette loi pour adoption à l'Assemblée, c'est d'actualiser la loi et, actualiser la loi, ça veut dire aussi que le mandat de la Régie aille au-delà du caractère discipline, policier ou respect des règles du jeu dans la commercialisation des produits, comme elle l'a fait, mais que ça déborde et que ça puisse être davantage une action orientée vers la commercialisation, la mise en marché du produit.

À cet égard, des chambres de coordination et de développement seront très certainement mises en place. Leur objectif, ce n'est pas d'ajouter un élément additionnel à la structure, c'est que les gens se parient, que les gens échangent en fonction de l'évolution des marchés, des besoins des consommateurs, notamment, parce que, l'obligation que nous avons dans l'alimentation, si on veut continuer à être performants, à maintenir nos acquis, à maintenir cette stabilité des revenus en amont de la consommation, s'adressant plus particulièrement

aux producteurs et aux productrices, on se doit d'être très évolutifs dans nos produits mis en marché.

Vous référiez, tout à l'heure, aux produits biologiques. C'est définitif qu'on se dirige vers une commercialisation beaucoup plus grande de produits biologiques, de produits naturels. On a rencontré des problèmes et le problème initial, c'était toute la question de la certification de ces produits parce que, comme association représentant les consommateurs, vous êtes certainement d'accord avec moi que l'absence de normes ne constitue pas la meilleure garantie pour le consommateur comme quoi il achète, effectivement, un produit qui est biologique, d'une part, et, d'autre part, souventefois, le produit commercialisé comme biologique se vend plus cher que le produit dit commercial de même nature ou comparable. Alors, c'est avec beaucoup d'intérêt qu'on reçoit le mémoire.

Vous vous référez à l'article 7 et vous nous dites: On aimerait avoir un ou des représentants ou deux représentants à la Régie, etc. J'ai indiqué que, traditionnellement, la Régie était composée de personnes de bonne foi, de gens compétents qui respectent la loi, mais qu'il y avait une relative identification de ces gens en fonction de leur passé, à savoir s'ils avaient évolué au niveau du syndicalisme agricole, au niveau de la coopération agricole, etc. J'ai très clairement indiqué la volonté du gouvernement de faire en sorte que, dans le renouvellement des mandats des membres de la Régie, on soit moins, entre guillemets, critiquables ou vulnérables, en termes de perception, à cet égard, c'est-à-dire qu'on cesse de penser que telle personne représente tel secteur ou est en quelque sorte un délégué du secteur. Il ne faudrait pas que ce soit perçu comme ça. J'entends faire en sorte que la composition des membres de la Régie puisse tenir compte davantage de ceux et celles qui consomment nos produits. Comment ça pourra se traduire? On va le voir à l'exercice, à l'expérience. Mais je crois que vous devez faire confiance au gouvernement dans sa volonté d'agir en semblable matière, animé par les objectifs auxquels je viens de me référer.

Comme le temps court, le temps fuit, je voudrais aborder avec vous le dossier très spécifique du pain. Vous nous demandez de réglementer le pain, le prix du pain, un peu comme on le fait dans le lait. On a eu des échanges sur le sujet. D'ailleurs, à ma demande, vous avez rencontré - si ma mémoire est fidèle, c'était le 6 ou le 13 décembre dernier - les différents intervenants dans le dossier du pain. Ça s'est fait ici, au Concorde, à Québec, je crois.' Vous avez rencontré les représentants des minoteries, des boulangeries. Essentiellement, le message qu'on vous avait dit, à ce moment-là, ce qu'on vous avait dit, c'était: Tenter de voir ensemble ce qui peut être fait, à quelles conditions, comment ça pourrait se faire et quelle serait la portée de ce que vous pourriez faire.

Je crois comprendre qu'il y a eu des échanges d'information, mais qu'il n'y a pas eu d'autres rencontres depuis. J'aimerais connaître votre réaction face à ces échanges et ce que vous attendez des échanges ultérieurs. Ensuite, je reviendrai, M. le Président, pour indiquer à ces bonnes gens que j'aimerais... Vous savez, nous, en politique, et ce, quel que soit notre parti, je pense que c'est intrinsèque aux politiciens, on préfère dire oui que dire non et je présume que vous auriez apprécié que je vous dise oui avec autant d'emblée que j'ai dit oui à nos bons amis les pêcheurs tantôt. Mais je vais vous dire pourquoi on ne peut pas dire oui, immédiatement, tout au moins, à la lumière des données que j'ai. Vous savez, le pain et le lait, je comprends que ce sont des produits de base tous les deux, mais ce ne sont pas les mêmes coûts, ce ne sont pas les mêmes intrants.

Je vous pose ma première question et je reviendrai, après ça, sur la problématique de réglementer le pain au Québec.

M. Beaudoin: Si je comprends bien, la première question, c'est surtout nos réactions par rapport aux rencontres avec les...

M. Pagé: Oui, non seulement vos réactions, mais surtout vos intentions.

M. Beaudoin: Bon, d'accord. Je ne sais pas, Richard, si tu... ou t'aimerais mieux moi?

M. Dagenais: Nos réactions étaient d'abord de répondre à la réponse des minoteries et des boulangeries sur le dossier qu'on avait soumis au ministère et le rapport-synthèse qu'on avait produit. Quant à nous, la position, finalement, que défendaient les minoteries et les boulangeries n'était pas toujours bien fondée et ne répondait pas vraiment à nos interrogations, n'expliquait pas, dans toute la mesure du possible, la différence de prix qui pouvait exister entre le Québec et l'Ontario, par exemple. En tout cas, nous, on n'a pas été satisfaits, somme toute, des réponses qu'ils nous ont apportées à ce chapitre-là.

Quant à l'avenir, je peux difficilement croire, somme toute, que les entreprises vont vraiment tenir compte de l'intérêt des consommateurs au point, par exemple, que Multi-Mar-ques se scinde en deux, comme avant 1985, ou des choses du genre. Je n'anticipe pas, honnêtement, de solutions...

M. Pagé: L'objectif, est-ce que c'est que Multi-Marques se scinde en deux ou que le consommateur paie un prix acceptable?

M. Dagenais: C'est-à-dire que, pour nous, le problème du maintien du prix plus élevé, de l'écart de prix plus élevé est en relation avec la

concentration. Je disais: Est-ce qu'une solution, ce serait, par exemple, la scission de Multimarques? Bon, pour nous, ce n'est pas possible. Le fait est que le marché est là, concentré, présentement, et qu'on est pris avec une situation qui est, de fait, là pour perdurer, quant à nous. Si je demande, par exemple, aux entreprises de baisser leur marge de profit et tout ça, ça serait reconnaître, quant à elles, qu'il y a des profits supérieurs pour l'instant, ce qu'elles ne veulent pas nous démontrer de façon claire. Je pense que c'est difficile pour nous de demander aux entreprises de régler les problèmes, alors que, pour nous, c'est plutôt le rôle de l'État de voir à ce qu'il n'y ait pas une concentration trop forte, qui donne trop de pouvoir à certaines entreprises sur le marché. Mais l'objectif de l'entreprise, c'est de gagner du marché et on ne peut pas les empêcher, somme toute, de poursuivre cet objectif. Dans ce sens, je pense que le rôle du gouvernement, pour nous, c'est plus de voir à maintenir un équlibre entre les forces de la production, de la transformation, de la distribution et de la consommation. Et je ne crois pas que les discussions qu'on a eues et qu'on pourrait avoir dans l'avenir pourraient régler le problème à cet effet. Je ne le crois pas, honnêtement, et ce n'est pas juste par déformation, être biaisé en faveur des consommateurs, mais je pense qu'en termes de réalisme on ne peut pas demander aux entreprises de modifier la situation sur le marché par elles-mêmes. C'est ma position, personnellement.

M. Beaudoin: Peut-être juste un dernier détail, c'est que le cadre de la rencontre qu'on a eue avec les industriels n'était pas toujours très clair, parce que c'était une démarche un peu particulière qui était à la fois officielle et officieuse, qui se passait, évidemment, dans des bureaux ou avec des fonctionnaires du ministre. Les règles du jeu n'étaient pas très claires, si vous voulez, mais, même si les règles du jeu avaient été plus claires, si les objectifs, de part et d'autre, avaient été plus clairs, ça n'aurait peut-être pas changé grand-chose. Disons qu'on a eu certaines surprises, des surprises très simples comme, par exemple, d'arriver dans un local où on nous avait parié d'une délégation de l'industrie. Nous, on s'est dit: Bon, une délégation, on va aller là pour présenter notre point de vue, pour répondre a ce qui est sorti de l'industrie. Finalement, on s'est retrouvés avec environ une douzaine de personnes de l'industrie et, nous, on était deux. Je vous dirai que c'est peut-être nous qui avons fait une erreur - c'est juste un petit détail technique - mais on ne pensait pas qu'à cette rencontre-là c'était le temps...

M. Pagé: C'est parce qu'ils devaient être nombreux à vouloir vous rencontrer, je suppose?

M. Beaudoin: Bof! Écoutez, oui, j'imagine, sauf que ça ressemble à une espèce de petite guéguerre, cette affaire-là. Deuxièmement, il ne faut pas être naïfs, je pense. Effectivement, l'industrie ne veut pas véritablement entrer dans une réglementation, mais, en même temps, elle ne propose rien non plus. Le gouvernement, pour le moment, est un peu en observation: Comment l'industrie va-t-elle réagir? Est-ce que la FNACQ réussit à prouver scientifiquement qu'effectivement il y a un problème, etc. ? Effectivement, pour nous, l'État doit prendre ses responsabilités, le gouvernement doit prendre ses responsabilités par rapport à ça. Sauf exception rarissime, ça serait très rare que des industries apprécient une réglementation. Ça serait être naïfs de penser ça.

M. Dagenait: Enfin, la rencontre qu'on a eue consistait, quant à nous, à clarifier, en tout cas, certaines données et certaines positions et non pas à voir les solutions que l'industrie voudrait vraiment avoir; ils n'en ont pas présenté comme tel. Eux, ils soutenaient qu'il n'y avait pas de problème sur le marché, que la situation était normale, que le marché était peut-être plus stable au Québec, mais qu'il n'y avait pas de problème pour les consommateurs. Alors que nous, selon notre interprétation, à partir des faits qu'on a relevés des statistiques officielles, tout cela nous indique qu'il y a quand même des différences importantes par rapport au reste du Canada.

M. Pagé: II y a des différences importantes, aussi, entre Québec et Montréal, mais, si on compare Montréal à Ottawa et Toronto, l'écart est moins grand qu'entre Ottawa, Toronto et Québec.

M. Dagenais: Effectivement, dans la région de Montréal, la concentration est moins grande. Il y a Multimarques qui se partage à peu près le marché avec Weston. Par contre, dans le reste du Québec, nos chiffres nous indiquent qu'en dehors de la région de Québec, Montréal et Sherbrooke la concentration est à peu près de 88 % de la part de marché pour Multimarques. Là, l'impact redistributif, somme toute, de la concentration est beaucoup plus important pour les autres régions du Québec, et je pense qu'il faut en tenir compte aussi.

M. Pagé: Je regarde ici, dans le Québec métropolitain, selon nos analyses, outre les magasins d'alimentation, comme Steinberg, Métro, Hudon & Daudelin et Provigo, on compte 40 boulangeries détaillantes et vous allez très certainement accepter ou convenir avec moi qu'on assiste à un phénomène, dans la spécialisation par boutique, de croissance assez importante de la fabrication de pain à partir de pâte congelée ou surgelée ou de la fabrication sur place au niveau des petites boutiques.

Donc, l'autre élément, la question que je voulais vous poser, c'est: Êtes-vous bien au fait qu'en demandant de régir le prix du pain, dans sept types de pain, le pain blanc, le pain brun, de blé entier, au lait, etc., vous nous demandez de régir les niveaux de rémunération dans les boulangeries du Québec, soit par décret, soit par une loi spéciale qui viendrait mettre de côté les conventions collectives? Parce que la concentration à laquelle vous vous référez - et vous allez en convenir - est accompagnée d'une démarche de syndicalisation très élevée des travailleurs et des travailleuses, dans ces entreprises. Et ce que vous nous demandez ce matin - et c'est un élément, aussi, qui doit être pris en compte dans toute analyse de comparabilité ou de comparaison entre le Québec et l'Ontario - c'est de venir régir les salaires. Quand on dépense 1 $ pour acheter du pain, il faut bien avoir à l'esprit que c'est entre 10 % et 15 %, le coût du blé ou de la farine, au maximum, et que l'ensemble des intrants, c'est au maximum 0, 20 $ dans le dollar dépensé, alors que, dans le lait, c'est une situation complètement différente. Par exemple, dans le lait de consommation, le pool 1 est à 54 $ l'hectolitre, environ. Le lait se vend 1, 05 $, 1, 08 $. Donc, c'est environ 50 % du produit de la matière première, alors que, dans le pain, c'est au maximum 20 %. Et quand on regarde le pain, Cintrant qui va chercher le plus haut pourcentage, c'est la main-d'oeuvre et la fabrication. Donc, il faudrait qu'on réglemente les salaires. (13 heures)

M. Dagenais: C'est-à-dire que c'est la distribution, dans le cas du pain, qui absorbe...

M. Pagé: La distribution aussi, mais la fabrication. Il faudrait...

M. Dagenais: Dans le cas de la fabrication, oui, c'est la main-d'oeuvre.

M. Pagé: Écoutez, réglementer le prix du pain, c'est venir régir ou contrôler, si on veut être conséquent avec la démarche, la main-d'oeuvre dans les entreprises qui fabriquent le pain, donc le boulanger, un, et, deux, contrôler les coûts de la distribution. Moi, à la résidence, chez nous, c'est encore un monsieur qui passe et qui livre le pain. Mais il faudrait que je lui contrôle son coût. Il représente quoi dans le pain que j'achète à tel prix?

M. Dagenais: Sur ce, les données des statistiques des boulangeries nous indiquent que les salaires, au Québec, sont un peu plus faibles qu'en Ontario. Et si on se réfère aux statistiques officielles, à ce moment-là, je pense que cet argument ne tient pas directement, quant à moi.

M. Pagé: Oui, mais peu importe le niveau, réglementer le lait... La Régie vient établir le prix payé au producteur, payé à l'entreprise qui transforme et impose un prix au niveau de la distribution. Et la référence, ce qui habilite, finalement, la Régie à pouvoir décider, à juger et à partager, c'est le fait que 50 %, au moins, du coût du lait, c'est le lait, c'est le produit de base, c'est le produit bioalimentaire. Ce ne sont pas les salaires et ce n'est pas la distribution, etc.

M. Beaudoin: Mais, M. le ministre, vous êtes en train de nous dire que c'est beaucoup plus complexe... Il y a peut-être deux choses.

M. Pagé: C'est beaucoup complexe, je vous le confirme, dans mon livre à moi, comme ministre. Et on regarde ça chez nous, je ne suis pas tout seul à regarder ça au ministère; c'est beaucoup plus complexe de donner un cadre de réglementation et de contrôle de prix dans le pain que dans le lait. Autre élément, c'est qu'on a toute une gamme d'intrànts dont on ne contrôle pas les prix au Québec. Le plus bel exemple, si on regarde les variantes dans les prix, en 1989, la farine a diminué de 1, 3 %, le sucre plus 22, 6 %, l'emballage plus 0, 6 %, l'électricité plus 3, 9 %, les salaires plus 5, 5 %, carburant et énergie plus 7, 9 %, alors que l'IPC global était de 4, 5 %. Et si on se réfère aux analyses qui nous ont été fournies, les. hausses du pain auraient varié entre 2, 8 % et 4 %, ce qui est en deçà de l'indice global des prix à la consommation.

M. Dagenais: Par exemple, quand vous fixez le prix au producteur, vous revenez, finalement, fixer un taux horaire aussi au producteur de lait et la question se pose aussi pour eux, somme toute. Alors, ce que vous faites, finalement, c'est que vous fixez aussi un taux horaire dans l'industrie de la transformation du lait et...

M. Pagé: C'est parce qu'on tient compte d'un coût de production qui est revu régulièrement en fonction de la performance globale des secteurs.

M. Dagenais: Oui, mais, dans le cas de la transformation du lait, somme toute, c'est que l'industrie doit s'adapter au prix qui lui est donné. Vous ne fixez pas directement le tarif, mais vous imposez, somme toute, à l'entreprise, de fonctionner à l'intérieur de barèmes spécifiques. Et elle doit, à ce moment-là, s'adapter et...

M. Pagé: Sauf que nous produisons seulement 135 000 tonnes de blé panifiable au Québec. On en produisait 15 000, 18 000 tonnes en 1985. On a augmenté de façon très importante notre degré d'autosuffisance. On l'a augmenté, mais on n'est pas rendu à terme, ça va de soi. On est à peu près à 145 000 tonnes. C'est bien peu

comparativement à la consommation globale.

Et, deux, c'est un Intrant qui représente environ quoi? 10 % à 15 % du produit. Donc la marge, la référence, si on veut réglementer, est infime, très mince. Et je comprends que c'est bien important. Je comprends que c'est un dossier qui a été priviligié par l'association, par les associations de consommateurs. Cependant, autre élément aussi, les ménages québécois dépensaient en moyenne 34 859 $, en 1989. Le pain représente 0, 4 % des dépenses des ménages québécois, soit environ 2, 97 $ par semaine pour des achats de 71, 11 $ par semaine, en moyenne, selon les données que j'ai ici. Je me réfère à 1986, cependant. Mais, sur des dépenses en alimentation de 71, 11 $ dans une semaine, c'était 2, 97 $ qui allaient au pain. Si on ramène cette dépense en référence au pourcentage que ça représente sur les dépenses globales de la famille, c'est 0, 4 %.

Et vous me direz que le lait ce n'est certainement pas beaucoup plus. C'est peut-être un peu plus. Ce sont des pourcentages infimes. On le réglemente. Mais, comme je vous l'ai indiqué, ce n'est pas du tout le même tableau, le même parterre d'intervention, si on veut, 15 % des intrants.

Deuxièmement, l'autre élément, c'est toute la difficulté, vous parlez des sept catégories de pain que vous voudriez voir réglementer. Mais, si on réglemente le pain, on le réglemente ou on ne le réglemente pas, donc, il faudrait réglementer les croissants. Pourquoi est-ce qu'on réglementerait le pain et qu'on n'aurait pas de règlement pour les croissants ou pour les muffins, les muffins au son, etc. ?

M. Dagenais: Dans le cas du lait, vous ne réglementez pas le lait au chocolat ou la crème et tout ça. Écoutez, vous avez défini, finalement, certains produits.

M. Pagé: On a des pools. Il y a des négociations. Il y a des prix qui sont établis.

M. Dagenais: Mais, pour le lait de transformation, ce n'est pas réglementé au niveau du Québec.

M. Pagé: Pardon?

M. Dagenais: C'est le lait de consommation qui est réglementé...

M. Pagé: Oui...

M. Dagenais:... par...

M. Pagé:... mais l'établissement des prix dans le lait de transformation se fait au niveau national avec des prix...

M. Dagenais: Au niveau fédéral, oui. D'ac- cord.

M. Beaudoin: Si vous me permettez, M. Dagenais, M. le ministre, disons que, premièrement, il y a deux ou trois arguments principaux, finalement, qui sont plutôt contre la réglementation là. Vous dites...

M. Pagé: Pas contre. C'est que j'identifie le caractère...

M. Beaudoin: Oui.

M. Pagé:... difficile de mettre en oeuvre une structure de réglementation du pain à partir de ces éléments-là.

M. Beaudoin: Disons qu'effectivement on est d'accord pour dire que c'est plus complexe que dans le domaine du lait, mais on n'est pas d'accord pour dire que c'est impossible, si on estime que ça doit être fait et si on estime que c'est important, la situation actuelle, où il y a un problème. À moins que vous ne nous disiez qu'il y a une autre solution qui pourrait très bien convenir et que vous ne nous précisiez ce qui pourrait être fait, nous on pense qu'effectivement la réglementation c'est la chose qui doit se faire. Qu'elle soit plus complexe, oui, on peut vous dire qu'effectivement elle pourrait être plus complexe. Cela dit, ça peut certainement se faire et sans nécessairement que ça soit des coûts immenses non plus.

D'autre part, l'idée que ça soit de 15 % à 20 % seulement du prix qui soit au niveau des intrants de base, on pourrait dire, au niveau agricole, oui, effectivement, là aussi il y a une raison. Mais nous on pense plus à l'intérêt des consommateurs, eux autres, dans leur panier de provisions, effectivement, ce que ça donne. Et, d'autre part, on est en train de changer le nom de la Régie des marchés agricoles du Québec pour Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. On pense que la Régie devrait regarder plus l'ensemble de l'alimentation de base des Québécois et des Québécoises.

Troisièmement, vous dites que ça ne représente pas beaucoup sur le panier alimentaire des familles. Ça représente quand même un montant appréciable pour la majorité des gens, surtout pour les gens à faible et moyen revenus, particulièrement les gens à faible revenu, finalement, à modeste revenu. N'oublions pas que c'est un aliment essentiel. C'est un aliment de base que tout le monde ou à peu près consomme. Et n'oublions pas non plus qu'on ne parle pas seulement d'allocation du prix du pain et de la farine, quoique, évidemment, ça serait quelque chose qui prendrait du temps. Mais on pense que d'autres produits pourraient être réglementés et, au bout du compte, on rejoindrait une grande part des aliments de base de la population.

Mais cela dit, s'il y avait d'autres moyens

précis pour régler la situation, on serait prêt à vous écouter et on serait prêt à les évaluer. C'est juste qu'il n'y a rien d'autre qui nous a été dit. Il n'y a rien de possible. La loi de la concurrence fédérale a des limites très très grandes. Donc, on aimerait savoir, nous aussi, à part la question de la complexité de la chose, etc., si vous considérez qu'il y a un problème dans le marché du pain. Est-ce qu'il y a un problème? Est-ce que vous pensez qu'il y a un problème?

M. Pagé: Si vous ne pensiez pas, vous, qu'il n'y en a pas, vous ne seriez pas ici.

M. Beaudoin: On aimerait savoir si vous, vous pensez qu'il y a un problème.

M. Pagé: Je m'excuse, mais moi, je suis ici pour vous écouter.

M. Beaudoin: Ah! D'accord. Alors nous, on pense qu'il y a un problème. On vous l'a expliqué, je pense.

M. Pagé: Oui, oui. Ce qu'on a fait au ministère... Écoutez, je vais être bien clair avec vous. Premièrement, dans tous les rapports qu'on m'a déposés, la conclusion, c'était l'impossibilité ou le caractère inopportun de la réglementation du prix du pain et c'est moi, personnellement, comme ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation plus particulièrement, qui ai demandé à mon monde de provoquer ces rencontres et ces échanges, et c'est ce pour quoi je suis ici aujourd'hui, pour vous écouter. N'allez pas croire qu'on est contre le fait de réglementer le pain, sauf que c'est de savoir comment le faire et comment faire oeuvre utile. Ce n'est pas la responsabilité, je pense, de la Régie des marchés agricoles et alimentaires, peu importe son nom, la Régie des marchés agricoles, sous la juridiction du ministre de l'Agriculture, de réglementer le prix des emballages, de réglementer le prix du pétrole et le coût de la main-d'oeuvre dans les boulangeries au Québec. Je vais être très clair avec vous, ce n'est pas le mandat de la Régie des marchés agricoles et ce n'est pas dans l'intention du ministre de l'Agriculture que je suis de faire en sorte d'étendre le mandat de ma régie et d'aller réglementer les salaires par des décrets, premièrement.

Notre mandat, c'est de travailler sur les produits bioalimentaires. Notre mandat, c'est de travailler sur une mise en marché ordonnée protégeant à la fois le consommateur, nos entreprises qui transforment, qui conditionnent et nos entreprises de production: stabilité, prix référant à différents indices, etc. On peut le faire quand on réglemente le lait. Le lait représente au minimum 50 % du coût du produit fini. Partant de là, je vous ai expliqué le problème que j'avais, avec une farine et un blé que je ne produis pas, premièrement, qu'on ne produit pas au Québec, il faut bien l'avoir à l'esprit. On a quoi? 150 000 tonnes, seulement, de blé panrfia-ble cette année, sur une consommation, un besoin total de je ne sais pas combien de millions de tonnes, mais je pourrai vous y référer tout à l'heure.

L'autre élément - je vous indique la problématique qu'on a - j'ai tenté de faire en sorte que vous puissiez échanger avec les bonnes gens de l'industrie. Vous me dites que ce n'est pas utile. Pariait, on va oublier ça. Quelle formule pouvez-vous nous proposer pour faire face à ces difficultés-là? On est ici pour vous écouter.

M. Dagenais: Je soutiens que la réglementation, dans le cas du prix du lait, par exemple, est déterminée en fonction d'un ensemble de coûts, que ce soient des coûts de produits importés, d'intrants dans le cas de la ferme, par exemple, de la nourriture d'animaux, etc., qui ne sont pas toujours nécessairement produits ici, au Québec, quoique, en bonne partie, je pense, ils sont produits ici, au Québec.

M. Pagé: 90 % d'autosuffisance.

M. Dagenais: Mais il y a un ensemble d'intrants dans lesquels on se trouve à déterminer des limites et, dans le cas du salaire du producteur agricole, c'est une composante importante de la production du lait: c'est à peu près, si je me trompe pas, le tiers, si je me souviens bien.

M. Pagé: C'est basé sur le salaire moyen de l'ouvrier spécialisé.

M. Dagenais: C'est ça. Ce qu'on dit, dans ce cas-là, somme toute, c'est qu'on impose des contraintes, finalement, à des gens dans le secteur de la production. Pourquoi ne pas en imposer dans le cas de l'industrie de la boulangerie? C'est notre industrie. Pourquoi faudrait-il imposer des contraintes aux producteurs de lait et non pas aux industries? On en impose dans le cas des transformateurs de lait et dans le cas des détaillants et ils ont une bonne composante de salaires dans leurs coûts de production. Pour moi, c'est un argument qui peut quand même être critiqué aussi.

Vous avez parlé tantôt du fait que le pain, par exemple, est une composante très faible dans les dépenses des ménages. Je pense qu'on se réfère ici à des dépenses moyennes. Si on se réfère aux classes de revenus qui sont inférieures, il est clair que la composante de dépenses d'épicerie est beaucoup plus importante. Elle peut aller jusqu'à 30 %. Dans le cas du pain, à ce moment-là... (13 h 15)

M. Pagé: Je suis d'accord avec vous là-

dessus.

M. Dagenais: ...ça devient un pourcentage quand même important. L'autre aspect, c'est que le pain est une production à base de blé. Donc, Cintrant est moins cher à ce moment-là. On ne peut pas le comparer directement à du steak. Pourtant, en termes de quantité, c'est quand même très consommé. C'est consommé régulièrement par les consommateurs. Je pense que ce n'est pas juste l'aspect de valeur économique qui est important, mais aussi de valeur pour le consommateur et considérer l'élément essentiel aussi du pain.

Le Président (M. Richard): Maintenant, M. le ministre, si vous permettez, je vais transférer la...

M. Pagé: Oui, j'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Richard): ...section des questions à M. le député d'Arthabaska.

M. Pagé: Juste une petite question, si vous permettez. Le ministre de l'Alimentation...

M. Baril: Je me méfie des petites questions. Des fois, ça prend une demi-heure.

M. Pagé: ...est très préoccupé par les consommateurs. Vous ne pensez peut-être pas ça, mais il est très préoccupé par tes consommateurs: qualité des produits, innocuité, bon, etc. D'ailleurs, on va mettre en oeuvre, à compter de cette année, des normes beaucoup plus rigoureuses au niveau des informations données aux consommateurs et aux consommatrices, la façon dont l'aliment a été conditionné, préparé, etc.

Aujourd'hui, vous insistez plus particulièrement sur un point, le prix du pain. Pourquoi, par exemple, ne faites-vous pas des représentations sur le problème du pompage dans le porc? Ça, c'est le ministre de l'Alimentation du Québec qui est obligé de sensibiliser les ministres des autres provinces parce qu'ils ne sont pas au courant de ce problème.

M. Dagenais: Quel problème?

M. Pagé: Le pompage dans le porc que vous achetez et que vos consommateurs achètent. On ne vous a jamais entendu parler là-dessus.

M. Dagenais: Non. C'est quoi, le pompage? Je veux le savoir.

M. Pagé: On vous expliquera ça. Ça, c'est le ministre de l'Alimentation du Québec qui est en train d'influencer les ministres des autres provinces et ce sera un des premiers sujets à la Conférence des ministres de l'Agriculture et de l'Alimentation du Canada qui va se tenir à

Moncton au mois d'août.

M. Beaudoin: Ce que je peux vous dire, c'est qu'on est ouverts aux suggestions, M. le ministre.

M. Pagé: Regardez donc ça, je ne serai pas tout seul à regarder ça. Regardez donc ça, le pompage dans le porc. On pompe de l'eau dans le bacon pour augmenter son volume et dans les jambons.

M. Beaudoin: On en prend bonne note.

M. Dagenais: Ça se produit ausi dans le poulet.

M. Pagé: "Checkez" donc ça.

M. Beaudoin: On en prend bonne note, M. le ministre.

M. Pagé: Parfait!

M. Beaudoin: mais je vous dirai une chose, pour répondre à votre question, à savoir pourquoi on ne s'occupe pas de ça, c'est qu'on s'occupe aussi de beaucoup de choses et qu'on a même collaboré, dernièrement, avec le ministère, justement, sur tout le réseau de la commercialisation des viandes.

M. Pagé: Oui et je l'apprécie. Ça s'en vient.

M. Beaudoin: Donc, attention. On ne fait pas une fixation prolongée sur la question spécifique du prix du pain.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Beaudoin: On s'occupe de ça. On trouve que c'est important, comme, d'ailleurs, beaucoup d'organismes sociaux, beaucoup de groupes de toutes sortes, des groupes sociaux, même la Corporation des diététistes, pour prendre un exemple. On a 179 organismes locaux, régionaux et même nationaux qui ont appuyé cette démarche. 655 organismes sociaux de toutes sortes, comprenant des syndicats, des CLSC, etc., qui ont appuyé aussi la campagne pour la réglementation du prix des aliments de base. On n'est pas les seuls non plus à trouver ça important.

Je vous dirai que l'innocuité des aliments, l'inspection des aliments, etc., on a toujours été actifs dans ce dossier-là et on l'est encore. On participe, dans la mesure de nos possibilités, à des rencontres, par exemple, nationales, pan-canadiennes sur des questions de cet ordre. Mais on prend bonne note de votre suggestion.

M. Pagé: Ça marche, on se revoit.

Le Président (M. Richard): M. le député

d'Arthabaska.

M. Baril: Merci, M. le Président. Une chance que le ministre a affaire à un député qui est très patient, parce qu'on est supposé avoir un bloc de 10 minutes chacun et ça doit faire à peu près 30 minutes que le ministre parle ou tout près, en tous les cas. Vous comprendrez qu'après 30 minutes d'échanges, souvent, les questions qu'on avait l'intention de poser à nos intervenants ont été posées par la même personne, qui est le ministre. C'est pour ça que je me dis que, même si la commission parlementaire achève, de toute façon, il ne faudrait pas que le ministre en prenne l'habitude et abuse du temps qui est alloué aux deux partis.

M. Pagé: Je n'ai pas l'intention d'abuser de l'Opposition.

M. Baril: De toute façon, je félicite la Fédération nationale des associations de consommateurs d'être venue présenter leur mémoire et d'avoir fourni spécifiquement des données, de nous avoir davantage sensibilisés sur des points bien précis sur lesquels, depuis déjà plusieurs années, l'association fait des revendications entre autres, sur le pain, dont le ministre a parlé durant une longue période. Je ne dis pas que c'était inutile, mais... Le problème est là. C'est vrai qu'il est là, il existe. Tous les gens en sont conscients mais, de là à trouver les solutions, ça c'est autre chose. Mais, quand on est conscients d'un problème, je pense que c'est déjà une étape de franchie pour essayer de trouver des solutions, d'abord.

Vous nous avez parlé aussi de représentation de vos membres, de vos délégués à la Régie des marchés agricoles et alimentaires. Moi, j'endosse cette position-là, d'autant plus qu'avec la création des chambres de coordination, comme on le démontre dans ce projet de loi là, on veut faire une place à tous les intervenants, les asseoir à la même table pour essayer de discuter des problèmes et trouver des solutions avant que certaines situations éclatent, bien des fois. On veut, dans le projet de loi, faire un rapprochement avec tous les intervenants. Dans le contexte qu'on vit présentement, il faut aussi absolument sensibiliser davantage le consommateur face aux problèmes que les agriculteurs et l'industrie vivent présentement et vont vivre dans les années à venir avec la libéralisation et la mondialisation des marchés. Aussi, avec l'ère de l'agriculture biologique, les consommateurs devront être sensibilisés davantage sur l'importance de la qualité du produit. Quand on a une qualité supérieure à l'importation, il faut sensibiliser le consommateur à payer pour cette qualité-là.

Trop souvent, aujourd'hui, il nous rentre, malheureusement, des produits des États-Unis, entre autres, qui sont cultivés avec des engrais ou des herbicides, des pesticides qui sont homologués, ici, depuis déjà plusieurs années, et pour les agriculteurs, les producteurs, leur coût de production est beaucoup plus élevé. En tout cas, importance de sensibiliser le consommateur à tous ces événements-là qui s'en viennent chez nous.

J'aimerais juste avoir une explication. À la page 28, vous faites mention, entre autres, à deux types de plan conjoint: "II nous semble curieux qu'existent deux types de plans conjoints." J'aimerais ça que vous puissiez m'éclair-cir un peu sur les deux types que vous voyez. À la page 28, les plans conjoints, chapitre IV, commentaires généraux.

Mme Pilon: C'est suite à une analyse qu'on a faite du projet de loi comme tel. Il est dit, à l'article 24, que. 10 producteurs peuvent former un plan conjoint, de sorte que, nous, on a vu que, finalement, dans la loi, il y avait deux sortes de plans conjoints, il y aurait eu des plans conjoints qui seraient formés par 10 producteurs et plus et il y aurait eu des plans conjoints qui seraient formés par des fédérations de producteurs. Ça, ça nous semblait étonnant parce que c'est une nouveauté dans la loi; disons que ce n'était pas là dans l'ancienne loi.

Ce qu'on voit aussi, c'est qu'il y a un traitement dans la loi qui est différent pour les deux groupes, c'est qu'il y a un groupe qui est obligé de faire un référendum aux deux tiers pour faire un plan conjoint et il y a un autre groupe qui n'a pas besoin de cette règle des deux tiers.

M. Baril: Je pense que c'est arrivé une fois, dans le porc, que le gouvernement avait autorisé la mise en place d'un plan conjoint sans obtenir les deux tiers. Je ne sais pas s'il y a d'autres exemples que vous avez... C'est un cas bien précis, si je ne me trompe pas. Je ne suis pas sûr, même si c'était mon gouvernement, je l'ai déjà dit en cette commission, je ne suis pas sûr que le gouvernement avait fait une bonne chose. Le temps l'a prouvé, d'ailleurs, ils n'ont pas été capables de le mettre en application.

M. Pagé: Le gouvernement...

M. Baril: Longtemps après, par exemple.

Mme Pilon: Nous, ce qu'on considère, c'est que la définition du plan conjoint est beaucoup trop imprécise dans cette loi-là. On assouplit visiblement la règle pour former des plans conjoints, mais on ne dit pas la différence entre un plan conjoint et un regroupement de producteurs. On ne dit pas quelles sont les fonctions spécifiques d'un plan conjoint. Donc, il y a une sorte de flou, et on se demande si ce flou-là, dans la loi, est un flou volontaire ou si c'est un flou involontaire, mais, nous autres, c'est ça

qu'on veut préciser. On dit: II y a un flou, on observe, on constate qu'il y a un flou dans la loi et ce flou-là, nous autres, on considère qu'il ne devrait pas exister. La loi, sur d'autres points, est ultraprécise. Elle va même à dire quelles sont les convocations des ordres du jour des offices de producteurs. Donc, c'est ultraprécis sur certains points et, sur d'autres points, c'est très flou. Alors, nous autres, c'est ça, c'est un peu ce déséquilibre entre le fait que, sur certains points, c'est flou et, sur d'autres points, c'est presque trop précis.

M. Baril: Un autre point, vous parlez de la situation d'oligopole que vous décrivez au Québec. Cette même situation existe-t-elle en Ontario? Et comment se fait-il que le pain, en Ontario, est beaucoup moins cher que... Puis c'est ma dernière question parce que je ne veux pas prendre une demi-heure moi non plus pour parler du prix du pain, mais là, sur cette question précise...

M. Oagenais: Alors, au Québec, pour nous il y a un déséquilibre structurel. Le premier, qui est Multimarques, a 65 % et le deuxième a 18 %. En Ontario, le premier a environ 25 % et le second 22 %. Et après ça, en Ontario, il y a beaucoup d'entreprises moyennes, finalement, qui peuvent assurer au niveau régional une distribution de pain à un prix raisonnable.

M. Baril: là, je n'ai pas les chiffres du ministre, mais il a nommé tout à l'heure une quarantaine si ce n'est pas 60 fabricants de boulangerie, je ne sais pas quoi...

M. Pagé: Québec seulement, je n'ai pas compté Montréal.

M. Baril: Bon, il y en avait une quarantaine, vous avez dit tout à l'heure, là. Ça n'équilibre pas avec ce qui se passe en Ontario?

M. Dagenais: Non, il reste que leur volume de ventes global est quand même une fraction du volume industriel à ce moment-là. Disons qu'il peut y avoir plusieurs points de distribution qui peuvent desservir au niveau local, mais ils n'ont pas un volume important global.

M. Baril: O. K.

M. Beaudoin: Encore aujourd'hui, la majorité des consommateurs et des consommatrices, et même particulièrement les gens à revenu faible et modeste, ce sont des gens qui achètent à l'épicerie, au dépanneur ou au supermarché des pains de marques chaînes ou de marques privées et qui sont produits à une échelle industrielle même s'il se développe depuis quelques années des petites boulangeries, soit dans les supermarchés, soit ailleurs pour des produits un petit peu plus peut-être sophistiqués ou plus frais. Encore aujourd'hui, c'est la réalité de la majorité des gens.

M. Baril: ça veut dire que la plupart du pain est produit par le même fabricant mais distribué sur un autre nom, c'est ça que vous voulez dire?

M. Beaudoin: Ah bien, c'est évident que Multimarques, ça s'appelle Multimarques ce n'est pas pour rien, je veux dire, c'est clair. Il y a énormément de marques suite à des fusions, à des acquisitions etc.. Et d'ailleurs, si on a bien compris, la compagnie Multimarques, semble-t-il, a l'intention de. poursuivre cette politique-là pendant un bon bout de temps, ce qui fait qu'il y a beaucoup de consommateurs et de consommatrices au Québec qui ne savent pas concrètement, parce que ce n'est pas tout le monde qui lit le détail sur l'emballage, qui ne savent pas nécessairement que le pain qu'ils mangent sous différentes marques, ça vient du même producteur.

M. Baril: Vous avez dit, tout à l'heure, que vous n'attendez pas grand-chose de la loi sur la coalition. Est-ce parce que vous avez déjà essayé de faire quelque chose avec cette loi-là, ou bien ça rien donné ou quoi? Vous avez parié tout à l'heure que c'était vague, là.

M. Dagenais: La loi sur la politique de la concurrence, c'est que la loi, somme toute, a été modifiée en 1986 et un de ses mandats, finalement, c'est de favoriser l'adaptation des marchés à la concurrence extérieure. Donc, elle admet la possibilité d'une plus forte concentration au pays. Dans le cas de Multimarques, la fusion a été réalisée en 1985 et la loi ne peut plus s'appliquer. Après trois ans, la loi ne peut pas s'appliquer à des entreprises dans la mesure où ces entreprises-là ne commettent pas des fautes importantes relativement à la loi, au complot, etc.

M. Beaudoin: Cependant, on a demandé au bureau de la concurrence d'examiner les dernières acquisitions de Multimarques, comme par exemple POM dans la région de Montréal, sauf que le bureau de la concurrence a l'air de penser que c'est... Bien c'est justement, ce n'est pas des grosses affaires, ce n'est pas aussi gros que Texaco ou Esso, par exemple. Alors pour eux autres, ce n'est pas quelque chose de très urgent ou de très prioritaire et ils avaient déjà, au préalable, examiné cette dernière acquisition ou cette avant-dernière acquisition de Multimarques avec POM et ils considéraient que ce n'était pas nécessairement problématique, justement suite à la nouvelle philosophie, effectivement, de se dire, au fond: oui, ce n'est pas trop grave qu'il y ait une augmentation de la concentration dans

certains secteurs. Dans certains cas, comme Texaco et Esso, on va obliger la fermeture de certains lieux de distribution là, mais pour des choses qui ne sont pas des milliards de dollars, le Bureau de la concurrence n'a pas l'air à vouloir bouger énormément et, d'ailleurs, tout dépendant des cas, mais, il y a beaucoup d'intervenants qui considèrent que le Bureau de la concurrence actuellement, en tout cas, n'utilise pas beaucoup ses dents mais plutôt ses lèvres, mais enfin bref, ce n'est pas très très fort en général.

M. Dagenais: En clair, c'est la continuité de la politique économique conservatrice, je pense. C'est clairement ça. Ça été vraiment modifié pour répondre aux besoins...

M. Beaudoin: ...leurs dents de scie ces temps-ci.

M. Baril: On a déjà vu que, quand c'était trop gros aussi, ils laissaient faire pareil parce qu'ils disaient que c'était trop gros, que ça ne nuisait pas plus, hein!

Moi, je vous remercie de la présentation et j'espère que le ministre tiendra compte, je ne veux pas dire de toutes vos propositions ou suggestions, en tous les cas, qu'il en retiendra quelques-unes pour améliorer le projet de loi parce que ce projet de loi, ça fait plusieurs années qu'il existe. Il a été amendé en 1973, je crois, en 1974, ça fait qu'on s'en va sur 20 ans. Si on établit un projet de loi encore pour les 20 prochaines années, il faut essayer de voir, planifier et penser, réfléchir pour les 20 prochaines années et ce n'est pas facile parce que dans l'évolution, tant de l'agriculture que de tout le secteur agro-alimentaire, ce n'est pas facile de planifier et prévoir pour les 20 prochaines années. Je vous remercie.

M. Pagé: Merci, messieurs dames.

Le Président (M. Richard): Merci beaucoup. Sur ce, puisqu'on vient de discuter du pain, ça aiguise notre appétit, alors nous suspendons les travaux. La commission reprendra ses travaux à 16 heures ou vers 16 heures, 16 h 15 cet après-midi. Bon appétit, mesdames et messieurs. Merci d'avoir été là.

Une voix: Merci de votre attention.

Le Président (M. Richard): Vous êtes bien aimables.

(Suspension de la séance à 13 h 31)

(Reprise à 16 h 26)

Le Président (M. Richard): Mesdames, messieurs, la commission reprend donc ses travaux. Nous recevons l'Association québécoise de l'industrie de la pêche. Vous vous identifiez, le premier qui prend la parole, et vous présentez votre collègue. Par la suite, vous avez 20 minutes maximum pour présenter votre opinion ou votre mémoire. À la suite de ça, nous aurons le questionnement de part et d'autre. Vous avez la parole, monsieur.

M. Grenier (Donald): Donald Grenier.

Le Président (M. Richard): Excusez, M. Grenier. M. le député d'Arthabaska, porte-parole officiel, avait l'intention, peut-être, de poser quelques questions à M. le ministre, auparavant. Est-ce que ça vous conviendrait?

M. Pagé: Immédiatement après.

M. Baril: Immédiatement après? C'est comme vous voudrez. C'est parce que tout à l'heure vous m'avez signalé que peut-être vous seriez obligé de vous absenter rapidement.

M. Pagé: Oui, mais immédiatement après quand même; immédiatement avant que je quitte.

M. Baril: C'est bien. Je suis patient.

Le Président (M. Richard): c'est de la régie interne, là. vous voyez que les deux partis sont très bien disposés. alors, vous avez la parole, monsieur.

Association québécoise de l'industrie de la pêche

M. Grenier: Donald Grenier, président de l'AQIP. Je vous présente Me Joli-Coeur, mandaté pour représenter les industriels de la pêche. M. le Président, M. le ministre, MM. les députés et M mes les députées, mesdames et messieurs, l'association québécoise des industriels de la pêche que nous représentons aujourd'hui regroupe les principales entreprises du domaine de la transformation des produits de la pêche au Québec. Notre Association a choisi d'intervenir dans cette commission parlementaire qui étudie le projet de loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires à l'invitation du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. Michel Pagé, à l'occasion de notre congrès de janvier dernier. Cette invitation nous a suggéré que le ministre songeait peut-être à étendre le projet de loi aux pêches commerciales.

Aussi, avons-nous tenté d'examiner ce projet de loi comme s'il s'appliquait au domaine des pêches commerciales. Par exemple, nous lirions d'entrée de jeu l'article 3 en ajoutant l'expression "produits bioaquatiques" à "produit agricole". Plus loin, dans le même article, nous

ferons comme si l'on ajoutait à la définition de "produit agricole" l'expression "pêches commerciales". La définition se lirait ainsi: tout produit de l'agriculture, de l'horticulture, de l'aquiculture, des pêches commerciales, de l'aviculture, etc."

L'exercice n'est pas inutile. À l'instar du secteur agricole, le milieu des pêches commerciales gagnerait à une concertation entre les producteurs, transformateurs et divers autres intermédiaires. Si nous sommes d'accord sur ce principe général de concertation, les modalités de son application auront à être étudiées de très près.

C'est que le secteur des pêches commerciales, vous en conviendrez, manque encore d'organisation. Il ne sera pas nécessairement facile de structurer des mécanismes de concertation. Depuis des années, voire des siècles, il a fallu à ceux qui vivaient de cette industrie un fort sentiment d'individualisme pour survivre, même si aujourd'hui, en vertu des changements intervenus dans la structure économique du Québec et du monde, la situation commande au contraire de se concerter pour non seulement survivre mais prospérer.

L'industrie de la pêche se trouve depuis longtemps dans une situation dominée par deux problèmes essentiels: l'approvisionnement en amont et la mise en marché en aval. Ces problèmes de mise en marché sont rendus d'autant plus complexes que 80 % de la production québécoise est exportée. Si les médias font abondamment état de la situation dans les provinces maritimes, la situation n'en est pas moins préoccupante au Québec. Bien au contraire. L'industrie de la transformation vit une situation beaucoup plus grave que celle des Maritimes. Elle ne peut compter, elle, sur aucun accès à la zone de 200 milles. Cette situation profondément injuste vient du fait qu'encore une fois le gouvernement fédéral a refusé aux pêcheurs du Québec cet accès à la zone de 200 milles en dépit des pressions multiples exercées par le gouvernement du Québec. Compte tenu du nombre des usines au Québec et de la rareté de la ressource, nous sommes d'accord avec la volonté du Québec d'aller de l'avant avec un projet d'approvisionnement à partir de la zone de 200 milles ou par le moyen de participation de "joint venture" avec des flottes étrangères.

Les entreprises de transformation des produits de la pêche sont engagées dans une course contre la croissance des frais fixes et variables. Blés se battent contre l'irrégularité et la "saisonnalité" des approvisionnements. La précarité des usines entraîne celle de l'emploi et celle des conditions de travail. Les fortes variations internationales des prix de vente, de même que la rareté des espèces entravent toute planification. Il est difficile, dans ce contexte, d'investir dans la recherche-développement qui n'en demeure pas moins essentielle dans un contexte de concurrence qui s'internationalise.

Nous convenons qu'il faut une rationalisation de l'industrie de la pêche. Dans ce contexte, nous croyons que le modèle de l'agriculture pourrait s'appliquer. Ce modèle a l'avantage d'avoir plus de 30 ans; 30 années au cours desquelles on l'a mis en place, rodé et ajusté aux différentes réalités. Il a aussi le désavantage d'avoir 30 ans; voilà pourquoi on veut le modifier par ce projet de loi, notamment en ce qui a trait aux chambres de coordination et de développement qu'en d'autres pays on nomme à bon escient "chambres interprofessionnelles". Ce modèle, donc, pourrait, a priori, s'appliquer, avec toutefois plusieurs réserves. Voilà pourquoi nous souhaitons avoir l'occasion d'une réflexion nouvelle sur le même projet de loi qui serait modifié de manière à tenir compte du domaine des pêches. Il faudrait une nouvelle commission parlementaire qui se penche sur la production et la mise en marché des produits de pêche commerciale.

À défaut d'une réflexion plus longue, permettez-nous de suggérer quelques amendements qui seraient souhaitables si l'on décidait d'inclure les pêches commerciales dans ce projet de loi. Disons tout de suite que, de façon générale, nous sommes d'accord avec l'économie générale du projet de loi, notamment au chapitre de la nécessité d'une concertation. Il faudrait simplement l'adapter en fonction des réalités du monde de la pêche. plans conjoints. nous en sommes conscients, le projet de loi est issu d'abord et avant tout dune situation qui existe dans le monde agricole. s'agissant des plans conjoints, il est difficile de les établir dans un domaine où le faible poids de notre industrie nous force à subir les fluctuations des prix sur les marchés internationaux. il est difficile de les établir dans un domaine où la libéralisation des échanges rend plus difficile une gestion de l'offre. la récente décision du tribunal sur le libre-échange qui permet aux américains, en colombie-britannique, de venir chercher à quai 25 % de la production du saumon le montre bien. nous croyons que, dans un contexte de systèmes de prix internationaux, il est difficile de mettre en place un système de gestion de l'offre. l'internationalisation de la concurrence sape les fondements de ce système des plans conjoints au rythme des accords de libéralisation des échanges comme l'accord canado-américain ou les ententes dans le cadre des négociations du gatt.

Tout système de gestion des approvisionnements est menacé par les ententes qui pourraient survenir dans le cadre du GATT si la proposition américaine visant l'abolition de toute forme de restriction au commerce international des produits agricoles était acceptée. Les producteurs de pêches commerciales qui se doteraient d'un système de gestion de l'offre seraient menacés par la disparition de l'article XI du GATT. Cet

article permet de limiter l'importation d'un bien lorsqu'on soumet sa production intérieure à un système de quotas. Ainsi, même si le système des plans conjoints peut être intéressant pour le domaine des pêches, il ne devrait pas, s'il était appliqué, engendrer une fausse sécurité qui permettrait à l'industrie de s'assoupir.

Par ailleurs, le système des plans conjoints au Québec, dans la mesure où il vise à contrôler l'offre de produits, ne peut être efficace que s'il est constitué en système clos. Il n'est efficace que si l'importation des produits est contrôlée. Cela implique d'étendre le système à l'échelle du pays. Les pêcheurs deviendraient dépendants de ce qui se passe dans les autres provinces avec lesquelles ils doivent partager le marché canadien. Ils devraient s'entendre sur une répartition des quotas de production avec les autres provinces où se pratique la pêche.

Le système des plans conjoints ne peut subsister à l'échelle canadienne que si le gouvernement fédéral s'en tient rigoureusement à une politique d'équité envers tous les producteurs canadiens. Nous ne croyons pas qu'une telle équité dans le domaine des pêches puisse exister, comme le montrent les résultats des efforts du gouvernement du Québec pour permettre un accès des pêcheurs québécois à la zone de 200 milles.

En outre, nous l'avons dit, le modèle est emprunté au monde agricole. Le fait que le monde agricole était déjà structuré lors de l'adoption des plans conjoints en a grandement facilité l'administration. Le développement du système des plans conjoints a été grandement influencé par l'existence de l'Union des producteurs agricoles, l'UPA. Nous poursuivons notre réflexion sur la capacité qu'aurait le monde des pêcheries de se structurer dans la même mesure.

Enfin, des plans conjoints qui s'appliqueraient à la pêche ne représenteraient tout de même qu'une fraction de la chaîne alimentaire qui sera toujours essentielle, la production, mais dont l'importance relative s'amenuise au plan économique au profit de la valeur ajoutée, de tout le travail de transformation et de distribution en aval, qui prennent de plus en plus d'importance.

Par conséquent, les articles 24 à 42 du projet de loi nous sembleraient peu applicables à notre situation puisque nous sommes sceptiques quant à la viabilité à long terme des plans conjoints dans le domaine des pêcheries. C'est tout le chapitre IV du projet de loi qu'il faudrait enlever ou modifier si l'on devait un jour appliquer ce dernier au domaine des pêcheries.

Les offices de producteurs. Même si nous estimons difficile, voire périlleuse, l'application de plans conjoints dans le domaine des pêches commerciales, il serait intéressant de structurer la production en équivalents des offices de producteurs.

Indépendamment des plans conjoints, nous serions d'accord avec la mise sur pied d'équiva- lents d'offices de producteurs qui devraient être représentatifs à la fois du secteur de pêche et du type de permis relatif à la nature de la pêche. Comme organisme représentatif de transformateurs, nous ne nous opposons pas à la création d'offices de producteurs, même s'ils n'avaient aucun plan conjoint à administrer, puisque nous aurions des interlocuteurs représentatifs du côté des producteurs, ce qui rendrait la concertation plus facile.

Nous souhaiterions particulièrement que les producteurs se regroupent selon chacun des quatre secteurs que sont les poissons de fond, les crustacés, les ressources pélagiques et les espèces sous-exploitées dans des offices de producteurs. Cela irait dans le sens de la volonté globale que nous partageons avec le gouvernement de regrouper les détenteurs de permis. Un pêcheur pourrait être membre de plus d'un office, s'il oeuvre dans des produits variés.

Dans les pays qui ont la réputation d'être les plus avant-gardistes, on reconnaît l'intérêt qu'il y a à renforcer le caractère professionnel des associations de pêcheurs pour qu'ils puissent être associés graduellement à divers processus de prises de décision relatifs à la gestion de la ressource, à l'administration et à la gestion des unités de pêche, à la mise sur pied de syndicats de gestion, au financement, etc. "L'examen des pêcheries dans les pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, lit-on dans la proposition de plan d'action 1990-1993 pour le développement des pêches et de l'aquiculture, démontre que les pêcheurs trouvent intérêt à s'organiser en association professionnelle mandatée de véritables pouvoirs de représentation et appuyée d'un personnel compétent."

Par ailleurs, plusieurs se sont penchés sur la possibilité de mettre en place des mécanismes pour régulariser les fluctuations des revenus des pêcheurs liées soit à des variations dans la disponibilité des ressources, soit à des oscillations de prix sur les marchés internationaux. Toutefois, un tel objectif implique l'existence d'organisations à la fois représentatives du milieu, fortes et structurées.

Nous aimerions cependant discuter davantage des modalités de la formation des offices de producteurs. Par exemple, l'article 24 du projet de loi, au chapitre IV sur les plans conjoints, prévoit que 10 producteurs intéressés ou plus peuvent transmettre à la Régie un projet de plan conjoint pour la mise en marché d'un produit agricole provenant d'un territoire désigné ou destiné à une fin spécifiée ou à un acheteur déterminé. L'article 27 précise ensuite que le projet de plan ainsi formé doit indiquer la composition de l'office qui sera chargé d'appliquer le plan.

Indépendamment des plans conjoints, nous sommes d'avis que les offices de producteurs devraient représenter un nombre suffisant de

producteurs pour que leur production représente plus de 50 % du volume total des débarquements dans leur secteur, ce qui est essentiel à leur représentativité. Les dispositions actuelles du projet de loi - un minimum de 10 producteurs - pourraient faire en sorte qu'un petit groupe forme un office de producteurs dont les décisions auraient un impact sur la majorité sans que celle-ci ait réellement été consultée. Dans le monde agricole, les offices de commercialisation par produit représentent tous les producteurs sans exception.

Pour cette raison, l'article 24 devrait être modifié. Les articles 43 à 46, de même que les articles 50, 51, 56, 59, 60 à 67, 74 à 78, 81 à 95, 99 à 110 devraient être modifiés pour rendre compte de la possibilité qu'un office de producteurs puisse exister indépendamment d'un plan conjoint. Toute référence au plan devrait être tempérée en soulignant clairement cette dernière possibilité pour le monde des pêches, ce qui laisse sous-entendre une nouvelle formulation du projet de loi.

Les chambres de coordination et de développement. Une fois la production plus structurée, il faudrait se pencher sur la possibilité d'intégrer les transformateurs en ajoutant un palier supplémentaire, un mécanisme additionnel pour impliquer tous les acteurs d'une chaîne alimentaire qui s'est singulièrement allongée au cours des dernières années. Aujourd'hui, les marchés sont à l'échelle internationale, la concurrence est mondiale et les entreprises sont de plus en plus concentrées et intégrées. Parallèlement, les marchés sont de plus en plus sophistiqués, les produits vendus en bout de ligne intègrent de plus en plus de valeur ajoutée et leur mise en marché est souvent déterminante dans leur succès auprès des consommateurs dont les goûts sont plus diversifiés et plus raffinés. Les transformateurs et les distributeurs ont un rôle de plus en plus important dans cette chaîne agro-alimentaire qui va de la mer à la table, pour pasticher une expression qui a, un temps, été chère au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Le développement des pêches passe aujourd'hui par nous aussi, industriels, qui assumons la transformation. Le système de mise en marché ne peut donc plus fonctionner en vendant au plus haut prix possible le produit brut sans tenir compte des étapes suivantes, notamment la mise au point d'un produit attrayant de deuxième et de troisième transformation. Notre comportement à nous, entreprises de transformation, sera crucial pour que les produits de la pêche répondent aux goûts, à des prix compétitifs sur les marchés internationaux. Nous devons donc participer pleinement au processus de négociation visant une mise en marché efficace sur les marchés de Tokyo, de Boston et de Barcelone. Face à la compétitivité mondiale, nous n'avons d'autre choix que la concertation. On ne peut s'ignorer. La qualité et les prix des produits agricoles et alimentaires reposent sur cette concertation soutenue entre transformateurs et ceux qui les approvisionnent. (16 h 45)

Aussi, le modèle des offices de production, s'il devait un jour s'appliquer au domaine des pêches, serait incomplet sans un autre forum où tous Ies échelons puissent prendre des mesures communes. Nous serions heureux d'être associés à ce futur travail de concertation et de discussion au sein d'une structure simple et efficace représentant une industrie enfin vue dans sa vraie perspective, celle d'une chaîne ininterrompue dont tous les maillons sont interdépendants et ont un intérêt de tous les instants à se consulter.

L'article 111 du projet de loi prévoit que "les offices, associations ou autres personnes intéressées à la production ou à la mise en marché d'un produit agricole peuvent s'entendre pour demander à la Régie de former une chambre de coordination et de développement concernant la production ou la mise en marché de ce produit. " Nous serions d'accord avec ce concept de chambre de coordination. De plus, nous aimerions préciser le terme "autres personnes" pour y inclure les courtiers, les grossistes, les distributeurs et d'autres acteurs du domaine de la commercialisation. Il importe de faire en sorte que les membres de l'organisme reflètent les préoccupations de toute la chaîne agro-alimentaire. Selon nous, il pourrait y avoir autant de chambres de coordination et de développement qu'il y a de secteurs de la pêche commerciale et qu'il y a de permis liés à la nature de la pêche.

Le troisième alinéa de l'article 112 du projet de loi prévoit qu'une chambre de concertation et de développement peut notamment "préparer, financer ou administrer des programmes de recherche, d'amélioration de qualité, de promotion, de publicité ou de vente du produit visé. " Selon nous, ces chambres de coordination et de développement devraient être essentiellement consultatives. À ce titre, elles ne devraient pas, du moins à court terme, être engagées dans des programmes de vente de produits. Nous serions plutôt d'accord avec l'article 122 qui prévoit qu"une chambre ne peut faire le commerce ni s'engager dans la transformation d'un produit agricole. " Même s'il existe des nuances entre l'idée d'administration de programmes de vente évoquée à l'article 112 et l'action de faire du commerce dont parle l'article 122, nous aimerions attirer votre attention sur le fait qu'il y a apparence de contradiction.

Même si des chambres de coordination et de développement dans le domaine des pêcheries ne devraient être, au départ, que consultatives, il appartient par la suite à leurs membres de décider ou non de leur ajouter au besoin un certain nombre de pouvoirs. La concertation au sein des chambres pourrait éventuellement

amener l'élaboration d'une véritable stratégie de développement, tant sur la nature, la qualité de produits que sur les normes et les modes de mise en marché. Elle pourrait favoriser à long terme un maillage des entreprises de production, de transformation et de distribution. La concertation au sein des chambres pourrait déboucher sur une négociation de prix. La négociation devrait alors se faire pour chacun des secteurs et des permis liés à la nature de la pêche et non pas sur une base géographique. Les prix négociés au sein des chambres pourraient être ajustés en. fonction des prix de vente nationaux et internationaux. En conséquence, dans la perspective d'un projet de loi qui s'appliquerait au domaine des pêches, nous endosserions les articles 111 à 123, avec la réserve exprimée au troisième alinéa de l'article 112 sur l'administration de programmes de vente du produit visé.

Certains pouvoirs de la Régie. Quelques mots sur la Régie des marchés agricoles. Dans le cas où la législation concernant la mise en marché de produits agricoles engloberait le secteur des pêches et viendrait réglementer des offices de producteurs agricoles et un système d'ententes administré par des chambres de coordination et de développement regroupant tous les acteurs dans la chaîne alimentaire, le rôle de la Régie des marchés agricoles serait substantiellement élargi. Nous serions d'accord avec le fait que les responsabilités de la Régie s'étendent aux décisions qui pourraient être prises par les chambres de concertation et de développement. Cela pourrait contribuer de façon significative à élever et à standardiser la qualité des produits apportés au marché par les producteurs agricoles et à régulariser les prix.

Concernant certains pouvoirs de la Régie, nous aurions un principe général à défendre: il faudrait éviter que les structures mises en place aient un effet négatif sur la rentabilité des entreprises. Si les interventions d'un régime ou d'un office interféraient avec des règles de marchés qui ne sont pas contrôlés au Québec, nos entreprises risqueraient d'être rapidement éconduites de ces marchés.

Conclusion. L'objectif à atteindre lorsqu'il s'agit du secteur des pêches, c'est le développement d'un secteur économique stable. Il faut une stabilité et une diversité des approvisionnements, de nouveaux produits, une utilisation des résidus, des sous-produits et des rejets, le développement de la seconde et de la troisième transformations, de nouvelles technologies qui réduisent le coût et augmentent la qualité et la diversité des produits. Tout cela nécessite une mentalité nouvelle qui s'incarne dans des structures nouvelles.

Il faut, en bout de ligne, une industrie rationalisée et structurée pour faire face aux défis à venir. C'est pourquoi nous sommes tout à fait heureux que le ministre se penche sur l'industrie de la pêche. Nous le remercions de son intérêt et nous lui offrons toute notre collaboration pour être associés au processus d'étude et d'élaboration d'un projet de loi qui inclurait tout le domaine des pêcheries, de la production à la distribution. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, M. Grenier. M. le ministre.

M. Pagé: Merci, M. Grenier, Me Joli-Coeur. M. le Président, compte tenu que je dois reconnaître qu'à plusieurs reprises au cours des travaux de cette commission j'ai peut-être dépassé le temps qui m'était imparti, compte tenu que la coutume veut que ce soit le ministre qui pose les questions en premier, par déférence pour mes collègues de l'Opposition, je vais leur céder la parole en premier et je reviendrai par la suite. Ça témoigne d'une volonté de collaboration très étroite entre la loyale Opposition de Sa Majesté et le gouvernement.

M. Baril: Vous êtes d'une gentillesse remarquable, surtout à la lecture de ce dernier mémoire de toute la commission. De toute façon, nous apprécions cette marque de délicatesse envers nous et, immédiatement, je vais passer la parole au responsable des pêches, M. le député de Duplessis.

Le Président (M. Richard): M. le député de Duplessis, vous avez la parole.

M. Perron: Merci, M. le Président. Bien sûr, je vais remercier le ministre pour sa grande collaboration.

M. Baril: Aïe, ne recommence pas! Des voix: Ha, ha, ha!

M. Perron: Pour ceux et celles qui m'ont entendu ce matin, mon collègue d'Arthabaska est inquiet des paroles que je vais prononcer à l'endroit du ministre.

M. Pagé: Est-ce que le député de Duplessis pourrait répéter, parce qu'on a la chance d'avoir Radio-Canada de la région maritime avec nous?

M. Perron: M. le Président, Radio-Canada ou non, je ne répéterai pas ce que j'ai dit ce matin.

Le Président (M. Richard): Ce qui est dit reste dit, M. le député de Duplessis.

M. Perron: Ce qui est dit reste dit et, s'il y en a qui veulent le voir, ils ont juste à regarder la transcription de la commission parlementaire.

M. le Président, je vous dis bien humblement qu'il est extrêmement difficile de poser un ensemble de questions, que ce soit à n'importe quel groupe qui se présente devant nous au

niveau des pêcheries, puisque nous n'avons pas encore devant nous le libellé des articles de la loi qui vont être apportés par le ministre de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation dans les prochaines semaines. cependant, il reste que votre mémoire mérite d'être commenté, d'une part. d'autre part, j'aurais plusieurs questions à vous poser en rapport avec certains écrits que vous avez dans votre mémoire. ce que moi, j'ai retenu - on me corrigera si je n'ai pas raison par rapport au mémoire que vous venez de présenter par le biais de votre association québécoise de l'industrie de la pêche - c'est que l'aqip suppose que le gouvernement s'apprête à intégrer les pêches commerciales aux produits couverts par le projet de loi 15 et que l'article 3 de la loi verrait l'expression "produits bioaquatiques" s'ajouter à celle de produits agricoles, et que ces derniers comprennent les pêches commerciales, bien sûr.

L'AQIP admet que "le milieu des pêches commerciales gagnerait à une concertation entre producteurs, transformateurs et divers autres intermédiaires." Ça, vous le mentionnez en bas de la page 1. Cependant, l'AQIP rejette l'application de plans conjoints aux producteurs dans la mesure où "le faible poids - et ça, c'est vous qui le mentionnez à la page 3 - de notre industrie nous force à subir les fluctuations des prix sur les marchés internationaux" et où 80 % de la production est exportée. L'AQIP ne s'oppose toutefois pas à la création d'offices de producteurs regroupés par type de produits; donc, ça veut dire par type de permis, sans plan conjoint à administrer. Ces offices devraient cependant représenter "plus de 50 % du volume total des débarquements" pour être considérés comme représentatifs.

L'AQIP est fortement en faveur de la création de chambres de coordination, comme le prévoit le nouveau projet de loi, à titre consultatif et ce, encore une fois, afin d'améliorer la concertation.

Dans votre mémoire vous parlez, bien sûr, à la page 2, puis je viens directement là-dessus, de la zone de 200 milles et vous mentionnez ce qui suit: "L'industrie de la transformation vit une situation beaucoup plus grave que celle des Maritimes", parce qu'on sait que les Maritimes ont accès à la zone de 200 milles. "Elle ne peut compter, elle, sur aucun accès à la zone de 200 milles. Cette situation profondément injuste vient du fait qu'encore une fois le gouvernement fédéral a refusé aux pêcheurs du Québec cet accès à la zone de 200 milles en dépit des pressions multiples exercées par le gouvernement du Québec. Compte tenu du nombre des usines au Québec et de la rareté de la ressource, nous sommes d'accord avec la volonté du Québec d'aller de l'avant avec un projet d'approvisionnement à partir de la zone des 200 milles ou par le moyen de participation de "joint venture" avec des flottes étrangères."

Se rapportant à la question de la zone de 200 milles, je répète ce que j'ai déjà dit aux anciens ministres de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, c'est-à-dire au secteur des pêcheries, à l'effet qu'on avait déjà, en tant que gouvernement, accès à la zone de 200 milles par le biais de deux bateaux qu'on appelait le Kristina Logos et le Lumaaq, tout le monde le sait. Par la vente de ces bateaux à des industries qui sont de l'extérieur du Québec, actuellement, on a perdu le pied, on a perdu la porte qui était ouverte dans la zone de 200 milles. Quant à la volonté du ministre actuel se rapportant à la zone de 200 milles par rapport au gouvernement fédéral, je ne remets pas cette volonté en question, mais ce que je peux vous dire, c'est que je remets en question la volonté des deux ministres qui l'ont précédé au niveau des pêcheries, parce qu'il n'y avait vraiment pas de volonté politique qui était exprimée, puis la bataille n'a pas été forte; la bataille a plutôt été faite à quatre pattes face au gouvernement fédéral, plutôt que de la faire de façon concrète et avec des bons arguments, puis de revenir à la charge systématiquement. Ça, ça n'a pas été fait, puis j'espère que l'actuel ministre de l'Agriculture va se diriger dans ce sens-là, c'est-à-dire être ferme avec le gouvernement fédéral, comme il l'a démontré ce matin face à la question du crabe, puis j'espère que ça va être la même chose aussi dans le domaine de la crevette, puis dans le domaine de la zone de 200 milles. Être très ferme face au gouvernement fédéral, parce que ça nous prend des permis pour approvisionner nos usines et, de plus, pour faire travailler les pêcheurs et, de plus, pour mettre au travail les travailleurs et les travailleuses d'usine qui sont actuellement devant une impasse.

En conclusion sur la question des 200 milles, qu'on se rappelle tous les efforts qui ont été faits par le consortium Nova Nord qui a reçu, bien sûr, l'appui du gouvernement, dans le temps, mais où ça n'a pas été beaucoup plus loin qu'un appui très minime et très peu fort pour en arriver a des conclusions qui étaient importantes pour alimenter nos industriels québécois.

Quant à la concertation - je vais passer à mes questions par la suite - il y a quelque chose que je ne comprends pas dans votre document. Vous parlez de la concertation, je suis parfaitement d'accord avec la concertation, mais, dans l'ensemble, vous semblez exclure toujours - je ne sais pas si c'était voulu ou si vous l'avez oublié - la présence des pêcheurs sur des groupes décideurs. Je voudrais bien qu'on m'explique ça: sur des groupes décideurs. Parce que, pour moi, le domaine des pêcheries, ça concerne le gouvernement, ça concerne les industriels, ça concerne les syndicats, les associations de travailleurs et de travailleuses au niveau des usines, ça concerne les travailleurs et les travailleuses qui n'ont pas d'association représentative syndicale et ça concerne aussi les pê-

cheurs, que ce soit les pêcheurs côtiers ou les pêcheurs hauturiers. Puis, il me semble que, si on fait de la concertation, on la fait avec tout le monde, puis on ne laisse pas du monde de côté. C'est ce que je ressens dans votre document et j'aimerais bien avoir une réponse, d'abord, sur cette question.

M. Grenier: Je dois vous spécifier qu'en tant que président de l'AQIP je représente l'ensemble des producteurs, mais je suis moi-même, à l'origine, un pêcheur. Donc, dans le dossier qui a été pondu, nous, quand on parle de concertation, on parle de l'industrie de la pêche. On sait très bien que tous les maillons de la chaîne doivent être rassemblés pour fonctionner. Si les pêcheurs n'en font pas partie, les industriels de la pêche que je représente ne pourraient pas se permettre d'évoquer... Dans l'esprit des industriels de la pêche, lorsqu'on parte d'approvisionnement, on parie d'entente, de concertation. Je crois, même je suis sûr que les industriels de la pêche parlent du premier maillon à aller jusqu'au dernier maillon. Notre "rapport" n'y fait peut-être pas allusion très directement, mais lorsqu'on parle de concertation de la pêche, on veut dire à l'origine jusqu'à la mise en marché, pour la concertation des produits marins. (17 heures)

M. Perron: M. le Président, j'en viens à une autre question. Dans le cas des plans conjoints, vous avez mentionné, et c'est votre droit, que vous étiez contre la mise en place de plans conjoints au niveau des pêcheries et c'était surtout dû au fait que tout système de gestion des approvisionnements est menacé par les ententes qui pourraient survenir dans le cadre du GATT"; là, on se reporte à l'article XI. Est-ce que vous pourriez élaborer davantage sur la question de l'article XI du General Agreement on Tarifs and Trade, le GATT, pour nous dire de quelle façon vous voyez les problèmes qui pourraient survenir en rapport avec les plans conjoints, s'ils sont appliqués?

M. Grenier: Je vais demander à Me Joli-Coeur de vous répondre étant donné qu'il a très fortement étudié le dossier avant de le transcrire. Il serait peut-être plus opportun pour moi de lui céder la parole.

M. Joli-Coeur (André): M. le député de Duplessis, vous dites que c'est avant tout à cause de l'article XI des accords du GATT, alors que nous avons surtout insisté sur le fait que c'est à cause du contrôle extérieur, effectivement, de notre marché qu'on était contre les plans de mise en marché.

M. Perron: L'exportation.

M. Joli-Coeur: Essentiellement, nous croyons difficilement viable un plan de mise en marché où nos produits sont essentiellement exportés et où ce qui est ici consommé est essentiellement importé. Ce n'est pas dit dans notre mémoire, effectivement, que ce qui est consommé ici est essentiellement importé, mais c'est aussi le cas. Alors, ce sont les deux côtés de la médaille qui font que c'est, à toutes fins pratiques, Impossible, selon nous, d'avoir un plan conjoint efficace lorsque, d'une part, la production est exportée et que, d'autre part, ce qui est consommé est importé. C'est essentiellement ça.

Quant à la référence à l'article XI des accords du GATT, je vous réfère au contenu d'un document gouvernemental qui est la proposition de plan d'action 1990-1993 sur le développement des pêches et de l'aquiculture, document qui vous est sûrement disponible, document qui vient du ministère de l'Agriculture du Québec, où on explique effectivement l'incidence de l'article XI du GATT implicitement sur les plans conjoints.

M. Perron: Maintenant, tout le monde sait qu'actuellement l'Alliance des pêcheurs, donc la grande majorité des pêcheurs, s'est prononcée en faveur des plans conjoints. D'autre part, nous savons très bien qu'un marché qui comporte actuellement 80 % en exportations, ça peut changer de bord s'il y a des plans conjoints qui se tiennent debout. Il y a des possibilités, à ce moment-là, de renverser la vapeur avec les années, avec le temps, pour que la production de nos usines puisse se faire, mettons 50-50, autant sur le marché international que sur le marché local du Québec et dans d'autres provinces canadiennes; je pense que ça, c'est faisable. En tout cas, c'est l'explication que je donne à la position des pêcheurs.

Il y a une quatrième question que je voudrais vous poser. Ça a rapport, en quelque sorte, avec l'AQIP et aussi ça a rapport avec SOCOMER. SOCOMER est une société qui, actuellement, est formée, qui est subventionnée par le gouvernement du Québec, où les industriels de la pêche s'impliquent financièrement dans le cadre du budget administratif. Est-ce que vous pourriez me dire quels sont les industriels qui font partie de SOCOMER, actuellement?

M. Grenier: Actuellement, la liste des membres de SOCOMER, je ne la possède pas. Je crois qu'il y a quand même quelques industriels qui en font partie et peut-être dans l'avenir plusieurs autres peuvent en faire partie. Ce sont toutes des choses dont... Dans ce que nous venons de déposer, nous exprimons la volonté de nous asseoir et de négocier avec le ministère pour joindre des groupes de commercialisation comme SOCOMER. Mais définitivement, notre "rapport" démontre que nous tenons à en discuter auparavant.

M. Perron: Maintenant, pourriez-vous me

dire, au moins, combien d'industriels font partie de SOCOMER?

M. Grenier: Je crois que c'est cinq industriels, actuellement. Cinq ou six.

M. Perron: Cinq industriels qui en font partie et qui détiennent combien de marché?

M. Grenier: Écoutez, c'est très difficile pour moi, ne connaissant pas la structure entière de SOCOMER, de définir exactement le marché que SOCOMER peut détenir dans les diverses productions qui s'effectuent. Parce qu'il y a quand même des diversifications de productions que le domaine des pêches regroupe actuellement.

Une voix: Allez-y, M. Joli-Coeur, s'il vous plaît.

M. Joli-Coeur: Oui, M. le député. On corrigera l'AQIP si on a mal compris, mais SOCOMER ne se veut pas une entreprise exclusive de commercialisation. SOCOMER est une entreprise qui se veut profitable et qui est en compétition directe avec d'autres entreprises de mise en marché qui font aussi bien au Québec. Alors, qu'il y ait cinq ou six membres chez SOCOMER, ce n'est que l'attrait de SOCOMER vis-à-vis de ces cinq ou six membres-là qui pourrait en attirer plusieurs autres. C'est une entreprise qui a le respect de tous les industriels de la pêche, mais plusieurs d'entre eux préfèrent avoir leur propre système de mise en marché, notamment aux Îles-de-la-Madeleine et, notamment, au bout de la péninsule gaspésienne.

M. Perron: Ou encore sur le marché de Montréal avec Qouston et compagnie.

M. Joli-Coeur: Avec aussi des entreprises qui ne sont pas de Montréal, des entreprises locales à la Gaspésie. Il y en a plusieurs qui font leur propre mise en marché. Jusqu'à tout récemment, par exemple, à moins que ça ne change cette année, une des plus importantes, Madelipêche faisait sa propre mise en marché sans faire partie de cette entreprise efficace où SOQUIA a investi et où SOQUIA est partenaire. Il est évident que SOCOMER crée de l'émulation dans le milieu de la mise en marché et que ce n'est vu qu'avec de bons égards de la part des autres industriels de la pêche.

M. Perron: Une dernière question sur SOCOMER versus l'AQIP, puisque l'AQIP regroupe les industriels de la pêche dont une partie est présente dans SOCOMER et l'autre partie n'est pas présente dans SOCOMER. Je suis heureux de voir l'ouverture d'esprit qu'a l'AQIP actuellement en rapport avec les autres industriels pour que ces industriels-là puissent être incorporés à l'intérieur de SOCOMER pour faire une force de frappe plus élevée face au marché du Québec et aussi au marché international. La question que je pose: Est-ce que vous avez une idée à peu près à quel moment vous allez être prêts, en tant qu'Association québécoise de l'industrie de la pêche, à faire les recommandations qui s'imposent face à SOCOMER pour inclure les autres industriels qui veulent en faire partie?

M. Grenier: Actuellement, nous, pour avoir divulgué à l'ensemble de nos membres l'existence de SOCOMER et leur avoir expliqué en gros le fonctionnement de SOCOMER, je crois que l'ensemble... Actuellement, on vit un système qui vise les regroupements et qui vise des rationalisations. Je crois que le système, de plus en plus, pourra gagner de la popularité, mais il reste toujours, à la base, qu'on parle de restructurer un domaine qui opère depuis déjà 30 ans et même plus, beaucoup plus. Je crois très difficile de précipiter les choses et peut-être même très dangereux de précipiter les choses en un regroupement général. On exprime quand même la volonté de bien vouloir expliquer à nos membres ce qu'il en est et de voir si, pour eux... Parce qu'il ne faut quand même pas oublier que, pour certains secteurs déterminants dans le domaine des pêches, ça peut être bénéfique de joindre SOCOMER. Maintenant, le nombre de membres qui pourront y adhérer pour faire une force de frappe, comme vous avez dit, j'espère que le plus rapidement possible, il y aura de très gros résultats dans SOCOMER et que beaucoup de gens y adhéreront.

M. Perron: Oui, M. Joli-Coeur.

M. Joli-Coeur: II ne faut pas oublier, nous le répétons ici, que le problème majeur n'en est pas un de mise en marché, mais en est un d'approvisionnement. Il ne faut pas perdre ça de vue. Vous avez rarement entendu les industriels de la pêche ou les pêcheurs se plaindre de leurs problèmes de mise en marché. On se plaint surtout des problèmes d'approvisionnement.

M. Perron: Oui, d'accord. Maintenant, pour bien s'approvisionner, il faut être en bonnes relations avec les pêcheurs et les associations de pêcheurs, tout le monde le sait, ce sont eux qui apportent les prises à l'usine. D'autre part, plus il va y avoir de prises à l'usine, plus la mise en marché devra se faire sur des marchés plus ouverts et avec une compétition beaucoup plus forte de votre part. Ça, tout le monde le sait.

Concernant la création d'offices de production, on sait, encore une fois, que, dans le projet de loi actuel, il n'y a rien qui concerne les pêcheries; ça concerne plutôt l'agriculture et l'alimentation. La création d'offices de production pour les pêcheurs n'aurait-elle pas pour effet d'améliorer la stabilité de l'approvisionnement des usines de transformation?

M. Grenier: Actuellement, pour répondre à votre...

M. Perron: Vous êtes contre, ça, on le sait. Mais est-ce que ce ne serait pas un effet contraire qui serait créé?

M. Grenier: Écoutez, le problème qu'on vit actuellement et que l'industrie de la pêche vit, c'est la très grosse capacité de production via la capacité de capture. Maintenant, tout semble aller vers une direction pour régler ce problème-là. Un office de pêcheurs, sans dire qu'on est contre à 100 %, on est d'accord pour négocier, comme on l'a cité au début, dans le cadre... Ce qu'on exprime, ce sont certaines craintes, mais on garde toujours la porte ouverte pour s'asseoir autour d'une même table, tous les gens concernés, autant les pêcheurs que les producteurs et que la mise en marché, pour en venir à un résultat qui ne pourra qu'être bénéfique dans le domaine des pêches.

M. Perron: Quant à la création des chambres de coordination, la concertation entre les différents intervenants de l'industrie des pêches n'est-elle pas possible sans la création de ces chambres? Je voudrais avoir votre opinion là-dessus.

M. Grenier: Je crois que, présentement, le ministère véhicule un mode d'introduction pour l'industrie de la pêche qui pourrait permettre de rallier tout le monde pour en venir à des résultats positifs. Je crois qu'on se doit de l'étudier pour se servir de ces modes de "véhicu-lation". C'est une ouverture qu'on possède actuellement. On ne veut pas rejeter du revers de la main cette opportunité. D'ailleurs, Me Joli-Coeur, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?

M. Joli-Coeur: Oui.

M. Perron: Avant que Me Joli-Coeur prenne la parole, est-ce que soit le président de l'AQIP ou Me Joli-Coeur, dans le même contexte, pourrait nous dire ce que le mécanisme concerné apporterait de particulier? Qu'est-ce que ça apporterait de particulier, la création de chambres de coordination, selon vous?

M. Joli-Coeur: D'abord, il faut constater, aux pages 5 et suivantes de notre mémoire, que les offices de producteurs, on ne s'est jamais prononcé contre. Au contraire, on a dit qu'on aimerait avoir des offices de producteurs pour avoir des gens représentatifs avec qui causer. Avec qui causer où? Avec qui causer aux chambres de coordination. On pourrait concevoir, M. le député, un tout autre lieu pour avoir des échanges, mais le projet de loi nous en apporte un, nous en suggère un, et c'est tout ce qu'on constate. Ça nous en suggère un qui n'est certainement pas mauvais en soi. Au contraire, on trouve ça intéressant de trouver enfin une place où retrouver des producteurs regroupés en offices de producteurs, et non seulement eux, mais les autres intervenants parce qu'il y a d'autres intervenants qui suivent et qui sont essentiels dans le domaine des pêches, qui ne le sont peut-être pas dans d'autres domaines, mais qui sont essentiels dans le domaine des pêches à cause du caractère d'exportation du domaine des pêches. On est sur les marchés internationaux; alors, on ne peut pas être tout seuls à discuter avec les pêcheurs sans tenir compte de ceux qui mettent en marché, notamment la société où l'État a des intérêts avec les industriels. Il faut les mettre en cause dans ces chambres de concertation parce que ce sont eux qui ont le contact avec les marchés internationaux, finalement.

M. Perron: O.K. Maintenant, puisqu'on parle de l'office, vous venez de mentionner l'office dans votre réponse.

M. Joli-Coeur: À la page 5, oui.

M. Perron: Vous étiez d'accord avec la question de l'office, de...

M. Joli-Coeur: C'est ce que nous exprimons.

M. Perron: O.K. vous l'exprimez. Mais je voudrais bien savoir de votre part comment on peut faire fonctionner un office comme celui-là sans modifier la structure actuelle d'un office ou encore changer toute l'évolution de l'office si on n'a pas de plans conjoints.

M. Joli-Coeur: Nous y répondons à la page 6, au dernier paragraphe, où nous vous citons une trentaine d'articles qui devraient être amendés dans le projet de loi pour arriver à ces fins-là. À la page 6, au dernier paragraphe.

M. Perron: O.K. D'accord.

M. Joli-Coeur: Dans la mesure où un office présuppose que le but, c'est de faire des plans conjoints, on est contre. Dans la mesure où un office, c'est afin de permettre d'être représentatif et de venir à une chambre de coordination et de développement, nous sommes pour.

M. Perron: C'est parce que le résultat de tout ça, c'est que, si l'office éventuellement créé n'a pas de plan conjoint, ça ne donne rien d'avoir un office pour les pêcheries à ce moment-là. En tout cas, c'est ce que je pense.

M. Joli-Coeur: Ce n'est pas notre lecture. (17 h 15)

M. Perron: Bon, en tout cas, on peut avoir une lecture différente, mais...

Une autre question que je voulais vous poser. Qu'est-ce qui explique les réticences de l'AQIP quant à la possibilité que les chambres de coordination s'engagent dans le programme de vente de produits, ce qui aurait pour effet d'augmenter le poids de l'industrie québécoise sur les marchés internationaux...

Le Président (M. Richard): En conclusion, M. le député de Duplessis, s'il vous plaît.

M. Perron: ...donc possiblement les prix obtenus aussi?

M. Grenier: Excusez-moi, j'ai mal... M. Perron: Je répète la question. M. Grenier: Oui, s'il vous plaît.

M. Perron: Qu'est-ce qui explique les réticences de l'AQIP quant à la possibilité que les chambres de coordination s'engagent dans des programmes de vente de produits, ce qui aurait pour effet, selon moi, d'augmenter le poids de l'industrie québécoise sur les marchés internationaux, donc, possiblement, les prix aussi?

M. Grenier: écoutez, nous, comme on le dit depuis le début, on a cerné des points où il devrait y avoir discussion, où il devrait y avoir des ententes ultérieurement. dire aujourd'hui que nous ne sommes pas d'accord à 100 %, c'est une chose, en discuter, c'en est une autre, en venir à une solution, c'en est aussi une autre.

Maintenant, lorsqu'on présente notre mémoire, on sous-entend toujours que nous, nous sommes disposés, avec ce qui est présenté, à discuter des modifications à ces programmes ou à discuter de l'opportunité de l'amélioration de ces programmes. Donc, c'est peut-être difficile, aujourd'hui, pour l'association québécoise des pêches, de dire: On ne veut pas en faire partie ou on veut en faire partie. Ce qu'on semble vouloir refléter, nous, les industriels des pêches, c'est qu'on est disposés à discuter de ces programmes qui nous sont offerts.

Pour conclure, écoutez, tout le long, on a élaboré des paragraphes de loi, des sujets, autant à l'exportation, à la fabrication, aux pêcheurs, mais on est d'accord, en tant qu'industriels des pêches, de voir à l'amélioration du secteur. Donc, on sait que, pour améliorer ce secteur, il va falloir en discuter. Comme je le répète, nous ne rejetons pas du revers de la main le projet de loi. On peut voir apparaître, au moins, qu'il peut y avoir une sorte de concertation à l'origine de tout le secteur des pêches. Déjà, je crois que c'est un pas assez positif pour le secteur des pêches. Nous croyons que c'est un facteur positif pour le domaine.

Le Président (M. Richard): Une dernière question, M. le député de Duplessis.

M. Perron: Oui, ça revient à dire ce que je disais au début, c'est extrêmement difficile de prendre une position ferme quand on n'a pas le libellé des articles de loi qui vont nous apparaître éventuellement dans les prochaines semaines.

Une dernière question. Est-ce que l'AQIP est actuellement présente sur l'organisme d'exportation canadien qui s'apppelle CAFE?

M. Grenier: Non. Nous ne sommes pas présents actuellement.

M. Perron: Est-ce que vous avez été approchés?

M. Grenier: Non, du tout.

M. Perron: Est-ce que vous avez eu des pressions pour être présent sur cet organisme-là?

M. Grenier: Non, on n'a pas subi de pression.

M. Perron: Non plus. M. Grenier: Non plus. M. Perron: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député de Duplessis. M. le ministre, vous avez des questions à l'endroit de nos invités?

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord remercier les représentants de l'AQIP d'être avec nous. Effectivement, j'ai eu l'occasion de les inviter le 30 janvier, si ma mémoire est fidèle, à venir nous rencontrer lors de leur assemblée annuelle. Il faut bien comprendre, M. le président, Me Joli-Coeur, ce qui inspire la démarche gouvernementale de vouloir inclure l'ensemble du secteur des pêches commerciales sous l'égide de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et des produits bioaquatiques, tel que vous vous y référez. Je peux vous assurer au départ, en termes techniques, que les modifications nécessaires seront apportées à l'article 3 de la loi pour habiliter le chapitre nouveau de la loi qui sera ajouté en amendement au texte original pour prévoir une application de règles disponibles, je dis bien disponibles, à l'industrie des pêches au Québec.

La responsabilité du gouvernement n'est pas d'imposer des règles de mise en marché des produits marins au Québec. La responsabilité du gouvernement, cependant, est d'offrir et de mettre à la disposition des représentants de cette industrie - et j'y reviendrai parce que je

constate, à la lumière de vos propos et de vos commentaires, qu'il y a des interrogations, je vais tenter d'y répondre au mieux - de mettre à la disposition des pêcheurs, de mettre à la disposition aussi des entreprises des règles permettant d'atteindre certains objectifs communs.

Premièrement, nous partons du principe que l'industrie des pêches est confrontée, particulièrement depuis deux ans, à des problèmes qui se posent avec une acuité non seulement renouvelée mais aggravée, si je peux utiliser le terme, à chaque année. Ça, c'est ma perception, comme ministre des Pêcheries, et j'ai eu tôt fait de me la faire, cette perception, suite à mes visites en décembre, en janvier, en février, durant l'hiver, qui est la période appropriée, vous en convenez avec moi. Ma perception, c'est que jamais l'industrie n'aura été confrontée à un tel ensemble de problèmes conjoncturels et aussi à certains problèmes structurels. Les problèmes conjoncturels étant, dans un premier temps, une valeur du dollar canadien qui affecte l'industrie des pêches au Québec, la force du dollar canadien, compte tenu qu'un pourcentage très élevé de nos produits de première transformation au Québec sont vendus sur le marché américain, nous place en situation de vulnérabilité sur des marchés traditionnels. Cet élément doit être lu aussi avec une politique de la Banque du Canada qui maintient des taux d'intérêt très élevés, ce qui implique des charges importantes à être assumées par les Industriels, les industries, les entreprises, dont vous êtes les représentants. Le tout conjugué aussi avec une baisse très importante des débarquements. Si on se réfère aux débarquements de 1989, ils auront été comparables à ceux de 1984. Nous sommes bien loin du volume de débarquements de 1986 et qui était en croissance, d'ailleurs, en 1987.

Quatrième élément, nous vivons une situation de faiblesse des prix importante. Surcapacité d'usine. Vos entreprises, les industries de transformation au Québec, ont les équipements nécessaires pour transformer davantage de volumes comparativement à ce qu'elles ont transformé en 1989. Enfin, diminution de la ressource. Donc, surcapacité de la flotte. Tout arrive en même temps.

On avait deux attitudes possibles. La première attitude en aurait été une de laisser-aller, de laisser jouer les règles économiques, avec l'impact que ça aurait pu avoir, à savoir que les plus forts, ou ceux et celles qui ont le plus d'équité, soit les entreprises ou les pêcheurs, s'en sortiront. Pour ce qui est des autres, bonne chance.

Ce n'est pas la position ou l'attitude que j'ai privilégiée comme ministre des Pêcheries, vu que, pour le gouvernement du Québec, pour le ministre des Pêcheries, le poumon économique, la vie économique de la région maritime dépend en très grande partie de la vitalité de l'industrie des pêches. Je ne connais pas encore tous les beaux villages de la Côte-Nord, mais je suis bien conscient que, si vous enlevez les pêches dans ces villages, vous devrez les fermer purement et simplement ou inviter les collectivités locales à venir gagner leur pain et leur beurre ailleurs au Québec. C'est la même chose en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine. L'économie des Îles-de-la-Madeleine dépend de l'industrie des pêches et du tourisme et de quelques autres secteurs, mais l'épine dorsale, si je peux utiliser le terme, de l'économie, là comme dans l'ensemble de la région maritime du Québec, ce sont les pêches. On a décidé d'intervenir.

Nous aurions pu intervenir de différentes façons. La première, on aurait pu convoquer un genre d'états généraux dans le secteur des pêches, s'échanger pendant plusieurs mois des documents de consultation, se convier à des réflexions continues, etc. J'étais convaincu que la situation commandait des gestes immédiats. Nous avons donc publié dès le mois de décembre un document de réflexion, accompagné d'une demande aux entreprises et aux pêcheurs de réagir. D'ailleurs, à ma première rencontre avec votre Association, M. le président, elle m'a dit: M. Pagé, on vous demande d'intervenir avant le 23 décembre. C'est l'AQIP qui m'a dit ça: Intervenez avant le 23 décembre, parce qu'on a une trentaine d'entreprises qui risquent la faillite. Ce que j'ai proposé et ce que je propose à l'industrie... Ça, c'est un premier élément, il y en aura d'autres, je ferai des annonces la semaine prochaine. Et je prévois, au nom du gouvernement du Québec, annoncer un plan d'action très complet dans des délais qu'on peut qualifier d'assez brefs si on se réfère à la coutume voulant que, pour bâtir des programmes d'intervention comme ceux-là, il faut quand même assez de temps.

Alors, on intervient dans un premier temps au niveau de la gestion de la ressource. Je comprends que les dispositions dans la loi ici vont changer des choses et la première réaction humaine face à des changements, quel que soit le changement, c'est de s'inquiéter, parce qu'on ne connaît pas l'état de la situation, comment ça se fera, quel sera l'impact de ces changements. J'ai constaté qu'on avait un problème majeur au niveau de la gestion de l'offre du produit et je m'explique. Comment peut-on bâtir une industrie rentable et efficace... Parce que c'est à partir de la rentabilité qu'on se donne les moyens de faire face aux défis des technologies; c'est à partir de la rentabilité qu'on peut développer davantage notre produit chez nous; c'est à partir de la rentabilité qu'on peut s'associer à des démarches de développement de marchés pour atteindre de nouveaux marchés; c'est toujours à partir de la rentabilité qu'on peut développer aussi de nouveaux produits; c'est à partir de la rentabilité qu'on peut participer à des structures de promotion et de pénétration de ces nouveaux marchés.

Pas de rentabilité, on n'en est pas capables. (17 h 30)

Je ne peux pas accepter, moi, comme ministre des Pêcheries, des situations où on n'a aucune fidélité ou aucune relation bien encadrée entre les produits qui sont péchés, puis les usines qui les reçoivent. Dans un contexte de rareté de ressources, accompagné d'un contexte de surcapacité de transformation, quel est le niveau qui est le plus vulnérable? Dans mon livre à moi, cette situation rend nos entreprises de transformation très vulnérables. Vos membres, s'ils n'ont pas l'assurance d'avoir de l'approvisionnement, des débarquements dans leurs usines, comment voulez-vous qu'ils investissent? Comment voulez-vous qu'ils se développent?

Alors, à la lecture que je fais de votre mémoire aujourd'hui, vous semblez manifester beaucoup d'inquiétude. Vous dites: Nous sommes favorables à un office de producteurs, mais vous ne voulez pas de plan conjoint. Somme toute, ce que vous souhaitez, c'est un office de producteurs qui n'a pas de pouvoirs, des règles du jeu qui n'ont pas beaucoup de dents. Un office qui n'a pas de pouvoirs, ça donne rarement des enfants forts, ça.

J'entends, du côté de l'Opposition, que les chambres de coordination, ça va être ça. Non, ce ne sera pas ça, les chambres de coordination, pas du tout, mon cher ami. On va l'expliquer; je vais vous dire pourquoi tantôt. Oui, on peut parler, puis écouter en même temps!

Cela étant dit, il ne faut pas voir les plans conjoints comme étant une menace aux industries. Puis, autre élément, il y a beaucoup de positif. On va commencer par le commencement. Combien avez-vous de membres?

M. Grenier: On était 22 membres actifs lors de la réunion du mois de janvier.

M. Pagé: Puis, là?

M. Grenier: Nous serons une trentaine.

M. Pagé: Bon, tant mieux.

M. Grenier: Selon les réponses reçues.

M. Pagé: Donc, vous aurez un levier dans la loi qui permettra à l'AQIP d'être accréditée comme étant l'association représentative des entreprises de transformation des produits marins au Québec, premièrement.

M. Perron: Au sein de l'office?

M. Pagé: Si elles en font la demande et elles vont devoir se soumettre à des règles, démontrer leur représentativité, etc. Et je suis persuadé que les dispositions de la loi vont déboucher sur une solidarité beaucoup plus grande, beaucoup plus claire de la part des entreprises.

Vous n'avez actuellement aucun pouvoir d'exiger à chacune des entreprises de transformation, un, de contribuer financièrement à votre Association, au départ; deux, vous devez convenir avec moi qu'avec, grosso modo, une centaine d'entreprises de transformation au Québec, vous avez seulement 30 membres; ça va faciliter, évidemment, le regroupement de ceux qui achètent les produits. Puis, vous vous donnerez les règles que vous jugerez opportun de vous donner dans ce cadre-là.

Même chose du côté des pêcheurs. Je rencontrais l'Alliance ce matin; on avait le plaisir de recevoir l'Alliance. Là, il y a toute une gamme possible de dispositions dans ces plans conjoints. Ça peut s'appliquer par production, par produit. On peut avoir un plan conjoint pour le homard, on peut en avoir un pour le crabe, on peut en avoir un pour la morue, etc., les poissons de fond, les pélagiques, etc. Ce sera à l'industrie de déterminer ça. On peut même avoir des dispositions d'un plan conjoint s'appliquant aussi sur une base régionale. Et ce sera aux entreprises, aux producteurs, aux pêcheurs d'établir ensemble les règles qu'ils veulent bien se donner.

Vous semblez vous inquiéter du nombre de 10 producteurs. Ça, c'est en quelque sorte une règle minimale qui exige qu'on ait un nombre minimum, un strict minimum de producteurs qui doivent se présenter devant la Régie, sauf que ça ne veut pas dire que 10 cosignataires d'une requête pour un plan conjoint, dans un secteur de production, reçoivent automatiquement l'autorisation de la Régie. Il faut qu'ils démontrent leur représentativité. La Régie est habilitée à demander et à appeler des référendums, à faire voter l'ensemble des intervenants. Est-ce que ces commentaires ne vous sécurisent pas?

M. Grenier: Je crois, M. le ministre, que nous avons fait part, d'ailleurs, d'une volonté de discussion et je crois que nous attendons fermement les résultats qui vont être pondus du ministère pour pouvoir en venir à une structure solide. D'ailleurs, à plusieurs reprises, je l'ai cité, M. le député de Duplessis: On ne veut pas aller nécessairement à l'encontre des objectifs du ministère ni de ceux de l'industrie. Ce que nous voulons, via tout ce dépôt de loi, ainsi que notre mémoire, c'est avoir la possibilité de discuter et d'en venir à une concertation qui ne peut être que favorable pour l'industrie. Est-ce que ça répond à votre question, M. Pagé?

M. Pagé: Oui, mais si on regarde, actuellement, la qualité de relations entre producteurs et transformateurs dans certains secteurs des produits agricoles au Québec, on constate que c'est à partir de ces plans conjoints, de ces habitudes de travailler ensemble entre les transformateurs et les producteurs, qu'il s'est

développé une véritable force. Ça a créé du dynamisme, ça a créé des situations où, constamment, on bonifie nos interventions.

Première intervention, donc, la loi, et, à cet égard, je peux vous assurer que l'ensemble des modifications que je vais déposer, j'entends les faire parvenir à l'Opposition parlementaire officielle, évidemment, avant de les déposer en commission parlementaire avec un délai pour qu'elle ait le temps de juger et d'apprécier. J'entends aussi rendre disponibles ces modifications aux entreprises, aux associations représentatives, que ce soit l'AQIP, que ce soit l'Alliance des pêcheurs, pour qu'elles puissent, si besoin en est, nous donner leurs réactions - parce qu'on est quand même accessibles - avant l'étude du projet de loi article par article en commission parlementaire.

Ça, je peux vous donner cette assurance parce que l'étude du projet de loi article par article ne pourrait pas commencer avant la fin de mai. Alors, vous aurez le temps de bien voir le libellé exact parce que, comme je vous le dis, Me Joli-Coeur, ce sera un chapitre particulier à l'industrie. Donc, on n'aura pas à modifier toute la série d'articles auxquels je me suis référé, 49, 50, etc.

Vous dites, à la page 4: "Le fait que le monde agricole était déjà structuré lors de l'adoption des plans conjoints en a grandement facilité l'administration. Le développement du système des plans conjoints a été grandement influencé par l'existence de l'Union des producteurs agricoles, etc." Je comprends qu'on n'a pas de traditions dans l'industrie des pêches au Québec aussi grandes que dans le secteur agricole. Cependant, le caractère délicat et difficile de la situation vécue par l'ensemble de l'industrie commandera, j'en suis persuadé, moi, un degré de solidarité assez grand à l'égard de mécanismes susceptibles de mettre un meilleur ordre, plus d'ordre dans la mise en marché des produits marins.

À la page 5, vous parlez des offices de producteurs. J'y ai répondu tantôt. Vous souhaitez que les producteurs se regroupent selon chacun des quatre secteurs: poissons de fond, crustacés, ressources pélagiques, espèces sous-exploitées. Ce sera possible. Ce sera aux producteurs et aux gens de l'industrie de l'établir, de le déterminer. Vous semblez mettre en cause le fait qu'on se donne, dans la loi, les moyens d'établissement de plans conjoints alors qu'on exporte une grande quantité de nos produits, que l'établissement des prix se fait au niveau international, bien souvent.

Le contexte est particulier dans le secteur des pêches. Le plan conjoint ne vise pas à discipliner la cueillette de la ressource dans le sens qu'on ne veut pas limiter la production. On est confrontés à un problème exactement contraire, on manque de ressources. Donc, le plan conjoint pourrait déboucher sur une politi- que - ça, d'ailleurs, je l'ai évoqué - au bénéfice des pêcheurs, parce qu'on se doit de rationaliser la flotte aussi. On a trop de pêcheurs au Québec et les pêcheurs qui y sont ont de la difficulté à vivre. Le plan de rationalisation que je vais annoncer va prévoir des interventions concrètes pour diminuer la flotte du Québec de façon que les pêcheurs qui vont demeurer dans l'industrie aient la capacité de pêcher des poissons en quantité pour pouvoir vivre honorablement et convenablement, et réinvestir, surtout.

L'autre élément, il ne faut pas penser que tout ça va venir imposer davantage de limites que nous en avons actuellement pour les entreprises de recevoir des produits. On n'est pas dans le lait, on est dans un secteur où on veut stabiliser les prises, augmenter le volume par pêcheur et garantir nos entreprises de transformation, créer ce lien entre les débarquements et l'approvisionnement aux usines. Si je comprends bien - je vous invite à commenter - ça a été une des grandes préoccupations des industries depuis un certain nombre d'années de ne pas avoir cette fidélité, cette garantie d'approvisionnement aux usines.

M. Joli-Coeur: Effectivement, M. le ministre, le nombre de permis d'usine est directement en cause, compte tenu de la ressource qui est là. Plus que jamais, à l'heure actuelle, nous favorisons le fait que le ministère s'en tienne aux permis d'usine actuels, vérifie, avant d'émettre de nouveaux permis d'usine, l'intérêt commun...

M. Pagé: Le comité sur l'intérêt public, oui.

M. Joli-Coeur: ...révise ses dossiers actuels afin de bien s'assurer que ceux qui n'ont pas de permis ne produisent pas et que ceux qui en ont produisent, dans la situation actuelle. Les deux sont liés ensemble, évidemment.

M. Pagé: D'ailleurs, c'est ce pourquoi nous aurons un programme d'intervention pour la rationalisation des usines. On va annoncer, la semaine prochaine, certains dossiers au niveau de la rationalisation. Cela va impliquer des sommes importantes de la part du gouvernement du Québec, mais c'est ce qu'on doit investir pour maintenir des entreprises qui vont être rentables, efficaces et qui vont pouvoir usiner au maximum de leur capacité.

M. Joli-Coeur: Un bon début de rationalisation est justement le respect des permis émis versus ceux non émis.

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Richard): Je vous demanderai de conclure, M. le ministre, puisque le temps est écoulé.

M. Pagé: Le président me demande de conclure. D'abord, je veux vous remercier de votre mémoire. Je comprends les interrogations que vous avez. Nous allons apporter, tel qu'indiqué, des modifications importantes, avec un objectif très clair: fournir les outils - ça, c'est un des premiers éléments de l'intervention - nécessaires à l'industrie pour qu'elle puisse mieux gérer et sa ressource et la mise en marché de son produit et le développement des marchés. Ça, c'est très important. On aura l'occasion de se rencontrer à nouveau, très certainement, peut-être dans un cadre moins formel qu'une commission parlementaire, mais nous voulons véritablement faire route avec l'industrie des pêches au Québec dans son ensemble.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le député d'Arthabaska et porte-parole officiel, est-ce que vous avez un commentaire final ou une question?

M. Baril: Juste un commentaire final. D'abord, je veux remercier les représentants de l'AQIP d'être venus présenter leur mémoire, en mon nom et au nom du responsable des pêches, le député de Duplessls.

Je voudrais, puisqu'on est à l'heure, éclair-cir quelques interrogations qu'on se pose. Cet avant-midi, le ministre nous a fait part de la démarche qu'il entend suivre pour présenter ce projet de loi et H nous a parlé de la semaine prochaine pour l'adoption en Chambre de la deuxième lecture. (17 h 45)

Nature des amendements envisagés

J'aimerais savoir, dans un premier temps, si le ministre entend amener des modifications et des amendements majeurs au projet de loi ou si c'est mineur. Il parie d'ajouter un chapitre complet qui touche le secteur des pêches. En tout cas, il me semble que c'est un peu difficile pour nous de parler sur le principe de la loi sans connaître l'intention du ministre, s'il veut la modifier de fond en comble. Est-ce qu'il va réécrire le projet de loi ou si ce sont des amendements...

M. Pagé: Tel que je l'ai indiqué, il y aura des modifications à la loi comme suite des représentations qui nous ont été faites, ça, c'est certain, j'annonce que des amendements vont être apportés à la loi. Cependant, les grands principes de la loi que nous étudions actuellement se réfèrent à la mise en marché de nos produits, aux plans conjoints, aux pouvoirs de la régie, aux règles régissant la mise en oeuvre de plans conjoints, la mise en oeuvre des chambres de coordination et de développement, etc. L'ensemble de ces principes est contenu dans le projet de loi. Je conviens avec vous, cependant, que le chapitre auquel nous nous référons portera sur la mise en marché des produits marins au Québec. On l'a discuté abondamment. On l'a discuté. Je pense que c'est public et le porte-parole peut en témoigner.

Nous pouvons faire le débat de deuxième lecture sans aucun problème et je déposerai les amendements non pas le matin de la commission parlementaire tel que ça se fait d'habitude, mais je prévois les rendre disponibles au moins une semaine, sinon deux semaines avant. Vous serez en mesure de les étudier et là on s'attellera au travail très méthodique de l'étude article par article et des amendements qui peuvent y être déposés.

M. Baril: Je comprends que, pour le ministre, c'est facile d'entreprendre le débat en deuxième lecture parce que dans sa tête c'est clair, - du moins, je l'espère, - il sait où il veut s'en aller avec son projet de loi, mais vous comprendrez que nous...

M. Pagé: Vous ne le savez pas?

M. Baril: Bien, on ne le sait pas justement...

M. Pagé: Bon.

M. Baril: ...et vous nous demandez de prendre position sur un projet de loi sans connaître les amendements. Dans l'ensemble des mémoires qui nous ont été présentés, les 25 ou la trentaine d'organismes qui sont venus nous les présenter, il y a des demandes majeures. C'est pour ça que nous, on aimerait ça si le ministre pouvait nous dire au moins une orientation des amendements, les déposer ou nous les faire connaître avant la deuxième lecture. Moi, je peux lui assurer notre collaboration. Ce n'est pas parce qu'on veut bloquer ou retarder le projet de loi, mais...

M. Pagé: Écoutez, il y a deux possibilités. On n'étudie pas le projet de loi en deuxième lecture la semaine prochaine, c'est-à-dire avant l'ajournement pascal; auquel cas, l'étude à l'Assemblée nationale ne pourrait pas s'amorcer avant la fin de mai, à cause de l'étude des crédits qui va immobiliser les travaux parlementaires pendant quoi? cinq semaines.

M. Baril: Oui, mais l'étude...

M. Pagé: Ça, ça veut dire quoi concrètement? Si on se convie à un débat à l'Assemblée en deuxième lecture à la fin de mai, ça veut dire pas de commission parlementaire qui peut siéger avant le début du mois de juin et là, on se réfère à la session intensive. Il faut bien avoir à l'esprit qu'on a le projet de loi 15. On a aussi le projet de loi 6. On a les projets de loi 21 et 23.

Je prévois aussi déposer d'autres pièces législatives avant le 15 mai. Moi, je ne veux pas passer au bout du pont.

M. Baril: Oui, mais vous conviendrez que...

M. Pagé: L'industrie des pêches, pour moi, c'est important. Mon objectif, c'est que la loi s'applique le 1er août parce que, si on va à l'automne 1990 pour l'adoption de cette loi, on risque de manquer la saison de pêche 1991.

M. Baril: Ça, je considère ça.

M. Pagé: Je ne veux pas vous bousculer dans le temps, sauf que vous avez suffisamment analysé et étudié le projet de loi. Il est déposé, le projet de loi. On ne parle pas d'un projet de loi qu'on va déposer dans le temps.

M. Baril: Regardez, monsieur...

M. Pagé: On a mené des consultations entre la première et la deuxième lecture. Vous avez suffisamment d'éléments et, d'ailleurs, c'est le leader qui vous l'assure. C'est non seulement le ministre, mais, comme leader du gouvernement, je peux vous dire qu'on est totalement habilités à amorcer l'étude du projet de loi en deuxième lecture à ce moment-ci et c'est ce que je vous propose.

M. Baril: Regardez, M. le ministre, comme je vous le dis, je ne veux pas retarder l'adoption de ce projet de loi là, mais ce qui est le plus long dans un projet de loi, ce n'est pas l'adoption en deuxième lecture, c'est l'adoption, souvent, en troisième lecture. L'adoption en deuxième lecture, moi, je peux vous assurer qu'on fait ça dans... On ne fera pas...

M. Pagé: Bien là, on va être à la fin de mai.

M. Baril: Bien oui, mais ça prend une journée là.

M. Pagé: Un instant, un instant. Si la stratégie parlementaire de votre groupe, à ce moment-là, est de bloquer un projet de loi, de parler plus longtemps sur un projet de loi pour en bloquer un autre qui s'en vient et qui ne fait pas votre affaire, c'est moi qui vais payer pour et c'est l'industrie des pêches qui va payer pour. Vous comprenez...

M. Baril: Vous nous demandez...

M. Pagé: ...à la lumière des expériences que j'ai vécues dans le passé, je ne veux pas me placer devant une situation de vulnérabilité dans mes lois. J'ai assez d'expérience pour ça. Combien de fois j'ai vu des lois bloquées ici au

Parlement, pas parce que l'Opposition voulait les bloquer, elles, mais voulait bloquer la machine pour que d'autres lois qui s'en viennent ne passent pas.

M. Baril: Pourquoi, nous, faudrait-il vous faire confiance alors que vous, vous n'êtes pas capable de nous faire confiance?

M. Pagé: Comment?

M. Baril: Bien, vous dites: Faites-moi confiance. Je suis le leader et vous allez voir qu'il n'y aura rien là.

M. Pagé: Écoutez, on est en session régulière, on n'est pas en session intensive. Et mardi, à ce que je sache, on siège. Demain, je vais ajourner à mardi matin. Puis, moi, mardi, je vais appeler des lois et j'ai l'intention d'appeler ma loi.

M. Baril: Mais vous comprendrez quand même...

M. Pagé: Qu'est-ce que vous me proposez en alternative? Qu'on étudie ça au mois de juin?

M. Baril: Moi, je ne vous parle pas du mois de juin, mais il me semble que c'est légitime de notre part de vous demander de connaître les amendements que vous allez apporter à cette loi avant qu'on en discute le principe. Ces amendements-là, ça ne prend pas trois mois à les faire. Vous allez appeler la commission parlementaire au mois de mai, vous me dites, je pense.

M. Pagé: Bien oui, mais je ne peux pas l'appeler avant.

M. Baril: Je comprends.

M. Pagé: Les quatre commissions parlementaires habilitées à siéger lorsque la Chambre ne siège pas, ce sont quatre commissions parlementaires qui vont siéger pour étudier les crédits de chacun des ministères.

M. Baril: Oui, je le sais. Mais c'est que le débat de deuxième lecture en Chambre, ça ne prendra pas une semaine. C'est ça que je veux vous dire. Faites-nous confiance là-dessus.

M. Pagé: J'avais prévu, moi, une journée: mardi en après-midi, mardi en soirée, avec une possibilité de terminer le débat mercredi matin.

M. Baril: C'est ça, mais discuter sur un projet de loi dont on ne connaît pas les amendements, c'est ça que je vous dis, en une journée. Vous la retardez une journée avant la commission parlementaire.

M. Pagé: Oui, sauf que vous savez pertinemment que, dans le processus d'adoption de nos lois, les amendements sont toujours amenés au moment de l'étude du projet de loi article par article, c'est-à-dire après la deuxième lecture.

M. Baril: Ça dépend des amendements que vous voulez apporter. Là, on sort d'une consultation. On a écouté 30 organismes...

M. Pagé: 30 organismes.

M. Baril:... qui sont venus nous faire part de leurs demandes, de leur volonté de voir modifier la loi.

M. Pagé: Ouais.

M. Baril: Allez-vous en tenir compte ou si vous n'en tiendrez pas compte, de cette consultation?

M. Pagé: On va en tenir compte, certain.

M. Baril: Bon, c'est ça que nous, on aimerait savoir.

M. Pagé: Je vais vous le dire en deuxième lecture.

M. Baril: Ha, ha, ha! Ouais, en tout cas, je vous remercie de votre collaboration, M. le ministre.

M. Pagé: Vous allez être là mardi?

M. Baril: Tout ce que je veux vous dire, nous, ce qu'on souhaite, ce qu'on demande, c'est d'avoir ces amendements avant le débat de deuxième lecture.

M. Pagé: quelle garantie pouvez-vous me donner sur le nombre d'interventions en deuxième lecture au mois de mai, par la voix de votre leader, par vous ou par la voix de votre chef? je ne veux pas me retrouver, moi, dans une situation, au mois de mai, où vous allez présenter une motion d'ajournement à six mois pour pouvoir faire pérorer la chambre pendant deux jours de façon à retarder le projet de loi sur les taxes municipales ou je ne sais trop quoi.

M. Baril: Écoutez, M. le ministre, on est conscients de l'importance de cette loi. Je l'ai dit et je l'ai répété à plusieurs reprises dans cette commission. Ce n'est pas à notre avantage de retarder l'adoption de cette loi. Ce n'est pas là qu'est la question.

M. Pagé: Je présume.

M. Baril: Maintenant, au niveau des inter- venants que nous aurons pour discuter de la loi, on serait bien plus en mesure de vous dire le nombre d'intervenants qu'on va avoir si on connaissait au moins ce que va être le projet de loi.

(M. Pagé: Vous l'avez le projet de loi devant vous.

M. Baril: Bien oui, mais vous allez peut-être le modifier de fond en comble. On ne le sait pas.

M. Pagé: O. K. Je vais parler à votre leader. Ça va me prendre des garanties parce que je ne me placerai pas, comme ministre responsable de l'industrie des pêches, dans une situation de vulnérabilité en raison de techniques parlementaires ou de filibusters" sur d'autres lois. Ça, là...

M. Baril: Non et je vous dis... M. Perron: M. le Président...

Le Président (M. Richard): M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. le Président, je m'excuse, mais là, il faudrait se comprendre. Moi, je ne suis aucunement d'accord à rendre une réponse au ministre aujourd'hui par rapport aux actions de l'Opposition quand je ne connais pas le contenu de tout un chapitre qui s'en vient dans un projet de loi. On n'a même pas le libellé.

M. Pagé: Ouais.

M. Perron: Je m'excuse, mais on n'est pas pour donner des garanties au ministre aujourd'hui à l'effet qu'on va être d'accord avec le chapitre complet.

M. Pagé: Bon, vous voyez. Raison de plus pour que je doive être prudent, vous ne voulez même pas me donner de garanties comme quoi vous...

M. Perron: Non, non. Il n'en est pas question non plus.

M. Pagé:... ne ferez pas de "f ilibuster"

M. Perron: Non, il n'y a pas de question de "filibuster" aujourd'hui. Les "filibusters", ça vient au mois de juin, vous le savez. Vous en avez fait quand vous étiez dans l'Opposition.

M. Pagé: Oui, mais si on ne la passe mardi, on va l'étudier quand, la loi?

M. Perron: M. le Président, le ministre est en train de nous demander quelque chose que lui n'a jamais fait lorsqu'il était dans l'Opposition.

M. Pagé: Quoi ça?

M. Perron: Quelque chose qu'il n'a jamais fait quand il était dans l'Opposition. C'est la personne qui a la plus grande expérience des "filibusters" qu'il a faits pendant neuf ans lorsqu'on était du côté ministériel. Et il avait toute la stratégie dans sa poche d'en arrière avant d'arriver en commission parlementaire. Wo, wo, minute, là!

M. Pagé: C'est vrai que j'ai de l'expérience et c'est vrai que, dans l'Opposition, je faisais une bonne job aussi, comme j'en fais une au pouvoir. Sauf que, quand je donnais ma parole, moi, à Pierre Marc Johnson, qui était ministre du Travail à l'époque, je disais: Pierre Marc, ta loi, tu as ma parole, elle va passer à telle date; quelles que soient les volontés de mes collègues membres de l'Opposition pour bloquer les lois et les "filibusters", ta loi, tu vas l'avoir telle date... Appelez Pierre Marc Johnson et demandez-lui si M. Pagé a toujours respecté sa parole, la parole donnée sur les projets de loi.

M. Perron: M. le Président, je vais conclure là-dessus.

M. Pagé: J'en demande autant de votre part.

M. Perron: On pourrait en parler longtemps. Mais je répète au ministre que moi, comme porte-parole en matière de pêcheries, je ne suis pas d'accord à donner une garantie au ministre à l'effet que la loi va être adoptée à telle date, tant et aussi longtemps qu'il n'aura pas déposé le chapitre et les amendements concernés, surtout en rapport avec les pêcheries. Moi, je ne veux pas donner des garanties au ministre sans savoir le contenu. Il n'en est pas question.

M. Pagé: Je ne veux pas que...

M. Perron: Parce que le contenu, justement, je veux le discuter avec des personnes concernées qui sont dans le domaine des pêcheries. Je ne veux pas discuter juste avec le ministre.

M. Pagé: Ouais. Puis, ça change quoi?

M. Perron: Ça change beaucoup de choses.

M. Pagé: Vous n'êtes pas correct.

M. Perron: Si je ne suis pas d'accord avec le contenu, à cause de...

M. Pagé: Vous n'êtes pas correct.

M. Perron: II n'est pas question qu'on n'est pas correct.

M. Pagé: Écoutez, M. Perron, vous risquez de placer cette industrie, qui attend depuis des années une législation comme celle-là ce matin, dans une situation où elle n'aura pas sa loi pour l'année prochaine. Ça se peut-y?

Le Président (M. Richard): Je m'excuse, si vous...

M. Perron: Ce n'est pas ça qu'on a dit, M. le Président. Le ministre extrapole sur des choses qui ne sont même pas arrivées.

Le Président (M. Richard): Si vous le permettez, j'ai l'impression de me retrouver à la période de questions de l'Assemblée nationale. Je comprends bien vos interrogations de part et d'autre, mais est-ce que ça doit être discuté ici, à ce moment-ci? Je ne le pense pas.

M. Baril: Moi, je tenais, en tout cas, à faire connaître publiquement mon intention à moi, qui représente l'Opposition, ma volonté ferme d'avoir ces amendements avant d'en discuter. J'ai donné mon consentement, ma parole au ministre...

M. Pagé: Vous allez avoir l'opportunité de les avoir avant d'en discuter.

M. Baril: Avant la deuxième lecture.

M. Pagé: Oui, mais en deuxième lecture on n'étudie pas chacun des articles.

M. Baril: Non.

M. Pagé: On étudie les grands principes. Les grands principes sont connus, un. Le contenu des articles, ça, c'est étudié en commission parlementaire.

M. Baril: Je sais tout ça, monsieur.

M. Pagé: La coutume veut que le ministre peut faire sa deuxième lecture, convoquer la commission parlementaire. La commission commence le matin à 10 heures et les articles, je vous les donne un après l'autre.

M. Baril: Ça, je connais ça.

M. Pagé: Les modifications à l'article 51 peuvent venir trois jours après. Vous en prenez connaissance trois jours après.

M. Baril: Mais là, on vient d'entendre 30 organismes. Ce n'est pas une loi que vous avez faite tout seul.

M. Pagé: Je n'ai pas terminé, M. le député. M. Baril: O.K.

M. Pagé: Là, je vous offre de faire le débat de deuxième lecture, de discuter des principes, parce que c'est ça qu'on doit discuter. Et je vais vous déposer les modifications aux articles une semaine et, je vais même le tenter, deux semaines avant. Vous allez avoir le temps de vous préparer. Vous allez avoir le temps de préparer des amendements si vous croyez qu'il faut en faire de façon beaucoup plus utile qu'à une commission parlementaire qui commence à 10 heures et où j'arrive avec mon premier amendement, par exemple, à l'article 2, à 10 h 15. Là, vous allez me demander d'ajourner, vous allez vouloir parier à l'UPA. Vous allez vouloir parler aux coopératives. Vous allez vouloir demander les réactions à je ne sais trop qui et là vous allez dire: Ça n'a pas de bon sens. On vient juste d'avoir cet amendement-là. Je vous offre de vous les donner deux semaines avant.

M. Baril: Est-ce tout là? Est-ce qu'on peut parier?

M. Pagé: On va passer notre principe mardi.

M. Baril: C'est parce que tout à l'heure...

M. Pagé: Ça, c'est "fair", loyal, c'est normal.

M. Baril: Parce que je ne veux pas vous couper. Tout à l'heure...

M. Pagé: Donnez-moi ma deuxième lecture, puis je serai en mesure de vous fournir les amendements beaucoup plus rapidement. Si vous dites: On ne veut pas collaborer avec vous, on veut avoir les amendements avant, on va se braquer de part et d'autre. Ce n'est pas bon.

M. Baril: Vous comprendrez...

M. Pagé: Demandez aux pêcheurs s'ils aiment les ministres qui se braquent. Ils ont vécu des situations d'affrontements entre le fédéral et le provincial.

M. Baril: II ne faut pas revenir sur le passé, M. le ministre.

M. Pagé: C'est correct, c'est correct.

M. Baril: Je vous demande simplement votre collaboration et le projet de loi dont on discute présentement n'est pas un projet de loi que vous avez fait seul avec vos fonctionnaires. Ce bout-là, oui, vous l'avez fait seul, mais, par contre, vous avez pris la peine de consulter 30 organismes qui sont venus ici nous faire un rapport de leur approbation ou de leur désap- probation de ce projet de loi. Vous allez sans doute tenir compte de ce qu'ils ont dit.

M. Pagé: Oui.

M. Baril: Ça ne se peut pas qu'ils soient venus ici une trentaine pour rien. Bon. Ce n'est pas comme si c'était un projet de loi qui avait été bâti et construit sans acune consultation. Là, vous auriez raison de dire: Attendez les amendements, on va les déposer à l'étude article par article. Ce n'est pas ça là. Vous nous demandez de prendre position sur un projet de loi que vous allez peut-être modifier de fond en comble. Je ne sais pas comment moi. On ne le sait pas. Est-ce que ce sont des virgules que vous allez changer de place ou si vous allez changer des articles au complet? C'est uniquement ça que je vous demande. Il me semble que ce n'est pas une terre en bois debout. C'est ça, la collaboration. Je vous ai assuré tout à l'heure que, quand je donne ma parole, je la donne, je ne reviens pas dessus. Je vous ai offert ma collaboration...

M. Pagé: Pour?

M. Baril: Je me fie à la vôtre.

Le Président (M. Richard): Je m'excuse...

M. Baril: Je vous dis que je ne boycotterai pas ce projet de loi avant qu'il soit adopté au mois de juin. Ça ne nous donne rien. On sait que c'est d'une importance capitale, ce projet de loi-là. Ça fait 20 ans qu'il n'a pas été amendé. Je l'ai dit.

M. Pagé: Parfait.

M. Baril: Bon. Voulez-vous que j'aille plus loin?

M. Pagé: Dites ça à votre leader, puis je vais parier à votre leader ce soir ou demain matin.

M. Perron: Les deux leaders vont régler ça.

Le Président (M. Richard): On est chanceux. La Chambre nous avait donné un mandat jusqu'à 18 heures. Il est 18 heures. On vous remercie sincèrement. Normalement, on aurait dû faire ça juste avant, de ma part, là.

M. Pagé: Messieurs, vous avez été témoins d'un genre de débat de procédure sur les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Merci beaucoup d'être venus. On l'apprécie.

Le Président (M. Richard): Merci. Avant d'ajourner, je vous rappelle les engagements financiers le 10 avril, de 9 heures à 13 heures.

M. Pagé: Mardi.

Le Président (M. Richard): Mardi matin, effectivement. J'ajourne donc sine die les travaux, puisque la commission a accompli son mandat. Merci, mesdames, messieurs et, merci aux membres de la commission.

(Fin de la séance à 18 h 1)

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