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(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Richard): Mesdames, messieurs, je vous
souhaite la plus cordiale des bienvenues. Je déclare cette séance
de travail ouverte. Je vais vous rappeler le mandat de notre commission qui est
le suivant: Tenir une consultation générale dans le cadre de
l'étude du projet de loi 15, qui est effectivement la Loi sur la mise en
marché des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres
dispositions législatives.
M. le secrétaire, M. Comeau, est-ce qu'il y a des remplacements
ce matin?
Le Secrétaire: Non, M. le Président, aucun
remplacement.
Le Président (M. Richard): Magnifique! Je vais vous
donner, si vous permettez, l'ordre du jour, M. le ministre. Au départ,
discours d'ouverture de la part du ministre et du porte-parole officiel de
l'Opposition. Le premier groupe que nous aurons en audition à 11 heures,
c'est l'Union des producteurs agricoles, puis ce sera la
Fédération des producteurs de bois du Québec, la
Fédération des producteurs de cultures commerciales du
Québec et le Syndicat des producteurs de bois du Bas-Saint-Laurent. Nous
aurons une suspension pour l'heure du dîner et nous recommencerons
à 15 heures avec la Fédération de l'UPA de Sherbrooke,
l'Association des éleveurs de moutons des Cantons de l'Est, l'Union
d'entraide des agriculteurs du centre du Québec. Suspension à 18
heures. Nous revenons à 20 heures pour les Producteurs de sucre
d'érable du Québec, la Fédération
interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du Québec inc., et nous
terminons avec Mme Marthe Olivier, pour ensuite ajourner.
Au niveau des ententes de temps, c'est 20-20-20.
M. Pagé: 30-30,20-20.
Le Président (M. Richard): Alors, lorsque nous recevrons
les groupes, c'est effectivement une enveloppe d'une heure...
M. Pagé: Fermée.
Le Président (M. Richard): ...fermée, avec une
répartition de 20 minutes pour les intervenants, la présentation
de leur mémoire, et 20 minutes chacun de part et d'autre.
M. Pagé: Exactement, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Sur ce, M. le ministre,
pour les déclarations d'ouverture, vous avez la parole.
Déclarations d'ouverture M. Michel
Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. M. le
vice-président de la commission, Mmes, MM. les membres de la commission
parlementaire de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation,
distingués visiteurs qui nous honorent de leur présence
aujourd'hui dans le cadre d'un échange, qu'on veut et que je souhaite
personnellement comme ministre responsable, très ouvert, très
contributif, si je peux utiliser le terme, c'est avec beaucoup de satisfaction
que nous amorçons et que j'amorce avec vous aujourd'hui l'étude
de ce projet de loi. Je suis accompagné du président de la
Régie des marchés agricoles du Québec et de nombreux
représentants de la régie.
Le projet de loi que je présente aujourd'hui propose une
révision majeure et une refonte de la Loi sur la mise en marché
des produits agricoles.
Vous me permettrez très certainement de dire d'abord quelques
mots du très grand rôle que cette loi, adoptée en 1956, a
joué et continue de jouer sur le développement de l'agriculture
québécoise. J'entends vous exposer ensuite pourquoi je crois
qu'il est vital, à ce moment-ci non seulement pour les producteurs
agricoles, mais pour l'ensemble du monde agro-alimentaire
québécois, de revoir et particulièrement d'élargir
la perspective des mécanismes déjà prévus dans
cette loi et de se donner ensemble des moyens d'action renouvelés,
repensés et refondus. Je terminerai en vous disant comment nous croyons
que la loi proposée peut contribuer d'abord à améliorer la
capacité concurrentielle de l'agriculture québécoise et,
en second lieu, à mieux articuler les efforts des producteurs et des
productrices avec ceux des transformateurs et des détaillants, puisque
ce sont là les deux propositions fondamentales qui ont inspiré ce
projet de loi.
La Loi de 1956 sur la mise en marché des produits agricoles
visait à favoriser, à l'époque, une mise en marché
ordonnée, efficace et juste des produits agricoles au
bénéfice autant des producteurs que des consommateurs en donnant
à la classe agricole, à la structure agricole, les moyens et les
mécanismes pour s'organiser. C'est en effet cette loi qui a
inspiré le système de plans conjoints de mise en marché
qui a été
on doit le reconnaître aujourd'hui - l'un des
éléments déterminants du profil actuel de l'agriculture
québécoise. En vertu de ce système, les agriculteurs
peuvent, comme on le sait, pourvu qu'une nette majorité d'entre eux le
veuillent, mettre sur pied un office de commercialisation ayant le mandat de
les représenter tous, obligatoirement, pour établir les
conditions de mise en marché du produit visé.
Aujourd'hui, les producteurs agricoles du Québec se
sont donné, sur la base de cette loi, une structure leur permettant
d'établir dans la discipline, à travers une trentaine de plans
conjoints couvrant à peu près tous les produits agricoles, des
modalités de mise en marché avec les transformateurs et les
autres intermédiaires ou, encore, ils se sont donné les moyens
pour en réglementer certains éléments, par exemple par le
contingentement.
Le système des plans conjoints a eu pour
résultat d'enclencher chez les producteurs agricoles un laborieux
processus de consultation et de concertation entre eux qui les a amenés
à rationaliser leurs productions et la mise en marché de leurs
produits. Cette démarche leur a permis d'abord de structurer
l'écoulement de leurs produits sur le marché local, avant qu'ils
ne prennent leur place sur le marché canadien où ils occupent,
par exemple, près de 50 % du marché du lait et 32 % de celui des
volailles. Bien plus, le système a permis, dans bien des cas,
d'élaborer des prix qui, sur la base des coûts de production,
procurent aux producteurs agricoles des revenus relativement confortables, mais
plus particulièrement stables.
Les progrès accomplis par l'agriculture
québécoise, qui est passée depuis la fin des années
cinquante d'un stade qu'on pourrait qualifier d'artisanal et presque
autarcique, où l'agriculteur produisait essentiellement pour satisfaire
ses propres besoins plutôt que pour vendre, à un stade actuel de
grande spécialisation lui permettant d'exporter sur les marchés
du monde des longes de porcs, des animaux vivants ou des produits horticoles,
par exemple. Tout ceci démontre bien que l'objectif poursuivi lors de la
sanction de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles a
été atteint dans une large mesure.
On peut comprendre, dès lors, l'attachement du monde
agricole au maintien d'un système qui a donné des
résultats aussi positifs. J'ai, pour ma part, à titre de ministre
de l'Agriculture, apporté à plusieurs reprises et dans tous les
milieux mon appui en ce sens aux producteurs agricoles québécois.
Les modifications que nous proposons aujourd'hui à la loi sur laquelle
se fonde le système n'ont donc pas pour objectif d'affaiblir le
rôle joué par les producteurs et productrices agricoles du
Québec. Ça ne signifie pas, cependant, qu'il n'y ait aucun
problème et que rien ne doit être changé. Bien au
contraire, une révision s'impose de façon urgente.
Cette nécessité d'une révision est
apparue clairement dans les nombreux mémoires qui ont été
soumis au comité que j'avais chargé, il y a maintenant presque
trois ans, d'examiner l'opportunité d'apporter des amendements à
cette loi. Pour l'essentiel, ce sont les structures mêmes du secteur
agro-alimentaire, tant au Canada que dans le monde entier, qui évoluent
rapidement, et ces changements structurels modifient les règles du jeu
sur lesquelles s'est construit le système des plans conjoints. Par
conséquent, si l'on veut éviter l'effritement graduel de ce
système, il faut prendre acte de ces changements, de ces mutations, et
prendre les mesures pour rendre le système plus performant et moins
vulnérable. C'est dans cette perspective que s'inscrivent les principaux
changements à la loi que je propose aujourd'hui et sur lesquels je
souhaite obtenir les commentaires et suggestions de tous et de chacun de ceux
qui ont à coeur le développement et la prospérité
de l'agriculture et de I agro-alimentaire québécois.
Et quand je me réfère aux commentaires et
suggestions, je souhaite et nous souhaitons très sincèrement - et
je pense parler pour et au nom de l'ensemble des députés ici -
que ces quatre jours d'échanges entre les parlementaires et les groupes
qui ont demandé à se faire entendre, soient très ouverts,
soient aussi très positifs. Vous savez que le libellé du projet
de loi 15 et des 209 articles qu'il contient, ça peut être
modifié. Nous sommes ici entre la première et la deuxième
lecture pour le motif d'entendre les gens et de voir avec eux, à partir
des propositions formulées par le gouvernement dans le cadre du projet
de loi déposé, ce qui pourrait être bonifié. Je peux
vous assurer tout de suite qu'au lendemain de cette commission, nous
prévoyons de notre côté voir la teneur, le contenu, les
propositions spécifiques qui auront été formulées
et, si besoin est, nous serons disposés, entre la deuxième
lecture et l'étude du projet de loi article par article, de
déposer des modifications.
Si on se réfère maintenant à ces
facteurs qui sont susceptibles d'affecter la position de l'agriculture
québécoise sur les marchés locaux et nationaux, et
ça, autant qu'à l'étranger, je peux en mentionner trois
qui m'apparaissent parmi les plus importants. Le premier facteur, c'est qu'avec
le développement des communications principalement, la planète
est devenue pratiquement le village de l'ancien temps: les distances tombent,
les différences et les mentalités des peuples autant que des
personnes s'atténuent, les pratiques et les façons de faire se
banalisent à l'échelle du monde entier. Ces changements
entraînent des mutations structurelles dans l'organisation des
échanges entre pays qui soumettent à une concurrence croissante
les marchés traditionnels de l'agriculture québécoise.
Cette concurrence internationale, cette mondialisation des marchés se
manifeste d'abord par
l'intermédiaire de produits alimentaires qui rejoignent la
sensibilité et les besoins du consommateur, des besoins qui sont
très évolutifs. Qu'on se donne la peine d'examiner les tablettes
des supermarchés et la multiplication, par exemple, des marques de
commerce extérieures. Le consommateur est beaucoup plus sensible aux
différences de prix, et l'homogénisation des habitudes de vie et
des goûts d'un pays à l'autre l'amènent à
répondre aux nouvelles initiatives d'où qu'elles viennent: plats
préparés sous vide, découpe individuelle des viandes,
etc.
Ce processus d'internationalisation de la concurrence est d'autant plus
rapide qu'on assiste parallèlement à une libéralisation
générale des échanges à travers le monde. Faut-il
rappeler à ce titre que nous venons d'atteindre le premier anniversaire
de l'Accord de libre-échange que le Canada a signé avec les
États-Unis et cet accord tient compte de cette ouverture des
marchés. Quelle sera la solution à ce nouvel environnement
commercial et à la compétition accrue d'outre-frontière?
Les producteurs canadiens de pizza, par exemple, pourront-ils concurrencer les
produits de pizza américains fabriqués avec du fromage vendu
à meilleur marché là-bas quand ce n'est pas avec des
succédanés? Par ailleurs, les marchés extérieurs
seront d'accès encore plus difficile pour les produits agricoles et
alimentaires québécois avec la concurrence des entreprises
européennes qui, dès 1992, pourront fonctionner à
l'intérieur d'un marché commun de 350 000 000 de consommateurs
sans barrière tarifaire interne et avec une harmonisation progressive
des règles non tarifaires. Et quelle menace laissent planer sur le
système même des plans conjoints les négociations actuelles
du GATT sur l'organisation mondiale du commerce des produits agricoles et
alimentaires? À cet égard, on doit reconnaître que la
position canadienne défendue au GATT reflète presque en tout
point la position adoptée par le gouvernement du Québec, la
position des agriculteurs et des agricultrices du Québec, la position
des transformateurs du Québec. Cependant, jusqu'où la position
canadienne sera-t-elle reçue positivement en entier dans le cadre des
accords du GATT? Nous le saurons d'ici la fin de l'année 1990, ce qui
obligera, je pense, autant les gouvernements des provinces que les intervenants
du Canada à être très vigilants à cet égard
auprès du gouvernement canadien. Encore là, c'est un contrat,
c'est une entente qui est susceptible d'avoir des impacts majeurs sur la mise
en marché des produits dans l'ensemble des pays industrialisés
dont, évidemment, le Canada.
Cette internationalisation des marchés qu'accentue la disparition
progressive des barrières aux échanges entre les pays est dans
une large mesure - et c'est là un second facteur qu'il faut
évoquer - le fait d'entreprises industrielles ou commerciales de grande
taille disposant de moyens humains, techniques et finan- ciers importants, qui
diversifient progressivement leurs activités à l'échelle
mondiale. Ce mouvement de concentration des entreprises est une des
caractéristiques de l'époque qui semble bien universelle et
irréversible. Est-il nécessaire de rappeler les noms d'Unilever,
de Reynolds Nabisco, de Pillsbury, Kraft, General Foods, Beatrice Foods, pour
ne pas mentionner les grandes sociétés canadiennes, Labatt,
Canada Packers, etc.? Or, il faut bien constater qu'à l'égard de
ce mouvement de concentration, les producteurs agricoles
québécois sont défavorisés. Faisons abstraction du
commerce de détail qui, pour l'essentiel, est entre les mains de trots
grandes entreprises québécoises et une autre entreprise
canadienne au Québec. Les plus grandes sociétés
industrielles de propriété québécoise dans le
secteur de l'agro-alimentaire sont bien petites à l'échelle
canadienne, sans qu'on ait à parler de l'échelle
nord-américaine ou mondiale. C'est ce pourquoi, d'ailleurs, on ne peut
que souhaiter l'émergence de ce qu'on qualifie de "majors" dans le
secteur agro-alimentaire québécois. En ce début de la
dernière décade de ce siècle, on sent une volonté
des entreprises québécoises de se regrouper, de mettre en commun
leurs activités ou certaines parties de leurs activités pour
prendre une place plus forte, être mieux outillées et être
mieux équipées pour faire face au défi de la
mondialisation des marchés, mais encore bien d'autres pas devront
être faits dans ce sens-là.
Ce facteur met donc en évidence la grande importance que prend,
pour l'agriculture québécoise, nos entreprises
québécoises les plus agressives et efficaces, ainsi que le
mouvement coopératif agro-alimentaire qui doit pouvoir se restructurer
et se développer pour pouvoir éventuellement agir à armes
égales avec les concurrents étrangers.
Enfin, le troisième facteur, et non nécessairement le
moindre, c'est la vulnérabilité elle-même du système
à l'intérieur du Canada, du fait de sa large dépendance
des politiques agricoles du gouvernement canadien et de la convoitise des
provinces qui se partagent le marché canadien et qui sont chacune
tributaire de ce qui se passe dans les autres. Rappelons-nous la menace
récente qu'a fait courir au système, dans le domaine du lait, la
volonté de la Colombie-Britannique d'élargir sa part des quotas
canadiens et de se retirer purement et simplement de la politique
laitière canadienne. Et quelles sont les provinces qui ne s'estiment pas
lésées lorsque le pourcentage de leurs quotas de lait, de
volailles ou d'oeufs est inférieur au pourcentage de leur population
dans l'ensemble canadien? Si quelques provinces seulement décidaient de
se retirer de l'un ou l'autre de ces arrangements pancanadiens, les
Américains auraient beau jeu de faire tomber toutes les restrictions
à l'importation, qui en sont le prolongement, et le système des
productions
contingentées serait, à ce moment-là, très
très sérieusement mis en danger.
Par-dessus tout, cependant, les positions prises par le gouvernement
canadien dans le processus de révision qu'il a entrepris
récemment de ses politiques agricoles peuvent être lourdes de
conséquence. La très grande majorité des intervenants
d'aujourd'hui étaient présents à Ottawa en décembre
dernier lorsque cette grande conférence pancanadienne s'est tenue les
13, 14 et 15. Mon collègue, ministre délégué
à l'Agriculture, M. Middlemiss, et moi serons d'ailleurs à
Ottawa, à compter de jeudi, pour le suivi de ce dossier-là. C'est
un dossier qui est important et qui aura très certainement des impacts
majeurs dans l'action canadienne en matière agricole pour les prochaines
années. À quoi aboutira donc la volonté du ministre
fédéral de l'Agriculture d'accroître l'efficacité
dans le régime de plans conjoints et de rendre les offices de
producteurs plus flexibles ou plus sensibles aux réalités du
marché? Je pense également à la position qu'il prend dans
les négociations sur l'Accord général sur les tarifs et le
commerce, à l'égard de l'article XI qui protège les
systèmes de plans conjoints nationaux en permettant à un pays de
réglementer l'importation des produits sous gestion d'offre à
l'Intérieur dudit pays. Enfin, comme je l'ai proclamé en de
nombreuses occasions, le système des plans conjoints pourrait beaucoup
plus difficilement subsister à l'échelle canadienne si le
gouvernement fédéral ne maintenait pas avec rigueur, avec force
et avec détermination une politique d'équité envers tous
les producteurs agricoles canadiens de quelque région ou de quelque
secteur qu'ils soient. Si, confronté à une guerre mondiale de
subventions à l'exportation pour les céréales, le
gouvernement canadien apportait une aide massive aux producteurs de l'Ouest
pour diversifier leurs productions à même leurs
céréales largement subventionnées, les élevages
québécois ne pourraient plus être concurrentiels.
Ainsi donc, les changements qui surviennent dans les secteurs de
l'agriculture et de I agro-alimentaire sont susceptibles d'affecter de
façon majeure le système des plans conjoints, même si les
législations sur lesquels il se fonde ne sont pas modifiées. Si
au contraire on estime, comme j'en suis convaincu, que le système est
bénéfique pour les agriculteurs québécois et pour
le Québec dans son ensemble, alors il faut se demander ensemble quelles
mesures nous pouvons prendre pour parer aux dangers qui menacent ces structures
qu'on s'est données depuis un certain nombre d'années.
Le projet de loi que je vous propose aujourd'hui s'articule pour
l'essentiel autour de deux propositions fondamentales. D'abord, compte tenu du
rôle déterminant joué par les transformateurs et les
détaillants, une mise en marché efficace des produits agricoles
implique aujourd'hui que soit considéré, non plus le seul
échelon de la production primaire, mais la totalité de la
chaîne agro-alimentaire, dont les partenaires sont désormais
pleinement solidaires. En second lieu, la protection juridique aux
frontières étant devenue aléatoire devant le
phénomène de la concurrence, qu'elle soit directe, indirecte ou
par l'intermédiaire des produits alimentaires, il faut tout faire ce qui
peut être humainement fait pour améliorer la capacité
concurrentielle de l'agriculture québécoise.
Sur papier, la loi actuelle sur la mise en marché des produits
agricoles a une grande extension. Elle vise à coordonner les diverses
opérations de la mise en marché des produits agricoles qui
doivent être réalisées par les producteurs agricoles,
l'industrie de transformation, le commerce et tous les autres qui sont
engagés dans cette activité. Les acheteurs sont tenus de
négocier avec un office de producteurs agricoles les prix et les autres
modalités de vente des produits. Et leurs associations peuvent
être accréditées dans cette compétence par la
Régie des marchés agricoles. (10 h 30)
En pratique cependant, les intentions exprimées dans l'objet de
la loi ne se traduisent pas toujours clairement en règles d'application
concrètes, sauf pour ce qui concerne l'établissement des plans
conjoints des producteurs agricoles. Il n'est donc point étonnant, par
conséquent, que la plupart des acheteurs, intermédiaires ou
transformateurs, aient perçu le système des plans conjoints - je
dis bien "perçu" - comme l'affaire des seuls producteurs agricoles qui
pouvaient imposer leurs conditions sans égard a la conjoncture ou
à la concurrence dans le marché alimentaire, et qu'ils n'aient
consenti à faire, dans la plupart des cas, que ce que la loi les
obligeait à faire.
Cette négociation, avec ses recours aux mécanismes
d'arbitrage usuels devant un tribunal spécialisé, était
perçue par beaucoup d'industriels et de commerçants comme une
confrontation plus que comme une collaboration entre des partenaires ayant des
intérêts communs. On voyait, d'un côté, des
producteurs dont on pensait que la seule intention était de vendre le
plus cher possible et, de l'autre côté, des acheteurs auxquels on
prêtait la seule volonté de payer le moins cher possible. Le
mécanisme des comités consultatifs n'a pas donné les
résultats attendus, les industriels et les commerçants
considérant, dans une large mesure, y perdre purement et simplement leur
temps.
Or, comme je viens de vous l'exposer, les intérêts de l'un
et l'autre groupe ne peuvent plus être perçus comme
contradictoires, ils sont convergents ces intérêts. C'est cette
évolution qu'il faut reconnaître et transposer, cependant, dans
les structures, dans la loi autant que dans les faits. C'est pourquoi cette
nouvelle législation prévoit la possibilité de la mise sur
pied, par
chacun des secteurs de l'agro-alimentaire, à la suite d'une
décision de chacun des principaux groupes impliqués, de "chambres
de coordination et de développement". Il pourrait, dans notre esprit,
éventuellement exister des chambres pour chacun des grands secteurs de
l'industrie agro-alimentaire. À titre d'exemple, la chambre de
coordination et de développement du lait, la chambre de coordination et
de développement de l'aviculture... Ces chambres seraient
composées essentiellement de producteurs agricoles, de transformateurs,
de grossistes et de détaillants et même, éventuellement
aussi, de consommateurs. Ses membres seraient désignés par les
offices de producteurs et les associations représentatives
d'intermédiaires, d'acheteurs, d'industriels, de grossistes et de
détaillants, dans des proportions à convenir entre eux et pour
atteindre les objectifs qu'ils déterminent ensemble. Les chambres ne
seraient crées qu'après audiences et décision de la
Régie des marchés agricoles qui jugerait de l'opportunité
de leurs pouvoirs en fonction des consensus exprimés par le milieu
lui-même.
Même si la loi doit prévoir l'extension ultime de leurs
responsabilités éventuelles, ces organismes de coordination
interprofessionnelle pour la défense ou la promotion des
intérêts généraux pourraient avoir des mandats
très variables. Ceux-ci pourraient aller, selon le consensus du milieu,
d'un simple mécanisme de consultation des membres, les uns avec les
autres, à une véritable stratégie de développement.
Ici, je dois vous le dire, c'est ce qu'on recherche. On a comme objectif que
ces gens puissent véritablement s'asseoir ensemble autour d'une table et
construire, mettre en place les mécanismes, les façons de faire.
Ça pourrait aller même jusqu'à la façon de produire,
dans certains types de productions, aux mécanismes à
établir pour développer de nouveaux marchés, aux
mécanismes à établir pour augmenter l'efficience et la
productivité. Et je dois vous dire qu'en ce qui me concerne, parce que
j'ai personnellement, ça va de soi, été intimement
associé à cette loi, je porte beaucoup de confiance d'ailleurs
à ce chapitre de la loi qui prévoit la mise en place,
c'est-à-dire l'offre aux gens de l'industrie de mécanismes leur
permettant d'établir une véritable stratégie de
développement et un plan d'action dont les éléments, par
exemple, pourraient aller des caractéristiques de la production agricole
jusqu'au type de transformation à privilégier, à un
programme de publicité commun ou à des recherches
génétiques efficaces, ou même au développement de
marques de commerce et à l'exportation de produits particuliers . sur
des marchés spéciaux. La gamme des fonctions est définie.
Tout cela dépendrait de la maturité des groupes et des avantages
respectifs que les parties verraient à négocier. Qu'est-ce que
représenterait, pour les entreprises d'abattage ou d'apprêt de
volailles, par exemple, une conven- tion triennale ferme d'approvisionnement de
la part des producteurs avicoles, à des conditions
prédéterminées.
Il se peut très bien qu'il y ait intérêt à ce
que les chambres n'aient au départ que des responsabilités
limitées au règlement de problèmes très pressants,
comme celui de la défense d'une filière contre une menace
américaine d'imposition de droits compensatoires contre des produits
exportés dans ce pays. On peut s'attendre également à ce
que les incohérences dans les décisions d'un échelon
à l'autre d'une filière dans une recherche de
compétitivité de l'ensemble soient au coeur des
préoccupations des participants. Il y aurait là, somme toute, un
forum où les intéressés seraient institutionnelle-ment en
contact, positivement condamnés à travailler ensemble pour le
bien de l'économie agricole.
Les discussions des chambres pourraient ensuite progressivement porter,
par exemple, sur l'accroissement de la qualité des produits
fabriqués au Québec ou sur la diffusion d'information aux
consommateurs. À une étape ultérieure, on pourrait penser
établir, pour l'ensemble de la filière, des normes de production
et d'emballage ou mettre en commun ses ressources pour développer les
techniques de production ou de transformation. On peut voir ensemble si des
initiatives d'exportation ne seraient pas possibles avec un effort promotionnel
à chacun des échelons de la filière. Les études de
développement de marché et l'harmonisation des calendriers de
production en fonction de la demande requièrent déjà une
plus grande habitude de travailler ensemble. Le ministre de l'Agriculture du
Québec le vit régulièrement, par exemple, dans le dossier
du poulet. On le voit régulièrement. Tous les intervenants qui
sont familiers avec cette production sont conscients qu'on a des
problèmes, entre autres, de garantie d'approvisionnement sur le
marché frais pour certains marchés de restauration.
Or, les circonstances font que, lorsque la demande est très
grande en période de pointe - par exemple, la fête des
Mères, c'est la journée au Québec où il se consomme
le plus de poulet - on a de la difficulté à fournir le
marché. Je ne peux pas comprendre, comme ministre de l'Agriculture du
Québec, qu'on ait de la difficulté, alors qu'on a 32 % des quotas
au Canada, à fournir le marché frais dans le poulet dans la
période des fêtes. Ce sont les enjeux qui nous guettent, la
maturité que devraient refléter nos interventions. On devra
régler des problèmes comme ceux-là, confrontés
à des problèmes beaucoup plus graves, comme nous le sommes, avec
cette internationalisation des marchés.
En somme, la législation concernant la mise en marché des
produits agricoles mettrait à la disposition des
intéressés, d'abord, un système de plans conjoints des
producteurs agricoles, administré par des offices de producteurs
agri-
coles et, en second lieu, un système d'ententes
interprofessionnelles de marché administré par des chambres de
coordination et de développement regroupant tous les intervenants d'une
môme filière ou d'une môme profession.
Le rôle de la régie serait, dans ces
conditions, substantiellement élargi, et c'est pourquoi elle devrait
être désignée à partir de ce moment sous le nom de
Régie des marchés agricoles et alimentaires. Sa mission de
protection de l'intérêt public prendrait alors une importance
d'autant plus grande.
La mise en place des chambres de coordination et de
développement par filières constitue la première
idée maîtresse de la révision de la Loi sur la mise en
marché des produits agricoles. Cette nouvelle étape dans
l'organisation de la mise en marché ne pourra se réaliser
cependant que si un changement d'attitude survient entre vendeurs et acheteurs,
aussi que si un climat de confiance mutuelle s'établit entre eux. La loi
elle-même ne peut pas forcer les gens à modifier leurs attitudes.
Tout au plus peut-elle clarifier les rôles et les fonctions de chacun de
façon qu'il n'y ait ni empiétement ni menace
d'em-piètement de l'un sur l'autre. En bref, la règle pour
éviter les conflits, c'est qu'on ne peut pas être
simultanément, d'une part, le vendeur et, d'autre part, l'un des
acheteurs. C'est la raison pour laquelle la loi enlèvera à toute
entreprise qui achète, prend en consignation ou transforme des produits
agricoles tout droit à gérer un plan conjoint. Elle interdira de
la même manière aux administrateurs d'un plan conjoint de
siéger également au conseil d'administration d'une entreprise
engagée dans le commerce du produit visé par le plan et qui
pourrait les placer en situation de conflit d'intérêts.
La seconde idée maîtresse qui a
présidé à la révision de la loi est la
volonté d'améliorer le fonctionnement même du
système des plans conjoints pour qu'il favorise une plus grande
compétitivité des firmes québécoises par rapport
à celles du Canada ou de l'étranger. Cette détermination
d'accroître notre capacité concurrentielle a entraîné
plusieurs amendements qui ensemble peuvent stimuler en ce sens les dirigeants
des offices. Ainsi, les offices devront passer au moins tous les cinq ans par
un processus public d'examen de leurs activités et du bien-fondé
du maintien du plan et de chacun de ses règlements.
C'est ainsi qu'on devra au moins périodiquement se
demander si tel ou tel règlement des offices ne limite pas la
productivité optimale des fermes ou encore le développement de
nouveaux débouchés. Par ailleurs, l'appropriation de quotas par
des non-producteurs peut être une des causes pour lesquelles le prix des
quotas serait trop élevé. Si tel était le cas, la
consolidation des fermes coûtera plus cher et les exploitations auront
conséquemment tendance à être moins performantes. Il
apparaît normal qu'à l'avenir, les producteurs agricoles puissent
seuls acquérir les quotas de production.
Par ailleurs, il est certain que la régie pourrait
disposer de pouvoirs plus souples, qui lui permettraient, par exemple,
d'obliger un office à justifier l'extension de certains de ses pouvoirs
- telle la création d'une agence de ventes - plutôt que de voir
tous les pouvoirs des offices leur être attribués par la loi au
moment de leur création. De plus, les précisions apportées
quant à la composition et aux pouvoirs de la Régie, ne peuvent
qu'accroître son efficacité et encore mieux préciser son
rôle quasi judiciaire.
Enfin, plusieurs amendements visent à
améliorer le fonctionnement des offices eux-mêmes, dont le
financement pourra être mieux organisé et plus souple, sur la base
du volume produit ou de la superficie ensemencée ou du nombre de
contenants utiisés, etc. Différentes mesures ou différents
termes de référence peuvent être utiles. La discipline sera
plus rigoureuse si l'office dispose de pouvoirs d'enquête et de
vérification auprès des producteurs agricoles pour l'application
des règlements et si les amendes pour infractions tiennent compte des
fruits illicites retirés par le contrevenant. Enfin, plusieurs
précisions sont apportées aux pouvoirs et fonctions
déjà prévus à la loi pour les offices de
producteurs, afin de les adapter aux circonstances nouvelles.
M. le Président, ce sont les commentaires
généraux que je voulais faire avant que débute le travail
de cette commission parlementaire. Avant, cependant, je voudrais profiter de
cette opportunité que j'ai ce matin pour, dans un premier temps, saluer
et rendre hommage à tous ceux et celles qui, au cours de ces
années, ont été associés, soit à
l'élaboration de la Loi sur la mise en marché des produits
agricoles, ceux qui lui ont donné son ossature, c'est-à-dire
celles et ceux qui ont travaillé dans cette Régie qui est
régulièrement critiquée, parce que, quand on s'y
présente, on n'en sort pas toujours gagnant. Mais, fondamentalement, on
doit retenir, après autant d'années, que cette loi et ceux et
celles qui l'ont mise en oeuvre auront contribué de façon plus
qu'éminemment importante - selon moi, de façon essentielle -
à la stabilité de l'agriculture et de l'agro-alimentaire au
Québec.
De plus, tel que je l'indiquais à la fin de
décembre dernier, je le réitérais encore en janvier
auprès des industriels et des producteurs d'un secteur qui est, lui
aussi, important au Québec, le secteur des pêcheries, tel que je
l'indiquais à ce moment-là, M. le Président, après
la deuxième lecture, j'ai l'intention de déposer toute une
série de modifications, en fait, surtout plus des ajouts que des
modifications au présent projet de loi, pour qu'on puisse mettre en
place un mécanisme analogue à celui ou à ceux qui existent
dans la loi actuelle modifiée par le projet de loi, et qui concernerait
plus spéci-
fiquement le secteur des produits marins et le secteur des pêches
au Québec. L'objectif qui m'anime, c'est de fournir autant aux
pêcheurs qu'aux industriels, qu'aux transformateurs de produits marins au
Québec, les mêmes outils, les mêmes clés pour ouvrir
des portes ou se donner des mécanismes garantissant une meilleure mise
en marché ou une mise en marché plus efficace de leurs
produits.
Alors, je souhaite donc que l'esprit qui a présidé
à l'élaboration de ce projet de législation soit le guide
des interventions, de tous ceux qui participeront à ces discussions,
à savoir la recherche de la concertation et celle de la
productivité qui permettront à l'agriculture et à I
agro-alimentaire québécois de prendre une part de plus en plus
grandissante des marchés du Canada et, somme toute, que
l'agro-alimentaire québécois soit mieux outillé, mieux
équipé pour faire face aux défis de l'internationalisation
des marchés, des défis qui sont audacieux, des défis qui
sont grands, mais à partir du savoir-faire du Québec, de notre
expérience et de notre confiance dans nos moyens, je suis convaincu que,
même si ces défis sont grands et audacieux, ils sont
réalisables. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): merci, m. le ministre.
maintenant, je cède la parole au porte-parole officiel de l'opposition
et député d'ar-thabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président, l'Opposition est
toute disposée à prêter son ' concours pour donner au
milieu agro-alimentaire une loi qui répondra à ses besoins, nous
l'espérons, et aidera à développer l'industrie
agro-alimentaire au Québec.
L'importance de cette loi nous est démontrée par les
nombreux mémoires présentés par différentes
fédérations, organismes tant coopératifs que privés
et autres. Je remercie tous ceux et celles qui ont bien voulu se donner du
temps pour nous présenter leurs préoccupations. Donc, cette
consultation se tient au moment même où persiste un litige
sérieux dans le secteur du lait. (10 h 45)
Ce litige entre la Fédération des producteurs de lait,
organisme responsable notamment de l'administration du plan conjoint
créé en vertu de la Loi sur la mise en marché des produits
agricoles, et les coopératives laitières risque, s'il n'est pas
réglé rapidement à la satisfaction de toutes les parties,
de causer des torts irréparables à l'ensemble de l'industrie
laitière québécoise.
L'absence de leadership aura été le fait marquant de
l'évolution de ce conflit actuellement devant les tribunaux. Les
jugements que ces derniers rendront permettront sans doute de donner un
éclairage nouveau sur la nature du conflit, mais nous devons être
réalistes et reconnaître que les décisions des tribunaux ne
régleront pas le problème définitivement. Au contraire,
elles pourraient l'amplifier et accentuer les clivages entre les parties,
d'où la nécessité de rechercher des solutions politiques
basées sur des consensus solides, susceptibles de solutionner le
problème dans une perspective à long terme. Ces consensus ne
seront atteints que par l'exercice d'un leadership fort, mais qui fait
actuellement défaut.
La mise en marché des produits agricoles et alimentaires est un
élément fondamental de l'agriculture québécoise.
Elle constitue un maillon essentiel entre le producteur et le consommateur.
À l'heure du libre-échange, du phénomène de la
mondialisation des marchés, elle prend une signification d'une
importance capitale. La libéralisation des échanges et les
profondes mutations qui s'opèrent sur les marchés internationaux
représentent le défi majeur de la révision de la loi sur
la mise en marché des produits agricoles et alimentaires. Qu'on ne s'y
trompe pas. Nos querelles paroissiales seront vite derrière nous si nous
n'arrivons pas à saisir les véritables enjeux des années
qui sont devant nous.
Les mémoires qui ont été déposés
à la commission insistent énormément sur l'article 2 du
projet de loi 15. Et, un peu à ma surprise, si on n'avait pas
vécu ou si on ne vivait pas ce conflit actuellement, si on peut dire
ainsi, au niveau du lait, il y a plusieurs mémoires qui auraient
peut-être été beaucoup moins volumineux qu'ils ne le sont
présentement. Et ce n'est pas parce que je veux contourner le
problème, mais c'est un petit peu regrettable parce que la loi sur la
mise en marché a une importance capitale, comme je l'ai dit tout
à l'heure, et touche l'ensemble des productions agricoles
québécoises, et pas seulement celle de la production
laitière. Mais l'importance que les organismes ont voulu donner au
conflit actuel démontre clairement qu'il y a une large place pour
clarifier ou pour améliorer cette loi. Peu de références
sont faites à l'égard de l'évolution du commerce
international dans les mémoires qui nous ont été
présentés. Pourtant, il y a moins de deux ans, le secteur
agricole était plongé dans une lutte féroce contre
l'Accord de libre-échange avec les États-Unis. Et il y a à
peine trois mois, le monde agricole québécois manifestait en
masse sur la colline parlementaire à Ottawa pour protester contre la
position du Canada aux négociations du GATT. Aujourd'hui, l'Accord de
libre-échange est en vigueur depuis plus d'un an et les
négociations du GATT sont dans une phase décisive et toujours
incertaine. Comment pouvons-nous donc escamoter ces enjeux dans le cadre du
débat sur la mise en marché des produits agricoles et
alimentaires, quand, il y a à peine quelque temps, ces enjeux
mobilisaient le monde agricole?
De notre côté de la Chambre, nous sommes
persuadés qu'il faut regarder la mise en marché des produits
agricoles et alimentaires avec les yeux de l'avenir. Nous sommes un peu surpris
que le gouvernement actuel, dont le slogan en 1965 était
"Maîtriser l'avenir et dont celui de 1989 était "Assurer
l'avenir", ait aussi vite laissé de côté ses propres
maîtres mots et qu'il nous propose un projet de loi sur la mise en
marché des produits agricoles et alimentaires qui, à peu de
choses près, nous en conviendrons, est une copie conforme de la loi
actuelle, dont la demfère révision d'importance date de 1974.
Dans le contexte commercial actuel et dans celui qui se
dessine pour les années à venir, nous souhaitons vivement que les
groupes qui viendront nous rencontrer nous transmettent leurs
préoccupations à cet égard puisque cette commission fait
partie du processus de préparation d'une nouvelle loi sur la mise en
marché des produits agricoles et alimentaires. De nombreuses questions
demeurent à l'ordre du jour. Par exemple, les plans conjoints tels que
nous les avons connus dans le passé sont-ils adéquats dans un
contexte de libre-échange? Pourront-ils répondre aux besoins des
producteurs, des transformateurs, des consommateurs, avec la
libéralisation des règles du commerce international? Quel
rôle et quelles responsabilités doit-on confier à nos
offices et organismes gouvernementaux chargés de faire appliquer les
lois dans un contexte de libéralisation des échanges? Quelles
règles doit-on établir au niveau de la qualité, du
contrôle et de la surveillance des produits alimentaires et de leurs
succédanés pour assurer le meilleur produit possible aux
consommateurs? Voilà des questions fondamentales qui devront être
examinées par les membres de cette commission dans le cadre de cette
consultation sur le projet de loi 15.
Nous sommes conscients que l'article 2 du projet de loi
constitue une préoccupation majeure pour plusieurs intervenants qui
viendront témoigner devant cette commission. Nous souhaitons seulement
qu'il ne monopolise pas tout le débat car nous considérons que
d'autres questions doivent aussi être discutées concernant la
révision de cette loi. Quant à nous, nous considérons que
l'article 2 du projet de loi 15 doit être examiné dans le contexte
que nous avons décrit auparavant, c'est-à-dire l'existence de
l'Accord de libre-échange avec les États-Unis et la
libéralisation du commerce international dans le cadre des
négociations du GATT. Il n'est pas évident qu'un tel article
puisse servir l'intérêt de l'ensemble de l'industrie agricole, y
compris celui des coopératives elles-mêmes.
Il faudra également étudier cet article en
fonction des dispositions de la loi des coopératives. Cette loi
définit le lien entre le membre et sa coopérative. Il faut donc
s'interroger sur la pertinence de maintenir une disposition de cette nature
dans la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et
alimentaires. Ne doit-il pas exister un équilibre entre la loi des
coopératives et celle de la mise en marché des produits agricoles
et alimentaires? Nous devons clairement établir s'il n'est pas plus
approprié d'assurer le développement des coopératives en
fonction de la loi sur les coopératives agricoles.
D'autre part, il faut aussi s'interroger sur la valeur
juridique d'une telle disposition. Les tribunaux n'ont pas eu à se
prononcer très souvent sur cet article. Deux cas nous ont
été soulignés depuis 1954, c'est-à-dire depuis
l'adoption pour la première fois de cette disposition. Serait-ce que les
coopératives entretiennent également des doutes sur sa valeur
juridique et qu'elles hésitent à s'en servir? Et, malgré
les interventions des tribunaux, la portée de l'article 3 de la loi
actuelle, repris à l'article 2 du projet de loi 15, n'est pas
établie clairement. Quel est l'intérêt de maintenir un
article dont la portée est incertaine, mais dont la présence est
suffisante pour créer une situation confuse dans l'industrie? La Loi sur
la mise en marché des produits agricoles accorde aux offices de
producteurs les pouvoirs d'administrer un plan conjoint, donc de signer des
ententes ou des conventions, et, en même temps, cette même loi dit
que son application ne doit pas nuire au développement des
coopératives. Donc, il y a éclaircissement à avoir dans
cette loi, une clarification.
En effet, la seule présence de l'article 2 suscite
la crainte et la méfiance du secteur privé qui n'est pas, non
plus, assuré de la véritable portée de l'article. Pourquoi
donc maintenir une situation aussi confuse et trouble qui ne sert les
intérêts de personne? Les protections législatives abusives
constituent souvent des obstacles majeurs pour le développement des
industries, y compris pour ceux et celles à qui ces protections
s'adressent.
Les coopératives agricoles sont trop importantes
pour le développement de l'agriculture du Québec pour ne pas
s'interroger sur les effets qu'a pu avoir l'article 3 de la loi actuelle, qui
est devenu l'article 2 du projet de loi 15, sur leur développement. Nous
sommes inquiets des différences dans la répartition des ventes de
lait selon les classes entre les coopératives et les entreprises
privées. Comment doit-on expliquer, par exemple, la concentration de la
production des produits de classe 5 chez les coopératives? Nous
craignons, en particulier, les conséquences d'une telle situation pour
le développement de l'agriculture régionale puisque les
coopératives sont fortement implantées dans les
régions.
Les coopératives sont essentielles à
l'agriculture du Québec. Leur nature même les protège des
prises de contrôle de la part des étrangers et, à l'heure
justement de la mondialisation des marchés, il s'agit là d'un
atout considérable, non seulement pour l'agriculture
québécoise, mais aussi pour l'ensemble de l'économie du
Québec. Les compagnies américaines peuvent toujours
venir acheter des compagnies privées, acheter nos marchés,
mais peuvent difficilement acheter nos coopératives.
Le mouvement coopératif québécois a
démontré qu'il était capable d'affronter et de
concurrencer avec succès la libre entreprise sur son propre terrain,
lorsque cela était nécessaire. Le mouvement Desjardins l'a
démontré, dans le domaine des institutions financières.
Les caisses populaires Desjardins ont commencé leurs activités
dans des sous-sols d'églises alors que les banques et les autres
institutions financières étaient déjà bien
implantées au Québec. Encore aujourd'hui, l'épargnant
québécois choisit la caisse populaire plutôt qu'une autre
institution financière, parce qu'il y trouve son intérêt,
tout cela, sans que les lois régissant les institutions
financières ne comportent de dispositions semblables à l'article
3 de la Loi actuelle sur la mise en marché des produits agricoles. De la
même façon, le producteur agricole choisira le mouvement
coopératif et y sera actif si cela s'avère profitable et
avantageux pour lui. C'est pourquoi le ministre devra examiner
sérieusement le retrait ou la clarification de la portée de
l'article 2 de son projet de loi. Les coopératives agricoles sont
capables d'opérer dans un milieu compétitif et les règles
du jeu sont les mêmes pour tous. Elles doivent être en mesure de
s'adapter à l'évolution constante des marchés. Il en va de
leur avenir et de celui de leurs membres.
Au Québec, la libre entreprise maintient un dynamisme connu. Nous
sommes assuré qu'il y a place pour les deux groupes d'industries,
privées et coopératives, mais il ne faut pas qu'une loi prive le
développement des unes envers les autres et surtout, peut-être
même, nuire aux deux.
Je m'arrêterai ainsi, M. le Président, car l'objet de la
commission est d'entendre les intervenants, et non l'inverse. Comme il y a
toujours plus à apprendre à écouter qu'à parler,
nous serions prêts, nous, à procéder à
l'étude des mémoires.
Auditions
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Arthabaska. Maintenant, concernant l'organisation des
travaux, c'est un bloc, en fait, de deux heures et les groupes suivants seront
entendus à tour de rôle - et je pense que vous en avez convenu
entre vous et que M. le secrétaire a vérifié tout à
l'heure - l'Union des producteurs agricoles, la Fédération des
producteurs de bois du Québec, la Fédération des
producteurs de culture commerciale du Québec et le Syndicat des
producteurs de bois du Bas-Saint-Laurent... Alors, je crois que vous avez des
porte-parole et que nous débutons par le représentant de l'Union
des producteurs agricoles, M. Jacques Proulx, président
général.
Alors, les quatre organismes, vous avez un maximum de 40 minutes pour
les présentations de vos mémoires. Je vous souhaite la bienvenue,
messieurs. M. Proulx, vous connaissez la mécanique, je pense, de nos
commissions.
M. Proulx (Jacques): Oui, merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Je voulais prendre un peu
d'alun et de chlore et je vous donne la parole.
Union des producteurs agricoles
M. Proulx: Merci bien. Alors, M. le Président, M. le
ministre, madame, messieurs les représentants de cette commission, il
nous fait plaisir de se présenter devant vous pour pouvoir discuter
pendant un certain temps de ce projet de loi qui est déposé
à l'heure actuelle. Je voudrais, dans un premier temps peut-être,
vous présenter les gens qui sont avec moi. Me Marcel Trudeau et M.
Laurent Pellerin, producteur, membre de l'exécutif de l'UPA, et M. Denis
Brassard, qui est responsable de la mise en marché. À ma suite,
viendront compléter notre mémoire, les différentes
productions, comme vous venez de le dire, du bois, des céréales
et une fédération régionale de producteurs de bois. (11
heures)
Je me limiterai à faire un résumé de la
présentation pour en arriver le plus vite possible aux différents
points qu'on veut soulever devant vous, qui nous sont présentés
dans le projet de loi. Je fais rapidement le tour des points saillants qu'on a
voulu introduire dans ça. Il est très important pour le
Québec de consolider. Je pense que l'initiative qui est prise à
l'heure actuelle de pouvoir consolider une loi sur la mise en marché qui
a donné des résultats très intéressants
jusqu'à aujourd'hui... Mais je pense, comme l'ont souligné le
ministre et l'Opposition dans leur introduction, qu'il est important de
l'adapter le mieux possible pour faire face aux nouveaux défis.
Nous représentons aujourd'hui l'ensemble des producteurs et des
productrices du Québec, des productions aussi, quoique certaines vont
venir compléter jusqu'à un certain point, sauf la
Fédération de l'UPA de Sherbrooke qui présentera son
mémoire comme prévu cet après-midi.
On va souligner très fortement dans ça l'importance de
conserver les moyens d'être efficace sans regroupement physique. Petite
unité de production, basée sur la ferme familiale et très
préoccupée par l'importance d'occuper le territoire agricole,
tout en se concentrant sur l'offre de notre produit, ce qui veut dire une
régularité d'approvisionnement, comme dans le passé, une
meilleure qualité, une meilleure gestion de l'offre, des prix qui nous
permettent d'en vivre décemment et un transfert de l'ef-
ficacité aux consommateurs.
Une agriculture aussi, je pense que les preuves sont là, qui a
été beaucoup moins subventionnée que toutes les sortes
d'agriculture, non seulement au Canada, mais un peu partout dans le monde, et
ça c'est grâce, surtout, à une loi de mise en marché
qui nous permettait de faire des choses et surtout nous permettait de
négocier, d'égal à égal, avec des partenaires ou
avec des conjoints. Besoin de réformer la loi, comme vous le disiez, et
on va le souligner à plusieurs occasions, H était urgent, je
pense, de réformer cette loi qui avait fait ses preuves, qui continue
quand même à faire des choses, mais qui a un besoin d'être
plus que dépoussiérée, c'est-à-dire d'être
ajustée justement aux nouveaux défis qu'on a à relever,
particulièrement face aux grands bouleversements qui se produisent et
qui vont se produire en cette fin de siècle, si on veut, et pouvoir bien
se préparer pour le prochain millénaire. Ça nous prend une
loi qui va être beaucoup plus claire, qui va permettre d'être
beaucoup plus efficace et qui va être mieux adaptée aux
réalités et aux nouveaux défis, comme je viens de le
dire.
Il y a eu, au cours des dernières années, certaines
améliorations apportées. Je voudrais souligner la question de
garantie de paiement, qui était loin d'être à notre
satisfaction, mais qui est quand même une initiative qui permet de
développer la responsabilité des différents partenaires
dans l'agro-alimentaire et particulièrement dans la transformation.
Toutefois, comme vous vous en doutez, la loi, telle que présentée
à l'heure actuelle, est, sur certains aspects, négative, et on
considère, dans le cas de certains articles, qu'elle causerait plus de
problèmes que de correctifs, qu'elle annulerait, par le fait même,
certains aspects positifs.
Des amendements s'imposent. Comme je viens de le dire, tout n'est pas
parfait dans ce projet de loi, loin de là. En fait, s'il devait
être adopté sans modification, il marquerait, à notre avis,
un recul plutôt qu'une amélioration, quand on fait la somme des
deux. Et il faudrait, bien sûr, s'attendre à une réaction
très vive de la part de ceux et celles que nous représentons.
Pour être acceptable, pour bien répondre aux immenses
espoirs qu'il suscite, un bon nombre de modifications devront y être
apportées. La plupart sont plutôt mineures, d'ordre purement
technique ou rédactionnel. Nous n'avons pas cru bon de vous en faire une
fastidieuse enumeration, mais nous les transmettrons, bien sûr, aux
autorités concernées avec bon espoir qu'elles s'empresseront d'y
donner suite. D'autres sont beaucoup plus fondamentales, et il nous
apparaît essentiel d'en discuter brièvement avec vous.
Les plans conjoints et la coopération. Je pense qu'il vaut mieux
l'attaquer tout de suite au départ, c'est une question délicate,
c'est évident, celle de nos relations avec notre partenaire de toujours,
la coopération agricole, cet organisme qui a grandi et qui a une
proportion très intéressante aujourd'hui, que nous avons
d'ailleurs, comme producteurs et productrices, activement contribué
à ériger tout au long de notre histoire. Je pense que ce n'est
pas à vous que je dois rappeler que ce sont absolument les mêmes
gens qui sont des syndicalistes et qui sont des coopé-rateurs.
Pendant longtemps, jusqu'à la toute dernière minute, je
dirai, nous avons vivement souhaité, et en toute bonne foi, que nous
parviendrions, finalement, à nous entendre, nous qui
représentons, comme je viens de le dire, les mêmes gens, les
mêmes intérêts. Après des années d'efforts
généralement soutenus, malgré les progrès
réalisés dans certains secteurs, il nous faut aujourd'hui nous
rendre à l'évidence et tirer les conclusions qui s'imposent:
l'entente et l'harmonie ne seront jamais possibles, tant et aussi longtemps que
la coopération pourra s'abriter sous le régime spécial que
la loi lui accorde, le fameux article 2 notamment, et surtout au nom duquel
elle revendique trop souvent des choses qui, à notre avis, nous
paraissent artificielles ou superflues. Revendications qui auraient pour effet,
si elles étaient retenues, de vider plusieurs plans conjoints d'à
peu près tout sens véritable.
Il faut pourtant, je pense que c'est évident, profiter de
l'occasion du réaménagement de la loi sur la mise en
marché pour corriger la situation une fois pour toutes et
éliminer une bonne partie des arguments qui causent les querelles
stériles qu'on subit à l'heure actuelle. Il faut surtout
éliminer cet article-là pour la raison que, très rarement,
il a été utilisé, mais qu'on l'a laissé suspendu
tellement souvent au-dessus de la tête des gens. Ça n'a servi, en
fait, qu'à enrichir certaines catégories d'avocats, et c'est leur
métier, je ne leur reproche pas. Je pense que, s'ils avaient à se
prononcer, ils seraient pour qu'il reste, mais, pour nous, c'est toujours la
même poche qui paie; quand il n'en reste plus dans une, on essaie d'en
trouver dans l'autre, et je pense que c'est malheureux. Monétairement,
c'est très coûteux, physiquement, intellectuellement, et ça
amène à mettre de côté de trouver des solutions les
plus potables pour apporter les correctifs qui s'imposent.
Dans l'intérêt de tout le monde, pour permettre à
l'un ou à l'autre de mieux faire face aux défis qui les
attendent, le gouvernement doit, cette fois, prendre ses responsabilités
et trancher définitivement. Le projet de loi va déjà dans
la bonne direction en supprimant la référence au caractère
supplétif des plans conjoints et en abolissant la priorité qui
était accordée aux coopératives pour administrer ce qu'on
appelle, dans notre jargon, une agence de vente. Il faut aller plus loin et
faire disparaître tout statut particulier réservé aux
coopératives. C'est ainsi seulement que nous croyons que nous pourrons
finalement mettre ensemble l'épaule à la
roue, au grand bénéfice de ceux et celles que nous
représentons. Et il ne faudrait surtout pas craindre pour l'avenir de la
coopération agricole. Nous avons toujours cru et nous continuons
à croire en cette formule et aux avantages qu'elle peut procurer
à ses membres. Les coopératives agricoles trouveront, et je pense
qu'elles le savent, toujours chez nous une oreille attentive et nous les
assurons de notre collaboration, comme organismes agricoles, pour tout projet
utile et à l'avantage des producteurs et des productrices agricoles.
J'aimerais peut-être faire une petite parenthèse à
ce moment-ci et vous dire que, pour certains d'entre vous, vous vous souvenez,
en 1969, quand on a mis en place un certain nombre de pouvoirs des plans
conjoints, il y a eu une levée de boucliers, particulièrement de
la part des coopératives qui disaient que c'était la fin, en
fait, avec ces pouvoirs-là, des coopératives. Je voudrais vous
rappeler qu'on 1969, par exemple, dans la production laitière, parce que
c'était la première production où on appliquait d'une
façon assez significative ces pouvoirs-là, la coopération
contrôlait moins de 40 % de la transformation du lait, tandis
qu'aujourd'hui, avec justement la mise en place et l'opération des plans
conjoints, nous donnant davantage de pouvoirs, elle contrôle 70 %. Ces
exemples juridiques ne reflètent, à mon avis, que... Parce qu'il
y a d'autres exemples qu'on pourrait souligner et qui ont causé des
problèmes majeurs. J'aimerais rajouter aussi que l'exemple des 40 % et
70 % est évident, mais on regarde de quelle façon a
progressé la transformation particulièrement par les
coopératives, mais je pense que c'est justement parce que les
producteurs ont eu la capacité, les moyens de s'organiser pour
régulariser l'approvisionnement, pour, par le fait même, offrir
une meilleure qualité, et je pense que quand on dit
régularité et qualité, ça donne une
sécurité aux entreprises de pouvoir investir davantage et d'en
arriver à donner les résultats qu'on compte, de prendre de
l'expansion et d'être capables de faire face aux défis auxquels on
a à faire face.
D'ailleurs, je suis persuadé qu'autant le ministre d'aujourd'hui
que les ministres antérieurement ont eu à intervenir quelquefois
pour essayer de rétablir un certain équilibre et de bien faire
comprendre à certaines personnes l'importance que les organismes aient
chacun un travail et se respectent dans ce travail à accomplir.
Dans un autre ordre d'idées, avant de clore cette question, si le
syndicaliste agricole ne s'objecte pas, en théorie du moins, à ce
que les coopératives puissent se voir confier l'administration d'un plan
conjoint, il doit être clair dans le projet de loi 15, qui nous semble
ambigu sur ce point, que les coopératives seront alors traitées
comme tout autre office de producteurs, avec les mêmes pouvoirs et les
mêmes restric- tions.
Les plans conjoints et les affaires. Le syndicalisme agricole a de tout
temps cru que l'action collective des producteurs et des productrices, par les
plans conjoints qu'ils et qu'elles se sont donnés, notamment et surtout
devrait leur permettre d'intervenir si besoin est à toutes les
étapes qui mènent de la terre à la table ou à
l'établi. Or, le projet de loi qui nous est présenté, par
ses articles 39 et 106 principalement, voudrait que cette action s'arrête
dorénavant à l'usine. Interdiction de s'engager dans la
transformation, interdiction de faire du commerce, interdiction de participer
de quelque façon que ce soit au financement de telles entreprises. De
telles propositions sont complètement inacceptables. Nous ne comprenons
absolument pas ce qui pourrait les justifier et elles nous ramèneraient
tout droit bien loin en arrière.
Au coeur de notre histoire, il y a un souci constant de donner aux
agriculteurs et aux agricultrices les outils qu'il leur faut, les meilleurs
outils possible. Et c'est cette volonté qui nous a amenés
à revendiquer et à obtenir des législations
maîtresses comme celle que nous étudions. C'est cette
volonté qui nous a amenés à créer une multitude de
coopératives, non seulement des coopératives agricoles, mais
aussi des caisses d'épargne et de crédit, des mutuelles
d'assurance, et le reste. C'est cette même volonté qui nous a
amenés à développer une gamme de services techniques
offerts par nos fédérations. Cette volonté demeure
toujours au coeur de notre action quotidienne, et elle s'est surtout traduite
au cours des dernières années par des projets collectifs de mise
en marché.
Assez curieusement, c'était pourtant le moyen idéal pour
ce faire, les plans conjoints ont jusqu'à date été assez
peu utilisés en ce domaine. Il faut dire que leur histoire est encore
toute jeune, que les besoins n'étaient peut-être pas ce qu'ils
sont et qu'il fallait bien sûr aller au plus pressant. Il nous
apparaît toutefois essentiel qu'ils conservent tous ces pouvoirs.
Pourquoi tient-on tellement à garder ces pouvoirs? Certainement
pas pour pouvoir, par simple plaisir, faire concurrence aux entreprises en
place, celles du type coopératif surtout. Si on y tient tant, c'est
d'abord pour pouvoir au besoin mesurer l'efficacité réelle de ces
entreprises, d'un point de vue économique surtout. Si on y tient tant,
c'est aussi et surtout pour pouvoir, seuls ou en collaboration avec d'autres
partenaires, tenter des expériences pilotes ou pallier aux graves
insuffisances qu'engendre parfois une économie de libre marché
obéissant au seul impératif d'une rentabilité à
courte vue.
L'exemple forestier est particulièrement éloquent. Alors
qu'on sait maintenant qu'à force de gaspillage et de saccage, nos
immenses forêts ne peuvent plus répondre à la demande, on
continue à laisser dépérir en pure perte des
espèces particulièrement prolifiques comme le
peuplier et le tremble. Une situation totalement inadmissible que les
producteurs et les productrices de bois comptent bien corriger, si possible
avec leurs partenaires de l'industrie, mais seuls et avec leurs seuls moyens
s'il le faut. Déjà, sur une base de "partnership", une usine de
panneaux gaufrés est en opération à Chambord au
Lac-Saint-Jean et, sur la même base, un projet d'usine à
pâte devrait prochainement aboutir dans le Bas-Saint-Laurent. Je pense
que voilà des exemples qui sont intéressants et qui prouvent,
hors de tout doute, l'importance de garder ces possibilités-là
quand c'est nécessaire. Et, encore une fois, je le rappelle, ce n'est
pas uniquement une question de pouvoirs, ce n'est pas uniquement de vouloir
tout contrôler. (11 h 15)
Ce sont les deux aspects importants: ou le faire seul ou le faire avec
des partenaires intéressés, mais qui ont besoin, justement, d'une
autre expertise. Je voudrais aussi vous souligner l'importance de regarder
ça, parce qu'on l'utilise dans certaines productions,
particulièrement maraîchères. On s'est permis, au cours des
dernières années, plutôt que de laisser gaspiller sur le
champ certains produits, tels le maïs, les pois, les concombres, les
tomates quand on avait dépassé d'une façon assez large les
contrats avec les entreprises avec lesquelles on faisait affaire, de prendre le
surplus, soit de l'offrir à d'autres entreprises qui ont
créé des jobs au Québec et faire davantage tourner
l'économie ou, même, dans certains cas, d'aller le porter à
l'extérieur du Québec.
Cela a permis aussi - vous allez voir tout à l'heure au niveau du
commerce des céréales, vous aurez des exemples avec ça -
par exemple, au cours des dernières années aussi avec Fedco, les
oeufs, de pouvoir s'occuper d'une façon plus particulière des
coquillages, de pouvoir libérer certaines industries qui ne pouvaient
pas... Et je pense que c'est toujours le même résultat au bout.
Ça crée davantage d'emplois, ça fait davantage tourner
l'économie au Québec plutôt que de créer du
gaspillage et, jusqu'à certain point, briser l'environnement.
Il serait, à notre sens, tout à fait irresponsable et
contraire aux intérêts de tout le monde de vouloir freiner de
telles initiatives et nous croyons qu'il importe que le gouvernement fasse
marche arrière avec cette proposition.
Au surplus, malgré leur apparente limpidité, les
dispositions en cause soulèveraient toutes sortes de difficultés
d'interprétation et pourraient nous entraîner, encore une fois,
dans une série de longues et coûteuses contestations judiciaires.
Devrait-on renoncer à toute activité de transport, de
congélation et d'emballage? Pourrait-on opérer des centres
d'encan ou des marchés publics?
Je peux vous rappeler qu'à Masson, par exemple, dans l'Outaouais,
où H n'y avait plus aucune disposition et endroit physique pour pouvoir
vendre les animaux, n'eût été de l'organisation agricole et
de la Fédération des producteurs de bovins, grâce,
justement, à l'initiative de la fédération
régionale et de la Fédération des producteurs de bovins,
vous avez là aujourd'hui un encan qui donne des services aux
producteurs, qui responsabilise encore davantage les producteurs et qui permet
d'économiser des sommes très importantes sur le transport.
De même, il nous apparaît important de le signaler au
passage, en cas de refus où nous nous retrouverions dans une situation
véritablement paradoxale, pour ne pas dire complètement absurde.
Les syndicats et les fédérations spécialement
mandatés par la loi pour voir à la commercialisation auraient, en
effet, beaucoup moins de pouvoirs en cette matière que n'importe quel
syndicat professionnel ordinaire.
Qu'on le sache bien, jamais les producteurs et les productrices
n'accepteront des plans conjoints ainsi tronqués. Jamais les producteurs
et les productrices n'accepteront qu'on fasse de leurs plans conjoints de
simples clubs de production. Par ailleurs, le projet de loi porterait
également un coup fatal sur ce qu'on appelle les agences de vente
volontaires, ces structures de commercialisation parallèles plus ou
moins autonomes mises sur pied pour permettre aux producteurs et aux
productrices qui le veulent de travailler ensemble à la mise en
marché de leurs produits.
Fruit d'une longue réflexion dans nos rangs, ces projets
collectifs de mise en marché ont poussé ça et là,
ces dernières années, tant à l'intérieur
qu'à l'extérieur des plans conjoints: Les bleuts sauvages,
Pomexpan, Pomexper, Cérégrains, Hortiser, Les serristes unis de
l'Estrie, et le reste. Malgré leurs imperfections et leurs limites, ces
instruments s'avèrent, en fait, les seuls possibles pour
améliorer la mise en marché là où il n'y a pas de
plan conjoint et là où, pour toutes sortes de raisons, il n'est
pas possible de mettre en place une organisation de vente obligatoire.
Et ces instruments, il importe de le dire clairement, ont très
généralement donné les résultats
espérés: une offre regroupée davantage susceptible de
répondre aux besoins des acheteurs, un meilleur contrôle de la
qualité, une intervention plus efficace en matière de promotion,
un regroupement qui permet des économies d'échelle et l'embauche
de personnel. Des retombées qui profitent non seulement aux producteurs
et productrices actionnaires, mais à l'ensemble d'une production
donnée.
Nous croyons donc qu'il serait également complètement
irresponsable, à tout le moins nettement prématuré, sur
une base d'un seul exemple où il y a eu problème, de
décréter leur arrêt de mort là où office de
producteurs est engagé.
Finalement, dans un domaine connexe, il
nous faut traiter de l'interdiction qu'on voudrait faire, par l'article
60 du projet de loi, à un administrateur d'un plan conjoint d'être
en même temps administrateur d'une entreprise engagée dans la
transformation ou la commercialisation du produit visé par ce plan. Il
s'agit d'un autre recul dont nous comprenons mal la justification, à la
lumière de l'expérience passée notamment.
De notre point de vue, il est clair que les producteurs et les
productrices ont tout à gagner à confier l'administration de
leurs plans conjoints à des gens qui connaissent la commercialisation,
à des gens qui ont le sens des affaires. Il faut donc s'attendre
à ce que ces gens siègent sur d'autres conseils d'administration,
à tout le moins sur celui de leur propre entreprise. De même, les
producteurs et les productrices ont également tout à gagner
à siéger, en plus grand nombre possible, même sur les
conseils d'administration des entreprises qui font la mise en marché de
leurs produits, surtout s'ils sont propriétaires, seuls ou avec
d'autres.
En ce domaine, le gouvernement a déjà compris qu'il allait
trop loin et il a accepté de faire marche arrière avec l'actuel
article 60, mais les dispositions demeurent boiteuses, et nous
considérons qu'elles doivent tout simplement disparaître. En
définitive, ces interdictions qui sont proposées par les articles
39, 60 et 106 ne nous apparaissent en aucune façon justifiées et
elles sont massivement rejetées par ceux et celles que nous
représentons. À la lumière de l'expérience
passée, nous croyons qu'il y a suffisamment de garanties pour
éviter tout abus: champs d'intervention limités par la loi,
consultation préalable des producteurs et productrices, etc. Nous avons
également tiré un certain nombre de leçons qui sont
déjà en application. Si toutes ces garanties étaient
jugées insuffisantes, nous sommes prêts à aller encore plus
loin, en nous conformant, par exemple, à toute exigence raisonnable qui
pourrait être fixée par la Régie. Mais les offices de
producteurs doivent à tout prix conserver leurs pouvoirs en
matière de transformation, de service et de commerce.
Pour un meilleur fonctionnement, un certain nombre d'autres
modifications de fond, bien que beaucoup moins importantes, nous apparaissent
également nécessaires et opportunes, surtout si l'on vise, comme
il se doit, le meilleur fonctionnement possible. Nous vous les
présentons sommairement et en vrac.
Ainsi, eu égard aux assemblées de producteurs, on comprend
mal pourquoi il faudrait dorénavant, conformémement à
l'article 67 du projet de loi, au cas d'un plan conjoint dont l'administration
est confiée à une fédération, par exemple, tenir
deux assemblées distinctes et séparées. En outre
d'être inutile et coûteuse, en outre d'obliger à un
difficile départage de ce qui relève de l'une ou de l'autre,
cette solution nous obligerait à une répétition sur bon
nombre de sujets et ne favoriserait guère la participation.
La solution actuelle des assemblées distinctes, mais qui peuvent
se tenir en même temps, nous apparaît nettement
préférable.
Sur le même sujet et pour des raisons qui tiennent
également surtout des inévitables mais sérieuses
considérations économiques, nous sommes d'avis que, sans en
aucune façon amoindrir la qualité du processus
démocratique, dispense pourrait être faite, contrairement à
ce que prévoient les articles 56 et 57 du projet de loi, de convoquer
individuellement, par avis écrit, chacun des producteurs et des
productrices visés par le plan, surtout lorsqu'un règlement
divisant les producteurs en groupes oblige à élire des
délégués.
Je veux juste vous donner un exemple. Quand la Fédération
des producteurs de bovins convoque ses producteurs à une
assemblée, c'est un coût de 12 000 $ uniquement pour convoquer,
c'est-à-dire 6000 têtes parce que la cotisation est de 2 $,
ça veut dire qu'il y a 6000 têtes de vendues. Ça
coûte la vente de 6000 têtes uniquement pour convoquer. Ça,
je parte d'une assemblée régulière parce que
déjà on profite de l'assemblée des producteurs de lait
pour convoquer ces 13 000 ou 14 000 producteurs de lait qui sont aussi des
producteurs. Dans le cas d'une assemblée générale
spéciale, c'est quelque 20 000 convocations. Alors, faites le
décompte vous-mêmes et vous allez voir pourquoi on soulève
l'importance de pouvoir convoquer individuellement les
délégués et, comme d'autres organismes, par la voie des
journaux ou des revues, l'ensemble des producteurs.
Ces convocations devraient dorénavant, surtout si tel est le voeu
majoritaire des producteurs et productrices concernés, pouvoir se faire
par voie d'avis public, comme je viens de le dire, dans un journal ou une revue
spécialisée. Il s'agit d'ailleurs d'une pratique de plus en plus
répandue et qui serait, à notre avis, tout aussi efficace.
Par ailleurs, pour ce qui est des contributions, s'il faut noter une
nette amélioration, il nous semble que le législateur devrait
profiter de l'occasion pour combler une grave lacune qui a pu contribuer
à l'insuccès des plans conjoints dans certaines productions.
Imposer des contributions ne règle rien s'il est impossible de les
percevoir, et, en cette matière, il est capital que tous soient
traités équitablement. Dans certaines productions, les
productions maraîchères notamment, seule une contribution sur une
base de contenants ou d'autres fournitures essentielles pourrait permettre de
traiter tout le monde correctement. L'article 107 du projet de loi devrait donc
être encore étendu pour pouvoir s'appliquer aux manufacturiers,
aux fournisseurs de tels intrants.
Pariant d'équité toujours...
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, M. Proulx.
Excusez-moi. Seulement pour une question
de rappel technique, c'est que le bloc de présentation est de 40
minutes. À moins que vous ayez convenu de ça avec vos autres
groupes, je n'ai pas d'objection. C'est qu'on vient de dépasser 25
minutes et ça voudrait dire que les trois autres auraient une dizaine de
minutes pour s'exprimer. Je ne veux pas vous faire accoire que vous avez pris
de leur temps, mais je voudrais voir comment vous avez composé avec
ça. C'est que vous êtes...
M. Proulx: Je ne le sais pas, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Ha. ha, ha! Vous êtes un
bloc où vous avez 40 minutes au total pour les quatre intervenants pour
la présentation.
M. Proulx: ça ne devrait pas dépasser, m. le
président. je pense que les autres vont s'ajuster en conséquence.
c'est juste un peu de le rappeler.
Le Président (M. Richard): Ha, ha, ha!
M. Proulx: Et je suis persuadé, M. le Président,
que vous devez être aussi patient que parfois vous êtes... En tout
cas, que vos collègues le sont à l'Assemblée nationale.
Quand même on dépasserait de quelques minutes, je ne pense pas
que...
Le Président (M. Richard): Non, je tenais à le
faire pour pas qu'à l'instant où, vous aurez terminé, je
dise aux autres: Je vous remercie beaucoup, parce que vous n'avez plus de
temps..
M. Proulx: Non, je comprends seulement que...
Le Président (M. Richard): Je ne veux pas me faire
d'ennemis. Vous comprenez ça.
M. Proulx: Non. Je trouve que c'est correct que vous fassiez
ça, que la discipline s'installe tout de suite au départ et que
vous puissiez la conserver tout le temps.
Le Président (M. Richard): Ha, ha, ha!
M. Proulx: Un petit écart au départ de cinq
minutes, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Alors, vous avez la parole,
monsieur.
M. Proulx: Mais j'essaie de vous donner ça parce que nous
sommes aussi friands que vous de répondre à vos questions parce
que je pense que c'est ça qui est le plus important. J'imagine que vous
avez tous lu et relu les mémoires avant de vous présenter ici.
Alors, vous êtes prêts pour les questions. Mais là, vous
venez de me faire perdre quelques minutes, M. le Président. Il faut que
je me retrouve.
Parlant d'équité toujours, nous savons depuis fort
longtemps qu'elle est la plus essentielle des conditions de réussite des
plans conjoints tant chez les producteurs et les productrices, comme nous
venons de le signaler, que chez les intervenants de l'extérieur. On veut
bien, à la longue du moins, respecter les règles du jeu, à
la condition cependant que tout le monde fasse de même. Ainsi, il nous
apparaît, malgré les diverses améliorations qu'on retrouve
parsemées dans le texte, qu'il faut aller encore plus loin. Les amendes
devraient être nettement renforcées plutôt que simplement
indexées. L'intéressant pouvoir d'ordonnance que l'article 143
propose de conférer à la Régie ne devrait pas être
limité aux seules actions ou omissions risquant d'entraver l'application
du plan conjoint, les dissuasives sanctions de l'article 184 pourraient
également recevoir une plus large application, etc.
Par ailleurs, même si nous sommes généralement en
accord avec l'idée des chambres de coordination et de
développement, il nous apparaît que des précisions
s'imposent si on veut vraiment atteindre l'objectif poursuivi, savoir le
développement d'une véritable concertation entre les
différents partenaires. Et je voudrais rappeler que ces
chambres-là peuvent être très intéressantes à
condition qu'on ne veuille pas les utiliser pour jouer un rôle que
d'autres organismes accrédités ne veulent pas jouer. Je pense
qu'il va être essentiel qu'un jour, un véritable rôle de
consensus soit là. Si c'est pour dégager l'État ou la
Régie ou d'autres organismes juridiques, nous allons nous opposer
très fortement.
De même, certaines reformulations et certains silences de la loi
nous laissent perplexes, inquiets même. Il en est ainsi de la
non-recommandation qui forme l'article 2.1 de l'ancienne loi, laquelle peut se
comprendre d'un point de vue de pure rédaction législative, mais
qui nous oblige à l'extrême prudence compte tenu de l'histoire
dictée par la Cour suprême. Cette disposition rappelant les
limites constitutionnelles en matière de mise en marché des
produits agricoles avait été introduite suite à des
décennies de batailles judiciaires menées à
l'échelle du pays. Il serait rassurant pour tout le monde qu'elle soit
conservée dans le texte de la nouvelle loi.
Il en est ainsi également de l'abrogation du pouvoir de
révision suprême traditionnellement accordé au
gouvernement. Si une telle solution se justifie pleinement lorsque la
Régie exerce des fonctions judiciaires ou quasi judiciaires, nous
croyons qu'il en va autrement et qu'il doit y en aller autrement lorsque la
Régie, comme instrument de régulation économique,
décide de ce qui doit ou ne doit pas être fait dans un secteur
donné. Les enjeux sont tels que c'est à ceux et à celles
qui doivent périodiquement rendre
compte à la population d'en décider ultimement.
De même, s'il est manifeste que le législateur a voulu
accroître substantiellement les pouvoirs généraux d'un
office, nous n'avons nulle part retrouvé dans le projet de loi les
pouvoirs pourtant élémentaires de fixer les conditions de mise en
marché et de servir d'intermédiaire pour la vente du produit
visé par le plan.
Par ailleurs, nous aurions souhaité retrouver dans cette nouvelle
loi des dispositions particulièrement mieux adaptées à la
réalité et au contexte de ce que nous appelons les petites
productions. Ainsi, nous avions demandé que certains pouvoirs coercitifs
puissent être accordés à certaines organisations
représentatives, pour des fins de promotion, par exemple, mais cette
demande n'a pas été retenue. Tout en avouant ne pas
posséder de formule magique, nous demeurons convaincus que des
règles plus légères et plus souples devraient être
prévues pour mieux répondre aux besoins de groupes de producteurs
et de productrices. Et j'espère qu'on aura l'occasion dans les questions
d'en donner des exemples.
De même, si nous nous réjouissons des dispositions visant
à réserver les quotas de production aux seuls producteurs et
productrices, il nous faut constater que le respect des droits acquis risque de
prolonger indéfiniment les situations souvent déplorables que
nous vivons actuellement. La nouvelle loi devrait, selon nous, comporter une
politique de récupération des quotas détenus par des
personnes qui ne les produisent pas, et cette nouvelle politique pourrait, en
partie du moins, être utilisée aux fins d'encourager les jeunes,
la relève, et les locataires actuels. (11 h 30)
Nous sommes également inquiets de l'abrogation presque
complète des pouvoirs de saisie, de la reformulation des pouvoirs
d'enquête de la Régie, de l'assujettissement de certains
règlements de la Régie - ceux visés dans le
deuxième alinéa de l'article 33 du projet de loi surtout -
à la Loi sur les règlements. Dans tous les cas, il faudrait bien
s'assurer que la Régie pourra continuer à agir de façon
convenable et efficace.
Finalement, nous nous interrogeons sérieusement sur
l'utilité réelle d'un certain nombre de nouveautés qu'on
voudrait ajouter à la loi: obligation de parader au moins une fois tous
les cinq ans devant la Régie pour justifier l'existence d'un plan
conjoint. Je pense que je n'ai pas besoin de vous rappeler que
l'adhésion aux fédérations qui administrent les plans
conjoints doit continuer à être suffisante pour le prouver, tant
qu'il n'y a pas de retraits majoritaires, je ne vois pas pourquoi on nous
obligerait à faire un exercice qui, encore une fois, va être
très coûteux - obligation, alors qu'on vient tout juste de faire
disparaître le mécanisme d'approbation par l'Inspecteur
général des institutions financières, de faire valider nos
règlements de régie interne par la Régie; obligation de se
doter de règlements sur la conservation et l'accès aux documents.
Ce sont tous là de beaux principes, souvent d'ailleurs,
déjà en application. Est-ce vraiment nécessaire d'en faire
des règles immuables et absolues?
Pour que poussent partout réussite et prospérité,
je réitère ce que j'ai dit au départ, l'urgence d'adapter
la loi sur la mise en marché aux réalités d'aujourd'hui et
de nous donner la possibilité d'être capables de relever ensemble,
les différents partenaires, les défis qu'on a à relever
à l'heure actuelle. Ça devrait apporter une réussite qui
signifierait de pouvoir continuer à exercer une profession qu'on aime et
d'en vivre dignement en se prenant en main, en se donnant les moyens... Une
réussite qui se propagera, contribuant ainsi à la
prospérité des régions et à la
prospérité du Québec tout entier. Merci, mesdames,
messieurs.
Je demanderais à la Fédération des producteurs de
bois de nous présenter son. complément. M. Bilodeau.
Fédération des producteurs de bois du
Québec
M. Bilodeau (Jean-Luc): Merci, mon président. M. le
Président, mesdames et messieurs les membres de la commission, comme le
temps est court, je vais m'attarder aux principaux points. Vous avez
sûrement tous en main ce document, et je vous en ferai lecture.
La Fédération des producteurs de bois du Québec
vous remercie de lui permettre de comparaître devant cette commission.
Comme notre organisme est affilié à l'Union des producteurs
agricoles et que nous sommes solidaires de la position défendue par
l'Union vis-à-vis de la commission, nous nous en tiendrons à deux
aspects du projet de loi qui nous tiennent particulièrement à
coeur, soit celui des producteurs transformateurs et l'implication d'un office
ou d'un syndicat dans la transformation du produit visé par le plan
conjoint.
Les producteurs transformateurs. Dans l'organisation de la mise en
marché du bois en provenance de la forêt privée, on
dénombre actuellement, au Québec, 17 plans conjoints
régionaux couvrant tout le territoire de la forêt privée.
Les plans conjoints régionaux, établis dans certains cas depuis
1958, appliquent les différents pouvoirs prévus aux plans et dans
la loi en rapport avec la mise en marché du bois feuillu ou
résineux des propriétaires possesseurs de ce produit. Ainsi, au
cours des années, nous avons assisté, au Québec, à
la mise en place d'agences centrales pour la vente de ces bois de la
forêt privée destinés aux papetières, dans la
plupart des syndicats administrant les plans conjoints de producteurs de bois.
Dans bien des cas, ces agences de vente ont été jumelées
à un règlement de contingent afin d'assurer un partage
équitable du marché souvent trop limité
pour répondre aux besoins des producteurs.
Sous prétexte que le bois récolté sur leur
propriété est transformé entièrement par eux, les
industriels forestiers et leur Association ont toujours contesté toutes
les obligations vis-à-vis des plans conjoints et de leurs
règlements. Si on s'en remet à d'autres productions qui
rencontrent le même problème, la voie juridique pour régler
cette question implique d'interminables procédures légales.
Cette situation, si elle n'est pas clarifiée une fois pour toutes
avec le projet de loi 15, entraînera rapidement une instabilité
des plans conjoints et de l'application des règlements adoptés
par les producteurs de bois. Cette division du territoire forestier
privé entre deux groupes de propriétaires, l'un couvert par le
plan conjoint et l'autre pas, minerait l'effort collectif déployé
par les producteurs pour améliorer les conditions de mise en
marché de leur bois en affaiblisssant graduellement la force du plan
dans chacun des territoires.
À l'intérieur du rapport du groupe de travail formé
en mars 1988 par le ministre délégué aux Forêts, M.
Albert Côté, avec comme mandat d'analyser les principes, les
orientations et les programmes d'aide existant actuellement en forêt
privée, on peut lire, à la page 17: "En conséquence, le
comité considère que tous les types de propriétés
privées contenus à l'intérieur des plans conjoints devront
être assujettis à ces mêmes plans conjoints. Le
comité recommande donc: "Que le ministère fasse le plus tôt
possible la lumière sur l'assujettissement des grandes
propriétés aux plans conjoints et qu'au besoin, la Loi sur la
mise en marché des produits agricoles soit amendée afin de
clarifier la situation et éviter toute interprétation autre que
celle proposée."
Il doit en être de même au niveau de la Loi sur la mise en
marché des produits agricoles et des plans conjoints de producteur de
bois. À cette fin, nous désirons, par notre intervention, nous
assurer que l'article 38 du projet de loi 15, à l'effet que "la personne
ou société qui est à la fois producteur du produit
visé par le plan et engagée dans la mise en marché de ce
produit est assujettie aux droits et obligations de l'un et de l'autre", aura
comme conséquence d'assujettir aux plans conjoints de producteurs de
bois tous les industriels forestiers possesseurs d'un produit visé par
le plan, et ce, sans aucune équivoque légale.
Alors, en terminant, la Fédération des producteurs de bois
du Québec réclame donc que la Loi sur la mise en marché
des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres dispositions
législatives permette aux syndicats et offices de producteurs de
travailler à la promotion et à la mise en place de nouveaux
marchés utilisant les essences disponibles. Nous demeurons à
votre disponibilité pour répondre à vos ques- tions.
Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, M. Bilodeau. Maintenant,
le commentaire de la Fédération des producteurs de cultures
commerciales du Québec. Alors, ça va marcher tout seul...
Fédération des producteurs de cultures
commerciales du Québec
M. Trudeau (Marcel): M. le ministre, madame, messieurs, mon nom
est Marcel Trudeau, je suis procureur de la Fédération. J'avais
le mandat de vous donner la lecture du mémoire de la
Fédération. Compte tenu des exigences de temps, vous comprendrez
que ce n'est pas possible, mais dans le but de vous faire la
démonstration de la discipline des producteurs, le président, M.
Germain Chabot, va vous expliquer ce que nous pensons à la
Fédération des producteurs de cultures commerciales, pourquoi
nous avons besoin du maintien de la formule des agences volontaires. Et, dans
le but de sauver du temps, je lui cède la parole.
Le Président (M. Richard): Merci, Maître, et
j'espère que ça ne touchera pas vos honoraires. Alors, M. Chabot,
vous avez la parole.
M. Trudeau: II y encore l'article 2, M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Richard): C'est de l'humour. Alors, M.
Chabot, vous avez la parole.
M. Chabot (Germain): M. le Président, M. le ministre,
madame, messieurs, je voudrais vous présenter le portrait d'un
producteur de cultures commerciales au Québec. Moi-même, je suis
producteur de cultures commerciales dans la région de Saint-Hyacinthe;
je suis président de la Fédération et représente
les producteurs aujourd'hui. Pourquoi - et je pense que vous avez
sûrement lu notre mémoire - on s'attache bien gros aux trois
articles 39, 60 et 106, qui touchent tout particulièrement les agences
de vente volontaires?
Comme vous le savez, il y a 2000 producteurs, à peu près,
au Québec, qui produisent des céréales sur une
échelle assez importante. Cette production-là est importante,
mais le nombre qui est spécialisé est réduit. Il y a
à peu près 400 producteurs de céréales qui sont
vraiment spécialisés: c'est que la principale occupation de leur
ferme, ce sont des céréales. Ce sont ces producteurs-là,
bien sûr, qui mettaient du poids au niveau de la Fédération
pour essayer d'organiser la mise en marché. Depuis 1976 que le plan
conjoint de la Fédération a été voté par les
producteurs, a été mis en place, puis le travail a
commencé, dès les années 1976, à essayer de
travailler à améliorer notre mise en marché. Au
début, les producteurs, on s'était donné comme mandat
d'essayer de négocier avec les intervenants dans le marché. Le
grand reproche qu'on a eu, dans cette négociation-là, au niveau
des intervenants dans le marché, des acheteurs dans notre produit, c'est
qu'on ne pouvait pas, comme producteurs, rassembler notre offre, vu qu'on
était à la grandeur du Québec. C'était une des
faiblesses qu'ils nous ont reprochées. Suite à ça, on a
travaillé quelques années, deux ans, deux ans et demi, sur ce
projet pour essayer de s'entendre et négocier des ententes de commerce
à l'intérieur de la province. Ça n'a pas réussi.
À partir de ce moment-là, les producteurs, à
l'assemblée générale de leur Fédération,
avaient décidé d'aller vers une agence de vente obligatoire.
Là aussi, on a travaillé, comme producteurs, à
élaborer les règles du jeu d'une agence comme ça. On a
consulté les intervenants. On a consulté nos producteurs et on
s'est aperçu, au cours du travail, dans les deux années de
travail sur ce dossier, qu'il y avait peut-être, à
l'intérieur des 400 producteurs qui sont spécialisés...
C'était important pour eux, la mise en marché, s'organiser. H y
avait un point majeur dans toute notre discussion qui ressortait,
c'était redonner à notre production la première place au
Québec.
Je vais essayer de vous expliquer, en courts termes, ce que ça
veut dire. C'est que la production de céréales s'est
développée beaucoup dans les 15 dernières années,
pour se spécialiser et devenir des producteurs qui vendent et qui
mettent en marché. Autrefois, la production de céréales
était "autoconsommée" a la ferme. Aujourd'hui, dans les
années quatre-vingt-dix, il faut la mettre en marché. Les
producteurs qui se sont spécialisés, c'est ce qu'ils font.
Il est bien certain que ces producteurs avaient une urgence beaucoup
plus pressante par rapport aux 2000 producteurs. Même si la
majorité était d'accord pour qu'on mette une agence de vente
obligatoire, il y avait une certaine résistance au niveau du
marché, c'est bien sûr, au niveau des marchands, des acheteurs de
nos céréales. Eux craignaient cette règle de jeu. Ils la
trouvaient trop exigeante. Aussi, à l'intérieur de nos
producteurs, plusieurs qui produisent et "autoconsomment" se posaient des
questions. C'est partant de là, qu'en assemblée
générale, les producteurs de céréales ont
décidé d'aller vers une agence volontaire, qui est beaucoup plus
souple et qui répond à un besoin. Parce que quand je vous ai
parlé tout à l'heure de redonner la première place
à notre grain au Québec, c'est avec cette compagnie volontaire
qu'on appelle aujourd'hui Cérégrains. J'espère que vous en
avez entendu parler, même si c'est un nouveau-né, qui n'a pas un
an d'existence, mais je vous assure que c'était volontaire. Je peux vous
assurer que les actionnaires qui sont dans cette compagnie aujourd'hui, il y a
203 producteurs, exactement, qui sont actionnaires de cette compagnie,
qu'à l'intérieur de ces 203 producteurs, 72 % de ces producteurs
ont mis 100 % de leur production dans Cérégrains. Parce qu'on
avait mis une règle, c'était volontaire. La règle
était, pour les céréales, de zéro à 40
hectares, le producteur était obligé de tout confier sa mise en
marché dans Cérégrains. Dans le maïs, c'était
de zéro à 100 hectares. Dans ça, j'ai 82 % des producteurs
qui sont en haut de 100 hectares et qui ont tous mis leur mise en marché
dans Cérégrains. C'est là qu'est la confiance pour les
producteurs.
L'objectif de Cérégrains est simple, c'est de regrouper
notre offre pour être présents continuellement sur le
marché. On réussit ce tour de force en se regroupant et en ayant
un volume important qui fait qu'on peut offrir régulièrement du
grain continuellement sur le marché à nos utilisateurs ou
à nos marchands, tout en sécurisant notre prix. Je vais essayer
de vous expliquer ça court. C'est qu'il y a deux éléments
qui font le prix du grain au Québec, surtout du maïs. Vous avez le
marché, la prime, ça c'est l'offre et la demande qui est un
facteur important pour mettre un montant d'argent au bout de ça. L'autre
partie, c'est le marché des options. C'est là qu'en se regroupant
comme Cérégrains on peut se donner un outil pour travailler.
C'est qu'on déconnecte le prix de la livraison. Pour l'acheteur, il
peut, en tout temps de l'année fermer son prix au moment où il le
désire, au prix qu'il désire, par rapport au marché
boursier. Nous, comme producteurs, en se regroupant comme ça, on
s'assure d'un prix moyen. C'est qu'on a partagé ce volume
également, sur les jours ouvrables au niveau du marché boursier.
C'est à partir de là qu'on s'assure un prix moyen.
Vous savez, dans les années qu'on vit, on n'a pas le choix comme
producteurs, il faut absolument aller chercher le meilleur parti possible, sur
le marché au niveau du prix et aussi être présents. C'est
sûr, le défi de Cérégrains, c'est d'être
présent continuellement sur le marché pour "circuiter" le grain
qui vient de l'extérieur.
Je résume vite. C'est pour ça que les trois articles 39,
60 et 106 qui touchent l'administration, pour commencer, qui touchent l'office
de la Fédération dans la mise en place de
Cérégrains. Je pense que c'est important qu'on soit maintenus,
pour les producteurs des céréales. Je pense qu'il faut que la
porte reste ouverte à tous les producteurs de céréales qui
ne sont pas dans Cérégrains aujourd'hui, mais qui veulent y
être demain.
L'autre point important est au niveau de l'administration. Je pense
qu'il est important que les administrateurs... (11 h 45)
Le Président (M. Richard): Juste un instant, M. Chabot,
s'il vous plaît. Est-ce que les deux partis sont d'accord pour donner une
extension,
puisqu'on dépasse l'enveloppe de temps. M. Pagé:
Pas de problème.
Le Président (M. Richard): Allez-y avec votre
deuxième partie, M. Chabot.
M. Chabot: Je vais faire ça vite. Au niveau de
l'administration, je pense que c'est important que les administrateurs de la
Fédération soient impliqués. En tout cas, dans notre
charte c'est prévu; dans Cérégrains, c'est
équilibré, entre les producteurs actionnaires, au niveau de
l'administration, et les producteurs de la Fédération.
L'autre point important est au niveau du financement. J'ai
travaillé à la mise en place de Cérégrains, et je
pense que c'est important qu'il y ait un support, pas seulement financier, au
niveau de la Fédération, mais aussi un support au niveau des
contacts avec les producteurs puis au niveau de la confiance envers les
producteurs. C'est pour ça que, si on déconnecte nos offices ou
nos fédérations de la mise en place d'agences volontaires, comme
ça, je pense qu'on va nuire à plusieurs productions, dans
l'avenir, qui vont vouloir améliorer leur mise en marché. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M Chabot. Maintenant, le
commentaire du Syndicat des producteurs de bois du Bas-Saint-Laurent.
Syndicat des producteurs de bois du
Bas-Saint-Laurent
M. Lechasseur (Jean-Maurice): M. le Président, je voudrais
d'abord...
Le Président (M. Richard): Je m'excuse. Êtes-vous M.
Lechasseur?
M. Lechasseur: Jean-Maurice Lechasseur, président du
Syndicat.
Le Président (M. Richard): Bienvenue. Vous avez la parole,
M. Lechasseur.
M. Lechasseur: M. le Président, M. le ministre, mesdames,
messieurs, d'abord, je dois vous remercier, au nom des 10 000 producteurs. On
veut dénoncer les articles 39, 60 et 106, évidemment, comme nos
prédécesseurs - vous comprendrez que je coupe un peu. À
notre avis, ces articles, tels que libellés, pourraient freiner des
initiatives de développement économique provenant des
régions rurales dites périphériques - j'ai ajouté
ça - et basées sur la transformation d'une ressource naturelle
abondante et qui ne trouve pas preneur.
L'histoire nous a appris qu'on ne peut compter uniquement sur les
grandes entreprises pour assurer notre développement économique.
Ici, le message de l'État est clair: Prenez-vous en main,
développez des alliances avec d'autres partenaires non gouvernementaux
et l'aide de l'État viendra compléter vos efforts. C'est dans ce
contexte que, depuis 1987, le Syndicat des producteurs de bois travaille
à trouver un promoteur ou à se faire promoteur d'un projet. Nous
avons, d'ailleurs, fait une campagne de souscription en 1987, qui nous a permis
de ramasser 3 000 000 $. Après avoir été tentés par
un projet d'usine de panneaux gaufrés dans le temps, par exemple, avec
le Saguenay-Lac-Saint-Jean, aujourd'hui, bien sûr, on parle d'un projet
d'usine de pâte.
En se prenant en main, les producteurs de bois du Bas-Saint-Laurent sont
en voie de se donner un instrument de développement de leur ressource
naturelle abondante. Ils estiment être en droit de
bénéficier des retombées directes et indirectes de cet
effort collectif. Dans le cadre d'une participation dans une usine de
transformation, nous sommes disposés à vivre avec des
règles de déontologie et des mesures qui vont viser à
assurer l'équité entre les producteurs. Mais le Québec des
régions a trop besoin d'initiatives régionales de toutes sortes
pour qu'une loi vienne empêcher des organismes dynamiques d'être la
bougie d'allumage d'investissements importants.
Pour conclure, M. le Président, je vous dirais que, dans le
Bas-Saint-Laurent, actuellement, c'est vrai, on surexploite nos forêts
résineuses et on sous-exploite nos forêts feuillues. On pense que
la solution, c'est d'investir dans la transformation, pour utiliser chez nous
notre matière feuillue. On veut développer un modèle de
partenariat avec l'industrie. Je pense que l'État paternaliste, c'est
fini, ça; c'est révolu, ce temps-là. Alors, moi, je vous
dis: Peut-on se priver d'une telle initiative? Les producteurs ont le
goût actuellement d'investir dans un projet. Il y une campagne de
souscription qui nous a permis d'amasser plus de 3 000 000 $. Ce qu'on
voudrait, éventuellement et à très court terme, c'est de
pouvoir investir, dans un projet majeur pour notre région, une somme de
9 000 000 $. Je dois vous dire qu'actuellement, si on s'en allait sur le
terrain demain matin, je suis persuadé que, dans le mois qui vient, nous
pourrions atteindre cet objectif-là. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. Lechasseur. Si vous
permettez, pour des raisons techniques, nous suspendons quelques minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 50) (Reprise à 12 h
1)
Le Président (m. richard): messieurs! je suis
certain que vos conversations sont fort intéressantes, mais la
commission reprend ses travaux. s'il vous plaît!
Nous en sommes à la période de questions. M. le ministre,
vous avez la parole.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je veux d'abord
remercier la Confédération de l'Union des producteurs agricoles
de son témoignage ce matin et du dépôt du mémoire,
et remercier chacune des fédérations qui ont joint leur voix
à celle de l'UPA pour nous sensibiliser à leurs
inquiétudes ou encore à leur interprétation en
référence au projet de loi.
Dans un premier temps, je note que l'Union des producteurs agricoles a
différentes modifications techniques qu'elle souhaite déposer,
formuler en demandes. Vous voulez vous inscrire en demandes, soyez
persuadés que, dès réception de cette requête ou de
cette ventilation de sujets qui nécessiteraient soit des
précisions ou des modifications, on va les analyser avec beaucoup de
sérieux. J'apprécierais cependant qu'on puisse quand même
les recevoir dans un délai assez bref.
Je note la satisfaction exprimée de la part de l'Union des
producteurs agricoles à l'égard de plusieurs dispositions du
projet de loi, entre autres, en ce qui concerne les chambres de coordination et
de développement. Je vais être très clair: ces dispositions
contenues dans le projet de loi, dans notre esprit, constituent un
véhicule à privilégier, avec un seul objectif: la
conjugaison des efforts et des démarches de l'ensemble des intervenants
du secteur bioalimentaire Je m'explique. Vous savez, pendant très
longtemps, la Régie des marchés agricoles du Québec a
été considérée comme un organisme voué au
règlement de conflits et de problèmes, se référant
surtout à la gestion de la production et de la mise en marché de
cette production. Or, après une expérience profitable d'un
certain nombre de décennies, il nous apparaît que, dans un
contexte, comme je l'indiquais dans ma présentation initiale, de
mondialisation des marchés où l'industrie elle-même a senti
l'obligation de faire plus au niveau de la mise en marché comme telle
des produits... On le voit par la création des agences de ventes, par
les différentes expériences auxquelles d'ailleurs vous vous
êtes référés et pour lesquelles vous vous inscrivez
en demandes, surtout en ce qui concerne les articles 36, 60 et 109, etc.
Je vais donc être très clair avec vous: Quant à ces
chambres de coordination et de développement, il n'est pas du tout dans
l'intention du législateur et du gouvernement de faire en sorte que ce
soient des comités dont l'objectif serait de parler pour parler. Il
faudra que ces gens-là parlent pour agir. Jusqu'à maintenant,
à défaut d'avoir de telles chambres, on a dû créer
des comités de dynamisation du secteur. On l'a fait dans le poulet,
notamment. Mais on sent une volonté chez chacun des intervenants. Chaque
année, je rencontre - comme vous le savez, je n'ai pas que des contacts
très étroits avec les producteurs via les différentes
fédérations - les grandes chaînes de distribution
alimentaire ainsi que des entreprises de transformation, et on a senti,
à la lumière de ces échanges, l'obligation que nous avions
conjointement de mettre en place un mécanisme beaucoup plus formel, pour
que des signaux soient continuellement envoyés auprès des
producteurs, surtout en ce qui concerne certaines mutations, au niveau de la
production, qui sont nécessaires à l'industrie, pour
répondre aux besoins des consommateurs. Tout comme aussi des signaux
doivent être envoyés aux transformateurs en regard, entre autres,
des investissements, des innovations technologiques, de l'audace qu'ils doivent
démontrer pour préserver certaines parts de marché, etc.,
et que d'autres signaux doivent être régulièrement
envoyés aux entreprises de distribution alimentaire, compte tenu des
règles internes, dans chacun de ces centres, de ces grandes entreprises
québécoises, en ce qui concerne la mise en marché de
produits sur les tablettes, la largeur des tablettes, la visibilité de
nos produits, la promotion de nos produits, la tendance des prix à la
baisse, etc.
C'est dans cet objectif-là que ces chambres seront
créées, et je dois vous indiquer que nous escomptons bien que
l'industrie s'associera pleinement et entièrement à cette
démarche-là. Il y va d'une responsabilité pour chacun des
intervenants.
Vous vous référez aussi à ta volonté du
gouvernement de faire en sorte que les quotas appartiennent uniquement aux
producteurs. C'est un problème. Nous pourrions déborder
très longuement le cadre strict des quelques minutes où nous
avons à échanger ce matin. Cependant, je dois vous dire ceci: la
récupération des quotas non utilisés disponibles... On se
réfère, entre autres, à toute la problématique des
locations de quotas. C'est un problème qu'on juge très
sérieux. J'ai déjà eu - pour citer un exemple concret -
dans le domaine des oeufs, des rencontres avec la fédération et
j'avais évoqué, à ce moment-là,
l'intérêt du gouvernement de s'associer à une
démarche visant à, entre guillemets, rapatrier les quotas non
utilisés ou en location, au bénéfice de certains
producteurs.
On entend donner suite et j'entends personnellement donner suite, en
cours d'année, à cette problématique des quotas en
possession d'entreprises qui ne les utilisent pas.
Vous vous référez à l'article 2, le fameux article
2. Il y a eu quelques procédures, depuis 20 ans, avec des
résultats divers, mais on retient de l'expérience que l'article 2
est apparu, pour chacun des intervenants, avec le temps, un mécanisme
à utiliser avec prudence et parcimonie. Et, à cet
égard-là - et je pense que Me Trudeau abondera probablement dans
le même sens que moi - le fait que cet article ait été
rédigé avec plusieurs imprécisions - si je peux utiliser
ce terme - aura débouché sur beaucoup
de prudence dans son utilisation, de part et d'autre.
Qu'on se rappelle le cas de Nutrinor, au Saguenay-Lac-Saint-Jean,
où il y a eu un problème de transport qui s'est finalement
réglé à l'amiable, et la procédure d'Agropur, il y
a six ou sept ans, concernant l'arrêt de prélever les
contributions des producteurs de lait, qui, finalement, s'était
réglé à l'amiable. On ne se rappelle pas, à la
Régie, d'un jugement final sur l'article 2, mais, dans de nombreuses
procédures, l'article 2 a été évoqué, on s'y
est référé. Cependant, compte tenu de son caractère
à la fois imprécis et ambigu, généralement, les
parties préfèrent en arriver à un règlement dit
hors cour, à l'amiable.
Vous portez à mon attention, vous me demandez, somme toute, soit
de le préciser, de le limiter ou de l'éliminer purement et
simplement. Je peux vous assurer, d'une part, que j'aborderai ce sujet avec
d'autres qui sont plus directement concernés, éventuellement.
Mais je ne voudrais pas - je pense que c'est très clair dans l'esprit de
plusieurs - que la présente commission parlementaire débouche sur
des règlements davantage circonstanciels et conjoncturels. Je ne
voudrais pas que la commission parlementaire déborde, ignore
l'obligation qu'on a, c'est-à-dire d'étudier le projet de loi,
pour traiter d'autres problèmes qui sont vécus dans certains
secteurs de l'industrie.
On va y revenir. J'aurai l'occasion, très certainement, au moment
de l'étude du projet de loi, en deuxième lecture, de me
référer à cet article 2, tout comme, je vous l'indiquais
au tout début, des modifications seront apportées au projet de
loi après la deuxième lecture et seront déposées au
moment de l'étude du projet de loi article par article. À ce
moment-là, on avisera en conséquence.
Vous semblez vous inquiéter beaucoup des dispositions relatives
aux articles 38 et suivants. On n'a pas l'intention - là, je voudrais
être clair, et ça touche aussi les préoccupations de la
Fédération des producteurs de bois, du Syndicat des producteurs
de bois du Bas-Saint-Laurent et de la Fédération des producteurs
de cultures commerciales... Notre objectif, c'est l'élimination des
conflits d'intérêts. Notre objectif n'est pas de paralyser ces
démarches qu'on a connues au Québec, où les producteurs,
membres d'une fédération, vont au-delà de la gestion de
l'offre du produit et vont jusqu'à se doter de structures de mise en
marché du produit. Ça, ce n'est pas notre intention.
Il y a un dénominateur commun dans le libellé de ces
articles-là. Il est très simple. C'est que les administrateurs
d'une fédération, nous considérons qu'ils sont
placés devant un risque très appréciable de conflits
d'intérêts, lorsque les mêmes administrateurs agissent comme
administrateurs d'une corporation qui, elle, a le mandat de mettre en
marché le produit. Une seule question, parce qu'on est convenus qu'on
échangerait de 10 minutes en 10 minutes - mais là, on est
déjà rendus à 14, alors on pourra s'arranger avec
l'Opposition pour qu'on ait le même temps. Quelles sont vos
recommandations pour éviter ces situations de conflits
d'intérêts?
M. Chabot: Je vais tenter d'y répondre. Moi, je pense, en
tout cas, que tout dépend jusqu'où on va impliquer ces compagnies
volontaires. Je vais essayer de vous répondre plutôt dans l'autre
sens. Moi, j'y vois comme importance, comme producteur, administrateur de cette
compagnie volontaire et de la Fédération en même temps, le
fait que ça m'assure, en tout cas à moi, comme producteur, qu'H
va y avoir un équilibre qui va être maintenu au niveau de
l'implication de cette compagnie volontaire, pour m'assurer que les gestes qui
vont être posés par cette compagnie ne viendront pas en tout cas,
pour les autres producteurs qui ne sont pas dedans - parce que c'est
volontaire, on l'a dit depuis le début, c'est volontaire - parce qu'ils
veulent attendre un peu avant d'y adhérer, leur nuire indûment au
niveau de la mise en marché. (12 h 15)
Moi, je pense qu'on est capables de faire un équilibre entre les
deux. Puis, je ne vois pas, si on déconnecte - parce que c'est ça
- l'office ou la fédération, comment on va pouvoir s'assurer que
les portes vont rester ouvertes pour ces compagnies volontaires, pour les
autres producteurs qui vont vouloir y entrer demain. C'est comme ça,
comme producteur, que je réagis. Je me dis: II faut absolument s'assurer
qu'il ne vienne pas au monde, pour une même production, une kyrielle de
ces compagnies volontaires. Je vais me référer à
Cérégrains. Cérégrains peut toucher toutes les
productions de céréales et de maïs qui se mettent en
marché au Québec dans des pools différents, dans la
même organisation. C'est ça l'objectif, il faut faire attention de
ne pas redoubler et mettre en place plusieurs structures qui vont coûter
énormément cher à la production ou aux producteurs. C'est
ce qu'il faut regarder aussi positivement à l'inverse. Je n'ai pas la
solution aux conflits d'intérêts possibles. Je pense qu'il y a
moyen - je ne dis pas qu'il faut l'enlever complètement - de mettre des
cadres et des points de vérification pour s'assurer qu'il n'y ait pas de
conflits d'intérêts à l'extrême, qui se produisent
dans l'administration de ces compagnies. Je pense qu'il faut faire le juste
milieu. C'est ma position comme producteur.
M. Proulx: Si vous me permettez, M. le Président, je vais
rajouter quelque chose. Il n'y a pas de solution magique, on l'a dit. Je pense
qu'on peut, quand même, établir un certain nombre de règles
qui vont nous mettre le plus possible à l'abri de la possibilité
de conflits
d'intérêts. Mais on n'a pas inventé la roue en
faisant ça. Je pense que vous voulez nous rendre beaucoup plus saints
que le pape, comme on dit assez souvent. Je peux être administrateur de
ma caisse pop et je peux avoir des emprunts autant que mon crédit peut
en porter, mais ça ne me met pas nécessairement en conflit
d'intérêts.
Là, on préconise, particulièrement ces
années-ci, de plus en plus, une prise en main par les gens.
L'État se retire, jusqu'à un certain point, pour toutes sortes de
raisons. On veut renouveler l'économie. On veut que les gens
s'impliquent, investissent. Mais comment pouvez-vous demander à des gens
d'investir et de refuser, par le fait même, de participer au suivi et
à la bonne administration des entreprises ou de les limiter à
participer à un autre organisme qu'ils se sont donné
collectivement? Établissons un bon code d'éthique, je pense que
ce serait une première solution. Ça, on est prêts à
regarder ces choses-là. On l'a dit: Se protéger le plus possible.
On est d'accord avec vous autres qu'il peut y avoir un certain danger. Mais
jusqu'à cette heure, je ne pense pas qu'il n'y ait eu nulle part quoi
que ce soit de terrible. Il y en a qui ont profité de ces
choses-là pour mettre en cause de vieilles rengaines, de vieilles
rancunes. C'est évident, ça existera toujours. Mais donnons-nous
un bon code d'éthique, précisons un certain nombre de choses,
mais n'allons pas défendre... Sinon, loin de stimuler l'implication des
gens, que ce soit au niveau économique, social ou n'importe quoi, vous
allez diminuer cet incitatif. Je pense que vous préconisez très
fortement, ces années-ci, l'implication du milieu. Alors, ne limitez pas
les gens. Il y en a assez peu qui veulent s'impliquer, ne venez pas les limiter
quand ils le veulent.
M. Pagé: Sauf que, je vais être bien clair, le
projet de loi n'interdit pas aux producteurs de se lancer dans des entreprises
de transformation. Il l'interdit aux administrateurs de plans conjoints. Comme
gouvernement on a supporté les démarches de Pomexpert, de
Pomexpan et on travaille étroitement avec les gens de l'entreprise Les
bleuets sauvages du Saguenay, etc. Notre objectif, ce n'est pas d'imposer un
frein au développement de telles initiatives, mais c'est de s'assurer
que l'ensemble de l'activité soit bien encadré.
Vous venez d'ailleurs de vous référer, M. le
Président, au fait que de telles structures, qui dans certains cas
peuvent prêter à équivoque, font
régulièrement l'objet de plaintes - appeliez ça des
rumeurs, des commérages, je ne sais trop. On a d'autres choses à
faire que ça. L'ensemble même des intervenants dans ces
entreprises ont d'autres choses à faire que ça. Nous, notre
objectif, il est très simple, il est très clair et même il
est très limité: c'est de nous assurer que les administrateurs
d'agences de vente ne se retrouvent pas en conflit d'intérêts.
Vous me dites: On pourrait imposer des codes d'éthique, etc. Je suis
ouvert à ce que vous nous fassiez des propositions dans les
modifications que vous allez nous demander. Mettez-nous un peu de chair sur
l'ossature, et on va regarder ça.
M. Proulx: Oui, on peut mettre de l'avant un certain nombre
d'idées, c'est évident. Mais, encore une fois, vous ne
réglerez pas la question en défendant. Vous êtes mieux de
mettre des règles plus précises. Jusqu'à cette heure, on a
suivi les règles qui étaient là. Si elles ne semblent pas
assez précises, mettons-les encore plus précises ou mettons les
plus exigeantes, mais n'allez surtout pas... Parce que, vous le savez comme
nous autres, on vit dans une situation qui a été très bien
exprimée, par exemple, par les producteurs de céréales qui
ont fait toutes les étapes possibles pour se donner collectivement une
mise en marche, mais c'a été refusé. On fait quoi,
à partir de là? On abandonne et on reste dans une situation qui a
l'air de plus en plus catastrophique ou on prend un moyen qui est à
notre disposition, qui peut comporter certains risques, mais qui peut donner le
goût à tout le monde. En fait, tout le monde espère avoir
des agences obligatoires, tout le monde, parce que c'est l'idéal et que
c'est ça qui va donner les meilleurs résultats. Sauf qu'à
un moment donné, quand tu es face à un mur des principaux
intéressés, pour toutes sortes de raisons, il faut que tu
choisisses une autre voie pour arriver possiblement aux mêmes objectifs.
Et c'est ça qui est important, parce que le but ultime de ça, ce
n'est pas de vivre constamment avec des agences volontaires, c'est d'en arriver
justement à donner le goût par ça, de se donner une
certaine expertise pour en arriver à une action collective
concertée de tous les intervenants dans ça. C'est ça qui
est le but poursuivi. C'est une étape dans la progression et dans
l'atteinte de l'objectif.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: Oui, M. le Président. J'écoutais parler
le ministre et il disait, entre autres, qu'il voulait éviter les
conflits d'intérêts qui peuvent exister entre des administrateurs
et les mêmes personnes qui administrent des compagnies ou des compagnies
de vente. C'est évident, pour empêcher ces conflits
d'intérêts, qu'il ne faut pas tout chambarder, qu'il ne faut pas
remettre en cause tous les moyens que les producteurs se sont donnés.
Dernièrement, quand le gouvernement a refait la Loi sur les caisses
d'épargne et de crédit, dans cette loi, il a mis certaines
balises pour, justement, limiter et contrôler, si on peut utiliser ce
mot, les conflits d'intérêts possibles. Alors, c'est vrai qu'il ne
faudrait pas encore ici, par deux ou trois articles, dire aux agriculteurs et
aux agricultrices qui se donnent
des moyens pour mieux mettre en marché leurs produits: Bien
là, vous autres - je vais utiliser le terme du président de l'UPA
- il faut que vous soyez encore plus catholiques que le pape, puis on
présume que vous faites toutes sortes de choses, et on va vous
l'interdire en vous enlevant les moyens que vous êtes capables de vous
donner aujourd'hui.
À l'intérieur de ces moyens, dans la présentation,
j'ai posé une interrogation sur la formule des plans conjoints, qui a
fait développer l'agriculture d'une façon extraordinaire, qui a
eu sa raison d'être, qui a encore sa raison d'être aujourd'hui,
c'est indiscutable. Alors, j'aimerais ça vous entendre nous expliquer
comment cette formule pourrait être améliorée, pourrait
être amendée. Il y a toujours de la place pour
amélioration. Pourquoi les producteurs se sentent-ils obligés de
se former des compagnies pour mettre en marché leurs produits ou
regrouper leurs produits, pendant que la même loi, qui autorise les
producteurs à se donner des agences de vente, est inefficace? Ou bien,
c'est qu'ils n'en sont pas capables, dans certains secteurs? J'aimerais
ça que vous nous disiez ce qui fait en sorte que, dans certains
secteurs, l'agence de vente ne peut être mise en place?
M. Proulx: Vous savez, c'est très simple à
expliquer. C'est une question de volonté, c'est une question d'habitude
à créer, etc. Les plans conjoints, c'est administré par
les producteurs. Les producteurs se donnent, par vote, un plan conjoint avec un
certain nombre de pouvoirs. Tu peux te donner un plan conjoint avec tous les
pouvoirs, comme il peut y avoir une multitude de restrictions, parfois qui sont
imposées par les producteurs, d'autres fois qui sont imposées par
d'autres organismes. À partir de là, on est obligés
d'opérer avec ce que, démocratiquement, on s'est donné
comme outils, soit des outils qui sont amputés. Au fur et à
mesure que le temps passe, on vient à bout de rapatrier certains
articles à l'intérieur de ça puis de les mettre en
application, mais ça découle toujours d'une volonté des
gens concernés. C'est ainsi que la loi est faite, puis je pense que
c'est correct que ça soit de môme. Mais pourquoi va-t-on vers des
agences volontaires plutôt que vers des agences obligatoires? Bien, c'est
une question d'habitude, c'est une question d'historique. Vous savez, on prend
toujours l'exemple du lait, mais le lait a une vieille histoire, une
très vieille histoire. Une production que tout le monde faisait au
Québec, il y a à peine quelques années. Il y a une
habitude de créée, il y a des besoins qui se sont fait sentir
avant. On ne peut pas appliquer ça intégralement dans toutes les
productions, parce qu'il y a des habitudes qui se sont perpétuées
dans les générations. Ne demandez pas aux producteurs de boeuf de
s'organiser facilement dans une mise en marché complètement bien
structurée, disciplinée. Qu'est-ce que vous vou- lez? Hs ont une
mentalité de "cattlemen", qui est le désordre, qui est l'ordre
dans le désordre. Alors, ça ne se change pas. Ça a beau
être des Québécois vivant dans un environnement
discipliné, il reste quoi, de ça. Les gènes du
désordre, ils sont là, quand t'es producteur de boeuf. Pour les
producteurs de céréales, c'est la même affaire, c'est un
marché libre. T'as beau être au Québec et puis ne pas tout
consommer, il y a des gènes qui sont là et qui ne sont pas
complètement disparus. Et vous avez ça dans d'autres productions.
C'est pour ça qu'il faut se donner les moyens pour que, graduellement,
les gens apprennent à vivre avec cette discipline-là et en
viennent à la rendre obligatoire. Mais on a essayé, vous le savez
- Me Prégent est là -d'autres ministres antérieurement ont
essayé d'en imposer dans le porc, particulièrement. Vous n'avez
pas fait long feu, avec ça. Vous le savez, vous autres, le
législateur, pour certains, ça n'a même pas pu... Ça
a été sous respiration artificielle pendant un bout de temps,
puis vous avez été obligés de le "déplugger". C'est
ça que ça a donné, parce que vous l'avez imposé
légalement. Alors, on vous dis, nous: On a trouvé une formule qui
est loin d'être parfaite et puis qui a certains risques, mais qui donne
le goût. Et la plus belle preuve, M. Chabot vous l'a donnée tout
à l'heure. C'est une première expérience, les gens vont
prendre le goût, ils vont s'impliquer, mais ils ne veulent pas être
limités dans leur implication. Vous l'avez, vous allez l'avoir dans les
producteurs de bois, et je ne vois pas ce qu'il y a de catastrophique, parce
qu'un organisme collectif, qui est là, travaille et incite ou est
imaginatif pour améliorer la situation de l'ensemble, mais qui, pendant
un certain temps, va utiliser juste un petit nombre. C'est ça. Je suis
peut-être un peu long, là, mais c'est un peu ça, c'est une
question de gènes, une question d'histoire, et il faut que tu les
inculques, que tu les éduques, les gens, il faut qu'ils apprennent.
M. Baril: Vous avez fait mention, M. le président, que le
gouvernement avait déjà imposé un plan conjoint dans le
porc. Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais c'était
à la demande de la Fédération ou de l'UPA parce que, elle,
au préalable, n'avait pas été capable, justement - je ne
sais pas si on peut dire...
M. Pagé: ...mon cher collègue, je me proposais de
le dire...
M. Baril: ...démocratiquement...
M. Pagé: ...non pas pour défendre mon
prédécesseur, mais c'est une demande de l'Union des producteurs
agricoles.
M. Baril: Bien c'est ça, c'est ça que je dis.
M. Pagé: Ça n'a pas été pondu,
ça, au
hasard dans le parlement.
M. Proulx: Je suis d'accord, mais c'est quoi l'expérience?
C'est la somme des erreurs qu'on ne recommet pas.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Proulx: Alors, comme on en a commis une là, en vous
demandant ça, on ne peut pas en commettre à nouveau.
M. Baril: Remarquez bien que je ne voulais pas vous faire une
réprimande, parce qu'à l'époque j'étais au
gouvernement et que justement, à l'intérieur de mon caucus,
j'étais contre l'obligation de vous obliger à cette formule de
plan conjoint, parce que je me disais: Un plan conjoint, ça s'implante
quand la majorité des producteurs le veulent. Bon. Et ce qu'il a fallu
corriger à l'époque, c'était le pourcentage du vote -
là, je ne me rappelle plus exactement - que ça prenait pour que
ce plan conjoint s'applique. Et, c'est après modification que la
Fédération a réussi à se donner un plan conjoint,
puis aujourd'hui on sait quand même où en est le fonctionnement de
ce plan. Je comprends votre explication, là, mais c'est quoi, comment,
comment pourrait-on... C'est peut-être des normes qui seraient à
modifier. C'est quoi qu'une agence de vente ne peut pas faire, puis c'est quoi
qu'une compagnie, qu'un groupe de producteurs qui se forment une compagnie ont
le droit de faire? C'est ça, ma question.
M. Proulx: Ah! ils peuvent tout faire, ils peuvent tout faire.
C'est rien qu'une question de: tu pars ou tu ne pars pas. Une question de: tu
tournes la clef, tu accélères, ou tu ne la tournes pas, la clef.
C'est rien que ça la différence, parce qu'ils peuvent se donner
toute la même chose dans les deux. Il faut que le problème, c'est
que tu décides de partir ou non, c'est la seule différence. Ou tu
restes face au mur qui est là, ou tu décides de faire un
détour pour aller derrière le mur. Et parfois, il vaut mieux
faire un détour pour aller voir derrière le mur, pour revenir
dire aux autres que c'est intéressant, de l'autre bord du mur. C'est
ça, en fait, l'agence volontaire, parce qu'elle ne se donne pas plus de
pouvoirs qu'une obligatoire. Elle fait exactement le même travail mais
avec un groupe qui est tanné d'attendre, des fois, qui est prêt
à risquer un certain nombre de choses. (12 h 30)
M. Chabot: Si je peux ajouter. En tout cas, de la manière
que je la vois, l'agence de vente, ça sert de rampe de lancement. En
tout cas, dans le grain, c'est de même que je la vois, moi, là.
Comme Jacques l'a souligné, ça donne le temps à tout le
monde de s'ajuster: les producteurs, et le commerce aussi s'ajuste à
ça. Je pense qu'on était réaliste quand on a mis en place
Cérégrains, nous autres. On a dit: On ne peut pas prendre tout le
volume d'un coup sec parce qu'il faut que le producteur s'ajuste à ce
nouveau mode de mise en marché parce qu'il regroupe son offre dans
Cérégrains, mais aussi il faut penser à l'autre bord. Il
faut penser que l'intervenant qui est important pour nous autres, c'est le
commerce. C'est lui qui l'achète, notre grain. C'est lui qui le dirige
dans le marché au Québec. Ça aussi, c'est important pour
nous autres.. C'est pour ça que tout le monde va pouvoir s'ajuster.
Cérégrains, la mise en place, on ne vient pas se battre contre
aucun intervenant dans le marché. On prend notre place comme producteur
et, graduellement, on redonne la première place à notre grain.
C'est ça, l'objectif qu'on se donne. Ça sert de base de
lancement. Comme Jacques l'a dit, c'est bien sûr que l'objectif terminal,
c'est l'agence obligatoire pour tout le monde, c'est bien sûr. On n'a pas
le choix, c'est ça. C'est ça le rêve de tous les
producteurs, parce que c'est là que tu t'assures, au niveau de
l'écoulement de ton produit et au niveau de ton prix, d'aller chercher
le maximum de prix que tu peux obtenir. C'est bien certain qu'on se sert de
ça comme rampe de lancement dans le fond. C'est la réaction que
j'avais à apporter.
Le Président (M. Richard): M. Lechasseur, vous aviez un
commentaire sur la question.
M. Lechasseur: Oui. O.K. C'est un commentaire suite à ce
que M. le ministre Pagé disait tantôt. Moi, je veux vous dire que
je viens d'une petite municipalité du Bas-Saint-Laurent. On a vraiment
un problème, nous autres, actuellement. Je vais vous dire une chose.
Quand on donne un coup de pied, des gens dynamiques, dans une paroisse de 300
ou 400, il n'en sort pas une douzaine. On veut pouvoir continuer à
travailler avec ces gens-là. Moi, je veux simplement vous dire que, bien
sûr, je suis président de mon conseil d'administration chez nous,
mais qu'on voudrait avoir la possibilité de continuer à oeuvrer
ailleurs, sur d'autres conseils d'administration suite aux initiatives qu'on
prend actuellement. Évidemment, de par nos plans conjoints, on a
certains pouvoirs. On peut se donner des outils aussi, des outils de
contrôle au niveau du contingentement, au niveau de l'exclusivité.
Peut-être que si on était mieux outillés, on pourrait
éviter certains conflits. Je suis capable de concevoir qu'il peut y
avoir à l'occasion, oui, certains conflits. Mais essayons de
prévoir des règles. On est capables de vivre avec ça,
éventuellement. C'est ça qu'on vous dit. Il ne faudrait pas
pénaliser une région comme la nôtre qui a
décidé de se prendre en main, parce que je vous le disais
tantôt dans mon intervention, on ne se fie pas uniquement au gouvernement
pour se développer. On a le goût de se prendre en main. On veut
faire quelque chose. On ne
voudrait pas être tassés trop trop non plus, mais on est
capables d'accepter certains compromis, par exemple. C'est tout simplement
ça que je voulais ajouter, M. le Président.
Le Président (M. Richard): M. Proulx.
M. Proulx: Oui. Juste ajouter sur la question de M. Baril aussi
parce que là, j'ai dit: II faut que les producteurs, j'ai donné
beaucoup d'exemples... Il faut tenir compte aussi du marché, qui
détient le marché. Il faut tenir compte qu'il faut que le
marché s'ajuste quand tu entres avec de nouvelles règles aussi.
Dans certains cas, c'était peut-être bien facile de modifier
ça au complet du jour au lendemain. Dans d'autres cas, il y a des choses
d'établies aussi. Il y a d'autres intervenants et ce n'est pas
nécessairement bon de les tasser immédiatement. Il y a quand
môme une expertise à aller chercher là où on doit
essayer de s'ajuster. Les céréales sont un bel exemple. Penser du
jour au lendemain, que vous allez - j'ai parlé à peu près
seulement des producteurs tout à l'heure, mais des "brokers", ou ainsi
de suite, excusez l'expression anglaise, je ne sais pas s'il y en a une
française - les tasser complètement, alors qu'ils sont là
depuis des générations, premièrement, ce n'est pas
faisable et deuxièmement, je ne suis pas certain que ce serait bon de le
faire. Je n'en suis pas certain parce qu'il y a un marché, il y a des
habitudes à d'autres niveaux. Et, graduellement, il faut qu'ils se
disciplinent aussi à ça.
Le Président (M. Richard): Monsieur...
M. Baril: II y avait... Je vais me référer entre
autres actuellement à deux compagnies que les producteurs se sont
données. Vous avez Cérégrains et vous avez Pomexpan aussi.
Bon, on connaît les difficultés que Pomexpan vit malheureusement
aujourd'hui. Et ça, ça fait partie du tout. C'est pour ça
que je vous demande: Pourquoi des producteurs, dans un plan conjoint, ont-ils
le pouvoir de se donner une agence de vente, et qu'ils ne l'utilisent pas? Vous
l'avez expliqué tout à l'heure, pourquoi ils ne l'utilisent pas,
parce que, vous me direz si j'interprète mal votre pensée, ce
n'est pas la majorité qui le veut. Il y en a un petit groupe qui veut se
donner un outil et les autres n'en veulent pas. Bon, il se servent de quoi? Ils
utilisent quoi? Je ne le sais pas, mais en tout cas ils ne l'utilisent pas.
Mais, par contre, quand vous avez l'ensemble des producteurs qui se donnent un
outil de vente, il y a autant de risque, ni plus ni moins dans ça, que
ça fonctionne ou que ça ne fonctionne pas. Et qui paie pour?
Est-ce que c'est l'ensemble des producteurs du secteur donné qui paient
pour ou bien si c'est juste ceux qui font partie de l'agence?
M. Proulx: Bon, écoutez, je suis content que vous
souleviez le cas de Pomexpan, je voulais le soulever tout à l'heure,
mais, comme le président me pressait, j'ai sauté quelques
paragraphes. Je voudrais juste revenir dire que la démocratie est ainsi
faite aussi. Nous, dans notre cas, il faut avoir au-dessus de 50 % pour
détenir le pouvoir. Ce n'est pas nécessairement partout de
même et, dans certaines productions, c'est très difficile parce
que vous avez une multitude de producteurs. Je pourrais vous donner l'exemple
des petites productions, que j'ai soulevé un peu tout à l'heure,
où vous avez à partir du "flatteux" à aller au
professionnel. Et, dans notre démocratie, il faut tenir compte de tout
ça, et vous savez que ce n'est pas facile, les intérêts ne
sont pas pareils du tout.
Le cas de Pomexpan, c'est un très beau cas. Un très beau
cas qui paraît être un échec, et pourtant, je ne dirais pas
qu'il est une réussite, je ne suis pas bête à ce
point-là, mais je dirai quand même qu'il n'est pas un si gros
échec que ça. Il connaît des difficultés, d'accord.
Mais arrêtons de scruter à la loupe ses difficultés et
regardons les bienfaits qu'il a apportés à l'ensemble. Il ne faut
jamais oublier que ça apporte toujours des avantages à
l'ensemble. Pour ceux qui le veulent et pour ceux qui ne le veulent pas, il y a
toujours des retombées autour de ça.
Vous allez me permettre, juste quelques minutes, de vous donner des
chiffres. C'est que le résultat, pour l'ensemble des producteurs, qui a
été obtenu dans la première année d'utilisation de
la marque de commerce est très intéressant. Premièrement,
les gains sur les prix ont été supérieurs de 0.15 $ les 10
livres en 1986 lors d'une période de surproduction. Dans une
période de surproduction, dans ces temps-là, le Québec a
enfoui trois fois moins de pommes de terre, toutes proportions gardées,
par rapport aux années antérieures de surproduction. Et la pomme
de terre du Québec a également repris les tablettes,
jusque-là occupées par les producteurs du Nouveau-Brunswick dans
notre marché. Et non seulement l'ensemble des producteurs a
gagné, mais les gouvernements ont eu leur compte également. Le
prix de l'assurance-stabilisation s'est situé en 1985 à 350 $
l'hectare, alors qu'en 1990, il est à 166 $ l'hectare. Alors, pour un
échec, ce n'est pas si mal. Oui, il y a des difficultés, mais il
faudrait regarder aussi les bienfaits que ça a apportés à
l'ensemble.
Mais ça, il faut que ça soit compris graduellement. Et
bien sûr que c'est toujours plus visible les échecs ou les parties
qui vont mal que les parties qui vont bien. Et assez souvent aussi,
l'importance autour de ça, c'est que la visibilité n'est pas
aussi grande qu'on le voudrait, mais ça a permis, dans certains cas,
d'être peut-être davantage au service de certaines des
régions qui étaient en plus grandes difficultés ou plus
éloignées, ou ainsi de suite. Et ça, tout combiné,
je pense, permet à l'ensemble de l'économie d'en
profiter.
M. Baril: Toujours au niveau des plans conjoints, la formule des
plans conjoints, telle qu'elle est appliquée actuellement, est-ce que,
selon vous, dans certains cas les plans conjoints sont-ils trop contraignants
pour les besoins des producteurs et en fonction des marchés? Et pour
ça ici, entre autres, je veux me référer, parce que
l'ensemble des mémoires parient quand même beaucoup de la
production du lait, des difficultés qu'on vit présentement. La
formule des plans conjoints, selon vous, est-ce qu'elle est contraignante pour
les producteurs et pour l'industrie, en sorte qu'avec les conventions qui ont
été signées, la Fédération est
obligée de diriger le lait aux utilisateurs qui trouvent les
marchés, qui transforment dans les marchés connus où il y
a des débouchés. Et, on entend aussi des industriels, des
transformateurs, qui disent qu'ils pourraient en avoir encore plus si ce
n'était pas de cette fameuse convention de vente. Donc, comment vous
voyez ça actuellement, tel que la formule est appliquée?
M. Proulx: À mon avis les plans conjoints ne sont pas trop
contraignants, et devront possiblement... Il faut s'ajuster constamment. Je
pense que ceux qui sont le plus contraignants, c'est ceux qui ont le plus de
crédibilité, et ceux qui rapportent le plus à l'ensemble
de l'industrie, non seulement aux producteurs, mais aux consommateurs et aux
transformateurs. L'exemple du lait est très pertinent mais on pourrait
en donner d'autres. L'industrie de transformation laitière n'a jamais
tant progressé que depuis, justement, qu'on a un plan conjoint et depuis
qu'on lui a donné des pouvoirs à ce plan conjoint-là.
Regardez l'industrie laitière au Québec, c'est une des plus
performantes. C'est évident qu'il y a des ajustements à apporter,
on est conscients, tous conscients de ça, mais il ne faut pas penser
à les apporter sur le dos d'un groupe en particulier, et vous le savez.
Moi, si j'étais un industriel, c'est évident, amènes-en du
stock, je peux t'en transformer à condition que je ne le paie pas.
Ça, c'est facile. Tu n'as pas besoin d'avoir d'imagination pour
ça, parce qu'on a toujours eu, avant qu'on ait des plans conjoints,
avant qu'on se discipline, qu'on se donne des moyens, des outils et des
pouvoirs, ça a tout le temps eu... Vous le savez qu'est-ce que
c'était l'agriculture il y a 30 ans, 40 ans? Bon, une . agriculture de
misère. C'est après ça qu'on s'est donné des
outils, qu'on a commencé à faire ressortir un peu et puis que
ça a été profitable pour l'ensemble. La même chose
pour le consommateur, on a été capables de livrer du produit, le
meilleur produit au monde, à part cela, au Québec. On en est
fiers, nous autres. Vous autres, vous en êtes fiers d'en parler un peu
partout. Regardez pourquoi notre système est-il imité par une
multitude de pays à l'heure actuelle, même dans des
périodes où on essaie d'abolir toutes les frontières? Je
pense que vous avez un bel exemple et on pourrait faire ça dans un tas
d'autres productions. Il y en a qui ont été obligés de
rajuster, et c'est sûr qu'il faut amener des ajustements, mais le
Québec devra, et ça c'est l'ensemble du Québec, que ce
soit les transformateurs, qu'ils soient coopératifs ou les autres
industriels, ils doivent, s'ils veulent être capables de faire face aux
défis de l'avenir, aux véritables défis, de très
bien se situer, de très bien cibler leurs objectifs à atteindre
et ne pas penser qu'on va être capables de concurrencer les grands
marchés de n'importe quelle façon. On va avoir besoin de
l'ensemble de ceux et celles qui participent à l'économie.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: Juste une petite seconde avant que je l'oublie. Tout
à l'heure, la Fédération a fait mention qu'elle fournirait
des petites modifications techniques à apporter. Est-ce que nous, de
l'Opposition, on pourrait être sur la liste des...
M. Proulx: Certainement, ça nous fait toujours plaisir. Ce
n'est rien qu'un timbre de plus.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Proulx: Non, on va vous faire parvenir certainement les
amendements qu'on pourra déposer dès le début de la
semaine prochaine.
Le Président (M. Richard): Effectivement, vous allez les
expédier, M. Proulx, à la commission...
M. Proulx: Oui...
Le Président (M. Richard): ...qui en fera la
distribution.
M. Proulx: ...et la commission, elle, elle distribue à
tout le monde.
Le Président (M. Richard): Magnifique! Alors, M. le
député de Berthier, vous aviez une question?
M. Houde: Je pourrais peut-être conter une petite anecdote
pour renchérir sur ce que M. le président de l'UPA disait
tantôt. Lorsque j'étais petit gars, le marchand de poules venait
chez nous. Il y en avait deux ou trois par semaine qui venaient acheter des
poules. C'était cinq cennes la livre et, quand il n'y en avait pas qui
passait, il y en avait rien qu'un qui venait et disait: Je vais te les payer
trois cennes ou bien non, elles restent là. Tu sais, c'était
ça avant les plans conjoints. Ma question, M. le président
de...
M. Pagé: C'est la force de l'expérience qui vient
de parler.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Houde: Ma question au président de t'UPA. J'aimerais
savoir votre vision, vos idées, en ce qui concerne la page 20 de votre
mémoire, lorsque vous partez de la récupération des quotas
pour pouvoir les distribuer à la relève. Est-ce que vous voulez
dire par là... Remarquez bien que je ne suis pas contre ça
là, que ce soit les producteurs qui détiennent et non les
personnes qui ne produisent pas. Là-dessus, je suis d'accord avec vous,
mais j'aimerais savoir si, selon vous, la banque rachèterait des quotas
qui sont en disponibilité, qui ne sont pas utilisés par les
producteurs comme tels et, en deuxième, que vous les revendriez à
la relève au prorata des gens qui en détiennent actuellement?
C'est quoi votre...
M. Proulx: En fait, il y a déjà un mouvement. Il y
a déjà des règles, à l'heure actuelle, dans la
production laitière par exemple, où un certain pourcentage quand
on vend un quota est mis en réserve pour être mis à la
disposition de ceux qui s'établissent, de la relève. Il y a
plusieurs possibilités, je pense, autour de ça. Il s'agirait de
se donner quelques moyens pour . élargir ça. D'ailleurs, il se
fait du travail au niveau de la volaille à l'heure actuelle...
M. Houde: C'est ça. C'est pour ça, là.
M. Proulx: ...et d'autres plans conjoints étudient comment
l'appliquer à leur production à l'heure actuelle. Je pense qu'H y
a une multitude de moyens, mais, là aussi, il ne faut oublier qu'il y a
des droits acquis. Tu sais, je veux dire, tout le monde souhaite...
M. Houde: Oui.
M. Proulx: ...que ça soit uniquement les producteurs. On
peut bien passer une loi ou passer un règlement demain matin, mais vous
savez qu'on va se retrouver devant les tribunaux...
M. Houde: Oui, justement.
M. Proulx: ...et ça ne sortira jamais. Alors, il vaut
mieux essayer de créer des incitatifs et essayer de corriger la
situation le plus vite possible. Tout le monde souhaite que ça soit
possédé entièrement par les producteurs. Je pense qu'il y
a beaucoup d'efforts qui ont été faits au cours des
dernières années pour que ça en vienne là, mais, en
même temps... Je pourrais vous donner dos exemples dans certaines
productions, de la volaille entre autres, où on a offert, dans certaines
régions, du quota. Les coopéra- tives qui en possèdent ont
offert du quota à un prix très abordable et même pas de
prix, je veux dire avec des ententes, et elles n'ont pas trouvé preneur.
C'est bien beau de dire qu'il faut que ça appartienne, mais une fois que
t'a émis que c'était ça la beauté, il faut que tu
sois capable de le réaliser. Il n'y a pas preneur. Qu'est-ce que tu fais
à partir de là? Je veux dire... Il y a tout ça, il y a
toute une question d'économie régionale, aussi. On pourrait bien
dire demain matin, je vais prendre le Lac-Saint-Jean, entre autres, ou
d'autres, qui est un bel exemple, une région périphérique
qui a absolument besoin de tout ça, parce qu'il n'y a pas preneur et
qu'on défend, par exemple, à la coopération d'exploiter
ses quotas, vous venez de faire baisser drôlement l'économie.
Alors, essayons de trouver des politiques incitatives, que ce soit pour les
producteurs. (12 h 45)
Je pense que là, il s'est fait, quand même, au cours des
dernières années, des améliorations importantes. Il y a eu
des améliorations et il y a eu une reprise en main des quotas par les
producteurs. Malheureusement, il y a encore certains quotas dans les mains
de... Mais c'est loin d'être catastrophique.
M. Houde: Et c'est ma deuxième question, M. le
Président, elle s'adresse à M. Chabot. J'aimerais savoir le
pourcentage de volume de vos 203 producteurs, à l'intérieur du
Québec, il se situe où? À10 %, 15 %, 20 %, 25 %?
M. Chabot: Au niveau du maïs, il y a 12 % du volume qui sont
mis en marché, 12 % à 15 % qui vont être mis en
marché par Cérégrains. C'est le volume de grains qui se
met en marché. Il se produit tout près de 1 000 000 de tonnes de
maïs, au Québec, mais il y en a gros qui est produit et
"autoconsommé". Actuellement, le volume de Cérégrains, en
tout cas, il est un peu secret, parce que ça s'affaiblit au niveau du
marché. Mais ça représente entre 12 % et 15 % du volume
qui se met en marché. Ça veut dire qu'il n'est pas tout seul
à vendre.
M. Houde: Merci beaucoup.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: Oui. J'aimerais vous entendre sur la
nécessité des chambres de coordination. Quel rôle vous
voyez à l'intérieur de vos fédérations? Quel
rôle vous voyez y jouer et ce que ce rôle doit être? Les
chambres de coordination, quel pouvoir doivent-elles avoir? Est-ce efficace,
est-ce nécessaire, est-ce obligatoire? Quel rôle?
M. Proulx: Bon, écoutez. Nous autres, on est bien
prêts à les accepter, comme on a dit, à condition qu'on
définisse très clairement leur
rôle à jouer. Est-ce là une nécessité
absolue pour le bon fonctionnement? On ne se battra pas bien bien fort pour les
avoir. On n'est pas contre, mais elle pourrait jouer un rôle fort
possiblement. Je pense que c'est plus ou moins clair, à l'heure
actuelle, dans le projet de loi ou que ça peut porter à
ambiguïté. Je ne suis pas capable d'élaborer bien plus sur
ça.
Ce serait plus un rôle de conciliateur ou, je ne sais pas,
d'essayer de faire des consensus. Mais il faudrait tout le temps que les
parties impliquées, concernées, soient en priorité
à l'intérieur de ça, soient eux et elles, il ne faudrait
pas essayer de faire régler, comme je l'ai dit tout à l'heure,
les problèmes que d'autres ne veulent pas porter pour toutes sortes de
raisons, essayer de faire régler ça par ça et par des
intermédiaires. Ça, il ne faudrait pas tomber dans ce
panneau-là. Mais il y aurait peut-être un rôle de meilleure
compréhension, meilleure concertation ou d'essayer de donner certaines
directives. Peut-être un rôle à ce niveau-là, mais
qui pourrait aussi, je pense, à l'examiner plus en profondeur,
être fait par d'autres organismes déjà en place, aussi.
M. Baril: Parce que, dans le projet de loi 15, le ministre en
fait un intérêt majeur, la création de cette chambre de
coordination et, à l'intérieur du projet de loi, à
l'article 112, on donne toute une série de rôles à jouer et
c'est là-dessus - remarquez que je ne veux pas insister non plus - que
j'aurais aimé vous entendre parler. Est-ce que le rôle qui lui est
dévolu par la loi, c'est assez, ce n'est pas assez, c'est
nécessaire, c'est essentiel?
M. Proulx: La seule chose que je pourrais vous dire sur
ça, c'est que, puis je l'ai dit tout à l'heure, il ne faudra pas
que ce soit des chambres qui vont imposer des choses. Elles ne pourront pas
imposer des choses, sinon ça ne fonctionnera pas. Je pense qu'il faut
que, comme producteurs, comme organismes représentant des producteurs,
on ait un droit de veto vis-à-vis de ça. Et s'il y a un retrait
des pâlies qui sont concernées par ce qu'on discute, ça ne
doit pas avoir la possibilité d'imposer, absolument pas.
M. Baril: À la page 19, vous mentionnez les petites
productions. Il faudrait voir à conserver, à améliorer,
à aider, à supporter - ou trouver toutes sortes de qualificatifs,
là - les petites productions. Comment vous voyez ça, vos petites
productions? Dans le bas de la page 19, là: "Nous aurions
souhaité retrouver dans cette nouvelle loi des dispositions
particulières mieux adaptées à la réalité et
au contexte que nous appelons les petites productions."
M. Proulx: Bien, c'est parce qu'il faut faire attention de ne pas
essayer de généraliser, il faut rendre un certain nombre de
règlements assez souples, et ainsi de suite. J'ai commencé
à vous en donner un exemple, tout à l'heure, un peu, dans
certains élevages où vous avez du monde qui vont avoir, par
exemple, deux ou trois mères lapins, puis vous en avez d'autres qui vont
en avoir 600. Ils n'ont pas les mêmes intérêts. Vous avez la
même chose dans l'élevage de l'agneau et du mouton: vous avez
quelques "flatteux" de lapins à 10 ou 12 brebis; vous en avez d'autres
qui en ont 900, 1000 ou 600. Tu n'as pas les mêmes intérêts.
Si tu es professionnel puis que tu as un petit lopin de terre puis, bon, tu as
le goût d'être un petit peu fermier, bien, tu t'en foutes bien: tu
décides de prendre des vacances, tu envoies tes moutons à
l'abattoir, pas de problème, le prix, ça ne t'intéresse
pas. Mais quand tu en vis puis que tu as des paiements a faire, c'est toute une
différence, sauf que, dans notre démocratie, c'est tout bien
correct. Je ne voudrais pas contester ça, c'est pour ça qu'il
faudrait rendre un certain nombre de règles un peu plus souples: il ne
faudrait pas traiter ce monde-là sur un pied d'égalité,
parce que, là, ça ne marche plus et c'est là qu'on a des
problèmes majeurs avec ce genre de production-là: que ce soit la
chèvre, le lapin, les cailles, que ce soit... Ce n'est pas mauvais en
soi que des gens aient - je peux paraître drôle, je ne suis pas
négatif - 10, 12, 20 ou 50 brebis, sauf que tu n'as pas les mêmes
intérêts, encore une fois. Et, par l'obligation très
sévère de se donner des moyens, à un moment donné,
ou un plan conjoint, le pouvoir est aussi fort à l'égard de
quelqu'un qui possède 10 chèvres ou bien qui possède 300
chèvres, ou 20 brebis, puis qui en possède 900. C'est là
que ça n'a plus d'allure puis que tu ne te donnes plus les mêmes
moyens. Vous allez dire que je vais aux extrêmes, mais c'est ça
qu'on vit dans ces productions-là. Les lapins - c'est le plus bel
exemple - c'est combien d'essais qu'il y a eus, par exemple, par des
producteurs qui ont voulu véritablement en vivre, et même avec de
l'aide substantielle de l'État, ça a presque toujours
été des échecs, justement parce que vous vous retrouvez
avec du monde qui élèvent des lapins dans leurs caves, dans la
cour en arrière l'été, puis, à un moment
donné, ils les échappent, c'est tout le monde qui en
hérite, puis tu te retrouves avec des producteurs qui ont investi des
centaines de milliers de dollars et des centaines de milliers de dollars dans
du professionnalisme d'éleveurs à ce niveau-là, et qui se
retrouvent dans la rue. Eux autres, les échapper, ça cause un
problème.
Le Président (M. Richard): M. le ministre.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Seulement quelques
commentaires avant de compléter nos travaux. D'abord, pour le Syndicat
des producteurs de bois du Bas-Saint-Laurent, je tiens à exprimer que
c'est avec intérêt, avec beaucoup
d'attention, que je comprends vos préoccupations,
vos inquiétudes, et la rareté de la ressource forestière,
le déséquilibre aussi entre les utilisations, les
références aux résineux ou aux feuillus. La
rétrocession des concessions forestières, tout ça doit
nous conduire à une utilisation véritablement optimale de notre
ressource. Je suis bien conscient, moi, pour être un député
d'une région, que nos syndicats ont un rôle éminemment
important à jouer dans la mise en marché du bois au niveau des
régions, non seulement au bénéfice de leurs membres, pour
une gestion peut-être plus rigoureuse des stocks, etc., mais aussi au
niveau de l'économie régionale, de l'impact sur l'économie
régionale. On prend bonne note de vos commentaires, et n'allez pas
croire que les dispositions prévues aux articles auxquels nous nous
référions tantôt et sur lesquels on a passé quand
même pas mal de temps ce matin, ce n'est pas, je le répète,
ce n'est pas... Le gouvernement et le ministre ne sont pas animés par
une volonté de freiner ce mouvement qui, selon moi, est
irréversible, et c'est bien qu'il en soit ainsi, que les producteurs
aillent uniquement au-delà de l'agence de vente. Cependant, sur la
notion de conflit d'intérêts, j'ai bien hâte de recevoir vos
propositions, parce que, il ne faut pas se faire de cachette, lorsqu'une
fédération est accréditée pour représenter
l'ensemble des producteurs, eHe a des pouvoirs de réglementation, elle a
des pouvoirs très étendus, et c'est bien qu'il en soit ainsi,
ça a fait sa preuve dans le passé, cependant elle a aussi des
pouvoirs de négociation et, si on y chapeaute une agence qu'on dit
volontaire, il y a un danger de conflit d'intérêts parce que les
mêmes gens risquent de se retrouver dans la situation où ils
devront négocier finalement avec leurs concurrents. Et il y a des
risques énormes de placer les administrateurs en conflit
d'intérêts et uttimement de placer l'ensemble des producteurs soit
de l'agence volontaire, soit de l'agence obligatoire, dans des situations
délicates et périlleuses. Exemple concret: il faut appeler les
choses par ce qu'elles sont. La question fondamentale, c'est qui paie quoi? Si
tous les producteurs dans le cadre d'une agence obligatoire de
représentation, fédération, tous les producteurs sont
obligés d'y participer, il y a des prélèvements, etc.
Quand le complément de l'activité est sous le chapeau d'une
agence volontaire de membres de cette fédération-là qui
décident d'investir pour transformer, conditionner, peu importe le
produit, le mettre en marché directement, il y a des risques
énormes de conflit d'intérêts. Exemple: que la
fédération garantisse un emprunt à l'agence volontaire.
Alors, l'objectif qui m'anime, moi, comme ministre, c'est de préciser
les règles du jeu pour que la partie soit claire pour tout le monde. Et
on va tenter au cours des prochaines semaines de voir jusqu'où on peut
concilier l'objectif qui nous anime et l'objectif que vous recherchez parce
qu'on ne voudrait pas qu'ultimement, ça débouche sur des
situations de recul. Mais l'objectif de continuer à avancer dans cette
démarche ne doit pas être interprété comme voulant
dire une caution du gouvernement à des structures pouvant être
l'objet de conflit d'intérêts au niveau des opérations.
Dernière question, très brièvement, M.
le Président. Vous vous référez dans le document à
l'article 13 de la loi actuelle, non pas du projet de loi 15 mais à
l'article 13 de la loi, appelons-la la future ancienne loi, si je peux utiliser
le terme, où l'ensemble des intervenants ont un pouvoir d'appel
auprès du Conseil des ministres. J'ai été informé
de la petite histoire de comment ça avait été écrit
à l'époque. Un jeune et brillant avocat de la Régie avait
assisté à tout ça et c'était assez
caractéristique, pourquoi le gouvernement s'était donné ce
pouvoir d'appel. Il a été utilisé lui aussi avec prudence
et parcimonie. Depuis 15 ans, je pense qu'il a été utilisé
peut-être seulement une fois. Je n'ai pas donné suite à de
nombreuses requêtes qui ont été adressées au cabinet
- parce qu'on s'adresse au cabinet à ce moment-là - demandant au
gouvernement de se prévaloir des dispositions de l'article 13 pour
modifier une décision de la Régie. Mes recommandations comme
ministre de l'Agriculture depuis le 12 décembre ont toujours
été de recommander au Conseil de ne pas donner suite à ces
requêtes. D'ailleurs, entre guillemets, il n'y a aucun mécanisme
d'appel. À ma connaissance, il n'y a aucun mécanisme formel
venant encadrer l'audition, par le Conseil des ministres, d'un citoyen ou d'un
groupe de citoyens. Je ne vois pas comment le cabinet de quelque gouvernement
que ce soit pourrait établir un tel mécanisme de comparution, de
plaidoirie et de représentation. Ça ne fonctionnerait plus, cette
affaire-là. Alors, cela étant dit. nous, dans le texte qui est
proposé, on recommande que la décision de la Régie soit
une décision finale, bon, etc. Vous nous demandez de rétablir
l'article 13. Dois-je comprendre que vous nous demandez que le gouvernement se
garde le pouvoir d'intervenir via une décision du cabinet pour modifier
une décision de la Régie, de son propre chef, ou si vous nous
demandez de maintenir le mécanisme d'appel qui, à partir du
moment où il est là tel que rédigé dans la loi,
crée espoir? Il crée espoir. Exemple concret: dans le fameux
débat sur les coopératives actuellement, il y a des gens qui
croyaient très sincèrement qu'ils seraient entendus par le
Conseil des ministres en séance à part ça. Je pense que
ça s'est même dit dans certaines réunions. Vous demandez la
reconduction mutatis mutandis, si je peux utiliser le terme, de la même
chose que ce qu'il y a dans la loi actuelle ou vous demandez qu'il n'y ait pas
de droit d'appel comme tel et plutôt que le gouvernement ait le droit
d'intervenir de son propre chef pour modifier une décision, comme - si
ma mémoire
est fidèle - ça a déjà été
fait dans le cas du prix du lait. Ça a été fait deux fois
dans le cas du prix du lait. (13 heures)
M. Proulx: Écoutez, je me fous un peu des
mécanismes, de quelle façon vous aller y arriver. Nous, ce que
nous voulons, c'est que l'État garde le pouvoir d'intervenir, sans
être obligé de faire tout un bouleversement abominable dans une
situation x. Mettons ça bien clair, je suis d'accord avec vous, il ne
faut pas, encore une fois, que ce soit utilisé pour atténuer ou
pour ôter des responsabilités à quelques groupes ou
à quelques instances juridiques que vous avez mis. Donnez plus de
pouvoir à la Régie et les moyens pour qu'elle les exerce, et on
va dire bravo. Donnez-lui tous les moyens pour que vous n'ayez jamais à
intervenir comme Conseil des ministres, comme gouvernement, bravo. Sauf que,
pour nous, l'État, c'est suprême. Ce sont des élus, ce sont
des gens qui sont obligés de revenir devant le peuple. Ils sont
obligés de se faire élire pour rendre compte de leurs actions.
Pour nous, il reste important, quand il arrivera des situations, que
l'État soit capable d'intervenir. Le mécanisme, mais vous
m'excuserez, mais l'un ou l'autre, je ne vois pas tellement la
différence. Je suis certain qu'il y en a. Pour nous, c'est ça qui
est important. On ne voudrait pas être obligés, advenant une
situation catastrophique, un jour, que l'État soit obligé de
tenir - je donne des exemples qui sont peut-être farfelus - une
série d'audiences, de commissions, qu'il soit obligé de voter un
règlement, et ainsi de suite. On ne voudrait pas ça. Qu'il se
donne donc en même temps qu'il l'adopte, que ce soit comme c'était
avant ou une nouvelle version, pour essayer de donner plus de
responsabilités à ses mécanismes. Je pense que c'est
ça. Pour nous, il serait important que la Régie... Il y a des
propositions qui nous plaisent. Je pense qu'on l'a souligné souvent que
la Régie ait davantage le pouvoir et les moyens d'appliquer son pouvoir
pour essayer d'accélérer. Parce que ça nous pose
énormément de problèmes à l'heure actuelle. Trop
souvent, soit qu'elle n'a pas les moyens ou qu'elle ne rend pas les sentences,
et un petit groupe de producteurs va neutraliser une action collective. C'est
tout ça qui nous a amené ça, pour différentes
autres demandes.
Directement votre question, pour nous, il reste essentiel que
l'État se garde, tout comme on veut que... C'est bien pire avec
l'article 2, où là vous créez tout le temps beaucoup
d'espoir et ça crée beaucoup de problèmes. Vous êtes
souvent, dans des négociations tripartites, obligés de discuter
à trois paliers différents, ce qui n'accélère pas
les choses. Celui-là vous pouvez le biffer, je pense que ça
rendrait service à tout le monde. L'autre c'est important que vous le
gardiez.
M. Pagé: Merci.
Le Président (M. Richard): Maintenant, M. le
député d'Arthabaska, est-ce que vous avez un commentaire final
pour remercier nos gens?
M. Baril: En terminant, je remercie les représentants des
fédérations de venir nous faire part de leurs commentaires. Soyez
assurés que nous, de ce côté de la table, on va essayer de
collaborer le plus possible avec le ministre et son équipe pour faire un
projet de loi qui réponde aux besoins du milieu.
Le Président (M. Richard): M. le ministre.
M. Pagé: Je vais remercier les Intervenants de ce matin.
Merci beaucoup. On se reparle.
Le Président (M. Richard): Merci, messieurs. Nous
suspendons les travaux. Nous revenons au travail après les affaires
courantes, donc vers 15 h 15.
(Suspension de la séance à 13 h 4)
(Reprise à 15 h 34)
Le Président (M. Richard): Je vous rappelle que le mandat
de notre commission est de tenir une consultation générale dans
le cadre de l'étude du projet de loi 15, Loi sur la mise en
marché des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres
dispositions législatives. Nous en sommes à l'audition des
groupes. Nous recevons - et nous vous souhaitons la bienvenue, messieurs - la
Fédération de l'UPA de Sherbrooke. Pour la mécanique, je
demanderais au porte-parole de s'identifier et d'identifier aussi les personnes
qui l'accompagnent. Par la suite, vous présenterez votre mémoire.
Vous avez la parole.
Fédération de l'UPA de
Sherbrooke
M. Blais (Jacques): Je me présente, Jacques Blais,
président de la Fédération de l'UPA de l'Estrie, depuis
quelque temps. J'ai, à ma droite, M. Clément Lanoue, qui est
secrétaire de la Fédération, M. Roger Couture,
deuxième vice-président de la Fédération, ainsi que
M. Gérald Routhier, membre de l'exécutif. Clément va lire
le mémoire, la partie où on demande des changements. Après
ça, si c'est votre volonté, on va poursuivre avec la
période de questions.
Le Président (M. Richard): Magnifique! Vous avez la
parole.
M. Lanoue (Clément): Merci. La Fédération de
l'UPA de Sherbrooke représente plus de 4300 producteurs sur son
territoire. Elle est composée de 11 syndicats de secteurs de base et de
10 syndicats spécialisés. Il fait partie de notre
mandat, et ceci est même de notre devoir, de s'assurer que les
différentes lois proposées par le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation répondent aux besoins des
producteurs. Nous devons nous assurer que les lois sont Justes et
équitables pour tous les groupes de producteurs oeuvrant dans les
différentes productions.
La loi sur la mise en marché des produits agricoles et
alimentaires est primordiale et d'une très grande importance, car elle
nous permet d'organiser notre mise en marché. Cela doit cependant se
faire de façon que chaque producteur puisse être partie prenante
et qu'il ne soit lésé en aucun moment. Nous désirons donc
intervenir à la commission parlementaire sur le projet de loi 15, afin
de pouvoir exprimer nos opinions, car, même si certains amendements
à la loi sont positifs pour les agriculteurs, d'autres nous laissent
dans le doute. Ainsi, certains ajouts à la loi n'améliorent en
rien les pouvoirs de la Régie. Vont-Us encore trancher le gâteau
en deux lors de litiges ou bien peuvent-ils réellement remplir les
fonctions pour lesquelles cet organisme a été mis en place? Dans
le court mémoire qui suit, nous reprenons les articles où nous
jugeons utile d'intervenir. Pour nous, cette approche est positive et nous
espérons qu'elle éclairera davantage les débats qui
suivront. Les producteurs et productrices, et l'agriculture en
général, n'en seront que mieux servis.
Nous allons nous permettre de faire seulement la lecture de nos
recommandations, étant donné que le temps est limité. Nous
demandons donc au législateur d'ajouter à l'article 5,
après "La Régie a pour fonction générale", les mots
"et se doit". Dans la présente loi, nous constatons que, quand nous nous
adressons à un office ou à la Régie, la recommandation est
intitulée: "L'office ou la Régie peut." Si vous remarquez, dans
la loi, il y a beaucoup de "peut": peut être, peut décider, peut
l'oublier, ne peut rien faire et ne peut rien voir. À notre avis,
à beaucoup d'endroits, nous pourrions remplacer le mot "peut" par "doit"
ou "se doit".
À l'article 6, nous demandons au législateur d'ajouter,
après "La Régie peut siéger à tout endroit au
Québec", les mots "et être poursuivie de la même
façon". Sur cet article, nous avons une jurisprudence: dans l'affaire
des six.
À la page 3, nous demandons de radier le deuxième
paragraphe de l'article 31. Nous ne sommes pas d'accord pour mettre une trop
grande importance aux autres intervenants, car, par exemple; est-ce que nous
avons notre mot à dire, est-ce que nous sommes invités lorsque le
Barreau, l'Ordre des agronomes, le Collège des médecins, etc.
prennent une décision qui nous touche, nous, à titre de
consommateurs?
Aux articles 39 et 106, nous sommes d'accord pour qu'il y ait un ordre
de donné à l'office, afin qu'il ne puisse en aucune façon
utiliser les contributions perçues pour financer une entreprise
commerciale. Cependant, au deuxième paragraphe de l'article 39, nous
demandons au législateur d'ajouter, après "les producteurs
visés par ce plan doivent, dans un délai déterminé
par la Régie", les mots "n'excédant pas trois mois".
À l'article 41, nous demandons au législateur d'ajouter,
après "favorisent une mise en marché efficace et
ordonnée", les mots "juste et équitable pour tous les
producteurs". Le mot "ordonnée" a été omis. On demande
aussi de rayer les mots suivants: "ordonnée du produit visé".
à la page 4, nous sommes d'accord avec les articles 60 et 203 qui
empêchent un administrateur d'être assis sur deux chaises en
même temps. pour ce qui est de l'article 91, il était temps de
mettre un frein à la propagation de ce régime féodal.
cependant, quant à l'article 206, nous demandons au gouvernement de m.
robert bourassa de ne pas inscrire cet article 206 et de prendre ses
responsabilités en décrétant que les quotas soient dans
les mains de ceux qui les produisaient au 1er janvier 1989 et, ensuite,
d'établir une politique pour que les producteurs paient leur droit de
produire à un prix abordable, basé sur le nombre d'années
qu'ils ont payé de la location. ainsi, les producteurs auront la
liberté d'acheter leurs intrants là où ils le jugeront
bon. nous ne pouvons, en effet, comprendre que l'on veuille accorder un
privilège à des gens qui, depuis de très nombreuses
années, ont exploité les producteurs en leur faisant payer un
droit pour produire.
Pour ce qui est de l'article 92, nous demandons au législateur
que le deuxième paragraphe soit rayé, afin de ne pas inviter les
négociateurs à négocier des prix inéquitables pour
certains producteurs. S'il y a impossibilité d'établir des
offices provinciaux selon les règles, nous travaillerons avec les
offices régionaux. Nous demandons aussi au législateur de
modifier l'article 94 pour qu'il se lise comme suit: "Un office peut, par
règlement, à l'égard du produit visé par le plan
qu'il applique, établir une procédure de mise en vente en commun.
Il doit faire en sorte que les producteurs reçoivent, déduction
faite de tout ou partie des frais de mise en marché
déterminés par l'office, le même prix pour un produit
identique, de même quantité et d'égale qualité, mis
en marché pendant une période déterminée, et ce,
indépendamment des marchés de l'office, de la variation du prix
de vente pour des causes étrangères à la valeur propre du
produit." Cela renforcerait la loi et aiderait à abolir le régime
le plus inéquitable de l'Amérique du Nord.
Cependant, si nous faisons référence à l'article
205 qui devrait faire suite, nous demandons au législateur de ne pas
adopter cet article avant que la Cour d'appel se prononce sur le
problème de fond qui lui a été soumis par les six
producteurs qui veulent vérifier la validité de
certains règlements de la fédération du lait du
Québec. Si le gouvernement de M. Robert Bourassa veut, par l'article
205, justifier ou légaliser les antécédents de la
Régie et de la fédération du lait du Québec, il
devrait avoir l'honnêteté et le courage politique de casser le
système en faisant un pool de lait au Québec. Ensuite, nous lui
demandons d'établir, avec la fédération du lait, une
politique pour que les producteurs qui ont été traités
injustement dans les transferts et les non-transferts de quotas depuis trois
ans, soient dédommagés.
Pour l'article 96, nous demandons au législateur un ajout qui se
lirait comme suit: "Avant de publier tout règlement, elle se doit d'en
vérifier la légalité." Il n'y a, en effet, rien dans la
loi qui stipule que, lorsque la Régie a des doutes sur la
validité d'un règlement, elle doit le refuser, éclaircir
la validité du règlement et ne devrait pas, comme nous l'avons vu
déjà, dire: On n'administre pas le plan conjoint.
Quant au chapitre XII sur la chambre de coordination et de
développement, nous demandons au législateur de ne pas
l'insérer dans la loi. Nous croyons que les problèmes de mise en
marché doivent se régler à court terme. Les producteurs
n'ont pas les moyens de régler les problèmes à long terme,
car, quand un problème est réglé à trop long terme,
nous voyons apparaître des faillites de production. Pour nous, la chambre
de coordination et de développement a le pouvoir de mettre des
bâtons dans les roues de nos offices, en ce qui concerne leur bon
fonctionnement. À notre avis, une chambre de coordination ne peut servir
l'agriculteur et l'agriculture, quand nous pensons que, dans son mandat, elle
rende compte seulement une fois l'an de ses activités. Nous voyons que
le gouvernement est prêt à lui confier des mandats à
l'article 118, mais quels mandats?
En plus, nous croyons que la loi est trop importante. C'est elle qui
permet à nos producteurs d'obliger les transformateurs à
négocier pour un produit déterminé. Nous ne voulons pas
que ces messieurs s'intègrent dans l'administration de nos offices, de
nos quotas, en affaiblissant nos droits. Pour nous, la loi sur la mise en
marché est importante pour le producteur, comme la Loi sur les normes du
travail pour le travailleur. (15 h 45)
Nous constatons que la Régie "peut", alors nous espérons
que le mot "chambre" va disparaître. Si le mot "chambre" est maintenu, la
chambre, le gouvernement et la Régie auraient plus de pouvoirs que les
producteurs concernés.
Alors, nous vous remercions, nous remercions la commission parlementaire
d'avoir bien voulu nous entendre et nous espérons que le
législateur prendra en considération nos demandes en n'oubliant
pas que la tolérance qui résulte de l'apathie ou de la paresse
mène à l'anarchie et à la révolte. La
véritable tolé- rance est issue du coeur et de l'intelligence.
Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, M. Lanoue. M. le
ministre.
M. Pagé: Alors, M. le Président, je remercie les
représentants de la Fédération de l'Union des producteurs
agricoles de Sherbrooke, M. Blais et ses collègues. C'est avec beaucoup
d'intérêt que nous prenons connaissance de votre mémoire,
de votre présentation, laquelle d'ailleurs se distingue des autres car,
sur deux sujets importants, vous adoptez, comme fédération
régionale, une position contraire et diamétralement
opposée à la Confédération de l'Union des
producteurs agricoles.
Ainsi, vous nous appuyez en ce qui concerne l'interdiction qui est faite
aux offices de s'engager dans la transformation et le commerce, et aux
administrateurs d'être à la fois administrateurs d'offices et
d'entreprises, d'agences dites volontaires. Vous vous opposez, de plus,
à la création des chambres de coordination et de
développement, qui sont prévues dans ce projet. Ça me
permettra, tout au moins, d'indiquer tout à l'heure à nos bons
amis de l'Union d'entraide des agriculteurs qu'il y a de la démocratie
dans l'UPA.
Une voix: Bon...
M. Pagé: Je n'ai pas fini. C'était un commentaire
initial. Vous savez que le ministre a beaucoup d'affection pour la
Fédération de l'Union des producteurs agricoles de Sherbrooke,
non pas parce qu'elle est souvent en opposition avec l'UPA provinciale, ce
n'est pas ça, mais parce qu'elle est particulière. Il y a
toujours eu une qualité et une quantité de relations très
valables entre nous, et j'espère que ça va continuer.
Quant à l'interdiction faite aux offices, et
particulièrement à leurs administrateurs, de s'engager dans la
fédération et les agences de vente, on est d'accord
là-dessus. L'objectif qui est poursuivi par le gouvernement c'est qu'on
n'ait pas de situations où des gens, en autorité, ayant des
mandats de leurs membres au sein d'une fédération, se verraient
placer en situation de conflits d'intérêts. C'est l'objectif qu'on
recherche.
Ce matin, avec vos collègues de l'UPA de Longueuil, nous avons
regardé la possibilité de donner un encadrement beaucoup plus
strict à cette problématique, à cette inquiétude
que j'ai quant au danger de conflits d'intérêts, à savoir -
exemple concret - qu'une fédération de producteurs garantisse des
emprunts contractés par une agence de vente, une agence volontaire,
formée par des producteurs, j'en conviens, qui sont membres de la
fédération, mais où ce n'est pas la totalité des
membres de la fédération qui sont membres. Ce sont des questions
comme
celle-là qu'il faut éviter. J'apprécie donc l'appui
très clair que vous donnez au gouvernement du Québec sur le
sujet. quant aux chambres de coordination et de développement, je ne
sais pas si vous étiez ici ce matin, mais j'ai très clairement
indiqué que ce n'étaient pas des organismes qu'on allait
bâtir pour le plaisir de jaser pour jaser. ce n'est pas un club de
placotage. c'est un organisme avec des mandats. ce sont des chambres, des
comités formés par l'ensemble des intervenants, parce que,
pendant trop longtemps, selon nous - et je vous invite à commenter
là-dessus - la régie des marchés agricoles a
été considérée comme un organisme de police entre
les producteurs, pour établir des prix, pour régler des conflits,
etc., alors que la fonction, le mandat, la responsabilité de la
régie des marchés agricoles, dans l'esprit du gouvernement et du
ministre, est d'appliquer la loi en fonction de la gestion des produits, de
l'offre globale des produits et de la mise en marché de ces produits.
qu'elle conserve son mandat de discipline, j'en conviens, mais que la
régie soit davantage orientée aussi vers la mise en marché
des produits comme telle. ça veut dire quoi concrètement?
ça veut dire de tenter de favoriser l'émergence de consensus au
sein de l'industrie ou autour de la même table? la
fédération des producteurs serait assise avec les transformateurs
et avec les gens de la distribution, pour développer de nouveaux
marchés.
Et ça, on l'a vécu. Je pourrais parier pendant trois
quarts d'heure ou une heure, facilement, de ce qu'on a vécu depuis un
certain nombre d'années. On a dû créer ce qu'on appelle des
comités de dynamisation pour faire en sorte que les gens s'assoient
ensemble. Pas plus tard qu'il y a un mois - c'était, si ma
mémoire est fidèle, le 6 ou le 8 février - on a assis
autour de la table, et c'était la première fois que ça se
faisait, la Fédération des producteurs de porcs du Québec,
les entreprises de transformation, les abattoirs, les entreprises de
transformation qui contrôlent, par exemple, une bonne partie du
marché du bacon au Canada. On a assis aussi les distributeurs, les gens
d'Hudon et Deaudelin, de Provigo, de Steinberg, de Métro-Richelieu.
C'était la première fois que ces gens-là s'assoyaient
ensemble. Souventefois, par contre, chacun, individuellement, soulevait des
inquiétudes ou des problèmes sur le comportement du voisin.
Alors, on les a assis tous ensemble, et, à la fin de la journée,
les gens étaient unanimes pour dire que ce type d'exercice était
utile.
Dans le domaine du poulet, on a fait un bon bout de chemin. Toute la
problématique des périodes de production qui étaient
reportées, toute la problématique des primes, ça s'est
réglé comment? Ça s'est réglé par des
comités comme ceux-là. Notre objectif est très simple,
c'est de faire en sorte qu'on soit capables de produire un produit
bioalimentaire au Québec qui réponde exactement aux attentes de
nos consommateurs et qui nous fasse pénétrer dans de nouveaux
marchés. Je ne partage pas votre inquiétude et j'aimerais que
vous me donniez des exemples concrets. Vous avez peur de quoi,
là-dedans?
M. Blais (Jacques): Bon bien, on a peur de différentes
choses. Premièrement, le producteur va être noyauté par un
comité, comme ça, bâti par une loi. Il va être
obligé d'y aller. Elle n'est pas claire, la loi. C'est très
dangereux, parce que ça va être juste un groupe d'intervenants
avec trois quatre ou cinq participants. Le plus bel exemple, on le vit
actuellement. Les coopératives sont noyautées par trois autres
organismes. Je ne veux pas embarquer dans ce conflit-là, mais je vois
bien qu'il n'y a personne pour faire la balance du pouvoir. Un conflit
coop-Fédération, là, mettons.
M. Pagé: Mais là, on se réfère
à une chambre différente. Là, ils ne sont pas encore
dedans.
M. Blais (Jacques): Bien, une chambre différente... Une
chambre qui peut se faire. On n'a rien contre le fait qu'il y ait des
comités. La preuve est que vous en avez fait des comités; mais on
n'est pas obligés de l'inscrire dans la loi. On revient encore à
notre document. On dit que la loi est trop importante pour former ces
groupes-là, qu'ils vont retarder l'évolution des dossiers.
Souvent, dans le normal des choses, les dossiers, quand il y a un
problème... Si un producteur, avec son plan conjoint, et son office ne
sont pas capables de s'entendre, la Régie est là et elle a le
pouvoir de régler le problème. Si c'est une usine de
transformation ou une chose semblable avec une fédération, un
plan conjoint, le rôle de la Régie est de trancher la question. Ou
arbitrer, si elle a raison d'arbitrer, pour faire une entente. Mais là,
vous allez encore mettre un groupe entre ça, un groupe qu'on ne voit pas
dans notre système économique normal. Ça veut dire que
c'est encore une autre affaire pour faire traîner nos cultivateurs en
attendant que les problèmes se règlent, les engouffrer dans des
choses à n'en plus finir. Et nous autres, on n'est pas d'accord
là-desssus. Seulement, on est d'accord qu'on fasse appel à des
comités, comment est-ce qu'on dirait, quand il y a des problèmes
spéciaux.
M. Pagé: Si on regarde le chapitre XII, vous nous dites:
Le chapitre XII, enlevez-nous tout ça, on ne veut rien savoir de
ça, là. Si on regarde les articles 111 et suivants, il est
très clair que c'est sur une base volontaire.
M. Blais (Jacques): C'est une base volontaire, mais il reste
que...
M. Pagé: Si les producteurs, dans une production
donnée, ne veulent pas participer, on
ne les entrera pas au bout de la baïonnette. C'est très
clair, et vous le dites d'ailleurs. Vous dénoncez qu'il y a trop de
"peut" dans la loi. Vous dites: la Régie peut, et la Régie peut,
et elle peut, peut, peut. Préférez-vous qu'on écrive: Une
chambre, les offices, associations ou autres personnes
intéressées à la mise en marché d'un produit
agricole doivent s'entendre pour demander à la Régie de former
une chambre de coordination? Donc, c'est "peuvent s'entendre". Ça veut
dire qu'il n'y a aucune obligation. Je suis persuadé, moi, qu'il y a
plusieurs fédérations, entre autres dans des secteurs où
on est largement dépendant des marchés extérieurs, au
Québec... Je suis persuadé que ces gens-là vont être
motivés à participer à une telle démarche.
M. Blais (Jacques): Non. Nous autres, on nous dit...
M. Pagé: Bien, de toute façon, ils peuvent. M.
Blais (Jacques):... on n'est pas...
M. Pagé: Et vous devriez faire suffisamment confiance aux
producteurs pour savoir que s'ils ne veulent pas, ils n'iront pas.
M. Blais (Jacques): Non, mais il reste... Ce n'est pas ça,
là. Nous autres, on dit: Qu'ils fassent partie des comités
semblables pour développer des marchés d'exportation ou ces
choses là, on n'a rien contre ça, mais ce n'est pas obligé
d'être dans une loi. Et la loi n'est pas assez encadrée pour dire
les pouvoirs que ça va donner. Vous dites même que vous pouvez
leur donner des pouvoirs. Ça peut aller dans l'administration des quotas
ou autres choses semblables. Selon la loi comme elle est faite là, en
n'importe quel temps, vous pouvez le faire, c'est permis. Pour moi, là,
c'est bien permis, et vous pouvez le faire du jour au lendemain. Ça fait
que nous autres, on dit: Qu'il y ait des comités de formés
bénévolement ou en bonne entente pour régler des
problèmes, d'accord, mais pas dans la loi. La loi, c'est pour les
produits agricoles et le producteur à la base. C'est comme ça
qu'on la voit, nous autres. On n'a peut-être pas raison, mais c'est comme
ça qu'on la voit.
M. Pagé: oui, mais à l'article 112, le mandat des
chambres de coordination et de développement ne se réfère
pas, par exemple, à la gestion des quotas.
M. Blais (Jacques): Oui, mais c'est bien vague, vous savez. Tout
est permis, à l'intérieur de ça.
M. Pagé: Non. Ça se réfère à
une fonction de marketing, une fonction de mise en marché des produits.
Étudier, coordonner, proposer des moyens de planifier les conditions de
production et de mise en marché du produit visé; rechercher et
proposer des moyens d'améliorer la production et la mise en
marché du produit visé; préparer, financer ou administrer
les programmes de recherche, d'amélioration de la qualité, de
promotion, de publicité ou de vente de produits; proposer aux
producteurs... Ça ne veut pas dire "imposer aux producteurs, ça.
Proposer aux producteurs, aux acheteurs, aux personnes engagées dans la
mise en marché ou aux autres intervenants des programmes de formation et
des moyens plus efficaces de production et de mise en marché du produit
visé; rechercher et développer des débouchés pour
le produit visé, etc. La fonction, c'est: mise en marché,
commercialisation et développement de marché. Nous, c'est comme
ça qu'on l'interprète. Et ça, c'est l'intention du
législateur.
M. Blais (Jacques): Vous n'avez pas besoin d'aller bien loin. Le
premier article dit: Étudier, coordonner, proposer des moyens de
planifier...
M. Pagé: Oui.
M. Blais (Jacques): Bon, des moyens de planifier. Un quota, c'est
quoi? C'est un moyen de planifier.
M. Pagé: On se réfère à la
production.
M. Blais (Jacques):... les conditions de production et de
mise...
M. Pagé: On se réfère à la
production. Exemple concret, là... On va se donner des exemples. Dans le
poulet - c'est peut-être le plus bel exemple - les producteurs
reportaient leur période...
M. Blais (Jacques): Oui.
M. Pagé:... à la fin de l'année. Bon, pas de
problème. On décide de reporter. On sait que l'été,
c'est plus difficile de produire: il y a plus de dangers, à cause de la
chaleur, des maladies, bon, etc. N'importe quel producteur dans une production
contingentée aussi importante que celle-là où on a, quoi?,
32 % des quotas au Canada pouvait décider, au début du mois de
juillet: Au revoir, mon cow-boy, tu ne l'auras pas, mon poulet, je prends des
vacances, je reporte ma période de production, c'est tout, pas plus
grave que ça. Pendant ce temps-là, nous autres, au
ministère, on s'évertue comme des diables dans l'eau
bénite. On a fait des choses positives pour s'assurer que les grandes
chaînes, entre autres les chaînes de restauration rapide,
achètent du poulet au Québec et le transforment au Québec.
En 1985, un très grand volume de poulet était abattu ici et
transporté en Ontario. Ça veut dire les jobs en Ontario, la
valeur rajoutée en Ontario. Et il nous revenait ici,
préparé, cuit, etc. Et on a établi, ce
n'était pas une chambre de concertation, mais c'était à
peu près la même chose. On s'est assis avec chacune des grandes
chaînes et on a dit: C'est quoi le problème? Dans le poulet, un
des problèmes, entre autres, c'était les fameux problèmes
de production et de report de production. On s'est assis avec l'industrie, avec
la Fédération des producteurs de volaille, et on leur a dit:
Écoutez, ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens
que, dans la période où il se fait le plus de poulets barbecue au
Québec, tout le monde soit assis sur le bord de la piscine et qu'on
doive importer du poulet parce qu'on n'en produit pas. Ça n'a pas
été facile de faire passer ça.
Mais quand on dit, à l'article 1, coordonner, proposer des moyens
de planifier les conditions de production et de mise en marché, c'est ce
à quoi on se réfère, purement et simplement, M. Blais. On
ne se réfère pas aux quotas.
M. Blais (Jacques): Vous n'avez pas besoin de la chambre pour
faire ça. Vous n'avez rien qu'à prendre votre nouvel article
41...
M. Pagé: Oui.
M. Blais (Jacques): ...et quand H y a un problème de mise
en marché, vous demandez à votre plan conjoint de s'asseoir avec
vous autres, par l'article 41 avec la Régie. Vous vérifiez leur
plan conjoint, s'ils font vraiment une mise en marché ordonnée.
S'Hs ne la font pas, bien, c'est à la Régie de donner les
ordres.
M. Pagé: Nous, on veut un mécanisme plus permanent
d'échanges. Nous croyons et, comme ministre, je crois que, globalement,
l'économie agro-alimentaire du Québec va sortir gagnante
grâce à ces mécanismes permanents où les
distributeurs, les grandes chaînes, les transformateurs, les
conditionneurs et les producteurs vont être assis autour de la même
table. Ça, c'est mon opinion. Je ne vous oblige pas à la
partager. Je respecte la vôtre. (16 heures)
M. Blais (Jacques): C'est ça, on ne partage pas...
M. Pagé: Mais nous croyons, et je crois, qu'il est
préférable d'établir des mécanismes sur une base
permanente que d'établir uniquement des mécanismes en cas de
crises.
M. Blais (Jacques): En tout cas, on ne partage pas votre opinion
là-dessus. On trouve que c'est très dangereux. Pour nos plans
conjoints...
M. Pagé: Bien, M. Blais, si on partageait toujours, vous
et moi, la même opinion, probablement que vos membres
s'inquiéteraient, ainsi que mes collègues.
M. Blais (Jacques): Ça se peut.
Le Président (M. Richard): Mme la députée de
Johnson.
Mme Juneau: Merci, M. le Président. Quand le gouvernement
établit des mécanismes permanents, je suis persuadée que
les gens pour lesquels ce mécanisme-là doit être
implanté ont tout à fait raison de se poser des questions. Est-ce
que ce mécanisme permanent dont le ministre parle va faire en sorte que
les producteurs... Quels seront les buts positifs de ce
mécanisme-là pour le producteur? Parce que, quand on
établit des choses, des lois ou des réglementations, c'est
censé être dans le but d'aider les producteurs.
Si j'ai bien compris la réponse de M. Blais, c'est que vous
n'êtes pas du tout d'accord pour ajouter une instance de plus, bien
établie et bien inscrite dans une loi pour vous encadrer davantage et
faire en sorte que ça minimise les mouvements que vous pouvez faire dans
le but d'aider les productions. Si j'ai bien compris, c'est ça. Est-ce
que c'est bien...
M. Blais (Jacques): C'est bien clair, c'est ça.
Mme Juneau: C'est bien clair que c'est ça. Quand on a un
mécanisme permanent, surtout celui qu'on voit là, est-ce que
c'est un mécanisme qui aura un pouvoir décisionnel?
D'après ce que je lis dans l'article 112, il s'agit simplement de
proposer, de recommander et de coordonner. Et il ne me semble pas, pour le
moment, en tout cas... J'aimerais peut-être que le ministre puisse
préciser. Peut-être que ça nous orienterait de façon
différente. Est-ce que ces mécanismes permanents là auront
l'obligation, le pouvoir décisionnel de prendre des décisions
à la place du ministre, ou quoi?
M. Pagé: Très brièvement, Mme la
députée. Si les chambres de coordination et de
développement avaient des pouvoirs réglementaires d'imposer,
d'établir, de fixer, elles prendraient la place des offices. Elles
prendraient la place de l'Office des producteurs de bois, elles prendraient la
place de la Fédération des producteurs de volaille.
Mme Juneau: Mais quand on met un mécanisme comme
celui-là...
M. Pagé: C'est un mécanisme de concertation de
l'industrie.
Mme Juneau: Oui, je suis d'accord, mais...
M. Pagé: Pour que les gens voient au-delà de leur
intérêt immédiat, qui est très bien défendu,
selon moi, dans le cadre des mécanismes des offices, avec des
réglementations, des
cotisations, etc.
Mme Juneau: Alors, je reprends ce que vous venez de dire.
Pourquoi ajouter un mécanisme de plus, s'ils sont très bien
représentés, comme vous le dites?
M. Pagé: Ah bien! c'est parce que ce ne sont pas les
mêmes choses, madame. Ce ne sont pas les mêmes choses. Un office,
une fédération a comme mandat de négocier, de
représenter, de défendre les intérêts de ses
membres. Mais ce n'est pas seulement ça, le secteur bioalimentaire au
Québec. Il faut que ces gens aussi... Je donnais l'exemple du poulet,
tantôt.
Mme Juneau: Oui, je sais, j'ai bien compris.
M. Pagé: II faut que les gens acceptent de s'asseoir avec
d'autres intervenants. Puis les producteurs sont les premiers à en
bénéficier N'allez pas croire que les rencontres qu'on a entre
les grandes chaînes et les fédérations de producteurs, ce
n'est pas au bénéfice des producteurs, ça. C'est au
bénéfice des producteurs qu'on fait ça, pour être
certains qu'on ait davantage de produits québécois qui sont sur
nos tablettes, qui sont dans nos comptoirs, dans nos frigidaires, etc.
Même chose pour les produits marins.
Mme Juneau: En tout cas, ce qu'on sent très bien, c'est
que les gens de Sherbrooke sont inquiets par rapport...
M. Pagé: Les gens de Sherbrooke sont
régulièrement inquiets.
Mme Juneau: C'est bien, ça, M. le ministre. C'est bien,
ça...
M. Pagé: Je n'ai rien contre ça.
Mme Juneau: C'est parce qu'ils surveillent leurs affaires, puis
ils font bien.
M. Pagé: Jacques le sait, puis je le lui dis souvent.
Mme Juneau: Ils font bien de surveiller leurs affaires, à
part de ça. Je voudrais demander... Dans votre mémoire, vous
mettez l'accent sur le rôle et les pouvoirs de la Régie. Vous
souhaitez que ces pouvoirs soient plus grands. Est-ce que vous
considérez que, dans le passé, la Régie ne disposait pas
de moyens pour faire appliquer la loi? Est-ce que c'est ça que vous
voulez dire, dans votre mémoire?
M. Blais (Jacques): Pour commencer, on va répondre
à la première question. On a eu une consultation avec un avocat,
là, si on parie de l'affaire de la chambre.
Mme Juneau: Oui.
M. Blais (Jacques): C'est une raison de plus qui explique qu'on
est si préparés à faire la lutte là-dessus. On dit
que c'est un moyen de trop dans nos jambes. On se limite toujours à
ça, et on n'est pas contre des rencontres.
Une voix:... À la page 7...
M. Blais (Jacques): C'est clair pour nous autres. La page 7
l'explique clairement. Maintenant, pour la Régie, oui, on demande plus
de pouvoir, parce qu'on a des preuves à l'appui que la Régie a
fonctionné selon la majorité de producteurs, mais que,
souvent elle agit, on pourrait dire de façon non légale, en ce
qui concerne certains dossiers. On demande qu'avant de vérifier des
dossiers, la Régie, ne décide pas selon une majorité dans
une fédération, mais selon le principe de la loi et de notre
constitution canadienne. C'est pour ça qu'on veut qu'elle ait plus de
pouvoirs.
M. Pagé: M. le Président, vous comprendrez que je
n'ai pas... Il serait non avenu, à ce moment-ci, que je me
réfère devant cette Chambre à des litiges qui opposent
votre Fédération avec la Fédération des producteurs
de lait, dans le cadre de poursuites qui sont actuellement devant les
tribunaux. Ça, ça serait contre l'éthique.
M. Blais (Jacques): Non, ce n'est pas une poursuite
particulière. Il y a plusieurs dossiers - on pourrait en sortir - dans
lesquels la Régie, en tant que tribunal, est supposée trancher
selon les lois du pays. Là, c'est de même que je peux dire
ça. Et elle a tranché selon une majorité de producteurs.
On a des dossiers, c'est clair.
Le Président (M. Richard): Alors, M. le
député de Jonquière, qui est vice-président de la
commission, vous avez la parole.
M. Dufour: Oui, M. le Président, j'aimerais
peut-être savoir au départ si tous les points que vous n'avez pas
soulevés dans votre mémoire... Si vous êtes d'accord avec
le mémoire de l'UPA qu'ils vous ont présenté ce matin.
Parce qu'il y a des articles, là, en tout cas, que je
considère fondamentaux, comme l'article 2. L'UPA, la
Confédération dit: Nous autres, on veut que ça soit
enlevé. Vous autres, est-ce que vous avez... Doit-on s'en tenir juste
sur les points que vous soulevez et que, pour tous les autres, vous êtes
d'accord, ou bien si...
M. Blais (Jacques): Bon, si vous voulez parlez de l'article 2, si
vous voulez savoir notre façon de voir les choses, l'article 2, les
coopératives, le problème majeur là-dedans, c'est que
la
loi n'est pas assez claire pour établir les rôles de
chacun. Et les rôles de chacun... L'article 2 peut rester dans la loi,
mais il faudrait que ça soit éclairci pour que chaque rôle
soit spécifié. Mais, on le dit dans notre mémoire, la
transformation du produit, la commercialisation, ce n'est pas le rôle des
plans conjoints. Ça veut dire que c'est le rôle des coops et des
entreprises indépendantes. Ce n'est pas le rôle des plans
conjoints, le commerce et le transport, ces choses-là.
M. Dufour: J'aurais peut-être voulu, M. le
Président, au départ, excuser mon collègue, M. Baril,
porte-parole de la formation, qui avait déjà pris des
engagements, mais qui va venir nous rejoindre. Je ne sais pas s'H pourra, au
cours de cette séance... Il va sûrement venir au cours de la
séance; je ne sais pas à quelle heure exactement, et
j'espère que vous ne lui en tiendrez pas rigueur.
Quant à l'article des champs de coordination et de
développement, d'une part, moi, je serais porté à croire
que votre point de vue, à l'effet qu'elle n'a pas de pouvoirs
précis... Ça me semble réel, en tout cas, si on regarde le
libellé des articles. Le ministre y tient beaucoup. Ça fait que,
si c'était un pouvoir moral qu'on veut exercer, ou un pouvoir
réel, ça, je pense que c'est là toute la question. Si on
regarde dans les différents articles, il y a des endroits où on
dit: Chaque partie constituant la chambre doit avoir un membre
représentant ou elle doit payer, suivre les règles du jeu qui
sont tracées. Dans votre groupe à vous autres, c'est quoi
l'inconvénient de... En supposant que cet article-là demeure tel
quel, et que vous ne voulez pas en faire partie. C'est quoi qui vous chicote
par rapport à ce qui est écrit là?
M. Blais (Jacques): C'est très dangereux, parce que
ça fait une porte de sortie pour que le gouvernement... À un
moment donné, il y a un problème: au lieu de l'envoyer à
la Régie, il va l'envoyer à la chambre. Et on dit qu'il y a trop
de problèmes pour que ça se règle assez vite. Ce sont
toutes des choses pour faire traîner les dossiers, pour ne pas faire
évoluer les dossiers. Mais, s'il y a un problème majeur - on
revient encore là-dessus - et que le gouvernement, avec les
intervenants, forme un comité pour faire évoluer le dossier, on
est d'accord là-dessus. Un autre point dangereux: si vous mettez une
chambre permanente, vous mettez une chose qui s'endort, comme on dirait, ce qui
fait que les vrais problèmes ne se règlent pas à mesure.
Mais quand il y a un problème majeur, si vous formez un comité
spécial, là, le comité va être assis sur le vrai
problème puis il va le faire évoluer, il va le faire avancer.
M. Dufour Donc, vous êtes, si je comprends bien, avec ou
sans... Tel quel ou avec des pouvoirs réels, vous vous opposez
carrément.
M. Blais (Jacques): On n'aime mieux pas avoir ce...
M. Dufour: Est-ce que c'est clair?
M. Blais (Jacques): ...gréement-là dans nos
jambes.
M. Dufour: Ha, ha, ha!
M. Blais (Jacques): On pense que le gouvernement a assez de
pouvoirs ou de moyens pour faire évoluer les dossiers sans avoir ces
gréements-là, je pense que c'est le mot, parce que...
M. Dufour: Oui, oui.
M. Blais (Jacques): ...souvent, nos producteurs vont être
pris pour aller rencontrer dans cette chambre-là et ça va
plutôt être un comité, je m'excuse, un genre de chambre de
"comitos", et, à un moment donné, ça ne fait pas
évoluer les choses.
M. Dufour: Le ministre était bien fier de ça, ce
matin. Je ne sais pas... Il va comprendre que là, vous appelez ça
un gréement. C'est un gréement, ça. Il ne faudrait pas
qu'il s'agrémente avec ça. Ha, ha, ha! Je pense qu'en tout cas,
votre point de vue est clair. Je ne poserai pas d'autres questions par rapport
à ça.
Vous parlez de l'article 6. Vous faites référence à
l'affaire des six et le siège de la Régie. C'est quoi l'affaire
des six? En tout cas, je vous avoue humblement que je ne sais pas ce que
ça veut dire.
M. Blais (Jacques): Je pense que vous êtes probablement un
des seuls au Québec.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dufour: Oui, ça peut arriver. Je veux dire, c'est
justement un avantage qu'on a. Quand on ne vient pas d'un milieu, l'avantage
qu'on a, c'est qu'on écoute beaucoup plus.
M. Blais (Jacques): Non, mais il s'agit des six producteurs qui
ont décidé d'aller vérifier des règlements de la
Fédération des producteurs de lait en Cour supérieure. On
est allés à la Cour supérieure. Sur le premier item, on ne
nous a pas donné raison; alors, on est rendus en Cour d'appel. Ça
fait que là, après qu'on a été en Cour
supérieure, le jugement nous a donné, en Cour d'appel, qu'il y
avait lieu de faire le procès, qui est dans Sherbrooke. Ça veut
dire qu'on veut que la Régie, sur demande de producteurs, puisse se
rendre dans les régions, partout en province.
M. Dufour: Ç'a un lien avec le siège social, en
autant que cette Régie-là a des pouvoirs de pouvoir se prononcer
sur des questions.
M. Blais (Jacques): Non, c'est... M. Dufour: Non?
M. Blais (Jacques): C'est un peu une bébelle. Par
exemple...
M. Dufour: Un autre gréement. Ha, ha, ha!
M. Blais (Jacques):... un producteur de la Gaspésie a un
problème majeur et il veut aller à la Régie. Pour lui, se
transporter avec quelques personnes, c'est un coût abominable. Mais il
reste que la Régie, elle, se doit de se transporter en Gaspésie,
de se déplacer. Ça existe au niveau des lois provinciales. Mais
là, ce n'était pas clair, et on leur demande d'éclaircir
ça.
M. Dufour: À la page 3 de votre mémoire, vous nous
dites: "Nous ne sommes pas d'accord de mettre une trop grande importance
auprès des autres intervenants... "
M. Pagé: Je soulève pour le bénéfice
de mon collègue...
M. Dufour: Oui.
M. Pagé:... pour le bénéfice de la
discussion, on demande que la Régie puisse siéger à
l'extérieur de Québec ou de Montréal. Ça se fait
actuellement.
M. Dufour: Je pense qu'il n'y a pas beaucoup d'organismes qui
n'ont pas ce pouvoir-là.
M. Blais (Jacques): Non, ce n'est pas un problème majeur,
mais on voudrait que ce soit plus clair. En tout cas, c'est pour donner aux
producteurs confiance à nos lois.
Une voix: On peut poursuivre de la même façon.
M. Dufour: Comme la Commission de police.
M. Pagé: Mais oui, mais on va continuer comme ça.
On va aller vous voir à Sherbrooke. On est bien reçus.
Mme Juneau: C'est bien ça.
M. Pagé: ce n'est pas plus grave que ça. et
là, on va être plus sujet à aller en gaspésie.
écoutez là, avec l'ajout des produits marins dans le cadre de la
loi...
M. Dufour: II ne faudrait pas que le mi- nistre prenne trop de
notre temps.
M. Pagé: Pas de problème. C'est
réglé.
M. Dufour: II ne faudrait pas que le ministre prenne trop de
notre temps. On est très compréhensif. On a laissé passer
ses 10 minutes.
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le
vice-président.
M. Pagé: C'est pour vous éclairer, M. le
député.
M. Dufour: À la page 3, vous parlez de
représentations. Vous dites: "Nous ne sommes pas d'accord de mettre une
trop grande importance auprès des autres intervenants et nous vous
donnons comme exemple: Est-ce que nous avons notre mot à dire - et
là, vous avez une nomenclature de certains ordres, les agronomes, le
Collège des médecins - lorsqu'ils prennent une décision
qui nous touche nous, à titre de consommateurs?" Est-ce que vous vous
considérez comme des consommateurs ou comme des producteurs par rapport
à ce que vous nous dites là?
M. Blais (Jacques): Pour nous autres, la loi sur la mise en
marché, c'est une loi pour les producteurs. C'est le pendant de la loi
sur les syndicats pour les travailleurs. Pour nous autres, c'est ça, en
tout cas. On n'a peut-être pas raison. Ça veut dire qu'un
syndicat, quand il demande d'être accrédité, quand il est
accrédité par le gouvernement, celui-ci ne vérifie pas
toute la bébelle qu'il y a alentour, si on parle de son employeur, si on
parle de son marché, si on parle de toutes ces choses-là. Il
vérifie quoi? Il vérifie si le syndicat fonctionne selon les
normes du travail. Nous, ce qu'on espère, c'est que, lorsqu'un plan
conjoint se met en place et que des producteurs demandent d'être
accrédités comme plan conjoint, le gouvernement vérifie si
c'est selon les normes de la loi. Les autres, pour nous autres, ça passe
en deuxième lieu.
M. Dufour: Les article 39 et 106, on a eu ce matin des
représentations de la Confédération de l'UPA qui demandait
carrément d'abolir ces articles-là, question de conflit
d'intérêts dans un, en tout cas. Je pense bien que c'était
ça. Vous autres, ça ne vous dérange pas du tout,
ça? (16 h 15)
M. Blais (Jacques): Nous autres, cet article-là, c'est
bien simple, on revient encore avec notre idée première. Un plan
conjoint, c'est pour faire de la mise en marché de la production. Quand
les producteurs paient une contribution, c'est pour l'ensemble des producteurs,
et tu n'as pas le droit de te servir d'une contribution pour faire fonctionner
des commerces de transformation ou autres, pour un groupe, même un petit
groupe. Parce que les transformateurs et les
commerces, ce sont les coopératives qui peuvent faire ça,
des individus. Mais on n'a rien contre les producteurs qui s'organisent avec
tous ces moyens pour se faire des usines de transformation, des transports, des
choses semblables. Seulement qu'il n'y aillent pas avec les contributions du
plan conjoint. Pour nous autres, c'est clair, ce sont deux articles. On
encourage les producteurs qui veulent s'en faire des usines de transformation,
du camionnage ou des choses semblables. On n'a rien contre ça. Mais on
ne veut pas que ce soient les contributions du plan conjoint qui servent
à ça
M. Dufour est-ce que vous avez, à part de votre propre
fédération, votre propre syndicat ou organisme, des sons de
cloche d'autres corporations, d'autres groupes qui pensent comme vous, par
rapport à ça?
M. Blais (Jacques): II y en a à l'intérieur de
l'UPA. Mais de groupes, je ne peux pas vous dire. Nous autres, on a
travaillé au niveau régional. Mais on sait qu'H y en a qui ont
bien peur de ça, parce que ça mêle les cartes. On peut vous
sortir des dossiers qui sont rendus vraiment creux par rapport à ces
choses.
M. Dufour: Mais la question que j'aurais le goût de me
poser et de vous poser en même temps, c'est par rapport à la
crainte que vous exprimez. Je dis, dans un groupe, il y a un certain nombre
d'irritants. Quand on pose un diagnostic, on pose une loi, i y a des
gens qui disent: Je n'aime pas cette partie-là, mais, en gros, je peux
vivre avec. Dans votre cas, vous semblez avoir une réticence très
marquée par rapport à un pouvoir qui est accordé dans ce
projet de loi. Nous, ce qu'on essaye de savoir, c'est: Est-ce que ça a
vraiment une force importante par rapport à ça, si se sont juste
des questions que vous nous posez, ou si vous êtes radicalement contre,
point, pour cet article?
M. Blais (Jacques): Nous autres, on veut être radicalement
contre, parce qu'on veut clarifier la situation, pour ne pas donner la chance
à des gens d'avoir des idées que j'appelle farfelues. Je reviens
encore à ma case de départ. Un syndicat n'a pas le droit de
"runner" des commerces n'importe où avec l'argent de ses
syndiqués. Ça fait que c'est pareil, là. Le plan conjoint,
qui est un syndicat, n'a pas le droit de se servir des contributions des
producteurs pour faire du commerce.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Jonquière. M. le ministre.
M. Pagé: Très brièvement, parce que je crois
comprendre que le temps est écoulé, M. le Président, ou
sur le point de l'être. Il y a des dispositions dans le projet de loi
dans lesquelles le gouvernement fait part de son intention de ne plus autoriser
de quotas détenus par des personnes autres que les producteurs. Vous
dites: Tout ça, ça dort être rétroactif. Vous
semblez peu soucieux des droits acquis, je pense, et des gens qui ont des
droits. On s'est déjà rencontrés dans un dossier
très particulier: celui des oeufs. Je pense que ce n'est pas briser de
secrets que la Fédération régionale de Sherbrooke
n'était pas d'accord, mais pas du tout d'accord avec Fedco, fa
Fédération, dans fa gestion des quotas, et plus
particulièrement des quotas alloués. Vous ne vous entendiez pas.
Par contre, vous étiez unanimes à vous retourner de bord et
à dire: La solution ne peut probablement pas venir de nous, mais c'est
de la faute du ministre. Pagé, règle-nous ça. Je vous
avais lancé une proposition sur la table, à ce moment-là,
de rachat de ces quotas. Ni l'un ni l'autre n'est revenu me voir. Est-ce que je
dois présumer que vous allez venir me voir bientôt?
M. Blais (Jacques): Premièrement, le droit acquis. Pour
nous autres, ce n'est pas un droit acquis, parce qu'il n'a même pas le
droit de l'avoir. C'est pareil, comme moi, comme producteur agricole, je ne
peux pas avoir le droit d'être professeur d'école. Je n'ai pas de
permis d'être professeur d'école si je n'ai pas suivi mon
cours.
M. Pagé: Si vous avez déjà été
professeur d'école...
M. Blais (Jacques): Si j'ai déjà été
professeur d'école...
M. Pagé: Avec un permis, oui.
M. Blais (Jacques): Si je me retire comme professeur, je ne peux
pas exploiter, le professeur qui va prendre ma place. Je ne peux pas
l'exploiter c'est impossible. Vous, vous n'êtes pas capable de... M.
Garon n'est pas capable d'exploiter la moitié de votre revenu parce que
vous êtes son successseur. Ça va plus loin que ça: la
personne qui a des quotas actuellement...
M. Pagé: Moi, mon siège, je ne l'ai pas loué
de Garon.
M. Blais (Jacques): Oui, mais ça va plus loin que
ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: C'est vous autres qui me lavez donné.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais (Jacques): La personne qui a les
quotas est en dehors de la production. C'est aussi aberrant, comme on
dirait, que quand on parle de libre-échange ou des ententes du GATT qui
veulent essayer d'entrer dans nos marchés à 10%, 15 %, 20 %. On
sent ça un peu, mais quand les Américains vont rentrer dans nos
marchés, ils vont rentrer, un point, c'est tout. Ils vont être
obligés de rentrer dans le marché. Mais là ce n'est pas
ça, c'est que le pouvoir appartiendrait aux Américains, puis,
nous, petits producteurs québécois, nous serions obligés
de payer aux Américains un droit de venir faire du produit chez nous,
parce que la loi est bien pour le producteur agricole, pas pour le...
M. Pagé: D'ailleurs, c'est pour ça que, dans la
loi, on le dit que, l'intention du gouvernement, c'est que les quotas soient
détenus par les producteurs, sauf que, dans le passé, on a eu
à vivre avec une situation. S'il y a des locateurs, des gens ou des
entreprises qui louent des quotas, c'est parce qu'il y a des gens qui acceptent
de les louer.
M. Blais (Jacques): Ils n'ont pas le choix de vivre avec.
M. Pagé: S'il y a des locateurs, c'est parce qu'il y a des
locataires.
M. Blais (Jacques): Oui, mais ils n'ont pas le choix de vivre
avec, parce qu'ils ne peuvent pas acheter de quotas. Ça a fait une
surenchère de quotas, et ils sont pris dans ces mains-là. Ils
n'ont pas le choix.
M. Pagé: M. Blais!
M. Blais (Jacques): Vous le savez...
M. Pagé: Ah oui! Vous savez, vous savez! Vous deviez vous
asseoir avec la Fedco. Assoyez-vous donc et venez nous voir.
M. Blais (Jacques): Nous autres, on a fait des
téléphones a votre bureau et on n'a pas eu de réponse. On
avait espérance...
M. Pagé: Ce ne sont pas les téléphones au
bureau qui sont importants, c'est que vous arriviez avec une solution
commune.
M. Blais (Jacques): Des solutions communes, on en a. Il s'agit
qu'il y ait des gens qui veulent s'asseoir, puis on va en discuter.
M. Pagé: On s'assoira.
M. Blais (Jacques): Des solutions, ce n'est pas ça qui
manque.
M. Pagé: Dans cette loi, on indique très clairement
la volonté du gouvernement du Québec de mettre en place des
mécanismes de règlement de ce fameux problème qui n'est
pas né d'hier, vous en conviendrez, de location de quotas et de quotas
qui sont détenus par des entreprises qui, somme toute, ne sont pas des
producteurs.
M. Blais (jacques): vous savez qu'on est dans le même sens
d'idées. vous savez même qu'on a fait passer une résolution
au congrès provincial de l'upa vous demandant de faire une politique
là-dessus. quand vous ferez votre politique, on est prêts à
s'asseoir et à travailler avec vous pour faire la politique.
M. Pagé: Je dois d'ailleurs recevoir bientôt l'Union
des producteurs agricoles pour la présentation officielle au ministre,
comme ça se fait régulièrement en avril et mai
généralement, de chacune des résolutions
adoptées.
M. Blais (Jacques): C'est clair.
M. Pagé: Merci de votre visite.
M. Blais (Jacques): Ça me fait plaisir.
Le Président (M. Richard): Avez-vous un message de
remerciement, M. le député de Jonquière?
M. Dufour: J'aurais eu d'autres questions à poser. Je
trouve que c'est intéressant, parce que je pense que, dans un monde
où tout le monde..
M. Pagé: L'école, c'est intéressant.
M. Dufour: ...veut être dans le même moule, puis
qu'il y en a qui sont un peu différents, je trouve que c'est le "fun".
c'est intéressant à écouter.
M. Pagé: Très bien, hein? Bon! Dynamique. Le
Président (M. Richard): Merci.
M. Dufour: Ce n'est jamais si blanc ou si noir que ça
paraît. Des fois il y a des coins gris, des zones grises. La poulette
grise, comme on dit. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Richard): Merci, messieurs, de la
présentation de votre mémoire.
Je demanderais que les gens représentant l'Association des
éleveurs de moutons des Cantons de l'Est prennent place, s'il vous
plaît.
Messieurs, vous connaissez la mécanique. Vous étiez
là tout à l'heure, alors vous avez la parole. Vous vous
présentez et vous présentez les gens qui vous accompagnent, s'il
vous plaît, pour la présentation de votre mémoire. Vous
avez la parole.
Association des éleveurs de moutons des Cantons
de l'Est
M. Caklwell (Gary): Merci, M. le Président. Je me
présente. Mon nom est Gary Caldwell. Je suis président du
comité de mise en marché de l'Association des éleveurs de
moutons des Cantons de l'Est. Les deux autres membres du comité de mise
en marché sont ici: M. André Desroches et M. Robert Laberge.
On va commencer avec une introduction de notre Association par M.
Desroches. Après un petit retour historique par M. Laberge, M. Desroches
va finir la présentation de notre mémoire et je vais faire une
petite synthèse à la fin.
M. Desroches (André): Ce mémoire est
présenté par l'Association des éleveurs de moutons des
Cantons de l'Est, corps politique légalement constitué en vertu
de la Loi sur les syndicats professionnels du Québec. Cette Association
a été fondée en 1915 et compte plus de 50 membres en
règle. Elle est de ce fait non seulement le plus ancien mais aussi le
plus important syndicat d'éleveurs de moutons au Québec. De plus,
elle représente la majorité des éleveurs de moutons des
Cantons-de-TEst, qui, soit dit en passant, est la deuxième région
en importance relativement à la production ovine de la province. Ses
activités sont financées par ses membres. Son bilan ne montre
aucun déficit, bien qu'elle ne reçoive aucune subvention de qui
que ce soit. L'Association est non affiliée à l'UPA, et la liste
de ses membres est disponible. Enfin, l'Association possède son propre
comité de mise en marché, composé de M. Gary Caldwell,
Robert Laberge et André Desroches. Ces trois éleveurs ont la
responsabilité de présenter et de défendre le
présent document pour le compte de l'Association. Je vais passer
par-dessus les définitions, si vous le permettez.
La plupart des membres de l'Association étaient des
éleveurs de moutons bien avant la création des syndicats
régionaux et de la Fédération affiliée à
l'UPA. Ils ont toujours été reconnus pour la haute qualité
de leur production et pour la régularité avec laquelle ils
mettent leurs agneaux en marché et pour leur fiabilité
personnelle. Aussi s'est-il créé, au cours des années, des
relations entre éleveurs et acheteurs qui existent depuis plus de 20 ans
dans certains cas. La mise en marché des agneaux de lait était
simple, non coûteuse, satisfaisante pour tous les partis. Elle
s'effectuait à la ferme. L'acheteur voyait ce qu'il achetait et payait
sur-le-champ le montant convenu. Le procédé ne comportait ni
contrainte ni coercition. Les agneaux lourds, qui sont peu
appréciés par les différents groupes ethniques,
étaient vendus à la ferme à la clientèle locale
pour la plupart. Certaines boucheries, auberges et restaurants étaient
donc en mesure d'offrir l'agneau régional aux clients qui en faisaient
la demande. Avec la venue du plan conjoint, et surtout la mise en place de
l'agence de vente et l'utilisation obligatoire de l'enchère
électronique approuvée par la Régie, tout cela est
terminé.
M. Laberge (Robert): Pour nous aider à planifier un
nouveau système de loi, H serait peut-être utile de repasser
l'expérience vécue par les éleveurs de moutons dans les
huit dernières années. En fait, les producteurs, presque
unanimement, se sont donné un plan conjoint en 1982. La
Fédération avait le droit de prélever 1 $ la tête,
et ceci était vite gobé par ses frais d'administration. En 1985,
elle avait un endettement d'environ 100 000 $. Elle était en tutelle
totale de la Confédération, et, encore en 1985, il n'y avait eu
aucune mise en marché de faite. À cette date, la Régie
accepte une demande pour 1 $ supplémentaire, supposément pour
faire de la mise en marché, quoique le directeur de la mise en
marché de l'UPA avait admis que ça leur prenait 3,25 $ simplement
pour rencontrer leurs frais d'administration. En 1989, à coûts de
subsides imposants de part et d'autre, elle se monte une enchère
électronique à l'automne 1989, supposément pour sauver
l'industrie. Le bilan actuel, nous payons maintenant 3 $ de
prélevés pour vendre nos agneaux. On est pris avec une
enchère qui est un désastre, une grande partie des
éleveurs vendent leurs agneaux d'une façon illégale, tous
les systèmes d'écoulement d'agneaux sont bouleversés, la
tutelle continue en dépit de démarches constantes et insistantes
auprès de la Régie. Ça c'est l'expérience qu'on a
vécue depuis huit ans.
M. Caldwell: C'est à peu près l'historique. Il
n'était pas dans le texte. J'aurais dû vous le dire à
l'avance.
M. Desroches: D'accord. Alors, je reprends la lecture du
mémoire à la page 4. Ce qui amène l'Association à
exposer son point de vue et à apporter ses commentaires et suggestions
dans le cadre de l'étude de la loi 15 fait suite de l'expérience
de trois présences devant la Régie: une première fois pour
s'opposer à la hausse du prélevé de 1 $ à 2 $ par
ovin mis en marché; une deuxième fois, pour tenter de faire
comprendre à la Régie que le projet de vente avec enchère
électronique obligatoire, tel que conçu et
présenté, n'avait guère de chances de fonctionner; enfin,
une troisième fois, pour en appeler de la décision concernant
l'acceptation de l'agence de vente présentée par la
Fédération. (16 h 30)
Dans les trois cas, les décisions rendues par la Régie ont
été décevantes. Les régisseurs n'avaient d'oreilles
que pour un office de producteurs qui, en cinq ans, avait accumulé un
déficit de 100 000 $, avait été placé en tutelle
et
qui, sur un budget annuel de 100 000 $ environ, ne parvenait même
pas, année après année, à dépenser les 2000
$ prévus pour la mise en marché.
Les producteurs d'ovins ont été contraints de verser 2 $
par ovin qu'ils mettaient eux-mêmes en marché à un office
qui n'avait même pas l'intention de faire une étude de mise en
marché. Mais pis encore, on les contraint, maintenant, à utiliser
une enchère électronique qui suscite beaucoup de
déceptions et de frustrations, d'autant plus que l'on ne voit aucune
solution prochaine aux problèmes que ce système engendre. Pour
sauver les meubles, de plus en plus d'éleveurs passent à
côté de l'enchère électronique, mais pour forcer les
éleveurs à passer par l'inacceptable, on incite le ministre de
l'Agriculture à changer les règles de
l'assurance-stabilisation.
D'abord, les membres de l'Association tiennent à exprimer leur
accord le plus entier sur les points suivants du projet de loi 15: la
séparation des assemblées du plan conjoint et des
assemblées syndicales; la tenue d'une comptabilité distincte pour
le plan conjoint; la tenue d'assemblées du plan conjoint où seuls
les délégués du plan conjoint ont droit de vote; la
défense, pour les administrateurs d'un plan conjoint, de faire du
commerce; et - on a rajouté ceci -l'obligation, pour les offices, de
paraître devant la Régie tous les cinq ans. Ils tiennent à
féliciter le législateur pour ces améliorations
apportées à la loi et le ministre pour avoir fait preuve
d'autonomie de jugement. Seulement, ils souhaiteraient, pour que tout ceci ne
demeure pas au niveau des bonnes intentions, qu'il soit dûment
précisé la prédominance des textes de la future loi sur le
règlement des plans conjoints qui sont contraires à la loi, ce
qui amène l'Association à s'interroger sur le rôle de la
Régie dans le cadre du projet de loi.
Dans la présente loi, le rôle de la Régie est fort
imprécis. S'agit-il d'un tribunal qui veille à l'application de
la loi ou d'un simple organisme qui fait de la mise en marché par
personnes interposées, les offices de producteurs en l'occurrence, avec
lesquels, d'ailleurs, elle entretient des relations harmonieuses et
bienveillantes? À l'article 186 du présent projet de loi, on peut
lire que c'est le ministre qui veille à l'application de la loi. Or,
tout le monde sait que l'honorable ministre est une personne qui n'est pas
à la portée de tout le monde. C'est un personnage lointain,
difficile à atteindre, qui a des choses plus importantes à
s'occuper que les frasques d'un office de producteurs qui se moque
éperdument de la loi.
M. Pagé: Le lointain personnage, je pense que c'est
vous.
M. Desroches: Oh! que si, vous n'êtes pas facile à
rejoindre, M. le ministre.
M. Pagé: Ma femme dit ça des fois aussi.
M. Desroches: A-ton refilé cette tâche au ministre
parce que les régisseurs ne se sentent pas de taille à remettre
leurs bons amis dans le droit chemin, celui de la légalité? N'y
a-t-il pas de place à plus de précisions en ce qui concerne
l'application de la loi? Est-ce que la situation s'est
détériorée au point qu'il faille maintenant en appeler
à l'autorité du ministre pour faire appliquer cette loi? Pour des
raisons incompréhensibles, l'actuel projet de loi persiste à
accorder à un office de producteurs tous les pouvoirs ou presque sans
lui imposer, en contrepartie, les responsabilités ou les obligations
dont il ne peut s'éviter.
Alors que la loi prévoit des pénalités pour le
simple producteur insoumis, qui ne se plie pas de bon gré aux diktats de
son office, elle ne prévoit rien pour un office qui fait du syndicalisme
au lieu de faire de la mise en marché. Un producteur ne peut rien, mais
doit tout; son office peut tout, mais ne doit rien. Est-il normal, dans une
société dite évoluée, qu'une telle situation
persiste et semble devoir persister?
Aussi, ne faut-il pas se surprendre du caractère abusif et de
l'attitude arrogante dont font preuve certains administrateurs de plans
conjoints. Ils comprennent rapidement l'étendue de leurs pouvoirs et de
leur non-responsabilité.
Le législateur rate ainsi une belle chance de les obliger, par un
texte de loi, à faire ce pourquoi ils ont été
formés, soit de la mise en marché. En cas d'omission de ce faire,
la Régie serait dans l'obligation de révoquer le plan conjoint de
façon harmonieuse et bienveillante, cela va sans dire. Le
législateur doit se rendre compte qu'il doit mettre fin à une
situation qui mène à bien des abus. Un office qui fait fi de la
loi devrait être pénalisé au même titre que n'importe
quel producteur. La loi, c'est la loi. Et la loi c'est pour tout le monde. Dans
l'état actuel des choses, il n'est donc pas surprenant de voir certains
offices de producteurs fonctionner de façon tout à fait
illégale et même désobéir aux requêtes de la
Régie. Il n'y a aucune pénalité prévue au niveau de
la loi, pourquoi s'en faire?
Ça aura pris cinq ans d'efforts pour les membres de notre
Association pourtant producteurs visés par le plan conjoint, à se
faire convoquer et admettre aux assemblées régionales et
générales de leur office de producteurs. Malgré des
demandes répétées de la part de la Régie, la
Fédération refuse toujours de rendre la liste des producteurs
visés par le plan conjoint disponible pour fins de contrôle.
Est-ce qu'il faut remonter jusqu'au ministre chaque fois que les
administrateurs d'un plan conjoint s'entêtent, pour des raisons obscures,
à défier à la fois la Régie et la loi?
En fait, lorsqu'on y réfléchit quelque peu, les raisons
qui motivent la Fédération à garder
secrète la liste des producteurs visés par le plan
conjoint ne sont pas si obscures que cela. Contrairement à ce qu'elle
prétend, la Fédération ne représente pas et
même est loin de représenter la majorité des
éleveurs de moutons du Québec. Actuellement, la
Fédération ne compte plus que neuf syndicats régionaux.
Certains d'entre eux n'ont même plus suffisamment de membres en
règle pour pouvoir exister légalement. Mais soyons
généreux et accordons les 15 membres que la Loi sur les syndicats
professionnels du Québec exige comme minimum. Le total des membres ne
dépasse pas 135. Soyons encore exagérément
généreux et accordons 200 membres à la
Fédération. On se trouve encore loin du compte, car, sauf erreur,
il y a 600 producteurs visés par le plan conjoint des producteurs
d'ovins. Et la présence de ces éleveurs aux réunions
générales serait très menaçante pour le petit
groupe qui s'appuie sur la formidable organisation de l'UPA pour imposer ses
quatre volontés. Beaucoup d'éleveurs diront qu'il est inutile de
faire partie d'un syndicat régional, car les
délégués ne sont pas tenus de voter selon les mandats
reçus de la base, à une réunion générale
annuelle, en vertu de la façon de procéder de l'UPA. Ne serait-il
pas plus simple que le législateur s'attaque immédiatement au
problème en proposant des articles de loi qui répondent
adéquatement à ces situations qui perdurent depuis trop
longtemps.
Nous remercions les membres de la commission parlementaire d'avoir bien
voulu nous recevoir et nous entendre, et nous les assurons de notre
entière collaboration.
M. CakJwell: Je termine avec une petite synthèse. Ce qui
nous préoccupe, dans le projet de loi, c'est que nous n'avons pas encore
la façon de contrôler, en tant que producteurs, notre plan
conjoint, pas d'élection d'administrateurs. La comptabilité
distincte, c'était dans l'ancienne loi, mais ce n'était pas
appliqué. On est inquiets d'un certain manque de
représentativité, on n'a pas accès aux listes des
producteurs pour des élections, l'office ne veut pas nous les donner. Il
y a toute la question du contrôle des délégués.
L'office a dit que les délégués ne sont pas tenus de voter
selon les élections en région et les assemblées, c'est
pareil. Ça, c'est un progrès.
La confusion sur le rôle de la Régie, est-ce que c'est un
instrument qui est lié à l'application de la loi ou est-ce que
c'est un organisme qui fait la mise en marché par
délégation et son incapacité, selon nous, de tenir en
respect l'UPA? Le processus d'appel, dans le passé, il fallait aller en
appel contre la Régie elle-même, après ça, on
pouvait avoir appel au Conseil privé, ça s'est
avéré, pour nous, un processus très peu gratifiant, on a
eu une réponse du Conseil exécutif, dix mois après, dans
un paragraphe.
Finalement, on demande la protection de la loi. C'est pour ça
qu'on a profité de cette occasion, de l'Assemblée nationale, en
commission parlementaire. On cherche la protection de la loi en tant que
producteurs contre les abus de pouvoir de l'UPA et même, en fin de
compte, le ministère qui essaie maintenant de nous imposer une
enchère électronique avec l'UPA. C'est tout.
Le Président (M. Richard): Merci, Messieurs. M. le
ministre, vous avez la parole.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je tiens à
saluer ces bonnes gens de l'Association des éleveurs de moutons des
Cantons de l'Est, qui viennent nous rencontrer aujourd'hui, qui nous font part
de leurs inquiétudes, de leur position et, entre guillements, aussi d'un
certain niveau tout au moins de frustration, qui est exprimé ici. Je ne
doute pas que votre Association, qui a été fondée en 1915,
constitue un élément très intéressant pour vos
membres d'échanges au niveau de la formation, au niveau des
connaissances. Je ne doute pas, non plus, que vous soyez une bonne
équipe de producteurs. Quel est le nombre moyen de moutons ou d'agneaux
mis en marché par vos membres, par année? Première
question.
M. CaWwell: Nous représentons deux tiers des moutons, des
agneaux mis en marché, mais je vais laisser Bob.
M. Laberge: On représente environ 7000 brebis sur un total
provincial d'environ 60 000, quelque chose comme ça.
M. Pagé: 12 % environ, c'est ça? M. Laberge:
C'est ça. M. Pagé: 12 %, 50 membres. M. Laberge:
Oui.
M. Pagé: Vous dites essentiellement ceci. Nous, nous
formons une association. On a la conviction de faire une bonne job. Vous dites:
On est des bons producteurs, puis on n'est pas satisfaits de ce qui se passe
dans l'UPA et de la façon dont la Fédération des
producteurs d'agneaux et de moutons du Québec fait sa job. C'est ce que
je retiens du message que vous nous livrez aujourd'hui. Et vous dites: Ces
gens-là, par exemple, devraient faire davantage d'efforts. Parce que je
vous lis, ici à la page 7 de votre mémoire, vous dites: "Le
législateur rate une belle occasion de les obliger, par un texte de loi,
à faire ce pourquoi ils ont été formés, soit de la
mise en marché." Mais quand ils mettent sur pied un système
d'enchère électronique, c'est de la mise en marché qu'ils
font.
C'est un élément de structure de mise en marché qui
est là. C'est pour défendre les producteurs.
M. Caldwell: Selon nous, l'encan électronique, ce n'est
pas de la mise en marché. C'est un mécanisme de vente.
M. Pagé: C'est un mécanisme de mise en
marché.
M. Caldwell: Un mécanisme de vente. Un encan, c'est
un...
M. Pagé: Ce n'est pas un mécanisme pour les
photographier, les regarder, voir s'ils sont beaux, ça. C'est pour les
vendre, il y a des acheteurs, c'est un pool, et pour diversifier les acheteurs,
pour que le producteur soit moins dépendant d'un nombre restreint
d'acheteurs.
M. Caldwell: Oui, mais ça ne stimule pas le marché.
Ça nous amène des consommateurs. Ça ne met pas en valeur
le produit. Ça n'étiquette pas l'agneau. Ça n'encourge pas
des critères de qualité. Ça ne met pas ensemble les
producteurs et les consommateurs. C'est un mécanisme de vente
uniquement.
M. Pagé: Mais c'est ce qu'on recherche, entre autres, par
nos chambres de coordination et de développement.
M. Caldwell: Peut-être. Nous, les chambres de coordination,
on trouve ça très intéressant comme suggestion parce qu'il
existe déjà trois ou quatre groupements de producteurs dans
différentes régions, le KRTB, dans les régions de
Rimouski, Québec, il y en a un autre dans la vallée de
l'Outaouais, il y en a un autre... Les chambres de coordination peuvent
permettre à ces gens qui faisaient déjà de la mise en
marché de faire ce genre de coordination avec les acheteurs. Ils peuvent
faire de véritables études de marché. On n'a jamais eu une
étude de marché. On a eu des études sur les
mécanismes. On n'est jamais allés voir c'est quoi le
marché, essayer de répondre à ce marché. Une
chambre de coordination pourrait faire ça et la chambre de coordination,
justement, on l'a trouvée une suggestion très
intéressante.
Pour revenir à vos remarques d'avant, M. le ministre, oui,
effectivement, vous avez raison. Notre problème, c'est que nous avons de
la misère à faire respecter le plan conjoint et le vouloir du
législateur quant au fonctionnement de ce plan conjoint par l'office du
producteur. L'UPA passe outre à la loi, et il y a des
améliorations dans la loi qui va aider à corriger cette
situation-là. Imaginez, il n'y a pas de comptabilité distincte
entre le plan conjoint qui est créé pour les producteurs et la
Fédération des producteurs d'agneaux, malgré le fait que,
dans la loi, cela, c'est dans l'ancienne loi. Imaginez-vous, comme
délégués du plan conjoint, on ne vote pas ensemble. Il y
a, en plus, des délégués syndicaux de la
Fédération. Ce ne sont pas les délégués du
plan conjoint qui votent sur les matières du plan conjoint. On ne vote
même pas sur la comptabilité. Il n'y a pas eu d'assemblée
distincte jusqu'à dernièrement, alors... On n'a même pas
accès à la liste des producteurs pour...
M. Pagé: Je m'excuse. Là-dessus, si vous le
permettez, vous avez fait des représentations auprès de la
Régie, c'était votre droit comme membre, etc., pour avoir la
liste...
M. Caldwell: Pour avoir accès à la liste de la
Régie.
M. Pagé: Oui, on l'a fait parvenir le 18 novembre 1988 et
on nous a confirmé l'avoir reçue par lettre, dans une lettre qui
a été adressée au secrétaire de la Régie, M.
Régnier, le 3 janvier 1989.
M. Caldwell: C'est ça, et j'ai bien dit que la
Régie avait demandé à l'office de rendre disponible la
liste et que la Régie nous a donné la liste pour cette
année-là. L'année dernière, on a demandé
d'avoir la liste de l'office et on a dit à l'office: Regardez, la
Régie accepte le principe que les producteurs peuvent avoir la liste.
Regardez, la Régie nous a communiqué la liste. Malgré
ça, l'office des producteurs - j'ai une lettre ici - nous a
refusé la liste. Et c'est ça qu'on veut dire quand on dit que
l'office passe outre à la Régie dans bien des cas. Nous, on le
dit, il y en a d'autres avant nous qui le disent: Souvent, le problème,
c'est de faire respecter la loi comme l'interprète la Régie, pas
l'office, et nous n'avons pas, cette année, accès à la
liste malgré le fait que la Régie nous l'ait communiquée
l'année d'avant. Il me semblait que c'était assez clair. (16 h
45)
M. Pagé: Pourriez-vous, pour le bénéfice des
membres, distribuer ce document.
M. Caldwell: Oui, oui, oui. Je l'ai ici.
M. Pagé: M. le Président, veuillez vous assurer
qu'on ait des copies de ça.
M. Caldwell: J'ai la lettre à laquelle vous faites
allusion, du 18 novembre, de M. Régnier: "Pour faire suite à
votre lettre du 29..."
M. Pagé: Pourriez-vous demeurer à votre fauteuil
parce que le micro ne peut pas vous suivre.
Une voix: Ha, ha, ha! Le micro vous suit...
M. Pagé: On n'est pas dans un studio de TV, là.
Une voix: Oui. Une voix: Ha, ha, ha!
M. CaMwell: Ici, c'est la lettre à laquelle vous faisiez
allusion le 18 novembre...
M. Pagé: Oui.
M. Caldwell: ...de 1988. "Pour faire suite à votre lettre
du 29 août dernier, vous trouverez sous ce pli une copie de la liste des
producteurs."
M. Pagé: OK.
M. Caldwell: La Régie nous l'a donnée...
M. Pagé: O.K.
M. CaMwell: ...par le plan conjoint des producteurs ovins. Bon!
on l'a eue pour cette année, on a trouvé ça très
bien, bien qu'on ait trouvé ça anormal qu'il faille monter
à la Régie pour l'avoir.
M. Pagé: O.K.
M. Caldwell: Bon!
M. Pagé: 1989, maintenant.
M. Caldwell: Oui, en 1989, moi, j'ai écrit à M.
Poirier, qui est le secrétaire de l'office des producteurs dans notre
région. "Pour ce qui est de la discussion de l'autre jour, quant
à notre droit d'accès à la liste, je vous envoie copie
d'une lettre de M. Régnier du 18 novembre 1988, dans laquelle ce droit
est consacré. Donc, on vous demande de bien vouloir communiquer la liste
courante pour l'Estrie, parce que c'est la région qui nous concerne,
à notre président, M. Darcy Ryan." Je vous lis la réponse
de M. Poirier. "M. Caldwell, suite à une assemblée du conseil
d'administration, les administrateurs ont été informés de
votre demande et ont pris connaissance de la copie de la lettre de la
Régie. Ils ont par la suite décidé de maintenir la
position de la Fédération régionale de l'UPA de l'Estrie -
des gens inquiets, qui étaient ici tout à l'heure - à
l'effet que les listes de membres et de producteurs sont confidentielles, et
vous suggère de placer votre demande à la Régie des
marchés agricoles, comme par le passé. Ce sera à eux de
décider s'ils acceptent de vous la fournir."
Alors, la Régie consacre le principe et l'office des producteurs
passe outre.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: Vous allez déposer ces documents-
là. Quelqu'un...
M. Caldwell: Oui.
M. Pagé: ...est allé les chercher. Pouvez -vous,
monsieur, aller chercher les documents de monsieur.
M. Caldwell: C'est pour ça qu'on est bien content que,
dans la nouvelle loi, on demande les assemblées séparées.
On aurait jamais eu ça avant.
Une voix: Oui.
M. CaMwell: La comptabilité distincte. On fait des
progrès sur ça: la Régie n'a pas voulu admettre qu'il
fallait deux... La loi semblait assez claire à nous. Alors, en gros,
vous avez mis le doigt là-dessus: le problème, c'est de faire
respecter la loi et de tenir en respect certains offices de producteurs, qu'ils
respectent la volonté du législateur qui est dans la loi, qui est
devant nous.
M. Pagé: Très rapidement - parce que mes
collègues auront d'autres questions, ma collègue aura d'autres
questions aussi - dernière question, et c'est le cas aussi de.. Je vais
certainement la poser à nos honorables visiteurs, qui suivront, tout
à l'heure, là. Vous êtes des producteurs, vous vivez
d'agriculture.
M. Desroches: On essaye.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: Oui, mais tout le monde essaie.
M. Desroches: Ça s'en vient de plus en plus difficile.
M. Pagé: Mais, ça, tout le monde essaie, tout le
monde essaie, et c'est pas pire.
M. Desroches: On n'est pas des producteurs de lait, là,
nous autres.
M. Pagé: Pardon?
M. Desroches: Nous ne sommes pas des producteurs de lait.
M. Pagé: Non, non.
M. Desroches: Notre position est beaucoup plus
précaire.
M. Pagé: Plus délicate.
M. Desroches: Plus délicate.
M. Pagé: D'où l'obligation de...
M. Desroches: C'est pour ça que, quand une grosse machine,
genre bulldozer, rentre dans une situation...
M. Pagé: D'où l'obligation de s'organiser...
M. Desroches: Oui, oui.
M. Pagé:... d'installer des mécanismes.
M. Desroches: Oui, on se fait organiser. S'organiser pour se
faire organiser, ce n'est pas la même chose.
M. Pagé: Ça, mon cher ami, je vous dirais que,
quand on ne s'organise pas, on a des bonnes chances de se faire organiser.
M. Desroches: C'est ça, on était organisés,
mais là...
M. Pagé: Souventes fois, puis c'est ce pourquoi je dis que
l'UPA... L'UPA, vous savez, elle est critiquée; les plans conjoints sont
critiqués, mais on...
M. Desroches: On ne critique pas...
M. Pagé:... s'est quand même donné des...
M. Desroches:... on veut qu'ils obéissent à la loi,
c'est tout!
M. Pagé: Écoutez, là, engeulez-moi pas.
M. Desroches: Excusez-moi.
M. Pagé: On a un échange qui est
intéressant.
M. Desroches: O. K.
M. Pagé: Je comprends que vous ne me voyez pas
souvent...
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Desroches: Je n'y manquerai pas, là.
M. Pagé:... mais on peut se parler de façon
utile.
M. Desroches: Pour une fois que je vous vois, je n'y manquerai
pas.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: Cela étant dit, moi, je crois que les
mécanismes qu'on s'est donnés au Québec ont profité
de façon très significative au développement et à
la stabilité des revenus des producteurs agricoles. Il y a certainement
des problèmes de fonctionnement, ça, je n'en doute pas.
Il y en a partout dans l'ensemble des organismes, etc. Vous avez des
droits, comme membres, parce que vous êtes membres de l'Union des
producteurs agricoles, vous êtes membres de votre
Fédération de producteurs. Pardon?
M. La berge: On n'est pas nécessairement membres de
l'UPA.
M. Pagé: O. K., vous payez votre cotisation.
M. La berge: Même si on la paie, on n'est pas
nécessairement membre de l'UPA.
M. Pagé: Non, je suis d'accord. Vous n'avez pas
l'obligation d'être membre...
M. Laberge: D'accord...
M. Pagé:... mais vous avez l'obligation, lorsque vous
mettez en marché un produit, de payer votre cotisation. Mais pourquoi,
pouvez-vous m'expliquer comment ça se fait qu'à un moment
donné... Vous êtes là depuis 1915, l'Association. Pourquoi,
un matin, ne vous êtes-vous pas levé, avec les convictions qui
vous animent, et ne vous êtes-vous pas dit: On va prendre notre place et
on va aller soutenir qu'on peut représenter, nous, les producteurs
d'agneaux du Québec plutôt que la Fédération? Vous
avez ce droit.
M. Caldwell: Le droit de? Une voix: De prendre
l'office...
M. Pagé: De prendre la place de la
Fédération et de vous présenter, et qu'il y ait des
votes.
M. Caldwell: Oui mais, M. le ministre, pour faire ça, il
faut que les mécanismes prévus par le plan conjoint fonctionnent.
Il faut qu'on puisse élire des délégués. Comme on
l'a dit, ça a pris cinq ans pour faire admettre qu'on pourrait
même assister à l'élection des
délégués. Il faudrait être capables de faire
élire les délégués. Il faudrait que les
délégués - parce qu'on est en division, comme vous le
savez, certains plans conjoints sont divisés en groupes - rendus
à l'assemblée, reflètent les mandats des
délégués. Et la Régie a dit qu'ils ne sont pas
obligés. Il faut qu'on contrôle l'élection des
administrateurs, au fond, qu'on vote sur la comptabilité. On ne conteste
pas le plan conjoint. On est pour la loi, pour le plan conjoint. On conteste
qu'on ne nous permette pas d'exercer la responsabilité et le
contrôle à travers le plan conjoint que le législateur a
voulu.
M. Pagé: Oui, mais vous avez le droit de voter sur les
matières, par exemple, sur la commercialisation. Et vous n'auriez pas,
selon les
informations que j'ai, le droit de voter sur les administrateurs.
M. Caldwell: Non, on n'a pas le droit de voter sur les
administrateurs.
M. Pagé: Mais si vous payez, pourquoi n'êtes-vous
pas membres? Vous pourriez voter, vous pourriez influencer...
M. Caldwell: Ah bon! mais ce serait...
M. Pagé: ...vous pourriez vous réunir, vous
pourriez vous organiser. Vous pourriez prendre le contrôle, vous pourriez
représenter.
M. Caldwell: Oui, mais, M. le ministre, c'est quand même un
pays libre. On n'est pas obligés de s'affilier à l'UPA. Nous ne
sommes pas affiliés à l'UPA.
M. Pagé: Je suis d'accord qu'on est dans un pays libre, et
d'ailleurs vous ne l'êtes pas.
M. Caldwell: Oui. Pardon?
M. Pagé: Vous n'êtes pas affiliés. Vous payez
votre cotisation...
M. Caldwell: C'est ça. Mais on ne peut pas voter.
M. Pagé: C'est votre droit fondamental.
M. Caldwell: Comme il est maintenant, on ne peut pas voter sur
les offres, sur les administrateurs.
M. Pagé: Non, d'accord. Vous n'êtes pas membres et
vous ne voulez pas l'être.
M. Caldwell: Non. Mais on est dans le plan conjoint quand
même, on est des producteurs.
M. Pagé: Bien oui. Mais vous avez le droit de voter sur
les matières relatives à l'application du plan conjoint, sauf les
administrateurs.
M. Caldwell: Mais je vous signale que, jusqu'à cette
année-là, jusqu'aux assemblées séparées, on
n'a pas eu le droit, je m'excuse. Dans ces assemblées combinées,
il y avait deux sortes de délégués: les
délégués du plan conjoint et les
délégués des différents syndicats. Et il n'y a
jamais eu de vote pour les délégués seuls.
Par exemple, l'encan électronique. On ne sait pas, à ce
jour-ci, si les producteurs rassemblés dans le plan conjoint
fonctionnent à travers ce mécanisme que le législateur a
voulu mettre en place pour leur permettre de prendre le contrôle de la
situation, s'ils sont pour l'encan électronique. Parce qu'il n'y a
jamais eu un vote des délégués seuls du plan conjoint sur
cette question-là.
Le Président (M. Richard): Mme la députée de
Johnson, vous avez la parole.
Mme Juneau: merci beaucoup, m. le président. je voudrais
vous demander: est-ce que tous les producteurs ovins de l'estrie font partie de
votre association?
M. Desroches: Non, la majorité, les deux tiers.
Mme Juneau: Quel pourcentage? Deux tiers?
M. Desroches: Deux tiers, solidement les deux tiers.
Mme Juneau: À la suite du libre-échange et de
toutes les productions diversifiées, est-ce que vous trouvez que le plan
conjoint est encore convenable? Est-ce qu'il rencontre les objectifs
d'après vous?
M. Desroches: Je peux répondre à ça? On va
parler du plan conjoint qu'on a dans le moment. Pour nous, c'est une
espèce de corset qui alourdit notre agilité pour répondre
à la demande des consommateurs. On est dans une espèce de corset
obligatoire qui coûte cher et qui, par le fait même, nous rend,
à notre avis, beaucoup moins concurrentiels. Il y a un aspect aussi
qu'on n'a pas mentionné et que personne n'ose mentionner, c'est que les
acheteurs, l'ennemi qui sont les acheteurs, en tout cas... Pour nous,
à l'Association, l'agneau, de notre bergerie jusqu'à la table,
doit participer à une mise en marché. Et une mise en
marché, ça comprend plusieurs chaînons: les producteurs,
les intermédiaires et le consommateur. Dans notre production, les
utilisateurs de plans conjoints sont en guerre contre les autres
intermédiaires. L'UPA a à peu près le même
réflexe que si la production ovine au Québec était une
production contingentée à l'étendue du pays, comme dans le
lait, par exemple. Les producteurs de lait s'inquiètent, à juste
titre, peut-être de faire concurrence, éventuellement, à la
concurrence du lait américain, mais, dans le moment, ils ne l'ont pas.
Alors, comme c'est une production fermée et que chaque intervenant a un
rôle bien précis à jouer, on peut peut-être utiliser
la force, la coercition pour s'imposer. Mais dans les productions non
contingentées, dont l'agneau, vous ne pouvez pas obliger les
intermédiaires à faire ce que vous voulez qu'ils fassent parce
qu'ils peuvent aller chercher de l'agneau ailleurs Et ça, c'est
très difficile à faire comprendre à l'UPA, dans le
moment.
Dans le moment, les acheteurs nous boudent et on nous dit: Ne passez pas
à côté de l'encan, on va les forcer, ici. à acheter
vos agneaux. Ce qui est complètement faux, en tout cas, en partie
faux, parce que les producteurs de l'Est de l'Ontario sont beaucoup plus
proches du marché de Montréal que les producteurs d'ovins du
Lac-Saint-Jean, de la Gaspésie et du Bas-du-Fleuve, puis ils sont
capables d'être très productifs et ils sont capables de nous
donner une sérieuse concurrence, de nous offrir une sérieuse
concurrence là-dessus. Ça, quand on soulève des points
comme ça à une assemblée de plan conjoint, on s'en va sur
le plan syndical. Nous, en fait, ce qui nous intéresse, c'est le
côté mise en marché, le côté
économique. La solidarité, c'est magnifique, la fierté,
c'est de toute beauté, sauf que ça ne paie pas les comptes de
moulée et ça ne fait pas sortir les agneaux de notre
bergerie.
Alors, qu'on vienne nous dire que le système est formidable, est
superbe, que la Fédération fait de la mise en marché, je
me demande, si c'était si formidable que ça, pourquoi, samedi
prochain, il va y avoir une réunion spéciale qui va remettre en
question le fameux système, si tout le monde est si... Je sais qu'on
dérange, on est des gens de Sherbrooke.
Mme Juneau: Mais, comment expliquez-vous que, dans certaines
productions, le plan conjoint est excellent ou, en tout cas, il fonctionne bien
puis, dans la vôtre, pas?
M. Desroches: Bon, c'est, en fait, une bonne question. Nous, on
ne se la pose pas la question, on n'a pas été les voir, dans les
autres productions. Nous, on est des producteurs de moutons et on voudrait que
ça marche dans le mouton. Évidemment, dans le mouton, on pose un
problème qui est particulier parce que je pense qu'on est la seule
production dans laquelle l'UPA doit admettre, dans ses cadres, dans son saint
cénacle, des non "upéistes", comprenez-vous? Alors là, je
sais qu'on jette tout à terre, mais la loi est là. Dans la loi
sur la mise en marché, ce n'est pas écrit qu'on doive faire
partie de l'UPA pour être couvert par le plan conjoint. On a des droits,
ça a pris cinq ans pour se faire inviter et admettre aux
assemblées régionales et provinciales, et on fait notre petit
bonhomme de chemin, puis on est ici, aujourd'hui, M. le ministre. Il faut se
déplacer pour vous voir. Ça nous fait plaisir.
M. Pagé: Bien, moi aussi. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laberge: Madame, je pense que votre question, par exemple,
était: Pourquoi ça ne s'applique pas à l'agneau quand
ça s'applique à autre chose?
Mme Juneau: Moi, je voulais savoir, la question que j'avais
posée, c'était très précis: Comment se fait-il que
le plan conjoint peut être bénéfique pour d'autres
productions et pas du tout pour vous, ou très peu?
M. Laberge: Ce n'est pas le plan conjoint qui n'est pas
bénéfique, dans le moment, c'est l'enchère
électronique qui n'est pas bénéfique.
Mme Juneau: J'allais y venir à ça. Parce que,
à la page 4 de votre mémoire, vous dites, au troisième
paragraphe: "Une deuxième fois, pour tenter de faire comprendre à
la Régie que le projet d'agence de vente, avec enchère
électronique obligatoire, tel que conçu et
présenté, n'avait guère de chance de fonctionner..."
Est-ce que vous parlez de l'agence de vente, du projet ou de l'enchère
électronique? Je trouve que c'est un peu confus. Voulez-vous nous
expliquer ça?
M. Laberge: On parle du projet de l'enchère
électronique, qui était au stade de projet, dans ce
temps-là...
Mme Juneau: Quand vous avez préparé votre
mémoire?
M. Laberge: Oui, justement. Pas ce mémoire-ci, non, mais
quand on est allés devant la Régie, c'était au stade de
projet, et puis on s'objectait au projet de l'enchère
électronique, en fait.
Mme Juneau: Est-ce que vous êtes favorables aux agences de
vente?
M. Desroches: Si elles sont efficaces, oui.
M. Laberge: Les agences de vente, là, on ne peut pas
être en faveur globalement, parce que ça dépend des agences
de vente. Ça, c'en est une avec laquelle on n'est pas d'accord parce
qu'elle est fondamentalement mauvaise.
Mme Juneau: Puis l'enchère électronique?
M. Laberge: C'est ça. L'enchère électronique
est fondamentalement mauvaise pour l'agneau. (17 heures)
M. Caldwell: Pour cette production-là.
M. Laberge: Ça ne tient pas debout.
Mme Juneau: Parce que ça ne vous donne pas les prix que
vous souhaiteriez? Ça ne fait pas assez de publicité?
M. Laberge: Non, madame, c'est plus compliqué que
ça. Pour commencer, c'est parce qu'on fait affaire, en grande partie,
avec des Italiens pour le marché de l'agneau de lait qui couvre a peu
près 60 % de nos agneaux. Ces gens-là sont habitués
à voir les agneaux, à les tâter, à les regarder.
C'est leur façon d'acheter les agneaux. Chacun a un client pour
l'agneau
qu'il achète. Dans le porc, vous avez une carcasse optimum. Dans
l'agneau, vous avez des agneaux qui partent peut-être de 25 livres
jusqu'à 125 livres et un acheteur qui pense que c'est l'agneau optimal
entre 25 et 125. Alors, c'est très compliqué. Avec ça,
vous avez des agneaux gras, des agneaux maigres. Vous avez différentes
races, des races qui sont viandées, des races qui ne le sont pas. Vous
avez de vieux agneaux. Il y a des ethnies qui préfèrent de vieux
agneaux, il y en a qui en préfèrent des jeunes. C'est
excessivement compliqué. Ça, c'est un problème qu'il y a
avec l'enchère électronique.
Mme Juneau: Est-ce que vous trouvez que la Régie dispose
de tous les moyens pour faire appliquer la loi des plans conjoints?
M. Laberge: Non. Je pense que c'est explicite dans notre
mémoire. En fait, on n'est pas certains de quels pouvoirs la
Régie est dotée. On leur a demandé une fois et on nous a
dit de vérifier la loi, que c'était là. On n'est pas
certains vraiment de ce que la Régie peut faire et ne pas faire.
Mme Juneau: Mais vous savez que la loi a toujours
prédominance sur la réglementation. Est-ce que c'est la loi qui
n'est pas assez claire ou si c'est la réglementation qui va trop
loin?
M. Laberge: Peut-être que c'est nous autres qui ne sommes
pas assez fins pour lire la loi et pouvoir l'interpréter, je ne sais
pas. Mais je sais qu'elle n'a pas travaillé pour nous.
M. Caldwell: Et, madame, je pourrais ajouter qu'il y a une
question fondamentale pour nous. Si la Régie était effectivement
une sorte de tribunal quasi judiciaire qui verrait à ce que tout le
monde rencontre ses obligations, respecte la loi, on trouverait ça bien,
et qu'il y aurait un processus d'appel. Mais ce n'était pas clair dans
l'ancienne loi.
La Régie fait deux choses. Elle voit comment les joueurs jouent;
elle essaie de régler les conflits d'une façon harmonieuse. Mais
la Régie est aussi responsable de la mise en marché,
c'est-à-dire qu'elle est à la fois un agent par
délégation. C'est fa Régie qui choisit l'office des
producteurs, dans notre cas, la Fédération. La Régie voit
à la mise en marché.
M. Pagé: Je m'excuse, M. le Président.
Pourriez-vous répéter?
M. Caldwell: Oui.
M. Pagé: La Régie qui...
M. Caldwell: II y a une ambiguïté. La Régie,
si vous lisez l'ancienne loi, c'est un peu dif- férent dans la nouvelle,
voit à la bonne marche de la mise en marché. C'est-à-dire
que la Régie est un agent qui voit à ce que des choses
s'accomplissent. Ici, dans ce cas, la mise en marché. En même
temps, elle s'est trouvée dans le rôle, et je trouve qu'elle a une
position très difficile, d'arbitrer entre les acteurs. Alors, ce n'est
pas du tout clair pour nous. Est-ce que c'est un quasi-tribunal qui voit
à ce que tous les joueurs respectent les règles du jeu ou est-ce
qu'ils sont aussi un des agents dans ce processus? Ce n'est pas. clair parce
que la loi, et la nouvelle loi aussi, donne à la Régie la
responsabilité de voir à ce que la mise en marché se
fasse. Pour nous, c'est un problème. Bien qu'on félicite la
Régie du fait qu'il y ait, dans la nouvelle loi, certaines
améliorations qui font en sorte que les producteurs puissent avoir un
peu plus de contrôle sur leur plan conjoint, qui voit à ce que le
rôle de l'UPA soit plus fidèle à la loi. Pour nous, il
reste une ambiguïté qui résulte de ce double rôle
d'agent et de personne qui voit à ce que la loi soit respectée.
C'est ma réponse à votre question.
Mme Juneau: Si j'ai bien compris, vous trouvez que l'UPA a trop
de pouvoirs et vous souhaiteriez que ça soit diminué. C'est
ça?
M. Caldwell: Oui. On trouvait que la Régie était
trop proche de l'UPA qui devait surveiller... Je reviens sur cette question. Si
on lit l'article 3 de l'ancienne loi, la Régie des marchés
agricoles est: "Un organisme de surveillance, - nous, on croyait que
c'était ça - de coordination et d'amélioration de la mise
en marché des produits agricoles..." Alors, sous l'ancien régime,
avant la nouvelle loi, on trouvait que la Régie n'était pas
suffisamment indépendante de l'UPA. Par exemple, toutes les
décisions de la Régie qui nous concernaient, on les apprenait,
dans La terre de chez nous, même avant de recevoir la
décision de la Régie. Il y a une sorte d'affinité
où l'UPA et la Régie sont trop proches l'une de l'autre, mais
peut-être que si la Régie est en train de faire la mise en
marché, elle a mandaté les offices de production qui sont tous
les UPA. Peut-être que c'est une ambiguïté, une
difficulté qu'il est difficile pour la Régie de trancher. On
apprécie l'occasion ici, en commission parlementaire, de soulever ce
point-là et aussi de souligner que, même sur le coût des
décisions, on était très déçus. Dans la
nouvelle loi, la Régie ou le gouvernement semble être sensible
à ce problème. Mais pour répondre à votre question,
oui, carrément, le pouvoir de la Régie était tel qu'elle
mettait tout à fait en veilleuse le pouvoir des producteurs
d'administrer leur plan conjoint.
Mme Juneau: Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, Mme la
députée Johnson. M. le ministre, vous avez
d'autres commentaires?
M. Pagé: Je vais me limiter à remercier nos bonnes
gens, les éleveurs de moutons des Cantons de l'Est. Je comprends qu'ils
sont confrontés à plusieurs problèmes. Mais, au fond,
pendant que vous vous tiraillez comme ça, l'agneau de la
Nouvelle-Zélande continue à rentrer.
M. Caldwell: Oui, mais tant que notre agneau n'est pas
étiqueté, on ne peut pas aller acheter l'agneau du Québec
nulle part encore.
M. Pagé: Ce que je veux dire, c'est que j'espère,
par les chambres de coordination et de développement, qu'on va
être en mesure d'avoir davantage d'unicité dans l'action.
M. Caldwell: Justement, et on espère participer.
M. Pagé: Vous avez des droits, je vous invite à les
faire valoir. Je vous invite aussi à continuer votre engagement pour
l'agriculture au Québec. On a noté vos commentaires.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Johnson, pour vos remerciements.
Mme Juneau: Oui, au nom de notre formation politique, je
désire vous remercier. J'ai trouvé que votre mémoire et
vos revendications étaient très corrects, et je vous remercie
beaucoup d'être venus nous les présenter.
M. Caldwell: On vous remercie beaucoup. Pour nous, c'était
un honneur et un privilège de venir ici, devant les
députés de l'Assemblée nationale, pour exposer notre point
de vue.
Le Président (M. Richard): Merci, messieurs. Je
demanderais aux représentants de l'Union d'entraide des agriculteurs du
centre du Québec de prendre place, s'il vous plaît.
Une suspension de deux minutes, s'il vous plaît. Vous vous
installez...
(Suspension de la séance à 17 h 9)
(Reprisée 17 h 12)
Le Président (M. Richard): Alors, c'est l'Union d'entraide
des agriculteurs du centre du Québec. Vous vous présentez
d'abord, évidemment, et vous présentez vos collègues qui
vous accompagnent. Vous avez la parole.
Union d'entraide des agriculteurs du centre du
Québec
M. Jédier (Michel): Michel Jédier, président
de l'UEACQ; à ma droite, M. Marcel Létourneau, directeur; un peu
plus loin en avant, M. Beau-doin, à ma droite; à ma gauche, M.
Maurice Lapalme, vice-président, et M. Jean-Pierre Varetta, à
l'extrême gauche.
Le Président (M. Richard): Merci. Vous avez la parole.
M. Jédier: Alors, nous allons commencer par
présenter le mémoire par M. Létourneau.
M. Létourneau (Marcel): Bonjour, tout le monde.
Avant de débuter, j'aimerais faire distribuer ceci qui a paru
après la composition du mémoire. C'est un extrait du Western
Producer qui confirme que nos amis de l'Ouest abondent un peu dans le
même sens que nous autres.
Avant de débuter aussi, j'aimerais...
Le Président (M. Richard): Vous parlez de l'Ouest
canadien, là?
M. Létourneau: Oui. J'aimerais ajouter que, dans notre
mémoire, il y a peut-être certaines comparaisons qui peuvent
être dures. On ne veut pas heurter personne. Tout ce qu'on recherche,
c'est un impact instantané et clair.
Secrétariat de la commission parlementaire de Québec,
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
Assemblée nationale, projet de loi 15, Loi sur la mise en marché
des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres dispositions
législatives. Le conseil d'administration de l'Union d'entraide des
agriculteurs du centre du Québec avec leur président et leurs
membres ont étudié ensemble le projet de loi 15. Nous avons
constaté qu'il déroge outrageusement aux Chartes
québécoises et canadiennes sur les droits et libertés de
la personne. Par conséquent, nous désirons être entendus en
commission parlementaire à ce sujet. Notre demande est faite pour le
meilleur intérêt de la classe des producteurs agricoles et dans le
plus grand respect de la démocratie. Et j'ajouterais aussi dans le but
de garantir l'accès à l'excellence pour tous les
agriculteurs.
Interprétation. Le mot "vous", dans nos commentaires,
représente le gouvernement du Québec d'hier, d'aujourd'hui et,
éventuellement, de demain. Voici donc brièvement nos
interventions sur chacun des articles suivants de ce projet. Nous n'avons pas
mentionné les articles parce que vous avez tous le projet devant vous,
mais on va vous donner nos commentaires. À l'article 2, nous ne voulons
pas que cette loi nuise en aucune façon au bon fonctionnement de nos
coopératives. Articles 23 à 27, comme dans l'article 26, nous
sommes d'accord qu'une association demande un plan conjoint pour ses membres,
mais nous ne sommes pas d'accord que tous les producteurs agricoles du
Québec soient
dans l'obligation d'être membres de cette même association,
en les privant ainsi de leur droit constitutionnel à la liberté
d'association.
L'article 37 crée une sorte de couloir ou entonnoir où
tous les producteurs agricoles devront passer pour aboutir à la
même association en question. Tous les producteurs de bétail ont
sur leur ferme ce genre de couloir ou entonnoir servant à diriger les
animaux vers un endroit spécifique comme dans un enclos
contrôlé ou à l'abattoir, et vous en connaissez le
résultat. Nous croyons que les agriculteurs ne sont pas comme des
animaux, qu'ils sont assez intelligents pour pouvoir choisir eux-mêmes
l'association qui leur convient. Le véritable problème dans toute
cette affaire, c'est que la démocratie n'est pas respectée
dès le début. Il est de notoriété publique que la
Régie des marchés agricoles est une extension au niveau
gouvernemental de l'association accréditée. Donc, tous les plans
conjoints sont automatiquement accordés à cette association et
refusés aux autres. Nous avons des exemples à ce sujet. Nous
pourrions écrire un ouvrage de plusieurs volumes sur les méfaits
créés par ce monopole dans le passé.
Un jour, vous, du gouvernement, avez passé une loi pour contrer
les méfaits d'un monopole ou des coalitions. En permettant
l'exclusivité d'une seule association, vous privez les producteurs de
l'accès à l'excellence dans les associations, ouvrant la porte
à toutes sortes d'abus, tels que la dictature, le favoritisme, et
même le règlement de compte à caractère
économique comme celui avec les coopératives. Notre
liberté individuelle se termine là où commence celle des
autres. Nous reconnaissons que la Régie a le mandat de surveiller chaque
intervenant en agriculture pour que les aliments livrés soient d'une
qualité impeccable et que les quantités soient justes et
précises. Mais qu'un producteur ait la liberté de vendre ses
produits aux clients de son choix et aux prix qu'il désire, ou qu'un
groupe indépendant de producteurs forment une association entre eux dans
le but d'obtenir un meilleur débouché à de meilleurs prix
pour ces produits, ceci est de la libre entreprise, et il n'y a rien
d'illégal dans ça. Nous ne voyons pas l'obligation d'avoir
toujours besoin de la Régie pour sanctionner des arrangements pris entre
différents individus. Il existe dans l'entreprise publique toutes sortes
d'associations et aucune n'a de succursale au gouvernement pour sanc tionner
ses règlements et les imposer par la force de la loi au reste de la
population. Il n'y a qu'en agriculture qu'on voit ça.
Au moment où le Parti communiste de la Russie a reconnu cette
erreur vieille de plus de 70 ans, soit l'article 6 de leur constitution qui
donnait l'exclusivité du pouvoir au Parti communiste, vous tentez par
cette loi de perpétuer et de raffermir cette exclusivité
consentie à cène association en 1972, et maintenant
illégale depuis le 17 avril 1987. J'ajouterai ici qu'elle a
été illégale cinq ans accidentellement quand le PQ, pour
ne pas être obligé de légiférer
instantanément suite à la rentrée de la constitution de
1982, a mis la clause "nonobstant" sur toutes les lois du Québec, et
ça s'est terminé le 17 avril 1987. C'est presque croire que les
Russes, après avoir aboli l'article 6 de leur constitution, vous aient
refilé à rabais leur vieux manuel d'opération.
Cette association, encore une fois, via la Régie, s'est permis
une mesquinerie de bas niveau, en refusant que le gouvernement publie les
informations d'intérêt agricole dans le journal The Advocate,
de la Québec Farmers' Association. Elle a, l'an dernier,
dirigé un complot pour faire exclure la Coopérative
fédérée et la Québec Farmers' Association des
réunions de la Fédération canadienne de l'agriculture.
Nous pourrions vous donner encore plusieurs exemples, mais nous nous
arrêterons ici. Je vais ajouter un commentaire ici. Ils leur ont
répondu qu'en vertu de l'Agriculture Act, je ne sais pas trop quoi, il
fallait que ce soit diffusé dans seulement un journal, parce que le
gouvernement paie pour ça, pour le mettre dans La terre de chez nous.
Mais je vous dirai ceci, qu'il y a des journaux agricoles qui appartiennent
à un ministre, et c'est publié dans ce journal-là aussi.
Ça fait que, tirez-en vos propres conclusions.
Nous vous demandons de redéfinir l'article 37 de façon que
nous puissions choisir l'office qui nous convient le mieux pour
l'administration d'un plan conjoint, et non un soul, ot que, exception faite
des contingentements, l'adhésion au plan conjoint pour la vente, le
transport, la recherche, la publicité, soit libre afin que les
promoteurs de ces plans conjoints aient l'obligation morale de prouver
l'efficacité de ces plans pour attirer les producteurs à s'y
joindre et à être membres. Nous suggérons que la meilleure
formule serait de signer des contrats avec l'office de notre choix, pour une
période de un, deux ou trois ans, pour adhérer à ces
plans, ce qui leur donnerait une base solide pour travailler. Ces contrats
étant renouvelables, ils auraient à se surpasser pour conserver
leurs membres, donnant ainsi aux agriculteurs l'accès à
l'excellence dans ce domaine. Cette formule permettrait aux producteurs de
juger aux-mêmes de l'efficacité de ces plans et non à
l'office qui déterminerait, tous les cinq ans, la valeur de ces plans
devant la Régie. Actuellement, l'association accréditée et
la Régie ne faisant qu'un, imaginez quel rapport ce serait et à
l'avantage de qui? Ce serait comme de demander à un chien de livrer une
saucisse à un autre chien.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Létoumeau: Si vous deviez faire la sourde oreille
à notre demande, étudions maintenant les méfaits possibles
de cette loi à partir du chapitre V, section I.
Article 43. Cet article donne à l'office le pouvoir de
détruire le travail du producteur qui se serait bâti une mise en
marché efficace et qui voudrait continuer dans le même sens.
Article 63. Par cet article, la loi étant passée dans sa
forme originelle, vous enlevez aux producteurs tous les pouvoirs qu'ils
auraient eus à l'article 59. Les diviser pour mieux les avoir. C'est
écrit dans l'ancien manuel russe. Avec des délégués
judicieusement choisis, et surtout avec une loi genre "mur de Berlin" qui
amènerait tous les producteurs dans son giron, un office peut faire
passer tous les règlements qu'il veut à son propre avantage et
les producteurs ne peuvent rien faire. D'autres intervenants avant nous ont dit
la même chose. Inutile pour vous de vouloir contester cela, car
l'expérience des dernières années le confirme et, de plus,
tout bon politicien et tout bon Chevalier de Colomb sait ça.
Article 64. Ce serait idéal si tout se passait comme il est
écrit, mais l'expérience a démontré dans le
passé qu'avec un système de délégués, les
demandes de la base qui déplaisent à l'office sont
automatiquement court-circuitées au niveau des
délégués.
Article 77. C'est tout à fait ce que nous recherchons, de pouvoir
se joindre à la coop de notre choix, dans notre secteur, ou à
l'association de notre choix, et non à une seule, pour l'administration
du plan auquel nous désirerions librement adhérer.
Article 81. Avec les pouvoirs absolus confiés à l'office,
la loi, dans sa forme actuelle, ouvre la porte à des abus de dictature
et de décision abitraire que seule la liberté d'adhésion
peut contrer.
Article 85. Il est écrit que la Régie peut arbitrer.
Malheureusement, nous avons de sérieuses réserves sur sa
façon de le faire. Quand un organisme comme la Régie, pour
satisfaire les exigences de l'association dont elle est issue, prend des
décisions arbitraires qui font perdre des millions de dollars aux
producteurs de lait en mettant en péril la stabilité
financière de leur coopérative, on se pose de sérieuses
questions.
Article 89. Encore une fois, avec sa forme obligatoire, la loi, par cet
article, détruirait le travail des fermes qui auraient
déjà une bonne structure de mise en marché.
Article 90. Nous sommes d'accord avec des contingentements, dans le but
d'améliorer la rentabilité de nos fermes. Mais les confier
à un seul office pour l'ensemble de la province serait
anticonstitutionnel, parce qu'ils nous forceraient à passer tous par le
même office. Nous suggérons donc que les contingentements soient
gérés par le ministère de l'Agriculture qui en assumerait
la supervision, en collaboration avec les offices que les producteurs auraient
choisis dans leur secteur respectif pour administrer leur plan conjoint.
Article 93. Avec un seul office obligatoire au niveau provincial pour
chacun des plans, l'application de cet article serait une marque de
mépris pour la personne humaine, du genre de fichiers que la Securitate
de Ceausescu en Roumanie ou que la police secrète en RDA avaient sur
leurs populations quand elles étaient régies, jusqu'à
l'automne dernier, par des lois de ce genre. Mais, avec le libre choix de son
office, l'enregistrement de son exploitation se ferait dans le respect de la
dignité humaine, garanti par l'article 4 de la Charte
québécoise des droits et libertés de la personne.
Article 94. Encore une fois, l'application obligatoire de cet article
détruirait l'organisation de la mise en marché que des
producteurs ont quelquefois mis des années à construire.
L'application de cet article doit être volontaire, ce qui lui donnerait
l'obligation absolue d'être efficace pour avoir des adhérents et
lui donnerait même, avec le volume de production de plusieurs
producteurs, un avantage de négociation des prix en concurrence avec
ceux qui font déjà leur mise en marché eux-mêmes.
Mais l'obligation ferait disparaître la compétition et
enlèverait cet avantage.
Article 100. Les producteurs agricoles sont toujours prêts
à payer pour ce qu'ils ont librement choisi pour améliorer la
rentabilité de leurs entreprises. Exemple: les assurances agricoles sont
libres et la plupart y adhèrent.
Article 101, alinéa 4. Comme le producteur qui fait sa mise en
marché lui-même assumera ses propres pertes, s'il y a lieu, nous
demandons que cet article soit changé de façon que ceux qui
auront librement choisi de faire leur mise en marché en commun en
subissent les pertes.
Article 107. Comme nous réclamons la libre adhésion aux
différents plans conjoints pour en garantir l'efficacité et que
nous acceptons, pour le bien commun, l'obligation dans l'acceptation des
contingentements, nous réclamons la modification de cet article pour y
inclure un droit d'"opting out" à la fin du contrat que nous aurions
éventuellement signé avec l'office de notre choix, excepté
pour les frais d'administration du contingentement, s'il y a lieu - ça,
c'est pour les productions contingentées - lesquels frais seraient remis
au ministère de l'Agriculture pour en administrer cedit
contingentement.
Ici, entre parenthèses, quand on parle de droit d'"opting out",
je fais référence aux provinces de l'Ouest qui ont des
associations qui ont un "checkoff plan" et puis toutes ces associations, c'est
sur une base volontaire. Et, en partant de là, elles sont
obligées de garantir une efficacité pour garder leurs membres,
puis je vous dirai qu'elles la garantissent, leur efficacité, parce
qu'elles sont prêtes. La Canola Producers of Alberta, ils ont
peut-être une dizaine de producteurs, à peine, peut-être
même moins, qui ont redemandé leurs prélevés, tous
les autres paient. Mais si c'était libre, on sait ce que ça
fait.
Article 132. Encore une fois, dans sa forme actuelle de la loi, cet
article est dictatorial et
arbitraire et vient à rencontre du respect de la dignité
humaine. Mais, fait dans la liberté et le respect de tous, les
agriculteurs iront tous s'enregistrer à ce qui est le plus rentable pour
eux.
Articles 149 et 150. Nous serions d'accord pour la constitution d'un tel
fonds administré par l'association accréditée de notre
choix, mais alors, une partie de ce fonds serait administrée par
l'association accréditée actuelle. Celle-ci ayant, par le
passé, chargé des frais d'administration exorbitants sur ce
qu'elle administrait pour les producteurs, nous souhaiterions que, dans
l'éventualité de la constitution d'un tel fonds, cet argent soit
remis au ministère de l'Agriculture pour être administré
par celui-ci. Comme vous voyez, on vous fait 100 % confiance.
Article 162. Dans la forme actuelle de la loi, cette clause serait digne
d'un ancien pays communiste, mais dans la forme proposée de la loi,
cette clause serait convenable pour vérifier l'exécution d'un
contrat signé entre un office et un producteur, de même que pour
vérifier le respect d'un contingentement, s'il y a lieu.
Chapitre VII. Nous serions d'accord avec ce chapitre dans les cas de
quelqu'un qui ne remplirait pas sa part d'un contrat signé avec un
office ou une coop ou pour quelqu'un qui produirait hors contingentement un
produit contingenté.
Chapitre XVIII. Dans ce chapitre, vous faites certaines modifications
à certaines lois. Nous vous demandons de profiter de cette occasion pour
modifier l'article 8 de la Loi sur les producteurs agricoles, Lois refondues du
Québec, chapitre P-28, en enlevant la restriction qui dit: "Une seule
association peut être accréditée." Si les Russes l'ont
fait, vous pouvez le faire aussi. Cette clause n'a été
constitutionnelle que depuis le mois d'avril 1982 jusqu'au 17 avril 1987, comme
on l'a dit tantôt, et ne l'est plus depuis cette dernière date.
Elle a été constitutionnelle parce que, dans la constitution, il
y a la clause "nonobstant".
Suite à cela, vous vous êtes certainement aperçu que
nous avions compris qui présente ce projet de loi, via M. le ministre
Pagé. Les nombreux abus et la non-constitutionnalité de l'article
8 de la Loi sur les producteurs agricoles ainsi que quelques cas de grave
trahison envers certains de ses membres ont fait que l'association
accréditée actuelle a perdu plusieurs membres ces
dernières années, et elle tente, par ce projet de loi, de
créer un mur hermétique, du plus pur style communiste, afin que
tous les producteurs soient obligés de passer par elle. Mais la
liberté d'association donnerait aux agriculteurs l'accès à
l'excellence dans les associations et fermerait la porte aux abus, car la
crainte de perdre ces membres amènerait les associations à faire
de leur mieux dans la représentation et la défense des
agriculteurs et non l'organisation arbitraire et dictatoriale de leur
activité économique dans le seul but d'en retirer un revenu qui
en est rendu à un point tel qu'il en coûte plus cher pour bien des
producteurs de payer leur association via leurs prélevés que de
payer leur impôt sur le revenu. (17 h 30)
Nous ne sommes pas dupes. Même si les Russes ont compris et se
sont eux-mêmes civilisés en enlevant cette clause abjecte de leur
constitution, nous nous attendons que. comme les Blancs de l'Afrique du Sud.
ils ne veulent pas lâcher le paquet. Comme nul ne peut prétendre
posséder en exclusivité la vérité et la sagesse,
nous pensons bien qu'eux aussi ne les possèdent pas en
exclusivité à eux seuls - nous autres non plus, d'ailleurs - et
qu'il leur manque des associations comme les nôtres, la Québec
Farmers' Association, pour ne nommer que celle-là, qui pourraient
très bien les compléter, et ce, pour le meilleur en agriculture.
La Régie n'aurait plus rien à sanctionner, sauf notre
accréditation parce que toute association civilisée, telle que
les coopératives... Dernièrement, on a eu des réunions de
coopératives; on a passé des règlements entre nous autres,
en accord avec les lois actuelles de notre pays, et on n'a pas eu besoin jamais
de la Régie pour sanctionner ça.
Nous avons fait ces recommandations dans le plus pur respect de la
démocratie et nous avons confiance en votre intelligence et en votre
respect de la constitution canadienne et de la Charte québécoise
des droits et libertés de la personne, car ce projet de loi n'aurait
même pas dû être présenté dans sa forme
actuelle, car il est, comme tel, anticonstitutionnel et une atteinte directe
à la dignité humaine. On va laisser faire le restant.
L'occasion vous est maintenant donnée de crever cet abcès
qui perdure depuis plusieurs années en agriculture, et nous vous
demandons d'avoir le courage de le faire. Un refus de votre part serait
très néfaste pour l'agriculture et amènerait, avant
longtemps, une situation comme celle qu'ont vécue les agriculteurs de la
Saskatchewan en 1984.
Avant de terminer, je vais ajouter ceci. Les premiers à
écoper, dans ça, ça va être l'UPA. Si vous donnez
tout à l'UPA, les agriculteurs vont finir par se révolter. C'est
ce qui est arrivé, en 1984, en Saskatchewan. L'UPA, ils ont de bonnes
idées, mais ils ne sont pas les seuls à en avoir des bonnes. Si
vous leur donnez tout, ça va être la révolte, et elle a
débutée. Quand on dit qu'il y a 200 producteurs de patates qui
non seulement n'ont pas demandé d'être exclus de l'UPA, mais ont
demandé de tout faire détruire ce qui est fait depuis 11 ans.
C'est comme les Allemands de l'Est. Ils ont été tellement
exaspérés contre leur régime qu'ils veulent tout faire
disparaître ce qui représente ça. Mais si vous allez trop
loin, c'est ça que les agriculteurs vont vouloir faire. Ils vont vouloir
tout faire disparaître ce qui a représenté leur
exaspération. Mais si vous y
allez mollo, l'UPA va rester, et nous autres aussi, on va pouvoir
marcher. On a déjà passé pour avoir le sida, mais
n'oubliez pas que David a vaincu Goliath, hein?
Espérant recevoir une attention toute spéciale de votre
part dans ce dossier, veuillez accepter nos salutations les plus chaleureuses
et nous demeurons, humblement vôtre, l'Union d'entraide des agriculteurs
du centre du Québec.
Le Président (M. Richard): Merci, messieurs. M. le
ministre, avez-vous des questions? Je m'excuse, juste un peu d'humour. Quand
vous avez fait allusion aux Chevaliers de Colomb, disiez-vous aussi les Filles
d'Isabelle?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Létourneau: Ah! Peut-être. O.K. Oui.
Le Président (M. Richard): C'est de l'humour.
M. Létourneau: Mais...
Le Président (M. Richard): M. le ministre, vous avez la
parole.
M. Pagé: Alors, merci, M. le Président. Donc, le
ministre est anticonstitutionnaliste, le ministre est communiste, le ministre
fait fi de la Charte des droits. Vous n'y allez pas avec le dos de la
cuiller!
M. Létourneau: On voulait être clairs et
précis.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Létourneau: Mais si vous l'avez remarqué, on l'a
fait dans le respect de tout le monde parce que la Charte
québécoise des droits et libertés, pour rester dans le
Québec, nous garantit le droit à la dignité. Il y a
seulement qu'en agriculture...
M. Pagé: Vous avez le droit...
M. Létourneau: ...qu'on se fait dire: On n'a pas besoin de
vous autres...
M. Pagé: Je m'excuse, monsieur, là, c'est moi qui
commente.
M. Létourneau: ...c'est seulement votre argent qu'on veut
avoir.
M. Pagé: C'est moi qui commente là. M.
Létourneau: Oui.
M. Pagé: C'est clair là? Vous avez eu votre tour.
Je ne vous ai pas interrompu, vous. Est-ce que je vous ai interrompu
tantôt? M. Létourneau: Non. M. Pagé:
Laissez-moi parier.
M. Létourneau: Mais quand je vous ai répondu...
M. Pagé: Faites-en autant!
M. Létourneau: ...vous ne pariiez plus.
M. Pagé: La dignité commence par ça. O.K.,
M. le Président, plus de question, plus de commentaire. That's it!"
Vas-y.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: Oui, M. le Président, c'est
évident que ce mémoire est d'une sévérité
remarquable. Par contre, je comprends que c'est vrai qu'on est dans un pays
libre. Ces gens ont le droit, le plein droit, de présenter un
mémoire devant la commission parlementaire. Ils ont le droit de
s'expliquer. J'aimerais savoir combien votre mouvement, votre union, l'Union
d'entraide des agriculteurs du centre du Québec, regroupe-t-il de
membres?
M. Jédier: Environ 800 membres actuellement.
M. Baril: Qui sont répartis à travers le
Québec ou bien s'ils sont centralisés plutôt dans une
région?
M. Jédier: Ils sont dans plusieurs régions du
Québec. Donc, il y en a en Estrie, il y en a jusqu'à Rimouski,
Valleyfield, la région de Saint-Hyacinthe.
M. Baril: Dans quelle production vos membres sont-ils
impliqués?
M. Jédier: À peu près dans toutes
productions.
M. Baril: Dans toutes les productions. Vous avez un conseil
d'administration?
M. Jédier: Oui.
M. Baril: II est élu comment? Vous avez une
assemblée générale?
M. Jédier: On a tenu notre assemblée
générale annuelle au mois de mars. D'ailleurs, nous avions
invité M. le ministre ou un délégué, mais nous
n'avons vu personne. Il y avait beaucoup de monde, il y avait beaucoup de
producteurs qui étaient là, qui voulaient poser
des questions, mais nous n'avons vu personne. Alors...
M. Baril: C'est évident que si on fait un bref
résumé de votre mémoire, une compréhension, en tout
cas, de votre mémoire, vous remettez tout en cause, le syndicalisme
agricole, le système des plans conjoints au Québec. Ça,
ça semble clair que...
M. Jédier: Eh! pas tous les plans conjoints.
M. Baril: Bien, le système des plans conjoints.
M. Jédier: Non, même pas. Le système, dans
certains...
M. Baril: Parce qu'il ne peut pas être...
M. Jédier: ...plans conjoints, il est très bien.
Là où c'est contingenté, il n'y a pas de problème,
on ne le met pas en cause.
M. Baril: Oui, mais puisque les plans conjoints sont
administrés par des offices de producteurs qui, eux, relèvent de
l'Union des producteurs agricoles, c'est dans ce sens-là que je dis que
vous remettez l'ensemble des plans. Tout le système syndicaliste, au
Québec, c'est un système agricole, et vous remettez ça en
question parce que vous ne semblez pas croire au fonctionnement. De toute
façon, vous dites, vous autres, que chaque producteur ou chaque groupe
de producteurs pourrait librement ou devrait librement adhérer à
un office...
M. Jédier: À une association.
M. Baril: ...à une association qui, elle, pourrait
administrer votre forme de plan conjoint à vous, votre forme de mise en
marché. Bon! Comment peut-on évaluer ça, là? Si on
multiplie les offices de producteurs, ça coûte des sous
administrer ça, et c'est avec la quantité des membres, souvent,
que t'es capable de réduire l'administration. Parce que vous avez
raison, aujourd'hui l'agriculture, entre autres, c'est la production la plus
réglementée, la plus contingentée, mais il faut voir
d'où ça part, ça, ce système-là, pourquoi
c'est mis en place aujourd'hui comme ça. Et, je me souviens, ça
n'a pas été mon cas à moi, mais je me souviens qu'à
plusieurs reprises, mon père travaillait pour l'UCC, à
l'époque et il devait passer par les maisons pour venir à bout de
ramasser, je pense que c'était 5 $, à l'époque, et il
devait passer bien des fois une soirée à la même place pour
venir à bout d'arracher le 5 $, pour toutes sortes de raisons. Il y en a
qui ne voulaient pas pantoute. Ça fait qu'aujourd'hui, la formule de la
reconnaissance de l'UPA à l'intérieur de notre système,
quand même, fait en sorte que, tout en admettant que tout n'est pas
parfait, que ça soit dans le domaine agricole ou ailleurs - il y a
toujours place pour l'amélioration, ça, c'est bien évident
- mais quand même, la formule a été efficace et elle a
permis à l'agriculture québécoise, je pense, de se
développer à un rythme plus accéléré que
dans d'autres provinces du Canada. Bon. Mais, pendant que la cotisation, je
vais dire, n'était pas obligatoire, il y avait quand même des
hommes et des femmes qui se battaient pour avoir des acquis, puis ceux qui ne
payaient pas, en profitaient pareil. Comment expliquez-vous ça si,
aujourd'hui, on remet tout ça en cause?
M. Jédier: Mais si, aujourd'hui, une partie des membres
appartient à une association et l'autre à une autre, ça
ferait exactement comme ça fait au Parlement: il y a le Parti
libéral, d'un côté, et le Parti québécois, de
l'autre, une Opposition, et c'est ce qui oblige les deux partis à
discuter, tandis que si c'est un monopole comme c'est le cas avec l'UPA, il n'y
a plus rien de possible. C'est un parti unique. Donc, on décide en haut
et on ne demande même plus l'avis à la base. J'ai assisté,
dernièrement, à l'assemblée générale
annuelle de la Fédération des cultures commerciales. Nous
étions 94, présents. Eh bien, ces messieurs ont élu dans
la salle 143 délégués. Pouvez-vous me dire que c'est
constitutionnel, que c'est normal d'élire 143
délégués alors qu'il y avait 94 personnes
présentes? Je peux vous faire passer le document, si vous voulez.
M. Baril: Non, non.
M. Jédier: Ensuite, je vais vous en citer un autre,
envoyé par la Fédération des producteurs de sirop
d'érable de Saint-Hyacinthe à tous les présidents de
syndicats de base. Objet: la rotation du plan conjoint acéricole. Les
producteurs acéricoles de votre syndicat ont reçu un bulletin de
vote de la Régie des marchés agricoles du Québec. Le
comité de l'opération référendaire souhaite
franchir avec succès l'étape de ia votation. Un bon nombre
d'administrateurs étant engagés dans la campagne de souscription,
nous n'avons pas voulu déranger cette opération sous aucun
prétexte. La correction de la liste préliminaire et la
tournée d'information sur le projet du plan conjoint a été
coordonnée par le comité référendaire. Pour cette
dernière étape, et non la moindre, nous aimerions analyser avec
vous la possibilité de faire voter ceux qui sont en faveur du plan
conjoint proposé. Ça, c'est signé par M. Michel Saucier,
coordonnateur de la campagne référendaire de l'UPA
Saint-Hyacinthe. Ça veut dire que ceux qui sont en faveur uniquement
décident pour ceux qui ne sont pas en faveur.
Pour revenir sur la réunion de la Fédéra tion des
cultures commerciales, dans cette
association, il y a en tout 3714 producteurs. Il y en avait 94
présents seulement, ce qui représente 3,49 % qui décident
pour les autres.
M. Baril: Oui, mais ça, ce n'est pas un
phénomène...
M. Jédier: Oui, mais le pire, monsieur, c'est qu'il y a
des producteurs qui n'étaient pas dans la salle, qui ne font même
pas partie de la Fédération ou même de l'UPA, qui ont
été élus délégués et ont
refusé d'être délégués. Ça n'a pas
d'allure. C'est pour ça qu'on dit que, s'il y a plusieurs associations,
ça permettra de faire de l'excellence parce que chaque association va se
battre pour bien travailler et bien représenter les producteurs.
M. Baril: De toute façon, vous savez, aujourd'hui, ce
n'est pas seulement au niveau des fédérations dont vous parlez
qu'on peut faire voter 194 personnes quand il y en a 80 présentes.
Comment y a-t-il de mouvements aujourd'hui qui autorisent un autre à
voter à ta place par procuration?
M. Jédier: Mais ils n'en avaient pas de procuration.
M. Baril: En tout cas, je ne veux pas faire une enquête
ici, mais...
M. Jédier: Ils ont voté sur ce qu'ils appellent,
par atelier, c'est-à-dire sur des fiches, sur des petits papiers.
M. Baril: Avez-vous essayé au niveau de votre syndicat de
base? Parce que quand même, l'UPA, il faut dire que c'est
démocratique. Tu as juste à te faire élire sur ton
syndicat de base. Vous dites que vous êtes 800. Il me semble que vous
seriez capables d'être en mesure, au niveau de votre syndicat de base, de
vous implanter, de faire valoir vos droits et de vous défendre. S'il le
faut, je n'utiliserai pas le mot parce que vous ne l'aimez... Je vais faire
attention, je ne veux pas que vous sautiez, je vais dire: Vous pourriez
même monopoliser votre syndicat de base, si vous êtes un groupe si
important que ça.
M. La palme (Maurice): Je vais répondre à cette
question parce que j'ai été président d'un syndicat de
base pendant huit ans. Tu ne décides rien.
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, excusez-moi. Vous
êtes M. Lapalme?
M. Lapalme: Oui.
Le Président (M. Richard): Ça va.
M. Lapalme: Tu ne peux rien décider parce que c'est
toujours court-circuité quand tu montes. Si tu n'es pas de leur dire, on
t'élimine. J'y ai été, moi, et la lettre que le
président vous a lue tantôt concernant le plan conjoint du sirop
d'érable m'avait été adressée personnellement. Je
devais faire ce qui est écrit dans la lettre. J'ai assisté au
congrès à Québec. J'y suis allé et je pense que M.
le ministre doit m'avoir vu. Le soir, on fait une réunion dans la suite
et on nous dit pour qui voter.
M. Pagé: Quelle année ce dont vous partez
là?
M. Lapalme: En 1983. C'était avant vous. O.K.
M. Pagé: Ouais, je n'étais pas ministre.
M. Lapalme: On vous dit la veille pour qui voter. Cela m'a
insulté énormément. Je ne partirai pas de chez nous,
laisser ma "business" pour m'en aller si je n'ai pas le droit de décider
moi-même. Ce n'est plus constitutionnel. Quand on décide, qu'on te
dit pour qui voter... Demain, on vote pour Untel. On ne vous dit pas que l'UPA
n'a jamais rien fait. L'UPA, ils ont fait de bonnes choses. Mais depuis 1972,
on leur a donné l'exclusivité, et l'exclusivité
amène des abus. (17 h 45)
Ce qu'on a proposé et qu'on aimerait, nous autres, c'est que
ça soit des fédérations autonomes. La
fédération qui administre le plan conjoint - j'ai assisté
à l'assemblée des cultures commerciales, dont ils ont un plan
conjoint et j'aimerais, M. le minisre, vous remettre l'ordre du jour qui
m'avait été envoyé - a fait l'assemblée du syndicat
avec l'assemblée du plan conjoint, mais en entrant, comme on n'est pas
membres de l'UPA, on nous remet un petit papier. Le mien était jaune.
Les administrateurs ont un papier vert. Mais j'aimerais vous faire remarquer
sur quoi on avait droit de parole et sur quoi on avait le droit de vote. C'est
là qu'est le problème et, le problème, c'est un gros
problème. On ne peut plus rien faire. Soit que tu appartiennes, que tu
sois membre, tu as le droit de vote, tu as le droit aux avantages. Si tu n'es
pas membre, tu n'as rien, même pas un état financier ni un rapport
d'activité. On a le droit de payer quand on envoie nos...
Depuis 1972 la loi nous oblige à appartenir.
Le Président (M. Richard): M. Lapalme, merci. M.
Varetta.
M. Varetta (Jean-Pierre): Oui. Je voudrais vous dire que je suis
à la mise en marché des veaux d'embouche dans Nicolet, dans votre
comté. J'ai su qu'il y avait une commission parlementaire par M. Jacques
Baril. J'ai essayé de savoir par mes dirigeants supérieurs ce qui
allait être discuté. Dans ma région, personne ne savait
rien. Est-ce que des gens qui sont à la mise en marché
seraient supposées être mis au courant du mémoire qui a
été déposé? Le mémoire, je viens de l'avoir
par des gens de Sherbrooke, aujourd'hui. Je trouve ça lamentable. Sauf
que pour vous dire que, à l'UEACQ, c'est comme à l'UPA, il y a
deux tranches. Vous avez l'UPA de Sherbrooke et (es autres et là aussi,
peut-être que je vous ai fait passer un mémoire que j'ai fait de
ma propre main, que je ne l'ai pas signé, parce que je voulais vous le
lire, où je vous mets des alternatives. Parce que, le danger, c'est
qu'on se protège... Trop souvent on a de l'initiative qu'on voudrait
faire, mais on est contrés par d'autres personnes. J'en parle en
connaissance de cause dans la mise en marché des veaux d'embouche dans
le moment. Et aussi, quand dans la même mise en marché vous avez
la grosse entreprise qui compétitionne avec la petite entreprise. La
petite entreprise n'a aucune chance de réussite. C'est une chose qui a
paru dans La terre de chez nous pour le bouvillon d'engraissement qui
stipule que les petits parcs touchent 0,07 $ de moins parce qu'ils ne peuvent
pas remplir des vannes complètes. Donc, c'est prouvé que la
petite entreprise ne peut pas lutter contre la grosse. Donc, il faudrait
essayer de dissocier la grosse entreprise qui fournit l'industrie
agro-alimentaire à bas coût et ensuite la petite entreprise plus
spécialisée qui sortirait moins de volume par rapport à
son travail, mais qui irait chercher une meilleure plus-value dans des produits
plus haut de gamme, c'est-à-dire, pour venir étayer les
producteurs de moutons tout à l'heure, des groupements de producteurs
volontaires. J'estime qu'on fait mieux les choses quand on est volontaires que
quand on est obligés d'adhérer à un plan conjoint. Je
pense que c'est ça qu'on voulait vous dire sans être arrogant,
qu'on aimerait... On conçoit qu'il y a plusieurs types de consommateurs.
Il faut qu'on les satisfasse, ces consommateurs.
J'ai fait une petite étude, là. On a un marché
potentiel au Québec pour les agriculteurs du Québec. 6 000 000
d'habitants, je pense que c'est ça, à peu près, pour 42
000 producteurs agricoles. Ça représente un producteur qui
pourrait alimenter 142 consommateurs. Ce rapport est réduit de
moitié en France. Donc, on a un pouvoir, si on veut. Il faut satisfaire
le maximum de consommateurs, c'est-à-dire qu'on ne peut plus aujourd'hui
imposer, par des plans conjoints, à nos consommateurs de manger ce qu'on
produit. Il faut être à l'écoute de nos consommateurs, sans
cesse. C'est un peu ça que je voulais dire, que j'espère que vous
lirez mon mémoire... Si on ne veut pas dépasser l'heure, je ne
l'ai pas signé parce que je pensais vous le lire, mais...
Le Président (M. Richard): merci, m. varetta.
j'étais certain que vous n'étiez pas arrogant puisque vous
êtes dans notre propre comté.
M. le ministre, c'est pour le message final et, par la suite, le
porte-parole de l'Opposition, le député d'Arthabaska.
M. Pagé: M. le Président. Je n'ai pas voulu poser
de questions à l'honorable citoyen qui se présente devant nous
compte tenu du caractère affirmatif, quasi infaillible de ses propos,
selon lui. Je ne peux pas accepter qu'un organisme, dans le cadre d'un
processus public... Je comprends qu'on ait la liberté d'expression. La
liberté d'expression n'implique pas le droit de dire n'importe quoi.
C'est totalement inacceptable qu'un organisme, qui se dit par surcroît
représentatif d'un nombre de 800 membres, vienne ici en commission
parlementaire accuser la Régie des marchés agricoles du
Québec d'être une espèce de filiale de l'Union des
producteurs agricoles du Québec, alors que ce sont des gens qui assument
des responsabilités avec un serment et qui puisent leurs
responsabilités et le champ de juridiction qu'ils ont dans une loi qui
est d'intérêt public et qui a été adoptée en
1956. Je dois donc vous dire que je n'accepte pas non seulement ces critiques
et ces commentaires, mais des attaques basses. Parce que ces gens-là ne
témoignent pas, eux autres, ces gens-là ne peuvent pas se
défendre. Ça, c'est ma responsabilité à moi de le
faire. Ça n'a pas d'allure, ce que vous avez fait là,
d'abord.
Deuxièmement, vous dites des faussetés. Je m'excuse,
là, vous dites des faussetés. La Québec Farmers'
Association s'est vu autoriser en 1986, par le ministre de l'Agriculture que je
suis, la publication de documents, de programmes en anglais, de publications
d'information en anglais, dans sa langue. C'était un droit,
c'était le minimum de respect, je pense, qu'on se devait d'adresser
à nos communautés, nos agricultrices et nos agriculteurs de
langue anglaise, qui, lorsqu'ils lisaient dans certains cas un programme du
ministère, ne le comprenaient pas.
Vous vous présentez ici sous l'égide d'une
présentation qui s'inspiro davantage de brutalité Vous savez,
quand vous vous référez au régime communiste, vous vous
référez au régime du bloc de l'Est, je me limiterai
à vous dire que comparer le vécu quotidien en agriculture ici
à ce qui se passe là-bas, ça témoigne d'une
méconnaissance très profonde. Si le régime était
tel que ce que vous en dites, vous ne seriez pas ici, monsieur, pour nous
parler sur ce ton-là et vous ne seriez pas ici pour dire des choses
aussi grossières, je pense. L'agriculture au Québec, ça
s'est bâti a coup de labeurs, de sacrifices, ça s'est bâti
aussi avec des gens qui ont travaillé, qui ont su s'organiser, qui se
sont donné des moyens et des gouvernements, et mon gouvernement a
adopté une loi ici, en 1972. Je vous inviterais à aller faire un
tour pour voir ce qui se passe aux États-Unis, ce qui se passe dans
l'Ouest du pays ou dans plusieurs Etats américains. On a ce type de
formule, de représenta-
tion selon une libre adhésion. Allez-y voir! Allez-y voir! Puis
revenez-nous après.
On s'est donné des mécanismes, au Québec, qui ne
sont pas parfaits, on en convient. D'ailleurs, c'est pour ça qu'on est
en train de les modifier cette année. On s'est donné des
mécanismes qui ont contribué à bâtir l'agriculture
d'aujourd'hui, une agriculture qui est dynamique, qui est progressive, qui a
ses faiblesses. On devra réorienter des choses au niveau du biologique,
notamment. Mais dites-vous bien une chose, je retiens que vous êtes en
désaccord. Mais la première chose que vous avez faite: vous avez
formé votre propre union vous autres aussi. C'est la première
chose que vous avez faite. Vous dénoncez l'Union des producteurs
agricoles, mais la première chose, ça été de vous
regrouper en union, vous autres aussi.
Vous revendiquez des choses. De la façon que ça
été présenté aujourd'hui, moi, je vais vous dire,
j'ai la qualité, à ce qu'on me dit, d'être franc et j'ai le
défaut d'être direct et d'être bête parfois. Ça
n'a pas d'allure, ce que vous avez fait aujourd'hui, je vous le dis comme je le
pense. Ça été présenté tout croche, tout
croche. Si vous étiez arrivés ici en disant... Puis je vais aller
aussi loin que vous dites. On le sait, d'ailleurs c'est de commune
renommée, c'est public, que vous contestez l'Union des producteurs
agricoles du Québec. Vous n'êtes pas d'accord avec l'obligation de
contribuer. C'est votre droit, ça, le plus légitime. Mais ce
n'est pas en arrivant devant l'Assemblée nationale du Québec et
en tentant de crêper le chignon de tout le monde, puis en affirmant des
grossièretés, comparant les régimes
québécois à ce qui se passe en Roumanie... Voyons donc,
ça n'a pas d'allure! Ça ne résiste à aucune
analyse. Si vous étiez arrivés ici en disant...
Je vais vous donner un exemple de questions que l'ensemble des
parlementaires aurait peut-être aimé entendre, parce que le
ministre aurait peut-être été dans l'embarras. Si vous
aviez dit: M. le ministre, dans votre projet de loi... D'ailleurs, je dois vous
dire que le projet de loi, monsieur, c'est moi qui l'ai écrit, ce n'est
pas l'UPA qui l'a écrit. Je ne dois rien à l'UPA, j'étais
pas là avant puis je ne prévois pas être là
après. Mais je vais faire ma job ici. Je veux être clair,
là!
Dans le projet de loi, j'ai écrit une disposition comme quoi,
tous les cinq ans, chacun des plans conjoints doit être revalidé
devant la Régie des marchés agricoles. Vous aviez une porte toute
grande ouverte. Vous auriez dû dire au ministre de l'Agriculture: M. le
ministre, pourquoi n'ajoutez-vous pas un amendement à l'effet que, tous
les cinq ans, au sein de l'Union des producteurs agricoles du Québec, il
y ait un vote général, universel, public, sur appel de tous les
membres? Vous auriez pu faire ça: chacune des fédérations
obligée de commander un vote secret général pour chacun
des membres pour réitérer son appartenance à cette
fédération. Vous auriez pu faire ça. Vous auriez pu
demander aux législateurs que nous sommes de revoir le statut des
délégués au sein de l'Union des producteurs agricoles.
M. Lapalme dénonçait tantôt le fait que, lorsqu'il
était président du syndicat de base, ça n'allait pas
à son goût, etc. C'est souventefois critiqués, les
délégués. Ce n'est pas la première fois que
j'entends, moi, comme ministre - puis je l'entendais même lorsque
j'étais député - des gens dire: Vous savez, le processus
de décision au sein de l'Union des producteurs agricoles passe trop
généralement par des délégués et devrait
passer plus souvent par les assemblées générales.
Vous auriez dû demander des choses comme ça plutôt
que de tenter de venir crêper le chignon puis salir tout le monde, le
gouvernement, l'UPA, les parlementaires. Puis même, vous avez
ajouté à l'insulte en venant dire ici, à
l'Assemblée nationale, publiquement, qu'un ministre du gouvernement a
des journaux puis a de la publicité dedans. Ça prend un
sacré culot! Puis vous devriez avoir assez de courage et de "guts" pour
le dire en dehors de la Chambre, puis probablement qu'il va se défendre,
ce gars-là. On ne peut pas se permettre de faire des accusations
fausses, erronées, fallacieuses, dire n'importe quoi, puis comparer tout
le monde au communisme, voyons donc!
Comprenez-vous, maintenant, pourquoi je ne suis pas allé à
votre congrès? Bonne fin de journée.
Une voix: Est-ce que je pourrais me défendre?
Le Président (M. Richard): Non...
M. Pagé: Bonne fin de journée, en ce qui me
concerne.
Le Président (M. Richard): ...je m'excuse. M. le
député d'Arthabaska, vous avez la parole pour le mot final. Je
regrette, parce que l'intervention doit être limitée, là,
ce n'est pas...
M. Baril: Oui, je vais être très bref.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: Je vais être très bref. C'est
évident que j'ai noté moi-même beaucoup de révolte
dans votre mémoire. C'est votre droit. J'ose croire que vous avez
préparé ce mémoire-là durant une de ces
journées maussades, froides, de l'hiver, à la suite d'une
mauvaise assemblée quelque part, je ne sais pas quoi, que vous avez
couché sur papier vos pensées que vous mijotiez depuis un certain
temps et que vous nous en avez fait part.
Je finirai tout simplement en disant que c'est sûr que la formule
est dure - vous avez dit tout à l'heure que vous vouliez écrire
ça clairement pour qu'on comprenne - mais, moi, je vais vous dire tout
simplement: N'oubliez pas que qui trop embrasse mal étreint, aussi.
Une voix: Bien, tantôt, à propos de la
prétention...
Le Président (M. Richard): Je m'excuse...
Une voix: ...concernant les publications dans les revues,
là, j'ai fait...
Le Président (M. Richard): Mesdames et messieurs...
Une voix: J'ai été attaqué, j'espère
que j'ai le droit de me défendre. Je n'ai pas été
impoli...
M. Pagé: Je ne vous ai pas attaqué, monsieur, j'ai
remis les points sur les i, en ce qui me concerne.
Le Président (M. Richard): Je m'excuse... M.
Pagé: Je n'ai pas été impoli.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska, est-ce que vous avez terminé votre commentaire?
M. Baril: Moi, j'ai terminé, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Alors, sur ce, la commission
suspend ses travaux et nous revenons ici à 20 heures. Merci,
messieurs.
(Suspension de la séance à 17 h 59) (Reprise à 20 h
20)
Le Président (M. Richard): Mesdames, messieurs, la
commission reprend ses travaux. Nous recevons les représentants des
Producteurs de sucre d'érable du Québec, et je dois vous dire
que, dans mon mandat comme président, j'ai le droit de recevoir des
dépôts. J'ai donc reçu un dépôt que je
demanderais à M. le secrétaire de distribuer aux membres de la
commission. Il faut admettre que normalement, c'est en papier les
dépôts, mais là, disons que le règlement n'est pas
spécifique.
M. Pagé: Je reconnais, M. le Président, la
générosité de M. Laroche...
Le Président (M. Richard): Ha, ha, ha!.
M. Pagé: ...digne président de la
coopérative de sirop d'érable, Chevalier de Colomb
quatrième degré. Merci.
M. Laroche (André-Paul): C'est ça.
Une voix: Ça, c'est le mot de passe, le sirop
d'érable.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: II ne faut pas le dire, il ne faut pas le dire.
Est-ce qu'il va en rester pour l'Opposition? M. le Président, je note
que M. le ministre délégué à l'Agriculture est en
train d'offrir à Mme la députée de Johnson de partager
leur sirop.
Mme Juneau: Ah! On a bien fait de parier, hein?
M. Pagé: Oui...
Le Président (M. Richard): Alors messieurs, on vous
remercie bien de ce dépôt, au nom des membres de la commission.
Ça n'arrive pas souvent qu'on remercie pour un dépôt, en
toute honnêteté.
M. Dufour: Continuez, continuez.
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole,
messieurs.
Producteurs de sucre d'érable du
Québec
M. Laroche: Merci. Je me présente, c'est André-Paul
Laroche, président de la coopérative des Producteurs de sucre
d'érable du Québec. Mon collègue à droite, c'est M.
Gaston Rioux, secrétaire général de la coopérative
des Producteurs de sucre d'érable du Québec. M. le
président de la commission, M. le ministre, il me fait plaisir de vous
saluer. M. le ministre, un peu exceptionnellement, parce que, depuis un an, je
vous ai rencontré au moins quatre ou cinq fois, je pense, et puis...
Une voix: Tu ne lui fais pas un nom! Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Laroche: Bien, on s'est rencontrés à la
fête des Laroche.
M. Pagé: On s'est rencontrés, ce n'est pas un
lointain personnage, comme on disait cet après-midi.
M. Laroche: Vous n'êtes pas si loin que ça, on s'est
rencontrés à la fête des Laroche, à Neuville.
Ça me fait plaisir aussi de souligner que je demeure à six milles
du comté de Mme Juneau.
Une voix: On vient de tout comprendre.
M. Laroche: MM. les députés, madame. La
coopérative provinciale des Producteurs de sucre d'érable du
Québec s'est toujours préoccupée et impliquée
activement dans la mise en marché des produits acéricoles de ses
3300 membres sociétaires. Sa raison d'être le commande, puisque
ses fondateurs l'ont créée pour fournir aux propriétaires
d'érablières, via un réseau de 150 dépôts de
ramassage, des services acéricoles variés tels que le
matériel d'érablière, les barils à sirop,
l'assurance-sirop, l'assistance technique, la formation coopérative et
l'information acéricole, le transport, la réception, le
classement, l'entreposage, le conditionnement, le marketing et la mise en
marché de tout le sirop d'érable en vrac de ses
sociétaires, provenant d'érablières de toute taille et ne
pouvant pas être écoulé localement, faute de bassin de
consommateurs et consommatrices suffisant.
Les acériculteurs et acéricultrices sont les
propriétaires à 100 % de leur entreprise coopérative de
services professionnels. Pour cette raison, la coopérative des
Producteurs de sucre d'érable du Québec s'implique
inlassablement, à l'année longue, dans la mise en marché
du sirop d'érable de ses sociétaires et suit toute
évolution des législations et réglementations qui
encadrent cette mise en marché. À ce propos, elle est solidaire
des autres secteurs coopératifs de production agricole, qui sont
assujettis aux encadrements législatifs et dont la présente
commission a été chargée de recevoir les points de
vue.
Depuis janvier 1990, le secteur québécois de l'industrie
de l'érable et plus particulièrement le secteur de la
coopération acéricole, suite au vote favorable en faveur de
l'expérimentation d'un nouveau plan conjoint provincial dès avril
et mai prochains, aura à vivre avec de nouveaux mécanismes
d'équilibre entre l'offre et la demande des produits de l'érable
et à s'y adapter.
Le mouvement coopératif acéricole compte donc 3300
sociétaires parmi lesquels on retrouve une grande majorité
d'individus, des sociétés et des corporations variées.
Fondée en 1925 et ayant accumulé une expertise acéricole
et de commercialisation assez unique et peut-être pas suffisamment connue
chez nous - on n'est pas prophète dans son pays - la coopérative
des Producteurs de sucre d'érable du Québec est encore, en 1990,
la plus importante entreprise de commercialisation de toute l'industrie, une
industrie qui depuis 1988 est passée majoritairement sous le
contrôle étranger, c'est-à-dire américain. Notre
entreprise coopérative est particulièrement bien connue par ses
marques de commerce Citadelle, Camp et O'Canada.
En tant que coopérative à caractère provincial, les
Producteurs de sucre d'érable du Québec représentent
maintenant les intérêts du plus grand groupe structuré de
producteurs et de productrices acéricoles du Québec et même
du
Canada qui, depuis quatre générations, anime la vie
associative de ses 3300 propriétaires usagers répartis dans 51
comtés acéricoles du Québec.
La coopérative provinciale des Producteurs de sucre
d'érable du Québec est également une entreprise
industrielle et commerciale de taille moyenne et moderne qui, en plus de
fournir à ses membres usagers des services professionnels, conditionne
et met en marché à l'année longue des millions de livres
de produits d'érable purs dans plus de 30 pays à travers des
réseaux de distribution diversifiés, dans des formats
variés et dans plusieurs langues étrangères. Il ne s'agit
donc pas d'une entreprise artisanale et saisonnière, mais d'une
organisation dynamique de chez nous qui opère à l'année
longue et apporte par ses activités une plus-value économique
à ses sociétaires et aux régions qu'elle dessert.
Ses 3300 membres propriétaires peuvent donc compter sur une
cinquantaine d'employés expérimentés, hommes et femmes,
une soixantaine d'agents, de courtiers et d'importateurs professionnels et un
réseau de plus de 325 chaînes et grossistes
spécialisés en distribution alimentaire. Son chiffre d'affaires
s'est élevé en 1989 à près de 18 000 000 $, dont 85
% à l'exportation. Notre entreprise coopérative est enfin
nouvellement affiliée à la Coopérative
fédérée de Québec depuis octobre 1989 et est
à finaliser son programme d'expansion pour la décennie 1990; elle
espère que la présente récession économique
internationale prendra fin rapidement.
Je vais laisser la parole à M. Rioux.
M. Rioux (Gaston): Merci, M. le président Laroche. Alors,
M. le président de la commission, M. le ministre Pagé, MM. et
Mmes les députés. Donc, au cours des derniers mois, notre
entreprise coopérative a eu à négocier intensément
une première convention et des règlements quant à la mise
en marché du sirop d'érable en vrac. Cette négociation
s'est faite à ce jour dans un climat civilisé dans le cadre et le
respect de la loi actuelle. Il s'agit bien sûr d'une première
convention d'une durée d'une année. Étant donné que
le tout nouveau plan conjoint de l'érable aura à s'ajuster
convenablement et légalement à une loi 15 amendée et
respectueuse des intervenants économiques, nous sommes d'opinion que le
législateur devrait, premièrement, limiter la portée de la
loi 15 et des pouvoirs des plans conjoints strictement à la
commercialisation qui intervient entre le producteur et le premier preneur de
son produit, quand celui-ci est encore à l'état brut,
c'est-à-dire se rend jusqu'à la porte de l'usine. Dans notre cas,
il s'agit du sirop d'érable de la ferme écoulé en vrac,
c'est-à-dire en grands contenants, pour être conditionné
ultérieurement, mis à point en usine coopérative ou autre,
puis vendu dans les circuits officiels de vente au détail. (20 h 30)
Maintenant, à l'instar de notre fédération
de coopératives agricoles, la Coopérative
fédérée de Québec, notre entreprise
coopérative spécialisée demande aussi au
législateur de conserver le droit de révision du gouvernement du
Québec, l'autorité suprême, quant à nous, dans les
cas d'appel et de révision des décisions de la Régie.
Également, nous demandons au législateur de conserver le droit
d'appel à la Cour du Québec sur toute décision
contestée de la Régie - autrement dit, ce que la loi actuelle
offre déjà - et, enfin, d'accroître le pouvoir de
contrôle et de surveillance de la Cour supérieure du Québec
dans les cas extrêmes.
Enfin, relativement aux trois points importants mentionnés
précédemment, nous partageons en définitive les
commentaires, les réserves et les suggestions qui seront émis
demain par la Coopérative fédérée de Québec,
la fédération à laquelle nous appartenons maintenant.
M. le Président, Mmes et MM. les députés, membres
de la commission, M. le ministre, il n'est pas dans notre intention de
reprendre toute l'argumentation qui sera évoquée demain par la
Coopérative fédérée relativement aux points
énumérés en titre dans notre mémoire. Nous tenons
simplement à vous informer que nous appuyons l'argumentation de la
Coopérative fédérée dans ses grandes lignes,
d'autant plus que la convention du nouveau plan conjoint de l'érable,
qui sera en vigueur ce printemps 1990, pourrait laisser encore quelques zones
grises que la loi 15 devrait aider, selon nous, à colmater avant le
printemps 1991, si l'on espère une bonne opérationalisation de ce
nouveau plan conjoint à la satisfaction des producteurs et productrices,
coopérateurs et coopératrices et de tous les autres intervenants
concernés de notre industrie.
À ce propos-là, je voudrais aussi indiquer à la
présente commission que ce n'est pas notre intention, ce soir -
d'ailleurs, vous l'avez vu dans notre mémoire que vous aviez reçu
à l'avance - de faire toute une révision article par article.
À notre avis, des règles plus claires ne peuvent que favoriser de
meilleures activités socio-économiques dans nos
sociétés rurales.
En conclusion, nous vous remercions pour votre bonne attention et nous
nous attendons à ce que vous apporterez une oreille très
attentive aux différents mémoires constructs que vous
présentera la coopération agricole demain et dans les jours qui
suivront, de même qu'au mémoire du Conseil de la
coopération du Québec.
Le secteur coopératif de l'érable qui, depuis plus de 65
ans, joue un rôle majeur dans cette industrie cyclique, laquelle vit
présentement des problèmes temporaires de surproduction qui
coïncident avec une nouvelle récession économique, approuve
particulièrement l'article 194 du projet de loi à l'effet de
tenir compte de l'intérêt public et de l'opportunité
économique dans un secteur contingente ou appelé à
l'être avant la délivrance d'un permis d'exploitation d'une
nouvelle usine de conditionnement. Et on pourrait ajouter aussi avant l'octroi
par l'État de subventions à toute nouvelle entreprise dans le
secteur.
Il n'y a pas de doute que, dans un secteur aussi cyclique que celui de
l'érable, l'on doit tenir compte des entreprises qui ont consenti des
sacrifices énormes, des investissements importants en argent, en
ressources humaines dans les services, dans le développement des
produits et des marchés, avant d'autoriser encore une fois
l'émission de nouveaux permis d'usine à des groupes
inexpérimentés et fragiles dont la seule préoccupation est
l'appât du gain immédiat.
Alors, M. le président de la commission, M. le ministre, nous
vous remercions sincèrement pour votre bienveillante attention. Notre
mémoire est fort bref, comme vous avez pu le constater. Nous voulons
quand même vous mentionner que, quant à nous, il y a en
particulier deux articles de l'ancienne loi auxquels on tenait beaucoup, les
articles 2 et 3. Alors, on veut aussi vous rappeler ce soir que ces deux
articles-là sont bien importants pour nous. On a pensé
également vous laisser un peu une trace de notre passage parce que,
comme je l'ai indiqué dans le mémoire, M. le Président,
l'industrie de l'érable connaît depuis deux ans une performance
assez exceptionnelle malgré, comme vous savez, les problèmes
causés par le dépérissement des éra-blières.
Il reste que, depuis deux ans, on a connu quand même des récoltes
exceptionnelles. On voulait aussi profiter de l'occasion pour vous souligner
que vous tous comme consommateurs, consommatrices, eh bien, on vous invite
à consommer les produits de l'érable, de grâce pas
seulement durant le temps des sucres, mais à l'année longue.
Merci beaucoup pour votre bonne attention.
Le Président (M. Richard): Merci beaucoup, messieurs.
Ça fait quand même un peu plus doux que certains mémoires
qui étaient un peu arides. M. le ministre, vous avez la parole.
M. Dufour: Un peu plus sucré également?
Le Président (M. Richard): Un peu plus sucré, vous
avez tout à fait raison.
M. Pagé: M. le Président, les mémoires
auxquels vous vous référez n'étaient pas arides, ils
étaient acides.
Le Président (M. Richard): Ha, ha, ha!
M. Pagé: Cela étant dit, M. le Président, je
tiens à remercier la coopérative des Producteurs de sirop
d'érable du Québec, tout particulièrement M. Laroche,
remercier M. Rioux, directeur général, de leur
présentation.
Je voudrais dans un premier temps vous réitérer toute ma
satisfaction, comme ministre de
l'Agriculture, concernant le rôle éminemment important et
utile au chapitre du conditionnement et de la mise en marché des
produits de l'érable au Québec, rôle joué par la
coopérative dont vous êtes les représentants, qui regroupe,
comme on le sait, au-delà de 3300 producteurs et qui a 18 000 000 $ de
chiffre d'affaires annuellement. Vous avez su, au cours des années, non
seulement regrouper les producteurs, mais surtout démontrer beaucoup de
détermination au niveau de la pénétration des
marchés. Je dois dire que c'est toujours avec une fierté
renouvelée que, quand je suis à l'extérieur du pays, je
vois soit les produits Citadelle ou Camp sur les tablettes. Soit dit en
passant, en dollars américains, il se vend beaucoup plus cher qu'ici.
Chose certaine, c'est probablement très intéressant pour la
coopérative qui met en marché là-bas. Vous êtes
présents d'ailleurs dans plusieurs États américains. C'est
le genre de mise en marché qu'on recherche au ministère et c'est
aussi le genre de mise en marché qui est susceptible de sécuriser
ceux qui sont en amont de la vente au détail, c'est-à-dire nos
producteurs et nos productrices.
C'est d'ailleurs dans ce sens-là que j'ai insisté,
à l'été 1989, pour que la coopérative des
Producteurs de sirop d'érable puisse être considérée
dans l'intervention du gouvernement du Québec, intervention qui, comme
on le sait, est venue garantir des sommes importantes, accompagnée aussi
du paiement d'intérêts pour l'entreposage de quantités
énormes. Au printemps 1989, c'était 15 000 000 de livres, si ma
mémoire est fidèle; à l'été 1989,
c'était 24 000 000 de livres, si ma mémoire est toujours
fidèle. J'avais, à ce moment-là, imposé comme
conditions d'intervention gouvernementale que, premièrement, les
producteurs accceptent de se convier à un véritable plan
conjoint, accompagné de mesures venant limiter la production, parce
qu'on ne pouvait pas - ça, je pense que tout le monde est unanime
à le constater - année après année, produire,
produire, produire, engranger, stocker - excusez le terme, on a le droit de
l'utiliser - sans se soucier du développement des marchés,
pendant que le gouvernement pompe des centaines de milliers pour ne pas dire
des millions de dollars annuellement pour supporter des inventaires.
Alors, à cet égard, merci. Encore une fois, je vous le dis
publiquement ici, en commission parlementaire, j'apprécie au plus haut
point les efforts que vous avez déployés dans le passé, la
discipline que vous vous êtes donnée et surtout
l'agressivité que vous avez démontrée au niveau de la
pénétration des marchés et de la qualité de
produits par un conditionnement, par des investissements importants, etc.
On accueille votre mémoire avec intérêt. Soit dit en
passant, j'apprécie aussi au plus haut point, comme ministre, le fait
que vous vous soyez joints à la Coopérative
fédérée du Québec à l'automne 1989,
Coopérative fédérée du Québec qui, comme on
le sait, est en quelque sorte l'organisme parapluie au-dessus de l'ensemble des
coopératives au Québec; ça va bien au-delà des
coopératives uniquement laitières, mais ça se
réfère aussi à l'ensemble de la distribution de produits
sur le réseau québécois. C'est avec beaucoup
d'intérêt qu'on entendra bientôt devant cette commission, M.
Alphonse-Roger Pelletier, qui est avec nous ce soir.
Cela étant dit, vous formulez certaines demandes. Vous dites,
à la page 5 de votre mémoire, que le législateur devrait
limiter la portée de la loi 15 et des pouvoirs des plans conjoints
strictement à la commercialisation qui intervient entre le producteur ou
la productrice et le premier preneur de son produit. Vous vous
référez donc à ce système implanté soit via
la coopération du sirop d'érable ou encore la banque de sirop
d'érable. À cet égard, vous souhaitez qu'on se
réfère uniquement au vrac, mais, si je me rappelle bien, dans le
plan conjoint qui a été déposé et adopté
à la très grande majorité par les producteurs de sirop
d'érable du Québec, c'est spécifiquement nommé. La
référence est bien exacte et ça se limite à ce qui
est mis en marché au niveau du vrac. Est-ce à dire que ça
ne vous sécurise pas ou quoi?
M. Laroche: Ça nous sécurise, mais, d'un autre
côté, c'est qu'étant donné que les gens vont faire
beaucoup plus de détail, ils vont se concurrencer eux autres mêmes
et, par le fait même, ils vont faire tomber le marché au
détail, puis là, ça va balancer le prix en vrac.
M. Pagé: Oui, c'est évident que les comportements
du printemps qui s'annoncent si, entre guillements, il finit par arriver...
Pour le bénéfice du Journal des débats, il faut
quand même se rappeler qu'il faisait encore moins 17, la nuit
dernière. Mais quand le printemps arrivera, le comportement va
être intéressant à suivre parce que la pression pour une
mise en marché directement au détail va être probablement
plus forte, ce qui n'est pas nécessairement négatif en soi parce
qu'un des problèmes majeurs que vit l'industrie - il ne faut pas se
faire de cachettes - c'est qu'on a un problème très
appréciable en ce qui concerne la commercialisation de notre produit
à l'intérieur même du Québec. On a quoi? 14 000
points de vente au niveau de la restauration, et je serais curieux de savoir le
pourcentage de restaurants du Québec qui pourraient nous offrir du sirop
d'érable avec les crêpes demain matin.
Nous sommes la province productrice, non seulement au Canada, mais
autour du monde; on fournit 80 % du marché du sirop d'érable
à l'échelle mondiale. J'étais, hier soir, avec le ministre
de l'Agriculture de l'État de New York, qui, même s'ils en
produisent là-bas, est quand même un marché important pour
nous, et, malgré que nous produisions 80 % du sirop d'érable
qui
est consommé dans le monde avec un marché qui est en plein
développement, notamment au Japon, malgré ça, force nous
est de reconnaître, malheureusement, qu'on a une structure de mise en
marché, au Québec môme, qui pourrait faclement être
bonifié. Alors, c'est dans ce sens-là qu'H y a d'autres
éléments dans la loi, auxquels vous n'avez pas eu
l'opportunité de vous référer, qui vont être offerts
à l'industrie, pour qu'on s'assoie ensemble et qu'on puisse mettre en
place des programmes de mise en marché de nos produits mieux
ciblés.
M. Laroche: Je voudrais poser une petite question à
l'Assemblée ici
M. Pagé: Allez-y.
M. Laroche: Quand on va manger dans un restaurant, est-ce qu'on
s'informe s'il y a du sirop d'érable?
M. Pagé: Le ministre de l'Agriculture s'informe de deux
choses: d'abord, s'il y a du vrai beurre, puis s'il y a du sirop
d'érable. Sauf que, maintenant, le ministre de l'Agriculture a moins
à s'Informer parce que, la margarine, elle se distingue maintenant.
Une voix: En passant.
M. Pagé: Oui, oui, en passant.
M. Rioux: M. le Président, si vous le permettez, pour
continuer dans la môme veine que M. Pagé, je pense qu'on doit vous
indiquer ce soir que, bien sûr, on parle, dans le projet de loi 15, de la
fameuse chambre de concertation et qu'on est ouverts à ça. Moi,
j'ai eu l'occasion d'aller à l'étranger et, entre autres, en
France, notamment, de voir certaines formules, disons, un petit peu de
môme acabit. Alors, je pense que c'est une bonne idée de mettre
tous les intervenants ensemble pour parler de mise en marché, mais de
tout le processus. Et là-dessus, je dois vous dire que la
coopérative est ouverte. D'ailleurs, elle est la seule,
honnêtement, à faire un effort de mise en marché assez
louable au Québec et au Canada. Bien sûr, on le fait avec les
moyens du bord, on n'a pas les moyens des grandes entreprises, mais on a quand
même des politiques de promotion actuellement. On peut vous donner un
exemple qui s'adresse surtout à ceux qui aiment bien aller au restaurant
Saint-Hubert. Bien, au restaurant Saint-Hubert, actuellement, les
grands-pères au sirop qui sont offerts, et tout ça, eh bien,
c'est la coopérative qui fournit le produit. Quant à ceux, ce
soir, qui ont mangé au café du parlement et qui ont pris la
fameuse couronne à l'érable, bien c'est aussi la
coopérative qui est le fournisseur privilégié ici, du
parlement, depuis des années. On fournit aussi beaucoup de grands
hôtels, de grands restaurants, mais le problème, M. le ministre,
qu'on entend souvent... Parce que, vous savez, tous nos produits sont offerts.
Nous travaillons, nous, avec les grandes chaînes de distribution et nous
avons un courtier en alimentation qui travaille à l'échelle
provinciale, au niveau aussi de la restauration, de l'hôtellerie en
général. Mais le problème qu'on nous rapporte le plus
souvent, c'est le prix du produit. Parce que vous savez, aujourd'hui, dans le
monde de l'alimentation, on travaille avec des portions
contrôlées, alors il faudra peut-être arriver avec des
portions peut-être moins généreuses que la petite bouteille
de 55 millilitres. Mais tous ces produits-là, les produits que vous avez
sur vos tables ce soir, sont offerts au monde de l'hôtellerie. Et le
commentaire malheureusement négatif, qu'on entend, de la part de ce
milieu-là, actuellement, c'est qu'ils trouvent que le produit est cher,
que le produit est dispendieux. Qu'est-ce qu'H faudra faire, dans le futur,
pour les convaincre? (20 h 45)
On a des idées là-dessus. Bien sûr que la fameuse
chambre de concertation, s'il y en a une qui est créée pour le
secteur de l'érable, en tout cas, nous, on y serait favorables de prime
abord, on en a parié. Il s'agira d'en discuter avec nos amis de la
fédération aussi. Je pense bien qu'ils seraient ouverts parce
qu'on parie aussi de promotion générique, dans les prochains
mois, pour l'industrie de l'érable. Il n'y a pas de doute, M. le
ministre, M. le Président, MM. les députés, qu'il faudra
définitivement s'asseoir ensemble, dans les prochains mois, et
élaborer un programme de promotion de notre produit au Québec, un
programme plus mordant, plus intéressant, il n'y a pas de doute.
Merci.
M. Pagé: Merci, M. le directeur. À la page 6, je
note que vous souhaitez voir maintenu, peut-être pas le pouvoir d'appel,
mais le pouvoir, pour le cabinet, de renverser une décision de la
Régie.
M. Rioux: Oui, c'est exact. M. Pagé: De
revoir...
M. Rioux: Disons que, en fait, dans notre esprit, on pense
à des cas extrêmes. C'est vrai que, ce matin, on a fait allusion,
dans la présentation de certains mémoires, qu'historiquement, il
y a eu peu de cas qui méritaient d'être portés à ces
niveaux-là, mais il n'est pas dit que, dans le futur... Vous savez, les
hommes changent, les femmes changent, dans les organisations, c'est vrai dans
les Parlements, c'est vrai dans les coopératives, c'est vrai dans les
organisations agricoles. Je pense bien que, d'une façon
générale, on essaie toujours, je pense bien, de discuter, de
trouver des terrains d'entente avant d'aller plaider, bien sûr, mais, que
voulez-vous,
les temps changent, alors peut-être qu'il faudrait prévoir,
en tout cas, dans ce projet de loi 15, quand même, certaines balises.
On comprend qu'au niveau de la Régie, les gens qui sont
là, ce sont des professionnels, des gens qui, je pense, font un
excellent travail, jusqu'à date, en tout cas. Nous, je peux vous dire,
M. le ministre, que, dans le processus qu'on vient de vivre, justement, dans la
votation du nouveau plan conjoint de l'érable, on a été
très satisfaits de la façon dont la Régie des
marchés agricoles a fonctionné. Je pense que c'a
été vraiment correct et qu'elle avait apporté toutes les
précautions pour que le vote se déroule démocratiquement.
Je pense que, quant à la majorité des producteurs qui se sont
prononcés, cette fois-ci, leur verdict était clair. Je pense
qu'on doit rendre hommage à la Régie. La Régie a fait un
bon travail au cours des derniers mois, et il n'y a pas de problème de
ce côté-là.
M. Pagé: Merci, M. Rioux. Dernier commentaire. À la
page 8, en conclusion, vous dites: "Le secteur coopératif de
l'érable qui, depuis plus de 65 ans, joue un rôle majeur dans
cette industrie cyclique, laquelle vit présentement des problèmes
temporaires de surproduction qui coïncident avec une nouvelle
récession économique, approuve particulièrement l'article
194 du projet de loi à l'effet de tenir compte de l'intérêt
public et de l'opportunité économique dans un secteur
contingenté ou appelé à l'être avant la
délivrance d'un permis d'exploitation d'une nouvelle usine de
conditionnement." Si ma mémoire est fidèle, l'article 194
s'applique uniquement dans le secteur laitier.
M. Rioux: Pour le moment, oui, vous avez raison. Maintenant,
nous, on s'est dit ceci. Dépendant, évidemment, de l'influence
des mémoires sur le projet de loi 15, on peut croire qu'il y aura
sûrement des amendements qui seront apportés...
M. Pagé: Probablement, oui.
M. Rioux: ...alors nous sommes d'opinion que, bien sûr, on
pense au secteur laitier, mais qu'il faudrait aussi penser,
éventuellement, aux autres secteurs où il y a une forme de
contingentement. Nous, notre préoccupation, actuellement, étant
donné qu'on est dans une phase, disons, d'inventaire un peu
exceptionnel, de réserve d'inventaire à vrai dire, c'est qu'on
pense que le gouvernement, en tout cas, devrait prendre des précautions
dans un contexte comme celui-là. Bien sûr que le secteur de
l'érable n'est pas encore un secteur contingenté. Je dois vous
dire qu'au niveau de la coopérative, nous, en raison des deux
récoltes très généreuses, cette année, notre
conseil d'administration, à notre assemblée
générale, a pris des mesures de contingentement et il n'est pas
dit que, l'an prochain, l'ensemble de l'industrie de l'érable ne sera
pas appelé à endosser un système de contingentement. Il
faudra, probablement, endosser un système de contingentement parce que,
vous savez, un des problèmes de l'industrie de l'érable... La
capacité de vente de notre industrie est de 30 000 000 de livres par
année. Alors, avec deux récoltes de 40 000 000 livres, comme on
vient de connaître au cours des deux dernières années, et
si on devait connaître encore une troisième année
d'abondance et une quatrième année... Parce que vous savez que
l'augmentation des prix à la ferme - depuis cinq ans, on a connu quand
même des augmentations d'au-delà de 140 %, globalement - a eu pour
effet d'encourager beaucoup de producteurs soit à acheter de nouvelles
érablières ou à entailler au maximum ce qu'ils
possédaient déjà comme boisés acéricoles.
Évidemment, c'a eu pour effet aussi d'attirer d'autres groupes de notre
société dans l'exploitation du sirop d'érable. Alors, tout
ça pour dire que je pense qu'on peut devenir un secteur très
fragile, s'il n'y a pas certaines balises qui sont prévues dans la
loi.
M. Pagé: O.K. Je note la référence, en tout
cas, à l'article 194, concernant l'intérêt public,
l'obligation qu'un projet soit validé par une notion
d'intérêt public quant à son implantation. On a les
mêmes dispositions dans le secteur des pêches. Cependant, si
ça peut vous sécuriser, je présume et j'ai tous les motifs
raisonnables de croire là, sans exagérer, que, si un projet, et
quel que soit ce projet, présenté par n'importe quel groupe,
était élaboré pour établir un autre centre de
conditionnement des produits de l'érable au Québec, ces
gens-là viendraient très certainement cogner à la porte du
ministère de l'Agriculture pour avoir un petit coup de main. Cela
étant dit, c'a été très clair dans ma
conférence de presse du mois d'août ou septembre dernier; j'ai dit
que la banque et la coopérative se devaient d'utiliser les
facilités déjà en place pour le conditionnement. Pour moi,
dans mon livre à moi et dans le livre des hauts fonctionnaires du
ministère, avant de s'associer à une démarche visant
à augmenter substantiellement la capacité de conditionnement, il
faudra y penser deux fois et il faudra s'assurer, premièrement, de la
régularité de l'approvisionnement et, deuxièmement aussi,
que cet approvisionnement soit nécessaire en fonction d'une mise en
marché. Je ne pense pas que, dans des délais,
c'est-à-dire, prévisibles, on puisse se permettre une dotation
d'infrastructures additionnelles. Ça, c'est mon opinion à ce
sujet-là.
Merci de votre présentation. C'est bien gentil et merci
encore...
M. Laroche: C'est nous qui vous remercions.
M. Pagé: ...pour nos collègues.
M. Rioux: Merci, M. le ministre, merci, tout le monde.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska, vous avez la parole.
M. Baril: Oui, M. le Président. À mon tour, je
voudrais féliciter, d'abord, les dirigeants des Producteurs de sucre
d'érable du Québec, une entreprise bien établie chez nous,
à Plessisville, qui font, je crois, depuis plusieurs années
déjà, un travail extraordinaire, qui sont
représentés dans une trentaine de pays. Et sans doute que
ça ne s'est pas fait du jour au lendemain. Pour avoir connu,
rencontré à quelques reprises les gens de la coopérative
des Producteurs de sucre, je suis en mesure d'évaluer tout le travail
qui a été fait pour essayer de trouver de nouveaux
débouchés à cette production qui a des hauts et des
bas.
Je vais partir de la dernière question que le ministre vous a
posée au sujet de l'article 194. Vous sembiez dire que la
délivrance des permis pour une nouvelle usine devrait être
évaluée à partir de l'expérience et aussi de
l'état actuel des marchés. Avez-vous des exemples? Est-ce que
ça arrive souvent dans votre secteur? Y a-t-il beaucoup de permis qui
sont émis? Ça ne doit pas arriver tous les jours que quelqu'un se
lance dans la transformation des produits de l'érable.
M. Rioux: Alors, si vous le permettez, M. le Président,
disons que, depuis une dizaine d'années, quand même, c'est
arrivé à quelques reprises que de nouvelles entreprises aient
été parties dans le secteur. Vous savez, lorsqu'on part dans
l'industrie de l'érable, ça prend quand même une certaine
expertise. Ça prend quand même une connaissance de ce
secteur-là, mais aussi des marchés, et tout ça. Or, il est
arrivé, effectivement, depuis une dizaine d'années, que des
entreprises qui avaient été parties avec l'aide de l'État
- des deux paliers de gouvernement - ont dû fermer leurs portes. Il y en
a une qui a fermé l'automne passé - c'est un peu délicat
de la mentionner - en 1982, il y en a une aussi qui a fermé dans la
région de Sherbrooke, et il y en a eu d'autres aussi dans les
années antérieures.
Tout ça pour vous dire que, ce matin, on pariait du
phénomène de mondialisation et M. le ministre Pagé faisait
état des regroupements d'entreprises, etc. Je pense que, vous savez,
dans l'industrie de l'érable, on est rendus à une étape
très importante de notre développement, et je m'explique. On a
indiqué sommairement dans le mémoire que, depuis deux ans, il y a
des changements énormes dans la structure de l'industrie de
l'érable. Il y a trois ans, il y avait une quarantaine d'entreprises. Il
en reste, actuellement, environ une trentaine, dont trois importantes. Vous
avez la coopérative, qui est encore la première, au point de vue
volume et au point de vue chiffre d'affaires, suivie de deux multinationales et
d'une multitude de - je dis une multitude - disons une vingtaine de petites
entreprises familiales ou beaucoup plus artisanales. C'est le contexte
actuellement et les trois principales entreprises dont je faisais état,
déjà elles commercialisent près de 80 % de toute la
production de sirop d'érable en grand contenant au Québec.
C'est un changement important depuis trois ans. En fait, on vit les
mêmes phénomènes que vivent et qu'ont vécus d'autres
secteurs agricoles importants. C'est le phénomène des fusions,
c'est le phénomène des regroupements. M. le ministre Pagé
soulignait tantôt qu'il était heureux de voir que nous faisions
maintenant partie de la grande famille des coopératives agricoles.
Justement, nous aussi, on a voulu, l'an passé, poser un geste important
en s'affiliant à la Coop fédérée, qui est une
grande coopérative. Nos dirigeants se sont dit que, puisqu'elle aussi
fait des affaires sur des marchés internationaux où nous ne
sommes pas encore, il y aurait avantage à travailler avec cette grande
organisation. Donc, c'est le même phénomène aussi dans le
secteur privé. Il y a eu des fusions et probablement qu'en ce qui
concerne la vingtaine de petites entreprises familiales qui demeurent encore
actuellement actives il faut nous attendre, d'ici quatre ou cinq ans, à
des fusions ou à des prises de contrôle par des
intérêts étrangers. C'est ce qu'on vit dans notre industrie
présentement.
C'est pour ça que, nous, on considère qu'une entreprise
comme la coopérative qui, depuis plus de 65 ans, avec les moyens du
bord... Parce que vous savez, ça n'a pas toujours été
facile. Bien sûr, c'est comme les individus: les entreprises grandissent,
mais c'est à coup d'efforts. Je pense qu'aujourd'hui l'industrie de
l'érable - et ça, MM. les députés, M. le ministre,
c'est important - il ne faut plus la considérer comme un secteur
artisanal, un secteur folklorique. On a dépassé cette
étape depuis plusieurs années. Il n'y a pas de doute qu'à
cause de tout ça, à cause de tous ces changements, on n'a pas le
choix, on va devoir continuer, disons, à progresser et à
s'associer aussi avec d'autres groupes.
C'est pour ça que nous - et on peut le dire, moi et M. le
président Laroche, avec toute franchise, ce soir - si nous avons
appuyé, entre autres, la démarche de la Fédération
des producteurs acéricoles, qui est affiliée à l'UPA,
c'est que nous avions constaté qu'il y avait un changement de
mentalité, un changement d'attitude dans cette organisation. On est
convaincus que, probablement, on pourra, dans les prochaines années,
faire peut-être des choses intéressantes avec eux.
Évidemment, aussi, si on va vers la formule d'une chambre de
concertation, on va probablement arriver tous ensemble à faire une
meilleure mise en marché de nos produits de l'érable, à
l'échelle québécoise et canadienne et à
l'échelle internationale. Parce qu'il y a encore tout de
même des pays qu'on ne couvre pas. On a comme principe, vous savez, dans
la coopérative, de travailler dans les pays stables politiquement et
à monnaie forte. On n'est pas intéressés à aller
commercialiser les produits de l'érable où il y a de
l'instabilité politique et économique. Vous savez, actuellement,
on est tout le monde, ceux qui sont dans le domaine concret de la mise en
marché, quels que soient les produits, passablement sur la sellette avec
tous les changements qu'on vit ces dernières années.
Alors, tout ça pour vous dire qu'en tout cas, pour les actions
futures, on est ouverts à la concertation. En passant, M. Pagé,
on veut nous aussi peut-être profiter de l'occasion pour remercier le
ministère, parce qu'on a un programme, actuellement, de promotion
à l'échelle internationale avec le MAPAQ. On fait actuellement
passablement de promotion des produits de l'érable du côté
américain, du côté de l'Australie, de la
Nouvelle-Zélande, bientôt du Japon et de l'Europe l'année
prochaine. Alors, nous faisons ça en tandem avec le ministère et
on est heureux de le faire comme ça aussi. C'est une façon, je
pense, de bien travailler ensemble. (21 heures)
M. Baril: Dans votre mémoire, vous faites
référence à la position de la
Fédérée. On sait que la Fédérée
demande le maintien de l'article 2 tel qu'on le connaît
présentement. J'aimerais savoir, dans votre secteur à vous, des
produits de l'érable, en quoi l'article 2 peut protéger votre
coopérative contre un éventuel compétiteur ou je ne sais
pas?
M. Laroche: L'article 2, pour les coopératives, c'est un
peu comme le cordon ombilical. Si tu le coupes, tu as deux individus. À
un moment donné, il y en a un qui part de son côté et
l'autre part de l'autre. Dans la coopération, si tu n'as pas un lien qui
peut garder un contact avec ton membre, je pense qu'à ce
moment-là... La formule coopérative qu'on connaît depuis
des décennies a été, à venir jusqu'à
maintenant, d'avoir des garanties, comme coopérative, d'exister. Moi, je
suis un des vieux bonhommes qu'il y a dans la Chambre ici, ce soir. Mais je
pense que-Une voix: ... Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dufour: Si vous êtes sage, M. le ministre, vous allez
peut-être atteindre notre âge un jour.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rioux: Je pense, M. Baril - si vous permettez, M. le
président Laroche...
M. Pagé: Vous m'avez ouvert la porte, M. Laroche
M. Rioux: Non, écoutez...
M. Pagé: Le député de Jonquière est
un bon ami à moi.
M. Rioux: Excusez-moi. On l'a indiqué bien clairement au
début de notre exposé; pour nous, les articles 2 et 3 de la loi
actuelle sont très importants. C'est toute la question du lien
privilégié avec le membre sociétaire. D'ailleurs, je peux
vous dire que, dans nos négociations avec la Fédération
des producteurs acéricoles, c'est une chose sur laquelle on a
actuellement des accords de principe, sur laquelle on a travaillé. Ce
sont des choses auxquelles on tient.
Écoutez, il ne faut jamais oublier qu'une coopérative,
c'est aussi une association de producteurs, qui s'unissent ensemble pour se
donner des moyens économiques, qui prend la forme d'une entreprise.
C'est ça, une coopérative. Pour nous, c'est fondamental. Je veux
dire qu'on ne peut pas dissocier l'association et l'élément
entreprise, c'est un tout. Pour nous, les articles 2 et 3 sont donc
fondamentaux à cause de ça.
M. Baril: Vous connaissez aussi également la Loi sur les
coopératives qui donne des droits, des pouvoirs aux coopératives.
Moi, je me demande pourquoi les coopératives se sentent plus
menacées. Si l'article 2 du projet de loi 15 est retiré, elles
ont toujours la protection qui est inscrite à l'intérieur de la
Loi sur les coopératives, qui est beaucoup plus claire, en passant.
C'est important d'en prendre connaissance. C'est intéressant même,
je dirais. Elle est beaucoup plus claire.
L'article 2 - on se répète un peu - je l'ai
évoqué dans mon discours d'ouverture et il a été
invoqué à plusieurs reprises, même devant les tribunaux.
Remarquez bien que je n'ai aucune formation juridique et que je ne veux surtout
pas être ni avocat ni juge, mais ça n'a pas donné une
valeur concrète aux coopératives qui allaient devant les
tribunaux, l'article 2, je parle bien, du projet de loi 15 sur la loi sur la
mise en marché, c'est-à-dire l'article 3 de la loi actuelle.
C'est pour ça que, nous, on cherche, on pose des questions pour
savoir en quoi vous vous sentez sécurisés avec une ceinture et
des bretelles en plus, avec ce fameux article qui donne, je l'accorde, un
pouvoir aux coopératives que d'autres secteurs n'ont pas?
M. Laroche: par contre, m. baril, pourquoi les autres veulent
tant le voir disparaître et que, nous autres, on veut tant le garder? il
faudrait peut-être que vous cherchiez...
M. Pagé: Le pourquoi.
M. Laroche: ...le pourquoi.
M. Baril: Pourquoi? Remarquez bien que l'ensemble des
intervenants, se réfèrent surtout... Je vous demande ça
parce que vous êtes une coopérative, remarquez bien. Tous les
mémoires, entre autres, qui parlent du retrait de l'article 2 font
surtout mention, actuellement, de la convention de vente du lait. On parie des
approvisionnements, etc. Et l'industrie privée, efle, elle se sent, je
dois dire, autant menacée que vous par le maintien de cet
article-là parce qu'elle se dit: Comment peut-on s'y fier pour essayer
de se développer, trouver de nouveaux marchés, sans savoir si ce
fameux article-là, un jour, ne nous dira pas: Houp! vous n'avez plus le
droit de grandir, vous autres, restez là? Moi, je suis persuadé
qu'il y a autant de place pour le mouvement coopératif que pour le
mouvement privé, et je l'ai dit, dans bien des endroits, les
coopératives remplissent des fonctions que l'entreprise privée ne
remplit pas. Aussi, vous avez fait mention, tout à l'heure, qu'on a vu.
dans le passé des compagnies privées qui ont été
vendues à des étrangers. Ça fait que les étrangers
ne pourront pas venir acheter nos mouvements coopératifs ou ils vont
avoir de la misère, en tout cas, à en convaincre plusieurs. C'est
pour ça que je vous dis que, selon moi, les deux ont leur place. Il y a
de la place pour les deux. Mais comment être capables de faire en sorte
que les deux mouvements se développent dans la structure actuelle ou
à l'intérieur de cette loi-là sans donner une protection?
On est dans une situation de libre entreprise. Pourquoi en avantager une au
détriment de l'autre? Vous n'êtes pas d'accord ou plusieurs ne
sont pas d'accord au niveau des agences de vente voyez-vous, qui viennent
même en compétition avec les coopératives, certaines
agences de vente. Ça, c'est un avantage que les plans conjoints ou les
offices de producteurs ont.
M. Laroche: Mais il y a des négociations qui se sont
faites là-dedans. Nous autres, on est entrés en
négociations. Peut-être qu'on deviendra une agence de vente avec
le plan conjoint, si c'est favorable à la coopérative. Mais,
laissez-moi vous dire, par exemple, qu'une coopérative, quand ça
fait des profits, ça les répartit à ses membres, tandis
que, les particuliers, quand ils font des profits, ils les mettent dans leurs
poches. Ça vient faire un peu de différence aussi ça.
M. Baril: O.K. Je vous remercie beaucoup de vos réponses,
mais vous comprendrez que, nous, ici, on essaie d'approfondir la situation pour
connaître un peu le pouls de chacun. C'est notre intérêt. Je
vous remercie beaucoup de la présentation de votre mémoire. Je
sais que ma collègue de Johnson a une question à vous poser,
alors, sur le temps qu'il me reste-
Le Président (M. Richard): Mme la députée de
Johnson, vous avez la parole.
Mme Juneau: C'est une très petite question. Dans votre
mémoire, à la page 7, vous dites: "...laisse encore quelques
zones grises que la loi 15 devra aider à colmater avant le printemps
1991* Qu'est-ce que vous entendez par ces zones grises-ià?
M. flioux: Bien, on l'a vu, M. le Président, depuis ce
matin. Nous, on n'a pas voulu, ce soir, disséquer tout le projet de loi
comme tel, mais il y a une zone grise. Je vais vous donner un exemple.
Mme Juneau: Oui.
M. Rioux: Dans la définition au début du projet de
loi 15, lorsqu'on parle de la mise en marché, où ça
commence et où ça finit la mise en marché, dans le
contexte d'un plan conjoint, par exemple? Or, c'est à ce
niveau-là - c'est un exemple bien simple - qu'on voudrait que ce soit
mieux défini. Pour nous, lorsqu'on parle de mise en marché dans
le contexte d'un plan conjoint, ça part de la ferme et ça va
jusqu'aux portes de l'usine. Après ça, - d'ailleurs, ça
été dit dans plusieurs mémoires ce matin - c'est la
responsabilité des entreprises, des organisations d'entreprises de finir
le travail de mise en marché et de se rendre jusqu'à la table du
consommateur. Ça n'empêche pas, disons, des
fédérations spécialisées, qui sont responsables de
l'application de plans conjoints, en concertation, d'élaborer des
programmes de publicité, de promotion générique, pour
sensibiliser le consommateur aux produits agricoles du Québec. Ça
n'empêche pas ça. Mais le travail cesse, à notre avis, aux
portes de l'usine. Alors, c'est un exemple. Écoutez, on...
Mme Juneau: Non, mais...
M. Rioux: II y aurait bien d'autres exemples, mais on ne voulait
pas... C'est parce que, je veux être bien direct avec vous, dans le
mémoire de la Coopérative fédérée et dans
d'autres mémoires, demain, d'autres grandes coopératives
laitières, vous allez avoir certains éclaircissements à ce
sujet-là. Nous, on s'était entendus avec les autres intervenants
de la coopération agricole pour traiter des aspects que vous avez dans
notre mémoire. Mais on voulait simplement attirer sur le fait votre
attention qu'il y a des zones grises. Et, demain, elles seront peut-être
moins grises parce qu'ils vont vous faire des suggestions concrètes
là-dessus.
Mme Juneau: Oui, je comprends bien, mais vous n'auriez
certainement pas mis ça dans votre mémoire si vous n'aviez pas
quelque chose de
très précis en tête.
M. Rioux: Je vous ai donné en exemple la définition
de mise en marché: où ça commence et où ça
finit. L'ancienne loi n'est pas claire et le projet de loi 15 n'est pas tout
à fait clair non plus. On sait que dans l'esprit du ministère de
l'Agriculture, qui est le parrain de cette loi... Probablement qu'ils savent de
quoi on veut parler. Ils savent que la mise en marché d'une structure de
plan conjoint, ça commence à la ferme et ça finit au
portes de l'usine.
Mme Juneau: Oui, mais on a le droit de le savoir aussi.
M. Rioux: ...mais il faudra le dire.
Mme Juneau: Écoutez donc, le ministère sait ce que
vous avez en tête; j'imagine que l'Opposition a le droit de le savoir
aussi. On est en commission parlementaire. Tous les membres ici sont des
membres dûment élus à la commission de l'agriculture. Donc,
nous avons tout intérêt à connaître vos zones grises,
non seulement le ministère de l'Agriculture, mais tout le monde ici,
assis autour de la table, quel que soit le côté.
M. Rioux: En tout cas, madame, on peut vous assurer que d'ici la
fin de la présentation des mémoires, au niveau de la
coopération agricole, vous aurez vos réponses.
Le Président (M. Richard): c'est ce qu'on vous souhaite,
mme la députée de johnson. est-ce que, m. le ministre, vous avez
un commentaire pour remercier nos invités?
M. Pagé: Seulement pour remercier M. Rioux et M. Laroche
très sincèrement. Continuez à faire votre bon travail. Je
me fais fort de tenter de sécuriser Mme la députée en ce
qui concerne vos zones grises, qu'elle a tenté de découvrir avec
acharnement, vigueur et détermination.
Mme Juneau: J'avais entendu parler d'affaires avant.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Arthabaska et porte-parole officiel, avez-vous un commentaire de
remerciement?
M. Baril: J'ai fait mes commentaires et mes remerciements tout
à l'heure, et ça serait me répéter.
Le Président (M. Richard): Merci beaucoup. Alors, on vous
remercie beaucoup, messieurs. Les gens qui représentent la
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du
Québec inc., si vous voulez prendre place, s'il vous plaît.
Le porte-parole évidemment se présente et présente
ses collègues. Vous avez donc dix minutes de présentation
d'entrée. Par la suite, c'est nous qui vous posons des questions. Vous
avez la parole, monsieur ou madame.
Fédération interdisciplinaire de
l'horticulture ornementale du Québec inc.
M. Boulet (Guy): Mon nom est Guy Boulet de la
Fédération de l'horticulture ornementale du Québec. Je
demanderai aux gens à partir de ma gauche de se présenter
eux-mêmes.
M. Tremblay (Jean): Jean Tremblay. Je suis consultant à la
Fédération.
Mme Roy (Madeleine): Madeleine Roy, avocate. Je suis
conseillère juridique pour la Fédération.
M. Tremblay (Jean-René): Jean-René Tremblay bis,
directeur exécutif à la Fédération
interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du Québec.
M. Mousseau (André): André Mousseau,
vice-président de la Fédération.
M. Boulet: Comme nous l'avons déjà fait, au cours
des deux dernières semaines, dans deux autres commissions
parlementaires, la Fédération interdisciplinaire de
l'horticulture ornementale du Québec remercie le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. Michel Pagé,
de nous permettre de présenter notre point de vue sur l'avant-projet de
loi intitulé Loi sur la mise en marché des produits agricoles et
alimentaires et modifiant d'autres dispositions législatives.
Certaines dispositions du projet de loi nous permettent d'examiner
ensemble comment nous pouvons nous doter de moyens pour répondre
à notre responsabilité commune dans le domaine de la mise sur
pied de mécanismes de financement. La formule de partenariat que nous
avons développée avec le ministère a donné des
résultats tangibles pour les deux parties. La mise sur pied de
l'Institut de développement en horticulture ornementale a jeté
les bases d'une coopération profitable, et nous intervenons aujourd'hui
pour trouver un moyen de financement nous permettant de répondre
à nos responsabilités.
Notre intervention portera sur le caractère spécifique de
l'horticulture ornementale dans la production agricole
québécoise. Nous croyons que 1rs produits d'horticulture
ornementale doivent relever de la Loi sur la mise en marché des produits
agricoles, mais qu'il faut en reconnaître le caractère
spécifique. Nous espérons que vous accueillerez favorablement nos
commentaires et recommandations. (21 h 15)
À la recherche d'un mode de financement considéré
comme prioritaire par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation du Québec, l'horticulture ornementale
bénéficiait, à compter du 26 juillet 1989, d'un plan de
développement intégré sur l'horticulture ornementale et
les cultures abritées, soit la serri-culture. Pour répondre
à son engagement de considérer le secteur de l'horticulture
ornementale comme une priorité, le MAPAO a alloué un montant
total de 6 000 000 $ réparti sur trois ans par le biais d'un plan de
développement intégré. À l'intérieur de ce
plan, le ministère mettait sur pied, en collaboration avec la FIHOQ,
l'Institut québécois de développement en horticulture
ornementale. Pour les trois premières années, il était
convenu que le MAPAQ assumerait les coûts de fonctionnement de l'IQDHO,
mais que l'industrie devait prévoir un mécanisme de financement
pour assumer une partie des coûts après la troisième
année. La F1HOQ doit trouver un mécanisme de financement pour que
l'IÛOHO puisse continuer à fonctionner après les trois
premières années.
L'IQDHO a comme mandat d'assurer les producteurs en horticulture
ornementale d'un encadrement technico-économique approprié et de
favoriser la recherche dans le domaine de l'horticulture ornementale. Pour
l'industrie que nous représentons, il est essentiel que l'IQDHO continue
d'exister, car notre secteur économique qui génère 23 000
emplois souffre d'un manque d'encadrement technico-économique. La FIHOQ
a donc entrepris des démarches pour trouver un mécanisme de
financement approprié. Nous avons trouvé des formules pour
améliorer la mise en marché des produits et des services
horticoles. Pour ce faire, nous avons produit une étude sur les modes de
financement possibles. Dans le mécanisme de financement que nous avons
retenu, il nous est apparu essentiel de ne pas prélever de cotisations
provenant uniquement des producteurs. L'industrie de l'horticulture ornementale
forme un tout où chaque élément est interdépendant.
Il serait injuste de prélever des cotisations des seuls producteurs. De
plus, les producteurs fournissent 47,4 % des végétaux ligneux et
31,2 % des produits floraux; cela est tiré d'une étude qui a eu
lieu en 1985. Ces producteurs ne seraient plus compétitifs s'ils
assumaient seuls le financement. Nous croyons donc que le mécanisme de
financement doit toucher tant le domaine de la mise en marché que celui
de la production.
De plus, le mode de financement idéal doit tenir compte de quatre
principes que nous considérons comme fondamentaux: administration
simple, faible coût d'administration, un seul endroit de
prélèvement et application aux producteurs et commerçants
de biens et de services horticoles. Les modes de financement de la FIHOQ qui
existent présentement sont insuffisants pour que notre
Fédération puisse remplir son rôle au niveau de la
commercialisation, de la mise en marché, de la recherche et de la
promotion en horticulture ornementale. C'est pourquoi nous croyons que le
mécanisme de financement idéal devrait toucher tous les secteurs
impliqués dans la vente et la production de biens et de services
horticoles.
Recommandations et commentaires. L'objectif de la
Fédération est de chercher les outils légaux
nécessaires dans le but d'assumer les responsabilités visant
à organiser la production et la mise en marché des produits
horticoles ornementaux. Pour ce faire, tant les producteurs que les
détaillants et les utilisateurs de ces mêmes produits doivent
participer. Pour la Fédération, la formule du plan conjoint est
inappropriée, puisqu'elle est un mécanisme qui amène
à ne faire porter le fardeau qu'aux producteurs horticoles seulement.
Comme nous l'avons mentionné précédemment, ces derniers
ont déjà affronté sur le marché la concurrence des
produits étrangers. Il faut qu'ils soient les plus compétitifs
possible. Pour ce faire, nous désirons que toute la filière
horticole participe.
Ainsi, en examinant de plus près le chapitre XII traitant des
chambres de coordination et de développement, on est en mesure de
constater que le projet de loi innove en consacrant la création d'une
nouvelle institution de type corporatif indépendante des offices. Il
semble que les objectifs de la chambre de coordination et de
développement coïncident avec ceux de la Fédération.
En effet la FIHOQ est une association intéressée par la
production et la mise en marché des produits horticoles. Le mandat de la
chambre rejoint celui de la FIHOQ. La FIHOQ représente des producteurs
et des groupes de personnes intéressés à la mise en
marché des produits agricoles visés, tel que l'exige l'article
113.
Comme recommandation, cependant, le projet de loi est restrictif quant
à l'objet étudié par la chambre, puisqu'il doit être
un produit agricole déterminé. Or, la FIHOQ vise un mandat
beaucoup plus large en cette matière. Considérant que nous
désirons rejoindre tous les types de production et de mise en
marché des produits horticoles ornementaux, nous recommandons que soit
élargie la gamme des produits qui fait l'objet de la chambre. Cette
recommandation s'appuie sur le caractère particulier de la production
horticole ornementale. En raison des nombreuses variétés
cultivées en pépinière ou sous serre, il nous
apparaît essentiel de considérer l'ensemble de la production
horticole ornementale comme un produit agricole déterminé. Ainsi,
au seul chapitre des plantes ligneuses au Québec, nous pouvons retrouver
arbres conifères, arbustes conifères, arbres à feuillage
caduc, rosiers, arbustes à feuillage caduc, arbustes pour arbres
fruitiers, plants de reboisement, plantes vivaces, vignes et plantes
grimpantes, ainsi que toutes les plantes qu'on
peut retrouver dans les serres. Dans un tel contexte, il serait
souhaitable qu'une chambre de coordination et de développement puisse
être formée pour l'ensemble de la production horticole
ornementale, qui serait considérée comme un produit agricole
déterminé. L'accréditation éventuelle de la
Fédération visant l'ensemble des intervenants dans la production
et la mise en marché de productions ou de services horticoles, pourrait,
en vertu de l'article 79, forcer la contribution de toutes ces personnes ou
sociétés. La Fédération a retenu, comme mode de
perception, l'émission de permis de production ou de vente de
végétaux d'ornement. L'article 79 semble se limiter à
déterminer le montant de la contribution pour couvrir les coûts
relatifs aux devoirs et aux obligations résultant de
l'accréditation. Par conséquent, nous recommandons que cette
disposition laisse à l'association accréditée la
possibilité de déterminer son mode de perception. Cette
démarche pourra se faire avec l'accord de la Régie. Pour nous,
l'emploi du mot "permis" ne fait pas référence à ceux
mentionnés aux articles 137, 138, 139 du projet de loi, car ceux-ci
visent plutôt à réglementer un secteur d'activité
qu'à permettre la cueillette de fonds. Par ailleurs, même si on
mentionne que toute personne ou société visée par
l'accréditation est tenue de payer cette contribution, à
l'article 79, troisième paragraphe, troisième alinéa, le
projet de loi devrait prévoir que le non-paiement de la contribution
constitue une infraction et est passible de sanctions. Il faut modifier
l'article 175 en conséquence.
La Fédération remercie sincèrement le ministre
Michel Pagé et les membres de cette commission pour l'attention
portée à nos recommandations. Comme nous l'avons mentionné
précédemment, l'horticulture ornementale est
considérée comme prioritaire par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Pour
la Fédération, cette reconnaissance marque une étape
importante du développement de l'horticulture ornementale au
Québec. Cependant, nous désirons contribuer de façon
significative aux actions en vue de nous approprier une plus grande part de ce
marché. Nous recommandons d'élargir le mandat de la chambre de
coordination et de développement afin de rejoindre l'ensemble de la
production et de la mise en marché des produits horticoles. Nous
recommandons également que la définition des modes de perception
soit une responsabilité de l'association accréditée. Et
finalement, nous demandons que l'on prévoie, dans le cas de non-paiement
de la contribution, des sanctions en conséquence. Nous espérons
que les modifications proposées seront accueillies favorablement, et
nous vous remercions de votre attention.
Le Président (M. Richard): Merci, M. Boulet. M. le
ministre, vous avez la parole.
M. Pagé: Merci, M. le Président. M. le
Président, je voudrais remercier M. Boulet, président de la
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale,
saluer M. Mousseau, M. Tremblay et Me Roy, les remercier de leur
présentation ici, et remercier, en fait, l'ensemble de la
Fédération et de ses membres, M. Boulet et son équipe,
pour tout le chemin parcouru, quand même en( un temps
relativement bref, depuis quelques années. Et vous me permettrez
très certainement, M. le Président, un bref commentaire relatif
à l'importance de cette industrie au Québec. Vous savez,
l'agriculture, c'est très vaste et très diversifié.
Ça passe aussi par les plantes, ça passe aussi par ce qui se fait
au niveau des fleurs, des arbustes. L'horticulture ornementale, au
Québec, est souventefois mésestimée ou sous-estimée
de la part du public en général, et comme le Parlement se veut
toujours le reflet sensiblement exact d'une population, bien, je suis heureux
de dire à mes collègues que l'horticulture ornementale joue un
rôle très important dans l'économie du Québec. Ce
sont des centaines de millions de dollars qui sont dépensés
chaque année. Si ma mémoire est fidèle, c'est une moyenne
de 1800 $ par chaque nouvel acquéreur d'une résidence, qui sont
dépensés dans l'horticulture. Exemple concret, dans le domaine
des arbustes, des plantes, on a encore beaucoup de chemin à parcourir et
le travail qu'on a dégagé ensemble, la réflexion qu'on a
dégagée ensemble conduira très certainement, dans le cadre
du plan de développement intégré, à une
augmentation substantielle du degré d'autosuffisance du Québec
dans les produits utilisés en horticulture. Pour nous, c'est de l'argent
bien investi, et, encore une fois je veux vous réitérer toute la
confiance du gouvernement du Québec à l'égard de ce que
vous faites et des objectifs que vous poursuivez. Parce que, dans la
Fédération interdisciplinaire, le mot l'évoque et le dit
très bien, on se réfère aux entrepreneurs paysagistes, aux
détaillants de produits horticoles. Nous nous référons
aussi aux pépiniéristes, aux serriculteurs, aux producteurs de
gazon en plaque, aux spécialistes en entretien d'espaces verts. Nous
nous référons aux arboriculteurs, aux architectes paysagistes et
aux fleuristes. Ce secteur-là fait l'objet, pourrait faire l'objet et
veut faire l'objet, en ce qui nous concerne, d'une démarche de
développement importante, non seulement au niveau des produits, mais
aussi au niveau des emplois. J'ai toujours été frappé,
moi... Lors de notre première rencontre, si ma mémoire est
fidèle, où on avait tenu un genre de mini-sommet au Jardin
botanique de Montréal - c'était début de septembre
1987-1988 - j'avais été frappé par les données de
ces bonnes gens qui... Exemple concret, à cette date-là, on
aurait eu 90 emplois de techniciens dans le domaine des fleurs, pour travailler
chez nos fleuristes, qui auraient eu un job le lendemain matin. Manque de
formation des
cadres au niveau des pépinières, au niveau des gens qui
font les gazons, etc. C'est un secteur qui mérite l'attention du
gouvernement et des membres de l'Assemblée nationale, par
conséquent.
Je vous remercie beaucoup de votre présentation ce soir.
Essentiellement, vous nous faites des demandes. Vous nous dites: La
Fédération interdisciplinaire devra se donner un outil de
financement après 1992. C'est le cas, d'ici 1992, nous pourvoirons,
évidemment, aux sommes nécessaires aux activités. Vous
dites dans vos recommandations: Le projet de loi est restrictif quant à
l'objet étudié par la chambre puisqu'il doit être un
produit agricole déterminé. C'est un très bel exemple,
là aussi, c'est un très bel exemple pour votre secteur de
l'opportunité de mettre en place les chambres de coordination et de
développement, compte tenu de la gamme très large de vos
activités, de leurs différents créneaux. Je prends bonne
note de votre inquiétude à ce sujet-là. Je comprends qu'on
ne se réfère pas ici à la mise en marché, par
exemple, du poulet, on ne se réfère pas ici à la mise en
marché des tomates de serre. Parce qu'on a fait une démarche - et
je pense que M. Mousseau en est conscient - on a fait une démarche, il y
a peu de temps, d'une mise en commun des producteurs en serre individuels avec
les producteurs en serre dits de mégaprojets, si on peut utiliser le
terme, et je suis convaincu que ça va porter fruit. Vous êtes
confrontés au même problème.
J'apprécierais si, d'ici quelques semaines... Je prévois
que le débat en deuxième lecture sur ce projet de loi pourra
s'amorcer autour du 11 avril, ce qui nous donne quand même 15 jours
environ. Et l'étude, article par article, pourrait venir vers le 22 mai,
de sorte que, entre avril et mai, ce serait intéressant si vous pouviez
faire parvenir aux membres de la commission... Qu'est-ce qu'on vous souffle
à l'oreille, M. le député?
Mme Juneau: Un secret du côté de l'Opposition. Ce
sont les zones grises de l'Opposition.
M. Baril: Qu'on connaît. M. Pagé: Ah oui?
Mme Juneau: Les cloches, là, c'est pour un vote.
M. Pagé: Grand bien vous fasse si vous pouvez vous
partager quelques secrets.
Mme Juneau: Vous ne voulez pas nous faire partager les
vôtres.
M. Baril: Nous ne sommes pas jaloux des vôtres.
Mme Juneau: On était indignés de voir que les
membres de la commission ne sont pas traités de la même
façon que le ministre.
M. Pagé: Je comprends votre indignation, ça se
reflète...
Mme Juneau: J'ai dit tous les membres, je n'ai pas dit simplement
ici.
M. Pagé: Ça se reflète dans votre image, ce
soir.
Mme Juneau: Les cloches sonnent, c'est pour un vote sur la loi
25.
M. Pagé: On va y aller, on va y aller bientôt.
M. Houde: C'est parce que la députée de Johnson...
Demain, il y a encore toute la journée pour entendre d'autres
mémoires qui vont être similaires à celui-là. C'est
pour ça qu'il a laissé la porte ouverte, ce soir.
Le Président (M. Richard): Est-ce qu'il y a d'autres
questions...
M. Pagé: Pourriez-vous, Carmen et Albert, ne pas vous
chicaner, s'il vous plaît?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: Cela étant dit... Oui, oui, les cloches
sonnent, le leader du gouvernement s'en vient, là. Carmen, dites-leur
ça, puis on va aller voter, on s'en vient. Cela étant dit,
pourriez-vous, d'ici la mi-avril, préciser davantage ce que vous
aimeriez voir comme dispositions dans la loi qui seraient susceptibles non
seulement de solutionner vos préoccupations, mais surtout de vous
sécuriser? Je vous laisse là-dessus pendant quelques minutes. On
va aller voter.
Le Président (M. Richard): On doit vous informer que ce
que l'on entend, c'est l'appel pour un vote. Alors, c'est l'obligation pour
l'ensemble de la députation d'aller en Chambre voter. Nous revenons ici,
ça va prendre quelques minutes. On s'en excuse, ça fait partie de
la mécanique...
M. Pagé: Ne gagez pas sur le résultat, le
gouvernement va gagner.
Des voix: Ha, ha. ha!
Le Président (M. Richard): Nous suspendons nos travaux
pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 21 h 30) (Reprise à 21 h
42)
Le Président (M. Richard): Â l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission reprend ses travaux. Nous en étions, avec le groupe
de la Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale
du Québec, à la période des questions. Nous en
étions aux questions du député d'Arthabaska.
M. Baril: Oui, M. le Président. Je vous remercie de
m'accorder ce temps et je tiens à féliciter la
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du
Québec inc. J'écoutais tout à l'heure, signalé par
le ministre, le développement phénoménal de cette
production chez nous au Québec, et ça me rappelait de beaux
souvenirs. Je crois que ce qui a beaucoup aidé au lancement de cette
production-là, c'est le concours "Villes et villages fleuris", que le
gouvernement du Parti québécois avait mis en place, en 1978 ou
1979, pour redonner la fierté aux Québécois et aux
Québécoises de décorer, d'orner, de planter des fleurs,
des arbustes un peu partout pour embellir nos villes, nos villages, nos
paroisses. J'aurais pensé que le ministre aurait souligné
ça. Ça aurait été, il me semble...
Mme Juneau: Ha, ha, ha! M. Baril: ...de bon... Mme
Juneau: Aloi.
M. Baril: ...de bon aloi. Mais, de toute façon, ça
nous permet, nous, de le rappeler en tout cas. À la page 11 de votre
mémoire, quand vous parlez d'élargir le mandat de la chambre de
coordination, vous faites plus spécifiquement mention du fait que vos
membres produisent plus qu'un produit, si je comprends bien. C'est ça?
Bon. Maintenant, le rôle que vous semblez vouloir jouer ou faire jouer
à cette chambre qui sera créée par le nouveau projet de
loi, qu'est-ce qui vous empêche, actuellement, dans votre secteur, dans
votre milieu, de vous réunir, de vous rassembler, de discuter entre vous
autres sans avoir cette chambre de coordination-là - on ne peut pas dire
cette obligation-là, parce que vous n'êtes pas
nécessairement obligés d'utiliser ses services - ce
mécanisme-là?
M. Boulet: Bien, je pense que c'est un peu dans la même
optique. On se réunit déjà, parce que notre
Fédération regroupe quand même la majorité des gens
qui oeuvrent dans le secteur. Mais c'est un peu lorsqu'on vient pour essayer de
développer un secteur où, chaque fois que de l'argent est
impliqué. Je pense la même chose au niveau de la fiscalité:
les contributions volontaires ne sont pas toujours faciles et les contributions
fiscales ou les contributions volontaires, dans un développement comme
ça, ne sont pas toujours réparties d'une façon
égale, et le bon vouloir de chaque personne n'est pas toujours
évaluable de la même façon. Alors, je ne sais pas si vous
comprenez ce que je veux dire, c'est qu'avec une loi qui encadre notre
possibilité de développement, tout le monde est obligé de
contribuer, tandis que si on s'assoit autour d'une table, tout le monde peut
être d'accord, mais tout le monde ne contribue pas
nécessairement... (21 h 45)
M. Pagé: À payer la soupe.
M. Boulet: ...à payer la soupe, même si tout le
monde en mange.
M. Baril: Pensez-vous que, dans les pouvoirs qui seront
conférés à cette chambre, elle aura le mandat de forcer un
groupe à s'asseoir avec l'autre ou...
M. Boulet: On n'a pas de confrontation en ce moment, là.
Vous me dites...
M. Baril: Non, mais lorsque la chambre... M. Pagé:
De coordination.
M. Baril: ...de coordination - merci, M. le ministre -
fonctionnera et que vous ferez appel à sa structure, pensez-vous que les
pouvoirs qu'elle a actuellement seront suffisants? Je comprends que vous
autres, vous n'ayez pas de problème à vous parler entre vous
autres, mais il y a d'autres groupes pour lesquels on sait que, des fois, il y
a des problèmes. Pensez-vous que les pouvoirs seront suffisants pour que
cette chambre-là puisse, je ne sais pas si je peux dire, forcer ou
obliger, en tout cas, un groupe à s'asseoir avec les autres groupes s'il
ne le veut pas?
M. Boulet: Je ne sais pas. C'est une question, peut-être
technique, légal... L'optique que vous voulez donner à votre
question...
M. Baril: Non, c'est juste une information: Est-ce que ça
serait...
M. Boulet: bien, l'information... peut-être pourriez-vous
expliquer un peu plus ce que vous voulez savoir. là, c'est moi qui suis
dans une zone grise peut-être, là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Baril: Ce que je veux dire, c'est: Pensez-vous que la chambre
devrait avoir le pouvoir, entre parenthèses, d'exiger de tous ceux et
celles qui font partie d'un même secteur de s'asseoir à une table
pour discuter ou bien si c'est uniquement volontaire? La chambre ne doit pas
avoir le pouvoir de...
M. Boulet: Non, je pense que c'est rattaché un peu
à ce qu'on demandait à la fin. C'est que,
si jamais H y a non-paiement d'une contribution, a y a des sanctions.
Alors, ça force les gens à avoir une action commune. Ça
veut dire que, si on demande une accréditation, nous autres, en tant que
Fédération pour représenter le secteur, 9 va falloir
prouver qu'on est représentatifs du secteur. À ce
moment-là, je pense, lorsqu'on deviendra accréditée comme
Fédération représentant un secteur, nous croyons pouvoir
avoir les pouvoirs conférés par cette loi-là, soit
d'être capables de diriger et de développer ce
secteur-là.
M. Baril: À la page 9, vous faites mention, au
deuxième paragraphe, que la formule du plan conjoint est
inappropriée puisqu'elle est un mécanisme qui amène
à faire porter le fardeau aux producteurs horticoles seulement.
Seriez-vous en faveur que, justement, cette formule de plan conjoint soit
améliorée ou bien si, pour vous autres, c'est inapproprié
et que vous n'avez pas besoin d'utiliser cette formule-là? J'aimerais
avoir plus d'éclaircissements sur ce deuxième paragraphe.
M. Boulet: Si on se reporte au pian conjoint, normalement, c'est
dirigé seulement sur la production, sur les producteurs en tant que
tels. Alors, étant donné que, quand on écrit au
début qu'on n'est pas autosufHsants au niveau de la fourniture de cette
production-là par rapport au marché, si on veut développer
le secteur, on ne peut pas remettre tout le fardeau du développement
seulement sur les producteurs, alors qu'on veut à la fois
développer le secteur pour qu'il y ait une plus grande demande, mais se
servir de cette demande-là pour prendre aussi notre part de
marché. Dans certains secteurs on est auto-suffisants entre 30 % et 47 %
et, si on mettait tout le fardeau du développement des différents
secteurs sur lés producteurs, je ne pense pas qu'on serait capables de
suivre le rythme de développement qu'on a connu ces dernières
années. Mais on veut aussi développer la partie qui s'appeHe
services en horticulture - ça veut dire aménagement paysager,
vente au détail - à travers ces secteurs-là qui ne sont
pas de la production, parce qu'on est convaincus que, si on développe
des secteurs de débouchés, on va être capables de
développer notre production rattachée à ça.
M. Baril: Parmi les membres de votre Fédération, il
y a des producteurs et il y a des personnes qui font juste de la mise en
marché?
M. Boulet: C'est ça, oui.
M. Baril: Puis, c'est quoi en chiffres, en pourcentage, les
producteurs, ceux qui produisent les plants et ceux qui les mettent en
marché?
M. Boulet: Si on prend juste le nombre de personnes, dans
l'Association des producteurs en serre, ils sont...
M. Mousseau: Au niveau de la production en serriculture, il y a
700 producteurs ornementaux en serre. Au niveau de la pépinière,
c'est...
M. Boulet: On en a à l'inventaire du ministère...
250, je crois, au dernier inventaire de pépinières. Ça, ce
sont les producteurs de gazon: à peu près 40 ou 50. Ensuite, vous
tombez dans les services: paysagistes, centres de jardin. Là, on a des
architectes paysagistes, mais on ne voit pas comment on les regroupera, cette
partie-là, mais on regroupe ces gens-là parce qu'on a des
intérêts communs.
M. Baril: Quant à moi, je vous remercie de vos
réponses, de vos explications et de la présentation de votre
mémoire.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Arthabaska. M. le ministre, vous avez un commentaire de
remerciement?
M. Pagé: Seulement remercier à nouveau les membres
de la Fédération et m'assurer qu'ils puissent nous faire parvenir
leurs précisions dans les meilleurs délais. Je peux vous indiquer
que mon intention est de recommander à mes collègues des
modifications pour s'assurer que vous vous retrouvez bien exactement selon vos
besoins dans le projet de loi qui sera étudié article par
article.
Le Président (M. Richard): Merci beaucoup, mesdames,
messieurs. Je demanderais à Mme Marthe Olivier de prendre place. S'il
vous plaît, madame.
Mme Olivier, ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue.
Je pense que vous êtes là depuis un bon petit bout de temps, alors
vous connaissez la méthode de fonctionnement. Vous avez un maximum de
dix minutes pour présenter votre mémoire et, par la suite, des
questions vous seront adressées. Vous avez la parole, madame.
Mme Marthe Olivier
Mme Olivier (Marthe): Je vous remercie. Je vous remercie
également d'avoir accepté de m'entendre ce soir. Mon nom est
Marthe Olivier, je suis une simple citoyenne et je me présente ici
à ce titre. J'ai produit un mémoire devant la commission
parlementaire, qui traite strictement de l'intérêt public. Par
contre, pour faciliter la compréhension du cas, je crois devoir vous
expliquer un peu ce qui s'est passé dans mon dossier personnel, de telle
sorte que vous pourrez ensuite comprendre le contexte dans lequel j'ai produit
le mémoire et pour lequel je
demande divers changements aux articles du projet de loi. Je vais
procéder très brièvement par ordre chronologique.
En février 1987, j'ai demandé un permis de production de
cheddar frais à la Régie des marchés agricoles, et j'ai
passé en audience. À ce moment-là, je devais apporter une
preuve d'accroissement du marché du cheddar frais. La preuve que j'ai
apportée, à ce moment-là, montrait que les
épiceries de la région où j'entendais établir
l'entreprise n'étaient pas desservies. Je pense à Varennes et
à Boucherville sur la rive sud, ainsi qu'aux milieux institutionnels en
général - je pense aux hôpitaux, aux écoles - qui
n'avaient pas de cheddar frais. Et quand je dis "frais", il s'agit d'un cheddar
non mature et qui est écoulé très rapidement, suite
à sa production.
En avril 1987, à peu près deux mois plus tard, une
sentence arbitrale intervient et change le cheddar frais de classe de lait.
Elle l'inclut désormais en classe 5, la classe théorique de
produits de conservation, tels que beurre et poudre de lait, et qui plus est,
la classe la moins rentable pour les producteurs. Dans la même sentence
arbitrale, le conseil arbitral crée une classe 5A pour l'entreprise
privée. Car, en fait, c'aurait été une situation
absolument catastrophique que de baisser dans une classe non garantie un
produit qui était transformé à près de 90 % par
l'entreprise privée, à l'époque.
En juin 1987, on me refuse le permis demandé et, à ce
moment-là, la Régie me mentionne que j'aurais dû
démontrer non seulement que j'accroîtrais le marché du
cheddar frais, mais qu'en plus, j'accroîtrais le marché du cheddar
mature, bien qu'il n'entrait pas dans mes intentions de faire cette
production-là. Qui plus est, on avait fréquemment affirmé
que c'était un marché saturé. Donc, une preuve impossible
à fournir.
En septembre 1987, je présente une requête en
évocation et mandamus devant la Cour supérieure du Québec,
où l'argument principal maintient que la Régie a étendu
indûment le champ de la demande de cheddar frais au cheddar de
conservation. En octobre 1987, une nouvelle sentence arbitrale change le prix
du lait payé en classe 5: elle lo baisse de 0,25 $. Elle augmente
parallèlement celui de la classe 4, qui continue à être
particulièrement occupée par les entreprises privées. Ma
requête s'est soldée par un refus, bien que le juge admette qu'il
y a effectivement eu une extension du champ de la demande. Inscription en
appel, novembre 1987: la cause n'a pas été entendue.
Décembre 1987: audience sur une deuxième demande que j'ai
produite devant la Régie, et qui traitait cette fois de la production
d'un fromage de type cheddar sous nomenclature descriptive, c'est-à-dire
hors des normes prévues pour le cheddar tel quel, normes légales
et incluses dans la loi. En mars 1988, je produis le mémoire à la
Cour d'appel du Québec et ce même mois, la Régie me fait
parvenir une suspension de sa décision jusqu'au 30 septembre 1988. Elle
mentionne alors que les intervenants vont devoir se prononcer, à savoir
dans quelle classe on va inclure ce produit-là, bien qu'il avait
été considéré jusqu'à ce moment-là
comme un fromage de spécialité de classe 4, donc garanti
d'approvisionnement. En septembre 1988, je produis également un
volumineux mémoire au comité interministériel du
ministère de l'Agriculture, ici même. Ce mémoire-là
traitait du marché laitier en général, à partir de
sentences arbitrales rendues de 1976 à 1987. Il traitait
également de la notion d'intétêt public, et, dans ce
mémoire, je faisais le même type de recommandation qu'aujourd'hui,
soit l'abolition, entre autres, de l'article 2 et diverses autres
recommandations. En novembre 1988, une autre prolongation de la suspension de
la décision. Encore là, on attend ce que les intervenants vont
décider au niveau de la classe. En avril 1989, enfin, une sentence
arbitrale est rendue. Elle inclut cette fois tout nouveau produit de type
cheddar frais en classe 5 et elle énumère d'une façon
stricte tous les produits de classe 3 et 4, de telle sorte qu'aujourd'hui, au
Québec, tout nouveau produit qui pourrait arriver sur le marché
se retrouve en classe 5, même s'il s'agit d'un produit frais. En avril
1989, la Régie malgré la sentence, me rend, une décision
favorable. J'obtiens un permis pour produire un fromage frais sous nomenclature
descriptive. Or, elle assortit le permis de conditions telles qu'il est
impossible d'ouvrir l'entreprise. Elle me demande alors de m'approvisionner en
lait auprès des entreprises existantes, ces entreprises mêmes qui
s'opposaient à ma demande. Et je pense ici aux entreprises
coopératives, celles-là mêmes qui, vous le savez,
même aujourd'hui en 1990, tentent encore d'obtenir tout le lait de leurs
sociétaires. Alors, c'était absolument inutile de me donner un
permis, puisqu'il était évident que je ne pourrais pas avoir de
lait. Et à ce sujet-là, je dois avouer que je trouve
étrange le fait que l'on confie, dans mon cas personnel, le droit
à des entreprises commerciales intéressées de se prononcer
finalement sur l'exploitation d'un permis qui a été
accordé au nom de l'intérêt public. Actuellement, je
considère qu'il y a une dénaturation de tout le système
théorique de l'approvisionnement en lait. Ce qui avait été
gagné par la Fédération était un approvisionnement
en lait dans les classes prioritaires de produits périssables et de
fromage de spécialité pour desservir directement la population
québécoise. Et la classe 5 visait la production de produits de
conservation, afin d'éviter des pertes de lait. Ces produits-là
pouvaient être exportables. Or, on en arrive maintenant à une
situation où des produits frais - et tout nouveau produit frais qui
pourrait entrer sur le marché - se retrouvent dans la classe la moins
rentable pour les producteurs, dans une classe de produits d'exportation,
à
l'équivalent du beurre et de la poudre de lait. (22 heures)
Face à tous ces développements, j'ai écrit à
M. le ministre Pagé en septembre 1989 pour lui demander d'intervenir
dans mon dossier, afin de régulariser cette situation. Il n'y a eu aucun
développement. En janvier 1990, une seconde lettre est
expédiée à M. Pagé. Et vous me retrouvez devant
vous aujourd'hui avec la production d'un mémoire.
M. Pagé: Je vous ai répondu le 24
février.
Mme Olivier: Janvier, je n'ai pas mis la journée telle
quelle.
M. Pagé: Non, mais je vous ai écrit le 24
février.
Mme Olivier: J'ai effectivement reçu un accusé de
réception. Aujourd'hui, j'en arrive à dire: Les
coopératives, on le sait, ont demandé une décision
politique pour obtenir encore tout le lait de leurs sociétaires. Je ne
considère plus qu'il est d'intérêt public de favoriser un
mouvement comme celui-là. Si on devait, à un moment donné,
leur donner tout le lait de leurs sociétaires pour produire dans la
classe la moins rentable pour les producteurs, on se trouverait, dans le fond,
à créer une sous-classe de producteurs qui seraient tenus de
produire dans la classe la moins rentable, celle des produits de
conservation.
Alors, telle est la situation. Je me suis permis de vous exposer mon cas
personnel, parce que c'est dans ce contexte que j'ai demandé diverses
modifications à la loi. Je me permets non pas de vous lire le
mémoire, ce qui serait beaucoup trop long, mais de vous
énumérer brièvement les articles et de vous mentionner mes
recommandations à la fin de chacun d'eux.
On a dit jusqu'à maintenant - et j'ai entendu les faits
mentionnés - qu'il était heureux qu'il y ait une forte
concentration d'entreprises, afin de pouvoir assumer adéquatement
l'internationalisation des marchés. Aujourd'hui, moi, je dis: Une petite
entreprise locale peut desservir adéquatement en produits frais une
population locale et ne pourrait certainement pas s'adresser à une
internationalisation quelconque de produits matures. Dans le cadre de
l'internationalisation, on peut effectivement voir l'avènement d'un
regroupement important d'entreprises, qui vont oeuvrer beaucoup plus sur un
plan international dans les produits de conservation. Mais je dis qu'à
côté de ces grandes tendances, H faut maintenant se pencher aussi
sur l'intérêt des consommateurs à pouvoir s'approvisionner
en fromage frais dans leur lieu d'approvisionnement privilégié,
les épiceries, et qu'à desservir ainsi les consommateurs en
produits frais, en fromage frais, on risque de créer de nouveaux
marchés, qui peuvent être très intéressants au
niveau des producteurs, également.
Alors, j'aborde les articles 1 et 7 qui mentionnent le but de la loi,
soit: "Permettre aux producteurs, acheteurs, transformateurs ou autres
personnes ou groupes intéressés d'organiser la production et la
mise en marché de façon ordonnée." Quand on mentionne
"autres groupes intéressés", les seuls qui, à ma
connaissance, n'ont pas été énumérés, ce
sont les consommateurs. Je pense qu'il y aurait lieu d'assurer une
représentation des consommateurs au sein même de la Régie.
Aussi, je recommande renonciation claire de cette catégorie des
consommateurs dans le cadre de l'article 1, ainsi que la présence de
leurs représentants au sein de la Régie lors de toute
audition.
L'article 2 a été, je dirais, assez touché
aujourd'hui par les personnes que j'ai entendues. Je dois avouer que j'ai
exactement la même opinion. Sous l'ancienne loi, on parlait de
privilèges aux coopératives et, en même temps, de la
création d'une loi qui ne mettait sur le marché qu'une mise en
marché supplétive. Dans le projet de loi, on enlève la
mise en marché supplétive, ce qui laisse croire que, dans les
faits, on veut en arriver à une mise en marché unique pour tous
les intervenants. Or, en conservant, je dirais, une sorte de privilège,
de non-concurrence au mouvement coopératif, on en revient encore, dans
les faits, à deux catégories d'intervenants qui vont avoir des
traitements différents sur le marché.
Je ne crois pas qu'en 1990 il y ait lieu de maintenir une telle
distinction, surtout pas lorsqu'on voit ces entreprises qui ont des chiffres
d'affaires très importants. J'ai la conviction que l'abolition de
l'article 2 n'affecterait nullement leur rentabilité financière.
Qui plus est, c'est un article qui a effectivement été
utilisé à un certain nombre de reprises au niveau de sentences
arbitrales, par exemple, pour obtenir un pouvoir de direction de lait des
sociétaires, pour essayer d'obtenir la création d'un
troisième plan conjoint ou divers points semblables. Ça a
donné lieu à des audiences importantes qui ont pris beaucoup de
temps, qui ont pris beaucoup d'argent. Je ne crois pas qu'il y ait lieu de
maintenir un article qui a, dans le fond, à mon avis, causé
beaucoup plus de difficultés, d'attaques, qu'un véritable acquis
ou un soutien à une mise en marché efficace. le président
(m. richard): je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît mme
olivier. peut-être qu'on pourra recouper certains autres articles pendant
la période des questions.'
Mme Olivier: Est-ce que je pourrais conclure en quatre
minutes?
Une voix: Oui, madame, mais on va vous questionner moins
longtemps.
Mme Olivier: Oui? Je vous remercie.
Le Président (M. Richard): La première
commence.
Mme Olivier: Alors, recommandation. Il faut cesser d'alimenter en
arguments le feu des conflits. La loi doit être claire et limpide. Aussi,
je recommande d'abolir complètement la préférence
accordée aux mouvements coopératifs dans l'article 2, et
d'assurer la création d'un véritable système de mise en
marché unique et valable pour tous les intervenants.
L'article 5, c'est simplement l'absence d'un mot. Le mot "juste" se
trouve à tomber lorsqu'on mentionne "une mise en marché efficace,
ordonnée". Mais on cesse de mettre le mot "juste", et je pense qu'il y
aurait lieu de le garder, parce que je me dis: À quoi sert une mise en
marché efficace, si elle doit se faire d'une façon injuste? Je
recommande donc de conserver l'obligation d'une mise en marché efficace,
ordonnée et juste, ainsi que renonciation d'un traitement
égalitaire et non discriminatoire de toutes les parties
intéressées dans une décision.
L'article 18 concernant le pouvoir de révision en appel
auprès du ministre. Je pense que ce pouvoir devrait être maintenu,
parce que l'abolition du pouvoir de révision consiste, dans les faits,
à obliger tout intervenant qui pourrait ne pas être, d'accord je
dirais, non seulement d'accord, mais devant une décision de la
Régie qui pourrait être critiquable, ça obligerait une
telle personne à se retrouver devant le système judiciaire, avec
tous les frais et les coûts que ça entraîne. Croyez-moi,
après trois ans, je sais ce que ça implique en termes de
démarches puis en termes de difficultés. Aussi, je dis que seul
le pouvoir de révision peut assurer une égalité entre un
particulier qui demanderait un permis ou une demande quelconque à la
Régie et une entreprise qui, elle, peut être assez forte pour
avoir recours au droit.
Je vous suggère donc de démocratiser votre loi et de la
rendre applicable pratiquement à tous les citoyens
québécois qui auraient une bonne idée, plutôt que de
favoriser une conservation de tout ce marché aux mains des entreprises
existantes. Il faut donc conserver un pouvoir de révision
extérieur et même le faciliter, dans la mesure du possible. Ainsi,
il pourrait être valable d'exiger la mention d'une possibilité de
révision à l'intérieur de toute décision de la
Régie.
Les articles 59, 60 et 125. Il s'agit du statut de producteur ou
d'acheteur. On sait que, dans le cadre de sentences arbitrales ou d'arguments
coopératifs, on passe allègrement d'un statut de producteur de
lait à un statut d'acheteur de lait. Il y a une confusion de statut qui
risque, je dirais, d'être embarrassante, à certains moments
donnés, parce qu'on ne peut pas savoir quel axe est
privilégié lors de représentations: les
intérêts des producteurs ou l'intérêt des entreprises
transformatrices. Je souligne à cet effet que s'il y a un danger de
conflit d'intérêts, à l'effet qu'un administrateur de plan
puisse être également administrateur d'une entreprise de
transformation, il m'apparait encore plus dangereux de permettre a des
entreprises, même coopératives, de pouvoir ainsi utiliser les deux
statuts. Je recommande donc un éclaircissement de ces dispositions par
une prise de position à l'effet qu'une entreprise de transformation, ou
un organisme intéressé dans . une entreprise de transformation,
ne puisse sous aucun prétexte gérer un plan conjoint. Je
recommande aussi une énonciation claire à l'effet qu'un organisme
ne puisse se représenter indifféremment sous deux statuts en tout
temps. Je recommande également l'abolition de l'article 125 qui
conserve, par son existence, la possibilité de revenir à une
confusion de statuts déplorable.
Brièvement, la création de chambres de coordination me
semble inopportune dans l'état actuel des choses. Je m'excuse de le
dire.
Au niveau du lait - parce que j'ai mentionné que je ne parlais
que du marché laitier - les chambres de coordination vont être
formées d'intervenants qui sont déjà sur le marché.
Je pense aux coopératives, au Conseil de l'industrie laitière,
à la Fédération. Or, on sait qu'il y a de grandes
difficultés de négociations, même aujourd'hui, entre ces
divers organismes-là. Tout ce que ça crée, à mon
avis, dans le marché laitier, c'est simplement un intervenant
supplémentaire qui va avoir lui aussi un pouvoir de
représentation auprès de la Régie en cas d'audience. Donc,
on verra les coopératives et, ensuite, on verra la chambre de
coordination. Ça me semble dédoubler les intervenants. Qui plus
est, c'est payé par les producteurs. Et je crois que, pour régler
un problème très spécifique, il y aurait peut-être
lieu d'utiliser un comité temporaire, en termes de coûts et de
paiements de la part des producteurs.
Les pouvoirs de la chambre me semblent flous: entre autres, le pouvoir
de représentation auprès de la Régie. Je serais assez
curieuse, je ne sais pas, je m'interroge, de savoir s'il y a des pouvoirs
décisionnels à cette chambre-là. Parce qu'on voit, entre
autres, des articles qui disent que la Régie peut suspendre une
décision de la chambre, par exemple. Or, quelle décision de la
chambre peut-elle suspendre, si c'est un organisme sans pouvoir
décisionnel? La répartition des voix ne devrait pas être
laissée aux intervenants, si une telle chambre est établie. On
sait que les coopératives, entre autres, ont toujours voulu avoir le
plus grand pouvoir de représentation, et elles ont certainement la
capacité d'essayer de l'imposer au niveau d'une chambre.
Dans les circonstances, je recommande prioritairement l'abolition de la
section relative à la création de chambres, de façon
à simplifier le
fonctionnement de la mise en marché, plutôt qu'à
l'alourdir. Dans le cas du maintien de cette section de la loi, malgré
les coûts impliqués, je recommanderais de clarifier les articles
flous, de façon à ne conserver à la chambre que des
pouvoirs de recherche, de développement et de marketing, sans pouvoir
effectif de représentation. Et enfin, dans cette situation de maintien,
il y aurait lieu de prévoir immédiatement la répartition
des votes ou une méthode juste et équitable de
répartition, de façon à éviter une prise de
contrôle d'une chambre par un organisme. J'ai presque terminé.
Alors, H s'agissait d'un article qui donne un pouvoir de prohibition
â un office. Je recommande d'enlever tout pouvoir de prohibition et de
donner une chance aux forces du marché de jouer favorablement. La
Régie doit conserver, dans l'intérêt public,
l'intégrité de son pouvoir d'émission de permis. Qui plus
est, il demeure toujours l'interrogation à savoir si une
coopérative pourrait gérer un plan conjoint ou exercer le
rôle d'un office. Si tel était le cas et qu'il y avait un pouvoir
de prohibition, on risquerait de donner quand même à des
entreprises transformatrices le droit de s'opposer absolument.
Enfin, l'article 33, qui est le dernier dont je parlerai. Je mentionne
simplement que le critère d'intérêt public en
matière d'émission des permis doit demeurer et qu'il doit
être explicité dans le sens de la considération
indéfectible des besoins des consommateurs plutôt que d'en
arriver, je dirais, à une considération qui est beaucoup plus
d'ordre économique: le secteur d'activité, les conditions
d'approvisionnement en lait, etc. Et je pense qu'il faut privilégier
l'intérêt des consommateurs et des producteurs plutôt que la
considération économique et la rentabilité des
entreprises.
Aussi, je recommande la prise en considération prioritaire de la
satisfaction des besoins de la population en produits laitiers frais et
périssables, le tout, tel que le voudrait un système
théorique de l'approvisionnement en lait.
Le critère de l'intérêt public doit demeurer et
même être explicité dans le sens de la considération
indéfectible des besoins des consommateurs. Toute la population
consommatrice d'un produit essentiel doit se voir accorder la priorité
sur les besoins des entreprises commerciales qui la desservent. Et ça
continue... (22 h 15)
Le Président (M. Richard): Mme Olivier, on a
extensionné les quatre minutes...
Mme Olivier: Oui.
Le Président (M. Richard): C'était fort
intéressant, par contre. M. le ministre, vous avez des questions pour
Mme Olivier?
M. Pagé: Commentaires, M. le Président. Je voudrais
remercier sincèrement Mme Olivier de sa patience. Elle a passé la
journée ici avec nous. C'est Un témoignage très
intéressant que vous formulez. Très intéressant.
D'ailleurs, parce que vous m'aviez envoyé littéralement un
mémoire, il me semble, en janvier, je vous avais invitée à
venir saisir les membres de la commission d'une problématique
vécue par une personne qui, un matin, décide de développer
la fabrication de fromage, enfin, tout ce que vous avez vécu. Je n'ai
pas l'intention de traiter du problème très spécifique que
vous avez vécu, vous le comprenez. Je crois que vous êtes
avocate...
Mme Olivier: Oui.
M. Pagé: ...vous avez suivi un cours de droit. Vous
comprendrez très certainement qu'il n'est pas question pour le ministre
de commenter une situation de fait qui a débouché sur une
problématique de droit où vous êtes actuellement devant les
tribunaux..
Mme Olivier: Oui.
M. Pagé: ...pour demander aux tribunaux de revoir les
décisions prises par la Régie des marchés agricoles du
Québec. D'autant plus que je suis le ministre responsable. Je ne peux
donc pas commenter.
Cependant, je trouve ça sain que, dans un monde où - il ne
faut pas se faire de cachettes - la gestion des produits laitiers s'appuie sur
des conventions, sur des décisions, etc. où les joueurs en
présence sont, d'une part, la coopération laitière - des
organismes très bien structurés, très bien
organisés, etc. - le Conseil de l'industrie laitière qui lui
aussi, est très bien organisé, très bien structuré,
et, d'autre part, les producteurs laitiers, par une Fédération
qui veille à l'intérêt de ses membres.
Vous mettez en relief le problème que vous avez vécu. Je
dois vous dire que, dans le cas du cheddar frais, je suis bien conscient du
problème, si je peux utiliser le terme. Et c'est d'ailleurs dans ce
sens-là que le 8 février dernier, j'ai formulé
personnellement des propositions à l'ensemble des intervenants. C'est
public. Il y a eu pas mal de dualité et d'affrontement entre le Conseil
de l'industrie, la Fédération et le Conseil de la
coopération laitière au Québec. J'ai proposé aux
trois groupes en présence des avenues de solution dont selon une, entre
autres, je leur demandais d'étudier la possibilité de mettre en
place, dans les conventions, une nouvelle classification spécifique au
cheddar, compte tenu des prévisions d'augmentation de consommation
d'environ, quoi?, 2,9 %. Ce qui aurait permis de sortir le cheddar de la classe
des poudres de lait et du beurre.
Deuxièmement, ce que vous venez nous dire aujourd'hui, c'est que
malgré tous ces beaux systèmes, une entreprise privée qui
a l'intention
non pas de vendre des produits à l'échelle mondiale et de
bousculer le marché traditionnel détenu par des "majors", une
entreprise devrait, au niveau local, pouvoir recevoir les volumes de lait
nécessaires à se développer dans le marché local et
le marché institutionnel...
Mme Olivier: Oui.
M. Pagé: ...tel que vous vous y êtes
référé. Je suis persuadé que l'ensemble des
collègues des deux côtés de la table sont très
sensibles au témoignage que vous nous avez livré et qu'on aura
peut-être l'occasion d'y revenir sans évidemment, toutefois, que
je veuille me référer au litige judiciaire...
Mme Olivier: Oui.
M. Pagé: ...que vous avez avec la Régie.
Très rapidement, des commentaires. Vous dites, à l'article
1: II faudrait que les consommateurs soient présents à la
Régie des marchés agricoles.
Mme Olivier: Oui.
M. Pagé: Je peux vous indiquer qu'une des recommandations
des membres du comité qui a étudié... D'ailleurs, vous
aviez été entendue. Vous les aviez rencontrés. Vous
aviez...
Mme Olivier: La Fédération des associations...
M. Pagé: Non, non, le comité qui a
siégé en 19... Non, O.K.
Mme Olivier: Non.
M. Pagé: Vous m'avez indiqué que les consommateurs
devraient être représentés.
Mme Olivier: Oui.
M. Pagé: Une des recommandations du comité qui a
travaillé là-dessus, pendant un an et demi est à l'effet
que les membres de la Régie, contrairement à la coutume ou
à la tradition, ne soient plus des gens qui aient été soit
dans la production, soit dans le milieu coopératif ou syndical, etc.
Vous dites: II faudrait un représentant des consommateurs. Je peux vous
dire ce soir, sans que ce soit interprété comme étant un
avis de licenciement des commissaires actuels ou des régisseurs actuels,
que mon intention, comme ministre, est de recommander au gouvernement que les
membres qui auront à assumer, dans l'avenir, les fonctions de
commissiaires ou de régisseurs à la Régie ne soient plus,
entre guillemets, de ces représentants des secteurs.
Assez curieusement, là où je voyais et je vois, entre
autres, les consommateurs, c'est particulièrement au niveau des chambres
de coordination. Cependant, vous ne semblez pas en vouloir, entre autres, dans
le lait.
Mme Olivier: J'ai parlé strictement du lait,
remarquez.
M. Pagé: O.K. Pour le lait, je comprends très bien,
madame, qu'avec ce que j'appelle cette dualité, fa dualité dans
l'industrie laitière que je vis depuis bientôt cinq ans que je
suis ministre, et je pense que je ne parodie pas en disant que, chaque automne,
il y a du tiraillage dans le lait. Ça coïncide toujours avec
l'ouverture de la Ligue nationale de hockey et, chaque printemps, au
début des éliminatoires, ça se tiraille encore dans le
lait, et, généralement, ça débouche sur des
décisions de la Régie parce que, la Régie, il faut qu'elle
prenne ses responsabilités, et elle les prend bien, selon moi.
Je comprends que, dans le lait, au lendemain de la prochaine entente que
je souhaite ardemment, et je dois vous dire que ça évolue et que
ça a évolué depuis le 8 février, j'ai l'impression
que les poignées de mains ne seront pas accompagnées de petits
becs. Je n'ai pas l'impression qu'ils vont se battre à la porte du
ministère pour aller former un comité de coordination et de
développement, une chambre de coordination et de développement.
Ça va venir. Mais une chose est certaine dans mon esprit à moi:
les consommateurs auront leur place dans ces chambres de coordination. Parce
que c'est une dynamique qu'on veut créer, entre autres, pour que
l'industrie et l'ensemble des intervenants tiennent compte des besoins
évolutifs spécifiques et particuliers des consommateurs.
Le privilège de l'article 2, je note votre commentaire. Il faut
bien avoir à l'esprit que cet article-là a été
écrit à une époque où les coopératives
n'avaient pas la taille qu'elles ont aujourd'hui. On se référait,
en 1956 et au début des années soixante, davantage à des
coopératives locales. On avait, dans presque chacun des villages
québécois, notre coopérative, notre beurrerie, etc. Vous
savez, les problèmes ne sont pas nouveaux...
Mme Olivier: Non.
M. Pagé: ...entre le monde syndical et le monde
coopératif parce que, si vous fouillez et que vous allez chercher la
thématique du congrès des agronomes du Québec, en 1950,
congrès tenu au Château Frontenac de Québec, la
thématique du congrès était "Syndicalisme agricole,
coopéra-tisme agricole, dualité ou
complémentarité". Et, 40 ans plus tard, ce sont sensiblement les
mêmes questions.
Mme Olivier: Oui.
M. Pagé: Pourquoi le législateur a-t-il fait
ça en 1956? C'est très simple, c'est que le monde agricole, le
monde syndical, le syndicalisme agricole était en train de se
bâtir, de s'élaborer et que le législateur ne voulait pas
que le monde se pHe sur les pieds au niveau des campagnes du Québec. On
a tenté de le réactualiser au mieux, mais je vous dirai que ce
n'est peut-être pas la perfection juridique, en termes d'écriture,
de la part du législateur, ça, j'en suis bien conscient.
Sauf que, de la façon dont il a été écrit,
avec ses désavantages, comme je le disais ce matin, ça a
constitué un frein. Je pense que ça a très bien
été évoqué, ce soir, par M. Laroche. M. Laroche
dit: Pourquoi est-ce que, nous autres, on y tient? Et pourquoi est-ce que les
autres veulent l'abolir? Moi, j'en conclus que c'est parce que les deux en ont
peur, parce que les deux craignent l'interprétation qui pourrait
être donnée, si jamais ça allait en Cour suprême,
l'interprétation qui pourrait être donnée par les
tribunaux.
Cela dit, je note votre commentaire et je note, de plus, que vous nous
appuyez dans notre volonté concernant les articles 60 et suivants,
l'administrateur d'un plan conjoint qui pourrait, en même temps,
siéger comme administrateur d'une entreprise de transformation. Somme
toute, je vous remercie beaucoup de votre visite. J'apprécie le
témoignage bien individuel mais très évocateur de la
dimension des problèmes qu'une entreprise québécoise peut
rencontrer, même si elle a un marché, lorsqu'elle veut se
développer. Et comme on a des représentants autant du monde
syndical que du monde coopératif, je suis persuadé qu'ils auront
été, eux aussi, attentifs et peut-être même un peu
sensibles aux préoccupations de l'honorable citoyenne du Québec
que vous êtes.
Mme Olivier: Je vous remercie.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Art habaska.
M. Baril: Oui. M. le Président. Je pense que, depuis ce
matin, c'est l'un des mémoires, pour ne pas dire le mémoire, le
plus articulé. Je pense que c'est tout à votre honneur.
Probablement que, s'il est si articulé, c'est à cause d'un cas
vécu, votre cas à vous que vous avez vécu qui vous a
permis de connaître toutes les faiblesses ou les forces de la loi
actuelle. C'est à partir souvent de cas vécus que chaque citoyen
et citoyenne peut évidemment faire valoir le mieux ses droits. Mais,
à vous entendre et en prenant connaissance de votre mémoire, vous
ne semblez absolument pas être contre la formule des plans conjoints
qu'on connaît actuellement dans le lait.
Mme Olivier: Je ne suis pas contre la formule des plans
conjoints. Moi, en fait, ce que je soutiens et dans tous les documents que j'ai
pu produire, c'est que le plan conjoint est administré par la
Fédération des producteurs de lait et la Fédération
doit diriger le lait dans les classes les plus rentables pour les producteurs
et qui desservent prioritairement les consommateurs en produits frais et
périssables. Et où je m'oppose plutôt, c'est lorsque je
vois que, depuis des années, des coopératives tentent de
s'approprier ce pouvoir en se justifiant, je dirais, de contrats individuels
d'achat-vente et qu'ainsi elles s'opposent à l'organisme
représentatif des producteurs et qu'eux-mêmes ont voté pour
lui concéder ces pouvoirs-là. Alors, c'est cette lutte que je
trouve un peu inadmissible. Je dirais plus clairement que j'aimerais que les
coopératives se rangent. Elles représentent des entreprises de
transformation, mais, si tel est le cas, elles ne représentent plus les
producteurs. Parce que de concentrer dans les mêmes entreprises les deux
statuts, qu'est-ce qui arrive d'une négociation saine et valable? En cas
de négociation, est-ce que l'entreprise qui négocie avec
elle-même va choisir le meilleur revenu des producteurs ou est-ce qu'elle
va choisir la meilleure rentabilité de son entreprise? Je dis: C'est
impossible de concentrer les deux statuts dans un seul et même organisme
car, à ce moment-là, il y a sous-représentation de
ceux-là même qu'elle dit représenter.
M. Baril: Dans le marché que vous vouliez combler, le
marché local...
Mme Olivier: Oui.
M. Baril: ...comment se fait-il que les entreprises existantes ne
pouvaient pas combler ce marché-là? Est-ce à cause de
l'éloignement? Est-ce à cause de leur propre approvisionnement?
C'est dû à quoi?
Mme Olivier: Écoutez, il y avait peut-être une
question d'éloignement. L'entreprise qui est entrée sur le
marché par la suite, c'est une entreprise qui est effectivement beaucoup
plus loin. Or, plus on éloigne la production du consommateur, plus
ça prend de temps à écouler le produit et moins il est
frais. Alors, moi, ce que j'envisageais, c'était une entreprise qui
était locale et dont la distribution serait effectuée même,
en majeure partie, par l'intermédiaire d'un bar laitier qui aurait
été connexe à l'entreprise. Donc, ses produits, c'est
vendu. Dans la seule région où on voulait s'établir, on
rejoignait, en dix minutes d'automobile là, une population de plus de 60
000 personnes. Alors là, c'était vraiment facile de pouvoir
distribuer de cette façon-là un produit frais et ça
permettait d'offrir une gamme, je dirais, de produits frais qui ne se
retrouvent qu'à une entreprise de production tel que le fromage en
"slab" par
exemple, le fromage non salé, des choses qu'on ne retrouve
pratiquement pas aux épiceries. Or, les consommateurs n'en ayant pas sur
les étagères, ils n'en achètent tout simplement pas. Et
c'est pour ça que je dis: Développez ce marché-là
et créez ce marché-là; réintégrez un produit
frais auprès des consommateurs. Ça permettrait fort probablement
d'écouler beaucoup plus de lait des producteurs dans ce
secteur-là, et je pense que ça assurerait une meilleure mise en
marché.
M. Baril: Est-ce que j'ai bien saisi? Tout à l'heure, vous
avez dit: Depuis, une autre compagnie a desservi là. Est-ce que, depuis
que vous vouliez établir la vôtre, maintenant ce secteur-là
est desservi par une autre? Est-ce ça?
Mme Olivier: Oui, une autre entreprise qui serait entrée
après les auditions.
M. Baril: Mais qui provient... Ce n'est pas une nouvelle, c'est
une entreprise existante qui fournit... (22 h 30)
Mme Olivier: C'est ça, c'est une entreprise existante qui
a commencé à distribuer dans le marché où on
voulait s'établir.
M. Baril: Donc, ça vous ferme la porte davantage.
Mme Olivier: Non, je ne croirais pas. Vous savez, pour
démarrer l'entreprise, il y avait ce marché local et
institutionnel, mais au niveau du développement de l'entreprise ou de la
croissance future, il y avait toujours lieu d'envisager le marché
montréalais parce qu'on était situés à peu
près à dix minutes du pont-tunnel. Donc, il y avait quand
même une possibilité d'écouler les produits frais sur le
marché montréalais.
M. Baril: Remarquez que je ne suis pas un spécialiste,
mais dans les produits que vous vous apprêtiez à mettre en
marché, est-ce qu'avec l'approvisionnement du lait que vous auriez
obtenu, vous auriez créé certains produits en surplus du
marché actuellement? Vous savez que, dans le lait, on peut faire tant de
beurre, tant de crème, je ne sais pas quoi, mais on ne peut pas tous
faire la même chose. Est-ce que vous auriez fini par créer, avec
des résidus, un produit, actuellement, qui est déjà en
surplus?
Mme Olivier: Avec les résidus du...
M. Baril: Avec les résidus du lait, avec les surplus,
quand on prend 100 livres de lait...
Mme Olivier: Oui.
M. Baril: ...c'est encore en livres, on fait tant de fromage,
tant de beurre, tant de poudre, etc. Il reste des résidus, mais
allez-vous être capable de tout les utiliser?
Mme Olivier: o.k. oui, ça, c'était prévu.
ce qui reste en très grosse quantité après une production
de fromage, c'est ce qui s'appelle le petit lait.
M. Baril: Oui.
Mme Olivier: Ça, ça doit effectivement être
écoulé. Il y avait des meuneries qui auraient envisagé la
possibilité de prendre ce petit lait. Et il y a toujours, aussi, un peu
de crème, et là, on voyait la possibilité de faire de la
crème glacée maison au bar laitier même, et c'aurait
été à partir de fruits frais, sans produits de
conservation. Donc, on voulait développer, au niveau de la population,
une marque de fraîcheur au niveau du fromage, mais aussi au niveau de la
crème glacée, si on avait pu en produire comme on voulait. Oui,
il n'y aurait pas eu de résidus, à ce moment-là.
M. Baril: Une dernière question. Vous avez parlé de
la chambre de coordination. Vous dites que vous n'en voyez pas la
nécessité parce que, entre autres, elle n'a pas de pouvoir. Si
cette chambre de coordination avait des pouvoirs, il faudrait qu'elle aille
chercher des pouvoirs à des organismes existants qui en ont
déjà. Croyez-vous que, si cette chambre de coordination là
avait des pouvoirs, vous seriez pour?
Mme Olivier: Je trouve dangereux de donner des pouvoirs à
un organisme qui, dans le fond, est composé de divers intervenants sur
le marché, donc des entreprises commerciales intéressées.
C'est dans ce sens-là que je trouve dangereux de donner des pouvoirs
quelconques. À la limite, si elle s'occupe de voir pour de nouveaux
débouchés, le marketing, peut-être, mais, à mon
avis, il ne faudrait pas qu'il y ait de pouvoir décisionnel. Or, dans le
projet de loi, je trouve qu'il y a un flou, je ne peux pas savoir si
l'organisme en question a ou non des pouvoirs. On semble dire que ce n'est
qu'un organisme de recommandation; par contre, dans un article
subséquent, on voit que la Régie peut suspendre des
décisions de la chambre. Alors, quelles décisions?
M. Baril: Je ne sais pas si le président me permettrait...
Vous faites mention aussi d'un droit d'appel sur les décisions de la
Régie, un droit d'appel à l'extérieur et à
l'intérieur. Quand vous parlez du droit d'appel, est-ce que c'est le
même droit d'appel au Conseil des ministres actuel?
Mme Olivier: S'il était vraiment exercé. Un droit
d'appel, que ce soit auprès du ministre, qu'on ait une procédure
pour le faire, mais qu'on puisse l'exercer parce que, effectivement, je
suis
consciente qu'actuellement, il y a un droit d'appel dans la loi, mais
qu'il n'est pas utilisé, je veux dire, on ne s'en sert pas. Moi, je dis
qu'un droit d'appel doit continuer d'exister pour permettre à un citoyen
ordinaire de ne pas se retrouver devant les tribunaux parce qu'on sait
qu'à ce moment-là, il n'y a personne qui va y aller, à tel
point qu'à ce sujet-là, je mentionne qu'il y a, actuellement,
pratiquement un monopole, et je vous mentionne le fait que j'ai porté
plainte en vertu de la loi sur la concurrence.
M. Baril: Puis le droit d'appel, dont vous pariez, à
l'intérieur de la Régie, ça serait une autre structure
à l'intérieur de la Régie?
Mme Olivier. Je crois que ce serait préférable que
ce soit aux instances gouvernementales, parce que ce sont les élus du
peuple, finalement, et je crois que c'est, je ne dirais pas eux, mais une
personne, peut-être déléguée par le ministre,
connaissant la question, qui pourrait étudier les dossiers. Mais ce que
je voudrais, ce serait un droit d'appel existant, mais surtout effectif et
qu'on peut utiliser.
M. Baril: Je vous remercie, Mme Olivier, d'être venue nous
présenter ce mémoire avec beaucoup de pertinence à la loi
sur la mise en marché. De notre côté, en tout cas, à
quelques occasions, sans doute, on va se référer à votre
mémoire pour se faire encore une meilleure idée de
l'élaboration de ce projet de loi.
Mme Olivier: Je vous remercie. Pourrais-je vous produire trois
documents que j'ai ici en main?
Le Président (M. Richard): Sûrement, madame.
Mme Olivier: Vous accepteriez?
Le Président (M. Richard): Vous pourrez les déposer
à la commission qui en fera distribution aux membres de la
commission.
Mme Olivier: Parfait.
Le Président (M. Richard): Absolument.
Mme Olivier: Je voulais simplement vous mentionner que ce sont
trois appuis que j'ai eus de syndicats de producteurs de laits
régionaux; et il y en a deux qui ne me sont pas parvenus à temps.
Alors, si vous voulez les consulter, je crois que ça peut vous
intéresser.
Le Président (M. Richard): Parfait. Merci. Alors, comme
mot final, M. le ministre, M. Middlemiss, vous avez un commentaire?
M. Middlemiss: Seulement dire à Mme
Olivier merci beaucoup pour votre présentation, aussi pour votre
grande patience: vous avez passé la journée ici. Je pense que
vous avez certainement sensibilisé les membres de la commission au
problème des gens qui veulent faire des choses et qui rencontrent des
obstacles.
D'un autre côté, je pense que le ministre a bien
expliqué qu'il y a des structures qui existent et qu'elles sont
là dans le meilleur intérêt de la production. Mais
peut-être qu'on pourra, un jour, trouver Un moyen de réussir
à satisfaire tout le monde, tout en utilisant de la meilleure
façon nos produits, et, dans votre cas, les produits laitiers. Merci
beaucoup.
Mme Olivier: Je vous remercie et je vous remercie tous de m'avoir
entendue.
Le Président (M. Richard): Merci beaucoup, madame. Merci,
madame, messieurs. Nous ajournons donc à demain matin, 10 heures, au
même endroit. Merci et bonne fin de soirée.
(Fin de la séance à 22 h 38)