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(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Garon): J'invite les
députés à gagner leurs sièges, les intervenants
à prendre leurs fauteuils, les représentants de la
Communauté urbaine, et je déclare la séance ouverte. Je
demanderais, tout d'abord à M. Michel Rivard, président du
comité exécutif de la Communauté urbaine de Québec,
de présenter les gens qui l'accompagnent, en lui disant qu'il dispose
d'une heure, c'est-à-dire 20 minutes, normalement, pour faire son
exposé, 20 minutes à la partie ministérielle, 20 à
l'Opposition. Ce que vous prenez en plus sera soustrait des deux partis, ce que
vous prenez en moins leur sera ajouté. Mais soyez bien libres.
Maintenant, avant de commencer, je vais demander s'il y a des
remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Carrier-Perreault
(Chutes-de-la-Chaudière) est remplacée par M. Bourdon
(Pointe-aux-Trembles), Mme Juneau (Johnson) par Mme Marois (Taillon). M. Lazure
(La Prairie) par M. Léonard (Labelle).
Le Président (M. Garon): À vous la parole, M.
Rivard.
Communauté urbaine de Québec
M. Rivard (Michel): Merci, M. le Président de la
commission. M. le ministre, messieurs - et j'ai vu des dames tantôt -
Mmes les députées, le mémoire dont je vais faire la
présentation aujourd'hui... Je voudrais avant, si vous me permettez,
présenter les gens qui m'accompagnent. À ma droite
immédiate, j'ai le maire de L'Ancienne-Lorette, M. Emile Loranger,
à mon extrême droite, M. Maurice Bergeron, directeur
général de la Communauté urbaine de Québec,
à ma gauche immédiate, M. Jean-Guy Kirouac, directeur du service
d'évaluation de la Communauté urbaine et, finalement, à
mon extrême gauche, Me Anne Sylvie Arteau, qui travaille au service du
contentieux de la CUQ.
Le mémoire dont je vais faire lecture... Vous savez que la
Communauté urbaine comme telle, si on ne parle pas de sa filiale, la
CTCUQ, est très peu touchée par la réforme, si ce n'est
les coûts additionnels dans l'évaluation. Mais, par contre, on a
décidé que ce serait la CUQ qui viendrait le faire au nom des
villes qui n'ont pas été invitées comme telles. En fait,
il n'y a que la ville de Québec parmi les 13 villes de la
Communauté qui a eu l'occasion de déposer un mémoire.
M. le Président, si vous permettez, je voudrais peut-être
attendre la présence à la table du ministre concerné.
alors, m. ryan arrive. je vais débuter ma présentation, si vous
permettez.
Le Président (M. Garon): Ceux qui veulent faire des
palabres, allez en arrière dans les corridors, parce que si on veut
écouter ce que les gens veulent dire... Ceux qui ne veulent pas
écouter les délibérations dans la salle, il y a des
corridors pour faire des discussions. Je ne dis pas qu'on est dans un
séminaire où on a fait l'engagement de ne pas dire un mot, mais
entre dire un mot à son voisin et engager des conversations... C'est
parce que ça nuit au bon entendement des interlocuteurs.
M. Rivard (Michel): Merci, M. le Président. Alors,
créée le 23 décembre 1969 par une loi de
l'Assemblée nationale, la Communauté urbaine de Québec
regroupe 13 municipalités de la rive nord du Saint-Laurent, soit
Beauport, Cap-Rouge, Charlesbourg, Lac-Saint-Charles, L'Ancienne-Lorette,
Loretteville, Québec, Saint-Augustin-de-Desmaures, Saint-Emile,
Sainte-Foy, Sillery, Val-Bélair et Vanier.
La CUQ a pour mandat la confection et la mise à jour des
rôles d'évaluation, le traitement des données, l'accueil et
la promotion touristiques, l'aménagement du territoire, la protection de
l'environnement, plus particulièrement, l'assainissement des eaux et la
gestion des déchets solides. De plus, elle assume le transport en commun
via sa Commission de transport appelée CTCUQ.
Le budget 1991 de la Communauté, qui compte environ 250
employés, s'élève à 104 000 000 $. Les
municipalités défraient environ 60 % de ces dépenses. La
très grande proportion des autres 40 % étant surtout
constituée de subventions relatives à la construction de deux
stations de traitement des eaux usées dont la mise en route est
prévue pour juin 1992. Selon le dernier décret provincial, la
population habitant le territoire de la CUQ se chiffre à 488 060
personnes. Ensemble, les municipalités membres de la CUQ ont un
potentiel fiscal de 22 700 000 000 $ et leurs budgets 1991 réunis se
chiffrent à près de 800 000 000 $.
Le projet de loi 145 signifie le désengagement de l'État
dans trois grands secteurs: la voirie locale, les services de police et le
transport en commun. Québec désire ainsi refiler les factures aux
municipalités selon le principe de l'uti-lisateur-payeur, où tout
ce qui est près du niveau municipal ou local doit être payé
par ce même niveau municipal.
Pour combler ce manque à gagner, le
gouvernement propose de nouvelles sources de revenus, notamment
l'imposition d'une surtaxe sur le secteur non résidentiel ou d'une taxe
sur le stationnement. En revanche, le même gouvernement réduit ses
"en lieu" de taxes redevables aux municipalités.
Sur le territoire de la Communauté urbaine de Québec,
certaines villes membres sont affectées par ce projet de loi.
Tantôt, il s'agit de la voirie locale, tantôt des services de
police, parfois les deux. Pour sa part, la Communauté urbaine de
Québec n'est donc pas affectée directement par le projet, si ce
n'est pour le transport en commun. Douze de ses villes membres sont
également touchées à ce chapitre.
Sur l'aspect transport en commun, nous avons laissé le
président de la CTCUQ exposer aux membres de cette commission les
impacts et les méfaits du projet Ryan. Disons simplement que les villes
membres de la CUQ desservies par le transport en commun devront combler un trou
de 20 000 000 $ suite au désengagement de l'État, une somme qui
représente environ le quart de son budget annuel d'opération en
supposant, bien sûr, un même niveau de service.
Indirectement touchée par le projet de réforme, la CUQ
n'en supportera pas moins les contrecoups. Parce que ses villes membres
souffriront d'un manque à gagner, certains projets à
caractère régional pourraient être retardés, voire
compromis.
Son aménagement, son développement subiront ainsi de
nouvelles contraintes que les nouvelles sources de revenus ne permettront pas
de corriger. Nouvelles sources de revenus qui comportent d'ailleurs beaucoup
d'interrogations et sur lesquelles nous reviendrons un peu plus loin.
L'important, ici, est de faire savoir au gouvernement du Québec
que la Communauté urbaine de Québec affirme sa solidarité
à l'ensemble du monde municipal. La CUQ dénonce aussi avec
vigueur le projet de transfert de responsabilités aux
municipalités, un projet qui consiste simplement en une opération
de pel-letage de factures, mais qu'on qualifie pompeusement de réforme
et que l'on masque sous le couvert de la décentralisation. Projet
improvisé qui ne démontre qu'une chose, le manque de vision du
gouvernement.
Le dictionnaire Larousse donne du mot "réforme" la
définition suivante: "changement opéré en vue d'une
amélioration". Si on transpose cette définition à la
volonté gouvernementale de transférer des factures de l'ordre de
400 000 000 $ aux municipalités, où se trouve
l'amélioration?
Dans la situation budgétaire du gouvernement peut-être?
Même pas. L'opération de délestage que contient le projet
de loi 145 s'accompagne ni d'une baisse d'impôt pour les contribuables,
ni d'une réduction d'effectifs ou de dépenses gouvernementales.
En fait, au lieu de donner l'exemple en faisant plus avec moins, le
gouvernement du Québec fait la démonstration qu'il entend faire
moins avec plus. Il ne fait que laisser payer par d'autres son manque de
rigueur et de vision.
Et justement, qui va payer pour ça? Les contribuables, bien
sûr. Eux aussi ne verront surtout pas leur situation s'améliorer.
Bien au contraire, les contribuables subiront soit une hausse de leurs taxes
foncières ou de services, soit une baisse de tarifs de services qu'ils
utilisent directement, soit une baisse de qualité de ces mêmes
services ou, encore, une combinaison des deux ou trois de ces
possibilités. Rien de réjouissant comme perspective.
Nous cherchons aussi l'amélioration dans le secteur non
résidentiel. Des centaines de petits commerçants
déjà amochés par les effets conjugués de la TPS, de
la récession sur leurs chiffres d'affaires, subiront ainsi un nouvel
assaut. Toute une amélioration lorsqu'on songe que dès l'an
prochain, plusieurs d'entre eux auront à faire face à la nouvelle
taxe de vente provinciale, la fameuse TVQ.
Changement opéré en vue d'une amélioration,
disions-nous. Mais où se trouve donc cette fameuse amélioration?
Sûrement pas dans les relations Québec-municipalités, en
tout cas. En utilisant de façon cavalière son pouvoir
tutélaire, le gouvernement du Québec a entaché pour
longtemps peut-être un partenariat qui fonctionnait fort bien depuis une
bonne décennie.
En traitant de façon aussi désinvolte les
municipalités, leurs élus, leurs contribuables, Québec a
détruit le respect mutuel qui existait entre nos deux niveaux de
gouvernement. Pourquoi? Pour qui? Simplement pour une politique à courte
vue. Au lieu de s'asseoir et de négocier dans un cadre structuré
et global, il a préféré l'affrontement. Il en portera
l'odieux pendant longtemps.
Mais quelle amélioration ce semblant de réforme
apporte-t-elle donc? À notre avis, il n'y en a aucune, si ce n'est de
permettre au gouvernement de refiler des hausses de taxes sans en porter
l'odieux, si ce n'est d'essayer de refiler en partie au gouvernement
fédéral une partie de son déficit. Gouvernement
fédéral dont on s'empresse pourtant de dénoncer les
pratiques lorsqu'il sert la même médecine qu'on veut faire avaler
aux contribuables et à leurs représentants municipaux.
Québec ne démontre qu'une chose: Faites ce que je dis, mais ne
faites pas ce que je fais.
En tout cas, ça a été emballé,
enveloppé sous le couvert de beaux principes comme celui de
l'utilisateur-payeur, principes qu'on se hâte de bafouer dès que
cela fait son affaire et pas besoin de chercher bien loin pour trouver des
exemples. La supposée réforme en contient.
En réduisant ses "en lieu" de taxes pour les écoles
primaires et secondaires, Québec en fait la démonstration. Comme
si les écoles avaient moins besoin de services tout d'un coup, comme
si les coûts de ces services municipaux n'étaient pas
sujets à l'inflation, inflation due en grande partie justement aux
actions des gouvernements supérieurs.
L'un des arguments les plus entendus en faveur du projet de loi 145 est
la nécessité d'une décentralisation des pouvoirs du
provincial vers les municipalités.
À l'instar de l'ensemble du monde municipal, nous convenons aussi
de la nécessité d'une décentralisation. Le Québec a
changé, a évolué. Les municipalités ont pris leurs
responsabilités. Au tour du gouvernement de prendre les siennes. Au lieu
de tenter de maquiller, de camoufler en prétendue
décentralisation son opération de délestage, qu'il amorce
plutôt un véritable processus.
Parce qu'elle suppose des changements, qu'elle entraîne des
coûts sociaux et monétaires, une décentralisation
s'accompagne habituellement de négociations entre les partenaires. On y
évalue alors la situation dans son ensemble; on y définit de
façon la plus claire possible les rôles de chacun. On fixe un
échéancier. On détermine les coûts et la
façon de les assumer. Rien de tout ça n'a été fait.
Pourquoi? Tout simplement parce que Québec a décidé
d'imposer ses volontés, elles-mêmes dictées par la
nécessité de réduire ses dépenses et son
déficit. D'ailleurs, quels pouvoirs obtiennent donc les
municipalités dans cette supposée décentralisation? Nous
répondons sans hésiter: Aucun. Nous le répétons, il
s'agit seulement d'un transfert de factures. De factures et de
problèmes. Pourtant et comme l'ont maintes fois réclamé
les représentants du monde municipal, un sain dialogue aurait pu
s'instaurer, dialogue qui aurait permis de faire le tour de l'ensemble de la
question, le tout dans un cadre structuré.
Nous disions à l'instant que le Québec a changé,
évolué. Le monde municipal a aussi changé. Il jouit
aujourd'hui d'une relative autonomie financière, autour de 85 %, ce
à quoi aucun autre palier de gouvernement ne peut prétendre. Ce
même monde municipal reconnaît qu'il y aurait lieu de s'asseoir et
de discuter de la question dans son ensemble.
Et si on applique le principe mis de l'avant par le gouvernement du
Québec, à savoir que tout ce qui touche au niveau local doit
être payé par ce même niveau local, alors pourquoi ne pas
inclure dans les discussions, la santé, l'éducation,
l'environnement, la culture?
Personne ne peut évidemment prévoir les résultats
d'un tel exercice. Il aurait cependant l'avantage d'envisager la situation dans
son ensemble plutôt que de tenter les choses au compte-gouttes comme veut
le faire le Québec. Cela nécessiterait plus de temps, bien
sûr, mais où est le caractère urgent de procéder
dès maintenant? Tout ça démontre seulement l'absence de
vision et le caractère improvisé, de cette prétendue
réforme.
Entre autres significations du mot "vision", le Larousse donne
celle-ci: "Le fait de voir ou de se représenter quelque chose". Alors,
posons-nous la question: Que voit le gouvernement du Québec dans cette
opération? En fait, il ne voit rien ou, plutôt, il n'y voit que
l'aspect comptable de la chose. Pressé de se départir d'une
partie de son déficit dû à son manque de rigueur,
Québec ne voit et n'entrevoit pas les conséquences de son geste.
Pourtant, celui-ci aura une grande influence sur l'étalement urbain dont
bien des villes et des régions. La nôtre en particulier subit
déjà les méfaits.
En se dégageant du transport en commun, par exemple, à
l'instar de Terre-Neuve - ce n'est pas un bel exemple à citer -
Québec privilégie ainsi l'auto comme moyen de transport
individuel. Il s'agit ici d'un choix de société avec tous les
effets que cela entraînera sur l'environnement, la qualité de vie
des gens.
Il ne faut pas se le cacher, le manque à gagner causé par
le désengagement gouvernemental freinera, pour ne pas dire stoppera,
l'amélioration et le développement du transport en commun. Il
conduira aussi à coup sûr à une réduction du
service. Et c'est bien connu, moins il y a de service et moins il y a de
passagers ou d'utilisateurs. Donc plus de gens sur les routes, matin et soir,
augmentant d'autant les coûts de voirie, de surveillance et ainsi de
suite.
Le pire est que, parallèlement à son désengagement
dans le transport en commun, Québec continue de subventionner le
stationnement de ses fonctionnaires. Une somme que nous estimons à
près de 8 000 000 $ sur notre seul territoire. On ne semble pas avoir de
vision globale de la situation. Tout semble géré à la
pièce et en fonction du court terme. Et je rappelle, pour les gens qui
étaient ici hier soir, la CTCUQ a parlé longuement des
subventions au stationnement des fonctionnaires.
L'un des reproches formulés les plus entendus contre le projet de
loi 145 est son caractère improvisé. Nous appuyons
entièrement ce point de vue. Le projet de réforme comporte, en
effet, inconnus et zones grises. Ainsi, en matière de voirie, personne
et même pas le gouvernement ne sait dans quel état se trouvent les
kilomètres de route qu'il s'apprête à céder aux
municipalités.
En matière de police, le projet n'indique aucunement comment
seront partagés les coûts de la police judiciaire, par exemple,
pas plus qu'il n'indique si les municipalités auront la
possibilité de se départir de leur corps de police en
échange d'une tarification pour les services de la Sûreté
du Québec.
En transport en commun, le provincial, en se désengageant, vient
renier ses propres efforts des 15 dernières années. Combien de
centaines de millions de dollars a-t-il investis pour les abandonner
maintenant? Le projet de loi 145 sent aussi l'improvisation en ce qui concerne
la
fixation des taux pour la surtaxe imposée au secteur non
résidentiel ou pour les taux de taxation relatifs au stationnement. Sur
le projet actuel, les municipalités détermineront ces taux; bref,
un beau fouillis en perspective qui ne favorisera que la concurrence entre les
municipalités d'un même territoire.
Pourquoi ne pas inclure dans le projet de loi que les communautés
urbaines et les MRC puissent fixer ces taux pour les municipalités
membres? À la CUQ, les corporations municipales ont d'ailleurs
identifié leur accord à cette amélioration au projet de
loi. Ce que je dois vous dire, toutefois, c'est que lors du dernier
comité exécutif, il y a eu une discussion de fond et, cette
semaine, deux villes m'ont fait part de leur désaccord, soit la ville de
Vanier et Cap-Rouge et la ville de Sainte-Foy m'a fait part hier, par fax,
qu'elle n'avait pas arrêté sa décision pour voir si elle
appuyait cette suggestion, que ce soit la région ou que ce soit les
villes individuelles.
Autre point, et celui-ci milite en faveur du principe utilisateur-payeur
si cher au gouvernement du Québec: Pourquoi les commissions scolaires ne
paieraient-elles pas pour les coûts de confection des rôles
d'évaluation? Et ici, c'est très important. La CUQ dépense
6 200 000 $ par année pour son service d'évaluation pour la
préparation, la mise à jour des rôles d'évaluation
pour défendre ses évaluations devant le BREF et, ceci est un
outil qui sert également aux commissions scolaires. Après tout,
elles utilisent les rôles défrayés par les
municipalités pour percevoir leurs taxes.
Il nous semble que le gouvernement du Québec aurait ainsi une
belle occasion de faire mentir la croyance populaire qui veut qu'il soit du
genre: Faites ce que je dis, mais ne faites pas ce que je fais.
Ces derniers démontrent bien le caractère improvisé
de toute cette opération. Alors, au lieu de faire adopter à la
vapeur un projet de loi qui fait l'unanimité contre lui, pourquoi ne le
retire-t-il pas du feuilleton de l'Assemblée? Pourquoi ne reprendrait-il
pas le dialogue avec le monde municipal afin de réaliser une
véritable décentralisation articulée et acceptée de
tous?
En conclusion, nous ne nous faisons guère d'illusions quant
à l'issue de cet exercice. Depuis le début, le gouvernement du
Québec ne désire qu'une chose: se délester d'une partie de
son déficit. Le reste n'est, selon lui, que débat inutile, que
tentatives du monde municipal pour ne pas accepter son projet de réforme
et la décentralisation proposée, réforme qui n'en est pas
une et décentralisation de mots seulement.
Voilà donc pourquoi nous réitérons notre opposition
au projet de loi 145 qui ne fera qu'alourdir le fardeau fiscal des
contribuables québécois, fardeau fiscal que le gouvernement
devrait recalculer. Contrairement à ses prétentions, en effet, il
n'existe pas d'écart de 17 % favorable au Québec par rapport
à l'Ontario. Cet écart, quant à la taxation de la richesse
foncière, est plutôt de l'ordre de 11,7 % favorable aux Ontariens.
Autrement dit, le gouvernement a fait une erreur de 28,7 %. Et j'attire votre
attention sur le fait que c'est un document qui a été produit
déjà par l'Union des municipalités et qui s'intitulait
"Analyse comparative du fardeau fiscal local Québec-Ontario". Mais quand
on improvise, il faut s'attendre à ce genre de chose.
En conséquence, nous vous demandons de retirer ce projet de loi
improvisé et de le remplacer par un dialogue avec le monde municipal. Ce
dialogue conduira, pour sa part, à un vrai projet structuré qui
risque de séduire l'ensemble des élus municipaux et leurs
électeurs. Je vous remercie, M. le Président, de votre
attention.
Le Président (M. Garon): Merci, M. Rivard. Maintenant, la
parole est au ministre.
M. Ryan: Oui. M. le président de la Communauté
urbaine de Québec, je vous remercie d'être venu nous rencontrer.
Votre discours avait plus l'allure d'un discours lors du débat sur le
principe du projet de loi à l'Assemblée nationale. Comme vous le
savez, l'Assemblée s'est prononcée sur le principe il y a trois
jours. Je ne pense pas qu'elle reviendra sur sa décision. (10 h 30)
Comme l'essentiel de votre mémoire portait plutôt sur le
principe, je le commenterai très brièvement. On a eu amplement
l'occasion de s'expliquer là-dessus ces derniers temps.
Je voudrais tout d'abord réitérer comme un fait bien
établi l'écart dont nous avons parlé entre l'Ontario et le
Québec. J'ai beaucoup plus confiance à la méthode du
ministère des Finances qu'à la méthode fort sommaire de
l'Union des municipalités du Québec, laquelle s'appuyait
d'ailleurs sur des données que nous avons mises dans ses mains. Nous
avons expliqué ça en long et en large plus tôt, je ne veux
pas y revenir ce matin. Mais je réaffirme sans l'ombre d'aucune
hésitation qu'il existe des écarts dont nous avons parlé
antérieurement. Nous avons mis toute la documentation à la
disposition des intéressés et nous vous la fournirons si
ça vous intéresse d'approfondir cette question-là.
Au sujet du principe du projet de loi, je lisais un article dans Le
Devoir ce matin. De plus en plus, à mesure que la presse a pu
approfondir les implications des projets gouvernementaux, elle s'est rendu
compte qu'il y avait des implications très importantes. Elle s'est rendu
compte aussi que c'était beaucoup plus sensé que ça ne
pouvait en avoir l'air au premier regard. Je lisais dans Le Devoir ce
matin un nouvel article de Jean Francoeur intitulé "L'autobus
écrabouillé", un éditorial très bien fait, selon
l'habitude de l'auteur, un éditorialiste sérieux, consciencieux,
qui va toujours aux sources avant
de se prononcer. Il conclut son article comme ceci, M. Francoeur, ce
matin. "Les municipalités ont déjà la
responsabilité politique et administrative du transport en commun. Elles
déterminent le niveau des services offerts. Elles fixent les tarifs
à l'usager. Elles négocient les contrats de travail de leurs
employés. Ce n'est que logique qu'elles en assument également la
responsabilité fiscale."
Ce n'est pas nous qui avons parlé de réforme. Je suis le
moins réformiste de tous les membres du gouvernement, peut-être.
Mais quand II y a un redressement qui s'Impose, on n'a pas peur de le mettre en
oeuvre. Peut-être pas une réforme, mais un certain redressement,
dans le sens d'une meilleure discipline, une meilleure cohérence dans le
partage des responsabilités, du poids, oui. Une réforme
complète? Ça viendra plus tard et on est prêt à la
travailler avec vous autres. On l'a dit à maintes reprises et on va le
répéter, tant que nous n'aurons pas repris le travail en commun
autour d'un grand nombre de problèmes qui sont vraiment
d'intérêt commun pour nous.
J'attendais surtout de votre mémoire, M. Rivard, des propositions
visant l'amélioration du projet de loi 145. J'en al trouvé une
exactement, dans tout le contenu du mémoire. C'est celle que nous avons
discuté hier soir avec la CTCUQ, concernant l'établissement d'un
taux régional de taxation. Pardon?
M. Rivard (Michel): Me permettez-vous un commentaire, M. le
ministre? Est-ce que M. le Président me permet un commentaire sur ce que
vous venez de dire?
M. Ryan: Ce n'est pas supposé, mais ça me fait
plaisir. Moi, ça me fait plaisir. Je consens volontiers si le
président n'a pas d'objection.
M. Rivard (Michel): C'est bien sûr qu'on ne voulait pas
qu'il y ait de la redondance avec la position de la CTCUQ hier qui a
déposé un rapport très technique. Et je me souviens
d'ailleurs, hier soir, les félicitations que vous aviez adressées
à l'organisme qui avait réellement fouillé sur, si on peut
appeler ça la plomberie du projet de loi. Moi, j'attire l'attention sur
trois points. C'est le stationnement des fonctionnaires qu'on a discuté
hier. Mais le point majeur que je ramène, ce matin, c'est de s'assurer
que la répartition des coûts, ça se décide au niveau
de la région, malgré la dissidence d'une ou deux villes du
territoire.
M. Ryan: Une chance qu'il y a cette proposition-là,
à la page 9 de votre mémoire, parce qu'autrement c'est un
mémoire entièrement négatif. Je pense que vous en
conviendrez avec moi.
M. Rivard (Michel): Ça serait difficile d'être
positif.
M. Ryan: Je poursuis ma réflexion à haute voix. En
ce qui touche l'institution d'un taux régional, j'ai fait part de mes
hésitations hier soir. Il s'agit d'un principe extrêmement
important. Si le gouvernement décide de confier à un corps
régional un pouvoir de taxation, ça serait une innovation qui n'a
pas été instituée jusqu'à maintenant. Je n'ose
vraiment pas m'aventurer dans cette voie avant d'avoir consacré quelques
mois à l'étude de ce problème. Par conséquent, il
n'y aura pas, à moins d'avis contraire, de modification au projet de loi
sur ce point précis. Cependant, tout ce que je pourrais faire pour
encourager les municipalités concernées à en venir
à un consensus dans une matière comme celle dont vous parlez, qui
pourrait donner le même résultat, serait très bien. Mais je
ne suis pas en mesure de proposer au gouvernement actuellement que 10
municipalités pourraient imposer à 2 municipalités un taux
de taxation sur leur territoire. Je ne suis pas encore prêt à
envisager cela. Je suis prêt à l'examiner, mais pas à
l'état de proposition au gouvernement, dans les deux ou trois jours qui
pourraient suivre. J'ai pris note de la suggestion, cependant.
En ce qui touche les fonctionnaires, je vous ai déjà dit
hier que nous examinons cette question. Nous en avons été saisis
à plusieurs reprises, au cours des dernières semaines. La CTCUQ,
hier soir, nous a fait une présentation saisissante de ce
dossier-là. Et soyez assurés que je vais l'aborder... Je l'ai
déjà abordé, d'ailleurs, avec le président du
Conseil du trésor, qui est responsable des négociations
collectives. Soyez assurés que nous allons le faire cheminer.
Maintenant, je voudrais vous demander, M. le président... Je
connais votre bienveillance foncière par-delà le caractère
plutôt négatif du mémoire de ce matin. Je connais votre
souci du bien public au sens le plus large du terme, embrassant aussi le bien
public de l'ensemble du Québec. Est-ce qu'il y aurait d'autres
éléments d'amélioration que vous verriez dans le projet de
loi que vous aimeriez porter à notre attention ce matin à
l'occasion de notre rencontre?
M. Rivard (Michel): Oui, effectivement, j'en ai fait une lecture
tantôt puis j'ai cru remarquer, à ce moment-là, que vous
étiez distrait, distrait dans le sens que vous vous adressiez à
quelqu'un d'autre, mais j'ai parlé - je ne me souviens pas à
quelle page - du fait que les commissions scolaires utilisent notre rôle
d'évaluation pour leur taxation. Si ce n'était que ça, on
pourrait dire que ça ne nous coûte pas plus cher. Mais si on
regarde ce qu'elles en font, c'est que lorsqu'un contribuable conteste son
évaluation, c'est nous qui assumons les coûts de défense et
le coût annuel du service d'évaluation à la
Communauté urbaine de Québec, c'est 6 200 000 $, c'est
récurrent, c'est à toutes les années et ça
gonfle avec l'inflation. Alors, s'il y avait une possibilité que,
dans la loi, ça soit à négocier avec les commissions
scolaires, mais qu'on puisse leur charger une partie des coûts pour les
défendre devant le bureau de révision, les mises à jour,
ça, je pense que ce serait très positif. Il me semble que
ça serait logique. On parle aujourd'hui que celui qui reçoit des
services doit en payer le coût et je ne vous cache pas que, sur le fond,
il n'y a pas grand monde qui peut discuter contre ce principe, mais il faudrait
l'appliquer à tout le monde. J'étais heureux hier quand vous avez
dit que le gouvernement serait soumis également à la taxe sur les
stationnements. Encore une fois, utilisateur-payeur. Pour les commissions
scolaires, il me semble qu'il devrait y avoir une contribution pour la
confection des rôles d'évaluation.
M. Ryan: J'ajoute juste un point à propos des commissions
scolaires. J'apprécie la précision que vous avez fournie quant
à ce que vous attendriez dans ce secteur-là. J'ai remarqué
souvent les interventions de type plutôt négatif de la part de
dirigeants municipaux à l'endroit du monde scolaire. Il faudrait bien
qu'on se rappelle une bonne fois qu'on est tous au service de la même
population puis, s'il y a un rôle d'évaluation, bien que les deux
corps puissent y avoir accès - ça, vous l'avez dit, je
l'apprécie hautement - sans qu'on commence à s'échanger
des factures. Il y a bien des services qu'on peut se rendre mutuellement. Vous
savez qu'en matière d'équipements récréatifs et
sportifs, par exemple, le gouvernement encourage de plus en plus les
commissions scolaires et les municipalités à échanger des
bons procédés. J'ai présidé, il y a quelques mois,
à la signature d'un protocole dans une municipalité importante
où la commission scolaire met tous ses équipements à la
disposition de la municipalité pour la somme de 1 $ par année et
la municipalité met ses équipements à la disposition de la
commission scolaire pour la somme de 1 $ par année. Je ne
prétends pas que ça devrait se répercuter partout, mais je
les ai félicités puis j'étais très heureux
d'être présent puis de leur dire: Si on marchait dans cet
esprit-là, ça nous reposerait donc du mercantilisme étroit
qui ne fait que pourrir les rapports au lieu de les améliorer. Mais, ce
que vous avez dit, quand il arrive des contestations concernant la taxation
scolaire, là, il faudrait examiner ça. Je suis prêt
à l'examiner avec mon collègue, le ministre de
l'Éducation, puis s'il y a quelque chose qui peut être fait,
peut-être qu'on fera une table éducation-affaires municipales pour
examiner ce problème-là puis essayer de trouver des
éléments de solution.
On a fait des améliorations considérables dans le projet
par rapport au point de départ. Ce n'était pas des choses qui
n'avaient pas du tout été entrevues, mais vous regardez pour la
Communauté urbaine de Québec, pour les munici- palités qui
en font partie, le solde à financer initial était de l'ordre de
26 000 000 $ puis là, il est plutôt de l'ordre de 12 000 000 $. On
vous fournira les statistiques là-dessus au cours des prochains jours
quand nous les aurons complètement mises à Jour. Mais iI y a un
allégement considérable en comparaison avec les données
initiales.
Alors, mon collègue, le député de Rimouski, aurait
peut-être une question à poser également à M. le
président, si vous le permettez.
Le Président (M. Garon): Ça va.
M. Tremblay (Rimouski): Oui, M. le Président. Voici, j'ai
lu le rapport et je m'aperçois que, finalement, vous mettez en doute la
qualité de la réforme. Vous dites même que ce n'est pas une
réforme, que ç'a été un projet
présenté d'une façon unilatérale et qui ne tient
pas compte des revendications des municipalités. Cependant, il faut bien
regarder tout l'historique de cette démarche et on ne peut dire qu'il
n'y a pas eu des consultations. Il y en a eu même... L'Union des
municipalités avait retenu les services du chef de l'Opposition, M.
Parizeau. et le rapport Parlzeau, nécessairement, était assez
éloquent à cet égard et proposait une réforme.
Finalement, c'est un peu une partie, dans le projet présentement qui est
devant vous, que l'on retrouve dans les recommandations du rapport Parlzeau.
Moi, ça m'Intrigue un peu la façon dont vous avez
présenté votre rapport, parce que vous ne semblez pas tenir
compte des besoins monétaires, si je peux m'exprimer ainsi, de la
province de Québec et vous semblez dire qu'on suit la même
démarche que le fédéral, le fédéral
transférant aux provinces et les provinces transférant aux
municipalités, et qu'on ne donne pas les moyens.
Bien au contraire, je pense qu'on vous donne les moyens. On vous fait un
transfert. Le transfert, il n'est peut-être pas de l'ampleur que vous
voulez le faire, mais on vous donne des moyens. On vous dit: Voici les places
où vous pourriez aller taxer. Alors, en plus de vous transférer
une responsabilité supplémentaire, on vous dit: Voici dans quel
champ de taxation, un champ de taxation élargi, vous pourriez aller.
Pour en arriver à la question, de quelle manière pensez-vous
qu'on aurait dû se prendre pour pouvoir arriver à une
véritable réforme si vous pensez que cette
réforme-là n'est pas une véritable réforme? C'est
quoi? Est-ce qu'on aurait pu s'attendre, par exemple, à ce que la
Communauté urbaine de Québec nous ait présenté une
réforme? Ou encore que les deux unions des municipalités nous
auraient présenté une réforme? C'est ce que nous
attendions depuis un certain temps, mais jamais ce n'est venu. Alors,
là, elle vient du gouvernement, elle est proposée, on en discute
et, finalement, on vous a donné toutes les chances voulues de vous
consulter. À
preuve, on est encore en commission parlementaire. Est-ce que ce n'est
pas suffisant, à mon sens, à partir d'un canevas de travail de
pouvoir essayer d'améliorer ça?
M. Rivard (Michel): écoutez, je vais vous répondre
par un exemple. la communauté urbaine de montréal est responsable
de la vérification des contrôles de qualité, de la
salubrité dans les restaurants, hôtels et pour l'alimentation et
quand elle a eu cette responsabilité, le gouvernement du québec
lui a donné la responsabilité ainsi que l'enveloppe
budgétaire. naturellement, avec la conjoncture économique que
nous vivons, je pense que la cum a accepté que les ententes
signées il y a quelques années soient maintenant revues à
la baisse et il y a un désengagement sur quelques années. il me
semble que le gouvernement du québec - on comprend aussi que la
situation économique est dure pour tout le monde - vous auriez pu
négocier avec nous un désengagement sur x années et non
pas arriver d'une façon brutale dans une seule année, imposer,
nous enlever toute la subvention au fonctionnement, qui représente 20
000 000 $. naturellement, vous nous permettez de retaxer. ce n'est pas
ça, un transfert. vous nous donnez la facture et vous dites: maintenant,
taxez pour aller la chercher. moi, ce que j'appelle une réforme ou un
scénario, on aurait pu vivre avec un désengagement sur x
années. ça peut se faire. à titre d'exemple, les
subventions, par exemple, aux immobilisations en transport. au début,
les autobus étaient payés, si ma mémoire est
fidèle, à 80 %. vous avez annoncé, ii y a quelques
années, que graduellement vous baissiez votre pourcentage. donc, on peut
augmenter graduellement le coût du transport. les villes en absorbent
plus. grâce à de nouvelles richesses foncières, les
nouveaux développements domiciliaires, on est capable de l'absorber.
mais là, ce n'est pas pareil, c'est du jour au lendemain. vous coupez
brutalement ce que vous donniez. alors, vous me demandez c'était quoi,
le scénario. c'aurait été: idéalement, vous
transférez l'argent comme on le faisait dans le passé et on
administrait, ou un désengagement progressif. c'a déjà
été fait, mais je ne voudrais pas... parce que, là, je
suis en train de penser que j'empiète sur votre temps, mais je peux vous
donner encore d'autres exemples où le gouvernement se désengage
d'une façon moins brutale qu'actuellement.
M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, je suis bien
content de constater que vous êtes favorable au désengagement.
Vous dites: O.K. Mais...
M. Rivard (Michel): Tout est dans la façon de le
faire.
M. Tremblay (Rimouski): ...tout est dans la manière de le
faire. La manière de le faire, on vous a donné des moyens pour
aller chercher de l'argent, d'une part, et on a étalé ça
sur deux ans, c'est-à-dire que ce n'est pas une réforme qui
s'applique d'une façon, disons, sauvage. Elle s'applique sur un espace
de deux années. Alors, je pense qu'il y a moyen de trouver des
accommodements en plus d'avoir des accommodements qu'on a déjà
consentis au niveau de la réforme qui était anticipée au
départ.
M. Gauvin: M. le Président, s'il vous plaît.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
(10 h 45)
M. Gauvin: M. Rivard, je vois ici... Il y a un passage que vous
mentionnez: Au niveau de la voirie locale, personne, même pas le
gouvernement, ne sait dans quel état se retrouvent les routes locales.
Je retrouve dans le mémoire de l'Union des municipalités
régionales de comté qu'eux autres spécifient très
clairement leur perception de la condition des routes assez
détaillée. Moi, je réagis à ça. C'est que
personne ne sait dans quel état les routes se trouvent. Les
contribuables du Québec, les municipalités surtout sont
conscientes. Elles connaissent très bien leurs routes, elles savent dans
quel état elles sont. Et c'est un peu suite à ça qu'il y a
une réaction. Et ça, je le concède. C'est qu'ils ont
constaté que les routes, depuis quelques années, n'avaient pas eu
le suivi approprié. C'est tout simplement un commentaire, une remarque.
Je ne sais pas sur quoi vous vous basez pour prétendre que les citoyens
ne connaissent pas la situation de leurs routes au niveau local.
M. Rivard (Michel): Écoutez, avec exactitude, pour savoir
dans quel état il est et comment ça va coûter pour le
remettre en état acceptable. Je pense que tout le monde constate qu'au
Québec, l'état routier est déplorable. C'est bien
sûr qu'on a un climat que Los Angeles n'a pas, mais, quand même,
les faits sont là.
M. Gauvin: C'est ça. Merci.
M. Rivard (Michel): M. le Président, est-ce que vous
permettriez, parce que je pense qu'il y a un point important, c'est la question
que M. Ryan a soulevée tantôt en disant: Je ne suis pas prêt
à permettre que les communautés ou les MRC puissent taxer. Ce
qu'on demande, ce n'est pas le pouvoir de taxer, c'est le pouvoir qu'on
s'entende par résolution pour établir que... À titre
d'exemple, on a parlé abondamment de 0,10 $ les 100 $
d'évaluation, que ce 0,10 $ là soit décrété
par une communauté pour dire: C'est ça que toutes les villes
doivent charger à leurs contribuables, pour qu'on s'entende que tout le
monde soit sur le même pied. Ce n'est pas donner le pouvoir aux
communautés ou aux MRC de facturer directement le contribuable ou de
facturer la ville autrement, c'est uniquement d'établir, de fixer
le taux. Et bien sûr, c'est sur le rôle non résidentiel; on
ne parle pas sur le rôle résidentiel. C'est sur le rôle non
résidentiel, tel que recommandé par M. le ministre.
Le Président (M. Garon): M. le ministre. Oui.
M. Ryan: Brièvement, c'est la règle de
décision qui est importante dans ceci. Si c'est une chose qui est
passée à l'unanimité, on peut regarder ça, mais si
c'est une chose qui ne sera pas unanime, là, je veux l'examiner
très attentivement puis pas dans l'espace d'une semaine. Je vous le dis
franchement. O.K.?
M. Rivard (Michel): Je tâcherai d'aller chercher
l'unanimité sur le sujet d'ici la fin de l'année ou, du moins,
pour la session d'automne.
Le Président (M. Garon): Alors, M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Merci, M. le Président. On s'aperçoit
que, avec le temps, comme je l'ai dit à quelques reprises depuis deux
jours, c'est comme à la bourse, ça monte, ça baisse et il
y a des changements de cap ou de stratégie par rapport à la
position gouvernementale. Au départ, on parlait de principe. On aurait
peut-être pu s'entendre sur un lexique des mots. Si ça peut
compléter le vôtre, M. le président de la Communauté
urbaine, je pourrais vous dire aussi que la responsabilité - parce qu'on
parlait de responsabilité pour un meilleur équilibre - le
responsable, ça veut dire quelqu'un qui décide, celui qui
décide. Et vous avez fait la démonstration sans donner la
définition qu'il n'y a pas grand-chose à décider pour les
municipalités à l'intérieur de votre
présentation.
Je pense que la démonstration commence à être de
plus en plus claire, c'est un délestage sur le dos des
municipalités. Ça devient de plus en plus évident. Ce
n'est pas une nouvelle responsabilité qu'on donne aux
municipalités. Et ça, je pense que l'ensemble des intervenants ou
ceux qui viennent ici présenter des mémoires le disent
carrément. Le ministre ne peut plus prétendre qu'il y a un
partage de responsabilités, c'est un délestage. C'est un court de
caisse qui fait qu'on est ici ce matin, parce que, hier, c'était clair,
même dans les propos du ministre, il disait: Oui, mais si je ne vous le
donne pas, quel serait le déficit du gouvernement du Québec?
C'est 400 000 000 $ de plus. C'est clair. Et la difficulté qu'on a, pour
nous, c'est d'être capables... Normalement, quand on propose des choses,
on propose des alternatives, puis là, il n'y en a pas. Il vient de vous
dire, encore ce matin, que les principes sont établis. Ça fait
que la commission parlementaire est là pour quoi? Juste pour que le
ministre se dédouane par rapport à des dialogues qu'il n'a pas
eus ou des concertations qu'il n'a pas eues durant le cours du
dépôt de ses propositions à aujourd'hui. Je trouve
ça malheureux, parce que j'avais l'impression qu'il avait plus
d'ouverture d'esprit. Le ministre a de la difficulté à accepter
qu'il avait toute l'autorité, depuis sa nomination, pour engager un
véritable dialogue avec les municipalités. C'est ça que
les gens viennent vous dire: On avait confiance en vous, M. le ministre. On
pensait que vous alliez être le défenseur des
municipalités, mais, malheureusement, on constate que vous avez choisi
de faire la job que le gouvernement vous a demandée, c'est-à-dire
d'aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables. C'est
ça. Parce que si Je regarde le ton et le dépôt des
mémoires, les mémoires ne sont pas agressifs envers vous. Les
mémoires sont agressifs dans le sens que les municipalités sont
incapables d'accepter - et Je pense que c'est correct - la façon dont on
les a traitées. Vous savez, quand on responsabilise les gens comme on
l'a fait en 1980 et 1979, et qu'on leur dit: Vous êtes des partenaires.
On leur donne un champ de taxation et on leur permet d'évoluer dans des
milieux différents, d'accepter de nouvelles responsabilités,
volontaires.
Et du jour au lendemain, on fait fi de tout ça, on remet tous les
rôles en question et on remet en danger tous les acquis. il ne faut pas
se surprendre que des gens qui se croyaient et qui se pensaient responsables,
du jour au lendemain, disent: Qu'est-ce qui va arriver demain matin? L'an
passé, c'était le scolaire. Cette année, c'est une partie
du municipal. Qu'est-ce que ce sera l'an prochain? Quand je parle de l'an
prochain, ça pourrait être dans deux ans parce que pour les vies
d'institutions, les années, ce n'est pas beaucoup.
Dix ans de paix et 10 ans d'évolution, ça ne sera pas long
dans 100 ans. Ils diront: II y a eu une période où les
municipalités se sont crues en possession de certains pouvoirs et de
certaines responsabilités. Et là, on ne les a plus.
J'étais surpris de voir dans votre propos: faire plus avec moins. J'ai
entendu ça en 1985-1986, au début de la prise de pouvoir du
gouvernement libéral, mais il disait toujours: On fait plus avec moins.
Et ça, c'est difficile à contrer parce que c'est une phrase qui
veut tout dire et rien dire. Et celui qui l'employait le plus, c'était
le ministre des Transports du temps. Il disait: On va faire plus avec moins
nous autres. Vous avez vu l'état des routes depuis ce temps-là.
Combien j'ai eu de discussions avec le ministre des Transports pour dire:
Ça n'a pas de bon sens ce que vous dites. S'il y a quelque chose qu'on
peut quantifier, Identifier, c'est bien ce qu'on fait sur les routes.
L'asphalte, le gravier, les explosions, le dynamitage de routes, l'arpentage,
la confection des plans, tout ça peut se mesurer. Il n'y a rien de plus
facile que mesurer combien ça coûte pour faire un chemin.
Le ministre dit: On va faire plus avec moins. Bravo pour son beau
programme! Il a fait moins avec plus, mais dans le cas des routes, il a fait
moins avec moins. Point, à la ligne! Le ministre, ce n'est pas qu'il
n'était pas bon. Il ne pouvait pas donner ce qu'il n'avait pas. Je
trouve ça effectivement un peu désengageant par rapport au
gouvernement. Le ministre, bien sûr, son ancien métier revient
à la surface, il s'abreuve d'éditoriaux, mais sur sa
réforme, quand il y en a un qui en parle, je le sais à toutes les
fois. Je pourrais presque vous les nommer de mémoire.
C. Masson, II en a parlé quelque peu. Il a pris un peu partie.
Là, il nous parle de M. Francoeur. Il ne parle pas beaucoup de M.
Lesage. Il a de bonnes antennes avec Le Devoir, c'est évident.
Comme travailleur d'Alcan, les gens n'ont pas discuté. Ils m'ont
rencontré. Ils m'identifient encore comme quelqu'un qui a
travaillé à Alcan. Le ministre a de très bonnes antennes
avec ces gens-ià. Moi, je ne le blâme pas, mais si on veut faire -
je suis prêt à le mettre au défi - l'addition des articles
qui sont contre sa réforme par rapport à ceux qui sont pour, je
pense qu'on arriverait avec une différence assez notoire ou notable.
En fait, ce que je prétends - et ça, c'est malheureux, on
devrait corriger ce tir-là immédiatement - ce n'est pas avec les
journaux et ce n'est pas avec des éditorialistes qu'on va faire ou
parler des principes et du vécu des municipalités. Ils peuvent
être de bons observateurs, ils peuvent être des gens qui peuvent
porter un oeil critique, mais on devrait, surtout pour le ministre des Affaires
municipales, s'assurer que sa clientèle, qui sont les
municipalités et les contribuables qui sont aussi une partie de sa
clientèle, soit traitée d'une façon correcte.
C'est ça, la responsabilité. Le soir, quand je me couche,
je ne me dis pas: Est-ce que le journaliste a été fin avec moi?
Je me dis: Est-ce que j'ai été correct avec les gens qui m'ont
élu? Bien sûr que c'est préoccupant, ce que le journaliste
pense. Mais pour moi, ma conscience, c'est mes électeurs. Eux autres
nous disent s'ils sont contents ou pas.
Voilà, en gros, on pourrait en discuter beaucoup. Je n'ai pas
d'objection à discuter encore des principes parce que cette
réforme-là, ou ces propositions, ou ce délestage de
comptes, a été amenée sur la table. J'ai la certitude que
les élus municipaux ont le droit, ont surtout l'obligation non seulement
de s'en défendre, mais de l'attaquer et de dire ce qui ne va pas. et
moi, je ne m'en offusque pas. jusqu'à preuve du contraire, j'ai toujours
cru que l'assemblée nationale, lorsqu'il y avait une commission
parlementaire, c'était en fonction de bonifier et
d'améliorer.
Là-dessus, M. le Président, j'aurais peut-être une
couple de questions qui m'intéressent et que j'aimerais poser, pas parce
que dans le mémoire, on pourrait relever toutes les questions, il y en a
déjà qui ont été répondues. Mais je voudrais
vous ramener à la question des rôles des commissions scolaires,
ça m'intrigue quelque peu, du paiement d'une partie des rôles
d'évaluation par les commissions scolaires. Les municipalités,
depuis toujours, s'offusquent ou s'insurgent contre l'intrusion des commissions
scolaires dans le champ d'impôt foncier. Jusqu'à preuve du
contraire, j'ai toujours l'impression que c'est la position fondamentale des
unions municipales. Est-ce que vous ne croyez pas que, par votre demande, en
supposant que les commissions scolaires ou que le gouvernement accepte ou
décide qu'une partie de ces rôles-là doit être
payée par les commissions scolaires, ça leur donnerait le droit
de prétendre qu'elles ont le droit de taxer, en vertu du principe que
celui qui paie, il a le droit de demander des comptes? Moi, j'essaie de
vraiment faire le principe utilisateur-payeur? Est-ce que vous ne croyez
pas?
M. Rivard (Michel): Elles le font actuellement, les commissions
scolaires, elles taxent...
M. Dufour: Oui...
M. Rivard (Michel): Et par contre, elles se servent de notre
outil sans nous indemniser. Tu sais, ça nous coûte 6 000 000 $, la
CUM et Longueuil, la même chose pour Laval, enfin les grandes villes du
Québec. Les grandes MRC mettent à leur disposition un rôle
d'évaluation qui sert aux commissions scolaires, et ce dans toutes les
municipalités, enfin, on se sert d'un seul rôle, on ne travaille
pas sur deux rôles. Mais on ne reçoit rien. Remarquez bien que
dans le passé, quand l'État nous subventionnait largement dans
différentes sphères d'activités, on ne s'est
peut-être pas arrêtés à ce problème, mais
aujourd'hui, alors que le gouvernement nous ramène à la
tarification des services qu'on donne, je pense qu'on se doit à ce
moment-là d'établir qui paie, qui utilise et qui doit payer. Ce
que M. le ministre disait tantôt sur l'échange un jour des
services, à 1 $ entre les deux, il y aura, bien sûr, un calcul
à faire pour voir s'il y a réellement un grand perdant ou un
grand gagnant. Si ça s'équivaut, ce sera la formule la plus
simple. On n'est pas rendus là. Mais à l'heure actuelle, à
ce que je sache... Moi, je me souviens, j'ai été maire d'une
ville qui s'appelle Beauport, pendant quatre ans, et à chaque fois que
la ville de Beauport louait des locaux dans des écoles ou n'importe
quoi, on payait un taux qui s'apparentait au public, il n'y avait même
pas de tarification spéciale, alors que là, on leur fournit
l'utilisation d'un rôle, de nos ressources, et vous savez combien
ça coûte se défendre devant le Bureau de révision.
Et là, on le fait naturellement, les commissions scolaires sont à
la remorque de nous, elles vivent avec des...
M. Dufour: Je comprends la façon dont ça
s'articule, mais mettons que dans les 10 dernières années, les
commissions scolaires qui n'avaient pratiquement qu'une perception symbolique
en grande partie, elles ont augmenté leurs demandes, le gouvernement a
accordé plus largement dans le champ de taxation. Mais si, à
partir de maintenant, en supposant que les municipalités paient pour la
confection du rôle - moi, je prétends, à tort ou à
raison, et ça, j'aimerais vous le faire dire - je comprends qu'il y a
des coûts, mais nonobstant les coûts qui sont en cause, le
principe, est-ce que vous ne croyez pas que les commissions scolaires, demain
matin, qui paient pour leur rôle d'évaluation pour une partie,
ça leur donne le droit au champ de taxation que vous avez?
M. Rivard (Michel): Elles pourraient prétendre ça,
mais ça ne veut pas dire, le fait qu'elles peuvent le prétendre,
qu'elles y ont droit.
M. Dufour: C'est un point de vue, vous ne me convainquez pas
nécessairement, mais je suis prêt à accepter votre point de
vue.
M. Rivard (Michel): Là, je vois ça un peu comme un
ticket modérateur, ce qu'on leur charge...
M. Dufour: Ha, ha, hal O.K. Vous nous dites, dans votre
mémoire, qu'une décentralisation s'accompagne habituellement de
négociations avec les partenaires. Est-ce que vous pourriez
élaborer un peu plus, par exemple, sur les rapports qu'il y a eu? Parce
que le député de Rimouski a semblé dire qu'il y a eu
beaucoup de négociations et que le rapport Parizeau pouvait compter, le
gouvernement pouvait s'en approprier pour dire que c'était des
négociations. Elles ont été faites voilà trois ans,
nous autres, on prend ce qui fait notre affaire et vous envoie ça dans
le visage. (11 heures)
M. Rivard (Michel): ...surtout une consultation qui s'est faite.
Je pense que M. le ministre et son équipe informent; je pense
qu'à chaque fois qu'on a eu l'occasion, que ce soit l'Union des
municipalités ou la Communauté urbaine ou des villes
individuelles de la CUQ, de poser des questions aux Affaires municipales, il
faut bien dire qu'ils nous ont très bien informés à date
sur le projet de réforme. Ils ne nous ont pas consultés avant,
ils ont pris la décision de dire: Cette année, c'est clair, on a
des problèmes budgétaires, on vous en tire dans votre cour pour
400 000 000 $. Maintenant, est-ce qu'il y a de la plomberie qu'on pourrait
modifier? On s'attendait que dans nos mémoires, on ne fasse pas allusion
du tout à notre mécontentement, mais qu'on parle seulement de la
plomberie. Il y a eu des mémoires qui ont parlé de plomberie,
nous, on parle du principe fondamental. On dit qu'il n'y a pas eu
réellement de négociation, c'est le même langage que
l'Union des municipalités et l'UMRCQ tiennent. On est encore toujours de
cet avis.
Notre crainte, c'est que, cette année, c'est 400 000 000 $ et,
l'année prochaine, ce que je mentionnais, à l'Environnement et
à la Culture, qu'on nous revienne avec un autre montant de 1 000 000 000
$. Il n'y a personne, à date, dans l'équipe ministérielle,
qui a démenti notre appréhension. Ça, ça nous
inquiète.
M. Dufour: Vous avez parlé des sources de revenus
problématiques. Vous avez semblé plutôt vous appuyer sur
une assurance à l'effet que le gouvernement pourrait payer sur ses
terrains les coûts de stationnement. Vous avez soulevé la question
des fonctionnaires, il semble que c'est une question de convention collective.
Mais il y a aussi les sources fédérales. Est-ce que vous, avec
toutes vos antennes, vous avez l'assurance.. Le ministre nous a bien dit qu'il
y avait un article de journal, mais ça, ça pourrait être
une source anonyme parce qu'il fait dire au ministre à Ottawa qu'ils
vont nous payer. Est-ce que ça fait partie des sources
problématiques de revenus pour la municipalité?
M. Rivard (Michel): M. le député, je peux vous
assurer que nous allons faire une petite gymnastique, grâce, bien
sûr, à nos gens qui travaillent à l'évaluation; Us
nous ont donné comme Idée qu'on va convertir notre rôle de
valeur locattve en rôle non résidentiel et, à ce
moment-là - ça existe dans d'autres provinces... Dans les autres
provinces, le fédéral pale ses contributions à ce
moment-là. C'est la raison pour laquelle on devra, bien sûr,
investir encore quelques centaines de milliers de dollars, à toute
vapeur, de toute urgence, mais avec cette idée de convertir le
rôle, on vient d'accrocher le fédéral pour qu'il paie ses
taxes lui aussi.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Dubuc.
M. Morin: Oui, M. le Président. Je voudrais relever un
petit peu ce que vous avez avancé au niveau de la vision comptable du
ministre par rapport à cette réforme-là. Je voudrais vous
informer, si vous ne l'êtes pas, des comparaisons un peu faciles que le
ministre a faites devant d'autres Intervenants.
La première fois, je pensais que le ministre avait commis un
Impair, parce qu'on connaît quand même sa rigueur habituelle, mais
II ne l'a pas fait devant des représentants municipaux. J'aurais cru
qu'il l'eût fait ce matin lorsqu'il a comparé ses 200 000 000 $ ou
300 000 000 $ de récupération à un simple petit 0,10 $ les
100 $ d'évaluation. Le ministre a voulu simplifier sa réforme en
nous comparant ça à tout simplement: C'est aussi simple que si on
imposait 0,10 $ de
l'évaluation aux municipalités. ce ne serait quand
même pas grand-chose. alors, je voulais tout simplement vous rappeler,
lorsque vous voyez dans la vision du ministre une vision purement comptable,
jusqu'à quel point vous visez juste, parce que, bien sûr,
garrocher 0,10 $ de même, hors contexte, sans tenir compte de la
façon dont la fiscalité municipale a été
établie, comment les municipalités n'ont
récupéré que partiellement le champ foncier qui avait
été dégagé par le scolaire... il est
démontré que la plupart des municipalités
réussissent à maintenir leur taux de croissance des
dépenses en bas du taux d'inflation, contrairement au gouvernement.
Je pense que le monde municipal a fait une démonstration d'une
administration quand même assez sévère et que le ministre
puisse prétendre qu'un simple petit 0,10 $ ne ferait pas mal à
personne, c'est vraiment faire fi de l'administration municipale à
partir des bases qui avaient été établies par la Loi sur
la fiscalité municipale, il l'a fait deux fois, mais je souhaitais qu'il
le fasse devant des élus municipaux, ce qu'il n'a pas fait.
Je voudrais uniquement faire un autre commentaire, à l'effet
qu'on ne semble pas comprendre les reproches que les intervenants font
vis-à-vis le gouvernement, à l'effet qu'il n'y a pas eu de
consultation. Parce qu'il y a ces audiences au sein de la commission, on
considère ça comme de la véritable consultation, alors que
je me souviens fort bien, lors de la conférence de presse du ministre du
mois de décembre dernier, lorsqu'il disait: SI vous avez des choses,
dites-le, mais j'ai un urgent besoin de 500 000 000 $. Alors, ça voulait
dire qu'il y avait de la place pour des échanges, mais certainement pas
au niveau des principes. Parce que le ministre, par préoccupation
purement financière, portait atteinte à des principes, mais ne
soumettait pas à la consultation des principes fondamentaux sur le plan
de la fiscalité, ce qui veut dire que ça limitait dès le
départ toute espèce de consultation valable.
Ce sont les commentaires que je voulais faire à ce stade-ci. La
rigueur à laquelle nous a habitués le ministre a
été un petit peu entachée par cette facilité de
garrocher un petit 0,10 $. Donc, la réforme Ryan n'est pas plus qu'un
petit 0,10 $ les 100 $ d'évaluation. Donc, il y a très peu de
place à la critique. Alors, je voulais tout simplement... Si vous avez
des commentaires à ajouter là-dessus, faites-le, mais c'est tout
simplement pour aller dans le sens, pour souscrire à vos propos que la
vision purement comptable du gouvernement, c'est là la base,
évidemment, de la contestation et des critiques du monde municipal.
M. Rivard (Michel): Je pense que ce qui va vous donner raison ou
tort, M. le ministre, c'est lorsque les municipalités vont
déposer leur budget 1992. On y travaille présentement. On va
connaître réellement l'effet de ce qu'on appelle cette
réforme. Soyez assuré que, pour ce qui est du territoire de la
Communauté urbaine de Québec, on entend bien démontrer
clairement sur le compte de taxes combien coûte la réforme
actuelle.
Le Président (M. Garon): II reste 30 secondes.
Mme Marois: À ce moment-là, ça ne vaut pas
la peine. Enfin, c'était sur les scénarios que vous aviez
élaborés, justement, pour voir comment absorber les coûts
chez vous. Comme mes calculs se sont faits dans les autres communautés
urbaines, à savoir quand on sort de la zone de ta communauté,
qu'est-ce que ça crée comme différence par rapport
à la municipalité, à côté, parce que c'est
ça qui a un effet sur l'étalement urbain. Alors, je voulais
savoir s'il y avait des scénarios qui avaient été faits
à cet égard-là chez vous.
M. Rivard (Michel): Permettez-vous, M. le Président, que
je réponde dans les 30 secondes qui restent?
Le Président (M. Garon): 30 secondes.
M. Rivard (Michel): C'est bien sûr que cette réforme
a comme danger que, peut-être, certaines villes vont demander aux
Affaires municipales de se retirer du transport en commun. Ce qui arriverait,
c'est que ces gens-là agiraient comme novateurs, arriveraient avec leurs
autos dans la municipalité voisine. Ils prendraient quand même le
transport en commun au détriment des autres villes. Il y a un grand
risque pour ça.
Le Président (M. Garon): M. le ministre, il vous reste
deux minutes et dix secondes.
M. Ryan: M. le président de la Communauté urbaine
disait tantôt s'inquiéter de ce que ceci ne soit peut-être
qu'une étape devant être suivie d'autres étapes
éventuelles. Il a été bien indiqué dans le document
du 14 décembre qu'une fois ces choses-ci réalisées, il n'y
aura pas d'autres choses du genre sous le présent mandat du
gouvernement. Ça a été dit bien clairement et je le
répète aujourd'hui parce que, sur ces grandes
questions-là, je pense qu'il faut être clair. C'est bien clair.
Quand j'ai, dans une intervention subséquente, indiqué qu'il
faudrait se mettre à table autour de tous les autres problèmes,
là, l'Union des municipalités régionales de comté
qui est ici avait mal compris mon intervention. On pourra s'expliquer
tantôt, quand nous les rencontrerons. Elle avait compris que
j'annonçais une deuxième ronde de mesures comme celles qui
étaient envisagées dans la première ronde. C'est
absolument faux. Il n'est pas
question de ça. Je crois que nous pourrons discuter dans un tout
autre contexte. Je pense que nous convenons de part et d'autre que, le plus
tôt ça se présentera, le mieux ce sera. Alors, je voulais
vous donner cette assurance claire qui a été donnée dans
le document gouvernemental. Ce n'est pas seulement une déclaration de
celui qui vous parle, c'est une intention très nettement définie
dans le document gouvernemental dont le ministre des Affaires municipales fut
cependant l'auteur.
Alors, je vous remercie. Pour le reste, on pourra discuter longuement.
Il y a des problèmes que nous pourrons reprendre. Sachez que nous sommes
à votre disposition pour tout échange susceptible de contribuer
à l'amélioration non seulement du projet de loi, mais des
relations entre Québec et la Communauté urbaine de Québec.
Merci.
Le Président (M. Garon): Le mot de la fin, M. Rivard.
M. Rivard (Michel): Merci de nous avoir reçus. Je suis
très heureux d'entendre de la part du ministre qu'il n'y aura pas
d'autre réforme sous l'actuel mandat du gouvernement. Je note bien.
Le Président (M. Garon): Je voudrais vous remercier, M.
Rivard.
M. Ryan: Je ne voudrais pas que vous me fassiez dire plus que
j'ai dit: d'autres mesures comme celles qui sont définies dans le projet
de loi 145. Je ne me condamne pas à l'inaction.
Le Président (M. Garon): Je voudrais remercier les gens de
la Communauté urbaine de Québec. Si j'avais toujours des
interlocuteurs comme vous, je vous dis que ce ne serait pas dur, ma tâche
de président. (11 h 15)
Je demande maintenant à l'Union des municipalités
régionales de comté et des municipalités locales du
Québec de s'approcher de la table.
La commission reprend ses travaux et je ferai remarquer aux journalistes
qu'il y a un protocole d'entente concernant la télévision dans
les... Et, depuis ce matin, je dois dire que je trouve que les caméras
ne respectent pas le protocole d'entente qui a été
élaboré avec la presse et la présidence. Et on me l'a fait
rappeler à quelques reprises. J'ai l'impression que c'est un
privilège que les journalistes et les caméras ont d'être
ici et j'ai le sentiment très net que si le protocole n'est pas
respecté, éventuellement, les gens vont demander que ça
redevienne comme avant. Il y a des endroits, il y a des locaux, il y a des
corridors pour faire des entrevues et ici on est dans le cadre de travaux d'une
commission parlementaire avec un horaire rigoureux. Et quand les gens vont
partir d'ici, tout à l'heure, ils vont avoir à peu près
quelques minutes pour dîner. Ils ont des réunions de part et
d'autre. On ne peut pas escamoter. Alors, M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: M. le Président, je veux renchérir
là-dessus. D'abord, on est toujours en retard sur les horaires. Il ne
nous restera pratiquement pas de temps pour manger. On travaille avec des
heures qui sont assez longues. On commence très rarement à
l'heure et on bouscule bien souvent les gens qui viennent se présenter
en commission parlementaire. Et mol, je m'oppose carrément à ce
qu'il y ait des gens qui abusent, parce que la presse peut abuser aussi. Mais
il ne faut pas accepter ça. C'est Inacceptable. Il y a des places pour
faire des entrevues. Il y a des "scrum". Il y a tout ce que vous voudrez, mais
pas en commission parlementaire. Mol, je m'objecte à ça
carrément. Je ne suis pas jaloux. Il peut y aller, le ministre, à
la télévision, quand il voudra, mais pas en commission
parlementaire.
Le Président (M. Garon): Alors, maintenant je vais
demander à M. Nicolet, le président de l'Union des
municipalités régionales de comté, de nous
présenter les gens qui sont avec lui, en lui soulignant qu'il a une
heure et demie qui est prévue pour la rencontre avec l'UMRCQ, que
normalement c'est une demi-heure, un tiers du temps pour l'exposé, un
tiers du temps pour la partie ministérielle, un tiers du temps pour le
parti de l'Opposition officielle. Ce que vous prenez en plus leur est
soustrait. Ce que vous prenez en moins peut être ajouté à
la fin, mais je suis bien prudent parce que parfois... J'ai remarqué
tantôt que le temps que n'avait pas pris le président de la
Communauté urbaine, ça faisait l'affaire de lui donner à
un moment donné pour répondre à une question alors qu'il
n'avait plus de temps.
Union des municipalités régionales de
comté et des municipalités locales du Québec
M. Nicolet (Roger): Je vous remercie, M. le Président. M.
le ministre, Mmes, MM. les députés, j'aimerais tout d'abord,
comme vous me le suggérez, vous présenter les membres de notre
délégation. À ma gauche, M. Michel Fernet, directeur
général de l'Union, et à mon extrême gauche, Me
Louise Canac-Marquis, conseillère juridique à l'Union. À
ma droite, Me André Lemay, procureur et avocat, qui a suivi en
particulier le dossier de la sécurité publique pour l'Union
depuis de nombreuses années déjà. En fait, Me Lemay est un
ancien collaborateur de l'Union qui connaît Intimement la
réflexion collective que l'Union a faite dans ce dossier depuis quatre
ou cinq ans déjà. Et, finalement, à mon extrême
droite, Me Beaulleu, qui est une collaboratrice de Me Lemay.
Si vous me permettez, j'aimerais bien sûr vous remercier d'abord
d'avoir accepté de nous rencontrer, d'avoir également
collaboré avec l'Union pour lui permettre de comparaître à
un moment qui était propice, dans le cadre du calendrier chargé
que votre commission parlementaire doit suivre. J'aimerais également,
bien sûr, m'excuser du fait que le mémoire n'a pu vous être
remis qu'en toute dernière heure, hier soir. Et étant
donné que vous siégiez jusqu'à une heure avancée,
probablement que vous n'avez pas pu en prendre connaissance, du moins en
détail. Je me permettrai donc dans ma présentation de vous lire
un résumé qui, je pense, reprend les principaux points
soulevés dans ce mémoire. Par contre, je vous conseille de
l'étudier en profondeur parce qu'il contient, en beaucoup plus de
détails, une argumentation des positions que nous tâchons de vous
présenter aujourd'hui.
L'UMRCQ invite les membres de cette commission à ne pas minimiser
la portée du projet de loi 145. SI les propositions
déposées par le ministre des Affaires municipales, M. Claude
Ryan, ont suscité une telle controverse, II ne s'agit pas que d'une
question de forme, comme certains ont semblé le croire, mais bien d'une
question de fond. Les élus municipaux réclament, depuis quelques
années déjà, un nouveau partage des responsabilités
entre le gouvernement et les municipalités. Notre objectif en est un
d'une plus grande efficacité de l'administration publique
québécoise, en d'autres mots, de meilleurs services aux citoyens
aux moindres coûts possibles.
La conjoncture de l'année dernière nous apparaissait
propice au démarrage d'un tel exercice. Au terme des débats qui
ont entouré l'ouverture du champ d'impôt foncier aux commissions
scolaires, le premier ministre du Québec s'était engagé,
en mai 1990, au nom de son gouvernement, à négocier avec les
municipalités un nouveau partage des responsabilités dans un
esprit de partenariat. Conséquemment, le Conseil des ministres adoptait,
le 20 juin, un décret confirmant la création d'un comité
ministériel pour amorcer sans retard une décentralisation dont le
Québec a un Imminent besoin. Cette annonce de la part du gouvernement a
été accueillie positivement par le monde municipal, non seulement
parce qu'il mettait fin à un conflit, mais parce qu'il donnait enfin
l'ouverture afin que les régions puissent, à brève
échéance, disposer des leviers qui leur permettraient de se
développer sur les plans social, culturel et surtout
économique.
L'automne dernier a été marqué par deux autres
événements significatifs: La nomination d'un nouveau ministre aux
Affaires municipales dont nous connaissions la détermination et qui
laissait entrevoir des actions énergiques en faveur des
municipalités et la création de la Commission
Bélanger-Campeau qui allait permettre à de nombreux organismes de
s'exprimer sur les orientations politiques et constitutionnelles du
Québec.
Comme on a pu le constater à maintes reprises lors des audiences
de cette commission, tout autant qu'à l'occasion des états
généraux du monde rural de février dernier, la
majorité des intervenants socio-économiques réclament la
décentralisation de l'État et le renforcement des pouvoirs
locaux.
Quelle ne fut pas notre consternation lorsque, le 14 décembre, le
ministre Ryan déposa une série de propositions qui substituaient
à la recherche conjointe d'une redéfinition du partage des
responsabilités entre les deux paliers de gouvernement une nouvelle
incursion dans le champ d'impôt foncier, sous le couvert, cette fois,
d'un transfert de fonctions et d'obligations.
L'UMRCQ n'a eu d'autre choix que de présenter, au nom des
municipalités qui la constituent, une fin de non-recevoir, d'autant plus
que sous prétexte que la Constitution ne reconnaissait pas aux
municipalités le caractère de gouvernement local, le ministre les
qualifiait de créatures administratives dans la présentation de
ses propositions.
Nous voici, six mois plus tard, contraints de commenter le projet de loi
visant à concrétiser ces propositions, assorties d'ajustements
mineurs malgré la vive opposition manifestée par les
représentants municipaux.
Depuis le début de l'année, au gré
d'assemblées spéciales et de consultations directes multiples de
ses membres, l'UMRCQ a articulé une position précise et sans
équivoque face aux diverses propositions gouvernementales,
résumée sous forme d'un manifeste contresigné par quelque
750 municipalités du Québec.
Même si le projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant tes finances municipales, ne couvre pas
l'ensemble des mesures annoncées par le texte gouvernemental du 14
décembre, l'UMRCQ ne peut en aborder l'étude et la discussion
sans se référer au plus large contexte dans lequel il a
été conçu. L'Union désire conséquemment
rappeler aux membres de cette commission que toute représentation
formulée au présent mémoire et qui concerne certaines
dispositions précises du projet de loi 145 ne constitue qu'une facette
des revendications municipales.
L'Union déclare donc que sa participation à la
présente commission parlementaire et l'apport qu'elle pourra faire
à l'étude du projet de loi ne peuvent être dissociés
des gestes qu'elle posera et des demandes qu'elle réitère en vue
d'obtenir les précisions et corrections essentielles à la reprise
d'un effort conjoint gouvernement-municipalités pour établir de
nouvelles bases au financement et à la définition de la mission
administrative des municipalités du Québec.
Nous nous devons d'être très clairs, même dans sa
forme quelque peu atténuée par la déclaration
ministérielle du 14 mai 1991, le
projet gouvernemental dont il est question dans le projet de loi 145
demeure inacceptable aux municipalités membres de l'UMRCQ. Il importe
néanmoins d'en évaluer de façon plus approfondie certains
aspects.
Les impacts fiscaux. Voyons d'abord les impacts fiscaux, si vous me le
permettez. Depuis le début de l'année, les élus locaux se
sont penchés sur les incidences fiscales des propositions
gouvernementales. Au-delà des discussions que provoquent les
hypothèses posées par le gouvernement, en particulier en
matière de coût de voirie locale, les chiffres gouvernementaux
fournissent, prima facie, la preuve de l'impact différent et apparemment
arbitraire de la réforme sur les budgets, d'une municipalité
à l'autre, que ne justifie aucune logique qui traduirait, de la part du
gouvernement, une préoccupation de justice sociale, de capacité
fiscale, un souci de péréquation ou une vision politique
d'occupation du territoire.
Sur une période de trois ans, à l'expiration des mesures
transitoires, ce sont en fait les localités plus économes, celles
qui, collectivement, ont manifesté dans le passé le plus de
retenue dans leurs décisions administratives qui devront faire face aux
pires augmentations de taux de taxe, en pourcentage, bien sûr. Le
gouvernement a eu beau jeu à date d'affirmer qu'un programme judicieux
et plus généreux de péréquation viendrait corriger
ces anomalies. L'UMRCQ se permet de demeurer sceptique face à de telles
prétentions. le ministre des affaires municipales se propose maintenant
de greffer à ce programme de péréquation un nouvel apport
financier significatif conçu pour pallier les difficultés
budgétaires locales occasionnées par le projet de réforme
du 14 décembre. la nature hétérogène de ces
transferts de charges a été soulignée
précédemment. dans cette perspective, comment prétendre
développer une grille qui reflète cette caractéristique,
tout en préservant le souci premier qui a présidé à
l'instauration du programme, lors de la réforme de la fiscalité
municipale?
En ce qui a trait plus particulièrement aux propositions sur la
sécurité publique, un irritant majeur pour les membres de
l'UMRCQ, il faut souligner que la nature même du service de protection
civile que requiert la société régionale offre
matière à réflexion. L'analyse des besoins doit, en fait,
précéder toute réévaluation de l'implication
municipale en la matière. À cette fin, il est intéressant
de se référer aux analyses les plus récentes du ministre
de la Sécurité publique. Là-dessus, je vous
réfère au document qui est joint au mémoire proprement
dit.
L'ensemble de ces données permet de conclure que la fonction
policière varie largement d'un milieu à un autre. Là
où, dans tes agglomérations urbaines, les infractions au Code
criminel revêtent plus d'importance, en région, s'imposent des
tâches qui relèvent davantage de la surveillance du territoire et
du maintien de la paix et de l'ordre social.
La Sûreté du Québec est bien consciente de cette
réalité. La répartition géographique des 107 postes
de la Sûreté du Québec disséminés à
travers le territoire, les différences d'effectifs qui les occupent, la
diversité des pratiques d'intervention, que ce soit de nuit ou de Jour,
confirment que la mosaïque québécoise en matière de
sécurité publique ne peut se réduire à une analyse
globale. En outre, pour les élus municipaux en région, les
exigences en matière de surveillance policière se conjuguent
à leur préoccupation de protection civile. Qu'il s'agisse de
prévention des incendies, de planification des interventions d'urgence,
de coordination inter municipale en cas de sinistre, tout comme de conservation
de la nature et de la faune ou de surveillance environnementale, la
société québécoise contemporaine multiplie les
demandes au palier local. L'administrateur municipal devra donc, à
brève échéance, repenser la sécurité
publique dans une perspective beaucoup plus large que la simple question de
surveillance policière, qu'elle soit assumée ou non par la
Sûreté du Québec.
Il y a donc, au-delà d'une simple question de transfert de
facture, de l'organisation fonctionnelle d'une famille de services connexes
qu'il faut ou faudra dispenser dans un État moderne. C'est pourquoi,
depuis le début de l'année, les porte-parole municipaux
multiplient les avertissements. Pas question que les municipalités
épongent des factures de la Sûreté du Québec sans
que le gouvernement leur offre le cadre et l'espace de temps nécessaires
à l'étude de leurs besoins spécifiques respectifs et que
le ministre dépose, sous forme de texte précis, les
critères qui leur permettront de comparer objectivement les
différentes options qui s'offrent à chaque communauté. (11
h 30)
Un peu plus d'une trentaine des 152 municipalités de plus de 5000
habitants n'ont pas respecté l'obligation que la loi leur faisait. Par
contre, la plupart des demandes de dispense, même fondées, sont
demeurées sans réponse. Pire encore, certaines
municipalités des 46 comptant moins de 5000 habitants et qui, par la
loi, avaient le droit d'abolir leur corps de police, ont vu l'autorisation
gouvernementale requise reportée injustement sous le prétexte
d'un comité de reclassement totalement inefficace. L'alternative du
versement d'indemnités de séparation raisonnables aurait dû
être utilisée dans tous les cas où le reclassement
n'était pas possible. Normalement, dans le domaine des relations du
travail, on considère comme privilégiés les travailleurs
qui peuvent obtenir une semblable prime lorsqu'ils perdent leur emploi. Ce
traitement, dont doivent notamment se contenter nos élus provinciaux,
est sans doute une Injustice pour ces
policiers, dont aucun autre corps de police ne veut.
Au Heu d'assumer le leadership politique d'appliquer les dispositions de
la loi aux municipalités délinquantes, soit par l'octroi de
dispenses justifiées à certaines municipalités ou
l'imposition de sanctions aux autres, tout en libérant les
municipalités de moins de 5000 habitants, le gouvernement a plutôt
choisi de pénaliser les quelque 1250 municipalités comptant moins
de 5000 habitants.
D'autre part, II est utile de rappeler que l'article 92 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique confie aux provinces la
responsabilité des affaires municipales et l'administration de la
justice. La juridiction de la province de Québec en matière
d'administration de la justice sur son territoire et, par conséquent, en
matière d'organisation policière, est sans équivoque, tant
pour l'administration de la justice criminelle que civile.
En fait, au Canada, le fédéral et les provinces peuvent
mettre sur pied et régir des corps de police, lesquels reçoivent
leur mandat des lois fédérales ou provinciales en fonction du
partage des compétences en matière d'administration de la
justice. Ainsi, la Gendarmerie royale du Canada voit à l'application des
lois fédérales, sauf le Code criminel. L'article 20 de la Loi sur
la Gendarmerie royale du Canada prévoit que le gouvernement
fédéral peut conclure des ententes avec toute province ou toute
municipalité, avec l'approbation du gouvernement provincial, en vue de
l'utilisation de la Gendarmerie pour aider à l'administration de la
justice dans cette province ou municipalité.
En pratique, outre son rôle fédéral à travers
le Canada, la GRC fournit les services de police pour toutes les fonctions de
juridiction provinciale dans toutes les provinces, sauf l'Ontario et le
Québec, qui possèdent leur Sûreté dans les deux
territoires fédéraux et dans environ 200
municipalités.
Il est conséquemment important de retenir, des réflexions
qui précèdent, le postulat de la responsabilité
première du gouvernement du Québec en matière
d'organisation policière sur le territoire de la province.
Dans une autre perspective, celui qui légifère ou
réglemente en imposant des normes devrait prendre la
responsabilité de les faire respecter. S'il paraît difficile,
parce que excessivement réducteur, de définir les tâches de
gendarmerie par rapport aux fonctions de sûreté, la distinction
demeure fondamentale dans la logique de l'analyse municipale. En effet, de
façon pratique, les corps de police municipaux, à l'exception des
plus importants, réfèrent généralement à la
Sûreté du Québec les tâches
spécialisées qualifiées de sûreté. Or,
l'application des règlements municipaux relève davantage des
fonctions de gendarmerie, alors que l'application des lois provinciales et du
Code criminel relève principalement des fonctions de
sûreté.
Quoique la séparation des tâches ait été
souvent écartée suite à la constatation de certaines zones
grises, l'UMRCQ est d'opinion qu'une étude plus poussée de ce
partage devrait sous-tendre toute révision du système policier au
Québec. En outre, indépendamment de cette distinction des
tâches en ce qui a trait au personnel policier, différentes
fonctions pourraient être exécutées avec autant
d'efficacité par du personnel non policier. Ainsi, une analyse
détaillée des tâches permettrait sans doute de distinguer
les fonctions qui peuvent être exercées par du personnel non
policier, celles qui pourraient être exercées par des officiers
municipaux en matière de gendarmerie, comme pour certaines missions en
matière de circulation, de constat d'accident, de réception de
plaintes pour fins de l'enquête préliminaire, de prévention
et celles qui pourraient être exercées par du personnel policier
en matière de sûreté. Une telle distinction permettrait une
spécialisation accrue qui deviendrait un gage d'efficacité.
Le ministère des Transports a utilisé ce principe en
confiant le contrôle du poids des véhicules à des
employés civils tout en retirant cette responsabilité à la
Sûreté du Québec. Le ministère a même
analysé l'opportunité de créer une police routière,
distincte de la Sûreté du Québec, qui compte des policiers
dont la formation permet l'exécution de tâches plus
spécialisées relevant davantage de l'aspect sûreté.
Les policiers se sont toujours opposés avec vigueur à une telle
séparation des fonctions et lorsque l'on sait qu'à peine 20 % de
leurs activités relèvent de la catégorie
sûreté, alors que 80 % de leurs fonctions relèvent de la
catégorie gendarmerie, l'on comprend mieux leur opposition.
D'autre part, on n'insistera jamais assez sur l'importance d'analyser
les besoins de protection policière, non pas à partir des
modèles théoriques, mais à partir de la
réalité qui illustre une disparité des besoins, surtout en
ce qui a trait aux attentes en milieu rural par rapport aux exigences en milieu
urbain.
Incidemment, il ne faut pas penser que seuls les contribuables de ces
petites municipalités bénéficient des services de la
Sûreté du Québec. Tel que mentionné
précédemment, dans la plupart des petites municipalités
qui sont dotées d'un corps de police, seules les fonctions de
gendarmerie et d'enquêtes préliminaires sont assumées par
le corps de police local. Les tâches relevant habituellement de la
Sûreté sont assumées par la Sûreté du
Québec. De plus, même dans le cas des municipalités qui ont
des corps de police d'une certaine envergure, encore là, c'est la
Sûreté du Québec qui intervient dans la plupart des crimes
majeurs.
Or, ce rôle de la Sûreté du Québec en regard
des municipalités qui ont leur propre corps de police municipal est
important. Les efforts, les effectifs et les sommes d'argent
allouées par la Sûreté du Québec pour
exécuter ces fonctions de sûreté sont très
Importants. En fait, la Sûreté du Québec offre des services
aux municipalités moyennes et de grande taille beaucoup plus qu'on ne
pourrait le croire et cela, à un coût qui, toutes proportions
gardées, est beaucoup plus élevé vu la
spécialisation particulière des fonctions exercées. Il n'y
a qu'à penser aux sommes d'argent investies, il y a quelques
années, par la Sûreté du Québec pour tenter de
régler le problème d'un groupe de motards ayant son chef-lieu sur
le territoire de la ville de Sorel qui possède pourtant un service de
police municipal.
Les événements de l'été 1990 à Oka et
à Châteauguay illustrent avec plus d'acuité les sommes
d'argent consacrées par la Sûreté du Québec pour
exécuter des fonctions inaccessibles pour un corps de police
municipal.
On peut penser également au travail effectué par la
Sûreté du Québec pour contrer le crime organisé, les
fraudes économiques et fiscales, où ces phénomènes
de criminalité sont quasi absents en milieu rural. En fait, l'importance
de la gravité des infractions criminelles relevées par la
Sûreté du Québec dans les petites municipalités ne
sont pas comparables avec celles relevées par la Sûreté du
Québec dans les municipalités plus importantes.
Enfin, il est primordial d'harmoniser les relations de travail des
policiers municipaux avec celles des autres employés municipaux. Les
chartes canadienne et québécoise des droits exigent
l'égalité de tous et il n'est plus acceptable d'enlever le droit
de grève aux policiers. Au surplus, le régime des services
essentiels permet d'assurer la sécurité des citoyens. L'arbitrage
obligatoire des conditions de travail doit cesser puisqu'il constitue un
système qui va à l'encontre du choix démocratique des
citoyens qui élisent des administrateurs publics.
Le président du Conseil du trésor a bien qualifié
un semblable système, le 11 avril dernier, en traitant du conflit du
gouvernement avec ses ingénieurs. M. Daniel Johnson répondait
ainsi à une suggestion de confier la solution de ce litige à un
arbitre. Je cite le Journal des débats, page 7348: "M. le
Président, confier la disposition des sommes que les contribuables, qui
ont du travail, versent aux coffres de l'État, confier l'administration
de ces sommes-là à un tiers non élu relève de la
plus grande irresponsabilité."
La position de l'UMRCQ sur les principes n'est donc pas changée
et il ne peut être question d'accepter que les municipalités
assument notamment une quote-part des coûts de la Sûreté du
Québec alors que les municipalités n'ont absolument aucun
contrôle sur la nature, la qualité et la quantité des
services offerts par la Sûreté. Bien que les positions de l'UMRCQ
présentées ci-haut soient fermes, il demeure qu'à titre de
porte-parole des quelque 1267 municipalités locales et
régionales, l'Union ne peut se soustraire à l'obligation de
commenter le projet de loi 145 qui vient d'être déposé
à l'Assemblée nationale du Québec.
En effet, en conformité avec l'opinion exprimée par une
large majorité de municipalités, telle que formulée, la
nouvelle obligation qui est faite aux municipalités en matière de
sécurité publique a été et est toujours
refusée par l'Union. L'opposition est formelle et le gouvernement, s'il
décide de procéder, devra en reconnaître les
conséquences politiques.
Certaines municipalités membres de l'Union se sont toutefois
déclarées disposées à s'Impliquer davantage en
matière de protection civile et de sécurité dans le sens
le plus large de cette fonction. Pour rendre justice aux préoccupations
de ces municipalités particulières, l'UMRCQ présente, de
façon subsidiaire, au chapitre 3 du présent mémoire, des
modifications concrètes au projet de loi 145 qui visent essentiellement
à permettre d'éviter de bloquer le dossier de la réforme
de la police dans des orientations qui risquent de causer des préjudices
considérables pour de nombreuses années à venir.
En résumé, là je vous lis les résolutions
adoptées par le conseil d'administration de l'Union et les
préfets des MRC membres de l'Union réunis jeudi et vendredi
dernier, qui reflètent donc l'opinion des membres de l'Union. 1° Que
les municipalités qui auront manifesté au 31 décembre 1991
leur intention formelle de mettre sur pied leur propre corps de police, de
conclure une entente avec une ou plusieurs municipalités pour
l'établissement en commun d'un corps de police ou de participer à
la mise sur pied d'un corps de police régional, ayant pour fonction la
dispense de services de base, n'aient pas à défrayer les
coûts de la Sûreté du Québec a compter du 1er janvier
1992. 2° Que le gouvernement du Québec assume une
responsabilité de premier ordre en matière de protection
policière sur son territoire. 3° Que les municipalités
assument sur leur territoire des services de base quant à la paix,
à l'ordre et à la sécurité publique. 4° Que
cette responsabilité soit liée à une définition des
services de base à offrir pour assurer cette paix, cet ordre et cette
sécurité publique. 5° Que la définition des services
de base résulte dune entente entre le gouvernement et les
représentants municipaux. 6° Que la définition des services
de base puisse varier selon les besoins des contribuables. 7° Que ces
services de base puissent être dispensés, selon le cas, par des
employés municipaux, des constatées, des agents de
sécurité et des policiers municipaux, toute autre personne
qualifiée ou en collaboration avec l'entreprise privée. 8°
Que ces services de base puissent être dispensés au niveau local
ou régional, ou après entente entre deux ou plusieurs
municipalités
9° Que tout ou partie des services de base puissent être
dispensés par la Sûreté du Québec, après
entente avec le gouvernement et les municipalités concernées.
10° Que les municipalités ne paient pour les services de la
Sûreté du Québec qu'après entente sur la
définition des services de base et seulement dans le cas où elles
n'assurent pas ses services de base. 11° Que la tarification des services
de la Sûreté du Québec tienne compte du niveau des services
de base dispensés par la Sûreté du Québec, selon
l'entente conclue. 12° Que pour faciliter la définition des services
de base, des expériences-pilotes soient menées sur le territoire.
13° Que les municipalités puissent continuer d'établir un
corps de police sans l'approbation du ministre. 14° Que les
mécanismes d'abolition ou de réduction des effectifs d'un corps
de police municipal ne soient pas uniquement théoriques, mais qu'ils
soient réellement efficients, notamment par le reclassement ou par
l'allocation de primes de séparation. 15° Que les règles
régissant les relations de travail entre les municipalités et les
policiers municipaux soient harmonisées avec celles des autres
employés municipaux.
Quelques mots encore, si vous me le permettez, sur le volet de la voirie
locale qui, pour nous, demeure indissociable de la réforme du 14
décembre dernier. Même si le transfert de la voirie locale n'est
pas abordé dans le projet de loi 145, l'UMRCQ considère qu'il
incombe au gouvernement, par la voie du ministre des Transports, de toute
urgence, de baliser les négociations qu'il entend mener avec les
municipalités au cours des prochains mois. Une déclaration
ministérielle, à cet effet, devrait donc prévoir une
opération en trois temps: établir, de concert avec chacune des
municipalités impliquées, les frais d'entretien réels et
la détermination d'un budget de réfection du réseau selon
un programme décennal; clarifier la politique du gouvernement concernant
le financement des travaux de réfection du réseau, de
répartition des budgets afférents et des montants d'aide aux
localités pour l'entretien annuel; négocier avec les
municipalités un protocole permettant de confirmer les modalités
d'un transfert du réseau local. (11 h 45)
Forts de leurs connaissances particulières de leur réseau
local et des contraintes climatiques qui en régissent l'entretien, les
élus municipaux s'interrogent sur le bien-fondé des moyennes
québécoises utilisées par le ministère des
Transports pour calculer les frais annuels transférés aux
municipalités.
Tout aussi préoccupante est la constatation que le gouvernement,
à toutes fins pratiques, a escamoté le problème de la
dégradation du réseau routier appelé à être
transféré. L'ensemble des investissements doit être
quantifié en préalable à toute négociation
gouvernement-municipalités en la matière. Compte tenu de la
nature même de la fonction appelée à être
déléguée, l'UMRCQ demande au gouvernement de
préparer un tel inventaire du réseau routier local en
région - MRC - conjointement avec les élus municipaux.
Les MRC qui regroupent déjà les municipalités
locales pour l'aménagement du territoire et les négociations avec
la CPTA offrent un cadre propice aux discussions entre le ministère des
Transports et les élus locaux. La classification fonctionnelle du
réseau avait déjà été abordée
à ce niveau et les bases de toute réforme en matière de
voirie locale devraient être posées en continuité avec les
orientations politiques gouvernementales qui ont déjà fait leurs
preuves.
Le projet de politique du 14 décembre a soulevé d'autres
inquiétudes. Que le gouvernement reconnaisse qu'il a une obligation en
matière de réfection du réseau, bravo! même s'il
faut encore aborder la quantification de la contribution de l'État. Les
modalités de la distribution des budgets alloués à cette
fin causent toutefois problème. Ainsi, une chose est d'ores et
déjà certaine. L'UMRCQ considère inacceptable que les
montants destinés à suppléer à la réfection
du réseau transféré soient attribués via
l'enveloppe discrétionnaire des députés. Dans une
perspective de saine gestion, il faut investir les sommes disponibles là
où les priorités le dictent. Qui d'autre que le responsable de
l'entretien et de l'aménagement peut être chargé
d'établir des projets d'intervention? Les municipalités
considèrent qu'avant tout le gouvernement doit établir un
système objectif et transparent face aux besoins pressants des
régions.
Le projet de loi 145 contient, par ailleurs, différentes mesures
découlant directement des propositions gouvernementales de
réforme rendues publiques le 14 décembre ainsi que divers
aménagements ponctuels aux lois municipales existantes. Je vous
réfère au texte de notre mémoire où nous faisons
état des modifications souhaitées par nos membres. En
résumé, voici nos principales recommandations: 1° Que la
Commission municipale, plutôt que le ministre des Transports, ait
discrétion pour accorder les exemptions en regard des taxes sur le
stationnement. 2° Que les contribuables des territoires non desservis par
un organisme public de transport en commun n'aient pas à
débourser la contribution de 30 $ pour l'immatriculation des
véhicules de promenade. 3° Que le gouvernement laisse aux
municipalités la discrétion de définir ou de
désigner des lieux ou des activités qui seraient exemptés
de l'imposition des droits sur les divertissements. 4° Que les
compensations tenant lieu de taxes payées par le gouvernement à
l'égard des écoles primaires et secondaires soient maintenues
à leur niveau actuel. 5° Que la nouvelle formule
prévoyant les critères généraux de
répartition de l'enveloppe du programme de péréquation
permette de fournir une aide adéquate aux municipalités les plus
défavorisées quant à leur richesse foncière per
capita en tenant compte, notamment, des revenus des contribuables et de leur
capacité de payer. 6° Que le gouvernement s'engage formellement
à assurer la permanence de l'aide financière accordée aux
municipalités à l'intérieur du programme de
péréquation. 7° Que l'inventaire de chaque lieu d'affaires
soit refait par l'évaluateur à tous les neuf ans comme c'est le
cas actuellement. 8° Que l'article 180 de la Loi sur la fiscalité
municipale soit modifié pour que le greffier ou le
secrétaire-trésorier de la municipalité puisse exiger le
paiement d'un tarif, déterminé par règlement du
gouvernement, pour la transmission à la commission scolaire de copies de
l'avis de modification du rôle.
Voilà donc l'essentiel des recommandations de l'UMRCQ. Nous
espérons que le gouvernement sera sensible à nos
représentations. Dans la conjoncture actuelle, le Québec ne peut
se permettre de laisser perdurer des relations aussi tendues entre le
gouvernement et les municipalités. Une correction importante s'impose et
la réforme doit être revue. Or, l'UMRCQ réalise qu'en
matière de sécurité publique particulièrement, les
politiques préconisées par les municipalités impliquent
pour le gouvernement un travail d'étude et de planification
important.
Les échéances que s'était données
initialement le Conseil des ministres risquent donc de ne pouvoir être
rencontrées. Une démarche de l'ampleur de celle qui est
envisagée pour réformer les services de sécurité
publique au Québec dicte que l'on procède avec un minimum de
circonspection. L'intérêt des Québécois et des
Québécoises ne permet pas de souffrir que l'on bâcle
l'adoption de mesures législatives qui marqueront profondément la
société régionale pour de nombreuses années
à venir.
Pour l'UMRCQ, il ne fait guère donc de doute que, compte tenu de
la complexité et de la problématique et par souci de formuler des
solutions équitables et durables, il est opportun de retarder l'adoption
du projet de loi 145 ou, du moins, des dispositions concernant la
sécurité publique. Le ministre des Affaires municipales doit,
sans plus de retard, les remettre sine die afin, tout particulièrement,
d'initier et de compléter de véritables négociations avec
les municipalités concernées et de pleinement mesurer les
implications des réformes préconisées au présent
mémoire.
Tout aussi significative pour le rétablissement de relations
fonctionnelles entre le gouvernement et les municipalités est la
clarification du nouveau partage de responsabilités en matière de
voirie locale qui est demandée par l'UMRCQ au nom de ses membres.
L'abandon pur et simple d'un réseau routier qui est essentiel à
la survie même des réglons du Québec est
Intolérable. L'état dégradé des équipements
routiers requiert au contraire une mobilisation conjointe de l'État et
des municipalités pour faire face à cette situation qui
hypothèque lourdement toute politique de développement
régional. Les membres de l'Union ne peuvent donc accepter les
demi-mesures et les Incohérences des propositions du 14 décembre
en matière de voirie locale.
La présente commission parlementaire est l'occasion
privilégiée qui s'offre au gouvernement pour jeter les bases
d'une relation renouvelée avec les municipalités du
Québec. Il faut espérer que les espoirs que les élus
municipaux placent dans la vision et la motivation des membres do
l'Assemblée nationale, face à une problématique) qui est
fondamentale pour l'administration publique en région, ne seront pas
déçus. Merci de votre attention.
Le Président (M. Garon): Alors, la parole est au
ministre.
M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de saluer le
président de l'Union des municipalités régionales de
comté du Québec ainsi que les personnes qui l'accompagnent ce
matin. Le mémoire que vient de nous résumer M. Nlcolet est un
mémoire très substantiel dont je ne puis que féliciter
l'organisme que M. Nlcolet représente. Je pense que c'est une
contribution importante à la démarche que nous poursuivons
ensemble et même si les jugements de fond demeurent sévères
à l'endroit du projet gouvernemental, je crois que la manière
dont ils sont formulés demeure éminemment civilisée et
ça n'a pas empêché non plus l'Union de formuler de
nombreuses propositions précises qui s'accordent très bien avec
ce stade où nous en sommes dans l'examen par le Parlement du projet
gouvernemental.
Par conséquent, mol, je n'ai que des félicitations
à adresser à l'Union des municipalités régionales
de comté du Québec au sujet de la pertinence de sa
présentation. J'aurais souhaité être d'accord à 100
% avec les auteurs du mémoire comme c'est toujours le cas, mais il y a
encore un certain nombre de points qui nous séparent. J'en mentionnerai
quelques-uns brièvement et, ensuite, quelques-uns de mes
collègues voudront intervenir aussi parce que, évidemment, les
questions intéressant les municipalités rurales sont du plus vif
Intérêt pour un très grand nombre de membres de la
députation ministérielle, y compris le ministre des Affaires
municipa les.
Je voudrais rappeler brièvement l'impact global de la
réforme. Je pense que j'ai formulé hier, dans un raccourci qui se
voulait le plus simple possible, l'impact réel de la réforme. Ce
qui est demandé aux municipalités, c'est de
financer par des décisions dont elles auront la
responsabilité des revenus additionnels de l'ordre de 252 000 000 $. Le
reste, il y a eu une réduction de la facture initiale. Il y a une partie
qui est assumée par des décisions du gouvernement ou de
l'Assemblée nationale. Ça fait 252 000 000 $ et nous avons fait
un calcul. L'évaluation totale de la richesse foncière au
Québec est de 252 000 000 000 $. Le calcul est facile à faire
pour un ingénieur comme M. Nicolet, ça donne un accroissement
moyen du fardeau fiscal, à supposer que tout s'en irait sur la taxation
foncière générale, de 0, 10 $ les 100 $
d'évaluation. je pense bien que tout de suite, quand on voit ce montant,
on se dit qu'il nous donne une très bonne idée du
caractère foncièrement modéré de l'ensemble des
mesures arrêtées ou, à tout le moins, envisagées par
le gouvernement. vous me direz, avec raison, qu'il s'agit d'une moyenne
abstraite qui ne saurait rendre compte d'innombrables variations qu'on
retrouvera d'une municipalité à l'autre. vous avez parfaitement
raison là-dessus. mais nous avons également prévu
plusieurs mesures égalisatrices qui viseront à réduire au
maximum les inégalités trop flagrantes qui découlaient
inévitablement de l'approche retenue par le gouvernement. c'est bien
simple à comprendre. je l'ai expliqué à maintes reprises.
nous partons d'une situation qui est inégale au départ. nous ne
pouvons pas faire une situation égale à partir de cette
situation-là. en matière de voirie, par exemple, vous avez un
grand nombre de comtés du québec où la voirie locale est
payée à 100 % par le gouvernement depuis un temps
immémorial, d'autres endroits c'est 90 %, d'autres endroits c'est 50 %,
d'autres endroits c'est 25 % et 10 %.
Je ne me souviens pas qu'il y ait beaucoup de représentations
formulées ces derniers mois, y compris par l'UMRCQ, qui aient
déploré cette situation. On a tous vécu avec cette
situation-là, sans trop parler pendant des années. Et
moi-même je ne savais pas que mon propre comté était
désavantagé à ce point, depuis très longtemps. Je
l'ai appris en faisant les calculs qui ont préparé la mise au
point des mesures gouvernementales.
Alors là, nous disons: À l'avenir, ils seront tous sur un
pied d'égalité partout à travers le Québec. Il n'y
aura plus de dossiers cachés. Il n'y aura plus de situations
privilégiées qui tiennent à l'influence du
député, ou du ministre, ou tout. On va avoir quelque chose qui va
obéir aux mêmes critères partout à travers le
Québec. C'est formidable ça, c'est bon. Excepté que pour
celui qui était financé à 100% et puis celui qui
était financé à 25 %, l'impact ne peut pas être le
même. C'est évident. Si l'impact était le même,
ça veut dire qu'on prolongerait, on perpétuerait
indéfiniment l'inégalité qui existait.
Alors, je pense qu'au moins, de ce point de vue-là, nous
accomplissons un progrès considéra- ble. Il y a toutes sortes de
considérants dont il faut évidemment entourer cet objectif que
j'estime éminemment noble. Et vous avez formulé des propositions
très intéressantes dans votre mémoire, dont mes
collègues auront l'occasion de discuter avec vous tantôt, à
propos de la voirie en particulier. Soyez assurés que nous recevons avec
beaucoup d'intérêt les propositions que vous formulez à
propos de la voirie. Je pense qu'on ne sera pas tellement loin d'une
convergence pratique capable de produire de bons résultats, après
que nous aurons continué à discuter. D'ailleurs, dans le projet
de loi, il n'est pas question de la voirie locale. Nous avons toujours dit que
cette partie du programme s'appliquera à compter du 1er avril 1993. Elle
ne nécessitera probablement pas d'intervention législative,
sûrement pas à ce stade-ci.
Par conséquent, la voie est ouverte pour les discussions et puis
je pense que nous allons continuer de nous rapprocher. Et puis votre
mémoire nous aide de ce point de vue-là, je le souligne avec
éminemment de plaisir.
Et je ne veux pas m'attarder sur tout le reste, on pourrait en discuter
longtemps, on l'a fait au cours des derniers mois. Nous en sommes à un
stade plus fonctionnel actuellement. Vous vous attendez à ce que je
commente un petit peu les propositions relatives à la
sécurité publique auxquelles vous accordez une importance
centrale dans votre mémoire. Je vais le faire très
brièvement.
Je pense que, dans l'ensemble, le principe de la responsabilité
municipale, nous l'affirmons clairement dans le projet de loi, vous proposez
certaines modifications que nous sommes disposés à examiner. Il y
en a une cependant qui sera difficile à accepter là. Si vous nous
demandez de définir avec trop de précisions les services de base
dans l'immédiat et que vous nous demandiez de modifier l'article 64 en
particulier d'une manière telle que ça puisse conduire à
des facturations à l'acte policier, je ne voudrais pas que vous comptiez
sur ma collaboration, parce que là vous allez nous embarquer dans un
fouillis inextricable. Je ne veux pas que nous allions vers une facturation
à l'acte. On a ça dans l'assurance-maladie. Si ça avait
été de moi, on aurait un tout autre système. Mais je
n'étais pas là "at the creation" comme on dit, à
l'origine. Je pense que c'est un système qui entraîne une
prolifération d'opérations comptables parfaitement artificielles,
dans un très grand nombre de cas. Et je ne voudrais pas qu'on se lance
dans cette voie-là en ce qui touche la police.
Cependant, le concept de services de base est utilisé même
dans le texte du projet de loi, je sais que vous me soulignerez ça avec
raison. C'est un paragraphe qui me fatigue un petit peu d'ailleurs, et
j'attends des commentaires là-dessus. J'aime mieux partir d'une
situation de fait. Je vous le dirai franchement. Nous avons depuis toujours 92
% des municipalités du Québec
qui comptent sur la Sûreté du Québec pour leur
offrir le service de protection policière. Je pars de ça. Je me
dis: ils ne paient rien depuis des années, on va leur demander une
contribution partielle au coût des services. Mais nous affirmons en
même temps le droit d'une municipalité de décider qu'elle
se dotera de son propre corps policier. Puis nous allons aider les
municipalités qui manifesteront cette intention à réaliser
leur désir, dans la mesure où il sera financièrement
accessible pour elles.
Et ça, c'est le principe de base que je voulais énoncer.
Les modifications que vous proposez, pourvu qu'elles se raccrochent à ce
principe de base, on va les étudier. Je ne peux pas ce matin commencer
à discuter chacune des modifications techniques que vous proposez. Je
vois que M. Lemay vous accompagne. M. le Président, nous connaissons
bien M. Lemay, nous connaissons sa compétence en matière
d'organisation policière. Vous avez trouvé un conseiller qui vous
a aidé à donner une tournure très substantielle à
votre mémoire sur ce point précis. (12 heures)
On serait prêts à avoir une rencontre avec vos
représentants, dès les prochains jours, afin d'étudier
chacune des modifications que vous proposez à des dispositions
précises du projet de loi. Maintenant, je ne peux pas acquiescer
à la proposition que vous formulez, parce que je vois très bien
où ça conduit. Vous dites: Attendez tout ça, ne faites
rien avant le 31 décembre, laissez les municipalités se
présenter et tout. Mais, les municipalités, elles ont eu 20 ans
pour se présenter. Ça fait 20 ans que le régime actuel
existe, bien plus que ça même. Celles qui ont voulu le faire nous
l'ont dit, et nous avons toujours répondu avec beaucoup d'ouverture aux
invitations qui nous étaient faites par des municipalités. Mais
là, je ne veux pas que s'engage une course à obstacles d'ici le
31 décembre, ça, je pense que ce n'est pas une bonne proposition,
pour être franc avec vous. Mais, partout, partout où nous aurons
des garanties raisonnables d'intentions sérieuses, nous allons les
examiner avec toute l'ouverture souhaitable.
Je voudrais ajouter un dernier point. Vous mentionnez parmi vos
résolutions, M. Nicolet, le désir de l'Union concernant la
faculté qui pourrait être donnée d'instituer des
expériences-pilotes en matière de protection policière
régionale. Je n'entends pas ouvrir un nouveau chapitre de la vocation
des MRC ce matin, en matière de protection policière, mais j'ai
eu l'occasion de causer de ce sujet avec vous ces temps derniers.
Personnellement, je pense qu'il serait une bonne chose que nous puissions avoir
des expériences sérieuses, des expériences témoins.
On ne recourt pas assez à cette méthode-là, au
gouvernement. On lance, des fois, des plans qui vont s'appliquer à tout
le territoire sans avoir fait des expériences témoins. Des fois,
ça aide beaucoup. Et, sur ce point précis, nous serons
intéressés à examiner la possibilité d'une ou deux
expériences témoins qui pourraient nous fournir un
éclairage utile quant aux perspectives d'avenir. Moi, je ne sais pas ce
qui en sera de l'organisation policière dans 10 ou 20 ans, je ne suis
pas particulièrement visionnaire, étant trop absorbé par
le présent, malheureusement. Mais je peux vous assurer que j'ai l'esprit
très ouvert là-dessus. Je le sais, le régime que nous
avons actuellement n'est pas parfait, n'est pas définitif ni complet
même. Nous avons beaucoup à faire pour le perfectionner, à
condition de ne pas vouloir tout chavirer sous prétexte qu'il arrive une
demande de contribution qui reste modeste, tout compte fait, étant
donné surtout les programmes d'égalisation qui seront
Institués. J'ai déjà mentionné que je serais
intéressé à avoir l'avis de l'Union des
municipalités régionales de comté en particulier, parce
que les municipalités qui bénéficieront de mesures
égalisatrlces seront surtout de petites municipalités faisant
partie de l'UMRCQ. il nous intéressa d'avoir l'avis de l'umrcq sur les
formules précises qui seront retenues. je pense que l'impact de tout
cela va atténuer très sensiblement les effets
appréhendés de l'accord. alors, je vous dis que nous allons
continuer la discussion avec vous. malheureusement, le temps très
limité dont nous disposons ce matin ne me permet pas d'entrer dans tous
les détails des propositions. je veux que mes collègues puissent
discuter avec vous. mais nous reviendrons peut-être, plus tard dans
l'échange, sur la partie de la police.
Le Président (M. Garon): Je voudrais tout de suite
régler une question. Comme c'est clair qu'on n'aura pas
écoulé le temps qui est prévu avec l'UMRCQ d'Ici 12 h 30,
est-ce qu'il y a consentement pour continuer, pour dépasser 12 h 30?
autrement, je vais partager également le temps d'ici 12 h 30 entre les
parties.
M. Ryan: M. le Président, moi, je n'ai aucune objection,
mais je vous préviens que je devrai quitter vers 12 h 30, 12 h 35, parce
que j'ai fixé un rendez-vous à des maires et j'ai une
réunion à 13 heures qui suit ensuite.
Le Président (M. Garon): Non. Non.
M. Ryan: On pourra continuer la discussion. Mais, d'habitude,
l'Opposition...
Le Président (M. Garon): Après la période de
questions?
M. Dufour: est-ce qu'on peut demander, m. le président, au
président de l'union des municipalités régionales de
comté s'il sera ici cet après-midi?
M. Nicolet: Oui. M. le député de
Jonquière,
je suis ici à votre disposition, si vous le désirez.
M. Dufour: M. le Président, vis-à-vis de
l'affirmation ou du positionnement du président de l'Union des
municipalités, je proposerais qu'on termine les travaux à 12 h 30
et qu'on recommence immédiatement à parler après la
période des questions, mais la période des questions ne dure
jamais jusqu'à 15 h 30. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on
commence à 15 h 15 et qu'on puisse bien travailler avec l'Union des
municipalités régionales de comté du Québec. C'est
un organisme important. Et moi, je pense que, quand le ventre crie, on n'a pas
nécessairement les oreilles ouvertes, parce que même quand on a le
ventre plein, on a tendance à oublier et à ne pas écouter.
Ça fait qu'on devrait se donner une bonne plage pour pouvoir travailler
correctement.
Le Président (M. Garon): alors, je vais partager le temps
d'ici 12 h 30 également entre les deux parties, la même chose en
commençant cet après-midi.
M. Dufour: Ça va.
Le Président (M. Garon): M. le ministre.
M. Ryan: Je laisserai la parole à ma collègue, la
députée de Mégantic-Compton, qui voudrait intervenir, puis
le député de Montmagny-L'Islet, aussi.
Mme Bélanger: Merci, M. le ministre. M. Nicolet,
étant donné que vous êtes un résident de l'Estrie,
vous connaissez très bien Mégantic-Compton et vous savez que
c'est un grand territoire, plusieurs municipalités, et que le
réseau routier est peut-être la mesure qui m'inquiète le
plus ou sur laquelle je me suis le plus penchée pour connaître les
impacts financiers qu'auront à subir mes municipalités.
D'ailleurs, 2730 kilomètres vont être remis à mes
municipalités. Mais on sait que ce transfert de la voirie n'est pas
abordé dans le projet de loi et que l'UMRCQ considère qu'il
incombe au gouvernement, par la voix du ministre des Transports, de baliser les
négociations qu'il entend mener avec les municipalités au cours
des prochains mois. J'aimerais que vous m'expliquiez plus en détail de
quelle façon vous voulez aborder ces négociations et j'aimerais
aussi que vous m'expliquiez pourquoi vous considérez inacceptable que
les montants destinés à suppléer à la
réfection du réseau routier transféré soient
attribués dans l'enveloppe des députés. Et vous dites, un
peu plus tard, dans une perspective de saine gestion, est-ce que vous n'avez
pas confiance en la gestion des députés et est-ce que vous croyez
que les députés ne connaissent pas leur réseau routier?
Hier, lors de l'audition du président du l'UPA, lui, il a presque
affirmé que c'étaient les députés qui connaissaient
le mieux leur réseau routier. Alors, j'aimerais que vous nous expliquiez
un peu cette prise de position et cette peur que ce soient les
députés qui gèrent l'enveloppe pour aider au réseau
routier, d'ailleurs, c'est une coutume qui est en voie depuis fort longtemps,
je pense.
M. Nicolet: Mme Bélanger, j'aimerais répondre
à votre deuxième question avant la première.
Peut-être considérez-vous ça une boutade, mais, vous savez,
le coeur a ses raisons que la raison parfois ne connaît pas. Et j'ai bien
peur que... Malheureusement, l'expérience a prouvé que les brebis
qui se présentent devant leur député n'ont pas toutes la
même toison et que, ma foi, malheureusement, parfois, la tonte est faite
suivant la couleur de la toison. En fait, je pense que notre argumentation va
dans le sens de dire que, essentiellement, si un administrateur public est
responsable d'une fonction, en l'occurrence l'entretien d'un bout de route, que
ce soit en kilomètre, que ce soit 50 kilomètres ou 150
kilomètres, cet administrateur doit lui-même être
également responsable des améliorations apportées à
ce réseau tout simplement parce que les investissements consentis au
niveau de l'amélioration ont un effet direct sur les frais d'entretien
et vice versa. Donc, ce sont deux fonctions qui sont indissociables et qui
devraient fondamentalement relever du même décideur et dans la
même enveloppe budgétaire. Il en va, avant tout, d'une question de
cohérence administrative et de responsabilité. Je ne vais pas
vous rappeler le nombre de téléphones que votre bureau de
comté doit recevoir, surtout pendant la période du dégel
où les élus municipaux en sont venus à un mécanisme
de défense absolument parfait: appeler le bureau du
député. Je joue à ça comme tous mes
collègues en milieu rural. Quand le chemin défonce et qu'on a des
gens qui sont en furie parce que le chemin défonce, on vous renvoie la
balle. Ne croyez-vous pas que le moment serait venu de mettre de l'ordre dans
tout ça? Si vous ramenez la responsabilité au niveau des
élus locaux, donnez-leur l'entière responsabilité pour
qu'on cesse de jouer à ce jeu de ping-pong. C'est ça l'essentiel
de notre argumentation. Soyons consistants, cohérents et donnons
à celui qui doit rendre des comptes la responsabilité et les
outils pour mener, planifier et réaliser. C'est essentiellement
ça.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Jonquière.
Mme Bélanger: Bien, un instant, s'il vous plaît!
Le Président (M. Garon): Non, mais... Mme
Bélanger: Bien, écoutez, monsieur...
Le Président (M. Garon): ...si je ne veux pas avoir de
troubles, là, il faut marcher avec les règles du jeu qu'on a.
Mme Bélanger: Bien, non, il n'a pas répondu
à ma première question.
Le Président (M. Garon): Oui, mais qu'est-ce que vous
voulez que je fasse? Alors, vous aurez encore du temps après, en
revenant, au retour, puisque je divise également le temps avant 12 h 30:
18 minutes et demie et 18 minutes et demie et vous aurez chacun 10 minutes en
revenant. Alors, M. le député de Jonquière.
M. Dufour: M. le Président, je suis heureux de rencontrer
le président de l'Union des municipalités régionales de
comté et son équipe. Je voudrais lui dire que j'ai admiré
beaucoup sa position et son courage vis-à-vis de la position
gouvernementale concernant le délestage des comptes à payer sur
le dos des municipalités.
Je pense que sa position a été cohérente du
début à la fin et, encore aujourd'hui, on sent que c'est le
couteau sur la gorge, l'épée sur la tête qu'il vient faire
des propositions au gouvernement. La démonstration n'a pas à
être amplifiée. Vous avez démontré hors de tout
doute qu'il n'y a pas eu de négociations. Il y a eu une volonté
d'imposer et, ça, votre mémoire en fait état largement. Il
y a peut-être un point que je voudrais soulever dans les propos du
ministre quand il dit: Vous comprenez, c'est seulement que 0,10 $ sur
l'évaluation. Est-ce qu'il a la mémoire aussi courte pour ne pas
penser que pour celui qui a été a l'origine des 0,13 $ l'an
passé, 0,13 $ plus 0,10 $, ça fait 0,23 $ et les 150 000 000 $
dont on ne parle pas, ils sont aussi sur le dos des contribuables? Je pense
bien que les gens qui demeurent en région, les 30 $ qui vont leur
être imposés, c'est aussi dans la poche du contribuable. Si on
fait l'addition, c'est 0,29 $. Petit à petit, l'oiseau fait son nid,
mais, petit à petit, le gouvernement vient vider vos poches et vient
vider nos poches; 3 319 000 000 $ de nouvelles taxes depuis 2 ans et il
faudrait sourire, continuer à dire: On veut confier notre argent
à l'État. Ce que vous nous dites, comme message, c'est qu'on
devrait bien mieux se gérer que de se faire gérer par les autres.
C'est ça votre message, il est clair.
Le ministre a de la difficulté à faire cette gymnastique.
Est-ce que c'est parce qu'il était habitué de négocier
avec des gens qui n'avaient pas de pouvoir? Parce que, dans le fond, au
ministère de l'Éducation, tout est dicté par
Québec. Il n'y a pas beaucoup d'autonomie dans les commissions
scolaires. Ce n'est pas les 320 000 000 $ de l'an passé qui ont
renforcé les commissions scolaires. C'est tellement vrai que je connais
des commissions scolaires qui se sont opposées à la
réforme, parce que, dans le fond, qu'est-ce qu'elles font? Elles
gèrent les écoles et elles ont le contrôle sur les
concierges pour faire l'entretien. C'est ça, l'autonomie qu'on a
donnée et on voudrait bien rapetisser autant les municipalités.
Parce que ce qu'on commence aujourd'hui, quand on va le finir? Le ministre peut
bien nous donner sa version en disant: Pas durant le temps qu'on sera au
pouvoir. Mais pour combien de temps encore? Quand y aura-t-il une
élection et quand recommencera la ronde? Et c'est loin d'être
fini.
Vous savez bien que l'appétit du gouvernement, c'est
incommensurable. Les taxes temporaires, il n'y a rien de plus permanent que ce
qui est temporaire pour un gouvernement. M. le président, je veux vous
réitérer que j'ai apprécié votre courage et je
comprends aussi que vos propositions sont teintées de gros bon sens.
À quoi ça sert d'avoir des manifestations pour donner la place au
monde rural et lui dire qu'il est en train de mourir? À quoi ça
sert de faire des statistiques pour démontrer qu'il y a 20 %, 25 % ou 30
% de chômage et tout le monde est en train de crever? La meilleure
médecine qu'on peut leur donner, c'est de les faire mourir plus vite.
C'est quoi le choix de votre cas? C'est vraiment le pendu. Est-ce que vous
voulez avoir une corde de lin ou une corde un peu plus grosse? C'est un peu
ça, vous êtes condamné. (12 h 15)
Le ministre, malheureusement, accentue ce mouvement-là,
probablement pas par mauvaise volonté, mais je suis presque convaincu
qu'il est d'accord avec son gouvernement. Il me semble que c'est un travail
qu'il ne peut pas refuser, parce qu'il n'a jamais été pour la
réforme municipale en 1979-1980. Il ne l'a jamais acceptée, de
ses propres paroles. Il nous a dit aussi que la commission parlementaire, les
principes étaient déjà acceptés: 400 000 000 $.
C'était le travail qu'il avait à faire.
On peut peut-être discuter des modalités, mais pas des
principes. J'ai toujours cru, parce que la démocratie c'est ça,
que la commission parlementaire était là pour améliorer et
bonifier des projets de loi. Depuis deux ou trois jours, il n'y a pas
grand-chose à faire, si ce n'est qu'il y a certains intervenants qui
sont venus démontrer hors de tout doute que c'était inapplicable.
Taxe du stationnement, ça va créer des iniquités.
Transport en commun, on étouffe Montréal et d'autres grands
centres. Malheureusement, des cris ou ce que vous nous dites ce matin, on ne
l'a pas entendu assez souvent. La commission parlementaire est portée
plutôt vers les gros centres, les gros ensembles. L'UPA est venue nous
dire à peu près la même chose, pas dans les
modalités, mais elle est venue nous dire qu'elle aussi était
affectée par les mesures que le gouvernement fait. Est-ce que le
gouvernement croit encore en l'agriculture au Québec?
C'est beau, les prétentions ou les grandes professions de foi sur
la place publique, les
paroles qu'on peut dire. Entre la parole et l'acte, c'est quoi?
Montréal est venu nous dire, parce que ça a été les
propos du ministre, qu'effectivement les dépenses gouvernementales
augmentaient plus vite que les dépenses municipales. Donc, à ce
moment-là, ça voulait dire que les municipalités avaient
une marge de manoeuvre. Plutôt qu'attribuer ces actions à la
connaissance du milieu, à l'économie que les municipalités
pouvaient avoir avec leurs contribuables, on les pénalise parce qu'elles
ont été des bons administrateurs ou parce qu'elles n'avaient pas
les moyens. C'était ça la logique qui était
imposée.
La démonstration est claire et évidente, puis quand vous
dites: Est-ce qu'on ne devrait pas s'asseoir pour travailler ensemble? Eh bien,
est-ce une question de vie ou de mort pour le gouvernement, ce montant d'argent
là? Ce n'est pas une question de vie ou de mort pour le gouvernement,
c'est une question de vie ou de mort pour les municipalités. Comment
va-t-on rétablir ce partenariat-là? Quelle confiance, demain
matin, les municipalités pourraient-elles avoir en un gouvernement qui
peut changer les règles du jeu à n'importe quel temps? Mettons
que c'est un mandat qui va se prolonger jusqu'à deux ans, mais j'ai
l'impression qu'on ne sera peut-être pas rendu à deux ans.
Ça va peut-être aller plus vite, parce qu'il y a un prix à
payer et vous le dites dans votre mémoire. Je suis convaincu que
ça va ère la mort du gouvernement aussi ou sa disparition pour un
certain temps.
Ce serait normal. Ça veut dire que, quand on gouverne, on doit
avoir aussi la responsabilité de nos actes. Dans ce projet de
réforme, ce n'est pas vous qui avez la responsabilité,
malgré tout ce qu'on dit, parce qu'être responsable, ça
veut dire avoir le pouvoir de décider. On ne vous donne pas le pouvoir
de décider, donc vous n'en êtes pas responsable. Le gouvernement
devra maintenir et garder sa responsabilité et je fais confiance aux
administrateurs municipaux pour mettre la responsabilité à la
bonne place.
On ne dit pas aux municipalités: Allez-vous-en dans le paysage,
on dit: Vous continuez à faire votre travail, mais mettez la
responsabilité où elle doit être. C'est ça qu'on vit
depuis trois mois, six mois. On dit au ministre: Pourquoi n'y a-t-il pas de
véritables tables de concertation? Pourquoi on ne s'assied pas et on ne
discute pas? Bien non. Là, il a dit: Écoutez un peu, je discute
avec des municipalités et elles semblent comprendre. Tous les
intervenants, depuis trois jours, viennent nous dire: On n'est pas d'accord
avec votre réforme. Ça n'a pas de bon sens. Qu'on le dise avec un
sourire ou qu'on le dise fâché, c'est juste une question de
présentation. C'est la même représentation et il y a des
gens qui ont moins de passion dans leurs propos et il y en a d'autres qui en
ont plus. Mais c'est le même message, à moins que je ne comprenne
rien.
C'est évident que tous les intervenants sont venus nous dire
qu'ils ne sont pas d'accord avec la réforme, puis le ministre persiste
à dire: C'est une bonne réforme. Il y a quelque chose qui ne
marche pas. Il y a un problème dans le problème. Je ne sais pas
là. Ne trouvez-vous pas qu'on devrait commencer à se faire
convaincre, à dire: II y a peut-être un recul qu'on doit faire? Ce
n'est pas scandaleux qu'un gouvernement recule quand ça n'a pas de bon
sens. Quelqu'un vous dit: Je vais te tirer à l'eau et il sait que vous
ne savez pas nager. Vous lui dites: Fais-moi pas ça, je vais me noyer.
Il dit: C'est correct, je change d'idée. Je ne t'enverrai pas à
l'eau. Je pensais que c'était pour rire ça. On va regarder
ça d'un autre angle.
Je déplore vraiment le manque, parce que sous le principe ou sous
le couvert qu'on a bien de l'ouverture... Est-ce que vous croyez
sincèrement et honnêtement que la nature des propositions que vous
faites ce matin, le ministre a le temps de les regarder, de les analyser et de
les mettre en pratique dans son projet de loi? Est-ce que vous croyez
ça?
M. Nicolet: C'est pourquoi la réponse est simple, M.
Dufour. La réponse, c'est évidemment: Non. C'est pourquoi nous
avons, au niveau de nos conclusions, demandé le report des dispositions
concernant la sécurité publique, en particulier, parce que ce
sont celles-là qui touchent, d'une façon plus directe et, pour
employer un terme à la mode, ce sont celles qui interpellent de
façon très directe toute la conception que se font les
municipalités de leurs responsabilités face à leurs
concitoyens. C'est la vie même du tissu social régional qui va
être influencée de façon profonde par les séquelles
de cette réforme.
M. Dufour: Est-ce que, M. le président de l'Union des
municipalités, vous croyez que ça va vous responsabiliser plus,
la réforme qu'on vous propose? Est-ce que vous vous sentez plus
responsable par rapport à ce qu'on veut vous imposer et qu'est-ce que
vous pensez des montants qu'on veut vous transférer? Est-ce que vous
croyez que c'est quelque chose de facile à avaler? Qu'il n'y a pas de
problème là-dedans?
M. Nicolet: C'est une question qui, en toute objectivité,
est complexe. Il est évident que, dans sa formulation actuelle, la
réforme n'est pas de nature à responsabiliser qui que ce soit.
Par contre, nos membres l'ont dit et l'ont répété à
plusieurs reprises. Au-delà d'un rôle de perception, de percepteur
de taxes qu'on semble vouloir leur confier actuellement, ils aspirent à
s'impliquer véritablement, de façon beaucoup plus directe dans la
gestion du quotidien, du cadre de vie de leurs concitoyens.
C'est pourquoi les réactions de l'Union et des membres de l'Union
face à tout le volet voirie locale ont été beaucoup plus
nuancées. On
a toujours dit: II y a... Et ça rejoint un peu les propos de M.
Ryan, tout à l'heure, à l'effet qu'il y avait matière
à révision en profondeur dans toute cette problématique de
la façon dont est géré le réseau routier au
Québec.
Où j'ai, par contre, certains désaccords avec les propos
du ministre, c'est quand il dit qu'il faut trancher et corriger certaines
injustices par une intervention chirurgicale soudaine et brutale. Je crois que,
actuellement, l'état des régions est tel qu'un choc
postopératoire peut être critique. On corrige des injustices, mais
il faut se donner le temps de permettre à l'organisme de les diriger. Et
ce qu'on tente de faire par le biais de la réforme, c'est, du jour au
lendemain, de corriger une certaine soi-disant iniquité et d'instaurer
un nouveau système dans un laps de temps qui ne permet tout simplement
pas a l'économie régionale d'y faire face et de faire les
ajustements qui s'imposent. Et je crois qu'une démarche de l'ampleur de
celle qui est envisagée, même si, en bout de piste, elle peut
produire une meilleure gestion de la voirie locale, pour ne parler que de ce
volet-là, il faut véritablement... et ça rejoint... Mme
Bélanger n'est plus là, mais la première question qu'elle
m'avait posée, comment est-ce que je crois qu'on devrait y arriver,
c'est véritablement en se donnant un programme de travail conjoint pour
faire l'inventaire de la situation pour quantifier l'entretien et les
investissements, de manière à ce que tous et chacun puissent
évaluer l'ampleur de la tâche à laquelle ils doivent
s'adresser et que, conjointement, on en fasse un projet collectif de
société parce que le réseau routier est à la base
même de la vie des régions.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Dubuc.
M. Morin: M. le Président, je voudrais féliciter le
président de l'UMRCQ pour, évidemment, la rigueur de son
mémoire à travers une critique peut-être
sévère, mais quand même... Il n'a pas hésité
à aller au-delà de la forme, au-delà de l'aspect purement
financier, mais aller vraiment sur le fond des choses. Je voudrais quand
même poser une question sur un aspect, une de ses recommandations, qui
m'inquiète un petit peu. C'est concernant la proposition que vous faites
par rapport à la voirie locale, concernant évidemment une
négociation avec les municipalités, parce que j'y vois un danger.
Vous connaissez la disparité des municipalités. On connaît
comment le gouvernement pourrait tirer profit de négociations un peu
hâtives et pourrait, je ne sais pas, les justifier ou les invoquer pour
imposer ce genre de protocole aux autres municipalités. Bien sûr,
je vois que vous appréhendez un petit peu le danger puisque vous
proposez qu'on balise les règles du jeu au départ. Alors, ma
question est la suivante: Est-ce que cette condition, à l'effet qu'on
doit baliser les règles du jeu dès le départ, est
conditionnelle, obligatoire, avant tous les préalables, à toute
négociation avec les municipalités? Est-ce que cette
entente-là sur les règles du jeu devrait se faire, je
présume, avec l'UMRCQ avant que le gouvernement entreprenne toute forme
de négociation avec les municipalités? Dernier aspect, quels
seraient les principaux principes sous-jacents à ce balisement des
négociations?
M. Nicolet: Depuis le début janvier de cette année,
donc tout de suite après le dépôt des propositions du 14
décembre dernier, nous avons demandé et nous avons tenu une
rencontre au niveau sous-ministériel, où étaient
présents le sous-ministre des Affaires municipales, le sous-ministre du
ministère des Transports, le sous-ministre adjoint de la
Sécurité publique et où nous avons abordé les
principaux aspects de la réforme. Nous avons, à cette occasion,
demandé au sous-ministre des Transports de véritablement
concevoir toute cette réforme dans la perspective que vous avez
abordée dans votre déclaration. Il nous semble essentiel que,
véritablement, on s'entende sur le contenu du panier à
provisions. Qu'est-ce qu'il y a là-dedans? Et, j'insiste, ce n'est pas
une négociation qui peut se mener au central. C'est une
négociation qui doit se mener en région et la seule façon
d'impliquer de façon constructive le milieu municipal dans toute la
réforme sur la voirie, c'est de véritablement asseoir, d'une
part, le ministère des Transports qui a la compétence technique
et qui a quand même l'expérience de la gestion du réseau et
les élus régionaux ou locaux, sans distinction. Mais il faut
regrouper ces gens sur le terrain, qu'ils s'entendent sur, d'abord, la nature,
la longueur, les routes à transférer, les modalités
d'entretien, comment toute cette complexité de mécanismes de
gestion va effectivement être transférée. Il y a des
dépôts du ministère des Transports, il y a certains
équipements, il y a certains approvisionnements au niveau du gravier,
des matériaux. Tout ça qui intervient de façon très
concrète dans les budgets d'administration d'un réseau local.
Toutes les modalités qui entourent ce transfert doivent
être débattues non pas au central en vertu de politiques dont on
mesure mal les impacts, mais il va falloir que les gens qui sont appelés
à s'impliquer d'ici quelques années dans l'administration de ce
réseau le mesurent et le comprennent. Et ce n'est que de cette
façon-là que les élus municipaux pourront
véritablement vous dire: Oui, ça a du sens, ça n'a pas de
sens. Sans ça, on parle dans le vide. C'est vraiment un exercice qui se
fait sans filet, actuellement. Et ce n'est que dans la mesure où,
véritablement, ces bases seront posées - et ça
répond à votre première question - que, pour nous, il est
raisonnable de s'asseoir et de parler avec le gouvernement, une fois qu'on aura
fait la synthèse de tout ça.
Le Président (M. Garon): Alors, je vous remercie, M. le
président. Je vais demander... Je vais suspendre les travaux
jusqu'après les affaires courantes. Nous allons demander à
l'Assemblée nationale que la convocation se fasse immédiatement
après les affaires courantes pour qu'on puisse faire les 20 minutes qui
restent, c'est-à-dire 10 minutes au parti ministériel, 10 minutes
à l'Opposition, avant d'entamer les travaux avec l'autre groupe,
à 15 h 30. De sorte que, normalement, on devrait se retrouver ici autour
de 15 heures, et on n'aura pas de retard sur notre horaire pour le reste de la
journée. Je l'espère. Je vous remercie.
Alors, si les députés peuvent être ici
immédiatement après les affaires courantes.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprisée 15 h 18)
Le Président (M. Garon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Si on veut ne pas retarder tout le monde, il faudrait commencer
immédiatement. J'avais la réputation... Je vais dire au ministre
que j'avais la réputation d'être discipliné, mais je
m'aperçois que j'étais un enfant d'école dans ce
sens-là.
Comme il nous reste 20 minutes, 10 minutes au parti ministériel,
10 minutes à l'Opposition, je vais demander immédiatement, M.
Nicolet, comme vous êtes ïci avec les gens qui vous accompagnent, au
ministre des Affaires municipales d'ouvrir le feu.
M. Gauvin: M. le Président.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Gauvin: Merci. J'aimerais... D'abord, à la lecture de
votre mémoire et à la présentation que vous avez faite ce
matin, M. Nicolet, je suis très fier, comme député et
comme représentant d'un comté rural, de constater que vous avez
apporté certaines suggestions qui sont très intéressantes
d'abord pour les députés. Ne serait-ce que pour permettre
à M. le ministre, en commission parlementaire, de travailler,
d'étudier le projet de loi article par article. Je vous dis, à ce
moment-ci... Je pense que la meilleure façon... Ce que les
députés souhaitaient justement, c'était que les
représentants du monde municipal puissent nous transmettre...
Probablement, si on avait pu il y a quelques semaines... Ce que
déjà vous proposez ce matin en leur nom, ça aurait
aidé la députation ou les députés, mes
collègues, ici, à ce niveau-ci.
J'aimerais revenir sur l'autre point que vous avez soulevé au
niveau du questionnement du dossier de la police. Je pense qu'on pourrait
convenir ensemble que, déjà, à la présentation de
ce transfert de responsabilités au niveau de la police,
c'est-à-dire une participation financière des frais,
déjà l'attitude, et je parle au niveau de ma région, ce
qu'on a pu constater, l'attitude de la Sûreté du Québec est
déjà très différente et plus attentive aux
réactions des municipalités. Vous savez très bien que
chacune des municipalités a eu des réactions assez
différentes les unes des autres, mais qui nous permettent justement de
constater que, quand on dit que les municipalités n'auraient rien, n'ont
pas de pouvoir sur le service de police de la Sûreté du
Québec, la meilleure démonstration est celle-ci, justement
l'expérience qu'on vient de vivre. Le plus grand pouvoir sur un corps
policier, c'est peut-être l'opinion publique.
Suite au débat qu'il y a eu au niveau des municipalités,
déjà l'opinion publique nous a permis de constater que la
Sûreté du Québec était très sensible, et
j'aimerais avoir vos commentaires à ce niveau-là.
M. Nicolet: M. Gauvin, je vous remercie de votre intervention.
C'est toujours avec plaisir que je m'adresse à un ancien
collègue, confrère et ancien membre de notre Union, maire d'une
municipalité rurale, donc quelqu'un qui connaît intimement le
milieu que nous représentons. Ça me peine doublement de devoir
être en désaccord avec votre propos et de devoir vous dire que,
fondamentalement, oui, bien sûr, il y a ce qu'on pourrait appeler,
présentement, une opération charme entreprise par la
Sûreté du Québec en région. Je peux vous faire
état de demandes de rencontres de la part de la direction des
différents postes régionaux de la Sûreté du
Québec qui, actuellement, s'affairent à rencontrer les conseils
des maires, au niveau des MRC, pour établir un certain climat de
dialogue. Là-dessus, je confirme effectivement vos propos à
l'effet qu'il y a une ouverture nouvelle face aux municipalités. Par
contre, je me dois de vous dire que, dans notre perspective, cela ne change
rien à la relation fondamentale qui serait instaurée par
l'adoption du projet de loi qui, effectivement, nous fait payer pour un service
sur lequel, formellement et techniquement, nous n'avons aucun contrôle.
Nous nous retrouvons donc dans la position où nous devons taxer pour de
l'argent qui sera dépensé par d'autres; là-dessus, je me
réfère à la citation de M. Johnson à
l'Assemblée nationale, à laquelle je faisais
référence ce matin.
M. Gauvin: Peut-être pour revenir... Évidemment, je
dois admettre, comme député, que c'est un dossier qui pose un
certain questionnement. Au niveau des élus municipaux, je suis d'accord.
Mais là, je voulais évoquer le fait que je pense qu'il y a une
meilleure compréhension de la part des élus municipaux sur
l'approche qu'on devrait avoir au niveau des services de la
Sûreté du Québec, du moins des services de police
que les municipalités locales reçoivent, c'est-à-dire
faire part des services ou l'amélioration des services souhaités
ou une meilleure perception des services de la Sûreté du
Québec dans chacune des régions. C'est peut-être ce qui a
été négligé dans le passé. Mais ça
n'a rien à voir avec la facture que déplore évidemment, je
l'admets...
On pourrait peut-être revenir au niveau du dossier, M. Nicolet, M.
le président, de la voirie municipale. À un moment donné,
et je suis fort heureux de voir que vous le mentionnez... Vous êtes un
des rares organismes qui mentionnent que les municipalités locales, les
élus municipaux et différents intervenants du milieu connaissent
très bien leur réseau local, contrairement à ce qui a
été véhiculé au niveau d'autres mémoires.
Ça, je vous le reconnais. Vous avez raison, le monde municipal
connaît très bien le réseau local, et ça, c'est
démontré. Il est probablement le mieux placé pour faire
l'évaluation des coûts. Quand vous dites: On ne devrait pas
transférer ce dossier-là tant et aussi longtemps qu'on ne
connaîtra pas les coûts, moi, comme élu, ancien élu,
comme vous l'avez mentionné, en milieu rural, je peux vous dire que
ça va être très difficile d'en venir à une
reconnaissance des coûts réels de l'entretien du réseau
local, ne serait-ce que l'entretien d'hiver conjugué à
l'entretien d'été. Tout ça pour vous dire que je pense
qu'on devra admettre qu'il manquera toujours de l'argent pour
récupérer cette partie du réseau. Mais moi, je suis
rassuré parce que les municipalités, et je vous le
répète, sont, à notre avis, les mieux placées pour
améliorer ce réseau-là avec le moins d'argent, comme on
l'a mentionné ce matin, à certains égards, avec le moins
d'argent et... pour répondre le mieux aux priorités aussi des
citoyens.
Tout ça pour vous dire que, justement, je le mentionnais au
début de mon intervention, à ce moment-ci, vous reconnaissez
cette partie-là, vous avez fait certaines propositions, comme vous
l'avez mentionné dans votre allocution, et je trouve ça
très intéressant. Ça, ce serait ma première
question, à savoir: Est-ce que vous êtes en accord avec nous?
C'est assez difficile, à ce moment-ci, d'établir le coût
réel de l'entretien sur un an, cinq ans ou sur une programmation, par
exemple, de cinq ans, comme je le mentionnais, d'une part. Le ministère
des Transports a déjà présenté aux
municipalités une projection d'abord de la qualité des routes, de
la qualité de l'entretien, c'est-à-dire des conditions des
routes, d'une part, ce qui a été amélioré et a fait
une certaine évaluation d'un certain niveau de nos routes municipales.
Et ça, ce travail est fait et il est en attente de la réaction
des municipalités, du moins ce que j'en sais dans ma région. Je
pense que ce que vous demandez a déjà été
proposé par le ministère des Transports. Est-ce que vous
êtes en mesure de reconnaître ça?
M. Nicolet: Je ne sais pas ce qui s'est fait, M. Gauvin, dans
votre région, mais je peux vous dire que, en tout cas en Estrie et dans
les autres régions que je connais, depuis notre réunion du
début janvier, lorsque nous demandions formellement au sous-ministre des
Transports de s'associer au monde municipal pour l'évaluation dont vous
parlez, nous n'avons eu aucune réaction formelle de la part du
ministère des Transports. Donc, actuellement, nous sommes en attente
d'une clarification ministérielle quant à la démarche
qu'entend poursuivre le ministère des Transports face à cette
problématique que vous soulignez, qui est très réelle,
à savoir la quantification des coûts.
Vous savez sans aucun doute que les chiffres qui nous ont
été présentés à date sont basés sur
une évaluation de 3000 $ comme chiffre moyen, par kilomètre par
an, pour l'entretien. Là-dessus, nos prétentions sont à
l'effet qu'il y a d'abord des variations considérables d'une
région à l'autre et que, de plus, ces chiffres méritent
d'être vérifiés et validés par les élus de
chaque région et ceci, selon nous, ne peut se faire de façon
constructive et intelligente qu'en mettant conjointement et en
développant conjointement cette analyse du dossier par les
fonctionnaires, les officiels du ministère, avec les élus
directement concernés. Tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas fait
cette étape qui, pour nous, est cruciale, on va continuer à
affirmer de part et d'autre des généralités qui ne seront
pas véritablement documentées et établies à partir
d'un travail de base.
Le Président (M. Garon): Le temps dévolu au parti
ministériel étant écoulé, je donne la parole au
député de Jonquière, pour 10 minutes. (15 h 30)
M. Dufour: Je voudrais, M. le Président, revenir sur la
question de la Sûreté du Québec. Concernant ce que vous
avez expliqué, vous avez fait un certain nombre de propositions,
discuté des services de base, négocié... En tout cas, je
ne reprendrai pas vos propositions, il y en a une quinzaine ou peut-être
plus, mais en quoi pensez-vous que... Parce que, après l'ouverture que
le ministre a faite en disant: Je suis prêt à l'examiner, en quoi
pensez-vous que cette possibilité d'ouverture puisse être
comblée dans un si court laps de temps, parce que, le projet de loi, ce
n'est pas pour l'année prochaine, d'après ce qu'on voit, c'est la
semaine prochaine? Comment pensez-vous arriver à une négociation
intelligente, surtout que vous proposez une gendarmerie? Vous ditez: Nos
problèmes locaux, ce n'est pas pareil, puis je pense que vous le
démontrez assez bien. Ce n'est pas pareil comme pour les grandes villes,
puis on a besoin d'autre chose que ça. Le ministre a semblé faire
cer-
taines ouvertures, mais il n'y a pas beaucoup de temps entre votre
proposition puis la loi. Comment croyez-vous qu'on pourrait gérer tout
ça et en quoi pensez-vous avoir plus de responsabilités par
rapport à ce qui est sur la table actuellement?
M. Nicolet: Effectivement, notre analyse est à l'effet que
le laps de temps dont nous disposons est extrêmement limité et
sans une volonté politique fermement articulée de la part du
gouvernement et du ministre, il ne sera pas possible d'en arriver, dans
l'espace de temps qui nous est alloué, à une solution qui
à la fois rencontre les attentes du monde municipal et réponde
aux intentions politiques du gouvernement. Donc, fondamentalement, je suis
d'accord avec vous qu'à première vue, la tâche
apparaît comme insurmontable. C'est pourquoi, dans nos conclusions, nous
suggérons un report de la partie concernant la sécurité
publique.
M. Dufour: II arrive des fois que, dans les lois, il y ait une
clause qui dise: Tel article s'appliquera plus tard, selon le décret
gouvernemental. Est-ce que vous pensez que ce serait une garantie raisonnable
que ça puisse être introduit à travers le projet de
loi?
M. Nicolet: Si encore nous pouvons nous entendre sur
l'articulation, la formulation des articles en question, oui, bien
sûr.
M. Dufour: Non, mais une clause, c'est comme une clause
grand-père. On dit: Bon, ça, ça va être
accepté après décret. Mais ça laisse supposer...
Parce que là, tout le monde a dit que le ministre avait de la rigueur et
qu'il est incorrect, etc., raisonnable; moi, je veux essayer de l'aider
à le prouver et à le démontrer, parce qu'au point de vue
municipal, il ne m'a pas montré cette "raisonnabilité" et cette
rigueur que tout le monde lui reconnaît. Mais je voudrais bien qu'on
puisse le reconnaître à travers ce projet-là, si c'est
vrai.
M. Nicolet: C'est pourquoi, en tout cas, nous nous sommes, en
toute modestie, permis de suggérer certaines modifications bien
précises au libellé de certains des articles, dans l'espoir
qu'effectivement, on pourrait, dans une démarche conjointe, tâcher
de débloquer au moins certains aspects particulièrement
difficiles de ces dispositions.
M. Dufour: Comme vous proposez une gendarmerie locale, c'est une
troisième police, je ne sais pas si on peut appeler ça... Ah oui,
ce seraient des gendarmes, ce serait une troisième police. Est-ce que
vous pourriez élaborer un peu plus en quoi ça consisterait et le
fonctionnement de ça, qui serait responsable et est-ce que vous
êtes prêts, par exemple, à faire des liens avec la
Sûreté du Québec? Comment ça
fonctionnerait-il, un peu?
M. Nicolet: Si vous le permettez, je demanderais à Me
Lemay d'élaborer, puisque c'est lui qui a eu l'occasion de
développer toute cette logique.
M. Lemay (André): O.K. Merci. En fait, on s'est
inspiré de l'article 258 du projet de loi actuel, qui introduit,
à l'article 64.4, une notion de services de base par opposition à
une notion de services spécialisés. À l'article 64.4, tel
que proposé, on nous dit que le ministre peut considérer les
services de base qu'une municipalité doit, selon lui - donc, il faudra
savoir qu'est-ce que c'est - dispenser et, en opposition, les services
spécialisés qu'elle pourra obtenir. Donc, on présume que
le gouvernement dit: Si on fait un partage des responsabilités, les
municipalités pourraient prendre des services de base et le gouvernement
pourrait faire les services spécialisés. Or, l'analyse qu'on a
faite depuis quelques années avec différents mémoires qui
ont été déposés au gouvernement, notamment avec la
réforme de M. Latulippe à l'époque, en 1987, et plusieurs
projets de faits à l'époque par M. Choquette, en 1971, le groupe
Sonia, en 1978, etc., ça fait 20 ans qu'on parle de protection
policière. On s'est rendu compte qu'il y a une partie importante des
tâches faites par des policiers qui pourraient être
adéquatement faites par d'autres que des policiers, des gendarmes, des
auxiliaires policiers, appelons-les comme on voudra. Par exemple, les constats
d'accidents, les déclarations préliminaires pour fins
d'enquête, il y a un vol à une place, ça ne prend pas
quelqu'un qui est armé pour aller constater qu'il y a eu une infraction
dans une résidence. Donc, on dit qu'il y a des fonctions qui peuvent
être adéquatement exercées, en matière de
sécurité publique, par d'autres que des policiers. Et c'est
là qu'on suggère au gouvernement en disant: Ne mettez pas comme
synonyme de sécurité publique, corps de police. Il y a autre
chose. Donc, quand vous voulez parler que les municipalités doivent
assurer la sécurité publique, donnez la possibilité, les
corps de police, la gendarmerie, d'autres officiers, etc., selon les besoins
des régions, parce que les besoins en protection, en
sécurité publique en région sont différents de ceux
des milieux urbains. Donc, on a dit: Des services de base, on est prêt
à discuter pour les définir et il faudrait qu'on s'entende pour
dire qu'ils peuvent varier selon les régions. Et quand on s'entendra sur
ce que sont les services de base, les services spécialisés
pourraient être offerts en collaboration avec la Sûreté du
Québec ou avec d'autres corps de police municipaux qui peuvent exister.
Donc, c'est une ouverture qui est importante dans le sens qu'on dit: On est
prêt à s'occuper de sécurité publique, mais
n'imposez pas comme seule et unique solution la création d'un corps
de
police. Permettez-nous d'adapter, selon des critères
raisonnables, adéquats, etc. - ça prend des qualifications - des
services de base adéquats selon chaque région. Ça
s'évalue ça, il y a des spécialistes là-dedans pour
chaque région pour nous dire... Il y a le taux de criminalité,
les densités de territoire, etc., qui permettent de dire: La protection
policière, dans telle région, au niveau du service de base est
différente dans le comté de Portneuf qu'elle peut l'être
dans certains secteurs de la rive sud de Montréal ou ailleurs.
C'est un peu ça, l'orientation. Donc, les services de base sont
variables selon les régions et il faut les évaluer et,
deuxièmement, il y a des tâches qui peuvent être
exercées adéquatement par d'autres que des policiers et,
évidemment, à coût moindre - il faut penser que, quand on
veut donner un service, il faut le payer - par d'autres personnes qui
pourraient être qualifiées pour les exercer. Dans le
mémoire, on a enuméré une série de types de
fonctions actuellement réservées à la Sûreté
du Québec ou aux policiers qui peuvent être adéquatement
exercées par d'autres. On a donné l'exemple du ministère
des Transports qui a décidé de donner à des civils - j'ai
employé l'expression "civils" - la question de la surveillance du poids
des véhicules alors qu'avant, c'était la Sûreté du
Québec. Ça ne prend pas un policier armé pour peser un
camion. Il y a des civils qui peuvent le faire aussi adéquatement. C'est
dans ce sens-là qu'on s'orientait.
M. Dufour: Moi, je pense qu'il y a une foule de questions qui se
présentent à mon esprit et on n'est pas limité dans le
sujet, au contraire, mais on est limité dans le temps. J'appelle
ça un exercice de frustration. Je veux juste vous inviter à
examiner le mémoire que la Fédération des policiers du
Québec a déposé, ici, à cette commission. Le
ministre s'est engagé à les rencontrer aussi. J'imagine que vous
allez être confessés chacun votre tour, en tout cas... Bonne
chance dans vos négociations. Il y a eu aussi la période de
questions où le ministre a semblé dire que vous étiez
prêts à accepter la voirie, mais il y a tellement d'obligations
que vous demandez dans votre mémoire... Oui, mais quand les conditions
seront respectées. J'espère que ça, c'était
sous-entendu dans la tête du ministre parce que vis-à-vis de...
Des fois, la période de questions, c'est pour la galerie. Mais,
fondamentalement, vous dites oui à la voirie, mais avec certaines
nuances.
M. Nicolet, il nous reste deux minutes, je voudrais vous dire merci pour
votre présence et votre apport à cette commission. Je voudrais
vous inviter, si vous avez un message, parce que quand c'est fini, c'est fini
autant pour vous que pour nous autres. Si vous avez un message à faire,
vous avez deux minutes pour le faire. Je pense qu'on serait bien heureux de
vous entendre pour que, si vous avez des recommandations ou autres à
nous faire, je suis prêt à les accepter.
M. Nicolet: M. le député, je vous remercie de cette
occasion que vous me fournissez de dire ces quelques mots en guise de
conclusion. Bien sûr, d'abord, j'aimerais remercier cette commission
parlementaire d'avoir bien voulu nous recevoir. Mais ce que je pense qu'il est
important de souligner, c'est que nous nous trouvons aujourd'hui au coeur d'une
tourmente, comme dans l'oeil. Cette période de grâce entre le
désordre et la confusion, une situation que nous avons vécue
depuis quelques mois et une situation qui nous guette si cette commission ne
parvient pas à suggérer à l'Assemblée nationale des
dispositions qui permettront de rebâtir - et j'ai utilisé dans le
mémoire le qualificatif "fonctionnel" - des relations fonctionnelles
entre notre monde municipal et le gouvernement.
Il nous apparaît absolument essentiel, dans la conjoncture que
nous traversons collectivement en tant que société
québécoise, de planifier à long terme cette relation et
cette complicité qui sont essentielles pour le mieux-être de notre
société. Je vous remercie.
M. Dufour: M. le Président.
Le Président (M. Garon): Je voudrais remercier - le temps
étant écoulé - M. Nicolet d'être venu nous
rencontrer avec les gens qui l'accompagnent. Immédiatement, je demande
aux prochains intervenants, la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal, de venir nous rejoindre à la table des
délibérations.
Nous avons déjà du retard. Je vais demander à M.
Jérôme Choquette, président et maire d'Outremont, de
s'approcher. M. Choquette, le temps prévu pour votre intervention est
d'une heure. Normalement, comme vous le savez, c'est un tiers, un tiers, un
tiers: vous avez 20 minutes, la partie ministérielle a 20 minutes,
l'Opposition a 20 minutes. Si vous en prenez moins, on va ajouter le temps que
vous n'aurez pas pris également. Si vous en prenez plus, on va
soustraire les minutes en plus que vous aurez prises. Si vous voulez prendre
toute l'heure, ils n'auront pas de question.
Conférence des maires de la banlieue de
Montréal
M. Choquette (Jérôme): Merci beaucoup, M. le
Président. M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs
les députés, j'apprécie vivement l'honneur que vous me
faites de recevoir la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal, dont je suis le président et que je représente
ici, aujourd'hui. Je suis accompagné du maire de Senneville, M. Ovila
Crevier; à mon extrême droite, je suis accompagné de M.
Paul Blier, autrefois sous-ministre des Affaires
municipales; je suis accompagné, à mon extrême
gauche, de M. Michel Lefebvre, trésorier de la ville de Dorval; et,
à ma gauche immédiate, M. Gilles Gagnon, de la Conférence
des maires de la banlieue.
J'aimerais vous faire savoir jusqu'à quel point nous ne pouvons
donner notre accord à ce que le gouvernement est en train de
préparer. Non pas par mauvais esprit. Non pas parce que nous sentons un
besoin inhérent de faire opposition à tout ce qui peut venir des
autorités supérieures, que nous respectons d'ailleurs.
Par contre, nous considérons que, dans le contexte actuel, le
projet de loi 145, qui est proposé et accompagné des mesures
financières qui en découleront, ne rendra vraiment pas service au
gouvernement lui-même ni aux municipalités surtout. Ce qui m'avait
surpris le plus, au point de départ des discussions, c'était
cette prémisse que le gouvernement mettait de l'avant comme la
justification de son action de se retirer des subventions au transport en
commun, avec, comme conséquence financière, un manque à
gagner, du côté de notre Communauté urbaine et de notre
société de transport en particulier, de 200 000 000 $.
Eh bien, c'était la prémisse à l'effet que la
fiscalité foncière dans la province de Québec était
moins lourde que la fiscalité foncière dans la province de
l'Ontario. Et c'est une des prémisses qui ont été
énoncées en noir et en blanc dans le texte qui était
à l'origine de cette loi de même qu'à l'origine des mesures
financières annoncées dans le budget, à l'effet que,
précisément, le contribuable québécois, sur le plan
immobilier, était en somme plus libre que le contribuable de l'Ontario
de charges financières. (15 h 45)
Ça m'avait paru comme une fausse prémisse. Je pense que,
même si, ces derniers temps, je n'ai pas entendu cet argument comme le
moteur ou comme la raison d'être des mesures gouvernementales, je dois
quand même le rappeler, d'une certaine façon, au moins au point de
vue historique parce que, à l'origine, c'était ça qui
fondait, en somme, l'action gouvernementale de vouloir imputer aux
municipalités ou aux collectivités locales un fardeau financier
plus lourd que celui qu'elles avaient. Or, quand on y pense bien, les
propriétaires de maison, même les propriétaires d'immeubles
industriels et commerciaux ne paient pas leur impôt foncier avec la vente
de leur propriété à chaque année. Ils le paient
nécessairement avec leur revenu et on sait, en particulier pour ce qui
est des contribuables résidentiels, qu'ils paient ces charges
foncières après l'impôt sur le revenu. De telle sorte que
c'était une vision tout à fait superficielle et tronquée
de la réalité que de proposer qu'on aille utiliser le champ de
l'impôt foncier pour venir en aide aux finances publiques du gouvernement
en disant: Eh bien, il y a de l'espace à occuper sur le plan de la
fiscalité municipale et nous allons nous empresser de le faire.
Alors, si le gouvernement, d'une certaine façon, abandonne cette
position, j'en suis fort aise. Si le gouvernement en est arrivé à
la conclusion que, franchement, on ne peut pas soutenir ce
raisonnement-là dans l'état actuel des choses, étant
donné qu'il est manifeste que la fiscalité totale du
Québec, la fiscalité dans son ensemble est beaucoup plus lourde
que la fiscalité ontarienne. On ne peut pas tronquer cette
fiscalité en isolant le foncier du reste. Quand on regarde le reste, eh
bien, ça veut dire l'impôt sur le revenu, ça veut dire les
taxes à la consommation, ça veut dire l'ensemble de la
fiscalité, tout ce qui contribue à donner des ressources
permettant de payer, justement, à l'État les ressources qui lui
reviennent ou même aux gouvernements locaux. Alors, donc, moi, j'aimerais
beaucoup pour ma part que, d'une certaine façon, pour clarifier le
débat, pour qu'on discute de ces mesures qu'on nous propose avec
honnêteté, avec des principes qui sont valables, qu'on
écarte complètement cette façon de comparer la
fiscalité foncière québécoise à la
fiscalité foncière ontarienne.
Maintenant, je pense que, dans un sens, le projet de loi 145 qui est
proposé reconnaît implicitement cette erreur au point de
départ, parce que le projet de loi veut amener les collectivités
locales à utiliser la surtaxe sur les immeubles industriels et
commerciaux comme le moyen de défrayer le retrait du gouvernement de ses
subventions au transport en commun. Dans le calcul du potentiel fiscal qui est
proposé par le projet de loi, en particulier à l'article 261, le
calcul du potentiel fiscal pour ce qui concerne les dépenses
générales de la communauté urbaine, c'est le potentiel
fiscal à peu près semblable à celui qui existait
précédemment, c'est-à-dire qu'on fait le calcul total des
valeurs résidentielles et des valeurs commerciales et industrielles en
appliquant justement à l'industriel et au commercial un facteur de 0,96
%, ce qui est déjà un facteur assez lourd mais, disons, d'une
certaine façon, auquel on est un peu habitué du simple fait que,
autrefois, on avait des modes semblables approximativement de calcul de notre
potentiel fiscal. Mais lorsqu'on arrive au potentiel fiscal qui est
établi par le projet de loi à l'article 261.7, pour les fins du
financement du transport en commun, eh bien, à ce moment-là, on
ajoute au potentiel fiscal classique, traditionnel des valeurs industrielles et
commerciales évaluées à leur juste valeur sur le
marché, on ajoute le facteur de 0,96 % qui s'applique au potentiel
fiscal pour fins des dépenses générales de la
communauté, on lui ajoute un facteur additionnel de 28 %, ce qui porte
le niveau de la fiscalité permise en matières industrielle et
commerciale à 2,24 $ par rapport à 1 $ pour les fins des
immeubles résidentiels. Et ici, malgré le fait qu'il peut
être difficile de discuter de chiffres
précis dans une commission parlementaire, il faut être
absolument précis. Ceci veut dire, en pratique, qu'une
propriété résidentielle à Montréal devant
être évaluée à 100 $, eh bien, son
équivalent, tout à fait son équivalent sera
évalué, si cette propriété est industrielle ou
commerciale, à 224 $, c'est-à-dire plus de 124 % de la valeur
d'une propriété résidentielle.
Maintenant, on pourrait certainement dire que le gouvernement est bon de
donner un "break", comme on dit en langage populaire, aux propriétaires
résidentiels. Il y en a probablement qui sont portés, d'une
certaine façon, à donner peut-être un petit coup de chapeau
au ministre des Affaires municipales et le remercier de sa bonté
à l'égard du domaine résidentiel. Mais, en
réalité, est-ce que, froidement parlant, on peut admettre que
dans les circonstances de la vie économique actuelle, de la
récession que nous vivons, des faillites qui affectent en nombre
grandissant les commerces sur ITIe de Montréal, de la dispersion de
l'industrie, de la perte de l'emploi dans notre région, est-ce qu'il est
franchement possible d'admettre, au nom de l'équité, au nom de la
justice, qu'on aille imposer des taxes aussi lourdes sur les immeubles
industriels et commerciaux que celles qui vont porter leurs impôts
à 124 % de plus que les immeubles résidentiels?
D'un côté, je suis porté à dire à
notre ministre: M. le ministre, merci pour les propriétaires
résidentiels, mais, d'un autre côté, alors qu'au
Québec on a toujours eu une fiscalité assez égalitalre
puisque les immeubles industriels et commerciaux étaient traités
tout à fait sur un pied d'égalité traditionnellement,
malgré la différence qui pouvait découler de la taxe
d'affaires qui était déjà un facteur de différence
acceptable, parce que la taxe d'affaires représentait peut-être 70
% de la taxe foncière, donc on allait chercher du côté
commercial et industriel un supplément nécessaire et utile
à la gestion des affaires publiques, là, on porte le niveau qui
va affecter l'industriel et le commercial à 124 % par rapport à
100 % pour le résidentiel. Moi, pour ma part, je m'inquiète, je
suis extrêmement inquiet. Je suis inquiet pour les propriétaires
certainement qui vont être obligés de défrayer des taxes
aussi élevées, mais je suis inquiet surtout pour l'effet
économique que cela aura sur l'île de Montréal alors que de
nombreux mémoires ont pu vous expliquer, et en particulier le
nôtre, ont cherché à vous démontrer jusqu'à
quel point l'étalement urbain, la disparition de notre population la
plus dynamique, la plus jeune, vers les couronnes nord et sud de l'île de
Montréal nous avaient affectés, jusqu'à quel point un
certain règne de la pauvreté s'est instauré dans notre
centre-ville et jusqu'à quel point, en fait, il est extrêmement
difficile actuellement de gérer les affaires municipales, au moins dans
certaines municipalités de lile de Montréal - et là, je ne
dis pas nécessairement la mienne - mais je dirais qu'il y a certaines
municipalités qui sont affectées d'effets sociaux, d'effets
économiques, d'effets négatifs qui font qu'actuellement, on peut
se demander si c'est vraiment indiqué que d'assener un coup fiscal
à notre He de Montréal par le biais justement des retraits des
subventions et faire en sorte qu'on alourdisse notre fiscalité et qu'on
encourage encore plus la dispersion des entreprises qui vont aller vers des
endroits plus cléments au point de vue fiscal, que ce soit au
Québec ou que ce soit en dehors du Québec.
Tout à l'heure, alors que vous discutiez avec celui qui m'a
précédé, ici, à la barre, le président de
l'AMRCQ, de la question des corps de police, j'attire votre attention à
ce propos sur le fait qu'à Montréal, nous payons deux fois la
police et nous n'avons les services que d'un seul corps policier. Nous payons
autant la Sûreté du Québec que la police de la
Communauté urbaine et pourtant, eh bien, en pratique, sans
négliger le rôle de la Sûreté du Québec qui
est incident, qui est occasionnel, nous avons quand même assez peu la
protection de ce corps de police.
Alors, si vous comparez nos coûts de police sur l'île de
Montréal, vous allez vous rendre compte qu'ils sont à peu
près deux fois, sinon deux fois au moins plus élevés que
ceux des villes qui nous entourent, des villes qui sont proches de nous. Ceci
explique que la fiscalité est déjà lourde sur l'île
de Montréal parce que nous donnons déjà un appui au
gouvernement indirectement de cette façon. Nous ne lui reprochons pas...
D'ailleurs, on pourrait peut-être dire que je suis un peu l'auteur de
cette situation historiquement, si l'on pourrait dire, mais, d'un autre
côté, est-ce que, actuellement, il est indiqué de venir, en
plus de nous laisser avec les coûts de deux corps de police, est-ce qu'il
est indiqué de nous retirer les subventions du gouvernement?
Alors, je pense que la prémisse à l'effet que nous pouvons
supporter présentement des coûts accrus, il faudrait quand
même que le gouvernement y pense vraiment deux fois, y
réfléchisse très sérieusement et s'interroge
vraiment sur les conséquences de son geste. Est-ce que la
médecine qu'il propose, au point de vue des finances publiques, ne sera
pas pire que le mal dont il souffre actuellement? Est-ce que ces taxes sur
l'industrie et le commerce, qui vont nécessairement être lourdes,
ne viendront pas encore plus réduire notre mouvement sur le plan
économique et faire en sorte que ce sera peut-être le gouvernement
qui, par le biais du ministère du Revenu, aura des recettes moindres
dans un avenir rapproché?
Maintenant, j'aimerais aussi prendre un élément qui a
été mis de l'avant, c'est celui à l'effet que les services
de transport en commun sont un service nécessairement local qui doit
être supporté par la taxation locale. Ça, c'est
aussi un grand principe qui est mis de l'avant, et on le fait au nom de
la responsabilisation des élus locaux. On dit aux élus locaux,
aux municipalités: Eh bien, si vous avez des services que vous offrez
à vos populations, c'est à vous de vous arranger pour les
financer. On peut dire qu'en règle générale, c'est un bon
principe. Je pense que celui qui dépense devrait, en
général, être celui qui perçoit les impôts
parce que ça le force à faire une comptabilité qui est
plus juste et appropriée, et ça évite, n'est-ce pas,
l'excès dans la dépense.
Donc, je n'en ai pas contre le principe, en soi. Mais lorsqu'on parle de
transport en commun, je voudrais quand même mettre les membres de cette
commission parlementaire en garde contre l'application absolue de ce
principe-là, contre une vision univoque de la réalité. Il
n'y a presque pas d'administration supérieure qui ne subventionne pas
les services de transport en commun dans les grands centres urbains. Cela est
vrai au Canada, cela est vrai aux États-Unis. Dans notre mémoire,
j'attire votre attention sur le fait que la province de l'Ontario, à
laquelle on nous compare souvent, est une province où l'on subventionne
le transport en commun. Je ne rentrerai pas dans un million de détails
pour vous expliquer les contributions et les modes de contribution du
gouvernement provincial de l'Ontario au service de transport du Toronto
métropolitain. Vous verrez que les chiffres qui vous sont
mentionnés sont extrêmement précis sur ce sujet et que, en
fait, le gouvernement de l'Ontario s'est reconnu au moins une certaine
responsabilité dans le domaine du transport en commun.
Donc, il faudrait quand même faire attention à une
application presque aveugle du principe que chaque région doit supporter
son service de transport en commun parce que, quand on arrive à un
service de transport en commun comme celui de Montréal et comme celui de
l'île de Montréal auquel nous participons, il est évident
que c'est le noeud, c'est le centre, c'est le point stratégique
où les institutions se trouvent, les institutions d'enseignement, les
endroits de divertissement et qu'on a une population énorme qui vient
tous les jours utiliser notre service de transport en commun. Historiquement,
eh bien, nous avons suivi les politiques du gouvernement du Québec dans
le développement de ce transport en commun, que ce soit métro ou
autobus: cartes mensuelles ou autres cartes à l'usage de la
clientèle. Et lorsque le gouvernement arrive, en quelque sorte, sans
avertissement, à brûle-pourpoint, et nous dit: On vous retire les
200 000 000 $ de subvention, il met en péril un service auquel il a
participé directement ou indirectement, dans le passé, un service
qu'il a aidé à financer, un service où il a eu son mot
à dire sur son développement et un service, en plus de ça,
qui ne dessert pas seulement les gens de l'île de Montréal, mais
qui dessert la région, la grande région montréalaise et
aussi, je dirais, le Québec en général. (16 heures)
Donc, j'en tire, d'une certaine façon, un principe
modéré, M. le ministre. Un principe modéré, oui.
Dans un sens, c'est un principe raisonnable et valable, que celui de demander
aux administrations qui dépensent de l'argent d'être ceux et
celles qui vont chercher les ressources et qui vont imposer les taxes pour les
faire fonctionner, en général, oui. Mais lorsqu'on arrive dans le
transport en commun, je pense que non seulement l'expérience
vécue un peu partout, mais l'expérience même que nous
vivons sur l'île de Montréal et aussi toute l'histoire qu'il y a
derrière ce service de transport en commun devraient vous amener
à conclure que vous avez aussi et garderez toujours une certaine
responsabilité financière vis-à-vis du fonctionnement du
transport en commun, de façon, précisément, à
donner à un service qui a une grande importance sur le plan, n'est-ce
pas, de la population, c'est évident, ou du service à la
population, mais qui a aussi une grande importance sur le développement
économique du Québec, parce que le service de transport en commun
est un facteur de localisation important pour n'importe quelle industrie,
n'importe quel commerce.
Lorsqu'on espère un développement industriel et commercial
vivant au Québec, il faut l'espérer, je pense bien, sur
l'île de Montréal, par des investissements qui se feront sur
l'île de Montréal et où les entreprises qui viendront
s'installer chez nous, venant de l'étranger, se diront: Bien voici, il y
a des services de transport en commun qui sont convenables, qui sont modernes,
qui sont adéquats et qui peuvent desservir notre population. En d'autres
mots, il y a une qualité de vie sur le plan du transport qui fait que
c'est un endroit où on peut se localiser avec avantage et avec
facilité. Alors, c'est donc vous dire que je pense que ce serait aussi
un très mauvais principe et une fausse prémisse aussi que de
partir d'un point de vue absolu, à l'effet que le transport en commun,
il appartient aux Montréalais et il n'intéresse pas du tout le
gouvernement du Québec.
Maintenant, je disais aussi que sur le plan de la taxe sur le
stationnement, qui est un des éléments de ce projet de loi,
où on donne certaines facilités à des municipalités
de taxer le stationnement dit public et non le stationnement
résidentiel, j'attire simplement votre attention sur le fait que cette
taxe, elle sera nécessairement utile aux villes parmi les villes de
notre île de Montréal, aux 29 villes, aux villes qui ont
déjà un secteur industriel et commercial. Cette taxe-là ne
peut pas avoir d'utilité pour les villes qui sont principalement
résidentielles parce que, dans les villes résidentielles, il n'y
a pas de stationnement public à taxer. Donc, le gouvernement veut nous
faire une certaine faveur en nous
offrant cette source de taxation, mais cette source de taxation, je veux
attirer votre attention sur le fait qu'elle n'est bonne que pour des villes qui
ont déjà le secteur industriel et commercial dont on parlait tout
à l'heure et qui pourront taxer additionnellement ce secteur-là.
La taxe sur le stationnement ne pourra, en aucune façon, être une
aide aux villes résidentielles qui, par définition et par leur
nature même, n'ont pas de stationnement public à taxer.
Maintenant, quelques aspects que je ferai un peu généraux
sur le projet de loi. Vous savez que j'exerce la profession d'avocat maintenant
depuis un certain nombre d'années. Naturellement, les textes
légaux ne devraient pas me faire peur. Mais je vais vous dire quelque
chose, que celui-là, je le trouve épeurant. On a juste à
regarder le nombre d'amendements d'articles, le nombre de lois qui sont
visées; c'est indescriptible, faire de la législation comme
ça. Je plains le ministre des Affaires municipales d'être
obligé d'administrer de telles lois. Je plains les fonctionnaires, les
avocats qui vont être obligés de travailler dans des
systèmes législatifs comme ça. Peut-être que vous
allez dire: Bien, M. Cho-quette, il est temps que vous preniez votre retraite
parce que, nous autres, ça ne nous fait pas peur, des lois avec à
peu près 300 articles qui amendent 30 lois. Nous, on est habitués
à ça, à Québec, on fait ça tout le temps.
Mais je vais vous dire quelque chose: Qu'est-ce qui résulte de ce genre
de législation? Ne pensons pas juste à vous ou à moi ou
aux fonctionnaires, pensons au peuple en général, aux gens qui
ont le droit de savoir où vont leurs taxes et qui a le droit de
percevoir leurs taxes. Est-ce qu'on a des lois claires ou est-ce qu'on a des
lois confuses? Il n'y a pas un chrétien au Québec qui va
être capable de comprendre sous quel empire législatif on
administre les taxes avec un tel système de loi. Ça, c'est
à côté de la formule de l'étalement ou du
non-étalement que chaque ville peut adopter ou refuser. La ville va
pouvoir imposer la surtaxe, laisser la taxe d'affaires subsister, faire un
cocktail entre la surtaxe et la taxe d'affaires qui va subsister. Ça va
être variable d'une ville à l'autre. Finalement, les conseils
municipaux, même les maires, ne s'y retrouveront pas.
De grâce, moi, je vous dis ceci: Par simple esprit de
clarté, il faudrait réprouver ce genre de législation. Je
comprends que le gouvernement a de grands problèmes fiscaux, des grands
problèmes de ressources financières, et je sympathise. Mais avant
de faire des lois comme celle-ci qui vont faire qu'on va vivre dans un univers
où on ne comprendra pas qu'est-ce qui se passe, où vous allez
demander aux citoyens: Savez-vous où vont vos taxes? Savez-vous qui est
responsable de vos taxes? Savez-vous quelle taxe... Et là, il va
être pris comme le personnage dans le roman de Kafka à qui on fait
subir un procès et qui ne sait pas à qui il doit répondre
et qui est le juge et on l'amène de chambre en chambre et, finalement,
c'est l'univers, on y perd ses moyens. En d'autres mots, c'est la tour de
Babel, ce que je crains, moi, que ça signale sur ce genre de loi. Et
moi, je ne peux tout simplement pas donner mon aval à ça et c'est
la raison pour laquelle je dois m'expliquer avec une certaine clarté sur
ce sujet et vous mettre en garde contre ce genre de choses.
Maintenant, la renégociation des baux. Là, on change tout
le système de la taxe d'affaires et tout. Là, les
propriétaires vont être obligés de se remettre à
discuter des baux avec leurs... Qu'est-ce que ça va faire? D'autres
litiges devant les tribunaux. Est-ce qu'on a besoin de ça? Et aussi, un
fait qui est assez, un peu, qui mérite d'être nommé,
mentionné, à l'article 244.15, quand un local est
inoccupé, eh bien, on ne peut pas charger une taxe d'affaires à
un local inoccupé. Il me semble que c'est élémentaire.
Quand un local est inoccupé, bien, il n'y a pas d'occupant pour payer la
taxe d'affaires. Pas en vertu de l'article 244.15. Là, la
municipalité garde le pouvoir d'imposer une taxe, la taxe d'affaires, en
quelque sorte, ou la surtaxe sur un local inoccupé. Il me semble que
c'est injuste. Si c'est valable dans un cas, qu'on ne puisse pas taxer un local
parce qu'il est inoccupé, donc qu'on ne puisse pas imposer la taxe
d'affaires. Est-ce que, en adoptant le système de la surtaxe que le
projet de loi propose comme une alternative qu'on donne aux
municipalités, est-ce que, en adoptant ce système de la surtaxe,
on devrait permettre aux villes, néanmoins, de taxer des locaux
inoccupés? Ça peut aboutir à des résultats,
franchement, qui seraient loin, je pense, des intentions du législateur
et qui seraient loin de vos propres objectifs. Je pense donc qu'à
l'article 244.15, si vous deviez maintenir la surtaxe, il faudrait que la
ville, en retenant la surtaxe, dise que les locaux qui sont inoccupés ne
pourront pas être taxés comme c'était le cas pour la taxe
d'affaires et comme ça continuera d'être le cas pour la taxe
d'affaires si les villes décident de garder la taxe d'affaires. Mais
vous voyez que ma façon de m'exprimer, qui n'est peut-être pas
très, très claire, elle est quand même
compréhensible du fait que, là, je suis obligé de parler
de différents régimes légaux qui peuvent exister
parallèlement en vertu de cette loi. Je suis sûr que le ministre
des Affaires municipales, qui est reconnu pour la clarté de sa
pensée, j'ai été un lecteur de ses éditoriaux
depuis presque mon enfance et j'ai toujours admiré...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Choquette: ...le caractère limpide de sa façon
de s'exprimer même si je n'étais pas toujours en accord avec lui.
Mais j'arrive mal à comprendre que maintenant qu'il est devenu
ministre des Affaires municipales, il ait été atteint
d'une maladie grave qui semble l'amener à faire des textes
législatifs d'où il va découler toutes sortes de
régimes légaux absolument incompréhensibles pour tous les
citoyens.
Bon. Alors donc, si je disais ça avec un certain humour, ce
n'était pas pour vous faire oublier l'article 244. 15, parce que
ça a quand même une certaine importance si on devait persister
dans les intentions que le gouvernement manifeste.
Maintenant, l'administration qui va découler de ça. Je
pense que la Communauté urbaine vous l'a peut-être
expliqué. On va voir l'annexe, on va voir le rôle des valeurs
locatives, mais est-ce qu'on veut vivre dans la bureaucratie jusque-là
dans la province de Québec? Moi, je pense qu'au contraire, il faudrait
chercher à simplifier nos lois, à amener les choses à un
degré de compréhension. Je fais un appel personnel au ministre
à ce point de vue là en lui demandant s'il ne pourrait pas, dans
les conditions actuelles - je vais conclure sur ça - se dire: Oui, il y
a une crise dans les finances publiques et nous sommes tous solidaires. Il y a
une crise à Ottawa, il y a une crise à Québec et il y a
une crise dans les municipalités et moi, je peux vous dire que nous, les
villes, nous sommes prêts à faire notre part. Nous sommes
prêts à accepter une partie de la responsabilité
financière. Je le dis en toute sincérité, on ne peut pas
venir ici, devant vous, comparaître et vous parler loyalement, avec
franchise, en vous disant qu'on ignore la crise dans les finances publiques.
Elle est là. C'est un cancer dévorant. Tout le monde a un devoir,
à tous les niveaux du gouvernement, de contribuer à régler
cette maladie-là, mais je ne pense pas, en toute
sincérité, que l'effort actuel du gouvernement soit dans la bonne
voie.
Je pense que, si vous nous envoyez des responsabilités et parce
que vous voulez vous retirer du transport en commun en disant: Nous n'avons
plus les moyens, eh bien, dites: Oui, nous allons le faire, mais pas en nous
apportant des lois alambiquées comme celle-là, pas en nous
apportant des textes législatifs qui vont rendre la situation encore
plus confuse. Et ça, je le dis, naturellement, sous réserve que
l'on admette, chez te gouvernement, qu'il a une présence à avoir,
en principe, dans le domaine du transport en commun, au moins sur l'île
de Montréal, à cause de l'importance de l'île de
Montréal et du fait que beaucoup des gens qui habitent aux alentours en
profitent.
En d'autres mots, je laisse à la discrétion, au jugement,
à l'intelligence, à la compréhension et aux connaissances
de ceux qui nous dirigent la décision de dire: Jusqu'à quel point
doit aller l'implication du gouvernement du Québec dans l'état
actuel des finances vis-à-vis du déficit du transport en commun
sur l'île de Montréal? Mais je pense qu'en principe, ils ont une
présence et ils devraient la maintenir, cette présence-là.
Mais on sait qu'on vit dans une période de crise. On sait que le
gouvernement n'a pas d'argent, que le gouvernement cherche par tous les moyens
à appeler les autres à sa rescousse. Sans doute que c'est vous
qui êtes les arbitres du bien commun et c'est vous qui avez à
décider, en définitive, quel est l'effort que vous allez demander
aux contribuables locaux, mais, au moins, reconnaissez le principe de votre
présence. Quant au degré de votre implication, c'est une question
d'appréciation et de jugement. Mais pour ce qui concerne le reste...
Et aussi, j'ajouterais que vu votre implication historique dans le
déficit du transport en commun, le retrait ne devrait pas être
brutal; le retrait devrait être graduel. Ça aurait dû
être annoncé, au moins, d'une certaine façon, qu'on nous
dise: On va se retirer à tant de degrés cette année et
tant de degrés dans une autre année, ainsi de suite, pour que,
nous, on réarrange nos finances pour pouvoir faire face à ces
nouvelles responsabilités que vous voulez nous imposer et avec
lesquelles on se débrouillera bien, parce que je pense que les maires,
malgré les critiques qui ont pu être faites au point de vue des
salaires que nous payons dans nos municipalités, et je voyais que
c'était peut-être une chose qui avait été
agitée, on disait: Les villes payent 27 % de plus que l'entreprise
privée à leurs salaires. C'est peut-être vrai, les
statistiques le disent, mais n'oubliez pas que, nous, on vit sous le Code du
travail; les syndicats nous prennent un par un et ils nous prennent par les
comparaisons. Vous savez jusqu'à point, M. le ministre, vous qui
êtes ministre de la Sécurité publique, la force de
négociation de la police est beaucoup plus prononcée que celle de
n'importe quel autre syndicat. Et les pompiers, vous ne pensez pas qu'ils ont
une certaine force de négociation? Ils n'ont pas le droit de
grève, donc ils ont l'arbitrage, donc les arbitres leur donnent des
sentences qui sont basées sur les salaires qui sont payés dans
telle et telle autre ville. Et leur salaire entraîne celui des cols
blancs et des cols bleus.
Donc, ce n'est pas que nous avons mal géré nos affaires,
nous les avons gérées suivant le Code du travail qui est en
vigueur au Québec, qui nous force à négocier de bonne foi.
Alors là, naturellement, on peut dire que la résultante de tout
ça, c'est vrai que nos salaires sont assez élevés. Mais
moi, je vous dis quelque chose, par exemple: Vu que vous avez
décidé de geler les salaires au niveau du gouvernement du
Québec, pourquoi ne le faites-vous pas au point de vue municipal?
Pensez-vous que, moi, j'ai peur de dire publiquement que je favoriserai cette
situation-là? Non. Je n'ai pas peur de le dire. Vous pouvez geler les
salaires des maires, vous pouvez geler les salaires des conseillers municipaux,
vous pouvez geler les salaires des cadres, puis vous pouvez geler les salaires
des syndiqués, puis je dis qu'il n'y aura pas beaucoup de maires
qui vont s'élever contre cette solution. Ils vont dire: Au moins,
le gouvernement a compris que ce n'était pas juste ses propres
employés, ses propres syndiqués qui l'intéressaient, parce
que c'était tout le secteur public qui l'intéressait.
Alors moi, je n'ai pas de directive à vous donner et je n'ai pas
de conseil. Je ne viens pas vous prier à genoux de le faire, mais je
vous dis: Si vous voulez le faire, dans votre jugement, vu que c'est vous les
arbitres du bien commun, n'oubliez pas que nous sommes des créatures de
l'Assemblée nationale. Ce n'est pas nous, les arbitres du bien commun,
c'est vous. Alors, c'est à vous de prendre ces grandes décisions
là. Mais puisque ça vous aide un peu, peut-être, que je
vienne vous le dire, je n'ai pas peur de vous le dire. Merci. (16 h 15)
Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. le maire
d'Outremont. Je dois vous dire que, quand vous avez dit que vous avez lu les
édito-riaux du ministre des Affaires municipales depuis votre tendre
enfance, je ne connaissais pas l'âge du ministre des Affaires
municipales, mais je me suis dit: II y a un âge biblique qui faisait
notre admiration quand on lisait l'Ancien Testament avec les grands
personnages. On s'est toujours demandé comment ça se fait que les
gens ne vivaient pas aussi vieux aujourd'hui. Mais comme il nous reste 17
minutes, non pas 17 minutes, pardon, 34 minutes... Vous avez pris 33 minutes et
demie, le reste du temps est réparti également entre les deux
partis, 27 minutes, ça veut dire 13 minutes et demie chacun.
M. Ryan: M. le Président, la jeunesse perpétuelle
est un don mystérieux. Ceux qui l'ont reçu n'ont pas le droit
d'en divulguer le secret. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Choquette: Excusez-moi, je n'ai pas compris, M. le
ministre.
M. Ryan: J'ai dit: La jeunesse perpétuelle est un don
mystérieux et ceux qui l'ont reçu n'ont pas le droit d'en
dévoiler le secret.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Je vous remercie de vous en venir tranquillement de mon
côté quand même, même si vous ne semblez pas vous en
apercevoir et ça ne semblait pas se manifester dans vos propos. Je sais
que, inexorablement, nous finirons tous du même côté.
Ça me fait plaisir de vous retrouver, M. Choquette, avec votre
collègue qui vous accompagne et vos collaborateurs. Nous avons eu
l'occasion de discuter à maintes reprises. J'essaierai d'être bref
parce que les idées de fond que vous avez soulevées cet
après-midi ont donné lieu à des nombreux échanaes
au sein de la commission depuis trois jours et entre nous depuis
déjà plusieurs mois.
D'abord, je rappelle brièvement le sens général de
la réforme. Il n'est pas aussi radical qu'on le laisse supposer en
certains milieux. Finalement, quand vous dites: Je voudrais que vous
reconnaissiez que vous avez une responsabilité. Le gouvernement le
reconnaît amplement, surtout dans le domaine du transport en commun que
vous avez principalement discuté cet après-midi. Seulement pour
l'année prochaine, là, en matière de transport en commun,
le gouvernement va continuer à engager des sommes qui vont
dépasser les 300 000 000 $. Au chapitre des immobilisations, le
gouvernement a inscrit à son programme des dépenses de 221 000
000 $. C'est de l'argent. Ça, ça reste 221 000 000 $. Pour les
organismes municipaux, en dehors des organismes publics de transport en commun,
les organismes municipaux qui favorisent l'émergence de services de
transport, il y a 10 000 000 $, les trains de banlieue, 16 000 000 $, le
Conseil métropolitain de transport en commun qui a été
créé par les différents offices publics de transport en
commun, le gouvernement va verser 26 000 000 $ pour cet organisme-là. En
plus, le transport adapté, 26 000 000 $. Pour le transport scolaire, le
gouvernement verse des sommes considérables. Je n'ai pas le total pour
l'île de Montréal. Je l'aurai probablement tantôt. Mais si
on additionne tout ça, je pense qu'il faut éviter de dire que le
gouvernement proclame de manière absolue qu'il n'est pas engagé
dans le transport en commun. Alors, ma réponse à cette question
que vous avez posée est affirmative.
Maintenant, vous avez justement dit: Une fois que ce principe-là
a été clarifié, là il y a des questions de
degré qui sont beaucoup plus discutables. Ce que le gouvernement demande
aux municipalités, c'est justement de prendre une partie plus importante
du fardeau du financement, surtout au niveau du fonctionnement concret, du
fonctionnement quotidien. Jusqu'à maintenant, nous absorbions une partie
du déficit que nous ne pouvons plus supporter. Si les finances du
gouvernement étaient meilleures, je pense bien qu'il n'y aurait pas
beaucoup de monde qui aurait soulevé cette question-là. Mais dans
l'état actuel des choses... Une fois, quand nous causions ensemble, vous
m'avez demandé: Est-ce que le problème se pose à tel
niveau ou à tel autre niveau? Dans l'état actuel des ressources
du gouvernement, il a été conclu, après un an et demi de
délibérations - ça, c'a été mis sur la place
publique la première fois dans le discours sur le budget du 26 avril
1990 - que la ligne de démarcation était au point qui est
indiqué dans la dernière version du plan gouvernemental. Et pour
les municipalités de la banlieue de Montréal, cela
représente un solde à financer net de 46 000 000 $. Pour toutes
les municipalités de l'île de Montréal, ça fait en
tout un solde à financer, auand on fait abstraction des adou-
cissements apportés par le gouvernement et des revenus
additionnels qui seront procurés aux municipalités en vertu de
décisions prises à Québec, ça fait un solde net
à financer de 114 000 000 $ pour toutes les municipalités de
l'île de Montréal, 46 900 000 $ pour les municipalités
autres que Montréal. Si on considère que les revenus totaux, les
revenus de taxation totaux de ces municipalités sont de 1 700 000 000 $
pour l'année 1991, il faut regarder le sens des proportions quand
même. Si nous demandions un effort herculéen, dépassant
toutes bornes raisonnables, je comprendrais le ton sur lequel vous avez conclu
vos propos et je serais tenté d'y souscrire. Mais nous ne sommes pas
dans cet ordre de grandeur, à mon humble point de vue, à moins
que j'aie perdu tout sens des proportions. Je ne pense pas parce que les
chiffres sont toujours devant moi, plus que jamais. en plus, nous donnons aux
municipalités la latitude de choisir de quelle manière elles se
procureront ce solde à financer. vous avez joué beaucoup sur la
carte de la surtaxe sur le non-résidentiel, c'est bien logique que vous
le fassiez parce que nous l'avons indiqué comme un moyen
préférentiel. mais si une municipalité veut avoir une
autre équation, si elle veut puiser un petit peu plus sur d'autres
sources de revenus, en particulier sur l'impôt foncier
général, elle peut le faire. mais je vous assure que j'ai les
chiffres ici pour l'île de montréal, l'impact total... on va faire
une hypothèse, qu'on mettrait ça à 50 % sur le
non-résidentiel, 50 % sur le général. l'accroissement du
fardeau fiscal qui découlerait de l'opération serait le suivant:
3,4 % en moyenne sur le résidentiel et le général et 7,3 %
sur le non-résidentiel. alors, ce n'est pas agréable, ce sont des
choses qui pourraient être évitées et ce serait encore
mieux, mais on n'est pas dans un ordre catastrophique encore une fois, à
mon humble avis. ce que nous demandons aux municipalités, c'est de
s'associer au gouvernement. j'ai encore une lettre que je vais recevoir demain,
nous disant: ii faut comprimer encore davantage et tout... on a des
problèmes continuels et je vous assure qu'on ne vit pas dans la
facilité et dans la complaisance. on dit aux municipalités qui
ont été un petit peu plus avantagées ces dernières
années quand même. on leur dit: prenez une légère
part du fardeau qui équivaut, si on compare le déficit de cette
année, ce qu'on irait chercher en période de croisière,
ça veut dire à peu près 8 % du déficit de cette
année, la partie qu'on demande aux municipalités de se procurer
par leurs revenus propres. je ne pense pas qu'on soit dans un ordre de grandeur
qui justifie les grandes croisades dont on a entendu parler ces derniers temps,
mais je respecte les opinions que vous avez exprimées cet
après-midi, je les respecte et je respecte également leur auteur.
je veux que ça soit bien clair. vous l'avez fait avec dignité, il
n'y a pas de problème là-dedans dans mon esprit.
La taxe sur le stationnement, M. Choquette, vous m'en avez parlé
à maintes reprises, vous l'avez caricaturée en parlant du cas
très marginal d'Outremont. Outremont, c'est une petite enclave dans une
grande île. Mais quand même, j'ai demeuré à
Outremont, je ne le dis pas de manière péjorative, je suis
maintenant un résident de Montréal, comme vous le savez, et ce
n'est pas à cause de vous que je suis déménagé,
c'est parce que j'ai trouvé un logement qui faisait plus mon affaire
là.
Une voix: Moins de taxes.
M. Ryan: Vous aviez baissé les taxes à Outremont,
et je vous en rends hommage. Vous avez une petite marge que vous pourrez
utiliser sagement.
M. Choquette: Est-ce que je peux me permettre juste d'ajouter cet
élément publicitaire? C'est que j'ai réduit la dette de la
ville d'Outremont de 75 % en 8 ans.
M. Ryan: Je le sais. Ah! Je le sais.
M. Choquette: D'autres gouvernements auraient peut-être
avantage...
M. Ryan: Regardez, on vous rend hommage de ça, mais vous
n'aviez pas à transiger avec des problèmes d'éducation, de
santé et les autres problèmes qui sont le propre de la
responsabilité provinciale que vous connaissez aussi bien que nous.
M. Choquette: C'est vrai.
M. Ryan: Très bien. La taxe sur le stationnement, M.
Choquette, vous savez qu'elle existe déjà pour Montréal.
C'est dans la charte de la ville de Montréal. Et elle exerce ce pouvoir
sous la forme de permis qui sont perçus sur des terrains commerciaux de
stationnement. Elle pourrait l'exercer d'une manière plus
étendue, c'est encore modeste mais ça existe déjà.
Je vais vous dire une chose, on a entendu tellement de représentations
qui allaient plutôt dans le sens des vôtres que je me pose des
grosses questions moi aussi à ce moment-ci. Nous nous les posions au
début, mais nous avons dit: Nous allons l'inscrire dans le projet de loi
à titre de possibilité pour une municipalité. Jamais nous
n'avons voulu l'imposer. Là, la question qui se pose, c'est la suivante:
Est-ce que ça ne serait pas mieux, s'il n'y a personne qui en veut,
même de l'enlever comme possibilité? On la regarde franchement. Je
pense que ce que vous avez dit cet après-midi vient ajouter aux
considérations qui se posaient déjà pour nous.
M. Choquette: On ne peut pas empêcher d'autres villes de
bénéficier de sources, excepté que, dans un sens, je fais
des représentations, M. le ministre, vous devez comprendre que je ne
peux échapper à ma propre ville, à ma propre
expérience. Je ne veux empêcher personne d'avoir des avantages qui
pourraient, par ailleurs, être bénéfiques. Donc, je ne
m'arrogerai pas... En plus de ça, j'ai un jugement général
sur les choses. Je me mets un peu à votre place, en tant que vous
êtes un peu l'arbitre et les gardiens du bien commun, à la fin.
Alors, ce que j'ai dit n'est pas seulement dans notre intérêt
égoïste. J'ai essayé de me mettre à votre place
aussi, de comprendre. Et si vous me permettez, je ne voudrais pas vous
interrompre, mais dire simplement: Faites attention de ne pas vouloir nous en
donner tellement, pour de si petits montants, comme vous nous avez dit. Parce
qu'à la fin, vous nous dites: Ça ne nous coûtera pas cher.
Mais pourquoi toute cette oeuvre législative si c'est pour de si petits
montants?
M. Ryan: Regardez, nous avons hérité d'un droit
municipal qui est extrêmement compliqué, vous le savez. Je
rêve du jour où on pourra réduire à un nombre
infiniment plus limité de pages ce droit qui n'est accessible
qu'à un très petit nombre de spécialistes et
d'initiés. Parce qu'il est trop compliqué, beaucoup trop
détaillé, c'est évident. On ne peut pas tout faire en
même temps. Et peut-être qu'il y aura d'autres entreprises
après celles-ci qui seront moins d'ordre financier.
Vous avez parlé de la surtaxe sur les immeubles non
résidentiels. Vous vous êtes inquiétés des locaux
vacants. Il y a des dispositions dans le projet de loi qui prévoient des
dégrèvements fiscaux pour ces situations-là. Nous en
sommes parfaitement conscients. Et si les dispositions ne sont pas
satisfaisantes et que vous ayez des représentations additionnelles
à nous soumettre là-dessus, nous en prendrons connaissance avec
intérêt et profit, j'en suis sûr.
Un dernier point, si vous me permettez, à propos du gel des
salaires municipaux. L'Union des municipalités du Québec nous a
écrit, il y a deux ou trois jours, demandant que le gouvernement
légifère dans le sens que vous avez indiqué. J'ai
répondu à l'Union des municipalités, au nom du
gouvernement, hier, que nous incitons les municipalités à
recourir d'abord au processus de la libre négociation et que, si ce
processus-là ne donne pas les résultats normalement souhaitables,
elles nous fassent des représentations nouvelles à l'automne et
nous verrons à examiner l'opportunité d'une intervention
législative. Mais vous savez que le gouvernement n'a pas
légiféré finalement pour son secteur à lui.
Là, nous allons le faire pour les ingénieurs parce qu'ils n'ont
rien voulu entendre. Tous les autres corps d'emploi du gouvernement ont
réglé le problème de la modération des hausses
salariales par la voie de la négociation. Nous ne voudrions pas donner
un instrument contondant aux municipalités sans qu'ait été
épuisé ce recours qui est premier dans le droit du travail, comme
vous le savez très bien.
Ceci étant dit, je vous remercie beaucoup de votre très
utile contribution, messieurs de la Conférence des maires de la banlieue
de Montréal. Et je vais terminer ici mes remarques, M. le
Président.
Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. le ministre,
M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres députés
ministériels?
M. Maciocia: Pourrais-je poser une question?
Le Président (M. Garon): II reste une minute et demie,
même pas.
M. Maciocia: O.K. M. Choquette, j'aurais une question à
vous poser dans le sens... On a reçu le mémoire de la ville de
Montréal hier, où le maire, M. Doré, nous a fait une
proposition que le ministre des Affaires municipales n'a pas rejetée du
revers de la main, celle de former une commission spéciale sur le
rôle de Montréal comme métropole du Québec. Est-ce
que, d'après vous, ça serait intéressant de soulever le
débat sur le rôle de Montréal et les villes de banlieue,
à cette commission spéciale?
M.. Choquette: Oui, M. Maciocia. Je suis d'avis que les villes de
banlieue devraient, si on donne suite à la suggestion du maire
Doré, être invitées à y participer. Parce que vous
savez que nous représentons quand même 800 000 personnes qui sont
nos administrés dans 27 villes de banlieue, et c'est presque
l'équivalent de la population de Montréal. (16 h 30)
M. Maciocia: Quel devrait être le mandat de cette
commission, d'après vous?
M. Choquette: Voici. M. Doré m'en a parlé.
Naturellement, il s'inquiète de l'avenir de sa ville et de l'avenir
démographique, économique, social de la ville de Montréal,
mais aussi d'autres parties de l'île de Montréal. Je comprends
qu'il y a beaucoup de banlieues qui sont peut-être en meilleur
état économique que la ville de Montréal comme telle. Mais
on se sent solidaire d'eux. Et je dois dire que nos relations avec la ville de
Montréal actuellement sont excellentes. Moi, je pense refléter
l'opinion de mes collègues de la Conférence des maires à
l'effet qu'une telle commission pourrait être utile, dans le sens qu'on
pourrait réexaminer certains aspects de nos politiques passées
qui ont fait que, actuellement, franchement, l'île de Montréal
perd. LTle de Montréal est perdante, actuellement, et il faut retrouver
une façon de restimuler les choses.
Alors, ma réponse est certainement oui, monsieur.
Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. le maire.
Alors, la parole est maintenant au député de
Jonquière.
M. Dufour: C'est évident que la démonstration que
vous nous faites, M. Choquette ou M. le maire, est assez évidente. Pour
une fois, le ministre des Affaires municipales a réussi, il nous a dit
qu'il vivait... que la polémique le nourrissait. Il avait passé
sa vie dans la polémique et c'est ça qui l'avait gardé
jeune. C'est ça, son secret. Mais là, ce n'est plus un secret,
c'est évident. Mais là, ce n'est plus une polémique, il
est tout seul. Il est dans son coin, puis tout le monde est contre. Quand il a
une solution, il est comme le noyé, il prend la branche puis il dit: Je
me suis sauvé. C'est ça un peu qu'on vit, puis c'est ça le
drame.
Le drame est encore plus grand quand on l'écoute parler, il dit:
Vous savez, le droit municipal, c'est complexe, je rêve du jour où
on va alléger tout ça. Mais quand on examine le droit municipal,
c'est complexe, puis c'est normal qu'il y ait beaucoup de lois: ça
touche à toute la vie des citoyens, dans tous les aspects. Comment on
pourrait légiférer, réglementer en disant trois phrases
puis vous avez réglé: Allez et ne péchez plus?
Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. On touche la loi
civile puis on touche le droit criminel. La municipalité, c'est un tout.
On ne veut pas encore l'appeler gouvernement. Le moins qu'on puisse dire c'est
que c'est très près du gouvernement. Toutes les facettes de la
société: la pauvreté, vous touchez à ça;
l'emploi, vous touchez à ça; vous touchez au bien foncier, pas
seulement dans la taxation, mais aussi dans les transactions. En fait, je pense
que jamais on ne pourra alléger à un point tel que tout le monde
va comprendre ça. C'est évident qu'il faut que les lois... Pas il
faut, il est nécessaire que les lois soient explicites.
Et lorsque vous nous dites, parce qu'on n'a plus à dire à
des gens: Vous n'avez pas occupé cette fonction-ci, puis c'est pour
ça que... On pourrait peut-être vous dire des choses, mais vous,
vous l'avez faite cette fonction-cï, alors vous savez de quoi vous parlez,
des deux côtés. J'ai fait à peu près le même
cheminement, mais à l'inverse.
M. Choquette: Vous avez eu une promotion puis moi j'ai eu... Ha,
ha, ha!
M. Dufour: C'est-à-dire que je pense que quand... Moi, je
comprends encore bien les élus. Je comprends encore quand ils disent: On
ne veut pas être traités comme à un deuxième palier.
Il y a les élus, ils ont un mandat. Je comprends tout ça. Et la
complexité de la loi actuelle, on avait compris aussi qu'elle
était difficile d'application, difficile de compréhension; on
touche à beaucoup de lois. On avait dit, en nous basant sur des
prémisses, parce que le gouvernement nous a déjà dit et
répété à satiété: On va
légiférer mieux et moins. On légifère moins et mal
parce qu'à tout bout de champ on est obligé d'amender les lois.
Ça, prenez ma parole. Je ne vous oblige pas à faire un acte de
foi là-dessus, mais je vous dis ce que j'ai vécu.
On est souvent obligé d'aller refaire les lois. Et on a
demandé de les scinder. D'abord, pour donner un meilleur temps de
réflexion, c'était un but, ça; peut-être gagner du
temps parce que ça fait réfléchir, le temps. Et en
même temps, c'était pour mieux éclaircir le paysage. On ne
peut pas... Ce n'est pas un fourre-tout. Et surtout, il s'était
engagé: plus de bill omnibus. Si ça ne ressemble pas à un
bill omnibus, je me demande à quoi ça ressemble. Moi, je n'en ai
pas fait beaucoup de bills omnibus, mais il me semble que c'est un fourre-tout.
Puis là, tout le monde va être mélangé. Et
ça, ça me semble dangereux.
Et vous avez soulevé, bien sûr, des points
extrêmement sensibles: la réouverture des baux. On a
vécu... Le ministre m'a dit, en réponse à une de mes
questions, que l'ouverture des baux, on l'avait faite en 1980. Et pourtant,
Dieu le sait, ce n'est pas le même phénomène. Je serais
surpris de voir comment ça a occasionné de litiges et de
contestations... parce qu'il y avait une raison fondamentale, les contribuables
remettaient de l'argent dans leur poche, en 1980 ou en 1979. Avec ça,
vous en enlevez. Voilà toute la différence du monde. C'est
surtout ça la complication, mais va pour les baux. Il semble que
ça c'est... parce que le ministre nous a dit que les principes
étaient adoptés par l'Assemblée nationale. La commission
parlementaire ici, c'est pour la plomberie. Une petite modalité. Vous
savez, les petits guidis, on peut peut-être regarder ça.
Il y a des propositions intéressantes qui ont été
faites. Je suis obligé de dire qu'il y a beaucoup d'intervenants qui ont
fait des propositions intéressantes. Mais je suis convaincu que jamais,
jamais, le ministre, quelle que soit sa compétence, sa
compréhension et ses gens qui le conseillent ne pourra arriver à
échéance pour attacher tous les bouts.
Mais on fera comme on a déjà fait. On fera des lois
imparfaites, des lois qui vont coûter cher parce qu'il y a aussi un
coût dans l'administration. Il me semble que le gouvernement, qui s'est
vanté de vouloir être un gouvernement efficace, un bon
gouvernement, un bon administrateur, est en train de nous donner la preuve que
ce n'est pas vrai. Moi, je l'ai constaté parce que vous savez, on aura
beau dire ce qu'on voudra, ce n'est pas beaucoup, les 0,10 $ de taxe et les
0,12 $. C'est 3 300 000 000 $ depuis 2 ans. Et vous, vous vivez avec ces
gens-là.
À force d'en mettre sur le paquet, est-ce
que c'est la première goutte ou la dernière qui fait
renverser le verre. On ne se posera pas la question. Mais c'est comme ça
qu'on fait.
Et il y a un autre élément. Ça c'est
là-dessus que je vais essayer de vous orienter et vous répondrez
ce que vous voudrez. On a entendu beaucoup de discours à
l'Assemblée nationale durant l'étude du projet de loi. Il y a
beaucoup de gens qui ont dit: Les administrateurs municipaux, on va les
responsabiliser. Je ne sais pas si c'est responsabiliser dans cette
question-là parce que vous n'avez pas le pouvoir de décider,
responsabiliser, ça veut dire le pouvoir de décider. Vous ne
déciderez rien. Vous allez subir.
Mais tout de même, des gens se sont permis de dire qu'avec ce
projet de loi on va obliger les municipalités à mieux se
réglementer, à mieux se comporter, et à mieux administrer.
Est-ce que vous croyez que c'est le cas?
M. Choquette: Voici, écoutez. Je pense que
l'administration des villes, c'est quand même variable. C'est comme
l'administration du gouvernement et même des ministères. C'est
presque impossible de dire: Quelle est la qualité générale
de l'administration municipale au Québec? Vraiment, il faudrait faire
des statistiques et étudier. Mais, dans l'ensemble, moi, d'après
ce que je vois, et ça fait huit ans que je suis maire et que je
fréquente des villes et que je vois ce qui se passe dans d'autres
municipalités, je pense qu'on aurait tort de penser que les villes sont
mal administrées au Québec.
Je pense qu'en général, l'administration est bonne. La
qualité de l'administration est bonne. Naturellement, tout à
l'heure j'ai fait une blague en me vantant un peu d'avoir réduit ma
dette. Je n'ai pas juste du mérite. J'ai une ville qui est
entièrement bâtie. C'est une ville qui n'a plus de
développement. Une ville qui est en développement a besoin d'une
dette puisqu'il faut qu'elle procure des services. Il faut qu'elle ouvre des
rues. Il faut qu'elle apporte l'eau, les égouts, etc.
Alors, il faut faire attention dans ce domaine-là de ne pas
mettre tout le monde sur le même modèle. Maintenant, nous aider
à nous responsabiliser. Est-ce que la Société de transport
de la Communauté urbaine fait vraiment des abus actuellement?
D'après moi, d'après ce que je vois de cette administration, je
pense qu'elle est assez saine. Il y a des gens qui m'ont dit: Mais regardez
donc ce que ça coûte pour accomplir des choses à la
Société de transport? Mais quand vous avez des syndicats de
trotskistes comme les syndicats d'entretien, et vous avez un Code du travail
qui est fait pour aider les syndicats, contre les employeurs. Un employeur,
dans le secteur public, n'oubliez pas qu'il ne défend pas un profit. Son
critère, c'est combien il peut obtenir des contribuables.
Alors, un employeur dans le secteur public est beaucoup plus
vulnérable qu'un employeur dans le secteur privé. Un maire
là, ça s'occupe aussi de sa popularité et de son image. Je
ne parle pas juste de moi, mais je parle en général. Les maires
n'aiment pas ça avoir de gros problèmes de relations de travail
et des cols bleus qui débraient, des cols bleus qui ne veulent pas
ramasser les vidanges et qui ne veulent pas ramasser la neige l'hiver.
Naturellement, ce n'est pas tous des héros, les maires. Ce sont des
êtres humains. Alors, les conseils municipaux, c'est la même
chose.
Alors, qu'est-ce qui arrive? C'est tellement plus facile de donner que
de dire non. C'est tellement plus facile de céder que de dire non. Et
avec notre Code du travail, nos systèmes d'arbitrage, comme je l'ai
expliqué plus tôt, tout va dans le sens du laxisme financier.
Alors, là, moi, je vous dis que ceci étant dit, les maires ont
fait une sacrée bonne job et les conseillers municipaux aussi parce que
je n'ai pa vu de villes en faillite au Québec. Je n'ai pas vu de villes
en faillite. J'ai vu des villes avec des budgets équilibrés.
Alors, je me dis que c'est quand même mieux que ce que le
fédéral et le provincial ont fait. Parce que, nous autres, on n'a
pas le droit. Tout ce qu'on collecte, on est obligé d'aller le chercher
en taxes. Si vous appliquiez la même rigidité, la même
discipline, on ne serait pas dans l'état où on a besoin d'une loi
comme celle-là aujourd'hui. C'est ça, le malheur. Et l'auteur
principal, il est plus haut. Entre nous, on va dire deux choses: il y en a un
qui a préparé cette déconfiture financière, qui est
parti, et puis, il y en a un autre qui est en train de consommer la mort
financière du pays. C'est aussi simple que ça.
Je suis peut-être un peu sibyllin, mais - qu'est-ce que vous
voulez? - quand ça fait 15, 20 ans qu'on vit sur un "party" et que
l'argent est illimité, on le dépense et tout est bon pour le
peuple, il n'y a jamais de... Ce n'est pas comme les politiciens d'autrefois.
Les gens d'autrefois, on pouvait peut-être leur reprocher un certain
conservatisme, mais avant qu'ils donnent un petit bout de patronage à
quelqu'un, ça prenait beaucoup de démarches et ils calculaient 0,
05 $ par 0, 05 $. Mais aujourd'hui, les vannes sont ouvertes depuis des
années et, aujourd'hui, on est rendu avec ça. Mais, les villes,
par exemple... Ma réponse est que les villes ont quand même tenu
le coup.
M. Dufour: Je vous écoute en me disant que c'était,
des fois, pour certains maires, qui protégeaient leur
popularité...
M. Choquette: Vous m'avez donné l'occasion de me
défouler, M. le député, merci beaucoup.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dufour: Vous allez voir, vous allez
changer de côté, j'en suis sûr, si on continue. Quand
vous me dites que les maires, des fois, veulent surveiller leur
popularité, etc., mais, dans la question du transport en commun à
Montréal, en fait, c'est l'organisme qui va subir le plus fort coup de
la réforme, spécifiquement. Il paraît - je ne sais pas si
les chiffres sont corrects ou pas, mais - qu'ils ont vécu 25
grèves. Donc, il y a des gens... Je ne sais pas si le chiffre est exact.
Il y en a qui ont parlé de 25 grèves, mettons.
M. Choquette: Ce n'était pas de...
M. Dufour: En tout cas, mettons de nombreuses grèves,
ça va être plus...
M. Choquette: Oui, il y en a eu. Mais la simple menace...
L'arrêt du transport en commun, ça cause des problèmes
à beaucoup de gens.
M. Dufour: Ce que j'essaie de dire, là-dedans, c'est qu'il
y a des gens qui ont dit non, tout de même...
M. Choquette: Ah oui!
M. Dufour: ...mais ils n'ont pas pu résister à des
choses...
M. Choquette: M. Dufour, je ne dis pas que... Je ne voulais pas
faire de caricature. Il y a des gens, dans le secteur public, qui sont vraiment
des gens de principe et qui ont une grande volonté de faire triompher
l'intérêt général. Mais où est
l'intérêt général quand un syndicat arrive et dit:
On prendrait 5 % d'augmentation cette année? Est-ce que l'administrateur
public doit dire: Non, c'est 4 % ou c'est 3,5 %? Et puis, il se dit: Bon, bien,
dans la vie, il faut mettre de l'eau dans son vin. Finalement, il met trop
d'eau dans son vin et ça finit par coûter cher. Moi, je ne sais
pas... Je sais que le secteur public est vulnérable, sur le plan des
relations de travail - c'est tout ce que j'ai à dire - parce qu'il n'y a
pas de faillite possible de l'entreprise. Le contribuable peut toujours venir
à la rescousse pour ajouter encore l'argent dont on a besoin pour
régler avec les syndicats.
M. Dufour: Saviez-vous, M. le maire, que le ministre des Affaires
municipales nous a dit: On peut augmenter les coûts aux entreprises parce
qu'on avait baissé de 1 300 000 000 $ leur taxation, lorsqu'on a pris le
pouvoir, en 1985. C'est à peu près ça. Saviez-vous, vous
autres, que c'est un des arguments qui va faire qu'on peut vous imposer une
fiscalité nouvelle? Est-ce que vous étiez conscients de
ça?
M. Choquette: Non. J'ai entendu ce raisonnement. Mais la seule
erreur de ce raisonnement-là, c'est que l'assiette fiscale de la taxe
d'af- faires et l'assiette fiscale foncière, ce sont deux assiettes
fiscales différentes. Et on fait une petite salade avec ça. Je
comprends que, souvent, dans l'industrie et le commerce, on est
propriétaire, en même temps, de l'immeuble. Donc, les rôles
sont confondus. Ce n'est pas toujours le cas, par exemple. Mais il faut faire
attention de ne pas confondre des assiettes fiscales bien
déterminées. Et moi, je trouve que la taxe d'affaires, c'est une
affaire qui marche bien; on en est satisfaits, nous autres, sur l'île de
Montréal. Pourquoi vouloir venir changer notre système
établi qui donne un rendement satisfaisant? C'est ça que je
n'arrive pas à comprendre, toutes ces bontés gouvernementales au
nom de taxes additionnelles. Je n'arrive pas à comprendre ça.
Pourquoi nous en donner tant que ça? On n'en demande pas tant que
ça. Donnez-nous des coûts financiers, mais ne nous donnez pas
ça à coups de lois.
M. Ryan: Vous pouvez garder votre taxe d'affaires, si vous la
voulez.
M. Choquette: Pardon?
M. Ryan: Vous pouvez la garder, la taxe d'affaires, si vous
voulez, avec le projet de loi. (16 h 45)
M. Choquette: Je le sais. Mais, M. le ministre, est-ce que vous
n'avez pas peur de créer une société où on ne se
comprendra plus? C'est ça, le problème. Il va y avoir toutes
sortes de régimes fiscaux, suivant les municipalités. Les gens ne
comprendront plus. Il n'y aura plus d'ordre.
Le Président (M. Garon): Alors, M. le maire et
président de la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal, je vous remercie de votre contribution à nos travaux de
même que ceux qui vous accompagnent et j'invite les représentants
de la Société de transport de la ville de Laval à
s'approcher de la table.
Alors, M. Beldié, de la Société de transport de la
ville de Laval, il y a une heure qui est mise à votre disposition.
Ça veut dire que normalement vous prenez 20 minutes, la partie
ministérielle prend 20 minutes, l'Opposition prend 20 minutes. Si vous
en prenez plus, on les soustrait aux deux autres; si vous en prenez moins, on
les leur ajoute. Alors, vous pouvez commencer, en nous présentant celui
qui vous accompagne, peut-être.
Société de transport de la ville de
Laval
M. Beldié (Jean-Jacques): Permettez-moi de vous
présenter M. Richard Courey, directeur général de notre
société. Alors, M. le Président, je vous remercie. M. le
ministre, mesdames et messieurs. Nous nous présentons devant vous
aujourd'hui pour vous faire part de la situation actuelle de la
Société de transport de la ville de Laval, des
conséquences que la réforme proposée peut avoir et de la
réflexion qu'elle provoque. Mais avant d'aborder spécifiquement
ces volets, nous aimerions situer dans le temps l'évolution
générale du transport en commun et plus particulièrement
les développements qu'il a connus sur notre territoire.
En 1971, à la suite d'enquêtes publiques,
l'Assemblée nationale légiférait pour amender la charte de
la ville de Laval et créait, par voie d'expropriation des transporteurs
privés, la Commission de transport de la ville de Laval. Ce nouvel
organisme prenait alors la relève et débuta l'implantation d'une
desserte par autobus qui eut tôt fait de passer de l'état
embryonnaire à celui de véritable réseau de transport en
commun. Le gouvernement affirmait alors sa volonté de développer
ce mode de transport dans les grandes agglomérations urbaines.
La réforme proposée laisse percer la volonté de
voir se regrouper les petites municipalités afin d'en optimiser la
gestion. Est-il utile de rappeler que voilà maintenant plus de 25 ans,
14 petites municipalités ont devancé cette volonté et ont
créé la deuxième plus grande ville au Québec? Le
gouvernement multiplia alors les mesures pour assurer le développement
du transport en commun, allouant des subventions très substantielles aux
transporteurs publics tant pour l'acquisition du matériel
nécessaire que pour l'implantation de tarifs réduits permettant
une plus grande accessibilité à ces services. L'instauration de
laissez-passer mensuels en est une preuve très significative.
Parallèlement à ces mesures directes d'aide aux transporteurs,
divers gestes étaient posés pour accroître la
présence du transport en commun dans la vie quotidienne des
communautés locales. À titre d'exemple, notons l'encouragement
qui fut fait aux commissions scolaires d'intégrer le transport de leurs
élèves aux réseaux existants.
D'autres responsabilités, le transport adapté pour les
personnes handicapées, étaient également confiées
aux commissions de transport. Ces diverses mesures accompagnaient la croissance
phénoménale que connaissait le monde du transport en commun.
C'est aussi à cette époque qu'une nouvelle tendance prenait
forme, soit celle de responsabiliser les élus locaux. On assiste donc
à une modification majeure des lois régissant les commissions de
transport; ces dernières sont transformées en
société et la création, en janvier 1986, des conseils
intermunicipaux de transport là où il n'existe pas de transport
public organisé par les instances locales, même si ces territoires
sont desservis par les sociétés voisines.
Car il ne faut pas oublier que la STL desservait un immense territoire
situé au nord de Laval qui relève maintenant de 14 conseils
intermunicipaux de transport.
Une voix: De quatre.
M. Beldié: De quatre. Excusez-moi. Merci. Il y en a qui
suivent. Ces derniers changements arrivent cependant à un moment
où le fardeau financier s'alourdit, tant pour le gouvernement central
que pour le palier municipal. On procède alors à de nombreuses
études, à des commissions parlementaires en août 1987 et en
janvier 1989, à l'énoncé de principe et à
l'élaboration de politiques.
Tout ce brouhaha émerge enfin sur un nouveau consensus
initié par Laval, regroupant les grands organismes de transport de la
région métropolitaine. Cette entente qui fut
entérinée par le gouvernement donna naissance au Conseil
métropolitain du transport en commun. On croyait voir la lumière
au bout du tunnel. On se rend compte aujourd'hui que c'était le phare du
train qui s'en venait.
La réforme qui est proposée comporte essentiellement deux
volets: une facture, qui non seulement sabre dans les acquis, mais
élimine également le volet d'encouragement à la
productivité que l'on retrouvait au programme triennal, qui ne devait se
terminer qu'à la fin de 1992, et une nouvelle répartition des
pouvoirs non liées à de nouvelles responsabilités, mais
strictement axées sur une manière d'absorber cette facture. Pour
les assumer, elle propose cinq alternatives, soit une surtaxe de 30 $ sur
l'immatriculation des véhicules de promenade dans les zones urbaines,
une nouvelle taxe foncière sur les immeubles non résidentiels,
une taxe sur les espaces de stationnement, une taxe foncière
générale et, finalement, une tarification accrue de l'usager.
Examinons-les rapidement.
La surtaxe sur l'immatriculation qui nous semblait dédiée
fait pourtant l'objet d'une clause échappatoire à l'article 234
du projet de loi à l'étude, permettant au gouvernement de
s'approprier les revenus générés. De plus, cette surtaxe
devait viser l'usage d'une automobile et non sa propriété.
Deuxièmement, la nouvelle taxe foncière sur les immeubles non
résidentiels affecte de façon marquée la position
concurrentielle des villes. Il ne sera pas surprenant de voir les industries
s'établir en périphérie et accroître, par ce choix,
les besoins en infrastructures routières et autres.
Troisièmement, la taxe sur les espaces de stationnement ne tient
aucunement compte de la réalité tant économique que
démographique de ville de Laval et s'avère, en pratique,
inapplicable sur notre territoire. Quatrièmement, une taxe
foncière générale accrue est également un
cul-de-sac alors que nous sommes présentement parmi ceux dont le taux de
taxes foncières dédiées au transport en commun est parmi
les plus hauts du Québec. Cinquièmement, finalement, une
tarification accrue de l'usager. À ce sujet, nous aimerions simplement
noter que notre grille tarifaire a progressé continuellement depuis 1985
pour amener l'usager
à contribuer au tiers des coûts d'opération, au
même titre que les deux autres partenaires. Ces diverses mesures, outre
la réserve qu'elles peuvent nous inspirer quant aux revenus
générés, s'avèrent des alternatives qui nous
semblent des traquenards. On nous donne des instruments pour nous pendre et ce,
au nom du respect de l'autonomie. Nous ne serons pas le messager de cette
opération de pelletage du gouvernement vers les paliers
inférieurs.
Nous avons respecté les règles du jeu. Nous avons, comme
objectif, assurer un transport efficace et ce, au meilleur coût possible.
Nous avons réussi ce qui pourrait être qualifié de tour de
force, si l'on considère la population globale et l'immensité du
territoire desservi. Cependant, par son essence même, la réforme a
une qualité. Elle nous ramène, nous, en tant que transporteur
public, à notre mission première, notre raison d'être, soit
celle d'opérateur d'un système de transport en commun. Nous
croyons bien nous acquitter de ce mandat.
D'ailleurs, la problématique que nous connaissons à Laval
est très différente de ce qui est vécu ailleurs dans la
province. Alors que les sociétés constatent une stagnation, voire
une baisse de leur achalandage, la Société de transport de la
ville de Laval vit une croissance fulgurante. L'année 1990 s'est
soldée par une hausse de clientèle de 18 % et les premiers mois
de 1991 indiquent que celle-ci s'est encore accrue de 5 %. Ce
phénomène est unique en Amérique du Nord et exige
possiblement un traitement unique. Vous comprendrez sûrement notre
désarroi devant l'annonce du retrait gouvernemental d'une subvention
d'opération de 15 500 000 $ sur un budget global de 62 000 000 $.
Une société de transport n'est pas une entreprise
manufacturière où la multiplication des clients
génère des profits accrus. C'est même l'inverse. Nous avons
même appris récemment par le biais des journaux que les
subventions d'opération étant abolies, vous étudiez
présentement des subventions aux dépenses d'immobilisation. Nous
croyons que si telle est votre volonté, tout l'aspect financement
étant alors en révision, il serait impératif que cette
démarche soit intégrée dans son ensemble et qu'elle fasse
l'objet d'une consultation auprès de tous les organismes de transport
puisque chacun d'entre eux a des besoins qui lui sont propres. Il nous est donc
très difficile de nous associer à la démarche
gouvernementale qui vise l'ensemble des sociétés de transport
sans tenir compte des réalités propres à chacune d'entre
elles. Cependant, elle nous enlève enfin le carcan qui s'était
développé avec les années et qui faisait des
opérateurs, des intermédiaires chargés de la
redistribution de mesures sociales.
Nous comprenons que les sociétés de transport sont
maintenant libres d'assumer exclusivement le rôle qui leur est
dévolu. Le rôle de la Société de transport de ville
de Laval est de transporter ses usagers. Au cours des années, par des
mesures incitatives, le gouvernement nous a fait instaurer des tarifs
réduits, faussant ainsi la perception du public à l'égard
du transport en commun, en y accolant également la notion de transport
des pauvres. Cette fausse réalité est maintenant bien
ancrée, tant dans l'esprit des usagers que dans celui de certains
gestionnaires de sociétés et ce, alors que le gouvernement nous
fait part de son incapacité à financer ce qu'il a
créé.
À Laval, nous croyons, nous avons démontré que le
transport en commun n'est pas le transport des pauvres, mais plutôt une
alternative de plus en plus valable au transport privé. Nous croyons
également que le transport en commun est un choix collectif qui
commence, d'abord et avant tout, par un choix individuel. C'est cette
philosophie qui nous pousse à croire à la survie et au potentiel
de développement du transport public et ce, selon les lois d'un libre
marché. (17 heures)
Les mesures sociales que les politiques antérieures du
gouvernement nous ont amenés à mettre en place totalisent,
seulement à Laval, 15 500 000 $, dont 6 000 000 $ en manque à
gagner en raison des tarifs réduits et du transport adapté.
Ce rôle qui peut se justifier dans une société
d'abondance est un luxe que l'on ne peut plus assumer dans notre
réalité locale. D'ailleurs, cette constatation est
également présente dans le projet de réforme, car aucun
transfert de responsabilités sociales n'a accompagné le pelletage
de la facture. Nous comprenons donc que le gouvernement entend, par des moyens
qui lui sont propres, s'acquitter de ses responsabilités.
En conséquence, nous notons ce retour à notre vocation
première qui ne fait que confirmer le mandat qui lui fut confié
par l'article 2 de la loi constituante de la Société et je cite:
La Société a pour objet d'exploiter une entreprise de transport
en commun de passagers utilisant quelque moyen de transport en commun dans le
territoire de la ville de Laval. Ce territoire est le territoire de la
Société. Notre mission est claire, M. le Président. Nous
sommes des transporteurs du public et c'est à ce rôle qu'à
l'avenir nous nous confinerons. Nous vous avons affirmé tantôt que
nous étions des victimes du problème que vous tentez d'exporter.
Nous vous avons prouvé par le passé que nous n'étions pas
réfractaires aux changements, mais plutôt initiateurs de nouvelles
avenues. Nous affirmons aujourd'hui que nous sommes à élaborer
des solutions novatrices et que des propositions concrètes seront
bientôt faites à tous ceux qui sont concernés par les
opérations de la Société de transport de la ville de
Laval.
Je vous remercie, M. le Président, et je demeure à votre
disposition ainsi que notre
directeur général, M. Courey, pour répondre
à vos questions et à celles de l'assemblée.
M. Ryan: M. le Président... Le Président (M.
Garon): Oui.
M. Ryan: Merci de votre amabilité. M. Beldié, il me
fait plaisir de vous accueillir à la commission au nom du gouvernement.
J'écoutais avec beaucoup d'intérêt le mémoire dont
vous nous avez donné communication. J'ai eu l'impression que vous aviez
intercalé ici ou là quelques paragraphes négatifs pour
satisfaire peut-être à la mode politique du jour dans les milieux
municipaux. J'ai senti que, foncièrement, l'inspiration de votre
mémoire est beaucoup plus positive que ces paragraphes ne semblaient
l'indiquer.
Avant d'en venir à une couple de questions qui m'apparaissent se
dégager de votre exposé, il faudrait tout d'abord essayer
d'indiquer quelle est la portée exacte des changements proposés
pour ville de Laval. J'ai examiné les chiffres que nous avons et je
constate que pour l'ensemble de l'opération, dans le cas de ville de
Laval, il y avait un solde à financer au mois de février de 14
000 000 $, 14 500 000 $. Et avec les atténuations que nous avons
apportées, les sources de revenus additionnels qui seront
procurées aux municipalités par des décisions du
gouvernement et de l'Assemblée nationale, le solde financé par
des revenus locaux sera de 8 100 000 $. Ça baisse de 14 500 000 $
à 8 100 000 $. C'est quand même une réduction
considérable.
Maintenant si j'examine les sources de revenus additionnels que nous
ouvrons aux municipalités, pour Laval, les frais, les droits sur
l'immatriculation des véhicules automobiles, 30 $ par véhicule,
ça, ça va rapporter 1 800 000 $ dans le cas de Laval, suivant nos
approximations.
Maintenant nous avons décidé de hausser les droits sur les
mutations immobilières afin d'aider à financer une partie de la
contribution des municipalités au fonctionnement du transport en commun.
Il y aura des revenus additionnels de 4 400 000 $ qui dériveront de
cette source-là pour Laval. Si on additionne les deux, on est rendu
à 6 200 000 $. Et comme le total est de 8 100 000 à financer, je
pense que la marge qui devra être trouvée n'est pas énorme.
Je pense qu'on a vu, avec les mesures prises par le gouvernement, à
ramener ces exigences nouvelles à un niveau fort raisonnable
étant donné l'ensemble du contexte actuel. Je vous indiquerai
tantôt ce que ça représente au point de vue de la taxation
possible, mais c'est des sujets que nous aurons l'occasion de discuter avec
votre charmant maire, que je vous prie de saluer de ma part quant vous
rentrerez à Laval parce qu'il a participé à bien des
conversations avec nous, et plusieurs des idées qu'il a émises
n'ont pas été sans influencer la pensée du
gouvernement.
J'ai remarqué une chose dans votre mémoire. Vous dites
que, chez vous, la clientèle a augmenté depuis deux ans. Vous
dites que ça a augmenté de 18 % en 1990 et que, selon les
données des premiers mois de 1991, il y aurait une autre augmentation de
5 %. Ça, c'est très intéressant. Dans le contexte actuel,
moi, j'apprécie énormément le ton de votre mémoire
sur cette question. C'est le point fondamental de votre mémoire. Le
reste, vos opinions politiques et tout, ça, on prend ça et c'est
la monnaie d'échange, ça va bien. Mais ce qui m'a
intéressé, c'est ce que vous dites sur le transport en commun qui
est votre domaine, et vous dites: Nous autres, on le fait fonctionner chez nous
de manière dynamique.
Là, j'aimerais bien que vous me disiez deux choses: comment
expliquez-vous cette hausse, alors que, sur le territoire de l'île de
Montréal, on accuse une baisse? J'ai noté que, sur la rive sud de
Montréal, il y a également eu hausse au cours de la
dernière année. Alors, j'aimerais que vous m'expliquiez comment
cette hausse a pu se produire. Est-ce que c'est par des méthodes de
promotion? Est-ce que ça a entraîné des programmes de
relance et de simulation de plusieurs millions de dollars? Qu'est-ce que vous
avez fait pour obtenir ce résultat-là? Deuxièmement, je
crois comprendre que vous avez eu des augmentations de tarifs pendant ce
temps-là, est-ce que ç'a nui à la hausse de la
clientèle ou si la hausse de la clientèle ne découle pas
davantage d'une dynamisation, d'une plus grande qualité du service? Je
pense que c'est la question que je voulais vous poser.
M. Beldié: M. le ministre, vous nous avez posé
plusieurs questions, entre autres, vous parlez des solutions que vous proposez
qui, en théorie, semblent assez faciles à appliquer. Dans la
pratique, pour ville de Laval, c'est un petit peu plus difficile à
appliquer. En ce qui concerne l'augmentation de notre clientèle,
évidemment, il y a eu la création du CMTC et de l'ORTC et, par la
suite, du CMTC qui a créé aussi une carte régionale.
Alors, si vous voulez, je vais porter ces questions à l'attention de
notre directeur général, qui va vous expliquer la technique en
arrière de ça. M. Courey.
M. Courey (Richard): Merci, M. le ministre. Pour la
première partie de votre intervention, qui traitait de la
problématique financière et de l'ordre de grandeur des chiffres
dont il était question et de l'incidence de la réforme, il semble
y avoir un certain désaccord au niveau des chiffres, dans la mesure
où ce que je comprends de l'explication que vous avez apportée
dans le détail des chiffres traitait d'une question de 14 500 000 $
comme représentant l'incidence totale fiscale de la réforme sur
le territoire de ville de Laval.
Pour ce qui est de ville de Laval vue dans son ensemble, on parlait
d'une enveloppe - parce qu'on a eu des discussions très récentes
avec les fonctionnaires de ville de Laval - d'approxima-tivement 20 000 000 $.
Dans les faits, pour ce qui est de la chose strictement limitée au
transport en commun, la Société de transport de la ville de
Laval, si le programme avait été maintenu pour l'année
1992, aurait obtenu une subvention d'exploitation de 13 400 000 $ et aurait
normalement été en mesure d'obtenir une subvention à la
productivité, programme qui était convenu dès la
réforme partielle de 1987 pour un montant de 2 100 000 $, ce qui
représente, au total, 15 500 000 $.
N'étant pas un fonctionnaire de ville de Laval, je leur laisserai
le soin d'expliquer la problématique et comment l'incidence de la
réforme peut se régler de leur côté. Me limitant
exclusivement à la chose du transport en commun, les 15 500 000 $
peuvent être défalqués, quant à nous, dans
l'application de la surtaxe sur l'immatriculation d'un montant qui n'est pas 1
800 000 $, mais d'après nous, qui représente une capacité
génératrice de revenus sur notre territoire de l'ordre de 4 500
000 $. De ce montant, on doit tenir compte des modalités qui sont
prévues dans l'application de l'article 267 du projet de loi, qui traite
de la répartition dans la grande région de Montréal.
Évidemment, c'est une problématique de fond qui remet en
question les principes d'autonomie qui ont été si chers à
chacun des intervenants lors de la saga de la création du CMTC au cours
de la même période, l'année dernière.
Évidemment, on change l'équilibre du partenariat en ajoutant
d'autres partenaires qui sont sis dans les Basses-Laurentides, faisant en sorte
que les critères qui ont fait l'objet de l'entente qui avait
peut-être pris 20 ans à discuter vont être remis en question
dès l'application de ce volet de la réforme. Évidemment,
on préconiserait une approche qui ferait en sorte que les sommes
d'argent qui seraient générées sur notre territoire
seraient utilisées exclusivement sur notre territoire en raison des
principes d'autonomie locale qui vous semblent si chers, quant à nous -
et on partage votre opinion là-dessus - de par l'énoncé de
principe même de la réforme.
Pour la deuxième partie de votre question qui traitait des
augmentations de clientèle et des hausses de tarifs, dans les faits, en
1990, on a effectivement connu une augmentation de 18 % de notre
clientèle. L'évaluation qu'on en fait et les sondages qu'on a
faits à l'interne auprès de nos usagers pour déterminer la
cause de cette augmentation de clientèle démontre effectivement
que c'est par choix alternatif que les gens en sont venus au transport en
commun.
On a effectivement fait une pénétration de marché
équivalente à ce que Pepsi pourrait faire chez Coke en allant
chercher des gens qui aimaient le Pepsi et qui prennent du Coke maintenant. La
réalité est telle que le phénomène de congestion
sur notre territoire dénote à quel point l'alternative qui est la
nôtre peut devenir intéressante et on a augmenté notre
achalandage de 18 %. En 1990, certains ont attribué cette
capacité d'augmenter nos volumes d'achalandage à l'introduction
d'une carte régionale à un tarif beaucoup inférieur
à celui que les Lavallois payaient avant. Cependant, je vous rappellerai
qu'en 1991, après une augmentation de plus de 23 % du tarif de la carte
régionale adulte, au mois de mars, on a connu, à Laval, sur notre
territoire, pour nos résidents, une augmentation de 10,63 %
d'achalandage en plus des 18 % qu'on avait l'an dernier, faisant ainsi une
sérieuse encoche, quant à nous, à la théorie de ce
que certains se plaisent à appeler "l'élasticité
négative de la croissance des tarifs" par rapport à la croissance
de l'achalandage.
Exprimé de façon plus simple, certains prétendent
qu'en augmentant les tarifs on réduit l'achalandage. De notre
côté, on prétend que, non seulement on croit que c'est un
mythe, mais que dans les faits, on semble avoir prouvé le contraire.
D'ailleurs, les sondages encore très récents du mois dernier
témoignent de ce que, pour ce qui est de la chose tarifaire, les gens,
chez nous, sont prêts à accepter qu'on tarife les services
municipaux qu'ils veulent consommer et, dans ce cadre-là, il y a eu un
sondage qui vient d'être fait, qui s'appelle "Le Sommet de la personne"
que la ville de Laval a entrepris. Il y a un sondage parallèle que la
STL a entrepris également qui confirme effectivement l'orientation de la
population dans son choix collectif d'aller davantage vers une approche
tarifaire que vers une approche fiscale.
À savoir pourquoi la Rive-Sud a réussi la même
augmentation d'achalandage pour une même période, je leur
laisserai évidemment le soin d'expliquer leur bonne nouvelle
eux-mêmes. D'après nous, il s'agit là évidemment
d'un phénomène qu'on retrouve en banlieue de par la position
concurrentielle qu'on y retrouve versus les villes centres au niveau des
déplacements et du temps de déplacement requis. Ça
complétait notre réponse sur ce volet-là.
M. Ryan: Je vous remercie. S'il reste du temps, je le prendrai
tantôt.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Dubuc. Pardon? M. le député de Deux-Montagnes. (17 h 15)
M. Bergeron: Voici. Moi, je vais être bref. Dans votre
texte, au commencement, vous m'avez extrêmement fait peur, parce que
lorsque que j'étais maire de Deux-Montagnes, j'ai employé une
expression pendant six ans, à savoir que la lumière s'en venait
au bout du tunnel, mais vous dites que vous voyez seulement le phare,
j'espère que c'est pour les autobus et non pas pour la
ligne Montréal-Deux-Montagnes.
Voici, la question que je voulais vous poser, c'est la suivante; en
fait, M. le ministre l'a posée avant moi... C'est sûr que c'est
toujours une surprise quand vous nous dites que vous avez augmenté votre
grille tarifaire durant cinq ans et que votre achalandage a augmenté. Je
suppose que, comme vous venez de le dire, c'est à cause du service, de
l'organisation interne que vous avez. Et on parle de la même chose sur la
Rive-Sud. Peut-être aussi, vous l'avez soulevé brièvement,
mais peut-être pour le bénéfice du ministre, Laval, il y a
six mois, M. Courey en a parlé, a fait une enquête au niveau de la
ville de Laval à savoir si les citoyens de Laval auraient objection
à avoir une augmentation des tarifs, s'il y avait un meilleur service.
Et je pense que le résultat a été de 62 ou 65 % à
savoir que...
Moi, les deux seules questions que je veux poser, c'est parce que c'est
intéressant... C'est qu'on apprend tellement de choses
dépressives depuis trois jours, que c'est encourageant d'entendre ce que
les gens de Laval ont à nous dire. Je voudrais que vous élaboriez
brièvement ce que vous voulez dire par "le transport des pauvres"? Vous
avez élaboré sur le transport des pauvres, à savoir que
votre devoir, vous autres, de la Société de transport de la ville
de Laval, c'est le transport des gens, en général. Est-ce qu'il
peut y avoir un jeu avec Montréal sur cette question-là, le
transport des pauvres, qui fait que Montréal a tellement un gros
déficit comparé à vous ou à la Rive-Sud?
M. Beldié: En tant que société, on nous
considère toujours un petit peu comme... On veut qu'on joue un
rôle social. On croit toujours que celui qui utilise nos services n'a pas
les moyens de voyager en auto, ou n'a pas les moyens de prendre un autre moyen
de locomotion. Ce n'est pas prouvé. On croit, nous, que c'est une
alternative, selon les sondages qu'on a. Et vous l'avez mentionné, suite
à notre Sommet de la personne, 62 % des répondants ont dit qu'ils
sont favorables à l'augmentation du tarif, à condition qu'on
améliore encore le service. Parce que nous, on vit un problème
à Laval, l'étendue de la ville fait en sorte que, dans les
extrémités, on ne nous voit peut-être pas passer assez
souvent. Alors c'est un problème sérieux qu'on vit. Mais les gens
nous disent: Si vous nous donnez un meilleur service, on est d'accord pour
payer un peu plus cher. Est-ce qu'ils savent exactement le coût
réel ou la facture qui va être au bout de ça? Je ne le
crois pas encore. Mais ils sont d'accord pour payer un peu plus cher. Alors,
c'est dans ce sens-là qu'on se dirige.
M. Bergeron: Une question très brève, qui peut, M.
le ministre, vous intéresser. Vous finissez votre texte en disant:
Initiateurs de nouvelles avenues. Peut-être que si vous nous mettiez au
courant, ça pourrait aider notre ministre des Affaires municipales, vos
initiatives de nouvelles avenues.
M. Beldié: Bien, pour qu'on n'accuse pas un politicien de
vous lancer... disons de donner des scoops, je vais laisser mon directeur
général répondre là-dessus.
M. Courey: Dans la réalité des choses, il
n'était pas notre intention aujourd'hui d'annoncer une stratégie
qu'on va rendre publique dans les jours à venir. Cependant, on peut
peut-être vous donner une bonne appréciation de notre
réflexion qui va vous permettre sûrement de conclure quant
à la finalité des solutions qu'on proposera.
Dans un premier temps c'est que, quand vous faisiez allusion
tantôt à la question du transport des pauvres, versus le transport
alternatif, on a la prétention de constater que dans l'ensemble du
Québec, le Québécois moyen, pour une voiture moyenne, doit
débourser, en moyenne, 500 $ par mois pour l'achat du véhicule,
le financement, l'entretien, les assurances, etc. Quand on regarde le prix
d'une carte mensuelle d'abonnement pour accéder à tout le
réseau de transport en commun de la grande région de
Montréal, soit la carte la plus dispendieuse, on parle aujourd'hui d'une
tarification de 52 $ par mois. Quant à moi, 52 $ par mois, versus 500 $
par mois, c'est déjà un bon "bar-gain". Quand on parle d'une
tarification qui fait en sorte qu'on encourage le mythe du transport des
pauvres, c'est quand on fait une appréciation de la question du
transport en commun en se disant: II faut réduire les tarifs pour avoir
plus de monde. On a de la difficulté à apprécier cette
réalité-là chez nous, étant donné qu'on a
augmenté les tarifs et qu'on a encore plus de monde.
Donc, dans les faits, notre réflexion porte davantage sur la
capacité de réduire le coût du déplacement, en
passage unitaire, qui est aujourd'hui d'une moyenne de 3 $, et auquel l'usager
ne contribue que dans une proportion de 1 $ à l'heure actuelle; le
gouvernement contribue dans une proportion de 1 $ et la ville de Laval, de par
sa taxation générale, contribue également dans une
proportion de 1 $ par passage. C'est bien évident que, quand on parlait
de la problématique financière, tantôt, on est conscient
d'une réalité, c'est que, dès 1992, nous autres, vu qu'on
a plus de monde dans les autobus, c'est une machine à saucisse. C'est le
principe inverse d'une entreprise privée: plus tu en vends, plus
ça coûte cher, parce que chaque usager de plus coûte 3 $,
mais ne rapporte que 1 $. Donc, on contribue à augmenter notre
déficit de 2 $ à chaque usager de plus.
La problématique financière budgétaire de la
Société de transport pour l'année 1992 est de l'ordre de
26 000 000 $ et non pas de 15 500 000 $ ou de 8 000 000 $ ou de 4 000 000 $,
c'est 26 000 000 $. Et à ce ti-
tre-là, la réalité des choses est telle qu'on est
appelé à se questionner sur la démarche gouvernementale,
à savoir: Quel est notre vrai rôle?
Notre vrai rôle, quant à nous, on l'a dit dans notre
mémoire quand on disait que la Société a pour objet
d'exploiter une entreprise de transport en commun. Et quant à moi, c'est
là que ça s'arrête. On est responsable de gérer le
transport public, au meilleur coût possible, mais il n'y a pas
d'obligation nulle part qui fait d'une société de transport un
intermédiaire qui doit repasser l'argent qu'il reçoit d'un niveau
de gouvernement ou d'un autre, au niveau de l'usager. C'étaient des
programmes qui existaient. On comprend que, par la réforme, ces
programmes n'existeront plus, puis on a compris également que la
réforme ne nous a pas transféré, comme
société de transport ou comme municipalité, une obligation
de gérer la question sociale.
C'est d'ailleurs un sujet d'actualité dans le débat qui
existe entre les responsabilités du provincial et du
fédéral quand on regarde le domaine de la santé, de
l'environnement, des programmes sociaux. Et à ce titre-là, on
prétend qu'il s'agit là encore, dans notre compréhension
des choses, d'une responsabilité que le gouvernement central, qui
s'appelle le gouvernement provincial, s'est conservée.
Conséquemment, on va se limiter à notre rôle, et on est
concaincu d'une chose, c'est que le gouvernement saura prendre ses
responsabilités de la même façon qu'on le fera de notre
côté. Dans ce sens-là, je pense qu'il n'y a rien d'immoral
à ce que tout le monde respecte les règles du jeu.
M. Ryan: Merci. Juste une question.
Le Président (M. Garon): Oui, M. le ministre.
M. Ryan: Juste une brève question dans cette
ligne-là, si vous me permettez. Vous n'avez pas changé vos
tarifs? Vous n'avez pas annoncé des changements de tarif pour votre
transport écolier? Pouvez-vous nous expliquer ce que vous allez faire
là-dedans?
M. Beldié: C'est-à-dire qu'on a annoncé aux
commissions scolaires visées qu'on chargerait le vrai coût, ce que
ça nous coûte, éventuellement. Et on n'a pas
augmenté officiellement le tarif, mais on leur a dit qu'on le
ferait.
M. Ryan: Mais vous savez qu'en pareille situation il y aura une
négociation possible avec Québec pour un ajustement de la
subvention qui est donnée à la commission scolaire aussi. Vous le
savez, hein?
M. Beldié: On est toujours ouvert aux négociations,
M. le ministre. On est toujours ouvert aux négociations.
M. Ryan: Très bien.
M. Courey: Pour parfaire l'information, M. le ministre, c'est que
la Société de transport de la ville de Laval, à l'heure
actuelle, déplace en moyenne, par mois, 10 000 étudiants en
transport scolaire, dit intégré, par opposition au transport en
autobus jaune. Ça représente 50 % de tout le transport scolaire
intégré de toute la province de Québec. À ce
titre-là, chez nous, en transport scolaire intégré, c'est
des enjeux qui sont fort importants. À l'heure actuelle, la tarification
qu'on charge aux commissions scolaires est équivalente à notre
plus bas tarif étudiant.
M. Ryan: C'est...
M. Courey: C'est de 20,50 $, à l'heure actuelle. On a fait
une proposition qui faisait en sorte qu'on atteignait l'équilibre du
coût de ces déplacements-là, qui amenait ça à
34 $. Les 34 $ étant justifiés, évidemment, de par les
coûts directs, en ne faisant aucune attribution de coûts
généraux autres que des coûts spécifiquement
marginaux, affectés au transport scolaire.
C'est bien évident que, dans le contexte, les commissions
scolaires trouvent ça très difficile et attendent anxieusement
les résultats de toute la démarche qui est entreprise aujourd'hui
pour voir si, effectivement, il n'y aurait pas une possibilité
d'ouverture, pour faire en sorte qu'on maintienne l'équilibre de
partenariat qu'on a développé, depuis dix ans, avec les
commissions scolaires, qui fait en sorte que les parents, les commissions
scolaires et surtout les étudiants peuvent voyager sur l'ensemble de
notre territoire, sept jours par semaine, à un coût qu'on
considère fort intéressant.
Le Président (M. Garon): On vous remercie. Comme ça
clôt le temps qui est dévolu au parti ministériel, le reste
du temps, 22 minutes, ira au parti de l'Opposition.
Je me suis inscrit pour poser une question. Comme je suis critique en
matière de transport, j'aimerais vous poser une question. J'ai bien
prévenu le député de Dubuc que je serais le plus bref
possible et je vous demande si vous pouvez me répondre rapidement aussi,
pour ne pas qu'il pense que je lui enlève son temps.
Alors comment, selon vous, si c'est mis en vigueur, devrait s'effectuer
le partage des revenus de la surtaxe sur l'immatriculation entre les
sociétés de transport de la région de Montréal, les
30 $ supplémentaires?
M. Courey: M. le Président, la réponse à
votre question est la suivante. Quant à nous, tout argent qui est
levé par quelque taxe que ce soit sur un territoire donné doit
rester sur le territoire afin que ce soit les gens du territoire donné
qui puissent en bénéficier. Si Laval a le potentiel de
générer une surtaxe sur l'immatricu-
lation qui rapporterait 4 500 000 $ dans les fonds, dans les coffres
publics réservés à cette fin-là, il est
évident, quant à nous, que les 4 500 000 $ devraient rester sur
le territoire.
Cependant, dans le projet de loi, sous sa forme actuelle, en vertu de
l'article 267, il y a une répartition régionale qui est
prévue par l'application des modalités convenues par le ministre
des Transports, qui ferait en sorte que l'équilibre de la région
qui est difficilement atteint dans la gestion quotidienne du Conseil
métropolitain de transport en commun, sur le plan des principes, qui
sous-tendent la mise en place de cette institution-là, serait remis en
question parce qu'on élargit non seulement les paramètres du
partage de revenus, mais qu'on va également chercher d'autres
partenaires dans l'ensemble de la région de Montréal de
recensement, ou on va chercher les Basses-Laurentides, on va chercher ville de
Lorraine, on va chercher une foule d'autres villes qui ne sont pas partie
prenante de l'entente actuellement.
Ce qui fait en sorte que ça crée un
déséquilibre et c'est dans ce sens-là que, quant à
nous, la seule façon de répartir ces sommes-là pour
éviter toute problématique régionale serait d'attribuer
spécifiquement les revenus levés dans une région à
la région donnée pour son utilisation.
Le Président (M. Garon): Les régions se
répartissant comment? Selon le territoire agricole des
sociétés de transport?
M. Courey: À l'heure actuelle, les régions, dans le
cas de la Société de transport de la ville de Laval, c'est le
territoire de ville de Laval. Par contre, ce qu'on lit dans le projet de loi,
c'est qu'à l'article 267 on a défini une région
particulière pour la région de Montréal et dans cette
région-là on inclut évidemment toutes les villes membres
de la CUM. Les villes de la Rive-Sud, les villes incluant ville de Laval, les
villes du bloc nord, ce qui fait en sorte qu'on a pris une espèce de
pool élargi au lieu de prendre un pool limité.
Déjà là, entre trois partenaires, la STL, la STRSM
et la STCUM, c'est déjà difficile - vous l'avez vu l'an dernier
quand le projet de loi du CMTC a été adopté - de
s'entendre. Si on ajoute d'autres partenaires avec des critères qu'on ne
connaît pas encore, on va juste ajouter au problème et non pas
trouver une partie de la solution. La solution simple, quant à nous,
c'est de dire: Ce qui est levé sur le territoire de la CUM reste dans le
territoire de la CUM. Ce qui est levé sur le territoire de la STRSM
reste dans les villes de la STRSM. Et ce qui est levé sur le territoire
de la STL restera au bénéfice de la STL. Ainsi, tout le monde
maintient son équilibre.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Dubuc.
M. Morin: Dans votre mémoire, je pense que vous avez
tenté de nous faire un petit historique finalement de la
société, à partir de sa création. Vous avez aussi
passé par les multiples mesures d'aide du gouvernement qui ont sans
doute contribué à votre développement pour enfin conclure
qu'au moment où vous atteignez votre vitesse de croisière, il
arrive un petit pépin: Vous exprimez votre désarroi par cette
perte de 15 000 000 $ de subventions sur l'opération.
Est-ce que ce serait possible de savoir - peut-être l'avez-vous
dit et je ne l'ai pas saisi - concrètement ce que ça voudrait
dire comme impact, soit en termes de tarification, même si vous l'avez
effleuré tout à l'heure, ou bien en termes de modifications de la
qualité et de la quantité du service parce que certaines
sociétés nous ont exprimé leur volonté très
ferme de maintenir le service, quitte à ce que l'usager paie. d'autres
nous ont dit que malheureusement, ils devraient se résoudre à
diminuer la qualité ou la quantité des services. j'aimerais avoir
votre opinion là-dessus de façon assez pointue sur l'impact que
pourrait avoir la réforme sur la tarification, la qualité ou la
quantité de services?
M. Beldié: Actuellement, le taux de taxation en ce qui
concerne le transport à Laval est de 0,14 $ des 100 $. Si la
réforme est adoptée telle quelle avec la croissance prévue
ce sera une augmentation, en 1992, de 0,26 $. Ce qui l'amènera à
0,40 $ des 100 $. C'est impossible de surtaxer nos concitoyens. Alors, c'est
pour ça qu'on croit que la réforme est inacceptable. On aurait
préféré bien sûr que cette réforme-là
se fasse par étapes comme pour d'autres organismes qui sont
passés avant nous. Mais il semble que ça ne se fera pas comme
ça. (17 h 30)
Alors, je peux peut-être demander à notre directeur
général d'élaborer là-dessus, si vous voulez, mais,
en gros, c'est ça. Si vous voulez, M. Courey, élaborer.
M. Courey: Au sujet de l'approche que M. Beldié vient
d'expliquer, ce serait une approche où on déciderait de ne pas
réduire nos services - c'est d'ailleurs notre philosophie, on ne veut
pas réduire nos services - et où on imputerait tout le fardeau
financier additionnel en surtaxe générale sur le compte de taxes
des lavallois pour la chose du transport en commun.
L'autre hypothèse est à l'extrême, également,
dans votre question, quand vous dites au niveau de la tarification quelle
incidence est-ce que ça peut avoir. Aujourd'hui, l'usager contribue
à 33 % du coût et ça représente, dans l'ordre
dé grandeur des choses, approximativement 22 000 000 $ chez nous en
termes d'argent. On a un problème financier en 1992 de 26 000 000 $.
Donc, c'est du simple au double au niveau tarifaire déjà
là. Dans des termes plus concrets, le paiement comptant aujourd'hui est
à 1,75 $. Du simple au double l'amènerait à 3,50 $. La
carte d'abonnement mensuel qu'on a à Laval, qui est présentement
à 41 $, serait portée à 82 $ pour faire en sorte que toute
notre grille tarifaire qui nous amène 1 $ par passage devrait nous
apporter 2 $ par passage, parce que notre coût, on va le maintenir
à 3 $ par passage.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Dubuc.
M. Morin: Une autre question d'un tout autre ordre. C'est que,
lors du débat en Chambre sur l'adoption du principe du projet de loi,
plusieurs députés, je dirais les députés du
côté ministériel plus particulièrement, ont soutenu
que, finalement, la loi aurait quelque chose de bon en ce sens qu'elle
amènerait les municipalités ou les sociétés de
transport à mieux gérer, à couper dans le gras et que
ça ferait une meilleure pression, une meilleure gestion.
Alors, par rapport à ce qui a été soutenu souvent,
j'aimerais que vous nous donniez un peu d'information justement sur cet
aspect-là de la croissance, de la moyenne de croissance des
dépenses des dernières années. Je sais que ce n'est
peut-être pas facile, parce que vous êtes une société
en développement, mais en considération de cet aspect-là,
est-ce que vous êtes en mesure de nous donner vos taux de croissance
versus, évidemment, l'inflation des dernières années et en
tenant compte, bien sûr, de votre développement?
M. Beldié: À une première partie de votre
question, je vais vous dire que du gras à la Société de
transport de Laval, il n'en existe pas, il n'en existe plus. Il y en a
peut-être déjà eu, mais il n'en existe plus. Depuis deux
ans, il y a eu un exercice de rationalisation qui a été fait
très sérieusement. Pour ce qui concerne la croissance, M. Courey,
peut-être que vous pouvez élaborer un petit peu plus
là-dessus.
M. Courey: En fait, pour répondre directement à
votre question, depuis la prise de contrôle par les élus
municipaux de la chose du transport, le passage de la CTL en 1985 à la
STL, les dépenses, dans un ordre de grandeur en dollars réels et
non pas en dollars indexés, on parlait à l'époque d'un
budget où il y avait 42 000 000 $ de dépenses en 1985. En 1985,
les dépenses totales étaient inférieures à 42 000
000 $. En 1986, elles étaient inférieures à 42 000 000 $.
En 1987, elles étaient inférieures à 42 000 000 $. En
1988, elles ont été à 42 200 000 $. En 1989, les
problèmes ont commencé, parce qu'on commençait à
avoir plus d'achalandage. On a eu une augmentation de volume de 4,6 % dans une
période d'inflation autour de 5 %. En 1990, avec une augmentation de
volume de 18 %, nos dépenses d'opération ont augmenté de
11,2 %. En 1991, on connaît, avec une hausse anticipée au total
depuis deux ans de 23 %, des hausses combinées qui nous laissent en
deçà de 10 %.
M. Morin: Ça va, merci.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Oui. Je m'excuse d'avoir été
obligé de m'absenter. Il y a des circonstances qui font que j'ai
été obligé de m'absenter, je veux m'excuser auprès
de vous, mais je voudrais aussi en même temps vous poser quelques
questions concernant le rôle social des transporteurs. Je pense que c'est
pas mal clair dans votre mémoire, mais j'aimerais que vous
répondiez à une ou deux questions concernant votre position par
rapport à ça.
Vous dites que votre société, et je cite: La
Société a pour objet d'exploiter une entreprise de transport en
commun de passagers, utilisant quelque moyen de transport en commun, dans ie
territoire de ville de Laval. Ce territoire est le territoire de la
Société. Notre mission est claire: nous sommes des transporteurs
du public. Vous semblez dire, si je l'ai bien lu, que vous pourriez, à
cause des compressions et à cause du pelletage qui se fait actuellement,
vous contenter de transporter seulement des usagers ordinaires, des gens qui...
Est-ce que vous continuez à faire du transport adapté? Est-ce que
vous continuez à faire du transport pour les personnes
âgées? Qu'est-ce qui va se passer à partir de maintenant,
si on maintient les propositions telles quelles?
M. Beldié: On a l'intention, évidemment, de
continuer à offrir du transport à tout le monde. Dans le
passé, étant donné que le gouvernement participait avec
nous, c'était peut-être plus facile d'offrir des taux
réduits, par exemple, si on prend le transport scolaire, le transport
intégré: taux réduits aux personnes âgées,
taux réduits aux étudiants. On va continuer à offrir du
transport à tout ce monde-là, mais on va se rapprocher le plus
possible du coût réel du transport. Malheureusement, on est
obligé d'en arriver là, parce que notre rôle social...
À la Société, on n'a pas ce rôle social là
à jouer, on ne peut pas le jouer. C'est aussi simple que ça, on
ne peut pas le jouer. Alors, peut-être, M. Courey, vous voulez
élaborer là-dessus.
M. Courey: Si vous permettez. Pour ce qui a trait à la
question sociale, notre position ou notre interprétation de ce qui se
passe de par la réforme, c'est que, avant... dans le contexte actuel
où il y a des subventions qui sont versées à
l'exploitation, on agissait comme transporteur,
dans notre définition première de rôle, et on
agissait également dans un deuxième volet qui était le
rôle d'intermédiaire, pour assurer ce qui s'appelle de la
redistribution sociale. Le gouvernement, qui collectait ça sous le
principe d'universalité, nous donnait de l'argent et on le redistribuait
sous le principe d'universalité. Il est bien évident que le
rôle premier de la Société, qui est de transporter des
gens, n'a pas changé. Ce qui a changé, par contre, c'est que les
mécanismes qui faisaient qu'on avait de l'argent à redistribuer,
on ne les a plus. Et même si on voulait prétendre qu'on les a
aujourd'hui, la réalité serait la suivante. On serait en
mesure... Parce qu'on voudrait maintenir l'universalité de
l'accessibilité à la chose sociale, on aurait simplement, comme
bassin financier, en termes de capacité génératrice de
revenus, une capacité locale, ce qui irait à rencontre de tout
l'équilibre de notre système financier en soi, au niveau de la
fiscalité municipale ou de la loi des impôts.
M. Dufour: Mais est-ce que vous croyez que le gouvernement vous
permettrait d'agir de cette façon? Il y a un certain montant, encore,
que le gouvernement paie par rapport aux investissements. Les subventions aux
investissements et aux immobilisations continuent. Le gouvernement, il paie, il
dit: Ce n'est pas ma responsabilité, mais il en paie une partie encore.
Et il donne une certaine marge de manoeuvre en disant: On va vous donner les
coûts des immatriculations. Il donne des subventions pour les personnes
handicapées. Il n'en donne pas - je ne pense pas - pour les personnes
âgées; c'est non. Avant, c'était entré dans le
"melting pot". Est-ce que vous pensez que vous pourriez faire ça sans
qu'il y ait des interventions extérieures? Je ne parle pas du public
comme tel, le public pourrait intervenir, mais parions des instances
gouvernementales.
M. Beldié: On a toujours été bon joueur,
à venir jusqu'à maintenant, et on a joué le rôle
d'intermédiaire dans le rôle social. Mais notre charte ne nous
oblige pas à jouer ce rôle-là et celle de la ville de Laval
non plus. Alors, je pense bien que chaque rôle devra être
joué par le gouvernement qui... Entre autres, le rôle social devra
être assumé par le gouvernement provincial.
M. Courey: Pour ce qui est du volet de votre question qui
traitait des immobilisations, dans le maintien de l'effort soutenu du
gouvernement dans le financement de cette chose-là, on a appris, par le
truchement des journaux, de quelque façon que ce soit, que la politique
d'aide au transport en commun pour le financement des immobilisations
était pour être maintenue; c'est intéressant. Ce qui nous
embête davantage, quand on tient compte de notre réalité,
chez nous, c'est que, étant donné qu'on est en pleine croissance
encore et qu'il est loin d'être évident quant à nous que la
priorité gouvernementale va être à l'avenir de continuer
à encourager du développement d'actif, mais visera sûrement
davantage à assurer le maintien du patrimoine ou à financer des
programmes spécialisés peut-être en mobilité
réduite ou autre, on s'inquiète sérieusement de
l'incidence que ça aura sur nos besoins d'opération. Dans ce
sens-là, à votre question: est-ce qu'on se sent mal à
l'aise relativement à l'effort gouvernemental aux immobilisations, dans
une politique d'équilibre, la réponse à ça, c'est
qu'on n'est pas mal à l'aise, en aucune façon. Ce sont les
règles d'équilibre du marché, qui sont les mêmes
règles d'équilibre du marché qui étaient
disponibles en 1986 quand les conseils intermunicipaux de transport ont
été créés et, sous le prétexte qu'on
était avantagé sur le plan de la compétitivité
versus l'entreprise privée, ça nous a coûté 3 600
000 $ de contrats de transport intégré avec les commissions de
transport intermunicipales. Dans ce sens-là, je pense que c'est le libre
marché qui devrait dicter ces choix-là.
M. Dufour: Je comprends que vous apportez "qui devrait". Mais
est-ce que vous avez déjà engagé des pourparlers à
l'effet que cette position, que vous annoncez aujourd'hui, vous pourriez la
maintenir? Est-ce qu'en dehors... Vous savez, il y a toujours la façade
et il y a aussi autre chose qui existe. Donc, en gros, vous pouvez nous dire
ici: Là, si le gouvernement maintient sa réforme telle quelle,
les coûts que ça va nous imposer, on va être tenté de
faire tel geste et on va revenir à notre opération
première et le délestage, ça ne paie pas les coûts
sociaux, mais ça fait partie de l'ensemble.
Si, demain matin, vous décidez ça, vous allez avoir
certainement des pressions de votre population, attendons-nous à
ça. Deuxièmement... Vous pourriez maintenir vos pressions ou vous
pourriez avoir raison, mais, en plus de ça, le gouvernement qui paie...
Il y a toujours quelque chose qui dit: Quand quelqu'un paie, il a le droit de
poser des questions et il a le droit de demander des comptes. Ce n'est pas tout
le temps vrai, mais là, en tout cas, ça devrait être un
principe. Ce principe-là, à mes yeux, il n'est pas aboli par le
projet de loi.
M. Beldié: Oui, présentement, ce qu'on nous
transfère comme pouvoirs, on n'a pas le pouvoir de lever des taxes,
nous, à la Société de transport. Alors, il faut absolument
équilibrer notre budget. Si on n'a pas de subvention qui vient du
gouvernement provincial et si on n'a pas d'autre moyen, alors il faudra refiler
la vraie facture à quelqu'un. Alors, c'est un petit peu ça.
M. Courey: Pour être plus spécifique au niveau de
l'incidence de la subvention aux
immobilisations, je peux vous assurer que, dans les règles
actuelles du jeu du programme d'aide au transport en commun pour la subvention
aux immobilisations, il n'y a aucun lien de causalité, soit de cause
à effet, entre la politique d'immobilisation et la politique tarifaire,
dans un premier temps. Dans un deuxième temps, si ça avait
été le cas, il y a peut-être certaines
sociétés qui, aujourd'hui, nous parlent de trou financier d'un
ordre très important qui ne seraient pas dans la même position
aujourd'hui, parce que le gouvernement aurait été en mesure
d'imposer, de par la carotte de la politique d'aide aux subventions aux
immobilisations, des choix tarifaires que d'autres n'ont pas acceptés
aujourd'hui.
Cela étant dit, de toute façon, dans une
société comme la nôtre, qui vise davantage à
gérer dans le modèle de l'entreprise privée, où
tout projet d'immobilisation doit avoir le mérite du
coûts-bénéfices, avant tout, la politique de subventions
est un volet qui nous permet d'atteindre les
coûts-bénéfices plus rapidement, mais il n'y a pas
d'échanges ou de discussions qui ont fait ou qui nous permettent de
croire aujourd'hui que ce serait l'intention du gouvernement de se retirer
complètement en disant: Vu que vous chargez trop cher, on ne veut pas
vous donner de subventions aux immobilisations, au contraire.
M. Dufour: En fait, si je comprends bien, les coupures sauvages
qui vont être exercées à travers le réseau du
transport en commun peuvent avoir des effets néfastes, dont celui de
votre désengagement par rapport à certains types de
clientèles qui ont été privilégiées, pas
parce qu'elles... Il y avait des problèmes, là, mais socialement,
elles ont eu des bénéfices. Est-ce qu'il y a d'autres
corporations de transport, parce que vous êtes dans un réseau
où il y en a quatre autres, qui envisagent les mêmes mesures,
c'est-à-dire qui pourraient dire: Nous, des subventions, des choses, on
ne marche pas là-dedans?
M. Beldié: C'est difficile pour nous de répondre
pour les autres sociétés. Je crois que vous en avez
rencontré une hier, vous en rencontrez une autre demain.
Évidemment, nous, on doit prendre des décisions en fonction de
notre territoire pour commencer et en fonction des revenus qu'on aura. Je ne
peux pas vous répondre pour les autres sociétés,
monsieur.
M. Courey: Mais pour ce qui est des autres organismes de
transport qui ne sont pas des sociétés et qui sont dans les
régions, à savoir les conseils intermunicipaux de transport en
commun, étant donné que ces derniers ne sont pas affectés,
ils ne perdent pas de subvention à l'exploitation dans la
réforme, j'imagine que leur position ne pourrait pas être
similiaire à la nôtre, compte tenu que c'est un problème
différent.
M. Dufour: Ça va. Malheureusement... La
Présidente (Mme Bélanger): Alors... M. Dufour: ...on
n'a plus de temps.
La Présidente (Mme Bélanger): ...M. Beldié
et M. Courey, nous vous remercions. Je demanderais à la
Corporation...
M. Beldié: Merci. (17 h 45)
La Présidente (Mme Bélanger): ...professionnelle
des évaluateurs agréés du Québec de bien vouloir
s'approcher de la table. Si vous vouliez accélérer un peu, s'il
vous plaît, parce qu'on a déjà 15 minutes de retard. Alors,
nous vous souhaitons la bienvenue. Vous avez une heure pour votre audience. M.
le président, si vous voulez bien présenter les personnes qui
vous accompagnent.
Corporation professionnelle des évaluateurs
agréés du Québec
M. Mailhot (Marcel): Oui, Mme la Présidente, à ma
gauche, vous avez M. Lachapelle, directeur du service de l'évaluation de
la ville de Laval. Est-ce que vous entendez bien?
La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, un
petit peu, s'il vous plaît. Je pense qu'il y a pas mal de...
M. Mailhot: Je reprends, Mme la Présidente. La
Présidente (Mme Bélanger): D'accord.
M. Mailhot: À ma gauche, M. Yves Lachapelle, du service de
l'évaluation de la ville de Laval. À ma droite, M. Jean-Guy
Kirouac, directeur du service de l'évaluation de la Communauté
urbaine de Québec et, à l'extrême-droite, M. Jean Tanguay,
directeur général de la Corporation des évaluateurs
agréés du Québec. Et votre humble serviteur, Marcel
Mailhot, président.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, vous avez 20
minutes pour présenter votre mémoire et cela se poursuivra par
une discussion de 40 minutes avec les deux partis.
M. Mailhot: Oui, Mme la Présidente. Alors, Mme la
Présidente, mesdames, messieurs, permettez-nous en premier lieu de vous
remercier au nom des 1300 membres de la Corporation professionnelle des
évaluateurs agréés du Québec de nous accorder
audience. À titre de signataires de la plupart des 1495 rôles
d'évaluation municipale au Québec, nos membres sont
directement
concernés par la réforme proposée, puisqu'ils en
assumeront l'application concrète.
L'objectif de notre intervention à la présente commission
n'a d'autre but que de vous sensibiliser aux effets pratiques de la mise en
place des modifications suggérées et de favoriser une
implantation la plus harmonieuse possible. Dans un premier temps, nous
souhaitons situer le rôle des évaluateurs agréés et
de la corporation professionnelle qui les représente. Nous vous
exposerons par la suite les constats et commentaires dégagés par
le comité d'étude de la corporation et, finalement, nous vous
soumettrons nos recommandations.
Mon introduction. La Corporation professionnelle des évaluateurs
agréés du Québec, par son comité des affaires
municipales, a pris connaissance du projet de loi 145 modifiant en profondeur
la Loi sur la fiscalité municipale. Dans le cadre d'une nouvelle
réforme de la fiscalité affectant le monde municipal du
Québec, cette importante pièce législative concerne en
très grande partie le quotidien de l'évaluateur
agréé, artisan de première main de l'exécution des
devoirs imposés tant par la loi sur la fiscalité que par les
règlements afférents.
L'évaluateur, comme premier juge, recherche constamment, dans
toutes ses actions, l'assurance qu'une inscription au rôle
représente équitablement la valeur qui servira à
établir la juste part à laquelle doit souscrire l'ensemble des
propriétaires fonciers. De plus, il s'assure d'éviter ou,
à tout le moins, d'atténuer les transferts fiscaux par un
contrôle vigilant de ses méthodes et procédures de travail,
tout en étant au fait de la conjoncture économique et des
diverses conditions de son marché immobilier local.
Comme membre d'une corporation professionnelle dont la mission est de
protéger l'intérêt du public, il est soumis à des
normes de pratique et au respect de son code de déontologie. Nous
pouvons affirmer que l'évaluateur agréé est à la
recherche de la qualité et de l'équité dans l'exercice de
ses fonctions. Dans cet esprit, il n'est pas de notre intention de prendre
position sur le bien-fondé des mesures présentement
préconisées. La Corporation est une entité apolitique et
notre jugement ne portera pas sur le fondement même de la réforme.
Nous nous attarderons sur la faisabilité des mesures avancées en
nous assurant de la possibilité de leur mise en place sans
préjudice aux effets escomptés.
Les modifications législatives relatives à
l'étalement du compte de taxes et des rôles d'évaluation
édictées en 1987, 1988 et 1989 nous ont imposé des
réformes ad hoc sans simulation concrète. Les évaluateurs
agréés veulent à tout prix éviter de
répéter de tels bouleversements qui ont un impact direct sur la
qualité des services rendus, d'où la prudence qui nous anime
aujourd'hui et qui justifie notre intervention.
Ce que les évaluateurs agréés recherchent en tout
premier lieu, c'est l'assurance d'un temps minimum requis pour mettre en place
les éléments sur lesquels s'appuieront les nouvelles mesures.
S'il est vrai que l'autorité est en droit d'exiger, il lui faut aussi
prendre en considération les commandes de 1989 qui se réalisent
actuellement à l'échelle de la province, soit les rôles
triennaux pour l'ensemble des municipalités.
Une enquête interne menée en février dernier par le
comité des affaires municipales de la Corporation professionnelle des
évaluateurs agréés du Québec auprès des
signataires de rôles a conclu très majoritairement à
l'impossibilité d'inscrire au rôle d'évaluation avant le
mois de septembre 1991, les divers éléments utiles à
l'application de la réforme annoncée. À partir de ce seul
constat, on peut s'imaginer ce qu'il adviendra maintenant des nouvelles mesures
transférées à l'autorité locale dont l'application
est prévue à compter du 1er janvier 1992. En outre, la
présente pièce législative qui risque de modifier en
profondeur le monde de la fiscalité représente un outil qui n'a
pas été mis à l'épreuve par des simulations
à partir de cas concrets. Certes, les fonctionnaires se sont
théoriquement attardés sur les modalités d'application de
ces mesures, mais, à notre connaissance, elles n'ont pas
été confrontées systématiquement à la
pratique du quotidien de l'évaluateur et sur un échantillon
représentatif du stock immobilier.
Les seules simulations qui, à notre avis, ont été
réalisées le furent pour détecter le rendement des
nouvelles mesures fiscales affectant chacune des municipalités du
Québec. Ainsi, on a pu évaluer l'ampleur potentielle du rendement
fiscal de la taxe sur le stationnement et de la surtaxe sur le
non-résidentiel, mais comment prétendre connaître le
rendement réel si on ne tient pas compte, à leur application, des
effets des transferts fiscaux qu'elles produiront nécessairement, des
effets sur les coûts directs et indirects de leur mise en place, de la
difficulté que représente leur interprétation qui,
finalement, sera tranchée par les tribunaux? Nous pensons qu'il y aurait
tout avantage à procéder à une étude pratique pour
découvrir en grande partie les coûts cachés des mesures
préconisées ou encore en prévenir les effets pernicieux
possibles.
Pour illustrer notre propos, comment peut-on penser avoir un outil
performant, lorsqu'on introduit dans le projet de loi des mots
différents: place d'affaires, lieu d'affaires, local et biens, qui, nous
a-t-on dit, doivent signifier la même chose? Selon notre
expérience, chaque fois qu'on introduit des mots dans une loi existante,
tous deviennent soupçonneux, prenant pour acquis que le
législateur n'a pas parlé pour rien dire. Et voilà le bal
qui recommence devant les tribunaux.
Dans le même ordre d'idées, la nouvelle définition
des organismes de charité stipulée à l'article 104 du
projet de loi laisse présager,
selon nous, une avalanche de nouvelles demandes et plusieurs
procès pour régler cette nouvelle problématique. Par
ailleurs, le libellé du paragraphe 13 de l'article 236, ajouté
par l'article 122 du projet de loi, porte à croire que les courtiers
d'immeubles pourraient être dégrevés de leurs taxes, car
leurs activités consistent à fournir à autrui un immeuble
résidentiel.
Les évaluateurs agréés recherchent un contexte
favorable à un travail professionnel et des outils qui leur permettent
de livrer la marchandise escomptée. À cet égard, nous
suggérons quelques réflexions sur différentes mesures qui
gagneraient à être améliorées.
Quelques recommandations. Articles 32 et 116 du projet de loi 145. Ces
deux articles modifient l'article 65 de la Loi sur la fiscalité
municipale pour y introduire une exception concernant les raffineries. Nous
savons tous que l'article 65 a fait l'objet de fort nombreux procès et a
donné lieu à de nombreuses interprétations. D'ailleurs,
à notre connaissance, il ne nous semble pas que les tribunaux aient
vidé le contentieux suscité par le monde industriel sur
l'interprétation de cet article. Les problèmes soulevés
par l'article 65.1 sont de deux natures: d'une part, il s'agit de savoir quel
bien doit faire l'objet d'une inscription au rôle et, d'autre part,
comment en établir la valeur. Quant au premier volet, nous sommes
conditionnés par l'interprétation de la jurisprudence et par les
opinions légales et, pour le deuxième, nous sommes guidés
par la Loi sur la fiscalité municipale. Dans les circonstances, il nous
semble inopportun d'apporter une modification d'exception. Au surplus, le
manque de précision dans l'expression "aire de production" va continuer,
à notre avis, à hanter l'esprit de bien des gens et fera de
nouveau l'objet de procès célèbres.
Cependant l'évaluateur devra entre-temps assumer seul
l'interprétation de ces termes. Une autre chose nous inquiète
également. Si la loi générale devait être
modifiée pour tenir compte d'une entente, pourquoi n'y inclurait-on pas
toutes les autres ententes? Si c'est vrai pour les pétrolières,
pourquoi ne le serait-ce pas pour tout le monde industriel? Au surplus,
même si les parties semblent s'être entendues, nous croyons que la
prochaine bataille sera sur la valeur inscrite au rôle pour les biens
représentant, selon le projet de loi, tout ouvrage d'aménagement
du terrain, toute construction destinée à loger ou à
abriter des personnes, des animaux ou des choses et toute base sur laquelle un
bien est placé ou est destiné à l'être. En effet,
nous croyons que tous les arguments seront bons pour prétendre que la
valeur inscrite au rôle par l'évaluateur ne représente pas
celle exigée par l'article 46 de la Loi sur la fiscalité
municipale, soit la valeur marchande. Ainsi donc, à titre d'exemple,
l'évaluateur aura à trouver sur le marché immobilier des
ventes de bases de béton dépourvues de leur objet principal,
celui de supporter des machineries. D'expérience, nous pouvons affirmer
la rareté d'un tel marché. Alors, nous vous laissons deviner la
suite.
Ne serait-il pas plus prudent, à l'instar d'autres provinces du
Canada, de trouver une solution plus adéquate avant d'introduire une
telle mesure qui, à notre avis, aura des conséquences importantes
sur l'assiette fiscale de plusieurs municipalités? À notre avis,
s'il y a lieu d'ouvrir la Loi sur la fiscalité municipale pour modifier
l'article 65, il faudrait le faire après avoir étudié tous
les impacts d'une telle intervention législative.
L'article 33 du projet de loi. Cet article ajoute deux
éléments nouveaux à la loi: l'annexe du rôle et le
contenu du rôle de la valeur locative. L'annexe du rôle
représente une disposition de droit nouveau qui vise essentiellement
à établir des pourcentages des locaux dans chacun des immeubles
soumis à la surtaxe sur les immeubles non résidentiels. Il est
à noter qu'en matière de surtaxe, les immeubles non
résidentiels visent une définition de local plutôt qu'une
définition de lieu d'affaires, comme c'est le cas dans la taxe
basée sur la valeur locative.
À notre avis, cette annexe n'est pas essentielle, puisque la
gestion du dégrèvement de la surtaxe pour les vacants et les non
imposables aurait pu être laissée à l'autorité
locale ayant la responsabilité et la confection du rôle, qui en
aurait établi le mode d'opération par voie de règlement.
Également, pourquoi faire intervenir l'évaluateur dans les
relations entre propriétaires et locataires pour le partage de la
surtaxe? De plus, l'expression "on entend par "local" toute partie d'une
unité d'évaluation qui est aménagée pour faire
l'objet d'un bail distinct" est loin d'être claire et devrait amener de
nombreux litiges. Par ailleurs, si nous devons vivre avec l'annexe, celle-ci ne
devrait-elle pas comporter pour une meilleure gestion, en plus de la
référence aux locaux par leur numéro matricule et le
pourcentage que représente sa valeur contributive, la mention du nom de
l'occupant, la date d'occupation et la référence
législative en cas d'exonération?
Au chapitre relatif au contenu du rôle de la valeur locative,
l'expression "tenue de payer la taxe d'affaires" semble être une
condition pour que le lieu d'affaires soit inscrit au rôle de la valeur
locative. Or, nous croyons que tous les lieux d'affaires devraient être
inscrits au rôle indépendamment de leur obligation de payer ou non
la taxe d'affaires.
Il aurait été avantageux de pouvoir, à partir d'un
modèle, simuler les fonctions que l'on veut attribuer à cette
annexe. Cependant, tel que présenté, nous croyons que sa
confection et son administration vont requérir autant d'efforts et de
coûts sinon plus que ceux requis à la gestion du rôle de la
valeur locative, sans en posséder nécessairement les vertus. Ces
nouvelles notions légales, à elles seules, justifient en
très grande
partie notre position déjà exprimée de ne pouvoir,
pour le 15 septembre prochain, inscrire au rôle les données
nécessaires à l'application des nouvelles mesures.
Finalement, et toujours à l'intérieur de l'article 33 du
projet de loi, l'article 69. 5 reprend la définition même de la
valeur locative en se référant à un loyer brut provenant
d'un bail sous certaines conditions. Pourquoi ne pas en profiter alors pour
aligner cette notion de loyer brut avec celle utilisée au calcul de la
médiane?
L'article 41 du projet. La modification proposée par cet article
semble donner maintenant au locataire le droit d'accéder aux
informations relatives à l'immeuble où il occupe un local ou un
lieu d'affaires. Jusqu'à maintenant ces données étaient
confidentielles, et ce, malgré l'article 9 de la Loi sur l'accès
aux documents des organismes publics. On connaît les efforts entrepris
par un autre ministère du gouvernement pour introduire une politique de
diffusion des informations apparaissant sur les bases de données. La
politique mise à l'étude consacre le respect et la
confidentialité des données dites personnelles, même
publiques. Appuyant cette politique, nous croyons que le droit du locataire
devrait plutôt se borner à accéder aux documents se
rapportant au local qu'il occupe et non pas à l'ensemble de l'immeuble.
(18 heures)
À l'article 91, nous poursuivons. Il s'agit de l'un des articles
du projet de loi qui modifie le principe de l'expédition par celui de la
réception. Ainsi, à l'avenir, ce sera la date de réception
et non plus la date d'envoi qui servira de preuve dans les différents
litiges. Cette proposition ne nous convient aucunement, lorsqu'on songe aux
grandes difficultés de faire la preuve de la réception.
Devrons-nous alors signifier par huissier tous les avis? Qu'arrivera-t-il dans
le cas d'un propriétaire demeurant hors du pays? Pour éviter ce
contentieux, nous proposons de rendre le fardeau de la preuve au contribuable
qui n'aura qu'à conserver son enveloppe de réception et à
l'exhiber dans les cas litigieux comme il le fait déjà en
matière de l'avis de cotisation en vertu de la Loi sur les
impôts.
Aux articles 235 à 247 dudit projet. Ces articles touchent la loi
autorisant les municipalités à percevoir un droit sur les
mutations immobilières. À l'occasion de ces modifications, il
nous semble important que le législateur réponde favorablement
à une demande que nous lui formulons depuis quelques années et
qui vise à obliger le dépôt d'une copie
supplémentaire d'un acte translatif d'un droit réel. Cette copie
supplémentaire serait destinée aux évaluateurs signataires
des rôles d'évaluation foncière. En effet, depuis 1989, les
municipalités, dont le rôle d'évaluation ne répond
pas aux critères de qualité énoncés par le
règlement du ministère des Affaires municipales, sont
menacées de perdre jusqu'à concurrence de 10 % des "en lieu" de
taxe. Or, plusieurs des critères de qualité font appel aux ventes
immobilières et, à plusieurs reprises, les évaluateurs se
sont plaints qu'ils ne recevaient pas du bureau d'enregistrement tous les actes
translatifs ou qu'ils les recevaient en retard ou amputés d'informations
importantes.
Par la même occasion, nous souhaitons qu'un acte ne puisse
être enregistré qu'à la condition expresse de mentionner
l'adresse postale complète des parties. Cette adresse postale
complète devrait notamment comprendre le code postal. Ce souhait
naît de notre seul souci d'améliorer l'efficacité du
travail des évaluateurs.
À l'article 148. À notre avis, cet article devrait inclure
une disposition qui ferait en sorte qu'il n'y ait pas de perte
d'étalement dans le cas d'une réévaluation de moindre
importance de l'ordre d'environ 10 %. Selon notre expérience de
l'application d'un rôle triennal, certaines actions de tenue à
jour du rôle foncier obligent l'évalua-teur à faire perdre
l'étalement à des contribuables pour des modifications de peu
d'importance. À titre d'exemple, mentionnons que l'expropriation d'une
parcelle de terrain de petite superficie entraîne une modification au
rôle qui prive le propriétaire du privilège de son
étalement.
En conclusion, Mme la Présidente. En introduction à ce
mémoire, nous vous avons signifié la quasi-impossibilité
de dresser, pour septembre 1991, les rôles comportant toutes les mentions
utiles à la mise en place des nouvelles mesures du projet de loi 145.
Néanmoins et compte tenu que le rôle de l'évaluateur est
d'appliquer la loi, nous croyons qu'il serait possible de mettre tout en oeuvre
pour réaliser la réforme avant la fin de la présente
année. Pour ce faire, il faudra cependant que la loi autorise les
corrections au rôle foncier après le 15 septembre, avec comme date
limite le 31 décembre 1991. De plus, à titre exceptionnel, pour
le rôle de 1992, la loi ne devrait pas obliger l'émission des
certificats selon l'article 77 de la Loi sur la fiscalité municipale. De
plus, la réussite de ces inscriptions sera possible si le projet de loi
édicte que le rôle de la surtaxe foncière procède
des mêmes principes et concepts régissant le rôle de valeur
locative avec, comme différence, qu'il serait à la charge du
propriétaire foncier. En effet, l'introduction de nouvelles expressions
tels "lieu d'affaires" et "local" nous oblige à dresser deux rôles
distincts, l'un possédant plus d'entrées que l'autre, ce qui aura
pour conséquence d'établir deux notions distinctes, de favoriser
la contestation devant les tribunaux et de placer le contribuable dans une
situation inconfortable.
À ces mesures, il faudra aussi agencer l'assouplissement des
codes de catégories, tel que proposé actuellement, pour en
atténuer la quantité et l'écart. Ainsi, nous pensons
pouvoir déduire des rôles de la valeur locative plusieurs
éléments que nous pourrions utiliser
mécanogra-phiquement pour codifier les unités d'évaluation
non résidentielles dans le rôle foncier. D'autre part, comme
l'autorité locale peut adopter un règlement pour dégrever
les locaux vacants, nous croyons que ce même règlement pourrait
aussi décréter leur mode de gestion et le traitement des locaux
non imposables.
Alors, avec ces amendements, nous croyons désormais inutile
l'annexe du rôle, laissant au propriétaire le soin de convenir
avec ses locataires des modes de répartition de la surtaxe
foncière. Pour les municipalités locales où il n'y a pas
de rôle de la valeur locative, le tout serait géré par
règlement, par les municipalités ayant compétence en
évaluation foncière, en autant que l'on opte pour une surtaxe sur
le non-résidentiel.
Si nos demandes devaient être agréées, nous croyons
qu'il serait alors possible de souscrire à la demande de
l'autorité de faire apparaître au rôle d'une manière
satisfaisante ce qui permettrait l'utilisation des nouvelles mesures pour
l'année 1992, en souhaitant que ces commentaires apporteront un
éclairage productif à votre réflexion, Mme la
Présidente. Nous vous remercions de nous avoir entendus.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Mailhot. M.
le ministre.
M. Ryan: Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir, M.
Mailhot, de vous accueillir en compagnie des officiers de la corporation qui
vous accompagnent. J'ai eu l'occasion de discuter avec certains d'entre vous du
projet de réforme à d'autres stades du cheminement des derniers
mois et je veux exprimer, une fois de plus, ma vive appréciation pour le
caractère apolitique de votre intervention dans cette démarche et
le souci que vous manifestez de la qualité technique et pratique des
décisions qui seront retenues, quelles qu'elles soient au plan
politique. J'avais constaté cette disposition chez vous lors d'une
rencontre antérieure et je constate, en prenant connaissance du
mémoire que vous avez préparé à l'intention de la
commission, que cette attitude s'est maintenue. Je m'en félicite et je
pense que vous apportez, à plusieurs égards, des suggestions qui
sont de nature à améliorer le projet de loi dans le meilleur sens
du terme.
Je vais commenter brièvement quelques-unes de vos propositions.
La première proposition, en bas de la page 6, peut-être qu'il y
aurait avantage à procéder à une étude pratique
pour découvrir en grande partie les coûts cachés des
mesures préconisées ou encore en prévenir les effets
pernicieux possibles. Je crois que, s'il y a des termes qui peuvent
prêter à des interprétations, dont les coûts
pourraient être supérieurs à nos prévisions, il
faudra les resserrer de proche. Mais je ne pense pas qu'on pourrait prendre
l'engagement de faire une telle étude avant que les choses se mettent en
marche. Je pense que, s'il fallait faire ça à propos de chaque
législation qu'on fait ici, on agirait avec beaucoup, beaucoup de
difficultés.
Nous avons sondé ces expressions-là comme il faut. Il y a
eu des représentations en commission parlementaire. Certains nous ont
dit: Telle expression, c'est nouveau ça. Ça n'a jamais
été utilisé avant. Et quand on regardait dans d'autres
parties de la Loi sur la fiscalité municipale, on trouvait ces
expressions-là. On s'apercevait qu'elles avaient déjà
reçu dans la pratique une interprétation qui ne prêtait pas
flanc aux dangers qu'on voulait nous signaler. Mais de toute manière, je
vais demander à nos techniciens de discuter de ces points-là avec
vous et, s'il y a des choses qui n'étaient pas claires, moi, j'en serai
saisi. Nous verrons à essayer de resserrer les affaires le plus
possible.
Je continue. Je vais à la page 7 ensuite. L'avant-dernier
paragraphe. Vous dites que le libellé du paragraphe 13 de l'article 236
pourrait induire à penser que les courtiers d'immeubles pourraient
être dégrevés de la taxe, vu que leur activité
consiste à fournir à autrui un immeuble résidentiel. Il y
a une possibilité d'interprétation dans le sens que vous dites.
Des corrections seront faites en conséquence, je vous en donne
l'assurance.
Je continue. Vous avez une remarque très importante à
compter de la page 8. À propos de l'article 32 et de l'article 116, deux
articles qui traitent de la taxation des raffineries de pétrole. Vous
nous signalez les dangers que présentent les modifications
proposées à ces deux articles. Nous en sommes conscients. Nous
avons essayé de traduire dans le texte du projet de loi l'essentiel
d'une entente qui a été conclue à Montréal, qui
permettrait de régler un gros problème accumulé depuis des
années, qui traîne devant les tribunaux et à propos duquel
les parties se seraient trouvées d'accord pour mettre fin à leur
litige, puis entrer dans la voie de la normalité.
Vous faites valoir des aspects importants - vous n'êtes pas les
seuls - mais vous faites valoir des aspects importants qui forcent la
réflexion. Là-dessus, je vous dirai que l'esprit du gouvernement
n'est pas définitivement arrêté. Nous allons examiner vos
représentations et nos techniciens seront chargés d'en parler
avec vous pour approfondir cette question-là. Il est sûr que, s'il
subsistait des éléments inconnus le moindrement importants, qui
seraient de nature à engendrer des situations inéquitables, il
faudrait que nous agissions avec beaucoup de prudence. Je prends note de votre
avis sur ce point-là et vous assure que nous ferons tout ce qui est
possible pour en tenir compte.
Au sujet de l'article 33, lequel prévoit l'ajout d'une annexe au
rôle d'évaluation pour tenir compte des nouvelles dispositions, en
particulier, concernant la surtaxe sur les immeubles non résidentiels,
il y a de bonnes raisons
qui justifient l'insertion d'une annexe comme celle-là à
cet endroit de la loi. Les arguments que vous invoquez méritent
d'être examinés de près. Certains seront peut-être
retenus. Je ne peux pas, cependant, vous promettre que nous serions
disposés à nous rendre à votre suggestion voulant que nous
puissions nous passer de toute cette annexe. Je vais demander à nos
techniciens d'en parler avec vous autres de manière plus
élaborée et je suivrai avec beaucoup d'intérêt le
cheminement de vos conversations avec eux.
L'article 41 semble donner au locataire des privilèges ou un
droit d'accès exagéré à l'information dont dispose
le propriétaire sur la conduite de ses affaires; une
représentation qui est très opportune, je pense bien. Nous
verrons à l'examiner attentivement. Je pense que vous pouvez compter que
nous sommes très sensibles aux considérations que vous avez fait
valoir. l'article 91, c'est la même chose. je pense que, dans un
élan de générosité chartiste, nous nous sommes
laissé entraîner dans une avenue qui conduisait à des
conséquences dont vous avez justement souligné le
caractère périlleux et les coûts éventuels aussi. il
faut toujours qu'on agisse dans la plus grande clarté possible. je vous
dirai que, moi-même, j'ai eu beaucoup d'hésitation à ce
sujet-là. comme on est encore au stade du projet, on va tenter
l'idée, on va tester l'idée, mais je suis plutôt enclin
à être conservateur sur ce point-là, c'est-à-dire
d'accord avec vous. je ne veux pas dire que vous êtes conservateur en
tout, sur ce point-là. il y a une vieille maxime de sagesse qui dit:
quand tu n'as pas trouvé mieux, tu gardes ce que tu as. ce que nous
allions proposer comme formule de remplacement n'était pas meilleur
suivant la critique que vous avez faite. comme je n'ai pas de réfutation
à vous apporter, je suis plutôt obligé, en conscience, de
vous dire que je sympathise avec votre point de vue. ça, c'est 91. 235
à 247, ce sont les modifications que nous entendons apporter à la
loi qui autorise les municipalités à percevoir un droit sur les
mutations immobilières. Vous faites une demande très importante
ici, dont M. Lachapelle en particulier m'a saisi à plusieurs reprises au
nom de votre profession. Que vous puissiez avoir accès aux documents qui
accompagnent les transactions immobilières, que des copies de ces
documents puissent être mises à la disposition des
municipalités, c'est une demande fort opportune. Si c'était fait
au fur et à mesure, je pense que ce ne serait pas excessif. Mais je
voudrais demander l'avis d'un de mes conseillers là-dessus, pour voir
s'il permettrait que je m'avance plus avant sur cette glace. M. Fournier... Je
ne peux pas vous dire le commentaire qu'il m'a dit. La question est à
l'étude. Soyez assuré que nous avons pris note de ce que vous
m'aviez dit, M. Lachapelle. J'ai donné suite à la conversation
que nous avions eue, mais ça demande une consultation entre plus d'un
ministère. Souvent, il y a bien d'autres considérations. Des
fois, ça ne va pas aussi vite d'un ministère à l'autre.
Soyez assuré qu'on aura les réponses à ceci à temps
pour l'adoption du projet de loi. Moi, je comprends votre point de vue et je
pense que vous pourriez faire un travail plus expéditif et plus
intéressant si vous aviez cette documentation-là. Ça
va?
L'article 148 sera l'objet d'un examen également. Je pense qu'il
y a quelque chose de très pertinent ici. Sur toute la ligne, vos
représentations sont de nature éminemment fonctionnelle. Ce sont
des représentations qui, visiblement, à leur face même,
veulent améliorer le projet de loi et en faciliter l'application.
Ça veut dire que sur la plupart vous aurez sûrement des
réactions très positives de notre part. (18 h 15)
À la fin de votre mémoire, vous avez une
considération qui m'a vivement intéressé. Vous avez fait
valoir en cours de route les difficultés, surtout pour la mise en oeuvre
de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels. À mesure que je
lisais votre document, je me disais, pour 1992, comme nous l'avions
anticipé, nous n'envisagions pas que ça puisse être mis en
vigueur tout de suite. Nous envisagions qu'on ferait usage des dispositions
actuelles en augmentant le plafond de rendement des mesures fiscales qui sont
présentement autorisées pour obtenir le résultat
souhaité pendant la première année, quitte à
marcher ensuite, la deuxième année et la troisième, selon
les circonstances.
Mais, là, vous nous dites des choses intrigantes à la page
16. Vous nous dites: En introduction à ce mémoire, nous vous
avons signalé la quasi-impossibilité de dresser, pour septembre
1991, les rôles comportant toutes les mentions utiles à la mise en
place des nouvelles mesures du projet de loi 145. Néanmoins et compte
tenu que le rôle de l'évaluateur est d'appliquer la loi, nous
croyons qu'il serait possible de mettre tout en oeuvre pour réaliser la
réforme avant la fin de la présente année. Ça va
faire de la peine au député de Jonquière, ça.
Une voix:...
M. Ryan: Non merci. Très bien, je suis content de savoir.
À mesure que nous avançons, je vois que vous vous rapprochez de
nous! Mais vous dites: Pour ce faire, il faudra cependant que la loi autorise
les corrections au rôle foncier après le 15 septembre, avec comme
date limite le 31 décembre 1991. De plus, à titre exceptionnel,
pour le rôle de 1992, la loi ne devrait pas obliger l'émission des
certificats selon l'article 77 de la Loi sur la fiscalité municipale. Et
vous dites: La réussite de ces inscriptions sera possible si le projet
de loi édicté que le rôle de la surtaxe foncière
procède des mêmes principes et concepts régissant le
rôle de la valeur loca-tive avec, comme différence, qu'il serait
à la charge du propriétaire foncier.
Peut-être que vous pourriez m'expliquer ça un petit peu,
comment vous voyez ça, vous autres, le cheminement des prochains
mois...
M. Mailhot: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Bélanger): û. mailhot.
M. Ryan: ...en supposant ce que nous avons exprimé comme
étant la volonté bien arrêtée du gouvernement, que
le projet de loi soit adopté d'ici l'ajournement d'été.
Après ça, de votre point de vue, au plan technique et en relation
avec ce que vous dites à la page 16, comment les choses se passent-elles
et qu'est-ce qui doit être fait pour que ça se passe le mieux et
le plus vite possible?
M. Mailhot: Mme la Présidente, si vous permettez, je vais
passer la parole à un praticien, un gars qui est dans le champ; je crois
qu'il va faire ça mieux que moi. Merci. M. Kirouac.
M. Kirouac (Jean-Guy): Je pense, M. le ministre, qu'à
l'heure où on est actuellement, il ne faut pas se leurrer, il y a
beaucoup de municipalités qui ont examiné le projet de loi sous
toutes ses coutures et qui se rendent bien compte que, pour l'exercice
financier 1992, il y aurait avantage à tester la surtaxe sur les
propriétés non résidentielles, ne serait-ce que pour aller
chercher un peu d'argent du fédéral, peut-être même
aller tout chercher du fédéral ce qu'elles peuvent. Donc, ils
sont venus nous voir, les évaluateurs, et ils nous ont dit: Essayez donc
de voir dans quelle mesure vous pourriez, en 1992, régler les
problèmes techniques et nous déposer les rôles avec ces
indications.
Alors, évidemment, on est un peu assis entre deux chaises; ion
nous demande de faire la commande, d'exéôuter la commande. Alors,
nous, on vient vous dire: Isji vous voulez qu'on exécute la commande, il
y a ' deux conditions. La première, c'est de nous permettre de corriger
le rôle d'évaluation, sans être obligé
d'émettre de certificat entre le 15 septembre et le 31 décembre.
C'est une mesure transitoire, ce n'est pas une mesure définitive,
strictement transitoire. Pour l'exercice financier 1992, c'est-à-dire
pour la fin de 1991, on veut être capable de corriger le rôle,
c'est-à-dire d'indiquer le code de catégorie nécessaire
à la surtaxe sur les propriétés non résidentielles.
C'est la première condition. La deuxième condition, maintenant,
c'est de rendre identiques les concepts qui prévalent à
l'établissement de la valeur locative aux concepts qui prévalent
à l'établissement de l'annexe au rôle, qui nous indiquent
les lieux d'affaires, le pourcentage de valeur contributive de ces lieux
d'affaires là.
Actuellement, à la lecture du projet de loi et suite aux
éclaircissements qui nous ont été donnés par les
légistes que nous avons ren- contrés, on s'aperçoit qu'il
y a une différence énorme dans la conception qu'on peut avoir
d'un local tel qu'on doit le définir à l'annexe au rôle et
un lieu d'affaires tel qu'il est défini dans le rôle de valeur
locative. Tout ceci n'est faisable rapidement que si on peut convertir le
rôle de valeur locative en annexe au rôle. À ce
moment-là, ce n'est qu'une opération quasi mécanographique
avec quelques vérifications des évaluateurs. Donc, on peut
réaliser l'opération dans les temps requis.
S'il ne s'agit pas de ça, s'il s'agit, comme on l'a
examiné, nous, comme on l'a interprété et comme le
légiste aussi nous l'a interprété, si on est obligé
de revisiter tous les locaux et de les remesurer comme on prévoit le
faire à la lecture du document actuel, il est physiquement impossible,
à moins de travailler nuit et jour et d'avoir une armée de monde,
d'aller revisiter tous les locaux et de tous les mesurer. C'est la
deuxième condition. On ne pourra pas remplir la commande si
celle-là n'est pas respectée.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.
M. Ryan: En même temps que vous parliez, je m'en excuse,
j'ai causé avec un conseiller qui est à mes côtés,
parce que je voulais qu'il ne se perde pas de temps après que vous
auriez fini de parler. Déjà, il y a eu des conversations entre
vous autres et nos collaborateurs sur ces points-là et je crois
être en mesure de vous dire que, sur la première condition, nous
allons voir à ce que les concepts soient alignés de telle
manière qu'il n'y ait pas de confusion et que l'objectif visé
puisse se réaliser.
Deuxièmement, en ce qui concerne la transposition, les taux pour
valeur locative et la surtaxe immeuble résidentiel, mon collaborateur
m'assure ici que c'est un problème auquel des solutions seront
apportées en collaboration avec vous autres. Nous allons vous consulter
là-dessus, mais ce sont deux points extrêmement pertinents. Le
délai, évidemment, pour les corrections, je pense que ça
va de soi. C'est une chose, si on veut favoriser la réalisation de
l'objectif, on va rencontrer les conditions nécessaires, et celles que
vous proposez m'apparaissent tout à fait raisonnables et responsables.
Alors, ça, j'en suis bien content.
Je veux signaler l'esprit éminemment constructif dans lequel vous
nous faites ces représentations et je ne veux pas vous annexer au
gouvernement, pas du tout. Loin de moi une idée aussi dangereuse pour
vous autres, mais je veux signaler qu'il y a des avantages là-dedans. Et
je suis content qu'on vous ait dit ça, vous autres, comme techniciens,
de la part de vos autorités politiques, ça m'intéresse au
plus haut point. C'est qu'on va peut-être vous aider à aller
chercher plus vite ces revenus additionnels qui nous apparaissent comme des
revenus tout à fait
légitimes, désirables et que nous comptons pouvoir vous
procurer le plus tôt possible.
Alors, comptez que ces conditions-là que vous avez
mentionnées, M. Kirouac, on va y travailler avec vous autres et on va
essayer de les inscrire dans le projet de loi sous la forme de modifications
opportunes. Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): Ça va. Alors,
M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Oui. Je voudrais rassurer le ministre sur le
contentement ou pas. Être d'accord ou pas d'accord, ce n'est pas de
même qu'on prend ça. J'espère que vous avez plus de rigueur
que ça.
D'abord, je veux vous rassurer et vous dire que c'est à notre
demande que les évaluateurs sont rencontrés. Bien sûr que
vous avez eu à l'accepter, mais, au départ, ils n'étaient
pas prévus dans la consultation et c'est à notre demande... Oui,
ça, je peux l'assurer de mon siège ici. C'est nous autres qui
avons demandé qu'ils soient ajoutés.
Une voix: Non...
M. Dufour: C'est quoi?
Une voix: Non, ils avaient déjà été
invités par...
M. Ryan: Ils étaient sur notre liste. Je regrette
infiniment.
M. Dufour: Coudon, ils n'étaient pas...
La Présidente (Mme Bélanger): Attention à
votre siège, M. Dufour.
M. Ryan: Aïe! Votre siège, faites-y attention.
M. Dufour: Attendez un peu voir! C'est moi qui les ai
ajoutés. Je n'ai pas perdu la mémoire tant que ça. On
pourra peut-être regarder les premières listes qui ont
été soulevées, si elles n'ont pas été
jetées.
M. Ryan: Non. Nous autres, on les avait mis sur notre liste.
C'était un "must" pour nous.
M. Dufour: En tout cas, d'une façon ou de l'autre,
came...
M. Ryan: On était d'accord.
M. Dufour: C'est ça, on était d'accord. Pas de
problème. On n'a pas eu de discussion là-dessus. Bon.
Les questions du contexte dans lequel vous présentez votre
mémoire, la question de l'étalement du compte de taxes,
actuellement, dans le projet de loi, vous l'avez vu sûrement, ça
va être facultatif. Les gens pourront y recourir ou non. Donc, c'est un
changement important. C'est une législation qui a été
faite il n'y a pas tellement longtemps, qui était compliquée, et
elle était faite à la demande surtout de Montréal, si je
ne me trompe pas. Donc, je pense que c'est une amélioration,
celle-là, on peut toujours la regarder comme telle.
Quand vous parlez des transferts fiscaux et des effets de coûts
directs, à la page 6 de votre mémoire, l'interprétation,
en fait, c'est toujours aux questions de l'évaluation. C'est
compliqué, cette affaire-là. Je pense que vous soulevez encore
ces complexités-là, une étude pratique... Le ministre
semble nous dire que c'est compliqué une étude pratique et que
ça pourrait retarder la loi d'une façon extraordinaire. Est-ce
que vous pourriez nous expliquer un peu plus c'est quoi que vous pensiez par
rapport à ça?
M. Mailhot: Mme la Présidente, si vous me le permettez, je
passerai la parole à M. Lacha-pelle.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M.
Lachapelle.
M. Lachapelle (Yves): Évidemment, ici, dans le texte, je
pense que nous disions qu'il y aurait eu avantage à ce qu'il y eût
eu des analyses et des études pratiques. Évidemment, à
savoir si c'est faisable au sens du gouvernement à ce qu'il y ait des
études pratiques au préalable du dépôt d'une loi,
vous allez comprendre qu'il m'est difficile de prendre position
là-dessus. Cependant, on sait tous, si on a des imprécisions
à l'intérieur d'un texte de loi qui servent à des litiges
à être tranchés par les tribunaux, que ça, ce sont
des coûts indirects. Si cependant aussi, au même titre qu'on l'a
mentionné quand même dans notre rapport, si notre
interprétation est exacte de prétendre que nous avons affaire
à deux rôles totalement distincts, c'est donc dire que nous aurons
à refaire le travail pour le rôle concernant la surtaxe, qui
comporte, à notre avis, à peu près la même
problématique de travail que pour faire le rôle de valeur
locative. Donc, ce sont des coûts qui, à notre avis, sont des
coûts cachés. C'est dans ce sens-là que nous entendons, les
coûts cachés.
M. Dufour: Est-ce que vous croyez que ça va plus
compliquer le travail, le fait qu'on ait deux façons nouvelles pour les
locaux commerciaux? Il y a deux sortes de taxes qui peuvent s'appliquer
concuremment, qui ne dépassent pas le total d'une... autrement dit, la
valeur locative et la surtaxe des immeubles. Est-ce que ça, ça
complexifie votre travail d'une façon très importante,
moyennement importante? Est-ce qu'il y a une complication d'après vous
dans l'application de ça?
M. Mailhot: M. Lachapelle, s'il vous plaît.
M. Lachapelle: À notre avis, non. Il n'y a pas de
complication en autant qu'on nous accorde ce que nous demandons,
c'est-à-dire qu'il y ait au sens des concepts entre les deux
rôles, les mêmes notions. C'est que, dans le projet de loi tel
qu'il est présenté, nous en déduisons qu'une
interprétation au mot "local", ça ne veut pas dire la même
chose qu'au mot "lieu d'affaires". On nous a dit que le lieu, que le local
était la plus petite entité pouvant être offerte sur le
marché de la location. Alors, je vais vous donner un exemple pour me
faire comprendre. Si nous avons au rôle de la valeur locative un
locataire qui occupe, par bail, 7 étages d'un édifice de 25
étages et que, au sens du rôle de la valeur locative, nous avons
une seule entrée, nous pourrions en avoir plusieurs si notre
interprétation est exacte que le local, c'est la plus petite
entité qui pourrait venir à bail sur le marché. C'est donc
dire qu'il faudrait prévoir autant d'entrées qu'il y aurait
possiblement de mises en location sur le marché pour ces 7 étages
là. Alors, c'est là qu'on dit: II y aurait lieu d'arrimer les
concepts et les principes entre les deux rôles. Et si on fait de cette
manière, nous allons déduire du rôle de la valeur locative
mécanogra-phiquement les éléments qui sont
nécessaires pour dresser le rôle de la surtaxe foncière. Ce
ne sera pas plus difficile, à mon avis.
M. Dufour: Vous parlez beaucoup de l'article 65.1 et je comprends
pourquoi on en parle beaucoup - la ville de Saint-Romuald est venue nous donner
l'argumentation à l'effet que, si on le fait pour ça, ça
peut toucher d'autres choses, ça peut déranger les ententes qui
existent - quel serait le danger pour vous que soit laissé dans le
projet de loi tel quel actuellement ce qui nous est présenté dans
le projet de loi concernant les pétrolières?
M. Mailhot: M. Kirouac, peut-être... (18 h 30)
M. Kirouac: Le danger, M. Dufour, c'est que d'autres veulent
avoir leurs dispositions particulières inscrites dans la loi. On a
inscrit ici les dispositions pour les raffineries. Tantôt, on peut
présumer que, par exemple, les alumineries voudront voir inscrites dans
la loi des ententes qu'elles auront conclues avec les municipalités.
Quand les alumineries en auront, peut-être que les papetières
voudront avoir inscrites dans la loi leur propre entente. Quand les
papetières l'auront leur entente, peut-être que les industries du
textile voudront l'avoir aussi leur entente inscrite dans la loi. Si bien que
la loi deviendra tout simplement une énumération d'ententes hors
cour entre de grandes industries qui ont un pouvoir de négociation ou un
pouvoir de modifier la loi que n'a pas le simple contribuable. On ne pense pas
qu'une loi serve à justement enchâsser des ententes
particulières ou des ententes hors cours. Il y a d'autres dispositions
qui sont possibles, qui sont prévisibles pour légaliser des
ententes hors cour, il peut y avoir des modifications dans la charte, des lois
particulières ou des choses comme ça. Mais on ne pense pas qu'une
loi fiscale comme la Loi sur la fiscalité municipale doive servir
justement à geler des ententes particulières hors cours dans des
cas particuliers pour des industries particulières.
M. Dufour: Je pense que c'est assez précis ce que vous
nous dites, en fait, et je concours à votre point de vue de ce
côté-là. C'est évident que ça peut être
homologué, les ententes. On peut faire toutes sortes d'autres
inscriptions qui permettraient de les légaliser, mais je ne pense pas
que le gouvernement ait à légiférer par rapport à
ça. À ce que je sache, est-ce que - toujours selon votre
expérience ou votre connaissance du dossier - vous croyez que les
propositions qu'on a devant nous concernant les pétrolières...
Là, ce n'est pas juste l'entente, savamment, ça deviendrait
légal. Le vécu qu'on a par rapport à des ententes ou
à des façons d'évaluer... Est-ce que ça rend
justice? Est-ce que vous avez eu le temps d'analyser - vous pouvez, vous avez
des moyens et vous l'avez peut-être fait - ce que ça veut dire par
rapport à ce qui existe actuellement, cette entente-là? À
première vue, on en a discuté, c'est complexe... C'est
compliqué pour moi, et peut-être autant pour vous autres que pour
moi, mais comment l'exprimer? Effectivement, on va amener d'autres notions.
S'ils avaient parlé seulement, par exemple, des réservoirs et
s'ils avaient laissé les autres articles, sans toucher à l'aire
de production, etc. J'ai comme l'impression qu'on met d'autres notions à
travers le projet de loi. Est-ce que je suis correct quand je dis ça?
Est-ce que ma perception est bonne ou pas?
M. Kirouac: Dans le projet de loi, effectivement, on amène
la notion d'aire de production. C'est une notion qu'on ne peut pas
définir, qui n'est pas définie dans la loi, évidemment, et
qu'on ne peut définir non plus avec exactitude. Vous savez, l'aire de
production d'une industrie, ça peut être très très
vaste ou très limité. Il n'y en a pas d'interprétation
là-dessus. Il n'y en a pas de jurisprudence. De donner, par exemple, des
expressions comme "réservoir" ou "tour de craquage" ou des choses comme
ça, ce sont des choses qui sont beaucoup plus facilement identifiables
techniquement. Mais de donner comme référence ou comme base les
mots "aire de production", c'est comme de donner, ici, par exemple, au
parlement, la description "aire de discussion". L'aire de discussion ici qu'on
a, elle se limite à quoi? Où elle commence, où elle se
termine? Est-ce qu'elle est localisée à cette pièce?
Est-ce qu'elle est localisée à l'édifice? Ou est-ce
qu'elle est localisée à tout l'ensemble du
terrain qu'on retrouve ici? Est-ce que ça englobe toute la
province? Je ne le sais pas. Mais tout le monde en discute de la Loi sur la
fiscalité municipale. Alors, qu'est-ce que ça englobe, l'aire de
discussion? C'est un peu la même chose pour l'aire de production d'une
raffinerie. Ça se réfère tout simplement, à notre
connaissance, parce qu'on a vu un peu le dossier, à un plan, à
une entente particulière entre des parties, à un plan où
des gens ont tracé, comme ça, avec un crayon jaune, les limites
de leur entente à eux. On dit: Pour nous, au crayon jaune, c'est
ça. On fait un grand cercle et on dit: C'est ça. C'est facile
à faire comme ça sur papier, mais, quand on parle de la mettre
dans un texte législatif, c'est une autre problématique, et,
après ça, faire vivre cette entente-là par d'autres
industries pétrolières. On vous dit: Ça va être la
même chose dans les cas des autres types d'industries. L'entente qui va
être négociée tantôt entre, par exemple, Lauralco et
la ville de Saint-Raymond dans Portneuf ou Deschambault, comment on va
l'inscrire dans la loi? Et est-ce que l'Alcan va être capable de vivre
avec cette entente entre Lauralco et Deschambault? Je ne sais pas. Est-ce qu'il
va falloir procéder à des ententes particulières et
à des enchâssements particuliers? C'est ce qu'on trouve dangereux
dans cette introduction. On prévient le gouvernement que ça ouvre
la porte à un régime particulier qui va pouvoir, après
ça, être quémandé par toutes les autres industries
et on soumet que c'est un pas dangereux qui est franchi.
M. Dufour: Est-ce que... Je présume que, oui, il y a des
négociations depuis 15 ans au moins sur la question de l'article 65. 1.
On l'appelle 65. 1, mais avant ça a commencé avec d'autres
choses. C'est un sujet qui fait l'objet de vifs débats depuis 18 ans,
à ma connaissance, au moins. Est-ce que vous pensez qu'actuellement il y
a des moyens qui pourraient résulter en une application
générale de cet article? Est-ce qu'on pourrait le bonifier d'une
façon telle qu'on puisse l'appliquer et qu'il puisse être vivable,
en dehors des ententes qu'il y a eu là? Moi, je n'aurais pas d'objection
à dire par exemple, si les municipalités se sont toutes
entendues, et on sait comment ça s'est fait des ententes, il y a eu des
condamnations, etc. Pour un certain temps on peut vivre avec ça et,
pourtant, on n'a pas de loi pour constater le fait. Donc, il y a des gens qui
vivent comme ça.
Mais c'est anormal qu'une loi se négocie. En principe, une loi,
ça ne devrait pas être négociable. Une loi, ça
existe point à la ligne. Donc, on doit vivre avec ça. Puis quand
elle n'est pas correcte, on essaie de l'améliorer et de la bonifier
jusqu'à temps qu'on puisse s'organiser.
Dans l'état actuel des choses, depuis 18 ans que ça se
discute, mais plutôt forcément depuis 1975 à peu
près ou 1974, est-ce qu'actuellement on pourrait dire qu'on est proche
d'un résultat tangible qui enlèverait toutes ces choses-là
et qui pourrait permettre aux gens de mieux s'adapter et de mieux vivre dans
ça?
M. Lachapelle: En fait, je pense que, dans notre mémoire,
on donne une avenue. On dit, à l'instar d'autres provinces du Canada...
On sait très bien, je pense, qu'en Colombie-Britannique il y a eu une
loi qui a décrété que les biens qui appartenaient au monde
industriel devraient être évalués sur la base du coût
tel qu'établi par rapport à l'application d'un manuel et d'une
table de dépréciation inscrite dans la loi par voie de
règlement.
Évidemment, c'est une avenue. On ne dit pas que c'est la
solution, mais je pense que, si on nous demandait de nous pencher sur la
question d'une manière à y trouver une solution, peut-être
on verrait là une avenue de solution. Je ne dis pas que ça serait
la solution, mais peut-être une avenue de solution.
Cependant, la loi telle que nous l'avons, nous souhaitons la conserver
sans la modifier, comme telle, parce qu'en définitive, et d'ailleurs
c'est ce que nous soulignons un petit peu dans le rapport, les litiges ne sont
pas tous réglés au niveau de la cour. Tant et aussi longtemps
qu'il y aura matière à interprétation, il y aura
nécessairement des procès qui feront pencher la balance d'un
côté ou la balance de l'autre côté, c'est
évident.
Évidemment en introduisant une exception comme on vient d'en
faire une, ça ne veut pas dire, en telles circonstances, que par la
suite on respectera ce que ça veut dire, l'entente. Parce que, en
définitive, on ira avec les termes de la loi et, au sens des termes de
la loi, il y a des imprécisions quant à nous. Et dans ces
imprécisions-là, il y aura matière à procès
encore. Et un des premiers, ça sera sur l'aire de production et le
deuxième que j'essaie d'énoncer depuis pas mal longtemps
là, c'est sur la valeur marchande des biens qu'on identifie comme
étant affectés pour l'évaluation du monde industriel.
Encore une fois, de mes nombreuses années d'expérience
dans le métier, je n'ai pas encore trouvé de ventes sur le
marché libre de bases de béton dépourvues,
évidemment, de soutenir des machineries. Alors, tout à l'heure,
il n'y a rien qui nous assure qu'au sens de l'entente on n'ira pas s'objecter
à la valeur qu'on a inscrite au rôle au sens de la loi. Et,
là, on dira: Écoutez, il n'y en a pas de marché, donc on
ne devrait pas avoir de valeur. Ça, c'est charrier un petit peu à
la limite, mais tout au moins on essaiera de faire diminuer la valeur sous
cette prétention.
M. Dufour: D'ailleurs, il y a une difficulté importante,
c'est qu'il n'y a pas de marché pour ça. Ça se fait
à la Bourse ces questions-là, ça fait que c'est difficile
à... J'ai une entreprise à Jonquière qui s'est
déjà vendue 650 000 000 $,
mais elle n'a jamais été inscrite au rôle pour 650
000 000 $. Puis je n'ai jamais reçu de mutation immobilière pour
cette raison-là.
Ça fait que c'est évident que la valeur sur le
marché, la valeur marchande, eh bien, c'est la valeur économique
- il y a plusieurs façons de pouvoir l'évaluer - la valeur de
remplacement. Il y a au moins trois méthodes d'évaluation.
Ce que je vous demande par rapport à ça, d'abord, il doit
y avoir un avantage certain. Moi, je ne peux pas deviner c'est quoi l'avantage.
Est-ce que c'est pour la compagnie, la municipalité ou si c'est pour se
donner du respir? Moi, en tout cas, je ne suis pas assez au courant du dossier
de Montréal-Est, il semble que c'est pour Montréal-Est
nommément. Mais vous nous dites: II y a un danger, cela pourrait toucher
les autres. On a vu d'autres endroits où ils ont eu des
difficultés avec cet article-là, puis ils vivent encore avec
ça. À Baie-Comeau, ce n'est pas encore réglé a ce
que je sache, ça fait des années que la situation perdure, puis
il y a des troubles majeurs. Les seuls endroits où il y a moins de
réactions, c'est quand les industries sont neuves. Là on s'entend
assez bien, parce que c'est une évaluation globale qui rentre dans la
municipalité. Les conseils municipaux sont peut-être plus ouverts
par rapport à ça, je n'ai pas de doute.
Ce que j'aimerais vous demander, par rapport à ce qu'on introduit
dans la loi, est-ce que ça enlève suffisamment d'irritants pour
empêcher une possibilité de règlement ou d'articles de loi
qui régleraient l'article 65.1 d'une façon définitive ou
si ça ouvre une boîte de crabes qu'on n'est plus capable de
contrôler?
M. Lachapelle: Eh bien, voici, notre avis est le suivant. Il peut
être contesté, c'est bien sûr. À notre avis, on pense
que le fait d'introduire ça dans une loi générale,
ça ouvre à plus grand litige encore. Et s'il y avait lieu qu'on
règle un problème légalement pour ratifier une entente, il
faudrait probablement le faire au niveau d'une loi locale, d'une charte de
ville ou d'une charte d'un organisme de qui relève ce
problème-là. Mais, l'entente, c'est évident qu'elle ne
pourra pas s'exporter pour régler d'autres litiges ailleurs. À
mon avis, ça va définitivement dégénérer.
Ça n'atténuerait pas, à mon avis, le fait d'avoir d'autres
procès.
M. Dufour: Je voudrais vous remercier. C'est évident, tout
à l'heure j'ai dit que j'avais vu la première liste qui a
été échangée entre les bureaux, puis ce
n'était pas la liste officielle du ministère. Au début, je
n'avais pas vu les évaluateurs agréés. Je voudrais vous
remercier de votre participation. Je pense que vous apportez des
éléments importants et ce dont on peut se rendre compte, c'est
que, effectivement, le ministre vient de vous annoncer qu'il y aura
sûrement, comme dans toutes les lois que je connais presque, au point de
vue municipal, un paquet de papillons pour corriger des articles ou pour (es
améliorer. On est habitué à ça, on prétend
que c'est une réforme qui est improvisée quelque peu. On est pris
à la hâte. Le principe, c'est d'aller chercher de l'argent.
Ça répond à un court de caisse gouvernemental, on en prend
bonne note, mais votre contribution est appréciée. Je vous en
remercie.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le
député de Jonquière. Alors, au nom des membres de la
commission, nous vous remercions MM. de la Corporation professionnelle des
évaluateurs agréés du Québec.
M. Mailhot: Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Bélanger): Et bon retour.
M. Mailhot: Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): La commission suspend
ses travaux jusqu'à 20 h 30 pour donner la chance aux membres de
souper.
(Suspension de la séance à 18 h 43)
(Reprise à 20 h 35)
Le Président (M. Gauvin): Je demanderais une minute
d'attention, s'il vous plaît. La commission reprend ses travaux. À
ce moment-ci, on appelle la Corporation des propriétaires immobiliers du
Québec. On invite les représentants à prendre place ici en
avant, s'il vous plaît. C'est ça. De préférence les
fauteuils du milieu. J'aimerais vous rappeler que vous avez 45 minutes pour
votre exposé et échange avec les membres de la commission. Le
temps est réparti comme suit: 15 minutes pour la présentation, 15
minutes pour le parti ministériel et 15 minutes pour le parti de
l'Opposition. J'inviterais à ce moment-ci le responsable à nous
présenter son collègue.
Corporation des propriétaires immobiliers du
Québec
M. Riverin (Michel): Mon nom est Michel Riverin, je suis le
directeur général de la Corporation des propriétaires
immobiliers du Québec. L'expert-conseil, qui est au soutien de notre
mini-mémoire, est M. François DesRosiers, économiste,
urbaniste, docteur en planification urbaine du London School of Economies. Il
est également professeur de gestion urbaine et immobilière
à l'Université Laval ici à Sainte-Foy. M. DesRosiers.
Le Président (M. Gauvin): Bienvenue.
M. DesRosiers (François): Bonjour.
M. Riverin: M. le Président, nous vous remercions de
l'invitation que vous nous avez transmise et, au nom de mon président -
je m'excuse de sa non-disponibilité - je vais agir comme frappeur de
relève ce soir. Le document que nous vous avons remis, nous allons
peut-être y aller avec une lecture en diagonale. Le document aux couleurs
du salon... Pardon? Peut-être certains points en particulier.
Au niveau de l'introduction, la Corporation des propriétaires
immobiliers du Québec, la CORPIQ, regroupe 2750 membres à travers
le Québec, lesquels ont sous leur gestion ou contrôle 146 000
unités de logement, tous du locatif résidentiel, soit près
de 15 % du parc locatif total. Ces derniers détiennent pour environ 40
000 000 000 $ en actif, dont quelques 10 000 000 000 $ en capital propre. Ils
constituent donc une force sociale, économique, politique majeure et les
services qu'ils fournissent affectent la vie quotidienne de millions de
Québécois, tout en générant auprès des
institutions financières et autres secteurs directement ou indirectement
reliés au domaine résidentiel une importante activité.
Par ailleurs, le propriétaire immobilier peut être
considéré, par les taxes qu'il paie aux gouvernements municipaux,
comme l'un des principaux financiers du secteur public local. Rappelons ici que
les taxes foncières représentent aujourd'hui en moyenne 15 % des
revenus bruts effectifs d'un immeuble résidentiel contre 13, 7 % en
1983. Cette tendance à la hausse s'accélère depuis 1990,
soit depuis la réforme du financement des commissions scolaires. Il
s'agit là, donc de la plus importante dépense d'exploitation pour
les propriétaires immobiliers.
Suite à l'invitation qui a été faite de
présenter un mémoire à la commission parlementaire sur le
projet de réforme de la fiscalité municipale et - on le dit bien
humblement - en dépit des délais extrêmement serrés
qui étaient imposés pour préparer un tel mémoire,
à peine quatre jours, la CORPIQ ne pouvait manquer de faire valoir son
point de vue sur une question aussi importante qui affectera directement ses
membres tout comme l'ensemble des intervenants du monde municipal.
Les pages 3, 4 et 5... Je pense que vous connaissez ce dont il est
question. En fait, il s'agit d'un résumé des grandes... On peut
dire que ce sont les grandes lignes de la réforme de M. Ryan. Nous
allons aller à la page 6 pour parler de transport collectif, des
"externalités" et des valeurs foncières.
Sans lire en détail la page 6, on va tourner à la page 7
où c'est écrit en caractères un peu plus gras: On peut
donc présumer qu'un sous-financement du transport collectif urbain se
traduira, tôt ou tard, par une baisse de la valeur des immeubles locatifs
résidentiels, suite à une détérioration de leur
accessibilité relative.
Au chapitre des solutions au problème du financement des
transports, il a été question de la taxe de 30 $. Pour la CORPIQ,
nous disons qu'une telle taxe devrait s'appliquer à l'ensemble des
détenteurs de véhicules automobiles de la province plutôt
qu'aux seuls résidents des zones sous juridiction des OPT.
Parmi les autres solutions à envisager, mentionnons le maintien
d'une participation minimale de 20 % - qui est une norme observée dans
les pays industrialisés - du gouvernement au financement des
dépenses d'exploitation des OPT. Également, le recours accru
à la tarification des usagers du transport en commun. Comme on le sait,
la demande pour ce service est fortement inélastique et une augmentation
des tarifs se traduira toujours par une baisse du déficit, alors qu'une
détérioration de la qualité des services entraînera,
elle, une spirale déficitaire. Des mesures compensatoires pour les
clientèles les plus démunies pourraient être
envisagées. Également, la réduction ou l'abolition pure et
simple des subventions au stationnement pour les employés du secteur
public et le versement des sommes ainsi récupérées aux
OPT. Également, le recours à une surtaxe spécifique sur
l'essence.
En page 9, on traite de la taxation du non-résidentiel, des
déplacements fiscaux et des disparités intrarégionales.
Nous allons au bas de la page 9. Pour résumer, les écarts
marqués dans la composition de l'assiette foncière des
municipalités de même que les différentes applications des
normes relatives à ces nouvelles mesures fiscales sont susceptibles de
déboucher sur une situation de concurrence, entre guillemets,
déloyale entre les municipalités d'une même région
et d'entraîner une accentuation des disparités
socio-économiques. Également, les municipalités qui ne
disposent pas d'infrastructures industrielles et commerciales suffisantes pour
absorber la hausse des coûts reliés au financement du transport en
commun se verront forcées de transférer le fardeau fiscal vers le
secteur résidentiel via une hausse de taxe foncière
générale, possiblement accompagnée d'une réduction
du niveau des services, ce qui exercera un effet à la baisse sur
l'ensemble des valeurs résidentielles et notamment locatives.
Également, dans un contexte où les enjeux financiers du
processus d'évaluation pour fins de taxation municipale sont de plus en
plus importants, il faut s'attendre à ce que les entreprises et les
organismes publics touchés par la réforme multiplient les
demandes de révision à la baisse de l'évaluation de leur
propriété, ce qui a pour effet d'inciter l'évaluateur
à sous-estimer volontairement la valeur du parc non résidentiel
par mesure de prudence. Il s'ensuit une fois de plus des déplacements
fiscaux du non-résidentiel vers le résidentiel. (20 h 45)
Le fait que les municipalités non desservies par un OPT et les
banlieues éloignées ne soient pas affectées par ces
nouvelles taxes confère à ces dernières un avantage
comparatif non équivoque qui risque, à moyen ou long terme,
d'encourager le vote avec les pieds des ménages, des commerces, des
industries des zones urbanisées, en particulier des secteurs limitrophes
de ces zones, et de favoriser un retour à l'étalement urbain.
À cet effet, un article récent dans le journal Les Affaires
du 13 avril 1991, simulant l'impact de la réforme Ryan sur la
fiscalité de 69 municipalités, est particulièrement
éloquent. En dépit des modifications apportées au projet
de loi depuis sa publication, on y constate des variations considérables
de la hausse estimée des taxes résidentielles per capita suite
à la réforme proposée, à l'avantage notamment des
banlieues éloignées de la région de Montréal.
À la lumière d'une recherche récente sur la
formation des valeurs résidentielles dans la région de
Québec qui établit, sans ambiguïté, l'influence
majeure de la fiscalité locale sur les valeurs immobilières - et
nous avons cité le professeur DesRosiers - on ne peut que s'interroger
sur le bien-fondé des mesures proposées et sur leurs
retombées fiscales nettes.
Enfin, à la lumière de ces commentaires, on peut se
demander sérieusement si une surtaxe spécifique sur l'essence ne
serait pas un moyen infiniment plus simple d'application et aux
retombées nettement moins dommageables que la surtaxe sur le
non-résidentiel et, surtout, la taxe sur les stationnements pour
supporter une partie des coûts d'exploitation des réseaux de
transport collectif urbain, tout en étant pleinement justifiée au
plan des principes.
À la page 12, nous traitons de la hausse des droits sur les
mutations immobilières. Ce que nous retenons principalement et ce que
nous proposons, c'est plutôt que d'appliquer la formule
suggérée initialement et apparaissant dans le document de
décembre 1990 intitulé Partage des responsabilités
Québec-municipalités: Vers un nouvel équilibre... On y
suggère un taux de 0,5 de 1 % sur la première tranche de 50 000 $
et un taux de 1 % sur l'excédent. Dans l'exemple que nous citons dans le
paragraphe précédent, cela se traduirait par des droits de 4750
$, soit une hausse de 66,7 % par rapport à la situation actuelle alors
que la proposition actuelle nous donne une hausse de l'ordre de 111 %.
À la page 13, conclusions générales et
recommandations, nous traitons de fusions municipales. Les fusions municipales
constituent certainement l'une des principales avenues à explorer dans
le contexte actuel. Bien que les économies découlant des
regroupements municipaux ne soient pas nécessairement
considérables dans la mesure où la structure des coûts per
capita de nombreux services municipaux est pratiquement constante, à
l'échelle, de tels regroupements permettent une rationalisation des
opérations, une optimisation des ressources humaines et
financières, une meilleure planification d'ensemble du territoire et une
réduction des effets de débordement.
Également, la régionalisation d'activités
spécifiques. Si la fusion peut apparaître comme un objectif
à long terme, la régionalisation d'activités
spécifiques peut constituer une première étape dans cette
direction. Parmi les activités qui sont susceptibles de faire l'objet
d'une unification régionale, citons le développement industriel,
la protection contre les incendies, la sécurité publique,
l'alimentation en eau potable, le transport et le traitement des eaux et des
déchets solides, les activités de loisir et de culture, le
transport en commun et les services administratifs.
Privatisation des services municipaux. Selon une étude de Robert
Gravel, Cahiers de l'ENAP, juillet 1985, la privatisation des services gagne en
popularité auprès des municipalités. Une étude
américaine réalisée sur 121 municipalités
californiennes a démontré que le coût de fourniture de
plusieurs services par les municipalités excédait de 37 %
à 96 % le coût de production de ces mêmes services par
l'entreprise privée.
Le recours aux taxes spéciales et à la tarification.
Malgré les pouvoirs que la loi 90 de 1988 a conférés aux
organismes municipaux en matière de tarification de services, le recours
à cette forme de financement demeure embryonnaire. Comme les taxes
spéciales toutefois, il s'agit là d'une forme de financement qui
répond particulièrement bien au principe de
l'utilisateur-payeur.
Enfin, peut-être une nouveauté, et je vais laisser M.
OesRosiers lire cette partie du texte à la page 15 qui traite du recours
à la proportion médiane catégorielle en regard de
l'évaluation. François.
M. DesRosiers: Oui. Ici, il s'agit tout simplement d'une
recommandation qui a trait au processus d'évaluation foncière. Il
y a, dans le processus d'évaluation foncière, plusieurs
faiblesses, plusieurs lacunes et une des principales, c'est le recours à
ce qu'on appelle la proportion médiane unique. Pour vous situer
très rapidement, ce qu'on appelle la proportion médiane, c'est
tout simplement un indicateur statistique qui est le ratio des prix de vente
sur l'évaluation des propriétés, qu'on range par ordre
croissant ou décroissant, et on prend le chiffre du milieu de la
distribution, c'est ce qu'on appelle la médiane. Cette proportion
médiane va servir à ajuster les rôles d'évaluation
pour les rendre à la valeur marchande. Le problème qui se pose
est essentiellement un problème de nature méthodologique,
c'est-à-dire que, à l'heure actuelle, on utilise un indicateur
unique pour tous les types de propriété, toutes les
catégories de propriété: résidentielle,
commerciale, industrielle. Et ça peut poser des problèmes, parce
qu'il y a des
biais qui se glissent, à ce moment-là, dans le calcul de
la proportion médiane et on peut, d'une façon
générale... Enfin, ce n'est pas nécessairement toujours,
mais très souvent ce qui se produit, c'est qu'on va sous-évaluer
les propriétés comme non résidentielles,
propriétés commerciales et industrielles, et l'impact de
ça, c'est des déplacements fiscaux qui se font du
non-résidentiel vers le résidentiel. Donc, on revient, en quelque
sorte, aux points qu'on a traités dans le mémoire un peu,
antérieurement. Une des solutions que beaucoup d'évaluateurs
proposent, c'est l'adoption d'une médiane multiple, une médiane
catégorielle. Par exemple, on ferait la distinction entre les terrains
vacants et les propriétés bâties, entre le
résidentiel et le non-résidentiel pour réduire ces
déplacements fiscaux et avoir un processus d'évaluation qui soit
plus performant. Éviter ces déplacements, donc, vers le
résidentiel. Alors, c'était simplement le point ici que je
voulais soulever.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M.
DesRosiers. M. le ministre.
M. Ryan: Mme la Présidente, je voudrais tout d'abord
exprimer mon appréciation à la Corporation des
propriétaires immobiliers du Québec pour le mémoire
d'excellente qualité dont elle vient de nous saisir. On voit que le
mémoire a été rédigé par des personnes qui
sont à la fois familières avec les réalités dont
traite le projet de loi 145, imbues d'esprit constructif et soucieuses de
chercher un équilibre meilleur dans toute la mesure du possible.
J'apprécie vivement l'esprit dans lequel a été
conçu ce mémoire et je voudrais le commenter, évidemment,
dans le même esprit.
Tout d'abord, j'ai bien noté à la page 5 - je ne pense pas
exagérer en citant ce passage, je ne pense pas déformer votre
pensée - que la Corporation des propriétaires immobiliers du
Québec souscrit à l'esprit de la démarche gouvernementale,
laquelle vise l'atteinte d'une saine gestion administrative au niveau
municipal. J'apprécie cette adhésion au principe du projet de
loi. J'aurais aimé que vous soyez avec nous l'autre soir, quand nous
avons voté le principe, je pense qu'on aurait eu des chances de vous
avoir de notre côté. Au moins, à ce niveau-là,
ça aurait brisé les illusions d'unanimité qu'a pu nourrir
l'Opposition depuis quelques jours.
Une voix: Vous ne seriez plus seul.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dufour: On va lui payer un verre.
M. Ryan: En politique, si on veut être fort, il faut savoir
être seul a certains moments. C'est ce que certains oublient parfois.
Mme Marois: Quand on est trop seul, ça cause d'autres
problèmes.
M. Ryan: II faut passer par là, madame. Maintenant, les
commentaires que vous faites, je voudrais les relever brièvement,
peut-être, pour m'attarder ensuite à un ou deux points. Les droits
additionnels sur l'immatriculation des véhicules automobiles, vous
souhaitez dans votre mémoire qu'ils soient appliqués à
l'ensemble du territoire du Québec. Inutile de vous dire que c'est une
voie qui a été explorée par le gouvernement avant que les
décisions ne soient prises à ce sujet. Le gouvernement a
décidé, finalement, de ne retenir que les régions de
recensement considérées comme se rattachant aux zones
métropolitaines desservies par des organismes publics de transport en
commun. Et la définition qu'on donne dans le recensement
fédéral de ces zones, je pense que M. DesRosiers est familier, ce
sont des zones où la majorité des gagne-pain vont chercher leur
revenu principal dans le centre de l'agglomération. Nous avons voulu que
ce soit des droits qui soient rattachés au financement du transport en
commun. Le raisonnement est facile à faire, les personnes qui utilisent
leur véhicule pour se rendre au centre-ville à partir de ces
endroits bénéficient des facilités de circulation que leur
procure l'existence du transport en commun. C'est pourquoi nous nous en sommes
tenus à ces zones. Il eut été très
intéressant d'étendre également la mesure à
l'ensemble du Québec et, peut-être, de créer un
deuxième fonds, celui-là pour l'amélioration du
réseau local en longue période; c'eut été
très intéressant. Mais le gouvernement était bien
conscient d'un facteur qu'a souligné souvent le député de
Jonquière depuis trois jours, c'est qu'il ne faut pas ajouter trop de
petites choses, parce que ça finit par faire de grandes choses. Nous
avons su arrêter là où ça nous apparaissait le plus
raisonnable.
En tout cas, là-dessus, la proposition est très bonne en
soi. Si nous eussions été dans un autre contexte, je crois
qu'elle eût peut-être été retenue par le
gouvernement, mais dans le contexte actuel, nous avons décidé
d'arrêter à la limite que je viens de mentionner. Je ne voudrais
pas que vous pensiez que le gouvernement se retire totalement du financement du
transport en commun. Le gouvernement demeurera engagé dans une mesure
qui gravitera autour de quelque 300 000 000 $ par année. Si l'on compte
la participation aux immobilisations qui demeurera supérieure à
200 000 000 $, si l'on compte également la participation au transport
scolaire qui va chercher beaucoup d'argent - pour l'ensemble du Québec,
la participation au transport scolaire est de 385 000 000 $ par année,
dont une bonne partie, surtout celle qui touche le transport
intégré, est versée sous forme d'aide au financement aux
commissions scolaires pour les services qu'elles commandent aux organismes
publics de transport en commun - et, en plus, une subvention que le
gouvernement maintient à l'intention de l'organisme métropolitain
de coordination, d'intégration des services de transport en commun dans
la région métropolitaine de Montréal, une subvention qui
va être de l'ordre de 25 000 000 $ par année, indexables pendant
trois ans, ensuite, les subventions au transport pour les personnes, le
transport adapté - il y a des subventions importantes qui sont
versées de ce côté-là aussi - les subventions pour
les trains de banlieue également, alors, si nous ajoutons tout cela,
nous dépassons les 300 000 000 $ par année. Il n'est pas
question, contrairement à ce que certains ont pu croire - ce n'est pas
du tout ce que vous dites dans votre mémoire, vous nous donnez un
avertissement, que nous prenons en bonne part - il n'est pas du tout question
que le gouvernement se retire totalement ou catégoriquement de toute
forme d'engagement dans le financement du transport en commun.
Il a été question dans votre mémoire de la taxe sur
les stationnements. Les difficultés que vous entrevoyez s'ajoutent
à de nombreuses autres qui nous ont été signalées
depuis quelques jours. Nous en étions conscients lors de la
rédaction du projet de loi. Nous avons décidé de le mettre
à l'essai quand même. C'était proposé sous forme
facultative. Il nous restera, maintenant, à décider, au cours des
prochains jours, si cette partie du projet de loi doit faire l'objet d'une
certaine ablation, ce qui n'est pas exclu. Nous délibérerons
là-dessus au cours des prochains jours et une décision sera
prise. Mais je pense que l'éclairage que vous nous apportez enrichit
notre réflexion.
Vous avez parlé des droits sur les mutations immobilières,
dont vous trouve^ que nous les astreignons à des hausses trop fortes.
Les taux que nous envisageons sont des taux qui se comparent à ceux qui
sont en vigueur dans la région de Toronto. M. DesRosiers est sans doute
au courant de ça. Au début, il est vrai que nous avions
proposé des taux plus modestes, mais cet ajustement fait partie de
toutes les... Les municipalités ne veulent pas qu'on parle de
négociation, disons qu'on parlera de conversations que nous avons eues
avec les représentants des municipalités, ce n'est pas sorti de
la cuisse de Jupiter, c'est de là que c'est sorti; au cours des
conversations, cette idée-là est venue à un moment
donné. Nous avons consulté ce qui se faisait dans l'autre
région comparable du Canada. Nous avons retenu des taux plus proches de
ceux de l'Ontario, de Toronto en particulier. (21 heures)
La surtaxe sur les immeubles, je voudrais vous interroger
là-dessus. Vous soulignez des effets appréhendés de cette
mesure au point de vue de la répartition équitable des charges
fiscales. J'aimerais peut-être que vous nous donniez quelques
explications là-dessus, votre réaction au sujet de
l'éventuelle surtaxe sur les immeubles non résidentiels.
La Présidente (Mme Bélanger): M. DesRosiers.
M. DesRosiers: Oui. En fait, il y a deux points, si vous me
permettez, M. le ministre, que j'aimerais ramener, qui synthétiseraient
en quelque sorte l'esprit des commentaires qui sont inclus dans le
mémoire de la CORPIQ. Le premier, c'est que, comme vous l'avez
mentionné, en fonction des principes de gestion qui sont la base de la
réforme de la fiscalité des années soixante-dix et, je
présume, de la réforme Ryan, on considère que ce sont les
décideurs qui doivent payer pour les services, et c'est tout à
fait logique. Sauf que, dans le cas du transport en commun, il y a un
élément additionnel dont il faut tenir compte et ce sont les
"externalités" positives qui sont générées par le
transport en commun. Je pense surtout à la région de
Montréal. Les effets de débordement, de ce fait, sont à la
grandeur de la province. C'est le premier point qui est un point sur lequel on
pourrait discuter longtemps, effectivement. À quel niveau se situe le
bien qu'on appelle le transport en commun? Est-ce que c'est essentiellement un
bien local ou régional ou est-ce que ça déborde ce
contexte-là? C'est un point que je voulais amener.
Le deuxième point m'amène à répondre
directement à votre question sur la surtaxe résidentielle.
Premièrement, je voudrais souligner - et je l'ai indiqué
d'ailleurs, nous l'avons indiqué dans le document - que ce n'est pas
tant la nature des taxes qui sont suggérées dans le projet de loi
qui est tellement problématique. En fait, une surtaxe foncière,
à mon avis - je l'ai également indiqué noir sur blanc -
est préférable, je crois, à une taxe sur la valeur
locative qui pose énormément de problèmes au niveau de
l'évaluation. C'est un système qui est très lourd à
gérer. En fait, c'est une taxe foncière déguisée.
Donc, la surtaxe foncière est préférable.
Le problème, ici, ce n'est pas tellement la nature des taxes que
les modalités d'application et, notamment, le fait que ces deux taxes
nouvelles, la taxe sur le stationnement et la surtaxe foncière, ne
concernent que des entités géographiques qui sont à
l'intérieur des zones desservies par les organismes publics de
transport. Administrativement parlant - comme vous l'avez dit tout à
l'heure, faisant référence au secteur de recensement comme
exemple - c'est évidemment toujours nécessaire d'avoir une
entité géographique avec laquelle travailler, sauf que ça
crée un déséquilibre entre les zones où ces taxes
sont perçues, et ces taxes peuvent être très importantes.
Les chiffres que j'ai vus sur la surtaxe, la taxe sur le stationnement
notamment, peuvent être très importants et avoir un impact sur le
caractère compétitif des entreprises.
Ce que ça pourrait avoir comme effet, par exemple, c'est de
provoquer un déplacement des activités à moyen ou à
long terme - ça ne se fait évidemment pas du jour au lendemain -
un déplacement des activités commerciales et industrielles et
aussi, par ricochet, résidentielles, parce que ça va affecter les
taux de taxation résidentielle, un déplacement des
activités vers la banlieue éloignée. Si on prend le cas de
Montréal, ce serait, par exemple, un déplacement vers Saint-Bruno
qui ne subit à peu près pas le contrecoup de ces taxes et qui,
donc, pourra offrir les services à moindre coût. Ça peut
avoir des effets qui ressembleraient, en miniature, à ce que l'on
connaît du problème qui a été très bien
exposé par un économiste américain qui s'appelle Charles
M. Tiebout et qui a baptisé ce phénomène le vote avec les
pieds, c'est-à-dire qu'au fur et à mesure que les fardeaux
fiscaux de certaines municipalités augmentent, les citoyens et les
entreprises se déplacent. Évidemment, aux États-Unis, le
problème est beaucoup plus épineux, étant donné que
les municipalités, les villes y assument les fonctions de
redistribution, ce qui n'est pas le cas au Québec où, en tout
cas, les fonctions de redistribution qui sont assumées se font sous une
forme déguisée; c'est par le biais du logement social
essentiellement. Alors, il se pourrait qu'il y ait, avec une loi dans la forme
de celle qui est proposée, un mouvement de ce type-là vers les
banlieues et ça impliquerait éventuellement un retour à
l'étalement urbain, ce qui évidemment n'est pas souhaitable,
puisque toutes les tentatives depuis la fin des années soixante-dix vont
dans le sens contraire.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Ryan, il
reste 30 secondes.
M. Ryan: Oui, je voudrais juste ajouter un mot. La surtaxe sur
les immeubles non résidentiels est d'application à travers tout
le Québec, pas seulement dans les zones desservies par le transport en
commun, hein? Je m'excuse, je ne peux pas commenter davantage, parce que la
présidente m'informe que le temps qui nous est imparti est
écoulé. On pourra reprendre ça peut-être
après ou à un autre moment. J'apprécie les explications
que vous avez fournies. Je pense que c'est le début d'un dialogue qui
peut être très utile. J'apprécie la pertinence de vos
commentaires, M. DesRosiers. Je vois que vous êtes très au
courant. Je sais que vous travaillez avec M. Letarte, dont j'ai lu des travaux
aussi très pertinents sur les sujets qui nous intéressent.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le
député de Jonquière. Je m'excuse, M. le
député de Labelle. M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: J'ai bien sûr examiné ou entendu avec
intérêt la lecture de votre mémoire. C'est évident
que, dépendamment à qui vous vous adressez, on peut vous
accepter, soit comme des partisans des propositions, soit comme des
adversaires, parce que ce qui ressort nettement de votre présentation,
c'est que vous acceptez ou vous prenez pour acquis que la réforme va
s'appliquer.
Deuxièmement, tous les autres, excepté nous, parce que la
taxe sur l'essence ne s'applique pas directement sur les immeubles. Les taxes
sur le non-résidentiel, ce n'est pas sur vous. En tout cas, il y a au
moins cet aspect que je veux faire ressortir, parce que sans ça le
ministre des Affaires municipales va penser que vous vous êtes
prononcé. Il va nous dire demain, voyez-vous, il y avait des gens qui
étaient pour ma réforme. Moi, je ne conclurais pas aussi vite que
ça. Il faut faire attention, parce que le ministre est ratoureur des
fois.
Mais en tout cas, tout ça pour dire que je voudrais vous poser
quelques questions et mon collègue de Labelle est anxieux aussi de vous
en poser quelques-unes. On ne peut pas en poser tellement. Il faut bien
s'entendre. Je vais juste demander: est-ce que vous considérez que le
transport en commun ça donne une plus-value à vos
propriétés?
M. DesRosiers: Ça donne une plus-value aux
propriétés très certainement. Et ça donne une
plus-value aux propriétés locatives, notamment, puisque la
clientèle des propriétés locatives constitue aussi une des
clientèles majeures du transport en commun. Donc, une
détérioration de la qualité du transport en commun risque
de se traduire par une baisse de la plus-value, par une augmentation du taux
d'inoccupation. Évidemment, peut-être pas au centre-ville, parce
que, s'il y a des coupures de service, ce ne sera pas nécessairement au
centre-ville que ça va se faire sentir d'abord. Ça va être
en dernier. Mais malgré tout, dans les banlieues, même dans les
banlieues proches, c'est une possibilité très certainement.
M. Dufour: Si je continue votre raisonnement, je veux savoir
comment vous arrivez au fait que le fait que les municipalités non
desservies par un OPT et les banlieues éloignées ne soient pas
affectées par ces nouvelles taxes confère à ces
dernières un avantage comparatif non équivoque qui risque,
à moyen et à long terme, d'encourager le vote avec les pieds,
donc, un déplacement de population.
Si, d'une part, le transport en commun donne une plus-value à la
propriété, comment - vous avez sûrement une explication -
pouvez-vous expliquer que des gens vont s'en aller à l'extérieur
pour se sauver de la taxe sur le transport en commun? Est-ce que vous pensez
que les avantages par rapport aux désavantages vont faire que ça
va débalancer les lieux de résidence de la population?
M. DesRosiers: Si les différentiels de fardeau fiscal sont
très prononcés, c'est tout à fait possible que ça
se produise. Ce ne sera pas la première fois que ça se voit. S'il
y a des différentiels prononcés de fardeau fiscal, des
municipalités limitrophes des zones périphériques qui ont
un fardeau fiscal important et, tout de suite, de l'autre côté,
l'absence de taxes, vous allez avoir très certainement un effet de
déplacement et ça va commencer par les entreprises, par les
centres commerciaux et, par la suite, ça pourrait avoir un effet sur les
clientèles résidentielles. C'est un processus à long terme
évidemment.
M. Dufour: Vous dites dans le haut de la page 11 - on
n'étudie pas tout à fait, complètement, les effets de la
réforme Ryan, comme vous l'appelez -: On ne peut que s'interroger sur le
bien-fondé des mesures proposées et sur leurs retombées
fiscales nettes. Est-ce que, actuellement, vous êtes rendus suffisamment
loin dans votre cogitation ou dans votre réflexion pour vous dire qu'il
y a des éléments majeurs dont vous ne connaissez pas les impacts
et que, là, vous faites presque un acte de foi au moment où on se
parle?
M. DesRosiers: C'est évident qu'on ne peut pas à
l'heure actuelle dresser un scénario définitif de ce qui va se
produire. Tout ce qu'on peut faire, à partir de ce qu'on connaît
déjà, des situations passées et de la situation à
l'étranger, c'est faire des hypothèses, mais qui m'apparais-sent
très probables sur les comportements des agents économiques face
à une situation dichotomique, c'est-à-dire une situation
où vous avez, d'un côté, des taxes qui sont imposées
à des municipalités, certaines vont les prendre plus
facilement... Je vous donne un exemple, la ville de Sainte-Foy choisit de ne
pas imposer de taxes sur les stationnements; la ville de Québec va en
imposer. Alors, il y a des villes qui vont se servir de cet outil-là,
d'autres qui ne s'en serviront pas. Vous allez avoir une grande
diversité de situations, une
hétérogénéité en fait au niveau des
modalités d'application, parce qu'il y a aussi une grande latitude
d'après ce que j'ai pu voir dans la loi sur l'application de cette
mesure fiscale sur les stationnements. Alors, vous allez avoir une grande
diversité et ça va se traduire, éventuellement, par une
situation dans laquelle certaines municipalités n'auront pas le choix,
certaines ne pourront pas se prévaloir de ces avantages-là, parce
qu'elles n'ont pas de stationnements à taxer ou elles n'en ont pas
assez, mais elles vont avoir des coûts à rencontrer. Donc,
ça va se décharger sur le résidentiel.
C'est un autre point important du mémoire. J'en ai dit deux tout
à l'heure. Le troisième serait que la réforme Ryan en
fait, dans la lettre, touche beaucoup plus les commerces et les industries,
mais il serait curieux de voir dans quelques années ce qui se sera
réellement passé. Dans certaines municipalités, ce sera le
résidentiel, et ça, ça va se produire à court terme
dans certaines municipalités; dans d'autres, ça va être
beaucoup moins clair ou plus mitigé, mais il va y avoir des transferts
vers le résidentiel.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Oui. Merci, Mme la Présidente. Bonsoir,
M. Riverin, M. DesRosiers. Je pense qu'il y a une constante qui s'est
manifestée lors de l'audition des mémoires, au moins de ceux que
j'ai entendus, c'est que tout le monde s'interroge sur les effets à long
terme de cette réforme et, effectivement, dès que l'on touche au
foncier, ça touche le long terme. Lorsqu'on fait une construction, c'est
évident qu'elle est là pour 25, 30, 50 ans. Vous, vous êtes
des propriétaires immobiliers, je suppose, vous dites que vous avez 146
000 unités de logement, donc c'est sûrement une partie très
importante des propriétés de ceux que vous représentez.
J'estime que, finalement, vous versez quelque 800 000 000 $ aux
municipalités en termes de taxe foncière. À 2 $ du 100 $,
c'est à peu près ça que ça veut dire. Donc, on
considère que c'est un élément très important. (21
h 15)
Moi, je voudrais reprendre ça, cette question du
débordement et je pense que le débordement ou l'étalement
urbain, c'est un élément fondamental dans toute politique
d'imposition foncière. C'est vrai de très petites
municipalités de villes centre par rapport aux villages comme c'est vrai
de Montréal par rapport à sa banlieue. Je pense que c'est
toujours la même chose, la ville centre doit assumer les services alors
que les villes ou les municipalités environnantes prennent le
résidentiel en bonne partie, ont un taux de taxe plus bas et
entraînent à terme un étalement. Moi, je me pose des
questions là-dessus.
Vous, vous dites que, à terme, même si l'on taxe
l'industriel, le commercial, ça va se répercuter sur la valeur du
résidentiel. Est-ce que vous avez fait des études
particulières là-dessus et est-ce que vous avez analysé un
milieu, disons, comme celui de la Communauté urbaine de Québec et
les villes autour? Est-ce que vous avez des statistiques sur cette
question?
M. DesRosiers: Mes travaux des dernières années et
mes discussions plus récentes des derniers mois - je viens de terminer
un mémoire sur la pratique de l'évaluation foncière au
Québec pour le Vérificateur général et j'ai eu
l'occasion de discuter avec bon nombre d'évalua-teurs de toutes ces
questions de transferts entre le résidentiel et le
non-résidentiel. Les transferts sont bien réels, parce que, si
vous taxez une municipalité et qu'elle n'a pas les infrastructures
commerciales et industrielles que sa voisine a, quelle va être la
solution pour rencontrer ses...
M. Léonard: Taxer le résidentiel, là.
M. DesRosiers: Alors, elle va taxer par le biais de la taxe
foncière générale qui, évidemment, est une
tentation omniprésente.
M. Léonard: Quelle est la longueur du transfert? Combien
de temps ça prend? Cinq ans?
M. DesRosiers: Je ne pourrais pas vous répondre.
M. Léonard: À peu près.
M. DesRosiers: Ça dépend des municipalités.
Il y a des municipalités où ça va se faire très
rapidement, où ça va se faire pratiquement de façon
immédiate. Dans d'autres cas, ça va se faire sur une plus longue
période, parce qu'il y a quand même plus de ressources.
M. Léonard: Est-ce que vous avez établi des
relations entre la stabilisation d'une population dans un milieu urbain
quelconque et la rapidité de la croissance des municipalités ou
des villes autour?
M. DesRosiers: Non, je n'ai pas fait d'analyse spécifique
sur ce point-là.
M. Léonard: Ah! Vous n'avez pas établi de
corrélation...
M. DesRosiers: Pas dans le cadre du mémoire que je vous
présente ce soir.
M. Léonard: Non, non. Je comprends. Je comprends, mais
c'est un fait que, si on augmente le taux de la taxe, dans la mesure où
ça s'en va sur le foncier global, dans le centre d'une
agglomération, c'est évident que ça va
accélérer, je pense. Il doit y avoir des relations quelconques en
termes de temps.
M. DesRosiers: C'est ça. Voyez-vous, il y a en fait une
indication qui peut être considérée, je pense, comme
relativement valable. Il y a un article qui est cité, ici, du journal
Les Affaires qui a paru...
NI. Léonard: Oui, j'ai vu.
M. DesRosiers: Vous l'avez lu. Alors, vous avez pu voir qu'en
termes de retombées fiscales sur les taux de taxation
résidentiels, il y a des disparités énormes d'une ville
à l'autre. Ça dépend de la structure du parc immobilier de
la municipalité et ça dépend aussi des dépenses
qu'elles ont à rencontrer.
M. Léonard: Je voudrais... Je sais qu'il me reste
seulement deux minutes, mais vous proposez une solution à la fin, je
pense, à la page 14. Ah oui! La régionalisation
d'activités spécifiques. Si la fusion peut apparaître comme
un objectif à long terme, vous parlez de la régionalisation et,
là, vous mettez dans la régionalisation le développement
industriel, la protection contre les incendies, la sécurité
publique, l'alimentation en eau potable, le transport, le traitement des eaux
usées et des déchets solides, les activités de loisir et
de culture, le transport en commun, les services administratifs. Qu'est-ce qui
reste à la municipalité locale?
M. DesRosiers: Ça ne veut pas dire que ça se fait
tout en même temps. Ça peut être un choix, voyez-vous. C'est
que, évidemment, dans...
M. Léonard: Ah! Eh bien, je... Vous êtes professeur
d'université, vous voyez les choses en perspective. Donc, dix ans de
plus ou de moins, je suppose que vous le voyez.
M. DesRosiers: Non, c'est qu'on peut aller vers l'une ou l'autre
de ces activités-là. ce que veut dire en fait cette
recommandation-là, c'est qu'à défaut d'avoir des fusions
intégrales, on peut viser la banalisation des équipements dans un
secteur en particulier et y aller progressivement.
M. Léonard: Oui, mais ce que vous dites là, c'est
important. Est-ce que vous le faites par des structures administratives ou par
le biais de la fiscalité? Je pense que c'est une question. Comment le
faites-vous?
M. DesRosiers: Je...
M. Léonard: Est-ce que le gouvernement doit dire aux
municipalités qu'elles doivent partager obligatoirement certains
services en commun à répartir sur le fardeau foncier?
M. DesRosiers: Mais les municipalités peuvent
elles-mêmes prendre l'initiative d'aller dans cette
direction-là.
M. Léonard: Ah, Mon Dieu! Un discours sur la bonne
volonté!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Léonard: Ça, c'est long!
M. DesRosiers: Ce sont des avenues. Je le vois comme des
suggestions, des avenues à explorer. Je n'ai pas, ce soir...
M. Léonard: Je le sais bien, mais...
M. DesRosiers: Je ne peux pas vous
apporter de solution toute faite là-dessus, mais ce sont des
avenues à explorer.
M. Léonard: Ça, ça veut dire des moyens
législatifs, mais par le biais de la fiscalité, est-ce que vous
pensez - puisque vous vous êtes penché sur cette question - qu'on
peut trouver des méthodes, des moyens pour inciter les gens à le
faire? Par le biais de la fiscalité?
M. DesRosiers: Oui, je pense que ce sont des choses...
M. Léonard: Foncière ou autre?
La Présidente (Mme Bélanger):... pour
répondre.
M. DesRosiers: Ça pourrait être par le biais du
foncier, mais pas nécessairement par le biais du foncier.
M. Léonard: Oui, je sais, je vois qu'il est très
prudent, là, mais je pense-La Présidente (Mme
Bélanger): Alors, merci beaucoup, malheureusement, le temps est
écoulé.
M. Léonard: Juste, quand même, une remarque.
La Présidente (Mme Bélanger): Ah! On ne peut
pas.
M. Léonard: La tarification, ça, ce n'est pas le
foncier.
M. DesRosiers: Non, la tarification, justement, c'est autre
chose, c'est une autre avenue qui est d'ailleurs à creuser.
La Présidente (Mme Bélanger): Je remercie la
Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, M. Riverin
et M. DesRosiers, pour leur participation. La commission suspend quelques
minutes, le temps de demander à l'Association de l'immeuble du
Québec de bien vouloir s'approcher de la table.
M. Riverin: Merci de votre bonne attention. (Suspension de la
séance à 21 h 21)
(Reprise à 21 h 23)
La Présidente (Mme Bélanger): La commission reprend
ses travaux. J'invite le président, M. François Pigeon, à
bien vouloir présenter la personne qui l'accompagne. On a 45 minutes
pour l'audition, alors vous avez 15 minutes pour présenter votre
mémoire.
Association de l'immeuble du Québec
M. Pigeon (François): Merci, Mme la Présidente.
Alors, je suis accompagné du directeur général de
l'Association de l'immeuble du Québec, M. Serge Cayer, à qui je
cède la parole pour qu'il présente ce qu'est l'Association.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Cayer.
M. Cayer (Serge): Mme la Présidente, madame et messieurs
les députés, l'Association de l'immeuble du Québec est
l'association qui regroupe présentement, sur une base volontaire,
quelque 11 000 des 12 000 détenteurs de permis de courtier et d'agent
d'immeubles dans la province de Québec. Notre présentation de ce
soir sera, évidemment, principalement axée sur l'aspect
marché et l'impact sur le marché pour les propriétaires
fonciers et les aspirants propriétaires fonciers du Québec. Vous
comprendrez que notre présentation de ce soir est également
quelque peu limitée, étant donné le peu de temps qui nous
a été imparti pour nous préparer alors même que la
loi régissant notre activité - la Loi sur le courtage immobilier
- fait présentement l'objet, dans la salle juste en dessous d'ici, de
pourparlers, enfin pas de pourparlers, mais d'une étude article par
article.
Alors, sans plus tarder, j'aimerais passer la parole, si vous le
permettez, Mme la Présidente, à notre président pour qu'il
fasse l'exposé principal.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Pigeon.
M. Pigeon: Mme la Présidente, les membres de l'Association
de l'immeuble du Québec s'inquiètent fortement de l'impact
qu'aura la réforme de la fiscalité municipale sur
l'efficacité du marché immobilier. Nous croyons que les
changements qui sont proposés par le gouvernement
québécois affecteront considérablement, dans de nombreux
marchés, la capacité des ménages québécois
à accéder à la propriété et au logement.
Depuis environ quatre ans, les municipalités sont tenues
d'évaluer les immeubles sur leur territoire à leur juste valeur
marchande, ce qui, de toute évidence, a porté les taxes
foncières à la hausse. Plus récemment, le gouvernement du
Québec éliminait certaines subventions aux commissions scolaires.
Par réaction, ces dernières ont augmenté les taxes
scolaires qui ont triplé dans certains cas. Ces seuls changements ont
déjà taxé lourdement la capacité de bien des
ménages d'accéder à la propriété ou encore
de se loger à des conditions adéquates.
L'Association croit que l'abolition ou la modification de certaines
subventions, de certains transferts ou avantages fiscaux aux
municipalités ainsi que l'octroi de nouveaux pouvoirs de
taxation à celles-ci taxeront encore davantage la capacité
des ménages québécois d'accéder à la
propriété et de se loger adéquatement.
Parmi les mesures qui inquiètent particulièrement
l'Association, il y a la possibilité que les municipalités
puissent majorer la taxe de mutation qui passerait de 0, 5 % de la valeur du
prix inférieur à 50 000 $ à 1 % de la valeur
additionnelle. La possibilité d'une taxe foncière
particulière imposée au secteur non résidentiel et
l'établissement d'une taxe d'affaires dorénavant basée sur
la valeur foncière imposée au propriétaire plutôt
que sur la valeur locative imposable au locataire sont d'autres mesures qui
auront des effets pervers sur le secteur de l'immobilier
résidentiel.
L'Association est d'avis que l'abolition du taux de la taxation uniforme
pour les secteurs résidentiel, industriel et commercial pourrait
entraîner une raréfaction des terrains destinés au
développement résidentiel, entraînant une augmentation
importante des coûts. De plus, les municipalités pourraient avoir
encore davantage tendance à transférer une partie du coût
d'aménagement des infrastructures résidentielles au promoteur,
freinant encore davantage le développement résidentiel au profit
du développement commercial et industriel.
Tous les ménages québécois ont été
touchés et le seront encore plus. Pour les premiers acheteurs, ces
charges additionnelles auront pour effet de les inciter à reporter leur
décision d'achat. Ces mesures pourront aussi avoir pour effet de freiner
le développement d'habitations répondant aux besoins des
personnes à la retraite et des personnes âgées, alors que,
dans ce secteur, l'offre est insuffisante et que la demande ira en
s'accroissant.
Pour plusieurs ménages qui sont propriétaires depuis peu,
cette réforme de la fiscalité pourrait même les forcer
à remettre en cause leur situation de propriétaires. Le nombre de
ménages ayant de la difficulté à se loger augmentera, il
en ira de même de la demande de logements sociaux dont l'offre, là
encore, est grandement insuffisante. Ces mesures annuleront les effets positifs
des programmes d'accès à la propriété mis de
l'avant par le gouvernement au cours des dernières années et
annuleront ou retarderont les effets positifs sur le marché et
l'accès à la propriété et au logement que
provoquent la stagnation des prix et la baisse des taux
d'intérêt.
Même le tout dernier programme Mon taux, mon toit a pour effet
d'annuler les ajustements qui surviennent actuellement dans le marché.
Nous croyons qu'il a même pour effet d'accroître la valeur des
propriétés qui seront construites, comparativement aux
propriétés identiques qui ont été construites
quelques mois auparavant. Nous comprenons que ce dernier programme a
été conçu pour relancer l'activité dans le domaine
de la construction, oui est censé être un secteur clé.
Malheureusement, les effets positifs de ce programme sur le marché
seront minimes, d'autant que l'offre, tant au niveau de l'habitation neuve que
dans l'habitation existante, dépasse déjà largement la
demande.
L'Association est d'avis qu'un programme d'accès à la
propriété, qu'elle soit neuve ou existante, ainsi qu'un programme
élargi d'aide à la rénovation auront un effet beaucoup
plus positif non seulement sur l'industrie de la construction, mais aussi sur
le marché en général et la capacité des
ménages d'accéder à la propriété et au
logement. De tels programmes permettraient un rajeunissement du parc de
logements, particulièrement à Montréal, et stimuleraient
vigoureusement le marché de la revente qui, bien qu'en apparence plus
effacé que celui de la construction, est beaucoup plus important du
point de vue des liquidités impliquées.
L'Association comprend que les changements fiscaux qui sont
apportés sont positifs et qu'ils sont devenus nécessaires pour
assurer une meilleure gestion des dépenses publiques. La
décentralisation de ces transferts fiscaux aux municipalités
permettra aux contribuables d'intervenir plus directement dans les
décisions et projets mis de l'avant par les élus locaux. À
notre avis, il s'agit là d'une approche extrêmement positive. Le
croisement des fonctions et responsabilités des appareils administratifs
sera diminué et il en sera de même des dépenses publiques.
Si celles-ci diminuent, les taux d'imposition pourront s'en trouver
allégés, favorisant un accroissement du revenu disponible et
stimulant ainsi l'activité économique en
général.
Ce que nous demandons cependant, c'est que cette réforme de
fiscalité soit appuyée par des programmes soutenus d'accès
à la propriété visant à la fois la construction, la
rénovation de logements existants, ou encore le financement, de
façon à freiner l'impact négatif qu'elle aura sur le
marché.
Maintenant j'aimerais parler plus particulièrement de la taxe sur
les mutations qui va être augmentée, en mentionnant que dans un
premier temps il faut comprendre que cette taxe-là devient obligatoire.
On souligne que cette taxe-là, pour nous, c'est une double taxation
parce qu'on paie la taxe de mutation avec de l'argent qui est
déjà taxé. C'est une taxe sur le capital, ce qui est un
peu inhabituel. On dit toujours que les résidences ne sont pas
taxées; dans le cas présent on met une taxe sur le capital, non
seulement sur le capital, mais sur le capital que les gens n'ont pas. Vous
savez que normalement une propriété de 100 000 $ comporte une
hypothèque de 75 000 $. C'est donc dire que quand on taxe 750 $ sur le
premier 100 000 $, que la personne a investi 25 000 $, c'est bien 3 % de son
capital qui part à l'achat. Et ça on croit que c'est
épouvantable.
C'est une taxe sur un capital non réalisé.
L'acheteur de la propriété paie la taxe à un moment
où il fait une dépense, pas à un moment où il fait
un profit ou quelque chose comme ça. On a tendance à croire, oui
mais il y en a un qui vend, celui qui vend c'est une chose, mais c'est celui
qui achète qui paie.
C'est une assiette fiscale non indexée; 50 000 $, il y a 12 ans.
Veux-tu dire quelque chose sur ça, Serge. Je pense que mon
collègue aimerait dire quelque chose sur ce montant-là.
M. Cayer: Une simple expérience personnelle, lorsque la
taxe sur les mutations immobilières est arrivée au début,
au milieu des années 1970, on disait 3/10 de 1 % de 50 000 $, et puis
l'excédent 1 %, c'était énorme évidemment. Qui
pensait à une propriété de 50 000 $ et plus? Bien je peux
vous faire part d'une expérience; il y a environ 12 ans, j'ai
acheté une propriété pour la première fois, et
évidemment ça coûtait 42 000 $. Il y a quelques
années on l'a vendue, la propriété en question
était rendue à 90 000 $. Pour en acheter une autre à peine
plus grande, mais tout simplement dans un autre secteur, parce qu'on avait
déménagé par suite d'une mutation, l'immeuble en question,
aujourd'hui, vaut 175 000 $. Bien on se retrouve donc avec une taxe qui, au fil
des années... on dit: Ah oui, mais c'est juste sur la portion
excédentaire, c'est juste sur un prix qui va taxer les plus riches.
Mais on aimerait soumettre ici que les plus riches d'aujourd'hui et les
plus riches de demain ne sont pas nécessairement les mêmes. Et on
parle donc d'imposer une taxe sur la propriété normale, la plus
courante, par exemple à Montréal qui se vend 110 000 $
aujourd'hui, dans 5 ans, dans 10 ans, on ne parlera plus de 100 000 $, de 120
000 $, on va parler plutôt de 250 000 $ et de 300 000 $. Or, on parle
d'une taxe dont l'assiette fiscale n'est pas du tout indexée et à
notre connaissance on n'a pas l'intention de l'indexer.
M. Pigeon: On mentionne également un frein à
l'accession à la propriété. Je vous mentionnais
tantôt une propriété de 100 000 $, 25 000 $ de comptant,
mais aujourd'hui on ajoute 7 % de TPS, on va ajouter 8 % de TVQ, 3 % de taxe de
mutation, comment ça va se financer tout ça? C'est certainement
un problème.
C'est un frein à la mobilité. On sait que les gens qui
sont appelés à changer d'emploi et à changer de ville
ça n'est pas nécessairement par goût, mais est-ce qu'ils
vont vouloir encore le faire? Les frais vont être trop importants. On ne
comprend pas pourquoi celui qui perd son emploi et qui est obligé de
vendre sa maison, d'en acheter une autre devrait payer. On ne comprend pas non
plus pour celui qui pour des raisons... on est à Québec ici,
voudrait passer de Charlesbourg à Sainte-Foy pour se rapprocher de
l'université, devrait être taxé pour ça, alors que
c'est pour faire étudier ses enfants.
On croit que c'est une taxe discriminatoire en raison des changements
familiaux. Notre clientèle dans le résidentiel, pour une bonne
partie, ce sont des gens qui ont des problèmes familiaux. Ils ont
vécu dans une maison, ils se séparent, ils vendent la maison et
ils en rachètent chacun une, on a toujours dit que le divorce
était une cause de la pauvreté, on vient encore de l'amplifier.
C'est la même chose lorsque les gens ont un enfant, on dit: On va
encourager le troisième enfant, mais souvent au troisième il faut
déménager. On donne d'une main et on reprend de l'autre avant
même de l'avoir donné.
Les gens à la retraite veulent souvent s'acheter un condo, se
rapprocher parce qu'ils ne veulent plus conduire. Ils vendent leur
propriété de banlieue. On veut encore leur en prendre une tranche
alors qu'on dit que ce sont les gens pauvres de la société. On a
de la misère à comprendre ça. Et en plus de ça,
bien, pour les gens riches, c'est une incitation à la "titrisa-tion"
pour contourner parce que le seul moyen de contourner ça, c'est de
vendre des actions, ça commence à se faire. Les
propriétés sont vendues par actions, elles échappent
à la taxe. Vous ne pensez pas que les grandes compagnies qui vont
vouloir vendre un immeuble vont le vendre comme immeuble, ils vont le vendre
par compagnie. Ça va coûter 1000 $ de frais de notaire pour sauver
20 000 $ ou 25 000 $ de frais de taxation. Ça, ce n'est pas permis pour
les gens qui vont divorcer, avoir un enfant ou qui prennent leur retraite.
Ça va avoir un impact sur la construction également. Les
constructeurs, pour contourner, ils vont vendre le terrain puis ils vont faire
un contrat de construction plutôt que de vendre un immeuble bâti
dans le cadre d'un développement. Ce qui n'est pas nécessairement
avantageux pour le consommateur. Et il faut comprendre que,
présentement, on parle d'un impact. Si on va dans la première
tranche qui va jusqu'à 250 000 $, c'est 66, 7 % d'augmentation. On
trouve ça difficile, nous, les gens de l'immobilier de dire à nos
clients: Vous avez juste à payer, ce n'est pas tellement plus. On croit
que c'est beaucoup plus dans les circonstances.
Et pour la taxe foncière en général, on voudrait
quand même mentionner que la taxe foncière, c'est une taxe sur le
capital. On parle de toutes sortes de moyens de relancer l'économie de
la construction puis à chaque fois que quelqu'un veut ajouter un garage,
une verrière ou quelque chose comme ça, on rajoute des taxes et
ça va être encore pire. Alors, les gens disent: Mon projet je ne
le réalise pas. Mais, celui qui ne réalise pas son projet de se
construire un garage, il ne fait pas travailler un entrepreneur. Celui qui ne
bâtit pas une verrière, il ne la fait pas.
Les gens se privent parce que dans la propriété, on taxe
le capital. Et ça, nécessaire-
ment, ça empêche les gens de posséder et on n'est
pas sûrs que la taxe municipale finalement ne devrait pas taxer les
services qu'on utilise parce qu'une maison de 200 000 $, ça ne
coûte pas plus cher à desservir qu'une maison de 400 000 $ mais
celle de 400 000 $ est souvent deux fois plus taxée. Et ça,
ç'a pour effet qu'il y a beaucoup moins de grosses maisons de
bâties et ça empêche notre économie de tourner. On a
de la misère à penser qu'on prend des moyens pour empêcher
l'économie de tourner d'un côté, puis qu'on essaie par
d'autres programmes de la relancer, tel que Mon taux, mon toit.
Je vous remercie en terminant de nous avoir permis de nous exprimer. On
aurait aimé vous présenter un beau mémoire. Mais
seulement, malheureusement, le temps alloué était trop court et,
comme l'a dit mon confrère: Bien, pour quelqu'un qui est
président bénévole d'une association qui est en commission
parlementaire, c'est-à-dire qu'il y a une loi de courtage qui est sur le
tapis, qui passe sa journée là-bas, c'était difficile de
vous fournir des écrits de ça. Mais on est ouverts pour
répondre à vos questions. Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le
ministre.
M. Ryan: Oui, Mme la Présidente. J'ai écouté
avec intérêt les observations qui viennent de nous être
livrées par les porte-parole de l'Association de l'immeuble du
Québec. Vous autres, c'est des propriétaires d'immeubles que vous
représentez, pas des agents d'immeubles.
M. Pigeon: Non. Nous, on représente des agents
d'immeubles. Nous, on est des intermédiaires de marché. Notre
principal commerce, c'est de prendre une maison à vendre et de trouver
un acheteur.
M. Ryan: Très bien.
M. Pigeon: Dans la maison existante, majoritairement.
M. Ryan: Très bien. Vous avez dit que pour que la
réforme produise des résultats équilibrés, il
faudrait qu'elle soit accompagnée, surtout en raison de certaines
mesures fiscales qui devront en découler, de programmes soutenus
favorisant l'accès à la propriété. Comme vous le
savez, le gouvernement fait beaucoup de travail dans ce secteur-là. Nous
avons le programme AMI. que vous connaissez sûrement qui produit
d'excellents résultats, qui permet l'accès à la
propriété familiale pour un foyer ayant au moins un enfant, qui
fournit une aide financière appréciable pour l'acquisition d'une
unité d'habitation, soit neuve, soit usagée et auquel
s'inscrivent chaque mois de très nombreux ménages. Le programme
devait expirer au mois de mai, le gouvernement l'a prolongé
jusqu'à la fin de l'année et s'il n'en dépend que du
ministre responsable de l'habitation, le gouvernement sera saisi de
recommandations visant à le poursuivre parce que c'est un excellent
programme. Le programme Mon taux, mon toit connaît un départ un
petit peu lent à cause de la situation générale qui
prévalait dans l'économie, mais depuis le mois d'avril, les
inscriptions se sont mises à se multiplier. Aujourd'hui, le programme va
très bien et il est très généralement
apprécié à travers le Québec. Je suis sûr
qu'un organisme que nous entendrons ce soir, l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du Québec, nous en dira du bien. Alors, de
ce côté-là, je souscris à ce que vous avez dit.
C'est important qu'il y ait des programmes de soutien de l'accès
à la propriété.
Vos observations concernant les droits sur les mutations ont
été notées avec attention. Je pense que nous avons
visé à ce que les taux restent concurrentiels par rapport
à ceux qui existent dans la province de l'Ontario, en particulier dans
la région de Toronto. Les taux que nous avons sont à peu
près comparables, légèrement inférieurs
d'après ce que je crois comprendre à ceux qu'on a en Ontario.
Je prends note de vos objections, mais je n'y souscris point. Tout ce
que vous avez dit est vrai, mais c'est parce qu'il y a d'autres
éléments qu'on peut ajouter également. Je ne veux pas
faire tout ce plaidoyer-là parce que nous n'avons pas beaucoup de temps,
mais en tout cas, je vous assure que j'ai bien noté ça.
Je voudrais vous poser une question. Je n'ai pas compris clairement
votre position concernant l'éventuelle surtaxe sur l'immobilier non
résidentiel. Est-ce que vous avez émis une opinion
là-dessus dans votre présentation, M. Pigeon?
M. Pigeon: Oui, on a émis nécessairement que le
fait d'avoir deux taux de taxation, ça pourrait inciter une
municipalité à faciliter un changement de zonage pour le mettre
commercial plutôt que résidentiel. Alors, on croit que ça
peut nuire au développement résidentiel parce que les
administrateurs municipaux sont face à des budgets comprimés,
d'accord. On met un incitatif au développement commercial, à le
rendre prioritaire sur le développement résidentiel dans
certaines régions. Et on voit un danger de ce
côté-là.
M. Ryan: Oui. Le danger n'est pas trop grand parce que la
tendance n'est pas à l'expansion commerciale beaucoup, ces
années-ci quand même à travers le Québec.
M. Pigeon: M. Ryan, ça dépend des secteurs. Il y a
des endroits où on voudrait conserver des secteurs résidentiels.
Vous savez qu'un secteur commercial, ça s'étend, ça
s'étend. Ça n'a pas de limite. On ne sait pas comment faire
pour le freiner. Or, dans certains endroits, ce n'est pas un
problème général, mais dans certains endroits, la
tentation va être là pour la municipalité de favoriser ce
qui est le plus payant, pour taxer moins le monde et ça, au
détriment d'habitations résidentielles.
M. Ryan: Maintenant, je vous rappellerai seulement que la
dimension véritable de l'entreprise que définit le projet de loi
145, reste relativement modérée, tout compte fait. J'ai fait des
calculs ces jours derniers, de nouveaux calculs, parce que nous en avons fait
continuellement depuis quelques mois. Grosso modo, l'impact de la
réforme à travers le Québec, à supposer qu'on
l'applique entièrement sur le foncier général, ça
représenterait une moyenne de 0,10 $ par 100 $ d'évaluation
à travers tout le Québec.
Évidemment, si on répartit cet impact entre le
résidentiel et le non-résidentiel, suivant des proportions
variables qui seront laissées au jugement de chaque municipalité,
on arrive à un impact qui n'a rien de catastrophique, qui n'a rien
même d'excessif et qui doit être accepté, à mon avis,
si nous voulons que tous ces discours que nous nous servons continuellement au
sujet de la nécessaire discipline qui doit exister dans les finances
publiques et de l'indispensable redressement qui doit être entrepris, si
nous voulons que ces discours-là aient du sens, il va bien falloir que
ça se traduise par des mesures concrètes. (21 h 45)
Et le gouvernement a estimé, après avoir regardé
l'ensemble du champ de la fiscalité, qu'il existait de ce
côté un espace relatif; pas illimité, c'est sûr, mais
un espace relatif qui pouvait être utilisé sans danger, pour le
développement économique. On a étayé cette option
que le gouvernement a retenue sur de nombreuses données statistiques et
économiques qui ont été mises à la disposition de
tous les intervenants par le ministère des Finances. Je crois que si on
en reste à ces limites... Évidemment, si une municipalité
allait dire: Là, on augmente de tant l'année prochaine et de
tant, ça c'est la faute des gens à Québec - je ne nommerai
pas le responsable en particulier - des gens à Québec: le
député de Rimouski, le député de Montmagny-L'Islet,
etc., pas le ministre des Affaires municipales.
À ce moment-là, ça serait injuste. Il y en a qui se
préparent déjà à faire ça. Il y en a qui ont
augmenté... Il y a un maire qui est passé ici pas plus tard que
ces jours derniers; il est venu nous affirmer que, dans sa ville, c'avait
augmenté de 5 % depuis un certain nombre d'années. On regarde les
4, 5 dernières années, c'est 10 % par année et on va dire:
Ça, c'est tout la faute de Québec. Ce n'est pas vrai.
Encore une fois, je vous le dis, l'impact exact de la réforme
demeure, tout compte fait, limité, mais toutes les observations que vous
nous avez faites, nous les prenons en bonne part. Étant donné le
rôle névralgique que vous jouez à titre d'agents
intermédiaires, soyez assurés que nous pensons à votre
travail. La ministre responsable des Institutions financières nous le
signale souvent; elle veut renforcer l'encadrement professionnel de votre
profession pour que vous soyez mieux en mesure d'accomplir un travail de haute
qualité professionnelle. Soyez assuré que nous
considérerons avec beaucoup d'attention le point de vue que vous nous
avez communiqué et, s'il y avait d'autres effets que vous n'auriez pas
mentionné ce soir et que vous voudriez porter à notre attention,
nous serons disposés à les accueillir en tout temps. Merci
beaucoup.
M. Pigeon: Merci, M. le ministre.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Oui. J'avais... Le 0,10 $, on commençait
à l'oublier quelque peu, mais comme le ministre en parle, on est bien
obligé d'en parler aussi. Le 0,10 $ d'augmentation dont on parle, c'est
une moyenne provinciale. C'est évident que ce n'est pas beaucoup, mais
il faut additionner ça aux 0,13 $ de l'an passé. Puis il y a 150
000 000 $ qui n'ont pas été distribués, qui vont
être pris ailleurs; ça fait 0,29 $ sur deux ans. C'est
évident que sur les 5 % de taxes de l'an passé, il me semble que
c'est entré aussi en ligne de compte, la taxe scolaire. C'est 3 300 000
000 $ dans les deux dernières années de taxation nouvelle sur le
dos des contribuables québécois. Il ne faut pas faire le jeu du
ministre des Affaires municipales qui essaie de nous convaincre parce que, au
moment où on se parle, vous n'avez pas existé; vous existez
à partir de ce soir parce que, ce soir, c'est 0,10 $ qu'on vous impose.
Si vous payez 0,00 $ ou bien 0,10 $, vous allez applaudir et vous allez dire:
Je n'aime pas ça, mais je vais le donner pareil, et moi, je ne vous
blâmerai pas. Je vais trouver que ça s'inscrit dans un cadre
normal.
Mais ce n'est pas ça, la bataille. La bataille, les gens sont
venus nous dire que ce n'est pas fini; il y a des iniquités et il y a
des inégalités, puis il y a un fouillis. Le ministre nous annonce
qu'il va y avoir un paquet de papillons qui vont amender la loi. Il a de bonnes
propositions; il saute sur toutes les propositions que les gens sont venus nous
porter et ça a bien du bon sens; moi, je ne sais pas comment on va les
traduire. Puis il semble que, demain après-midi, on va commencer
à étudier article par article. La commission parlementaire n'est
pas finie et on est prêt à continuer. Il semblerait - ce n'est pas
officiel - mais si on commence cet après-midi, comment on va traduire
ça dans la législation? Ça ne tombe pas du ciel. Les
chiffres qu'il a, il les garde pour lui. L'Opposi-
tion n'y a pas accès. C'est comme la bourse. Ça varie
d'une journée à l'autre, d'une heure à l'autre. Nous
autres, on attend qu'il nous donne ça goutte à goutte. Il y a le
supplice - mais disons que, moi, je n'en souffre pas - de la goutte d'eau. Le
ministre a le supplice de la goutte d'information. La minute de
l'information.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dufour: C'est curieux, mais on vit ça avec lui depuis
trois ans. On apprend à le connaître. Tout le monde dit qu'il a
une rigueur extraordinaire. Mais là, j'aimerais que... On a
essayé de lui donner un peu de pâture et de l'aider. On essaie de
l'aider pour qu'il soit un bon ministre parce que, là, il va passer pour
un mauvais ministre parce qu'il ne défend pas les contribuables et il ne
défend pas les municipalités; il défend son gouvernement
et il défend ses propositions. Je pense qu'il ne faut pas être
dupe de ça. Il faut le voir comme il est.
On ne parle plus de réforme là, on parle de propositions,
et on ne parle pas de principe; des principes, il n'y en a pas. Le principe qui
sous-tend tout ça, c'est le transfert de... C'est un manque de caisse ou
un court de caisse du gouvernement du Québec qui est pelleté
ailleurs. Ne nous faisons pas d'illusions; on va appeler un chat, un chat.
Mordu par un chien ou une chienne, c'est mordu pareil. Moi, ça ne me
dérange pas du tout. Je n'ai pas peur de voir ce qui se passe par
rapport à ça.
On ne posera pas beaucoup de questions, mais vous me dites... On vous a
écouté parce que ça devient un peu plus difficile, parce
que vous aviez beaucoup de matière, mais juste l'entendre, ce n'est pas
comme le lire et l'entendre. Je veux tout de même vous remercier de votre
présentation au départ, et je voudrais vous poser une question,
à savoir que vous dites que, depuis quatre ans, les municipalités
ont commencé à évaluer les propriétés a leur
juste valeur marchande.
Une voix: Oui.
M. Dufour: Est-ce que c'est tout l'ensemble des
municipalités du Québec ou si c'est juste des cas
particuliers?
M. Pigeon: À ma connaissance, les rôles
d'évaluation, dans la grande majorité des municipalités,
ont été refaits et, dans les municipalités comme
Québec ou Montréal, dans les grands centres, dans les
municipalités... Remarquez une chose, c'est que le milieu de
l'immobilier est beaucoup plus actif en milieu urbain et, dans les milieux
urbains, les propriétés ont été
réévaluées. Mais, quand je parle de grands centres, je ne
voudrais pas limiter ça à Québec ou Montréal. Vous
allez aller à Chicoutimi, Trois-Rivières, ça
été fait. Maintenant, il peut y avoir des petites
municipalités où ça n'a pas été fait, mais
il faut comprendre que le courtier en immeubles et l'agent d'immeubles sont
beaucoup plus actifs dans les grandes municipalités.
M. Dufour: Vous exercez votre profession surtout dans la
région de Montréal, j'imagine.
M. Pigeon: Moi, à Québec.
M. Dufour: À Québec...
M. Pigeon: Mais seulement, il y a...
M. Dufour: Montréal, ça va. Parce que je sais que,
dans la région de Montréal, la région de Québec,
les grands centres, ils ont de la difficulté à accepter de
s'ajuster à l'heure de la réforme sur la fiscalité au
point de vue de l'évaluation. C'est une obligation, mais il y a eu des
extensions et, ça, ça a amené un certain nombre de
problèmes, ce qui fait, par exemple, que l'étalement des
augmentations, ça a été demandé encore par des
grands centres, et on l'a appliqué à tout le monde. Vous savez
que, dans ce projet de loi, qui est une loi fourre-tout, on va accepter un
choix. On va donner un choix. Les municipalités vont appliquer ou pas;
l'étalement d'augmentation trop brusque de hausse de taxes, soit en
montant soit à la baisse, ça va se faire. Ce qui me fait dire
qu'on était supposé légiférer moins et mieux; moi,
je dis: On légifère moins et mal. C'est ça, parce qu'on
n'a pas la pratique trop trop et quand on le fait, on ne le fait pas bien,
ça fait que c'est à la dernière minute et, moi, je le
sais. La loi sur la fiscalité, vous savez ce que ça veut dire: 90
articles, 89 amendements. Ça, ce n'était pas le record... Si
c'est une moyenne, en tout cas, c'est une moyenne un petit peu
exagérée, mais j'ai vécu ça, le face à face
avec le ministre des Affaires municipales... pas celui-là, mais un autre
que je ne nommerai pas. Vous avez parlé.. Les transferts
vis-à-vis des municipalités - je ne sais pas si j'ai bien compris
- pourraient - vous pouvez me remettre à l'ordre ou à l'heure...
Est-ce que j'ai bien compris que vous avez dit que ça serait positif
pour les municipalités, ces transferts de taxes?
M. Pigeon: Nous autres, on a dit: En autant qu'il y aura les
réductions d'impôt appropriées, le fait que les
municipalités gèrent leur territoire pleinement, on n'est pas
contre le principe en général, d'accord. Que les
municipalités assument leurs dépenses et leurs
responsabilités, ça rend ça plus proche des citoyens et
c'est en autant qu'il y a la compensation.
M. Dufour: Oui, je comprends, c'est évident et c'est
l'argumentation des municipalités. Si on a des transferts de sommes
correspondantes, il n'y a pas d'objection à l'administrer. C'est
parce
que j'avais cru comprendre que ça pourrait être
géré mieux et là, je ne comprenais pas parce qu'il n'y a
pas d'augmentation de services dans ce transfert-là. C'est exactement un
pelletage, purement et simplement, parce que le fait qu'on remette la
sûreté à des petites municipalités, ça
n'améliore pas le service; d'ailleurs, il y a eu des
démonstrations évidentes.
M. Pigeon: et si on comprend bien, il y a certaines
municipalités qui vont avoir des choix à faire, qui vont avoir le
choix de donner des services ou d'acheter des services.
M. Dufour: Mais les petites municipalités, même si
elles achètent des services de la Sûreté du Québec,
vous savez bien que ça ne va rien leur donner de plus. Je vais vous
donner l'exemple de Natashquan qui me semble un exemple farfelu. Natashquan,
vous savez, c'est où?
M. Pigeon: Oui.
M. Dufour: Bon. La mère de Gilles Vigneault va fêter
son 100e anniversaire. Quand ils en ont besoin, ils vont payer à partir
de maintenant pour le service policier. Quand ils font une plainte contre du
vandalisme, ça prend deux mois avant de voir la police. Pensez-vous que
le fait qu'ils vont payer le service, ça va leur en donner plus?
Pensez-vous qu'à la place où ils sont là, il peut y avoir
des hold-up très souvent? Il y a à peu près 300, 400
habitants, et ils se connaissent tous par leur nom.
Une voix: C'est une police d'assurance.
M. Dufour: Bon, c'est une police d'assurance au cas où...
Mais tout ça pour vous dire que ça ne donne pas
nécessairement d'augmentation de services. J'avais de la
difficulté à vous suivre, mais là, je comprends bien et Je
vous remercie de le préciser parce que, pour moi, c'est évident
que plus on va rapprocher les services des citoyens, plus les gens vont avoir
quelque chose à dire. Mais là, je ne peux pas faire cette
gymnastique-là parce qu'au point de vue de la Sûreté du
Québec, même si les municipalités paient, pensez-vous que
les municipalités vont pouvoir diriger la police?
M. Pigeon: Certaines municipalités vont pouvoir choisir de
se doter d'un corps de police.
M. Dufour: C'est vrai. Donc... Quand vous dites que les taux des
programmes d'accès à la propriété, toutes les
avalanches de taxes dans les dernières années ont eu un effet
démotivant par rapport à l'accès à la
propriété, je vous rejoins un peu parce que j'avais dit à
un moment donné que toutes ces taxes-là avaient pour effet, dans
le fond, d'enlever aux jeunes Québécois et
Québécoises même le droit de rêver d'avoir leur
propre maison. Vous donnez un certain nombre de pistes pour dire: II faut
soutenir, et tout ça, et vous l'enlevez d'une main. Avez-vous une ou des
suggestions qui pourraient peut-être nous orienter plus encore pour...
Comment verriez-vous ça, vous, avec votre expérience?
M. Pigeon: Disons que, quand on parle de programmes d'aide
à l'accès, l'une des choses qu'on pourrait avoir dans un premier
temps, c'est que quelqu'un paie une taxe de mutation dans sa vie, dans cinq ans
ou dans dix ans, ça peut avoir de l'allure. Mais les gens qui sont
victimes de ce qu'on a donné, qui en paient à tous les ans parce
qu'il se fait du roulement et qu'on veut empêcher le roulement, on croit
que c'est injuste de les taxer chaque fois. Il y a des gens qui vont être
beaucoup plus taxés que d'autres. Quand on parle de programmes d'aide,
une façon d'aider, ce serait de moins taxer. Et, plus vous mettez la
taxe municipale élevée, bien, nécessairement, plus c'est
difficile d'avoir accès à la propriété.
Alors, il faut comprendre que, nécessairement, c'est difficile
pour nous autres de dire: Bien, il faudrait taxer moins. Ça, c'est
facile. Il y a quand même des besoins, mais seulement les gens ont besoin
de se loger et la question qu'on se pose, c'est est-ce que la solution c'est de
faire des maisons, des HLM ou des maisons pour personnes âgées
subventionnées plutôt que de permettre aux gens d'avoir leur
propre résidence et de prendre l'argent qu'on met sur les programmes
pour les HLM et les personnes âgées, de laisser cet
argent-là en circulation? Parce que, en bout de ligne, on ne sauve rien.
Si on ne fait pas en sorte que les . gens acceptent facilement un logement,
l'État est obligé de revenir à l'autre bout. Alors, on se
dit: il y a une espèce d'illogisme. Il y a un chien qui court
après sa queue dans ça. Maintenant... Oui, Serge?
M. Cayer: Si vous permettez, un des problèmes qu'on
perçoit avec la taxe sur les mutations c'est l'absence de
corrélation entre cette taxe-là et le service qui est
sensé être fourni en retour. On peut comprendre qu'une
propriété, à la limite, puisse être taxée en
fonction de sa valeur et non en fonction du coût de lui fournir des
services. Ça devient foncièrement une façon de taxer la
richesse des gens, supposément. Mais il ne faut pas oublier que c'est
une richesse qui n'est pas encore réalisée. Avec l'immeuble que
j'ai acheté à 42 000 $ et qui en vaut 180 000 $ aujourd'hui, je
n'ai pas 180 000 $ dans mes poches. Je suis toujours... Je vais peut-être
l'avoir la journée où... Je vais sûrement l'avoir,
même, la journée où je vais le vendre, mais il n'y a
toujours pas de corrélation entre cette taxe de mutation et les
services.
À l'époque, lorsque le ministre, si je me souviens bien,
c'était M. Garneau, avait présenté cette taxe sur les
mutations, ça avait d'abord et
avant tout comme but de financer les coûts qu'encouraient les
municipalités lorsqu'on changeait de propriétaire. C'était
pour changer dans les registres le nom du propriétaire. On
s'était élevé contre le fait que, oui, mais si c'est le
cas, pourquoi est-ce qu'on augmente le taux aussitôt qu'on dépasse
les 100 000 $? C'était effectivement une taxe sur la richesse. Mais
aujourd'hui encore, la question d'origine doit se poser. Pourquoi exactement
est-ce qu'on est en train de taxer une mutation pour financer des services
courants d'une municipalité, de quelque nature que ce soit? Le principe
fondamental manque absolument, ici.
M. Dufour: Combien une personne ou combien de fois une
propriété... Combien de temps un propriétaire garde-t-il
sa maison?
M. Cayer: Une propriété roule... En principe,
d'après l'ensemble du marché, notre participation du
marché, on a déterminé, au fil des années,
qu'à toutes les cinq années environ, en moyenne, une
propriété va changer de propriétaire.
M. Dufour: C'est des statistiques ça? M. Pigeon:
Oui. M. Cayer: Oui.
M. Dufour: Si vous vous opposez ou, en tout cas, vous avez
beaucoup de choses à dire concernant l'imposition de la mutation
immobilière, comment considérez-vous les taxes sur les gens qui
bâtissent pour la première fois? Ça rentre comment, dans
votre cheminement? Les gens qui commencent, ils paient leurs taxes, la TVQ, la
TPS sur leur propriété au départ. Il y a un coût.
Comment faites-vous la relation?
M. Cayer: C'est évidemment la taxe, pardessus la taxe,
par-dessus la taxe. Il faut bien réaliser ici que les gens qui
achètent une propriété, et surtout si on considère
depuis un an, bien, on a la taxe de vente fédérale, la TPS qui,
somme toute, est à peu près équivalente à ce que
c'était auparavant, semble-t-il, sur l'achat d'une
propriété sauf lorsqu'on rajoute les rénovations qui sont
faites au fil des années. On paie la TPS par-dessus ça. La TVQ
par-dessus. Lors de l'achat, il y a tous les services connexes, les services
professionnels des gens qui sont impliqués dans la transaction. Par
exemple, on achète une propriété. On a besoin d'un
arpenteur-géomètre. On a besoin d'un notaire. On a besoin d'un
agent immobilier. Ce sont tous des services qui n'étaient pas
taxés auparavant. Ils le sont maintenant au niveau de la TPS. À
compter de janvier prochain, ils vont l'être au niveau de la TVQ et on
rajoute une autre augmentation sur la taxe sur les mutations.
Mais, il ne faut pas oublier que les gens qui achètent ont un
capital restreint. Quand un premier acheteur arrive pour acheter une
propriété de 100 000 $, typiquement, ils vont arriver avec 10 000
$, 15 000 $, mais le problème c'est qu'avec toutes ces taxes qui
s'appliquent toujours sur l'ensemble du montant, bien, ils s'en viennent tout
de suite gruger les 10 000 $, 15 000 $ de capital. Ces gens doivent les
financer, ces montants-là. L'argent ne pousse toujours pas dans les
arbres pour eux. Alors, on se trouve à avoir taxe, par-dessus taxe,
par-dessus taxe et le problème c'est: Est-ce qu'il y a
véritablement une corrélation, toujours, entre le fait de payer
une taxe spécifique et les services qui sont payés par elle? (22
heures)
M. Dufour: Là, j'avais presque envie de vous poser la
question: Qu'est-ce que vous proposeriez comme alternative? Puis vous semblez
me dire: Tarification des services. Mais là, il y a peut-être
d'autres sortes de problèmes parce que...
M. Cayer: Une sérieuse remise en question, M. le
député de Jonquière, sur les services qui sont offerts.
C'est pourquoi, jusqu'à un certain point, on est favorable au principe
mis de l'avant par les réformes en question, c'est-à-dire le
transfert au palier le plus près des dépenses du pouvoir de
taxation et de le financer. C'est toujours simple pour quelqu'un de dire:
Écoutez, je veux m'acheter ci, je veux m'acheter ça et je vais
aller chercher l'argent ailleurs. Face à mes électeurs, c'est
bien facile. Si je regarde, par exemple, à LaSalle, la ville de LaSalle
recherche des sommes... Pardon?
M. Dufour: Ce serait un beau débat.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le
député de Rimouski. Il reste encore huit minutes pour le
côté ministériel. M. le député de
Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Je voulais revenir sur l'autre...
La Présidente (Mme Bélanger): Ah! c'est sur
l'autre. Alors merci, MM. Pigeon et Cayer, de l'Association de l'immeuble du
Québec.
M. Pigeon: Merci, Mme la Présidente. M. Cayer:
Merci, madame.
La Présidente (Mme Bélanger): On vous remercie de
votre participation. Alors, je demanderais à l'Association provinciale
des constructeurs d'habitations du Québec de bien vouloir prendre place
à la table.
S'il vous plaît! Alors, je suppose... M. LaSalle, président
de l'Association provinciale des
constructeurs?
M. LaSalle (Richard): Oui, madame.
La Présidente
(Mme Bélanger): alors, si vous
voulez bien présenter les personnes qui vous accompagnent. vous avez 15
minutes pour faire votre exposé.
Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec
M. LaSalle: M. Rousseau, notre vice-président
exécutif, va vous présenter les membres de l'Association.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M.
Rousseau.
M. Rousseau (Orner): Mme la Présidente, M. le ministre des
Affaires municipales, surtout responsable de l'habitation, mesdames et
messieurs de ladite commission. Alors, mon nom est Orner Rousseau, je suis
vice-président exécutif de l'Association provinciale. Pour
débuter, je me permettrais de présenter la table, en
procédant peut-être par mon extrême droite.
Évidemment, ils sont tous placés à droite. Alors, M. Serge
Crochetière, qui est conseiller juridique, M. François Bernier,
économiste. Évidemment, M. Richard LaSalle, qui est
président de l'APCHQ et, tout près de moi, M. Hugues Moisan, qui
est également économiste. Évidemment, je n'aurai pas
à intervenir beaucoup dans le débat puisque, effectivement, il
s'agit de technicalités et ce sont surtout les économistes qui
auront à intervenir.
Dans un premier temps, le président interviendra pour tenter,
effectivement, de situer un peu le dossier et, par la suite, il sera suivi
d'une présentation, qui se veut une présentation en
résumé par M. François Bernier. N'ayez crainte, on ne vous
fera pas une lecture de ça. De toute façon, on sait que vous
êtes très avare de votre temps. Alors, nous allons faire un bref
résumé et nous allons tenter de rentrer dans les 25 minutes que
vous allez nous accorder, Mme la Présidente.
Simplement un mot avant de commencer pour vous dire que l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations, c'est une association qui
représente 10 000 entreprises dans le secteur de la construction
résidentielle, spécialement. Donc, nous sommes la seule
association qui représente vraiment le secteur de l'habitation puisque
80 % à 90 % de tous les travaux sont exécutés par nos
membres. Évidemment, nous sommes une association professionnelle et
aussi une association de services et nous sommes surtout remarqués par
les programmes de garantie que nous avons instaurés, tant au niveau des
garanties de maisons neuves que des garanties-rénovation et,
également, nous avons fait, je pense, des preuves dans le domaine
technique, des expositions, de même que l'ensemble de la consultation,
c'est-à-dire pour les consommateurs qui sont aux prises avec des
problèmes dans l'industrie de la construction.
Alors, sur ce, je demanderais tout simplement à M. LaSalle
d'introduire ou de situer un peu le sujet dans son débat global.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M.
LaSalle.
M. LaSalle: Alors, Mme la Présidente, M. le ministre,
membres de la commission, permettez-nous un avant-propos que nous croyons
nécessaire. Le projet de loi 145 s'inscrit dans un contexte
économique détérioré où il est très
difficile de trouver des éléments positifs pouvant nous permettre
d'anticiper des jours meilleurs. L'économie est en mauvais état
et la reprise annoncée sera au mieux très graduelle. Cette
incertitude économique s'ajoute à une certaine relative
incertitude constitutionnelle qui a des répercussions évidentes
sur le marché immobilier. De plus, à peine nous sommes-nous
familiarisés avec la TPS fédérale que nous devons nous
préparer à l'introduction d'une TVQ déjà
augmentée à 8 %. Ces deux taxes, très peu
harmonisées, vont probablement ajouter 5 % au prix de vente des
logements neufs de 150 000 $ et moins en 1992; au-dessus de 150 000 $,
l'augmentation sera encore plus forte et la situation est la même dans la
rénovation.
Enfin, pour ajouter à nos difficultés, M. le ministre,
votre collègue, le ministre du Travail, M. Normand Cherry, nous annonce
qu'il part en guerre contre le travail au noir dans l'industrie de la
construction. Avec les 62 recommandations du rapport Picard-Sexton, nous sommes
dans son coffre d'outils: plus de règlements, plus d'inspecteurs,
création d'un fonds de formation des travailleurs pour remplacer,
probablement au même coût, le fameux régime proposé
de stabilisation du revenu des travailleurs. Comment, croyez-vous, M. le
ministre, que notre industrie va pouvoir absorber tout ça? Nous sommes
d'accord pour faire la guerre au marché au noir dans l'industrie, mais
ça ne doit pas être un alibi pour passer les recommandations de la
commission Picard-Sexton. Ce que l'on craint d'ailleurs, c'est que cette guerre
se fasse sur le dos du secteur de l'habitation. Comment penser autrement
lorsqu'on propose d'interdire à l'entrepreneur oeuvrant seul de
travailler quelques fois avec ses outils sur nos chantiers? On cherche à
nous enlever un des seuls modes efficaces de répartition des
activités qu'il nous restait. De plus, M. Cherry veut
réassujettir les travaux de rénovation résidentielle,
alors que ce même gouvernement les a désassujettis, il y a
à peine quelques années, soit en 1988.
M. le ministre, pour répondre efficacement aux besoins
d'accession à la propriété des
ménages québécois, il faut absolument sauvegarder
le pouvoir d'achat des ménages en ne surchargeant pas notre industrie
d'une suite de taxes ou de règlements et de coûts indirects trop
onéreux pour le ménage québécois moyen. En ce sens,
le projet de loi 145 vient ajouter à l'érosion du pouvoir d'achat
des ménages. Outre nos interrogations sur le véritable fondement
de cette réforme, nous craignons particulièrement l'introduction
de taux de taxe foncière différenciés, secteur
résidentiel et non résidentiel, puisqu'ils marquent un pas de
plus vers l'adoption d'un modèle de taxation ontarien dont les
incidences sur l'habitation se sont révélées
désastreuses. en marge de la présentation de notre
mémoire, je vous pose quelques questions, m. le ministre. avec toutes
ces contraintes, quelle chance raisonnable d'accession à la
propriété laissons-nous aux ménages locataires?
pourrons-nous un jour rattraper le taux de propriété de plus de
60 % des autres provinces canadiennes et des états-unis? pourrons-nous
aussi encore prétendre que la société
québécoise favorise ce mode privilégié
d'épargne et de sécurité que constitue la
propriété?
Moi, je vous remercie et, M. le ministre, je laisserai à M.
François Bernier, économiste chez nous, de résumer notre
mémoire et peut-être de fournir les réponses
détaillées à vos questions. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Bernier.
M. Bernier (François): Merci. Eh bien, notre
mémoire, premièrement, pour éviter l'effet de choc, a
quelques pages seulement. Vous allez le consulter. On prend soin, je pense, de
laisser ça en partant. Il est constitué quand même
d'annexes qui sont volumineuses et qui, je l'espère, seront très
utiles à votre réflexion.
Alors, ce qu'on veut signaler, en résumé bref, c'est que
le projet de loi qui est devant nous est quand même quelque chose de
considérable pour notre industrie. On réalise très bien
qu'il est fondé sur certains principes, et vous en faites mention dans
toute votre approche. On constate, par exemple, qu'il doit également
tenir compte de certaines contraintes, et vous faites moins mention de ces
contraintes-là. Alors, c'est à nous, peut-être, de vous
indiquer les contraintes qui nous semblent quand même importantes
à retenir. Ces contraintes seraient peut-être de deux ordres, pour
l'instant. Il s'agit, dans un premier cas, des contraintes qui nous sont
indiquées, au fond, par les grands principes de la finance publique
elle-même. À cet effet-là, je vous réfère
tout simplement au mémoire qu'on dépose également, qui est
une étude commandée au groupe Secor, qui sont quand même
des gens très respectés dans le domaine et qui, je pense,
questionnent définitivement l'approche du gouvernement au niveau de la
finance publique elle-même. Alors, c'est peut-être matière
à réflexion, à ce niveau-là.
Dans un deuxième temps, la deuxième contrainte sur
laquelle on tient beaucoup plus à attirer l'attention est que, au fond,
le projet doit tenir compte de l'importance de l'accession à la
propriété et de l'accessibilité au logement qui sont des
enjeux sociaux tout à fait considérables. L'APCHQ a toujours
présenté l'habitation comme un domaine d'activité
essentiel, un domaine d'activité névralgique. Outre, disons, leur
complexité, il faut quand même que les interventions dans le
domaine de l'habitation soient cohérentes et coordonnées de la
part des secteurs public et privé. On pense que le gouvernement a quand
même démontré qu'il partageait une vision, notre vision
dans une certaine mesure, du rôle unique de l'habitation en adoptant,
à l'occasion, des mesures et des programmes permettant aux
ménages de mieux se loger et, parfois, d'accéder à la
propriété résidentielle.
Or, la situation du logement au Québec pose un défi. Le
taux de propriété n'est que de 55 %, comparativement à 62
% dans l'ensemble du Canada. Pour l'île de Montréal, seulement le
quart des ménages sont propriétaires de leur logement. Par
ailleurs, on note une demande importante de logements sociaux que l'offre ne
comble qu'à moitié seulement. Il y a des études, dont une
de Frank Clayton qui a été rendue publique en 1989, qui fait
ressortir que les chances des ménages québécois
d'accéder à la propriété sont directement
reliées aux efforts qui seront entrepris par tous les niveaux de
gouvernement afin de préserver l'accessibilité financière
au logement. Compte tenu des bénéfices économiques et
sociaux liés à la propriété résidentielle,
il nous semble qu'un rattrapage du taux de propriété canadien est
quand même un objectif social des plus désirables.
Le moyen d'y arriver serait bien sûr d'éviter les hausses
injustifiées du coût du logement. Or, les hausses de taxes
induites à court terme comme à long terme par le projet de loi
145 vont directement à rencontre de cette sage orientation. De plus, les
gains anticipés par la réforme seront diminués par les
sommes supplémentaires qu'il faudra consacrer au logement social. Dans
l'élaboration de ce projet, le gouvernement a entièrement
négligé de prendre en considération les contraintes
sociales de l'accession à la propriété et de
l'accessibilité au logement. Voilà pourquoi, en
définitive, l'APCHQ ne peut accepter ce projet dans sa forme
actuelle.
Nos collègues qui sont passés précédemment
ont mis en lumière une discussion intéressante à propos
des taux de mutation qui sont un des deux éléments sur lesquels
on aimerait discuter maintenant, le deuxième étant l'introduction
des taux différenciés. Peut-être pour ajouter à ce
qui a été dit avant ou pour réaffirmer ce qui a
été
dit avant, nous aussi, on a la conviction profonde que les taux de
mutation, l'introduction de taux de mutation obligatoires, de taxes de mutation
obligatoires auront un impact, premièrement, essentiellement dans le
secteur résidentiel, pour la simple et unique raison que, dans le
domaine non résidentiel, la plupart des transactions se font par le
biais d'échange d'actions ou d'autres façons, de façon
à éviter, au fond, l'échange du bien foncier
lui-même. Donc, c'est le résidentiel qui supporte essentiellement
la facture des droits de mutation. (22 h 15)
Dans un deuxième temps, il ne faut quand même pas oublier
que l'augmentation des droits de mutation, on peut la chiffrer à peu
près à 300 $, simplement dans le cas d'une habitation ordinaire
de 100 000 $. Ça vient s'ajouter à l'ensemble. Quand on disait,
tout à l'heure: Une taxe sur une taxe, sur une taxe, c'est quand
même vrai. Je veux dire: On a la TPS qui est maintenant arrivée et
on a un contexte économique quand même difficile, qui a
été rappelé par M. LaSalle. Et, si on songe à 1992,
avec l'entrée en vigueur du projet, il faudrait ajouter à
ça la TVQ qui, on le sait très bien, prendra vigueur à ce
moment-là.
Donc, n'oublions jamais qu'on a beaucoup de clients qui sont à la
marge, en bordure de l'accession à la propriété et on les
voit régulièrement visiter les projets des entrepreneurs,
hésiter et retarder leur décision d'achat. Chaque tranche
additionnelle de coûts qu'on vient imposer comme ça, de
façon indirecte à l'habitation, retarde, enfin, ces
gens-là. Donc, une augmentation de 67 % des droits de mutation, telle
qu'elle est proposée ou tel qu'on peut le vérifier dans notre
exemple, ici, c'est quand même considérable.
Pour ce qui est du reste de la réforme, l'autre message est clair
et je suis sûr que d'autres l'ont dit: Lorsqu'on n'a pas la base
foncière suffisante, c'est le résidentiel qui devra supporter les
frais de la réforme. Il est donc clair qu'il y aura des
possibilités ou, à la limite, il est possible qu'une ville soit
complètement obligée de se tourner vers le résidentiel
pour assumer le financement de la réforme. C'est donc à ne pas
oublier.
Le projet de loi 145, par le biais de l'introduction des taux
différenciés pour le secteur non résidentiel, ouvre la
voie - et c'est notre deuxième point - à l'adoption du
modèle ontarien en matière de taxation municipale. On en a
discuté plus tôt, c'est bon de pouvoir y revenir pour
peut-être éclairer davantage ce point-là. Ce qui s'est
passé en Ontario, essentiellement, c'est qu'on a vu, au fil des
années, l'introduction de ce taux différencié là et
les décideurs locaux ont trouvé, tout à coup, beaucoup
plus intéressant... C'est-à-dire que s'il y a quelque chose
à développer, c'est de se tourner vers le secteur non
résidentiel. Beaucoup plus payant!
Avec le temps, le secteur résidentiel lui-même est devenu
quelque chose de pas du tout intéressant à encourager. La
créativité financière s'est installée chez les
décideurs locaux et ils ont introduit l'instrument idéal, en
fait, pour rattraper la différence de fonds qui leur manquait, le manque
de fonds, et c'étaient les taxes de lotissement elles-mêmes. Pour
avoir une idée de ce que ça peut représenter... En tout
cas, on a noté dans notre mémoire, à la page 17, que
grosso modo, pour une habitation résidentielle bien ordinaire,
unifamiliale, en Ontario, selon l'état de la situation actuellement, on
constate que les taxes de lotissement sont de l'ordre de 9000 $ à 15 000
$, facilement, par lot. C'est la façon qu'ont trouvée les
décideurs locaux, là-bas, pour combler la différence de
revenus, presque à perte, qu'ils ne pouvaient pas rattraper autrement
à cause des taux différenciés beaucoup plus avantageux
dans le secteur commercial ou, en fait, dans le secteur non
résidentiel.
Donc, nous craignons l'arrivée des taxes de lotissement à
la suite de l'adoption du projet de loi 145. Certains prétendront que
les municipalités n'ont pas le pouvoir de taxer de cette manière,
mais ne soyons pas naffs au point de croire qu'elles ne se trouveront pas un
moyen d'accéder à une forme de taxation semblable si elles y sont
contraintes. Je pense qu'il est assez clair que c'est à ça qu'on
se destine. Le projet reconnaît très clairement que c'est
l'introduction de taux différenciés, là, qu'on vient de
faire.
À quoi devons-nous nous attendre avec des taux
différenciés? Bon, bien, pour revenir à une étude
qu'on vous soumet en annexe - celle de Secor - elle nous dit que si on adopte
le modèle ontarien au sens où les municipalités
édictent une taxe de lotissement de 10 000 $ par nouvelle construction,
bien, au Québec, ça correspond à 25 000 ménages
locataires qui, soudainement, seront évincés du marché ou
de toute chance raisonnable d'accéder à la
propriété. Donc, c'est considérable et si on veut mettre
ça en perspective, bien... On a parlé du programme AMI qui,
effectivement, est une belle entreprise et qui, en trois ans, a permis à
40 000 ménages d'accéder à la propriété.
Donc, s'il y a 25 000 ménages qui sont déplacés par
l'introduction des taux différenciés, il faut réaliser
qu'on est peut-être en contradiction avec nous-mêmes. Combien de
temps?
La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez
dépassé votre temps de deux minutes, monsieur.
M. Bernier: M'en donnez-vous deux autres?
La Présidente (Mme Bélanger): Oui.
M. Bernier: Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): C'est parce
que le temps de discussion va être plus court.
M. Bernier: Merci bien. Alors, au niveau des messages - et je
vais passer directement à la conclusion et aux recommandations - nous
favorisons une taxe foncière uniforme pour le secteur... pour tous les
secteurs. Donc, pas question de taux différencié, à notre
avis, pour ses effets pervers à long terme, c'est tout à fait
inacceptable comme avenue.
On s'oppose également aux droits de mutation puisque les droits
de mutation, comme on l'a dit, je pense, frappent directement, à court
terme et un peu trop fort les premiers acheteurs.
Le gouvernement doit en bout de ligne réexaminer son projet
à la lumière de certaines contraintes qui nous semblent important
de ne jamais négliger. Outre les principes de finances publiques, le
gouvernement doit veiller à ce que l'accession à la
propriété et l'accessibilité au logement ne soient jamais
compromises.
Et, en définitive, le gouvernement doit surseoir à sa
réforme de la fiscalité locale, réviser son projet
à la lumière des principes reconnus de saine gestion des finances
publiques et établir un nouveau pacte, ce qui est quand même un
aspect important - le pacte qu'on peut établir avec les instances
locales qui, je pense, sont échaudées à ce moment-ci -
donc, un pacte qui pourra quand même donner une direction à long
terme et une respectabilité un peu plus forte à ce
projet-là. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci M. Bernier. M.
le ministre.
M. Ryan: Oui, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de
saluer les dirigeants de l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec. Nous avons eu à transiger passablement
avec vous au cours des derniers mois dans le secteur de l'habitation, et je
veux vous exprimer mon appréciation pour la collaboration dont vous avez
fait montre à l'endroit du gouvernement en matière
d'habitation.
Je ne parle pas à propos de ce projet-ci parce que la
collaboration est un petit peu plus réduite ce soir, mais il est bon que
l'on sache du côté de l'Opposition que des rapports de
collaboration très active existent entre le gouvernement et vous dans le
domaine où vous avez vraiment compétence, celui de
l'habitation.
Vous avez souligné, à juste titre, les résultats
magnifiques du programme AMI, et je ne cesse de le souligner à
l'intention du député de Shefford qui en parle peu souvent de son
côté, pour des raisons qu'on peut comprendre. Le programme Mon
taux, mon toit, après un départ un petit peu lent, s'en vient
très bien. Nous l'avons ajusté, comme vous le savez, pour tenir
compte le plus largement possible des représentations que vous nous
aviez faites. Je pense que nous nous en réjouissons de part et d'autre.
Si vous voulez le commenter tantôt, j'en serai très heureux. Je
veux vous assurer qu'en ma qualité de ministre responsable de
l'habitation, j'accorde une très grande importance à ce secteur,
non seulement pour le gouvernement et pour les familles, ou les ménages
immédiatement bénéficiaires, mais pour la santé de
l'économie. Pour la santé de l'économie, le secteur de
l'habitation est un secteur tout à fait capital.
J'ai pris note de vos observations concernant les intentions
exprimées récemment par le ministre du Travail, et je lui ferai
part de vos observations dès demain, s'il est présent à
Québec. Je lui ferai part de vos observations; je lui ferai remettre une
copie de votre mémoire et je l'inviterai à en prendre
connaissance avec attention. C'est vrai que vous représentez une
très grande partie des constructeurs d'habitations au Québec et
que vous avez par conséquent dans ce secteur une expertise très
importante.
Dans votre mémoire, il y a deux propositions principales
d'après ce que je peux comprendre, lesquelles malheureusement sont
toutes les deux plutôt négatives. Il n'y a pas beaucoup de
suggestions positives dans votre mémoire. Il y a un problème pour
le gouvernement, là; au point où nous en sommes, il fallait
augmenter légèrement le fardeau fiscal. Il fallait l'augmenter
légèrement parce que le déficit, autrement, va continuer
d'augmenter et puis ça, ça joue contre vous autres. Si nous
laissons le déficit monter continuellement, ça dessert vos
meilleurs intérêts, dans votre secteur comme dans les autres
secteurs de l'économie.
Alors là, il s'agissait de décider si on allait augmenter
légèrement le fardeau fiscal en recourant uniquement aux sources
provinciales de revenus ou si on allait également regarder dans les
autres sources de revenus publics. Le gouvernement doit chercher un
équilibre dans tout l'ensemble. On a décidé d'en prendre
une part, somme toute assez modeste, du côté des sources de revenu
municipales parce que nous avions constaté qu'il y avait la un espace
disponible, tenant compte de notre situation de comparabili-té avec
l'Ontario. On peut discuter ce choix-là, on pourrait discuter à
l'infini, mais le gouvernement l'a fait, et puis je pense que les
données sur lesquelles s'appuie son choix sont des données qui
sont très bien défendables.
Maintenant, vous nous dites que les droits sur les mutations, c'est
dangereux. Nous ne partageons pas votre opinion sur ce point. Je pense que les
taux que nous proposons dans le projet de loi 145 restent des taux qui sont
quand même raisonnables. Vous savez, on parle beaucoup, on souligne
surtout les aspects négatifs, mais il faut voir les aspects positifs
aussi. Dans un discours que je faisais à l'Assemblée nationale le
22 mai, j'ai donné des extraits d'un article qui était paru dans
la livraison de mai du périodique Affaires Plus. On indiquait
dans cet article
qu'une résidence principale qui avait été
payée 18 389 $ en 1972 à Montréal valait 89 040 $ en 1989,
17 ans plus tard, soit une appréciation annuelle de 9,3 % sur une base
de 18 ans. Et vous en avez vendu des maisons, bien plus que moi, vous autres.
Moi, il m'est arrivé de participer à quelques transactions, puis
j'ai vécu expérimentalement ce qui est raconté ici. Encore
ces temps derniers, j'ai été témoin de deux transactions
dans cette période de récession, là, à
Montréal, des logements de valeur modeste et où le vendeur a pu
réaliser une appréciation significative sur le prix qu'il avait
payé l'année précédente, mais ça, on n'en
parle pas quand on fait la critique. C'est comme si tout était
gelé du côté des avantages et qu'il n'y avait qu'une
accumulation de désavantages. Il faut voir les deux côtés
et je vous signale que les côtés positifs sont quand même
importants.
Je suis conscient des difficultés actuelles de l'économie,
soyez-en assurés. Le gouvernement en sait quelque chose par les
pressions qui s'exercent sur lui et par la diminution du rendement des
impôts. Alors, celui-là, je pense que nous pouvons le supporter.
Je pense que va continuer l'appréciation du terrain surtout dans des
régions comme Montréal, par exemple. C'est inévitable que
le terrain continue de s'apprécier. C'est la base de la
propriété à cause de la rareté du terrain. Vous
voulez bâtir quelque chose à Montréal aujourd'hui, il faut
chercher parce qu'il n'y a pas beaucoup d'espace, nous le savons tous. Alors,
je pense que de ce côté-là, la mesure est convenable.
Ailleurs, en province, il y a plus d'espace mais les prix sont moins
élevés, par conséquent.
Le droit sur les mutations: Une propriété de 50 000 $,
ça va être un droit de mutation qui va équivaloir à
250 $; c'est cinq dixièmes de 1 %, 250 $. On peut bien faire du drame
puis tout, mais je pense que celui qui vend la propriété 50 000
$, il y a 250 $ pour cette transaction-là. Il va payer à la
municipalité en retour de la contribution de la municipalité
à l'appréciation de sa propriété. C'est ça
qui est le lien, parce que tous les services qu'il reçoit de la
municipalité contribuent à l'accroissement de la valeur de sa
propriété. C'est une contribution minime qui lui est
demandée, et je ne pense pas que ce soit exagéré.
Vous en avez contre les taux différenciés. Je vous
comprends parce que c'a été la doctrine établie depuis
très longtemps au Québec puis on pensait bien que c'était
une doctrine immuable. Le gouvernement innove sur ce point précis d'une
manière qui est quand même assez répandue aujourd'hui,
ailleurs. Nous ne sommes pas seuls, nous étions davantage isolés
en nous cantonnant dans un espèce de stéréotype qui
remontait plutôt à une autre époque. Je pense que
l'ouverture modeste que nous faisons de ce côté-là n'est
pas de nature à nuire à la propriété
résidentielle puis je ne pense pas que ça va nous conduire...
Éventuellement, il faudra considérer la possibilité que
vous évoquez par rapport à l'Ontario; il n'en est pas question
maintenant. Ça demandera des études approfondies. Il faudrait
voir le pour et le contre là-dedans.
Mais, en tout cas, moi, je ne vois pas trop les difficultés
insurmontables. Je vais vous poser une question, M. LaSalle qui êtes un
homme de grande expérience dont j'ai appris à estimer le
jugement, puis le sens pratique. Quelle proposition auriez-vous faite au
gouvernement, vous, pour améliorer sa situation générale,
qui aurait été meilleure que celle que nous mettons de l'avant?
(22 h 30)
M. Lasalle: m. le ministre, notre devoir était
d'étudier autant que possible les effets du projet de loi 145 et nous
sommes peut-être tombés dans la partie négative, mais nous
croyons que la partie négative que nous avons détaillée
devrait être sérieusement étudiée par votre
gouvernement car le pire que nous voyons dans la loi 55, c'est qu'il refuse
à une grande majorité de jeunes ménages le droit à
l'accès à la propriété par le coût excessif
que nous croyons que les municipalités imposeront. sur le lotissement et
aussi en général, pour nous, il y a une augmentation d'au moins 5
% sur le coût de la propriété. m. moisan.
M. Moisan (Hugues): Si je peux me permettre, M. Ryan, je suis
tout à fait d'accord avec vous pour dire que c'est très
avantageux d'être propriétaire. Le problème qu'on
identifie, c'est qu'il y a des gens qui n'ont pas cette chance-là et il
faut absolument les conserver, ces chances-là. Quand on regarde ce qui
se passe en Ontario, c'est justement là-bas qu'on doit aller puiser nos
exemples à ne pas suivre. C'est ça qui est notre point de vue
parce que c'est en 1989 qu'on a fait réaliser l'étude par Frank
Clayton et on a dit: Tu es en Ontario, tu sais ce qui se passe là-bas.
Dis-nous ce qui s'est fait là-bas et qu'on ne doit pas
répéter au Québec. Une des grandes conclusions de son
étude, c'étaient les taux différenciés et c'est ce
qui a amené, en Ontario, les taxes de lotissement et une série
d'autres réglementations ou taxes indirectes qui ont fait que la
propriété est devenue de plus en plus inaccessible.
On a un tableau dans notre mémoire où on voit les
différences de prix entre Montréal et Toronto. Il y a une
quantité de réglementations municipales qui sont responsables de
ces différences-là et la principale source de ça, c'a
été les taux différenciés. On comprend
qu'aujourd'hui, ce que vous proposez, la différence n'est pas si
énorme que ça par rapport à l'ancienne taxe d'affaires,
etc., mais on vient de mettre le pied, si vous voulez, à l'étrier
et le cheval va partir et on va être obligé de suivre avec.
Ça, c'est le danger qu'on identifie, puis si on a une suggestion
à faire, c'est d'avoir des taux unifor-
mes pour l'ensemble des types de propriété dans les
municipalités; de cette façon-là, l'ensemble de ces
propriétés vont recevoir une forme de traitement équitable
ou, en tout cas, qui ne sera pas biaisée par le fait qu'on a des sources
de revenue différentes selon un type de propriété ou
l'autre.
M. Ryan: Moi, je ne vois pas le lien de causalité entre
les deux. Pour être franc, je pense qu'on peut très bien avoir une
surtaxe sur les immeubles non résidentiels pour une partie du programme
qui est mis de l'avant sans que ça débouche sur une taxe sur le
lotissement. Je ne pense pas qu'on doive établir de lien de
causalité entre les deux. Il peut arriver qu'en Ontario on institue les
deux pour des motifs propres à l'Ontario. L'Ontario avait un but
louable; il voulait assurer le financement des services d'une manière
qui engageait directement les bénéficiaires de ces
services-là. On peut discuter des effets. Je ne suis pas sûr que
ça aille aussi loin que vous le dites, mais c'est évident qu'en
Ontario, il y a un certain déclin du marché de l'habitation
actuellement, qui est un fait significatif. Il y aurait peut-être eu une
inflation de ce côté-là, j'en conviens.
Je vais vous poser une question si vous me le permettez. Je ne veux pas
vous engager, mais les droits sur les mutations immobilières, ça
existe de toute manière. Déjà, dans plusieurs
municipalités, nous les rendons obligatoires pour l'ensemble. Mais je
voudrais vous poser une question et ne vous sentez pas piégé. Si
vous ne voulez pas répondre, soyez bien à l'aise. Vous autres,
est-ce que vous trouvez que ce serait mieux d'imposer ça au vendeur
plutôt qu'à l'acheteur, comme c'est proposé?
La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez 40 secondes
pour répondre.
M. LaSalle: C'est une très bonne question, M. le ministre.
Je pense que la réponse, pour nous, devient très difficile parce
qu'on veut protéger l'acheteur de logements. Alors, que ce soit l'un ou
l'autre, c'est une taxe qui est, pour nous, superflue. Ce n'est pas...
Mme Marois: Le vendeur va l'introduire dans son prix.
M. Ryan: Ce n'est pas une question théorique.
M. Crochetière (Serge): Je m'excuse. Dans
l'hypothèse où on représente les constructeurs,
évidemment les constructeurs seraient les vendeurs et ça se
traduirait dans le prix de vente. Alors, inévitablement, ça
accroîtrait le prix de vente.
M. Ryan: Ça, c'est pour les habitations neuves, mais pour
les habitations usagées, il y en a beaucoup de transactions là
aussi.
M. Crochetière: Non. Nous, pour notre part, étant
des constructeurs d'habitations, ça ferait partie des coûts si
vous les imputiez au vendeur et ça se traduirait... Donc, les effets
qu'on vous a décrits seraient exactement les mêmes au niveau du
frein à l'accession à la propriété.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Oui. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue aux
gens de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du
Québec, qui est aussi présente dans toutes les régions,
c'est évident. Vous représentez beaucoup de gens avec qui on
travaille, avec qui on a déjà, négocié en tout cas.
Je voudrais vous dire que votre mémoire apporte un élément
excessivement important dans la discussion. Depuis le début des
discussions concernant les propositions du ministre des Affaires municipales,
la base où i! a semblé marquer des points, c'était qu'en
Ontario, ça coûtait moins cher. L'Union des municipalités
du Québec a pris une hypothèse que le ministre a niée,
mais la vôtre, on peut difficilement la contrer parce qu'elle se base sur
une étude que vous avez faite concernant le prix de la
propriété. La taxe sur le lotissement était à 2500
$ à peu près en 1974, de 1972 à 1975 et, aujourd'hui, vous
nous dites qu'elle est à 10 000 $. Le ministre vous dit: Ne vous
inquiétez pas; même si, nous autres, on fait des taux
différenciés, il n'y a pas de problème là parce que
ça ne pourrait pas être la même chose qu'en Ontario. Mais je
ne suis pas convaincu parce que la volonté de calquer et de copier sur
l'Ontario... C'est le gouvernement actuel qui le prend toujours comme exemple,
qui nous donne toujours l'exemple de... L'impôt des particuliers, c'est
l'Ontario; l'habitation, c'est l'Ontario. Tantôt, je ne sais pas ce qu'on
va avoir, mais en tout cas, l'Ontario semble le modus vivendi;
régulièrement, c'est comme un refrain. Je pense que vous le
faites ressortir clairement, ce n'est pas un exemple nécessairement
à suivre.
L'un des autres éléments - et je trouve ça
extraordinaire - La bible SECOR est un consultant qui nous a frappés
depuis les six dernières années. SECOR, c'était la bible
du gouvernement actuel, c'était le maître à penser. Je ne
sais pas si c'est une coïncidence ou si vous avez voulu confondre un peu,
mais connaissant SECOR comme je la connais, je suppose que, comme
professionnelle, elle n'est pas arrivée à des conclusions que
vous avez souhaitées; elle a fait une étude professionnelle. Que
dit SECOR? Elle dit qu'un tel transfert de responsabilités affecterait
non seulement le fardeau fiscal des contribuables des municipalités
concernées, l'accessibilité au logement des ménages et
la
capacité concurrentielle des entreprises, mais viendrait
réduire l'efficacité de l'économie et son
développement. Il va de soi que le gouvernement du Québec doit
maintenir une contribution financière substantielle à la mesure
des bénéfices retirés par l'ensemble de l'activité.
Et elle en vient à la conclusion, en gros, que ce n'est pas la bonne
méthode et que ce n'est pas les principes sur lesquels on doit s'appuyer
pour faire de la fiscalité municipale.
Ce n'est pas de même qu'on va relancer l'économie, ce n'est
pas de même qu'on va développer la responsabilité des
élus, parce qu'elle dit: Ce n'est pas ça, le but visé.
C'est vraiment du délestage de comptes à payer, un court de
caisse gouvernementale. Je pense que ça me semble assez évident,
et vous avez la tabula-tion des chiffres. En fait, on va les donner, les prix
de comparaison pour deux maisons à peu près similaires. Ça
coûte, à Montréal, 137 000 $ et, en Ontario, 324 000 $.
C'est le double. C'est quelque chose. Ce n'est pas... Quant à moi, je
trouve que ça aura beau... Votre mémoire est très
révélateur et il parle beaucoup. Le ministre vous a
demandé: Quels sont les changements que vous apportez? Quelles sont les
propositions que vous faites pour remplacer ce que je vous dis? Je pense que
vous en avez une proposition, elle est importante, elle est à la page
25, c'est votre conclusion. Je vais la lire avec vous autres; je pense que
c'est important, des fois, de la lire, parce qu'on vient d'avoir le
mémoire: "Le gouvernement du Québec doit donc surseoir à
sa réforme de la fiscalité locale, réviser son projet
à la lumière des principes reconnus de saine gestion des finances
publiques afin d'établir un nouveau pacte avec les instances locales. Le
tout respectueusement soumis. "
Ça, ça me semble une proposition importante, d'autant plus
que le montant que le gouvernement va chercher pour la première
année à aller jusqu'au prochain budget, c'est 100 000 000 $. Le
Conseil du patronat a dit carrément hier: On va les prendre, les 100 000
000 $, et étudiez-le un peu plus longtemps. Apportez-nous
différentes formules pour qu'on puisse en discuter, qu'on puisse les
mâcher comme il faut et on verra ce que ça va donner. C'est un
court de caisse, c'est oui. C'est ça que le Conseil du patronat a dit.
Imaginez-vous que le ministre a fait le tour de force de concilier la position
du Parti québécois, donc de l'Opposition officielle, avec celle
du Conseil du patronat. C'est du jamais vu. Non seulement il a réussi
ça, mais il a réussi à amener les syndicats aussi avec
l'Opposition officielle et avec les patrons, les chambres de commerce. C'est un
concert unanime. Ce qu'on demande et ce que la plupart des intervenants ont
demandé, c'est: Pourquoi on ne réfléchit pas un peu plus
longtemps? Est-ce qu'il y a péril en la demeure? Est-ce qu'il y a un
danger qui nous guette? Est-ce que vraiment, si ça ne passe pas,
l'avenir de la nation est en jeu? Mais là, je pourrais bien dire: Bien
oui, on peut toujours attendre quelque peu, ce n'est pas plus grave que
ça, on doit y penser, on peut réfléchir, mais on ne pourra
pas réfléchir plus tard, on a d'autres sujets qui nous
préoccupent tellement qu'on ne pourra pas y repenser et depuis trois
jours, on a des propositions qui sont autres que les vôtres. Il y a
d'autres propositions qui disent: Retirez-le, mais au cas où vous ne le
retireriez pas, on va vous proposer autre chose pour la Sûreté du
Québec, pour la voirie, qui n'est pas dans le portrait, mais qui... Il y
a tout le temps des problèmes ou des solutions à soulever, mais
là, c'est intéressant. Il y a seulement un problème; je ne
sais pas quand on va trouver le temps pour concilier ou pour cumuler toutes ces
propositions qu'on fait avec l'adoption du projet de loi qui va se faire
incessamment. Il n'y a pas de temps à la réflexion. Là,
vraiment, on est obligés, nous autres, de conclure qu'il y a
péril en la demeure, c'est une question de vie ou de mort. Si on ne
réussit pas à passer ça, le ministre vient de faillir
à sa tâche, une mission qu'il n'aura pas accomplie et il va avoir
failli à son devoir.
Moi, je me dis par rapport à ça: Un instant! On peut
peut-être y penser un peu plus. Moi, je trouve que, par rapport à
votre mémoire, on s'est basé sur des principes et ce n'est pas
allé comme ça à peu près. Moi, je l'ai
regardé, malheureusement pas assez longtemps. On peut être
d'accord ou pas d'accord avec votre mémoire, mais vous soulevez tout de
même des points interrogatifs très forts et concernant votre
industrie, mais concernant aussi l'avenir des gens qui veulent vivre au
Québec. Par exemple, est-ce que vous pensez que ces mesures-là
sont de nature à augmenter l'accession à la
propriété? Tout à l'heure, on a dit: Non. Vous dites: On
est un peuple de locataires jusqu'à un certain point. De quelle
façon va-t-on augmenter cette volonté de s'établir et de
devenir propriétaire?
Vous n'avez pas parlé de transport en commun. J'ai compris que
c'était la construction, mais il y a d'autres éléments
pernicieux dans la réforme. Est-ce que vous pouvez me soulever d'autres
points que ceux que vous avez démontrés dans votre mémoire
qui, aussi, peuvent vous affecter?
M. Moisan: On se concentre essentiellement sur ce qui touche
l'habitation. Pour répondre à votre question plus tôt, je
pense que le meilleur programme pour favoriser l'accession à la
propriété, c'est de veiller, lorsqu'à tout moment on va
modifier une politique, un programme, une loi, à ce qu'on n'ait pas
d'impact de façon directe ou indirecte sur le coût de
l'habitation, de façon à ce qu'on ne pousse jamais le coût
plus haut qu'il n'a besoin de l'être en fonction du marché. Ne pas
faire comme en Ontario, par exemple, où on peut dire... Parce que
l'habitation rapporte moins en termes de revenus fonciers, on
va dire: Dans telle municipalité, ça prend du
revêtement de briques pour 100 % de la façade. On sait que
ça coûte bien plus cher que tous les autres revêtements. On
va imposer un minimum de superficie, etc. De sorte qu'on se retrouve
finalement... Non pas par une façon directe. On n'a pas dit que les
habitations doivent coûter ça, mais on a dit: II faut compenser
pour une faiblesse de revenus fonciers. Donc, on va aller chercher ces
revenus-là d'autres façons, de façon indirecte: taxe de
lotissement, évidemment faire payer toutes les infrastructures par le
promoteur de sorte qu'il les reporte. On a tout un processus, extrêmement
long là-bas, d'approbation des lotissements. Ça peut durer
jusqu'à cinq ans. Qu'est-ce que vous pensez que le promoteur fait
pendant tout ce temps-là? Il paie ses intérêts et tout le
truc. Vous avez, ensuite de ça - les taxes de lotissement, on vient d'en
parler - les demandes d'avoir des bâtiments avec des valeurs
foncières minimales, etc. Alors, tout ça fait que... On doit
éviter ça. Je pense que c'est un mandat qu'on doit se donner
et...
M. Dufour: J'ai juste une petite question pour donner la chance
à ma collègue de vous questionner aussi.
M. Moisan: Oui.
M. Dufour: Combien c'est rendu que ça prend de temps
à votre organisme pour développer un terrain, pour viabiliser les
terrains dans une municipalité? La moyenne? Est-ce que vous avez une
moyenne? Parce qu'en Ontario, c'est vrai. Voilà trois ou quatre ans,
c'était... Voilà dix ans, c'était quatre ou cinq ans.
C'était deux ou trois ans et, aujourd'hui, c'est cinq ans?
M. LaSalle: C'est une moyenne de quatre ans, dans le moment, pour
préparer et développer un terrain.
M. Dufour: Actuellement. O. K. Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Ça me fait
plaisir, comme mon collègue, de vous souhaiter la bienvenue. Dans le
fond, le ministre vous dit: Pas de suggestions nécessairement
très précises, sauf des embûches à éviter.
C'est un peu ce qu'il vous dit par ses commentaires. De toute façon,
quand quelqu'un fait une petite suggestion quelque part, le ministre dit que
l'organisme qui est devant nous l'appuie. Alors, il faut toujours être un
peu prudent!
Je pense que c'est intéressant, le rapprochement, enfin,
l'analyse que vous faites par rapport à l'Ontario et le fait que vous
identifiez les effets pervers qu'a eus l'application d'un certain nombre de
mesures, d'orientations et de choix qui se sont faits et qui ont eu les effets
que l'on connaît. Vous identifiez assez bien dans le mémoire -
même très bien, dans le fond -l'essentiel des objectifs du
ministre et, à la page 8, vous le dites particulièrement bien: Le
gouvernement provincial désire simplement faire supporter le financement
de ses responsabilités par les instances locales.
Je pense que vous n'êtes pas les premiers, soit dit en passant;
depuis que nous siégeons là quelques jours, c'est
l'unanimité à cet égard, J'ai posé la question
à d'autres avant vous sur le fait qu'ils avaient été ou
non consultés, d'une façon informelle, évidemment, parce
que... et c'est souvent le cas. Là, nous le faisons d'une façon
formelle. Mais comme le ministre, depuis le début de nos travaux, dit
toujours que, de toute façon, le principe de la loi a été
adopté, puisque c'est le cas de la part du gouvernement, même si,
nous, nous nous sommes opposés, nous procédons maintenant
à des consultations.
Mais est-ce que, préalablement, il y a eu des consultations?
C'est toujours souhaitable et intéressant que ça se fasse
auprès des principaux concernés, puisque ça va les toucher
éventuellement. Alors, premièrement, est-ce qu'il y a eu des
consultations? Deuxièmement - et ça, c'est un petit peu plus
global - vous mentionnez dans votre mémofre que l'habitation est un
domaine complexe et nécessite une intervention cohérente et
coordonnée de la part des secteurs public et privé. Si vous aviez
des propositions à faire, mais d'un ordre assez majeur, finalement,
cette affirmation réfère à quoi en termes de
propositions?
Troisième élément...
La Présidente (Mme Bélanger): Mme la
députée de Taillon, vous mettez beaucoup
d'éléments; vous n'aurez pas de réponse.
Mme Marois: Je termine. D'accord. C'est dommage, parce que c'est
toujours ça devant lequel on est pris; c'est le temps qui nous manque.
Enfin, allons-y avec ça, puis je reviendrai s'il me reste du temps.
M. LaSalle: En ce qui concerne la consultation, Mme la
Présidente, notre Assocation a toujours eu avec le gouvernement, tant au
pouvoir qu'à l'Opposition, de très bonnes relations. Et il faut
dire que nous sommes régulièrement consultés dans les
programmes. Nous travaillons... nos économistes travaillent avec les
économistes du gouvernement dans les programmes ponctuels,
malheureusement, souvent. Mais ce que nous avons fait remarquer, à
chaque occasion des consultations, c'est que nous croyons que le gouvernement
devrait procéder à la formation d'un ministère de
l'habitation clair et concret, parce que tout le monde parle de construction,
que ce soit dans le rapport Picard-Sexton ou ailleurs.
Mais la construction et l'habitation, c'est deux choses, deux choses
tellement différentes que nous insistons pour, chaque fois que nous
sommes consultés - parce que, oui, nous sommes consultés -
suggérer au gouvernement d'instaurer ou de réinstaurer un
ministère avec un ministre strictement pour l'habitation. C'est
très important, l'habitation; c'est le logement des
Québécois et nous croyons qu'avec le temps, il faudrait avoir un
ministère de l'habitation.
Alors, oui à la question des consultations. Nous sommes assez
régulièrement consultés.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors...
Mme Marois: Sur le projet, cependant, qui est devant, est-ce que,
dans les faits, il y a eu des demandes qui ont été
présentées à l'Association? Oui?
M. LaSalle: Pas vraiment, dans le sens où c'est... Le
domaine municipal n'est vraiment pas le domaine qui nous touche
directement.
La Présidente (Mme Bélanger): ...monsieur, parce
qu'on dépasse déjà de trois minutes.
M. LaSalle: Pardon?
La Présidente (Mme Bélanger): Un petit 30 secondes
pour la réponse; on dépasse de 3 minutes.
M. LaSalle: Je disais que, comme c'est un domaine qui est avant
tout municipal, on n'a pas été consulté directement,
spécifiquement là-dessus. On fait valoir des choses, mais pas
spécifiquement.
Mme Marois: Ça va. Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Messieurs de
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, on
vous remercie de votre participation. Je demanderais aux représentants
de l'Association du transport urbain du Québec de bien vouloir prendre
place. On va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 22 h 45)
(Reprise à 22 h 51)
La Présidente (Mme Bélanger): Pourriez-vous
accélérer, s'il vous plaît? À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission reprend ses travaux. M. le ministre, si vous voulez
prendre place. S'il vous plaît! Nous prenons place. Nous débutons.
J'inviterais M. Bernard TangUay, président du conseil d'administration
de l'Association du transport urbain du Québec, à bien vouloir
présenter les personnes qui l'accompagnent. Vous avez 15 minutes pour
présenter votre mémoire. M. le ministre. Alors, M. Tanguay,
est-ce que vous voulez bien nous présenter les personnes qui vous
accompagnent?
Association du transport urbain du
Québec
M. Tanguay (Bernard): Merci, Mme la Présidente. J'aimerais
vous présenter, à ma droite, M. Reynald Blouin, directeur
général de la CTCUQ, la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec, et président du
comité des directeurs au sein de l'Association du transport urbain du
Québec; à ma gauche, M. Jacques Lacroix, directeur
général de la Corporation métropolitaine du transport de
Sherbrooke et vice-président du comité de gestion, en question.
J'aimerais excuser l'absence de mon vice-président, M. Robert Perreault,
président de la STCUM à Montréal. Malheureusement, il ne
pouvait être ici ce soir. En son nom, j'excuse son absence. En second
lieu, j'aimerais aussi remercier, au nom de l'ensemble des organismes, la
commission de nous donner l'opportunité de présenter notre
mémoire.
Je tiens à souligner, dès le départ, que nous avons
dégagé, à l'intérieur du mémoire, quelques
pistes de solution. Notre mémoire se veut, pour employer des expressions
qui sont peut-être chères à d'autres personnes, davantage
théorique dans le sens que reposant sur le fond. Je pense que le
débat sur le fond de la vitalité du transport en commun n'a pas
été suffisamment fait et on se permet, dans ce
mémoire-là, d'insister davantage sur ce volet.
L'Association du transport urbain du Québec, l'ATUQ, regroupant
les sociétés publiques de transport en commun est très
préoccupée par la décision du gouvernement du
Québec de modifier unilatéralement les règles actuelles de
financement du transport en commun en diminuant drastiquement ses subventions.
Il est important, dans le cours de l'étude du projet de loi 145, de ne
pas oublier que l'enjeu de la réforme présentée par le
ministre des Affaires municipales n'est pas seulement le partage fiscal entre
Québec et les municipalités et ses modalités
d'application, mais aussi l'avenir du transport en commun. C'est principalement
de ces impacts de la réforme du financement du transport en commun mise
en oeuvre par le projet de loi 145 et de l'avenir du transport en commun dont
il sera question dans le présent mémoire.
Premier volet, le point sur le retrait de Québec et ses impacts.
En 1991, les sociétés de transport membres de l'ATUQ
dépenseront environ 975 000 000 $ pour répondre aux besoins de
transport collectif dans les plus grandes agglomérations urbaines du
Québec. La contribution du gouvernement du Québec dans le
financement de ces dépenses sera dé 370 000 000 $, dont 227 000
000 $ au titre de subventions à
l'exploitation.
Le partage des responsabilités du financement du transport en
commun, mis de l'avant par le gouvernement, prévoit que ce dernier
diminuera de 175 000 000 $ sa contribution au financement des membres de
l'ATUQ. Ceci représente près de 18 % de leur budget. De plus, en
reconnaissant le besoin, pour les sociétés de transport,
d'investir dans le maintien en bon état de leurs actifs, le gouvernement
annonce également qu'il ne participera pas au financement de cette
dépense. C'est une facture de 46 000 000 $ qui passe au niveau
local.
L'an prochain, seulement pour maintenir le service actuel en tenant
compte des besoins pour le renouvellement des actifs, les transporteurs urbains
publics devront trouver 220 000 000 $. Si on prend en considération les
besoins de développement du transport en commun, ces besoins montent
à 250 000 000 $. En pratique, cela revient à doubler la
contribution actuelle des municipalités au transport en commun ou
d'augmenter les revenus des usagers de 70 %. Une telle augmentation de la
participation des usagers nécessiterait que les tarifs doublent, en
tenant compte des pertes d'achalandage qu'entraînent invariablement de
telles hausses.
Dans un cas comme dans l'autre, de telles hausses seraient
inadmissibles. Finalement, les autres retraits du gouvernement du Québec
pourraient augmenter la facture jusqu'à 300 000 000 $ en 1995. Je vous
fais grâce des détails de ces chiffres-là, vous les avez en
annexe.
Les fondements de la responsabilité du gouvernement en
matière de transport en commun... La très grande majorité
des sociétés de transport desservant les grandes villes des pays
industrialisés peuvent compter sur un apport financier des gouvernements
de palier supérieur. Cette pratique généralisée
n'est pas fortuite. Les impacts associés à l'utilisation du
transport en commun débordent largement les frontières
étroites d'une municipalité ou même d'une région. La
présence d'"externalités" et d'effets redistri-butifs dans un
secteur aussi névralgique pour les grandes agglomérations
urbaines justifient cet engagement gouvernemental. En somme, dans tous les pays
industrialisés, le système politique a trouvé une
justification à la participation des instances nationales au financement
du transport en commun en zone urbaine. Il s'agit d'une responsabilité
partagée. Cette situation de fait repose d'ailleurs sur des fondements
économiques indéniables et inattaquables.
Les fondements d'une intervention publique. Il est en effet reconnu que
les mécanismes de marché se révèlent
généralement insuffisants pour assurer un financement
adéquat des activités générant des
"externalités". Le cas du transport en commun ne fait pas exception
à cette règle. Dans toute agglomération urbaine de taille
importante, les "externalités" associées au transport collectif
et, notamment, les réductions de congestion et de pollution et les
effets d'entraînement des pôles urbains sont tels que la
participation du secteur public au financement de ce mode de transport est
solidement établie.
Sans prétendre pouvoir déterminer de façon
précise la valeur de ces effets externes, il ne fait aucun doute que,
sans transport collectif, l'efficacité économique des villes
serait grandement réduite. Les régions métropolitaines
desservies par le transport en commun représentent plus des deux tiers
de l'économie québécoise en termes de valeur
ajoutée. S'il n'en coûtait que 0,10 % du produit intérieur
brut en termes de coût, les gains d'efficacité
représenteraient une somme de 150 000 000 $.
Au niveau de l'environnement, le transport en commun représente
aussi un important levier de protection pour l'environnement. D'une part,
l'utilisation accrue du transport collectif constitue un moyen pour limiter la
pollution atmosphérique et ses conséquences négatives:
réchauffement de la terre, "smog", pluies acides, etc. En se substituant
à l'automobile, cette forme de transport contribue à
protéger l'environnement d'un territoire qui s'étend bien
au-delà des limites des municipalités desservies par le
réseau. Les bénéfices environnementaux associés au
transport en commun s'étendent donc, eux aussi, à l'ensemble du
Québec. D'autre part, le transport en commun permet d'augmenter la
densité urbaine et limite l'étalement urbain. Des villes comme
Détroit, Atlanta et Houston, qui ont négligé leur
réseau de transport en commun, ont vu non seulement leur
périmètre urbain s'élargir, mais aussi leur centre-ville
dépérir sous l'effet des forces centrifuges du
développement. La lutte à l'étalement urbain permet
également de protéger les territoires agricoles situés en
périphérie des grands centres.
Enfin, soulignons le fait que le transport en commun constitue un moyen
efficace pour ralentir notre consommation d'énergie et, donc, de
réduire notre dépendance envers l'importation de combustibles
fossiles. Doit-on rappeler qu'un autobus de plus élimine 50 voitures de
nos routes? Sur le plan environnemental, il est donc évident que tous
les Québécois bénéficient des effets externes
associés au transport en commun. Les résidents des zones
directement desservies en sont les premiers bénéficaires, mais
les effets positifs en matière de qualité de l'air, de protection
de sols arables et de conservation d'énergie profitent à
l'ensemble des citoyens du Québec.
La redistribution du revenu: Le transport en commun constitue aussi un
outil de redistribution de revenus et d'équité sociale.
L'automobile n'est pas un moyen de déplacement accessible pour une
couche importante de la population, en particulier pour les personnes à
faible revenu, les personnes âgées et les jeunes. Les
résidents des grands centres urbains deviennent particulièrement
vulnérables en raison de leur taux de pau-
vreté souvent élevé et des plus grandes distances
à parcourir. (23 heures)
Le maintien d'un service de qualité est essentiel à
plusieurs de leurs besoins fondamentaux. Or, il n'est pas du ressort des
municipalités et encore moins des sociétés de transport en
commun de garantir un standard de vie minimal aux citoyens des grandes villes.
La responsabilité associée à la redistribution et à
la sécurité du revenu incombe principalement au gouvernement
supérieur. Cette fonction redistributive se reflète aussi dans de
nombreuses politiques à caractère national: tarifs réduits
pour étudiants, tarifs réduits pour personnes âgées,
transport adapté, etc. D'ailleurs, des changements d'orientations
politiques de la désinstitutionnalisation à l'aide au transport
des étudiants ont, par le passé, eu des incidences importantes
sur les coûts de fonctionnement des sociétés de transport
en commun. Ceci ne fait qu'illustrer la fonction sociale du transport
collectif.
Le gouvernement du Québec est généralement
l'initiateur et, ultérieurement, le défenseur de ces politiques
sociales de transport, que ce soit la tarification réduite, le transport
adapté ou encore la carte mensuelle. La situation du transport en commun
s'apparente d'ailleurs au contentieux entre le gouvernement
fédéral et les provinces, quant au financement de certains
programmes sociaux conjoints mis sur pied par le gouvernement
fédéral, mais, dans ces cas, la juridiction est
partagée.
Le cas présent est différent. La politique sociale et
particulièrement ses aspects redistribu-tifs ne relèvent pas des
municipalités. Tout au contraire, le principe de neutralité au
palier local a été clairement établi lors de la
réforme de la fiscalité municipale de 1978. Le régime
fiscal proscrit, d'ailleurs, toute progressivité dans les taux de
taxation des particuliers. On peut certes envisager que le gouvernement du
Québec délègue aux sociétés de transport des
responsabilités d'exécution en matière de politique
sociale. Cette délégation ne doit toutefois pas servir de
prétexte au désengagement financier. En somme, il est
évident et reconnu que la politique sociale et, plus
particulièrement, ses aspects redistributifs relèvent des paliers
supérieurs et non des paliers locaux de gouvernement. De plus, une
partie significative des coûts nets de fonctionnement des
sociétés de transport en commun est attribuable à des
mesures sociales mises de l'avant par le gouvernement du Québec à
un moment ou à un autre.
Les principes d'un partage équitable des coûts et du
financement à long terme du transport en commun. Les
responsabilités en matière de financement des opérations
du transport en commun devraient être partagées par les
différents bénéficiaires, soit les usagers, les
automobilistes, les entreprises, la communauté, par
l'intermédiaire des villes, et la société en
général, par l'intermédiaire du gouvernement. Les usagers
défraient déjà environ le tiers des dépenses des
sociétés de transport. Pour leur part, les résidents et
les entreprises des régions desservies par le transport en commun, par
le biais des contributions des municipalités, contribuent, en 1991, pour
plus de 25 % des revenus des sociétés de transport. Ainsi, une
part appréciable du transport en commun est financée, au niveau
local, par les usagers, les résidents et les entreprises.
L'ensemble de la population du Québec bénéficie de
l'impact économique, environnemental et énergétique du
transport en commun dans ses grandes villes et devrait assumer, en
compensation, une certaine partie des coûts de fonctionnement de ce mode
de transport. Avec le retrait de Québec, cette participation sera
fortement réduite. Le gouvernement du Québec est responsable du
coût des mesures à incidence sociale et redistributive. Ces
mesures concernent les politiques tarifaires différenciées et
certains services spécifiques des sociétés de transport,
par exemple, le transport adapté et le transport des étudiants.
À ce titre, il devrait en défrayer le plein coût. Au
même titre qu'il supporte le coût des infrastructures de transport
hors des grandes villes par le biais de ses routes, ponts et chaussées,
le gouvernement du Québec doit également assumer les frais
associés aux infrastructures de transport en commun dans les grandes
villes, en particulier par son programme d'aide aux immobilisations, dont le
contenu et les sommes qui y seront affectées ne sont pas encore
connus.
Les automobilistes, principaux bénéficiaires des effets de
décongestion, devraient supporter une partie significative des
coûts de fonctionnement du transport en commun. À l'heure
actuelle, aucune contribution spécifique n'est exigée d'eux, sous
réserve des droits d'immatriculation de 30 $ additionnels qui sont
prévus dans le projet de loi dont on discute aujourd'hui. Pour que le
transport en commun puisse être géré plus efficacement et
évolue rapidement pour répondre aux besoins de la
clientèle, des bases solides et durables de financement doivent
être mises en place. Une certaine permanence de ces fonds doit aussi
être assurée. En effet, contrairement à la plupart des
services publics, le transport en commun est un service commercial en situation
de concurrence avec l'automobile. Ceci exige une plus grande souplesse dans sa
gestion et aussi une plus grande stabilité dans son financement, afin de
permettre la mise en place de stratégies à plus long terme,
visant à répondre aux besoins des utilisateurs.
Propositions de l'Association du transport urbain du Québec: En
diminuant aussi brutalement et de façon aussi importante sa
participation au transport en commun et en faisant porter principalement le
poids de sa réforme sur les usagers et les municipalités,
Québec remet
fortement en question la place occupée par le transport en commun
en milieu urbain. Il va sans dire qu'il remet, de ce fait, en question tout
développement susceptible de permettre au transport en commun de rester
compétitif face à l'automobile. Les conséquences de ce
geste sur le niveau de service, l'environnement, le développement
économique et les moins bien nantis risquent d'être
catastrophiques. Il apparaît de plus en plus évident, à
cause des impacts qu'il peut représenter, que les municipalités
ne pourront pas combler le retrait de Québec. Par ailleurs, la part
qu'elles accepteront de prendre viendra inévitablement restreindre toute
augmentation future de leur participation. Étant donné les
besoins financiers des sociétés de transport au cours des
prochaines années, la réforme pourrait avoir des impacts bien
plus forts et durables que prévu et amplifier les problèmes
financiers déjà importants des sociétés de
transport.
L'apport des usagers ne peut pas non plus être augmenté
substantiellement. Ainsi, une hausse de 15 % des tarifs n'entraînerait,
en bout de ligne, qu'une hausse d'environ 10 % des revenus et des pertes
d'achalandage de l'ordre de 5 %. Une telle perte signifie une hausse des
déplacements effectués en automobile de l'ordre de 20 000 000 $
par année. L'ATUQ croit que le gouvernement a l'obligation de
défrayer les coûts sociaux associés au transport en commun
en milieu urbain. L'ATUQ estime à environ 55 000 000 $ le coût
annuel des rabais tarifaires accordés aux utilisateurs de moins de 18
ans et de 65 ans et plus, et supportés par les organismes publics de
transport. Les rabais tarifaires pour les plus jeunes constituent un
élément de la politique familiale, domaine clairement de
juridiction provinciale. Quant aux rabais accordés aux personnes
âgées, ils relèvent de la politique de
sécurité du revenu. De la même manière, les
instances locales en milieu urbain sont victimes de discrimination en ce qui a
trait au transport scolaire. Alors que celui-ci est subventionné
à 100 % partout ailleurs au Québec, en milieu urbain, plusieurs
transporteurs publics font office de transporteurs scolaires, ce qu'on appelle
le transport scolaire intégré.
Il existe un programme qui compense les parents d'une partie des
étudiants qui ont recours au transport en commun plutôt qu'au
transport scolaire pour se rendre à l'école. Mais les
sociétés de transport ne reçoivent aucune compensation.
Les membres de l'ATUQ estiment à 25 000 000 $ les coûts qu'ils
doivent ainsi assumer en plus des pertes associées aux tarifs
réduits. D'autre part, les contraintes imposées par le
ministère des Transports à la progression des subventions au
transport adapté et à l'admissibilité de certaines
dépenses ont des impacts négatifs croissants sur les budgets des
sociétés de transport. Au seul titre des coûts sociaux
assumés par les transporteurs urbains publics en 1992, Québec
devrait maintenir à 85 000 000 $ ses subventions au transport en
commun.
Dans le projet de loi 145, le gouvernement du Québec propose la
création d'un fonds de 50 000 000 $ financé à même
les contributions des automobilistes à partir d'une contribution de 30 $
liée à l'immatriculation. La création d'un tel fonds est
un pas dans la bonne direction, nous en convenons, dans le sens où le
gouvernement met à contribution les automobilistes. Cependant, ce fonds
demeure sous le contrôle du gouvernement du Québec et sa
permanence est loin d'être assurée. Les montants qui y sont
versés sont nettement insuffisants et il ne faudrait pas non plus que
l'existence de ce fonds dégage Québec de sa responsabilité
de contribuer aux coûts sociaux associés au transport en
commun.
Les membres de l'ATUQ proposent donc que le gouvernement
éclaircisse le rôle que jouera le fonds dans le financement du
transport en commun et que les montants alloués à ce fonds soient
substantiellement augmentés. En particulier, l'ATUQ propose qu'une taxe
spéciale de 0,02 $ ou 0,03 $ le litre d'essence vienne s'ajouter au
montant déjà prévu pour alimenter le fonds.
En conclusion, le gouvernement justifie son désengagement au
transport en commun en invoquant que celui-ci est une fonction essentiellement
locale et, aussi, ses difficultés financières. Ce raisonnement ne
tient pas compte des "externalités" importantes
générées par le transport collectif et qui
dépassent les frontières des centres urbains. Ces
"extemalttés" commandent à elles seules un engagement financier
des gouvernements de palier supérieur. De plus, l'argumentation
gouvernementale cherche à légitimer un retrait complet en
recourant à la notion de pleine autonomie décisionnelle des
élus locaux. Or, le gouvernement du Québec continuera
d'intervenir, d'une manière directe ou indirecte, dans le processus de
décision des sociétés de transport, que ce soit par son
programme de financement des immobilisations, par son contrôle des
conditions d'admissibilité au transport adapté, par ses
règles et lois sur le transport, etc.
Quant aux responsabilités en matière de transport scolaire
et de redistribution des revenus, personne ne pourra défendre qu'elles
relèvent du niveau local. Ces deux arguments à eux seuls
justifient une participation substantielle du gouvernement du Québec au
transport en commun. Quant aux difficultés financières de
Québec, nous y compatissons, mais sont-elles importantes au point de
mettre en danger l'avenir du transport collectif au moment même où
on s'apprête à investir des millions de dollars dans la protection
de l'environnement et de la dépollution? Le transfert des impacts
financiers du retrait de Québec vers les usagers et les
municipalités nous apparaît d'autant plus injustifié qu'il
existe une alternative: une participa-
tion plus importante des automobilistes, bénéficiaires
indirects importants, au financement du transport en commun. Encore une fois,
la création d'un fonds financé par les automobilistes qui
apporterait une plus grande stabilité au financement du transport en
commun serait un pas dans la bonne direction, mais les dispositions du projet
de loi 145, à ce titre, de toute évidence, ne vont pas assez
loin. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, monsieur. M.
le ministre, il reste 14 minutes pour le côté ministériel
et 14 minutes pour le côté de l'Opposition. 14 minutes.
M. Ryan: Vous êtes bien généreuse, Mme la
Présidente, on vous en remercie. À cette heure-ci, que vous nous
donniez 14 minutes, c'est très apprécié. Je vous remercie
d'avoir attiré de nouveau notre attention sur des points qui ont
évidemment été abordés à plusieurs reprises
au cours des derniers jours, mais sur lesquels l'éclairage de votre
Association est un élément très important pour nous. Je ne
peux pas commenter très longuement votre mémoire parce que je
voudrais en venir à des points assez précis le plus tôt
possible, étant donné le peu de temps dont nous disposons. Je
voudrais simplement rappeler que la contribution en provenance de
l'immatriculation des véhicules automobiles, instituée par le
gouvernement dans le projet de loi 145, procurera aux organismes publics de
transport en commun des revenus d'appoint équivalent à peu
près à 20 % du montant total du transfert. Le montant total du
transfert est de 266 000 000 $; les revenus d'appoint seront de 50 000 000 $.
Dans certains cas, à la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec, ce sera 30 %; à la Société de
transport de l'Outaouais, 31 %; à l'organisme de transport en commun de
Sherbrooke, 36 %; à l'organisme de transport en commun de
Trois-Rivières, 95 %; et à l'organisme du transport du Saguenay,
60 %. Ce sont quand même des... Vous le dites d'ailleurs dans votre
mémoire, je vous en sais gré: C'est un pas dans la bonne
direction.
Une voix:...
M. Ryan: Ha, ha, ha! Nous l'avons bien noté et je voulais
vous en remercier. Je voulais vous poser deux questions. Une question, puis un
commentaire avant. Vous dites qu'il faudrait que l'ensemble de la population du
Québec soit appelée à contribuer au financement du
transport en commun. Comme proposition de discussion, je n'ai pas d'objection
à recevoir cette affirmation, mais je pense qu'elle a besoin
d'être examinée de très près. Je vais vous donner un
exemple concret. Moi, je représente le comté d'Argenteuil
à l'Assemblée nationale. Mes gens à Lachute n'en ont pas
du tout, de transport en commun. Ils sont obligés de payer, même
pour aller voir un médecin à Saint-Jérôme, il faut
qu'ils prennent soit la voiture d'un parent ou un taxi. Il n'y en a pas, de
transport en commun, puis vous voudriez qu'ils paient pour le transport en
commun à Montréal. C'est difficile à comprendre. Et les
gens de mes 22 municipalités rurales. Je pense qu'à un moment
donné...
M. Tanguay:...
M. Ryan: Pardon?
M. Tanguay: Est-ce que c'est une question ou un commentaire?
M. Ryan: Non, non. C'est un commentaire pour l'instant, parce que
vous avez cette proposition dans votre mémoire. Je vous donne la
réaction en provenance.
M. Tanguay: On va revenir là-dessus.
M. Ryan: Oui, oui. Vous pourrez commenter ça en toute
latitude tantôt. Je vais vous donner le plus de temps possible à
cette fin. C'est une question qui nous est posée. Si j'écoutais
le député de Rimouski et le député de
Montmagny-L'Islet, je suis sûr qu'ils auraient des réactions
semblables. Quand on est rendu dans la municipalité dont le
député de Montmagny-L'Islet a été maire pendant
longtemps, Saint-Pamphile, je pense que c'est pas mal loin du transport en
commun. Et eux, ils ont des problèmes de transport qui ne sont pas
réglés. C'est ça qui presse, ils ne sont pas
réglés leurs problèmes.
Alors, je vous pose la question: Est-ce qu'il y a beaucoup, beaucoup de
possibilités de ce côté-là? En toute
honnêteté, je ne le pense pas. Nous sommes allés à
peu près aussi loin que nous pouvions aller et vous avez sans doute
entendu les commentaires du maire de Mirabel - c'est dans mon comté, je
vous le mentionne à dessein - critiquant cette mesure de 30 $ de droit
sur les frais d'immatriculation des véhicules automobiles. C'est
vraiment presque un crime de lèse-majesté que j'ai commis
à l'endroit de sa population en proposant cette mesure-là comme
ministre des Affaires municipales. (23 h 15)
Nous sommes sur le terrain de la politique et, évidemment, il y a
des choses qui sont accessibles; il y en a d'autres qui ne le sont point. Je
vous donne juste cette réserve-là. Ma question est la suivante.
Vous dites: II n'y a pas grand-chose à tirer de la hausse des tarifs.
L'apport des usagers, dites-vous, ne peut pas être augmenté
substantiellement. Nous avons entendu cet après-midi la
Société de transport de la ville de Laval, dont les dirigeants
nous ont dit qu'ils ont procédé à une hausse significative
des tarifs, l'an dernier, et qu'en même temps le service a
enregistré un accroissement d'achalan-
dage de l'ordre de 18 %. Ils ont dit qu'ils envisagent un nouvel
ajustement cette année et que, jusqu'à ce jour, le volume de
trafic voyageur accuse également une progression. Ils ont fait un
sondage au début de l'année, demandant à la population:
Aimez-vous mieux payer un petit peu plus pour avoir un meilleur service ou
moins avec un service détérioré? La réponse
à 80 %, si j'ai bien compris cet après-midi, a été
dans le sens d'un service amélioré, même si ça doit
comporter une certaine augmentation. Je vous demande, par conséquent,
est-ce qu'à Montréal, d'autre part, on n'a pas beaucoup
touché aux tarifs au cours des dernières années et,
finalement, il y a eu une diminution de l'achalandage? C'est évident,
quand le système ne fonctionne pas, quand on l'arrête à
tout propos pour des considérations syndicales et autres, ce n'est pas
de nature à attirer la clientèle beaucoup.
Alors, je vous pose la question: Est-ce que vraiment on ne pourrait pas
aller un petit peu plus loin que ne le suggère votre mémoire?
Est-ce que vous n'êtes pas un petit peu timoré là-dessus,
vous de l'Association du transport urbain du Québec?
M. Tanguay: Probablement que l'adverbe "substantiellement" est
peut-être mal choisi. Je peux en convenir. Sauf qu'il faut le remettre
dans toute sa perspective. Ce qu'on regarde globalement au travers du document,
c'est l'enjeu de 175 000 000 $ avec lesquels devront composer les
sociétés de transport, à partir du 1er janvier prochain.
Deux alternatives s'offrent concrètement à nous à partir
du 1er janvier, c'est soit les tarifs, soit une participation accrue des
municipalités et par les différents volets. Si vous le permettez,
je pourrai revenir plus en détail, tantôt, là-dessus.
Ce qu'on veut dire, finalement, c'est que c'est évident qu'au
niveau des usagers, on ne peut certainement pas arriver demain matin et doubler
les tarifs, même pas les augmenter de 50 %. Ça aurait des
conséquences extrêmement négatives sur le niveau
d'achalandage. Si la ville de Laval, en montant de façon plus que
substantielle ses tarifs, a réussi quand même à maintenir
un achalandage intéressant, tant mieux pour elle. Nous, on est quand
même obligés d'avoir une vision provinciale de la
problématique où, au cours des dernières années,
dans certains milieux, il y a eu quand même des augmentations
importantes.
Je vous donne l'exemple d'Oshawa qui a augmenté le coût de
12,5 % avant l'entrée en vigueur de la réforme Ryan, en 1991, ou
on va être obligé de l'augmenter de l'ordre d'à peu
près 7 % à 10 %, et ça va être ces
proportions-là à peu près partout. On pense, au niveau de
l'ATUQ, que ça va être le maximum raisonnable où on est
capable d'aller. Autour de 10 %. Demander 10 % additionnels à nos
usagers, c'est déjà un très, très bel effort, d'une
part.
Voyons, j'ai perdu mon idée. Je voudrais revenir aux commentaires
que vous faisiez tantôt. Dans notre document, on mentionnait que l'on
croit qu'une partie du financement des opérations du transport en commun
devrait être défrayée par l'ensemble de la population du
Québec. Je ne veux pas répéter ce qui est dit
là-dedans. C'est à cause des "extemalités", des effets
bénéfiques pour l'ensemble de la population que constitue le
transport en commun. Que ce soit en matière de pollution, tant qu'il y a
de la pollution ou de la congestion dans les centres-villes, ce n'est pas juste
les gens qui vivent là qui en profitent. Ceux qui viennent des parties
plus rurales ou extérieures aux régions métropolitaines
sont aussi bénéficiaires de ça.
Si vous le permettez, je vais vous faire une comparaison un peu
ridicule, j'en conviens d'avance, mais je pense qu'elle a toute sa pertinence.
En 1920, Tancrède disait à Gaston: Écoute, Gaston, tu ne
trouves pas que ça n'a pas de bon sens d'envoyer tes excréments
et tes égouts domestiques dans la rivière? Gaston, dans ce
temps-là, il disait: Ce n'est pas bien, bien grave. Écoute, la
rivière, elle coule là et c'est une petite parcelle de l'ensemble
de la rivière. Ce n'est pas plus grave que ça. Avec des
raisonnements comme ça, on s'est retrouvé dans les années
1980, et on a été obligé de dépenser des milliards
pour la dépollution des eaux.
J'ai l'impression, des fois, que ce message-là est difficile
à passer tant qu'on veut essayer d'exprimer que, finalement, le
transport en commun, ce n'est peut-être pas l'unique coup de scie qu'on
peut utiliser, mais c'est un outil fondamental pour nous aider à faire
en sorte d'éviter la pollution atmosphérique. Ce ne sera pas dans
50 ans que ça va être le temps de se réveiller.
Les gouvernements du Québec antérieurs ont fait des
efforts considérables là-dessus. Je pense qu'il faut être
objectif et il faut être positif aussi. Il y a eu de très beaux
efforts, autant par le gouvernement libéral que par le gouvernement du
Parti québécois et les autres antérieurement. Vous nous
demandez de donner des réponses honnêtes? On va vous en donner
une. Effectivement, le gouvernement a peut-être mis trop d'argent dans le
transport en commun. Sauf que ce n'est pas parce qu'il en a mis un petit peu
trop qu'il est obligé de se retirer complètement. On n'est pas
obligé de passer d'un extrême à l'autre.
Il y a un juste milieu. Il y a un équilibre quelque part dans
l'ensemble de cette probléma-tique-là. C'est ce qu'on essaie de
refléter à l'intérieur du document où on dit qu'il
y a cinq groupes distincts qui devraient financer le transport en commun.
Les municipalités défraient déjà à
peu près 25 %. Je pense que c'est une part appréciable, c'est
important. Les usagers en paient déjà au-delà de quelque
30 %, c'est important. Le gou-
vernement du Québec en payait peut-être trop. Ce qu'on
suggère, nous autres, humblement, c'est qu'il y ait un quatrième
intervenant qui sont les automobilistes, qui sont des grands
bénéficiaires du transport en commun. Que ça prenne la
forme de loi sur les immatriculations, que ça prenne la forme
additionnelle des droits sur l'essence, mais que ces gens-là contribuent
au financement du transport en commun.
M. Ryan: Monsieur...
La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.
M. Ryan: ...j'allais ajouter qu'hier soir, nous avons entendu le
point de vue du Club automobile du Québec, qui est venu nous parler de
la contribution que les automobilistes apportent déjà au
trésor public sous mille et une formes différentes. Il faut quand
même le dire. Le député de Jonquière, tout ça
s'additionne. Je sais que cette source-là ne présente pas un
potentiel illimité, mais je voudrais vous rappeler une autre chose,
c'est que le gouvernement ne se désengage pas du transport en commun. La
contribution qu'il versera l'an prochain, je l'ai indiqué au cours de la
journée, sera, tout compte fait, de l'ordre de 300 000 000 $, sans
compter le transport écolier pour lequel, comme vous le savez, le
gouvernement dépense cette année, je pense que c'est 385 000 000
$ dont une partie va aux organismes de transport en commun. Cette
partie-là, je l'estime à, attendez un petit peu, peut-être
une quarantaine de millions.
Alors, le gouvernement est loin de se désengager totalement. On
pourrait discuter ad infinitum est-ce que ça devrait être 300 000
000 $, 325 000 000 $ ou 340 000 000 $ et je respecte votre point de vue, il est
peut-être aussi bon que le nôtre. Excepté qu'il faut que
quelqu'un tranche quelque part, et le gouvernement doit trancher en fonction
des nombreux autres impératifs auxquels il doit obéir. Si on peut
ajuster, on va l'examiner, mais je crois que le désaccord entre nous est
plus de l'ordre du quantum que de l'ordre des principes. Sur les principes,
nous sommes tous d'accord qu'il y a... Nous ne disons pas que c'est
essentiellement de responsabilité, nous disons que c'est surtout, que
c'est principalement de responsabilité locale et municipale. Je ne dirai
jamais que c'est de responsabilité exclusivement locale, parce que je
suis capable de comprendre l'autre dimension, étant un citoyen de
Montréal depuis ma naissance.
M. Tanguay: Mais, M. Ryan, indépendamment des quanta, je
pense qu'il y a des calculs qui sont simples, que les chiffres existent. Quant
on parle que les effets sociaux du transport en commun représentent 80
000 000 $, je pense que c'est évident pour tout le monde que c'est une
responsabilité non pas locale, mais provinciale. Quant au reste, nous ne
demandons pas au gouvernement de l'absorber. On lui dit tout simplement: Vous
avez fait un bel effort avec les droits sur les immatriculations, faites un
effort additionnel en utilisant une partie des droits d'essence que vous avez
décrétés lors de la présentation du dernier budget.
Et, à notre connaissance - et vous me corrigerez si je suis dans
l'erreur - il n'a pas été déclaré à quel
endroit spécifiquement, à quelles fins spécifiques
seraient dévolus ces droits additionnels sur l'essence. Ça se
peut que je me trompe, je pose la question en même temps que je la
dis.
M. Ryan: Vous voulez dire la taxe additionnelle sur
l'essence?
M. Tanguay: Oui.
La Présidente (Mme Bélanger): L'ensemble des
dépenses.
M. Ryan: Ça va dans le trésor commun, dans le fonds
consolidé...
Le Présidente (Mme Bélanger): C'est ça.
M. Ryan: ...pour l'éducation, pour les routes, pour les
hôpitaux et la santé, pour une infinité d'autres fins
auxquelles doit répondre le gouvernement. Ça, c'est bien simple.
Je pense que la réponse est claire.
M. Tanguay: En tout cas, ce que le document vient vous dire,
à toutes fins pratiques en conclusion, c'est: Utilisez donc une partie
de ces droits d'essence supplémentaires qui ont été
décrétés pour les affecter au financement du transport en
commun. À ce moment-là, ça permettra aux automobilistes de
contribuer, eux aussi, au-delà des 50 000 000 $ qu'on leur demande sur
les droits d'immatriculation.
M. Ryan: Regardez, j'ai déjà répondu
à cette suggestion-là à maintes reprises...
M. Tanguay: Merci. Ça va.
M. Ryan: ...au cours des derniers mois. Je ne me
répéterai pas ce soir, mais je veux commenter juste
brièvement un autre aspect de ce que vous venez de dire.
M. Tanguay: Oui.
M. Ryan: C'est les coûts sociaux du transport en commun. Je
voulais en dire un mot et j'allais l'oublier. Nous en avions déjà
discuté dans des rencontres antérieures. J'avais proposé
à l'Union des municipalités du Québec que nous formions au
besoin une table spéciale pour examiner ce problème-là de
manière approfondie.
Si les échanges s'étaient déroulés dans un
climat plus constructif au cours des derniers mois, je pense que nous aurions
pu progresser davantage sur ce point-ci. On faisait une rencontre qui se
déroulait dans un esprit très constructif et moi, je lisais, le
lendemain, dans les journaux une dénonciation en règle, qui ne
reflétait pas du tout l'esprit des conversations que nous avions eues et
vous en fûtes témoin.
M. Tanguay: Oui.
M. Ryan: Mais, à ce moment-là, on n'était
pas trop enclin à reprendre la discussion le surlendemain, et celui qui
avait agi de cette manière-là non plus. Je crois qu'il va falloir
qu'on se retrouve. Vous soulevez un problème, là, auquel je n'ai
jamais donné de réponse péremp-toire. Je sais qu'il y a
quelque chose à regarder. Nous allons l'examiner. Il y a un premier pas
qui a été fait par le gouvernement avec les droits sur
l'immatriculation des véhicules automobiles, et je suis loin de
prétendre que la question est fermée à jamais.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.
M. Ryan: Je prends note de ce que vous avez dit, et nous
poursuivrons le travail sur ce point-là.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le
ministre. Alors, pour être équitable, 15 minutes. Le ministre n'a
pas eu une minute de plus.
M. Dufour: Merci, Mme la Présidente. Effectivement, je
pense bien que le ministre vient de reconnaître qu'en 1990, il y a eu
presque un état de guerre de déclaré avec les
municipalités concernant le financement scolaire. Il y a eu certains
engagements. Le 14 décembre, ça a été une nouvelle
guerre qui s'est déclarée, le front s'est rouvert. Dans le fond,
il y avait eu une trêve, mais je pense que le message n'a pas
été bien perçu par Québec parce qu'ils ont cru que
ça s'était résorbé; dans le fond, c'était
juste une accalmie. Le 14 décembre, par la mise en avant de certaines
propositions, la guerre s'est déclarée. Là, c'était
une vraie. Le ministre a eu de la difficulté à accepter ça
et à comprendre qu'on s'attaquait vraiment et fondamentalement au pacte
fiscal de 1979. Là, il vient de reconnaître et de dire: On aurait
pu avoir un bon dialogue, si on avait engagé... Là, on est rendu
au dialogue. Ça arrive, des fois, qu'on déclare la guerre.
Là, on pourrait déclarer une trêve et se donner un temps de
réflexion et un temps de concertation et de discussion. C'est encore le
temps. On le lui a proposé. D'autres intervenants qui vous ont
précédé ont dit: Retirez donc ça un petit bout de
temps, on pourrait discuter et on pourrait essayer d'en faire quelque
chose.
Le ministre vous a dit: Laval, ça va bien. Mais, Laval,
savez-vous ce qu'ils ont dit cet après-midi? "Nous comprenons que les
sociétés de transport sont maintenant libres d'assumer
exclusivement le rôle qui leur est dévolu." Un peu plus loin, on
nous dit que les mesures gouvernementales ont faussé la perception du
public à l'égard du transport en commun, en y accolant
également la notion de "transport des pauvres". Là, on dit:
Actuellement, c'est ancré. Les mesures sociales que les politiques
antérieures du gouvernement nous ont amenés à mettre en
place totalisent 15 000 000 $, dont 6 000 000 $ de manque à gagner pour
les tarifs. Ce rôle-là peut se justifier dans une
société d'abondance, mais c'est un luxe qu'on ne peut plus
assumer. Ils disent: Actuellement, notre mission est claire: nous sommes des
transporteurs du public et c'est à ce rôle qu'à l'avenir,
nous nous confinerons. Je leur ai posé la question, et savez-vous ce que
ça veut dire? Ça veut dire que tout ce qui a été au
point de vue social, ils sont prêts à mettre la hache
là-dedans. Je leur ai demandé: Pensez-vous que vous avez le
pouvoir de le faire? Ils ont dit: Oui.
Je veux vous poser deux questions, par exemple. Dans les montants
d'argent que vous suggérez - est-ce que j'ai bien lu? - il y a 85 000
000 $ pour les coûts sociaux, il y a 50 000 000 $ que vous demandez en
plus - ça pourrait être plus que les coûts d'immatriculation
- vous les avez - 50 000 000 $ - et 0,02 $ ou 0,03 $, si on met ça sur
le sens, 0,02 $, ça représente 150 000 000 $. Ça veut dire
285 000 000 $, c'est à peu près ça que vous demandez
actuellement au gouvernement pour fonctionner.
M. Tanguay: Écoutez, je n'ai pas le sentiment que c'est la
place pour faire des quanta.
M. Dufour: Je prends vos chiffres à vous autres.
M. Tanguay: On veut s'asseoir sur les principes. Il y a cinq
grands bénéficiaires du transport en commun et qu'il y ait une
redistribution de l'enveloppe générale, eu égard aux
responsabilités de chacun... Pour le gouvernement, on estime que sa part
devrait être minimalement d'au moins 85 000 000 $. Je ne le ferai pas,
mais on pourrait faire la démonstration n'importe quand qu'effectivement
c'est 85 000 000 $.
M. Dufour: On a beaucoup la situation de Montréal,
Québec, Laval. Ils sont venus nous donner un point de vue assez
important concernant le transport en commun. Même à la ville de
Montréal, il y a beaucoup de gens qui sont venus nous en parler. Mais
pour les corporations régionales, vous êtes les premiers qui
sont...
M. Tanguay: Oh! faites attention, là.
M. Dufour: ...les intervenants.
M. Tanguay: Moi, je ne suis pas ici comme un intervenant
régional. Je suis pour...
M. Dufour: Mais vous êtes pour l'Association...
M. Tanguay: ...l'ensemble des neuf organismes de transport en
commun au Québec...
M. Dufour: O.K.
M. Tanguay: ...y inclus Montréal et Québec.
M. Dufour: Mais vous êtes bien placé pour
répondre.
M. Tanguay: Je suis placé pour vous répondre sur ce
qui se passe dans les milieux régionaux, effectivement.
M. Dufour: Si la réforme n'est pas bonifiée ou si
elle demeure telle qu'elle est proposée actuellement, quel effet cela
aura-t-il sur les transporteurs, les sociétés ou les corporations
autres que celles que j'ai identifiées - Laval, on le sait, ils sont
venus - que celles qui ont présenté des mémoires ici? Les
autres, quel effet ça peut avoir?
M. Tanguay: Pour les plus petits... Je ne peux pas
répondre pour tout le monde, mais je peux vous dire, suivant des
discussions que j'ai eues avec certains d'entre eux, qu'effectivement, dans
certains milieux, ça met même en péril l'existence du
transport en commun. C'est un net recul qu'à l'aube du XXIe
siècle on en soit rendu là au Québec, alors que, dans la
majorité des grandes agglomérations urbaines de notre monde
occidental, on investit beaucoup dans le transport en commun. Je ne nie pas que
le gouvernement investit là-dedans, il investit. Mais la réforme,
telle qu'elle est présentée actuellement, effectivement,
ça met en péril l'existence même du service dans certains
milieux. Je ne les nommerai pas, par égard pour ces
municipalités-là, mais ça met en péril...
Globalement parlant, même si on achetait la réforme telle qu'elle
est, même si on l'achetait pour 1992, à mon point de vue - et
là, c'est un point de vue personnel que je vous donne - je pense que
c'est dramatique. Pour une raison fort simple. Les municipalités,
à notre point de vue, vont refuser - il y en a certainement
quelques-unes qui sont venues vous le dire - d'injecter des sommes aussi
considérables dans le transport en commun sur la base de la taxe
foncière. Pourquoi je dis sur la base de la taxe foncière? Et
ça, je ne suis pas l'homme le plus qualifié de la province de
Québec pour répondre à ça, mais il y a certainement
des experts qui vont vous dire que les droits sur les stationnements et la taxe
sur les immeubles non résidentiels, à toutes fins pratiques, pour
1992, ce n'est pas applicable. Ça fait qu'à partir de là,
je pense que les organismes, le gouvernement et les municipalités ont
besoin d'un petit peu de temps. Ils ont besoin d'un petit peu de temps pour
voir comment est-ce qu'on va gérer cette affaire-là.
M. Dufour: Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi ce
n'est pas applicable?
M. Tanguay: Le temps que les municipalités vont se revirer
de bord pour asseoir l'assiette sur laquelle elles vont aller taxer sur le
stationnement, on va être rendu en 1992. En tout cas, moi j'ai eu une
discussion - là, c'est très personnel ce que je vous dis
là et on n'a pas fait d'enquête à travers la province - au
sein de la ville de Sherbrooke on en a discuté avec le directeur des
services financiers qui, lui, était catégorique, à toutes
fins pratiques, ce n'était pas possible d'appliquer ça pour
1992.
M. Dufour: Bon. Il y a les évaluateurs qui sont venus nous
dire, cet après-midi, qu'en mettant bien, bien du gros travail - je ne
sais pas s'ils ont présumé de leurs forces - mais que ça
pourrait être possible, mais avec une certaine extension que la loi
permette au point de vue de l'inscription au rôle et des ajustements.
C'est évident que toute cette réforme-là, vous savez bien
que c'est un marathon pour l'adoption de la loi, ça va être un
marathon pour l'application et ça va être une désolation
après qu'elle sera appliquée.
M. Tanguay: Écoutez, tant mieux si je me trompe, mais j'ai
de sérieuses réserves là-dessus.
M. Dufour: Je n'ai pas de crainte. Moi, je ne mets pas en doute
ce que vous me dites. Vous avez l'expérience du domaine municipal et
c'est une forme de gouvernement qui, comme ailleurs...
M. Tanguay: Ce n'est pas toujours...
M. Dufour: ...on sait comment c'est dur de faire bouger une
machine ici. Dans les municipalités, c'est pareil. Ça prend un
bon poids pour la faire bouger. Ce n'est pas aussi facile que ça. Ce
n'est pas aller... Va, prends ton grabat et marche. Ce n'est pas comme
ça. Il faut prendre le temps de faire l'analyse. Est-ce que vous pensez
qu'avec les lois "habilitantes" - parce que vous avez une loi qui a mis sur
pied ces corporations de transport là - vous avez des marges d'autonomie
ou de manoeuvre? Ce que je veux dire par là: Est-ce que vous croyez que
vous pouvez penser - et est-ce que vous l'avez pensé - privatiser?
Est-ce que vous pensez que vous pouvez cibler ou vous désengager par
rapport à Québec dans certains domaines en
supposant, comme Laval nous a dit, si les gens n'ont pas le moyen de
payer, ils ne le prendront pas le transport? Ils ne l'ont pas dit aussi
clairement que ça mais lisons leur mémoire, c'est ça
qu'ils nous ont dit. Je ne sais pas s'ils le feront, mais c'est écrit.
Est-ce que vous pensez que dans cette loi-là vous avez cette marge de
manoeuvre? Parce que, normalement, si on vous donne l'obligation de payer, vous
avez plus de pouvoir décisionnel.
M. Tanguay: Ce genre de décision ne dépendrait pas
de la loi, il dépendrait d'une volonté politique du milieu local
de privatiser le transport en commun. Écoutez, vous avez eu toutes
sortes de versions. Je pense que ça confirme ce qu'on vous dit de la
psychose que ça occasionne un petit peu partout à travers la
province, la réforme telle qu'elle est présentée. Ce qu'on
craint énormément, c'est que finalement les municipalités,
faute de - peut-être, je le mets entre guillemets - si elles ne sont pas
capables d'aller chercher des ressources qui leur sont attribuées
à l'intérieur de la réforme, elles vont demander aux
organismes de transport en commun d'effectuer des coupures qui, à toutes
fins pratiques, ne seront pas gérables et qui vont constituer un net
recul sur le service et tu ne pourras plus revenir en arrière. Une fois
que le mal va être occasionné, il va être trop tard.
Ça va prendre deux décennies pour ramener tout ça.
M. Dufour: Est-ce que vous croyez... Peut-être ceux de
Sherbrooke, est-ce que vous croyez qu'avec ces mesures-là qu'on vous
impose, vous pourrez... Parce que je sais que Sherbrooke a été
longtemps presque le modèle régional au point de vue
transporteur. Moi, en tout cas, les échos que j'avais, c'était
que Sherbrooke avait à peu près la commission de transport la
plus efficace, à tort ou à raison, mais je l'ai entendu dire
à plusieurs reprises. Est-ce que vous croyez que vous pouvez
rationaliser, économiser, étirer le budget et que vous n'aurez
pas d'impact? Est-ce qu'il est possible encore d'aller couper dans le gras ou
quelque part par là?
M. Lacroix (Jacques): Globalement, pour Sherbrooke... D'une part,
Sherbrooke est peut-être la corporation au Québec qui a la marche
la plus haute à franchir par rapport à l'application de la
réforme. Ça représente au-delà de 20 % de
l'ensemble de son budget, compte tenu des subventions qu'on recevait. C'est
vrai que c'est une corporation qui est performante compte tenu de son
achalandage, de son coût d'entretien, ces choses-là, quand on
considère des indicateurs de performance. À date, on commence
à regarder avec les gens chez nous de quelle façon on va pouvoir
non pas appliquer cette réforme-là parce que ça ne sera
pas à la corporation de le faire, ça va être aux
municipalités de décider quels moyens elles vont mettre à
la disposition des corporations et, une fois qu'on aura ça, on aura les
outils après ça, nous autres, pour travailler. Mais je peux vous
dire qu'à date, on ne pense pas être en mesure d'appliquer
l'ensemble de la réforme à court terme sans prendre en
considération une évaluation très sérieuse du
niveau de service qu'on offre. Et ce niveau de service correspondait à
un niveau de performance qui est un modèle au niveau de la province.
M. Dufour: Est-ce que vous avez des choses à ajouter ou
à nous dire? Vous pouvez prendre ça sur mon temps.
M. Lacroix: Pardon?
M. Dufour: J'ai dit: Je pourrais continuer à vous
questionner, mais le temps commence à se faire rare. Est-ce que vous
avez des choses que vous voudriez rajouter? Supposons qu'on n'a pas posé
toutes les questions, si vous aviez une question spéciale, un message
spécial ou un point spécifique.
M. Lacroix: Moi, je veux juste rajouter une chose. C'est
qu'à chaque fois qu'on a parlé à notre niveau
administratif ou politique au niveau de l'ATUQ - et là, quand je dis "on
a parlé", on est quand même des représentants provinciaux
-les neufs corporations ont toujours été d'accord pour que la
quatrième source de financement, ce soit les automobilistes. Il y a un
effort qui a été fait dans ce sens-là, mais il y a
d'autres statistiques qui démontrent que les automobilistes
bénéficient largement du transport en commun comme d'autres
services qui sont offerts aux citoyens. Les citoyens paient aussi pour d'autres
services qui bénéficient aux automobilistes et, dans ce
sens-là, la contribution pourrait être largement augmentée
pour assurer la pérennité du transport en commun.
M. Dufour: Je voudrais vous remercier de votre participation
à cette commission. J'espère que le ministre aura entendu que sa
réforme peut sonner la mort ou l'asphyxie du transport en commun dans
l'ensemble du Québec. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Bélanger): MM. Tanguay, Blouin
et Lacroix, nous vous remercions de votre participation. La commission ajourne
ses travaux à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 38)