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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le jeudi 21 mars 1985 - Vol. 28 N° 23

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation particulière sur le projet de loi 13 - Loi sur les parcs nationaux


Journal des débats

 

(Dix heures neuf minutes)

Le Président (M. Marquis): La commission parlementaire de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux afin de procéder à une consultation particulière sur le projet de loi 13, Loi sur les parcs nationaux. Je demanderais à M. le Secrétaire s'il y a des remplacements prévus.

Le Secrétaire: II n'y en a aucun, M. le Président.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup. Nous accueillons nos premiers invités, ce matin, les représentants du Jardin botanique de Montréal avec, comme porte-parole, M. André Bouchard, conservateur du Jardin botanique. C'est cela?

M. Bouchard (André): C'est cela.

Le Président (M. Marquis): Vous êtes accompagné.

M. Bouchard: De M. Jean-Luc Bourdages qui est à la faculté d'aménagement de l'Université de Montréal.

Le Président (M. Marquis): Très bien. Alors, M. Bouchard, la parole est à vous.

Jardin botanique de Montréal

M. Bouchard: Je vous remercie beaucoup. Permettez-nous, en premier lieu, de remercier la commission de l'aménagement et des équipements de nous avoir invités à apporter nos commentaires sur le projet de loi 13 intitulé Loi sur les parcs nationaux.

Ce projet de loi, déposé par l'ex-ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, M. Guy Chevrette, remplacerait la Loi sur les parcs adoptée en 1977. Essentiellement, ce projet de loi ajoute le concept de parc national, mais diminue les garanties de protection du milieu naturel que contient l'actuelle loi, en enlevant la distinction entre parc de conservation et parc de récréation.

Avant de discuter davantage du contenu du projet de loi, nous désirons vous faire part de nos interrogations sur la pertinence même du projet. En effet, nous nous demandons dans quelle mesure la préparation d'une nouvelle loi sur les parcs fait suite à des requêtes fréquentes de la part des intervenants du milieu dans le domaine des parcs. Rappelons d'ailleurs que l'actuelle Loi sur les parcs ne fut sanctionnée qu'en 1977 et que la politique sur les parcs fut présentée en 1982, voilà donc seulement trois ans. Nous ne prétendons aucunement que l'actuelle loi soit parfaite et qu'elle ne nécessite aucune modification. Par exemple, certains changements seraient souhaitables au niveau du zonage, de la consultation publique et de l'expropriation. Toutefois, cette même loi a permis et permet encore de créer plusieurs parcs. Ainsi, tout récemment, le gouvernement créait les parcs de conservation d'Aiguebelle, en Abitibi, de l'Île-Bonaventure et de Miguasha, en Gaspésie. En 1984, le parc de conservation du Bic et le parc de récréation des Îles-de-Boucherville étaient créés. À cela s'ajoutent ceux établis depuis 1977: les parcs de la Gaspésie, de la Jacques-Cartier, des Grands-Jardins, du Mont-Orford, du Mont-Tremblant, du Saguenay et de ta Yamaska. Le ministère annonçait même, le 9 mars dernier, la tenue prochaine d'une audience publique au sujet de la création d'un parc de conservation à Pointe-Taillon, en bordure du lac Saint-Jean. Et tout cela, en s'accommodant très bien du* principe de classification prévu par l'actuelle loi. En fait, il subsiste un seul problème, celui du parc du Mont-Saint-Bruno dont les audiences remontent déjà à décembre 1982. La lecture du Journal des débats nous porte d'ailleurs à croire que le projet de loi 13 n'a été présenté que pour régler ce seul problème.

La Loi sur les parcs de 1977 permet la création de parcs de conservation et de parcs de récréation. Le premier a comme objectif prioritaire - vous avez dû l'entendre plusieurs fois déjà - la protection permanente de territoires représentatifs des régions naturelles du Québec ou de sites naturels à caractère exceptionnel tout en les rendant accessibles au public pour des fins d'éducation et de récréation extensive, alors que le second favorise la pratique d'une variété d'activités récréatives de plein air tout en protégeant l'environnement naturel.

C'est très important de réaliser que les Québécois ont un besoin pressant des deux genres de parc. Cependant, les parcs de conservation sont les seuls à répondre aux critères et à la tradition des grands réseaux de parcs nationaux du Canada et des États-Unis. Par exemple, le parc de récréation de

la Yamaska joue un rôle important - je ne veux pas du tout, par mon intervention, faire croire que je ne crois pas que ces parcs ne sont pas importants - mais ne saurait s'appeler le parc national de la Yamaska. Les touristes étrangers qui nous arriveraient des États-Unis par l'autoroute, qui font le tour des réseaux de parcs nationaux américains et canadiens, seront étonnés de voir de tels territoires porter cette appellation. Demandez à vos parents, à vos amis ce que représentent pour eux les parcs nationaux. Ils vous parleront alors de Banff, de Forillon, de Yosemite, de Yellowstone, de la Mauricie. Au Québec, nous pourrions ajouter, et nous serions justifiés de le faire, les parcs de la Jacques-Cartier, des Grands-Jardins, du Saguenay, de la Gaspésie, etc.

À notre avis, il aurait été plus pertinent d'amender la Loi sur les parcs de 1977 pour y inclure les éléments nécessaires à une meilleure administration et application de celle-ci. Au contraire, plutôt que d'introduire certains éléments suggérés au cours de diverses audiences publiques, le projet de loi 13 élimine les quelques garanties d'une protection adéquate des éléments représentatifs ou exceptionnels du patrimoine naturel québécois. À vrai dire, le seul élément positif que nous avons noté dans ce projet de loi se trouve à l'article 2, lequel prévoit un pouvoir explicite d'expropriation qui pourrait permettre au ministère de régler les litiges lors de la création de nouveaux parcs, litiges qu'il a connus d'ailleurs dans le cas de la création du parc d'Aiguebelle, en Abitibi.

Le projet de loi crée des ambiguïtés en remplaçant la classification en parcs de récréation ou de conservation par l'identification d'objectifs moins bien définis. La diminution des garanties de protection vient surtout de l'ambiguïté des deux objectifs mentionnés et qui se réfèrent aux définitions des deux types de parcs prévus par la loi de 1977. En effet, le premier objectif correspond à la définition du parc de conservation dont on a pris soin d'enlever deux notions importantes, celles d'éducation et de récréation extensive. Le second objectif se rapproche sensiblement de la définition du parc de récréation. Cependant, le projet de loi ne spécifie pas si un de ces objectifs peut ou doit primer l'autre.

Par contre, le second aliéna de l'article 23 laisse croire que les futurs parcs nationaux assujettis à cette loi seraient à la fois des parcs de conservation et de récréation puisque la classification des parcs existants serait substituée par les deux objectifs prévus è l'article 1.

Mais la confusion est d'autant augmentée par l'aliéna qui suit les deux objectifs et qui précise que: "Le décret établissant un parc national doit spécifier pour lesquels de ces objectifs il est établi".

C'est donc dire que d'autres objectifs viendront se greffer aux précédents. Alors qu'est-ce qui primera? Nous craignons que l'objectif fondamental du concept de parc national devienne bien secondaire par rapport au développement d'infrastructures récréatives et au tourisme. Or, le parc national doit prioritairement poursuivre des objectifs de préservation du milieu naturel, auxquels s'ajoutent des objectifs sous-jacents comme la récréation extensive de plein air et le tourisme. Nous ne nions aucunement le rôle important d'un réseau de parcs au sein d'une politique d'ensemble du tourisme et du développement régional. Au contraire, il importe que le gouvernement du Québec réalise enfin l'importance des deux grands réseaux de parcs nationaux, celui des Etats-Unis et celui du Canada, comme éléments essentiels de leur politique du tourisme, bien que ceux-ci assurent un haut niveau de préservation des sites naturels.

La diminution des garanties de protection résulte aussi du fait que le ministre n'aura plus à tenir d'audiences publiques s'il décide de modifier les objectifs pour lesquels un parc a été établi. Rappelons que la loi actuelle oblige !e ministre à tenir des consultations s'il désire changer la classification d'un parc. Le pouvoir discrétionnaire du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche s'en trouverait donc accru. D'autre part, bien que le ministère compte beaucoup, par ce projet de loi, atténuer les rares et finalement assez rares confrontations sur la question de la classification, nous sommes persuadés que le retrait de la distinction entre les deux classes de parcs n'empêcherait pas les confrontations normales et saines entre les conservationnistes et les récréationnistes; elles sont là pour demeurer, ces confrontations, elles sont tout è fait naturelles. Au contraire, les discussions se transposeraient au niveau des objectifs, du schéma d'aménagement et, particulièrement, du plan de zonage. On n'aura donc pas réglé le problème en enlevant cette distinction, bien au contraire.

Il est intéressant de constater que le projet de loi ajoute une disposition concernant le zonage dans le pouvoir réglementaire. Mais cette disposition demeure négligeable si l'on considère que le ministère a toujours préparé un plan de zonage lors de la création d'un parc. Elle est aussi beaucoup trop sommaire, car il s'agit là d'une question fondamentale qui réclame plus d'analyses préalables et qui devrait constituer un enjeu important dans les débats en audience publique. Outre la question de l'expropriation, celle du zonage constitue l'une des seules véritables faiblesses de l'actuelle loi, en raison de la possibilité pour le ministère de faire modifier les décrets au chapitre du zonage, une fois un parc établi. Lors de

certaines audiences, le ministre d'alors s'était dit conscient du pouvoir discrétionnaire dont il bénéficiait et, par le fait même, des craintes manifestées, par plusieurs intervenants. Il suggérait - donc de modifier la Loi sur les parcs surtout pour corriger cette lacune. Or, il serait illusoire de penser que la seule inscription, dans la loi, du pouvoir réglementaire de diviser un parc en zones puisse assurer une meilleure gestion et un meilleur contrôle de l'utilisation du territoire. L'emphase doit plutôt être mise sur les modalités entourant l'élaboration et la modification des plans de zonage et des plans directeurs. D'ailleurs, c'est un aspect qui est extrêmement important dans la procédure que prend Parcs Canada lorsqu'il consulte la population sur l'élaboration des plans de zonage. Il faut donc que la loi comprenne des modalités précises à ce sujet.

Nous croyons avoir abordé les éléments fondamentaux du projet de loi sur les parcs nationaux. À nos yeux, les éléments nouveaux apportés au chapitre II sur l'administration, au chapitre IV sur les dispositions pénales et au chapitre V sur les dispositions transitoires et finales nous paraissent secondaires secondaires par rapport à ce qui précédait -dans l'ensemble de la problématique des parcs. Dans plusieurs cas, il s'agit de modifications au niveau de la forme et, dans d'autres cas, d'ajouts qui permettront de faciliter la gestion et le contrôle des parcs.

En conclusion, étant donné la diminution des garanties de protection du milieu naturel et devant l'ampleur des inconvénients et des remaniements qu'impliquerait l'adoption du projet de loi 13, il est préférable de conserver l'actuelle Loi sur les parcs. La richesse et la diversité du patrimoine naturel du Québec doivent être protégées d'une manière adéquate et rendues accessibles à la population si nous voulons développer au Québec un réseau de parcs comparable à ceux du Canada et des États-Unis.

On nous a souvent accusés de faire de la sémantique au sujet de la classification des parcs. Mais voilà que, dans ce projet de loi, on ne s'intéresse qu'à l'épithète accolée au concept de parc, sans aucun égard à la philosophie déjà centenaire du concept de parc national. Pourtant, aujourd'hui, on s'entend à l'échelle internationale sur des critères bien précis de sélection et de gestion des parcs nationaux.

L'Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources, une organisation internationale dépendant de l'ONU, une organisation à laquelle adhère le gouvernement du Québec, résume ainsi ces critères: "Les parcs nationaux sont des régions terrestres ou aquatiques relativement étendues qui contiennent des échantillons représentatifs de régions naturelles importantes, de traits ou de panoramas d'importance nationale ou internationale, où les animaux et les plantes, les sites géomorphologiques et les habitats présentent un intérêt particulier du point de vue scientifique, éducatif et récréatif. Ils contiennent un ou plusieurs écosystèmes entiers qui n'ont pas été matériellement altérés par l'exploitation ou l'occupation humaine. Des mesures sont prises par les autorités compétentes du plus haut niveau pour empêcher ou éliminer dès que possible l'exploitation ou l'occupation de la région et pour faire entrer effectivement en vigueur le respect des traits écologiques, géomorphologiques ou esthétiques qui ont entraîné son établissement. "La ressource est gérée et mise en valeur de manière à pouvoir y poursuivre durablement les activités de loisir et d'éducation de manière contrôlée. La région est gérée de manière à rester dans un état naturel ou semi naturel. Les visiteurs y pénètrent dans des conditions particulières, à des fins d'inspiration, d'éducation, de culture et de détente. "

Vous pouvez comprendre alors que des parcs tels que ceux des Îles-de-Boucherville et de la Yamaska ne correspondent en rien au concept de parc national. Si le projet de loi 13 devait être adopté, il deviendra nécessaire pour le MLCP de tenir des audiences publiques au sujet de l'abolition de ces parcs et du transfert de leur juridiction à des municipalités régionales de comté ou à des municipalités. De même, il est possible que le ministère doive réviser les plans de zonage de certains parcs à la faveur d'une protection accrue de certains éléments naturels.

La Loi sur les parcs et son application sont beaucoup trop récentes pour en faire disparaître la philosophie de conservation qui y prévaut. II est préférable de laisser le Québec acquérir une expertise dans la gestion des sites naturels, avant d'adopter une nouvelle loi qui affaiblirait la protection de notre patrimoine naturel et qui invaliderait la politique sur les parcs québécois adoptée en 1982.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup, M. Bouchard. Avant de donner la parole au ministre, je vais rappeler les règles du jeu. Lorsque nos invités ont fini leur intervention, il reste une enveloppe de temps, au maximum une heure, avec la lecture ou la présentation du mémoire. On divise le temps entre les deux partis, le parti gouvernemental et l'Opposition. C'est à l'intérieur de chaque équipe à partager ce temps.

Dans le cas présent, si on arrondit, il reste entre 20 et 25 minutes de chaque côté. Alors, c'est à vous autres à le partager, sinon le président devra imposer la fin des

discussions, comme j'ai dû le faire hier. Il faudra vous entendre avec votre collègue pour partager quelque 20 minutes. M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, je serai très bref, quant à moi. Je voudrais d'abord remercier le Jardin botanique de Montréal de participer à cette consultation particulière et, du même coup, de manifester son vif intérêt pour l'établissement de parcs nationaux au Québec.

D'après ce que je peux voir, le débat se poursuit. Le débat commencé hier se poursuit, en particulier l'article 1, sur le fait que l'on enlève du projet de loi toute référence à une classification. Je pose un peu la même question que celle qu'on a posée hier aux organismes qui ont témoigné devant nous. Quand on prend connaissance de votre mémoire, on se rend compte - là-dessus, je suis pleinement d'accord avec vous - que le débat ou l'enjeu, quand on crée un parc national, doit porter sur les objectifs, les intentions d'aménagement, le zonage. Je pense que c'est là vraiment que se retrouve l'essentiel. Ce sont là vraiment les véritables enjeux. C'est à partir du zonage, des intentions d'aménagement, des objectifs poursuivis qu'on peut véritablement bien voir ce qu'on entend faire avec cette portion de territoire qu'on veut établir comme parc.

À partir de ce moment, quand on lit votre mémoire, c'est ce qu'on constate. D'ailleurs, vous recommandez que le zonage soit l'objet de consultation publique et que ce soit bien indiqué dans la loi. A partir de ce moment, est-ce que vous ne pensez pas que le maintien de la classification, dans la loi actuelle, risque de faire dévier le débat au cours d'audiences publiques, que le débat ne porte pas vraiment sur l'essentiel, alors que le projet de loi actuel indique que la consultation et le débat, par conséquent, vont porter sur les objectifs, donc sur la vocation, et également sur les intentions d'aménagement? Vous ajoutez le zonage, j'en conviens, mais, à partir du moment où on discute des intentions d'aménagement, naturellement, on discute aussi du zonage.

Je vous avoue que je parviens difficilement à prendre conscience qu'en ne mettant pas dans la loi la classification, on affaiblit ou on augmente les risques que le milieu naturel soit moins bien protégé. J'aimerais avoir des précisions là-dessus, sur les enjeux. Est-ce qu'on est d'accord pour dire que les enjeux véritables, quand on fait un parc, c'est la vocation, les objectifs poursuivis, les intentions d'aménagement, ce qu'on a l'intention de faire dans le parc et aussi le zonage, évidemment?

M. Bouchard: En fait, ces enjeux sont certainement les enjeux principaux. La classification est peut-être vue comme une première grande division quant à ce qui va suivre à la fois dans les plans de zonage d'un type de parc et dans l'autre type de parc. Ce qui donne, dans le moment, à partir de la classification, une protection accrue, c'est que, lorsqu'un parc est déclaré parc de conservation, ce parc de conservation doit être voué d'abord à la protection des sites naturels et peut permettre la récréation extensive, seulement, et l'éducation, alors que les parcs de récréation, en se servant de la loi telle qu'elle existe dans le moment, ouvrent une porte qui est beaucoup plus considérable. C'est avec l'exemple des parcs qui ont été créés depuis que la loi a été adoptée qu'on peut voir la différence. Le parc du Mont-Orford, manifestement, au point de vue de la qualité du site naturel, avait un potentiel qui aurait pu en faire un parc de conservation puisqu'il représentait une région naturelle très particulière.

Mais, à ce moment-là, on voulait y grossir des infrastructures de ski alpin et on sentait que, si on le classait parc de conservation, on ne pourrait y mettre ce genre d'infrastructures. Il est donc vrai que la loi donnait de plus grandes garanties au parc de conservation qu'au parc de récréation. La preuve est là, si on analyse la classification qui s'est faite des parcs au Québec. Lorsqu'on a voulu qu'un parc ait de plus grandes infrastructures, on l'a classé parc de récréation, même s'il avait un potentiel biophysique très clair. Que ce soit le parc du Mont-Tremblant ou le parc du Mont-Orford, ces deux parcs avaient tout à fait le potentiel d'être des parcs de conservation, peut-être plus que d'autres qui ont été déclarés par la suite parcs de conservation.

Donc, ce n'est pas de la sémantique. Quand un parc est un parc de conservation, il y a certaines activités récréatives qui ne peuvent pas s'y faire si elles sont classées dans les activités récréatives dites intensives. Donc, c'est une protection qu'a le parc de conservation par rapport au parc de récréation. C'est dans les faits. Si on regarde les parcs classifiés, vous avez un moins grand développement.

M. Brassard: Au fond, vous confirmez que ce sont les objectifs et les aménagements qu'on entend faire dans un parc qui sont importants. À partir de là, on peut classer, mais ce n'est pas la classification qui m'apparaît importante.

M. Bouchard: Non, je serais d'accord avec vous, parce que, sans cela, ce serait...

M. Brassard: On pourrait dire d'un parc que c'est un parc de conservation et prévoir un certain nombre d'aménagements et d'objectifs à atteindre. On pourrait à la rigueur changer sa classification et dire que

c'est un parc de récréation et conserver exactement les mêmes objectifs et les mêmes aménagements. Donc, ce n'est pas tellement la classification qui importé que ce qu'on a l'intention de faire à l'intérieur du parc et les objectifs qu'on entend poursuivre.

M. Bouchard: Je suis fondamentalement d'accord avec vous à savoir que, si les objectifs étaient définis de façon plus contraignante quant à ce qui peut se faire comme type de récréation, s'ils faisaient l'objet d'audiences publiques et que, lorsqu'on voudra changer les objectifs, ce qui n'est pas le cas dans le texte de loi actuel, il faille revenir encore en audiences publiques, si c'était accompagné d'un plan de zonage, idéalement, cela donnerait à peu près le même résultat, si on allait dans ce sens-là. Je serais porté à croire que... (10 h 30)

Mais une chose qui est certaine, c'est que, dans la loi actuelle, un parc qui a été classé parc de conservation jouit d'une plus grande protection qu'un parc de récréation. Je crois que cela est indéniable, puisque, pour le parc de conservation, on dit qu'il est restreint à de la récréation extensive. Je pense qu'on ne peut pas nier cela. Maintenant, si on veut arriver au même résultat en faisant sauter la classification -je n'y tiens pas de façon absurde; je ne vais pas me rendre ridicule en disant que c'est la seule chose au monde qui peut protéger des parcs - si on devait laisser tomber la classification, il faudrait que les objectifs soient mieux articulés et que, lorsqu'ils sont donnés, ils ne soient pas changeables sans audiences publiques.

M. Brassard: Je vous comprends bien. Actuellement, le projet de loi, tel que libellé, indique que les objectifs sont soumis à la consultation lorsqu'on établit un parc. Ce que vous suggérez également, ce qui assurerait de meilleures garanties, c'est que, lorsqu'on a l'intention de modifier les objectifs, cela soit également soumis aux audiences publiques. Est-ce que, à ce moment-là, si une pareille chose était introduite dans le projet de loi, cela comporterait suffisamment de garanties? Quand on dit que les objectifs sont définis sommairement, à l'article 1, c'est bien évident que, lorsqu'on établit un parc, cela va être plus élaboré. C'est clair qu'on va mieux définir les objectifs dans un texte. On ne se contentera pas de dire qu'on établit un parc pour mettre en valeur tel site naturel ou pour protéger tel territoire représentatif. On va davantage préciser et élaborer, pour les soumettre aux audiences publiques, les objectifs qu'on vise.

Une fois les objectifs déterminés, vous dites qu'il y a un risque que le ministère modifie ces objectifs de façon substantielle sans qu'il y ait eu consultation publique. Est-ce que vous...

M. Bouchard: C'est un risque qui existe dans le texte de loi actuel.

M. Brassard: Oui, d'accord. Est-ce que vous admettez, à ce moment-là, qu'à partir du moment... Si on amendait le projet de loi pour que toute modification importante des objectifs soit également soumise aux audiences publiques, est-ce que cela vous apparaîtrait comme étant une garantie suffisante?

M. Bouchard: Bien, ce serait certainement une amélioration substantielle. Il demeure pour moi une inquiétude par rapport, disons... Le système actuel a été essayé sur à peu près une douzaine de parcs, on peut savoir à peu près ce qui était conservation et ce qui était récréation. Dans le cas de la conservation, cela faisait un nombre très précis et restreint d'objectifs. Ce qui peut être dangereux, évidemment, c'est que, si on en arrive à dire que cela peut être beaucoup d'objectifs, à un moment donné, on peut aboutir avec cinq objectifs et, finalement, au moment des audiences, peut-être pas de façon malveillante, on dira: Voyez, le premier est quand même la conservation des sites naturels, et il arrivera un dernier objectif, en cinquième place, qui laisse une porte ouverte. Vous savez, dans tout ce qui est long, parfois, on finit, avec ce qui est en dernière ligne, à annuler ce qui est au début du paragraphe. Si les objectifs sont bien articulés, ne laissent pas des portes ouvertes à tout bout de champ, on pourra arriver au même résultat. Vous voyez ce que je veux dire. C'est évident que, si on dit que les objectifs... Vous êtes membres de l'Assemblée nationale, vous êtes habitués à voir des textes de loi continuellement, vous voyez que parfois la liste de ce qui est permis est tellement grande que la dernière chose vient annuler la première, ou à peu près. Donc, dans ce sens, j'aurais une inquiétude et je pourrais seulement vous dire dans sept ans, en allant réanalyser les cas qui vont venir, si effectivement cela a donné les mêmes garanties. Théoriquement, cela pourrait donner les mêmes garanties.

M. Brassard: Ce que vous dites, au fond, et je termine là-dessus, M. le Président, c'est qu'il faudrait "prioriser" les objectifs.

M. Bouchard: Effectivement, que cela soit "priorisé" fortement et que cette "priorisation" se reflète peut-être, justement, dans le plan de zonage de façon claire. Là, on voit vraiment le lien entre les objectifs et le plan de zonage. Évidemment, je ne sais

pas si la loi peut aller jusque-là, mais j'aimerais qu'on indique, si c'est possible, que les parcs sont avant tout pour des activités récréatives de type extensif, que l'industrie privée, de toute façon, a à maintenir. Outre les cas historiques du parc du Mont-Tremblant et du parc du Mont-Orford -éventuellement, peut-être du mont Sainte-Anne parce que là aussi il y a un cas historique - dans l'ensemble, à mon avis, le gouvernement du Québec doit d'abord faire des parcs qui sont dans la philosophie des parcs nationaux américains et canadiens, c'est-à-dire pour protéger de grands territoires et les rendre accessibles à la population. Cette population qui y va, elle y va en famille la plupart du temps. Elle n'y va pas pour faire du camping, de la pêche, ce genre d'activités; elle n'y va pas pour les centres de ski ou des infrastructures de ce type. J'ai toujours été d'accord qu'on devait tenir pour acquis que le parc du Mont-Orford et le parc du Mont-Tremblant étaient des cas historiques et qu'on ne pouvait pas les juger à partir de ce principe parce que c'étaient des parcs déjà créés. Dans l'avenir, ce dont il faudra toujours se méfier - c'est la même chose pour la ville de Montréal -c'est que, une fois que vous avez le parc du Mont-Royal ou un parc à Montréal, c'est évident, au moment où il est créé - comme le parc Lafontaine - que tout le monde s'entend pour dire: Cela doit demeurer un grand espace vert. La tentation, avec le temps, c'est qu'il arrive des projets et on se dit: Bon, on a une nouvelle bibliothèque municipale, où est-ce qu'on peut la mettre? Cela coûte plus cher d'acheter des terrains que de la mettre dans le parc. Quand les Olympiques arrivent et qu'il faut faire des pyramides olympiques, c'est compliqué; finalement, c'est peut-être moins compliqué de les mettre dans le golf municipal. Il y a toujours une pression évidente pour que les grandes infrastructures envahissent les sites naturels. Les Montréalais en sont conscients dans leurs propres parcs et ils font beaucoup de pression pour qu'on les protège. C'est ce que je viens vous demander indirectement. C'est un peu la même chose au niveau...

Si la loi pouvait être plus spécifique sur ce qu'on entend par récréation, éventuellement, et jusqu'où on peut aller en infrastructures, peut-être que ce serait plus acceptable.

M. Brassard: Je vous remercie.

Le Président (M. Marquis): Merci, M. le ministre. M. le député de Charlesbourg.

M. Côté: J'ai une première question. À la page 1, au troisième paragraphe, on dit: "En effet, nous nous demandons dans quelle mesure la préparation d'une nouvelle loi sur les parcs fait suite à des requêtes fréquentes de la part des intervenants du milieu dans le domaine des parcs. " Je pense que la réponse vient assez rapidement. Je n'ai pas entendu encore beaucoup de gens du milieu qui ont revendiqué cette loi.

On a l'impression, de notre côté, que c'est une loi - et cela a été, je pense, assez clairement dit dans le cas de l'ex-ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche -pour régler le cas du parc du Mont-Saint-Bruno. Ma question est la suivante: N'avez-vous pas l'impression que les difficultés deviennent plus grandes lorsqu'il s'agit de classer, par exemple, un parc de conservation qui est situé à proximité d'un grand centre? À la lumière de ce qu'on a vécu jusqu'à maintenant, dans une région un peu plus éloignée des grands centres, cela ne cause pas d'énormes problèmes. On peut parler d'Aiguebelle, cela en est un, compte tenu des milieux miniers, mais, dans le cas de Saint-Bruno, vous vous rapprochez d'un grand centre qui est Montréal et toute sa périphérie, et on bloque. N'avez-vous pas l'impression que c'est un peu relié au centre?

M. Bouchard: Je crois que c'est relié à cela, mais, pour ma part, je demeure convaincu que c'est une mauvaise analyse du problème. Vous me permettrez de reprendre mes exemples à Montréal. À Montréal, la communauté urbaine a décidé de créer huit parcs régionaux. Évidemment, vous en avez beaucoup entendu parler parce qu'il y a certaines de ces décisions qui ont été prises par l'Assemblée nationale. Si on regarde les huit, c'est évident que l'île de la Visitation, qui est juste derrière l'église de la Visitation, est un parc pour recevoir beaucoup plus de gens en même temps, il n'y a pas d'éléments naturels spectaculaires è cet endroit.

Mais il y a un continuum dans cela. À l'autre bout des huit parcs, vous avez le plus spécial qui est le bois de Saraguay. Le bois de Saraguay va être - d'après ce qu'on sait jusqu'à maintenant; ce sera toujours des batailles à faire, il faut toujours les faire -aménagé, tout compte fait, selon les concepts et les principes qu'il y a dans la partie des parcs de conservation de la loi actuelle.

Le parc du Mont-Saint-Bruno, à moins que le gouvernement ne veuille y faire des infrastructures qu'on ne connaît pas, même une fois qu'il aura été déclaré parc de conservation, continuera à recevoir des foules énormes. Parce qu'un parc de conservation, cela n'a pas de normes en fonction de dire: II faut exclure du monde. À côté de San Francisco, juste au nord de San Francisco, vous avez un bois qui s'appelle le bois Muir Woods, pour protéger les séquoias qui ont 300 pieds de haut. C'est en fait un parc de conservation, un parc national et il y a

énormément de monde. Il y a même un chemin pour les aveugles avec des plaques en braille.

Cela enlève la possibilité de faire de grandes infrastructures dans le style des piscines, des pistes de ski alpin ou quelque chose du genre. En soi, comme je vous le dis, je pense que la communauté urbaine va faire des parcs de conservation, même sur l'île de Montréal, certainement avec Saraguay et peut-être avec Cap-Saint-Jacques.

M. Côté: À la page 8 du mémoire, on fait état de la définition de l'Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources. J'ai pu prendre connaissance d'un article que vous avez publié dans le Devoir du jeudi 22 mars 1984. On y retrouve un certain paragraphe qui, je pense, est assez évocateur et ajoute même à ce qu'on a déjà dans le mémoire. Vous disiez ceci: "D'ailleurs, les parcs nationaux sont avant tout la responsabilité du gouvernement national d'un État. En ce sens, le ministère québécois du Loisir, de la Chasse et de la Pêche devrait se préoccuper en priorité de ses parcs de conservation ou des parcs nationaux du Québec. "

Cela fait trois mémoires qu'on entend et les trois sont exactement sur la même longueur d'onde. Le message - à moins que je ne comprenne mal ou que je ne saisisse mal - est très clair. Ce que vous dites au gouvernement du Québec, c'est: Occupez-vous d'abord des parcs de conservation, et la responsabilité des parcs de récréation devrait relever d'autres milieux ou d'autres intervenants, quitte à ce qu'ils soient aidés financièrement par les gouvernements provincial ou fédéral. Ai-je bien compris?

M. Bouchard: II y a à cela des risques. Personnellement, je crois que cela demeure vrai dans l'ensemble. Ce que j'ai dit, c'est que la responsabilité du gouvernement du Québec, surtout dans le cadre même de la constitution canadienne, qui donne une juridiction provinciale sur les ressources naturelles, c'est de protéger ses parcs et de les appeler parcs nationaux. Ceux-là sont des parcs de conservation. Quant aux parcs de récréation, il y a un problème, je crois, d'évolution sociale. C'est-à-dire que des grandes villes comme Montréal, comme Laval, comme Québec sont probablement déjà assez bien outillées pour se voir transférer des juridictions de parcs de récréation. Dans d'autres situations, c'est peut-être plus délicat; un parc pourrait être près d'une petite ville qui n'a pas beaucoup de traditions, etc. Évidemment, les gens misent beaucoup sur les municipalités régionales de comté. Or les municipalités régionales de comté sont au début de l'élaboration de leur schéma d'aménagement et ont peu d'expertise, de façon générale. C'est un des arguments pour moi pour garder l'ancienne loi, c'est-à-dire, que cela donne encore au gouvernement du Québec la possibilité de faire ses parcs nationaux au moyen des parcs de conservation. Les parcs de récréation, il va continuer à les faire, mais dans le sens que - parce qu'il y a un trou dans le moment - ce n'est pas impensable que, si les MRC étaient plus articulées, dans quelques années, ce serait une juridiction qui pourrait leur revenir. Ce n'est pas quelque chose qui serait mauvais en soi. D'autant plus que cela donnerait un exemple à d'autres municipalités régionales de comté qui voudraient faire des parcs régionaux en même temps puisqu'elles verraient quelques municipalités régionales de comté être encouragées à le faire. Pour l'instant, je ne trouverais pas absurde que le gouvernement juge qu'il n'est pas opportun maintenant de les transférer immédiatement aux MRC, compte tenu qu'il n'est pas sûr de la possibilité pour ces MRC de pouvoir les gérer.

Si la loi devait être adoptée telle quelle, les parcs d'Orford et du Mont-Tremblant devraient redevenir beaucoup plus des parcs de conservation, en y incluant qu'il y a une exception historique qui s'est faite pour ces parcs, que cela ne change rien à la politique générale, mais qu'on l'accepte vu qu'il y a un côté historique. Dans le fond, l'envergure du parc du Mont-Qrford... Ce que je vous dis, c'est que, si l'Américain qui a pris l'autoroute, près de Sherbrooke, en arrivant au mont Orford voit "parc national du Mont-Orford", s'il y entre, sauf pour la piste de ski - il va trouver cela curieux qu'au Québec on fasse de pistes de ski dans nos parcs nationaux - il va trouver que ce parc a l'envergure du concept qu'il a dans sa tête de ce qu'est un parc national. S'il continue sur la même autoroute et qu'il voit "parc national de la Yamaska", surtout s'il est pressé d'arriver à Montréal, mais qu'il se dit: II faut quand même que j'aille tous les voir... Les gens qui font des tournées de réseaux de parcs nationaux, c'est comme faire des tournées de cathédrales en Europe. Les gens les voient avec tant d'étoiles et ils veulent arrêter, ne pas en manquer. S'il sort à Yamaska, je vous dis qu'il va être pas mal déçu et on va passer pour des pas bien fins. Il va aller voir cela et il va se dire: Ils appellent cela un parc national! Mais cela n'a pas de bon sens; chez nous, cela serait à peine un parc d'État ou un arrêt sur le bord de la route. (10 h 45)

II ne faut pas oublier que la définition que donne l'Union internationale pour la conservation de la nature, à laquelle on adhère comme gouvernement, c'est que cela doit être "des régions terrestres ou aquatiques relativement étendues qui contiennent des échantillons représentatifs de

régions naturelles importantes. " Or, vous arrivez à un endroit qui est un terrain de camping, même pas un terrain de camping de nuit, mais un terrain de pique-nique de jour. C'est pour cela que je trouve qu'il y a des choses à régler dans cela parce qu'on va faire rire de nous, c'est certain.

Moi, je sais bien que je n'inviterai jamais des amis en leur disant: Automatiquement, faites la tournée de tout ce que vous voyez comme parcs nationaux, parce que l'étiquette que vous allez mettre sur les cartes du Québec, à partir du jour où vous allez mettre "parc national", c'est une étiquette qui a une connotation importante pour les Américains et les Canadiens. Cela veut dire quelque chose de beau et d'important. Souvent les gens planifient ensuite leur visite en fonction de cela. Je l'ai fait moi-même et j'ai beaucoup d'amis qui l'ont fait. En allant vers la Nouvelle-Écosse, vous regardez une carte et vous dites: II ne faut pas manquer Fundy, il faut aller à Cap-Breton, il faut aller à tel endroit. En règle générale, vous avez tendance è laisser tomber les plus petits parcs et vous faites un réseau de parcs comme cela. Les Américains font la même chose aussi. Ils font encore beaucoup plus: rendus à l'âge d'or, ils s'achètent une roulotte et passent la moitié de leur vie à voyager. Ils vont dans les réseaux.

Évidemment, quand ils vont voir ici tel territoire s'appeler "parc national", ils ne comprendront plus rien. Au contraire, on va dévaluer l'ensemble. Pour des petits cas comme cela, les gens vont dire qu'il n'y a rien de fiable dans cela.

M. Côté: Ce que je comprends, finalement, c'est qu'on aurait intérêt comme gouvernement à intégrer davantage le développement de nos parcs au contexte nord-américain pour que tout le monde s'y retrouve.

M. Bouchard: C'est ça.

M. Côté: Une autre question, lorsqu'on parte de zonage et de classification, pour bien saisir ce que vous nous dites. Je pourrais peut-être vous fournir l'exemple du parc de la Gaspésie que vous devez bien connaître, j'imagine.

Compte tenu d'une ressource naturelle qui est assez spécifique, le caribou - on sait qu'il y a 150 à 250 têtes qui ont beaucoup de difficulté à survivre - on faisait, demain matin, du mont Albert, de la montagne de la Table et d'une partie du mont Jacques-Cartier une zone de conservation intégrale, cela poserait le problème suivant. Il y a des excursions en montagne, l'escalade du mont Albert par des sentiers de la nature est un attrait récréatif et touristique assez important pour le parc de la Gaspésie. Est- ce que vous iriez jusqu'à éliminer cette pratique?

M. Bouchard: Dans le domaine de la conservation, vous avez tout le gradient des extrémistes aux autres extrémistes. Personnellement, dans toutes les situations que j'ai vues... J'ai plutôt travaillé sur un parc qui est semblable, celui de Gros-Morne, à Terre-Neuve, qui a beaucoup d'analogie avec celui de la Gaspésie. Mon expérience, c'est que, tant que ce sont des sentiers, que c'est bien aménagé, que c'est fait en bordure, etc., cela ne peut pas causer des torts si irréparables que cela. Sûrement que les étudiants de mon cours d'écologie trouveraient que je vieillis. Je crois qu'il y a quand même beaucoup de choses qui sont conciliables. Je crois d'ailleurs que c'est une des choses qui nuisent à la position des conservationnistes. Souvent, certains d'entres nous prennent des positions qui sont vues comme étant extrêmes et cela nous nuit, d'autant plus que ceux qui sont contre nous ont l'habitude de ne rapporter que celles-là et de les grossir. Je crois qu'il y a beaucoup de cela qui est conciliable. Maintenant, cela peut être dans le nombre de personnes qui peuvent y aller et, évidemment, de quelle façon, etc. Je crois qu'il y a des choses comme celles-là qui peuvent être conciliables.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Marquis): Très bien. M. le député de Chambly.

M. Tremblay: Merci, M. le Président. On a parlé beaucoup, et je pense que c'est presque la trame de fond des discussions, depuis le début des travaux de la commission, de la classification internationale. Moi, je ne suis pas familier -peut-être que vous l'êtes, vous - avec ce qui se fait dans les autres pays. Ma première question est de connaître de vous ce qui se fait. Est-ce qu'aux États-Unis on a des parcs de récréation et des parcs de conservation?

M. Bouchard: Aux États-Unis, même dans les réseaux de parcs nationaux, les parcs nationaux sont des parcs de conservation. Mais le National Park System soutient aussi des parcs qui sont ce qu'ils appellent des National Monuments - ils ont une classification assez complexe - qui vont se rapprocher des parcs nationaux comme tels, mais il va y avoir des National Seashore Areas qui sont plus orientés vers la récréation.

Donc, ils sont conscients du spectre des besoins des citoyens - c'est pour cela que, tout à l'heure, j'ai tant insisté sur le fait qu'il y a un spectre de besoins - et ils essaient de le remplir. C'est-à-dire que Cape

Cod, par exemple, a beau être sous la responsabilité des parcs nationaux américains, cela ne porte pas le titre de parc national de Cape Cod, cela porte un autre nom du style National Seashore Area of Cape Cod. Tandis que, si vous allez juste un peu au nord, vous allez à Acadia National Park, vous tombez dans autre chose et vous savez que c'est un parc national.

M. Tremblay: Essentiellement, un parc national, c'est un parc de conservation aux États-Unis?

M. Bouchard: Certainement.

M. Tremblay: Est-ce que vous ne croyez pas que, finalement, c'est ce qu'on fait avec le projet de loi 13?

M. Bouchard: Non, parce qu'on...

M. Tremblay: Puisque, dès lors qu'on a un parc national et presque tous les parcs qu'on a au Québec - vous excluez Boucherville et Yamaska - y inclus Saint-Bruno, il serait possible de les désigner comme parcs nationaux.

M. Bouchard: Oui. Moi, je pense que la plupart des parcs actuels, de ceux qu'on a -évidemment, il reste à voir - il y en a qui sont un peu petits. Mais, quand même, Parcs Canada s'est laissé aussi passer quelques petits parcs, comme celui de la pointe Pelée. On a peut-être, proportionnellement, un peu plus de petits parcs que ce qu'ont normalement les réseaux de parcs nationaux, mais, même là-dessus, cela serait acceptable comme concept. L'affaire, c'est que, quand vous classez quelque chose parc national, vous restreignez pas mal le type de développement que vous pouvez faire dans le parc. La loi actuelle, cela, elle ne le fait pas.

Dans un parc national américain ou canadien, vous ne pouvez pas faire de développements d'infrastructures importants. Cela doit être essentiellement voué à la conservation et à l'éducation. C'est à ce point fort que, même le parc des Adirondacks, qui est au sud de Montréal, aux États-Unis, dans l'État de New York, ce parc - cela, c'est un exemple unique - est même protégé dans la constitution de l'État de New York. Pour faire des changements dans ce parc, il faut faire un amendement à la constitution de l'État.

Donc, les gens ont habituellement raison de vouloir demander de bonnes garanties de protection, parce que c'est la nature humaine, ça. Un site naturel, cela vit en soi, cela a son intérêt en soi. Il n'y a pas tellement de gens qui sont prêts à le comprendre. Vous avez un ensemble de personnes, à côté de cela, qui pensent toujours en fonction que ce qui est vert, c'est une banque pour certains développements. On a connu cela à Montréal et on peut connaître cela à bien des endroits.

Évidemment, les dangers, vous ne les voyez pas immédiatement, mais les parcs régionaux de la communauté urbaine, dans le moment, les gens sont en train de se donner des règlements assez précis pour les contrôler. S'ils ne se donnaient pas de règlements précis dans le moment, nul doute que, dans dix ans, quelqu'un arriverait et dirait: Tout compte fait, pourquoi, dans celui de Bois-de-Liesse, qui est prêt d'une petite rivière, pourquoi ne pas faire une grande marina? Pourquoi ne pas faire de l'équitation et faire telle affaire? Finalement, vous aboutissez au fait que ce parc a perdu toute son intégrité naturelle.

Donc, il y a toujours un lobby très bien organisé, pas mal intentionné en soi. Le vert, c'est une présence, mais, pour bien des gens, c'est une absence. C'est uniquement une banque de terrains pour quelque chose qu'on fera un jour. Cela, ce n'est pas la philosophie des parcs nationaux américains, ni la philosophie des parcs nationaux canadiens.

M. Tremblay: Est-ce que je simplifierais trop en disant que vous ne verriez pas d'un mauvais oeil, dans le projet de loi 13, d'enlever les désignations, s'il y avait des provisions dans la loi qui donnaient ces garanties?

M. Bouchard: Comme je le disais tantôt, une loi se juge sur le texte, cela se juge aussi sur son application. Disons que sur papier cela me semblerait probablement assez acceptable. Maintenant, il faudrait voir si l'application... Comme je le disais tantôt, si on nomme cinq objectifs et que, finalement, le dernier permet de contredire le premier, là, je ne le sais pas. C'est plus facile pour moi d'évaluer la loi actuelle parce qu'on a eu neuf cas pour juger comment elle fonctionne tandis que là c'est de juger de l'avenir qu'on ne peut pas nécessairement connaître.

M. Tremblay: II y a aussi le problème véritable. Je m'avance peut-être un peu, mais vous avez parlé de Tremblant, d'Orford; je connais mieux le mont Saint-Bruno. Il y a dans ces parcs - et peut-être dans d'autres -des infrastructures qui sont considérées de récréation intensive. Par contre, il y a aussi, dans tous ces parcs, des éléments qui colleraient très bien à la désignation d'un parc national tel que connu internationalement. Ne trouvez-vous pas cela un peu malheureux que, simplement parce qu'il faut les désigner d'une manière ou d'une autre, on mette en danger des éléments qu'on voudrait protéger d'une façon plus particulière?

M. Bouchard: Vous savez, si vous regardez le cas du mont Saint-Bruno, par exemple, et du mont Saint-Hilaire, le mont Saint-Hilaire a été laissé, par testament, à l'Université McGill. Si vous regardez le testament du colonel Gault, il est bien moins sévère que la loi ou que les lois qu'on s'est données au Québec et, pourtant, il y avait une tradition de l'Université McGill de dire: le mont Saint-Hilaire, il faut que ce soit conservé dans le sens d'un parc national. De cette façon, j'aimerais vous faire remarquer que le mont Saint-Hilaire a été désigné par l'UNESCO - ce n'est quand même pas rien, cela - qui a désigné peu d'endroits - il y en a deux ou trois au Canada, je pense bien -Réserve de la biosphère au sens de l'UNESCO, le mont Saint-Hilaire qui est la petite montagne qui est juste à côté.

Si vous allez là les fins de semaine, c'est rempli de monde au mont Saint-Hilaire. Vous êtes obligé de stationner jusqu'en bas de la côte et tout cela. Cela attire énormément de monde. Les gens ont l'impression - c'est une fausse idée - que, si on fait un parc qui est dans le sens de la conservation, c'est uniquement pour les écologistes barbus et aux cheveux longs qui vont aller regarder quelques oiseaux en fin de semaine et qu'on va éliminer tout ce qui bouge. Ce n'est pas vrai, cela. Allez voir le mont Saint-Hilaire! Pourtant, le mont Saint-Hilaire aurait les capacités d'être un parc de conservation. Il a eu l'honneur d'être désigné Réserve de la biosphère de l'UNESCO et, pourtant, il est juste à côté du mont Saint-Bruno.

Je serais curieux de faire une étude comparative du nombre de personnes qui vont dans les deux sites. Il y a peut-être autant de gens qui vont à l'autre site. Il se fait du ski de fond au mont Saint-Hilaire, mais on a empêché les développements qui auraient été de gros développements comme des pistes de ski ou quelque chose du genre, et Dieu sait que le mont Saint-Hilaire a peut-être plus de potentiel de ce côté que le mont Saint-Bruno parce qu'il a une plus grande élévation, etc. C'est un choix qu'on a fait. On a fait cela dans les années cinquante et on l'a gardé comme cela, mais il n'y a rien dans le testament du colonel Gault qui défende à McGill de faire une piste de ski. C'est marqué qu'il laisse le mont Saint-Hilaire pour la jouissance des jeunesses à venir.

Je pense que le mont Saint-Bruno, il n'y a aucune raison pour laquelle il ne pourrait pas être aménagé dans l'esprit qui prévaut au mont Saint-Hilaire. D'ailleurs, lors des audiences publiques, le ministre Chevrette avait été un peu imprudent en posant cette question, mais il avait dit: Pourquoi tant insister pour que le mont Saint-Bruno soit un parc de conservation quand vous en avez déjà un avec le mont Saint-Hilaire? Évidemment, la réponse est facile à donner. C'est un peu curieux de se dire qu'on va faire protéger nos ressources naturelles par une institution privée et, par surcroît, l'Université McGill, qu'on n'assumera même pas nous-mêmes notre responsabilité première dans la loi.

Je pense que - de la même façon qu'aux États-Unis on a beaucoup réalisé cela - dans le fond, les infrastructures lourdes, il est beaucoup mieux de les laisser à l'industrie privée qui peut les installer sur des territoires qui lui appartiennent, les gérer selon le changement des clientèles, selon ce que les gens veulent, etc. Je ne crois pas qu'a été particulièrement profitable le centre de ski du mont Orford dans les deux ou trois dernières années. Cela a amené pas mal de problèmes, probablement, au niveau du gouvernement, qui a été forcé de réinvestir parce qu'on se disait: Si on fait ce pas de plus... La compagnie de gestion Orford s'est plainte, en tout cas, pendant deux ans, qu'elle ne faisait pas d'argent, que c'était presque en faillite, etc. Je pense qu'on est mieux de laisser l'industrie privée s'occuper de ce genre d'infrastructures et, comme gouvernement, nous, de s'occuper de ce que la population ou une bonne partie de la population veut avoir: de véritables parcs de verdure pour se promener. (11 heures)

Le Président (M. Marquis): Une dernière question, M. le député.

M. Tremblay: C'est ma dernière, Tout cela fait partie de ce que l'on appelle les équipements de récréation intensifs qui sont déjà dans nos parcs. Tout à l'heure, vous avez donné l'exemple d'un parc - je ne me souviens pas duquel - en disant: Les gens vont là en famille pour faire du camping et de la randonnée. Selon votre interprétation, est-ce qu'un terrain de camping, c'est un équipement récréatif intensif ou extensif?

M. Bouchard: S'il est planifié dans des zones qui ne sont pas particulièrement sensibles, il est normal d'avoir dans les parcs nationaux, compte tenu des distances et des coûts énormes qu'auraient à assumer des familles pour se loger au motel ou à l'hôtel, des terrains de camping bien aménagés dans des zones qui peuvent plus le supporter que d'autres, c'est-à-dire là où le sol est de till ou de moraine de fond, tel genre de végétation. C'est acceptable. C'est accepté à la fois dans le réseau des parcs nationaux du Canada et dans le réseau des parcs nationaux des États-Unis.

M. Tremblay: Donc, vous considérez un terrain de camping comme un équipement extensif?

M. Bouchard: Extensif, mais il ne faut pas les multiplier...

Le Président (M. Marquis): Vous pouvez terminer, M. Bouchard.

M. Bouchard: II ne faut pas que cela commence par un terrain de camping qui peut recevoir tant de personnes. Vous avez une pression illimitée pour cela. Au Jardin botanique, si on suivait ce que les gens nous demandent, on n'aurait que des terrains de stationnement. Finalement, on aurait peut-être juste une serre au bout. Il y a toujours une pression qui vient et, si on ne sait pas la contrôler et si on ne veut que lui répondre, on va faire des choses absurdes, finalement.

M. Tremblay: J'aurais eu d'autres questions. Malheureusement, le temps...

Le Président (M, Marquis): Je n'en doute pas. Alors, merci beaucoup à M. André Bouchard et M. Jean-Luc Bourdages pour leur présence et leur témoignage devant cette commission parlementaire.

J'invite maintenant les représentantes de la Société d'animation du Jardin et de l'Institut botaniques à prendre place.

Nous vous souhaitons la bienvenue à cette commission parlementaire. Je pense m'adresser à Mme Céline Arseneault, présidente...

Mme Arseneault (Céline): C'est cela.

Le Président (M. Marquis):... ainsi qu'à Mme Nicole Gagnon, écologiste. C'est bien cela? Alors, la parole est à vous pour nous présenter le contenu de votre mémoire.

Société d'animation du Jardin et de l'Institut botaniques

Mme Arseneault: Je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui. Alors, la SAJIB est la Société d'animation du Jardin et de l'Institut botaniques. Pour ceux qui ne la connaîtraient pas, c'est une société à but non lucratif qui existe depuis dix ans - je vais le dire tantôt - et dont les objectifs visent la diffusion des connaissances en botanique, en horticulture et en écologie à partir des ressources du Jardin botanique, mais on a également des objectifs conjoints qui sont la protection de l'environnement et surtout des sites naturels.

Je commence donc mon mémoire. La SAJIB est donc heureuse de pouvoir exprimer son opinion sur le projet de loi 13, Loi sur les parcs nationaux, visant à remplacer la Loi sur les parcs telle qu'on la lit dans les Lois révisées du Québec, chapitre P-9.

En effet, en tant que mouvement oeuvrant dans le loisir scientifique au Québec depuis bientôt dix ans et regroupant près de 1500 membres, je dois vous dire qu'on est plus grosse, du moins une des plus grosses sociétés en loisir scientifique au Québec, non seulement dans les domaines des sciences naturelles, mais en loisir scientifique. Nous sommes donc les porte-parole d'une partie de la population québécoise. De plus, de par nos objectifs propres et notre implication répétée dans le domaine des parcs provinciaux et régionaux, nous nous sentons concernés par le peu d'importance accordée à la conservation dans les parcs par ce nouveau projet de loi.

Alors, j'ai divisé mon intervention en quelques grands thèmes; chacun n'a pas la même importance. Le premier est de l'éducation et du rôle de la conservation. La SAJIB préconise la conservation des milieux naturels. Nous croyons que nous sommes déjà lésés par la loi actuelle puisque, dans son application, on a déjà été très tolérant vis-à-vis du degré de conservation réelle dans les parcs de conservation et ceci, sans souligner la quasi-absence des secteurs protégés dans les parcs de récréation. Donc, on inclut des zones de récréation dans les parcs de conservation et, quelquefois, on ne fait pas le contraire. Mais, du moins, cette loi garantit-elle l'appellation "parc de conservation" en rapport avec la définition d'objectifs de conservation. Ainsi, un parc de conservation est présentement, et je cite la loi actuelle: "un parc dont l'objectif prioritaire est d'assurer la protection permanente de territoires représentatifs des régions naturelles du Québec ou des sites naturels à caractère exceptionnel tout en les rendant accessibles au public à des fins d'éducation et de récréation extensive".

Dans l'esprit du public, la volonté de conservation se perçoit alors clairement. Cet énoncé, d'ailleurs, rejoint dans son principe un des buts premiers de la SAJIB, qui est l'animation en sciences naturelles à des fins de sensibilisation à la protection du patrimoine naturel. Dans cette optique, les parcs de conservation constituent pour nous l'endroit privilégié où chacun, selon ses connaissances, peut mieux prendre conscience de la valeur exceptionnelle du monde qui l'entoure. Ce cheminement peut être réalisé par les programmes d'interprétation de la nature destinés au public.

Présentement, ces programmes ne se retrouvent majoritairement que dans les parcs de conservation, à l'exception du parc des Îles-de-Boucherville et du parc Paul-Sauvé. Pourtant, l'existence de tels programmes est primordiale dans tous les parcs, d'une part parce qu'ils s'intègrent dans une politique gouvernementale d'éducation en matière de respect de l'environnement, d'autre part parce qu'ils incitent la population à venir découvrir des milieux non perturbés plutôt que de les inciter à venir exercer des activités récréatives nécessitant l'installation d'infrastructures complexes au détriment du milieu naturel. Ces activités sportives, mais bien souvent sociales,

pourraient avoir lieu dans d'autres endroits, si nombreux soient-ils, comparativement aux milieux naturels protégés. C'est là qu'une distinction s'impose entre récréation intensive et extensive, seule la dernière permettant un contact réel avec la nature.

Des écosystèmes à protéger. La SAJIB s'intéresse principalement à la protection de la végétation. C'est elle, en effet, qui est à la base de tout écosystème, tout en étant la première touchée par toute nouvelle orientation d'un parc, en particulier par l'installation d'infrastructures ou l'utilisation récréative intensive. Pour ces raisons, on doit étayer notre connaissance de la végétation d'études analytiques en fonction des autres composantes biophysiques. Ceci nous permet de mieux prévoir l'aménagement des parcs, mais également de les répartir géographiquement dans l'ensemble du Québec, particulièrement près des zones urbaines ou des secteurs susceptibles d'être modifiés par l'exploitation économique ou touristique. Cette conservation du patrimoine naturel est l'essence même d'un réseau de véritables parcs nationaux, réseau qui vise la protection en fonction des générations futures comme témoin d'un milieu non perturbé.

Une nomenclature adaptée aux besoins. L'appellation même de parcs nationaux, mentionnée dans le projet de loi 13 et employée indifféremment selon leurs objectifs prioritaires, risque de susciter une confusion inutile avec les parcs nationaux du Canada dont le but premier est la conservation. Nous ne voyons aucune contradiction entre la désignation de parcs provinciaux de récréation ou de conservation et celle de parcs régionaux ou urbains, tel qu'on le justifie dans les notes explicatives au projet de loi 13.

Des objectifs à définir et en devenir. Enfin, attardons-nous aux objectifs spécifiés lors de l'établissement des parcs, selon le projet de loi 13. Ainsi, on peut lire que le premier objectif est de protéger et mettre en valeur des sites naturels à caractère exceptionnel ou des territoires représentatifs des régions naturelles. Nous voudrions savoir si c'est cela l'objectif de conservation, même si on ne le précise pas. La mise en valeur dont on parle ne risque-telle pas de nuire à la protection? Y inclut-on la notion d'éducation et de récréation extensive, comme on le fait vraiment dans la loi actuelle? Y inclut-on d'autres approches, telle la mise en valeur touristique requérant des infrastructures qui détruisent peut-être le milieu naturel et ce, à quel niveau? Cet objectif ne décrit pas plus le pourcentage du territoire voué à la conservation que ne le prévoit la loi actuelle, mais, du moins, cette dernière définit-elle qualitativement la conservation par rapport à la récréation. Quant au deuxième objectif qui vise à favoriser la pratique d'activités de plein air, dans quelle mesure ne sera-t-il pas jugé prioritaire par rapport au premier objectif? Le projet de loi sous-entend que les deux objectifs peuvent être utilisés de pair dans un même parc. On lit, en effet, que "le décret établissant un parc national doit spécifier pour lesquels de ces objectifs il est établi". Même si, dans le décret, à la suite d'audiences publiques, l'objectif de conservation devenait prioritaire, quelle certitude aurions-nous qu'il le demeure! Et à quel point la population pourra-t-elle distinguer les différentes vocations dans le réseau de parcs?

Au sujet des parcs existants, l'article 23 du projet de loi dit que "le gouvernement peut, par décret, modifier l'appellation d'un parc pour y insérer le mot "national" et substituer à la classification d'un parc les objectifs prévus aux paragraphes 1 et 2 de l'article 1". La protection du territoire des parcs de conservation classifiés selon l'actuelle loi sera-t-elle permanente si le ministre peut décider quand il lui semble d'une nouvelle interprétation des objectifs prioritaires? De même, au paragraphe 2 de l'article 11, le ministre pourra adopter des règlements pour "diviser un parc en différentes zones", sans consultation préalable.

Voici la conclusion de ce très court mémoire, mais qui dit vraiment ce que nous pensons. En regard des failles majeures du projet de loi 13, particulièrement de ses lacunes en matière d'éducation et de conservation, la SAJIB le rejette. Nous souhaitons beaucoup plus l'amélioration de l'application des concepts de conservation précédemment établis dans la Loi sur les parcs. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup, Mme Arseneault. La parole est au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Brassard: Je voudrais d'abord remercier la Société d'animation du Jardin et de l'Institut botaniques d'avoir bien voulu participer à cette consultation particulière et j'aurais trois questions portant sur son mémoire.

D'abord, à la première page, vous affirmez de façon péremptoire, et je cite: "Nous croyons que nous sommes déjà lésés par la loi actuelle puisque, dans son application, on a déjà été très tolérant vis-à-vis du degré de conservation réelle dans les parcs de conservation et ceci, sans souligner la quasi-absence des secteurs protégés dans les parcs de récréation. " C'est là une affirmation assez grave que vous faites et, comme ministre responsable du réseau des parcs nationaux au Québec, je souhaiterais beaucoup que vous apportiez certaines preuves ou certains faits qui fondent et

justifient une pareille affirmation. J'imagine que vous avez visité un certain nombre de parcs parmi la douzaine qui existent actuellement. Comment pouvez-vous affirmer une telle chose en regard de ce qui se fait présentement dans les parcs nationaux? Comment pouvez-vous affirmer que l'application de la loi, actuellement, dans le réseau des parcs de conservation, fait preuve de tolérance vis-à-vis du degré de conservation réelle? Ce que je voudrais savoir, c'est sur quoi vous vous basez pour affirmer une telle chose.

Mme Gagnon (Nicole): D'accord, je peux répondre. C'est que, justement, dans un travail sur les parcs naturels du Canada et du Québec fait par Jean-Luc Bourdages, André Bouchard et Marie-Odile Trépanier, à un moment donné, on parle de l'importance relative des zones de conservation dans les parcs québécois. Des zones de conservation, dans les parcs de conservation, on en retrouve environ un tiers de la superficie qui est zoné pour la conservation tandis que dans les parcs de récréation, il y en a un cinquième qui est zoné pour la conservation, comparativement au parc national de Forillon où il y a environ 90% de la superficie qui est zonée pour la conservation. Dans les parcs de l'Ontario, il y en a environ 90%. Dans ce sens, on veut dire qu'on est déjà lésé par rapport à la quantité de territoires qui sont vraiment zonés de conservation. (11 h 15)

M. Brassard: Cela dépend beaucoup de la façon dont on zone, sauf que, dans le zonage qu'on applique au Québec, qu'on retrouve dans la politique sur les parcs, on parle de la zone d'ambiance. La zone d'ambiance n'est peut-être pas qualifiée de préservation, mais les aménagements qu'on peut retrouver dans la zone d'ambiance sont très légers. On y pratique surtout des activités à caractère éducatif, fondées sur la découverte et l'exploration du milieu ambiant. Vous savez en quoi consiste la zone d'ambiance. Elle peut être... C'est vrai que cela ne s'appelle pas zone de préservation, mais dans le fond vous savez très bien que c'est une zone de protection.

Mme Gagnon (Nicole): Oui, mais dans le sens que, lorsque vous présentez un parc, ce qu'on voit, ce sont vraiment les zones de conservation, la zone d'ambiance, les zones de récréation intensive dans les parcs de récréation et les zones de service. Il y a quand même une possibilité d'un aménagement plus intensif et vous pouvez changer le zonage par rapport... Vous pouvez peut-être augmenter une zone de récréation extensive ou... Dans ce sens, c'est...

M. Brassard: Si je comprends bien, votre affirmation repose sur des statistiques dans le sens qu'à partir du zonage vous avez une certaine portion du territoire des différents parcs qui est zonée zone de préservation et, ensuite, une partie du territoire qui est zonée zone d'ambiance, zone de service.

Mme Arseneault: II faudrait comprendre, M. le ministre, que ce n'est pas là nécessairement un reproche; on dit un fait, c'est une constatation. Je crois que, si on calcule, sur la base du zonage, le pourcentage, au moins, dans les parcs de conservation, on est plus sûr qu'il y a un certain pourcentage de territoires réservé à la conservation alors que, dans les parcs de récréation, ce pourcentage diminue assurément beaucoup plus. C'est surtout ce point qu'on voulait mentionner.

M. Brassard: C'est un point de vue que vous défendez, mais je pense que, quand on parle de territoires où l'on assure une protection du milieu naturel et qu'on veut faire une analyse purement quantitative du territoire où la protection du milieu naturel est assurée, il faudrait inclure les zones d'ambiance. C'est une question de point de vue.

Deuxième question, c'est normal qu'une société comme la vôtre insiste beaucoup sur les fins d'éducation que l'on doit poursuivre dans le réseau des parcs. Cela fait partie de votre vocation, de votre mission, en quelque sorte, c'est tout à fait normal que vous insistiez là-dessus.

J'ai d'ailleurs indiqué hier que c'était là aussi une activité essentielle, fondamentale, qui devait s'exercer dans les parcs nationaux du Québec et que, pour éviter toute ambiguïté, nous allions apporter un petit amendement à la loi pour qu'on retrouve cela dans la loi également, comme on le retrouve dans la loi actuelle où on parle d'éducation.

Je voudrais vous demander, comme vous vous intéressez beaucoup à l'interprétation de la nature, quelle est votre appréciation des programmes d'interprétation de la nature qu'on retrouve actuellement dans la plupart des parcs, dans tous les parcs qui ont l'appellation de conservation.

Mme Arseneault: Je pense qu'il y a quelques années il y avait eu quand même un très fort mouvement en vue de l'interprétation de la nature des parcs, dans les parcs. Cependant, on note - je n'aurais pas de chiffres à vous donner, c'est surtout, en fait, une appréciation personnelle - quand même une perte au niveau total des activités par rapport à l'éducation, par rapport aux programmes d'interprétation de la nature. Je pense que, dans plusieurs parcs, il y a eu des programmes qui sont tombés ou qui ont fait l'objet de coupures; non pas dans tous les

parcs. Je sais que, dans certains parcs, même encore de récréation, il existe des programmes d'éducation. Je crois qu'on devrait aussi mettre plus d'accent au niveau de la protection par le public, c'est-à-dire que, dans les parcs, qu'ils soient de conservation ou de récréation, peut-être que les programmes d'interprétation de la nature attirent une certaine clientèle et l'éducation peut se faire à tous les niveaux, à partir de la personne qui arrive dans le stationnement jusqu'à la personne qui suit une visite de quelques heures par un naturaliste. Toutes ces clientèles sont attirées selon différents besoins, mais elles ont toutes besoin d'éducation. C'est peut-être là probablement - je ne dirais pas la faille, du moins, ce serait trop fort - le point sur lequel on devrait mettre l'accent dans les prochaines années.

D'autre part, lorsque vous dites que vous allez amender le projet de loi et que vous allez ajouter la vocation éducative, je crois que c'est vraiment très bien. Je vous remercie beaucoup. Le seul problème, c'est qu'on croit que parfois cela devrait aller de pair avec la conservation. On peut vraiment bien faire de l'éducation dans un milieu non pertubé et qui est conservé dans sa plus grande totalité; si on calcule que l'éducation n'est pas incompatible avec la récréation extensive, on peut vraiment viser des niveaux d'éducation très grands. À ce point, justement, lorsque, dans vos objectifs, vous ne définissez pas tout de suite la priorité de conservation ou de récréation, c'est là que cela nous inquiète. On croit que l'éducation peut être à certains niveaux incompatible avec la récréation intensive. Autrement dit, cela laisse moins de territoire.

M. Brassard: J'aurais une- troisième question. À la page 3, quand vous parlez de nomenclature adaptée aux besoins, vous indiquez que l'appellation de parcs nationaux risque de susciter une confusion inutile avec les parcs nationaux du Canada dont le but premier est la conservation. Juste pour mémoire... Je dois d'abord vous dire que le terme "national", je ne pense pas que ce soit un monopole exclusif du gouvernement fédéral. Il y a l'Assemblée nationale, il y a les musées nationaux du Québec, enfin, le terme "national", je ne crois pas qu'il y ait un décret divin qui stipule que c'est une propriété exclusive du gouvernement fédéral.

Mme Arseneault: Absolument pas.

M. Brassard: Le terme "national" pourrait être utilisé également au Québec pour bien marquer l'intérêt du site qu'on établit en parc, l'ampleur de l'intérêt, donc, qui est d'un intérêt national. Quand vous dites que les parcs nationaux du Canada dont le but premier est la conservation, je ne l'ai pas tout lu, mais je vous renvoie au document dont vous me parliez tantôt, des étudiants Bourdages, Bouchard et Trépanier qui, portant sur les parcs du Canada, affirme en page 10, parlant des parcs du Canada, et je cite: "Certains parcs sont plutôt voués à la protection du milieu naturel ou même d'une espèce en particulier alors que d'autres constituent des sites récréatifs en nature. "

Mme Arseneault: Sites en nature.

M. Brassard: Même si cela n'apparaît pas - et je vous signale aussi qu'il n'y a pas de classification dans la loi sur les parcs fédéraux - dans les faits, il y a des parcs dont l'élément fondamental est le paysage et l'état naturel, le milieu naturel et il y en a d'autres qui sont surtout destinés à la récréation. Il y a même une troisième catégorie, les parcs qui ont pour fonction de préserver un genre particulier de flore et de faune. C'est le document dont vous parliez tantôt. Quand vous dites "dont le but premier est la conservation", on peut dire cela du réseau des parcs actuels du Québec, de la douzaine ou des treize qui existent présentement. Ce sont d'abord des parcs de conservation.

Mme Arseneault: Ce que je voulais dire surtout par conservation, c'était comme l'exemple de M. Bouchard tantôt. C'était que, quand même, dans les parcs nationaux du Canada, il y a une vocation. Même si elle est récréative, c'est une récréation extensive, donc qui n'est pas incompatible avec la protection, mais qui, au contraire, vise même l'éducation dans les sites de protection. Je ne vois aucune incompatibilité à nommer "parcs nationaux" les parcs du gouvernement du Québec; au contraire, ce n'est pas là mon point. C'est plutôt parce que, selon les objectifs, il n'y aurait plus de classification, à ce moment-là, entre le parc de la Yamaska ou le parc des Îles-de-Bouchervilie et celui, peut-être, du Mont-Orford qui pourrait devenir un parc de conservation, ou du moins dans une grande partie. C'est à ce niveau-là surtout. Quand je dis que le but premier est la conservation, c'est l'objectif premier, la conservation, même s'il y a une récréation extensive dans les parcs, et c'est en vue des générations futures. Donc, en vue des générations futures, cela implique vraiment une conservation. C'est à ce niveau-là.

M. Brassard: II y a aussi de la conservation dans les parcs qui ont un statut de parcs de récréation au Québec...

Mme Arseneault: Oui.

M. Brassard:... et dans le réseau des parcs relevant du gouvernement fédéral, on

retrouve la même chose aussi. Vous parlez de récréation intensive ou extensive. Je vous signale qu'à Banff, qui est le premier des grands parcs créés par le gouvernement fédéral, il y a des équipements de récréation intensive aussi. Il y a des pistes de ski alpin à Banff.

Mme Arseneault: Oui, c'est encore là une raison historique. Je veux dire qu'il y a toujours des raisons...

M. Brassard: Comme au Mont-Orford.

Mme Arseneault: Oui, mais, si on les agrandit au détriment du milieu naturel, ce ne sont plus des raisons historiques, ce sont des raisons économiques.

Le Président (M. Marquis): Je vous remercie, M. le ministre. La parole est à M. le député de Charlesbourg.

M. Côté: M. le Président, je voudrais accueillir la présentation de Mme Arseneault et de Mme Gagnon et peut-être un peu corriger le ministre quant aux étudiants Bourdages, Bouchard et Trépanier, nos prédécesseurs à la présentation des mémoires. À ce que je sache, le conservateur M. Bouchard a peut-être fait des études à temps partiel, mais il n'est plus étudiant. Je ne crois pas que Mme Trépanier, qui est avocate et urbaniste, soit encore aux études.

J'aimerais en savoir davantage - ce n'est pas une méconnaissance du dossier -sur la société elle-même. Votre société, on apprend qu'elle est fondée depuis dix ans et qu'elle a 1500 membres. De quelle manière fonctionnez-vous au plan financier? À combien de personnes dispensez-vous votre savoir annuellement, si c'est possible de l'évaluer? Hier, le député de Chambly nous faisait part d'un sondage scientifique, en matinée, et d'un sondage maison en après-midi, pour parler du Mont-Saint-Bruno. J'ai l'impression que vous représentez davantage l'utilisateur de ces espaces-là et que vous nous donnez une expertise assez intéressante.

Mme Arseneault: La société regroupe 1500 membres qui sont répartis vraiment dans tout le territoire québécois. Environ 35% sont dans la grande région de Montréal. Le but premier d'adhérer à notre société, c'est surtout pour les objectifs qu'on défend. La SAJIB vise en premier, comme je l'ai dit, la diffusion des connaissances, donc elle a un rôle d'éducation en botanique, en horticulture et en écologie. C'est donc très vaste, c'est pourquoi on a vraiment un éventail de membres assez vaste. Nous avons tout autant M. Tout-le-Monde qui est habitant de Rosemont ou citoyen de Montréal. Nous avons aussi des écologistes, des gens qui travaillent au jardin et à l'institut, évidemment, et des sens de tous les secteurs, gouvernemental, institutionnel... (11 h 30)

Nos activités sont assez diversifiées. Cela part évidemment de l'implication quotidienne. Nous sommes autosuffisants au niveau financier, nous ne recevons aucune subvention. Même si nous avons été appelé "organisme national de loisir scientifique" depuis un an et demi, nous n'avons reçu aucune subvention. Les seules subventions que nous obtenons, et nous en sommes très fiers, c'est lorsque nous présentons des projets qui visent la création d'emplois ou qui visent vraiment des projets très spécifiques. Ainsi, Mme Gagnon, qui est écologiste, a pu travailler pendant plusieurs mois grâce à une subvention du ministère de l'Environnement qui a été accordée pour un programme de création d'emplois qui visait à une meilleure connaissance des sites naturels protégés du sud du Québec.

Alors, ça vous donne un aperçu vraiment de nos activités. Cela part de l'atelier où on apprend à bouturer des plantes, ce qui s'adresse à des spécialistes en horticulture ou à des amateurs, et va jusqu'à de grands projets qui visent vraiment l'éducation et la conservation.

La dernière activité qui nous permet aussi de diffuser beaucoup plus de connaissances, c'est notre bulletin, qui est une revue dont les coûts sont complètement absorbés par les membres et qui est un organe de diffusion en vulgarisation scientifique au Québec. Il est publié quatre fois par année. D'ailleurs, ce mémoire fera sûrement l'objet d'un article à l'intérieur du bulletin, puisque nous y mettons l'information diffusée par la SAJIB, mais, également, des articles de nos membres, que ce soit sur les parcs, sur les plantes rares.

Nous avons eu, dans le cas du dossier Saraguay, énormément d'impact puisque c'était un parc tout près de nous. Comme 35% de nos membres sont dans la région de Montréal, cela avait beaucoup d'importance pour nous. Alors, on a défendu ce dossier. On en a fait un bulletin spécial qui est encore aujourd'hui une source d'information assez importante. C'est le genre de dossier dans lequel on s'implique. On s'est impliqué aussi dans les audiences publiques du mont Tremblant et du mont Orford. Ce sont des exemples dans lesquels on s'est impliqué.

Évidemment, la coexistence de deux institutions un peu mères avec la nôtre, cela favorise beaucoup l'échange de connaissances. D'autre part, nous, on donne l'impact du public, c'est-à-dire une variété de votants, si on peu appeler ça comme ça, de citoyens qui ont beaucoup de préoccupations, mais qui, lorsqu'ils adhèrent à la SAJIB, je crois, sont d'accord avec nos objectifs primordiaux.

M. Côté: Juste une dernière question sur le financement. Vous avez un budget de fonctionnement de combien? Je vous ai entendu dire tout à l'heure que vous n'aviez pas de subvention. Bien souvent, on a comme réponse que c'est parce qu'on n'en a pas demandé. Dans votre cas, est-ce que cela a été demandé?

Mme Arseneault: Oui, on en a demandé l'année dernière au MLCP. Je crois que c'était la première année qu'on le demandait. On l'a redemandé cette année. On n'a jamais eu de mauvaises relations avec le MLCP, qu'il soit libéral ou péquiste. Mais disons que, l'année dernière, c'était la première année qu'on demandait une subvention et on ne l'a pas eue.

Mais on n'attend pas ça pour vivre. On a un employé à temps partiel; on a un budget de fonctionnement de 20 000 $. Cela, c'est sans compter, évidemment, les projets de création d'emplois, autant fédéraux que provinciaux. On a eu des projets vraiment fantastiques, comme diriger toute l'animation au niveau plus spécialiste.

Lors des Floralies internationales de Montréal, on avait formé des guides. On les a employés grâce à un projet du gouvernement du Canada. On a également dirigé des projets beaucoup plus communautaires, tels La Cité écologique, qui est encore un programme du gouvernement du Canada, qui a été repris cette année sous un autre vocable, Ensemble, un quartier vert, qui est dans le comté de Rosemont, au niveau fédéral, et qui vise la sensibilisation du public à l'écologie et à l'embellissement urbain.

Ce sont des exemples qui nous permettent vraiment de fonctionner et de mieux diffuser notre rôle, mais qui, à un stade journalier, ne nous aident pas. Mais je crois qu'on a toujours un bon contact avec tous les paliers gouvernementaux.

M. Côté: Pour revenir au projet de loi, on retrouve à la page 4, au dernier paragraphe avant la conclusion, une préoccupation: "La protection du territoire des parcs de conservation classifiés selon l'actuelle loi sera-t-elle permanente si le ministre peut décider quand il lui semble d'une nouvelle interprétation des objectifs prioritaires?" Dans la loi actuelle, à l'article 1c, on parle de "protection permanente de territoires représentatifs".

Hier, à l'Association des biologistes du Québec, j'ai posé la question: Est-ce que vous ne pensez pas qu'il y ait un danger et que ça puisse être un recul? Cela a été une réponse plutôt négative. Est-ce que je dois comprendre de votre affirmation qu'il y a un danger, que vous craignez à ce niveau?

Mme Arseneault: Comme M. Bouchard l'a mentionné, lorsqu'on crée un nouveau parc, on définit des objectifs. Dans le cas des parcs déjà existants, ils ont déjà des objectifs de conservation ou de récréation. Cela va parce qu'il va y avoir des audiences publiques lors de la création d'un nouveau parc; lorsqu'il y a eu dénomination ou classification: parc de conservation et parc de récréation, il y a eu des audiences publiques. La population a donc eu la chance d'exposer ses idées là-dessus. Je crois surtout que c'est lorsqu'on mentionne qu'on pourrait adopter des règlements pour diviser un parc en différentes zones par décret que c'est un peu dangereux. C'est à ce stade, si cela s'applique aux nouveaux parcs, mais en plus si cela s'applique aux anciens parcs. Les "batailles", entre guillemets, qui ont été gagnées ou perdues pour la récréation ou la conservation, on devrait vraiment savoir... Il devrait peut-être y avoir des audiences publiques à nouveau lorsqu'on doit diviser ou changer le zonage. C'est surtout à ce niveau, je crois, qu'est le danger. C'est un danger qu'il faut considérer.

Mme Gagnon (Nicole): Je voudrais ajouter quelque chose aussi, c'est que vous substituez à la classification d'un parc les objectifs, c'est-à-dire les deux objectifs: conservation et récréation, ce qui va un peu à l'encontre de sa classification antérieure qui est de conservation.

M. Côté: Ma collègue de Chomedey...

Mme Bacon: J'aurais peut-être quelques petites questions, M. le Président. À la page 2 de votre mémoire, je reviens à l'élément "éducation" et au rôle de la conservation. Vous semblez privilégier le fait qu'on offre davantage une éducation quant à l'interprétation de la nature, par exemple, dans des parcs, et vous voulez que cela s'intègre dans une politique gouvernementale d'éducation en matière de respect de l'environnement. Je suis tout à fait d'accord avec cela. Je pense qu'on ne peut pas dissocier l'un et l'autre. En même temps, une question me vient à l'esprit: Est-ce que vous compteriez, à ce moment, sur du bénévolat? Est-ce que nous avons suffisamment de gens? Vous avez parlé de formation, quand même, par la diffusion de votre information, d'une éducation que vous faites auprès de vos membres qui sont déjà des gens sensibilisés dans le domaine. Il y a des gens qui le sont plus ou moins. Est-ce que vous trouvez que nous avons suffisamment de gens qui seraient formés et prêts à transmettre cette éducation, cette formation?

Mme Arseneault: Je pense qu'il y a suffisamment, présentement, au Québec, d'organismes à but non lucratif qui

s'intéressent à ce domaine et ils sont répartis pas mal dans l'ensemble du Québec. On est peut-être localisé tout en étant très national, mais il y a des organismes régionaux aussi, des sociétés d'horticulture et d'écologie, des organismes qui visent, admettons, la connaissance de la faune ailée. Je crois que le bénévolat peut se mettre surtout au niveau de la sensibilisation. C'est déjà une clientèle cible. Quand nous faisons des activités par le Comité de la flore québécoise, nous avons nos propres animateurs. Nous allons dans ces parcs; nous sommes déjà formés. Nous avons des animateurs écologistes ou amateurs avertis, mais je vous donne ma parole que ce sont d'aussi bons écologistes et ils sont prêts, eux, ces gens, à diffuser leurs connaissances à ceux qui sont invités lors des activités. Nos activités ne sont pas restreintes seulement à nos membres. Nous faisons de la publicité pour nos activités. Je crois qu'au niveau régional ce serait d'autant plus important que le ministre puisse encourager ces mouvements à croître, à se multiplier.

Mme Bacon: Vous devancez la question que je voulais vous poser: Est-ce que vous verriez d'un bon oeil le fait que tout ce groupe de bénévoles ou de gens intéressés soit encadré, peut-être, dans un soutien technique qui pourrait être donné par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ou celui de l'Environnement? Je ne sais pas si vous verriez cela d'un...

Mme Gagnon (Nicole): Si vous entendez un soutien administratif, il existe déjà des structures - souvent assez lourdes, d'ailleurs - au niveau régional, au niveau national: le Conseil de développement du loisir scientifique, les conseils régionaux. Ces gens, je pense, sont tous en mesure d'offrir un soutien administratif. Quant au soutien technique, je crois qu'il faut faire bien attention, également. Il y aura toujours des organismes qui vont n'être créés que pour cela. Il ne faut pas non plus avoir un organisme qui ne naisse que pour faire du bénévolat dans un parc national. Je crois que ces objectifs doivent être beaucoup plus vastes et doivent englober des objectifs beaucoup plus permanents et un peu extérieurs aux parcs.

Il y a aussi d'autres organismes qui vont être créés qui seront beaucoup plus lucratifs et qui auront tendance à offrir le même type de services que des organismes à but non lucratif, mais qui vont amener les gens en autobus, qui vont les véhiculer et qui vont devenir des mini-organisateurs de voyages. Non pas que ces gens-là ne doivent pas être appuyés au niveau touristique, mais il appert que ce sont quand même des organismes à but lucratif. Il faudrait quand même les dissocier des objectifs dont la portée d'action est beaucoup plus vaste.

Mme Bacon: Verriez-vous d'un bon oeil des contrats qui pourraient être accordés à un organisme comme le vôtre, par exemple, par un ministère? Là, vous ne vous sentiriez pas encadrés massivement par une bureaucratie pour ni plus ni moins livrer la marchandise...

Mme Arseneault: Oui, c'est évident.

Mme Bacon:... parce que vous auriez les gens nécessaires...

Mme Arseneault: Oui, je crois...

Mme Bacon:... et cela ne vous tient pas à la merci d'un pouvoir discrétionnaire ministériel.

Mme Arseneault: Absolument. C'est là, d'ailleurs, une de nos préoccupations dans le cadre du projet Archipel, par exemple, où on parle d'un nouveau parc, où on a les ressources humaines, tant pour l'animation que pour l'étude de la végétation. De par nos membres, nous avons suffisamment de potentiel pour que cela ne représente pas qu'une institution, mais bien un ensemble de personnes. C'est à ce niveau-là. Évidemment, on fait des démarches et, d'ailleurs, on a été très bien reçus. On a été entendus. J'espère que cette communication va pouvoir continuer.

Mme Bacon: Merci.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup, Mme Arseneault et Mme Gagnon, pour votre présence et votre témoignage devant cette commission parlementaire.

Alors, sur ce, la commission parlementaire suspend ses travaux jusqu'après la période des affaires courantes cet après-midi.

(Suspension de la séance à 11 h 42)

(Reprise à 16 h 39)

Le Président (M. Marquis): La commission parlementaire de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux afin de procéder à une consultation particulière sur le projet de loi 13, Loi sur les parcs nationaux. Nous nous excusons, auprès de nos invités pour le retard dû à des travaux parlementaires qui se sont prolongés dans l'autre salon et nous invitons là-dessus le premier groupe qui était prévu à 15 heures, l'Union québécoise pour la conservation de la nature, à se présenter à la table et à nous livrer son exposé.

Alors, je pense qu'il s'agit de M.

Harvey Mead qui est le président...

UQCN M. Mead (Harvey): C'est cela.

Le Président (M. Marquis):... et de M. Yves Bédard - c'est bien cela? -...

M. Bédard (Yves): Oui.

Le Président (M. Marquis):... qui est le vice-président à la conservation. Alors, la parole est à vous.

M. Mead: J'aimerais remercier la commission de recevoir nos commentaires et, d'une certaine façon, j'aimerais excuser l'absence d'un mémoire écrit. Lorsque nous avons été avisés, au mois de novembre, de la tenue d'une commission, nous avons consulté les affiliés. Mais, croyant, par la suite, que le projet de loi n'allait pas revenir sur la table, nous n'avons pas continué la démarche en vue de la préparation d'un mémoire écrit.

Ce que j'aimerais faire, cet après-midi, se ferait en deux étapes. Premièrement, j'aimerais essayer de situer notre intervention dans un contexte un peu plus global que le contexte du projet de loi comme tel. Par la suite, on aimerait faire quelques commentaires sur le projet de loi en le comparant à la loi actuelle. J'ai soumis à la commission, cet après-midi, le texte d'un communiqué de presse que nous avons émis la semaine dernière ainsi qu'un document produit par la Fédération canadienne de la nature avec laquelle l'UQCN maintient des contacts assez étroits.

Je crois que, pour nous situer, le communiqué me permet d'indiquer trois aspects du problème dans lequel se situe la question du projet de loi sur les parcs. Nous croyons, en fait, qu'un réseau de parcs dans la province est essentiel. Il est accepté par le ministère et nous n'avons pas d'objection comme telle à la volonté du ministère de maintenir ou d'instaurer un réseau de parcs québécois. Par contre, les questions de conservation, nous le croyons vraiment, englobent plus que cela et - dans le communiqué, nous en parlons - les espèces indigènes de la province ne sont pas protégées de façon que nous considérons adéquate. Nous croyons que les parcs comme tels ne peuvent pas s'adresser à cet aspect de la question de conservation. Nous espérons que la commission prendra note de cette carence dans les dispositions législatives qui existent actuellement. De la même façon, les parcs - tout dépendant de la façon dont on interprète les premiers articles et surtout si on s'en tient à la loi actuelle - répondent à des objectifs assez précis, spécifiés dans la loi. Ils visent la protection de sites représentatifs ou exceptionnels, si je m'en tiens à la première catégorie de parcs.

Il existe tout un autre domaine de sites, d'habitats qui ne sont pas protégés, qui ne sont pas visés par la Loi sur les parcs et qui ne devraient peut-être pas être visés par une telle loi. Il s'agit dans ce cas-ci de ce qui est appelé, au niveau du ministère, les habitats fauniques et, encore une fois, l'UQCN croit que c'est essentiel que la Loi sur les parcs soit complétée par une loi portant sur une protection différente, importante pour des sites fauniques, selon le mandat du ministère, mais pour les habitats de la province.

Dans les deux cas, le cas des espèces indigènes et le cas des habitats, des projets de loi sont prêts et nous espérons que la commission tiendra compte de cela et que les deux projets de loi seront déposés ce printemps. Le ministre a promis qu'il y aurait une commission parlementaire sur la question des habitats fauniques. C'est dans ces contextes que je fais des remarques sur les habitats fauniques.

Alors, je ne sais pas si vous avez eu le temps de lire le communiqué mais ces remarques se situent dans un contexte que l'union et l'exécutif trouvent inquiétant mais qui répond assez bien, quand même, à notre expérience depuis quelques années. C'est-à-dire que, une étude qui est une première étude et qui a certainement des failles - je suis prêt à répondre à des questions si vous en avez - une étude de la Fédération de la nature en utilisant neuf catégories portant sur les questions de la conservation, classe le Québec neuvième sur dix au Canada en ce qui concerne l'implication dans le domaine de la conservation, dans le domaine de l'environnement.

Nous trouvons que cette situation pourrait être corrigée de façon importante en adoptant les deux lois dont je parlais, la loi des espèces menacées et la loi des habitats fauniques. D'autres mesures, évidemment, vont prendre plus de temps.

Dans le communiqué, par contre, nous disons que nous croyons que la loi actuelle est supérieure, est meilleure que la loi qui est proposée dans le projet de loi 13.

Dans cette partie de notre intervention, j'aimerais faire quelques commentaires sur les deux lois. Dans le communiqué, nous demandons tout simplement que le projet de loi soit retiré. Il y a des failles dans la loi actuelle. Nous n'essayons pas de dire que c'est parfait, mais nous la croyons beaucoup plus importante, beaucoup plus impressionnante du point de vue législatif que la loi que vous proposez.

Je peux commencer avec les définitions, peut-être, en guise de présentation. L'Union québécoise pour la conservation de la nature est affiliée, est membre de l'Union internationale pour la

conservation de la nature. Cette, union internationale a déjà adopté une définition de parc qui, nous le croyons, devrait quand même guider la réflexion de la commission. Si on compare la définition... Je pense que je peux la lire, avec votre permission, ce n'est pas dans le communiqué: Un parc national... D'ailleurs, c'est un des changements importants dans le projet de loi 13, le nom serait changé. On a quelques réticences è ce propos, mais cela ne vise pas l'essentiel de notre problème. Un parc national est un territoire relativement étendu qui présente un ou plusieurs écosystèmes généralement peu ou pas transformés par l'exploitation ou l'occupation humaine, où les espèces offrent un intérêt spécial du point de vue scientifique, éducatif et récréatif ou dans lesquels existent des paysages d'une grande valeur esthétique et dans lesquels la plus haute autorité du pays a pris les mesures pour empêcher ou éliminer, dès que possible, sur toute sa surface, cette exploitation ou cette occupation et pour y faire, effectivement, respecter les entités écologiques, géomorphologiques ou esthétiques ayant justifié sa création et dont la visite est autorisée, sous certaines conditions, à des fins récréatives, éducatives et culturelles.

Quant à nous, cette définition rejoint l'objectif visé par la loi actuelle. La distinction entre parc de conservation et parc de récréation, dans la loi, cause des problèmes. Il y a peut-être des moyens qu'on peut viser pour améliorer le processus, mais les définitions comme telles... Surtout pour faire la comparaison avec la définition de l'UlCN, la définition de parc de conservation correspond vraiment aux objectifs que l'UQCN se fixe dans le domaine des parcs et que le gouvernement s'est fixés.

Je crois bien que le ministère ne cherche pas à démolir le réseau actuel, mais je crois qu'il faut vraiment constater que le projet de loi, en mettant dans le premier article "protéger" et "mettre en valeur" dans la même phrase, cherche vraiment à affaiblir ce qui semble assez fort dans la loi actuelle, c'est-à-dire que le parc de conservation, dans les définitions de l'article 1, a comme objectif prioritaire d'assurer la protection permanente. Il n'est pas question de mise en valeur comme telle et nous considérons que c'est vraiment une insertion, un changement important,

La question de la récréation extensive est clairement identifiée aussi dans la loi actuelle. Cela disparaît, si je ne me trompe, dans le projet de loi. Nous croyons que, sans vérification absolue, cette distinction est importante. Cela répond aussi, évidemment, à la définition de parc national faite par l'UICN. La récréation est toujours en fonction de la protection et la récréation extensive correspond à cet objectif dans la loi actuelle.

Il reste peut-être à régler la question de parc de récréation. On a eu quelques petits débats à propos au Mont-Tremblant et au Mont-Saint-Bruno. Si le gouvernement veut créer des parcs nationaux, nous croyons que le réseau qui va englober ce qui est distingué dans la loi actuelle risque de perdre l'objectif premier qui est la conservation. La politique des parcs du gouvernement, d'ailleurs, spécifie ou identifie, je crois que c'est 44 ou 45 régions, qui devraient être représentées. Nous sommes d'accord avec cet objectif de faire représenter les régions naturelles. Encore une fois, cela correspond à la définition que je viens de lire.

Dans la nouvelle loi, d'ailleurs, d'autres parties de la définition semblent disparaître. À la fin de la définition on lit: "à des fins d'éducation et de récréation extensive". Or "récréation extensive" tombe, "éducation" aussi. Bref, nous croyons qu'avec la loi actuelle, nous avons une loi qui permet, en partant d'une décision du ministre quant à la catégorie de parcs dans laquelle va s'insérer la proposition, de créer un réseau de parcs nationaux, qui seraient des parcs de conservation. Nous sommes d'accord avec cela, nous voulons garder cette loi avec cette définition de parc de conservation. Si vous voulez les appeler parcs nationaux, c'est tout à fait raisonnable et correct, mais cela peut comporter quelques problèmes, croyons-nous, quant aux petits parcs, aux parcs de petite superficie et aux parcs de récréation où l'on peut sous-entendre les parcs de récréation intensive, les parcs où il y a du ski alpin, par exemple.

Un autre changement - peut-être que c'est le seul autre point principal - qu'on voudrait souligner, se rapporte à la question de zonage. On a un choix entre la loi actuelle et le projet de loi qui est présenté. On peut faire confiance au ministère au niveau du zonage ou on peut faire confiance au ministère au niveau de la classification, des objectifs. L'union préfère faire confiance sur le zonage plutôt que sur la classification. Donnez-nous des parcs de conservation et on est prêt à comprendre que le zonage à l'intérieur de ceux-ci va se définir, va se réaliser en fonction de l'objectif premier. Mais si on est obligé... Il semble, selon l'article 5, qu'il y aurait des audiences publiques sur un plan de zonage; je crois qu'il serait difficile de s'attendre qu'un gouvernement puisse vraiment présenter, dès le départ, des plans de zonage qui seraient retenus intégralement. Cela risque de créer des problèmes au niveau des audiences et au niveau de la consultation.

Sur ces deux points, je pense que je vois une différence entre les deux lois. Dans les deux cas, on préfère de beaucoup la loi actuelle, où il y a quelques améliorations à apporter; une surtout, c'est au niveau de

l'expropriation. C'est un pouvoir important pour le ministère, pour le gouvernement; nous sommes certainement d'accord avec cet ajout à l'article 2 du projet de loi. Mais il n'y a rien qui empêche un amendement à la loi actuelle, pour y inclure l'expropriation comme un pouvoir dans ce contexte.

Je pense que cela suffit pour exprimer nos préoccupations. On serait prêt à répondre à vos questions.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup, M. Mead. Je passe la parole au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Brassard: Je voudrais remercier l'Union québécoise pour la conservation de la nature d'avoir bien voulu participer à cette consultation particulière de la commission de l'aménagement et des équipements. Je voudrais aussi, par la même occasion, rendre hommage au travail tout à fait remarquable et exemplaire que vous accomplissez au Québec en matière de conservation et de protection des milieux naturels. Je pense que c'est important de le souligner. Vous êtes l'un des organismes les plus vigilants et les plus dynamiques au Québec en cette matière, actuellement.

Ceci étant dit, vous avez raison d'exprimer votre conviction que la politique sur les parcs ne constitue qu'un volet d'une politique plus globale en matière de conservation de la nature. Effectivement, nous sommes à mettre au point, actuellement, un énoncé de politique ou une proposition de politique portant sur les habitats fauniques, qui devrait faire l'objet d'une consultation le plus tôt possible, je l'espère, et qui devrait aussi donner lieu à un projet de loi qui, sans aucun doute, pourrait être soumis à une consultation en commission parlementaire.

J'aurais quelques petites questions, M. le Président, compte tenu du temps qu'il nous reste. D'abord, l'étude dont vous parlez au tout début de votre communiqué de la Fédération canadienne de la nature qui classe assez mal le Québec - j'en parlais tantôt au sous-ministre adjoint, on n'a pas eu connaissance de cette étude au ministère -est-ce qu'elle est récente?

M. Mead: Je vous en ai envoyé une copie la semaine dernière. Je m'excuse, si vous ne l'avez pas encore reçue. Elle a été publiée jeudi dernier.

M. Brassard: Ah bon! On va en faire une analyse minutieuse. On va scruter cette étude pour en vérifier le bien-fondé. Pour ce qui est de la Loi sur les parcs, je vois que vous demandez, comme d'autres organismes l'ont fait, le maintien du statu quo en quelque sorte c'est-à-dire, le maintien de la loi actuelle. Je comprends les objectifs que vous poursuivez: assurer la conservation des milieux naturels. Mais je parviens difficilement à percevoir comment le projet de loi actuel peut comporter des risques en matière de conservation des milieux naturels puisque - au fond je répète un peu toujours la même chose - ce n'est pas uniquement par la classification de parcs qu'on assure et qu'on obtient des garanties de protection des milieux naturels, c'est bien plus par les objectifs qu'on poursuit, par les intentions d'aménagement et par le zonage.

Je trouve un peu bizarre que, tout à l'heure, vous ayez dit: On est prêts à faire confiance au ministère en matière de zonage. Contrairement à ce que d'autres organismes nous ont exprimé ce matin et hier, vous dites: On est prêts à faire confiance au ministère pour ce qui est du zonage - ce qui est pourtant une opération fondamentale lorsqu'on établit un parc, parce que la conservation est assurée en très grande partie et presque totalement par le biais du zonage, dans nos parcs - par contre, on lui fait peu confiance pour ce qui est des objectifs poursuivis et de l'appellation qu'on veut accorder aux parcs. J'avoue que je reste un peu perplexe devant vos propos. J'accepte bien la confiance que vous manifestez à l'égard du ministère en matière de zonage, mais je vois mal comment cette confiance peut accompagner ou être associée à une espèce de méfiance ou de mise en doute du ministère lui-même en matière d'objectifs à poursuivre et d'appellation même du parc. Si on mérite votre confiance pour ce qui est du zonage - et le zonage, c'est une opération essentielle en matière de conservation de la nature - il me semble qu'on devrait aussi la mériter pour ce qui est de déterminer les objectifs. D'autant plus que les objectifs, en vertu du projet de loi actuel, sont soumis à des audiences publiques, alors que pour le zonage, ce n'est pas le cas. Les objectifs sont soumis à des audiences publiques. Vous faites preuve de méfiance pour des objets qui sont soumis à des audiences publiques et vous faites preuve de confiance pour des choses qu'on fait sans être obligés d'aller en audience publique. J'avoue que je parviens mal à rattacher les fils. (17 heures)

M. Mead: Je peux m'expiiquer. En assumant que la proposition est pour un parc de conservation, l'article 2 de la loi actuelle - je comprends mal le mot "exclusives", mais en tout cas - parle d'affecter un parc, "à des fins exclusives de conservations ou de récréation... ". Je dis: Si c'est un parc de conservation qui est proposé, les objectifs du zonage vont être nécessairement en fontion de la conservation. Si, par contre, c'est une réponse peut-être trop simple, si je me dis: Bon, où mettre la confiance, où voir le

travail important du ministère par comparaison au travail du public, je dirais qu'en nous donnant un parc de conservation affecté à des fins exclusives de conservation, c'est un acquis très important, alors qu'avec la nouvelle loi, même si vous consultez sur les questions de zonage, c'est évident que cela va changer en cours de route. Il me semble que c'est évident, c'est nécessaire.

Mais, l'objectif est beaucoup plus vague: protéger et mettre en valeur. Apparemment, on peut s'attendre à d'autres objectifs, mais quand même, il n'y en a pas un seul qui a la clarté de la définition actuelle. Alors, si on sait que vous allez faire un zonage en fonction de la conservation, allez-y, mais si on ne sait pas cela, on ne peut pas le savoir avec le projet de loi actuel. On trouve que c'est regrettable.

M. Brassard: On va faire un zonage en fonction des objectifs poursuivis. C'est cela qui est important. Comme les objectifs sont soumis aux audiences publiques, la population, les organismes vont pouvoir vérifier quelles sont les objectifs. Si ce sont des objectifs de conservation, à ce moment-là, vous jugerez les objectifs de conservation. On va les déterminer au moment des audiences publiques. On va déterminer que ce sont des objectifs de conservation et le zonage, évidemment, en découlera. Le zonage va être en fonction des objectifs qu'on aura, qu'on veut atteindre.

M. Mead: Oui, mais je pense que les groupes de citoyens ne veulent pas être obligés de débattre à chaque proposition de parc la question de l'objectif. On ne veut pas être obligé de débattre si cela coïncide avec un objectif de conservation. On peut s'attendre, selon le projet de loi, à peut-être une dizaine d'objectifs, je ne sais pas. J'en vois trois ici, deux regroupés dans le premier alinéa et le deuxième, tout seul. D'accord. Protéger et mettre en valeur, d'un côté, et favoriser la pratique d'activités de plein air. Alors, les groupes ne veulent pas être obligés de se remettre à défendre les objectifs qui sont clairement identifiés dans la loi actuelle. Cela correspond très bien, quant à nous, à la définition de parc national de l'union internationale. On perd un acquis, cela va remettre des débats beaucoup plus lourds que ce qu'on connaît maintenant. Quand vous dites que vous proposez un parc de conservation, on sait à quoi s'attendre, on connaît la limite du débat. Mais, quand vous allez présenter un objectif différent pour chaque parc - on peut s'attendre à cela, apparemment - je pense que le rôle des audiences publiques devient extrêmement lourd.

M. Brassard: Donc, vous voulez que les audiences publiques, si je comprends bien, continuent de porter sur les sujets qu'on retrouve dans la loi actuelle. Je vous signale qu'il s'agit exclusivement du périmètre et de la vocation.

M. Mead: C'est cela. Créez des parcs de conservation et on va participer pour essayer de faire des suggestions quant au plan d'aménagement, le zonage, au périmètre, mais c'est cela.

M. Brassard: Vous ne trouvez pas pertinent, comme c'est le cas dans le projet de loi actuel, que, à l'occasion des audiences publiques, les intentions d'aménagement du ministère soient soumis à la consultation? Vous ne trouvez pas cela pertinent?

M. Mead: On le voudrait bien et on s'attend que... D'ailleurs, dans toutes les audiences jusqu'ici, on a eu un plan quelconque. Mais, cela n'était jamais approfondi. Ces plans sont complexes et difficiles à établir et on ne s'attend pas que, lors de la création d'un parc... Je pense qu'au niveau fédéral, cela prend cinq ans, il y a des plans de cinq ans pour arriver à un zonage, mais je peux me tromper.

On voudrait bien participer à une évaluation de vos projets de zonage, mais vous avez quand même un personnel qualifié pour cela et l'objectif principal, qui reste plutôt politique que professionnel, je dirais, est la conservation. Cela est dans la loi actuelle et cela disparaît dans la loi que vous proposez.

M. Brassard: Je vous remercie.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Charlesbourg.

M. Côté: M. le Président, j'aimerais qu'on s'attarde peut-être davantage à l'étude qui a été rendue publique la semaine dernière et qui fait l'objet de votre premier paragraphe au sujet des parcs. Effectivement comme l'a constaté le ministre, elle constitue un jugement très sévère sur les efforts accomplis par le gouvernement du Québec en comparaison avec les autres. J'aimerais peut-être vous entendre davantage... Je remarque principalement la page 2, au tableau 1, ce qui nous concerne davantage à ce moment-ci au niveau des parcs, gestion de la faune et parcs provinciaux, le Québec obtient des notes "C" et des notes "F". Or, dans vos barêmes "F" est inférieur à 50. J'aimerais avoir quelques explications, même si j'ai tenté de voir la méthodologie très rapidement en écoutant votre conversation.

M. Mead: Comme point de départ le site... Cette étude est basée sur une analyse

comparative des différents gouvernements. Le "A" ne signifie pas un idéal mais plutôt le meilleur dans la classification. Il y a toujours un "A" dans chaque étape.

Dans la question des parcs, c'étaient des chiffres donnés par les différents gouvernements provinciaux. M. le ministre peut vérifier, mais je n'ai pas fait une étude. Apparemment ce sont des chiffres du ministère. Pour spécifier, dans la question des parcs, c'est à la page quinze, il y a deux évaluations. La première c'est le pourcentage de superficie de parc par province. Là c'est une des failles, si vous voulez. Il y a des parcs en Ontario ou en Colombie-Britannique qui se classent en premier et où la coupe forestière est permise, alors que le Québec a des réserves fauniques qui sont distinguées de façon très claire des parcs. Par contre le seul parc, je croirais, de Quético en Ontario engloberait tous les parcs provinciaux du Québec. Je peux me faire corriger sur cela. En tout cas, la différence entre 5% du territoire et 0, 22% est énorme. C'est cela l'échec.

Dans les dépenses par personne, le Québec est classé neuvième sur dix, je crois, dans les dépenses par personne investies dans le réseau des parcs. Là on a justement un investissement dans le cas d'Archipel qui, apparemment, englobera énormément d'argent. Il faudrait au moins essayer de balancer cela avec les besoins du réseau des parcs de conservation en milieu naturel.

Alors, pour la gestion de la faune, nos commentaires portent surtout sur le fait qu'il semblerait qu'il faut un effort beaucoup plus grand en ce qui concerne les habitats fauniques. Le Québec investit 6 $ vérifions, c'est à la page onze - et c'est très bien par rapport aux autres provinces, la troisième au pays, 6 $ pour chaque dollar de revenu qu'apportent la chasse et la pêche. C'est quand même une dépense plutôt qu'un revenu en comparaison à la gestion forestière, mais c'est très faible. On le voit parce que les habitats fauniques et les habitats en général ne sont pas protégés.

Les espèces menacées, le débat sur l'ail des bois, finalement, donne l'idée de ce qu'il y a. Cela se vend au marché. Il n'y a aucune protection pour les espèces quant à leurs habitats, quant au commerce, etc. Je ne sais pas si cela répond à vos...

M. Côté: Oui, j'ai pu voir dans la méthodologie que vous avez eu certaines difficultés à obtenir des statistiques récentes auprès de certains gouvernements. C'est une étude qui date quand même de... avec des chiffres d'il y a deux ou trois ans.

M. Mead: De Statistique Canada. Cela date généralement de 1981-1982. C'est seulement dans le cas de la gestion forestière au Québec que je verrais personnellement une différence sensible par rapport à ces années-là. Il y a une augmentation de l'investissement dans la sylviculture, j'espère, je soupçonne, je crois, au Québec mais dans les autres domaines, je ne pense pas qu'il y ait lieu de croire qu'il y a un gros changement.

M. Côté: Sur les parcs, c'est 1983-1984, les statistiques comme...

M. Mead: Cela, c'est cette année. C'était une consultation auprès du ministère.

M. Côté: Dans les espèces menacées, j'aimerais peut-être vous entendre davantage parce qu'en entendant cela, j'avais l'impression, au départ, que c'était concernant les habitats fauniques et je me suis rendu compte par la suite qu'on le trouvait sur la deuxième page du communiqué. J'aimerais peut-être vous entendre davantage sur les espèces menacées.

M. Mead: En fait, l'Association des biologistes a présenté un mémoire, hier ou ce matin, je ne sais pas, je ne sais pas s'ils en ont parlé mais ils ont fait une étude, c'est le groupe COSEMEC qui étudie les espèces indigènes de la province, depuis plusieurs années. Ils ont fait une étude de six espèces, en particulier, l'an dernier. Actuellement, les fonds ne sont même pas investis pour identifier les problèmes. On en connaît plusieurs, sans aucun doute. L'identification d'une espèce en danger comporte l'identification de son habitat, de ses besoins du point de vue migration et souvent de son exploitation. Dans le cas du beluga, cela a été chassé pendant longtemps. Cela est arrêté. Il reste, maintenant, la question de l'habitat.

Dans la Loi sur la conservation de la faune, il y a quelques articles qui portent, en fait, sur la défense de chasser, piéger ou pêcher des animaux sans permis. C'est une protection pour un animal, mais pas pour l'espèce. Je ne sais pas quelle sorte de réponse vous voulez, mais l'identification des espèces se fait, au ministère de l'Environnement, mais il n'y a rien pour les protéger et il faut procéder, je crois, conjointement, probablement avec d'autres ministères, quand cela concerne l'habitat.

M. Côté: Ce qui m'étonne, c'est de voir qu'un projet de loi visant la protection des espèces indigènes est actuellement à l'étude au ministère de l'Environnement et,d'autre part, vous avez au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche un projet de loi qui est en préparation sur la protection des habitats fauniques. Alors, il me semble que pour la conservation de la faune, l'initiative devrait peut-être revenir au ministre du Loisir, de la Chasse et de la

Pêche. Non?

M. Mead: En fait, je pense que la division s'est faite au fil des années. On ne cherche pas à intervenir de ce côté. C'est pour cela qu'on parle de problèmes interministériels. Je pense qu'il y a des ententes, quand même, assez bonnes entre les deux ministères, que je sache. De toute façon, je n'ai pas un mot à dire à ce propos. De façon générale, le ministère de l'Environnement prend les plantes et le MLCP prend la faune, mais il y a moyen quand même de déléguer à un ministère l'application de la loi tout en utilisant les services de l'autre ou de plusieurs autres. Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est très important dans le portrait des milieux humides.

M. Côté: Comme le temps est quand même limité, je m'excuse, ma collègue de Chomedey aurait des questions.

Le Président (M. Marquis): Mme la députée de Chomedey.

Mme Bacon: Puisque vous le mentionnez dans votre document, je vais déborder sur l'environnement. Vous parlez des contenants consignés et vous nous dites que plusieurs provinces ont des dispositions législatives ou administratives plus progressistes que celles qui existent actuellement au Québec. Est-ce que vous avez è l'esprit une province en particulier?

M. Mead: À l'Île-du-Prince-Édouard, il n'y a pas un contenant dans le domaine des boissons qui est jeté, c'est-à-dire que tout est consigné. Il faudrait que je vérifie, mais il y a plusieurs provinces qui contrôlent beaucoup plus la quantité, le volume de contenants qui peuvent être jetés plutôt que recyclés.

Mme Bacon: Est-ce qu'à l'île-du-Prince-Édouard ce n'est pas le verre surtout?

M. Mead: Je ne sais pas si les canettes ne sont tout simplement pas défendues. Je ne peux pas vous répondre de façon détaillée.

Mme Bacon: II y avait autre chose au niveau de votre évaluation de l'environnement. Vous y dites: On peut inclure le public comme des participants actifs dans la préparation et la révision de documents de révision.

M. Mead: Vous êtes où, s'il vous plaît?

Mme Bacon: À la page 20 de votre mémoire...

M. Mead: Merci.

Mme Bacon:... vous dites qu'une évaluation de l'environnement comprend normalement l'évaluation des moyens alternatifs pour réaliser un projet et on peut inclure le public comme des participants actifs dans la préparation et la révision de documents de révision. Si on revient aux canettes et aux consignes, est-ce que vous trouvez, à ce moment, qu'on ne devrait pas laisser au milieu le soin de trouver des solutions à des situations qui méritent des corrections.

M. Mead: Dans le communiqué de presse, nous apppuyons le ministre de l'Environnement dans ses efforts d'exiger la consigne. Je pense que le processus...

Mme Bacon: Mais vous savez que cela ne fonctionne pas bien en ce moment.

M. Mead: Excusez-moi.

Mme Bacon: II y a des problèmes en ce moment avec les consignes.

M. Mead: C'était prévisible.

Mme Bacon: Est-ce qu'on ne peut pas demander au milieu de trouver, peut-être, certaines solutions, à ce moment, et de faire des propositions au gouvernement?

M. Mead: Mais si vous voulez dire qu'on devrait peut-être laisser au jeu du marché, au jeu des questions financières de chaque citoyen la décision...

Mme Bacon: Non, non. Ce qui est le problème, en ce moment, c'est que cela devient un problème économique et non un problème de protection de l'environnement. Quand on fait ces lois c'est pour protéger l'environnement; ce n'est pas qu'un problème économique.

M. Mead: Je ne vous suis pas, je m'excuse. C'est un problème économique dans le sens que les dépanneurs et les détaillants...

Mme Bacon: Ils trouvent qu'ils ont des prix à payer pour la consigne et tout cela. Ils ont l'impression qu'ils font les frais et qu'ils ont toujours fait les frais quand ils ont des reprises au niveau des bouteilles, par exemple, du verre.

M. Mead: Mais ces canettes...

Mme Bacon: Ils auront à payer les frais de la même façon au niveau des canettes. Je simplifie, mais c'est ce qu'ils disent en ce moment. À ce moment-là, cela devient un

problème économique, mais il faut penser à un problème environnemental. (17 h 15)

M. Mead: En fait, le communiqué en parle. Toute la question de changer le contenant de verre en aluminium comporte un problème environnemental et économique, parce que c'est une question de création d'emplois dans le domaine des alumineries. Nous demandons une réévaluation de cela. On s'est inquiété dès le départ de cette démarche. Mais les canettes actuellement consignées remplacent les bouteilles consignées. Alors, on n'est pas capable quand même de comprendre le problème que connaît le détaillant quand il dit qu'il ne veut pas les canettes mais qu'il a accepté les bouteilles depuis des décennies.

Mme Bacon: Peut-être que cela fait trop longtemps qu'il les accepte.

M. Mead: Pardon?

Mme Bacon: Cela fait peut-être trop longtemps qu'il les accepte, c'est pour cela.

M. Mead: Je crois que c'est une très bonne affaire.

Mme Bacon: Vous n'avez pas pensé à aller plus loin dans votre recherche à ce sujet-là. Vous êtes d'accord avec ce qui se fait, vous n'avez pas pensé d'aller plus loin dans la recherche.

M. Mead: Nous essayons, justement ces temps-ci, de réévaluer la situation. Mais on n'a pas de position définie, actuellement...

Mme Bacon: D'accord.

M. Mead:... autre que celle du communiqué.

Le Président (M. Marquis): Alors, je remercie, au nom des membres de la commission...

M- Tremblay: M. le Président, une très courte...

Le Président (M. Marquis): Très courte.

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Est-ce que, selon vous, les objectifs énoncés à l'article 1 du nouveau projet de loi 13 seraient conformes à la déclaration de l'UlCN relativement aux parcs nationaux dans leur cas, ce qui ressemble étrangement à ce que sont, avec l'ancienne loi, les parcs de conservation?

M. Mead: Non. Je crois que la notion de "protéger" en enlevant "protection permanente" et en ajoutant "mettre en valeur", ceci fait que cet objectif premier ne correspond plus à la définition de pare national de l'UlCN.

M. Tremblay: Et la deuxième partie où il est question de favoriser les activités de plein air, est-ce que cela irait?

M. Mead: Non, il n'est pas question de cela dans un parc national pour l'UlCN ou pour le réseau américain ou canadien. On ne ferait pas des parcs nationaux pour la récréation. C'est pour cela que je dis qu'il y a peut-être des questions à se poser à ce niveau. Un parc national, de la tradition mondiale, est un parc de conservation et on ne parle pas de mettre en valeur en même temps qu'on parle de protection. On ne s'oppose pas à la mise en valeur de ces parcs, c'est évident qu'il faut que les gens les visitent.

M. Tremblay: Merci.

Le Président (M. Marquis): MM. Mead et Bédard, nous vous remercions beaucoup de vous être déplacés et d'être venus témoigner devant la commission parlementaire sur le projet de loi 13. On s'excuse encore une fois d'être obligés d'écourter vos interventions, compte tenu du temps limite et des circonstances qui nous ont amenés à faire cela cet après-midi.

M. Mead: On est bien prêt à céder la parole au RONLQ pour la question des parcs de récréation. Je vous remercie M. le Président, M. le ministre.

Le Président (M. Marquis): Très bien. J'inviterais à prendre place devant nous les représentants du Regroupement des organismes nationaux de loisir du Québec, avec comme porte-parole, je pense, M. Pierre Trudel, qui est le président du secteur plein air. Je lui demanderais de nous présenter les deux personnes qui l'accompagnent, ensuite de livrer à la commission le message qu'ils ont. M. Trudel.

RONLQ

M. Trudel (Pierre): Merci, M. le Président. Les deux personnes qui m'accompagnent sont, à ma gauche, Daniel Caron, qui est le responsable du dossier accessibilité aux terres publiques, au regroupement secteur plein air et, à ma droite, Pierre Lefebvre, du même secteur.

On profite de l'occasion pour vous rappeler l'importance croissante des activités de plein air dans le monde du loisir et de vous souligner l'une des plus récentes démonstrations de vitalité du secteur, soit le symposium qui s'est tenu dernièrement, en novembre dernier. Il réunissait pas plus de

six représentants des divers secteurs plein air de la société québécoise, résolus à donner à cette forme de loisir une place importante à cette dimension essentielle, la qualité de la vie. Une de ces formes de résolutions est, entre autres, de vous soumettre nos réactions suscitées par l'étude du projet de loi 13 sur les parcs nationaux.

Au nom des organismes nationaux de plein air, j'inviterais M. Daniel Caron, qui est notre responsable à ce dossier, à vous présenter nos réactions.

Le Président (M. Marquis): M. Caron.

M. Caron (Daniel): Notre intervention va porter, en fait, sur six thèmes, à savoir: L'appellation et les objectifs; la pratique des activités de plein air - est-elle favorisée ou prohibée dans les parcs - l'entretien des parcs, une obligation; la réserve de parcs nationaux, un outil indispensable et quelques autres réflexions qui découlent de ces points.

Au niveau de la dénomination et des objectifs, nous sommes disposés à considérer favorablement la dénomination de parcs nationaux sous certaines conditions. L'ouverture que nous manifestons en ce sens s'appuie sur le fait que le nombre de sites naturels et de territoires concernés à l'échelle nationale est extrêmement important. En conséquence, il est probablement utopique de lier à une seule instance politique la fonction de protéger tous ces territoires et de les mettre en valeur. De plus, nous croyons que l'intérêt de la conservation d'éléments naturels admissibles à un statut de parc national se place définitivement au-delà de la notion de responsabilité administrative. C'est pourquoi nous croyons à la primauté des caractéristiques naturelles objectives sur les modalités de gestion.

La suite de notre réflexion s'appuie sur la définition de "parc national" adoptée en 1969 par l'assemblée générale de l'Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles, comme l'ont fait nos prédécesseurs qui l'ont mentionné. Non pas que cette définition soit une loi, une règle absolue ou que les organismes nationaux de plein air aient l'intention de se transformer en groupes d'intervention au niveau écologique, mais plutôt parce que cela donne une sorte de voie directrice qui est admise au niveau international.

Nous découvrons, dans le premier élément de cette définition, ce qui semble, pour nous, l'essentiel de la politique des parcs nationaux. Il nous apparaît fondamental que les espaces naturels soient effectivement peu ou pas altérés par l'intervention humaine et qu'ils soient spéciaux, en termes scientifiques, éducatifs, récréatifs ou esthétiques, è l'échelle nationale. Il existe bien sûr, en Europe plus particulièrement, des parcs dits nationaux qui sont passablement altérés par l'intervention humaine. Toutefois, nous croyons que le Québec a encore la possibilité d'appliquer son statut de parc national à des espaces naturels peu ou pas altérés, ce qui fait sûrement l'envie des pays contraints à agir autrement.

En fait, la définition de l'UICN rejoint en substance la notion de parc de conservation de la loi sur les parcs de 1977 et la première fin pour laquelle le gouvernement peut établir un parc national, selon la loi 13 qui nous est actuellement proposée. Ce second objectif, dans la mesure où le décret établissant un parc national doit identifier pour lesquels de ces objectifs il est établi, nous apparaît, pris séparément, comme inopportun et d'ailleurs inapte à justifier à lui seul un parc national. De fait, il nous apparaît beaucoup plus souhaitable de fusionner les deux fins proposées pour les rendre compatibles à la définition de l'UICN, à savoir qu'un parc national doit protéger les sites naturels à caractère exceptionnel ou des territoires représentatifs des régions naturelles et les mettre en valeur en favorisant plus particulièrement la pratique d'activités de plein air compatibles avec la notion de conservation.

De plus, nous croyons qu'il serait beaucoup plus opportun de considérer la création de parcs de récréation intensive -ce que d'ailleurs, à cause de notre origine, nous appuyons fortement, les parcs de récréation, comme notion - sur la base de parcs régionaux ou même de parcs urbains.

Au chapitre de la responsabilité administrative, comme nous l'avons annoncé plus tôt, nous croyons que les considérations plus scientifiques devraient prédominer dans la création d'un parc ayant un statut national et que le fait, comme le mentionne l'UICN, que ce soit la plus haute autorité officielle d'un pays qui crée un parc national nous semble plutôt secondaire dans la mesure où ce sont vraiment des critères objectifs qui devraient présider à un tel statut.

Nous souscrivons également à l'importance de définir des conditions permettant d'exercer le droit d'entrer dans un parc national. Il nous apparaît évident que la conservation du milieu naturel passe par un certain nombre de mesures visant à sa conservation. Pour rejoindre encore une fois la loi sur les parcs de 1977, nous soulignons que la définition de récréation extensive, c'est-à-dire impliquant une faible densité d'utilisation et des équipements peu élaborés, rejoint bien notre conception des besoins de mise en valeur et de conservation.

Quant à l'étendue, je pense que c'est une notion qui est considérée par tout le monde comme flexible.

La deuxième partie de notre

intervention: Les activités de plein air sont-elles favorisées ou prohibées par la loi 13? Nous sommes heureux du fait que la notion d'activités de plein air devienne un concept légalisé dans ce projet de loi. Toutefois, il nous apparaît évident encore aujourd'hui, malheureusement pour nous, que cette notion d'activités de plein air, bien que de plus en plus véhiculée, comporte encore un certain flou et tout particulièrement auprès du public. C'est pourquoi, afin d'assurer notre compréhension d'activités de plein air dans le texte de loi, nous considérons que ceci doit sous-entendre, en fait, comme base minimale, les activités de plein air mentionnées dans la première édition des documents relatifs à la politique des parcs du ministère et, éventuellement, une ouverture à un plus large éventail d'activités. Mais, pour nous, en tout cas, le minimum d'activités de plein air, c'est ce qui existe dans les documents, notamment le document 4 du ministère sur sa politique.

On trouve aussi dans la loi un article qui dît qu'il y a une ouverture à la possibilité, à l'article 2, de prohiber certaines activités de plein air. Évidemment, cela suscite quelques interrogations de notre côté. Dans la mesure où la pratique d'activités de plein air est favorisée, que celles-ci sont bien identifiées dans le document que j'ai mentionné relatif à la politique des parcs et qu'elles sont soumises, de toute façon, aux exigences propres à la conservation, on s'interroge sur la pertinence de l'article. On serait intéressé à avoir des précisions sur les raisons qui pourraient justifier, par exemple, qu'une activité dans un parc soit prohibée.

De même, la loi spécifie que des règlements pourraient confier aux employés tout pouvoir ou devoir portant sur une matière relative à l'admission et aux activités. Nous osons croire que cette délégation de pouvoir, qui est sans doute justifiée pour des facilités administratives, en est une de gestion de principe et d'activité admise dans la politique des parcs. Donc, on revient toujours à ce document.

Au niveau de l'entretien des parcs, on croit que la création d'un parc implique une responsabilité au niveau de l'entretien qui va bien au-delà d'un simple pouvoir comme c'est mentionné dans la loi, qui mentionne que le ministre a le pouvoir d'effectuer des travaux d'entretien, etc., mais se situe plutôt au niveau de devoir. La création d'un parc se fait toujours aux dépends d'autres usages possibles. Il s'agit donc d'une prise de responsabilité qui doit être pleinement assumée par celui qui en est l'instigateur. L'entretien des parcs et des infrastructures qui sont mises en place n'est pas une possibilité mais une obligation.

Au niveau d'un outil qu'on considérait utile dans le cadre, éventuellement, de la

Loi sur les parcs, c'est ce qu'on appellerait la notion de réserve de parcs nationaux. On est bien conscient que la création de parcs nationaux nécessite des disponibilités financières qui sont difficiles à dégager au niveau des budgets gouvernementaux dû à l'état actuel de l'économie. Cependant, on considère que l'importance de conserver les sites naturels à caractère exceptionnel et les territoires représentatifs des régions naturelles du Québec devrait se placer au-delà de ces considérations. C'est pourquoi nous suggérons, en fait, considérant cette absence potentielle de moyens financiers adéquats, d'ajouter à la présente loi un mécanisme de mise en réserve de territoires qui pourraient devenir des parcs nationaux. Il nous apparaît inacceptable qu'un territoire remplissant les critères précédemment énoncés au niveau de sa valeur telle que définie, entre autres, par l'UICN, ne puisse être protégé parce que dans l'immédiat, les ressources financières nécessaires pour l'acquisition ne seraient pas disponibles. Le mécanisme pourrait peut-être s'apparenter au mécanisme de zonage appliqué au niveau municipal. C'est bien sûr que cet instrument légal devrait s'accompagner de mesures visant à s'assurer que le territoire ne sera pas endommagé et/ou victime de spéculations indues, parce que, éventuellement, une réserve de parcs pourrait provoquer assez rapidement des spéculations.

De plus, la durée de l'application du mécanisme pourrait être précisée en termes de temps, ce qui aurait peut-être pour effet de rassurer les "conservationistes" et les amateurs de plein air sur l'éventualité que faute de ressources immédiatement disponibles, certains gestionnaires retirent de façon définitive des plans de développement des parcs qui sont déjà prévus. D'ailleurs, on a des rumeurs assez persistantes concernant le retrait des gorges de la rivière Malbaie qui est au plan quinquennal de développement du ministère. Ce projet aurait été retiré, du moins si on se fie aux rumeurs. Ces mises en réserve devraient être soumises au public, tout comme le retrait, et le gouvernement devrait impliquer les intervenants du milieu dans la sélection de territoires à mettre éventuellement en réserve.

Dans le cadre d'une perspective plus large, on profite de l'occasion qui nous est offerte pour reconnaître la quantité et la qualité du travail réalisé dans le domaine des parcs au Québec depuis l'adoption de la loi 77. Toutefois, nous déplorons que la volonté gouvernementale ne se soit pas nécessairement traduite par une disponibilité financière vraiment accrue. Nous déplorons que l'entretien, l'animation et l'éducation dans les parcs aient particulièrement écopé dans les dernières années des restrictions budgétaires. (17 h 30)

En fait, ces programmes devraient, à tout le moins, être aussi importants sinon plus importants que l'installation d'infrastructures souvent beaucoup plus coûteuses. Nous aimerions également souligner que la création de parcs de petite taille le cas qui nous vient à l'idée, c'est évidemment Miguasha - est particulièrement intéressante; il s'agit d'appliquer un statut à un plus petit territoire. Évidemment, un tel discours nous amène à nous poser des questions à savoir quels seraient, dans ce cadre-là, nos véritables parcs dits nationaux. Dans ce sens-là, nous sommes tentés de reconnaître de prime abord, comme parcs nationaux, les parcs suivants, parmi les parcs qui sont déjà créés: Parcs de la Gaspésie, du Bic, Saguenay, des Grands Jardins, Jacques-Cartier, Mont-Orford et Mont-Tremblant.

Quant aux deux autres, c'est-à-dire celui de la Yamaska et des Îles-de-Boucherville, le statut de parcs nationaux dû à la position qu'on explique depuis tout à l'heure nous apparaît un statut inapplicable. Ces parcs se placeraient beaucoup plus dans le cadre de parcs de récréation régionale. C'est un peu le même cas pour le parc national de l'Archipel qui, tel que défini, correspond beaucoup plus pour nous à un parc de grande envergure à l'échelle régionale, mais qui n'est quand même pas admissible à un statut de parc national.

Donc ce que nous recommandons, face à tout cela, c'est que le gouvernement puisse établir un parc national aux fins de:

Protéger les sites naturels à caractère exceptionnel ou des territoires représentatifs des régions naturelles et les mettre en valeur en favorisant plus particulièrement la pratique d'activités de plein air.

Que les activités de plein air favorisées soient celles identifiées dans les documents relatifs à la politique des parcs et, éventuellement, qu'il y ait une possibilité d'étendre cette liste.

Que les pouvoirs ou devoirs confiés aux employés par la réglementation sur une matière relative à l'admission ou aux activités en soient de gestion des éléments de la politique des parcs.

Que le ministère doit autoriser ou effectuer tout travail d'entretien des lieux susceptibles de maintenir ou d'améliorer la qualité d'un parc et que le ministère se dote d'une politique d'entretien des parcs nationaux dans les plus brefs délais.

Que soit ajoutée dans la loi la possibilité de mettre en réserve des territoires admissibles au statut de parcs nationaux et que le ministère se dote des instruments pour ce faire.

Que le gouvernement démontre une reconnaissance accrue de l'intérêt national d'un réseau de parcs québécois en y consacrant des ressources plus importantes.

Que parmi les parcs créés selon la loi des parcs (1977), seulement ceux qui satisfont pleinement à la première partie de la définition de l'UICN deviennent des parcs nationaux et que l'appellation de parcs nationaux soit réservée pour désigner ceux-ci. Nous sommes donc très heureux d'avoir pu exprimer notre point de vue sur le projet. Soyez assurés de notre volonté de participer dans la mesure de nos moyens à l'amélioration du réseau des parcs québécois. Merci!

Le Président (M. Marquis): Merci, M. Caron. J'inviterai maintenant M. le ministre à intervenir s'il a des questions à poser ou des observations à apporter.

M. Brassard: M. le Président, je voudrais, évidemment, remercier le Regroupement des organismes nationaux de loisir du Québec de participer aux travaux de cette commission. Je voudrais le remercier aussi pour le mémoire bien articulé et bien étoffé sur le projet de loi 13. Si j'ai bien compris, vous considérez comme étant un certain progrès sur la loi actuelle, le projet de loi 13. Autrement dit, vous ne semblez pas, comme certains organismes l'ont réclamé avant vous, demander le retrait du projet de loi 13 et le retour au statu quo. Est-ce que je me trompe? Est-ce que vous considérez qu'il n'y a pas, avec le projet le loi 13, d'affaiblissement des garanties en matière de conservation des milieux naturels?

M. Trudel: Effectivement, on est plutôt en accord avec le projet de loi, avec les conditions dont on vient de vous faire part. Nous sommes pour des parcs qui vont permettre de réaliser des activités de plein air. Là où on se pose des questions, c'est que lorsqu'on parle d'un parc national on devrait avoir ou conserver des critères qui sont admis internationalement. À ce moment-là, on est dans une drôle de situation. On ne veut absolument pas perdre de territoire, on en a assez peu. Si on peut créer des parcs nationaux où on peut entretenir et pratiquer certaines activités, bravo! À notre avis, le vocable "national" paraît inopportun pour certains parcs qui existent maintenant sous ce vocable.

M. Brassard: Est-ce que je vous comprends bien si je vous dis que vous êtes plus ou moins d'accord, finalement, avec la création de parcs de récréation, comme on peut le faire selon la loi actuelle, avec le statut de parc de récréation? Vous semblez être en désaccord avec un tel type de parc. D'après la proposition que vous faites, vous voulez fusionner l'objectif d'activités de plein air, qui est distingué dans le projet de loi actuel, avec les premiers objectifs, soit la conservation de sites exceptionnels ou de milieux représentatifs.

M. Trudel: Si on parle de parc national?

M. Brassard: Oui.

M. Trudel: Avec le qualificatif national ou international?

M. Brassard: Oui, c'est bien sûr. M. Trudel: D'accord.

M. Brassard: Dans le réseau des parcs nationaux; tout en reconnaissant que des activités de plein air doivent se retrouver dans le réseau des parcs nationaux, je dis bien. Vous ne semblez pas tellement d'accord, dans le réseau des parcs nationaux, avec l'existence de parcs de récréation.

M. Trudel: Effectivement, on est porté à maintenir le vocable "conservation" dans un parc qualifié "national". On a une certaine crainte de voir dans des parcs qu'on appelle "nationaux", des activités qui, à notre avis, ne sont pas des activités de plein air, qui sont incompatibles avec le milieu, en tout cas, avec la vocation d'un parc de conservation ou un parc national. Chez nous, c'est à peu près la même chose. Si on parle de parc de récréation, on n'est pas contre, mais ce n'est pas ce projet.

M. Brassard: Ce n'est pas comme cela que je l'ai vu non plus. Vous n'êtes pas contre des parcs de récréation, mais vous n'êtes pas très chauds non plus pour les voir intégrés dans le réseau des parcs nationaux.

M. Trudel: C'est cela.

M. Caron (Daniel): On voit difficilement, en fait, l'appellation "parc national". On voit plus facilement "parc national de conservation" et très difficilement "parc national de récréation". C'est à ce niveau que cela se joue. On pense que les activités de plein air sont un excellent moyen et peut-être le moyen idéal de mettre en valeur un parc national. Dans ce sens, on pense que les activités de plein air devraient être bienvenues à l'intérieur d'un territoire de parc national sauf qu'elles doivent être, en fait, non pas l'objectif premier, mais un moyen de mise en valeur, de se placer au niveau du moyen de mise en valeur, alors que dans un cadre de parc de récréation, par définition, l'objectif principal est la récréation. Donc, il y a une partie de conservation qui va automatiquement être sacrifiée. Il y a une primauté plus grande du loisir dans l'autre cas.

M. Brassard: Je vous remercie.

Le Président (M. Marquis): M. te député de Charlesbourg.

M. Côté: M. le Président, je suis heureux de constater que parmi tous les mémoires que nous entendrons, il y a unanimité sur un point, je pense, pas nécessairement sur tout, mais sur le point que "parc national de récréation", c'est faire injure, si je ne m'abuse, à l'UICN. Quand on parle de parc national, partout on parle d'un parc national de conservation.

Ma question provient de votre conclusion de la page 16, deuxième phrase du premier paragraphe où vous dites: "La progression éminemment positive du dossier des parcs au Québec depuis quelques années nous apparaît extrêmement intéressante et devrait être garante d'un avenir prometteur. "

Par contre, lorsque je vois le mémoire à la page 11, deuxième paragraphe, vous dites: Le gouvernement doit, en l'absence de moyens financiers adéquats, ajouter à cette dernière un mécanisme de mise en réserve de parcs, comme vous avez parlé tantôt et vous y allez plus allègrement à la page 12 dans les perspectives plus larges, au deuxième paragraphe, où vous dites: "Nous déplorons que l'entretien, l'animation et l'éducation dans les parcs écopent tout particulièrement dans le cadre des restrictions budgétaires actuelles. En fait, ces programmes devraient être à tout le moins aussi importants sinon plus importants que la réalisation d'infrastructures coûteuses, plus visibles mais sans vie. " Vous citez l'exemple du cas de la Jacques-Cartier, qu'on a cité hier au début des audiences, ainsi que celui de Mont-Tremblant. Il me semble que votre conclusion, dans cette hypothèse, est un peu généreuse. J'ai plutôt l'impression que c'est au niveau de l'immobilisation que votre critique est beaucoup plus ferme en ce qui concerne l'entretien. Est-ce que je me trompe?

M. Trudel: C'est évident. Notre conclusion souligne qu'on n'avait pas de parcs récemment et que maintenant on en a. Ce n'est pas suffisant. Il faut arrêter des... On est pour la création de territoires, c'est évident, sauf que cela nous... Comme beaucoup de gens le pensent, créer un territoire, y donner une certaine infrastructure sans l'entretenir, ce n'est pas intéressant. C'est une des remarques que l'on fait dans le mémoire. Évidemment, elle est particulièrement importante.

M. Côté: Si le ministre vous demandait conseil demain matin, parce qu'il a, lui aussi, des restrictions budgétaires assez importantes, on l'a vu avec le dépôt des crédits cette semaine, avec une diminution au niveau des parcs, s'il vous disait: Est-ce que ma priorité serait la création de nouveaux parcs, ou prendre l'argent

d'immobilisation que j'ai et bien entretenir les parcs actuels, de façon que les sentiers de la Jacques-Cartier soient ouverts? Je pense que votre réponse est très claire, c'est: Allons d'abord rendre potable et convenable ce que l'on a créé et mettons en réserve - pour ne pas faire un jeu de mots -la création de nouveaux parcs.

M. Trudel: Vous l'avez dit. Notre priorité serait d'abord d'essayer de voir s'il n'est pas possible de faire quelque chose pour mettre en réserve d'autres territoires que ceux qui sont actuellement créés sous forme de parc et d'améliorer la qualité de nos parcs actuels.

M. Côté: Vous placez le ministre dans une drôle de situation. On va avoir des choix difficiles à faire concernant le parc de Pointe-Taillon. Quant à une question qui a été posée au ministre à l'intérieur du mémoire et qui n'a pas été relevée par le ministre, je la retrouve à la page 9, vous parliez de prohiber certaines activités de plein air. Je pense que votre question a été assez précise. J'aimerais bien entendre la réponse du ministre. C'est à la page 9, premier paragraphe: "Prohiber certaines activités de plein air?"

M. Brassard: Oui, de quelles activités parle-t-on?

M. Côté: Je pense que c'est clair. On pose la question. La question a été posée par l'intervenant. Il peut peut-être préciser la question. Mais j'aimerais bien avoir la réponse.

M. Brassard: Article 11?

M. Caron (Daniel): Ce que je disais dans le mémoire, c'est que, dans la loi, il y a un article, je pense que c'est l'article 2, où l'on trouve une possibilité de prohiber certaines activités de plein air. Considérant que, sur l'ensemble de la loi, cela vise, entre autres, à favoriser la pratique de certaines activités, que les activités de plein air sont placées comme un moyen de mise en valeur et donc, soumises aux priorités de conservations, on remarque qu'il y a la possibilité de prohiber des activités, on aimerait savoir sur quels critères. Cela représente quoi, on veut un exemple de l'application du fait de prohiber une activité. Quelle pourrait être la raison?

M. Brassard: Eh bien, la raison pourrait être le zonage et les objectifs poursuivis dans un parc. Si dans un parc, en fonction du zonage adopté et des objectifs poursuivis, une activité de plein air risque de perturber le milieu et de le mettre en danger, il faut avoir la possibilité de prohiber cette activité.

M. Caron (Daniel): Oui, mais je pense que de toute façon, dans un sens, on le spécifiait bien dans notre intervention. C'est clair pour nous que l'activité de plein air pratiquée dans un parc dans la mesure où on est les tenants des parcs de conservation, en plus, c'est clair pour nous qu'on est subordonné; en fait, la pratique d'une activité ne sera tolérée que dans la mesure où elle est en harmonie avec la capacité de support, etc. Donc, si effectivement, la possibilité de prohiber s'arrête là, pour nous, on ne voit pas à quoi cela sert. (17 h 45)

M. Brassard: II y a certaines activités qu'on peut qualifier de plein air qui sont interdites par le règlement actuellement en vigueur dans les parcs, la motoneige, par exemple.

M. Trudel: On ne considère pas non plus, chez nous, que c'est une activité de plein air.

M. Brassard: Pardon!

M. Trudel: Nous ne considérons pas que c'est une activité de plein air. C'est une activité motorisée, c'est...

M. Brassard: Oui, c'est une question de point de vue. J'imagine que la fédération des motoneigistes est d'une autre opinion.

M. Trudel: Sûrement.

M. Côté: Je viens de comprendre pourquoi il ne répondait pas tantôt.

M. Caron (Daniel): II y aurait peut-être un truc que je voudrais ajouter à la suite de l'intervention du député de Charlesbourg. À ce qu'il m'a semblé, vous faisiez le parallèle entre des choses qui n'ont pas exactement le même poids. Vous dites qu'en conclusion, évidemment, on vante le travail qui a été fait dans le domaine des parcs et vous nous reprenez sur nos arguments...

M. Côté: Ne me prêtez pas de mots que je n'ai pas prononcés, "vanter", non.

M. Caron (Daniel): Vous nous dites qu'on trouve extrêmement positive, en tout cas, la progression dans ce domaine et vous nous reprenez sur le fait qu'à un endroit on dit que l'entretien, l'animation et l'éducation sont dans un état déplorable. Il faudrait quand même voir que depuis 1977, pour les gens qui interviennent dans le domaine de la conservation et du plein air, il y a quand même un grand bout de chemin qui a été fait, avec l'adoption d'une loi applicable sur les parcs qui exclut, entre autres, un paquet de trucs qui se passaient dans ■ les parcs avant, que ce soit de l'exploitation

forestière, ou autre. Il y avait une lutte d'intérêts qui était toujours en cause. Pour nous, c'est déjà un gros pas en avant et il y a aussi le fait qu'il s'est créé, depuis 1977, un paquet de parcs qui existent légalement. C'est donc une intervention positive. C'est sûr qu'on a des points faibles qu'on relate, mais je pense qu'il y a deux poids deux mesures dans cela.

M. Côté: Je ne veux pas qu'on poursuive la discussion inutilement, mais quand vous me parlez de progression, j'ai trouvé des chiffres que j'ai cités hier - ce n'est pas moi qui les ai inventés - la superficie, en termes de parcs, est passée de 14 000 kilomètres carrés à 4000.

M. Caron (Daniel): Oui, cela pourrait peut-être introduire un autre débat avec le choix du territoire à protéger. C'est une autre dimension du débat que nous n'avons pas abordée là-dedans.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup aux représentants du Regroupement des organismes nationaux de loisir du Québec pour leur présence et pour l'éclairage que vous avez apporté aux membres de la commission. Merci et bon retour.

J'inviterais maintenant, pour nous faire la présentation de leur mémoire, les représentants des Laboratoires de géographie de l'Université du Québec à Chicoutimi. Il s'agit du Dr Jules Dufour, accompagné...

Une voix: M. Gilles Lemieux.

Le Président (M. Marquis):... du Dr Gilles Lemieux. Comme vous avez accepté de bonne grâce de nous présenter l'ensemble de votre document de façon assez rapide -nous nous excusons quand même des inconvénients qui ont été causés cet après-midi - le document va rester là et les gens du ministère en feront sûrement un usage important dans leur réfexion. M. Dufour, nous vous écoutons.

Laboratoires de géographie de l'UQAC

M. Dufour (Jules): Avec plaisir, merci beaucoup. M. le Président, M. le ministre Brassard, messieurs les députés, mesdames et messieurs, nous sommes heureux d'être ici cet après-midi - pratiquement ce soir - et nous vous remercions d'avoir accepté de nous recevoir et de recevoir notre mémoire. En tant que Jeannois et vivant au Saguenay au coeur de la forêt boréale, dans cette oasis tempérée comme on l'appelle, il me fait plaisir de parler de parcs.

Nous suivons ceux qui nous ont précédés, le RONLQ, l'UQCN et nous voudrions dire que nous sommes membres aussi de l'Union québécoise pour la conservation de la nature, ce qui explique peut-être en partie la teneur de notre mémoire.

Sans aller dans tous les détails du mémoire, j'aimerais quand même vous dire ceci. Notre société d'aujourd'hui, marquée par le capital, qu'on appelle capitaliste, et très productiviste, que nous avons construite au cours du dernier siècle, a profondément bouleversé notre environnement naturel. Alors, un très grand nombre d'écosystèmes ont été altérés, des espèces fauniques ont disparu - d'ailleurs, on parlait de menace d'extinction tout à l'heure - le cours de nombreuses rivières a été grandement modifié, les eaux ont été fortement acidifiées, et on en sait quelque chose, des territoires très étendus ont été inondés, etc. Bref, le milieu naturel de la péninsule du nord-est américain que constitue le Québec a subi des impacts considérables qu'il est encore bien difficile d'évaluer.

Dans un tel contexte, quel rôle peut jouer un parc? Quelle est la fonction d'une aire protégée dans un espace capitaliste? En d'autres mots, est-il possible de vouloir protéger une partie du territoire quand le reste est soumis à des processus d'exploitation intensive?

Le présent projet de loi favorisera-t-il le développement de meilleures pratiques d'aménagement et de conservation au Québec?

Ce bref rapport contient, en fait, quatre recommandations, à partir d'un certain nombre de considérations. Nous nous interrogeons sur l'avenir de notre patrimoine naturel et historique, celui qu'on est en train de construire au Québec pour les générations actuelles et futures. Il y a deux recommandations sur le présent projet de loi.

Le premier point que j'aimerais développer rapidement, c'est un peu l'interrogation majeure que nous avons presque toujours, notre rôle en tant qu'économie. Notre économie au Québec a été une économie axée sur les matières premières, donc sur l'extraction, dans un monde industrialisé nord-américain. Alors, il y a eu des impacts considérables. Il nous semble opportun, à ce moment-ci, au moment où on s'interroge sur un projet de loi, on s'interroge sur une loi que nous avons déjà, de s'interroger sur ce contexte dans lequel nous vivons. Est-il possible de sauvegarder au Québec les ressources naturelles et d'assurer leur renouvellement? Est-il possible de développer, c'est surtout cela qui est important, des pratiques de conservation quand les secteurs industriels les plus importants et les plus dynamiques sont fondamentalement intégrés à l'appareil de production de biens d'équipement militaire? Cela peut paraître surprenant d'entendre cela dans un rapport sur des parcs, mais c'est absolument important de le souligner. Il

ne faut pas oublier que la moitié des industries de guerre canadiennes se retrouve au Québec, soit 100 sur 200.

S'il est aussi possible de créer une économie qui soit mise au service des besoins fondamentaux des communautés régionales, si l'État peut encore intervenir pour réorienter l'économie vers cet objectif ultime - et moi, je suis un régional comme mon collègue, on vit en région et on se pose souvent la question - alors, à cette question, il nous semble que oui. Oui, l'État pourra le faire en agissant notamment de la manière suivante: en établissant une politique forestière démocratique, une politique qui fasse appel à la participation de tous les intervenants, de tous les citoyens intéressés; en faisant disparaître progressivement les industries de guerre au Québec - c'est un gros projet - en transformant l'économie agricole en économie moins productiviste, diversifiée et orientée vers la production d'aliments de base.

Et quatrièmement, en ce qui nous concerne, en mettant en place un réseau d'espaces protégés qui puissent permettre le développement chez tous d'attitudes de conservation qui puissent nous permettre de réapprendre à respecter la terre, l'eau et la vie. C'est le titre, d'ailleurs, du mémoire: Des parcs pour l'éducation à la conservation.

Et première recommandation: Que le gouvernement du Québec déploie tous les moyens mis à sa disposition pour doter le Québec d'un système économique endogène, foncièrement basé sur l'exploitation douce des ressources naturelles renouvelables et orienté vers la satisfaction des besoins fondamentaux des communautés régionales.

Deuxième point majeur. Je pense que le ministère a fait des efforts considérables depuis la promulgation de la loi 19, Loi sur les parcs, mais il reste encore beaucoup à faire. Ce deuxième point, c'est que nous recommandons que le réseau des espaces protégés soit complété. Alors, ici je pourrais spécifier: Compléter le réseau de parcs de conservation et principalement sous les latitudes médionordiques; Établir un réseau de rivières du patrimoine - je ne pense pas qu'on ait encore ce système à l'intérieur du Québec - Développer davantage le concept des réserves fauniques et élaborer une politique à cet effet; Consolider le réseau des ZEC; Développer le réseau des réserves écologiques en utilisant comme cadre spatial le bassin hydrographique; Développer un réseau de parcs historiques; Mieux circonscrire l'aire des refuges d'oiseaux migrateurs et créer les parcs urbains et péri-urbains nécessaires.

Deuxième recommandation: Que le gouvernement du Québec complète le réseau des parcs et des espaces analogues et ceci, dans les meilleurs délais.

Ici, je me réfère maintenant à la troisième partie, à la loi elle-même, au projet de loi lui-même: d'autres parcs nationaux. Comme question: est-ce qu'il est opportun d'amener ce nouveau vocable, cette nouvelle appellation de "parc national"?

Déjà la carte des espaces protégés est suffisamment complexe au Québec. Pourquoi introduire le concept de parc national provincial alors que l'appellation "parc national" a un sens spécifique partout dans le monde? Je pense que les intervenants antérieurs ont suffisamment parlé à ce sujet.

Or, l'introduction d'une nouvelle catégorie à l'intérieur des espaces protégés au Québec ne nous semble pas maintenant nécessaire et, cela, pour plusieurs raisons. La première: la Loi sur les parcs, qu'on appelait la loi 19, sanctionnée le 29 novembre 1977, a permis de créer de véritables parcs de conservation au Québec. Le réseau actuel en témoigne. Cette loi très précise fait une distinction essentielle entre conservation et récréation.

Troisièmement, à notre connaissance, cette loi n'a pas été remise en question par l'ensemble des citoyens du Québec. La pression exercée sur le ministère pour la modifier nous semble venue de quelques groupes intéressés par l'exploitation des ressources forestières, minières et touristiques. Tout projet de modification de la Loi sur les parcs devrait découler d'une profonde évaluation des opérations de création des nouveaux parcs depuis 1980. Si cette évaluation existe, a-t-elle été rendue publique? C'est une question.

À partir de ces considérations, nous proposons ceci: Qu'un moratoire soit institué avant de procéder à l'adoption du présent projet de loi pour permettre aux différents intervenants du milieu de connaître les motifs fondamentaux qui animent le MLCP dans cette opération.

Quatrième et dernier point: les parcs, l'éducation, la récréation et les loisirs de plein air, des éléments intimement liés. Le parc de conservation constitue le milieu naturel par excellence pour l'éducation environnementale, la pratique d'activités de récréation extensive et le développement du loisir de plein air. Je pense que les représentants antérieurs l'ont bien démontré.

Le présent projet de loi réaffirme cette relation, au premier paragraphe. Cependant, le texte est fort imprécis. Au premier alinéa, en effet, la mise en valeur des territoires pourrait correspondre à bien des choses comme par exemple à l'exploitation forestière, minière, hydroélectrique, touristique.

Si le présent projet de loi est éventuellement adopté, nous recommandons ce qui suit. Que le texte du premier paragraphe soit modifié et se lise ainsi: Assurer la conservation des territoires représentatifs des régions naturelles - en

fait, on reprend pratiquement le texte du projet de loi - et la protection des sites naturels exceptionnels du Québec et les mettre en valeur à des fins d'éducation, de récréation extensive et de loisir de plein air.

Conclusion. Je pense que les questions fondamentales sur l'avenir de notre société restent posées. Pourquoi cette nouvelle loi? Est-elle conçue pour permettre à l'État de ne plus parler de conservation? Facilitera-t-elle l'identification, l'établissement, la gestion des parcs actuels et futurs? Favorisera-t-elle une meilleure définition du découpage fonctionnel interne des nouveaux parcs, si vous voulez, le zonage? Va-t-elle contribuer à subordonner les nécessités de la conservation aux impératifs de la production? Permettra-t-elle de mieux saisir la valeur excessivement élevée de la conservation pour la société?

L'application de cette loi, comme celle des parcs, rencontrera plusieurs obstacles de taille qu'on connaît et, notamment, le manque de volonté politique de la part des citoyens du Québec, en bien des cas, pour conserver leurs ressources naturelles et la faiblesse chronique de l'appareil d'État dans ce domaine. Je ne me réfère pas au MLCP ici.

Enfin, nous aimerions reprendre ici les propos que nous avons tenus dans la lettre que nous avons adressée au premier ministre René Lévesque en novembre dernier: Nous croyons que la Loi sur les parcs, dont dispose présentement le gouvernement du Québec, possède un contenu de grande qualité et que son application pourrait être facilitée non pas en en révisant la substance, mais plutôt en développant en cette matière une plus grande volonté politique et en y apportant les ressources nécessaires.

Nous souhaitons que le MLCP passe au premier rang des ministères dans le gouvernement du Québec. Alors, vous avez une légère bibliographie qui appuie ce mémoire.

Le Président (M. Marquis): Merci, M. Dufour. Les réactions, M. le ministre.

M. Brassard: Je voudrais vous remercier de votre mémoire, de votre participation à la commission. Compte tenu de l'heure, je me contenterai de quelques remarques.

D'abord, ce qu'on pourrait qualifier de rétablir les faits, quand vous dites que ce nouveau projet de loi est peut-être issu de pressions exercées sur le ministère pour le modifier, de quelques groupes intéressés par l'exploitation des ressources forestières, minières et touristiques... en tout cas, je peux vous affirmer que ce n'est pas le cas. Ce n'est pas exact. Il y a peut-être d'autres motifs, mais ce n'est sûrement pas celui-là, d'autant plus que votre inquiétude, quant à la mise en valeur, ne m'apparaît pas fondée.

(18 heures)

Quand on parle de mise en valeur des territoires, à l'article 1, cela ne veut absolument pas signifier exploitation forestière, minière, hydroélectrique, ou touristique, puisque vous savez qu'à l'article 7, on interdit toute forme d'exploitation de ressources dans un territoire ou dans un parc. Par conséquent, je pense que c'est peut-être bon de bien se comprendre sur ce point. Il n'y a pas eu de pressions de quelque groupe que ce soit intéressé directement à l'exploitation des ressources qui voulait modifier la loi sur les parcs, affaiblir les garanties en matière de conservation des milieux naturels, je pense que c'est exclu. Bien au contraire, on précise davantage les interdictions, dans le projet de loi, en matière d'exploitation des ressources. Si ce n'est pas encore assez clair, en cours d'étude article par article, on précisera encore davantage.

Vous avez également indiqué que dans votre réseau d'espaces protégés, vous souhaitez développer un réseau de parcs historiques. Est-ce que vous souhaiteriez que la création de parcs historiques soit possible par le biais de la Loi sur les parcs nationaux?

M. Dufour: C'est-à-dire que si on accepte de vraiment consacrer les parcs nationaux en des parcs de conservation ou pour l'éducation à la conservation, parce qu'il faut quand même voir cela en termes de projet de société, les parcs historiques pourraient être créés à l'intérieur de cette loi et servir aussi à l'éducation. Les parcs historiques, c'est pour la conservation, l'éducation, la connaissance de notre patrimoine historique. En ce qui me concerne, cela serait compatible.

M. Lemieux: Pas uniquement l'histoire des Blancs, mais l'histoire des peuples qui ont agi sur le territoire québécois depuis des siècles, depuis des millénaires.

M. Brassard: Oui, bien sûr. Vous connaissez certainement Val-Jalbert qui est un site historique qui appartient d'ailleurs au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui est administré par le MLCP, mais qui n'est évidemment pas un parc historique parce qu'il n'y a aucune loi qui permet la création de ce type de parc. Vous verriez d'un bon oeil que la Loi sur les parcs puisse permettre l'établissement de parcs historiques?

M. Dufour: Oui, je serais d'accord, en tout cas, nous serions, je pense, d'accord. M. Lemieux pourrait apporter des nuances, peut-être. J'aimerais redire que - je pense que d'autres l'ont répété - si on parle de parc national, il va falloir garder, à l'intérieur de

ce concept, le concept de la conservation, assurer pour l'avenir, pour les générations futures, le renouvellement des ressources naturelles. Par contre, il est possible de créer d'autres catégories de parcs, par exemple, un parc de récréation. À mon avis, la récréation intensive ne devrait pas être à l'intérieur d'un parc comme on l'appelle dans le vocable général. Des parcs urbains devraient être créés, mais cela n'empêche pas de protéger et de conserver aussi, dans d'autres parcs. En d'autres mots, la conservation doit être générale au Québec mais, si vous l'appelez le parc national, le parc qu'on appelle aujourd'hui le parc de conservation, c'est vraiment l'espace qui sert à l'éducation, à la conservation. On aimerait, en tout cas, que cela reste du moins dans les concepts. Si le ministère garantit que, dans la création d'un parc national, au niveau des objectifs, la conservation va être prioritaire, là on serait d'accord mais ce n'est pas clair dans le premier article.

M. Brassard: Une dernière petite question, M. le Président. Je trouve un peu étonnantes vos réflexions sur le concept de parc national. Vous semblez vouloir en réserver le monopole au gouvernement fédéral. Je ne vois pas pourquoi ce terme ne serait pas également utilisé pour des parcs créés par le gouvernement du Québec. On connaît bien le parc Saguenay, c'est un site tellement exceptionnel, je ne vois pas pourquoi, parce que c'est un parc créé par le gouvernement du Québec, il n'aurait pas droit à l'épithète "national", compte tenu de la valeur du site, du caractère exceptionnel de ce milieu.

M. Dufour: Non, je suis d'accord avec vous. Il n'y a aucun doute que le parc du Saguenay est un site exceptionnel. On peut l'appeler parc national, mais, encore une fois, ce n'est pas le fait qu'on l'appelle parc national qu'on... Il faut voir l'objectif fondamental qui est la conservation. Quand on l'a créé, c'était un parc de conservation. Maintenant, si vous dites: On l'appelle parc national, il faut que l'objectif fondamental, l'objectif premier soit la conservation, et cela, je pense qu'on s'entend là-dessus.

Le Président (M. Marquis): Merci. M. le député de Charlesbourg.

M. Côté: Deux petites questions. À la page 4, vous dites que le réseau des espaces protégés doit être complété et, dans la nomenclature, le ministre s'est servi de l'élément: développer un réseau de parcs historiques. Il y a un autre élément un petit peu plus loin où vous parlez de consolider le réseau des ZEC. J'aimerais vous entendre davantage là-dessus.

M. Dufour: Avec plaisir. Je pense que dans les réflexions ou l'analyse qu'on peut faire de l'ensemble du réseau des ZEC - on a créé énormément de ZEC et cela est très récent, c'est une création récente - c'est, à mon avis, extrêmement important de s'assurer que les espaces qu'on dit protégés, les zones d'exploitation contrôlées au Québec, aient tout le support et tout l'appui, non seulement de l'État, mais de l'ensemble des citoyens, pour qu'on puisse vraiment leur permettre de remplir leur rôle.

Quand vous regardez la carte des espaces des Laurentides, dans l'ensemble, c'est pratiquement vert, c'est pratiquement tout en ZEC, mais cela va au-delà. Chez nous, c'est quand même vraiment impressionnant, on a la plus grande ZEC du Québec. Alors, c'est de savoir si on va garder tout cet espace en ZEC que nous avons ou bien si nous allons le réduire, mais vraiment lui assurer le rôle que cette zone doit remplir dans la société. C'est un peu l'idée, ici, de consolider le réseau des ZEC. Si on en a trop, si on n'est pas capable de les supporter, il faudra les réduire.

M. Côté:... se situe au niveau du "C" des ZEC, en termes de contrôle, zone d'exploitation contrôlée. C'est un peu là l'inquiétude, je pense, de ceux qui veulent la conservation. On devait avoir 6 000 000 d'agents de conservation et je pense qu'on s'est rendu compte qu'on avait des agents de consommation. C'est la faune qui en subit les conséquences.

M. Dufour: C'est cela. C'est dans ce sens.

M. Côté: L'autre question, recommandation trois: Qu'un moratoire soit institué avant de procéder à l'adoption du présent projet de loi pour permettre aux différents intervenants du milieu de connaître les motifs fondamentaux qui animent le MLCP dans cette opération. Tantôt, vous aviez des interrogations, des pressions qui venaient du milieu forestier, minier ou touristique. Là, on voit que la réponse du ministre est très claire: cela ne vient pas de là. Maintenant, est-ce que vous partez satisfaits en vous disant: On peut éliminer notre recommandation trois parce que maintenant on sait d'où viennent les pressions?

M. Dufour: Je dirais que s'il existe, par exemple, une analyse qui a été menée, conduite par le ministère ou, je ne sais pas, un autre agent de l'État sur les exploits de la loi 19, la Loi sur les parcs, comment elle s'est comportée, quels sont les résultats qu'elle a donnés, je pense que tout le monde est satisfait; à mon avis, en tout cas. Il y a une évaluation qui... Si cette évaluation a été faite, j'aimerais bien la connaître; si

elle a été faite, si elle a été consignée dans un document, si le ministère l'a faite. Si cela est fait et que cela n'a pas donné les résultats escomptés, que la Loi sur les parcs n'est pas bonne ou n'a pas donné les résultats escomptés, à ce moment-là, il faut la modifier et cette modification est commandée par une analyse. C'est simplement une interrogation dans ce sens-là. Alors, par exemple, ce moratoire peut durer cinq minutes, le temps d'une réponse, comme tout à l'heure, mais cela peut durer une semaine ou deux, si on nous donne vraiment les motifs fondamentaux.

M. Côté: Avant de poser la question au ministre, est-ce que vous croyez que la loi 19 de l'époque et maintenant la loi qui est en application, on l'a appliquée suffisamment de temps pour voir tous les vices qu'elle pourrait avoir ou si on ne devrait pas attendre encore quelques années pour voir les effets?

M. Dufour: Je pense qu'il faudra attendre encore quelques années parce qu'on a créé, on a quand même modifié les parcs. Cela a duré quoi? Les quatres parcs existants, on les a modifiés en 1978, 1979, 1980 et, là, on a commencé vraiment à créer de nouveaux parcs assez récemment. Évidemment, cela peut être une modification. Si on dit que le projet de loi 13, c'est une modification mineure à la loi pour l'aider à mieux être appliquée, d'accord, mais, comme on hésite sur le premier paragraphe - et je ne pense pas qu'on soit les seuls - il faut vraiment attendre, voir ce que le MLCP nous présente à ce sujet.

M. Côté: Maintenant, ma question s'adresse au ministre. C'est une question fort pertinente qui est venue de vos concitoyens qui posent la question très clairement: Est-ce qu'il y a eu une étude au ministère sur l'application de la loi 19? Si oui, est-ce que cette étude pourrait être rendue publique? Je suis convaincu que, de bonne grâce, nos invités accepteraient d'éliminer la troisième recommandation, probablement.

M. Brassard: M. le Président, je dois dire que je suis d'accord avec nos invités quand ils disent que la Loi sur les parcs actuelle est une bonne loi. C'est une bonne loi. On est parfaitement d'accord là-dessus. J'ai voté pour, d'ailleurs.

M. Côté: Moi aussi, c'est clair.

M. Brassard: Tout le monde a voté pour; cela a été unanime. Donc, c'est une très bonne loi, la loi actuelle, mais à la pratique, au cours des années, les quelques années qu'elle a été mise en vigueur et en application, on s'est quand même rendu compte qu'elle avait besoin d'être améliorée, complétée, précisée, clarifiée dans beaucoup de ses points.

Depuis le début de cette consultation, le débat et les interventions de nos invités ont porté presque exclusivement sur l'article 1, sur le fait qu'on écarte la classification telle qu'on la retrouve dans la loi actuelle et qu'on la remplace par un article qui porte surtout sur les objectifs. Presque toutes les interventions ont porté là-dessus. Il est évident que c'est leur droit, c'est le droit des organismes d'exprimer leur point de vue sur l'aspect qui les intéresse, mais cela ne veut pas dire que c'est la seule modification qu'on retrouve dans le projet de loi 13. Plusieurs amendements, plusieurs modifications, plusieurs précisions, clarifications, ajouts également, ont été apportés pour se donner un meilleur outil en matière de création d'un réseau de parcs. Il est évident qu'à l'intérieur du ministère, à la direction des parcs, on a procédé à l'identification des problèmes posés par l'application de la loi actuelle. On n'a pas le temps de passer en revue tout cela, mais je pense aux pouvoirs d'expropriation; on a eu des difficultés à ce niveau. On a eu des procédures judiciaires devant les tribunaux qui venaient du fait que ce n'était pas clair dans la loi actuelle. Alors, il fallait préciser cela également. Les pouvoirs des agents de conservation de la faune aussi sur le territoire des parcs, il y a des précisions à apporter à ce niveau.

En d'autres termes, l'expérience - elle n'est pas longue - de quelques années a quand même fait apparaître un certain nombre de difficultés qu'il convenait d'aplanir par des amendements. Il est évident que le principal amendement sur lequel porte presque toutes les discussions, c'est l'article 1, mais il y en a plusieurs autres. Évidemment, en commission parlementaire et à l'occasion du débat sur le principe, je vais aborder longuement aussi les autres modifications qu'on apporte à la loi.

Il y avait suffisamment de ces modifications, de ces clarifications à apporter pour en arriver à la conclusion qu'il valait peut-être mieux, plutôt que d'arriver avec un projet de loi qui amende la loi actuelle, d'arriver avec un texte complètement nouveau, qui reprenne plusieurs des libellés, plusieurs des articles de la loi actuelle, mais qui en modifie certains et qui en ajoute aussi certains autres. Sur la simple question de lecture, c'est pas mal plus facile à étudier quand on a un texte complet plutôt que les fameux projets de loi qui amendent un autre projet de loi. C'est plus difficile à comprendre, à suivre et à étudier.

Il y a évidemment eu, en réponse au député de Charlesbourg, une analyse, une identification des problèmes, qui vient de la pratique, de l'expérience, et qui fait que, au

bout d'un certain nombre d'années, il convient de modifier, d'amender la loi actuelle tout en affirmant - en terminant, M. le Président - que cela ne signifie pas que la loi actuelle est une mauvaise loi, bien au contraire.

M. Côté: Peut-être une dernière question dans cette veine, parce que c'est une question qui est revenue à plusieurs reprises dans les mémoires. J'imagine qu'il y a eu une foule de représentations de la part du milieu pour qu'il y ait des amendements à la loi?

M. Brassard: Ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit. La plupart de3 amendements viennent de l'expérience en matière de création de parcs et cela provient du ministère lui-même, de la direction générale des parcs. Pour la plupart des amendements, on s'est rendu compte en cours de route que, comme je le mentionnais tantôt, à partir de la création, du fonctionnement et de la gestion des parcs, cela comportait certaines difficultés et qu'il convenait de clarifier les choses.

Le Président (M. Marquis): Nous vous remercions beaucoup, MM. Lemieux et Dufour, pour votre présentation devant cette commission parlementaire. Nos travaux sont suspendus jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 15)

(Reprise à 20 h 16)

Le Président (M. Marquis): La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux afin de poursuivre la consultation particulière sur le projet de loi 13, Loi sur les parcs nationaux. Ce soir, nous recevons comme premier intervenant M. Pierre Bannon, président de la Société québécoise de protection des oiseaux Inc. La parole est à vous, M. Bannon.

Société québécoise de protection des oiseaux Inc.

M. Bannon (Pierre): Mercil Juste une correction, je ne suis pas président de la société, je suis président du comité de conservation.

Le Président (M. Marquis): Nous acceptons la correction.

M- Bannon: Alors, mesdames, messieurs les membres de la commission, j'aimerais d'abord remercier le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche de donner à la Société québécoise de protection des oiseaux, que j'appellerai SQPO pour abréger, l'occasion d'exprimer son avis sur le projet de loi 13. Toutefois, avant d'aborder ce sujet - et probablement que j'en aurai le temps parce que je ne crois pas utiliser les 30 minutes qui me sont allouées - j'aimerais fournir les précisions suivantes sur la société que je représente. La SQPO est l'une des plus anciennes sociétés d'histoire naturelle du Québec et l'une des plus dynamiques. Elle a, en effet, été fondée en 1917 et regroupe environ 600 membres habitant surtout la région de Montréal. Les principaux objectifs poursuivis par la société consistent à promouvoir la protection de nos oiseaux indigènes, à faire connaître le rôle important qu'ils jouent dans l'environnement et à contribuer à différentes études relatives aux oiseaux du Québec. Les nombreuses activités de la SQPO comprennent, entre autres, l'organisation d'excursions et de conférences publiques, ainsi que la publication de différents documents sur les oiseaux du Québec.

La société a toujours étroitement collaboré avec les autres groupements régionaux, nationaux ou internationaux. Ainsi, par exemple, elle fut, en 1951, l'hôte de la conférence annuelle de l'American Ornithologists' Union et, en 1971, elle participait a la fondation de la Fédération canadienne de la nature.

La société a également joué un rôle très concret en matière de conservation en mettant sur pied un programme d'acquisition d'habitats menacés ou sensibles aux activités humaines. Par exemple, la société possède et gère un sanctuaire d'oiseaux près de Philipsburg; elle est également propriétaire de l'île aux Perroquets, qui fait partie du sanctuaire de la baie de Brader et qui est un lieu reconnu pour ses oiseaux marins nicheurs, au large de la côte nord du Saint-Laurent. Récemment, la société a fait l'acquisition de deux îles du Saint-Laurent, près de Varennes. Ces îles englobent des marais d'eau douce très représentatifs du Haut-5aint-Laurent et essentiels pour plusieurs espèces d'oiseaux nicheurs du sud-ouest du Québec.

La société commandite également des activités de conservation menées par d'autres associations, tel le Centre de recherche sur les oiseaux de proie du Collège Macdonald, et accorde, d'autre part, des bourses pour des étudiants gradués, engagés dans des études sur l'avifaune du Québec. La SQPO s'est également intéressée à l'avenir des parcs québécois et a présenté des mémoires aux audiences publiques sur le parc du Mont-Tremblant et sur le parc du Mont-Saint-Bruno.

Dans le présent mémoire, la SQPO s'interroge particulièrement sur les amendements touchant les aspects fondamentaux de la Loi sur les parcs, c'est-à-dire ceux touchant la conservation du

patrimoine naturel, l'éducation du public au milieu naturel, ainsi que la participation du public au processus décisionnel. Nous avons, par ailleurs, consacré peu de temps à l'étude des articles qui touchent l'administration des parcs, où l'on ne retrouve, de toute façon, que peu de modifications. Également, nous ne nous sommes pas attardés sur la réglementation, de même que sur les dispositions pénales et législatives dont le but n'est d'ailleurs que d'assurer la concordance avec le nouveau projet de loi.

Après étude du projet de loi 13 sur les parcs nationaux, la SQPO croit que ce projet accuse un net recul sur la loi 19, tout particulièrement en ce qui a trait è la notion de conservation et à la participation du public. Les modifications proposées étonnent quelque peu puisqu'elles n'ont fait suite à aucune pression de la part du public. Nous nous interrogeons donc sur les motivations qui ont poussé le gouvernement à modifier la loi 19.

Ce projet propose en premier lieu que les parcs soient désignés comme parcs nationaux plutôt que provinciaux afin de les distinguer des parcs régionaux et des parcs urbains. Pourtant, la désignation de parcs provinciaux les distinguait tout aussi bien de ces deux dernières catégories de parcs. La nouvelle désignation contribuera, d'autre part, à créer une certaine confusion dans l'esprit des visiteurs qui associent ordinairement la notion de parc national à l'administration fédérale.

Toutefois, notre désaccord avec ce type de désignation se situe à un autre niveau et concerne plutôt le fait qu'il y a, à notre sens, plusieurs parcs du Québec qui ne méritent tout simplement pas la désignation de parcs nationaux. En effet, plusieurs des parcs provinciaux actuels ou projetés, notamment dans la région de Montréal, ne cadrent pas très bien avec la conception de parcs nationaux puisqu'ils sont plutôt identifiés à des parcs régionaux dont la vocation principale est la récréation intensive. Ces parcs sont généralement de faible superficie et supportent des équipements plutôt lourds. De tels parcs ne devraient pas bénéficier de l'appellation parcs nationaux, car ils ne jouent pas vraiment le rôle de parcs nationaux tel qu'on le conçoit à l'échelle internationale et qui consiste principalement à protéger des éléments caractéristiques du patrimoine naturel. De plus, il semble illogique d'attribuer le statut de parcs nationaux, même à nos parcs de conservation, sans en modifier préalablement le zonage. En effet, les zones de préservation dans ces parcs n'occupent en moyenne que le tiers du territoire. À titre de comparaison, le parc national de Forillon consacre plus de 90% de son territoire à la préservation.

À l'examen détaillé des premiers articles du projet de loi, nous constatons que le système de classification en parcs de conservation et de récréation est mis de côté, de même que la notion de récréation extensive. Tels que formulés à l'article 1, les deux objectifs associés à l'établissement d'un parc ne semblent pas mutuellement exclusifs, ce qui laisse supposer que le ministère pourrait simultanément attribuer les deux objectifs à un parc ou même lui en assigner d'autres. Même si nous nous opposons à la dualité conservation-récréation, puisque, selon nous, il ne devrait y avoir que des parcs de conservation, nous pensons que la loi 19 est beaucoup plus explicite en ce qui concerne la définition d'un parc de conservation. Elle offre certainement plus de garanties, tandis que le projet de loi 13 demeure très vague sur la question des parcs de conservation qui seront, par conséquent, voués à être défavorisés. L'article 23 raffermit, d'ailleurs, l'appréhension que les parcs de conservation existants pourraient perdre leur statut de parcs de conservation.

Attardons-nous maintenant à l'énoncé des objectifs présentés à l'article 1. Le paragraphe 1°, qui se veut une substitution à la définition de parc de conservation, a été malheureusement amputé de la notion de permanence qui avait été associée auparavant à la protection de territoires et de sites naturels. Doit-on en conclure que le seul gestionnaire du patrimoine naturel québécois ne peut plus garantir une protection permanente de nos sites naturels? De plus, une préoccupation fondamentale, celle de l'éducation du public au milieu naturel, a été mise de côté dans ce paragraphe. Alors que l'éducation et l'interprétation de la nature étaient reléguées à l'arrière-plan dans la loi 19, elles sont maintenant carrément mises aux oubliettes. Ce désintéressement pour l'éducation constitue donc un recul difficilement concevable, car l'interprétation et les activités en grande nature sont les raisons d'être des parcs nationaux. En effet, la conservation de ces territoires naturels n'est justifiée que pour autant qu'elle permette aux visiteurs de découvrir et de mieux comprendre la faune, la flore et les principaux écosystèmes.

Le paragraphe 2° de l'article 1, tout comme le paragraphe précédent, a également perdu beaucoup d'étoffe. En effet, l'objectif de protection de l'environnement naturel, qui était tout de même au second plan dans les parcs de récréation, a été complètement oublié lors de la rédaction du projet de loi. Est-ce à dire que le ministère ne peut plus assurer la protection de l'environnement dans les parcs de récréation?

D'autre part, en ce qui concerne la participation du public, encore là, le projet de loi 13 a beaucoup moins à offrir que la loi 19. Comme auparavant, le ministre devra entendre les intéressés en audience publique

lors de l'établissement d'un parc, de son abolition ou de la modification de ses limites, mais non plus lors de la modification de sa classification ou de ses objectifs. La classification des parcs de conservation existants pourrait donc être modifiée sans aucune consultation publique. Qu'est-il donc advenu de la volonté du ministère d'associer la population à la planification et au développement du réseau des parcs québécois?

Il est donc clair que le projet de loi 13 offre moins de garanties que la loi 19 relativement à la conservation et à la participation du public. Devant ce recul du ministère, la SQPO ne peut qu'être en désaccord avec ce projet de loi. Le seul aspect positif de ce projet se retrouve à l'article 2 qui stipule que le ministère peut acquérir par expropriation tout bien qu'il juge nécessaire à l'établissement d'un parc ou à la modification de ses limites.

Toutefois, nous ne croyons pas que les retranchements importants à la superficie des parcs, observés depuis 1977, soient reliés à l'absence d'un pouvoir d'expropriation, mais plutôt aux intentions dissimulées du gouvernement de vouloir favoriser une fois de plus les impératifs économiques, principalement l'exploitation minière et forestière, le développement touristique et la récréation.

La SQPO réclame donc le retrait immédiat du projet de loi 13 et le maintien de la loi actuelle, tout en proposant au ministère des modifications à cette loi. À notre avis, deux aspects de la loi 19 devraient faire l'objet d'amendements. En premier lieu, la SQPO déplore l'antagonisme entre la conservation et la récréation. Cette polarisation du problème est inutile puisque le but de la loi est d'abord de conserver un territoire. Nous croyons donc qu'il ne devrait exister qu'un seul type de parc, soit le parc de conservation Les activités récréatives permises dans ces parcs ne devraient être que celles qui s'intègrent bien avec la fonction éducative et les programmes d'interprétation de la nature. Aucun équipement de récréation élaboré n'est souhaitable à l'intérieur des parcs québécois.

Comme dans les parcs nationaux canadiens et américains, l'établissement de centres d'interprétation, où des naturalistes qualifiés se chargent de faire connaître aux visiteurs les différents éléments du milieu naturel, devrait être l'approche privilégiée à l'intérieur de nos parcs provinciaux et, plus particulièrement, dans les parcs situés à proximité des centres urbains où l'on retrouve un plus grand nombre de visiteurs. Le MLCP doit, avant tout, gérer efficacement notre patrimoine naturel et non exploiter le milieu naturel à des fins de récréation intensive.

En second lieu, nous déplorons également le fait que le ministère n'ait pas tenu compte dans son projet de loi du désir exprimé par de nombreux intervenants, lors des audiences publiques sur les parcs, concernant le zonage dans les parcs. En effet, ces intervenants ont demandé à maintes reprises que le plan de zonage et le plan directeur d'aménagement soient soumis à des audiences publiques et offrent certaines garanties légales. Jusqu'à maintenant, le plan de zonage et l'aménagement du parc peuvent faire l'objet de changement de la part du gouvernement sans préavis auprès du public. L'omission de tels amendements dans le projet de loi est d'autant plus décevante que, lors de l'audience publique sur le parc du Mont-Saint-Bruno, le ministre de l'époque avait fait part de son intention d'apporter des amendements à la loi qui garantiraient la révision par le public de modifications apportées au plan de zonage et au plan directeur. (20 h 30)

Au sujet du plan directeur, la SQPO souhaite également que le ministère accorde plus d'importance aux inventaires biophysiques avant de présenter son plan directeur. La connaissance des caractéristiques biophysiques s'est avérée souvent déficiente et trop fragmentaire lors de la présentation des propositions gouvernementales. Il serait donc préférable, comme l'ont proposé d'autres regroupements, que le plan directeur final ne soit adopté et discuté publiquement qu'après un délai de quelques années suivant la création d'un parc, c'est-à-dire après que toutes les études pertinentes ont été complétées.

Comme dernière remarque, la SQPO souhaite, d'autre part, que le ministère étudie la possibilité d'accroître la part du budget consacrée au développement du réseau des parcs québécois. Le budget consacré à cet objectif est actuellement infime et ne permet pas une évolution suffisante du réseau de parcs québécois. En outre, il semble que l'on assistera au transfert d'une partie du budget affecté aux parcs provinciaux au profit du parc de l'Archipel. Il serait fâcheux que le parc de l'Archipel empêche le développement normal des autres parcs en drainant une partie importante de leur budget.

En terminant, je remercie sincèrement les membres de la commission pour leur attention apportée à l'audition de ce mémoire et je vous prie d'accepter mes salutations les plus distinguées. Merci.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup. M. le ministre, avez-vous des questions?

M. Brassard: M. le Président, je remercie la Société québécoise de protection

des oiseaux de sa participation aux travaux de la commission et également de son mémoire. Il semble que les organismes invités se soient en quelque sorte - je ne sais pas si c'est le cas, mais on le croirait -donné le mot, puisqu'on retrouve les mêmes inquiétudes et les mêmes commentaires sur le projet de loi 13, en particulier dans les remarques qui portent sur la conservation, où l'on prétend que le projet de loi 13 constitue un net recul - c'est l'expression que vous utilisez - par rapport à la loi actuelle.

Il me semble que ce n'est pas en inscrivant un peu partout dans la loi le mot "conservation" que cette dernière va nécessairement être assurée. On ne le retrouve pas du tout dans la loi fédérale sur les parcs. Pas une seule fois on ne retrouve le mot "conservation" dans la loi fédérale sur les parcs. Comme vous l'avez signalé, cela ne signifie absolument pas que, dans les parcs fédéraux, la conservation du milieu naturel n'est pas assurée. Ce qui compte, par conséquent, ce sont les objectifs poursuivis, le zonage, comme vous l'avez mentionné, les intentions d'aménagement. C'est cela, au fond, qui est important. Ce sont là les vrais enjeux.

Je ne sais pas sur quoi vous vous basez. Depuis l'adoption de la Loi sur les parcs, en 1977, est-ce que vous êtes en mesure d'affirmer que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche n'a pas accompli son devoir ou n'a pas assumé ses responsabilités en matière de "conservation dans le réseau des parcs nationaux? En d'autres termes, vos inquiétudes se fondent-elles sur une mauvaise expérience depuis l'adoption de la loi? Parce qu'on retrouve, un peu dans tous les mémoires, une espèce de méfiance. J'aimerais savoir sur quoi vous vous fondez pour exprimer une pareille méfiance. Dans le passé, depuis l'adoption de la loi en 1977, est-ce que dans la pratique, de façon concrète, le ministère a mal assumé ses responsabilités en matière de la conservation de la faune à l'intérieur du réseau des parcs? J'aimerais savoir l'origine de cette méfiance soudaine.

M. Bannon: La question n'est pas là. Je pense qu'actuellement on nous propose un projet de loi qui offre beaucoup moins que la loi 19 sur les parcs provinciaux. La question est là. On ne comprend pas pourquoi le gouvernement nous arrive avec un projet de loi qui offre moins. Personne ne comprend pourquoi on veut absolument changer la loi 19. Pourquoi exactement voulez-vous changer la loi 19? C'est cela, la question; on ne le comprend pas.

M. Brassard: Pour que les débats, à l'occasion des audiences publiques et des consultations de la population, portent sur les véritables enjeux et ne soient pas déviés.

Quand les débats portent sur une étiquette et non pas sur le contenu, sur l'essentiel de ce qu'on a l'intention de faire dans un parc...

M. Bannon: Vous comprendrez que les bases légales sont d'une extrême importance. Je veux bien croire que les enjeux sont importants, mais la loi est extrêmement importante aussi.

M. Brassard: Oui, je conviens qu'elle est importante, la base légale, mais je vous signale que du côté fédéral - est-ce que vous connaissez la loi sur les parcs fédérale? -c'est très fragile comme base légale et cela ne les empêche pas d'avoir un grand souci de conservation à l'intérieur de leurs parcs. Il ne faut pas, non plus, s'imaginer que tout est dans la loi et que tout peut être dans la loi. Il y a également une politique qui est issue d'une loi et qui comporte pas mal plus d'éléments.

M. Bannon: Encore une fois, j'insiste: Pourquoi voulez-vous modifier la loi 19?

M. Brassard: Pour bien des raisons, il y en a plusieurs. Évidemment, comme je le mentionnais avant l'ajournement de 18 heures, jusqu'à maintenant, la discussion n'a porté que sur l'article 1, mais quand on examine l'ensemble de la loi il y a plusieurs autres raisons qui expliquent les amendements et les modifications qu'on a apportés au projet de loi actuel et qui constituent des progrès par rapport à la loi actuelle qui n'est pas - je le répète - une mauvaise loi, mais qui méritait d'être clarifiée sur certains points. À l'article 1, on a voulu indiquer les objectifs. On a voulu que, dans l'établissement d'un parc, les objectifs soient l'élément essentiel plutôt que l'appellation de conservation ou de récréation, de façon que le débat public porte véritablement sur les enjeux réels, les enjeux essentiels.

De toute façon, quand vous parlez d'affaiblissement, par exemple, vous dites qu'on recule également sur le plan des audiences publiques. Pourtant, par rapport à la loi actuelle, les objets qui vont être soumis à la consultation sont plus nombreux. Dans la loi actuelle, ce ne sont que le territoire ou la délimitation et la classification, alors qu'avec le projet de loi 13 on inclut également dans les audiences publiques les intentions d'aménagement, ce qui n'est pas le cas dans la loi actuelle.

M. Bannon: Je pense que vous avez laissé tomber le point le plus important.

M. Brassard: C'est-à-dire?

M. Bannon: Maintenant, le public ne

peut plus se prononcer sur la modification de la classification des parcs.

M. Brassard: Oui, mais il peut se prononcer sur les objectifs ou les motifs. Vous ne trouvez pas que cela revient au même, si le public peut se prononcer sur les objectifs ou les motifs?

M. Bannon: Bien, je ne vois pas cela dans la loi. Où voyez-vous les objectifs?

M. Brassard: À l'article 1.

M. Bannon: Parce que la consultation du public, c'est à l'article 3.

M. Brassard: Oui, l'article 4: "L'avis prévu au paragraphe 1° de l'article 3. "

M. Bannon: Oui, mais ça, c'est l'avis. Regardez l'article 3: "En vue de l'établissement d'un parc, de son abolition ou de la modification de ses limites, le ministre doit... " C'est là qu'il aurait fallu inclure "et de ses objectifs", et non è l'article 4.

M. Brassard: II doit les "entendre en audience publique" et l'avis qui prévoit les audiences publiques est à l'article 4.

M. Bannon: Oui, c'est seulement l'avis.

M. Brassard: Si on le donne en avis, c'est parce que c'est ça qui va faire l'objet de l'audience publique.

M. Bannon: Ce n'est pas clair, ce n'est pas très clair. Pourquoi la question des objectifs n'a-t-elle pas été incluse au début de l'article 3? Pourquoi n'avez-vous inclus que "l'établissement d'un parc, son abolition, la modification de ses limites... " Pourquoi ne pas avoir inclus "et de ses objectifs" à cet endroit-là?

M. Brassard: Si, dans l'avis, on doit indiquer "les objectifs et les limites envisagés; dans le cas de l'abolition d'un parc, les motifs", c'est évidemment pour les soumettre en audience publique.

M. Bannon: Moi, je ne vois pas cela comme ça. Si on recommence à lire l'article 3: "En vue de l'établissement d'un parc, de son abolition ou de la modification de ses limites, le ministre doit... " Ensuite, il y a trois sous-paragraphes. Regardez le troisième qui fait suite à cela. "En vue de l'établissement d'un parc... le ministre doit entendre en audience publique les personnes visées. " C'est ça, c'est tout simplement cela.

M. Brassard: C'est ça.

M. Bannon: En vue de l'établissement d'un parc, il aurait fallu inclure "de ses objectifs" à cette place-là.

M. Brassard: À l'occasion de l'établissement, de l'abolition et des modifications de limites, à ces trois occasions-là, le ministre va en audience publique et l'audience publique porte sur les objets contenus dans l'avis, c'est-à-dire, en particulier, les objectifs de l'établissement ou les motifs de l'abolition. C'est comme ça que je le comprends.

M. Bannon: Vous admettrez comme moi que cela laisse place à de l'interprétation. C'est ce qu'on reproche à cette loi-là. Elle est vague, elle n'est pas claire, elle est confuse, on peut l'interpréter de mille et une façons. Elle est beaucoup moins claire que la loi 19. Elle est très vague. Cela peut s'interpréter de toutes sortes de façons.

M. Brassard: Enfin, c'est une question de point de vue.

M. Bannon: Je voudrais vous poser une question. Est-ce qu'il y a eu de la part du public une certaine pression, une demande pour changer la loi 19? Qui vous a demandé de changer la loi 19?

M. Brassard: II n'y a pas eu d'organismes qui l'ont fait ou de pétitions qui ont circulé.

M. Bannon: Pourquoi vous la changez alors, si elle plaît à tout le monde?

M. Brassard: On la change parce qu'en cours d'expérience, à partir du moment où on a commencé à créer et à mettre sur pied le réseau des parcs, il est apparu un certain nombre de difficultés. Il est apparu qu'un certain nombre d'articles de la loi actuelle manquaient de précision, un certain nombre de carences aussi. C'est pour toutes ces raisons qu'on a décidé de réviser la loi et de l'amender.

M. Bannon: Vous la changez parce que cela fait votre affaire, quoi, et non l'affaire de la population.

M. Brassard: Écoutez! Dans le cas des parcs, il faut bien dire que ce n'est pas...

M, Bannon: C'est pour alléger vos difficultés.

M. Brassard: Pardon?

M. Bannon: Vous la changez pour alléger vos difficultés, comme vous avez dit.

M. Brassard: Sur le plan pratique, oui, il y a un certain nombre de difficultés qui

sont apparues.

M. Bannon: II me semble que ce n'est pas là un objectif très noble.

Une voix: Je ne comprends pas pourquoi quelqu'un se forcerait pour rester dans la "marde".

Mme Bacon: II faut quand même respecter, M. le Président...

M. Côté: II faut tirer comme conclusion que la loi a été faite pour le public et pour l'utilisation du public. Ce n'est plus le public qui est visé, mais ce sont certains éléments du ministère qui ont de la difficulté à l'appliquer.

M. Brassard: Est-ce que j'ai perdu le droit de parole?

M. Côté: Elle est au service du ministère, elle n'est pas au service de la population. (20 h 45)

M. Brassard: La Loi sur les parcs nationaux vise à créer un réseau de parcs nationaux en vue de protéger certains sites exceptionnels ou des milieux naturels représentatifs, comme c'est indiqué dans la loi actuelle et comme c'est aussi indiqué dans le projet de loi. Or, il est arrivé qu'en cours d'établissement de ces parcs plusieurs articles sont apparus incomplets, imprécis et ont donné lieu, d'ailleurs, dans certains cas, à des démêlés judiciaires. Il nous est apparu essentiel, à ce moment-là, de corriger ces articles, de revoir un certain nombres de dispositions de la loi.

C'est évident que la Direction générale des parcs, qui a vécu la mise en place du réseau, a été une des principales sources pour indiquer et identifier les dispositions dans la loi qui devaient être modifiées ou amendées. C'est bien évident que c'est une des principales sources. Enfin, c'est clair aussi que, dans le cas des parcs, il n'y a pas de lobby puissant comme dans d'autres cas, comme dans les négociations des secteurs public et parapublic. Des lobbies très puissants et très bien organisés, dans le cas de parcs, ça n'existe pas; à regret, peut-être.

M. Bannon: Enfin, si c'est là votre unique raison, cela ne me satisfait pas du tout.

M. Brassard: Cela va, M. le Président.

Le Président (M. Marquis): Mme la députée de Chomedey.

Mme Bacon: Moi, je dois vous dire que je vous trouve bien courageux de venir faire face à la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements, tout seul, comme ça. Il faut que vous soyez drôlement impliqué dans votre dossier et que vous croyiez au bien-fondé de ce que vous avez à nous dire. Vous avez tout mon respect d'avoir le courage, la générosité de passer le temps, d'avoir préparé votre dossier et d'être venu nous le présenter. Moi, je dis chapeau à ça.

Je pense que des gens de votre milieu sont très préoccupés par vos dossiers et, surtout, y croient beaucoup. C'est pour ça, je pense, que votre présence est importante ici, devant nous, et je la respecte beaucoup.

M. Bannon: Merci.

Mme Bacon: Je dois dire que, moi aussi, ça m'inquiète un peu d'entendre le ministre dire que tous ont les mêmes inquiétudes et font les mêmes commentaires. C'est presque un aveu de la part du ministre que lui seul a le pas et les autres, non, parce que lui ne pense pas comme les groupes qui sont venus nous rencontrer. Même ceux qui avaient un certain accord avec le projet de loi se demandaient si c'était venu du milieu et eux-mêmes avaient des objectifs à poursuivre qui étaient sensiblement certains objectifs que vous avez, vous aussi.

Si on reprend votre document, à la page 1, vous nous expliquez ce qu'est la Société québécoise de protection des oiseaux et certains objectifs qui sont poursuivis par votre société et vous mentionnez la protection, évidemment, des oiseaux indigènes et faites connaître le rôle important qu'ils jouent dans l'environnement. Est-ce que vous avez inventorié les différentes espèces que nous pouvons avoir au Québec? Si oui, est-ce qu'il a des espèces qui sont en voie de disparition, par exemple, faute de soins qu'on peut leur apporter ou faute de possibilités d'avoir des endroits où on peut les garder?

M. Bannon: Évidemment, il y a déjà des espèces qui sont disparues du territoire québécois. Je crois qu'il y en a trois ou quatre qui sont disparues au cours du siècle dernier ou au début du siècle et il y en a actuellement. Je crois que c'est même le ministère de l'Environnement actuel qui vient de publier une liste qui contient 24 espèces d'oiseaux qui sont considérés comme vulnérables ou menacés d'extinction. Cette liste a été publiée par la Direction des réserves écologiques et des sites naturels.

Mme Bacon: II existe - j'en ai déjà visité - aux États-Unis, par exemple, des endroits où on interprète - on parle ici d'interprétation de la nature - les différentes espèces d'oiseaux. Par exemple, on prend un sentier dans un parc et on y voit les

oiseaux. C'est déjà expliqué dans des dépliants qu'on nous remet au départ et il y a même des gens sur les lieux qui peuvent nous donner des informations. Comptez-vous plusieurs endroits comme ceux-là ici, des parcs où l'on fait cela?

M. Bannon: Nous croyons que cela fait défaut dans la province, ce genre d'activité d'interprétation de la nature. Je crois que nous sommes très en retard, comparés aux États-Unis et au reste du Canada, dans ce domaine. C'est, d'ailleurs, l'aspect de l'éducation du public que j'ai abordé dans mon mémoire qui fait énormément défaut au Québec. Il était, d'ailleurs, mentionné dans la loi 19 et on l'a complètement laissé tomber dans le projet de loi 13. On ne parle plus du tout, à aucun endroit, d'éducation ou d'interprétation de la nature alors que c'était inscrit dans la loi 19.

Mme Bacon: Est-ce que les espèces plus vulnérables y trouveraient leur compte à un moment donné si cela existait? Est-ce qu'on pourrait les sauver?

M. Bannon: Évidemment, tout dépend...

Mme Bacon: C'est une question d'habitat, à un moment donné.

M. Bannon: C'est sûr que, si on veut protéger les espèces menacées et vulnérables, il faut d'abord protéger leur habitat. Si ces espèces perdent leur habitat, évidemment, elles ne survivront plus. Il faut absolument protéger l'habitat des espèces menacées si on veut les conserver.

Mme Bacon: Dans votre association ou société, avez-vous suffisamment de membres - question de membership - pour organiser des bénévoles ou des gens qui pourraient, même avec un encadrement ou un soutien technique ou financier, donner cette éducation à la population? II faut dire qu'ici on n'est pas très près de cela et qu'il y a une éducation à faire dans le grand public.

M. Bannon: On a des bénévoles à l'intérieur de notre société qui acceptent de diriger des excursions à différents endroits. Toutes les fins de semaine il y a des excursions qui sont dirigées dans la région de Montréal, autour de Montréal. Je suis moi-même responsable de quelques-unes de ces excursions. Évidemment, si on avait un soutien financier, peut-être que ce serait amélioré. On pourrait évidemment offrir plus; c'est toujours difficile de trouver des bénévoles, etc.

Mme Bacon: Est-ce que vous avez un soutien du ministère?

M. Bannon: Non.

Mme Bacon: Vous n'en avez jamais eu?

M. Bannon: Non.

Mme Bacon: En avez-vous déjà demandé?

M. Bannon: Non.

Mme Bacon: Non plus. Même au ministère de l'Environnement?

M. Bannon: La Société québécoise de protection des oiseaux Inc. dépend strictement de dons de particuliers.

Mme Bacon: Le membership.

M. Bannon: Le membership et les dons de particuliers.

Mme Bacon: Mais, vous ne vous opposeriez pas, à un moment donné, à avoir un soutien financier pour poursuivre votre oeuvre d'éducation ou d'information?

M. Bannon: Aucunement.

Mme Bacon: Par contrat ou autrement, sans que ce soit discriminatoire envers qui que ce soit.

M. Bannon: Aucunement.

Mme Bacon: Le ministre a posé certaines questions tout à l'heure. Je pense que vous faites quand même part de votre préoccupation quant à la participation des citoyens à des audiences, par exemple. Je dois dire que je suis tout à fait d'accord avec vous qu'on pourrait modifier des limites ou la classification des objectifs sans retourner à la population et demander par audiences si la population voit des dangers ou pas, si elle est d'accord ou pas. Là-dessus je dois dire que je suis tout à fait d'accord avec vous. C'est quand même très important de retourner à la population. Est-ce que ce serait basé sur une espèce d'expérience que vous avez du milieu qui verrait cela d'un mauvais oeil?

M. Bannon: Est-ce que vous voulez répéter votre question? Je n'ai pas très bien compris.

Mme Bacon: Est-ce que le milieu que vous représentez verrait d'un mauvais oeil qu'on modifie la classification et les objectifs de certains parcs, par exemple, sans retourner le consulter par des audiences publiques?

M. Bannon: Bien oui. Si on le

mentionne dans le mémoire, c'est que... Mme Bacon: Cela répond aux...

M. Bannon:... c'est un objectif important. On devrait conserver, je crois, dans la loi ce point-là.

Mme Bacon: D'accord. Aussi, à la page 11 de votre mémoire, vous indiquez les inventaires biophysiques et vous dites qu'il est préférable, comme l'ont proposé des regroupements, "que le plan directeur final ne soit adopté et discuté publiquement qu'après un délai de quelques années suivant la création d'un parc". Est-ce que vos suggestions, c'est basé sur votre expérience ou si c'est basé sur la demande du milieu ou sur des discussions que vous avez eues dans votre regroupement?

M. Bannon: J'ai moi-même, disons, présenté un mémoire, par exemple, aux audiences publiques sur le parc du Mont-Tremblant, mais je me suis aperçu, en consultant la documentation qui était disponible sur le parc du Mont-Tremblant, qu'elle était très déficiente, qu'il n'y avait rien de vraiment disponible. On se demandait sur quoi le gouvernement se basait, par exemple, pour déterminer le zonage à l'intérieur du parc alors qu'il n'y avait aucune étude qui avait été faite sur la faune et la flore du parc. En tout cas, par exemple, dans le domaine des oiseaux, il y avait très peu de publications disponibles. Il n'y avait rien de disponible. Les publications qu'on nous a offertes, c'étaient des choses qui dataient de 25 ou 30 ans, des études qui avaient été faites il y a 25 ou 30 ans et, même, ce n'étaient pas des études très poussées, très sérieuses.

Mme Bacon: Est-ce qu'il y a beaucoup de recherche dans ce domaine en ce moment?

M. Bannon: Dans le domaine de... Mme Bacon: Des oiseaux.

M. Bannon: Disons que oui. Je ne pourrais pas, personnellement, étant un amateur, m'aventurer dans ce domaine, à savoir quel type de recherche on fait au niveau des universités.

Mme Bacon: Vous pouvez quand même comparer, j'ai l'impression, si vous êtes très intéressé, avec certains pays qui sont plus sensibilisés peut-être.

M. Bannon: Au niveau de la sensibilisation, je crois que le Canada anglophone est beaucoup plus sensibilisé à ces choses - de même que les Britanniques et les Américains aussi - que les Québécois en général.

Mme Bacon: Merci.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Charlesbourg.

M. Côté: II n'y a pas de problème.

Mme Bacon: On n'aura pas fini notre temps.

M. Côté: II n'y a pas de problème; M. le député de Chambly, si vous voulez parler.

M. Tremblay: Je ne serai pas long. J'ai juste deux questions. La première est celle-ci; M. Bannon, je crois?

M. Bannon: Oui.

M. Tremblay: Vous défendez, en fait, dans votre mémoire - c'est votre droit - la loi actuelle. D'un autre côté, dans le même mémoire, vous dites très clairement que vous souhaiteriez qu'il n'y ait qu'un seul type de parcs...

M. Bannon: Oui.

M. Tremblay:... soit les parcs de conservation. Comment pouvez-vous concilier ces deux choses ensemble?

M. Bannon: C'est évident que, si on nous propose un projet de loi sur les parcs nationaux qui nous offre beaucoup moins que ce que pouvait nous donner la loi 19, à la loi 13, on préfère la loi 19. Cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas avoir mieux que cela, comprenez-vous? C'est dans cette optique que je l'ai dit.

M. Tremblay: Donc, vous considérez qu'il serait...

M. Bannon: C'est pour cela qu'on propose des amendements à la loi 19.

M. Tremblay: Mais, est-ce que vous ne pourriez pas aussi proposer des amendements à la loi 13 qui donneraient les mêmes résultats?

M. Bannon: II faudrait revenir, je crois, il faudrait réinclure toutes sortes de choses comme la consultation du public, par exemple, concernant les objectifs, la classification des parcs, qui ont été exclues maintenant...

M. Tremblay: C'est un bon exemple. M. Bannon:... du projet de loi 13.

M. Tremblay: Cela pourrait être une solution, donc. (21 heures)

M. Bannon: À mon avis, il faudrait reconsidérer tout ce qui a été exclu du projet de loi 13, principalement dans les cinq premiers articles qui, en fait, concernent la philosophie, la base; c'est vraiment la philosophie de la loi. Le reste, évidemment, ce sont des détails d'administration et tout.

M. Tremblay: Est-ce que, selon vous, la philosophie de la loi actuelle par rapport au projet de loi 13 est très différente?

M. Bannon: Vous voulez dire par rapport à la loi 19?

M. Tremblay: La loi actuelle, oui, la loi en vigueur, la loi 19, dans le temps.

M. Bannon: Bien oui. Si vous m'avez suivi durant mon exposé, je crois que la notion de conservation telle qu'elle existait dans la loi 19, on ne la retrouve pas du tout dans le projet de loi 13. La consultation du public et son éducation, on ne retrouve rien à ce sujet dans le projet de loi 13. Ce sont toutes des choses qui étaient spécifiées dans la loi 19, qui sont tombées dans le projet de loi 13.

M. Tremblay: Oui. Mais, vous avez dit dans votre exposé - et d'autres l'ont dit aujourd'hui - que, présentement, dans les parcs de conservation, il y a 30% du territoire qui est zoné véritablement de conservation.

M. Bannon: De conservation, oui.

M. Tremblay: Si un nouveau zonage était fait avec la nouvelle loi et s'il y avait 40% du territoire zoné de conservation, est-ce que cela améliorerait, à votre point de vue, la situation des parcs?

M. Bannon: Pourquoi 40%? Pourquoi pas 90%?

M. Tremblay: Là, en tout cas, c'est difficile de zoner un stationnement en...

M. Bannon: Pourquoi le parc de Forillon, par exemple, est-il zoné à 90% en conservation? Pourquoi pas le parc des Grands-Jardins, le parc de la Gaspésie?

M. Tremblay: Je ne peux pas répondre à cela, mais il est possible que le type de désignation de conservation soit différent, dans la loi des parcs du fédéral, de celui qui est dans notre loi. Peut-être qu'ici on désigne seulement de conservation les zones d'un parc qui sont exclusivement dévolues à cela, tandis que peut-être, on dit, pour un parc fédéral, que même les aires de stationnement, tout est voué à la conservation.

M. Bannon: Ah bien, là! Cela me surprendrait énormément qu'un terrain de stationnement fasse partie d'une zone de conservation dans un parc fédéral.

M. Tremblay: Vous comprendez que j'ai caricaturé un peu. Il reste que cela peut être cela.

J'ai une autre question.

Le Président (M. Marquis): La dernière.

M. Tremblay: Oui, cela va être la dernière. Donc, un seul type de parcs, pour vous, serait souhaitable, des parcs de conservation, des parcs nationaux, en fait, puisque c'est la désignation qu'on utilise...

M. Bannon: C'est cela.

M. Tremblay:... qui est approuvée mondialement...

M. Bannon: C'est cela.

M. Tremblay:... pour désigner des parcs de conservation.

M. Bannon: C'est cela.

M. Tremblay: Je vous ferai remarquer, entre parenthèses, que c'est comme cela qu'on veut désigner nos parcs. Mais il y a, vous n'êtes pas sans le savoir, dans les parcs, actuellement, et dans ceux qu'il reste à créer, j'imagine - je ne les connais pas -dans ceux qui sont déjà créés, des équipements de récréation intensive. Qu'est-ce que vous faites avec cela?

M. Bannon: Écoutez, actuellement, les équipements lourds, on les retrouve dans des zones quand même assez restreintes, qui pourraient être exclues du parc, à mon avis.

M. Tremblay: Cela veut dire que, selon...

Le Président (M. Marquis): Est-ce que cela va?

M. Tremblay:... vous, éventuellement, par exemple un centre de ski alpin, qui serait la propriété de l'entreprise privée, pourrait être démantibulé et vendu pour du développement domiciliaire. Personne ne pourrait empêcher cela parce que c'est une entreprise privée et les gens ont le droit de construire là?

M. Bannon: Là, tout de même, cela me

surprendrait qu'on aille construire en haut du mont Tremblant, sur la montagne à Mont-Tremblant. Je ne sais pas où vous voulez en venir exactement, je ne vous suis plus du tout.

Le Président (M. Marquis): Merci, M. le député. Je passe la parole à M. le député de Charlesbourg.

M. Côté: Pour une courte question. À la page 2 de votre mémoire, vous faites état de certaines activités de la société, entre autres, d'acquisition d'habitats menacés; cela me paraît une expérience assez intéressante. Faute de gestes concrets des gouvernements, c'est le milieu qui doit aller sauvegarder...

M. Bannon: Exactement.

M. Côté:... ces endroits. Vous avez 600 membres, aucune subvention gouvernementale; il doit certainement y avoir une participation de dons...

M. Bannon: Ce sont des dons privés. M. Côté: Des dons privés. M. Bannon: Oui. -

M. Côté: Dans ces cas-là, je voyais, à certains égards aussi, que vous faites de la gestion. Est-ce que cela veut dire que ce sont des territoires qui peuvent appartenir à l'entreprise privée, mais qui vous sont confiés pour la gestion par la suite? "Par exemple, la société possède et gère un sanctuaire d'oiseaux près de Philipsburg. "

M. Bannon: C'est-à-dire qu'on peut, par exemple, entretenir des sentiers d'observation sur des terrains privés, avec l'accord des propriétaires, évidemment.

M. Côté: Est-ce que tous les cas où vous êtes impliqués sont mentionnés ici ou s'il y en a plus?

M. Bannon: Non. On a aussi un terrain dans la région de Piedmont, dans les Laurentides, qui n'est pas mentionné. Je crois que tout est mentionné.

M. Côté: C'est une expérience qui est valable. Je pense à la loi 9. Si je ne m'abuse, au moment où on avait parlé de saumon, il y avait eu une fondation pour la conservation de la faune créée dans le cadre de la loi 9 qui supporte le milieu, finalement, dans la préservation de certains habitats. Je ne sais pas si une fondation comme celle-là - le ministre pourrait peut-être nous informer - pourrait être d'un secours pour vous.

M. Bannon: Oui, en tout cas, nous sommes particulièrement fiers du récent achat que nous avons fait de deux îles du Saint-Laurent où il y a des habitats essentiels. Nous espérons que le ministre, dans son projet de parc Archipel, va considérer cette zone comme une zone d'habitat faunique. Actuellement, si j'ai bonne mémoire, cette zone était prévue pour être une zone de récréation intensive, ce qui pourrait nuire énormément à la reproduction de la faune dans ces marais, dans ces habitats.

M. Côté: Vous parlez en particulier des deux îles que vous possédez?

M. Bannon: Oui, dans la région de Varennes.

M. Côté: Est-ce que cela voudrait dire que le ministère devrait vous exproprier, à ce moment-là?

M. Bannon: Non, je ne crois pas qu'il soit intéressé à nous exproprier.

M. Côté: Cela va, merci.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup, M. Bannon, de votre présence, de vos commentaires et de la présentation de votre mémoire devant la commission.

M. Bannon: Merci beaucoup!

Association québécoise des groupes d'ornithologues

Le Président (M. Marquis): J'inviterais maintenant les représentants de l'Association québécoise des groupes d'ornithologues. Le porte-parole est M. Gilles Seutin, directeur général; c'est bien cela?

M. Seutin (Gilles): Exactement.

Le Président (M. Marquis): Pourriez-vous, avant de nous faire la présentation de votre mémoire, nous présenter également tes gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?

M. Seutin: Je tenais justement à le faire. Je pense que M. le député avait une question à vous poser. Je le voyais lever la main tout à l'heure.

M. Perron: Non, cela va.

M, Seutin: M. le Président, Mme la vice-présidente, chers membres de la commission, je vous présente M. Claude Simard, président du Club des ornithologues du Québec. Cet organisme est un de nos organismes membres, voué è l'observation ornithologique depuis qu'il est né, en 1955,

et qui est actif, dans la région de Québec plus particulièrement, depuis maintenant 30 ans. Je suis aussi accompagné par M. Normand David qui travaille, entre autres, au Centre de recherches écologiques de Montréal, un ornithologue émérite depuis bientôt quinze ans. Il est présentement secrétaire de l'exécutif de l'Association québécoise des groupes d'ornithologues.

Notre association est un organisme à but non lucratif, né il y a quatre ans de la volonté des sociétés et clubs régionaux d'observation ornithologique d'être regroupés au niveau provincial. L'association a pour but de promouvoir le loisir ornithologique et de défendre l'intérêt des observateurs d'oiseaux au Québec. Il me fait donc plaisir de remercier immédiatement la commission, aujourd'hui réunie pour nous entendre sur un sujet qui est sans contredit d'une importance majeure pour nos membres.

Notre association représente, à ce jour, quelque 3000 membres individuels qui sont regroupés, sur une base régionale, par douze clubs. Chacun de ces clubs oeuvre dans une région particulière du Québec, plus ou moins regroupés en fonction des régions loisirs, tel que défini par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Il faut constater que les chiffres, 3000 membres, 12 clubs, ne représentent que très partiellement l'intérêt des Québécois pour l'observation des oiseaux. En effet, depuis seulement cinq ans, c'est-à-dire la première parution d'un guide d'ornithologie, d'un guide d'identification d'oiseaux en langue française au Québec, on a assisté à la vente de plus de 75 000 copies. Il existe maintenant deux guides. C'est donc démontrer l'intérêt profond des Québécois pour l'observation ornithologique.

Mais, il faut aussi comprendre que l'intérêt de nos membres ne peut pas se réduire à la simple compilation de la présence ou de l'absence d'une espèce, ou d'une forme d'une espèce dans une région donnée, l'observation ornithologique prenant tout son sens quand elle intègre l'observation des interactions des oiseaux entre eux et de leur habitat. Un des buts fondamentaux de l'association est donc de promouvoir toute cette intégration des différentes disciplines au sein de l'ornithologie avec comme base générale pour nos membres l'ornithologie, leur faisant comprendre l'intégration des différents systèmes écologiques. À la lumière de ce fait, vous comprendrez l'importance que revêt pour nous la préservation des habitats écologiques et, a fortiori, des habitats fauniques du Québec. L'orientation "conservationniste" dont nous sommes représentants et dont nous n'étions pas seuls, je suis sûr, aujourd'hui, représentants, nous semblait partagée par le législateur lorsqu'il a adopté en 1977 la Loi sur les parcs, la loi 19.

Faute de temps, contraints par le temps et les possibilités matérielles et physiques, nous devons malheureusement aujourd'hui restreindre nos commentaires à certains éléments qui, dans le projet de loi, peuvent avoir des conséquences importantes sur l'orientation conservatrice que se donnait le législateur. Ces éléments sont le principe de classification des parcs, la compatibilité des activités de plein air et de la conservation des parcs et, finalement, le plan de zonage des parcs.

Pour ce qui est de la classification des parcs, une modification majeure que propose le projet de loi se trouve à l'article premier. Nous nous inquiétons aujourd'hui de voir le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche prôner l'abolition de la distinction légale entre parcs dits de conservation et de récréation. Les parcs de conservation fournissent à de très nombreux observateurs québécois et à leurs invités outre-frontière, aussi bien français, allemands, suisses qu'américains ou ontariens, des espaces prévilégiés d'étude des communautés aviennes indigènes de nos régions. Force nous est malheureusement de constater la rareté croissante de ces habitats, de ces territoires naturels préservés et conservés, représentatifs des écosystèmes québécois, en périphérie des grands centres urbains.

Ceci nous oblige comme Québécois et comme Québécoises à exiger des autorités, dont les gouvernements et plus particulièrement le gouvernement provincial, qu'elles prennent les mesures nécessaires pour la protection permanente de ces territoires. La classification d'un territoire comme parc de conservation en vertu de la loi de 1977 garantit, selon nous, la permanence de cette protection. L'abolition de la distinction entre parc de conservation et parc de récréation réduirait, à notre avis, l'assurance d'une protection è long terme des territoires désignés comme parcs et nous ne pouvons donc souscrire à cette mesure.

Pour ce qui est des activités de plein air qui peuvent avoir lieu à l'intérieur des parcs, il faut tout d'abord comprendre - et nous sommes un des artisans de cette mutation actuelle du concept d'activités de plein air - que ce concept a fortement changé depuis les dernières années au Québec. Via les interventions de groupes, de confédérations comme le RONLQ, Regroupement des organismes nationaux de loisirs du Québec, qui s'est doté d'une table de plein air, il y a de cela six ans, le concept de plein air a changé et dépasse son simple objet récréatif pour intégrer maintenant des objectifs éducatifs, socioculturels, scientifiques. Nous sommes représentants aujourd'hui, je pense, du secteur scientifique du plein air. Nous soucrivions donc à l'intention du ministère de modifier l'appellation "activités récréatives de plein air" telle qu'elle s'est présentée

dans la loi de 1977 par, simplement, "activités de plein air". Mais, ce qu'il faut comprendre, c'est que la conception de plein air dont nous venons de parler reste l'apanage d'un petit nombre de pratiquants. Pour le grand public, plein air signifie encore majoritairement, et peut-être malheureusement, des activités de récréation sportive. (21 h 15)

Ce qui nous inquiète dans le projet de loi actuel c'est la possibilité qu'aura le ministère de jouer sur ce double entendement du terme "activités de plein air" si le projet de loi devait être adopté. Bien plus que de prétendre à l'incompatibilité entre la pratique d'activités de plein air et l'objectif de conservation des parcs nationaux appelons-les nationaux - nous demandons que soit consacrée la suprématie de cet objectif - l'objectif de conservation bien entendu.

La loi de 1977 limitait aux "activités extensives" les activités de plein air autorisées dans les parcs de conservation. La définition ambiguë donnée au terme "activités extensives" a créé certains problèmes, nous devons malheureusement le constater. Plutôt que d'éliminer ce terme, comme le propose le projet de loi» nous estimons souhaitable - voire nécessaire - de le mieux définir. Nous sommes de plus d'avis que l'objectif de conservation des parcs sera mieux servi si les limites au développement des activités de plein air sont établies dans un cadre légal plutôt que réglementaire ou politique. Nous demandons donc que soient contenus dans toute loi future sur les parcs les critères en fonction desquels une activité de plein air sera jugée compatible à l'objectif de conservation des parcs.

La question du zonage. La nécessité d'avoir un plan de zonage propre à chaque parc est apparue évidente à tous avant même l'adoption de la Loi sur les parcs de 1977. En 1970, le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche proposait un premier plan de zonage concernant le parc du Mont-Tremblant. L'abolition proposée de la distinction entre parc de conservation et parc de récréation ferait que tout le débat entourant la création d'un parc serait maintenant dirigé sur le plan de zonage qui y serait proposé. Plutôt que de faire porter les discussions sur "des choses concrètes", comme le disait M. Guy Chevrette alors ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le 18 septembre 1984, nous appréhendons que le projet de loi, s'il est adopté, aura l'effet inverse. En effet, le projet de loi ne prévoit aucun mécanisme de consultation avant l'adoption du plan du zonage définitif d'un parc. La consultation des intéressés, les utilisateurs ou leurs représentants, serait donc réduite à la discussion d'hypothèses de zonage. Au surcroît, aucune consultation ni même avis préalable ne sont prévus dans le cas de modifications, aussi importantes soient-elles, aux plans de zonage des parcs existants. Nous constatons donc que le projet de loi tel que présenté réduit substantiellement la possibilité pour les intéressés de s'exprimer sur les enjeux fondamentaux entourant la création et l'utilisation des parcs. Ceci ne nous semble pas propre à assurer la protection à long terme des territoires désignés.

En conclusion, l'ensemble de ces considérations nous forcent à conclure que, comparativement au projet de loi 13, la loi de 1977 offre des meilleures garanties de protection et de conservation permanente des territoires représentatifs des régions naturelles du Québec. Nous demandons donc le maintien de la Loi sur les parcs de 1977, bien que certaines modifications doivent y être apportées. En ce sens, nous nous limiterons à discuter de certaines modifications. Nous estimons surtout qu'il aurait été plus profitable aujourd'hui d'entreprendre une discussion sur les parcs régionaux, sur leurs fins et sur le cadre légal et réglementaire devant les régir.

C'est un peu la conclusion que je peux tirer. Il est évident que ce mémoire ne peut être considéré comme complet. Un grand nombre d'autres considérations auraient pu ou peut-être dû être abordées.. Je pense que nous avons développé une expertise précise sur un certain nombre de domaines qu'il aurait été intéressant de présenter aujourd'hui, mais force nous est de constater - et vous en conviendrez avec moi - qu'une commission parlementaire convoquée à neuf jours d'avis laisse très peu de temps aux intervenants pour se préparer. Si notre mémoire n'est pas très complet, c'est à cause de ce manque de temps. Merci.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, merci. Tout d'abord, je veux remercier l'Association québécoise des groupes d'ornithologues d'avoir accepté de présenter leur mémoire à cette commission et de participer à cette consultation.

J'aurais simplement deux questions portant sur leur mémoire. En page 5, quand vous parlez de la question du zonage des parcs, vous indiquez que l'abolition proposée de la distinction entre parcs de conservation et parcs de récréation fera que tout le débat entourant la création d'un parc sera dirigé sur le plan de zonage qui sera proposé. Vous semblez considérer cela comme peu souhaitable. Je vous avoue que cela m'étonne un peu parce que, quand on est vivement préoccupé par la conservation du milieu naturel, il me semble qu'on est forcément préoccupé par le zonage que l'on veut faire dans un parc, puisque c'est par le zonage

que l'on assure la protection de certains milieux jugés plus fragiles. Ils sont, à ce moment-là, classés comme zone de préservation, parfois même zone de préservation extrême quand le milieu est très fragile.

En matière de conservation du milieu naturel, cela m'apparaît - j'aimerais que vous me donniez quelques explications là-dessus - souhaitable que, plutôt que de porter sur les appellations "parc de conservation", "parc de récréation", le débat porte sur le zonage, compte tenu que le zonage est extrêmement important en matière de protection et de conservation. Ne trouvez-vous pas que ce serait souhaitable qu'à l'occasion d'audiences publiques et de consultation de la population une bonne partie du débat et, donc, un des enjeux importants de cette consultation, ce soit précisément le zonage? Cela m'étonne de voir une pareille phrase d'une association qui, à juste titre d'ailleurs, est fortement préoccupée de conservation.

M. Seutin: Tout d'abord je voudrais remercier le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, parce que c'est peut-être un manque dans notre mémoire que de ne pas reconnaître l'appui qu'a apporté à notre association le ministère du Loisir de la Chasse et de la Pêche. Nous sommes en fait subventionnés pour une partie de nos activités par le ministère dans le cadre de son programme de politiques de reconnaissance et de financement des organismes nationaux de loisir et je l'en remercie.

En guise de réponse à votre question, il est évident que le plan de zonage d'un parc revêt une importance, sinon fondamentale, du moins majeure en ce qui a trait à l'utilisation de ce parc. Il est évident qu'au sein d'un parc certaines aires plus vulnérables doivent être classées sous un statut différent, doivent être zonées différemment de certaines autres aires.

Le seul problème que nous voyons, c'est de restreindre le débat à cela. Selon moi, l'objectif que doit promouvoir le gouvernement est l'implication du citoyen dans la décision qui va être prise sur un territoire qui le préoccupe. En ce sens, en ayant dans l'idée de rester sur les questions fondamentales tout d'abord, pour après cela aller vers les cas particuliers, il nous faut, premièrement, déterminer en fonction de quel grand objectif on va utiliser un territoire, c'est-à-dire la conservation, et les objectifs secondaires, qu'ils soient socioculturels, éducatifs, scientifiques ou quoique ce soit; deuxièmement, aborder la question du zonage.

M. Brassard: Je suis d'accord avec vous pour dire que le zonage est un enjeu important, mais qu'il y a d'autres sujets qui doivent être soumis à la consultation, entre autres ce qu'on a l'intention de faire ou d'aménager dans le parc. Et c'est la raison pour laquelle dans le projet de loi 13 les intentions d'aménagement du ministère vont désormais être soumises à la consultation publique. Donc, la population et les organismes intéressés vont pouvoir se prononcer et donner leurs points de vue sur ce qu'on a l'intention de faire dans le parc. Je pense que c'est cela qui intéresse beaucoup les citoyens.

Ma deuxième question c'est sur le plein air ou la notion d'activité de plein air. Vous jugeriez utile ou même nécessaire que, dans la loi même, on établisse et on indique les critères en fonction desquels une activité de plein air sera jugée compatible à l'objectif de conservation des parcs. J'aimerais peut-être voir un peu concrètement ce que cela peut vouloir dire. Est-ce que vous avez en tête des exemples de ce genre de critères? Est-ce que vous jugez vraiment utile d'intégrer cela dans une loi? Cela ne devrait-il pas plutôt faire partie d'une politique des parcs qui, elle, est issue de la loi?

M. Seutin: Ce qui est tout d'abord important de noter c'est que la loi' de 1977 prévoyait des critères. Quand on parlait d'activité extensive et d'activité intensive, l'une était exclue des parcs de conservation alors que l'autre était privilégiée dans les parcs de récréation. C'était déjà un critère. Selon nous, il aurait peut-être été préférable d'aménager ce critère-là en fonction d'une définition plus précise mais tout en le conservant.

En écrivant le mémoire, nous n'entendions pas qu'à l'intérieur de la loi soient prévus 92 petits règlements. Je connais déjà les tracasseries que peuvent représenter les politiques pour justement passer à travers les 92 critères de représentativité demandés dans la politique de reconnaissance, par exemple, du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Évidemment, il est impensable d'inclure ça dans une loi. Mais certains grands critères, certains grands principes, selon nous, doivent être conservés dans la loi.

M. Brassard: Vous reconnaissez tout de même que l'expression "activité récréative extensive ou intensive" c'est aussi assez ambigu, c'est flou, c'est imprécis.

M. Seutin: C'est imprécis parce qu'il n'y a jamais eu, selon nous, de volonté de les mieux définir, de mieux démarquer ce qu'est une activité récréative extensive, une activité intensive, de faire une démarcation claire entre les deux. De là vient l'ambiguYté. L'ambiguïté, selon nous, vient

beaucoup plus de l'utilisation qui a été faite de ces termes et de certains cas historiques. Par exemple, pensons au parc du Mont-Tremblant, la présence de pentes de ski, donc un facteur purement historique, a créé toutes sortes de pépins quand est venue la volonté de classer ce parc comme parc non pas de récréation mais de conservation. On ne pouvait plus le classer comme parc de conservation parce que des activités intensives avaient lieu là. C'est vraiment par l'utilisation qui a été faite des termes et par un contexte historique que les termes eux-mêmes sont devenus flous, beaucoup plus que parce qu'ils étaient de façon inhérente des termes imprécis.

M. Brassard: Je vous remercie.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Charlesbourg.

M. Côté: M. le Président, à la page 3, dans la classification des parcs, il y a un petit paragraphe assez intéressant qu'on a soulevé précédemment avec un autre organisme: ''Force nous est malheureusement de constater la rareté croissante des territoires naturels, représentatifs des écosystèmes québécois, et ce surtout en périphérie des grands centres urbains".

Il ne faut pas se le cacher, non, il n'y a pas eu de pressions populaires - il y a bien du monde qui l'ont dit ici - pour amener des changements à la Loi sur les parcs. C'est une initiative, on le sait maintenant, du ministère. Est-ce que vous n'avez pas l'impression que cette initiative est due principalement à tout l'imbroglio autour du parc de Saint-Bruno et que, lorsqu'on parle d'endroit à conserver en priorité près des grands centres, Saint-Bruno est un exemple typique de ce que vous dénoncez-là?

M, Seutin: Je ne peux tout d'abord pas dire que je dénonce une situation. Je constate, "force nous est malheureusement de constater". C'est malheureux, c'est ça, c'est dû à une situation historique qui, je pense, est beaucoup plus due à une certaine conception chez les Québécois de la nature et de sa conservation qu'à une volonté administrative ou politique. Cela, c'est une première considération que je veux faire.

Maintenant, pour ce qui est du cas du futur parc - espérons-le, un jour - du Mont-Saint-Bruno, nous aimerions que ce parc, conformément aux voeux d'un grand nombre, soit classé comme parc de conservation, si la loi tient, évidemment. Je préférerais, aujourd'hui, ne pas faire le procès de tout le débat qui a eu lieu il y a deux ans et demi sur cette question.

M. Côté: Je vérifiais, tout à l'heure, la liste des intervenants et je pense que vous n'aviez pas, à l'époque, déposé de mémoire.

Il y la deuxième partie de ce paragraphe, où, finalement, vous préférez -si je comprends bien - qu'on s'en tienne à la loi actuelle en ce qui concerne "protection permanente", au lieu de "protéger", qu'on retrouve dans le texte de la loi 13, si je saisis bien.

M. Seutin: En gros, oui. Nous pensons que, malheureusement, une simple initiative sur un coup de tête - là, je n'accuse aucun fonctionnaire ou qui que soit - soit d'un individu soit d'une institution, peut occasionner de trop grands dommages pour qu'on puisse la permettre.

Le Président (M. Marquis): Cela va. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Je remercie les représentants de l'Association québécoise des groupes d'ornithologues qui se sont présentés pour nous expliquer leur mémoire et répondre aux questions des membres de la commission. Nous vous remercions, donc, et un bon retour chez vous.

M. Côté: M. le Président, avant de terminer, je voudrais faire une demande à la commission ou au ministre. Le secrétaire des commissions a reçu, au cours des dernières semaines, la demande de certaines personnes représentant des groupes afin d'être entendues à la commission et cela a été refusé parce que le mandat de l'Assemblée nationale était, à ce moment-là, spécifique à certains mémoires. J'ai rencontré une personne aujourd'hui qui m'a donné un mémoire et m'a demandé, si c'était possible de le déposer tout simplement et qu'il soit considéré comme ayant été reçu par la commission, compte tenu du fait que cette personne avait déjà déposé un mémoire - il portait le no 24 - au niveau des audiences sur le Mont-Saint-Bruno.

Je ne sais si on pourrait accepter de déposer le mémoire et qu'il soit considéré comme ayant été déposé à la commission?

M. Brassard: M. le Président, quant à moi, je n'ai pas d'objection. Je ne sais pas si mes collègues en ont?

M. Côté: Vous êtes bien généreux!

Le Président (M. Marquis): II s'agit de quel mémoire?

M. Côté: II s'agit du mémoire de M. Latulippe, au nom de l'Association libérale du comté de Chambly, qui était fait.

M. Perron: On aurait dû poser la question avant!

Mme Bacon: Le député de Duplessis

est encore naïf!

M. Côté: Je remercie le ministre et ses collègues de leur bonne compréhension.

Le Président (M. Marquis): Comme il s'agit d'une permission qui relève, d'après l'article 158 de notre règlement, du président de la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements et s'il y a consensus des deux côtés de cette table, ça me fait plaisir d'acquiescer à votre demande et de verser ce mémoire dans les archives de la commission.

Merci beaucoup pour votre présence et votre collaboration. Là-dessus, nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 21 h 35)

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