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Commission permanente de l'agriculture
et de la colonisation
Projet de loi no 24 Loi concernant la mise en
marché
des produits agricoles au Québec
Séance du jeudi 13 septembre 1973
(Dix heures dix minutes)
M. GIASSON (président de la commission permanente de
l'agriculture et de la colonisation): A l'ordre, messieurs!
Le rapporteur proposé à notre commission est M. Benjamin
Faucher. Est-ce que cela fait l'unanimité?
Je cède donc la parole au ministre de l'Agriculture.
Exposé général du
ministre
M. TOUPIN: M. le Président, la commission de l'agriculture se
réunit pour regarder les amendements que nous avons l'intention
d'apporter à la loi concernant la mise en marché des produits
agricoles au Québec.
Plusieurs organismes seront appelés à présenter des
mémoires. Nous en avons déjà reçu quelques-uns,
notamment du secteur des pâtes et papiers. D'autres se préparent
en ce qui concerne le Conseil d'alimentation au Québec et il est
probable que les producteurs vont aussi venir faire valoir leur point de vue.
J'avais pensé, M. le Président, à moins que les membres de
la commission ne soient pas tout à fait d'accord, que, pour la
première journée, la première séance, l'on fasse un
peu le tour des principaux amendements que nous avons apportés à
cette loi, que nous essayions ensemble de comprendre ces amendements pour que
nous soyons plus en mesure de comprendre les interventions que feront ceux qui
se présenteront devant la commission, soit sous forme de
déclarations verbales ou de déclarations écrites.
Alors, je vais vous donner, au départ, une idée de ce que
comportent les principaux amendements. Les membres de la commission des partis
de l'Opposition auront, sans aucun doute, aussi des choses à dire. Je
vois devant moi une déclaration de M. Clément Vincent,
député de Nicolet.
M. VINCENT: Elle n'est pas devant vous, elle n'est pas faite.
M. TOUPIN: Non, mais elle est écrite. Alors, je vais rectifier.
Je vois une déclaration pas faite devant moi, qui vient du
député de Nicolet et que l'on m'envoie quand même dans un
document.
M. VINCENT: Je vois une déclaration du ministre devant moi
également.
M. TOUPIN: Oui. Alors, je vais...
M. VINCENT: Mais je parlerai de sa déclaration seulement
après.
M. TOUPIN: Je vais vous donner ce que contient le document que nous
avons.
Je vais lire le document et, après, si certaines
précisions méritent d'être apportées, comme le
président de la régie, M. Benoît Lavigne, est avec moi,
ainsi que le vice-président, M. Gilles Ledoux, ils pourront vous donner
plus de précisions sur le contenu des principaux amendements.
M. DEMERS: M. le Président, est-ce que le ministre a copie de son
document? Non?
M. TOUPIN: Non, j'en ai seulement une copie. Il y aurait peut-être
avantage, cependant, à ce que tout le monde l'ait.
M. DEMERS: Bien, on verra après s'il y aurait eu avantage.
Après que vous l'aurez lu, on verra s'il est bon.
M. TOUPIN: Oui, mais moi, je veux vous dire...
M. DEMERS: D'après vous, il serait bon avant. C'est bien.
M. TOUPIN: ... que vous pouvez prendre une chance. Il va être bon.
Je peux vous affirmer cela.
Le projet de loi. Oui...
M. VINCENT: Avant que le ministre fasse sa déclaration, on
pourrait peut-être permettre aux fonctionnaires de faire les copies. Si
je comprends bien, nous siégeons aujourd'hui, seulement la
députation, seulement les membres de la commission...
M. TOUPIN: Les membres de la commission.
M. VINCENT: ...pour nous situer un peu dans les cadres. Nous allons
ajourner vers midi trente.
M. TOUPIN: Oui.
M. VINCENT: Nous allons décider aujourd'hui de la date de la
prochaine rencontre, et à la prochaine rencontre nous recevrons des
mémoires.
M. TOUPIN: C'est ça.
M. VINCENT: Est-ce qu'il y a lieu qu'on vérifie tout de suite
à quel moment on pourrait plus facilement rencontrer les autres
commissions en perspective?
M. TOUPIN: J'ai l'impression que la semaine prochaine...
M. VINCENT: Je pense que ça va être difficile la semaine
prochaine.
M. TOUPIN: Alors ça irait dans l'autre semaine.
M. VINCENT: Non, mais si on pouvait tenter d'établir...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): II n'est pas question de battre personne ou
de gagner personne, mais si jamais...
UNE VOIX: Même s'il y a une campagne électorale...
UNE VOIX: On réglera ça...
M. CROISETIERE: Vous allez vivre l'expérience.
UNE VOIX: Je vous demande un renseignement, je ne vous donne pas des
ordres.
M. VINCENT: Si on regarde la semaine prochaine, mardi et mercredi
prochain, ce sera la commission sur la Loi des assurances?
M. TOUPIN: Le 18 et le 19.
M. VINCENT: Le 27, ce sont les engagements financiers.
UNE VOIX: II n'y aurait pas d'objection à ce que les deux
siègent...
M. TOUPIN: Le mercredi c'est toujours difficile parce qu'on a le conseil
des ministres.
M. VINCENT: Non, c'est en octobre. M. LACROIX: II y a le 25 et le
26.
M. TOUPIN: Le 25 est un lundi, c'est ça? Un mardi. Le 25
septembre, d'accord.
UNE VOIX: Oui, c'est un mardi.
M. TOUPIN: II y a le jeudi 27 aussi où nous pourrions
peut-être...
M. LACROIX: On pourrait avoir une audition le 25 et le 27.
M. TOUPIN: Le 25 ou le 27. M. LACROIX: Et le 27.
M. TOUPIN: Le 25 et le 27, il y aura deux commissions
consécutives.
UNE VOIX: Le 27, ce sont les engagements financiers.
M. LACROIX: On a siégé simultanément le mois
dernier.
M. TOUPIN: Les 25 et 27 septembre.
M. VINCENT: II reste quand même ceci: si on prend le 25, on entend
des mémoires, et il arrive souvent que des mémoires ne sont pas
prêts.
On pourrait fixer le 25, et à cette date, on décidera si
on doit continuer le lendemain ou le surlendemain.
M. LACROIX: Si vous voulez, on va vérifier auprès du
bureau du leader et à la fin de la séance on vous le dira.
M. TOUPIN: Choisissons le 25, en tout cas, pour le moment.
LE PRESIDENT (M. Giasson): M. le ministre, nous vous
écoutons.
M. TOUPIN: Le projet de loi ci-joint est une révision et une
refonte de la Loi des marchés agricoles qui tient compte des
recommandations faites par le comité qui avait été
chargé de réviser la législation relative à la mise
en marché des produits agricoles au Québec. En plus d'un
réaménagement des dispositions actuelles de cette loi selon un
ordre plus logique, le projet contient des amendements importants qui devraient
donner aux producteurs un meilleur outil pour la mise en marché mieux
ordonnée de leurs produits... Oui?
M. DEMERS: ... Vous avez des collègues qui parlent plus fort que
vous.
M. TOUPIN: Bon. Je vais parler plus fort, M. le Président. Cela
va mieux ainsi?
M. DEMERS: C'est tellement discret qu'on entend parler de rien quand on
sort de là après.
UNE VOIX: Merci, M. le ministre.
M. TOUPIN: Alors, je disais que le projet contient des amendements
importants qui devraient donner aux producteurs un meilleur outil pour la mise
en marché mieux ordonnée de leurs produits, un mécanisme
plus souple d'application des plans conjoints et un meilleur contrôle par
l'organisme d'Etat, c'est-à-dire la Régie des marchés
agricoles du Québec, des activités des offices de producteurs.
Plusieurs des modifications suggérées permettraient à la
régie d'exercer une surveillance et même un contrôle sur les
organismes chargés d'appliquer les plans conjoints, ce qui est presque
inexistant dans la loi actuelle. Il serait également prévu de
façon expresse un mécanisme de coopération avec d'autres
juridictions (provinciales ou fédérale) pour permettre aux
offices de producteurs, à la régie et au ministre de conclure des
ententes à ce niveau pour tenter de régler les divers
problèmes de commerce interprovincial de certains produits agricoles.
Enfin, le financement de l'application de diverses modalités de vente
d'un produit visé par un plan est mieux établi et plus
souple.
La liste suivante donne succinctement les idées maîtresses
qui ont été retenues lors de la rédaction de ce projet.
Bien entendu, il ne s'agit pas d'une énumération complète
de tous les amendements.
Alors, le premier donne la définition du mot producteur. Elle n'a
pas été modifiée et a un sens aussi général
que dans la loi actuelle.
Quant à la définition de l'expression "produit agricole",
elle comprend toujours le bois, ce qui permet de réglementer les
conditions de mise en marché de ce produit situé sur les terrains
privés.
Troisièmement, le principe du statut particulier accordé
à la coopération est conservé. La loi reproduit donc la
déclaration de principe de l'article 2, accorde toujours la
priorité comme agence de vente à une coopérative qui
représenterait la majorité des producteurs concernés et la
coopérative continue à être considérée comme
un producteur pour les fins de la loi, sauf dans certains cas, s'il y a
péréquation.
Cela n'a pas changé tellement à ce niveau-là. Le
pourcentage requis des producteurs pour l'approbation d'un plan est
conservé, c'est-à-dire qu'il doit être approuvé par
au moins les deux tiers des votants. Au moins la moitié des producteurs
paraissant sur la liste doivent voter.
Le projet de loi prévoit plus de flexibilité pour
l'organisme qui est chargé de l'appliquer. En effet et cela est
important, je pense le quorum de la régie serait diminué
à trois régisseurs il est de quatre, actuellement
et la régie aurait la faculté de siéger
simultanément en deux divisions, en deux endroits différents
à la fois. Cependant, la présence de la majorité des
membres de la régie sera requise pour tout autre problème de
portée générale. Cette disposition peut faciliter à
la régie la pratique déjà adoptée de siéger
dans la région où le problème est soulevé et lui
permettrait de rendre ses décisions dans le plus bref délai.
Le comité consultatif général actuellement
prévu à la loi serait remplacé par la possibilité
de former divers comités d'étude ad hoc en fonction des
problèmes particuliers qui peuvent se présenter.
Déjà, d'ailleurs, la régie a commencé à
travailler de cette façon mais la loi ne le prévoit pas. La loi
prévoit la constitution d'un comité général, lequel
serait appelé à disparaître et à être
remplacé par des comités particuliers. La loi conserve le
principe de la formation d'un plan sous l'initiative des producteurs et selon
les mêmes modalités. Le projet de loi rend cependant obligatoire
la procédure d'avis public que la régie suit déjà
mais qui n'existait pas dans la loi auparavant afin d'assurer une plus grande
publicité des projets de plans conjoints soumis pour approbation.
De plus, la régie sera tenue de fournir une copie du projet
à toute personne intéressée qui en fait la demande. Cela
n'existait pas avant dans la loi et très souvent les producteurs se
plaignaient de ne pas être informés suffisamment du contenu des
plans conjoints avant qu'ils aient à se prononcer au niveau des votes.
Le projet précise également une procédure de
référendum plus articulée surtout quant aux
modalités d'établissement de publication et de
vérification de la liste des producteurs qui ont le droit de vote. Vous
vous rappelez la formule qu'on avait discutée dans le projet de loi 64
qui est maintenant devenue la Loi des producteurs agricoles. On avait convenu
que des listes soient exposées dans des endroits publics. La
régie n'était pas tenue de le faire mais, avec ces amendements,
elle devra le faire pour informer encore davantage les producteurs.
La loi prévoit déjà que l'assemblée
générale des producteurs peut remplacer l'Office des producteurs
chargé d'appliquer un plan conjoint par un syndicat professionnel. Le
projet permet la procédure inverse de telle sorte qu'un plan
administré par un syndicat pourrait être confié à un
office de producteurs créé lors d'une assemblée
générale de producteurs.
Au fond, ici, on simplifie seulement les mécanismes qui
permettaient à une assemblée générale de
producteurs de confier l'administration d'un plan à un syndicat de
producteurs ou vice versa.
Le projet de loi accorde un rôle plus important au
vérificateur des états financiers des offices. Il y est
prévu que le vérificateur de l'office est nommé par
l'assemblée générale des producteurs et qu'il doit faire
rapport à l'assemblée annuelle, ainsi qu'à la
régie. Il a accès en tout temps aux livres de l'office et peut
exiger des administrateurs les renseignements nécessaires pour remplir
son mandat. Enfin, la régie pourrait exiger le dépôt de
garanties des administrateurs des plans conjoints.
Dans l'ancienne loi ou dans la loi actuelle, évidemment, il n'est
pas prévu que le vérificateur soit nommé par
l'assemblée générale. C'était le conseil
d'administration qui le choisissait. Maintenant, c'est l'assemblée
générale qui choisira le vérificateur et la régie,
à ce chapitre, s'est donné des pouvoirs additionnels.
Il y a également des modifications au chapitre de
l'assemblée générale pour assurer la plus grande
participation possible des producteurs et leur permettre d'ajouter à
l'ordre du jour les sujets qui leur paraissent importants. Avant,
c'était complexe. Des producteurs en assemblée
générale voulaient qu'on mette à l'ordre du jour certains
articles et la loi ne le prévoyait pas. Maintenant, le projet le
prévoit et les producteurs auront plus de latitude pour faire valoir
leurs points de vue sur la commercialisation des produits au chapitre des plans
conjoints.
D'autre part, il est prévu qu'à défaut par l'office
de convoquer une assemblée générale annuelle la
régie peut le faire à sa place. Cela était un
problème qu'on rencontrait assez souvent et, avec cette disposition,
nous allons apporter un correctif. Tel qu'il est actuellement stipulé,
si le plan est administré par un syndicat professionnel ou une
coopérative, les administrateurs doivent être élus par les
membres de
cet organisme et non par l'assemblée générale des
producteurs visés par le plan conjoint. Donc, si un plan conjoint est
administré par une coopérative, ce sont les membres de la
coopérative qui auront à élire le conseil d'administration
de l'office et ce ne seront pas les producteurs visés par le plan
conjoint. Si, par exemple, une production comporte 10,000 producteurs, que le
plan est administré par une coopérative et que la
coopérative a seulement 5,000 membres, ce sont les 5,000 qui auront
à élire le conseil d'administration et non les 10,000
producteurs, parce que c'est la coopérative qui se trouve responsable de
l'application du plan conjoint et non, au fond, l'ensemble des producteurs
couverts par le plan.
Le projet comporte une nouvelle accréditation des associations de
personnes qui ont un intérêt général dans les
activités de la régie et des plans conjoints, telle une
association de consommateurs. Avant, lors des audiences publiques, la
régie pouvait recevoir des mémoires de la part des associations
de consommateurs, mais ces associations n'étaient pas
accréditées au même titre qu'un certain nombre d'autres
associations. Par exemple, le Conseil de l'industrie laitière
était accrédité; l'Association, je pense, des producteurs
de pâtes et papiers était accréditée.
Mais les consommateurs ne l'étaient pas, de telle sorte qu'ils
avaient plus de difficultés à faire valoir leur point de vue,
lors des audiences publiques à la régie. Maintenant, on
prévoit reconnaître une ou des associations de consommateurs qui,
au cours des audiences publiques, seront sur le même pied que quelque
autre groupe que ce soit, qui est relié soit directement ou
indirectement à la commercialisation des produits agricoles au
Québec.
Il conserve aux associations d'acheteurs et à d'autres personnes
engagées dans la mise en marché d'un produit
commercialisé, l'accréditation déjà prévue
dans la loi actuelle. C'est ce que je viens de vous expliquer.
Les modalités de conciliation et d'arbitrage ne sont pas
modifiées. On ajoute, cependant, que si une personne refuse
indûment de se présenter à la conciliation ou à
l'arbitrage, la régie pourra, après audience,
décréter par ordonnance les conditions de mise en marché
d'un produit visé. Alors, il arrive parfois que des conflits
interviennent entre les négociateurs, qui sont les producteurs, et des
associations d'acheteurs ne s'entendant pas. La loi prévoit un
mécanisme d'arbitrage, de conciliation. Si l'une ou l'autre des parties
ne veut pas se présenter à l'arbitrage ou à la
conciliation, la régie, alors, prendra la décision, après
audience, après avoir entendu les parties, de décréter par
ordonnance les conditions de mise en marché du produit visé.
Il est également prévu un mécanisme de
négociation entre divers offices de producteurs, mais sans arbitrage
obligatoire. La loi actuelle ne prévoit que très difficilement
les ententes entre offices de producteurs. Un exemple bien typique, qui est
connu de pas mal de personnes, c'est que lorsque nous négocions, avec
les autres provinces, des ententes sur le poulet, il est parfois
nécessaire que des ententes aient lieu au préalable entre les
offices de producteurs du Québec pour que nous puissions négocier
simultanément certains produits à l'étendue de la
province. Mais la loi actuelle ne le prévoit pas. Celle que nous
proposons prévoit que les offices de producteurs pourront faire des
ententes, signer des protocoles, etc. pour mieux coordonner la mise en
marché de l'ensemble des produits et non seulement d'un produit en
particulier.
La loi actuelle prévoit déjà la possibilité,
pour un office, de décréter le contingentement d'un produit
agricole, c'est-à-dire des quotas. Il s'avère cependant essentiel
de prévoir dans la loi que l'office puisse réglementer le
transfert des quotas. Cela commence à être un problème, je
pense, le transfert des contingents de lait, par exemple, le transfert des
contingents de poulet. Actuellement, ni les plans conjoints, ni les offices, ni
la régie n'ont des pouvoirs de réglementer comme on le voudrait.
Il y a un minimum de pouvoirs, bien sûr, mais réglementer comme on
le voudrait le transfert des quotas ainsi que les ajustements
périodiques qui doivent y être apportés et, en plus, la
création de banques de quotas pour distribution ultérieure...
On rencontre souvent des problèmes. Il y a des producteurs qui
n'utilisent pas entièrement leur quota, d'autres utilisent plus que leur
quota.
Celui qui dépasse le quota est pénalisé et celui
qui ne le produit pas reste assis dessus. Donc, en créant une banque de
quotas, on sera capable de régulariser ou, tout au moins, de distribuer
de façon plus équitable l'ensemble des quotas détenus par
les producteurs, dans une production donnée.
Le projet de loi précise et, dans certains cas, complète
les pouvoirs que les offices de producteurs peuvent rechercher dans le cadre
d'un plan conjoint. Ainsi, les pouvoirs de l'agence de vente sont mieux
définis, particulièrement quant à la possibilité
d'acheter et de vendre le produit visé et d'assurer le financement de
cette opération par voie de contribution spéciale à cette
fin ou d'emprunt.
Actuellement, les agences de vente ont des problèmes. Elles ont
beaucoup de difficulté à offrir, par exemple, en garantie, aux
banques ou aux caisses populaires, tout au moins aux institutions de
crédit, les comptes qu'elles ont à leur charge, parce que la loi
ne le prévoit pas. Donc, nous précisons le rôle d'une
agence de vente et nous allons assez loin, disant qu'une agence de vente peut
acheter et vendre le produit. Plutôt que de le recevoir en consignation,
elle pourra maintenant l'acheter et le vendre et, à cause de cette
opération, elle pourra, sans trop de problèmes, administrer
normalement son agence.
Egalement, même si la loi prévoit déjà la
fixation de prix par un office, le projet élargit la
possibilité, en permettant la délégation de l'exercice de
ce pouvoir à un comité spécial, qui pourrait être
interprofessionnel. Lorsqu'il s'agit de fixer les prix d'un produit, si on
touche seulement un secteur de ceux qui sont touchés par le plan
conjoint, cela crée parfois des problèmes.
Or les offices pourront, par extension de pouvoirs, créer des
comités interprofessionnels, comprenant les producteurs, comprenant, si
nécessaire, peut-être les consommateurs, comprenant, si
nécessaire, les autres qui sont impliqués, les acheteurs, etc.
Ils auraient pour fonction de fixer les prix d'un produit donné. Je
pense que ce serait beaucoup plus logique et cela éliminerait un certain
nombre de conflits que comporte la fixation des prix de façon
unilatérale, soit par les producteurs ou par les acheteurs. Mais
là on prévoit la création de comités
interprofessionnels.
Pour assurer une application efficace du plan et des règlements,
un nouveau chapitre sur le financement a été ajouté,
où l'on rend à la fois plus complet et plus souple ce facteur
important du financement des offices. Le coût de l'application d'un plan
conjoint est toujours défrayé par les producteurs, au moyen d'une
contribution fixée dans le plan. Il est cependant prévu, dans le
projet, que l'assemblée générale des producteurs pourrait
modifier le montant de cette contribution et même décréter
une perception spéciale additionnelle aux fins de mettre à
exécution l'une des dispositions spécifiques du plan ou d'un
règlement.
Avant cela, pour augmenter la participation économique des
producteurs, il fallait aller, je pense, au référendum. C'est
beaucoup plus facile en procédant de cette façon-là.
L'assemblée générale aura plus de pouvoirs, ce qui
accélérera l'activité des plans conjoints et rendra, par
conséquent, beaucoup plus facile le fonctionnement des différents
organismes dont se dotent les producteurs pour la mise en marché de
leurs produits.
Il est également prévu que l'office peut se constituer un
fonds de roulement adéquat. Actuellement, les offices de producteurs
n'ont pas le droit de créer des fonds de roulement pour un office; ils
ont seulement le droit de créer des caisses, qu'on pourrait appeler de
compensation, pour faire la péréquation. La
péréquation demeure mais actuellement, avec les amendements que
nous proposons, les offices de producteurs pourront créer des fonds de
roulement pour agir sur la stabilité des activités de leur
organisme. Cette nouvelle disposition permettrait ainsi de financer
l'application d'un règlement d'agence de vente par décision des
producteurs rendus en assemblée générale. On dit que cette
possibilité existe seulement dans le cas de la
péréquation, comme je vous le disais tantôt.
Pour apporter un élément de solution au problème
complexe de la mise en marché interprovinciale des produits agricoles,
on peut recourir, dans le cadre d'une loi nationale, à des ententes
entre offices de producteurs ainsi qu'avec des organismes gouvernementaux.
Le projet de loi prévoit un mécanisme spécifique
à cette fin pour permettre la mise en marché en
coopération avec d'autres juridictions. Les plans nationaux étant
établis à cette fin, les ententes nécessaires seraient
conclues par les groupes de producteurs directement intéressés
avec la participation et l'approbation gouvernementale.
Ce que nous prévoyons ici, en termes généraux,
c'est que les offices de producteurs provinciaux pourront s'entendre avec les
autres provinces, les autres offices provinciaux des autres provinces,
même avec le conseil de commercialisation nationale. Mais ces ententes ne
pourront entrer en vigueur avant qu'elles aient été
approuvées, soit par la régie, si le lieutenant-gouverneur en
conseil lui donne ce pouvoir, soit par le lieutenant-gouverneur en conseil. De
telle sorte qu'on éviterait des décisions prises par les
producteurs qui parfois, je ne dirai pas vont à l'encontre des
politiques, mais ne sont peut-être pas toujours en droite ligne avec les
politiques que le ministère met de l'avant pour développer
l'ensemble des productions. Actuellement, les offices peuvent signer des
ententes mais il n'est pas prévu qu'elles doivent être
approuvées par le lieutenant-gouverneur en conseil. La régie a
certains pouvoirs à ce chapitre, qu'elle peut exercer dès
maintenant. Là, nous avons précisé le rôle de chacun
et on saura où on ira si toutefois ces amendements sont
agréés par l'assemblée nationale.
En vertu d'autres modifications importantes à la loi, on donne
à la Régie des marchés agricoles du Québec des
pouvoirs plus étendus de contrôle et d'enquête sur
l'administration et l'application des plans conjoints. La régie avait
très peu de pouvoirs concernant certaines dispositions des
règlements préparées par les producteurs pour la mise en
marché des produits.
La régie s'est donné des pouvoirs lui permettant,
après probablement avoir entendu des groupes, d'amender un
règlement, lui permettant d'amender un plan conjoint, sans que ce soit
nécessaire que nous allions toujours consulter les producteurs, mais
elle le fera après audiences publiques, bien sûr. On a
rencontré là-dedans de sérieux problèmes et je
crois qu'il était nécessaire que nous donnions à la
régie plus de responsabilités dans ce cadre. L'exemple le plus
typique est celui du lait. Lorsqu'il s'agissait de négocier avec le
gouvernement fédéral ou avec la Commission canadienne du lait, il
fallait agir rapidement pour modifier les règlements et ajuster nos
programmes à ceux de la Commission canadienne du lait. Alors il fallait
consulter les producteurs, convoquer l'assemblée générale.
La régie pourra le faire maintenant seulement après convocation
d'audiences publiques.
Le texte actuel de la loi permet à la régie de suspendre
un plan, mais seulement à la demande des personnes
intéressées. De plus, la loi ne pourvoit pas au remplacement de
l'organisme suspendu pour assurer la continuation de l'application des
règlements dont on ne peut annuler les effets trop rapidement, telle une
péréquation, par exemple. Le projet de loi prévoit que la
régie pourrait suspendre un plan ou un règlement et qu'elle
pourrait confier à un organisme qu'elle désigne l'application des
dispositions de ce plan ou de ce règlement qui lui paraissent
essentielles de conserver.
Supposons, par exemple, qu'une agence de vente existe dans le poulet et
que l'on rencontre des problèmes d'application; les producteurs
décident de mettre fin à leur agence, mais comment? On n'avait
rien de prévu pour continuer l'administration de cette agence même
si ce n'était que pour deux ou trois mois. On le faisait, mais dans
l'illégalité. Cela s'est produit, je pense, en 1966 ou 1967, dans
le cas des producteurs du lait de Montréal; mais là, nous dotons
la régie de mécanismes précis à ce chapitre, lui
permettant d'apporter dans l'immédiat une solution précise aux
problèmes rencontrés.
La loi prévoit enfin un mécanisme de consultation
auprès des producteurs afin que la régie puisse vérifier
leur opinion sur des dispositions particulières d'un plan ou d'un
règlement. Il arrive très souvent que nous faisons voter un plan
conjoint par les producteurs. Le plan conjoint prévoit certaines
dispositions particulières permettant, par exemple, à un office
de créer une agence, ou de mettre de l'avant un programme de vente et
d'achat en commun d'un produit en particulier. Alors, ce qui se produisait, on
faisait une demande à la régie et celle-ci, avant d'approuver
cette demande de la part de l'office, faisait quelques contacts et se rendait
compte souvent que cela ne correspondait pas à l'ensemble des opinions
des agriculteurs ou des producteurs visés par le plan. Donc, à
cette date, il y aura un mécanisme qui lui permettra de faire des
sondages de façon permanente et ces sondages pourront avoir, non
seulement une certaine utilité, mais pourront donner à la
régie des indications assez claires quant aux désirs des
producteurs vis-à-vis de l'application d'un règlement de
péréquation ou d'un règlement de vente en commun. Le
problème, je pense, nous a démontré assez clairement les
difficultés rencontrées à ce chapitre. Dans le domaine du
bois à pâtes et papiers, on a également rencontré ce
problème. Donc, la régie se dote d'un mécanisme nouveau
qui lui permettra de faire des sondages.
Voilà, M. le Président, dans les grandes lignes, ce que
contiennent les principaux amendements que nous voulons apporter à la
Loi de mise en marché. C'est, jusqu'à un certain point, donner un
peu plus de pouvoir à la régie, clarifier certains articles,
donner plus de pouvoirs, dans certains cas, au plan conjoint relati- vement aux
agences de vente et éclaircir les mécanismes qui nous permettront
des ententes avec les autres provinces ou avec le gouvernement
fédéral dans le cas d'une commercialisation nationale.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Nicolet.
Exposé de M. Clément Vincent
M.VINCENT: M. le Président, il est bien entendu que nous
recherchons tous le meilleur système de mise en marché au
Québec, avec un ou des organismes des plus efficaces pour assurer,
premièrement, la mise sur pied de plans conjoints; deuxièmement,
l'arbitrage des différends entre des groupes d'intérêts
différents et également, en troisième lieu, pour assurer
une meilleure coordination entre tous ces intérêts qui souvent ne
sont pas les mêmes, mais qui aboutissent toujours par donner à
l'agriculteur du Québec la meilleure formule pour qu'il puisse vendre
son produit au meilleur prix, sans pour autant obliger le consommateur à
payer des prix exorbitants, comme nous le rencontrons dans le contexte actuel,
mais là n'est pas le but de la discussion.
Le projet de loi no 24, je suis content que ce soit un outil de travail
déposé devant les membres de la commission pour qu'ils puissent
le discuter, l'analyser et, par la suite, recevoir les mémoires de
différentes personnes qui viendront, elles, également faire des
suggestions qui pourraient devenir des amendements qui se tiendraient dans
cette nouvelle loi de mise en marché, qui remplace ou qui modifie
complètement la loi de mise en marché de 1963, laquelle
remplaçait la loi de 1956 qui établissait un office provincial
pour aider à la vente des produits agricoles.
Donc, en substance, nous avons devant nous un outil de travail. Le
ministre a donné les raisons pour lesquelles on apportait ces
changements. Est-ce que nous allons assez loin? Est-ce que ça rencontre
les désirs de tous? Est-ce qu'on ne devrait pas aller plus loin? C'est
ça que nous allons discuter au cours des prochains jours et des
prochaines semaines.
Maintenant, suite à une question que je lui posais lors de
l'étude des crédits du ministère de l'Agriculture en
commission parlementaire, le 15 mai 1973, le ministre avait décrit
l'objectif du projet de loi comme suit: "Notre objectif est très clair
là-dessus. On veut absolument que les députés, cette
fois-ci, participent à la commission parlementaire, très
ouvertement et le plus longuement possible à la discussion, parce qu'il
y a plusieurs amendements qu'on apporte. Il en a plusieurs qui sont d'ordre
mineur. On apporte certains éclaircissements, par exemple. Il y avait
certaines ambiguïtés, à un certain moment, dans certains
articles. Or, on éclaircit la question. On apporte des changements au
niveau des pou-
voirs de la régie, en ce qui a trait à la
réglementation etc."
En ce qui nous concerne, le ministre peut se réjouir. Nous allons
essayer de participer le plus complètement possible pour avoir une
législation qui se tient.
Pour ma part, j'ai lu le projet de loi très attentivement. J'ai
été un peu déçu de constater qu'il n'apportait
aucun changement fondamental à la structure actuelle qui régit la
mise en marché des produits agricoles au Québec. C'est
là-dessus que j'ai l'intention d'élaborer afin que nous puissions
prendre conscience, dans le contexte actuel, de ce qui peut être fait
demain, l'an prochain, dans deux ans ou dans trois ans. Tout de suite, je
ferais une suggestion: Vu que la commission ne siège que le 25
septembre. Je souhaiterais que les discussions d'aujourd'hui soient le plus
tôt possible rendues publiques par le Journal des Débats.
Je ne sais pas si ce sera possible, mais c'est seulement dans 15 jours,
afin que les organismes qui viendront se faire entendre puissent prendre le
temps de lire les observations des membres de la commission. Si c'était
possible, j'aimerais bien qu'on le fasse.
Certainement le projet de loi précise certains points obscurs de
la loi actuelle, par exemple la procédure à suivre en cas de
référendum, la publication d'un plan conjoint, le rôle et
les pouvoirs des vérificateurs et autres. Deuxièmement, le projet
de loi permet au gouvernement de contraindre la régie ou un office de
producteurs à conclure des ententes avec d'autres gouvernements et leurs
organismes, ce qui n'existait pas auparavant. En troisième lieu, il
donne plus de pouvoirs aux offices de producteurs (article 65 et suivants) et
modifie les pouvoirs de réglementation de la régie. Le projet de
loi apporte également des précisions quant à l'aspect
financier des plans conjoints.
M. le Président, vous me permettrez de vous dire que je cherche
en vain quelque chose de véritablement nouveau qui pourrait mettre un
terme au problème majeur qui entrave une meilleure mise en marché
des produits agricoles, à savoir le manque de coordination entre les
producteurs, le ministère, la Régie des marchés agricoles,
le fédéral, et ajoutez-en.
Le ministre me permettra de lui faire quelques suggestions à ce
sujet. Dans notre optique, le seul moyen efficace d'assurer une saine
coordination est de procéder immédiatement à la formation
de deux organismes distincts. Il s'agirait d'abord de modifier la structure
juridique de la Régie des marchés agricoles pour en faire un
véritable tribunal par toutes les lois sur la mise en marché de
produits agricoles. En tant que tribunal administratif, la régie
tiendrait des audiences publiques, comme elle le fait présentement,
aurait des pouvoirs d'enquête et arbitrerait les différends entre
les producteurs, ce qu'elle fait présentement: acheteurs,
transformateurs et consommateurs des produits agricoles. Ce serait son
rôle, à la régie, d'être ce véritable tribunal
pour toutes les lois sur la mise en marché des produits agricoles au
Québec. Je crois que de plus en plus un organisme quasi judiciaire comme
la régie aura et d'ailleurs le ministre l'a souligné tout
à l'heure, on permet même avec cette nouvelle loi, dans cet
outil de travail, de siéger à deux endroits, au même
moment, de diminuer son quorum de quatre à trois membres. C'est donc
dire que la Régie des marchés agricoles, au cours des prochains
mois et des prochaines années aura beaucoup plus de travail à
faire, comme tribunal, comme arbitre dans les différends qui existeront
et qui existent présentement. Donc, nous lui donnerions cette
responsabilité et ce serait son rôle d'être le
véritable tribunal.
Il ne faudrait pas s'arrêter là. Une réforme
complète de ce secteur exige aussi la création d'un second
organisme pour promouvoir sur tous les plans la commercialisation des produits
agricoles du Québec. En créant un office de commercialisation des
produits agricoles, le gouvernement pourrait vraiment agir au service des
agriculteurs et des consommateurs québécois. En pratique, cet
office veillerait premièrement à conseiller et surveiller
l'aspect financier des plans conjoints. On sait que les plans conjoints
comportent, sur le plan financier, des sommes assez considérables et
même très considérables.
Il faut de toute nécessité qu'il y ait des personnes, des
experts, qui pourraient travailler à l'intérieur d'un office de
commercialisation des produits agricoles, qui pourraient prêter leurs
services au plan conjoint, parce que les plans conjoints, qu'on le veuille ou
non, quant ils sont mis sur pied, ils sont formés de producteurs avec
les moyens de fortune qu'ils ont. Mais si, sur le plan financier de ces plans
conjoints, les producteurs pouvaient compter sur un organisme qui leur
prêterait les services d'experts qui coûtent quelques fois entre
$30,000 et $40,000 par année, ce sont des montants assez importants et
je crois que l'Office de commercialisation pourrait jouer là un
rôle des plus important...
Deuxièmement, cet office de commercialisation des produits
agricoles pourrait mettre sur pied, avec la profession agricole et comme tout
autre organisme, après approbation par la régie qui serait le
tribunal dans les matières agricoles, un ou des véhicules de mise
en marché pour les produits non couverts par un plan conjoint. Ici, je
vais donner un exemple. Supposons, hypo-thétiquement, que le plan
conjoint, préparé par les producteurs, en ce qui concerne le
porc, serait, une fois de plus, rejeté au référendum
prochain. Je ne fais pas de prévision, ce plan conjoint a
été rejeté au référendum en 1971, mais s'il
l'était encore une fois à l'automne 1973, cela veut dire que nous
attendrions à 1975 avant d'avoir un organisme de mise en marché
en ce qui concerne le porc au Québec. On attend déjà
depuis 1967-68-69-70-71 pour avoir un véhicule de mise en marché
en ce qui concerne le porc au Québec.
A ce moment-là, si le plan conjoint touchant
le porc, était de nouveau rejeté par
référendum je ne le souhaite pas, mais s'il
l'était, il l'a déjà été nous serions
encore dans une jungle en ce qui concerne ce domaine; tandis que si l'Office de
commercialisation des produits agricoles pouvait mettre sur pied, avec la
profession agricole et après approbation par la régie, un
véhicule de mise en marché en ce qui concerne le porc, nous
pourrions régler ce problème qui traîn depuis bien des
années au Québec. Je donne cela comme exemple. Il y aurait aussi
d'autres exemples à illustrer dans d'autres productions où il
sera presque impossible, pour ne pas dire absolument impossible, de mettre sur
pied un plan conjoint.
Si la profession, la Régie des marchés agricoles, voit que
dans un secteur donné de production au Québec, il est impossible
de faire voter un plan conjoint, ce serait le rôle de l'Office de
commercialisation des produits agricoles au Québec de travailler avec la
profession, d'aller devant la Régie des marchés agricoles faire
valoir, comme tout autre organisme, qu'il serait bon pour l'agriculture
québécoise, qu'il serait bon pour les producteurs du
Québec, pour une meilleure mise en marché de mettre sur pied ce
véhicule de mise en marché et là, après audience,
la Régie des marchés agricoles, ce tribunal administratif,
pourrait permettre à l'Office de commercialisation des produits
agricoles d'aller de l'avant avec une formule de mise en marché. Ce sont
des exemples que je donne.
M. TOUPIN: Est-ce que je pourrais poser une question?
M. VINCENT: Oui.
M. TOUPIN: Pour plus de précision, à ce chapitre, est-ce
qu'on pourrait, par exemple, appeler cette suggestion que vous nous faites, ces
organismes, des sortes de commissions mixtes ou des commissions de
producteurs...
M. VINCENT: Cela se pourrait, dans les détails, oui.
M. TOUPIN: ... qui mettraient en place de toutes pièces un plan
conjoint pour régulariser la mise en marché des produits?
M. VINCENT: Dans les détails, oui. M. TOUPIN: Là
où... M. VINCENT: Cela pourrait être. M. TOUPIN: D'accord.
M. VINCENT: Ce serait un office qui travaillerait complètement
aux côtés de la Régie des marchés agricoles ou du
tribunal agricole, mais cet office de commercialisation ce serait son
rôle, advenant que rien ne se produise, de surveiller l'aspect financier
des plans conjoints, et quand il n'y aurait pas de plan conjoint, de voir
à en mettre sur pied avec la profession, mais après approbation
par la régie.
Troisièmement, cet office de commercialisation des produits
agricoles devrait être responsable auprès des organismes
similaires au Canada pour la mise en marché de tout produit agricole et
exercer à cette fin les pouvoirs et accomplir les devoirs
résultant de toute loi d'une autre juridiction prévoyant une
telle responsabilité. Présentement, la Régie des
marchés agricoles a cette responsabilité, mais est-ce qu'elle a
le temps de l'exercer? Est-ce que c'est son rôle de le faire, en plus de
jouer son rôle d'arbitre, en plus d'avoir des audiences publiques? Moi,
je dis qu'à l'heure actuelle nous donnons trop de responsabilités
à la Régie des marchés agricoles, parce qu'elle a un
rôle encore plus important à accomplir, celui d'être un
tribunal agricole au Québec.
L'Office de commercialisation des produits agricoles pourrait
également, en quatrième lieu, intervenir pour assurer
l'approvisionnement en matières premières, par exemple en grains
de provende, pour les producteurs du Québec. Dieu sait que l'agriculture
au Québec est basée sur des facteurs sur lesquels nous n'avons
absolument aucun contrôle, des facteurs sur lesquels nous n'avons
absolument rien à dire, du moins en ce qui concerne l'approvisionnement
dans le contexte actuel. Il faudrait qu'un Office de commercialisation des
produits agricoles puisse, à la suite d'enquêtes, à la
suite de statistiques, établir ce qu'il en faut au Québec comme
volume pour nourrir dans une année donnée tout ce que nous devons
produire en fait de volailles, en fait de porcs, ce qu'il faut pour les fermes
laitières en fait d'alimentation, ce dont nous aurons besoin au cours
des prochaines années avec le programme d'autosuf-fisance pour ce qui
est des grains de provende produits au Québec. Il faudrait que cet
office de commercialisation puisse intervenir pour assurer un approvisionnement
en matières premières, parce que l'agriculture du Québec
est basée, en bonne partie, sur ces grains de provende que nous recevons
des autres provinces et que nous pouvons même, à l'occasion,
importer des autres pays.
Cinquièmement, cet office de commercialisation aurait comme
tâche d'informer les agriculteurs sur les tendances des marchés
des produits agricoles, faire la grande planification pour l'avenir, que, je
crois, ,1a Régie des marchés agricoles, avec tout le travail
qu'on l'oblige à faire, qu'on l'obligera à faire question
des plans conjoints ne pourra pas faire au cours des prochains mois, des
prochaines années.
Sixièmement, cet office de commercialisation des produits
agricoles pourrait avoir le rôle de surveiller l'inspection et la
classification des produits agricoles au Québec.
M. le Président, le 8 août dernier, le ministre disait, au
cours d'une interview: "Toute la question de la commercialisation est à
l'origine
de la hausse des prix". Cela a paru dans le Nouvelliste, à la
suite d'une entrevue qu'il avait avec un journaliste. Conscients de cette
réalité fondamentale, nous osons croire que le ministre
accueillera favorablement nos recommandations en vue d'améliorer son
projet de loi et de doter le Québec des instruments qui lui manquent
pour mieux coordonner la mise en marché de ces produits agricoles et,
par le fait même, empêcher une hausse abusive des prix.
Avant de passer la parole à un autre collègue, je veux
signaler au ministre notre inquiétude à l'égard d'un
aspect du projet de loi, qui concerne particulièrement l'industrie du
bois. Comme son prédécesseur, le projet de loi 24
considère les produits de la forêt comme des produits agricoles.
Nous savons que, de son côté, le ministre des Terres et
Forêts procède actuellement à une restructuration
complète de son ministère, qu'il est en train d'élaborer
une politique globale qui touchera tous les produits forestiers. L'autre jour,
le 4 septembre 1973, il annonçait qu'il déposerait dès
l'automne un projet de loi en vue de créer un crédit forestier
semblable au crédit agricole. Le ministre a déjà
parlé également de la possibilité d'une régie pour
la mise en marché des produits forestiers.
Nous aimerions savoir, d'abord, si le ministre de l'Agriculture est au
courant des projets de loi de son confrère et, le cas
échéant, s'il en a tenu compte lors de l'élaboration de ce
projet de loi. Vu le nombre d'associations reliées directement à
l'industrie du bois, qui ont soumis des mémoires devant cette
commission, nous sommes d'avis que le ministre de l'Agriculture doit nous
informer immédiatement ou, au début de la prochaine
séance, des intentions du gouvernement à l'égard des
produits forestiers. Nous savons que le ministère des Terres et
Forêts s'apprête à une réforme globale de ce secteur
dans un proche avenir. Y aura-t-il effectivement une régie pour la mise
en marché des produits forestiers? Est-il utile, pour nous,
d'étudier à ce moment-ci un projet de loi qui s'applique à
la fois aux produits forestiers et aux produits agricoles proprement dits?
Je laisse au ministre le soin de répondre à ces questions
car, je dois l'avouer, à la commission des richesses naturelles, nous
n'avons pas reçu du ministre des Terres et Forêts la certitude que
les produits forestiers demeureraient dans la Loi des marchés agricoles.
Il nous a dit que peut-être il aurait une régie. Je pense que ce
serait le moment, peut-être pas aujourd'hui, mais à la prochaine
occasion, de donner l'intention du gouvernement du Québec en ce qui
concerne ce secteur de l'économie qu'on peut dire agricole au
Québec.
Voilà, M. le Président, les quelques observations que
j'avais à faire. Je répète ce que j'ai dit au
début: C'est un outil de travail que nous avons devant nous. Cet outil
de travail peut être amélioré considérablement. Pour
l'améliorer c'est notre point de vue, en ce qui nous concerne de
ce côté-ci il serait temps, je crois, avec les
mémoires que nous entendrons, que nous regardions la possibilité
de créer deux organismes distincts j'y reviens et j'y reviendrai
qui joueraient un rôle très important pour l'avenir de
l'agriculture au Québec. Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de
Lotbinière.
Exposé de M. Jean-Louis Béland
M. BELAND: M. le Président, tout d'abord, ce matin, à mon
arrivée, étant donné que nous ne connaissions pas quelle
sorte de travail nous aurions à faire ici, je croyais, il va sans dire,
compte tenu des autres commissions parlementaires passées, que nous
devions entendre des organismes, puisque nous avions déjà eu,
tout au moins pour ce qui me concerne, au moins trois mémoires de gens
qui désirent se faire entendre concernant le projet de loi no 24 qui
nous est présenté, Loi des marchés agricoles.
Or, compte tenu de cela, comme principe de base, je m'étais
toujours dit, étant donné les quelques expériences que
j'ai vécues dans ce domaine dans le passé, qu'il serait
préférable, d'abord, de procéder à l'inventaire des
lacunes qui pouvaient exister dans la loi première, non pas parce que ce
sont les membres de la régie qui ont créé ces lacunes; au
contraire, ils ont essayé, dans maints cas, de contourner des lacunes
qui existaient dans la loi. Par contre, il y a eu différents
commentaires qui ont été expédiés par lettres
à la régie; d'autres ont été expédiés
au ministre de l'Agriculture, entre autres par les offices de producteurs de
diverses natures, lesquels ont certainement été le
préambule du travail premier en vue de procéder à une
refonte de cette loi.
Par contre, je constate également que, dans le projet de loi qui
nous est présenté, il existe encore de fortes lacunes. On a
touché à beaucoup d'éléments. On a apporté
des corrections, je dirais, plus que mineures. Je n'emploierai pas le mot
majeur parce que ce serait peut-être trop avancer. Au moment où
nous discutons, en ce mois de septembre 1973, tout change tellement vite en
agriculture et des besoins nouveaux se présentent.
Compte tenu également de l'acheminement vers les villes, de plus
en plus flagrant, des agriculteurs, il va sans dire que les causes
premières, les indices premiers qui existent concrètement doivent
faire en sorte que nous devons nous éveiller pour innover dans ce
domaine, de façon à parer à l'avenir.
D'ailleurs, le ministre lui-même en a dit quelques mots
tantôt. Il parle de banques de quotas, de la possibilité, avec le
mécanisme de la loi nouvelle, que l'on puisse procéder à
des banques de quotas, pour aider justement beaucoup d'agriculteurs dans ce
domaine. Il parle également d'autres mécanismes qui sont
ajoutés ou améliorés. Oui, quant à cela, d'accord.
Par
contre, je pense qu'il faudrait aller plus loin, beaucoup plus loin.
Tantôt, l'honorable député de Nicolet a parlé
également du fait qu'il faudrait trouver un mécanisme pour faire
en sorte que nous puissions approvisionner, ou voir à ce que nos
agriculteurs, pour le surplus de blé, enfin, de céréales
dont ils ont besoin, puissent s'approvisionner facilement par la
création d'un office de commercialisation typiquement du Québec,
pour faire en sorte que nos agriculteurs, directement ou indirectement,
puissent s'approvisionner à des coûts logiques afin que les
agriculteurs puissent couper leur coût de production de ce
côté.
Seulement, justement, on ne va pas allez loin avec les mécanismes
présents. Je préfère, à ce moment-ci, attendre les
mémoires qu'apporteront certainement les organismes, ou les
associations, l'UPA et la Coopérative fédérée entre
autres. Il y aura certainement, dans ces mémoires, quelque chose de
nouveau encore, qui sera davantage à point, pour corriger et
peut-être aider le ministre à innover suffisamment de façon
que nous puissions avoir au moins la lueur d'espoir qu'au Québec
l'agriculture pourra redevenir la ressource première pour alimenter
davantage notre population.
On sait parfaitement qu'en ce moment, dans un domaine particulier
je ne donnerai que cet exemple qui ressort des statistiques provinciales, je ne
vais pas le chercher ailleurs au Québec, alors que nous
possédons les sols, alors que nous possédons d'immenses prairies
capables de produire des animaux de boucherie en quantités plus que
suffisantes, nous ne produisons que 22.5 p.c. de ce que nous consommons au
Québec.
Je n'irais pas jusqu'à dire que c'est là un scandale, mais
par contre, cela s'en rapproche certainement. C'est une lacune très
forte. Je n'ai cité que cet exemple. Il y en a beaucoup d'autres.
M. DEMERS: Les moutons.
M. BELAND: Merci, honorable député de Saint-Maurice.
M. DEMERS: On importe 75 p.c. des moutons.
M. BELAND: C'est vrai. Vous déclarez une
vérité.
M. DEMERS: Ce n'est pas une lapalissade.
M. TOUPIN: Le député de Saint-Maurice, plutôt que
d'avoir deux chevaux, serait mieux d'avoir 15 moutons.
M. DEMERS: Oui, et de les faire hiverner par le ministère de
l'Agriculture.
M. TOUPIN : Ah cela, on va le faire, par exemple.
M. DEMERS: Comme les chevaux du Dr Dionne.
M. TOUPIN: Cela, on va le faire!
M. DEMERS: II les a mis dans la crèche du Parti libéral,
l'hiver passé.
M. BELAND: Apparemment, il y a beaucoup de gens, justement, qui...
M. TOUPIN: Cela, on va le faire. Mais j'ai offert au
député de Saint-Maurice d'amener les siens et il ne veut pas. Il
ne veut pas amener les siens.
M. DEMERS: ......... manger du foin et la caisse libérale par les
chevaux du Dr Dionne, l'hiver passé. Et ils sont encore là! Vous
avez demandé $1 au docteur pour garder ses chevaux. C'est le scandale du
siècle! Vous voulez en parler, on va en parler.
M. CROISETIERE: Cela coûterait combien pour 75 moutons?
M. DEMERS: Pour 75 moutons, cela coûterait...
M. TOUPIN: $75.
M. DEMERS: Non, $0.075.
M. TOUPIN : $1 par année.
M. DEMERS: $0.075. C'est $1 pour un cheval.
M. BELAND: M. le Président, si on peut revenir à toucher
le contexte dans lequel nous travaillons, il y a cette possibilité,
quand même, au Québec, de procéder à l'agencement de
banques de produits agricoles. Il va sans dire que cela en fait rire
plusieurs.
Mais, il reste un fait. Ces choses que nous suggérons, c'est
curieux que cela en fasse rire plusieurs mais, en d'autres mots, on vise
à peu près les mêmes buts depuis quelque temps. C'est
très surprenant. Vous savez, M. le Président, il y aurait
tellement de choses que l'on pourrait dire ce matin. Il y en a une entre autres
qui a été abordée très légèrement
tout à l'heure concernant les produits forestiers, qui font quand
même partie intégralement du contexte agricole par excellence,
tellement ce secteur est important chez les agriculteurs au Québec. M.
le Président, il va sans dire que quant à la lacune, par exemple,
qui existe au niveau du crédit agricole nous avions
suggéré à l'honorable ministre qu'il y ait une section
à part. C'est-à-dire une section qui serait
désignée à part mais qui ferait partie de l'ensemble du
crédit agricole, enfin ça pourrait être crédit
agricole et forestier. Pour nos fermiers, que ce soit nos jeunes et moins
jeunes qui veulent se prévaloir d'un tel système, ça
manque présentement et ça empê-
che dans bien des cas l'établissement de jeunes en agriculture.
Le ministre déclare, et je l'ai entendu encore dernièrement dans
une de ses envolées fracassantes habituelles, qu'il essaie...
M. DEMERS: Le capitaine Fracasse.
M. BELAND: ... le plus possible de faire en sorte que nos jeunes
s'installent en agriculture. C'est bien beau à dire mais dans les faits,
au moins, essayons de créer le mécanisme nécessaire pour
faciliter l'établissement de jeunes. Ce n'est pas drôle en 1973
pour le jeune qui ne possède à peu près rien,
peut-être $1,000 ou $2,000 et il veut le lendemain matin avoir l'occasion
d'avoir sa quote-part, de s'établir en agriculture et Dieu sait si
justement, pour pouvoir aborder ce domaine, ça prendrait $50,000
à ce jeune et il ne possède pas les premiers deniers.
M. DEMERS: M. le Président, est-ce que je pourrais faire une
petite remarque, s'il vous plaît?
LE PRESIDENT (M. Giasson): Certainement, M. le député de
Saint-Maurice.
M. DEMERS: Je me demande que vient faire l'esprit de la loi 24 dans la
rétrospective ou les prévisions agricoles du député
de Lotbinière. Je me demande si ça se tient, on peut parler de
n'importe quoi.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Comme le député de
Saint-Maurice, j'ai écouté attentivement le député
de Lotbinière. J'étais à me poser des questions à
savoir s'il respectait la pertinence du débat. Tout de même, dans
les commentaires du ministre comme ceux formulés par le
député de Nicolet, il y avait une liaison entre le crédit
agricole et le crédit forestier. Le député de Nicolet
avait posé des questions à savoir si ce serait dans l'avenir le
ministère des Terres et Forêts qui aurait son propre crédit
forestier et son office de consultation.
M. DEMERS: On pouvait relier ça à la mise en
marché.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Nous allons écouter encore le
député de Lotbinière et, s'il faut l'interrompre, on le
fera.
M. DEMERS: C'est très intéressant, moi, ça ne me
fait rien.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est une décision sage.
M. BELAND: M. le Président, je vous remercie pour votre sage
décision. Etant donné l'éventail des
éléments qui entrent en ligne de compte en agriculture pour
procéder à une refonte complète d'une loi de ce genre,
nous devons en tenir compte. Il y a tellement d'éléments qu'il va
sans dire que nous pourrions nous éloigner très largement du
domaine bien spécifique, changement à la Loi des marchés
agricoles, c'est entendu. J'ai vécu des expériences dans ce
domaine, dans des négociations, des séances d'arbitrage,
Régie des marchés agricoles, tout. Il y a le travail qu'ont eu
à exécuter les membres de la Régie des marchés
agricoles, le manque, les lacunes qui existaient à ce moment-là.
D'autre part, il y a la nécessité pour les agriculteurs d'avoir
le mécanisme suffisant afin de pouvoir se défendre convenablement
devant des requins, dans certains cas, qui ont existé et qui ne sont pas
peut-être complètement éliminés.
Or, M. le Président, je n'irai pas plus loin ce matin. J'avais un
texte préparé à cet effet mais je désirais entendre
les commentaires. C'est bien beau préparer un mémoire de la part
d'associations, de groupements, pour revendiquer soi-disant leurs droits. Par
contre, il y a des commentaires qui s'ajoutent qu'ils n'ont certainement pas
inclus là.
J'aurais eu des questions à poser, parce que sur les trois que
j'ai présentement apparemment, on a dit tantôt qu'il y en
avait maintenant cinq de rendus, enfin, au bureau du ministre, je ne sais trop
je vais avoir de drôles de questions à poser à ces
gens. On a besoin d'éclaircissements.
Dans les autres qui sont arrivés et qui, probablement, viendront
également à l'avenir, il y aura certainement des choses
très intéressantes également dont nous devons tenir compte
si nous voulons réellement être à la page dans ce domaine
et faire en sorte que les membres de la régie puissent avoir l'outil
dont ils ont réellement besoin, avec tout le mécanisme
nécessaire pour donner justice à ceux qui ont été
trop longtemps dans le passé laissés de côté et qui
n'avaient pas la possibilité de faire entendre leur voix. Cet outil que
nous avons eu depuis 1963 ne fut qu'un outil premier. Il est nécessaire
de l'améliorer. Il a été même quelque peu
amélioré avec le temps. Par contre, il serait temps, non pas
d'apporter des changements mineurs, mais d'apporter des changements majeurs,
c'est-à-dire d'aller en profondeur et de regarder d'avance quelles
pourront être les répercussions vis-à-vis de la classe
agricole et vis-à-vis, en même temps, de façon indirecte,
des prix que devront payer nos consommateurs au Québec, compte tenu des
possibilités d'approvisionnement des divers produits.
Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Sainte-Marie.
Exposé de M. Charles Tremblay
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, mes commentaires
seront très courts. Naturellement, on veut étudier un projet de
loi
qui est très technique. Le ministre nous a donné des
explications, surtout sur le mécanisme, sur le fonctionnement de la
loi.
Cependant, au début, je voudrais ajouter que je suis d'accord
avec une observation qu'a faite le député de Nicolet, lorsqu'il
disait qu'il faut absolument que les députés, cette fois-ci,
participent à la commission parlementaire très ouvertement et le
plus longuement possible à la discussion parce qu'il y a plusieurs
amendements apportés à cette loi. Le député de
Nicolet a dit qu'il y en avait plusieurs; nous aussi.
Alors, je me demande ce que cette nouvelle loi, qui est attendue depuis
longtemps, va apporter aux cultivateurs. Est-ce qu'elle va donner plus
d'expansion au principe des plans conjoints, aux coopératives? Est-ce
que l'intégration agricole va se faire par les agriculteurs, au lieu de
se faire par Canada Packers ou n'importe? On connaît tous les
problèmes.
Je remarque, ici, une déclaration que le ministre de
l'Agriculture a faite le 16 mai 1973, qui est au journal des Débats.
D'ailleurs, je l'avais prise dans le journal des Débats et même
dans un mémoire de la commission permanente de l'Association des
manufacturiers de bois de sciage. Le ministre de l'Agriculture lui-même
disait: "Pour les plans conjoints, jusqu'à maintenant, la théorie
veut que nous nous limitions au secteur primaire, que nous cherchions, d'abord
et avant tout, à ajuster l'offre à la demande, à agir sur
la qualité du produit, à établir des mécanismes de
négociation avec les autres provinces. C'est surtout, je pense, la
philosophie qui nous anime actuellement au niveau des plans conjoints".
Ce qui semble un peu paradoxal, contradictoire avec ce que disait le
ministre tantôt, c'est cette déclaration qu'il faisait le 16 mai,
lorsqu'il dit que les plans conjoints doivent rester dans le secteur
primaire.
C'est une déclaration que vous aviez faite. Je me pose des
questions devant ce que vous disiez tantôt, parce qu'il faudrait que
cette loi permette au cultivateur d'étendre son activité dans les
secteurs primaire, secondaire et tertiaire, dans la transformation des produits
et qu'on lui donne des pouvoirs de transformer des produits, qu'on lui donne
les pouvoirs aussi de vente, soit par le système coopératif ou
par l'institution de plans conjoints.
Je me demande si cette nouvelle loi va être amendée et va
avoir pour résultat de permettre au cultivateur d'intégrer
l'agriculture et que l'intégration se fasse par le cultivateur et non
pas par les compagnies comme Canada Packers ou autre qu'on pourrait nommer.
Maintenant, nous allons l'étudier et, en cours de route, à chaque
article nous proposerons les amendements nécessaires afin que la loi
atteigne son but. Mais il restera toujours des doutes sur l'efficacité
d'une telle loi le ministre en a eu l'exemple avec la guerre des oeufs
et des poulets tant que le Québec ne contrôlera pas ses
frontières.
La mise en marché ordonnée des produits de l'agriculture
québécoise risquera toujours d'être
désordonnée par le dumping de l'extérieur. Et le ministre
est au courant actuellement de ce qui se passe avec le dumping de
l'extérieur sur le marché québécois. Le ministre
est pas mal au courant de ça. Il a eu des problèmes avec les
oeufs, les poulets, et tout ça. Je me demande si cette loi va être
assez parfaite. Elle ne sera pas absolument parfaite, c'est impossible, mais
elle sera au moins assez efficace pour permettre à l'agriculteur, une
fois pour toutes, d'étendre ses pouvoirs dans le domaine primaire et
tertiaire. Ce n'est pas ce que le ministre disait ici, le 16 mai 1973.
J'aimerais que le ministre nous donne des explications là-dessus. Est-ce
que vous voulez que les plans conjoints s'étendent plus loin que le
domaine primaire? Si vous ne voulez pas, ça ne sert à rien de
changer la loi.
M. TOUPIN: On vous répondra à ça tantôt.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Est-ce que le député de
Sainte-Marie a terminé son intervention?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Sainte-Marie.
M. DEMERS: Je voudrais poser une question.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'avais terminé par une question au
ministre.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Je crois que le ministre, d'ailleurs, va user
d'un droit de réplique pour commenter les attitudes ou les visions de
chacun des intervenants.
M. DEMERS: Vous avez, M. le député de Sainte-Marie,
parlé de produits primaires, secondaires et tertiaires. Est-ce que vous
avez une idée sur ce que seront les produits primaires en agriculture,
les produits secondaires et les produits tertiaires? C'est quoi à peu
près, au point de vue pratique, mais on parle...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je parle d'industrie. Ecoutez, c'est une
industrie. Quand on parle des plans conjoints, ici, je cite une
déclaration du ministre où il dit que ça doit rester dans
le domaine primaire. Vous savez ce que c'est que le domaine secondaire, la
transformation des produits ou l'industrie tertiaire, c'est-à-dire la
distribution, la vente et le contrôle des prix, enfin tout.
Maintenant, si vous voulez que je vous donne la liste, la nomenclature
de tout ça, je peux vous la donner. Si le ministre me le permet, je vais
vous apporter ça cet après-midi. Cela va être à peu
près épais comme un catalogue, chez Eaton.
M. DEMERS: Non, je parle, moi... Un exemple d'un produit primaire. Le
ministre avait fait sa déclaration qu'il voulait limiter
l'étendue et la précision du projet de loi aux produits primaires
et vous voulez extentionner le projet de loi aux produits secondaires et
tertiaires.
J'aurais aimé que vous me citiez quelques exemples de produits
secondaire et tertiaires.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Quand je parlais de la déclaration du
ministre...
M. DEMERS: II y a des patates là-dedans, il y a des chips.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je parle des plans conjoints. Jusqu'à
maintenant, la théorie, c'est le gel. Je cite le ministre. Il dit: La
théorie...
M. DEMERS: C'est parce que, quand on fait une suggestion en
commission...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voulez-vous me laisser finir, s'il vous
plaît? La théorie veut que nous nous limitions au secteur primaire
pour les plans conjoints. Je demande tout simplement au ministre: Est-ce qu'il
veut encore se limiter seulement au secteur primaire? Il y a le secteur
secondaire et il y a le secteur tertiaire aussi, c'est-à-dire que le
cultivateur peut s'organiser pour transformer ses produits, en faire la mise en
marché et en faire même la distribution par l'entremise de
coopératives ou n'importe. Vous savez ce à quoi je fais allusion.
Est-ce que le ministre peut me répondre là-dessus? Inutile que je
vous donne des exemples d'industries primaires, secondaires et tertiaires; vous
en connaissez.
M. TOUPIN: M. le Président, tout ce que j'aimerais ajouter aux
questions qui ont été posées...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est seulement pour nous emmerder avec des
choses qui n'ont pas de sens.
M. DEMERS : Est-ce parlementaire, ça, M. le Président?
UNE VOIX: L'engrais? Certainement.
M. DEMERS: En agriculture, mais ce n'est pas parlementaire.
LE PRESIDENT (M. Giasson): A l'intérieur d'une commission de
l'agriculture, on peut accepter le terme.
M. DEMERS : Vous acceptez le terme.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela ne faisait que nous emmerder; c'est cela
que j'ai dit.
M. DEMERS: On pose des questions...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): La campagne électorale n'est pas
commencée encore.
M. DEMERS: Ce n'est pas une campagne électorale. Quand on parle
de quelque chose, on peut toujours définir les termes qu'on emploie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Tout le monde sait ce que cela veut
dire.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Messieurs, si vous le permettez, nous allons
entendre le ministre de l'Agriculture.
M. TOUPIN: Je voudrais répondre d'abord aux questions qui ont
été posées pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté
lorsque nous rencontrerons les groupes, pour que nous sachions vraiment ce que
contiennent les amendements à la loi et que nous soyons capables de
faire les bons parallèles.
Le député de Lotbinière disait tantôt qu'il
ne savait pas, ce matin, ce qui l'attendait et que, maintenant qu'il est
arrivé, il ne savait pas trop quoi faire. Mais il reste...
M. BELAND: Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. TOUPIN: ... un fait, c'est que le projet de loi est dans les mains
des députés déjà depuis plusieurs semaines, pour ne
pas dire plus d'un mois, et il m'est apparu que c'était
nécessaire...
M. BELAND: M. le Président, question de privilège.
M. TOUPIN : M. le Président, je ne pense pas que je mette en
cause le privilège d'un député. J'essaie simplement
d'expliquer une affirmation qu'il a faite.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Si j'ai bien compris le député
de Lotbinière, il semble que c'est un point de rectification à
l'endroit du ministre.
M. BELAND: Justement. Je pense que l'honorable ministre m'a mal compris.
Ce à quoi j'ai fait allusion, c'est que cela fait plusieurs semaines que
nous avons ce projet de loi. Or, depuis le dépôt de ce projet de
loi, il y a du nouveau qui s'ajoute, compte tenu des déclarations
fédérales, compte tenu de ce qui se passe dans les autres
provinces au niveau de l'agriculture. A ce moment-là, je disais ceci,
à peu près: que ce serait nécessaire d'entendre, d'une
part, les producteurs ou enfin toute autre association ou groupement qui font
partie du contexte de la mise en marché des produits agricoles.
Après quoi, le ministre serait encore mieux informé sur la
réalité du moment qu'il ne pouvait l'être à ce
moment-là, parce que cela fait déjà quelques mois.
M. TOUPIN: C'est ce que je voulais dire, M. le Président, et je
ne veux pas là-dessus blesser
le député de Lotbinière d'aucune façon. Je
voulais simplement lui rappeler que le rôle d'un député
à la commission parlementaire, à mon point de vue, c'est
d'apporter des précisions à caractère original sur les
amendements que nous proposons dans le projet de loi ou sur un projet de loi
que nous présentons pour tenter de l'améliorer. Or, c'est la
raison qui nous a amenés à déposer, d'abord, le projet de
loi en première lecture, à laisser aux députés un
mois, un mois et demi pour qu'il puissent prendre le temps de l'étudier
et de formuler des propositions concrètes.
C'est la raison qui nous a amenés à procéder de
cette façon-là. Je ne vois pas ce que vient faire
là-dedans la déclaration qu'une fois rendu ici, on ne sait pas
quoi faire. Si on veut être en mesure, vraiment, d'apprécier ce
que vont nous donner les organismes qui vont faire des représentations,
il faut d'abord être en mesure d'apprécier comme il faut ce que
contient le projet de loi dans ses suggestions, dans ses
améliorations.
Je suis bien prêt à admettre que dans l'esprit du
député de Lotbinière ce projet de loi n'est pas complet,
c'est fort possible; mais où n'est-il pas complet, où sont ses
faiblesses, qu'est-ce qu'il faudrait apporter comme améliorations?
Là, je suis encore beaucoup plus d'accord. Je pense que c'est là
le rôle d'une commission parlementaire, à savoir la participation
des députés d'une façon concrète à
l'élaboration même d'un projet de loi; c'est la raison qui nous
amène très souvent, aussi, à accepter des amendements.
Je voudrais ajouter ceci: Le député de Nicolet nous a
présenté un document qui mériterait, sans aucun doute, que
nous y réfléchissions un peu. Je voudrais seulement apporter un
commentaire. Le député de Nicolet me corrigera si je ne suis pas
tout à fait dans la ligne. Il me paraît que le
député de Nicolet propose, tout compte fait, deux types
d'organisations ou d'organismes qui s'occuperaient de la commercialisation des
produits agricoles au Québec. D'abord, un premier qui serait la
Régie des marchés agricoles actuelle et à laquelle on
pourrait enlever certains pouvoirs de recherche économique, par exemple,
à laquelle on pourrait enlever certains pouvoirs de recherche sur les
marchés qui sont contenus, d'ailleurs, dans la loi actuelle et
créer, à côté, une autre société ou un
autre office qui, lui, aurait pour fonction de faire ces travaux-là.
Je ne veux pas, pour le moment, me prononcer pour ou contre cette
suggestion qui nous est faite. Nous avons, au ministère de concert avec
la régie, travaillé presque pendant deux ans à ce projet.
Un comité spécial, formé de spécialistes, a
contribué à l'élaboration du projet que nous avons
actuellement. Si ma mémoire est fidèle je pense qu'on va
le confirmer, de la part de la régie presque tous les groupes
intéressés ont été entendus sous une forme ou sous
une autre avant de préparer ces amendements-là. Ce qui m'intrigue
le plus dans cela, c'est de savoir ce que viendra faire une deuxième
société dans la participation de la commercialisation au
Québec alors qu'on sait, de façon très pertinente, de
façon assez claire et évidente aussi, que la Régie des
marchés agricoles du Québec, lorsqu'elle a à prendre une
décision à caractère économique doit non pas
peut faire des études de marché. Elle n'a pas le
choix.
Comment voulez-vous que la régie décide, par exemple, de
l'augmentation du prix du lait avant de faire une étude du comportement
du marché, du comportement économique des entreprises? Elle doit
le faire. Si nous lui enlevons...
M. VINCENT: Elle doit le faire faire ou...
M. TOUPIN: Elle peut le faire faire, mais cela me paraît
évident que la régie serait mieux placée pour faire ce
travail-là.
M. VINCENT: Si le ministre me le permet...
M. TOUPIN: Je ne veux pas aller plus loin pour le moment, c'est
simplement des réflexions que je fais là-dessus.
M. VINCENT: D'accord, mais si le ministre me le permet, quant à
la loi de mise en marché ou la Loi des marchés agricoles, les
amendements qui sont suggérés sont valables, bon. On a
demandé à un comité de faire l'analyse de cette
loi-là, d'apporter les amendements, etc. Je suis parfaitement d'accord
sur cela, c'est ce que nous avons devant nous.
M. TOUPIN: Oui, c'est exact.
M. VINCENT: Est-ce qu'il y a d'autres amendements que nous devrons
apporter? Est-ce qu'il y a certaines clarifications que nous devrons
suggérer? Reste à savoir quels seront les mémoires qui
nous seront soumis.
Mais, partant de là, est-ce que ce n'est pas le moment,
aujourd'hui, en 1973, de penser que la Régie des marchés
agricoles qui est un tribunal administratif, un organisme quasi judiciaire, qui
aura de plus en plus de responsabilités, en ce qui concerne les
différends, les audiences publiques, etc. pour toutes les lois agricoles
au Québec, que ce soit les lois de mise en marché, formation de
plans conjoints, syndicalisme agricole, audiences publiques pour les garanties
d'emprunt, etc., est-ce que ce n'est pas le moment en 1973 de faire de la
Régie des marchés agricoles un véritable tribunal
agricole? Cela existe dans d'autres secteurs, le tribunal judiciaire existe
dans d'autres secteurs. Parallèlement la régie jouerait
son rôle comme arbitre, comme tribunal il y aurait un organisme
qui s'occuperait exclusivement de commercialisation des produits agricoles,
lequel organisme pourrait faire des travaux aussi pour la Régie des
marchés agricoles comme pour les
agriculteurs, comme pour les intermédiaires. Mais lorsqu'il y
aurait des décisions importantes à prendre, que ce soit l'office
de commercialisation, il serait dans l'obligation de soumettre ses projets
devant ce tribunal agricole au Québec. Je suis content que le ministre
nous mentionne qu'il n'a pas l'intention de se prononcer là-dessus tout
de suite, mais je le lance pour qu'on puisse le discuter, pour qu'on puisse
faire la lumière là-dessus. Moi, je suis convaincu
qu'éventuellement on en viendra là, parce qu'autrement nous
allons trop charger la Régie des marchés agricoles. Nous lui
demandons trop souvent de jouer un rôle secondaire alors que son
rôle principal c'est d'être un véritable tribunal. Le
ministre le sait. A son bureau, il a eu déjà et il aura encore
des agriculteurs mécontents parce qu'à l'intérieur de tel
plan conjoint ils croient qu'ils sont lésés, qu'ils sont mal
reçus. A ce moment, c'est le rôle de la régie de recevoir
ces plaintes, de les analyser, de les discuter, de voir les deux
côtés de la médaille et de rendre une décision.
Mais, si au même moment on demande à la régie de faire des
études de marchés, d'aller discuter avec les autres provinces,
d'aller discuter avec le gouvernement fédéral, la régie
divorce de son rôle principal qui est d'être un véritable
arbitre. C'est cela que je veux lancer dans la discussion pour qu'on puisse
l'analyser. Moi, je dis qu'éventuellement ça en viendra
là. Autrement dit, le ministère sera obligé
peut-être de former à l'intérieur de son propre
ministère un service spécial de mise en marché ou de
commercialisation. D'ailleurs, c'est déjà commencé cela.
Qu'on le structure parallèlement à la régie.
Déjà, au ministère il existe un service de
commercialisation. Ce serait plus coordonné, ce serait plus complet si
c'était réellement un office de commercialisation qui travaillait
avec la Régie des marchés agricoles.
M. TOUPIN: Oui, je pense que là, de la part du
député de Nicolet, c'est déjà plus clair un peu
dans mon esprit, en tout cas, avec les explications qu'il vient de nous
apporter, en plus de ce qui est écrit dans le texte qu'il nous a
présenté.
Comme je vous disais tantôt, je n'ai pas l'intention de commenter
tout de suite cette nouvelle orientation qu'on pourrait donner, au
Québec, à la commercialisation des produits, distinguer les
décisions quasi juridiques ou encore distinguer le secteur des conflits
des secteurs de la promotion des produits, de la recherche économique.
Cela pourrait sans doute être valable, parce que déjà et le
ministère et la régie travaillent tous les deux dans ce secteur.
Le ministère se sert de temps en temps des services de la régie
pour prendre certaines décisions ou la régie se sert des services
du ministère pour prendre certaines autres décisions. Mais il y
aurait peut-être avantage de circonscrire un peu plus le problème
concernant la promotion et la distribution des produits, l'ouverture à
de nouveaux marchés, des études économiques, etc.
C'est déjà le ministère qui le fait mais il y
aurait peut-être lieu de rejoindre ça dans une structure plus
spécialisée.
Quant à ce que disait le député de Sainte-Marie,
c'est simplement une précision que je veux apporter sur le bout de texte
qu'il a cité d'une déclaration que j'aurais faite. Il faudrait
distinguer clairement le secteur primaire et le secteur secondaire en
agriculture. Quand j'ai fait la déclaration, le but de cette
déclaration était le suivant: C'est que les plans conjoints n'ont
pas été conçus dès le départ je ne
pense même pas que ce soit dans l'esprit des producteurs pour le
secteur industriel, le secteur de la transformation. Ils ont été
conçus pour les producteurs mêmes. On sait que les producteurs
sont, d'abord, des producteurs primaires. Ce sont ceux-là qui produisent
la première production; la première chaîne de production
part de là. Eux, ils se disent: Dépassé le secteur
primaire, on peut être présent mais par d'autres moyens que les
plans conjoints. On pourrait peut-être être présent par des
agences de vente. Mais, encore là, des agences de vente s'occupent
seulement du produit primaire. Elles ne s'occupent pas ou presque pas du
produit transformé. La seule que nous avons au Québec et qui
commence il y en a deux à se préciser un peu dans
l'ordre des rôles qu'elle a à accomplir, c'est l'Agence des oeufs
et celle du lait de consommation, du lait nature.
Dans le lait nature, les producteurs, présentement,
contrôlent le prix, les quotas, etc. Les transformateurs, eux,
reçoivent le lait, le transforment, paient l'office des producteurs qui
lui fait une péréquation et remet l'argent aux producteurs. On
n'a pas dépassé encore cette conception à venir
jusqu'à maintenant. Dans le domaine des oeufs, c'est la même
chose. Dans le domaine des oeufs, on prend l'oeuf à l'état
primaire et on le rend jusque dans le magasin à succursales parce que
c'est le premier acheteur, dans la plupart des cas, à l'exception des
postes de mirage qui sont possédés, d'une part, par la
fédération et, d'autre part, par des producteurs privés.
On tente une expérience qui peut peut-être donner l'impression
qu'on dépasse le secteur primaire. Mais on y est encore à cause
d'une transformation assez réduite d'un produit donné, que l'on
peut appeler l'oeuf. La Fédération des producteurs d'oeufs du
Québec ne fait pas encore de tartes, je pense, et je ne pense pas non
plus qu'elle s'oriente vers le séchage des oeufs, etc. Ce sont des
entreprises qui peuvent être la propriété des
producteurs.
C'est là, je pense, où l'on peut se rejoindre. La
philosophie qui nous anime actuellement, au niveau des plans conjoints, c'est
de se limiter, autant que possible, au secteur primaire; négociation des
prix au producteur, stabilité des prix au producteur, contrôle de
la production pour maintenir une stabilité des prix. C'est là,
évidemment, où l'action des plans conjoints s'exer-
ce. Je ne sais pas si, dans dix ans, on pourra pousser un peu plus loin.
Mais si jamais on veut pousser plus loin, probablement qu'il nous faudra penser
à d'autres types de structures. On devra penser beaucoup plus, par
exemple, au secteur coopératif qui, actuellement, est déjà
engagé, lui, dans la transformation du produit. Il est rendu loin. La
Coopérative fédérée est rendue très loin, la
Coopérative de Granby est rendue loin. Dans le bois, c'est la même
chose. Il y a des coopératives qui sont actuellement
propriétaires de scieries, qui transforment le bois et le mettent en
marché. Ce sont aussi des organismes de producteurs.
On doit établir un lien entre les coopératives de
producteurs et les plans conjoints. Il y a cinq ou six ans, quatre ou cinq ans,
celui qui m'a précédé au ministère sait combien les
conflits étaient durs entre le secteur coopératif et le secteur
des plans conjoints.
Ils sont parvenus, au cours des dernières années, à
signer un protocole d'entente pour éclaircir le champ d'action de l'un
et de l'autre. La coopérative est bien d'accord que le plan conjoint
s'occupe de la première étape du produit, et le plan conjoint ou
les producteurs en association professionnelle sont prêts à
accepter que la transformation est davantage du ressort d'une structure qui
émanerait d'une loi coopérative que d'une loi de mise en
marché.
C'était simplement pour apporter certains éclaircissements
que j'ai dit que les plans conjoints devaient se limiter au secteur
primaire.
Maintenant, il n'y a rien, je pense, qui puisse empêcher des
producteurs membres d'un plan conjoint de se former des compagnies, de
négocier avec eux-mêmes, avec leurs collègues, des ententes
pour le transport, par exemple, l'emmagasinage et l'entreposage du produit.
Mais la Loi de mise en marché actuelle n'est pas conçue dans
cette perspective. Il faudrait changer toute son orientation.
L'idée du député de Nicolet de pousser un peu plus
loin dans le domaine de la commercialisation, c'est peut-être un peu plus
logique.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Avant de passer à l'idée du
député de Nicolet, je voudrais poser une question au ministre
pour éclaircir les affaires afin d'étudier la loi et de se
comprendre.
La section 4 traite de la formation, de l'approbation, de la
modification et de l'administration d'un plan conjoint de mise en marché
d'un produit agricole, dans la Loi des marchés agricoles. Je ne veux pas
être hors d'ordre, on n'est pas en train d'étudier cela article
par article, mais je cite cet article. A l'article 1 d), on parle de mise en
marché, de la vente, la classification, la transformation, l'achat,
l'entreposage, l'empaquetage, l'expédition pour fins de vente, l'offre
de vente, le transport d'un produit et ainsi de suite. Là, on tombe dans
l'industrie primaire et tertiaire, la transformation et la vente.
Est-ce que cette loi va aider un groupe de producteurs qui a un plan
conjoint, par exemple, à étendre leur activité dans la
mise en marché, dans la transformation du produit, dans tout cela?
Est-ce une loi qui va aider les producteurs dans ce sens ou qui va s'en tenir
encore, tout simplement, à une théorie, comme vous dites, que
nous nous limitons au secteur primaire, que nous cherchons d'abord et avant
tout à ajuster l'offre à la demande? Est-ce que cette loi va
avoir tout simplement cela comme implication ou si cela va aller aussi loin que
je le dis?
M. TOUPIN: Cela peut aller jusque là.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si cela reste comme ça, vous
êtes aussi bien de déchirer la loi et de ne pas la changer.
Qu'est-ce que cela va donner aux agriculteurs? Ce sont des lois sur des
tablettes et c'est tout.
M. TOUPIN: Non, non.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce une loi qui va favoriser les plans
conjoints dans la mise en marché, la transformation du produit et tout
cela?
J'espère que le député de Saint-Maurice a compris:
Primaire, on cultive une tomate; secondaire, on prend une tomate et on en fait
du ketchup et tertiaire, on vend le ketchup.
M. DEMERS: Non, on doit dire du coulis.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): En tout cas. J'allais encore intervenir pour
rien.
M. DEMERS: M. le Président, il est donc susceptible, le
député, ce matin. Il a la peau courte pas mal. Est-ce que cela va
mal dans l'est de Montréal?
M. TOUPIN: Ce qu'il faut éviter, M. le Président, ce sont
les affirmations trop...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je connais les vieux politiciens, c'est
épouvantable!
M. TOUPIN: ...globales, parfois, sur des problèmes aussi
épineux que ceux-là, des problèmes aussi complexes que les
problèmes de commercialisation des produits agricoles. La loi
prévoit que les plans conjoints peuvent aller jusque-là; mais je
soutiens encore, comme je l'ai soutenu, qu'à venir jusqu'à
maintenant, les producteurs n'ont pas cru bon aller plus loin que cela. Il y a
peut-être des raisons qu'on ne peut expliquer pour le moment, à
savoir pourquoi les producteurs n'ont pas voulu aller plus loin que cela.
Dans les circonstances actuelles, un plan conjoint pourrait bien faire
une suggestion et dire: Demain matin, le lait, au niveau de l'empaquetage, va
se vendre seulement dans deux contenants: le contenant en verre et le
contenant en plastique, et c'est une pinte, point. Il pourrait le faire;
la loi lui permet, tout au moins, d'aborder le problème. On sait fort
bien que, lorsque nous entrons dans ce secteur qu'on appelle l'industrie de
transformation, il faut se doter de mécanismes particuliers. Les
producteurs sont déjà engagés, par ailleurs, avec une
autre structure, qui est le secteur coopératif, dans le domaine de la
transformation des produits. C'est pour ça que c'était important
que les producteurs, membres de coopératives et membres de plans
conjoints, puissent trouver un certain terrain d'entente et que les uns, dans
le plan conjoint, se limitent à telle chose et les autres, dans la
coopération, se limitent à telle autre chose. C'est ça qui
était l'objet de l'interprétation des choses que j'ai dites. La
loi n'empêche pas de le faire, mais le problème que ça
pose, c'est que les producteurs ne semblent pas prêts à aller
jusque-là et que leur philosophie me paraît favoriser le
primaire.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): II faut qu'une loi aide et favorise ça
aussi.
M. TOUPIN: Enlevez ça de la loi et vous ne changez rien aux
circonstances, aux événements actuels. Les producteurs vont
continuer, au niveau du secteur primaire, à se regrouper, à fixer
des contingents de production, à négocier les prix avec les
acheteurs, à s'assurer une sécurité dans les revenus,
à participer à la production en l'ajustant à la
consommation. Les contingents sont un pouvoir extrêmement fort.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): La loi ne peut pas obliger un producteur de
tomates à faire du ketchup avec ses tomates. Ce n'est pas ce que je dis.
Mais, s'il veut le faire, est-ce que la loi va l'aider? Actuellement, la loi
comme elle est, l'ancienne, ne le favorise pas du tout. C'est peut-être
pour ça que nos cultivateurs à Québec n'ont pas tellement
embarqué dans le domaine de la transformation des produits, sinon par
quelques coopératives.
M. TOUPIN: Mon cher monsieur, la province de Québec est la
province au pays où les producteurs y participent le plus avec le
secteur coopératif!
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, mais seulement dans quelques
secteurs.
M. TOUPIN: Le secteur agricole est le plus avancé. Regardez ce
que les producteurs font comme travail dans le domaine de la transformation,
seule presque la distribution leur échappe actuellement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je parle de tout, des productions de la
forêt, etc.
M. TOUPIN: Le Québec est la province où les producteurs
participent le plus à la transformation.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si vous lisez le mémoire de
l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec, ils sont
exactement contre ce que je viens de dire.
M. TOUPIN: C'est bien évident.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ils veulent négocier individuellement
avec les gens; ils ne veulent pas... Est-ce que le ministre va prendre ses
responsabilités et est-ce qu'il va faire des lois pour les favoriser ou
s'il va laisser la loi comme elle était avant, ce qui favorise la
demande de ces gens?
M. TOUPIN: Si les industriels forestiers demandent de négocier
individuellement avec les producteurs, déjà, ils veulent faire
disparaf-tre les plans. Voyez-vous, entre une position aussi radicale que
celle-là et aussi radicale que l'autre contraire où le producteur
s'occuperait de tout, il y a une place. C'est là que les producteurs ont
choisi d'oeuvrer.
M. DEMERS: Le milieu est la vertu.
M. TOUPIN: Je peux aller plus loin que ça. Le
député de Nicolet, tantôt, parlait de son nouvel organisme.
Je lui ai demandé: Est-ce que ça voudrait dire qu'on pourrait
mettre des commissions mixtes et imposer aux producteurs des plans conjoints?
Personnellement, je ne suis pas contre cette théorie, mais je suis
convaincu que les producteurs ne sont pas prêts à ça.
M. VINCENT: C'est-à-dire l'imposer...
M. TOUPIN: Je suis persuadé que les producteurs ne sont pas
rendus là.
M. VINCENT: Juste un point, je n'ai pas parlé d'imposer aux
producteurs. Dans un cas donné, le porc, par exemple...
M. TOUPIN: D'accord avec les producteurs.
M. VINCENT: ... l'Office de commercialisation pourrait, après
consultation avec la profession, non pas l'imposer aux producteurs, mais, avec
eux, aller devant la régie...
M. DEMERS: C'est l'artifice du ministre, il faut en mettre un peu plus.
Si je comprends bien, le ministre ne veut pas en donner plus que le client n'en
demande, dans cette loi.
M. TOUPIN: Ce n'est pas nécessairement cela.
M. DEMERS: C'est à peu près cela.
M. TOUPIN: Non, il ne s'agit pas d'en
donner plus que le client n'en demande. Le problème ne se pose
pas là. La loi de mise en marché est une loi des producteurs.
Cela me parait évident.
Je ne pense pas que je puisse imposer aux producteurs des choses qu'ils
ne veulent pas faire.
M. DEMERS: C'est cela. Justement, c'est ce qu'ils veulent.
M. BELAND: En d'autres mots, M. le Président, pour être
bref, ce que nous constatons présentement c'est que de plus en plus
l'agriculture évolue pour être tantôt entre les mains de
géants qui vont tout contrôler et qui vont être très
limités dans la quantité. Or, est-ce que l'on doit ou pas faire
en sorte que les mécanismes inclus dans cette nouvelle loi que nous
étudions... Est-ce que l'on doit essayer de contourner ce laisser-aller
néfaste? Est-ce que l'on doit donner le mécanisme
nécessaire pour faire en sorte que l'agriculture, soit de type familial
ou d'autre type analogue, puisse continuer ef s'intensifier, compte
tenu justement de tous les mécanismes, tout ce qui concerne la mise en
marché, soit même la publicité, enfin la recherche du
marché, et le reste? Dans le passé, si l'on parle strictement de
ce niveau, la recherche du marché, cela a été quoi? Cela a
été à peu près seulement au niveau gouvernemental
avec les agents de liaison. Je ne sais pas ce qu'ils faisaient à
l'extérieur, mais de toute façon, passons, cela ne vaut
à peu près pas la peine d'en parler les agriculteurs
avaient l'impression que le gouvernement avait quelqu'un pour effectuer
certaines recherches dans ce domaine aussi, et cela n'existait à peu
près pas. Compte tenu de tout cela, c'est seulement un
élément dans tout le mécanisme, dont on doit tenir compte
pour faire en sorte que cela colle réellement à aujourd'hui et
que cela prévienne également, en même temps, ces choses que
les agriculteurs ont en avant d'eux, en avant de leur nez. Ils voient, ils
constatent que demain, si rien ne change à la base, l'agriculture ne
sera plus contrôlée par eux, soit par des offices de producteurs
ou autrement, mais par trois ou quatre géants. Il faut prévoir
tout cela. C'étaient mes seules observations supplémentaires.
M. TOUPIN: Je pense qu'on l'a mis dans le projet de loi actuel. C'est
cette affirmation qui m'amène à la conclusion que vous n'avez
peut-être pas suffisamment approfondi le projet de loi que l'on vous a
présenté.
M. BELAND: Cela reste à voir.
M. TOUPIN: Oui, mais vous avez là-dedans une disposition qui va
permettre aux offices de commercialisation d'acheter des quotas et d'en
créer des banques, plutôt que de les laisser aller dans les mains
des industries privées. Pour moi, il me semble que c'est fondamental
pour la mise en marché des producteurs, c'est prévu dans la
loi.
M. BELAND: C'est là une couple d'éléments.
M. TOUPIN: Oui, mais un élément, souvent, règle un
problème. Chaque élément règle un problème,
mais il ne faut pas charrier trop là-dedans.
M. BELAND: C'est justement...
M. TOUPIN: C'est bien beau de dire que la production agricole au
Québec n'est peut-être pas suffisante vis-à-vis de certains
secteurs. Je pense que l'on est tous d'accord avec cela. Les gouvernements
peuvent créer des organismes de commercialisation, peuvent promouvoir
des produits, peuvent mettre à la disposition des agriculteurs des lois,
mais ils ne peuvent pas créer des agriculteurs de toutes pièces.
Pas plus que l'on peut créer des députés, et Dieu sait que
si on était capable d'en créer il y en a plusieurs qui
partiraient.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le ministre...
LE PRESIDENT (M. Giasson): Si vous le voulez, on va mettre fin à
la cacophonie et une personne parlera.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je suis d'accord.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Est-ce que le député de
Lotbinière avait terminé ses questions à l'endroit du
ministre?
M. BELAND: C'était, tout simplement, pour répéter
ceci au ministre, étant donné que je constate de plus en plus
qu'il n'a rien compris à ce que j'ai dit au début. Je n'ai pas
dit que ce qui est présenté ne contenait rien de bon. Ce n'est
pas ce que j'ai dit. J'ai dit qu'il y avait de bons éléments
à l'intérieur, mais j'ai dit également, en même
temps, que le ministre n'allait pas assez loin dans ce domaine pour
créer le mécanisme dont ont besoin les producteurs agricoles du
Québec.
M. TOUPIN: Je vais vous apporter un exemple. Vous allez voir que ma
prédiction n'est pas sotte là-dedans. Les producteurs sont en
train de s'organiser pour contrôler la mise en marché du bois
à papier avec un agence de vente. Ils veulent se donner plus de
pouvoirs. Je suis convaincu que votre groupe va être le premier à
dénoncer ça. Vous avez déjà commencé
à le faire en prenant la part des producteurs. J'ai des lettres au
bureau où vous me disiez: Ecoutez, les producteurs sont astreints
à faire telle chose, etc., etc. Mais, quand vous donnez des pouvoirs
à des producteurs et qu'ils s'en
servent, ça crée des remous sociaux. Il faut les
épouser ces remous, si on est d'accord avec ça. Il faut les
épouser; il faut aller jusqu'au bout de la ligne.
M. BELAND: J'aimerais connaître la nature de ces
avancés.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le ministre, je vous écoutais
à la télévision, il y a quelques jours à peine et
vous étiez d'accord lorsque parlant de la hausse des prix surtout des
produits agricoles, des produits de consommation, on disait que les plus gros
profits allaient surtout aux grands de l'alimentation.
Vous avez fait une genre de déclaration, en somme, qui approuvait
ce document qui avait été sorti par François Dagenais qui
est l'économiste de l'Union des producteurs agricoles. Actuellement,
tout ce qu'on paie plus cher dans les produits agricoles, que ça soit le
boeuf, les carottes, les légumes ou n'importe, ce n'est pas le
producteur qui fait le profit; ce sont les grands de l'alimentation ou ceux qui
font la transformation ou qui font la vente du produit.
Vous l'avez dit à la télévision; pas dans les
mêmes mots, mais, en somme, vous abondiez à peu près dans
le même sens. Il faudrait une loi qui n'impose pas aux producteurs, qui
font partie d'un plan conjoint, de transformer leurs produits et d'ouvrir un
comptoir de vente, mais qui les aide dans ce sens, qui les favorise, au lieu de
dire que ça va rester toujours dans le domaine primaire, parce
qu'à ce moment-là l'article 1 d) de la loi 24 ne s'appliquera
pas. Lisez l'article 1 d).
M. TOUPIN: Cela va beaucoup plus loin que ça.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): II faut que la loi aille beaucoup plus loin
encore qu'elle va actuellement.
M. TOUPIN: Elle va déjà plus loin.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Sans cela, vous ne contrôlerez jamais
les grands de l'alimentation qui profitent du petit cultivateur pour pressurer
le consommateur. C'est cet intermédiaire qui crée une hausse des
prix. Le cultivateur travaille quinze heures par jours pareil et il ne fait pas
plus d'argent qu'il n'en faisait. Les grands de l'alimentation en font,
cependant.
M. TOUPIN: Voyez-vous, ce qui nous guette très souvent, lorsque
nous parlons de problèmes comme ça, ce sont des affirmations trop
globales.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Si vous vou- lez qu'on détaille, on va
siéger là-dessus toute la journée et on parlera de
cela.
M. TOUPIN: Ce sont des affirmations trop particulières.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On peut parler de ce sujet tout
l'après-midi.
M. TOUPIN: Oui, mais il y a une chose qui me paraît
évidente dans le contexte actuel. Les producteurs profitent un peu, bien
sûr, de la hausse des prix. Il n'y a pas d'erreur possible. Le prix du
lait va augmenter de $1.05. On a donné une augmentation de $0.60, il n'y
a pas longtemps. Cela fait $1.65 d'augmentation en un an. Cela ne me
paraît pas trop mal, tout compte fait.
M. BELAND: Quelle a été l'augmentation du coût de
production dans le même temps?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si vous prenez le pourcentage,
l'augmentation du revenu du producteur agricole et l'augmentation du prix des
produits agricoles, il y a un déséquilibre complet. Vous l'avez
dit.
M. TOUPIN: Je voudrais que vous me laissiez finir. On cherche un
coupable dans cette affaire-là. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de
coupable, on en cherche un. Il est possible que ce que l'UPA a dit et
affirmé soit vrai, ce n'est pas impossible. Tout comme ce n'est pas
impossible ce que le représentant de la société
d'alimentation a dit. Cela peut être vrai aussi. A cette
émission-là, le climat était le suivant: Le consommateur
accusait le distributeur, le distributeur accusait le spéculateur et le
spéculateur accusait le producteur. Ce n'est pas dans un contexte
d'accusations générales comme cela qu'on va trouver des solutions
satisfaisantes. Il s'agit de voir comment se comporte, du point de vue de
l'équilibre, l'ensemble du secteur de la consommation des denrées
alimentaires au Québec.
Je suis convaincu que le député de Sainte-Marie est
d'accord avec moi là-dessus. On n'a pas le choix. Mise à part
l'intervention du secteur intermédiaire, la transformation et la
distribution, on n'a pas le choix. Ou les gouvernements mettent des budgets
pour des subventions aux produits agricoles, ou le consommateur va payer plus
cher. Autrement l'agriculteur n'existera plus. Que voulez-vous que j'y fasse?
Je n'affirme pas cela pour le plaisir de la chose, pour faire des
déclarations politiques. L'évidence même est sous nos yeux
tous les jours dans ce secteur-là.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le ministre, il y a une firme qui a
haussé ses profits de 212 p.c.
M. TOUPIN: Oui. Il faudrait le prouver, cela.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On parle d'imposer un surplus de profit qui
n'est pas légitime chez certaines compagnies et vous dites que cela n'a
pas de bons sens, qu'on ne devrait pas faire cela.
M. TOUPIN: Non. Ce n'est pas cela que j'ai dit.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce sont des profits abusifs au
détriment des consommateurs et qui ne rapportent rien au producteur.
Quand bien même vous parleriez de quelques cents de plus sur le lait,
qu'est-ce que c'est? Ce sont des peanuts parmi tout ce que vend l'agriculteur
dans un an. Cela ne lui rapporte rien la hausse des prix actuellement. Les
citoyens disent: Les maudits cultivateurs, ils vendent leurs tomates trop cher,
mais ce n'est pas le cultivateur qui vend ses tomates trop cher.
M. DEMERS: II faudrait aller voir les cultivateurs.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): A Montréal, tous les
supermarchés sont bondés de tomates. Je connais des cultivateurs
autour de Montréal qui viennent vendre leurs tomates en ville; ils
retournent chez eux et les font manger à leurs cochons. Savez-vous
pourquoi? C'est parce que nos marchés sont bondés de produits qui
viennent du dumping, qui viennent de l'Ontario. Le dumping de l'Ontario et de
certains Etats américains. Ils ne vendent même pas leurs produits.
Est-ce que cette loi-là va régler un peu cela? Je l'ai toute lue
et je trouve que cela ne changera pas grand-chose.
M. TOUPIN: La loi n'obligera pas les consommateurs à manger des
tomates. Mettez vous cela dans la tête aussi.
M. DEMERS: Elle ne peut pas interdire non plus le commerce entre les
provinces.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, mais elle peut favoriser le
marché de ceux qui produisent au Québec. Actuellement, cela se
fait au détriment des producteurs de l'Ontario. Ce sont les producteurs
de tomates de l'Ontario qui nous vendent des tomates, à Montréal
dans les supermarchés, deux fois plus cher qu'on pourrait les acheter
des cultivateurs. Les cultivateurs retournent chez eux avec les tomates, les
jettent dans le champ et les laissent pourrir. Le savez-vous, cela?
M. TOUPIN: Actuellement, c'est aller loin.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Demandez à votre collègue du
comté de Deux-Montagnes, le ministre L'Allier, il va vous le dire.
M. TOUPIN: Je ne veux pas aller trop loin là-dessus.
M. DEMERS: C'est un ancien péquiste, L'Allier.
M. TOUPIN: J'ai l'impression que vous lancez les tomates pas mal trop
loin.
M. DEMERS: C'est un ancien péquiste, il a peut-être les
mêmes informations que vous.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): La Loi des marchés agricoles, il faut
qu'elle intervienne là-dedans.
M. TOUPIN: Oui. On est bien d'accord...
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Seulement vous allez encore m'arriver avec
les conflits de juridiction: On ne contrôle pas notre importation, notre
exportation, comme vous l'avez déjà dit à la
télévision, c'est du domaine fédéral. Alors, on est
toujours pris dans un cul-de-sac et on n'en sort pas.
M. TOUPIN : J'ai beaucoup d'amitié pour le député
de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Moi aussi, j'ai beaucoup d'amitié
pour vous.
M. TOUPIN: Je voudrais simplement lui dire ceci. Je pense que...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne suis pas fâché, je
voudrais qu'il présente une loi...
M. DEMERS: Vous nous le direz ce jour-là!
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui. Mais je voudrais qu'il présente
une loi efficace qui règle des problèmes comme cela.
M. TOUPIN: Je suis d'accord sur cela, mais je voudrais que le
député de Sainte-Marie ouvre...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On parle de grandes théories pendant
des semaines et cela reste la même chose.
Qu'est-ce que cela va donner?
M. TOUPIN: II faudrait que le député de Sainte-Marie ouvre
ses horizons un peu. L'exemple que vous apportez...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne suis pas fâché, je suis
en maudit.
M. TOUPIN: ... d'un manque de contrôle de frontières, on
est en train, en Europe, de régler le problème de la
commercialisation des produits agricoles en faisant tomber les
frontières. Aux Etats-Unis, on a imposé, récemment, un gel
des prix et pour maintenir l'application raisonnable d'une politique comme
cella-là, on a aussi imposé des contraintes à
l'exportation et
à l'importation. Cela a eu exactement l'effet contraire de ce
qu'on avait visé. Il faut regarder plus loin que sa frontière,
aujourd'hui. Il faut voir dans une perspective nationale, dans la
commercialisation, tout au moins, et il faut voir dans une perspective
internationale.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, mais...
M. TOUPIN: A ce moment-là, si vous voulez ramener les producteurs
québécois à produire chez eux dans le cadre de
frontières, vous allez ramener votre lait chez vous, vous allez ramener
vos poulets chez vous et vous allez ramener...
UNE VOIX: Les tomates.
M. TOUPIN: Les tomates, on en vend un peu à l'extérieur,
mais cela circule assez librement. Il y a la salade, il y a dix ou quinze
produits qu'on vend à l'extérieur. Voyez-vous? L'argument des
frontières, pour moi, ne m'influence pas du tout.
M. VINCENT: Le ministre vient de défendre ma suggestion.
M. TOUPIN: II ne m'influence pas du tout, l'élément des
frontières.
M. TREMBLAY (Sainte-Maire): Cela ne vous influence pas? Ce n'est pas
toujours ce que vous avez dit.
LE PRESIDENT (M. Giasson): Messieurs, la commission ajourne ses
travaux...
M. VINCENT: Avant d'ajourner, M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Giasson): ... au 25 septembre, dix heures, en
matinée.
M. VINCENT: ... est-ce que le 25 est accepté?
LE PRESIDENT (M. Giasson): Oui, c'est accepté. Je l'annonce,
c'est accepté.
M. TOUPIN: C'était d'accord avec le 25 septembre?
M. VINCENT: D'accord!
LE PRESIDENT (M. Giasson): Mardi, le 25, dix heures.
(Fin de la séance à 11 h 55)