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Étude du projet de loi no 43
(Dix heures dix-neuf minutes)
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, s'il vous
plait!
La commission parlementaire de l'agriculture et de l'alimentation
reprend ses travaux sur le projet de loi no 43, Loi modifiant la Loi du
ministère de l'Agriculture.
Les membres de la commission sont, pour cette séance: M. Baril
(Arthabaska) remplacé par M. Lavigne (Beauharnois); M. Beauséjour
(Iberville); M. Russell (Brome-Missisquoi); M. Gagnon (Champlain)
remplacé par M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes); M. Garon
(Lévis), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Rancourt (Saint-François), M.
Vaillancourt (Orford).
Comme intervenants: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Charbonneau
(Verchères), M. Chevrette (Joliette-Montcalm); M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe) remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M.
Larivière (Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Dubois
(Huntingdon); M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord); M. Picotte
(Maskinongé) remplacé par M. Mathieu (Beauce-Sud) et M. Samson
(Rouyn-Noranda). Le rapporteur est M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata).
Présentation de deux rapports à la
Chambre
À la suspension de la séance d'hier, nous avions
commencé l'étude de l'article 1 et, déjà, une heure
de débat s'était écoulée. Maintenant, on m'a fait
part d'une demande du leader parlementaire pour qu'il y ait deux rapports. Je
désire qu'une motion soit faite à cet effet.
M. Garon: Oui.
Le Président (M. Laberge): Voulez-vous la formuler ou si
vous voulez que je la formule?
M. Garon: Vous pouvez la formuler, vous avez les mots.
Le Président (M. Laberge): Alors, j'ai compris que deux
rapports distincts soient faits en Chambre...
M. Garon: Un sur le projet de loi no 41...
Le Président (M. Laberge):... un sur le projet de loi no
43 et l'autre sur le projet de loi no 41. Cette motion est adoptée?
Une voix: Adopté.
M. Giasson: Est-ce qu'on garde le même rapporteur sur
chaque projet de loi? On aurait pu nommer le député de
Deux-Montagnes.
M. Garon: Oui, on pourrait nommer le député de
Deux-Montagnes pour la banque de terres; c'est lui qui en
bénéficiera peut-être le plus dans son comté.
Le Président (M. Laberge): Alors, on pourra voir à
cette suggestion lors du début de l'étude du projet de loi no
41.
M. Giasson: C'est le député de Mirabel.
M. Garon: Aussitôt qu'on va avoir transféré
les terres...
M. Giasson: Aussitôt que vous aurez acquis les terres du
fédéral?
M. Garon: ... on va...
M. Giasson: Combien allez-vous payer cela, M. le ministre?
M. Garon: Pas cher!
M. Giasson: Ces terres ne valent pas cher?
M. Garon: Cela valait cher au départ, mais ça a
tellement été déstructuré.
M. Giasson: Cela vaut au moins le prix que le
fédéral a payé?
M. Garon: Cela ne vaut plus ce prix; c'est
détérioré. Cela s'est déprécié.
M. Giasson: Pas à un tel point. M. Garon: Ah!
M. Giasson: Vous avez toujours prétendu que le
fédéral avait spolié les droits des propriétaires.
J'espère que le Québec va au moins corriger cela, qu'il va donner
l'exemple au fédéral sur la méthode d'acquérir des
terres en payant le prix qui doit être payé. On l'attend, le
ministre de l'Agriculture du Québec.
M. Garon: Les bleus sont peut-être plus
intéressés à régler cela que les rouges.
M. Giasson: Vous êtes quoi, à ce moment-ci? Bleu ou
rouge?
Une voix: ...
M. Giasson: Vous êtes les nouveaux bleus? C'est le "flag"
qui vous fait dire cela, le drapeau?
M. Garon: Nous sommes, comme Duplessis l'aurait dit, des bleus et
des rouges améliorés.
M. Giasson: Oui. Il vous en manque encore, par exemple. Cela va
vous en prendre plus que cela. "Mon petit garçon".
M. Garon: Pardon?
M. Giasson: Comme le disait M. Levesque: "Mon petit
garçon".
Une voix: Gérard D.
Une voix: J'espère que ce n'est pas enregistré.
Le Président (M. Laberge): Oui. Tout est sur les ondes
présentement.
M. Garon: Pardon?
Le Président (M. Laberge): Oui. Tout est sur les
ondes.
M. Giasson: "Show time".
Le Président (M. Laberge): Tout ce que vous dites est sur
les ondes. M. le député de Brome-Missisquoi.
Projet de loi no 43
Pouvoir d'acquisition (suite)
M. Russell: M. le Président, lorsque nous avons
ajourné hier, nous avons tenté de concilier un peu la loi et en
commençant par l'article 1, il semble y avoir un peu de contradiction.
Le ministre disait hier qu'il ne veut rien changer dans la situation actuelle.
Donc, il a prouvé que ce que j'ai dit en Chambre semblait inutile. Si on
ne veut rien changer, on a les pouvoirs nécessaires pour ne rien
changer. Le ministre s'est peut-être mal exprimé car dans
l'exposé qu'il a fait en Chambre, il nous disait je l'ai lu hier:
"Nous pouvons aussi présumer que certaines terres actuellement non
utilisées ou sous-utilisées et détenues par des
non-agriculteurs..." La question que j'avais posée hier visait ceux qui
sont réellement sur des lots, qui ne détiennent pas de lettres
patentes, qui ne cultivent pas les lots, qui ne sont pas tout à fait
conformes aux normes réglementaires gouvernementales, qui
détiennent ces lots depuis nombre d'années et qu'ils n'utilisent
pas à des fins agricoles. Le ministre pourrait, s'il le voulait, avec le
consentement du propriétaire détenant ce billet acheter je
comprends par la loi qu'il pourrait l'acheter mais il ne possède
pas le pouvoir d'expropriation. Il aurait simplement un pouvoir de
révocation qu'il détient entre les mains actuellement, ce qui est
plus fort que la tactique qu'il met devant nous.
En ce qui me concerne, je prétends que malgré la bonne
volonté du ministre de nous démontrer la nécessité
de cette loi, il n'en a pas du tout besoin, car il possède
déjà, à la section VI tous les pouvoirs nécessaires
qu'il réclame dans cette loi, à moins qu'il y ait d'autres
raisons qu'il n'a pas données dans son exposé en Chambre, qu'il
ne nous a pas données hier dans les quelques remarques qu'il a faites et
qui seraient contenues à l'intérieur de règlements.
M. le Président, vous allez comprendre qu'il est difficile pour
nous de s'asseoir ici et d'examiner bien objectivement une loi lorsqu'on n'a
pas plus d'explications que celles qu'on a pu avoir hier concernant le cas
qu'on a tenté d'étudier à l'article 1. Je crois que si le
ministre voulait réellement accélérer les travaux de cette
commission pour qu'on procède à l'étude le plus rapidement
possible... Je sais que c'est son désir et c'est le mien aussi; je ne
veux pas traîner ici à longueur de semaine pour discuter ce projet
de loi. Par contre, je dirais qu'on n'a pas nécessairement un devoir,
mais une obligation comme député de l'Opposition de clarifier
chacune de ces questions durant l'étude du projet de loi article par
article. Je ne vois pas qu'on puisse le faire intelligemment dans le contexte
actuel d'une loi-cadre comme celle-là. C'est pour toutes ces raisons qui
ont été invoquées préalablement et pour celles que
j'invoque ce matin. Même que ces raisons ont été
invoquées par un collègue du ministre actuel qui disait
très clairement, dans un article, qu'il ne voyait pas qu'on pouvait
étudier intelligemment un projet de loi sans avoir les articles. Il
était d'accord avec une loi-cadre, mais une loi-cadre ne dit rien.
Le ministre va nous dire: Moi, j'ai de bonnes intentions; je ne devais
rien déranger, comme il l'a dit hier. Je le comprends. Je comprends la
bonne foi du ministre, et je ne crains pas le ministre actuel. On sait que les
ministres ne sont pas comme les fonctionnaires, ils changent rapidement.
Demandez cela au ministre des Transports, au ministre des Affaires culturelles
et des Communications, à l'ancien ministre de l'Industrie et du
Commerce. Parfois, les ministres changent. C'est son successeur... S'il fallait
qu'arrive un ministre qui a une idée socialisante et qui tomberait avec
une loi comme celle-là! Il y a des pouvoirs extraordinaires dans ce
projet de loi. Il pourrait se mettre à acheter des terres, il n'y a pas
de contrôle, même qu'il pourrait emprunter de l'argent. Il n'y a
pas de contrôle. Le ministre des Finances a même le
privilège de payer le déficit. Ce sont toutes ces
choses-là qu'on devrait regarder objectivement. Comme je le disais
tantôt au ministre, c'est notre devoir de faire en sorte que chacun de
ces points soit clarifié parce que ce projet de loi sera remis
à... Ce n'est pas le ministre qui va l'administrer. Il en est
responsable, je le conçois. C'est un peu comme quand on parlait de la
Loi de protection du territoire agricole. On avait averti le ministre dans le
temps que cela n'était pas facile de contrôler tout cela avec une
seule commission et que cela créerait un embouteillage. C'est une chose
qui est arrivée. Malgré tout cela, M. le Président, je
pourrais vous montrer des documents qui feraient sursauter le ministre. Je sais
que ce ne sont pas des ordres qu'il a donnés à son
président. Je ne voudrais pas être obligé de me servir,
vis-à-vis du président, du langage qu'a servi le premier ministre
hier au chef de l'Opposition en disant que parfois une promotion... Il y a des
gens qui n'ont pas... C'est un peu comme la boisson, il y a des gens qui n'ont
pas la tête pour porter cela. Cela ne devrait pas exister parce que,
quand un député intervient auprès d'une commis-
sion, M. le Président, je voudrais bien que le ministre sache que
ce n'est pas sa cause qu'il plaide. Il plaide la cause d'un de ses
électeurs. Qu'il soit un député de l'Opposition ou un
député ministériel, à mon sens, il
représente un groupe d'électeurs et il a les mêmes droits.
Il devrait être traité de la même façon.
D'après mon expérience parce que j'ai aussi
oeuvré dans le cabinet comme le ministre le fait actuellement
c'étaient des ordres très sévères au niveau de mes
hauts fonctionnaires; surtout lorsqu'un député
téléphonait, il avait priorité pour sa réponse
parce qu'il n'appelait pas pour embêter le ministre, mais normalement
pour clarifier une situation. Ce n'est pas tout à fait le cas dans le
contexte actuel au ministère de l'Agriculture. Je peux dire au ministre
que c'est peut-être l'un des ministères où il y a le plus
de gens en conférence parmi ceux que j'ai eu à appeler. Ils
travaillent fort; ils sont toujours en conférence. Chaque fois que
j'appelle, ils sont en conférence et il n'y a pas de retour d'appel. Des
fois, nos secrétaires sont obligés de rappeler et on parle, quand
on rappelle, à nos secrétaires. Je pense que cela les vexe un peu
parce que c'est un secrétaire. Mais mon secrétaire, quand il
appelle au ministère de l'Agriculture, il appelle en mon nom et je suis
prêt à accepter la responsabilité et même des
bêtises que mon secrétaire pourrait faire. C'est ma
responsabilité. Je le fais au nom de mes électeurs et c'est
souvent pour aider à clarifier des situations.
Le cas que j'ai eu la semaine dernière, je ne vous le rappellerai
pas; c'est simplement pour vous illustrer jusqu'où cela peut aller. Tout
ce qu'on voulait dire au président de la commission, c'est qu'on croyait
que le cas ne devait pas aller devant la commission. Après deux mois,
quand il est intervenu, il l'a regardé et sa réponse a
été que cela n'avait pas d'affaire à aller là.
C'est un jeune notaire, de bonne foi, remarquez bien, et je ne le blâme
pas. Il a voulu être certain de son affaire.
M. Garon: II a fait cela pour rien. M. Russell: Non.
M. Garon: Vous avez dit des choses en Chambre et vous avez
accusé la commission mais vous vous apercevez que, dans le fond, elle
n'était responsable de rien. Le notaire a envoyé un cas à
la commission qui n'avait pas à aller à la commission. (10 h
30)
M. Russell: Le ministre veut avoir des preuves, on va lui en
donner. Je vais lui expliquer de bonne foi ce qu'on a tenté de dire au
président deux mois avant, soit que ces documents ne devaient pas aller
là, d'en faire la revue rapidement et de les retourner. Cela a pris deux
mois à avoir une réponse et à en avertir le notaire en
conséquence. Je sais que cela ne fait pas partie de la loi actuelle,
mais c'est pour démontrer au ministre comment cela peut être
grave. Si on ne fait pas en sorte, quand on va passer une loi comme
celle-là, d'être certain que les citoyens vont être bien
pro- tégés, on est en défaut et on n'a pas le droit de se
faire prendre en défaut comme députés.
À cette commission, c'est notre rôle, notre travail, non
pas de critiquer le gouvernement, mais de faire en sorte, avec le gouvernement,
que la loi soit claire, que le ministre puisse s'exprimer clairement, que ses
fonctionnaires puissent, en regardant l'exposé du ministre, si cela
n'apparaît pas dans la loi, connaître un peu la philosophie du
ministre, savoir quelles sont les actions qu'ils doivent prendre pour respecter
la conception de la loi lorsque ce n'est pas écrit dans la loi. Mais,
dans le contexte actuel, il faudrait que le ministre prenne pas mal de
responsabilités. Si je tente de concilier ses déclarations
d'hier, à savoir qu'il ne voulait rien changer, je dis: Bien, la loi est
inutile.
M. Garon: M. le Président, il faut arrêter de dire
des mensonges. J'ai dit qu'on ne changeait rien concernant l'acquisition, mais
qu'on facilitait la transmission des terres.
M. Russell: D'accord.
M. Garon: C'est ce que j'ai dit. J'ai dit: Au point de vue de
l'acquisition, on n'a pas besoin d'avoir de droits nouveaux; on les a, les
droits, en vertu des lois actuelles. Mais, quand on voulait les revendre aux
agriculteurs ou pour les nouveaux agriculteurs, on est soumis à la Loi
des terres de colonisation qui est une loi désuète. On veut
pouvoir procéder plus rapidement, plus facilement. C'est exactement le
contraire de ce que vous dites.
M. Russell: M. le Président, vous pouvez inscrire les
paroles du ministre à propos de ce que j'aurais dit. C'est exactement ce
que je suis en train de lui dire. Je tentais de concilier ce que le ministre
avait dit dans son exposé en Chambre et ce qu'il a dit hier pour tenter
de démontrer ce qu'il voulait dire. Il faut quand même le dire
clairement. Quand on n'a pas les règlements...
M. Garon: II n'y en a pas, de règlements. Il n'y a pas de
pouvoirs réglementaires là-dedans.
M. Russell: Non, je le sais.
M. Garon: Ils ne demandaient pas les règlements. Lisez
l'article. Il n'y a pas de pouvoirs réglementaires.
M. Giasson: Allez donc voir l'article 36.
M. Garon: Ce n'est pas la même affaire. L'article 36, ce
n'est pas la même chose. Là, on règle les terres de
colonisation avec l'article 1. Parlons de l'article 1. On verra l'article 36
plus tard.
M. Russell: M. le Président, je pense qu'avec le
débat...
M. Giasson: Vous allez acquérir en vertu de
règlements, M. le ministre, ne niez pas cela. Quand vous allez
acquérir des immeubles détenus
sous billet de location, pour les modes d'acquisition, cela va prendre
des règlements quelque part.
M. Garon: Pas là. Pas en vertu de cet article. Je vous
l'ai dit hier qu'il y a deux paragraphes. On aurait pu en faire trois.
M. Giasson: Vous allez acquérir comment?
M. Garon: Cela ne concerne pas l'acquisition.
M. Giasson: Non.
M. Garon: Non.
M. Giasson: Vous répudiez totalement les modes
d'acquisition qui étaient définis dans la loi par l'article
40.
M. Garon: Que l'Union Nationale et le Parti libéral
s'engagent des avocats. Il faudrait peut-être que vous engagiez des
avocats.
M. Giasson: Pas besoin d'avocats. Prenez la Loi des terres de
colonisation au chapitre IV des révocations...
M. Garon: C'est un peu comme la loi 116. Quand vous avez
consulté des avocats, à un moment donné, vous êtes
tombés les deux pieds à terre. Avant que vous en consultiez, vous
disiez n'importe quoi.
M. Vaillancourt (Orford): Est-ce que vous êtes d'accord,
par exemple, pour constater qu'avec cette loi vous vous donnez la
discrétion absolue pour acquérir n'importe quelle ferme sans
passer par un processus comme la Loi des terres de colonisation?
M. Garon: Non. Ce qu'on veut faire concerne des lots qui ont
été acquis depuis 1969.
M. Russell: M. le Président, j'avais l'impression que
j'avais la parole.
M. Garon: On veut les remettre dans le régime de banque de
terres plutôt que dans un régime de terres de colonisation.
M. Russell: Je n'ai pas d'objection à ce qu'on intervienne
dans mon exposé. Je vais essayer d'être court et clair. Je sais
que ce n'est pas toujours facile. Je vais tenter de le faire. Comme je le
disais lorsque j'ai commencé mon exposé, je voudrais passer
à travers cette loi le plus rapidement possible. Je pense qu'on pourrait
alléger la discussion de beaucoup si le ministre pouvait demander
à ses fonctionnaires de déposer les règlements.
M. Garon: II n'y en a pas. M. Russell: II n'yen a
pas.
M. Garon: En vertu de l'article 1, il n'y a pas de
règlement.
M. Russell: Je parle à l'article 1, d'accord. On pourrait
peut-être, en vertu de l'article 1, clarifier la situation...
M. Garon: C'est ridicule.
M. Russell: ... de l'article 1, parce qu'elle n'est pas claire.
Les autres qui suivent, ce sont des règlements dans tout. Il n'y a rien
qui ne se fait pas par règlement.
M. Garon: On le dira à la population que vous retardez I
adoption de cela et que si la protection des lots ne se règle pas, cela
dépend des partis d'Opposition. Cela finit là. Vous savez que la
population est tannée de voir ces lots qui niaisent, qui sont
inutilisés, qui doivent être remis à la population.
Qu'est-ce que vous voulez, si l'Opposition ne veut pas.
Vous dites qu'actuellement, dans la loi, on a le droit de
révocation.
M. Russell: Oui.
M. Garon: On a le droit de révocation.
M. Russell: Oui.
M. Garon: Et là, parce que c'est marqué que le
ministre peut acquérir, ce qui est bien moins fort que le droit de
révocation, de toute façon, en vertu du programme de
réaménagement foncier, vous bloquez là-dessus. C'est
ridicule à sa face même. C'est du grand guignol. Qu'est-ce que
vous voulez faire.
M. Russell: M. le Président, je ne bloque pas
là-dessus, mais je vais bloquer sur le projet de loi si le ministre
continue. Je dis qu'actuellement on a une responsabilité qui est de
faire en sorte que le projet de loi soit clair. On a une loi-cadre actuellement
qui va être régie par des règlements. On n'a pas les
règlements devant nous du tout.
M. Garon: Ce n'est pas une loi-cadre, c'est un projet de loi qui
amende une loi existante. Voyons donc! Ne dites pas n'importe quoi. C'est
l'article 29 de la Loi du ministère de l'Agriculture qui est
modifié par l'addition, à la fin, des alinéas suivants. Ce
n'est pas une loi-cadre, voyons donc!
M. Russell: L'article que le ministre lit là, mais je
parle de la loi en général.
M. Garon: Bonne mère! Après cela, on ajoute une
section à la Loi du ministère de l'Agriculture, la section VII.
Ce n'est pas une loi-cadre.
M. Russell: M. le Président, à la suite de la
discussion d'hier qui a eu lieu sur l'article 1, je prétends qu'on va
s'accrocher à cela, cela va être une discussion qui va
s'éterniser.
M. Garon: Eternisons-la.
M. Russell: Ce n'est pas nécessaire.
M. Garon: Vous ravalerez les mêmes paroles que sur la loi
116.
Le Président (M. Laberge): À l'ordre! À
l'ordre, M. le ministre.
M. Garon: Vous vous rappelez ce qui s'est passé sur la loi
116, le même groupe aujourd'hui est obligé de dire qu'il en veut
un plan conjoint dans le porc.
Le Président (M. Laberge): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Russell: M. le Président, attendons...
M. Giasson: ... le ministre lui-même.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Garon: Ah!
M. Giasson: Allez donc au bout de la vérité.
M. Garon: Oui, oui. Il dira dans le public maintenant.
M. Vaillancourt (Orford): Finissez votre phrase.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre, nous sommes
à l'étude du projet de loi no 43 et j'aimerais que nous
continuions dans la pertinence du débat.
M. Russell: Dans le contexte actuel, je ferais une motion
qu'avant de continuer de procéder à l'article 1 du projet de loi
no 43, la commission invite le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation
à distribuer aux membres de la commission le projet de règlements
devant être adopté en vertu des dispositions du projet de loi no
43. J'en fais une motion. Qu'on vote contre si on veut, c'est le ministre qui
en décidera, mais lui aussi prendra ses responsabilités. On dira
qu'on n'a pas pu avoir les règlements pour en discuter
intelligemment.
Le Président (M. Laberge): Puisque vous avez dit que vous
en faites une motion, j'aimerais en prendre connaissance. La motion du
député de Brome-Missisquoi se lit comme suit: "Qu'avant de
procéder à l'étude de l'article 1 du projet de loi no 43
la Commission invite le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation à
distribuer aux membres de la commission les projets de règlements devant
être adoptés en vertu des dispositions du projet de loi no
43."
De la façon dont cette motion est écrite, j'ai des doutes
sur sa recevabilité puisque nous sommes déjà à
l'étude de l'article 1 depuis 17 h 5 hier soir. On dit "avant de
procéder à l'étude". Là-dessus, à sa face
même, il y aurait une difficulté quant à la
recevabilité. Maintenant, je ne voudrais pas faire un débat de
procédure, je ne voudrais pas en entamer un personnellement; si vous
voulez la modifier pour qu'elle soit recevable, j'accepterais qu'elle soit
modifiée.
M. Russell: On va inscrire l'article 2 à la place de
l'article 1, c'est tout.
M. Vaillancourt (Orford): Ce serait bien plus court, M. le
Président, si le ministre avait les règlements; qu'il les
dépose, cela nous permettrait d'étudier la loi dans son ensemble,
avec les règlements.
M. Garon: Je ne vous présenterai pas les
règlements. Les règlements sont un pouvoir du gouvernement, ce
n'est pas un pouvoir de l'Assemblée nationale. C'est un pouvoir du
gouvernement, le pouvoir réglementaire.
M. Vaillancourt (Orford): Je suis bien d'accord, mais...
M. Garon: Respectons donc la loi au lieu d'être
illégaux!
M. Vaillancourt (Orford): Cela arrive assez souvent qu'on
étudie une loi avec les règlements; cela nous permet de mieux
comprendre la loi et assez souvent cela accélère nos travaux.
M. Garon: Pas dans ce cas là!
M. Russell: M. le Président, vous avez un collègue
qui n'est pas de votre avis; il dit qu'avant d'étudier une loi-cadre on
devrait déposer les règlements.
M. Giasson: Une loi-cadre?
M. Garon: Ce n'est pas une loi-cadre.
M. Russell: Cette loi est presque une loi-cadre. Vous avez les
pouvoirs, c'est un chèque en blanc que vous avez là. Vous ne
pouvez pas dire le contraire.
M. Garon: Je ne vous comprends pas. M. le Président...
Le Président (M. Laberge): Je vous redonnerai la parole
là-dessus. J'ai ici la motion qui a été amendée par
le député de Brome-Missisquoi et qui se lit maintenant comme
suit: "Qu'avant de poursuivre l'étude de l'article 1 du projet de loi no
43...". Le texte suivant demeure le même. Cette motion est recevable et
reçue, vous pouvez en disposer selon votre guise. M. le ministre.
M. Garon: Je veux dire une chose, M. le Président. En
deuxième lecture, l'Union Nationale et, notamment, le
député de Brome-Missisquoi se sont levés pour dire que je
n'avais pas besoin de faire cette loi, que j'avais déjà tous ces
pouvoirs, que c'était une loi inutile parce que j'avais tous ces
pouvoirs, que je faisais cette loi inutilement pour faire du "show". Rendue en
commission parlementaire, cette loi est devenue une loi terrible, avec des
pouvoirs nouveaux extraordinaires, c'est devenu une loi-cadre qui bouleverse la
législation actuelle. Quand mentiez-vous? À l'As-
semblée nationale ou en commission parlementaire?
M. Russell: Je présume que j'ai la parole maintenant?
M. Giasson: Vous avez la parole? Allez-y. Le Président
(M. Laberge): Oui.
M. Russell: M. le Président, le ministre lui-même,
hier, nous a dit qu'il avait déjà les pouvoirs de révoquer
les lots; c'est l'article 1. Est-ce que je mens, oui ou non? Est-ce que le
ministre a ce pouvoir, oui ou non?
M. Garon: Oui.
M. Russell: Maintenant...
M. Garon: Ce n'est pas là-dessus.
M. Russell: ... à la section VI de la Loi du
ministère de l'Agriculture: "Le ministre peut élaborer des plans,
programmes ou projets pour favoriser, dans une zone qu'il désigne, le
redressement ou le développement de l'agriculture, une meilleure
utilisation et conservation des ressources agricoles" ainsi de suite.
Il y a les pouvoirs qui continuent: "le ministre peut, avec
l'approbation du gouvernement, assumer la direction et assurer
l'exécution de ces plans, programmes et projets et peut, en vertu de ces
plans, programmes et projets, acquérir, louer ou aliéner..." Vous
avez le pouvoir d'aliéner; vous avez le pouvoir aussi "d'acheter tout
meuble ou immeuble, d'accorder des subventions, des prêts, verser des
primes, allocations ou des dédommagements, exécuter ou faire
exécuter des travaux d'amélioration, de drainage..." Vous avez
tous ces pouvoirs que vous demandez ici. Vous pouvez acheter, vous avez le
pouvoir d'acheter actuellement. Vous avez le pouvoir de révoquer
actuellement.
La seule chose que vous pourriez demander, ce serait un pouvoir
d'expropriation dans les cas que j'ai exposés hier et que j'ai
tenté d'exposer ce matin sur l'article 1, dans les lots de colonisation.
Je dis que vous avez le pouvoir et que vous demandez d'autres pouvoirs, mais
pourquoi?
M. Garon: Je vous le dis depuis hier. On ne demande pas des
pouvoirs au point de vue de la révocation ou de l'acquisition; on a ces
pouvoirs. Je vous dis qu'au point de vue de la révocation, c'est dans la
Loi des terres de colonisation. Au sujet de l'acquisition, on a cela au
chapitre du réaménagement foncier, à la section VI de la
Loi du ministère de l'Agriculture. Mais, pour la transmission, la
revente de ces lots il y en a qui sont éliminés parce
qu'ils n'auraient jamais dû être cultivés, ils auraient
dû rester en forêt, ils ont été cultivés
à tort parce qu'on faisait de l'agriculture dans les roches, dans les
années trente, dans le passé on veut les remettre à
la forêt.
Par ailleurs, pour les remettre à l'agriculture par la location,
la vente, ainsi de suite, on est soumis à la Loi des terres de
colonisation, qui est une loi désuète. C'est tellement vrai que
le ministère ne s'appelle plus le ministère de la Colonisation.
Là, tout simplement, ce n'est pas pour les acquérir ou pour la
révocation, tout cela; on ne veut pas de pouvoirs nouveaux
là-dedans, on a tout ce qu'il faut, mais pour les revendre aux
agriculteurs. Même plus que cela, je vous ai dit et le
député de Montmagny-L'Islet l'a dit, par exemple qu'au
point de vue des parcelles de terre je suis obligé quand
même de suivre ce que les conseillers juridiques du ministère me
disent les résidus de la voirie, si on veut, de façon
systématique, ces parcelles, les transférer au ministère
de l'Agriculture et les mettre en vente aux agriculteurs plutôt que de
les laisser là sur le bord des routes il y a des parcelles qui
ont 60 acres, il y en a de 80 acres et il y en a de 100 acres...
M. Giasson: Vous avez des fermes complètes dans mon
comté...
M. Garon: Je le sais.
M. Giasson: ... propriété du ministère des
Transports.
M. Garon: C'est parce qu'ils avaient besoin de 100 pieds. Mais
que voulez-vous, c'est comme dans le temps de Taschereau, ils expropriaient.
Pourquoi, dans le temps de Taschereau, les chemins étaient-ils croches?
Parce qu'ils faisaient le tour des terres qu'ils voulaient exproprier, ils
allaient en chercher une là, une autre là, et ils retournaient
là.
M. Giasson: Ils n'expropriaient pas.
M. Garon: Ils expropriaient; ils achetaient les terres.
M. Giasson: Bien non, ils se les faisaient donner à
l'époque.
M. Garon: Non, ils expropriaient.
M. Giasson: Au temps de Taschereau, allez voir. Si tu voulais
avoir un chemin, il fallait que tu donnes l'emprise nécessaire à
la route, sinon pas de chemin. C'était cela, l'époque de
Taschereau.
M. Garon: Non, vous irez voir.
M. Giasson: C'est sous Duplessis que cela a commencé. (10
h 45)
M. Garon: Les conseillers juridiques du ministère me
disent que, dans l'état actuel de la législation, on ne devrait
pas d'une façon systématique aller chercher des parcelles de
terre, les transférer au ministère et, après cela, les
vendre aux agriculteurs avec des lots contigus. On n'a pas ces pou-
voirs-là. Que voulez-vous? Je suis, quand même,
obligé de fonctionner avec les conseillers juridiques du
ministère. Les conseillers juridiques disent qu'on n'a pas ces
pouvoirs-là. C'est un peu comme pour un autre projet de loi que j'aurai
l'occasion de déposer cet après-midi; on parle de sa
constitutionnalité. Quand les gens me disent: Là-dessus, il faut
éviter telle chose, il y a tel ou tel problème, je ne peux pas
agir, au ministère, comme ministre, fonctionnaire, conseiller juridique
et tout cela, parce que j'ai comme politique de suivre les opinions des
conseillers juridiques du ministère. Ils me disent: On a besoin de ces
pouvoirs pour faire le transfert de ces parcelles pour ne pas être soumis
à des lois qui sont dépassées, comme la Loi des terres de
colonisation. On n'a pas le pouvoir de faire de la location et tout cela. Que
voulez-vous que je vous dise?
M. Giasson: Vous demandez de nouveaux pouvoirs.
M. Garon: Pour la revente des terres. M. Giasson: Pour
l'acquisition. M. Garon: Pas pour l'acquisition.
M. Russell: Vous demandez un pouvoir d'acquisition.
M. Garon: On l'a, le pouvoir d'acquisition, en vertu de la Loi du
réaménagement foncier. On l'a.
M. Russell: Vous avez le pouvoir de revendre et de louer. Cela
existe déjà dans la loi. Lisez vous-même la section VI au
complet.
M. Garon: Que voulez-vous que...
M. Russell: Les articles 24, 25 et 26 vous donnent tous ces
pouvoirs.
M. Garon: Quand il s'agit de lots sous billet de location qui
sont revenus au ministère, on n'a plus le droit de les revendre.
M. Giasson: Mais vous pouvez les céder au ministère
des Terres et Forêts.
M. Garon: Oui, pour la forêt. On veut céder pour la
forêt ce qui n'a pas une vocation agricole, mais céder à
l'agriculture ce qui a une vocation agricole avec des regroupements ou une
réorganisation de ces terres. On n'a pas ces pouvoirs.
M. Giasson: Mais pourquoi dites-vous cela, M. le ministre? Y
aurait-il eu autant de décisions illégales prises dans la
province de Québec? Des lots détenus sous billet de location ont
été révoqués en vertu du chapitre IV de la Loi des
terres de colonisation, soit des pouvoirs de révocation. Lorsque vous
avez loué de nouveau à d'autres cultivateurs ces terres qui
avaient été détenues sous billet de location,
révoquées en vertu des pouvoirs de la loi, vous avez posé
des gestes illégaux quand vous avez procédé ainsi.
M. Garon: On a le droit de les louer de nouveau, mais on n'a pas
le droit de les vendre. Il faudrait que ce soit le ministère qui fasse
cela, alors qu'on veut faire tout cela au sein de l'Office du crédit
agricole, avec un organisme spécialisé là-dedans. On veut
que pour toutes ces terres, cela se fasse au même endroit. Là, il
y a la concession des terres. On a l'Office du crédit agricole qui
administre un réaménagement foncier. Il y a toutes sortes
d'affaires semblables. Là, on a le droit de louer, mais on n'a pas le
droit de vendre. Ce qu'on veut, c'est faire faire cela par le même
organisme.
M. Giasson: C'est le ministère qui loue. Ce n'est pas
l'office.
M. Garon: Le ministère a le droit de louer et l'office n'a
pas le droit de louer. Alors, tu es pris dans cela. L'office administre le
réaménagement foncier. Nous administrons les terres de
colonisation. On n'a pas le droit de faire une affaire; l'autre a le droit de
faire l'autre affaire et cela devient tout un fouillis administratif. Tout cela
n'a qu'un but, c'est d'avoir un seul régime juridique avec une banque de
terres, des terres qu'il y a et qui sont bonnes. On va envoyer cela là
et on va pouvoir les louer et les vendre.
M. Russell: M. le Président, je...
M. Garon: C'est cela le but. Ce n'est pas au point de vue de
l'acquisition, pas une minute.
M. Vaillancourt (Orford): Vous allez avoir le droit de les louer
et de les vendre.
M. Garon: Oui, c'est cela qu'on dit dans la loi.
Le Président (M. Laberge): Je vous rappelle, messieurs,
que j'ai laissé passer certaines questions...
M. Garon: C'est cela le but.
Le Président (M. Laberge): ... mais nous avons une motion
sur la table.
M. Garon: Ce sera cela le but. C'est là que la banque de
terres entre en fonction. C'est pour cela que je dis que la banque de terres
n'est pas là pour acquérir. Je l'ai toujours dit, c'est pour
louer et vendre les terres.
M. Giasson: C'est pour acquérir d'abord. Si vous voulez
les louer et les vendre, il va falloir que...
M. Garon: Les pouvoirs d'acquisition, on les a tous
actuellement.
M. Giasson: Non, vous ne les avez pas tous. Vous avez des
pouvoirs de révocation dans la loi, pas d'acquisition. Voyons!
M. Garon: Dans la Loi du ministère de l'Agriculture, on a
des pouvoirs d'acquisition. On n'a pas besoin des pouvoirs d'acquisition. On
les a, les pouvoirs d'acquisition.
M. Giasson: Dans les lots détenus sur billet de
location?
M. Garon: Aussi.
M. Giasson: En vertu de votre programme de
réaménagement foncier.
M. Garon: Oui. M. Giasson: Point.
Une voix: Qui est adopté sous la loi du ministère
de l'Agriculture.
M. Russell: Si vous regardez le programme de
réaménagement foncier, vous avez, à l'article 1, un
programme d'achat, d'amélioration des terres ainsi que de leur location
et de leur vente à des agriculteurs sérieux qui désirent
agrandir leur exploitation. Vous l'avez, suivant le programme de
réaménagement, le pouvoir de vendre ces terres-là.
M. Garon: On ne peut pas vendre des lots qui étaient sur
billet de location. Il y a trois ou quatre systèmes juridiques qui sont
dépassés. Le but de tout cela, c'est de simplifier. Vous avez
remarqué à un moment donné, vous allez le remarquer
qu'on ne nomme pas l'organisme. Pourquoi? Parce que, dans l'état
actuel des choses, ce qui est le plus simple, c'est de faire passer les lots,
les transférer et les mettre dans un organisme et, à ce
moment-là, on les fait administrer par l'Office du crédit
agricole. On ne peut pas présumer de l'avenir. L'organisme actuel, c'est
l'Office du crédit agricole parce que c'est lui qui s'occupe de l'aspect
immobilier. Il y a toutes sortes de chinoiseries au point de vue administratif.
Il y a même des choses qui ont été faites à un
moment donné... Dans certains cas je ne me rappelle plus de tous
les cas il faut, pour un lot, que je signe un arrêté en
conseil pour le transférer au ministère des Terres et
Forêts. Quand ils l'ont eu, il faut qu'ils signent un autre
arrêté en conseil pour me le redonner afin que je le mette dans un
autre programme. Autrement, on n'a pas le droit de faire certaines choses.
C'est ridicule. Ce n'est que du brassage de papier.
M. Russell: Je suis bien d'accord avec le ministre qui veut
essayer d'alléger la procédure.
M. Garon: Oui.
M. Russell: Mais cela semble vouloir l'alourdir et je vais vous
dire pourquoi! Écoutez! Vous avez un pouvoir qui existe
déjà. On ne révoque pas ce pouvoir; on le garde.
M. Garon: Au point de vue de l'acquisition, on a tous les
pouvoirs qu'il faut.
M. Russell: Oui, la vente aussi.
M. Garon: Hein?
M. Russell: La vente aussi.
M. Garon: Non, pas les lots sur billet de location.
M. Russell: Ah bon!
M. Garon: C'est pour cela qu'on dit: "À compter de cette
acquisition, un tel immeuble n'est plus soumis à cette loi". Quand vous
dites: "À compter de cette acquisition, ce billet de location est
révoqué de plein droit et la révocation a le même
effet que si elle était faite par le ministre en vertu de la section IV
de cette loi. À compter de cette acquisition, un tel immeuble n'est plus
soumis à cette loi". La phrase importante dans tout ce paragraphe, c'est
celle-là. On rétroagit au 22 décembre 1969. Toutes les
terres qui ont été acquises par le réaménagement
foncier, ce sont des terres qui étaient sur billet de location. On n'a
pas le droit de les revendre. L'office n'a pas le droit de les louer, sauf s'il
nous transfère les terres que nous louons. Nous ne sommes pas
organisés au ministère. On ne va pas créer trois ou quatre
bureaux, un à l'office, un au ministère...
Au point de vue administratif, cela n'a pas de bon sens. Ce qui arrive,
c'est que vous avez actuellement une situation où les gens voudraient
avoir ces lots pour faire quelque chose avec mais ces lots sont
paralysés. Les gens sont en maudit, ils font des manifestations et ils
disent "les lots du bon Dieu". Ils appellent cela les lots du bon Dieu. Ils
sont là et ils ne peuvent y toucher parce que c'est un fouillis
administratif. C'est ridicule.
M. Vaillancourt (Orford): Vous avez dit, M. le ministre, que
toutes les terres sous billet de location avant le 22 décembre 1969,
vous ne pourrez pas les acquérir.
M. Garon: Mais non.
M. Vaillancourt (Orford): C'est l'inverse?
M. Garon: Mais non, elles ont été acquises.
M. Vaillancourt (Orford): S'il y en a qui n'ont pas
été acquises?
M. Garon: C'est le réaménagement foncier qui a
commencé à cette date. Depuis ce temps, le
réaménagement foncier a acquis des terres et elles sont
là. Il y a de ces terres dans lesquelles il faut faire le ménage.
Je peux vous dire qu'actuellement on est en train de faire le ménage
là-dedans. Qu'est-ce que sont ces terres? Là-dedans, il y a des
terres de roche. J'ai dit au ministère: Je ne
veux pas qu'on garde des terres de roche et des affaires comme cela. Ce
qui n'est pas bon pour l'agriculture, on renvoie cela aux Terres et
Forêts parce que, dans les terres de roche, on peut quand même
planter des arbres, ils poussent, mais semer se fait mal. Là, ce qu'on
veut faire, c'est le ménage dans tout cela. Je ne veux pas que le
ministère garde des terres comme cela. Je veux qu'il les loue avec
option d'achat ou qu'il les vende. Pour le gouvernement, avoir des terres qui
sont là, cela ne donne rien. Au fond, il faut brasser le papier. Il faut
avoir toutes sortes de dossiers sur chacun de ces lots. Pourquoi ne pas les
liquider et les remettre au public? C'est ce que le public veut actuellement.
Ce qui n'est pas bon pour l'agriculture, pourquoi l'administrer?
Le Président (M. Laberge): Sur la motion de
dépôt de règlements, est-ce que vous voulez intervenir?
M. Giasson: M. le Président, j'aimerais intervenir.
Le Président (M. Laberge): Je vous donne la parole, M. le
député de Montmagny-L'Islet. Ce sont tous des noms
composés d'ailleurs.
M. Giasson: Le ministre nous a dit tout à l'heure qu'en ce
qui a trait à l'article 1 de la loi il n'y avait pas de
règlements à déposer parce que les règlements
s'appliquaient aux autres articles subséquents. J'invite le ministre
à lire avec moi. À l'article 1, il est dit: "À ces fins,
le ministre peut, notamment, acquérir tout immeuble détenu en
vertu d'un billet de location émis sous l'autorité de la Loi des
terres de colonisation". "Peut acquérir tout immeuble". Or, pour faire
cette acquisition, le ministre aura besoin de règlements. C'est
tellement vrai qu'à l'article 36 il est dit: Le lieutenant-gouverneur en
conseil peut, par règlement, prescrire: 1°les bases
générales d'évaluation des immeubles à
acquérir..." Donc, vous allez avoir des règlements, M. le
ministre, qui vont s'appliquer nécessairement aux dispositions de
l'article 1 de la loi. "2° les critères permettant de fixer le prix
d'acquisition ou d'aliénation ou le coût du loyer de tels
immeubles". Donc, ces règlements ont une relation directe avec le
pouvoir d'acquisition d'immeubles détenus en vertu de billets de
location.
M. Garon: II faudrait que vous lisiez la phrase au complet.
Là, vous lisez l'article 36, qui est dans la section VII, alors que
l'article 1 n'est pas dans la section VII. Que dit cet article? Le
lieutenant-gouverneur en conseil peut, par règlement, prescrire: 1°
les bases générales d'évaluation des immeubles à
acquérir ou à aliéner en vertu de la présente
section". La présente section; l'article 1 ne fait pas partie de la
présente section. Alors, l'acquisition dont vous parlez, c'est l'article
32. Pas l'article 1.
M. Giasson: Bon. En vertu...
M. Garon: Cela ne change rien par rapport à cela.
M. Giasson: En vertu de quels règlements, critères
ou normes vous allez acquérir ce que vous avez défini à
l'article 1?
M. Garon: C'est en vertu des règlements existants du
réaménagement foncier.
M. Giasson: Quelles sont les normes de base de ces
règlements?
M. Garon: C'est ce que je dis depuis le début pour
l'acquisition dont il est question, dans le cas d'un immeuble: Sous billet de
location acquis par le ministre à compter du 22 décembre 1969 ou
qu'il va acquérir dans l'avenir aux fins de plans, programmes et projets
visés à l'article 28 de la loi. Le réaménagement
foncier, cela a été constitué à partir de l'article
28 de la loi. Je vous ai dit au début, quand je vous ai donné les
explications, que le ministre pourra en disposer sans être astreint au
régime de la Loi des terres de colonisation. C'est clair. C'est que
c'est le réaménagement foncier qui prévoit cela. Les
immeubles sous billet de location acquis par le ministre le 22 décembre
1969 et pour l'avenir, il pourra en disposer après avoir adopté
cet article, sans être astreint au régime de la Loi des terres de
colonisation.
M. Giasson: Ce n'est pas l'arrêté en conseil.
Le Président (M. Laberge): La motion du
député de Brome-Missisquoi est-elle retirée ou
autrement?
M. Russell: M. le Président, je pense que, dans le
contexte actuel, la motion veut que les règlements soient
déposés pour toute la loi pour éviter cette
ambiguïté qui semble exister. On vient d'apprendre les
règlements existants qui vont être appliqués pour l'article
1 ici, mais on sait que, pour les autres, ce ne sont pas les mêmes
règlements. Ce sont d'autres règlements qui vont s'appliquer.
À ce moment, si on veut faire une coordination de ces règlements,
je pense que cela revient au ministère de faire cela et de les
déposer devant la commission pour qu'on puisse intelligemment regarder
cela et rapidement et éviter beaucoup de discussions et de malentendus.
Je vous avoue honnêtement j'ai écouté le ministre
hier à la suite d'une question que je lui avais posée que
la clarification qu'il a apportée ne m'a pas satisfait et n'a pas
satisfait non plus le député de Mégantic-Compton. Je ne
dis pas que cela va se faire, mais, s'il arrive des situations difficiles
à régler pour un fonctionnaire, il va être obligé de
le faire. S'il avait une réglementation on pourrait dire: Au moins, on
s'établit sur une réglementation. À ce moment, le ministre
va me dire: On prendra nos responsabilités. C'est ce qu'on tente de
faire actuellement nous autres, prendre nos responsabilités, en discuter
en temps et lieu. C'est le temps et ce sont les lieux pour en discuter. Je
pense que, si on avait la réglementation pour en discuter intelligemment
avec le ministre, on pourrait procéder beaucoup plus rapidement à
l'étude de cette loi 43.
Je ne condamne pas plus que cela. Actuellement, je ne pense pas que la
loi soit totalement nécessaire. Il aurait peut-être pu, avec
quelques petits amendements aux lois existantes, éviter de
déposer une loi qui semble faire double emploi.
M. Garon: Là, elle n'est plus nécessaire. Je ne
comprends pas.
M. Russell: M. le Président, M. le ministre tente de
dramatiser et cela ne m'impressionnera pas...
M. Garon: C'est ce que vous avez fait tantôt.
M. Russell: ... parce que je lui ai dit en Chambre qu'elle ne me
semblait pas utile. Je l'ai dit en Chambre qu'elle était inutile. Pour
ce qu'il a dit hier, ce qu'il tente d'expliquer actuellement, il peut y avoir
quelques petits amendements à la loi existante et cela va régler
tout le problème. Ce n'est pas nécessaire d'avoir toute une loi.
Il semble y avoir dédoublement parce que je peux lire l'article 32, je
peux lire l'article 33, je peux trouver les mêmes pouvoirs dans le
chapitre 6 de la Loi du ministère de l'Agriculture. (11 heures)
Écoutez, il faut quand même être raisonnable. Je ne
suis pas un avocat comme le ministre. Je suis un profane, mais on en a un
avocat, nous aussi, qui est député. Je me suis adressé
à lui, je suis allé le voir avec cela et je lui ai demandé
s'il y avait une différence et il m'a dit: Je n'en vois pas. C'est pour
cela que je dis au ministre que moi non plus je n'en vois pas et je demande au
ministre pourquoi deux lois qui donnent les mêmes pouvoirs, des pouvoirs
parallèles. Peut-être que cela va régler la situation,
peut-être qu'on va voir par les règlements qu'il y a certaines
choses qu'il ne peut pas faire par réglementation et que c'est
nécessaire qu'il apporte un projet de loi comme cela. S'il n'a pas cela,
comment voulez-vous qu'objectivement on tente de démêler tout
cela. On n'est pas ici pour essayer de mêler une situation.
Le rôle, la responsabilité du ministre, accompagné
de ses fonctionnaires qui connaissent très bien le service et le
ministère, c'est d'essayer de clarifier la situation devant les membres
de la commission. C'est là le rôle du ministre, appuyé par
ses fonctionnaires. Eux savent ce qu'ils veulent, ils savent ce dont ils ont
besoin. Nous, nous pourrons à ce moment discuter intelligemment et faire
en sorte qu'on soit satisfait quand on sortira d'ici. Sans cela, comment
voulez-vous, si on n'est pas satisfait... Je sais que le ministre peut, avec le
rouleau compresseur, adopter la loi, même si on n'est pas satisfait,
monter en Chambre et nous faire voter contre. Avec le rouleau compresseur, il
va l'adopter. Ce n'est pas une façon de procéder pour adopter des
lois.
Je pense qu'il y a un moyen à notre disposition ou que le
ministre possède: c'est de déposer les documents
nécessaires. Il pourrait facilement déposer tous les documents de
la loi qui a été appliquée sur le
réaménagement foncier et dire: Messieurs, on avait une loi qui a
été adoptée de bonne foi, on a tenté de l'appliquer
du mieux qu'on a pu, mais elle n'a pas fonctionné. Voyez-vous, cela a
été un fiasco parce qu'on a essayé telle et telle chose,
et cela n'a pas marché. On a dépensé tel et tel montant
d'argent et on n'a pas réussi l'objectif qu'on poursuivait. Il pourrait
nous déposer cela en disant: C'est pour ces raisons qu'on sent le besoin
d'intervenir avec ce nouveau projet de loi; et voici les règlements qui
vont accompagner la loi et, avec ce projet de loi, de la façon dont on
va l'appliquer, cela va régler la situation qui existe actuellement, en
nous expliquant réellement la situation. On va être d'accord
là-dessus.
On veut l'aménagement du territoire agricole autant que le
ministre, autant que ses fonctionnaires. Mais on dit, actuellement, qu'il y a
une ambiguïté et, plus cela va, plus cela semble vouloir se
mêler. Je voudrais essayer de faire clarifier cela. C'est la seule raison
qui m'a amené à déposer cette motion, ce matin. Parce
qu'à la suite de la discussion d'hier, je n'étais pas tellement
heureux d'avoir pris une heure et de ne pas avoir obtenu plus d'information que
j'ai pu en obtenir, pour me satisfaire, pour que je puisse répondre au
moins à mes collègues qui ne pouvaient pas venir en commission,
parce qu'il y a d'autres commissions qui siègent, mais qui sont pris
pour répondre à des électeurs qui auront des petits
problèmes qui vont se présenter dans leur comté.
C'est cela la raison, et je pense que le ministre devrait
répondre rapidement à cette demande et faire en sorte qu'on
puisse continuer les travaux de cette commission.
M. Garon: On peut voter.
Le Président (M. Laberge): II n'y a pas d'autres
intervenants, alors vous demandez le vote.
Sur la motion du député de Brome-Missisquoi, j'appelle le
vote. M. Lavigne (Beauharnois). M. Beauséjour (Iberville).
M. Beauséjour: Contre.
Le Président (M. Laberge): M. Russell
M. Russell: Pour.
Le Président (M. Laberge): M. de Bellefeuille. M.
Garon.
M. Garon: Contre.
Le Président (M. Laberge): M. Giasson.
M. Giasson: Pour.
Le Président (M. Laberge): M. Lévesque.
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):
Contre.
Le Président (M. Laberge): M. Rancourt. M. Rancourt:
Contre.
Le Président (M. Laberge): M. Vaillancourt. M.
Vaillancourt (Orford): Pour.
Le Président (M. Laberge): La motion est donc
rejetée par quatre voix contre et trois voix pour. Je demande maintenant
si l'article 1 sera adopté?
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Russell: Je regrette que le ministre ait adopté cette
attitude de rouleau compresseur. Je ne suis pas satisfait, actuellement, de
l'article 1. Ce n'est pas la réponse qui satisfait à la question
que j'ai posée hier, à savoir qu'il y aura des lots qui sont
occupés actuellement, dont les occupants ne se conforment pas tout
à fait à la loi qui régit ces lots, et que le ministre n'a
pas le pouvoir d'expropriation, ce qui fera en sorte qu'il sera obligé,
peut-être, pour agrandir la terre voisine, de révoquer le billet
de location.
Je voudrais que le ministre nous dise clairement s'il a l'intention
d'utiliser son pouvoir dans ce sens-là, si le résident refuse de
vendre ce lot et que le ministre insiste pour agrandir la terre du voisin qui
veut l'acquérir.
M. Garon: L'article 1, comme je l'ai mentionné à
plusieurs reprises, ne comporte aucun pouvoir d'expropriation; il n'ajoute
aucun pouvoir à ce qui existe à l'heure actuelle au point de vue
de l'acquisition des lots. Le pouvoir de révocation est contenu dans la
Loi des terres de colonisation. Le pouvoir d'acquisition est prévu dans
la Loi du réaménagement foncier et, à ce point de vue, il
n'y a rien de changé par rapport à ce qu'il y avait
antérieurement.
M. Russell: Si je comprends bien, le ministre ne veut pas
répondre à l'article positivement. Je sais qu'il a actuellement
le pouvoir de révoquer, mais, en vue de cette nouvelle politique qu'il
veut instaurer à l'intérieur du ministère, telle qu'il l'a
énoncée dans son exposé en Chambre, dans des cas bien
particuliers cela peut se présenter, par exemple si un voisin voulait
agrandir sa ferme et se conformer justement à cette politique
qu'énonce le ministre. On sait qu'il y a des gens qui sont
entêtés. Ils ont un lot voisin qui n'a pas de lettres patentes,
mais ils ont habité là depuis nombre d'années d'une
façon quasi illégale ou tolérée, si vous voulez. Le
ministre pourra le révoquer, s'il le veut. La question est: Est-ce qu'on
insistera pour révoquer ou si on va continuer à appliquer la
tolérance qui existe actuellement?
M. Garon: Ce que le projet de loi vise à faire au fond,
c'est remettre aux gens les lots qui ont été
révoqués dans le temps de l'Union Nationale ou du Parti
libéral, les lots qui ont été enlevés aux gens
d'une façon ou d'une autre par le Parti libéral et l'Union
Nationale. Le gouvernement du Parti québécois veut faciliter la
transmission de ces lots aux gens.
M. Giasson: C'est la meilleure qu'on aura entendue!
M. Garon: C'est ce que cela vise. Ces lots... M. Giasson:
C'est la meilleure! Notez cela.
M. Garon: ... qui sont actuellement dans les mains du
ministère de l'Agriculture, sont essentiellement des lots qui ont
été acquis en vertu de programmes qui ont été faits
sous l'Union Nationale...
M. Russell: Mais appliqués par le Parti
libéral.
M. Giasson: Comme petit politicien, on ne peut pas faire
mieux!
M. Garon: Vous voulez jouer la "game", on va la jouer
complètement.
M. Giasson: D'accord, allez-y. Sortez-nous-en d'autres comme
celle-là!
M. Garon: Je vous dis depuis le début qu'on ne change pas
les méthodes d'acquisition de ces lots, mais il y a actuellement un tas
de lots qui sont entre les mains du ministère de l'Agriculture parce
qu'ils ont été révoqués sous le Parti
libéral et sous l'Union Nationale, parce qu'ils ont été
acquis sous l'Union Nationale ou sous le Parti libéral. Ces lots sont
inutilisés. Ils sont dans les mains du ministère de l'Agriculture
qui n'a pas les instruments juridiques et administratifs requis pour les
remettre facilement.
M. Giasson: C'est faux. Vous pouvez les remettre aux Terres et
Forêts. Arrêtez donc de charrier, ce matin!
M. Garon: Oui, mais...
M. Giasson: Arrêtez donc de charrier!
M. Garon: ... ils ne peuvent pas être remis facilement pour
l'agriculture.
M. Giasson: Petit politicien!
M. Garon: Ils peuvent être remis à la forêt,
mais nous ne remettons à la forêt que ce qui n'a pas de vocation
agricole. On n'a pas les instruments pour les remettre facilement aux
agriculteurs. Ce que nous voulons faire par ces lois, c'est faciliter la remise
de ces lots à la propriété privée par la vente, la
location ou la location avec option d'achat à des gens qui veulent
cultiver ces terres pour l'agriculture.
M. Russell: Le ministre nous affirme ce matin que des lots ont
été révoqués dans le temps du Parti libéral
et de l'Union Nationale. Comme il est
tellement sûr de lui-même, il doit certainement savoir quel
est le nombre de ces lots, dans quelles régions ont été
révoqués ces lots et quelle est la superficie de terre
concernée. Quelle sera la superficie de terre qui ira à
l'Agriculture et quelle sera celle qui sera remise aux Terres et Forêts
pour des fins forestières? Vous devez être au courant pour faire
les accusations que vous faites ce matin.
M. Garon: J'ai dit qu'au ministère il y en a qui ont une
vocation agricole et il y en a qui n'ont pas de vocation agricole. Il n'y avait
aucun inventaire de fait à ce point de vue au ministère quand
nous avons pris le pouvoir; les lots restaient là et pourrissaient
là.
Actuellement, nous sommes à faire l'inventaire de ces lots en
fonction de leur valeur agricole et, comme je vous ai dit hier et que je vous
ai répété aujourd'hui, ceux qui n'ont pas de vocation
agricole, qui sont, par exemple, du sol 5, 6 et 7, qui n'ont aucune vocation
agricole en vertu de la classification des terres, sont remis d'une
façon systématique au ministère des Terres et
Forêts.
Quand il s'agit simplement, si on veut, de "spots", ou de petites
parcelles sur lesquelles on pourrait faire de l'agriculture à
l'intérieur de grands ensembles sur lesquels il ne serait pas possible
de faire de l'agriculture, c'est remis aussi au ministère des Terres et
Forêts.
Nous voulons faire le ménage dans tous ces lots et
transférer à la banque de terres les lots qui ont une vocation
agricole, en tenant compte des régions dans lesquelles on est. Si on est
dans le Bas-Saint-Laurent, dans la Gaspésie, dans les Cantons de l'Est,
dans l'Abitibi ou dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean, on va tenir compte de la
réalité. Les terres sur lesquelles cela ne donne rien d'inciter
des familles à s'établir, leur faire croire qu'elles peuvent
gagner leur vie alors qu'elles ne pourront pas gagner leur vie en agriculture,
ces terres ne seront pas gardées pour l'agriculture mais remises au
ministère des Terres et Forêts parce qu'elles pourront servir
à des gens qui gagnent leur vie dans la foresterie.
Celles qui ont une vocation agricole, nous allons, par des programmes de
remise en valeur, travailler pour remettre ces terres en valeur et,
après cela, les remettre pour l'agriculture à ceux qui voudront
les acquérir ou les louer avec bail ordinaire, avec bail
emphytéotique ou avec bail avec option d'achat.
Ce sont des instruments modernes. Le bail emphytéotique, par
exemple, dans le domaine de la location des terres, va devenir de plus en plus
une forme de tenure de terre; c'est une formule qui n'a jamais
été utilisée au Québec et qui a des avantages
considérables. Je peux vous dire que c'est moi qui ai
suggéré cette formule quand j'ai rencontré les
expropriés de Mirabel, par exemple, parce qu'il y a un dilemme important
dans l'affaire de Mirabel. Je suis celui qui a suggéré le bail
emphytéotique parce que cela permet de répondre exactement aux
besoins qu'ont les agriculteurs de ces lots qui ne pouvaient pas, par exemple,
être vendus. Ce sont des formules modernes qui peuvent être
utilisées dans la transmission de ces lots à ceux qui veulent les
utiliser. Les lois qu'on a actuellement pour le faire sont
désuètes.
M. Giasson: M. le Président, le ministre vient de nous
dire que les lois existantes sont désuètes. Par contre, il est
sans doute au courant que, déjà, son ministère loue
à des agriculteurs des terres qui avaient été
détenues autrefois sous billet de location et qui ont été
révoquées. Je ne pense pas que ce soit illégal. Les
locations qui ont été faites à des cultivateurs de mon
comté ne doivent pas être illégales.
M. Garon: Ce n'est pas illégal, au ministère, de
faire des locations. Mais ce que je veux dire, c'est qu'il y a
différents types de tenure pour des terres. Il y a des gens qui veulent
louer des terres, qui sont intéressés à développer
des terres avec une location. Mais la mentalité au Québec,
actuellement, dans l'ensemble du Québec, n'est pas faite à
l'idée de la location.
La plupart des gens, pour développer une terre, veulent
l'acquérir. On va essayer la formule du bail emphytéotique parce
que la valeur ajoutée dans l'amélioration foncière va se
refléter pour l'agriculteur dans son bien qui va lui appartenir. Cette
partie va lui appartenir. Mais...
M. Giasson: C'est un bon argument.
M. Garon: ... la location n'est pas une formule qui correspond,
je dirais, à la mentalité actuelle; peut-être que dans dix
ans, dans quinze ans, ce sera possible. Avec la rareté du sol, avec
l'inflation considérable, avec les instruments de protection contre les
changements de valeur de la monnaie dans le monde entier et au Québec en
particulier, on voit des phénomènes qui ne se produisaient pas
auparavant, et les gens investissent dans le sol pour garder la valeur de leurs
biens.
Il est possible qu'à ce moment-là on voie de nouvelles
formes, non pas pour exploiter, mais qu'on voie cela a été
dit à la conférence socio-économique sur les
céréales par, notamment, des banquiers dans certains
endroits, aux Etats-Unis ou ailleurs, de nouvelles formules de tenure de sol
à cause de la situation actuelle, la situation financière
internationale, la situation monétaire internationale. (11 h 15)
C'est possible que cela se produise. Mais si on veut faire quelque chose
à ce moment-ci, il faut se donner des instruments du temps actuel. Dans
dix, quinze ou vingt ans, les mentalités auront probablement
évolué; mais là, il faut tenir compte d'une
évolution historique. Ici, les gens sont habitués à
acquérir le sol. Rares sont ceux qui développent
véritablement une terre lorsqu'elle est sous location ordinaire, par
exemple, placer du drainage. Ici, au Québec, on a besoin de beaucoup de
drainage à cause du genre de climat qu'on a, des précipitations.
Qui va investir dans le drainage?
Cette année, on s'en va vers 150 000 acres drainées. Je
peux vous dire qu'en 1977, 1978 et 1979 on aura sans doute plus fait dans le
drainage que de 1908 à 1976 inclusivement c'est quand même
quelque chose en changeant les méthodes pour le faire.
Actuellement...
M. Russell: Cela a dû commencer en 1867.
M. Garon: Pardon?
M. Russell: Cela a dû commencer en 1867.
M. Garon: Non. Cela a commencé en 1908, le drainage
souterrain. Je parle de drainage souterrain. Evidemment, ce n'est pas en 1908
ou en 1910. J'aurais pu dire 1940, parce que cela a commencé
plutôt vers 1940. Mais qui va drainer, dépenser? J'ai vu cette
année une terre qui a été drainée par un
agriculteur qui a reçu une subvention de $80 000 pour du drainage. C'est
quelqu'un qui est dans les céréales. Il a drainé entre 400
et 500 acres. C'est la première année, cette année, qu'on
accorde des subventions qui dépassent $25 000 par terre pour du
drainage. Il y a plusieurs cas, dans Iberville, dans la région de
Saint-Hyacinthe, dans la région de Nicolet également. Il y a des
cultivateurs qui décident à un moment donné de drainer
leur terre au complet. Au ministère, on m'a dit que c'est la
première fois cette année. Comme c'est un programme en bas de $25
000, le sous-ministre ou le ministre n'ont pas besoin de signer. Mais on a eu
besoin de signer plusieurs documents parce qu'il y a eu du drainage qui
dépassait $25 000 de subvention, du drainage souterrain. Ce sont toutes
des affaires qui se tiennent ensemble, qui font partie d'un ensemble et ce
projet de loi vient permettre de faciliter certaines choses au point de vue des
terres agricoles, la vente et la location de terres agricoles à des
agriculteurs. On pense que cela va dans le même sens et qu'on va avoir
besoin de ces instruments-là.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: M. le Président, tout à l'heure, M. le
ministre disait que l'usage du bail emphytéotique pour la tenure serait
une bonne chose, oui, mais il y a un inconvénient. Le terme est
limité entre 10 ans et 99 ans. Vous savez qu'en fait de transmission de
ferme cela arrive souvent que, trois générations, les 99 ans sont
passés. Que va-t-il arriver?
M. Garon: C'est vrai ce que vous dites. Ce qu'on pense comme
formule, c'est que le bail emphytéotique pourrait être pour plus
de neuf ans. Il pourrait être pour 25 ou 30 ans selon l'âge de
celui qui fait la demande, mais avec une possibilité de renouvellement.
Il ne serait pas pour 99 ans. Il serait pour une vie humaine. Il pourrait aller
jusqu'à une vie humaine, mais avec une possibilité de le
transmettre à ses héritiers.
M. Mathieu: Le bail emphytéotique ne peut pas être
reconduit, d'après le Code civil.
M. Garon: Non. On pourrait, par exemple, prendre l'engagement que
celui qui en est le bénéficiaire pourra déterminer qui il
voudrait, avec qui on contracte. On pourrait trouver un engagement du
gouvernement.
M. Russell: M. le Président, j'avais posé une
question au ministre tout à l'heure et j'espère que vous vous
êtes rendu compte que je n'ai pas eu de réponse à ma
question. Il a fait une accusation, à savoir qu'il y avait eu des terres
révoquées par l'Union Nationale et par le Parti libéral,
qu'il les possédaient actuellement et dont il ne pouvait pas disposer.
Je lui ai demandé de me donner le nombre d'acres qui avaient
été révoquées par l'Union Nationale et le nombre
d'acres révoquées par le Parti libéral, le nombre d'acres
qui pourraient être utilisées à des fins agricoles dans
l'avenir, qu'il pourra revendre ou louer, le nombre d'acres qui doivent
être retournées aux Terres et Forêts à des fins de
développement forestier.
M. Garon: Cela peut prendre un certain délai. Je peux vous
donner facilement le nombre de lots vacants qui appartiennent au
ministère de l'Agriculture. Vous allez être étonné,
mais il y en a un très grand nombre. Quant à la valeur de ces
lots, je ne pourrais pas vous donner cela immédiatement. On est en train
de faire ce travail. On a commencé. Ce travail n'était pas fait
au ministère. Les titres étaient dans les classeurs, mais il n'y
avait pas d'évaluation des lots.
On est en train, avec le service de la protection du territoire
agricole, selon des critères d'évaluation, la valeur du sol, la
"pierrosité", les parcs, etc., de faire l'évaluation du potentiel
géophysique du sol, afin de déterminer si ces terres-là
sont bonnes ou non pour l'agriculture... Quand elles ne sont pas bonnes
ce que je vous disais tantôt on les remet au ministre des Terres
et Forêts. Cet inventaire va peut-être prendre je pourrais
m'engager à vous le donner un an, deux ans. C'est
considérable. Ce ne sont pas des dizaines et des centaines, mais ce sont
des milliers d'acres. Je ne voudrais pas m'avancer plus là. On pourrait
quasiment dire des dizaines de milliers. C'est considérable. Seulement
dans deux unités d'aménagement du Bas-Saint-Laurent où on
a travaillé il y a treize unités d'aménagement dans
le Bas-Saint-Laurent-Gaspésie 200 lots sont susceptibles
d'être échangés avec le ministère des Terres et
Forêts; 200 lots à 100 acres par lot, c'est-à-dire 20 000
acres, seulement dans deux unités sur treize, dans une seule
région du Québec.
M. Russell: Cela a été révoqué.
M. Garon: Non, ce sont des lots du ministère qui sont
là. Il y a eu toutes sortes de choses. Ce sont des lots vacants du
ministère. Il y a toutes sortes de choses là-dedans. Il n'y a
même pas de billet de location. Il n'y a rien. Je vous dis que ce
sont des chiffres considérables en superficie. Il y a eu des
manifestations dans le Bas-Saint-Laurent il y a quelques années
vous vous rappelez les opérations dignité où il y a
des milliers d'acres qui sont là, inutilisées, ni pour la
forêt, ni pour l'agriculture. Le monde, qui les appelle les "lots du bon
Dieu", pense qu'on pourrait faire quelque chose avec cela.
Ce qu'on a dit, c'est qu'on va faire le ménage là-dedans.
On a commencé à le faire, mais c'est long. Comme je vous le
disais, sur deux unités d'aménagement sur treize dans le
Bas-Saint-Laurent, au-dessus de 200 lots sont susceptibles d'être
touchés. Un lot a environ 100 arpents. Cela veut dire environ 20 000
arpents seulement là. Si on avait la même proportion, seulement
dans le Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, cela voudrait dire environ 100 000
arpents. C'est du monde. Après cela, il y a la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, l'Abitibi, les Cantons de l'Est. Cela
représente des montants considérables. On ne les a pas
additionnés. Ce qu'on voudrait faire, c'est du ménage
là-dedans. La plupart de ces lots je dirais la plupart, c'est
assez difficile à dire, on n'en a pas assez fait jusqu'à ce jour
je dirais quand même la majeure partie de ces lots ont une
vocation plus forestière qu'agricole. Quand on tombe au niveau des
terres de colonisation dans les années trente...
Une voix: ...
M. Garon: Oui, quand on arrive dans les hauts de comté, le
plus grand nombre de terres là-dedans... Imaginez-vous que si toutes ces
terres qui sont vacantes et dont on ne sait pas quoi faire étaient mises
en forêt, on pourrait employer des centaines d'hommes, ces milliers
d'hommes pour reboiser ces terres. On aurait un aménagement plus
rationnel.
M. Russell: Est-ce que ces terrains sont devenus disponibles
à la suite du programme de réaménagement foncier pour
lequel ARDA...
M. Garon: II y a toutes sortes de choses. Il n'y a pas que cela.
Il y a toutes sortes de choses là-dedans. Il y a, là-dedans, les
lots qui ont toujours été possédés par le
ministère en vertu de la Loi des terres de colonisation. Il y en a
d'autres qui avaient été concédés ou loués
par billet de location et qui ont été révoqués. Il
y en a qui ont été rachetés pour taxes. Il y en a qui ont
été rachetés par le réaménagement foncier.
Il a dû y avoir d'autres affaires aussi. L'ARDA n'en a pas acheté
quand il a vidé les paroisses... Le réaménagement foncier,
quand il a vidé les paroisses, a aussi racheté des lots et des
paroisses entières. Ce sont toutes ces choses-là. On est pris
avec ces terres et on n'en fait rien. Il y a des gens qui ont des billets de
location qui demandent d'aller à l'aménagement forestier,
avec...
M. Giasson: Aux fins d'obtenir des lettres patentes.
M. Garon: Oui. Mais nous autres, on pourrait faire cela d'une
façon beaucoup plus systématique, un nettoyage dans tout
cela.
M. Giasson: M. le Président, je constate, par les paroles
du ministre, qu'il y a des régions au Québec où les
politiques n'ont pas été appliquées de la même
manière. Je dis cela parce que je connais assez bien la situation qui
existe dans ma région, dans Montmagny-L'Islet, entre autres. Les lots
qui ont été révoqués chez nous par le
ministère, en vertu des pouvoirs de révocation de la loi de
colonisation, ont presque tous je ne sais pas s'il en reste même
été retournés au ministère des Terres et
Forêts. Les propriétés du ministère de la
Colonisation qui restent encore dans mon comté sont des lots
détenus sous billet de location; ils ne sont pas la
propriété réelle des détenteurs de billet mais sont
encore la propriété du ministère.
Je vous dis qu'à un moment donné j'ai fait des recherches,
il y a déjà quelques années, lors de mon premier mandat.
Nous avions des cultivateurs qui étaient à la recherche de lots
de support, comme complément de ferme. J'ai mené des recherches
au ministère de l'Agriculture et de la Colonisation pour connaître
le nombre de lots propriété du ministère de l'Agriculture
et de la Colonisation afin de voir s'il n'y avait pas possibilité de
donner des lots de support à certains cultivateurs dans les hauts de
comté. À ma grande surprise, j'ai appris à ce
moment-là que toutes ces révocations qui avaient
été faites pendant des années, en vertu des pouvoirs
prévus dans la loi, avaient été retournées au
ministère des Terres et Forêts, étaient restées dans
le domaine public mais devenues la propriété du ministère
des Terres et Forêts. Il n'y avait plus de lots disponibles,
propriété du ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation, sauf les lots auxquels j'ai fait allusion tout à l'heure
qui étaient déjà détenus en vertu de
l'émission de billets de location. Mais vous me dites que, dans d'autres
régions, le ministère de la Colonisation n'a pas retourné
au ministère des Terres et Forêts les lots qu'il
possède.
M. Garon: La semaine dernière, dans le Lac-Saint-Jean, je
n'ai pas regardé si c'était la paroisse au complet, mais je peux
vous dire qu'en termes de lots vacants, c'était des centaines d'acres,
peut-être des milliers...
M. Giasson: Où il ne se payait plus de taxes par les
détenteurs de billet? Tout le monde avait laissé...
M. Garon: Des lots vacants du ministère.
M. Giasson: Est-ce qu'ils avaient déjà
été entre les mains de détenteurs de billet où
s'ils sont entre les mains du ministère depuis toujours? Ils n'avaient
jamais été concédés sous billet de location?
M. Garon: Depuis 50 ou 60 ans, le ministère les avait et
ne faisait rien avec. Il y a eu de la friche et des choses comme cela. C'est
là que cela devient rationnel. J'ai demandé qu'on fasse tout cela
en faisant un inventaire du sol. Il peut bien y avoir des sols qui n'ont pas de
valeur agricole mais qui en auront peut-être dans 50 ans, on ne le sait
pas, mais on dit: On fait une analyse du sol et de sa valeur biophysique
potentielle. S'il n'y a pas de potentiel biophysique agricole pour vivre
décemment, cela ne donne rien de selon l'expression populaire
planter des carottes à la dynamite ou des choses comme cela. Cela
ne donne rien d'essayer de faire de l'agriculture sur des terres qui n'ont pas
de potentiel. Dans ce canton, je me rappelle entre autres qu'en grande partie,
c'était du sol no 7. Il y avait des petites poches de sol no 5 ce
qui n'est déjà pas riche mais avec un sol no 7, il n'y a
rien à faire là. Des fois, il y avait... Bonne mère, sur
un lot, il y avait une partie, environ 20%, de sol no 4. Il n'y a personne qui
va gagner sa vie en agriculture avec des affaires comme cela. D'une
façon systématique, on a demandé de faire le ménage
au complet. On a commencé à le faire avec une technique qu'on a
poussée plus à fond. Actuellement, dans le
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, tout l'inventaire devait être
terminé à la fin de décembre. On m'a dit que ce serait
terminé à la fin de mars. J'aimerais que ce soit fini plus
rapidement que cela. Si cela va bien dans ce secteur, on pourra
généraliser cette méthode et faire le nettoyage de tous
ces lots dans toute la province.
M. Giasson: Présentement, M. le ministre, est-ce que vous
avez un inventaire, justement, des lots qui sont la propriété du
ministère de l'Agriculture?
M. Garon: C'est inscrit au nouveau terrier des terres de
colonisation mais...
M. Giasson: Je parle de lots qui ne sont pas détenus par
billet de location, qui sont la propriété absolue...
M. Garon: Des lots vacants.
M. Giasson: Des lots vacants. Quel en est l'ordre
approximativement?
M. Garon: Je ne pense pas qu'il y ait eu de cumulation.
M. Giasson: Vous n'avez pas un ordre de grandeur
approximatif?
M. Garon: Des lots sous billet de location, il en
resterait...
M. Giasson: Oui, mais vous n'avez pas un ordre approximatif de
grandeur?
M. Garon: Des lots sous billet de location, il en resterait
c'est ce que le fonctionnaire à la condition des terres me dit
environ 15 000.
M. Giasson: Oui.
M. Garon: Sous billet de location. 15 000 lots, c'est à
peu près 100 acres le lot?
M. Giasson: En moyenne.
M. Garon: Cela a l'air de rien, mais c'est 1 500 000 acres.
M. Giasson: C'est 1 500 000 acres, mais êtes-vous conscient
que, sur les 15 000 lots, la partie qui serait propre à l'agriculture
est extrêmement minime?
M. Garon: Mettons que c'est 10%. M. Giasson: C'est
minime.
M. Garon: Mettons que ce serait cela. Il resterait 1 350 000
acres sur lesquelles on pourrait faire de l'aménagement forestier
systématique. C'est quand même une richesse.
M. Giasson: Oui.
M. Garon: Ils gagneraient leur vie.
M. Giasson: Vous n'avez aucune idée des lots qui ne sont
pas détenus par billet de location, du nombre de ces lots?
M. Garon: Vous voyez, si cela avait été fait, je
donnais tantôt un exemple, sur les terres de "décan" qui vont
être transférées. C'étaient des terres qui
étaient là depuis 1920 à peu près. Si on avait fait
l'aménagement forestier en 1920, ce n'est qu'un exemple, aujourd'hui,
serait 60 ans plus tard, on arriverait près de la cueillette.
M. Giasson: Êtes-vous conscient que, sur les 15 000 lots,
il y en a un certain nombre qui ont été très bien
traités par les propriétaires de billets de location?
M. Garon: Oui. C'est ce qui va arriver aussi, ce que je pense,
vous le disiez tantôt. Allez-vous révoquer des lots, des choses
comme cela?
M. Giasson: C'est important.
M. Garon: Ce n'est pas à cela que je pensais.
M. Giasson: C'est important, les gens sont inquiets de cela.
M. Garon: Ce n'est pas à cela, en ces termes, que je
pense. Je vais vous dire comment je voyais cela. Je me suis dit: Si on fait le
ménage dans ces lots, les lots qui sont vacants et qui appartiennent au
ministère, je ne parle pas des billets de location, mais des autres, il
y en a en masse. On transfère tout cela aux Terres et Forêts, s'il
n'y a pas de vocation agricole, pas de vocation forestière. Et les
autres, à vocation agricole, on va
essayer de faire le développement de l'agriculture
là-dessus. Cela va avoir un effet incitatif quand même, parce que
cela va faire des ensembles forestiers, des ensembles agricoles, des ensembles
agro-forestiers. Le gars qui a un billet de location et qui est au travers de
cela va dire: Dans le fond, ils mettent cela en forêt, parce que ce n'est
pas bon. Il me semble que cela va avoir un incitatif. Si tu arrives à un
rang complet dans une place, mettons, tu as un chemin et tu dis: II y a tant de
terres du ministère qui n'ont pas de vocation agricole. On les
transfère au ministère des Terres et Forêts, qui y fait des
réaménagements forestiers. Il y a peut-être cinq gars qui
ont des billets de location là-dedans. Ils voient cela et se mettent
à s'organiser en forêt. Ils se disent: Pourquoi on ne
rembarquerait pas, la machine est là, on plante des arbres. J'ai
l'impression que c'est incitatif, que ce serait fort.
M. Russell: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: J'avais fait motion hier pour que ceux qui ne sont
pas membres de la commission, mais qui avaient intérêt...
M. Garon: Cela pourrait être fait de façon plus
systématique.
M. Russell: ... à poser des questions puissent venir et
intervenir. On avait dit que chacun des cas serait étudié.
Là, le député de Mégantic-Compton est ici. Il
aurait quelques questions à poser.
Le Président (M. Laberge): D'accord. En vertu de l'article
148, je suis tout à fait d'accord.
M. Grenier: Je n'ai pas de chapitre à vous lire dans mon
livre ce matin, même si ce serait intéressant.
M. Garon: Vous grouillez un peu. Je ne sais pas si ce sont les
mites.
M. Grenier: Mon chapitre aurait été plus
intéressant dans l'autre commission où on était. Il aurait
été plus adapté qu'ici, je pense. Vous avez ici un
article. Le ministre est conscient, je pense, et les fonctionnaires qui sont
ici sont conscients que je suis largement touché par l'article premier
de cette loi, dans mon comté, pour des lots qui sont sous billet de
location pas encore couverts par les lettres patentes. On en a parlé
largement depuis ce matin ou hier. Il serait peut-être bon, même si
je reviens avec des questions qui ressemblent à celles d'hier ou de ce
matin, de revenir sur le sujet parce que c'est loin d'être clair dans
l'esprit de pas mal de monde. Je lis que c'est fait, que le ministre peut
notamment acquérir tout immeuble détenu en vertu d'un billet de
location émis sous l'autorité de la Loi des terres de
colonisation et qu'à compter de cette acquisition, ce billet de location
est révoqué de plein droit, la révocation a le même
effet que si elle avait été faite par le ministre en vertu de la
section IV de la loi, moi, cela m'inquiète. Je voudrais que le ministre
me dise exactement ce qui va se passer. Si cela s'est fait dans des
régions comme la nôtre, c'est que, dans les années trente,
le gouvernement laissait ces terres pour une somme de $30 environ.
C'était un agrandissement au début, c'étaient des lots de
colonisation qui étaient donnés à des cultivateurs qui se
sont sauvés là pendant la crise, un peu comme on l'a fait en
Abitibi, et on a découvert au pied de montagnes dans le coin que
c'étaient des terres pas trop propres à la culture ou encore, on
ne pouvait pas faire de grande culture sur ces terrains. Dans d'autres cas,
cela a été de bonnes fermes qu'il pouvait y avoir et on remettait
un lot de support, c'est ainsi qu'on les appelait, pour permettre à ce
monsieur ou à cette famille de vivre là pendant la période
d'été pour faire un petit train de sept ou huit vaches. On
ajoutait à cela un lot de patentes qui permettaient, à
l'occasion, de couper un peu de bois l'hiver avec les contrôles que le
gouvernement exigeait à ce moment.
Il y a eu la loi qui a été plus ou moins respectée,
les exigences du ministère dans le temps je dirais plutôt
moins que plus pour émettre des lettres patentes à des
gens.
Maintenant, ce que je voudrais savoir du ministre, c'est ce qu'on a
fait, à ce moment. Il y a pas mal de gens qui ont obtenu, par des moyens
qui n'étaient pas tout à fait selon la loi il faut le dire
leurs lettres patentes pour des terrains qui accommodaient ou qui
allaient avec leur ferme, à savoir qu'on exigeait, par exemple, tant
d'acres en abattis, tant d'acres en labour, une grange, une étable et
une maison. Je pourrais dire qu'il y a une bonne moitié des gens dans
notre région qui n'ont pas accompli les devoirs exigés et qui ont
quand même obtenu leurs lettres patentes, parce que cela faisait partie
de leur patrimoine. Cela faisait 25 ans, 30 ans ou 35 ans qu'ils payaient des
taxes là-dessus et c'était compris que c'était à
peu près le seul revenu des enfants qui avaient accepté de
travailler et de travailler dur, comme on le disait au ministre l'autre jour,
sur des terres qui n'étaient pas des terres rocheuses, mais des roches
terreuses. Une fois qu'ils étaient prêts à
s'établir, cela faisait partie des dons que le père pouvait leur
donner.
À partir de maintenant, quand le ministre dit qu'il va
révoquer ces terres, on n'a plus de moyen, depuis trois ou quatre ans;
il y a le regroupement forestier qui est installé et cela ne se fait
plus, des patentes de lot. Pour ce que je sais, ce que je peux voir à
mon bureau, cela ne se donne plus à un particulier, ou dans des
conditions où les gars se battent mal, ne frappent pas aux bonnes
portes, mais cela ne semble plus s'accorder.
M. Garon: On émet à peu près 100 lettres
patentes par mois.
M. Grenier: À qui on les donne et avec quelles conditions,
j'aimerais qu'on me le spécifie clairement.
Est-ce qu'on donne encore une lettre patente à un monsieur qui a
vécu là depuis 1930, qui est retiré maintenant au village,
qui a sa pension...
M. Giasson: ... est sur le lot détenu sous billet de
location, s'il habite là lui-même, il a encore la
possibilité d'obtenir ses lettres patentes.
M. Grenier: Je pose la question au ministre, j'aimerais mieux que
le ministre me réponde. C'est lui qui va être pris avec la
réponse tout à l'heure et non pas un parti de l'Opposition.
J'aimerais que le ministre me dise si le monsieur qui était
propriétaire d'une terre et qui vit maintenant au village peut encore
avoir son billet, sa lettre patente, ou s'il doit encore habiter sur son lot ou
sur sa terre non "patentée"?
M. Garon: II faut qu'il habite sur son lot.
M. Giasson: Ou s'il vit de l'agriculture.
M. Garon: Ou qu'il soit producteur agricole.
M. Grenier: S'il ne remplit pas les autres conditions, c'est
large un peu là-dessus. Maintenant, est-ce qu'il peut le vendre?
M. Giasson: Cela n'a pas de valeur.
M. Grenier: Est-ce que vous lui permettez encore de vendre ou si
le ministère va en profiter pour accaparer le lot quand cela va
être adopté?
M. Garon: Pour les fins agricoles.
M. Grenier: Pour des fins agricoles, c'est-à-dire dans des
territoires qui ne sont pas zonés. Il peut le vendre à la
condition que cela reste pour des fins agricoles. Quand c'est une terre qui
n'est pas beaucoup cultivable, vous l'avez dit tout à l'heure, vous
allez exiger quand même que ce soit pour des fins agricoles. Tout ce qui
pourrait être élevé dessus, ce serait un nid d'abeilles ou
une couple de chèvres.
M. Garon: Si c'est pour des fins forestières, vous pouvez
reboiser et le terrain peut se mettre sur l'aménagement forestier. On
transfère le lot au ministère des Terres et Forêts et c'est
le ministère des Terres et Forêts qui va s'arranger avec cela.
M. Grenier: Vous l'achetez du propriétaire?
M. Garon: Non, non. Ils font une entente au niveau local, entre
le gars, le bureau des Terres et Forêts et le ministère de
l'Agriculture au niveau régional, les papiers nous sont envoyés
et on transfère le lot au ministère des Terres et Forêts
qui émet les lettres patentes.
M. Grenier: J'aimerais que le ministre me dise...
M. Garon: Selon l'arrêté en conseil 1032.
M. Grenier: Mes cas bien précis, ce sont ces cas qu'on a;
le bonhomme est rendu au village et il paie une taxe sur son lot depuis 1930
à peu près; cela vaut $10 000, cela vaut $15 000, il y a une
partie, il a essayé de remplir des devoirs au début et il n'a pas
été capable. Il arrive quoi maintenant, s'il n'est pas capable
d'avoir de lettres patentes parce qu'il reste au village? Comment
règle-t-on ce cas? J'en ai huit à peu près par lundi
matin. Ils ne viennent plus, ils sont tannés...
M. Garon: S'il a une valeur forestière et qu'il n'a pas de
valeur agricole, il n'a qu'à le mettre sur l'aménagement
forestier, nous allons transférer cela aux Terres et Forêts et il
va s'arranger pour avoir ses lettres patentes. S'il y a une valeur agricole, il
faut, s'il veut cultiver...
M. Giasson: Vous l'invitez, à ce moment, au moment de sa
demande des lettres patentes, à rétrocéder à un
agriculteur qui vit, qui est producteur agricole, les droits du billet de
location.
M. Grenier: Oui, cela ne fonctionne qu'un peu.
M. Garon: S'il ne cultive pas, ça ne fonctionnera pas.
M. Grenier: II faut qu'il fasse semblant de vendre en ne vendant
pas. Vous connaissez le trafic qu'il y avait en dessous de cela. Ils font
semblant de vendre. Si vous ne le saviez pas, il est temps que vous
l'appreniez. Ils font semblant de vendre à un oncle ou à un gars
de confiance. C'est ce qui s'est passé depuis cinq ou six ans. Ce n'est
pas mieux parce que le PQ est au pouvoir, c'est encore pareil. Ils font
semblant de vendre à quelqu'un...
M. Garon: Ce n'est pas moi qui ai fait ces règlements.
M. Grenier: ... ils font semblant, au ministère, de ne pas
le savoir ou ils ne le savent pas.
M. Garon: On ne peut pas changer tous les règlements dans
trois ans.
M. Grenier: Pardon?
M. Garon: On ne peut pas changer tous les règlements dans
trois ans.
M. Grenier: Ce n'est pas un reproche, cela dure depuis longtemps.
Le problème est que le bonhomme, le propriétaire...
M. Garon: Le règlement favorise cela.
M. Grenier: Je ne veux pas partir, ce matin, sans qu'on
éclaircisse ce point; c'est exactement ça, le problème,
c'est à l'article 1.
M. Garon: Est-ce que ce sont les notaires qui suggèrent
cela à leurs clients?
M. Grenier: Non, ils viennent au bureau du député
pour cela.
M. Garon: Ce sont les députés qui suggèrent
cela.
M. Grenier: Non, ils le savent, la machine est rodée
depuis assez longtemps. On l'a appris d'autres, cela.
M. Garon: Cela s'est rodée dans le temps des
élections.
M. Grenier: Non, pas dans le temps des élections.
C'étaient des gens qui étaient avec nous, ils sont devenus
péquistes depuis ce temps-là, ils connaissent bien le
système. Ils l'exploitent.
Farce à part, c'est un problème qui n'est pas
réglé. On demande au propriétaire d'un terrain qui n'est
pas patenté depuis nombre d'années de passer par le regroupement
forestier. Il y en a qui sont rébarbatifs à cela, ils craignent
de ne pas être les seuls propriétaires, d'être
copropriétaires. Le député de Beauce-Sud qui est ici ce
matin est témoin de cela dans sa région. Je suis sûr qu'il
y en a qui vont le voir pas mal souvent, des gens qui sont propriétaires
d'un terrain et qui vont voir un notaire qui, comme tous les autres, est
censé être très honnête et donner les vrais
renseignements. Ils sont "poignés" avec un dossier qui évolue
très peu rapidement. C'est bien pénible depuis le regroupement
forestier. Nos gens ne veulent pas faire confiance bien fort au regroupement
forestier; est-ce qu'ils ont tort ou raison? Je ne suis pas en mesure de juger,
c'est à vous de le savoir. J'ai l'impression, pour ma part, que le
regroupement forestier commence à faire du bon boulot. Au début,
on reprochait au regroupement forestier de détruire une forêt; ce
n'était pas mieux d'après les gens qui allaient glaner
dans la forêt que nos bonshommes qui étaient
propriétaires privés. Ce n'était pas mieux. Maintenant,
cela va peut-être mieux.
Avez-vous une solution, ce matin, pour mon bonhomme qui reste au
village, qui paie une taxe sur son lot? Son lot vaut $10 000, $15 000 ou $25
000, il y a du bois dessus, il peut y avoir une petite partie qui a
été défrichée, mais en gros, c'est ça. Je
veux savoir comment vous allez régler le cas de mon bonhomme, ce matin,
avec votre nouvelle loi. Est-ce qu'il va tout perdre? Allez-vous l'acheter pour
la valeur? Vous allez me dire: II a payé son lot $30, on n'est quand
même pas pour lui en donner $30 000 maintenant! Oui, mais ça fait
trente ans qu'il paie une taxe dessus, cela fait trente ans qu'il espère
qu'un jour ça va lui appartenir. Il ne l'aura plus demain matin, si on
laisse passer ça.
M. Giasson: M. le ministre, à votre connaissance, n'y
aurait-il pas une autre possibilité, dans le cas que vient de nous
expliquer le député de Mégantic-Compton, de
procéder en vertu de prévisions de l'arrêté en
conseil 1032? C'est-à-dire que si un individu, possédant un lot
sous billet de location, s'engageait vis-à-vis du bureau régional
du ministère des Terres et Forêts à faire de
l'aménagement lui-même avec un suivi par les techniciens, les
fonctionnaires des Terres et Forêts, est-ce qu'on ne pourrait pas
également déboucher sur une émission de lettre patente
pour un aménagement forestier individuel?
M. Grenier: Ce que suggère le député de
Montmagny-L'Islet, c'est à cela qu'il faut en venir. Quand le ministre
me dit qu'il veut absolument se faire une banque et aller
récupérer ces lots, je me dis que cela peut se faire en passant
par les personnes qui sont déjà propriétaires sans les
déposséder. On est capable de trouver un stimulant qui pourrait
leur permettre de le faire avec un contrôle aussi. Il n'y en a pas eu de
contrôle sur ces lots, il faut l'admettre.
Une voix: Cela existe.
M. Grenier: Oui, cela existe, mais ce n'est pas bien fort.
M. Garon: Cela existe actuellement.
M. Grenier: Oui, mais ce n'est pas très fort. Je le sais
car dans ma famille, on a été propriétaire de terrains
comme cela. Le gouvernement nous donnait un coup de main pour un peu de
reboisement, on est bien au courant du fait.
M. Garon: Vous avez cela depuis longtemps? M. Grenier:
Oui, depuis les années dures. M. Garon: Quelle
année?
M. Grenier: Depuis les années trente, à peu
près, je pense. C'est patenté, maintenant, ce ne sont plus des
lots non patentés, mais cela a été patenté avec des
accommodements comme on le faisait dans le temps, comme tout le monde le
faisait, un peu en dehors de la loi.
M. Garon: II paraît qu'on en émettait beaucoup plus
la veille des élections, des lots.
M. Grenier: Pardon?
M. Garon: Des billets de location, il paraît que la veille
des élections, ça sortait!
M. Grenier: Oui, ça se donnait en grand nombre. Je suis
d'accord pour dire que c'était meilleur. Les gens savaient aussi que
c'était mieux de venir la veille des élections, c'était
meilleur.
M. Giasson: Des lettres patentes, il y en avait à chaque
campagne électorale sous l'Union Nationale.
M. Vaillancourt (Orford): C'est parce qu'il y avait bien des
dossiers de prêts.
M. Grenier: Je peux vous dire que cela se faisait pas mal sous
tous les gouvernements. Si on
allait voir les dossiers de l'ancien député libéral
du coin chez nous, M. Gagnon, on verrait qu'il s'en est patenté
plusieurs à son nom la veille des élections. Il est mort, paix
à ses cendres! Comme mon père, qui était organisateur
libéral, il a dû passer pas mal de temps au purgatoire lui aussi!
Cela ne règle pas notre problème, chez nous.
M. Garon: Quand vous avez vu tout cela, vous avez
décidé de lâcher...
M. Grenier: Avant de reprendre ça pour la couronne
je ne devrais pas dire ça devant le ministre j'aimerais mieux
qu'on pense à laisser ça au secteur privé, d'abord, et
leur donner un stimulant là-dedans.
M. Garon: C'est ce qu'on fait. (11 h 45)
M. Grenier: Mais par quel moyen? Quel stimulus avez-vous pour les
encourager?
M. Garon: Quelqu'un qui veut faire un aménagement
forestier, il n'y a pas de problème, mais il s'engage à le faire
de façon privée; il peut avoir la même chose par lettres
patentes du ministère des Terres et Forêts. On passe le lot au
ministère des Terres et Forêts qui s'engage à le faire
personnellement.
M. Grenier: En tout cas, cela ne me satisfait pas, remarquez
bien, et c'est loin d'être clair. Vous allez me nommer un monsieur qui
est ici, je vais m'arranger pour dîner avec lui prochainement pour savoir
exactement comment marche votre système. Parce que, ce matin, c'est loin
d'être clair.
M. Garon: Bien, c'est clair! Regardez, le lot va pour
aménagement...
M. Grenier: C'est peut-être clair pour les autres, mais ce
n'est pas clair pour vous, cela m'a l'air!
M. Garon:... agricole. Il en vend une tranche...
M. Grenier: C'est peut-être clair pour d'autres autour de
vous, mais pour vous c'est loin d'être clair, je peux vous dire cela.
M. Garon: C'est bien clair. Il va pour aménagement
agricole, développement agricole ou développement forestier;
c'est l'un ou l'autre.
M. Grenier: En général, cela ne sert pas pour les
abeilles.
M. Garon: Chez vous, vous me disiez que cela servait pas mal pour
les abeilles; ils étaient achetés par les Américains et
les gars...
M. Grenier: On en a quelques-uns. Je vous en ferai visiter
quelques-uns quand vous viendrez. Arrêtez de venir voir des PQ chez nous,
quand vous venez dans le comté, et je vais vous présenter ces
gens-là. On va faire une petite tournée dans le coin qui ne va
pas loin du comté d'Orford, où il y a de vrais problèmes;
j'aimerais cela, quand vous viendrez dans le coin, vous montrer ces
problèmes. Ce n'est pas que la Gaspésie. Je vous écoutais
parler depuis tout à l'heure, on pense que cela n'existe que là.
Regardez le territoire sur votre carte, de quoi a l'air mon comté et il
y en a le tiers à peu près de couvert par ces lots.
Il y a du monde partout maintenant et quand vous dites que c'est un
autre problème, qu'il n'y a plus de contribuables, ce n'est plus vrai.
Je m'excuse, mais vous êtes en retard! On s'arrache les lots dans le coin
et ce ne sont pas nécessairement des Américains qui le font. On
s'arrache les lots et il n'y a plus de terrains.
Dans mon premier mandat, de 1966 à 1970, ces terrains, les
municipalités venaient nous voir et disaient: Est-ce qu'il y a moyen, M.
le député, de trouver le gars; il est
déménagé, on n'a plus d'adresse; il ne veut plus se faire
connaître, il ne veut plus payer de taxes; on n'a plus personne qui paie
ses taxes dans la municipalité, sur quinze lots, vingt lots dans un
petit village.
M. Garon: C'est dans ce cas qu'il y a révocation.
M. Grenier: Ce n'est plus cela maintenant. Ce n'est plus cela! Il
y en a, des gens qui veulent payer des taxes sur des lots, et tous les lots
sont vendus. Je pense que vous auriez de la misère à trouver un
lot qui n'est pas vendu dans notre coin. Cela a bien changé, et il est
temps qu'on sache ce qui se passe.
Il y a des contribuables partout et ils veulent tous avoir leur petit
lopin de terre. S'ils ne sont pas rendus en Gaspésie, ils vont arriver
parce que, chez nous, c'est plein. Il y a des contribuables partout. Mais cela
n'a pas fait évoluer l'agriculture dans le moment. Ils sont
installés là; c'est généralement une commune, comme
on en a dans nos coins, les coins un peu difficiles; ils sont trois, quatre qui
vivent ensemble du bien-être social et ils restent sur un lopin de terre.
Je ne les blâme pas, ils font une sacré belle vie. Cela me
coûte quelque chose sur mes chèques de paie, mais ils font une
belle vie.
M. Garon: Est-ce qu'ils votent pour vous?
M. Grenier: II y en a plusieurs de ceux-là; ils ont pas
mal de jugement, ces jeunes-là. Ils votent pour l'Union Nationale.
M. Garon: Vous n'avez pas l'air de trouver ça diable, ces
gens-là?
M. Grenier: Bien, ce n'est pas diable parce qu'on ne s'occupe pas
de cela. Je trouve que ce n'est pas un système. Vous allez venir visiter
les municipalités de La Patrie, de Notre-Dame-des-Bois; vous allez
visiter Marsboro, Val-Racine, Woburn, Milan, Scotstown. Vous viendrez
visiter
ce coin, c'est un petit coin qui est important, vous en avez
certainement entendu parler.
M. Garon: J'ai fait tous ces villages un par un, par tous les
chemins même.
M. Vaillancourt (Orford): Saint-Mathias. M. Grenier:
Saint-Mathias, oui.
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):
"Saint-Cap-de-Roue".
M. Grenier: Je voudrais qu'on trouve une formule pour
régler ce problème. Si ce doit être repris par le
gouvernement, je dis que c'est la dernière formule. Il faudrait trouver
des intérêts privés qui seront propriétaires de
cela, des gens qui vont vraiment avoir envie de faire une plantation. Dans le
moment, ce n'est pas ce qui se fait. Il y a des cabanes qui sont restées
et on vit là-dessus, mais ce territoire est inexploité. Il y a
des gens qui sont propriétaires, qui restent là...
M. Garon: Ils sont...
M. Grenier: Oui, c'est un peu ce genre-là, mais ils sont
moins nombreux dans les communes. Ils sont moins de personnes que cela, mais
quand même assez pour la faire vivre.
J'aimerais qu'on trouve une façon de régler cela. C'est un
point qui ne semble pas qu'on ait ce matin, mais vous allez me nommer quelqu'un
avec qui je peux entrer en communication et je vais essayer de vous faire des
suggestions, voir comment on pourrait remettre cela au secteur privé et
faire développer un coin comme celui-là. C'est important ce que
je vous dis là.
L'autre partie, ce que je voudrais savoir de vous...
M. Garon: Bien, c'est exactement le but de la loi, c'est de
faciliter ces choses.
M. Grenier: Oui, oui, mais le moyen, c'est le ministre qui
reprend cela en main.
M. Garon: Non, non, non.
M. Grenier: Je vois la dernière solution, si c'est
cela.
M. Garon: Non, non, non.
M. Grenier: Vous aimez cela, les affaires qui appartiennent
à l'État, vous êtes fort là-dessus, vous.
M. Garon: Non.
M. Grenier: J'aime mieux que cela appartienne au secteur
privé.
M. Garon: Nommez-moi une affaire qui appartient à
l'État depuis que...
M. Grenier: Bien, votre banque de terres arables, là.
M. Garon:... le ministère de l'Agriculture. On a remis
tout le crédit agricole même...
M. Grenier: Cela va appartenir à l'État.
M. Garon: Aïe, aïe, aïe! On a remis le
crédit agricole même aux caisses populaires et aux banques.
Trouvez-moi une chose, au ministère de l'Agriculture, depuis trois ans,
qu'on a rapatriée à l'État. Je peux vous en nommer en
masse qu'on a remis à l'entreprise privée, cependant.
M. Giasson: Les sociétés d'Etat, c'est presque
l'État.
M. Garon: Laquelle?
M. Giasson: Soquia.
M. Grenier: L'autre problème, M. le ministre...
M. Garon: Soquia n'appartient à rien, c'est...
M. Grenier: M. le Président, l'autre problème
celui-là, je pense qu'on ne le réglera pas autour de la
table ce midi; on va trouver quelqu'un qui va nous donner des
éléments de solution c'est celui des
érablières sous location, des terrains qui appartiennent à
la couronne. Je m'excuse d'utiliser ce mot devant vous, je sais que vous
n'aimez pas cela. Ce sont des terrains qui appartiennent au gouvernement.
M. Garon: Ce n'est pas nous autres.
M. Grenier: Ce n'est pas vous autres, mais cela va vous toucher
de très près. Qu'est-ce qui va arriver à ces gens...
M. Garon: Cela, c'est...
M. Grenier: ... qui ont investi considérablement dans des
érablières sur des terrains qui appartiennent au
gouvernement?
M. Garon: Cela touche le ministère des Terres et
Forêts. Nous, c'est l'exploitation, ce n'est pas les
érablières, les érables; si on entend
l'érablière dans le sens d'un ensemble d'érables, elles ne
sont pas nécessairement en exploitation. Quand elles sont sur des terres
publiques, la concession d'érablières, c'est fait par les Terres
et Forêts.
M. Grenier: Avez-vous l'intention c'est un produit
maintenant, on donne une vocation agricole quand il s'agit
d'acériculture de laisser continuer cela? Avez-vous l'intention
de laisser ces gens qui sont propriétaires oeuvrer là-dedans?
C'est de l'agriculture. Cela n'appartient plus à M.
Bérubé, cette affaire-là. C'est à vous,
là.
M. Garon: Où ça?
M. Grenier: Sur les terrains de la couronne. Avez-vous
l'intention de les laisser continuer sur le terrain des Terres et
Forêts?
M. Garon: Si les terres appartiennent au gouvernement...
M. Grenier: Oui, oui. Ils ont des billets de location. Ils ont
des baux. Ils font du sucre depuis dix ou quinze ans et ils aménagent
leur territoire. Cela va assez bien.
M. Garon: Avec des chaudières.
M. Grenier: Je souhaite qu'il arrive des gens qui aient le droit
de pénétrer, maintenant que c'est ouvert avec les lois et
là, ils commencent à avoir des problèmes. Ce n'est pas de
votre ressort. C'est une autre grille, cela, mais dans...
M. Garon: Non.
M. Grenier: ... le moment, ils ont leur érablière.
Je voudrais savoir si vous allez leur permettre à partir de maintenant
d'avoir du changement pour ces gens-là.
M. Garon: J'ai l'intention de continuer à faire du sirop
d'érable avec les cultivateurs.
M. Grenier: Oui, et cela va mieux que cela allait. Je peux vous
dire cela. Depuis quelques années, cela va mieux. Il s'en fait pas mal
plus, parce que le gouvernement aide davantage et c'est pas mal meilleur que
c'était. Je peux vous dire cela en passant. On n'a pas seulement de
mauvaises nouvelles. Parfois, on en a des bonnes. On exploite de plus en plus
les érablières. Mais ceux-là, ceux qui sont sur les
terrains du gouvernement, vous me dites ce matin que vous avez l'intention de
les laisser poursuivre, de prolonger les baux, s'il y a lieu, de leur faciliter
la tâche et de ne pas leur causer d'embêtements. M'assurez-vous de
cela? Ne me faites pas signe! Le micro est ouvert.
M. Giasson: Je pose moi aussi la question au ministre des Terres
et Forêts.
M. Garon: Je n'ai pas affaire à cela. M. Grenier:
Pardon?
M. Garon: Je n'ai pas affaire à cela, mais je vais vous
dire bien franchement que je ne favorise pas la mise sous tubulure avec des
subventions du gouvernement autrement que sur des terres de cultivateurs.
M. Russell: M. le Président. C'est cela qui est important.
Ce sont des lots comme vous le dites actuellement qui sont
loués des Terres et Forêts, mais comme cette exploitation est
reconnue agricole...
M. Garon: Oui.
M. Russell: ... cela ne devrait-il pas revenir au
ministère de l'Agriculture et sous le contrôle du ministère
de l'Agriculture, pour s'assurer que l'exploitation est bien faite, qu'elle est
rationnelle, et que ce n'est pas utilisé pour d'autres fins que cela. Je
pense que c'est là le coeur du problème.
M. Garon: Au rythme où cela va actuellement, cela va assez
bien. On a augmenté l'an dernier. Il y a 1 518 000 000 érables
qui ont été mis sous tubulure. Cette année, on dit que
cela va dépasser deux millions d'érables qui ont
été mis sous tubulure. C'est un programme de cinq ans. Cela va
numéro un actuellement. Dans la Beauce, M. Bois-vert avait un projet
d'érablière, mais les gens ne semblaient pas d'accord avec cela
parce qu'ils n'ont pas voté pour lui. Donc, on ne le fera pas.
M. Mathieu: J'aurais un mot à dire là-dessus. J'ai
dit hier...
M. Garon: Même à Dorset, ils ont voté contre!
Ils sont en plein au milieu de l'érablière. Alors, on ne touchera
pas à cela.
M. Mathieu: Vous devriez écouter le député
de Beauce-Sud. Il aurait peut-être des explications à vous
donner.
M. Garon: Pardon?
M. Grenier: Le notaire Mathieu avait passé beaucoup de
contrats avec les gens de Dorset. Il était installé à La
Guadeloupe dans le temps. Ils l'ont bien connu.
M. Garon: Ils ont voté contre cela. Alors, ils n'en auront
pas.
M. Mathieu: Vous interprétez mal, M. le ministre. Ils ont
voté contre l'administration et contre l'option et non pas contre les
bonnes choses.
M. Giasson: Ils ont voté pour le meilleur homme. Le
député de Beauce-Sud ne peut pas l'avouer, mais nous, on peut le
dire.
M. Grenier: M. le Président, je termine avec cela. Je
reste sur mon appétit, bien sûr, et pas en tant que politicien,
mais...
M. Garon: C'est bien curieux, dans ces élections, de
suivre cela, parce que je n'étais pas convaincu entièrement que
l'exploitation des érablières autrement que par les
cultivateurs... C'était peut-être... Les gens voulaient-ils cela
ou non? Je serais curieux de voir cela. Avec les élections, on a eu
notre réponse.
M. Grenier: Je peux vous dire, M. le Président, que ceux
qui ont une location sont vraiment très satisfaits. C'est
intéressant et cela va bien pour
eux. Je pense que le gouvernement n'a pas à changer sa politique
là-dessus. Ce sont des gens satisfaits. Il n'y en a pas un grand nombre,
remarquez bien. Il y a peut-être une dizaine de cas dans ma
région, mais ceux qui exploitent une érablière du
gouvernement, dans l'ensemble, cela se fait bien et il n'y a personne
qui...
M. Garon: Est-ce de l'exploitation sous tubulure ou avec des
chaudières?
M. Grenier: Ils ont ce qu'il faut pour s'organiser. Ce ne sont
pas des...
M. Mathieu: Les gens de Dorset, ce n'est pas le même
rapport du tout. C'est une concession qui appartient à Domtar à
pleine propriété et non pas au gouvernement, à la
couronne. On offrait les érables à tous les cultivateurs.
Voulez-vous des érables? Cela appartient à Domtar. C'est comme si
j'allais offrir de l'amiante avant de la nationaliser. La réponse, on ne
peut pas se fier là-dessus.
Ensuite, la municipalité de Dorset retire $25 000 de taxes
foncières de Domtar. Qu'est-ce qui va se passer si cette
patente-là retourne à la couronne?
M. Garon: II retire cela...
Une voix: Réaménagement de fiscalité.
Le Président (M. Laberge): C'est un peu en dehors de la
pertinence de l'article 1 et je demanderais justement si... Domtar, je n'ai pas
vu cela dans le projet de loi.
Une voix: Vous avez fini par vous en apercevoir.
M. Russell: M. le Président, je pense que...
Le Président (M. Laberge): Non, cela fait
déjà un certain temps. J'ai été très
tolérant et je sais d'ailleurs que quelques membres ont
écoulé le temps de parole auquel ils avaient droit sur l'article
1.
M. Russell: Ma dernière question est celle-ci.
Le Président (M. Laberge): Vous avez droit à une
question.
M. Russell: Le ministre a-t-il l'intention de
récupérer ces érablières pour l'agriculture, parce
qu'elles sont exploitées il y a eu des subventions du
ministère de l'Agriculture ou si cela va rester sous le
contrôle du ministère des Terres et Forêts? C'est une
question importante. Par ce projet de loi, avez-vous le droit de le faire?
M. Garon: Non.
Le Président (M. Laberge): Alors, l'article...
M. Grenier: M. le Président, j'aimerais avoir une
dernière réponse. Mon bonhomme au village, vous n'avez pas
réglé son problème. Allez-vous révoquer son lot
s'il ne reste pas dessus? Cela fait trente ans qu'il paie des taxes. Il a
élevé sa famille les trois quarts du temps. Il est rendu au
village. Qu'est-ce qui va lui arriver? Comment allez-vous régler son
problème?
M. Garon: II faudrait voir le cas. Le projet de loi, par rapport
aux révocations ou ces choses-là, ne touche pas à cela. Le
projet de loi ne touche pas les révocations. Au point de vue de
l'acquisition, cela ne touche à rien à ce qui se faisait
avant.
M. Grenier: Cela ne touche pas les lots qui ne sont pas couverts
par les lettres patentes et qui appartiennent à des individus.
M. Garon: Non.
M. Grenier: Vous me confirmez cela, vous? M. Garon:
Oui.
M. Grenier: Attention! Il y a des fonctionnaires qui ont affaire
à vous, je pense.
M. Garon: On peut acquérir des lots sur billet de
location, mais on pouvait les acquérir, de toute façon, par un
réaménagement foncier. On ne change rien.
M. Grenier: Dans le temps, je ne pense pas que cela se
faisait.
M. Garon: Oui, cela se faisait. Ah oui!
M. Grenier: Vous preniez des lots qui appartenaient à des
individus.
M. Garon: On les achetait.
M. Grenier: Vous les achetiez, mais à quel prix?
M. Garon: Non...
M. Grenier: Au prix évalué ou à environ
$30?
M. Garon: Non, ils n'étaient pas forcés de
vendre.
Une voix: À la valeur marchande.
M. Grenier: Ils n'étaient pas forcés, mais ne le
seront-ils pas avec cela?
M. Garon: Non. Quand vous dites que le ministre peut
acquérir, cela veut dire qu'il peut acheter. Ce n'est pas marqué
"exproprier". Il n'y avait aucun pouvoir d'expropriation dans le temps.
M. Grenier: Le gars continue à avoir le droit de vendre
son terrain, à des étrangers s'il veut. Il continue à
avoir le droit de vendre son terrain à des étrangers.
Une voix: Non, il n'est pas propriétaire.
M. Garon: II ne le peut pas. Il est sous billet de location.
M. Grenier: Avez-vous envie de régler ce problème?
Ne trouvez-vous pas que cela est anormal?
M. Garon: C'est cela qu'on essaie de faire, mais il faut
commencer quelque part. Là, on commence par cela. Après cela, il
y a autre chose qu'on voudrait mettre en place, soit changer les
arrêtés en conseil, adopter de nouveaux arrêtés en
conseil, pour régler ce problème. Vous savez que cette affaire
est un moyen fouillis. Je vais vous dire une affaire: Comme ministre de
l'Agriculture, durant les trois premières années, je n'ai pas
commencé par les billets de location. Je suis franc avec vous. Je n'ai
pas commencé par cela.
M. Grenier: Non.
M. Garon: Là, on est rendu là. Cela fait un bout de
temps qu'on travaille là-dessus quand même. Cela a
nécessité un an et demi quand même, avant que ces papiers
arrivent à point. La loi a été déposée il y
a un an.
M. Giasson: M. le ministre, j'aimerais savoir une chose.
Êtes-vous conscient de l'inquiétude de détenteurs de
billets de location, non seulement dans le comté de
Mégantic-Compton, mais dans d'autres comtés du Québec? Il
y a des fonctionnaires qui, depuis quelques années, ont laissé
entendre que des modifications à apporter à la loi du
ministère de la colonisation ou du ministère de l'Agriculture
feraient qu'à brève échéance, après les
changements à la loi, la possibilité de conserver le billet de
location pouvait disparaître. Cela n'a pas été
inventé, M. le ministre. Cela a été dit par des
fonctionnaires du gouvernement dans nos comtés et dans nos
régions.
M. Garon: Oui, il se dit beaucoup de choses. On entend
constamment des rumeurs.
M. Giasson: Non, cela a été dit par des
fonctionnaires du gouvernement du Québec.
M. Garon: Quand?
M. Giasson: Cela a été dit à
différentes occasions dans des échanges individuels entre
fonctionnaires et détenteurs de billets de location. Ils ont dit: Mon
gars, dépêche-toi de le placer dans le groupement forestier parce
qu'il ne s'écoulera pas beaucoup d'années que tu n'auras plus la
possibilité de l'inclure dans le groupement forestier. Les changements
aux lois vont donner des pouvoirs qui feront qu'on t'enlèvera ton billet
de location.
M. Rancourt: Je pense que certains fonctionnaires le disent
actuellement, depuis que le gouvernement du Parti québécois est
là, pour faire peur au monde contre nous autres. Je m'en excuse, mais
c'est dit comme cela.
M. Giasson: M. le député de Saint-François,
cela a été dit bien avant la prise du pouvoir par le Parti
québécois.
M. Rancourt: Je le sais, je l'ai entendu dire moi-même.
M. Garon: Cela doit avoir été dit par des bleus.
M. Giasson: Ah! des bleus.
M. Garon: Des fonctionnaires, on n'en avait pas.
M. Giasson: Ce n'est pas d'hier.
M. Grenier: Vous aviez pas mal d'informations qui sortaient des
ministères pendant que les fonctionnaires faisaient des... Remarquez
qu'on se plaignait de cela bien avant que vous arriviez.
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, s'il vous
plaît! La mise au point étant faite, est-ce que l'article 1 sera
adoptée?
M. Giasson: M. le Président, j'aurais une question
à poser au ministre. (12 heures)
Le Président (M. Laberge): Je voudrais simplement
souligner au député de Montmagny-L'Islet qu'il a, avec toutes les
interruptions depuis hier sur l'article 1, parlé à peu
près 27 minutes. Je suis tolérant. Je note tout à la
minute près. Je peux quand même vous permettre de poursuivre
à la condition que la commission soit d'accord.
M. Garon: Comme cela, il aurait dépassé son
temps!
M. Giasson: Le ministre nous donne l'impression qu'il va
respecter fort bien la forme de droits que possèdent présentement
les détenteurs de billets de location. On n'ira pas acquérir ces
lots. Surtout dans une région comme la mienne, ce sont des lots qui
n'ont à peu près aucune valeur agricole et qui ont
véritablement une valeur forestière. Mais, s'il doit appliquer sa
loi, quand il aura des pouvoirs conférés, quel va être
l'avenir possible du Service de concession des terres si le ministère de
l'Agriculture décidait d'utiliser au maximum le pouvoir que lui
confère l'article 1 dans son premier ou son deuxième
alinéa?
M. Garon: Vous ne voudriez pas que ces fonctionnaires soient en
chômage?
M. Giasson: Je vous demande quel va être l'avenir du
Service de concession des terres. Si vous respectez tous les billets de
location présentement en vigueur, il n'y a pas de problème, ma
question ne tient pas.
M. Garon: Ils émettent des lettres patentes, comme on le
disait tantôt, au rythme de 100 par mois à peu près. On a
parlé de 15 000 lots. À 100 par mois, cela fait à peu
près 1200 par année.
Admettons que le rythme pourrait s'accélérer un peu, cela
voudrait dire qu'ils en ont pour dix ans avant d'avoir passé à
travers.
M. Giasson: Si votre raisonnement tient, cela suppose que tous
ceux qui ont des billets de location vont débloquer un jour sur
l'émission de lettres patentes.
M. Garon: Ceux qui y ont droit.
M. Giasson: Oui, mais qui y a droit? Sur 15 000 lots
détenus par billet de location, combien y en a-t-il de centaines qui y
ont droit? Vous n'avez pas l'impression qu'au rythme de 100 par mois, cela ne
vous prendra pas deux ans à compléter l'émission des
lettres patentes et ensuite, les autres n'y auront pas droit?
M. Garon: Comme vous le dites là, c'est un peu...
M. Giasson: On nous dit qu'il y aurait 10 000 détenteurs
de billets de location qui seraient admissibles à l'émission de
lettres patentes.
M. Grenier: Combien?
M. Giasson: On a dit 10 000.
M. Grenier: 10 000 sur 15 000 qui ont droit aux lettres
patentes?
M. Garon: En tout cas, cela va bien actuellement. Il faut dire
qu'il y a un nouveau dynamisme en agriculture du fait que les gens sont plus
confiants.
M. Grenier: M. le Président, vous allez me permettre de
dire au ministre que son dynamisme... Je voudrais qu'il réponde à
notre question.
M. Garon: Dans les terres et forêts également.
M. Grenier: Cette affaire est restée floue et c'est un
problème qui est inquiétant. Il a dit tout à l'heure que
15 000, c'était considérable en acres au Québec. J'admets
avec lui que c'est considérable. On n'a pas de réponse directe
là-dessus. Il parle de 10 000 ce matin. Mais que fait-on avec l'article
1 ? Que veut-on régler? Dans le moment, on ne sait pas à quoi
s'en tenir à ce sujet. Le député de Montmagny-L'Islet
soulève le problème, on le soulève aussi et le ministre
parle de dynamisme en agriculture, que cela va bien, que c'est bon. Ce n'est
pas cela qu'on veut savoir. Comment allez-vous régler ce problème
pour ces gens?
M. Garon: Vous venez d'arriver. J'ai tout expliqué cela
hier et ce matin.
M. Grenier: Non, non, on repose les mêmes questions. Je
m'excuse si je n'étais pas présent. J'aurais pu être ici
depuis ce matin puisque tout a "foiré" à l'autre commission, on
n'a rien fait. J'aurais pu être ici et je n'aurais pas perdu de temps,
mais il reste que les questions que pose le député de
Montmagny-L'Islet qui était ici hier et ce matin, j'ai l'impression que
ce sont les mêmes questions qu'on se pose. Ce n'est pas plus clair pour
lui que ce l'est pour moi et pourtant, il était ici hier. Cela veut donc
dire que les propos n'ont pas été d'une transparence
incommensurable, comme dirait Jean-Noël Tremblay. Mais, j'aimerais que
vous nous disiez... Ces lots non patentés, quand vous nous dites qu'il y
en a qui sont patentables et que d'autres ne le sont pas, quelle en est la
proportion? Dans combien de temps cela va-t-il se régler? Ceux qui ne
sont pas patentables, pourquoi ne le sont-ils pas quand ils sont détenus
depuis une trentaine d'années par des propriétaires? Est-ce parce
que ceux-ci ont eu le malheur de vieillir trop vite, de déménager
au village trop vite? S'ils étaient demeurés sur leur terre,
leurs lots seraient patentables comme les autres? C'est injuste envers ces
gens-là alors que ceux qui ont eu des lots un peu plus jeunes, qui ont
atteint 50 ans et qui sont encore là en profiteront et que le bonhomme
qui a 68 ans, qui est rendu au village, qui est à sa pension, n'a pas le
droit d'en profiter, où est la justice entre les deux?
Remarquez bien que je ne veux pas que ce soit un "free for all" pour
tout ce monde et qu'on fasse ce qu'on a fait il y a dix et quinze ans, qu'on
leur permette de rentrer dedans, de glaner, même des
érablières, comme on l'a fait. C'était mauvais. Il faut le
dénoncer. Je pense que dans le moment, le ministre a une mesure de
reboisement qui est efficace, en tout cas, qui commence à l'être.
Si on veut aider ces secteurs privés à vendre à d'autres
à condition qu'ils aient leurs lettres patentes, qu'ils puissent vivre
de leur patrimoine et de le vendre à d'autres, il faut exiger on
a des inspecteurs en masse que le reboisement se fasse de la part de ces
propriétaires privés. Combien y en a-t-il et dans combien de
temps prétend-il le faire?
M. Garon: Je ne peux dire combien il y en avait parce qu'il y a
des milliers de dossiers. On n'a pas fait l'inventaire de ces dossiers. On
répond à la demande. Aussitôt que les dossiers arrivent
là, on a assez d'ouvrage avec la demande actuellement qu'on
fournit là-dedans. C'est-à-dire que les lettres patentes sont
demandées en région. Les dossiers sont acheminés, les
transferts se font et cela marche. Pardon?
M. Giasson: On dit beaucoup de non aussi. À la suite de
demandes, oui.
M. Garon: Quand cela n'est pas applicable, quand cela ne
rencontre pas les conditions. Le problème, ce qu'on veut
régler...
M. Giasson: Sur toutes les demandes d'émission de lettres
patentes...
M. Grenier: J'ai la conviction, M. le Président, qu'au
ministère de l'Agriculture c'est un problème
qui n'est pas survenu ce matin, il n'est pas arrivé avec le PQ.
Il existait avant vous autres, avant nous autres et après nous autres,
il continue à exister et il va encore exister après le changement
de gouvernement aussi. Même avec la réélection du
gouvernement, il va exister encore. On est capable de dire, M. le ministre, ce
matin, j'en suis convaincu, j'ai la conviction qu'on peut vous dire à
votre ministère qu'il y a tant de lots qui ne sont pas couverts par des
lettres patentes, il y en a tant qui répondent aux conditions, il y en a
tant qui ne répondent pas aux conditions et vous êtes capable de
nous mettre sur la table demain matin, de nous donner cela. Je suis sûr
de cela moi. Vous êtes capable de mettre cela sur la table demain matin
et dire: Dans votre région, M. le député, vous en avez 77,
et il y en a 30 là-dessus qui ne sont pas patentables. C'est cela qu'on
veut avoir.
M. Garon: Ils n'ont pas cela, ces données.
M. Grenier: Voyons donc. Cela dure depuis tout le temps.
M. Garon: On est en train de le faire actuellement pour
l'aménagement dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, je vous
le disais tantôt. On est en train de faire cela. Cela n'est pas fait et
cela fait des mois qu'ils travaillent là-dessus. Ce n'est pas fait. Ici,
ce qu'on vient régler avec cette loi, on ne règle pas tous les
problèmes avec cette loi, mais les lots qui sont au ministère de
l'Agriculture, qui ont été révoqués dans le
passé ou qui ont été acquis par
réaménagement foncier ou qui pourraient venir de parcelles, on
pourrait les revendre ou les louer. Ce qui n'est pas à vocation
agricole, on l'enverrait aux Terres et Forêts qui s'occupent de
l'aménagement forestier. Ce qui est à vocation agricole, on
pourrait plus facilement le louer et le revendre plutôt que d'être
soumis à la Loi des terres de colonisation. C'est le but de cet article.
On ne règle pas tout avec cet article, mais on règle ce
problème.
M. Russell: M. le Président, est-ce qu'on pourrait poser
la question d'une autre façon? Même si on ne règle pas tout
avec cet article, les cas qui ont été soulevés par le
député de Mégantic-Compton, je les connais très
bien. Celui qui a été sur sa terre pendant plus de 30 ans,
légalement, il n'a pas ses lettres patentes et ne peut pas vendre cette
terre. Est-ce qu'au ministère de l'Agriculture, il y aurait moyen de
régler ces cas? Il ne doit pas y avoir des milliers de ces cas.
M. Giasson: La loi donne ces pouvoirs: D'acquérir d'un
détenteur de lots un lot de location à sa valeur marchande.
M. Garon: On peut, avec le programme de l'aménagement
foncier, faire cela. Le gars qui est au village, comme vous dites, au fond ce
qu'il voudrait, il y a un cultivateur à côté, mettons, qui
serait intéressé à acquérir cette terre,
l'idéal c'est que ce gars au village dise: Je vais la vendre.
M. Russell: Est-ce qu'il n'y a pas une autre possibilité,
M. le Président, que le cultivateur concerné s'adresse au
ministère et dise: Je n'ai pas mes lettres patentes et je veux les
obtenir. Le ministère dit: Non, on ne peut pas te donner tes lettres
patentes. On peut acheter ta ferme pour la valeur marchande qu'elle a
actuellement et libérer ces cas. Il ne doit pas y avoir des milliers de
cas comme cela.
M. Garon: C'est ce qui se fait actuellement.
M. Russell: Même sous billet de location? Avec la loi vous
pourrez faire cela.
M. Garon: On peut actuellement.
M. Russell: Vous pouvez actuellement.
M. Garon: L'acquisition, le problème, cela se fait
actuellement.
M. Grenier: II y en a beaucoup qui vendent cela au
ministère et qui sont satisfaits des conditions offertes par le
ministère.
M. Garon: C'est de l'acquisition. C'est un programme
d'acquisition selon la valeur marchande. S'ils ne s'entendent pas sur la valeur
marchande, le gars garde son billet, il reste comme cela.
M. Grenier: J'ai l'impression qu'il ne doit pas y avoir un grand
nombre de contrats qui se passent au gouvernement.
M. Garon: Ils disent que dans l'administration du
réaménagement foncier, l'évaluation faite par l'office est
acceptée dans une proportion de 85% à 88% des cas.
M. Grenier: Les demandes.
M. Garon: C'est un achat de gré à gré. Si
l'évaluation faite par le Crédit agricole, dans l'administration
du réaménagement foncier, n'est pas acceptée, il n'y a pas
d'acquisition par le réaménagement foncier. On dit que dans 85%
à 88% des cas, il y a acceptation.
M. Russell: M. le Président, je suis d'accord que vous
pouvez le faire actuellement, mais le problème c'est que vous ne pouvez
pas le revendre.
M. Garon: On est soumis à la Loi des terres de
colonisation. Avec cet article, on pourrait.
M. Russell: Je pense que c'est important que cela soit
clarifié.
M. Grenier: Le revendre à des individus.
M. Garon: C'est parce qu'une fois qu'on l'a acquis...
M. Russell: Pour des fins agricoles.
M. Garon: C'est cela. Pour des fins agricoles. S'il n'a pas une
valeur agricole, on va l'envoyer aux Terres et Forêts. Je ne veux pas
administrer ces lots pour brasser du papier pour du papier, il y a assez de
milliers d'affaires et de classeurs. S'il n'y a pas de vocation agricole, les
Terres et Forêts s'organiseront avec cela. Ce qui est à vocation
agricole, on pourrait, avec cet article du projet de loi no 43, le louer ou le
vendre facilement, sans être astreint à la Loi des terres de
colonisation.
Le Président (M. Laberge): Alors l'article 1 sera-t-il
adopté?
M. Giasson: Sur division.
Le Président (M. Laberge): Adopté sur division.
J'appelle l'article 2, qui se compose de plusieurs paragraphes que nous allons
étudier séparément. Alors l'article 2 ajoute d'abord une
section...
Constitution d'une banque de terres arables
M. Garon: À l'article 2, j'aimerais proposer... C'est
parce que, sur la même feuille, j'ai deux propositions.
Je vais vous le dire et on fera un papier après. L'article 2 est
modifié par l'insertion, dans le paragraphe troisième, le
deuxième alinéa de l'article 32 proposé par ledit projet,
après les mots "aux prix et conditions" des mots "et selon les
critères ".
M. Giasson: J'aimerais avoir une copie, si c'était
possible.
Le Président (M. Laberge): Je vais le prendre "et selon
les critères", et je vais vous installer cela.
Alors, la proposition du ministre à l'article 32 demande qu'au
troisième alinéa, à la deuxième ligne, après
le mot "conditions" on ajoute les mots "et selon les critères".
Au troisième alinéa, deuxième ligne, après
le mot "conditions", on ajoute les mots "et selon les critères".
M. Giasson: Pourriez-vous relire l'alinéa?
Le Président (M. Laberge): L'alinéa 3 amendé
se lirait donc comme suit: "Louer, vendre ou autrement aliéner à
titre onéreux un tel immeuble aux prix et conditions et selon les
critères fixés, conformément au règlement."
Est-ce que cet amendement sera adopté?
M. Giasson: On va le discuter avant.
Le Président (M. Laberge): Vous avez le choix. C'est sur
le mot "critères".
M. Garon: Je vais vous dire pourquoi je marque cela. C'est parce
qu'à l'article 36, je vais avoir un autre projet d'amendement qui va
avoir pour but aussi... plutôt que de l'avoir dans le règlement,
vous savez que, dans ces cas, il y a des critères au point de vue des
candidatures, alors, on va marquer "ainsi que les critères de
sélection des acquéreurs ou des locataires éventuels."
Parce qu'on va publier les critères plutôt que d'avoir des
critères secrets. Les gens nous demandent: Quels sont les
critères? On voudrait que le règlement prévoie les
critères pour que cela soit ouvert, que ce ne soit pas caché. Les
gars nous disent: Moi, j'ai été refusé, j'ai
été accepté. Alors le règlement prévoirait
des critères des acquéreurs, des critères de
sélection, pour que cela soit connu.
M. Russell: Si on avait les règlements, cela pourrait
clarifier ces petits points.
M. Garon: Je vous mentionnerai les critères. Les
règlements ne sont pas encore complétés. Quels seraient
les taux de location? On est en train de regarder cela et de travailler
là-dessus. Ils ne sont pas prêts complètement encore. Il y
a eu plusieurs hypothèses et là on arrive à des
hypothèses qui sont vraiment intéressantes.
Le Président (M. Laberge): Alors, cet amendement, qui
consiste à ajouter les mots "et selon les critères", sera-t-il
adopté?
M. Russell: M. le Président, je suis bien prêt
à adopter cet amendement, mais est-ce qu'on peut discuter l'article?
Parce que moi aussi, j'ai des amendements à apporter.
Le Président (M. Laberge): Oui, oui, c'est simplement pour
régler mon cahier ici. S'il n'y a pas de discussion sur les mots "et
selon les critères", on peut l'adopter et l'article demeure ouvert.
Adopté?
M. Russell: Adopté. M. Giasson: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Amendement adopté. Alors
l'article 32 amendé est discutable.
M. Giasson: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le député...
(12 h 15)
M. Giasson: L'article 1 a apporté des modifications
à la Loi des terres de la colonisation, a donné des pouvoirs
d'acquisition, des pouvoirs d'utilisation et de commercialisation de terres ou
de lots appartenant au ministère de l'Agriculture et de la Colonisation.
Or, l'article 32, puisque la première démarche est
déjà entreprise en ce qui a trait aux lots sous billet de
location ou aux immeubles sous billet de location ou autres lots
possédés directement par le ministère, permettrait
maintenant, si j'interprète bien les pouvoirs de la loi, la
possibilité pour le ministre d'acquérir des immeubles qui sont
des propriétés réelles d'individus au Québec,
c'est-à-dire d'acquérir des immeubles sur lesquels des lettres
patentes ont été émises, quelle
que soit l'époque, sur la propriété privée
d'individus.
M. Garon: Non, ce qu'on vise ici... Il faudrait oublier les
lettres patentes et les billets.
M. Giasson: Cela a été réglé à
l'article 1. M. Garon: Oui, c'est ça.
M. Giasson: J'essaie de comprendre si ce sont des
propriétés privées que le ministre pourrait se procurer
dans la constitution de la réserve, de la banque des terres arables.
M. Garon: Se procurer des propriétés
privées? Il faut s'entendre. Le but n'est pas d'acquérir des
propriétés privées. L'idéal, pour l'étude de
cet article, je ne sais pas ce que vous en pensez, mais ce serait d'aller voir
un autre article, on pourrait passer à l'alinéa...
M. Giasson: C'est une section nouvelle à la Loi du
ministère de l'Agriculture.
M. Garon: Oui. D'abord, à partir de l'article 32, tout
l'article 2 du projet de loi. Ce projet de loi ne comprend pas beaucoup
d'articles, il a trois articles. L'article 1 amende la loi du ministère,
l'article 2 ajoute une section nouvelle à la loi du ministère, la
section VII, la constitution d'une banque de terres arables. Maintenant,
l'article 32 a une certaine longueur. Je ne sais pas si on veut... On
pourrait...
M. Giasson: On peut y aller article par article. M. Garon:
Pardon?
M. Giasson: On va voir quelles sont les fins recherchées
exactement par l'article 32.
M. Garon: Je pourrais vous donner des explications sur l'article
32, tranquillement. Le but de la banque de terres, j'ai voulu qu'il soit
inscrit dans la loi. Des fois, parce que ce n'est pas inscrit dans la loi, on
oublie l'objectif de la loi. Si on avait adopté une loi, en fonction
d'une banque de terres arables, sans avoir inscrit ses objectifs, les buts de
la banque, au cours des années, on aurait pu arriver à dire: On
va faire une banque pour faire une banque. Je voulais que ce soit bien
précis que le but de la banque de terres est, premièrement, de
favoriser la relève en agriculture, pour aider à vendre, à
louer ou à louer avec option d'achat des terres aux jeunes;
deuxièmement, favoriser l'agrandissement ou la consolidation de fermes
de type familial; troisièmement, favoriser l'exploitation de terres
arables non utilisées ou sous-utilisées.
M. Giasson: On est d'accord là-dessus. M. Garon:
Pour réaliser ces fins... M. Giasson: Bon.
M. Garon: ... quels sont les pouvoirs accordés au ministre
pour les fins de la loi? Premièrement, l'acquisition d'immeubles.
M. Giasson: Appartenant à qui, dans le moment? À
des particuliers.
M. Garon: À des particuliers. Cela pourrait être,
par exemple...
M. Giasson: Légalement propriétaires de parcelles
de terres.
M. Garon: Ce peut être une ferme complète. Dans mon
esprit, ici, on est dans une autre affaire. Je pense qu'il faut oublier
l'article 1 pour tomber dans un autre cadre.
M. Giasson: Je suis d'accord avec vous.
M. Garon: Dans mon esprit, il peut arriver différents
types d'affaires. Dans le cas de l'acquisition d'immeubles, par exemple,
à l'article 2, on dit que les conditions et le prix d'achat devront
être en conformité du règlement; même si le
règlement n'est pas complété, on peut présumer
qu'il sera prévu que les immeubles seront acquis avec bons ou titres de
propriété sujets aux servitudes existantes et pour un prix
n'excédant pas la valeur marchande. C'est la valeur marchande. Il peut
arriver plusieurs cas. Ce peut être, par exemple, une ferme. Normalement,
parce que la banque de terres existe, ce qui va arriver normalement, c'est que
des jeunes vont savoir ça et vont s'informer des terres qui peuvent
être disponibles.
Il y en a qui vont dire: Moi, je suis intéressé. S'il y a
des terres disponibles à un endroit, pourriez-vous m'en aviser? Il peut
y avoir un genre de liste de jeunes qui disent: Pourriez-vous m'aviser? Je suis
intéressé à m'établir dans tel coin.
Il arrive souvent que des gens veulent vendre des terres, des belles
fermes organisées, ils ont mis trente à quarante ans à les
monter, et ne trouvent pas d'acquéreur. Le cultivateur est alors
obligé de vendre son troupeau et, après cela, faire un encan pour
la machinerie et ensuite vendre le fonds de terre. Tandis qu'avec une banque de
terres, un jeune pourrait, dépendamment... C'est pourquoi cela va
prendre des critères de sélection, pour prendre des gens qui ont
une certaine expérience. Il est évident que si vous voyez un gars
de Montréal qui dit qu'il a été élevé sur
l'asphalte toute sa vie, mais qu'il aimerait s'établir sur une terre,
avant de lui confier une terre de $200 000, ou de $150 000, tu y penses deux
fois. Le gars n'a jamais vu de vache de sa vie. Il ne sait même pas
combien une vache a de trayons. Je pense bien que ce n'est pas à ce
gars-là que cela s'adresse.
Disons qu'il y a une personne qui arrive qui a une terre à vendre
et qu'il n'y a pas d'acheteur dans le village, dans le coin ou dans la
région, il y a peut-être un gars qui reste dans une région
plus loin qui serait intéressé à commencer là,
même s'il ne veut pas rester dans cette région-là toute sa
vie.
II y a bien des Européens qui viennent. Vous pourriez bien avoir
des gars qui changent de région au Québec. Là, il serait
possible d'acquérir la terre pour la banque, parce qu'elle a un acheteur
pour cette terre-là ou un locateur avec une option d'achat. Cela
pourrait arriver des affaires comme cela. Ces choses-là faciliteraient
les choses aux gens. Cela peut être un genre d'acquisition.
Le deuxième genre d'acquisition qui peut être fait est le
suivant. De par la Loi de la protection du territoire agricole, on a vu qu'il y
avait sans doute un million d'acres sous spéculation au Québec,
dans les basses terres du Saint-Laurent et, à des endroits, des milliers
d'acres. Prenons un cas concret. Dans la région de Saint-Hubert, des
compagnies ont acheté des terres complètes. Elles les ont
divisées en lots et elles ont vendu les lots d'un bout à l'autre
à des gens. Dans Saint-Hubert, il y a 19 000 lots qui sont la
propriété de 6500 propriétaires différents
localisés dans à peu près tous les pays du monde. J'ai
reçu des lettres de ces gens-là après que la Loi de la
protection du territoire agricole ait été adoptée. Il y en
avait de tous les pays. Tout le monde est coincé. La municipalité
est coincée. Les gens qui ont acheté là sont
coincés. Qui va faire une rue, des aqueducs et tout cela, quand vous
avez, sur la même rue, un gars qui reste en Suisse, un autre en
Allemagne, un autre à Hong Kong, un autre aux Etats-Unis? Il ne se fera
jamais de développement là. Ce qu'on vient de gaspiller d'une
façon nette, c'est 19 000 lots au Québec dans ce
territoire-là.
Il y a des territoires complets comme cela. Pour la banque de terres,
par exemple, quelqu'un peut arriver et dire: Je suis intéressé
à vendre cela. Des gars regardent cela. À un moment donné,
il y a un, deux ou trois lots. La banque de terres pourrait parce qu'il
va y en avoir une connaissance, les gens vont savoir que cela existe
arriver et dire... Les gens diront: C'est zoné agricole. Maintenant,
cela ne m'intéresse pas de garder cela. Je pensais à
spéculer, à faire éventuellement du développement.
D'accord, je vais revendre cela. Je vais revendre cela. Le cultivateur seul va
arriver et dire: Acheter cela; mettre cela en valeur, bâtir une maison,
c'est... La banque de terres pourrait jouer ce rôle-là de
regrouper deux trois parcelles, faire une ferme viable. Prenons comme exemple
la région de Montréal et celle de Saint-Hyacinthe. Je ne dis pas
qu'elle va en faire une, trois ou cinq par jour.
M. Giasson: Vous avez raison.
M. Garon: Même si elle en faisait dix ou quinze par
année, ce serait déjà quelque chose. Elle va
peut-être regrouper 200, 300 ou 400 acres ensemble et, à ce
moment-là, même si ce n'est pas l'idéal, de faire
l'amélioration, elle pourrait le faire et dire à quelqu'un, une
fois qu'elle est améliorée: Es-tu intéressé
à louer ou à acheter? C'est prêt maintenant?
Et il y a des gens qui auraient déjà donné leur nom
d'avance pour ces choses-là. Cette banque va permettre une information
qui n'est pas disponible à l'heure actuelle. C'est évident qu'il
y a des courtiers, des notaires, des agents d'immeubles qui ont une certaine
information qui est très localisée. Cela n'a pas pour but de
remplacer des individus, mais cela a pour but d'avoir une information sur
l'ensemble du territoire québécois qui va être accessible
aux gens, concernant les terres. C'est le but. On pourrait faire cela, aussi
dans ce sens-là, encore pour les mêmes fins. Après cela, on
pourrait faire exécuter les travaux. En attendant de trouver preneurs,
certains travaux peuvent soit devenir obligatoires, comme les charges
ordinaires du propriétaire telles les clôtures de ligne, les
passages de ligne, etc. ou s'avérer essentiels pour la mise en valeur de
l'immeuble concerné. C'est pour cette raison qu'il faut pouvoir
exécuter des travaux. Il y a des travaux où on n'a pas le choix.
Il faut les faire. Il y en a d'autres qui peuvent être
nécessaires. Il y a aussi des travaux de mise en valeur qui pourraient
être faits. La terre serait remise en valeur à ce
moment-là. La location, l'aliénation d'immeubles, c'est
prévu au paragraphe 3 que le ministre peut louer, vendre ou autrement
aliéner soit un bail à loyer pour une durée et un loyer
fixés en conformité du règlement, soit par vente aux prix
et conditions fixés par règlement, soit par un autre mode
d'aliénation à titre onéreux comme, par exemple, le bail
emphytéotique.
Quatrièmement, les dispositions... C'est une supposition qui peut
être nécessaire si on fait...
M. Giasson:... gouvernement fédéral...
M. Garon: C'est cela, entre autres. Cela pourrait être
nécessaire, cet article-là, pour d'autres territoires aussi. Les
autres pouvoirs du ministre qui sont inscrits aussi là-dedans: Si le
règlement le prévoit, le ministre pourrait aliéner un lot
ou une parcelle de lot à des fins autres que celles
énumérées ci-dessus, mais uniquement dans les cas
prévus au règlement et aux conditions fixées en
conformité du règlement.
M. Giasson: Quoi?
M. Garon: Si c'était nécessaire, on pourrait
indiquer là-dedans s'il y a des terres, par exemple, qui... Pour
régler certains problèmes qui existent, des...
M. Giasson: Même à l'intérieur du territoire
agricole protégé?
M. Garon: Oui. S'il y a des situations de fait, parfois des
droits acquis, vous ne pouvez pas passer à côté.
M. Giasson: Si les droits sont acquis, vous n'avez pas à
intervenir. Ils sont là.
M. Garon: II y a des titres de propriété
là-dedans qui font secs en mosus. Il faut que ce soit tout
clarifié, parce que vous allez arriver et la banque de terres pourrait,
en même temps qu'elle
va étudier des questions... Remarquez bien que c'est inscrit dans
la loi. Il n'y en aura sûrement pas 5000 par année, mais on peut
avoir besoin de ce pouvoir pour clarifier des situations, à un moment
donné.
M. Russell: Mais, par règlement, on pourrait indiquer quel
genre de conditions vont se présenter. Cela peut être pour faire
une route, pour bâtir un édifice.
M. Garon: Oui.
M. Russell: II faudrait quand même le limiter pour qu'on
s'en serve à acheter une terre et, après cela, l'utiliser pour
d'autres fins.
M. Giasson: Sauf sur des articles qui donnent des pouvoirs
absolus au gouvernement.
M. Garon: Si le ministre acquérait un lot sous billet de
location dans le cadre de ce programme, il ne serait pas soumis aux
dispositions de la Loi des terres de colonisation. L'aménagement foncier
ne fonctionne pas dans tout le Québec. Il fonctionne dans une partie du
Québec. Cela pourrait être acquis par le
réaménagement foncier. Cela pourrait être acquis par la
banque de terres. À ce moment-là, on pourrait vendre et louer ces
terres facilement sans être soumis à la Loi des terres de
colonisation. C'est le but de l'article 32.
Le Président (M. Laberge): M. le député
d'Iberville.
M. Beauséjour: Ce serait seulement pour corriger quelque
chose au troisième alinéa: "Louer, vendre ou autrement
aliéner à titre onéreux un tel immeuble aux prix..."
J'imagine que le "et", on pourrait le changer par une virgule. Ce serait un
amendement. "... aux prix, conditions et selon les critères".
Le Président (M. Laberge): Parfait. On va enlever le "et"
après "prix", le remplacer par une virgule. "... aux prix, conditions et
selon les critères fixés conformément au
règlement". Merci beaucoup. D'accord.
M. Garon: Vous en avez pris bonne note.
Le Président (M. Laberge): Oui, je l'ai noté, c'est
fait.
M. Garon: Oui?
Le Président (M. Laberge): Oui, ce n'est pas plus long que
cela. Les amendements, ce n'est pas long. L'article 32 est-il
adopté?
M. Giasson: Vous avez le même style de réaction avec
la présidence qu'avec vos fonctionnaires!
M. Garon: Je lui demande si c'est possible. Pardon!
Le Président (M. Laberge): C'est aussi possible que cela.
Il n'y a aucun problème. Cela va très bien. Avant de suspendre,
voulez-vous que l'article 32 soit adopté?
M. Russell: Non, j'ai plusieurs questions sur l'article 32.
Le Président (M. Laberge): La commission ajourne donc ses
travaux sine die.
Fin de la séance à 12 h 27