(Dix heures
)
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon
matin. Nous allons nous recueillir quelques instants.
Vous pouvez vous asseoir.
Affaires du jour
Donc, nous débutons nos travaux aux affaires du
jour. Donc, M. le leader adjoint, pouvez-vous nous indiquer nos travaux?
M. Lévesque (Chapleau) : Oui,
bonjour, Mme la Présidente. Un bonheur de vous retrouver ce matin pour
poursuivre nos travaux. J'en profite pour saluer l'ensemble des collègues. Et
je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 7 du feuilleton,
s'il vous plaît.
Projet de loi n° 88
Adoption du principe
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc,
à l'article 7 du feuilleton, M. le ministre du Travail propose l'adoption
du principe du projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi concernant le
régime de négociation des conventions collectives et de règlement des
différends dans le secteur municipal.
M. le ministre du Travail, je vous cède la
parole pour votre intervention.
M. Jean Boulet
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Évidemment, c'est un projet de loi qui concerne un dossier bien,
bien particulier du monde des relations de travail, et c'est plus particulièrement
le régime de négociation collective applicable aux policières et policiers
ainsi qu'aux pompières et pompiers qui sont à l'emploi des municipalités du Québec. En raison du caractère essentiel de leur
travail, ces salariés ne bénéficient pas du droit de grève. Pour compenser
l'absence de ce droit, le cadre légal prévoit d'autres mécanismes qui viennent
régir les négociations entre ces employés et les municipalités. Le but du
projet de loi modifiant la Loi concernant le régime de négociation de
conventions collectives et de règlement de différends dans le secteur municipal
est de s'assurer que ces travailleurs bénéficient d'un mécanisme adéquat,
indépendant et équilibré comme substitut à la grève.
Le projet de loi n° 88 intervient pour
corriger une partie du régime mis en place en 2016 par le précédent
gouvernement. Plus précisément, il s'agit d'éléments liés spécifiquement aux
mécanismes d'arbitrage applicables aux policiers et aux pompiers. Les
modifications sont rendues nécessaires en raison de décisions judiciaires. En
effet, en octobre 2021, la Cour supérieure avait déclaré
inconstitutionnels les articles 10, 11, 12, 25 et 26 de la loi. Ces
articles concernent la composition et la sélection d'un conseil de règlement de
différends destiné à mener à bien les négociations qui n'ont pas abouti dans le
cadre du processus de négociation. À noter également que la cour avait validé
plusieurs autres dispositions concernant, entre autres, la durée des
conventions collectives, les critères d'évaluation utilisés par le conseil de
règlement de différends et le partage des honoraires du conseil.
En août 2024, la Cour d'appel a maintenu le
jugement de la Cour supérieure. La Cour d'appel a ensuite donné un délai de six
mois au législateur pour modifier la loi et remplacer le mécanisme prévu.
L'échéancier prévu est le 28 février 2025, dans à peu près trois semaines.
Ça explique pourquoi nous devons agir avec diligence afin d'adopter ce projet
de loi. La cour a essentiellement considéré que le mode de nomination des trois
membres du conseil de règlement des différends était inadéquat, notamment parce
qu'il ne permettait pas aux parties de participer de façon significative au
choix des décideurs.
Le présent projet de loi, Mme la Présidente, propose
ainsi un nouveau mécanisme d'arbitrage en remplacement du conseil de règlement
des différends et allège le processus de nomination des arbitres agissant dans
les dossiers concernant, je le réitère, les policiers, policières, les pompiers
et pompières à l'emploi des municipalités. On y définit des critères permettant
au ministre du Travail de constituer une liste de personnes aptes à agir comme
arbitres de différends dans le cadre de négociations collectives. Et la liste
en question est constituée d'arbitres dont les noms ont été proposés conjointement par les associations représentatives des
municipalités, l'Union des municipalités et la Fédération québécoise des municipalités, les régies
intermunicipales, les policiers, les pompiers du secteur municipal regroupés en
association.
C'est ensuite à partir de cette liste que les
parties décident... ou choisissent, plutôt, après consultation, un arbitre à qui soumettre le différend. En l'absence
d'entente sur l'identité de l'arbitre, le projet de loi prévoit, comme ce sont
les règles habituelles prévues dans le Code du travail, que le ministre
procède à une nomination, toujours parmi cette liste qui a fait l'objet d'un
consensus entre les parties.
Le projet prévoit la possibilité, pour le
ministre, d'ajouter des noms à cette liste-là, au besoin, à partir de la liste
qui a été confectionnée par le Comité consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre qui regroupe, bien sûr, les associations patronales et les
centrales syndicales.
Le projet de loi prévoit
également la possibilité, pour chacune des parties, de désigner un assesseur
afin de la représenter et d'assister l'arbitre lors de l'audition et, si
nécessaire, pendant le délibéré.
De plus, le projet de loi propose que la
rémunération des arbitres nommés pour l'arbitrage de tout différend dans le
secteur municipal suive les dispositions du Règlement sur la rémunération des
arbitres, adopté en vertu du code québécois du travail.
Je crois que ces modifications permettent
d'obtenir l'équilibre recherché et de répondre aux préoccupations formulées par
la cour. On a déposé quelques amendements de concordance. Je me suis assuré de
les transmettre, de les déposer à mes collègues des partis de l'opposition,
dans un souci, bien sûr, de collaboration.
En terminant,
je veux également prendre un moment pour remercier les personnes et les groupes
qui ont participé aux consultations particulières. Certains groupes ne sont pas
venus, exprimant un accord total avec les dispositions du projet de loi.
Les parties qui sont venues ont fait certaines recommandations. Évidemment, on
a tout étudié avec attention et considération. Et, lors des travaux
législatifs, bien, vous le savez, c'est important de s'assurer que toutes les
parties, toutes les personnes qui
participent à l'étude détaillée aient une bonne compréhension d'un projet de
loi ainsi que de ses objectifs.
Puisque les modifications concernent un aspect
assez circonscrit de la loi, je suis convaincu, avec mes collègues
gouvernementaux, avec les collègues des partis d'opposition, qu'on va pouvoir
assurer un cheminement avec le plus de célérité possible de ce projet de loi
là. C'est pourquoi, Mme la Présidente, j'invite les membres de cette Assemblée à adopter le principe de ce projet de loi afin que
nous puissions résoudre la situation actuelle dans les délais requis. Merci,
Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, la prochaine
intervenante, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. À vous la parole.
Mme Madwa-Nika Cadet
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Donc, à mon tour d'intervenir sur l'adoption du principe du projet
de loi n° 88, Loi modifiant la Loi concernant le régime de négociation des
conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur
municipal. Je remercie, donc, le ministre, donc, pour son allocution et sa
présentation, donc, des différents éléments
que nous retrouvons au projet de loi. Et d'emblée, Mme la Présidente, donc, je
rassure les partis, donc, que notre
formation politique, le Parti libéral du Québec, donc, votera en faveur du
principe du projet de loi n° 88.
Mme la Présidente, avant de vous parler de ce
qui se retrouve au projet de loi, j'imagine que vous avez déjà entendu parler,
donc, de la locution «municipalités, créatures des provinces», hein? C'est
ainsi qu'on les nomme sur le plan constitutionnel. Et on le dit, donc, dans
notre régime constitutionnel canadien, donc, une séparation, donc, des pouvoirs, donc, a été dévolue au gouvernement
fédéral et aux gouvernements provinciaux, et laissant, donc, les municipalités
dans le giron des provinces, en les appelant communément «créatures».
Lorsque le Parti libéral du Québec était au
pouvoir, c'était absolument important pour nous de nous assurer, donc, que les
municipalités soient bien plus que ce que nous nommons, donc, dans le jargon
constitutionnel, donc, des créatures, mais deviennent des gouvernements de
proximité. C'est à cet égard que notre gouvernement libéral s'est assuré de pouvoir octroyer des pouvoirs supplémentaires
à ces municipalités, d'abord, en les nommant... en les reconnaissant,
plutôt, comme gouvernements de proximité. Et ça, j'imagine aussi que c'est une
locution que vous avez entendue de plus en
plus, au cours des dernières années, parce que ça commence, donc, à intégrer...
celle-ci commence à intégrer le jargon de notre environnement politique,
de notre univers politique. Donc, nos municipalités sont dorénavant des
gouvernements de proximité.
• (10 h 10) •
Dans cet esprit, donc, en les nommant
gouvernements de proximité, en s'assurant d'octroyer des pouvoirs spéciaux à la
ville de Québec, à Montréal, en s'assurant de faire de Montréal... octroyer à
Montréal un statut de métropole, donc, dans la foulée, donc, de ces différentes
modifications là est née la loi sur les régimes de négociation... pardon, la
Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et de
règlement des différends dans le secteur municipal, donc, une loi, donc, qui
s'assurait, donc, de reconnaître le caractère distinct des municipalités.
Vous le savez peut-être, Mme la Présidente, mais
auparavant, donc, plusieurs dispositions du Code du travail portaient, donc,
sur, donc, le... bien, en fait, sur le régime de négociation des policiers et
des pompiers municipaux. Le ministre, donc,
l'a mentionné, donc, un article distinct du Code du travail, donc, prévoit
l'effet que les policiers et les pompiers municipaux ne bénéficient pas
du droit de grève. Donc, ça, c'est en vertu du Code du travail. Donc, tout ce
qui concernait la négociation des conventions collectives dans le milieu
municipal ne se retrouvait, donc, qu'à travers, donc, le giron du Code du
travail de façon générale, avec
quelques dispositions distinctes, donc, bien précises. Mais il nous
apparaissait opportun, en considérant que nos municipalités, donc, sont
redevables à la population et répondent, donc, à certains principes différents... c'est des principes distincts, de
ceux qui régissent, donc, les entreprises privées, qu'elles bénéficient
au même titre que les employés de la fonction publique québécoise, par exemple,
d'un régime distinct. C'est un élément que préserve le projet de loi n° 88.
On vous nomme quelques-uns de ces principes, Mme
la Présidente, en disant, donc, les principes devant guider en tout temps la détermination des conditions de
travail dans le secteur municipal, soit : le fait qu'en qualité
d'institution démocratique une municipalité est redevable auprès de ses
contribuables et qu'elle doit donc utiliser le produit, donc, des taxes et tarifs pour assumer la prestation de
services publics; donc, le principe que l'attraction et le maintien à l'emploi
de personnel qualifié commandant des conditions de travail justes et
raisonnables eu égard aux qualifications requises, aux
tâches à exécuter, à la nature des services rendus; l'équité entre les membres
du personnel, bien évidemment; et le fait qu'il est de la responsabilité de
l'employeur de pourvoir à l'embauche de personnel qualifié et de gérer ses
effectifs de manière à combler ses besoins
opérationnels. Donc, ça vous donne, donc, un concept... vous octroie, donc, un
contexte, donc, supplémentaire pour
bien saisir comment, donc, le projet de loi... comment la loi n° 24, donc le projet de loi n° 110 à l'époque, dans quel
contexte celui-ci avait été déposé.
Le ministre l'a aussi
mentionné plus particulièrement, mais donc le projet de loi mettait de l'avant,
à titre de nouveauté, entre autres
nouveautés, différents critères que, bon, à l'époque le conseil de règlement
des différends devait suivre pour rendre sa décision, par exemple, donc,
la situation financière et fiscale de la municipalité, les conditions de
travail applicables aux salariés concernés, les conditions de travail
applicables aux autres salariés de la municipalité, la politique de rémunération et des dernières majorations consenties par
le gouvernement aux employés des secteurs public et parapublic, des
conditions de travail applicables dans les municipalités et régies
intermunicipales semblables, les exigences relatives à la saine gestion des
finances publiques, la situation économique locale et la situation des
perspectives salariales et économiques du Québec.
Il faut savoir, Mme
la Présidente, que ces critères-ci, donc, du... en fait, plusieurs, donc, de
ces critères, donc, étaient nouveaux avec l'adoption de la loi n° 24
en 2016, mais le concept de critères n'était pas nouveau en droit québécois. Le
Code du travail prévoyait, à l'article 99.5, qui a depuis été abrogé,
qu'il fallait, donc, que... que l'arbitre devait
tenir compte de l'équité interne, de l'équité externe ainsi que de la situation
des perspectives salariales économiques du Québec. Donc, ce concept
n'était pas nouveau.
Donc, la loi étant...
ayant été contestée et évidemment, donc, avec un juste dialogue entre les
différentes instances qui composent notre
État de droit, ce que nous saisissons, c'est qu'une grande partie... une
grande, en fait, majorité de ce qui
se retrouvait, donc, à la loi n° 24, donc, a été préservé par les tribunaux, dont
les critères, mais qu'effectivement que
certaines dispositions ont été invalidées, principalement, en fait, donc, les
dispositions, donc, concernant l'établissement d'un conseil de règlement
des différends. Le ministre, donc, l'a mentionné, nous faisons la même
interprétation des décisions de la Cour supérieure de 2021 et de la Cour
d'appel de 2024 qu'on... portant, donc, surtout sur le mode de nomination des
membres du conseil de règlement des différends.
C'est donc avec cet
esprit ouvert et cet esprit de juriste, de lentille constitutionnelle que nous
abordons, donc, l'étude du projet de loi
n° 88. Je le répète, Mme la Présidente, donc, une bonne partie, donc, de
l'essence de ce qui y avait été déposé en 2016 se retrouve donc
préservée, donc, dans le caractère du projet de loi n° 88.
Nous avons bien pris connaissance, ma collègue la députée de Robert-Baldwin,
qui m'accompagne dans... et qui m'a accompagnée lors des consultations particulières et qui m'accompagnera
lors de l'étude détaillée du projet de loi dès cet après-midi, donc, des
nouvelles, donc, dispositions qui
sont propres au projet de loi n° 88, et c'est avec grande attention que nous les
étudierons dans le détail.
Je tiens à mon tour à
remercier, donc, je l'ai dit, le ministre, j'ai aussi parlé de ma collègue. Je
veux, bien sûr, remercier l'ensemble des
collègues, autant de la partie gouvernementale que des autres partis d'opposition qui ont enrichi le débat, donc, par leurs différentes questions aux
groupes. Ça nous permet toujours d'apprendre, Mme la Présidente.
Je remercie à mon
tour, donc, les groupes qui nous ont permis de bonifier notre réflexion,
évidemment, sur les mécanismes de règlement
de différends opportuns, qui sont venus en commission parlementaire, donc, le
Conseil provincial du secteur
incendie, la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec, la
Fraternité des policiers et policières de Montréal et Me Michel Coutu. Je
remercie aussi, donc, les groupes qui auront déposé des mémoires et qui nous
auront permis de mieux réaliser notre travail de législateur comme à
l'accoutumée. Et, tout simplement, Mme la Présidente, donc, dire que
nous nous reverrons ici lors de l'adoption du projet de loi n° 88. Merci
beaucoup.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci
à vous, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le
projet de loi n° 88?
Mise
aux voix
Alors, comme il n'y a
pas d'autre intervention, le projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi
concernant le régime de négociation des conventions collectives et de règlement
des différends dans le secteur municipal, est-il adopté?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi
à la Commission des institutions
M. Caire : Merci,
Mme la Présidente. Conformément à l'article 243 de notre règlement, je
fais motion afin que le projet de loi
n° 88, Loi modifiant la Loi concernant
le régime de négociation des conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal, soit déféré à la Commission des institutions
pour son étude détaillée et que le ministre du Travail soit membre de
ladite commission pour la durée du mandat.
Mise
aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci. Cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme
Soucy) : Adopté. M. le leader adjoint, pour la suite de nos travaux.
M. Caire : Pourriez-vous appeler
l'article 2 du feuilleton, Mme la Présidente?
Projet de loi n° 82
Adoption du principe
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui.
Donc, à l'article 2 du feuilleton, M. le ministre de la Cybersécurité et
du Numérique propose l'adoption du principe du projet de loi n° 82, Loi
concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions.
Alors, je vous cède la parole, M. le ministre.
M. Éric Caire
M. Caire : Oui. Merci, Mme la
Présidente. Donc, très heureux d'intervenir sur le principe de cet important projet de loi qui touche, oui, effectivement, vous
l'avez mentionné d'entrée de jeu, Mme la Présidente, l'identité numérique,
mais d'autres dispositions tout aussi
importantes pour la progression de la transformation numérique de l'État dans
son ensemble, mais aussi de la société civile, ce qui est une première,
et je reviendrai là-dessus, Mme la Présidente.
Donc, l'identité numérique, qu'est-ce que c'est?
Essentiellement, Mme la Présidente, c'est la façon dont on s'y prend pour identifier de façon unique un
citoyen dans l'univers numérique, essentiellement. Maintenant, cette identité
numérique là va évidemment se décliner dans différents services. On est tout à
fait habitué à... au fait de s'identifier et s'authentifier.
Lorsqu'on va se connecter sur une prestation électronique de service, on va sur
un site Web, on nous demande d'entrer
le mot de passe, le mot de passe, le nom d'usager. Maintenant, petite
modification supplémentaire, on va vous envoyer un code, on s'assure que
vous êtes bien la personne que vous prétendez être. Ça, on est habitué à ça.
• (10 h 20) •
Maintenant, là où on va un peu plus loin, Mme la
Présidente, c'est quand on parle d'attestation numérique. Qu'est-ce que c'est, l'attestation numérique? Puis
on a tous en poche notre permis... bien, tous, la plupart des Québécois
ont en poche un permis de conduire, une carte d'assurance maladie et d'autres
pièces justificatives qui émanent du gouvernement.
On les a en papier, on va à l'urgence, on sort notre carte d'assurance maladie.
Malheureusement, petit excès de
vitesse, M. l'agent nous demande notre permis de conduire. On est habitué à ça.
On est aussi habitué, Mme la Présidente, par exemple, à aller acheter du
vin à la SAQ, et donc, là, on se fait demander : Avez-vous l'âge légal? Et
là on sort notre permis de conduire, on sort notre carte d'assurance maladie.
Ce faisant, Mme la Présidente, il y a un bris de sécurité. Pourquoi? Parce que ce qu'on vous demande, c'est :
Avez-vous l'âge légal pour acheter de l'alcool? C'est tout. Et la
réponse à cette question-là devrait être oui ou non. Mais la réponse à cette
question-là, c'est votre date de naissance,
votre nom, votre prénom, votre adresse, votre numéro de permis de conduire ou
votre numéro d'assurance sociale, votre classe de conducteur. C'est ça,
la réponse qu'on donne, Mme la Présidente, quand on nous pose cette
question-là, et ça, c'est beaucoup trop.
Alors, Mme la
Présidente, l'identité numérique, donc les attestations numériques qu'on pourra
utiliser éventuellement sur nos
téléphones intelligents vont nous permettre non seulement de répondre à des
questions : Avez-vous l'âge légal? Êtes-vous citoyen de? Êtes-vous
résident de ou êtes-vous assuré? Avez-vous participé au régime d'assurance
maladie?, en ne donnant que les informations nécessaires, sans plus,
mais sans moins, évidemment.
Et là il y a tous les aspects dans notre vie,
Mme la Présidente, où on sait qu'on pose ces gestes-là et où on sait que
l'univers numérique va nous permettre, évidemment, différentes possibilités.
Donc, l'identité numérique, Mme la Présidente,
c'est quoi? C'est un meilleur contrôle sur les informations qu'on donne quand
on a besoin de s'identifier, de s'authentifier.
L'identité numérique, Mme la Présidente, c'est
aussi une capacité à numériser les services. Je l'ai dit, j'ai l'expérience, comme beaucoup de Québécois, où je
vais à l'urgence pour un problème de santé, où j'arrive à l'urgence, appuie
sur un petit piton, sort un numéro. Pourquoi? Je ne sais pas. Bien, parce que,
dans la chaîne de services, il faut qu'on sache
à quel moment, moi, je vais pouvoir être servi. Alors, on a le petit papier, on
est au XXIe siècle, là, puis on m'imprime un petit papier avec un
numéro, au XXIe siècle.
Bon, je me
présente au comptoir où on finit par m'appeler. Je donne mon petit numéro. On
me dit : Bien, avez-vous votre carte d'assurance maladie?
Absolument. Je mets la carte d'assurance maladie. Et là on m'imprime un
bracelet. Ah! Pourquoi? Alors, je mets le bracelet, c'est parce que... au cas
où vous tomberiez inanimé, il faut qu'on soit capable de vous identifier. O.K.,
mais c'est parce que je viens de vous donner ma carte d'assurance maladie qui a
une photo dessus puis tous les renseignements. Pourquoi j'ai besoin d'imprimer
un petit papier pour m'identifier alors que j'ai ma carte d'assurance maladie?
Je ne sais pas. Mystère et fromage mou.
Et là je me présente à l'admission. On me
dit : Avez-vous votre carte d'hôpital? Bien, non, pourquoi? Vous voulez que je fasse quoi avec une carte d'hôpital?
Ah! là, ça prend la carte d'hôpital. Et là, Mme la Présidente, s'enclenche
un processus où la carte d'hôpital... on va imprimer des papiers qui vont être
envoyés à l'administration, qui vont être envoyés je ne sais pas où, qui
vont...
Mme la Présidente, tout ça pourrait être
numérisé, tout ça pourrait faire l'objet d'une transformation numérique. Imaginez les gains d'efficacité, imaginez la
rapidité avec laquelle on pourrait traiter tout ça jusqu'au bureau du médecin,
si on était capable. Et le point d'émission
de ça, c'est quoi? Bien, c'est ça, c'est les attestations numériques, Mme la
Présidente. Et imaginez l'ensemble des services
pour lesquels on pourrait augmenter l'efficacité de l'État et donc augmenter la
qualité des services, augmenter la disponibilité des services et augmenter la
confidentialité des services dans l'univers numérique.
Alors, Mme la Présidente, c'est ça, l'identité
numérique, c'est ça, la volonté de l'identité numérique. Et je vous dirais
qu'en consultations particulières, cette volonté-là a été saluée par la très
grande majorité des intervenants.
Maintenant, il y a des risques. C'est vrai, je
veux dire, ce n'est pas un univers parfait, il y a des risques. On nous a
dit : Il ne faut pas centraliser toutes les informations, parce que sinon,
évidemment, une fuite de données devient catastrophique. Encore là, Mme la
Présidente, je vous dirais que l'état actuel du gouvernement du Québec, c'est
ça qui est problématique, parce qu'on nous a dit : Là, vous allez créer le
registre d'identité numérique, vous allez concentrer toutes les informations d'identité d'un citoyen dans un registre. C'est
vrai. Ce qu'il faut comprendre, Mme la Présidente, c'est que, quand un
ministère ou un organisme donne une prestation de services aux citoyens, il
fait exactement ça, il crée son propre registre d'identité des citoyens.
Pourquoi? Parce qu'avant de donner un service, il a besoin d'identifier le
citoyen à qui il donne le service.
Donc, ce
n'est pas un registre d'identité numérique qu'il y a au gouvernement du Québec,
c'est des dizaines, voire des centaines. Et ça, c'est autant de surfaces
d'attaque, c'est autant de possibilités de fuites de données qu'on ne souhaite
pas.
Donc, Mme la Présidente, loin d'être un
problème, la vision du gouvernement, c'est, au contraire, d'éliminer ces
dizaines de registres là et de s'assurer qu'il n'y en a qu'un. Pourquoi? Un,
pour des questions de sécurité. Vous comprendrez que c'est plus facile et ça
consomme moins de ressources de protéger un seul que d'en protéger des
dizaines. Je pense que tout le monde comprend ça assez aisément. Ensuite, ça
évite la distorsion, les doublons dans les informations, parce que ces dizaines
de fichiers là ne peuvent pas être mis à jour en temps réel.
Donc, mon
identité, dans un service que je consomme régulièrement, risque d'être à jour.
Mais il y a des services qu'on consomme beaucoup moins régulièrement, et
ça, ça se peut qu'il y ait des informations qui datent, qui soient périmées,
mais qu'on conserve, qu'on continue d'avoir, et ce qui fait que vous allez
recevoir une lettre à une adresse à laquelle vous n'habitez plus depuis
10 ans. Pourquoi? Parce que les fichiers ne sont pas à jour. Et ça, c'est
arrivé, au gouvernement du Québec : Voyons donc, je n'habite plus là ça
fait des années, voulez-vous bien me dire pourquoi que vous m'envoyez une lettre? Bien, parce que les fichiers ne sont pas à
jour. Donc, s'il y a un fichier unique auquel tout le monde se
réfère, bien, tout le monde a une information qui est à jour, qui est à date.
Autre avantage, Mme la Présidente, avec
l'identité numérique, le citoyen se connecte, voit évidemment ses
renseignements d'identité et contrôle ses renseignements d'identité. Pensez au
fameux changement d'adresse, Mme la Présidente,
le chemin de croix, le parcours du combattant que c'est, de changer son adresse
dans l'administration publique. Pourquoi? À cause de ces dizaines et ces
dizaines de fichiers dont je vous parlais. Le fait d'en avoir un seul, unique,
le citoyen fait son changement d'adresse puis c'est terminé. Puisque c'est la
source de tous les services publics, tout le monde vient chercher son
information là, bien, tout le monde a une adresse à jour, tout le monde à la
bonne adresse, tout le monde a les bons changements faits en temps réel, et le
citoyen retrouve le contrôle sur ses données. Alors, ça, Mme la Présidente, ça
aussi, c'est dans le projet de loi.
Pour l'identité numérique, Mme la Présidente, ça
prend évidemment un cadre législatif, parce qu'il faut évidemment que,
l'univers numérique, on puisse travailler avec des pièces qui sont reconnues,
qui sont authentiques, authentifiées, et ça
prend un cadre juridique. Nous créons ce cadre juridique pour l'utilisation de
l'identité numérique nationale.
Autre élément, Mme la Présidente, très
important, la cybersécurité. On le sait, un des trois enjeux les plus
importants pour n'importe quel gouvernement à travers le monde, c'est la
protection des systèmes d'information et la protection des renseignements
personnels. Le ministère de la Cybersécurité, et ça, je pense que c'est un
secret bien gardé, a évidemment la responsabilité de la cybersécurité des
systèmes d'information du gouvernement du Québec, mais, avec l'avènement du ministère, son rôle dépasse celui du
gouvernement. Sa mission, c'est une mission régalienne. Elle est sur l'ensemble du territoire québécois.
Or, Mme la Présidente, pour être capable d'assumer cette fonction-là, bien,
il faut avoir connaissance des faits, et malheureusement, sur le territoire
québécois, il y a des attaques réussies pour lesquelles
on n'est pas avisés. On n'est pas au courant ou alors on l'est, mais tellement
longtemps après les faits qu'il n'y a plus d'intervention possible.
Donc, le projet de loi fait deux choses. D'une
part, il rend obligatoire la divulgation des incidents de sécurité au ministère pour les organismes publics, mais il
va aussi permettre au gouvernement d'établir par règlement des secteurs
névralgiques pour lesquels le secteur public-privé sera tenu aux mêmes
obligations. On le sait, Mme la Présidente, il y a des secteurs, comme l'énergie, le transport,
l'alimentation... Ce sont des secteurs qui sont névralgiques pour l'économie
québécoise, pour la société en général, et on a vu, dans le passé, des
cyberattaques qui ont évidemment créé des soucis assez majeurs, mais ces
cyberattaques-là n'étant pas déclarées, la capacité d'agir et d'interagir
devient assez difficile, la capacité d'informer aussi, Mme la Présidente, parce
que, si un secteur est particulièrement attaqué, si on n'est pas avisés de ces
attaques-là, on ne peut pas le savoir. On ne peut pas détecter que, de toute
évidence, le secteur de l'énergie fait l'objet d'attaques concertées, alors
qu'avec la divulgation obligatoire on va pouvoir le savoir et on va... Ça va
nous permettre d'aviser les sociétés et les
entreprises qui sont visées par cette menace-là de s'y préparer. Ça va nous
permettre de déterminer le type d'attaque, l'origine de l'attaquant.
Bref, avec l'information, Mme la Présidente, c'est beaucoup plus facile de se protéger. Donc, ça, le projet de
loi vient faire ça, et je pense que c'est une avancée extrêmement importante.
• (10 h 30) •
Autre élément
du projet de loi, Mme la Présidente, le courtier en infonuagique. Puis, je vous
dirais, particulièrement dans le contexte qu'on vit avec la crise, je
pense qu'on peut appeler ça la crise tarifaire... Le courtier en infonuagique,
Mme la Présidente, c'est un modèle qu'on a mis en place au début du précédent
mandat. Qu'est-ce que ça fait en gros? Bien,
c'est ça, c'est un courtier. Donc, les entreprises qui offrent des services en
infonuagique vont se qualifier selon les critères
très stricts du courtier, mais, une fois qu'on est inscrit, ça permet aux
ministères et organismes de choisir avec quelle
entreprise ils veulent faire affaire, et c'est au choix... pourvu que ce soit
un... une des entreprises, pardon, qualifiées à la liste du courtier, c'est au choix du ministère et de
l'organisme de choisir l'entreprise avec laquelle il veut faire affaire.
On
élargit la portée du courtier, qui devient, donc, le courtier en ressources
informationnelles. Il se... trois nouveaux secteurs pour lesquels le
courtier va pouvoir agir, et l'avantage de ça, Mme la Présidente, par rapport,
disons, au modèle conventionnel des appels
d'offres, bien, c'est qu'une fois que l'entreprise est qualifiée, comme je l'ai
dit, le ministère et l'organisme peut choisir, peut choisir sans
enfreindre nos règles internationales, sans enfreindre nos ententes, sans enfreindre nos lois, notamment la Loi sur les contrats des organismes publics, peut choisir l'entreprise avec laquelle il veut
faire affaire.
Mme
la Présidente, est-ce que j'ai besoin de vous dire que, dans le contexte
actuel, il serait beaucoup plus facile de dire... par exemple, de
favoriser une entreprise québécoise, canadienne, européenne, que dans un
contexte classique du cadre des appels
d'offres? Donc, pour moi, ça, c'est une avancée. On le limite quand même à
certains secteurs qui sont plus névralgiques pour les opérations du
gouvernement, parce qu'effectivement on pense qu'il ne faut pas non plus
délaisser le modèle des appels d'offres, qui a ses avantages, très
certainement.
Un autre élément, Mme
la Présidente, qui est important, c'est tout le secteur des télécommunications.
Le ministère de la Cybersécurité et du
Numérique a, par héritage, la responsabilité d'assumer les télécommunications,
que ce soit le fameux réseau RENIR pour la sécurité publique, que ce
soit le RITM ou sa version modernisée, le Réseau gouvernemental des
télécommunications, etc. Donc, le ministère a, par héritage, qui était au CSPQ,
qui a été à l'ITQ, qui est maintenant au
ministère, cette responsabilité-là, mais il ne l'a pas de façon légale.
Résultat des courses, Mme la Présidente, n'importe quel ministère ou
organisme qui veut se lancer dans un projet de télécom, légalement, a le droit
de le faire, il peut le faire.
Ça pose différents problèmes.
Ça pose des problèmes au niveau de la coordination, du déploiement du réseau de
télécom québécois. Ça pose des problèmes au niveau des choix technologiques qui
sont faits. Or, il faut s'assurer d'avoir
des technologies qui sont compatibles. Il faut aussi faire des choix
technologiques qui sont sécuritaires, Mme la Présidente. On l'a vécu avec les caméras Hikvision, qui sont produites
en Chine. On sait que, bon, maintenant, le ministère a interdit
l'acquisition de ces caméras-là. Mais, avant que ça se fasse, il y en a quand
même qui ont été acquises, qui ont été installées dans nos réseaux, puis
maintenant il faut gérer ça. Donc, au niveau des acquisitions, de la sécurité, des choix des fournisseurs, ça peut poser
différents problèmes. On l'a vu avec nos homologues canadiens, qui, pour
surveiller les frontières, ont acquis des drones chinois. C'est leur
choix.
Bon, alors, pour
toutes ces raisons-là, Mme la Présidente, on va donner maintenant légalement la
responsabilité de la coordination, le déploiement
et la gestion du réseau, des différents réseaux de télécommunications du
gouvernement, au MCN. Ce qui ne veut pas dire qu'un ministère ou un
organisme ne pourrait pas y aller de son projet, sauf que ce projet-là sera
considéré comme un projet en ressources informationnelles au sens de la loi, et
donc devra requérir des autorisations
nécessaires, d'abord l'approbation du MCN et ensuite l'approbation du Conseil
du trésor au niveau des dépenses.
Donc, on donne un
meilleur contrôle au gouvernement sur le déploiement de son réseau, et je pense
que ça, c'est quelque chose d'important et de majeur pour... Surtout
qu'aujourd'hui je pense que tout le monde est d'accord pour dire que les réseaux de télécommunications, c'est l'infrastructure
du XXIe siècle, et c'est important pour le gouvernement d'assurer le contrôle de cet aspect-là du développement de
sa transformation numérique. Ces infrastructures-là sont névralgiques,
et on doit être capables de les déployer selon une vision, un plan qui est
cohérent, et le projet de loi va nous permettre de faire ça.
Donc, Mme la
Présidente, je ne veux pas aller beaucoup plus loin. Je pense que j'ai donné
les grandes lignes. Il y a d'autres petites
subtilités qui sont inhérentes au projet de loi, mais les grandes lignes, je
vous les ai exposées avec les motifs.
Et donc, pour cette raison, Mme la Présidente, je recommande à cette Assemblée
de voter en faveur du principe du projet de loi. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, nous allons... nous
allons continuer avec la prochaine intervenante. Mme la députée de Mont-Royal—Outremont, à vous la
parole.
Mme Michelle
Setlakwe
Mme Setlakwe :
Merci, Mme la Présidente. À mon
tour, donc, de prendre la parole ce matin à l'étape de l'adoption du
principe du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale
et modifiant d'autres dispositions, ce projet de loi qui avait été déposé par
le gouvernement de la CAQ à la fin de la dernière année, 2024.
Ce projet de loi, qui
vise à établir une identité numérique nationale pour les citoyens québécois,
est un projet de loi très important qui aura un impact majeur sur nous tous.
Certes, cette idée d'introduire une identité numérique nationale aura un impact
potentiellement très positif, car les Québécois s'attendent aux meilleurs
services numériques de la part de
l'administration publique. L'identité numérique nationale deviendrait la seule
façon de s'identifier, tant dans le monde réel que dans le monde
numérique. Elle vise à permettre aux citoyens de s'authentifier en ligne pour
accéder aux services gouvernementaux de manière sécuritaire. Du moins, c'est ce
que l'on souhaite, Mme la Présidente.
L'identité
numérique nationale fonctionnerait comme un substitut pour les documents
d'identité physiques tels le passeport, le permis de conduire, les certificats
de naissance, etc. Ces avancées, on doit le souligner, elles peuvent être très
positives, nous en convenons, mais on parle d'un projet de loi qui a aussi le
potentiel d'affecter négativement les Québécois au niveau notamment de la
sécurité des données et de la protection de leurs renseignements personnels. La
transparence, la planification, la communication, l'encadrement et le déploiement
de ce grand projet nécessiteront la plus grande rigueur, la plus grande
prudence.
À l'opposition officielle,
nous voterons pour le principe, car nous partageons le souhait de moderniser
les services de l'État. C'est un projet de société qu'il nous faut entamer.
Offrir aux citoyens des services numériques accessibles, sécuritaires et
adaptés à leurs besoins, nous ne pouvons pas être contre cet objectif, Mme la
Présidente. Il faut le souligner, par ailleurs, nous avons accumulé un retard
important dans ce domaine. Dans d'autres juridictions... et permettez-moi ici
de me référer au mémoire qui a été déposé par l'expert en cybersécurité,
M. Steve Waterhouse. Il mentionne, d'entrée de jeu dans son mémoire, que
le travail de préparation ne fait que s'allonger d'année en année, alors que
d'autres gouvernances ont réellement fait le choix de numériser les
transactions entre les citoyens et les institutions,
entre autres Singapour, la Suède, l'Estonie, la Belgique, l'Inde, le Danemark,
les Pays-Bas, le Nigéria. Donc, si on regarde ce qui se fait ailleurs, on
constate qu'ici, au Québec, il est grand temps qu'on avance vers cette identité
numérique, qu'on avance dans ce projet, je
dirais, tous ensemble, parce que c'est un projet structurant pour les
Québécois.
• (10 h 40) •
Évidemment,
Mme la Présidente, vous vous en doutez, je vais arriver avec certains bémols,
mais, sur le principe, le principe, sur l'objectif, sur l'idée de
moderniser l'État québécois, il est certain que l'opposition officielle ne se
mettra pas dans le chemin du progrès, du moins dans l'intention de procéder à
cette avancée. Et donc nous nous assurerons que
tous les enjeux et toutes les préoccupations qui ont été mis de l'avant dans le
cadre des consultations et dans les mémoires soumis soient discutés en
commission parlementaire lors de l'étude détaillée. Tout au long du processus,
comme toujours, nous contribuerons de façon constructive à l'analyse article
par article du projet de loi afin de le bonifier, car nous espérons sincèrement que cette identité numérique nationale, d'une
part, facilitera l'obtention des services publics pour le plus grand nombre possible de Québécois et
qu'il réduira les risques de fraude, comme les vols d'identité, l'hameçonnage,
les fuites, etc. Il faudra donc trouver l'équilibre
entre l'efficience administrative, la protection des renseignements personnels
et l'inclusion numérique. Bref, il faudra chercher l'équilibre entre simplicité
et sécurité.
Un élément que je me dois de mettre de l'avant
comme énorme bémol à notre vote en faveur du principe du projet de loi
n° 82, Mme la Présidente, le projet d'identité numérique nationale, c'est
beaucoup plus que le libellé de cette pièce législative. Le ministre doit
rassurer la population, fédérer les Québécois et mettre de l'avant un plan et
une feuille de route qui assurera le succès de ce projet structurant. Le
ministre de la Cybersécurité et du Numérique, qui a joué un rôle déterminant
dans le déploiement de SAAQclic et qui a admis que ce déploiement avait été un
fiasco, saura-t-il cette fois-ci réunir les conditions gagnantes pour mener à
bien ce projet structurant d'identité numérique? Permettez-moi de lever ce
drapeau, Mme la Présidente. D'ailleurs, la Vérificatrice générale du Québec,
dans son mémoire, nous rappelait les différents
travaux d'audit qu'elle a effectués au fil des ans, et elle invite le ministère
ou le ministre de Cybersécurité et du Numérique à consulter et
considérer les résultats de certains de ses travaux, et, à cet égard, elle
attire l'attention sur trois principaux enjeux dans son mémoire fort pertinent.
Elle a traité de la cybersécurité et de la
protection des renseignements personnels. Elle a aussi traité de
l'accessibilité et de la qualité des services aux citoyens. Et enfin elle a
parlé de gestion de projet et, quand elle parle de gestion de projet, Mme la
Présidente, elle nous dit qu'il est important de bien définir les besoins. Elle
nous dit que ça prend une bonne planification, que c'est essentiel afin de
limiter les retards et les dépassements de budget. Plus loin, elle mentionne
que le MCN doit s'assurer d'avoir les ressources humaines compétentes pour
réaliser le projet. Elle mentionne aussi que
le processus contractuel pour ce projet ne doit pas rendre le ministère
dépendant d'un seul fournisseur.
Donc, ce seront des questions qu'on pourra
discuter davantage en étude détaillée parce qu'on a beau avoir cette intention
louable de moderniser l'État, encore faut-il s'assurer que tout le gouvernement
soit derrière ce projet avec les ressources humaines et financières adéquates
pour le mener à bien pour les Québécois et assurer que les Québécois aient
confiance en ce nouveau système. Donc, quand je parle des conditions gagnantes
qui sont nécessaires à la réussite de ce
projet, je parle d'éléments qui ne se retrouvent pas forcément dans le projet
de loi, mais qui sont cruciaux à la réussite du projet, notamment ceux
qui ont été mis de l'avant dans le mémoire de la Vérificatrice générale.
Avant tout, Mme la Présidente, et ça a été dit
et redit en consultations, il faut bien communiquer le projet aux citoyens afin qu'ils voient l'utilité du système
et qu'ils comprennent en quoi l'identité numérique leur offrira une meilleure
accessibilité aux services gouvernementaux. Donc, l'importance de bien
communiquer avec la population est primordiale dans ce dossier. Comment cette
identité numérique nationale va-t-elle simplifier la vie des Québécois? Ça peut paraître simpliste, là, mais, si on veut
qu'il y ait une adhésion, une acceptabilité sociale, si on veut que ça
fonctionne, puis qu'on fédère les Québécois, puis qu'ils participent à
ce nouveau régime, assurons-nous de bien communiquer, prenons le temps d'investir dans cette communication, dans cette
transparence, pour atteindre une acceptabilité sociale élevée.
À cet égard, d'ailleurs, permettez-moi de me
référer à un passage du mémoire de l'observatoire international sur les impacts
sociétaux de l'intelligence artificielle et du numérique, Obvia. À la
page 8 de leur mémoire, ils parlent donc des expériences internationales
en matière d'identité numérique, on l'a mentionné, il y a plusieurs cas
d'espèce en Estonie, l'Australie, etc., et
de s'en inspirer pour les bonnes pratiques. Bon, d'autres juridictions, on peut
s'en inspirer pour tirer des leçons de ce qui a été appris car... et là
c'est... Le passage pertinent est le suivant : «Ces études de cas
démontrent que l'utilité perçue d'une identité numérique nationale est
essentielle à son adoption, voire à son succès. Pour assurer cette utilité, on
nous dit, à l' Obvia, il faut impliquer différents acteurs gouvernementaux et
privés dans le processus ainsi qu'inclure la population utilisatrice pour
développer un système répondant à ses besoins.» J'ai trouvé d'ailleurs leur
mémoire très utile et très pertinent dans le cadre de notre étude... de notre
étude du projet de loi. Donc, essentiellement,
les citoyens doivent avoir confiance dans cette identité numérique.
L'acceptabilité sociale, encore une fois, constitue un enjeu
fondamental, et elle se construit inévitablement par la confiance.
Dans ce contexte, je me demande si le ministre
n'a pas déjà manqué à son premier devoir dans ce dossier. Moi, ça m'a étonnée
quand le projet de loi a été déposé, à la fin de l'année 2024 :
Pourquoi il n'y a pas eu de conférence de presse lors du dépôt? Ce projet de
loi là est extrêmement important. Il a été déposé... Je pense, c'était la
semaine où il y avait le dépôt de la mise à jour
économique. Ça a été déposé en douce dans le contexte, donc, de cette mise à
jour économique. J'ai trouvé ça étonnant, Mme la Présidente, alors que nous
savons que la façon d'aborder ce grand projet aura une incidence sur son taux
d'acceptation et d'utilisation. On espère que le ministre va se reprendre, et
va exercer son leadership, et va bien
communiquer le projet à l'aide de ses équipes pour que, dès le début, les
citoyens le comprennent et aient envie d'y adhérer.
À cet égard-là, je me
réfère encore au mémoire de l'Obvia, à la page 11. Bon, eux, ils nous
parlent d'une enquête qui a été menée auprès de 2 000 citoyens
québécois l'an dernier, au printemps 2024, portant sur la confiance, le partage de données et l'identité numérique. Et
leur enquête a montré que 25 % des personnes interrogées ne sont pas
du tout ouvertes à l'identité numérique.
Mais, plus spécifiquement, une grande majorité de répondants, près de
87 %, s'est déclarée favorable à
l'utilisation de l'identité numérique si certaines conditions étaient
respectées. Donc, il y a énormément de potentiel ici, Mme la Présidente,
si les conditions gagnantes sont respectées.
Par
exemple, sur le plan de la sécurité, les citoyens seraient plus ouverts à
l'identité numérique si le gouvernement implantait de meilleurs systèmes
de sécurité ou s'il s'assurait de limiter le nombre d'endroits où les renseignements
d'identification sont détenus. Sur le plan
du service, une meilleure communication avec le gouvernement et une réduction
du délai des prestations seraient des éléments qui favoriseraient l'adhésion
citoyenne à l'identité numérique.
Enfin, l'enquête a
fait ressortir que les craintes sont plus élevées lorsque l'identité numérique
touche au partage de données fiscales ou de
données de santé. Ça se comprend. Toutes les initiatives de partage de données
qui satisfont les attentes citoyennes en matière de partage de
renseignements de santé devraient être mieux acceptées.
Alors,
voilà pour les mises en garde. Encore une fois, objectifs louables :
moderniser l'État, assurer qu'il y ait des... que les citoyens québécois
puissent bénéficier pleinement de tous ces outils technologiques qui sont
extraordinaires, mais dans la confiance, dans la transparence, etc.
Par
ailleurs, et c'est important, la Vérificatrice générale en a parlé, elle traite
de cet élément-là dans son mémoire, le succès du projet va dépendre des
ressources que le gouvernement y investira. Je parle de ressources financières
et humaines adéquates. Dans le contexte du déficit record de
11 milliards de dollars, des coupures budgétaires qu'on observe de la
part du gouvernement de la CAQ et du manque d'expertise à l'interne au
ministère de la Cybersécurité et du
Numérique, qui le pousse à recourir de façon excessive à la sous-traitance, et
aussi dans le contexte du gel d'embauche, il est tout à fait normal, Mme
la Présidente, qu'on se pose ces questions avant de donner notre aval final au
projet.
Alors, on va
demander, dans le cadre de l'étude détaillée, des explications. On va
questionner le ministre sur sa vision. On va s'assurer qu'il ait donc parlé à
ses collègues et que ce soit vraiment tout le gouvernement, avec toutes les ressources nécessaires, qui soit derrière ce
projet. Tout ça, ce n'est pas juste, là, pour... Quand on dit qu'on va talonner
et questionner le ministre, ce n'est pas
juste pour nous rassurer, nous, là, les groupes d'opposition. C'est pour
rassurer les Québécois, rassurer... les rassurer que les conditions
gagnantes sont rencontrées pour le bien des Québécois, qui n'ont clairement pas
envie de faire les frais, encore une fois, d'une planification bâclée.
• (10 h 50) •
Mme la Présidente, le
gouvernement doit apprendre de ses erreurs, et les Québécois peuvent compter
sur nous à cet égard, non pas pour ralentir indûment le projet, mais pour
soulever des préoccupations légitimes entendues de la part de plusieurs experts
durant les consultations particulières.
Revenons brièvement
sur les consultations particulières, donc, qui se sont tenues sur deux jours la
semaine dernière. Ce fut un exercice très
enrichissant. Je remercie tous les experts, les groupes, tous les intervenants,
toutes les personnes qui sont venues faire des présentations de grande
qualité et aussi toutes les personnes et groupes qui ont soumis des mémoires. Merci pour la qualité des échanges.
Merci pour vos recommandations. On a pris connaissance, on va continuer d'en prendre connaissance pour pouvoir soulever...
mentionner vos préoccupations et discuter avec le ministre de potentiels
amendements à la pièce législative.
Je l'ai mentionné
précédemment, ce projet soulève plusieurs enjeux importants. Permettez-moi d'en
aborder quelques-uns. Steve Waterhouse en a
fait d'ailleurs un résumé dans son mémoire. Il décline les enjeux de façon très
sommaire, très efficace. Il parle d'infrastructures. Les gouvernements
ont besoin de réseaux robustes, capables de gérer une forte demande et de protéger les données. On a besoin,
donc, aussi de s'assurer que la cybersécurité est au rendez-vous. Le ministre
en a parlé dans son allocution. La confiance du public est un élément clé. J'en
ai parlé.
La culture numérique,
ma collègue de La Pinière, qui était avec moi durant les consultations
particulières, je suis certaine qu'elle va en parler dans son allocution.
Aussi, s'assurer qu'on puisse rejoindre et inclure le plus grand nombre de Québécois possible. Il faut tenir compte
de cette fracture numérique et ne laisser personne de côté. Et évidemment
M. Waterhouse fait référence à nos lois sur la protection des données.
Bon, pour revenir sur
la protection des renseignements personnels et de la vie privée, la CAI, la Commission
d'accès à l'information du Québec souligne que l'évolution de l'identité
numérique nationale accroît les risques liés à la protection de renseignements
personnels, bon, ça va de soi. Donc, un encadrement juridique insuffisant
pourrait diminuer la protection de la vie
privée des citoyens et entraîner une perte de confiance envers cette identité
numérique nationale.
Au niveau de la
sécurité des données, le syndicat des professionnels du gouvernement du Québec
exprime des préoccupations quant à
l'hébergement centralisé d'une grande quantité de données personnelles et
confidentielles, soulignant l'importance
de mettre en place des ressources humaines et financières adéquates pour
assurer la cybersécurité du projet.
Il y a toute la
question de la collecte de données biométriques aussi. C'est un élément qui est
revenu souvent durant les consultations. Entre autres, la Ligue des droits et
libertés, bon, eux s'opposent à l'utilisation de la biométrie dans le cadre de l'identité numérique nationale.
On a entendu de fortes réserves de plusieurs intervenants, car ces données
biométriques sont... étant intrinsèques à la personne, ne peuvent être
modifiées comme un identifiant ou un mot de passe en cas de compromission. Le
SPGQ, donc le syndicat de professionnels du gouvernement du Québec, partage cette inquiétude et recommande de se limiter à des
données d'identité simples pour l'accès aux services gouvernementaux.
Il y a toute la question
de l'accessibilité des services, Mme la Présidente. Encore une fois, la
convivialité et l'accessibilité devront être au rendez-vous. Il sera important,
et ça, on ne peut pas le répéter assez souvent, de ne pas laisser de côté tout
un pan de la population qui n'est pas doté d'une littératie numérique adéquate
leur permettant de bénéficier des outils technologiques. Le Protecteur du
citoyen insiste sur la nécessité de maintenir l'accessibilité des services gouvernementaux par des moyens
traditionnels, que ce soit en personne, par téléphone, par la poste, pour les
citoyens qui le préfèrent, afin d'éviter toute forme de coercition à
utiliser l'identité numérique nationale.
Un autre
enjeu qui a été... qui est très important, c'est l'hébergement des données et
la souveraineté numérique. La question
de l'hébergement des données est très importante et elle a été soulevée à
maintes reprises durant les consultations, Mme la Présidente. Nous
discuterons avec la... avec le ministre de sa vision à cet égard.
S'assurera-t-il que les données soient entreposées dans une infrastructure
infonuagique souveraine ou stockées dans une structure gouvernementale? Comment
empêchera-t-on que les données puissent transiter ou être hébergées hors du
Québec?
Des acteurs
comme Micrologic plaident pour que les données des Québécois demeurent sous
contrôle québécois, recommandant l'intégration du principe de
souveraineté numérique et l'établissement de seuils minimaux de contrats avec des entreprises locales pour la gestion des
données numériques nationales. Toute la question de l'approvisionnement
local et d'encourager la participation de nos entreprises locales lors d'octroi
de contrats gouvernementaux est un sujet, on s'entend, Mme la Présidente,
d'actualité extrêmement important dans le contexte de la menace de tarifs qui
plane sur notre société et qui nous inquiète tous. Donc, on aura clairement des
questions pour le ministre, à savoir quelle est sa vision et quels éléments
est-il... sur lesquels est-il en train de travailler pour encourager une
participation accrue de l'expertise québécoise.
Il y a la question de l'interopérabilité et son
encadrement juridique. La Ligue des droits et libertés exprime des
préoccupations concernant l'interopérabilité de l'INN, là, l'identité numérique
nationale, avec d'autres systèmes, soulignant le risque de dérives si
l'encadrement juridique n'est pas suffisamment étoffé. Elle appelle à un débat
public transparent et informé sur l'ensemble du projet, incluant le
portefeuille numérique, son architecture, son mode de fonctionnement et de gouvernance, son utilité et son financement. Je pense
qu'on ne veut pas... oui, le débat est important, et je pense que les
préoccupations qui ont été mises de l'avant par la Ligue des droits et
libertés, on doit en tenir compte maintenant, pas dans une optique de ralentir,
parce qu'il faut rattraper le retard, assurons-nous d'être transparents,
assurons-nous d'encourager ou d'exhorter le gouvernement à bien communiquer
pour justement rassurer la population afin qu'elle adhère au projet.
L'Institut de gouvernance numérique souligne,
quant à lui, qu'au-delà de l'interopérabilité et la reconnaissance mutuelle des
identités numériques à travers le pays ce projet doit également mobiliser
toutes les forces vives, toutes les forces vives de notre... de la société
québécoise. J'ai trouvé intéressant leur mémoire, un autre mémoire de grande
qualité. À la fin, lorsqu'ils... cet institut conclut, ils nous disent
qu'au-delà des collaborations institutionnelles... bon, notamment avec... On
sait que la Colombie-Britannique a déjà son système en place et qu'éventuellement,
si on en arrive à bien comprendre la feuille de route du ministre, il y aurait
cette interopérabilité avec d'autres juridictions. «Le projet, selon l'Institut
de gouvernance numérique, doit mobiliser toutes les forces vives de la société
québécoise. Les citoyens, les organisations de la société civile, les experts
en technologie, les juristes et les chercheurs doivent être impliqués
activement dans le processus.» Ils l'ont déjà été, là, dans le cadre des
consultations. Ça démontre... ce genre de commentaire démontre à quel point
c'est un projet important et structurant pour le Québec.
«Le Québec bénéficie d'une expertise de premier
plan en matière de gouvernance numérique, d'identité numérique autosouveraine
et de technologies décentralisées, comme en témoignent les travaux des
organisations et des chaires de recherche actives dans ces domaines. Ces
ressources peuvent jouer un rôle stratégique en accompagnant le gouvernement
dans ses efforts de conception, de mise en oeuvre et de gestion d'une identité numérique
nationale.» Des commentaires fort pertinents, Mme la Présidente.
Il y a la question du profilage. Écoutez, cette
question du profilage a été soulevée par plusieurs acteurs. Et permettez-moi de
revenir encore une fois à l'excellent mémoire de l'Obvia, à la page 10,
qui nous met en garde, qui nous dit qu'«à
chaque fois qu'un citoyen utilise son identité numérique, cette action peut
créer des empreintes électroniques qui sont susceptibles d'être
collectées et stockées de manière automatique. En fonction du choix
d'architecture effectué pour implémenter l'identité numérique, en particulier
si les données collectées sont centralisées, il devient possible de les croiser
facilement et de générer de nouvelles données qui peuvent mener à un profilage
précis et à des risques de surveillance.» Bon, on va s'assurer que la pièce
législative, donc le projet de loi n° 82, prévoit les bonnes balises, parce
qu'effectivement il peut y avoir des croisements entre les différentes banques
de données. C'est un élément sur lequel on aura des discussions en étude
détaillée, Mme la Présidente.
Je reviens brièvement sur les préoccupations qui
ont été mises de l'avant par la CAI, la Commission d'accès à l'information. La
présidente a mentionné... elle a levé un drapeau au niveau des sanctions. S'il
y a du profilage, elle veut être sûre d'avoir une mainmise, qu'elle puisse
avoir le pouvoir d'imposer des sanctions, et il y aura lieu de regarder tout le
corpus législatif pour s'assurer que ce soit le cas.
• (11 heures) •
Bon, finalement, j'en arrive bientôt à ma
conclusion, je vais faire, donc, un bref rappel des facteurs clés de réussite. Je trouve tellement que certains des
mémoires ont été extrêmement bien conçus, là, que ça vaut la peine d'y revenir.
Il y avait celui de... celui que j'ai déjà cité, le mémoire de la SFPQ, à la
page 6, là, donc, ils font tout un... SPGQ, je suis désolée. Il y en a
eu... Il y en avait tellement qu'on les a lus avec tellement d'intérêt. Ils
font... J'y arrive. Ils font un retour sur les facteurs clés de succès, et je
trouve ça vraiment un bon résumé. Donc, en approchant de la conclusion : «Les facteurs clés de réussite pour la mise en
oeuvre du projet de loi n° 82 et l'ensemble des pouvoirs existants que la
loi confère au ministère de la Cybersécurité
et du Numérique depuis sa création : diminuer la dépendance du
gouvernement face à la sous-traitance en technologies de l'information et de la communication,
moderniser rapidement la classification des emplois en technologies de
l'information et de la communication et les conditions de travail pour tenir
compte des réalités du marché de l'emploi dans ce domaine et, finalement,
procéder à l'embauche de ressources internes pour combler les postes vacants le
plus rapidement possible, notamment des ressources qui font de la programmation
ainsi que de l'analyse et de l'architecture organique.»
Donc, on a beau avoir, là, la meilleure pièce
législative, puis on va travailler en collaboration pour peaufiner le projet de loi, si on n'a pas réuni ces facteurs
clés de réussite, on n'arrivera pas à déployer un système qui sera fonctionnel
et utile pour les Québécois. Encore une fois, assurons-nous que les Québécois
ne soient pas les victimes, là, d'une planification bâclée. Assurons-nous
d'avoir toutes les ressources en place. Et, à cet égard-là, le ministre devra
parler à ses collègues, notamment au Conseil du trésor, pour s'assurer que les
ressources humaines et l'expertise interne soient présentes ainsi que les
ressources financières pour mener ce projet à bien.
Donc, Mme la
Présidente, en conclusion, nous discuterons de tous ces enjeux avec le ministre
lors de l'étude détaillée afin d'assurer une mise en oeuvre respectueuse
des droits des citoyens. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous allons
poursuivre avec M. le député de Maurice-Richard.
M. Haroun Bouazzi
M. Bouazzi : Merci, Mme la
Présidente. Chers collègues, très heureux d'être ici pour commenter ce projet
de loi que je pense important. Donc, d'entrée de jeu, je rappelle que...
j'annonce que nous allons voter pour.
Mme la Présidente, ce projet de loi parle
d'identité numérique, et nous avons besoin d'une identité numérique qui se
tient, au Québec, pour moderniser nos services, pour accélérer nos services et
pour permettre à la fonction publique de
pouvoir mieux répondre aux besoins de nos concitoyennes et concitoyens et à
leurs attentes, aussi, parce qu'évidemment, à l'ère du numérique, nous ne
pouvons pas continuer à être à la remorque, en retard sur ces questions-là.
Donc, je ne ferai pas plus que ça l'éloge de
l'importance de l'identité numérique, mais je vais revenir sur un certain
nombre de risques associés à cette démarche : d'abord, la question des
services et du risque d'avoir, en fin de compte,
une diminution de services associés à ce projet; deuxièmement, les problèmes,
les risques de sécurité et de droits fondamentaux associés à ce projet;
et enfin, comment mettre en place une fonction publique à la hauteur du défi
qui est le nôtre.
Alors,
d'abord sur la question de la diminution des services, donc, le ministre nous a
rappelé, à juste titre, à plusieurs reprises, que l'identité nationale n'était
pas... l'identité numérique n'était pas obligatoire et que c'était seulement
un choix. Soit, mais il y a des choix qui
peuvent devenir obligatoires si, en fin de compte, les services ailleurs ne
sont pas à la hauteur des attentes.
Nous avons tous en tête déjà une grande transformation
numérique de la plus grande coopérative au Québec, pour ne pas la nommer, la
banque Desjardins, qui a numérisé, à travers un énorme effort, une énorme
partie de ses services numériques et qui
s'est retrouvée à fermer un certain nombre de succursales, surtout en région,
ce qui a, bien sûr, pénalisé toutes les personnes qui ne sont pas à
l'aise avec les services numériques. Et il ne faudrait surtout pas que la
fonction publique se retrouve dans la même situation, car il est imaginable
que, dans des moments d'austérité, des moments où on coupe partout, on se
retrouve à... sous prétexte d'automatiser, de numériser, se trouver à couper
les fonctionnaires qui servent les citoyennes et les citoyens.
Or, Mme la Présidente, il y a vraiment beaucoup
de personnes qui sont mal à l'aise avec la technologie, qui ont... il y a une
fracture numérique, il y a des problèmes de littératie numérique. Et les
personnes qui ont du mal avec la technologie sont plus nombreuses parmi les
moins nantis, parmi les personnes les plus âgées, parmi les personnes qui ont
des niveaux d'éducation inférieurs à la moyenne. Il y a aussi les personnes qui
auraient pu y arriver, mais qui paniquent. On connaît tous, autour de nous, un
oncle, une tante, une grand-mère qui a fait des bêtises, des fois, sur son
ordinateur, qui a effacé un fichier par erreur et qui se retrouve paniquée,
alors même qu'elle aurait pu y arriver, parce qu'elle a peur de faire des
bêtises. Donc, ça va très, très loin, ça va très, très loin, cette difficulté
associée aux solutions numériques. Et, au-delà de la formation, on se retrouve,
en fait, à... Si on pousse au tout numérique, si, de facto, on se retrouve avec
des solutions numériques qui prennent plus de place, on se retrouve, en fin de
compte, à avoir des personnes qui étaient dans une autonomie déjà et qui se
retrouvent en perte d'autonomie parce qu'elles dépendent de d'autres pour les
aider.
Donc, en parallèle avec le plan A, qui est les
solutions purement numériques, il ne faut pas un plan B pour la solution qui
est humaine, d'humain à humain, mais il faut un autre plan A aussi pour les
solutions d'humain à humain. Il faut que
cette transformation numérique soit une extraordinaire chance pour dégager du
temps de qualité de nos fonctionnaires pour pouvoir servir ceux qui en
ont le plus besoin, dont ceux que je viens de citer, les aînés, les personnes
moins nanties, les personnes les moins éduquées, les personnes avec des
déficiences intellectuelles, qui ont besoin
d'accompagnement humain et non pas des numéros de téléphone qui nous
accompagneraient à faire la même chose que ce que le numérique aurait
fait, à savoir remplir un formulaire sur... On a besoin de cette approche
humaine de la fonction publique.
Le deuxième point, c'est la question des risques
associés à la sécurité et les risques associés aux droits fondamentaux.
D'abord, même, encore une fois, si on se retrouve avec une identité numérique
qu'on va utiliser non seulement sur Internet, mais possiblement aussi dans nos
interactions avec la police, par exemple, bien, il se pourrait que cette
identité, de facto, devienne comme une carte d'identité. Or, voici maintenant
quelques siècles que nous n'avons pas de carte
d'identité, Mme la Présidente, au Québec et au Canada, et pour cause, parce
qu'avoir une carte d'identité viendrait toucher directement le droit à
l'anonymité.
Et on le sait, et les études sont nombreuses,
que les pays qui ont mis en place des cartes d'identité nationale se retrouvent
avec une police qui se sent légitime d'arrêter n'importe qui dans la rue pour
demander cette dite carte sans raison. Les cas de profilage sont abondants,
notamment en France, mais on pourrait nommer à peu près n'importe quel pays qui
a une carte d'identité nationale. Or, la meilleure manière d'éviter que la police
se sente légitime de demander une carte
d'identité nationale, c'est de ne pas en avoir, Mme la Présidente, et c'est un
choix de société que nous avons fait ici, en Amérique du Nord, et qu'il
va falloir respecter.
• (11 h 10) •
Ensuite, il y a la question des données que ce
système-là va stocker. On nous parle de l'utilisation possible de la biométrie, c'est-à-dire des données
intrinsèques à l'être humain, qui sont immuables et qui ne changeront
pas : la rétine de l'oeil, la forme du visage, les empreintes
digitales. Tout ça, c'est des choses qui ne changeront pas, contrairement à un
mot de passe. Et donc, si ces données-là se font voler, vous imaginez
évidemment à quel point est-ce que ces données sont personnelles, confidentielles,
et qui pourraient être utilisées à toute sauce. Et donc une de nos premières
recommandations, c'est de ne jamais stocker aucune donnée qui ne soit pas
obligatoire pour faire fonctionner ce système. Il faut garder le minimum de
données possible pour pouvoir faire en sorte que la solution soit
fonctionnelle.
Le deuxième point, c'est : qu'allons-nous
faire avec ces données? Et le gouvernement nous dit : Dans le projet de loi, nous allons interdire le profilage avec
les données. J'espère bien, Mme la Présidente, parce que le profilage est
interdit par la loi. Ceci étant dit, malheureusement, étant donné
l'historique de ce gouvernement, laissons-nous quand même le bénéfice du doute.
Rappelons qu'aujourd'hui même il y a des cas de profilage systémique dans notre
police, dans notre police nationale, au SPVM, à la SQ, où des personnes noires
ont 400 % plus de chances d'être arrêtées pour rien, des personnes
autochtones ont 400 % plus de chances d'être arrêtées pour rien, les
personnes arabes ont 300 % plus de chances d'être arrêtées sans raison
valable. Et ce n'est pas Québec solidaire qui le dit, Mme la Présidente, c'est,
bien sûr, la Ligue des droits et libertés, c'est, bien sûr, la commission
droits de la personne, de la jeunesse, mais c'est aussi des décisions de
justice qui blâment ce gouvernement qui malheureusement, encore une fois, a
porté en appel sans jamais apporter une alternative aux décisions, aux
politiques publiques et aux actions de la police, pour pouvoir permettre aux
policiers de faire leur travail sans en arriver à pénaliser de facto des
minorités racisées.
Et donc ils nous disent : Nous n'allons pas
faire de profilage avec les données. Soit, c'est une bonne nouvelle. Mais
pourquoi pourrions-nous faire quoi que ce soit d'autre que d'identifier les
personnes, avec ces données-là? Pourquoi allons-nous donner des données
personnelles au gouvernement, et que le gouvernement décide après coup de faire
de l'intelligence artificielle sur nos données, basé sur autre chose que l'idée
d'identifier les personnes, et donc la raison même d'avoir ramassé ces
données-là? Bien, pour nous, la question est simple, il n'y en a pas, de
raison. Si on accumule des données personnelles sur les gens pour faire
fonctionner une identité numérique, ça doit servir à une seule chose,
l'identification numérique des citoyennes et des citoyens.
Surtout que
nous sommes dans un moment charnière, Mme la Présidente, de manière
technologique, c'est-à-dire qu'il faut réussir à imaginer un avenir qui
avance très, très vite, qui avance très, très vite, où les interconnexions sont
de plus en plus nombreuses et où les technologies s'accumulent. Évidemment, il
y a l'infonuagique, il y a l'intelligence artificielle, le big data, je ne sais
pas, moi, les imprimantes 3D, les «blockchains», les chaînes de... etc., et il
faut se poser la question : Comment est-ce que ces choses-là vont
interagir?
Or, imaginons, Mme la Présidente, qu'on a un
système qui accumule la reconnaissance faciale pour l'identité numérique, qui
centralise toutes ces données-là et que, d'un autre côté, c'est un projet qui
traîne depuis longtemps, dont on entend parler de temps en temps, où on
voudrait avoir des caméras sur les vestes des policiers et des policières.
L'investissement est déjà là, l'infrastructure est déjà là. Et on peut tout à
fait imaginer qu'en temps réel, avec très, très peu d'investissement, on se
retrouve à capter tous les visages de tous les manifestants, de tous les
passants dans la rue, par cette caméra accrochée à nos représentants de
l'ordre, qu'ils soient envoyés à cette base de données qui, en temps réel, reconnaîtrait 100 % des personnes qui
sont présentes à une manifestation. C'est déjà un problème, mais on peut aller
plus loin. On peut recouper ces données-là très facilement, étant donné qu'on a
une identification sûre de la personne qu'on vient de croiser dans la
manifestation, pour savoir qui est en congé longue durée et qui ne devrait pas
être là parce qu'il est censé être sur le CNESST, qui est... qui n'a pas
respecté telle ou telle condition, qui n'est pas immigrant avec ses papiers. Et, quand on voit la chasse à
l'homme qui a été ouverte au sud de nos frontières et à quel point est-ce
que des principes démocratiques peuvent malheureusement bifurquer, il faut
absolument qu'on y réfléchisse tout de suite pour ne pas permettre à des
prochains gouvernements de mettre en place, basé sur de la technologie, des
États qui briment les droits et libertés des citoyennes et citoyens et qui
briment le droit à la citoyenneté, qui briment notre droit à une démocratie et,
plus spécifiquement, le droit à l'anonymité dans la rue.
Restons sur les données, Mme la Présidente. Il y
a la question de la transparence associée à l'utilisation de nos données. Et
donc, à chaque utilisation de nos données, il y a un log qui va s'accumuler au
fur et à mesure du temps sur l'utilisation. Bien, nous, ce qu'on pense, c'est
que ce log-là doit être accessible par une et une seule personne, c'est la
seule vraie propriété des données, qui est le citoyen qui est concerné. C'est-à-dire
qu'à tout moment un citoyen devrait être capable d'aller sur ce système-là pour
savoir qui a validé son identité, dans quel contexte, et donc valider que c'est
bien lui-même qui a eu accès à ça. Mais, en même temps, ni le gouvernement ni
personne d'autre ne pourrait être capable de vérifier cela, parce que, sinon,
ça va être un formidable outil de flicage, Mme la Présidente. Imaginez, vous
allez à la SAQ, vous montrez votre identité pour montrer que vous avez plus de
18 ans, hop! une ligne, vous allez à une autre SAQ, hop! une autre ligne,
vous allez à la SAAQ, vous allez... etc., et là on a, ligne par ligne, où
est-ce que vous allez, pourquoi vous y allez. Même sur des questions
d'assurance, par exemple, l'idée même que vous consommez de
l'alcool est loguée. Mais de quel droit l'État saurait ce genre d'information?
Eh bien, nous, on pense que c'est très, très important que, dans ce projet de
loi, on y réfléchisse tout de suite pour permettre une véritable confiance et
transparence envers l'utilisation de notre identité numérique.
Ensuite, il y a des questions de sécurité. Il y
a des questions de sécurité associées à l'idée d'avoir une énorme base de
données qui a toutes ces informations personnelles sur les citoyennes et
citoyens, et l'idée est de dire : Bien, nous allons la sécuriser, vous...
n'ayez pas de crainte. Bien, commençons par dire où vont être stockées les
données avant de dire comment elles vont être sécurisées.
A priori, l'idée serait, c'est ce qu'on entend,
de les mettre sur l'infonuagique. Rappelons ici, Mme la Présidente, que nous
avons un grave problème avec l'utilisation de grosses compagnies, pour ne pas
les nommer, AWS d'Amazon, Azure de
Microsoft, le cloud de Google, qui sont des clouds qui appartiennent à des
multinationales du Sud, des multinationales avec toutes sortes de
dérives, Mme la Présidente, où les P.D.G. ont un manque de scrupules, dont
évidemment personne ne peut douter aujourd'hui, mais, en plus, qui sont
assujettis à des législations qui ne sont pas les nôtres, à savoir le CLOUD
Act, Mme la Présidente. Que permet le CLOUD Act? Il permet, le CLOUD Act, sous
certaines conditions, d'obliger ces compagnies-là de partager leurs
informations sur des citoyens qui sont stockées chez eux avec le gouvernement
américain sans même prévenir les personnes dont les données ont été données au
gouvernement.
J'ai moi-même déposé une motion la semaine
dernière qui demandait au gouvernement de s'assurer que ni des compagnies
étrangères, et avant tout américaines étant donné les politiques du CLOUD Act,
et ni l'idée même d'avoir ces données à
l'étranger, même si c'est des compagnies canadiennes ou québécoises, ne soit
envisagée par ce gouvernement, et, à notre grande tristesse, cette
motion a été refusée par la partie majoritaire, par le groupe de la CAQ. Nous
espérons, ceci étant dit, que cela ne durera pas, Mme la Présidente, et
qu'évidemment ces données-là ne vont pas être stockées sur des serveurs à
l'étranger ou par des compagnies étrangères.
• (11 h 20) •
Maintenant, une fois qu'on a dit ça, il y a deux
options qui s'offrent à nous, une qui consiste à dire : Nous allons les
stocker dans un cloud d'une compagnie locale ou nous allons les stocker dans un
cloud privé, c'est-à-dire un cloud qui est «hosté», qui est organisé à l'intérieur
même de nos ministères. La question se pose, Mme la Présidente, mais imaginez le risque associé à l'idée d'avoir
une compagnie qui fleurit, qui marche bien, qui a un cloud local et que,
demain matin, Google, Amazon ou Microsoft
décide tout simplement de l'acheter. Du jour au lendemain, elle est assujettie
à des législations étrangères.
Donc, ou bien on légifère, pour ne pas permettre
cette perte de souveraineté numérique par rapport à nos compagnies numériques pour qu'elles ne puissent pas se faire acheter avec
tous les serveurs et toutes les données qu'il y a à l'intérieur, ou bien on s'assure d'avoir une
solution qui nous garde toutes nos données à l'intérieur même des murs virtuels
de nos ministères, à travers ce qu'on appellerait un cloud privé, tout en collaborant
évidemment avec des spécialistes de la technologie.
Le dernier point. Donc, on a parlé des services
qui pourraient reculer, des questions de droits fondamentaux, les questions de
risques associés. Je ne rentrerai pas ici, Mme la Présidente, sur la question
de stockage sur des systèmes distribués parce que, malheureusement, je pense
que je perdrais les gens qui nous écoutent et... mais je me permettrais de dire
qu'une technologie basée sur le «blockchain», donc les chaînes de blocs,
devrait être très sérieusement étudiée, même si j'ai très, très peu, très, très
peu d'attentes dans ce sens-là, je dois l'avouer. Mais la chaîne de blocs
apporterait de manière structurelle une
sécurité qu'une grosse base de données centralisée ne peut pas apporter, apporterait
une transparence de manière
structurelle qu'une grosse base de données ne peut pas apporter. Je ne
rentrerai pas plus dans des détails techniques.
La dernière
question, c'est la question de la fonction publique : comment avoir une
fonction publique à la hauteur du
défi. Et malheureusement les dernières années ont montré un certain nombre de
fiascos qui se sont produits et reproduits année après année. Or, le
virage numérique ne fait que commencer, c'est maintenant que nous allons faire
les plus gros investissements. Dans les perspectives du gouvernement, si mes
souvenirs sont bons, il y avait 10 milliards de dollars de projets, sur
les huit prochaines années, qui allaient être mis sur la table. Or, nous
manquons d'expertise dans la fonction publique. Tous les intervenants sont
venus nous expliquer le risque associé à avoir peu d'expertise. Nous avons des
postes qui sont ouverts. Autour de 10 %, voire même, des fois, 15 %,
17 % des postes en fonction du profil, en fonction du rôle sont à pourvoir
depuis maintenant beaucoup trop longtemps. Non seulement ils sont à pourvoir, mais il y a eu en plus un gel d'embauche, Mme la
Présidente. Ça fait qu'on a du mal à comprendre comment nous allons
régler ce problème-là.
Et ça, ça ouvre, et comme vous le savez, Mme la
Présidente, j'ai été 15 ans dans l'industrie, et je dois avouer que du non-sens, j'en ai vu vraiment beaucoup au
fur et à mesure des années, ça ouvre la porte à des situations qui sont
totalement absurdes, où on a des consultants qui viennent sous prétexte qu'on
ne peut pas payer comme du monde les fonctionnaires qu'on a, les analystes, les
développeurs, les architectes de solutions, les architectes d'entreprise, les
«data scientists», ce que vous voulez, sous prétexte qu'on n'est pas capable de
les payer comme quelque chose qui s'approcherait
même un peu de ce que l'industrie peut payer ailleurs. On se retrouve à prendre
des consultants qu'on paie le double, le double pour faire exactement la
même job, et dont on ne peut plus se passer.
Des consultants, il y a deux catégories, en
fait, il y a ceux qui restent un an, deux ans, trois ans, jusqu'à 10 ans
de suite comme consultants, et c'est-à-dire qu'on aurait eu un poste où on
payait bien les gens, on aurait quand même économisé beaucoup d'argent. Mais il
y a aussi ceux qui débarquent, et puis qui pensent avoir des solutions à tout,
et puis qui trouvent toutes sortes de solutions comme ça, avec une assurance
absolument incroyable, comme ce qu'on peut
voir chez les grosses boîtes de consultants, et qui partent ensuite, et qui
laissent tous les problèmes pour ceux qui restent sur place. Et donc
c'est des gens qui ne vivent jamais les conséquences de leurs décisions.
Or, Mme la Présidente, 80 %
des coûts des projets se font, entre le moment où il est livré et le moment où
il est décommissionné, 80 % se fait en maintenance. Et donc avoir des
consultants qui arrivent et qui ne vivent pas la maintenance qui va venir après
fait en sorte qu'ils ne prennent pas les meilleures décisions pour la suite des
choses pour les Québécoises et Québécois, pour le ministère, pour la
maintenabilité. Tout ce qu'ils veulent faire, c'est... ils ont des clauses dans
un contrat, check, check, check. Si, un jour, il y a un changement, je veux
dire, c'est limite si, quand on ne leur dit
pas bonjour, ils disent : Ce n'est pas prévu, c'est une demande de
changement, il faut augmenter les prestations. C'est quelque chose, Mme
la Présidente.
Il faut
absolument arrêter notre dépendance à ce système de consultation. On a parlé de
toute la question de la santé et des infirmières. Sachez, Mme la
Présidente, que le prochain gros scandale des dépenses totalement indues que
nous allons avoir, moi, je veux bien le
parier, sera dans les prestations des informaticiens et informaticiennes,
prestataires de services et des grosses boîtes de consultation. Donc, de
grâce, de grâce, assurons-nous de bien payer nos fonctionnaires. La sécurité de
nos données, notre sécurité, la qualité de nos services va en dépendre,
assurons-nous d'embaucher les personnes dont on a besoin. La transition
énergétique... la transition numérique va durer encore un autre 10 ans, en
imaginant qu'elle s'arrête, ce n'est pas
comme si nous n'allons pas avoir du travail à n'en plus finir pour toutes ces
personnes.
Je tiens d'ailleurs à saluer tous les
fonctionnaires qui travaillent actuellement au Numérique. S'ils y sont, c'est
aussi parce qu'ils y croient, parce que je peux vous jurer, Mme la Présidente,
qu'ils peuvent avoir toutes sortes d'emplois beaucoup mieux payés à l'extérieur
du fonctionnaire... du ministère et leur travail est vraiment essentiel et leur
expertise... et eux, ils le savent, ils le voient, leur expertise est vraiment
importante.
Donc, je vais conclure, Mme la Présidente, en
disant, premièrement, la prémisse de base, nous accueillons avec joie une
identité numérique. Ça va accélérer, améliorer les services donnés aux
citoyens. Pour les personnes qui sont doués en technologie, ça va vraiment faciliter
leur vie, et Dieu sait qu'on en a besoin.
Maintenant, il y a trois risques. Un, c'est
qu'en fin de compte ça diminue le service donné aux personnes qui ne passent
pas par le numérique, qui sont les personnes les plus marginalisées, les
personnes âgées, les personnes pauvres, les personnes les moins diplômées. Il y
a un risque face à la dérive sécuritaire, la dérive policière, la dérive
antidémocratique, et ça, il va falloir être très, très vigilants pour que cette
identité ne serve qu'à ce dont elle a été faite pour et non pas à devenir un formidable mouchard, une manière de savoir
ce que font les fonctionnaires... les citoyennes et citoyens, de pouvoir
recouper ces données-là avec autre chose, de pouvoir faire de l'intelligence
artificielle, de pouvoir les profiler. Il va falloir s'assurer de bien protéger
ces données-là. Et, en fin de compte, il va falloir renforcer la fonction
publique pour qu'elle puisse répondre aux enjeux associés à cette
transformation numérique, qui n'est pas une mince affaire. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, nous allons
poursuivre avec l'intervention de Mme la députée de La Pinière.
Mme Linda Caron
Mme Caron : Merci, Mme la
Présidente. Alors, ça me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur l'adoption
du principe du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique
nationale et modifiant d'autres dispositions.
Alors, c'est un projet de loi qui ratisse très,
très large afin de créer une identité numérique nationale et qui mise beaucoup,
et je dirais même trop, sur la réglementation pour préciser des volets
importants de l'identité, du projet d'identité
numérique nationale. Et d'ailleurs, la Vérificatrice générale du Québec fait un
appel à la prudence au gouvernement à ce sujet-là à la fin de son
mémoire, qu'elle est venue nous présenter en commission parlementaire la
semaine dernière.
• (11 h 30) •
Comme indiqué dans les notes explicatives du
projet de loi, l'identité numérique nationale est un ensemble de moyens dont
dispose l'État pour permettre à toute personne, donc à vous et moi, à vous
aussi, Mme la Présidente, d'avoir un accès sécurisé aux prestations
électroniques de services gouvernementaux ainsi qu'un niveau de confiance élevé
lors de nos transactions avec les organismes publics et dans la collectivité,
notamment à l'aide d'attestations numériques
gouvernementales. Autrement dit, avec ce projet de loi, le gouvernement veut
créer pour tous, vous, et moi, et Mme la Présidente ici présente, sans
l'obliger... sans obliger les personnes à l'utiliser, mais veut créer, donc
veut pouvoir créer pour tous une identité numérique qui va nous donner un accès
sécurisé aux divers services publics qui sont offerts en ligne par le
gouvernement ou par des organismes et ministères du gouvernement.
Et, bien entendu, il faut que la sécurité de
cette identité soit sans faille. Il faut que l'accès soit sans faille pour que,
vous, et moi, et Mme la Présidente, nous
ayons confiance au système pour pouvoir l'utiliser sans crainte, sans crainte
pour nos données personnelles, sans crainte de nous faire voler notre identité,
sans crainte que des personnes qui, dans le cadre de leur travail, ont
accès à nos informations... sans crainte qu'ils aient accès à toutes nos
informations, mais confiance qu'ils aient accès seulement aux informations
nécessaires pour faire leur travail et nous servir, et aussi que, lorsqu'on
utilise l'identité numérique pour nous authentifier ou pour montrer qu'on est
majeur, bien, on n'a pas besoin de montrer... les gens qui vérifient n'ont pas
besoin d'avoir ou le système n'a pas besoin d'avoir notre date de naissance au
complet, mais simplement l'année pour montrer qu'on est majeur. C'est ce qui
est visé par le projet de loi. Et, quand je
parle de confiance, c'est un élément extrêmement important. On sait que les
institutions dans la société ne fonctionnent que si elles ont la
confiance du public. Alors, l'identité numérique nationale, c'est d'une
importance assez grande que c'est appelé à devenir une institution, et ça prend
la confiance du public pour que ça fonctionne.
Durant les interventions en commission
parlementaire, on a cité... certains groupes ont cité l'exemple de la Colombie-Britannique, où l'objectif d'utilisation
est très faible, environ 10 %, parce qu'il n'y a pas eu une communication,
il n'y a pas... les étapes à faire au préalable de
l'instauration, de l'implantation de l'identité numérique n'ont pas été faites
pour rassurer le public, pour expliquer au public, pour que ce soit simple
d'utilisation pour le public. Et donc la confiance n'y est pas. Et, bien
entendu, ce n'est pas ce qu'on veut pour le Québec. On veut que le système
fonctionne bien, qu'il soit solide et qu'on puisse y avoir confiance.
Alors, c'est clair que, le projet de loi, c'est
dit en toutes lettres, qu'on veut faciliter l'accès et protéger les informations. On ne veut pas nuire aux citoyens.
Le projet de loi, c'est clair là-dessus, c'est un projet de loi qui veut
simplifier la vie et qui se... et qui veut que ça fonctionne bien. Et je
pense que, dans cette salle, les 125 députés sont bien d'accord avec ça.
Le hic, c'est qu'il y a très loin de la coupe aux lèvres. Premièrement, le
Québec est en retard sur toute la ligne en ce qui concerne l'identité numérique
de ses citoyens et citoyennes. Plusieurs groupes invités à prendre... à
présenter leurs mémoires en commission
parlementaire nous l'ont dit. C'est un constat qui fait consensus, y compris au
gouvernement, et c'est pour ça que le
projet de loi n° 82 est déposé. On s'entend, donc, que le projet de
création d'une identité numérique est souhaitable et nécessaire. C'est
pourquoi, d'ailleurs, nous allons appuyer le principe du projet de loi.
Par contre, ce que nous avons entendu en
commission parlementaire la semaine dernière nous a démontré que le
gouvernement du Québec et le ministère de la Cybercité et du Numérique ne sont
pas du tout prêts à légiférer en la matière. En plus des nombreux angles morts
du projet de loi que les groupes ont fait ressortir, le ministère de la Cybercité et du Numérique est loin d'être prêt à
mener ce projet à bien des égards : que ce soit au chapitre des
ressources, les ressources et les compétences nécessaires au sein du ministère,
elles n'y sont pas, la vision et la planification du projet également.
Puis là la Vérificatrice générale, parce que ce
n'est pas moi qui invente ça, là, la Vérificatrice générale du Québec a utilisé
le mot «planification», je pense que c'est un maître-mot, et on l'a vu dans
d'autres projets, c'est le talon d'Achille du gouvernement. Et le passé étant
garant de l'avenir, la Vérificatrice générale est revenue dans son mémoire sur
les résultats de certains de ses travaux passés, dans un passé pas si lointain,
pour attirer l'attention sur trois enjeux
principaux, dont je vais vous parler, la cyber... premièrement, la
cybersécurité et la protection des renseignements personnels; deuxièmement, l'accessibilité et la
qualité des services aux citoyens; et, troisièmement, la gestion de projets.
Alors, pour la cybersécurité et la protection
des renseignements personnels, la Vérificatrice nous dit... On sait que ces
éléments-là sont cruciaux. Les données personnelles doivent être protégées.
Malheureusement, elle a constaté à plusieurs reprises des lacunes à ce sujet
dans différentes entités. En novembre 2023, je vous disais que ça ne faisait
pas si longtemps, elle a constaté que des améliorations étaient nécessaires
pour réduire les risques d'atteinte à la confidentialité
de ces renseignements. Et, parmi les points à améliorer, elle avait noté la
gestion des accès aux informations personnelles, la gestion des risques et des
incidents liés à la confidentialité, ainsi que les actions de sensibilisation et
de formation du personnel concerné. Deux ans plus tôt, en novembre 2021,
elle avait mentionné aussi des améliorations nécessaires pour les accès, les
coupe-feux et les alertes de sécurité automatisées, les tests d'intrusion. Et,
en juin 2020, elle avait recommandé aussi
d'améliorer les contrôles et les mesures de sécurité pour le personnel qui a
des accès privilégiés, de réviser périodiquement les accès informatiques
de l'ensemble du personnel et de renforcer la surveillance par les instances du
gouvernement.
Alors, c'est
absolument essentiel de se reporter à ces recommandations passées que la
Vérificatrice générale a faites pour s'assurer qu'on met toutes les
chances, que le gouvernement met toutes les chances de son côté pour que les
objectifs du projet de loi n° 82 soient atteints.
En matière d'accessibilité et de qualité des
services, la Vérificatrice générale a aussi constaté des lacunes, par exemple, en novembre 2023, au sujet de Services Québec, qui n'était toujours pas devenu un guichet multiservice d'envergure
pour simplifier l'accès aux services gouvernementaux pour les citoyens, alors
que c'était l'objectif. Et, aussi, dans son rapport d'octobre 2020,
pour le Réseau national intégré de radiocommunication, le RENIR, elle avait
constaté la qualité des services offerts aux utilisateurs du réseau, qui
n'avait pas atteint non plus le niveau qui était désiré. Alors, elle souligne que ça va être important de simplifier et
faciliter, améliorer l'accès pour les citoyens aux services gouvernementaux,
comme il est espéré avec le projet de loi n° 82,
mais, pour ça, ça prend aussi l'adhésion des organismes qui vont être
impliqués.
Je vois que le temps file, alors je ne vais pas
m'étirer trop longtemps sur la question du traitement des incidents
informatiques, qui doit être efficace et rapide, comme elle l'a mentionné dans
son rapport, en page 8, et la nécessité de tester, tester et tester — c'est
moi qui répète — avant
la mise en service, en page 9 du rapport de la Vérificatrice générale.
Je vais m'arrêter, par contre, sur la gestion de
projet, sur laquelle elle insiste en page 10, parce qu'une bonne
planification de... une bonne planification est essentielle, vraiment
essentielle afin de limiter les retards et les dépassements de budget qui sont
souvent attribuables à des problèmes dans la planification des projets, qu'il
s'agisse de consulter les utilisateurs, les citoyens et les organismes
gouvernementaux ou bien qu'il s'agisse des processus pour sélectionner les fournisseurs, qui, soit dit en
passant, ne doivent pas rendre le ministère de la Cybersécurité et du Numérique
dépendant d'un seul fournisseur, ou le gouvernement du Québec, ou les
Québécois, par leurs données, ne doivent pas dépendre d'un seul
fournisseur, et, à plus forte raison, de fournisseurs étrangers, dans le
contexte actuel.
La planification, ça comprend aussi la nécessité
de se doter des ressources humaines compétentes pour réaliser le projet, compétentes mais en nombre suffisant,
et aussi d'avoir les ressources matérielles et financières nécessaires. Alors,
à ce sujet, on le saura peut-être en étude
détaillée, mais la question qui se pose : Quelle somme le ministre de la
Cybersécurité et du Numérique a-t-il
convaincu le ministre des Finances d'allouer à ce projet? Pour l'instant, c'est
une donnée inconnue.
Bref, pour que le projet de loi atteigne ses
objectifs, pour qu'il soit bon et sécuritaire pour les Québécois, il faut plus que le projet de loi qui est sur la
table dans sa forme actuelle, il faut de nombreux amendements au projet de loi,
mais il faut surtout une feuille de route pour couvrir tous les aspects de la
gestion de ce projet, les aspects qui sont dans les volets d'angles morts du projet de loi. Et, pour qu'une feuille de
route soit solide et exhaustive, il faut qu'elle réunisse toutes les
conditions gagnantes, et, pour ça, bien, il faut y mettre des ressources, il
faut y mettre du temps, aussi, et de la planification.
Alors, le gouvernement serait avisé de préparer cette feuille de route avant de
procéder plus avant avec l'étude détaillée
du projet de loi, à mon avis, pour que la sécurité des données des Québécois
soit assurée, pour que tout le monde adhère à ce projet de loi et au
système d'identité numérique et que ça fonctionne.
• (11 h 40) •
Tout à l'heure, ma
collègue députée de Mont-Royal—Outremont a déjà abordé les enjeux de traçabilité des données, de souveraineté numérique, de
l'hébergement des données au Québec, de l'autosouveraineté des citoyens par
rapport à leurs propres données, de la communication et de la
transparence garantes de l'acceptabilité sociale de l'identité numérique, de la
biométrie, du profilage, de l'interopérabilité des systèmes. Et, sur le
profilage, je veux simplement préciser que je ne crois pas, ma collègue non plus,
que le gouvernement veuille faire du profilage. Ce n'est pas du tout ça ici.
Quand on parle de profilage, et les groupes qui sont venus en commission
parlementaire l'ont bien mentionné, c'est que, lorsqu'il existe des données à
différents endroits, et surtout avec l'intelligence artificielle, parce que,
même si on... Le projet de loi ne parle pas beaucoup d'intelligence
artificielle. L'intelligence artificielle est déjà utilisée dans les processus
techniques, disons, de ça. Alors, l'intelligence artificielle sera
nécessairement présente dans l'identité numérique
nationale. Alors, avec l'intelligence artificielle, c'est aussi facile d'aller
chercher des données un peu partout, de les amalgamer, disons, et d'en
déduire des déductions.
Et
il y a un groupe qui n'était pas présent en commission parlementaire, qui n'a
pas été invité à faire sa présentation, mais qui a tout de même déposé
un mémoire, c'est le Centre Alpha-Sourd Rive-Sud, qui nous rappelle... Et vous
vous en rappellerez sûrement, parce que ça a fait les manchettes il y a
quelques années, la question du profilage des gens bénéficiaires de l'aide
sociale en France. Alors, ce que le système faisait, c'est qu'il tentait de
chercher les risques de fraude du système, et finalement il y avait... il ciblait
les mères monoparentales dans un certain secteur parce qu'elles étaient plus nombreuses et disait : Bon,
bien, voilà, ce sont des personnes qui risquent de frauder l'aide sociale.
Alors là, soit qu'elles étaient
coupées ou que les... elles étaient surveillées davantage, et ça, ce n'était
pas une visée du gouvernement français, mais ça découlait de
l'utilisation de la technologie.
Alors, je le dis
bien, loin de moi l'idée de donner de mauvaises intentions au gouvernement sur
le profilage. Quand on parle de profilage
dans le cadre de l'identité numérique nationale, c'est vraiment des systèmes
qui peuvent finir par réunir des
données et profiler certains groupes à qui on pourrait couper les services ou
leur rendre l'accès très difficile aux services. Alors, je tenais à
faire cette précision-là.
Je reviens au mémoire
de la Vérificatrice générale, en page 7, où elle dit, justement : «Il
est prévu dans le projet de loi de ne pas
pénaliser ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas avoir un identifiant
numérique national.» Et elle nous dit qu'«il sera important de s'assurer
que ce sera effectivement le cas et que ceux-ci pourront accéder facilement et
efficacement à tous les services gouvernementaux».
Alors, je vais vous
parler ici de l'enjeu de la littératie, la littératie, point, et la littératie
numérique. Il y a triste constat, très
triste constat, seuls 46,8 % des Québécois, donc moins d'un sur deux,
seuls 46,8 % des Québécois maîtrisent les compétences en littératie
pour lire, apprendre, agir à partir de ce qu'ils lisent. Ça veut dire que
53,2 % des Québécois ne maîtrisent pas ces compétences. Certains ne savent
pas lire du tout. D'autres savent lire, mais ils ne comprennent pas ce qu'ils
lisent. Du moins, ils ne comprennent pas assez bien le sens des mots, le sens
des mots mis ensemble, donc le sens des phrases, pour être capables de savoir
ce qu'il faut faire, de comprendre ce qui leur est expliqué par écrit. C'est
énorme.
Alors, le Centre
Alpha-Sourd Rive-Sud, toujours lui, nous dit... nous met en garde, en
disant : «Le fait de fixer des cibles et des taux d'utilisation pour
l'identité numérique sous-entend que ce moyen d'accéder aux services publics
sera probablement favorisé.» On comprend qu'on veut simplifier... Le
gouvernement veut simplifier la vie et l'accès aux services par ce projet de
loi, par la création d'une identité numérique, mais ne veut pas l'imposer.
Mais, quand on regarde ces chiffres-là sur la littératie, on se dit : Ça
va être difficile d'atteindre un 30 %, 35 %, 40 %, 50 %,
même, d'utilisation parce qu'il faut y adhérer, comme je le disais tout à
l'heure, il faut avoir confiance que le système fonctionne bien. Ça prend de la
communication pour ça, d'où l'idée... le besoin d'avoir une feuille de route
pour identifier toutes ces étapes du projet. Mais, si autant de personnes ne
peuvent pas comprendre, ces personnes-là ne pourront pas utiliser l'identité
numérique nationale.
Et aussi ce que le
Centre Alpha-Sourd nous rappelle... en fait, ce qu'il nous dit, c'est que, sur
le terrain, on observe déjà que l'accès aux alternatives non numériques est
plus complexe, par exemple, parce que les bureaux de service ferment et qu'il
faut se déplacer sur de plus longues distances pour avoir un service en
personne, alors il faut se déplacer. S'il y a des bureaux qui ferment, il y en
a moins, donc les distances sont plus grandes, ça coûte plus cher, il faut être
mobile, il faut y aller. Alors, il ne faut pas oublier ce point-là. En ne
rendant pas l'utilisation d'identité numérique obligatoire, ça veut dire qu'on
ne veut pas laisser ces personnes pour compte, mais il faut que les conditions
soient réunies pour que ces personnes ne soient pas laissées pour compte.
Alors, ça, c'est fort important pour la question de littératie, point.
Maintenant, en
terminant, j'arrive à la question de la littératie numérique. Je pense aux
aînés. Je suis certaine que, s'il y a des
jeunes qui nous écoutent, ils ont déjà aidé leurs parents ou leurs
grands-parents à s'y retrouver sur un média social ou bien sur d'autres
applications sur leur téléphone ou sur leur tablette. Mais sachons... gardons
en tête que l'identité numérique, c'est sensible, comme information, et il y a
toute la question des finances. Et, malheureusement, la maltraitance financière
est un fléau qui affecte les aînés, et, malheureusement, la maltraitance, les
chiffres nous montrent que c'est souvent... ça vient plus souvent de la part de
membres de la famille que de l'extérieur. Alors, il faut être très, très, très
vigilants pour les aînés par rapport à l'identité numérique nationale.
Sur ce, je vous
remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée, pour votre intervention.
Maintenant, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi
n° 82?
Mise aux voix
Comme il n'y a pas
d'autre intervention, le projet de loi n° 82, Loi
concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, est-il
adopté?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi
à la Commission des finances publiques
M. Caire :
Oui, Mme la Présidente. Conformément à l'article 243 de notre
règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 82,
Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres
dispositions, soit déféré à la Commission
des finances publiques pour son étude détaillée et que le ministre de la
Cybersécurité et du Numérique soit membre de ladite commission pour la
durée du mandat.
Mise
aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté. M. le leader adjoint, pour la suite de nos
travaux.
M. Caire :
Oui, Mme la Présidente. Pouvez-vous suspendre nos travaux jusqu'à
13 h 40, s'il vous plaît?
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bien
sûr. Donc, afin de permettre la tenue des affaires courantes, cet après-midi,
je suspends les travaux jusqu'à 13 h 40.
(Suspension de la séance à
11 h 50)
(Reprise à 13 h 40)
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
bonjour à toutes, bonjour à tous. Collègues, prenez place, nous allons
débuter nos travaux.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous
sommes à la rubrique Déclarations des députés. Et, sans plus tarder, je
reconnais M. le député de Chauveau.
Saluer
le projet socioprofessionnel Café-In de l'organisme Servio
M. Sylvain Lévesque
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. C'est avec fierté que je
mets en valeur le projet socioprofessionnel Café-In, mis sur pied par
l'organisme Servio, anciennement L'Association des TCC des deux rives, à
Loretteville.
Je salue, dans les
tribunes, le directeur général, Benoit Durand, le directeur adjoint Rive-Sud,
Simon Demers, la directrice adjointe
Rive-Nord, Caroline Gauvin la responsable philanthropique, Annabelle Ross,
l'agent de communication, Jean-Luc Jolivet, et le responsable du
Café-In, Patrick Bérubé Deschamps.
Après plusieurs mois
de travail, c'est le 2 octobre dernier, journée du 35e anniversaire
de Servio, que le projet socioprofessionnel Café-In a été inauguré. S'inscrivant
dans les pas de la populaire cuisine collective, Café-In permet à ses membres de mettre la main à la pâte dans
tout ce que produit le service de restauration. Ouvert au public, Café-In
est une occasion de sensibiliser la
population aux réalités que vivent les personnes ayant subi un traumatisme craniocérébral
modéré ou sévère.
Bon succès, Café-In!
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Chauveau. Et bienvenue parmi nous.
Je reconnais maintenant Mme la députée de La
Pinière.
Souligner
la Semaine de la canne blanche
Mme Linda
Caron
Mme Caron : En
cette Semaine de la canne blanche, j'attire notre attention sur le sort de plus
de 200 000 Québécois et
Québécoises en situation de handicap visuel à la suite d'un accident, d'une
maladie ou du vieillissement.
Cinq capsules illustrant un cas vécu seront
diffusées chaque jour, cette semaine, sur le canal YouTube du Regroupement des
aveugles et des amblyopes du Québec afin de nous sensibiliser au parcours du
combattant et aux délais déraisonnables pour obtenir le moindre service.
De quatre enjeux majeurs découle la
détérioration des services de réadaptation : le manque d'information sur
les services disponibles, la pénurie de personnel dans les centres de
réadaptation, l'inadéquation entre formation exigée et besoins du terrain, la
déshumanisation du processus d'intervention.
Vivement des services en temps opportun pour
assurer l'autonomie des personnes aveugles et malvoyantes.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de La Pinière.
La parole revient maintenant à M. le député de Drummond—Bois-Francs.
Rendre hommage à M. Brian
Illick
M. Sébastien
Schneeberger
M. Schneeberger : Merci,
M. le Président. Aujourd'hui, je souligne l'intronisation de M. Brian
Illick au Temple de la renommée des affaires de la Chambre de commerce et
d'industrie Drummond. Il devient ainsi le 38e bâtisseur.
En 1993, il
prend la tête de la compagnie d'assurance fondée par son père. Il entreprend
alors une phase d'expansion qui mènera à six sociétés d'assurance avec une
centaine d'employés. Curieux de nature, Brian Illick devient co et propriétaire de 17 compagnies dans le domaine
de la restauration, l'alimentation, l'imprimerie, et l'ambition le porte même
à fonder Les Vallons de Wadleigh, un vignoble à Ulverton.
Philanthrope
de nature, il s'implique auprès d'une quinzaine d'organismes, président de la
chambre de commerce, du club de
hockey des Voltigeurs, bénévole auprès du Club Rotary, Centre Normand-Léveillé,
Société canadienne du cancer et la Fondation Sainte-Croix/Heriot, mais, le tout,
c'est sa gentillesse et son humour que nous apprécions le plus.
Brian, tu mérites amplement cet honneur. Nous
sommes fiers de toi.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Je cède maintenant la parole à M. le député de Jean-Lesage.
Partager une lettre du comité
des usagers du 388
M.
Sol Zanetti
M. Zanetti : Merci, M. le
Président. Voici des extraits d'une lettre remise au ministre de la Santé et
des Services sociaux de la part du comité des usagers du 388, que le CIUSSS de
la Capitale-Nationale s'apprête à fermer par manque de vision.
Je cite : «Cette annonce de fermeture a eu
l'effet d'une bombe, anéantissant d'un seul coup tout espoir de guérison. La
prévention coûte beaucoup moins cher que les hospitalisations et tout le monde
devrait avoir la possibilité de choisir l'approche qu'il juge la plus
appropriée. Le 388 est bien plus qu'un centre de traitement des psychoses :
c'est une communauté où chacun retrouve confiance, sourire et espoir. On a vu
des pairs s'épanouir. Devenir artistes, enseignants,
fonctionnaires, infirmiers. La rapidité avec laquelle ce lieu permet à ses
usagers de se reconstruire est remarquable. Il faut maintenir le
traitement du 388 et même en implanter de semblables partout dans la province,
plutôt que de le faire disparaître.»
En espérant, M. le Président, que ces paroles
justes seront entendues.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de
Jean-Lesage. Au tour, maintenant, de Mme la députée d'Argenteuil.
Souligner l'efficacité des
interventions préventives d'Hydro-Québec
dans la circonscription d'Argenteuil
Mme Agnès
Grondin
Mme Grondin : Merci. Au cours
des dernières années, la région des Laurentides a été touchée par plusieurs aléas climatiques, particulièrement en Argenteuil,
où la force du vent a remporté le duel sur de nombreuses infrastructures,
laissant les citoyens dans un noir total trop longtemps.
En milieu rural forestier, la gestion de la
végétation près des lignes électriques est un enjeu de sécurité. Depuis plusieurs mois, les équipes d'Hydro-Québec
effectuent des interventions préventives, au déplaisir de certains
propriétaires amoureux de leurs paysages
quotidiens. Mais, lundi dernier, toute la province a été balayée par de grands
vents et des rafales qui dépassaient les 90 kilomètres
à l'heure. Dans ma circonscription, très peu de pannes ont été répertoriées. Du
jamais-vu, M. le Président.
Je tiens donc
à saluer la collaboration entre les équipes d'Hydro, les ouvriers en émondage
et, dans certains cas, les municipalités, qui ont su trouver la
meilleure façon que nos coeurs restent au chaud.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée
d'Argenteuil. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Notre-Dame-de-Grâce.
Dans le cadre du Mois de
l'histoire des Noirs, souligner le
travail et l'engagement de citoyens de la circonscription
de Notre-Dame-de-Grâce
Mme Désirée
McGraw
Mme McGraw : Merci, M. le
Président. En ce mois de février, le Mois de l'histoire des Noirs, et
notamment, c'est une occasion en or pour reconnaître et rendre hommage aux
immenses contributions des communautés noires, ici, à la société québécoise.
Dans mon comté de Notre-Dame-de-Grâce, cet
héritage est particulièrement prononcé, avec un leadership fort, génération
après génération.
I'm honored to recognize three of NDG's
most prominent black leaders, with us here today, whose contributions to our community are nothing short of heroic. We have with us
Nadine Collins, a radiant champion of women in NDG and everywhere, who serves as executive director of Women on the rise;
Simeon Pompey, who leads both the Caribbean Coalition Network of Montréal and comité jeunesse NDG while also
teaching at Dawson College, he is a local superstar. Miranda Potts is
the executive director of Outreach and Education at the Eva Marsden Center for
Social Justice and Aging and an unwavering advocate for seniors everywhere in
our community.
Merci pour votre
engagement. On est très fiers de vous. Merci.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Et bienvenue à vous à notre Assemblée
nationale.
Je reconnais maintenant Mme la députée de Hull.
Rendre hommage à Mme Jo-Anne
Donoghue
Mme Suzanne
Tremblay
Mme Tremblay : Merci, M. le
Président. En décembre dernier, j'ai eu le plaisir et l'honneur de remettre la Médaille de la députée de l'Assemblée nationale du
Québec à une figure incontournable du monde culturel en Outaouais, Mme Jo-Anne
Donoghue.
Auteure-compositrice,
scénariste et metteure en scène d'oeuvres originales, elle se dévoue depuis
plus de 35 ans aux arts de la scène à Gatineau et dans l'Outaouais.
Fondatrice, directrice de L'Artishow, elle a
créé une véritable plateforme de production, de formation et d'encadrement pour
la relève artistique en Outaouais. Elle croit fermement en la possibilité de
bâtir une industrie culturelle forte et
ancrée dans notre région, offrant ainsi aux artistes un espace pour grandir et
s'épanouir. Son engagement auprès de la jeunesse a permis de former
plusieurs artistes talentueux.
Par sa passion et son dévouement, elle a
profondément enrichi la culture de l'Outaouais et marqué durablement son milieu
artistique. Elle poursuit son engagement en partageant son expertise à travers
de nombreux projets, inspirant ainsi toute une communauté.
Merci, Mme Donoghue, pour votre
contribution exceptionnelle.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de
Hull. Et la parole revient maintenant à M. le député de Saint-Jean.
Souligner le 250e anniversaire
du siège du fort Saint-Jean
M. Louis
Lemieux
M. Lemieux : M. le Président,
je me souviens. Donc, un peu d'histoire sur le sujet du 51e État américain,
qui est d'autant plus sur toutes les lèvres que le nouveau président américain
nous plonge dans un scénario de guerre commerciale en même temps qu'il nous
invite à devenir son 51e État.
Cette lubie américaine commence en 1775, lors de
leur guerre d'indépendance. Les Britanniques contrôlaient alors le territoire
qui est devenu le Canada.
Il y a donc
exactement 250 ans cette année, les Américains partaient à l'assaut de
Québec. Chemin faisant, ils se sont butés au fort Saint-Jean, qu'ils ont
dû assiéger, et c'est le fort Saint-Jean qui a probablement... et son siège,
qui a probablement tout changé dans la suite de
l'histoire de notre nation. Le petit poste militaire sur le Richelieu du temps,
devenu aujourd'hui Saint-Jean-sur-Richelieu, a permis de retenir les forces
américaines pendant plusieurs semaines, entraînant leur défaite à Québec.
Nous ne sommes donc pas devenus américains cette
fois-là, ni les autres tentatives depuis. Notre réponse a toujours été et
demeurera : Non, merci.
• (13 h 50) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Saint-Jean. Merci pour ce morceau d'histoire.
Et je reconnais maintenant Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice.
Rendre hommage à M. Gilles
Bourdon
Mme Marie-Louise
Tardif
Mme Tardif : Après une vie
professionnelle bien occupée à titre de comptable pour différentes entreprises,
M. Gilles Bourdon a pris une retraite bien méritée.
En fait, sa retraite a duré trois jours. Il a
accepté de revenir travailler pour l'organisme SIT Mauricie à titre de
coordonnateur au développement des affaires.
Il faut dire
qu'il est très dynamique, convaincant, persévérant et travaillant. C'est lui
qui rencontre les entreprises et qui vante les avantages de donner à
sous-contrat certaines tâches aux personnes vivant avec une problématique de
santé mentale. Et, en grande partie grâce à
lui, plus de 20 personnes minutieuses et travaillantes s'épanouissent sur
des plateaux de travail.
À 77 ans, Gilles aime encore s'occuper des
clients et des travailleurs.
Merci, Gilles. Vous êtes merveilleux.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice. Au tour, maintenant, de Mme la députée de Rimouski.
Rendre hommage à Mme Monique
Vézina
Mme Maïté
Blanchette Vézina
Mme Blanchette Vézina : Merci.
Merci, M. le Président. Aujourd'hui, je voudrais rendre hommage à une femme
d'exception de ma circonscription qui est décédée récemment, Mme Monique Vézina.
Femme politique et gestionnaire, Monique était
une personne de conviction, d'engagement, qui a toujours recherché une plus grande justice sociale. Elle a
grandement contribué à l'avancement des femmes et à leur participation à la vie
publique. Ce sont des femmes comme Monique Vézina qui ont ouvert la voie aux
femmes en politique.
Née à Rimouski en 1935, elle s'est impliquée
dans de nombreux organismes du Bas-Saint-Laurent. Députée de la circonscription
de Rimouski-Témiscouata à la Chambre des communes de 1984 à 1993, Monique a
dirigé plusieurs ministères. En tant que personnalité politique, elle a pris
part à de nombreux projets qui auront marqué le Québec, le développement
socioéconomique de l'Est du Québec.
En 2005, Monique Vézina reçoit l'insigne
d'officière de l'Ordre national du Québec.
À Marie-Andrée, Mireille, Marie-Claire et Marc,
mes plus sincères condoléances. Monique et Jean Yves vont continuer de veiller
sur vous. Merci.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de
Rimouski. Je reconnais maintenant M. le député de Taillon.
Souligner la Semaine nationale
de prévention du suicide
M.
Lionel Carmant
M. Carmant : Merci, M. le
Président. J'ai eu le plaisir de participer, avec le député de Vanier-Les Rivières,
au lancement des activités de la semaine de prévention du suicide, un événement
annuel de sensibilisation et de mobilisation chapeauté par l'Association
québécoise de prévention du suicide depuis 1991.
Jusqu'au 8 février, de nombreuses activités
auront lieu un peu partout au Québec, dans chaque communauté, pour sensibiliser
les citoyens et les décideurs à l'ampleur du problème et à mobiliser la
population afin que tous jouent un rôle actif pour le prévenir. L'objectif est
également de mieux faire connaître les ressources disponibles, dont la ligne 1
866 appelle, le 535353 et suicide.ca, en plus de normaliser et encourager la
demande d'aide.
Je tiens donc à exprimer toute ma gratitude
envers les personnes qui oeuvrent ensemble à prévenir le suicide et à offrir de l'aide aux personnes en détresse
psychologique. Votre travail est indispensable, et sachez que la population
est derrière vous, mobilisée pour agir. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Taillon. Et la parole revient maintenant à M. le député de
Lévis.
Féliciter
Mme Sylvie Héon, lauréate du Prix d'alphabétisation
du Conseil de la fédération
M. Bernard
Drainville
M. Drainville : M. le
Président, depuis 2004, le Prix d'alphabétisation du Conseil de la fédération
souligne les efforts exceptionnels des apprenants adultes dans le domaine de
l'alphabétisation, et ce, à travers le pays.
Aujourd'hui, je suis fier de vous présenter la
lauréate du Prix d'alphabétisation du Conseil de la fédération de l'année 2024
pour le Québec, Mme Héon, qui est ici avec nous.
Âgée de 54 ans — on l'applaudit — âgée
de 54 ans, mère monoparentale de trois enfants, Mme Héon est un exemple de
courage et de détermination.
À l'automne 2023,
elle a effectué un retour aux études au centre de formation Rimouski-Neigette.
Grâce à ses efforts, elle a réalisé des progrès spectaculaires.
Elle est également bénévole dans un organisme
qui vient en aide aux victimes de violence entre partenaires. Elle est source
de fierté pour ses enfants, qui voient bien que, malgré les obstacles, on peut
réaliser de grandes choses. Grâce au soutien de l'équipe du centre
Rimouski-Neigette, elle poursuit maintenant des études universitaires dans le
domaine psychosocial.
Je vous
invite à vous joindre à moi pour applaudir à nouveau Mme Sylvie Héon,
fière lauréate québécoise du prix...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Félicitations,
Mme Héon! Merci, M. le député de Lévis.
Alors, écoutez, voilà qui met fin à la rubrique
Déclaration des députés. Je remercie chaque collègue pour votre déclaration.
Nous allons suspendre les travaux quelques
instants.
(Suspension de la séance à 13 h 55)
(Reprise à 14 h 04)
La
Présidente : Bonjour, tout le monde. Vous êtes nombreux
aujourd'hui, en ce mardi 4 février 2025. Mesdames messieurs,
bienvenue. Le parlement du Québec, c'est chez vous.
Mmes et MM. les députés, nous allons nous
recueillir quelques instants.
Merci beaucoup. Veuillez vous asseoir.
Présence
du consul général de Turquie, M. Zeki Öztürk
Eh bien, aujourd'hui, j'ai le plaisir de
souligner la présence, dans les tribunes, du consul général de Turquie,
M. Zeki Öztürk, à l'occasion de sa visite de prise de poste.
Décision
de la présidence concernant la demande de débat d'urgence
au sujet de l'imposition de tarifs douaniers par les États-Unis
Voilà. J'ai reçu, conformément aux dispositions
de l'article 88 et suivants du règlement, une demande de débat d'urgence
de la part du leader du deuxième groupe d'opposition concernant l'imposition
par les États-Unis de tarifs douaniers de 25 % sur les produits canadiens.
Le leader du deuxième groupe d'opposition
allègue qu'après plusieurs semaines de spéculations et de débats hypothétiques
la menace des tarifs se concrétise, compromettant l'économie québécoise et la
stabilité de plusieurs entreprises et travailleurs. Il soutient que
l'imposition de tarifs entraînera des répercussions directes sur l'économie du Québec, en ce qu'elle va nuire à la compétitivité
des entreprises québécoises, menacer des milliers d'emplois, freiner les
investissements, fragiliser les chaînes
d'approvisionnement et augmenter le coût de la vie. Le leader du deuxième
groupe d'opposition fait également valoir qu'il est essentiel que les élus
puissent prendre la parole pour démontrer leur engagement, discuter de solutions et rassurer la population et
les commerçants qui ont des inquiétudes face à l'incertitude économique engendrée par lesdits tarifs. C'est pourquoi,
selon lui, un tel débat doit se faire de manière urgente, et ce, malgré la
décision de surseoir à l'application des tarifs annoncée hier.
À la lumière
des critères qui découlent du règlement et de notre jurisprudence
parlementaire, j'en viens aux constats suivants quant à la recevabilité
ce cette demande.
Tout d'abord, elle porte sur un sujet précis et
d'une importance particulière. La jurisprudence a établi que le sujet doit
concerner une crise aiguë et soudaine ou l'aggravation d'une telle crise. Dans
le cas présent, bien que la menace d'imposition de tarifs douaniers ait été
dans l'actualité depuis un certain temps, cette menace était hypothétique
jusqu'à sa concrétisation par le président des États-Unis le 1er février
dernier. En ce sens, la mise à exécution de la menace constitue une aggravation
soudaine de la situation. Il est vrai que le président des États-Unis a annoncé
hier que ces tarifs seront suspendus pour un
mois, mais cela ne rend pas l'enjeu moins important. Le Québec doit quand même
se préparer à leur entrée en vigueur, et la crise est toujours sérieuse. Je
reviendrai d'ailleurs sur cet aspect dans ma conclusion.
Il
faut également que le sujet relève de la compétence de l'Assemblée. Cela est
clairement le cas ici, comme le démontre la jurisprudence traitant de débats
d'urgence sous l'angle de mesures économiques étrangères ayant des impacts sur
l'économie québécoise. En effet, bien qu'ils aient une dimension internationale
et pancanadienne, les tarifs douaniers imposés par les États-Unis entraîneront
des conséquences tangibles au Québec, le Québec qui dispose de nombreux moyens
d'action financiers et commerciaux afin d'y répondre.
La présidence doit
aussi se demander si le sujet ne peut ou n'aurait pu être discuté autrement.
Elle doit considérer s'il a été abordé dans d'autres circonstances et les
occasions prochaines de le faire. Nous en sommes à la première journée où
l'Assemblée siège depuis la mise à exécution de la menace des tarifs douaniers.
Il s'agit donc de la première occasion dont
l'Assemblée disposera pour réellement débattre de cet enjeu. Bien qu'une
déclaration ministérielle portera également sur ce sujet dans quelques
minutes, il s'agit d'une procédure parlementaire distincte, avec un objectif différent, qui ne peut se faire qu'à l'initiative
de l'Exécutif. Ce geste posé par l'Exécutif illustre néanmoins l'importance
accordée à l'imposition de ces tarifs.
Cela m'amène au
principal critère de recevabilité, qui demeure l'évaluation de l'urgence de
tenir un tel débat. Il faut que les circonstances soient exceptionnelles et le
sujet d'une importance telle qu'il justifie l'interruption des travaux
législatifs, et il revient à la présidence d'interpréter ce critère. En
l'espèce, je considère que la gravité de la situation
est d'une telle ampleur qu'elle justifie la tenue d'un débat d'urgence. La
population est en droit de s'attendre à une réaction des parlementaires, et ces
derniers doivent pouvoir s'exprimer sur le sujet. Cela est d'autant plus vrai
que j'ai été informée que les parlementaires sont d'accord pour la tenue
de ce débat d'urgence.
Alors, pour toutes
ces raisons, je déclare la demande de débat d'urgence formulée par le leader du
deuxième groupe d'opposition recevable.
Cela dit, oui, M. le
leader du deuxième groupe d'opposition, je vous reconnais.
• (14 h 10) •
M. Cliche-Rivard :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Nous vous remercions tous et toutes pour
cette décision importante. Dans les
circonstances exceptionnelles qui nous occupent, voire historiques, il est
essentiel que les élus puissent s'adresser aux Québécois et aux
Québécoises au sein de leur Parlement. Merci beaucoup.
La
Présidente : Et je vous rappelle à toutes et à tous que le débat aura
lieu un peu plus tard aujourd'hui.
Déclarations ministérielles
Nous poursuivons les
affaires courantes. À la rubrique Déclarations ministérielles, M. le premier
ministre.
Tarifs
douaniers américains
M. François Legault
M. Legault :
Merci, Mme la Présidente. Bonjour, tout le monde. Je tenais, aujourd'hui, à
m'adresser à tous les élus de l'Assemblée nationale et à tous les Québécois
parce qu'on fait face à une attaque économique brutale des États-Unis, une
attaque brutale contre le Canada, contre le Québec.
Malgré le report des
tarifs, la menace plane toujours au-dessus de nos têtes comme une épée de
Damoclès, et l'incertitude créée par M. Trump a déjà des effets négatifs
sur l'économie du Canada, sur l'économie du Québec.
L'incertitude, c'est
un poison pour l'économie. L'incertitude, ça rend frileuses toutes les
entreprises qui ont des projets
d'investissement. C'est un peu comme si l'économie du Canada et du Québec était
sur pause. Je répète qu'on doit
commencer à renégocier l'accord de libre-échange avec les États-Unis le plus
vite possible, ne pas attendre la révision qui est prévue en 2026, mais
le faire le plus vite possible pour, justement, se débarrasser de cette
incertitude.
L'économie, ce n'est
pas anodin. C'est l'économie qui nous permet d'investir en éducation, en santé,
dans la culture, de prendre toutes les
responsabilités de l'État. L'économie, la création de richesse, ce n'est pas
une fin en soi, mais c'est un moyen qui nous permet de pouvoir avancer,
de pouvoir aller au-devant de nos ambitions.
Notre
principal partenaire économique nous menace de nous attaquer. En quelques
jours, notre monde a changé. Pour qu'on soit en mesure de passer au travers, il
va falloir un énorme effort collectif, avec beaucoup de détermination,
beaucoup d'endurance.
D'abord, sans
dramatiser la situation, on ne doit pas se faire d'illusions, le peuple
québécois est un peuple d'exportateurs, et 71 %, depuis plusieurs années,
de nos exportations se font aux États-Unis. Si l'administration Trump s'entête,
ce qui nous attend, dans les prochains mois, ce sont des milliers de
travailleurs qui risquent de perdre leurs emplois. Ce qui nous attend, ce sont
des chefs d'entreprise qui vont être obligés de se démener, dans certains cas,
pour survivre. Et, Mme la Présidente, j'ai vécu une situation comme ça en 1990,
quand j'étais président d'une compagnie aérienne, lorsqu'il y a eu la guerre du
Golfe. On se retrouvait dans une situation où il y avait une explosion par 10
du coût du carburant, on n'était plus capables d'assurer nos avions, donc on a
pensé y passer. Et donc je suis très sensible au stress, à l'anxiété que vivent
nos dirigeants d'entreprise qui exportent aux États-Unis.
Ce qui nous attend,
malheureusement, c'est que certaines industries soient frappées de plein fouet,
entre autres des industries qui font vivre beaucoup de familles dans les
régions du Québec. Je pense à l'industrie forestière, je pense à la
transformation de l'aluminium, je pense à l'industrie agroalimentaire. On ne va
pas se dorer la pilule. Si M. Trump nous impose des tarifs de 25 %,
les experts nous prédisent plus de 100 000 pertes d'emplois au
Québec.
Évidemment,
on doit se tenir debout face à l'administration Trump, puis on est prêts à le
faire, toutes les provinces ensemble. Il y aura... il y aurait des mesures,
donc, autant fédérales que de la part du gouvernement du Québec. Mais, Mme la Présidente, on
doit faire attention de ne pas se faire mal à nous-mêmes. Je comprends qu'il y
en ait qui souhaitent qu'on réplique durement, fortement, qu'on mette des
contre-tarifs, dollar pour dollar, mais on doit garder la tête froide.
Il faut être intelligents. Faire mal au gouvernement Trump, oui, mais faire mal
à nos propres entreprises, non. Il faut être prudents.
Je vous donne un
exemple, Mme la Présidente. On importe des États-Unis beaucoup d'intrants. J'ai
rencontré des entreprises dans le secteur de l'aluminium, du métal qui nous
disent : Si, demain matin, on met des contre-tarifs sur nos intrants qui viennent des États-Unis, nos
produits finaux ne seront plus compétitifs, donc on ne sera plus capables
de les vendre en Europe, partout dans le monde. Donc, il faut être prudents, il
faut être intelligents dans notre réplique.
Évidemment, ce que
tout le monde souhaite, c'est que M. Trump recule. Mais, quand on voit
aller M. Trump, je pense qu'on ne peut pas se fier là-dessus puis penser
que c'est ça qui va arriver.
Donc, Mme la
Présidente, on a le devoir d'entreprendre un grand, un long chantier pour
rendre notre économie moins dépendante aux États-Unis. Comment on fait ça?
Bien, d'abord, il faut se dire qu'on n'est pas démunis. Depuis quelques années,
notre économie croît à un rythme plus rapide que celle du reste du Canada. Je
l'ai souvent répété, mais, il faut quand
même le constater, depuis six ans notre PIB par habitant, donc notre richesse
par habitant, a crû plus rapidement
que le PIB par habitant du reste du Canada. On a aussi, au Québec... on est
chanceux d'avoir des instruments d'État
qui sont puissants, avec Hydro-Québec, avec la Caisse de dépôt, avec Investissement Québec. On a aussi des institutions financières
fortes comme la Banque Nationale, comme Desjardins, dont j'ai rencontré le
président hier, puis qui nous promettent leur appui dans cette lutte. On a
aussi des compagnies d'assurance. On a nos fonds des travailleurs, la FTQ, CSN.
Puis on a plusieurs belles institutions qui sont selon le modèle qu'on a appelé
le modèle québécois.
Donc, qu'est-ce qu'on
doit faire? La première chose qu'on doit faire, à court terme, c'est de se
préparer à aider les entreprises à passer au travers, donc aider du côté des
liquidités, mais immédiatement il faut travailler aussi sur le structurel. On
doit déployer l'économie du Québec d'une nouvelle façon. On doit redéployer
l'économie du Québec région par région. Dans les dernières décennies, ça a été
vrai sous tous les gouvernements depuis des décennies, on a trop misé sur la
proximité du marché américain. On a réussi à augmenter les exportations dans le
reste du monde, mais, avec le boom économique qu'il y a eu lieu aux États-Unis,
il y a eu une augmentation importante aussi aux États-Unis. Donc, le 71 %
est stable depuis très longtemps. Donc, il faut maintenant redéployer notre
économie dans des nouveaux marchés internationaux.
Mais,
avant de parler des marchés internationaux, il ne faut pas oublier le meilleur
marché, le marché du Québec. Acheter québécois, c'est ce qui est le plus
efficace pour protéger nos emplois. C'est vrai pour le gouvernement,
c'est vrai pour les entreprises, c'est vrai pour les consommateurs. Je pense
que ça doit être notre premier chantier. On doit miser avant tout sur nous-mêmes. On doit développer ce réflexe de regarder
d'abord vers le Québec, d'abord vers nos produits, d'abord vers nos
technologies, vers notre savoir-faire.
• (14 h 20) •
Le
deuxième marché d'exploitation... d'exportation du Québec, c'est le reste du
Canada. Et on a un chantier, là aussi, il faut bien se l'avouer. On doit
augmenter nos échanges avec le reste du Canada et, oui, on doit travailler à un
vrai libre-échange entre les provinces canadiennes.
Nos entreprises
doivent aussi tout faire pour fabriquer ici, au Québec, des produits pour
remplacer les produits qu'on importe d'ailleurs. Et Investissement Québec est
prêt à aider tous les bons projets. Mais on doit aussi redéployer notre économie dans des secteurs où on a des
avantages compétitifs. On ne peut pas être bons dans tout, mais on a plusieurs
avantages compétitifs. On a développé une expertise en aérospatiale. On a des
grandes alumineries. On a des minéraux critiques. On est forts en intelligence
artificielle. On est forts en informatique, en électronique, en quantique. Et surtout,
surtout, Mme la Présidente, on a de l'énergie renouvelable.
Ça fait plusieurs
années que je travaille à relancer les grands chantiers chez Hydro-Québec parce
que je suis convaincu, depuis longtemps, qu'Hydro-Québec, c'est la plus grande force du Québec. Et on a maintenant un plan ambitieux chez Hydro-Québec pour
doubler sa capacité. Ça veut dire qu'on parle du plus grand chantier de toute
l'histoire du Québec. Puis on ne parle pas dans 10 ans, on parle de
maintenant.
En décembre dernier,
j'ai signé une entente avec le premier ministre de Terre-Neuve jusqu'en 2085.
Les tarifs qui sont dans ces ententes vont
nous permettre d'économiser 200 milliards de dollars par rapport à
tous les projets alternatifs qu'on aurait pu faire. Et, Mme la
Présidente, on entend souvent dire : Les politiciens pensent à court
terme, pensent à la prochaine élection, mais,
quand on a signé l'entente avec Terre-Neuve, on a d'abord pensé aux prochaines
générations.
On travaille aussi
sur plein de projets, au Québec, plein de projets dans l'éolien pour aussi
augmenter la puissance des centrales, que ce soit dans le Nord-du-Québec, à La
Grande, que ce soit sur la Côte-Nord. Pas plus tard que la semaine passée,
j'étais avec les représentants d'une nation innue puis une MRC pour annoncer un
grand projet éolien au Saguenay—Lac-Saint-Jean
et sur la Côte-Nord.
L'immense chantier
d'Hydro-Québec, ça va créer un premier boom économique dans nos régions quand
on va les construire, donc on parle des prochains mois, des prochaines années,
mais on va avoir ensuite un deuxième boom économique quand les entreprises vont
se développer ici, au Québec, avec un avantage compétitif incomparable, de
l'énergie renouvelable à bas coût. Et il faut qu'on regarde... qu'on garde les
yeux sur les prochaines décennies, sur le long
terme. Même s'il y a de la résistance, actuellement, l'économie de l'avenir,
c'est l'électricité, c'est l'économie verte. Et là-dessus le Québec est
dans une position extraordinaire, puis il faut se le dire, il faut en profiter.
Donc, bref, on a des
faiblesses qu'on traîne depuis des décennies, qu'on doit absolument corriger, notre
productivité, la surréglementation, la bureaucratie, la taxation, on a beaucoup
travaillé là-dessus depuis 2018, mais il reste encore beaucoup de travail à
faire, et on a surtout, surtout, une trop grande dépendance au marché
américain.
Donc,
on a des faiblesses, mais on a aussi des forces, des grandes forces. On a un
grand chantier générationnel. On a un grand chantier chez Hydro-Québec, mais on
a aussi un grand chantier pour redéployer l'économie de chacune des régions du Québec dans des nouveaux marchés
mais aussi dans des secteurs où on est capable de gagner. Il va falloir
que tout le Québec s'y mette.
Aujourd'hui, je tends
la main à tous les députés qui siègent ici, à l'Assemblée nationale. Je tends
la main à nos entrepreneurs, à nos travailleurs, à nos chercheurs, à tous les
Québécois. On va avoir besoin de tout le monde dans cette grande corvée. On est ouverts à toutes les idées, toutes les
suggestions. Le monde, notre monde est en train de changer. Je n'ai pas
toutes les réponses, mais ce que je sais, c'est qu'on doit se relever les
manches, on doit se battre, puis on doit le faire ensemble, intelligemment, à la
québécoise. Vive le Québec! Merci.
(Applaudissements)
La
Présidente : Merci, M. le premier ministre. Et, par souci d'équité,
chaque groupe parlementaire pourra s'exprimer durant 15 min 12 s.
M. le chef de
l'opposition officielle, à vous, maintenant, pour vos commentaires.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Évidemment, évidemment, la menace tarifaire de Donald Trump crée de l'inquiétude partout,
partout au Québec, partout au Canada, de l'anxiété, également, non seulement
chez nos gens d'affaires, mais de l'anxiété chez les travailleurs, les
travailleuses. Il faut s'occuper de notre monde.
Je reviendrai sur ce
qu'a dit le premier ministre. Aussi important soit le débat, aussi unis
pouvons-nous être à cette Assemblée nationale, quand même, quand même, les
choses doivent être dites. Ce gouvernement est dans sa septième année. J'aurai
l'occasion, durant mon 15 min 12 s, Mme la Présidente, de faire
état notamment du degré de non-préparation que ce gouvernement-là nous met
devant cette situation-là, un gouvernement qui n'a pas fait l'économie d'une
priorité, Mme la Présidente, un gouvernement qui a vu... Et je vois que ça
réagit beaucoup du côté de la banquette
ministérielle, parce qu'on a l'impression de venir briser un peu, un peu ce qui
voulait être fait aujourd'hui, à savoir une sorte de grand
rassemblement, que tout va bien puis qu'on regarde en avant. On a perdu sept
ans avec la Coalition avenir Québec.
Je vous donne une
seule statistique, et celles et ceux qui maugréent en face, Mme la Présidente,
pourront nous répondre si c'est vrai ou faux. La vérité est que, durant les
cinq années de la Coalition avenir Québec, la productivité de nos entreprises
est à 0,1 %. 0,1 %. À toutes fins pratiques, c'est 0 %, de gains
de productivité pour nos entreprises, nos
PME. Alors que le premier ministre vient de dire : Je n'ai pas toutes les
réponses, on lui en faisait, pendant sept ans, Mme la Présidente, des
propositions. On en faisait, des propositions, on a sonné l'alarme, Mme la
Présidente. Et aujourd'hui le Québec n'est
pas où il aurait dû être, n'eût été de ces années-là, évidemment, de la
Coalition avenir Québec.
Évidemment, face aux
menaces, et j'y reviendrai dans mon 15 minutes, face aux menaces de Donald
Trump, Mme la Présidente, force est de
constater qu'hier le sursis n'est que, finalement, la fin du premier domino qui
est tombé. Il y en aura d'autres, dominos. Donald Trump va revenir, il
faut en être conscients. La menace, il y a un sursis quant à la menace, mais,
dans 30 jours très exactement, nous nous retrouverons fort probablement
comme hier matin, lorsque nous avions, c'était imminent, évidemment, les tarifs
qui allaient nous tomber dessus, qui allaient lourdement affecter nos
entreprises, nos travailleurs au Québec et au Canada.
• (14 h 30) •
Donc,
ce sursis fait en sorte, aujourd'hui, que nous avons 30 jours
additionnels, collectivement, pour se préparer. Et l'opposition
officielle libérale va continuer de faire ce qu'elle a fait, durant les six
dernières années : faire des propositions
tangibles et demander des choses très, très concrètes au gouvernement, qu'il
agisse, qu'il prépare les choses et qu'il arrête de les subir, Mme la
Présidente.
Donc, le Canada, le
Québec au premier titre, doit se serrer les coudes. On doit se serrer les
coudes, on doit se défendre puis on doit être meilleurs. On doit se serrer les
coudes avec nos alliés du Canada. N'en déplaise à certains ici, en cette
Chambre, le marché économique canadien est un marché extraordinaire. 40 millions
d'habitants, Mme la Présidente. C'est 1 300 milliards d'échanges
économiques entre le Québec et le Canada annuellement, c'est un peu plus de 3,5 milliards par jour d'échanges
économiques. Ce marché, ce grand marché économique canadien là, nous devons
réaliser toute l'importance qu'il a dans nos vies de façon très tangible, et un
Québec isolé, un Québec seul, pour celles et ceux qui imaginent le grand soir
de la souveraineté, ne saurait répondre de façon aussi efficace et aussi
déterminante que le marché économique canadien.
On l'a déjà dit,
nous, libéraux : Québécois, c'est notre façon d'être Canadiens. On l'a
bâti, ce pays-là, il nous appartient, puis
on a des leviers économiques formidables. Les chiffres sont là, ils parlent.
Quand le Canada et le Québec parlent d'une même voix, les États-Unis
écoutent, Mme la Présidente. Ce n'est pas pour rien que Donald Trump a décidé de mettre de l'avant un sursis de
30 jours. Il y a une réussite là. Mais la partie ne fait que commencer.
Donald Trump sera là pendant quatre
ans. Le long terme, c'est quatre ans. Le moyen terme, c'est peut-être deux
ans, Mme la Présidente, avec les élections de mi-mandat. On verra quels
auront été les impacts au sein de nos alliés, États américains, les États
bleus, notamment, tels que New York, faire en sorte de stimuler les échanges
diplomatiques. Québec a sa carte à jouer. Québec a sa carte à jouer, mais dans
le concert fédéral, dans le concert canadien, où nous devons protéger les
intérêts du Québec et parler d'une seule et
même voix, et chacun doit prendre son bâton du pèlerin puis aller porter ce
message-là, très fort, à l'effet que le Québec et le Canada ne se
laisseront pas faire, et on saura répliquer, donc, se serrer les coudes, se
défendre et être meilleurs pour développer notre économie, aider nos
entrepreneurs et développer nos marchés.
Je reviens sur se serrer
les coudes, préparer l'aide. On se souvient de la pandémie qui nous est tombée
dessus, Mme la Présidente. On s'en rappelle tous, le vendredi 13 mars ou
le samedi 14 mars 2020, du jour au lendemain, le gouvernement, à ce
moment-là, a mis de l'avant différents programmes. 3 milliards ont été mis
de l'avant. Ça s'était fait dans la précipitation. La Vérificatrice générale du
Québec avait déposé un rapport, en novembre 2021, disant qu'il y avait eu des
ratés, disant que les critères n'avaient pas été appliqués de façon
transparente et que d'une région à l'autre les critères étaient appliqués de
façon différente, ce qui fait que certaines entreprises n'avaient pas eu droit
à cette aide-là. Là, le premier ministre, il
le sait. Depuis le 6 novembre dernier, il sait que c'est Donald Trump. Il
sait depuis plus de deux mois que, les tarifs, la menace est là, et là
il a un 30 jours de plus pour préparer l'aide, s'assurer que l'aide soit
bien ciblée, soit efficace et aide non seulement, évidemment, à soutenir nos
entreprises, mais à soutenir aussi, ultimement, nos emplois, les travailleuses
et travailleurs du Québec. Ça, c'est se serrer les coudes, Mme la Présidente.
Et également, sous le chapitre de se serrer les
coudes, et je reviendrai sur les contre-tarifs, mais le fruit des
contre-tarifs, ce qu'Ottawa irait chercher à titre de contre-tarifs doit
revenir, quant au Québec, sur des... à des PME, à des entrepreneurs pour soutenir
des emplois qui seront identifiés notamment par l'apport du Québec. Ottawa ne
peut pas faire cavalier seul quant à la redistribution du fruit des
contre-tarifs, Québec doit faire... doit être dans le coup. Ça, ça veut dire
que le premier ministre doit s'en assurer dès maintenant — il a
30 jours pour le faire — s'en
assurer dès maintenant. On ne veut pas l'entendre se plaindre dans deux, trois
mois, Mme la Présidente, dire que, finalement, on n'a pas eu d'entente puis, ce qui se passe, on n'est pas d'accord avec
ce qui se passe. Il doit assumer la place du Québec au sein de la
fédération canadienne et assumer ce leadership-là. Donc, redistribution des
contre-tarifs, Québec doit d'ores et déjà... Puis j'imagine qu'il avait déjà
commencé à le faire, parce qu'il avait été annoncé, avant que le sursis ne soit
prononcé par Trump, qu'il avait déjà
commencé à faire : Voici la vision du Québec, voici notre réalité sur le
terrain et voici comment vous pouvez l'aider. Et, en passant, que
100 % du fruit produit de ces contre-tarifs-là aille à l'aide directe, à celles et ceux qui font face aux impacts de Trump,
et non pas dans le fonds consolidé, ne serait-ce que partie, c'est important.
Se défendre, Mme la Présidente, c'est nos
premières demandes. Le premier ministre a dit : L'ALENA devra être révisé
en 2026. Ça, c'est l'an prochain. Le premier ministre a dit : On ne doit
pas attendre, il faut commencer déjà à
s'activer. Le premier ministre nous l'a promis deux fois plutôt qu'une, depuis
l'élection de Donald Trump, qu'il allait, exemple, nommer un négociateur
en chef. Il ne l'a toujours pas nommé. Je l'avais interpelé ici, en cette
Chambre, fin novembre, début décembre, il
avait dit : Oui, oui, oui, ce sera fait avant que Donald Trump ne soit
assermenté. Ça a eu lieu le 20 janvier, et aujourd'hui on n'en a toujours
pas, le 4 février, le lendemain du sursis de 30 jours. Alors, à un
certain moment donné, c'est beau, les
beaux discours, c'est important d'avoir des bons discours, mais il faut agir,
Mme la Présidente. C'était une promesse réitérée plus d'une fois par le
premier ministre, on n'a toujours pas notre négociateur en chef. Où s'en va le
Québec?
Également, il faut déployer, intensifier notre
offensive diplomatique avec des élus, parce qu'on a des alliés aux États-Unis,
avec des élus à Washington, avec des États clés. Je parlais de l'État de New
York, le Connecticut, l'Illinois, ce sont des États bleus, des États
démocrates, et ce sont les trois premiers qui reçoivent nos exportations, New
York, Connecticut, Illinois. Il faut s'activer, parler par la diplomatie
québécoise. Ça existe, la diplomatie québécoise. Il faut s'activer pour faire
en sorte de préparer ce qui risque de se passer dans 30 jours et que
pression vienne de l'interne, aux États-Unis. On l'a demandé et on ne voit pas
de façon tangible et concrète cette activation des relations bilatérales
diplomatiques.
On doit obtenir du Conseil de la fédération...
On est tous heureux de voir qu'ils se réunissent de façon un peu plus soutenue,
mais on doit mettre sur pied une cellule de crise, une cellule qui va préparer
la réplique canadienne, dans laquelle le Québec pourra avoir une voix forte. Il
faut formaliser ces rencontres. Il faut ni plus ni moins qu'avoir une cellule
de crise et, oui, déjà penser au renouvellement de l'ALENA, parce qu'ultimement
pour Trump, c'est ça, le gain qu'il voudra, c'est resigner un ALENA, pour lui,
2.0. Bien, il faut déjà préparer nos arguments et préparer ce que nous sommes prêts à mettre sur la table, nous,
Québécoises et Québécois, être intelligents sur ce qui fait le plus de sens, ce
qui ne nous pénalise pas davantage, nous. Et, en ce sens-là, il faut élaborer
cette... il faut élaborer cette stratégie-là.
Être meilleurs, Mme la Présidente, une fois
qu'on a parlé de se serrer les coudes, de se défendre, bien, il faut être
meilleurs. Il faut accélérer la diversification de nos exportations. Sous le
premier ministre, les exportations du Québec aux États-Unis sont à un peu plus
de 73 %, alors qu'elles étaient moindres, autour de 69 %, 70 %,
avant.
Le premier ministre avait promis, en 2019, avait
parlé de doubler les échanges commerciaux avec la France. Six ans plus tard, les échanges sont exactement
les mêmes, ça stagne. En ce sens-là, Mme la Présidente, il faut diversifier
nos exportations. Oui, diversifier nos exportations en Europe, en France, mais
également développer tout le marché de l'Asie. Et il faut être moins dépendants
face aux États-Unis. Pour ça, il faut aider nos manufacturiers et exportateurs,
il faut aider nos PME par des programmes
ciblés qui vont faire en sorte, qui sait, qu'aujourd'hui les jeunes pousses
seront des joueurs excessivement importants à l'international. Et déjà
les jeunes pousses sont excessivement importantes ici, au Québec, parce que ce
sont des gens qui signent des chèques de paie, qui font vivre notre économie.
Puis on va en
reparler dans le temps qu'il me reste, Mme la Présidente, du fait qu'ultimement,
un gouvernement, c'est stimuler
l'économie, avoir des finances publiques en ordre puis donner les services.
C'est un échec sur ces trois chapitres, Mme la Présidente. On ne pourra
pas nous faire accroire que l'économie va bien, Mme la Présidente, quand on
sait qu'au Québec il y a 940 000 personnes par mois qui sont en ligne
devant les banques alimentaires, imaginez-vous ça, près de 1 million de
notre monde en ligne, par mois, dans les banques alimentaires. Savez-vous aussi
que 20 % de ces Québécoises et Québécois ont un emploi? Le contrat social,
sous la CAQ, a été brisé. Vous aviez un emploi, jadis, vous pouviez vous en
tirer. Aujourd'hui, 20 % de ceux qui sont en ligne d'attente pour les
banques alimentaires ont un emploi. C'est sous la CAQ. On ne peut pas dire que
l'économie va bien quand on constate ça. On ne peut pas dire que l'économie va
bien, Mme la Présidente, quand même au niveau de l'itinérance, imaginez-vous
ça, des concepts qui, normalement, ne vont pas ensemble,
bien, la CAQ les aura mariés, l'itinérance, 16 % des personnes qui sont en
situation d'itinérance ont un emploi. Pouvez-vous imaginer ça, Mme la
Présidente? On ne peut pas dire que l'économie va bien. On ne peut pas dire que
le premier ministre nous a bien préparés à ce que l'on vit présentement. Et ça
fait des années, il est dans sa septième année, qu'on martèle ces arguments-là,
qu'on martèle ces propositions-là, que l'on fait référence à cela.
Le premier
ministre a parlé de la foresterie. Il est où, le nouveau régime forestier au
Québec, Mme la Présidente? Le nouveau régime forestier, c'est
57 000 emplois. On a vu les feux de forêt en 2023, on a vu la
nécessité d'avoir un nouveau régime, faire en sorte que l'on puisse tirer notre
épingle du jeu. C'est des milliers d'emplois partout en région. Et, le nouveau
régime, on ne le voit toujours pas, Mme la Présidente. Ça, ça viendrait assurer
que l'on peut renforcer le Québec.
• (14 h 40) •
Vous nous
avez entendus, Mme la Présidente, entendus bien avant Donald Trump, ici, au
Parti libéral du Québec, parler de quoi? Québec d'abord, s'occuper de notre
monde. On dirait qu'aujourd'hui M. le premier ministre a voulu l'introduire dans son discours. Ça fait maintenant
sept ans qu'on lui dit : Aïe! Québec d'abord, occupez-vous de notre monde.
Et les exemples très tangibles que je vous ai donnés, Mme la Présidente, font
en sorte que le Québec n'a pas été bien préparé.
On pourrait parler... Parce qu'il a parlé
d'Hydro-Québec, il a parlé d'électricité, Mme la Présidente, alors qu'on sait qu'il a donné 365 mégawatts à Northvolt,
qui était son fer de lance économique, c'est pour ça qu'il faisait de la
politique, Northvolt. Vous me jugerez à l'aune de Northvolt. Northvolt,
on voit où ça s'en va, Mme la Présidente. Northvolt, c'est en train de prendre le champ carrément, Mme la Présidente. Et,
pendant ce temps-là, tu as 365 mégawatts, l'équivalent de la
consommation de la ville de Longueuil, qui est gelé parce qu'ils ont signé une
mauvaise entente avec Northvolt.
Mme la Présidente, c'est ça, le résultat d'un
gouvernement qui n'a pas su prévoir, d'un gouvernement qui n'a pas su s'occuper
de notre monde. On va répéter les demandes que l'on fait, accroître la
productivité. On va répéter les demandes de
faire en sorte qu'on ait un régime fiscal beaucoup plus performant, beaucoup
plus efficient pour nos PME. On va continuer à demander à ce gouvernement-là de
diminuer de façon tangible le fardeau administratif. La FCEI a dit que c'était plus de 730 heures par année pour
une PME, pour brasser du papier puis de la paperasse. Ça, ce sont des impacts
d'économies évidemment très tangibles.
Alors, à ce gouvernement en fin de régime, Mme
la Présidente, à ce gouvernement-là, oui, qui fait face aux menaces de Donald
Trump, mais c'est collectivement que nous faisons... faisons face aux menaces
de Donald Trump, nous allons jouer notre rôle, pleinement notre rôle, du Parti
libéral du Québec, le parti de l'économie, de l'opposition officielle, pour
faire en sorte que les 9 millions de Québécoises et Québécois aient voix
au chapitre, qu'on puisse bien se préparer
au sein de la fédération canadienne, profiter de notre pays qu'on a bâti, d'un
Québec fort, Mme la Présidente, et nous aurons l'occasion de constater
la pertinence et l'importance de notre... de nos institutions. Ensemble, on va
être capables, Mme la Présidente.
La
Présidente : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. Je
cède maintenant la parole à Mme la députée de Mercier pour ses
commentaires. Nous vous écoutons, madame.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Merci. Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Dans un moment comme celui-là, je ne ferai pas de détour, il faut appeler un chat un chat. Nous
avons devant nous l'empire américain dans sa version la plus décomplexée.
Nous avons devant nous un empereur voyou, un «bully» de la pire espèce, un
intimidateur qui se fiche complètement des lois, des règles et des traités.
D'ailleurs, j'entendais le premier ministre dire
qu'il veut renégocier l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, mais Trump, cet accord-là qu'il a lui-même signé, il ne le respecte même
pas. Encore faut-il le renégocier, cet accord-là, dans l'intérêt des Québécois et Québécoises et
qu'il soit respecté par Trump. Mais, avec Trump, on ne sait pas à quoi
s'attendre.
Il y en aura pour dire que l'orage va passer. Il
y en aura pour dire que l'Oncle Sam va revenir à la raison, que Donald Trump va finir par comprendre que c'est
dans l'intérêt de l'économie américaine et du peuple américain de cultiver
de bonnes relations avec ses voisins. Nous, les Québécois et Québécoises, on
est des gens optimistes, mais on est aussi lucides.
René Lévesque disait, en 1969 : «Il y a deux Amériques, il
y a un visage sombre et ténébreux et il y a un visage lumineux.» Dans
les dernières 48 heures, Donald Trump, malheureusement, nous a montré son
vrai... son vrai visage, un visage sombre.
Même si la
menace d'une guerre commerciale est écartée pour le moment, allons-nous rejouer
dans le même film dans un mois, dans deux mois, dans trois mois? Allons-nous
rejouer dans ce film-là pendant quatre ans? C'est impensable. Est-ce que
c'est comme ça qu'un ami traite ses amis, à coups de menaces, en faisant du
chantage? Pierre Elliott Trudeau disait,
lorsqu'il parlait aux Américains : «Être votre voisin, c'est comme dormir
avec un éléphant. Quelque douce et placide que soit la bête, on subit
chacun de ses mouvements et de ses grognements.»
Mme la Présidente, depuis des décennies, on a
fait le choix d'un rapprochement toujours plus grand entre le Québec et les États-Unis. On traite chaque
conflit, comme le bois d'oeuvre, comme une petite bosse sur la belle route du
libre-échange, comme une petite chicane de couple dans un mariage de raison. À
chaque fois que l'éléphant nous dicte quelque chose, on finit par lui obéir, en
espérant qu'il se rendorme.
Aujourd'hui, les choses ont changé. Le Québec ne
peut plus se permettre comme auparavant de mettre tous ses oeufs dans ce panier-là. Notre économie, nos emplois, notre politique
ne peuvent plus dépendre des sautes d'humeur d'un mauvais voisin. Moi,
je dis aujourd'hui : Ça suffit. Ça suffit de subir, ça suffit d'être pris
en otages. Nous avons devant nous Donald Trump. C'est une
menace, oui, mais c'est aussi un défi pour le Québec, et c'est à nous de saisir
et de relever ce défi.
Je disais tantôt que nous, les Québécois et
Québécoises, on est optimistes, on est lucides, et, j'ajouterais, on est capables. On est le peuple qui a fait la Révolution tranquille, on est le peuple qui a fait Hydro-Québec.
Acheter chez nous, c'est possible. Innover chez nous, c'est possible.
Notre économie est beaucoup trop dépendante des
États-Unis. Tout le monde le dit aujourd'hui, mais ce n'est pas nouveau, ça
fait très longtemps qu'on le dit et qu'on en est conscients, mais on n'a jamais
agi. Alors, c'est le temps, maintenant, de saisir cette crise-là, cette
opportunité-là et de transformer notre économie. Trouvons des marchés, de nouveaux marchés pour les produits qui sont
fabriqués ici, au Québec. Soyons le meilleur marché pour nos produits, pour
les produits d'ici. Et l'exemple, Mme la Présidente, doit venir d'en haut,
l'exemple doit venir du gouvernement du Québec lui-même.
Les Américains ont une expression que j'aime
bien, que je vais dire en anglais, «putting your money where your mouth is», ou, en bon Québécois, il est temps
que les bottines suivent les babines. C'est le moment, Mme la Présidente,
d'arrêter de donner des contrats aux Amazon de ce monde, c'est le moment
de se choisir enfin. Et je dis ça sans aucune, mais aucune rancune pour le peuple américain, qui ne mérite pas ce que
le président américain actuel est en train de lui faire subir. On doit aussi être solidaires du
peuple américain, qui souffre de la situation actuelle et qui risque de
continuer à souffrir.
Tantôt, je lisais l'éditorial d'une infirmière,
sur Facebook, Florence Saint-Arnaud, et je la cite : «Comment ça se fait, donc, que ça prend une pandémie ou le
"power trip" monumental d'un président arrogant, dénigrant et
littéralement insultant pour notre fierté nationale pour que le discours
sociétal et l'intérêt de la population se tournent vers les entreprises d'ici?» Mme la Présidente, Florence a
raison. À chaque crise, à chacune des crises, que ce soient les gouvernements
ou le monde économique, le monde des affaires, tout d'un coup tout le monde
découvre en même temps l'achat local, la souveraineté alimentaire, la
souveraineté économique. Et tout de suite après, quand la crise se résorbe, on
oublie ça, et c'est «business as usual».
Mais le peuple québécois, lui, il est déjà rendu
ailleurs. Le peuple québécois, on le sent encore aujourd'hui, plus que jamais, il est très mobilisé. Des
Florence Saint-Arnaud comme cette agricultrice, il y en a plein partout, dans
toutes nos régions, au Québec. Alors, quoi qu'il arrive en mars, ne
faisons pas l'erreur de revenir au «business as usual». Choisissons nos
travailleurs et travailleuses, choisissons nos entrepreneurs, choisissons nos
artisans et artisanes, choisissons nos agriculteurs et agricultrices,
choisissons le Québec, ce Québec dont nous rêvons, dont je rêve qu'il soit un jour indépendant et qu'il participe avec le
concert des nations à faire face à des «bullies» comme Trump. Choisissons-nous,
Mme la Présidente.
J'ai entendu,
tout à l'heure, le premier ministre dire qu'il était ouvert à toutes les
propositions. Des propositions, à Québec solidaire, on en a plein. Des
propositions pour l'autonomie alimentaire, pour la souveraineté économique,
ce n'est pas d'hier, là, qu'on en a, ça fait
des années et des années, depuis notre fondation, depuis 20 ans, qu'on a
des propositions, et malheureusement très peu... les gouvernements ne
les prennent pas en compte.
Donc, je veux profiter de cette fenêtre
d'ouverture de la part du premier ministre, qui dit que toutes les solutions sont bonnes et il veut les entendre. Je l'invite à
écouter attentivement le débat d'urgence, tout à l'heure, et à nous écouter.
Et j'espère qu'il va tenir compte de nos propositions, et j'espère même qu'il
va mettre certaines, au moins, de nos propositions en oeuvre, parce que c'est
comme ça qu'on sortira forts de cette crise. Merci, Mme la Présidente.
• (14 h 50) •
La Présidente : Merci, Mme la
députée de Mercier. Et je cède maintenant la parole à M. le chef du troisième
groupe d'opposition pour ses commentaires.
M. Paul St-Pierre
Plamondon
M. St-Pierre
Plamondon : Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je veux
dire que je comprends l'intention du gouvernement de vouloir rassurer les
entrepreneurs, j'en suis. Je pense, en fait, que les 125 députés ici
veulent tous le bien de nos entreprises. Tout le monde veut que
l'économie du Québec soit une affaire de succès. Mais, je dois quand même le
dire d'entrée de jeu, j'ai entendu très peu de mesures concrètes, très peu de
mesures spécifiques et beaucoup de lieux communs dans ce discours du premier
ministre. À ce stade-ci, je pense que les Québécois s'attendent que le
gouvernement mette de l'avant un plan et des mesures réfléchies, des mesures
adaptées à la situation. Et je constate que, dans les deux premières minutes de
ce discours du premier ministre, on retrouve les expressions «attaque brutale»,
«menace», «épée de Damoclès», on a dit le mot «incertitude» trois fois,
«poison», «attaquer», «angoisse», «frapper de plein
fouet», j'en passe. Respectueusement soumis, Mme la Présidente, ce qu'on veut
du gouvernement, dans les situations délicates et complexes, ce n'est
pas qu'il accentue la peur et l'inquiétude, ni qu'il fasse des mises en scène
médiatiques comme on l'a connu en temps de pandémie. Ce qu'on veut, c'est de la
clarté...
Des voix : ...
M. St-Pierre Plamondon : Ils ne
veulent pas l'entendre, mais je vais le répéter, Mme la Présidente. Ce qu'on veut, c'est de la clarté, de la clarté sur ce
qu'on compte faire, de manière à générer ici un débat éclairé et transparent
sur la valeur de ces orientations.
Mme la
Présidente, avant d'intervenir, le Parti québécois a fait ses devoirs, on a
rencontré plusieurs gens d'affaires dans
les chambres de commerce, on vient de rencontrer le président de la Fédération
canadienne des entreprises indépendantes, on a
parlé aux syndicats, et le constat, c'est que, des mesures spécifiques, des
mesures précises à mettre en place dès maintenant, il y en a, à commencer par
la diversification. «Diversification», c'est le mot qui devrait guider nos
priorités, en ce moment, parce qu'on le dit depuis plusieurs années sans qu'on
agisse, ici, au Québec, le Québec est beaucoup trop dépendant d'un seul marché,
en l'occurrence les États-Unis. Près de 75 % de nos exportations
internationales sont vers les Américains. Et,
sous la CAQ, cette dépendance s'est accentuée. Elle a passé, en 10 ans, de
69 % à 75 % aujourd'hui. Et, pendant ce temps-là, l'Europe,
c'est un maigre 6 %, un minuscule 1,6 %, 1,7 % pour la France,
un maigre 1 % vers le Royaume-Uni. Et
c'est nettement insuffisant dans le contexte géopolitique. Ça crée un environnement
de vulnérabilité pour le Québec dans le cadre de négociations comme on
connaît en ce moment. Donc, l'urgence, ce n'est pas seulement d'envoyer nos gens aux États-Unis, mais bien de
les envoyer aux quatre coins de la planète, où il y a une demande pour
notre savoir-faire et nos produits, donc le Mexique, l'Europe, l'Amérique
latine, l'Asie, l'Afrique. Le Parti québécois propose
et offrira sa pleine collaboration pour que l'on mette rapidement sur pied les
plus grandes missions commerciales de notre histoire, des équipes Québec
pour diversifier nos partenaires commerciaux et nos exportations. C'est tout le
personnel diplomatique québécois qui doit être mis à contribution, et ce, dès
maintenant. On en parle depuis plusieurs semaines. Il faut mobiliser nos entrepreneurs,
nos grandes organisations de travailleurs.
En passant, je me suis entretenu avec les
grandes centrales syndicales. Elles m'indiquent qu'elles sollicitent depuis
plusieurs semaines une rencontre avec le premier ministre sur la question des tarifs.
Elles attendent toujours. Donc, parler,
également, aux syndicats, parler à toute personne avec un carnet d'adresses
susceptible de faire la promotion des entreprises québécoises pour qu'on fasse
cette diversification, de manière chirurgicale mais très proactive.
Nous avons
d'ailleurs une chance inouïe, puisque les Européens vont vraisemblablement nous
accueillir à bras ouverts. On les écoute, dans les derniers jours, ils nous
invitent à fortifier nos liens commerciaux et feront face aux mêmes
défis que nous dans quelques semaines à peine.
Or, nous n'avons rien entendu de précis de la
part du premier ministre dans son allocution, donc pas de mission commerciale, pas de date précise, pas de
préparation par secteurs économiques, pas de préparation par régions du monde
que nous comptons visiter. Je comprends, puis j'ouvre les guillemets, je
comprends qu'il affirme vouloir redéployer notre économie dans de nouveaux marchés, mais le constat, c'est qu'à part cet
énoncé général il n'y a rien de concret, rien de précis.
Pour que la diversification de nos marchés ne
soit plus qu'un... soit plus qu'un rêve théorique, il faut également encourager
fiscalement nos entrepreneurs, il faut que ça devienne payant d'aller chercher
de nouveaux clients dans d'autres marchés. C'est ce qui va permettre de vrais
changements de fond, c'est ce qui va permettre de changer nos habitudes, qui,
malheureusement, sont les États-Unis, presque entièrement, et ça depuis
longtemps.
Donc, à nouveau, on n'entend pas de mesure
claire ni précise de la part du gouvernement aujourd'hui. Le Parti québécois
propose de créer un réel incitatif à la diversification des exportations en
rendant tout nouveau revenu d'exportation non imposable. C'est précis, c'est
clair.
Nous n'avons rien entendu, non plus, de précis
par rapport à la réduction du fardeau fiscal de nos PME. Il faut privilégier
cette avenue de réduction du fardeau fiscal et non pas retourner aux
subventions tous azimuts et aux programmes d'aide généraux qu'on a connus
durant la pandémie, parce que, oui, de nombreuses questions demeurent par rapport à l'efficacité de ces subventions. Où
sont allés les centaines de millions à des compagnies bidons et fantômes
à l'étranger? Pourquoi est-ce qu'on a refusé d'entamer de quelconques démarches
de récupération de ces sommes? Quels sont les... Quels étaient les critères de
la CAQ lorsqu'elle attribuait des subventions à des entreprises comme le
bijoutier Birks, qui a obtenu plus de 10 millions de dollars en aide
financière? Subventionner tous azimuts ne permettra pas aux entreprises de se
réorienter vers de nouveaux marchés, et ça devrait être ça, la priorité, en ce
moment.
Donc, de manière générale, nous sommes d'avis
que ce gouvernement a beaucoup trop subventionné les entreprises en général depuis
les sept dernières années et les résultats n'ont pas été au rendez-vous, comme
en témoigne un déficit historique de
11 milliards de dollars. Il faut donc changer d'approche et réduire le
fardeau fiscal, particulièrement de nos PME. Je n'ai rien entendu de
concret en ce sens. Il faut également rapidement mettre sur pied un grand plan
de réduction de la bureaucratie et de la paperasse de manière à ce que ces
entreprises se concentrent sur cette adaptation, sur cette nouvelle mission. À nouveau, je n'ai rien entendu de
spécifique ou de concret de la part du gouvernement, que des
affirmations générales et assez floues.
Mme la Présidente, j'invite également le
gouvernement à considérer de réindustrialiser le Québec pour nous donner une
économie basée sur des circuits courts et des produits faits ici, au Québec. La
Fédération des chambres de commerce du
Québec a identifié
40 opportunités au sein de six industries dans lesquelles le Québec
pourrait être compétitif. J'aimerais entendre de la part du premier
ministre qu'on va continuer en ce sens-là et nommer spécifiquement quel est le
plan de match à ce niveau-là, parce que ça ferait une différence énorme dans la
santé de notre économie.
En ces temps
d'incertitude, Mme la Présidente, il y a quand même des évidences. On n'a pas
beaucoup de marge de manoeuvre devant un grand défi. Le Québec vient de
faire le pire déficit de son histoire, à 11 milliards, notamment parce que
ce gouvernement a dépensé sans compter, et ce 11 milliards de déficit, ce
n'est ni la faute de Donald Trump ni la faute de la pandémie. Ce déficit est
grave au point d'amener le gouvernement à faire des coupures dans toutes les
directions, en ce moment, santé, éducation, services sociaux, et donc le Québec
a peu d'espace, peu de marge de manoeuvre vis-à-vis les défis qui s'en
viennent. Augmenter ce déficit qui est déjà historique, à 11 milliards,
amènerait potentiellement une décote,
amènerait potentiellement le Québec dans une spirale vers le bas dans le cadre
duquel notre coût d'emprunt augmenterait à nouveau. Ce n'est donc pas
une option.
• (15 heures) •
Nous l'avons demandé à plusieurs reprises, et on
le redemande, on veut que le gouvernement fasse preuve de transparence et nous présente rapidement son plan
de compressions pour chacun des ministères touchés par les coupures
actuellement. Et, s'il a l'intention de subventionner des entreprises, advenant
l'imposition de tarifs par les Américains, il doit le
faire de manière transparente, de sorte qu'on puisse évaluer l'impact sur nos
finances publiques très fragiles et l'impact
sur d'autres coupures en santé, d'autres coupures en éducation, d'autres
coupures dans les services sociaux qui ont déjà lieu en ce moment.
En termes clairs, peu
importe la teneur des événements qui auront lieu avec nos voisins du Sud dans
les prochaines semaines ou dans les prochains mois, il n'est pas question de
retourner dans un environnement similaire à ce
que nous avons connu durant la pandémie, et ce, d'aucune manière. En clair, on
ne reviendra pas à la gouvernance par décrets.
On ne reviendra pas à des subventions tous azimuts dans un environnement où il
y a très, très, très peu de reddition de
comptes. On a particulièrement besoin de transparence et de reddition de
comptes dans les circonstances très, très fragiles que sont les nôtres,
qu'est la nôtre.
Si le premier
ministre doit jouer son rôle, cela signifie que les oppositions doivent
également jouer leur rôle, parce que dans trop de dossiers les Québécois ont
fait les frais de l'improvisation caquiste, et, à 11 milliards de déficit,
il n'y a plus d'espace pour de l'improvisation qui vire au vinaigre. Le Parti
québécois va continuer de faire des propositions et d'être constructif, comme
on l'a fait dans les dernières semaines, mais on ne s'empêchera pas de faire notre travail lorsque les orientations ou les
déclarations du gouvernement sont potentiellement problématiques. Le premier
ministre doit l'accepter et le comprendre. On ne peut absolument pas retomber
dans une forme de pensée unique où toute remise en question des orientations de
la CAQ était vue comme un manque de solidarité envers le Québec. Je crois que toute cette Chambre a à coeur le Québec,
en plus... bien plus encore a à coeur ses travailleurs, ses entrepreneurs,
mais on peut avoir des différences de points de vue très légitimes en ces temps
difficiles. Réfléchir et proposer, ce sont les
bases de notre démocratie, et c'est encore plus important quand les situations
sont complexes. Assumons ces principes fondamentaux de la démocratie.
Donc, en conclusion,
Mme la Présidente, je veux m'adresser directement aux entrepreneurs et aux
travailleurs qui vivent un moment d'incertitude pour les prochaines semaines.
Sachez que nous comprenons que c'est une situation exigeante et sachez que
notre rôle, comme députés, c'est de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour
générer des solutions pragmatiques le plus rapidement possible. Et donc le
Parti québécois, comme les autres partis d'opposition, je n'en doute pas, vont
redoubler d'ardeur pour trouver les solutions les plus susceptibles d'aider
l'entrepreneuriat, d'aider également notre
capacité à s'adapter. Nous croyons que la solution, elle passe par là
essentiellement. Laissons les entrepreneurs et les travailleurs du
Québec travailler. Enlevons tout ce qu'il y a d'embûches et faisons-leur
confiance, nous ne serons pas déçus. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente : Merci, M. le chef du troisième groupe d'opposition. Maintenant,
M. le premier ministre, souhaitez-vous vous prévaloir de votre droit de
réplique? Parfait.
Alors, mesdames
messieurs, aujourd'hui il n'y a pas de présentation de projets de loi.
Des voix :
...
La Présidente :
Article 32. Je vous invite au silence.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, M. le ministre de l'Éducation.
M. Drainville :
Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de déposer le rapport annuel 2023‑2024
du Comité d'agrément des programmes de formation à l'enseignement transitoire.
Merci.
Des voix :
...
La
Présidente : Oui. C'est un petit peu bruyant ici. Nous allons
poursuivre. Mme la ministre des Affaires municipales.
Mme Laforest :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, permettez-moi de déposer le rapport
de mise en oeuvre de la Stratégie
gouvernementale pour assurer l'occupation et la vitalité des territoires 2018‑2022,
prolongée jusqu'en 2024, ainsi que la
Stratégie gouvernementale pour assurer l'occupation et la vitalité des
territoires 2025‑2029. Merci, Mme la Présidente.
(Applaudissements)
La Présidente :
Ces documents sont déposés. À
cette étape-ci, les députés ont le droit d'applaudir. M. le leader du
gouvernement.
M. Jolin-Barrette :
Bonjour, Mme la Présidente. Je dépose les réponses aux questions inscrites
au feuilleton le 28 novembre 2024 par les députées de D'Arcy-McGee et de Jeanne-Mance—Viger.
Et je dépose
également la réponse du gouvernement à la pétition déposée en Chambre le
20 novembre 2024 par la députée des Mille-Îles.
La
Présidente : Ces documents sont déposés.
Pour ma part, je
dépose le nouveau diagramme de l'Assemblée en date d'aujourd'hui.
Et
j'ai reçu préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain
aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à
l'article 97.1 du règlement, je dépose copie du texte de ce préavis.
Dépôt de rapports de commissions
À la rubrique Dépôt
de rapports de commissions, M. le président de la Commission de l'aménagement
du territoire et député de Drummond—Bois-Francs.
Consultations particulières sur le projet de loi n° 86
M. Schneeberger :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je dépose le rapport de la Commission de
l'aménagement du territoire qui, les 28, 29, 30 janvier 2025, a tenu des
auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet
de loi n° 86, Loi visant à assurer la pérennité
du territoire agricole et sa vitalité.
La Présidente :
Ce rapport est déposé. Mme la
présidente de la Commission des
transports et de l'environnement et députée de Westmount—Saint-Louis.
Consultations particulières sur le projet de loi n° 81
Mme Maccarone :
Merci, Mme la Présidente. Je dépose le rapport de la Commission des
transports et de l'environnement qui, les 28, 29 et 30 janvier et
4 février 2025, a tenu des auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi n° 81, Loi
modifiant diverses dispositions en matière d'environnement.
La
Présidente : Ce rapport est déposé.
Il n'y a pas de dépôt
de pétitions.
Il n'y a pas de
réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de
droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes
maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède
maintenant la parole, en question principale, au chef de l'opposition
officielle.
Mesures
pour limiter l'impact d'éventuels tarifs douaniers
sur les exportations vers les États-Unis
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Parfait, Mme la Présidente. Alors, après le beau discours, on va tester,
maintenant, la résolution du gouvernement puis voir si c'est un gouvernement
pertinent ou pas, parce que, là, ça fait sept ans qu'on perd. On a des questions précises, j'espère qu'on va avoir
des réponses précises, aujourd'hui. J'espère que le premier ministre, il est
prêt, parce qu'il y a des Québécoises et Québécois qui ont souffert sous ce
gouvernement-là, d'ici, Mme la Présidente, pendant sept ans...
Des voix : ...
La Présidente :
Un instant! Je suis debout. Article 32, article 37. Demeurez assis.
Gardez le silence. Je vous vois, je vous
entends. C'est moi qui fais un appel au règlement. Je vous demande de
respecter le décorum. C'est la période des questions, une seule personne
a le droit de parole ici, c'est le chef de l'opposition officielle, et on l'écoute.
M. Tanguay :
Oui, Mme la Présidente. Puis on va la prendre, la parole, pour défendre les
9 millions de Québécoises et Québécois
qui ont été abandonnés sous ce gouvernement-là, qui a affaibli l'économie puis
qui a mis à mal les finances publiques, Mme la Présidente. Aujourd'hui, on se
retrouve Gros-Jean comme devant devant Donald Trump. Mme la
Présidente. C'est ça, le bilan de la Coalition avenir Québec.
On
a des questions très précises. Ça fait des années qu'on lui pose des questions,
puis qu'on a toujours de l'à-peu-près, puis qu'il dit : Ça va
venir, ça va venir, découragez-vous pas. Mais là, Mme la Présidente, on a
besoin qu'il se ressaisisse pour les deux seules années qu'il leur reste.
Alors, question, Mme
la Présidente. Le premier ministre a déclaré sur X, je le cite : «On va
rediriger les travailleurs qui vont perdre leur emploi vers d'autres secteurs
porteurs d'avenir. Hydro-Québec, par exemple.» On sait que, sur le terrain, la
Fédération des chambres de commerce, la P.D.G., Véronique Proulx, a affirmé le
31 janvier, et je la cite : «Comme employeurs, les gens ont travaillé
très, très fort pour attirer et retenir les travailleurs. Advenant qu'il y ait
des mises à pied, on espérait pouvoir les garder et les former.»
Alors,
Mme la Présidente, comme il est en train de préparer des programmes pour
soutenir, notamment, les emplois, peut-il
confirmer que son principal facteur, ce ne sera pas de transférer les jobs à
Hydro-Québec mais de soutenir les emplois?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
Oui, Mme la Présidente. Bon, d'abord, revenons aux faits, là, parce que,
dans l'introduction, on nous disait qu'on avait mal réussi. La vérité, c'est
que quand on regarde 2003, quand les libéraux sont arrivés au pouvoir, quand on
regarde le PIB par habitant, il y avait un écart de 20 % avec le reste du
Canada. 15 années plus tard, il y avait toujours un écart de 20 %.
Donc, zéro progrès en 15 ans. Qu'est-ce qu'on a aujourd'hui, en 2024? On
est rendus... on est passés de 20 % d'écart à 14 % d'écart de PIB.
Pourquoi? Parce que l'économie du Québec a eu une croissance plus grande que
celle du reste du Canada, ce qui n'était pas arrivé pendant les années
libérales.
Maintenant, Mme la
Présidente, je l'ai dit tantôt puis je vais le répéter, déjà on a des
programmes, chez Investissement Québec, pour augmenter la productivité, pour
diversifier les marchés, pour être capables de voir quels sont les nouveaux
produits qu'on est capables de fabriquer au Québec. Mais, Mme la Présidente, il
faut être réalistes, on n'arrivera pas, demain matin, à remplacer tous les
produits qui sont exportés aux États-Unis par des exportations en Europe, en Asie. Donc, pendant la période
intérimaire, ce qu'on dit, c'est qu'on va demander aux employés, par exemple,
du secteur manufacturier qui risquent de perdre leur emploi de se requalifier
pour aller travailler sur...
• (15 h 10) •
La
Présidente : En terminant.
M. Legault :
...la construction de nouveaux barrages ou de rehaussement de barrages...
La Présidente :
Première complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : O.K. À la toute fin, on
commençait à avoir un début de réponse à notre question. Si je comprends bien,
le premier ministre, puis il me corrigera si j'ai mal compris, son programme
d'aide ne sera pas pour conserver les emplois dans nos industries, mais
ce sera pour les requalifier, parce qu'il y a un problème de
35 000 travailleurs pour l'hydroélectricité.
Est-ce que son
programme d'emploi sera d'abord et avant tout, principalement pour maintenir
les emplois de, notamment, nos manufacturiers et exportateurs, nos industries,
ou ça va être de la requalification pour aller boucher d'autres emplois?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
Bon, Mme la Présidente, le Québec exporte chaque année
87 milliards de dollars de produits aux États-Unis. S'il y a des
tarifs de 25 %, c'est assez clair qu'on ne sera pas capables, à court
terme, de remplacer tous les emplois qui étaient reliés aux exportations
américaines. Évidemment, on travaille déjà, avec toutes les entreprises manufacturières, à diversifier les marchés. Ça
veut dire exporter plus dans le reste du Canada, exporter plus en Europe, en
Asie. Nos délégations, déjà, sont orientées, puis je leur ai dit depuis que je
les rencontre, depuis six ans : exportations.
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Je ne l'ai pas compris, Mme la Présidente, le raisonnement du premier
ministre quand il dit que, quand il y aura un tarif de 25 %, ils vont
perdre les emplois, tout ce qu'il va nous rester à faire, ça va être de les
envoyer ailleurs puis de les requalifier, plutôt que de prévoir ce qu'ils
demandent. Les manufacturiers et exportateurs le demandent, les industries le
demandent : Ayez un programme pas de requalification, dès qu'un emploi est
en péril on vous sort de là puis on vous
envoie ailleurs, parce qu'en passant
on n'avait pas prévu les 35 000 emplois nécessaires pour Hydro-Québec et compagnie. Ce qu'ils veulent,
c'est un programme de maintien en emploi le temps que la reprise soit là.
Est-ce que...
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Bien
là, ce que je comprends, c'est que le Parti libéral dit, supposons qu'on perd
100 000 emplois parce qu'on n'exporte plus aux États-Unis... ce que
propose le Parti libéral, c'est de payer tout ce monde-là pour rester en
emploi.
Mme
la Présidente, on va faire tous les efforts possibles, tous les efforts
possibles pour être capables de remplacer des produits qu'on importe, pour être
capables de diversifier nos marchés, pour être capables, dans certains cas, que
des entreprises manufacturières changent de produits, manufacturent d'autres
produits. On est en contact avec eux autres, Investissement Québec, la Caisse
de dépôt, le ministère de l'Économie.
La
Présidente : Troisième complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Je vais lui... Je vais l'aider, je vais reciter Véronique Proulx, P.D.G. de
la FCCQ, 31 janvier, écoutons-la bien : «Comme employeurs, les gens
ont travaillé très, très fort pour attirer et retenir les travailleurs.
Advenant qu'il y ait des mises à pied, on espérait pouvoir les garder et les
former.» Fin de la citation.
Mme la Présidente, ce
n'est pas compliqué à comprendre, les manufacturiers et exportateurs, nos
industries, nos entreprises veulent garder leurs employés, ne veulent pas se
faire dire : Ah! bien, il m'en manque 35 000 ailleurs, on va les
prendre...
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
Oui, Mme la Présidente, comme l'a expliqué la ministre de l'Économie, il y
aura deux étapes. Dans une première étape,
il y aura des liquidités qui seront offertes aux entreprises pour maintenir le
plus possible d'employés en poste. Par contre, si les tarifs de
25 % se maintiennent pendant plusieurs mois, bien, il va falloir
effectivement être capables de travailler à diversifier puis, oui, reformer
dans d'autres secteurs les travailleurs qui, malheureusement, étaient attachés
aux exportations américaines.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député
de Marguerite-Bourgeoys.
Productivité
des entreprises québécoises
M. Frédéric Beauchemin
M. Beauchemin :
Mme la Présidente, en 2018, on a laissé un surplus de 7 milliards et
des services publics solides, on a laissé la marge de manoeuvre nécessaire pour
affronter les crises. Depuis, la CAQ a dilapidé les finances publiques, épuisé
nos réserves et laissé un déficit record, affaiblissant nos services et notre
résilience. La CAQ sera jugée comme gouvernement qui a gaspillé notre marge de
manoeuvre, n'a rien fait pour améliorer la productivité.
Depuis cinq ans,
aucun gain de productivité, rien, zéro. Pourtant, plus de productivité, c'est
plus de richesse, plus de revenus pour l'État.
Le Parti libéral a
proposé des solutions, mais la ministre ne semble pas comprendre l'ampleur du
problème. Comment la ministre va relancer notre productivité?
Comment va-t-elle définir le succès? Parce que zéro, là, c'est zéro.
Des voix :
...
La
Présidente : La réponse de la ministre de l'Économie, de l'Innovation
et de l'Énergie. On l'écoute.
Mme Christine Fréchette
Mme Fréchette :
Oui, merci, Mme la Présidente. On le sait, la productivité, c'est un enjeu,
un enjeu de longue date qu'il y a pour l'économie québécoise et, je dirais,
l'économie canadienne. Quand on se compare aux États-Unis, c'est sûr que le
niveau de rehaussement de la productivité n'a pas été le même. Et je dirais que
c'est un enjeu marqué aussi depuis la pandémie. Et, à l'intérieur même du
Canada, bon, le Québec a besoin de rehausser sa productivité.
Alors,
c'est un problème qu'on avait ciblé déjà et pour lequel on déploie des efforts
considérables. Avec Investissement Québec,
il y a un accompagnement qui est fait auprès des entreprises pour les amener à
investir davantage dans les technologies, dans les nouvelles technologies, de
manière à rehausser leur niveau de productivité. Et on a également... on a développé une enveloppe, l'automne dernier, on
l'a annoncé en novembre dernier, une enveloppe, Mme la Présidente, de 4,5 milliards de dollars, présentée
et portée par Investissement Québec, pour accompagner les entreprises d'une
manière encore plus marquée, pour rehausser la productivité. Alors,
c'est une enveloppe qui va être déployée au cours des trois prochaines années,
et il y a deux volets intéressants...
La Présidente :
En terminant.
Mme Fréchette :
...pour lesquels je pourrai revenir en complément.
La Présidente : Première
complémentaire.
M. Frédéric Beauchemin
M. Beauchemin : C'est écrit
noir sur blanc, page D.6 du budget : aucun gain de productivité en
cinq ans. Une économie en mauvaise posture, sous ce gouvernement-là, Mme la
Présidente. Pour renverser ce désastre, on doit encourager nos PME à investir, stimuler la recherche, le développement
et l'innovation. Je l'entends, la ministre, Mme la Présidente, mais je
n'entends pas comment elle va définir la réussite de son programme.
Comment définissez-vous le succès? Parce que
zéro, c'est...
La Présidente : La réponse de la
ministre.
Mme Christine
Fréchette
Mme Fréchette : Oui,
Mme la Présidente. Alors, le programme d'Investissement Québec se déploie
de deux manières. D'une part, on veut aider financièrement les
entreprises à procéder à des investissements dans les technologies, et ça, ça
passe par des aides financières, qui débutent à 250 000 $. Il y a des
moratoires, également, pour ce qui est du remboursement, pouvant aller jusqu'à
48 mois. Donc, vraiment quelque chose d'intéressant pour inciter les
entreprises, parce qu'on sent qu'il manque parfois d'élan pour aller de l'avant
avec des investissements. On sait que ce sont des investissements importants,
alors on est là pour les accompagner. Et il y a également une aide qui se fait
à travers l'accompagnement par les experts d'Investissement Québec auprès des
entreprises pour les aider à adopter la bonne approche...
La Présidente : En terminant.
Mme Fréchette : ...et à
déployer les bonnes mesures pour faire en sorte de rehausser la productivité.
La Présidente : Deuxième complémentaire.
M. Frédéric
Beauchemin
M. Beauchemin : C'est un
problème qui nous frappe tous, Mme la Présidente. Ça fait qu'au lieu de choisir
les gagnants le gouvernement devrait aider toutes nos entreprises. Je veux une
mesure concrète, une simple, puis je vais vous en proposer une : une
fiscalité optimale pour nos PME. Ça, c'est la façon de faire pour aider toute
l'économie en même temps, parce qu'on va tous faire face aux tarifs de Donald
Trump.
Est-ce que la ministre comprend que la fiscalité
optimale est la solution?
La Présidente : La réponse de la
ministre.
Mme Christine
Fréchette
Mme Fréchette : Oui. Mme la
Présidente, je m'étonne que le collègue veuille qu'on aide toutes les
entreprises, parce qu'en fait ce programme-là, chez Investissement Québec, il
est accessible à l'ensemble des entreprises qui souhaitent s'investir dans une
démarche de rehaussement de la productivité. Et j'aimerais rappeler à ce
sujet-là que, Investissement Québec, 91 % de ses interventions sont faites
auprès de PME, sont faites auprès d'entreprises ayant moins de 200 employés. Et plus de 40 % de ces interventions
sont faites auprès d'entreprises ayant moins de 20 employés. Alors,
c'est dire à quel point l'approche d'Investissement Québec rejoint tout le monde.
Et on engage l'ensemble des entreprises, on les invite, en fait...
La Présidente : En terminant.
Mme Fréchette : ...à
s'investir davantage dans le rehaussement de la productivité, et on a les
outils pour ce faire.
La Présidente : En question
principale, je reconnais maintenant le député de Pontiac.
Modernisation du régime
forestier
M.
André Fortin
M. Fortin : Mme la Présidente, la période de 30 jours avant les
possibles tarifs, c'est un sursis et rien de plus, on ne peut pas se permettre
de les gaspiller. C'est vrai au niveau des règles interprovinciales, c'est vrai
au niveau de l'allègement bureaucratique et fiscal, de la productivité, mais,
Mme la Présidente, c'est vrai au niveau de notre régime forestier aussi.
Nos compagnies forestières sont déjà dans une
situation plus que précaire. Elles paient des tarifs de 15 % aux Américains, mais, en plus, on a beaucoup de règles
internes ici, au Québec, qui empêchent nos entreprises d'être compétitives.
Et tout le monde ici, là, est d'accord, il faut moderniser le régime forestier.
La CAQ l'a promis en 2018, ça n'a pas été fait. Ils l'ont promis en 2022, ça n'a pas été
fait. La ministre a promis de le faire avant l'élection, l'industrie s'est
fâchée. Là, elle promet de le faire cet hiver, mais on l'attend encore.
Là,
là, ça presse plus que jamais. Si on ne fait pas les changements nécessaires,
nos compagnies n'ont aucune chance le jour où Donald Trump impose ces
nouveaux tarifs.
Qu'est-ce que la
ministre attend pour aller de l'avant avec une réforme?
• (15 h 20) •
La
Présidente : La réponse de la ministre des Ressources naturelles et
des Forêts.
Mme Maïté Blanchette Vézina
Mme Blanchette
Vézina : Merci, Mme la Présidente. Je suis contente de pouvoir me
lever pour parler de cette filière si importante pour l'économie de nos
régions, l'économie du Québec, et, oui, qui était, en ce moment, touchée déjà
par des tarifs, par des droits compensateurs en raison du conflit du bois
d'oeuvre.
Mme la Présidente, je
pense qu'il faut rectifier certaines situations. Puis moi, je suis en contact
avec l'industrie depuis deux ans, depuis que j'ai été nommée, et ce qu'ils me
disent, c'est qu'il faut moderniser, effectivement, le régime forestier, et
c'est ce que je fais en ce moment. Et vous savez quoi, Mme la Présidente? Pourquoi
on en est là aujourd'hui? C'est le régime forestier adopté par le gouvernement
libéral. Au jour 1, on m'a répété que, depuis l'adoption de ce régime-là,
l'environnement d'affaires n'est pas bon, ils ont des problématiques avec leur
compétitivité en raison du régime forestier.
Mme la Présidente, je
suis engagée à moderniser le régime, on est en action et, oui, des changements
vont être apportés, mais on n'est pas les...
on n'est pas les bras croisés, Mme la Présidente. On a mis en place cet automne
un régime... pas un régime, pardon, une aide financière pour soutenir
les entreprises, 100 millions qui ont été annoncés pour soutenir celles
qui sont victimes de ces droits compensateurs.
Alors,
Mme la Présidente, moi, j'ai un tableau, j'ai un tableau ici. On aime démontrer
avec des chiffres ce qu'on fait. Pour les quatre... la moyenne par année
sur...
La
Présidente : Première complémentaire.
M. André Fortin
M. Fortin : Mme la Présidente, il n'y a pas personne qui pense que les
solutions avancées il y a 15 ans c'est encore celles dans un nouveau
marché aujourd'hui. Mais la ministre est là, son gouvernement est là depuis
sept ans, et ils ne l'ont pas changé, le régime forestier. Elle nous promet la
même chose, mais elle ne le fait pas. Juste dans les derniers mois, là, il y a des usines qui ont fermé dans les Laurentides,
en Outaouais, en Haute-Mauricie, au Lac-Saint-Jean, puis j'en passe. Il y a des
centaines et des centaines de travailleurs qui ont perdu leur emploi, et ça n'a
pas fait avancer la ministre.
Les
tarifs, là, ça va être le dernier clou pour bien des usines. On a 30 jours
pour les protéger, c'est tout. Allez-vous déposer votre réforme?
La
Présidente : La réponse de la ministre.
Mme Maïté Blanchette Vézina
Mme Blanchette
Vézina : C'est... Je pense, c'est ma collègue la ministre des
Transports et de la Mobilité durable qui l'a
dit souvent, là, le sans-gêne libéral. Dès le jour 1, dès le jour 1,
les partenaires de la filière ont dit combien c'était un régime qui
n'allait pas fonctionner. Et aujourd'hui on doit encore une fois corriger les
erreurs du Parti libéral.
Mais là je vais
revenir à ce que je voulais vous expliquer tout à l'heure. 100 millions qu'on
a annoncés dès cet automne, la ministre de l'Économie, de l'Innovation et de
l'Énergie, pour soutenir, donc, les entreprises qui vivent en ce moment avec
des tarifs, donc, les impacts des tarifs, ils les ont, et, sur la moyenne par
année, sur quatre ans, donc on a fait une moyenne du gouvernement, les
investissements du gouvernement libéral puis du gouvernement de la CAQ, on est
à 433 millions de dollars, qu'on soutient, pour les entreprises de la
filière, pour se moderniser. Et on est...
La Présidente :
Deuxième complémentaire.
M. André Fortin
M. Fortin : Il ne faudrait pas faire la moyenne des usines qui ont
fermé au cours des dernières années.
Mme la Présidente,
là, les travailleurs de la forêt, ils ont entendu le premier ministre dire :
Bien, vous pourrez travailler sur les barrages, vous pourrez travailler sur des
nouveaux projets d'école en banlieue de Montréal, mais, si vous habitez à La
Tuque, à Maniwaki ou dans... ou ailleurs, Mme la Présidente, là, le choix
numéro un, ce n'est pas de s'expatrier en banlieue de Montréal pour aller
travailler sur les projets d'école, c'est de travailler chez eux.
Est-ce que la
ministre peut démontrer une écoute de tous ces gens-là qui pendant des années
se battent pour un nouveau régime forestier puis le déposer tout de suite?
Des
voix : ...
La
Présidente : Pas de bravo. La réponse de la ministre.
Mme Maïté Blanchette Vézina
Mme Blanchette
Vézina : En termes d'écoute, Mme la Présidente, je ne pense pas avoir
de leçons à avoir du Parti libéral. Ça fait... Ils ont été 15 ans au
pouvoir, et les changements qu'ils ont apportés ont été décriés dès le départ.
Ça fait deux ans. On
a eu des feux de forêt. J'ai consulté les parties prenantes. On est prêts à
déposer un régime forestier bientôt. Effectivement, on souhaite cette
modernisation. Et, ce que j'entends de la part du Parti libéral, je suis contente de l'entendre, ils vont vouloir, donc,
nous aider, ils vont collaborer pour l'adoption d'un projet de loi si important
pour nos régions, pour nos travailleurs, pour l'économie du Québec. Donc, je
m'attends à une collaboration de leur part. Je serai très heureuse de pouvoir
parler plus en détail avec eux.
Et je voulais
d'ailleurs les inviter à collaborer, dans les prochains jours...
La
Présidente : En terminant.
Mme Blanchette
Vézina : ...à l'élaboration du projet de loi. Donc, s'ils veulent
répondre à mon invitation, ce sera avec plaisir.
La
Présidente : En question...
Des voix : ...
La Présidente :
Mon Dieu qu'il y a de l'électricité dans l'air aujourd'hui! En question
principale, je...
Des voix : ...
La
Présidente : C'est de l'amour, oui. Je vous entends, vous aussi. En
question principale — on
reprend notre sérieux — en
question principale, je reconnais maintenant le député de Pontiac.
Réorganisation du système de santé
M. André Fortin
M. Fortin : Avec raison, Mme la Présidente, à peu près tout le monde au
Québec est inquiet des tarifs de M. Trump, mais il y a à peu près autant
de monde inquiet par ce qui se passe en santé en ce moment. Les gens de
l'Outaouais qui devraient avoir un test pour la résonance magnétique en trois
mois mais qui l'ont en 20 mois sont très inquiets. Les gens à
Trois-Pistoles, où le gouvernement menace de fermer leur urgence de nuit, ils
sont très inquiets. Les gens en Abitibi, où le gouvernement ferme des
programmes qui fonctionnent très bien en matière de santé mentale, sont
inquiets. Les gens à Montréal qui voient leurs soins à domicile diminués sont
inquiets. Les gens partout au Québec qui voient leurs chèques d'emploi-service
coupés sont tous très inquiets.
Mme la Présidente,
comment un premier ministre qui a promis de ne faire aucune coupure en santé
pas plus tard qu'en avril... comment il peut justifier 1,5 milliard de
coupures en quatre mois?
La
Présidente : La réponse du ministre de la Santé.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Mme
la Présidente, je commencerais, aujourd'hui... Je pense qu'il y a une question
aussi bien mettre les choses au clair. J'ai
beaucoup de respect pour le travail du député de Pontiac puis je comprends le
rôle de l'opposition. Je ne suis pas
certain que c'est toujours la bonne approche, mais je le respecte, je le
respecte. Par contre, Mme la Présidente, j'aimerais parler aux Québécois
puis leur dire une chose : dans le réseau de la santé, là, tous les jours,
on sert plus de 125 000 personnes,
tous les jours. Ça, ça veut dire aux urgences, ça veut dire dans nos cliniques,
ça veut dire dans nos CHSLD, etc. Et,
en plus de ces 125 000 personnes, on sert plus de
400 000 personnes annuellement en soins à domicile.
Est-ce que, dans ces
temps difficiles là, où on est en train de faire une transformation du réseau
de la santé... est-il normal qu'il y ait des
endroits où ça aille moins bien que d'autres puis qu'on soit capables de citer
comme aujourd'hui et comme le fait souvent le député de Pontiac?
Je vous le dis, je
respecte ça, c'est son rôle. Moi, savez-vous c'est quoi, mon rôle, Mme la
Présidente? C'est de faire fonctionner le réseau, faire la transformation que
les Québécois s'attendent. Puis c'est ça qu'on va continuer à faire...
La
Présidente : En terminant.
M. Dubé : ...parce
qu'il faut faire les changements qui sont nécessaires. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Présidente : Première
complémentaire.
M.
André Fortin
M. Fortin : Bien, le rôle du ministre de la Santé, c'est aussi d'être
transparent avec la population. Et, la semaine dernière, il nous a dit :
Jamais on n'a demandé au réseau de couper 1,5 milliard en quatre mois. Le problème,
c'est que tout le monde, y compris Santé Québec, y compris sa P.D.G., avait
compris exactement ça. Pire, Mme la Présidente, le ministre et Santé Québec ont appris dans le journal qu'il y aurait
des cibles spéciales de coupures pour certaines régions.
Alors là, tout le monde est mêlé. Les patients
font les frais parce que les gestionnaires ne comprennent pas la commande du
gouvernement. Est-ce qu'il peut s'expliquer?
La Présidente : La réponse du
ministre.
M.
Christian Dubé
M. Dubé : Mme la Présidente, je
veux être très clair, là, moi, je pense... je parle à la direction de Santé
Québec deux à trois fois par semaine, dans les moments qu'on vit en ce moment,
puis je pense qu'ils comprennent très bien où on en est rendus, ils comprennent
très bien ce qu'on a à faire. Ça fait que je ne sais pas à quoi réfère le
député de Pontiac, mais moi, je pourrais vous dire que nos commandes sont très
claires au niveau de Santé Québec. On leur a demandé de transformer le réseau.
Je vous ai dit plusieurs fois, Mme la
Présidente, puis je me permets de répondre encore aujourd'hui, oui, on a dit
qu'il y avait des fermetures de postes. C'est normal, on doit réorganiser le
réseau. On a trop de gens qui travaillaient de jour, de semaine, et on doit
avoir des gens qui travaillent de soir, de fin de semaine. Qu'on aime ou pas...
La Présidente : En terminant.
M. Dubé : ...cette réponse-là,
Mme la Présidente, c'est la réalité. C'est ça qu'on a demandé à Québec de... à
Santé Québec de faire.
La
Présidente : Deuxième complémentaire. Et, pour ce faire, je
cède la parole au chef de l'opposition officielle.
M.
Marc Tanguay
M. Tanguay : Parfait, Mme la
Présidente. Le ministre vient de dire qu'on vit dans la réalité. Bien, parfait.
On va demander au premier ministre quelle est la réalité caquiste. Là, avant
les fêtes, c'était clair et reconnu, c'était 1,5 milliard de coupures en
santé. On présentait ça comme... disant : Il faut qu'ils respectent les
budgets. C'était 1,5 milliard. Là, le ministre, dans les derniers jours,
dernières semaines, fin janvier, a fait volte-face. Ce ne serait plus
1,5 milliard.
Alors, on va demander au premier ministre :
Combien, les coupures, en santé? Combien?
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : Oui. Mme la
Présidente, j'invite le chef de l'opposition officielle à aller revoir la mise
à jour du ministre des Finances qui a été déposée l'automne dernier, la
page E.42. Il va voir qu'il y a toujours une augmentation de prévue pour
le budget du ministère de la Santé.
Maintenant, Mme la Présidente, je pense que le
ministre de la Santé a été assez transparent, il y a eu des dépassements
au-dessus de ce qui a été accordé au réseau de la santé, on est... il est en
train de voir comment on peut se rapprocher du budget, qui est en croissance.
Puis, Mme la Présidente, c'est important de le
rappeler, depuis six ans, le budget de la santé a augmenté de 50 %. C'est
du jamais-vu.
• (15 h 30) •
La Présidente : En question
principale, je reconnais maintenant la députée de Mercier.
Contrats attribués à Amazon
Mme
Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Merci, Mme la
Présidente. Il y a 10 jours, Amazon a fermé ses sept entrepôts au Québec.
Jeff Bezos traitait déjà ses employés québécois comme de la schnout,
maintenant il les jette à la rue comme des vieux Kleenex. Encore une fois, une
multinationale américaine préfère fermer au lieu de négocier avec ses
travailleurs et travailleuses québécois. Et le pire dans
tout ça, Mme la Présidente, c'est que cette multinationale reçoit des contrats
publics et de l'argent public.
Quand Amazon s'essuie les pieds sur les
travailleurs et travailleuses du Québec, Amazon ne mérite pas de tapis rouge de
la part du gouvernement. Les employés licenciés demandent au gouvernement de
fermer le robinet d'argent public, de l'argent des Québécois vers Amazon.
Contrats pour les données, achats gouvernementaux, tout ça doit cesser.
Est-ce que ça gêne le premier ministre que son
gouvernement fasse encore affaire avec Amazon? Est-ce que c'est ça qu'on veut
encourager, au Québec, de la part d'entreprises étrangères qui traitent mal nos
travailleurs ici, au Québec?
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : Oui.
Mme la Présidente, je suis d'accord avec la cheffe du deuxième groupe
d'opposition. Ce qu'a fait Amazon, c'est inacceptable. On n'a même pas été
avisés qu'il y aurait des mises à pied, ça a été fait de façon sauvage.
Maintenant, Mme la Présidente, j'ai demandé à la
présidente du Conseil du trésor de revoir les contrats avec Amazon. Évidemment,
il faut faire attention, là, pour ne pas avoir un boomerang où Amazon gagne
parce qu'on casse un contrat. On va regarder d'abord pour les prochains
contrats, on va essayer d'éviter Amazon. Puis on est en train de regarder si on
peut briser, effectivement, les contrats avec Amazon.
Il faut regarder aussi c'est quoi, les
alternatives, c'est quoi, les alternatives. Il ne faut pas... comme je le
disais tantôt dans ma déclaration, il ne faut pas se faire plus mal que le mal
qu'on essaie de faire à la gang de M. Trump.
La Présidente : Première
complémentaire.
Mme
Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Bien, je suis
vraiment contente. On est pas mal d'accord, là, ces derniers temps avec... le
premier ministre et moi. Donc là, là, ce que je vais lui proposer... Puis
j'aime beaucoup mieux sa réponse maintenant que
sa première, qu'il a dit de façon intuitive, où il me disait : C'est un
contrat public... privé, je ne peux rien faire avec ça. C'est important que le premier ministre du
Québec... de montrer que c'est lui, le boss ici, au Québec, et non pas Jeff
Bezos.
Maintenant, on ne lui demande pas de faire
n'importe quoi. Moi, ce que je veux l'entendre dire, c'est : Oui, j'ai un
engagement ferme pour arrêter de faire affaire avec Amazon. C'est ce que je
veux l'entendre dire.
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Bien, soyons très
clairs, Mme la Présidente, c'est vrai que, depuis un bout de temps, on a une
espèce de complicité, la cheffe du deuxième groupe d'opposition et moi. En fin
de semaine, je pensais faire un débat d'urgence. Tout à coup, je la vois nous
demander un débat d'urgence. Vraiment, là, exceptionnel comme complicité.
Maintenant, bien, je répète ce que j'ai dit à
propos d'Amazon. Idéalement, on voudrait s'en passer. On est en train de
regarder ce qu'on peut faire avec les contrats existants puis on est en train
de regarder ce qu'on fait pour la suite des choses.
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Merci, Mme la
Présidente. Vu qu'on est sur la même longueur d'onde, aujourd'hui, j'aimerais
quand même entendre le premier ministre aller plus loin puis dire qu'il a un
engagement ferme pour au moins travailler sur un plan de transition pour
arrêter d'être dépendants d'Amazon, qu'on brise les contrats ou pas. Et ce
qu'il doit faire aussi, c'est développer une
expertise au Québec, hein, parce que les données, c'est quelque chose de
sensible, on ne va pas les donner à des entreprises étrangères. Il y a aussi
des aspects de sécurité.
Est-ce qu'il
s'engage aussi, au moins, à développer une expertise ici, au Québec, d'avoir
des acteurs québécois...
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui. Mme la
Présidente, on se rappellera tous qu'on a essayé, pendant la COVID, de
remplacer Amazon par Le Panier bleu. Ça pose deux défis importants.
D'abord, il faut avoir un site qui est aussi beau, je dirais, que celui... ou
aussi facile à utiliser que celui d'Amazon, puis ça suppose aussi d'avoir une
livraison à domicile partout.
Donc,
Mme la Présidente, il n'y a rien que je rêverais de plus que de remplacer
Amazon, qui souvent, sans s'en rendre compte, nous vend des produits
américains. Donc, oui, on regarde cette possibilité-là, mais on va le faire
d'une façon intelligente.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député
de Laurier-Dorion.
Encadrement
de l'hébergement touristique collaboratif
M.
Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
Merci, Mme la Présidente. Au Québec, on a une ministre du Tourisme et,
heureusement, on a une mairesse de Montréal qui fait la job de la ministre du
Tourisme, Mme la Présidente. Voilà la triste réalité.
Jeudi dernier, la
ville de Montréal a pris une décision très claire pour défendre la population
de la métropole : fini, les Airbnb à Montréal hors de la saison estivale.
C'est plus de 2 000 unités de logement qui vont être libérées pour
les locataires à la recherche d'un logement. Au lieu de se réjouir de la
nouvelle, la ministre du Tourisme s'est empressée d'aller dire que la mairesse
Valérie Plante cherche un coupable pour son inaction. L'inaction, la
complaisance, le tapis rouge pour Airbnb, c'est la ministre du Tourisme, Mme la
Présidente. Ce qui est clair, depuis des années, c'est que la ministre du
Tourisme banalise et minimise l'effet néfaste d'Airbnb dans nos villes. Ça, ce
n'est pas une fiction, et les gens le savent depuis des années.
Est-ce que la
ministre du Tourisme trouve ça normal que la mairesse de Montréal fasse sa job?
La
Présidente : La réponse de la ministre du Tourisme.
Mme Caroline
Proulx
Mme Proulx :
Ce n'est pas de mauvaise foi, Mme la Présidente, je n'ai pas
entendu la fin de la question, je suis vraiment désolée. En toute honnêteté,
là, je ne l'ai pas entendue. Alors, je vais essayer de répondre au député.
La
première des choses, Mme la Présidente, je dois admettre que la mairesse Plante
n'a pas consulté le ministère du Tourisme avant sa sortie de la semaine
dernière, qui allait, donc, faire en sorte qu'il n'y aurait plus d'hébergement
courte durée à Montréal sur la résidence principale. Nous, on est un
gouvernement pragmatique. Il y a des gens qui veulent s'acheter une maison à
Montréal, il y a des gens qui veulent s'établir à Montréal, et, avec leur
résidence principale, ce qu'ils font, c'est que, quelques semaines par année,
ils vont chercher une somme qui va leur permettre, bien, de payer un paquet de
services, que ce soit Hydro-Québec, que ce soient les taxes municipales. Il y a
des gens qui nous ont écrit, là, c'est
5 500 $ de taxes municipales, à Montréal. Donc, c'est un revenu
d'appoint pour ces gens-là dont va priver la mairesse de Montréal, avec cette
interdiction-là. Il va y avoir un far Web qui va se créer, ce qu'on a
tenté de défaire avec le projet de loi n° 25.
Et, moi, ce qui m'inquiète, c'est non seulement la sécurité des touristes,
parce que c'est une priorité du gouvernement...
La
Présidente : En terminant.
Mme Proulx :
...mais la réputation de Montréal.
La
Présidente : Première complémentaire.
M.
Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
Il y a un grave manque de cohérence, ici, dans l'action gouvernementale,
Mme la Présidente. Pendant que la ministre de l'Habitation a toutes les peines
du monde pour sortir quelques unités de logement avec son Programme
d'habitation abordable, la ministre du Tourisme préfère que des multinationales
américaines retirent des milliers d'unités de logement du marché montréalais et
partout à travers le Québec. Le gouvernement fait preuve d'un grave manque de
cohérence. Ce qu'il tente de faire d'une main, il le détruit de l'autre.
C'est ça, la vision pour
régler la crise du logement...
La
Présidente : La réponse de la ministre.
Mme Caroline
Proulx
Mme Proulx :
Mme la Présidente, on ne retire pas de logements, c'est la résidence
principale. 99 % du temps est passé dans la résidence principale.
D'ailleurs,
je questionne beaucoup les chiffres de la mairesse de Montréal. Elle parle de
2 000 illégaux. Je ne sais pas où elle prend ces chiffres-là. Ce
n'est pas les chiffres qu'on a, nous. Et il faut faire une grande distinction,
là. La résidence principale n'enlève pas de logement locatif à Montréal
et ailleurs au Québec.
Puis
un autre élément que je tiens à souligner, Mme la présidence... la Présidente,
pardon, c'est qu'il y avait trois inspecteurs pour tout le territoire de
Montréal. Et, la ville de Montréal, les arrondissements, ils les donnaient, les
autorisations pour faire de l'exploitation courte durée. Elle se réveille
aujourd'hui.
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
M.
Andrés Fontecilla
M. Fontecilla : La ministre ne connaît
carrément pas la réalité. C'est justement des milliers d'unités de
logement qui ne sont pas des résidences principales qui sont retirées du marché
locatif. Elle devrait mieux s'informer, la ministre. Depuis six ans, par sa
complaisance envers Airbnb, elle travaille contre la population de Montréal.
Est-ce qu'elle va se
rétracter...
La
Présidente : Oui. M. le leader du gouvernement, quel est votre appel
au règlement?
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, ce sont de graves accusations, ce sont des propos
blessants, de la part du député, il devrait
retirer. Écoutez, ce qu'il a dit, c'est qu'il a accusé la ministre d'un fait,
ici, qu'on ne peut pas tolérer en cette Assemblée, Mme la Présidente.
La
Présidente : Moi, je vous demanderais de faire attention. Je vais vous
reconnaître. Mais quel est votre appel au règlement, M. leader du deuxième
groupe d'opposition?
M. Cliche-Rivard :
Mme la Présidente, le mot n'est pas de lexique, il est permis. La critique
est juste. Voilà.
La
Présidente : Le mot n'est effectivement pas au lexique, mais je vous
demande de faire attention dans votre critique pour ne pas imputer des
intentions malveillantes aux collègues. Faites attention. Poursuivez. Il vous
reste 10 secondes.
M. Fontecilla :
Est-ce que la ministre va s'excuser auprès de la population de Montréal et
collaborer enfin avec la mairesse de Montréal?
La
Présidente : La réponse de la ministre.
Mme Caroline
Proulx
Mme Proulx :
D'abord et avant tout, Mme la Présidente, il y a des entreprises québécoises,
hein, qui sont sur le Web et qui font de
l'hébergement courte durée. Et on souhaite avoir de plus en plus de ces
entreprises québécoises là qui vont venir s'intégrer dans le marché
québécois de façon responsable, dans le cadre réglementaire du gouvernement du
Québec.
Je ne sais pas si
j'ai le droit de nommer des entreprises, mais, puisque vous plantez Airbnb à
fond de caisse, bien, je vais parler de WeChalet, qui est une entreprise
québécoise, de chez nous, qui fait de l'hébergement touristique courte durée.
Et vous savez quoi, Mme la Présidente? Elle joue dans les règles du
gouvernement du Québec. Elle joue dans le cadre de la loi n° 25.
Alors, j'invite les Québécois à continuer d'encourager les entreprises
québécoises.
• (15 h 40) •
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le chef
du troisième groupe d'opposition.
Mesures
pour diversifier les exportations
M. Paul
St-Pierre Plamondon
M. St-Pierre
Plamondon : Mme la Présidente, le Parti québécois plaide depuis un bon
moment pour que la priorité du gouvernement soit la diversification de nos
partenaires économiques. On le sait, on est trop dépendants des marchés
américains. C'est près de 75 % de nos exportations internationales. Mais,
pendant ce temps-là, bien, c'est un maigre 6 % de nos exportations vers
l'Europe, dont un très maigre 1,7 % vers la France et 1 % vers le
Royaume-Uni. Donc, c'est vraiment très loin du potentiel de ces marchés-là pour
nos entreprises.
Donc, malgré nos
désaccords, je suis content, je note que le premier ministre souscrit à ce
grand objectif de diversifier nos exportations dans son discours il y a
quelques instants, mais on ne peut pas s'en tenir à des affirmations générales,
là. Il faut comprendre que, pour changer des habitudes aussi ancrées, ça va
prendre des mesures fortes et surtout des mesures précises qu'on peut
comprendre. Et le gouvernement, là-dessus, a une obligation de résultat. Il
faut que ça devienne payant pour que nos entreprises se dirigent vers d'autres marchés.
Le Parti québécois
propose de créer un réel incitatif à la diversification des exportations en
rendant tout nouveau revenu d'exportation non imposable. Je tends la main au
premier ministre pour qu'il aille de l'avant.
Est-ce qu'il peut
nous dire s'il est d'accord, oui ou non, avec cette mesure claire et précise?
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : Oui. Mme la
Présidente, ça fait des décennies que tous les gouvernements, que ce soient libéraux,
péquistes ou caquistes, disent : On doit diversifier nos marchés, on est
beaucoup trop dépendants des États-Unis.
Il y a six ans, quand je suis arrivé, j'ai
demandé, à l'époque, à la ministre des Relations internationales, puis j'ai
redemandé la même chose à la nouvelle ministre des Relations internationales,
qu'il y ait une priorité dans les délégations du Québec à l'étranger :
aider les entreprises québécoises à augmenter leurs exportations. Je me
rappelle d'ailleurs que des anciens du PQ
m'ont blâmé pour mettre trop d'emphase sur l'économie dans les délégations du
Québec à l'international.
Maintenant, quelle est la situation, depuis
2018? Depuis 2018, les exportations du Québec hors États-Unis ont augmenté de
12 %. Par contre, aux États-Unis, on a eu un boom économique, il y a eu
une augmentation de 35 %. Le bon côté des choses, par contre, c'est quand
on regarde les exportations du Québec dans les autres provinces du Canada. Depuis
2018, on a eu une augmentation de 34 %.
Donc, Mme la
Présidente, on ne peut pas aller dire aux entreprises québécoises : N'augmentez
pas vos exportations aux États-Unis. Ce qu'on fait, c'est qu'on les aide
à augmenter leurs exportations dans le reste du monde, dans les autres provinces. Mais, Mme la Présidente, il reste
qu'on a un marché — puis
on ne changera pas la géographie — qui est juste à côté de nous autres...
La Présidente : En terminant.
M. Legault : ...donc c'est un
petit peu normal que ce ne soit pas facile de changer ses habitudes.
La Présidente : Première
complémentaire.
M. Paul St-Pierre
Plamondon
M. St-Pierre Plamondon : Mme la
Présidente, je note que le premier ministre souligne en effet que notre
dépendance aux États-Unis a augmenté sous la CAQ, mais surtout je note que, je
pose une question précise, à savoir est-ce qu'il est d'accord pour défiscaliser
les revenus d'exportation, on n'a pas de réponse.
Donc je vais
aller vers une autre proposition concrète et claire du Parti québécois. On
propose de mettre sur pied rapidement les plus grandes missions
commerciales de toute notre histoire, des équipes Québec avec nos entreprises,
vers les pays qui ont des synergies sur le plan économique.
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui. Bien, Mme la
Présidente, on n'a pas attendu la suggestion du Parti québécois pour faire des
missions à l'étranger. Je rappelle au chef du troisième groupe d'opposition
qu'il n'y a pas longtemps j'étais à Paris, puis,
avec Henri-Paul Rousseau, j'ai rencontré une série d'entreprises françaises qui
sont intéressées à investir au Québec. Puis
on a rencontré aussi des entreprises où on pourrait exporter en France. Et j'ai
parlé avec M. Macron. Ce qu'on essaie de faire, c'est que la France soit la porte d'entrée du Québec en
Europe. Donc, on travaille là-dessus. Henri-Paul Rousseau y travaille.
Je voudrais que ça augmente plus vite...
La Présidente : En terminant.
M. Legault : ...les exportations
à l'extérieur. Donc on va continuer de le faire.
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
M. Paul St-Pierre
Plamondon
M. St-Pierre Plamondon : Je
reconnais que le premier ministre s'est déjà rendu en France, mais ma question,
elle est beaucoup plus pointue. On est en situation très, très urgente, selon
ce que le premier ministre nous dit, et je demande : Est-ce que,
concrètement, le premier ministre peut nous dire à quelle date nos missions
commerciales à l'étranger commencent pour diversifier? Et je ne parle pas d'un
aller-retour à Davos ou d'une rencontre qui a eu lieu je ne sais pas quand, là.
Est-ce qu'on a un plan de match maintenant? Est-ce qu'on peut avoir de
l'information?
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Bon,
d'abord, effectivement, le chef du troisième groupe d'opposition vient de le
dire, il y a quelques semaines, si ce n'est pas quelques jours, la
ministre de l'Économie était à Davos, là où sont réunies toutes les grandes entreprises internationales. Elle a aussi profité de son
voyage en Europe pour aller à Munich. Elle prévoit, au cours du mois d'avril,
aller à Londres, donc, être capable d'aller augmenter nos exportations. En
juin, elle sera au Bourget, on sait comment c'est important pour l'aéronautique.
Le ministre délégué à l'Économie était à Toronto pour augmenter nos
exportations dans les autres provinces.
La
Présidente : En terminant.
M. Legault :
Donc, Mme la Présidente, le chef du troisième groupe d'opposition défonce une
porte ouverte, on est...
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
Hausse
du salaire minimum
M.
Alexandre Leduc
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Vendredi dernier, le ministre du Travail a
profité de l'éclipse médiatique sur les tarifs pour annoncer en douce la hausse
annuelle du salaire minimum. Et on comprend le malaise, on comprend sa gêne,
c'était de 0,35 $, Mme la Présidente, 2,2 % de hausse seulement. Pendant
ce temps-là, l'indice du TAL pour l'augmentation des loyers est, lui, à
6 %. Puis ça, c'est pour ceux qui restent dans leurs logements, parce que,
on le sait, quand le locataire change, ça peut facilement atteindre 10 %,
15 % à 20 %. L'alimentation, de son côté, c'est de 3 % à
5 % d'augmentation, jusqu'à 6 % pour la viande. Les deux principaux
postes de dépenses des personnes à revenus modestes vont donc dépasser
l'augmentation caquiste du salaire minimum. Puis ça, c'est sans compter les efforts... les effets potentiels de la guerre
commerciale qui nous pend toujours au-dessus de la tête. Autrement dit, on
appauvrit les plus pauvres, parmi les
plus pauvres de nos travailleurs, qui n'avaient déjà pas un revenu suffisant
pour vivre décemment.
Nous, à QS, on pense
que chaque personne qui se lève le matin pour aller travailler devrait recevoir
un salaire lui permettant de vivre dignement. Le ministre, lui, pourquoi il
n'est pas d'accord avec ça?
La Présidente :
La réponse du ministre du Travail.
M. Jean
Boulet
M. Boulet : Merci, Mme la Présidente.
Évidemment, à chaque année, le 1er mai, on augmente le salaire minimum
et on s'inspire d'un certain nombre
d'indicateurs. D'abord, protéger le pouvoir d'achat des personnes à faibles
revenus, mais respecter aussi la
capacité de payer des PME, qui embauchent les personnes qui sont, généralement,
au salaire minimum.
Devant l'insécurité
économique actuelle, devant les mises à pied, les licenciements potentiels, il
faut être extrêmement prudent puis prendre une
décision qui est équilibrée puis respectueuse du marché de l'emploi. Je
rappellerai à mon collègue qu'année après année la chaire en fiscalité
et en finances publiques de l'Université de Sherbrooke nous place en tête de
peloton en termes de salaire minimum ajusté au coût de la vie. C'est le
troisième salaire minimum le plus élevé au Canada. Et, ceci dit, ça respecte,
ça protège le pouvoir d'achat, c'est une augmentation de 2,22 %, tout à
fait équivalente à l'inflation anticipée du 1er mai 2025 au 30 avril
2026.
La
Présidente : En terminant.
M. Boulet :
Donc, on est fiers de ce salaire minimum. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente : Première complémentaire.
M.
Alexandre Leduc
M. Leduc :
Avec la hausse de 0,35 $, le gouvernement traverse le supposément
infranchissable mur du 50 % du salaire moyen en passant à 50,5 %, une
vraie révolution. Quand le ministre est arrivé en fonction, il ne voulait rien
savoir de dépasser 47 %. Mais qu'est-ce qui l'empêche de faire un pas supplémentaire?
Pourquoi ne pas aller à 53 %? Ça
donnerait 16,90 $. À 55 %, ça donnerait 17,55 $. On n'est
pas à 20 $ de l'heure, mais on s'en approcherait pas mal plus que
le ridicule 16,10 $ qui vient d'être mis sur la table par le ministre.
Est-ce que le
ministre peut m'expliquer pourquoi il pense que notre monde qui travaille fort
ne mérite pas au moins 20 $ de l'heure?
La
Présidente : La réponse du ministre.
M. Jean
Boulet
M. Boulet : Mme
la Présidente, on est tous... on a, évidemment, la même sensibilité pour les
personnes qui sont au salaire minimum. Et le ratio entre le salaire
minimum et le salaire horaire moyen, avec le 16,10 $, est de 50,52 %,
donc une augmentation équivalente à celle reçue par l'ensemble des travailleurs
et travailleuses au Québec.
Et,
une autre statistique qui est quand même assez révélatrice, on a, au Québec,
une augmentation... en ce qui concerne le taux de couverture de la mesure du
panier de consommation, on passe de 113 % à 115 %.
La Présidente :
En terminant.
M. Boulet :
Donc, encore une fois, c'est une décision équilibrée. Merci.
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
M.
Alexandre Leduc
M. Leduc :
L'année passée, Mme la Présidente, on a augmenté de 0,50 $. À 40 heures-semaine,
ça donnait une augmentation de 20 $
pour une semaine, ce n'était pas grand-chose. Cette année, avec son
0,35 $, à 40 heures-semaine ça donne combien, Mme la
Présidente? Ça donne 14 $ pour une semaine, d'augmentation du salaire
minimum, pour des gens qui nous nourrissent, nettoient... fait toute la job un
peu partout au Québec.
Est-ce que c'est
suffisant, 14 $ d'augmentation par semaine, du salaire minimum...
La
Présidente : Bon, je dois vous arrêter ici, monsieur, vous connaissez
le décorum, nous ne pouvons pas utiliser d'objet, et ce n'est pas un tableau
didactique. Il vous reste trois secondes.
M. Leduc :
Les gens méritent mieux, au Québec, M. le ministre. Travaillez mieux.
• (15 h 50) •
La
Présidente : La réponse du ministre.
M. Jean
Boulet
M. Boulet :
Oui, Mme la Présidente, cette hausse, encore une fois, elle est équivalente
à l'inflation anticipée, elle protège le pouvoir d'achat des personnes à
faibles revenus, elle respecte la capacité de payer. Il ne faut pas non plus
mettre en péril les emplois des personnes que nous voulons protéger. Ne
négligeons pas aussi la qualité du filet social
québécois, le Régime québécois
d'assurance parentale, les garderies
à contribution réduite. On est reconnus comme ayant des lois
progressistes, généreuses et qui permettent, à ce salaire minimum là, d'être,
encore une fois...
La
Présidente : En terminant.
M. Boulet :
...respectueux de tous les acteurs du marché de l'emploi. Merci, Mme la
Présidente.
La
Présidente : En question principale, je reconnais le député de
Pontiac.
Réorganisation
du système de santé
M.
André Fortin
M. Fortin : Vendredi, après que le ministre de la Santé a dit que
jamais il n'avait demandé au réseau de la santé
de couper 1,5 milliard en quatre mois, il y a un chroniqueur qu'on connaît
tous qui a demandé, à la radio : Bien, si je suis gestionnaire en
santé, qu'est-ce que je fais avec ma tronçonneuse, Mme la Présidente?
Parce que les coupures, en ce moment, là,
elles sont bien réelles. L'urgence à Trois-Pistoles, elle va fermer parce qu'il
y a eu une commande d'avoir des coupures dans cette région-là, Mme la
Présidente. Alors, je vais me réessayer avec le ministre de la Santé pour que
tout le monde dans le réseau puisse avoir un minimum de clarté.
Si ce n'est pas
1,5 milliard, combien de coupures est-ce que le gouvernement de la CAQ
demande de faire, en santé? Et est-ce qu'on peut avoir un budget exact pour
chacune des régions? Parce qu'en ce moment il y a des gens qui perdent des
services parce que les gestionnaires n'ont aucune idée de ce qu'ils ont besoin
de faire comme coupures.
La
Présidente : La réponse du ministre de la Santé.
M.
Christian Dubé
M. Dubé :
Mme la Présidente, j'ai déjà répondu maintes fois. Ce qu'on demande à nos
gestionnaires, c'est de respecter les
budgets qu'on leur a donnés. J'ai des conversations très régulières, comme j'ai
expliqué, Mme la Présidente, avec l'équipe de Mme Biron. Ils savent
très bien ce qu'ils ont à faire. C'est des gens qui connaissent maintenant le
réseau. Ils ont des discussions avec tous les P.D.G. Ils sont là pour
accompagner ceux qui ont plus de difficultés que d'autres, on le reconnaît.
Alors, Mme la
Présidente, cette équipe-là sait ce qu'elle a à faire. C'est une grande
transformation de notre réseau, puis on fait pleinement confiance à ces gens-là
pour trouver des solutions. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente : Alors, cela met fin
à la période de questions et de réponses orales.
Motions
sans préavis
Comme il n'y a pas de
votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis, et, pour
ce faire, je cède la place au troisième vice-président de l'Assemblée
nationale. Merci pour votre attention.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Alors, bon après-midi, collègues. En fonction de
nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais
un membre du groupe de la deuxième opposition, M. le député des
Îles-de-la-Madeleine... de la troisième opposition, troisième, M. le député des
Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
...Parti québécois, finalement. Merci, M. le Président. Je sollicite le
consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement
avec le député de Pontiac, le député de Rosemont et la députée de Vaudreuil, la
motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale demande au gouvernement du Québec la suspension du paiement des
primes salariales octroyées au personnel
d'encadrement et à la haute direction de Santé Québec tant qu'il y aura des
compressions dans le réseau de santé du Québec.»
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion?
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il
n'y a pas de consentement. Ce qui nous amène vers la prochaine motion, d'un membre du groupe formant le gouvernement, et
je cède la parole à Mme la ministre de l'Économie, de l'Innovation et de
l'Énergie.
Souligner l'importance de continuer le travail visant à
contrer la menace économique
de nouveaux tarifs douaniers et appeler tous les parlementaires
et tous les Québécois à unir leurs efforts en ce sens
Mme Fréchette :
Oui. M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin
de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Verdun, le
député de Jean-Talon, la députée de Vaudreuil et le député d'Arthabaska :
«Que l'Assemblée
nationale affirme l'importance de continuer le travail visant à contrer la
menace économique que représente les tarifs douaniers proposés par
l'administration Trump;
«Qu'elle réitère la
nécessité de développer et de promouvoir encore davantage l'achat local et
d'encourager les consommateurs québécois à acheter des produits du Québec;
«Qu'elle rappelle
l'importance de poursuivre la diversification de nos marchés d'exportation afin
de réduire notre dépendance économique envers le marché américain et
d'accentuer nos échanges commerciaux avec les autres provinces canadiennes et
le reste du monde;
«Qu'elle appelle tous
les parlementaires et tous les Québécois à unir leurs efforts face à cette
nouvelle menace économique.»
Merci.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion?
M. Lévesque
(Chapleau) : Consentement, sans débat, M. le Président.
Mise
aux voix
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Consentement, sans débat. Donc, cette motion
est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Adopté. Pour la prochaine motion, qui revient à
un membre du groupe de l'opposition officielle, je reconnais M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Beauchemin :
M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de
présenter la motion suivante conjointement
avec le chef du troisième groupe d'opposition, la députée de Vaudreuil et le
député de Saint-Jérôme :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte que selon le Budget 2024‑2025
du gouvernement caquiste, la croissance de la productivité au Québec est
de 0,1 % sur les cinq dernières années;
«Qu'elle prenne acte
que cette situation place l'économie et toutes les entreprises du Québec en
situation de faiblesse accrue dans le cadre du contexte tarifaire actuel;
«Qu'enfin, elle
demande au gouvernement caquiste de doter le Québec d'une politique de gains
réels en matière de productivité et d'établir des objectifs clairs de
recherche, de développement et d'innovation en ce sens.»
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Lévesque
(Chapleau) : ...pas de consentement, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Il n'y a pas de
consentement. Ce qui nous amène vers la prochaine motion, qui revient au
deuxième groupe d'opposition. M. le député de Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci,
M. le Président. J'aimerais saluer, dans les gradins, des délégations
syndicales, M. Luc Vachon, de
la CSD, M. Steve Couillard, Mme Jessica Harvey, d'Unifor, et
M. Pascal Côté, de la CSQ. Ils sont l'économie québécoise, eux et
elle aussi, et ils attendent un rendez-vous avec le premier ministre.
Mme la Présidente... M. le Président, pardon, je
sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante
conjointement avec le député de Jean-Talon :
«Que l'Assemblée nationale constate que le Premier
ministre consulte des dirigeants de grandes entreprises et de sociétés d'État
du Québec dans l'objectif de redéfinir notre économie dans un contexte
d'instabilité;
«Qu'elle
rappelle que l'avenir de l'économie du Québec ne peut être décidé en huis-clos
sans tenir compte des intérêts de toute la société québécoise;
«Qu'elle rappelle que les organisations
syndicales représentent les intérêts des travailleuses et des travailleurs,
dont celles et ceux qui risquent de perdre leurs emplois au courant des
prochaines semaines;
«Qu'ainsi,
l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'élargir ses consultations, pour
redéfinir l'économie québécoise, au reste de la société civile,
notamment les syndicats, les représentants de l'économie sociale et les groupes
écologistes.»
Merci.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Lévesque (Chapleau) : Il n'y
a pas de consentement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il
n'y a pas de consentement.
Avis touchant les travaux des
commissions
Ce qui nous
amène à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui.
Merci beaucoup, M. le Président.
J'avise cette Assemblée que la Commission de
l'aménagement du territoire va poursuivre l'étude détaillée du projet de loi
n° 79, la Loi édictant la Loi sur les contrats des
organismes municipaux et modifiant diverses dispositions principalement aux fins d'allègement du fardeau
administratif des organismes municipaux, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
19 h 15, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission de l'économie et du travail va
poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 87, la Loi concernant
principalement le développement et la mise en valeur de terrains industriels et
la gouvernance de la Société du parc
industriel et portuaire de Bécancour,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission des institutions va entreprendre
l'étude détaillée du projet de loi n° 88, la Loi modifiant la Loi concernant le régime de négociation des
conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur
municipal, aujourd'hui, après
les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à la salle Pauline-Marois.
• (16 heures) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le leader adjoint du gouvernement.
Pour ma part, je vous annonce que la Commission
spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes se réunira en séance publique aujourd'hui, après
les avis touchant les travaux des commissions, vers 15 h 15,
jusqu'à 17 h 40, à la salle Marie-Claire-Kirkland, afin de procéder à
la deuxième phase des consultations particulières et auditions publiques dans
le cadre des travaux de la commission.
Renseignements sur les travaux
de l'Assemblée
À la rubrique Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée, je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés
de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Cette motion se lit comme suit :
«Que l'Assemblée
nationale prenne acte que le ministre de la Santé exige des compressions
budgétaires de 1,5 milliard de dollars au réseau de la santé d'ici le 31 mars
2025;
«Qu'elle rappelle
que Santé Québec a aboli plusieurs centaines de postes à travers toutes les
régions et annoncé de multiples réductions de services;
«Qu'elle reconnaisse
que le système public de santé fait déjà face à un manque de personnel
soignant, à des fermetures d'urgences et à la vétusté des établissements;
«Qu'elle exige que
Santé Québec rende public le plan complet des compressions budgétaires en
santé;
«Qu'enfin,
l'Assemblée nationale reconnaisse que le gouvernement du Québec doit prendre la
responsabilité des 1,5 milliard de dollars de compressions en santé et de
ses conséquences sur les services aux citoyens.»
Affaires du jour
La période des
affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires
du jour.
Débat d'urgence sur l'imposition de tarifs douaniers par
les États-Unis
Aux
affaires du jour, l'Assemblée tiendra maintenant le débat d'urgence au sujet de
l'imposition de tarifs douaniers par les États-Unis demandé par
M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
Je vous informe que
la répartition du temps de parole se fera comme suit : 57 minutes
allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement,
31 min 4 s allouées au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, 20 min 34 s
allouées au deuxième groupe d'opposition, 6 min 51 s allouées au
troisième groupe d'opposition, 1 min 30 s allouée à
chacun des députés indépendants. Dans le cadre de ce débat, le temps non
utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires
sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions
établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront
soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle
aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours du débat,
ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la
présidence.
Je cède maintenant la
parole à Mme la ministre de l'Économie.
Mme Christine
Fréchette
Mme Fréchette : Merci. Merci beaucoup, M.
le Président. Alors, je tiens d'abord à saluer le collègue de Saint-Henri—Sainte-Anne,
qui vous a fait la demande de tenir un débat d'urgence sur l'imposition des
tarifs sur les exportations canadiennes vers les États-Unis, tarifs que je
qualifie de taxe Trump. Malgré le report...
Des voix : ...
Mme Fréchette :
Est-ce que je poursuis? Oui? Malgré le report de 30 jours de
l'imposition des tarifs, je crois tout de même que cette conversation est
importante. Il s'agit d'une bonne nouvelle, mais la menace n'est pas terminée,
donc il faut poursuivre le travail.
Alors, M. le
Président, je salue également les partis d'opposition qui appuient le
gouvernement de la CAQ dans le cadre des menaces de l'administration Trump
envers le Canada. D'ailleurs, les parlementaires ont adopté à l'unanimité une
motion de l'Assemblée nationale soulignant notre opposition à cette imposition
de tarifs douaniers. Permettez-moi de vous la relire rapidement, puisque je
pense qu'elle met l'accent sur le caractère d'unité qui habite les Québécois
face à cette menace. Cette motion allait comme suit :
«Que l'Assemblée nationale
exprime sa ferme opposition à ce que des tarifs douaniers soient imposés sur
des produits canadiens exportés aux États-Unis;
«Qu'elle affirme
qu'il n'est pas dans l'intérêt des États-Unis de créer un conflit commercial
avec le Canada et le Québec;
«Qu'elle réitère
l'importance d'être prêt à toute éventualité afin de protéger l'économie et les
entreprises québécoises; et
«Qu'elle réitère
l'importance de rester unis face à la menace de tarifs douaniers.»
Maintenant,
M. le Président, certaines personnes se retiennent de dire que l'imposition de
tarifs de 25 % constitue une
guerre commerciale, mais, n'ayons pas peur des mots, c'est réellement ce qui
est en train de se produire, si l'Administration américaine va de
l'avant.
Les États-Unis sont
en contravention complète avec nos accords de libre-échange et ils s'attaquent
directement à notre économie, à nos entreprises et aux emplois des Québécois,
et ça, c'est inacceptable.
Je
sais que ça préoccupe tous les députés des oppositions autant que nous, à la
Coalition avenir Québec. Et plus encore,
je sais que plusieurs sont inquiets pour la suite des choses. Les États-Unis,
on le sait, ils constituent notre premier partenaire commercial. Plus de 70 % des exportations québécoises de
marchandises sont destinées au sud de la frontière. Ces exportations,
elles sont liées à plus de 400 000 emplois au Québec, et il y a plus
de 9 300 entreprises québécoises qui brassent des affaires en sol
américain.
Alors, ma première
responsabilité, c'est de protéger notre économie, et nos emplois, et nos
entreprises. Avec le comité Québec—États-Unis, présidé par le premier ministre
M. Legault, et sur lequel je siège avec sept autres de mes collègues
ministres, nous nous rencontrons très régulièrement pour ficeler différents
scénarios d'actions et rester en phase avec ce qui circule sur le terrain.
En parallèle, on se
garde très connectés avec le milieu des affaires pour envisager les meilleurs
scénarios possibles. La semaine dernière, par exemple, j'ai rencontré la
cellule économique Beauce—États-Unis,
créée par le député de Beauce-Sud. Je souhaite comprendre, bien sûr, la réalité
de nos PME en région. Alors, j'ai rencontré, hier aussi, une soixantaine de
chefs d'entreprise afin de prendre leur pouls sur les impacts qu'auraient des
tarifs et surtout sur les solutions que le gouvernement peut apporter pour
soutenir l'économie et les entreprises.
Hier, le premier
ministre et moi-même avons rencontré M. Guy Cormier, président et chef de
la direction du Mouvement Desjardins, et M. Laurent Ferreira, président et
chef de la direction de la Banque Nationale, afin de sonder le milieu
économique et financier pour assurer le développement du Québec.
Je le répète, M. le Président, notre priorité,
c'est de protéger notre économie et nos emplois, et, M. le Président, nous allons nous battre pour y arriver. Je
continuerai à tenir des réunions régulières avec les représentants des
principales associations
économiques pour discuter des secteurs qui seront les plus touchés, par
exemple, comme ceux de l'aéronautique, de
l'aluminium, de l'industrie forestière, de l'agriculture, de l'agroalimentaire
et des semi-conducteurs, pour ne nommer que ceux-là.
En plus de tout ça,
notre gouvernement continue de faire pression sur le fédéral pour qu'il
resserre la gestion de la frontière canado-américaine, et je salue le pas que
le premier ministre Justin Trudeau a fait hier en ce sens. On a interpelé aussi
le fédéral pour s'assurer d'être impliqués dans les négociations à venir en ce
qui a trait à la révision de l'accord de
libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, afin que les
intérêts du Québec soient bien pris en considération. Bref, on est
actifs sur plusieurs fronts.
Par ailleurs, le
gouvernement du Québec a développé, au fil des années, un solide réseau à
l'international. Avec des délégations partout dans le monde, le Québec est l'un
des seuls États fédérés à être aussi présent à l'étranger. Il est essentiel de
travailler en étroite collaboration avec les États-Unis pour leur faire valoir
le haut degré d'intégration de la relation commerciale entre nos deux nations.
Et, dans cette
optique, il faut dire qu'on était au travail avant l'élection du nouveau
président. Le Québec est encore plus prêt qu'en 2016 pour travailler avec une
administration Trump. En prévision des élections, on a notamment augmenté de 20 % nos effectifs aux États-Unis
et on a rehaussé les représentations de Miami et de Washington au statut
de délégations.
Cela dit, il faut
tout de même commencer à considérer davantage de marchés d'exportation
alternatifs, comme l'Europe, comme l'Amérique latine, comme l'Asie, pour être
moins dépendant du marché américain. J'étais à Davos récemment pour poursuivre
notre discussion avec d'autres marchés d'exportation et pour rencontrer des
entreprises québécoises qui ont un pied-à-terre à l'étranger. Le message que
j'ai porté là-bas, c'est que le Québec est un partenaire d'affaires de premier
plan pour réaliser des projets d'envergure. On doit profiter davantage des
opportunités découlant de nos accords de
libre-échange, comme celui avec l'Union
européenne ou encore avec l'accord
transpacifique, et faire valoir à nos partenaires que le Québec est la
place pour développer leurs entreprises.
Dans l'avenir, on
doit aussi promouvoir davantage le commerce interprovincial avec nos
partenaires canadiens. Mon collègue le
ministre délégué à l'Économie et député de Sainte-Rose fait d'ailleurs partie
d'un comité sur le commerce intérieur avec des représentants du gouvernement
fédéral et de toutes les provinces et territoires. Ils se sont rencontrés
pas plus tard que vendredi dernier pour établir une liste des barrières qui
pourraient être éliminées rapidement afin de faciliter nos échanges, et le
ministre vous en parlera plus en détail, M. le Président. La situation actuelle
nous démontre clairement qu'il est essentiel
pour les entreprises québécoises de diversifier leurs marchés d'exportation, et
il faut y voir dès maintenant.
Cela dit, une chose
m'est apparue claire ces derniers temps avec les propos tenus par le président
Trump, c'est qu'on doit faire le point sur
nos atouts, sur ce qui nous distingue et sur ce qui fait du Québec un
partenaire incontournable pour les Américains, parce que ce sont nos
atouts qui vont faire la différence dans le cadre des négociations et des
échanges à venir.
Par exemple, en
matière d'énergies propres, est-ce qu'on est vraiment conscients que l'énergie
renouvelable produite au Québec équivaut à 22 % de toute l'énergie
renouvelable produite aux États-Unis? Le Québec est une véritable puissance nord-américaine en matière d'énergie renouvelable.
Or, c'est un actif recherché et un actif dont la valeur va aller
croissante dans un contexte de transition énergétique comme celui que l'on
connaît.
• (16 h 10) •
Si on prend également
l'aluminium, ça va être très difficile pour les États-Unis de se passer de
nous, surtout qu'ils ne souhaitent plus importer d'aluminium de Chine.
Pourquoi? Parce que le Québec produit plus de 70 % de tout l'aluminium
primaire en Amérique du Nord. Et, avec notre technologie révolutionnaire, qui
est appelée Elysis, on va se démarquer
encore plus comme leader de cette industrie en produisant l'aluminium le plus
vert au monde. Et c'est vrai non seulement pour l'aluminium, mais dans
une série d'autres secteurs stratégiques.
Notre expertise et
notre capacité d'innover en matière d'aérospatiale, en matière de sciences de
la vie et technologies de la santé, en matière d'intelligence artificielle, de
technologies quantiques, de semi-conducteurs, notre expertise dans ces
domaines-là est reconnue à travers le monde. Il faut être fier de nous, de nos
atouts et des secteurs dans lesquels on est des leaders et il nous faut miser
sur ces forces pour nous démarquer à l'échelle internationale.
Ma collègue la
députée de Rimouski, ministre des Ressources naturelles et des Forêts et
ministre responsable de la région du Bas-Saint-Laurent et de la région de la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine,
vous en parlera d'ailleurs plus longuement, mais on dispose aussi d'un nombre
important, il faut le souligner, de minéraux critiques et stratégiques sur
notre territoire, qui vont nous permettre de propulser l'innovation et le
développement technologique dans plusieurs secteurs. Je pense aussi à la
filière batterie, où le Québec est une véritable plaque tournante à l'échelle
nord-américaine.
Et cette liste de nos
atouts, bien sûr, elle n'est pas exhaustive. Je pourrais vous parler de nos
forces, en fait, encore longtemps parce que notre tissu industriel foisonne
d'ingéniosité et de PME innovantes qui apportent des solutions à la fine pointe
de la technologie et aux grandes entreprises québécoises, canadiennes et
internationales.
D'ailleurs, ce qui
est clair, c'est que Donald Trump a tout faux lorsqu'il dit qu'il n'a pas
besoin du Canada et, par conséquent, du Québec. Les États-Unis s'appuient sur
de nombreuses entreprises et secteurs d'activité du Québec pour plusieurs de
leurs chaînes d'approvisionnement d'importance. Les contrecoups subis par les
Américains avec l'imposition de tarifs, notamment en matière de hausse de prix
de nos exportations, vont se faire sentir dans plusieurs sphères, plusieurs
sphères économiques et politiques aux États-Unis, s'il advenait que des tarifs
soient imposés. Et la pression exercée par les entreprises américaines sur
leurs dirigeants va rapidement suivre. Déjà, la saga des derniers jours a
généré un vent d'inquiétude chez plusieurs dirigeants politiques et économiques
et chez plusieurs dirigeants d'entreprise aux États-Unis. On doit rester proche
de ces alliés parce qu'il n'y a rien comme un Américain pour convaincre un
Américain.
Maintenant,
comme je l'ai dit, mon objectif premier, c'est de protéger nos entreprises et
protéger notre économie. Notre gouvernement sera au rendez-vous pour soutenir
celles qui pourraient être particulièrement touchées en raison de l'importance
de leurs exportations vers les États-Unis. C'est le rôle de notre gouvernement
de les aider à demeurer productives, à demeurer compétitives sur leur marché et
à les aider à travailler cette période difficile, si le président américain met
sa menace à exécution.
Sur ce, je vais
m'arrêter ici, M. le Président, mais, comme vous l'avez entendu, je pourrais
parler encore longtemps de tous les atouts que le Québec a à offrir au monde et
à quel point l'administration Trump se trompe avec une menace de guerre
tarifaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la ministre. Je reconnais tout de
suite Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition et députée de Mercier.
Mme
Ruba Ghazal
Mme Ghazal :
Merci beaucoup, M. le Président. Je suis vraiment très heureuse de me lever
aujourd'hui pour le débat d'urgence qui a été demandé par le leader de Québec
solidaire. On vit aujourd'hui un moment historique, et c'était très important
que tous les députés à l'Assemblée nationale, on puisse s'exprimer et on puisse
apporter des propositions face à la
situation exceptionnelle qu'on vit. Un débat d'urgence, c'est quelque chose de
rare, d'exceptionnel, mais la situation qu'on vit en ce moment, face aux
menaces de Trump, mérite cette procédure d'urgence exceptionnelle à l'Assemblée
nationale. Donc, je suis très, très fière qu'on puisse tenir ce débat-là à la
demande de Québec solidaire, et je remercie Mme la présidente de l'avoir
accepté.
Même si on a un
sursis, là, de 30 jours sur les tarifs de 25 % sur nos exportations,
l'instabilité économique créée par les menaces de Trump, bien, mérite qu'on
continue à agir de façon rapide et à répondre par des mesures aussi
exceptionnelles face à cette instabilité. Même si les tarifs n'ont pas lieu
maintenant ou n'auront pas lieu dans un mois ou
dans deux mois, ça mérite quand même qu'on travaille activement à protéger
notre économie, à protéger les travailleurs et travailleuses, parce que
cette instabilité-là crée déjà un impact sur notre économie et sur les gens,
les Québécois et Québécoises.
Je veux aussi
remercier tous les partis politiques qui ont accepté aussi de participer à ce
débat. Ça a été accueilli avec ouverture, et
c'est important de le souligner, parce que les citoyens et citoyennes du Québec
aiment ça, quand leurs élus qui les
représentent travaillent ensemble pour leur bien-être, pour défendre leurs
intérêts. Moi, je sens énormément, et je suis certaine que c'est la même
chose pour vous, M. le Président, et la même chose pour tous les élus ici, à
l'Assemblée nationale, je sens énormément de colère, de peur, d'inquiétude de
la part de nos citoyens et citoyennes. Et on doit ici... nous avons la
responsabilité de pouvoir travailler fort ensemble pour les rassurer et pour
trouver des solutions pour eux et pour notre avenir.
Et, même si je trouve
que c'est important qu'on travaille en collaboration, c'est tout à fait correct
et c'est même bénéfique que nous ne soyons pas tous d'accord. Moi, j'ai hâte
d'entendre les solutions, par exemple, de nos collègues du gouvernement, j'ai
entendu, tout à l'heure, la ministre de la CAQ, la ministre de l'Économie,
d'entendre nos collègues du Parti libéral, du Parti québécois, mais ça ne veut
pas dire que nous allons tout le temps être d'accord. Et ça, c'est correct, de
ne pas être d'accord ensemble, c'est même important, c'est même sain dans une
démocratie saine. Et il faut encore plus le souligner aujourd'hui, alors qu'on
voit que la démocratie aux États-Unis, dans la société extrêmement polarisée
des États-Unis de Trump, à quel point elle est malade, cette démocratie. Donc,
on doit en tenir... en prendre soin encore beaucoup plus et avoir des débats, des
réels débats. Même si nous ne sommes pas d'accord, ça ne veut pas dire que nous
ne travaillons pas dans l'intérêt des Québécois et Québécoises.
On vit une époque
nouvelle, on fait face à Trump, un homme qui ne respecte aucune loi, qui ne
respecte aucune règle, aucun traité, un mythomane qui nous mène en bateau avec
des problèmes imaginaires, comme le fentanyl qui transite du Canada vers les
États-Unis, surtout le fentanyl perçu par les autorités américaines en
provenance du Canada, c'est... sur toute cette quantité de fentanyl qui est
perçue par les autorités américaines, seulement 0,2 % proviennent du Canada. C'est minime, ce n'est rien. De vouloir
mettre à mal toute l'économie au Canada, toute cette relation d'amitié qui
existe entre le Québec, entre le Canada et les États-Unis pour ce problème-là,
qui n'en est pas un, qui n'est pas un problème
d'urgence, c'est vraiment tout à fait irraisonnable de la part de cet homme-là.
Vraiment, Trump, il faut se le dire, et se le répéter, et se le rappeler, c'est
un homme qui n'a que faire de la réalité. Pour lui, la réalité, les faits, ça
n'existe pas.
Donc, la première
chose raisonnable qu'on doit faire, c'est de ne pas embarquer dans son délire,
de ne pas lui donner raison. Comme j'ai entendu ici, à l'Assemblée nationale,
on ne peut pas donner raison à cet homme-là parce qu'il ment. Et les faits, on
ne doit pas les laisser tomber parce qu'on veut lui plaire. On ne veut pas lui
plaire à n'importe quel prix. Ce qu'on veut,
c'est protéger notre monde. C'est la responsabilité du gouvernement, c'est
notre responsabilité comme élus, et, pour ça, il ne faut pas faire non
plus n'importe quoi.
La deuxième chose à
faire, qui est très importante, et je l'ai mentionné tout à l'heure, dans la
réplique à la déclaration ministérielle du premier ministre, c'est de rendre
notre économie moins dépendante des États-Unis et plus résiliente. Notre
économie, depuis des décennies, est beaucoup trop imbriquée avec les
États-Unis. Et c'est impossible de tout
changer ça du premier coup par un coup de baguette magique. On ne sera pas
prêts à changer notre économie, à la rendre plus autonome face aux États-Unis
le 1er mars, mais ça ne veut pas dire qu'il faut qu'on s'assoie sur nos
mains, ça ne veut pas dire que le statu quo peut continuer, au
contraire. Souvent, on le dit, hein, dans les crises, c'est aussi une opportunité pour se relever, c'est une
opportunité pour changer les choses, c'est une opportunité pour prévenir aussi
les situations qui pourraient être difficiles dans l'avenir pour
notre... pour nous, pour notre économie. Il faut commencer à diversifier, donc,
notre économie. Il faut un plan complet de diversification de notre économie.
Ma collègue la députée de
Verdun, tout à l'heure, quand elle va participer à ce débat d'urgence, va
nommer plusieurs propositions que nous avons, à Québec solidaire. Et on ne l'a
pas... on n'a pas pensé à ça récemment, depuis Trump, on n'y a même pas pensé
uniquement depuis la pandémie, l'achat local, avoir une autonomie économique,
avoir une autonomie aussi dans le secteur agroalimentaire, une souveraineté
alimentaire, une souveraineté économique. Ça fait des années qu'on en parle, à
Québec solidaire, ça fait des années que nous avons des propositions. Et on le
fait depuis notre fondation, depuis 2006, c'est peu dire.
Même pendant la pandémie, on l'a répété, on se
rappelle, pendant cette situation urgente où on a eu un... on a fait face à un virus qu'on ne connaissait pas. On
s'est rendu compte à quel point on était dépendants, par exemple, pour
les instruments médicaux, pour les produits pharmaceutiques des États-Unis et
d'autres entreprises dans le monde. Et ça fait depuis la fondation de Québec
solidaire quasiment que mon collègue l'ancien député de Mercier,
Amir Khadir, parle de Pharma-Québec, un
pôle de production de nos médicaments ici, de nos instruments médicaux, de
recherche aussi. Qu'est-ce qui a été fait depuis ce temps-là, depuis
20 ans? Rien. Qu'est-ce qu'on attend? On attend le prochain virus? Parce
que je ne veux pas être un oiseau de malheur, mais c'est tout à fait possible
que le monde fasse encore face à un autre virus, et on ne sera encore pas
prêts. À un moment donné, il faut faire des bilans des crises, et il faut
apprendre, et il faut agir surtout.
• (16 h 20) •
D'ailleurs, la semaine dernière, ma collègue la
députée de Verdun avait posé une question à la ministre de l'Économie, de nous
présenter un plan de réplique aux tarifs douaniers de Trump, et la ministre
avait dit qu'elle travaillait sur ça,
qu'elle était en rencontre avec les entreprises. Je comprends qu'elle a
continué, avec le premier ministre, à rencontrer des entreprises. Cette
fin de semaine, le premier ministre aussi disait qu'il regardait des avenues
possibles, qu'il veut réduire notre dépendance. Est-ce qu'il y a un plan? S'il
y a un plan, ça va être important que le gouvernement nous le présente de la
façon la plus transparente.
C'est important, le débat d'urgence qu'on est en
train de mener ici. On a deux heures de débat sur comment contrer les menaces
de Trump, mais, si le gouvernement, qui a tous ses ministères et qui a toute la
fonction publique à son service pour aider les Québécois... bien, ce serait important
aussi de nous impliquer puis de nous le sortir, ce plan-là, pour qu'on puisse en parler puis qu'on fasse ça de façon
transparente et non pas de le garder pour eux puis qu'on le découvre
avec tout le monde. Donc, cet aspect-là est aussi très important.
Comment est-ce que le gouvernement peut agir
très, très rapidement, là, pour protéger les Québécois face à cette instabilité
économique? Bien, le premier ministre, il l'a dit, on risque, à cause des
tarifs de Trump, de perdre 100 000 emplois,
100 000 emplois dans différents secteurs, surtout dans le privé.
Bien, il ne faudrait pas que lui aussi, comme premier ministre,
contribue à mettre des gens à la porte. Et en ce moment, malheureusement,
depuis quelques semaines, il y a eu des coupures : compressions en santé,
1 000 employés de moins en un mois; dans Chaudière-Appalaches, 30 postes coupés en santé mentale. On ne peut
pas se permettre de couper des emplois alors qu'il y a des emplois qui sont
déjà menacés par Trump. Donc, déjà là, d'arrêter les coupures et les jobs dans
les services publics, c'est déjà un pas qui va être très important.
Pensons à une famille... un couple, un homme qui
travaille, par exemple — je
dis un homme parce que souvent, malheureusement, ce genre d'emplois sont
genrés, puis je vais y revenir — qui travaille, par exemple, dans le
secteur de l'aluminerie et qui perd son emploi à cause des tarifs de Trump,
parce qu'il y a des coupures dans l'industrie et dans la compagnie où il travaille, et la mère de famille... par exemple, une
famille de deux enfants, la mère de famille qui travaille dans le
système de santé et qui voit son poste coupé à cause des décisions du ministre
de la Santé ou de Santé Québec, bien, je
veux dire, cette famille-là va s'appauvrir. Donc, il y a, déjà là, une
possibilité pour le premier ministre d'aider des Québécois à ne pas
s'appauvrir.
Une des raisons pour laquelle on a demandé ce
débat d'urgence et aussi pour laquelle j'ai demandé à M. le premier ministre d'écouter nos propositions, nous,
les oppositions, puis aussi de les mettre en application, c'est parce que,
des fois, le gouvernement, peut-être en
étant pressé, il ne peut pas rencontrer tout le monde, bien, des fois, il y a
des angles morts. Et on l'a vu
pendant la pandémie, quand il y a eu le couvre-feu, ma collègue la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques avait levé le drapeau rouge
en disant : Il est possible qu'il y ait des itinérants qui soient dehors,
qui n'aient pas aucun lieu où se rendre. Et malheureusement, le pire est
arrivé, un itinérant est décédé parce qu'il était dans la rue, il n'avait nulle
part où aller. Et ça sert à ça, le travail des oppositions et de Québec
solidaire.
Un angle mort dans la situation actuelle, c'est
l'impact économique sur les femmes, hein? M. Legault nous dit qu'il veut
contrer, ça veut dire qu'il veut que les chômeurs...
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Je vais vous rappeler,
Mme la députée de Mercier, donc, on appelle les élus par leur titre.
Mme Ghazal : J'ai dit «M. Legault»?
Ah! je suis désolée. Merci. Pardon. M. le premier ministre.
Donc, j'ai entendu M. le premier ministre aussi
dire qu'il voudrait que les chômeurs construisent des barrages. Tout ça, c'est
des secteurs d'économie, des secteurs d'emploi à majorité masculine, et c'est
souvent le cas, quand le gouvernement veut construire des infrastructures,
faire des barrages. Et on est d'accord avec ça, il faut que le gouvernement
investisse dans les infrastructures qui servent à tout le monde. On veut aussi
rapidement avoir une ligne bleue, rapidement
construire le tramway. Ça crée de l'emploi pour que les gens qui tombent au
chômage puissent travailler. Mais c'est quand même des emplois dans
les... à forte majorité masculine. C'est important que le gouvernement n'ait
pas dans son angle mort les emplois à majorité féminine, qui sont, pour la
grande majorité, dans les services publics. Par exemple, en santé, c'est
82 % de femmes; dans les... en enseignement, droit et services sociaux,
communautaires, gouvernementaux, 73 % de femmes.
Donc, ça, c'est un angle mort que le gouvernement devrait faire... auquel il
devrait faire attention.
Et je demanderai
aussi au gouvernement... Oui, ils sont connectés avec le secteur économique,
avec les entreprises, ils rencontrent des P.D.G., des hauts dirigeants
d'entreprise. C'est très important aussi de ne pas oublier les travailleurs et travailleuses, les syndiqués,
les représentants des travailleurs, travailleuses, de ne pas oublier aussi de
les rencontrer, de les écouter, parce qu'ils sont des acteurs très importants
pour notre économie. Et ce n'est pas vrai que
le gouvernement, en aidant par toutes sortes de moyens les entreprises, les...
que l'argent va percoler comme par magie et que les travailleurs et
travailleuses vont s'enrichir. Ce n'est pas ce qu'on a vu. À chaque fois qu'il
y a des situations économiques difficiles, l'argent qu'on donne ne
percole pas nécessairement. Il faut des mesures fortes et que le gouvernement n'ait pas dans son angle mort les
emplois à prédominance féminine et aussi les travailleurs et travailleuses.
Donc, c'est très urgent qu'il les rencontre et qu'il les considère comme des
acteurs économiques importants pour les Québécois et Québécoises.
Donc,
merci. Merci beaucoup. Et je remercie encore une fois tous les
collègues de participer à ce débat d'urgence qui a été demandé par
Québec Solidaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Mercier. Et je reconnais maintenant M. le député de
l'Acadie.
M. André
Albert Morin
M. Morin :
Merci, M. le Président. Alors, c'était important pour moi, cet après-midi,
de prendre la parole dans le cadre de ce débat d'urgence proposé par le
deuxième groupe d'opposition, en lien avec les tarifs qui sont imposés ou qui vont être imposés puisqu'à la toute
dernière minute il y a eu un sursis imposé éventuellement par le président
américain.
C'est une situation
sans précédent, et je peux très bien comprendre, M. le Président,
l'inquiétude des Québécois et des
Québécoises face à ces menaces venant pourtant d'un pays que l'on considérait
comme étant un pays allié et ami, mais je connais aussi la résilience
des Québécois et des Québécoises. Et, s'il y a une nation qui est capable de
faire preuve de créativité, c'est bien la nation québécoise. Je vous dirai que
cette incertitude que nous vivons doit devenir une opportunité, et ma formation politique, le Parti libéral du Québec,
sera toujours là pour le Québec, pour son économie. Nous sommes le parti de l'économie. Pour nous, ça
a toujours été le Québec d'abord, et on va s'occuper de, évidemment,
s'occuper de notre monde.
Et je vous dirai que,
présentement, un des moyens les plus efficaces pour redonner confiance aux gens
qui nous écoutent, c'est de leur démontrer
qu'on est capables de travailler ensemble, qu'on est unis, qu'on travaille au
sein de la fédération canadienne et qu'on est capables d'agir
rapidement. Toutes nos forces doivent être mises à contribution. On a le
talent, les idées, l'expertise pour le faire. Et la population du Québec pourra
toujours compter sur ma formation politique, le Parti libéral du Québec. Il
faut donc travailler ensemble à préparer une contre-attaque, parce que, comme
je le soulignais précédemment, nous avons un sursis. Espérons qu'il sera de
30 jours, on ne sait jamais. Et j'ai donc écouté avec attention
l'allocution du premier ministre, et il y avait beaucoup de paroles, mais je
n'ai pas vu ni entendu rien de très concret
de la part du gouvernement. Et je pense qu'aujourd'hui, si on a besoin de
quelque chose, ce sont des initiatives
concrètes. Et je vous dirai que, pour l'opposition officielle, j'en ai, des
mesures à proposer, des idées à partager avec les élus de cette Chambre
et avec le gouvernement.
Je
vous dirai qu'il est important et... de pouvoir utiliser notre diplomatie, nos
délégations à l'extérieur du Québec pour aider l'économie québécoise. Le
premier ministre a parlé, il disait : Moi, j'ai insisté pour que nos
délégations s'occupent d'économie. Soit,
mais moi, j'ai hâte d'avoir un plan très concret du gouvernement pour nous
expliquer et pour expliquer à la population ce qu'ils entendent faire
d'une façon très concrète. Moi, j'en ai, des suggestions.
D'abord, des états
généraux avec notre diplomatie québécoise pour être capables d'identifier
clairement quelles sont nos dépendances économiques afin d'être capables de
combler ces dépendances, faire le point avec nos délégués, travailler conjointement avec la fédération
canadienne, les autres provinces, mais évidemment, bien sûr, avec les
affaires... le ministère des Affaires étrangères du Canada.
• (16 h 30) •
Créer une cellule de
crise pour qu'on soit capables de diversifier nos marchés, notre économie. On
en a déjà parlé, mais il faut véritablement
un plan et un plan qui soit clair, un plan qui soit énoncé clairement, en toute
transparence pour que les Québécois
et les Québécoises soient au courant de ce que leur gouvernement va faire. Et
croyez-moi, nous, dans l'opposition officielle, on va y veiller.
Mais permettez-moi de
revenir à notre réseau de diplomates au Québec. Le Québec est privilégié. Nous
avons un réseau très étendu dans les autres provinces canadiennes, mais
beaucoup aux États-Unis. Et ça, je pense qu'il est très important que le gouvernement
nous présente un plan, un plan qui soit cohérent pour voir quels sont,
finalement, les missions, les critères, les
objectifs qui sont donnés à nos représentants à l'étranger. Et je vous dirai
que, quand on regarde la liste des délégations générales et des
délégations, il y en a plusieurs aux États-Unis, dans des villes importantes,
mais il ne faut pas non plus oublier l'importance de dialoguer avec des élus
américains, et là aussi le Québec est très bien
positionné, et je pense notamment au Council of State Governments, aux
États-Unis, et le National Conference of State Legislatures où le Québec
peut agir d'une façon efficace.
Donc, il faut que
tous ces efforts-là soient mis en place pour que nous puissions diversifier
notre économie, mais faire en sorte que nos
entreprises soient évidemment protégées, très important. Pourquoi parler aux
élus américains? Je demeure convaincu
que, si jamais le président des États-Unis d'Amérique change d'idée, bien, ça
va venir de l'interne, des gens qui le conseillent, et donc d'où
l'importance d'entretenir de bonnes relations
Mais je disais également
diversifier nos marchés. Il n'y a pas que les États-Unis d'Amérique. Pensons
notamment aux États unis du Mexique avec lesquels il y a un traité de
libre-échange et avec lesquels il faut continuer à développer un partenariat pour diversifier nos marchés. Ça m'apparaît
être totalement essentiel, et ça, c'est une mesure concrète.
Mais je vous dirai également : Pensons à
l'Europe, pensons aux marchés européens. Et, là encore, le Québec, à l'international, a des antennes, a des liens
dans plusieurs organismes internationaux. Je pense à l'Organisation mondiale du commerce qui est là, avec le Canada, l'Organisation
de coopération et de développement économiques. Le Québec est représenté via
la délégation canadienne. La francophonie économique... Et j'en ai déjà parlé
en cette Chambre précédemment, M. le Président, il faut développer ces
marchés, et, dans la francophonie économique, que ce soit le CONFEMEN, le CONFEJES
ou l'OIF, le Québec est membre à part entière de l'Organisation
internationale de la Francophonie. Nous participons à leurs initiatives
économiques.
Donc, faisons en sorte que, dans cette
diversification des marchés, ce ne soit pas uniquement le marché américain,
qu'on soit capables de diversifier et qu'on soit capables d'avoir un plan
cohérent pour être capables d'agir évidemment dans l'ensemble de la
Francophonie, et en particulier en Europe.
Le premier ministre nous disait qu'il a
rencontré notre délégué à Paris. Bien, soit, excellent! Quelles sont les
cibles? Le gouvernement aime ça parler de tableaux de bord. Est-ce qu'on
pourrait nous partager le tableau de bord? Est-ce
qu'on pourrait nous expliquer quels sont les objectifs, comment ils vont les
atteindre? Parce qu'en toute transparence ça permettrait évidemment aux
Québécois et aux Québécoises d'y voir plus clair. Il faut être capable, donc,
de fixer des objectifs économiques, et donc d'avoir un plan.
Et là-dessus,
évidemment, j'aimerais bien entendre la ministre des Relations internationales,
parce qu'il nous faut planifier. Il faut être capable de savoir
exactement où on s'en va, que ce soit en Europe, que ce soit au sein de la
Francophonie mondiale, mais que ce soit également en Asie. Et donc ça, c'est
excessivement important. L'Asie est un marché qui est en pleine évolution, et
il faut que le Québec soit capable de se positionner tout à fait à
l'international.
Je vous dirai
également que, face aux Américains, nous devons évaluer toutes nos
possibilités. Malheureusement, avec les décisions du président américain
actuel, on se rend compte qu'il y a un élément qui n'existe plus, et c'est
celui de la prévisibilité. Et dans le monde des affaires, dans le monde des
relations internationales, s'il y a un élément qui est important, c'est
celui-là. Donc, il faut être capable de diversifier, mais d'avoir évidemment un
plan.
Et je vous
dirais qu'au niveau des éléments très concrets, revoir les contrats
gouvernementaux avec les États-Unis, évaluer la possibilité de les
annuler, évidemment faire ça d'une façon cohérente et intelligente, voir s'il
n'y aura pas des pénalités, bien, il faut quand même regarder tous ces
éléments-là pour que le Québec soit bien positionné pour aider nos entreprises
québécoises. L'achat local est un élément, une façon de faire que le
gouvernement doit continuer, mais surtout amplifier, ça m'apparaît tout à fait
important. Revoir toutes nos chaînes d'approvisionnement, on en a parlé pendant
la pandémie, mais là il faudrait arrêter d'en parler, il faudrait le faire, et
le temps presse.
Donc, je m'attends également de notre premier
ministre qu'il soit présent lors d'événements internationaux importants avec
les Américains. J'en parlais la semaine dernière, il y aura bientôt, à
Washington, une rencontre des gouverneurs. Il est très important que le Québec
y soit, mais que notre premier ministre exerce un rôle de leadership et qu'il
soit là pour parler à ses homologues américains. Ceci m'apparaît tout à fait
essentiel.
Donc, oui, il faut réagir, mais il faut un plan,
il faut faire preuve de transparence, il faut être capable de diversifier nos
marchés et d'avoir un plan global au niveau, évidemment, de nos relations
internationales, travailler conjointement avec le gouvernement canadien pour
être capable de bien positionner le Québec et travailler avec les autres
provinces pour faire en sorte que notre économie soit dorénavant diversifiée,
qu'on soit capable d'aider des entreprises et surtout, surtout, qu'on ait un
plan. Je pense que, s'il y a quelque chose qu'on peut retenir de ce débat et qu'il faudra faire, c'est évidemment parler de
transparence. Nous, on est là pour collaborer, mais encore, là, faudrait-il
que le gouvernement ait un plan, un plan
clair pour le Québec, pour nos gens, parce que nous, évidemment, on va y
veiller. Et, comme je vous le soulignais d'emblée, et je termine
là-dessus, pour nous, au Parti libéral du Québec, c'est le parti de l'économie,
et ça va être nos gens, et ça va être le Québec d'abord. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de l'Acadie. Et je reconnais maintenant M. le député de
Jean-Talon.
M. Pascal Paradis
M. Paradis : Merci au collègue
de la deuxième opposition de nous offrir cette opportunité de discuter de ce
thème extrêmement important, avec l'appel du premier ministre tout à l'heure
ici, en Chambre, à ce qu'on collabore. Il
nous invite aussi à garder la tête froide. On est d'accord à répondre à cet
appel — en
fait, on y répond — à
la collaboration, dans une ère où, oui, on a besoin d'unité au Québec
face à une nouvelle administration américaine qui fait fi des règles du droit
commercial international en adoptant des mesures d'une ampleur inédite, avec
cette menace de tarifs qui plane toujours sur nos têtes.
• (16 h 40) •
Mais je trouve ça intéressant que le
gouvernement, donc le premier ministre, dans son discours, je le cite, nous dit
qu'il tend la main à tous les députés, qu'il tend la main aux entrepreneurs,
aux travailleurs, aux chercheurs, à tous les Québécois, qu'on va avoir besoin
de tout le monde dans cette grande corvée, qu'on est ouverts à toutes les
idées, à toutes les suggestions. J'invite le gouvernement et j'invite le
premier ministre, déjà, à tenir parole et à faire ce qu'il dit. Parce que le
Parti québécois a offert, il y a presque un mois déjà, qu'on discute ensemble
et qu'on ait une stratégie commune, qu'on se rencontre,
qu'on se parle. On n'a même pas eu de réponse encore du premier ministre à la
lettre que le chef de la troisième opposition lui a transmise.
On apprend
aujourd'hui — il
nous parle des travailleurs — que les grandes centrales québécoises ont
demandé à le rencontrer pour parler de cette question-là, et ils ont... ils
n'ont pas eu de réponse. Le premier ministre du Canada le fait. Au Danemark,
par exemple, parce qu'il y a une menace relativement au Groenland, la première
ministre s'est empressée de regrouper les forces vives. Et là le premier
ministre nous parle de le faire à la Québécoise mais n'accepte même pas encore
la main. Elle est déjà tendue, de la part des oppositions, et on n'a toujours
pas de réponse.
Il y a eu une motion,
qu'on vient de proposer aujourd'hui, elle a été refusée, pour qu'on parle à
tous les acteurs, notamment ceux de l'économie sociale, les syndicats; ça a été
refusé. La première opposition a proposé qu'on s'entende sur la nomination d'un
négociateur en chef, d'un porte-parole de nos intérêts commerciaux, toujours
pas de réponse. Alors, s'il y a une main tendue, il faut que ce soit la
réalité.
Soutenir nos
entreprises, nous dit-on dans le discours, qui ont des problèmes de liquidités.
Mais qu'est-ce que ça signifie? Est-ce que ça signifie qu'on va répéter les
mêmes erreurs que pendant la pandémie? Est-ce qu'on s'apprête déjà à avoir un
plan de subventions? Si oui, quel est-il? Quel est ce plan? On n'en sait rien.
En fait, on ne sait rien encore des intentions du gouvernement dans sa réaction
face à cette menace de tarifs de l'administration américaine.
Idem pour les
frontières. Ça fait des années qu'au Parti québécois on parle de l'importance
d'avoir une gestion normale de nos frontières, pas une gestion d'un État
postnational où s'occuper de nos frontières, ce n'est pas important, voire
c'est quelque chose de mal. C'est juste la normalité pour les États de
s'occuper de leurs frontières.
Aujourd'hui comme par
les années passées, ce n'est pas juste la présente administration, les
États-Unis nous disent : C'est une préoccupation pour nous aussi, et on
veut voir des actions concrètes. Là, le gouvernement fédéral vient de présenter
son plan frontière hier. Mais où est le gouvernement du Québec là-dedans?
Quelle est sa voix relativement à la question de la gestion de la frontière?
Que dit le ministre de la Sécurité publique, qui encore il y a quelques jours,
il y a deux semaines, ridiculisait ceux qui disaient que, oui, il y a des
problèmes de trafic à la frontière puis il faut s'en occuper? Alors, quel est
le plan du Québec par rapport à ce que le gouvernement fédéral a proposé hier
et quels sont les intérêts, comment veillent-ils, le ministre de la Sécurité
publique et le gouvernement du Québec, à la protection des intérêts du Québec à
l'intérieur de cette phase de négociation qui commence, qui s'amorce avec les
États-Unis puis se continue avec les États-Unis?
Donc, parlant des
intérêts du Québec, on l'a mentionné tout à l'heure dans l'intervention de
notre chef, la question de la diversification est extrêmement importante, et,
bravo, le gouvernement du Québec l'a enfin entendue. Ça fait des semaines,
nous, qu'on dit qu'à court, moyen et long terme c'est ça, la priorité. Alors,
que la ministre se mette en action, son absence en Chambre sera motivée, M. le
Président. Qu'elle parle au monde entier, pas seulement au Canada, pas
seulement à l'intérieur de nos frontières, qu'elle aille en Europe, qu'elle
aille en Asie, qu'elle aille en Afrique, qu'elle aille en Amérique latine et
qu'elle amène avec elle une véritable équipe Québec, une autre proposition du
Parti québécois à laquelle on attend toujours une réponse qui n'a toujours pas
été formée. Donc, qu'il y ait des missions commerciales d'une envergure sans
précédent qui soient organisées dès maintenant. Ça se fait, ça. Puis nos
partenaires nous attendent, ils ont les mêmes inquiétudes, ils voient les mêmes
choses que nous. S'assurer que notre réseau diplomatique international est
optimal : Est-ce que nous avons les bonnes personnes dans tous les bons
postes? Est-ce qu'on a assez de l'expertise québécoise qui est regroupée au
sein de cette véritable équipe Québec pour qu'on puisse tirer le maximum de
cette expertise qu'on a au Québec en affaires internationales?
Quel est le plan par
rapport aux petites et moyennes entreprises? On a proposé, nous, déjà, il y a
plusieurs jours, des mesures fiscales pour favoriser les exportations, les
nouvelles exportations, de les rendre non imposables. Que répond le
gouvernement à ça? L'accompagnement des petites et moyennes entreprises, débureaucratiser,
enlever les embûches. Est-ce qu'on va continuer à donner notre argent à des
multinationales étrangères ou on va investir encore plus dans nos entreprises
locales? L'achat local, on n'a pas réussi Le Panier bleu, mais comment on va
faire pour favoriser les efforts québécois pour l'achat local? Qu'en est-il des
achats gouvernementaux? Qu'en est-il du contenu québécois des projets
d'éoliennes qu'on annonce? Qu'est-ce qui va se passer avec l'argent des
contre-tarifs, s'il y a des contre-tarifs, dans une guerre commerciale? Est-ce
que le Québec va avoir son mot à dire? Est-ce qu'on va toucher notre part des
recettes ou ça va aller dans le fonds consolidé fédéral? S'il y a une guerre
commerciale, quelles mesures budgétaires? Parce que ce gouvernement a affaibli
la position du Québec avec les dépenses frivoles des sept dernières années, des
mesures fiscales mal avisées. Qu'est-ce qui va se passer avec l'électricité du
Québec? Est-ce qu'on met ça sur la table en premier ou on va ne pas laisser
l'Alberta s'en tirer à bon compte en disant : Tout sauf le pétrole? C'est
le pétrole, notre principal outil de négociation.
Alors, on demande du
gouvernement, M. le Président, de la transparence, une véritable ouverture au
dialogue, un véritable plan, et on sera prêts à travailler ensemble, sinon on
va faire notre travail...
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci, merci. Merci, M. le député de Jean-Talon.
Et je reconnais maintenant Mme la ministre... Attendez. Je l'ai vue avant, je
l'ai vue avant. Donc, je cède la parole...
Des voix : ...
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a une entente?
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Parfait.
Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Verdun.
Mme Alejandra Zaga Mendez
Mme Zaga
Mendez : Merci, M. le Président. Moi, ce que j'ai le goût de vous
parler dans mon intervention, ce sont des propositions. Je pense que c'est le
moment d'amener des idées sur la table. On a entendu le premier ministre nous
dire qu'on va lancer une corvée nationale, et c'est le temps de discuter
comment, dès maintenant, on va être capables de trouver des solutions pour
défendre le Québec. Mais, pour ça, M. le Président, il faut qu'on soit d'accord
sur une chose : c'est qui, la priorité, qui on va mettre, d'abord et avant
tout, dans toutes les différentes solutions que nous allons trouver. Et, pour
nous, c'est simple, notre priorité, ce sont les travailleurs et travailleuses
du Québec. Il faut que tout le monde ici, on s'entende sur ça, le plan de
sauvetage, l'aide qu'on va donner aux entreprises. Il faut penser d'abord, avant tout, aux travailleurs et
travailleuses. On le sait, c'est quoi, les principaux secteurs qui vont être
touchés dans notre économie. C'est l'aluminium, parce qu'il y a 96 % des
exportations qui s'en vont vers les États-Unis, c'est près de
8 milliards de dollars. C'est la... aéronefs, 64 % des exportations
vers les États-Unis et une valeur de 6 milliards de dollars.
Et je veux vous
parler plus en détail de deux secteurs. Nos produits alimentaires, c'est
89 % d'exportations et une valeur de
3 milliards de dollars. Et ici je fais attention, ce n'est pas des
travailleurs, travailleuses, c'est nos producteurs et productrices
agricoles, nos agriculteurs qui nous nourrissent, qui nourrissent le Québec,
qui prennent soin de nos terres et qui déjà, à chaque fois qu'on négocie des
traités de libre-échange, ils sont menacés. On sait que les États-Unis veulent
aussi avoir le contrôle de l'offre en ce qui concerne les produits laitiers,
ils veulent inonder le marché québécois de leurs produits. Il faut qu'on soit
capable de protéger nos producteurs et productrices d'une façon particulière.
Il y a un secteur
important et qui n'est pas le moindre, c'est le secteur du bois d'oeuvre :
95 % des exportations, une valeur de 3 milliards. C'est près de
57 000 emplois qui sont à risque en foresterie. Puis il faut
comprendre que, depuis la mi-août,
Washington a déjà imposé des tarifs de 14,5 % sur les importations de bois
d'oeuvre canadien. Ça veut dire qu'une menace de 25 % s'ajoute au
14 %, ce qui donne un total de 40 %. Et ça, ça peut être dramatique,
voire fatal pour les 57 000 personnes qui travaillent en foresterie
au Québec.
Ce
n'est pas seulement des chiffres qu'on présente. Derrière chaque chiffre, il y
a des histoires, il y a des travailleurs, il y a des familles, il y a
des communautés entières qui risquent de se trouver sans emploi si on ne
commence pas dès maintenant à mettre des mesures.
• (16 h 50) •
Comme je vous disais,
tous les plans de sauvetage et des aides à ces secteurs doivent avoir comme
priorité nos travailleurs et travailleuses. Et je salue la présence des membres
des syndicats qui sont ici pour nous le rappeler. Ça veut dire quoi? L'aide
qu'on donne, chaque dollar qu'on donne, que ce soit en subvention ou en prêt,
ce soit destiné pour maintenir des emplois. Ce qu'on ne veut pas voir, c'est
des P.D.G. qui vont se voter des bonis ou augmenter les dividendes aux
actionnaires. C'est l'argent qui doit aller directement dans la sauvegarde des
emplois. C'est de l'argent qui doit maintenir nos fermes familiales et ne pas
être au profit des grands conglomérats de l'alimentation. Nous, ce qu'on
souhaite, puis c'est la première solution qu'on met sur la table, qu'il y ait
une condition : à chaque subvention et prêt qu'on donne, que ce soit
directement pour aider nos travailleurs et travailleuses, et, s'il ne peut pas
sauver l'emploi dans cette entreprise, bien, qu'on soit capable de les
accompagner, parce que, malheureusement, il y a certains secteurs qui vont bouger,
on ne le souhaite pas, mais il va falloir les accompagner. Et là l'État doit
jouer un rôle, parce que l'État peut être un employeur exemplaire, mais, en ce
moment, l'État québécois ne l'est pas.
Notre deuxième mesure
qu'il faut mettre dès maintenant, c'est arrêter les coupes dans le secteur
public. Ce n'est pas possible que la CAQ, qui fait des grands discours sur la
nécessité de protéger les emplois, soit le premier architecte des pertes
d'emplois actuellement au Québec. J'ai le goût de nous rappeler ce que ma
collègue la députée de Mercier nous disait : il y a
1 000 emplois en santé, en l'espace d'un mois, qui sont... qui ont
disparu, qui ont été coupés, et c'est inacceptable. Ce n'est pas acceptable
qu'en ce moment on coupe dans la fonction publique. Pour un couple ou un
ménage, si une personne perd son emploi dans la foresterie puis se tourne vers
l'autre personne, puis cette personne-là n'a
plus son emploi comme infirmière auxiliaire, ça ne marche pas. L'État doit
arrêter de couper des postes, c'est la chose à faire.
Le troisième volet
dont j'ai le goût de vous parler rapidement, c'est de s'attaquer au coût de la
vie. Les Québécois et Québécoises ont un
seul portefeuille. Ils vont sortir du même compte de banque... ils vont
absorber le prix des tarifs, ils vont absorber les hausses à l'épicerie puis
ils vont absorber aussi la hausse des loyers. Notre... Le moyen que nous, on demande, c'est de plafonner les
hausses de loyer et limiter cette hausse à l'inflation autour de 3 %. On
vous rappelle que c'est... ce que le
TAL a annoncé, c'est un minimum de 6 %. C'est énorme. Dans un
environnement d'instabilité, on ne
peut pas continuer comme ça. Plafonner la hausse du loyer à 3 % va
permettre de donner l'oxygène et nous préparer aux... à absorber le coût
de la vie, qui risque d'augmenter.
Finalement, il faut
parler de santé économique au Québec. C'est presque à chaque crise ou cycle
qu'on se rappelle qu'on a un marché local, on se rappelle qu'on doit soutenir
nos entreprises au Québec. Et ça, il faut arrêter de juste être en réaction, il faut être encore plus proactif. Il faut
continuer à mettre tous les efforts pour augmenter notre demande de
produits locaux. Qu'est-ce que ça veut dire, augmenter la demande? Ça veut dire
que l'État québécois doit s'engager à mettre
des quotas d'achat de produits locaux dans l'alimentation dans nos
institutions, dans la construction des infrastructures. Désormais,
chaque édifice et infrastructure qu'on construit, une école, un hôpital ou un
tramway, doit être fait avec des matériaux
faits au Québec. Chaque fois qu'on va à l'hôpital puis qu'on demande un repas,
là-dedans, on doit trouver des ingrédients puis des produits québécois.
C'est pour ça qu'il faut des quotas qu'on a dans l'approvisionnement des
marchés publics.
J'aurais pu vous parler également d'autres
solutions, comme changer notre code du bâtiment pour encourager la construction
du bois d'oeuvre ou relancer tous nos projets de transport en commun. C'est une
façon d'augmenter la demande, de créer de l'emploi, un
emploi qui est durable et qui va nous permettre de sauvegarder, ici, notre
économie. C'est ça, nos différentes attentes, M. le Président, et je vous
remercie pour le temps.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Verdun. Et je reconnais maintenant M. le ministre
de... ministre délégué à l'Économie.
M. Christopher
Skeete
M. Skeete :
Merci beaucoup, M. le Président. On se côtoie souvent en lien avec la lutte
au racisme, mais, vous avez raison, je suis aussi le ministre délégué de
l'Économie.
Bien,
vous savez, nous vivons des moments, ma foi, de changement et de
bouleversement. L'économie traditionnelle, le monde traditionnel qu'on a connu,
de l'ère Deuxième Guerre mondiale, est terminé, M. le Président. C'est mon
constat des dernières semaines, des dernières années, les normes internationales,
les amitiés internationales vont changer.
Vous savez, j'ai eu
la chance, depuis le début de mon mandat, à voyager assez souvent aux
États-Unis. J'ai fait des missions à New York, j'ai fait des missions au Texas,
j'ai fait des missions en Californie. Et, partout où je vais, les gens comprennent l'importance de faire affaire
avec le Québec. Par contre, il y a comme un narratif, une trame de fond de protectionnisme qu'on a vu grandir depuis les
dernières années. On se fait souvent critiquer, M. le Président : Ah! la
CAQ n'a rien vu voir... vu venir. Mais, M. le Président, c'est faux, ça fait
longtemps qu'on voit venir cette montée du protectionnisme.
C'est la raison pour
laquelle on est rendu maintenant à 10 bureaux du Québec aux États-Unis. On
a augmenté les effectifs, on a rajouté 22 personnes sur le territoire
américain pour essayer de renforcer le message qu'on est un partenaire de choix. M. le Président,
32 États sur 50 comptent le Canada comme premier partenaire d'échange.
Comment on peut penser que le Canada fait partie des problèmes que les
États-Unis vivent? M. le Président, ça m'échappe, mais force est de constater
qu'on est ailleurs.
La
bonne nouvelle, M. le Président, jamais le Québec n'a été aussi présent à
l'international, jamais. Vous savez, M. le Président, on a fait, en 2019, une
réforme d'Investissement Québec. Cette réforme d'Investissement Québec
nous a permis de mettre l'accent sur le
commerce international à l'intérieur de nos missions du Québec. Finis les
représentations simplement pour représenter. Maintenant, on avait des
objectifs chiffrés pour nos délégations. Résultat des courses, M. le Président, selon Investissement Québec,
c'est 13 milliards de retombées économiques qu'on a vues grâce à cette
nouvelle formule mise de l'avant depuis 2019.
On s'est fait
critiquer, M. le Président. Les oppositions nous ont dit : Vous dépensez
trop, vous en faites trop, vous êtes trop présents, vous attirez trop
d'entreprises, on veut juste le local, on veut juste le local. Puis, aujourd'hui,
tout à coup, quand on réalise notre
dépendance, en tant que... d'économie d'exportation, là, tout à coup :
Bien là, faites plus de missions.
Faites plus de missions, M. le Président, c'est ça qu'ils nous disent
aujourd'hui. Comme si on ne le savait pas, comme si on n'a pas écrit le
livre, M. le Président.
J'ai
rigolé aujourd'hui parce qu'on nous disait : Il faut multiplier les
missions à l'Europe. Il faut aller en Europe, apparemment. Comme si on ne le
savait pas. Imaginez, M. le Président, si j'arrivais demain en cette Chambre
puis je vous disais : Aïe! On est allés en Suède puis on a attiré une
entreprise dans la transition énergétique. Qu'est-ce que les gens
diraient aujourd'hui? Il y a à peine quelques mois dans cette Chambre, les
oppositions critiquaient le gouvernement du
Québec sur un projet avec une entreprise suédoise en lien avec la transition
écologique, qui nous aide à faire la transition verte, qui joue dans
notre créneau d'avenir.
Alors, les
oppositions qui, aujourd'hui, ont vu la lumière sur la diversification de nos
échanges, je pense qu'aujourd'hui force est de constater qu'on avait raison.
Puis je suis content qu'on ait eu raison, parce que les retombées économiques nous ont permis de réduire l'écart de richesse
avec l'Ontario encore cette année, M. le Président. L'année passée, on est passé de 16 % à 13 %
d'écart de richesse avec l'Ontario. Maintenant, c'est plus 11 %,
11,9 %. On continue de réduire
l'écart de richesse avec l'Ontario. Sur toute la planète, c'est au Québec... on
est la deuxième juridiction qui a eu le plus de croissance en termes de
dollars dans ton portefeuille. Imaginez la crise économique, imaginez
l'inflation qu'on a vécue, M. le Président, imaginez à quel point ça a fait
mal. Puis nous, toutes choses étant égales par ailleurs, on s'en sort mieux que les autres. Imaginez la
détresse ailleurs. Une chance qu'on avait une vision économique depuis le début. Une chance qu'on a visé bien. Une chance
qu'on a changé le mandat d'Investissement Québec pour aller à l'international
et diversifier nos accords et nos échanges.
Le premier ministre
l'avait dit tantôt, c'est vrai, nos transactions, notre volume a augmenté vers
les États-Unis. C'est vrai. Parce que c'est
un marché de proximité, parce qu'il y avait un boom économique aux États-Unis,
c'est vrai. Mais l'histoire ne dit
pas tout, quand on regarde cette donnée-là. On a aussi réussi à augmenter le
volume de transactions, le volume de dollars, le volume d'échanges avec
d'autres pays.
• (17 heures) •
Mais on n'a pas
arrêté là, M. le Président. Moi, j'ai la chance d'être le représentant du
gouvernement du Québec à l'intérieur de l'ALEC, l'accord du libre-échange du
Canada. L'ALEC se réunit à toutes les années pour discuter de comment on peut
réduire les barrières qui existent entre les provinces. Il y en a, des
barrières. Puis j'ai entendu un peu des gens ici, mais surtout les médias puis
les groupes de pression, dire : Bien, le Québec, lui, il est un mauvais
élève dans les échanges interprovinciaux.
Puis ils se servent du métrique... un métrique, M. le Président, le nombre
d'exceptions que le Québec a.
Une exception, là, pour les gens qui nous
écoutent, c'est... dans le fond, on se dit : Oui, bien, nous autres, on
est d'accord avec ça, mais on se donne le droit de ne pas répondre
favorablement à cette disposition-là, même si on est d'accord avec le principe.
Je vais vous donner un exemple.
Dans la mobilité de la
main-d'oeuvre, M. le Président, 30 % du temps, on donne l'accréditation
équivalente en dedans de cinq jours. Notre niveau de service est de
30 jours, dans la moyenne des transactions qu'on va avoir, pour accorder cette équivalence-là. Mais ce qui
alourdit le processus, c'est l'exigence du Québec sur le français. Moi, je
pense que c'est normal qu'un ordre professionnel exige le français pour
quelqu'un qui veut travailler et vivre au Québec. Mais ça, c'est une exception,
ça fait gonfler les exceptions, et donc les gens disent : Le Québec a des
exceptions.
En voulez-vous une autre, exception, M. le
Président? Nous, on est la seule juridiction qui dit : Si tu veux faire
l'acquisition d'une terre agricole, bien, il faut que tu sois résident du
Québec. Pourquoi qu'on fait ça? Pour protéger nos terres agricoles puis de
s'assurer qu'elle est exploitée par des Québécois, pas pour des fins de
spéculation. Bien oui, c'est une exception que les autres n'ont pas puis que
nous, on a.
Mais je vous demande : Dans ces deux
exemples que je vous ai donnés, est-ce qu'on peut vraiment chiffrer un problème? Moi, je pense que ça frappe
l'imaginaire, le Québec a plus d'exceptions. Mais est-ce que vraiment,
vraiment, si on enlevait cette barrière-là... Notre société serait affaiblie,
je crois, puis je ne suis pas sûr qu'on augmenterait le commerce pour autant.
Nous, on a décidé que c'était plus important de mettre l'emphase sur la
reconnaissance mutuelle et l'harmonisation des lois. Des termes
techniques, je vais vous l'expliquer rapidement, M. le Président.
Moi, si je fabrique un casque ici, au Québec, je
peux créer un casque qui est conforme à toutes les entités québécoises, mais ça
ne veut pas dire que le casque, lui, il est conforme à ce qui est écrit dans
les lois de l'Ontario ou de la Colombie-Britannique. Parce qu'eux, de leur
côté, dans leurs Parlements, ils ont écrit une loi pour leur casque, qui était
conforme à ce qu'eux, ils voulaient. Le problème, il est là. C'est qu'on est
10 Parlements, trois territoires qui, chacun d'entre nous, vont écrire des
lois qui sont bonnes pour nous, mais le réflexe de dire, oui, mais est-ce que
ça cause une barrière avec les autres n'y était pas avant. Là, maintenant, on
commence à avoir ce réflexe-là. On commence à l'avoir, mais est-ce qu'on peut
se dire qu'un casque fait en Alberta ou en Colombie-Britannique devrait être
conforme pour le Québec? Moi, je pense que oui.
Puis il y a du travail à faire sur la
reconnaissance mutuelle. C'est ça qu'on appelle la reconnaissance mutuelle et c'est là-dessus qu'on s'est engagés, vendredi
dernier, à Toronto, de travailler avec mes homologues ministres de l'Économie,
responsables des accords de libre-échange. On s'est dit : On ne va pas
s'éparpiller sur tous les secteurs, tous les produits qui peuvent exister en
dessous du soleil. On s'est dit : On va se concentrer sur cinq à
10 dispositions précises pour voir c'est quels... ceux qui ont le plus de
valeur pour nous, ceux qui vont nous permettre d'aller plus rapidement.
La bonne nouvelle, M. le Président, c'est que,
d'ici le mois de mars, on va avoir une cartographie d'où mettre nos efforts. Puis, même avant ça, le Québec s'est
engagé à contribuer en participant dans un projet pilote sur le camionnage
pour harmoniser les règles du camionnage. Ça n'a pas été facile, M. le
Président. Les différents ministères, pas juste au Québec, un peu partout, ils
n'aiment pas ça quand on leur dit quoi faire. Ils n'aiment pas ça quand on
force des façons différentes de faire. Puis ils n'aiment surtout pas trop, trop
s'harmoniser parce qu'ils se disent toujours : On est différents. Mais, en bout de ligne, c'est ça, les
barrières qui existent à l'intérieur du commerce... du commerce libre à
l'intérieur du Canada, et c'est là-dessus qu'on s'attarde, M. le
Président, pas les exceptions qui sont un arbre qui cache la forêt.
Juste pour vous dire, pour confondre les sceptiques,
parce que je pense que ça vaut la peine de le dire, j'ai parlé des délégations
du Québec un peu partout dans le monde, mais le saviez-vous qu'on a aussi des
délégations à l'intérieur du Canada? On a
des bureaux à Moncton, à Ottawa, à Toronto. On a une antenne à Calgary puis à
Vancouver, M. le Président. Le rôle de ces gens-là, c'est d'accompagner
les entreprises québécoises à exporter leurs produits à l'intérieur des
provinces et d'aider les entreprises qui sont dans ces provinces-là à venir
chez nous investir.
Puis la bonne nouvelle, M. le Président, c'est
que ça marche tellement bien que, dans ma rencontre de vendredi, on s'est engagés auprès des pairs, mes homologues
ministres d'Économie... qu'on va leur montrer c'est quoi, la formule du
Québec, parce que la réalité, c'est que nous, la valeur de nos importations de
biens et de services en provenance des autres provinces s'élève à
95,9 milliards de dollars. Ça représente 32,8 % des importations
du Québec. On est des champions. Puis le premier ministre aime ça quand on se
compare à l'Ontario. L'Ontario, c'est 24,8 %, ça fait qu'on bat l'Ontario
en termes d'importations des autres provinces.
Ce narratif que, le Québec, il n'est pas
performant, j'en doute. Les chiffres disent le contraire. Le commerce québécois avec les autres provinces, en 2021,
c'était 172 milliards de dollars, et, depuis 2018, on a vu une
augmentation de 51 milliards dans le commerce interprovincial en
six ans, une augmentation de 34 %. Alors, je n'achète pas que le Québec ne
fait pas sa part, mais on peut continuer à en faire plus. Je vous parlais
d'harmonisation, reconnaissance mutuelle. Il y a beaucoup, beaucoup de travail
à faire à ce niveau-là.
L'autre affaire qu'on doit travailler, c'est
l'achat local. Moi, je suis responsable de l'achat local, et on a un organisme
qui s'appelle Les Produits du Québec. Les Produits du Québec, c'est un joyau.
Imaginez, M. le Président, un organisme qui certifie des biens pour être
sûr qu'ils sont réellement faits au Québec. Avant, n'importe qui se disait
Québécois, ça disait que c'était québécois parce que, bien, j'ai une adresse
postale au Québec, j'ai deux, trois employés au Québec, mon produit, il a été
peinturé au Québec, c'est un produit du Québec. Non. Les Produits du Québec ont
une norme certifiée, certifiable et valide, qui leur permet de donner une
distinction particulière.
Alors, les
gens qui veulent encourager l'achat local, je vous regarde aujourd'hui, je vous
le dis : Repérez ce logo-là, c'est la manière d'encourager l'achat
local au Québec. C'est plus de 200 entreprises qui ont été certifiées,
c'est plus de 95 000 produits qui
ont été certifiés, et ça, depuis seulement trois ans. L'achat local, ce n'est
rien de nouveau pour nous. Ma collègue
la secrétaire du conseil du... la présidente
du Conseil du trésor a passé une loi
qui donne le droit aux entreprises de mesurer le qualificatif dans les
appels d'offres. C'est un changement historique, M. le Président. Pour la
première fois, on ne se fie pas seulement sur le prix le moins cher pour faire
les acquisitions gouvernementales. Maintenant, on peut attitrer une notion
qualificative, un produit du Québec. Bien, il est-tu vraiment moins cher, ton
produit, s'il a fait 10 000 kilomètres
dans un conteneur puis qu'il n'a pas eu des retombées économiques? Mais
peut-être on devrait évaluer les retombées économiques à l'intérieur des appels
d'offres. Puis, en réplique au président, on va regarder toutes les façons
de faire pour encourager l'entreprise québécoise. Le premier ministre l'a dit,
je m'engage également à le faire, on doit continuer à vouloir faire de l'achat
local une priorité.
Puis je vais
me permettre de vous faire une observation, M. le Président, parce que... je
parlais tantôt des oppositions qui, aujourd'hui, peut-être, réalisent que,
oui, on a peut-être été un peu sévères avec les désirs du gouvernement d'aller chercher des contrats à l'extérieur, notamment en
Europe, notamment en Suède, on va se le dire comme ça. Bien, une autre place où est-ce que les oppositions n'ont pas
rendu la vie facile pour l'achat local, c'est dans le dossier du Panier bleu.
Ce qu'on a réalisé avec Le Panier
bleu, M. le Président, c'est que les entreprises québécoises n'étaient pas
prêtes à la transformation numérique.
Il y a eu des délais, il y a eu des problématiques à remplir les... la
technologie, de développer, de mettre les entreprises à point pour
qu'ils puissent livrer, signer les contrats d'entrepôt. Les gens l'oublient,
là, mais Amazon était déficitaire pendant plus de 10 ans avant d'être
rentable. Le Panier bleu, c'était quelques années. Puis je peux vous dire que
les questions des oppositions n'étaient pas tendres. Quand on parle de
solidarité, M. le Président, c'est surtout ça qu'on veut dire. C'est qu'à un
moment donné... faites votre travail, je le respecte, votre travail, mais on
avait une opportunité en or, puis malheureusement je pense qu'on a tiré dans la
chaloupe. Je pense qu'on a tiré dans la chaloupe, M. le Président.
Vous allez me permettre de parler de mon autre
passion, l'innovation, en terminant. Mon collègue, aujourd'hui, parlait de
l'écart de productivité, puis il a raison, il y a un enjeu de productivité, au
Québec. On doit augmenter notre productivité. Notre avenir en dépend. C'est
aussi simple que ça. Et j'invite les gens, les entreprises à venir nous voir, il
y a des programmes qui existent, au ministère de l'Économie, qui peuvent vous
accompagner dans votre transition numérique, mais c'est la solution pour nous
sortir de tous les défis futurs qui peuvent venir. Immunisez-vous du nouveau
monde, qui va être plus difficile, moins prévisible et surtout plus dangereux.
Merci, M. le Président.
• (17 h 10) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le ministre délégué à l'Économie. Et je reconnais maintenant M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Frédéric Beauchemin
M. Beauchemin : Merci beaucoup,
M. le Président. Évidemment, on est dans une situation un peu compliquée.
L'ordre mondial, comme on le connaît, a définitivement été changé. Ce qu'on
croyait être un ami n'est pas vraiment le
cas maintenant. Donc, on doit s'adapter, c'est normal. Je pense que ça fait
partie, en fait, de tout bon modèle d'affaires. On doit rester agiles. On doit
rester concrets sur les actions qui sont apportées pour s'assurer que, justement,
on ne s'endort pas sur notre modèle d'affaires puis que, là, finalement,
on se retrouve à se réveiller quelques années plus tard puis on n'est plus
bons, on s'est fait dépasser par la compétition.
Mais, pour
moi, ça a toujours été un phénomène intéressant. Quand j'étais dans le privé
puis je regardais comment le gouvernement, comme le gouvernement de la CAQ,
comment les autres gouvernements ont agi, j'ai toujours trouvé qu'il y
avait une drôle de façon de se comparer puis de dire : On était... On est
capables de réussir, on a fait du progrès, on
est là pour vous, etc. Je trouve ça vraiment difficile quand on entend le
premier ministre puis le ministre délégué, là, à l'Économie de nous
dire : On va très bien, si on se compare à l'Ontario. C'est probablement
le truc le plus vieux en marketing. Pour que
tu paraisses bien, prends l'élève le plus cancre de la classe, O.K., puis
dis : J'ai une meilleure note que lui. Il y a 32 élèves dans
la classe, O.K., c'est le 32e, puis tu es le 31e élève.
Moi, ce n'est
pas ma définition du succès. Moi, dans ma tête à moi, là, ce n'est pas de même
que j'ai élevé mes enfants, ce n'est
pas de même que j'ai encouragé tous les employés que j'ai eus. Je me suis
toujours assuré d'une chose, c'est qu'on s'assure qu'on va vers l'avant,
d'avoir un objectif d'être les meilleurs. Malheureusement, quand on se compare
à l'Ontario, on fait l'erreur de se comparer contre le pire élève. On devrait
se comparer contre les États-Unis qui, eux,
ont une croissance phénoménale de leur PIB par habitant. On a pris du retard,
au Québec, par rapport à ce qui se passe aux États-Unis. On a pris un
énorme retard. Donc, moi, d'entendre le ministre délégué puis le premier
ministre dire : On va bien, on va bien, on va bien, on est meilleurs que
l'Ontario... On a pris du retard.
Puis je
comprends que c'est important de faire la promotion, faire le marketing pour
s'assurer qu'on puisse bien paraître dans l'opinion publique, là, mais
la réalité, O.K., c'est que ce gouvernement-là a pris du retard. Puis aujourd'hui
j'en ai parlé en Chambre, il y a eu zéro gain de productivité, au Québec, dans
les cinq dernières années, sous la gouverne de ce gouvernement-là. Il y a eu
des gains de productivité... puis ça dérange peut-être les gens au
gouvernement, là, de l'entendre, là, mais il y a eu des gains de productivité
aux États-Unis, des doubles, des multiples, par rapport à ce que nous, on a été
capables de faire depuis 2018.
Donc, on n'est pas là pour dire que, tu sais,
Mme la Marquise, tout va bien, là, au contraire. Le rôle de l'opposition, c'est
de faire réaliser la concrète réalité à tous les citoyens, mais surtout au
gouvernement. De se comparer au pire élève de la classe pour dire : PIB
par habitant, ça va bien, Mme la Marquise, pendant que, «by the way», aux États-Unis
puis ailleurs dans le monde, il y a une croissance de loin plus phénoménale
qu'au Canada, ce n'est vraiment pas la chose
à faire. C'est d'en fait s'assurer qu'on met un peu, là, de maquillage
là-dessus puis on espère que le client achète. Mais la réalité, c'est
que ça ne va pas bien, l'économie. Parce que, quand on n'est pas capable de
faire des gains en productivité, M. le Président, c'est notre pouvoir d'achat
qui diminue, c'est notre qualité de vie, c'est le standard de vie de tous les
Québécois qui est affecté.
Ça fait depuis que je suis élu que je parle de
ça ici, dans cette Chambre, puis la première fois qu'on en entend parler, c'est cette semaine, comme quoi c'est
important, de la part de ce gouvernement-là, de soudainement avoir peut-être
une idée que des gains en productivité, c'est important. C'est la pierre
angulaire, c'est la variable première dans n'importe quelle équation de bonne gestion de
l'économie, on doit avoir des gains de productivité. M. le Président. Ce n'est
pas ce que j'ai entendu dans les deux dernières années, et là, soudainement, on
se réveille, du côté du gouvernement.
Vous savez,
on peut parler de diversification de notre économie, mais force est de
constater qu'en 2018 il y avait 68 % de toutes les exportations du
Québec qui allaient aux États-Unis. Aujourd'hui, c'est 73 %. Donc, on est
encore en train de manger encore plus le Kool-Aid américain puis se dire :
C'est encore mieux. Puis on a rentré le bras dans l'engrenage encore plus loin.
C'est ça qui s'est passé. On avait un objectif, semble-t-il, noble de vouloir
tripler nos exportations avec la
France : 2018, 1,6 milliard; 2024, 1,6 milliard. Il y a eu quand
même six années d'inflation là-dedans, là. Un dollar de 2024 vaut moins qu'un
dollar de 2018. Donc, M. le Président, c'est comme dire : Nos exportations
ont, en fait, baissé.
Ça fait que moi, j'écoute le gouvernement puis
j'écoute le ministre délégué à l'Économie nous dire : C'est une priorité,
on n'a rien inventé de nouveau, tatati, tatata. J'entends tout ça, là, O.K.,
mais les chiffres sont têtus, là, solide, O.K.? On a augmenté nos exportations
aux États-Unis, sous la CAQ, on a diminué nos exportations vers l'Europe, sous
la CAQ. On a fait l'inverse de diversifier notre économie. On n'a pas été
capables d'avoir de gain de productivité, en plus de ça, M. le Président.
Vous savez, j'ai entendu l'exemple du Panier
bleu. Je pense que ça prend la couenne dure, normalement, là, pour amener un
projet à terme. Puis je le sais bien, là, qu'Amazon ça a pris 10 ans avant
que ce soit profitable. Ça fait 35 ans
que je suis dans les marchés, je l'ai vue, moi, la réalisation, quand est-ce
que le «break even» est arrivé pour Amazon. Je le comprends, comment difficile c'est. J'en avais parlé avec le ministre
de l'Économie, M. Fitzgibbon, que je connaissais d'une autre époque. J'ai
dit : Pierre, ça va prendre des années, là. Ce n'est pas une affaire d'un
an ou deux, là, c'est des années avant que Le Panier bleu puisse
être profitable. Soyons juste transparents sur le sujet, disons-le aux
Québécois, prenons le temps de bien
l'expliquer. Au lieu de faire ça, on a plié bagage parce qu'on était tanné de
la critique. Écoutez, en négociation, en gestion du risque, en affaires,
il faut avoir la couenne dure.
Un autre exemple, le USMCA, là, US-Mexico-Canada
Agreement, là, négociation en 2026, O.K., en 2026. On n'est même pas encore en
train d'avoir eu les attentes du président Trump, à savoir qu'est-ce qu'il va
vouloir faire sur cette renégociation-là,
qu'on a déjà plié, là, le genou, puis on a dit : Nous, on est prêts à
renégocier. M. le premier ministre l'a déjà dit, là, il veut renégocier
tout de suite, il est prêt, là, c'est important qu'on le fasse tout de suite.
Négociation 101, là, gardons les cartes
proches. Pourquoi tout de suite dire qu'on est prêt à donner ça? On est prêt
tout de suite à dire qu'on veut
renégocier. Il va nous demander autre chose de plus, là, c'était... sinon il
aurait fallu qu'il nous demande ça, mais là, maintenant, c'est checké,
on l'a, les Canadiens, les Québécois le veulent, on y va. Ça fait que c'est...
négociation 101.
Tout ça, c'est un contexte, M. le Président,
qu'il est important de comprendre parce qu'en négociation avec quelqu'un qui
joue «rough» comme ça, l'important, là, O.K., c'est de s'assurer que, de notre
côté à nous, on est solides. Puis il y a
plusieurs façons de faire en sorte que, de notre côté, l'économie du Canada,
l'économie du Québec soient solides.
Spécifiquement pour l'économie du Québec, là, ça
fait, encore une fois, deux ans que je le mentionne ici, dans cette Chambre,
rendons notre fiscalité plus optimale, soyons plus justes envers toutes nos
PME, assurons-nous que le taux d'imposition soit compétitif par rapport à
d'autres juridictions et soyons capables de s'adapter aux réalités. Là, on a un
vent de face solide, là. On doit s'adapter au fait que la fiscalité américaine
pour les entreprises va baisser. On doit donc envisager de faire la même chose.
Mais au lieu de faire ça, la réponse que j'ai eue de la part de la ministre de l'Économie, tout à l'heure, en période des
questions, c'est de me faire une liste, encore, exhaustive de tous les
programmes où est-ce que le gouvernement a choisi d'aider un joueur ici,
un joueur là, un joueur ici, un joueur là.
• (17 h 20) •
Vous savez, je l'entends, la ministre, là, je
la... je comprends ce qu'elle fait, là. Je sais, là, que c'est bon parce que
c'est vraiment ciblé. On aide telle personne dans tel coin du Québec, parce que
ça, c'est des gens qui vont être capables de parler positivement pour nous,
tatati, tatata. Je la comprends, cette histoire-là, là, mais toutes les entités
du gouvernement mises ensemble, là, c'est beau s'ils aident
10 000 PME. O.K.? C'est beau, là, je suis généreux, si je dis qu'ils
aident 10 000 PME. Mais moi, ce que je veux, c'est qu'on aide nos
270 000 PME.
Puis le rôle du gouvernement, là, ce n'est pas
choisir le gagnant. Le rôle du gouvernement, c'est de créer des conditions gagnantes pour que tous puissent avoir
une chance de gagner. Bien, dans le contexte spécifique de la fiscalité
puis de l'aide administrative, comment que le gouvernement peut la définir, peu
importe, là, de choisir : On donne l'argent à eux autres, puis pas à eux
autres, puis à eux autres, puis pas à eux autres, là, simplifions l'affaire.
Rendons la fiscalité, pour toutes nos entreprises, plus compétitive, donnons
une chance à tous de pouvoir gagner. Parce que le prochain Couche-Tard, là, il
est quelque part au Québec, là. Je ne sais pas il est où, là, mais il est
quelque part au Québec, puis, si on lui
donne ce break-là, bien, peut-être qu'il va justement avoir une chance de
percoler, il va peut-être justement devenir le prochain Couche-Tard.
Ça fait que de choisir le gagnant comme le
gouvernement le fait actuellement, ça va à l'encontre même du développement économique. C'est ça que j'essaie de
dire, M. le Président. Pour moi, c'est important qu'on le comprenne. La
fiscalité, ça va jouer massivement dans le succès de s'assurer que nous, de
notre côté, on fait ce qu'il faut pour s'assurer de gagner.
Évidemment, là, on parle de reporter en 2026,
comme le fédéral a fait, la taxe sur l'innovation, la taxe sur l'inclusion,
taxe sur le gain en capital, la taxe sur l'entrepreneuriat. Voyons donc! C'est
la pire chose qu'on doit faire. Même d'en parler, que c'est retardé à 2026...
Allons-y tout de suite puis disons-le, là : On ne le fera pas. Aidons nos entrepreneurs
à avoir confiance. Là, on fait juste reporter la douleur encore une fois. Les
barrières, là, entre chacune des provinces,
c'est essentiel qu'elles tombent. Je suis content d'entendre, là, qu'on mette
l'épaule à la roue puis qu'on veut aller dans cette direction-là. C'est
la bonne chose à faire, mais, vous savez, juste pour qu'on puisse aligner les
flûtes avec tout le monde, là, pour le Québec, faire tomber les barrières des
autres provinces pour qu'ils puissent acheter les produits québécois, c'est l'équivalent positif des
tarifs de Trump, qui, eux, évidemment, sont négatifs... et qu'on a les moyens
de se donner l'énergie pour passer à travers la tempête. Assurons-nous que
c'est translucide, assurons-nous que c'est transparent pour tous les
Québécois, assurons-nous de le faire.
On a besoin d'avoir, autant au Québec qu'au
gouvernement central, un plan national d'infrastructures. C'est une approche
qui est similaire en Europe puis c'est similaire dans des pays d'Europe comme
la France, comme en Angleterre, c'est la même chose aux États-Unis. On n'a pas
ce phénomène-là au Canada. Peut-on se coordonner pour au moins être équipés avec les mêmes leviers? Comment se fait-il qu'on
n'est pas capables d'avoir cette conversation-là avec le gouvernement central? Comment se fait-il que la CAQ ne le fait
pas? Ça me dépasse, M. le Président. Pour moi, c'est comme un fruit, là,
très bas dans l'arbre, qu'on devrait aller cueillir.
Vous savez, on parle d'innovation, on parle de
productivité, on parle de recherche et développement. Tout ça, c'est attaché,
là, mais il y a une séquence. Il faut faire la recherche et développement de
façon ciblée, de façon vraiment intelligente pour s'assurer qu'on ait de
l'innovation, puis l'innovation, là, il faut la transmettre par la suite à nos entreprises pour qu'elles puissent être plus
productives. Ça ne prend pas la tête à Papineau, c'est exactement ça, la
séquence. Soyons originaux dans la façon qu'on veut faire les choses
pour qu'on en arrive à cet objectif.
Mais je pense
qu'au-delà de tout ça, une chose que je me suis rendu compte, c'est que, depuis
que je suis ici, là, je n'entends jamais, peu importe quel ministre avec
lequel on va discuter, je n'entends jamais les définitions de «succès». Comment
on va définir la réussite de mon programme? Comment on va définir le fait que
je vais engager des millions de dollars dans cette direction-là? Comment se
fait-il qu'on a augmenté les budgets de 50 % en santé puis on n'a même pas émis le moindre objectif de
performance? Comment se fait-il qu'on n'est pas capables de se dire : En
productivité, on veut faire un gain de, disons, 1 %, O.K.? Puis comment
qu'on va définir le succès, c'est : Voyons voir comment cette
productivité-là s'enclenche trimestre après trimestre, puis, si ça ne
fonctionne pas, il faut revisiter le programme.
Assurons-nous qu'on dépense intelligemment l'argent des Québécois pour faire
des gains en productivité. On est fiduciaires de l'argent des Québécois,
M. le Président.
Donc, la clé, c'est de mettre en place les
conditions gagnantes pour que nous, on puisse soutenir ce vent de tempête là. J'en ai fait la liste. La priorité,
c'est définitivement les barrières interprovinciales, définitivement des gains
en productivité, puis aussi faire une bonne gestion de ça en ayant des
mesures claires et précises de comment on va vouloir atteindre ces objectifs-là, parce que sinon, encore une fois, on va
perdre l'argent des Québécois, on va dépenser comme des marins en
cavale. Malheureusement, M. le Président, on n'a plus cette flexibilité. Merci.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Et, comme prochain intervenant, je reconnais Mme la ministre
des Ressources naturelles et responsable des Forêts.
Mme Maïté Blanchette
Vézina
Mme Blanchette Vézina : Merci,
M. le Président. Je tiens d'abord à saluer le travail qui s'est fait dans les derniers
jours pour répondre à l'attaque injustifiée de notre voisin du Sud. On a fait
un front commun face aux actes qui menaçaient notre économie, notre stabilité
économique, et ça a permis d'obtenir un sursis. Le premier ministre l'a dit
tout à l'heure, le monde a changé en quelques jours. Bien, ce que j'ai vu dans
les derniers jours, M. le Président, c'est un Québec uni, un Québec résilient,
un Québec prêt à se battre, et les Québécois s'attendent de nous, s'attendent
des députés qu'on travaille ensemble face à ce défi et qu'on s'élève au-dessus
de la mêlée.
La ministre
de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie l'a dit tout à l'heure, notre
priorité, à l'heure actuelle, c'est de protéger notre économie, nos
travailleurs, nos entreprises québécoises. La collègue de Verdun a mentionné qu'il y avait des syndicats dans la salle.
D'ailleurs, je tiens à les saluer s'ils sont toujours présents. Oui, on a eu un
sursis de 30 jours, mais on n'est pas à l'abri de cette guerre
commerciale. Les menaces qui plombent au-dessus de nos têtes ne sont pas que négatives par contre. Le Québec a
des possibilités à saisir, et c'est là-dessus que, mes collègues et moi, on
travaille et on va continuer de travailler dans les prochaines semaines.
Malgré l'ouverture de l'administration Trump
hier, l'incertitude demeure. Le premier ministre a été clair, notre premier
choix a toujours été d'éviter un conflit commercial avec notre principal
partenaire. Mais, devant l'incertitude, on
ne va pas baisser les bras, on ne va pas rester les bras croisés. On va
regarder les choses en face. La menace d'imposer des tarifs par le
président Trump représente une attaque directe contre notre économie et contre
des milliers d'emplois au Québec. Le Québec,
c'est la richesse de nos régions, la compétence de nos travailleurs, la
résilience de nos entreprises et une situation géographique pleine
d'opportunités. Depuis l'arrivée de notre gouvernement, notre objectif a
toujours été de se battre pour l'épanouissement des Québécois.
Le président des États-Unis joue un jeu où, au
final, on va tous être perdants. En attaquant les Québécois, en attaquant les Canadiens, c'est aux Américains
aussi auxquels il s'est attaqué. Et j'insiste, les mesures de Trump font
d'abord et avant tout mal aux Américains eux-mêmes, et Trump l'a même
reconnu dimanche matin. En cas de tarifs, ils vont rapidement se faire sentir avec une augmentation du coût de la vie, un
ralentissement des mises en chantier et des pertes d'emplois. Plusieurs
économistes craignent un regain marqué de l'inflation, cette même inflation que
déteste Trump.
Maintenant, malgré la situation qui est tendue,
il est important de maintenir nos canaux de communication avec les Américains. On voit ce que ça donne, ça
nous permet de négocier avec lui. Le Québec va continuer de porter la voix de
nos entreprises, de nos travailleurs et de nos régions auprès des autorités
américaines dans les prochains mois. Les États-Unis sont notre partenaire
commercial, avec lequel on a construit une économie de manière très intégrée.
Comme le premier ministre l'a dit, on va être là
pour accompagner les entreprises qui vont être touchées. Ça fait d'ailleurs
plusieurs mois que le comité d'action Québec—États-Unis se rencontre et qu'on
planifie la suite des choses. Ma collègue de l'Économie
en a parlé tout à l'heure, on est là, on travaille pour protéger notre économie
et les Québécois face aux actions de nos voisins du Sud.
Je tiens à vous
assurer que nous sommes en constante communication avec les différents secteurs
touchés par cette hausse de tarifs ou cette potentielle hausse des tarifs. Le
premier ministre ainsi que mes collègues, la ministre de l'Économie, de
l'Innovation et de l'Énergie, le ministre des Finances, également moi-même, on
a tenu des séries de rencontres, la semaine dernière et cette semaine, avec
plusieurs sociétés d'État et entreprises. Je suis en communication également constante avec les acteurs du secteur
minier et forestier. Le signal est clair, on est prêts. On est prêts à se
battre.
• (17 h 30) •
D'ailleurs, le
premier ministre va se rendre à Washington dans les prochaines semaines pour
rencontrer des acteurs clés qui pourront défendre la pertinence de notre
partenariat économique avec les Américains. Et je ferai de même dans deux
semaines à Miami, parce qu'on veut occuper le terrain et mettre un maximum de
pression pour faire reculer les États-Unis. Notre premier ministre a même été
très proactif, il s'est entretenu avec le président américain à la suite de son
élection. Alors, on est en action puis... On est en action, M. le Président.
On a fait pression
sur le fédéral également pour qu'il resserre la gestion de la frontière
canado-américaine, et force est de constater que le fédéral a entendu nos
demandes. D'ailleurs, Justin Trudeau a annoncé qu'il allait renforcer la
frontière avec de nouveaux hélicoptères, des technologies et du personnel
présent. Et, de notre côté, on a été clairs aussi sur le rôle de la Sûreté du
Québec, qui agit à titre de troisième ligne de défense, en assurant la sécurité
par des enquêtes visuelles le long de la frontière. Par ailleurs, on a déjà
interpelé le fédéral pour être à la table de négociations avec le Canada et les
États-Unis afin que les intérêts du Québec soient respectés.
Bref, M. le
Président, on est actifs sur plusieurs fronts. L'important, en ce moment, c'est
de rester calme et de se serrer les coudes.
On travaille en continu à minimiser les impacts sur les personnes qui seront
affectées par ces décisions, par les décisions futures du président
Trump. Prenons le bois, par exemple. C'est très clair, une guerre commerciale
serait dommageable, très dommageable pour l'économie québécoise, canadienne et
américaine. Le bois, c'est une de nos exportations les plus importantes, mais
c'est avant tout un secteur qui génère plus de 50 000 emplois dans
plus de 900 municipalités au Québec, dans toutes les régions du Québec. La
filière forestière, elle représente plus de 10 % des emplois, ça, dans
552 villes du Québec. C'est majeur. Parmi eux, on retrouve des communautés
forestières, je les appelle comme ça, la forêt occupant une place centrale dans
la vitalité économique de leurs municipalités et des municipalités voisines. Lorsqu'une
usine est en opération dans une communauté, ça crée des emplois, ça stabilise
le nombre d'habitants, ça permet aux
conjoints de trouver un emploi localement aussi, ça permet aux enfants d'aller
à l'école, d'occuper nos écoles, ça
permet d'utiliser les services dans nos régions. Alors, vous comprendrez que
notre communauté... tout le sens d'une communauté forestière, c'est ça,
c'est que ça gravite autour d'une ou de plusieurs entreprises liées à
l'activité forestière. Mais une usine qui ferme, c'est ultimement une
communauté qui en assume les conséquences, et on va tout faire pour éviter ce
genre de situation. Que ce soit pour la récolte, le transport, les scieries ou
les efforts de reboisement, on est chanceux d'avoir des travailleurs qui sont
au rendez-vous.
Nos entreprises
subissaient déjà des droits compensateurs de 14,4 % sur les exportations
canadiennes de bois d'oeuvre vers les États-Unis. Alors, en effet, on a un
conflit, là, du bois d'oeuvre depuis 2017, une pression déjà qui affecte l'industrie forestière. Ces droits
compensateurs sont injustifiés, car nos exportations viennent compléter les
besoins en bois d'oeuvre des
Américains. D'ailleurs, c'est 10 %, M. le Président, des importations
américaines qui proviennent du Québec. C'est majeur pour eux et c'est
majeur pour nous. S'ils importent autant de notre bois, c'est qu'ils ne sont
pas autosuffisants, malgré ce que dit le président Trump.
L'augmentation des
droits de 25 % se traduirait d'abord par une augmentation des coûts
directs pour les consommateurs américains. On pourrait, par la suite, observer
un ralentissement du nombre de mises en chantier aux États-Unis, ce qui impactera tous les acteurs des deux côtés de la
frontière. Et le difficile accès déjà à la propriété va connaître une nouvelle
contrainte. Notre voisin américain a besoin, en moyenne, de 35 % de ses
besoins en bois d'oeuvre de l'extérieur pour ses mises en chantier de maisons
et de logements.
Les coûts de
transport avantageux, dont la proximité des marchés... la faible valeur du
dollar canadien rend les produits québécois plus attrayants pour les
importateurs de bois américain. Le coût des maisons aux États-Unis a fortement
augmenté au cours des quatre dernières années, tant pour les loyers que pour
les prix d'achat d'une propriété. Et les
tarifs douaniers auront... auraient des effets inflationnistes, car les
importateurs, ceux qui paient cette taxe à l'importation, bien, ils vont
refiler la facture à ceux qui achètent leurs produits.
Mais on ne restera
pas les bras croisés. Ce qu'on souhaite faire, c'est utiliser cette situation
d'incertitude à notre avantage, à l'avantage du Québec, parce qu'on pense que
c'est important d'utiliser chaque occasion que nous avons pour moderniser nos
façons de faire. On se doit de penser en dehors de la boîte pour la
valorisation de nos ressources naturelles. On a déjà commencé un virage
d'innovation et une modernisation de la filière forestière. Et les partenaires, ils sont prêts. On a différents
programmes de modernisation qu'on a mis en place, notamment le programme
Innovation Bois. J'étais, M. le Président,
au Saguenay—Lac-Saint-Jean avant Noël, j'ai annoncé des sommes importantes pour la filière
forestière pour, justement, moderniser l'industrie.
On parle
d'investissements par les entreprises mais aussi par le gouvernement du Québec
pour aider et soutenir l'innovation. Ça peut être de la cogénération, soit de
la production d'énergie avec des résidus forestiers, l'implantation d'une usine
de biocharbon et d'hydrogène vert, l'ajout de nouveaux équipements nécessaires
sur les... des machines à papier pour
produire des nouveaux produits spécialisés, l'automatisation de la
planification d'une production sur mesure, de la réalité augmentée pour les processus, l'implantation d'une flotte
de véhicules à guidage automatique pour le transport de produits finis
vers des quais de chargement, le tri automatisé, la modernisation de lignes de
tri et de conditionnement de bois. Alors, la liste que je viens de vous faire,
M. le Président, ça regroupe que quelques exemples de projets qu'on a soutenus
dans les dernières années, qui sont réalisés dans nos régions du Québec.
Et,
lorsque je me déplace sur le terrain, je suis toujours impressionnée de voir la
capacité d'innover des Québécois. Ça vient
aider la filière à se moderniser et à créer un marché intérieur. On a commencé,
donc, avec le programme Innovation Bois pour utiliser le bois du Québec dans
nos grands chantiers. On a aussi entamé un virage dans... pour nos
grandes infrastructures. On va encourager, d'ailleurs, à faire... les
entreprises à faire de même. On peut penser à favoriser l'utilisation du bois
dans la construction. On a aussi un programme en ce sens-là qui permet plus
d'utilisation du bois dans la construction. Ma collègue de l'Habitation, France-Élaine
Duranceau, dispose de leviers pour accroître... Oui, pardon, hein, je ne peux pas nommer. Donc, ma collègue à
l'Habitation, pardon, dispose de leviers pour accroître la part du bois dans la
construction de logements sociaux et abordables. Déjà, il y a des initiatives
intéressantes de modules préfabriqués en bois.
En plus de favoriser
des matériaux innovants, on s'affranchit de l'impact des tarifs douaniers quand
on crée ce marché intérieur. Des actions
qui, lorsqu'elles sont cumulées, vont permettre au Québec de consommer
davantage de bois que nous produisons plutôt que de l'exporter.
L'incertitude économique
apporte déjà des impacts sur l'économie, et c'est certain que, si les tarifs
entrent en vigueur, ça va être difficile pour l'économie du Québec. Mais on va
être là pour les Québécois et pour nos régions. Le Québec a des leviers pour tirer son épingle du jeu, j'en suis
convaincue. Et, comme je le disais plus tôt, on est en action déjà.
De mon côté, je
travaille d'arrache-pied à moderniser le régime forestier québécois. En offrant
plus de prévisibilité, d'agilité, on
souhaite protéger les emplois de la filière forestière partout au Québec,
surtout en région, d'ailleurs. On s'attend, donc, à avoir la
collaboration des partis d'opposition pour adopter rapidement ce nouveau régime
qu'on déposera prochainement.
Un autre des atouts
du Québec, ce sont les minéraux critiques et stratégiques. Toutes les nouvelles
technologies qu'on utilise aujourd'hui nécessitent des minéraux critiques et
stratégiques. Et les Américains, mais également les autres pays d'Europe,
d'Asie en ont grandement besoin. Les minéraux critiques et stratégiques sont
nécessaires partout, pas seulement pour les
batteries de véhicules électriques, mais aussi pour l'énergie solaire, les
éoliennes, les semi-conducteurs, et j'en passe, les téléphones
intelligents. La demande de graphite, elle augmente, le cobalt aussi devrait
augmenter et multiplier par 100 d'ici 2040. Mais, au Québec, on a ces
minéraux-là en grande quantité et on va accélérer nos efforts pour les extraire et pour transformer le minerai
québécois. On le sait, le marché des États-Unis va être en croissance, mais
celui de plusieurs autres pays également, et c'est là où on peut se démarquer.
M. le Président, j'ai
été en Europe cet automne, justement, pour travailler nos canaux de relations
avec les partenaires européens. On était là avant l'arrivée de M. Trump et
on va continuer de travailler avec nos partenaires européens pour développer
ces marchés, déployer des chaînes d'approvisionnement avec l'Europe, notamment
avec le port de Rotterdam. Donc, on
travaille et on est en action. Une chose est certaine, nos ressources sont un
atout important. Nos ressources
suscitent un vif intérêt des partenaires internationaux, notamment dans le
contexte actuel de réalignement des chaînes de valeur et
d'approvisionnement, et on va s'assurer de tirer profit de cette grande
richesse que nous avons.
M. le Président, je
peux vous assurer que nous suivons la situation en temps réel et que nous
continuerons d'agir dans le meilleur intérêt
des Québécoises et des Québécois. À titre d'exemple, lors de la mise à jour
économique, notre gouvernement a mis en place un programme de près de
100 millions de dollars pour soutenir les entreprises forestières
déjà visées par les tarifs du conflit du bois d'oeuvre, et on va continuer
d'être présents.
Dans cette période
d'incertitude, il faut se serrer les coudes, et c'est beau de voir les gens
mobilisés, les Québécois mobilisés. Ma collègue la ministre de l'Économie, de
l'Innovation et de l'Énergie le disait un peu plus tôt, nous sommes dans une guerre commerciale, et il ne faut pas avoir peur de
le nommer. On est dans une période difficile, certes, mais le Québec
travaille en étroite collaboration avec le gouvernement fédéral pour négocier
une entente gagnant-gagnant avec les États-Unis, et on ne se laissera pas
faire. Notre premier ministre, il a les deux mains sur le volant et il a toute
ma confiance pour protéger les Québécoises et les Québécois. Merci, M. le
Président.
• (17 h 40) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la ministre. Je reconnais maintenant, selon le principe d'alternance,
M. le député de Saint-Jérôme. Je vous rappelle,
M. le député de Saint-Jérôme, que vous disposez de 1 min 30 s.
Allez-y.
M. Youri
Chassin
M. Chassin : Merci, M. le Président. Alors, évidemment, on fait un débat d'urgence
sur une décision fondamentalement injuste, et je pense qu'on peut tous
le reconnaître, une décision qui est évidemment de nature économique dans ses
conséquences, mais de nature politique dans la décision qui est prise. Et je
pense que Trump espère nourrir chez ses concitoyens une perception politique
que lui se bat pour les États-Unis et lui rendre sa grandeur, mais c'est là où
il faut s'attaquer à cette décision, M. le Président, à mon avis.
Donc, c'est
probablement une posture de négociation, mais les gouvernements, ici, québécois
et canadien, devraient répliquer notamment par une campagne de publicité. Et,
si je peux me permettre de suggérer cette publicité aux États-Unis, elle devrait porter sur un message de : «If you
say, "Stand by me," I say, "Don't hit me, then."»
Évidemment, c'est la réponse, pour moi, qui est peut-être absente des
discours à l'heure actuelle, cette réponse politique, en appeler au coeur des
Américains.
Il y a aussi un volet
plus économique. Est-ce qu'on peut être solidaires entre Canadiens? Est-ce que
l'énergie enclavée dans l'Ouest pourrait profiter d'un projet comme GNL Québec?
Est-ce qu'on peut revoir? Est-ce que la bureaucratie qui existe ici pourrait
être diminuée? Ou encore les règles du marché interprovincial, qui
correspondent à des tarifs, quelle ironie, M. le Président, de 25 %, ça aussi,
c'est politique et ça aussi, c'est injuste.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Saint-Jérôme. La parole revient
maintenant à Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Madwa-Nika Cadet
Mme Cadet : Merci,
M. le Président. J'ai décidé d'intervenir dans ce débat d'urgence cet
après-midi parce que j'ai été ahurie plus tôt par les propos du premier
ministre en période de questions, qui nous parlait de la situation des
travailleurs. En fait, ce que j'ai constaté par les propos du premier ministre
aujourd'hui, mais ce n'est pas la première fois, lors de sa toute première
intervention, il y avait fait allusion, samedi soir, lors de son point de
presse, également, donc, il s'est aussi empressé, donc, de parler, donc, de son
désir de déplacer des emplois du secteur manufacturier aux chantiers d'Hydro-Québec et au secteur de la
construction. Donc, ce que j'ai constaté, c'est que notre premier ministre du
Québec préfère abandonner le secteur manufacturier en temps de crise, au moment
où ce secteur-là a le plus besoin de son premier ministre.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Allez-y,
M. le leader adjoint du gouvernement.
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, je vais demander à
Mme la députée de Bourassa-Sauvé de poursuivre dans sa critique du
gouvernement, mais avec prudence. Allez-y, madame.
Mme Cadet : M.
le Président, en fait, la question que je me pose, c'est : Comment le
premier ministre du Québec peut affirmer, comme il l'a déjà fait autrement,
vouloir défendre coûte que coûte le secteur dans cette guerre tarifaire
quand il est immédiatement prêt à lui prendre son atout le plus précieux, soit
ses travailleurs? Comment le premier ministre
du Québec peut affirmer vouloir diversifier les marchés vers d'autres... bien,
en fait, donc, diversifier nos exportations qui sont, comme l'a exprimé mon
collègue, donc, de Marguerite-Bourgeoys... qui sont, de façon disproportionnée,
vers les États-Unis, donc, d'exporter, donc,
vers des marchés comme ceux de l'Europe, comme ceux de l'Asie, quand le premier
ministre, donc, ne laisse pas la chance au secteur manufacturier de pouvoir
conserver ses travailleurs?
Puis je veux rappeler quelque chose, parce que,
quand... Tu sais, on nous parle de diversification ici, là. On a tous vécu la période de la COVID. Je vais vous
donner l'exemple du secteur aéronautique, qui, donc, en temps de COVID, manifestement, donc, avait... n'était plus en
mesure, donc, de pouvoir retenir ses travailleurs. Bien, quand ça a été le
moment de la relance, ça a été très difficile de ramener ces travailleurs qui
avaient quitté vers d'autres secteurs d'activité vers le milieu
aéronautique, et on en paie encore les frais aujourd'hui.
Donc, ce que... Le message que je veux lancer au
premier ministre du Québec et à la CAQ de façon générale, c'est de ne pas toucher à ces travailleurs et, en
fait, de rassurer le secteur de façon générale, mais, ça, quand je vous pose
ces questions-là et puis, quand j'entends le premier ministre, bien, je me dis,
M. le Président, que c'est un petit peu la marque de commerce de la CAQ, hein?
On le sait, avec la CAQ, on pellette par en avant, on ne planifie pas, mais surtout on improvise, parce que ce qu'on voit,
parce que je trouve important de le nommer, M. le Président, c'est qu'en ce
moment, quand le premier ministre nous nomme les chantiers d'Hydro-Québec puis
la construction, ce n'est pas anodin, ce ne sont pas des exemples comme ça qui
sont offerts au grand public québécois.
On se rappellera qu'au cours des deux dernières
années... Bien, par exemple, en ce qui a trait au milieu de la construction, je
me suis levée plusieurs fois ici pour dénoncer les formations accélérées dans
le secteur de la construction, qui ont été un échec, au point où le ministre du
Travail, la ministre de l'Emploi ont été obligés, donc, en fait, de changer d'idée et de ne plus mettre de
l'avant ces formations-là, parce que ça ne fonctionne pas. J'ai siégé sur
l'étude du projet de loi n° 51
qui cherchait, donc, à offrir plus de mobilité de la main-d'oeuvre dans le
secteur de la construction, et ce qu'on voit... et ce que j'avais dit à
ce moment-là, c'est que, bon, j'étais en faveur du principe, mais que,
justement, on n'allait pas assez loin, que ce qui nous était présenté n'allait
pas nous donner les résultats escomptés.
Donc là, on le voit, le premier ministre a des
objectifs à remplir autrement, et ce qu'il voit, c'est que, quand on lui posait
ces questions-là, bien, la CAQ n'avait pas de réponse, n'avait pas de solution
à nous offrir. Et là c'est comme si, bien,
Donald Trump vient offrir une réponse au gouvernement actuel, vient offrir une
solution au gouvernement actuel : chantiers
d'Hydro-Québec, le plan d'action d'Hydro-Québec 2035,
35 000 travailleurs par année seront requis. Chaque fois qu'on
a demandé au premier ministre qu'est-ce qu'il allait faire avec ça, il n'en
avait pas, de réponse.
Ce que nous souhaitons lancer comme message, aujourd'hui,
au Parti libéral du Québec, c'est que le premier ministre ne pourra pas
utiliser ces travailleurs pour pouvoir répondre aux problèmes auxquels il
n'avait pas de solution auparavant. Les travailleurs québécois ne sont pas de
la marchandise à exporter d'un secteur d'activité à l'autre. On vient d'entendre la ministre des Ressources
naturelles nous parler avec passion du secteur, du milieu forestier, de la
filière forestière, et d'à quel point il s'agit d'une filière qui crée de la
vitalité dans nos régions, une filière, en fait, qui fait en sorte que les travailleurs... où les travailleurs, en
fait, sont fiers de travailler. Est-ce que ce sont des filières comme
celles-là, comme la filière forestière, que le premier ministre du
Québec souhaite démantibuler, avec les propos qu'il a tenus aujourd'hui en
Chambre, avec les propos qu'il a tenus, il y a quelques jours à peine, à la
population québécoise. J'espère que non,
parce qu'aujourd'hui son rôle, selon le Parti libéral du Québec, c'est de
rassurer les entreprises, c'est de nous assurer, comme l'a dit le
collègue de Marguerite-Bourgeoys, de leur offrir des allègements fiscaux, de
leur offrir le soutien nécessaire, mais surtout, surtout,
de soutenir ce secteur-là coûte que coûte afin qu'il croisse, parce que, on le sait, il n'y a eu aucune croissance du secteur
manufacturier sous la CAQ au cours des quatre prochaines années, et, sous
le Parti libéral du Québec, on vous le certifie, M. le Président, ce sera
différent. Merci beaucoup.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de
Bourassa-Sauvé. Je reconnais maintenant M. le député de Beauce-Nord.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Beauce-Sud.
Ah oui! Beauce-Sud. Allez-y, monsieur...
M. Samuel Poulin
M. Poulin : ...il nous reste
combien de temps?
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il
vous reste 15 min 29 s.
M. Poulin : Excellent, M. le
Président. Alors, je tenais, évidemment, à intervenir cet après-midi concernant
ce débat d'urgence qui concerne, évidemment,
les relations entre le Canada et les États-Unis, mais, intimement, les
relations entre le Québec et les États-Unis.
Je suis député de Beauce-Sud, effectivement, M.
le Président, une circonscription de 24 municipalités, où la douane
d'Armstrong se retrouve, d'ailleurs, chez nous. Important de dire aussi, M. le
Président, que les liens entre la Beauce et
les États-Unis sont forts depuis fort longtemps. Je ne veux pas trop tomber
dans les échanges personnels, mais c'est aussi très social, nos
relations que nous avons avec les Américains. Il n'est pas rare que nous avons
un chalet du côté du Maine. Nous, c'était le cas au lac Moosehead, à
Greenville, plus précisément, et j'ai encore des amis qui ont des chalets dans le Maine. On a eu des terrains
dans le Maine, dans le Vermont. Plusieurs ont des cabanes à sucre, également,
du côté des États-Unis. On a des gens qui font la frontière à tous les jours,
chez nous, que ce soit pour le travail mais également
sur le plan personnel. Alors, nos liens avec les Américains, ils sont sincères,
ils sont de longue date. Beaucoup de Québécois, évidemment, vont passer
des étés aux États-Unis, vous connaissez les destinations.
Alors,
aujourd'hui, on peut le dire : Ah! il y avait une dépendance aux États-Unis.
Moi, je dirais plutôt qu'il y avait un
lien normal et tout à fait naturel avec les Américains, M. le Président, et
d'autant plus d'une région comme la mienne, extrêmement manufacturière,
extrêmement acéricole, extrêmement agricole, pour nous, il était tout à fait
normal de travailler avec les Américains,
tout comme eux travaillent avec nous, également, M. le Président. Ce n'était
pas une relation qui était unidirectionnelle. Nous avons des partenaires
américains.
Je viendrai, dans les prochaines secondes, M. le
Président, aux enjeux que nous avons, à l'incertitude des quatre prochaines
années, aux discussions que j'ai eues avec des entrepreneurs, dans les
dernières heures, jusqu'à 22 heures hier
soir, ce matin, et ça va se continuer ce soir parce que plusieurs sont du côté
américain, présentement, pour aller discuter avec leurs partenaires. Rien de
mieux que de se voir dans les yeux pour décider si on va continuer de
travailler ensemble. On peut faire des échanges téléphoniques, on peut
se parler par courriel, mais rien de mieux que d'être sur place.
Alors, hier, je discutais avec des entrepreneurs
qui étaient aux Illinois, qui étaient dans l'État de New York, qui discutaient
toujours avec leurs entreprises, parce que le choc est beaucoup venu lundi, M. le
Président, de la part des Américains, en ce
qui a trait aux tarifs canadiens. Nous, on la vivait, l'incertitude, depuis
déjà plusieurs semaines, mais ça s'est vraiment passé lundi, du côté des
Américains, on l'a vu avec les sondages qui ont été publiés, où, visiblement,
une forte majorité des Américains n'appuient pas la direction de Donald Trump.
On l'a vu avec des chambres de commerce américaines qui sont sorties. Alors, il
n'y a rien de mieux que d'être sur le terrain.
• (17 h 50) •
Et, en fin de semaine, je me suis aussi rappelé
des souvenirs. Parce que je suis issu d'une famille, évidemment, de l'industrie
forestière de la Beauce, et je me suis souvenu quand les tarifs américains
avaient frappé ma famille. Parce que la
crise du bois d'oeuvre, M. le Président, ça ne date pas d'hier, ça fait
plusieurs années qu'il y a ce conflit-là. Et je me souviens de mon père qui avait 60 employés et qui est
passé de 20 à zéro. Je me souviens du stress qu'il y avait dans la
famille. Je me souviens des annonces de mises à pied que nous avons faites dans
l'entreprise familiale. Et les Beaucerons le
savent, là, pour se connaître depuis toujours, qu'ils peuvent compter sur moi,
au plus profond de moi-même, parce que je comprends la réalité de nos
entreprises, je comprends ce que les familles ont vécu et je comprends ce
qu'elles pourraient potentiellement vivre aussi, M. le Président. Parce que,
lorsqu'on exporte, et c'était le cas de mon père, à plus de 90 % aux
États-Unis, bien, du jour au lendemain, quand tu as des tarifs de 10 %, de
15 %, ta marge de profit, elle n'existe plus. Alors, tu dois prendre des
décisions à savoir si tu continues ton séchage, ton planage, mais ça devient
extrêmement difficile.
Et je sais exactement... Et, encore dans les
derniers jours, quand je parlais avec les entrepreneurs, j'avais l'impression
de parler avec un membre de la famille. On me demandait : Est-ce que je
devrais déplacer ma machinerie dans mon entrepôt américain? Est-ce que je
devrais commencer à déplacer des employés du côté des États-Unis? Puis,
évidemment, ça relève de décisions d'affaires, ultimement, parce qu'il y a
toujours la balance des risques lorsqu'on prend
une décision comme celle-là. Mais je sais une chose, avec tous les
entrepreneurs de la Beauce à qui j'ai parlé dans les dernières semaines, puis je l'annonce, M. le Président, qu'il n'y a
personne qui a un genou à terre. Personne, personne, personne. On est
persévérants, on est lucides.
Des
voix : ...
M. Poulin :
Non, mais c'est vrai. C'est vrai, il n'y a personne qui a un genou à terre.
Et on est persévérants, on est lucides, on est réalistes. On sait ce dont on
peut avoir à faire face parce qu'on a vécu des tarifs, évidemment, notamment
dans le bois d'oeuvre dans les dernières années. Alors, on le sait. Mais il n'y
a personne, M. le Président, qui nous appelle en panique. Au contraire, nos
gens sont structurés, ils sont organisés, et c'est pour cette raison-là que
j'ai mis en place une cellule économique dans les dernières semaines, ce qui
nous a permis de revoir de fond en comble notre économie régionale, mais aussi
de refaire des plans d'affaires d'entreprises.
Et je veux saluer le
travail extraordinaire qui est accompli par Beauce-Centre Économique, par
Développement économique Nouvelle-Beauce, le Conseil Économique de Beauce, qui
célèbre ses 50 ans, dont le premier président était Jean-Denis Poulin, mon
grand-père, soit dit en passant, et où on s'assoit avec des entrepreneurs
présentement, et on leur offre de revoir leur plan d'affaires, et de dire :
Est-ce qu'on est capables, avec Investissement Québec, de vous aider
actuellement au niveau des liquidités? Parce qu'il y a un travail qui se fait
actuellement. On nous dit : Est-ce qu'il y a des mesures concrètes? Oui,
il y a des mesures concrètes. Ça ne fait pas la une des journaux, M. le
Président. Vous comprenez que les entrepreneurs ne veulent pas alerter non plus
trop vite leurs partenaires ou ne veulent pas alerter trop vite leurs employés.
Puis, avec le 30 jours que Trump vient de nous donner, là, bien, ils
avaient raison, nos entrepreneurs, de dire : Il faut être structurés puis
il faut être organisés.
Puis le gouvernement
du Québec doit aussi aller au rythme de nos entreprises. Oui, on peut prévoir.
C'est notre rôle, on le fait à tous les jours. Mais, lorsqu'un entrepreneur
prend une décision, il doit être capable de pouvoir parler évidemment à son
député, à un partenaire économique assez rapidement pour voir si on est capables
de l'appuyer dans cette décision-là. Des fois, c'est des bonnes nouvelles, des
fois, c'est des moins bonnes nouvelles, mais il faut être capable de pouvoir
suivre le désir des entrepreneurs en temps réel.
Et nos organisations
économiques ont rejoint, hier, j'avais la liste, plus d'une soixantaine
d'entreprises. On leur a demandé :
Comment ça va? Comment vont vos partenaires? Est-ce que vous avez de la
liquidité? Est-ce qu'il y a des emplois que vous comptez mettre à pied?
Pour avoir l'élément le plus à jour possible et de pouvoir être prêts. Et on a eu un travail aussi préalable qui s'est fait
dans les dernières semaines, notamment, et je veux la remercier, ma collègue,
la ministre de l'Emploi, et où on s'est assis avec Services Québec, et on a
dit : Est-ce qu'on est prêts à accueillir une manne de travailleurs qui pourraient perdre leur emploi, ce qu'on ne
souhaite pas, M. le Président, mais pour lequel il faut se préparer?
Est-ce qu'on connaît le nombre d'emplois vacants en Beauce? Vous savez, moi,
chez nous, c'est le taux de chômage le plus bas au Canada, là, 2,19 %.
Alors, c'est sûr que
j'ai encore des emplois vacants dans des marchés intérieurs, dans des
entreprises qui se tournent vers l'Europe. Est-ce qu'on a la liste pour faire
en sorte que ces employés-là, qui pourraient perdre leur emploi, on puisse les relocaliser rapidement? C'est fait.
Il y a des postes vacants au CISSS, on a la liste. Il y a des postes vacants
à la commission scolaire, on a la liste. On est prêts à faire face à cette
situation-là, qui pourrait être difficile dans le meilleur scénario comme dans
le pire.
On
travaille également, aussi, M. le Président, et ça, c'est hyperimportant de le
mentionner, comme gouvernement, dans tous nos projets publics, qui font une
différence dans les régions du Québec. On en a fait depuis 2018. On a
construit un complexe multisports à
Saint-Georges. 36 millions de notre gouvernement. Qui a remporté l'appel
d'offres? Constructions Binet de Saint-Benoît-Labre dans Beauce-Sud.
Deux ans de travail pour les travailleurs. On a fait une maison des aînés dans
le comté de Beauce-Sud. Qui a remporté le contrat? Vous allez me dire : Il
est chanceux. Constructions Binet, Saint-Benoît-Labre,
deux ans de travail pour les travailleurs. On a investi dans les routes de
Beauce-Sud, M. le Président, comme jamais ça s'est fait dans les
dernières années. Les gens me le disent : 269, 173, 204, on n'a jamais vu
ça. Qui remporte ces contrats-là? Des entrepreneurs locaux de la Beauce, M. le
Président.
Alors, oui, le
gouvernement du Québec a un rôle à jouer dans le développement économique de
nos régions. On n'a pas attendu, évidemment, Donald Trump, mais on l'a fait
dans les dernières années pour s'assurer d'avoir des investissements massifs
qui font travailler notre monde. Et il y a une chose qui est sûre, c'est que
des investissements de 36 millions,
puis d'une quarantaine de millions, puis de plus de 100 millions sur les
routes, M. le Président, ça ne se serait pas fait dans les dernières
années au Québec. C'est parce qu'on a eu un leadership, on a eu une
détermination. Et ça a fait travailler notre
monde. Et ça, je tiens à le mentionner, parce que, oui, il y a le travailleur,
mais il y a aussi la famille. Et je peux vous dire qu'avec mon collègue le
député de Beauce-Nord, on travaille, et je sais, comme l'ensemble de mes collègues ici, à continuer d'avoir des
investissements dans nos infrastructures dans les prochaines années, parce
qu'on en a pour quatre ans avec ce
président américain là, pour s'assurer de mettre notre monde au travail. C'est
gagnant-gagnant. C'est gagnant pour la société, mais c'est aussi gagnant
pour les travailleurs.
Également, on l'a vu,
il y a eu un mouvement de solidarité important, M. le Président, envers l'achat
local. On avait fait, dans les dernières années, Achetons beauceron, Ma Beauce
d'abord. On va remastériser le tout et faire en sorte de proposer une nouvelle
campagne pour appuyer l'achat local dans nos régions. Il faut savoir que, même
dans les dernières années, dans les derniers mois, il y a beaucoup de nouveaux
produits québécois qui gagnent à être connus, M.
le Président, qui gagnent, évidemment, à être reconnus sur les tablettes, puis
je veux saluer le travail de nos commerçants locaux, qui ont réussi à positionner de plus en plus, dans les derniers
jours, les produits québécois, les produits canadiens, puis je veux les
remercier. C'est dommage que, par moment, ça prend une crise pour faire des
choses, mais les crises, c'est des opportunités, puis la solidarité, c'est
aussi de poser des gestes comme ceux-là. Acheter, c'est voter, et je sais que nos citoyens en font de plus en plus le choix,
et, en Beauce, on va trouver, évidemment, une façon de pouvoir le faire
et de mettre le tout de l'avant.
Je vous parlais aussi, M. le Président, des
entreprises, mais il ne faut pas oublier l'agriculture. Elle est tellement, tellement
importante dans nos municipalités. Chez nous, là, c'est 1 916 fermes
familiales. Hier, j'étais dans mon bureau avec les
producteurs de lait, qui sont fondamentaux. Non seulement il faut protéger la
gestion de l'offre dans toutes nos discussions à l'international... Et j'espère
que le Canada, peu importe le prochain gouvernement, va jouer un rôle de leader, à ce niveau-là, pour protéger
la gestion de l'offre, qui permet à des milliers de fermes, partout dans les
régions du Québec, de vivre.
Et je ne suis pas
certain que l'ensemble des politiciens ont la même position sur la gestion de
l'offre, mais, dans les temps d'incertitude, c'est peut-être le temps de revoir
leur position et de se dire qu'on se doit d'appuyer nos fermes. C'est
important, aussi, le modèle de ferme familiale. On sait qu'il y a... on doit
les appuyer pour la relève agricole, on doit les appuyer pour l'aide à
l'automatisation, à la machinerie. Bien, moi, j'ai des municipalités dans le
comté de Beauce-Sud, M. le Président, que les taxes municipales, plus de
50 % viennent du milieu agricole. Alors, vous comprenez que, si
l'agriculture rencontre des défis, c'est tout notre tissu économique qui va
jouer un rôle.
Je veux vous parler,
M. le Président, du sirop d'érable, vous ne serez pas surpris. On a maintenant
la Journée nationale de l'érable. 1 000 productions acéricoles en Beauce,
M. le Président. C'est l'endroit au Québec où il y a le plus de production
acéricole qui est concentrée. Puis je regardais la liste de représailles du
fédéral, il s'y trouvait, le sirop d'érable, on ne l'avait pas oublié,
évidemment. Mais c'est important, parce que c'est un des plus beaux modèles
qu'il n'y a pas, là. Ce sont du sirop d'érable qui se trouve sur les plus
grands restaurants de New York, qui a été produit dans des rangs à
Saint-Robert-Bellarmin, M. le Président. C'est ça, le modèle de l'acériculture,
c'est nos cabanes à sucre qui s'en vont dans la réserve québécoise, et qui, par
la suite, fait en sorte qu'on exporte aux États-Unis. Et il faut le mentionner,
que ça, c'est une des plus grandes fiertés qu'on se doit d'avoir.
Mais je peux vous
dire qu'il y a un impact économique parce que nos cabanes à sucre, M. le
Président, oui, on en a encore qui sont un petit peu plus artisanales, à la
bouilloire, mais d'autres ont beaucoup automatisé. Moi, j'en ai visité
énormément en Beauce, là, et je peux vous dire que c'est impressionnant, le
travail qui est fait pour augmenter la réserve de sirop d'érable. Alors, il
faut aussi protéger ce système-là, parce que c'est des hommes puis des femmes
qui mettent du temps, de l'énergie. Souvent, c'est du travail qui se fait sur
une période pas seulement de trois mois par année, mais six mois, huit mois.
Alors, il faut protéger ça, le mentionner et le saluer.
Dans
les prochaines semaines, on sera extrêmement avisé, M. le Président, parce
qu'évidemment là, le président américain a parlé de 30 jours. En
fin de semaine, qu'est-ce qu'il va dire je ne le sais pas, dans une semaine,
qu'est-ce qu'il va dire je ne le sais pas, mais il y a une chose qui est sûre,
c'est qu'on en a pour quatre ans. Alors, il y a une nouvelle incertitude
économique qui vient de s'installer non seulement au Québec, au Canada et en
Beauce pour les prochaines années. Et on ne pourra jamais mettre de côté nos
partenaires américains. C'est la plus longue, évidemment, douane que nous
avons. Nous avons des liens très, très forts avec eux en termes
d'accessibilité, d'environnement réglementaire, alors on ne pourra jamais les
mettre éternellement de côté, M. le Président.
• (18 heures) •
Et on va... on doit
entretenir les discussions avec nos partenaires américains, parce qu'il n'est
pas vrai que les Américains appuient tous leur président. Et, moi, s'il y a une
chose que je fais la différence, M. le Président, c'est la différence entre les Américains et leur président,
parce que ce n'est pas la même chose. Cependant, on est avec lui pour
les quatre prochaines années et on dit : Il joue avec nous, mais il joue
aussi avec notre argent, avec notre économie, avec nos emplois.
Alors,
il y aura tout un travail de fait dans les prochaines années pour redéfinir nos
relations avec les États-Unis en termes de libre-échange, pour revenir
aux valeurs profondes que Brian Mulroney avait mises de l'avant et qui avaient
été tant appréciées aussi par les Canadiens, en termes de nouveaux marchés puis
de nouvelle économie. À l'époque, ça avait
permis, dans une région comme la mienne, dans le domaine, par exemple, de
l'acier, de l'aluminium, de pouvoir
aller de l'autre côté... nos compagnies de camionnage, M. le Président, à quel
point le libre-échange est important pour
eux. Vous comprenez que, si des entreprises ne peuvent plus aller du côté des
États-Unis, les entreprises de camionnage doivent très, très vite
s'orienter vers le marché canadien. Alors, c'est tout un défi également pour la
deuxième ligne.
Nos compagnies de
logiciels en informatique vivent l'incertitude présentement avec des commandes
qui ne se font pas. Un concessionnaire automobile me dit : Je me suis fait
canceller une commande de quatre véhicules, d'une grande entreprise. Alors, même
ces gens-là sur la deuxième ligne vivent l'incertitude économique, M. le
Président.
Mais il y a une chose
qui est sûre, c'est qu'ils peuvent compter sur une équipe économique,
évidemment, par notre premier ministre, qui a énormément d'expérience, qui est
la personne, selon moi, la plus crédible dans la situation actuelle pour
défendre les entrepreneurs, il en est un, il nous en a parlé cet après-midi,
mais ils peuvent compter sur une équipe qui
sera extrêmement alerte, M. le Président, qui n'ira pas dans la précipitation,
mais qui va aller au rythme de nos
entrepreneurs, parce que c'est eux qui connaissent leur marché, c'est eux qui
connaissent leurs partenaires américains, c'est eux qui connaissent leurs employés. Et on va tout faire pour les
aider, les supporter, travailler avec eux, parce qu'on est le gouvernement des régions et on va y mettre
tout notre coeur, toutes nos énergies et toutes nos fins de semaine dans
les prochaines années. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Beauce-Sud. Et je reconnais maintenant M. le député d'Arthabaska.
M. Eric
Lefebvre
M. Lefebvre : Merci beaucoup,
M. le Président. Écoutez, M. le Président, depuis que je fais de la politique active que je prône un Québec fort à l'intérieur
d'un Canada uni, et je pense que c'est exactement ce qu'il faut faire. Il faut
poser des gestes concrets pour protéger nos frontières, pour protéger notre
économie, mais il faut le faire pour nous. Il ne faut pas le faire pour Donald
Trump.
Je veux saluer aujourd'hui
l'initiative qui a été faite par Entreprise Victoriaville et sa région, d'avoir
mis sur pied une cellule d'action. Et ça, ça a été fait conjointement avec la
chambre de commerce Bois-Francs—Érable,
la Jeune Chambre de Victoriaville, S.A.D.C.
Arthabaska-Érable, la BDC, Développement économique Canada, Cité Innovation,
Investissement Québec, Carrefour Québec International.
Comme vous voyez, M. le Président, la région se
prend en main. On veut soutenir nos entreprises pour les impacts des tarifs. On
veut atténuer les répercussions, renforcer notre région et diversifier nos
marchés. Et, quand on parle de diversifier nos marchés, chaque crise offre des
opportunités. Et là on a des opportunités de développement économique avec des
nouveaux partenaires, puis ces partenaires-là, c'est les partenaires canadiens
d'est en ouest.
Et on a une problématique, présentement, c'est
plus difficile de faire affaire avec les autres provinces que de faire affaire
avec les États-Unis. Un exemple, c'est au niveau des transports. La
réglementation, présentement, entre nos provinces n'est pas coordonnée. On doit
travailler pour faciliter les échanges commerciaux entre nos provinces. Et ce que je veux dire, M. le Président : Courage
aux entrepreneurs, aux travailleurs et travailleuses qui vont être touchés,
et que je serai toujours...
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député
d'Arthabaska. Alors, voilà qui met fin au débat d'urgence sur
l'imposition de tarifs douaniers par les États-Unis. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Ajournement
M. Lévesque
(Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je vous
demanderais de bien vouloir ajourner nos travaux à demain, s'il vous
plaît, 9 h 40.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette
motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, par conséquent,
nous ajournons nos travaux au mercredi 5 janvier... 5 février,
pardon, à 9 h 40.
(Fin de la séance à 18 h 06)