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Version finale

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Le mardi 23 mai 2023 - Vol. 47 N° 45

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Table des matières

Affaires du jour

Projet de loi n° 24 —  Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif
indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de
l'Assemblée nationale

Adoption du principe

M. Eric Lefebvre

M. Monsef Derraji

Mme Christine Labrie

M. Jonatan Julien

Mme Ruba Ghazal

M. Alexandre Leduc

Motion d'ajournement du débat

Mme Ruba Ghazal

M. Alexandre Leduc

Affaires courantes

Déclarations de députés

Féliciter le journal La Voix du Sud, lauréat des Grands Prix des hebdos

Mme Stéphanie Lachance

Souligner le 50e anniversaire du Conseil du statut de la femme

Mme Brigitte B. Garceau

Souligner le 25e anniversaire du programme des rangers juniors canadiens

Mme Kateri Champagne Jourdain

Rendre hommage à M. Moridja Kitenge Banza, artiste multidisciplinaire

M. Haroun Bouazzi

Souligner l'avancement du projet de rénovation de la maison Bouthillier

M. Louis Lemieux

Souligner la Journée de commémoration du génocide tamoul

Mme Sona Lakhoyan Olivier

Souligner la tenue du 30e Festival du TRAC

Mme Catherine Blouin

Souligner la Journée de La Matapédia

M. Pascal Bérubé

Souligner la tenue du Gala Les Pléiades et le 150e anniversaire de la Chambre de commerce
et d'industrie du Grand Lévis

Mme Martine Biron

Inviter les citoyens à visiter les marchés publics du Haut-Saint-François

M. François Jacques

Souligner le 75e anniversaire du Cercle de fermières Lac-Saint-Charles

M. Sylvain Lévesque

Rendre hommage aux maires et aux mairesses de la circonscription de Soulanges

Mme Marilyne Picard

Présence de M. Michel Morin, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Dépôt de documents

Dépôt de rapports de commissions

Étude détaillée du projet de loi n° 12 — Loi portant sur la réforme du droit de la famille en
matière de filiation et visant la protection des enfants nés à la suite d'une agression
sexuelle et des personnes victimes de cette agression ainsi que les droits des mères
porteuses et des enfants issus d'un projet de grossesse pour autrui

Consultations particulières sur le projet de loi n° 20 — Loi instituant le Fonds bleu et modifiant
d'autres dispositions


Dépôt de pétitions

Améliorer le diagnostic et la prise en charge du syndrome d'Ehlers-Danlos

Accorder un soutien financier temporaire aux familles en attente d'une place en service de
garde éducatif


Questions et réponses orales

Modification du projet de troisième lien entre Québec et Lévis

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

Processus de nomination des juges

M. André Albert Morin

M. Simon Jolin-Barrette

M. André Albert Morin

M. Simon Jolin-Barrette

M. André Albert Morin

M. Simon Jolin-Barrette

Problèmes de violence et d'itinérance à Val-d'Or

Mme Jennifer Maccarone

M. François Bonnardel

Mme Elisabeth Prass

M. Lionel Carmant

M. André Albert Morin

M. Ian Lafrenière

Augmentation de la rémunération des députés

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

Pénurie de main-d'oeuvre dans le réseau de la santé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

Stratégie du gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques

Mme Alejandra Zaga Mendez

M. Benoit Charette

Mme Alejandra Zaga Mendez

M. Benoit Charette

Mme Alejandra Zaga Mendez

M. Benoit Charette

Régularisation du statut de certains immigrants

M. Guillaume Cliche-Rivard

Mme Christine Fréchette

M. Guillaume Cliche-Rivard

Mme Christine Fréchette

M. Guillaume Cliche-Rivard

Mme Christine Fréchette

Décontamination du site des lagunes de Mercier

Mme Désirée McGraw

M. Benoit Charette

Mme Virginie Dufour

M. Benoit Charette

Mme Désirée McGraw

M. Benoit Charette

Conflit de travail au cimetière Notre-Dame-des-Neiges

Mme Michelle Setlakwe

Mme Kateri Champagne Jourdain

Motions sans préavis

Demander au gouvernement de poursuivre ses démarches afin d'améliorer les conditions et le
respect des droits des prestataires d'aide sociale

Mise aux voix

Rappeler le rôle des députés de l'Assemblée nationale

Mise aux voix

Entériner le mandat de procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° — Loi
modifiant principalement la Loi sur l'instruction publique et édictant la Loi sur l'Institut national d'excellence en éducation

Mise aux voix

Entériner le mandat de procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° — Loi
visant à lutter contre l'hébergement touristique illégal

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 24 —  Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif
indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de
l'Assemblée nationale

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Alexandre Leduc (suite)

M. Haroun Bouazzi

Motion de report

Mme Ruba Ghazal

M. Guillaume Cliche-Rivard

Mme Christine Labrie

Mme Alejandra Zaga Mendez

M. Etienne Grandmont

M. Gabriel Nadeau-Dubois

Mise aux voix

Poursuite du débat sur l'adoption du principe

M. Guillaume Cliche-Rivard

Débats de fin de séance

Problèmes de violence et d'itinérance à Val-d'Or

Mme Elisabeth Prass

M. Lionel Carmant

Mme Elisabeth Prass (réplique)

Décontamination du site des lagunes de Mercier

Mme Désirée McGraw

M. Benoit Charette

Mme Désirée McGraw (réplique)

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures une minute)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon mardi. Avant de débuter nos travaux, nous allons nous recueillir quelques instants.

Vous pouvez vous asseoir.

Affaires du jour

M. le leader du gouvernement, est-ce que vous voulez nous indiquer les travaux?

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, bonjour, Mme la Présidente. D'abord, vous dire que c'est un plaisir de vous retrouver après cette semaine de travail en circonscription. Et je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 4 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 24

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, aux affaires du jour, à l'article 4 du feuilleton, M. le leader parlementaire du gouvernement et ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 24, Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale.

Y a-t-il des interventions? M. le député d'Arthabaska-Érable, alors, la parole est à vous.

M. Eric Lefebvre

M. Lefebvre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour à tous les collègues en ce beau mardi matin.

Mme la Présidente, je désire aujourd'hui prendre la parole dans le cadre du débat sur l'adoption de principe du projet de loi n° 24, Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant de la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale.

Comme son nom l'indique, cette loi est strictement inspirée du rapport du comité consultatif indépendant, formé de deux ex-députés de l'Assemblée nationale, Mme Lise Thériault, du Parti libéral, et M. Martin Ouellet, du Parti québécois, ainsi que M. Jérôme Côté, qui était président de ce comité, un expert en ressources humaines reconnu.

Mme la Présidente, je tiens à rappeler que la dernière révision de la rémunération des députés de l'Assemblée nationale remonte au rapport Gouin, en l'an 2000. Ça, ça veut dire que c'est près d'un quart de siècle. Vous avez bien entendu, près d'un quart de siècle qu'on n'a pas révisé les salaires des élus. C'est comme si tout le monde s'entendait pour dire que c'était la chose à faire depuis toutes ces années, mais que rien n'était fait. Pourquoi il n'y a rien qui a été fait? Parce qu'il n'y en aura jamais, de bon moment pour toucher au salaire des élus. Il n'y en aura jamais, de bon moment pour le faire. Puis je suis convaincu qu'il n'y a pas personne ici, dans cette Chambre, qui pense que cette révision n'était pas due pour être faite, personne.

Mme la Présidente, je le répète, à chaque fois que je fais une allocution dans mon comté, je termine toujours en disant la même chose. Je dis à mes citoyens que c'est un grand privilège d'être leurs yeux, leurs voix et leurs oreilles à l'Assemblée nationale. Et je suis persuadé que c'est la même chose pour l'ensemble de mes collègues, mais je suis persuadé... Quand les collègues se sont présentés, tout comme moi, pour être députés, on savait qu'il y avait une charge de travail, comme députés, on s'en doutait bien, mais on ne pensait jamais que cette charge de travail là était à tel point d'une grande ampleur.

Je me réfère d'ailleurs, Mme la Présidente, au comité consultatif indépendant, qui, dans son rapport, a parlé de la précarité de l'emploi. On parle de moyenne de six ans pour un député. Ça fait que, donc, il y a la moitié, à peu près, des députés qui font un mandat, l'autre moitié qui font deux mandats, pour une durée moyenne de six ans. L'ampleur de la charge de travail, Mme la Présidente, les membres du comité en ont parlé. Et je vais vous revenir un petit peu plus tard sur ça, mais je veux vous parler également de la conciliation travail-famille.

Mme la Présidente, à Noël, cette année, ma mère, qui est fière du travail que je fais, mais je l'ai sentie triste, et elle m'a dit : Eric, te rends-tu compte qu'on s'est vus une fois dans l'année? On s'est vus une fois dans l'année. Mme la Présidente, j'ai 17 municipalités dans mon comté et je dois avoir à peu près l'équivalent de 17 clubs des FADOQ. Les gens des clubs des FADOQ, je les vois trois, quatre ou cinq fois par année; ma propre mère, une fois.

Les amis, Mme la Présidente, je n'ai plus d'amis qui m'appellent la fin de semaine pour souper. Ils savent que j'ai des soupers à tous les soirs, les jeudis soir, vendredi soir, samedi, dimanche. Il n'y a plus aucun de mes amis qui m'appelle pour faire des activités parce qu'ils savent que j'en ai dans mon comté. Mais c'est notre réalité et je l'accepte, ça fait partie de notre travail, mais il faut être conscient de notre réalité au niveau de notre travail. Et savez-vous ce que je fais, Mme la Présidente, pour pallier ça? Bien, le 26 décembre, en dehors de la pandémie, naturellement, vous vous rappellerez que ça a été cancellé, mais le 26 décembre, je réunis tous mes amis chez moi, de toutes amitiés confondues, pour m'excuser à mes amis de mon absence durant toute l'année parce que je ne les vois plus. Puis, si je n'entretiens cette amitié-là une fois par année, le 26 décembre, bien, je vais perdre cette amitié-là.

Alors, il y a des sacrifices importants, Mme la Présidente, qui sont faits. Et le comité consultatif estime qu'en moyenne, un élu travaille 63 heures par semaine et 10 heures de déplacements.

Alors, lorsque lorsqu'elle a présenté son rapport au Comité consultatif indépendant, en point de presse, Lise Thériault a bien résumé l'ampleur de la tâche du député. Et je vais lire ce que Mme Thériault a dit : «Quand les députés partent [du parlement] pour aller dans leur comté, c'est comme si, en plus d'avoir travaillé 30 [heures], 35 [heures], 40 heures, bien là, tu tombes dans [un] deuxième emploi pour aller travailler 30, 35, 40 heures, parce que la fonction de député, c'est sept jours sur sept, 24 heures sur 24, matin, midi, soir. [On a] des activités le soir, [on a] des déjeuners le matin, [et] tu peux aller à un [...] déjeuner, à un brunch, une soirée de Chevaliers de Colomb.» Ça, Mme la Présidente, c'est Lise Thériault, qui a été au-delà de 20 ans députée ici, à l'Assemblée nationale, qui reconnaît ce travail-là.

Et, en conclusion, Mme la Présidente, je voudrais simplement citer Martin Ouellet, du Parti québécois, qui est également membre dudit comité : «On a essayé de trouver le juste milieu et on pense qu'à ce niveau-là c'est juste et équitable.» Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député d'Arthabaska. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le leader de l'opposition officielle, la parole est à vous.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, très heureux de prendre la parole, comme on le fait souvent dans la prise... dans l'intervention sur le principe de ce projet de loi, projet de loi n° 24. Premièrement, vous allez me permettre, Mme la Présidente, de saluer l'excellent travail, mon collègue vient de le mentionner, l'excellent travail d'un comité consultatif indépendant. J'insiste sur ces mots, parce qu'on a tendance à oublier que les deux ex-collègues qui ont travaillé, ils n'étaient pas seuls, ils étaient accompagnés d'un expert en ressources humaines qui s'appelle M. Jérôme Côté. Donc, je vais prendre quelques moments pour les remercier sur le travail qui a été fait. Et aux gens qui nous écoutent, aux gens qui nous suivent, qui ont des questions sur la rémunération des élus, et je l'avoue, c'est des questions légitimes, que ce soit entre élus, que ce soit au niveau de la population, je les invite, le rapport, il est public.

Mon collègue vient d'exposer quelques faits par rapport à son travail, par rapport au nombre de municipalités, j'en suis sûr, vous-même, j'en suis sûr, pas mal de collègues à travers tout le Québec, vous vivez des situations similaires, chacun dans sa circonscription. Mais pour les gens curieux, les gens qui veulent savoir la nature du travail, comment le travail a évolué dans le temps et des comparatifs par rapport à d'autres corps de métier au Québec, et d'autres fonctionnaires, et hauts fonctionnaires de l'État québécois, ce rapport, il est public, détaillé. Et je peux prendre le temps qui m'est alloué à vous exposer, mais, j'en suis sûr et certain, si vous êtes curieux et si ça vous intéresse, je vous invite à aller le chercher en ligne, c'est 80 pages détaillées sur le travail des élus, l'évolution dans le temps.

• (10 h 10) •

Alors, Mme la Présidente, je vais être quand même bref, par rapport à ce que je vais dire par la suite, mais je tiens juste à rappeler, à rappeler que l'augmentation du salaire des députés ou la refonte n'a pas été faite depuis presque 20 ans. Et nous croyons, au Parti libéral, que, peu importe le sujet, cette discussion mérite... ce sujet mérite discussion, et c'est pour cela qu'on est en faveur de l'adoption du principe du projet de loi n° 24. Et nous sommes prêts à l'étudier en commission parlementaire, comme on le fait avec n'importe quel sujet, quand le gouvernement dépose, peu importe le sujet. C'est ça, notre rôle, en tant que députés, en tant que législateurs, c'est se saisir du principe de ce projet de loi. C'est vrai que ce principe touche la rémunération des élus, et nous sommes d'accord qu'on doit l'étudier.

Ce que nous devons aussi saluer, aujourd'hui, c'est qu'en majorité le projet de loi s'inspire des recommandations, même s'il y a des recommandations qu'on ne voit pas dans le projet de loi, mais s'inspire en majorité du travail qui a été fait par le comité indépendant.

Donc, Mme la Présidente, considérant que le gouvernement a présenté ce projet de loi faisant suite aux recommandations du comité indépendant, le comité que... je tiens à rappeler, présidé par M. Jérôme Côté et nos deux ex-collègues, notre collègue Lise Thériault et notre collègue Martin Ouellet, nous allons voter en faveur du principe de projet de loi. Et nous allons l'étudier avec la même rigueur en commission parlementaire. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, Mme la Présidente. Je veux prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi qui vise à augmenter le salaire des élus de 30 % et je veux souligner à quel point je trouve ça indécent qu'avec tous les enjeux qu'il y a au Québec, actuellement, le gouvernement décide de prioriser une augmentation de salaire pour les élus. Indécent, il n'y a pas d'autre mot pour moi. Dans l'ensemble de tous les enjeux qui traversent le Québec, en ce moment, on choisit de consacrer du temps ici, à l'Assemblée nationale, à se voter une augmentation de salaire.

Gouverner, c'est choisir. Et là on est devant un gouvernement qui choisit de se voter une augmentation de salaire de minimum 30 000 $ par député, parce que, bien souvent, ça va être beaucoup plus que ça, plutôt que de répondre à des besoins réels des citoyens qu'ils sont supposés représenter en se déplaçant à Québec toutes les semaines, ici.

Moi, j'aimerais ça savoir s'il y en a un seul, citoyen, qui est allé cogner à la porte de son député pour demander que les députés soient mieux payés. J'aimerais vraiment ça le savoir. Sérieusement, est-ce qu'il y en a, de la demande citoyenne pour améliorer la rémunération des élus? Moi, je dois vous dire que ça fait cinq ans, maintenant, que je fais de la politique québécoise, et il n'y en a aucun, citoyen, qui est venu me dire qu'il fallait augmenter le salaire des élus. Aucun. Ça n'est jamais arrivé.

Ils m'ont parlé de bien des affaires. Ils m'ont parlé de l'accès à une consultation pour un professionnel de la santé, c'est le sujet qui revient le plus souvent, tous les jours, ils m'ont parlé de l'accès à une place en service de garde, ils m'ont parlé de la crise environnementale, de la difficulté d'avoir des services pour des enfants à besoins particuliers dans les écoles, dans les garderies aussi, du trou noir dans lequel les parents d'enfants autistes se retrouvent. Ils m'ont parlé du manque de soutien, du manque de répit pour les proches aidants, des services à domicile pour les aînés, des personnes avec un handicap. Ils m'ont parlé de la protection de la jeunesse. La liste est longue, je pourrais la continuer longtemps, mais, même en bas de cette liste-là, jamais, jamais on ne retrouverait le salaire des députés. Ce n'est pas arrivé. Il n'y a pas de demande citoyenne pour ça. Mais, pour être honnête, j'ai commencé à en entendre beaucoup parler, depuis que la CAQ a annoncé son intention de monter le salaire des députés. Énormément, en fait.

On vient tout juste, mes collègues et moi, de passer une semaine dans nos circonscriptions, puis je pense qu'il n'y a pas une seule personne que j'ai rencontrée, dans les derniers jours, qui ne m'a pas parlé de la hausse de salaire qu'on allait se voter. Ils étaient scandalisés, bien sûr. Il y en a plusieurs qui m'ont fait des blagues avec ça parce qu'ils savent très bien que je suis avec eux contre cette hausse-là. Mais il y en a plusieurs qui m'expriment aussi leur colère, leur indignation, en fait, de voir les députés de la CAQ se voter une hausse de salaire de 30 %, alors qu'eux ont de la misère à arriver, avec l'inflation, à l'épicerie, avec les hausses de loyer, avec l'augmentation des taux d'intérêt. Il y a vraiment beaucoup de colère actuellement qui gronde. Les citoyens ne comprennent pas pourquoi le gouvernement qu'ils ont choisi prend cette décision-là.

Il y en avait déjà, de la colère, chez, par exemple, les jeunes travailleurs qui remboursent encore leurs prêts étudiants puis qui voient leur taux d'intérêt passer de 0 % à 7 % d'un seul coup. Bien, imaginez comment ils se sentent quand ils voient que le gouvernement qui leur impose ça, hein, qui fait le choix de leur imposer 7 % de taux d'intérêt, se vote en même temps des dizaines de milliers de dollars de hausse de salaire. Il y avait de la colère chez les locataires, qui subissent déjà de plein fouet les hausses de loyer. Bien, imaginez comment ils se sentent quand ils voient que le gouvernement, qui refuse encore, après des années et des années de crise du logement, de légiférer pour contrôler les hausses de loyer, bien, ce gouvernement-là se vote des dizaines de milliers de dollars de hausse de salaire.

Il y avait de la colère chez les parents qui se privent d'un salaire parce qu'ils ne trouvent pas de place en garderie ou qui paient leurs places une fortune dans une garderie privée. Bien, imaginez comment ils se sentent, ces parents-là, quand ils voient que le gouvernement, qui refuse de leur offrir une aide financière d'urgence en attendant une place puis qui avance à peine dans le dossier de la conversion, se vote des dizaines de milliers de dollars de hausse de salaire.

Il y avait de la colère chez les travailleurs du milieu communautaire qui travaillent à des salaires de misère malgré qu'ils sont hautement diplômés, qui se démènent pour gratter des fonds de tiroirs, qui passent un temps considérable à organiser des activités de financement pour réussir à offrir des petits bouts de services essentiels. Bien, imaginez comment ils se sentent quand ils voient que le gouvernement, qui refuse de les financer à la hauteur de leurs besoins, de les financer à un montant qui leur permettrait d'avoir des salaires décents, qu'eux se votent des dizaines de milliers de dollars de hausse de salaire.

Il y avait de la colère chez les travailleurs du secteur public, évidemment, qui se font offrir une hausse de salaire inférieure à l'inflation. Bien, imaginez comment ils se sentent quand ils voient que le gouvernement leur propose littéralement de s'appauvrir pendant qu'ils... que leurs élus qui leur proposent ça se votent eux-mêmes une hausse de salaire de plusieurs dizaines de milliers de dollars par année. Imaginez comment ils se sentent.

Là, je vous parle d'un sentiment de colère, mais ce n'est pas juste ça, il y a aussi un sentiment d'abandon chez beaucoup de citoyens. Moi, je parle à des aînés qui sont étouffés par leurs loyers puis qui se privent de repas pour payer leurs cotisations à l'assurance médicaments parce qu'ils ont un revenu juste un petit peu trop élevé pour être exemptés. Comment vous pensez qu'ils se sentent, ces aînés-là? C'est des aînés qui vont voir leurs députés caquistes pour leur parler de leur situation de précarité financière puis qui se font envoyer dans les banques alimentaires. Et, pendant ce temps-là, leur élu, qui est supposé les représenter, défendre leurs intérêts à eux, les aider dans leur situation, bien, il les envoie dans les banques alimentaires, puis il se revire de bord pour venir ici se voter une hausse de salaire de plusieurs dizaines de milliers de dollars. Vraiment? Quand les élus font ça, les citoyens se sentent méprisés, littéralement.

Puis je pense aux enseignants aussi, qui se sont sentis particulièrement méprisés par leur ministre dans les derniers jours. C'était quand même phénoménal, les propos du ministre d'Éducation, puis surtout le contraste total avec les propos qu'il tenait il y a quelques années à peine, hein, ça ne fait pas si longtemps que ça. Il a changé d'opinion du tout au tout, il est passé d'un député qui défendait ses citoyens, qui dénonçait la volonté d'un autre gouvernement, dans le passé, de se voter une hausse de salaire à un député qui largue les citoyens puis qui défend ses propres intérêts financiers. Tout le monde peut changer d'idée, là, mais changer de valeurs à ce point-là, c'est grave.

Puis ce que la CAQ est en train de faire, ça fait littéralement exploser le cynisme au sein de la population, ça brise la confiance des gens envers la politique, envers leurs élus, ça entretient l'idée que les gens qui vont en politique y vont pour défendre leurs propres intérêts. Et moi, je refuse de croire ça, ce n'est pas vrai, ce n'est pas ça, le message qu'on devrait envoyer à la population. Je refuse de croire que tous les députés de la CAQ qui sont ici sont vraiment à l'aise avec l'idée de se voter une hausse de salaire rétroactive de 30 % pendant qu'ils offrent 9 % sur cinq ans aux centaines de milliers de personnes qui se donnent, tous les jours, pour offrir nos services publics à la population au point de sacrifier, souvent, très souvent, trop souvent, leur santé.

Je le sais, là, qu'on travaille fort comme députés, tout le monde ici travaille fort, mais on n'est pas les seuls à travailler fort. Partout dans nos services publics, les gens travaillent fort. Les gens qui sont au salaire minimum aussi travaillent fort. Et la CAQ propose de se voter une hausse de salaire qui représente plus que le salaire annuel d'une personne qui travaille au salaire minimum actuellement. C'est quand même phénoménal. C'est un carburant pour le cynisme qui est... j'allais dire du jamais-vu, mais, en fait, on l'a déjà vu, il y a un autre gouvernement qui a essayé ça, dans le passé, puis il avait reculé, hein?

Donc, moi, j'aimerais ça que les députés de la CAQ se demandent s'ils sont vraiment d'accord avec ça. Je ne peux pas croire qu'ils le sont. Je ne peux pas croire qu'ils trouvent tous ça juste. Puis j'espère qu'il y en a, puis qu'il y en a beaucoup, des députés de la CAQ, qui travaillent en coulisse actuellement pour convaincre leur parti de reculer. J'espère qu'ils savent qu'ils ont le droit de le faire. Ils sont peut-être pris avec la ligne de parti, mais, la ligne de parti, c'est eux qui la décident. Ils peuvent faire changer la ligne de parti s'ils se mettent ensemble pour le dire que ça n'a pas d'allure comme projet de loi. Ils peuvent faire changer la ligne de parti à ce sujet-là.

• (10 h 20) •

Moi, j'ai commencé mon intervention en disant que gouverner, c'est choisir. Bien, c'est le choix que je leur demande de faire. Nous, en tout cas, à Québec solidaire, on a choisi notre camp, on n'est pas ici pour améliorer nos propres conditions de travail, on est là pour améliorer les conditions de travail et les conditions de vie des citoyens qu'on représente.

Et j'aimerais voir les députés de la CAQ faire le même choix : prioriser les citoyens. Je leur demande de les prioriser en améliorant en premier les conditions de travail des citoyens, pas les leurs. Je leur demande de les prioriser en améliorant les conditions de travail dans le secteur public parce que c'est la seule manière de réussir à retenir, attirer toute la main-d'oeuvre dont on a besoin.

Je voudrais que le gouvernement réalise qu'il y a des citoyens qui souffrent actuellement beaucoup parce qu'ils sont sur une liste d'attente pour une chirurgie, pour des services en santé mentale, en éducation, pour une place en garderie. Il y en a qui souffrent parce qu'ils attendent un procès depuis des mois. Il y en a qui attendent une place dans une maison des aînés déjà toute prête. On n'est pas capables d'offrir ces services-là parce qu'il manque de monde. Les gens qu'on embauche démissionnent au fur et à mesure à cause des conditions de travail qu'on leur offre. Puis la seule manière de réussir à répondre aux besoins des citoyens, c'est d'attirer assez de monde pour offrir des services publics. Et ça devrait être ça, la priorité. C'est ça que je veux sentir comme priorité du côté de la CAQ.

Le projet de loi qui nous est soumis en ce moment, on ne devrait même pas l'étudier. Puis la seule manière de montrer aux citoyens qu'on les respecte puis qu'ils peuvent nous faire confiance, c'est de le laisser mourir au feuilleton. C'est ça que je demande à la CAQ aujourd'hui, de penser aux citoyens qui les ont élus, à tous les citoyens qui les ont élus, qui vont les voir dans leurs bureaux, qui les appellent, qui leur écrivent pour leur parler de leurs besoins comme citoyens. Demandez-vous, que chacun ici se demande : Est-ce que ce que les citoyens ont besoin, c'est vraiment une hausse du salaire des élus? Est-ce que c'est ça qu'ils ont le besoin le plus en ce moment? Est-ce que c'est sur ça qu'on devrait être en train de se pencher? Est-ce que c'est à ça qu'on devrait consacrer notre temps? Est-ce que c'est à ça qu'on devrait consacrer nos fonds publics? J'aimerais que tout le monde ici pense à ça. Revoyez-les, les visages des gens qui vous ont élus. Demandez-vous s'ils vont encore vous faire confiance après ça. Pensez-y sérieusement.

Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole au ministre responsable des Infrastructures.

M. Jonatan Julien

M. Julien : Oui, merci, Mme la Présidente. Je veux simplement mentionner que l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et qu'il en recommande l'étude par l'Assemblée. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le ministre. Maintenant, je suis prête à céder la parole à un autre intervenant. Alors, Mme la députée de Mercier.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, à titre de whip du deuxième groupe d'opposition et membre du Bureau de l'Assemblée nationale, bien, je suis... il me fait plaisir de prendre... de parler de ce projet de loi, pas à cause de son contenu, mais je trouve que c'est important que des choses soient dites, et c'est ce que j'ai l'intention de faire dans le temps qui m'est imparti.

Je vais vous étonner, j'ai eu beaucoup de plaisir à lire le rapport Ouellet-Thériault. Je pense que c'est comme ça, maintenant, qu'on peut l'appeler. J'ai retrouvé beaucoup, beaucoup d'éléments qui étaient dans le rapport L'Heureux-Dubé, que j'avais aussi lu, au début, quand je suis devenue députée et whip aussi du deuxième groupe d'opposition, parce qu'il y avait des discussions, depuis le début de l'ancienne législature, sur la question des salaires des députés, comment est-ce qu'on peut s'assurer d'avoir un salaire juste, équitable, etc., entre les différents partis. Donc, il y a des éléments qui étaient repris, et même M. Ouellet et Mme Thériault nous l'ont dit, nous l'ont répété : Tu sais, nous, on n'a pas inventé des choses de notre tête, là, on a repris tout le travail qui a été fait et qui était très, très important. Ils le reconnaissaient, puis je trouve que leur rapport était très, très bien écrit.

Puis ma partie préférée, puis j'ai eu aussi l'occasion de le dire quand ils sont venus nous le présenter au BAN, c'était l'annexe à la fin. Puis j'invite tout le monde à lire cette annexe à la fin. Je n'avais jamais lu ça avant de devenir députée. C'est une description de tâches. Dans tous les emplois, il y a une description de tâches, qu'est-ce que la personne va faire, c'est quoi, ses tâches, c'est quoi, ses responsabilités, et les objectifs à atteindre, etc., mais, pour un député, ça n'existe pas. Puis souvent, les gens, là, vous parlez à n'importe qui, là, vous leur demandez que fait un député, c'est très, très mystérieux. Moi, quand je parle avec des gens puis je leur dis : Vous savez ce que fait un député?, là ils sont gênés parce qu'ils ne savent pas trop. Bien, un député, je ne sais pas, vous... vous êtes à la période des questions, vous vous opposez quand vous êtes dans l'opposition puis vous vous chicanez entre vous. Tu sais, ça reste juste cette partie-là, qui est comme une petite partie de rien du tout, ce n'est même pas 1 % de tout le travail qu'on fait comme députés, et c'est nébuleux. Donc, c'est une bonne chose que les gens le sachent.

On peut peut-être... Je peux recommander au whip du gouvernement de prendre cette partie-là puis de la distribuer à tous ses amis et à sa mère pour qu'elle voie tout ce qu'il fait quand il ne peut pas la voir. Moi-même, j'ai fait ça. Je l'ai... J'ai donné cette annexe-là à mon chum pour qu'il comprenne pourquoi, pourquoi on se voit... En fait, on se voit souvent, mais, je veux dire, je ne suis pas là, là, tu sais, mentalement, mais pourquoi je suis toujours sur mon cellulaire. Ça peut peut-être être une bonne chose pour prévenir des chicanes de couple. Voilà. Un conseil que je fais.

Écoutez, on n'a pas fini d'entendre parler de ce sujet-là. Pourquoi? Parce qu'il y a aussi un autre élément intéressant, dans le rapport Ouellet-Thériault, c'est à la fin. Ce qu'ils disent : Nous, notre mandat, là, c'était de regarder une partie de votre rémunération, le fameux 101 000 $ et quelque chose, 101 000 $, c'est tout ce qu'on pouvait regarder, mais on vous invite très fortement à avoir un comité indépendant — eux autres, ils ne disaient pas exécutoire, mais, en tout cas... — puis de continuer à en parler, parce que vous recevez plein d'autres choses comme rémunération.

Si, par exemple, vous êtes whip du gouvernement, de l'opposition, du deuxième groupe d'opposition, si vous êtes président d'une commission, si vous êtes adjoint parlementaire, si vous êtes leader, si vous êtes président de commission, si vous êtes remplaçant d'un président de commission, remplaçant dans une commission de présidence, par exemple, même si vous remplacez une fois ou deux... des fois, il y en a qui ne remplacent pas tant que ça, mais ils ont quand même de l'argent pour ça, juste au cas où, et aussi il y a notre fonds de pension, donc, tout ça, ils nous ont dit : Il va falloir qu'on vous propose fortement de continuer à en parler puis de continuer à regarder ça pour éventuellement faire le ménage. Nous, on ne pouvait pas vous le recommander. Vous nous avez juste dit de regarder une petite partie. On aurait regardé le reste, mais ce n'était pas dans notre mandat. On en tenait compte, de tout le reste, pour parler de 101 000 $ puis le proposer, mais on ne pouvait pas parler du reste, est-ce qu'on doit l'enlever ou pas.

Pourtant, si on lit le rapport de Claire L'Heureux-Dubé, c'était clairement écrit dans leur proposition : Il faut faire sauter toutes ces affaires-là. Ces petites choses là, à gauche et à droite, des fois sont justifiables, des fois elles ne le sont pas. Ce n'est pas vraiment clair, pourquoi est-ce qu'on reçoit, par exemple, l'argent, le... c'est 39 000 $ ou 38 000 $, là, de plus, etc. Donc, on fait sauter ça. On peut augmenter votre salaire de base, votre rémunération de base. On revoit aussi votre fonds de pension. Donc, il faut faire le ménage. Et le rapport Ouellet‑Thériault ne permettait pas de faire ça, donc on n'a pas fini d'en entendre parler.

Ce projet de loi sur lequel on va... malheureusement, le gouvernement, évidemment, va vouloir l'adopter malgré notre opposition, à Québec solidaire, parce qu'on a une position cohérente depuis le début, depuis qu'Amir Khadir était député ici, à l'Assemblée nationale, bien, on n'a pas fini d'en parler. Ce ne sera pas la fin, ce ne sera pas la fin de la discussion sur le salaire des députés. Et c'est une opportunité manquée. C'est vraiment dommage, parce qu'on aurait pu, une fois pour toutes, avoir ce fameux comité indépendant et exécutoire. Un comité réellement indépendant composé... Oui, il peut y avoir un ex-élu que ça fait un bout de temps qu'il n'était pas député, puis que c'est un ex-élu qui peut comprendre, qui sait c'est quoi, le métier, pour conseiller les gens autour de la table, mais ça prend surtout des gens qui s'y connaissent en rémunération et qui soient réellement indépendants. Mais ça prend aussi un comité qui soit exécutoire, c'est-à-dire que dans le rapport il ne va pas juste avoir une recommandation de ce comité-là, il va y en avoir plusieurs. Et nous, on ne peut pas dire, on regarde le rapport : Ah! on l'aime celle-là, on va voter pour ça. Ah! telle autre chose, par exemple, sur le fonds de pension, non, ça, on n'aime pas ça, on ne votera pas là-dessus. On ne fera pas, comme on dit en bon français, du «pick and choose», c'est tout ou rien. Il y a des gens indépendants qui ont regardé ça, voilà le salaire, puis on n'en parle plus jamais, «ciao, bye», c'est terminé, ce ne sera plus un sujet de discussion, puis on pourra se concentrer sur les choses réellement importantes qui préoccupent les Québécois et Québécoises, comme ma collègue la députée de Sherbrooke l'a nommé.

• (10 h 30) •

Ce serait ça, la position la plus cohérente pour nous, comme élus, qui sommes responsables de faire ça. Puis moi, je trouve ça très, très dommage parce que le gouvernement... Et, quand le whip du gouvernement m'a appelée, moi, je pensais qu'on allait reprendre le travail là où on l'avait laissé avant. On était arrivé à une entente. Elle était presque signée. Il y avait peut-être quelques détails à fignoler. Une entente pour mettre en place ce comité indépendant pour que ce comité-là puisse se pencher sur toute la rémunération globale des députés, pas juste sur une portion de l'argent qu'on reçoit, le fameux 101 000 $, pas juste sur ça, sur tout. Et je me rappelle du document, ça a été fait, à l'époque, par notre chef parlementaire, et on en discutait au BAN, on discutait aussi de ça au comité Picard, et on a parlé... Parce que son objectif, ce comité-là, c'était parler des conditions de travail des députés. Ce n'est pas à nous... C'est-à-dire qu'on en discute, on en parle ensemble pour arriver avec des propositions puis des solutions. Donc, on est arrivés avec cette entente, puis moi, j'étais vraiment confiante, j'étais même fière du travail qui a été fait en disant : Peut-être qu'on ne sera pas tous d'accord, par exemple, peut-être, sur l'exécutoire, mais, au moins, on allait voter sur quelque chose qui avait de l'allure, qui allait pouvoir continuer, puis on n'en parle plus après, puis que ce serait réglé. Enfin, le rapport Claire L'Heureux-Dubé, qui date de maintenant plus que 10 ans, de 2013, on va le mettre à exécution puis on aurait le courage de mettre à exécution ce qui y est contenu.

C'est sûr qu'après ça, si, par exemple, le rapport regarde l'ensemble de l'oeuvre et dit : Bien, on va vous donner telle augmentation, il y aura peut-être une augmentation, ce n'est pas à nous de le juger, c'est le comité indépendant, peut-être vous allez avoir une augmentation, mais on va enlever tout le reste puis on va regarder l'ensemble de votre rémunération, est-ce que les gens, par exemple, dans la société, vont dire : Ça n'a pas de bon sens, ils ont une augmentation? Ça se peut, mais, au moins, on aurait eu une discussion globale puis raisonnée, raisonnable et qui aurait clos le dossier en disant : Bien, cette fois, on va avoir une augmentation, mais on aura enlevé tout le reste, on aura revu les conditions de travail, et on en parle plus, puis ce sera réglé, ce ne sera plus entre nos mains. On serait comme tous les Québécois et toutes les Québécoises, on ne voterait pas puis on ne déciderait pas nous-mêmes de notre salaire.

C'est sûr que, par exemple, des gens me demandent : Est-ce que, Mme la députée, vous trouvez que vous gagnez bien votre vie? Est-ce que c'est un bon salaire? Moi, personnellement, je peux bien donner mon opinion très, très personnelle en fonction de ma situation personnelle, en fonction de ce que je gagnais avant, etc., je peux bien dire : Moi, en ce moment, je me dis : Bien, dans ma situation, moi, je considère personnellement que c'est un salaire suffisant, que je gagne bien ma vie. Je n'ai pas besoin de plus. Après ça, il y a un autre député qui a une autre situation familiale, qui a une autre situation, qui gagne un autre salaire, qui pourrait dire : Bien, moi, dans mon opinion personnelle, je crois que je ne gagne pas assez. Puis souvent... Moi, j'ai travaillé pendant une quinzaine d'années dans les entreprises, puis les gens dans les entreprises nous disent... tu sais, c'est rare, là, que quelqu'un dit : Ah! moi, je suis entièrement satisfait, j'aime ça. Tu sais, des fois, c'est comme un truc de négociation, aussi, avec ton employeur, si tu n'es pas syndiqué, de dire : Bien, moi je ne gagne pas assez. Mais, à la limite, ce que j'ai envie de dire, Mme la Présidente, ce que moi, je pense de mon salaire, ce que l'autre député pense de son salaire, ce que les gens pensent de leur salaire, on s'en fout. On s'en fout, c'est juste une opinion personnelle. C'est relatif. Ce n'est pas important. Ce n'est pas important, notre opinion personnelle sur notre salaire. Ce qui est important, c'est qu'il y ait un processus qui soit indépendant, exécutoire, juste, équitable. Et, après ça, c'est sûr qu'il peut y avoir des discussions là-dessus, mais, à un moment donné, on prend une décision puis on avance. Comme tous les Québécois et Québécoises qui nous entendent, ce n'est pas eux qui disent : Voici les échelles salariales, voici, moi, ce que je pense que je mérite. Souvent, les gens, ils ont l'impression qu'ils méritent plus. D'autres personnes vont être justes, ils vont dire : Non, non, moi, je vois mon collègue, il travaille très, très fort, moi, j'ai envie de consacrer ma vie à ma vie de famille, donc je veux travailler moins. Donc, moi, ça ne me dérange pas d'avoir un plus bas salaire. Mais ce n'est pas les Québécois et Québécoises, ce n'est pas les salariés, ce n'est pas les gens qui ont un travail autre que des députés qui disent : Bien, voilà, moi, c'est ça que je me vote, voici mon salaire.

Même les entrepreneurs, même les entrepreneurs, oui, ils vont se voter eux-mêmes leur propre salaire... bien, pas voter, mais ils vont le décider, mais ça va être en fonction de mesures, d'une structure, puis ce serait correct et ce serait compréhensible. Nous, on est toujours entre deux chaises, on se sent toujours mal, on ne sait jamais quoi faire avec cette patate chaude. Et je le sens, le malaise de la part du gouvernement, je le sens, le malaise de la part de l'opposition officielle, du troisième groupe d'opposition. On le sent, il y a un malaise. Mais ce malaise-là ne va pas se dissiper et ne va pas arrêter seulement avec l'adoption du projet de loi. Ça va continuer. Tout ce qu'on fait, c'est ce qu'on a fait à l'époque de Claire L'Heureux-Dubé. On va pelleter par en avant, puis ça va être d'autres députés qui vont encore se lever en Chambre puis qui vont avoir encore la même discussion. Puis c'est ça, le problème avec ce projet de loi là.

Puis les Québécois, en fait, souvent, on parle de ça, puis ça, comme je le disais, ça reste nébuleux, notre travail, mais ce qui est aussi nébuleux, c'est la rémunération, qu'est-ce qu'on reçoit. Maintenant, dans les nouvelles, ce qui est sorti, c'est beaucoup le 101 000 $, 101 000 $, 101 000 $ qui va devenir 131 000 $, mais il y a tout le reste. Moi, par exemple... Puis tout ça, c'est public. Il n'y a pas de malaise à le dire, les gens peuvent le voir. Moi, par exemple, comme whip du deuxième groupe d'opposition, sur le 101 000 $, je reçois un 20 %. Puis là, quand je dis 101 000 $, évidemment, il y a aussi le 39 000 $ ou 38 000 $, là. Je me mélange tout le temps. Au net, je sais que c'est 20 000 $ aussi qu'on reçoit. Là, je ne parle même pas de ça, mais je parle de mon 20 %. Il y en a d'autres. Si on est membre du BAN, donc, il y a quelques rencontres dans l'année. Là, je ne les ai pas comptées. Bien, en siégeant au BAN, ils reçoivent un 15 %. Après ça, il y a... Je n'ai pas tous les pourcentages, mais, par exemple, j'ai ici les salaires actuels, la rémunération, par exemple le whip adjoint du gouvernement, ça va passer de 121 873 $ à 158 119 $. Pourquoi? Parce que le fameux pourcentage va s'appliquer pas sur le 101 000 $, mais c'est sur le 131 000 $. Donc, en réalité, ce n'est même pas 30 000 $ que les députés vont recevoir. Ils vont recevoir... Il y a des députés qui vont... et des ministres, évidemment, mais des députés qui vont recevoir beaucoup plus que le 30 000 $. Le 30 000 $, c'est un minimum. Le 30 000 $, c'est... Par exemple, nous, dans notre groupe de... deuxième groupe d'opposition, on a sept collègues qui ne reçoivent pas de pourcentage supplémentaire parce qu'ils n'ont pas d'autre charge, sept, si je me... ou peut-être moins, je ne le sais plus. En tout cas, je ne me rappelle plus du chiffre, mais il me semble que j'avais entendu que c'était sept qui ne reçoivent aucun pourcentage supplémentaire de plus. Et donc eux vont recevoir le 31 000 $, en tout cas, si le projet de loi est adopté et voté. Donc, le maximum de l'indemnité additionnelle, là, c'est de 105 000 $, ça, c'est celle du premier ministre, puis 75 % pour un ministre, puis après ça il y a les députés. Donc, ce n'est même... On ne parle plus de 30 %, là. On n'est pas là. C'est une minorité de députés qui vont juste recevoir le 30 %, puis ça aussi, ça aussi, ça amène un sentiment d'injustice de la part des députés, qui ne comprennent pas.

Moi, je suis en train de faire une tournée au Québec sur l'éducation puis je rencontre des enseignants et des enseignantes. J'en ai rencontré juste avant que le ministre de l'Éducation ne dise sa fameuse phrase, en disant : Voyons donc, on ne peut pas comparer la job d'enseignant avec la job de député. Après ça, il s'est excusé, et c'est une chose très... c'est une bonne chose qu'il se soit excusé, mais, juste avant, les gens, avant même ces propos-là, les enseignants et enseignantes que je rencontrais étaient heurtés puis ils me posaient des questions : Qu'est-ce qui va se passer, là, avec le 30 %? Comment ça se fait, alors que, pour les gens de la fonction publique ou les gens du... qui travaillent pour nos services publics... Ils vont recevoir quoi? C'est 9 % qui est mis sur la table. Comment ça? Les gens sont heurtés du plus profond d'eux-mêmes par ça.

Donc, moi, ce que j'invite le gouvernement, c'est d'avoir une... de réfléchir à ce que les gens, les citoyens et les citoyennes disent en ce moment, puis de dissiper ce malaise, puis de changer d'idée, et de décider de ne pas... de retirer ce projet de loi là puis de refaire le travail là où on l'avait arrêté juste avant la pandémie. Le gouvernement a tiré la plug juste avant la pandémie en disant : Bien là, on ne peut pas... La raison, c'était : Bien là, on ne peut pas commencer... même si on a fait un bon travail, là, pour arriver peut-être à un comité indépendant pour regarder la rémunération globale, on ne peut pas commencer à parler de notre salaire alors que les gens, à cause de la pandémie, étaient en train de perdre leurs emplois. Ils étaient en train de perdre leurs jobs. Il y a des secteurs économiques qui avaient fermé à l'époque, si on se rappelle. Donc, les gens, pour eux, c'était ça, l'argument du gouvernement pour dire : Bien, on arrête ça puis on n'en parle pas. On ne peut pas le faire pour ne pas heurter les gens.

Bien, aujourd'hui, c'est exactement la même chose, qu'est-ce qu'ils sont en train de faire. Ça heurte les gens de penser que les députés vont pouvoir se voter un salaire basé sur un rapport qui avait un mandat qui n'est pas totalement indépendant, qui n'est pas indépendant, avec deux ex-élus très proches encore de leurs partis actuels, et qui avait un mandat extrêmement restreint. Eux-mêmes, dans leur rapport, ont dit : Bien, nous, on ne pouvait pas tout regarder.

Donc, on ne peut pas... Cet argument-là, j'invite le gouvernement à réfléchir à l'argument qui a fait qu'ils ont décidé d'arrêter les discussions par rapport à regarder la rémunération globale, juste avant la pandémie, en disant que ce serait injuste pour les Québécois... bien, de reprendre cet argument-là, puis de le transposer à aujourd'hui, puis entendre ce que les gens disent. Là, en ce moment, comme je le dis, il y a des négociations dans le secteur public, et ce qu'on est en train de faire, ça heurte les gens, puis on peut les comprendre, puis on peut les comprendre, avec l'inflation, avec le prix des loyers.

• (10 h 40) •

Juste hier — c'était ça, c'était hier — j'étais avec des citoyens qui... dont un citoyen... trois, en fait, dans un immeuble où ils ont reçu un avis d'éviction. Plusieurs autres personnes qui habitent dans le logement — c'est dans le Mile End — ont décidé de quitter, mais ces trois citoyens résistent, dont un qui a 75 ans. Mais même le citoyen qui a 75 ans et qui est normalement protégé par la loi Françoise David, il avait les larmes aux yeux et il me disait : Mon propriétaire m'appelle, il me harcèle. Peut-être que je devrais quitter. Peut-être que je devrais accepter l'argent qu'il me donne. Il lui donne 25 000 $. Il me dit : C'est beaucoup d'argent, 25 000 $, peut-être que je devrais l'accepter et quitter. Il avait les larmes aux yeux. Puis vraiment, si les gens l'entendaient, si les gens du gouvernement l'entendaient, ils diraient : On a besoin de construire plus de logements, on a besoin de donner plus à ces gens-là qui sont au bas de l'échelle et qui souffrent en ce moment parce qu'ils se sentent... ils se sentent abandonnés parce qu'il n'y a pas suffisamment de logements. Parce que cette personne-là, si elle quitte, dans le Mile End, son logement, elle ne va pas se retrouver un autre logement dans le même quartier qui a été très gentrifié puis où il manque de logements. Il va falloir sortir... Et ça fait 25 ans qu'il habite dans le Mile End. Il va falloir que ce citoyen-là quitte à 75 ans puis aille ailleurs, très loin, là où il n'y a pas son réseau, là où il n'a pas ses amis. Puis, pour lui, 25 000 $, c'est peut-être assez. Puis il me dit : C'est beaucoup d'argent, peut-être que je devrais l'accepter. Puis il a peur à cause du harcèlement de son propriétaire.

Ça, c'est ce que les gens vivent aujourd'hui, c'est ce que... c'est la réalité, en 2023, de personnes aînées. On n'arrête pas de parler des personnes aînées, qu'on aime, qu'on trouve qu'il faut qu'on en prenne soin, etc. Bien, on peut en prendre soin, par exemple, avec... en réglant la crise du logement, en construisant plus de logements sociaux. Et il y a une fin de non-recevoir de la part du gouvernement sur cette question-là. Il y a des mesures qui sont mises à gauche et à droite, mais qui ne règlent pas le problème de façon fondamentale. Ce monsieur-là, son problème n'est pas réglé.

Et c'est sur ces enjeux-là que moi, j'ai envie qu'on parle, ici, à l'Assemblée nationale, pas de notre salaire, pas de l'argent que nous, nous allons nous mettre dans les poches. Ça, je trouve ça honteux. Moi, j'ai honte. Et c'est sûr et certain que je suis fière que Québec solidaire, on ait la même position depuis le début, qu'on ait été cohérents depuis le début et que nous allons, encore une fois, voter contre ce projet de loi là, parce que, ce que ça prend comme solution, nous, nous avons été cohérents, c'est un comité indépendant et exécutoire, point à la ligne. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, la parole est à vous.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Pas d'autres interventions avant, Mme la Présidente?

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Non.

M. Leduc : Bon, commençons par le début, Mme la Présidente. Je relisais tantôt la page titre du projet de loi, projet de loi n° 24, Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale, présentation... présenté par M. Simon Jolin-Barrette, leader parlementaire du gouvernement et ministre de la Justice. Là, est-ce que je comprends que, si j'interviens juste après ma collègue, c'est qu'il n'y aura pas d'autre intervention de la part du gouvernement jusqu'à la fin de ce débat-là? C'est étonnant, Mme la Présidente. Moi, c'est la première fois que je vois un projet de loi dont le ministre porteur ne vient pas faire acte de présence, ne vient pas prendre la parole...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : ...souligner l'absence ou la présence de collègues, et on doit prendre la parole des collègues. Et donc le gouvernement a décidé de faire parler notre whip en chef du gouvernement.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Alors, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous connaissez bien nos règles, vous savez très bien qu'on ne peut pas souligner l'absence d'un élu. Alors, soyez prudent. Vous pouvez continuer.

M. Leduc : Parfait. Je ne faisais, Mme la Présidente, que me désoler de cette situation, de regretter cette situation et de notifier que c'est la première fois que je vois ça, moi. Ça fait cinq ans que je suis ici, comme mes collègues ici, derrière moi, c'est la première fois que je vois ça. Je trouve ça désolant. Je trouve que ça envoie un étrange signal. J'ai fait mon point, Mme la Présidente. Je n'étirerai pas davantage cette situation-là, mais vraiment j'espère que ça porte à réfléchir du côté gouvernemental.

Allons-y sur le fond des choses. Ça fait des années qu'on parle de ça, Mme la Présidente. Ce n'est pas un sujet nouveau, là, la rémunération des députés. Ça fait des années qu'on traite de ça. Moi, je n'étais pas encore élu, je m'intéressais à la chose politique depuis longtemps, c'était un sujet qui revenait de manière cyclique dans l'espace public.

La dernière fois qu'on en a parlé avec substance, c'est lors du fameux rapport de la juge L'Heureux-Dubé. Ça fait 10 ans de ça déjà. Le temps passe vite. Pourtant, ce rapport-là est d'une actualité déconcertante. C'est un comité consultatif qui était indépendant, qui était mandaté par le Bureau de l'Assemblée nationale, en juin 2013, pour étudier les conditions de travail des députés et leur régime de retraite. Elle a déposé... le comité, en fait, a déposé son rapport en novembre 2013 toujours à l'Assemblée nationale. Ça proposait un réaménagement en profondeur des conditions de travail. Le comité était composé, bon, on l'a dit tantôt, de Mme Claire L'Heureux-Dubé, juge à la retraite de la Cour suprême du Canada, de M. Claude Bisson, juge en chef à la retraite de la Cour d'appel du Québec et jurisconsulte des membres de l'Assemblée nationale, ainsi que de François Côté, secrétaire général de l'Assemblée nationale de 2001 à 2010, trois personnes très intéressantes, très compétentes, bien sûr.

Le rapport était touffu. Il y avait 31 recommandations qui touchaient, entre autres, les indemnités de députés dont on débat aujourd'hui, mais aussi les allocations de transition, les régimes de retraite. Ils avaient adopté une approche globale de la rémunération des élus. C'est quelque chose qui avait été très clair dès le départ, c'était le mandat et c'était ça qui devrait être le mandat de n'importe quel comité qui se penche sur la rémunération des élus.

Deux objectifs fondamentaux étaient poursuivis par les membres de ce comité. Le premier, c'était de recommander, pour les élus de l'Assemblée nationale, des conditions de travail qui correspondent à l'importance de la fonction de député et à son rôle essentiel dans le maintien d'une saine démocratie, et, deuxième chose, rendre des conditions de travail... pardon, rendre ces conditions de travail les plus transparentes et compréhensibles possible tout en tenant compte des finances publiques. C'est important, ça, transparentes et compréhensibles. On reviendra tantôt sur le rapport qui est à l'origine du projet de loi qu'on nous propose. On peut difficilement qualifier l'exercice qui nous anime aujourd'hui d'être transparent. On peut difficilement qualifier la façon dont on fonctionne aujourd'hui et dans les prochaines journées comme transparente, Mme la Présidente.

Au cours de son mandat, le comité a consulté des députés, des personnes reconnues pour leurs compétences et leur vision. Il a également considéré les commentaires des citoyens qui ont répondu à son appel public. Le comité a examiné les rapports sur le sujet des comités antérieurs... parce que, comme on le disait tantôt, ce n'est pas nouveau, ce débat-là, hein? C'est une longue série, une longue chaîne de rapports qui se succèdent les uns après les autres, rarement appliqués dans leur intégralité, certainement pas le cas du rapport L'Heureux-Dubé. Le comité a examiné les rapports sur le sujet des comités antérieurs, fait des comparaisons avec les autres assemblées législatives canadiennes ainsi qu'avec certains postes de gestion du secteur public et parapublic. Il a aussi fait faire une évaluation objective de la fonction de député par Le Groupe Hay, une firme internationale de ressources humaines reconnue tant au Canada qu'à l'étranger.

Tout le monde, tout le monde à l'époque, avait reconnu le travail rigoureux qui avait été fait par le comité. C'était un consensus transpartisan très, très clair, et on aurait pu croire à ce moment-là, il y a 10 ans, Mme la Présidente, qu'avec un consensus aussi fort alentour de ce rapport-là, qui était d'une grande qualité sur le fond et sur la forme, il y aurait eu une démarche rapide qui aurait mené à l'application des recommandations du rapport. Malheureusement, ce n'est pas ça qui est arrivé.

Le comité recommandait, comme c'est le cas dans presque toutes les assemblées législatives du Canada, d'intégrer l'allocation annuelle des dépenses à l'indemnité de base. On est assez en retard là-dessus à l'Assemblée nationale du Québec, où on traîne encore cette étrange façon de faire, alors que la plupart des autres assemblées, comme je le disais à l'instant, ont procédé à un changement, un changement logique.

Dans un souci d'équilibre de saine utilisation des fonds publics, les indemnités additionnelles, soient l'allocation de transition, le régime de retraite, bien, elles font l'objet de modifications importantes en conséquence. Tous ces éléments font partie de la rémunération globale et doivent être considérés les uns avec les autres. C'est ça que dit le rapport L'Heureux-Dubé, il faut s'en souvenir.

On a un petit écho de ça dans le rapport Ouellet qui nous est déposé dans les dernières semaines où on dit : Oui, oui, il faudrait revoir un peu la rémunération globale. Il ne faut pas oublier que c'est un tout, un ensemble. J'étais content de lire ça. J'étais content de lire ça parce qu'ils sortaient un peu de leur mandat. On y reviendra tantôt, mais ils avaient un mandat beaucoup trop restreint. On leur avait mis des oeillères pour qu'ils arrivent à une conclusion presque télécommandée, on pourrait dire. Ils auront quand même eu l'ouverture, je dirais, il faut le reconnaître, de déborder de ce mandat-là en disant : Oui, il faut aller plus large, oui, il faut dépasser la simple question des indemnités de base.

Je reviens au rapport L'Heureux-Dubé, Mme la Présidente. Le comité proposait donc d'ajuster à la baisse les pourcentages des indemnités additionnelles pour toutes les fonctions parlementaires. Il faisait aussi disparaître deux indemnités de fonction, soient celles de président de séance de commission et de membre du Bureau de l'Assemblée nationale. On y reviendra tantôt, là. J'ai sorti la petite liste de tous les bonus qu'on peut obtenir ici, à l'Assemblée nationale, avec les différentes fonctions.

• (10 h 50) •

Dans les cas particuliers de premier ministre et de ministre, le comité recommandait que leur rémunération soit du même ordre que celle du plus haut fonctionnaire sous leur responsabilité. Ça aussi, c'est un autre débat qui existe depuis longtemps ici : Est-ce que les élus peuvent être rémunérés plus ou moins que les hauts fonctionnaires? On peut tous avoir une opinion là-dessus. En tout cas, le comité L'Heureux-Dubé, lui, proposait que ce soit du même ordre.

Le rapport L'Heureux-Dubé s'est aussi penché sur le régime de retraite des députés. Le rapport proposait que le taux annuel du crédit de rente passe de 4 % à 2 % et que la rente maximale ne puisse excéder 70 % du salaire au lieu du maximum actuel de 100 %. Ainsi, les députés assumaient 40... qui assumaient 41 % des coûts annuels du régime plutôt que 21 % présentement... Ça, on l'a dit en long et en large, Mme la Présidente, à peu près tout le monde le souligne à chaque fois qu'on parle du débat de la rémunération globale, soit on utilise le terme de Cadillac, soit on utilise le terme de BMW ou de peu importe la voiture qu'on préfère, on est en grosse voiture. La Ferrari. Nommez-les, il n'y a pas de problème. Certains pourraient dire une Tesla aujourd'hui, hein? Ça pourrait être plus au goût du jour. Mais tout ça pour vous dire, Mme la Présidente, qu'à ma connaissance à peu près personne au Québec ne jouit d'un rapport... pas d'un rapport, pardon, ne jouit d'un régime de retraite de cette nature-là. C'est sans précédent.

Puis, pour un Parlement qui a traité de manière frontale l'enjeu des retraites, notamment dans le milieu municipal, il y a plusieurs années, je m'en rappelle très bien, j'étais conseiller à la recherche à la FTQ à l'époque, et là, tout à coup, là, il fallait vraiment que ce soit 50-50 partout, hein, parce qu'il y avait certains secteurs qui, à travers des négociations, à travers des batailles, avaient réussi à aller chercher un équilibre plus avantageux pour les travailleurs, on va le dire de même, des 55-45, des 60-40, alors là il fallait que ce soit un principe, là, mur à mur, il faut que ce soit 50-50 partout. Bon, on pouvait en débattre, il y avait de la... il y avait légitimité d'en débattre, certainement, mais, étrangement, cette logique-là, on ne l'a jamais appliquée pour nous ici. Nous, on a toujours été très satisfaits de n'avoir que 21 % à cotiser sur nos régimes de retraite. Hallucinant! Personne n'a ça au Québec. À ma connaissance, personne n'a ça. C'est vraiment impressionnant.

À la limite, on le souhaiterait à tout le monde, n'est-ce pas? Quand on a des bonnes conditions de travail, le but, ce n'est pas de les baisser pour que les autres soient tout aussi bas mais qu'ils soient moins loin de la personne qui est en haut. Le but, c'est d'augmenter pour tout le monde. Ça fait que moi, je ne me plains pas de ça, d'avoir accès à ce bon régime de retraite là. La question n'est pas là. La question, c'est : Pourquoi on a voulu appliquer ça bord en bord dans le milieu municipal à l'époque, mais pourquoi on n'a pas voulu l'appliquer pour nous autres? Puis c'est intéressant, ça, parce que, j'y reviendrai tantôt, il y avait eu une motion adoptée par un certain parti politique d'opposition à l'époque. On y reviendra.

Je cite Mme L'Heureux-Dubé, qui arrivait à la... au terme de son rapport, qui disait la chose suivante : «Les changements recommandés aux conditions de travail des députés sont justes, opportuns et équitables pour tous. Ils sont un tout cohérent, et il serait inapproprié de n'en choisir que certains éléments. Nous sommes convaincus que ce que nous proposons apportera une solution durable à la question du traitement des députés.» Fascinant, cette citation-là : «...sont un tout cohérent, [...]il serait inapproprié de n'en choisir que certains éléments.»

Qu'est-ce que nous sommes en train de faire, Mme la Présidente, en ce moment, si ce n'est pas l'exact contraire de la recommandation de la juge L'Heureux-Dubé? Le rapport, basé sur une recommandation avec des oeillères du BAN n'a fait que se concentrer sur les indemnités de base, et le projet de loi qui en découle garde les mêmes oeillères et ne se concentre que sur ces indemnités de base. C'est comme si on avait pris le rapport L'Heureux-Dubé, que tout le monde avait salué à l'époque, que tout le monde avait dit que c'était, mon Dieu, quasiment la meilleure chose depuis le pain tranché et qu'on le jetait aux poubelles, au recyclage, certains diront, en disant : Non, non, finalement, elle était dans... elle n'avait pas rapport, on y va avec une autre logique, on y va directement sur l'indemnité de base.

Vous avez certainement lu comme moi les articles de presse il y a à peu près une semaine ou deux, quand le rapport a été déposé, quand le projet de loi a été déposé, où Mme L'Heureux-Dubé n'était pas contente, on va le dire comme ça, en termes polis, elle n'était pas contente de constater que sa recommandation et que son rapport, j'oserais dire, étaient méprisés, méprisés par le chemin choisi par le gouvernement de la CAQ, Mme la Présidente, méprisés par la manière dont on fait l'exact contraire de sa recommandation. On ne prend qu'un élément, on décide de travailler que sur cet élément-là et on agit à travers une loi que sur cet élément-là. Personne ne parle du régime de retraite, personne ne parle des assurances, des allocations, alors que tout le monde dit, les chroniqueurs, les éditos : Ça doit être une approche globale qui mobilise ce débat au Québec. Non, on ne fait pas ça. On fait un choix contraire à ça. On y va à la pièce dans le fameux «cherry picking», comme on dit en anglais, une sélection un petit peu trop intimiste, un peu trop au goût du jour, et on se met dans une situation inconfortable. Et on le voit, à quel point le gouvernement est inconfortable avec ça. On a juste à constater le peu d'empressement qu'ont les députés et les ministres à aller faire des entrevues sur le sujet.

Les autres, les autres partis politiques, ne sont pas particulièrement plus à l'aise non plus. Ça n'a pas couru au micro du côté de mes collègues de l'opposition officielle pour aller défendre ce projet de loi là. Position plus alambiquée, peut-être, de mes collègues de la troisième opposition. Cela étant dit, on entendra peut-être de leurs discours dans la prochaine journée ou dans les prochaines heures. Ce sera à eux de se manifester.

Toujours est-il qu'il y a un immense malaise, visiblement, hein? On n'est pas dans un projet de loi enthousiaste où tout le monde est d'accord puis tout le monde dit : Oui, oui, c'est bon, on y va. On en a fait, pourtant, des choses, ici, dans l'enthousiasme, dans les fameux un, deux, trois. Je me rappelle du projet de loi sur le serment... l'abolition du serment au roi. Ça s'est adopté dans l'enthousiasme. Le projet de loi du gouvernement pour geler les tarifs en décembre, là, pendant les deux semaines qu'on a siégé ici, ça s'est fait dans l'enthousiasme. Tout le monde était d'accord, tout le monde se ralliait, tout le monde était prêt à aller en parler en sortant de la porte, tout le monde souhaitait, à la limite, se faire interroger par un journaliste sur le sujet.

C'est un indice très clair, Mme la Présidente, quand vous avez des ministres ou des députés qui longent les murs pour éviter d'avoir à répondre à des journalistes. Très, très claire comme situation. Très, très clair comme malaise. Je le constate, je le sens, je le vois. Le très peu... On va voir, tantôt, s'il y en a d'autres qui s'expriment, mais le très peu de députés, aujourd'hui, du gouvernement qui prennent la parole, ceux qui l'ont pris l'ont pris en quelques secondes, quelques minutes à peine, témoigne de ce malaise-là. Et je le comprends, ce malaise-là. Je le comprends. Je ne comprends juste pas pourquoi l'énorme malaise qui est généré par ça ne les empêche pas de procéder ou ne leur fait pas réfléchir en disant : Peut-être qu'on est allés trop vite, peut-être qu'on prend un mauvais chemin, peut-être qu'on ne s'y prend pas de la bonne façon.

Ça me surprend parce que c'est un gouvernement qui est réputé pour être un gouvernement de communication, un gouvernement à l'écoute. Ils doivent en avoir reçu, là, autant que nous, des courriels puis des appels dans leurs bureaux de circonscription. J'en ai reçu une pelletée, moi, Mme la Présidente. Je suis convaincu qu'ils en ont reçu, eux autres aussi. Ils n'ont pas dû... Ça n'a pas dû être bien tranquille, ces téléphones-là pendant les dernières semaines. Il a dû y avoir quand même quelques courriels, quelques personnes. Le degré de personnes fâchées, ma collègue de Sherbrooke et de Mercier en parlaient à l'instant, le nombre de personnes fâchées, là, moi, m'impressionne.

Il y a du cynisme, hein? Il n'y a pas eu de manifestation devant les bureaux des députés caquistes, à ma connaissance, on n'en est pas là, Mme la Présidente, mais les gens qui viennent me voir puis qui me disent qu'ils ne sont pas contents ou qui me font des blagues sur les augmentations de salaire qu'on va se voter, c'est... moi, ça m'impressionne. Je ne l'ai pas vécu comme ça, depuis que je suis en politique, Mme la Présidente. J'ai vu des gens fâchés, j'ai vu des gens... mais ce niveau de cynisme là, moi, m'inquiète. Ce n'est pas quelque chose avec lequel je veux apprendre à vivre. Je ne veux pas être confortable avec ce cynisme-là. Moi, je ne l'aime pas, ce cynisme-là. Je suis mal à l'aise qu'on l'alimente aujourd'hui avec ce projet de loi, et c'est pour ça que je prends la parole et que mes collègues prendront la parole aussi au courant de la journée.

Le rapport L'Heureux-Dubé dont je faisais référence, Mme la Présidente, dans les précédentes minutes, j'aimerais ça qu'on le redépose aujourd'hui. J'aimerais ça qu'on le redépose en cette Chambre en m'adressant particulièrement à mes collègues des autres partis, en particulier la partie gouvernementale. Qu'ils prennent la soirée, peut-être, ou l'après-midi, ou même pendant que je parle, ça ne me dérange pas qu'ils ne m'écoutent pas pendant que je parle, mais qu'ils prennent un moment pour le lire, particulièrement les 31 recommandations. Ce serait important qu'ils aillent relire ce moment-là de notre démocratie et ce moment-là de... j'oserais dire, d'intellectualisme, parce que c'était vraiment un bon rapport, le rapport L'Heureux-Dubé, qui avait vraiment fait une bonne synthèse du débat et une bonne synthèse surtout du chemin à emprunter pour être capable d'avancer sur ce dossier-là en évitant les malaises qu'on constate depuis quelques jours. C'était pourtant très clair, très simple, le chemin qu'on avait à parcourir. Malheureusement, ce n'est pas celui qu'on a pris.

Alors, on est dans une ère de numérique, Mme la Présidente. Je n'ai pas amené 125 copies papier de ce rapport-là, les gens savent très bien qu'ils peuvent aller le taper dans leur moteur de recherche et en trouver une copie numérique instantanément. Alors, c'est ce que je leur souhaite, à mes collègues dans les prochaines minutes, les prochaines heures, les prochains jours. Parce qu'il est encore temps de changer d'avis, il est encore temps de reculer, Mme la Présidente. Une de mes collègues le disait à l'instant, ça peut mourir au feuilleton, ça, ce projet de loi là. Il n'y a pas urgence en la demeure. Le feu n'a pas pris dans la bâtisse. Il n'y a pas eu de pétition pour nous demander d'augmenter nos salaires.

• (11 heures) •

Est-ce que ça veut dire qu'on ne doit rien faire sur ce sujet-là? Ce n'est pas ça que je dis, je dis l'exact contraire. Depuis tantôt, je vante le rapport L'Heureux-Dubé en disant qu'il y avait là un chemin très clair à emprunter pour à la fois se saisir et régler ce dossier-là, mais le faire dans l'ordre. Et c'est mon souhait le plus cher, qu'on prenne le temps, du côté de mes collègues du gouvernement, les autres oppositions aussi, de relire le rapport, les conclusions, les recommandations, d'en prendre acte, de réaliser qu'on est en train de commettre une erreur collectivement, qu'on est en train de rajouter une dose de cynisme dans la population québécoise, et d'agir en conséquence. C'est mon souhait le plus cher, Mme la Présidente, et c'est pour ça que j'aimerais qu'on redépose le rapport L'Heureux-Dubé, dans sa version numérique, bien sûr.

J'attire votre attention, toujours sur le rapport L'Heureux-Dubé, sur trois recommandations particulières. Il y en aurait... Je ne les lirai pas, les 31, bien sûr, ce serait un peu abuser, mais il y en a trois en particulier que je veux souligner, par contre, à grands traits.

La première, c'est la numéro 8 : «Le comité recommande d'abolir les allocations de présence attribuées, lorsque l'Assemblée ne siège pas, aux députés qui assistent à une séance de commission ou de sous-commission ainsi qu'aux membres et aux membres suppléants qui assistent à une séance du Bureau de l'Assemblée nationale.»

C'est un exemple intéressant de chose reliée à la rémunération globale qui aurait dû être corrigée depuis longtemps, et qui aurait dû être corrigée dans un projet de loi qui touche la rémunération des élus, et que, sciemment, le gouvernement décide d'ignorer. Sciemment, en n'intégrant pas ces choses-là dans le rapport, on décide de l'ignorer. En même temps, si le rapport... si le projet de loi, pardon, dit se baser sur le rapport et que le rapport avait une oeillère qui disait : Tu ne te concentres que sur les indemnités, en toute logique, le gouvernement, ce serait étonnant qu'il rajoute des éléments là-dedans à la toute dernière minute.

Alors, vous voyez à quel point ce processus-là, depuis le début, est vicié. Ce projet de loi là est la conséquence d'une logique qui est partie sur la mauvaise track, là, dès le début. On l'avait dit, on l'avait dénoncé même, ça ne se terminera pas bien, ça ne sera pas quelque chose qui se fera dans la joie et l'allégresse. On l'avait clairement indiqué au départ. On ne nous a pas écoutés et on se retrouve aujourd'hui, en fin de session législative, avec cet inconfort-là que je ressens du côté du gouvernement.

Recommandation n° 13 : «Le comité recommande que les revenus d'emploi, de service, d'entreprise ou de retraite que l'ex-député peut toucher pendant la période où il aurait droit à l'allocation de transition soient soustraits du montant de cette allocation. Le comité recommande aussi qu'avant de toucher son allocation l'ex-député ait l'obligation de déclarer ses revenus anticipés au Commissaire à l'éthique et à la déontologie, qui en informe le secrétaire général de l'Assemblée nationale.»

Un autre exemple de rémunération globale qui devrait être revu, qui devrait être révisé, quelque chose qui devrait être corrigé. On ne l'a pas fait. On n'a même pas demandé au comité de s'en charger et là on se retrouve avec un projet de loi qui, en toute logique, ne s'en occupe pas. Ça veut dire qu'on est d'accord avec ça. Ça veut dire que, finalement, on décide de dédire ou de désavouer le rapport L'Heureux-Dubé qu'on avait pourtant tous et toutes encensé il y a 10 ans maintenant.

La dernière recommandation que je vous lis, Mme la Présidente, la 14 : «Le comité recommande que l'ex-député s'engage auprès de l'Assemblée nationale, avant de toucher son allocation de transition, à rembourser le trop-perçu si les sommes totales versées à titre d'allocation de transition excèdent ce à quoi il aurait eu droit, compte tenu des revenus d'emploi, de service, d'entreprise ou de retraite réellement touchés.»

On est dans un... Encore une fois, c'étaient trois exemples, Mme la Présidente, qui traitent de notre rémunération, mais qui, évidemment, ont des ramifications énormément plus grandes que la simple allocation de base. L'indemnité de base, c'est une chose. C'est là que vient le plus gros de notre rémunération, on s'entend, et ça mérite d'être traité. Ça mérite d'être étudié. Ça mérite d'avoir... d'être l'objet de propositions.

Mais là on ne se fera pas des accroires, là, ce n'est pas l'unique chose qui touche notre salaire ici, qui touche notre rémunération globale. Il y en a des dizaines d'autres. Il y avait 31 recommandations dans le rapport L'Heureux-Dubé, 31. Ça aurait fait un projet de loi pas mal plus gros que, quoi, deux articles, deux articles dont le deuxième, c'est : «La présente loi entre en vigueur le...» Un article, finalement, Mme la Présidente, un article, c'est tout ce qu'on a à dire sur la rémunération des élus au Québec, un article, alors que L'Heureux-Dubé faisait 31 recommandations. C'est surprenant. C'est surprenant qu'on en atterrisse à cette conclusion-là. Ça me dépasse. Je ne comprends pas qu'est-ce qui anime à ce point mes collègues du gouvernement pour vouloir procéder si rapidement et, j'oserais dire, si cavalièrement sur ce dossier-là.

Parlant de mes collègues du gouvernement, ils n'ont pas toujours été au gouvernement, Mme la Présidente. Forcément, un parti politique fait des sauts de l'opposition au gouvernement. Dans un passé pas si lointain, on a parlé de motions. J'en ai une, motion, ici, qu'on a ressortie, qui date de juin 2019. La CAQ était déjà au gouvernement ici. Je vous la lis, vous allez voir, ça va être rigolo.

«Considérant les récents débats entre...» Donc, juin 2019, là, ça fait quatre ans de ça.

«Considérant les récents débats tenus dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail, le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada...»

Vous vous rappelez, là, c'était quand l'Agence du revenu du Canada a décidé de fiscaliser une partie de nos revenus.

Alors, je continue la motion :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que le processus de détermination des conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale doit présenter des garanties d'impartialité et d'indépendance dans le but de préserver la confiance de la population envers eux et l'Assemblée nationale;

«Que l'Assemblée nationale affirme clairement que la détermination des conditions de travail des députés et des membres de l'exécutif ne peut être examinée de façon parcellaire et doit faire plutôt l'objet d'un examen global et complet;

«Qu'à cette fin le Bureau de l'Assemblée nationale soit mandaté, conformément aux dispositions de l'article 100 de la Loi sur l'Assemblée nationale, afin de déterminer le meilleur processus à mettre en place visant à assurer périodiquement, en toute indépendance, la détermination de l'ensemble des conditions de travail des députés;

«Que le BAN fasse rapport à l'Assemblée nationale au plus tard le 6 décembre 2019;

«Qu'enfin, cette motion devienne un ordre de l'Assemblée.»

Est-ce que c'est ça qu'on a obtenu, finalement, avec le projet de loi n° 24, Mme la Présidente? Est-ce qu'on a eu un examen qui n'est pas parcellaire, un examen global et complet? Non, non, non. On a eu l'exact contraire de ça, comme on a l'exact contraire du rapport L'Heureux-Dubé. Ce n'est pas ça qu'on a eu. C'est ça qu'on a voté, par exemple, tout le monde ici, là, en juin 2019. J'étais là, je m'en rappelle. Juin 2019, ça ne fait pas mille ans de ça, là, ça fait quatre ans. Est-ce qu'on a eu un processus indépendant? On en discutera tantôt, de l'indépendance du processus. Une chose est certaine, le côté exécutoire, lui, a été complètement évacué, puis, ça aussi, on en viendrait tantôt, Mme la Présidente.

À partir, par contre, de cette motion-là, tous les espoirs étaient permis à ce moment-là. On se disait : Bon, il y a quand même un consensus, on va travailler ensemble, on va pousser une certaine logique en espérant que, petit chemin faisant, on en arrive à quelque chose qui ait de l'allure, à quelque chose qui fasse... qui ratisse large, qui permette à tout le monde d'être confortable avec le fait de traiter du salaire, ici, au salon bleu, traiter de nos salaires au salon bleu.

Bien là, il y a eu un comité qui a été mis en place, on l'appelait, à l'époque, le comité Picard, en référence à votre prédécesseur, notre ancien collègue vice-président qui a travaillé très fort sur ce dossier-là avec plusieurs collègues des différentes formations politiques, plusieurs, plusieurs rencontres. Je me rappelle notre leader parlementaire de l'époque, le député de Gouin, vous en parlait régulièrement au caucus, nous faisait des suivis à quel point ça discutait, ça avançait, ça freinait, ça repartait, ça jouait du coude, mais, au moins, ça bougeait, ça allait dans un certain sens. Et je le répète, Mme la Présidente, tous les espoirs étaient permis à ce moment-là. On y croyait qu'on était à quelques éléments, à quelques virgules près d'obtenir le processus consensuel auquel on aspirait tous et tous... tous et toutes, pardon. Le compromis était à portée, là, de main, là. On sentait qu'il ne manquait pas grand-chose. Il était tellement à portée de main, le compromis, qu'on en est arrivés à commencer à faire des listes, des listes pour le comité indépendant, Mme la Présidente. Ça a été discuté, ça, à ce moment-là, pour vous témoigner du moment... pas du moment, mais de la distance qu'on avait réussi à faire ensemble sur ce débat-là.

Malheureusement, pour une raison un peu qui nous échappe, pour être franc, on n'a pas tout à fait compris ce qui s'est passé, mais visiblement le gouvernement a rétropédalé complètement et a décidé de jouer tout seul dans son film et de se... comment je dirais ça, de faire l'économie de notre participation dans ce film-là parce que les modalités du film qu'on s'apprêtait à jouer, il le savait, ne nous convenaient pas du tout, ne nous avaient jamais convenu. C'est ce qu'on leur disait depuis, mon Dieu, des décennies maintenant, notamment avec mon prédécesseur, M. Khadir, le député de Mercier... l'ancien député de Mercier.

• (11 h 10) •

Alors, est-ce étonnant qu'on se retrouve ici, aujourd'hui, à débattre, à mobiliser du temps au salon bleu pour ça? Bon, là, on s'est fait à l'idée, là, ça fait deux semaines qu'on sait que ça s'en vient. Moi, j'avoue que je suis surpris, parce qu'avec le recul sur le troisième lien, les ministres qui se mettent dans des situations fâcheuses, le ministre de la Justice, le ministre de l'Éducation, j'aurais cru qu'on aurait décidé, peut-être du côté gouvernemental, de mettre la pédale douce sur cet aspect-là. Alors, je suis surpris. Est-ce qu'ils se sont tellement attachés auprès du reste du caucus, en leur promettant qu'il y aura une augmentation de salaire dans les prochains mois, que, là, ils ne pouvaient plus reculer? Je ne le sais pas. Je ne suis pas dans leur caucus. Ce n'est pas quelque chose qui a coulé nécessairement. C'est une hypothèse. Est-ce qu'ils se sont dit : Bien, coudon, c'est le début de mandat, on est rentrés bien fort, on aura bien le temps de remonter dans les sondages d'ici 2026? Une autre hypothèse, Mme la Présidente, une autre hypothèse.

À ce moment-ci, toutes les hypothèses sont bonnes, parce que la question demeure : Qu'est-ce qui anime le gouvernement? C'est quoi, cette volonté-là de vouloir procéder à tout prix avec une adoption rapide d'un projet de loi qui est hautement contesté par la population, par l'espace médiatique, par les partis d'opposition? Ça me surprend. Ça me surprend.

Alors, tout ça pour vous dire que le mauvais chemin, la mauvaise track, en bon français, qui a été prise très tôt, là, dans les précédents mois, dans les précédentes années, nous mène à cette situation fâcheuse, et c'est regrettable parce que ce n'est pas ça qu'on aurait dû faire.

J'en arrive, Mme la Présidente, au rapport, au fameux rapport Thériault-Ouellet. Je suis désolé, j'ai oublié le nom de Mme Thériault tantôt. Alors, le rapport Thériault-Ouellet ou Ouellet-Thériault, peu importe, c'est un peu le nom, là, qui a été attribué informellement à ce rapport-là. Je n'ai pas le titre exact. Tout le monde comprend à quoi je fais référence.

Alors, le fameux comité consultatif, le comité Thériault-Ouellet, a été mandaté par le BAN, le Bureau de l'Assemblée nationale, le 16 février 2023. Le 16 février, c'est récent, là. Ça fait trois mois à peu près, dans ces eaux-là. Ils ont été mandatés pour réviser l'indemnité annuelle, et annuelle seulement, et de voir s'il n'y aurait pas un mécanisme d'indexation. Il a déposé son rapport au Bureau de l'Assemblée nationale, toujours, le 11 avril dernier.

Quand même, hein, de 16 février à 11 avril, c'est extrêmement rapide. On n'est pas contre ça, nous, du travail vite fait, tant qu'il est bien fait. Honnêtement, Mme la Présidente, je n'ai pas tant de choses à dire sur la méthodologie de leur rapport. Je l'ai lu attentivement, je l'ai relu, mes collègues aussi... toujours moyen de critiquer ou de faire des commentaires constructifs, on s'entend, mais, dans sa facture, dans sa méthodologie, ça va, là. C'est quelque chose qui s'est fait dans, grosso modo, les règles de l'art. Ce n'est pas un problème.

Ce qu'on ressent, par contre, c'est l'empressement de procéder. Trois mois pour pondre un rapport comme ça, chop-chop, un projet de loi digéré ou, du moins, rédigé très, très rapidement après la digestion, justement, du rapport, c'est impressionnant. On ne voit pas le même enthousiasme ou le même empressement pour régler plusieurs autres problèmes. On va le dire comme ça, Mme la Présidente. Pas en train de dire que le gouvernement ne fait rien, là. On n'ira pas jusque-là. Il en fait, des choses. Il y en a, des projets de loi. Ça a été long à démarrer, par exemple.

Combien de fois ici, en Chambre, en février, en mars, même en avril, je me plaignais, lors de l'étude... pas de l'étude, pardon, mais de la rubrique sur les renseignements sur les travaux... je me plaignais qu'il ne se passait rien au bleu? Combien de fois on a ajourné ici, au bleu, parce qu'il n'y avait rien, dans les commissions, qui remontait? On en avait déposé pourtant, nous autres, des projets de loi, là. On était prêts à en étudier. On avait des mandats d'initiative. Bon, ils ont adopté celui sur le hockey, toujours bien ça. Il y en a plusieurs autres, malheureusement, qui n'ont pas été l'objet de leur intérêt. On va le dire comme ça. Mais qu'est-ce qui nous... qu'est-ce qui les anime de vouloir défoncer si rapidement l'espace-temps et nous imposer ce projet de loi là? Moi, ça me dépasse.

Alors, le projet... le rapport, pardon, toujours, Thériault-Ouellet contient trois recommandations au sujet de l'indemnité annuelle des parlementaires et trois pistes de réflexion qui touchent plus largement la révision de l'ensemble des conditions de travail des députés. «Le comité statue donc sur la rémunération des parlementaires et souligne qu'elle doit correspondre à l'échelle maximale de cette classe, soit 169 950 $, en prenant toutefois en considération l'allocation de dépenses allouée aux parlementaires. En soustrayant du montant de 169 950 $ l'équivalent pleinement imposable de l'allocation de dépenses — soit 38 184 $ — le comité recommande de fixer l'indemnité annuelle des parlementaires à 131 766 $.» C'est la première recommandation.

«Deuxièmement, dans un souci de cohérence, le mécanisme d'indexation doit suivre l'évolution de la rémunération de l'emploi auquel la fonction de député est comparée. Le comité recommande que l'indemnité annuelle des parlementaires soit majorée de façon équivalente à toute révision et majoration du traitement de cette classe.» Un peu ce qu'on appelle, dans le jargon, une forme de clause-remorque, assez classique dans le milieu du secteur public.

Souvent, une convention collective peut dire : Moi, dans ma convention... J'ai une convention... En tout cas, tu sais, on prévoit les augmentations, mais, à défaut de mettre un chiffre précis, on accroche ce chiffre-là à une autre locomotive, très typique. Moi, j'ai même négocié ça dans le milieu universitaire. Quand j'étais au syndicat des employés étudiants de l'UQAM, on avait une clause qui disait que nos augmentations de salaire allaient être les mêmes que celles du secteur public. D'ailleurs, on l'avait regretté, parce que ça n'avait pas été une bonne année cette fois-là. Le secteur public, il y avait eu une loi spéciale, puis il y avait eu des augmentations assez faméliques, puis on s'était dit : Woups! Nous, on pensait avoir accroché notre wagon à une bonne locomotive, finalement, on avait regretté.

Ça fait qu'à ma connaissance, là... évidemment, je n'ai pas été voir les conventions subséquentes, n'étant plus là-bas, mais, à ma connaissance, ils ont choisi une autre stratégie. Mais bref, quelque chose qu'on connaît nous-mêmes ici, là, dans nos masses salariales, si je ne me trompe pas de circonscription, qui sont calculées un peu en fonction de ce qu'obtiennent les fonctionnaires du secteur public. Alors, c'est pour vous dire à quel point il y a quand même une certaine logique, de cette suggestion-là, de s'accrocher. C'est quelque chose qu'on voit fréquemment. Donc, ce n'est pas... Encore une fois, hein, je ne suis pas en train de vous dire que je déchire le rapport Ouellet-Thériault. C'est vraiment dans sa rapidité et dans sa commande qu'il nous met mal à l'aise, sur la parole.

Et finalement, troisième chose : «...considérant le retard constaté dans la rémunération des élus et élues, le comité recommande la mise en oeuvre des recommandations dès l'exercice [...] 2023‑2024.» Ah! bien, ça, c'est intéressant, par exemple. Bien, ça, c'est quand même assez nouveau. Dans tous les rapports précédents, là, on disait toujours que ça devait s'appliquer pour la législature suivante, que tous les gens qui se sont présentés à une fonction élective étaient au courant des conditions de travail qui allaient s'appliquer durant leur mandat. Là, on déborde. Là, on dit... on innove. On innove puis on dit : Vous devriez avoir cette augmentation-là maintenant. D'ailleurs, on s'est posé la question, les collègues, en lisant le projet de loi du ministre. On a bien hâte de voir, en étude détaillée, si on s'y rend, là, si c'est ça qu'il veut dire, le projet de loi, si c'est ça, l'intention gouvernementale, d'appliquer dès maintenant la hausse, parce que ce n'est pas écrit textuellement, hein, dans le projet de loi.

En même temps, on assume que, si le projet de loi entre en vigueur le... c'est écrit «indiquer la date de la sanction de la présente loi» — c'est un peu la compréhension qu'on a eue avec les travaux puis le département de la recherche — bien, ça veut dire que l'augmentation va s'appliquer à partir du moment que la loi sera sanctionnée, ce qui est, souvent, quelques jours après l'adoption finale. Donc, on imagine, on a pris pour acquis, puis on nous indiquera le contraire si on s'est trompés, là... on a pris pour acquis qu'en effet, cette recommandation d'appliquer immédiatement la hausse, bien, celle-là, là, elle est prise textuellement dans le projet de loi, et qu'en effet, si d'aventure, on adopte cette loi-là d'ici la fin des travaux, à la mi-juin, quelques jours, faire un petit tour, l'autre bord, au lieutenant-gouverneur général, bien, voilà, il doit sanctionner, et, voilà, application immédiate.

Certaines personnes dans les médias ont même parlé d'un effet rétroactif. Bien, encore une fois, là, on ne le sait pas trop, là. Est-ce que c'est rétroactif? On va-tu remonter jusqu'à notre élection, au 3 octobre? Il va-tu y avoir un petit chèque de «backorder», une petite rétro, une petite rétro depuis le 3 octobre, sur le 30 000 $? On ne le sait pas. On ne le sait pas, à suivre. Ce sera à découvrir lors de l'étude détaillée, que je me ferai un plaisir de mener pour mon groupe parlementaire, Mme la Présidente, vous l'avez deviné.

Mais j'insiste encore une fois sur l'application immédiate, parce que ça, ça m'a fait énormément sourire, puis j'ai trouvé ça, honnêtement, un peu triste, Mme la Présidente, parce que, dans les quelques commentaires, hein, je vous disais tantôt que ça longeait les murs, là, pour ne pas avoir à répondre à des journalistes sur ce sujet-là, du côté gouvernemental, mais, dans les quelques commentaires qui ont été attrapés par les journalistes, il y en a qui disaient : Il faut augmenter le salaire pour aller recruter les meilleurs. C'est spécial, dire ça, Mme la Présidente, parce que ça laisse sous-entendre que ceux qui sont là actuellement... C'était-tu eux autres, les meilleurs? C'est spécial, dire ça. Moi, je ne comprenais pas, là. J'espère que personne ne s'est senti comme un plan B, du côté du gouvernement, lorsqu'ils ont lu cette citation-là. Moi, j'aurais eu de la peine que mon chef parlementaire dise ça, pour être honnête, Mme la Présidente.

• (11 h 20) •

Mais, blague à part, blague à part, pour vrai, là, si quelqu'un... Puis je sais que tout le monde ici est bien intentionné puis fait de la politique pour les bonnes raisons, parce qu'ils veulent servir le Québec. Je n'ai aucun doute de ça. On a des débats sérieux ici. On peut se lancer des tomates, symboliquement, bien sûr, mais, au final, on le sait que la personne qui est devant nous est là pour les bonnes raisons. Moi, je n'ai jamais douté de ça. Ça fait que l'argument de dire : Il faut augmenter le salaire pour aller en recruter encore des meilleurs... Mais je suis bien désolé, là, mais, si tu refuses de venir travailler ici pour servir le peuple québécois parce qu'il te manque 20 000 $, 30 000 $ dans ton offre de salaire, bien, tu étais mieux de ne pas venir, justement. Tu es peut-être mieux de rester dans ton emploi actuel. Peut-être que tu ne seras pas animé de la bonne énergie en venant ici, au salon bleu.

J'imagine qu'il y a autant de situations que de personnes ici présentes, Mme la Présidente. Il doit y avoir des personnes qui ont eu à peu près le même salaire, une fois élues, qu'elles avaient auparavant. Moi, c'est mon cas. Dans le milieu syndical, on a la chance d'avoir une bonne rémunération, ça fait que c'était un peu moins, mais c'était assez similaire. Du monde qui ont dû baisser de salaire en venant ici, c'est quelque chose qui, à la limite, est admirable, puis il y a quand même certaines personnes qui ont eu une augmentation de salaire en venant ici.

Mais tout ça, à la limite, est impertinent. Le but de venir ici, c'est de servir le peuple québécois et de faire avancer la société à travers des réformes qu'on fait dans nos projets de loi, dans nos déclarations de ministre, dans nos propositions de gouvernement, dans nos propositions d'opposition, dans les budgets, dans les annonces. On gère l'actualité du Québec tout le monde ensemble ici. On mène ensemble le débat de l'actualité québécoise à tous les jours au salon bleu. Ça fait que, si 20 000 $, 30 000 $, c'est ça qui te manque pour venir ici, bien, pour vrai, reste chez vous. Reste chez vous, tu réfléchiras sur pourquoi tu veux aller en politique. Ce n'est peut-être pas les bonnes raisons qui t'animent si tu trouves qu'il manque 20 000 $, 30 000 $ puis tu décides de ne pas y aller. Reste chez vous, personne ne va pleurer, personne ne va te manquer.

Des talents, là, Mme la Présidente, il y en a à la pelletée. Des candidatures de qualité, il y en avait dans toutes les circonscriptions puis il y en avait dans tous les partis. Ça fait que moi, l'argument du recrutement, à part me faire sourire sur les... sur la blague des plans B de tantôt, là, je le trouve dommage, il envoie un drôle de signal. Puis j'en rajoute une couche, Mme la Présidente, j'oserais dire qu'il envoie un signal classiste. Le classisme, là, c'est une discrimination basée sur la classe sociale. Ça laisse sous-entendre que c'est normal puis que c'est correct que la fonction d'élu, de député de l'Assemblée nationale, qu'on s'arrange pour qu'elle soit attirante pour l'élite économique du Québec. Mais comment on va réussir à avoir une assemblée représentative du vrai monde si c'est ça qui nous mobilise comme objectif?

Mais, encore une fois, là, je ne suis pas en train de dire qu'il faudrait baisser nos salaires pour être au salaire industriel moyen. Il y en a qui disent ça, des fois, là, dans certains milieux politiques, là, pour avoir l'air un peu radical, là, puis c'est bien correct, là : Ah! un député, ça devrait être payé le salaire moyen puis ça devrait être payé deux, trois fois le salaire minimum. Ça se défend. Moi, je ne suis pas de cette école-là, mais ça se défend. Ça fait qu'on n'est pas en train de dire ici, à Québec solidaire, aujourd'hui, qu'on ne veut rien savoir de toute forme de révision de la rémunération. On l'a dit ad nauseam que, s'il y a un bon processus indépendant, exécutoire, qui fait une révision de la rémunération globale, bien, on va embarquer. On était à ça de l'avoir. On était à ça de l'avoir, mais ce n'est pas ça qui est devant nous. Alors, évidemment, ça ne fait pas notre affaire.

Je reviens sur Thériault-Ouellet pour conclure cette section-là, Mme la Présidente. Donc, le comité recommandait que «l'indemnité annuelle des parlementaires soit fixée à 131 766 $». Le montant, là, il «correspond au maximum de l'échelle de traitement de la classe 4 de la catégorie des premiers dirigeants, vice-présidents et membres d'un organisme du gouvernement — ce qu'on appelle un DM04, là, c'est un langage un peu technique — diminué de l'équivalent pleinement imposable de l'allocation de dépenses».

«Le comité recommande que l'indemnité annuelle des parlementaires soit majorée de façon équivalente à toute révision et majoration du traitement de la classe 4 de la catégorie des premiers dirigeants, vice-présidents et membres d'un organisme du gouvernement — DM04 toujours.

«Le comité recommande la mise en oeuvre des recommandations dès l'exercice financier 2023‑2024.»

Et là je veux prendre un petit moment pour parler du caractère indépendant du comité. J'ai côtoyé, pendant quatre ans, Mme Thériault, M. Ouellet. J'ai particulièrement apprécié M. Ouellet. Savez-vous pourquoi? Parce que, dans mon tout premier projet de loi, ma toute première étude détaillée, j'étais tout nouveau, critique en matière de travail de mon caucus, puis il l'était aussi pour son caucus, et je ne connaissais pas du tout la procédure ou à peu près pas, mon recherchiste, qui était flambant neuf lui aussi, pas plus, et l'ancien député de René-Lévesque avait eu l'immense gentillesse, il n'était pas obligé de faire ça, de me donner plein de conseils sur quand est-ce faire ma motion, quand est-ce faire mon allocution, quand est-ce faire mon sous-amendement. Vraiment, c'était de la pure gentillesse pour un adversaire. En plus, on sortait d'une élection où on peut dire que QS et PQ, ça n'avait pas été des grands amis, ça avait eu des frictions. Alors, il aurait pu avoir toute la légitimité de me dire : Arrange-toi puis apprends-le à la dure. Non, il avait été superfin. Alors, je le salue.

Et, encore une fois, je sais que lui aussi et Mme Thériault, évidemment, ne sont pas animés de mauvaises intentions à travers ce rapport-là. Alors, je n'ai aucune forme d'animosité, ou de déception, ou quoi que ce soit envers eux, que ce soit clair. Cela étant dit, on a longtemps débattu, si ce comité-là était indépendant ou pas. Ça se débat, Mme la Présidente. Moi, je ne suis pas en train de dire que c'est ça ou ce n'est pas ça. Ça se débat.

Personnellement, ma collègue de Mercier le disait aussi précédemment, des élus qui siégeaient avec nous, il y a à peine quelques mois, est-ce que c'est les personnes les plus indépendantes possible? On peut probablement acquiescer que non, là, qu'il est sûrement faisable de trouver du monde avec un peu plus de distance face à la fonction que nous occupons aujourd'hui. Ce n'est pas d'avoir quitté la vie politique à la seconde un qui nous donne l'indépendance. L'indépendance, c'est aussi la perception de l'indépendance. Et, visiblement, la perception d'indépendance de ces deux collègues, de ces deux ex-collègues, bien, elle n'est pas parfaite, elle n'est pas pleine et entière.

Certaines personnes leur reconnaissent une indépendance, vu qu'ils ne sont plus ici avec nous physiquement. Soit. D'autres personnes disent : Eh boy, c'est bien récent, là, leur départ, ils sont bien trop collés. On assume qu'ils connaissent très bien encore leurs caucus respectifs, la direction de leurs caucus respectifs. Et là je n'ai aucune idée s'il y a eu des communications pendant, avant, après. Je ne veux pas faire d'allégation. Seulement, c'est... Parce qu'on peut se poser cette question-là légitimement. Déjà, on est dans une zone qui devrait nous inquiéter, en matière d'indépendance. Déjà, on sort, là, de ce qui devrait être un carré de sable très clair sur le type de personnes que l'on recherche pour ce genre de comité là.

C'est dommage, parce qu'encore une fois, du début de la fin, là, ce processus-là, du dernier processus Ouellet-Thériault, on leur a dit, au gouvernement : Faites pas ça comme ça, ça ne marchera pas, ça n'aura pas l'adhésion du large public, ça n'aura pas l'adhésion de la classe médiatique et surtout ça n'aura pas l'adhésion de l'ensemble des députés, ici. Et, s'il y a bien quelque chose sur lequel on devrait être unanimes, c'est sur l'augmentation de nos conditions de travail ou soit... en tout cas, sur la redéfinition de nos conditions de travail. Malheureusement, pas un chemin que le gouvernement a choisi de prendre.

Ça me mène, Mme la Présidente, après, donc, le rapport L'Heureux-Dubé, le rapport Ouellet-Thériault, au projet de loi n° 24, le projet de loi n° 24 qui se veut, évidemment, la mise en application. Puis c'est exactement ça qui est écrit, en plus, là : Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale. Bon, si on se demandait c'était quoi, le nom exact, tantôt, du comité, là, le voici. On l'appelle le Ouellet-Thériault, mais c'est Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale.

Le rapport a un seul article. Il est d'une simplicité déconcertante. L'article 1 dit la chose suivante, dit : L'article 1 de la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale (chapitre C-52.1) est remplacé par le suivant — donc, on comprend que l'ancien article 1 est effacé et qu'il y en a un nouveau qui le remplace, qui le supplante :

«1. Chaque député reçoit une indemnité annuelle égale à 131 766 $.

«Cette indemnité est augmentée de tout montant équivalent à toute augmentation du maximum de l'échelle de traitement d'un titulaire d'un emploi supérieur applicable aux premiers dirigeants, vice-présidents et membres d'un organisme du gouvernement de niveau 4.

«En outre, chaque député reçoit un montant équivalent à toute autre augmentation de traitement accordée aux titulaires d'un emploi supérieur auxquels l'échelle visée au deuxième alinéa est applicable.»

Ce que je disais tantôt, Mme la Présidente, c'est qu'il y a deux articles, en réalité. J'ai parlé abondamment du deuxième, là, sur la date de l'entrée en vigueur, mais, sinon, la substantifique moelle du projet de loi n° 24, c'est l'article 1 qui révise le 131 000 $, qui parle d'un processus d'augmentation automatique et qui parle de son applicabilité immédiate, du moins c'est ce qu'on en a décodé — encore une fois, on se fera corriger, si on s'est trompés — mais qui parle, donc, d'espèce de rétroaction. Pas clair, encore, on retourne jusqu'à quand. Est-ce que c'est à la date de la sanction? Est-ce qu'il y aura un petit chèque pour notre réélection, depuis le mois d'octobre? Tout ce sera à découvrir, malheureusement, beaucoup trop, trop rapidement.

Alors, c'est ça qui est devant nous, Mme la Présidente, c'est le projet de loi n° 24. C'est quelque chose qui est, à notre avis, regrettable, quelque chose qui ne fait... qui n'est pas à la hauteur de la situation et quelque chose qui aurait pu être évité facilement, si on avait suivi un chemin différent.

• (11 h 30) •

Parlant de chemin différent, j'aimerais vous lire un extrait d'une lettre qui a été publiée la semaine dernière, si je ne me trompe pas, peut-être la semaine d'avant, une lettre ouverte du précédent député de Mercier, notre ex-collègue. Je dis «notre», je n'ai pas eu la chance de siéger avec. J'ai eu la chance de siéger avec la nouvelle députée de Mercier. J'aurais aimé ça pouvoir siéger avec lui, par exemple, ça aurait été rigolo, on va le dire comme ça. Mais, bref, l'ancien collègue de Mercier a publié une lettre. Puis, vous savez, dans beaucoup de nos interventions qu'on a faites depuis le début de ce débat-là, moi, je le disais souvent qu'à Québec solidaire, on défend la même ligne de pensée sur la rémunération des élus d'Amir Khadir à aujourd'hui. Donc, de 2008 à 2023, d'un caucus d'une personne unique à un caucus de 12 députés aujourd'hui, Mme la Présidente, dont on est très fiers, dont je suis très fier, on tient exactement la même ligne. On a une cohérence irréprochable du début à la fin de ce débat-là, et ça a commencé avec Amir Khadir, dont je vais vous lire un extrait de la lettre. Amir dit ça : «On se demande comment fixer le salaire des députés de l'Assemblée nationale du Québec depuis longtemps. J'ai siégé de 2008 à 2018. On se posait les mêmes questions : Qu'est-ce qui pourrait être équitable? Qu'est-ce qui serait acceptable aux yeux du public pour ne pas saper la confiance en l'intégrité de l'institution?

«La dernière question n'est pas banale. La confiance de la population est la base de la démocratie, aussi imparfaite soit‑elle. Ce n'est pas le temps d'aggraver le déclin de cette confiance. Évitons de souffler sur les braises du cynisme ambiant.

«Je vous écris pour vous inviter à ne pas voter vous-même pour vous octroyer une hausse de 30 000 $.

«Je m'explique.

«[...]Le BAN a choisi deux ex-députés pour faire des propositions que les députés sont ensuite appelés à voter pour eux-mêmes. Ce n'est pas acceptable, car ce processus ne possède pas l'indépendance requise. Une recommandation par deux ex-députés encore proches de leur parti et soumise au vote des députés qui sont les bénéficiaires de la décision, accentue la désagréable perception que les élus vont voter une hausse de 30 000 $.

«On s'entend pour dire que la perception du conflit d'intérêts est aussi grave que le conflit d'intérêts. Ici, la perception est inévitable. En fait, pour éviter cette perception, il faudrait que les 125 députés de l'Assemblée se retirent de la salle au moment du vote sur cette proposition! Ce qui est absurde.

«Il serait donc plus sage de confier la tâche de réviser votre rémunération à un comité totalement indépendant des élus et des partis comme le propose le rapport L'Heureux-Dubé depuis 2013. Ce comité [pourrait] faire l'examen équitable de l'ensemble de vos conditions de travail et vous faire une proposition qui soit exécutoire. François Gendron, ex-député de l'Assemblée nationale pendant 42 ans, reconnu pour sa sagesse et son équité par l'ensemble de ses pairs, partage cet avis.

«Pour avoir siégé — toujours la lettre de M. Khadir — avec plusieurs d'entre vous de 2008 à 2018, je sais que le travail de député est exigeant et que les heures sont longues. Je sais surtout qu'aucun d'entre vous ne s'est présenté comme député pour faire de l'argent. Vous y êtes par conviction. Vous y êtes pour servir le public.

«Il y a votre salaire de base auquel s'ajoute une allocation de dépenses de 38 184 $. Mais il y a aussi un régime de retraite doré, une assurance collective payée à 100 % par l'employeur. Ensuite, la majorité d'entre vous bénéficient d'autres primes selon leurs fonctions additionnelles. Et ça peut monter vite! Exemple : 14 000 $ par an aux présidents de séance en commission parlementaire, même si appelés à remplacer le président de la commission que moins de 10 heures par [année]!

«Je ne dis pas que les députés sont trop payés, mais il faut faire le ménage. Une instance indépendante pourra évaluer convenablement ce qui est équitable. Autrement, les citoyens [et] citoyennes de vos comtés verraient une hausse de 30 000 $ par an votée par vous-même comme un abus, au moment où des milliers de gens vivent avec un revenu total de 30 000 $, aux prises avec ce que vous savez de l'inflation galopante à la crise du logement en passant par l'explosion du coût d'épicerie.

«Je vous invite donc à renoncer au rapport Ouellet-Thériault et de lancer un processus de révision équitable, indépendant et exécutoire de vos conditions salariales.»

C'est signé Amir Khadir, ancien député de Mercier.

Alors, c'est intéressant, il résume en quelques paragraphes l'entièreté des propos que je vous tiens depuis presque une heure, Mme la Présidente. Ce n'est pas indépendant. Il faut que ce soit exécutoire. On souffle sur les braises du cynisme. On peut faire l'erreur de saper la confiance en l'intégrité de l'institution en procédant de manière trop cavalière. Il aurait fallu se baser sur L'Heureux-Dubé. Le BAN a pris le mauvais chemin dès le départ. Il y a du ménage à faire sur plein d'autres conditions de travail. C'est une erreur de ne se concentrer que sur l'indemnité de base. Je ne dis pas que les députés sont trop payés, mais il faut faire le ménage. Il y a de l'abus dans certains moments, on parle notamment des présidents de séance.

C'est intéressant, Mme la Présidente, qu'un ex-député qui nous a quittés depuis maintenant, quoi, cinq ans, six ans, de sa fonction ait le recul, et ait envie de participer au débat public, et de mettre son grain de sel, et de faire le trait, hein? Je vous parlais de la cohérence qu'on tient ici. Il fait le trait d'union, M. Khadir, avec cette lettre-là, entre les propos qu'on tient ici depuis quelques jours, quelques semaines, et ce que lui tenait comme propos, il y a... depuis plus de 10 ans, maintenant, depuis... depuis, mon Dieu, quoi, 15 ans, maintenant. 2008, ça fait plusieurs années, 15 ans que l'on tient ces propos-là.

Mme la Présidente, à certains moments, on a senti qu'on avait marqué des points avec les autres collègues. Visiblement, ce n'est pas ça qui est arrivé, avec ce qu'on nous soumet. Mais on ne renonce pas. On renonce jamais, à Québec solidaire. On continue la bataille, on continue à soumettre des propositions, on continue à faire notre travail d'opposition constructif, parce qu'on a la conviction qu'on est capables d'aller rechercher l'adhésion de nos collègues d'en face. On y arrive sur plein de sujets, alors je ne vois pas pourquoi on ne serait pas capables d'y arriver sur celui-ci.

Ça, c'était la lettre de M. Khadir. Je la mets en écho, j'oserais dire, avec la lettre de mon collègue le porte-parole de Québec solidaire, qui l'a cosignée avec Manon Massé, là, la co-porte-parole de Québec solidaire également, une lettre qui a été envoyée, mon Dieu, le... il n'y a pas la date, mais il y a quelques jours aussi, et qui s'adressait, donc, aux trois chefs des autres partis, qui s'intitulait Salaire des députés : Notre devoir d'exemplarité.

«La semaine dernière, un comité d'ex-parlementaires a recommandé une augmentation de salaire de 30 000 $ par année pour les députés de l'Assemblée nationale du Québec. Cette hausse serait immédiate et rétroactive. Nous vous écrivons pour vous demander de ne pas donner suite à cette recommandation.

«Actuellement, le salaire le plus bas que reçoit un député de l'Assemblée nationale s'élève à 139 745 $ par année, sans compter plusieurs avantages sociaux, dont l'un des régimes de retraite les plus généreux du Québec. Vous savez d'ailleurs comme nous que seulement 10 parlementaires touchent cette indemnité de base : 115 députés sur 125 touchent des allocations supplémentaires, pouvant porter leur rémunération totale à plus de 200 000 $.

«Dans un tel contexte, l'augmentation proposée d'au moins 30 000 $ par année, immédiate et rétroactive, n'est ni justifiée ni justifiable. C'est un montant équivalent à un an de travail au salaire minimum. C'est une augmentation beaucoup plus rapide que l'inflation alors que le gouvernement propose moins de 9 % d'augmentation aux infirmières et aux enseignants des services publics. S'attribuer une telle augmentation de salaire enverrait un message de déconnexion envers les gens que nous représentons.

«En outre, le processus est vicié : encore une fois, les députés seraient juges et parties, en votant eux-mêmes sur cette augmentation de salaire. C'est un conflit d'intérêts direct. Depuis 2013, le rapport L'Heureux-Dubé recommande de mettre fin à cette pratique dépassée et de mandater un comité indépendant et exécutoire pour revoir les conditions de travail des députés dans leur ensemble. C'est ce que nous vous proposons, au nom de Québec solidaire. Mettons sur pied un vrai processus indépendant qui sortira pour de bon les députés québécois de cette fâcheuse position de devoir statuer sur leur propre rémunération. Il n'est pas trop tard pour bien faire. Il n'y a aucune urgence. Nous savons que les élus de l'Assemblée nationale, tous partis confondus, sont en politique pour les bonnes raisons et non pour s'octroyer des privilèges. Nous sommes convaincus que votre intention n'est pas de fragiliser le lien de confiance entre les élus et la population québécoise.

«Or, il m'apparaît évident que l'adoption par les parlementaires d'un projet de loi bonifiant leur propre salaire alimentera le cynisme envers nos institutions politiques.

Cordialement, Gabriel Nadeau-Dubois, député de Gouin et co-porte-parole de Québec solidaire, et Manon Massé, députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, co-porte-parole de Québec solidaire.

Motion d'ajournement du débat

Mme la Présidente, mon temps s'écoule, et je veux terminer cette allocution par la conclusion logique. Après tous les arguments que je vous ai soumis, après toutes les analyses que je vous ai soumises également, j'aimerais déposer une motion d'ajournement, Mme la Présidente, qui se dit comme suit :

«Qu'en vertu de l'article 100 du règlement de l'Assemblée nationale le présent débat sur le principe du projet de loi n° 24, Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale, soit ajourné.»

J'aurai l'occasion d'expliquer ma motion à la fin de mon allocution. Je terminerais, Mme la Présidente, en soulignant à quel point, avec l'ensemble des documents qu'on a analysés aujourd'hui, le rapport L'Heureux-Dubé, le rapport Ouellet-Thériault, le document de la... le projet de loi du ministre, la lettre de M. Kadhir, la lettre de M. Nadeau-Dubois, l'ensemble de la lecture que moi et mes collègues faisons et vous livrons, il me semble que c'est clair qu'il n'y a pas de presse, qu'il n'y a pas feu en la demeure, qu'on n'est pas obligés de procéder aussi rapidement avec ce projet de loi. On peut prendre le temps de recommencer. Ce ne sera pas perdu, le rapport Ouellet-Thériault, si on recommence. Ils pourront travailler à partir de ça comme base de départ. Mais, s'il vous plaît, pour être capables de garder une cohésion de la classe politique et combattre le cynisme de la population, combattre cette fascination qu'on a parfois envers les élus qui revotent des affaires eux-mêmes et qui se défendent eux-mêmes, il faut sortir de ça, il faut sortir de ça. Et je pense qu'on peut y arriver ensemble si le gouvernement décide de donner raison, notamment, à ma motion d'ajournement, dont nous allons débattre à l'instant. Merci, Mme la Présidente.

• (11 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, il va y avoir un débat de 10 minutes par... Je vais juste demander... Merci. Alors, avant de vous céder la parole, je vous rappelle que l'auteur de la motion est... un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de 10 minutes et que l'auteur a droit à une réplique de cinq minutes. Donc, je vais immédiatement céder la parole à Mme la députée de Mercier pour un temps de parole de 10 minutes.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Très bien. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, je vais intervenir sur la motion que le leader, notre leader, vient de déposer pour ajourner, parce que, comme il l'a dit, c'est vrai qu'on a de l'espoir de faire changer d'idée et d'opinion les élus.

Moi, je l'ai dit tantôt, moi, j'ai honte... j'aurais honte, personnellement, là, de prendre cet argent-là. On n'est pas rendus là. Donc, j'ai encore espoir, comme mon collègue et mes autres collègues aussi, de faire changer d'idée le gouvernement de la CAQ.

Je me rappelle ce que l'ancienne députée caquiste, Mme Émilie Foster, a dit récemment. Elle a dit que c'est une position très, très difficile, d'être une députée dans un gouvernement. Des fois, on n'est pas d'accord avec qu'est-ce qu'il dit, mais on ne peut pas le dire publiquement. Moi, j'aurais aimé entendre mes collègues députés, ici, parler de leur malaise. Peut-être qu'ils ne peuvent pas le faire publiquement, mais je vais amener d'autres arguments, et mes collègues. Nous allons le faire pour qu'ils puissent faire le débat à l'interne puis dire que ce n'est pas une bonne idée, ce projet de loi là, qu'il doit mourir au feuilleton et qu'on devrait recommencer... même pas recommencer, continuer le travail qui avait été presque achevé juste avant la pandémie et qui était la chose juste à faire pour avoir un comité indépendant et exécutoire, parce que, comme je le disais, là, le rapport qui a été déposé par... le rapport Ouellet-Thériault, ce qu'il dit, c'est qu'il faut avoir un comité. Il faut continuer à faire le débat. Il faut continuer à parler de l'ensemble des conditions de travail.

Donc, ce n'est pas terminé. Ce qu'on est en train de faire en ce moment, si le gouvernement ne change pas d'idée puis si les députés qui ne peuvent pas prendre la parole, en ce moment, ou qui décident de ne pas prendre la parole, même si, peut-être... je ne veux pas savoir qu'est-ce qui est dans leur coeur puis qu'est-ce qu'ils ont envie de dire, mais, peu importe, si, par exemple, le gouvernement décide d'aller de l'avant malgré les arguments qu'on vient de leur apporter, bien, ça va être d'autres députés, plus tard, qui vont continuer à avoir les mêmes discussions plus tard, alors qu'on a d'autres choses plus importantes à faire. Et les Québécois n'ont pas voté pour nous... pour que nous, on se vote des salaires selon notre propre désir.

Vous savez, Mme la Présidente, quand on fait des sondages puis qu'on regarde c'est quoi, les métiers les plus populaires, il y a les pompiers, les infirmières qui sont en haut de la liste. Puis qui est en bas de la liste? Qui est en bas de la liste? Les députés, à côté des vendeurs de chars usagés. Puis moi, je ne suis pas fière de ça. Ce qu'on est en train de voter aujourd'hui, est-ce que ça va régler cette situation-là? Est-ce que ça va faire qu'on va augmenter dans la popularité auprès des gens puis dans l'estime des gens? Non. Être député, c'est un privilège. Et je suis certaine que tous les députés, tous, j'en suis certaine, tout le monde, les 125, ne sont ici pas pour des raisons d'argent, j'en suis convaincue profondément.

Donc, pourquoi est-ce qu'on n'est pas cohérents avec nous? Au moins, qu'on dise : On va faire ça pour les prochains députés et les députés qui vont venir la prochaine fois, pas nous, avoir cet argent-là, puis maintenant... Et même, peut-être, il y a eu un questionnement qui va être répondu lorsque le projet de loi va être étudié de façon détaillée, empocher aussi l'argent de façon rétroactive, au début de l'année financière de 2023, c'est inacceptable. Il y a déjà assez de cynisme au Québec envers les politiciens. Ce qu'on est en train de faire aujourd'hui, si le gouvernement ne change pas d'idée, c'est d'empirer la situation, d'empirer le cynisme. Je ne sais pas comment est-ce que les députés, après s'être voté une augmentation de salaire substantielle, substantielle, vont pouvoir regarder leurs électeurs et dire : Non, non, non, ce qu'on est en train de faire, c'est justifié.

Je vous rappelle, j'ai rencontré un citoyen de 75 ans. Il a tous les droits de rester dans son appartement. Il m'a dit, hier... je vois ses yeux pleins de peur... qui me dit : 25 000 $, Mme la députée, c'est beaucoup d'argent, peut-être que je devrais accepter et quitter mon appartement. C'est ça qu'il m'a dit. Il n'est peut-être pas au courant, parce qu'il a d'autres choses à penser, que nous, les députés, on est en train de se voter un salaire de 30 000 $ minimum, parce que, je le rappelle, il y en a d'autres qui vont recevoir beaucoup plus que ça à cause de leurs charges supplémentaires. C'est une minorité de députés qui vont avoir le 30 000 $, une minorité, même pas... à peine 10, dont sept sont à Québec solidaire.

Puis on veut jouer sur le jeu des comparaisons? Bien, comparons. Combien les élus des autres Parlements provinciaux... puisqu'encore aujourd'hui au Québec, ici, on est encore un Parlement provincial, malheureusement, c'est un autre débat, combien les autres députés des autres parlements gagnent? En Alberta, c'est 120 936 $, je parle de leur salaire de base. En Ontario, tiens — le premier ministre adore se comparer avec l'Ontario, il adore ça — combien est-ce que les députés de l'Ontario gagnent comme salaire de base? 116 500 $. Les députés de la Colombie-Britannique, 115 046 $. Nous, si on inclut l'allocation, là, qu'on reçoit, c'est 139 745 $, actuellement. C'est ça qu'on reçoit, comme députés, aujourd'hui.

Avec l'augmentation qui est contenue dans le projet de loi, savez-vous, Mme la Présidente, notre salaire va être de combien, de base, là? 169 950 $. On est déjà, à l'heure actuelle, les mieux payés de tous les Parlements de la province... du pays, les mieux payés déjà en ce moment, et on se vote un salaire pour être encore plus meilleur payés. Je sais, ça ne se dit pas, là, «plus meilleur». Bien, en tout cas, il y a un premier ministre qui disait ça. On rit, mais ce n'est pas drôle. Une des propositions, un des arguments, si je me rappelle bien, qui était contenu dans le rapport Ouellet-Thériault, c'est de dire : Bien, nous, on a plus de pouvoirs, au Québec, donc les députés travaillent plus. Ça, c'est insultant pour les autres députés. Moi, je suis responsable des dossiers d'éducation, du dossier d'éducation, par exemple. L'éducation, c'est une... c'est de compétence provinciale. Donc, en Ontario, la... le député responsable de l'éducation, de l'opposition, par exemple, est-ce qu'il travaille... moi, je travaille plus? Je ne comprends pas cet argument-là. C'est un argument extrêmement faible pour justifier cette augmentation substantielle, alors qu'on est déjà les mieux payés partout au pays. Si on veut comparer, on veut jouer à la comparaison, bien, parlons de comparaison.

Et, je répète, encore une fois, s'il y avait un comité indépendant et exécutoire, s'il y en a un, si les députés de la CAQ, si le gouvernement de la CAQ décide de reculer puis d'aller vers le bon sens et qu'il disait : Bien, on va faire... on va reprendre le travail pour mettre sur pied ce comité, qui va regarder l'ensemble de notre rémunération puis qui va faire le ménage là-dedans... parce qu'en ce moment c'est bordélique, la rémunération des députés, même le rapport Ouellet-Thériault l'a dit, donc, s'il décide de faire le ménage, ça se peut qu'après ça il y ait une décision de dire : Bien, on va enlever tout puis on va regrouper ceci et cela, on va revoir toutes les... par exemple, le fonds de pension, etc., puis qu'il dise : Bien, voici, vous allez... On va finalement voir une augmentation, peut-être, de salaire de base en enlevant tout le reste, et il va y avoir des gens qui vont chialer, qui vont dire que ça ne se peut pas, mais au moins on l'aura fait de façon réellement indépendante, qui ne laisse pas de place au cynisme.

Et, le cynisme, ce n'est pas juste parce que, moi, ça me blesse dans mon petit coeur de voir que les gens sont cyniques face à notre métier. Nous sommes des représentants du peuple, nous sommes dans une institution extrêmement importante qui est au fondement même de notre démocratie, et c'est la démocratie qui souffre quand on prend des décisions comme celle-là, et c'est à ça que les députés du gouvernement doivent réfléchir. Puisqu'ils ne peuvent pas prendre la parole publiquement, bien, au moins à l'interne, qu'ils puissent parler à l'interne, à l'intérieur de leur caucus pour faire entendre raison au premier ministre.

Nous, ce qui est important, ce que les Québécois attendent de nous, c'est des décisions qui soient cohérentes, qui soient justes, qui soient, aussi, connectées à leur vie. Et en ce moment, on a l'air d'une gang de déconnectés. C'est de ça qu'on a l'air, Mme la Présidente, et je ne suis pas fière de ça. Je ne suis pas du tout fière de ça.

Tout à l'heure, le leader, notre leader, a amené... a parlé pendant une heure, a amené plein d'arguments, plein de références, de citations pour argumenter sur l'importance de laisser tomber ce projet de loi là, et j'espère que ce qui a été dit, aujourd'hui, dans cette Chambre, va être pris en considération. Et on va continuer, on va débattre au courant de la journée sur le principe de ce projet de loi là. Donc, j'espère que ces arguments-là vont être repris, parce que ce n'est pas juste des arguments de Québec solidaire, c'est ce que les gens, aussi, nous disent. Moi, j'ai reçu... ma boîte vocale, j'ai... ma boîte vocale, des courriels, et plein de courriels où les gens nous disent : Tenez bon, essayez de les convaincre de ne pas aller de l'avant, parce que ce serait insultant pour nous qui travaillons très, très fort, 30 000 $, ce n'est pas rien, et prenez la bonne décision. Donc, j'espère que les députés du gouvernement vont en discuter à l'intérieur de leur caucus, puisqu'ils ne veulent pas parler publiquement, j'espère qu'ils vont le faire et reprendre les arguments, un à un, qu'on vient de leur mentionner. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

• (11 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a des interventions sur la motion déposée par M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve? Alors, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, je vous cède la parole.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Toujours pas d'intervention des collègues. C'est regrettable, mais c'est comme ça.

Bon, revenons juste un peu en arrière. On le disait tantôt, mais c'est important de le répéter, d'abord le Bureau de l'Assemblée nationale a formé un comité ayant pour mandat d'analyser une partie seulement de la rémunération des élus. Ça a toujours été, à notre avis, un mandat beaucoup trop restreint que de seulement revoir à la pièce le salaire des élus sans revoir l'ensemble des conditions de travail des élus.

Si on veut une meilleure conciliation politique-famille, je ne vois pas comment se donner plus d'argent, se donner plus d'argent, permet d'atteindre cet objectif. On a eu, tantôt, en ouverture, dans le peu de minutes que le gouvernement a consacré à ce projet de loi là dans son adoption de principe, un témoignage, que je salue, de notre collègue du whip en chef du gouvernement par rapport à la difficulté de maintenir une vie sociale, une vie familiale, une vie amicale dans nos fonctions. Et j'en suis, je vois substantiellement moins ma famille et mes amis depuis ma première élection en 2018, et je suis sensible à ça. Et, si on veut discuter de conciliation politique-famille, notamment, dans la réforme parlementaire, on aura tout l'espace pour le faire. On a déjà fait certains ajustements à travers l'entente entre les partis en début de législature... législation, pardon.

Mais, vraiment, je ne comprends pas comment s'octroyer... — le «s'» est fondamental — je ne vois pas comment s'octroyer 30 000 $ et plus de nouveaux revenus va nous permettre de plus voir nos familles et nos amis. Là-dessus, là, je l'ai perdu, là. J'étais sensible à son argument, j'étais sensible à ce qu'il nous témoigne, parce qu'on le vit tous d'une certaine manière, avec une certaine intensité, mais, après l'empathie, le lien avec le débat, avec l'objet du débat m'a semblé... m'a semblé ténu, je vais le dire comme ça, Mme la Présidente. Alors, peut-être qu'il pourra intervenir de nouveau pour nous le réexpliquer, mais, d'ici là, je l'invite à se pencher sur la réforme parlementaire. On attend, d'ailleurs, toujours des nouvelles du gouvernement à ce niveau-là, pour redémarrer les travaux qui sont suspendus... encore une fois, on va le dire comme ça, qui sont suspendus depuis beaucoup trop longtemps maintenant.

Alors, le comité a remis son rapport. Son contenu était une suggestion, bien sûr, il n'était pas exécutoire, ce rapport-là, c'était un des problèmes que nous dénoncions il y a 15 ans, que nous dénonçons toujours aujourd'hui. Un projet de loi a été rédigé, étudié... doit être étudié et voté par les élus pour que cette augmentation-là soit opérante. Bon, là, les élus... les députés, on a les deux mains dans le processus de révision des conditions de travail. On se retrouve au salon bleu à devoir voter une augmentation de salaire et alors que, depuis toujours... en tout cas, dans notre cas, à Québec solidaire, les autres fonctions... les autres formations ont peut-être eu des modifications ou des ajustements de leurs discours, mais, à Québec Solidaire, on le dit depuis le début, on dénonce ce processus-là, on ne devrait pas avoir les deux mains sur le volant.

On ne devrait même pas avoir d'opinion, à la limite, sur notre condition de travail. Des fois, on me demandait ça en point de presse : Oui, mais là, M. Leduc, vous vous opposez au projet de loi, vous devriez gagner combien, d'abord? Moi, ce que je répondais dans ces moments-là ou dans des entrevues, c'était : Bien, mon opinion ne devrait même pas compter, je ne devrais même pas en avoir, d'opinion. Je ne suis pas là pour faire de l'argent, comme tout le monde ici. Ceux qui nous emploient, c'est-à-dire la société québécoise, c'est eux qui devraient décider à travers un processus indépendant, exécutoire. Ça fait que, que moi, je pense qu'on devrait avoir 5 000 $, 10 000 $, 15 000 $... Parce qu'il y en a qui disait ça, là : Bien là, M. Leduc, là, le 30 000 $, vous ne le voulez pas, mais, s'ils proposent 15 000 $ dans le projet loi, ça va-tu passer? Bien non, ce n'est pas ça, la question. Ils pourraient nous proposer juste 2 000 $ d'augmentation, si c'est nous qui nous la votons, le processus est tout autant vicié, là. Bien sûr que, là, le 30 000 $, en plus dans un contexte d'inflation puis de propositions un peu dérisoires du gouvernement dans la négo du secteur public n'aide pas. Mais l'objet, ce n'est pas tellement le montant, c'est le processus.

Bon, pourquoi on dépose une motion d'ajournement, Mme la Présidente? On l'a dit en long et en large, parce qu'on ne juge pas ce projet de loi là prioritaire, parce qu'on ne juge pas qu'il y a feu en la demeure et qu'il faut absolument procéder, là, avec hâte et essayer de mettre ça vite, vite sous le tapis puis qu'on passe à autre chose. On comprend l'intérêt du gouvernement de fonctionner comme ça, on comprend la stratégie du gouvernement de fonctionner comme ça, mais ça nous apparaît une mauvaise chose à faire, alors on propose d'ajourner.

D'autres arguments qui nous poussent à proposer cet ajournement-là, Mme la Présidente, c'est le reste des choses que nous avons à faire ici d'ici la fin de la session, et là j'en ai une petite liste non exhaustive, là.

Le projet de loi n° 12, sur le droit de la famille, qu'on étudie aujourd'hui même. J'en ai traité, moi, la première moitié, avec le ministre de la Justice dans la précédente législature. Il nous avait monté un bon projet de loi, substantiel. Dès le départ, on lui avait dit qu'il voulait manger trop gros, la bouchée d'éléphant, avec le temps qu'il nous restait. Le temps a fait son oeuvre, et il s'est rendu à l'évidence, puis on a fini par le trancher en deux, ce qui était une bonne chose, puis à l'adopter, je dirais, dans l'enthousiasme.

La deuxième moitié de ce morceau d'éléphant est en train d'être disséquée. Ça me semble pas mal plus prioritaire de travailler là-dessus, de faire aboutir cette réforme-là, qui traîne depuis des années, parce qu'en plus il y en a un autre qui est supposé venir, hein? C'est la première moitié... c'est la deuxième moitié de la première moitié qu'on est en train de traiter, là. C'est le deuxième quart, on va le dire de même. Alors, qu'on embraie, là, sur cette réforme-là plutôt que de parler de notre rémunération. Ce n'est pas prioritaire du tout. Le...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, juste un instant. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : ...règlement. Je pense que c'est important de ne pas induire la Chambre en erreur, là, n'est-ce pas, Mme la Présidente? Alors, ma présence aujourd'hui démontre qu'on a terminé l'étude détaillée du projet de loi n° 12, pour le bénéfice du député d'Hochelaga-Maisonneuve, Mme la Présidente. Et certainement qu'on pourra adopter le projet de loi n° 12 rapidement, mais il faut faire en sorte que le salon bleu soit libre. Alors, on attend juste que vous terminiez votre intervention pour pouvoir, cet après-midi, faire en sorte de pouvoir prendre le rapport de la prise en considération du projet de loi n° 12 et compléter le droit de la famille. Alors, je pense que le député d'Hochelaga-Maisonneuve n'était pas au courant qu'on avait terminé.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. On va laisser le député d'Hochelaga-Maisonneuve poursuivre.

M. Leduc : Je n'ai pas entendu de règlement, là, mais, bon, on va... En tout cas, j'entends, j'entends, monsieur... Mme la Présidente, l'objectif. Je lui refais une suggestion, à mon estimé collègue, qu'il retire le projet de loi n° 24, puis on va procéder immédiatement avec l'adoption du projet de loi n° 12 cet après-midi. On va signer en bas de ce deal-là, nous, il n'y a pas de problème.

Sinon, Mme la Présidente, d'autres projets de loi qui mériteraient plus d'attention que celui du projet de loi n° 24, c'est le projet de loi n° 14 sur la sécurité publique, la Loi modifiant diverses dispositions relatives à la sécurité publique et édictant la Loi visant à aider à retrouver des personnes disparues, un projet de loi qui mérite qu'on mobilise les ressources de la Commission des institutions pour bien le faire cheminer avant la présente pièce législative n° 24 qui nous anime aujourd'hui. C'est un projet de loi qui manque peut-être un peu de poigne, mais, quand même, qui a le but de lutter contre le profilage racial. Donc, ça, c'est le genre de chose qui nous intéresse. On a salué les intentions du ministre, on va être là pour le bonifier et s'assurer qu'il soit à même de rencontrer son objectif. Encore une fois, ça nous apparaît un enjeu extrêmement plus prioritaire que le projet de loi n° 24, qui mériterait d'être sur les rails plutôt qu'être mis sur l'accotement pour faire de la place à l'adoption en vitesse d'une augmentation de salaire pour les membres de cette Chambre. Mais il y a aussi le projet de loi n° 26, sur les juges, qu'on pourrait décider d'étudier à la place du projet de loi n° 24.

Sinon, Mme la Présidente, on en a déposé, des... pas des dizaines encore, là, on s'en approche, de la première dizaine, mais on en a déposé plusieurs, des projets de loi, dans les précédentes semaines. Je peux en nommer quelques-uns : le projet de loi n° 198, Loi modifiant le Code civil afin d'assurer une plus grande protection aux locataires aînés contre les reprises de logement ou les évictions, qu'on a un peu rebaptisé le projet de loi Françoise David, qui fait le suivi de ce qu'elle avait adopté ici, là, dans un des rares projets de loi de l'opposition adoptés dans les...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député, compte tenu de l'heure, et afin de permettre la tenue des affaires courantes cet après-midi, le présent débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 24 est ajourné.

Alors, je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 13 h 40)

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, bonjour à toutes, bonjour à tous. Prenez place. Nous allons débuter nos travaux.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous sommes à la rubrique déclarations des députés. Et, sans plus tarder, je cède la parole à Mme la députée de Bellechasse.

Féliciter le journal La Voix du Sud, lauréat des Grands Prix des hebdos

Mme Stéphanie Lachance

Mme Lachance : Merci, M. le Président. Nos médias locaux travaillent fort pour nous livrer une information de grande qualité. C'est le cas du journal La Voix du Sud, un acteur important de l'actualité et du développement de Bellechasse depuis 60 ans.

Le 3 mai dernier, La Voix du Sud s'est mérité la deuxième place dans la catégorie Mise en valeur du contenu et qualité de la langue lors de la remise des Grands Prix des hebdos 2023. Cette distinction est le fruit du travail de deux journalistes passionnés, MM. Serge Lamontagne et Éric Gourde, qui sont toujours sur le terrain près des gens pour raconter Bellechasse, mais c'est aussi grâce au support de toute une équipe. Je pense à Mme Caroline Gilbert, Mme Chantal Lessard, Jessy Fournier et Steve Godbout.

Félicitations à vous tous et longue vie à La Voix du Sud!

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant Mme la députée de Robert-Baldwin.

Souligner le 50e anniversaire du Conseil du statut de la femme

Mme Brigitte B. Garceau

Mme Garceau : Merci, M. le Président. Je suis honorée de prendre la parole aujourd'hui afin de souligner le 50e anniversaire du Conseil du statut de la femme.

Il y a 50 ans, le Québec avait posé un geste concret et durable en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes, il avait pris l'engagement de créer une société égalitaire, équitable et inclusive, et, pour réaliser cet engagement, a fondé le Conseil du statut de la femme.

Grâce aux anciennes pionnières et présidentes du conseil ainsi qu'à l'engagement des groupes et des associations communautaires, citoyennes et professionnelles de tous horizons, la société québécoise peut s'enorgueillir du modèle égalitaire qui l'anime, une source d'inspiration pour le monde entier.

Je souhaite longue vie au Conseil du statut de la femme, et félicitations pour tous vos exploits! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Duplessis.

Souligner le 25e anniversaire du programme
des rangers juniors canadiens

Mme Kateri Champagne Jourdain

Mme Champagne Jourdain : Merci. M. le Président. Aujourd'hui, je souhaite souligner le 25e anniversaire de l'appartenance du programme des rangers juniors canadiens à l'Organisation de cadets du Canada, qui s'adresse aux jeunes de 12 à 18 ans qui vivent dans les communautés éloignées.

Sur la Côte-Nord, ce sont 331 jeunes, répartis en 16 patrouilles, qui participent à ce programme jeunesse communautaire. Ils sont présentement sur la Basse-Côte-Nord, en Minganie, à Schefferville et à Kawawachikamach. Ce programme stimulant et gratifiant pour les jeunes intègre des compétences pratiques et des activités traditionnelles dans un environnement amusant et convivial. Les apprentissages couvrent des domaines comme le travail d'équipe, le leadership, la survie en milieu sauvage et l'aide aux personnes en situation d'urgence.

Je souhaite un bon anniversaire au programme et je félicite tous les jeunes qui participent activement au bien-être de leur collectivité. Je salue également le travail indispensable de ces bénévoles qui les accompagnent dans leurs réalisations et leur cheminement. Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Et je reconnais maintenant M. le député de Maurice-Richard.

Rendre hommage à M. Moridja Kitenge Banza, artiste multidisciplinaire

M. Haroun Bouazzi

M. Bouazzi : Merci, M. le Président. Je suis très heureux, aujourd'hui, de souligner la présence de l'artiste Moridja Kitenge Banza, citoyen de ma circonscription, dans Maurice-Richard.

C'est à travers sa pratique artistique que Moridja s'interroge sur son histoire, sur la mémoire et l'identité des lieux qu'il habite en mélangeant fiction et réalité. Si vous avez la chance de voir une de ses oeuvres, vous comprendrez toute la complexité des réflexions qu'elles expriment. On y retrouve des critiques sociales, politiques et économiques percutantes.

Moridja n'a plus à faire ses preuves depuis longtemps. Il a reçu le prix Sobey en 2020. Ses oeuvres se retrouvent dans de nombreux musées, comme le Musée des beaux-arts de Montréal et du Canada, dans de multiples collections corporatives, comme celles de BMO ou de la Caisse de dépôt, ou même ici, sur les murs de l'Assemblée nationale. La Fondation Phi présentera d'ailleurs une importante exposition de son art en août 2023.

Cher Moridja, merci pour ton engagement. Ta contribution à l'art québécois est une richesse commune incroyable.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député. Et la parole revient maintenant au député de Saint-Jean.

Souligner l'avancement du projet de rénovation
de la maison Bouthillier
 

M. Louis Lemieux

M. Lemieux : M. le Président, le 7 décembre 2019, je m'étais levé ici, comme aujourd'hui, pour vous parler de la maison Bouthillier, du nom du Dr Alexis Bouthillier, qui a occupé six fois mon siège de député de Saint-Jean en cette Chambre. Sa maison, tombée en décrépitude, allait être sauvée, que je vous disais à ce moment-là.

Mais je n'avais pas eu le temps de vous expliquer qu'elle allait servir de maison de transition dans le cadre d'un vaste programme d'aide à l'itinérance chez nous, parce que c'est devenu une triste réalité, dont je vous ai souvent reparlé, d'ailleurs.

Tout ça pour vous dire que vendredi, en compagnie du ministre responsable des Services sociaux, j'ai visité le chantier de la maison Bouthillier. Il reste beaucoup à faire, il y a beaucoup à dire, et tout ça sera annoncé bientôt, mais je profite de notre visite du chantier pour saluer et remercier M. Georges Coulombe, dont la renommée n'est plus à faire dans le monde de la restauration et de la rénovation patrimoniale, et grâce à qui la maison Bouthillier va renaître et revivre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chomedey.

Souligner la Journée de commémoration du génocide tamoul

Mme Sona Lakhoyan Olivier

Mme Lakhoyan Olivier : Merci, M. le Président. Avant tout, je tiens à saluer les membres de la communauté tamoule ici présents dans nos tribunes. Merci d'être parmi nous et de nous sensibiliser sur l'importance de commémorer la journée du 18 mai 2009.

L'année passée, le gouvernement canadien a reconnu la date du 18 mai comme étant la journée commémorative du génocide tamoul, du massacre de Mullivaikkal, qui, à la fin de la guerre civile, en 2009, a coûté la vie à 70 000 civils tamouls sri lankais lors des derniers mois de la guerre, selon les Nations unies.

En ce 14e anniversaire du génocide tamoul, commémorer cette journée, c'est dire non à la répétition d'une telle tragédie. Ces actes inhumains, ces atrocités survenus dans l'histoire de l'humanité, et pas si lointains, doivent être dénoncés afin de ne jamais oublier.

Chère communauté tamoule, merci pour votre contribution à notre société québécoise. Et sachez qu'à Chomedey nous sommes avec vous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Bonaventure.

Souligner la tenue du 30e Festival du TRAC

Mme Catherine Blouin

Mme Blouin : Merci, M. le Président. Je tiens aujourd'hui à souligner un événement culturel important dans la ville de Paspébiac, soit l'ouverture de la 30e édition du Festival du TRAC.

TRAC fait référence au théâtre, à la recherche, à l'action et à la création. Ce festival a pour objectif d'amener la jeune relève à développer son potentiel créateur, à faire valoir ses talents, à échanger et à rayonner dans son milieu.

Au fil des 30 dernières années, cette fête théâtrale a présenté plus de 360 spectacles. Occupant un rôle de premier plan sur la scène culturelle gaspésienne, le Festival du TRAC a même réussi à faire une percée internationale avec la pièce Léo à vélo, qui a d'ailleurs été présentée en Roumanie.

Cette édition, ce sera l'occasion de rendre un hommage à tous ceux et celles qui ont créé, vécu et soutenu la mission du Festival du TRAC. Toutes mes félicitations pour ces années de célébration de l'art de la scène, et je vous souhaite le meilleur des succès pour cette 30e édition! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. J'accueille maintenant l'intervention du député de Matane-Matapédia.

Souligner la Journée de La Matapédia

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, en février dernier, la MRC de La Matapédia a décrété la tenue d'une journée spéciale afin de célébrer le sentiment d'appartenance de la population à l'égard de cette magnifique région. C'est le vendredi 26 mai prochain que se tiendra la première Journée de La Matapédia.

D'une part, cette journée commémore l'acte de concession, le 26 mai 1694, de la seigneurie du Lac-Matapédia par le comte de Frontenac et gouverneur général de la Nouvelle-France. D'autre part, cette journée rappelle également les origines, et le toponyme de La Matapédia est un dérivé du mot micmac «matapegiag», signifiant la jonction ou la rencontre de rivières. Plus de 300 ans plus tard, la MRC de La Matapédia, c'est 18 municipalités, sept territoires non organisés et une population unie de près de 18 000 personnes.

C'est donc un honneur pour moi de souligner la tenue de cette journée, de représenter La Matapédia et tous les Matapédiens et Matapédiennes.

Bonne Journée de La Matapédia! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Souligner la tenue du Gala Les Pléiades et le 150e anniversaire
de la Chambre de commerce et d'industrie du Grand Lévis

Mme Martine Biron

Mme Biron : Merci, M. le Président. Ce jeudi se tiendra le traditionnel Gala Les Pléiades organisé par la Chambre de commerce et d'industrie du Grand Lévis.

Cet événement annuel célèbre l'innovation, la créativité et le leadership de nos entreprises de Lévis et des environs. Je suis donc heureuse de prendre part à cette grande célébration de l'entrepreneuriat, qui soulignera par la même occasion le 150e anniversaire de la chambre de commerce. À tous les entrepreneurs et entreprises finalistes, je vous dis bravo. Votre vision et vos accomplissements contribuent au dynamisme et à la croissance fulgurante de l'économie de Lévis et de la région de Chaudière-Appalaches.

Je souhaite finalement saluer les employés et administrateurs de la chambre de commerce, notamment Mme Marie-Josée Morency et Mme Éliane Trudel, pour leur dévouement et l'excellence de leur travail. Vous assurez dignement la pérennité et le développement de cette organisation riche d'un siècle et demi d'histoire et de succès. Merci.

• (13 h 50) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. La parole revient maintenant au député de Mégantic.

Inviter les citoyens à visiter les marchés
publics du Haut-Saint-François

M. François Jacques

M. Jacques : M. lePrésident, aujourd'hui, je veux souligner une démarche importante des marchés publics du Haut-Saint-François.

Cette MRC compte six marchés publics, Bury, Dudswell, La Patrie, Lingwick, Sawyerville et Westbury, qui se sont regroupés pour se donner une signature distinctive en 2023. Le projet va promouvoir l'unicité de chaque marché tout en créant un parcours riche en saveurs dans cette merveilleuse MRC. Plusieurs acteurs économiques seront impliqués pour promouvoir les activités et les nouveautés du circuit, qui en donnera de tous les goûts à nos papilles gustatives.

Je vous invite à faire la tournée des marchés du Haut-Saint-François cet été pour découvrir chacune des belles réussites, des activités et des produits différents qu'ils proposent. Des marchés qui sont devenus des incontournables dans l'offre estivale de nos petites localités.

Alors, je souhaite une excellente saison 2023 à l'ensemble des marchés publics de ma circonscription. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Mégantic. Et j'accueille maintenant l'intervention du député de Chauveau.

Souligner le 75e anniversaire du Cercle de fermières Lac-Saint-Charles

M. Sylvain Lévesque

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Aujourd'hui, je souligne le 75e anniversaire du Cercle des fermières de Lac-Saint-Charles. Je salue d'ailleurs, dans les tribunes, la présidente, Line Lévesque, ainsi que Mmes Claire Fournier, Francine Tremblay et Lucille Perron.

Fondé en 1948, le Cercle des fermières de Lac-Saint-Charles regroupe quelque 57 membres, très actives dans leur milieu. Ces femmes contribuent à la préservation et à la transmission du patrimoine culturel et artisanal et travaillent à l'amélioration des conditions de vie de la femme et de la famille. Affectueusement appelées les gardiennes du patrimoine culturel et artisanal, ces artisanes se font un devoir de transmettre leur savoir. Et tous sont unanimes : les pièces confectionnées par ces passionnées sont de véritables oeuvres d'art, et leur talent est indéniable.

Merci aux membres du Cercle des fermières de Lac-Saint-Charles pour votre implication dans notre communauté, et bon 75e anniversaire à toutes! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci beaucoup, M. le député de Chauveau. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Soulanges.

Rendre hommage aux maires et aux mairesses
de la circonscription de Soulanges

Mme Marilyne Picard

Mme Picard : Merci, M. le Président. Je tenais aujourd'hui à profiter de l'occasion pour rendre hommage à 16 femmes et hommes de ma circonscription qui ont le privilège d'être élus par la population à titre de mairesses et de maires. Je salue d'ailleurs ceux qui ont accepté l'invitation et qui sont présents aujourd'hui, dans nos tribunes, à l'Assemblée nationale.

Je peux constater, depuis le début de mon implication en politique, que chacune des mairesses et chacun des maires de Soulanges sont très présents pour leur population. Ce dévouement est remarquable et mérite d'être souligné. Vous êtes des acteurs clés de notre territoire, vous avez la région à coeur, et c'est tout à votre honneur. Soulanges est chanceuse de vous avoir, et moi aussi, car je considère que le travail d'équipe avec chacun d'entre vous est essentiel pour notre belle région.

Le travail d'élu n'est pas toujours de tout repos, et je vous félicite pour votre engagement citoyen et implication. Grâce à vous tous, de nombreux beaux projets sont en cours de réalisation dans nos villes, et je vous en remercie au nom de tous les citoyens de la circonscription de Soulanges. Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Soulanges. Alors, voilà qui met fin à la rubrique Déclarations de députés.

Et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 13 h 54)

(Reprise à 14 h 04)

La Présidente : Bonjour, tout le monde. Bienvenue au Parlement du Québec. Vous êtes nombreux. Messieurs dames les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir, je vous prie.

Présence de M. Michel Morin, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

J'ai le plaisir de souligner la présence, aujourd'hui dans nos tribunes, de M. Michel Morin, ex-député de Nicolet-Yamaska de 1994 à 2007.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, la parole est à vous.

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de déposer les états financiers clos les 31 mars 2019, 31 mars 2020 et 30 octobre 2020 de Transition énergétique Québec.

La Présidente : Ces documents sont déposés. M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bonnardel : Mme la Présidente, permettez-moi de déposer le plan stratégique 2021-2025 de la Régie des alcools, des courses et des jeux. Merci.

La Présidente : Ce document est déposé. Mme la ministre de l'Emploi.

Mme Champagne Jourdain : Mme la Présidente, permettez-moi de déposer le rapport annuel de gestion 2022 du Conseil de gestion de l'assurance parentale. Merci.

La Présidente : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : ...Mme la Présidente. Je dépose la réponse à la question inscrite au feuilleton le 18 avril 2023 par le député de Laurier-Dorion ainsi que la réponse à la question inscrite au feuilleton le 20 avril 2023 par le député de Matane-Matapédia.

La Présidente : Ces documents sont déposés.

Pour ma part, j'ai reçu préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose copie du texte de ce préavis.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission des institutions et député de Richmond.

Étude détaillée du projet de loi n° 12

M. Bachand : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je dépose le rapport de la Commission des institutions qui, les 18, 19 et 20 avril ainsi que les 9, 10, 11 et 23 mai 2023, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 12, Loi portant sur la réforme du droit de la famille en matière de filiation et visant la protection des enfants nés à la suite d'une agression sexuelle et des personnes victimes de cette agression ainsi que les droits des mères porteuses et des enfants issus d'un projet de grossesse pour autrui. La commission a adopté le texte du projet de loi avec amendements. Merci.

La Présidente : Ce rapport est déposé. Mme la présidente de la Commission des transports et de l'environnement et députée de Westmount—Saint-Louis.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 20

Mme Maccarone : Mme la Présidente, je dépose le rapport de la Commission des transports et de l'environnement qui, les 9, 10 et 11 mai 2023, a tenu des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 20, Loi instituant le Fonds bleu et modifiant d'autres dispositions.

La Présidente : Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député de Pontiac.

Améliorer le diagnostic et la prise en charge
du syndrome d'Ehlers-Danlos

M. Fortin : Merci. Merci, Mme la Présidente. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 351 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que le syndrome d'Ehlers-Danlos — SED — est une maladie héréditaire du tissu conjonctif sous-diagnostiquée, longue, invalidante, orpheline, dont la prévalence s'avère plus importante qu'estimée;

«Considérant que les connaissances actuelles sur le SED montrent que cette maladie n'affecte pas seulement les articulations et la peau, mais qu'elle est une maladie multisystémique pouvant affecter presque tous les systèmes et organes du corps humain et qu'elle est accompagnée de douleurs de différents types;

«Considérant que, traditionnellement, le diagnostic du SED se fait par [des] médecins généticiens et que les délais sont de trois à cinq ans pour obtenir une consultation;

«Considérant qu'il existe des lacunes majeures dans la formation des médecins de famille et que le SED est sous-diagnostiqué;

«Considérant que plusieurs médecins spécialistes, autres professionnels de la santé et les centres de réadaptation physique doivent être mis à contribution et qu'il n'existe pas de corridor de services bien défini qui permettrait une prise en charge réelle et efficace des patients atteints du SED;

«Considérant que la plupart des patients ont actuellement recours à des services au privé et que certains consultent à l'international;

«Considérant que les personnes atteintes du SED doivent s'absenter de l'école et du travail et qu'elles éprouvent des difficultés à réconcilier leur vie de famille et leur vie sociale;

«L'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, signataires, demandons au gouvernement du Québec que l'INESSS soit mandaté pour mettre en place les outils nécessaires à un meilleur diagnostic et une prise en charge du syndrome d'Ehlers-Danlos selon les bonnes pratiques existant à l'international.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, Mme la Présidente.

• (14 h 10) •

La Présidente : Cet extrait de pétition est déposé. M. le député de Jean-Lesage.

Accorder un soutien financier temporaire aux familles en
attente d'une place en service de garde éducatif

M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 7 067 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que le Québec connaît une pénurie de places en service de garde éducatif à l'enfance sans précédent depuis plusieurs années;

«Considérant que des milliers de places en milieu familial ont été perdues entre 2018 et 2022, exacerbant la pénurie de places en services de garde éducatifs à l'enfance dans les régions;

«Considérant que plusieurs dizaines de milliers d'enfants — 33 356 selon les derniers chiffres du ministère de la Famille — sont en attente d'une place en service de garde sur la Place 0-5 partout au Québec;

«Considérant que des dizaines de milliers de parents d'enfants en attente d'une place, et principalement des mères, sont contraints de renoncer à leur activité professionnelle et sont ainsi privés de revenus au terme de leurs prestations du Régime québécois d'assurance parentale — RQAP;

«Considérant que le réseau de services de garde éducatifs à l'enfance ne sera pas complété avant plusieurs années et que des milliers de parents devront renoncer à leur activité professionnelle et donc à leurs revenus et indépendance financière dans le futur;

«Considérant que le Québec connaît une crise inflationniste importante depuis plusieurs mois exerçant une pression supplémentaire sur la situation financière déjà fragilisée des parents en attente d'une place en service de garde éducatif à l'enfance;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, signataires, demandons au gouvernement du Québec de fournir un soutien financier temporaire aux parents ayant dû renoncer à leur activité professionnelle et laissés sans revenus faute de place en services de garde éducatifs à l'enfance pour leurs enfants.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

La Présidente : Cet extrait de pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole, pour sur sa question principale, au chef de l'opposition officielle.

Modification du projet de troisième lien entre Québec et Lévis

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. On le sait, le gouvernement de la CAQ se démarque en étant un gouvernement pas fiable, un gouvernement brouillon. Depuis cinq ans au pouvoir, on peut voir nombre de promesses qui ont été brisées. La plus récente en titre, celle qui a été la plus frappante, très certainement, ça a été l'abandon de la promesse-phare, pendant six ans, de construire un troisième lien autoroutier.

Ça en dit beaucoup sur le style de gestion du premier ministre, qui n'écoute pas, qui prend ses décisions seul. Parce que, vous savez, Mme la Présidente, mercredi dernier, Le Journal de Montréal a fait état des commentaires de l'ex-collègue caquiste de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, Émilie Foster. Et le journal écrivait ce qui suit. On apprend... Elle s'est sentie très mal à l'aise de voter, en juin 2021, contre le rapport de la Commissaire à l'éthique blâmant son collègue ministre de l'Économie. Elle révèle aussi que la décision d'abandonner le troisième lien autoroutier a été imposée. «Les élus — je la cite — ont été mis devant le fait accompli.» Pourtant, le 3 mai dernier, le député de Charlesbourg, ministre responsable de la Capitale-Nationale, disait que c'était une décision unanime, qu'il n'avait pas eu vent d'un seul désaccord. Pour l'ex-députée caquiste Émilie Foster, c'est clair, et je cite toujours : «Ça, c'est un exemple frappant que ce ne sont pas les élus qui ont pris cette décision-là.» Fin de la citation.

Mme la Présidente, le premier ministre a décidé de ne pas écouter son caucus. Peut-il reconnaître qu'il ne peut pas gérer le Québec comme il gère son caucus, de façon autoritaire?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, écoutez, bon, par où on commence? Brouillon. Brouillon. Rappelons-nous Gaétan Barrette et Carlos Leitão, hein, qui disaient que le gouvernement libéral a trop coupé, a coupé des milliards de trop, qu'ils se sont trompés, qu'ils sont arrivés avec des surplus. Donc, résultat des courses, ils ont trop coupé en santé, en éducation. Ce n'est pas moi qui le dis : Gaétan Barrette, Carlos Leitão. C'est gênant.

Maintenant, pour ce qui est du caucus, je suis content, je vois Michel Morin qui est ici, qui a été longtemps whip au Parti québécois, où j'étais, et c'est là que j'ai appris, c'est avec Michel Morin que j'ai appris comment gérer un caucus. Je pense que c'est comme ça dans tous les partis. Au caucus, tous les députés ont le droit de s'exprimer. Ça arrive régulièrement, que ce soit au PQ, que ce soit à la CAQ, que des députés ne soient pas d'accord avec les positions du parti, mais, une fois qu'on a pris une décision en équipe, il faut jouer en équipe. Donc, on se rappelle, je pense, c'était Michel Morin qui était là, il y avait eu Jean-Pierre Charbonneau, à un moment donné, qui n'avait pas suivi la décision du caucus, puis Jean Charest, à répétition, nous était rentré dedans, au grand déplaisir de Michel Morin.

Donc, Mme la Présidente, je pense que, quand on est dans une équipe, on peut tout se dire en équipe, mais il faut aussi être solidaires quand on sort du caucus. C'est comme ça que ça fonctionne, les partis politiques. En tout cas, c'était comme ça au Parti québécois quand j'étais là, c'est comme ça à la CAQ. Maintenant, il y a peut-être une façon différente de travailler, au Parti libéral.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Ce matin, Radio-Canada, sous la plume d'Alexandre Duval, révèle, je cite l'article : «Des députés de la CAQ ne sont pas seulement déçus par l'abandon du troisième lien, ils sont en profond désaccord. [Le premier ministre] a demandé à ses élus de ne pas exprimer publiquement leur dissidence.» Fin de la citation de collègues qui brisent le silence. Son ex-députée Émilie Foster contredit le premier ministre, et des députés actuels le contredisent aussi.

La question revient : Que vaut donc la parole du premier ministre?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, j'ai de la difficulté à faire le lien entre ma parole et les discussions qu'on a au caucus. C'est normal, dans un caucus où on a 90 personnes fortes, qu'on ne soit pas toujours unanimes sur tous les sujets. Donc, on en débat, on en débat en caucus, on prend une décision d'équipe puis on travaille ensuite en équipe.

Je suppose que Carlos Leitão puis Gaétan Barrette, ils n'étaient pas d'accord avec les coupures. Ils ne l'ont pas dit à cette époque-là, mais ils le disent maintenant.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Mme la Présidente, toujours selon Radio-Canada, je cite l'article : «...des députés ont lu les études rendues publiques par la ministre des Transports [...] et estiment que l'argumentaire du gouvernement contient des incohérences.» Il y en a qui voient clair, Mme la Présidente, au caucus, finalement. Même chose pour nous.

L'article poursuit : «Certains admettent même ne pas croire au discours de leur formation politique...» Imaginez-vous ça, des députés caquistes ne croient pas au discours de leur formation politique.

Si les propres députés du premier ministre ne le croient pas, pourquoi la population devrait le croire?

La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, quand on est au gouvernement, on a des décisions difficiles à prendre, ce n'est jamais noir ou blanc. Dans le cas du troisième lien autoroutier, il y avait des pour, il y avait des contre. Je l'ai dit, ce n'est pas idéal de se retrouver avec deux ponts du même côté, un à côté de l'autre, ce n'est pas idéal, mais, Mme la Présidente, quand ça prend 10, 15 minutes pour traverser ces deux ponts-là, quand ça coûte 10 milliards pour construire un troisième lien autoroutier, je pense qu'il faut mettre les pour et les contre dans la balance puis prendre des décisions difficiles. On gère des fonds publics.

La Présidente : Troisième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Quand le premier ministre dit, Mme la Présidente : Il y avait des pour, il y avait des contre, est-ce qu'il parle des députés caquistes ou ils parlent des arguments pour puis des arguments contre? Parce que son collègue de Charlesbourg, lui, a dit que c'était unanime, il n'y avait que des pour. Alors, s'il n'y avait que des pour, qui a considéré les contre?

Alors, mon point, Mme la Présidente : le premier ministre ne peut pas dire que c'est une décision qui a été unanime, ne peut pas dire, également, que c'est une décision qui fait en sorte d'écouter la population. C'est ça, son leadership, Mme la Présidente.

Encore une fois, que vaut la parole du premier ministre?

La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, ce qu'on aimerait savoir : C'est quoi, la position du Parti libéral? Parce que, dans l'histoire du gouvernement libéral, ça a changé. Pendant un bout de temps, ils étaient d'accord avec un troisième lien; après, ils n'étaient plus d'accord. Après, ils étaient d'accord, mais ils disaient : Ce ne sera pas un pont ni un tunnel. On se rappelle de ce moment assez fantastique de Dominique Anglade.

Mme la Présidente, ce qu'on sait, aujourd'hui, là, c'est qu'on connaît la position du gouvernement de la CAQ, mais on ne connaît toujours pas la position du Parti libéral.

La Présidente : En question principale, je reconnais le député de l'Acadie.

Processus de nomination des juges

M. André Albert Morin

M. Morin : Mme la Présidente, le ministre de la Justice a procédé récemment à la nomination d'un juge à Sept-Îles. Pour ce faire, il a d'abord refusé tous les candidats lors d'une première ronde de recommandations. Il a demandé que soit lancée une deuxième ronde de recommandations pour le même poste. À la suite de la seconde ronde, le ministre a arrêté son choix sur un candidat qui réside, attention, à 852 kilomètres de Sept-Îles. Selon les paroles du ministre, et je le cite : «Le poste a été difficile à combler à Sept-Îles.» C'est un euphémisme.

Annuler un concours de nomination d'un juge, ce n'est pas une mince affaire, ça commande des circonstances exceptionnelles.

Est-ce que le ministre peut nous dire quelles étaient ces circonstances exceptionnelles?

• (14 h 20) •

La Présidente : La réponse du ministre de la Justice.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, le collègue de l'Acadie connaît très bien le règlement sur la sélection des juges qui a été instauré suite à la commission Bastarache. Est-ce que je dois vous rappeler, Mme la Présidente, qu'est-ce qui a mené à la commission Bastarache — je crois que nos collègues d'en face le savent très bien — où il y avait du patronage relativement à la nomination des juges à la Cour du Québec, aux cours municipales, les juges de paix magistrats également? La lumière a été faite : il y avait quelqu'un qui était au bureau du premier ministre, M. Charest, et qui collait des post-it...

La Présidente : Je reconnais le leader de l'opposition officielle. Est-ce que c'est une question de règlement? J'aimerais savoir laquelle.

M. Derraji : ...la question porte sur une nomination à Sept-Îles. Donc, j'invite le ministre à répondre...

Des voix : ...

La Présidente : S'il vous plaît! Je suis debout et je vais trancher. La réponse demeurait sur les faits de la cause, c'est-à-dire la nomination des juges. M. le ministre, vous pouvez poursuivre.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je comprends que ça dérange le Parti libéral de ramener le passé, mais il y a une chose que je peux vous dire, Mme la Présidente : toutes les nominations que j'ai effectuées, au nombre de 71, ont été faites avec la plus grande intégrité, Mme la Présidente.

Pour ce qui est du cas de Sept-Îles, Mme la Présidente, le règlement sur la sélection des juges prévoit que, dans l'intérêt de la justice, le ministre peut annuler un concours, et il y aura publication d'un deuxième concours, Mme la Présidente, d'un deuxième affichage. C'est ce qui a eu cours dans le cadre du présent dossier.

Par ailleurs, Mme la Présidente, je comprends que les gens de Sept-Îles auraient souhaité avoir un candidat provenant de l'endroit. Le règlement, cependant, prévoit que tous les avocats membres du Barreau depuis 10 ans peuvent soumettre leur candidature, et il y a un processus de sélection indépendant qui fait des recommandations au ministre, et le ministre choisit parmi ceux-ci.

La Présidente : Première complémentaire.

M. André Albert Morin

M. Morin : Ce que les habitants de la Côte-Nord me disent et comprennent de la nomination par le ministre, c'est que, de Tadoussac à Blanc-Sablon, il n'y a actuellement aucun avocat ou avocate qui possède les compétences requises pour être juge. Le seul candidat compétent, il faut le faire venir de la Rive-Sud de Montréal.

Les gens de la Côte-Nord veulent des explications. Est-ce que le ministre peut leur en donner?

La Présidente : La réponse du ministre.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, le député de l'Acadie devrait être prudent. Le règlement sur la sélection des juges prévoit qu'il y a un comité indépendant, dont le président est un juge de la Cour du Québec qui est désigné par la juge en chef de la Cour du Québec, de deux avocats qui sont désignés par le Barreau du Québec et de deux personnes qui sont désignées par l'Office des professions. Le comité de sélection formule des recommandations au ministre, et le ministre, par la suite, les soumet au Conseil des ministres.

Je comprends que les gens de la Côte-Nord auraient souhaité avoir quelqu'un qui provient de leur région et je le conçois bien. Cependant, le juge qui a été nommé, le juge Germain, a toutes les compétences et les aptitudes, malgré le fait qu'il ne résidait pas dans la région, pour occuper cette fonction. D'ailleurs, il a été recommandé par le comité indépendant.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. André Albert Morin

M. Morin : Les avocats et les avocates de la Côte-Nord ne sont pas des avocats de seconde zone. Je comprends que la CAQ tente d'envoyer des familles en région, c'est ce que disait la députée de Duplessis, mais ce n'est pas en nommant un juge de la Montérégie qu'on va repeupler les régions du Québec.

Ma question pour le ministre est la suivante : Est-ce que désormais les comités de sélection, puisqu'il en parlait, prendront en considération le peuplement des régions dans leur analyse des candidatures?

La Présidente : La réponse du ministre de la Justice.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je comprends que le député essaie de faire de l'humour, mais je n'ai pas l'intention à rire et je prends ma fonction avec sérieux, Mme la Présidente. À toutes les fois que je recommande un juge au Conseil des ministres, je m'assure qu'il ait les compétences et l'intégrité requises pour occuper sa charge, et le député de l'Acadie le sait très bien.

Alors, dans ce cas-ci, effectivement, c'est une personne résidant à Longueuil qui va s'établir avec sa famille sur la Côte-Nord parce qu'il y a une obligation de résidence. Cela étant dit, est-ce que cette personne-là avait l'expérience requise? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'elle avait les compétences requises? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'elle avait l'intégrité requise pour occuper les fonctions? La réponse, c'est oui. Elle a été recommandée par un comité de sélection indépendant.

Je comprends que, de la part du Parti libéral, on souhaite venir jouer dans le processus.

La Présidente : En terminant.

M. Jolin-Barrette : Je ne ferai pas ça, comme le suggère le Parti libéral du Québec.

Des voix : ...

La Présidente : En question principale, il n'y a qu'une personne qui aura la parole, et c'est la députée de Westmount—Saint-Louis. La parole est à vous.

Problèmes de violence et d'itinérance à Val-d'Or

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Mme la Présidente, on parle beaucoup d'augmentation de violence partout au Québec. La semaine dernière, devant une hausse de violence de plus en plus inquiétante pour la population, la ville de Val-d'Or a demandé à Québec d'intervenir pour les aider à régler le problème. La mairesse de Val-d'Or affirme être à bout de ressources. La mairesse a invité le ministre de la Sécurité publique à aller la rencontrer à Val-d'Or pour constater lui-même qu'est-ce qui se passe sur le terrain. La réponse n'est pas venue du ministre de la Sécurité publique. C'est le député d'Abitibi-Est qui lui a répondu en débarquant en plein conseil municipal, lundi dernier, pour dire que le gouvernement allait leur donner de l'argent. La réponse de la ministre est claire... de la mairesse est claire : Je ne veux pas de l'argent, je veux de la police.

Mme la Présidente, je sais que le ministre a rencontré la mairesse. Au lieu d'envoyer son collègue au conseil municipal, est-ce que lui, aujourd'hui, il peut prendre ses responsabilités et répondre à sa demande d'envoyer des policiers pour protéger la population?

La Présidente : La réponse du ministre de la Sécurité publique.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Mme la Présidente, la sécurité de tous les Québécois et Québécoises, pour moi, est extrêmement importante, qu'on soit dans une communauté ou autre. Et, oui, j'ai eu des discussions, dans les derniers jours, avec la mairesse de Val-d'Or, qui vit une situation particulière, qui vit une situation d'itinérance, de délinquance quand même assez importante. Je lui ai dit que rapidement, dès le 1er juin, il y aurait, donc, des cadets qui seraient sur le terrain pour supporter le travail des policiers. Je lui ai dit aussi que, dans la réorganisation des effectifs de la Sûreté du Québec, il y aurait trois policiers de plus sur le territoire et un enquêteur de plus. J'ai demandé aussi... j'ai discuté avec la direction, là-bas, pour être capable d'avoir plus de policiers sur le terrain qui sont visibles, à vélo ou à pied, pour être capables d'intervenir le plus rapidement possible.

Maintenant, c'est un problème qui n'est pas simple. On travaille, avec mon collègue des Affaires autochtones, nécessairement, et mon collègue des Services sociaux, pour s'assurer de sécuriser la population et sécuriser nos rues.

La Présidente : Première complémentaire, Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Elisabeth Prass

Mme Prass : Merci, Mme la Présidente. La semaine dernière, le député caquiste d'Abitibi-Est a banalisé l'itinérance. Comment est-ce qu'on peut s'attendre à ce que ce gouvernement propose de vraies solutions avec une telle attitude envers l'itinérance? Plutôt que de condamner les itinérants, le gouvernement du Québec devrait — excusez-moi — agir pour offrir de vraies solutions, plutôt que des refuges quand il fait moins 50° dehors.

Est-ce que ce gouvernement caquiste va répondre positivement à la demande de la mairesse de Val-d'Or et venir en aide à la municipalité sur les enjeux en itinérance?

La Présidente : La réponse du ministre responsable des Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Merci, Mme la Présidente. Je vais dire à la députée de D'Arcy-McGee ce qu'on fait pour l'itinérance en Abitibi. On est en train de bâtir la trajectoire que j'ai déjà mentionnée ici, soit des refuges, de l'hébergement de transition et des logements supervisés, qui vont être, effectivement, supervisés par des intervenants psychosociaux à travers toute la trajectoire. En plus, pour l'Abitibi, on a également, avec le Secrétariat aux affaires autochtones, donné des fonds pour un refuge pour les personnes autochtones. C'est 400 000 $ par année, récurrents, qui ont été investis pour aider dans cette situation-là, Mme la Présidente. Et, en plus, on travaille avec le CAA pour mettre sur pied un refuge à haute tolérance, ou «health shelter», comme on appelle en anglais.

La Présidente : Deuxième complémentaire, le député de l'Acadie.

M. André Albert Morin

M. Morin : Mme la Présidente, les propos du député d'Abitibi-Est sont indignes d'un représentant du gouvernement, lorsqu'il s'attaque aux travaux de la commission Viens. J'ai parlé, la semaine dernière, à des citoyens de Val-d'Or, ils sont troublés par le comportement et les propos de leur député, inquiets pour le climat social à Val-d'Or. Le chef Picard ainsi que le chef de Lac-Simon, Lucien Wabanonik, exigent la démission du député d'Abitibi-Est.

Est-ce que le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuit est d'accord avec les propos...

La Présidente : M. le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations.

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Mon collègue d'Abitibi-Est s'est excusé, il a reconnu que ses paroles avaient... les paroles qu'il aurait exprimées avaient dépassé... ses mots avaient dépassé ses pensées. Il a avoué qu'il avait parlé sous le coup de l'émotion.

Et, Mme la Présidente, on est en action, sur le terrain, je veux le rappeler à mon collègue. Vous savez, quand on parle de la commission Viens, il y a déjà 86 des recommandations qu'on est en voie d'appliquer. Alors, on est en action. C'est du concret, ça, Mme la Présidente.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le chef du deuxième groupe d'opposition.

Augmentation de la rémunération des députés

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. «Es-tu vraiment en train de comparer le travail d'un prof à celui d'un député?» Moi, j'étais dans une école, jeudi, puis je peux vous dire que les profs sont tombés en bas de leurs chaises quand ils ont entendu les propos du ministre de l'Éducation. Le premier ministre a utilisé le mot «courage», durant son congrès, pour justifier son augmentation du salaire des députés, mais le mot qui était sur les lèvres des profs que j'ai rencontrés la semaine passée, c'était plutôt «mépris».

Le ministre de l'Éducation s'est excusé, c'est vrai, mais tout le monde a compris que le mal est fait, parce que ce que le ministre dit, c'est ce que le premier ministre fait. Il offre 9 % sur cinq ans aux profs, aux infirmières, il pense que c'est ça que ça vaut, leur travail, mais, pour les députés, ah! là il propose 30 000 $ de plus d'un seul coup, immédiatement. Ce n'est pas juste les profs qui sont en colère, Mme la Présidente, c'est bien du monde au Québec qui font face à l'inflation, qui font face à des hausses de loyer puis qui ne peuvent pas se voter eux-mêmes une augmentation de salaire. Les gens, au Québec, n'ont pas ce pouvoir-là, puis les députés ne devraient pas avoir ce pouvoir-là.

Est-ce que le premier ministre peut retomber sur le plancher des vaches, réaliser que sa décision ne passe pas et suspendre l'étude de son projet de loi qui va augmenter les salaires des députés de 30 000 $ d'un coup? Ça n'a pas d'allure, Mme la Présidente.

• (14 h 30) •

La Présidente : Je vous invite, M. le chef, à faire attention au choix des mots. M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Merci, Mme la Présidente. Ça fait 20 ans qu'on parle de revoir le salaire des députés. Il y a eu des discussions même quand j'étais au Parti québécois avec celui qui était le leader au Parti libéral, qui était Jean-Marc Fournier. Ça a failli arriver, mais ce n'est pas arrivé.

Mme la Présidente, le Bureau de l'Assemblée nationale, le Bureau de l'Assemblée nationale, pas le gouvernement, le Bureau de l'Assemblée nationale a nommé un comité indépendant avec Jérôme Côté, un spécialiste qui, depuis 25 ans, compare la rémunération, secteur privé, secteur public. Il a été décidé, donc, au Bureau de l'Assemblée nationale, que Jérôme Côté serait responsable de cette étude. Le Parti libéral a nommé Lise Thériault pour se joindre au comité, le Parti québécois a nommé Martin Ouellet. Malheureusement, Québec solidaire, représenté par la députée de Mercier, a refusé de nommer quelqu'un au comité indépendant. Donc, Mme la Présidente, c'est facile, après, de venir dire : Ah! ce n'est pas un comité indépendant parce qu'il n'y avait pas quelqu'un de Québec solidaire. Mme la Présidente, c'est Québec solidaire qui a refusé de nommer quelqu'un de Québec solidaire.

Donc, Mme la Présidente, les recommandations qui ont été faites, ce sont les recommandations qui sont dans le projet de loi, telles quelles. Donc, Mme la Présidente, c'est un comité indépendant qui vient s'assurer qu'on va être capable de continuer de recruter les personnes de tous les milieux pour devenir députés au Québec.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Mme la Présidente, le comité dont parle le premier ministre, là, c'est la CAQ qui en a écrit le mandat, puis ce mandat-là était non négociable, les conclusions étaient biaisées d'avance, et, non, on n'allait pas fournir des noms à un comité qui était biaisé.

Mme la Présidente, le premier ministre gouverne, c'est son projet de...

Des voix : ...

La Présidente : Bon, je suis debout. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, en vertu du règlement, on ne peut pas induire la Chambre en erreur. C'est présentement ce que le député de Gouin est en train de faire. Il avait une représentante qui était au BAN, elle a refusé de participer aux travaux, elle a refusé de soumettre des candidatures, et par la suite, par la suite, elle adopte la politique de la chaise vide. Alors, on comprend que Québec solidaire veut faire...

La Présidente : C'est beau. Je suis debout, M. le leader du gouvernement. J'ai bien entendu. Nous allons poursuivre dans le respect, je vous prie, des procédures.

M. Nadeau-Dubois : C'est lui qui gouverne, c'est lui qui dépose le projet de loi, c'est lui qui propose d'augmenter les salaires des députés de 30 000 $ par année. C'est sa priorité, Mme la Présidente, pas celle des Québécois.

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, Mme la Présidente, on parle d'un comité indépendant nommé par le Bureau de l'Assemblée nationale, on parle d'une comparaison pour être capables d'attirer toutes sortes de personnes, pas nécessairement des personnes qui ont déjà fait leur argent avant dans le privé. Je pense, entre autres, à un jeune père de famille qui veut offrir le plus possible à ses enfants. Je pense que c'est normal qu'on lui offre une rémunération qui est compétitive avec ce que cette personne-là pourrait avoir dans le public, dans le privé. Pourquoi ce serait différent pour la politique? Pourquoi un père de famille ne serait pas capable d'aller gagner le plus possible pour ses enfants? Pourquoi?

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Il y a un point avec lequel je suis en désaccord. Je pense que personne ne va en politique pour faire le plus d'argent possible. Je pense que ce n'est la motivation de personne ici, dans aucun parti. Tout le monde ici, on n'est pas d'accord sur tout, mais on est tous ici pour servir les Québécois, les Québécoises.

Si le premier ministre veut augmenter les salaires des députés pour un meilleur recrutement en 2026, pourquoi est-ce qu'il n'accepte pas de reporter la hausse de salaire après la prochaine élection? J'aimerais une réponse.

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, je n'ai jamais dit qu'on allait en politique pour faire de l'argent. En tout cas, je peux vous dire que, dans mon cas, là, je faisais pas mal plus d'argent au privé qu'en politique.

Maintenant, ce que j'ai dit, c'est qu'un père de famille, un jeune père ou une mère de famille a le droit d'aller gagner le plus d'argent possible pour donner le plus possible à ses enfants. C'est comme ça que je vois la vie, moi.

Des voix : ...

La Présidente : Pas de commentaire après les réponses, je vous prie. En question...

Des voix : ...

La Présidente : S'il vous plaît! Je suis debout.

En question principale, j'aimerais entendre le député de Rosemont. La parole est à vous, juste à vous.

Pénurie de main-d'oeuvre dans le réseau de la santé

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. On sait que le ministre de la Santé a une passion pour les chiffres, les tableaux, les indicateurs. Que disent ses derniers chiffres? Ce n'est pas beau, ce n'est pas beau. On le savait, mais c'est encore pire. Ils disent, ses chiffres, que le réseau de la santé public a perdu 21 000 travailleurs et travailleuses depuis deux ans, 21 000 sur 350 000. Ça, c'est 6 % de la force vive de notre réseau public qui a foutu le camp dans les deux dernières années.

Pendant que le réseau perd son monde, pendant que les gens quittent le réseau, encore, là, aujourd'hui, les infirmières qui ont démissionné dans tous les CIUSSS du Québec, pendant ce temps-là que fait le ministre? Il nous propose une énième réforme de structure.

Est-ce qu'il pourrait nous dire, là, où est-ce qu'il a trouvé la solution, la poudre de perlimpinpin, dans le projet de loi n° 15, pour embaucher du monde? Où est-ce qu'il a trouvé ça?

La Présidente : La réponse du ministre de la Santé.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je suis content, Mme la Présidente, parce que j'ai rencontré des élèves de Drummondville, ce matin, puis je leur avais dit : J'espère que je vais avoir une question. Alors, bonjour, tout le monde. Puis le député de Drummond et le député de...

Une voix : ...

M. Dubé : ...de Johnson vous saluent aussi.

Alors, je reviens à la question. Écoutez, premièrement, j'aimerais rappeler au député de Rosemont qu'il faut regarder deux chiffres — il aime ça, les tableaux de bord, lui aussi. On a perdu 20 000 personnes sur deux ans, mais, dans la dernière année, 10 000 de ces 20 000 personnes là ont été remplacées par des gens qui sont revenus en absence de maladie. Alors, au net, pour l'année qui s'est terminée en 2023, dans le même tableau de bord, la perte nette, c'est zéro. On commence... Non, non, mais c'est important, madame... On peut regarder un côté des chiffres, mais on a oublié... le député a oublié de regarder l'autre côté.

La très bonne nouvelle de cette année, c'est qu'on n'en a pas perdu, de gens. On a été capables de récupérer des gens qui étaient en absence de travail parce qu'ils étaient remis de la COVID, ils étaient remis de différentes absences. Alors, on a réussi ça. C'est une première chose.

Est-ce que c'est suffisant? Non, Mme la Présidente.

La Présidente : En terminant.

M. Dubé : Je reviendrai. Merci.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Je sais que le ministre était à la même place que moi quand on a étudié le projet de loi n° 15. Est-ce qu'il y a entendu un seul intervenant — il y a 103 mémoires — qui a dit que son projet de loi n° 15 va embaucher du monde? Bien non, pas un seul, puis il le sait très bien.

Est-ce que le ministre voit, là, que, pendant qu'il rêve à une nouvelle structure, là, pendant qu'il rêve à un nouvel organigramme, le personnel sur le terrain vit un enfer, un cauchemar, puis ça va être encore pire dans les prochaines semaines avec les vacances? Est-ce qu'il voit ça ou il est obnubilé par son nouveau... son nouvel organigramme?

La Présidente : M. le ministre.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, Mme la Présidente, plusieurs choses. J'ai toujours dit que ce n'est pas le p.l. n° 15 seulement qui va sauver le réel... le réseau de la santé. On a ma collègue, en ce moment, au Trésor, qui négocie des conventions collectives, qui est capable de bonifier les conditions de travail pour nos gens, d'être capable de les attirer, les... revenir. Le projet de loi n° 15 peut amener beaucoup d'améliorations, dont, entre autres, la gestion de proximité.

Alors, ce n'est pas seulement le projet de loi, c'est tout ce qu'on fait à part. Prenons juste l'exemple, par exemple, des bourses qu'on a données à nos infirmières, le programme qu'on a annoncé la semaine dernière, pas plus tard qu'il y a une dizaine de jours, pour les préposés aux bénéficiaires, d'aller chercher une bourse de 12 000 $.

La Présidente : En terminant.

M. Dubé : En fait, ce que j'ai dit depuis... plusieurs fois, il y a plusieurs actions, dont le projet de loi n° 15, Mme la Présidente.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Ah! on le sait, là, le ministre, il s'est bricolé un monde rêvé. Avant aujourd'hui, c'est toute la COVID, pour, après, bien, attendez les miracles du projet de loi n° 15. Mais, en ce moment, là, en ce moment, là, qu'est-ce qui se passe sur le terrain, ce n'est jamais de sa faute. Remarquez, ça lui évite d'avoir à s'excuser chaque semaine, contrairement à certains de ses collègues. Mais, en attendant, là, pour cet été, là, ce qui s'en vient cet été avec les vacances, là, il a dit : On ne peut pas empêcher les gens de prendre des vacances, qu'est-ce qu'il va faire? Où est-ce qu'il va trouver le monde qui quitte par centaines chaque semaine?

La Présidente : M. le ministre.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, là, Mme la Présidente, je vais répondre très gentiment que je me promène sur le terrain, je rencontre des gens. J'étais justement à Victoriaville, il y a quelques dizaines de jours, j'ai rencontré des gens. Les infirmières discutent avec la direction, maintenant, pour améliorer la présentation de ce qui va se faire comme planification pour l'été, pour être capables d'éliminer le TSO. Je suis allé à La Pocatière : même chose, les gens se sont entendus avec les gestionnaires sur place pour éliminer le TSO, ce qu'ils ont réussi à faire depuis un an.

Alors, je pense qu'on est en train de changer notre culture, on est en train d'améliorer notre réseau puis on va trouver des solutions. D'ici quelques années, nous allons avoir un réseau que les Québécois peuvent se vanter d'avoir. Merci beaucoup.

• (14 h 40) •

La Présidente : En question principale, je reconnais la députée de Verdun.

Stratégie du gouvernement en matière de lutte
contre les changements climatiques

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : Merci, Mme la Présidente. Vous savez, c'est rendu une tradition. Une fois par année, le ministre de l'Environnement nous fait la mise à jour du pourcentage d'échec de la CAQ dans la lutte aux changements climatiques.

Comme si ce n'était pas suffisant d'avoir une cible loin en dessous de ce qui est nécessaire selon le consensus scientifique qu'est le GIEC, la CAQ ne sait toujours pas comment on va atteindre la totalité de sa cible. Les mesures annoncées vendredi, juste avant le long congé, permettent seulement d'atteindre 60 % d'une cible insuffisante en 2030. C'est écrit noir sur blanc dans le document, 60 % seulement. Ça veut dire qu'il manque des actions pour 40 %, puis la CAQ ne sait pas où ils vont aller le chercher.

2030, c'est demain matin. Franchement, là, ce n'est pas sérieux.

Est-ce que le ministre est fier de nous montrer à chaque année que son gouvernement se traîne les pieds en matière de lutte aux changements climatiques?

La Présidente : M. le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs.

M. Benoit Charette

M. Charette : Nous étions très fiers, vendredi dernier, de présenter le troisième plan de mise en oeuvre du Plan pour une économie verte. On se rappellera, la première année, on était à 42 % du travail identifié, non seulement le travail identifié, mais le travail financé avec la réglementation adaptée. L'année dernière, on est passés de 42 % à 51 % et, cette année, de 51 % à 60 %. Il ne faut pas être très, très bon en mathématiques pour additionner ces bonds-là et nous croire... et nous permettre de croire qu'on sera à 100 % en 2030. Donc, à partir du moment où on fait des bonds de cette nature-là année après année, on sera effectivement un des rares États, sinon... un des rares États, il faut le dire, dans le monde à atteindre cette cible.

Ce qu'il faut savoir aussi, sur les 60 États en Amérique du Nord, seulement 23 États ont une cible de réduction de gaz à effet de serre. Et, de ces 23 États là, seulement trois États ont un plan complet de réduction, et le Québec fait partie de ces trois États. Et, de ces trois États, quel est l'État où les émissions par habitant sont les plus basses? C'est le Québec.

La Présidente : En terminant.

M. Charette : Donc, on est les leaders sur toute la ligne, en Amérique du Nord, en matière de réduction de gaz à effet de serre, et le plan...

La Présidente : Première complémentaire.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais qu'on arrête de nous comparer aux cancres de l'Amérique du Nord puis qu'on commence à être le pays le plus vert au monde. Parce que ce que le ministre nous dit, là, c'est qu'à chaque année on va nous faire miroiter avec des annonces pour dire qu'on va augmenter un petit peu cette année, et l'année prochaine, et l'année d'après. Puis c'est quoi, c'est en 2030, quand on va avoir un plan au complet?

Je pense que le ministre n'a pas accompli la tâche. La tâche, là, c'est de réduire en 2030, ne pas le faire sur papier. Est-ce que le ministre peut nous avouer que son plan...

La Présidente : M. le ministre.

M. Benoit Charette

M. Charette : Je vais essayer de ne pas rire, mais on parle de 9 milliards de dollars. Comment peut-on prétendre que ce n'est pas quelque chose qui nous mène en position de leaders? Je regardais les budgets des gouvernements précédents, c'est hors catégorie. Jamais un gouvernement du Québec n'a investi autant au niveau de la lutte aux changements climatiques. Et, lorsqu'on regarde au niveau nord-américain par rapport au poids de la population du Québec, c'est aussi au Québec qu'on est des leaders. Et on pourrait y aller secteur par secteur. Au niveau de l'électrification des transports, c'est au Québec qu'on retrouve le plus de véhicules zéro émission. Au niveau des émissions elles-mêmes...

La Présidente : En terminant.

M. Charette : ...je le mentionnais, on a un bilan tout à fait enviable. Donc, je comprends le rôle...

La Présidente : Deuxième complémentaire.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : La CAQ, là, ne fait pas juste rater sa cible, là, le plan incomplet de la CAQ se base aussi sur des mesures du gouvernement fédéral. Pourtant, le ministre nous a dit, à l'étude des crédits, il n'y aura aucune mesure du fédéral qui allait être comptabilisée. Mais c'est écrit noir sur blanc, il y a cinq mesures qui proviennent du fédéral, dans le lot, pour compenser l'inaction de la CAQ.

Est-ce que c'est ça, le nationalisme de la CAQ, attendre que le Canada pétrolier... on dépend du Canada pétrolier pour faire le travail à leur place?

La Présidente : La réponse du ministre...

Des voix : ...

La Présidente : S'il vous plaît!

M. Benoit Charette

M. Charette : Je me souviens, en campagne électorale, quel était le plan de Québec solidaire, un plan en rien crédible, qui reposait sur des réductions de 55 % d'ici 2030 alors qu'on n'a même pas la disponibilité électrique pour y parvenir. Je me souviens que les experts avaient mentionné qu'avec des réductions de cette nature-là il faudrait fermer, essentiellement, deux tiers des industries au Québec et il faudrait couper de moitié les émissions au niveau du transport routier. Ça ne tient pas la route.

Et, oui, la réponse a été positive. Les experts ont reconnu la valeur du plan. Et, si Québec solidaire avait participé en plus grand nombre à la formation sur les changements climatiques, on aurait pu...

La Présidente : En terminant.

M. Charette : ...du côté de Québec solidaire, comprendre la valeur du plan du gouvernement.

Des voix : ...

La Présidente : Bon, pas de commentaire!

Une voix : ...

La Présidente : Je suis debout. M. le député d'Arthabaska, je vous ai très, très bien entendu.

Des voix : ...

La Présidente : Silence! Il n'y a qu'une personne qui a droit de parole ici, en question principale, et c'est M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne. La parole est à vous.

Régularisation du statut de certains immigrants

M. Guillaume Cliche-Rivard

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Laissez-moi d'abord souligner la présence de jeunes à statut précaire dans les tribunes. Ces ados vivent ici depuis plusieurs années. Ils ont des implications ici, et leurs amis sont ici, et tout ce qu'ils connaissent est ici. Ils vont à l'école en français, ils rêvent même en français. Ils ont fait la route ce matin parce que leur statut d'immigration barre leur avenir au Québec. Chaque jour, ils vivent dans la peur de l'expulsion. À la fin de leur secondaire, ils ne pourront pas continuer au cégep comme leurs amis, ils ne pourront pas étudier en médecine ou en génie, comme plusieurs le souhaitent. Ils devront rapidement prendre le chemin du marché du travail.

Mettons-nous à leur place, Mme la Présidente. En 1980, le gouvernement Lévesque a obtenu du fédéral un programme de régularisation du statut des réfugiés haïtiens. Aujourd'hui, est-ce que la ministre de l'Immigration va se battre pour garder ces jeunes chez eux, ici, au Québec?

La Présidente : La réponse de la ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration. La parole est à vous.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Merci, Mme la Présidente. Alors, nous sommes sensibles, d'une part, à la situation que peuvent vivre ces gens qu'évoque le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, mais, en même temps, il n'est pas clair de qui, exactement, on parle. J'ai écouté un peu les échanges, là, qu'a eus le député avec les journalistes. Je pense que je n'étais pas la seule à ne pas nécessairement saisir de qui... à qui on faisait référence dans sa demande de régularisation. Est-ce qu'on parle de personnes sans papiers? Est-ce qu'on parle de demandeurs d'asile qui ont été déboutés? Est-ce qu'on parle de gens pour qui les autorisations d'être sur le territoire canadien arrivent bientôt à échéance? C'était... Ce n'était pas clair pour moi. Je comprends que Québec solidaire veuille être inclusif, mais, en même temps, à force d'être inclusif, on ne sait plus tout à fait de qui on parle. Alors, lorsqu'il s'agit de régularisation, eh bien, encore faudrait-il préciser quels sont les profils des gens dont il est question.

Le député, en fait, m'a interrogée, pendant l'étude des crédits, sur le processus de régularisation qui était envisagé...

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : ...par le fédéral, et j'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Guillaume Cliche-Rivard

M. Cliche-Rivard : Mme la Présidente, c'est simple, de qui on parle, ils sont là. Donc, je pense que tout le monde sait très bien de qui on parle, tout le monde sait très bien quelles personnes on vise. On parle de personnes avec statut précaire qui font face à l'expulsion. Voilà la réponse. Je pense que c'est très clair, tout le monde l'a très bien compris.

Shivani est dans les tribunes. Elle a 20 ans, elle réside au Québec avec sa famille depuis 2018. Elle aimerait étudier en comptabilité, elle adore les maths, mais cela lui est impossible. Entre-temps, elle attend. Elle vient d'être nommée assistante-gérante chez Couche-Tard, mais elle espère rapidement pouvoir travailler ici.

La Présidente : Mme la ministre.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Oui, Mme la Présidente. Alors, des gens à statut précaire, est-ce une nouvelle catégorie que le député de Saint-Henri—Sainte-Anne veut créer dans nos programmes d'immigration? Parce qu'en fait ce n'est pas un qualificatif qui existe sur le plan formel.

Donc, je reviens à la discussion qu'on a eue à l'étude des crédits. J'ai entendu, tout à l'heure, que le chef de la deuxième opposition, en fait, avait indiqué que j'avais montré de l'ouverture face à la création d'un programme québécois de régularisation des gens à statut précaire. Or, je l'invite à réviser, en fait, les échanges qu'on a eus à cette occasion-là puisque je me prononçais sur la réflexion qui est en cours au fédéral pour régulariser la situation...

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : ...des sans-papiers.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Guillaume Cliche-Rivard

M. Cliche-Rivard : Alors, pour mieux savoir qui ils sont, j'invite la ministre à venir les rencontrer. Ils sont ici. Elle pourrait échanger et voir directement qu'ils veulent vivre ici en français. Leur rêve et leur avenir est ici, en français.

Quand même, c'est hallucinant, il faut attendre la position du gouvernement fédéral avant de savoir ce que le ministère de l'Immigration du Québec en pense. À Québec solidaire, on veut rapatrier l'ensemble des pouvoirs d'immigration. Le gouvernement du Québec doit avoir sa position en matière d'immigration.

Est-ce que le Québec va, oui ou non, demander un programme de régularisation?

• (14 h 50) •

La Présidente : Mme la ministre.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Oui, Mme la Présidente. Alors, bien, il y a effectivement une réflexion qui est en cours au fédéral, et on souhaite avoir davantage d'information, justement, sur ce qu'entend faire le fédéral en matière de régularisation des sans-papiers, puisqu'il est question, ici, de sans-papiers, lorsqu'on parle de la discussion qui est... de la réflexion qui a cours au fédéral et qui fait l'objet du mandat du ministre Fraser. Donc, on veut avoir davantage de précisions, de détails quant aux orientations qui seront proposées par le fédéral avant de prendre position.

Et, pour ce qui est de rencontrer des gens, j'ai déjà rencontré quelques personnes qui sont sans statut, dans le cadre de rencontres que j'ai menées antérieurement, et je continue, en fait, à surveiller l'évolution des discussions avec le fédéral pour définir une position du gouvernement du Québec.

La Présidente : En question principale, je reconnais la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Décontamination du site des lagunes de Mercier

Mme Désirée McGraw

Mme McGraw : Merci, Mme la Présidente. La semaine dernière, je suis allée sur un site qui est reconnu comme étant la pire contamination d'eau souterraine en Amérique du Nord, la pire. Mme la Présidente, vous savez où il se trouve? Ici, au Québec, à Mercier, où des déversements de produits toxiques d'une quantité impressionnante ont été autorisés. Les sols et les eaux de la région environnante s'en retrouvent donc contaminés.

La mairesse m'a fait part des nombreux enjeux découlant de la contamination, incluant l'approvisionnement en eau. Elle m'a confirmé qu'on ne peut même pas chercher de nouvelles sources d'eau potable sur son territoire, tout est contaminé.

Au nom des citoyens de Mercier, j'ai une question simple et directe pour le ministre : Que compte faire son gouvernement pour décontaminer le territoire et assurer un approvisionnement autonome en eau potable?

La Présidente : La réponse du ministre de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques.

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Merci à la collègue pour la question. C'est un enjeu environnemental important, qui n'est pas récent, par contre, ça date du début du siècle dernier. C'est plusieurs dizaines d'années de contamination industrielle, avec des critères, à l'époque, on se doute bien, qui étaient nettement moins établis qu'aujourd'hui.

Donc, on parle d'un passif environnemental qui est important, on en est bien conscients, au niveau du ministère, mais la situation n'est pas nouvelle. Je le mentionnais, ça fait quelques décennies, notamment des années où le Parti libéral était au pouvoir. Si la solution avait été simple, je suis convaincu que le gouvernement, à l'époque, y aurait accordé une attention tout aussi importante, mais la réponse est : Ce n'est pas simple. C'est un passif environnemental, oui, avec une infiltration dans les nappes d'eau souterraines, ce qui fait en sorte que, dans la région, il y a plusieurs municipalités qui doivent composer avec cette réalité-là. Donc, oui, il y a des actions qui sont posées par le ministère de l'Environnement pour éviter que la contamination s'étende encore davantage, mais il n'y a pas de solution simple. C'est la raison pour laquelle les villes avoisinantes collaborent.

La Présidente : En terminant.

M. Charette : Le ministère de l'Environnement collabore pour que ces populations-là puissent compter sur de l'eau potable de qualité.

La Présidente : En première complémentaire, je reconnais la députée de Mille-Îles.

Mme Virginie Dufour

Mme Dufour : ...avait une solution, mais la CAQ n'a rien fait pendant quatre ans. Le gouvernement libéral avait signé une entente qui prévoyait de prendre en charge le site contaminé et construire une nouvelle usine de rétention des contaminants. L'usine aurait même déjà dû être en construction, aujourd'hui, mais, depuis l'élection de la CAQ, bien, c'est silence radio, depuis cinq ans. Les municipalités ont même été obligées d'écrire, l'an dernier, au premier ministre pour faire un suivi, mais c'est toujours silence radio, malgré qu'il y a deux députés caquistes dans la région.

Qu'est-ce que le gouvernement attend pour répondre aux citoyens...

La Présidente : M. le ministre de... Mme la ministre des Affaires municipales? Mme la ministre des Affaires municipales.

Des voix : ...

La Présidente : Décidez-vous. Un ou l'autre.

Des voix : ...

La Présidente : M. le ministre de l'Environnement.

M. Benoit Charette

M. Charette : Démonstration ultime qu'on est plusieurs à travailler le dossier, Mme la Présidente. Mais, je le mentionnais, ce n'est pas simple. L'important, c'est que les populations concernées puissent être approvisionnées en eau potable, et c'est le cas présentement, c'est le cas présentement.

Pour ce qui est de la décontamination du site, c'est un passif qui va prendre vraisemblablement encore plusieurs années. Je le mentionnais, et c'était sans partisanerie, si la solution avait été simple, étant donné que le problème persiste depuis plusieurs décennies, les libéraux, ils auraient sans doute trouvé sa solution. Donc, une collaboration avec les Affaires municipales pour s'assurer de l'approvisionnement en eau, et le ministère de l'Environnement s'occupe du passif dans l'éventualité...

La Présidente : En terminant.

M. Charette : ...d'une décontamination des terrains, si c'est possible.

La Présidente : Deuxième complémentaire au niveau de la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Désirée McGraw

Mme McGraw : Ce n'est pas normal qu'au Québec des villes vivent avec une insécurité en eau. C'est pourtant la réalité de Sainte-Martine, qui se trouve littéralement au bout du tuyau. La ville subit fréquemment des coupures d'eau mettant à risque la santé et la sécurité publique. La mairesse craint d'ailleurs qu'avec l'approche de l'été et la crise climatique les risques d'incendie vont augmenter.

Mme la Présidente, que va-t-il se passer si les citoyens manquent d'eau pendant des incendies?

La Présidente : La réponse du ministre de l'Environnement.

M. Benoit Charette

M. Charette : ...région de la Montérégie vit une problématique d'eau. On en perd souvent cette référence, mais ce n'est pas uniquement en lien avec les lagunes de Mercier. Il y a une problématique d'approvisionnement en eau potable dans la région de la Montérégie. On travaille actuellement à un projet de loi, ensemble, qui va nous aider à accorder toute la valeur nécessaire à cette précieuse ressource. Parce qu'on prend souvent pour acquise sa disponibilité. Or, ce n'est pas le cas. Mais, pour les citoyens de la Montérégie, nous sommes présents. Les municipalités concernées par la problématique des lagunes de Mercier sont régulièrement rencontrées par les gens du ministère de l'Environnement mais également des Affaires municipales.

La Présidente : En terminant.

M. Charette : Donc, elles sont accompagnées, ces municipalités. Les citoyens ne seront pas laissés à eux-mêmes.

La Présidente : En question principale, je reconnais la députée de Mont-Royal—Outremont.

Conflit de travail au cimetière Notre-Dame-des-Neiges

Mme Michelle Setlakwe

Mme Setlakwe : Le conflit de travail au cimetière Notre-Dame-des-Neiges a des conséquences importantes. Des centaines de corps demeurent dans des congélateurs, ne pouvant être inhumés. Des milliers de familles ne peuvent aller se recueillir sur les tombes de leurs proches. Cet immense lieu historique, déjà affecté par un manque d'entretien, s'apparente maintenant à une zone dévastée, depuis le récent verglas.

Je sais qu'on n'a pas affaire à un service jugé essentiel et je connais fort bien le caractère fondamental du droit de grève, mais déposons nos chapeaux de juristes et de législateurs devant ce conflit qui touche à la dignité humaine. Je porte en cette Chambre la voix et la détresse des familles endeuillées. Elles sont véritablement tourmentées par ce conflit qui s'étire.

Des conciliateurs ont été nommés, et le ministre du Travail encourage les parties à en arriver à un compromis. C'est ce qu'on nous répète depuis février. Ma question est simple : À quel moment est-ce que la patience du ministre, dans ce dossier, aura-t-elle atteint sa limite? Parce que les familles, Mme la Présidente, n'en peuvent plus.

La Présidente : La réponse de la ministre de l'Emploi.

Mme Kateri Champagne Jourdain

Mme Champagne Jourdain : Mme la Présidente, je tiens à vous dire qu'on est très sensibles à la situation que vivent les familles endeuillées, et sachez que nous suivons de très près ce dossier-là. On a nommé deux conciliateurs-médiateurs qui sont impliqués de manière intensive pour aider les parties à régler les conflits dans les meilleurs délais. Nous allons aussi nous assurer que le processus de recherche de solution se poursuive. Il y a plusieurs rencontres de conciliation, d'ailleurs, qui ont eu lieu récemment, et on est disposés à prendre des mesures supplémentaires aussi si les parties n'arrivent pas à trouver une solution rapidement.

Alors, afin de respecter le processus de conciliation en cours, vous comprendrez aussi qu'on ne commentera pas davantage la situation, mais on est de tout coeur avec les familles et surtout en mode solution. Merci.

La Présidente : Voilà. Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis. Pour ce faire, je cède la place au troisième vice-président. Je vous souhaite une belle fin de journée. Merci pour votre collaboration.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant le ministre de la Langue française.

M. Roberge : M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Chers collègues, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je demanderais votre attention. Il y a une personne qui a la parole, et c'est M. le ministre de la Langue française. Merci.

M. Roberge : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que le projet de loi C-13 introduit pour la première fois des références à la charte québécoise de la langue française dans la loi canadienne sur les langues officielles;

«Qu'elle souligne qu'avec l'adoption de ce projet de loi, des dispositions importantes de la charte québécoise de la langue française se retrouveront à l'intérieur de la loi canadienne;

«Qu'elle se réjouisse que ce projet de loi représente une avancée significative dans plusieurs domaines pour la francophonie, notamment en contribuant à la francisation des entreprises à charte fédérale dans les communautés francophones situées à l'extérieur du Québec;

«Que l'Assemblée nationale demande au Sénat canadien d'adopter le projet de loi dans sa forme actuelle et rapidement.»

• (15 heures) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, M. le Président, il y a consentement, sans débat.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il y a consentement, sans débat. Oui?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Ah! il n'y a pas de consentement. Alors, je reconnais maintenant un membre du groupe formant l'opposition officielle, et c'est M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, le chef du troisième groupe d'opposition et la députée de Vaudreuil :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte que le ministre de la Justice a nommé un ami personnel à la fonction de juge de la Cour du Québec;

«Qu'elle reconnaisse que l'indépendance individuelle et institutionnelle de la magistrature est un principe fondamental d'un État de droit;

«Qu'elle reconnaisse l'importance que les nominations à la magistrature soient faites de façon non partisane et exempte de favoritisme ou de lien d'amitié;

«Qu'enfin, elle souligne l'importance qu'aucun doute ne subsiste dans la société quant à l'impartialité et la neutralité du processus judiciaire au Québec.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : Il n'y a pas de consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il n'y a pas de consentement. Alors, pour la prochaine intervention, je reconnais maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition, et c'est M. le député de Laurier-Dorion.

Demander au gouvernement de poursuivre ses démarches
afin d'améliorer les conditions et le respect des droits
des prestataires d'aide sociale

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante conjointement avec la ministre responsable de la Solidarité sociale et de l'Action communautaire, le député de Jacques-Cartier, le député des Îles-de-la-Madeleine et la députée de Vaudreuil :

«Que l'Assemblée nationale rappelle que, dans certains programmes d'aide sociale, les prestations de deux personnes qui cohabitent sont regroupées dans un seul chèque pour couvrir les besoins de deux personnes;

«Qu'elle prenne acte que cette façon de faire porte atteinte à l'indépendance financière et à la vie privée des personnes et augmente indûment le risque d'endettement;

«Qu'elle demande au gouvernement de poursuivre ses démarches de consultation afin que le prochain plan de lutte à la pauvreté tienne compte du droit des personnes assistées sociales de cohabiter, de s'entraider et de s'aimer sans que cela affecte le montant de leurs prestations;

«Qu'elle demande au gouvernement d'écouter les préoccupations des prestataires d'aide sociale par des consultations afin d'améliorer leurs conditions dans le prochain plan de lutte à la pauvreté.» Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, M. le Président, il y a consentement, sans débat.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Consentement, sans débat. M. le leader.

M. Leduc : Je vous demanderais un vote par appel nominal, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Un vote par appel nominal a été demandé. Qu'on appelle les députés.

Mise aux voix

Alors, que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Nadeau-Dubois (Gouin), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), M. Marissal (Rosemont), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Ghazal (Mercier), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Cliche-Rivard (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Bouazzi (Maurice-Richard), Mme Zaga Mendez (Verdun).

M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville), Mme Fréchette (Sanguinet), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Girard (Groulx), M. Bonnardel (Granby), Mme LeBel (Champlain), M. Roberge (Chambly), Mme D'Amours (Mirabel), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Proulx (Berthier), M. Charette (Deux-Montagnes), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Lecours (Les Plaines), Mme Biron (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Roy (Verchères), M. Julien (Charlesbourg), M. Drainville (Lévis), M. Carmant (Taillon), M. Caire (La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Bélanger (Prévost), M. Lamontagne (Johnson), Mme Hébert (Saint-François), M. Émond (Richelieu), Mme Blanchette Vézina (Rimouski), M. Lacombe (Papineau), Mme Champagne Jourdain (Duplessis), Mme Laforest (Chicoutimi), M. Lévesque (Chapleau), Mme Charest (Brome-Missisquoi), Mme Duranceau (Bertrand), Mme Déry (Repentigny), M. Lafrenière (Vachon), M. Skeete (Sainte-Rose), M. Simard (Montmorency), M. Allaire (Maskinongé), Mme Grondin (Argenteuil), M. Provençal (Beauce-Nord), Mme Lachance (Bellechasse), M. Chassin (Saint-Jérôme), M. Jacques (Mégantic), Mme Boutin (Jean-Talon), M. Bélanger (Orford), Mme Jeannotte (Labelle), M. Bachand (Richmond), M. Caron (Portneuf), M. Sainte-Croix (Gaspé), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel), M. Bussière (Gatineau), M. Lamothe (Ungava), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Lemay (Masson), Mme Abou-Khalil (Fabre), M. Bernard (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Dorismond (Marie-Victorin), M. Montigny (René-Lévesque), Mme Mallette (Huntingdon), Mme Dionne (Rivière-du-Loup—Témiscouata), Mme Blouin (Bonaventure), Mme Haytayan (Laval-des-Rapides), M. Tremblay (Dubuc), Mme Bogemans (Iberville), M. Thouin (Rousseau), M. Girard (Lac-Saint-Jean), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Tremblay (Hull), Mme Schmaltz (Vimont), Mme Guillemette (Roberval), Mme Poulet (Laporte), M. Gagnon (Jonquière), M. St-Louis (Joliette), Mme Gendron (Châteauguay), M. Rivest (Côte-du-Sud).

M. Derraji (Nelligan), Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont), M. Fortin (Pontiac), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Beauchemin (Marguerite-Bourgeoys), Mme Dufour (Mille-Îles), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Garceau (Robert-Baldwin), Mme McGraw (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Prass (D'Arcy-McGee), Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey), Mme Caron (La Pinière), M. Morin (Acadie), Mme Cadet (Bourassa-Sauvé), M. Ciccone (Marquette).

M. St-Pierre Plamondon (Camille-Laurin), M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

Mme Nichols (Vaudreuil).

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? Mme la secrétaire générale.

La Secrétaire : Pour :         108

                      Contre :              0

                      Abstentions :     0

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est donc adoptée. M. le leader.

M. Leduc : M. le Président, est-ce qu'on pourrait envoyer copie de cette motion au Front commun des personnes assistées sociales du Québec et au collectif Québec sans pauvreté? Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Ce sera fait. Alors, pour la prochaine motion, j'accueille maintenant le chef du troisième groupe d'opposition.

Rappeler le rôle des députés de l'Assemblée nationale

M. St-Pierre Plamondon : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le leader parlementaire de l'opposition officielle, le député de Jean-Lesage et la députée de Vaudreuil, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale rappelle que par leurs fonctions de législateurs, contrôleurs de l'action gouvernementale et d'intermédiaires entre les citoyens et l'administration publique, ses membres occupent un rôle fondamental dans la vie démocratique du Québec;

«Qu'elle réitère que le plein exercice de ces fonctions est tributaire d'une certaine liberté de parole et indépendance d'esprit;

«Qu'elle rappelle que le rôle de député comprend notamment la représentation et la défense des intérêts de la circonscription et de la région qu'il représente;

«Qu'elle affirme l'importance de valoriser les débats, la réflexion et l'indépendance de ses membres dans l'exercice de leurs fonctions parlementaires et démocratiques, et contribuant ainsi à une meilleure confiance envers nos institutions démocratiques et parlementaires.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, M. le Président, il y a consentement, sans débat.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Consentement, sans débat. Cette motion est-elle adoptée? M. le leader.

M. Leduc : Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Un vote par appel nominal a été demandé. Qu'on appelle les députés.

Mise aux voix

Alors, que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. St-Pierre Plamondon (Camille-Laurin), M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville), Mme Fréchette (Sanguinet), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Girard (Groulx), M. Bonnardel (Granby), Mme LeBel (Champlain), M. Roberge (Chambly), Mme D'Amours (Mirabel), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Proulx (Berthier), M. Charette (Deux-Montagnes), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Lecours (Les Plaines), Mme Biron (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Roy (Verchères), M. Julien (Charlesbourg), M. Drainville (Lévis), M. Carmant (Taillon), M. Caire (La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Bélanger (Prévost), M. Lamontagne (Johnson), Mme Hébert (Saint-François), M. Émond (Richelieu), Mme Blanchette Vézina (Rimouski), M. Lacombe (Papineau), Mme Champagne Jourdain (Duplessis), Mme Laforest (Chicoutimi), M. Lévesque (Chapleau), Mme Charest (Brome-Missisquoi), Mme Déry (Repentigny), M. Lafrenière (Vachon), M. Skeete (Sainte-Rose), M. Simard (Montmorency), M. Allaire (Maskinongé), Mme Grondin (Argenteuil), M. Provençal (Beauce-Nord), Mme Lachance (Bellechasse), M. Chassin (Saint-Jérôme), M. Jacques (Mégantic), Mme Boutin (Jean-Talon), M. Bélanger (Orford), Mme Jeannotte (Labelle), M. Bachand (Richmond), M. Caron (Portneuf), M. Sainte-Croix (Gaspé), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel), M. Bussière (Gatineau), M. Lamothe (Ungava), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Lemay (Masson), Mme Abou-Khalil (Fabre), M. Bernard (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Dorismond (Marie-Victorin), M. Montigny (René-Lévesque), Mme Mallette (Huntingdon), Mme Dionne (Rivière-du-Loup—Témiscouata), Mme Blouin (Bonaventure), Mme Haytayan (Laval-des-Rapides), M. Tremblay (Dubuc), Mme Bogemans (Iberville), M. Thouin (Rousseau), M. Girard (Lac-Saint-Jean), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Tremblay (Hull), Mme Schmaltz (Vimont), Mme Guillemette (Roberval), Mme Poulet (Laporte), M. Gagnon (Jonquière), M. St-Louis (Joliette), Mme Gendron (Châteauguay), M. Rivest (Côte-du-Sud).

M. Derraji (Nelligan), Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont), M. Fortin (Pontiac), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Beauchemin (Marguerite-Bourgeoys), Mme Dufour (Mille-Îles), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Garceau (Robert-Baldwin), Mme McGraw (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Prass (D'Arcy-McGee), Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey), Mme Caron (La Pinière), M. Morin (Acadie), Mme Cadet (Bourassa-Sauvé), M. Ciccone (Marquette).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), M. Marissal (Rosemont), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Ghazal (Mercier), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Cliche-Rivard (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Bouazzi (Maurice-Richard), Mme Zaga Mendez (Verdun).

Mme Nichols (Vaudreuil).

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Celles et ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? Mme la secrétaire générale.

La Secrétaire : Pour :         107

                      Contre :              0

                      Abstentions :     0

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est donc adoptée.

Une motion sans préavis ayant déjà été présentée par le groupe parlementaire formant le gouvernement, je demande s'il y a consentement pour permettre la lecture d'une autre motion sans préavis. Consentement?

Des voix : ...

• (15 h 10) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Je comprends qu'il n'y a... Est-ce qu'il y a consentement ou il n'y a pas consentement?

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : M. le leader.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, conformément à notre tradition, ça a toujours été acheminé, ça a été négocié. Le projet de loi n° 23, on s'est entendus pour des consultations particulières. Même chose pour le projet de loi n° 25, on s'est entendus pour des consultations particulières. Le leader adjoint va faire la lecture, comme à l'habitude, pour tenir les consultations.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, je reprends. Donc, une motion sans préavis ayant déjà été présentée par le groupe parlementaire formant le gouvernement, je demande s'il y a consentement pour permettre la lecture d'une autre motion sans préavis? Consentement. M. le leader adjoint.

Entériner le mandat de procéder à des consultations
particulières sur le projet de loi
n° 23

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Donc, je demande le consentement pour déroger à l'article 84.1 de notre règlement afin de déposer une motion rétroactive de consultations particulières donnant suite à une entente entre les leaders et la députée indépendante de Vaudreuil.

Je fais motion, conformément à l'article 146 du règlement de l'Assemblée nationale, afin :

«Que l'Assemblée nationale entérine le mandat donné à la Commission de la culture et de l'éducation, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 23, [la] Loi modifiant principalement la Loi sur l'instruction publique et édictant la Loi sur l'Institut national d'excellence en éducation, de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques, le jeudi 1er juin 2023 après les avis touchant les travaux des commissions vers 11 h 15 à 13 h 05, de 14 h 45 à 18 heures et de 19 h 30 à 21 h 55, le vendredi 2 juin 2023, après les avis touchant les travaux des commissions vers 11 h 15 à 12 h 50, le mardi 6 juin 2023, de 10 heures à 11 h 35, [après] les avis touchant les travaux des commissions vers 15 h 15 à 17 h 40 et de 19 h 30 à 21 h 05 et le mercredi 7 juin 2023 [après] les avis touchant les travaux des commissions vers 11 h 15 à 12 h 50 et de 15 heures à 18 h 15;

«Qu'à cette fin, la commission entende les personnes et organismes suivants : Dr Égide Royer, psychologue et spécialiste de la réussite scolaire, M. Martin Maltais, professeur UQAR[...], Association montréalaise des directions d'établissement scolaire, Association québécoise du personnel de direction des écoles, Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement, Fédération des centres de services scolaires du Québec, Fédération des comités de parents du Québec, Regroupement des comités de parents autonomes du Québec, Confédération des syndicats nationaux, Fédération autonome de l'enseignement, Fédération des syndicats de l'enseignement, M. Normand Baillargeon, Association des directions générales scolaires du Québec, Steve Bissonnette et Mario Richard, TELUQ, Julien Prud'homme, professeur UQTR, Conseil supérieur de l'éducation, Nancy Goyette, professeure UQTR, Centrale des syndicats du Québec, Association des commissions scolaires anglophones du Québec, Association des doyens, doyennes, directeurs, directrices pour l'étude et la recherche en éducation au Québec, L'école ensemble, Coalition interjeunes, Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec, Regroupement des organismes communautaires québécois de lutte au décrochage;

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la manière suivante : 6 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 3 minutes 36 secondes pour l'opposition officielle, 1 minute 12 secondes au deuxième groupe d'opposition, 1 minute 12 secondes pour le député indépendant;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi : 17 minutes 30 [...] pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes 30 secondes pour l'opposition officielle, 3 minutes 30 secondes [...] deuxième groupe d'opposition, 3 minutes 30 secondes [...] député indépendant;

«Qu'une suspension de 5 minutes soit prévue entre les échanges avec chaque personne et organisme;

«Que le ministre de l'Éducation soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Des voix : Consentement.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Allez-y, M. le leader.

Entériner le mandat de procéder à des consultations
particulières sur le projet de loi
n° 25

M. Lévesque (Chapleau) : ...je demande le consentement pour déroger à l'article 84.1 de notre règlement afin de déposer une motion rétroactive de consultations particulières donnant suite à une entente entre les leaders et la députée indépendante de Vaudreuil.

Je fais motion, conformément à l'article 146 du règlement de l'Assemblée nationale, afin :

«Que l'Assemblée nationale entérine le mandat donné à la Commission de l'économie et du travail, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 25, [la] Loi visant à lutter contre l'hébergement touristique illégal, [...]le mardi 23 mai 2023 de 9 h 45 à 12 h 25 et après les avis touchant les travaux des commissions vers 15 h 15 jusqu'à 19 h 20, et le mercredi 24 mai 2023 après les avis touchant les commissions vers 11 h 15 jusqu'à 12 h 50 et de 15 heures à 17 h 25;

«Qu'à cette fin, la commission entende les personnes et organismes suivants : Airbnb, Union des municipalités du Québec, Fédération québécoise des municipalités, Corporation de l'industrie touristique du Québec, association [hôtelière] du Québec, Association hôtelière de la région de Québec, Revenu Québec, David Wachsmuth, professeur de l'Université McGill, Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, Front d'action populaire en réaménagement urbain, Alliance de l'industrie touristique du Québec, ville de Montréal, Martin Blanchard;

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la manière suivante : 6 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 4 minutes 30 secondes pour l'opposition officielle [...] une minute trente au deuxième groupe d'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi : 17 minutes 30 [...] pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 13 minutes 8 secondes pour l'opposition officielle et 4 minutes 23 secondes pour le deuxième groupe d'opposition;

«Qu'une suspension de 5 minutes soit prévue entre les échanges avec chaque personne et organisme;

«Que la ministre du Tourisme soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Des voix : Consentement.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté. M. le leader adjoint.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Nous en sommes maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. Et j'avise donc cette Assemblée que la Commission de la santé et des services sociaux poursuivra les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 15, la Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace, aujourd'hui, après les avis touchant les travaux des commissions jusqu'à 19 h 20, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 14, la Loi modifiant diverses dispositions relatives à la sécurité publique et édictant la Loi visant à aider à retrouver des personnes disparues, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 16, la Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et d'autres dispositions, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à la salle Pauline-Marois;

La Commission de l'économie et du travail poursuivra les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 25, la Loi visant à lutter contre l'hébergement touristique illégal, aujourd'hui, après les avis touchant les travaux des commissions jusqu'à 17 h 40, à la salle Marie-Claire-Kirkland.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 143 du règlement concernant l'horaire des travaux des commissions?

Des voix : Consentement.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, avis de la présidence. Pour ma part, je vous avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance de travail le mercredi 24 mai 2023, de 7 h 30 à 9 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de poursuivre l'étude des observations, conclusions ou recommandations de la commission à la suite des consultations particulières et auditions publiques sur le mandat d'initiative portant sur les révélations de violence lors des initiations dans le milieu du hockey junior et la possible situation dans d'autres sports.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le chef du troisième groupe d'opposition. Cette motion se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale affirme que le plein respect des lois adoptées démocratiquement par le Parlement du Québec, plus particulièrement de la Loi électorale du Québec et de la Loi sur la consultation populaire, est une condition essentielle au maintien de la santé démocratique de la nation québécoise et du respect de sa volonté exprimée démocratiquement;

«Qu'elle rappelle que les conclusions du rapport du commissaire Bernard Grenier, publié en mai 2007, indiquent qu'une somme de 539 460 $ a été engagée illégalement par Option Canada et le Conseil pour l'unité canadienne pendant la période référendaire de 1995;

«Qu'elle rappelle que la commission Grenier n'avait pas obtenu le mandat de se pencher sur d'autres dépenses frauduleuses potentielles, notamment l'organisation du "love-in" et le placement publicitaire financé par Patrimoine Canada;

«Qu'elle affirme que près de 30 années se sont écoulées depuis la campagne référendaire de 1995 et que le droit à la liberté d'expression, le droit à la liberté de la presse, le droit à l'information et le principe de la publicité des débats commandent la divulgation publique des documents colligés dans le cadre des travaux du commissaire Grenier, et ce au bénéfice du droit des générations futures à connaître l'histoire du Québec;

«Par conséquent, qu'elle ordonne au gouvernement du Québec de présenter dans les plus brefs délais un projet de loi pour permettre la déclassification de l'ensemble des documents de la commission Grenier et d'entreprendre toutes les procédures législatives nécessaires à cette fin.»

La période... Attendez. Je pense que, M. le leader, vous souhaitez intervenir.

M. Derraji : En fait, c'est... Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Donc, si vous me permettez... C'est bon?

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Oui, bien sûr.

M. Derraji : Alors, M. le Président, ma question s'adresse au leader du gouvernement concernant le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires afin notamment de donner suite à l'Entente entre la juge en chef de la Cour du Québec et le ministre de la Justice.

Le projet de loi vise deux choses. Dans un premier temps, il vise donner suite à une entente visant à faire passer le nombre de juges de la Cour du Québec de 319 à 333, chose qui a été déjà discutée. Et le leader du gouvernement nous a demandé si on était prêts pour adopter le projet de loi en un, deux, trois.

Par la suite, dans un deuxième temps, le même projet de loi... et c'est là où nous avons des interrogations, M. le Président, c'est que le ministre souhaite changer directement le mode de financement du Conseil de la magistrature, et ce, sans avoir consulté personne. D'ailleurs, le Conseil de la magistrature a d'ailleurs soumis un mémoire à la Commission des institutions en soulignant que «sans le bénéfice de consultations et dans le court laps de temps imparti afin de formuler des observations à cette commission, il est prématuré, voire contre-productif, avec respect, de modifier la structure de financement du Conseil de la magistrature». Ça, ce sont les propos du Conseil de la magistrature.

• (15 h 20) •

En fin de semaine, nous apprenions que la bâtonnière du Québec a transmis, vendredi, une lettre à M. le ministre de la Justice lui faisant part que son projet de loi «risque de nuire à l'indépendance de la justice». Ce sont les propos de la bâtonnière du Québec. Selon le Barreau du Québec. Le changement proposé par le ministre de la Justice «comporte des risques d'atteinte à l'indépendance du Conseil de la magistrature. Cela pourrait mener à des contestations judiciaires qui fragiliseraient cette confiance nécessaire envers notre système démocratique.»

Alors, M. le Président, nous devons procéder à de courtes consultations. Nous soumettrons au leader du gouvernement quelques propositions de groupes que nous souhaitons entendre en consultation, notamment le Barreau du Québec, l'Association du Barreau canadien, division Québec, et des experts universitaires. Et je tiens à préciser au leader du gouvernement que nous sommes à l'aise à procéder au débat sur le principe avant les consultations. Cependant, nous insistons à la tenue de ces consultations avant le début de l'étude détaillée.

La question est très simple, M. le Président : Est-ce que le leader du gouvernement peut confirmer qu'il prendra en considération nos demandes des groupes pour la tenue de ces courtes consultations particulières et aussi s'il a vu les deux rapports, bien, le rapport de la Commission des... désolé, le rapport de... le mémoire du Conseil de la magistrature ainsi que la lettre qu'il a reçue de la bâtonnière du Québec?

Nous pouvons nous entendre, bien sûr, très, très rapidement, et les groupes pourraient être convoqués dès aujourd'hui. Et on peut procéder rapidement, comme il voulait, M. le ministre, dès le départ. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci. M. le leader.

M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, on aura des discussions avec les collègues leaders parlementaires pour ce qui est souhaité par les collègues.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Parfait. Donc, je comprends que... M. le leader, vous souhaitez intervenir aussi? Allez-y.

M. Leduc : J'ai un autre appel, un autre renseignement sur les travaux, M. le Président.

Tout à l'heure, au point de presse, avant que nous entrions dans cette Chambre, le premier ministre répondait à une question sur le projet de loi n° 24 qui est présentement à l'étude. On va voir s'il l'est encore tantôt, à la fin de la présente rubrique. Questionné sur sa capacité de procéder dans l'ordre normal des choses ou de vouloir procéder avec un bâillon, il n'a pas fermé la porte.

Alors, ma question, peut-être, pour le leader, pour la bonne suite des travaux, pour mon estimé collègue : Est-ce qu'il peut nous confirmer aujourd'hui qu'il n'y aura pas de bâillon sur le projet de loi n° 24 que nous sommes en train d'étudier au salon bleu?

Le Vice-Président (M. Benjamin) : M. le leader.

M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, je suis convaincu que nous allons pouvoir adopter le projet de loi n° 24 par la voie régulière, malgré l'ensemble des techniques utilisées par le collègue de Québec solidaire, qu'il nous a annoncées, donc, c'est-à-dire tous les types de motion et l'utilisation de tous les moyens parlementaires pour tenter de bloquer, hein? Il va utiliser tout son temps parlementaire, c'est ce que son chef nous a dit, pour faire en sorte de bloquer l'adoption du projet de loi. Alors, il revient à lui d'utiliser tous les moyens pour faire en sorte de faire son travail de parlementaire. S'il estime opportun et approprié d'agir en ce sens-là, ça lui appartient. Je n'ai pas rien d'autre à ajouter.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci. M. le leader, allez-y.

M. Leduc : En terminant, et rapidement, M. le Président, la raison pour laquelle on met beaucoup d'efforts sur le projet de loi n° 24, c'est qu'on pense qu'il serait plus utile de le retirer, pour le débat démocratique, en ce moment, au Québec, pour éviter qu'on ajoute une couche de cynisme.

Je ne ferai pas un long discours là-dessus, M. le Président, je veux juste notifier qu'il y a quand même plusieurs projets de loi que les oppositions ont déposés, en tout cas de la part de mon caucus, qui mériteraient, je trouve, plus d'attention que celle qu'on donne au projet de loi n° 24. Je vais juste vous les lire rapidement, puis, après ça, je m'arrêterai ici, M. le Président : le projet de loi n° 198, Loi modifiant le Code civil afin d'assurer une plus grande protection aux locataires aînés contre les reprises de logement, déposé par la députée de Sherbrooke; le projet de loi n° 390, Loi favorisant la prise en compte de l'égalité des sexes et de la diversité dans une perspective intersectionnelle dans le processus budgétaire, déposé par la députée de Mercier; projet de loi n° 392, Loi concernant la suspension de la délivrance de nouveaux claims miniers et mettant fin à la préséance des droits miniers et gaziers sur les autres usages du territoire, déposé par la députée de Verdun; également déposé par la députée de Verdun, le p.l. n° 393, Loi visant à lutter contre le gaspillage alimentaire; déposé par la députée de Mercier, le p.l. n° 397, Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement dispensant des services de l'éducation préscolaire, d'enseignement au primaire ou d'enseignement en formation générale ou professionnelle au secondaire, incluant les services éducatifs pour les adultes; et finalement, déposé par mon collègue de Maurice-Richard, le projet de loi n° 399, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec afin d'obliger la Caisse de dépôt et placement du Québec à faire des investissements ayant des impacts sociaux et environnementaux durables et à en rendre compte.

Tous ces projets de loi, je pense, M. le Président, mériteraient plus de prise en considération de la part du gouvernement, et on devrait travailler sur ce genre de projet de loi là plutôt que celui qui est présentement à l'étude, du projet de loi n° 24. Est-ce que le leader gouvernemental pourrait nous indiquer s'il entend peut-être, en effet, suspendre le projet de loi n° 24 et se concentrer sur ces autres projets de loi? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je comprends de la demande du député d'Hochelaga-Maisonneuve, qu'il souhaiterait qu'on étudie les différents projets de loi des oppositions. Je l'ai dit et je l'ai toujours dit candidement, moi, je suis ouvert. Encore faut-il avoir du temps parlementaire pour le faire. Donc, je comprends que... C'est sûr que, si le député d'Hochelaga-Maisonneuve fait en sorte de ralentir tous les travaux parlementaires au salon bleu en utilisant l'ensemble de l'arsenal réglementaire pour s'opposer, s'objecter et ralentir l'ensemble des travaux, ça laisse moins de temps pour étudier les projets de loi des oppositions. Mais moi, je l'ai toujours dit, je suis très ouvert à ce qu'on puisse étudier des projets de loi des oppositions. D'ailleurs, je l'ai déjà fait dans le passé. Je sais que le député de Nelligan souhaiterait qu'on appelle le projet de loi sur les nominations aux deux tiers ou sur le don d'organes, tout ça. Moi, je suis ouvert, je suis parlable, mais encore faut-il travailler en collaboration puis faire avancer les choses, pas bloquer pour bloquer l'ensemble des projets de loi.

Alors, moi, je suis très ouvert à appeler des projets de loi des oppositions, mais encore faut-il démontrer un peu de bonne foi, du côté des oppositions officielles, puis ne pas s'objecter pour s'objecter puis bloquer tout le processus législatif. Alors, il n'en tient qu'à vous. Je vous tends la main, tendez-moi votre main.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : En conclusion, M. le leader.

M. Leduc : ...moi, je suis bien ouvert à ce qu'on puisse suspendre le projet de loi n° 24 quelques jours pour traiter un ou l'autre de ces projets de loi là puis qu'on revienne après ça. Ça, il n'y a pas de problème. La main est tendue.

Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, c'est sur cette note d'harmonie que nous allons maintenant vous rappeler que, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Justement, période d'harmonie, du moins on le souhaite, et je vous demanderais de bien vouloir, M. le Président, appeler l'article 4 du feuilleton.

Projet de loi n° 24

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, à l'article 4 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt aujourd'hui sur l'adoption du principe du projet de loi n° 24, Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale.

Y a-t-il des interventions? M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Alexandre Leduc (suite)

M. Leduc : Est-ce qu'il me restait du temps, M. le Président, avant qu'on termine mon bloc? Combien de temps il me restait?

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Attendez. 2 min 8 s.

M. Leduc : Bien, je terminerais ces deux minutes, si possible, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Bien sûr.

M. Leduc : Merci beaucoup. Bien, des éléments nouveaux se sont rajoutés, M. le Président, depuis qu'on s'est laissé pour la pause dîner. Je viens d'y faire référence, de manière assez étonnante, le premier ministre n'a pas fermé la porte à une adoption sous bâillon du projet de loi n° 24. Ça m'inquiète profondément, M. le Président, parce qu'un type de projet de loi qui est très controversé, comme celui que nous sommes en train d'étudier, qui ne fait vraiment pas l'unanimité ni dans cette salle, ni dans l'espace public, ni dans les différents chroniqueurs ou les différents analystes de la situation politique québécoise, qu'on se dise que ce soit urgent au point où on envisage l'adoption par bâillon, ça me dépasse. Je vais être franc avec vous, M. le Président, ça me dépasse.

Moi, le bâillon, j'en ai vécu, quoi, trois ici, dans la précédente législature. C'est quelque chose de désagréable, c'est quelque chose qu'on devrait utiliser le plus rarement possible. On l'avait utilisé, notamment, sur la Loi de la laïcité, de mémoire, sur l'abolition des élections scolaires et sur l'industrie du taxi. Ce sont les trois bâillons, de mémoire, qu'on a connus dans la précédente législature. Et je trouve ça impressionnant, pour utiliser un euphémisme, que le premier ministre du Québec considère que ce n'est pas impossible que, pour s'octroyer... avec un beau s apostrophe, là, pour s'octroyer une hausse de salaire, on soit prêts à étudier et à considérer un bâillon. Et là, ça, un bâillon, ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'on réduit au maximum la période de l'étude détaillée, qu'on siège ici jusqu'aux petites heures du matin, qu'on adopte ça dans la... j'oserais dire, dans une certaine violence institutionnelle. Moi, ça m'inquiète, ça m'inquiète pour la suite.

Je pense que c'est un débat qui doit être le plus serein possible. Je suis conscient que mes collègues du gouvernement n'aiment pas ce qui se passe en ce moment. Je pense qu'ils devaient s'y attendre, cela dit, là, qu'on n'allait pas faire le tapis par rapport à ce projet de loi là. Ils devaient s'y attendre, qu'on allait se battre. Bien, c'est ça qu'on fait. Mais, qu'on fasse référence à un bâillon pour un projet de loi qui vise à s'octroyer des hausses de salaire, je ne sais pas dans quel monde vit le premier ministre, mais je l'invite à redescendre sur terre et à retrouver sa raison. Merci.

• (15 h 30) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le leader. Et, prochain intervenant, je cède la parole au député... M. le député de Maurice-Richard.

M. Haroun Bouazzi

M. Bouazzi : Merci, M. le Président. Je suis vraiment très heureux de prendre la parole concernant ce projet de loi, donc, je le rappelle, qui va augmenter de 30 % les salaires des députés.

Commençons par dire dans quel contexte vient ce projet de loi, hein? Il vient dans un contexte où il y a des négociations qui s'annoncent pour les travailleuses et travailleurs du service public et où le gouvernement propose une augmentation de 9 % sur cinq ans. C'est la proposition qu'il y a sur la table. Rappelons que nous, les députés, nous sommes payés, comme salaire de base, autour de 101 000 $ et que seulement 11 députés sur 125 ont ce salaire de base, dont, d'ailleurs, sept sont dans ma formation politique. La plupart des députés, donc, gagnent plus, sans compter d'autres revenus sur lesquels je reviendrai plus tard.

Mais parlons plutôt de la situation dans le service public. Donc, actuellement, en 2022, les employés de l'administration québécoise gagnent en moyenne 55 652 $, qui est un salaire de 11,9 % inférieur à celui de l'ensemble des autres salariés québécois travaillant dans des entreprises de 200 employés et plus. C'est un retard de 8,7 % qui est également observé par rapport aux employés du secteur privé et de 18,6 % par rapport aux salariés des autres secteurs publics, donc sociétés d'État, universités, municipalités, administrations fédérales au Québec. En ce qui concerne la rémunération globale, donc, incluant les avantages sociaux, c'est une rémunération de 3,9 % inférieure à celle des autres salariés québécois et de 20,4 % inférieure à celle des salariés des autres secteurs publics.

Il faut comprendre que ça s'inscrit déjà dans une perte de pouvoir d'achat de la part des fonctionnaires. L'inflation, en 2021, était de 3,4 %, mais l'augmentation salariale était de 2 %. En 2022, l'inflation était de 6,8 %, et l'augmentation salariale, de 2 %. Pas besoin, M. le Président, d'être le ministre des Finances pour comprendre qu'une augmentation de 2 %, quand l'inflation est de 3,4 %, et, a fortiori, une augmentation de 2 % quand l'inflation est de 6,8 %, est une baisse du pouvoir d'achat. Même le ministre, qui n'est pas en charge des finances mais en charge de la justice, dépositaire de ce projet de loi, je suis sûr, l'admet volontiers.

Alors, comment pouvons-nous défendre cette augmentation de 9 % sur cinq ans et, au même moment, s'augmenter nous-mêmes, à travers un processus qui n'est ni indépendant ni exécutoire, voter nous-mêmes notre augmentation de 30 % qui touche aux députés ici présents?

Un des arguments que nous a dit le premier ministre tantôt est l'argument du recrutement, l'importance de pouvoir recruter de toutes les classes sociales. Je rappelle ici que les classes sociales les plus défavorisées sont très largement sous-représentées à l'Assemblée nationale, mais, bon, soit. Ceci étant dit, il n'y a pas de pénurie de députés à l'heure actuelle. Il y en a 125 sur 125, et on en est bien contents.

Parlons, ceci étant dit, des différents postes à pourvoir dans la santé, par exemple. En mai 2022, il manquait toujours, au Québec, l'équivalent de 5 340 infirmières à temps complet. Novembre 2022, pourtant, l'Ordre des infirmières et des infirmiers du Québec affirmait qu'on n'a jamais autant eu d'infirmières au Québec. 82 271 infirmières étaient inscrites au tableau de l'ordre le 31 mars 2022. C'est important, parce qu'il n'y a pas de pénurie d'infirmières, il n'y en a jamais eu autant, M. le Président. Elles ne veulent juste pas travailler dans le réseau actuel de la santé en raison des terribles conditions de travail et, entre autres, des incitatifs financiers que le gouvernement de la CAQ ne leur présente pas ou ne sont pas à la hauteur.

En décembre 2022, on cherchait encore 4 258 préposés aux bénéficiaires, et actuellement les postes à pourvoir continuent à s'aggraver malgré le problème... le programme pilote.

Donc, les mains-d'oeuvre, dans la santé, sont vraiment très nombreuses. Donc, en 2022, on parle des besoins de main-d'oeuvre. 22 octobre 2022, on parle de 9 689 postes à pourvoir, donc infirmières, inhalothérapeutes, préposées aux bénéficiaires et aides de service. Plus de 4 000 infirmières ont démissionné dans le réseau public entre mars et décembre 2020, soit 43 % de plus que l'année d'avant, révèlent les données compilées par La Presse l'an dernier.

Je ne sais pas si on prend acte de la situation. On nous parle de l'importance de pouvoir recruter en augmentant les députés de 30 % et on observe notre réseau de santé vivre des difficultés absolument énormes. Et, je le rappelle, dans le cas des infirmières, ce n'est pas un manque d'infirmières, car elles existent, mais elles ne veulent pas travailler dans les conditions que le service public leur offre.

On a parlé des infirmières. On peut tout à fait parler d'autres corps de métier. Si on prend l'exemple des psychologues, par exemple, on assiste présentement à une hémorragie de psychologues dans le secteur public. Les difficultés de recrutement sont immenses, et des centaines de psychologues ont quitté le réseau. Entre 2011 et 2021, 719 professionnels ont décidé de se consacrer exclusivement à la pratique privée, dont un bon nombre directement à la fin de leurs études. Durant la même période, le réseau public a définitivement perdu 367 psychologues.

Nous, à Québec solidaire, c'est ce recrutement-là qu'on pense qui devrait être prioritaire. Et, devant cet état des lieux, se retrouver, en parallèle avec cette situation dramatique de nos services publics, à voter un projet de loi, comme si c'était une priorité, qui nous augmente, nous, de 30 % sous prétexte qu'il faut réussir à attirer les talents, comme s'il ne fallait pas faire la même chose ailleurs dans le secteur public...

Toujours au niveau des psychologues, selon les données colligées de Radio-Canada, les difficultés de recrutement sont une réalité un peu partout dans le réseau public de la santé, même si certains secteurs s'en tirent mieux que d'autres. Au CISSS de la Côte-Nord, par exemple, 44 % des postes sont vacants, 12 sur un total de 27. Au CISSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal, 20 % des postes sont à pourvoir, 24 sur 123. Près de 10 % des postes sont vacants dans le CIUSSS de la Mauricie... dans les CISSS de la Mauricie, cinq sur 44, et, à la Capitale-Nationale, c'est 29 sur 267. À l'Hôpital de Montréal pour enfants, les postes permanents de psychologues ont tous un titulaire, mais 24 % des postes temporaires restent à pourvoir. Entre 2011 et 2021, 719 professionnels ont décidé de consacrer exclusivement leur travail au privé.

• (15 h 40) •

Parlons maintenant de l'éducation. La pénurie du personnel dans les écoles québécoises est encore plus importante qu'on ne le pensait. Près de 2 600 emplois sont présentement vacants dans le réseau scolaire, dont près d'un millier de postes d'enseignants. Des postes à temps plein, il y en a 71, des postes à temps partiel, il y en a 856 actuellement. Des éducateurs en service de garde, il y a 57 postes à temps plein, 456 postes à temps partiel à pourvoir, des techniciens en éducation spécialisée, 350 postes à temps plein, 280 postes à temps partiel, des psychologues, 130 postes à temps plein, 50 postes à temps partiel, des orthophonistes, 105 postes à temps plein, 59 postes à temps partiel, des psychoéducateurs, 144 postes à temps plein, 46 postes à temps partiel.

Derrière chacun de ces chiffres, M. le Président, il y a des enfants qui ne reçoivent pas les services dont ils ont besoin. Il y a des recrutements qui ne se font pas. Il y a une situation dramatique pour des familles, pour des parents qui ont besoin de tous ces services-là, et actuellement il y a un manque à pourvoir absolument terrible dans la fonction publique.

On a parlé de la santé, on a parlé des psychologues, on a parlé de l'enseignement, parlons d'informatique, un domaine que je connais bien. Pour les personnes expertes en informatique, le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec a constaté qu'entre 2015 et 2021 le nombre de postes vacants a presque doublé. De 2015 à 2021, le nombre de postes vacants est passé de 7,6 % à 14 %, M. le Président, dans le ministère des Finances, juste dans le ministère des Finances.

Pour ce qui est de la sous-traitance en informatique en 2021, on battait des records : 33 % des ressources utilisées dans la dernière année étaient des sous-traitants, alors que près de 1 200 postes demeurent vacants, du jamais-vu M. le Président. Et on nous parle aujourd'hui de l'importance de passer un projet de loi à toute vitesse pour pouvoir attirer des talents.

Moi, je ne suis pas contre l'idée d'attirer des talents, effectivement, et je pense que la rémunération joue un rôle. Pourquoi, à ce moment-là, vouloir absolument que cette augmentation commence maintenant? Est-ce qu'il y a la possibilité qu'une des 125 personnes ou une partie des députés actuels quitte sous prétexte qu'elle n'a pas l'augmentation de 30 %? Moi, je ne pense pas. Je pense que c'est un argument qui pourrait être valable, et, à ce moment-là, il faudrait décider que ces augmentations-là commencent à la prochaine législature.

Donc, on a parlé de la sous-traitance en informatique. 2021 aura été l'année de tous les records pour la dépendance du Québec à l'externe en gestion des ouvrages informatiques. Quelque 33 % des ressources utilisées dans les dernières années étaient sous-traitantes, alors que 1 200 postes étaient à pourvoir, comme nous l'avons dit. Ce manque est à tous les niveaux, et je peux continuer. Au niveau des agents de la protection de la faune, on a un problème. En octobre 2022, on apprenait dans La Presse, si je ne me trompe pas, qu'en 2018 on dénombrait 440 postes à pourvoir partout en province... Ah non! 440 postes, alors qu'il y en avait seulement 300 à l'heure actuelle. À Revenu Québec, c'est le même problème. On a le problème partout, M. le Président.

Donc, si on parle d'attractivité, commençons par parler des conditions de travail, des revenus des personnes dans la fonction publique. Donc, pour Revenu Québec, en avril 2022, on apprenait, dans Le Journal de Montréal, qu'«en l'espace de quelques semaines, plusieurs dizaines d'employés de Revenu Québec ont quitté leur emploi pour aller travailler à l'Agence du revenu du Canada, selon le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec. "C'est [...] hécatombe à Revenu Québec", s'exclame Line Lamarre, présidente du syndicat.

«Selon elle, cette vague de départs s'est produite lorsque les employés ont vu les emplois affichés à l'Agence du revenu du Canada. "Je pense que — donc je la cite — le gouvernement fédéral a compris quelque chose que le gouvernement provincial n'a pas compris, dit-elle. Pour aller faire le même travail à l'agence, cela veut dire 15 000 $ à 20 000 $ de plus par année, avec [la possibilité du] télétravail..."»

À la Cour du Québec, on a aussi des problèmes. Encore une fois, en mai 2023, on apprenait, dans Le Journal de Montréal, qu'en 18 ans... Alors là, je cite le président du Syndicat des constables spéciaux. Donc : «En 18 ans de carrière, je n'ai jamais vu un tel manque de sécurité. [...]il faudrait environ 90 agents de la paix de plus pour assurer la sécurité de l'ensemble du personnel et des visiteurs — donc 90 — au palais de justice de Montréal. Or, la situation est si mauvaise que "quand on est 80, on est [bien] heureux".» On parle de plus de 10 % de manque actuellement.

Vous comprenez donc, M. le Président, que les arguments du gouvernement sur l'attractivité sont peut-être bons, mais ils sont spécialement meilleurs quand ils nous parlent de la fonction publique, de l'enseignement, des services dont nos enfants ont besoin, dont les familles ont besoin, des services de santé, de psychologie, des services des impôts, de sécurité, de justice. Les manques sont très, très nombreux, et l'attractivité est un problème. Elle est un problème, entre autres, à cause des revenus.

Et donc je rappelle, M. le Président, que l'inflation en 2021 était de 3,4 %, alors que l'augmentation salariale était seulement de 2 %. Ça, ça veut dire qu'ils ont tout simplement baissé leurs revenus en 2021. En 2022, c'est pire : l'augmentation est toujours de 2 %, alors que l'inflation est de 6,8 %, sachant que l'inflation n'est pas distribuée de la même manière pour toutes les citoyennes et les citoyens, sachant que, si la moyenne des revenus des personnes qui travaillent à la fonction publique est de 55 000 $, le pourcentage de leurs revenus qui est dépensé dans les services... dans l'épicerie est supérieur que les personnes qui gagnent évidemment plus d'argent, sachant que, si, parmi elles, il y a des locataires et locatrices qui ont le malheur de devoir quitter leurs appartements pour en louer un nouveau... vont se retrouver à dédier 30 %, 40 %, peut-être même 50 % de leurs revenus à leurs loyers, étant donné les augmentations faramineuses des loyers et, malheureusement, aussi l'inaction du gouvernement pour pouvoir plafonner les augmentations de loyer au Québec.

Donc, on a parlé des pertes de pouvoir d'achat à prévoir avec une... Donc, on a parlé des pertes de pouvoir d'achat qu'ils ont déjà eues dans les deux dernières années. Parlons maintenant des pertes du pouvoir d'achat à prévoir avec l'offre de 9 % sur cinq ans. Pendant les crédits provisoires, la présidente du Conseil du trésor a mentionné que l'inflation prévue sur cinq ans était de 11,9 %. Au mieux, l'offre du gouvernement se rend à 11,5 %, si on achète le discours gouvernemental qui comprend du forfaitaire et des augmentations supérieures pour certains. Mais on reste en dessous de l'inflation prévue par le gouvernement lui-même. Vous imaginez, M. le Président, on reste en dessous. Donc, on a une offre qui est inférieure aux prévisions du gouvernement en matière d'inflation, c'est-à-dire que non seulement, actuellement, les gens se sont appauvris dans les deux dernières années, mais ils se retrouvent à continuer à s'appauvrir dans les cinq prochaines, si effectivement l'offre de 9 % est maintenue sur cinq ans pour les fonctionnaires.

Et nous, aujourd'hui, nous allons... le gouvernement voudrait qu'on se vote tout de suite, sans avoir un comité indépendant et exécutoire... nous-mêmes, nous allons nous voter cette augmentation de 30 %, tout de suite rétroactive, même pas pour la prochaine législature.

L'écart avec le fédéral va encore augmenter. L'écart a eu une entente... Le fédéral a eu une entente de 11,5 % sur quatre ans. L'écart est déjà important et il se creuse avec l'offre de 9 %.

Motion de report

Il ne me reste pas beaucoup de temps, M. le Président. Je vais donc déposer une motion de report qui... Donc, en vertu de l'article 240 de notre règlement, je dépose une motion afin de reporter l'adoption du principe du projet de loi n° 24, et la motion se lit comme suit :

«Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans 12 mois."»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, merci, M. le député. Votre motion va être... elle est déposée. Donc, nous allons suspendre quelques instants afin d'en prendre connaissance et de pouvoir la distribuer aux autres collègues.

Nous allons suspendre.

(Suspension de la séance à 15 h 50)

(Reprise à 16 h 02)

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Je vous informe que deux débats de fin de séance se tiendront aujourd'hui à 18 h 30. Le premier débat portera sur une question adressée par Mme la députée de D'Arcy-McGee au ministre responsable des Services sociaux concernant les propos tenus par le député d'Abitibi-Est sur l'itinérance. Le deuxième débat portera sur une question adressée par Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce à M. le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs concernant l'absence de progrès dans le dossier des lagunes de Mercier.

Alors, je vous avise que la motion de report présentée par M. le député de Maurice-Richard est recevable. En vertu de l'article 240 du règlement, cette motion fait l'objet d'un débat restreint de deux heures. Je vous informe que la répartition du temps de parole pour ce débat restreint s'effectuera comme suit : 60 minutes sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 31 min 36 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 20 min 54 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, six minutes sont allouées au troisième groupe d'opposition, 1 min 30 s allouées à la députée indépendante.

Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par la députée indépendante ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle à la députée indépendante que, si elle souhaite intervenir au cours du débat, elle a 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.

Je cède donc maintenant la parole à Mme la députée de Mercier.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, je souhaite intervenir sur la motion de report de mon collègue sur ce projet de loi. Écoutez, moi, j'ai une question en ce moment qui me trotte dans la tête, là, depuis la période de questions... bien, même avant, mais encore plus après la période de questions, qui a été un petit peu agitée par la question du salaire des députés et de ce projet de loi, c'est : D'où vient l'empressement?

J'ai été estomaquée quand j'ai appris que le premier ministre est prêt à aller jusqu'à un bâillon pour voter rapidement une augmentation de salaire de 30 000 $ aux députés. Je ne comprends pas d'où vient l'empressement. Quand je me suis indignée de ça, j'ai eu des commentaires de collègues. Moi, je les invite à nous expliquer, peut-être qu'ils ont des arguments qui pourraient être justifiables, mais je ne les entends pas. Je les invite à prendre la parole.

Si on regarde le rapport qui a été déposé, le rapport Ouellet-Thériault, à la fin, là, dans l'annexe qui parle de la description de tâches d'un député, qui est une partie très, très intéressante à lire par toute la population pour savoir ce qu'un député fait, ça dit qu'une de nos tâches comme député, c'est de voter des lois. Mais voter des lois, ça ne veut pas dire uniquement de se lever puis de dire «pour» ou de se lever puis de dire «contre» ou «abstention», ça veut aussi dire de débattre des lois.

Et là, ici, nous avons devant nous un projet de loi pour augmenter les salaires des députés, et il y a des pour et il y a des contre. Il y a le premier ministre et d'autres de ses ministres qui sont intervenus, notamment le leader du gouvernement, pour dire pourquoi il trouve que c'est important, mais ils ne l'ont presque pas fait ici, au salon bleu, dans cette enceinte, où doit se tenir le lieu pour avoir ce genre de débat. Ça a été fait devant les médias. Je lis, dans des articles de journaux, ce qu'ils en pensent, mais moi, j'aimerais entendre les autres députés de cette Chambre nous dire c'est quoi, les arguments qui font que c'est tellement pressant de nous voter une augmentation de salaire, avec le projet de loi que nous avons devant nous, qu'on ne ferme même pas la porte, que le premier ministre ne ferme même pas la porte à ce qu'il y ait un bâillon.

Ça, c'est la procédure, là, la plus extrême de notre Assemblée. C'est quand il y a une urgence que les gouvernements, des fois, en usent. Certains en abusent. Je m'en rappelle, lors de la dernière législature, j'ai été sur une commission... sur deux projets de loi où il y a eu un bâillon, et c'est des moments très intenses. Aux yeux du gouvernement, souvent, c'est pour le bien commun. On fait ça parce qu'on veut accélérer les choses pour les citoyens, pour le bien commun, pour le bénéfice des citoyens et des citoyennes qui vivent une certaine situation puis on veut que la loi puisse les aider. En quoi est-ce que le projet de loi que nous avons devant nous pour augmenter les salaires de 30 000 $, minimum, des députés est quelque chose d'urgent? En quoi est-ce que c'est bon pour le bien commun? J'aimerais qu'on me l'explique. On pose la question, mes collègues, ce matin, ont posé la question. Nous allons continuer à poser la question jusqu'à avoir une réponse. Et ce n'est pas Québec solidaire qui va avoir une réponse, c'est les citoyens et citoyennes qui nous interpellent.

Les gens qui nous voient aller, qui nous regardent en ce moment, ils nous interpellent. Moi, j'ai reçu beaucoup de courriels de citoyens et citoyennes qui nous disent : Pourquoi est-ce que vous êtes empressés? Pourquoi est-ce que les députés trouvent que c'est important de se voter cette augmentation de salaire? Je peux prendre le temps d'en lire quelques-uns, c'est un échantillon. J'ai reçu ça dans ma boîte vocale, dans mon bureau de comté, et j'en ai trois. Évidemment, je vais taire les noms parce que je n'ai pas eu le temps de demander à ces gens-là s'ils acceptent, s'ils ou elles acceptent que je les nomme. Mais je vais quand même lire qu'est-ce qu'ils m'ont envoyé. Je suis certaine que plein de députés ici, à l'Assemblée nationale, ont reçu ce genre de courriels.

On a ici, par exemple, un courriel que j'ai reçu très récemment, en mai, 23 mai... pas le 23 mai, le 2 mars, pardon. 23 mai, c'est parce que je l'ai imprimé puis je l'ai envoyé... Donc, le 2 mars. Bonjour, Mme Ghazal... excusez-moi. «Bonjour, Mme la députée de Mercier. Avant de prendre l'argent des contribuables pour augmenter le salaire des députés, pourriez-vous vous assurer que j'en aurai, moi aussi? Je suis d'accord avec le fait que les députés veulent une augmentation — c'est intéressant, on a un citoyen qui dit "bien oui, ça pourrait être justifiable" — mais des milliers de dollars encore sur le dos des contribuables, c'est assez. Il y a les hôpitaux, les écoles, les services publics, etc. Notre gouvernement — et là il parle, j'imagine, du gouvernement de la CAQ — aurait-il oublié les priorités?» Un simple citoyen, qui, apparemment, n'a aucun pouvoir.

J'ai ici un autre courriel, que j'ai reçu le 28 février. Donc là, ça, c'est quand il y a eu l'annonce de la formation du comité. Parce qu'il y a eu des débats, puisque je me suis opposée, comme membre du BAN et au nom de ma formation politique, à ce que ce comité-là puisse travailler sur un mandat aussi restreint, et que ce ne soit pas un comité réellement indépendant et exécutoire, comme Québec solidaire le demande depuis le début.

• (16 h 10) •

Donc, le 28 février : «Mme la députée de Mercier, j'ai un malaise à appuyer votre demande d'augmentation de salaire.» Évidemment, elle me dit «vous» pour parler des députés, parce que l'augmentation de salaire, c'est pour tous les députés. «Je suis une retraitée frappée par la loi n° 126 — ça, c'est une ancienne loi de l'ancien gouvernement, en 2017, pour les employés de la fonction publique — une loi injuste, qui manque de respect envers ses employés. J'ai quitté mon travail en raison dans mon épuisement au travail. Avoir su que mon gouvernement n'avait pas l'intention de respecter sa signature, poussant l'odieux à voter une loi n° 126 pour priver 128 retraités de leurs droits, je n'aurais pas quitté mon travail. J'aurais pris un congé de maladie prolongé. Nous n'avons jamais été consultés. Nous avons vécu la grande récession de 2008, et voilà que l'inflation vient nous appauvrir et gruger nos économies. Étant cadre de sexe féminin, je n'ai jamais été payée pour le salaire que j'ai accompli, consacrant mes fins de semaine pour fournir un travail de grande qualité. J'aimerais sensibiliser la population de vous enlever vos avoirs de futurs retraités pour que vous compreniez l'odieux des conséquences de votre loi n° 126. J'exige de vous le respect, faire en sorte que cette loi n° 126 soit abolie. Par la suite, il me fera plaisir d'appuyer votre demande.» Et ça, c'est une retraitée qui était régisseuse en transport scolaire. Donc, c'est quelqu'un pour qui la vie n'est pas facile, qui n'est pas capable d'assumer tous ses besoins en cette période d'inflation, et surtout comme retraitée.

Mais les gens, ce qu'ils disent... puis ça, j'ai pris les courriels qui sont les moins agressifs parce que je ne voulais pas dire des propos non parlementaires. Les gens, ce qu'ils disent : Vous voulez vous voter une augmentation de salaire, mais ayez aussi un respect pour les gens qui travaillent, les gens dans la population qui travaillent aussi extrêmement fort.

Un autre courriel, aussi, à peu près à la même période, 28 février : «Le Bureau de l'Assemblée nationale a annoncé la création d'une commission chargée d'évaluer les salaires et les avantages des élus de l'Assemblée nationale. Sur la base des recommandations du comité, les élus eux-mêmes pourront voter une augmentation de salaire.

«La CAQ, le PLQ et le PQ ont tous annoncé leur soutien à la formation du comité — le fameux comité Ouellet-Thériault — et rien n'indique qu'ils s'abstiendront de piger dans nos poches pour augmenter leur salaire. Tout porte à croire que le généreux salaire des députés, qui s'élève déjà à 101 000 $, sera augmenté. Leur salaire est déjà plus élevé que celui de plus de 92 % des Québécois.

«Après un tollé contre leur augmentation de salaire indexée sur l'inflation, les députés de la Colombie-Britannique ont décidé de geler temporairement leur salaire. Les députés de la Nouvelle-Écosse ont également rejeté une augmentation de salaire. Les membres du Parlement doivent être solidaires des contribuables. Un gel des salaires montrerait que les politiciens ne sont pas déconnectés de notre réalité.» C'est un citoyen de Montréal... une citoyenne.

Évidemment, à Québec solidaire, nous ne sommes pas en train de demander un gel des salaires. Nous avons été cohérents depuis le début, depuis qu'Amir Khadir siégeait ici comme ancien député de Mercier. Ça prend un comité qui soit réellement indépendant et dont les décisions sont exécutoires.

Puis c'est intéressant parce que cette citoyenne fait référence au salaire de député, par exemple, de la Colombie-Britannique. Je l'ai dit, dans une intervention plus tôt aujourd'hui, que les députés de la Colombie-Britannique, si on veut, leur salaire de base, leur indemnité de base, c'est 115 046 $. Nous, si on inclut l'allocation de dépenses... parce que, pour vrai, aujourd'hui, puis ça a été dit aussi dans le rapport de Ouellet-Thériault, aujourd'hui, ce montant-là, c'est une allocation de dépenses mais c'est considéré comme un salaire pour les députés. Donc, eux-mêmes l'ont inclus, de la même façon que Claire L'Heureux-Dubé aussi l'a fait. Donc, notre salaire est beaucoup plus élevé. Il s'élève à 139 745 $ versus, pour la Colombie-Britannique, 115 046 $. Et que personne ne vienne me dire que les députés de la Colombie-Britannique travaillent moins fort que les députés de Québec.

Donc, il se pourrait... parce que certains pourraient dire : Mon Dieu! vous faites preuve de populisme, vous parlez... les gens, c'est ce qu'ils voient. C'est un petit peu les critiques que j'entends entre les branches, mais qui ne sont pas, malheureusement, mentionnées ici, au salon bleu. Mais la journée... le débat est commencé. Peut-être qu'à un moment donné il y a des députés qui vont vouloir se lever puis nous expliquer pourquoi la position de Québec solidaire est fausse, et que ce soit fait ici, au Parlement, et non pas uniquement devant les médias, par certaines personnes et non pas par tous les députés, parce que ça va impacter tout. Ça va avoir un impact sur tous les députés, cette augmentation de salaire. Et je suis certaine que tous les députés ont une opinion, qui est probablement contraire à la nôtre, probablement, mais j'aimerais ça qu'ils nous en parlent. C'est à ça que ça sert, notre travail de législateurs, c'est de débattre de questions. Puis pour en débattre, bien, il faut en discuter, puis on est ici dans l'endroit pour le faire.

Donc, comme je l'expliquais aussi plus tôt, il pourrait y avoir une augmentation de salaire qui pourrait être substantielle, peut-être, par un comité indépendant exécutoire, après avoir fait le ménage partout, toutes les autres indemnités ou tous les autres montants qu'on reçoit parce qu'on est président de commission, parce qu'on est leader adjoint, parce qu'on est whip, etc. Et donc il pourrait... par exemple, allocation de transport, ça aussi, on n'a pas besoin de fournir des justificatifs. C'est peut-être justifié, ça pourrait être inclus dans le salaire total qu'on recevrait. Et donc ce comité-là pourrait faire ce travail, et il y aurait peut-être une augmentation qui serait justifiée parce qu'ils auraient fait des comparatifs. C'est ce que le rapport Claire L'Heureux-Dubé faisait aussi, et ça a amené à une augmentation. Et il y aurait peut-être des critiques dans la population pour dire que ce n'est pas juste qu'ils se font une augmentation, mais au moins on arrêterait d'en parler, puis ce serait réglé, puis on en parlerait une fois pour toutes, puis on enlèverait nos mains de nos salaires.

Je dis que j'invite les députés du gouvernement d'en parler, j'aimerais ça aussi que les autres députés des autres oppositions aussi en parlent. Il y a le député de Matane-Matapédia qui a été très vocal à... dans les médias et qu'il a dit qu'«on est très mal à l'aise», en parlant du Parti québécois. Et il avait des bons arguments, que je vais citer et qui ont été publiés dans un article le 11 mai dernier. Il dit : Selon... En fait, c'est une information qu'il fournit puis qui est citée dans l'article : «Selon les plus récents chiffres de l'Institut de la statistique, le revenu médian à Amqui et Matane — donc c'est des villes qui font partie du comté de Matane-Matapédia — figure parmi les plus bas au Québec à 36 000 $, à peine 6 000 $ de plus que l'augmentation à laquelle les députés québécois auront droit.»

36 000 $, ça, c'est le salaire... le revenu médian dans la région du député de Matane-Matapédia. «40 % des localités du Bas-Saint-Laurent se retrouvent dans le dernier quintile du classement.» Et ce qu'il dit : «On connaît les revenus disponibles dans nos comtés, on est très mal à l'aise, les députés du PQ. Moi, je n'ai pas demandé ça, j'aurais fait tout le mandat sans augmentation sans problème. Là, on est confrontés à ça.»

Donc, il y a un malaise de la part pas uniquement de Québec solidaire, des autres députés. Et moi, je devine... je sais qu'on ne peut pas prêter d'intentions, on ne peut pas le faire, mais je devine qu'aussi il y a un malaise de la part des députés du gouvernement qui fait qu'ils ne se lèvent pas en Chambre pour nous convaincre pourquoi c'est si urgent, tellement urgent d'avoir cette augmentation de 30 000 $, qu'il pourrait même y avoir un bâillon pour l'exiger rapidement. Je ne les entends pas, les arguments, M. le Président, puis non seulement moi, mais aussi les citoyens dont je viens citer les courriels. Et ça, c'est juste un échantillon. Comme je vous dis, j'en suis certaine qu'il y en a d'autres puis que les députés les ont lus. Mais ils pourraient répondre. Les citoyens ont le droit d'avoir des réponses.

C'est le processus qui est mauvais, parce qu'on pourrait avoir une augmentation. Et d'ailleurs, il y a... je vais citer une partie du rapport Ouellet‑Thériault. Attendez, je veux juste retrouver la page. Dans leurs recommandations... en fait, ce n'est pas des recommandations, j'aurais aimé ça qu'ils écrivent... que ce soient des recommandations. Dans les recommandations, c'est la fameuse augmentation, là, du 30 000 $, après ça, ils amènent des pistes de réflexion. Ça aurait pu être des recommandations. Ils ont choisi de ne pas le faire, alors que le fait d'avoir un comité indépendant, c'était une recommandation du rapport Claire L'Heureux-Dubé. Elle mentionnait : Voici l'augmentation qui serait juste, après avoir fait le ménage, et il faudrait que ce soit un comité indépendant exécutoire.

Donc, dans les pistes de réflexion, c'est à la page 54 du rapport Ouellet-Thériault : «Le Comité consultatif indépendant invite les parlementaires à se pencher sur les pistes de réflexion suivantes — il y en a trois — procéder à une analyse globale des conditions de travail afin de compléter l'exercice de révision que le comité a entamé avec le présent rapport.» Puis ça, ils le disent dans leur rapport, ils disent : On ne pouvait pas trop aller sur les autres éléments de votre salaire, puis là ils rappellent toutes les augmentations, tous les montants supplémentaires. Moi, comme whip du deuxième groupe d'opposition, j'ai un 20 % sur le 101 000 $, donc je calcule que ça fait 21 000 $, plus le 20 000 $ pour l'allocation de dépenses, plus d'autres choses, plus d'autres choses. En plus, avec l'augmentation, 131 000 $, ça va faire 20 % de 131 000 $. Là, on est rendus vraiment beaucoup plus haut.

Ils disent : Nous sommes conscients de ça, mais on ne pouvait pas en parler, ce n'est pas le mandat que le Bureau de l'Assemblée nationale nous a donné. Vous nous avez demandé de parler du 101 000 $, l'indemnité de base, en prenant en considération tout le reste. Une chance, parce qu'imaginez, si on ne leur a pas demandé de prendre en considération tout le reste, ça n'aurait pas été 30 000 $, peut-être que ça aurait été 50 000 $, 60 000 $, 70 000 $. Mais ils ont tenu compte de tout le reste et ils ont... ils sont arrivés à ce montant, qui est substantiel, très, très important pour les citoyens.

• (16 h 20) •

La deuxième piste de réflexion à laquelle ils nous invitent, ça, c'est ce qui a été déposé et c'est de ça que se déclame ou se réclame le gouvernement quand il a déposé son projet de loi, en disant : Mais nous, on prend exactement, texto, là, ce qui est écrit dans le rapport. Donc, c'est important aussi de regarder ce qu'il nous mentionne, comme, pour aller plus loin, et c'est pour ça que je dis qu'on n'a pas fini d'en entendre parler, M. le Président.

«Intégrer l'allocation de dépenses à l'indemnité annuelle.» Donc, eux, ils ont décidé de l'ajouter, le fameux... je me mélange toujours entre 38 000 $ ou 39 000 $, je pense que c'est 39 000 $ brut, de l'intégrer, d'arrêter de dire : Il y a une allocation qu'on a de côté, non, non, ça fait partie du revenu, et de mettre... Ça, c'est très intéressant et très important : «Mettre en place un processus périodique et indépendant de révision des conditions de travail des parlementaires.»

Avant, à la dernière législature, il y avait ce qu'on appelait le comité Picard. Maintenant, je ne sais pas si je peux le dire, mais c'est le comité du... qui est du nom de famille du vice-président de l'Assemblée nationale, le comité Lévesque — c'est correct, je peux continuer, merci, donc on peut le dire — donc, qui aussi va regarder les conditions de travail, et je pense qu'il va y avoir une rencontre cette semaine. Bien, moi, quand le whip du gouvernement est venu me voir, je lui ai dit : Mais ces discussions-là, on ne peut pas les avoir comme ça, là, par un échange courriel puis texto, puis un petit peu dans les corridors. Il faudrait qu'on l'ait à la bonne place, là où on avait déjà entrepris cette discussion-là, c'est-à-dire dans le comité qui est mis sur pied par la présidente de l'Assemblée nationale pour discuter de nos conditions de travail. Ça inclut le salaire, ça inclut nos conditions de travail, ça inclut énormément de choses. Et ce comité-là aurait pu reprendre le travail qui avait été fait et mettre sur pied ce fameux... s'entendre ensemble, tout le monde, on met un comité réellement indépendant, pas avec des ex-élus.

Puis je n'ai rien contre M. Thériault et M. Ouellet, qui ont été mes collègues et que je respecte profondément. Ils ont fait un très beau rapport, je le répète, mais ils ne sont pas assez indépendants pour qu'ils forment le deux tiers du comité. C'est un comité de trois personnes, ils sont deux sur trois. Je comprends, il peut y avoir un ex-député, un ex-élu choisi parmi... à l'unanimité entre tous les partis représentés à l'Assemblée nationale pour former ce comité. Après ça, il va y avoir d'autres personnes, qui sont réellement indépendantes, pour discuter de ça, pour déterminer notre salaire. Et, après ça, on ne fait pas... on ne va pas choisir ce qu'ils nous disent, ce qui nous plaît, ce qui ne nous plaît pas. On n'a rien à dire là-dessus, de la même façon que c'est le cas pour tout le monde, pour tous les salariés au Québec. Ils ne se votent pas leur propre salaire. Et le débat serait terminé.

Mais, en ce moment, ce qu'on est en train de faire, si le gouvernement décide de ne pas changer d'idée... Parce que, comme le disait le leader plus tôt aujourd'hui, nous sommes optimistes, avec nos arguments, en faisant entendre la voix des citoyens et citoyennes qui nous parlent, qui leur parlent. Ce n'est pas uniquement notre opinion personnelle qu'on est en train de dire ici, en faisant ce travail-là, en essayant de les convaincre de ne pas aller de l'avant. Donc, comme je dis, je garde espoir qu'ils pourraient changer d'idée et ils pourraient prendre en compte cette chose-là. Parce que, là, ce qu'on fait, c'est qu'on pellette en avant. À la prochaine législature, il va y avoir un nouveau gouvernement, et on va avoir encore la même discussion.

Aujourd'hui, juste avant la période des questions, j'étais à l'extérieur, avec mon collègue le député de Laurier-Dorion et le député de Taschereau, avec des gens qui étaient mobilisés de partout au Québec. On m'a dit qu'il y avait une dizaine d'autobus qui sont venus à Québec, et c'est le Collectif pour un Québec sans pauvreté. Ça fait 20 ans que la loi pour un Québec sans pauvreté, la lutte à la pauvreté, a été instaurée, et aujourd'hui on voit que les écarts entre les Québécois s'accentuent de plus en plus. Et lutter contre la pauvreté, ça peut se faire de différentes façons. Et ce qu'ils demandent, c'est un plan d'action réel, un vrai plan d'action avec des mesures costaudes, structurantes pour lutter contre la pauvreté, notamment, par exemple, sur les questions du logement.

Et ces gens-là sont devant l'Assemblée nationale. Et, au lieu de parler de ça, nous avons devant nous un projet de loi pour augmenter les salaires des députés. Je ne pense pas que c'est leur priorité, ces personnes qui sont devant l'Assemblée nationale, qui demandent qu'il y ait un plan de lutte important, et sérieux, et rigoureux pour lutter contre les inégalités, pour lutter contre la pauvreté. Ce n'est pas acceptable qu'en 2023 il y ait encore des enfants qui arrivent à l'école le ventre vide, M. le Président. Ça, c'est des priorités, c'est à ça que s'attendent les citoyens et citoyennes.

Et je refuse que le ministre... le premier ministre ou que le leader du gouvernement accuse le deuxième groupe d'opposition de faire durer les débats. Je ne me rappelle pas du terme, exactement, qu'il a choisi, et même le premier ministre aussi l'a dit. Ça fait partie de notre devoir, quand on voit quelque chose qui est injuste, de nous lever ici, au salon bleu, et de le dire haut et fort. Ça fait partie de notre travail, et c'est pour ça qu'on est payés, M. le Président. Et c'est pour ça que je répète et j'invite, encore une fois, mes collègues des autres oppositions et aussi du gouvernement de nous convaincre, s'ils ont des bons arguments. S'ils sont confiants que c'est la chose juste à faire, qu'ils se lèvent et qu'ils nous convainquent, parce qu'il en va de la confiance du public.

Moi, M. le Président, je ne pourrais pas prendre cet argent-là puis aller revoir le citoyen dont je parlais ce matin. Hier, hier matin, je suis allée rencontrer un citoyen du Mile End, il a un avis d'éviction de son propriétaire. L'immeuble dans lequel il habite a été acheté par un nouveau propriétaire. Et il m'a regardée, il avait la peur dans les yeux. J'étais chez lui, avec d'autres locataires qui sont plus jeunes, dont une pleurait quand elle disait que... Moi, ça fait 15 ans que je vis ici, mais je vais quitter. Mais elle était quand même relativement jeune, et a pu trouver un autre appartement, et a décidé de quitter parce qu'elle ne se sentait pas en sécurité.

Mais ce locataire de 75 ans, qui est dans son droit... Il avait parlé avec mon bureau, il est dans son droit de rester dans son appartement, parce qu'il a 75 ans. Et c'est ce que mon bureau a fait, c'est ce que j'ai... c'est ce que mes attachés politiques, quand il a appelé à mon bureau, ont fait, lui ont dit : Vous pouvez rester, parce que vous êtes dans votre droit, à cause de la loi Françoise David. Mais, même quand je l'ai vu, il le sait qu'il était dans son droit, il m'a dit : Je vais quand même recevoir... le propriétaire m'offre 25 000 $. Et il me dit : C'est quand même beaucoup d'argent, hein, 25 000 $, je pourrais peut-être l'accepter. 25 000 $. Comment je vais faire, si on ne réussit pas ici à convaincre le gouvernement de ne pas aller de l'avant puis de mettre au recyclage ou à la poubelle ce projet de loi là... puis regarder ce citoyen-là dans les yeux, avec 30 000 $ d'augmentation minimum? Je ne pourrais pas, M. le Président, j'aurais trop honte.

On n'est pas rendus là, à la discussion, puisqu'on est encore sur le débat sur le projet de loi. Il va y avoir une étude détaillée, et j'espère de tout mon coeur que le gouvernement va entendre raison, que le premier ministre va entendre raison, pas uniquement par rapport à ce que Québec solidaire lui dit, mais ce que les citoyens aussi vivent. Qu'il revienne sur terre, comme le disait le chef, notre chef parlementaire, qu'il revienne sur terre, qu'il soit connecté à la situation réelle des Québécois et des Québécoises, ceux... les citoyens et citoyennes dont nous servons.

Il en va, selon moi, de la confiance du public. Les gens ne placent pas très haut les politiciens, par rapport aux métiers, au Québec, et ce qu'on doit faire, par respect pour notre démocratie et nos institutions, c'est leur donner confiance, pas augmenter encore plus le cynisme dans la population, comme le disait, dans sa lettre, l'ancien député de Mercier, Amir Khadir. Donc, j'espère qu'à un moment donné on va entendre d'autres personnes que le leader du gouvernement ou que le premier ministre parler de cette question, puisque les gens ont voté pour tous les députés qui sont ici, à l'Assemblée nationale. Et donc c'est notre devoir de prendre la parole et d'en parler. Et c'est donc notre devoir ici, dans le deuxième groupe d'opposition, quand on trouve que c'est juste, bien, de le dire haut et fort. C'est pour ça que les électeurs, c'est pour ça que les gens nous ont élus.

• (16 h 30) •

J'ai très, très hâte aussi de continuer d'entendre les débats, de voir où ça va aller, si, par exemple, le député de Matane-Matapédia va venir prendre la parole, dire ce qu'il a dit dans les médias, parce que c'est très, très juste. Plus on est nombreux à convaincre le gouvernement, mieux c'est. Et, si, par exemple, le gouvernement décide de procéder, puis qu'on est en étude détaillée, j'espère, j'espère que le gouvernement va aussi, peut-être, entendre raison et peut-être décider de... s'ils tiennent à cette augmentation-là, bien, qu'elle ne soit pas pour nous, qu'elle soit pour les députés de la prochaine législature, puisqu'un des principaux arguments que j'ai entendus, c'était le fait d'attirer des députés. Il n'y a pas de pénurie de députés. Les 125 sièges, là, à l'Assemblée nationale sont comblés. Il n'y a pas de pénurie de députés, contrairement à la pénurie d'enseignants, à la pénurie d'infirmières, à la pénurie de plein d'employés du secteur public qui donnent des services à la population. Donc, il n'y a pas d'urgence pour adopter la loi, pour adopter le principe, encore moins pour le faire sous le bâillon. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Mercier. Je reconnais maintenant M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne.

M. Guillaume Cliche-Rivard

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, M. le Président. Merci à mes collègues ici d'être là aujourd'hui. Salutations aux gens qui nous écoutent ici, à l'Assemblée, à la maison aussi.

Pour situer les gens, parce que, quand même, on a un long débat, on est toujours dans l'adoption de principe mais cette fois-ci sur la motion de report, bien sûr, dans le projet de loi n° 24, Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale. J'écoutais ma collègue. Ça me fait beaucoup réfléchir quand même. C'est très intéressant à entendre. Et, moi aussi, sur le terrain, quand même, depuis quelques semaines, on m'interpelle sur cette question-là, une question qui n'est pas simple, une question qui est difficile.

Je sors quand même tout droit d'une campagne électorale partielle dans laquelle il y avait plusieurs candidats, plus d'une dizaine, et tout le monde aspirait à avoir le privilège de venir représenter les citoyens de Saint-Henri—Sainte-Anne en connaissance de cause du salaire tel qu'il est, tel qu'il était affiché, tel qu'il est connu. Alors, il y avait quand même immensément de gens qui étaient venus participer aux débats démocratiques, qui étaient venus à nous comme candidats, là, dans les débats locaux avec les différentes associations de quartier, qui voulaient représenter Saint-Henri—Sainte-Anne à l'Assemblée, qui se sont présentés, qui ont fait leur porte-à-porte des heures, vous le savez, des heures de porte-à-porte, des heures de téléphone, tout ça en très grande connaissance de cause du salaire, de l'indemnité, tel qu'il était, bien sûr, avant la présentation du projet de loi. On ne le connaissait pas, ou les tenants et aboutissants du projet de loi, quand on s'est présentés, encore moins — parce que j'étais aussi candidat à l'élection générale de 2022 — en 2022 savions-nous que cette question-là allait resurgir de manière très, très, très imminente dans le débat public.

Donc, bref, malgré ça, à chaque fois, des candidats, de tous les partis confondus, considérant l'indemnité, considérant les avantages, s'étaient quand même lancés dans l'épopée qu'est une campagne et puis dans la volonté qu'est de représenter ses citoyens à l'Assemblée nationale, qu'importe le... pas «qu'importe», parce qu'ils le savaient, mais, sans que cette hausse-là soit d'abord annoncée, les gens étaient au rendez-vous.

Et, en porte-à-porte et dans les dernières semaines, les citoyens dans la rue, mais aussi à l'épicerie ou ailleurs dans le quartier — moi, j'ai la chance d'habiter ma circonscription — m'ont interpelé à plusieurs reprises, à savoir pourquoi, dans le contexte actuel, notamment, du... contexte inflationniste quand même difficile, notamment suivant nos promesses... On a fait des campagnes sur la promesse de s'attaquer au coût de la vie, quand même, de faire des propositions concrètes en matière de logement pour nous assurer que les gens de ma circonscription, mais aussi de partout ailleurs au Québec, soient capables de rester dans leurs appartements. On a fait des propositions de suspension de taxes, par exemple, dans la première campagne. Il y a eu plein de choses sur la table pour faciliter, pour les familles, de joindre les deux bouts. Et c'est ça qu'on a promis, essentiellement, en campagne électorale, c'est ça qu'on a voulu mettre de l'avant et qu'on a promis de faire comme probable unique priorité, là, au jour le jour, dans le contexte inflationniste d'aujourd'hui, de nous assurer que nos citoyens et citoyennes soient capables de joindre les deux bouts, qu'il n'y ait pas de décision difficile entre le paiement d'une facture d'Hydro ou le paiement de la facture de la garderie ou de la voiture, des plaques, etc., qu'il n'y ait pas de décisions absolument catastrophiques et difficiles, telles qu'elles se font actuellement, et qu'on soit prêts, donc, à les aider. Et ces gens-là, suivant cette promesse-là, s'attendent à ce que les élus, à l'Assemblée nationale, on travaille en ce sens continuellement, en tout temps, sans arrêter. Et là on est incrédule, on est surpris, on me questionne sur la pertinence, dans le contexte bien réel, difficile qu'on connaît, de proposer un projet de loi, le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui, qui va nous voter, nous, directement mais aussi rétroactivement, une augmentation de salaire de 30 000 $, alors qu'eux peinent à obtenir les quelques moyens, ou les quelques solutions... ou les quelques dizaines, voire centaines de dollars qui leur permettraient de boucler le budget mensuel.

Donc, quand même, face à ces gens-là, j'arrive avec une difficulté de réponse, parce qu'effectivement, contrairement à ce qu'on a vu dans les derniers jours, comparer le travail de l'un et de l'autre, c'est rarement à propos. Tous et toutes travaillent au meilleur de leurs capacités, j'en suis convaincu, certains, des heures incalculables, double chiffre, triple chiffre, des heures qui se suivent et qui se succèdent sans jamais vraiment s'arrêter. Mais ils ne peuvent pas, ces gens-là, évidemment, du jour au lendemain, s'auto-octroyer, se voter une hausse de salaire substantielle, bien qu'ils le voudraient. Ils sont actuellement, beaucoup d'entre eux, en négociation relativement avec leurs conventions collectives. Ils sont à négocier pour un peu plus, dans le contexte inflationniste qu'on connaît, et ça ne leur est que rarement accepté, du moins jamais au niveau où ça nous est présenté à nous aujourd'hui.

Et, quand on fait les visites, dans nos circonscriptions, de banques alimentaires, par exemple, où on en voit, des travailleurs et travailleuses qui peinent à joindre les deux bouts quand même, qui doivent dépenser les 7 $ ou 10 $ en contrepartie d'un paquet de nourritures qui leur permettront de combler les besoins alimentaires du mois ou de la semaine, c'est très difficile, après ça, d'avoir une légitimité sur le terrain, de leur expliquer qu'on comprend leur réalité, qu'on comprend les sacrifices qu'ils sont en train de faire dans le contexte où, en ce moment, ce débat... et se profilent et s'écrivent plusieurs chroniques qui mettent de l'avant constamment la proposition actuelle de hausse.

Et évidemment que les gens ne comprennent pas qu'on ne soit pas exclusivement et continuellement en train de mettre de l'avant des pièces législatives, des modifications réglementaires, des propositions qui s'adresseront plutôt uniquement et toujours à eux. Et, vous le savez, le gouvernement, les oppositions ont soumis plusieurs projets de loi qui vont directement et exclusivement dans l'intérêt du public, qui s'assurent, dans la meilleure des intentions, qu'on soit capables d'aider nos citoyens et citoyennes dans le contexte, dans le contexte des deux, trois dernières années, où vraiment l'explosion des coûts, les pénuries de main-d'oeuvre, l'inflation ont rendu ça de plus en plus difficile.

• (16 h 40) •

Alors, à chaque article, à chaque chronique, à chaque proposition, ou débat, ou avancée sur ça, c'est sûr que vient son lot de courriels, c'est sûr que vient son lot de discussions. Et on se voit, malheureusement, bien contre nous, dans la situation où on a eu l'air d'avoir mis ça de l'avant, où on a l'air d'avoir légitimisé ça ou d'avoir eu l'idée de proposer cette pièce législative, alors que ce n'est pas le cas. Et les gens se demandent bien alors pourquoi est-ce que cette question-là figure toujours au feuilleton, pourquoi on en parle encore.

Et je reviens à l'idée que le premier ministre a parlé qu'il fallait attirer des talents. Bon, peut-être, en toute humilité, que je ne suis pas le talent ou je ne fais pas partie des talents que le premier ministre identifiait, mais il y avait quand même un député, un candidat... peut-être vous, je ne le sais pas, mais il y avait quand même un candidat de son groupe parlementaire. À mon humble avis, celui-ci est un talent. Il aurait... Il est visé, je pense, par ce que le premier ministre appelle un talent. Cela dit, sans la hausse annoncée ou affichée, il était toujours... ou il était quand même en rendez-vous... au rendez-vous. C'est la même chose pour celui qui était là en 2022 et ceux-là qui étaient là tout avant.

Et je regarde mes collègues d'en face, mes collègues d'ici, moi, je les considère tous et toutes comme des talents, et je ne pense pas qu'ils ne le sont point ou que l'indemnité actuelle n'aura pas permis de les recruter. Au contraire, ils sont ici. Ils se sont battus en campagne. Ils ont gagné leurs élections, et leurs citoyens les ont élus. Et, pour moi, ils sont excessivement, tous et toutes, talentueux. Et, quand j'entends dire qu'il faut, donc, absolument hausser l'indemnité pour attirer des talents, moi, je veux plutôt faire le message, et mes collègues le savent ici, que je pense que les talents sont là. Je pense que les gens, ici, sont là pour les bonnes raisons, et ils ont travaillé fort pour porter l'épinglette, là, qu'on porte ici, dans cette 43e législature, certains depuis longtemps, beaucoup plus longtemps. Et ils vont continuer de le faire même si cette hausse devait être battue, même si elle devait être reportée.

Je suis certain que l'ensemble des députés ici présents continueraient leur travail de la même façon. Je suis certain qu'ils seraient tout aussi talentueux dans leur travail et je suis certain qu'ils mettraient toute l'énergie ou tout l'effort qu'ils sont absolument prêts à faire chaque jour. On comprend les sacrifices, quand même. On les vit. On est séparés de nos familles plusieurs jours par semaine. On travaille des heures interminables, sous une pression, quand même, accrue. Et, qu'importe qu'avait été le salaire au jour de l'assermentation, ces gens-là ont fait cette promesse et ils vont la faire sans égard à l'acceptation ou non de la motion de report. Je pense que, si on reportait ou on acceptait la motion jusqu'à l'année prochaine... Je suis certain que, sans augmentation, nos collègues feraient leur travail de manière assidue, de manière tout à fait conforme et légitime au serment qu'ils ont prêté envers l'Assemblée nationale.

Alors, pour moi, de lier l'attrait des talents à la question de la hausse, ça me semble quand même envoyer un message problématique alors que nous sommes toujours, presque tous partis confondus, plusieurs à nous battre pour un siège, pour une meilleure représentation à l'Assemblée, pour être un député de plus, 120 députés de plus, 125 députés de plus, pour qu'on soit toujours un groupe plus influent. Alors, je ne pense pas que certains, certaines font la décision basée sur l'indemnité, basée sur le salaire, en se disant : Vous savez quoi, si ça avait été 30 000 $ de plus, je serais allé, mais, finalement, au prix actuel, ça ne me tente pas. Je ne pense pas vraiment qu'il y a des gens qui se reconnaissent à la maison en disant : Maintenant que c'est 30 000 $ de plus, cette année, je vais y aller. Je pense que c'est une façon bien triste, probablement, d'imaginer comment se fait la décision de se lancer dans l'arène politique. Je pense qu'on est guidé par beaucoup plus que la question de savoir s'il y avait ou il n'y avait pas, finalement, cette année, la question du 30 000 $.

Ça me surprend d'autant plus dans le contexte où on semble être pressé, là. Ça semble être urgent. Il faut qu'on adopte ça, et ça presse, avant les vacances estivales, avant que l'Assemblée suspende. Pourquoi? Ça, ça n'a pas du tout, je pense, été justifié. On a des rumeurs de bâillon. Du moins, le premier ministre ne l'exclut pas. Je ne vois pas l'urgence d'agir. Je pense que tous et toutes ont fait leurs serments sur la base de l'indemnité qu'on connaît. Je ne pense pas que personne, demain matin, ne va décider que, si le p.l. est reporté ou annulé, ils vont décider de ne pas siéger. Je pense que personne n'a cette position-là. Donc, devons-nous à tout prix, d'urgence, voter ce projet de loi là? La démonstration, pour moi, n'en a pas été faite.

On parle du fameux club des 10. Le club des 10, M. le Président, ce sont les 10 députés, les seuls 10 de l'Assemblée nationale qui gagnons l'indemnité de base. Mon groupe parlementaire... j'en fais partie, mon groupe parlementaire en a sept des 10. Donc, en tant, quand même, que représentants majoritaires du club des 10, on ne voit pas l'urgence d'agir. On pense que la question peut très bien être portée, tel que le suggère mon collègue de Maurice-Richard... la motion me semble très à propos.

Et, écoutez, je reviendrai, j'ai du temps qui suivra un peu plus tard, beaucoup d'autres choses à partager avec l'Assemblée. Alors, je céderai la parole à mes collègues.

• (16 h 50) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne. Je reconnais maintenant Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Écoutez, ça fait bientôt cinq ans que je siège ici, les gens commencent à me connaître, je n'ai pas l'habitude de parler pour parler, de faire du temps, j'ai l'habitude d'aller droit au but. C'est la deuxième fois que je prends la parole sur ce projet de loi là aujourd'hui, puis je le fais parce que je trouve ça purement indécent ce qui est en train de se passer. C'est pour ça que je trouve que ça vaut la peine d'insister, c'est pour ça qu'on prend autant notre temps, actuellement, pour laisser du temps aux députés de la CAQ de réfléchir à ce qu'ils sont en train de faire, de réfléchir au message qu'ils sont en train d'envoyer à la population.

J'espère qu'ils prennent le temps d'écouter les interventions qu'on fait. J'espère qu'ils prennent le temps de réfléchir au message que ça envoie, au geste qu'ils sont en train de poser en se votant une hausse de salaire de plusieurs dizaines de milliers de dollars par année, alors qu'il y a des millions de Québécois qui ne sont pas dans la possibilité de hausser leurs revenus de cette manière-là, qui font face à l'inflation, qui font face à la hausse des taux d'intérêt, qui ne comprennent pas pourquoi les gens qu'ils ont élus pour les représenter ici, à l'Assemblée nationale, ne sont pas en train de défendre l'amélioration de leurs conditions à eux, sont plutôt en train de défendre l'amélioration de leur propre qualité de vie comme députés. C'est un problème majeur. Je voudrais qu'il y ait une prise de conscience de ça ici, à l'Assemblée nationale.

Ce matin, on a entendu le premier ministre défendre le droit de gagner le plus d'argent possible. Le plus d'argent possible. C'est comme ça que le premier ministre voit la vie. C'est lui-même qui nous l'a dit, ce sont ses mots à lui. Puis, je dois vous dire, ça explique beaucoup de choses. On avait déjà un peu compris ça entre les lignes, dans les dernières années, parce que c'est un peu leur mode de gestion, hein? À chaque fois qu'il y a une pénurie de personnel quelque part, bien, c'est prime après prime, après prime, sans prendre le temps d'essayer d'écouter les gens. Puis les infirmières nous l'ont beaucoup dit, d'ailleurs : Ce n'est pas des primes qu'on demande, on veut savoir à quelle heure on va pouvoir retourner chez nous, on veut pouvoir retourner chercher notre enfant au service de garde, souper à la maison de temps en temps, on veut pouvoir savoir qu'on va avoir une journée de congé ou des vacances sans se les faire annuler, on veut pouvoir prendre une petite journée de temps en temps sans se faire harceler pour rentrer quand même, sans se faire harceler pour rester pour un chiffre de plus. Ce n'est pas des primes qu'ils demandent, sur le terrain, en santé, c'est de la considération comme êtres humains qui ont envie d'avoir une vie en dehors de la job.

Ça fait que, le mode de gestion de la CAQ, on le voyait déjà, puis il est devenu extrêmement limpide ce matin, quand le premier ministre a dit que, lui, dans le fond, ce qui le préoccupe, c'est défendre le droit de ses députés de gagner le plus d'argent possible. Mais moi, je suis convaincue que ce n'est pas ce que veulent les députés ici. Quand ils sont allés en politique, ces personnes-là, tout le monde, peu importe le parti politique, ils ne sont certainement pas allés là pour faire le plus d'argent possible, ça ne se peut pas. On ne défend pas toutes les mêmes valeurs ici, là, mais tout le monde sait le travail considérable que ça prend comme député, personne, ici, qui compte ses heures dans une semaine, peu importe le projet politique qu'on défend. Ce n'est pas vrai que les gens se sont présentés en politique pour gagner le plus d'argent possible. Ça ne se peut pas qu'ils soient d'accord avec les propos que le premier ministre a tenus ce matin. Si le premier ministre veut défendre ça, qu'il le fasse, mais moi, j'aimerais que ses députés se lèvent et prennent la parole, au mieux à l'extérieur, au minimum au sein de leur propre caucus, pour discuter de ça, de ce qu'ils sont en train de faire collectivement comme parti politique.

D'ailleurs, le seul député de la CAQ qui a pris la parole ce matin pour défendre le principe du projet de loi, lui, il ne défendait pas le droit de gagner le plus d'argent possible. J'ai bien écouté son intervention, il déplorait de ne presque jamais voir sa mère, ses amis. Il nous parlait de la peine, de son sentiment de culpabilité de ne pas pouvoir passer du temps avec ses proches. C'est de ça dont il nous a parlé. Puis il n'y a pas d'argent qui va réparer ça. Il n'y a aucune augmentation de 30 000 $ minimum qui va venir compenser le temps qu'on n'a pas pour appeler notre mère, la voir, prendre du temps avec nos proches. Ce n'est pas l'argent qui règle ça. Peut-être une réforme parlementaire pourrait faciliter les choses, régler certains de ces enjeux-là, peut-être. On a travaillé là-dessus pendant plusieurs années dans la dernière législature. Ça n'a pas abouti, malheureusement.

Mais, oui, un des enjeux qui est vécu par tous les parlementaires ici, c'est la conciliation travail-famille-vie personnelle. Le manque de temps qu'on a en dehors de ça, ça fait partie des conditions de travail les plus difficiles qu'on vit. Mais ce n'est pas un plus gros chèque de paie qui va régler ça. En aucun temps, un plus gros chèque de paie ne va compenser pour chaque minute où les députés qui sont ici s'ennuient de leurs enfants, de leurs conjoints, de leurs conjointes, de leurs parents, de leurs amis, de leurs proches. Ça ne remplacera jamais ça.

Le premier ministre, ce qu'il défendait ce matin, c'est le droit pour ces députés, ou pour un père, ou une mère de famille qui veut se lancer en politique de gagner le plus d'argent possible pour ses enfants. Mais moi, je pense que ce qu'on devrait viser, c'est que cette personne-là puisse passer le plus de temps possible avec ses enfants, même si elle se lance en politique. C'est ça que j'aimerais voir le premier ministre défendre. Donc, je l'invite à réfléchir sérieusement à la position qu'il prend actuellement. Ce n'est pas vrai que l'argent est la seule réponse. Si ses députés lui font valoir que leurs conditions de travail sont difficiles, il y a d'autres solutions à ça, ce n'est pas juste le salaire.

Je veux renchérir aussi sur les propos de ma collègue la députée de Mercier puis de mon collègue le député de Saint-Henri—Sainte-Anne par rapport à l'urgence. On a entendu que le premier ministre était prêt à aller jusqu'au bâillon pour imposer une hausse de salaire de minimum 30 000 $ de plus à ses députés, alors qu'il n'y a absolument aucun enjeu de recrutement en ce moment. C'est probablement, le salon bleu, ici, là, un des seuls endroits au Québec pour lequel tous les postes sont comblés. Puis il n'y a pas d'enjeu de recrutement puis de rétention de la main-d'oeuvre. Il n'y en a pas, d'enjeu, par rapport à ça.

La dernière fois qu'il y a un siège qui s'est libéré, tout le monde, ici, est bien au courant, c'était Saint-Henri—Sainte-Anne. Moi, je suis convaincue à 100 %, il n'y a aucune chance que l'ancienne députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, Dominique Anglade, soit partie parce que le salaire ne la satisfaisait pas. Ce n'était pas ça, la raison de son départ. Cette femme-là était ici par conviction. Ce n'est pas ça qui l'a fait partir. Ce n'est pas pour ça qu'on n'a pas su la retenir en politique. Quand le siège est devenu vacant, ça s'est précipité pour la remplacer, et mon collègue vient d'en faire état. Cette course-là a été une chaude lutte, des candidats de qualité qui se sont présentés. Il n'y en a pas eu, de problème de recrutement. Puis d'ailleurs on a réussi à aller chercher une excellente recrue à travers cette course. Le siège n'est pas resté vacant longtemps. Puis je suis convaincue que, s'il y avait une autre élection partielle à y avoir, ce ne serait certainement pas parce qu'un député a décidé de partir à cause du salaire, à cause du salaire pas assez élevé, puis on n'aurait certainement aucune difficulté à combler ce siège-là, puis certainement que la recrue serait une personne avec d'énormes qualités, d'énormes compétences à mettre à contribution pour la société.

Donc, si on n'a pas de difficulté à trouver des candidats intéressants, pourquoi utiliser cet argument-là pour justifier une hausse? Et pourquoi le demander de manière aussi urgente? Pourquoi ça ne pourrait pas, au minimum, attendre à la prochaine législature? Les députés ici, là, même les moins bien payés, même ceux qui, comme mon collègue, font partie des seuls 10, sur les 125, qui n'ont pas d'indemnités supplémentaires, font tous partie des 10 % les plus riches au Québec. En 2019, pour faire partie des 10 % les plus riches au Québec, il fallait un revenu de 88 400 $. Tout le monde ici fait partie des 10 % les plus riches au Québec, aucune ambiguïté là-dessus. Donc, il faut prendre conscience de ça aussi, là.

Nous, notre responsabilité, c'est de prendre soin des personnes qui n'en font pas partie, en particulier celles qui en sont le plus loin. Notre responsabilité, c'est de réduire les inégalités entre les différentes personnes, au sein de la population, qui ont des revenus considérablement différents, là. Je veux dire, il y a des gens qui ne sont pas capables de se rendre à la fin du mois sans avoir recours aux banques alimentaires. C'est ça, les inégalités auxquelles on fait face actuellement, c'est ça dont on devrait s'occuper, c'est ça, notre responsabilité.

Alors, moi, je suis convaincue qu'il y a beaucoup de députés de la CAQ, en ce moment, qui sont extrêmement gênés de savoir qu'ils font partie des 10 % les plus riches, que leur premier ministre défend le droit, pour eux, de gagner le plus d'argent possible, alors qu'ils savent très bien que les citoyens qu'ils représentent, il y en a plein qui font la queue dans les banques alimentaires, puis qu'en plus ces banques alimentaires, bien, ils n'ont même pas assez de denrées pour fournir à la demande. Les députés, ici, ils le savent tous très bien. Ils passent... ils viennent de passer, là, une semaine en circonscription. Ils ont visité plein d'organismes dans leurs circonscriptions. Ils les connaissent, les réalités sur le terrain. Ils la connaissent, la précarité énorme des citoyens qu'ils représentent, peu importe où, sur le territoire du Québec, ils se trouvent. Même dans les circonscriptions les plus riches, il y en a, de la précarité. Et les députés ne font pas partie des personnes qui méritent qu'on se penche sur leur sort au niveau financier en ce moment au Québec.

J'aimerais dire aux députés de la CAQ que j'espère qu'ils travaillent en coulisses pour faire changer ça. C'est possible que la CAQ change d'idée. C'est arrivé souvent. D'ailleurs, c'est arrivé plusieurs fois. Puis d'ailleurs ils s'en font une fierté, d'être un gouvernement qui est capable de changer d'idée. C'est parfois une excellente chose, parfois moins. Ils ont abandonné la réforme du mode de scrutin. Ils ont abandonné aussi le troisième lien. Il y a des décisions meilleures que d'autres, mais, assurément, ce gouvernement-là est capable de changer d'idée. Puis parfois ça crée de la grogne, mais, dans ce cas-ci, là, par rapport à l'augmentation de salaire des députés, je suis convaincue à 100 % que ça ne créerait aucune grogne au sein de la population, peut-être un petit peu au sein du caucus, mais certainement pas au sein de la population. Il n'y a pas de député, ici, qui recevrait des messages de bêtises pour avoir décidé de reculer sur le projet de loi qui est à l'étude en ce moment.

Donc, moi, ce que j'ai à dire, c'est qu'il n'est pas trop tard pour cesser tout de suite l'étude de ce projet de loi, pour donner le mandat à un comité indépendant, exécutoire de se pencher sur l'ensemble des conditions de travail des députés, bien oui, les salaires, puis aussi le régime de retraite, puis, pourquoi pas, des congés parentaux, tant qu'à y être, puis la conciliation travail-famille. Moi, c'est l'invitation que je lance aux députés de la CAQ : Travaillez en coulisses, convainquez vos collègues, convainquez votre premier ministre que vous n'êtes pas ici pour faire le plus d'argent possible. Ça, ce n'est pas vrai. Vous êtes ici pour prendre soin des citoyens que vous représentez, puis ce n'est pas avec ce projet de loi là que vous allez y arriver. Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant Mme la députée de Verdun.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : Merci, M. le Président. Je joins ma voix à celles de mes collègues députés afin qu'on prenne le temps, tous ensemble, ici, de réfléchir à ce qui est en train de se passer dans cette Chambre. Vous savez, on a entendu tout le monde ici. On est conscients qu'un comité d'ex-parlementaires recommande, donc, une augmentation de salaire de 30 000 $ par année pour les députés de l'Assemblée nationale, une hausse qu'on nous dit qui va être immédiate, une hausse qui va être rétroactive.

Je veux revenir sur cet enjeu-là parce que, déjà, ce sur quoi je veux accentuer mes propos aujourd'hui, c'est le fait même que, comme élu, on ait le pouvoir de se voter une telle hausse. C'est scandaleux. On ne connaît aucun milieu de travail, aucun milieu de travail, dans lequel c'est possible de se dire un matin : Mes conditions de travail sont insuffisantes, et je vais me voter une telle hausse de 30 %, une hausse, en plus, rétroactive.

Actuellement, là, le plus bas salaire qu'on reçoit à l'Assemblée nationale, c'est 139 745 $ par année. Je ne sais pas si mes collègues connaissent des gens, dans leurs circonscriptions, qui font 139 745 $ par année, là. Moi, les gens que je croise à Verdun, les gens qui viennent me voir, le milieu d'où je viens, c'est des gens qui ont peine à arriver à la fin du mois, qui font tout leur possible pour payer le loyer, le service de garde, les frais de scolarité, l'épicerie avec 34 000 $, avec 40 000 $ avec 50 000 $. C'est ça, les salaires médians. C'est ça, les salaires moyens.

• (17 heures) •

Nous sommes parmi, puis je vais le dire, les personnes les plus privilégiées au Québec à partir... déjà, avec 139 000 $. Puis, en plus de ça, on exerce... Ce projet de loi, cette institution nous force à exercer un autre privilège qui nous est juste donné ici, aux députés, c'est d'être capables de se voter cette hausse-là. Ah! puis je veux qu'on se rappelle aussi qu'on a un des régimes de retraite les plus généreux du Québec. On a un des régimes de retraite les plus généreux au Québec. Nos conditions ne sont déjà pas à plaindre. Et, comme le disaient mon collègue de Saint-Henri—Sainte-Anne et ma collègue de Sherbrooke, moi aussi, je fais partie de ce fameux club des 10, des 10 personnes, seulement 10 parlementaires, qui sont touchées par l'indemnité de base. Je veux rappeler que 115 députés sur 125 touchent déjà des allocations supplémentaires qui peuvent porter leur rémunération totale à plus de 200 000 $.

Encore une fois, je demande à mes collègues de se promener dans les rues de leur quartier et de leur circonscription puis demander aux gens qui gagne 200 000 $. Puis la réponse est simple, c'est, encore une fois, un pourcentage très petit de cette société. Et on n'a pas seulement le privilège d'avoir ce salaire-là, on a un privilège absurde de devoir se voter des hausses ici, en Chambre.

Vous savez, l'augmentation qui est proposée, d'au moins 30 000 $ par année, c'est un montant qui équivaut à un an de travail au salaire minimum. Ça fait que moi, je me mets à la place d'une personne, caissière à l'épicerie, une personne qui gagne le salaire minimum puis qui entend ça aux nouvelles, ça démontre la déconnexion, la déconnexion qu'on veut... — moi, je crois bien que tous mes collègues travaillent, en fait, très, très fort pour être sur le terrain — une déconnexion qu'on veut, en fait, être capables de se distancier. Mais, lorsqu'on fait des projets de loi comme ça pour se payer des hausses de salaire, on augmente ce sentiment de déconnexion envers des gens qui, eux, n'ont pas les moyens d'aller se voter une telle hausse. Je veux vraiment avoir une pensée pour ces personnes-là, qui doivent se dire : C'est qui, ces gens si loin de moi qui se disent... qui ont ce pouvoir-là, pendant que des travailleurs et travailleuses dans plusieurs milieux de travail n'ont pas ce privilège?

Quand, moi... penser à des gens que j'ai côtoyés, je dis : Moi, je viens d'un milieu très, très modeste, puis j'ai grandi entourée de personnes au salaire minimum, j'ai grandi en faisant la ligne à la banque alimentaire. Je sais c'est quoi, ces gens-là, je sais leurs préoccupations, parce que je les ai vécues, puis ma mère les a vécues, et tout le monde autour de moi les a vécues. Et, quand on me parlait, autour de la table, en fin de semaine, puis je parlais avec mes voisins, voisines dans ma circonscription, personne ne comprenait comment ça se fait que vous allez... vous avez le pouvoir... on a le pouvoir, ici, de se voter une telle hausse, pendant que les gens vivent, là, l'effet de l'inflation. En ce moment, les gens vivent l'effet de l'inflation, la hausse des loyers ou du coût de la vie, puis ils n'ont pas de moyen pour s'en sortir.

Je veux aussi penser aux jeunes, parce que je représente le dossier jeunesse, des jeunes qui se disent inquiets de leur futur. Oui, on peut... Je parle souvent, ici, de changements climatiques, parce que c'est une des grandes préoccupations, mais il y a des jeunes qui sont très, très inquiets par le futur de leurs conditions économiques, qui ne rêvent même pas à acheter une propriété. Je veux avoir une pensée pour eux quand... puis j'invite à mes collègues d'avoir cette pensée-là pendant qu'on a ce débat sur le projet de loi n° 24.

Je veux aussi avoir une pensée envers tous les travailleurs et travailleuses en environnement. Moi, je viens d'un milieu en recherche en environnement. J'ai travaillé avec des groupes communautaires en environnement, qui, à peine... ils sont payés des salaires très, très petits pour faire un travail de protection important. Moi, je peux les nommer, c'est nos coordonnateurs dans nos OBV, c'est les personnes qui font du travail auprès de nos organisations environnementales de terrain, de protection, de conservation. Je veux avoir une pensée pour les collègues qui sont agronomes dans des centres d'expertise et qui ne peuvent pas, un jour, se lever et améliorer par eux-mêmes leurs conditions de travail.

Je pense que le message que mes collègues de Québec solidaire et moi, on veut faire à nos autres collègues députés, c'est de dire à soi-même : Qu'est-ce qu'on est en train de faire, ici? Comment ça se fait que, pendant que des milliers de personnes au Québec n'arrivent pas à payer, n'arrivent pas à combler l'ensemble des factures, ils s'endettent — parce que l'endettement augmente à chaque jour — M. le Président, nous avons le pouvoir, ici, de voter une hausse de 30 000 $? Moi, je veux dire, ça me dérange, ça. Ça devrait être impossible. Puis le fait qu'on n'a pas eu un processus indépendant, c'est encore plus dérangeant. On ne devrait pas avoir ce droit-là. Personne n'est venu ici, en politique, pour se donner des privilèges. J'espère croire que c'est ça aussi qui anime mes collègues ici, en Chambre.

Puis, comme disait ma collègue de Sherbrooke, il n'y a aucune urgence, il n'y a aucune urgence de voter ce projet de loi. C'était difficile, entendre, tantôt, les propos du premier ministre, de lire les propos du ministre, de dire qu'on a... on va aller peut-être voter ce projet de loi par bâillon. Il n'y a aucune urgence, et on a le temps de réfléchir, on a le temps de se positionner, ceux et celles qui n'ont pas eu la chance de le faire. Parce que, si on se vote... on vote ce projet de loi là, si on se vote cette hausse-là, on va créer un abîme qui est encore... qui est très, très grand, je vous dirais, entre nous puis la population du Québec. Il faut qu'on travaille, comme députés, à rétablir cette confiance dans nos institutions.

Puis faire ce qu'on est en train de faire est... se voter une telle hausse, ici, en conflit d'intérêts, envoie un message de déconnexion, envoie un message de... peut-être même des gens qui vont dire : Est-ce que ces gens s'intéressent à nous? Est-ce que les personnes qui représentent les Québécois et Québécoises s'intéressent à ce que la caissière de l'épicerie est en train de vivre, s'intéressent à ce que nos travailleurs et travailleuses dans nos centres, dans nos comités communautaires, dans le communautaire sont en train de vivre? Parce que ces personnes-là ne peuvent pas se payer une hausse de salaire, même qu'ils sont en train de travailler avec moins de sous à chaque jour pour combler à des besoins en termes de services sociaux, puis qu'ils sont en train de combler ces besoins-là puis ils ne peuvent pas se tourner à leur C.A. puis s'augmenter le salaire parce qu'il n'y en a pas, de sous, il n'y a pas de sous dans le communautaire, mais nous, ici, on est capables, puis nous, ici, on est capables en étant déjà assez privilégiés avec le salaire que j'ai mentionné tantôt.

Et un argument, aussi, que j'aimerais inviter les collègues à réfléchir, on nous dit souvent : On travaille très fort en politique. Puis on le sait, on passe tous des soirées avec nos équipes plutôt que les passer avec nos familles, on passe nos fins de semaine avec nos citoyens plutôt que voir nos amis, ça fait partie du service public. C'est un sacrifice que je reconnais que l'on fait tous et toutes ici, dans la Chambre... en Chambre. Mais je veux qu'on pense aussi aux travailleurs et travailleuses qui font le même sacrifice que nous et qui ont deux jobs, une job la semaine, une job la fin de semaine, des fois la nuit, puis qui ne voient pas leurs enfants puis ne voient pas leurs amis, ils n'ont pas le luxe d'avoir des vacances. Ces personnes-là existent aussi. Ces personnes-là existent aussi, puis je veux qu'on comprenne le message qu'on est en train de les envoyer.

Je veux qu'on pense aux travailleurs et travailleuses d'Amazon qui se battent pour de meilleures conditions de travail puis qui ne sont... ils ne vont pas... ils travaillent très fort, très fort, même plus que 40 heures-semaine, mais ils n'ont pas le pouvoir qu'on a d'aller se voter leurs propres salaires. J'ai une pensée pour les travailleurs de Dollarama, les travailleurs et travailleuses dans des hôtels, comme des femmes de chambre, et même pour les personnes... des préposés aux bénéficiaires, qui travaillent très fort puis ils ne vont... ils ne pourront jamais se voter une telle hausse de salaire. Au contraire, pendant la pandémie, il y a certains préposés aux bénéficiaires qui ont tout donné et qui, à cause de leur statut immigration, n'ont pas reçu une hausse de salaire, ils ont reçu des avis de déportation. Puis ça, je veux aussi le dire pour qu'on réfléchisse et qu'on prenne en considération ces personnes-là.

L'augmentation qu'on nous propose est beaucoup plus rapide que l'inflation, alors que le gouvernement propose moins de 9 % d'augmentation aux infirmières et aux enseignantes de services publics. Je tiens à le mentionner, comme ça a été fait par mes collègues auparavant.

Puis qu'est-ce qu'on fait avec l'argument d'attirer des gens en politique? On le disait, on n'a pas manqué de candidats lors des dernières élections, on n'a pas manqué de candidats lors de l'élection partielle. Je n'ai... on n'a pas manqué de candidats à Verdun. J'ai eu le plaisir de débattre avec près de 11 personnes qui se sont présentées dans ma circonscription, puis je les salue, d'ailleurs, pour le travail qu'ils ont fait comme candidats et candidates. Partout au Québec, on n'en manque pas, de personnes qui veulent se lever puis représenter leurs régions puis leurs comtés.

• (17 h 10) •

Alors, quand on dit qu'on veut attirer des nouvelles personnes en politique, de qui qu'on parle? Est-ce qu'on parle de juste des P.D.G. des grandes entreprises? Parce que, si on veut attirer des gens en politique, puis tantôt ma collègue faisait mention, il faut qu'on pense à l'ensemble du travail des députés. Personne n'est venu ici pour se faire du cash. Je le répète, on l'a dit, il faut qu'on pense à notre fonction, il faut qu'on pense aux conditions, surtout des femmes, des jeunes femmes qui veulent venir en politique, pour lesquelles la conciliation travail-famille est plus difficile, pour les personnes qui vivent avec un handicap, que peut-être, même venir dans cette Chambre-là, c'est plus difficile. Donc, toutes ces choses-là, c'est des choses sur lesquelles il faut qu'on travaille plutôt que des choses... se voter nous-mêmes un salaire ici. Parce que s'attribuer une telle augmentation, comme je disais, envoie un message de déconnexion envers les gens que nous représentons, avec les gens que je croise dans la rue à Verdun.

Puis, on l'a dit, le processus est vicié. Encore une fois, on est juge et partie en votant nous-mêmes cette augmentation de salaire, on est en conflit d'intérêts direct. Puis ce qu'on demande, c'est de mettre sur pied un processus indépendant qui va sortir, pour une fois pour toutes, le fardeau qu'on a de se voter nous-mêmes nos salaires, cette fâcheuse position de devoir statuer sur notre salaire. Ça ne devrait pas être à nous de le faire. Il nous faut un comité indépendant qui va être capable d'exécuter ce mandat-là, puis ce n'est pas à nous, ici, de le faire.

Je répète, on n'a aucune urgence, on n'est pas ici dans... on ne siège pas à l'Assemblée nationale pour s'octroyer entre nous, déjà, des privilèges, encore plus de privilèges. Il faut travailler à regagner la confiance de nos concitoyens et concitoyennes. Puis j'invite à tous mes collègues ici, en Chambre, d'avoir cette réflexion-là, de parler entre vous, de parler dans vos caucus respectifs. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Verdun. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je reconnais maintenant M. le député de Maurice-Richard.

M. Bouazzi : Merci, M. le...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Pardonnez-moi, M. le député de Maurice-Richard, je n'étais pas à la présidence, mais je crois que vous êtes déjà intervenu.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Pas sur la motion? Alors... Non, mais vous avez... on m'informe que vous avez présenté la motion.

Attendez un petit instant, je vais suspendre nos travaux quelques instants, juste pour m'assurer de la bonne procédure.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

(Reprise à 17 h 17)

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, nous reprenons le débat sur la motion de report. Et je suis prêt, maintenant, à reconnaître le prochain intervenant, et ce sera M. le député de Taschereau. M. le député.

M. Etienne Grandmont

M. Grandmont : Merci beaucoup, M. le Président. Très heureux d'être ici aujourd'hui pour discuter d'un projet de loi très important, très important parce que gênant, en fait, gênant comme projet de loi, gênant de se retrouver dans une situation où un groupe de personnes est en mesure... ou prépare, en fait, la capacité de se donner lui-même une augmentation de salaire. Moi, je le décris comme ça. Je ne sais pas qu'est-ce que ça vaut, le travail d'un député, je ne sais pas qu'est-ce que ça vaut. Moi, je sais que je gagne beaucoup plus d'argent que ce que je gagnais dans le communautaire avant, et il y aura des beaux parallèles à faire avec les gens qui travaillent au salaire minimum, des gens qui travaillent dans le communautaire, des gens qui ne travaillent pas moins que bien des gens que je côtoie ici et qui, déjà, gagnent beaucoup moins d'argent, mais aussi n'ont certainement pas le loisir, le luxe, la possibilité de se voter eux-mêmes leur augmentation. Parce que c'est ça, le principal... la principale faiblesse de ce projet de loi là. Moi, je suis... je trouve ça hallucinant d'avoir la possibilité de me payer... de me voter mon propre salaire. Je suis persuadé que, si on donnait la possibilité aux gens un peu partout au Québec de se voter eux-mêmes leur salaire, on observerait des hausses de salaire pas mal importantes au Québec, M. le Président.

Les besoins sont grands. Les gens qui travaillent au salaire minimum... Il est rendu à combien le salaire minimum? Il est rendu à 15,25 $, de mémoire. 15,25 $? 15,25 $, M. le Président, ce n'est pas assez pour sortir de ce qu'on considère être le seuil de la pauvreté. Quelqu'un qui travaille à temps plein à 35 heures par semaine, voire même peut-être 40 heures par semaine n'arrive pas à se sortir de la pauvreté en travaillant au salaire minimum.

C'est quand même fou, aujourd'hui, dans une société aussi riche et aussi fière de ses racines, disons, sociales-démocrates, de se retrouver avec des gens qui travaillent au salaire minimum à temps plein, qui n'ont même pas d'enfants, là, des gens qui... des personnes qui sont seules, célibataires, qui travaillent au salaire minimum et qui sont obligées, aujourd'hui, de fréquenter les banques alimentaires. Et c'est ce qu'on voit. J'ai rencontré, récemment, les gens de chez Moisson Québec, que vous connaissez peut-être, M. le Président, des gens très dévoués, des gens qui travaillent à aider les gens à finir la fin de mois, des gens qui font un travail essentiel, évidemment, et qui s'occupent, en fait, de récupérer, hein? Tu sais, c'est intéressant comme principe, Moisson Québec, ils font le travail de grossiste, en fait, qu'ils ne veulent pas voir faire par les petites organisations qui travaillent sur le terrain avec les personnes en situation de pauvreté. Donc, ils vont s'assurer d'aller collecter, avec leur flotte de camions, d'aller chercher le matériel, les denrées qui sont données soit par des fondations, soit qui sont données par des chaînes de supermarchés, par exemple, qui vont les chercher, les ramènent à leur entrepôt, réfrigèrent ça et après s'assurent de faire la distribution vers les petites organisations, qui, elles, sont collées sur les gens, là, ces personnes-là qui sont... qui vivent la pauvreté, qui vivent des enjeux de revenus.

Puis, vous savez, M. le Président, dans le budget d'une personne, dans le ménage québécois, il y a des dépenses qui sont compressibles puis il y en a d'autres qui sont incompressibles. On l'a souvent répété, on parle souvent de logement ici, au Québec, là... à l'Assemblée nationale, pardon, la question du logement, c'est un poste budgétaire qui est incompressible, c'est un budget que, malheureusement, on ne peut pas réduire comme on le voudrait. Bon, chez Québec solidaire, on a, évidemment, des propositions pour alléger ce fardeau important des ménages québécois, mais, pour ce qui est du commun des mortels, là, c'est un poste qui est malheureusement incompressible.

• (17 h 20) •

Les transports, c'est le deuxième poste. Donc là, des fois, les gens vont réussir à compresser ce poste-là, vont utiliser le transport en commun, les gens les plus pauvres vont se mettre à marcher beaucoup, utiliser le vélo, parce qu'ils n'ont pas d'autres moyens pour se déplacer.

Mais le troisième poste en importance chez les ménages québécois, c'est l'alimentation, et on baisse, on baisse ce poste-là et on décide de couper dans la bouffe. On achète de la nourriture de moins bonne qualité, on mange moins. Il y a beaucoup de jeunes qui arrivent à l'école le matin et qui n'ont pas le ventre plein. Ça, M. le Président, je trouve ça tout à fait déplorable dans une société comme la nôtre.

Et donc, pour revenir à Moisson Québec, ce qu'ils me disaient, c'est qu'il y a une hausse phénoménale du nombre de personnes qui fréquentent les banques alimentaires, et, là-dedans, il y a de ces travailleurs qui travaillent au salaire minimum et qui, malheureusement, là, viennent gonfler les chiffres de Moisson Québec. Si on leur permettait une hausse de salaire équivalente, en pourcentage, je pense que les gens au Québec... Bien, à peu près, tu sais, c'est 30 %, disons ça comme ça. 15 % de 15,25 $, ça amène, à quelque part, autour de 20 $ de l'heure, on atteindrait, justement, le seuil de pauvreté. Donc, augmenter d'une hausse équivalente à ce qu'on veut s'octroyer nous-mêmes, ici, aux gens qui sont à salaire minimum, sauf erreur, on s'approche du 20 $, 21 $ de l'heure et on irait chercher le seuil de pauvreté, on sortirait de la pauvreté pour tous les gens qui sont au salaire minimum.

Donc, moi, ce que j'aimerais bien, c'est qu'on offre aux gens la possibilité d'avoir cette possibilité-là. Pourquoi nous, nous l'offrir alors qu'on maintient des gens qui sont au salaire minimum à un salaire qui est en dessous du seuil de la pauvreté? C'est une grande question à laquelle je n'ai pas de réponse, mais pour laquelle je trouve qu'il y a une profonde injustice, M. le Président. Moi, je trouve que c'est incohérent et injuste de, nous, nous octroyer une hausse importante et, par ailleurs, la refuser aux gens qui sont à l'aide... qui ne sont pas à l'aide sociale, pardon, mais qui sont au salaire minimum.

Par ailleurs, l'offre qui est sur la table, à travers ce projet de loi là, c'est 30 000 $ pour les députés sans responsabilités. On est 10. On m'a dit, tantôt, de parler du club des 10, dont je fais fièrement partie. Donc, on est 10 députés à être touchés par une hausse de 30 000 $. Évidemment, il y a beaucoup d'autres personnes, au sein de cette Assemblée, qui toucheraient davantage que ce 30 000 $ là, j'y reviendrai tantôt. Mais le 30 000 $ par année, quand on divise ça par 35 heures par semaine puis on divise ça, après ça, par 52 semaines, ça fait un salaire... un taux horaire de 16,48 $ brut. Ça, c'est en haut du salaire minimum. Donc, les députés, ici, sont en train d'étudier un projet de loi où on se voterait une hausse de salaire qui est plus élevée que le salaire minimum au Québec.

Donc, je reviens là-dessus, là, sur l'indécence de cette proposition-là, le fait que nous-mêmes, nous nous votions une hausse qui soit plus élevée que ce que le salaire minimum offre aux Québécois qui travaillent au salaire minimum. Moi, je trouve qu'il y a une profonde injustice à ce niveau-là. C'est quand même indécent. Et je comprends les gens d'être fâchés, je comprends les gens de nous interpeler dans la rue.

Je ne sais pas s'il y a beaucoup de membres du gouvernement ou du Parti libéral qui ont suivi les recommandations de notre chef parlementaire et co-porte‑parole, qui disait : Allez parler à la caissière de l'épicerie, allez parler à la caissière de la caisse populaire, allez parler à l'employé qui est en bas de l'échelle, là, puis demandez-lui comment il trouve ça, une augmentation de salaire de 30 000 $ par année, voire plus quand on est avec des responsabilités supplémentaires. Donc, il y a quelque chose là qui me choque profondément. Je ne sais pas si les gens ont fait ce travail-là, mais, moi, dans la rue, on m'en parle, on m'en parle beaucoup. On ne m'en parle pas juste parce que moi-même, je viens du milieu communautaire, puis mon réseau, c'est des gens qui ne gagnent pas des gros, gros, gros salaires, mais parce qu'il y a une indécence profonde. Je pense que les gens se questionnent sur la façon de procéder encore plus que sur le montant lui-même, parce que ça n'a juste pas de sens de se l'offrir soi-même.

Aujourd'hui, il y avait une manifestation à l'extérieur. On est quelques députés solidaires à avoir été participer à cette manifestation-là, à aller rencontrer les gens. C'était pour souligner la création... bien, pas la... bien, l'écriture de l'adoption de la loi pour un Québec sans pauvreté. Il y avait là des gens qui représentaient des organisations d'un peu partout au Québec, qui travaillent avec les gens qui sont en situation de... certaines difficultés financières, des gens qui sont en situation de faibles revenus, qui sont à l'aide sociale, des gens qui travaillent au salaire minimum, des petits travailleurs, des gens qui sont en alphabétisation, en parcours de réapprentissage de notre belle langue française pour pouvoir intégrer le marché du travail, des gens qui travaillent dans des... sur des enjeux de logement, donc des gens d'un peu partout qui étaient là pour souligner l'adoption de cette loi, mais tout le travail qu'on doit faire encore aujourd'hui, en 2023.

Puis du travail, il y en a beaucoup, beaucoup, beaucoup à faire, M. le Président. Il y a beaucoup à faire. Je l'ai dit tantôt, si on augmentait de 30 % le salaire minimum au Québec, déjà on sortirait beaucoup de monde du... de la pauvreté au Québec. Peut-être qu'on aurait moins de monde qui irait recourir aux services de Moisson Québec. Peut-être qu'on aurait moins de gens, aussi, qui auraient des enjeux de santé parce qu'ils coupent dans les médicaments. Quand on n'a pas d'argent, je vous l'ai dit tantôt, il y a des postes qui sont incompressibles, le logement en est un puis il est important. Puis on l'a souligné à plusieurs reprises, le logement a augmenté de façon importante, le prix des loyers a augmenté énormément dans les dernières années, et ajoutons à cela qu'il n'y a pas de mesures de contrôle des loyers adéquates au Québec.

Il y a plusieurs mesures qui ont été discutées, débattues. Je pense que les gens du gouvernement et des oppositions ne seront pas surpris si je rappelle certains... certaines propositions qu'on a faites à travers le temps, notamment celle de protéger nos aînés à travers la clause F du bail, de protéger aussi les nouveaux locataires qui signent un bail, donc on parle de clause G, hein, savoir le prix que payait l'ancien propriétaire dans son logement, donc des espèces de mesures de contrôle du loyer aussi gérées par le Tribunal administratif du logement, c'est très important. Il n'y a rien qui vient protéger les locataires, des gens qui ont de la misère à arriver. On le sait, là, actuellement, les gens doivent faire la démonstration eux-mêmes... les ménages locataires doivent faire la démonstration eux-mêmes qu'ils subissent une hausse injustifiée de loyer. Donc, c'est aux gens qui, souvent, ne gagnent pas beaucoup d'argent, qui ont des hausses... pas des hausses... bien, qui ont des hausses de loyer importantes, qui doivent eux-mêmes se débattre, se défendre face à des propriétaires qui sont souvent organisés, qui connaissent très, très bien la game, comme on dit en bon latin, qui sont accompagnés par des avocats, des propriétaires qui, souvent, là, sont propriétaires de plusieurs... des gros stocks de logements, des gros... des grands ensembles immobiliers. Donc, c'est des hausses de loyer importantes que les gens subissent, et on a proposé, à travers le temps, que ce soit l'inverse, qu'on renverse le fardeau, que ce soit plutôt le propriétaire qui doive aller faire la démonstration au Tribunal administratif du logement que cette hausse est justifiée.

Donc, ça, c'est des choses qui peuvent être faites. Mais, encore une fois, on dirait qu'il y a comme une ligne de pensée très forte au gouvernement, on ne veut pas aider tant que ça les gens qui sont à l'aide sociale, les gens qui sont en situation de pauvreté, les gens qui ont un salaire... qui travaillent au salaire minimum puis qui n'arrivent plus à joindre les deux bouts. Puis, de l'autre côté, on se vote une hausse de salaire de 30 000 $, voire plus, selon les responsabilités, et qui, honnêtement, est beaucoup plus que ce que ces gens, même, gagnent dans une seule année.

Et je n'ai même pas parlé des locataires aînés, là, j'ai oublié d'en parler, en fait, mais c'est important de le souligner, tant qu'à avoir la tribune, de reparler de nos aînés, qui, pour l'instant, grâce à la loi Françoise David, se voient protégés, là, contre toutes sortes de manigances de leurs propriétaires, quand elles ont 70 ans ou plus et 10 ans de plus d'ancienneté dans leur logement. Nous, on a proposé de baisser ça, là, à 65 ans et cinq ans pour protéger les aînés. Et ça, c'est une population, aussi, qui est très, très, très fragilisée. Mais je serais curieux de les entendre, moi, les aînés. Je serais curieux de les entendre, les aînés, dans le cadre d'un projet de loi qui donne suite aux recommandations d'un comité sur l'augmentation de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale.

• (17 h 30) •

D'ailleurs, ça m'étonne aussi qu'on n'ait pas eu d'auditions dans le cadre de ce p.l. là. Pourquoi se forcer à vouloir accélérer tant que ça l'adoption d'un projet de loi? Qu'est-ce qu'il y a de si pressant? De toute façon, hein, ce qui est prévu dans le projet de loi, c'est qu'il soit rétroactif. Donc, que la rétroactivité commence en septembre ou qu'elle commence au mois de mai ou au mois de juin, bien là, ça ne change pas grand-chose, là. Donc, on aurait pu faire des auditions, comme on le fait dans la plupart des projets de loi, un processus que j'apprends à découvrir, hein, je suis nouveau ici, à l'Assemblée nationale, et je trouve ça très important d'entendre les contreparties, d'entendre des opinions différentes, d'entendre des acteurs qui ont peut-être une opinion intéressante sur le projet de loi. Pourquoi voter... pourquoi s'organiser, ici, à la va-vite, en catimini, pourquoi vouloir faire ça de manière express alors que rien ne presse? La rétroactivité aurait existé. On aurait pu l'adopter en 2025, ce projet de loi là, on aurait pu avoir la rétroactivité, selon la façon dont c'est expliqué dans le projet de loi, donc, dans la façon dont c'est prévu dans le projet de loi.

Donc, pourquoi vouloir faire les choses aussi rapidement? Pourquoi vouloir clencher, comme on dit en bon bulgare, pourquoi vouloir clencher, avant les vacances d'été, ce projet de loi là? Est-ce que c'est parce qu'il y a un inconfort? Je ne sais pas, ça ne nous est pas dit, on n'a pas accès à cette information-là. Et les différents membres du gouvernement longent les murs quand ils se font poser la question par les journalistes. Il n'y a pas beaucoup d'ouverture à la discussion sur ce projet de loi là. Donc, moi, c'est quelque chose qui me préoccupe. D'habitude, on est davantage à essayer de trouver des voies de passage, à essayer de trouver des façons d'améliorer les projets de loi, d'entendre ce que les gens ont effectivement à dire, tu sais. Donc, voilà, je ne comprends pas pourquoi on est cette étape-là en train de discuter de ça. Est-ce qu'on...

Ah oui! c'est ça, il y avait quelque chose d'intéressant. Le projet de loi prévoit que cette... en fait, l'argument qui est utilisé pour déposer ce projet de loi là, c'est qu'on veut intéresser davantage de gens à venir, à se présenter aux élections pour les différents partis. Moi, là, c'est quelque chose qui m'a fait un peu rire, honnêtement, quand j'ai entendu cet argument-là. Moi, je n'ai pas senti qu'on avait une pénurie de candidats aux élections. D'une part, je trouvais que ce qu'on avait présenté comme candidatures, les 125 candidats qu'on avait présentés, chez Québec solidaire, étaient très bons. C'étaient des bonnes candidatures, des hommes et des femmes du Québec qui étaient prêts à mettre leur coeur, leur tête, leurs tripes sur la table pour défendre les idées, les valeurs de Québec solidaire, des gens d'une grande pertinence, compétents, compétentes, des gens qui veulent changer le Québec en faveur du bien commun.

Et je me demandais pourquoi on avait tant que ça besoin de... d'où venait cet argument, finalement, d'attirer des bonnes candidatures. Je veux dire, un, on n'a pas manqué personne, chaque parti, disons, en importance, là, les principaux partis ont présenté 125 candidats, d'une part, mais, d'autre part, je veux dire, chez nous, en tout cas, pour notre part, on était très fiers des candidats, des candidates qu'on a réussi à attirer. Donc, je me pose la question : Est-ce que les partis qui sont en faveur du projet de loi, la CAQ, le PLQ, est-ce qu'ils étaient insatisfaits des candidats, des candidates qu'ils ont réussi à attirer sur la ligne de départ, au début des élections? Moi, je pose la question. Je n'ai pas de réponse. Ce n'est pas à moi de juger de la pertinence des gens qui étaient sur la ligne de départ à l'élection de l'automne dernier, mais je me demande en quoi on avait... on sent le besoin d'être capable d'attirer d'encore meilleures candidatures à travers une hausse de salaire. Bon, ça, c'est la première question qui m'est venue à l'esprit.

Puis la deuxième réflexion qu'on a eue par la suite, c'est : Effectivement, si c'est pour attirer des gens aux élections, si l'objectif, c'est d'attirer de meilleures candidatures aux élections, bien, ce travail-là doit commencer, nécessairement, à l'élection de 2026. Il n'y a rien qui dit... il n'y a rien à changer sur la composition actuelle, à moins qu'on ait une partielle prochainement, je ne sais pas, il y a peut-être des annonces qui seront faites éventuellement, vous nous le direz. Mais, pour moi, si l'objectif est effectivement d'attirer des candidatures pour la prochaine campagne électorale, bien, la prochaine campagne électorale, elle est en 2026, elle n'est pas avant.

Donc, pourquoi faire cette augmentation de salaire là maintenant, alors que l'objectif, c'est d'attirer des candidatures en 2026? Et, qui plus est, pourquoi faire un mécanisme de rétroaction? Il y a quelque chose qui, fondamentalement, ne fonctionne pas. On est dans une espèce de «loop», là, qui... un continuum, on vient dérégler le continuum espace-temps, aurait dit une personne dans un film que j'écoutais quand j'étais jeune. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, fondamentalement, il y a quelque chose qui cloche dans le raisonnement.

En tout cas, moi, je me questionne beaucoup sur le processus, sur les motivations qui sont derrière l'augmentation de salaire dans le but d'attirer de meilleures candidatures. Ça me questionne vraiment puis, vraiment, c'est ces deux aspects-là, à la fois la qualité des candidatures, est-ce qu'on est insatisfaits de la qualité des gens qu'on a réussi à regrouper, puis, de l'autre côté, pourquoi faire le travail aujourd'hui, dès maintenant, et même de manière rétroactive, pour une élection qui arrivera dans trois ans et des poussières.

Vous savez, la question des salaires des députés fait beaucoup jaser, fait beaucoup couler d'encre. Il y a notre ancien député Amir Khadir qui avait appelé... pardon, qui a écrit une lettre ouverte. Je ne sais pas si mes collègues en ont fait mention dans les précédentes interventions. Mes excuses, hein, j'étais en commission parlementaire sur le projet de loi, là, sur Airbnb, donc j'ai peut-être manqué des bouts, mais je me permets d'y revenir quand même. Le député Khadir, l'ancien député Khadir, dans le fond, rappelait qu'il a siégé de 2008 à 2018, et il se posait les mêmes questions : Qu'est-ce qui pourrait être équitable? Qu'est-ce qui serait acceptable aux yeux du public pour ne pas saper la confiance en l'intégrité de l'institution? Puis la question, puis il insiste là-dessus, la question de la confiance de la population, c'est la base de la démocratie. Si on doit... si on veut maintenir la démocratie au Québec, si on veut s'assurer que les gens ont confiance dans le système démocratique dans lequel on évolue, si on veut que cette confiance-là demeure, il faut éviter de souffler sur les braises du cynisme. C'étaient ses paroles : «Évitons de souffler sur les braises du cynisme ambiant.»

Et je pense que le message, en fait, du député, je ne sais pas si j'ai le droit de l'appeler député, mais en tout cas député... Oui, député Khadir?

Une voix : ...

M. Grandmont : Ex-député Khadir, de Mercier, je pourrais dire ça. L'ex-député de Mercier voyait très clairement la question du conflit d'intérêts. Et je pense qu'elle est là, fondamentalement, la grande question qui tue, là, c'est le conflit d'intérêts. Comment voulez-vous que les gens aient confiance en les députés, en l'Assemblée nationale, en l'institution démocratique que nous représentons si, en même temps, on a les deux mains dans le plat de bonbons? Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas et qui met à mal, potentiellement, cette confiance envers l'institution.

Après ça, tu sais, moi, je ne sais pas combien ça vaut, le travail d'un député, je ne sais pas combien ça vaut. Et je pense que c'étaient les paroles de mon leader parlementaire qui disait : Je n'ai même pas à avoir d'opinion sur ce que ça vaut, le travail d'un parlementaire, ce n'est pas à moi de gérer ça. La plupart des gens ne dictent... n'écrivent pas eux-mêmes les conditions dans lesquelles ils vont travailler. Ce n'est pas les gens eux-mêmes qui fixent leurs conditions de travail. C'est une négociation dans... à l'occasion, mais le plus souvent, c'est un patron, mais bref c'est un agent externe qui vient déterminer quelles sont les conditions dans lesquelles je vais avoir ma rémunération.

Moi, j'ai toujours vécu là-dedans. C'était mon conseil d'administration qui fixait mes conditions de travail, puis, après ça, on pouvait négocier à quelque part, mais... Puis moi, comme directeur général d'une organisation, c'est moi qui fixais les conditions de rémunération de mes employés. Puis évidemment j'allais les consulter, je faisais le travail de façon la plus transparente possible, mais, à la fin, ce n'est pas mes employés qui décidaient pour eux puis ce n'est pas moi qui décidais pour moi non plus. Donc, d'où l'idée d'avoir... puis c'est l'idée qu'on a amenée chez Québec solidaire, c'était une autre proposition, là, qu'on avait mise sur la table, outre le fait de reporter la hausse à 2026, c'est la question d'un comité externe indépendant mais surtout exécutoire. Je pense que c'est ça, la grande... je pense, la solution vers laquelle il faudrait tendre.

Je pense que le député Khadir allait dans le même sens, là. Je ne me souviens plus exactement la fin de cette lettre, mais je pense que oui. Oui, effectivement, il disait : «...de lancer un processus de révision équitable, indépendante et exécutoire de vos conditions salariales.» Mais moi, je vais exactement dans le même sens, M. le Président. On l'a déjà proposé, on fera probablement des amendements, là, en ce sens-là, mais je pense que ce n'est pas à nous de fixer nous-mêmes nos conditions de rémunération. Ça doit être un comité qui, d'une part, ne travaillera pas juste sur la question des indemnités, l'indemnité de base, mais qui pourrait aussi voir la rémunération dans son ensemble, comme un tout, parce que c'est comme ça qu'on doit la voir.

• (17 h 40) •

Et c'est là une des failles aussi du comité. On a eu comme mandat, à ce comité, aussi indépendant soit-il, on a eu comme mandat unique que de regarder les indemnités de base sans toucher à tout ce qui vient avec. Bien, évidemment, toutes les indemnités qu'on a droit autour, qui se chiffrent à à peu près 30 000 $, mais aussi toutes les augmentations, les majorations de cette indemnité-là qui sont attachées au fait d'avoir une présidence de l'Assemblée nationale, une vice-présidence, une deuxième vice-présidence de l'Assemblée nationale, même chose pour une présidence de commission, une vice-présidence de commission, d'être adjoint parlementaire, d'être adjoint gouvernemental. Donc, toutes des fonctions qui, finalement, mériteraient sans doute un dépoussiérage. Ça a été dit par plusieurs personnes, ça mériterait d'être dépoussiéré. Le système, il est en place, mais depuis trop longtemps, et on devrait avoir cette réflexion-là.

Donc, moi, ce que je propose aussi, éventuellement, on en fera, des propositions plus formelles, mais c'est que ce comité soit externe, soit exécutoire, et que, pour une fois, comme groupe... pas comme groupes parlementaires, mais comme parlementaires, nous ayons effectivement une révision, dans les temps donnés, qui nous permettrait d'avoir une réflexion et des propositions exécutoires sur les conditions de rémunération. Moi, je pense qu'on aurait là, M. le Président, des moyens de redonner la confiance du public envers l'institution démocratique que nous représentons. Et je pense que c'est dans ce sens-là qu'on devrait aller, plutôt que de travailler à un projet de loi dans lequel on se met en situation de conflit d'intérêts, où on se vote nous-mêmes notre augmentation.

Ce sera tout. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Taschereau. Et je cède maintenant la parole à M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Pour ma gouverne, pouvez-vous m'indiquer de combien de temps est-ce que je dispose?

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Vous disposez, M. le chef du deuxième groupe d'opposition, de 27 min 28 s.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci beaucoup. M. le Président, j'aimerais revenir sur certains éléments de mon échange de cet après-midi avec le premier ministre. J'entendais le premier ministre, ce matin, dans... en fait, pas juste... cet après-midi, dans des déclarations qu'il a faites, dans les derniers jours, au sujet de la hausse de 30 000 $ pour les députés, je l'entendais dire : Ça fait 20 ans qu'on en débat. En fait, je pense que c'est intéressant de se rappeler d'à quel point ce débat-là date à l'Assemblée nationale du Québec.

En fait, ça ne fait pas 20 ans qu'on en parle, ça fait précisément 49 ans. Depuis 49 ans, ici, à l'Assemblée nationale du Québec, les députés, périodiquement, débattent de cet enjeu-là, et on ne l'a jamais tranché, même si on connaît, depuis de nombreuses années, la manière de le faire de manière définitive. J'ai envie, cet après-midi, M. le Président, de retracer avec vous les grands jalons de l'histoire de ce débat-là à l'Assemblée nationale du Québec parce que je pense qu'on peut en apprendre beaucoup. On peut apprendre des leçons de décisions qui ont été prises par les parlementaires du passé à cet effet-là.

Le premier comité qui traite de la question des conditions de travail des députés à l'Assemblée nationale du Québec, c'est le comité Bonenfant, et on est en 1974. Il faut savoir qu'avant le comité Bonenfant de 1974 la fonction de député n'était même pas considérée comme une occupation à temps plein. La vision qu'on avait du rôle de législateur, du rôle de parlementaire, datait d'avant la Révolution tranquille, époque où l'État québécois était bien moins développé, époque où il y avait bien moins de ministères au Québec, époque où l'organisation, par l'État québécois, de la société québécoise était beaucoup moins avancée. Et donc, il y avait beaucoup moins de travail législatif fait au Québec et donc il y avait cette conception selon laquelle les parlementaires faisaient ça seulement à temps partiel.

C'est seulement en 1974, donc, que, dans le cadre du comité Bonenfant, le comité va recommander qu'enfin on considère le travail parlementaire comme une occupation à temps plein et que, donc, les députés devraient recevoir une rémunération suffisante. La raison est claire. On juge, à ce moment-là, que le député ne peut plus avoir une occupation professionnelle à côté de son rôle de parlementaire, mais qu'au contraire ça devient son travail principal et que, donc, il faut le rémunérer en conséquence. C'est à ce moment-là, donc, dans une loi qui est sanctionnée en 1974, que les parlementaires vont suivre la recommandation de ce comité, le comité Bonenfant, pour confier à la Commission de régie interne, c'est l'ancêtre du Bureau de l'Assemblée nationale, les pouvoirs réglementaires pour établir les conditions, les barèmes, les modalités pour le paiement des différentes allocations qui sont versées aux membres de l'Assemblée nationale. Donc, c'est en 1974, en fait, que commence ce débat-là au Québec.

Le deuxième épisode se passe en 1982. En 1982, on va modifier le mode d'indexation de la fameuse indemnité de base, le fameux salaire de base des députés. On va d'ailleurs, à ce moment-là, l'accrocher à l'indice des prix à la consommation au Canada. On va, en 1982, instaurer une prime... pardon, une allocation de transition, et, plus important encore, c'est en 1982 qu'on crée le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale du Québec. En fait, on institue, pardon, je me corrige, un nouveau régime de retraite qui va réduire de façon substantielle la valeur des prestations qui avaient été acquises auparavant.

Le troisième épisode, c'est le comité Lavoie. Et là ça commence à devenir intéressant, parce qu'on est en 1987, et c'est le Bureau de l'Assemblée nationale qui va mandater, donc, le comité Lavoie, qui est un autre comité d'étude, donc extraparlementaire, de cette question-là. Le BAN, donc, comme on l'appelle dans notre jargon, va mandater ce comité de faire un examen complet dans l'ensemble des conditions de travail des députés de l'Assemblée nationale du Québec, donc, les indemnités pour fonctions additionnelles, l'allocation annuelle non imposable, le régime de retraite et, bien sûr, la fameuse indemnité de base, celle qui est l'objet du projet de loi déposé par la CAQ.

Et donc, en 1987, le comité Lavoie se fait donner un mandat large, général, de dire : Revoyez l'ensemble des paramètres de la rémunération des députés, faites-nous des recommandations. Et devinez quelle est l'une... en 1987, une des recommandations du comité Lavoie. Le comité Lavoie recommande de lier les échelles salariales des députés avec les échelles salariales des cadres supérieurs de l'État du Québec et de le... et que cette clause remorque, comme on dit dans le jargon des conventions collectives, des salaires des députés envers les cadres supérieurs de l'État québécois soit automatique. Pourquoi est-ce que le comité Lavoie, en 1987, recommande ça? Pour éviter que les membres de l'Assemblée nationale débattent de leurs propres conditions de travail. 1987, je n'étais même pas né.

On a un comité indépendant ici qui recommande de faire ce qu'aujourd'hui, en 2023, Québec solidaire continue de répéter, avec des modalités différentes, bien sûr, mais l'esprit est le même : mettre en place un processus qui va faire en sorte que les députés ne seront plus juge et partie sur leurs salaires, sur leurs conditions de travail. Donc, quand vous entendez, depuis 10 ans maintenant, Québec solidaire répéter ça, ça... je veux dire, ça ne vient pas de notre chapeau, ça ne vient pas ni de l'imagination d'Amir Khadir ni de la mienne. Ça fait depuis 1987 que des gens nous le disent : Trouvez donc un moyen, chers parlementaires, de vous sortir de cette situation franchement délicate et, oui, malaisante. Je reconnais, moi, ce malaise-là, il est... c'est l'éléphant dans la pièce. Sortez-vous de cette situation-là en mettant en place un mécanisme qui va décider à votre place. À l'époque, ce que recommandait le comité Lavoie, c'était une indexation automatique à la rémunération des cadres supérieurs de l'État, mais l'idée de base est la même : mettons fin aux conflits d'intérêts, mettons fin à la situation insupportable qui consiste en ce que les députés se votent à eux-mêmes leurs propres conditions de travail.

En 1992, cinq ans plus tard, il va y avoir des modifications législatives de faites encore à la suite d'un comité d'étude extraparlementaire. À ce moment-là, c'est un comité qui avait comme mandat de revoir le système de retraite des députés. Et c'est en 1992 que notre régime de retraite, le Régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale du Québec, va être établi dans sa forme définitive. Huit ans plus tard, 2000 : le comité Godin. Le comité Godin se fait donner un mandat similaire : examiner les conditions de travail des députés. Le comité Godin va recommander différentes choses, je ne ferai pas la liste de toutes les recommandations, mais le rapport du comité Godin, en 2000, se termine par quoi? Par un plaidoyer en faveur d'un examen périodique des conditions de travail des députés par un comité indépendant.

• (17 h 50) •

Donc, 1987, comité Lavoie; comité Godin en 2000. Déjà, on a, bien avant l'ère moderne de la politique québécoise, deux comités qui viennent dire aux députés : Sortez-vous les mains de votre propre rémunération, ça n'a pas d'allure. C'est un problème démocratique, c'est un problème de confiance envers les institutions. Et malheureusement, à deux reprises, avant les années 2000, les législateurs vont décider de ne pas donner suite aux recommandations de ces comités-là ou, quand ils vont le faire, ils vont le faire de manière partielle, en prenant certains éléments du rapport mais n'en adoptant pas d'autres. Et quel est l'élément qui va toujours être laissé de côté? C'est l'élément pourtant fondamental, les recommandations qui disent aux députés : Sortez-vous de votre situation de conflit d'intérêts, mettez en place un mécanisme qui va décider, sans votre intervention, de vos conditions de travail, de vos salaires. 13 ans plus tard est fondé le fameux comité, celui-là, je pense que les collègues de l'Assemblée nationale le connaissent peut-être davantage que les premiers que j'ai cités, le fameux comité L'Heureux-Dubé, présidé donc par la juge L'Heureux-Dubé, qui se fait donner par le Bureau de l'Assemblée nationale un mandat similaire aux comités précédents, celui de procéder à un examen complet et global des conditions de travail des députés de l'Assemblée nationale. Et qu'est-ce que fait ce comité-là? Il fait des consultations, compare les conditions de travail des législateurs québécois à des fonctions comparables au Québec, au Canada, en Amérique du Nord, à travers le monde, consultent des experts pour connaître les meilleures pratiques. Et la conclusion du rapport L'Heureux-Dubé, sa conclusion fondamentale est extrêmement intéressante, devinez quoi : mettre sur pied un comité indépendant et exécutoire pour revoir la totalité des conditions de travail des députés, troisième recommandation depuis 1974.

Et la juge L'Heureux-Dubé fait une proposition assez intéressante. Elle dit : Mettez sur pied un processus qui va mettre fin aux conflits d'intérêts. Et elle recommande aussi, à côté de ça, une augmentation du salaire des députés d'à peu près 30 %. Ça avait indigné, à l'époque, l'homme qui est aujourd'hui premier ministre et l'homme qui est aujourd'hui ministre de l'Éducation, alors que la recommandation de la juge L'Heureux-Dubé était pas mal plus modérée que celle que ces deux députés-là font aujourd'hui. La juge L'Heureux-Dubé recommandait, oui, de bonifier de 30 %, à peu près, le salaire des députés, mais, en échange, elle revoyait en profondeur les paramètres du régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale et elle faisait le ménage dans toute la pléthore d'allocations et de primes qui sont distribuées aux différents députés des différentes formations politiques. Et, devinez quoi, le résultat de cette opération-là se faisait à coût nul pour les contribuables québécois.

Il y avait, dans le rapport L'Heureux-Dubé, un vrai exercice d'examen global et général de l'ensemble des conditions de travail, qui accordait, oui, une augmentation significative aux parlementaires québécois, mais, dans un souci d'équité, on revoyait les paramètres du régime de retraite. Mme L'Heureux-Dubé, à l'époque, avait qualifié ce régime de retraite là de Ferrari des régimes de retraite québécois, pour dire à quel point, suite à ses travaux, elle était arrivée à la conclusion que c'était un régime qui était extrêmement généreux. Puis elle reconnaissait, hein, que le travail de parlementaire est particulier puis que ça peut justifier des paramètres de régime de retraite différents de ceux qu'on voit usuellement, mais de là à ce que ce soit aussi généreux que ça, elle avait un malaise et elle nous recommandait, donc, de le modifier.

Et, je répète, troisième pilier de ses recommandations : un ménage des différentes allocations. Parce que, comme le disait mon collègue de Taschereau tout à l'heure, on entend beaucoup parler du salaire de base des députés dans les médias depuis les derniers temps, mais, M. le Président, des députés qui font le salaire de base, il y en a juste 10. Il y en a 115 sur 125 qui font plus que ça. Ce n'est pas une critique, c'est juste que, si on veut débattre avec honnêteté de ce sujet-là, on ne peut pas prendre comme chiffre de départ pour faire des communications publiques le salaire que seulement une poignée de gens font. Ce n'est pas la bonne donnée pour avoir le débat. Si on voulait calculer réellement l'état des finances... si on voulait juger l'état des finances personnelles ou l'état de la rémunération des députés aujourd'hui, il faudrait prendre les salaires... le salaire moyen, peut-être, ou expliquer aux Québécois, Québécoises les différentes composantes de la rémunération qui font que des députés, je le répète, qui font cette fameuse indemnité de base, il y en a seulement 10. Puis on connaît bien ça à Québec solidaire, parce que, sur 10, il y en a sept qui sont dans notre formation politique.

Donc, dans le rapport de la juge L'Heureux-Dubé, il y avait cet effort de faire un vrai examen global, plutôt qu'à la pièce, des conditions de travail. Et, je réitère, il y avait, et c'est pour moi ce qu'il y a de plus intéressant dans ce rapport-là, il y avait la création d'un comité pas seulement indépendant... J'entendais le premier ministre, ce matin, dire : Le comité est indépendant. En partie, mais il n'était pas exécutoire. Exécutoire, ça veut dire quoi? Ça veut dire que les députés se gardent encore, et c'est pour ça qu'on est ici aujourd'hui, la possibilité de voter leurs propres salaires. Et, je le répète, ça fait, depuis 1974, trois comités d'experts qui nous disent le contraire. Il faut mettre fin à cette logique qui nous place en conflit d'intérêts.

Il aurait été souhaitable qu'à l'époque du rapport L'Heureux-Dubé on trouve une voie de passage, un compromis entre les formations politiques. On n'y est pas arrivés, et c'est ce qui nous a placés, en 2019, prochain épisode de la série, encore une fois, dans la même mautadine de situation très désagréable, M. le Président, qui est d'encore une fois devoir statuer sur notre rémunération. Et ça, j'étais là, je m'en rappelle. On sait, il y a eu, en fait, un changement dans la fiscalité fédérale qui a changé la manière dont l'allocation de dépenses, auparavant non imposable, devenait dorénavant imposée pour les députés québécois. Ça représentait donc une forme de baisse de salaire au net. C'est fâcheux parce qu'à Québec solidaire on est absolument opposés à la bonification de 30 000 $ que veut faire passer le gouvernement, mais baisser le salaire des députés, je veux dire, c'est un autre scénario.

Donc, nous, on comprenait que c'était quand même fâcheux de voir tous les députés perdre du salaire net. Ce n'était pas ce qu'on souhaitait voir, mais, en même temps, quel était le seul remède possible? Encore se lever au salon bleu pour s'attribuer à soi-même une augmentation pour pallier le changement dans la fiscalité fédérale. J'étais là à ce moment-là. J'ai pris la parole ici, au salon bleu, j'étais en commission parlementaire avec le leader du gouvernement. J'ai travaillé extrêmement fort pour qu'on trouve une voie de passage puis qu'on s'entende sur une manière que ça n'arrive plus jamais. J'ai fait des amendements, M. le Président, pendant des heures pour essayer de convaincre mes collègues des autres formations politiques qu'on devait se doter enfin de ce processus-là qui nous sortirait de notre situation de conflit d'intérêts. Puis savez-vous ce qu'on a fait, M. le Président? On était en commission parlementaire, et là je disais : Là, la gang... bon, je ne leur parlais pas comme ça, là, mais : Collègues, là, on est encore en train de faire la même erreur, on peut-tu s'assurer que ce soit au moins la dernière fois et qu'on mette sur pied un vrai processus indépendant et exécutoire?

Et on a discuté entre formations politiques, puis vous savez quoi, M. le Président? On a eu une entente. Mes collègues des autres formations politiques ont dit : Gabriel, on ne votera pas pour ton amendement qui crée un processus indépendant et exécutoire, mais on va s'entendre sur une motion unanime à l'Assemblée nationale du Québec, on va la faire adopter. Ça, ça va nous contraindre nous-mêmes, ça va nous forcer un peu la main collectivement à enfin avancer vers la mise sur pied de ce processus indépendant et exécutoire.

Ce n'était pas le scénario que je souhaitais voir arriver, M. le Président, mais j'ai dit : O.K., on va essayer. On a négocié un libellé de motion, tout le monde ensemble. On l'a fait adopter à l'unanimité, ici, à l'Assemblée nationale, puis pendant deux ans, entre 2019 et 2021, j'ai travaillé avec des collègues de toutes les formations politiques, notamment le collègue d'en face, de la Coalition avenir Québec, un collègue de l'opposition officielle, un collègue de la troisième opposition. On a travaillé ensemble, on a travaillé fort, on en a mis, des heures, dans ce dossier-là puis, vers la toute fin de la législature, on est arrivés à une entente. Puis on avait mis de l'eau dans notre vin, M. le Président. Ce n'était pas ce qu'on voulait au départ, mais on est arrivés à quelque chose qui ressemblait à une entente où on pourrait enfin mettre sur pied ce processus indépendant et exécutoire ou, en tout cas, le plus exécutoire possible. Et ce comité-là aurait eu, bien sûr, le mandat de faire un examen global et complet de la rémunération des députés.

• (18 heures) •

Et on était à un cheveu, à un cheveu, M. le Président, de s'entendre enfin, toutes les formations politiques, là-dessus pour arrêter de répéter l'erreur que les parlementaires québécois font depuis 1974, celle de faire perdurer le régime dans lequel les députés sont fâcheusement en situation de conflit d'intérêts, celle de devoir voter sur leur propre salaire. Et quelques mois avant la fin de la législature, le gouvernement de la Coalition avenir Québec nous a annoncé que cette entente-là ne tenait plus puis que, finalement, il n'y avait plus l'appui nécessaire au caucus, que ça ne passait pas. Et on a raté l'occasion historique de régler enfin ce débat-là.

Donc, vous comprenez que, quand j'entends le premier ministre, à son congrès la fin de semaine passée, parler de courage en disant : Moi, j'ai le courage de régler ce débat-là qui dure depuis 20 ans, je suis désolé, M. le Président, c'est le contraire du courage, l'attitude actuelle du gouvernement, parce qu'on avait une entente à la dernière législature et parce que la décision courageuse, ça aurait été de la mettre sur pied, de l'appliquer pour qu'enfin on n'ait plus besoin de faire ce qu'on est en train de faire en ce moment ici, de débattre de notre propre salaire à l'Assemblée nationale puis, après ces débats-là, voter là-dessus. On y arrivait, M. le Président, on y était. Pour reprendre un langage qu'adorent le premier ministre et son ministre de l'Économie, on avait un deal, et ce deal-là s'est effondré, et nous voilà aujourd'hui.

Dès les premiers mois de la législature, le gouvernement nous approche et nous dit : On veut relancer le processus. Ah! ça va peut-être être intéressant. Quelle n'a pas été notre déception, M. le Président, quand on a appris que l'intention du gouvernement, ce n'était pas de ressusciter l'entente de 2021, ce n'était pas d'aller dans le sens d'un comité indépendant et exécutoire, c'était, au contraire, de procéder extrêmement rapidement avec un comité dont le mandat est extrêmement restreint. Quel est-il? Examiner seulement, seulement l'indemnité de base des députés, le fameux salaire de base, tu sais, le salaire qu'il y a comme juste 10 personnes qui font, là. C'est sûr que, si on prend ce point de départ là, M. le Président, ça se peut très bien que la recommandation à laquelle on arrive, c'est qu'il n'est pas assez élevé. C'est normal, on l'a déconnecté du régime de retraite, on l'a déconnecté de toutes les primes et allocations supplémentaires.

Le mandat de ce comité-là, depuis le départ, était problématique parce qu'il faisait un examen partiel et incomplet des conditions de travail des députés. Et ce mandat-là est tellement incomplet et partiel que les gens qui ont eu le mandat... qui ont eu ce mandat-là puis qui ont formé le comité ont essayé de contourner leur propre mandat en disant : On n'a pas le droit de recommander un processus indépendant et exécutoire parce que ça ne rentre pas dans notre mandat. Donc, ils l'ont mis comme une piste de réflexion dans leur rapport, pas comme une recommandation, parce que leur mandat les empêchait de le faire.

Même chose pour le régime de retraite. Même s'ils avaient voulu faire des recommandations pour le modifier, ils ne pouvaient pas. Le mandat était clair, limpide, non négociable, imposé par la CAQ : c'est l'indemnité de base, et c'est tout. Ah! ils ont ajouté «en prenant en considération le reste», mais, M. le Président, prendre en considération le reste, ce n'est pas la même chose qu'avoir le pouvoir de recommander des changements sur le reste. En fait, c'est extrêmement différent du mandat qu'avait eu le comité L'Heureux-Dubé à l'époque.

Donc, j'entendais le député de Matane-Matapédia, l'autre fois, dire quelque chose comme... c'est une citation libre, mais il ne m'en voudra pas, dès le mois de janvier, là, c'était très clair dans l'esprit de toutes les formations politiques que l'objectif de la CAQ, c'était de procéder avec diligence, rapidement, de déposer un projet de loi rapidement pour procéder rapidement à une bonification des salaires des membres de l'Assemblée nationale du Québec. Et le député de Matane-Matapédia, qui n'est pas de ma formation politique, était en point de presse il y a, quoi, deux semaines et a dit en toute transparence, lui, que, dès le mois de janvier, il avait très bien compris que c'était une opération qui était bien organisée, que l'objectif, c'était de procéder rapidement et qu'en fait il n'y avait raisonnablement aucune autre issue possible qu'une recommandation d'augmenter rapidement les salaires et que ce serait adopté tout aussi rapidement d'ici les vacances d'été.

Donc, quand j'entends le premier ministre, ce matin, dire : Québec solidaire, ils n'ont pas voulu envoyer quelqu'un de leur parti sur le comité, bien, M. le Président, le mandat était imposé, non négociable. On aurait même recommandé quelqu'un, ça n'aurait rien changé. Ça n'aurait rien changé parce que le problème avec ce comité-là...

D'ailleurs, ce n'est pas sa composition. Mme Thériault, M. Ouellet, c'est des gens... d'ailleurs, on a échangé avec eux durant le processus puis suite au dépôt de leur rapport. C'est des gens qui ont fait un travail rigoureux, un travail sérieux. Ils ont fait ce qu'ils pouvaient avec le mandat qu'ils avaient, mais il y avait une main attachée dans le dos. C'était limité, ce qu'ils pouvaient faire comme recommandations. Donc, moi, je n'en tiens pas rigueur aux membres du comité. Au contraire, ils ont fait un bon travail. C'est des gens pertinents. Ils étaient aussi accompagnés d'un expert des relations de travail, et tout ça, et des ressources humaines. C'est très bien. Le problème, ce n'est pas la composition du comité. Le problème, c'est son mandat qui était étroit, et limitatif, et qui prédisposait le comité à recommander une seule chose, une augmentation de l'indemnité sans révision du reste des conditions, contrairement à ce que faisait L'Heureux-Dubé.

Le deuxième problème aussi, c'est qu'il n'est pas exécutoire. Donc, encore une fois, les législateurs, nous nous sommes gardé la possibilité d'adopter ou non leur recommandation et même, pourquoi pas, de les modifier. Puisque c'est un projet de loi, qu'est-ce qui empêcherait un député d'arriver en commission parlementaire, de déposer un amendement pour dire : Ça ne sera pas de 30 000 $, ça va être 40 000 $? Absolument rien. Je n'ai pas entendu que quelconque... que quelqu'un avait cette intention-là, comprenez-moi bien, mais, dans le processus, le processus n'est tellement pas indépendant, tellement pas exécutoire, qu'il y a une possibilité théorique que les députés interviennent dans le projet de loi pour modifier eux-mêmes, à la virgule près, à la cent près, le montant de leur rémunération.

Et c'est ça, le problème, M. le Président. C'est à ça qu'il faut mettre fin, à cette idée où les députés se votent leur propre salaire. Ça fait des années qu'on le sait. Ça fait, moi, depuis 2019 que je le répète, mes confrères et consoeurs solidaires le répètent depuis 2013. C'est tellement simple, pourtant. Plein de pays dans le monde le font, d'autres provinces au Canada le font. Ça a été recommandé par L'Heureux-Dubé. On aurait pu, on aurait dû aller de l'avant il y a longtemps.

J'aurais eu encore beaucoup de choses à dire, M. le Président, pour répondre à certains arguments particuliers que le premier ministre a avancés ce matin, mais je veux terminer avec ce qui est, pour moi, je pense, le plus important, parce que je trouvais ça important de faire l'historique, là, mais, au-delà de l'historique, aujourd'hui, au jour d'aujourd'hui, qu'est-ce qu'on fait? Bien, moi, je vais vous dire, ce qui m'inquiète le plus profondément, M. le Président, avec cette histoire-là du salaire des députés, c'est qu'il existe une perception injustifiée, mais elle existe, cette perception, que la classe politique, c'est des gens qui vont en politique pour servir leurs intérêts puis se donner des privilèges. Cette perception-là, elle est fausse. Comprenez-moi bien, il n'y a rien de plus faux que ça. Il n'y a personne ici, dans aucune formation politique, qui est allé en politique pour se mettre de l'argent... des poches... dans les poches ou se donner des privilèges. Ce n'est pas la motivation qui habite personne ici. Mais cette perception-là, chez nos concitoyens et concitoyennes, elle existe. Puis, honnêtement, elle affaiblit la confiance en nos institutions démocratiques.

Pas juste ici, partout dans le monde on assiste à une explosion du cynisme, à une explosion de la méfiance envers les élites politiques, envers la classe politique. Et, quand les gens qu'on représente vont nous voir ici se lever un par un pour se voter une hausse de 30 000 $, qu'est-ce que vous pensez que ça va avoir comme effet sur cette perception-là? Ça va l'alimenter. Ça va alimenter cette perception-là. Et moi, je pense qu'on ne devrait jamais poser de gestes, ici, qui alimentent cette perception-là. On devrait combattre cette perception-là parce qu'elle est fausse.

Et la bonne manière de la combattre, ce n'est pas de dire : On va adopter ça vite, vite avant les vacances. La bonne manière de la combattre, c'est faire enfin ce que depuis des décennies les experts nous disent de faire, mettre sur pied un processus qui va mettre fin au conflit d'intérêts dans lequel se placent les parlementaires. Il faut le faire par respect pour les gens qu'on représente, il faut le faire par respect pour les gens qui vont nous suivre ici pour leur enlever le fardeau de prendre ce genre de décision là qu'on ne devrait pas avoir à prendre quand on se lance en politique pour défendre le bien commun. On ne devrait pas avoir à prendre ces décisions-là.

C'est ce qu'on dit, à Québec solidaire, depuis des années, et c'est l'esprit, la raison fondamentale pour laquelle mon groupe parlementaire va s'opposer jusqu'à la dernière minute à l'adoption de ce projet de loi là, parce qu'il n'est pas juste. Pas juste parce que c'est un projet de loi de la CAQ, parce que c'est un mauvais projet pour l'esprit de la démocratie québécoise, parce que c'est un mauvais projet. C'est un projet qui va affecter, qui va nuire à la confiance que les gens ont envers la classe politique puis envers nos institutions politiques. C'est pour ça qu'on va se battre démocratiquement, avec les outils qui sont les nôtres ici, comme parlementaires civilisés, jusqu'à la dernière minute pour convaincre les collègues de toutes les autres formations politiques de s'opposer...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Eh bien, cela met fin... Merci beaucoup, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Cela met fin au débat restreint de deux heures sur la motion de report présentée par M. le député de Maurice-Richard.

Alors, je vais maintenant mettre aux voix la motion, qui se lit comme suit :

«Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans 12 mois".»

Est-ce que cette motion est adoptée? M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Leduc : Je vous demanderais de faire un vote par appel nominal, M. le Président, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, le vote par appel nominal est demandé. Alors, que l'on appelle les députés.

Je vais suspendre nos travaux quelques instants, le temps que les députés se...

(Suspension de la séance à 18 h 10)

(Reprise à 18 h 21)

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, nous allons maintenant mettre aux voix la motion de report présentée par M. le député de Maurice-Richard, qui se lit comme suit :

«Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans 12 mois".»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Nadeau-Dubois (Gouin), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), M. Marissal (Rosemont), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Cliche-Rivard (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Bouazzi (Maurice-Richard), Mme Zaga Mendez (Verdun), M. Grandmont (Taschereau).

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Laframboise (Blainville), Mme Fréchette (Sanguinet), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Bonnardel (Granby), M. Roberge (Chambly), Mme D'Amours (Mirabel), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Charette (Deux-Montagnes), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), Mme Lecours (Les Plaines), M. Carmant (Taillon), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Bélanger (Prévost), M. Émond (Richelieu), Mme Blanchette Vézina (Rimouski), Mme Laforest (Chicoutimi), M. Lévesque (Chapleau), Mme Déry (Repentigny), M. Lafrenière (Vachon), M. Simard (Montmorency), M. Allaire (Maskinongé), Mme Grondin (Argenteuil), M. Provençal (Beauce-Nord), Mme Lachance (Bellechasse), M. Chassin (Saint-Jérôme), M. Jacques (Mégantic), Mme Boutin (Jean-Talon), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Bachand (Richmond), M. Sainte-Croix (Gaspé), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel), M. Bussière (Gatineau), M. Lamothe (Ungava), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Lemay (Masson), Mme Abou-Khalil (Fabre), M. Bernard (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Dorismond (Marie-Victorin), M. Montigny (René-Lévesque), Mme Mallette (Huntingdon), Mme Dionne (Rivière-du-Loup—Témiscouata), Mme Blouin (Bonaventure), Mme Haytayan (Laval-des-Rapides), M. Tremblay (Dubuc), Mme Bogemans (Iberville), M. Thouin (Rousseau), M. Girard (Lac-Saint-Jean), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Tremblay (Hull), Mme Schmaltz (Vimont), Mme Guillemette (Roberval), Mme Poulet (Laporte), M. Gagnon (Jonquière), M. St-Louis (Joliette), Mme Gendron (Châteauguay), M. Rivest (Côte-du-Sud).

M. Derraji (Nelligan), Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont), M. Fortin (Pontiac), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Beauchemin (Marguerite-Bourgeoys), Mme Dufour (Mille-Îles), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme McGraw (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Prass (D'Arcy-McGee), Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey), Mme Caron (La Pinière), M. Morin (Acadie), Mme Cadet (Bourassa-Sauvé), M. Ciccone (Marquette).

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Y a-t-il des abstentions? Mme la secrétaire générale.

La Secrétaire : Pour :           9

                      Contre :          76

                      Abstentions :   0

Le Vice-Président (M. Lévesque) : La motion est rejetée.

Poursuite du débat sur l'adoption du principe

Alors, nous allons maintenant poursuivre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 24, Loi donnant suite aux recommandations du rapport du Comité consultatif indépendant sur la révision de l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale. Le prochain intervenant, je reconnais M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne.

M. Guillaume Cliche-Rivard

M. Cliche-Rivard : Merci, M. le Président.

Des voix : ...

M. Cliche-Rivard : Je vais laisser quelques secondes, mais je vais, bien sûr...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Évidemment, M. le député, je vais demander aux collègues qui doivent quitter l'enceinte du salon bleu de bien vouloir le faire dans le silence et dans le respect. M. le député, je vous invite à poursuivre votre intervention.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup. Alors, comme je disais un petit peu tout à l'heure, là, mes collègues, ici, et moi, on se voit être représentants, d'une certaine façon, du club des 10, le club des 10 qui représente ceux de l'Assemblée nationale qui gagnent l'indemnité de base, le salaire de base. Et donc c'est dans cette capacité-là, avec mes collègues, ici, de la banquette arrière, notamment mes collègues de Taschereau, de Verdun et de Maurice-Richard, qu'on vous présente les messages qu'on veut avancer aujourd'hui.

Alors, c'est un thème récurrent à l'Assemblée nationale, l'augmentation des salaires des députés. Mon co-porte-parole de Gouin, qui vient tout juste de quitter, nous a fait quand même un certain cours d'histoire des dernières frasques ou des derniers développements en la matière en ce qui concerne les débats sur l'augmentation de salaire des députés, mais surtout sur les questions, finalement, d'indépendance et de conflit d'intérêts dans lequel on est à même de se placer en s'auto-octroyant des hausses, chose que peu de gens peuvent faire au Québec, quand même, certainement pas par la voie législative où ils seraient appelés, eux et elles, à voter en faveur de leur propre salaire dans une assemblée.

Alors, ça fait des années qu'on parle de ça. La situation, par contre, elle est simple, il fallait, ou il faut, ou il aurait fallu mettre en place un comité indépendant et exécutoire de manière à régler le problème parce qu'encore une fois force est de constater que, quelques années d'aujourd'hui, un autre, peut-être, député de Saint-Henri—Sainte-Anne sera avec vous pour débattre de la même question dans une difficile situation où, encore une fois, il ou elle aura à prendre parti sur son propre salaire, dans une situation difficile et délicate que celle dans laquelle on se trouve aujourd'hui. Mais, encore une fois, ce comité indépendant et exécutoire qui est demandé n'est pas mis en place. Il n'y a rien qui le prévoit dans la législation ou dans le projet de loi qui a été annoncé. Et, encore une fois, on va se retrouver, donc, à jeter le problème par en avant, à avoir à se repositionner, à avoir à recommencer la réflexion, à réfléchir à nouveau de comment on va, dans l'avenir, devoir se repositionner sur ces questions-là. Mon collègue de Gouin faisait état de rapports, de suivis, de motions, d'ententes, de promesses, et évidemment la situation est telle qu'on reprend la parole ici, en Chambre.

Alors, évidemment, pour ma part, je m'oppose, comme mes collègues, à l'augmentation de l'indemnité de base de 30 %. C'est une proposition qu'on ne peut appuyer sur le principe de comment ça se passe, hein, de comment ça se fait, après tout, où on est dans un processus qui est très loin d'être idéal, qui nous place visiblement dans une situation de conflit d'intérêts en ce sens où on s'auto-octroie, où on se vote une augmentation salariale. Les députés ne devraient pas avoir à voter sur leur propre salaire.

Récemment, et j'en parlais tout à l'heure, lors de ma décision, d'abord dans la campagne de 2022 puis dans celle de 2023, de me lancer... était en connaissance de cause de l'indemnité telle qu'affichée et telle qu'annoncée. Et je reviens sur le fait qu'il y avait une pléthore de candidats, candidates qui, tous et chacun, auraient très bien voulu l'emporter dans cette élection et qui, sachant pertinemment quelle était l'indemnité, ont pris décision, certains de mettre sur pause leur carrière, certains de prendre un congé sans solde, certains de se retirer d'autres potentiels conflits d'intérêts, en sachant très bien les conditions dans lesquelles ils ou elles se lançaient sans pour autant que ceci ait un impact sur la pénurie de futurs députés en ce sens où tous les postes, évidemment, et tous les partis étaient bien représentés.

Alors, la confiance de la population est au coeur de nos institutions, est au coeur de notre démocratie. En fait, c'est la base de notre système démocratique. Et continuellement s'auto-octroyer... je vais vous laisser le plaisir de me dire quand j'aurai terminé, mais...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, ce n'est pas que c'est un plaisir... c'est que nous sommes à 18 h 30. Je dois vous demander, à cette étape-ci : Est-ce que vous avez terminé votre intervention?

M. Cliche-Rivard : ...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Donc, vous n'avez pas terminé votre intervention. Vous allez pouvoir poursuivre cette intervention à la reprise du présent débat.

Et nous en sommes maintenant à l'étape des débats de fin de séance, et je vais suspendre nos travaux quelques instants afin de permettre, dans quelques instants, la reprise des débats de fin de séance.

(Suspension de la séance à 18 h 30)

(Reprise à 18 h 31)

Débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux débats de fin de séance. Le premier débat portera sur une question adressée par Mme la députée de D'Arcy-McGee au ministre responsable des Services sociaux concernant les propos tenus par le député d'Abitibi-Est sur l'itinérance.

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député a ensuite droit à une réplique de deux minutes.

Alors, tout d'abord, pour sa première intervention, je cède la parole à Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Problèmes de violence et d'itinérance à Val-d'Or

Mme Elisabeth Prass

Mme Prass : Merci, M. le Président. Donc, contrairement à la pensée populaire, l'itinérance est en augmentation partout au Québec, et ne touche pas seulement les grandes régions.

Quand on parle d'itinérance, qu'on soit à Montréal ou en région, il y a un dénominateur commun : les autochtones sont surreprésentés. À Val-d'Or, en Abitibi-Témiscamingue, les statistiques sont alarmantes, alors que 56 % des itinérants sont issus de communautés autochtones, contre 10 % pour l'ensemble du Québec. C'est donc dire que cette partie de la population, qui, dans les faits, ne représente que 2,3 % de la population totale, a au moins cinq fois plus de risques de se retrouver à la rue que les allochtones.

La ville de Val-d'Or, qui tente depuis quelques années de résorber l'enjeu de l'itinérance, presse le gouvernement du Québec d'agir contre la délinquance au centre-ville, se disant préoccupée par des tensions sociales que celle-ci entraîne dans son sillage.

La situation semble s'être détériorée au cours des dernières années, à Val-d'Or, d'abord et avant tout pour les personnes sans abri, mais aussi pour le reste de la communauté, qui vit parfois certains contrecoups de l'augmentation du nombre de personnes vivant dans la rue, avec des problèmes de consommation ou, encore, de santé mentale. La situation est rendue à un tel point que la mairesse de Val-d'Or a dû tenir une conférence de presse pour demander à votre gouvernement d'agir, car elle estime que l'enjeu de la délinquance dépasse le champ de compétence de la ville et que votre gouvernement doit prendre ses responsabilités en cette matière. Si vous le faisiez déjà, elle n'aurait pas à vous interpeler de façon publique.

La ville de Val-d'Or demande aux autorités provinciales d'augmenter le nombre d'intervenants sociaux et de patrouilles policières à pied au centre-ville. Elle réclame également sans délai l'ouverture d'un centre de jour destiné aux personnes en situation d'itinérance. La mairesse Brindamour vous a adressé une lettre réclamant l'intervention de votre ministère et de celui de la Sécurité publique ainsi que pour vous inviter à vous rendre à Val-d'Or pour mesurer la situation en personne sur le terrain. Allez-vous et votre gouvernement répondre positivement... Allez-vous... Est-ce que ce gouvernement va répondre positivement à cette demande?

Lorsque la pandémie a frappé et que le centre-ville et la municipalité ont été désertés, la population itinérante a pris ses quartiers le long de la rue principale, dans un parc juste à côté, une communauté dont les membres ont augmenté au fil des mois, en raison de la crise du logement et de la surpopulation dans les réserves autochtones. De plus, sur une base annuelle, de 150 à 215 personnes itinérantes transitent par Val-d'Or, une municipalité de 33 000 habitants, ce qui est disproportionné pour la taille de la population. Certains de ceux-là ont des problèmes de consommation et de santé mentale, ce qui fait en sorte qu'ils perturbent le sentiment de sécurité pour des résidents de Val-d'Or, une situation qui crée de l'exaspération chez certains commerçants, car leurs clientèles ne se sentent plus en sécurité. On a besoin de plus d'intervenants dans les rues et parmi cette population, avant que l'intolérance envers cette population devienne trop élevée.

La ville estime qu'environ 25 individus, dont certains souffrent de problèmes de santé mentale, ont des comportements inadéquats, mais ça déteint sur l'ensemble des gens qui ont besoin d'aide. Préoccupée par la situation, la mairesse Brindamour enjoint la population pour ne pas confondre l'itinérance et la délinquance et, du même coup, à se montrer tolérante, car l'itinérance était déjà à Val-d'Or, ou elle est encore là, mais s'ajoute maintenant de la délinquance.

C'est cette délinquance qui fait en sorte que la mairesse et le conseil de la ville réclament l'aide des services sociaux et de la sécurité publique du gouvernement. La ville a l'impression d'être à bout de ses ressources et demande alors l'aide de ce gouvernement.

Les itinérants ont le droit d'aller au centre-ville. Il ne faut pas l'oublier. Ce que dit la ville, c'est qu'ils doivent respecter la réglementation, comme ne pas boire, ne pas consommer et ne pas déranger les citoyens, ce qui s'améliorerait s'il y avait plus de présence policière dans les rues.

Selon un mémoire sur le phénomène de l'itinérance chez les autochtones en milieu urbain du Québec du Regroupement des centres d'amitié autochtones du Québec, nous savons qu'avec environ 3 % de la population canadienne les peuples autochtones représentent 10 % de la population itinérante du Canada. Il y a donc, de toute évidence, une dimension autochtone à l'itinérance qui s'explique par les conditions particulières vécues par les membres des Premières Nations, des conditions qui ne sont pas seulement d'ordre économique, mais aussi social, politique et culturel, inégalités sociales et économiques, exclusion sociale et tutelle politique, combinant dramatiquement leurs effets.

Nous voudrions que ce gouvernement arrête de trouver des solutions-pansements, et amène de vraies solutions, et réponde...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci. Merci, Mme la députée de D'Arcy-McGee. Et je vais maintenant céder la parole à M. le ministre responsable des Services sociaux pour cinq minutes. M. le ministre.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Merci beaucoup, M. le Président. Très heureux d'être ici avec vous aujourd'hui, parler d'itinérance et de toutes les améliorations qu'on a pu amener au cours des dernières années, depuis la pandémie, depuis que je m'occupe du dossier. La députée de D'Arcy-McGee me donne une grande tâche, où elle me demande de parler de vraiment l'approche gouvernementale quand on inclut itinérance, affaires autochtones et sécurité publique dans la même question, M. le Président. Donc, allons-y morceau par morceau.

Et, premièrement, parlons de l'approche qu'on a au niveau de l'itinérance en général au niveau du Québec. Ce qu'on est venu développer au Québec et qui n'était pas là auparavant, c'est vraiment une trajectoire de soins pour les personnes en situation d'itinérance, qu'elles soient autochtones, allochtones ou autres, M. le Président. Et cette trajectoire inclut vraiment trois étapes : un, les refuges ou l'hébergement d'urgence, qui vient vraiment capter les personnes qui soient nouvellement en situation d'itinérance ou chroniquement en situation d'itinérance; l'hébergement de transition, comme elle l'a mentionné, pour ceux qui ont des problèmes de toxicomanie et de santé mentale, pour qu'on puisse avoir une intervention intensive avec nos intervenants psychosociaux, pour les aider dans leur récupération, réhabilitation au fil des années, M. le Président; et, par la suite, parce que la trajectoire est souvent menée d'embûches ou d'allers-retours, le logement supervisé, pour s'assurer qu'une fois que la personne en situation d'itinérance arrive en logement, qu'elle ait quand même un certain encadrement, un certain soutien des équipes psychosociales pour demeurer, de façon réussie, en logement supervisé.

La situation en Abitibi n'est pas distincte de celle des autres situations, et on a ajouté, lors de notre Plan d'action interministériel en itinérance, des sommes considérables en Abitibi pour les supporter. Premièrement, au niveau des hébergements d'urgence, donc, les gens qui sont en refuge, on a 40 places stables avec l'organisme... s'appelle La Piaule. Et, en place de débordement... d'ailleurs, je ne sais pas, il y a quelques mois, j'ai aidé à maintenir cet hébergement de débordement, on a un autre, je vais vous dire exactement le... un autre 40 places en hébergement de débordement. Comme la trajectoire est en train de se développer, ils sont en train de développer l'aspect transition et logement supervisé. Et on attend bientôt d'avoir un nouvel emplacement pour 41 unités, qui vont inclure les deux étapes, soit la transition et l'hébergement supervisé, pour, encore une fois, permettre que cette transition vers la réhabilitation soit réussie, M. le Président.

• (18 h 40) •

Puis, effectivement, parmi ces populations-là, il y en a qui ont des problématiques qui ne sont plus au niveau de la santé mentale, et, pour venir les aider, on a développé un programme de psychiatrie communautaire, on a développé des patrouilles mixtes avec, effectivement, des intervenants psychosociaux. On a développé le Centre de bénévolat de la Vallée d'Or pour aider les personnes défavorisées. On soutient le Centre d'amitié autochtone, également, en collaboration avec le secrétariat des affaires autochtones.

Donc, on est venu soutenir, au niveau des services sociaux, de façon substantielle, M. le Président, la région de l'Abitibi et particulièrement la région Val-d'Or, où c'est plus de 500 000 $ récurrents qui sont investis année après année, M. le Président.

En plus, comme vous le savez, au niveau du gouvernement, du niveau de la CAQ, on fait... On travaille toujours en équipe. Donc, je travaille avec le ministre de la Sécurité publique pour toucher cet enjeu, puis la députée de D'Arcy-McGee l'a bien mentionné puis c'est important de le mentionner à tout le monde, pour toucher l'aspect de la délinquance. Et il ne faut vraiment pas faire d'amalgame ici non plus entre délinquance et itinérance. Et, ce qui est important, M. le Président, c'est d'ajouter du soutien non seulement avec des patrouilles mixtes, mais également avec des corps policiers. Et on travaille en très bonne collaboration avec mon collègue de la Sécurité publique.

Maintenant, il y a le dernier enjeu, qui est celui des personnes qui cherchent, à la sortie, par exemple, de la protection de la jeunesse... Et, ça aussi, on travaille là-dessus pour diminuer en amont les situations d'itinérance, en offrant, par exemple, des programmes de supplément au loyer aux jeunes qui quittent la DPJ, qui, également, vous le savez, sont surreprésentés dans les communautés des Premières Nations, pour s'assurer que tout le monde soit pris en charge tant en amont qu'en aval, M. le Président.

Donc, les efforts sont colossaux. Ça prend la collaboration de la municipalité et de tous les intervenants.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : En terminant.

M. Carmant : Et, comme d'habitude, M. le Président, notre gouvernement est au rendez-vous. Merci.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le ministre. Et je vais maintenant céder la parole pour un droit de réplique de deux minutes à Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Elisabeth Prass (réplique)

Mme Prass : Merci, M. le Président. Si toutes les mesures dont le ministre vient de nous parler avaient le succès attendu, la ville ne ferait pas un cri de coeur publiquement pour demander que le gouvernement intervienne directement. Oui, la situation d'itinérance des personnes autochtones est particulière à cause de tous les enjeux qui entourent leur situation. Donc, oui, c'est quelque chose qui doit amener... qui doit demander une approche gouvernementale, qui collabore avec plusieurs ministères.

L'Union des municipalités du Québec, comme on le sait, qui souhaite trouver des solutions pour lutter contre l'itinérance, a mis en place un comité pour produire un rapport pour chiffrer l'aide dont les municipalités ont besoin de la part du Québec pour réduire l'itinérance sur leur territoire. On espère que le gouvernement va s'asseoir avec eux à ce moment-là et les écouter et répondre à leurs demandes, parce que peut-être qu'eux ils ont des connaissances sur le terrain que votre ministère n'a pas nécessairement.

Et, dans le même sens, réunis plus tôt ce mois à l'Université McGill, le constat des membres du Collectif québécois sur la prévention de l'itinérance est sans appel, que les façons de faire actuelles de ce gouvernement, axées autour de l'hébergement d'urgence, ne suffisent plus. Ce sont des personnes avec des enjeux de dépendance et de santé mentale qui ont besoin d'un logement à long terme plutôt que des gestes de dernier recours. On espère que le gouvernement va collaborer avec ceux sur le terrain pour agir en amont plutôt que de se contenter de faire les choses de la même façon, qui, clairement, ne fonctionnent pas.

Donc, de la part de la ville de Val-d'Or, j'espère que le ministre va répondre positivement à la demande pour la création d'un centre de jour et une visite sur le terrain pour voir vraiment ce qui se passe, parce que chaque situation est différente, est individuelle, et il faut que le gouvernement travaille avec les municipalités, et ce, sur le terrain, pour vraiment trouver des solutions à long terme et pas juste des pansements. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Nous allons maintenant procéder au deuxième débat, qui portera sur une question adressée par Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce à M. le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs concernant l'absence de progrès dans le dossier des lagunes de Mercier.

Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, je vous cède la parole pour un premier cinq minutes.

Décontamination du site des lagunes de Mercier

Mme Désirée McGraw

Mme McGraw : Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'être ici, de poursuivre la discussion entamée pendant la période de questions plus tôt, aujourd'hui. Alors, justement, pendant la semaine en circonscription, j'ai été en tournée, justement, j'ai été en Montérégie et j'ai eu la chance de rencontrer les mairesses de Mercier et de Sainte-Martine, des femmes en politique exceptionnelles. Et j'ai été voir plusieurs sites, dont les lagunes, les fameuses lagunes à Mercier. Et on reconnaît tristement comme étant site de contamination d'eaux souterraines les plus reconnues, effectivement, en Amérique du Nord, ici au Québec. Alors, c'est vraiment surprenant.

Et, ça, c'est vrai, comme avait dit le ministre plus tard aujourd'hui, ça a commencé dans les années 60 et mais ça a été des décisions de gouvernements qui ont autorisé, justement, qui ont autorisé le déversement de 170 000 mètres cubes d'huile et d'autres produits toxiques dans une sablière désaffectée sur le territoire de la municipalité de Mercier. Alors, ça, ça a causé une contamination majeure des eaux souterraines dans la région, pas juste à Mercier, mais dans la région, et jusqu'à aujourd'hui ça demeure un problème. Alors, il en résulte que Mercier, Sainte-Martine, Saint-Isidore, Saint-Urbain-Premier aussi sont... ils ont un impact. Ça, ça a un impact sur le territoire.

Et, justement, il y a deux choses qu'on demande. Alors, Mercier, si je comprends bien, la mairesse m'avait expliqué qu'ils cherchent... demandent au gouvernement les moyens, de l'aide financière pour devenir plus autonomes, ça avec les autres villes, mais, dans un premier temps, de regarder la contamination du site et aussi l'accès aux données, mais des données indépendantes, pas nécessairement les données de gouvernement. Si je comprends bien, j'ai compris qu'il y avait... il y a un bris de confiance avec le gouvernement, et, justement, la ville veut avoir accès à des données d'experts indépendants pour avoir les informations plus complètes, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, on demande, avec les autres villes avoisinantes, de l'aide financière pour devenir plus autonome. Parce qu'il y a une entente avec Châteauguay pour fournir l'eau potable, mais il y a beaucoup de croissance dans cette région-là, et on n'arrive plus. Il y a beaucoup de pression à Châteauguay et les villes avoisinantes, et surtout à Sainte-Martine, qui se trouve vraiment au bout du tuyau. Et Sainte-Martine, à cause de la sécheresse, qui va devenir... qui va s'empirer avec les changements climatiques, surtout pendant la saison sèche qui est l'été, il y a une vraie crainte, M. le Président, que les incendies vont coïncider avec un manque d'eau. Ça fait que c'est vraiment une crainte qui est réelle. Alors, on demande au gouvernement de financer plus de... c'est un cas d'exception, de financer, de donner plus de financement, justement, pour avoir accès ou pour avoir l'accès à l'eau potable, mais de façon plus autonome. Donc, ça, c'est vraiment les...

Puis il y a eu une entente. C'est vrai que c'est un problème qui a duré pendant des décennies. Mais, en 2018, M. le Président, il y a eu une entente. Dans le temps, ça a été annoncé par l'ancien gouvernement libéral, et ça... il y avait... faisait partie, dans tout ça, c'est la prise en charge du lieu, avec des travaux préparatoires, un plan de caractérisation en 2019 et la construction d'une nouvelle usine entre 2020 et 2025, et donc ça aurait été en construction et complété sous peu.

Par contre, quand la CAQ est rentrée au pouvoir en 2018, il y avait silence radio, et, depuis ce temps-là, à moins que le ministre peut nous éclairer, il n'y a pas eu d'action suffisante, selon... au moins selon les mairesses, selon les municipalités. Et même, l'été passé, en août l'été passé, ces mêmes municipalités ont écrit au premier ministre, au premier ministre, justement, pour demander un peu... avec l'historique, j'ai là une copie de la lettre, et on demande, justement, l'aide financière, les moyens de reconnaître le cas exceptionnel. Mais, si je comprends bien, à moins qu'on va me corriger, il n'y a toujours pas de réponse qui vraiment répond aux enjeux, aux questions.

Donc, qu'est-ce que le gouvernement va faire? Et il va-tu y avoir une réponse à...

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci. Merci beaucoup, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Et je cède maintenant la parole, pour son droit de réplique de cinq minutes, à M. le ministre de l'Environnement, des Changements climatiques, de la Faune et des Parcs. M. le ministre.

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, M. le Président. Je vais déjà vous confirmer que je serai beaucoup plus bref que les cinq minutes, étant donné qu'on a eu cet échange-là un petit peu plus tôt, mais c'est effectivement un sujet qui est important.

Ce que je mentionnais, ce que la collègue rappelle, c'est que c'est un dossier qui date de plusieurs décennies, avec un degré de contamination qui est effectivement effarant, qui a toutes les raisons d'inquiéter la population, et c'est la raison pour laquelle le gouvernement, et peu importe sa couleur, le gouvernement précédent... et, je le mentionnais, si la solution avait été simple, le gouvernement précédent, les gouvernements précédents auraient sans doute solutionné le problème, mais les gouvernements qui se sont succédé depuis quelques années maintenant prennent la chose au sérieux.

• (18 h 50) •

Moi, personnellement, depuis mon arrivée en fonctions au niveau de l'Environnement, c'est un dossier que j'ai sur le bureau depuis quelques années maintenant, et c'est la raison pour laquelle il y a eu des suivis. Le ministère est en constante communication avec les autorités concernées. Il y aura, d'ailleurs, une rencontre le 2 juin prochain, c'est la semaine prochaine, avec les élus municipaux du secteur, pour parler de la suite des choses.

Et, pour ce qui est des mesures qui ont été annoncées à la toute veille des élections de 2018, la collègue a bien fait de rappeler que c'est un programme, un échéancier sur plusieurs années, qui nous a menés en 2025, et même davantage, selon les mesures qui allaient être retenues. C'est un projet qui n'est pas mort, c'est un projet qui est toujours en évaluation actuellement. Donc, le 2 juin prochain, c'est, notamment, la suite des choses qui sera discutée avec les élus municipaux du secteur. Et la grande crainte, elle est à deux niveaux. Que la contamination s'étende davantage, c'est une crainte que l'on prend au sérieux, et on s'assure que cette contamination-là ne s'étende pas davantage qu'elle ne l'est présentement. Et l'autre crainte, la collègue l'a mentionné, c'est aussi la disponibilité en eau potable. Ce n'est pas propre à la région de Mercier ou de Châteauguay. En Montérégie, de façon générale, il y a un enjeu qu'il faut considérer au niveau de la disponibilité en eau potable, et ça va amener les municipalités du secteur à revoir certains de leurs plans de développement.

Donc, du côté du gouvernement, l'engagement est clair, c'est d'accompagner les municipalités, et s'assurer que cette contamination-là ne déborde pas les frontières actuelles, et c'est de travailler avec les municipalités pour qu'elles puissent s'assurer et assurer à leur population une disponibilité en eau potable convenable. Donc, oui, il y aura, manifestement, des investissements qui pourront être faits tantôt par ma collègue aux Affaires municipales, pour tout ce qui est du volet assainissement des eaux, mais également approvisionnement en eau potable, et le ministère de l'Environnement sera aussi là pour accompagner, pour la suite des choses. Et le prochain rendez-vous à noter à nos agendas respectifs, c'est le 2 juin, avec les élus municipaux, pour, justement, discuter de la suite des choses. Mais le phénomène n'est pas nouveau, il date de plusieurs décennies, et, par conséquent, la solution ne peut pas être simple, mais on s'assurera de retenir la bonne. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le ministre. Et je cède maintenant la parole, pour un droit de réplique de deux minutes, à Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Désirée McGraw (réplique)

Mme McGraw : Merci, M. le Président. Donc, je suis contente qu'il va y avoir une rencontre. Je sais que les mairesses, en tout cas, s'attendent à une action gouvernementale. C'est vraiment un cas d'exception, mais on sait qu'avec les changements climatiques aussi ça va devenir peut-être moins exceptionnel.

Et on regarde... D'ailleurs, peut-être demain, en tout cas cette semaine, il va y avoir l'adoption de principe du projet de loi n° 20, quand on parle beaucoup d'eau, du Fonds bleu. Et Québec détient 3 % des eaux douces à travers le monde, ça fait que c'est vraiment impensable de comprendre qu'il y a des municipalités, il y a des villes au Québec qui manquent d'eau, ou pour lesquelles il y a une certaine insécurité.

Donc, la lettre au premier ministre, qui est très claire, qui a été envoyée en août, est-ce qu'on va avoir une réponse claire? Est-ce qu'on va... Est-ce que le gouvernement va prendre ses responsabilités et donner une aide financière supplémentaire à ces villes pour, justement, assurer une autonomie locale en prévision d'eau potable, regarder la décontamination du site et, aussi, à donner accès ou donner de l'aide financière, justement, pour que les villes, les MRC en particulier, aient accès à des données par des experts autonomes, indépendants? Donc, il y a beaucoup d'enjeux, M. le Président.

Et je vais citer, peut-être, en conclusion, d'autres maires de la région. Ça, c'est le maire de Saint-Isidore, qui est affectée : «Sans aide financière additionnelle aux programmes réguliers, nos municipalités doivent faire des choix financiers que d'autres municipalités n'ont pas à faire.» On connaît qu'il y a... On sait très bien qu'il y a une stratégie québécoise de l'eau à partir de 2018, l'élection... première élection du gouvernement caquiste, et on dit que toutes les municipalités doivent avoir accès à une eau potable. Alors, c'est une promesse importante du gouvernement, et on espère que le gouvernement va s'y tenir. Merci.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Et cela met fin aux débats de fin de séance.

Ajournement

Et je vais donc... Compte tenu de l'heure, les travaux sont ajournés au mercredi 24 mai 2023, à 9 h 40.

(Fin de la séance à 18 h 56)