(Neuf heures quarante minutes)
Le Vice-Président (M. Picard) : Bon,
mercredi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous débutons
avec la rubrique de déclarations des députés, et la première est pour M. le
député de Chauveau.
Souligner le 30e anniversaire
du Tournoi de hockey huron-wendat
M. Sylvain Lévesque
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Aujourd'hui, je
souhaite souligner le 30e anniversaire du Tournoi de hockey
huron-wendat, édition qui se déroulera cette fin de semaine, soit du 15 au
17 avril, au complexe sportif Desjardins de Wendake.
Le tournoi a
été présenté pour la première fois en 1988. Les organisateurs, à l'époque,
étaient MM. Roger Vincent, Bertrand Picard et Jacques Vincent.
Aujourd'hui, le Tournoi de hockey huron-wendat réunit plus de 24 équipes
qui proviennent des quatre coins du Québec et attire des centaines de
partisans.
M. le
Président, pour présenter 30 éditions d'un tournoi de hockey de cette
envergure, ça prend des gens qui y croient et surtout des personnes de
coeur qui s'impliquent année après année. Chaque année, les employés du Conseil
de la nation huronne-wendat peuvent compter
sur la présence très appréciée de précieux bénévoles qui viennent prêter
main-forte.
«Tiawenhk» à tous ceux qui rendent possible ce
tournoi de hockey reconnu à travers le Québec. Bon succès et «yiheh» à tous les
hockeyeurs. Merci. M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci,
M. le député. Je cède la parole à M. le député de Saint-Jean.
Souligner le départ à la
retraite de Mme Cécile Tremblay,
fondatrice et présidente-directrice générale de
Ballet classique du Haut-Richelieu inc.
M. Louis Lemieux
M. Lemieux : Merci,
M. le Président. Le poste de la direction générale du Ballet classique du
Haut-Richelieu est ouvert. C'est
important parce que c'est la première fois en 43 ans. Alors, laissez-moi
vous parler de Cécile Tremblay, qui a dirigé le ballet, comme on
l'appelle chez nous, depuis 43 ans et qui aura donc bientôt un ou une
successeure.
Après avoir
fondé l'école, en 1979, Mme Tremblay en a fait une référence québécoise
dans le monde de la danse et un
organisme incontournable du paysage culturel en Montérégie, avec au programme
la danse créative, le ballet classique, la danse moderne et
contemporaine, le jazz contemporain, la comédie musicale et un programme
parent-enfant.
Les dernières
années ont été costaudes. Après le déménagement en catastrophe et en pleine
pandémie, le ballet s'est réinstallé
dans des locaux plus modernes et mieux adaptés à ses besoins et sa réalité, que
Mme Tremblay m'avait d'ailleurs fait visiter fièrement à
l'inauguration, sans me dire, toutefois, qu'elle s'en allait. Mais maintenant
je comprends. Elle voit aujourd'hui son
ballet devenu grand et elle part la tête haute, avec la satisfaction du devoir
accompli. Merci, Mme Cécile Tremblay.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Je cède
maintenant la parole à M. le député de D'Arcy-McGee.
Rendre hommage au chef
d'orchestre Boris Brott
M. David Birnbaum
M. Birnbaum : M.
le Président, Sydney Lanier, poète et musicien, a fameusement constaté que la
musique est l'amour en quête d'un
mot. Le maestro Boris Brott, qui nous a quittés trop tôt et tragiquement,
incarnait cet amour avec chaque souffle de son être, et son legs va
sûrement rayonner à travers son Québec natal, son pays et le monde.
Maestro Boris Brott transformed the
Orchestre classique de Montréal, conducted under Leonard Bernstein, made classical music accessible to
listeners of every background and persuasion in Montréal, London, Hamilton, and
numerous capitals in between. But
perhaps more important, he transformed, embraced, and empowered musical talents
whenever he found them.
60 seconds
is hopelessly short to honor the lasting impact of a man whose warmth, passion,
and humor enriched so may
lives every day. A close friend and colleague probably said it best : he
was an extraordinary human being who just happened to be an
extraordinary musician. May his memory be forever a blessing
Le Vice-Président (M.
Picard) :
Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Huntingdon.
Féliciter
les lauréats du Gala Agristars de la circonscription de Huntingdon
Mme
Claire IsaBelle
Mme
IsaBelle : Bonjour, M. le Président. Cette semaine a eu lieu le
neuvième Gala Agristars de la grande Montérégie 2022. D'emblée, je tiens à
féliciter tous les organisateurs de cet événement, qui fut un franc succès.
Également, je tiens à
féliciter Les Fermes V.-Forino & Fils inc., de
Saint-Patrice-de-Sherrington, qui se sont mérité
un des prix, Ma ferme, mon monde. Ce prix souligne la bonne idée en gestion des
ressources humaines. En effet, cette entreprise assure une écoute et un
soutien constant auprès des travailleurs étrangers temporaires.
Le
prix Relève a été remporté par Gabriel Leclair, de Saint-Patrice-de-Sherrington.
M. Leclair contribue régulièrement à des chroniques au journal La Terre de chez nous et à la
production de capsules Visages de la relève. Par son sens de
l'initiative et son leadership, il sait mettre en valeur l'importance de
la relève agricole.
Merci. Merci d'être
là pour mieux nourrir le Québec.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède la parole à M. le député
de Vachon.
Souligner
le 75e anniversaire du journal Le Courrier du Sud
M. Ian
Lafrenière
M.
Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Plus que jamais, dans un
monde où nous sommes confrontés à la
désinformation, les citoyens ont besoin de sources d'information fiables,
neutres et locales. C'est avec beaucoup de reconnaissance que je
souligne aujourd'hui le 75e anniversaire du Courrier du Sud.
M.
le Président, les hebdos locaux, tout comme les télés et radios communautaires,
sont au coeur de nos communautés. Depuis
plus de 75 ans maintenant, les organismes communautaires, les associations
sportives, les commerçants, les citoyens de Saint-Hubert et de la
Rive-Sud peuvent compter sur leur journal local.
Aujourd'hui, Le
Courrier du Sud, c'est 110 000 copies distribuées à chaque
semaine, qui sont préparées par 55 employés.
On le sait, durant la pandémie nos médias d'information locaux ont été plus
qu'importants à travers ces contenus pertinents,
ces reportages, même les espaces publicitaires, qui, en passant, ont stimulé et
encouragent l'achat local des produits de chez nous. Le Courrier du
Sud occupe une place importante dans nos communautés.
Alors, à tous ces
artisans, je dis bon 75e anniversaire et longue vie au Courrier du Sud!
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, M. le député. M. le député de Beauharnois, la
parole est à vous.
Annoncer
la construction d'une nouvelle unité d'hébergement
adapté au CHSLD Cécile-Godin
M. Claude
Reid
M. Reid : Merci
beaucoup, M. le Président. Dès juin prochain, le CHSLD Cécile-Godin, de
Beauharnois, accueillera un projet unique et régional mis sur pied par le CISSS
de la Montérégie-Ouest, à savoir un nouveau milieu de vie pour 10 jeunes adultes qui présentent une déficience
intellectuelle, un polyhandicap ou des troubles de comportement.
Par ailleurs, pour
contribuer à offrir un milieu de vie stimulant pour les jeunes, les fondations
des hôpitaux Anna-Laberge et du Suroît ont
récemment décidé de travailler main dans la main pour amasser une somme de 270 000 $
en vue d'acquérir des équipements adaptés. À
cette initiative, je dis merci aux fondations d'avoir mis en oeuvre cette
campagne, qui aidera ces jeunes à
vivre dans un environnement conçu pour eux, avec des professionnels dévoués,
et, surtout, qui laisse une grande place aux familles.
Sachez,
M. le Président, que vous pouvez compter sur la collaboration de plusieurs
députés en Montérégie-Ouest. D'ailleurs,
à l'initiative de ma collègue et députée de Soulanges, qui vit avec un enfant
aux prises avec un lourd handicap, nous inviterons prochainement nos autres
collègues de cette Chambre à donner généreusement. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci,
M. le député. Je cède la parole à Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Féliciter
Mme Beatriz Mediavilla, nommée Artiste
de l'année en Abitibi-Témiscamingue par le
Conseil des arts et des lettres du Québec
Mme
Émilise Lessard-Therrien
Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le
Président. L'Abitibi-Témiscamingue regorge d'artistes de grand talent, et c'est
un honneur pour moi, aujourd'hui, de souligner le travail d'une artiste
multidisciplinaire de Rouyn-Noranda, Mme Beatriz
Mediavilla, qui a remporté le Prix du CALQ pour l'Artiste de l'année dans le
cadre de la remise des Prix d'excellence en arts et culture de l'Abitibi-Témiscamingue.
La
région est de plus en plus une plaque tournante pour le septième art, plusieurs
cinéastes y font leur marque, et Mme Mediavilla
contribue grandement à notre rayonnement artistique. Elle s'est
particulièrement démarquée avec son oeuvre documentaire Habiter le mouvement, un récit en dix chapitres, qui
a reçu plusieurs prix et distinctions, et ce, un peu partout dans le monde.
Elle aborde le thème de la danse de façon très poétique dans ses oeuvres, et
c'est une grande beauté qu'elle nous offre à travers son travail.
Bravo,
Mme Mediavilla, et bon succès pour vos futurs projets!
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. Je cède la parole à M. le député de Portneuf.
Rendre
hommage à M. Michel Gauthier pour son parcours
professionnel et sa contribution au développement
économique et social de Portneuf et du Québec
M.
Vincent Caron
M. Caron : Merci, M. le Président. Je veux souligner ici le
brillant parcours qui a été celui de M. Michel Gauthier, un citoyen
de ma circonscription. M. Gauthier est parmi nous aujourd'hui.
Que
de chemin a été parcouru par ce natif de Saint-Basile! Pendant près d'une
cinquantaine d'années, il a mis ses capacités
d'administrateur au service de nombreuses organisations à vocation coopérative
et sociale, comme au sein du Conseil
québécois de la coopération et de la mutualité, dont il est aujourd'hui le
président. Il a toujours été guidé par ces belles valeurs que sont l'entraide, l'intégrité et la solidarité. Il a
apporté sa pierre à l'édifice d'une économie fondée davantage sur l'utilité collective. Il a prouvé à de
nombreuses reprises la force du groupe des coopératives et des mutuelles du
Québec et de leur grande résilience devant les crises que nous avons pu
connaître. Il a toujours répondu présent lorsqu'il s'agissait de
soutenir des initiatives qui ont bénéficié à l'ensemble des citoyennes et
citoyens de Portneuf.
Alors, bravo et
merci, M. Gauthier, pour votre apport inestimable au développement
économique et social de Portneuf et du Québec!
• (9 h 50) •
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci,
M. le député. Je cède la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Souligner
le 50e anniversaire du Club Optimiste LaSalle inc.
Mme
Hélène David
Mme David : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, c'est un
privilège pour moi de rendre hommage aux membres du Club Optimiste de
LaSalle pour leur 50e anniversaire de fondation.
Depuis un demi-siècle,
maintenant, le Club Optimiste occupe une des places les plus importantes dans
la vie communautaire laSalloise par son implication dans plus d'une cause.
Avec
à sa tête la première femme présidente d'un club Optimiste, Mme Annette
Blanchard, le Club Optimiste de LaSalle
organise différentes levées de fonds afin de soutenir les familles laSalloises
et les causes soutenant la jeunesse. En effet, que ce soit grâce au bazar annuel de jouets, permettant à des
familles de pouvoir offrir des cadeaux de Noël à leurs enfants, par la remise d'habits de neige dans les
écoles pour des enfants laSallois ou encore par leur implication dans des
activités scolaires, les membres du Club
Optimiste de LaSalle répondent toujours présent pour un grand nombre
d'activités philanthropiques au sein de ma circonscription.
Pour
toute cette implication et ce dévouement, je désire vous remercier sincèrement,
toutes et tous, et vous souhaite un très bon cinquantième.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, Mme la députée. Cela met fin à la rubrique
Déclarations de députés.
Je suspends les
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 51)
(Reprise à 10 h 4)
Le
Président : Mmes et MM. les députés, bon mercredi à toutes et à tous.
Prenons quelques
instants pour nous recueillir.
Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir.
Mmes et MM. les
députés, nous poursuivons les affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.
Dépôt de documents
Nous en sommes à la rubrique Dépôt de documents.
M. le leader du gouvernement.
Réponse à une pétition
M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je dépose la réponse du
gouvernement à la pétition présentée en Chambre le 23 mars 2022 par
le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Réponses à des questions inscrites au feuilleton
Je
dépose également les réponses du gouvernement aux questions inscrites au
feuilleton le 24 février 2022 par le député de Rimouski et le
23 mars 2022 par le député de Laurier-Dorion. Merci.
Le
Président : Ces documents sont déposés.
Dépôt de rapports de commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commission, Mme la présidente de la Commission
des transports et de l'environnement et députée de l'Acadie.
Étude détaillée du projet de loi n° 22
Mme St-Pierre : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de
la Commission des transports et de l'environnement qui, les 23 et 24 mars ainsi que les 6, 7 et
12 avril 2022, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 22,
Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile, le Code de la
sécurité routière et d'autres dispositions. La commission a adopté le texte du projet de loi avec ses
amendements. Merci, M. le Président.
Le
Président : Merci. Ce rapport est déposé.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt
de pétitions, M. le leader de l'opposition officielle et député de Pontiac.
Maintenir la direction générale locale et le centre
régional de lutte de la
Société de protection des forêts contre le feu à la base de Maniwaki
M. Fortin : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par 705 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant que la
Société de protection des forêts contre le feu — la SOPFEU — est
un organisme financé majoritairement par le gouvernement du Québec pour assurer
la protection des forêts contre le feu;
«Considérant
que la SOPFEU a entrepris de déménager des postes décisionnels de la base de
Maniwaki, une région économiquement
défavorisée, vers celle de Val-d'Or, et ce, sans aucune étude démontrant la
nécessité et la rentabilité d'une telle réorganisation;
«Considérant que la
SOPFEU est l'un des fleurons de La Vallée-de-la-Gatineau;
«Considérant
que la base de Maniwaki a toujours démontré un professionnalisme et une
compétence exemplaire soutenue par l'expertise des employés en place;
«Considérant que rien
ne motive le démantèlement de cette base d'opérations qui a fait ses preuves;
«Considérant
que des emplois de qualité seront perdus, que des contrats et des achats se
feront ailleurs, alors que la MRC Vallée-de-la-Gatineau occupe
l'avant-dernier rang parmi les MRC dévitalisées du Québec;
«Considérant
que nous estimons que nous avons droit au soutien du gouvernement pour la
croissance économique de l'Outaouais et des Laurentides;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement du Québec de s'assurer que la base de
Maniwaki redevienne une entité à part entière, en incluant son centre
régional de lutte, en réintégrant une direction générale locale régissant les
opérations avec tout le soutien de la structure antérieure.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le
Président : Et cet extrait de pétition est déposé. Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice.
Revoir la planification des coupes forestières dans la
zone de villégiature
du secteur nord du lac du Missionnaire, à Trois-Rives
Mme Tardif : Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par 508 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant
que le lac du Missionnaire est classé prioritaire pour la villégiature par les
ministères provinciaux, la MRC de Mékinac et la municipalité de
Trois-Rives;
«Considérant
que le chantier Océanne s'étend sur un flanc de montagne très visible en marge
d'une zone de villégiature facilement accessible et desservie par tous les
services, comptant 120 résidences et un camping saisonnier;
«Considérant
les retombées économiques récurrentes pour la communauté liées à la taxation, à
la dynamisation des commerces et aux besoins en biens et services;
«Considérant que
l'Association du lac du Missionnaire désire que les usagers puissent pratiquer
leurs activités extérieures dans une forêt de proximité accessible et ayant
préservé son caractère naturel;
«Considérant
que la récolte qui est planifiée pourrait toucher la moitié du couvert
forestier comme les coupes déjà réalisées au nord de notre secteur où on
observe une forêt résiduelle dévastée;
«Considérant que le MFFP a mis en place une politique visant
l'harmonisation des activités forestières avec les autres usages du
territoire;
«Considérant
que plusieurs autres territoires pourraient être identifiés pour permettre aux
compagnies forestières d'exercer
leurs droits de coupes avec un plus faible impact sur les paysages, les
activités économiques et récréotouristiques;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du
Québec et au MFFP de revoir la planification du chantier Océanne pour exclure
le bloc principal localisé dans l'encadrement visuel de la zone de villégiature
concentrée au lac du Missionnaire
nord et de renoncer à tout projet de coupe sur ce secteur qui pourrait avoir
des impacts néfastes comparables.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
• (10 h 10) •
Le
Président : Et cet extrait de pétition est déposé. M. le leader de
l'opposition officielle et député de Pontiac.
Réviser les formulaires et les critères d'admissibilité
pour les
demandes de supplément pour enfant handicapé
M. Fortin : Merci, M. le Président. Je dépose, au nom de ma collègue de Westmount—Saint-Louis, l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale et signée
par 1 225 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du
Québec.
«Les
faits invoqués sont les suivants :
«Considérant que les parents d'enfants handicapés ont droit à
un accès équitable au supplément pour enfant handicapé;
«Considérant que les décisions de Retraite Québec doivent
reposer sur des documents remplis par des professionnels de la santé;
«Considérant que les critères d'admissibilité au supplément
pour enfant handicapé disponibles ne sont pas assez clairs ou détaillés, et que
des critères d'analyse méconnus des parents et des cliniciens sont utilisés
lors du traitement d'une demande de révision pour justifier un refus ou
une acceptation;
«Considérant que les familles dont les diagnostics ne sont pas
nommés précisément dans la liste ont souvent un accès difficile à la
subvention;
«Considérant
que les dossiers des enfants dont le diagnostic n'est pas nommé sur la liste
actuelle de Retraite Québec sont
souvent étudiés en fonction de critères qui ne touchent pas leur diagnostic et
en minimisant [la] situation de handicap;
«Considérant que le handicap d'un enfant a des impacts
importants pour les familles, incluant des impacts financiers;
«Considérant que les
formulaires de Retraite Québec sont basés sur d'anciennes classifications
utilisant des appellations désuètes;
«Considérant qu'il est important que les cliniciens et les
décideurs de Retraite Québec utilisent un langage commun;
«Et l'intervention réclamée
se résume ainsi :
«Nous, soussignés,
demandons au gouvernement du Québec :
«Que les formulaires
internes et externes de Retraite Québec pour le supplément pour enfant
handicapé soient revus afin de refléter des catégories ayant pour référence des
classifications et la nomenclature actuelle utilisée par les cliniciens — c'est-à-dire
DSM-5 et CIM-10;
«Que les critères
d'inclusions et d'exclusions pour les diverses catégories soient publiés.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le
Président : Et cet extrait de pétition est également déposé.
Il n'y a pas de
réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de
droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes
maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la
parole à la cheffe de l'opposition officielle.
Gestion de la pandémie de coronavirus dans les centres
d'hébergement et de soins de longue durée
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Merci, M. le Président.
La semaine dernière, je questionnais le premier ministre à savoir s'il avait
su ce qui se passait chez Herron avant le 10 avril. Il nous a dit que non.
Hier,
lorsqu'on lui parlait du CHSLD Herron, on lui a demandé est-ce qu'il savait
avant le 10 avril, et là il nous a dit qu'il savait qu'il manquait
d'employés.
La question que j'ai pour le premier
ministre aujourd'hui : Avant le 10 avril, est-ce qu'il savait qu'il y
avait des décès chez Herron? Si oui,
quand est-ce qu'il l'a appris et à quel moment? Est-ce qu'il peut nous dire la
date qu'il l'a appris?
Le
Président : M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, à chaque
matin, sept jours par semaine, au mois de mars, on avait un rapport sur l'état
de la situation dans tous les CHSLD, publics
et privés. Il y en avait plusieurs où il manquait d'employés, M. le
Président. On avait des informations
sur les éclosions. Et, M. le Président, bien, on s'assurait, là, de faire des
démarches. Donc, on a mis en place le
compte Je contribue pour demander aux Québécois, même ceux qui n'avaient pas de
formation, de venir nous donner un
coup de main. On a parlé avec les médecins spécialistes. On a parlé avec toutes
les personnes pour voir comment on pourrait combler le manque d'employés
dans les CHSLD.
Mais, je le répète,
M. le Président, le 30 mars, le CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal
nous a dit : Il manque d'employés au CHSLD Herron, et on va s'en occuper.
Le
Président : Première complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition
officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : M. le Président, je vais
répéter la question que j'ai pour le premier ministre : Est-ce qu'avant le
10 avril il savait qu'il y avait des décès chez Herron? Si oui, quand
est-ce qu'il l'a appris? Et combien de décès y avait-il à ce moment-là?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui. M. le Président, je
ne me rappelle pas d'avoir su, le 30 mars, là, qu'il y avait des décès au
CHSLD Herron.
Le
Président : Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition
officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : La question pour le
premier ministre, c'est : Avant le 10 avril, est-ce qu'il savait
qu'il y avait des décès au CHSLD Herron?
Le
Président : M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, la
cheffe de l'opposition officielle fonctionne un peu... elle est en train de
faire le travail de la coroner. La
coroner est en train de poser toutes ces questions-là. Moi, ce que je vous dis,
c'est qu'on avait un rapport complet
sur la situation globale à chaque matin. Mais, honnêtement, je ne peux pas vous
dire, pour un CHSLD en particulier,
quel était le rapport, combien il y avait de décès, combien qu'il y avait
d'éclosions, combien il manquait d'employés. Je ne peux pas répondre à
ça, là. Mais on a fourni toute cette information à la coroner.
Le
Président : Troisième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition
officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Donc, le premier ministre
ne répond pas à la question. Mais, sur la question de l'état de situation,
il nous dit que chaque matin il y avait des
états de situation, et chaque matin il y avait des états de situation sur le
manque de personnel. Pourtant, l'état de situation qu'on lui a envoyé le
4 avril disait : Saignements de la peau, plaies ouvertes, pansements
jaunis, manque d'équipement. Ça, ce sont les gens qui étaient au CHSLD Herron.
Est-ce qu'il était au
courant? Est-ce qu'il avait reçu cet état de situation qui remontait au
4 avril?
Le
Président : M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, vous
allez comprendre, là, qu'il y a des centaines d'établissements. Donc, on avait
des rapports sur la situation, sur le personnel, sur la situation des
éclosions, mais on n'avait pas le genre d'informations que vient de mentionner
la cheffe de l'opposition officielle.
Le Président : Question principale,
Mme la députée de Fabre.
Gestion de la pandémie de
coronavirus dans
les résidences pour personnes âgées
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : M. le Président, il y
avait 100 établissements, il y en avait un seul avec un S.O.S., un courriel
urgent, et qui a été pris en charge le lendemain. Rappelons-nous ce courriel du
29 mars : «...il n'y a presque plus de personnel pour prendre
soin des 154 résidents[...]. C'est très problématique.»
Or, lors de son point
de presse, pour la première fois le premier ministre a admis qu'il savait, le
30 mars, qu'il se passait quelque chose
au CHSLD Herron. Il dit : «...dans le cas du CHSLD Herron, on avait une
information le 30 mars, à l'effet que le CIUSSS s'en occupait, donc qu'il
allait envoyer des employés pour combler le manque de personnel au CHSLD
Herron.» En résumé, là, M. le Président, le 30 mars, tout le monde savait.
Ma
question va être simple : Il savait qu'il manquait du personnel, mais
est-ce qu'il peut nous dire s'il savait qu'il n'y avait presque plus
personne pour s'occuper des 154 résidents au CHSLD Herron?
Le
Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches
aidants.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais (Prévost) : M.
le Président, premièrement, au 30 mars, il y avait 25 établissements
où il y avait des éclosions, je le
répète, là, et au 10 avril il y en avait 274. Il n'y avait pas uniquement
un CHSLD avec la notion «urgence», là, il y en avait plusieurs qui nous
transmettaient des courriels comme quoi c'était urgent.
Avant
la pandémie, il manquait 10 000 préposés aux bénéficiaires dans nos
établissements. Pendant la pandémie, il
a manqué beaucoup de personnel. Personnel infecté, personnel malade, alors il a
manqué beaucoup de personnel. Et le premier ministre a raison de
dire : On a fait appel avec Je contribue pour obtenir des personnes qui
puissent venir aider à l'intérieur de nos établissements.
Donc,
on savait, le 30 mars, qu'il manquait de personnel, mais le CIUSSS de
l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal nous a indiqué qu'il prenait la situation en main,
comme tous les autres CISSS et CIUSSS quand il y avait des difficultés dans les
CHSLD.
Par ailleurs,
M. le Président, la raison pour laquelle il y a eu une tutelle...
Le
Président : En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : ...c'est parce que c'était un CHSLD privé.
Le
Président : Première complémentaire, Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : Merci, M. le Président.
Je répète : un seul établissement sous tutelle. Trois ministres savaient,
le premier ministre aussi, le 30 mars, je le cite : «...on avait une
information le 30 mars à l'effet que le CIUSSS s'en occupait[...]. Donc,
évidemment, [...]on a accepté cette information-là.»
M.
le Président, le problème, c'est que, le CIUSSS, c'est lui, il a accepté cette
information, et personne n'a cru bon, sur la cellule de crise, d'assurer sa responsabilité de faire un suivi et de s'assurer que les 154 résidents étaient maintenant
en sécurité.
Le
Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches
aidants.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais (Prévost) : M.
le Président, le CHSLD Herron a été sous tutelle parce que la P.D.G. avait des
difficultés de communication avec les propriétaires pour avoir accès aux
dossiers, et cela est connu. Pour obtenir la tutelle, on a dû passer par
la Santé publique de Montréal.
Maintenant,
avec la loi n° 101 concernant la maltraitance, tous les CISSS et
CIUSSS ainsi que le ministère ont un levier
juridique pour être en mesure de faire une administration provisoire quand il y
a des difficultés, c'est-à-dire pouvoir entrer immédiatement dans un
milieu privé...
Le
Président : En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : ...pour être en mesure d'offrir les soins.
• (10 h 20) •
Le
Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé :
Je répète : parmi tous les
CHSLD privés, un seul sous tutelle, un seul pour l'ensemble des
établissements.
M. le Président, nous avons beaucoup
entendu le gouvernement caquiste dire, dans les derniers jours, que le CIUSSS,
c'était sous contrôle, c'est ce qu'il entendait. Et, sur la cellule de crise,
il n'y a personne, encore une fois, qui a cru bon de faire un suivi à une situation très problématique. Si ça
avait été un membre de leur famille qui avait été au CHSLD Herron, le 30 mars, est-ce qu'ils auraient fait un suivi,
est-ce qu'ils auraient vérifié, et les jours suivants, si leurs proches avaient
été nourris, hydratés, qu'il y avait du personnel sur place pour en
prendre soin?
Le Président :
Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Mme la ministre.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais (Prévost) : M.
le Président, ce qu'on a vécu au CHSLD Herron va rester gravé dans la mémoire
et dans l'histoire du Québec. C'est une tragédie. On ne veut plus jamais
que cette tragédie se produise.
On
sait, au 30 mars, qu'il y a un décès. Il y a 25 établissements en
éclosion, des établissements où on nous dit que c'est urgent parce qu'il manque de personnel, parce qu'il y a beaucoup
d'infections. Et on sait aussi qu'au 10 avril il y a
274 établissements à suivre à tous les jours.
Le
Président : En terminant.
Mme Blais (Prévost) : Quand
le CISSS... ou le CIUSSS — c'est
plutôt un CIUSSS — de
l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal nous dit qu'il prend le CHSLD en main, il
pend le CHSLD en main.
Le
Président : Question principale, Mme la députée de Fabre.
Gestion de la pandémie de COVID-19 dans les centres
d'hébergement et de soins de longue durée
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : M. le Président,
4 avril, le CIUSSS rédige un rapport complet de deux pages sur sa visite
au CHSLD Herron. Je lis le
rapport : Pas de ratios établis, aucun horaire pour les employés, manque
criant de matériel de protection, les
patients positifs qui circulent librement avec les patients négatifs, aucun
équipement jetable, aucune lingette disponible, usagers avec des selles sèches sur le corps, au nettoyage, saignements
de la peau, patients avec bonbonnes d'oxygène vides, patients avec de
multiples plaies à la grandeur du corps. Ça, c'est six jours après la prise en
charge. Et il faudra attendre le lendemain, soit le 5 avril, pour enfin
demander aux Ressources humaines du CIUSSS de recruter massivement du personnel.
La
ministre des Aînés parle de plein d'états de situation, des états de situation
qu'elle ne nous dépose toujours pas. Là, on a un rapport accablant du
CIUSSS, une réalité d'horreur malgré la tutelle.
Est-ce qu'il y en a
d'autres, rapports comme celui-là qui existent?
Le
Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches
aidants.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais (Prévost) : M.
le Président, il y a une coroner qui est en train d'écrire un rapport, qui a
fait une enquête, qui a été en mesure
d'enquêter et de poser des questions à toutes les personnes, qui a tous les
documents qu'elle souhaitait avoir,
qui a les états de situation, qui a des courriels, qui a tout. Il y a des
personnes qui sont même revenues une deuxième fois pour témoigner. J'ai
témoigné, la ministre... l'ex-ministre de la Santé a témoigné, les
sous-ministres ont témoigné. La coroner va faire son rapport, va le déposer, on va lui laisser faire son
travail. Nous, on a fait le travail avec tout ce qu'on disposait, avec
notre coeur.
Et puis, vous savez,
à un moment donné, là, il faut se remettre avec les yeux de 2020. On ne le connaissait
pas, le virus. Il est entré dans toutes les portes de nos établissements. On
manquait de personnel, on manquait... on avait coupé en cliniciens de prévention des infections avant, avec la réforme
du député de La Pinière, on avait coupé en santé publique...
Le
Président : En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : ...on avait coupé dans le personnel. Oui, malheureusement,
c'est la triste...
Le
Président : Première complémentaire, M. le député de Marquette.
Des
voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! M. le député, vous êtes le seul à avoir
la parole.
M. Enrico Ciccone
M. Ciccone : Merci, M. le Président. Le gouvernement caquiste dit depuis des jours
qu'ils vont attendre le rapport du coroner, et nous l'attendons tous aussi avec
impatience. Cependant, la coroner enquête sur 53 décès seulement.
On sait qu'il y a eu 5 060 décès dans les CHSLD.
Alors,
pour les 5 007 autres familles qui veulent aussi des réponses, est-ce
que la ministre des Aînés et l'ancienne ministre de la Santé peuvent consacrer leurs six derniers mois de vie
politique à convaincre le premier ministre de déclencher une enquête
publique indépendante à la grandeur du Québec, s'il vous plaît?
Le
Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches
aidants.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : Je n'aime pas ça
faire ça, M. le Président, mais le député de Marquette a l'île de Dorval dans
sa circonscription. Est-ce qu'il savait ce qui se passait? Non, mais...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! J'apprécie quand
ça redevient calme. Les sujets sont importants et les questions le sont, les réponses également, vous le savez. Je vous
demande toujours votre collaboration, d'être attentifs. Une seule personne
a la parole, et c'est la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants,
s'il vous plaît. Il vous reste 32 secondes, Mme la ministre.
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président,
on a vécu une tragédie, ici. À travers le monde entier, ça a été une pandémie.
Oui, il y a eu des morts dans nos milieux de vie. Il y a eu des morts, aussi, à
la maison. Les personnes les plus vulnérables ont été touchées. On ne veut plus
que ça se reproduise, alors on a mis en place des gestionnaires dans chacun des
établissements, on a embauché près de 10 000 préposés aux
bénéficiaires, on a formé des champions en prévention et contrôle des infections...
Le
Président : En terminant...
Mme Blais
(Prévost) : ...on a plus de matériel de protection. On ne veut plus
que ça se reproduise.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le leader de l'opposition
officielle.
M. André Fortin
M. Fortin : Je vais vous redonner ça à sa plus simple
expression, M. le Président. Le 30 mars, ils savaient que les soins n'étaient pas donnés. Le 4 avril, ils avaient
un rapport écrit comme quoi des gens étaient dans des conditions atroces. Le
7 avril, il y avait un autre cri
du coeur du CIUSSS pour dire qu'ils n'étaient plus capables de donner des
soins. Le 8 avril, c'était aux nouvelles, à Citytv Montréal. Et ils ont attendu jusqu'au 10 avril pour agir,
alors que le député de Marquette était sur place, le 10 avril.
Ça mérite une prise
de responsabilité du premier ministre. Ça mérite des réponses. Ça mérite une
commission d'enquête publique.
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît!
Sans commentaire au terme des questions. La réponse est à Mme la ministre
responsable des Aînés et des Proches aidants. Votre attention à toutes
et à tous.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président,
on reçoit un courriel le 29, je le reçois le 30. Dans ce courriel, on parle
effectivement qu'il y a un manque de personnel flagrant, mais on dit aussi que
le CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal va prendre la situation en main, va
la redresser et former du personnel. À travers tout le Québec, pendant la
pandémie, les P.D.G. des CISSS et des CIUSSS, quand il y avait des difficultés dans leurs
établissements, ou même dans des établissements privés, privés conventionnés,
nous disaient à peu près la
même chose, qu'ils étaient sur place pour prendre en main la situation.
Alors,
notre travail, on le suivait à tous les jours. Si nous avions réellement su le
drame qui se déroulait, on ne serait pas restés comme ça, là, au
contraire.
Le Président :
Question principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Accès au logement
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois : M. le Président, j'ai lu un lead dans le journal,
ce matin. 8,5 %. Aux États-Unis, l'inflation est rendue à 8,5 %.
C'est la plus grosse inflation en 40 ans. Et ici aussi on bat des records,
jamais les prix des logements n'ont été aussi élevés, puis je n'ai pas besoin
de vous dire que les salaires ne suivent pas du tout.
Sylvie nous a
écrit, elle est incapable de se trouver un loyer en bas de 1 000 $.
Et ça, ce n'est pas à Outremont, c'est à Saint-Eustache. Joannie cherche un
petit trois et demie qui rentre dans son budget, elle ne trouve rien. Puis ça,
ce n'est pas à Westmount, c'est à
Beauharnois. Dans les Laurentides, Nancy a reçu une augmentation de loyer,
tenez-vous bien, de 720 $ par mois, par mois. Ça n'a pas d'allure.
Elle est forcée de déménager, elle n'a pas le choix.
Ça, c'est ce
qui se passe dans le vrai monde. Dans le monde merveilleux du premier ministre,
celui où les écoles sont en bon état,
là, bien, les augmentations abusives, ça n'existe pas. De toute façon, les
logements coûtent 500 $. Puis d'ailleurs
l'inflation aussi, ça coûte juste 500 $. D'ailleurs, un petit chèque par
la malle, et voilà, c'est réglé, merci, bonsoir.
J'ai trois
mots pour le premier ministre, trois mots qu'il refuse de prononcer depuis
quatre ans, trois mots que les Québécois,
eux, connaissent par coeur : Est-ce qu'il peut se lever, aujourd'hui, et
reconnaître la crise du logement qui frappe partout au Québec?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault : M. le Président, on est tous d'accord pour dire
qu'il manque de logements, actuellement, dans plusieurs
régions au Québec puis dans plusieurs
secteurs, pas seulement du côté des logements abordables, mais aussi les
logements pour la classe moyenne.
Le prix des
logements, des maisons a beaucoup, effectivement, augmenté, même si ça reste moins
élevé si on se compare, par exemple,
avec l'Ontario. Les salaires ont augmenté de façon importante, mais il y a des
personnes qui, par exemple, ont une
pension qui n'ont pas eu des grosses augmentations. C'est pour ça que le
ministre des Finances a posé deux
gestes : d'abord, envoyer un chèque à ceux qui reçoivent en bas de
50 000 $, qui sont éligibles au crédit de solidarité, puis un autre chèque, dans le dernier budget, pour
tous ceux qui gagnent moins de 100 000 $. Je sais que Québec
solidaire dit : On n'aurait pas
dû envoyer de chèque à ceux qui gagnent entre 50 000 $ et
100 000 $. Moi, je pense que ces personnes-là de la classe
moyenne ont aussi été affectées par le logement.
Ma collègue
la ministre des Affaires municipales accélère la construction. Ce n'est pas
toujours facile. L'argent est disponible.
Même le fédéral vient d'annoncer, dans le dernier budget, qu'il ajoute de
l'argent. Parfois, il y a un processus qui est long avec les offices
municipaux.
Donc, M. le
Président, le problème, c'est un problème qu'il manque de logements, il manque
de résidences, entre autres à cause de la pandémie...
Le Président : En terminant.
M. Legault : ...qui a retardé
des constructions.
• (10 h 30) •
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. Gabriel
Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois : Le problème,
M. le Président, ce n'est pas seulement qu'il manque de logements, c'est que ceux qui existent sont trop chers, et leur
prix augmente trop vite. Ça, ça s'appelle une crise du logement. J'ai demandé
au premier ministre de prononcer ces mots, «crise du logement», il est
incapable de le faire, il n'en a pas le courage.
Je lui donne
une deuxième chance : Est-ce qu'il reconnaît que le Québec vit en ce
moment une crise du logement?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault : M
le Président, on peut bien s'obstiner, est-ce que c'est une crise, est-ce que
c'est une pénurie, est-ce que c'est
un manque de logements, ce qu'on sait, M. le Président, c'est qu'il y a un
problème dans beaucoup de régions. Puis, contrairement à ce que pense
Québec solidaire, ça n'affecte pas seulement les personnes dans les logements
abordables. Les personnes qui sont dans la classe moyenne aussi ont vu le prix
des maisons, le prix des condos augmenter de façon importante. Je connais des jeunes d'une trentaine d'années, là, qui
pourtant ont un bon salaire puis qui n'ont pas accès à un logement à un
prix qui est raisonnable.
Donc, M. le Président, qu'est-ce qu'on doit
faire...
Le Président : En terminant.
M. Legault :
...on doit pousser pour qu'il y ait plus de construction. C'est ce qu'on
fait.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe
d'opposition.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois :
Le premier ministre aime dire qu'il est pragmatique. J'ai des petites
nouvelles pour lui : une maison, ça ne se construit pas d'ici le
1er juillet. Il faut poser des gestes maintenant.
Aujourd'hui, Québec
solidaire dépose une motion pour rendre illégales les hausses abusives et
immorales. Par exemple, 700 $ par mois
d'augmentation de loyer, le premier ministre est obligé d'être d'accord avec
moi, c'est ridicule, ça n'a pas de
bon sens, en 2022, au Québec, puis c'est vrai que ça frappe aussi la classe
moyenne. Est-ce qu'il va voter en faveur de la motion solidaire qui
réglerait ce problème important pour les familles?
Le
Président : M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, il existe déjà un tribunal, un processus...
Des voix :
...
M. Legault : Non, non, mais je vois la leader, là, qui est en
train de s'arracher les cheveux. M. le Président, il y a une
exception...
Le
Président : ...question de règlement? Est-ce que c'est une question de
règlement, Mme la leader?
Mme Labrie :
...laisse entendre que c'est...
Le Président :
Non, merci. Non, non, non, Mme la
leader, je m'excuse, je vous demandais s'il y avait une question de règlement, je considère qu'il n'y en a pas. Je
considère qu'il n'y en a pas, à ce moment-ci. Le premier ministre est en réponse
à la question...
Une voix :
...
Le
Président : M. le
leader du gouvernement, je pense que j'ai... Il n'y a pas de question de
règlement, il n'y a pas de... et je
me suis relevé dès que la leader s'est levée. Je pense qu'on s'est rendus au
bout de l'exercice, au bénéfice des réponses et du premier ministre. M.
le premier ministre, il vous reste encore 30 secondes à votre réponse.
M. Legault : M. le Président, il
existe, puis la leader de l'opposition le sait très bien, une exception pour
les nouveaux logements. Les
propriétaires ont le droit, quand ils viennent juste de construire, pendant une
certaine période, de cinq ans... On
regarde pour réduire le cinq ans, parce que, oui, des fois, on peut dire :
On fait une offre spéciale, pour la première année, qui est en bas du
marché...
Le
Président : En terminant.
M. Legault :
...puis après on revient au marché. La ministre travaille là-dessus, puis
la leader le sait très bien.
Le
Président : Question principale...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Question principale. La parole vous
appartient, M. le député de Jonquière.
Entente entre Hydro-Québec et Énergir en matière de
biénergie
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault : Oui, M. le Président, on
a déjà dénoncé l'entente entre Énergir et Hydro-Québec qui prévoit que
les contribuables québécois vont compenser
Énergir jusqu'en 2041 pour ses pertes. Au départ, on nous disait que ça
coûterait environ 400 millions jusqu'en 2030. Or, aujourd'hui, le
Regroupement des organismes environnementaux en énergie nous apprend que l'entente pourrait finalement coûter 2,4 milliards
jusqu'en 2050. Pourquoi? Parce qu'Hydro-Québec pourrait dédommager non seulement les
clients actuels d'Énergir, mais également les futurs clients, les bâtiments pas
encore construits, ce qui signifie
qu'Énergir va étendre son réseau gazier à contresens de l'objectif de
carboneutralité aux frais des consommateurs.
Quand est-ce
que le ministre va mettre fin à ce bar ouvert qui favorise Énergir au détriment
des consommateurs?
Des
voix : ...
Le Président : Monsieur... S'il vous plaît! M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, nous vous écoutons.
M. Jonatan Julien
M. Julien : Merci, M. le Président.
Écoutez, l'entente, actuellement, entre Énergir et Hydro-Québec qui est analysée par la Régie
de l'énergie est certainement une
entente la plus efficiente pour atteindre nos objectifs audacieux de réduction
des GES pour le Québec.
De
manière claire, si on faisait le choix d'électrifier, de tout électrifier, pour
la seule période de pointe, les bâtiments qui sont visés, parce que notre objectif, c'est de réduire de 50 %
les GES dans les bâtiments, ça prendrait une autre Romaine, 2,6 milliards de dollars. Naturellement, ce
serait remettre aux calendes grecques cette vision, cette volonté de réduire
les GES.
Le
geste qu'on pose actuellement avec Énergir et Hydro-Québec, c'est de venir
dire : En période de pointe, une centaine
d'heures par année, on va venir utiliser Énergir avec du gaz naturel, auquel on
injecte du renouvelable, avec nos règlements,
justement pour venir faire état de la puissance. Au net, c'est une réduction
importante de l'utilisation du gaz naturel
au Québec. On parle d'une réduction de 540 000 tonnes par année de
GES. Si on électrifiait au complet, ça coûterait 2,6 milliards pour
obtenir 20 % de plus. Donc, en termes d'efficience, c'est un cinquième du
coût...
Le
Président : En terminant.
M. Julien :
...pour 80 % de l'objectif. C'est le pragmatisme de notre
gouvernement.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault : Oui, M. le Président, le
ministre nous parle de réduire les gaz à effet de serre, mais cette entente-là,
elle va prolonger l'utilisation d'une
énergie fossile pour plusieurs décennies puis, savez-vous quoi, aux frais des
contribuables puis des consommateurs.
Est-ce que le
ministre peut enfin nous dire ce que vont gagner les Québécois avec cette
entente-là?
Le
Président : M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M. Julien : Bien, je pensais l'avoir
mentionné, mais je vais le redire. Essentiellement, ce que propose mon collègue
de Jonquière, avec l'idéologie derrière ça, ce
serait de venir tout électrifier, même en période de puissance, c'est-à-dire,
pour une très, très courte période, se doter
d'actifs justement pour faire en sorte qu'il n'y ait plus du tout de gaz
naturel au Québec. On le réitère, cette option-là, proposée par mon
collègue de Jonquière, coûterait 2,6 milliards de dollars. Pour 400 millions de dollars, on atteint 80 %
de l'objectif visé justement pour venir gérer en pointe par du gaz naturel,
auquel on souhaite qu'il soit de plus en plus renouvelable. Donc, c'est
ce que les Québécois gagnent, c'est un cinquième... un sixième du coût pour
80 % des résultats.
Le
Président : En terminant.
M. Julien :
Donc, on pense que c'est intelligent.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault : Oui. Le ministre a beau
essayer de nous convaincre, là, mais personne ne le croit, parce qu'avec
cette entente-là c'est le pollueur payé, et
non le pollueur-payeur, aux frais des Québécois. C'est quoi, la plus-value pour
le climat, la plus-value pour les Québécois? On ne la voit pas.
Le
Président : M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M. Julien :
Trop longtemps, les gouvernements précédents, sur des idéologies comme
celle véhiculée par mon collègue de
Jonquière, n'ont pas fait le travail. Rapidement, on doit agir, d'ici 2030. En
voulant maintenir une électrification totale et complète, on n'agira pas.
Nous,
on dit que, d'ici 2030, on va atteindre 80 % du résultat de réduction des
GES des habitations au cinquième et
au sixième du prix. Alors, on n'a pas le temps d'attendre. On agit maintenant,
promptement et avec efficience. Je pense que c'est assez clair.
Donc, oui, c'est un mariage de raison,
justement, pour avoir les résultats maintenant...
Le Président : En terminant.
M. Julien : ...parce qu'on a
assez tardé, M. le Président.
Le Président : Question principale,
M. le député de Nelligan.
Accès à un médecin de famille
M. Monsef Derraji
M. Derraji : M.
le Président, bientôt quatre ans que les caquistes sont au pouvoir, et les
patients québécois attendent toujours
d'avoir accès à un médecin de famille. Pourtant, le premier ministre a affirmé
à plusieurs reprises, main sur le coeur, qu'il s'engageait à offrir un médecin de famille à tous les Québécois.
Malheureusement pour eux, le premier ministre n'a pas honoré sa
promesse.
Aujourd'hui, au moment où on se parle, il y a 99 postes non comblés, dans nos universités
québécoises, en médecine familiale. Hier,
Dre Desrosiers écrivait sur Twitter : «[Il ne] faut pas s'en surprendre,
on la rabaisse constamment — en parlant de la médecine familiale — depuis
plusieurs années.
«Le climat
politique, les insultes même pas camouflées par les dirigeants politiques — dont
le premier ministre — et
d'autres représentants à l'Assnat y sont assurément pour quelque chose.»
Des voix : ...
Le Président : S'il vous plaît!
Question de règlement. M. le leader du gouvernement.
• (10 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Le
député de Nelligan prête des propos blessants, prête des intentions également.
M. le Président, on ne peut pas dire
n'importe quoi ici. Il dit que le premier ministre, l'équipe gouvernementale
insultent les médecins. Au contraire, on travaille au bénéfice des
citoyens et des patients pour faire en sorte de réparer le...
Le Président : On va le régler assez
rapidement. M. le leader de l'opposition officielle, rapidement.
M. Fortin : Si on nous demande de ne citer que les experts qui sont d'accord avec le
gouvernement, la liste va être courte, puis on ne le fera pas souvent.
Le
Président : Je vais vous dire... Non, je vais compléter. Même
par citation, vous le savez, même par citation il n'est pas permis... Donc, on
ne peut faire indirectement ce que l'on ne veut pas faire directement. C'est
aussi dans nos règles. C'est dans nos règles, et vous le savez.
M. le député
de Nelligan, posez votre question, mais, non, à ce moment-ci, je vous demande
de ne pas vous servir de citations pour dire ce qu'on ne peut pas faire
directement.
M. Derraji : Fin de la citation
de Dre Desrosiers.
M. le
Président, comment le ministre de la Santé compte-t-il combler les postes
vacants en médecine familiale et régler
le problème de la relève, c'est un problème qui est urgent, et d'ainsi régler
le problème de l'accessibilité à la première ligne?
Le Président : M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Il
y a plusieurs façons de régler les enjeux qui concernent la médecine familiale,
puis une de ces façons-là, c'est celle avec laquelle je collabore avec
mon collègue le député de Nelligan, c'est le projet de loi n° 11, le
projet de loi n° 11 qui est en cours,
en ce moment, où on a eu... Et je tiens à le dire à mes collègues, ici, de tout
le Parlement, nous avons eu, hier, une excellente collaboration des deux
oppositions, une excellente collaboration. Et, j'aimerais dire aux médecins, les médecins qui nous écoutent, dont
celui auquel fait référence le député de Nelligan, c'est exactement ce qu'il
faut faire pour aider à changer la perception, pour aider la valorisation de la
médecine familiale puis encourager les jeunes médecins, dont ceux qui sont membres de la FMEQ, de revenir à la
profession de médecine familiale, ce qu'on fait en ce moment avec le p.l. n° 11.
Et je tiens à souligner la bonne contribution du député de Nelligan et de celui
de Rosemont, hier, qui ont fait une excellente avancée dans le projet de
loi n° 11. Merci, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Nelligan.
M. Monsef
Derraji
M. Derraji : Effectivement, M. le
Président, nous avons une excellente collaboration parce que ça nous intéresse
et nous sommes préoccupés par l'état de santé des Québécois. Aujourd'hui, j'ai
plusieurs patients qui m'envoient des messages :
Qu'est-ce que je vais faire, docteur? Leurs médecins annoncent leur départ à la
retraite. Aujourd'hui, nous sommes devant
un phénomène préoccupant : les trois dernières années, presque
200 personnes, 200 postes non comblés, 275 départs à la
retraite. C'est un enjeu qui est très sérieux. Quand on va avoir une solution?
Le
Président : ...des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
On a eu la chance, notamment,
lors de la commission... des consultations particulières qui ont précédé
l'article par article du projet de loi
n° 11, de voir l'effet dévastateur, par exemple, des sanctions qui avaient
été mises, dans le projet de loi
n° 11, face aux médecins. Et ça, je peux bien regarder en avant, mais il
faut être quand même conscient du climat
de confrontation qu'il y avait eu par l'ancien gouvernement avec les médecins,
qu'on est tributaires de ça aujourd'hui et qu'il faut travailler de
l'avant.
Alors, encore une
fois, toutes les mesures sur lesquelles on travaille, M. le Président, pour
améliorer le sort des médecins de famille, je pense qu'en ce moment, avec le
projet de loi n° 11...
Le
Président : En terminant.
M. Dubé :
...on avance très bien, puis j'espère qu'on pourra continuer ça.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Nelligan.
M. Monsef Derraji
M. Derraji : M. le Président, le
gouvernement a brisé sa promesse d'offrir un médecin de famille à tous les
Québécois. Et, avec les jeunes
médecins qui délaissent la médecine de famille, le nombre de patients orphelins
va carrément exploser. Nous sommes vraiment très loin de la prise en
charge.
M.
le Président, comment le ministre de la Santé peut-il laisser la situation se
détériorer à ce point pour les patients québécois? C'est inacceptable. Et je tiens à lui rappeler que le premier
ministre a mené toute une charge envers les médecins généralistes
l'automne dernier.
Le
Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
M. le Président, on a dit, hier...
Puis on était... Je vous le dis, ça a été une journée extraordinaire. Moi, je
me suis pincé durant la journée pour être
certain que je vivais vraiment ce moment-là. Le p.l. n° 11,
c'est une chose, mais le guichet d'accès à la pertinence qui a été mis en place
par nos collègues à Rimouski est maintenant en train d'être implanté partout au Québec. Et ça aussi, c'est une mesure
qui va être excessivement intéressante pour les médecins qui sont en ce moment dans le réseau mais pour les jeunes qui
s'en viennent, d'avoir une différente prise en charge, qui va respecter la
demande des Québécois d'être pris en charge par un professionnel de la santé.
M. le Président, on
s'en va dans la bonne direction. On a dit qu'on allait innover, en santé...
Le
Président : En terminant.
M. Dubé :
...et c'est exactement ce qu'on est en train de faire.
Le
Président : Question principale, Mme la députée d'Iberville.
Contrats
attribués à la firme McKinsey
Mme Claire Samson
Mme Samson : Merci, M. le Président. M.
le Président, en vertu de l'état d'urgence sanitaire, parmi les contrats octroyés sans appel d'offres par le
gouvernement, on en retrouve pour quelques millions octroyés à la firme McKinsey.
J'aimerais savoir
quelle expertise dont le gouvernement ne disposait pas McKinsey nous a-t-elle
apportée.
Le
Président : M. le leader du gouvernement.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, sur
l'état d'urgence sanitaire, on a déposé le projet de loi n° 28 pour y mettre
fin, à l'état d'urgence. Mais savez-vous quoi? La députée d'Iberville, hier,
dans son live, en direct de son lit, de sa chambre à coucher, M. le
Président, a dit à tout le monde, M. le Président...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Des voix :
...
Le Président : Non, mais s'il
vous plaît! S'il vous plaît! Je pense qu'il y a une notion, je vous l'ai dit,
des propos que l'on tient, la notion de respect. C'est important, ici, au salon
bleu. Vous en êtes toutes et tous, ça s'adresse à toutes et tous et ça
s'applique dans toutes les interventions.
Mme
la députée d'Iberville, vous êtes debout, mais la réponse n'était pas
complétée. M. le leader du gouvernement, il vous reste encore une
minute.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, la
députée d'Iberville, dans son vidéo en direct, M. le Président, a dit à sa
population, aux gens qui l'écoutaient, à
l'ensemble du public... a dit qu'elle avait contacté chacun des groupes
d'opposition et elle a dit qu'on
allait faire du temps sur le projet de loi n° 28. Donc, on va bloquer le
Parlement, avec la collaboration des collègues
des oppositions, c'est ce qu'elle a dit, pour freiner l'adoption du projet de
loi n° 28 pour mettre fin, justement, à l'état d'urgence sanitaire.
Alors,
voyez-vous de quelle façon on fait de la politique, du côté de la députée
d'Iberville, du Parti conservateur, M.
le Président? On dépose un projet de loi pour mettre fin à l'état d'urgence
sanitaire, mais elle nous dit : Moi, je vais le bloquer au Parlement, c'est sûr que ça ne va pas
avancer, puis on ne réussira pas à enlever l'état d'urgence sanitaire. Alors,
voyez-vous, ils plaident quelque chose d'un
côté, mais, dans les actions qu'ils font au Parlement, c'est des actions qui
sont complètement irresponsables.
Et
elle annonce publiquement, également, la stratégie de l'ensemble des groupes
parlementaires ici pour bloquer l'adoption d'une loi...
Le
Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...et qu'ils vont
s'arranger, à l'adoption de principe, pour étirer le plus possible le débat et
le bloquer, M. le Président.
Le
Président : Première...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! La parole, à ce moment-ci...
Des voix :
...
Le
Président : Je vous
demanderais votre attention, s'il vous plaît, à toutes et à tous. Il y a une
personne qui a la parole, c'est la députée d'Iberville, elle est en
première complémentaire. Je vous demande d'être attentifs aux questions comme
aux réponses. Mme la députée, à vous la parole.
Mme Claire Samson
Mme Samson : M. le Président, je n'ai
toujours pas eu la réponse à ma première question. Je la réitère : De
quelle expertise dont le gouvernement ne... que le gouvernement ne
possédait pas la firme McKinsey nous a-t-elle apportée?
Le
Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Écoutez, M. le Président, là, en
complémentaire avec mon collègue le leader ici, deux choses que j'aimerais
dire.
J'ai
donné à titre d'exemple, M. le Président, que, lorsque l'opposition veut
collaborer dans l'intérêt des Québécois pour remettre en ordre notre système de santé, on peut avoir cette
collaboration-là. J'aimerais rappeler à la députée d'Iberville que les
propos qu'elle a tenus sur sa vidéo hier sont tout à fait contraires à l'esprit
de collaboration qu'on s'attend de l'opposition pour faire avancer nos projets
de loi. M. le Président, soyons clairs...
Le Président : En terminant.
M. Dubé : ...les
intérêts des Québécois sont mieux servis par une autre approche, M. le
Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée d'Iberville.
Mme Claire Samson
Mme Samson : Je
n'ai toujours pas la réponse à ma première question, M. le Président. En quoi
l'expertise... Quelle expertise McKinsey a-t-elle apportée? Et était-elle
mandatée et habilitée à commander des sondages pour le gouvernement?
Le Président : M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : M. le
Président, mon deuxième point. Non seulement je pourrais être surpris des
propos de la députée d'Iberville, mais ils sont sur vidéo. Je ne pense pas que
c'était une vidéo qui était truquée. Mais, ce qui me dérange encore plus, est-ce que la collaboration des oppositions,
elle est véridique? J'aimerais ça entendre les oppositions, pour dire :
Est-ce qu'ils ont accepté de participer à ce filibustage durant le p.l. n° 28? J'aimerais entendre les oppositions sur ce point-là,
M. le Président.
• (10 h 50) •
Le Président : Question principale,
M. le député de D'Arcy-McGee.
Accès aux services en santé
mentale
M. David Birnbaum
M. Birnbaum : M. le Président,
il y a un enjeu tellement sérieux qui touche aux milliers de Québécoises et Québécois, mais qui reste un angle mort de ce
gouvernement : l'enjeu de la santé mentale. À chaque saison, le ministre
nous promet des millions pour réduire les listes d'attente. Ces listes...
Des voix : ...
Le Président : ...
M. Birnbaum : ... — merci — c'est
les personnes en crise qui se trouvent dessus. Et à chaque saison il y a plus
de personnes en attente. À chaque saison,
les cibles à atteindre sont redéfinies et repoussées dans le temps. Toujours,
c'est des personnes en détresse qui en écopent.
Donc, sans
surprise, nous apprenons, dans un reportage de Radio-Canada, que le
100 millions annoncé en novembre 2020 n'a eu aucun effet, aucun
effet sur les attentes ni sur les délais d'attente.
Au lieu de
multiplier les points de presse, est-ce que ce gouvernement va finalement
répondre sur le terrain pour multiplier l'accès aux psychologues pour
les personnes qui attendent en souffrant?
Des voix : ...
Le Président : Je vais vous demander
simplement d'être un petit peu moins bruyants. Moi, ça me dérange un petit peu.
Les questions, je veux les entendre. Les réponses, je veux les entendre.
Et la réponse vous appartient, M. le ministre
délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M. Carmant : Oui.
Merci beaucoup, M. le Président. Toujours heureux de me lever pour parler de
santé mentale ici.
Je pense que, un angle mort dans lequel on vient
d'investir plus de 1 milliard de dollars pour les cinq prochaines années,
on peut redéfinir le terme «angle mort».
Quant à
l'investissement de 100 millions, je reviens encore là-dessus,
77 millions, disait le reportage, ont été dépensés sur le
100 millions, M. le Président. Tout ce que le reportage disait, c'est que
la partie qui était pour les psychologues en privé était plus difficile, car certaines régions n'ont
pas contribué à ce programme-là, M. le Président. Et j'ai même nommé les
régions qui n'ont pas contribué pour qu'elles puissent améliorer leurs façons
de faire, M. le Président.
Le but que
l'on a, c'est d'améliorer le réseau de la santé, l'accès au réseau de la santé
mentale. Je répète ce même mot depuis deux ans, M. le Président,
«l'interdisciplinarité». Oui, on peut regarder les psychologues, mais on a
besoin de regarder tous les
professionnels qui travaillent en santé mentale, M. le Président. Et c'est
comme ça qu'on va réussir à diminuer nos listes d'attente.
D'ailleurs,
ce que je dois dire, c'est que, durant la pandémie, on a eu une augmentation de
40 % des demandes et on a été capables de maintenir le niveau de
ces listes d'attente là...
Le Président : En terminant.
M. Carmant : ...ce que la présidente de l'Association des
médecins psychiatres considère remarquable, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.
M. David Birnbaum
M. Birnbaum :
Remarquable? Y a-t-il une grande
vente de lunettes roses, l'autre côté de la Chambre? Que le ministre cesse de répéter les sommes d'argent
annoncées quand on constate que cet argent ne rend jamais sur le terrain. Que
le ministre cesse de n'offrir que de belles
phrases aux personnes qui souffrent d'angoisse et de dépression et leur offrir
de vrais accès à la guérison.
Est-ce que le ministre peut leur offrir de
l'espoir concret et clair?
Le Président : M. le ministre
délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M. Carmant : Bien,
M. le Président, l'argent doit se rendre sur le terrain. Si on compare avant la
pandémie d'après la pandémie, on a
1 000 personnes de plus en santé mentale ou 500 personnes de
plus en santé mentale au Québec, M. le Président.
On a développé un programme d'accès 24 heures par jour, sept jours par
semaine, où on peut parler à un professionnel en santé mentale, le 8-1-1
Info-Social. Il faut dire à vos citoyens de l'utiliser, M. le Président.
On a
développé l'interdisciplinarité, M. le Président, en ajoutant des travailleuses
sociales, des infirmières praticiennes, des psychoéducateurs. C'est tout
le monde ensemble qu'on va réussir à améliorer les choses, M. le Président.
Puis, si, pour nous, la santé mentale est une
priorité...
Le Président : En terminant.
M. Carmant : ...pourquoi eux ne
tenaient même pas en compte les listes d'attente, quand on est arrivés, M. le
Président?
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.
M. David Birnbaum
M. Birnbaum : Le
25 millions de dollars pour permettre aux gens de consulter un psychologue
sans frais en cabinet privé, annoncé
en grande pompe par la CAQ, n'a jamais été dépensé. 80 % de l'argent est
retourné dans les coffres de l'État. Ça a été déployé à la vitesse de la
tortue, selon la présidente de l'Ordre des psychologues. Ça n'a donné lieu à
aucun rendez-vous, le ministre l'admet, additionnel dans plusieurs régions, et
l'argent n'a pas été reconduit.
C'est quoi, le plan B, M. le ministre?
Le Président : M. le ministre
délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M. Carmant : Bien,
le plan B, M. le Président, c'est de toujours évoluer vers plus
d'interdisciplinarité pour que les bons patients soient vus par le bon
professionnel au bon moment. On appelle à une porte d'entrée unique, le 8-1-1
Info-Social, qui nous amène vers le bon professionnel.
Si tout le monde veut aller voir un psychiatre ou un psychologue, on n'avancera pas. Et
le fait de dire que tout le monde doit aller vers le psychologue, ce
n'est pas la bonne solution, M. le Président.
D'ailleurs,
c'est pour ça que l'argent n'a pas pu être dépensé. Évidemment, on ne savait
pas qu'il y aurait de multiples vagues. Et la demande a augmenté, je le répète,
de 40 %. Moi, ce que je veux dire, aujourd'hui, c'est un grand merci
à tous les intervenants du réseau de la
santé mentale, qui ont vu leur travail augmenter, qui ont travaillé des heures
supplémentaires...
Le Président : En terminant.
M. Carmant : ...et qui nous ont
aidés à être dans la situation positive qu'on a, M. le Président.
Le Président : Question principale,
M. le député de La Fontaine.
Processus de fixation des
tarifs d'électricité
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Oui,
merci, M. le Président. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a
rendu public un sondage en début de
cette semaine auprès des Québécoises et Québécois. 68 % refusent que la
hausse des tarifs d'électricité soit liée à l'inflation. Également, dans la même
proportion, on demande que la Régie de l'énergie fixe annuellement les
tarifs d'électricité, comme c'était le cas avant le mauvais projet de loi
n° 34.
François
Vincent, vice-président de la FCEI, section Québec, disait, et je le
cite : «Le message lancé par la population du Québec aujourd'hui au
gouvernement est très fort : l'adoption sous le bâillon du projet de loi
n° 34 était une erreur.» On peut lire plus loin, M. le Président,
dans le communiqué, et je cite : «58 % des Québécois croient que de
permettre à Hydro-Québec d'obtenir une
hausse de tarifs plus que le nécessaire à son bon fonctionnement s'apparente à
une taxe aux consommateurs.» Fin de la citation. Ils ont bien raison.
M. le
Président, en ces temps difficiles, pourquoi le gouvernement caquiste
insiste-t-il pour taxer les Québécois?
Le Président : M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M. Julien : Oui,
merci, M. le Président. Bien, écoutez, je suis heureux de la question de mon
collègue de LaFontaine.
Naturellement,
le choix qu'on a fait, c'est un choix qui est éclairé et qui vise
essentiellement à limiter les hausses dans
le temps des tarifs d'Hydro-Québec. Quand mon collègue de LaFontaine mentionne
ça, on réitère que, dans les 15 années du règne libéral, si on avait effectivement appliqué l'inflation, c'est
1,2 milliard de dollars de moins que les citoyens et les citoyennes
du Québec auraient payé en tarifs d'Hydro.
On reconnaît également, ce qui est mentionné
dans le sondage, que les tarifs hydroélectriques au Québec ne peuvent être fixés que par une seule institution,
c'est la Régie de l'énergie, et c'est maintenu, et les pouvoirs de la régie
sont maintenus. On l'a mentionné :
au lieu que ce soient des causes tarifaires annuelles, c'est aux 60 mois,
aux cinq ans. Alors, dans l'intervalle, on applique l'inflation.
On a bien
observé que, de manière conjoncturelle, on a une situation particulière,
actuellement, et le choix qu'on a fait, c'est de venir dire : On va
plafonner à 3 % la hausse, qui est la limite supérieure...
Le Président : En terminant.
M. Julien : ...des ambitions de
la Banque du Canada pour, justement, assurer une inflation adéquate.
Le Président : Question principale,
M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : M. le Président,
la réalité, dans ce dossier-là, puis on voit tellement de vidéos sur les
réseaux sociaux, là, la CAQ, ils ont eu tout
faux depuis le départ. On ne pouvait pas avoir une inflation qui avoisine, ce
qu'on disait à l'époque, 4 %, 5 %. Alors, ils ont eu tout faux depuis
le départ. Et ils continuent d'avoir tout faux, M. le Président, en disant : Bien, ça va être 3 %. Un projet
de loi dont on n'a pas encore vu la couleur, M. le Président. Ils vont
politiser la fixation des tarifs
d'hydroélectricité. Ils ont retiré ça à la Régie de l'énergie, qui était un
système indépendant, un tribunal indépendant qui analysait ça selon les
coûts réels d'Hydro-Québec.
M. le
Président, quand on regarde, 73 % des dirigeants de PME qui, eux aussi, en
plus des Québécoises et Québécois, devront
augmenter leurs prix pour faire face à l'inflation et devront également
travailler encore plus d'heures, ce qui fait dire toujours à François Vincent, je le cite : «Les actions de
Québec pour aider les PME confrontées à l'inflation sont tout simplement
inexistantes.» Fin de la citation.
Le ministre de l'Économie, lui, il pense quoi de
cette taxe déguisée aux PME?
Le Président : M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M. Julien : Oui,
merci, M. le Président. Écoutez, on réitère, en fin de compte, l'objectif... Et
on l'a bien vu dans le passé, là,
puis on s'en rappelle, mais mon collègue semble vouloir l'oublier, des hausses
à trois, à quatre fois l'inflation, sur
le modèle précédent, dans les années de son gouvernement. On est venus
dire : Ce sera l'inflation. Et on a clairement démontré que l'inflation, sur une période des
26 dernières années, a toujours été située dans un corridor entre 1 %
et 3 %, qui est l'objectif, en fin de compte, de contrôle de la
Banque du Canada.
Ce qu'on
observe actuellement, puis on n'est pas là pour le nier, bien au contraire, M.
le Président, actuellement, de
manière conjoncturelle, avec la pandémie, avec le conflit en Ukraine, on vit
une situation particulière qui nécessite des gestes particuliers, et c'est ce qu'on a posé, c'est l'intention qu'on a
nommée, de venir plafonner à 3 %, plafonner à 3 %, qui est le
corridor actuel de la Banque du Canada.
Donc, il y a
du pragmatisme. C'est la vision de la Banque du Canada, qui dit : On doit
aller maximum jusqu'à 3 %. Donc, dans l'intervalle, c'est ce qu'on va
appliquer. Et soyez assurés qu'on est à l'écoute des Québécois par rapport
à leurs préoccupations sur le coût de la
vie. Les gestes qu'on pose de manière conséquente, à la fois avec le ministère
des Finances et le ministère de l'Économie...
Le Président : En terminant.
M. Julien : ...le
démontrent clairement.
Le Président : Et cela met fin à la
période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
Le
Vice-Président (M. Picard) :
À la rubrique Motions sans
préavis, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des
motions sans...
Des voix : ...
• (11 heures) •
Le Vice-Président (M. Picard) : S'il
vous plaît! Les travaux se poursuivent. En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis,
je reconnais maintenant un membre du groupe formant l'opposition officielle.
M. le leader de l'opposition officielle.
M. Fortin : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de
cette Assemblée afin de présenter la motion suivante
conjointement avec le député de Jean-Lesage, le chef du troisième groupe
d'opposition, le député de Chomedey, la députée d'Iberville, le député
de Bonaventure et le député de Rimouski :
«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement
caquiste, par principe de transparence au moment de leur annonce, qu'il dévoile et rende publiques les
études, les évaluations, les coûts, les échéanciers et les projections de
l'impact sur l'environnement, l'étalement urbain et sur la circulation
de tout projet d'infrastructures routières au Québec.»
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger : Pas de
consentement.
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) :
S'il vous plaît! Je reconnais
maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition. M. le député de
Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Merci,
M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée pour débattre de
la motion suivante conjointement avec la députée de Vaudreuil, la
députée de Gaspé et le député de Chomedey :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse que la situation du logement est préoccupante
dans plusieurs villes du Québec;
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse que les locataires demeurant dans un immeuble
construit depuis moins de cinq ans ne peuvent pas refuser une
augmentation de loyer, comme c'est le cas pour la majorité des locataires;
«Qu'elle
constate que, dans un contexte de pénurie de logements locatifs, cela ouvre la
porte à des augmentations abusives de loyers, tel qu'il a été rapporté
abondamment par les médias dans les dernières semaines;
«Qu'elle
reconnaisse que de nombreux ménages ne peuvent absorber ces augmentations
abusives, les obligeant ainsi à déménager;
«Que l'Assemblée nationale demande au
gouvernement d'appeler le projet de loi n° 892, Loi
visant à élargir le droit d'un locataire de
faire fixer le loyer et de faire modifier d'autres conditions du bail par le
Tribunal administratif du logement, ou de déposer son propre projet de loi à cet
égard avant le 15 mai afin qu'il soit adopté d'ici la fin de la période
des travaux, pour assurer une réelle protection aux locataires demeurant dans
un immeuble construit depuis moins de cinq ans.» Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Est-ce qu'il
y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger : Pas de consentement.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Pas de consentement. Je reconnais
maintenant un membre du troisième groupe d'opposition. M. le député de
Jonquière.
Souligner l'adoption à
l'unanimité du principe du projet
de loi affirmant la primauté de la compétence du
Québec en matière d'environnement
M. Gaudreault : Oui,
M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec
la députée de Rouyn-Noranda Témiscamingue, le député de Bonaventure, le député
de Chomedey et le député de Rimouski, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale souligne l'adoption à l'unanimité du principe du projet
de loi n° 391, qui affirme la primauté de la
compétence du Québec en matière d'environnement;
«Qu'elle
insiste sur le fait que la souveraineté environnementale du Québec vient avec
une responsabilité accrue du gouvernement du Québec ainsi qu'un devoir
d'exemplarité en lien avec la protection de l'environnement et la lutte
contre les changements climatiques;
«Qu'elle
s'oppose à toute intervention du gouvernement fédéral en matière
d'environnement sur le territoire québécois;
«Qu'elle déplore l'intention du gouvernement
fédéral de faire fi du cadre législatif et réglementaire du Québec visant à
protéger les espèces fauniques en situation précaire;
«Qu'elle
reconnaisse que la prise d'un décret d'urgence constituerait une atteinte au
plein exercice de la compétence du Québec en matière de protection de la
biodiversité ainsi qu'à celle visant l'aménagement de son territoire.» Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Est-ce qu'il
y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger : Consentement,
sans débat.
Le Vice-Président (M. Picard) : Consentement,
sans débat. Oui, M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Je demande le
vote par appel nominal, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) : On
appelle les députés? Ça va? Nous allons...
Mise aux voix
Que les députés en faveur de cette motion
veuillent bien se lever.
Le
Secrétaire adjoint : M. Arsenault (Îles-de-la-Madeleine),
Mme Perry Melançon (Gaspé), Mme Hivon (Joliette),
M. Gaudreault (Jonquière), M. Bérubé (Matane-Matapédia).
Mme Guilbault
(Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), Mme D'Amours (Mirabel), M. Girard (Groulx), Mme McCann
(Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy
(Montarville), M. Lemay (Masson),
M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel
(Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), M. Lévesque
(Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes),
M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais
(Prévost), M. Caire (La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska),
M. Dubé (La Prairie),
Mme Laforest (Chicoutimi), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Chassé
(Châteauguay), Mme Hébert (Saint-François), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lacombe (Papineau),
Mme Proulx (Berthier), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Julien (Charlesbourg),
M. Boulet (Trois-Rivières), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu),
M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin
(Saint-Jérôme), Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford),
Mme Picard (Soulanges), Mme Grondin (Argenteuil), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid
(Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), Mme Jeannotte (Labelle),
M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau
(Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice),
M. Thouin (Rousseau), M. Jacques
(Mégantic), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), Mme Boutin
(Jean-Talon), M. Girard (Lac-Saint-Jean),
M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval), M. Lamothe
(Ungava), M. Lemieux (Saint-Jean), M. Bussière (Gatineau),
M. Provençal (Beauce-Nord).
M. Leitão
(Robert-Baldwin), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
M. Tanguay (LaFontaine), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), Mme David (Marguerite-Bourgeoys),
M. Derraji (Nelligan), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Melançon (Verdun), Mme Charbonneau (Mille-Îles),
M. Barrette (La Pinière), M. Kelley (Jacques-Cartier),
M. Benjamin (Viau), Mme Sauvé
(Fabre), M. Polo (Laval-des-Rapides), M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont), M. Ciccone (Marquette), Mme Rizqy
(Saint-Laurent), M. Rousselle (Vimont).
Mme Labrie
(Sherbrooke), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Ghazal
(Mercier), M. Zanetti (Jean-Lesage),
Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Fontecilla
(Laurier-Dorion), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve).
M. Ouellette
(Chomedey), M. LeBel (Rimouski), M. Roy (Bonaventure),
Mme Samson (Iberville).
Le Vice-Président (M. Picard) : Que les députés contre veuillent bien se lever.
Est-ce qu'il y a des abstentions? M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 99
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Vice-Président (M. Picard) :
Je vous remercie. La motion est adoptée.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Picard) : Oui?
M. Gaudreault : J'aimerais
que la motion soit envoyée aux chefs des partis fédéraux à Ottawa, au ministre
fédéral de l'Environnement et à l'organisation SNAP-Québec, s'il vous
plaît.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Ce sera fait, M. le député de Jonquière.
Je reconnais
maintenant un membre formant le gouvernement. M. le ministre de l'Économie et
de l'Innovation.
Souligner le 200e anniversaire de la Chambre de
commerce du Montréal métropolitain
M. Fitzgibbon : M. le Président, je
sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion
suivante conjointement avec le député
de LaFontaine, la députée de Mercier, la députée de Gaspé, le député de
Chomedey, le député de Bonaventure et le député de Rimouski :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse les célébrations du bicentenaire de la
Chambre de commerce du Montréal métropolitain en 2022, un véritable
jalon historique;
«Qu'elle
souligne que cet anniversaire représente 200 ans d'engagement et
d'accomplissements pour la communauté des affaires montréalaise;
«Qu'elle reconnaisse
la volonté de la CCMM à contribuer à la prospérité des entreprises et des
personnalités d'affaires et du même fait, du Québec en entier;
«Qu'elle
souligne, à titre de plus grande chambre de commerce francophone en Amérique du
Nord, son rôle dans le développement d'un milieu d'affaires francophone
des plus dynamiques;
«Qu'elle
reconnaisse l'apport de la chambre dans la relance économique du centre-ville
de Montréal et son ambition à dynamiser l'écosystème d'affaires
montréalais.»
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre
de cette motion?
M. Schneeberger :
Consentement, sans débat.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Consentement, sans débat.
Mise
aux voix
Cette motion est
adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Adopté.
Avis touchant les travaux des commissions
Maintenant, à la
rubrique Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Schneeberger : Oui, M. le Président.
J'avise cette Assemblée que la Commission
de la culture et de l'éducation poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec,
le français, aujourd'hui,
après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à
18 h 30, à la salle Marie-Claire-Kirkland;
La Commission de la
santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée du projet de loi
n° 11, Loi visant à augmenter l'offre
de services de première ligne par les médecins omnipraticiens et à améliorer la
gestion de cette offre,
aujourd'hui, de 15 heures à 18 h 30, à la salle Pauline-Marois.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Avis de sanction du projet de loi n° 21
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. À la rubrique Renseignements sur les travaux
de l'Assemblée, je vous informe qu'il y aura
sanction du projet de loi n° 21, Loi
visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production
d'hydrocarbures ainsi qu'au financement public de ces activités, aujourd'hui, à
11 h 30, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.
Affaires du jour
La période des
affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires
du jour.
Mais je vais
suspendre quelques instants afin de permettre aux députés de vaquer à leurs
occupations.
(Suspension de la séance à
11 h 10)
(Reprise à 11 h 12)
Le Vice-Président (M. Picard) : Aux
affaires du jour, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Schneeberger : Oui,
M. le Président. Une fois n'est pas coutume, mais je demanderais à tous les
députés de garder silence lors de la
fin des affaires courantes, parce qu'on l'a vu encore tout à l'heure, ça
devient cacophonique, et puis vos
consignes ne sont pas écoutées. Alors, par respect pour la présidence, je
demanderais à tous nos collègues de bien vouloir maintenir silence quand
il y a la fin des travaux.
Alors, M. le Président, pour poursuivre, je vous
demanderais d'appeler l'article 4 du feuilleton.
Projet
de loi n° 28
Adoption
du principe
Le
Vice-Président (M. Picard) :
À l'article 4 du feuilleton,
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 28, Loi visant à mettre fin à
l'état d'urgence sanitaire. Y a-t-il
des interventions? Je reconnais M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Christian
Dubé
M. Dubé : Alors, bonjour, M. le
Président. En fait, je suis excessivement content, ce matin, qu'on puisse déjà
procéder à la prochaine étape législative dans le cadre du projet de loi n° 28. Les consultations particulières des derniers jours étaient nécessaires pour entamer l'étude
détaillée en ayant en tête les points de vue de divers intervenants. Comme
élus, c'est notre devoir de déposer
des projets de loi pour faire avancer notre société comme c'est notre devoir
d'écouter les gens qui sont autour de
ces enjeux-là et d'entendre ce qu'ils ont à dire. Je tiens d'ailleurs à
remercier tous ceux et celles qui se sont rendus disponibles pour nous
rencontrer. Ce fut des échanges très intéressants.
Maintenant, M. le Président, on doit demeurer
très prudents. Tout d'abord, il faut comprendre le contexte dans lequel nous sommes. Avec la sixième vague qui nous
touche de plein fouet, on le sait, qu'on doit demeurer très prudents. Le virus, M. le Président, est excessivement actif
présentement, et on connaît tous, chacun d'entre nous, un collègue, un ami,
un parent qui a été affecté par Omicron au
cours des dernières semaines. Malheureusement, depuis Omicron, beaucoup de gens
se méfient moins du virus, mais il ne faut pas baisser notre garde, surtout à
l'approche du long congé pascal. Les hospitalisations
sont en hausse, on a des éclosions dans les CHSLD et on a énormément d'absences
dans le réseau de la santé. On doit donc être capables d'apprendre à vivre avec
le virus, tout en gardant l'agilité qu'on a acquise au cours des dernières années... Excusez-moi, j'ai un petit problème avec
ma technologie. Excusez-moi. C'est la première fois que ça m'arrive.
En fait,
j'aimerais dire, M. le Président, qu'il faut revenir sur les objectifs du
projet de loi, du projet de loi n° 28. Pour ce faire, il faut comprendre que le projet de loi n° 28, il suit son cours normal en ce moment. Et je veux rassurer les
Québécois, le gouvernement se
comporte depuis plusieurs semaines, depuis plusieurs semaines de la même façon
que si le projet de loi avait été accepté depuis le dépôt du
16 mars. Et je vais m'expliquer.
Qu'est-ce que
ça veut dire se comporter comme s'il était présentement accepté? Ce que je veux
dire, c'est que nous agissons présentement comme si nous n'étions plus
en urgence sanitaire, mais en même temps on se sert de mesures transitoires qui sont contenues dans le p.l. n° 28, comme par exemple les ressources de vaccination, le port du masque,
et, par exemple, les entrepôts pour nos équipements de protection
individuelle, et les tests rapides.
Je tiens à le
répéter, M. le Président, pour qu'il n'y ait pas de confusion, le projet de loi
prévoit qu'on ne peut pas ajouter de
nouvelles mesures. Ça, c'est très clair. Nous n'avons pas ajouté de nouvelles
mesures depuis le 16 mars. Donc, pour la population, M. le
Président, aucune mesure populationnelle, à l'exception du masque, n'est encore
maintenue dans le cadre du projet de loi. Et
je laisserai le Dr Boileau, de la Santé publique, faire les explications sur le
port du masque. Mais la seule mesure populationnelle qui reste
présentement, c'est le port du masque.
En fait, M.
le Président, avec les avantages et les inconvénients, la vie a repris. Les
Québécois ne sont pas touchés par ce
projet de loi. Il est même prévu que le port du masque sera levé à un certain
moment, dans les prochaines semaines. Et
le directeur, comme je l'ai mentionné, de la santé publique pourra en discuter
un peu plus tard aujourd'hui, lors de son point de presse.
Maintenant,
pourquoi il est important d'avoir les mesures transitoires? C'est important de
le rappeler aux Québécois. Premièrement,
pour la protection de la population. C'est ça, notre rôle comme gouvernement.
Et pas uniquement le gouvernement, les gens de l'opposition doivent
reconnaître qu'il est important de continuer à protéger la population.
Un des enjeux
importants, donc, concerne nos employés temporaires qui font la vaccination et
le dépistage. Autant l'enjeu qu'ils
ne sont pas régis par des conventions collectives... On le sait, c'est des gens
qu'on a pris à l'extérieur des conventions
collectives, car il fallait agir rapidement, notamment par le processus de Je
contribue, le temps, en fait, qu'on puisse régler le tout avec l'offre...
des professions. C'est une question de protection de la santé des Québécois, et
un gouvernement responsable doit agir ainsi. C'est une des raisons pour
laquelle on a mis cette mesure transitoire jusqu'au 31 décembre 2022,
puisque ce délai permettra à quelconque gouvernement de mettre en place les
mesures législatives nécessaires, même après
les élections. Et c'est pour ça que nous avons utilisé la date du
31 décembre 2022. En fait, M. le Président,
on est déjà en action, par l'intermédiaire de la ministre de l'Enseignement
supérieur, pour demander à l'Office des
professions de mettre en place les mécanismes nous permettant de régler tout ce
décloisonnement des professions qui est si important.
Je
tiens à le rappeler, M. le Président, je tiens à le rappeler, que, si nous
n'avons pas ces mesures transitoires, nous allons nous priver de 29 000 ressources de Je contribue qui
servent présentement à vacciner et à dépister. Ces 29 000 personnes
de moins entraîneraient une forte pression
sur notre réseau de santé, qui n'a pas besoin d'avoir cette pression
supplémentaire.
D'ailleurs,
sur la vaccination qui est actuellement en cours, je donne quelques chiffres. 146 000
prises de rendez-vous depuis
l'ouverture de la quatrième dose — c'est
il y a quelques jours. Environ 30 000 vaccins sont donnés,
présentement, tous les jours. Ce sont
nos 29 000 ressources qui nous permettent de faire ceci. Et nous
sommes en pleine sixième vague. Ce n'est pas rien, M. le Président.
Je viens de
parler de la population, parlons de nos employés. En ce qui concerne nos
employés, nous avons une mesure
temporaire qui est relative aux primes. Pour que tout le monde se comprenne
bien, une des mesures qui se rapportent aux primes et montants forfaitaires sera levée le 14 mai. Pour ce
qui est des mesures encadrant la main-d'oeuvre indépendante, on vient baliser les horaires. Ça nous permet une
rétention de notre personnel. Encore une fois, ce sont des mesures transitoires
qui sont importantes pour nos employés qui sont au front depuis plus de deux
ans.
• (11 h 20) •
Maintenant,
pour la gestion des fonds publics, les oppositions nous disent que la
prolongation des contrats, c'est problématique. L'analyse qu'on a faite, et je
l'ai présentée la semaine dernière en commission parlementaire, au-delà
de l'urgence sanitaire, c'est-à-dire que...
lorsque ça va être levé, seulement 2 %, M. le Président, 2 % de la
valeur des contrats seront conservés.
Ceci représente 6 % de tous les contrats, en termes de nombre de contrats,
mais 2 % de la valeur. Et on a pris
l'engagement que l'information sur les contrats serait limpide dans le rapport
d'événement pour bien expliquer l'importance de ce renouvellement.
Or, on a eu
des intervenants qui sont venus nous parler des conséquences monétaires
d'ouvrir chacun des contrats pour
aller en appel d'offres, considérant le nombre important de pieds carrés
d'entrepôts qu'on a pour stocker les EPI et les tests rapides. On a une quantité majeure de matériel dans nos entrepôts,
qui représentent, en fait, 17 terrains de football. De plus, il y a une rareté des entrepôts
actuellement. D'aller en appel d'offres représenterait une hausse importante
des coûts d'entreposage, compte tenu de ces deux éléments.
Les trois exemples que je viens de donner sur
l'importance d'avoir des mesures transitoires, ces trois exemples démontrent clairement qu'on doit garder des
mesures temporaires pour un temps défini. Mais, je le rappelle, on n'ajoutera
pas de nouvelle mesure, comme on l'a fait
depuis le 16 mars, aucune nouvelle mesure. On le fait pour la population,
on le fait pour nos employés et on le fait pour la bonne gestion des
fonds publics.
Maintenant,
on a eu ce matin une discussion concernant la collaboration de l'opposition au
cours des prochaines semaines. Je
l'ai répété et je vais le redire encore, hier, en commission parlementaire sur
le projet de loi n° 11, on a eu une excellente collaboration de l'opposition. Je pense que, si les Québécois
avaient la chance de voir ce genre de collaboration tous les jours en
commission parlementaire, les choses iraient beaucoup mieux, beaucoup mieux.
Maintenant, j'espère sincèrement pouvoir
compter sur la collaboration de mes collègues de l'opposition dans le projet de
loi n° 28, lorsqu'on va faire l'article par article.
Mais maintenant, ce matin, quelle ne fut pas ma
surprise, M. le Président, j'ai vu circuler le vidéo de la députée d'Iberville comme quoi il y aurait un consensus
des oppositions de ralentir le projet de loi, de ce qu'on appelle faire du
temps, faire du temps. Il y aurait une
entente à faire du temps avec les oppositions. Ça peut paraître surprenant. Au
lieu de commenter plus à fond, je
vais plutôt me fier sur ce que j'ai vu hier comme collaboration au p.l. n° 11, M. le Président. Je ne
m'en cache pas, c'est un peu surprenant, ce que j'ai entendu par cette vidéo,
mais j'aimerais penser qu'on peut continuer, M. le Président, dans un
climat de collaboration.
Je le répète
pour que tous les Québécois comprennent bien, je ne veux pas de jeu de mots, on
veut enlever l'urgence sanitaire le plus rapidement possible on peut le faire,
mais il est important de conserver des mesures transitoires, parce qu'avec
ce projet de loi là ce que les Québécois s'attendent de leur gouvernement,
c'est de rester prudent.
En parallèle, M. le Président, nous allons
continuer nos travaux sur un autre dossier important pour la santé des Québécois, c'est-à-dire la prise en charge par
un professionnel, du projet de loi n° 11. L'agenda préliminaire est très
chargé, mais il est représentatif de notre
ambition pour la santé des Québécois. Chaque jour compte, d'où le besoin
d'avoir l'entière collaboration de
tous les membres de l'opposition. J'ai bon espoir que tout se passe rondement,
malgré ce que j'ai entendu ce matin, M. le Président. Merci de m'avoir
entendu. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant M. le député de Nelligan.
M.
Monsef Derraji
M. Derraji : Oui, merci, M. le Président. En premier lieu, je
vais remercier M. le ministre, parce qu'effectivement, hier, nous avons eu une très bonne collaboration
par rapport à un projet de loi qui... malgré qu'on n'est pas d'accord à 100 %,
mais, quand même, il y avait un climat vraiment de collaboration.
Donc,
maintenant, par rapport au projet de loi n° 28, on s'entend tous,
M. le Président, les Québécois veulent la fin de l'état d'urgence sanitaire. Et tout le monde, tout le monde veut la
fin de l'état d'urgence sanitaire, mais on n'a pas besoin d'un projet de loi pour lever l'état d'urgence, et
ça a été dit par plusieurs intervenants. Tous les Québécois veulent la fin de
l'état d'urgence sanitaire. Ça n'a aucun bon
sens. On est le seul État fédéré, en Amérique du Nord, qui continue à gouverner
par état d'urgence et par décret.
Donc, oui, oui, M. le ministre, on veut lever
l'état d'urgence. Oui, on veut mettre la fin de l'état d'urgence, mais il faut
être honnête et transparent avec les Québécois. Le projet de loi veut prolonger
l'état d'urgence jusqu'au 31 décembre
2022. C'est ça que vous devez retenir aujourd'hui. Le projet de loi, il existe,
il est en ligne, trois pages. Le titre, c'est Loi
visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire. Un peu plus loin, on
dit : Écoutez, on a besoin de mesures transitoires jusqu'au
31 décembre 2022. O.K., mais, au 31 décembre 2022, on va redéposer un
autre projet de loi pour demander d'autres mesures transitoires pour une autre
année? Ça n'a aucun bon sens.
Donc, je veux
juste remettre les pendules à l'heure. Le ministre a fait une intervention de
11 minutes ou 12 minutes pour
mettre le fardeau sur les oppositions. M. le Président, c'est le gouvernement
qui contrôle l'agenda parlementaire. Je vais l'expliquer aux gens qui
nous suivent.
Le gouvernement, et surtout le ministre de la
Santé, a, dans son cartable, quatre projets de loi. L'aide médicale à mourir : aucune nouvelle. Projet de loi n° 19 sur l'accès aux données : aucune nouvelle. Le projet de loi
n° 11, qui est supposé un projet
de loi pour aider l'accès à la première ligne, ça veut dire trouver une façon
pour dire : On n'était pas capables de vous offrir un médecin de famille pour tous les Québécois, donc ça
concerne les données, nous sommes en train de l'étudier. Là, aujourd'hui, c'est un autre projet de loi, 28,
qui touche l'urgence sanitaire. Et il y a un autre projet de loi sur la DPJ.
Donc, je viens de vous en énumérer cinq. On
ne peut pas étudier tous les projets de loi au même moment. Il y a un projet de
loi, il faut le terminer, après on passe à l'autre. Qui est responsable de
l'agenda? Bien, ce n'est pas les partis de
l'opposition, c'est le gouvernement. Ça, c'est un travail qui doit se
faire par le leader.
Donc, j'invite le ministre de la Santé, au lieu
de cibler les oppositions, de parler avec son leader, de voir le sens de la
priorisation de son leader et dire que ce projet de loi est important. Est-ce
que l'aide médicale à mourir, on n'en entend
plus parler, il n'est plus important? Il est où, ce projet de loi? Le projet de
loi par rapport aux données, il est où, ce projet de loi? Il n'est même pas
déposé. Mais aujourd'hui on vient, parce qu'on a très mal fait notre travail,
mettre le fardeau sur les oppositions.
Et vous n'avez pas le droit de parler, 30 élus
de l'équipe libérale, non, non, vous n'avez pas le droit de parler sur l'urgence sanitaire. Non, non, il faut
accélérer, hein? Non, non, c'est nous, les maîtres. Non, non, il faut
accélérer, vous n'avez pas le droit
de parler. M. le Président, il n'y a aucun parlementaire de ce Parlement qui va
dire ou dicter quoi que ce soit à un collègue. Chaque collègue a le
droit de parler et dire ce qu'il pense de ce projet de loi. Et d'ailleurs on le
fait souvent, parce que nous sommes élus, et
on doit représenter le peuple, et c'est le peuple qui a besoin de voir et
entendre sa voix à l'intérieur de ce Parlement. Donc, ce n'est pas vrai,
aujourd'hui, dire : Ah! écoutez, on veut la collaboration. Ça veut dire quoi, la collaboration? Applaudir?
Fermer la discussion? Pas de débat? Bien, écoutez, je pense qu'on est quand
même dans une démocratie, hein? Ça, ça existe dans d'autres pays, hein? On fait
des discours, le peuple, oui, bénit, il applaudit tout, ça va très bien, on
ferme le débat, il n'y a pas de débat sur les projets de loi. Ça ne marche pas
de même, M. le Président.
Il y a un
projet de loi qui est très important. Le projet de loi vise à mettre fin à
l'état d'urgence sanitaire. On a eu beaucoup
de groupes qui sont venus en commission parlementaire que je tiens à remercier
parce qu'ils nous ont éclairés. Et vous savez quoi? Avant le début du
projet de loi, je disais : Écoutez, je vais écouter attentivement la
volonté du ministre par rapport à la fin de l'état d'urgence sanitaire. Et
j'étais là, M. le Président, et j'étais là. Et je pense que vous étiez
témoin, la semaine dernière, de mon
échange avec le directeur national de santé publique, parce que, la veille du
début de la deuxième journée des consultations, le premier ministre qui...
parlait de sa propre expérience — oui,
il est vacciné, je le suis, je le suis comme
lui — et
il disait que ça apparentait à un rhume. C'est sa déclaration. Donc, le
gouvernement, d'un côté, dit que les symptômes s'apparentent à un rhume
et il veut des mesures exceptionnelles jusqu'à la fin de l'année.
• (11 h 30) •
Je tiens à
rappeler au ministre de la Santé qu'avant qu'il devienne ministre de la Santé
le Québec a réussi beaucoup de choses. On a fait beaucoup de campagnes
de vaccination où on était les meilleurs. Le Québec est très fort par rapport à l'organisation des soins, surtout par rapport à
la vaccination. M. le Président, combien de grippes saisonnières? On a
vacciné des milliers de personnes.
J'aimerais bien que le bon gestionnaire qu'il est nous expose les chiffres de
la vaccination.
Donc, M. le
Président, vouloir venir, aujourd'hui, dire aux élus : Écoutez, on va voir
comment vous allez travailler, bien,
je ne suis pas membre caquiste, je suis porte-parole de l'opposition officielle
au Parti libéral du Québec, je vais me gouverner comme je veux. Et mes
collègues font la même chose.
Pensez-vous
que la députée de Verdun ne reçoit pas des messages des infirmières? Il y a
quelques minutes, elle me parlait des infirmières qui n'ont pas reçu leurs
primes. Il avait tout le pouvoir, tout le pouvoir, le ministre de la Santé.
Et elle me parlait de plusieurs cas qui
l'appelaient dans son bureau : Mme la députée, s'il vous plaît, est-ce que
vous allez poser des questions par rapport aux primes qu'on n'a pas
reçues? Ils nous ont promis des primes, on ne les a pas reçues.
C'est un gouvernement qui gouvernait par
arrêtés. C'est contrôle total du ministère. Et là je vais arriver un peu plus
tard à ce que le syndicat de la nouvelle députée de Marie-Victorin disait sur
l'attitude du gouvernement caquiste. Ça va
être très intéressant, parce que je ne sais pas est-ce que la nouvelle députée
de Marie-Victorin va appuyer les dires de son syndicat, où elle était
vice-présidente. Ça, ça va être très intéressant dans quelques instants, M. le
Président.
Je vais
revenir à ma collègue députée de Verdun, qui est une excellente députée pour
les citoyens de Verdun, elle m'a dit : Monsef, explique-moi, O.K.? Là, on
dit : On veut enlever l'état d'urgence, mais les mesures continuent. Parce
que les citoyens de Verdun me disent : Écoute, bien, comment ça se fait
qu'on dit qu'on va lever l'état d'urgence, mais l'état d'urgence va continuer jusqu'au 31 décembre? Je dis :
Bien, écoute, je t'invite à écouter le ministre, ce qu'il va dire.
Mais effectivement, M. le Président, le
titre du projet de loi qui parle... Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence,
les juristes qui se respectent nous ont dit clairement, pas un, pas deux, O.K.,
je peux vous les nommer, Me Valois et M. Lampron...
J'ai posé une question, hein, il y a pas mal de juristes dans la salle :
Est-ce qu'on a besoin d'un projet de loi
pour lever l'état d'urgence? La réponse était non. À certains moments, je me
suis dit : O.K., je vais répéter la question. Est-ce qu'on a besoin d'un projet de loi pour
lever l'état d'urgence? La réponse était non. Donc, venir dire, aujourd'hui :
On veut collaborer... Bien, vous savez c'est
quoi, la meilleure chose à faire qu'il... Il peut lever l'état d'urgence, il
n'a pas besoin de ce projet de loi. Mais,
non, attendez, M. le Président, on est mercredi, hein, on est mercredi, le
ministre de la Santé a un Conseil des ministres. Vous savez quoi... qu'est-ce qu'il va faire,
dans à peu près 30 minutes, à midi? Il a un Conseil des ministres, il va
renouveler, il va renouveler encore une fois son décret, 108e, 108 fois,
pour une autre semaine.
Donc,
M. le Président, il faut un peu de cohérence. Il parle de la collaboration. Je
veux bien collaborer, mais, qu'on soit
très clairs, j'en suis sûr et certain qu'au sein du caucus caquiste,
probablement, il n'y a pas unanimité par rapport à ce projet de loi.
Parce qu'on se pose des questions. Les citoyens m'appellent de plusieurs
régions, oui, oui, les citoyens m'appellent
de Drummondville, oui, oui, des citoyens m'appellent de votre région :
Est-ce que vraiment le ministre de la Santé a besoin de ce projet de loi
pour lever l'état d'urgence? J'ai dit non. Écoutez les interventions des
spécialistes. On dit souvent : Il faut
écouter les spécialistes. Bien, les spécialistes étaient unanimes, le projet de
loi ne peut pas... on n'a pas besoin d'un projet de loi pour lever
l'état d'urgence.
Donc,
M. le Président, je vais rappeler le contexte pourquoi nous sommes là
aujourd'hui. Par la suite, je vais vous partager quelques citations. Et je
vous ai promis que je vais vous parler de la fédération de... la FIQ, là où
était la nouvelle députée de Marie-Victorin, et ça va être vraiment
intéressant, à la fin.
Maintenant,
pourquoi nous sommes là aujourd'hui? Nous sommes là parce qu'un gouvernement
caquiste a décidé de gouverner le
Québec autrement. L'exception québécoise, l'exception québécoise en termes de
gestion de pandémie nous ramène
aujourd'hui, le 13 avril, à discuter, hein, écoutez, de discuter si on
donne notre accord à la levée de l'état d'urgence, mais je veux être juste... mettre les choses au
clair. Le gouvernement, depuis mars 2020, a lu, pour la première fois, la Loi
sur la santé publique. Et, dans la Loi sur la santé publique, ils ont
dit : On va lancer les mesures d'urgence et l'état d'urgence. Pourquoi lancer l'état d'urgence? Parce qu'on
s'est rendu compte, comme plusieurs autres pays, qu'il faut qu'on agisse pour
contrôler la situation pandémique. Ça a été
faisable au début. La plupart des pays, ils ont mis tous les efforts
nécessaires pour contrôler la pandémie. Et je tiens à rappeler un point
très important, M. le Président, les collègues, tous mes collègues participaient régulièrement à des «conference
calls» avec l'équipe ministérielle, qu'on vient aujourd'hui attaquer et leur
dire : Je vais voir comment vous allez... M. le Président, un peu
de respect envers les collègues, c'est très important.
Moi,
j'ai été impliqué dans des rencontres pour les mesures économiques, avec le
ministre de l'Économie et les autres collègues de l'opposition. Mon collègue
député de Mont-Royal—Outremont était impliqué avec le bureau du premier ministre. On nous a tous appelés pour
encourager les gens à suivre les mesures parce qu'on voulait tous contribuer
à cet effort de guerre. Donc, tous mes
collègues faisaient un effort. J'avais des collègues, M. le Président, qui ont
dit : Écoute, on va faire plus, pas uniquement répondre et
participer à des «conference calls», on va aller en CHSLD, et ils étaient nombreux, M. le Président. Je suis moi-même allé
au CHSLD Herron pendant à peu près deux à trois semaines. Donc, nous
avons tous contribué à cet effort de guerre au départ, parce qu'on voulait que
le Québec puisse contrôler la situation épidémiologique.
Donc, ça a été une volonté de nous tous, comme Québécois, de dire : On va
travailler ensemble pour qu'on puisse, un, sécuriser, parce qu'on ne veut pas
qu'on l'échappe et qu'on ait un contrôle en fonction des informations qu'on
avait.
Donc,
ça, ça a été la première vague. Qu'est-ce que le gouvernement a choisi? Et là
je tiens à le préciser, la loi que le gouvernement utilise maintenant,
ça s'appelle la Loi de la santé publique, la LSP. La Loi sur la santé publique,
c'est très important. Parce que, là, je vais
vous ramener avec moi en vous expliquant un peu la genèse de tout cela et pourquoi
nous sommes rendus là aujourd'hui.
Le
gouvernement, il a utilisé la Loi sur la santé publique. Et, dans les deux
articles, il y avait deux choix, deux options, soit renouveler les décrets d'une manière hebdomadaire... C'est pour
cela, je vous ai dit tout à l'heure, aujourd'hui, à midi, ils doivent le renouveler pour la 108e fois,
108e décret, parce que le décret signé aujourd'hui, il est pour
10 jours. Donc, ils ont un
conseil des ministres, ils signent le décret. Le décret, c'est du mercredi
jusqu'au prochain vendredi, ou du vendredi jusqu'au prochain... vendredi jusqu'au prochain mercredi, et ainsi de
suite. Ou bien ils avaient le choix de faire un décret aux mois. Mais qu'est-ce
que la loi dit? C'est que, si c'est aux mois, ils doivent venir au Parlement.
Ah! ils doivent venir au Parlement.
Ils avaient deux choix. Le premier ministre, hein, le premier ministre avait
deux choix : soit renouveler sans décret,
à la semaine, comme aujourd'hui, et il n'y a personne qui va lui dire quoi que
ce soit, ou bien venir au Parlement par mois. Et je vous laisse le soin
de comprendre pourquoi ils ont choisi hebdomadaire versus mensuel.
Donc, dire que les
oppositions étaient impliquées, l'opposition avait leur mot à dire... Il n'y a
aucun élu de l'opposition qui a été impliqué
en quoi que ce soit par rapport à la pandémie. On n'avait pas le droit de parler
ni sur les mesures... Et je sais que
pas mal d'entre vous m'ont dit : Écoute, regarde ce qui se passe au
Parlement français, où les gens parlaient
de toutes les mesures. On n'avait pas le droit de parler des mesures parce que
les décisions étaient donc uniquement réservées dans la cellule de
gestion de crise et le bureau du premier ministre. Et on s'est dit :
Comment on peut contrôler tout cela? Bien,
on utilise la Loi sur la santé publique. Il y a un article, on va utiliser.
Oui, l'article vous donne ce droit. Oui, l'article leur donne ce droit. Mais pourquoi continuer à le faire depuis
le début? Pourquoi ne pas venir à l'Assemblée nationale et impliquer les
autres élus? Ça, ça a été le début.
• (11 h 40) •
Parce qu'on le sait
très bien, ce n'est pas la première fois que le premier ministre aime ce mode
de gouvernance. C'est plus facile, il faut
le dire. Ils peuvent faire ce qu'ils veulent. Les contrats gré à gré, vous êtes
tous témoins du nombre de contrats
gré à gré que ce gouvernement a donnés. C'est énorme. C'est quoi, mon rôle en
tant que député? Là, vous savez c'est
quoi, le rôle de la partie gouvernementale. Vous savez c'est quoi, le rôle des
ministres. Mais c'est quoi, le rôle des députés de l'opposition? Les gens, la
population, en 2018, nous ont donné un mandat. Ils ne nous ont pas donné le
mandat de gouverner le Québec, ils nous ont dit : Vous allez être
l'opposition officielle de ce gouvernement.
C'est
quoi, une opposition officielle? C'est contrôler les actions de ce
gouvernement. Comment on contrôle les actions de ce gouvernement? Parce
qu'on s'est donné, comme État fédéré, comme institution, des moyens de
contrôle, que ce soit pour les appels
d'offres, pour ne pas tomber dans les irrégularités. Et vous m'avez vu, entendu
et vous m'avez entendu parler à plusieurs reprises sur les contrats, et je vous
ai dit que, même dans certains contrats gré à gré, on a fait affaire avec un vendeur de batteries de cuisine au
Mexique pour nous vendre des masques. Et donc, depuis le début, il y a toute
une liste de contrats gré à gré que ce gouvernement a utilisée pour gérer la pandémie.
Je vous explique la situation parce
que c'est très important. Le gouvernement sait très bien qu'il y a des
élections, les élections seront
annoncées d'ici trois ou quatre mois. Je ne détiens pas l'agenda, mais fort
probablement l'automne, sinon avant.
Ça, c'est la responsabilité du gouvernement. Mais, pour un gouvernement qui
gouverne par décrets depuis le début, quand les 76 élus caquistes
vont commencer à faire du porte-à-porte, et vous allez leur poser la question,
je vous invite : Pourquoi votre
gouvernement a choisi de gouverner par décrets depuis le début?, bien, vous
allez comprendre que ce n'est pas
bon, continuer à faire du porte-à-porte l'été ou l'automne, et le gouvernement
renouvelle les décrets chaque semaine.
Là,
ils ont trouvé une idée géniale. Au lieu de renouveler chaque semaine les
décrets, et on est rendu au 108e, on va
déposer un projet de loi et, dans ce projet de loi, on va inventer quelque
chose de nouveau, c'est qu'un décret jusqu'au 31 décembre 2022. Donc,
quand je vous ai dit, tout à l'heure, que ce n'est pas réellement un projet de
loi pour mettre fin à l'état
d'urgence, mais c'est plus un projet de loi pour prolonger l'état d'urgence
avec des pouvoirs, des arrêtés et des décrets jusqu'au 31 décembre
2022, c'est ça, la réalité.
Donc, si un caquiste
vous parle de l'état d'urgence et qu'on veut le lever, ce n'est pas vrai, ce
n'est pas la levée de l'état d'urgence. Le projet de loi est très clair, le
projet de loi n° 28, c'est un prolongement des décrets jusqu'au 31 décembre 2022. Ça veut dire garder les
mêmes pouvoirs, c'est juste... on ne va plus s'obstiner à renouveler les
décrets chaque mercredi, lors d'un
conseil des ministres. Ça, ce sont les faits de l'utilisation d'un mode de
gouvernance par décrets du premier ministre et de son ministre de la
Santé.
Donc,
M. le Président, avec ce que je viens d'expliquer, la Loi sur la santé publique
demande et exige au gouvernement un
dépôt, un dépôt formel de l'ensemble de l'oeuvre de la gestion de la pandémie,
y compris les contrats, tout ce qui a été fait pendant la pandémie. Ça,
ça n'a pas été encore fait. Maintenant, un message très important par rapport à
ce projet de loi, c'est vrai que c'est un
projet de loi qui n'est pas... ce n'est pas un long projet de loi, mais c'est
quand même avec beaucoup de répercussions.
Parlons des contrats.
Le ministre l'a dit tout à l'heure, le projet de loi prévoit que la durée de
certains contrats qui ont été conclus
pendant l'état d'urgence sanitaire peut être prolongée pour une période
n'excédant pas le 31 décembre. Je
vais revenir au 31 décembre 2021, et là vous allez comprendre, O.K.?
Ils sont tellement, en fait, convaincus que ça leur prend l'état d'urgence jusqu'au 31, mais pas le
1er janvier 2023. Je tiens juste à rappeler que ce même gouvernement
nous a envoyé une alerte AMBER le
31 décembre. Vous l'avez sûrement reçue, M. le Président, et probablement
que vous étiez en face de votre télé
pour voir Le bye-bye, et ça a été la panique totale. Moi, ça a été la
panique, chez moi, parce que je cherchais
comment voir mon émission préférée. Mais ça, les Québécois vont se rappeler
souvent qui est ce gouvernement qui
les a avisés le 31 décembre : Attention, couvre-feu ce soir. Ça,
c'est 31 décembre. Ce n'est pas l'année... ce n'est pas il y a deux
ans, là, cette année, là, 31 décembre. Donc, le gouvernement veut
maintenir les mêmes pouvoirs jusqu'au 31 décembre 2022, le maintien
des contrats.
Maintenant,
je veux parler du réseau de la santé, mais je vais parler aussi de la FIQ.
Pourquoi la FIQ? Parce que là, maintenant, on a une nouvelle élue qui
était vice-présidente de la FIQ. Donc, j'espère qu'elle ne va pas reculer comme
elle l'a fait sur d'autres sujets :
racisme systémique, la responsabilité gouvernementale de la CAQ à l'époque où
ils disaient : C'est eux les
responsables, c'est à cause du racisme systémique qu'on a eu tant de morts,
que... tu sais, je ne vais pas revenir parce qu'elle vivra avec ses
déclarations.
Mais
la FIQ, qu'est-ce qu'elle est venue nous dire en commission parlementaire?
«Vous le savez, nos 76 000 membres,
infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes
cliniques ont particulièrement fait les frais de la gestion autoritaire
du gouvernement depuis le début de la pandémie.» J'aurais aimé voir la collègue
et lui dire : Est-ce qu'elle est
d'accord avec la déclaration de son syndicat, où elle était vice-présidente, où
il qualifie la gestion du gouvernement caquiste d'autoritaire?
«En
décrétant l'état d'urgence sanitaire à 107 reprises depuis le 13 mars
2020, le gouvernement s'est donné tous les pouvoirs et en a abusé en brimant
les droits des travailleuses et en contournant leur convention collective.»
Mais c'est ça que le gouvernement
veut jusqu'au 31 décembre. Ça, M. le Président, ce n'est pas mes propos,
ce sont les propos de la FIQ. O.K.?
Donc, la fédération, elle est venue nous dire, écoutez : «Depuis deux ans,
il a imposé unilatéralement aux professionnelles
en soins un nombre incalculable d'arrêtés et de décrets.» Incalculable, le
nombre d'arrêtés et de décrets. Et
après, vous savez, M. le Président, quand j'ai vu le plan marketing de la
refondation de la santé, je me disais : Est-ce que je suis en train
de voir un film? Comment on peut faire la refondation de la santé ou la réforme
de la santé sans le professionnel de la santé? Ça, c'est le syndicat le plus
important qui représente nos infirmières et nos inhalothérapeutes.
«Avec
ce projet de loi, le gouvernement souhaite — très
important, hein? — le
gouvernement souhaite ni plus ni
moins conserver le droit de décider seul des mesures spéciales qu'il entend
maintenir jusqu'au 31 décembre 2022 sans rien devoir justifier à quiconque.» Vous savez, M. le
Président, les groupes... J'ai entendu le ministre, tout à l'heure, parler
d'une collègue. Les groupes, c'est
eux qui ont écrit ces rapports, là. Depuis tout à l'heure, je ne peux même pas
continuer parce que c'est sûr que... Écoutez, j'invite les gens à aller
voir, là, sinon, on peut le mettre public.
M.
le Président, regardez, là, avec ce projet de loi, hein, 28, «le gouvernement
souhaite ni plus ni moins conserver le droit de décider seul des mesures
spéciales qu'il entend maintenir jusqu'au 31 décembre 2022 sans devoir
justifier à quiconque». Sans devoir justifier à quiconque. Mais on n'est pas en
pouvoir absolu, on est dans une démocratie. Le gouvernement doit comprendre qu'il a une responsabilité, des devoirs. Le
rôle de l'opposition, il est très important. C'est ça, une saine démocratie. Ce n'est pas parce qu'ils
se sont habitués à gouverner par décrets qu'ils doivent continuer à gouverner
par décrets l'ensemble de leur mandat.
«Nous
avons l'impression...» Et ça, c'est très important, et j'en suis sûr et certain
que ma collègue députée de Verdun va
rire maintenant. Je vous l'assure, je ne lui ai rien dit, hein, mais
attention : «Nous avons l'impression de revivre le dépôt du projet
de loi n° 61 en juin 2020, lequel a finalement été
abandonné sous les protestations.»
Une voix :
...
M.
Derraji : Bien oui. On se parlait, ma collègue de Verdun. On
se parlait de ça, M. le Président. C'est très important, rappeler ça au public.
Et j'en suis sûr et certain, ma collègue députée de Verdun va avoir un immense
plaisir de vous expliquer le pourquoi
du comment du lien entre le projet de loi n° 28 et le projet de loi
n° 61. Je ne vais pas lui voler son punch, mais je vous invite à la
suivre, ça va être extrêmement pertinent.
«Dans le projet de loi n° 28, l'article 1
mentionne que l'état d'urgence sanitaire prend fin, ce qui implique une reconnaissance qu'il n'y a plus de menace grave à
la santé de la population, réelle ou imminente. Cela devrait normalement
conduire à la fin de l'application des mesures prises par arrêté ministériel
modifiant les conditions de travail. Pourtant, ce n'est pas le scénario qui se
dessine. Le gouvernement cherche plutôt à continuer d'agir...» Ce n'est pas mes
propos, M. le Président. Je vous ai dit ce que je pense tout à l'heure. Là, je
vais vous parler des groupes.
• (11 h 50) •
«Le
gouvernement cherche plutôt à continuer d'agir de façon unilatérale...» Faites
juste un contrôle... Comment on fait,
calculer le nombre de mots, «unilatéral», dans un fichier Word? J'ai oublié le Ctrl
quoi, mais vous allez trouver, dans ce
document, énormément de fois, à plusieurs reprises le mot «unilatéral». Ça
qualifie quand même ce gouvernement qui veut gouverner d'une manière unilatérale, parce que c'est simple, encore
une fois, c'est plus facile, gouverner comme dans une business, par décrets et par arrêtés.
«...lesquelles devraient faire l'objet d'une entente avec les associations des
salariés.» Là, on parle de bafouer le
droit des travailleurs, bafouer le droit de travailleurs, parce que, quand il
n'y a plus de convention collective, écoutez, bien, c'est des arrêtés
qui sont là.
«Nous sommes
d'avis que le véritable objet du projet de loi n'est pas de mettre fin à l'état
d'urgence sanitaire, mais bien de permettre au gouvernement de prolonger ou de
modifier toutes les mesures prises par décret ou arrêté ministériel, même si l'état d'urgence sanitaire est levé.» Et
c'est là la contradiction du gouvernement. Et je sais que le ministre, tout à
l'heure, parlait que... Écoutez, nous, on
veut lever l'état d'urgence. Mais, M. le ministre, soyez honnête avec les gens.
On veut enlever l'état d'urgence, mais on veut garder le pouvoir en
utilisant les arrêtés et les décrets.
«Le ministre
de la Santé [...] avait promis publiquement que seulement trois, quatre décrets
resteraient en vigueur et, pour
maintenir cette promesse, il a simplement fusionné en une poignée d'arrêtés des
dizaines, voire des centaines de mesures exceptionnelles déjà existantes.»
C'est vrai, il y a cinq arrêtés, mais, pour chaque arrêté, il y a au moins
75 pages. Et c'est ce que la FIQ
vient de nous dire. La FIQ vient de nous dire : «Le ministre de la Santé
et des Services sociaux avait promis publiquement que seulement trois,
quatre décrets resteraient en vigueur et, pour maintenir cette promesse, il a simplement fusionné en une poignée d'arrêtés des
dizaines, voire des centaines de mesures exceptionnelles déjà existantes.»
Je continue :
«Les professionnels en soins n'ont pas choisi les mesures qui leur ont été
imposées et n'auront pas leur mot à
dire sur le maintien de celles-ci.» Ça, c'est encore une fois le syndicat de la
nouvelle députée de Marie-Victorin. «Le projet de loi fait fi du droit
des salariés de présenter collectivement des demandes et de participer à des
discussions en vue d'obtenir des gains. Il aggrave les inégalités qui façonnent
les relations entre employeurs et salariés...»
M. le
Président, mettez-vous un peu dans les souliers des infirmières. Et là,
aujourd'hui, je veux m'adresser aux infirmières, je veux m'adresser aux
inhalothérapeutes, qui font un excellent travail. Et je les ai rencontrés. Et
j'avais un immense plaisir, hier, en
commission parlementaire, de rappeler l'importance des inhalothérapeutes. Et
j'ai proposé au ministre de les
accueillir, de les inviter en commission parlementaire parce qu'ils veulent
participer à l'effort de guerre par rapport
à la première ligne. Mais qu'est-ce que leur association nous informe ou nous a
informés, lors de l'étude du projet de
loi, les consultations? «Il aggrave les inégalités qui façonnent les relations
entre employeurs et salariés, déjà fragilisées par la pandémie», et la
façon de faire qui s'est instaurée en début de pandémie et qui a perduré dans
le temps. Encore une fois, aucun processus
véritable de dialogue n'a été prévu pour rencontrer les représentantes des
salariées et convenir avec elles de
la meilleure façon d'utiliser les sommes investies durant la pandémie pour
attirer et retenir des salariés dans le réseau de la santé. Pourquoi
c'est important?
(Interruption)
Le
Vice-Président (M. Picard) :
...un appareil électronique, là.
S'il vous plaît, on ferme nos appareils électroniques. Vous pouvez
poursuivre, M. le député de Nelligan.
M. Derraji : M.
le Président, pourquoi c'est important, parler des travailleurs aujourd'hui?
Parce que je vais vous parler aussi de l'État de droit, qui est une
notion très chère pour moi, parce que, M. le Président, si je suis en politique
aujourd'hui, parce que j'ai été élevé par un père qui a milité toute sa vie
pour un État de droit, et, pour moi, le droit et l'État de droit est extrêmement important dans une démocratie. Je vais
toujours me lever pour un État de droit et pour le respect de la
démocratie.
Et c'est pour
cela qu'aujourd'hui, que ce soit moi ou l'ensemble de mes collègues, on se
lève. On se lève parce que nous
sommes tous interpelés par ce qui se passe. Ce n'est pas vrai qu'on est
l'exception dans l'état d'urgence sanitaire. Ce n'est pas vrai qu'il y a uniquement le Québec qui fait face à la
pandémie. Les Québécois ne sont pas dupes. Les Québécois sont très intelligents, et ils suivent ce qui se
passe, et ils comprennent la réalité, et ils sont au courant des autres mesures
dans les autres provinces
canadiennes. Ils sont au courant de ce qui se passe aux États-Unis. Ils sont au
courant de tout ce qui se passe à travers le monde. Nous sommes une
démocratie, une démocratie où des gens, des hommes et des femmes, ont payé cher pour avoir le droit de parler à
l'intérieur de ce Parlement. Et, pour parler à l'intérieur de ce Parlement, on
doit respecter nos lois et respecter le mode de fonctionnement de notre
État de droit.
Et, dans ce sens, M. le Président, j'ai eu un
excellent échange avec Me Martine Valois, professeure de droit à l'Université de Montréal, et aussi
Pr Lampron. Pre Martine Valois disait : «...les conditions posées par
l'article 118 de la Loi sur la
santé publique pour justifier la déclaration d'état d'urgence ne sont plus
satisfaites...» Là, maintenant, M. le Président, c'est très important, cet élément. Le gouvernement
a déclenché l'état d'urgence en se basant sur une loi, la Loi de la santé
publique. Et, pour déclencher l'état d'urgence, le gouvernement comprenait le
contexte ainsi que la population.
Regardez ce que la
Pre Martine Valois nous disait en commission parlementaire : «...les
conditions posées par l'article 118 de la Loi sur la santé publique pour
justifier la déclaration d'état d'urgence ne sont plus satisfaites, et la prolongation de l'état d'urgence, à [son] avis,
dans le projet de loi n° 28, vise des fins autres que la protection
de la santé de la population.» Vise
des fins autres que la protection de la santé de la population. Vise des fins
autres que la protection de la santé
de la population. Vise des fins autres que la protection de la santé de la
population. Ce sont les propos de la Pre Martine Valois, professeure de
droit à l'Université de Montréal.
«Cette prise de
position s'appuie sur les trois considérations principales suivantes. D'abord,
l'évolution de la pandémie et les progrès de
la vaccination ne justifient plus le maintien de l'état d'urgence sanitaire et
des pouvoirs exorbitants du droit
commun autorisés par la Loi sur la santé publique en cas de menace grave à la
santé de la population. Ainsi, les mesures
prises en vertu de l'article 23 de la Loi sur la santé publique, que le
gouvernement souhaite prolonger, ne sont pas liées à des menaces à la santé de la population — donc il n'y a pas de menace à la population — elles concernent principalement la gestion
des ressources humaines du réseau de la santé...»
Même
le gouvernement lui-même, il dit : Écoutez, j'ai besoin d'arrêtés pour
gérer les ressources humaines. Mais, M. le Président, donc, on va faire quoi
quand on va avoir une grippe saisonnière? On va demander un état d'urgence
avec des décrets pour gérer le système de
santé? Ça a été le cas pour tous les ministres de tous les gouvernements de
travailler en collaboration avec les
professionnels de la santé et les membres du réseau de la santé, avec les
conditions qu'on s'est données comme État de droit. On s'est donné,
comme État de droit, des conditions pour travailler et on doit les respecter,
mais ce gouvernement a trouvé la Loi de la
santé publique, un élément qui justifiait la gouvernance presque depuis 2020...
au fait, c'est depuis leur élection,
si j'enlève, là, 2019. Si j'enlève 2019, depuis l'élection de ce gouvernement,
la pandémie leur a donné l'occasion de gouverner en utilisant les
arrêtés, les décrets.
D'abord,
là, je continue, M. le Président, au niveau des éléments, parce que la
professeure, Me Martine Valois nous a
vraiment éclairés. Donc, premièrement, la prolongation de l'état d'urgence vise
des fins autres que la protection de la santé de la population. Et ça, je laisse les citoyens qui nous écoutent
de demander aux députés caquistes pourquoi. «D'abord, l'évolution de la pandémie et les progrès de la
vaccination ne justifient plus le maintien de l'état d'urgence sanitaire et des
pouvoirs exorbitants du droit commun autorisé par la Loi sur la santé publique
en cas de menace grave à la santé de la population.
Ainsi, les mesures prises en vertu de l'article 23 sur la santé publique,
que le gouvernement souhaite prolonger, ne sont pas liées à des menaces à la santé de la population. Elles
concernent principalement la gestion des ressources humaines du réseau [...] tandis que les mesures de
prophylaxie qui permettent de protéger la population contre la [COVID] peuvent
être continuées sous le chapitre IX de
la Loi sur la santé publique, sous l'autorité [du] directeur de la santé
publique. Quant aux contrats qui ont
été conclus pendant les deux ans [sur l'état] d'urgence, la nécessité de leur
renouvellement jusqu'au 31 décembre
[...] ou [...] cinq ans sans égard aux dispositions de la Loi sur les contrats
des organismes publics n'a pas été démontrée.»
Là,
M. le Président, encore une fois, on revient à l'État de droit. Les Québécois
nous ont donné le mandat, comme je vous ai dit, de contrôler les actions
du gouvernement. Le gouvernement choisit une façon autre en utilisant l'urgence
sanitaire pour continuer ses contrats. Qu'est-ce que nous a dit Pre Martine
Valois : «Il est urgent de mettre fin à la gouvernance par décrets et arrêtés ministériels qu'autorisent les
dispositions extraordinaires de la Loi sur la santé publique.»
• (12 heures) •
Quand
je vous ai dit que je vais toujours me lever pour un État de droit, je le
crois, c'est mes convictions profondes. Et, pour moi, aucun État ne doit virer... aucun État ne doit utiliser
des lois pour ne pas respecter l'État de droit. Comme je vous ai dit, le
gouvernement a utilisé le renouvellement par décret, chaque semaine,
hebdomadaire, pour fuir le débat à l'Assemblée
nationale. On n'a plus de débat sur les mesures depuis le début. Ça a été
justifié lors de la première vague, mais, par la suite, aucune
justification.
Encore
une fois, posez-vous la question : Pourquoi c'est uniquement un seul
gouvernement, un seul gouvernement, qui
est un gouvernement caquiste, au Québec, qui gouverne de cette façon?
Posez-vous la question : Pourquoi on est les seuls au Canada à avoir,
aujourd'hui, le débat sur l'état d'urgence sanitaire? Posez-vous la question
aux caquistes, parce que la ministre
de la Santé l'a mentionné tout à l'heure : J'ai plein de projets de loi,
mais nous sommes en train d'avoir des discussions
avec l'opposition, et j'espère qu'ils vont collaborer. C'est lui qui a décidé
de déposer ce projet de loi aujourd'hui. Ce n'est pas moi, ce n'est pas notre
formation politique. S'il veut lever vraiment l'état d'urgence, il n'avait pas
besoin de ce projet de loi. Ce projet de loi, il va le déchiqueter et il va
lever l'état d'urgence.
Je vais vous partager
le bout qui, selon moi, a été un élément important lors de la présentation de
professeure, Me Martine Valois : «Le
renversement de la hiérarchie de normes opéré par la déclaration d'état
d'urgence est contraire au principe
de la primauté du droit législatif.» Le renversement de la hiérarchie. «L'Assemblée
nationale est la seule autorité — nous, les
législateurs — ayant
la légitimité démocratique pour intervenir et modifier les normes juridiques
applicables à l'ensemble de la population. Le renversement de la
hiérarchie de normes opéré par la déclaration d'état d'urgence est contraire au
principe de la primauté du droit
législatif.» Je vais la répéter, c'est extrêmement important :
«L'Assemblée nationale est la seule
autorité ayant la légitimité démocratique pour intervenir et modifier les
normes juridiques applicables à l'ensemble de la population. Le renversement de la hiérarchie de normes opéré par
la déclaration d'état d'urgence est contraire au principe de la primauté
du droit législatif.» Qu'est-ce que le gouvernement a fait? Depuis le
13 mars 2020, en s'autorisant de l'article 118 de la Loi sur la santé
publique, le gouvernement du Québec a adopté le décret 177-2020 déclarant
l'état d'urgence sanitaire au Québec, et cet
état d'urgence a été renouvelé, jusqu'à la semaine dernière, 107 fois, et
aujourd'hui ça va être le décret n° 108... pas
le décret n° 108, ça va être le renouvellement du
décret à la 108e fois.
La troisième
condition, je vous ai parlé de... La nécessité de l'application immédiate n'est
plus présente. À ce jour, 82 %,
et je tire ces chiffres... je pense, 83 %... de ces chiffres publiés par
l'institut de santé publique, a reçu au moins... On parle de la vaccination. Donc, la condition
sanitaire qui est préoccupante, au Québec, est la maladie. On voit que
continuer à gouverner par décrets
n'aide pas l'État de droit. Dans le projet de loi n° 28, la majorité des
décrets que le gouvernement souhaite prolonger ne concerne aucunement
des mesures de prophylaxie visant à protéger la santé de la population. Ces mesures peuvent être prises par les directeurs
de santé publique et par le ministre en vertu des pouvoirs réguliers qui
sont conférés par la Loi sur la santé publique, et là on parle du
chapitre IX de la loi.
Comme je vous
ai dit lors des consultations, les groupes que nous avons rencontrés étaient
presque contre le projet de loi. Mais je veux vous dire, par respect...
Je veux partager ceux qui étaient pour, et vous allez comprendre, ceux qui étaient pour : un sous-ministre associé au
ministère de la Santé qui est venu témoigner en commission, c'est
M. Daniel Paré, il était pour;
Dr Luc Boileau, sous-ministre adjoint, directeur national de la santé publique
par intérim, pour; Mme Julie Labbé, P.D.G. du CIUSSS du Saguenay—Lac-Saint-Jean; M. Guy Thibodeau, P.D.G., CIUSSS; Jean-François Fortin Verreault,
P.D.G., CIUSSS de l'est de Montréal.
Maintenant,
ceux qui étaient contre, vous allez comprendre le lien — un,
deux, trois, quatre, cinq — cinq
personnes, pourquoi ils veulent voter...
ils nous ont dit «contre» : Alliance du personnel professionnel et
technique de la santé et des services sociaux, APTS; la Fédération
interprofessionnelle de la santé du Québec — c'est la fédération où la
nouvelle députée de Marie-Victorin a été vice-présidente; Pr Louis-Philippe
Lampron, professeur de droit à l'Université Laval; Me Martine Valois, professeure de droit, Université de Montréal; Ligue
des droits et libertés; Confédération
des syndicats nationaux et la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec. Tous ces groupes étaient contre le projet de loi tel
que posé par le ministre.
Donc, si je résume, à part les gens qui sont
liés directement avec le ministre, parce que soit ils ont un rôle de sous-ministre soit ils sont des P.D.G., ça veut
dire... Ils ont un lien avec le ministre, travaillent dans le réseau de la
santé. Donc, ils sont venus
corroborer les dires du ministre. Mais il n'y a personne qui appuie un projet
de loi du ministre. Mais, normalement,
quand on dépose un projet de loi, la moindre des choses, c'est avoir des
corroborateurs, des gens de la société civile, des gens qui appuient ce
projet de loi. Bien, j'aimerais bien... À part le gouvernement caquiste et
probablement quelques élus caquistes, parce
que je ne pense pas que les 76... Écoutez, je formule une hypothèse, M. le
Président. Je ne sais pas si tout le monde est d'accord. Mais j'invite
la population, quand ils vont rencontrer leurs élus, au courant des prochaines
semaines, de leur poser la question s'ils étaient pour ou contre. Mais on va le
voir parce qu'il va y avoir un vote sur ce
projet de loi. On va voir si tout le monde va suivre la demande ou la commande
du ministre de la Santé, ils vont voter
pour ce projet de loi ou ils vont voter contre, parce que, si je suis les
e-mails que je reçois, M. le Président, énormément d'e-mails de
plusieurs régions, plusieurs régions, bien, il y a plusieurs personnes qui se
posent la question : Pourquoi le
ministre de la Santé et pourquoi le gouvernement caquiste a déposé ce projet de
loi pour nous dire qu'il veut lever l'état d'urgence, mais, au bout de la ligne, il veut juste prolonger les
pouvoirs jusqu'à ce que l'élection passe? Les gens, ils ont compris ça.
D'ailleurs,
ça a été dit par Me Valois, je lui ai posé la question : Ce n'est pas
votre interprétation, mais il m'a dit : Bien, écoute, il y a
élection à l'automne. Le gouvernement ne veut pas se casser la tête, mais il
veut un seul décret et il veut ce décret
jusqu'à la fin de l'année présente. Donc, j'invite le ministre à refaire ses
devoirs, chercher des appuis, chercher des appuis. Qui appuie son projet
de loi, à part les sous-ministres, à part les P.D.G. de CIUSSS? C'est très
important, M. le Président, c'est très, très
important. Le même ministre qui a déposé le projet de loi n° 61...
et il a été obligé de le retirer et
quitter le ministère du Trésor, et c'est sa collègue qui a piloté par la suite,
il a dit qu'on faisait fausse route, il a déposé un autre projet de loi.
• (12 h 10) •
Donc, aujourd'hui, M. le Président, je m'adresse
aux Québécois, parce qu'ils étaient très nombreux, et je tiens à les remercier pour leurs messages. J'ai reçu des
milliers de messages depuis que je suis devenu porte-parole en santé, mais
surtout, surtout depuis que nous avons
commencé l'étude en commission parlementaire de ce projet de loi, et vous étiez
nombreux à me demander : Comment ça se fait-il que le Québec est
l'exception en termes de gestion de pandémie? Je me pose les mêmes questions que vous. Pourquoi un seul gouvernement, qui
est caquiste au Québec, veut continuer à gouverner par décrets jusqu'à ce que l'élection de l'automne
passe? Est-ce que l'objectif, c'est passer l'élection en toute tranquillité
et ne pas être obligé d'avoir d'autres
décrets? C'est une hypothèse. Mais, dans un État de droit, et quand je vois,
des professeurs, c'est leur
spécialité, l'État de droit, les deux, que ce soit le Pr Lampron ou Me
Valois, les deux étaient unanimes, ils étaient unanimes, M. le
Président, que ça n'a aucun bon sens de continuer à gouverner en utilisant ce
mode de gouvernance. Et il ne faut pas
oublier, parce qu'on a eu plusieurs débats, et le gouvernement a été obligé de
déposer ce projet de loi, parce que, je
me rappelle, la collègue d'Iberville a déposé une motion, le collègue de
Rosemont s'est levé aussi à plusieurs reprises pour parler de l'état
d'urgence. J'ai, moi-même, déposé une motion sur l'état d'urgence.
Venir,
aujourd'hui, dire que les oppositions veulent bloquer, ne veulent pas
collaborer, ça, ça touche le leader et le ministre de la Santé, c'est leur point de vue. Il n'y a personne qui va
me dicter quoi faire et je ne vais pas dicter au député de Rosemont ni à la députée d'Iberville quoi
faire, ni, elle aussi, ne peut pas me dicter quoi faire, ni le député de
Rosemont ne peut me dicter quoi
faire. On est des députés indépendants, chacun fonctionne comme il le souhaite.
Mais c'est parce qu'on est unanime
contre son projet de loi, là on s'arrange pour avoir des choses; je pense que
c'est insulter l'intelligence des
Québécois. M. le Président, il faut être très, très, très prudent par rapport
aux déclarations, surtout si on veut collaborer. Je veux bien collaborer avec ce projet de loi, je suis prêt qu'il enlève
tous les autres articles, et qu'il garde le premier, et on déclare la levée de l'état d'urgence, et c'est
fini. Mais vouloir continuer à décréter et à gouverner par décrets et par
sondages, je pense que c'est insulter l'intelligence des Québécois.
Et je vais
parler, M. le Président, des sondages. Est-ce que c'est normal d'utiliser
l'argent des contribuables pour sonder la popularité d'un ministre? Ils ont
sondé la popularité du premier ministre, ils ont sondé la popularité du
ministre de la Santé, il y a des
questions qui touchaient la pandémie, mais, au même moment, qu'est-ce que vous
pensez du ministre, avec son nom, pas le ministre de la
Santé, son nom? Qu'est-ce que vous pensez du premier ministre, avec son nom? Il
y a d'autres ministres, ils ont testé leurs noms avec l'argent des
contribuables.
Encore une
fois, c'est un débat extrêmement important, et, je tiens à rappeler au
ministre, ce n'est pas avec les menaces que ça va marcher, de dire qu'on ne doit pas faire un débat, on doit
faire très rapidement, parce qu'il a besoin de décréter... des décrets, pour les signer, et continuer, et
fermer la porte qu'on a levé l'état d'urgence. Je tiens à le rappeler à tous
les Québécois, que le ministre de la Santé, le premier ministre ont une
seule chose à faire, lever l'état d'urgence sanitaire. Il n'y a pas autre chose à faire. Ce qu'ils sont en train de faire, avec
le dépôt de ce projet de loi, c'est qu'ils veulent retarder le débat, parce qu'ils peuvent. Ils ne sont pas
obligés d'avoir ce projet de loi pour lever l'état d'urgence. Les professeurs
de droit, que ce soit M. Lampron
ou Me Valois, étaient unanimes, les deux m'ont dit la même réponse, les deux
avaient la même réponse : le
ministre et le gouvernement n'avaient pas besoin de nous faire perdre tout ce
temps pour qu'on vienne aujourd'hui
parler de ce projet de loi. Bien, c'est leur faute. C'est eux qui ont pris la
décision de rédiger ce projet de loi, c'est eux qui ont pris la décision de
faire des consultations, c'est eux qui ont pris la décision de ramener ce
projet de loi. Et là on va perdre quand même des jours au niveau de la
commission qui va étudier ce projet de loi.
Alors, M. le
Président, pour moi, c'est très clair, je suis contre ce projet de loi, notre
formation politique est contre ce projet de loi. Et on va voter contre ce
projet de loi parce que nous sommes convaincus qu'on n'a pas besoin de ce
projet de loi pour lever l'état d'urgence.
Et je sais,
M. le Président, qu'on va avoir d'autres occasions pour parler de ce projet de
loi, et je vais continuer à le dire : Je ne suis pas convaincu, je ne suis
pas convaincu qu'uniquement le Québec, en Amérique du Nord... Je ne vais pas
ajouter l'Europe, parce que je n'ai pas eu le temps de voir, les autres
juridictions, comment ils fonctionnent. Mais une chose certaine, une chose certaine, gardez-la en tête : le
gouvernement, il ne veut pas lever l'état d'urgence avec ce projet de loi, il veut prolonger l'état d'urgence jusqu'à la
fin de l'année. Ce n'est pas le masque ou les autres mesures qui sont importantes, c'est le pouvoir, c'est le pouvoir
unilatéral. C'est ce que la Fédération des infirmières nous a dit, c'est ce que
les deux profs spécialistes en droit nous ont dit, par rapport à l'État de
droit : c'est le pouvoir et un pouvoir législatif, mais il y a un
pouvoir aussi de l'exécutif.
On le sait
très bien, le premier ministre s'est habitué, le ministre de la Santé aussi.
Donc, c'est plus facile, naviguer dans un système où il n'y a pas de
convention collective, parce qu'ils savent qu'ils seront obligés de travailler
avec des règles et des normes. Mais est-ce
que les caquistes veulent travailler en suivant les normes et en suivant les
règles des conventions collectives? À
mon avis, non, parce qu'ils se sont habitués à avoir ce mode de gouvernance
depuis mars 2022. Ce n'est pas un an,
ce n'est pas deux ans, c'est pour bientôt trois ans. Et pensez à quelqu'un qui
joue avec le même jouet, ça fait deux, trois ans. Est-ce que c'est facile, lui
enlever ce jouet? Non. Bien, c'est ce qu'il se passe avec la CAQ présentement. Ce qui se passe, avec la CAQ, c'est
qu'ils veulent envoyer au public l'illusion qu'ils ont enlevé l'état d'urgence,
alors que l'état d'urgence sera uniquement prolongé en gardant les mêmes
pouvoirs. Et ce qu'on discutait, au début, ce n'est pas les mesures sanitaires, c'est le pouvoir
absolu, d'une manière unilatérale, que ce gouvernement s'est donné depuis le
début de la pandémie. C'est ça, l'élément clé.
M. le Président, dans une démocratie qui se
respecte, il faut respecter tous les pouvoirs, y compris le pouvoir que le peuple nous a donné en tant qu'opposition
officielle, et on doit l'honorer au nom du peuple parce que c'est le peuple
qui nous a élus, c'est le peuple qui nous a
envoyés à l'Assemblée nationale. Et ce même peuple, aujourd'hui, se lève, se
lève, pas uniquement pour dire au gouvernement : C'est assez, ce
gouvernement qui gouverne par décrets, mais se lève aussi pour leur dire : Comment ça se fait qu'uniquement
au Québec un gouvernement continue à gouverner par décrets depuis mars 2020? Pour bientôt, je l'ai mentionné lors de
ma motion du mercredi, probablement, le souhait du premier ministre,
c'est enfin déposer pour avoir le record Guinness d'un gouvernement qui a
gouverné par décrets, au niveau mondial.
Aujourd'hui, ils vont signer le
108e décret, le décret n° 108. M. le Président,
ce sont les faits. Et, aujourd'hui, en tant que porte-parole de la santé et
porte-parole en santé et services sociaux qui va étudier ce projet de loi, je
tiens à envoyer un message très clair aux
gens qui nous écoutent. Le projet de loi, tel qu'il est déposé aujourd'hui, ne
respecte pas, à mon avis, l'État de
droit. Et, quand je dis l'État de droit... parce qu'on s'est donné des moyens
au Québec pour avoir un État de
droit, des députés, une Assemblée nationale qui va gérer tous les aspects, pas
uniquement de santé publique, mais de contrats publics. Sinon, bien,
fermons le Conseil du trésor, fermons l'AMP, enlevons toutes les mesures des
appels d'offres, faisons affaire avec les firmes
de génie, faisons affaire avec les firmes de génie-conseil, faisons affaire
avec les firmes de relations publiques, et ne travaillons plus avec nos
fonctionnaires. Si c'est ça, le souhait du premier ministre, c'est son choix. Et je vous invite à leur poser la
question quand ils vont venir taper votre porte pour demander un autre mandat
l'automne prochain.
• (12 h 20) •
Mais nous, au
Parti libéral, on va se lever et on va le dire haut et fort : Ce n'est pas
dans un État de droit, ce n'est pas dans un État qui se respecte qu'un
gouvernement va utiliser d'une manière unilatérale tous les pouvoirs pendant
presque 80 % de leur mandat. Ça ne
passera pas. Ça ne passera pas. Et ça, pour moi, c'est très clair, c'est très
clair dans le sens où le gouvernement,
d'une manière délibérée, au début, ils ont choisi le renouvellement de l'état
d'urgence d'une manière hebdomadaire. S'ils avaient le moindre respect
envers notre institution, ils auraient dû choisir le renouvellement des décrets aux mois. La loi leur permettait ça. La
loi leur donnait ça. Ils ne l'ont pas fait parce qu'ils savaient pertinemment :
on ne veut rien savoir des oppositions.
Pourquoi on va aller parler avec l'opposition? Pourquoi on doit inclure
l'opposition? On veut l'opposition
juste qu'ils soient dociles et qu'ils propagent nos informations. Ça a été le
cas au début, parce qu'on avait l'intérêt de la population, mais, par la
suite, excusez-nous, par la suite, on doit jouer notre rôle. Et on doit jouer notre rôle parce que c'est pour cela que nous
sommes élus. Nous sommes élus pour surveiller les actions de ce gouvernement.
Et je l'ai très bien dit, M. le Président, c'était très clair : Le mandat
que la population nous a donné en 2018, c'est pour surveiller les
actions de ce gouvernement, et on va le faire, et on va continuer à le faire.
Et c'est pour cela, je
tiens à le rappeler encore une fois, pour moi, ce n'est pas... ce projet de
loi, il ne vise pas à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire, il vise à mettre
fin à l'état d'urgence sanitaire uniquement dans l'article 1, dans l'article 1. Et, s'ils voulaient lever l'état
d'urgence sanitaire, il y avait déjà un projet de loi déposé par la collègue
députée d'Iberville. Le gouvernement
avait la possibilité de lever l'état d'urgence, mais ce qu'ils veulent, ce
qu'ils veulent exactement, avec
l'approche des élections, c'est ne pas avoir un casse-tête à vous expliquer
pendant l'élection qu'ils sont en réunion les mercredis pour renouveler l'état d'urgence. Et ils ont eu l'idée de
génie, encore une fois, de dire : Au lieu de se casser la tête à
renouveler chaque mercredi l'état d'urgence, on va demander à l'Assemblée
nationale, parce qu'on est majoritaires, on a 76 élus, on va leur demander un décret, un seul, avec un
projet de loi, on va mettre tout dedans, tout dedans, et on va gouverner tranquillement, pas de problème avec
l'opposition jusqu'au 31 décembre 2022. Mais je sais que les Québécois
suivent ce qui se passe, et je sais, et j'en suis sûr et certain, qu'ils vont
suivre avec grand intérêt les explications lors de l'étude détaillée de ce projet de loi, mais je
dois le dire aujourd'hui clairement, haut et fort, que notre formation
politique votera contre le principe de ce projet de loi. Pourquoi, M. le
Président? Parce que, pour moi, c'est très simple, ce projet de loi est loin, est très, très loin de la réalité
des gens, très loin du respect de l'État de droit. Un projet de loi qui bafoue
les droits des travailleurs, un projet de loi qui envoie un signal très
négatif à nos professionnels de la santé, que ce soient infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes, au niveau du
réseau de la santé, sur qui le fardeau il est très élevé, sur qui le système de la santé repose à
100 %. Donc, pour eux et au nom du peuple québécois, notre rôle,
aujourd'hui, c'est ramener leurs
préoccupations, bien, le peuple québécois nous a dit : Écoutez, ça n'a
aucun bon sens, que ce gouvernement continue
l'état d'urgence. Et vous savez quoi? Le gouvernement voulait leur envoyer un
message, mais, ils l'ont comme très
bien compris, ce n'est pas parce que tu as mis dans le titre «loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire»
que... les Québécois vont tout comprendre, parce que, par la suite, ils ont
compris, ils ont compris que le gouvernement veut garder les pouvoirs
jusqu'à la fin de l'année. Merci, M. le Président, pour votre écoute.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député de Nelligan.
Je cède la parole à M. le député de Rosemont.
M. Vincent Marissal
M. Marissal : Merci,
M. le Président. Heureux de vous revoir, chers collègues. Alors, projet de loi n° 28, loi devant supposément mettre fin à l'état d'urgence
sanitaire.
Avant de
commencer sur le fond, un peu de forme et un suivi à ce qui a été dit, tout à
l'heure, pendant la période des questions. Le leader du gouvernement, le
premier ministre, le ministre de la Santé et les collègues en face,
généralement, avaient l'air bien, bien, bien intéressés par une vidéo produite,
apparemment, par notre estimée collègue d'Iberville, vidéo que je n'ai pas vue, je m'en excuse à ma collègue
d'Iberville. Alors, je voudrais juste rassurer tout le monde, là, qu'on soit
tout le monde à la même place puis à la même heure, il n'y a pas de sombres
machinations en train de se dérouler entre le
parti de ma collègue d'Iberville et le mien. Et je ne crois pas que ce soit le
cas de mes collègues à droite, ici, pas plus que ceux à gauche, le Parti
québécois ou les libéraux. Alors, que ce soit dit pour qu'on soit quand même
sur la même page.
Parce qu'on
peut, avec le jeu des micros et du chronomètre, dire des choses ici, à
l'Assemblée nationale, se rasseoir puis,
après ça, laisser, dans l'air, quelques effluves douteux. C'est ce qui a été
fait tout à l'heure par le leader du gouvernement. Puis on n'a pas réagi pour
ne pas brûler de temps, mais, franchement, ce n'est pas sérieux. Ma position,
elle est connue sur le projet de loi n° 28, je l'ai refaite ce matin devant au moins 12 journalistes. Je
pense que ma position, elle est claire, elle est très connue. Le gouvernement a parfaitement le droit de ne pas la
partager, mais ce serait agréable, puisque le ministre de la Santé, quelques minutes plus tôt, ce matin, à la
période des questions, parlait de la bonne entente puis de la collaboration,
ce serait quand même agréable de ne pas se
mettre à propager toutes sortes de rumeurs vaguement complotistes, là, sur
les oppositions ensemble, qui vont tranquillement fomenter un blocage
systématique du projet de loi.
D'abord, je
ne peux pas dire que je le bloquerais ou non, je n'ai pas vu les amendements du
projet de loi n° 28. Je souhaite qu'il y en ait, sinon la
commission parlementaire ne servirait strictement à rien. Puis ce n'est
certainement pas moi, jamais, qui
dirait ça ici. Les commissions parlementaires servent à quelque chose. J'ai
très bien fait connaître ma position, que,
dans l'état actuel, le projet de loi n° 28, pour moi, il est
irrecevable et qu'il devrait aller dans la corbeille ou dans le tiroir 13, là, c'est selon. Et puis on
pourrait réécrire quelque chose. On aurait le temps parce qu'avec le
consentement on peut tout faire ici,
surtout le bien. On aurait pu. Mais là on perd du temps avec un mauvais projet
de loi. Puis là, ce matin, on rajoute une couche avec des histoires
absurdes de complot ou que sais-je encore.
Je pense, M.
le Président, cela dit, que ça en dit plus sur l'obsession de la CAQ pour le Parti conservateur du Québec que sur notre propre opposition quant au projet de
loi n° 28, position qui est connue, je le redis, puis je
vais l'étoffer ici. D'abord, mon
collègue de Nelligan l'a dit, mais je vais le redire parce que c'est important,
les consultations particulières qu'on a eues, donc, avec des témoins ont
démontré une chose : Le milieu de la santé, le personnel soignant est
contre le projet de loi n° 28 parce qu'il continue de maintenir la gouvernance par décret, quoi
qu'en dise le gouvernement, de un.
De deux, tout
ce qui est réfléchi dans le domaine juridique au Québec est contre, parce que,
comme l'a dit mon collègue tout à l'heure, notamment, ce projet de loi bafoue
la primauté du droit législatif. Et j'aurai d'autres citations, dans les prochaines minutes, de gens, ma foi, vraiment
intéressants, érudits, des juristes de qualité qui ont la démocratie à coeur et
le rôle du Parlement à coeur, qui sont venus nous dire : Ce n'est pas par
là qu'il faut passer. De un, vous n'avez pas besoin de ça, puis, si vous utilisez ça, ce n'est pas
pour faire ce que vous prétendez vouloir faire. Et j'y reviens dans quelques
minutes.
Et puis il y a un troisième groupe qui était
pour le projet de loi. Comme par hasard, ce sont tous des gens qui sont payés directement par le gouvernement. Je ne
remets pas leurs compétences en cause, mais leur loyauté à tout crin envers le gouvernement est inscrite dans leur
contrat. Un P.D.G. de CIUSS ne peut pas sortir publiquement pour critiquer
ouvertement le gouvernement. Ça ne se fait
pas. Le gouvernement nous a mis trois D.G. de CIUSSS. J'en connais un assez bien, M. Fortin
Verreault, que j'apprécie énormément, le P.D.G. du CIUSSS de Montréal... de
l'est de Montréal. Je le connais, je
connais bien, on travaille ensemble sur l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Je ne
vous parlerai pas de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, M. le Président, je
vous le promets, aujourd'hui, mais je l'ai dit pareil. Je travaille avec lui régulièrement. Chic type, apprécié, il vient
d'arriver en poste, il a des gros projets devant lui. Mais M. Fortin
Verreault, il ne peut pas critiquer
le gouvernement, il n'a pas le droit, il va perdre sa job, s'il fait ça. Alors,
parlez-moi d'un témoin crédible et indépendant.
• (12 h 30) •
Ça se peut
que M. Fortin Verreault, comme ses collègues des CIUSSS, dise : Ah oui! moi,
ce projet de loi là, j'en ai
absolument besoin. Mais c'est un témoin dont l'indépendance n'est pas
démontrée, n'est pas démontrable. Même chose pour le docteur Luc Boileau, homme estimé qui rend de précieux services
à la population du Québec, et on lui en remercie, directeur général de la santé publique par
intérim. Il est sous-ministre. Sous ministre qui sort sur la place publique
pour dire publiquement : Ce
projet de loi là est mal foutu, il bafoue des droits parlementaires, on devrait
le retirer, bien, il n'aura pas fini sa phrase qu'il va avoir son
4 %.
Alors, vous voyez, les trois catégories de gens,
le milieu de la santé est contre — contre, là, et contre, et contre, là — le
milieu juridique, dont le Barreau, est contre, absolument contre, puis, bien,
on nous a sorti quelques personnes qui travaillent
pour le gouvernement du Québec, qui n'ont pas le droit d'afficher leur
opposition et leur dissidence. Alors, ça, c'est pour l'objet général de
la consultation et des témoins qui sont venus devant nous.
En fait, M. le Président, je vais vous faire une
confidence, moi, j'aime beaucoup l'absurde, j'aime beaucoup l'humour absurde,
le théâtre absurde, je suis un grand, grand amateur : Ionesco, Tchekhov, La
petite vie, dans un autre registre.
J'aime beaucoup l'humour absurde, le théâtre absurde. J'aime beaucoup les jeux
intellectuels autour de l'absurdité. Mais,
quand ça tourne autour d'un projet de loi, là, je débarque. J'ai l'impression
qu'on n'est pas sur la bonne scène, là, on n'est pas sur la bonne scène. Pour prendre une autre image, là, quand
je regarde le projet de loi n° 28, son titre, mais, dans le fond,
ce qu'il fait vraiment, j'ai l'impression d'être devant une toile de Magritte.
Hein, tout le monde la connaît, la toile de
Magritte, là, la célèbre toile avec la pipe, là, écrit en dessous : «Ceci
n'est pas une pipe.» Bien, c'est ça, ce projet de loi ne fait pas ce
qu'il prétend vouloir faire. Donc, c'est pour ça que les juristes, qui savent
lire un projet de loi, qui voient clairs, et
les gens qui subissent la gouvernance par décrets depuis plus de deux ans sont
venus nous dire : Ce n'est pas la voie à suivre, retournez faire
vos devoirs. Et c'est ça qu'on devrait faire.
Parmi les
gens qui sont venus nous dire : Ne faites pas ça, ce n'est pas la voie à
suivre, ce n'est pas... Je l'air perdu, mais je suis en train d'allumer mon
appareil ici. J'arrive. J'ai une heure. Parmi les gens qui sont venus nous
voir, nous dire que ce projet de loi
est non seulement mal foutu, mais il n'est pas nécessaire, on a eu d'abord, mon
collègue de Nelligan en a parlé, Martine Valois, juriste, professeure émérite à
l'Université de Montréal, le genre de femme que j'entends, puis je me dis : J'aurais donc dû étudier en droit ou
peut-être que je devrais prendre des cours de soir puis d'aller étudier le
droit, tellement cette femme est inspirante, claire dans ses propos et
toujours, toujours sur la cible. Elle nous a dit, et mon collègue l'a dit tout
à l'heure, mais je vais le redire parce que c'est pas mal le fond de
l'affaire : Le projet de loi n° 28 bafoue la primauté du droit
législatif. Ça, c'est quoi, ça? Vous le savez, c'est quoi, ça, c'est le travail
des parlementaires ici, qui devraient,
normalement, faire leur travail, débattre et ne pas se faire imposer des
décrets à répétition. Ensuite, maître Valois nous dit ceci, écoutez
bien : On a délibérément évincé l'Assemblée législative. C'est une loi symbolique,
on aurait pu le déposer bien avant et
autrement. C'est assez clair, c'est pas mal clair de la part de Me Valois, qui
ajoute : «...depuis le 13 mars 2020, pas moins de
168 lois concernant d'autres sujets ont été adoptées par l'Assemblée
nationale. Ce chiffre démontre hors de tout
doute que l'Assemblée législative élue était tout à fait en mesure de
délibérer, d'évaluer et de voter à propos
des mesures concernant la lutte contre la propagation de la COVID-19.» La
deuxième partie, là, c'est précisément ça, la primauté législative, et
elle vient de faire la démonstration que cette primauté a été bafouée.
On a ici la
Ligue des droits et libertés : «...il y a les mesures destinées à protéger
la population et celles qui ont pour effet
de consacrer l'impunité du gouvernement en temps de crise sanitaire.» Ce n'est
pas moi, là, c'est des gens très crédibles,
sérieux, la Ligue des droits et libertés, qui sont venus nous dire ça. Puis je
répète, là : «...il y a les mesures destinées à protéger la population et celles qui ont pour
effet de consacrer l'impunité du gouvernement en temps de crise sanitaire.»
Ça, c'est la cloche de verre par décret sous laquelle gouverne le gouvernement
depuis maintenant plus de deux ans.
La Ligue des droits et libertés ajoute :
«En d'autres mots, le gouvernement demande à l'Assemblée nationale d'avaliser
un processus antidémocratique, [soit] la gestion par décrets et le non-respect
des procédures de négociation collective,
par un éventuel vote démocratique, l'adoption éventuelle de la loi n° 28, qui incorporerait à titre les mesures, les arrêtés ministériels...»
Ça me paraît aussi assez clair qu'on débusque ici ce que moi, j'ai appelé un
subterfuge et même une supercherie.
La Ligue des droits et libertés l'écrit 100 fois mieux que moi, je
pourrais vous le dire ici. On essaie de nous faire avaliser quelque chose par un projet de loi qui n'est pas
nécessaire, qui est mal foutu, puis qui ne passe pas la rampe et qui
bafoue notre propre rôle ici. C'est quand même assez cynique. C'est assez
cynique.
Me Lampron, qui n'a plus besoin de présentation,
un autre dont j'aurais dû suivre les cours, un gars passionnant qui est aussi très, très précis, il nous conseille
d'ajouter un amendement pour obliger un débat dans le cas où on retourne à
l'état d'urgence. Ça, c'est le mieux qu'il a
trouvé à dire de ce projet de loi. Il a dit : Si jamais vous êtes obligés,
vraiment, là, d'avaler les couleuvres
puis d'adopter cette affaire-là, bien, assurez-vous, au moins, que vous
pourriez en débattre si jamais le gouvernement devait réinstaurer l'état
d'urgence. C'est ce qu'on aurait dû faire, d'ailleurs, depuis longtemps, au
lieu de perdre notre temps avec ce
projet de loi n° 28. On aurait très bien pu retravailler la Loi sur
la santé, à la section Déclaration de l'état d'urgence.
Parenthèse,
d'ailleurs, M. le Président. Vous savez, quand on parle en privé avec le
ministre, je ne pense pas révéler de
grand secret ici, là, puisqu'il l'a dit publiquement, on veut la revoir, la Loi
sur la santé. On veut revoir la façon dont le gouvernement décrète l'état d'urgence, mais pas tout de suite :
Passez-nous donc 28, là, laissez-nous, là, passer 28, qui nous donne, en passant, des
pouvoirs extraordinaires jusqu'au 31 décembre 2022, soit après les
prochaines élections, passez-nous ça,
là, docilement, puis, peut-être, après, si vous êtes fins, on va revoir la Loi
sur la santé, à la section Déclaration de l'état d'urgence. Je comprends que le «on verra» a parfois guidé les pas de ce
gouvernement-là, là, mais moi, je ne fonctionne pas avec des «on verra»,
hein? Il n'y a pas de projet de loi qui s'appelle «on verra» ici, là. Si on
veut le faire, bien, qu'on le fasse, c'est
la voie à suivre. Mais le gouvernement ne veut visiblement pas aller là
puisqu'il a tous les pouvoirs puis il est très bien capable de déposer
les projets de loi qu'il veut. La preuve a été faite.
On arrive dans le
Barreau du Québec. Ah! ça, c'était pas mal édifiant aussi d'entendre la
bâtonnière et son adjointe nous dire à quel
point ce projet de loi est mal ficelé. Elle nous dit, par exemple : «La
LSP — c'est la Loi
sur la santé publique — ne prévoit pas de mécanisme de transition entre
un état d'urgence sanitaire et un éventuel retour à la normale. Le mécanisme de renouvellement et
d'abrogation de l'état d'urgence sanitaire prévu à la LSP permet actuellement
au gouvernement de l'abroger par décret ou
bien tout simplement de ne pas le renouveler à la fin de la période de
10 jours.» Ça, c'est le mécanisme dans lequel on est
malheureusement, a contrario, que le gouvernement ne fait que le renouveler aux
10 jours, puis il nous dit, d'un côté de la bouche : Je veux mettre
fin à l'état d'urgence sanitaire, mais, de l'autre côté de la bouche : Je vais quand même me garder un
certain nombre de pouvoirs, et ils sont nombreux. Quand vous regardez la
liasse, là, on peut dire : C'est juste cinq arrêtés. Mais, quand vous
regardez ce qu'il y a dans les arrêtés, c'est pas mal plus que ça, là. Et, d'un
autre côté de la bouche, le gouvernement dit : Bon, bien, moi, je vais
quand même me garder le pouvoir de décréter
ça, là, puis vous n'aurez pas votre mot à dire, parce qu'en plus on aura voté
ici une loi qui me donnera tous les pouvoirs de continuer là-dedans.
• (12 h 40) •
Je
continue avec le Barreau : «Le gouvernement reconnaît que l'une des seules
mesures actuellement maintenues qui
touchent directement la population en général est le port du masque en public.
Or, plusieurs autres mesures prises par décrets ou arrêtés s'appliquent toujours, notamment celles concernant la
gestion du personnel dans le milieu de la santé, l'autorisation de certains professionnels à contribuer à la campagne de
vaccination ainsi que d'autres mesures opérationnelles.
«Ces
nombreux décrets et arrêtés ont également fait objet de modifications successives,
sans qu'une codification administrative
soit effectuée, comme c'est le cas pour les lois et les règlements. Pour plus
de clarté, le Barreau du Québec considère que le gouvernement devrait
faire l'exercice d'identifier les décrets qui doivent continuer à s'appliquer
jusqu'au 31 décembre 2022, en les incluant en annexe de la loi», ce qui
n'est pas le cas, je le précise, pour le moment.
«Si cet exercice est
trop complexe, ou ne peut être réalisé en temps utile, la date du
31 décembre 2022 devrait être revue afin que la période de transition soit
limitée autant que nécessaire.»
Quand
on demande à la bâtonnière : Pourquoi 31 décembre 2022? La
bâtonnière, elle ne fait pas de politique, mais, comme tout le monde aussi, elle est capable de lire un calendrier. Puis
entre maintenant puis le 31 décembre 2022, il y a une grosse,
grosse date, là, qu'on a tous et toutes encerclée, là, avec un gros crayon
rouge, c'est le 3 octobre, parce qu'il
y a des élections. Personne n'est dupe, là. Personne n'est dupe. Tout le monde
a vu le jeu, là. Le projet de loi, l'encre n'était même pas sèche, là, que déjà les journalistes nous posaient la
question, là, par rapport au 31 décembre : Oui, mais c'est-tu parce qu'il y a des élections? Bien oui,
je vais répondre à la question : Oui, c'est parce qu'il y a des élections.
C'est clair, c'est clair comme de l'eau de roche. Ça nous a été dit. Ça
nous a été dit de maintes façons par des juristes.
Je
termine avec la bâtonnière, ici, Barreau du Québec : «La Loi sur la santé
publique prévoit que le gouvernement doit
faire une reddition de comptes à l'Assemblée nationale de toute déclaration
d'état d'urgence sanitaire en soumettant un rapport d'événement. Le
projet de loi ne propose aucune mesure de cette nature.
«Nous croyons que la
reddition de comptes qui sera effectuée par le gouvernement concernant l'état
d'urgence sanitaire en vertu de la Loi sur
la santé publique et le rapport d'événement qui en découle devraient inclure
les actions posées en application du projet de loi.» Ce n'est pas fait,
je précise.
«Le Barreau du Québec
croit que le projet de loi devrait donc être modifié en ce sens.
«En terminant — et
c'est la bâtonnière qui parle toujours — nous souhaitons également
souligner que cette situation aurait pu être
évitée si la Loi sur la santé publique avait été modifiée afin d'y inclure des
règles particulières concernant la fin de l'état d'urgence sanitaire et
les mesures transitoires pouvant être appliquées.»
Voilà,
c'est exactement ce qu'on dit depuis plus d'un an... en fait, depuis
15 mois, je vais parler pour ma formation politique, c'est précisément ça qu'on dit, une loi transitoire
permettant de revoir la Loi sur la santé publique. Ça n'a pas été fait. Puis là on arrive en fin de session, en fin
de mandat, en route vers une prochaine élection, avec un projet de loi qui
prétend mettre fin à l'état d'urgence
sanitaire alors que, dans les faits, il ne fait que le reconduire et même passé
la date des prochaines élections, soit le 31 décembre 2022. Je
répète : Personne n'est dupe. On peut faire bien des affaires avec une majorité dans un Parlement comme le nôtre,
mais on ne peut pas duper des gens qui savent lire et qui comprennent la
situation. Ça vaut aussi pour la population du Québec, qui voit très bien le
jeu du gouvernement.
Alors, je vais de
terminer sur une note positive. Le ministre de la Santé, avec qui je passe
beaucoup de temps ces temps-ci, un homme
agréable quand on arrive à s'entendre... puis je le dis, je le dis puisqu'on en
arrive à bien travailler ensemble. Il
l'a dit ce matin, pendant la période des questions : On avance sur le
projet de loi n° 11. Pour les non-initiés, c'est le projet de loi
sur les omnipraticiens. Je devrais même dire que c'est peut-être même plus le
projet de loi sur les omnipraticiens, parce
que le premier amendement du ministre c'était de changer le titre. En fait,
c'est pour la réorganisation des
soins de première ligne. On a beaucoup de points de convergence là-dessus, puis
c'est vrai qu'on avance, puis je pense qu'on avance dans la bonne
direction, en plus, pas de garantie de résultat ni de succès, mais je pense
qu'on s'en va dans la bonne direction.
Alors, le ministre nous dit : Les oppositions, les partis de l'opposition
collaborent. Il a nommément apprécié la contribution de mon collègue de
Nelligan, je crois bien qu'il m'a nommé aussi, mon collègue des Îles puis ma collègue d'Iberville aussi, qui est dans cette
commission. Et il est vrai que nous collaborons pour le bien commun, parce
que personne ici ne va venir nous convaincre
que la première ligne est en bon ordre au Québec, là. On a un maudit problème avec
la première ligne. Puis tant mieux si on peut contribuer, dans la mesure du
possible, à faire avancer ça.
Alors, je lui tends la
main, quand c'est bien fait puis qu'on va dans la bonne direction. Ça ne veut
pas dire qu'il n'y aura pas de débat, là, ça ne veut pas dire qu'on va être
d'accord sur tout, à la fin, là, puis qu'on va s'envoyer des fleurs. Non, non, ce n'est pas la secte des
Apôtres de l'amour infini, ici, là, on s'entend, là. On va débattre, on va
débattre. C'est d'ailleurs ça qu'on aimerait, là, avec la fin de l'état
d'urgence sanitaire, c'est d'être capables de débattre. Mais, même si on ne s'entend pas sur tout, à la fin, si
on s'entend sur les objectifs, bien, je lui tends la main, au ministre de la
Santé. Voilà. Continuons donc sur ce bel esprit, sur cette belle lancée, parce
que ce n'est pas supercrédible, d'un côté, nous dire : Ah! vous êtes donc bien collaboratifs, dans
l'opposition, on travaille bien ensemble, puis, de l'autre côté, de dire :
Je vais essayer de vous passer un savon puis de vous déposer un projet de loi
qui dit une chose mais qui va faire son contraire.
Regardez, à un moment donné, la collaboration aura des limites, sur le projet de loi n° 28. S'il reste tel qu'il est, il n'y a pas de sombre complot pour le bloquer,
mais je peux vous dire que je vais voter contre. Et, à cette étape-ci, je vote
contre le principe. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci,
M. le député de Rosemont. Et je cède la parole au chef du troisième groupe
d'opposition et député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Joël Arseneau
M.
Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je vous
avoue que c'est avec des sentiments partagés que je prends la parole ici, aujourd'hui, sur la question de la levée de
l'état d'urgence, parce que, depuis déjà plus d'un an, c'est ce qu'on
réclame, c'est ce qu'on réclame, mais pas de cette façon-ci.
En fait, dès
le printemps dernier, 2021, on a voulu tendre la main au gouvernement en
essayant de s'entendre sur une motion
pour s'assurer qu'on puisse sortir de cet état d'urgence et sortir aussi de la
gouvernance par décret. Et, à ce moment-là, souvenez-vous, la campagne
de vaccination allait bon train, on voyait que ça s'améliorait dans les
hôpitaux et on se disait : Il y a
peut-être cette fameuse et proverbiale lumière au bout du tunnel. Et là on dit
au gouvernement : Il faut
prévoir les mécanismes permettant de revenir à une démocratie normale, à une
gouvernance normale et que le pouvoir législatif
puisse reprendre son rôle et qu'on puisse ensemble s'assurer d'une transition
adéquate pour, justement, revenir à une certaine normalité.
Alors,
c'était un peu surréaliste de voir qu'aujourd'hui on est à débattre d'un projet
de loi qui a été déposé après la levée d'à peu près toutes les mesures
populationnelles, à l'exception du port du masque obligatoire dans un certain
nombre de lieux publics, et que ce projet de
loi — ça,
c'est l'élément clé — nous
amène, en pleine sixième vague, à discuter d'un titre qui se lit comme suit : Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire, un titre qui, disons-le, est fallacieux dans
la mesure où l'urgence sanitaire, elle a été proclamée par décret. Et, tant et
aussi longtemps qu'on décide de renouveler ce
décret, l'état d'urgence demeure. On a même vu le gouvernement qui a préféré
renouveler les décrets aux 10 jours plutôt que de permettre un débat à l'Assemblée nationale au bout de
30 jours, ce qu'on reproche, évidemment, au gouvernement. Il aurait
été utile, éclairant pour la population du Québec, de pouvoir connaître les
indicateurs, les enjeux, l'état de situation épidémiologique, les contrats, les
conditions qui font que, d'un mois à l'autre, une situation demeure urgente et nécessite que le Parlement accepte que le
gouvernement se donne des pouvoirs, disons-le, exorbitants, à l'extérieur
du cadre du droit législatif normal
pour gérer le quotidien de la société québécoise, du système de santé, du
système d'éducation, et ainsi de
suite, donc que le gouvernement se mette, en quelque sorte, au-dessus des lois
dans une période où il y a urgence d'agir.
D'ailleurs, on pense qu'il aurait été plus utile, plus adéquat d'utiliser
l'état d'urgence pour une période limitée au moment où la menace, comme le dit la Loi sur la santé publique, la
menace est réelle ou imminente et met à risque, de façon immédiate, la
sécurité, la santé ou même la vie des Québécoises et des Québécois.
• (12 h 50) •
Alors, je pense qu'on peut tous convenir que,
d'une vague à l'autre, il y a eu des périodes où les pouvoirs extraordinaires
de l'exécutif gouvernemental n'étaient plus nécessaires. Il y a eu des
périodes, qu'on pense à l'été 2020 ou à
l'été 2021 et à d'autres périodes, où il serait objectivement faux de dire
que la santé, la sécurité ou la vie des gens était menacée de façon imminente, globalement, à travers
le Québec. On a tous admis que c'est la faiblesse du système de santé qui
faisait en sorte qu'on maintenait un certain nombre de pouvoirs entre les mains
du gouvernement pour pouvoir s'assurer qu'on tienne le coup.
Alors, contrairement à mon collègue que je viens
d'entendre, mon collègue de Rosemont, qui souhaite, tout simplement, mettre au panier ce texte législatif
et recommencer à zéro, nous, au troisième groupe d'opposition, au Parti québécois, nous souhaiterions plutôt
proposer le recyclage, le recyclage non seulement du papier, mais également du contenu
de ce projet de loi pour pouvoir le réécrire de façon à ce qu'il corresponde à
un certain nombre d'objectifs clairs, précis, mais qu'il nous permette surtout
d'arriver à l'objectif que semble sous-tendre le gouvernement dans le projet
de loi, c'est-à-dire permettre une
transition avec un certain nombre de mesures très ciblées, qui doivent être
explicitées de façon claire dans un texte législatif ou pour une durée
limitée, et qui soient fortement argumentées et justifiées, donc qu'on puisse
identifier précisément et justifier quels sont les pouvoirs qui échappent
présentement dans le droit régulier et le fonctionnement
de l'exécutif et du législatif de l'Assemblée nationale ou de l'État du Québec,
qui puissent justifier, donc, qu'est-ce qui nécessite actuellement des
modifications au régime législatif dans lequel on opère régulièrement. Parce qu'il y a une différence fondamentale entre la
levée de l'état d'urgence telle qu'a voulu le décrire le ministre de la Santé,
dans son projet de loi n° 28, et mettre fin à la gouvernance par décrets.
En fait, c'est ce qui est aussi fondamentalement contradictoire dans le projet de loi. Non seulement nous n'avons pas
besoin d'un projet de loi, d'autres l'ont dit avant moi, pour permettre la levée de l'état d'urgence, il
suffit de ne pas convoquer les instances, le cabinet, le Conseil des ministres pour renouveler
l'état d'urgence, et nous mettrons fin à ce régime de droit particulier et
exceptionnel.
Or, si on n'en a pas besoin — et
c'est même, je dirais, une errance par rapport au droit de mentionner ce qui
va, de toute façon, tomber
naturellement dans un projet de loi — bien,
il faut modifier le titre, bien entendu, parce que, je l'ai dit, ce titre, en fait, nous cache l'intention réelle
du gouvernement dans son projet de loi ou l'intention qui est celle de
maintenir un certain nombre de
pouvoirs extraordinaires, de maintenir, en fait, un certain nombre de décrets
qui ont été adoptés sous l'état d'urgence.
Mais pourquoi les
décrets ont-ils été adoptés sous l'état d'urgence? Parce qu'ils étaient jugés
nécessaires pour protéger la vie, la
sécurité et la santé des gens pendant l'état d'urgence. Si nous sommes dans une
situation où il n'y a plus urgence,
si nous sortons de l'état d'urgence, il faut pouvoir justifier de façon
extrêmement claire, précise, les raisons pour lesquelles nous aurions
besoin d'avoir des décrets qui n'existaient que par l'état d'urgence. Et c'est
là, évidemment, la principale faille du
projet de loi, mais c'est aussi, en fait, le squelette du projet de loi, ce sur
quoi repose le projet de loi. C'est
la raison pour laquelle nous devons essentiellement le réécrire, en passant par
l'article 1 : «L'état d'urgence sanitaire déclaré le
13 mars 2020 et renouvelé depuis prend fin.»
Le législateur,
lorsqu'il prend la plume et écrit un certain nombre d'articles dans un projet
de loi, doit avoir un objectif qui soit, évidemment,
relié au droit. Cet article-là ne correspond pas à l'objectif de base puisque,
comme j'ai voulu le démontrer, l'état d'urgence disparaît si on ne le
renouvelle pas. Donc, il ne parle pas pour ne rien dire, le législateur. Donc, c'est l'article 1 qu'il faut
nécessairement éliminer. Et ça, plusieurs des gens, des témoins, des
intervenants que nous avons eu la chance de rencontrer au cours des
consultations particulières nous l'ont dit et répété.
Donc, je pourrais y
aller article par article puis on aura l'occasion de le faire lors de l'étude
en commission, mais il y a quand même
quelques éléments, je vais en nommer trois, là, qui posent problème, outre
l'article no 1 qui réfère au
titre, c'est essentiellement, initialement, dans la mouture première du projet
de loi, mais il y a eu certains amendements que le ministre nous a
annoncés et qu'on pourra étudier éventuellement, le plus tôt sera le mieux.
Essentiellement, le
projet de loi nous dit que certains décrets ou arrêtés ministériels sont
toujours en vigueur au moment où la loi est
promulguée. Bien, ils vont le rester, en vigueur, jusqu'au 31 décembre
2022. Une formulation aussi vaste et
imprécise est tout simplement inacceptable. Nous devons, nous avons
l'obligation morale et, je dirais, législative d'expliciter, de préciser, encore une fois, de quoi on parle. Et ça, ce
message-là semble avoir été partiellement compris par le ministre, qui nous a regroupé, là, les arrêtés,
j'y reviendrai, dans un certain nombre d'éléments, là, on parle de cinq catégories.
Mais, dès le départ, le gouvernement,
essentiellement, se donnait tous les pouvoirs de la gouvernance par décret, une
fois fini l'état d'urgence, avec un
libellé comme celui-là qui était totalement inacceptable. «Jusqu'au
31 décembre», d'autres l'ont mentionné avant moi, nous, nous en
avons parlé pendant les consultations particulières et il n'y a pas
d'explication scientifique, épidémiologique
ou contractuelle pour fixer la date de péremption, si on veut, d'un certain
nombre d'arrêtés ministériels ou de décrets au 31 décembre 2022. Ce
qu'on sait, par contre, c'est que le mois de décembre vient après le mois de novembre, qui, lui-même, suit le mois
d'octobre, où on aura, évidemment, un rendez-vous électoral. Alors, on
peut penser que la date est tout simplement commode pour le gouvernement de
prolonger, donc, les décrets, la mise en
oeuvre des décrets au-delà du contexte électoral. C'est ce qu'on devine et
c'est sur cette base-là que nous ne pouvons pas accepter, donc, la prolongation de l'état d'urgence jusqu'à la fin de
l'année... bien, l'état d'urgence... en fait, la gouvernance par décrets
jusqu'à la fin de l'année, alors que l'objectif, précisément, que l'on semble
vouloir tous atteindre, c'est la fin de
l'état d'urgence et la fin de la gouvernance par décrets. Donc, on ne peut pas
parler des deux côtés de la bouche. On le fait, on passe à autre chose, on tourne la page ou non. Nous, on
souhaite qu'on tourne la page, on le dit depuis plus d'un an, c'est le
temps de le faire, maintenant. Et ça, c'était le premier élément.
Le
deuxième élément, c'est concernant toute la question des renseignements. Ça
peut avoir l'air mineur, mais le libellé
de l'article nous dit que tout ministère ou organisme doit communiquer ou donner les
renseignements en sa possession, sur demande du ministre, pourvu que ce soit nécessaire
pour protéger la santé de la population en lien avec la pandémie. Encore
une fois, c'est une formulation qui est extrêmement vaste. Je pourrai y
revenir, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Donc, vous allez y revenir lorsque nous allons reprendre
le débat.
Et,
compte tenu de l'heure et afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une
affaire inscrite par les députés de l'opposition, le présent débat sur
l'adoption du principe du projet de loi n° 28 est ajourné.
Les travaux sont
suspendus jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à
13 heures)
(Reprise à 15 h 1)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, bon après-midi. Vous pouvez prendre
place.
Affaires
inscrites par les députés de l'opposition
Motion
proposant que l'Assemblée exige du gouvernement qu'il déclenche une
enquête publique et indépendante pour faire la lumière sur les circonstances
entourant les décès survenus au CHSLD Herron lors de la
première vague de la pandémie de COVID-19
Et maintenant nous en sommes à l'article 85
du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. M. le
chef du troisième groupe d'opposition présente la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale déplore le
drame survenu au CHSLD Herron, où 47 aînés sont décédés lors de la
première vague de la pandémie de COVID-19, au printemps 2020;
«Qu'elle rappelle
les inquiétantes révélations concernant cette tragédie qui ont ressurgi dans
les médias ces derniers jours;
«Qu'elle réitère le principe de responsabilité ministérielle
dans la gestion des événements, c'est-à-dire que les ministres sont individuellement responsables de la gestion
de leur ministère et qu'ils doivent répondre non seulement de leurs propres
actions, mais aussi de celles de leurs fonctionnaires;
«Enfin, que l'Assemblée nationale exige du gouvernement le
déclenchement d'une enquête publique et indépendante pour faire toute la lumière sur les circonstances
entourant ces décès, et ce, tant pour les familles des victimes que pour la
dignité de celles et de ceux qui ont perdu la vie.»
Je vous
informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la
motion inscrite par M. le chef du
troisième groupe d'opposition s'effectuera comme suit : 10 minutes
sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, puis
46 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le
gouvernement, 27 min 48 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 min 18 s
sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 18 min 9 s sont
allouées au troisième groupe d'opposition,
7 min 30 s sont allouées à l'ensemble des députés indépendants,
sous réserve d'un maximum de deux minutes par député.
Dans le cadre
de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des
groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon
les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne sont soumises à aucune limite de
temps. Et enfin je rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent
intervenir au cours du débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant
pour en aviser la présidence.
Je cède maintenant la parole à M. le chef du
troisième groupe d'opposition pour son intervention.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Pour être bien clair, mon intervention initiale,
je dispose de combien de temps?
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Votre formation politique
dispose de 18 min 9 s, puis vous aurez un 10 minutes
supplémentaire pour votre réplique.
M. Arseneau : Excellent.
Merci beaucoup. Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à mes
collègues qui sont ici présents pour
ces deux heures de débat sur une motion qui est extrêmement importante sur un
sujet qui est très, très grave et que l'on débat depuis maintenant deux ans,
mais de façon plus active depuis plusieurs mois, parce que le dossier est éminemment sérieux, grave et tragique. On parle,
évidemment, de l'hécatombe, et ce n'est pas un mot sans signification, la mort tragique de milliers de Québécoises et de
Québécois, de personnes aînées qui étaient sous la responsabilité de
gestionnaires de CHSLD publics ou privés. Ce sont des gens qui sont
vulnérables, des gens qui comptaient sur l'État pour pouvoir les soigner et les protéger durant la
période de pandémie qu'on a vécue durant la première vague, qui a été, certes,
inattendue, qui était inédite, et la
question qui se pose, c'est : Est-ce que tout le travail a été fait pour
les protéger adéquatement?
Bien entendu,
on a pu comprendre qu'au Québec, comme ailleurs, la pandémie et le virus, son
intensité, sa propagation, il y avait plein d'éléments qui étaient
inconnus au moment du début de la pandémie. On voyait ce qui se passait d'abord en Asie, puis ensuite en Europe,
et on se doutait bien que la pandémie frapperait chez nous. On a vu également
qu'à certains endroits, en
Colombie-Britannique par exemple, on a mis en place des mesures très, très tôt
dans les résidences pour personnes
âgées pour protéger ces personnes qu'on savait plus vulnérables, ce qui n'a pas
été fait ici et qui est toujours assez
mystérieux, d'ailleurs, parce qu'on a fait le choix, ici, de protéger les
hôpitaux. On regardait ce qui se passait en Europe, notamment en Italie, et on a fait ce choix-là. Et
ce choix a été malheureux, on le sait aujourd'hui : plus de 5 000
victimes dans les CHSLD du Québec chez les personnes aînées les plus
vulnérables.
Mais ce dont
il est question aujourd'hui, pour revenir plus spécifiquement sur le dossier
qui nous intéresse, c'est la séquence
durant laquelle la cellule de crise et le gouvernement, qui s'est doté de
pouvoirs extraordinaires, du jamais-vu dans l'histoire du Québec, l'état
d'urgence, où tout le pouvoir... en fait, on a essentiellement fermé la société
civile et, évidemment, le Parlement, pour
s'occuper de notre monde, avec le résultat catastrophique qu'on connaît
aujourd'hui, et plus précisément, évidemment, dans les CHSLD.
Et le cas de Herron est un cas d'espèce qui est
particulièrement dramatique, où on avait... On a pu constater, au terme de la
première vague, presque une cinquantaine de décès et dans des conditions
déshumanisantes, absolument indignes de la
société québécoise. Et ce qu'on veut tenter d'éclairer, ce sur quoi il faut
absolument jeter un regard et jeter toute
la lumière, c'est la façon dont cette tragédie-là a pu se produire ici, au
Québec, ce qui a été fait, bien sûr, et ce qui n'a pas été fait pour
s'assurer que l'on protège au mieux les personnes les plus vulnérables.
Je l'ai dit tout à l'heure, les pouvoirs étaient
extraordinaires, ils étaient entre les mains d'un petit groupe de personnes. On sait qu'autour du premier ministre
il y avait quelques ministres et un certain nombre de conseillers politiques
ou en communications. Ce groupe-là avait
pour fonction première de mettre tout en oeuvre pour protéger les Québécoises
et les Québécois. Et la question qui se
pose, c'est : Qu'est-ce qu'ils ont fait? Comment ont-ils agi pour
s'assurer de protéger des vies
humaines? On sait ce qu'ils ont fait pour communiquer au public des
informations à travers les grands médias en période de grande écoute,
alors que tout le monde était pendu aux lèvres du premier ministre et de ses
ministres à la télévision au jour le jour,
pendant des semaines, voire des mois. Ça, évidemment, c'est l'image, le
portrait de la première vague que l'on connaît.
Ce qu'on veut savoir,
maintenant, c'est ce qui s'est passé derrière les portes closes. Et
malheureusement le gouvernement refuse depuis deux ans de jouer franc jeu et de
nous révéler ce qui s'est véritablement passé. Et on est, aujourd'hui encore, comme il y a quelques mois,
comme il y a maintenant deux ans, devant cette espèce de mystère, de trou noir dans les décisions et les communications
internes entre ce qui se passait sur le terrain, le travail des fonctionnaires,
les ministres, la cellule de crise, qui,
d'ailleurs, se réunissait à tous les jours à 9 h 30, d'abord la cellule de
crise, 10 h 30, selon ce qu'on a pu
apprendre aussi par des révélations journalistiques, 10 h 30 avec le
premier ministre et ses ministres. Alors,
il y avait des rendez-vous quotidiens qui devaient, j'imagine, permettre de
discuter, de transmettre de l'information et de choisir un certain
nombre d'orientations, d'actions, parce qu'il faut quand même se souvenir que
tous les moyens financiers, logistiques,
légaux même, étaient entre les mains de ce groupe-là pour agir, pour s'assurer
de protéger la population.
Alors,
visiblement, quelque chose n'a pas fonctionné, pour que ça déraille à ce point
au Québec en général, dans les CHSLD
en particulier, et dans le CHSLD Herron de façon plus spécifique. On a dit, et
j'aimerais entendre le contraire, mais
basé sur des faits... j'ai évoqué le fait qu'on avait communiqué, qu'on avait
communiqué abondamment, qu'on avait rassuré
les gens, et je dirais qu'on l'avait fait avec une certaine expertise, mais
est-ce qu'on a tout révélé sur la situation qui se déroulait sur le terrain? Est-ce qu'on a obtenu toutes les
informations? À l'évidence, non, puisqu'encore aujourd'hui, au jour le jour, selon des documents qui peuvent être
obtenus, le plus souvent par les journalistes d'enquête, on apprend par bribes ce qui s'est peut-être passé et on essaie
essentiellement, là, de raccorder les points, de mettre en place, là, les
morceaux du puzzle pour mieux comprendre.
• (15 h 10) •
Et, moi, là,
ce qui me heurte le plus dans cette discussion-là qui s'éternise depuis deux
ans, c'est le fait qu'on n'aura jamais
connu une catastrophe aussi importante avec un aussi grand nombre de victimes
au Québec et qu'on ne semble pas vouloir
aller jusqu'au bout de l'exercice et savoir exactement ce qui s'est passé, que,
comme l'ont dit certains commentateurs et
analystes, personne ne soit imputable, qu'on ne puisse pas véritablement
comprendre qui était responsable de quoi, qui savait quoi à quel moment et comment on a agi et pourquoi on a agi de
telle façon plutôt que de telle autre, quels étaient les choix qui
étaient à la disposition des décideurs, à cette époque-là.
Alors, je reviens sur la question des 10, 12 ou
14 jours, là, de trou noir dans les histoires qu'on peut essayer de recomposer à travers les différents témoignages
qui ont été révélés dans un certain nombre de publications, de livres, de
publications journalistiques ou encore de
reportages télévisuels ou à travers des réponses qu'ont pu donner des membres
du gouvernement lors de la période de questions au salon bleu, et nous sommes...
et les Québécois, et les familles des victimes,
et les proches sont contraints de devoir eux-mêmes tenter de reconstituer les
faits, et ça, je trouve ça inadmissible. Et vous le savez, qu'une commission d'enquête publique et indépendante
permettrait d'aller au bout de l'exercice, permettrait de faire le bilan, permettrait de tirer des
leçons, de savoir comment se préparer à une prochaine pandémie, d'éviter des
drames de cette envergure ou de ce
type-là. Et, si on ne le fait pas, on sera jugés par l'histoire comme ayant été
des gens qui ont refusé avec lâcheté
de faire face à nos démons, de faire face à une situation qui est inadmissible,
qui n'aurait jamais dû se produire et
ne pas trouver les moyens pour empêcher que ça se reproduise à nouveau. Et,
moi, c'est la plus grande honte que
j'aurai, en tant que membre de ce Parlement, si un jour ou l'autre on ne décide
pas de faire, justement, une enquête en bonne et due forme, ad hoc, avec tous les mandats, d'interroger et de
contre-interroger tous les acteurs, absolument tous les acteurs de cette crise
qu'on a vécue au printemps 2020.
Et, quand on
regarde les faits qui sont à notre disposition pour l'instant, et je reviens
sur cette période fatidique, là, entre le 27 mars et le
10 avril, cette histoire-là est pleine de trous, cette histoire-là est
pleine, aussi, d'incohérences, d'invraisemblances, pleine de failles, et les
commentaires et les opinions, les témoignages qui sont livrés sont parfois contradictoires. Et là je reste poli dans le
domaine de l'euphémisme, parce que je ne veux pas lancer d'accusations à tort
et à travers, je souhaite qu'on
puisse atteindre un niveau de discours qui nous permette de connaître la
vérité, toute la vérité, rien que la vérité et qu'on puisse croire que
la séquence qui nous est présentée, elle est crédible, elle s'explique et elle
s'explique par l'information qu'on avait, le comportement qu'on a eu, les
décisions qu'on a prises, les choix qui ont été
pris par, encore une fois, les décideurs, mais, actuellement, ça ne colle pas, il y a trop
d'éléments, dans cette histoire-là, qui
ne collent pas, et c'est la raison pour laquelle, encore une fois, j'éprouve un
malaise des plus profonds à l'idée
que ces milliers de personnes qui ont
vu leurs parents ou leurs grands-parents mourir dans des conditions absolument
atroces sont encore dans l'expectative à savoir si un jour ils
comprendront ce qui est véritablement arrivé, ce qui s'est véritablement
produit.
Comment se fait-il que, le 27 mars... Là,
j'y vais un peu dans la chronologie. On va commencer, d'ailleurs, le 23 mars, disons, 2020. On a un médecin du
CHSLD Herron qui réclame des tests de dépistage et de la formation de la part
du CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île parce qu'on
voit qu'il y a des patients qui éprouvent des symptômes. Comment se fait-il
que la première sonnette d'alarme se
retrouve absolument sans réponse? Premier dépistage massif le 11 avril, on
parle de plus de deux semaines après
le moment où on a signifié, bien, en fait, aux autorités du CIUSSS qu'il y
avait un problème. Et je vous
rappelle qu'en Colombie-Britannique on avait déjà pris des mesures pour
protéger les personnes aînées, et on sait que leur bilan est largement
favorable par rapport au nôtre.
26 mars,
on continue un peu dans la séquence, premier cas de COVID est déclaré. Le
patient provenait du CHSLD Herron. Il
est décédé le lendemain à l'hôpital juif de Montréal. Et là le personnel qui
éprouve, sans aucun doute, des symptômes ou encore sont effrayés par la COVID, par le virus, quitte massivement
les lieux, l'institution. Les propriétaires appellent au 8-1-1 pour avoir du support parce que c'est le
silence radio au CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal, il n'y a pas de
réponse. Les responsables de l'institution,
sur le plan étatique, de l'institution privée ne répondent pas au téléphone, il
faut appeler au 8-1-1. C'est inconcevable.
On
sait aussi que, le 29 mars — puis
là je vais devoir accélérer — les
ministre de la Santé et ministre responsable des Aînés sont informées par la sous-ministre adjointe,
Mme Rosebush, que le personnel a déserté le CHSLD Herron. Et il y a un courriel qui est
transmis et qui s'intitule... bien, enfin, dans le titre : «Urgent :
Situation CHSLD Herron». On a entendu la
ministre dire : J'ai compris, à la lecture de ce courriel, que le CIUSSS
de l'Ouest-de-l'Île avait pris les choses en main, avait la situation en charge. C'était au nom du
gouvernement que le CIUSSS prenait la responsabilité. Alors, une fois que la
responsabilité est prise par le gouvernement, par l'État, bien, qu'en est-il du
suivi de la situation? Comment peut-on simplement
dire : Dossier réglé, coché, on passe à autre chose, alors qu'on est en
pleine crise, alors que, comme l'a dit la ministre, des éclosions se révèlent, apparaissent un peu partout?
J'imagine que la responsabilité et le réflexe naturel seraient, de temps en temps, d'aller chercher... d'aller aux
nouvelles, de demander un rapport sur ce qui s'y passe. Et de voir que,
semble-t-il, personne au cabinet n'ait effectué de suivi, c'est absolument
aberrant.
Le 7 avril — là,
j'y vais plus rapidement — la
présidente du CIUSSS écrit un texto au sous-ministre adjoint, M. Gendron, dans lequel on a des indications
claires que le politique est au courant. Et c'est ça qu'on veut savoir :
les décideurs, qu'est-ce qu'ils savaient, exactement? Et je cite :
«Le cabinet vient de me contacter à l'effet que Mme Chowieri, la propriétaire [du CHSLD] Herron, menace d'aller
dans les médias, car elle n'a pas d'information sur ce qui se passe dans
son CHSLD.» Bien, en fait, si les choses
allaient bien, ce serait un moindre mal. Elle n'a pas d'information sur ce qui
se passe dans son CHSLD, qui a été
mis sous tutelle, mais où, visiblement, il n'y a pas plus de personnel, il n'y
a pas plus de soins qui sont offerts
aux personnes qui y habitent. Pourquoi? Pourquoi n'a-t-on pas déployé des
services, alors qu'on avait mis sous tutelle, au nom du gouvernement, ce
CHSLD?
Et
évidemment, le 10 avril, publication dans le journal The Gazette de cette histoire abominable.
Évidemment, elle fait scandale, elle horrifie l'ensemble des Québécois, et même
au-delà de nos frontières, pour qu'ensuite, quelque part en soirée, on ait un appel — et
ça, c'est troublant — au
9-1-1, comme pour se dédouaner. Après 12 jours de mise en tutelle, les responsables de la tutelle appellent au 9-1-1.
À quoi sert le 9-1-1? Pour signifier, évidemment, des urgences. L'urgence,
depuis 12 jours, on n'en a pas pris
note, on n'en a pas pris acte, et évidemment le message apparaît, on le sait,
scripté. On avait fait appel à une
agence de communications, de relations publiques. Tout ça est extrêmement
troublant. Et la question fondamentale
est la suivante : Comment se fait-il que le gouvernement, par l'entremise
de son CIUSSS, avec des communications
régulières avec les fonctionnaires, notamment le sous-ministre, n'ont pas agi
de façon à éviter cette stratégie, n'ont pas agi pour, justement,
s'assurer de doter l'institution du personnel suffisant, n'ont pas agi avant
que tout cela devienne public?
C'est
pour ça que je regrette... Ça fait mal à entendre, mais, que le gouvernement
ait pu soigner son image plutôt que soigner les gens qui étaient
mourants dans le CHSLD, c'est, à proprement parler, révoltant. Et c'est la
raison pour laquelle, si l'histoire est
différente de l'intérieur, bien, qu'on le sache, qu'on explique pourquoi on n'a
pas agi en temps utile pour sauver
des vies, pour s'assurer que les services soient offerts, alors que c'était la
responsabilité première... la seule responsabilité, en fait, du
gouvernement, en s'appropriant tous les pouvoirs de l'état d'urgence et en
mettant sur place une cellule de crise,
c'était, encore une fois, sa seule et plus prioritaire responsabilité, de
sauver des vies, alors qu'il y avait clairement
une situation dramatique qui se jouait au CHSLD Herron et qu'on n'a pas agi en
temps utile, avec les résultats qu'on
connaît aujourd'hui, et qu'on ne connaîtra vraisemblablement jamais si on n'a
pas une commission d'enquête publique et indépendante d'instituée.
Merci, Mme la Présidente.
• (15 h 20) •
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le chef du troisième
groupe d'opposition. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la ministre
responsable des Aînés et des Proches aidants.
Mme Marguerite
Blais
Mme Blais (Prévost) : Merci,
Mme la Présidente. Premièrement, je tiens à prendre quelques instants pour
honorer la mémoire des personnes qui ont souffert, qui ont perdu la vie
à la suite de cette terrible pandémie qu'on appelle la COVID-19, qu'on appelait le
coronavirus au tout début, au mois de janvier. Nous devons toujours nous
souvenir de ce printemps 2020,
où, au Québec, à travers le monde entier... le monde entier, Mme la Présidente,
a été contaminé, et nous devions
apprendre à connaître et à lutter contre ce virus. Le monde entier a été témoin
des ravages de la COVID-19, et rappelons-nous
qu'il a fait des ravages, jusqu'à maintenant, de plus de 6 millions de
personnes qui ont été victimes de ce coronavirus.
Je tiens aussi à
remercier mon collègue le chef du troisième groupe d'opposition d'avoir déposé
cette motion, parce qu'elle va me permettre,
pendant quelques minutes, de vous faire part de la situation comme je l'ai
vécue. On vit nos situations
différemment, Mme la Présidente, d'après les fonctions qu'on a, d'après les
informations que nous avons aussi. C'est facile, deux ans plus tard, de
juger de ce qui aurait pu avoir été fait différemment à l'époque. Mme la
Présidente, j'aurais beaucoup aimé avoir une
boule de cristal pour savoir comment le virus était pour se comporter à
l'époque. J'aimerais bien,
aujourd'hui, avoir une machine à remonter le temps pour éviter que ces milliers
et ces millions de personnes soient affectés puis qu'il y ait des
personnes décédées.
Mme la Présidente, on
a fait, au gouvernement, chacun de notre mieux avec les connaissances que nous
avions à l'époque, en 2020. On a eu des
discussions, des suivis, des décisions. Il y en avait à tous les jours, sept
jours sur sept. Il faut aussi dire
que nos décisions ont toujours été prises sur la base de la Santé publique et
des experts qu'on consultait. On avait
des experts. Ce sont les experts qui orientaient nos décisions, il faut le
souligner. Nos journées commençaient aux petites heures du matin puis elles se terminaient, je pense, au début du
matin, donc très, très tard dans la soirée. Les gens travaillaient sans
cesse, au détriment de leur santé. C'était la guerre, la guerre à un virus que
nous ne connaissions pas. C'était le monde entier qui était en guerre, à
l'époque.
Nous ne nous
sommes jamais cachés, Mme la Présidente. Nous avons, à plusieurs reprises,
changé d'orientation, voire reculé
sur des directives. Dans un contexte de pandémie, ne rien faire et ne prendre
aucune décision aurait été une grave erreur. Il fallait agir, agir vite,
il fallait sauver des vies et protéger la population.
Mme
la Présidente, le bien-être des personnes, là, des gens, et plus spécifiquement
des personnes aînées, a toujours été
au coeur de mon engagement. Au cours de ma vie, j'ai travaillé à faire entendre
leur voix, j'ai fait entendre leurs préoccupations. Si j'avais su qu'un
tel drame se profilait, en particulier au CHSLD Herron, je n'aurais jamais,
jamais, jamais laissé une telle situation se
produire. Notre gouvernement, le gouvernement de la Coalition avenir Québec, a
été capable de prendre ses responsabilités et d'admettre ses torts. Nous
avons toujours eu l'humilité d'ajuster le tir lorsque c'était nécessaire.
Souvenons-nous, Mme la Présidente, quelle était la
situation de nos CHSLD, à l'époque : un triste héritage de décennies de négligence et de mauvaises décisions.
Quand la coroner m'a posé la question à savoir si les CHSLD avaient été l'angle mort pendant la pandémie, je lui ai
répondu quelque chose comme ça, que les personnes aînées, ce peuple invisible
qui réside dans nos CHSLD, ce peuple est
l'angle mort, depuis des années, des différents gouvernements. Les
infrastructures étaient désuètes. Il
n'y avait pas de gestionnaire sur place, pas d'équipe en prévention et contrôle
des infections, pas de clinicien en
prévention et contrôle des infections. Il manquait beaucoup de main-d'oeuvre.
Entre autres, il manquait déjà 10 000 préposés
aux bénéficiaires. Pendant la pandémie, il manquait 10 000 préposés
aux bénéficiaires, il manquait des infirmières,
des infirmières auxiliaires, il manquait de tout. Les conditions de vie des
aînés hébergés avaient été négligées et mal organisées. On est responsables,
tout le monde, de ce qui s'est passé non seulement pendant la pandémie,
mais au cours des années antérieures, de ne pas avoir voulu améliorer les
conditions de vie des vulnérables dans nos CHSLD.
Souvenez-vous,
Mme la Présidente, en 2014, le fameux mandat d'initiative pour examiner les
conditions de vie des adultes hébergés
en centre d'hébergement et de soins de longue durée. Qui, Mme la Présidente,
d'après vous, a demandé cette
commission, cette commission parlementaire à la santé et aux services sociaux,
qui, Mme la Présidente? Les événements du
CHSLD privé Herron sont tragiquement devenus emblématiques de la COVID-19 au
Québec, mais aussi des problématiques
qui existaient déjà dans le réseau depuis longtemps, dans le réseau depuis
longtemps. Puis avec, aussi, les changements dans le réseau, avec ces
méga-infrastructures, c'est devenu encore plus complexe. Les communications
sont difficiles, descendent mal du haut vers le bas, on a oublié le
local, on a oublié le local.
Bien que le cas du CHSLD Herron relève d'une
séquence d'événements complexes, je réitère fermement, oui, j'ai été informée, le 30 mars, que la
situation était très inquiétante, car il n'y avait presque plus d'employés.
Mais nous étions rassurés parce que
l'établissement qui s'appelle le CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal nous
avait indiqué qu'il était pour
redresser la situation et former le personnel. Entre le 30 mars et le
10 avril, je vous l'ai dit à plusieurs reprises ici, dans ce salon bleu,
le 30 mars, il y avait 25 établissements où il y avait des éclosions,
et le 10 avril il y en avait 274. Oui, c'était urgent, Herron, mais c'était urgent aussi dans d'autres. Et, à
tous les matins, on regardait les tableaux des CHSLD avec les éclosions, et il n'y a rien qui indiquait
que c'était une catastrophe au CHSLD privé Herron, il n'y a rien qui indiquait ça. Je l'ai mentionné, les informations nous
provenaient des différents CISSS et CIUSSS, c'est comme ça que nous étions
capables d'alimenter nos tableaux. Entre le
30 mars et le 10 avril, je vous l'ai dit, que nous étions rassurés
que le CIUSSS soit en place pour prêter main-forte et aider à
circonscrire l'éclosion. Ce n'est véritablement que le 10 avril, suivant l'article paru dans la Gazette, que nous avons eu
le portrait réel de la situation. Jamais on n'a été informés de l'ampleur de la
situation qui prévalait au CHSLD privé Herron. Il aura fallu de nombreuses
interventions de la part d'avocats pour tenter d'obtenir la collaboration avec les propriétaires du CHSLD Herron, c'est
ce qu'on nous rapporte. Tout cela en vain, puisque c'est finalement par une lettre d'ordonnance de la
Santé publique qui nous aura permis de mettre en place une administration
provisoire de façon légale, ce qui s'appelle
une tutelle provisoire. Et, oui, on l'a fait pour le CHSLD Herron, parce qu'il
était privé, on n'a pas besoin de tutelle provisoire pour un établissement
public.
• (15 h 30) •
Il y a eu des
rapports, des enquêtes. On attend maintenant, Mme la Présidente, impatiemment
le rapport de la coroner. Nous avons entièrement collaboré à cette enquête, et
la coroner a entre les mains tous les documents pour faire la lumière
sur ce qui s'est passé. Malgré mon congé de
maladie pour épuisement professionnel, j'ai été témoigner devant elle. Je l'ai
fait pour les familles, je l'ai fait pour les proches des victimes et par
respect pour le travail de la coroner.
Maintenant,
il y a beaucoup d'attaques partisanes des collègues de l'opposition, qui
constituent, pour moi, un moment difficile.
Ce qui fait la force de notre gouvernement, Mme la Présidente, c'est qu'il y a
une équipe, ici, tricotée serré, et ce tricot serré fait en sorte que ce
n'est pas une personne unique qui est en mesure de tout faire, mais nos talents
sont partagés. C'est la même chose dans un
ministère de la Santé, nous sommes trois personnes, il y a un ministre en titre
et chacune, et chacun, nous avons nos
dossiers respectifs et on met notre talent à contribution avec les uns et les
autres. Notre gouvernement n'a jamais
eu peur de faire le travail, et je crois que notre agenda législatif et la
liste de nos réalisations en témoignent.
Mme la Présidente, la Loi visant à renforcer la
lutte contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité
ainsi que la surveillance de la qualité des services de santé et des services
sociaux vient renforcer le cadre
légal existant afin que les épisodes de maltraitance puissent plus facilement
être identifiés et corrigés. Cette
loi, nous y avons travaillé ensemble, avec les collègues des oppositions. Je
suis très fière qu'enfin on y retrouve tous les leviers juridiques, des sanctions et obligations de dénoncer. Nous
avons fait de ce projet de loi un rempart pour protéger toutes les personnes vulnérables, qu'elles soient
à domicile, en CHSLD, en RPA, en RI. Toutes les personnes qui seront protégées par cette loi, qu'elles soient connues
ou non des services de santé ou des services sociaux, elles auront maintenant
une porte, une oreille, de l'aide pour faire cesser les situations de
maltraitance.
La loi de
2017, adoptée par les libéraux, avait initié une démarche nécessaire et très
importante, Mme la Présidente. Force
est de constater qu'on a dû améliorer, une fois de plus, la pièce législative.
Et c'est correct, les lois évoluent dans le temps, et ce qui s'est passé fait en sorte qu'il fallait aller beaucoup
plus loin. Vous le savez, on l'a donné, le levier juridique aux CISSS et aux CIUSSS pour être capables de
faire immédiatement une tutelle provisoire. On l'a donné au ministère
de la Santé et des Services sociaux.
Alors,
les personnes âgées sont souvent en situation de vulnérabilité, que ce soit à
cause des problèmes de santé, de
perte d'autonomie ou parce qu'ils vivent une forme d'isolement. C'est aussi le
cas des personnes en situation de handicap physique ou intellectuel, qui doivent faire face à des situations très
complexes au quotidien. Des choses qui nous apparaissent banales se
révèlent pour d'autres de véritables défis, et ce, depuis longtemps.
Avec la
pandémie, cette situation déplorable a trop souvent été accentuée par l'aspect
aléatoire des vagues d'infection et
des éclosions. Si nous pouvons tirer un enseignement des deux dernières années,
c'est véritablement l'importance de resserrer un filet de sécurité
autour des personnes vulnérables. Nous devons le faire, nous, en tant que
parlementaires, mais toute la société doit
mettre la main à la pâte. On doit resserrer ce filet de sécurité auprès de nos
vulnérables. Il est plus que
nécessaire de s'assurer que toute personne, peu importe son milieu de vie, RPA,
aide à domicile, CHSLD, ait accès aux soins dont ces personnes ont besoin et
que leur intégrité morale et physique, de même que leur dignité, soit placée au
coeur de notre système de soins.
Parmi les
grands changements apportés à la loi de 2017, on peut noter que nous avons
raffermi l'engagement des gestionnaires
à prendre les moyens nécessaires pour mettre fin immédiatement aux cas de
maltraitance. Nous avons instauré des
mécanismes plus efficaces pour que les personnes en situation de vulnérabilité
qui ne reçoivent pas de soins appropriés puissent formuler une plainte ou un signalement. En ce sens, nous avons
prévu l'implantation d'un centre d'aide, d'évaluation et de référence en maltraitance pour faciliter le
repérage des cas problématiques et pour faciliter l'orientation des personnes concernées vers les acteurs appropriés. Nous avons
élaboré de meilleures politiques de lutte contre la maltraitance en précisant les instances responsables à l'intérieur
du réseau de la santé et des services sociaux tout comme à l'extérieur du
réseau. Comme je vous le mentionnais plus tôt, nous avons ajouté des leviers
juridiques.
Mon
implication politique a toujours été marquée par l'importance et le respect que
je porte à l'endroit des personnes aînées,
aux personnes sans voix et aux personnes qui nécessitent un soutien afin de
pouvoir vivre dans la dignité. C'est ça, mon pouvoir, Mme la Présidente.
Mon pouvoir, c'est de pouvoir faire avancer des dossiers de société.
Si je n'étais
pas au gouvernement, Mme la Présidente, est-ce que j'aurais été en mesure de
faire adopter une loi pour
reconnaître les personnes proches aidantes? Est-ce que j'aurais été en mesure
de pouvoir déposer la première politique d'hébergement, et de soins, et de services de longue durée? Si je
n'avais pas eu de pouvoir à l'intérieur du ministère de la Santé et des Services sociaux, est-ce que je
pourrais déposer prochainement le premier plan d'action en hébergement, en
soins et en services de longue durée? Si je
n'avais pas de pouvoir, Mme la Présidente, est-ce que je serais en mesure de
faire en sorte qu'il y ait plus de places d'hébergement?
Il y a actuellement 34 maisons des aînés et
alternatives, alternatives, oui, parce que ça découle de 2014, de la commission parlementaire pour examiner les
conditions de vie des adultes hébergés en CHSLD, oui, les jeunes qui sont
toujours avec des personnes âgées. 34
maisons, actuellement, sont en train de se construire partout, et un changement
de culture par rapport à donner des soins se met en place.
Mme la Présidente, si je n'avais pas de pouvoir
à l'intérieur du ministère de la Santé, est-ce que nous serions en train de lever un moratoire de 30 ans sur
les CHSLD privés, où on fermait les yeux, là, où on achetait des places au plus
bas soumissionnaire? On confiait des aînés
au plus bas soumissionnaire, alors que les employés étaient moins payés, un
salaire qui n'était pas celui des employés
des CHSLD privés conventionnés puis que des CHSLD du public. Nous avons
nationalisé un CHSLD, nous avons conventionné un CHSLD. Nous avons trois
projets pilotes qui arrivent à leur fin. Nous
sommes en train de conventionner des CHSLD pour faire en sorte que, nonobstant
l'endroit où est placée une personne âgée dans le réseau de la santé,
elle puisse obtenir la même qualité de soins et de services.
• (15 h 40) •
Mme la Présidente, nous sommes en train de
rénover des CHSLD. C'est inscrit au programme québécois des infrastructures. Nous allons le faire. Entre
autres, le CHSLD Saint-Augustin, ça faisait 25 ans qu'on nous promettait
de le rénover. On ne le faisait pas.
C'est tellement vétuste. Pendant la pandémie, Mme la Présidente, l'une des
choses très difficiles, parfois il y
avait deux ou trois personnes par chambre. On sait maintenant que le virus
contaminait énormément. Maintenant, on
veut donner des conditions de vie à ces personnes, où il y aura aussi des
mesures de protection contre les virus et les infections.
Alors, mes
actions, mes engagements, et j'achève : le 22 avril 2021, dépôt de
la première politique nationale sur les
personnes proches aidantes; bientôt, l'ouverture de la 11e Maison Gilles-Carle,
en Gaspésie, on est rendus à près de 130 lits
de répit, 130; bonification du crédit d'impôt pour les proches aidants, il a
doublé; ajout de près de 10 000 PAB en CHSLD; 10 millions pour la recherche sur la maladie d'Alzheimer;
100 millions pour améliorer, sur cinq ans, l'alimentation en CHSLD;
l'adoption du projet de loi n° 52 qui vise à
renforcer le régime d'examen des plaintes pour les commissaires à la santé et au bien-être et à la qualité des
services; l'adoption du projet de loi n° 56 qui reconnaît les
proches aidants; j'en ai parlé, le lancement de la première politique
d'hébergement. On a développé des projets en gérontologie et gériatrie
sociale, on va en développer un autre prochainement, il y en a un peu à travers
le Québec. En janvier 2022, 3,7 millions pour les CHSLD privés non conventionnés afin de consolider les postes
d'encadrement clinique et d'ajouter des postes de soutien administratif. Augmentation de plus de
3 milliards pour le soutien à domicile, au terme de notre premier mandat.
Soutien majeur aux milieux de vie pendant la
COVID. Modification de la loi contre la maltraitance. J'en parlais, il y a
34 maisons, mais nous allons en
construire 46. On s'était engagés à développer 30 maisons, pour
2 600 places. À l'automne, c'est
2 680 places. On rénove les CHSLD vétustes. La création et la mise en
place d'équipes de coordination à la proche aidance; le plan d'action en proche aidance; assurer la survie du Fonds
de soutien aux proches aidants. On ne cessait de me dire que le Fonds de
soutien aux proches aidants était pour disparaître. On me l'a dit, là, dans des
études de crédit, on me le répétait,
on me le répétait. Mais non seulement le gouvernement investissait
15 millions par année, il investit maintenant 25 millions par
année dans le Fonds de soutien aux proches aidants, et ça va toucher l'ensemble
des personnes proches aidante. La révision
de la certification des résidences privées pour aînés qui sera déposée prochainement.
La révision du soutien
à domicile, par des actions concrètes, dont le chèque emploi-service qui donne
des services directs et choisis par les usagers. On continue d'agir avec
bienveillance et avec la plus grande transparence dans l'intérêt des Québécois.
J'ai
des feuilles, ici, qui parlent de millions d'argent, mais je vais cesser de
vous dire ça, Mme la Présidente. Ce que
je veux dire, c'est que c'est un sujet très délicat, le sujet du CHSLD Herron.
Puis il y en a d'autres, CHSLD qui ont été
extrêmement touchés. Puis c'est vrai qu'il y a eu beaucoup de morts, au Québec,
beaucoup de personnes vulnérables dans nos
CHSLD. On ne veut plus que ça se reproduise. On veut surtout que la coroner
Kamel dépose son rapport. Elle a été en
mesure d'interroger toutes les personnes qu'elle souhaitait interroger.
Parfois, elle les a fait revenir une deuxième fois pour les contre-interroger. Elle a toutes les
pièces. Quand on me demande : Déposez les états de situation, la coroner a
les états de situation, la coroner a les courriels, la coroner a entendu
tout le monde. On va la laisser faire son travail.
Et,
en terminant, une fois de plus, je veux remercier le collègue, parce que c'est
vrai que c'est un sujet important. Mais
je vous dis très sincèrement que, si j'avais su le 6, le 5, le 9 qu'il se
passait quelque chose de si grave, il n'y a pas quelqu'un, dans un gouvernement, puis il n'y a pas trois ministres en
même temps qui auraient laissé faire une chose similaire, c'est
impossible. C'est impossible. C'est impossible, c'est trop tragique.
Encore
une fois, je veux offrir mes plus sincères condoléances aux familles, aux
proches, aux personnes qui sont prises avec ça. Je tiens à vous dire que
toute ma vie, pour le restant de ma vie, Mme la Présidence, je vais porter ce
souvenir très proche dans mon coeur, que, Mme la Présidente, je prends mes
responsabilités. Je l'ai dit souvent, je le réaffirme
solennellement aujourd'hui dans ce salon bleu, à l'Assemblée nationale, Mme la
Présidente, j'ai fait de mon mieux.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches
aidants. Et je vais reconnaître, maintenant, Mme la députée de Fabre.
Mme Monique
Sauvé
Mme Sauvé :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Dans un premier temps, je veux vraiment
remercier le collègue, le troisième chef de
l'opposition. Bien sûr que nous sommes en plein appui avec la proposition de
cette motion du mercredi. Je veux
souligner aussi la présence et la participation à tout ce questionnement que
nous avons et qui légitime mon
collègue de Marquette... qui, dès le début et à travers toute cette crise, a
été présent, présent sur le terrain, présent au CHSLD Herron, et je veux
le remercier très sincèrement.
Mme
la Présidente, je suis vraiment en réaction à entendre ce que la ministre nous
présente aujourd'hui : le bilan, son
bilan politique, alors qu'on est en train de parler de 47 décès dans des
situations inimaginables, complètement inhumaines. C'est de ça dont il est question. La motion du
mercredi, c'est le rappel de ces décès, c'est la situation d'horreur, c'est les
faits éloquents qui sont sortis depuis deux
semaines et c'est l'obligation de ce gouvernement d'assumer les responsabilités...
de chacun des ministres, qui sont les leurs,
et de demander, de façon obligatoire, enfin, une enquête publique indépendante.
La ministre a
dit : Je vais vous présenter comment je l'ai vécu. Laissez-moi vous
présenter comment les aînés ont vécu
l'horreur. Et je ne suis pas en train de faire du sensationnalisme, je suis en
train de rappeler les faits. Alors, vous me permettrez, Mme la Présidente, de lire un texte très dur, très dur,
de ce livre 5060 : «L'odeur s'engouffre dans l'ascenseur
dès l'ouverture des portes, une odeur d'excrément et d'urine mêlée à celle de
la nourriture qui rancit. Nous sommes au
CHSLD Herron, le 29 mars 2020.
Martine Daigneault, qui est la
directrice adjointe au soutien à l'autonomie des personnes âgées au CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal,
vient d'y mettre les pieds pour la première fois de sa vie. Elle s'attelle à
donner le souper à des pensionnaires. Elle s'assoit devant un premier résident.
Elle ne trouve aucun plan de soins. Impossible de savoir s'il peut manger de la
nourriture en morceau sans s'étouffer. Dans les plateaux, le pâté chinois est tellement
froid qu'il est difficile d'en prendre avec
une fourchette. Mais ça ne fait rien, les bénéficiaires n'ont pas faim, ils ont
soif. Ils ont la peau, la bouche et les lèvres complètement desséchées.
"J'ai vu des résidents boire deux, trois verres d'eau et nous embrasser
les mains par-dessus les gants pour nous remercier. Ils ont soif, et pas juste
depuis aujourd'hui."
«Dans
une chambre, un homme âgé est assis sur son lit. Il est tout bien habillé en
chemise et en pantalon de sortie. Sous lui, un cercle d'urine est devenu noir
tellement cet homme s'y trouve depuis longtemps. Son pantalon est souillé.
Le matelas est fissuré et imbibé d'urine. L'infirmière déshabille l'homme, elle
le lave, elle le change. Pour le matelas, il n'y
a rien à faire. Elle bute sur le même problème dans les chambres suivantes.
Elle trouve de la poudre pour assécher les matelas. La majorité des résidents n'avaient pas de savon. Pour la
plupart, ils étaient pleins d'urine et de selles. Il y avait de la pâte en quantité trop épaisse. Quand on
essayait d'enlever ça, on risquait d'enlever de la peau. C'était brûlé. Pendant
des jours, des soignants envoyés en renfort continuent de décrire des
situations catastrophiques. Les décès s'accumulent jusqu'à la fin d'avril. Le
bilan grimpe à 31 le 10 et à 47 le 1er mai.
«Que
s'est-il passé pour que des aînés continuent de mourir dans des conditions
inhumaines et dégradantes? La coroner
Géhane Kamel dira : "J'ai
l'impression que, depuis le
27 mars, la maison est en train de brûler et qu'aucun pompier n'est
arrivé avant la mi-avril."»
• (15 h 50) •
Ce sont les faits.
Voici comment les aînés et les familles, aujourd'hui, vivent cette horreur.
Et
aujourd'hui, aujourd'hui, après deux semaines, je n'entends aucune
responsabilité ministérielle. C'est la faute de tout le monde, la pandémie à
travers la planète, et bien sûr on ignore le bilan et l'horreur du CHSLD
Herron. La ministre a dit ceci :
Si j'avais su. Ça fait deux semaines qu'on le sait, qu'elle savait. On le sait,
trois ministres le savaient. Le premier ministre, le 30 mars, savait qu'il y avait une
situation importante de personnel, et elle nous dit, encore aujourd'hui, malgré
les faits, malgré les faits qu'entre le 29 mars où... il y a eu ce
courriel d'urgence, ces S.O.S. envoyés qui disaient qu'il n'y avait plus personne pour s'occuper des résidents, de
tous les résidents du CHSLD Herron, et ensuite l'article d'Aaron Derfel, et
j'en reparlerai, dans le Montreal Gazette le 10 avril, dans cet espace-temps, si elle l'avait su. Mme la
Présidente, elle le savait le 30, son cabinet était avisé :
Urgence. Urgence. S.O.S.
Et là je peux vous décliner encore,
entre le 30 mars et le 7 avril, tous les drapeaux rouges, tous les
drapeaux rouges à son cabinet à
elle : le 4, un rapport dévastateur du CIUSSS qui rappelle l'horreur du
CHSLD Herron; le 7, sa chef de cabinet dit : Encore, encore et toujours,
les résidents ne sont toujours pas en sécurité. Combien de drapeaux rouges
faut-il qui soient levés pour qu'elle
n'ait pas compris qu'il fallait agir? Les mots de la ministre
aujourd'hui : Il fallait agir et agir vite. Comment la ministre peut-elle dire cela, alors qu'il y aura eu
besoin de tout ce temps, tout ce délai, alors qu'elle savait, alors que
les drapeaux étaient levés, alors qu'il n'y a eu aucun suivi?
L'excuse
depuis deux semaines, Mme la Présidente, c'est : Oui, mais le CUISSS a
pris sous tutelle, a pris en charge. Mme
la Présidente, là, dans tous les univers du monde, quel que soit le secteur,
arrive une crise, quelqu'un s'en charge, on fait un suivi, on fait des suivis, et à tous les jours. Il est question
de vies humaines, il est question de situations inhumaines, et on ne fait aucun suivi, et on dit :
Parfait, il y a quelqu'un qui s'en occupe. C'est inimaginable. Et, vous le
voyez, aujourd'hui, là, je suis entre
la colère et l'émotion. Je ne peux pas entendre ce que j'entends. Et ce que
j'entends depuis deux semaines : aucune,
aucune reconnaissance de la responsabilité ministérielle qui englobe non pas
seulement la personne, la ministre, mais
l'ensemble des fonctionnaires. Et le suivi qui était absolument obligatoire, il
ne s'est jamais fait. On a abandonné ces aînés dans le CHSLD Herron tels
qu'ils ont été... tels qu'ils ont vécu.
Je veux rendre
hommage aux auteures du livre, les trois journalistes, mais je veux rendre
hommage aussi à Aaron Derfel, du Montreal Gazette, qui a levé le drapeau, qui a nommé l'horreur et qui a fait bouger les
choses par son article, par son professionnalisme. Il aura fallu
l'article pour qu'il y ait quelque chose qui se passe, mais ça faisait plus de
10 jours que tout le monde savait, tout le monde imputable, ministres,
rien ne bougeait. Il aura fallu son article. Merci, M. Derfel. Merci, Thomas Gerbet, de Radio-Canada, qui a levé le
voile sur des faits qui nous ont appris, entre autres, que les ministres savaient depuis une dizaine de
jours. Merci à lui d'avoir aussi apporté une parcelle de lumière et de vérité
dont ont tellement besoin les
familles qui vivent encore le deuil. Parce que, ces familles, là, ce qu'elles
apprennent, c'est qu'il n'y a rien
qui a été fait, il n'y a pas de réponse et il n'y a personne qui n'est
responsable de rien. Ce gouvernement se protège lui-même plutôt que d'avoir protégé les aînés. Ils ont été abandonnés,
ils ont été complètement abandonnés. Les faits, ils sont là, les signaux
ont été là.
Et,
quand on nous dit : On attend le rapport de la coroner, on le sait, la
coroner a fait un travail exceptionnel, elle aura un rapport très certainement excessivement, excessivement éloquent.
Mais on a eu beaucoup de rapports, on attendra celui-là, rappelons-nous, rapport des Forces armées canadiennes, la Protectrice du citoyen, Commissaire à la santé, et les enquêtes,
les témoignages devant la coroner. Il viendra, le rapport.
Et,
malgré tout ça, malgré tout le travail immense, le CHSLD Herron, l'horreur, on
apprend que tout le monde savait, puis il n'y a personne qui a agi. On s'est
contentés de dire : Quelqu'un s'en occupe, quelqu'un s'en occupe, là,
c'est correct, c'est O.K., c'est O.K.
Moi, c'est épouvantable, c'est une crise humanitaire, le CHSLD Herron, dans la
crise humanitaire de l'hécatombe.
Et
moi, je n'accepte pas que ce gouvernement se dise : Bien là, c'est dur,
là, on a des questions, et tout ça. Savez-vous quoi, Mme la Présidente, je vais continuer à poser des questions tant
qu'il n'y aura pas de réponse pour ces familles. Je vais continuer à le
faire avec toute ma sincérité parce qu'encore aujourd'hui il n'y a pas de
réponse. Alors, oui, si c'est de l'attaque
partisane, là, bien, je m'excuse, mais moi, je suis en train de porter la voix
des familles qui vivent le deuil et je
continuerai à le faire. Parce que, Mme la Présidente, les véritables victimes,
ce sont les 47 aînés, et leurs familles, qui sont décédés au CHSLD Herron. Les véritables
victimes, ce sont les 5 060 aînés qui sont décédés durant les deux
premières vagues de l'hécatombe dans les CHSLD.
Et,
tant qu'on n'aura pas eu tous les éléments de lumière, on n'aura pas les
réponses à donner à toutes ces familles, on ne pourra pas retrouver la dignité dont ont tant besoin nos aînés au
Québec après tout ce qu'ils ont vécu. Les véritables victimes, ce sont
les aînés décédés dans des situations atroces, et il faut continuer la lutte,
il faut continuer à demander à comprendre
parce que, présentement, tout ce qu'ils ont devant eux, c'est les versions
contradictoires. Il y a une équation mathématique très simple, Mme la
Présidente. Impossible d'avoir, devant une contradiction, deux vérités. Ça,
c'est mathématiquement, là, impossible.
Quand on a une contradiction, il y a une vérité, et, l'autre, je ne nommerai
pas le mot parce que ce n'est pas parlementaire. Mais c'est ça, la
réalité. Les victimes, ce sont les aînés.
Alors,
on a eu beaucoup d'éclairage, et merci à tous ceux qui apportent cet éclairage
et le grand travail. Mais, même avec l'enquête et le grand travail de la
coroner, nous n'aurons pas toutes les réponses pour les
5 060 familles, nous n'aurons
pas les réponses à rendre hommage aux 5 060 aînés qui sont décédés
dans nos CHSLD. Alors, il faudra, oui, il faudra véritablement qu'on ait une enquête publique indépendante.
Jean-Paul Sartre disait : «Plus claire la lumière, plus sombre
l'obscurité.» Il faudra que cette obscurité qui émerge, elle donne la vérité.
Mme la Présidente, je
vais terminer avec un extrait, encore, de ce livre. Je vais lire un extrait de
la préface de M. Arcand, et ça se lit
comme suit : «Le fait que plus de 5 000 aînés québécois aient
été emportés par la COVID-19, dont plusieurs
sont morts affamés, déshydratés, souillés et abandonnés, c'est une tragédie, et
nous devrions avoir honte. Pourtant, le gouvernement du Québec refuse de
créer une commission d'enquête publique pour faire la lumière sur ce drame. Il
l'aurait fait dans n'importe quelle autre circonstance aussi sordide.»
Mme
la Présidente, les victimes ont besoin qu'on leur rende hommage, et pour ça
nous avons besoin de donner des réponses aux familles. Merci beaucoup,
Mme la Présidente.
• (16 heures) •
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Là, je vois qu'il y a deux intervenants qui
sont debout.
Une voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, mais d'habitude je donne la chance à toutes les formations
politiques d'intervenir, puis ensuite, quand il reste du temps, je fais ça.
Mais c'est à vous de décider lequel des deux va prendre la parole. Merci
beaucoup. Alors, M. le député de Jean-Lesage, vous disposez d'un temps de
parole de 10 min 31 s.
M. Sol
Zanetti
M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. Alors, évidemment,
Herron, c'est une vraie honte nationale, une honte qui implique beaucoup de monde. La ministre de la
Santé de l'époque, la ministre des Aînés et la sous-ministre Natalie Rosebush, Pascale Fréchette, Lynne McVey, les propriétaires
de Herron, le premier ministre, chacun se renvoie la balle. On pourrait ajouter les gouvernements précédents. Tel courriel
a été envoyé à telle date, tel ministre a hurlé pour se faire entendre le
29 mars, le 7 avril, appel au
9-1-1. Tout est rendu tellement emmêlé, évidemment que ça nous prend une
enquête pour aller au fond de toute
cette histoire-là et de l'ensemble de la gestion de la pandémie, pas seulement
ce qui s'est passé à Herron.
Mais moi, j'ai envie de parler d'autre chose
aujourd'hui, parce que ce qui s'est passé à Herron ne doit pas nous faire perdre de vue les vraies causes de tout ça,
les causes lointaines. Le sort de Herron, ce n'est pas seulement... ne s'est
pas seulement joué en mars et en
avril 2020, le sort de tous les autres CHSLD privés non plus d'ailleurs.
Cette tragédie du printemps 2020,
c'est une répétition générale depuis... de ce qui se propage... de ce qui se
préparait, je dirais, depuis 20 ans, et ça, c'est à cause, entre autres, de l'inaction de gouvernements
successifs qui ont laissé un système de santé complètement affaibli et à
terre, incapable de relever le défi d'une pandémie mondiale.
Si on remonte
20 ans en arrière, qui ont été nos ministres de la Santé? De 2002 à 2003,
il y a l'actuel premier ministre. De
2003 à 2008, c'était Philippe Couillard. De 2008 à 2012, Yves Bolduc. 2012 à
2014, Réjean Hébert. 2014 à 2018, le député de La Pinière. 2018 à
2020, la députée de Sanguinet. Et depuis 2020 : le député de La Prairie.
Depuis
20 ans, les rapports sur les conditions de vie des aînés ramassent la
poussière sur les tablettes des ministères. L'AREQ, donc l'association des
retraités en éducation du Québec, a recensé 17 rapports contenant 153 recommandations
pour remédier aux lacunes et améliorer les
services aux soins des aînés depuis 20 ans. À peine 10 % des
recommandations ont été réalisées.
20 ans, 17 rapports, 153 recommandations, 10 % mises en
place, ça en dit long sur la place qu'ont occupée les aînés dans nos
préoccupations collectives, ou, je dirais plutôt, celle des gouvernements dans
les 20 dernières années. C'est là que s'est préparé ce qui s'est passé à
Herron, et c'est de ça qu'il faut tirer des leçons absolument.
Soins à
domicile, résidences privées pour aînés, CHSLD et maltraitance, personnes
proches aidantes, tous ces thèmes ont
été discutés et réfléchis en masse, et les gouvernements n'ont pas fait ce
qu'il fallait. Il y a eu des annonces, il y a eu des petites choses, mais, manifestement, on n'était pas prêt. Pourtant,
on sait depuis longtemps qu'on fait face à un vieillissement de la population qui s'accélère. Ça n'a tout
simplement pas été pris au sérieux par les gouvernements des 20 dernières
années. Il y a quelque chose de
prévisible, d'extrêmement prévisible dans l'évolution démographique. On le
savait. La proportion des personnes
âgées de 65 ans et plus, sur la population totale au Québec, a atteint
18 % en 2016, comparativement à 12 % en 1996. Et, selon les prévisions de l'Institut de la statistique du
Québec, près d'une personne sur quatre aura 65 ans et plus en 2030. Ce sera trois personnes sur 10 au
Québec en 2066. Il faut absolument changer de paradigme. Imaginez notre incapacité actuelle à aider tout le monde à quel
point elle va être décuplée dans quelques années s'il n'y a pas un changement
radical qui est fait. Et tout ça, ça prend énormément de volonté politique.
Après l'hécatombe du printemps 2020 dans les
CHSLD, la ministre des Aînés s'est engagée à conventionner tous les CHSLD
privés non conventionnés. Deux ans plus tard, où est-ce qu'on en est? C'est quelque chose qui n'avance pas
rapidement, et la situation est extrêmement pressante.
Quand les résidents de la résidence privée pour aînés,
c'est autre chose, Mont-Carmel se sont fait annoncer par huissier qu'ils se feraient mettre dehors de leur
résidence privée pour aînés parce qu'elle venait de se faire racheter par un
groupe immobilier, bien, nous, à Québec solidaire, on s'est mis en action. On a organisé une assemblée avec les aînés, on
a fait des propositions au
gouvernement pour mieux les protéger. Je suis même allé voir la ministre des
Aînés en personne pour lui proposer d'inclure des propositions dans le
projet de loi n° 101 sur la maltraitance des aînés. Nos amendements n'ont pas été acceptés. Il y a eu des amendements
proposés par la ministre pour adoucir un peu la chute, adoucir le drame que vivent ces personnes-là, mais ces
adoucissements-là du drame et de la chute n'enlèvent pas non plus le drame, la
chute et l'injustice.
Il y a
quelque chose là qui est à réformer profondément, et on sent qu'il n'y a pas,
jusqu'ici, là — et
ça, c'est... je suis vraiment clément en disant «jusqu'ici» — de
volonté dans l'ensemble du gouvernement de venir dire : Au Québec, ça ne se passera plus, ça ne se passera plus, des
aînés menacés par la cupidité d'investisseurs immobiliers qui pensent juste à
l'argent quand ils achètent une RPA puis qu'ils veulent transformer ça
en condos de luxe. C'est la liberté du marché. C'est ça qu'on a choisi comme
société. Et ça, ça va rester comme ça.
Il y a un
problème, là. Ce n'est pas vrai que c'est intouchable, ça. Ce n'est pas vrai
qu'on ne peut pas empêcher le drame
de Mont-Carmel et le drame de RPA qui se font convertir comme ça. On peut faire
quelque chose, il n'est absolument pas
trop tard, et on pourrait même agir dès la fin de la législation. Il y a des
choses qu'on peut faire. Moi, je suis très ouvert à collaborer avec la ministre responsable des
Aînés et la ministre responsable de l'Habitation aussi pour qu'on mette en
place des solutions pour mettre les aînés du
Québec à l'abri de la cupidité des investisseurs immobiliers sans scrupules qui
font ce genre de choses là, parce que, quand on décide de ne pas agir, on le
cautionne et on se rend complices, comme législateurs,
de ces drames humains là qui n'ont aucun bon sens. Déraciner quelqu'un qui est
dans une résidence privée pour aînés,
qui a 80 ans et plus puis qui pensait faire là le reste de ses jours,
c'est inacceptable. Ça a quelque chose de cruel. Et déraciner cette
personne-là pour ensuite lui dire : Trouvez-vous une autre place dans une
place qui va peut-être coûter 1 000 $ de plus, des fois bien plus, ou
qui va nécessiter, pour rentrer dans son budget, là, qu'elle change de région,
en déracinant peut-être du contact avec sa
famille ou avec les gens dont elle est proche, c'est vraiment quelque chose
d'inacceptable.
Pour Herron
et la pandémie, il faut une réelle enquête publique. C'est sûr qu'elle va avoir
lieu, c'est une question de temps. Le
gouvernement aussi le sait. En ce moment, on sent qu'ils veulent gagner du
temps parce que les élections arrivent, mais tout le monde sait que ça va arriver. Moi, ce qui m'inquiète le
plus, c'est l'attitude du gouvernement de la CAQ depuis deux ans, parce qu'on dirait que, globalement, là,
sur le fond, les choses ne changent pas. On ne va pas... On n'est pas en
train de relever le défi de
l'augmentation... des changements démographiques qui sont devant nous et on
n'est pas en train de s'adapter au marché puis aux nouvelles tactiques de rénovictions qui
touchent aussi les aînés. Et ça, pour moi, ça me dérange parce qu'on va être encore en train de parler de choses comme ça
dans quelques années s'il n'y a rien qui est fait maintenant.
Pour
ce qui est des CHSLD privés, ce qu'il faut, c'est les nationaliser, c'est de
faire en sorte qu'ils soient publics, parce
qu'il n'y a pas d'argent à se faire avec ça. Ça ne sert personne de dire :
On va laisser au marché le soin de donner ces soins-là, qui sont essentiels. Quand quelqu'un arrive en CHSLD, là, ce
n'est pas du luxe, ce n'est pas un choix personnel, ce n'est pas quelque chose qu'il fait ou qu'il
aurait pu ne pas faire, c'est parce qu'il est contraint à le faire. Et donc
c'est un soin essentiel, c'est un
service public, et ça devrait être fait avec les plus hauts standards de
qualité, de manière accessible, et ça
devrait être disponible pour tout le monde qui en a besoin. C'est ça, une vraie
société qui est solidaire, et je suis persuadé que c'est faisable.
Il va nous falloir
tirer des leçons de la pandémie, évidemment, des leçons sur quelle place le
privé doit prendre dans le système de santé,
quelle place le privé doit prendre dans l'hébergement des aînés. Je pense que,
si on ne tire pas ces leçons-là et si
on ne fait pas un changement de cap extrêmement important, les tragédies qu'on
va voir, on va les voir se répéter dans les années à venir et on va
tous, comme société, en porter la responsabilité. Merci, Mme la Présidente.
• (16 h 10) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je
vous remercie, M. le député de Jean-Lesage. Et maintenant je cède la
parole à Mme la députée de Repentigny.
Mme Lise
Lavallée
Mme Lavallée : Mme la Présidente, je
vais vous donner un exemple à partir du cas de ma mère. Quand mon père est
décédé, c'est moi qui allais magasiner avec ma mère, lui acheter des vêtements,
ce que mon père faisait. Il aimait toujours qu'elle soit bien habillée.
Et, quand j'allais avec elle dans des magasins, on rentrait, il y avait
toujours un employé qui disait :
Bonjour, ma petite madame. C'est ça, le regard qu'on porte aux aînés, «ma
petite madame». Et là j'ai réalisé
que, quand on vieillit, on rapetisse physiquement, mais aussi dans le regard de
l'autre jusqu'à devenir invisible. Ça reflète un peu le regard que la
société porte à cette étape de vie, à ces personnes qui atteignent un âge vénérable.
Pour
les organisations, les aînés, ça se résume à des lits qu'on doit libérer, à des
personnes qu'on a déplacées. Où, quand,
comment? On s'en fout. Est-ce que ça fait l'affaire des familles, des proches
aidants? On s'en fout. Je suis certaine qu'ici à l'Assemblée nationale tous les
députés ont eu la visite de conjoints, de familles pour venir partager ce
qu'elles vivaient avec des personnes
proches d'elles qui étaient placées dans un CHSLD privé, non... public, mais
souvent privé, privé non conventionné.
Je
ne lirai pas un extrait du livre qui est sorti récemment, mais je vais vous
raconter des histoires que j'ai entendues. Un enfant qui va voir sa mère un après-midi, en fin d'après-midi, vers
15 heures. La première chose que sa mère lui dit : J'ai envie. 15 heures. L'enfant lui
demande : Depuis quand tu as envie? Depuis ce matin. Il n'y a personne qui
est venu te voir? Non. L'enfant pèse
sur un bouton, panique, parce qu'on ne peut pas lever la personne seuls. Elle
n'a plus de motricité, rien. L'employée
finit par passer. L'enfant dit : Ma mère a envie depuis ce matin. Est-ce
que quelqu'un peut venir l'aider? L'employée
la regarde : Je m'excuse, je n'ai pas le temps, j'ai trop d'ouvrage. Puis,
elle repart. L'enfant a dû apporter sa mère à la toilette avec beaucoup,
beaucoup de force, puisque la personne n'en avait pas. Tout était
mouillé : le pantalon, la couche débordait, les bas étaient mouillés, les
souliers étaient mouillés, la chaise roulante était mouillée.
Un
autre cas, une famille qui va voir sa... l'aînée dans une résidence, ouvre la
porte de l'unité. En ouvrant la porte, l'odeur
de merde et de pisse. C'est beaucoup. Ça envahit l'unité. Un autre parent, qui
accompagne son aîné au repas dans une
grande salle à dîner, s'assoit, attend le repas. Pendant l'attente, on entend
un aîné qui dit : J'ai envie, madame. J'ai envie, madame. Madame, j'ai envie. La préposée qui lui
répond : Je n'ai pas le temps, il faut que je fasse le service, fait dans
ta couche, je vais te changer après.
Ça,
c'est des histoires avant la pandémie. Il y avait des problèmes
organisationnels avant la pandémie. La pandémie n'a fait que d'exacerber, mettre une lumière crue sur des horreurs qui
existaient déjà. Naturellement que la pandémie, il y a eu un virus qu'on ne pouvait pas contrôler. On a
créé des mégas CISSS. Chez nous, dans ma région, on a fusionné l'hôpital du
Lanaudière-Sud avec l'hôpital du Lanaudière-Nord. Une gestion. On couvre la
période de Mascouche, Terrebonne, Repentigny,
jusqu'à Manawan, Saint-Zénon. Super! Et là il faut gérer les aînés. Qu'est-ce
que ça veut dire quand on crée ce système-là? Je le sais, on a des
appels constamment à mon bureau. Un aîné qui vit à Repentigny, qui doit être
placé dans un CHSLD, on va lui trouver une
place libre à la grandeur du territoire. On va l'envoyer à Rawdon, on va
l'envoyer à Saint-Jean-de-Matha. Les gens nous appellent, il y en a qui
disent : Ça n'a pas de bon sens! Un conjoint qui est déjà lui-même un aîné va dire : Moi, j'aime mieux
m'occuper de mon conjoint, je vais aller la visiter souvent, mais je ne peux
pas aller aussi loin que ça. Puis là il faut se tirailler avec l'organisation.
C'est
ça, la réalité. On peut bien vouloir en discuter, de reparler de tout ce qui
s'est passé, c'est une horreur, ce qui s'est passé à Herron. Est-ce qu'il y
avait des problèmes avant? Il faudrait le savoir. Est-ce que cette résidence-là
avait eu les agréments qui avaient
été renouvelés? Est-ce qu'on avait bien vérifié comme il faut? Est-ce qu'il y
avait des problématiques avant? Ce
n'est pas apparu du jour au lendemain. Peut-être que oui, peut-être que non.
Pourquoi des employés sont disparus tout d'un coup? C'étaient quoi, les
conditions de travail?
Donc,
on peut bien vouloir critiquer la ministre, mais elle ne peut pas être
responsable des problématiques à la base. Ces problématiques-là, je les
entends, vous les entendez, tout le monde les entend ici. Les problèmes étaient
là avant. Les aînés, ça ne parle pas.
On en parle quand il y a des histoires comme ça, des horreurs comme ça, sinon
on se ferme les yeux.
Moi, je les
ai entendues. Ça me choque, mais ça me choquait même avant la pandémie. Ça me
choquait d'entendre ces histoires-là. Ça me choquait de la façon dont on
traitait les aînés. Ça me choque tellement que, si moi, je le sais que je risque de me retrouver là, je préfère
prendre une petite pilule puis arrêter ça là. Je n'ai pas envie d'être l'autre
côté.
On
dit qu'on respecte les aînés, on se préoccupe des aînés. La ministre des Aînés,
je suis allée la chercher, je l'ai recrutée. C'est ça qu'elle voulait,
s'occuper des aînés. C'était sa mission. Elle s'en est occupé. Elle ne pouvait
pas tout contrôler. Personne ne
connaissait la pandémie, personne ne connaissait le COVID, personne ne savait
les dommages que ça ferait, mais ça a fait ressortir des problématiques
qui étaient là bien avant, bien, bien avant.
Je pense que,
quand on parle de responsabilité ministérielle, il faut parler aussi de la
responsabilité organisationnelle, mais
la responsabilité qu'on porte, chacun de nous, face à nos aînés. J'étais sur la
commission Laurent. On a parlé aussi de
la responsabilité individuelle de tout le monde pour s'occuper des enfants,
pour les protéger, mais c'est la même chose pour les aînés. On doit s'en préoccuper tout le temps. On a beau écrire
des livres, les histoires d'horreur, j'en ai entendu, elles ne sont pas
dans des livres, mais elles existent.
• (16 h 20) •
Donc, tout à
l'heure, le député des Îles-de-la-Madeleine disait qu'on n'aurait jamais connu une
catastrophe aussi importante. Je
l'invite à écouter La grippe espagnole — La grande tueuse, qui a passé à Télé-Québec. C'est du copier-coller avec notre histoire. Dans ce documentaire-là, on
parle des gestes barrières inexistants, consignes sanitaires très limitées,
promiscuité dans les transports et l'espace public, le virus mutant, les
hôpitaux débordés, décès en cascade, les malades en sale état, les médecins hagards. On parle qu'on
préconise le lavage des mains, la distanciation sociale. C'est du copier-coller.
Oui, ça a déjà existé, du copier-coller.
50 millions de morts à la grandeur de la planète. On essaie de régler les
choses, mais on fait face à un virus qu'on ne connaît pas. Mais, quand on dit...
on veut faire porter la responsabilité de comment on traite nos aînés, j'aimerais qu'on se rappelle de tous
les gens qui viennent témoigner à nos bureaux, de tous les gens qui nous appellent pour nous soulever les problèmes, à
toutes les semaines, concernant la maltraitance de nos aînés. La maltraitance,
elle est partout tout le temps. Donc, ce
n'est pas quand arrive une crise comme ça qu'il faut s'en préoccuper. Oui, il
faut le reconnaître, il faut
reconnaître notre responsabilité, puis je pense que le premier ministre l'a
fait, la ministre des Aînés l'a fait,
on l'a tous fait, mais il faut s'en préoccuper à l'année longue, à tous les
jours. Ça s'applique aux enfants vulnérables, ça s'applique aux aînés
vulnérables. Pour moi, c'est ça, notre responsabilité. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Repentigny. Et maintenant je vais céder la parole à M. le
député de Marquette. Et votre formation politique dispose d'un temps de parole
de 15 min 24 s.
M. Enrico Ciccone
M. Ciccone : Merci, Mme la Présidente. Il y a de ces moments qui sont difficiles.
C'en est un aujourd'hui. C'est un
privilège, vraiment, c'est un privilège d'être capable, dans notre société qui
est la nôtre, le Québec, d'avoir un salon bleu où les gens te font confiance, où on est capable de se lever, on est
capable de prendre la parole, où tout ce qu'on dit, nos écrits vont rester, et
nos dire vont rester également. Ça, c'est un privilège. Et souvent on espère et
on veut se lever parce qu'on a des
choses à dire. Nous avons le rôle d'intermédiaire, comme député, nous avons un
rôle d'amener la problématique, les
enjeux dans notre comté ici, dans ce beau salon bleu, dans notre démocratie,
pour être capables de l'améliorer, d'améliorer le sort des gens qu'on
représente. Mais aujourd'hui la prise de parole que je suis en train de faire,
j'aurais aimé ça ne pas la faire.
J'écoutais un peu plus tôt la députée de Fabre,
ma collègue, qui est venue me chercher énormément parce que... Et je vous dirai, bien honnêtement, j'ai commencé
à lire le livre, je n'ai pas été capable de le finir, c'était impossible.
Pourquoi? Parce que, la journée du
10 avril 2020, qui était, soit dit en passant, le jour de mon
anniversaire, mon cinquantième anniversaire, où je franchissais quand même une étape importante dans ma vie, ça a été
la pire journée de ma vie. Ça a été la pire journée de ma vie, mais jamais aussi pire que les gens,
les victimes du CHSLD Herron et de d'autres CHSLD, des familles également.
Ça a été une dure journée pour moi, mais jamais autant que les leurs.
Cette
journée-là, il est à peu près, si je ne me trompe pas, 6 heures,
6 h 45, Mme la Présidente. Je reçois un coup de téléphone qui m'annonce qu'on vient de
découvrir 32 décès chez Herron depuis les deux dernières semaines.
Immédiatement, immédiatement, l'homme
que je suis, de la façon que j'ai été élevé, l'instinct protecteur qui m'a déjà
mis, soit dit en passant, dans le
trouble, Mme la Présidente, mais ce n'est pas grave, je vais vivre avec elle,
mon instinct protecteur a pris le dessus. Mais, en même temps, de la façon que j'ai été élevé, au niveau de
l'analyse, je me suis dit : J'ai-tu manqué quelque chose? Qu'est-ce que j'aurais pu faire de plus? Qu'est-ce
que j'aurais pu faire de mieux? Alors, immédiatement, qu'est-ce que tu
fais? Tu te mets en action. Tu te mets en action.
Aux petites
heures du matin, Mme la Présidente, je suis embarqué dans ma voiture, j'ai
mobilisé. Le soir même, là, c'était
rencontre statutaire avec mon équipe. On se met en action. On est en crise
présentement. On fait quelque chose puis on se garde prêts. Transfert de
téléphone au bureau sur les téléphones de mes employés, de mes collègues, pour
être capable d'absolument, mais absolument
ne rien manquer. Aux petites heures du matin, on se dirige à Herron. Bien
entendu, les policiers, crimes
majeurs, de la ville de Montréal qui est là... sont là, et il y a un ruban
jaune qui est là parce qu'on est en enquête.
Ce sont les crimes majeurs qui sont là. Mais il n'y a pas juste les policiers,
Mme la Présidente, il y a les familles qui sont là. Il y a les familles
qui attendent, qui sont angoissées, qui pleurent, qui ne savent pas où donner
de la tête. Ils n'ont pas de réponse. Et
moi, j'arrive sur les lieux, je me présente à tout le monde. Qu'est-ce que je
peux faire pour vous? Je sais qu'il n'y a pas grand-chose que je peux
faire. Je ne peux pas vous enlever votre douleur présentement, là, mais
qu'est-ce que je peux faire pour vous? Mais on aimerait ça savoir telle chose,
telle chose, telle chose.
Je souligne
par le fait même la grande collaboration des policiers qui étaient sur place à
la ville de Montréal, parce qu'ils me
permettaient d'aller en dessous du ruban pour protéger une scène de crime — ce
n'était pas une petite enquête, Mme
la Présidente, là, c'était une scène de crime — qui me laissaient passer sous le ruban pour aller
voir, pour aller leur poser des
questions. Je revenais, je posais des questions, je revenais avec l'information
du mieux que je pouvais avec les familles
qui étaient là. Et ça, ça a continué, Mme la Présidente, pendant plusieurs,
plusieurs jours, là. On essayait d'avoir de l'information, ce n'était pas évident. On ne
veut pas parler parce que, justement, c'est devenu judiciarisé, alors on fait
très attention à ce qu'on dit du côté des
policiers. J'étais en contact avec mon commandant du PDQ 5, poste de
quartier 5, que je salue en
passant, qui a été d'une aide extraordinaire pour me garder au courant. Il y
avait les éléments confidentiels, il
y avait les éléments confidentiels également, mais, en même temps, il me
donnait le plus d'informations possible, que je puisse transmettre
l'information aux familles qui étaient là, endeuillées, mais, en même temps, on
se posait la question : Est-ce que le
prochain sac noir qui va sortir, ça va être un membre de ma famille? Imaginez-vous,
là, l'anxiété, l'angoisse, la crainte, la peine, la peur. C'était ça,
cette journée-là.
La
députée de Repentigny le disait tantôt : Oui, mais il y avait des
problèmes avant, on cherche à critiquer. Ce n'est pas ça, Mme la
Présidente. Ce n'est pas une question de critiquer. On veut juste comprendre.
On veut juste avoir des réponses. On veut
juste avoir des réponses. Puis on est tous ici des députés, des êtres humains
qui ont eu... qui ont perdu des êtres
chers dans nos vies. Puis un des éléments les plus difficiles à vivre, c'est le
deuil. Le deuil, ça prend un certain temps. Mais, pour être capable de vivre ce deuil-là puis être capable de passer
à d'autres choses, pour ne pas que ça devienne une sentence à vie, il
faut être capable de fermer le chapitre.
Alors,
ce n'est pas une question de critiquer. Ce n'est pas une question de juger.
Oui, on pose des questions. Oui, c'est fatigant. Je le sais que la ministre des
Aînés est tannée de se lever. Ça fait deux semaines qu'elle se lève à tous
les jours. Elle est tannée, je le sais, mais on veut des réponses. Ce n'est pas
moi qui veux une réponse, ce sont mes familles. Qu'est-ce qui s'est passé? Pour être capable de passer à d'autres
choses, de faire notre deuil, d'avoir une vie convenable, parce qu'on a
toujours cette lourdeur-là, constamment, parce qu'on ne comprend pas puis on
n'a pas de réponse.
• (16 h 30) •
La
chose que je ne comprends pas, Mme la Présidente, le 24 mars, on avait
commencé, parce que, je veux dire, il commençait
à avoir des problèmes dans les CHSLD, là, à la grandeur du Québec, là. Il y
avait des éclosions. Il commençait à y
avoir des décès, et là qui étaient reliés à la pandémie. Le 24 mars, il y
avait quatre personnes. Ça, c'est des chiffres, là, l'INSPQ. Le 25, cumulatif, on était rendu à sept.
Le 26, cumulatif, on était rendu à neuf, 26, neuf. 27, on était rendu à 11.
Le 28, on était rendu à 20. Le 29, on était
rendu à 26. Puis là Herron n'est pas comptabilisé dans ça parce qu'on ne sait
pas encore, là, on ne sait pas, là. Et
là, Mme la Présidente, à partir du 3, 4 avril, regardez la courbe
exponentielle. Le 26 avril, on est rendu à 2 000, on est rendu
à 2 000. Alors, c'est pour ça qu'on est en droit de se poser la question.
La
ministre peut dire qu'elle ne savait pas, mais il y a une responsabilité
ministérielle. Elle ne peut pas dire qu'elle ne sait pas. Pourquoi? Parce que, même si quelqu'un qui est sous ta
responsabilité, tu es un dirigeant de compagnie, il y a un problème à quelque part, puis il dit :
Inquiète-toi pas, boss, je m'en occupe, mais, le lendemain, tu rentres dans ton
bureau, je vais aller faire une
petite visite voir. Puis comment ça va, le problème? Ça s'est-u réglé? Ah! ça
s'en vient, là, on est en train de... O.K. Parfait. On retourne le
lendemain : Comment ça va? Tu retournes dans l'après-midi.
Moi,
je n'ai jamais été ministre. Peut-être que je ne connaîtrai jamais ça, Mme la
Présidente. Mais chose certaine que je sais, c'est que les ministres, ils ont
des équipes pas à peu près. Au pire, là, au pire, là, tu prends un conseiller
politique, parce qu'il y en a pas mal, de
conseillers politiques. Les ministres, moi, j'en ai quelques-uns, vous en avez
quelques-unes, on en a tous, on en a tous
deux, trois, à peu près, là. Les ministres, ils en ont pas mal plus que de
deux, trois, là. Est-ce qu'on aurait
pu, je dis ça comme ça, en prendre un, conseil ou une conseillère politique,
dire : Toi, là, il y a un gros problème,
c'est grave, même très grave, puis on a vu, là, les courriels, là, nos équipes
nous ont avisés, ça ne va pas bien, toi,
à partir de maintenant, ta job, ton boulot, 24 heures sur 24, tu appelles
deux fois, trois fois, tu vérifies comment ça va puis tu me rapportes
les informations. Ça, c'est le minimum. Ça, c'est le minimum, Mme la
Présidente.
Est-ce qu'il y a un
livre pour t'expliquer ça? Non. Puis je l'ai entendu souvent, là, de la part du
premier ministre, des ministres.
Franchement, ce n'est pas écrit, mais on utilise notre jugement, là. Il faut
utiliser notre jugement. Il me semble, il me semble que tu désignes une
personne, que tu le mets sur le cas 24 heures sur 24 puis tu lui
dis : Au moins, minimum, là, tu
dois appeler deux fois par jour. On est rendu à combien, là? C'est quoi, le
problème, là? Oh! on sait qu'il y a une tutelle. Ah! bien là, on va vérifier encore plus. Pourquoi? Où ça se développe,
là? De la bouche de la ministre, il y a une problématique à aller chercher cette tutelle-là parce que c'est
privé. Mais pourquoi cette problématique-là? Bien, parfait, mais appelle. Va
savoir... Va aux sources.
Moi,
personnellement, je l'aurais fait, là. C'est facile à dire, après, tu l'aurais
fait. Non, mais, en même temps, je veux dire, quand tu vois qu'il y a cette
problématique-là puis tu sais que, potentiellement, ça peut exploser... puis,
en plus, j'ai entendu de la bouche de
la ministre plusieurs fois : C'était nouveau. On ne sait pas, on ne sait
pas ce qui arrive. Bien, justement,
si tu ne sais pas ce qui va arriver, bien, c'est un gros point d'interrogation.
Tout peut arriver, puis tu te prépares pour tout. Moi, c'est juste le
minimum, c'est juste le minimum que j'aurais aimé qu'on fasse.
J'en ai parlé, ce
matin, lors de ma question, j'ai demandé à la ministre, j'ai demandé à
l'ancienne ministre de la Santé également,
de faire de son six derniers mois, là, le plus beau cadeau qu'elle pourrait
faire aux familles du Québec, aux
5 060 personnes sont décédées. La coroner, elle a un mandat, mais un
mandat qui est très, mais très restreint. Pour les 5 060 personnes du Québec, leurs
familles, est-ce qu'elle peut, elle et sa collègue ancienne ministre de la
Santé, convaincre le premier ministre de déclencher une enquête publique et
indépendante? Puis ça, Mme la
Présidente, comme la ministre
a dit, comme d'autres collègues l'ont dit
également : Ah! c'est des problèmes du passé, mais on va prendre nos
responsabilités. On va les prendre, nos responsabilités. Oui, on a été
au pouvoir. Oui, il y a eu des réformes. Oui, on a pris des décisions. Mais, si on a une part de responsabilité, Mme la
Présidente, on va les prendre. Vous savez pourquoi? Parce que les familles, on
leur doit bien ça. Puis ça, c'est notre rôle en tant que législateurs, en tant
que membres élus démocratiquement par le peuple, Mme la Présidente.
Il ne me reste pas
beaucoup de temps. Je prendrai les quelques minutes qu'il me reste pour
remercier M. Aaron Derfel. C'est une
personne qui n'a jamais accepté ce qu'on lui a dit initialement. C'est une
personne qui a creusé. C'est le quatrième
pouvoir. Le quatrième pouvoir est archi important. J'ai travaillé dans les
médias pendant 18 ans, Mme la Présidente, puis je sais que... le
rôle des gens des médias, ils sont importants.
Je
remercie également M. Thomas Gerbet, ma collègue l'a mentionné, qui
continue aujourd'hui, ne lâche pas le morceau,
veut savoir. Si on n'est pas capables d'avoir une enquête publique indépendante
pour avoir, justement, les réponses nécessaires pour le bien de nos
familles, bien, eux, au moins, ils sont capables d'aller chercher de
l'information qui va faire en sorte qu'ici,
dans le salon bleu, bien, on est capables de rebrasser la soupe, Mme la
Présidente, et de reposer des questions.
C'est plate,
je sais, là, c'est plate, là, mais, une chose certaine, Mme la Présidente, je
ne suis pas docile, ça, c'est sûr. Je ne suis pas docile. Je sais que le
gouvernement aimerait ça qu'on soit dociles, veulent que la population soit
docile et obéissante. Moi, je ne le suis
pas. Dans ce cas-ci, je ne serai jamais, mais jamais obéissant, Mme la
Présidente, puis ce n'est pas vrai que je vais me la fermer. Merci
beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, M. le député de
Marquette. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Masson. Et
votre formation politique dispose d'un temps de parole de
12 min 16 s.
M. Mathieu Lemay
M. Lemay : Merci, Mme la Présidente.
Donc, à mon tour d'intervenir aujourd'hui sur la motion du député des Îles-de-la-Madeleine
en ce qui concerne que l'Assemblée nationale exige du gouvernement le
déclenchement d'une enquête publique et
indépendante pour faire toute la lumière sur les circonstances entourant ces
décès, et ce, tant pour les familles des victimes que pour la dignité de
celles et de ceux qui ont perdu la vie.
Et, Mme la Présidente, vous savez, le drame du
CHSLD Herron, il a marqué toute la population du Québec, là, puis c'est un symbole fort des failles de
notre système en santé puis plus particulièrement dans nos CHSLD. Ma collègue...
bien, tous les collègues qui ont pris la
parole aujourd'hui en ont parlé. Le témoignage de ma collègue députée de
Repentigny était très touchant, comme celui de Fabre aussi, et celui du député
de Marquette, notamment. Mais c'est un événement qui est difficile, puis c'est normal que la population,
elle ait voulu voir clair. Et c'est normal qu'il y ait des demandes d'enquête
pour connaître le déroulement de ces épisodes qui sont tragiques, Mme la
Présidente.
Et moi, ce que je pense, c'est que malgré le
fait qu'il y a quand même des nombreuses enquêtes qui ont été tenues par des
organismes indépendants, il y a certains des collègues de l'opposition qui
semblent dire que la vérité du CHSLD Herron
n'est pas encore tout à fait sortie. Et là ils demandent une enquête publique
sur la gestion de la pandémie, bon, quelque chose qui serait normal s'il
n'y avait pas déjà eu d'autres enquêtes indépendantes. Parce qu'il y a en eu
quelques-unes. Laissez-moi vous les nommer, Mme la Présidente.
Tout d'abord,
l'ancienne ministre de la Santé, le 16 avril 2020, avait demandé la tenue
d'une enquête indépendante visant à faire la lumière sur des faits allégués
concernant le CHSLD Herron. On voulait ainsi documenter les événements survenus dans le cadre de la pandémie de la
COVID-19, identifier les actions mises en place par le CHSLD pour assurer
les soins requis par la clientèle et détailler les interventions effectuées par
le CIUSSS dans ce CHSLD privé. Donc, ce rapport,
il a été déposé en juin 2020. Il y avait huit recommandations. Si j'ai le
temps, je vous les mentionnerai tout à l'heure.
Un peu plus
tard, il y a aussi eu l'enquête de la coroner sur la gestion de la pandémie
dans les CHSLD, et la ministre responsable
des Aînés et des Proches aidants est sortie d'un congé de maladie, malgré un
épuisement professionnel, parce qu'elle
insistait pour venir témoigner dans cette enquête. Donc, le rapport, il est
attendu, bien entendu. Le coroner nous a mentionné que ce serait pour avant l'été ou, au plus tard, cet été. Donc,
ça va certainement poser un regard professionnel et indépendant sur cet événement qui est quand même sombre, on doit se
le dire. Et on va se rappeler que les témoignages, dans cette enquête,
ont été diffusés au public. Ce n'est pas très, très différent de ce que demande
aujourd'hui le député des Îles-de-la-Madeleine.
• (16 h 40) •
Une autre enquête, Mme la Présidente, c'est
celle concernant la Commissaire à la santé. Donc, le 19 août 2020, il y a eu un mandat spécial du gouvernement qui a
été confié afin d'évaluer la performance du système de santé et des services
sociaux aux égards de la prestation des services de santé et des services
sociaux effectuée en situation d'état d'urgence sanitaire, dans le contexte de la pandémie de COVID-19, plus spécifiquement
quant à la dispensation des soins ainsi que des services d'hébergement
aux aînés.
Donc, ça, Mme
la Présidente, le rapport, il a déjà été publié. Il a été publié en janvier
dernier, puis je vais juste vous mentionner un extrait du rapport, là,
dans le fond, et je vais citer, là, c'est... Pourquoi l'hécatombe est-elle
survenue dans les CHSLD et résidences pour aînés pendant la première vague au
Québec? Donc, c'est Mme Castonguay qui fait quatre principaux constats. Donc, tout d'abord, la gestion du système de
santé en contexte de crise, indiquant que le Québec était mal préparé pour faire face à une pandémie.
Le témoignage de ma collègue de Repentigny l'a mis en lumière. L'état du système de soins et de services aux aînés au
moment d'entrer en pandémie, donc le manque de main-d'oeuvre, l'insuffisance
d'encadrement du personnel, le déficit d'expertise en matière de prévention et
de contrôle des infections, ça, c'est un autre item. Un autre point, la
gouvernance défaillante des soins et des services destinés aux personnes âgées
ainsi que la gouvernance générale du système de santé et des services
sociaux.
Ces
points-là, Mme la Présidente, là, c'est des points pour lesquels il y a des
actions qui sont en cours. Je n'aurai peut-être
pas le temps de vous les mentionner, mais je veux juste vous mentionner que
c'est pris au sérieux. Il y a eu une autre
enquête aussi, qui a été menée par les ordres professionnels, les infirmières
et les infirmières auxiliaires, aussi le Collège des médecins du Québec. C'est
une enquête qui a été lancée de leur propre chef, et ce rapport-là a été déposé
en janvier 2021. Dans ce rapport-là, ça a mis en lumière qu'il y
avait une organisation déficiente au travail. Le député de Marquette l'a mentionné tout à l'heure, il y avait
une méconnaissance du domaine des soins de santé chez ces gestionnaires,
et puis je suis d'accord que c'est très troublant, Mme la Présidente.
Donc,
ça fait beaucoup d'enquêtes sur la gestion de la pandémie qui ont été faites
par le gouvernement ou d'autres organismes indépendants puis, bref, il y
a plusieurs recommandations qui sont déjà organisées, qui sont en cours de réalisation. Peut-être que ma collègue qui va me
suivre en parlera davantage, mais moi, ce que j'aimerais vous donner en conclusion, c'est la conclusion du rapport
d'enquête sur la qualité des services médicaux et des soins infirmiers qui a
été faite au CHSLD Herron ainsi qu'à l'Institut universitaire de gériatrie de
Montréal durant la première vague de la pandémie.
Et, je vous laisserais là-dessus, Mme la
Présidente, c'est que les personnes hébergées en CHSLD sont en droit de recevoir des soins et des services de qualité,
de même que de mourir dans le respect et la dignité. Il est donc impératif que
l'offre de services aux personnes âgées en
perte d'autonomie soit réformée par le ministère de la Santé, en collaboration
avec tous les acteurs impliqués. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Masson. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée
de Saint-François. Et vous disposez d'un temps de parole de
6 min 11 s.
Mme Geneviève Hébert
Mme Hébert : Merci,
Mme la Présidente. Permettez-moi tout d'abord de prendre un moment, Mme la
Présidente, pour réitérer toute la peine, la sympathie du gouvernement pour les
familles qui ont perdu des êtres chers lors du drame du CHSLD Herron.
Mme la
Présidente, le Québec en entier a eu le coeur brisé en mille morceaux de
découvrir des conditions absolument horribles
dans lesquelles ces aînés ont malheureusement passé leurs derniers moments. Il
n'y a aucun mot qui peut décrire adéquatement
la stupeur, l'incompréhension qui s'est emparée de nous à ce moment-là, quand
on en a pris connaissance. Puis plus jamais, Mme la Présidente, plus
jamais une telle situation ne doit se reproduire.
Le premier
ministre l'a répété à plusieurs reprises depuis quelques jours : Est-ce
que la gestion de la pandémie était parfaite?
Non, je pense qu'on le concède. Il aurait certainement été plus facile d'avoir
une dizaine de robots qui pouvaient être branchés sur le futur puis qui
auraient pu nous assurer une gestion de la pandémie puis de toujours prendre
les meilleures décisions. Mais, comme ma
collègue la ministre responsable des Aînés l'a dit, on n'avait pas de boule de
cristal non plus. Mais nous, nous
sommes tous des humains, le premier ministre, l'ex-ministre de la Santé, la
ministre responsable des Aînés, les équipes autant au niveau politique
qu'administratif, tous et toutes des humains.
Alors que le
feu était pris littéralement partout au Québec, avec plusieurs dizaines, voire
des centaines d'éclosions, le
gouvernement, il a fait de son mieux. Puis cela, Mme la Présidente, bien, je
crois que la population du Québec en est consciente. Est-ce que les Québécois et les Québécoises pensent que le
gouvernement a été parfait dans la gestion de la pandémie? Sans doute pas. Mais la population est capable de faire la
part des choses et comprendre que devant une situation absolument inédite, qui a pris la planète d'assaut
par surprise, le gouvernement a agi de bonne foi, a agi de son mieux afin
de protéger la population québécoise.
Ce mieux, Mme
la Présidente, bien, ça a pris plusieurs formes. Comme vous le savez, la
pandémie a révélé au grand jour un
important problème de main-d'oeuvre dans notre système de santé. Ça ne date pas
de la pandémie, ça date d'avant, ma
collègue la députée de Repentigny en a mentionné, particulièrement dans le
réseau des CHSLD. C'est d'ailleurs en partie cette pénurie absolument
sans précédent de personnel qui a causé ce qui s'est passé au CHSLD Herron.
Puis le gouvernement, bien, il a agi
rapidement puis avec précision afin de pallier à cette pénurie de main-d'oeuvre
dans le réseau de la santé. Je crois
sincèrement, Mme la Présidente, que l'action du gouvernement en ce domaine fait
partie du mieux dont je vous parle depuis quelques minutes.
Devant les
nombreux besoins des préposés aux bénéficiaires dans les CHSLD, qui ont été
exacerbés au cours de la pandémie de
la COVID-19, bien, le ministère de la Santé, en collaboration avec le ministère
de l'Éducation, ils ont développé un
programme de formation accélérée de PAB, de préposés aux bénéficiaires. Ce
programme, qui a débuté, je le rappelle, en juin 2020, qui avait un objectif d'embaucher
10 000 nouveaux préposés aux bénéficiaires, bien, en date du
23 mars 2022, bien, il y avait 9 790 candidats embauchés.
9 790 candidats embauchés, ce n'est quand même pas rien.
L'ajout de
ces préposés aux bénéficiaires en CHSLD permet de contribuer significativement
aux soins et services offerts aux aînés en CHSLD. Puis on a rehaussé de
façon significative aussi les salaires, de façon, même, historique, je dirais, Mme la Présidente. Depuis le
1er avril, les préposés aux bénéficiaires qui travaillent en CHSLD ou dans
des hôpitaux touchent maintenant un salaire de près de 26 $ de
l'heure. C'est du jamais-vu. Je suis fière que ce geste significatif du gouvernement envers nos préposés, bien, ce soit
enfin une façon de valoriser à la hauteur l'importance de leur travail. Puis,
bien, pour assurer une équité entre le
secteur public et privé, bien, on a ajouté 27,2 millions pour soutenir les
salaires, autant dans les CHSLD privés non conventionnés, pour les
préposés aux bénéficiaires, d'ailleurs.
Puis, bien,
j'aimerais prendre quelques minutes aussi pour parler du programme Je
contribue, Mme la Présidente. Le
système, là, il craquait de partout avec la COVID qui s'engouffrait dans le
réseau. Le gouvernement, il a lancé un appel à la mobilisation par la
plateforme Je contribue. Bien, Mme la Présidente, croyez-le ou non, entre le
1er mai 2020 puis le
28 février 2022, c'est 52 296 embauches, via la plateforme Je
contribue, qui ont été comptabilisées. Ce n'est pas rien. On connaît tous des
personnes dans notre entourage qui ont donné un coup de main dans le réseau
durant la pandémie, que ce soit en
CHSLD, dans les hôpitaux, que ce soit à l'entretien, l'administration, aux
soins, à la sécurité. Je peux même en
témoigner, j'ai été bénévole avec des aides générales au CHU de Fleurimont.
Donc, ces initiatives-là, bien, ça a permis aux établissements de
maintenir leurs services puis d'assurer aux usagers un milieu de vie décent.
Mme la
Présidente, on pourrait parler aussi de la campagne de vaccination, qui a été
un succès, au Québec. Puis on a le plus haut taux de vaccination... qui est
dans les plus élevés au monde. Puis ça aussi, c'est grâce à Je contribue.
Il y a plus de 20 000 personnes qui sont venues s'inscrire pour
contribuer.
Mais,
en conclusion, Mme la Présidente, est-ce que le gouvernement, il a été
absolument parfait dans sa gestion de la
pandémie? Non, il n'y a pas personne de parfait, puis ça, je peux vous le
confirmer. Mais la population, elle le sait. Le gouvernement, il a fait
de son mieux. Puis, ce mieux, bien, je viens de vous le démontrer, puis ça va
avoir un impact significatif pour la qualité
des soins dans les années à venir, puis ça, bien, je pense qu'on peut en être
fiers. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Saint-François. Et maintenant au tour de l'auteur de cette
motion de livrer sa réplique d'une durée de 10 minutes.
M. Joël Arseneau (réplique)
M. Arseneau : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Alors, d'entrée de jeu, je voudrais revenir sur certains propos de la ministre responsable des Aînés lors
de sa présentation qui a dit qu'il était facile de juger deux ans plus tard.
Bien, en fait, il est plutôt difficile de
juger deux ans plus tard quand on n'a pas toute l'information. Alors, ce n'est
justement pas facile de juger des
faits et gestes du gouvernement lorsqu'on ne fait pas la lumière sur la chaîne
de commandement, sur l'information,
sur ce que les gens au sein de la cellule de crise savaient et pour juger de la
façon dont ils ont agi ou de la façon dont ils n'ont pas agi.
• (16 h 50) •
Deuxième
élément, elle dit : Bien sûr que, si nous avions une machine à remonter
dans le temps, on pourrait corriger le
tir. Là n'est pas la question. La machine à remonter dans le temps que l'on
souhaite, c'est la commission d'enquête qui va pouvoir nous permettre de remonter dans le temps pour voir la
séquence des événements, des faits, de l'information, de la communication entre le terrain, les ministres, les
sous-ministres et évidemment l'ensemble des gens parties prenantes à la
cellule de crise.
Elle a aussi
mentionné qu'elle n'était pas informée de la situation. Écoutez, les preuves
s'accumulent, elles sont lourdes et
irréfutables. Et on a vu des courriels de S.O.S., urgents, qui informaient la
ministre de l'information de ce qui se passait
sur le terrain avec sa collègue ministre de la Santé. On ne peut plus nier ces
faits-là. Et une fois qu'on a l'information, on a la responsabilité d'agir, on a la responsabilité de gérer un
ministère, on a la responsabilité, comme ministre, de faire le suivi, on a la responsabilité de demander des
comptes, de rendre les fonctionnaires, à tous les niveaux, imputables de leurs
actions, surtout lorsqu'on a été informé. Ça s'appelle la responsabilité
ministérielle.
Je veux citer
ici un article de Thomas Gerbet, qui dit : «Le gouvernement pouvait bien
louvoyer entre inquiétude et
apaisement. Une chose est sûre : il était informé.» Il n'a pas agi. Mme la
Présidente, les faits sont têtus, et ce qu'on veut savoir, c'est pourquoi, en
fait, les responsabilités n'ont pas été assumées à différents niveaux par les
ministres ou par le premier ministre
qui était en tête des opérations. La responsabilité ministérielle, Mme la Présidente,
elle existe au Québec et elle est
fondamentale. Le premier ministre et ses ministres sont responsables
collectivement devant l'Assemblée nationale des actions de leur gouvernement.
Un ministre doit répondre non seulement de ses propres actions, mais aussi de
celles de ses fonctionnaires. Et là on voit malheureusement, Mme la Présidente,
une ministre qui avoue une certaine impuissance à agir à l'époque en disant
tout simplement : Je n'étais pas informée.
Elle a aussi
parlé aujourd'hui à nouveau du pouvoir de la ministre en faisant la
nomenclature des gestes qu'elle a posés
au cours des dernières années en déviant un peu le sujet. Là n'est pas le sujet
de la motion d'aujourd'hui. Mais ce qui
est intéressant, c'est qu'elle parle et elle évoque le pouvoir qu'elle a
aujourd'hui comme ministre. Pourtant, lors d'un reportage de l'émission Enquête à Radio-Canada, elle disait
essentiellement le contraire, elle remettait en doute le pouvoir qu'elle
avait elle-même d'agir à l'époque de la première vague en disant que le
pouvoir, et je cite, «c'est extrêmement relatif»,
disait-elle. «Le pouvoir, c'est celui que le premier ministre te donne. Le vrai
pouvoir, le pouvoir, c'est le premier ministre qui le détient.»
Alors, il est intéressant de savoir, à ce moment-ci,
qu'est-ce que le premier ministre savait, sachant qu'il avait le pouvoir d'agir. Et à cet égard, lorsqu'on
regarde un certain nombre de propos tenus par le premier ministre face à des
révélations des derniers jours, notamment la publication d'un livre qui
s'intitule 5060, dont les auteurs sont Gabrielle Duchaine, Katia Gagnon
et Ariane Lacoursière, on peut voir un certain nombre d'indications.
Tout d'abord,
le 30 mars, le premier ministre disait en conférence de presse, et je
cite : «...autre grande priorité, on le répète depuis le début, toute la situation dans les résidences de
personnes âgées, nos aînés. Marguerite Blais est en contact avec les directions de tous ces établissements.»
Était-elle en contact avec la direction de l'établissement du CHSLD Herron?
Visiblement non, puisqu'elle dit ne pas savoir... encore aujourd'hui, elle
répète qu'elle ne savait pas ce qui s'y passait. Elle savait ou elle ne le savait pas? Mais on sait qu'elle savait au
moins qu'il avait été mis sous tutelle et que le pouvoir était exercé par le CIUSSS de l'Ouest-de-Montréal au nom
du gouvernement et qu'elle ne s'est pas informée de la suite des choses.
Le premier ministre disait aussi, le
7 avril : «Moi, je vous dirais [...] là, que je n'ai pas l'impression
qu'on a sous-estimé la situation dans les
résidences pour personnes âgées et les CHSLD. Dès les premières rencontres, on
s'est tout de suite dit que c'était
là la priorité.» Ce n'est pas tout à fait ce qu'on a compris par la suite.
«Donc, il faut comprendre ça aussi, qu'on
s'attendait à avoir quand même relativement beaucoup de décès dans ces
résidences-là.» Je pense qu'on [a] fait les bons gestes aux bons
moments.» Le premier ministre qui nous dit ça le 7 avril.
Pendant ce
temps, on peut lire qu'au même moment, les mêmes journées, voilà ce qui se
passait au CHSLD Herron, et je cite : «Dans une chambre, un homme lui
confie, à l'infirmière, ne pas avoir bu depuis 10 jours, sauf pour prendre
son médicament quotidien. Il a la
langue gercée et l'intérieur des joues couvert d'ulcères. Une dame demande de
prendre un bain, elle a des
excréments jusqu'au cou. Un résident a trois culottes d'incontinence l'une
par-dessus l'autre, elles sont brunes. Du
vomi séché dans la bouche l'empêche de parler. Il se met à pleurer quand une
infirmière lui donne de l'eau. Plus loin, un homme de
100 ans et rachitique, il a le visage bleu, il est inconscient, en
hypothermie.» La même journée, je le répète, le premier ministre affirme à tous les Québécois qui l'écoutent, en
heure de pleine écoute, à la télévision : «Je pense qu'on a fait les bons gestes aux bons moments.» Comment
réconcilier la version livrée par le premier ministre à la télévision avec
ce qui se passait sur le terrain?
Autre
citation. Le 9 avril, le premier ministre disait en conférence de
presse : «...j'ai posé beaucoup de questions, depuis quelques jours, autant à l'équipe de
Danielle — la ministre
de la Santé — qu'à l'équipe
du Dr Arruda, puis ce qu'on voit,
c'est... Le problème est vraiment dans quelques CHSLD.» Et il les nomme :
CHSLD Sainte-Dorothée, à Laval, le Centre
d'hébergement Notre-Dame-de-la-Merci, Centre d'hébergement de LaSalle, Centre
d'hébergement Alfred-Desrochers, CHSLD
Laflèche, en Mauricie, et à Shawinigan ou Grand-Mère il y en a un autre. Où est
le CHSLD Herron dans la liste des
établissements qui sont problématiques? Il n'y en a qu'un seul sous tutelle,
Mme la Présidente, et c'est celui d'Herron. Le premier ministre l'ignore dans sa nomenclature. Comment comprendre ce
qui s'est passé au sein de la cellule de crise? Comment concevoir que le premier ministre n'était pas au courant, alors
qu'il a dit s'informer régulièrement de ce qui se passait?
Alors, Mme la
Présidente, c'est la raison pour laquelle nous demandons, nous réclamons qu'il
y ait une enquête publique et indépendante pour faire toute la lumière sur ce
trou noir du 29 mars au 11 avril et que chacun des membres de la cellule de crise, incluant le premier
ministre, puisse témoigner et être interrogé sur ce qui s'est vraiment passé,
sur l'information dont ils
disposaient, question de savoir qui savait quoi, à quel moment, pourquoi on a
agi, comment on a agi et comment s'est installée la séquence des
événements. Voilà.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le chef du troisième groupe
d'opposition.
Alors,
je vais maintenant mettre aux voix la motion de M. le chef du troisième groupe
d'opposition, qui se lit comme suit :
«Que
l'Assemblée nationale déplore le drame survenu au CHSLD Herron, où
47 aînés sont décédés lors de la première vague de la pandémie de
COVID-19, au printemps 2020;
«Qu'elle rappelle les inquiétantes
révélations concernant cette tragédie qui ont ressurgi dans les médias ces
derniers jours;
«Qu'elle
réitère le principe de responsabilité ministérielle dans la gestion des
événements, c'est-à-dire que les ministres
sont individuellement responsables de la gestion de leur ministère et qu'ils
doivent répondre non seulement de leurs propres actions, mais aussi de
celles de leurs fonctionnaires; et
«Enfin,
que l'Assemblée nationale exige du gouvernement le déclenchement d'une enquête
publique et indépendante pour faire
toute la lumière sur les circonstances entourant ces décès, et ce, tant pour
les familles des victimes que pour la dignité de celles et de ceux qui
ont perdu la vie.»
Alors, cette
motion... M. le chef du troisième groupe d'opposition.
• (17 heures) •
M. Arseneau :
On aimerait que la motion soit votée... appelée par vote nominal.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Un appel nominal. Alors, j'ai besoin de...
Des voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant. On a besoin de cinq députés de l'opposition pour faire une telle demande. Il y a cinq députés, alors nous
avons une demande de vote par appel nominal. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la
Présidente, je vais demander à ce que ce vote soit reporté à demain, après...
pendant les affaires courantes.
Vote
reporté
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors,
c'est très bien. Ce vote est reporté à demain, aux affaires courantes.
Et maintenant, pour
la suite de nos travaux, je cède la parole à M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Schneeberger : Oui. Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler
l'article 18 du feuilleton.
Projet
de loi n° 15
Prise
en considération du rapport de la commission qui en a
fait l'étude détaillée et des amendements transmis
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors,
à l'article 18 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de la santé et des
services sociaux sur le projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres
dispositions législatives,
ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement
par Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce et
M. le député de Jean-Lesage. Et je vous indique que ces amendements sont déclarés
recevables.
Alors, sans plus
tarder, je vais céder la parole à M. le ministre délégué à la Santé et aux
Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M. Carmant : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Je suis très heureux, là, de prendre part à cette
prise en considération. J'aimerais saluer
tous les députés de ma formation politique qui ont participé à l'étude
détaillée dans le cadre de la
Commission santé et services sociaux. Merci de leur soutien. Merci de leur
support. Merci de leurs conseils tout au long du processus.
J'aimerais également
remercier les députés des différentes oppositions qui ont collaboré tout au
long du projet. Et je vois la députée de
Notre-Dame-de-Grâce qui nous a particulièrement donné des indications qui
étaient... qui ont venu valoriser le projet.
Mme
la Présidente, je pense que la construction de ce projet de loi a été pour moi
une expérience unique. Comme vous le saviez, ça faisait suite aux
recommandations de la commission Laurent, et ce qu'on voulait, c'était mettre l'intérêt
de l'enfant au centre de cette loi. Et dès
le dépôt du rapport, les équipes du ministère, tant clinique qu'au niveau de la
direction des affaires juridiques,
ont travaillé extrêmement fort pour faire rapidement un projet de loi qui a été
très bien construit. En plus, j'ai
participé de façon hebdomadaire à des rencontres avec eux pour bonifier le
projet de loi pour s'assurer que la volonté du législateur, comme on dit
ici, était vraiment respectée dans ce projet de loi.
Quand
on a déposé le projet de loi initialement, Mme la Présidente, on avait un
projet de loi très solide en main, mais on savait d'entrée de jeu qu'on était
prêts à le bonifier, qu'on était prêts à travailler avec les différents groupes,
qu'on était prêts à écouter les oppositions
pour bonifier ce projet de loi. Et c'est ce qu'on a réussi à faire, je crois,
au cours des six, des... de la quinzaine de séances auxquelles on a
participé.
Je
pense qu'il est important pour moi de remercier les collègues, à ce moment-ci,
soit la collègue de Notre-Dame-de-Grâce, le collègue de René-Lévesque, le
collègue de Jean-Lesage qui, par leurs interventions, nous ont permis de
bonifier le projet de façon très
collaborative autour de la table. Et aussi, je dois remercier le président de
la commission qui a mené ça en chef d'orchestre incroyable.
Deux
moments particuliers que je dois soulever, deux rencontres que j'ai eues, une
avec un groupe sur la violence conjugale,
un groupe de représentants d'organismes qui luttent contre la violence
conjugale, à la demande du député de René-Lévesque. Des conversations
très intéressantes suite à laquelle on est encore venus ajouter des éléments au
projet de loi. Mais je pense qu'on a fait vraiment un grand pas qui nous était
demandé par tous, c'est-à-dire de créer un alinéa spécifique à la violence conjugale, et un alinéa qui nous donne une
conduite à tenir pour les enfants qui sont exposés à la violence
conjugale. Un grand pas, selon moi, pour cette loi.
Une
autre rencontre qui a été particulièrement intéressante, c'était avec un groupe
de jeunes qui avait fréquenté la DPJ,
le groupe s'appelle les ex de la DPJ, avec qui on a eu des discussions intéressantes
sur le passage vers la vie adulte, la transition à la vie adulte. J'ai
été très touché par chacun de leurs témoignages. Tous avaient une expérience
très différente. Tous étaient extrêmement
heureux de cette rencontre, mais nous ont demandé de continuer à essayer de
bonifier la loi, ce qu'on a réussi à
faire de façon assez originale, non pas en modifiant la Loi sur la protection
de la jeunesse, mais la Loi sur la santé et les services sociaux pour
venir répondre à cette demande.
Une
chose qui est importante aussi, c'était que ce projet de loi vient vraiment
changer les mentalités de tous ceux qui
travaillent à la protection de la jeunesse. J'ai parlé de mettre l'intérêt de
l'enfant au centre de la loi, mais, également, j'ai parlé à plusieurs reprises,
au cours du projet de loi, de la nécessité d'intensifier la formation
postacceptation du projet de loi. Sur
plusieurs points, il va falloir vraiment s'assurer que, au cours de la mise en
place du projet de loi et de l'année qui vont suivre, les formations
suivent dans toutes les régions et à tous les niveaux de la protection de la
jeunesse. Il y a plusieurs inégalités dans
l'interprétation de la loi actuellement. On est venu clarifier plusieurs
éléments, mais sans cet aspect de formation de nos intervenants. Et je compte
sur le rôle qui est inscrit dans la loi de la directrice nationale de la
protection de la jeunesse pour s'assurer que
cette formation soit vraiment nationale et équivalente d'une région à l'autre
et d'un groupe de professionnels à
l'autre, allant des intervenants au contentieux, et, évidemment, au niveau
juridique également.
Pour
moi, comme je vous le dis, ça a été un processus exceptionnel. Je pense que
c'était une grande responsabilité que
tous ceux qui ont participé à la commission de Mme Laurent sur les droits
de la jeunesse, la protection de la jeunesse m'ont mis entre les mains. Je pense que j'ai relevé le défi avec fierté.
Je pense qu'on a fait un grand pas en avant également en allant de l'avant avec
ce projet de loi. Je tiens à dire à tout le monde, cependant, qu'il reste
encore du travail à faire. Je réfère
toujours à ce fameux napperon qui nous dit les prochaines étapes. Maintenant
qu'on avance avec le projet de loi, une
fois qu'il va être adopté, on pourra aller de l'avant avec ce qui est dans la
phase 2, éventuellement la phase 3, et réussir vraiment à
mettre en place tout ce qui nous a été suggéré par la commission Laurent, et
aller de l'avant pour la dignité de nos
jeunes au Québec, pour qu'ils soient bien représentés, non seulement en amont,
mais au cours de leurs années en protection de la jeunesse, et également
une fois qu'ils vont à la transition vers la vie adulte.
Donc,
merci beaucoup à tous ceux qui ont contribué. Merci au président de la
commission, qui nous a grandement aidés. Et j'ai bien hâte qu'on puisse
adopter ce projet de loi, Mme la Présidente. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je suis prête à reconnaître un
député de l'opposition officielle. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Kathleen
Weil
Mme Weil : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, à titre
de porte-parole de l'opposition officielle pour la protection de la jeunesse,
il me fait vraiment grand, grand, grand plaisir de prendre la parole sur le
projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur la protection
de la jeunesse et d'autres dispositions législatives, dans le cadre de la prise en considération du
rapport de la commission.
• (17 h 10) •
Avant
de vous faire état, Mme la Présidente, des avancées du projet de loi, de
certaines déceptions, je tiens à souligner le climat de collaboration qui a régné tout au long de l'étude
détaillée. Je vous dirais que c'est une des commissions... une des plus belles expériences en tant que
collaboration que j'ai vécue, et je suis ici depuis 14 ans, Mme la
Présidente. Donc, plus de 120 amendements ont été déposés lors de
l'étude article par article pour bonifier le projet de loi à la suite des commentaires et recommandations des groupes et
experts qui sont venus en commission. Notre formation a déposé 48 amendements, dont une quinzaine ont été
adoptés, plusieurs rejetés, mais aussi plusieurs qui ont suscité des échanges
avec le ministre et son équipe pour enfin aboutir à des amendements du ministre
qui répondaient quand même à nos préoccupations,
mais qui étaient bonifiés. Alors, c'est ce genre de travail qu'on a pu faire
lorsqu'on n'était pas... quand on prenait
des pauses pour bien comprendre un enjeu, creuser, et le ministre et son équipe
trouvaient très, très souvent des réponses à nos questions.
Malheureusement,
deux recommandations... Le ministre m'a donné une réponse par rapport à ça,
mais, quand même, deux
recommandations-phares de la Commission spéciale sur les droits des enfants et
la protection de la jeunesse ne se retrouvent
pas maintenant dans le projet de loi, soit la création du commissaire au
bien-être et aux droits des enfants et du commissaire adjoint dédié aux
enfants autochtones et d'une charte des droits de l'enfant. Je le mentionne
parce que Mme Régine Laurent aussi se posait des questions, où en est ce
projet-là. Lorsqu'elle est venue en commission, elle a dit : «[La commission-phare] est celle d'instituer un commissaire
pour promouvoir le bien-être et les droits de tous les enfants du Québec. [...]Cette
recommandation se poursuit par la création — et je la cite — d'un commissaire adjoint dédié — c'est
bien important — au bien-être et aux droits des enfants
autochtones, nommé après consultation des représentants autochtones, parce que — elle
le dit — pour
la commission, la situation des enfants autochtones doit faire l'objet d'une
attention particulière.»
M.
Jean-Pierre Hotte est aussi venu dire qu'il trouvait le commissaire, la
création d'un commissaire et commissaire adjoint très complémentaire à la création aussi du directeur national de
la DPJ. L'ordre des criminologues aussi sont venus appuyer, donc, l'idée de la création de ce
commissaire et d'un commissaire adjoint au bien-être et aux droits des enfants.
Le Conseil de la nation atikamekw aussi a
rajouté sa voix, très intéressé par le commissaire adjoint, aussi, responsable
des autochtones. Donc, beaucoup de consensus.
Le ministre
nous a répondu qu'il crée un groupe de travail, il lance des travaux. C'est
dans son napperon, j'ai oublié mon napperon, M. le ministre,
aujourd'hui, c'est dans le napperon du ministre. Donc, je comprends, c'est des
enjeux compliqués, la charte aussi. Il
faudrait consulter beaucoup de gens, des experts, des modèles ailleurs, parce
qu'au Canada on trouve des
institutions semblables, ailleurs dans le monde aussi. Donc, je tenais quand
même à le dire, parce que beaucoup ont
été surpris de ne pas le voir dans le projet de loi. Je comprends
l'explication, mais je tenais quand même à dire : Nous aussi, moi, pour ma part, c'était une des
recommandations-phares. Moi, je l'appelais toujours une recommandation-phare
et j'avais bien hâte de voir le résultat. Donc, on suivra les travaux du
ministre à cet égard.
Il y a un
préambule qui a été rajouté, donc, à la Loi sur la protection de la jeunesse,
avec, au départ, 11 considérants, maintenant,
il y en a 12. Essentiellement, les considérants, je ne vais pas les nommer, je
ne vais pas les lire, mais donnent un
goût sur les grandes orientations du projet de loi. Au début, on a commencé à
faire des amendements, etc. Finalement, on a décidé de suspendre les considérants afin de voir ce que l'étude du
projet loi allait nous amener comme changements, modifications, parce qu'on ne sait jamais le trajet qu'on peut prendre
quand on adopte un projet de loi. Et finalement on est revenus aux
considérants pour finalement les adopter. Il y en a beaucoup, de considérants.
J'en viens,
le ministre en a parlé, l'intérêt de l'enfant, la considération primordiale.
Donc, on est au chapitre II de la loi, les principes généraux, droits de
l'enfant et de ses parents et responsabilités des parents. Alors, dans le cadre
des travaux de la commission
spéciale, on a souvent évoqué l'importance de prendre des décisions dans
l'intérêt de l'enfant. On l'a beaucoup
entendu depuis le terrible, tragique drame de Granby, la petite Lilly. Et,
finalement, toute la société, on a bien compris que c'est l'intérêt de l'enfant qui doit primer toujours. Mais,
quand elle est venue en commission, Mme Laurent trouvait que la façon que c'était libellé la
laissait un peu, comment dire, en attente, elle dit, je la cite : «Mais le
libellé du considérant relatif à
l'intérêt de l'enfant me questionne. Pour la commission, il était essentiel que
l'intérêt de l'enfant soit au-dessus des autres considérations. Et, en ce sens,
l'intérêt de l'enfant devrait être la considération primordiale et non une considération primordiale, une considération
parmi d'autres.» Alors, finalement, l'amendement a été apporté par le ministre pour rajouter, donc, que ce serait la
considération primordiale. C'est un petit changement, mais avec un gros, gros
impact, un impact important.
Autre
changement important à l'article 6 du projet de loi n° 15, on propose
de clarifier que la stabilité de l'enfant est un déterminant majeur pour son
sain développement. Alors, bien que le maintien ou le retour de l'enfant dans
son milieu familial est privilégié
pour assurer cette stabilité, il est conditionnel à l'intérêt de l'enfant.
Donc, cette notion de stabilité, elle
se conjugue avec l'intérêt de l'enfant, oui, la stabilité, mais il faut
s'assurer que c'est toujours dans l'intérêt de l'enfant, et finalement toutes les décisions qui se
prendront devront être dans l'intérêt de l'enfant et que c'est vraiment la
priorité. Donc, l'amendement vient clarifier que c'est l'intérêt de
l'enfant qui prime.
Aussi, dans
le projet de loi, il vise également à mettre en évidence l'ordre de priorité
pour choisir un milieu de vie substitut.
Cela répond aussi à des préoccupations soulevées lors des consultations. Donc,
lorsque le maintien de l'enfant dans son milieu familial n'est pas dans son
intérêt, l'enfant doit être confié en priorité à des personnes qui lui sont les
plus significatives, notamment les
grands-parents et les autres membres de la famille élargie. Lorsque ça, ce
n'est pas possible, ce n'est pas dans l'intérêt de l'enfant qu'il soit confié à
ces personnes, l'enfant doit être confié à un milieu de vie se rapprochant le plus d'un milieu familial, à un
milieu familial. Et, lorsque le retour de l'enfant dans son milieu familial
n'est pas dans son intérêt, la décision doit, de façon permanente,
assurer la continuité des soins et la stabilité des liens et des conditions de
vie appropriées à ses besoins.
Donc, on vient vraiment expliquer, pour ceux qui
ne comprennent pas nécessairement, le processus. C'est des professionnels qui
prennent en charge, évidemment, la protection de l'enfant et son développement.
Mais il y a une séquence,
un travail difficile, quand même, à faire. Il y a des priorités qui sont bien
expliquées ici, et, à chaque étape, toujours vérifier l'intérêt de l'enfant. J'ai proposé un amendement, et le
ministre a accepté. J'étais bien, bien, bien heureuse de ça. C'est un amendement du PLQ afin de favoriser le
maintien de l'enfant avec sa fratrie dans un milieu de vie substitut quand
la situation est favorable.
Donc, si
c'est favorable d'être avec son frère ou sa soeur, l'intention, c'est de les
garder ensemble. Alors, ça, c'est une
nouveauté. Le ministre trouvait ça intéressant que ça me touchait beaucoup,
mais je lui ai expliqué que je suis sixième de sept enfants. Donc, la fratrie a toujours joué un rôle important dans
ma famille. Et je comprends que ça donnerait une stabilité, une sécurité à un enfant qui est placé ailleurs que dans sa
famille. Alors, je remercie, d'ailleurs, le ministre de cet amendement.
Agir avec
diligence pour assurer la sécurité et le développement. Donc, aussi, compte
tenu de la notion de temps, on parle
aussi... Ça, c'est une autre notion, Mme la Présidente. On a parlé aussi de
l'intérêt de l'enfant et le temps de l'enfant. Souvent, on entendait les
commissaires parler de... le temps est précieux, son développement, et qu'on
agisse en temps opportun et rapidement, si on peut, c'est tout dans l'intérêt
de l'enfant, et, ça aussi, donc, on l'a bien souligné.
• (17 h 20) •
Il y a
aussi un amendement intéressant, c'est l'article 4.4. On parle de
collaborer... donc tenir compte des caractéristiques des communautés ethnoculturelles — c'est
un autre amendement du Parti libéral — au
lieu de parler de minorités. C'est d'ailleurs mon ancien ministère qui a
donné le feu vert à cette expression, le ministère de l'Immigration, j'en suis
bien contente. Les minorités... On a plus
tendance, de plus en plus, à parler de communautés au lieu de minorités ethnoculturelles,
notamment dans le choix du milieu de vie substitut. Et on parle, dans l'article
4.4b :
«b) collaborer
entre eux et voir à obtenir de façon optimale la collaboration des ressources
du milieu; ils se concertent avec celles de ces ressources qui leur
offrent leur collaboration, afin que leurs interventions s'accordent.»
Ça, c'est un
article important qui évoque, justement, cette première ligne. La commission
Laurent en a beaucoup parlé.
Et d'ailleurs
un expert en la matière de protection de la jeunesse, Jean-Pierre Hotte, je
tiens à le citer... Et le ministre est
très sensible à cette question, moi aussi, avec un certain background
communautaire, l'importance de la communauté. Et, quand on parle de ce village, ça prend un village pour s'occuper
d'un enfant, c'est ce concept qu'on retrouve dans cet article. Et M. Hotte dit : «En toute
cohérence avec les recommandations de la commission spéciale, la clé du succès
réside de façon particulière dans
l'apport du plus grand nombre de partenaires pouvant apporter une forme d'aide,
de soutien et de conseils comme le propose la LPJ, ces actions étant liées au
développement de l'enfant. Trop souvent, faute de moyens, l'emphase est placée sur l'enjeu de la sécurité de
l'enfant, conséquemment misant davantage sur des activités axées sur le contrôle, que sur l'intervention clinique. Il ne
s'agit évidemment pas de mettre l'enjeu de la sécurité de l'enfant au second
plan, mais l'expérience terrain démontre
qu'en misant massivement sur l'intervention clinique, avec l'appui de plusieurs
partenaires, le filet de sécurité ne s'en trouve que renforcé.
«Pour y
arriver, devant la complexité des problématiques sociales nécessitant le
recours au DPJ, il faut pouvoir miser sur
la contribution de plusieurs directions concernées [...] les CISSS-CIUSSS, mais
aussi sur l'appui des organismes communautaires — je tiens à le souligner — des
milieux scolaires, des centres de pédiatrie sociale, des services de garde
éducatifs et autres. Des approches telles que Ma famille, ma communauté ont
démontré l'efficacité de telles pratiques.»
Je le
souligne parce que, quand même, dans mon comté de Notre-Dame-de-Grâce, j'ai vu, justement, ces genres de partenariats entre notre DPJ Batshaw avec les organismes communautaires
sur le terrain, en mode intervention-prévention. Donc, il peut y avoir un signalement, mais Batshaw se rend compte. Le
CIUSSS du Centre-Sud aussi a fait un projet semblable, quand il voit que peut-être c'est... l'enfant
n'est pas vraiment compromis, il n'y a pas compromission, mais peut-être
un enjeu qui pourrait être réglé avec plus d'aide et d'appui aux parents
pour les guider dans leur parentalité. Et c'est des programmes qui ont connu du
succès.
Alors, je
sais que le ministre est sur cette même longueur d'onde en cette matière. On
peut faire beaucoup de choses quand on est en partenariat avec le milieu
communautaire, en autant qu'il soit bien financé. Je dois vous dire, c'est un
enjeu partout, partout, actuellement, dans tous les secteurs et dans mon
comté aussi.
Il y a aussi,
donc, un amendement qui a été déposé, qu'on a déposé, c'est concernant
l'utilisation de la langue, donc offrir
les services dans la langue maternelle. On a eu l'occasion d'échanger un peu
avec le ministre, mes collègues aussi, ma collègue de l'Acadie a soulevé
cette question de l'importance qu'on parle dans la langue de la personne.
Donc,
l'explication, le Conseil des Innus de Nutashkuan, ce qu'ils nous disent :
«La sécurité culturelle comprend l'usage de la langue maternelle lors
des interventions de ceux appelés à prendre des décisions au sujet d'un enfant
issu d'une Première Nation.
«En effet, il
ne faut pas sous-estimer les biais de compréhension mutuels qu'entraîne une
intervention sociale entre deux
groupes culturels distincts. Bien trop souvent, l'utilisation du français sans
considérer la langue maternelle de l'enfant issu d'une Première Nation entre en
conflit avec son droit de recevoir des informations et des explications
adaptées à sa compréhension. Il en va de même pour les parents.» Donc,
c'est un enjeu bien important.
Le ministre
et son équipe, ils ont répondu qu'ils ont des interprètes, ils utilisent des
interprètes. Je sais que ça existe dans
le réseau de la santé. Juste vous donner un exemple, l'hôpital le Children's de
Montréal est connu, il y a 40 langues, ils sont capables d'offrir des services en 40 langues, donc... et
ils font 8 000 interprétations par année. Donc, ça montre la diversité, évidemment, de Montréal, mais
le Children's reçoit des gens de partout du Québec. Donc, c'est une force
d'avoir cette compétence. Mais, dans
le système, évidemment, ce serait utile aussi. Je comprends qu'ils ont recours
à des interprètes lorsqu'ils ne sont
pas capables de parler la langue, mais c'est important de le souligner, l'importance
de la communication pour l'enfant.
Directeur
national, donc, on a parlé de son rôle, du directeur national. On a pu échanger
avec la nouvelle directrice nationale.
C'était un plaisir de pouvoir travailler avec elle sur ce projet de loi. Donc,
un amendement, donc il y a une proposition dans la loi, dans le projet de loi, d'établir un
forum des directeurs. Nous, on a déposé un amendement pour que ça s'appelle
Table des directeurs. Ça a été accepté parce
qu'un forum donne l'impression que c'est tout le monde qui peut participer pour
tout le monde pour venir échanger sur la
protection de la jeunesse. Or, l'objectif de cette table, ça vient remplacer un
peu l'ancienne Association des
centres jeunesse du Québec, mais légèrement différent. Moi, j'ai siégé à
l'ancienne Association des centres
jeunesse dans une autre vie. Donc, cette table, c'est pour échanger les
meilleures pratiques et aussi, vraiment, partager les expériences, et ils devront déposer un rapport au plus tard
six mois de la fin de l'année financière sur les activités de la table.
Violence conjugale, un thème bien important. Il
me reste... je pense que c'est à peu près quatre minutes.
Une voix : ...
Mme Weil : Ah!
30 minutes. Bon. Violence conjugale, ça, ça a été un enjeu majeur qu'on a
pu discuter, creuser, travailler et
apporter vraiment une bonification au projet de loi. Et c'est plusieurs...
d'ailleurs, beaucoup de groupes et individus, notamment la Fédération
des maisons d'hébergement pour femmes, le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, L'Alliance des
maisons d'hébergement de 2e étape et Suzanne Zaccour ont souligné la
notion ou l'importance d'inclure la notion
dans le projet de loi n° 15 de l'impact de la violence conjugale, surtout
dans le contexte de la pandémie, mais, bon, pas surtout, mais il y avait
ce contexte de pandémie qui a fait ressortir et jaillir ce problème-là, le nombre de féminicides, etc. Donc,
ils ont proposé plusieurs amendements, parce que l'enfant qui vit dans une famille où il y a de la violence conjugale est
victime de violence conjugale, dans le sens qu'il est victime de voir sa mère
souffrir, et l'enfant est terrorisé, terrorisé de passer du temps avec le père
violent, et donc... et c'est un enjeu bien compliqué.
Donc, je n'irai pas dans tous les détails, je n'aurai pas le temps aujourd'hui,
mais plusieurs recommandations ont été faites.
Donc, on
déposait des amendements, les autres partis aussi, d'opposition, et finalement
on a décidé... le ministre a proposé
que lui, il allait demander, mandater, je dirais, son ministère pour revenir
avec des recommandations, et pour regarder vraiment la cohérence de tout ça, et dans quel article il faudrait
inclure. Donc, on a beaucoup apprécié le travail. Et donc ça a pris un certain temps, et il est revenu,
donc, avec des amendements au projet de loi. Je n'irai pas... Je n'ai pas le
temps d'aller dans le détail de l'impact de la violence conjugale, mais
il y a eu plusieurs projets de loi sur le tribunal unifié, il y a eu cette consultation, je pense que c'est
la première année de ce nouveau mandat, où on a parlé de violence conjugale,
une table spéciale créée. Donc, il y a eu une sensibilisation à l'enjeu, et
voilà qu'on vient de l'inclure dans cette loi.
Et donc...
excusez-moi, madame... donc, là, Mme Zaccour,
elle explique qu'en incluant ces modifications on vient guider les
intervenants et les tribunaux avec une définition de la violence conjugale qui
reflète la conception moderne de la
violence. On permet de tirer des conséquences pour protéger l'enfant, quand
c'est ce motif de compromission qui est retenu. La DPJ doit en tenir compte et devrait pouvoir conclure une
entente avec le parent non violent. Définir la violence conjugale permettra d'échapper à une vision
restrictive selon laquelle seuls les coups comptent. Au contraire, la violence
conjugale prend souvent plusieurs formes physiques et non physiques, incluant
les menaces, les mauvais traitements psychologiques et l'exploitation
financière.
Il y a, d'ailleurs... Le bureau du coroner nous
avait déposé aussi son opinion en la matière. Il a dit que c'était urgent qu'on comprenne et qu'on inclut la violence
conjugale dans nos lois et dans nos analyses de situation. Donc, un amendement du ministre, je le cite : «Pour
l'application de l'article 38.2, toute décision visant un signalement pour
une situation d'exposition à la violence conjugale doit notamment prendre en
considération les facteurs suivants : les conséquences de l'exposition à cette violence sur l'enfant; la reconnaissance
de ces conséquences sur l'enfant par l'auteur de cette violence et les moyens pris par ce dernier pour prévenir
d'autres situations d'exposition à la violence, le cas échéant; les actions
prises par le parent qui n'est pas l'auteur de cette violence pour protéger
l'enfant de l'exposition à cette violence ainsi que les entraves à ces actions posées par l'auteur de cette
violence, le cas échéant; la capacité des ressources du milieu à soutenir
les parents dans l'exercice de la responsabilité; et l'ordonnance, la condition
ou la mesure de nature civile ou criminelle concernant la sécurité ou le
développement de l'enfant.»
• (17 h 30) •
Passage à la vie adulte. Le ministre a évoqué,
donc, ce sujet. Et là je dois vous dire, Mme la Présidente, c'était un moment très, très précieux et émotif pour moi
lors de l'étude de ce projet de loi. Depuis longtemps, j'ai toujours pensé
qu'à 18 ans, évidemment, on n'a pas vraiment atteint l'âge adulte. On est
tous passés par là. Mes enfants, j'en ai quatre, ils sont dans la trentaine,
une dans la vingtaine. On sait ce que ça prend pour permettre à un jeune de
18 ans de devenir vraiment un adulte, donc, au niveau de l'emploi, au
niveau académique, logement, etc. Et, à plusieurs reprises, j'ai eu l'occasion d'en parler avec le ministre. J'ai
regardé des modèles ailleurs dans d'autres pays, le gouvernement s'engage à un
accompagnement de ce jeune, qui... souvent,
à 18 ans, ils n'ont pas de logement, ils n'ont pas fini leur éducation. Il
y en a qui tombent dans l'itinérance,
dans la rue, dans la drogue, un taux de mortalité très élevé comparé à la
population en général. Et donc il y a beaucoup d'études dans ce sens.
J'ai commencé à lire sur le sujet il y a plusieurs années.
Alors, je revenais constamment au ministre, et il
me disait toujours que ce n'était pas possible, etc. Certaines réponses qui avaient été données, qui ne faisaient
pas l'affaire d'ex de la DPJ, des jeunes qui sont maintenant adultes et
qui militent pour un accompagnement depuis certaines années. Ils sont venus. Je
les ai invités à venir à l'Assemblée nationale
pour une conférence de presse, et le ministre les a rencontrés. Et c'était un
moment très fort, très fort pour eux, pour ces jeunes.
Et la belle histoire, c'est que, quelques jours
plus tard, le ministre m'a annoncé qu'il allait d'ailleurs accorder, donc, cette aide dans la loi. C'est enchâssé dans
la loi. Donc, on va être comme les autres provinces qui offrent ce service.
Donc, après l'âge de... on atteint l'âge de 18 ans, et on sera accompagné pour
le logement, santé mentale, l'éducation, l'employabilité, bien important. Et les études
montrent que c'est un investissement pour un gouvernement d'investir dans
ça, parce que c'est des gens qui vont
contribuer à la société dans tous les sens. Mais je pense beaucoup à
l'épanouissement de ces jeunes adultes, alors je vous dirais que c'est
un moment très, très spécial, et j'en suis particulièrement fière.
Aussi,
oui, un amendement que... j'ai réussi à avoir un amendement. On prépare, dans
le projet de loi... le ministre prévoyait
de préparer l'année avant son départ à 18 ans, se préparer pour sa sortie.
Donc, moi, j'ai déposé un amendement pour
qu'on le recule d'un an. Donc, deux ans de préparation. Le ministre a accepté.
Donc là, on voit qu'on vient vraiment renforcer.
Évidemment, comme le ministre le dit, là, il faut qu'il monte ce programme.
Donc, il devra monter ce programme, qui
prendra un certain temps pour être sûr que tous les collaborateurs seront là
pour appuyer. Et tous les liens se feront avec des établissements et les
institutions qu'il faudra comme partenaires.
Bon,
un mot sur les familles d'accueil. Je tiens à souligner que nous souhaitons...
bon, ça, ça concerne l'amendement. Oui,
ça concerne les plus de 21 ans. Maintenant, pour l'amendement, j'ai
peut-être une question pour vous, Mme la Présidente. Si je comprends bien,
est-ce que je présente l'amendement? Vous, vous avez l'amendement en main? Oui.
Donc, je pourrais peut-être l'évoquer.
Une voix :
...
Mme Weil :
Oui. Donc, je ne l'ai pas en main
avec moi, mais l'idée, ici, c'est que, pour les familles d'accueil, c'est qu'on
puisse permettre... c'est une demande du collectif des DPJ, mais aussi de la
Fédération des familles d'accueil et des ressources intermédiaires du Québec. C'est de permettre ceux qui sont
vraiment bien dans leur famille d'accueil... Il y en a qui sont là depuis très, très longtemps. Et, si, à
18 ans... il y a déjà une disposition qui dit que s'ils sont toujours à
l'école, au cégep, ils peuvent rester
jusqu'à ce qu'ils finissent... au secondaire, en fait. Mais là la demande,
c'est qu'ils puissent rester jusqu'à
21 ans. L'amendement a été refusé, mais je redépose, parce que, là, on a
la certitude, parce que, déjà, ils sont très stables dans ce milieu de famille. On nous a vraiment évoqué des
expériences formidables de jeunes qui sont très bien dans leurs familles
d'accueil, et la difficulté pour eux de quitter cette famille d'accueil à un si
jeune âge.
Alors,
je conclus, donc, Mme la Présidente, avec ça. C'est un tour rapide des amendements
qui ont été apportés...
Il
y a un... Ah! excusez-moi, il y a un... que je soulèverais, oui, il me reste quelques minutes. Il y a un dossier, puis j'y
reviendrais demain dans mon discours, pour les autochtones, et ça concerne...
excusez-moi, c'est le délai de placement, qui fait en sorte que, si un enfant d'une communauté autochtone est
placé, il y a, dans la loi, actuellement, une limite dans le temps pour que ça fonctionne. Et, si ça ne
fonctionne pas, il va falloir trouver une solution permanente, si ça ne marche
pas, pour un retour dans sa famille.
Alors, plusieurs
groupes sont venus dire... Et là il y a un amendement que le ministre avait
proposé dans son projet de loi pour dire : À moins qu'il y ait un conseil
de famille. S'il y a un conseil de famille dans cette communauté, il n'y aura pas de limite de placement. Mais ce
qu'on nous a expliqué... C'est Richard Gray, en particulier, qui nous a
expliqué que c'est vraiment une
minorité de communautés qui ont des conseils de famille, et que la tradition et
la façon de faire, dans les
communautés autochtones... Le temps, c'est l'inverse de notre notion de temps.
Je peux parler de l'importance du temps chez nous. Pour eux, le temps, c'est
infini. Donc, ils prennent en charge l'enfant, et c'est la communauté qui prend
en charge l'enfant, donc ce n'est pas juste les parents. Le concept de
parentalité est très différent. C'est la grand-mère, la tante, les amis, c'est la communauté qui prend en charge.
Et c'est le vécu qu'ils ont. Alors, ils ont demandé d'enlever cette exception
et de tout simplement dire que ça ne
s'applique pas pour les communautés autochtones, et ça fait longtemps qu'ils
demandent cet amendement.
Et ce que j'ai
découvert, par les études, etc., c'est des motifs de compromission qui ne sont
pas que... La vie, en général, c'est... Plus
de 80 % des cas, c'est de la négligence, parce qu'ils vivent dans la
pauvreté, ce n'est pas des cas de
violence. Il y en a. C'est une autre situation. Mais ce qu'on dit dans les
études, c'est vraiment un problème de soins ou d'attention, etc. Mais, comme on
me l'a expliqué, nous, on gère ça. Nous, on a les institutions pour gérer ça,
on a les organismes, on a la
communauté. Et, si vous déplacez l'enfant loin de sa communauté, on risque, et
c'est ce qui arrive, de briser, de
créer une fissure entre ce jeune, cet enfant et sa communauté à tout point de
vue, culturel, etc., alors... et c'est très difficile de réintégrer
avant.
Alors, ils sont venus
plaider leur cause. Vous avez vu plusieurs articles de journaux là-dessus. Mais
je voudrais revenir là-dessus demain, dans
mes remarques finales, parce que c'est un enjeu important. On parle de leur
donner plus de pouvoirs, de
l'autonomie de ces communautés, et ça, c'est un exemple très, très concret de
l'importance qu'ils aient une autonomie sur ces enjeux-là.
Alors, merci, Mme la
Présidente. Ça conclut donc mes propos pour ce...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci,
Mme la députée. Je suis maintenant prête à céder la parole à Mme la députée
de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Je vous rappelle que vous disposez d'un temps de 30 minutes.
Mme Manon
Massé
Mme Massé : Merci, Mme la Présidente.
Bonjour, chers collègues. On arrive à une étape importante, hein? Je me rappelle, j'étais, à l'époque, chef parlementaire
pour Québec solidaire lorsque le malheureux incident — ce
n'est pas un accident — qui
est arrivé à la jeune fille de Granby nous a mis, tout le monde, à l'envers.
Et, je me souviens, le premier ministre et moi, on s'est regardés et on
s'est dit : Plus jamais. Et le chemin est parti sur une nécessaire
révision de la Loi sur la protection de la jeunesse.
Ça faisait longtemps qu'on le savait. Ça faisait
longtemps qu'on savait que notre système fonctionnait mal, qu'on savait que les conditions de travail dans
lesquelles travaillaient nos travailleuses n'allaient pas bien, qu'on savait
que nos enfants
se retrouvaient trop souvent sur des listes d'attente. Bref, on savait que ça
n'allait pas bien. Mais, à un moment donné,
il y a des électrochocs, et celui qui, malheureusement, a sacrifié la vie d'un
enfant de sept ans est un électrochoc qui nous amène à, aujourd'hui, arriver à l'étape de l'adoption du projet de
loi n° 15, qui vise justement à revoir la... qui est pour une réforme de la protection de la jeunesse.
C'est sûr qu'avant ça il y a eu une longue démarche, parce qu'on s'est
dit : Cette fois-là, on va faire le travail, on va mettre les deux mains
dedans, on va aller à fond. Et il y a eu cette commission spéciale qui,
d'entrée de jeu, après deux ans de travail forcené, je vous dirais... parce que
les gens qui travaillaient là travaillaient
à temps très plein, sont arrivés avec des conclusions, sont arrivés avec des
enlignements et ont guidé le chemin pour le projet de loi qui a été
déposé par le ministre.
• (17 h 40) •
Je vous dirais, on pourrait reprendre l'ensemble
et revoir le tout. D'entrée de jeu, vous le savez, ma formation politique est en faveur de ce projet de loi là.
Mais, ceci étant dit, on a un rendez-vous manqué, un rendez-vous manqué parce
que ça n'arrive pas souvent, là, qu'on
dépoussière, mais qu'on fait plus que dépoussiérer, hein, on se repose... La
commission Laurent s'est... La
commission spéciale, qu'on a appelé, disons, la commission Laurent, a vraiment
mis la main à la pâte, n'a pas juste
passé un coup de balai, elle est allée au fond. Les questions ont été posées.
Les experts ont été au rendez-vous. Les
personnes qui ont vécu la situation ont été considérées comme les experts, que
ce soit tant les enfants qui ont passé par la DPJ ou les familles
d'accueil. Bref, un beau travail réalisé par la commission Laurent.
Mais aujourd'hui je ne peux pas refaire tout le
tour, et mon collègue de Jean-Lesage viendra compléter demain, mais je veux attirer l'attention sur deux grands
absents que je nomme un rendez-vous manqué. Le chapitre 12 du rapport
de la commission spéciale nous demandait
quelque chose de très spécifique, il nous demandait de reconnaître les impacts
de conflits familiaux et de la violence
conjugale sur les enfants. Les constats étaient clairs : les intervenantes
ne sont pas assez suffisamment
formées et préparées pour faire face aux situations de violence conjugale; on
constate un manque de coordination entre la DPJ et les maisons
d'hébergement; l'expertise, l'expertise des maisons d'hébergement, des
intervenantes en maison d'hébergement n'est pas reconnue; le système judiciaire
est mal adapté pour les situations de violence
conjugale. Bien sûr, avec le tribunal spécial, on fait un pas, mais c'est quand
même juste... il n'est même pas sur l'ensemble
du territoire. Dans une situation de violence conjugale, c'est le rapport
Laurent qui nous le rappelle, l'agresseur peut utiliser le tribunal pour
contrôler ou pour punir sa victime. La commission recommande donc la nomination
d'une personne responsable de la violence conjugale dans chaque direction de la
protection de la jeunesse.
Entre vous et
moi, je ne m'attendais pas à voir nécessairement tous les éléments. Mais,
honnêtement, de voir que, dans le dépôt du projet de loi, dans le dépôt
initial, il n'y avait rien concernant la violence conjugale, ah! bien là, les deux bras m'ont tombé. Les deux bras m'ont tombé
parce que je ne peux pas croire qu'avec des recommandations aussi claires d'un travail aussi sérieux ou avec autant
de rigueur que l'a fait la commission Laurent, où on reconnaît et on dit
clairement qu'il faut aborder la question de
la violence conjugale, qu'il faut, collectivement, s'éduquer sur les impacts de
la violence conjugale, bien sûr sur
les femmes, mais sur la famille, sur les enfants, sur la famille élargie...
d'avoir un projet de loi qui est déposé puis qui n'avait aucune mention,
pour nous, il y avait quelque chose là d'inacceptable.
Alors, bien
sûr, on a travaillé fort avec les oppositions, avec le ministre pour essayer de
faire en sorte qu'on n'en reste pas
là. On revoit cette loi-là. Je ne me souviens plus de combien d'années cette
loi-là n'avait pas été revisitée. Là, on
avait une occasion en or d'arriver au XXIe siècle et de faire en sorte que tous les apprentissages, que chaque meurtre de femme, chaque féminicide posé par les mains d'un
conjoint ou d'un ex-conjoint servent à quelque chose, servent à nous
enseigner quelque chose.
Les groupes en violence conjugale, d'ailleurs,
ont sonné l'alarme. Les groupes en violence conjugale nous ont indiqué le
chemin à suivre. La commission Laurent et les expertes en violence conjugale
nous ont indiqué le chemin. Et l'alerte a
même été lancée en conférence de presse, parce que, comme nous, elles ont bien
vu, ça n'avait pas de bon sens, l'absence
totale. Alors donc, elles nous ont clairement dit, en conférence de
presse : «Si aucune modification n'est apportée au projet de loi,
plusieurs pratiques mettant en danger les enfants et leurs mères se
perpétueront en toute impunité.»
Quelles sont
ces pratiques, Mme la Présidente? Bien, on a essayé, à Québec solidaire... J'ai
d'ailleurs cinq députés solidaires
qui sont allés intervenir, avec leur expertise, des hommes, des femmes, ma
collègue qui a travaillé au niveau de Rebâtir la confiance, mon
collègue qui était à la commission Laurent, et, aujourd'hui, moi. Parce que,
oui, Mme la Présidente, en tant que
responsable du dossier de condition féminine, c'est à ce titre-là que je suis là
aujourd'hui pour dire : On ne peut pas manquer ce rendez-vous-là.
Il y a trop de femmes qui l'ont payé de leur vie et il y a trop d'enfants qui
l'ont payé de leur vie, qui ont payé de leur vie le fait qu'on ne veut pas,
comme législateurs, le gouvernement ne veut pas, comme législateur, reconnaître que la violence conjugale a un impact
particulier chez les femmes, certes, mais chez les enfants dans ces
familles-là.
Et c'est
pourquoi nous avons redéposé, Mme la Présidente, aujourd'hui même, des
amendements qui viennent nous dire quelles sont ces pratiques. Comme nous le
disaient les groupes de femmes, les expertes en violence conjugale auprès
des femmes et de leurs enfants, donc, «plusieurs pratiques mettent en danger
les enfants et leurs mères».
Alors, on a
redéposé ces amendements-là parce que, bien sûr, le ministre a, après avoir
entendu les groupes, après avoir entendu mes collègues, les collègues des
oppositions dire : Il ne faut pas manquer ce rendez-vous-là, là... On ne
peut pas, d'un côté, se désoler de
féminicides, on ne peut pas se désoler qu'il y ait des pères violents qui tuent
leurs enfants avant de se suicider sans agir quand on peut le faire. Et c'est
exactement ce rendez-vous qui a été manqué. Sauf si, bien sûr, une,
comment on dit ça... que le ministre, finalement, se dit : Oui, en se
couchant à soir, je ne suis pas capable de vivre avec ça sur la conscience, moi, là, de penser que, parce que je n'ai pas
inclus, par exemple, des amendements qui nous ont été... qu'on a
défendus auprès du ministre, plusieurs...
Aujourd'hui,
on n'en aura déposé que quatre qui nous apparaissaient comme l'infrastructure
de base, le squelette de ce que
voulaient nous aviser... de ce que voulaient nous donner comme moyens les
femmes qui sont intervenues, des femmes expertes en matière de violence conjugale,
qui sont intervenues pour venir nous dire : Bien, vous savez quoi, quand
il s'agit d'aliénation parentale, c'est une
pratique — et
là je reprends leurs termes — qui
met en danger les enfants et leurs mères.
Et ça va se perpétuer si vous ne l'encadrez pas, si vous n'envoyez pas un
message clair que cette pratique n'est pas documentée de façon à nous
dire clairement que ce principe-là, quand on l'applique en situation... quand
on l'applique pour analyser une situation de
violence conjugale, pour voir, par exemple, c'est quoi, le meilleur intérêt de
l'enfant, bien, si on considère que
la femme qui ne veut pas que l'enfant ait de lien régulier avec le parent
violent, bien, elle a peut-être des
bonnes raisons de ne pas le vouloir, puis que la femme qui, bien sûr, va
essayer de protéger son enfant, si on considère que c'est de la
domination parentale... On ne s'en sort pas. Alors, ça, c'est un des exemples.
• (17 h 50) •
Ensuite,
bien, écouter l'enfant. L'enfant est en âge de s'exprimer. L'enfant est capable
de vous dire... Ça aussi, c'est des amendements qu'on aurait voulu voir
apparaître. Parce que, oui, le ministre a fait un pas en disant, après la
pression, et tout, que la violence conjugale
peut être... doit être considérée comme motif de compromission. Mais, un coup
qu'on a dit ça, Mme la Présidente, on
n'a rien dit ou presque. Si on n'est pas capable de comprendre... Ça fait
longtemps qu'on le sait, que la
violence conjugale, ça n'a pas de bon sens pour les familles. Ça fait longtemps
qu'on sait que ça tue des enfants, que ça tue des femmes. Mais ça a de l'air
qu'on ne comprend pas comment ça marche, parce que, quand vient le temps
d'inscrire ça dans une loi, on ne le fait pas.
Alors,
c'est très... Comment dire? C'est là pourquoi je parle de rendez-vous manqué,
parce que c'est un angle mort du projet de loi qu'on est venu mettre un
petit plasteur, là, en disant : O.K, ça va être... on va le concevoir
comme motif de compromission. C'est un gain,
là. Tu sais, je ne veux pas dire... je ne vais pas cracher dans la soupe, mais,
en même temps, si on n'est pas
capables de se dire, ensemble, comme législateurs, c'est quoi qu'on reconnaît
comme étant périlleux pour nos
enfants, parce que c'est l'intérêt de l'enfant qui nous guide, bien, je pense
qu'on passe à côté de ce qu'aurait pu amener réellement comme... disons, comme réel changement la protection des
enfants en matière de violence conjugale. Parce que, et avec raison, si
on ne le comprend pas...
Hein,
quand la commission Laurent parlait de formation, quand les groupes de femmes
qui sont venus en audition nous
parlaient de l'importance de la formation, quand la coroner qui a étudié la
situation de cet homme qui a assassiné ses deux enfants, et je la cite, hein... la coroner, ce qu'elle dit, c'est...
«...après avoir tué ses deux enfants, la coroner [dit] que toute cette violence était dirigée envers son
ex-conjointe, et [ça] s'apparente à [un] règlement de comptes.» Ça, là, c'est
qu'on ce entend dans les groupes de femmes
depuis très longtemps. C'est ce qu'on sait dans les groupes de femmes depuis
très longtemps.
Alors, soit, le motif
de compromission est là, la grille d'analyse est là. Mais il faut travailler à
déconstruire les mauvais plis qui nous ont
amenés là où on est dans notre société, c'est-à-dire qu'on a de la misère à
protéger nos enfants dans des cas de
violence conjugale parce qu'on ne comprend pas la mécanique de comment ça
fonctionne. Alors ça, c'est le premier rendez-vous manqué, Mme la
Présidente. On a déposé des amendements dans ce sens-là pour venir essayer de
boucher l'angle mort qui est présentement dans le projet de loi tel qu'amendé
en commission.
L'autre
grand absent de ce projet de loi là, c'est notre relation de nation à nation
avec les peuples autochtones. Je ne parlerai pas de la loi n° 92, le C-92 que le gouvernement canadien a adopté parce
que le gouvernement du Québec, après 1985, après avoir reconnu le droit à
l'autodétermination des Premières Nations, après avoir reconnu les Premières Nations,
après avoir reconnu la capacité qu'ils ont de partager et de prendre des
décisions en fonction du territoire, en
fonction de leur culture, etc., bien, le gouvernement du
Québec, les gouvernements du Québec jusqu'à aujourd'hui ont laissé traîner,
malheureusement, cette réalité qui fait que les gens des Premières Nations
n'ont pas l'autorité, parce qu'on leur enlève, parce que la Loi sur les Indiens l'a enlevée, parce que la Confédération
canadienne est coloniale, et continue d'être coloniale... Le Québec continue d'agir de façon coloniale avec
les premiers peuples, parce qu'on dit : Ah, mais, vous savez, en matière
de protection de l'enfance, c'est une compétence du Québec, et donc, par
conséquent, vous n'avez pas l'autorité de vous
occuper de vous-mêmes à 100 %. Je paraphrase, je n'ai fait aucune
citation, c'est de l'interprétation libre. Mais c'est une interprétation
qui est assez collée à la réalité, et je vais vous en faire la démonstration.
S'il
y a un des endroits où la Déclaration des Nations unies pour le droit des
peuples autochtones est claire, c'est que les peuples autochtones ont le droit
de dire qui ils sont, comment ils veulent que ça fonctionne, prennent soin
d'eux autres mêmes, prennent soin de
leur langue, leur culture, prennent soin de leurs enfants, de leurs familles,
et qu'ils ont... C'est ça, le droit à l'autodétermination. Ils peuvent
déterminer eux-mêmes qu'est-ce qui est bon pour eux-mêmes.
Alors là, dans le
projet de loi n° 15, Mme la Présidente, on est arrivés à quelque chose de
complètement... je ne veux pas le qualifier,
je ne veux pas le qualifier, je ne trouve pas le bon mot, puis je ne voudrais
pas mettre des mots qui n'ont pas le
plein sens de ce que je veux dire. Ce à quoi on assiste, c'est qu'on le sait,
que les enfants des Premières Nations et les Inuits sont surreprésentés dans les services de direction de la
protection de la jeunesse. On peut définitivement savoir pourquoi, hein? La commission Laurent l'a indiqué,
la commission Viens a tracé des lignes, là, en fait on n'arrête pas d'en
parler depuis très longtemps... qui fait en sorte que le cadre colonial qu'on
applique sur les Premières Nations, ça ne marche
pas! Ça ne marche pas. Quand on dit : Pour être une bonne famille, il faut
bien avoir un enfant par chambre qui mesure telle grandeur par telle
grandeur, allez au Nunavik, vous allez voir, c'est impossible. Allez sur une
communauté comme Manawan, vous allez voir, c'est impossible. Pourquoi? Bien,
pas parce que ces gens-là n'aimeraient pas avoir leurs chambres à eux autres tout seuls, parce qu'ils sont en hyper crise
de logement. Quand il n'y a même pas d'eau au Nunavik pour flusher ta
toilette, là, c'est bien possible que, quand tu es 12, 13, 14 de toutes les
générations dans cette maison-là, ça ne réponde pas aux règles de la DPJ.
Bon,
il y a des bouts qui ont été faits dans le Grand Nord. Ils ont leur agence, ils
ont leurs mécanismes, etc. Mais il était
temps qu'on agisse aussi pour le sud, pour les Premières Nations au sud. Il
était temps qu'on agisse aussi en reconnaissant vraiment, et pas seulement en mots, mais
vraiment que les Premières Nations sont les mieux placées pour savoir de ce qui
est bon pour leurs enfants.
• (18 heures) •
On
a, là aussi, ramené des amendements, Mme la Présidente, pour la simple et bonne
raison... notamment, dans l'espèce de
préambule ou, à tout le moins, l'article 1, où le ministre a la très bonne
volonté en disant que les autochtones sont les mieux placés pour répondre aux besoins de leurs enfants de la
manière la plus appropriée. Ça, là, c'est écrit actuellement dans le
projet de loi. Mais, quand les autochtones viennent nous dire : Vous savez
quoi, le conseil de famille, là, pour les
placements, pour les placements à durée maximale, là, ça, là, ce n'est pas dans
notre culture, ça, là, ça va faire en sorte que ça va discriminer nos enfants... On vous le dit : On est les
mieux placés... Attendez, je ne relis pas la bonne feuille. Ça ne va pas bien. «On est les mieux placés pour
répondre aux besoins de leurs enfants dans la manière la plus appropriée.» Ça,
on a eu beau le dire une fois, deux fois,
trois fois, même un peu choqués, on va être honnête... Les Premières Nations
aussi se sont choquées. Ils ont
dit : Tu ne peux pas, dans le même cadre d'un projet de loi, écrire une
phrase comme ça à l'article 1 puis,
rendu à l'article... rendu à l'article 131 — c'est-u celle-là, oui? — faire
en sorte qu'on impose cette vision coloniale, qui peut être tout à fait
bonne, je ne la remets pas en cause, pour les enfants allochtones. D'ailleurs,
les autochtones ne remettent pas en cause
que c'est bon pour les enfants allochtones. Mais ce qu'ils disent, c'est que ça
n'a pas de bon sens pour nous, les
Premières Nations et les Inuits. Ça ne va pas avec notre façon de fonctionner.
Et, en bout de ligne, qu'est-ce que ça va faire? Ça va pénaliser les
enfants autochtones encore.
Ça
fait que moi, je les comprends quand ils sont choqués. Puis d'ailleurs ils
prennent la peine, le 6 avril, là, ça ne fait pas très longtemps,
là, on était en pleine étude du projet de loi, où ils viennent, ils cosignent,
une bonne batch de Premières Nations,
ensemble, et aussi, oui, des gens du Nunavik... signé par le CSSSPNQL, qui
dit : Nous, là, cette méthode-là
de conseil de famille, ça ne fonctionne pas, ça crée préjudice aux enfants de
nos familles, et on vous demande donc d'inscrire l'exception, pour les
familles... pour les enfants autochtones, de cette règle-là.
Moi,
là, quand je dis que je traite de nation à nation, là, ça veut dire que je
considère que ces gens-là sont nos égaux, qu'ils sont nos égaux et
qu'ils savent ce qui est bon vraiment pour leurs enfants.
Alors,
c'est sûr que j'ai ramené l'amendement, Mme la Présidente, parce que je le
sais, qu'ils nous écoutent en plus, là.
Ils nous écoutent, pourquoi? Bien, parce qu'ils ont espoir que, même si le
gouvernement du Québec conteste leur capacité de s'occuper de leurs
enfants avec... en tout cas, le petit différend avec Ottawa, là. Même si le
gouvernement du Québec répète constamment
que sa façon de travailler avec les Premières Nations et les Inuits, c'est de
nation à nation, quand il vient le
temps de démontrer, là, que c'est vrai, c'est vrai qu'on travaille de nation à
nation, parce que le Parlement du Québec, il adopte une loi sur la protection de la jeunesse, système dans lequel
les enfants autochtones et inuits sont surreprésentés, puis qu'ils nous
disent : S'il vous plaît, imposez-nous pas ça, là... Ça, là, ce n'est pas
adapté culturellement. Moi, je ne comprends
pas que le ministre n'a pas sauté là-dessus. Ce n'est pas grand-chose, là,
vraiment pas grand chose, juste de dire :
Ah! oui, vous avez raison, dans le fond, vous nous le dites, on vous croit. Ce
n'est pas une révolution ça, là, là, juste de reconnaître que cette
condition-là des conseils de famille ne s'appliquerait pas aux enfants
autochtones.
Alors, je donne une
dernière chance au ministre. J'ai déposé l'amendement. Nous avons déposé
l'amendement. Et je donne une chance au
ministre parce que, des coups durs, de ce temps-là, là, les Premières Nations,
là, ils en ont eu quelques-uns. Ils
en ont eu quelques-uns. On a voulu faire en sorte, parce qu'ils nous l'ont dit,
que les enfants, pour une meilleure
réussite scolaire, les enfants autochtones ne soient pas soumis aux mêmes
règles que le reste des enfants, pour s'assurer
une réussite scolaire. Ça a été une fin de non-recevoir. Quand je suis rentrée,
à un moment donné, en commission pour
aller jaser avec la ministre, mes collègues qui étaient ici, là... J'ai dit au
ministre : Bien, voyons, sur la question, justement, des conseils
de famille, je veux dire, écoutez, M. le ministre, là, ça n'a pas de bon sens.
Je pense que le ministre aurait fort
probablement, par lui-même, aimé ça changer ce qui était écrit dans cette
loi-là. Je ne le sais pas, c'est qui qui dirige. Mais je sais une chose, c'est que, quand j'ai regardé le ministre dans
les yeux puis que je lui ai dit que ça n'avait pas de bon sens, là, qu'on ne pouvait pas, dans un
préambule, écrire — puis
ça, ce n'est pas moi qui l'ai écrit, c'est lui — que les gens
sont les mieux placés pour répondre aux besoins de leurs enfants de la manière
la plus appropriée, puis, quand ils nous disent : Ce n'est pas la
bonne façon, on leur dit non, j'ai vu dans ses yeux... j'ai vu son malaise.
Alors,
je ne le sais pas, je ne le sais vraiment pas qui qui empêche ça, là, mais il
reste 24 heures. Il reste 24 heures pour revoir que, si on veut que
les bottines de l'introduction de l'article 1 suivent les babines de
l'article 131, bien, il va falloir
que l'amendement qu'on a déposé, Mme la Présidente, soit intégré. Puis je le
sais, qu'il n'y aura pas de chichi avec les autres partis, parce que, quand je
suis allée à la rencontre du ministre, les autres partis étaient là aussi pour
dire : On ne pouvait pas faire ça.
Alors,
moi, mon attente, aujourd'hui, elle est claire. Il reste 24 heures avant
l'adoption finale. C'est pour ça que l'institution
s'est donné la possibilité, à cette étape-ci de la prise en considération du
rapport, de ramener des amendements, et c'est pour ça, Mme la Présidente, que,
dans le cas des Premières Nations, j'ai ramené deux amendements, un au
préambule et un à l'article 131,
pour être en cohérence avec ce que le gouvernement de la CAQ nous dit, qu'il
veut traiter de nation à nation. Et,
d'ici les 24 prochaines heures, j'espère qu'on aura des bonnes nouvelles,
collectivement, à annoncer à nos frères et soeurs autochtones. Merci,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je
vous remercie, Mme la députée. M. le député de Jacques-Cartier, la parole
est à vous. Je vous rappelle que vous avez un temps de parole de
10 minutes.
M.
Gregory Kelley
M. Kelley : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Je veux juste remercier ma collègue de Marie—Saint-Jacques pour son
intervention. Elle a soulevé un enjeu de qui est vraiment en charge pour
nécessairement accepter de réviser un article qui était déjà adopté. Moi, j'ai
entendu dans cette Chambre, ici, sur plusieurs reprises les membres du
gouvernement qui ont dit : Il faut avancer sur le projet de loi n° 15
plus rapidement, en ordre d'avancer notre agenda, avec nos autres piles
de projets de loi qu'on a déposés, avec une session qui a seulement comme huit
semaines qui restent.
Alors, nous
avons un projet de loi devant nous pour la protection des jeunes personnes, des
jeunes enfants partout au Québec,
mais des sections qui sont très importantes pour les enfants autochtones. Puis
on sait que c'est très complexe, Mme la Présidente, mais on sait qu'il y
a probablement le leader de ce gouvernement qui a mis de la pression sur le ministre d'aller plus vite, plus rapidement. Il
faut régler ça maintenant. Puis on a manqué une opportunité pour s'assurer que
leur projet de loi, une réforme majeure de notre système, réponde à des besoins
des nations autochtones du Québec.
Il n'y a pas
un équilibre, vraiment, entre le gouvernement puis les groupes qui viennent
ici, à l'Assemblée nationale, pour
participer dans les audiences publiques puis la création... tout le travail
autour d'un projet de loi dans la section des études détaillées. Le
gouvernement puis leur armée de fonctionnaires arrivent avec un projet de loi,
peut-être il y a des consultations qui sont
faites : Ah oui! merci pour cette idée-là, c'est très intéressant, mais,
finalement, c'est le gouvernement qui dépose ça. Je comprends, il y a des
règles. On ne veut pas jamais commis l'outrage puis donner un projet de
loi avant que c'est déposé à des autres
élus. C'est les règles. Mais, quand même, le moment que c'est déposé, on donne
souvent des groupes deux semaines de
faire une révision de ces lois, préparer un mémoire, préparer des
recommandations, puis revenez ici avec vos commentaires pour les
audiences publiques, puis, après ça, on verra si on va modifier la loi.
• (18 h 10) •
Au Québec, on
a l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador qui fait ça
souvent, et, des fois, ils sont interpelés de faire ça sur plusieurs
projets de loi en même temps. Puis, quand même, les conseils de bande ou les
différentes communautés, si c'est les Inuits, dans le Nord, ils n'ont pas les
mêmes ressources que le gouvernement du Québec.
Ils n'ont pas une armée d'avocats qui sont prêts à regarder un projet de loi
puis de faire les commentaires comme ça.
Ils n'ont pas tous des experts. Alors, de faire tout ce processus, de faire des
commentaires, des recommandations et des
mémoires pour un projet de loi, ça prend du temps, ça prend de l'argent. Et eux
autres sont toujours de bonne foi de participer
dans notre processus, notre façon de faire des choses. Et je peux comprendre
quand le grand chef Ghislain Picard, des fois, dit que le gouvernement
abuse la bonne foi des Premières Nations et les Inuits du Québec. Je peux
comprendre pourquoi il dit ça.
Sur le côté de l'opposition, il y a toujours
cette question d'équilibre aussi. Nous n'avons pas des fonctionnaires qui travaillent pour nous. Nous avons des attachés
politiques, des recherchistes qui sont extraordinaires, formidables, mais
ils partagent plusieurs différents chapeaux,
comme recherchistes, ils travaillent sur les différents dossiers, eux autres ne
sont pas nécessairement un expert dans un domaine non plus. Alors, ils font
leur mieux possible pour aider nous. Je sais que les élus dans
l'opposition aussi parlent avec les différents groupes pour mieux comprendre
leur perspective sur un projet de loi. Mais,
quand même, de bien comprendre comment tout un système marche, un système aussi
complexe comme la protection de la
jeunesse, c'est sûr que les gens qui ont travaillé pour le ministère, qui
travaillent dans le système ont plus
d'expérience, plus d'expertise que moi ou, quand même, la députée de Notre-Dame-de-Grâce, qui a travaillé dans ce domaine pour une certaine période, mais, après
ça, elle fait déjà autre chose après, on peut étudier, on peut regarder
différents rapports, mais, en bout de ligne, Mme la Présidente, c'est
eux autres qui sont les experts.
Alors, quand
on pose des questions et quand on arrive avec les suggestions, les
recommandations, les amendements qui
sont préparés par les Premières Nations dans les différents groupes puis on
dépose ça... Et le ministre nous explique : Non, non, tout est correct, ici, ça va bien. Il y a une certaine réalité
qu'on dit : Bien, regarde, on a fait de notre mieux possible, on a présenté les arguments, mais on laisse ça
dans la cour du gouvernement d'expliquer aux groupes pourquoi, oui, cet
article marche avec leurs besoins ou avec leurs demandes ou non.
Et, avec ce projet loi, je pense qu'on a
vraiment raté une occasion, parce qu'après qu'on a débattu de sections qui
touchent les enfants autochtones, où je vais dire qu'il y a certains éléments
qui sont très bons, qui fait l'affaire des différents
groupes, et des suggestions qui étaient faites par les groupes autochtones,
mais, quand même, on arrive avec cette situation-là où, avec le comité
des familles, on a eu des demandes de retirer ça, le projet de loi, mais on a
dit non.
Alors, je pense que c'est important, souligner
et lire, ici... Et peut-être, ma collègue vient juste de déposer un amendement, peut-être, le gouvernement, dans les
24 prochaines heures, vont accepter ça. Mais je veux lire le courriel de
M. Gray, qu'il a envoyé au président de
la commission et à tous des membres de la commission. Tout le monde a reçu ce
courriel-là : «Hi, Catherine. Thanks for sharing the info in English
and please allow me to share some comments about the process we followed for the
consultation that was held on Tuesday morning and the discussions that occurred
Wednesday at the parliamentary committee on Health and
Social Services, clause by clause consideration of Bill 15. I make these comments with all due respect, and they are not
meant to be offensive in any way. They are important constructive criticisms.
«Firstly, I believe it was
shared by everyone [on] Tuesday morning that the time allowed for us to study
these questions in advance and prepare was totally inadequate and does not
represent a true consultation that First Nations expect, especially when it comes to these important matters that affect
the lives of our children, families, and communities. It is also unacceptable to hold a consultation on
such important matters without translation services. Doing so inevitably
silences English-speaking participants' views and concerns. More often than
usual, it seems the political processes are more
important than the substance of First Nations' concerns and needs when it comes
to these kinds of consultations. Further, after viewing the parliamentary proceedings on Wednesday, I got the
feeling that our views and perspectives we not adequately shared nor captured based on the discussions and
exchanges which occurred at the committee studying the bill. [That] brings
me to my second point.
«Secondly,
our concerns that Bill 15 will be imposing the creation of Family councils to
bypass maximum placement periods continue. The creation of a family council
should under no circumstances be conditional to the exemption of Indigenous children from the maximum placement periods. Because
Québec has now adopted this section and will be imposing it as a condition on First Nations,
will they be now ready to pay for its development, implementation, and training
or will they expect the feds — federal Government — to pay or get the child and family
services agencies — that offer both
protection or prevention services — to use
their existing funds to develop and implement these family councils? This is a real shame because we already have
limited funding, and our First Nations' child and family services agencies
could instead use their funds to
address their community needs and not those imposed by Québec. Québec seems to
be real concerned about the Feds
imposing standards on Québec, but it seems Québec does not have any problem
about imposing standards or conditions on First Nations. Why the double
standard? As a reminder, First Nations...» Excuse me. «...First Nations self-governance
and self-determination and our generic inherent rights in child and family
services and Québec is now inadvertently
forcing our community services to reorganize which is not its jurisdiction and
could be legally challenged.»
Il
n'y a pas beaucoup de temps qui reste, alors je vais juste dire : «The
Court of Appeal of Quebec has confirmed that all First Nations have an inherent
generic right to self-government as regards notably child and family services. This right is constitutionally
protected. It includes legislative jurisdiction and the right to apply and
enforce First Nation laws. The Rule
of Law requires that the National Assembly, the Ministers of the Government and
the Courts respect the decision of
the Court of Appeal. The laws of the province that infringe First Nation
jurisdiction only apply if their application is justified. Part of the test for justification is the consultation and
accommodation of the rights and viewpoint of First Nations. In this
context, the reintroduction of the rejected amendment is required.»
Je pense que
M. Gray a fait la démonstration qu'il faut changer des choses, on a une
petite fenêtre à la fin, Mme la Présidente,
mais ça, c'est, je sais, une autre chose où souvent les Premières Nations et
les Inuits sont frustrés, c'est... on
impose notre façon de faire ici, au Québec, puis ça va terminer devant la Cour
suprême ou Cour supérieure du Québec. On
adopte des lois qui sont contre la Constitution, on va faire une chicane, on va
dépenser l'argent qu'on était probablement mieux... mieux servir à mettre cet argent directement dans le système ou
ailleurs pour la protection ou, quand même, investir dans l'avenir des
enfants autochtones.
Alors, je sais que je n'ai pas plus de temps,
mais merci beaucoup, Mme la Présidente, pour votre écoute.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je
vous remercie, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mise aux voix de l'amendement
de la
députée de Notre-Dame-de-Grâce
Comme il n'y
a pas d'autre intervention, je vais mettre aux voix les amendements, en
premier, puis, ensuite de ça, nous voterons sur le rapport. Donc, l'amendement
proposé par Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce est-il adopté?
Des voix : Adopté.
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
M. le leader? Pardon?
M. Schneeberger : Contre.
Mise aux voix des amendements
du député de Jean-Lesage
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci. Les amendements proposés
par M. le député de Jean-Lesage sont-ils adoptés?
Des voix : Adopté.
M. Schneeberger : Contre.
Mise aux voix du rapport
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, rejeté. Donc, le rapport de la Commission de la santé et des services sociaux portant sur le
projet de loi n° 15, Loi modifiant la
Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives,
est-il adopté?
Des voix : Adopté.
M. Schneeberger : Pour, oui.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Adopté. M. le leader du gouvernement, pouvez-vous donner la suite des travaux?
M. Schneeberger : Oui.
Alors, Mme la Présidente, alors, pour la suite, je vous demanderais de rappeler
l'article 4 du feuilleton.
Projet
de loi n° 28
Reprise du débat sur
l'adoption du principe
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Donc, à l'article 4 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné
plus tôt aujourd'hui sur l'adoption du principe du projet de loi n° 28,
Loi visant à mettre fin à l'état d'urgence sanitaire. M. le député de Robert-Baldwin,
je vous cède la parole.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Donc, nous voilà, on reprend le débat sur le
projet de loi n° 28, Loi visant à mettre fin à l'urgence
sanitaire.
Le projet de
loi n° 28, c'est un projet de loi qui est très court, à peine huit
articles, Mme la Présidente. Donc, c'est... on en a déjà vu bien plus long que ça. Et, en fin de compte, c'est
simple, l'article 1 dit que «l'état d'urgence sanitaire déclaré le 30 mars 2020 et renouvelé depuis prend
fin». Bon, c'est très clair. Mais l'article 2, l'article 2
dit que «les mesures prévues par
décrets ou par arrêtés du ministre de la Santé et des Services sociaux pris en
vertu de l'article 123 de la Loi sur la santé publique qui sont en vigueur au moment où prend
fin l'état d'urgence le demeurent jusqu'au 31 [mars] 2022». Donc, l'État
d'urgence sanitaire prend fin, mais il demeure, il demeure en application
jusqu'au 31 décembre 2022. Bien là, alors, ce n'est pas... on ne met pas fin à l'état d'urgence.
Si on voulait faire ça, on resterait à l'article 1, et rien d'autre,
«prend fin», mais, non, en fin de
compte, on prolonge tout ça jusqu'au 31 décembre 2022. Ça, Mme la
Présidente, c'est évidemment notre plus grande objection. Ne serait-ce
que juste pour ça, nous voterions contre ce projet de loi.
• (18 h 20) •
Il y en a
d'autres, choses, mais juste ça, ce projet de loi qui ne fait pas ce qu'il dit
qu'il fait, il ne met pas fin à l'état d'urgence
sanitaire, il le prolonge d'encore quelques mois, mais pourquoi il fait ça? Il
fait ça, le gouvernement fait ça, dit-il, parce qu'il nous faut des mesures transitoires. Il nous faut des mesures
transitoires jusqu'au 31, donc jusqu'à la fin de l'année. Et pourquoi il nous faut des mesures transitoires?
Ah! parce que, sinon, on ne pourrait pas bien gérer les ressources humaines.
On nous dit même que, si on ne fait pas ça,
bien, ce sont 29 000 travailleurs de la santé de moins. Ah oui? Ils
disparaîtraient? Où est-ce qu'ils iraient, là? Ce n'est pas clair du
tout, Mme la Présidente.
En fin de
compte, il n'y a pas d'urgence sanitaire, à mon avis, il y a une urgence administrative.
Le gouvernement fait tout ça pour
mieux gérer ses ressources humaines et aussi pour mieux gérer, bien gérer,
enfin, dans son esprit, continuer de
gérer les contrats, les contrats de gré à gré qui ont été accordés depuis tout
ce temps-là. Alors, ce n'est pas une urgence sanitaire, c'est une urgence administrative. Mais, là, c'est là où j'ai
vraiment beaucoup de problèmes avec ce projet de loi. Les systèmes de santé et
de santé publique au Canada, dans toutes les provinces, sont relativement similaires.
Ils ne sont pas identiques, chaque
province a ses particularités, mais c'est très, très semblable. Les grands
principes sont les mêmes. Il n'y a aucune autre province au Canada où il y a
encore cet état d'urgence sanitaire. Depuis longtemps. Il y a eu, oui,
au début de la pandémie, mais depuis longtemps que l'Ontario, la
Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse, toutes ces provinces-là n'utilisent
pas de dispositions de l'état d'urgence sanitaire. État d'urgence sanitaire, je
vous rappelle, Mme la Présidente, qui est
renouvelé à chaque semaine. Encore aujourd'hui, après la réunion du Conseil des ministres, il a été encore renouvelé pour une autre
semaine. Ailleurs au Canada, on réussit à gérer sans cet état d'urgence.
De plus, Mme
la Présidente, l'argumentaire du gouvernement, c'est aussi : Bien là,
écoutez, les partis d'opposition, là,
il ne faut pas bloquer, là, il faut y aller, il faut y aller vite, on a déposé
un projet de loi, il faut procéder rapidement. Un instant. Un instant,
Mme la Présidente. Nous sommes toujours en démocratie. Aux dernières nouvelles,
le Parlement existe toujours. Nous sommes
toujours dans un État de droit. On est dans un État de droit. Dans une
démocratie libérale comme la nôtre,
Mme la Présidente, la fonction parlementaire, la fonction de contrôle du
Parlement, des parlementaires est au centre de notre vie démocratique. Le
gouvernement veut aller au-delà de ces mécanismes parlementaires qui existent
chez nous depuis plus d'un siècle, Mme la Présidente. Ça, c'est très
préoccupant. Et puis, en plus, on nous dit : Et là, là, si vous bloquez, là, vous allez causer un tort énorme à la
société québécoise. Non, nous allons faire notre travail, notre
travail de parlementaires. Comme j'ai
dit, c'est un projet de loi qui contient huit articles, ça ne devrait pas être
si long que ça d'étudier ce projet de loi, mais il faut l'étudier.
On a des
questions, on a beaucoup de questions à poser. Pourquoi on agit de cette
façon-là? Pourquoi on ne peut pas venir au Parlement, quand il y a ou
s'il y a des événements, des décisions, des mesures qu'il faut prendre, qui
sont nécessaires parce qu'il y a un grand
défi d'ordre sanitaire? Pourquoi ça ne peut pas être discuté au Parlement? Ça
se fait ailleurs, ça se fait en Ontario, ça se fait dans le Parlement
fédéral, ça se fait en Europe, ça se fait partout où il y a des démocraties libérales, où on peut discuter de ces
enjeux-là. Ah! mais non, au Québec, non, non, c'est une perte de temps de venir
au Parlement, ne serait-ce qu'une fois par mois, pour discuter de ces choses-là
si c'était nécessaire. Non, non, non, on ne peut pas faire ça, nous, là, allez, allez, allez, il faut aller vite.
Non, non, ça ne marche pas comme ça. On ne peut pas, en toute
conscience, on ne peut pas accorder au gouvernement un chèque en blanc pour
faire ces choses-là.
On nous a
parlé aussi... le ministre de la Santé nous a parlé de la vaccination. Si on
n'a pas ces mesures transitoires, bien
là, la vaccination s'arrête. Ah oui? On n'a jamais fait de campagnes de
vaccination au Québec? Ça fait plusieurs années, Mme la Présidente,
probablement que vous aussi, je ne sais pas... mais que nous recevons à chaque
année la vaccination contre la grippe ici même,
ici même, à l'Assemblée, et ça se passe très bien, toutes sortes d'autres
campagnes de vaccination. Je me
rappelle très bien, aussi, il y a quelques années de ça, la campagne nationale
de vaccination, lors de la dernière urgence sanitaire qui était le H1N1, on a organisé ça. On n'y a pas eu besoin
d'avoir de grandes entraves à notre démocratie libérale.
Ces choses-là
peuvent se discuter, ces choses-là peuvent... on peut s'accorder, ça ne prend
pas un débat parlementaire interminable pour faire
ça, quand on a besoin de le faire, Mme la Présidente. D'ailleurs, les juristes
qui sont venus en commission parlementaire
étaient tous d'accord. D'ailleurs, mes collègues qui ont parlé avant moi ont
mentionné Me Martine Valois ainsi que le Pr Louis-Philippe Lampron,
qui ont bien mentionné que, dans un État de droit, ce qui est proposé par le projet de loi n° 28 n'a
pas lieu de... ne se fait pas, ne peut pas se faire, ne devrait pas se faire.
C'est une entrave majeure à notre démocratie.
Et vraiment
je ne comprends pas pourquoi, je ne comprends pas pourquoi le gouvernement
insiste à ne pas vouloir vraiment, ne
pas vouloir vraiment, comme le dit le titre de la loi, mettre fin à l'état
d'urgence sanitaire. Ça peut se faire. Nous sommes capables de nous
gouverner, nous sommes capables de mettre en place des mesures, s'il le faut,
après discussions au Parlement. C'est pour ça qu'un Parlement existe, c'est à
quoi sert un Parlement.
Il y a eu des milliards de dollars qui ont été
donnés en contrats de gré à gré, Mme la Présidente. On comprend l'urgence en
2020. Bien là, maintenant, nous sommes en 2022, avril 2022. Je pense que ce
sentiment d'urgence n'est plus nécessaire.
Et, s'il fallait encore mettre des mesures extraordinaires, ça peut et ça doit
se discuter ici, dans cette Chambre, où
on doit avoir les différentes perspectives, les différentes opinions, où on
peut exprimer nos points de vue, où on peut poser les questions au gouvernement. Ça ne prend pas trois semaines pour
étudier ces choses-là, ça se fait... ça pourrait se faire assez
rapidement.
Donc, je ne
comprends pas, toujours, Mme la Présidente, pourquoi le gouvernement nous vient
avec cette loi, ce projet de loi qui,
soi-disant, met fin à l'état d'urgence sanitaire, mais, dans son
article 2, après avoir mis fin à l'état d'urgence sanitaire, on garde les mesures en place jusqu'à
la fin de l'année. C'est véritablement contradictoire et incompréhensible.
Je vois que
vous regardez l'horloge, Mme la Présidente. Je n'ai pas terminé, donc je pense
que je reprendrai lors de notre prochaine session.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : C'est la question que j'allais vous poser, M. le
député. Alors, on en prend note. Lorsque le débat sera rappelé, vous
pourrez poursuivre.
Ajournement
Alors, vous
aurez compris que, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont
ajournés à demain, jeudi le 14 avril 2022, à 9 h 40.
(Fin de la séance à 18 h 30)