(Neuf heures quarante minutes)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon mercredi à vous tous et toutes. Vous pouvez prendre place.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Et nous allons débuter notre séance avec la
rubrique des déclarations de députés. Et la première déclaration d'aujourd'hui
sera celle de M. le député de Beauce-Nord.
Souligner le retour de la campagne d'Opération
Nez rouge Beauce-Etchemins
M. Luc Provençal
M. Provençal :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Après une année d'absence sur nos routes,
les citoyens de la Beauce et des Etchemins peuvent à nouveau compter sur le
service d'Opération Nez rouge.
En activité depuis le 26 novembre dernier,
l'édition 2021 se poursuivra jusqu'au 31 décembre prochain. Ce classique du temps des fêtes contribuera non
seulement à rendre nos routes plus sécuritaires, mais permettra aussi de
soutenir financièrement des organismes locaux oeuvrant auprès des jeunes
et dans le sport amateur.
Reconnaissant
l'importance de cette organisation dans nos communautés respectives, mes
collègues de Bellechasse, Beauce-Sud et moi avons accepté la
coprésidence d'honneur de l'événement de notre région.
Les citoyens
et entreprises souhaitant être bénévoles peuvent visiter le site Internet
d'Opération Nez rouge ou se rendre
dès 20 heures, les soirs de service, à l'une des centrales suivantes :
polyvalente Saint-Georges, école Maribel de Sainte-Marie, école
Notre-Dame de Lac-Etchemin.
Nous vous souhaitons un heureux temps des fêtes
en toute sécurité. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Beauce-Nord. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de
Verdun.
Rendre hommage à Mme Chantal Machabée, journaliste
sportive
Mme Isabelle Melançon
Mme Melançon :
Merci, Mme la Présidente. Alors, aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à
Mme Chantal Machabée, une pionnière en journalisme sportif au
Québec.
Non seulement Chantal a-t-elle réussi à percer
dans un milieu d'hommes, mais elle a, pendant toute sa carrière, démontré sans relâche à quel point sa présence
dans ce domaine est pertinente. Première journaliste à prendre l'antenne au
Réseau des sports RDS, première femme à animer la télédiffusion du hockey
des Canadiens de Montréal, cheffe
d'antenne pour les Jeux olympiques de Vancouver et de Londres, à chaque nouvel
accomplissement elle nous en met plein la vue avec son professionnalisme,
son talent, son intelligence.
N'oublions
pas que Chantal est la maman de deux garçons, maman poule, selon ses propres
dires, et ça ne l'a pas empêchée de foncer vers son rêve.
J'espère que
son exemple saura inspirer d'autres jeunes femmes et les convaincre qu'elles
peuvent, elles aussi, rêver d'une formidable carrière en journalisme
sportif. Félicitations, Chantal Machabée!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Verdun. Et maintenant je cède la parole à
M. le député de Blainville.
Souligner le travail et l'engagement des membres
du Cercle de fermières Bois-des-Filion
M. Mario Laframboise
M. Laframboise : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Aujourd'hui, je veux rendre hommage à un organisme
qui fait un travail exceptionnel depuis sa fondation, en mars 1955, le
Cercle des fermières de Bois-des-Filion.
La mission du
cercle des fermières est la préservation et la transmission du patrimoine
culturel et artisanal, tel que le
tissage, la couture, le tricot, sans oublier l'amélioration des conditions de
vie de la femme et de la famille, notamment par leur mise en forme.
C'est également un lieu de rencontre, de partage, qui contribue à briser
l'isolement des aînés.
Se réunissant
tous les mercredis, elles déterminent les organismes pour lesquels le cercle de
Bois-des-Filion viendra en aide tout au cours de l'année. Que ce soit
pour les femmes violentées, l'autisme ou les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, elles s'activent et s'engagent avec
passion, ne ménageant pas leur temps et leur énergie. Quelle bienveillance
pendant toutes ces années!
J'aimerais
donc profiter de l'occasion pour témoigner de toute ma reconnaissance pour le grand dévouement dont les membres de cette belle organisation ont fait
preuve depuis tant d'années au sein de la communauté filionoise. Permettez-moi
de saluer tous les membres passés et
présents, ainsi que sa présidente actuelle, Mme Diane Gervais. Longue
vie au Cercle des fermières de Bois-des-Filion!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Blainville. Et maintenant je reconnais M. le député de
Laval-des-Rapides.
Rendre hommage à
Mme Perpétue Muramutse pour son
engagement bénévole, social et communautaire
M. Saul Polo
M. Polo :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'ai le plaisir de rendre hommage à
Mme Perpétue Muramutse, écrivaine, conteuse, éducatrice, militante et
citoyenne de Pont-Viau—Laval.
Rwandaise
d'origine, cette femme courageuse a fui la guerre dans son pays pour vivre
ensuite dans les camps de réfugiés de
Goma, au Congo. À cette époque, elle se charge du programme de recherche et de
réunification des familles de l'UNICEF.
Cofondatrice de la section Canada du Réseau international des femmes pour la
démocratie et paix, une organisation de
femmes déterminées à promouvoir la démocratie et la paix en Afrique, véritable
modèle d'intégration et de résilience, Mme Perpétue Muramutse
s'engage rapidement dans sa communauté d'accueil, et elle transmet aux plus
jeunes son amour à la littérature, et elle s'implique activement dans la
défense et le développement des femmes immigrantes à Laval.
C'est
donc un privilège pour moi, aujourd'hui, de lui signifier ici, à l'Assemblée nationale, toute mon admiration et ma reconnaissance pour
sa précieuse contribution à l'enrichissement collectif de notre communauté lavalloise.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Laval-des-Rapides. Et maintenant je me tourne vers M. le député de
Masson pour sa déclaration d'aujourd'hui.
Inviter les citoyens à
privilégier l'achat local pour le temps des fêtes
M. Mathieu Lemay
M. Lemay :
Mme la Présidente, nous avons la chance aujourd'hui d'avoir pour une neuvième
édition le Marché de Noël de Terrebonne, qui est situé sur le magnifique
site historique de l'Île-des-Moulins.
Alors,
j'ai eu le plaisir d'y aller en fin de semaine dernière et je peux vous assurer
que ce marché est un événement incontournable
dans la région, où toute la famille peut y trouver son compte. Alors, une
vingtaine de producteurs et d'entreprises y offrent des produits locaux
de grande qualité.
De
plus, en complémentarité du Marché de Noël à l'Île-des-Moulins, on a aussi le
salon des artisans, qui offre une véritable
vitrine aux créateurs de la région qui y tiennent un kiosque. Il y a plusieurs
artistes du bois, du verre, des métaux, des tissus, bref... de la
peinture. Ils offrent tous de magnifiques créations, et j'ai d'ailleurs fait quelques
achats.
Alors, le marché et
le salon seront ouverts tous les vendredis, les samedis et les dimanches
jusqu'au 19 décembre ainsi que lundi le 20 décembre.
Alors,
pour terminer, Mme la Présidente, je souhaite encourager tous les citoyens de
la circonscription et de la grande région
du Montréal à venir faire un tour au marché moulinois, au Marché de Noël de
Terrebonne, puisque c'est un incontournable dans le temps des fêtes. On
en profite pour faire nos achats locaux et encourager nos artisans. Merci, Mme
la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Masson. Et je reconnais maintenant M. le député de René-Lévesque.
Souligner le travail de l'équipe
de Gestion SPACT inc.
M. Martin Ouellet
M. Ouellet : Merci, Mme la Présidente. Je désire souligner aujourd'hui tout le
travail qui a été accompli par l'équipe de Gestion SPACT lors des derniers championnats québécois de cyclisme
sur route élite 2021, qui ont eu lieu à Baie-Comeau.
Gestion
SPACT est une entreprise dévouée qui a à coeur le succès de ses événements et
le bonheur de ses partenaires, véritable
spécialiste en gestion d'événements, tant dans l'organisation que dans la
gestion, que dans la création d'événements
sportifs d'envergure. Depuis sa fondation, en 2016, SPACT a déjà plus d'une
vingtaine de collaborations dans ces
compétitions à succès. Divertir la population et les athlètes de façon
professionnelle, et ce, peu importe l'ampleur de l'activité. Ils ont d'ailleurs été récompensés en 2020 et encore en 2021
par la Fédération québécoise des sports cyclistes dans le cadre du
Mérite cycliste québécois.
En
mon nom et en celui des citoyens de la circonscription de René-Lévesque, je
tiens à féliciter toute l'équipe de Gestion
SPACT pour les retombées économiques positives qu'elle a créées dans la région
et toute l'atmosphère dynamique que ses événements produisent dans la
Manicouagan et sur toute la Côte-Nord. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, M. le député de René-Lévesque. Maintenant, je cède la parole
à M. le député de Gatineau.
Féliciter le Service de la sécurité publique de la MRC des
Collines-de-l'Outaouais pour la mise sur pied
du projet MAINtenant ensemble
M. Robert Bussière
M. Bussière : Merci, Mme la Présidente. Je tiens à offrir mes
sincères félicitations au Service de la sécurité publique de la MRC des
Collines-de-l'Outaouais pour la mise sur pied du projet MAINtenant ensemble.
Depuis le
mois de novembre dernier, ce service a mis en place une équipe
multidisciplinaire spécialisée en matière de violence conjugale. Les
policiers sont maintenant accompagnés d'intervenants mobiles et disponibles sur
appel lors d'interventions nécessitant leur
support en moment de crise, ce qui est une première au Québec. L'objectif est de placer la personne victime de violence conjugale et ses
enfants au coeur des actions pour les accompagner dans ces situations
difficiles.
Félicitations
aux architectes de ce projet, M. Yves Charette, directeur du Service de la
sécurité publique, Joël Blain, inspecteur
à la division des enquêtes criminelles, Catherine Madore-Thibault, agente à la
division de la gendarmerie, et Mme Céline
Lefebvre, directrice générale de la Maison Libère-Elles. Bravo! Cette
reconnaissance est pleinement méritée.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Gatineau. Et je cède
maintenant la parole à Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Rendre hommage à M. Jacques Matte, ex-directeur du
Théâtre du Cuivre
Mme Émilise Lessard-Therrien
Mme Lessard-Therrien : Merci,
Mme la Présidente. Le 3 décembre dernier, un pilier de la scène culturelle
régionale a pris une retraite bien méritée.
M. Jacques Matte, qui a dirigé le Théâtre du Cuivre à Rouyn-Noranda pendant 35 ans, a finalement passé le flambeau.
M. Matte,
c'est la figure de l'ombre, très humble, qui sait faire briller, et faire
briller grand. On lui doit, à lui et son équipe, plus de 2 300 spectacles sur les planches du Théâtre
du Cuivre. C'est grâce à lui et son équipe que ce théâtre est devenu un pôle culturel majeur en région, attirant
même des artistes de renommée internationale. L'impact de ses accomplissements est indéniable et indélébile, et
je lui souhaite encore de nombreuses années dans son engagement comme président et cofondateur du Festival du cinéma
international en Abitibi-Témiscamingue,
une fonction qu'il accomplit avec brio.
Je joins
donc ma voix aux nombreux acteurs du milieu qui ont souligné son départ pour
lui dire : Merci, M. Matte, pour votre dévouement sans faille
et pour l'héritage considérable que vous laissez derrière nous.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie,
Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. Et maintenant je reconnais
M. le député de Lac-Saint-Jean.
Rendre hommage à MM. Patrick Audet et Janick Maltais,
récipiendaires de la Médaille de l'Assemblée nationale
M. Éric Girard
M. Girard
(Lac-Saint-Jean) : Mme la Présidente, le 2 juillet dernier,
c'était jour de vacances pour la famille de Jacob Thomas, une magnifique occasion de profiter de notre beau lac
Saint-Jean, mais ça ne s'est pas déroulé tout à fait comme prévu. Jacob s'est retrouvé en danger sur sa
planche à pagaie. Il s'est retrouvé trop loin au large avec un vent de
face l'empêchant de revenir vers la plage.
Janik Maltais
et Patrick Audet n'ont pas hésité à prendre leur bateau, à se joindre aux
secours. Sans l'intervention de
Patrick et Janik, la vie aurait pu prendre une tournure bien plus dramatique
pour Jacob et sa famille. Quand ils l'ont retrouvé, il était en hypothermie, ses lèvres, ses pieds et
ses mains étaient bleus, il sombrait tranquillement dans l'inconscience. Grâce
à leur sens du devoir et à leur désir de
porter secours, Jacob est retourné sain et sauf auprès des siens, et ça, la
famille de Jacob s'en souviendra toujours.
C'est donc
avec beaucoup de fierté et d'émotion, Mme la Présidente, que j'ai remis à
Patrick Audet et à Janick Maltais la
Médaille de l'Assemblée nationale afin de souligner le geste héroïque qu'ils
ont posé le 2 juillet dernier. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, M. le député de Lac-Saint-Jean. Et maintenant je
reconnais M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
Souligner
le 20e anniversaire du Journal de Lévis
M. Marc Picard
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. Le Journal de Lévis célèbre cette année
son 20e anniversaire.
Témoin
de la vie lévisienne, ce journal hebdomadaire rend compte de l'actualité en
demeurant toujours à l'affût des sujets
qui intéressent et touchent les lecteurs. Petits et grands événements sont
relatés avec rigueur, pour le plus grand bénéfice des Lévisiennes et des
Lévisiens.
Au fil du temps, il a su établir un véritable lien
de proximité entre ses lecteurs et les différents acteurs de notre communauté.
Or, il représente un véhicule de communication indispensable, notamment pour
nos organismes, nos commerces et nos institutions.
Pour
toutes ses années de présence et d'implication au coeur de l'action citoyenne,
pour sa vitalité et son dynamisme, je
remercie toutes les personnes qui contribuent à la qualité et la pérennité du Journal
de Lévis. Au plaisir de vous lire encore très longtemps. Merci,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
Maintenant,
j'aurais besoin de votre consentement afin de permettre à Mme la députée
de Sainte-Marie—Saint-Jacques
de faire une 11e déclaration. Consentement. Alors, Mme la députée, la
parole est à vous.
Inviter le gouvernement et les
organismes à travailler en
concertation avec les jeunes en matière de prévention
et de lutte contre l'itinérance
Mme Manon Massé
Mme Massé :
Merci, Mme la Présidente. En novembre, la Coalition Jeunes+ réunissait
150 participants et participantes au Forum Prévention itinérance jeunesse
nommé Marche un boutte dans mes bottes.
Une déclaration
commune invite le gouvernement à s'engager aux côtés des jeunes vivant ou à
risque de vivre de l'itinérance ainsi que
les organismes qui les soutiennent. Ce qu'ils et elles nous disent, c'est qu'il
faut bâtir un filet social autour des
jeunes. Agir en prévention, ça passe par l'aide aux familles, l'amélioration de
la protection de la jeunesse, des services en santé mentale. Ça passe
aussi beaucoup par l'éducation et par le logement.
Souvent
marginalisés, les jeunes nous demandent d'être à l'écoute de leur voix, de
leurs idées et de leurs solutions. Mme la Présidente, notre réponse doit
être collective, nous avons un devoir envers eux, parce que chaque arrivée
d'un ou d'une jeune en situation d'itinérance résulte d'une succession d'échecs
de notre société.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Et
maintenant ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.
Et je suspends nos
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 54)
(Reprise à 10 h 3)
Le Président :
Mmes et MM. les députés, bon mercredi. Prenons quelques secondes pour nous
recueillir.
Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir.
Nous poursuivons les affaires
courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique Présentation
de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette :
Oui, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article a du feuilleton.
Projet de loi n° 18
Le
Président : Et, à
l'article a du feuilleton, Mme la
ministre de la Sécurité publique
présente le projet de loi n° 18, Loi modifiant diverses dispositions en
matière de sécurité publique et édictant la Loi visant à aider à retrouver des
personnes disparues. Mme la ministre.
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault : Merci, M. le Président. Ce projet de loi apporte
diverses modifications en matière de sécurité publique.
Le projet de
loi modifie la Loi sur la police afin de prévoir le versement, par le
gouvernement, à l'École nationale de police du Québec d'une contribution
annuelle basée sur la masse salariale des membres des corps de police
spécialisés.
Le
projet de loi consacre le principe de l'indépendance des corps de police et de
leurs membres dans la conduite des enquêtes
et des interventions policières et précise leur devoir d'agir en concertation
et en partenariat avec les personnes et les différents intervenants des
milieux concernés par leur mission.
Le projet de
loi modifie les conditions minimales pour être embauché comme policier. Il
permet au gouvernement de déterminer, par règlement, les domaines dans lesquels
une personne qui n'est pas diplômée de l'École nationale de police du Québec... Pardon, M. le Président, il
faudrait juste que je boive une petite gorgée d'eau. Bon. Excusez.
(Interruption) Woups! Excusez, M. le
Président. Ce matin, ce n'est pas ma journée, on dirait. Donc, je vais le
mettre ici, tiens, là, bon, confortablement
installé. Alors, j'étais... Bon, c'est ça. Il permet également au gouvernement
de déterminer, par règlement, les
obligations de formation continue des policiers de même que la formation
requise pour exercer certaines fonctions dans un corps de police autre
qu'un corps de police spécialisé.
Le projet de
loi apporte différentes modifications en matière de déontologie policière.
Ainsi, il confie au Commissaire à la
déontologie un rôle de prévention et d'éducation en cette matière. Il prévoit
qu'une plainte relative à la conduite d'un policier susceptible de constituer un acte dérogatoire au Code de
déontologie des policiers du Québec ne peut être formulée que par une personne
présente lors d'un événement ayant fait l'objet d'une intervention policière ou
par celle à l'égard de qui la
conduite d'un policier est susceptible de constituer un tel acte dérogatoire.
Il permet toutefois à toute autre personne de formuler, anonymement ou
non, un signalement au commissaire relatif à la conduite d'un policier qui est
susceptible de constituer un acte
dérogatoire au code, conformément à la procédure établie à cette fin par le commissaire. Il accorde au commissaire le pouvoir de tenir une enquête de sa
propre initiative dans certaines circonstances. Il permet au commissaire
de tenir des travaux de conciliation à distance
par un moyen technologique et au Comité de déontologie policière de faire
de même pour tenir une séance. Il revoit les
sanctions que peut imposer le comité lorsque la conduite d'un policier est
jugée dérogatoire et lui permet
d'imposer au policier, en plus des sanctions, des mesures additionnelles. Il
remplace l'appel de plein droit de
toute décision finale rendue par le comité par un appel sur permission et
prévoit la procédure applicable ainsi que les effets de cet appel.
De plus, le
projet de loi prévoit que le gouvernement détermine, par règlement, le contenu
minimal de tout règlement de discipline interne des membres d'un corps
de police.
Le projet de
loi établit que les priorités d'action et les directives élaborées à l'égard
des corps de police sont écrites et
rendues publiques et prévoit des restrictions quant à leur contenu. Il précise
également que le directeur ou un membre d'un corps de police doit refuser de communiquer ou de confirmer l'existence
d'un renseignement lorsque sa divulgation pourrait avoir des incidences
sur l'administration de la justice et la sécurité publique.
Le projet de loi prévoit que l'enquête sur une
allégation relative à une infraction criminelle commise par un policier ou un constable spécial est tenue par le Bureau
des enquêtes indépendantes, sauf dans certaines circonstances. Il permet la transmission, s'il y a lieu, des
renseignements concernant l'allégation à certains organismes pour que ceux-ci
en fassent le traitement lorsqu'elle n'est pas relative à une infraction
criminelle.
Le projet de
loi prévoit que le directeur du Bureau des enquêtes indépendantes peut décider,
dans certaines circonstances, de ne pas tenir une enquête lorsqu'une personne,
autre qu'un policier en devoir, décède, subit une blessure grave ou est blessée par une arme à feu utilisée
par un policier lors d'une intervention policière ou lors de sa détention par
un corps de police. Dans ce cas, le directeur communique au public les
motifs de sa décision. Le projet de loi prévoit également que le directeur communique au public un résumé de l'enquête
lorsque le directeur des poursuites criminelles et pénales décide de ne
pas porter des accusations à la suite d'une enquête.
Le projet de
loi établit, en outre, des obligations supplémentaires en matière de reddition
de comptes pour les corps de police
et étend le pouvoir du ministre de la Sécurité publique d'établir des lignes
directrices à tout sujet relatif à l'activité policière. Ces lignes
directrices peuvent porter notamment sur l'absence de discrimination dans les
activités policières.
Le projet de
loi modifie aussi la Loi sur le ministère de la Sécurité publique afin de
confier au ministre de la Sécurité publique le pouvoir d'élaborer et de
proposer au gouvernement des mesures et des programmes ainsi que celui de
veiller à leur mise en oeuvre.
Le projet de loi édicte la Loi visant à aider à
retrouver des personnes disparues, laquelle a pour objet de faciliter l'obtention par les membres d'un corps de police
de renseignements concernant la personne disparue et, si cette dernière
est mineure ou en situation de vulnérabilité, la personne qui l'accompagne. À
cette fin, cette loi prévoit qu'un juge de la Cour du Québec ou un juge de paix
magistrat peut, sur demande d'un membre d'un corps de police, ordonner la communication de certains renseignements
concernant une personne disparue ou celle qui l'accompagne. Elle lui permet
également, sur demande d'un membre d'un
corps de police, d'accorder l'autorisation de pénétrer dans un lieu, y compris
une maison d'habitation.
Le projet de
loi modifie la Loi sur le système correctionnel du Québec notamment afin de
prévoir que la révision de toutes les décisions des comités de discipline
institués dans les établissements de détention s'effectue par une personne
désignée par le ministre et que la
permission de sortir d'une personne contrevenante prend fin automatiquement dès
que celle-ci fait l'objet d'une décision de refus de sa libération
conditionnelle.
Le projet de
loi apporte à la Loi sur la sécurité incendie différentes modifications
relatives au schéma de couverture de risques.
Ainsi, le
projet de loi modifie la durée de la validité du schéma et la période de
révision. Il précise les cas où le schéma doit être modifié et la procédure
applicable à cette fin. Il permet au ministre d'ordonner à une autorité
régionale de procéder à la
modification ou à la révision de son schéma dans certains cas. En outre, le
projet de loi donne compétence à la Commission
municipale du Québec sur certains différends entre des municipalités locales ou
des régies intermunicipales qui
empêchent l'une d'elles de se conformer aux objectifs de protection optimale.
Il modifie les modalités de la reddition de comptes des autorités
régionales et des municipalités locales quant à la mise en oeuvre du schéma.
Enfin,
le projet de loi apporte certaines corrections de nature technique et comporte
diverses dispositions de concordance et transitoires. Merci.
Mise aux voix
Le
Président : Et, en application de l'ordre spécial, j'invite
maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur la présentation de ce
projet de loi, suivi des députés indépendants. Et je débute par M. le
leader du gouvernement.
• (10 h 10) •
M. Jolin-Barrette :
Pour.
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président :
Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?
Mme Labrie :
Pour.
Le Président :
M. le leader du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet :
Pour.
Le Président :
M. le député de Chomedey?
M. Ouellette :
Pour.
Le Président :
M. le député de Bonaventure?
M. Roy :
Pour.
Le Président :
Mme la députée d'Iberville?
Mme Samson :
Pour.
Le Président :
En conséquence, cette motion est adoptée. M. le leader de l'opposition
officielle.
M. Fortin : Oui, merci, M. le Président. Simplement pour vous indiquer qu'on
souhaite la tenue de consultations sur ce projet de loi. Merci.
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette :
...on pourra échanger des groupes.
Dépôt de documents
Le Président :
Nous passons à la rubrique Dépôt de documents. M. le leader du
gouvernement.
Réponses à des questions inscrites
au feuilleton
M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je dépose les réponses
du gouvernement aux questions inscrites au feuilleton le
10 novembre par le député de Rimouski et le 11 novembre par le député
de LaFontaine. Merci.
Le Président :
Merci. Ces documents sont déposés.
Dépôt de rapports de commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commission, Mme la présidente de la
Commission spéciale sur l'évolution de la Loi concernant les soins de
fin de vie et députée de Roberval.
Consultations particulières sur
l'évolution de la
Loi concernant les soins de fin de vie
Mme Guillemette : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport
de la Commission spéciale sur
l'évolution de la Loi concernant les soins de fin de vie qui, afin
d'analyser les enjeux reliés à l'élargissement potentiel de l'aide médicale à mourir pour les
personnes en situation d'inaptitude et pour les personnes souffrant de troubles
mentaux, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations
particulières les 14, 18, 19, 20, 21, 25 et 28 mai ainsi que les 9, 10,
11, 12, 18, 19 et 23 août 2021. La
commission s'est par ailleurs réunie à 39 reprises en séance de travail,
et le rapport de la commission contient 11 recommandations. Merci,
M. le Président.
Le Président :
Merci bien. Ce rapport est donc déposé.
Il n'y a pas de dépôt
de pétitions.
Il n'y a pas de
réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de
droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je
cède la parole à Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Gestion de la pandémie de
coronavirus dans les centres
d'hébergement et de soins de longue durée
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade :
Merci, M. le Président. M. le Président, depuis des semaines, on constate qu'il
y avait des gens qui savaient, au gouvernement, qu'il allait y avoir une
hécatombe dans les CHSLD, et ce, depuis le mois de janvier. On l'a entendu de l'ancienne ministre de la Santé.
On l'a entendu de l'ancien sous-ministre. On l'a entendu de l'INSPQ. On
l'a entendu également du directeur de la santé publique.
Pourtant,
le premier ministre, lui, nous a dit : Ah! moi, je n'étais pas au courant,
on regardait CNN puis on n'avait pas
cette information-là, malgré le fait que la Protectrice du citoyen soit sortie
pour dire qu'il y avait des signaux d'alerte avant et que le
gouvernement n'a pas agi.
Il
y a des courriels qui ont été envoyés, M. le Président, pas à n'importe qui,
des courriels qui ont été envoyés à des gens qui faisaient partie de la cellule de crise dirigée par le premier
ministre. Le premier ministre soutient, encore une fois, que personne
n'était au courant.
Donc,
les experts étaient au courant, son ancienne ministre de la Santé était au
courant, son ancien sous-ministre était
au courant, l'INSPQ était au courant, des courriels ont été envoyés pendant le
mois de mars, mais, encore une fois, le premier ministre nous dit que,
lui, dans son entourage, il n'entendait pas ces messages-là.
Est-ce
que le premier ministre, qui était chef de la cellule de crise, était le seul à
ne pas être au courant qu'on allait à l'abattoir dans nos CHSLD?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, à chaque matin, sept jours par semaine, on était réunis, 15, 20 personnes, autour de
la table. Il y avait la ministre de
la Santé, que mentionne la cheffe de l'opposition officielle, il y avait le
sous-ministre à la Santé, que
mentionne la cheffe de l'opposition officielle, et il y avait le directeur
national de la santé publique, qui était en contact avec l'INSPQ. Donc, M. le Président, toutes ces personnes, m'incluant,
on se réunissait à chaque matin et on prenait les décisions dès qu'on
avait des informations.
Et,
M. le Président, je le répète, la cheffe de l'opposition officielle parle des
équipements de protection individuelle, et la ministre de la Santé et le sous-ministre de la Santé étaient au
courant qu'il y avait un inventaire national, qui s'est beaucoup réduit au cours des semaines, mais qui n'a jamais
atteint zéro. Par contre, on sait tous, maintenant, qu'il y a des
établissements qui ont manqué d'équipement,
donc il y a eu un problème de distribution. Mais ce qu'on avait à la table,
c'était l'inventaire national. Et on essayait, même si l'inventaire n'était pas
à zéro, de tout faire en notre possible, incluant d'aller chercher des
livraisons sur des tarmacs en Chine. Tout le monde cherchait de l'équipement.
Donc, M. le
Président, dès qu'on a eu de l'information, on a agi.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Vous savez ce qui est particulier, M. le
Président? C'est que le premier ministre nous parle de son ancienne ministre
de la Santé, mais que jamais, en
cette Chambre, elle ne s'est levée pour répondre à des questions, justement,
que l'on avait par rapport à ça.
M.
le Président, la question que j'ai pour le premier ministre : Tous ces
courriels qui sont allés pour alerter, pourquoi est-ce que le
gouvernement n'a pas agi avant le 10 avril?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, dans sa première question, la cheffe de l'opposition
officielle dit que l'ancienne ministre de la
Santé a dit le contraire de moi. La ministre
de la Santé de l'époque dit la même
chose que moi, c'est qu'au comité de
gestion de crise on suivait la situation, on a vu qu'il manquait de personnel,
on a mis en place, dès le 15 mars, Je contribue pour demander un effort aux Québécois, qui ont accepté de
venir nous donner un coup de main. M. le Président, dès qu'on avait de
l'information, on agissait. C'est vrai pour la ministre, c'est vrai pour le
sous-ministre...
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
...c'est vrai pour moi.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : M. le Président, le premier ministre nous dit
que, dès qu'il a eu l'information, il a agi. Mais hier ce qu'il nous a dit en Chambre, c'était :
Chez nous, à notre table, malheureusement, ces indications, on ne les avait
pas, ça ne s'est pas rendu à notre
table. Pourtant, on sait très bien, on sait très bien que des courriels ont été
envoyés à des gens qui étaient à la
table, des courriels qui ont été écrits, envoyés, pas d'accusé de réception,
qui alertaient qu'on allait se retrouver dans une hécatombe, et le
gouvernement n'a pas posé les gestes requis avant le 10 avril.
Comment est-ce que le
premier ministre peut expliquer ça à la population?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, je viens de dire qu'on a mis en place Je contribue pour aller
chercher du personnel. On a fait ça
le 15 mars. Puis là je viens d'entendre la cheffe de l'opposition officielle dire : On n'a rien fait avant le mois d'avril. Écoutez, qu'est-ce
que vous voulez que je lui dise? On a
mis Je contribue en place le 15 mars. Donc, c'est... je vais essayer
d'être parlementaire, là, mais ce n'est pas exact, de dire qu'on n'a pas agi
avant le mois d'avril.
Le Président :
Troisième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : M. le Président, ce n'est pas moi qui le dis,
c'est la Protectrice du citoyen qui dit qu'il y avait des signaux d'alerte
et que le ministère n'a pas revu sa stratégie.
Le
premier ministre aime nous parler de Je contribue, mais la
réalité, c'est que, dans les messages qui ont été envoyés, les gens disaient
qu'il manquait d'équipement et qu'on devait arrêter le transfert de personnel
et le transfert de patients. Pour ces trois éléments-là, le premier
ministre n'a pas agi avant le mois d'avril. C'est ça, la réalité, M. le
Président.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, il manquait 10 000 employés
dans les CHSLD. Donc, entre permettre à un employé de travailler dans deux CHSLD ou de ne pas avoir
d'employé du tout, on a choisi le moindre mal. Je suis certain que la cheffe
de l'opposition officielle aurait fait la même chose.
Donc, M. le
Président, dès qu'on a su qu'il y avait des problèmes, on a fait le maximum
avec les ressources qu'on avait.
• (10 h 20) •
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Fabre.
Déplacements
de personnel entre les centres
d'hébergement et de soins de longue durée
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : Mobilité de personnel. Parlons-en. Revenons sur la chronologie des événements
et les 10 courriels accablants
d'Annick Lavoie, de l'Association des établissements privés conventionnés. Le 12 mars, rencontre, elle
plaide auprès du ministère
de ne pas permettre le déplacement des employés d'un établissement à l'autre. 17 avril, elle écrit à des hauts fonctionnaires du ministère
de la Santé : «On avait prévenu les autorités qu'il fallait cesser les
admissions en CHSLD et ne pas
permettre le déplacement des employés d'un établissement à l'autre[...].
Le temps de réponse a été trop long, et l'hécatombe en a suivi[...]. Par
pitié, écoutez les experts terrain.»
M. le Président, on le sait, là, la
mobilité de personnel, ça a été un des principaux facteurs de contamination
durant la première vague. Le terrain avait levé un drapeau rouge, il a été
ignoré, et, un mois plus tard, faute d'actions, il était déjà trop tard.
Entre le 12 mars et le 17 avril, 831 aînés sont décédés en CHSLD.
Pourquoi ne pas avoir
écouté les experts sur le terrain?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : M. le Président, j'ai répondu plusieurs
fois à cette question-là, au cours des dernières semaines, puis je
pense que... La députée de Fabre peut revenir sur le sujet, je pense que
tous les témoignages qui ont été présentés et qui vont continuer d'être
présentés à la coroner Kamel, M. le Président... je suis certain qu'elle va en
prendre en compte. C'est exactement ça, le
travail de la coroner. Puis, au risque de me répéter encore une fois ce matin,
M. le Président, je vais donner la même information. Si la coroner, qui prend
connaissance des différents articles ou publications qui sont faits au cours
des derniers jours... qu'elle juge bon
d'amener ces personnes-là à témoigner lors de son enquête, je pense que tout le monde va être content qu'on aille
au fond des choses puis qu'on comprenne exactement ce qui est arrivé, M. le
Président.
Alors,
on l'a dit, et je vais le répéter, ce gouvernement a avantage à ce que les faits soient connus. Il y
a de l'information qui n'était malheureusement pas disponible. On a
fait, justement, un travail, au cours des derniers mois, pour essayer
d'améliorer l'information qu'on a au ministère. Puis je pourrai y revenir, M.
le Président.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : M. le Président, la Protectrice
du citoyen, dans son rapport,
questionne, elle aussi, les décisions du gouvernement face à la
mobilité du personnel. Page 48 : «...les transferts de personnel entre les
installations et les unités ont
favorisé les éclosions au Québec. D'ailleurs, le [ministère] reconnaît cet état
de fait.» Page 46 : «Un mot d'ordre des hautes autorités a été donné au [ministère]
de ne pas contraindre les libertés individuelles des travailleurs et
travailleuses en les forçant à se limiter à une seule installation...»
M. le Président,
pourquoi ne pas avoir interdit la mobilité de personnel?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Je pourrais peut-être demander la même question à la députée de Fabre. Comment
ça se fait que la mobilité de
personnel a été si utilisée au cours des dernières années, même avant la pandémie?
Je pourrais lui poser la même question, M. le Président.
Nous, ce qu'on a fait...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Dubé :
M. le Président, c'est exact, ce que je viens de dire. C'était un problème qui
était majeur, la mobilité de personnel, c'était une culture. Il y avait
une culture de mobilité parce que c'était une question de coûts.
Alors,
malheureusement, ça a eu un impact. Lorsqu'on s'est rendu compte de l'impact
que ça avait, M. le Président, on a
agi. On a été capables de faire des ajustements importants à la mobilité de
personnel. Il y a eu des décrets qui faisaient partie de la...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...de l'urgence sanitaire pour être capables d'attaquer le problème de la
mobilité.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé :
M. le Président, les CHSLD privés conventionnés ont alerté le gouvernement des
risques de déplacement de personnel. La Protectrice du citoyen a rappelé
l'impact de la mobilité de personnel et questionné les décisions du gouvernement. Et l'actuel ministre de la Santé, des mois
plus tard, est venu encadrer la mobilité du personnel mais ne l'a jamais interdit, contrairement à la
Colombie-Britannique, qui l'a fait le 25 mars 2020. Les faits sont
troublants. Une commission d'enquête publique indépendante, ça presse.
Le Président : M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Bon, je suis content, par exemple, que la députée de Fabre reconnaisse qu'on a
agi sur la mobilité de personnel, ce que l'ancien gouvernement n'avait pas
fait. Ça, déjà, c'est une grande avancée. Ça a été un des points majeurs
du plan de deuxième vague qu'on a fait, M. le Président.
On a toujours été,
par contre, malheureusement, limités par le nombre de personnels, puis il a
fallu trouver des ajustements. Mais on le
voit, la deuxième vague, beaucoup moins d'impact, troisième vague. Je pense que
le gouvernement a montré... Et c'est
ce qu'on dit. Oui, c'est beau, l'enquête, mais on a agi déjà, suite aux
recommandations, notamment, de la Protectrice du citoyen, mais on a déjà
agi même avant d'avoir ces recommandations, M. le Président.
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
Donc, on va continuer de faire le meilleur travail possible.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Fabre.
Mouvements de personnel entre
les centres
d'hébergement et de soins de longue durée
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : M. le Président, deuxième témoignage de la sous-ministre adjointe aux
Aînés, Mme Rosebush, devant la
coroner, on est revenu sur les fameuses grilles pour les visites de vigie. Et
savez-vous quoi? On a appris que les inspecteurs ne pouvaient pas entrer dans un CHSLD avec du papier, du crayon, même les
clés d'auto, pour éviter tout risque de contamination. Alors, ce que faisaient les inspecteurs, ils mémorisaient
les 17 questions de la grille, mémorisaient les réponses et retournaient
dans leur auto pour faire le compte rendu.
Alors,
pendant qu'on interdisait un crayon, bien, il y avait du personnel qui se
promenait d'un étage à un autre, d'une zone chaude à une zone froide et,
pire encore, d'un CHSLD à un autre. C'est complètement absurde.
En
plus, M. le Président, dans la fameuse grille de trois pages, là, il n'y a pas
une seule question qui vise à savoir s'il y avait de la mobilité de personnel.
Je vous rappelle, là, hier on a su que les CHSLD privés avaient déjà demandé
au gouvernement d'arrêter cette pratique.
M.
le Président, pourquoi le gouvernement s'est fermé les yeux sur un enjeu aussi
fondamental que la mobilité de personnel?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Vous êtes le seul à avoir
la parole. Et je vous demande de ne pas faire de communications entre vous,
au-delà de la réponse du ministre, il est le seul...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Je vous demande d'être attentifs à la réponse. Merci.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
M. le Président, je vais être très, très clair, là. C'est très facile de
refaire le passé. Je voudrais insister sur le fait, M. le Président, que l'ancien gouvernement a réduit les budgets en
santé publique, ont enlevé des gestionnaires locaux, ont réduit les budgets non
seulement aux protections et contrôle des infections dans les CHSLD... Et la
liste que je pourrais faire, M. le Président, est assez longue.
Je le répète, lorsque
ce gouvernement, notre gouvernement, a pris acte de ce qui arrivait dans les
CHSLD, c'est immédiatement qu'on a posé les
gestes. Un geste très fort, M. le Président, je le répète, c'est l'engagement
des 10 000 personnes, des
10 000 préposés aux bénéficiaires. On a donné des conditions monétaires
qui ont fait qu'on a été capables rapidement de trouver... ce qui n'avait pas été le cas, M. le Président, de faire des
offres différenciées à des gens qui étaient importants pour nos aînés.
Alors,
moi, je vous dis, aujourd'hui : Continuons de laisser travailler la
coroner sur son travail, mais... une chose, essayer de refaire le passé, nous,
ce n'est pas là qu'on est. On essaie d'améliorer un réseau de santé, M. le Président...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...qui avait été délaissé.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Jeanne-Mance—Viger.
Mme Filomena Rotiroti
Mme Rotiroti :
Merci, M. le Président. Le 25 mars, la Colombie-Britannique interdit la
mobilité du personnel, pendant qu'ici, le
Québec, les CHSLD étaient des portes tournantes. Lors du témoignage de
l'ex-ministre de la Santé devant le coroner, elle a affirmé avoir discuté avec ses
homologues des autres provinces, mais non pas avec la Colombie-Britannique.
La sous-ministre Rosebush a même confirmé que le ministère ne leur a pas parlé.
M. le Président, pourquoi
nous n'avons pas suivi les meilleures pratiques?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Certainement, M. le Président, puis je pense que c'est intéressant de faire le
lien... On a parlé, tout à l'heure, de ce qui se passait dans les CHSLD, du manque d'information. La coroner a aussi demandé aux gens qui sont en amont, de la santé publique, puis je pense
ici à l'INSPQ, je pense aux autres organismes qui doivent
s'assurer d'une veille, le groupe,
aussi, de Santé Canada, on n'en parle pas souvent, qui sont là, justement,
pour essayer... assurer une veille de ce qui se passe dans le monde... Je
pense que, si la coroner, et je le
répète, si la coroner juge bon qu'à la lumière des faits qui ont été entendus
ces gens-là devraient revenir en commission pour être capables de donner un meilleur état de
la situation...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...de ce qui s'est passé en amont, ce sera au coroner de le décider.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Paule Robitaille
Mme Robitaille : M. le
Président, pendant qu'on interdisait
aux inspecteurs d'entrer dans un CHSLD avec un crayon, on trimbalait des
travailleurs de la santé d'un CHSLD à l'autre sans équipement de protection jusqu'à
la mi-avril 2020. On sait ce qui est arrivé, beaucoup de ces gens-là ont
attrapé la COVID. Certains en sont morts, M. le Président, comme Marcelin
François, un homme de mon comté.
M. le Président, à
quand une enquête publique pour faire la lumière sur tout cela? Merci.
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Alors, écoutez, M. le Président, je pense qu'à chaque fois qu'on a cette même
question-là je suis capable, à chaque
fois, de montrer comment, justement, la coroner Kamel fait un travail excellent
pour faire ressortir les faits, obtenir... savoir ce qui s'est passé, le manque d'information qu'on avait. Et je le
dis, je le dis, M. le Président, la plus belle preuve que nous avons agi, au cours de la suite de la
première vague, c'est de voir l'amélioration de la situation qui s'est passée
dans nos milieux de vie, qui,
malheureusement, ont été traités uniquement comme des milieux de vie, sans
penser, et je reviens sur l'ancien gouvernement, aux impacts d'une pandémie,
aux impacts d'un manque de protection et contrôle des infections.
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
M. le Président, on a agi quand c'était le temps de le faire.
• (10 h 30) •
Le Président :
Question principale, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
Enquête sur la gestion de la
pandémie de coronavirus dans les
centres d'hébergement et de soins de longue durée
M. Joël Arseneau
M. Arseneau :
M. le Président, dans toute l'histoire, là, des CHSLD, au printemps 2020,
il y a quelque chose qui ne colle
pas. Depuis trois semaines, on pose des questions, et ça ne fonctionne pas. On
essaie de reconstituer les faits, à défaut d'avoir une commission d'enquête
publique et indépendante.
Et
ce qu'on sait, c'est qu'il y avait une cellule de crise, cellule de crise sur
laquelle siégeait le premier ministre, sur laquelle siégeait la ministre des Aînés et également, on a oublié de le
mentionner tout à l'heure, la sous-ministre responsable des CHSLD, Mme Rosebush. Toujours en mars
2020, on sait que le cabinet de la ministre des Aînés a reçu plusieurs
messages, des appels à l'aide, des
courriels parlant d'une hécatombe à venir dans les CHSLD. C'est le même cabinet,
je le répète, qui siégeait sur la cellule de crise et qui disait
transmettre les messages au premier ministre.
M. le
Président, clairement, là, il y a des messages qui se sont perdus, ou qui ne se
sont pas rendus, ou qui ont été ignorés par la cellule de crise ou le
premier ministre.
Alors, comme il n'existe apparemment ni écrits ni
procès-verbaux des travaux de la cellule de crise et de ces rencontres, est-ce
qu'on peut savoir si la ministre des Aînés a effectivement transmis les signaux
d'alarme des CHSLD au premier ministre?
Le Président : M. le
premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, effectivement, la ministre des Aînés et la
sous-ministre des Aînés, Mme Rosebush, étaient autour de la table à
tous les matins, parfois par téléphone, parfois en personne.
M. le Président,
je l'ai dit puis je le répète, on avait à chaque jour un inventaire des
équipements de protection individuelle. On a été... j'ai été immensément
transparent, j'ai dit à chaque jour l'état de l'inventaire.
Maintenant,
M. le Président, on s'est rendu compte, effectivement, qu'il y a eu un
problème de distribution. Est-ce que
c'est entre le CHSLD privé et le CISSS? Est-ce que c'est entre le CISSS et le
ministère? Il y a trois enquêtes, actuellement, qui sont en train
de regarder le détail de tout ça.
Mais,
M. le Président, je le répète, autour de la table on avait une réunion
chaque jour, puis l'inventaire national n'a jamais été à zéro.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef du troisième groupe de l'opposition.
M. Joël
Arseneau
M. Arseneau :
M. le Président, le premier ministre parle des inventaires, alors que
nous, on parle des actions. Entre le
12 mars et le 10 avril, il ne s'est rien passé pour venir en aide aux
CHSLD. Cette information-là a-t-elle été transmise, qu'on avait besoin d'aide, qu'on avait besoin
d'intervention, d'arrêter, là, justement, la mobilité de la main-d'oeuvre, par
exemple? On a un sérieux problème, à
l'heure actuelle. Nous n'avons pas tous les faits, nous avons besoin d'une
enquête publique et indépendante. Et on a besoin de responsabilité
ministérielle. Quand le premier ministre va-t-il l'assumer?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
Bien, M. le Président, je répète que, dès le 15 mars, on savait qu'on
manquait de milliers d'employés dans
les CHSLD. On a mis en place Je contribue. Et malheureusement, M. le
Président, on aurait aimé arrêter la mobilité de certaines infirmières ou préposés d'un CHSLD à l'autre, mais on
pensait que, dans la balance des inconvénients, c'était mieux d'avoir des demi-employés dans chaque CHSLD
que d'avoir des gens qui ne recevaient pas du tout de services. Donc, M.
le Président, avec les ressources qu'on avait...
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
...on a fait notre possible.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M. Joël
Arseneau
M. Arseneau :
M. le Président, les Québécois s'attendent à des réponses beaucoup plus claires
sur la chronologie des événements et
sur qui a fait quoi, qui a dit quoi à qui et pourquoi les actions n'ont pas été
prises pour venir en aide aux CHSLD
qui voyaient venir la catastrophe et l'hécatombe. Et la raison pour laquelle on
demande une enquête publique et indépendante, c'est pour en tirer des
leçons.
Pourquoi ne pas tenir
cette commission d'enquête publique et indépendante pour faire la lumière sur
tout...
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, c'est exactement le rôle de la coroner, d'aller au fond des
choses. C'est exactement le rôle
aussi de la Commissaire à la santé, d'aller au fond des choses. Et ce sont des
personnes indépendantes, qui ont tous les
pouvoirs. Même le chef du Parti québécois n'a jamais été capable de nous dire
un pouvoir que n'avaient pas la coroner ou la Commissaire à la santé.
Ce
qu'on a besoin, actuellement, ce n'est pas d'une quatrième ou d'une cinquième
enquête, c'est d'agir. C'est ce qu'on est en train de faire.
Le Président :
Question principale, M. le chef du deuxième groupe deuxième opposition.
Projet de construction d'un
nouveau stade de baseball à Montréal
M. Gabriel
Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le
Président. La saga des stades payés par des fonds publics a commencé avec le
Parti libéral et l'amphithéâtre de Québec et elle pourrait bien se poursuivre
avec la CAQ. Hier, on apprenait que le gouvernement envisage sérieusement de financer le
stade de Stephen Bronfman avec de l'argent public. M. le Président,
moi, mon «steamé», au baseball, je l'aime «all dressed», ketchup, mais pas
d'argent public.
Sérieusement,
là, M. Bronfman, je suis sûr que c'est un bon monsieur, je suis sûr que
lui puis le premier ministre ont eu
une belle jase sur le baseball, mais la famille Bronfman, elle est
milliardaire, c'est une des plus riches au Canada. Puis Stephen Bronfman a été visé directement par
les Paradise Papers, le scandale d'évitement fiscal. Très franchement, je ne
pense pas que ce monsieur-là a besoin de
l'aide financière des contribuables québécois. Je pense aussi que les contribuables québécois ont d'autres priorités.
Dans
les quartiers centraux de Montréal, là, la priorité de Québec solidaire, ce
serait le logement social. C'est de ça dont les familles ont besoin. On
a besoin d'un ministre des écoles, on a besoin d'une ministre des CHSLD, on
aurait besoin d'une ministre du logement social. Une affaire dont on n'a pas
besoin, c'est d'un ministre du baseball.
Est-ce
que le premier ministre peut se lever en cette Chambre et dire clairement aux
familles québécoises qu'il ne mettra pas une cent de leur argent dans le
stade privé de Stephen Bronfman?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, on a devant nous un
chef de parti qui dit qu'il veut devenir premier ministre. Hier,
il écrivait sur son compte Twitter, et je le
cite : «En lisant les nouvelles ce matin, j'ai capoté. Mettre des millions
dans une demi-équipe de baseball
pendant que les aînés mangent de la bouette, c'est ça, la vision de la
CAQ?» Ce matin, le même chef de parti nous parle de hotdogs «all dressed»,
ketchup. Puis il veut devenir premier ministre du Québec.
M.
le Président, soyons très clairs. Contrairement à ce que dit le chef de Québec solidaire, il n'est pas question que notre gouvernement mette un sou des
contribuables là-dedans.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. Gabriel
Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois : Bien, je suis content que le premier ministre rectifie les faits, parce qu'aux dernières informations, et selon ce que des gens dans son gouvernement ont dit hier, ce
n'était pas la position du gouvernement
du Québec.
J'aimerais
que le premier ministre précise sa position. J'aimerais qu'il soit très
clair sur le fait que le plan, ce n'est pas un stade à coût nul, donc un investissement du gouvernement du Québec compensé par des retombées économiques,
mais qu'il n'y aura bel et bien pas un seul
sou d'argent public investi dans le stade privé de Stephen Bronfman. J'aimerais
que ce soit clair pour tout le monde.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : M. le Président, le chef de Québec solidaire va devoir trouver un autre sujet pour faire des sparages sur ses
comptes Twitter. Non, mais, je veux dire, ce n'est pas digne d'un chef de
parti, ce qu'il fait sur...
Le
Président : Je vais
vous demander de faire attention, quand
même. Non, jusqu'à maintenant
ça va très bien, le ton
est bon, les mots sont justes. Je vais vous demander simplement d'éviter, de
faire attention... notion de faire en sorte qu'on utilise les bons mots, qu'on évite de faire en sorte que ça puisse
déraper. Ce n'est pas le cas, et on ne le souhaite pas. Alors, je vais seulement
vous demander votre collaboration et votre prudence dans les termes utilisés.
M. Legault :
M. le Président, on a un gars qui vient nous dire, là, qu'il...
Une voix :
...
M. Legault : ...non, non, mais qu'il veut être premier ministre du Québec. Puis lisez ses messages, là. Ce n'est pas
digne d'un chef de parti.
Le
Président : Je vous
demande de ne pas remettre en question — puis je
m'adresse à tout le monde — la dignité des uns et des autres. Pas
besoin d'aller là, je pense. Je vous laisse continuer, M. le premier ministre.
M. Legault :
M. le Président, le chef de Québec solidaire nous dit qu'il veut faire de la
nouvelle politique, qu'il veut faire ça moderne. Je n'ai jamais vu ça,
de la bouette comme ça.
Le Président :
...demander encore une fois d'être prudents dans les termes, s'il vous plaît.
Des voix :
...
Le Président : S'il
vous plaît! Poursuivons de bonne façon. Conservons les précieuses secondes pour
la période de questions. Je vous
demande de collaborer et d'éviter d'utiliser des langages qui pourraient
porter... ou faire en sorte qu'on perde du temps précieux. M. le chef du
deuxième groupe d'opposition.
M. Gabriel
Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois :
Le premier ministre a raison sur une chose. Je vais me présenter aux Québécois,
en octobre prochain, puis je vais
leur soumettre très humblement ma candidature comme premier ministre. Ils me
jugeront sur mon ton. Mais les Québécois le jugeront aussi, le premier
ministre, sur son ton, notamment celui qu'il vient d'emprunter.
Tout
le monde sait qu'il a rencontré M. Bronfman le 22 février dernier. Est-ce qu'il peut donc
confirmer en cette Chambre que, lors
de cette rencontre, c'est ce qu'il a dit à M. Bronfman, qu'il n'y aurait
aucun sou d'argent public investi dans un stade de baseball à Montréal?
• (10 h 40) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault : M. le Président, le chef de Québec solidaire parle de son
ton, qu'il veut se présenter face aux Québécois.
Et, par
exemple, prenons le dossier des
éducatrices. Non, non, mais il dit sur son compte Twitter, là, qu'on ne veut
pas valoriser les éducatrices. Il sait... Savez-vous quoi? Il sait que ce n'est
pas vrai. Il sait que le fond du dossier, c'est les employés de soutien. Mais ça ne le dérange pas ça, M. le Président, ça ne le dérange pas, de dire le contraire de la vérité sur son compte
Twitter chaque jour.
Des voix :
...
Le Président :
M. le... Mme la leader... Non! Mme la leader du deuxième groupe d'opposition, s'il
vous plaît.
Mme Labrie : Écoutez, M. le
Président, le premier ministre vient de prêter des motifs indignes à mon collègue. Le premier
ministre sait aussi très bien que son gouvernement ne dit pas non plus les
faits exacts à propos des négociations.
Le Président :
M. le leader du...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Non. Deux secondes, deux secondes. On va tous être
attentifs... S'il vous plaît!
Des voix :
...
Le Président :
Et on perd de précieuses secondes. Alors, M. le leader du gouvernement, à vous
la parole.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, dans le cadre
d'une question de règlement, je ne crois pas qu'on peut faire ce que... pourquoi est-ce qu'on se lève.
Alors, la députée de Sherbrooke se lève pour prêter des intentions et imputer
des motifs aussi. Alors, ça, sur la question de règlement, on ne peut pas...
Des voix :
...
M. Jolin-Barrette :
M. le Président... (panne de son)... qui sont avérés et qui sont composés par
le chef de l'opposition... — pardon, j'allais dire «l'opposition officielle» — par le chef de la deuxième opposition, pour
l'instant, M. le Président.
Le Président : Bon, pour terminer sur ces notions, on n'a pas besoin
d'épiloguer longtemps. Je pense que chacun est allé sur cette voie. Vous savez
ma vision des choses, mon rappel à tous, je le refais à nouveau à ce moment-ci.
Je vous demande de compléter où nous en sommes maintenant. M. le premier
ministre, il vous reste à peine huit secondes.
M. Legault :
Contrairement à ce que dit le chef de Québec solidaire, si jamais il y a un
stade de baseball, ça ne va pas coûter un sou aux contribuables
québécois.
Le Président :
Question principale, M. le député de LaFontaine.
Enquête
sur la gestion de la pandémie de COVID-19 dans les
centres d'hébergement et de soins de longue durée
M. Marc
Tanguay
M. Tanguay : M. le Président, est-ce que le
premier ministre prend toute l'ampleur du besoin, de la nécessité pour les
familles endeuillées de connaître la
vérité? Est-ce qu'il prend toute la mesure de ce désir et de ce droit à la
vérité pour les familles endeuillées?
Rappelons-le, 831 Québécoises et
Québécois sont décédés dans les CHSLD entre le 12 mars et le 17 avril. Pendant ce temps-là, hier, le ministre de la Santé disait : Moi, je n'étais pas là au début de la crise. Plus tard
dans la période de questions, il a dit :
À mon arrivée, en juin 2020, j'ai eu accès à des documents, et là je peux vous
dire qu'on n'a rien à se reprocher. C'est la vérité que l'on veut, M. le Président. Hier, on a vu Annick Lavoie,
qui représente 59 CHSLD, M. le Président, alerter le sous-ministre
adjoint chargé de la logistique, des équipements et de l'approvisionnement.
Le gouvernement
savait, on veut savoir pourquoi ils n'ont pas agi.
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian
Dubé
M. Dubé : Encore une fois, je vais mettre les choses très
claires. L'opposition demande une enquête publique, puis j'aimerais
savoir ce qui n'est pas public de l'enquête du coroner présentement. Est-ce que
l'enquête... est-ce que les témoignages sont
connus du public? La réponse, c'est oui. Est-ce que l'enquête, elle est
publique parce que les informations sont
connues de tous? La réponse, c'est oui. Est-ce que la coroner a le droit de
demander toutes les personnes qu'elle peut contacter? La réponse, c'est oui.
Puis, savez-vous, M. le Président, son rapport, parce qu'on a confiance en
elle, il sera aussi public, M. le Président.
Alors,
je redemande, comme le premier ministre l'a demandé souvent : Qu'est-ce
que l'opposition veut de plus d'une cinquième
enquête, alors qu'on doit faire confiance à nos institutions? Et, je le répète,
les Québécois veulent savoir ce qui s'est
passé, et c'est exactement ce que la coroner est en train de faire, M. le
Président. Alors, je redemande à l'opposition : Qu'est-ce qu'on aurait de plus que l'excellent
travail qui est fait par Mme Kamel en ce moment et qui est très public
dans toute cette documentation et les témoignages qui sont là? Merci,
M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc
Tanguay
M. Tanguay : Ce qu'on veut savoir : Pourquoi, quand, le
20 mars, le sous-ministre adjoint chargé à la logistique des équipements
et de l'approvisionnement a été mis au courant qu'il y avait une crise, qu'il
manquait de l'équipement, pourquoi le premier ministre est allé dire : On
a assez d'équipements, il n'y en a pas besoin, je veux rassurer tout le
monde? Pourquoi le lendemain, le
21 mars, Mme Natalie Rosebush, sous-ministre, qui était dans la
cellule de la crise, assise à côté du premier ministre, pourquoi, quand
elle aussi a été avisée... pourquoi la ministre a dit : On est corrects
pour quelques semaines? Pourquoi?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian
Dubé
M. Dubé : Je vais être très clair, M. le Président, c'est
exactement pour ça qu'on a une enquête de la coroner. C'est exactement
les questions qu'elle pose. Et, quand elle juge bon, M. le Président, de
revenir et de demander des précisions sur ce
qui a été dit, au fur et à mesure qu'elle pose ses questions, au fur et à
mesure qu'elle a de la nouvelle information, au fur et à mesure qu'elle
a des réponses à ses questions, qu'est-ce qu'elle fait? Elle conclut, elle
avance dans son enquête.
Elle
a décidé d'extensionner l'enquête jusqu'à l'an prochain. Tout le monde salue
cette décision-là parce que c'est une femme que l'on reconnaît, qui est une
excellente coroner et qui va aller au fond des choses. C'est exactement son
travail. Merci, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc
Tanguay
M. Tanguay :
Pourquoi le ministre de la Santé ne répond pas aux questions? Pourquoi le
ministre de la Santé a-t-il besoin que ce
soit la coroner qui enquête sur six CHSLD et une RPA, M. le
Président? Pourquoi ne répond-il pas pour l'ensemble de l'oeuvre? Pourquoi,
l'ex-ministre de la Santé, qui est assise derrière lui, nous n'entendons pas
ici, en cette Chambre, sa voix à des questions que se posent les familles
endeuillées, M. le Président? Pourquoi le premier ministre disait
le contraire de la vérité, que le gouvernement savait?
Des voix :
...
Le
Président :
M. le... S'il vous plaît! M. le... C'est non, évidemment. Je vais
être obligé, M. le député de LaFontaine,
de vous demander le retrait sur la fin de
votre question. Vous avez... Non, vous avez sous-entendu que le premier
ministre... Vous comprenez. Alors, je vous demande le retrait sur
votre...
Une voix :
...
Le Président : Retiré.
M. le leader du gouvernement.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette :
Oui. M. le Président, on voit que l'opposition...
Le Président :
Question de règlement.
M. Jolin-Barrette :
Non, non, non, sur...
Des voix :
...
Le
Président : Ah! vous
êtes en réponse? Je m'excuse. Vous êtes en réponse, M. le leader de
l'opposition officielle... M. le leader du gouvernement. Je
m'excuse. Erreur de ma part.
M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, je n'en pose... je
n'interviens pas tant que ça sur des questions de règlement.
M. le Président,
c'est un sujet qui est fort sérieux, et il y a plusieurs enquêtes qui ont
cours, présentement, avec tous les pouvoirs
associés, tous les pouvoirs associés : les pouvoirs de contrainte, les
pouvoirs de demander des documents, le pouvoir d'entendre les témoins
qui sont voulus.
L'opposition, et on
le voit avec l'attitude et le ton des questions du député de LaFontaine, veut
faire le procès, M. le Président, du
gouvernement, veut faire le procès de la COVID. Pourquoi, M. le
Président? Pourquoi? Le fait de poser la
question, M. le Président, tout le monde en cette Chambre le sait,
pourquoi le député de LaFontaine pose cette question-là.
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette :
Alors, M. le Président, on va laisser les enquêtes faire leur cours et on
aura les résultats...
Des voix :
...
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Gaspé. Nous vous écoutons.
Amélioration
de la sécurité sur la route 132 en Haute-Gaspésie
Mme Méganne
Perry Mélançon
Mme Perry
Mélançon : Merci, M. le
Président. Je me lève en Chambre ce matin pour souligner les actions rapides
des équipes régionales d'urgence du MTQ et
des élus de la Haute-Gaspésie pour assurer la circulation sur la route 132
après d'importants dégâts causés par les hautes marées la fin de semaine
dernière. Encore une fois, le village de Marsoui a passé proche d'être
coupé du monde, mais on a pu éviter le pire sur le seul lien routier majeur de
la Gaspésie.
M. le
Président, c'est la troisième fois que ça survient. Il y a eu la tempête Arthur
en 2013, puis en 2016, et encore cette année. On vient juste
d'investir 9 millions pour rendre ce tronçon-là précisément plus résilient
aux changements climatiques. Et on peut être
certains d'une chose, il y aura d'autres tempêtes. Ça nous prendra une
meilleure concertation et un plan d'intervention clair pour se préparer
au pire scénario.
Est-ce que le ministre
des Transports peut confirmer à la population qu'il va former un comité
rassemblant la communauté, les élus, les experts et tous les ministères
concernés?
Le Président :
M. le ministre des Transports.
M. François
Bonnardel
M. Bonnardel :
M. le Président, on n'a pas attendu
que le Parti québécois se lève pour agir rapidement. Et je m'explique.
La situation
climatique apporte son lot de défis, en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine,
et la semaine passée on a vu une situation
de tempête assez importante, du côté de la Gaspésie, qui a endommagé une partie
de la 132. J'ai parlé aux maires de La Martre et de Marsoui pour
leur expliquer ce qu'on allait faire à très court terme, de façon urgente, et à
moyen terme. Je leur ai expliqué que, rapidement, on ne devait pas enclaver la
Gaspésie, d'entreprendre des travaux d'enrochement,
de récupérer le muret qui est tombé dans le fleuve. On devait réparer de façon
plus importante la route au printemps, mais on a décidé, donc, de le
faire plus rapidement. Donc, ça, c'est la portion de la 132.
Pour
le moyen et long terme, la députée l'a mentionné, la relation — ou les relations — de la direction territoriale avec les élus est
très bonne. Maintenant, on a agi rapidement, suite à la situation
climatique, répertorié 273 sites qui sont problématiques, oui, sur la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, et de s'assurer que, pour la suite, on a un plan
de match précis. Ça veut dire quoi? On a donné un mandat pour réaliser
une étude d'impact cet automne, en 2021...
Le Président :
En terminant.
M. Bonnardel :
...qui va nous permettre... Puis je vais répondre par la suite à la question de
la députée.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Gaspé.
Mme Méganne
Perry Mélançon
Mme Perry
Mélançon : Oui, M. le Président, le ministre nous parle d'une étude
qui sera réalisée, là, d'ici 2024. Puis
je l'ai dit, il y aura d'autres tempêtes. Les Gaspésiens ont le droit de
connaître l'état actuel de la route 132, mais surtout, surtout, ce qui est
prévu pour la renforcer face aux changements climatiques. C'est une question de
sécurité. Il y a déjà un comité comme
je le propose qui est formé aux Îles-de-la-Madeleine avec tous les ministères
concernés, avec la communauté, avec les élus, aussi, des Îles-de-la-Madeleine.
J'ai besoin de savoir, pour ma région, est-ce qu'il y aura ce...
• (10 h 50) •
Le Président :
M. le ministre des Transports, à vous la parole.
M. François
Bonnardel
M. Bonnardel :
Bien, c'est une très bonne question, M. le Président. Et, je l'ai mentionné, à
court et moyen terme, ce sont des
enjeux extrêmement importants et majeurs. Quand je parle d'études d'impact qui
ont été données et qui seront faites
dans les prochaines années, on se donne deux ans pour évaluer ces sites
potentiellement importants qui seront à revoir, à refaire, on parle de 273 sites, là, il faut se donner le temps de
bien faire le travail, par la suite avoir une audience sur... une analyse
environnementale, que nous ferons, donc, pour ces 273 sites, pour être
capables d'aller le plus rapidement possible et de s'assurer de
sécuriser le réseau dans son ensemble, autant du côté de la Gaspésie et des
Îles-de-la-Madeleine.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain
Gaudreault
M. Gaudreault :
Oui. Le ministre des Transports nous parle de 273 sites pour l'ensemble de
la péninsule et des Îles. Pourtant,
dans son Plan pour une économie verte, dans la section Adapter les
infrastructures aux impacts des changements climatiques, le ministre de l'Environnement, lui, il met un
gros 1,5 million par année à partir de 2023 pour tout le Québec.
On
voit bien qu'on n'y arrivera jamais avec des montants aussi dérisoires. Est-ce
que le gouvernement va augmenter rapidement les montants en adaptation?
Le Président :
M. le ministre des Transports.
M. François
Bonnardel
M. Bonnardel :
Bien, M. le Président, on va se donner le temps de faire le travail, d'évaluer,
donc, ces 273 sites qui sont
potentiellement à revoir, à refaire. Quand cette étude d'impact sera terminée,
d'ici deux ans, il y aura une analyse environnementale
qui sera faite par le ministère de l'Environnement, et par la suite on pourra
identifier, donc, échéanciers, coûts, puis on mettra toutes les sommes
possibles pour s'assurer de sécuriser la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine.
Ça, les gens peuvent s'en assurer.
Et,
dans ce travail qu'on aura à faire pour la suite des choses, à la question de
la députée, oui, je ne dis pas oui ni non, mais on va travailler ensemble, avec
les élus, pour s'assurer d'avoir une bonne compréhension des travaux qui seront
à faire pour les prochaines années, du côté de la Gaspésie et les
Îles-de-la-Madeleine.
Le Président :
Question principale, M. le député de Rosemont.
Enquête sur la gestion de la
pandémie de COVID-19
M. Vincent
Marissal
M. Marissal :
Merci. Il y a une dizaine de jours, M. le Président, j'ai demandé au ministre
de la Santé une rencontre avec les
collègues de l'opposition pour faire le point sur la COVID. Il a acquiescé, je
le remercie. Il a même fait de cette rencontre une rencontre hebdomadaire,
jusqu'à preuve du contraire. Encore là, merci.
Maintenant
qu'on a son attention, est-ce que je peux lui rappeler qu'hier nous avons uni
nos voix, dans l'opposition, pour demander ce que de plus en plus de gens
demandent, au Québec, une commission d'enquête publique indépendante sur
la gestion de la crise de la COVID?
Face
au drame de la fillette de Granby, le gouvernement a agi, il a créé une
commission. On le félicite, on s'en félicite. Même chose pour les problèmes avec les femmes autochtones à Val-d'Or,
enquête publique élargie. On le félicite, on s'en félicite.
Maintenant,
est-ce que le ministre pourrait joindre notre front commun, faire ce que doit
et créer une commission d'enquête publique?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian
Dubé
M. Dubé :
Bien, premièrement, M. le Président, j'apprécie beaucoup ce que le député de
Rosemont vient de dire dans la première partie, le fait que, sous sa
demande, il a initié... il nous a demandé si on pouvait faire le point sur la pandémie de façon
régulière, étant donné tous les enjeux, ce que, à cette demande, j'ai accepté
rapidement. Puis je pense que ça fait
une communication avec l'opposition... D'ailleurs, l'opposition est là, et je
pense que ça a fait, au cours des dernières semaines, de très belles
discussions.
Maintenant,
sur l'enquête publique, je pense que tout le monde comprend, puis c'est pour ça
que j'ai dit tout à l'heure... puis,
je pense, c'est important pour les gens de comprendre que l'enquête du coroner,
et je le répète, M. le Président, elle est publique. Elle est publique, cette enquête-là. Les Québécois, par
l'intermédiaire des médias, par l'intermédiaire des réseaux sociaux...
est excessivement bien informé de ce qui se passe dans cette enquête-là de la
coroner.
Alors,
à ce moment-là, moi, je redemande au député, et je pense qu'il faut être très
clair : Qu'est-ce qu'une enquête publique, selon leur définition,
serait plus bonne... meilleure pour les Québécois...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...alors qu'en ce moment il y a encore deux enquêtes qui sont en cours?
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Rosemont.
M. Vincent
Marissal
M. Marissal :
J'ai l'impression de voir un film que j'ai déjà vu dans ma carrière de
journaliste. Une situation embarrassante.
D'abord, le gouvernement balaie puis ridiculise les demandes d'enquête
publique. Ensuite, le gouvernement nie. Puis ça finit toujours de la
même façon, le gouvernement s'isole. Le gouvernement est là, il est isolé.
Alors,
devant les demandes répétées, et parce qu'on veut avoir la lumière, est-ce
qu'on peut finalement déclencher une réelle enquête publique qui fera la
lumière sur ces milliers de morts?
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian
Dubé
M. Dubé : M. le Président... Puis je vais faire le point rapidement,
là, sur les trois enquêtes dont on parle. Puis en plus on oublie aussi que le Vérificateur général va s'en mêler puis va prendre une quatrième approche, donc... Mais la Protectrice du citoyen a fait un excellent rapport. On en a pris
connaissance, c'est terminé. Mais, en
même temps, on a appliqué énormément
de ses recommandations. Ça, c'est les bénéfices de cette première enquête là. Tout
le monde voit bien les bénéfices, en ce moment, de l'information qui est portée
à la connaissance du public avec l'enquête de Mme Kamel.
Troisièmement, ce qui
est en train d'être préparé par la Commissaire à la santé, elle a fait un
rapport d'étape...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...elle a dit qu'elle déposerait...
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Rosemont.
M. Vincent
Marissal
M. Marissal :
Prenons seulement la question de l'approvisionnement, dont il est beaucoup
question cette semaine, au début de
la crise, mais après aussi. On a une version romanesque, là, du gouvernement en
James Bond sur les tarmacs à travers
le monde, à la recherche d'équipement, puis on a la réalité, au Québec, de gens
qui criaient à l'aide, de personnel soignant
qui appelait dans nos bureaux en disant : On n'a même plus de masques, on
n'a plus de gants, qu'est-ce qu'on fait?
Alors, est-ce qu'on
pourrait, s'il vous plaît, par respect pour tous ces gens qui sont morts, leurs
survivants et la population du Québec, avoir une vraie...
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian
Dubé
M. Dubé :
Bien, écoutez, M. le Président, là, par respect pour les Québécois, là, je
pense que de conduire trois et même
quatre enquêtes, avec le travail que la Vérificatrice générale va initier... je
pense qu'il y a un respect pour les Québécois d'aller au fond des choses.
Et c'est exactement ce que les personnes qui sont responsables de ces
enquêtes-là...
Sur la question de
l'EPI, je pense qu'il y a beaucoup d'information qui est sortie, mais d'aller
faire... de dire que c'est un James Bond et
qu'on n'a pas pris ces choses-là au sérieux, je pense que c'est manquer de
réalité de ce qui se passait au début
de la pandémie. Je pense que tout le monde sait les conditions difficiles dans
lesquelles la cellule de crise évoluait. Le monde était en panique...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé : ...par
rapport aux équipements de protection, puis je pense que c'est important d'être
respectueux de ce qui...
Le Président :
Question principale, M. le député de Nelligan.
Guide de gestion du Programme
d'action concertée
temporaire pour les entreprises
M. Monsef
Derraji
M. Derraji :
M. le Président, la semaine dernière,
le ministre de l'Économie, en lien avec son pouvoir discrétionnaire, il nous a répondu que les critères étaient
relativement simples, trois critères : société en sol québécois,
société qui a des difficultés
financières causées par la pandémie et, troisièmement, société qui pouvait
redevenir rentable. Le premier, facile; les deux autres demandent du jugement. Et c'est là où on est rendu, le
jugement. Quelques heures plus tard, le ministre a déclaré que le jugement était un peu élastique. En
parallèle, en répondant la à Vérificatrice
générale, le ministère a confirmé
qu'il y avait un guide de gestion.
Aujourd'hui, une question très simple : Combien de guides il y avait au sein
du ministère? Et est-ce que le guide a
été appliqué dès le lancement du PACTE, ça veut dire le premier jour du lancement
de PACTE, au mois de mars 2020?
Le Président :
M. le ministre de l'Économie et de l'Innovation.
M. Pierre
Fitzgibbon
M. Fitzgibbon :
Effectivement, M. le Président, comme je l'avais dit la semaine dernière, le
13 mars, l'économie est fermée,
quelques jours après le programme Essor, pour PACTE, a été mis de l'avant avec
des guides, avec des données. Et,
effectivement, on a demandé aux gens d'Investissement Québec d'utiliser leur
jugement, parce que de déterminer si les problèmes de liquidité survenaient à
cause de la pandémie et, deuxièmement, si la compagnie pourrait devenir
rentable dans le futur est une science inexacte. Il y a beaucoup de
jugement impliqué là-dedans. Donc, on a demandé aux gens d'Investissement
Québec : Prenez le temps pour regarder comme il faut les deux éléments.
Et,
comme je l'ai dit la semaine dernière, il y a eu 1 400 projets qui
ont été approuvés. Tous les projets, sauf une vingtaine, ont été approuvés
automatiquement par Investissement Québec. Les 20 ou 25 qui sont passés au
bureau du ministre, c'était leur recommandation, selon leur évaluation. Ils
voulaient valider, effectivement, le jugement qu'ils avaient apporté
était véridique.
Alors,
dans tous les cas, ce sont des dossiers qui ont été apportés par Investissement
Québec et non par le ministre. Et, dans tous les cas, le ministre et ses
collègues au ministère ont accepté la recommandation d'Investissement Québec.
Le Président :
Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions
sans préavis
Nous
passons maintenant à la rubrique des motions sans préavis, et je reconnais M.
le leader du troisième groupe d'opposition. À vous la parole.
Demander
au gouvernement de privilégier une approche globale misant sur la
prévention, en matière d'itinérance jeunesse, et s'inspirant de la vision et
des valeurs communes contenues dans la déclaration issue
du Forum prévention itinérance jeunesse
M. Ouellet : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de
cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de
Westmount—Saint-Louis,
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
le député de Bonaventure, le député de Chomedey et le député de Rimouski, la
motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaissance que la prévention de l'itinérance jeunesse est une
responsabilité collective de la société québécoise;
«Dans un souci de
bienveillance et d'inclusion, qu'elle tienne compte du fait que les jeunes en
situation précaire ont des besoins spécifiques, mais également des forces ainsi
qu'un pouvoir certain d'autodétermination;
«En
ce sens, qu'elle s'engage à défendre les droits des jeunes dans toutes les
sphères de leur vie, ainsi qu'à impliquer concrètement et
inconditionnellement ces derniers dans toutes les initiatives visant à faire
reculer l'itinérance jeunesse;
«Enfin, qu'elle demande au gouvernement de privilégier une approche globale pour entamer un virage misant sur
la prévention et s'inspirant de la vision et des valeurs communes
contenues dans la déclaration issue du Forum prévention itinérance jeunesse des
18 et 19 novembre derniers.»
• (11 heures) •
Le Président :
Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette : Oui, M.
le Président. Il va y avoir consentement, sans débat. Mais j'ai peut-être manqué le début, le ministre délégué à la
Santé et Services sociaux est également conjoint.
Le Président :
Alors, c'est noté. À défaut, ce sera dans le procès-verbal, bien sûr.
Mise aux voix
Alors,
consentement, sans débat. Je vous demande vos votes
respectifs. M. le leader du troisième
groupe d'opposition?
M. Ouellet :
Pour.
Le Président :
M. le leader du gouvernement?
M. Jolin-Barrette :
Pour.
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président :
Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?
Mme Labrie :
Pour.
Le Président :
M. le député de Chomedey?
M. Ouellette :
Pour.
Le Président :
M. le député de Bonaventure?
M. Roy :
Pour.
Le Président :
Mme la députée d'Iberville?
Mme Samson :
Pour.
Le Président :
Cette motion est donc adoptée. M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet : Oui, merci, M. le Président. J'aimerais que cette motion soit transmise
aux chefs des partis politiques, qu'ils puissent la mettre sur les réseaux
sociaux, parce que c'est un message d'espoir qu'on envoie aux jeunes.
Le
Président : Ce sera fait. Je reconnais, à ce moment-ci, Mme la
ministre de la Culture et des Communications.
Rendre
hommage à l'écrivaine Marie-Claire Blais et offrir
des condoléances à sa famille et à ses proches
Mme Roy :
Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de
cette Assemblée afin de présenter la motion
suivante conjointement avec la députée de l'Acadie, la députée de Taschereau,
le député de Matane-Matapédia, le député de Chomedey, le député de
Bonaventure et le député de Rimouski :
«Qu'à l'occasion de
son décès, l'Assemblée nationale du Québec rende hommage à
Mme Marie-Claire Blais, reconnue comme une des plus illustres écrivaines,
scénaristes et dramaturges du répertoire littéraire francophone de sa
génération au Québec;
«Qu'elle
souligne sa contribution d'une quarantaine de romans, recueils de poésie et
pièces théâtrales ou radiophoniques à la littérature québécoise, au
cours d'une carrière de plus de six décennies, débutant avec son premier
ouvrage, La belle bête, à l'âge de 20 ans;
«Qu'elle reconnaisse
l'humanité de son oeuvre à caractère inclusif toujours empreinte de compassion,
donnant la parole à des personnages vulnérables et diversifiés sur des
thématiques avant-gardistes;
«Qu'elle
rappelle que Mme Blais était récipiendaire de très nombreuses distinctions
nationales et internationales, donc le prix Médicis en 1966 pour Une
saison dans la vie d'Emmanuel ainsi que le prix Gilles-Corbeil de la
Fondation Émile-Nelligan pour l'ensemble de son oeuvre, en plus d'avoir été
nommée officière de l'Ordre national du Québec en 1995 et compagne de l'Ordre
des arts et des lettres du Québec en 2016;
«Qu'elle
transmette ses condoléances à sa famille, à ses proches, ainsi qu'à ses
nombreux admirateurs au Québec et à l'étranger;
«Qu'enfin,
elle observe un moment de recueillement en sa mémoire.»
Le Président : Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette :
Oui, M. le Président, il y a un consentement pour un débat de deux minutes
par intervenant dans l'ordre suivant :
la ministre de la Culture et des Communications, la députée de l'Acadie, la
députée de Taschereau et le député de Matane-Matapédia.
Le
Président : Je comprends qu'il y a donc consentement pour qu'il
y ait quatre intervenants pour la durée... et que la durée des interventions soit limitée à un maximum de deux minutes
chacune, débutant par Mme la ministre de la Culture et des
Communications. À vous la parole.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy : Merci
beaucoup, M. le Président. Avec son
départ, le Québec perd l'une des auteures les plus talentueuses
de sa génération. Sa première oeuvre, La belle bête, créée en 1959, est
devenue un livre culte pour les jeunes professionnels, professeurs de littérature, et pour les lecteurs,
qui lui resteront fidèles avec le temps. Son talent a été remarqué aux
États-Unis et dans la francophonie,
ce qui l'a incité à poursuivre et vivre de sa plume. C'était l'époque où une
nouvelle génération se dévouait à
créer une littérature en phase avec un Québec entrant dans la modernité. À ce
titre, Marie-Claire Blais a créé un choc, car elle bousculait les diktats de l'écriture, usant des
paragraphes et de la ponctuation d'une façon inédite et autorisant ses
personnages à parler et agir avec la rudesse et la violence qui sont celles de
la vraie vie.
Grâce au soutien de
critiques et d'éditeurs éclairés, l'écrivaine de Québec a ensuite publié, en
1966, le roman Une saison dans la vie d'Emmanuel, qui a connu un succès mondial, remportant le
prix Médicis et le prix France-Québec alors que les éditeurs de partout s'en
emparaient, le traduisant en plus d'une dizaine de langues. Aujourd'hui, M. le
Président, ce roman demeure l'une des oeuvres québécoises les plus lues dans le
monde. Il a été suivi d'une vingtaine de romans, de quelque six pièces
de théâtre et de recueils de poésie.
Inimitable, brillante
et pleine de compassion dans ses oeuvres, Mme Blais est une immortelle de
la littérature québécoise. Elle avait un style à la fois très descriptif et
brutalement détonnant qui n'appartenait qu'à elle.
Parmi les nombreuses
distinctions accordées à Mme Marie-Claire Blais, je mentionnerais, M.
le Président, le prix Athanase-David, des
Prix du Québec, la plus haute récompense remise par l'État en matière de
littérature, qui lui a été décerné en 1982.
J'aimerais,
M. le Président, que l'Assemblée se joigne à moi pour saluer la contribution à
la culture québécoise de cette artiste d'exception qui nous a quittés le
30 novembre dernier. Merci, M. le Président.
Le Président :
La parole est à vous, Mme la députée de l'Acadie.
Mme Christine St-Pierre
Mme St-Pierre :
Merci, M. le Président. Il y a de ces grands écrivains pour lesquels on se dit :
Ils n'arrêteront jamais d'écrire, ils ne
mourront jamais. Marie-Claire Blais était l'une de celles-là. Son oeuvre,
commencée en 1959, à 20 ans à
peine, avec La belle bête, était un cri de liberté émanant de la «grande
noirceur», une liberté qui s'est sans cesse affirmée par la suite dans
des personnages poétiques d'enfants solitaires et révoltés, de familles
dysfonctionnelles, de tendresse inassouvie
et de transfiguration poétique au coeur d'une américanité portée par la
francophonie. Une oeuvre de marginalité et de laideur. Qu'est-ce que la
laideur, sinon une valeur sur l'échelle de la beauté?
Bien
sûr, même les plus grandes voix ne sont pas éternelles, et, après une trentaine
de romans en 60 ans, mais aussi des
essais, des poèmes, des pièces pour le théâtre et la radio, et de nombreux
prix, dont le Médicis, en 1966, Marie-Claire Blais s'est éteinte. Chez nous, on voudra dire que
Marie-Claire Blais était une grande écrivaine québécoise, mais, dans les faits,
il faudrait plutôt dire qu'elle était une
grande voix littéraire de la francophonie, bien au-delà de nos frontières.
Quand, une voix aussi rare, on la
salue, quand on lui rend hommage, on ne l'oublie pas. Ce qui me fait dire, M.
le Président, en y pensant bien, qu'au fond c'est vrai qu'elle ne meurt
pas.
Alors,
j'offre toutes mes condoléances, au nom de ma formation politique, aux proches
et à la famille de Mme Marie-Claire Blais. Merci, M. le Président.
Le Président :
Mme la députée de Taschereau.
Mme Catherine Dorion
Mme Dorion :
La fille sauvage.
«Fille sauvage qui
préparez le feu
Et qui, mélancolique,
partagez avec cet homme
De silencieux repas,
Quand donc lui
parlerez-vous?
«Longue est cette
table qui vous sépare de lui,
Sévère votre regard,
Ne pourrait-il
entendre jaillir de vos dents
Blanches et dures
Cette fraîche colère
qui serait votre rire?»
Dans Existences :
«Les villes se sont
écroulées sans bruit
Le ciel submergé de
mouettes noires a coulé au fond des océans,
Ce n'était qu'une fin
de journée comme les autres
Car en baissant la
tête
Chacun avait pensé au
lourd ennui
Lié à ses gestes
jusqu'à l'éternité.»
Marie-Claire
Blais, on l'a entendu, était reconnue internationalement, reconnue au Québec.
On lui a donné des prix. Mais,
comparée à d'autres auteurs aussi prolifiques ou aussi reconnus, elle est moins
connue par le Québec que d'autres. Pourquoi?
Premièrement, parce que c'est une femme discrète, et, deuxièmement, parce que
c'était une femme. Et, en l'honneur de
cette femme-là qui n'a pas eu la reconnaissance qu'elle aurait méritée si elle
avait été moins discrète ou si elle avait été plus mise de l'avant, je trouve que ce serait le fun
qu'on lui fasse un petit hommage supplémentaire, que ce soit une forme
d'hommage national, qu'on nomme un lieu de son nom, qu'on fasse quelque chose
ici, à l'Assemblée nationale, peut-être, où, je lance l'idée à tout le monde, ce serait une belle façon de
reconnaître l'importance qu'on vient de souligner et qui devrait aller
plus loin encore, à mon avis. Merci.
• (11 h 10) •
Le Président :
M. le député de Matane-Matapédia, à vous la parole.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé : Merci, M. le Président. Mme Marie-Claire
Blais, une grande dame, une grande dame de notre littérature, s'est éteinte. Son talent et son oeuvre, depuis,
sont célébrés aux quatre coins du monde et de la francophonie, voire au-delà.
Poésie, essais, théâtre, romans, elle aura
touché à autant de genres littéraires qu'elle aura touché de gens par ses mots
justes, humains et émouvants.
La grande militante
indépendantiste Andrée Ferretti parlait de sa singulière singularité, comment
elle l'inspirait à travers sa force, à
travers son âme. Nous devons également souligner sa longévité sur la scène de
l'écriture, ce qui n'est pas rien, ainsi que son esprit, de toute évidence,
intarissable de mots, d'histoires et de parcours, souvent singuliers, atypiques,
voire empreints de détresse et de violence.
Plusieurs
récompenses prestigieuses sont venues jalonner sa carrière. On disait même
qu'elle pourrait aisément, vu son
calibre, être une candidate pour le Nobel de littérature. Nul doute que, malgré
sa timidité, malgré son humilité, elle aura accueilli ces reconnaissances comme
un baume, même si celles-ci ne constituaient d'aucune façon un moteur pour
sa création.
Elle,
Marie-Claire, quoique tout en douceur, était fille de la cruauté du monde,
désireuse de sensibiliser à la différence, à la marginalité et aux défis qu'elles entraînent. Elle voulait que ses
personnages vivent et soient entendus par-dessus le tumulte de
l'existence pour semer l'espoir et la beauté sous toutes leurs formes.
Toute
sa vie, Marie-Claire Blais fut une rebelle au coeur immense, à l'esprit
courageux et libre, une femme inspirante. Elle se reconnaissait dans la jeunesse de toutes les époques, la
trouvait inspirante, positive. J'espère qu'elle savait à quel point c'était réciproque, combien elle a contribué
à faire émerger de nouveaux talents, de nouvelles vocations littéraires.
Nous lui sommes très reconnaissants. Et nous pouvons avoir la certitude que son
oeuvre magistrale, puissante et grandiose fera en sorte qu'elle demeurera
vivante dans nos coeurs, vivante et libre, vivante et éternelle.
À
tous ses proches, à tous ses admirateurs, à toutes ses admiratrices, j'adresse,
au nom du Parti québécois, mes sincères condoléances. Merci, M. le
Président.
Mise aux voix
Le
Président : J'invite
maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur
cette motion, suivi des députés indépendants. D'abord, M. le leader
du gouvernement?
M. Jolin-Barrette :
Pour.
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président :
Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?
Mme Labrie :
Pour.
Le Président :
M. le leader du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet :
Pour.
Le Président :
M. le député de Chomedey?
M. Ouellette : Pour.
Le Président :
M. le député de Bonaventure?
M. Roy : Pour.
Le Président : Mme la
députée d'Iberville?
Mme Samson : Pour.
Le
Président : Cette motion est adoptée. Je vous demanderais de
vous lever, à ce moment-ci, pour observer une minute de silence à la
mémoire de Mme Marie-Claire Blais.
• (11 h 12 — 11 h 13) •
Le Président : Je vous
remercie. Veuillez vous asseoir.
M. le député de LaFontaine, à vous la
parole.
M. Tanguay : Oui, merci, M. le Président, je vous
remercie. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec
la leader du deuxième groupe d'opposition, la députée de Joliette
et le député de Chomedey :
«Que l'Assemblée nationale rappelle que l'entente collective avec les
centres de la petite enfance — CPE — est échue depuis le 31 mars 2020,
soit il y a plus de 20 mois;
«Qu'elle constate que la pénurie de personnel
dans le réseau [des services] de garde est telle que nous assistons depuis
plusieurs mois à des ruptures de services dans certains CPE;
«Qu'elle souligne que la négociation actuelle
est essentielle afin de permettre la rétention du personnel dans les CPE et
aussi, afin de recruter massivement les éducatrices et intervenantes
nécessaires au développement du réseau;
«Qu'elle
condamne le gouvernement qui laisse planer le doute quant à une loi spéciale
pour mettre fin à la grève;
«Qu'elle
condamne également l'utilisation des fonds publics pour financer des publicités
gouvernementales au sujet des négociations actuellement en cours;
«Qu'elle
exige que le premier ministre s'implique dès aujourd'hui dans la négociation
afin de dénouer l'impasse qui complique grandement la vie de dizaines de
milliers de familles québécoises.»
Le Président : Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette : Pas de
consentement, M. le Président.
Le Président : Pas de
consentement. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Je demande le consentement de cette Assemblée pour débattre de la
motion suivante conjointement avec le député de Jonquière et le député de Chomedey :
«Que l'Assemblée nationale félicite l'économiste
canadien David Card, professeur à l'Université de Berkeley, qui est l'un des récipiendaires 2021 du Prix
de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel,
notamment en raison de ses recherches qui ont
démontré que l'augmentation du salaire minimum n'entraînait pas nécessairement
une diminution du nombre des emplois;
«Qu'elle
demande au gouvernement de présenter un plan d'augmentation graduelle du
salaire minimum à 18 $ l'heure d'ici le 1er mai 2023,
afin d'assurer une prévisibilité des hausses;
«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'inclure dans le plan
d'augmentation du salaire minimum des mesures de soutien pour les
petites entreprises et le milieu communautaire.» Merci.
Le Président : Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette : Pas de consentement,
M. le Président.
Le Président : Pas de consentement.
Avis
touchant les travaux des commissions
Nous passons à la rubrique des avis touchant les
travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, j'avise cette Assemblée que
la Commission de la culture et de
l'éducation poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 12 h 45 et de 15 heures à 18 heures, à la salle du
Conseil législatif;
La Commission
des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi visant à faciliter le déroulement des
prochaines élections générales provinciales dans le contexte de la pandémie de
la COVID-19 et modifiant la Loi électorale, aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 12 h 45 et de 15 heures à 18 heures, à la salle Pauline-Marois;
La Commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 102, Loi
visant principalement à renforcer l'application des lois en matière
d'environnement et de sécurité des barrages, à assurer une gestion responsable des pesticides et à mettre en
oeuvre certaines mesures du Plan pour une économie verte 2030 concernant les véhicules zéro émission, aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 12 h 45, à la salle
Marie-Claire-Kirkland;
La Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 5, Loi donnant suite à des mesures fiscales
annoncées à l'occasion du discours sur le budget du 25 mars 2021 et à certaines
mesures, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle
Marie-Claire-Kirkland. Merci.
Le
Président : Merci.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Avis de sanction de projets de
loi
À
la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, bien, je vous
informe qu'aujourd'hui, à 13 h 15, au bureau de Son Honneur le
lieutenant-gouverneur, auront lieu les sanctions des projets de loi suivants :
le projet de loi n° 3, Loi modifiant diverses dispositions
législatives principalement dans le secteur financier; le projet de loi
n° 200, Loi concernant la Ville de Montréal; le projet de loi n° 201,
Loi prolongeant le délai prévu à l'article 137 de la Charte de la Ville de
Gatineau; et le projet de loi n° 202, Loi concernant l'activité d'assureur
de la Fédération québécoise des municipalités locales et régionales et la
fusion par voie d'absorption de La Mutuelle des municipalités du Québec avec
celle-ci.
Affaires du jour
La
période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer
aux affaires du jour.
Et
je suspends les travaux pour quelques instants. Merci à toutes et à tous.
(Suspension
de la séance à 11 h 17)
(Reprise à 11 h 26)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous reprenons nos travaux, et je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui. Bon matin, Mme la Présidente. Alors, je vous demanderais d'appeler
l'article 1.
Débats sur les rapports de commissions
Prise en considération du rapport de la commission qui a
procédé à
l'audition de certains sous-ministres et dirigeants d'organismes
en vertu de la Loi sur l'administration publique
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie. À l'article 1 du
feuilleton, l'Assemblée prend en considération
le rapport de la Commission de
l'administration publique qui, le 15 septembre, les 6 et 27 octobre ainsi
que le 30 novembre 2021, a procédé à l'audition du ministère
de la Famille sur sa gestion administrative et ses engagements financiers ainsi que sur le chapitre 2 du
rapport d'octobre 2020 du Vérificateur général du Québec intitulé Accessibilité
aux services de garde éducatifs à l'enfance, et à l'audition
de la Société d'habitation du Québec sur le chapitre 4 du rapport
d'octobre 2020 du Vérificateur général du Québec intitulé Programme
AccèsLogis Québec : réalisations des projets d'habitation et en suivi
de la recommandation 2.1 du 41e rapport de la Commission de
l'administration publique. Ce rapport, qui a été déposé le
7 décembre 2021, contient des observations, des conclusions et
cinq recommandations.
Je
vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du
règlement, la prise en considération du rapport donne lieu à un débat restreint
d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable. Je vous rappelle
également qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 95 ce
débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.
Conformément
à ce qui a été énoncé antérieurement par la présidence, la répartition des
temps de parole dans le cadre de ce
débat s'effectuera comme suit : 56 min 15 s sont allouées
au groupe parlementaire formant le gouvernement, 34 min 31 s sont allouées au groupe parlementaire formant
l'opposition officielle, 12 min 47 s sont allouées au deuxième
groupe d'opposition,
8 min 57 s sont allouées au troisième groupe d'opposition, puis
7 min 30 s sont allouées à l'ensemble des députés indépendants sous réserve d'au maximum
de deux minutes par député. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un
des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon
les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les
interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Et, enfin, je rappelle aux députés indépendants que, s'ils
souhaitent intervenir au cours du débat, ils ont 10 minutes à partir
de maintenant pour en aviser la présidence.
Et, sans plus tarder,
je cède la parole au premier intervenant, qui sera M. le député de
Robert-Baldwin.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Très bien. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, c'est avec plaisir
que je vous présente le rapport sur l'imputabilité de l'automne 2021, qui
a été déposé ici hier, mardi. Je voudrais saluer tout d'abord les collègues
membres de la Commission de l'administration
publique. Encore cette année, je tiens à souligner que nous travaillons dans un
climat non partisan et que nos mandats sont adoptés à l'unanimité. Cette
collégialité nous permet d'accomplir un examen rigoureux de
l'administration publique.
• (11 h 30) •
Pendant
cette période de crise sanitaire, nous avons recommencé à nous réunir en
personne lorsque c'est devenu possible. Nous avons toutefois profité de la
visioconférence pour accueillir certains témoins. Ainsi, la commission a
organisé deux auditions mixtes, c'est-à-dire qu'elles ont couvert un volet de gestion
administrative et un volet de suivi des rapports du Vérificateur
général. Nous avons d'abord entendu le ministère de la Famille sur
l'accessibilité des services de garde éducative
à l'enfance. Dans notre rapport, nous lui demandons un suivi régulier pour nous
assurer que le développement de nouvelles
places et l'ajout de main-d'oeuvre suivent les objectifs du ministère. Nous
reviendrons un peu plus tard sur cet enjeu-là.
La semaine dernière,
nous avons reçu aussi le président-directeur général de la Société d'habitation
du Québec et son équipe pour discuter, entre
autres, de sa gestion du programme AccèsLogis. Nous suivrons ces démarches au cours des prochains mois pour veiller aussi à la mise en
place du nouveau programme de construction de logements sociaux et
abordables. On reviendra aussi sur cet enjeu-là.
Par ailleurs, la commission a examiné 13 rapports annuels de gestion de
ministères et organismes. Nous résumons nos constats au chapitre III du rapport sur l'imputabilité. J'aimerais mentionner que, dans l'ensemble, les rapports annuels sont de grande qualité. Nous
avons pu constater le travail accompli sur la planification stratégique et la gestion axée sur les résultats
au cours des dernières années. Cependant, dans plusieurs cas, l'information
présentée sur les ressources financières nous a laissés sur notre faim, une situation que nous ne manquerons pas
de rappeler aux ministères et organismes concernés afin d'assurer une
gestion efficiente des ressources de l'État.
Mais
revenons maintenant sur les deux auditions auxquelles j'ai fait allusion juste
il y a quelques minutes. Alors, pour ce qui est du ministère de la Famille, je
pense que c'est important de revenir un peu sur le rapport du Vérificateur
général qui a déclenché cette audition et
quels étaient donc les faits saillants du rapport du Vérificateur général?
Alors, le rapport visait à vérifier
si le ministère met en place des mesures efficaces et efficientes afin de
remplir sa mission d'assurer l'égalité
des chances pour tous les enfants d'accéder, en temps opportun, à des services
de garde de qualité et adaptés à leurs
besoins ainsi qu'à ceux de leurs parents.
À la suite de son
audit, le Vérificateur général a émis cinq constats.
Numéro
un : L'offre de places subventionnées ne suffit pas à répondre aux besoins
des familles du Québec, et les familles
qui ne peuvent en bénéficier doivent
payer plus cher pour un service dont la qualité ne répond pas nécessairement
à leurs attentes.
Le
deuxième constat du VG : Les enfants de familles à faibles revenus sont
sous-représentés dans les centres de la petite enfance des régions de
Laval et de Montréal.
Troisième :
Le guichet unique, La Place 0-5, ne permet pas une gestion efficace de
l'accès aux services de garde. Il n'est pas à jour et l'information y
est insuffisante.
Quatrièmement :
L'encadrement des services de garde par le ministère est insuffisant et ne permet
pas d'optimiser l'accès des familles aux services de garde, plus spécifiquement
pour les enfants avec des besoins particuliers.
Et
finalement : Le ministère n'atteint pas ses objectifs de création de
nouvelles places subventionnées, ce qui l'empêche de répondre aux besoins des
familles. Donc, ça, c'étaient les faits saillants du rapport du Vérificateur
général.
Après
discussions en commission, Commission de l'administration publique, avec la
sous-ministre et son équipe, discussions très fructueuses, et très cordiales,
et où des questions étaient posées et des réponses avaient été données,
la Commission de l'administration publique a
émis deux recommandations. Puis encore une fois, dans l'esprit de la
commission, ces recommandations sont unanimes, donc c'est la commission
qui a fait ces recommandations.
Première :
«Que le ministère de la Famille transmette à la Commission de l'administration
publique, au plus tard le 1er mars 2022, et, par la suite, tous les
six mois jusqu'en septembre 2024, un portrait à jour du développement de
nouvelles places en services de garde éducatifs à l'enfance. Que ce
portrait comprenne, sans s'y limiter, les données suivantes :
«1°
l'objectif de développement de places, le nombre de places en chantier, le
nombre de places fermées et le nombre de places livrées;
«2° l'état de
situation des appels de projets, dont le nombre de projets reçus et réalisés;
«3° le nombre
d'enfants en attente d'une place.»
Et aussi : «Que
le ministère présente ces données ventilées par région administrative...»
La deuxième recommandation : «Que le ministère
de la Famille transmette à la Commission de l'administration publique, au plus tard le 1er mars 2022
et par la suite tous les six mois jusqu'en septembre 2024, l'état de
situation de la main-d'oeuvre du réseau de services de garde [...] à
l'enfance. Que cet état de situation comprenne notamment :
«a)
une mise en relation des objectifs et des résultats des programmes incitatifs
développés par le ministère, dont le programme de formation de courte
durée, les bourses d'études[...] — etc.;
«b) le détail des
ressources financières accordées à ces différents programmes incitatifs;
«c) le nombre de
postes d'éducatrices qualifiées et non qualifiées à pourvoir[...]; et
finalement
«d) le nombre
d'éducatrices inscrites en formation technique.»
Alors, ces recommandations, qui ont fait suite à la discussion avec la sous-ministre, Mme la
Présidente, s'insèrent dans le mandat de la Commission d'administration publique, qui ne questionne pas le bien-fondé
ou pas d'un programme gouvernemental, mais la capacité du ministère
de livrer ce programme gouvernemental. Donc, c'est sur ça et c'est dans cet esprit-là qu'on devrait, à mon avis,
interpréter les recommandations de la commission. Donc, on veut s'assurer que la machine
administrative est capable de suivre les objectifs que le gouvernement lui
envoie.
La deuxième audition, Mme la Présidente, a eu
lieu avec la Société d'habitation du Québec, la SHQ, et visait le programme AccèsLogis. Et donc je vais faire un peu la même
chose, c'est-à-dire, Mme la
Présidente, je vais faire un résumé des faits saillants du rapport du Vérificateur général qui a déclenché cette audition et, par la suite, les recommandations de la commission.
Alors, le
rapport de performance du Vérificateur
général portait sur la réalisation des projets d'habitation dans le
cadre du programme AccèsLogis Québec. Plus
précisément, il visait à déterminer si ces projets étaient correctement
encadrés par la Société d'habitation
du Québec, donc la performance administrative de l'organisme. Le Vérificateur
général conclut que la SHQ n'assume pas adéquatement ses responsabilités
quant à la gestion de ce programme.
À cet égard,
il formule cinq constats. Le vérificateur note l'absence de stratégie
d'intervention afin de maximiser l'aide
aux ménages ayant des besoins en matière de logement. De plus, la société
n'effectue pas d'analyse des besoins des ménages et de leur environnement socioéconomique, ce qui permettrait de
mieux adapter les programmes. L'analyse des besoins est insuffisante lorsque vient le temps d'évaluer
l'admissibilité des projets au programme AccèsLogis. Les besoins par
type de clientèle ainsi que par répartition géographique des projets ne font
pas l'objet d'un suivi satisfaisant.
Sur le plan
d'évaluation financière des projets, le VG la pratique relève la pratique de ne
pas contrôler le coût total, mais plutôt de plafonner la subvention à
50 % des coûts admissibles. D'autres pratiques problématiques sont
décelées, notamment le fait que les coûts
prévus sont trop peu documentés et que les barèmes financiers n'ont pas été mis
à jour depuis plus de 10 ans.
Les groupes de ressources techniques, les GRT,
sont des partenaires importants de la société. Ils jouent un rôle-conseil
auprès des organismes qui développent les projets et sont les seuls à être
reconnus pour le faire. Leur rôle et le fait
qu'ils ont, pour la plupart, des territoires exclusifs leur donnent beaucoup
de pouvoirs, encore une fois, selon la VG, dans la réalisation des projets dans
le cadre du programme AccèsLogis. Cependant, ces groupes sont peu encadrés
et aucune évaluation n'est réalisée pour
assurer de leur intégrité et de leur indépendance envers les objectifs de développement.
• (11 h 40) •
Certains
projets autorisés ne visent pas seulement la construction de logements sociaux
et abordables. Notamment, l'audit présente des exemples de projets qui
incluent des parties non résidentielles importantes, qui constituent un
risque pour la réalisation de leurs parties résidentielles. De plus, d'autres projets sont menés
pas des organismes dont les activités connexes présentent un risque pour
la pérennité des projets résidentiels.
Alors, encore une fois, Mme la Présidente, une discussion s'est suivie avec le président-directeur général de la SHQ. Et d'ailleurs, comme c'était le cas aussi pour le ministère de la Famille, les organismes, donc la SHQ et le ministère de la Famille, souscrivent entièrement aux recommandations et aux constats du Vérificateur général. Et donc, ça, je pense, c'est un signe de bonne collaboration
entre l'appareil administratif et le VG.
Alors, suite à
la discussion avec le P.D.G. de la SHQ, la Commission de l'administration publique a émis trois recommandations.
Premièrement : «Que la Société d'habitation
du Québec transmette à la Commission de l'administration publique, au
plus tard le 1er mai 2022, son
nouveau cadre de reconnaissance des groupes de ressources techniques — les GRT, comme vous avez mentionné tantôt.»
Deuxièmement : «Que la SHQ fasse rapport à
la Commission de l'administration publique, au plus tard le 1er mai 2022,
des progrès de la mise en place de son nouveau programme pour la réalisation de
logements sociaux abordables.» Le
gouvernement avait, dans la mise à jour du 25 novembre, parlé qu'un
nouveau programme serait mis en place. Donc, la commission souhaiterait
que, d'ici le 1er mai 2022, cette information soit transmise. «Que ce document résume la progression des portraits régionaux sur
les besoins en matière d'habitation et la prise en compte des constats dressés par le Vérificateur général dans
ses deux rapports d'audit sur le programme AccèsLogis.»
Et troisièmement : «Que la SHQ transmette à
la Commission de l'administration publique le résultat des évaluations
du Vérificateur général du Québec en suivi des recommandations formulées dans
l'audit intitulé Programme
AccèsLogis : réalisation des projets.»
Donc, ça, c'étaient les deux auditions que la Commission
de l'administration publique a pu faire pendant ces trois mois.
Maintenant,
le mandat de la Commission de l'administration
publique reste le même, il
n'a pas changé, et c'est celui d'être
le lieu privilégié pour la reddition
de comptes et le contrôle parlementaire. Il s'agit d'un de nos rôles essentiels comme parlementaires. Nous le savons tous, comme députés,
nous sommes les contrôleurs de l'action du gouvernement. Il faut garder en
tête, Mme la Présidente, que ce rôle évolue au fil des années, et nous sommes
en constante réflexion pour nous adapter
aux nouvelles réalités et aux meilleures pratiques en matière de gestion axée
sur les résultats. C'est pourquoi nous avons participé, en septembre, à la conférence annuelle du Conseil canadien
des comités de comptes publics organisée virtuellement à partir
d'Edmonton. Il est toujours enrichissant de discuter avec nos homologues des
autres provinces et des autres Parlements de leurs pratiques de
reddition de comptes.
Cet automne, nous avons envisagé d'examiner,
nous, la commission, examiner les états financiers consolidés du gouvernement en commission parlementaire. Il
s'agit d'un mandat traditionnel du Comité des comptes publics, dont on a parlé avec nos collègues à Edmonton, mais qui
n'incombe actuellement à aucune de nos commissions parlementaires ici,
au Québec. Nous comptons poursuivre notre réflexion, au cours des prochains
mois, à cet égard-là, surtout dans le contexte où les comptes publics du
gouvernement, donc l'analyse consolidée des états financiers est rendue
publique, à notre avis, beaucoup trop tard,
dans le sens où cette année c'était lors de la mise à jour, donc le
25 novembre. Dans toutes les autres provinces canadiennes et au
gouvernement fédéral, le dépôt des comptes publics est beaucoup plus tôt que
ça, suite à la fin de l'année fiscale qui est le 31 mars.
Et donc le Québec est la dernière des provinces
à rendre publics ses comptes publics. Et, lors de cette... quand c'est rendu
public, il n'y a rien qui se passe. Il n'y a aucune commission parlementaire
qui étudie les comptes publics, contrairement, encore une fois, aux autres
provinces. Alors, nous continuons de réfléchir, quel serait le meilleur
véhicule pour cet exercice important de reddition de comptes. Est-ce que ce
serait la Commission de l'administration publique? Est-ce que ce serait la
Commission des finances publiques? Quelque chose à réfléchir non seulement
entre nous en commission, mais peut-être aussi que le président de l'Assemblée
nationale, dans son projet de réforme parlementaire, pourrait aussi réfléchir à cet enjeu-là de comment
est-ce qu'on pourrait procéder à cet égard-là. Surtout que pas plus tard
qu'hier, par exemple, Mme la
Présidente, lors d'une rencontre avec le ministre des Finances, dans une autre
commission, la Commission des
finances publiques, où on discutait de la mise à jour économique du
25 novembre, le ministre des Finances nous a dit très clairement, et c'est le cas, et c'est le cas depuis
sept, huit, neuf ans, qu'il y a toujours une bonne différence entre les montants qui sont budgétés, lors d'un
budget, et les montants qui sont dépensés par les ministères et organismes.
Donc, cet écart-là, on... Le public et les
parlementaires constatent cet écart-là seulement lors du dépôt des comptes
publics. Donc, dans ce cas-ci,
c'était seulement au mois de novembre. C'est un peu tard. Je pense qu'une
discussion parlementaire de ces
écarts-là beaucoup plus tôt dans l'année fiscale... Les autres provinces sont
capables de déposer leurs comptes publics généralement vers le mois de
juin, juillet, alors... et, par la suite, de procéder à un examen parlementaire
de ses comptes publics. Je pense qu'on
devrait aller dans cette direction-là, mais il va falloir que la Commission de
l'administration publique poursuive
sa réflexion, mais aussi que le président de l'Assemblée, par exemple, puisse
prendre ça en considération aussi dans ces projets de réforme
parlementaire.
Maintenant, à la fin de la période des travaux,
Mme la Présidente, donc aujourd'hui, maintenant, demain, je constate que la commission remet son rapport avec
encore plusieurs mandats à accomplir. Je me permets de rappeler à tous mes collègues ici l'importance des travaux de la
Commission de l'administration publique pour améliorer la gestion de l'État québécois. Ces travaux, qui sont
nécessaires, nécessitent du temps, nécessitent du temps pour nous réunir. Et franchement, Mme la Présidente, de septembre 2021
à novembre 2021, donc trois mois, deux auditions. Deux auditions en trois mois, ce n'est nettement pas suffisant surtout
que nous avions, dans notre plan de travail, quatre ou cinq auditions qui sont
déjà en retard.
Donc, encore une fois, je fais appel aux
leaders, au pluriel, aux leaders des différents groupes
parlementaires pour qu'on trouve le temps
nécessaire à la commission de pouvoir continuer
à jouer le rôle important qu'elle joue de contrôle parlementaire de
l'activité du gouvernement.
Bien sûr, le travail de la commission ne serait
pas possible sans la participation de tous les membres permanents et aussi les membres remplaçants qui exercent leur
rôle de contrôleurs parlementaires dans un esprit de collégialité, et de transparence,
et collégialité transpartisane aussi.
Nous pouvons
aussi compter sur deux institutions précieuses, c'est-à-dire le Vérificateur général du Québec et le Protecteur du citoyen, qui
alimentent nos travaux et prennent régulièrement le temps de nous présenter
leur travail.
La commission
reconnaît aussi le soutien d'une équipe chevronnée et méticuleuse. Je remercie
tout particulièrement l'équipe du service des missions... des commissions,
pardon, composée de notre secrétaire, Dominic Garant, mais aussi de Afiwa Gbonkou, Julie Godbout et Mathieu LeBlanc,
ainsi que l'équipe du Service de la recherche, c'est-à-dire François Gagnon,
Audrey Houle, Brenda-Lee Leblanc, Josée
Levasseur, Xavier Méthé Mercier, Julie Paradis, Jules Racine, Michèle Rioux
et Danielle Simard.
En terminant, Mme la Présidente, j'aimerais saluer M. Paul Lanoie.
M. Paul Lanoie a pris sa retraite cet été, ayant ainsi quitté son poste de
Commissaire au développement durable. M. Paul Lanoie, un économiste de renom, un
spécialiste du développement durable, a contribué énormément à vulgariser ces
enjeux-là avec ses rapports et avec ses discussions avec la commission
et dans d'autres forums aussi. Et les membres de la commission et moi-même,
nous avons grandement, grandement apprécié son expertise et sa rigueur.
Et finalement,
Mme la Présidente, je tiens également à exprimer ma
profonde gratitude à Mme Julie Paradis, du Service de la recherche, pour son précieux soutien au cours des
dernières années dans le cadre de nos divers mandats. Je lui souhaite la
meilleure des chances pour la suite de son cheminement professionnel. Merci
beaucoup, Mme la Présidente.
• (11 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Robert-Baldwin. Et maintenant je suis prête à reconnaître le prochain intervenant,
et ce sera Mme la députée de Labelle.
Mme Chantale Jeannotte
Mme
Jeannotte : Merci, Mme la Présidente. En tant que première personne à
prendre la parole du côté gouvernemental dans le cadre du débat sur le dépôt du rapport de la Commission de
l'administration publique, permettez-moi de faire un bref survol des
travaux tenus cet automne. Nous allons donc revenir sur ces aspects.
Nous avons
donc reçu, Mme la Présidente, la Vérificatrice
générale à deux reprises en audiences cet automne, une première fois au mois de
septembre, afin d'analyser la gestion du ministère de la Famille sur
l'accessibilité aux services de garde
en milieu éducatif à l'enfance. Nous avons entendu la sous-ministre,
Mme Julie Blackburn, et son équipe nous expliquer de quelle façon
ils comptaient régler les lacunes soulevées par la vérificatrice dans son
rapport.
Nous avons
reçu la Vérificatrice générale une seconde fois, plus récemment, à la fin
novembre, afin d'analyser la gestion
de la Société d'habitation du Québec par rapport à la réalisation des projets
d'habitation du programme AccèsLogis Québec.
Nous avons entendu le président-directeur général par intérim,
M. Jean-Pascal Bernier, et son équipe avancer que les
manquements identifiés par la vérificatrice allaient être pris en compte dans
la nouvelle mouture du programme à venir. Je laisserai toutefois mes collègues développer plus en détail au sujet
de ces auditions pour revenir plus largement sur les activités de la commission
tenues cet automne.
Ainsi, comme
je viens de le mentionner, nous avons procédé à l'audition du ministère de la
Famille ainsi que de la Société
d'habitation du Québec. Nous avons également procédé à l'analyse de rapports
annuels de gestion et appréciation de
la performance de cinq entités distinctes, soit la Commission municipale du
Québec, l'Institut national de santé publique du Québec, le ministère de
l'Éducation, la Régie de l'assurance maladie ainsi que le secrétariat du
Conseil du trésor.
À la suite
d'échanges et de la volonté de la commission, il a été convenu d'effectuer
désormais des analyses sur l'ensemble des entités regroupées dans les
quatre catégories prévues par la loi. S'ajoutent donc aux ministères et aux
organismes budgétaires les organismes dont le personnel est nommé en vertu de
la Loi sur la fonction publique et les organismes
dont la majorité des membres ou des administrateurs sont nommés par le
gouvernement et dont au moins la moitié des dépenses sont assumées
directement ou indirectement par les fonds consolidés du revenu.
Nous avons
donc procédé à l'analyse de la qualité d'information de huit organismes non
assujettis au chapitre II de la Loi sur l'administration publique. Cette
analyse est basée sur l'information publiée dans les rapports d'activité
des entités. Ces huit organismes sont la
Commission des normes, de l'équité et de la santé et de la sécurité du travail,
mieux connue sous le nom de la
CNESST, le Conseil de gestion de l'assurance parentale, le Fonds de recherche
du Québec—Nature et technologies, le Fonds de recherche du Québec—Santé, le Fonds de recherche du Québec—Société et culture, l'Office des
professions du Québec, l'Office Québec-Monde pour la jeunesse ainsi que la
Société de télédiffusion du Québec, Télé-Québec.
Alors, dans un cas comme dans l'autre, je
laisserai également mes collègues développer plus largement sur ces deux
aspects du travail réalisé cet automne. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Labelle.
Et je cède maintenant la parole à M. le député de Masson.
M. Mathieu Lemay
M. Lemay : Merci,
Mme la Présidente. Alors, tout d'abord, j'aimerais remercier mes collègues membres de la Commission de l'administration publique avec qui j'ai eu le plaisir de travailler aux
nombreuses auditions que nous avons faites
avec cette commission. Alors, plus particulièrement, j'aimerais souligner le travail du député de
Robert-Baldwin, notre président,
qui fait ça de main de maître, ainsi que nos vice-présidents, députés de
Portneuf et de Jonquière, les membres de la commission. Et M. le député de Robert-Baldwin le mentionnait tout à l'heure, mais je
voulais le faire moi aussi, de mon côté,
merci particulier à Julie Paradis, qui est au Service de la recherche, qui nous
a fait des excellentes analyses de rapports de gestion... annuels de gestion. Donc, merci beaucoup, Mme Paradis,
pour vos travaux au sein de notre commission et bon succès dans votre
prochain travail.
Alors, vous
savez, Mme la Présidente, notre commission, elle a plusieurs
compétences. Premièrement, on fait des vérifications des engagements financiers du gouvernement, on étudie des rapports annuels sur l'application de la Loi sur l'administration publique, on fait l'audition du Vérificateur
général, son rapport annuel de gestion ainsi que l'audition des sous-ministres et des dirigeants des
organismes publics. Donc, on a plusieurs compétences, Mme la Présidente, et
nous avons aussi terminé plusieurs
mandats au cours de la présente législature. Il y a plusieurs mandats aussi
superintéressants que j'aimerais souligner aujourd'hui.
Dans le fond,
on peut mentionner, en plus de toutes les analyses de rapports annuels, le
suivi de la recommandation 1.3 du rapport du printemps 2021 de la
commission, l'audition du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur et le suivi de la recommandation 3.2
du 40e rapport sur l'imputabilité, l'audition sur le rapport spécial du
Protecteur du citoyen portant sur l'accès au Régime québécois
d'assurance maladie aux enfants nés au Québec de parents au statut migratoire précaire, des sujets importants, Mme la
Présidente, ainsi que l'audition du ministère des Transports du Québec sur le chapitre 2 du rapport de novembre 2019 de
la Vérificatrice générale portant sur les activités du Centre de gestion de
l'équipement roulant ainsi que plusieurs autres mandats que je ne mentionnerai
pas, faute de temps, Mme la Présidente. Mais
sachez qu'à chaque fois qu'on fait des auditions comme ça, on trouve des
points, des recommandations, des conclusions, des observations, et ça mène à d'autres suivis. Donc, c'est pour ça que
notre commission, effectivement, on a besoin de temps pour siéger pour
faire notre travail adéquatement.
Alors, vous voyez, Mme la Présidente, notre rôle
à la Commission de l'administration publique est essentiel pour la démocratie afin d'assurer la reddition de
comptes des organismes publics et des ministères. Et, dans les derniers mois
plus précisément, nos travaux y ont été
entre autres consacrés, bon, bien entendu, à d'autres rapports annuels des
ministères qu'on n'avait pas eu la
chance de faire à date, mais on a aussi fait l'audition du ministère de la
Famille, que le député de Robert-Baldwin a mentionné, ainsi que de la
Société d'habitation du Québec, on a aussi examiné leurs états financiers
consolidés du gouvernement.
Donc, moi, là, ce que je ferais, dans mon
allocution, Mme la Présidente, je vais me consacrer plus en profondeur sur les
travaux qu'on a faits avec la SHQ. D'ailleurs, c'était l'audition qui a eu lieu
le 30 novembre dernier. Et avant d'aller plus
loin sur ce sujet-là, ce serait important de rappeler certains faits entourant
les travaux de la commission afin de mieux comprendre, là, dans quel
contexte la dernière audition de la SHQ, elle a eu lieu.
Dans le fond,
premièrement, en février 2020, là, notre commission,
elle avait auditionné déjà la présidente-directrice générale de la SHQ et
son équipe afin de faire suite à notre rapport de la VG sur le programme
d'AccèsLogis Québec. Là, il y avait plusieurs éléments qui avaient été
abordés durant cette rencontre, tels que l'administration du programme
AccèsLogis, les
critères d'admissibilité au programme et les besoins de logement social au
Québec. Puis après cette audition-là, les membres de la commission, on avait déterminé que... on
avait trois recommandations qu'on avait adoptées à l'unanimité dans un
précédent rapport et qui concernaient spécifiquement la SHQ.
Premièrement, on
avait dit : Bien, écoutez, ce serait intéressant que la commission entende
à nouveau la SHQ à l'automne 2020 puis qu'on poursuive l'examen de sa gestion
administrative ainsi que la conduite du programme AccèsLogis du Québec quant au sujet de la définition du revenu modeste,
de la sous-capitalisation des fonds de réserve des organismes et du
suivi réalisé auprès des ménages en attente d'un logement subventionné.
La
deuxième recommandation, c'était que la SHQ devait transmettre à la commission,
d'ici le 30 juin 2020, une revue des exigences légales qui limitent
son travail dans le contexte de l'amélioration de ses pratiques.
Et
notre troisième recommandation du temps était que la commission stipule que la
SHQ devait rendre publique sa planification des besoins et les travaux
réalisés au Nunavik d'ici le 30 juin 2020.
Donc, la SHQ, pour
les deux dernières recommandations, elle a transmis les informations dans les
temps requis à la commission. Cependant, la
première recommandation, qui était de l'entendre à l'automne 2020, compte tenu
du contexte de la pandémie, Mme la
Présidente, ça a été reporté et on l'a entendue à l'automne 2021, ce que nous
avons fait le 30 novembre.
Alors,
suite à ça, bien, c'est sûr que nous, dans le fond, on voulait aussi regarder
la recommandation 2.1 du 41e rapport sur l'imputabilité des
sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics sur leur gestion
administrative de la commission et on
voulait aussi, en même temps, quand on revoyait la SHQ, étudier le quatrième
chapitre du rapport d'octobre 2020 de la Vérificatrice générale portant
sur le programme d'habitation AccèsLogis.
Ça fait que c'est
là-dessus qu'on s'est penchés dans notre audition, puis les membres de la
commission, on a pu échanger avec les
représentants de la SHQ ainsi qu'avec la Vérificatrice générale du Québec. Puis
ça a été quand même productif et constructif, ces échanges-là, Mme la
Présidente, parce qu'on a... Bon, tu sais, oui, c'est sûr là, on a abordé plusieurs sujets, l'audit de performance notamment,
mais avant d'aller dans le coeur, pour comprendre un peu où c'est qu'on s'en va... parce que, sérieusement, on était quand
même préoccupés, là, on était... tu sais, on l'a marqué dans notre présent
rapport, là, qu'on était insatisfaits, là,
de l'absence de stratégies puis qu'on trouvait qu'il y avait un manque de
rigueur, là.
• (12 heures) •
Mais,
tu sais, avant d'aller là, Mme la Présidente, je veux juste vous mentionner le
contexte de la SHQ, là. Puis, tu
sais, c'est sûr que, dans le fond, avec le programme AccèsLogis... Ça a été créé en 1997. Après ça, le programme,
bien, c'est d'offrir des logements
sociaux abordables à des ménages à
faibles et modestes revenus, des personnes avec des besoins particuliers
en habitation. Puis c'est pour ça qu'AccèsLogis, ils oeuvrent avec des
organismes développeurs, tels que des organismes à but non lucratif, des coopératives d'habitation, avec des villes
mandataires, comme Québec, Montréal et Gatineau. Bon, tu sais, ces villes mandataires là, elles
ont des rôles spécifiques pour développer. Mais, tu sais, après ça, on a
aussi... Avant que tout se place, on a besoin de sécuriser le financement, puis
c'est pour ça que nos organismes développeurs, ils doivent ensuite faire
affaire avec des groupes de ressources techniques, on reviendra là-dessus, différentes firmes professionnelles,
entrepreneuriales pour réaliser leurs travaux, parce qu'ils n'ont souvent pas
l'expertise eux-mêmes pour les
réaliser. Puis ce qu'on doit savoir, comme statistique,
c'est qu'en date du 31 décembre 2019 ce sont
1 157 projets qui ont été réalisés, qui représentent environ
34 000 logements, qui ont été construits avec le programme
AccèsLogis. Ça fait qu'il y a quand même du positif, là, mais, tu sais, je
voulais quand même vous donner un contexte, Mme la Présidente, avant d'aller
dans la partie plus croustillante, que j'appellerais.
Bon,
ça aide qui, AccèsLogis? Ça aide les familles, des personnes seules, des aînés
autonomes, des aînés en légère perte d'autonomie. Ça a aussi un volet pour
aider les personnes ayant des besoins particuliers, telles que les personnes
en itinérance, des jeunes en difficulté et
des personnes victimes de violence, des personnes ayant une déficience
intellectuelle. Donc, ça aide
plusieurs personnes. Puis il y a aussi d'autres ménages qui sont desservis par
AccèsLogis, qui bénéficient du Programme
de supplément du loyer. AccèsLogis, ça détermine la proportion de logements
d'un immeuble qui doivent être occupés
par des ménages admissibles au Programme en supplément du loyer. Ça fait que
c'est ça qui fait un peu l'historique, le contexte, là. Je trouvais
important de le rappeler.
Mais,
si on revient à notre... dans notre audition, dans le fond, la VG, elle, quand
elle avait fait son audit de performance,
bien, écoute, il y avait eu quand même quelques constats. Il y en avait cinq
qui avaient été rapportés par la VG, là. Tout d'abord, la VG, elle remarque que
la SHQ n'a aucune stratégie d'intervention, n'a réalisé aucune analyse lui
permettant de s'assurer que ces programmes sont utilisés de façon judicieuse,
ce qui inclut le programme AccèsLogis. Ça fait que c'est quand même
préoccupant, là, tu sais, c'est... Quand c'est impossible pour la SHQ de
déterminer si ces programmes permettent réellement de maximiser l'aide
attribuée aux ménages, tu sais, on peut se poser des questions.
En
plus, ça signifie que la SHQ, elle n'a aucun moyen de connaître les
disponibilités et les besoins réels pour des logements sociaux et abordables
dans les différentes régions du Québec. Ça, c'est une autre problématique, là,
tu sais. Pourquoi est-ce qu'on en
aurait plus dans une ville que dans une autre? C'est quoi, les besoins
régionaux? On ne le sait pas. Les coûts des différents programmes d'aide à la
pierre et d'aide à la personne, c'est un facteur important, qui n'est
pas suffisamment pris en compte par la SHQ
dans ses projets d'habitation. Ça fait que c'est correct d'aider à la pierre,
c'est correct d'aider à la personne, mais est-ce qu'on pourrait faire
une meilleure optimisation de nos ressources?
Il n'y a pas de
stratégie globale de la SHQ. C'est difficile pour l'organisme de faire un suivi
adéquat avec les différentes régions qui
présentent moins de demandes. Ça fait que, tu sais, est-ce que c'est parce
qu'ils n'ont pas fait de demandes qu'ils n'ont pas de besoins? On ne le
sait pas, Mme la Présidente. La Vérificatrice générale, elle remarque aussi qu'AccèsLogis, c'est le programme qui est le
plus dispendieux parmi l'ensemble des programmes d'aide aux ménages offerts par la SHQ. Ça fait qu'en résumé, là, le
manque d'analyse sur les ménages ne permet pas à la SHQ de s'adapter les
programmes qui ont des besoins sur les différents contextes socioéconomiques,
puis c'est problématique.
Le deuxième constat que la VG, elle avait fait,
c'était les besoins en matière de logements sociaux et abordables qui ne sont pas assez analysés lors de
l'évaluation de l'admissibilité des projets au programme d'AccèsLogis. Et puis
là, là-dessus,
vu qu'il n'y a pas de cibles qui sont fixées par la SHQ quant au nombre de
logements à construire par type de clientèle
puis de territoire, bien, nous, on voyait un problème avec ça. Ça fait qu'il
est difficile pour la SHQ d'analyser la pertinence des projets en fonction des besoins et locaux, plus
particulièrement la répartition des logements entre les villes mandataires et les autres territoires. Ça, c'est
un constat qu'on a fait. La VG, elle note également qu'il n'y a aucune base
de données centralisée qui regroupe l'ensemble des ménages en attente d'un
logement social ou abordable.
Bon, ça fait
que, là, chaque organisme, il détient leurs propres données, mais qu'elles ne
sont jamais partagées entre les
organismes. Tu sais, Mme la Présidente, là, on est en 2021, là. On parle de
déploiement de fibre optique à travers le Québec, là, pour justement partager
l'information. Mais là on ne peut pas croire qu'en 2021 on est encore dans une
situation où c'est que les données ne
sont pas partagées, là. Ça fait qu'il me semble qu'on pourrait faire mieux de
ce côté-là. Mais, par contre, la SHQ,
elle nous a dit qu'elle prévoyait répondre à ces lacunes-là d'ici le
31 décembre 2021. Ça, c'est dans quelques semaines. Elle a spécifié
dans son plan d'action que les cibles à atteindre par type de clientèle et par
territoire seront accessibles et que
le problème de la centralisation des données sera réglé d'ici cette date. Donc,
on verra. Ce sera à suivre, Mme la Présidente. Puis, à ce moment-là,
quand a fait l'audition, le 30 novembre, on se le rappelle, c'est la semaine dernière, la SHQ n'était pas en mesure de
donner plus de précisions sur ces aspects lors de nos échanges. Ça fait
qu'on va attendre au 31 décembre et on va suivre ça de près.
Le troisième
constat de la VG, c'était que le coût total des projets du programme AccèsLogis,
il n'est pas contrôlé par la SHQ.
Vous voyez, tu sais, la hausse des coûts des projets... on n'effectue pas de
contrôle financier lors d'évaluations de
projets. On a relevé plusieurs pratiques problématiques quant à la SHQ, quant à
l'évaluation financière des projets. L'une des pratiques consiste à plafonner la subvention à 50 % des frais
admissibles plutôt que d'évaluer le coût total d'un projet. Ça fait qu'encore là, c'était problématique de ce
côté-là. De plus, les coûts prévus d'un projet ne sont pas assez évalués, les
critères financiers pour octroyer les
subventions ne sont pas actualisés puis c'est difficile pour la SHQ de
s'assurer que les fonds disponibles sont là pour réaliser les projets.
Bref, plusieurs problématiques de ce côté-là.
Le quatrième
constat de la VG, c'était que les groupes de ressources techniques ne sont pas
suffisamment encadrés par la SHQ. Puis là, bien, quand on parle des GRT, là,
les groupes de ressources techniques, c'est des acteurs quand même importants qui sont dans le développement des projets parce que c'est eux qui ont
l'expertise, les compétences. Par
contre, qu'est-ce qu'elle dit, c'est qu'on n'est pas en
mesure de... tu sais, certains administrateurs, là, ne sont pas évalués, ça
fait que, là, on ne peut pas... on
doute des fois de l'intégrité, de l'indépendance qu'ils peuvent avoir avec
d'autres sociétés qui participent au projet. C'est des lacunes
importantes, Mme la Présidente. Il n'y a aucun mécanisme aussi qui existe présentement pour vérifier si les groupes de ressources techniques
impliqués dans un projet sont en conflit
d'intérêts. Donc, ça, c'est quelque
chose qu'on a noté, Mme la Présidente, d'un enjeu assez important.
Ça fait que le dernier constat de la VG, qu'elle a fait dans son dernier rapport, c'était
aussi que plusieurs composantes des projets admissibles n'étaient pas,
en fait, admissibles par le programme. Ça fait que, là, on parle de parties non
résidentielles qui sont incluses dans les projets qui sont supposés d'être
résidentiels. Ça fait que, là, il n'y avait pas d'adéquation de ce côté-là. On a trouvé ça problématique. Ça fait que c'est sûr que je vous dirais qu'on
est sortis de là un peu, là,
préoccupés, là, tu sais, puis on était insatisfaits, là, puis on disait :
Bien là, ça manque de rigueur, c'est inacceptable. Ça fait que c'est
pour ça qu'on a formulé nos propres recommandations.
Donc là, je
vais les présenter, on en a trois. Ça
fait que, d'abord,
on a dit, notre commission : On souhaite que la SHQ transmette son nouveau
cadre de reconnaissance des groupes de ressources techniques
au plus tard le 1er mai 2022.
Ensuite, que
la SHQ fasse rapport, à la Commission
de l'administration publique au plus
tard le 1er mai 2022, des progrès de la mise en place de son nouveau programme
pour la réalisation de logements sociaux et abordables. Que la recommandation
stipule également que le document doit contenir les portraits régionaux sur les
besoins en matière d'habitation et la prise
en compte de constats dressés par la Vérificatrice générale dans ses deux
rapports d'audit sur le programme
AccèsLogis, puis que notre deuxième recommandation suggère également que la SHQ
pourra être entendue de nouveau par
la commission à ce sujet. Donc, on s'est gardé une porte pour l'auditionner de
nouveau, Mme la Présidente.
Et,
finalement, notre dernière recommandation stipule que la SHQ doit transmettre à
la commission le résultat des évaluations
de la Vérificatrice générale en suivi des recommandations formulées dans
l'audit intitulé Programme AccèsLogis : réalisation des
projets.
Donc, en
conclusion, Mme la Présidente, là, c'est important de noter que l'audition
était particulière considérant l'annonce récente d'un nouveau programme
de logements sociaux et abordables dans la mise à jour économique du 25 novembre dernier. Ainsi, il n'y a aucun
fonds qui ont été engagés dans cette mise à jour économique puisque, pour le
programme AccèsLogis — donc, ça veut dire que, dans le fond, c'est pas
mal la fin de ce programme-là — une refonte complète du programme
AccèsLogis Québec est actuellement en cours auprès du ministère des Affaires
municipales et de l'Habitation. On va
attendre les détails. Tel que présenté précédemment, le programme AccèsLogis
comportait plusieurs limites et des
lacunes dans son fonctionnement, entre autres en ce qui a trait aux besoins
spécifiques des régions, les groupes de
ressources techniques, l'absence d'une stratégie d'intervention. Donc, il est
plus que nécessaire de réformer ce programme afin de maximiser le nombre
de projets de logement social abordable au Québec. Et les problématiques
soulevées par la VG ainsi que de la commission seront certainement des éléments
qui seront considérés dans l'élaboration du nouveau programme de logement
social et abordable. Puis, même si AccèsLogis sera remplacé prochainement,
bien, le travail qui est effectué par les
membres de la commission demeure pertinent afin d'aider les ménages à faibles
revenus du Québec. Merci, Mme la Présidente.
• (12 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Masson. Et maintenant
je vais céder la parole à M. le député de Laurier-Dorion. Et je vous
indique que votre formation politique dispose d'un temps de parole de
13 min 38 s.
M. Andrés Fontecilla
M.
Fontecilla : Merci, Mme la
Présidente. Donc, voilà, nous sommes ici pour nous prononcer sur l'audition de
la Société d'habitation du Québec devant la Commission de l'administration publique, là, entre autres, et
principalement beaucoup pour répondre aux inquiétudes, aux critiques, on va le
dire, là, faites par la Vérificatrice générale du Québec à propos de la gestion de cette importante institution québécoise,
là, la Société d'habitation du Québec, mieux connue, pour les intimes,
comme la SHQ.
D'emblée,
cette audition-là se produit peut-être un peu trop tard, parce qu'on vit depuis
quelques années, tout le monde le sait, en plein milieu d'une grave crise du
logement au Québec, là, qui affecte toutes, toutes les régions du Québec, là.
Et voilà, c'est une crise du logement qui a différentes manifestations, mais
elle se concrétise surtout par le manque de logements un peu partout à travers le Québec, dans les zones
rurales, dans les grandes, les moyennes, les petites villes du Québec, dans
les régions ressources, dans les grands centres, etc. Il manque de logements,
il y a une construction insuffisante de logements pour permettre au marché de
l'habitation de fonctionner correctement. Cela induit différents effets
pervers, comme des augmentations abusives de
loyer, comme les phénomènes de rénovictions, etc., là. Et, dans cet aspect-là,
dans cette crise du logement là, la
Société d'habitation du Québec devrait, à tout le moins, jouer un rôle central,
essentiel afin de contribuer à
atténuer les effets de cette crise et offrir un logement décent, accessible et
adéquat à l'ensemble des ménages québécois, là. Pourquoi la SHQ a ce rôle-là?
Parce qu'elle met en place des programmes qui aident les logements à...
les ménages, pardon, à se loger
convenablement à travers, principalement, deux programmes, là. Il y en a
plusieurs, là, mais il y en a deux qui nous intéressent tout
particulièrement ici, c'est le programme de construction de logements sociaux
AccèsLogis et le Programme de supplément au loyer qui aide les ménages à payer
leur loyer, là.
Et je l'ai
mentionné tantôt, là, la crise du logement qu'on vit actuellement, là, est due
principalement à une rareté de logements locatifs, en particulier, donc
à un manque de construction. Et la SHQ, depuis presque trois décennies, a mis en place un modèle québécois dans le logement
social tout à fait original et qui fonctionne jusqu'à présent. C'est le
programme AccèsLogis, qui vise la construction de logement social sous la forme...
sous deux formes, les coopératives d'habitation
et les organisations sans but lucratif, les OSBL en habitation, ce qui permet...
ce qui a permis la construction de plusieurs dizaines de milliers de
logements qui, en quelque sorte, sont extraits de la logique du marché du
logement locatif et assurent à des ménages,
à 33 000, en quelque sorte... à quelque 33 000 ménages québécois
de payer des loyers moins chers tout en assurant une pérennité à long
terme, la permanence de ces ménages-là dans leur milieu. Et donc c'est un modèle éprouvé qui bénéficie à un très grand
nombre de personnes et qui pourrait bénéficier à beaucoup plus d'autres ménages
québécois, là.
Donc, pour
les fins de la discussion, il est important qu'en ce moment, là, à la Société d'habitation du Québec, là... Il y a autour de 8 000 logements
qui sont, permettez-moi l'expression, dans le pipeline de la construction de
logements, donc à peu près
8 000 logements qui sont à différents stades de construction mais
qui, pour la plupart, ne peuvent être livrés à des ménages qui ont
besoin d'être logés parce qu'il manque du financement pour terminer la
construction.
Donc, les
membres de la Commission de
l'administration publique ont entendu
la Société d'habitation du Québec, là, et avec beaucoup d'attention, ont manifesté
beaucoup d'inquiétude. Écoutez, je vous cite quelques débuts de phrases
du rapport de la Commission de l'administration publique, là : «La commission soulève diverses
questions liées aux différents constats du Vérificateur général[...].
«[...]Il est surprenant de constater que la
société ne dispose pas de portrait des régions[...].
«[...]Le nouveau programme mérite plus de
précision[...].
«[...]Il est inquiétant de voir le manque...»
Donc, des
mots très diplomatiques pour exprimer une réalité qui, je pense, là, était très partagée par l'ensemble des membres de la commission, une très grande
inquiétude par rapport, on va dire, à la productivité, le rendement de la Société d'habitation du Québec, là, dans le
contexte de la crise du logement qu'on connaît.
Bref, la
question centrale est : Que fait la Société d'habitation du Québec
pour réabsorber la crise du logement qu'on vit au Québec, là? Que fait-elle
pour le logement social? Que fait-elle pour mieux planifier le déploiement des
logements sociaux dans les régions?
Que fait-elle pour améliorer sa gestion très opaque? Que fait-elle pour...
quels types d'analyses des besoins,
surtout des besoins des différentes régions du Québec, produit-elle pour
justifier ses différentes politiques, là?
La Vérificatrice générale du Québec a lancé des
pistes de réflexion, et la Société d'habitation a répondu, selon moi, de façon insatisfaisante en renvoyant toutes les
questions à un temps futur, là, et... mais il y a plusieurs questions qui
demeurent concernant le faible taux
de rendement de la Société d'habitation du Québec, là, surtout dans le domaine
de la construction des nouveaux
logements sociaux au Québec, là. Pourquoi, alors qu'il y a plus... au début de
mandat de l'actuel gouvernement, il y
avait 15 000 logements qui étaient approuvés et qui étaient
supposément... qui devaient être réalisés dans une courte période de temps. Pourquoi la Société d'habitation
du Québec n'arrive pas à livrer la marchandise, là? Est-ce dû à une mauvaise
gestion, à une mauvaise planification? Et est-ce que les critères sur les coûts
des constructions n'ont pas été indexés à travers les années? On connaît que les matériaux de
construction ont connu une augmentation notable au cours des dernières années.
Il y a un phénomène d'inflation. Est-ce que les critères ont suivi cette
inflation-là? Est-ce que... pourquoi ces critères n'ont-ils pas été indexés? Est-ce un problème de gestion ou est-ce
peut-être un problème de volonté politique, là, pour mettre les ressources nécessaires afin de débloquer ces
projets qui sont déjà approuvés et en cours de réalisation dans différents
stades de développement, là, ou peut-être les deux, problème de gestion et
problème de volonté politique, là?
Et la SHQ
nous a répondu que beaucoup de nos questions allaient se retrouver et allaient
être répondues dans la nouvelle version... dans le nouveau programme qui
est annoncé par le gouvernement, là, de construction de logements sociaux, un nouveau programme dont on ne connaît pas grand-chose pour l'instant, et ça nous a
laissés sur notre faim, parce qu'on a
besoin de ces réponses-là, et dont on sait seulement que le nouveau programme
de construction de logement social va faire... va ouvrir larges les portes aux
promoteurs privés, ce qui fait craindre à plusieurs que le programme d'accès de
construction de logements sociaux soit
dénaturé dans sa nature même. Mais, avant de se prononcer, on aimerait voir le
programme, là, mais... et, en même temps, la SHQ, encore une fois, nous dit :
Les réponses à vos questions se retrouveront dans la nouvelle mouture du programme AccèsLogis, là. Donc, on est
devant... à la veille, on est à la veille d'un changement majeur du
modèle québécois de logements sociaux, comme je l'ai dit tantôt, qui s'appuie
fondamentalement sur les coopératives
d'habitation et les OSBL d'habitation, donc des formules qui sont sous le
contrôle des communautés, là, et nous
nageons malheureusement dans l'incertitude la plus totale concernant les
tenants et aboutissants de ce programme-là. Et, les questions que nous voulons poser à la SHQ, elle nous dit :
Bien, attendez, on ne sait pas trop combien de temps, là, c'est dans le
nouveau programme, là, que vous allez retrouver les réponses.
• (12 h 20) •
Plus
fondamentalement, au milieu de tous ces grands questionnements et devant cette
absence de réponse là aux membres de
la Commission de l'administration
publique de l'Assemblée nationale, là, il y a des questions essentielles qui se posent, en ce moment, là, sur l'avenir du
logement social au Québec, là. Par exemple, on sait qu'il y avait une promesse
de construire 15 000 logements, je
l'ai dit tantôt, là, différents projets qui sont approuvés, qui sont financés,
mais dont il manque du financement pour arriver à la livraison à des
ménages qui en ont bien besoin, là. Il y en a... Bon, là, avec Mme la
ministre de l'Habitation, il y a une différence d'opinions, les chiffres ne
concordent pas, mais on peut dire qu'approximativement,
sur les 15 000, il y en a, disons, 6 000, on va être généreux,
6 000 qui ont déjà été livrés, il en manque 8 000. Que va-t-il arriver avec ces 8 000 logements dans
le nouveau programme qui va être annoncé on ne sait pas quand? Mais c'est une question qui est essentielle, parce
qu'on a besoin et les familles du Québec ont besoin de ces
8 000 logements là, qui ont
déjà été promis et qui sont déjà, en quelque sorte, en train d'être construits.
Est-ce que ces logements-là... on va
arrêter la construction de ces logements-là?
On va les transférer au privé? On va les faire disparaître? Que va-t-il arriver
avec ces 8 000 logements là? On a besoin d'avoir ces
réponses-là.
D'ailleurs, il y avait 15 000 logements de
planifiés, mais on n'en a pas annoncé de nouvelles unités de programmation
de construction de logements sociaux. Mais,
depuis qu'on a arrêté les nouvelles programmations, il y a
10 000 autres logements qui
se sont inscrits, là, pour être réalisés dans le cadre du programme
AccèsLogisactuel, dont plusieurs dans mon comté, plusieurs dans les
comtés de l'ensemble des collègues ici présents à l'Assemblée nationale. Là, il
y en a 10 000 autres. Que va-t-il arriver avec ces logements-là? On a
besoin d'avoir ces réponses-là.
Maintenant,
la crise du logement — et
on la vit en ce moment, là, on ne peut pas attendre un an, plusieurs
mois avant d'avoir la réponse à ces questions-là — la ministre
de l'Habitation nous a promis une
réforme qui va être annoncée sous
peu, peut-être, je l'espère, en tout cas, dès les premiers
mois de l'année 2022. Et on va voir en quoi ça consiste, ce programme-là. Mais, rapidement, la Commission
de l'administration publique devrait
reconvoquer la Société d'habitation
du Québec, là, pour qu'elle réponde enfin au programme, là... aux questions
des députés qui font partie de la Commission
de l'administration publique, là. Il est temps de s'intéresser... que les députés de
l'Assemblée nationale s'intéressent de façon très attentive à la Société d'habitation du Québec, parce
qu'elle joue un rôle central dans la
vie de milliers de personnes au Québec. On ne peut pas laisser aller les choses comme ça.
Donc, la commission devrait être réentendue par la Commission de
l'administration publique dès les prochains mois. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Laurier-Dorion, et maintenant je cède la parole à Mme la députée de
Jean-Talon.
Mme Joëlle Boutin
Mme Boutin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Écoutez, c'est
toujours un plaisir pour moi de participer à ce genre de débat, les débats sur
la Commission de l'administration publique, avec mes collègues et les collègues
qui font partie de la Commission de
l'administration publique. Je pense qu'on a tous du plaisir, et surtout on
prend ça à coeur. On fait ce
travail-là avec rigueur, puis on voit la stabilité aussi des membres, puis ça
démontre un peu notre intérêt. Ça fait partie
du rôle de contrôleur du député, donc, d'auditionner les membres de
l'administration publique, les hauts fonctionnaires, sur certains sujets
qui nous préoccupent.
J'en profite également pour remercier, là,
Mme Julie Paradis, qui a été la secrétaire sur la Commission de l'administration publique, qui vient de changer
d'emploi, là, mais qui a fait un travail remarquable. Je pense que, sans les
gens qui travaillent en soutien pour les commissions, surtout la Commission de
l'administration publique, qui demande beaucoup
de travail, on ne serait pas capables d'accomplir notre mission de contrôleur,
de députés. Puis je tiens également à
remercier Mme Leclerc, la Vérificatrice générale, qui, vraiment, là, a
toujours un regard très éclairant sur divers sujets.
Alors, aujourd'hui, je vais vous présenter les
constats, un peu, de l'audition du ministère de la Famille. Le 15 septembre dernier, on a entendu la
sous-ministre de la Famille, Mme Julie Blackburn, sur la gestion
administrative et les engagements
financiers du ministère, mais également la Vérificatrice générale du Québec sur le chapitre 2 de son rapport
d'octobre 2020 intitulé Accessibilité aux services de garde éducatifs à
l'enfance. Alors, c'est un enjeu d'actualité, on s'entend, c'est quelque chose qui nous préoccupe tous en tant que
parlementaires mais aussi en tant que citoyens. Moi, mes enfants ne vont plus à la garderie, mais on a tous
passé par là, et on croit que tous les parents devraient avoir accès à un
service de garde. Donc, c'est quelque chose
qui nous préoccupe. Puis le politique a un rôle là-dedans, mais la fonction
publique également a un rôle là-dedans, donc c'est important pour nous
d'auditionner ce ministère-là à ce moment-ci du mandat, en fait, de la législature.
Tout d'abord,
je peux énoncer quelques faits saillants qui, je pense, sont pertinents de
mentionner. Je tiens à préciser que,
la première année, il y a... une partie, en fait, de l'audition portait sur la
première année du plan stratégique, parce que le ministère
de la Famille a déposé un nouveau plan stratégique 2019‑2023,
donc c'était la première année de réalisation de ce plan-là. Donc, c'était les premiers résultats, dans le fond, du plan
stratégique. Ils venaient d'être publiés, donc c'était quand même pertinent de commencer à voir l'évolution de
ça, parce qu'on se souvient que, dans le passé, le ministère
de la Famille a été, un peu, jugé sévèrement, là, dans le bulletin des
ministères. Puis, en 2018, il y a une commande du Conseil du trésor pour que tous les ministères, organismes fassent
de nouvelles planifications stratégiques avec des éléments, là, excusez-moi
l'anglicisme, là, des métriques ou des
indicateurs de performances qui sont mesurables. Donc, le ministère
de la Famille a dû se conformer à ça. Et je tiens à préciser, puis ça,
c'est vraiment les fonctionnaires qui s'occupent de ce volet-là, la qualité du plan a quand même été soulignée par le
Conseil du trésor, donc je tenais à le souligner également parce que 70 %
des objectifs stratégiques identifiés pour
l'année 2019‑2020 ont été réalisés. Les cibles touchaient, entre
autres, l'évaluation de qualité
éducative des services de garde, l'offre de services en pédiatrie sociale, les
mesures de conciliation travail-famille et le soutien aux enfants
handicapés. Donc, je tenais à préciser ça.
Ceux que nous
avons entendu, bien entendu, la sous-ministre Blackburn, en lien avec,
justement, le rapport de la Vérificatrice
générale... Je vais commencer en mentionnant cinq constats qui ont été énoncés
par la Vérificatrice générale, puis
je tiens à préciser également que ce chapitre-là portait sur les années, puis
ce n'est pas juste 2019, là, les années 2014 à décembre 2019. Donc, ça porte sur deux gouvernements. Il y a eu des changements, aussi, au niveau des sous-ministres,
probablement au niveau de la haute fonction publique. C'est quand même
important de le mentionner.
Donc, le premier constat de la Vérificatrice
générale est que l'offre de places subventionnées ne suffit pas à répondre aux besoins des familles du Québec.
Donc, on le sait, on a un système un peu inéquitable, en ce moment, il y a des familles qui ne
peuvent pas bénéficier d'un service subventionné et qui doivent payer plus cher pour aller dans
des services non subventionnés.
Je le vis personnellement dans mon comté, j'ai beaucoup
de services de garde qui sont non subventionnés. Et puis,
là, pour ces années-là, jusqu'à 2019, il y avait quand même une inéquité dans
le système.
Les enfants
de familles à faibles revenus sont sous-représentés dans les centres de la petite enfance des régions de Laval et de Montréal. Ça, c'est le constat numéro deux, puis c'était
un constat relativement important dans le chapitre 2. Puis là, quand on a
auditionné, là, la sous-ministre Blackburn, on a réalisé que le ministère
de la Famille n'a pas nécessairement un super
bon portrait d'ensemble des besoins réels, là, par région. Puis la Vérificatrice générale a vraiment identifié que, dans certaines régions,
donc Montréal et Laval, les familles défavorisées avaient difficilement accès à
des services de garde subventionnés. C'est
eux qui devraient avoir accès, donc, pas nécessairement des gens, là, qui se
promènent en Porsche qui devraient juste avoir accès à Montréal, dans
ces secteurs-là, à des services subventionnés mais plutôt des gens qui sont à
faibles revenus. Et, actuellement, ils sont sous-représentés dans ces
régions-là.
Troisièmement, le troisième constat était que le
guichet unique, La Place 0-5 ans, ne permet pas une gestion efficace de l'accès aux services de garde, n'est
pas à jour, et l'information y est insuffisante. On le sait, on a identifié un
manque de transparence, là, sur le guichet 0-5 ans, plusieurs lacunes qui
ont été identifiées, je vais avoir la chance d'en reparler un petit peu plus tard, mais c'est quelque chose qui a été
quand même soulevé par la Vérificatrice générale, qui est quand même
inquiétant, parce que c'est le système, c'est un système géré par un OBNL,
c'est le système qui est utilisé pour que
les parents puissent s'inscrire, demander une place. Je l'ai moi-même utilisé
dans le passé. Puis là je vais en parler dans nos discussions, là, mais,
entre autres, les garderies reçoivent des demandes de parents, mais ils ont le
pouvoir de choisir. Donc, il y a certaines
familles qui sont choisies selon d'autres... puis ça peut créer un système
inéquitable. On se rappelle le
constat précédent, que les familles à faibles revenus sont sous-représentées,
bien, c'est peut-être lié aussi à ça. Elles ne sont peut-être pas
choisies par les garderies.
Le quatrième
constat est que l'encadrement des services de garde par le ministère est
insuffisant et ne permet pas d'optimiser
l'accès des familles aux services de garde, plus spécifiquement pour les
enfants avec des besoins particuliers. Je vais avoir la chance d'en parler. Les
besoins particuliers, on parle des enjeux de conciliation travail-famille, des
enfants, dans le fond, qui ont des
parents avec des horaires particuliers. On le sait, on a des pompiers, des
infirmières, tout ce monde-là qui ont des horaires... qui travaillent
parfois de nuit. Donc, il y a des enjeux et des besoins réels à ce niveau-là,
puis la Vérificatrice générale, là, identifie une faiblesse, là, à ce
niveau-là.
• (12 h 30) •
Et,
cinquièmement, le ministère n'atteint pas ses objectifs de création de
nouvelles places subventionnées, ce qui empêche de répondre aux besoins
des familles. Jusqu'à dernièrement, la liste d'attente qui était... en 2020, en
fait, 51 000 enfants étaient en
attente d'une place, et ce nombre ne cesse d'augmenter. Donc, on le sait, c'est
la mission numéro un... Une des
missions numéro un, principales du ministère de la Famille, c'est d'offrir des
places en garderie à tous les enfants du Québec. Il y a des places
subventionnées, idéalement, on ne peut pas juste faire des places non
subventionnées.
Donc, suivant
l'exposé de la sous-ministre et de la Vérificatrice générale, mes collègues et
moi, on était très passionnés, en
fait, par rapport à ces sujets-là. Ce que j'aime — un mini-aparté sur cette commission-là — c'est qu'on est apolitiques, donc on est capables de discuter ensemble. Ça
fait, là, on commence à travailler... on travaille depuis plusieurs mois
ensemble, on se connaît, on est
apolitiques, puis notre objectif, c'est vraiment, vraiment, vraiment de rendre
imputable, là, la haute fonction publique, et qu'ils se sentent...
qu'ils sentent l'obligation de répondre à nos questions.
Donc, il y a
cinq sujets qui ont été abordés par les membres de la Commission de
l'administration publique, là, suite
à cet exposé. Premièrement, le premier sujet touchait le développement du
réseau de services de garde éducatifs en enfance. Je viens juste de le dire, 51 000 enfants, à l'heure
du rapport, là, de la VG, qui étaient en attente puis 37 000 enfants
qui étaient prêts à intégrer le réseau, là.
37 000, ça correspond à l'engagement du gouvernement. Mais, tu sais, c'est
beau, l'annoncer, mais il faut créer
ces places-là. Donc, nous, on avait certaines inquiétudes par rapport à la
capacité du ministère de la Famille
de créer ces places-là en zéro... entre un objectif, un échéancier d'un à trois
ans, donc. Et une des préoccupations est
que le ministère n'a pas nécessairement un superbon portrait d'ensemble, un
portrait régional des besoins réels à travers le Québec. Donc, ce qu'ils nous ont dit, c'est qu'ils sont en train de
mettre en place un modèle d'estimation qui mesure le nombre de places requises dans plus de
1 000 territoires au Québec, mais c'est quelque chose de nouveau, là.
Donc, nous, on les a beaucoup questionnés sur ça, sur leur capacité à livrer la
marchandise, mais, premièrement, est-ce que vous avez un bon portrait d'ensemble, est-ce que vous savez
exactement où est-ce qu'il faut créer des places? Puis c'est difficile, parce
que, comme on le sait, La Place 0-5 ans, le
site, c'est quelque chose qui est séparé du gouvernement pour plusieurs raisons
qu'on connaît, puis ça va peut-être changer
dans le futur, mais, à ce moment-là, où est-ce que le rapport de la
Vérificatrice générale a été déposé, c'était la situation.
Un des enjeux
aussi, c'est que la création des places est dépendante des projets soumis par
les promoteurs. Donc, le ministère
n'a pas le contrôle sur les projets... jusqu'à maintenant, n'a pas le contrôle
sur les projets, donc les promoteurs déposent...
On fait un appel d'offres, les promoteurs déposent des projets, mais le
ministère n'a pas un contrôle direct sur l'échéancier, la livraison pour s'assurer du suivi, au niveau de
l'information ça peut être difficile également, puis, lorsque les échéanciers ne sont pas respectés, bien, les
places sont simplement redistribuées à un autre promoteur, ce qui fait que
c'est un système où est-ce que beaucoup de
parties prenantes sont impliquées, puis ça fait en sorte que nous, on avait des
questionnements par rapport à la capacité du
ministère de livrer, justement, ces 37 000 places
là. C'est un objectif, mais c'est
vraiment, outre d'être un objectif politique,
c'est un besoin réel des familles. On le sait, on est en pénurie de main-d'oeuvre en ce moment, Mme la Présidente. On ne peut pas se permettre d'avoir des femmes, parce que
c'est souvent des femmes, malheureusement, qui paient le prix, qui restent à la maison
pour, justement, pour s'occuper des enfants. Tu sais, on n'est
plus en 1950. Donc, c'est le temps de créer ces places-là puis que tout le monde
ait le droit de travailler.
Le deuxième
point qui nous a préoccupés, c'est au
niveau de l'attribution des places
dans les services de garde éducatifs à l'enfance. On le sait, l'objectif,
là, du ministère de la Famille, c'est que toutes les familles québécoises
devraient avoir accès à une place,
idéalement une place qui réponde à leur capacité de payer, donc une place
subventionnée ou une place où est-ce qu'elles peuvent recevoir un crédit
d'impôt à leur juste valeur. C'est vraiment
l'objectif, mais actuellement, dans le système, les parents ne peuvent
pas nécessairement choisir leur service de garde.
Je l'ai un petit peu mentionné tout à l'heure, on s'inscrit sur La Place 0-5 ans, on marque
notre territoire, on dit le type de garderie qu'on est prêt.
Souvent, on marque tout parce qu'on a absolument besoin d'une place. Donc, ça va
être garderie subventionnée, non subventionnée, CPE, tout. Je l'ai moi-même
fait. Mais ensuite on envoie ça dans l'univers. Ça va dans le système.
Puis ce sont vraiment les garderies qui reçoivent les demandes. Puis
souvent, ce qui arrive, c'est que ce n'est pas nous qui choisissons,
c'est vraiment, là, les garderies selon leurs propres critères de sélection.
Puis ça, ça
peut créer des problèmes d'équité, donc, créer une iniquité dans le système.
Des parents vont peut-être être choisis plus pour x raisons. Puis, en
parallèle de ça, on le sait, là, combien de parents en appellent directement
aux garderies. On essaie de faire de la
séduction de garderie pour avoir de la place. Donc, c'est un système,
moi, je trouve, qui crée de l'iniquité. C'était une préoccupation des
membres de la commission, d'ailleurs.
Donc, justement,
la place... La Vérificatrice générale, par
rapport à, justement,
La Place 0-5 ans, a mis en lumière plusieurs lacunes, là, de
ce... Ce n'est pas un logiciel, là, mais cette plateforme-là. Elle dit que le
nombre de places disponibles dans les services
de garde n'est pas... Tu sais, c'est vraiment,
vraiment un système qui est opaque, là. On ne sait pas le nombre
de places qu'il y a dans chaque garderie. On
ne sait pas le nombre d'enfants qui sont inscrits sur les listes d'attente des services de garde. On n'affiche pas le
positionnement des enfants sur la liste d'attente.
Donc, il y a
une liste d'attente, mais il n'y a pas vraiment de liste d'attente, on comprend. Tu sais, on
s'inscrit, puis, après ça, il y en a qui attendent moins que d'autres puis il y en a
qui attendent une éternité. Et puis le site n'indique pas clairement aux parents que les services de garde ne sont pas dans l'obligation de respecter la position des enfants pour combler
leurs places. Donc, c'est comme si la liste d'attente n'est pas vraiment
importante.
Puis il n'y a
aucune information sur les plaintes ou sur les résultats d'inspection
du ministère concernant les services de garde. Ça, c'est aussi une préoccupation du ministère de la Famille. C'est une préoccupation de la Vérificatrice générale, de
nous également. Donc, c'est spécial, parce qu'on veut choisir un service de
garde, mais on n'a aucune espèce
d'idée des évaluations des services
de garde. Puis c'est un enjeu,
surtout dans les garderies qui sont non subventionnées. Je regarde le
temps qui file, hein, je vais accélérer un petit peu.
La Vérificatrice générale a parlé des maternelles quatre ans qui pourraient
être une piste... qui est une piste de solution, qui aident, justement, à surmonter la pénurie de places puis soutenir
les enfants qui sont issus de milieux défavorisés, parce que c'est gratuit.
Le troisième
point, bien, je vais y aller tout de
suite au point de la main-d'oeuvre parce que je vois que le temps passe, là. Oui, on a parlé
des enfants aux besoins spécifiques, mais il y a un enjeu qui nous a beaucoup
préoccupés, c'est l'enjeu de la main-d'oeuvre. Parce que, oui, on veut
créer 37 000 places, mais est-ce qu'on a la main-d'oeuvre nécessaire?
La Vérificatrice générale, la sous-ministre de la Famille a dit : Pour pouvoir répondre
à... combler, justement, ces places-là, il faut engager entre... d'ici cinq ans, il faut engager entre
10 000 et 13 000 éducatrices spécialisées. Donc, c'est énorme.
Sur trois ans, il faut en engager près de
5 000, c'est beaucoup. Il y a beaucoup de programmes de recrutement qui ont été en place.
Encore là,
une de nos questions, et, je me souviens, je pense que c'est moi qui l'ai posée, c'était : Avez-vous un portrait
d'ensemble, actuellement, là, qui qui travaille où? Est-ce que
les besoins sont en adéquation avec les programmes de formation? Comment ça se passe, le recrutement,
actuellement, dans les programmes de formation au niveau
des cégeps? Donc, on a senti qu'ils étaient en train de mettre ça en place,
donc ils construisaient leur avion, là, en même temps qu'ils
pilotaient.
Donc, nous,
on avait ces préoccupations-là puis on les a encore, puis c'est le rôle de
la Commission de l'administration
publique de poser ces questions-là,
parce qu'au niveau de la
main-d'oeuvre, c'est crucial. Là, en ce moment, on a un système un peu inéquitable où est-ce que les garderies non
subventionnées, et les garderies subventionnées, et les CPE se cannibalisent
un peu les mêmes personnes. C'est dans tout le marché actuel, là, le marché du
travail, il y a un enjeu de pénurie de main-d'oeuvre. Mais, dans les secteurs essentiels
comme ça, le ministère de la Famille, c'est le rôle du gouvernement, doit
s'assurer qu'on ait assez d'éducatrices dans
les milieux de garde pour pouvoir créer ces places-là, parce que
37 000 places et 37 000 enfants, c'est beaucoup.
Juste en bref, là,
actuellement, pour vous donner une idée de grandeur, là, actuellement, le
réseau des gardes subventionnées, c'est
16 000... c'est presque 17 000 éducatrices qualifiées et près de
3 000 non qualifiées. Et le réseau de garde non subventionné, c'est près de 6 000 qualifiées et
2 000 non qualifiées, donc c'est énorme. Puis là il faut en rajouter
à ça entre 10 000 et 13 000 $... 13 000 personnes,
excusez-moi, sur cinq ans, donc c'est énorme. Il y a des programmes qui ont été mis en place, Parcours travail-études,
programmes de bourses, il y a énormément d'efforts qui sont mis en place,
j'ai l'impression qu'ils travaillent en accéléré, mais c'est ça.
Donc, suite à ces
constats-là et ces discussions-là, la Commission de l'administration publique a
émis certains constats qui sont quand même
importants, puis je pense que ça vaut la peine d'en parler. Nous, dans le fond,
notre objectif, c'est d'avoir un
suivi serré et que les objectifs, là, se réalisent, du ministère de la Famille.
Donc, nous, ce qu'on a demandé au
ministère de la Famille, c'est que le ministère transmette à la Commission de
l'administration publique, au plus tard le 1er mars 2022, et par la suite tous les six mois jusqu'en septembre
2024, un portrait à jour du
développement de nouvelles places en
services de garde éducatifs à l'enfance, et que ce portrait-là comprenne, sans
s'y limiter, les données suivantes. Donc, c'est toute une question de données
d'information, on veut savoir l'objectif de développement de places, le
nombre de places en chantier, le nombre de places fermées et le nombre de
places qui sont livrées, ce qui est superimportant, on peut bien en annoncer, mais il faut les livrer. Deuxièmement, l'état
de la situation, les appels de projets, dont le nombre de projets reçus
et réalisés, ensuite le nombre d'enfants en attente d'une place. C'est toutes
des informations qu'on n'avait pas accès, on
veut avoir accès à ça, on veut que la Commission d'administration publique ait
accès à ces informations-là. Puis on a demandé que le ministère présente ces
données-là, ventilées par région administrative si possible, parce que
les régions ont toutes des réalités différentes.
• (12 h 40) •
Deuxièmement, on a
demandé au ministère de la Famille qu'il transmette à la Commission
d'administration publique, au plus tard, même chose, 1er mars 2022 et tous
les six mois par la suite, un état de situation au niveau de la main-d'oeuvre
du réseau des services de garde à l'enfance. Donc, pour s'assurer, justement,
de voir qu'il y ait une adéquation, une mise
en relation des objectifs et des résultats des programmes incitatifs développés
par le ministère, dont le programme de formation courte durée, les bourses
d'études, les aides au démarrage. On veut les détails des ressources
financières qui sont attribuées à chacun de ces programmes-là, on veut le
nombre de postes d'éducatrices qualifiées et non
qualifiées à pourvoir dans chaque territoire du ministère, par région
administrative, et le nombre d'éducatrices inscrites en formation
technique.
Comme
vous pouvez le voir, on prend notre travail très au sérieux, à la Commission de
l'administration publique. Notre objectif, c'est justement de rendre
l'imputabilité de la haute fonction publique beaucoup plus forte. Mais on veut s'assurer d'un suivi, puis c'est ça qu'on fait, je
pense qu'on est en train de renforcer cette commission-là, ça nous tient à
coeur, on veut un suivi plus serré.
On veut que les ministères et organismes se sentent obligés de nous fournir des
données, un état de la situation, un portrait pour que, justement,
ensemble, toute la société, on puisse livrer la marchandise pour les Québécois
et surtout pour les familles. Alors, merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Et je cède maintenant
la parole à Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.
Mme Isabelle Lecours
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Merci. Tout d'abord, Mme la Présidente, je
souhaite profiter de l'occasion pour saluer mes collègues de la Commission de
l'administration publique. Le travail que nous effectuons au sein de
cette commission est exigeant et rigoureux,
et les exercices de reddition de comptes que nous supervisons sont
indispensables à la mise en place de
saines pratiques de gestion. C'est de cette façon que nous pourrons atteindre
les plus hautes attentes de la population du Québec en matière
d'administration publique.
Ceci étant dit, le
débat d'aujourd'hui porte sur le dépôt du rapport des audiences publiques de la
commission. J'aimerais plus précisément porter à votre attention l'audition que
nous avons réalisée avec la Société d'habitation du Québec en suivi de la recommandation 2.1 du 41e rapport de la Commission de l'administration publique sur la réalisation des projets d'habitation du programme
AccèsLogis Québec. L'audition a porté sur certaines recommandations du rapport sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes, ainsi que sur le
chapitre 4 du rapport d'octobre 2020 du Vérificateur général du Québec,
intitulé Programme AccèsLogis Québec : réalisation des projets
d'habitation.
Tout
d'abord, il faut noter que les rapports sont tous deux assez sévères avec la
SHQ, particulièrement dans le cas du Vérificateur général. Les recommandations
font état de plusieurs lacunes dans la gestion d'AccèsLogis, un des programmes
phares de l'organisme. Par
exemple, la VG note que la SHQ peine
à se donner des objectifs clairs et à élaborer des indicateurs de performance, qui lui permettraient de mieux
évaluer l'efficacité de ses programmes. Toujours selon le rapport, ces lacunes sont
observables à la fois sur le terrain, dans la capacité de la SHQ à rendre à terme
ses projets d'habitation, mais aussi concernant la gestion financière et le
contrôle du coût final des projets une fois qu'ils sont réalisés.
À la page 10 du
rapport du Vérificateur général, on peut lire que «selon notre examen d'un
échantillon de 30 dossiers, les coûts
engagés pour la réalisation des projets [...] sont 45 % plus élevés que la valeur foncière
reconnue des immeubles». Donc, c'est énorme. La situation mérite
clairement un redressement.
Fort heureusement, un changement est déjà
entamé, selon le président-directeur général de la SHQ, qu'il nous a révélé lors de son audition. M. Jean-Pascal
Bernier nous a tout d'abord rappelé que la SHQ a transmis son plan d'action
à la commission en
mars 2021. Les travaux se poursuivent à l'heure actuelle, notamment par une
modification législative, l'élaboration
d'un règlement visant à mieux définir la notion de revenus modestes, des
ajustements aux formulaires utilisés ainsi que des précisions aux normes
des programmes.
M. Bernier
nous a aussi précisé qu'aucune réforme majeure n'a eu lieu depuis 1997, mais
qu'un nouveau programme pour la
réalisation de logements sociaux et abordables a été annoncé le
25 novembre dernier. Ce nouveau programme de construction de 2 200 logements
abordables, annoncé par mon collègue le ministre des Finances la semaine
dernière, pourra compter sur des
crédits de 123 millions de dollars en cinq ans. En y ajoutant le montant cotisé
par le gouvernement fédéral, ce montant atteindra 197 millions
de dollars. À ces montants déjà
importants s'ajoutera une aide directe au paiement des loyers pour les
personnes à faibles revenus, soit plus de 35 millions sur cinq ans,
doublée d'un soutien de 146 millions,
aussi sur cinq ans, pour la modernisation du programme
Allocation-logement.
Un autre
constat inquiétant posé par la Vérificatrice
générale concerne plutôt les portions
logistiques et pratiques du programme AccèsLogis. La Vérificatrice
générale a noté, dans son rapport, que les connaissances nécessaires à une application rigoureuse du programme étaient
insuffisantes. On peut lire le constat suivant : «La SHQ n'a pas élaboré
de stratégie d'intervention ni réalisé d'analyses lui permettant de
s'assurer d'une utilisation judicieuse de ses programmes, dont le programme AccèsLogis Québec, afin de
maximiser l'aide aux ménages ayant des besoins en matière de logement.»
Par exemple, il est primordial, selon moi, d'avoir une connaissance fine des
besoins des différents types de clientèle. C'est uniquement de cette manière que l'analyse de l'admissibilité des
requêtes reflétera véritablement la situation sur le terrain.
Qu'en est-il des personnes en situation d'itinérance, des aînés autonomes ou en perte
d'autonomie? Quels sont les besoins des familles nombreuses?
Vous savez,
Mme la Présidente, un dossier qui me tient particulièrement à coeur est celui
des femmes et des enfants victimes de
violence conjugale. Une meilleure connaissance du milieu permettrait assurément
à la SHQ de mieux évaluer les besoins
pour ce type très particulier de clientèle qui, pour se sortir du piège de la
violence et de l'intimidation, se retrouvent souvent dans une situation
financière très précaire.
Notre gouvernement est activement engagé dans cette cause importante, et cela se reflète
aussi dans le financement des maisons d'hébergement et des alternatives d'aide
au logement pour les femmes victimes de violence conjugale. Lors du dernier exercice budgétaire, nous avons bonifié
de 8,5 millions de dollars le
budget des maisons d'hébergement. Nous avons aussi alloué 10 millions de
dollars afin de consolider le réseau des maisons d'hébergement de deuxième
étape pour femmes victimes de
violence en situation postséparation. Au total, ce sont près de 407 millions
de dollars sur cinq ans qui sont inscrits au budget pour lutter contre la violence conjugale et les féminicides. Une portion significative de ce montant-là est prévue pour l'aide au logement et l'hébergement d'urgence. L'argent est là, il est disponible, il faut maintenant
travailler à ce que les projets voient le jour.
Avec le resserrement du marché locatif, les
besoins en logements sociaux et abordables n'iront pas diminuant. Soyez assuré que les membres de la commission
assureront un suivi serré avec la SHQ afin de l'inciter à améliorer ses
pratiques de gestion et que ses
projets soient menés dans les délais les plus courts, avec un souci de
performance financière et logistique accru.
C'est en ce
sens que la commission recommande que la Société d'habitation du Québec
fasse rapport à la Commission de l'administration
publique au plus tard le 1er mai
2022 sur les progrès de la mise en place de son nouveau programme
pour la réalisation de logements sociaux et abordables. Les membres de la commission
recommandent également que ce document résume la progression des portraits régionaux sur
les besoins en matière d'habitation et la prise en compte des constats dressés par le Vérificateur général du Québec dans ses deux rapports d'audit sur le programme
d'AccèsLogis. Merci, Mme la Présidente.
• (12 h 50) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, Mme la députée. Et maintenant je cède la parole à Mme la
députée de Côte-du-Sud. Et vous disposez d'un temps de parole de
15 minutes.
Mme Marie-Eve Proulx
Mme Proulx
(Côte-du-Sud) : Merci, Mme la Présidente. Je tiens à vous mentionner
d'entrée de jeu que j'ai été nommée à
la Commission d'administration publique en septembre, puis c'est, pour moi, une
expérience fort pertinente et intéressante
de pouvoir questionner, scruter, observer, analyser toutes les actions que fait
le gouvernement au quotidien dans l'administration.
Comme
députés, on a un rôle crucial et important d'être la voix des citoyens, mais
aussi de s'assurer que l'État rende des
comptes puis aussi de s'assurer que les choses sont faites convenablement. Puis
la Commission d'administration publique nous permet de le faire de manière transpartisane. Donc, c'est vraiment
un mandat important et crucial pour l'avancement tant des différents ministères que des différents organismes
gouvernementaux. C'est un honneur,
pour moi, de siéger à cette commission pour faire avancer ces dossiers. Aujourd'hui,
Mme la Présidente, je vais vous parler des rapports de différents
organismes. Donc, à l'instant, je débute.
Donc,
depuis 2005, la Commission de
l'administration publique examine les
rapports annuels des ministères et des
organismes publics soumis à certaines dispositions de la Loi sur
l'administration publique. Depuis 2008, la commission concentre son
attention non seulement sur la qualité de l'information relative à la reddition
de comptes des entités placées sous son regard mais aussi sur leurs
performances organisationnelles.
S'appuyant
sur la définition retenue par le Secrétariat
du Conseil du trésor, la commission estime que, pour être jugée performante, une organisation doit réaliser
des activités qui couvrent l'ensemble de sa mission, atteindre des objectifs
stratégiques, produire des services de qualité aux citoyens, utiliser des
ressources de façon optimale.
Depuis 2017,
la commission a élargi son mandat à l'ensemble des entités correspondant à
l'une des quatre catégories définies à l'article 3 de la Loi sur
l'administration publique. Elle réalise dorénavant deux types d'examens.
Le deuxième type d'examen, qui est celui sur
lequel je me concentrerai aujourd'hui, consiste en une analyse de la qualité de
l'information. Elle s'intéresse aux
organismes non assujettis ou assujettis en partie au chapitre II de la
loi. L'exercice est basé sur l'information publiée dans les rapports
d'activité des entités.
Le
6 octobre 2021, la Commission de l'administration publique a donc
examiné les rapports annuels de huit organismes. Il s'agit, pour cette année,
l'année en cours : la Commission des normes, de l'équité et de la santé et
sécurité au travail, le Conseil de
gestion sur l'assurance parentale, les Fonds de recherche du Québec — Nature et technologies, celui sur la santé,
et celui... Société et culture.
Aussi, on a analysé l'Office des professions du Québec, s'est ajouté à cela le
rapport annuel de l'Office
Québec-Monde pour la jeunesse et finalement nous avons étudié le rapport annuel
de la Société de télédiffusion du Québec, soit Télé-Québec.
D'entrée de
jeu, je vais aborder, là, les éléments qui sont sortis, ou qui ont émergé, là,
de l'analyse qu'on a pu faire de la Commission des normes, de l'équité et de la
santé et de la sécurité au travail. Donc, le rapport annuel de la CNESST
était exhaustif, il brossait un portrait
complet des activités de l'organisme. Les résultats obtenus, eu égard au plan
stratégique, y étaient clairement
présentés. Nous avons également pris acte de la décision de la CNESST de
scinder un de ses indicateurs afin qu'ils reflètent davantage les délais
qui lui sont non attribuables.
Néanmoins,
nous nous sommes demandé pourquoi cet
aspect n'a pas été pris en compte lors de l'élaboration de la planification
stratégique au départ. La non-atteinte de la cible de trois engagements pris
sur les services aux citoyens, dont
celui visant à rendre une décision d'admissibilité dans un délai de
15 jours pour une réclamation relative à un accident de travail,
était toutefois préoccupante, Mme la Présidente. Ces résultats mériteraient
d'être davantage documentés.
De plus, le rapport présentait certaines données
sur le traitement des plaintes, mais ni le nombre ni la teneur de celles-ci n'étaient indiqués. La publication de
ces données ferait pourtant preuve de plus de transparence pour cet organisme fort
important pour les travailleurs du Québec.
Enfin, nous avons souligné que les excédants cumulés de l'organisme et du Fonds de la santé et de la sécurité au travail sont très
élevés.
Deuxièmement, en ce qui a trait au Conseil
de gestion de l'assurance parentale du
Québec, le rapport annuel de 2020
était complet et répondait aux obligations de l'organisme en matière de reddition de comptes. Plusieurs données ont été publiées sur la
mise en oeuvre du plan stratégique 2018‑2021. Toutefois, dans un souci
d'amélioration continue, la commission invite le conseil à intégrer davantage
d'indicateurs de résultats mesurables annuellement dans sa prochaine
planification stratégique.
Il a été noté aussi que le conseil a une entente
administrative avec le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale
pour la gestion des relations avec la clientèle. Aussi, un certain manque de transparence du conseil et du ministère
conduit la commission à s'interroger sur les efforts consentis à la qualité des
services aux prestataires de l'assurance. À
titre d'exemple, il était impossible de comprendre quels
effectifs sont spécialement affectés au service à la clientèle du Régime québécois d'assurance parentale. La commission s'attend à de l'information plus complète dans
une reddition de comptes
rigoureuse qui doit décrire clairement l'utilisation des ressources.
Concernant
les Fonds de recherche du Québec, tant le fonds Nature et technologies, celui de
la Santé et de la Société et culture, qui sont gérés maintenant
sous une même égide, les constats sur les rapports annuels de ces trois fonds
du Québec étaient sensiblement les
mêmes. Dans l'ensemble, les rapports répondaient aux exigences du Conseil du trésor. Plusieurs données présentaient les activités en détail, le tout
accompagné de nombreux tableaux éclairants. Bravo! De plus, les trois
rapports traitaient de façon exhaustive les résultats obtenus en lien avec le
plan stratégique, donc il y a de la cohérence dans les gestes.
Pour la commission,
les fonds doivent poursuivre leurs efforts pour atteindre les cibles de leur
plan stratégique. Du travail reste à
faire à cet égard. Par
ailleurs, les trois fonds avaient
prévu, pour 2019‑2020, un budget déficitaire. Deux d'entre eux ont conclu leur exercice avec un déficit. Donc, un des trois fonds a eu un surplus.
Donc, bravo pour ça! Donc, on a dépassé les objectifs attendus.
En ce
qui a trait au rapport sur l'Office des professions du Québec, cette dernière
présentait un rapport annuel qui a répondu
aux exigences. L'information publiée permettait de brosser un portrait complet
de ses activités. Bien qu'il n'y soit
pas tenu, l'office s'est doté d'un plan stratégique et d'une déclaration de
services aux citoyens. Il en présentait les résultats dans son rapport
annuel. L'Office est invité à poursuivre cette bonne pratique. Enfin, les
données fournies sur l'utilisation des ressources étaient exhaustives.
Concernant
maintenant l'Office Québec-Monde, la lecture de leur rapport annuel pour la
jeunesse était toutefois plutôt
compliquée. En effet, les données provenaient des Offices jeunesse
internationaux du Québec, LOJIQ, soit de l'Office Québec-Monde pour la jeunesse, qui est assujetti en
partie à la Loi sur l'administration publique, et de l'Office franco-québécois
pour la jeunesse, qui ne l'est pas. Nous recommandons que l'organisation
s'assure que les données soient séparées et
ventilées entre les deux afin d'être en mesure d'apprécier les efforts et les
résultats chacune. LOJIQ, pour sa
part, s'engageait, dans sa déclaration de services aux citoyens, à
rendre compte des résultats de ses engagements. Pourtant, le rapport annuel 2019‑2020 ne présentait
aucune information à cet égard. Enfin, bien qu'il soit assujetti à l'obligation
de consacrer 1 % de masse salariale à la formation du personnel comme le
prévoit la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des
compétences de la main-d'oeuvre, LOJIQ n'en faisait pas mention dans sa
reddition de comptes.
Finalement,
Mme la Présidente, en ce qui a trait à la Société de télédiffusion du Québec,
soit Télé-Québec, le rapport annuel 2019‑2020 contenait beaucoup
d'information sur la programmation de la chaîne télévisée. On y abordait aussi les autres plateformes et proposait plusieurs
données sur les visionnements et l'auditoire. Les données sur la gestion des
ressources étaient peu nombreuses mais
éparses. La plupart des obligations liées à la reddition de comptes étaient néanmoins respectées.
Télé-Québec a l'obligation de se doter d'un plan stratégique et de le
déposer à l'Assemblée nationale. Nous avons été étonnés de lire dans le rapport annuel 2019‑2020 que, pour des raisons de concurrence, la chaîne
ne divulgue ni son plan stratégique ni aucune information détaillée sur ses objectifs
et leur atteinte. De plus, aucune
donnée n'était fournie sur l'accès à
l'égalité en emploi et sur la masse salariale consacrée à la formation du
personnel. Donc, il aurait été
important de le faire.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Mme la députée...
Mme Proulx (Côte-du-Sud) : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Vous concluez? Alors...
Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Ceci
conclut les huit organismes. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Très bien. Merci. Je vous remercie.
Alors, compte tenu de l'heure, je suspends nos
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 1)
Le Vice-Président (M. Picard) :
Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Aux affaires
du jour, à l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée poursuit le débat sur le
rapport de la Commission de l'administration publique.
Je vous
informe du temps de parole qu'il reste à écouler pour la durée de ce débat :
5 min 42 s au groupe parlementaire formant le gouvernement,
15 min 49 s au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, 9 min 36 s au troisième groupe d'opposition,
pour un total de 31 min 7 s.
Je suis maintenant prêt à céder la parole à M.
le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault : Oui, merci, M.
le Président. Alors, c'est toujours avec beaucoup de plaisir que je prends la parole sur les rapports... sur l'imputabilité de
la Commission de l'administration publique. Vous savez à quel point c'est
une commission qui est importante pour
l'Assemblée nationale, qui est importante pour la reddition de comptes, on ne
le dira jamais assez.
Dans nos
fonctions de député, évidemment, il y a celle d'intermédiaire de la population
qui nous a élus dans chacune de nos circonscriptions, il y a celle de
législateur, donc de faire ou de contribuer, de participer à l'élaboration des
lois en commission parlementaire, puis il y
a celle de contrôleur. Celle de contrôleur c'est peut-être celle qui est un peu
la plus méconnue, ou la plus théorique pour la population, ou, souvent,
qui est trop ramenée à la période des questions où on assiste à un échange entre les partis d'opposition et le gouvernement
puis les ministres sur les enjeux d'actualité. Mais un des gros volets
de la reddition de compte et du contrôle de l'action gouvernementale, bien, ça
se fait par la Commission de
l'administration publique. Alors, c'est pour ça que c'est un travail très
important qui est fait à la CAP et
qui est fait de façon non partisane, comme vous le savez, parce que
l'objectif, c'est d'entendre l'administration publique, les sous-ministres, les
dirigeants d'organisme, des ministères, de l'appareil public de l'État sur la
gestion de leur administration.
Donc,
l'objectif de la Commission de l'administration
publique n'est pas de questionner
l'opportunité des choix gouvernementaux, ça, ça se fait à la période de
questions, ça se fait à l'étude des crédits, c'est aussi de la reddition de
comptes, mais le but de la Commission de l'administration publique, une fois
que les choix politiques sont faits, c'est bien
de savoir si la gestion est bien faite. Donc, c'est une reddition de comptes extrêmement importante, parce qu'au fond ça revient à quoi? À s'assurer que les
impôts et les taxes des citoyens sont bien gérés en fonction des choix politiques
du gouvernement.
Donc, on fait ça de façon non partisane. Nous
rencontrons, à la Commission de l'administration publique, les sous-ministres, les dirigeants d'organisme. Moi, je suis membre de la Commission de l'administration publique presque sans interruption depuis 2014, ce qui est
vraiment très apprécié de ma part, parce que c'est une commission,
comme je viens de le dire, qui fait
un travail tout à fait important. Et c'est un travail aussi, malgré le
caractère un peu parfois... je pense que c'est juste un préjugé ou un
stéréotype, mais le caractère un peu bureaucratique de notre travail, c'est vraiment
un travail qui se fait pour les gens,
pour les électeurs, pour les citoyens, les citoyennes, puis je veux en faire la preuve par
l'intervention que je vais faire aujourd'hui sur le rapport de la commission.
Évidemment,
on a travaillé en fonction de la réalité de la pandémie, donc parfois à
distance, pas aussi souvent non plus
qu'on aurait aimé le faire. L'agenda des parlementaires est très chargé. Et
l'autre élément, c'est qu'on n'a pas un temps déterminé dans l'agenda parlementaire. Ça, c'est une revendication de
longue date de la Commission de
l'administration publique, une revendication que je répète aujourd'hui.
Je sais que le leader parlementaire du gouvernement a présenté une réforme des
règles qui nous gouvernent, des règles parlementaires, pour améliorer notre
travail, pour améliorer les conditions
entourant notre travail. On parle même de revoir l'aménagement du salon bleu,
ce qui est tout à fait correct. Mais dans l'ensemble de ces réformes,
dans l'ensemble des choses que nous devons améliorer pour bonifier notre
travail au nom des
citoyens et des citoyennes, c'est de faire en sorte qu'on ait un temps réservé,
dans l'agenda parlementaire, pour la Commission de l'administration
publique. Alors, je veux profiter de l'occasion, ici, pour le dire, pour le
redire, pour le répéter. Je sais, M. le
Président, que vous avez un rôle à jouer également parce que vous faites partie
du bureau de la présidence. Vous avez
l'occasion de pouvoir transmettre les messages parfois. Alors, j'insiste pour
que nous ayons du temps réservé.
Les autres commissions ont du temps réservé
parce qu'elles font de la législation. Donc, quand il y a un projet de loi qui se présente, bien, on réserve du temps
pour que le projet de loi avance en étude détaillée, en auditions. C'est tout à
fait correct. Mais la commission parlementaire de la Commission de
l'administration publique, vu qu'elle ne fait pas de législation, se trouve à tomber entre deux chaises
parce qu'il faut toujours qu'on négocie à la pièce les agendas puis le moment
pour se rencontrer pour faire notre travail. Ce qui n'a aucun sens.
Alors, un des gestes forts, phare et fort, qui
pourrait être posé par l'Assemblée nationale et dans l'éventuelle réforme, c'est d'accorder un temps déterminé,
définitif, une fois par semaine, on verra le moment, mais pour que la Commission de l'administration publique puisse
faire son travail. Et c'est le souhait que je transmets ici. Il y a plein
d'autres choses, là, qu'on pourrait
améliorer, notamment d'étudier les comptes publics, mais certainement au moins,
je dirais, garantir un temps réservé pour le travail de la commission,
ce serait fortement apprécié.
Maintenant,
sur le fond des choses, il y a deux chapitres dans le rapport que nous avons
sous les yeux aujourd'hui, le
chapitre I et le chapitre II. Ça tombe bien, hein, il y a deux
chapitres. Alors, le premier concernant l'audition du ministère de la Famille sur sa gestion administrative et sur
l'accessibilité aux services de garde éducatifs à l'enfance, le deuxième
chapitre sur l'audition de la Société
d'habitation du Québec en suivi de la recommandation n° 2.1
du 41e rapport de la Commission de
l'administration publique. Et je dois dire que, dans les deux cas, comme ça se
fait souvent, d'ailleurs, à la Commission de l'administration publique, nous
travaillons en étroite collaboration avec le Vérificateur général, qui est
Mme Guylaine Leclerc présentement, que je salue et que je
remercie pour sa grande collaboration.
Donc le Vérificateur général du Québec, comme vous
le savez, M. le Président, fait des rapports de façon régulière sur un ensemble
de sujets. Elle se donne ses propres mandats, parfois elle a des mandats de l'Assemblée nationale. Et, quand elle fait rapport, bien, elle vient nous les
déposer à huis clos, les présenter auprès de la Commission de l'administration publique, puis, après ça,
nous, on peut s'en saisir. Donc, dans le cas du ministère de la Famille, on a
travaillé étroitement avec la VG, dans le cas de la Société d'habitation
du Québec aussi.
• (15 h 10) •
Dans le cas
du ministère de la Famille, la VG avait fait quand même
des recommandations. J'en retiens cinq, des recommandations assez fortes, assez substantielles, assez critiques également
concernant les services de garde
éducatifs à l'enfance. Premièrement, elle nous disait que l'offre de places en service de garde est insuffisante par rapport
aux besoins des parents. Deuxièmement, et c'était préoccupant, les familles à faibles revenus sont
sous-représentées dans les services
de CPE dans la région montréalaise, alors que les CPE, bien sûr,
répondent à des besoins universels, mais l'objectif également des CPE était bien de faire en sorte que des parents, en
particulier des mères qui doivent s'occuper des enfants... mais aussi leur donner l'occasion d'avoir des
services de garde éducatifs de qualité qui vont leur permettre, dans certains
cas, de pouvoir reprendre le marché du travail, de retourner dans une formation
qualifiante dans un certain nombre de cas. Donc, les CPE sont un service
universel pour faire en sorte que l'ensemble des familles puissent avoir un
soutien pour améliorer leur situation. Donc,
c'est sous-représenté, les places en CPE, dans la grande région de Montréal,
pour les familles à faibles revenus. C'était questionnant.
La
Vérificatrice générale nous disait également que le guichet unique pour les
places 0-5 ans ne marchait pas bien, qu'il manquait aussi de
l'encadrement des services de la part du ministère, des services de garde à
l'enfance, et les objectifs de création de
places n'étaient pas remplis. Donc, cinq recommandations, cinq constats de la
Vérificatrice générale, très sévères envers le ministère de la Famille.
On a, à la Commission de l'administration
publique, procédé à l'audition du ministère de la Famille sur ces enjeux-là avec la Vérificatrice générale et on
est venu à la conclusion de proposer deux recommandations, dont la
première, qui est de faire en sorte que le ministère de la Famille
transmette à la Commission de l'administration
publique, au plus tard le
1er mars 2022, donc, c'est très bientôt, et ensuite à tous les six mois, jusqu'en
septembre 2024, un portrait à jour du développement de nouvelles places
en service de garde.
Donc, c'est
très important. Moi, je peux juste prendre dans ma propre
région, dans ma propre circonscription, c'est une
des demandes que nous avons le plus, comme député, des parents qui cognent à la
porte du bureau de circonscription pour nous dire : On est en
panique. On n'est pas capables de trouver de place en CPE. Mon congé parental
se termine. Je dois retourner au travail.
J'ai un jeune enfant, un poupon, un bambin qui n'est pas encore à l'école. Il
faut trouver des places. Et c'est
très difficile de pouvoir faire un suivi, d'avoir les chiffres à jour, de
savoir où on s'en va, c'est quoi, les projets qui s'en viennent.
Alors, avec
cette recommandation, que le ministère n'aura pas le choix de suivre parce que
c'est une recommandation d'une commission parlementaire, bien, on va obtenir un portrait à jour du
développement des nouvelles places avec les données suivantes : l'objectif de développement de places, le
nombre de places en chantier, le nombre de places fermées, le nombre de places livrées, l'état de situation
des appels de projets, dont le nombre de projets reçus et réalisés, puis on va
obtenir également le nombre d'enfants en attente d'une place. Et, dans la
mesure du possible, on veut obtenir ça ventilé par région administrative. Donc, c'est une recommandation très forte
pour s'assurer que les constats de la Vérificatrice
générale soient pris en compte et suivis par le ministère.
Deuxième chose, deuxième recommandation, un peu
la même chose que sur les services ou le nombre de places en services de garde, mais par rapport à la main-d'oeuvre. On
sait que la main-d'oeuvre dans les services de garde est très, très sollicitée, surtout aujourd'hui,
là, on le voit avec les négociations avec le Conseil du trésor, mais on va
obtenir par
recommandation... la Commission de l'administration publique va obtenir du
ministère de la Famille, au plus tard le 1er mars 2022 et, par la suite, tous les six mois,
jusqu'en septembre 2024, un état de situation de la main-d'oeuvre du
réseau des services de garde éducatifs avec une mise en relation des objectifs
et des résultats des programmes incitatifs développés par le ministère, dont le Programme de formations
de courte durée et les bourses d'études, les aides au démarrage en milieu
familial, le détail des ressources financières accordées à ces différents
programmes, le nombre de postes d'éducatrices qualifiées et non qualifiées à pourvoir dans chaque territoire du
ministère ou par région administrative et le nombre d'éducatrices
inscrites en formation technique.
Alors, ce
sont des chiffres, des données très importantes, qui vont nous permettre de
faire le suivi des constats qui ont été faits par le Vérificateur général
auprès du ministère de la Famille. Puis, encore une fois, je le répète, ça peut
avoir l'air un peu lourd ou bureaucratique, mais, au contraire, c'est
extrêmement utile, parce qu'après ça dans les autres outils de reddition de comptes que nous avons, comme la
période de questions, comme l'étude des crédits, bien, on va pouvoir se saisir
de ce travail puis des redditions de comptes qui seront faites aux
six mois par le ministère de la Famille auprès de la CAP pour être capable, après ça, d'avancer puis
de répondre aux citoyens puis aux citoyennes qui viennent nous voir dans
nos bureaux de circonscription pour savoir où on en est rendus dans le
déploiement des places en service de garde dans
chacune des régions du Québec. Alors, c'est un outil extrêmement pratique et
c'est un travail tout à fait concret pour le... qui est fait par la
Commission de l'administration publique.
L'autre chapitre, puis on vient tout juste de
tenir l'audition, je pense, c'est la semaine passée, avec la Société d'habitation du Québec, là aussi la Vérificatrice générale avait
fait des recommandations puis des constats j'allais dire assez sévères, mais le terme «assez» n'est pas assez. La
Vérificatrice générale avait fait des recommandations très sévères
envers la Société d'habitation du Québec. Trois éléments. La Vérificatrice générale nous a dit que la SHQ ne gère pas adéquatement
le programme AccèsLogis, que la SHQ évalue
mal les besoins des ménages qui ont besoin de logement abordable, sans faire non plus un portrait socioéconomique des
besoins par région, et les groupes de ressources techniques, qu'on appelle
les GRT, dans chacune des régions du Québec, les GRT sont peu encadrés par la Société
d'habitation du Québec, c'est très inégal
d'une région à l'autre, et également leur travail est mal évalué. Puis là, ici,
évidemment, je ne lance pas la pierre aux
GRT, parce que c'est inégal sur le territoire. Même, l'ensemble des GRT peuvent
bien fonctionner, mais il n'y a pas nécessairement
de relation directe ou d'encadrement qui est fait par la SHQ, ce qui ouvre la
porte à des déséquilibres d'une région à l'autre.
Donc, face à
ça, on a entendu la direction de la SHQ. En passant, beaucoup d'intérims dans
l'organigramme de la SHQ, ce qui nous pose des questions aussi. Vous savez,
quand une organisation a beaucoup d'intérims dans ses différentes directions, ça envoie un signal de désorganisation
ou d'instabilité. Alors, évidemment, on souhaite que les postes intérimaires
soient comblés rapidement pour donner une erre d'aller puis donner une
constance à la Société d'habitation
du Québec.
Donc, les recommandations que nous avons faites
à cet égard, premièrement, c'est que la Société d'habitation du Québec
transmette à la Commission de
l'administration publique, au plus
tard le 1er mai 2022, son nouveau cadre de reconnaissance des
groupes de ressources techniques. Donc, les groupes de ressources techniques,
comme je le disais tout à l'heure, voient à
la réalisation, concrètement sur le terrain, des immeubles d'habitation et des
programmes AccèsLogis qui atterrissent dans chacune de nos régions.
Puis, en audition, le P.D.G. intérimaire de la SHQ nous a dit qu'ils étaient à la veille de s'entendre avec les GRT pour avoir
un cadre de reconnaissance de leur travail, ce qui va permettre de faire
cet encadrement, on le souhaite, cet
encadrement qui était jugé insuffisant par la VG. Donc, 1er mai 2022 au plus tard, on va obtenir, à la
CAP, le nouveau cadre de reconnaissance des GRT par la Société d'habitation du
Québec.
Deuxième
recommandation, que la Société d'habitation fasse rapport à la CAP, au plus
tard le 1er mai 2022, des progrès
de la mise en place de son nouveau programme pour la réalisation des logements
sociaux et abordables. La SHQ nous a dit : On est en train de mettre en
place des nouveaux programmes pour réaliser les logements sociaux et abordables.
Alors, nous, on veut que ce soit déposé à la CAP.
Et troisième
recommandation, c'est que la Société d'habitation du Québec transmette aussi à
la CAP le résultat des évaluations du Vérificateur général en suivi des
recommandations formulées dans l'audit intitulé Programme AccèsLogis :
réalisation des projets.
Donc, la
Commission de l'administration publique devient un peu le pilier qui va
permettre d'avoir une reddition de comptes publique sur le suivi que la SHQ va
faire quant aux critiques sévères du VG à son endroit. Donc, ça ne tombera
pas dans les limbes, ça va revenir à la CAP.
Puis je peux vous assurer d'une chose, comme je vous disais tout à l'heure,
moi, je suis membre de la Commission de l'administration publique depuis 2014,
et il n'y a pas une recommandation qu'on laisse tomber entre deux chaises. On s'assure qu'il y a toujours un
suivi. Donc, quand la Société d'habitation du Québec va nous faire parvenir son suivi des recommandations
de la VG, bien, nous, on va avoir ce qu'il faut pour s'assurer que ça se
fasse réellement.
• (15 h 20) •
Donc, c'est
ce qui concerne les deux chapitres de ce rapport, d'une part, le ministère
de la Famille, d'autre part, la SHQ. Mais on a fait autre chose aussi à la CAP.
Comme il est dans notre mandat statutaire, on fait l'analyse détaillée des rapports annuels de gestion, ce qu'on appelle
les RAG, les rapports annuels de gestion de l'ensemble des ministères et
organismes qui sont soumis à la Loi sur
l'administration publique. Donc, on en a fait huit pour ce rapport-ci à la
dernière session, à la session qui
s'achève dans les prochains jours. On a fait le suivi de huit rapports
annuels de gestion et l'analyse fine
et précise de huit rapports annuels de gestion. Et, vous savez, on fait ça
régulièrement. Donc, il faut s'assurer que chaque ministère et organisme soit
analysé, que les rapports annuels de gestion soient analysés par la CAP. Puis,
au bout d'à peu près quatre ans, woups! on revient, on recommence
les rapports annuels de gestion, de sorte que ce n'est pas juste des documents qui sont faits pour être tablettés, mais
c'est vraiment suivi par notre commission. Et, une fois qu'on a analysé un rapport annuel de gestion, bien là on envoie
une lettre à l'organisme avec nos commentaires pour qu'ils s'améliorent,
pour qu'ils bonifient
leur prochaine édition. Et, parfois même, on les auditionne à la Commission de
l'administration publique. Donc, c'est très important.
Et là on a
fait huit groupes, huit organismes : la Commission des normes,
de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, le Conseil de gestion de l'assurance parentale, le Fonds de
recherche du Québec — Nature
et technologies, le Fonds de
recherche du Québec — Santé,
le Fonds de recherche du Québec — Société et culture, l'Office des
professions, l'Office Québec-Monde
pour la jeunesse et la Société de
télédiffusion du Québec, qu'on appelle aussi Télé-Québec. Donc, ce
sont les huit organisations qu'on a examinées dans cette dernière session avec
leurs rapports annuels de gestion.
Je ne vous
ferai pas le résumé des contenus, vous l'avez dans le rapport. Alors, ce serait
de la redite inutile. Je vous invite
à aller les lire, M. le Président. Vous allez voir, il n'y a rien de
catastrophique, mais on fait parfois des recommandations ou on cible des petits éléments à améliorer puis
on envoie ça à l'organisation, ce qui permet d'améliorer, dans le fond, la
gestion des deniers publics que nous avons à surveiller.
J'achève mon
intervention, M. le Président, en vous disant que nous faisons un travail extraordinaire,
nous travaillons en collégialité.
J'ai l'immense privilège de faire partie du comité directeur de la CAP avec mon
collègue de Robert-Baldwin, qui est
le président, et mon collègue de Portneuf, qui est le vice-président. Et je
pense qu'avec le temps nous avons développé une bonne chimie pour bien travailler ensemble, pour bien collaborer,
toujours dans le souci d'améliorer le travail de la Commission de
l'administration publique pour le bien-être des citoyens et citoyennes du
Québec.
Je veux
remercier la Vérificatrice générale du Québec encore une fois. Sans elle — puis je vois mon collègue de Portneuf, je
pense qu'il est d'accord avec moi — on serait dans l'incapacité de faire notre
travail, parce que la VG et son équipe
font un travail extraordinaire. Je voudrais remercier la Commissaire au
développement durable, qui vient de prendre ses fonctions, elle a remplacé M. Paul Lanoie, que je salue, et
avec qui on travaille très étroitement. La Protectrice du citoyen, même
chose.
Et vous allez
me permettre de remercier une recherchiste de grand talent. Chez nous, au
Saguenay, on dit... quelqu'un qui a
un grand talent, ce n'est pas nécessairement positif, mais là je ne le dis pas
en tant que Saguenayen, je le dis de façon universelle. Alors, je veux
remercie Julie Paradis, qui vient du Saguenay, ça fait qu'elle va bien
comprendre, donc, Julie Paradis, qui fait un
travail extraordinaire et qui nous a annoncé qu'elle quittait la commission,
malheureusement pour nous,
heureusement pour elle parce qu'elle a des nouveaux défis, mais qui, sans elle,
on serait aussi dans l'incapacité de faire notre travail.
Alors, voilà, M. le Président, merci. Et nous
espérons être capables de faire encore un bon travail à la prochaine session
parlementaire.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député de Jonquière. Je reconnais maintenant M. le député de Portneuf.
M. Vincent Caron
M. Caron : Merci, M.
le Président. Bien, à mon tour de
saluer l'ensemble des collègues ici présents, mais particulièrement les collègues
qui siègent sur la Commission de
l'administration publique, la députée de
Jean-Talon, députée
de Châteauguay, députée de
Labelle, députée de Lotbinière-Frontenac, député
de Masson et députée de
Côte-du-Sud. Bien entendu,
aussi un salut particulier à mes collègues de l'opposition officielle,
président, dont a parlé, il y a quelques instants, le député de Jonquière, le
président, député de Robert-Baldwin... pardon, la députée de Vaudreuil et la députée
de Saint-Laurent, du côté de
la deuxième opposition, la députée de Mercier, la troisième opposition, le
député de Jonquière.
En effet, peut-être
suis-je arrivé en politique parfois avec des lunettes roses, mais j'ai la
chance de retrouver, au sein de la
Commission de l'administration publique, cet esprit de non-partisanerie qui
nous permet de creuser les dossiers parfois de manière complètement différente.
On le sait, nos journées sont politisées, et je comprends tout à fait le rôle
des partis d'opposition de venir poser
des questions ici, au salon bleu. Mais ce que j'apprécie particulièrement, au
sein de la Commission de
l'administration publique, notamment au sein du bureau directeur, lorsqu'il
est... le temps est venu de s'interroger sur, justement, l'élaboration d'un chapitre selon des recommandations qu'on a
obtenues des différents groupes représentés ici, à l'Assemblée nationale, bien, on est capables de prendre ce pas de recul non partisan pour
pouvoir éclairer comme il le faut,
finalement, la situation, ce que j'apprécie aussi particulièrement. Et je
voulais féliciter, finalement, mes collègues de la partie gouvernementale,
parce que ce n'est pas toujours facile, en effet, quand on participe à d'autres
commissions et quand on arrive à la Commission d'administration publique, de
comprendre cette subtilité qui est complètement différente et de pouvoir poser
des questions qu'on n'oserait possiblement pas poser dans une autre commission.
Donc, vraiment, je trouve que le
travail que nous réalisons est exemplaire, et puis c'est vraiment un travail
d'équipe dans tout ça, outre la partisanerie qui peut occuper, bien
entendu, ces lieux.
Bien entendu,
le rapport dont nous parlons aujourd'hui comporte deux chapitres. Mes collègues
de ce matin sont revenus à de multiples reprises sur les sujets qui nous
animent aujourd'hui, le ministère de la Famille et l'audition de la SHQ. Je perçois aussi parfois, lorsque je vois les
ministères qui sont face à nous alors que nous les convoquons, je sens
une certaine inquiétude de leur part. Cependant, je trouve que c'est une
attitude saine, mais ils doivent bien comprendre aussi, eux, le rôle que joue la Commission de l'administration publique,
qui est plutôt un rôle de chien de garde plutôt qu'un rôle de quelqu'un qui veut poser des gestes répréhensifs,
mais plutôt aider les ministères et ceux qui les dirigent à mieux se gouverner et à apporter des solutions qui
puissent être acceptables pour tout le monde et qui répondent absolument à notre fonction de vigilance,
la fonction qui occupe les esprits de l'ensemble des députés qui sont réunis
ici.
Bien entendu, la pandémie a eu pour effet de
ralentir nos travaux. J'entendais mon collègue député de Jonquière souligner le
fait qu'il trouvait très intéressant qu'on puisse allouer du temps à la commission,
à ce que puisse siéger la commission. Je peux l'assurer que je sensibilise de manière régulière
notre leader parlementaire. Et je peux vous assurer aussi que notre leader parlementaire est toujours
sensible et a toujours cette question à l'esprit... présente à l'esprit,
plutôt, pour faciliter les choses et faciliter les travaux de la
Commission de l'administration publique.
J'ai
aussi découvert un fonctionnement que je n'imaginais pas, une proximité, même,
même si le mot est peut-être fort, mais c'est une proximité dans le bon sens,
avec la Vérificatrice générale, le Vérificateur général, qui apporte et joue
un rôle essentiel dans les travaux de notre
commission. Et j'apprécie toujours à la fois la précision, à la fois le
professionnalisme, mais à la fois
aussi le tact avec lequel nous présente les dossiers la Vérificatrice générale,
mais toujours dans une objectivité absolue. Donc, c'est vraiment une
relation qui est assez exceptionnelle.
Il
se développe un sentiment de confiance, finalement, entre la Vérificatrice
générale et l'ensemble des parlementaires qui siègent sur la Commission de l'administration publique. Et, sans
vouloir aucune proximité, puisqu'on sait bien que la Vérificatrice générale doit absolument demeurer
complètement indépendante, mais je pense que cette façon de travailler
que nous avons, à la Commission de l'administration publique, avec la
Vérificatrice générale est vraiment exemplaire.
Bien
entendu... Je vois que le temps file très, très vite, M. le Président. Bien
entendu, je voulais remercier l'ensemble des personnes qui travaillent autour de nous, à l'administration
publique... à la Commission de l'administration publique, plutôt. Je veux, bien entendu, parler de Dominic
Garant, qui est secrétaire de la commission, de François Gagnon et
Audrey Houle, du Service de la recherche.
• (15 h 30) •
Mais,
à mon tour, je voulais souhaiter bon vent et puis un bon succès à Julie
Paradis, qui a travaillé longuement au Service
de la recherche et qui nous a fourni un travail qui était vraiment précieux à
chaque fois qu'elle venait soumettre les rapports à notre commission. En
effet, Julie quitte le Service de la recherche pour se tourner vers de nouveaux
défis, et je tiens vraiment à lui rendre
hommage aujourd'hui et à la remercier profondément
pour son apport inestimable aux travaux de la commission.
Je
reviendrai brièvement sur le mandat de la commission,
sa raison d'être et son fonctionnement pour le bénéfice des gens qui nous
regardent si c'était encore nécessaire. Donc, contrairement aux autres commissions
permanentes, la Commission de
l'administration publique n'étudie
pas les projets de loi, mon collègue député
de Jonquière l'a précisé juste
avant moi, mais agit réellement en qualité de contrôleur. Et les répercussions de
ce rôle et aussi la manière dont les choses peuvent évoluer dans le bon sens, naturellement, lorsque
la Commission de l'administration
publique met finalement
le doigt sur une situation
qui pourrait poser problème, eh bien, vite, on le remarque, se retrouvent
ici, à la période de questions au salon
bleu, et souvent ça permet de mettre en évidence... ou, en tout cas, de tout mettre en oeuvre pour essayer de chercher des solutions
pour venir rétablir à situation.
Donc,
c'est de cette manière que je vais terminer mon propos, M. le Président. M. le Président, vous êtes généreux, vous m'accordez maintenant
un petit peu plus de temps. Donc, l'exercice de reddition de comptes dont je
vous parlais il y a quelques instants est effectué de manière
transpartisane, dans un esprit de collégialité avec des collègues,
et ce, pour le bénéfice de toutes et tous. Pour appuyer ces travaux,
nous avons, comme je le disais précédemment, le précieux soutien de la Vérificatrice
générale mais aussi le précieux
soutien de Mme la... j'oublie son nom, mais enfin, bref, l'ensemble des
personnes qui se mobilisent autour de nous.
Il
faut rester au fait des bonnes pratiques et de l'évolution de la reddition de comptes. Je sais aussi que les membres de
la Commission de l'administration
publique soulèvent depuis un bon
moment la possibilité d'étudier les comptes publics, comme ça peut se
faire ailleurs au Canada. Le comité directeur s'est penché aussi sur cette
question. On ne souhaite pas fermer la porte, bien entendu, mais on évalue
cette charge de travail qui serait ajoutée, justement, à celle, qui est déjà
lourde, de la Commission de l'administration publique. Donc, ce dossier
est en développement.
C'est
de cette manière que je vais conclure mon intervention, M. le Président. Je
vous remercie. Encore une fois, félicitations et merci à l'ensemble des
députés qui siègent sur cette Commission de l'administration publique. Merci
beaucoup.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Portneuf.
Cela met fin au débat restreint de deux heures sur le rapport de la
Commission de l'administration publique.
Avant
de céder la parole au leader adjoint du gouvernement, je tiens à rappeler que
toutes les personnes qui n'ont pas la parole doivent porter le masque.
Donc, M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui, M. le Président. Alors, j'aurais besoin du consentement pour la demande
d'appeler le débat sur le rapport de la
Commission spéciale sur l'évolution de la loi sur les soins de fin de vie qui,
afin d'analyser les enjeux reliés à
l'élargissement potentiel de l'aide médicale à mourir pour les personnes en
situation d'inaptitude ou pour celles
souffrant de troubles mentaux, a tenu des auditions publiques dans le cadre de
consultations particulières les 14, 18, 19, 20, 21, 25 et 28 mai
ainsi que les 9, 10, 11, 12, 18, 19 et 23 août 2021 derniers.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Y a-t-il consentement pour déroger
aux articles 94 et 96 du règlement prévoyant que de tels rapports de
commissions contenant des recommandations sont pris en considération dans les
15 jours suivant leur dépôt à
l'Assemblée et prévoyant que le leader du gouvernement indique l'affaire
inscrite au feuilleton qui fera l'objet d'un débat? Consentement?
Des voix :
Consentement.
Prise
en considération du rapport de la commission qui a analysé les enjeux reliés
à l'élargissement potentiel de l'aide médicale à mourir pour les personnes
en situation d'inaptitude et pour celles souffrant de troubles mentaux
Le
Vice-Président (M. Picard) : Donc, l'Assemblée prend en
considération le rapport de la Commission spéciale sur l'évolution de la loi sur les soins de fin de
vie qui, afin d'analyser les enjeux reliés à l'élargissement potentiel de
l'aide médicale à mourir pour les personnes en situation d'inaptitude et pour
celles souffrant de troubles mentaux, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières les 14,
18, 19, 20, 21, 25 et 28 mai ainsi que les 9, 10, 11, 12, 18, 19 et 23 août
2021. La commission s'est réunie à 39 reprises en séance de travail
relativement à ce mandat. Ce rapport, qui a été déposé aujourd'hui,
contient des observations et 11 recommandations.
Je vous rappelle que,
conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, la prise en
considération du rapport donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures
et qu'aucun amendement n'est recevable. Je vous rappelle également qu'en vertu
du deuxième alinéa de l'article 95 ce débat n'entraîne aucune décision de
l'Assemblée.
Conformément
à ce qui a été énoncé antérieurement par la présidence, la répartition des
temps de parole dans le cadre de ce
débat s'effectuera comme suit : 56 min 15 s sont allouées
au groupe parlementaire formant le gouvernement, 34 min 31 s sont allouées au groupe parlementaire formant
l'opposition officielle, 12 min 47 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 8 min 57 s
sont allouées au troisième groupe d'opposition, 7 min 30 s sont
allouées à l'ensemble des députés
indépendants, sous réserve d'un maximum de deux minutes par député. Dans le
cadre de ce débat, le temps non utilisé
par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera
redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies
précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront soumises à
aucune limite de temps. Enfin, je
rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours de
débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la
présidence.
Et je suis maintenant
prêt à céder la parole à Mme la députée de Roberval.
Mme Nancy Guillemette
Mme Guillemette :
Merci, M. le Président. Comme vous l'avez mentionné, c'est plusieurs heures
qu'on a eues, de discussions avec
tous les collègues. J'ai eu le privilège de pouvoir présider une commission
transpartisane. Dans la vie politique,
ça n'arrive pas souvent, donc c'est un beau privilège que j'ai eu et j'en
remercie mes collègues. Effectivement, on a déposé le rapport ce matin
en Chambre, ici. C'était un très grand privilège.
Donc, j'aimerais
prendre un moment pour saluer et remercier chaleureusement tous les collègues
qui m'ont accompagnée et m'ont soutenue dans
mon rôle de présidence tout au long de ces travaux. N'importe quelle capitaine
de bateau qui compte sur
11 lieutenants de cette trempe peut se compter chanceuse, M. le Président.
Donc, diriger les échanges et les
débats au milieu de ces collègues fut pour moi une expérience extrêmement
enrichissante et stimulante, et d'avoir pu compter sur la collaboration
de chacun et chacune d'entre elles, compte tenu de la délicatesse du sujet
abordé, ça a été déterminant dans la
conduite de mes travaux. Donc, je tiens à remercier le député de D'Arcy-McGee,
la députée de Joliette, le député de
Rosemont, la députée d'Abitibi-Ouest, la députée de Mille-Îles, le député de
Lac-Saint-Jean, la députée de Saint-François,
le député de Mégantic, la députée de Westmount—Saint-Louis, la députée de Soulanges et finalement
le député de Chomedey. Remerciements
sincères également à la députée de Maurice-Richard et au député
de Gouin, qui ont été avec nous pour la première partie des auditions.
Et
je voudrais aussi remercier tout le personnel. Et je suis certaine que tous mes
collègues de la commission vont se joindre à moi pour remercier le
personnel de l'Assemblée, qui nous a, tout au long de la commission,
accompagnés. Ce sont des acteurs qu'on ne
voit pas beaucoup, ce sont des acteurs dont on n'entend pas beaucoup parler,
mais ils sont vraiment essentiels à notre institution. Que ce soit le
secrétariat, la recherche, le Service de référencement, la révision linguistique, le graphisme ou encore les
communications, tous ont été d'une aide très précieuse pour mener à bien nos
travaux et dans l'échéancier prévu. Ce travail énorme, cette
responsabilité sans précédent auraient été impossibles sans l'équipe exemplaire
qui nous a soutenus et accompagnés durant l'ensemble de cette commission.
Des
notes, des documents, des questions, des réponses, des brouillons, des propres,
des résumés, des synthèses, des rapports,
des jugements, des lettres, des courriels, des appels, ça fait un méchant
paquet de documents, M. le Président. Aucun député n'aurait pu surmonter
l'ensemble de cette tâche titanesque à lui seul, surtout pour un sujet qui est
si délicat. Donc, je tiens à
remercier sincèrement Ann-Philippe, Félix, Mathieu et Constance. Ce sont eux
que nous voyons avec nous à chaque
rencontre. Mais, bien sûr, il y a plein d'autres gens en arrière de tout ça,
donc passez le message à vos collègues, vous quatre. Vous avez été
tellement précieux pour nous, pour rendre à bien ce mandat, pour nous faire
digérer toute l'information qui rentrait,
rendre ça dans... le langage technique, le rendre lisible dans notre rapport et
le rendre cohérent, compréhensible
pour les gens, formuler en mots clairs nos instincts, nos craintes, en fait, à
faire connaître nos conversations et nos échanges. Donc, on est venu à bout de
11 recommandations et sept observations, desquelles nous sommes tous
et toutes très fiers.
• (15 h 40) •
On
a eu à faire cette commission-là, et je crois que c'est probablement la
première dans l'histoire de notre Parlement, entièrement en visioconférence. On
a réussi à se voir cet après-midi, à la conférence de presse, à 13 heures,
tout le monde ensemble, pour la première fois. Donc, on a eu notre photo avec
tous les membres de la commission. Donc, c'est pour ça que je tiens à remercier tous les collègues, tous
les camarades. Je vais m'ennuyer de vos vieilles mains, neuves mains, nos
problèmes de branchement d'Internet. Donc, un merci sincère à vous tous.
M. le
Président, quelle épopée! Depuis neuf mois, maintenant on y est, c'est
aujourd'hui. Après un long parcours, parfois
contre vents et marées, mais toujours déterminée, j'ai déposé ce matin, au nom
de mes collègues, le rapport final de la commission spéciale sur l'évolution des lois de
fin de vie. Et je vais vous mentionner quelques données, donc : 10
recommandations applicables en
situation d'inaptitude, une recommandation applicable pour les personnes dont
le seul problème est un trouble médical
en lien avec la santé mentale, sept observations. Il y a eu 75 heures d'auditions, donc, deux
phases de consultations, 77 personnes
et organsimes entendus, 75 mémoires déposés, 3 421 réponses au
questionnaire de la consultation en ligne qu'il y avait, 2 076
commentaires transmis aux membres de la commission, et ça, c'était quelque
chose à gérer, et c'est pour ça que je tiens
vraiment à remercier le personnel qui nous a accompagnés.
On a eu 25 heures en séance de travail et en comité directeur, donc pour 39 séances de travail et 46 comités
directeurs. C'est beaucoup de travail en quelque mois. Donc, c'est un
travail colossal, en effet.
Grâce à ce
rapport, le Québec sera la première juridiction à travers le monde à
mettre en place les demandes anticipées d'aide médicale à mourir. Cela
faisait plusieurs années que nous sentions les Québécoises et les Québécois,
particulièrement ceux qui vivaient
avec des troubles neurodégénératifs, prêts à faire ce pas en avant et à élargir
l'aide médicale à mourir pour permettre
à ces personnes de quitter notre monde avec dignité au moment qu'ils jugent
opportun et entourées de leurs proches.
Vous
savez, je me suis engagée en politique pour faire avancer des causes à
caractère humain en particulier, je m'y suis
appliquée avec beaucoup d'humilité depuis mon arrivée. Mais là j'avoue
que j'ai été honorée et vraiment, vraiment
émue d'avoir été choisie pour présider cette commission avec des collègues que
je respecte beaucoup, de qui j'ai appris beaucoup durant ces neuf mois. C'est avec empathie,
respect, écoute et tout mon coeur que j'ai entrepris, que nous avons
tous entrepris ce mandat en mars 2020... 2021, excusez.
Donc,
permettez-moi de vous guider à travers le cheminement logique qui a guidé nos recommandations. Après nous être entendus sur le fait que nous allions permettre un
régime de demande d'aide anticipée à mourir, maintenant les questions difficiles commençaient : Pour qui
et comment? Donc, pour la plupart des experts et invités que nous avons
entendus, la question du diagnostic était centrale et la question de la
souffrance également. Donc, autrement
dit, pas de diagnostic précis, pas de demande d'aide médicale
anticipée. C'est pourquoi notre recommandation n° 1 suggère «l'obtention d'un diagnostic de maladie
grave et incurable menant à l'inaptitude» comme porte d'accès à la demande
anticipée. On pense ici à des maladies comme l'alzheimer, Huntington ou
à la démence à corps de Lewy, par exemple, des maladies à la progression connue, à la finalité documentée et
dont les porteurs peuvent évaluer avec lucidité le moment auquel ils pourront
considérer, à titre personnel, que les symptômes vécus créent un manque ou une
absence de dignité humaine.
Une fois la
porte ouverte, M. le Président, il fallait également s'entendre sur des balises
fermes afin que cet élargissement de l'aide médicale à mourir, un
élargissement pas banal, j'en conviens, inédit à travers le monde, se déroule
dans des conditions sécuritaires et encadrées selon des principes clairs, qu'il
respecte l'autodétermination des personnes mais aussi la protection de nos gens
les plus vulnérables. Donc, pour guider la demande anticipée d'aide médicale à mourir, nous avons convenu de s'appuyer sur le principe d'autodétermination de
la personne. Nous nous sommes donc entendus qu'il revenait à l'individu
de déterminer, à l'intérieur de ses valeurs et de ses convictions, qu'est-ce
qui constitue pour lui une vie digne. Donc,
c'est pourquoi, dans sa demande anticipée d'aide médicale à mourir, la
personne munie d'un diagnostic éligible devra décrire en détail les
conditions de vie qu'elle jugera comme ne faisant pas partie de sa conception d'une vie digne et qui, le cas échéant,
devront enclencher le processus de la demande d'aide médicale à mourir. Ces conditions de vie devront toutefois
être validées par un médecin qui s'assurera en amont, d'une part, qu'elles sont
suffisamment graves et irréversibles pour
donner accès à l'aide médicale à
mourir et en aval, d'autre part, que
le moment critique venu, les
conditions sont bel et bien remplies et que le moment du départ est arrivé, et
ceci devra être contresigné par un deuxième médecin.
Une balise
supplémentaire : un tiers de confiance sera identifié par le patient.
C'est d'ailleurs celui-ci qui identifiera au médecin que le moment serait probablement venu d'analyser la demande d'aide médicale à mourir. Ce qu'il est important de savoir, c'est que cette demande-là ne donnera
pas automatiquement accès à l'aide
médicale à mourir à la personne. Le
médecin, comme je le mentionnais tout à l'heure, va devoir valider si les
critères sont tous bien remplis et qu'ils respectent les conditions. Donc, la
décision d'enclencher le processus d'aide
médicale à mourir, M. le
Président, ne sera donc jamais faite par une seule personne.
Voilà un peu
les grands principes qui nous ont guidés dans la formulation des recommandations :
autodétermination, oui, afin de respecter la volonté des individus qui
souffrent mais également, prudence, équilibre, consensus et responsabilité,
car l'aide médicale à mourir, ce n'est pas banal. Personne ne peut exiger l'aide
médicale à mourir, l'aide médicale à mourir est un soin. Donc, je crois toutefois qu'avec ce
rapport nous avons réussi à atteindre un point d'équilibre important par rapport aux demandes anticipées d'aide médicale à mourir, et je suis très fière du travail accompli en ce
sens avec tous les collègues, au bénéfice des citoyennes et des citoyens
du Québec.
Commencer et
terminer sa semaine, pendant des mois, les lundis et les vendredis, à
8 heures, en discutant de mort, de maladie, de souffrance, ce n'est pas
une chose facile. Ce n'est pas nécessairement quelque
chose auquel nous sommes habitués, en tant que parlementaires, non plus. Tout cela a pris une bonne dose de résilience de la part de
mes collègues et de la part de moi-même. Mais cette
résilience, ce n'est rien à côté de celle de toutes ces personnes qui sont
venues s'ouvrir à nous, qui sont venues partager, qui sont venues nous
témoigner, le coeur sur la main, parfois le coeur meurtri également,
se confier sur leur vie, parfois sur leur maladie ou celle de leurs proches.
Nous avons été honorés par la présence de
toutes ces personnes en audience, M.
le Président. Et j'ai encore en mémoire
le témoignage d'un regroupement qui nous partageait...
qui nous disait : Bien, il y a une dame en résidence pour personnes... qui est
atteinte d'Alzheimer, et elle ne reconnaît plus son conjoint, mais, pour elle, elle a encore le goût de
le séduire. Donc, elle est alzheimer, elle n'est plus là, elle ne reconnaît plus son conjoint, mais elle est quand même
contente et heureuse de le voir arriver, puis elle a un petit kick, là, quand
elle le voit arriver. Donc, c'est des... Autant on a eu des moments qui étaient
touchants émotivement, autant on a eu d'autres moments où ça... en tout cas, moi, personnellement, ça me réconciliait un peu avec la situation
que les gens vivaient.
• (15 h 50) •
On
a parlé beaucoup de nos recommandations, mais on a très peu parlé des sept observations.
Donc, je vais prendre quelques
minutes, parce qu'il me reste quelques minutes, pour vous partager les
observations, parce que je pense que ce n'est pas ça qui va ressortir beaucoup dans les médias, mais il y a
des choses qui peuvent être intéressantes et importantes. Donc, la commission suggère : «Que soit [écrite] au dos de la
carte d'assurance maladie l'existence de directives médicales anticipées; que la requête pour déclencher le
traitement de la demande anticipée soit faite par écrit; qu'il soit possible de
joindre [un] vidéo complémentaire à la
demande, mais que la demande écrite ait préséance; que le médecin s'entretienne
avec le patient en ce qui concerne les avancées médicales en lien avec sa maladie; que les infirmières praticiennes spécialisées puissent administrer l'aide médicale à mourir; que le gouvernement mène une campagne de sensibilisation sur le recours possible aux directives médicales anticipées; [et] qu'un
rappel soit fait sur l'importance d'une consultation systématique
du Registre des directives médicales anticipées.»
On parle ici de directives médicales anticipées,
M. le Président, et non de demandes médicales. Les gens nous demandent... nous ont demandé, nous ont fait l'observation,
ceux qui ont un AVC, un accident subit, pourquoi on n'a pas ouvert à ces gens-là. Bien, premièrement, ce
n'était pas dans notre mandat, et ces gens-là ont accès aux directives
médicales anticipées, qui est le
refus de soins, de ne pas être gavé, de ne pas être mis sous respirateur. Mais
ces directives-là ne sont pas vraiment bien publicisées et bien connues, donc
nous, ce qu'on veut, c'est qu'elles soient connues, mieux connues pour
offrir cette opportunité-là aux gens.
Donc, on a également...
je vais vous nommer quelques gens qui sont venus témoigner. On a eu des
experts qui sont venus témoigner généreusement également, donc :
Dr Marcel Arcand, qui est médecin de famille, Dr Marcel Boisvert, médecin retraité en soins palliatifs. On a eu des
gens qui sont venus, qui, à la première mouture de Mourir dans la dignité,
n'étaient pas tellement en faveur. Et, quand ils sont venus, il y en a plusieurs
qui nous ont dit : Maintenant, j'administre l'aide médicale à mourir et je vois qu'il n'y aura pas de dérive, qu'il
n'y a pas eu de dérive. Donc, je tiens à rassurer les gens, il n'y a pas eu de dérive, et on dirait que ces
gens-là, à l'usage, à l'administrer, se rendent compte que c'est apaisant et
c'est un soin de fin de vie qui est important. Donc, Dr Félix Carrier, psychiatre,
Me Danielle Chalifoux, présidente de l'Institut de planification des soins du Québec, la Chambre
des notaires, le Collège des médecins, la Commission sur les soins de fin de vie.
La Commission sur les soins de fin de vie passe
au travers de toutes les aides médicales à mourir qui ont été administrées pour
voir si c'est dans les règles, si tout est fait correctement. Donc, il y a
7 000 aides médicales à mourir depuis
le début de... depuis que c'est légal. Donc, 30 % n'ont pas été... n'ont
pas eu droit à l'aide médicale à mourir pour différentes raisons, mais en particulier pour celle qu'ils ne
répondaient pas aux critères de l'article 26, là, de la loi sur les
soins de fin de vie.
Donc, on a eu
le Curateur public qui est venu
également nous témoigner, Me Nicole Filion, coprésidente du Groupe d'experts sur la question de l'inaptitude et
l'aide médicale à mourir, parce que, oui, il y a eu un groupe d'experts qui
avait été nommé pour faire un peu le
point, pour regarder... pour l'aide médicale à mourir et en situation
d'inaptitude, mettre des balises,
commencer un peu le travail, et on les a entendus avec un très, très grand
intérêt. On a également Dre Michèle Marchand, médecin de famille,
Me Jean-Pierre Ménard, avocat, Dr Brian Mishara, professeur de
psychologie, Dr Alain Naud, médecin de famille, Dr Félix
Pageau, interniste gériatrique. On a eu des groupes : L'Association des
groupes d'intervention en défense des droits
en santé mentale, l'association des retraités de l'éducation et des services
publics, l'Association québécoise de prévention du suicide,
l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité, le
Dr Laurent Boisvert, médecin de famille. Carpe Diem, le Centre de
ressources Alzheimer, collectif des médecins contre l'alzheimer, donc,
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. On a entendu
une panoplie de gens pour et contre. On
devait se faire une tête, je pense que ça a bien nourri nos discussions. Ça
nous a permis d'avoir des recommandations claires, des balises fermes pour la suite des choses. On souhaite qu'il
y ait suite à notre rapport, donc on va suivre ça de près également.
Avant de
conclure, M. le Président, je veux vous dire à quel point je suis fière qu'on
ait pu faire ce travail au sein d'une commission transpartisane. Encore une
fois, je le mentionne parce que c'est important, c'est important pour nous,
les parlementaires, d'avoir accès à ces commissions transpartisanes là. C'est
des questions sensibles, délicates et importantes pour nous, pour l'ensemble
des Québécoises et des Québécois, et le sujet demandait qu'on ait accès à cette
commission transpartisane là. Nous sommes
vraiment privilégiés, M. le Président, de vivre dans une société qui permet de
discuter des enjeux comme ça dans le tout respect de chacun, et ça, je tiens
vraiment à le souligner. Je rappelle que le Québec est un pionnier et un leader
en matière d'aide médicale à mourir et de soins de fin de vie, et c'est en ce
sens, également, que les recommandations ont
été prises. Merci, M. le Président. Merci, encore une fois, à tous mes
collègues.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Et je reconnais M. le député de D'Arcy-McGee.
M. David Birnbaum
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. C'est avec humilité et fierté que j'ai le privilège d'intervenir
comme vice-président de la Commission spéciale sur l'évolution de la Loi
concernant les soins de fin de vie, un honneur solennel, en quelque part. Ce n'était pas une tâche facile qui nous a
été confiée par l'Assemblée nationale de continuer sur un chemin tracé
presque uniquement par le Québec, avec notre loi actuelle.
Alors, on
avait devant nous une tâche assez solennelle. Et j'ai eu le plaisir de travailler
avec la députée de Roberval, notre
présidente, que je salue pour son efficacité, son humanité et l'intelligence
avec laquelle elle a coordonné nos opérations, ainsi que le député de Rosemont, la députée de Joliette, qui se sont
joints à notre comité directeur, ainsi que mes collègues la députée de Mille-Îles, qui a contribué son
expertise et sagesse — elle était membre de la première commission — ainsi que la députée
de Westmount—Saint-Louis,
qui a contribué largement aussi. Et je salue mes collègues du côté ministériel
aussi pour leur travail formidable. Je veux
saluer aussi la députée de Maurice-Richard, qui a été la vice-présidente dans les
premiers mois de nos délibérations.
Et je tiens à nous rappeler que notre travail
s'insère dans une réalité qui existe déjà, dont on peut être fiers,
c'est-à-dire une loi qui était un précurseur mondial, en quelque part, sur la
fin de vie et sur l'aide médicale à mourir. Et,
à ce sujet, je tiens à remercier aussi l'ancien ministre de la Santé,
maintenant député de La Pinière, ma collègue la députée de Hull, qui siégeait, qui présidait cette
première commission, l'ancien ministre et député Geoff Kelley, la députée
actuelle de Joliette, une autre fois, et tant d'autres. Finalement, il faut
vraiment remercier une équipe de recherche qui nous a épaulés de façon brillante et avec une patience et une
expertise sans limites : Mathieu Houle-Courcelles, Félix Bélanger,
Ann-Philippe Cormier ainsi que Constance Goodrich-Maclean, entre autres.
• (16 heures) •
Depuis son
entrée en vigueur en 2015, la Loi concernant les soins de fin de vie a permis à
plus de 7 000 personnes d'avoir
accès à l'aide médicale à mourir, respectant
ainsi leur volonté de mourir dans la dignité. Notre travail, en quelque
part, a été déclenché par deux exigences. Premièrement, et je crois qu'il faut
le souligner, une évolution évidente de la
population québécoise, basée sur cette loi régionale, les façons de voir cette
question qui est légalement située comme soin médical, et à juste titre, l'évolution de la façon de voir cette
question tellement difficile est évidente au Québec. Alors, c'est une
des choses qui nous a interpelés à franchir notre mandat.
Deuxième
chose, on va se rappeler d'une décision de la cour... du tribunal, qui a mis
fin à un des critères existant dans notre loi, c'est-à-dire un critère de fin
de vie. Et, bon, pour le bon ou le pire, la cour a tranché là-dessus,
ce qui nous laissait dans une zone grise. Mais je tiens à noter que
c'était d'une évidence qu'on avait du travail sérieux et solennel devant nous.
Devant ces deux questions, l'Assemblée nationale
nous a accordé un mandat avec deux questions primordiales, il y en avait d'autres, mais deux questions
primordiales, c'est-à-dire : Est-ce que l'accès à l'aide médicale à mourir
devrait être élargi aux personnes
devant un diagnostic d'une maladie neurodégénérative, comme l'alzheimer, et
est-ce que l'aide médicale à mourir devrait être accessible aux
personnes souffrant uniquement d'un trouble mental?
Et nos 11 recommandations s'adressaient à
ces deux questions, et, je tiens à noter, deux questions d'un ordre solennel, et difficile, et humain. Et, si je peux
nous féliciter, en quelque part, nous étions, collectivement, je trouve, à
chaque moment, respectueux de deux ou
trois choses qui étaient des fois conflictuelles : notre devoir de faire
des recommandations qui pouvaient être crédibles, réalistes,
responsables et légales pour le Québec dans son entier, en même temps, le genre
de questions dont on nous parle, comment on
peut faire abstraction de son implication pour moi, de 65... pour votre mère, pour votre conjoint, pour votre conjointe, pour
votre enfant atteint d'un trouble mental. Et je trouve que, de façon responsable, nous avons toujours gardé en
équilibre ces deux réalités. Et je les identifie parce qu'il faut être
conscient du fait que quand... c'est notre boulot ici chaque jour. Chaque fois
que nous avons à trancher sur des questions, on fait notre mieux collectivement dans tous nos débats musclés, mais
de travailler au nom de tous et toutes, Québécois et Québécoises. Mais,
à chaque fois, et là, ici, de façon très profonde, il y aurait eu des gens, des
individus qui seraient, en quelque part... c'est
brutal de le dire comme ça, mais un tout petit peu laissés à côté. Alors, je
crois que, chaque lundi, chaque vendredi, on se présentait à nos rencontres
avec un respect et une conscience de ce fardeau énorme. Et je me permets de
croire que, de façon très responsable et unanime, nous avons... nous
sommes arrivés aux conclusions dignes et raisonnables.
Comme je dis, il y avait ces deux grandes
questions devant nous. Dans un premier temps, la possibilité de se prévaloir
d'accès à l'aide médicale à mourir en cas d'inaptitude. Et c'est le sujet de
plusieurs de nos recommandations principales, dont la deuxième, où on
recommande que la personne qui est apte mais devant un diagnostic d'une maladie
neurodégénérative ait la possibilité, selon
des conditions à plusieurs reprises déjà identifiées dans la loi et d'autres
que nous aurions bonifiées dans nos
discussions, de rédiger une demande anticipée de l'aide médicale à mourir en
cas d'inaptitude.
Qu'on se
comprenne, deux choses très importantes, M. le Président, dans un premier
temps, on parle uniquement des personnes devant un diagnostic. Pas une question
facile, mais je trouve qu'on a la responsabilité d'être clair là-dessus avec la population qui nous écoute. Et, juste pour
le rendre très, très clair, je me donne comme exemple. J'ai mes propres
voeux, mais je comprends et je respecte qu'actuellement il n'y a aucune étape
que je pourrais prendre en termes de demande anticipée, même selon nos
recommandations, qui m'assurerait d'avoir accès à l'aide médicale à mourir advenant un diagnostic d'Alzheimer. Suite aux recommandations d'une majorité des experts, des individus qu'on
a consultés lors de nos libérations,
c'était le consensus du conseil qu'on a eu et, après nos mûres réflexions,
notre conclusion aussi. Alors, voilà une première balise, il faut, de
notre avis, être devant un diagnostic.
Là, qu'on ne fasse pas l'abstraction de tout ce
qu'il y a à faire à ce point-là. Mais, premièrement, pour défendre, si vous voulez, cette recommandation, qu'on se rappelle... Et
voilà, je touche aux critères déjà dans la loi. Si on parle d'être
devant un diagnostic d'une maladie neurodégénérative, c'est triste à dire, mais
voilà ce qui confronte les gens devant ces
diagnostics, on est dans un domaine d'incurabilité, d'irréversibilité et où
l'horizon d'une amélioration est presque nul. Alors, voilà pourquoi, en gros,
nous avons jugé, comme plusieurs nous ont invités de faire, que c'était
légitime que cette personne, avant de
devenir inapte, qu'on se comprenne, qui, dans ces cas-là, est une certitude,
ait le droit de demander l'accès médical à mourir.
Parce que, comme a bien dit la présidente de
notre commission, nous avons une double obligation, de respecter l'autonomie
des individus, mais aussi de respecter notre responsabilité comme législateur
de protéger la vulnérabilité des gens. Juste
pour vous donner un exemple possible et très triste, une famille de mauvaise
foi qui trouve ça très difficile de prendre soin de quelqu'un de leur
famille, qui trouverait des façons, à leur place, de décider, toutes sortes
d'autres circonstances où on doit assurer
que la demande soit libre et éclairée, nous avons eu une responsabilité d'être
très prudents là-dessus. Et là je
vous soumets que nous avons pris la décision de recommander un compromis, qui
est tout à fait réalisable et responsable, dernière chose à noter dans ce cas-là : il y a
l'étape, l'heure de déclenchement où... avant le déclenchement d'une
éventuelle aide médicale à mourir dans ces cas-là, il y a l'équipe médicale qui
doit valider que les conditions nécessaires sont comblées pour passer à l'acte.
Maintenant, très vite sur le deuxième gros volet, si vous voulez, qui était aussi déchirant, et
j'avais fait allusion déjà, c'est
advenant des troubles mentaux exclusifs, pas d'autre symptôme qui se manifeste. Nous avons pris la décision,
j'insiste, responsable de ne pas
recommander l'élargissement de l'aide médicale à mourir dans ces cas-là parce
qu'il y a trois questions qui sont
très difficiles à combler : Y a-t-il un élément d'incurabilité qui peut
être établi de façon très claire? Des questions se posaient beaucoup là-dessus. Est-ce qu'on est devant
l'irréversibilité? Des questions se sont posées. Et, comme je dis,
troisième question : Est-ce qu'il y a une fiabilité dans tout ce qui à
trait au diagnostic des conditions de santé mentale détériorée? Nous avons trouvé que la seule réponse responsable à offrir
était de ne pas recommander l'élargissement, mais avec ses conséquences,
qui peuvent être, dans certains cas, très tristes. Je me
permets de le dire.
• (16 h 10) •
In
the few minutes I have remaining, allow me to note my appreciation, my humble
appreciation for having had the opportunity to serve as
vice-president of this commission looking into the evolution of the existing
Act respecting end-of-life care in Québec.
First
of all, I think we should share a pride in Québec being a pioneer with respect
to end-of-life care, and that is what we were talking about. Legally, in Québec,
the notion of medical aid in dying is on the continuum, as it should be,
of care in very clearly and carefully
designated circumstances. The two major questions before us were : Should
a person confronted with the diagnosis of a neurodegenerative disease
like Alzheimer's, in front of a diagnosis, be allowed the right to indicate
their wishes to avail themselves of medical aid in dying, under very strict,
and serious, and observable conditions? And
our recommendation, balancing the right to autonomy with our responsibility to
protect the most vulnerable, our assessment was that the answer to that
question should be yes.
Second
very difficult question was : Should we recommend the widening of access
to... the possible access to medical aid in dying to those who were suffering from
severe mental difficulties and no other medical condition? And, again, this
was a very difficult, emotional,
intellectual exercise. And in all due prudence and responsibility we came to
the conclusion that we could not recommend that enlargement, for three
reasons, very quickly : one, the notion of incurability and irreversibility, two conditions already in the law, are both
difficult to establish when we're dealing with mental illness, and the ambiguity surrounding the possibility of a firm and clear
diagnosis in those questions is also not the subject of consensus. So, on that question, we came to the difficult choice that we
could not recommend enlarging the medical aid in dying.
Tout cela pour dire que c'est un travail colossal,
j'ose dire, que nous avons entrepris, et, je dirais, avec responsabilité,
j'ose dire, intelligence et compassion.
C'est pourquoi je me joins, je crois, à tous les membres de notre commission,
en espérant que la suite va être un projet de loi sur nos recommandations dans les plus brefs délais. Et, une autre fois,
je tiens à remercier tout le monde qui est venu devant nous ainsi que tous mes
collègues, qui ont fait un travail formidable. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Je cède la parole à M. le député de Rosemont. Vous disposez de 13 min 38 s.
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : Merci. Merci, M. le Président. Ce n'est pas beaucoup de temps pour parler de tant de travail qui a
été fait sur un sujet si important. Parfois, c'est plus difficile de faire
court, quand on a un gros sujet, parce que je pourrais en parler
probablement, comme mes collègues, d'ailleurs, pendant des heures et des
heures. Quand j'étais chroniqueur à l'écrit,
des fois je disais au répartiteur : Je t'ai fait un texte de
1 000 mots. Si J'avais le temps, je l'aurais coupé à 600, mais
je n'avais pas le temps. C'est plus facile
de se lancer dans des grandes discussions, malheureusement je n'ai pas ce
luxe-là aujourd'hui, mais j'ai quand même le grand, grand privilège
de pouvoir me lever ici aujourd'hui puis pouvoir parler de ce sujet extrêmement important et du travail extrêmement important qu'on a fait en Commission spéciale sur l'évolution de
la loi sur les soins de fin de vie. Voyez, j'ai même réussi à le dire sans me
reprendre puis sans avoir à le lire. Après neuf mois de travaux, j'aurais au
moins gagné ça.
C'est un grand privilège, je le dis puis je le
pense. Ça a été un grand privilège de travailler là-dessus, de réfléchir là-dessus, d'arriver avec ce rapport, dont je suis
très fier, je pense que mes collègues en sont très fiers. Je pense que tout
le monde, ici, tous les élus de l'Assemblée nationale peuvent en être fiers, avec les réserves qu'ils y
mettront, c'est correct. Et puis ça
aura une vie après, un projet de loi, je le souhaite, très rapidement, un débat, oui.
Et je souhaite aussi un débat dans la
société là-dessus. C'est d'ailleurs le débat dans la société qui nous a amenés,
ici aujourd'hui, à pondre ce rapport. C'était aussi un débat dans la société qui nous a
amenés à la première mouture de la première loi sur les soins de fin de vie.
C'est un grand privilège, M. le Président. Je le
dis parce qu'ici, dans cet édifice, à l'Assemblée nationale, et en particulier dans cette salle, le salon bleu, on
fait souvent de la politique, ce qu'on appelle la joute politique, puis c'est
correct, puis moi, j'y prends un certain plaisir, j'espère que mes collègues
aussi. Ça fait partie de ce qu'on fait ici, c'est correct. Mais parfois
on fait autre chose aussi, par exemple le travail en commission. On travaille
en commission parlementaire, on travaille
des projets de loi, j'adore ça. J'ai été à la Commission de l'administration
publique pendant les trois premières années, j'ai adoré ça aussi. J'ai adoré travailler aussi sur ce difficile défi
qui était devant nous, de proposer une modernisation de la loi sur
l'évolution des soins de fin de vie... sur la Loi concernant les soins de fin
de vie.
J'ai
l'impression que je laisse, avec mes collègues, un morceau solide, quelque
chose qui va rester puis ce sur quoi on
peut travailler pendant les prochains mois et certainement les prochaines
années. Puis je peux vous dire, M. le Président, qu'à chaque jour qui a passé, je me suis joint...
Le train était déjà en route, parce qu'il y a eu un petit changement ici, du
côté de ma formation politique, le
train était déjà en route, mais je suis arrivé quand même pas mal au début des
travaux. Puis je peux vous dire que,
depuis, chaque jour qui a passé, que je sois ici en train de travailler, que je
sois dans ma circonscription en train
de travailler, que je sois en train de faire du jogging sur les plaines
d'Abraham ou même, parfois, en train de cuisiner avec mes enfants, il n'y a pas une seule journée où je n'ai pas pensé à
ce dossier-là, parce que c'est un dossier qui est un peu obsédant. Vous comprenez que le dossier et les
questions qui étaient devant nous ne sont pas simples et ne sont pas
légères, c'est des questions qui sont fondamentales dans notre société, et je
pense, encore une fois, qu'on est arrivés à quelque chose qui se tient, quelque
chose de solide, quelque chose de cohérent, surtout, et c'est ça qui est très
important.
Je veux
d'abord remercier mes collègues, la présidente de la commission au premier
chef, la députée de Roberval, que je ne connaissais pas. Puis, en plus, à cause
de la foutue pandémie, on a perdu nos collègues de vue un peu, puis, quand on les voit, c'est à travers des plexiglas,
et il y a des collègues que je revois des fois comme ça, à l'occasion, mais
on s'est perdus un peu de vue. Puis la
présidente l'a dit, la députée de Roberval, on a fait presque... en fait, pas
presque, on a fait tous nos travaux...
peut-être une ou deux réunions du comité directeur en présence, le reste, ça
s'est tout fait devant nos écrans, ce qui était évidemment un peu impersonnel
aussi. Mais, cela dit, on a bien travaillé, puis, à un moment donné,
dans une pause, la députée de Roberval
m'avait dit... parce qu'on la complimentait pour sa façon de mener le travail
qu'elle devait mener, et je le refais
ici d'ailleurs, je la complimente et je la remercie, puis elle m'a dit :
Oui, tu sais, je gagne à être connue. C'est vrai, c'est vrai, je reconnais que
la députée de Roberval gagne à être connue. Et il y a d'autres députés, tout à
l'heure, quand on a fait la conférence de
presse, qui nous ont dit, qui m'on dit puis qui se disaient entre eux :
Ah! ça a été le fun de se voir dans un autre contexte et de travailler
ensemble. C'est vrai. Je le dis et je le pense sincèrement.
Merci aussi
au personnel de l'Assemblée nationale qui nous a permis de pondre ce rapport-là en des
temps records. La députée de Joliette, qui a plus d'expérience que moi
là-dedans, avait même des doutes sur la capacité qu'on aurait à livrer dans les temps voulus. Moi aussi, je dois
dire que je regardais le calendrier avec une certaine anxiété. Sans le
personnel extraordinairement compétent de l'Assemblée nationale, on n'y
serait pas arrivés. Puis on ne le dit pas assez souvent, ces gens-là
travaillent de façon extraordinaire et puis ils nous soutiennent tous les jours
dans le travail qu'on fait ici.
Bon, maintenant,
que dit le rapport? Essentiellement, on avait deux questions devant nous.
Devions-nous aller de l'avant avec un
élargissement pour les patients qui tombent en état d'inaptitude? Nous avons
tranché, la réponse est oui, avec, évidemment, un diagnostic. L'autre question qui était devant nous : Devrions-nous
élargir l'accès à l'aide médicale
à mourir aux gens dont le problème de santé est seul un trouble mental ou des
troubles mentaux? Là-dessus, nous n'avons pas franchi le pas, pour les raisons que je vous expliquerai et qui sont
très bien expliquées dans le rapport, d'ailleurs.
J'invite la population à le lire, le rapport. Il est digeste, il est
bien écrit. Il y a 11 recommandations, ça se tient, c'est solide.
• (16 h 20) •
Quand je dis
qu'on a ouvert ou qu'on suggère d'élargir la loi sur les soins de fin de vie
dans les cas d'inaptitude après diagnostic, quand je dis ça, et je l'ai
testé à maintes reprises, sans révéler aucun scoop, je vous promets, M. le
Président, je n'ai pas commis d'outrage au
tribunal, même pas un soir en prenant une bière avec les amis, mais, à chaque
fois que je disais ça à des gens dans
mon entourage : On va peut-être,
ou on songe à, ou on étudie la possibilité de proposer d'ouvrir la loi en cas d'inaptitude, je vous dirais que
neuf fois sur 10, si ce n'est pas 10 fois sur 10, la réponse était :
Bien oui, c'est évident! Bien non, ce
n'est pas si évident que ça, finalement, une fois qu'on se penche sur les
détails, et on sait que le diable s'y cache souvent, ce n'est pas si
évident que ça.
On a dû quand même trancher, après des heures et
des heures de débat, sur qu'est-ce qu'on entend par «accès à l'aide médicale à mourir en cas d'inaptitude»?
C'est là qu'on a, d'abord et avant tout, tranché sur la question, que ça prend
un diagnostic. Donc, ça prendra un
diagnostic pour avoir la possibilité préalablement, de façon anticipée, de
donner son consentement. Pourquoi un diagnostic? Tout simplement pour
respecter le principe d'autodétermination, puisque, si, d'une minute à l'autre,
on devient inapte, évidemment nous n'avons pas pu faire de demande anticipée,
ça va de soi. Et il y aura certainement des
débats là-dessus, mais il nous apparaissait essentiel que la personne qui signe
ce document soit en pleine possession de ses moyens à ce moment-là et
qu'elle comprenne tous les tenants et aboutissants. Autrement, il se pourrait que nous glissions vers ce qu'on ne
voulait pas, c'est-à-dire le consentement substitué. Et de ça nous avons
tranché rapidement.
Il y a des
balises, aussi, dont on parle dans le rapport et qui devront être déterminées
aussi de façon très précise dans un
éventuel projet de loi, que nous souhaitons le plus tôt possible. Pourquoi des
balises? Je vais dire une évidence ici, là : C'est parce qu'on parle de la mort, on parle tout
de même de la mort. Et jamais, jamais, jamais nous n'avons parlé de la mort ou de l'accès médical à mourir avec légèreté,
jamais. Ça a toujours été au coeur de nos délibérations, de nos travaux,
le plus grand respect pour les gens qui souhaiteraient y avoir accès, mais
aussi pour les avis contraires, et avec toujours l'idée qu'on va pondre un jour, à partir de ce rapport, un projet de loi
qui va changer le Québec, qui va nous faire avancer, certes, mais qui n'est pas un détail dans la vie
d'une législation, que de permettre à ses citoyens d'accéder à des soins vers
la mort.
Je l'ai dit, puis mes collègues vont me
reconnaître ici, il y a des statistiques, tout de même, qui nous incitent à la prudence et à la réflexion. Sachez, par
exemple, M. le Président, que, dans 15 ans, au Québec, à moins qu'on
trouve un remède avant, ce qui serait extraordinaire, mais, dans 15 ans, au
Québec, il y aura autour de 260 000 personnes atteintes d'Alzheimer, 260 000. Je n'ai même pas parlé
de la démence et d'autres maladies neurocognitives ou neurodégénératives.
Ça fait beaucoup, beaucoup, beaucoup de monde. C'est pour ça que moi, et je
pense que mes collègues partagent mon fardeau,
j'ai senti sur mes épaules tout du long une responsabilité d'arriver avec
quelque chose de solide et de respectueux, qui se tient.
Les troubles
mentaux, je l'ai dit, M. le Président, on a décidé, après analyse, après
beaucoup de travaux, beaucoup de réflexion, de ne pas suggérer l'élargissement
pour les troubles mentaux. Il y aura des débats là-dessus, j'en suis
persuadé, il y aura des débats, c'est
inévitable. Je pense assez bien résumer la position de mes collègues, en tout
cas c'est la mienne assurément, qu'à ce moment-ci, et peut-être pour toujours, je n'en sais
rien, je ne suis pas omniscient, les piliers du pont qu'on nous invitait à traverser n'étaient pas
assez solides pour se rendre l'autre bord de la rivière, puis c'est correct,
puis c'est correct. Puis, comme je le
dis souvent, en plusieurs circonstances, les fleurs ne poussent pas plus vite quand on tire dessus. Il
y a des débats dans la société.
Ils se feront. Nous en serons, puisque nous sommes les élus de la population
du Québec.
Donc, je
souhaite que le débat se poursuive. Je souhaite que le débat n'oublie pas une
autre chose fondamentale, c'est qu'on parle beaucoup d'aide
médicale à mourir, et c'est un soin, puis on veut l'offrir idéalement à une population
plus large afin d'éviter des souffrances,
afin d'éviter de perdurer des souffrances, des drames. Mais j'ai toujours
gardé en tête et je garderai toujours
en tête qu'avant l'aide médicale à
mourir ou avant mourir dans la dignité, le principal objectif que nous devrions poursuivre, ici, en tant que société,
en tant qu'élus et en tant que gouvernement, pour qui occupe les sièges du gouvernement,
c'est de vivre une vie et vivre, oui, dans la dignité plutôt que de mourir dans
l'indignité.
Je veux vous
lire, là, et je vais terminer bientôt là-dessus, parce
que je n'ai plus beaucoup
de temps, mais je veux vous lire, M. le Président, un seul paragraphe d'une très longue lettre, que j'ai reçue au tout
début de nos travaux sur les soins de
fin de vie, d'un citoyen de ma circonscription, qui est gravement malade. Je n'essaierai même pas
de dire le nom de sa maladie, mais c'est une maladie dégénérative, une
forme d'arthrite, on sait qu'il y a plusieurs formes d'arthrite. Et ça fait 20 ans qu'il souffre de ça, il a beaucoup
essayé des traitements, il a tenté toutes
sortes de choses, avec plus ou moins de succès. Et un jour il nous
a écrit une longue lettre, et il y a un paragraphe qui dit ceci :
«L'affaire, M. Marissal, c'est que je
ne veux pas mourir. Je m'y sens contraint. La chose qui me frustre le plus dans
tout ça, c'est que ça m'aura pris 19 ans pour avoir les traitements
adéquats pour mes arthrites, mais ça m'aura pris moins de deux mois pour avoir l'aide
médicale à mourir.»
Qu'on ne se
trompe pas, je suis parfaitement d'accord avec le rapport unanime qu'on remet ici. Je suis parfaitement d'accord avec l'idée d'élargir
l'aide médicale à mourir, dans les balises et dans les conditions, aux
maladies que l'on a déterminées. Mais n'oublions jamais ces gens qui
demandent aussi des soins et qui demandent de vivre.
En attendant,
je le redis, je souhaite que ce projet... que ce programme... ce rapport — je
vais finir par le dire — ce rapport donne rapidement naissance à un
projet de loi. Et je suis tellement enthousiaste que je vais d'ores et déjà
offrir ma collaboration si, quelque part en
2022, nous pouvions avoir un projet de loi là-dessus. Et je remercie encore une
fois mes collègues pour la belle expérience et le très beau travail
qu'on a fait ici. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Rosemont.
Je cède la parole à Mme la députée de Joliette. Vous disposez
de 9 min 33 s.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Merci, M. le Président. Alors, c'est
vraiment remplie de gratitude que je me présente devant vous aujourd'hui. Remplie de gratitude parce que je
saisis pleinement le privilège et la responsabilité que nous avons comme élus
de l'Assemblée
nationale quand on se penche sur des
questions aussi fondamentales, aussi sensibles, aussi complexes mais
aussi importantes pour notre société.
Je suis
remplie de gratitude parce qu'encore une fois j'ai eu la chance, avec cette
deuxième commission spéciale transpartisane sur des enjeux relatifs aux soins
de fin de vie et à l'aide médicale à
mourir, de travailler dans un
esprit réellement transpartisan, comme on
devrait le faire tellement souvent, avec des collègues extraordinaires,
complètement dédiés aux enjeux qui nous étaient soumis, où on a appris à
se connaître, avec le défi supplémentaire de ne pas pouvoir travailler dans une
salle, réunis ensemble, donc toujours avec des écrans entre nous. Mais,
rapidement, on a senti qu'on était là, d'abord
et avant tout, comme des humains représentant d'autres humains et que cela, ça
allait primer sur tout le reste. Et
ça ne s'est pas démenti pendant tous ces mois de travaux, pendant toutes ces
longues heures de débat, de réflexion, où on a retourné chaque pierre,
où on s'est posé toutes les questions qui devaient être posées.
Et je suis
emplie de gratitude parce que je pense qu'aujourd'hui on a réussi, avec
l'équipe formidable de collègues et l'équipe qui nous soutenait, extrêmement
compétente aussi dans ces travaux-là, à arriver à des propositions qui sont
vraiment en phase avec l'évolution de la
société, mais qui sont surtout en phase avec le sens profond que l'on veut
donner au respect de la personne, au
respect de son autonomie, au respect de sa dignité tout autant qu'à
l'importance de tout faire pour protéger, dans notre société, les
personnes vulnérables.
Et je suis
vraiment reconnaissante, parce que je pense qu'avec toutes nos heures de dur
labeur et de travail intense... Les délais étaient courts, c'est bon de
le rappeler, on a commencé ça véritablement au printemps, et le tout est fait, débattu, déposé devant vous dans un magnifique
format, dans ce rapport-là, que j'invite tout le monde à lire, avec, je pense,
les bonnes recommandations.
• (16 h 30) •
Alors, c'était complexe, Mme la Présidente.
Je veux parler, d'entrée de jeu, de la question pour laquelle nous demandons... nous recommandons une ouverture,
celle de la demande anticipée d'aide
médicale à mourir en prévision d'une
inaptitude pour des personnes qui peuvent être atteintes de maladies
dégénératives neurocognitives comme, on va tous y penser, la maladie
d'Alzheimer.
Pour moi,
c'est central, un, de s'être donné ce mandat-là ensemble de travailler à cet
enjeu-là. Pourquoi? Parce que je suis
convaincue profondément, comme je l'étais lorsqu'on a fait les autres travaux,
que ce sont des questions qui relèvent d'abord et avant tout de l'Assemblée
nationale, du pouvoir législatif, des élus et non des tribunaux. Les tribunaux,
dans ces enjeux-là, devraient être un lieu
de dernier ressort. Mais nous, on a la responsabilité de travailler au nom de
nos concitoyens et concitoyennes
quand ils nous amènent des enjeux, pour se poser les questions, offrir le forum
le plus sain qui soit pour les tenir correctement, pas juste à coups de plaidoiries interposées ou
de sorties dans les journaux interposées, mais vraiment dans un forum serein, sain, où on est capables de
regarder tous les aspects de chacun des enjeux. Donc, je pense que la
manière de le faire importe énormément.
Et
pourquoi c'était si important de le faire? C'est que les gens nous interpellent
partout. Vous l'avez senti, Mme la
Présidente, tout le monde au Québec a une préoccupation sur cet enjeu-là. Mon
collègue de Rosemont le disait, tout le monde dit tout le temps : Bien
oui, il faudrait faire ça. Moi, j'ai la chance, depuis quelques années, compte
tenu de la loi sur les soins de fin
de vie, de parler souvent du dossier, de donner des conférences. C'est
incroyable, c'est inévitable, c'est toujours
le premier sujet qui arrive en période de questions, parce qu'il y a tellement
de gens qui accompagnent des gens qui ont une maladie dégénérative comme
l'alzheimer, qui ont perdu toutes leurs facultés, toutes leurs aptitudes, et
qui savent très bien que, quand la
personne était encore apte, ce qu'elle anticipait de pire, c'est de vivre
certaines étapes de complète dépendance, de complète souffrance, de
complète dégénérescence, et donc cette espèce d'impuissance qui est ressentie par les proches mais aussi par la personne au
premier stade de la maladie, qui voit quel est l'avenir qui se trace devant
elle, qui ne veut pas prendre une
décision hâtive et qui veut pouvoir jouir de la vie le plus possible, tant
qu'elle a encore ses facultés, mais
en ayant, si possible, la paix d'esprit de savoir que, si le pire doit survenir
et si ses pires angoisses et ses pires souffrances
se concrétisent, dans les stades très avancés de la maladie... que cette espèce
de sortie de secours va exister. Bien, moi, aujourd'hui,
je suis très fière qu'on dise à ces personnes-là puis qu'on dise aux personnes
qui les entourent, que, oui, la sortie
de secours, on veut qu'elle puisse exister, parce que ce n'est pas vrai qu'une société
aussi humaine et avancée que la société québécoise peut se contenter de laisser des gens qui se trouvent dans ces situations-là
souffrir pendant des semaines, des mois, parfois des années, sans aucune
issue, et dont, on le sait, la mort est inévitable.
Alors,
c'est sûr qu'il y avait énormément
de questions complexes qui se posaient. Et tantôt, c'était intéressant parce
que toutes les questions les plus complexes... Les journalistes ont bien senti
la complexité de ces enjeux-là. Ils nous les ont posées, ces questions, et c'était assez drôle de leur dire : Oui,
oui, on y a pensé, on a réfléchi quelques journées, quelques semaines
sur ces enjeux-là. Puis ces questions-là, elles sont réelles. Est-ce que la
personne, alors qu'elle est au premier stade
de la maladie et toujours apte, est-ce qu'elle va être la même personne, avec
les mêmes besoins et les mêmes volontés, que la personne qui a perdu son
aptitude, et qui peut-être vit relativement bien dans sa nouvelle vie? Est-elle
la même personne? Ses souffrances... Est-ce qu'on doit s'arrêter aux
souffrances anticipées uniquement ou aux souffrances contemporaines? Est-ce que les circonstances qui sont émises froidement
par une personne qui a toutes ses capacités doivent être intégralement
respectées ou s'il faut les jumeler avec le respect des critères actuels de la
loi?
Donc,
c'étaient des questions extrêmement complexes, et je pense qu'on est arrivés
vraiment au bon équilibre. Et cet équilibre-là, c'est vraiment l'équilibre
entre l'autonomie et l'autodétermination de la personne, qui a le droit de
demander à l'avance, dans une demande
anticipée, l'aide médicale à mourir, si certaines manifestations de sa maladie
se produisaient, en nommant un tiers
de confiance qui va être responsable d'agiter le drapeau, pas de consentir pour
elle, pas de se mettre à sa
place — le
consentement substitué, on a mis ça de côté — juste pour dire : Moi, ma mère, moi,
mon conjoint, moi, mon ami a demandé ça, je lève le drapeau parce que je veux
être sûr qu'il y a quelqu'un qui considère la demande, parce que je pense qu'on est peut-être rendus dans les
manifestations de la maladie qu'elle avait prévues. Mais il n'aura pas droit...
il n'y a pas de droit d'exiger l'aide médicale à mourir, comme c'est le cas,
d'ailleurs, à l'heure actuelle, vous le savez, Mme la Présidente.
Donc,
à partir du moment où on lève le drapeau, bien là, l'équipe médicale embarque et elle va évaluer est-ce que, un, c'est conforme à ce qui
était indiqué dans la demande anticipée mais, surtout, est-ce que
c'est conforme à l'ensemble
des critères qui sont maintenus, maladie grave et incurable, évidemment, déclin
avancé et irréversible des capacités et souffrance
constante, inapaisable, dans des circonstances jugées tolérables. Et je pense
que oui. Quand on regarde tout ça, on arrive au bon équilibre.
Et
j'ai rappelé aujourd'hui qu'il y a une experte, que je relisais hier soir, qui
nous a donné le cas où une personne, par
exemple, aurait dit tout simplement : Moi, vous savez, si je ne reconnais
plus mes proches, ça va être la catastrophe, et je voudrais avoir l'aide médicale
à mourir. Mais cette personne-là, rendue à ce moment-là, elle ne le
reconnaissait plus, son mari, mais
elle trouvait donc que c'était la plus belle personne qui existait au monde, et
à chaque jour elle voulait le séduire et
le reconquérir. Donc, on peut s'imaginer que, dans un cas comme celui-là, la
souffrance n'est pas présente, même si on avait pu anticiper autrement.Mais, par ailleurs, pour toutes ces
personnes qui sont dans des états de souffrance intolérable, dans des états grabataires, dans des états où la
vie n'a plus de sens, je pense qu'aujourd'hui on fait une avancée significative, et on la fait
de manière extrêmement balisée, ce qui fait que ça va être une vraie
avancée pour l'ensemble de la société québécoise. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Joliette. Et maintenant je
reconnais Mme la députée de Soulanges.
Mme Marilyne Picard
Mme
Picard : Merci, Mme la
Présidente. D'entrée de jeu, permettez-moi de saluer chaleureusement les collègues
avec qui nous avons traversé ce beau mandat. Tout d'abord, notre dévouée
présidente, la députée de Roberval, qui a toujours été au poste et qui a très bien mené les travaux,
la députée d'Abitibi-Ouest, la
députée de Saint-François, le député de Mégantic et le député de
Lac-Saint-Jean, merci, chers collègues, pour nos discussions parfois animées
mais toujours franches, parfois corsées mais toujours cordiales, ce fut
un plaisir de siéger à vos côtés sur cette commission spéciale; également les collègues des oppositions, en
commençant par le vice-président M. le député D'Arcy-McGee, la députée de
Westmount—Saint-Louis, la députée de Mille-Îles, le député
de Rosemont, la députée de Joliette, le député de Chomedey ainsi que la députée de Maurice-Richard et le député de Gouin, qui ont malheureusement dû nous quitter en cours
de route.
La
Commission spéciale sur l'évolution de la Loi concernant les soins de fin de
vie traitait d'un sujet vraiment délicat. Mais nos échanges ont toujours été riches, l'écoute toujours au
rendez-vous. Du débat sont nés des consensus importants au bénéfice des citoyens et des citoyennes du
Québec. Et je crois que nous avons tous et toutes sortis de ce mandat la tête
haute et fiers du travail accompli et, surtout, un travail transpartisan.
Je me suis
sentie particulièrement privilégiée de pouvoir participer à cette commission si
importante pour tous les Québécois.
Mon expérience personnelle avec la maladie, la fragilité de la vie, la mort a
très bien certainement contribué aux échanges tant avec les milieux et entre
nous, les membres. Nous avons passé presque tout l'été en virtuel à rencontrer
des groupes et des professionnelles en
consultations particulières. Cela m'a beaucoup ébranlée. Je m'apercevais qu'à
chaque intervenant, je modifiais ma
vision personnelle de cet enjeu. J'avais ensuite hâte de rencontrer les membres
de la commission pour en débattre
avec eux, voir leur point de vue. Lorsque nous avions des échanges sur le
consentement substitué ou encore sur
l'encadrement qui pourrait être
nécessaire aux proches aidants, j'apportais mon point de vue, mon point de vue
de mère, mon point de vue de partenaire du milieu.
Mme la
Présidente, recommandation par recommandation, nous avons scruté chaque mot
afin qu'il reflète notre vision. La recommandation n° 1 a suscité des heures et des heures de
réflexion. Je la lis : «La commission recommande qu'une personne majeure et apte puisse faire une
demande anticipée d'aide médicale à mourir à la suite de l'obtention d'un
diagnostic de maladie grave et incurable menant à l'inaptitude.»
• (16 h 40) •
D'accord.
D'où vient cette recommandation? Quelles ont été certaines de nos réflexions?
Une «personne majeure et apte», donc
un enfant de 17 ans et 11 mois n'y aurait pas accès, alors qu'à son
anniversaire, un mois plus tard, il y aurait accès. Et encore, une personne majeure et apte, donc un adulte ayant une
déficience intellectuelle légère y aurait peut-être accès, alors qu'un adulte avec une déficience intellectuelle
moyenne, peut-être pas. Et un autre exemple, le mot «diagnostic», dans
cette recommandation. Devait-on cibler des diagnostics précis? Si nous le
faisions, cela pourrait limiter ce soin à quelques
personnes. Et les mots «maladie incurable menant à l'inaptitude»... Qu'est-ce
qu'une maladie incurable? Une maladie peut-elle
être réellement incurable, avec les progrès constants de la science et de la
médecine? Comme vous le voyez, ce sont des très grandes discussions
profondes qui nous ont tous animés.
Mme la
Présidente, la toute dernière recommandation, qui semble si banale lorsqu'on la
lit, la voici : «La commission recommande
de ne pas élargir l'accès à l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul
problème médical est un trouble mental;
qu'à cet effet, l'article 26 de la Loi concernant les soins de fin de vie
soit modifié.» Cette recommandation, vous devinerez, a suscité de nombreux débats. Personnellement, je n'ai pas
été convaincue, à la suite des consultations particulières, qu'une
maladie mentale pourrait être jugée incurable.
Mais ce qui est venu le plus me chercher, dans
tous ces travaux, c'est probablement que plusieurs nous ont dit qu'il y avait une pression autour des gens en fin
de vie, et ils se sentent un fardeau. Plusieurs veulent mettre fin à leurs
jours pour alléger leurs proches. Je
tiens à rappeler qu'une demande d'aide médicale à mourir fait partie d'un
processus rigoureux par l'équipe médicale et que l'article 29 de la
loi indique que le médecin doit s'assurer que la demande d'aide médicale à mourir ne résulte pas de pressions extérieures
et que le demandeur doit nécessairement répondre à tous les critères, dont un
des plus importants, la souffrance, souffrance physique, souffrance
psychologique, y compris existentielle, constante, insupportable et
validée, surtout, par le médecin.
Mme la
Présidente, je me suis aperçu qu'il y a une possibilité offerte actuellement dans le réseau que peu de gens connaissent, les directives médicales anticipées.
Il est possible, en ce moment, d'aller sur le site clicSEQUR ou de trouver
sur Internet le formulaire de directives médicales anticipées. C'est gratuit et
disponible pour tous. Une personne peut spécifier
ses dernières volontés, soit de refuser les traitements ou de ne pas vouloir
demeurer dans un état comateux. Il y a aussi le mandat d'inaptitude
rédigé par un notaire qui peut être possible pour certaines personnes.
Dans tous les cas, Mme la Présidente, nous
devons continuer, en tant que société, de tout faire en notre possible si une
personne désire vouloir continuer de vivre et nous devons l'aider à soulager
ses souffrances via l'aide médicale à mourir si elle le souhaite. Il est très important
de respecter le choix de cette personne. De vouloir choisir son dernier soin
est en soi le dernier choix dont nous disposons, et je suis fière d'être dans
une société qui permet ce choix.
En conclusion, Mme la Présidente, permettez-moi
de remercier toutes ces personnes qui, vivant des situations extrêmement
difficiles sur le plan individuel ou familial, ont trouvé le courage de venir
raconter leurs histoires et leurs expériences
devant les membres de la commission. Que ce soit en auditions ou encore sous forme de
mémoire, de lettre, de correspondance, de commentaire, ce sont des
milliers de témoignages que nous avons reçus à la commission. Vivre avec la maladie, ce n'est déjà pas
facile. De venir s'ouvrir et se raconter devant des inconnus, devant des
dizaines, voire des centaines de
personnes, c'est encore une tout autre paire de manches. Je salue leur courage.
Nous avons accueilli à la commission des gens de tous horizons, des gens
d'une force intérieure incroyable, des gens qui, peu importe le contenu de leurs témoignages, nous ont tous beaucoup appris sur notre propre relation à la vie
et, par le fait même, à la mort. Nous ressortons tous et toutes grandis
de cette commission, et je suis très fière d'en faire partie. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, Mme la députée de Soulanges. Et maintenant je reconnais Mme
la députée de Mille-Îles.
Mme Francine Charbonneau
Mme
Charbonneau : Merci, Mme
la Présidente. Je vous avoue que
c'est un moment un peu émotif. Je vous explique. Cette commission est arrivée dans ma vie en 2009, et je suis
arrivée en politique le 8 décembre 2008. Donc, aujourd'hui, Mme la Présidente, je suis peu égoïste en le faisant, mais je souligne
mes 13 ans de vie politique. Je ne les souligne pas n'importe comment,
je les souligne avec une commission qui m'a amenée à comprendre encore plus le
rôle que nous avons à jouer en politique.
Mon collègue de Rosemont le disait, il y a la joute politique, il y a la vie, il y a la complicité, et il y a l'avancement de la société. Et je vais
commencer parce que... je vais commencer par le début en faisant les
remerciements d'usage, puisqu'il le faut.
Vous
savez, Mme la Présidente, en ce moment, et depuis deux ans, on vit un contexte
tout à fait particulier. On parle de
mort, mais pas nécessairement parce qu'on a le goût d'en parler. On reçoit des
téléphones d'inquiétude de gens qui
parlent de leurs parents, pas nécessairement parce qu'on a le goût d'en parler
mais parce qu'il faut en parler. Et dans cette vie politique active et un peu
folle, il y a eu cette parenthèse, cette parenthèse où, nonobstant le chapeau
qu'on a sous quelle forme de gouvernement ou de parti nous sommes, on
s'assoit ensemble et on discute.
Puis
je suis heureuse que ce soit vous qui soyez sur le trône aujourd'hui parce que
vous avez été des premiers débats. 2009,
on a commencé à tourner, à parler, à aller partout au Québec, parce que, dans
ce temps-là, on le pouvait, on ne se parlait
pas de masques puis on s'assoyait une à côté de l'autre. Et on a fait le tour du Québec
pour entendre la première fois où on a parlé du droit de demander l'aide
médicale à mourir. Mme la Présidente, je vous rappelle, avec sourire, que ce n'était pas facile. Vous, comme la députée de Joliette, on a fait ça ensemble et on
a fait... on s'est assuré qu'à tous les soirs on pouvait se quitter avec un
petit sourire, avec un souvenir drôle parce que c'est lourd, parce que c'est
dur puis parce que si vous pensez que
parler politique, d'argent puis de religion, c'est toffe, bien, parler de sa
propre mort ou la mort de quelqu'un d'autre, ce l'est tout autant. Ça
n'a pas été simple, mais on a appris et on a grandi.
Puis,
en 2012, presque le jour de mes 50 ans,
on a déposé le premier rapport, un
pas de géant, je vous le dis, là, j'en
ai encore des frissons, un pas de géant parce qu'on se donnait le droit
d'entendre les gens sur cette volonté
qu'ils avaient de dire :
J'aimerais choisir, j'ai une maladie, je ne vais pas guérir, je ne vais pas
être mieux la semaine prochaine, je m'en vais de pire en pire, pendant que je le
sais, pendant que j'ai mon diagnostic — parce que c'était clair que c'était vers ça qu'on s'en allait, on ne pouvait pas choisir comme ça n'importe comment — j'aimerais ça avoir le choix. Et l'Assemblée nationale du Québec, au mois
de mars 2012, a dit : Oui, on fait ce pas.
Je
ne veux pas vous dire combien de fois j'ai entendu le mot «dérive», combien de
fois on a échangé avec différentes personnes
qui nous ont dit : Attention à la dérive, attention, ça va
arriver, il va arriver des moments où ça
va être difficile. Mais je vous avoue, Mme la Présidente, que les
gens à qui on a confié ce mandat d'écouter les patients, de les accompagner
puis de faire en sorte qu'il n'y en ait pas, de dérive, ont tenu la porte serrée. Et, à
ce jour, on ne peut pas dire qu'il y
en a eu. Même au contraire, on peut
dire qu'il y a des gens qui nous ont écrit pour dire : Je veux y avoir
droit, j'aimerais ça y avoir droit,
faites une place pour mon droit puis mon autodétermination. Et, à chaque fois,
on est revenus avec la même discipline en disant : Non, non, non, ça ne se
fera pas sans un diagnostic, sans un accompagnement et sans être sûr que ce qu'on
fait, c'est la bonne décision. Bien,
10 ans plus tard, mesdames et messieurs assis dans cette Chambre avec moi,
encore un grand pas, encore une avancée, mais toujours avec la fine ligne de
prudence entre l'autodétermination, la possibilité d'avoir accès et ne pas arriver à la
dérive.
• (16 h 50) •
Et
je vous le dis, Mme la Présidente... puis vous le savez, je vous parle comme si
vous étiez une amie, mais vous en
êtes une, et, de ce fait, c'est difficile, pour moi, en ce moment, de vous vouvoyez puis dire «Mme
la Présidente» tout le
temps, j'aimerais beaucoup
plus dire : Tu sais, Maryse, ça n'a pas été plus facile. Ça n'a pas été
plus facile parce que chacun d'entre nous, mes collègues
ici, en face de moi, mes collègues ici, de ce côté-ci, on avait toutes nos forces
et toutes nos contradictions, mais
aussi toute notre volonté. Puis je vous le dis, Mme la Présidente, il y en a
eu, de la volonté, à tous les lundis
matin, à 8 heures, à tous les vendredis matin, à 8 heures. Puis ce
n'est pas parce qu'on était toujours devant une caméra chacun chez nous que c'était plus facile, puis de se dire :
Bien, je n'écouterai pas. Non, on était tous suspendus aux lèvres de chacun d'entre nous pour voir comment je
peux faire un pas de plus, comment je peux mieux comprendre, comment je peux mieux m'adapter à ce que ma collègue
dit. Et chacun d'entre nous avait une réalité puis une expérience de vie, de
gens qui avaient accompagné, de gens qui
avaient des gens encore chez eux qui avaient besoin de soutien, à des citoyens
qu'on avait entendus. Nous avons eu des échanges difficiles, et mes collègues
l'ont tous dit, puis je pense qu'on va tous le dire, mais tellement
respectueux. Et, à chaque fois, les petites avancées se font.
Mme la Présidente, je vous avoue aussi que notre présidente nous a menés de main de
maître : sensibilité, respect. Des
fois, elle me trouvait un peu tannante. Mais, à chaque fois que je vais la
voir, je vais lui rappeler que j'aurai
toujours une vieille main pour elle,
toujours, puisque vous savez, Mme la Présidente, on lève la main sur
l'ordinateur et, quelquefois, elle nous redonnait la parole puis on disait :
Non, non, vieille main. Ça voulait dire qu'on avait juste oublié de
baisser notre main. Et c'est rendu maintenant notre petite complicité de dire
«vieille main».
Mme
la Présidente, après 13 ans de vie politique, quand quelqu'un me demande :
Ça vaut-u la peine pour tous les sacrifices qui se font? Je dirais
qu'aujourd'hui oui. Pour vous, à votre premier mandat, si jamais vous avez
l'opportunité d'avoir une commission
transpartisane, allez-y. C'est difficile parce qu'il faut oublier, là, que la
veille ou l'après-midi il s'est passé
des trucs, on s'est brassé un peu. On n'est pas tout à fait d'accord puis on se
plante un peu dans nos affaires, mais la
volonté de vouloir avancer ensemble, la volonté de tourner chaque pierre pour
être sûr que chacune d'elles nous rappelle le chemin qu'on a à faire
fait toute la différence.
Je
garde mes derniers mots pour les gens qui sont venus nous témoigner, pas les spécialistes,
parce qu'ils ont été exceptionnels. Ils ont été exceptionnels, mais ils le sont
à chaque fois. À chaque fois qu'on invite des gens, ils sont toujours
exceptionnels puisque c'est dans leur métier, c'est dans leur façon de faire
qu'ils nous donnent leur approche puis leurs recommandations.
Mais ma collègue de Joliette le disait, les gens qui vivent la maladie, les
gens qui accompagnent les gens qui
vivent la maladie, puis je vais rajouter les gens qui ont peur de la maladie...
Vous le savez, Mme la Présidente, quand on accompagne un parent, quand
on accompagne quelqu'un, la crainte qu'on a, c'est toujours la génétique qui
nous accompagne avec ça. Puis il y a des
gens qui sont venus nous dire : Je n'ai pas le goût de ça. Je n'ai pas le
goût de ça. Mais on a gardé notre prudence sur comment bien faire les
choses.
Puis j'ai un collègue, si
je me souviens bien, c'est mon collègue de Rosemont, ça va sûrement le faire
sourire, il disait : Il ne faut pas signer un document pour la
coquetterie. Il ne faut pas faire en sorte que, parce que je commence à avoir un peu d'incontinence, je pourrais signer
un document. La volonté n'était pas là. La volonté, c'était de faire en sorte que ce qu'on donnait comme recommandation pour un
projet de loi solide était une recommandation qui était applicable, sans dérive, juste et qui respectait
l'autodétermination de chacun. Il est simple de dire que, quand on parle de sa
mort, la seule question, c'est :
Toi, tu veux-tu être enterré on tu veux être incinéré? Mais ce n'est pas la
seule question. Il y en a beaucoup plus que ça. Et on a eu le plaisir de
partager ces discussions-là ensemble.
Mme la Présidente, c'est avec beaucoup de fierté
que je me suis jointe à ce groupe. J'ai été accueillie avec beaucoup... de façon très chaleureuse. J'ai fait
au moins le trois quarts de la commission avec les gens. Je suis heureuse de vous dire que, ce rapport, j'espère qu'il sera lu,
qu'il sera jugé et qu'il fera en sorte que, dans 10 ans, qui sait, je me
lèverai peut-être en Chambre pour dire que je suis heureuse de
participer au troisième rapport qui sera déposé. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Mille-Îles. Et maintenant je
cède la parole à M. le député de Mégantic.
M. François Jacques
M. Jacques : Merci, Mme la
Présidente. Tout d'abord, je tiens à exprimer toute ma gratitude aux collègues
de l'Assemblée nationale qui nous ont permis à tous de pouvoir participer à
cette commission spéciale sur les soins de fin de vie. Il s'agit d'un sujet
délicat, qu'il a fallu évaluer de façon rationnelle tout en n'oubliant pas
l'élément humain qui devait rester autour de
toute cette grande démarche. Je crois que, malgré nos positions personnelles
parfois divergentes, on a eu des
grandes discussions, des discussions animées. Tout le monde ensemble, nous
sommes arrivés à un consensus qui, selon moi, contribuera grandement,
dans le cadre législatif de l'aide médicale à mourir.
Vous savez,
Mme la Présidente, au-delà des députés que nous étions lors de la commission,
je pense que chaque personne s'est
présentée là humainement, avec un devoir à faire à chaque séance qu'on avait.
On a eu à faire les audiences de tous les 88 groupes qui sont venus nous
partager leurs recommandations. On a eu à travailler ensuite sur les
recommandations et les observations, sur le rapport, autant sur la
pochette que sur tout ce qui s'est retrouvé dans le rapport. Et on avait une belle fraternité, on se tutoyait, tous et
chacun, lors de toutes ces rencontres-là, et, pour moi, ça a été une proximité
qu'on a réussi à développer tout le
monde ensemble malgré le fait qu'on était d'origines... de partis différents.
Mais je crois que l'orientation de la
commission des soins de fin de vie était très importante pour l'ensemble des
collègues, là, qui étaient là.
Donc, je
remercie... j'aurais aimé ça vous nommer par vos noms aujourd'hui, je sais que
ça ne le permet pas ici, puis, bien,
je vais me retenir. Parce que je pense qu'on a eu de beaux échanges. Je remercie
quand même, là, tout le monde, Mme la
Présidente, le comité directeur, la recherche, la bibliothèque, tous les gens
qui ont participé, là, à nos travaux puis qui ont été en soutien avec tout
le monde, avec nous.
Donc, pour ma part, une notion m'a suivi tout au
long de cette grande réflexion et de mon travail à titre de commissaire, c'est tout le principe de l'autodétermination. On a eu beaucoup de discussions, avec certains collègues un peu plus que d'autres, mais je peux vous
dire que, pour moi, c'est important que les gens puissent choisir de quelle
façon la fin va arriver, la fin de vie va
arriver. Vous savez, les soins de fin
de vie, une demande médicale de soins
de vie, c'est une décision
personnelle, c'est un choix personnel. Les gens ne... Il n'y a
personne qui peut être forcé à faire une demande de soins de vie. Donc, dans mon passé, dans ma vie familiale, ma femme
est décédée du cancer, et jamais, jamais, au grand jamais elle n'aurait accepté
de prendre l'aide médicale à mourir. Donc, c'est un choix, puis on en a bien parlé
longuement dans toute cette grande discussion là, puis il faut que ça
reste comme ça aussi. Je ne pense pas que les Québécois voudraient autre chose que ça. Donc, je demeure fermement convaincu que
le choix doit, en toutes circonstances, demeurer celui de la seule personne véritablement concernée, c'est-à-dire le patient. Je
crois que la compassion et la décence la plus élémentaire nous implorent de respecter les voeux de la personne
souffrante. Ces personnes sont souvent déjà dépossédées de leurs capacités physiques, de leur autonomie,
d'une partie de ce qu'ils sont. Il m'apparaît tout à fait inapproprié de les
déposséder du choix qu'ils ont de finir leurs jours selon les modalités qu'ils
souhaitent.
Cependant, il ne faut pas oublier et passer sous
silence une autre facette de ce débat, et elle m'interpelle tout particulièrement : ceux qui restent derrière les personnes qui vont
recourir à l'aide médicale à mourir, ceux qui accompagnent les personnes mourantes dans la souffrance et qui,
même s'ils peuvent voir la fin de celle-ci comme une forme de délivrance,
sont ceux qui vivront pour se poser la question : Ce choix était-il le
bon? Aurait-on pu faire autrement dans d'autres circonstances?
• (17 heures) •
Accompagner
une personne dans la mort est une expérience marquante qui peut être
profondément douloureuse. Elle peut
venir avec son lot de culpabilité et de doute. C'est pourquoi
l'aide médicale à mourir doit être un processus qui ne se termine pas
abruptement par la mort de la personne souffrante. Les vivants, eux, souffrent
aussi, et cette souffrance, bien que de nature différente, ne doit pas
être minimisée ou invisibilisée dans la démarche.
Je crois que
c'est dans cet esprit que nous avons délibéré afin de produire notre rapport.
Il apparaît clair aux membres de la commission que le respect du principe
d'autodétermination doit être au coeur de toute réforme législative du
droit d'obtenir l'aide médicale à mourir, y compris lorsque la demande est
formulée de façon anticipée.
Cependant, il nous apparaît impératif de
préciser que ce droit doit être balisé et que celui-ci doit répondre d'une définition précise des situations dans lesquelles
il s'applique. Dans un souci de respect des valeurs humanistes qui animent
la société québécoise, il est primordial que le recours à l'aide médicale à
mourir ne soit pas banalisé et présenté comme une solution comme une autre. Il s'agit d'une
décision grave qui doit être abordée avec tout le sérieux et le respect qui est
recommandé.
Je crois que c'est uniquement de cette façon que
nous pourrons assurer la dignité des personnes et du processus. Nous ne devrons jamais oublier, en tant que
législateurs, que chaque vie est unique, que chacune des situations mérite
d'être évaluée et contextualisée aussi.
Nous devons avoir le souci de trouver un équilibre entre le droit de décider de
son destin et un cadre légal qui
assurera la protection des personnes vulnérables, quelle que soit leur
décision, des plus ultimes. Donc, valider
notre conception de mourir dignement, sans coercition, sans obligation et
surtout sans subir la pression de devoir se conformer à un souhait précédemment exprimé. Donc, Mme la Présidente,
la notion de liberté est inséparable de celle de la dignité. Merci, Mme
la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Mégantic. Et maintenant
je cède la parole à Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Jennifer Maccarone
Mme
Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. À mon tour de partager un peu la réflexion en ce qui concerne notre
Commission spéciale sur l'évolution de la
Loi concernant les soins de fin de vie. Je vous ai tous entendus. Vous êtes
tous très éloquents et éloquentes. Vous m'avez beaucoup inspirée. Je pensais
de dire autre chose, puis là, évidemment, ça fait du bien que je n'avais rien
d'écrit parce que je veux juste parler dret de mon coeur.
Un, premièrement, c'était tout un honneur et un privilège d'assister... que, pour moi, a
été une première commission spéciale et aussi un privilège de siéger avec tous
mes collègues de toutes les formations politiques ici, à l'Assemblée nationale,
d'une façon transpartisane, avec beaucoup de
respect, avec des échanges qui ont pris, je pense, beaucoup de courage, avec
de la transparence, avec beaucoup
d'humilité, avec beaucoup de caution, avec des gens que j'ai appris à apprécier
beaucoup.
Et je partage
aussi les sentiments de mes collègues en disant que j'ai vraiment hâte à mieux
vous connaître. Puis c'est vrai,
c'était la première fois, aujourd'hui, qu'on était réunis ensemble, en
personne. On a passé au-dessus de 200 heures en virtuel ensemble. Alors, personnellement ça m'a
vraiment fait du bien de vous voir ensemble. Et, si ce n'était pas COVID,
je vous aurais vraiment tous embrassés, parce que j'ai beaucoup appris avec
vous, grâce à vous.
Un privilège
de siéger dans cette commission, Mme la Présidente, parce que c'est toute une
grande responsabilité quand on parle
de ce qui est peut-être le plus cher. C'est le plus cher, c'est ce que nous
avons, c'est le plus précieux, c'est nos
vies. Ça fait que, quand on parle de la mort, bien, dans le fond, il faut
parler de la vie et qu'est-ce qu'on souhaite pendant que nous sommes ici
en train de vivre.
Alors, j'ai
pris cette responsabilité vraiment à coeur. J'ai apprécié chaque moment de nos
débats et de nos discussions. Puis,
malgré que je veux que la population soit sensible à l'effet que, oui, c'est
unanime, mais nous avons eu des débats. Nous avons eu vraiment beaucoup de débats, puis c'est vrai ce qu'elle a
dit, la députée de Joliette, les journalistes nous ont posé des
questions aujourd'hui que, nous aussi, nous avons posées entre nous. Et on a
joué à l'avocat du diable, on a vraiment
posé des questions difficiles, parce qu'on a vraiment pris cette responsabilité
à coeur, parce que c'est très important.
Je veux remercier les experts, les spécialistes.
Ma collègue de Mille-Îles l'a mentionné, puis oui, c'est sûr, ils viennent avec cette expertise, mais j'ai beaucoup
appris avec eux puis je pense que les gens... je sais que c'est beaucoup de
temps, mais les gens qui veulent en apprendre de plus devront aller lire les
mémoires qu'ils ont partagés avec nous, parce que ça a vraiment nourri notre réflexion en termes de membres de la
commission. Ça fait que je veux remercier les experts, les spécialistes, les chercheurs, la communauté
médicale, la communauté légale et évidemment, surtout, les citoyens, les gens qui sont en train de vivre des situations en ce qui concerne les
soins de fin de vie et l'accès a l'aide médicale à mourir, parce que ça, ça prend énormément de courage, de
venir témoigner et de partager qu'est-ce qui se passe dans leur vie
personnelle.
Je pense
qu'on était tous honorés d'entendre ces histoires. C'était très émotif comme
commission. On a ri ensemble, on a
pleuré ensemble, on a appris ensemble. Puis avant tout, nous sommes tous des
élus, mais avant tout nous sommes des humains, puis je pense aussi, c'est
important que la population en prenne conscience de ça. On vient avec un bagage
politique, on vient avec notre formation
politique. Oui, on a des débats ici, au salon bleu, oui, nous avons des débats
en commission parlementaire, mais avant tout nous sommes des humains et
nous vous... ont entendu. On a pris le temps, vraiment,
de travailler en concertation pour s'assurer que vos droits seront respectés et
vos voix seront entendues. Puis ça, c'est quelque chose que, pour moi,
était très important.
Oui, on a
déposé des recommandations puis on espère qu'il y aura une prochaine étape en
ce qui concerne le dépôt d'un projet
de loi pour poursuivre les travaux, parce que ce n'est que le début d'un
processus, ce que nous avons fait ensemble. C'était huit mois de
travaux, Mme la Présidente, vraiment, puis 11 recommandations unanimes. Ça
aussi, ce n'est pas n'importe quoi. Puis,
comme mes collègues, je dois remercier notre présidente qui... nous avons tenu
avec une main forte mais aussi avec
beaucoup de compassion, puis pas facile de faire ça tout en mode virtuel, ainsi
que tous les autres collègues qui ont mené une réflexion qui était très
profonde.
Je pense qu'on a eu beaucoup de questions des
gens qui disaient : Bien, allez-vous statuer sur x, y, z? C'était compliqué comme commission de s'assurer qu'on
reste à l'intérieur de notre champ d'expertise et de... les deux questions dont
nous avons eues à poser puis à avoir une réflexion, puis ça, c'était vraiment
est-ce qu'on pensait qu'on était pour faire
les recommandations en ce qui concerne l'élargissement de l'accès de l'aide
médicale à mourir à des personnes en situation d'inaptitude et les
personnes où le seul problème médical, c'est un trouble mental.
C'était très
difficile, je pense, d'avoir des débats, parce que c'est un débat de société,
mais je suis heureuse de voir qu'encore une fois nous sommes allés
au-delà de la mort pour parler de la vie puis de respecter qu'est-ce que les
gens, ils voulaient comme vie quand ils sont rendus, vraiment, à des soins de
fin de vie. Puis je reflète aussi ce qui a été dit auparavant, que l'aide médicale à mourir, c'est un
soin, ce n'est pas un droit. Alors, c'est très important de prendre ça en
considération.
Alors, il y
avait vraiment une ligne très mince entre l'autodétermination et la protection
des personnes en situation de
vulnérabilité ou des personnes vulnérables. Je pense que moi, évidemment,
Mme la Présidente, je vais parler de la cause des personnes handicapées, les personnes autistes.
Je pense que c'est très important parce qu'ils ont fait partie de nos débats.
Nous avons discuté de leur situation en particulier, et je vais citer le
chercheur Martin Caouette parce que je pense que lui, il l'a dit
vraiment justement : «Les personnes qui ont une déficience intellectuelle
devraient avoir la possibilité d'accès à l'aide médicale à mourir, mais la
raison pour y accéder ne devrait jamais être la déficience intellectuelle.»
• (17 h 10) •
Le respect de
tous les Québécois et Québécoises, peu importe leur situation, s'ils peuvent
consentir, s'ils peuvent être déterminés aptes, c'est ça que nous avons fait.
Nous avons travaillé d'une façon pour s'assurer qu'il n'y aura pas de discrimination. On a vraiment vidé la question en
ce qui concerne les personnes qui sont en situation de handicap ou les personnes qui souffrent du spectre de l'autisme.
Puis c'était, je pense, des débats qui ont été très difficiles, parce qu'on a
dû aussi faire le débat en ce qui concerne les personnes qui souffrent
d'une maladie cognitive neurodégénérative comme l'alzheimer. Alors, je suis très contente pour ces personnes et ces
familles. S'ils souhaitent placer une demande anticipée, ça fait partie de nos recommandations, Mme la Présidente. Ils vont pouvoir faire ceci pour eux et pour
leur famille, pour s'assurer qu'eux, ils sont en contrôle de leur
destin. C'est ça, l'autodétermination.
Avec le très
peu de temps qui me reste, je veux parler des personnes qui souffrent
uniquement d'un trouble de santé mentale.
C'est tellement complexe, tellement complexe, Mme la Présidente, mais comme
mon collègue de D'Arcy-McGee
l'avait mentionné, les aspects d'incurabilité, les aspects de... le déclin
irréversible puis le manque de... l'absence de consensus dans la communauté médicale, des personnes qui sont venues
témoigner, à l'intérieur de ce que nous avons entendu de la consultation en ligne, puis ce n'est pas
n'importe quoi. Mme la Présidente, «just an aside», presque
3 500 personnes ont répondu à notre questionnaire en ligne et
on a reçu au-dessus de 2 000 commentaires.
Je sais que
ce n'est pas facile, surtout pour les personnes
qui souffrent d'un problème de santé mentale, parce que c'est une
souffrance. C'est une souffrance, puis on y reconnaît. Puis ce n'est
pas une question de jugement, mais c'est une question
que nous pensons, parce qu'il y a un
manque de consensus, qu'il faut aller à une autre étape pour faire le débat sur
cette question. Il faut aller au-delà de la commission que nous avons eue
ensemble pour s'assurer qu'on protège vraiment les personnes qui peuvent se retrouver en situation de vulnérabilité,
parce que c'était vraiment un débat que nous avons eu. Je ne sais pas
combien d'heures nous avons passées là-dessus, parce qu'on avait vraiment une
sensibilité à ceci.
So, it really was a privilege for me to
participate in this commission on the evolution of the existing act pertaining
to end-of-life care. And, if I had more time, I would have loved to explain
everything also in English for those of you that are
following. Please, take the time to read the work that was done.
Merci aux équipes qui ont travaillé tellement fort
pour produire ce rapport, les équipes de soutien, les équipes de la bibliothèque. Merci beaucoup. Sans vous, on
n'aurait pas pu se rendre aujourd'hui où nous sommes pour faire le débat en
ce qui concerne le dépôt du rapport. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Et maintenant je cède
la parle à M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Éric Girard
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci,
Mme la Présidente. Alors, permettez-moi de saluer les membres de la
commission, mes collègues ici présents, mes collègues en face de moi, merci de
rester afin de nous écouter. Mme la Présidente,
je veux remercier aussi la présidente de la commission d'avoir mené, aussi,
cette commission d'une main de maître, en virtuel aussi, qui était quand
même un grand défi, et de toujours avoir su être à l'écoute des membres de la commission, et vraiment, elle a fait ça d'une
façon très digne. Merci aussi à tous les intervenants, bien entendu, les
groupes qui ont participé aux consultations, toutes ces personnes d'horizons
très variés. On parle de professionnels de la santé, d'éthiciens, de philosophes, de spécialistes en
droit, mais surtout aussi de personnes qui ont connu des expériences à propos
de ce sujet.
Ça a été
aussi un grand privilège pour moi de pouvoir participer à cette commission
spéciale et d'avoir pu contribuer, avec mes collègues, à ce mandat dans un
environnement de respect et d'humilité. Et je tiens à remercier aussi
tout le personnel qui a travaillé avec nous,
parce qu'ils ont réussi à mettre toutes nos réflexions sur un document, un
document qui est très facile à lire et à comprendre. Donc, c'était très
important, parce que c'est ça qui va nous rester, en fait, aussi de cette
commission-là pour avoir des références et se référer à ça aussi, avec ce qui
s'en vient.
On sait qu'en
décembre 2009, bien, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité une motion
créant la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité, et
nous voilà plus de 10 ans... c'est à notre tour d'aborder la
question de l'aide médicale à mourir, et je vais pouvoir dire que nous avons
réussi avec succès le mandat de cette commission, notamment grâce à une
conciliation entre les députés de tous les partis. On l'a dit, je le redis,
c'est très important de le mentionner, ce consensus et cette conciliation que
nous avons eus. Donc, c'était important de le souligner.
Et on a traité aussi ce sujet avec toute la
rigueur et tout le coeur qu'il commande. Donc, nous avons eu une grande réflexion, et l'essentiel de notre débat
concernait la possibilité pour une personne de formuler une demande anticipée
d'aide médicale à mourir alors qu'elle était encore apte à le faire, et c'était
l'enjeu principal, et c'est ce qui est ressorti de la recommandation numéro un. Nous avons passé beaucoup de temps sur
cet enjeu, parce que c'était là le départ de tout le reste de la
commission et c'était aussi le mandat de cette commission.
Bien entendu, c'est un
sujet qui a soulevé plusieurs questions philosophiques, notamment sur la vie,
sur la souffrance et sur la dignité autant des personnes malades que de leurs
proches. On avait aussi la question du patient, l'autodétermination, mais on
avait aussi le souci des proches, des gens qui vivent aussi ces situations-là.
Donc, c'était important de penser à ces
personnes-là et aussi de penser aux personnes seules, qui ont aussi à vivre ces
situations. On sait que la majorité des experts s'entendent pour dire que les
troubles, aussi, neurocognitifs peuvent entraîner une perte de dignité pour les personnes qui en souffrent. Donc,
l'appréhension de cette fin de vie peut également leur causer une grande
souffrance. Ils savent d'avance que leur condition de vie va se dégrader,
qu'ils vont perdre plusieurs de leurs capacités. Donc, on a donc parlé de respecter la dignité de la personne malade en
lui donnant un soin et, bien entendu, l'autodétermination.
Je me souviens des personnes qui ont participé
aussi à nos consultations, et je me souviens, entre autres, d'une personne qui
était atteinte d'une forme précoce de la maladie d'Alzheimer, et je suis
convaincu que mes collègues s'en souviennent
aussi. Je me souviens aussi de bien d'autres personnes qui ont passé avec
différentes expériences de vie et je dois avouer qu'en écoutant ces
gens-là qui ont passé devant nous, eh bien, ça m'a appris encore beaucoup de
choses sur la vie. En entendant toutes ces
personnes, on reconnaît qu'il faut donner une importance à un choix à la
personne malade sur comment elle
souhaite passer sa fin de vie. On doit prioriser sa volonté sur ce qui
constitue une fin de vie digne. C'est une question qui est subjective. C'est quelque chose qui, selon un grand nombre de personnes, revient aussi aux croyances et aux
valeurs propres à chacun.
Nous ne
devons pas juger du bien-fondé de ces convictions, mais bien nous interroger sur
les responsabilités de notre société envers ces personnes
qui souffrent de la détérioration de leur état de santé. Ce qu'on a
déterminé, c'est que la dignité des personnes
doit passer par l'écoute de leurs besoins à l'intérieur, bien entendu,
d'un cadre prévu par la Loi concernant les
soins de fin de vie. Donc, tout comme mes collègues l'ont mentionné,
un processus, mais bien encadré, avec des balises pour éviter aussi les dérives, c'était
un devoir pour nous.
On s'est
entendu aussi pour dire qu'il était noble de permettre à des personnes dont
l'état de santé ira en s'aggravant et dont les facultés déclineront
inévitablement d'éviter de souffrir inutilement. On parle, bien entendu, ici de
souffrance physique, mais aussi de
souffrance psychologique. On a eu beaucoup de discussions au niveau des
souffrances. On a eu des réflexions
et beaucoup aussi d'interrogations au niveau de la question... tout ce qui
tourne autour de la question de la souffrance.
• (17 h 20) •
On a, bien entendu, fait des recommandations.
Tout à l'heure, auparavant, mes collègues en ont fait état, donc je ne reviendrai pas là-dessus. Mais il faut bien
comprendre que, dans tout ça, la personne qui fait la demande anticipée se
voit aussi avoir un droit de soins aussi. Ce qui est important, c'était un soin
aussi dans cette perspective-là.
Donc, vous
savez, Mme la Présidente, notre société chemine. Donc, le temps était venu pour nous d'avoir une
réflexion là-dessus, et c'était un des pas importants qui vise aussi à
ajuster nos lois aux valeurs québécoises qui évoluent. Et la consultation en ligne de cet été en témoigne, et
le principe de mourir dans la dignité obtient l'approbation d'un large pan de
notre société. Donc, ça témoigne de l'ouverture d'esprit de nos
citoyens qui font preuve... et qu'on doit reproduire dans nos fonctions parlementaires aussi pour bien
représenter la population. Je crois que nous avons agi au bénéfice de
notre population tout au long de cette commission et je suis fier d'avoir été
un membre et un acteur.
Donc, encore
merci aux spécialistes, aux professionnels de la santé, mais aussi aux citoyens
qui nous ont partagé leur expérience dans le cadre de cette commission.
C'est ce qui a été essentiel pour élaborer notre rapport. Ce rapport,
selon moi, représente parfaitement le
cheminement que nous avons parcouru au cours des derniers mois. Et c'est une
très belle représentation du travail que nous avons effectué, j'en suis fier.
Et nous avons été très loin, nous avons été au fond des choses, et on devait le faire, ça a été mentionné à plusieurs reprises,
le patient était l'élément principal, la famille, les proches et les
personnes seules aussi, tout ça en étroite collaboration avec des
professionnels et des spécialistes de la santé.
Donc, encore
une fois, merci. Merci. Ce fut un privilège pour moi de pouvoir participer à
cette commission qui était une des commissions extrêmement, extrêmement
importante pour notre société. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Lac-Saint-Jean. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée
d'Abitibi-Ouest.
Mme Suzanne Blais
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Mme la Présidente, chers collègues, la
responsabilité qui nous a été impartie dans le cadre de la commission spéciale de l'évolution concernant les soins de
vie est extrêmement importante. En tant que législateurs, nous avons l'habitude
de travailler afin d'encadrer légalement la vie des Québécoises et des
Québécois, de travailler à élaborer des
politiques qui auront pour finalité d'améliorer leur quotidien. Cependant, il
est plus rare que nous ayons à légiférer sur la façon dont ils vivront
leurs derniers moments.
Ce fut un
mandat à la fois émotif et complexe, un mandat où se sont croisés empathie et
éthique, droit et compassion, philosophie
et politique. En ce sens, je tiens à remercier l'ensemble de mes collègues de
la commission pour leur participation active
et constructive qui m'a souvent permis de voir certaines problématiques sous un
autre jour. Nos échanges ont été
hautement enrichissants, et j'en garderai un excellent souvenir.
Je tiens aussi à remercier tous les experts et
les spécialistes que nous avons entendus lors des consultations, mais surtout
je tiens à remercier ceux qui sont venus partager des témoignages et qui nous
ont permis de comprendre comment ils ont
vécu la mort de leurs proches, comment cette expérience profondément marquante les a transformés. Il est primordial de trouver l'équilibre entre
l'analyse rationnelle et le caractère profondément émotif et humain de la
question des soins de fin de vie.
La
participation à cette commission a été une expérience qui m'a profondément
bouleversée. Ayant travaillé dans le réseau de la santé pendant de nombreuses
années, j'ai souvent été témoin de la souffrance, de la maladie et même de la
mort. J'ai eu le privilège d'accompagner, pendant 13 ans, des patients
confrontés à un diagnostic irréversible.
Même en la côtoyant de façon régulière, nous
sommes appelés instinctivement à nous questionner sur la nature de la souffrance, sur le sens à donner à la
condition humaine, mais, sur ces enjeux, même les aspects plus pratiques sont
difficiles à trancher. Comment qualifier et
quantifier la souffrance? Comment évaluer la souffrance psychologique? Est-elle
plus difficile à supporter que la souffrance physique?
Savez-vous, Mme la Présidente, ça m'a pris huit ans, huit ans à apprivoiser le phénomène de la mort,
huit ans à prendre le temps de
discuter avec les patients et leurs proches, à prendre le temps d'élaborer des
plans de soins adéquats qui respectent leurs volontés. Et, dans ces
nombreuses discussions, une constance se dégageait. Il y avait toujours la même
inquiétude devant la souffrance. Alors,
cette question se pose : Est-ce que la volonté de choisir soi-même le
moment de sa mort marque réellement un désir de fin de vie ou
l'expression d'une profonde détresse devant la souffrance?
Comment choisir le moment approprié de son
départ? Dans quelles conditions? Quel doit être l'équilibre entre l'autonomie
et la dignité du choix personnel et la valeur sacrée de la vie humaine? Qui
sommes-nous pour juger de ce processus? Ce
sont ces questions qui nous ont habités pendant de nombreuses semaines. Je sais
que, pour ma part, la réflexion continuera encore longtemps.
Et aujourd'hui, même après toute cette expérience humaine, le grand départ, même si je
l'aborde de façon plus posée et
sereine, garde encore tout son mystère, tout son aspect solennel, l'ultime
inconnu qui nous a fait réaliser que le vacarme de l'existence prend son
sens dans le silence de la finitude, le silence pour toujours.
Puis il y a ceux qui restent derrière, ceux dont
la voix toujours vibrante fera vivre l'être aimé pendant quelques années encore, au coeur de leurs souvenirs. Et,
devant l'apaisement de la souffrance enfin échappée, il y a parfois un sourire
triste et des larmes qui s'entremêlent. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée d'Abitibi-Ouest. Et maintenant je reconnais Mme la députée de Saint-François.
Mme
Hébert : Merci, Mme
la Présidente. Combien qu'il me reste de temps?
• (17 h 30) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Un peu plus de 10 minutes.
Mme Geneviève Hébert
Mme
Hébert : Parfait. Merci. Donc, c'est avec beaucoup
d'humilité que je me lève la dernière en cette Chambre pour prendre la parole
sur le débat du rapport de la Commission
spéciale sur l'évolution de la Loi concernant les soins de fin de vie,
un rapport, donc, je pense que tout le monde a dit qu'il était très fier.
Vous savez, Mme la Présidente, être plongée pendant neuf mois, des dizaines d'heures par semaine,
dans un sujet aussi sérieux et aussi
déterminant pour des milliers de Québécois, bien, ça vient avec son lot d'émotions,
des émotions parfois posititives,
comme lorsque les 11 membres de la commission parvenaient à s'entendre de
manière consensuelle sur le libellé d'une recommandation, au bénéfice
des citoyennes et des citoyens du Québec.
Ce sentiment partagé d'avoir réussi entre
nous à faire une différence positive dans la vie des gens, de toutes ces
personnes qui comptaient sur la commission pour leur venir en aide, bien, je vous dirais que ça a créé en moi un certain
apaisement puis une satisfaction de la mission que nous avions.
Des émotions
parfois difficiles, comme lorsque nous sortions ébranlés d'un témoignage particulièrement touchant, particulièrement bouleversant. D'entendre des personnes se sachant
parfois condamnées venir s'adresser à nous avec une voix forte, déterminée, le regard lucide puis
passionné. Sentir toute la pression qui vient avec le rôle qui était le nôtre,
se sentir parfois bien petit dans nos chaussures devant la dimension de
la tâche et des décisions qui nous étaient confiées. Mme la Présidente, on parlait
de vie, on parlait d'espoir, on parlait de peur, on parlait de craintes, de
perception aussi face à la mort, mais on parlait de mort et de
désespoir.
Vous savez, Mme la Présidente, le rôle qui était le nôtre était parfois déchirant. C'était garni de
dilemmes intérieurs puis, je vais utiliser le mot qui est fort, là, mais
cornéliens, car, bien que nous cherchions tous et toutes à remplir nos
fonctions de la manière la plus objective
et neutre possible, malgré tout, bien, on vient avec notre propre bagage
de vie, nos valeurs, nos convictions, nos
expériences, toutes ces choses qui déterminent la façon dont on voit la vie
puis dont on voit également la mort.
Ces valeurs,
ces convictions, ces expériences puis je dirais même, dans mon cas, ces croyances
qui sont les miennes, bien, elles ont été confrontées pendant la commission. Ce
n'était pas toujours facile, mais, avec humilité devant la tâche que commandait... de se mettre en mode écoute,
d'ouvrir ses oreilles, bien évidemment, mais surtout d'ouvrir son coeur à l'autre, d'ouvrir son coeur à la souffrance,
d'ouvrir son coeur à l'espoir comme au désespoir, d'ouvrir son coeur à ces
personnes qui, elles, ont pris tout leur
courage à deux mains pour venir nous ouvrir leur coeur, à nous, ces personnes
qui sont venues nous dire : Je vais mourir, et aidez-moi à mourir
dignement, c'est confrontant. Ce ne fut pas facile, Mme la Présidente, pour une personne qui, comme moi, est
plutôt réticente à l'aide médicale à mourir. D'accepter d'élargir aux personnes
atteintes d'une maladie dégénérative et de manière anticipée, bien, c'est un
grand pas que j'ai eu à franchir, puis c'est un acte d'humilité et
d'ouverture que j'ai fait.
C'est
pourquoi je suis particulièrement fière d'avoir contribué à ma façon à ce que la
procédure qui sera mise en place soit la plus humaine et responsable
possible. Il était très important pour moi que la personne qui soit chargée d'accompagner et
d'exécuter la volonté de la personne demanderesse, qu'on appelle le tiers de
confiance, bien, soit bien au courant
du rôle qui lui est imparti puis qu'aucune décision ne soit prise à la légère.
La décision, c'était le choix du demandeur, mais le tiers de confiance, bien, ça l'implique. Alors, il devait savoir
à quoi il était engagé. Donc, il ne fallait pas risquer
l'incompréhension ou encore un désistement lorsqu'il y a un... moment critique
de la décision fatale arrive. Être la personne
qui déclenche, au nom de son proche, le processus d'aide médicale à mourir, bien, ce n'est pas banal. Puis personne ne doit être appelé à jouer ce rôle décisif sans
bien comprendre tous les tenants et aboutissants de cette responsabilité qui était... qui est sans précédent. Ce n'est pas arriver
encore. Mme la Présidente, quand on signe un contrat, on le lit. C'est
important. Donc, c'est un engagement que la personne prend. Je trouvais
important qu'elle puisse mettre la signature.
Donc,
c'est pourquoi que je suis fière puis en confiance de la recommandation 8a que je vais vous lire :
«La Commission recommande que la
personne désigne sur le formulaire un tiers de confiance chargé de faire
connaître sa demande anticipée d'aide
médicale à mourir et de réclamer en son nom le traitement de la demande au
moment opportun; que le tiers de confiance consente par écrit au rôle
qui lui est attribué.»
Donc, elle
vient confirmer, par la signature du tiers de confiance, que celui-ci, bien, il
ne sera pas laissé dans le flou quant à la demande anticipée de son
proche puis toutes les étapes qu'il aura à suivre au moment décisif.
Donc, Mme la
Présidente, en conclusion, bien, j'aimerais prendre un moment pour remercier et
saluer les collègues avec qui j'ai
participé à cette commission. Il faut dire, Mme la Présidente, cette commission
spéciale, bien, c'était ma toute première.
Vous savez, moi, je suis whip adjointe. Je suis un officier souvent au salon
bleu. On se côtoie souvent, on se voit régulièrement,
mais ce n'est pas un rôle que j'ai à jouer dans les commissions parlementaires.
Donc, bien qu'au commencement des
consultations particulières, bien, j'étais un brin nerveuse, hein, je vous
l'avoue, donc, je remercie mes collègues
pour leur appui indéfectible. Franchement, j'ai des collègues qui m'ont rendu
cette expérience-là très enrichissante et qui va rester marquante dans
ma vie.
Puis j'ai un
merci spécial tout d'abord à ma collègue de Roberval, notre présidente, qui a
fait un travail remarquable. Tout le
monde l'a mentionné, mais moi, je vais y mettre ma petite touche personnelle.
Durant cette commission, elle a fait naviguer
le bateau, là, puis à travers des eaux qui étaient, je dirais, tumultueuses à
quelques occasions. Puis notre présidente, bien, elle n'a jamais hésité à décrocher le téléphone pour m'écouter,
pour me rassurer. Je le dis personnellement parce que c'était ma première commission, puis je vous ai
dit aussi mes opinions personnelles. Donc, on allait discuter avec moi de la
direction que prenait à commission puis on a eu de beaux échanges. Puis je la
remercie grandement pour ça.
Ensuite, bien, il y a mes collègues, hein, de Soulanges,
Abitibi-Ouest, Mégantic, Lac-Saint-Jean. C'est un plaisir et un honneur de siéger à vos
côtés. Puis les expériences de vie que vous nous avez partagées avec nous
durant cette commission, bien, ça a
été déterminant dans la suite de nos travaux. Vous avez teinté nos travaux par
vos expériences, puis je suis très reconnaissante.
Il y a aussi
les collègues des oppositions, les députés de D'Arcy-McGee, Maurice-Richard, Mille-Îles, Westmount—Saint-Louis, Rosemont, Gouin, Joliette et Chomedey. Je vous le dis, c'est un privilège que j'ai eu
d'apprendre à vous connaître. J'ai
une devise, hein, qui est Connaître, Aimer et Servir. Donc, je pense que
plus on apprend à connaître l'autre,
bien, j'ai appris à vous apprécier encore plus, parce que j'ai vu l'humain dans
chacun de vous, et j'ai le goût encore plus de collaborer avec vous.
Alors, cette
commission fut un excellent exemple de transpartisanerie, Mme la Présidente,
avec des échanges riches, des
perspectives multiples, des débats sains, toujours menés dans l'idée de
rechercher le bien commun autour duquel tous les citoyens et les
citoyennes pourraient se rassembler.
Au final, je
vous dirais que chaque personne a dû mettre un peu d'eau dans son vin, ça,
c'est... je pense que c'est une expression québécoise, mais on est arrivés avec
un rapport final duquel nous sommes tous, je pense que tout le monde l'a
mentionné, très fiers, et je suis certaine, et ce, au bénéfice de tous les
Québécois et les Québécoises. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Alors, cela met fin au débat sur le rapport de la Commission
spéciale sur l'évolution de la loi sur les soins de fin de vie.
Pour connaître la suite, je vais maintenant
céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article 8 du
feuilleton.
Projet de loi n° 15
Adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : À l'article 8 du
feuilleton, M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux propose l'adoption du principe du projet
de loi n° 15, Loi
modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives. Alors, M. le ministre délégué à la
Santé et aux Services sociaux, la parole est à vous.
M. Lionel Carmant
M. Carmant :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est avec beaucoup de fierté que je prends
la parole comme ministre parrain de ce projet de loi visant à réformer
en profondeur la Loi sur la protection de la jeunesse.
Je vais vous
faire une confidence, Mme la Présidente, lors de mon discours d'ouverture, il y
a presque trois ans, jour pour jour,
je remerciais le premier ministre de me confier le mandat de faire du Québec un
État qui offre à tous les enfants la possibilité de réaliser leur plein
potentiel. J'avais l'occasion unique d'implanter le programme Agir tôt, un programme qui permet de
faire de la prévention et de la détection pour les retards de développement chez nos tout-petits qui
présentent des difficultés d'apprentissage et ainsi intervenir le plus tôt
possible dans leur milieu de vie. Cet objectif avait été au coeur de mes recherches et de ma carrière
en neuropédiatrie, et je me disais que ce projet allait définir mon engagement politique.
Mais, quand
je suis arrivé, Mme la Présidente, à mon bureau de ministre, j'avais deux dossiers sur mon bureau qui me trottaient dans la tête sans arrêt, celui de
deux enfants de la DPJ qui avaient eu une fin tragique. Les recommandations
de la CDPDJ
n'avaient toujours pas été appliquées, et, devant ces deux dossiers, j'ai
décidé d'appeler une réunion de toutes les DPJ du Québec, en janvier,
pour leur parler de cette situation. Et alors elles m'ont exprimé le désir
d'avoir plus d'encadrement pour les
intervenantes, les jeunes intervenantes de la DPJ qui prenaient en charge ces
enfants-là. Et c'est ce qu'on a fait. Mais, malgré tout, j'ai quand même
demandé un deuxième avis à M. André Lebon, qui a été le futur vice-président de la commission pour les jeunes et
la protection de la jeunesse, qui... pour lui demander qu'est-ce qu'on pouvait
faire de plus à ce moment-là.
• (17 h 40) •
Malheureusement,
Mme la Présidente, moins de trois mois plus tard est survenue la tragédie de
Granby, un drame qui a ébranlé le
Québec, qui nous a tous chamboulés, moi aussi, profondément. C'est alors que le
premier ministre a mis sur pied la
Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse.
Et, en entendant ces témoignages, en prenant connaissance et conscience
de cet univers qu'est la protection de la jeunesse, la nécessité de réformer en
profondeur cette loi, adoptée il y a plus de
40 ans, s'imposait plus que jamais à mes yeux. J'ai compris que cette
étape allait vraiment marquer mon
passage en politique, Mme la Présidente. Il y avait eu un avant-Granby, il y
aura un après-Granby.
Il y a six
mois à peine, le gouvernement recevait le fruit du travail colossal réalisé par
cette commission spéciale mise sur pied en mai 2019. Régine Laurent et
tous les commissaires nous ont remis un impressionnant rapport, qui contient quelque 65 recommandations et plus de
250 pistes d'action. Et, à ce moment-ci, je tiens à remercier
Mme Laurent, tous les commissaires,
tous ceux qui ont travaillé, toutes les intervenantes qui sont allées parler à
la commission et qui nous ont permis
d'avancer autant qu'on a pu le faire dans ce rapport. Nous nous étions engagés
à ne pas le tabletter, Mme la Présidente. Avec le projet de loi n° 15, nous tenons parole. Dire que les
attentes à l'égard du rapport Laurent
étaient très élevées et que le projet de loi était attendu avec
impatience relève de l'euphémisme.
Au cours des
derniers mois, nous avons travaillé sans relâche, avec les équipes du
ministère, à formuler des propositions législatives qui soient à la
hauteur des espoirs qu'a fait naître le rapport. Et, à en juger par les
premières réactions depuis le dépôt du projet de loi n° 15, j'ai le sentiment que nous allons aller dans
la bonne direction, celle souhaitée par une grande majorité des
citoyens.
Vous me
permettrez ici de citer le Dr Julien, qui, dans une lettre ouverte publiée
en fin de semaine dernière, soulignait : «"Mettre l'enfant au
coeur des décisions", selon la commission Laurent. "Affirmer
l'intérêt primordial de l'enfant et le
respect de ses droits qui seront [des] éléments à considérer dans toute prise
de décisions", selon le nouveau projet
de loi sur la protection de la jeunesse.
[...]Nous applaudissons le gouvernement, qui semble déterminé à poursuivre dans
la voie du changement profond.»
De son côté,
l'ex-président du groupe de travail sur Un Québec fou de ses enfants,
M. Camil Bouchard, a écrit : «Ce jour restera marqué dans ma mémoire comme un point de bascule essentiel
vers une meilleure protection de nos enfants les plus vulnérables. [...]Nous passons, avec cette réforme, d'une loi qui
au fil des années était devenue une loi de la protection des liens
familiaux de l'enfant à une véritable loi de la protection des enfants.»
Depuis mon
arrivée en politique, Mme la Présidente, j'ai bien compris l'importance
que revêt l'intention du législateur quand
on étudie un projet de loi, et je tiens à être sans équivoque à cet effet :
l'intérêt de l'enfant est primordial et doit être la considération première
dans toute décision le concernant lorsqu'il s'agit d'interpréter et de poser
une décision dans la Loi sur la
protection de la jeunesse. Nous nous donnons désormais les moyens requis pour
que cette considération primordiale devienne une condition sine qua non.
Déjà dans le
préambule, on vient affirmer plusieurs considérants en ce qui a trait aux
droits des enfants et à l'intérêt de
l'enfant, qui doit être le principal facteur dans la prise de décision. Un peu
plus loin, au chapitre II, les articles 3 et 4, on vient clarifier une confusion qui avait pour effet
d'induire un biais en faveur du maintien dans la famille. On y comprenait
que l'intérêt de l'enfant était la
considération principale, mais qu'il fallait néanmoins tendre vers un retour de
l'enfant dans la famille.
Aujourd'hui, on vient dire que c'est important, la famille, mais seulement si
c'est dans l'intérêt primordial de l'enfant.
Par conséquent, le retrait de cette notion de «tendre vers», ça vient vraiment
clarifier les choses, Mme la Présidente.
Il est
révolu, le temps où un enfant devait payer le prix d'une mauvaise
interprétation de la loi ou souffrir d'une situation dans laquelle il n'a aucun contrôle. Parfois, il
arrive qu'un enfant soit mieux de rester en famille d'accueil plutôt que d'être
ballotté d'un milieu à un autre. Ça ne veut
pas dire que les parents ne sont pas importants, loin de là. Le rôle de la
famille demeure tout entier, et les parents sont des acteurs clés dans
le développement et le bien-être de leurs enfants. Nous sommes et serons toujours là pour apporter notre soutien aux familles les
plus vulnérables, notamment par nos interventions
en prévention et par le biais de programmes
dont nous avons rehaussé le financement, tels que SIPPE, les Services intégrés
à la périnatalité et à la petite enfance, pour venir en aide aux mères pendant
leur grossesse et qui suit les enfants jusqu'à l'entrée à l'école, l'avis de grossesse informatisé, qui va nous permettre
de détecter beaucoup plus tôt les femmes enceintes qui ont des besoins particuliers, le programme de
Crise-Ado-Famille-Enfance quand les enfants se désorganisent, ont des problèmes de santé mentale, le programme de
négligence quand les enfants sont délaissés, évidemment, le programme dont
je vous ai parlé au début, Agir tôt, quand
les enfants ont un retard de développement, qui sera lui aussi pleinement
déployé en 2022.
Nous allons
aussi repérer les familles vulnérables via la première ligne et travailler avec
elles en les accompagnant en amont.
On veut leur donner plus de chances de travailler leur parentalité. Ce que les
chercheurs nous ont démontré, c'est que, souvent, ces
enfants sont signalés à répétition, soit des complications pendant la grossesse,
quand ils sont jeunes enfants, quand
ils sont plus vieux, quand ils sont adolescents, et souvent, même, quand ils
sont adultes, ça devient des adultes à problèmes. Donc, ce qu'on veut,
Mme la Présidente, c'est les accompagner tout au long de ce chemin de vie.
Puis ce qu'on
vient préciser avec ce projet de loi, c'est de statuer qu'à un moment donné
quand le juge ou quand la directrice de la protection de la jeunesse
voit que les choses ne s'améliorent pas une décision doit être prise dans l'intérêt de l'enfant, dans son intérêt
primordial. Parce que la notion de temps, pour un enfant, n'est pas du tout la
même que pour un adulte. Le placer
dans une situation d'incertitude est traumatisant pour l'enfant, qui peut
développer des problèmes d'attachement
et entraîner d'autres problèmes à long terme. Plus l'enfant est jeune, plus
cette décision doit être prise tôt pour
s'assurer que cet enfant ait une famille pour la vie. C'est ça que Régine
Laurent nous a demandé, c'est ça que les autres commissaires nous ont
demandé et c'est ce qu'on est fiers de livrer avec ce projet de loi, Mme la
Présidente.
Dans le même
esprit visant à faire primer l'intérêt de l'enfant, dans la loi actuelle, il
n'y avait assignation d'un avocat à
l'enfant que quand il y avait un conflit entre l'enfant, les parents et la
Direction de la protection de la jeunesse. Désormais, comme nous le demande le rapport Laurent, on veut
faire entendre la voix de l'enfant et on souhaite que l'avocat prenne le temps de connaître celui-ci, de travailler avec
celui-ci, de l'accompagner tout au long du processus, pas seulement à la
dernière minute, quand il est assigné en
cour. On veut que ce soit vraiment un représentant de l'enfant qui soit
toujours présent, et ce, dans toutes les causes.
Autre modification
législative substantielle, la confidentialité, le partage de l'information et
des renseignements. Ce changement majeur est introduit pour prévenir certains
drames qu'on a vécus qui étaient carrément dus à un manque de partage de cette information. C'est notamment le
problème vécu par de nombreuses familles d'accueil qui nous ont déploré de ne pas disposer de toute l'information requise
sur le passé de l'enfant et ce qu'il a vécu. Si on a de l'information qui
peut protéger la vie d'un enfant, il faut la partager avec la direction de la
protection de la jeunesse puis il faut que nos intervenantes puissent la partager avec les autres partenaires, que ce
soit la famille d'accueil, l'école ou les autres intervenants auprès de l'enfant. Ainsi donc, en levant les
verrous et en modifiant les règles de confidentialité, le message qu'on envoie
est on ne peut plus clair, et c'est qu'on
doit protéger nos enfants, la confidentialité ou le secret professionnel ne
peut valoir plus que la vie d'un enfant, Mme la Présidente.
Je résume
donc les principaux objectifs de notre projet de loi : renforcer la
primauté de l'intérêt de l'enfant et le respect de ses droits, soutenir
l'interprétation de la Loi sur la protection de la jeunesse, améliorer la
communication de renseignements confidentiels, améliorer et harmoniser les
pratiques cliniques en matière de protection de la jeunesse, notamment par la nomination d'une directrice
nationale de la protection de la
jeunesse, préciser les responsabilités de la directrice
dans cette loi, faciliter le passage des jeunes à la vie adulte et reconnaître
que les autochtones sont les mieux placés pour répondre aux besoins de
leurs enfants de la manière la plus appropriée.
D'ailleurs, je veux également souligner toute l'importance
que ce projet de loi accorde aux Premières Nations et aux Inuits. C'est avec les groupes autochtones des communautés
conventionnées et non conventionnées, ainsi que les Inuits, que les propositions d'intervention en protection de la jeunesse en contexte autochtone
ont été élaborées. Plusieurs rapports d'enquête nous proposaient des solutions
concrètes pour adapter les services aux enfants autochtones. Ce que nous
proposons aujourd'hui est une mise en oeuvre de plusieurs recommandations de
l'ENFFADA et du rapport Viens. C'est avec et
pour nos partenaires des Premières
Nations autochtones et inuites que
des adaptations sont proposées à la Loi
sur la protection de la jeunesse afin de s'attaquer notamment à la
surreprésentation des enfants autochtones dans le système de la protection de la jeunesse. Je les
remercie vraiment pour leur apport et leur collaboration entière à la
réalisation de cette réforme.
• (17 h 50) •
Je suis très fier des travaux qui ont été menés
au cours des derniers mois afin de présenter ce projet de loi. Je tiens à saluer tous ceux et celles qui y ont
travaillé de près ou de loin, que ce soient les gens du ministère de la Santé
et des Services sociaux, ministère de
la Justice, également le comité permanent qui a travaillé sur ce projet. Il s'agit
du premier jalon de ce grand parcours qui nous amènera à mieux protéger
nos enfants au Québec.
D'ailleurs,
je présente également aujourd'hui les étapes de mise en oeuvre des
recommandations du rapport de la commission
Laurent. À la suite du dépôt du rapport final, en mai dernier, je m'étais
engagé à donner suite aux recommandations
avec diligence et rigueur. Les actions mises de l'avant visent à transformer
les services offerts aux jeunes et
aux familles en misant sur la prévention et la participation des acteurs clés de la communauté et des différents
réseaux. Elles s'articuleront autour de cinq axes et seront réalisées en
trois phases : promotion et prévention pour les jeunes de 0 à 12 ans, trajectoire de qualification pour les
12 à 25 ans, gouvernance nationale, régionale et locale, protection de la
jeunesse modernisée et intervention de
pointe et soutenue, Mme la Présidente. Ces étapes témoignent de mesures déjà en
cours et d'autres à venir. Elles seront de nature évolutive et seront
mises à jour sur une base annuelle.
Je ne peux
pas terminer sans parler à nos intervenantes. Vous faites un travail
extraordinaire et vous avez à coeur le
devenir de nos enfants. C'est également pour vous que nous déposons ce projet
de loi. L'accès à toute l'information, le partage de celle-ci avec nos partenaires, le fait de mettre l'enfant au
centre du projet de loi, ce sont des enjeux que vous m'avez mentionnés à
de nombreuses reprises lors de mes passages en centres jeunesse. Et nous allons
poursuivre en parallèle le déploiement des
recommandations Laurent pour améliorer vos conditions de travail et valoriser
le travail essentiel que vous faites
sur une base quotidienne. Je sais que votre tâche est exigeante et qu'on vous
en demande beaucoup, parfois dans des
délais relativement serrés. Sachez que nous en avons conscience, sachez que je
suis là pour vous et que je vais continuer d'être à vos côtés.
Le
24 novembre 1917, le ministre d'État au Développement social,
M. Pierre Marois, concluait en ces mots son discours à l'étape de ce qui était alors le débat en deuxième lecture
sur le projet de loi n° 24 sur la protection de la jeunesse : «[Cette loi] repose sur le postulat fondamental
qu'il est possible d'amener une collaboration fructueuse des intervenants,
qu'il s'agisse des
policiers, des centres de services sociaux, des juges et des procureurs, des
établissements du réseau des affaires sociales, des centres d'accueil, des
CLSC, des organismes du milieu. Il est certain que cela suppose des ajustements
de comportement, d'attitude et même de mentalité.
«C'est donc
un défi que tous ces gens devront relever, et ce dans l'intérêt fondamental des
jeunes Québécois et des jeunes Québécoises, que cette loi vise avant
tout à aider.»
C'est dans ce
même esprit de collaboration, de solidarité et d'entraide auquel je convie mes
collègues parlementaires afin que
nous adoptions le principe de ce projet de loi qui, je l'espère sincèrement,
constituera une autre étape historique en matière de protection de la
jeunesse au Québec. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux. Et
je cède maintenant la parole à Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil : Merci, Mme la
Présidente. Donc, évidemment, il reste peu de temps. J'aurai l'occasion de
revenir demain. Donc, ce serait plus une introduction.
Je suis
vraiment heureuse et je me considère très privilégiée d'être porte-parole de
l'opposition officielle dans ce dossier.
J'écoutais le ministre et je pense que je suis animée par cette même passion.
Je pense qu'on est tous... D'ailleurs, il
y a eu des débats très, très, très passionnants et importants juste avant qu'on
procède ici sur les travaux de cette commission spéciale. J'ai entendu les collègues de gouvernement, du parti du gouvernement s'exprimer. Mais on est aussi, ici, dans un dossier humain, profondément
humain. On parle des enfants, on parle de leur avenir, de leur potentiel et
qu'est-ce qu'on peut faire comme société pour nous assurer d'une
stabilité pour ces enfants.
Et donc,
aujourd'hui, on commence... donc, c'est l'adoption de principe. Normalement,
dans les processus, on aurait entendu
les groupes d'abord et on serait venus ici expliquer les points de vue de tous
et chacun. Ça fait partie de ce processus. On nous avait demandé, le gouvernement nous avait demandé si on serait
prêts... Parce que j'avais quand même exprimé mon souhait qu'on puisse procéder, ça, c'est avant que le projet de loi
soit déposé, je me suis exprimée auprès du leader, on était en commission parlementaire, ensemble,
sur un autre projet de loi, je disais : Quand est-ce que ce projet de loi
vient? J'ai vraiment hâte qu'on
puisse aller de l'avant. Il y a urgence d'agir. Je pense que le ministre, il
est dans cette urgence d'agir, parce
qu'il a monté ce dossier puis ce projet de loi. Mais, pour nous tous, ces
dernières années ont été très difficiles en matière de protection de la
jeunesse.
Dans mon
passé, juste pour vous dire, Mme la Présidente, j'étais membre du conseil
d'administration de Batshaw, d'ailleurs,
quand Batshaw a été baptisé avec ce nom, Batshaw. Et j'étais aussi membre d'un
comité qui existait, l'Association des
centres jeunesse, qui avait aussi des administrateurs comme moi, qui
siégeaient, pas simplement les directeurs. Et on aura l'occasion d'en parler, peut-être pas à ce stade-ci, mais en
commission parlementaire, et je trouve que c'est intéressant qu'on ramène un peu cette notion avec un groupe de
travail ou un groupe qui va se rencontrer régulièrement, et c'est les directeurs de protection de la jeunesse. Et, en
guise d'introduction, c'est un outil intéressant pour s'assurer qu'on
rafraîchit toujours nos façons de faire, on partage les meilleures
pratiques, qu'on aille regarder ailleurs, c'est ce qu'on faisait à l'époque, et c'était toujours
quelqu'un qui amenait... Savez-vous ce qu'ils... Bon, je me
rappellerai toujours un projet à Hawaï qui avait fait feu, dans le sens que... donné des résultats
extraordinaires où les grands-mamans... il y avait
des groupes de grands-mamans qui allaient visiter les familles avec des
enfants vulnérables.
Alors, en introduction, c'est de dire à quel
point on va... Je déclare mes intentions. Évidemment, le travail que j'ai à faire aujourd'hui, c'est de
souligner, évidemment, les modifications, mais aussi peut-être est-ce qu'on a bien suivi les recommandations de la commission Laurent, mais
on aura l'occasion d'entendre la voix des autres organismes. Et, toujours
dans un projet de loi, l'objectif, c'est d'améliorer, hein, c'est de bonifier, on
parle toujours de bonifier le projet de loi, je pense que le ministre, il a eu l'expérience
avec un projet de loi, c'est toujours ça, l'intention. Et c'est évident qu'on sera
vraiment... je travaillerai, évidemment, avec beaucoup de diligence, parce que j'ai vraiment
à coeur... On a tous été ébranlés par
les terribles histoires. Depuis, d'ailleurs, ce tragique événement de la petite fille
de Granby, il y a eu beaucoup d'autres histoires
très, très préoccupantes d'horreur, etc., et, à quelque part, il faut souligner
le travail des médias, les médias qui ont
réussi à faire en sorte que toute la société
québécoise se sente interpellée par cette mission fondamentale du gouvernement,
dans un premier temps, mais de la société dans son entièreté.
Alors donc,
pour parler plus précisément du projet de loi n° 15...
Parce qu'il faut savoir, ici, on parle des mesures législatives. Le ministre a
évoqué un grand plan d'action, mais là, évidemment, le travail qu'on a à faire,
c'est de voir si les mesures
législatives qui sont proposées... doivent-elles être... Est-ce qu'elles
répondent, donc, aux recommandations de
la commission Laurent? Est-ce qu'elles ont besoin d'être bonifiées? C'est de ça
que je vais vous entretenir, Mme la Présidente.
Mais, avant d'aller dans le vif du sujet, je
voulais savoir : Combien de temps est-ce qu'il me reste?
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il ne vous reste que quelques
secondes avant l'ajournement de nos travaux.
Ajournement
Alors, je vais tout de suite ajourner nos
travaux au jeudi 9 décembre, à 9 h 40. Merci.
(Fin de la séance à 18 heures)