(Neuf heures quarante minutes)
Le Vice-Président (M. Picard) : Bon
mercredi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous débutons
nos travaux à la rubrique Déclarations
des députés, et je commence par M. le député de Masson.
Souligner la tenue du
Festival Frissons
M. Mathieu Lemay
M.
Lemay : M. le Président, je tiens à prendre quelques instants pour
inviter les citoyens de Masson à profiter pleinement des différentes
activités qui leur seront offertes cette Halloween dans le cadre du Festival
Frissons, qui se tiendra les 25 et
26 octobre prochains au parc du Grand-Coteau. Des jeux, des animations et
un parcours lumineux seront offerts
gratuitement aux plus petits comme aux plus grands, le tout dans un décor des
plus effrayants. Il ne fait aucun
doute à mes yeux que cet événement sera, encore cette année, un franc
succès.
Par la suite, le soir du 31 octobre,
j'invite les citoyens qui feront la collecte de bonbons à prendre une pause et à nous rejoindre au parc de la Seigneurie, à
Mascouche. Au programme : un spectacle immersif entièrement gratuit sous le thème d'un cimetière hanté. Il y aura aussi une performance de
cracheurs de feu, mais surtout la distribution des bonbons, M. le Président.
Alors,
j'invite donc toute la population de
Masson à se joindre à nous le 31 octobre prochain. C'est un
rendez-vous à ne pas manquer. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, M. le
député de Masson. Je reconnais maintenant M. le député de Vimont.
Féliciter Mme Lily-Mai
Boivin, lauréate au Gala des prix Leviers
M. Jean Rousselle
M. Rousselle : Merci, M. le
Président. En 2018, Lily-Mai Boivin a commencé à fréquenter le café
étudiant Cafardeur, où elle a fait plusieurs nouveaux liens. Très rapidement,
elle est appréciée par ses pairs et décide donc de s'inscrire dans un groupe d'appartenance du programme
PAIRSévert. Elle profite de cette occasion pour démontrer son savoir-faire en matière d'équipe, d'attitude et d'effort. Elle participe à plusieurs
projets, dont celui de promouvoir des organismes.
Elle écrit aussi un article dans le magazine Tapage et termine son année
en acceptant de faire un témoignage de sa rencontre avec l'organisme
ROCAJQ.
Malgré son
jeune âge, on lui reconnaît une
maturité incroyable. La persévérance, la détermination et l'assiduité qu'elle a eues tout le long de l'année lui ont
valu une reconnaissance au gala méritas des prix Leviers le 1er octobre
dernier. À cette jeune fille, je lui
souhaite de continuer dans cette voie et de continuer à inspirer des jeunes de
son milieu dans sa communauté. Bravo, Lily-Mai, pour cette belle
réussite! Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député de Vimont. Je cède la parole à M. le député de Portneuf.
Souhaiter du succès à la
karatéka Rose Rhéaume
au Championnat panaméricain junior
M. Vincent Caron
M.
Caron : M. le Président, je voudrais vous parler aujourd'hui d'une athlète émérite dans Portneuf, il s'agit de
Rose Rhéaume, une jeune karatéka de 18 ans.
Originaire de Donnacona, Rose a commencé à pratiquer le karaté dès son plus jeune âge. C'est en voyant son frère
s'entraîner qu'elle décide, elle aussi, de se lancer dans ce sport. Elle prend
part à sa première compétition à l'âge de huit ans.
Depuis, elle n'en finit plus de récolter les
médailles. Son palmarès est époustouflant. Elle a été championne canadienne junior à neuf reprises et championne du
monde junior à 10 reprises. Son rêve serait de participer, un jour, aux
Jeux olympiques. Je suis persuadé qu'elle y parviendra. En attendant, elle
continue de briller sur les tatamis.
J'ai une
pensée pour elle, puisqu'elle est, en
ce moment même, avec l'équipe
canadienne, à Santiago, au Chili, pour
prendre part au championnat du monde de karaté. Nous savons que la situation
dans ce pays est présentement difficile, je lui souhaite le meilleur
pour sa compétition. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Nous poursuivons avec Mme la députée de Fabre.
Souligner la Semaine nationale de l'action communautaire
autonome
Mme
Monique Sauvé
Mme Sauvé :
Merci, M. le Président. En cette semaine québécoise de l'action communautaire autonome, j'ai une pensée toute spéciale pour l'ensemble des
organismes communautaires de mon comté qui font la différence dans la vie
des personnes plus fragiles au quotidien.
J'ai une pensée pour le centre d'entraide La Rosée, j'ai une pensée pour mes
deux maisons de jeunes, la Maison de la
famille de Laval-Ouest, mes Saint-Vincent-de-Paul, la Maison de Lina. À tous
les jours, les équipes et l'ensemble des bénévoles redonnent à des milliers de
citoyens la dignité et le droit de rêver à une meilleure vie.
À
vous tous, organismes communautaires de Fabre et de tout le Québec, au nom des
familles, des jeunes, des aînés, des
personnes handicapées et fragiles qui reçoivent votre écoute, votre aide et
votre accompagnement, je veux vous dire, de tout mon coeur, un immense merci. Que cette semaine puisse nous
rappeler l'importance de votre action. Qu'elle nous rappelle à quel
point vous changez la vie de tant de gens. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais Mme la députée
d'Huntingdon.
Rendre
hommage à M. Neil Mosher Sturgeon,
vétéran de la Deuxième Guerre mondiale
Mme
Claire IsaBelle
Mme
IsaBelle : M. le Président, voici l'histoire remarquable de M. Neil
Sturgeon. Vétéran de la Deuxième Guerre mondiale, M. Sturgeon devient membre actif de la Légion royale
canadienne de Lacolle dès 1946. C'est donc 73 ans de bénévolat, de soutien, d'écoute qu'il offre auprès
d'autres vétérans plus jeunes. C'est un homme dévoué qui inspire la
confiance et suscite les confidences.
Pour
marquer l'histoire et pour nous livrer son histoire, il a
publié ses mémoires de combat, un livre fort instructif et émouvant. De
par ses qualités, son charisme, sa loyauté, M. Sturgeon constitue un bel
exemple de sagesse pour ses confrères et ses consoeurs ainsi que pour toute la communauté.
Thank
you, Mr. Sturgeon, for your devotion. Thank you and you are well deserving of this
honor.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je
cède la parole à M. le député de Matane-Matapédia.
Souligner
le 150e anniversaire de la municipalité
de Sainte-Angèle-de-Mérici
M.
Pascal Bérubé
M. Bérubé :
M. le Président, aujourd'hui, je tiens à souligner le 150e anniversaire de
la municipalité de Sainte-Angèle-de-Mérici.
Fondée en 1869 par Mgr Jean Langevin, évêque de Rimouski,
cette communauté agricole et forestière s'est développée
autour des rives de la rivière Mitis. En juillet dernier, les Mériciennes et
Mériciens ont pu célébrer cet événement en
grand par la présentation d'une programmation de quatre jours de spectacles de
musique et d'humour, de repas
communautaires et d'activités extérieures pour tous les groupes d'âge. C'est
l'ensemble de la communauté qui s'est mobilisée pendant près de deux ans
afin d'assurer la préparation et de faire de cet événement un succès. Ces célébrations ont été un moment de retrouvailles
pour les familles et des anciens résidents de Sainte-Angèle-de-Mérici, qui
se sont spécialement déplacés pour l'occasion.
Je
tiens à féliciter l'ensemble des bénévoles qui ont fait de ces célébrations un
succès et un moment particulier pour
se commémorer une riche histoire de ce magnifique village mitissien. Une fois
de plus, bon 150e anniversaire à toutes et tous! Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Maintenant, je
cède la parole à M. le député de La Peltrie.
Dans
le cadre du Mois de l'histoire des femmes au Canada, souligner
la contribution des femmes au sein des Forces armées canadiennes
M.
Éric Caire
M.
Caire : Merci, M. le Président. Alors, au Canada, M. le
Président, octobre est le Mois de l'histoire des femmes. J'aimerais
profiter de la tribune qui m'est offerte aujourd'hui pour souligner plus
particulièrement la contribution de celles
s'étant engagées au sein des Forces armées canadiennes. En effet, M. le
Président, depuis plus de 100 ans, les femmes s'impliquent dans le service militaire au Canada,
ayant pris part à l'écriture de son histoire, contribuant à sa richesse. Par
leur détermination, leur dévouement et leur professionnalisme, ces femmes sont indispensables au maintien de la
paix, au rehaussement de la sécurité, ainsi qu'au déploiement
d'opérations d'aide humanitaire en zones de conflits.
En
ce Mois de l'histoire des femmes, il m'apparaît essentiel de souligner l'apport de ces femmes exceptionnelles, dont le désir, voire le rêve de servir au sein des Forces canadiennes n'a d'égal qu'un fort désir de
protéger la population... les
plus vulnérables. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je cède la
parole à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Souligner le succès de la
Nuit des sans-abri tenue dans
la circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve
M. Alexandre Leduc
M. Leduc : Merci, M. le
Président. C'est avec une grande fierté qu'Hochelaga-Maisonneuve a été, pour la
première fois, l'hôte de la Nuit des sans-abri
de Montréal, et je dois dire que cette 30e édition a été un succès retentissant. La veillée festive a rassemblé plus
de 1 000 curieux et curieuses et habitués de la rue. À l'échelle du
Québec, c'est 10 000 personnes dans 35 villes qui ont
participé aux divers événements locaux.
Dans mon quartier, l'itinérance est en nette
croissance et touche des populations non conventionnelles et distinctes de celles du centre-ville. Les
programmes d'aide essaient donc de couvrir plus large, mais avec des budgets
stagnants. Le quartier Hochelaga-Maisonneuve
n'a donc souvent pas les ressources nécessaires pour offrir des solutions durables et adaptées. L'injection d'argent neuf finançant un large spectre de
solutions novatrices est devenue urgente.
C'est pourquoi
je dis merci aux organisateurs et
organisatrices d'avoir mis cette réalité locale en lumière. Si vous êtes assez dignes pour présenter ces histoires de
vie à la face du monde, nous nous devons, en tant que parlementaires, de
témoigner de la même dignité dans la façon
dont nous répondrons à la question de l'itinérance, et vous trouverez toujours
en moi un allié convaincu. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Je cède la parole à M. le député de Chapleau.
Souligner le 30e
anniversaire de la Coopérative des paramédics de l'Outaouais
M. Mathieu Lévesque
M.
Lévesque (Chapleau) : Merci, M. le Président. Je tenais à souligner le
30e anniversaire de la Coopérative des
paramédics de l'Outaouais, qui a été fondée en août 1989 par 46 membres dévoués
envers leur communauté. Ils se sont donné pour mission d'assurer les meilleurs
services préhospitaliers d'urgence de l'Outaouais. Des milliers de femmes
et d'hommes travaillent jour et nuit afin d'assurer la sécurité ainsi que des
services de soins d'urgence de qualité aux citoyens de l'Outaouais. D'ailleurs, ces derniers ont à
coeur leur travail et sont toujours prêts à répondre aux besoins de la population.
Le professionnalisme, la proximité, la coopération et le partenariat sont au coeur des valeurs de la coopérative.
J'aimerais
donc prendre le temps de remercier tous les paramédics de l'Outaouais pour leur
travail de qualité auprès de la population.
Vous êtes toujours au rendez-vous et prêts à servir le comté de Chapleau et la
région de l'Outaouais, ainsi que la
ville de Gatineau. 1 000 mercis à vous pour votre dévouement. Et bon 30e
anniversaire, bonne continuité!
• (9 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Pour la dernière déclaration, je reconnais M. le député de Bourget.
Remercier Les Chevaliers
de Colomb du conseil de ville d'Anjou n° 5321
pour leur collecte de fonds au profit des paniers de Noël
M. Richard Campeau
M.
Campeau : Merci, M. le Président. Depuis maintenant 57 ans, les Chevaliers de Colomb du conseil
d'Anjou sont implantés dans le comté
de Bourget, dont plus de 25 à leur emplacement actuel, soit dans la paroisse
Saint-Donat. Les chevaliers sont vraiment actifs dans la communauté.
Il me fait
plaisir de souligner, aujourd'hui, leur implication dans la récolte de fonds qui
leur permettra, on l'espère, de
distribuer autant de paniers de Noël que l'année dernière. C'est une journée
festive, quand on distribue ces paniers. Il s'agit là d'une belle démonstration de générosité, de charité que
d'aider, à chaque année, des dizaines de familles dans le besoin. Cette collecte de fonds est rendue
possible par les différents déjeuners, soupers spaghetti, épluchettes de blé
d'Inde qui ont lieu dans notre secteur.
J'aimerais
remercier tout spécialement le grand
chevalier, M. Jocelyn Ross, ainsi que son prédécesseur, M. Claude Lachance, pour leur dévouement après plus de 30
ans comme membres. Votre énergie contribue directement à perpétuer l'aide aux démunis dans le comté. Merci à vous deux pour
l'exemple que vous êtes dans la communauté. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Cela met fin à la rubrique Déclarations de députés.
Et je suspends les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 9 h 51)
(Reprise
à 10 h 2)
Le Président :
Mmes et MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, Mme la ministre des Relations internationales et de la
Francophonie.
Entente en matière de sécurité sociale entre le Québec
et la République de Bulgarie, et note explicative
Mme Girault : Merci,
M. le Président. M. le Président, permettez-moi de déposer l'Entente en matière de sécurité sociale entre le Québec et la République de
Bulgarie, accompagnée d'une note explicative sur le contenu et les effets de
cette entente. Merci, M. le Président.
Le
Président : Ce document est déposé. À nouveau, Mme la ministre des Relations internationales et de la
Francophonie.
Motion proposant d'approuver l'entente
Mme
Girault : Conformément à l'article 22.3 de la Loi sur le
ministère des Relations internationales, je propose la motion
suivante :
«Que
[...] l'Assemblée nationale approuve[, dans les délais prescrits par la loi,] l'Entente
en matière de sécurité sociale entre le Québec et la République de
Bulgarie.» Merci, M. le Président.
Le
Président : Merci, maintenant
déposé. Je vous avise qu'en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales la
motion est présentée mais ne pourra être débattue avant 10 jours.
Dépôt de rapports de commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission
de la Santé et des Services sociaux et député de Beauce-Nord.
Étude détaillée du projet de loi n° 28
M. Provençal : M. le
Président, je dépose le rapport de la Commission de la santé et des services
sociaux qui, les 10 et
22 octobre 2019, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 28, Loi permettant la mise en place de certaines mesures en matière de santé et de services sociaux
liées au statut géographique particulier de la région sociosanitaire de la
Mauricie et du Centre-du-Québec. La commission a adopté le texte du projet de
loi avec des amendements. Merci, M. le Président.
Le Président :
Ce rapport est déposé.
Il n'y a pas de dépôt
de pétitions.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
violation de droit ou de privilège.
Questions
et réponses orales
Nous
en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je
cède la parole au chef de l'opposition officielle.
Troisième lien entre Québec
et Lévis
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
Merci, M. le Président. Lundi dernier, le premier ministre n'a, de toute
évidence, pas obtenu les résultats qu'il espérait. Il doit maintenant
collaborer avec un gouvernement minoritaire libéral, alors qu'il espérait un
gouvernement conservateur minoritaire, avec la balance du pouvoir au Bloc.
M.
Trudeau a affirmé à de nombreuses reprises en campagne électorale que le projet
de troisième lien n'existe pas, parce qu'il n'y a rien sur la table et que le
gouvernement caquiste n'a rien dévoilé. À plusieurs reprises, nous avons
demandé de la transparence au gouvernement.
M. le Président, la CAQ choisit maintenant de museler le ministère des
Transports. Il est temps que le premier ministre comprenne, réponde aux
appréhensions grandissantes des radios, des journalistes, mais surtout des
citoyens. C'est quoi, un troisième lien vert? Quel est le tracé exact? Qui sera
exproprié? Combien de voies pour les automobilistes? Si le projet est si
avancé, pourquoi ne pas informer la population?
Je
joins donc aujourd'hui ma voix à celle du député de La Pinière :
Peut-on entendre enfin Frédéric Pellerin, le directeur du bureau de projet, en commission
parlementaire afin de rassurer la population et d'envoyer un signal positif
à tous les intervenants qui sont concernés?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, le chef du Parti libéral du Québec nous dit que, lundi, les
résultats n'ont pas été ceux, selon
lui, qu'on attendait. M. le Président,
dans le fond, ce que nous dit le chef du Parti libéral, c'est qu'on
n'aurait pas dû rappeler aux chefs
fédéraux qu'une grande majorité de Québécois sont pour la loi n° 21. Moi, je pense que... Le chef du Parti libéral disait : On s'est mal réveillé lundi. Moi,
je pense que c'est lui. En 2022, je sais qu'il hésite à se représenter,
mais c'est lui qui risque de mal se réveiller...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
M. Legault : ...s'il continue de
nier la volonté de la grande majorité des Québécois d'être pour la loi n° 21, M. le Président. Donc, je ne comprends pas qu'il
n'ait pas encore tiré cette leçon-là.
Maintenant,
concernant le troisième lien, on l'a dit, on analyse tous les scénarios. Quand
les données vont être disponibles, on va les rendre publiques.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le
Président, c'est parce qu'ils font toutes sortes de déclarations. Le fédéral,
il n'a aucune information sur le projet au
moment où on se parle. Et, selon la CAQ, il faudrait qu'il contribue, le
fédéral, financièrement, pour éviter un péage.
Alors, que le premier ministre soit clair. C'est
quoi, votre demande envers le fédéral?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault : M. le Président, le
chef du Parti libéral était là dans les quatre dernières années. Je pourrais
lui retourner la question. Quelle demande le Parti libéral a faite au gouvernement
fédéral sur le troisième lien?
Des voix : ...
Le Président : Votre
attention, s'il vous plaît!
M.
Legault : M. le Président, je peux rassurer le chef du Parti
libéral, on va en faire pas mal plus
dans notre mandat, pour le troisième lien, que ce qui a été fait par le Parti
libéral. Puis, oui, éventuellement, quand on va être prêts, on va demander la
contribution du gouvernement fédéral.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le
chef de l'opposition. Je vous demande votre attention, s'il vous plaît,
à tous.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président,
comme tout ce que fait la CAQ, c'est encore très brouillon, c'est encore
extrêmement imprécis. Même le député
de La Peltrie affirme que son gouvernement aurait intérêt à être plus
présent pour répondre aux citoyens sur la question du troisième lien.
Alors, je vais encore une fois tenter d'en savoir plus.
En septembre, le premier ministre affirmait
qu'il investirait un montant raisonnable dans le projet. Pourquoi refuse-t-il
d'expliquer à la population ce qu'est, pour lui, un montant raisonnable?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, d'abord, on... Une journée, le Parti
libéral est pour le troisième lien, une autre journée, il n'est pas
d'accord avec le troisième lien. La...
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît! Je vais vous demander... On débute la période de
questions. Histoire d'être efficaces
également, par respect pour tous et toutes, je vous demande, s'il vous plaît,
d'être attentifs tant aux questions qu'aux réponses.
M.
Legault : M. le Président, la troisième journée, le Parti libéral nous
dit : Bien, ça dépend du prix, si le prix est trop élevé, on est contre le
troisième lien. Nous, notre position est claire depuis le début, on est pour le
troisième lien. Il y a actuellement 10 personnes qui travaillent à
élaborer les différents scénarios, à évaluer les coûts du tunnel qui va être
fait pour faire le troisième lien. Donc, M.
le Président, le projet, avec le gouvernement de la CAQ, va se faire,
contrairement à ce qui n'a pas été fait par le Parti libéral.
Le Président : Troisième
complémentaire, la parole appartient au chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand : Chaque fois qu'on
pose des questions là-dessus, M. le Président, le gouvernement se sent attaqué,
alors que ce qu'on veut, c'est des réponses.
Alors, au lieu de rassurer les gens, le gouvernement alimente les suspicions.
Qu'est-ce que
le premier ministre a à cacher? Quelle information son gouvernement a-t-il peur
de rendre publique?
• (10 h 10) •
Le
Président : Je vais vous demander de faire attention aux
propos, notamment des mots, vous les connaissez, «cacher» en est un.
Alors, évitez d'utiliser des termes comme ceux-ci. La réponse au premier
ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, la chose qui est claire, c'est que, durant
les quatre dernières années du Parti libéral, il n'y a rien qui a été fait sur le troisième lien. Nous, on y
travaille, on y travaille très fort. Il y aura une évaluation des
différents scénarios, il y aura un tunnel à l'est, et, quand les chiffres
seront disponibles, on va les rendre publics.
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Question principale. Encore une
fois, votre attention à toutes et à tous. M. le député de Pontiac, vous
avez la parole.
Rupture de services en obstétrique à l'Hôpital du Pontiac
M.
André Fortin
M. Fortin :
Merci, M. le Président. Au printemps, la ministre de la Santé et moi, on a
beaucoup discuté de la question des bris de
service en obstétrique en région. Des femmes, vous vous en souviendrez, ont
accouché en pleine salle d'urgence,
mais sans équipe d'obstétrique. Une autre a accouché dans son auto, sur le bord
de la 138, à 2 heures du matin, seule avec son chum. Et il n'y a
toujours rien de réglé, M. le Président.
Chez moi,
dans le Pontiac, ça fait maintenant six bris de service en quatre semaines.
Juste dans la dernière semaine, vendredi
le 18, c'était ouvert; le 19, c'était fermé; le 20, c'était fermé; le 21,
c'était une demi-journée; le 22, c'était ouvert; maintenant, le 23, le 24, le 25, ça va être fermé, M. le Président. Pour
les mères enceintes de la région, c'est presque une loterie à savoir quand leurs eaux vont crever, M.
le Président. Si c'est le jeudi, chanceuses, elles vont pouvoir accoucher
localement. Si c'est le vendredi, elles vont
devoir accoucher à Gatineau, à 1 h 30 min de route. Puis, si
c'est le samedi, bien, elles vont
devoir accoucher à Pembroke, en Ontario. Le stress sur les futures mères de la
région est insupportable, la situation est intolérable.
Combien de temps la ministre va laisser la
situation perdurer?
Le Président : Mme la
ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Danielle
McCann
Mme
McCann : M. le Président, on suit de très près la situation à
l'Hôpital de Pontiac. D'ailleurs, j'en ai discuté avec mon collègue
député de Pontiac hier, avant-hier également. Alors, on suit cette situation-là
de très près, qui est difficile. On sait que
l'obstétrique, c'est un service de base. Alors, M. le Président, on en a réglé,
des situations au Québec, on a réglé
La Sarre, on a réglé La Malbaie, on en a réglé d'autres, et c'est ce qu'on va faire avec l'Hôpital
de Pontiac.
Alors, l'établissement a vraiment travaillé très
fort pour vraiment voir... remédier à la situation, et là on est en appui à l'établissement, et on fait
appel aujourd'hui à d'autres établissements du Québec, notamment
à Montréal. On sait
qu'il y a des hôpitaux à Montréal qui sont venus aider La Sarre et on a réglé
La Sarre. C'est ce qu'on va faire pour l'Hôpital de Pontiac.
Le réseau va se mobiliser, on va faire appel à des infirmières qui sont parties
à la retraite et on va remédier à la situation, M. le Président, on va
tout prendre les stratégies nécessaires pour que ce service...
Le Président :
En terminant.
Mme McCann : ...soit ouvert de façon
continue pour la population.
Le
Président : Première complémentaire, M. le député de Pontiac.
Nous sommes attentifs à votre question autant qu'aux réponses.
M.
André Fortin
M.
Fortin : Oui, M. le
Président. La région à laquelle on fait surtout appel en ce moment, c'est
l'Ontario quand on leur envoie les mères qui sont enceintes, M. le Président.
La semaine
dernière, en Outaouais, il y a une femme qui a accouché en ambulance. Ça, c'est
loin d'être idéal, mais ça arrive.
Heureusement, l'accouchement s'est bien déroulé, puis, après la naissance,
l'ambulance a amené bébé et maman à l'hôpital de Shawville. Mais, arrivé sur
place, surprise, l'obstétrique est fermée, on ne peut pas s'occuper de
la mère et de son bébé. Tout le monde
rembarque dans l'ambulance, on s'en va à Gatineau, à 1 h 15 min de route.
M. le Président, il y a tellement de
fermetures que même les ambulanciers ne comprennent plus rien. Les gens de la
région veulent une solution maintenant.
Le
Président : Mme la ministre de la Santé et des Services
sociaux. Votre attention à tous et votre collaboration.
Mme Danielle
McCann
Mme McCann : Oui, M. le Président.
Effectivement, c'est la situation qui me préoccupe le plus au Québec actuellement, au niveau de l'obstétrique. Dans les
autres régions du Québec, il y a une forme de stabilité, puis je pense
que c'est parce que les gens travaillent très fort.
Mais moi, je
veux dire à la population de Pontiac et spécialement aux familles, spécialement
aux mères, qu'on va tout faire pour
que ce service soit rétabli de façon continue. On fait tous les efforts. On va
faire comme on a fait à La Sarre. On
fait des appels à d'autres établissements, notamment à Montréal. On fait des
appels aux infirmières qui sont retraitées. On fait des mesures vraiment
spécifiques pour l'Hôpital de Pontiac. Moi, je veux dire à la population...
Le Président : En terminant.
Mme McCann : ...on ne va pas ménager
nos efforts et on va continuer de travailler pour eux.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député. Encore une fois, votre attention.
M.
André Fortin
M.
Fortin : M. le Président, on
fait des plans d'accouchement pour une raison : pour rassurer la mère,
pour rassurer les parents, pour
enlever le stress, l'anxiété, là, avant la naissance. Mais chez nous, en ce
moment, c'est tout le contraire, la situation ajoute un stress
incroyable.
C'est tellement rendu ridicule, écoutez bien ça,
M. le Président, là, on est rendus à céduler des césariennes et à provoquer des
accouchements pour que ça fitte dans le calendrier des bris de service de
l'hôpital.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît, sans commentaire.
M.
Fortin : Et ensuite, M. le
Président, on renvoie les femmes et les bébés à la maison plus tôt parce qu'il
n'y a pas de personnel pour s'occuper d'eux. Ça ne peut pas continuer
comme ça, M. le Président.
Le
Président : Mme la ministre de la Santé et des Services
sociaux. Vous êtes la seule à avoir la parole. Je vous demande également d'éviter les commentaires et d'être
attentifs tant aux questions qu'aux réponses.
Mme Danielle
McCann
Mme McCann : Bien, M.
le Président, on va s'assurer de la
qualité des services à l'Hôpital de Pontiac. M. le Président, on a là un établissement responsable, des
employés, du personnel, des gestionnaires, et ils voient à la sécurité de ces familles, de ces mères, de ces enfants. Et on
soutient ça, M. le Président, alors on va tout faire pour que ce service soit
réouvert de façon continue...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
Mme McCann : On a une situation qui a été fragilisée, je le répète, M. le Président, dans les dernières années, mais
on va travailler très fort pour la rétablir, comme on a fait à La Sarre,
comme on a fait à La Malbaie, comme on a fait ailleurs au Québec, M.
le Président, c'est ce qu'on...
Le Président : Question
principale...
Des voix : ...
Le
Président : Vous
savez, j'aimerais... Je pense que vous appréciez bien entendre les questions.
J'apprécierais bien entendre également les réponses. Merci. Mme la
députée de l'Acadie, à vous la parole.
Réglementation
en matière de langue d'affichage
Mme Christine
St-Pierre
Mme St-Pierre : Merci,
M. le Président. Depuis son entrée au
pouvoir, la CAQ a promis beaucoup dans le dossier d'application de la Charte
de la langue française. Mais, deux
ministres plus tard, force est de constater que l'on assiste à du grand
parleur, petit faiseur.
Les budgets
de l'Office québécois de la langue
française n'ont reçu aucune augmentation, même pas pour absorber les
coûts de système. Huit postes ont été abolis. La nouvelle P.D.G.
de l'OQLF a zéro expérience en la matière. Le ministre s'est fait recadrer
par son premier ministre sur le «Bonjour! Hi!». Et on apprend maintenant
qu'un règlement adopté par le gouvernement libéral en 2016 concernant l'affichage en français
des marques de commerce et qui donne aux entreprises jusqu'au
24 novembre pour se conformer ne comporte aucun plan, outre l'envoi d'une
lettre.
M. le
Président, après avoir déchiré son linge lors de l'adoption de ce règlement en
2016, quel est le plan du premier ministre, outre celui de tasser le
rapport Samson?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Je suis heureux que
la collègue de l'Acadie pose cette question. Dans un premier temps, la
députée de l'Acadie fait référence à la présidence de l'Office québécois de la
langue française. M. le Président, pour les
fonctionnaires de l'État québécois, pour les hauts fonctionnaires, pour les
sous-ministres ou les présidents d'organisme, je pense qu'on devrait
leur marquer notre respect au fait qu'ils servent le public. Et Mme Galarneau a servi durant plusieurs années
l'État québécois, et je pense qu'on devrait saluer ce travail, son travail,
et souligner son travail, M. le Président.
Et je dois vous dire que je n'apprécie pas du tout la tendance de la députée de
l'Acadie à attaquer les fonctionnaires de l'État québécois qui ont servi l'État
durant plusieurs années.
Pour ce qui
est du règlement, M. le Président, pour ce qui est du règlement, le Parti
libéral a décidé d'adopter un règlement,
il y a de cela quelques années, relativement à l'affichage, suite à une
décision de la Cour d'appel relativement à l'affichage des marques de commerce. L'Office québécois de la langue française
a pris déjà des mesures pour s'assurer que les différentes entreprises
pourront respecter la réglementation. C'est une démarche d'accompagnement de
ces différentes entreprises là. Et soyez
assuré que tout le suivi sera apporté. Il y a une chose qui est sûre, M. le
Président...
Le Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...c'est que nous allons apporter des réformes
majeures avec la Charte de la langue française, et je l'ai dit la
semaine dernière.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de l'Acadie.
Mme Christine
St-Pierre
Mme St-Pierre : Merci,
M. le Président. C'est un dossier
sérieux. Ce règlement est un geste fort et concret du gouvernement
libéral pour renforcer la langue d'affichage au Québec.
Ma question
est simple : C'est quoi, son plan? Il se passe quoi après le
25 novembre? A-t-il mis les ressources additionnelles à l'OQLF?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le
Président depuis déjà plusieurs
mois, vous savez, le Parti libéral a adopté un règlement
qui rentre en vigueur le
14 novembre. C'était sur une période de trois ans. Les entreprises
ont déjà été accompagnées et sensibilisées. S'il y
a certaines entreprises qui ne sont pas conformes en date du mois de novembre,
elles seront accompagnées vers cette transition-là. Nous,
on croit qu'on doit déployer les ressources pour faire en sorte que, oui,
l'affichage respecte la réglementation, et nous irons dans ce sens-là.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée.
Mme Christine St-Pierre
Mme St-Pierre : M. le
Président, on demande qu'est-ce qui
va arriver après le 25 novembre. Un communiqué de... l'OQLF,
dis-je, émis un dimanche matin, parle de milliers d'entreprises qui doivent
encore se conformer.
Le
ministre a-t-il un portrait clair par rapport à ce règlement? Si oui, peut-il le déposer? Et peut-il nous
assurer que toutes les ressources seront mises en place pour faire
respecter ce règlement?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration et de la Francisation.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, en matière de langue française,
de langue d'affichage, on n'a pas de leçons à recevoir du Parti libéral.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Jolin-Barrette : M. le Président, il y a eu une décision de la
Cour d'appel qui a été rendue à l'encontre de l'interprétation qui avait
été faite. Tout ce que le Parti libéral a fait, c'est d'adopter un règlement,
alors qu'il aurait eu l'opportunité, le
Parti libéral du Québec, de rouvrir la Charte de la langue française, de mettre
ses culottes et de faire en sorte... et de faire en sorte...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Jolin-Barrette :
...qu'au Québec on allait défendre la langue...
Des voix :
...
• (10 h 20) •
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît! Encore une fois, je fais appel à votre
collaboration. Je vous demande votre
attention. Vous souhaitez poser des questions et qu'on soit attentifs. Vous
souhaitez, j'en suis convaincu, aussi entendre les réponses. Je vous
demande votre collaboration à toutes et à tous.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, on n'a pas de leçons à recevoir
du Parti libéral en ce qui concerne la promotion et la valorisation de la langue française. M. le Président, la députée
de l'Acadie a été pendant cinq ans ministre responsable de la Langue
française. Quel est son bilan?
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette :
Nous allons prendre des actions. Vous allez être gênés.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Gaspésie.
Projet d'exploitation d'hydrocarbures de Cuda Pétrole
et Gaz inc.
Mme Méganne Perry Mélançon
Mme Perry
Mélançon : Merci, M. le Président. En ce moment, il y a une demande
qui chemine au gouvernement pour autoriser des forages en plein paradis
de la pêche au saumon à Gaspé. Il s'agit du projet Galt.
Alors qu'on assiste
partout dans le monde à un désinvestissement massif dans la filière des
hydrocarbures, pendant ce temps-là, au
Québec, le gouvernement de la CAQ s'apprête à octroyer le tout premier permis
d'exploitation pétrolière d'une
compagnie détenue par des intérêts étrangers. Le projet pétrolier prévoit
d'exploiter le sous-sol gaspésien pour
une période de 40 ans, M. le Président. 40 ans de forage pour
l'équivalent de 42 jours de consommation pétrolière au Québec. Le
gouvernement a l'opportunité de refuser le permis d'exploitation pour Galt.
Est-ce
que le ministre de l'Environnement
peut aujourd'hui nous confirmer que ce projet ne verra jamais le
jour à Gaspé?
Le Président : M. le ministre
de l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M.
Julien : Oui. Merci, M. le Président. Écoutez, les informations amenées par ma collègue ne sont pas celles
que moi, je connais. Essentiellement, il y a une Loi sur les hydrocarbures. Il
y a un règlement sous-jatent qui a été... sous-jacent, oui, excusez-moi...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M.
Julien : ...qui a été
autorisé le 18 septembre 2018. Le règlement en question est strict. Le règlement
en question est rigoureux. Le règlement
en question fait en sorte qu'aucune fracturation
hydraulique n'est permise. Le règlement en question fait en sorte que la protection des milieux hydriques est
assurée. Et c'est par ce règlement et par la loi que notre gouvernement
allons nous gouverner. Il est rigoureux, il est robuste, et nous allons
l'appliquer.
Alors, pour ce qui
est du projet en question, on n'est pas sur le point d'émettre...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M.
Julien : ...une permission
d'exploitation, puisqu'il doit être cohérent avec ce règlement
et avec la loi. Merci.
Le
Président : Je vous
demande encore une fois d'être attentifs, pour la ixième fois. Mme la députée de Gaspé, la parole
vous appartient et à vous seule.
Mme Méganne Perry Mélançon
Mme
Perry Mélançon : La ministre déléguée au Développement régional était à Gaspé pas plus tard qu'au
début du mois pour sa tournée de
consultation sur la lutte aux changements
climatiques, puis en même temps,
interpelée par le sujet, elle fait
des entrevues concernant le projet Galt pour défendre son gouvernement qui s'intéresse encore aujourd'hui
aux hydrocarbures.
Est-ce que
la ministre est à l'aise de faire une tournée sur les changements climatiques et en même temps vanter un projet
pétrolier au nom de son gouvernement?
Le Président :
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M.
Julien : Oui. M. le Président, j'étais justement en contact avec ma collègue, lors de sa tournée,
pour discuter de ces éléments-là, et
on en a bien discuté ensemble. Essentiellement, ici, les craintes qui sont
énoncées... Je le réitère, là, le
18 septembre 2018, le règlement qui a été adopté par le Québec,
par le gouvernement du Québec, est hyperrobuste, c'est-à-dire qu'on vise
à protéger, justement, dans l'exploitation des hydrocarbures, face à certains
risques, face à des éléments comme, justement,
la fracturation hydraulique, la protection des milieux hydriques. On s'est
doté d'un règlement sous-jacent de cette loi-là qui fait en sorte
que, si, éventuellement, il y a de
l'exploitation d'hydrocarbures au Québec...
Le Président :
En terminant.
M. Julien :
...ça doit cadrer avec ce règlement-là. Alors, c'est comme ça qu'on va se
gouverner.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Gaspé.
Mme Méganne Perry Mélançon
Mme
Perry Mélançon : M. le Président, le gouvernement prétend que, sans
acceptabilité sociale, il n'ira pas de l'avant
avec le projet Galt. Mais, je vous le dis aujourd'hui, à titre de députée de
Gaspé, native et qui a grandi en Gaspésie, qui parle à son monde tous les
jours sur le terrain, il n'y en a pas, d'acceptabilité sociale, chez nous pour
le pétrole.
M.
le Président, j'écoute mon monde, je représente les intérêts de la Gaspésie, et
j'aimerais savoir pourquoi le gouvernement
ne peut pas écouter, lui, la population de la Gaspésie et représenter les
intérêts de ces gens-là, qui sont les principaux concernés.
Le Président :
Mme la ministre déléguée au Développement économique régional.
Mme Marie-Eve Proulx
Mme
Proulx (Côte-du-Sud) : En effet, pour nous, ce qui est important dans
tous les projets d'exploitation, c'est qu'il
y ait une acceptabilité sociale d'abord et avant tout. Donc, pour nous, si la
population de Gaspésie n'accepte pas le projet, on va écouter ce qu'ils ont à dire à ce sujet-là, d'abord et
avant tout. Mais, mon collègue l'a mentionné, je pense que c'est important de le rappeler, que le
règlement est très robuste puis qu'en ce moment toutes les étapes... le
processus d'évaluation des projets
est tellement clair et tellement contraignant que, les projets, les promoteurs
doivent vraiment se lever de bonne
heure pour démontrer l'intérêt de cela. Mais ce qui nous concerne, nous, comme
gouvernement, c'est que l'acceptabilité de la région le fasse.
Le Président :
En terminant.
Mme
Proulx (Côte-du-Sud) : Puis nous aussi, nous sommes à l'écoute de la
population de la Gaspésie, puis on va travailler avec eux sur ces
projets.
Le Président :
Question principale, M. le député de Rosemont.
Position
du gouvernement sur le projet de gazoduc et d'usine
de liquéfaction de gaz naturel de GNL Québec inc.
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : Merci, M. le Président. Ça fait un bout de temps que les
environnementalistes au Québec disent que GNL, c'est un mauvais projet.
Évidemment, ça n'a pas beaucoup ému le gouvernement, on le sait. Par contre,
là, maintenant, il y a 40 économistes
qui ont uni leurs plumes pour dire la même chose : GNL, c'est un mauvais
projet pour l'environnement et même
pour l'économie. Visiblement, ça a attiré l'attention du ministre de
l'Économie, qui a posé plein de
questions la semaine dernière quant à la pertinence de GNL. Ça fait du bien, M.
le Président. Ça nous change un peu de l'enthousiasme débridé du premier
ministre pour le projet.
Alors,
ma question pour le ministre de l'Économie. Maintenant que lui semble avoir vu
le début de la lumière, est-ce qu'il pourrait expliquer au premier
ministre : Il ne faut pas croire tout ce qui sort de la bouche des
lobbyistes, il faut aussi écouter les environnementalistes, les
économistes et la science en général?
Le Président :
M. le ministre de l'Économie.
M. Pierre Fitzgibbon
M.
Fitzgibbon : M. le Président, je pense ce que j'ai dit la semaine
dernière sur le projet, c'est qu'on n'ira pas mettre 1 milliard de dollars dans le projet de GNL Québec. J'ai dit
aussi, par contre, que le projet avait des répercussions économiques potentielles énormes, et qu'il fallait
comprendre quels seraient les preneurs de ce gaz naturel liquéfié là, et qu'il y avait peut-être le contexte
aussi. Le gaz naturel était pour remplacer l'énergie fossile, le charbon.
Peut-être, sur une base planétaire, on pourrait conclure que c'est un bon
projet. À ce moment-ci, la réponse à ces questions est inconnue.
Alors,
j'ai tout simplement dit qu'on va supporter les études économiques. On va
supporter les promoteurs s'ils veulent
continuer à faire le travail. Ils vont devoir passer par l'acceptabilité
sociale. Ils vont devoir passer par le processus avec mon collègue au niveau de l'Environnement. Je pense qu'on ne
changera pas ça. Mais, à l'origine, au projet, on encourage, j'encourage encore les promoteurs à continuer leur
travail parce qu'on n'a pas de réponses aux questions. Puis les questions
qui ont été posées par les
40 économistes sont des très bonnes questions, et je pense qu'on va devoir
y répondre, mais on n'a pas les réponses aujourd'hui.
Alors, entre-temps,
il ne faut pas tuer un projet dans l'oeuf, alors qu'il n'est pas rendu à
échéance.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Rosemont.
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : Moi, j'invite le ministre de l'Économie à prendre un café
avec le premier ministre. Ils pourraient comparer leurs notes, parce que, le premier ministre, ça fait des mois
qu'il nous dit que c'est un excellent projet, avec des vertus absolument
extraordinaires. Le ministre de l'Économie dit : Je ne mettrais pas
1 milliard là-dedans. Moi, j'aurais dit : Je ne mettrais pas une cent
là-dedans, mais, en tout cas, c'est une question d'échelle, je présume, M. le
Président.
Entre
une cent puis 1 milliard, est-ce que le ministre peut nous dire qu'il n'y
aura pas d'argent public dans ce projet d'un autre siècle?
Le Président :
M. le ministre de l'Économie.
M. Pierre Fitzgibbon
M.
Fitzgibbon : Premièrement, je peux confirmer à la population du Québec
que ce que M. le premier ministre pense du projet et moi est en harmonie, parce
que ce projet-là pourrait avoir du bon sens si, encore une fois, l'énergie
qu'on va remplacer est une énergie qui est
plus dommageable pour la planète. D'autre part, le projet, s'il va de l'avant,
le 14 milliards, qui est des contrats
appropriés qui vont faire que le produit est finançable, ce n'est pas le rôle
du gouvernement de financer ça, de là mon commentaire pour le milliard.
Entre-temps,
est-ce qu'on doit aider les promoteurs à évaluer le projet sur une base
environnementale, sur une base économique? La réponse est oui, on va
aider. Quelle forme va prendre l'aide?
Le Président :
En terminant.
M.
Fitzgibbon : Quelle forme pourra prendre l'aide? C'est encore, ici,
incertain.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député.
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : C'est bien que les économistes d'ici ont attiré l'attention
du ministre. Je lui cite un autre économiste qu'il connaît, Mark Carney, gouverneur de la Banque d'Angleterre, qui a
dit cette semaine qu'aucun grand projet ne devrait être financé sans d'abord
évaluation de son impact écologique. C'est quand même Mark Carney qui dit ça.
La dernière fois que j'ai vérifié, il n'est pas membre de Québec
solidaire, M. Carney. C'est le gouverneur de la Banque d'Angleterre.
Est-ce que le
ministre préfère rester à la remorque des lobbyistes ou alors écouter les
économistes?
Le Président :
M. le ministre de l'Économie.
M. Pierre Fitzgibbon
M.
Fitzgibbon : Je connais M. Carney, je suis totalement en accord avec
ses commentaires. Tout ce que je dis, c'est qu'à ce moment-ci on ne peut pas
rejeter un projet sur la base de «peut-être». J'encourage continuellement les
promoteurs à continuer le travail et
j'encourage les promoteurs à regarder quels sont les marchés qui vont vouloir
prendre le produit en question. Et je
pense que, quand on aura les réponses à ces questions-là, avec mon collègue le
ministre de l'Environnement, avec qui
on travaille très étroitement, on va répondre aux questions puis on va devoir
se poser les mêmes questions que tout le monde se pose. On est en accord
complet avec ce que vous avez dit.
Puis
je pense que mon seul point aujourd'hui, c'est de dire : Laissons les
promoteurs faire leur travail. Je pense qu'on ne peut pas conclure prématurément. Ce n'est pas harmonieux avec
comment on veut travailler, au gouvernement, avec nos entreprises.
• (10 h 30) •
Le Président :
Question principale, M. le député de Nelligan.
Prospection et attraction des
travailleurs étrangers
M. Monsef
Derraji
M. Derraji : Merci, M.
le Président. Qu'ont en commun MonarK
Éco Fibre de Granby, Dorman dans les Laurentides,
Osmia à Baie-Comeau et Garneau textiles à Québec?
Ce sont toutes des entreprises, comme des dizaines d'autres au Québec,
qui ont dû fermer leurs portes faute de main-d'oeuvre.
Les études sont
claires, la pénurie de main-d'oeuvre est le principal frein à la croissance économique
de nos régions. L'immigration et la main-d'oeuvre rapportent... est une des
solutions incontournables à cette problématique.
Pour
des raisons idéologiques, la CAQ a décidé de fermer la valve de l'immigration. On a mis la pagaille dans le
Programme de l'expérience québécoise, on a réduit
drastiquement le traitement des dossiers dans le système Arrima. Pour preuve, seulement 32 immigrants ont reçu une invitation, au mois de
septembre, pour venir au Québec. 32 personnes, M. le Président.
Comment
le ministre peut-il tourner le dos aux régions et que dit-il aux
entrepreneurs qui doivent fermer leurs portes faute de main-d'oeuvre?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, tout au contraire, on
modifie le système d'immigration justement pour répondre aux besoins du
marché du travail et répondre à la pénurie de main-d'oeuvre.
M. le
Président, sous le gouvernement libéral, là, la façon dont les personnes
immigrantes étaient sélectionnées, c'était en fonction d'une grille de
sélection, en fonction d'un pointage, avec aucun lien avec le marché du
travail. On a adopté
le projet de loi n° 9, M. le Président, pour réformer la façon dont on
sélectionne justement pour que, lorsqu'il y a un emploi qui est disponible, on
accueille une personne immigrante qui puisse y répondre en fonction de son
expérience, en fonction de son
talent, en fonction de son éducation, M. le Président. C'est logique, mais ça
n'avait pas été fait par le Parti libéral.
L'autre point, M. le Président, lorsque le
député de Nelligan nous dit : Il y a seulement eu 32 invitations dans
Arrima au mois de septembre, bien, c'est
32 offres d'emploi validées, M. le Président. On a répondu à toutes les
demandes qui avaient été versées par
les employeurs. Alors, M. le Président, ce qu'il faut dire aussi, c'est qu'avec
Arrima on a décidé d'inviter les
3 700 personnes qui avaient déposé leurs dossiers au Québec, ici, qui
étaient présents ici, M. le Président. On
invite ceux-ci en priorité, comme on s'y était engagés au moment de l'adoption
du projet de loi. Alors, M. le Président...
Le Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...on pourrait aller beaucoup plus rapidement si
on avait le concours du Parti libéral, comme c'est le cas avec le projet
de loi n° 9.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Nelligan.
M. Monsef Derraji
M. Derraji :
M. le Président, aucune leçon de recevoir du gouvernement caquiste qui est fier
aujourd'hui d'envoyer 32 invitations.
Le 16 octobre dernier, le ministre de l'Emploi annonçait une aide
financière pour aider les entrepreneurs à aller chercher des travailleurs à l'étranger. Par contre, le ministre de
l'Immigration, depuis un an, lui, a complètement paralysé le système d'immigration au Québec. Concrètement, on envoie des
entreprises faire le démarchage à l'international sans s'assurer que les
employés qu'ils trouveront pourront bénéficier d'une voie rapide vers la
résidence permanente.
Est-ce que les ténors économiques peuvent se
lever...
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Bien, M.
le Président, vous savez, au gouvernement du Québec, on fait quelque
chose que le Parti libéral n'avait pas fait, on travaille en collaboration. Je travaille en
collaboration avec mon collègue du Travail, hein, on a ouvert des bureaux
d'immigration régionaux dans toutes les régions du Québec, dans 50 villes
au Québec justement pour régionaliser
l'immigration, pour faire en sorte qu'on s'installe dans les bureaux de
Services Québec, puis, lorsqu'un
employeur ou un entrepreneur a besoin
de main-d'oeuvre, bien, il n'aille cogner qu'à une seule place s'il y a des
travailleurs locaux avec le ministère de l'Emploi, sinon à l'étranger avec le
ministère de l'Immigration, qui vont les accompagner.
On travaille avec le ministère des Relations internationales aussi pour le recrutement
à l'étranger. Mon collègue du Travail a annoncé un programme pour
soutenir les entreprises.
Mais il y a une chose qui est sûre, M. le
Président, lorsqu'on va à l'étranger...
Le Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...pour recruter des personnes immigrantes, il
faut qu'elles répondent aux besoins du marché du travail. Et on s'assure
de cela en collaboration de tous nos ministères.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député. Vous êtes le seul à avoir la parole.
M. Monsef Derraji
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Les entreprises ont besoin d'employés pour croître. La Fédération
des chambres de commerce du Québec, le Conseil du patronat,
le bureau de coopération internationale interuniversitaire, personne ne
comprend où s'en va le gouvernement avec sa politique migratoire. Personne.
Le ministre
doit reconnaître qu'il nuit à nos entrepreneurs et au développement économique
du Québec. Va-t-il, dès maintenant,
faire la chose qui s'impose, et rectifier le tir, et arrêter de nuire à la
prospérité de nos entreprises partout au Québec?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration, la parole vous appartient.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, je vous dirais, avec égard, que les propos de mon collègue sont un
peu sévères. Tout ce qu'on fait, M. le
Président, c'est de faire en sorte de mieux accompagner les entreprises,
notamment dans le recrutement des travailleurs étrangers temporaires, de faire
en sorte aussi que les personnes qu'on accueille au Québec, elles ont les outils pour bien s'intégrer, bien se
franciser. Toute la démarche du gouvernement d'accompagner dès l'étranger,
avec des agents d'aide
à l'intégration, des personnes immigrantes pour que, dès le départ, elles
puissent se sentir comme chez elles
au Québec, dans toutes les régions du Québec... Est-ce que le député de
Nelligan, M. le Président, est contre ça, le fait qu'on offre plus de cours de français, qu'on offre des
allocations en francisation, qu'on enlève le plafond de cinq ans pour
suivre un cours de francisation...
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette :
...et qu'on les accompagne dans les différentes régions du Québec, pas juste à
Montréal? Est-il contre ça?
Le Président :
Question principale. M. le chef du troisième groupe d'opposition.
Protection du territoire
agricole
M. Pascal
Bérubé
M. Bérubé : M. le Président, une des grandes richesses du
Québec, que certains oublient, ce sont nos terres agricoles. Pourtant, le
gouvernement de la CAQ y va d'un décret pour construire en zone agricole, même
quand d'autres terrains sont disponibles.
Il donne ça à qui? Pas à la relève agricole. 94 hectares qu'on donne à
Google pour un centre de données.
Le
président de l'UPA Montérégie, Christian St-Jacques, a constaté durement
l'attitude de la CAQ face aux terres agricoles.
Je le cite : «Ce
gouvernement semble vouloir détruire le territoire agricole.» Les terres
agricoles, M. le Président, ce n'est pas des champs libres qui attendent seulement qu'un condo ou
qu'une entreprise viennent s'installer sur son territoire.
Je demande au premier ministre de renoncer à ce site, de
proposer un site alternatif. Je lui demande également d'arrêter
de contourner la Commission de protection du territoire agricole.
Le
Président : M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, je me
rappelle d'un Parti québécois qui connaissait bien Beauharnois, qui
s'intéressait à
l'économie régionale. On parle d'un projet de 450 emplois payants dans une
région qui en a bien besoin. On
parle de la possibilité d'échanger
des terres, c'est-à-dire de prendre des terres qui sont plus ou moins utilisées
pour l'agriculture, et de les
échanger contre des terres, actuellement, qui ne sont pas zonées agricoles,
puis de permettre, dans ces terres-là, de faire de l'agriculture, mais permettre aussi de créer 450 emplois pour
450 familles, des emplois beaucoup mieux payés que la moyenne des salaires au Québec. Comment le Parti
québécois peut-il être contre le développement économique régional?
Le Président :
Première complémentaire. M. le chef de l'opposition officielle, à vous la
parole.
M. Pascal
Bérubé
M. Bérubé :
M. le Président, encore une fois, n'importe quoi. La question porte sur le
zonage agricole. Oui à Beauharnois, oui aux
emplois. Mais est-ce qu'on peut trouver un autre site pour accueillir cette
compagnie qui veut venir à l'insistance du premier ministre, qu'on ne taxe pas,
d'ailleurs, Google? Donc, notre demande : on peut trouver un autre
site puis respecter les règles, respecter le territoire agricole. On est
capables de faire preuve d'imagination.
Je
demande au premier ministre de regarder d'autres sites pour créer ces
emplois-là. Puis, tant qu'à ça, il devrait les taxer aussi.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, le chef du PQ traite le dossier comme si c'était simpliste.
C'est sûr que, si demain matin on était capables de mettre la future
usine sur un terrain qui n'est pas zoné agricole, bien, on l'aurait fait depuis
longtemps. M. le Président, il y a des
enjeux plus compliqués que ça, entre autres les approvisionnements en
électricité.
Mais
ce que vient de nous dire le Parti québécois, là, puis je veux bien comprendre,
c'est qu'il n'est pas prêt à échanger
les terres agricoles — donc, au total, il y aura la même quantité de terres
agricoles — pour
créer 450 emplois payants dans une région qui en a bien besoin. Je
comprends que le Parti québécois, ça va mal, ses affaires.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du troisième
groupe d'opposition. Vous êtes le seul à avoir la parole.
M. Pascal
Bérubé
M. Bérubé :
M. le Président, vous aurez noté la condescendance du premier ministre à
l'égard de son ancienne formation politique.
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement. D'ailleurs, à ce
propos...
Une voix : ...
Le Président : M. le chef du
premier groupe d'opposition, on ne commence pas cela! Sur ce propos-là, non,
également. M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, on ne prête pas d'intentions, on
n'utilise pas de langage injurieux non plus envers un membre de cette
Assemblée. Je demanderais que le collègue retire ses propos.
Le
Président : Et je viens de le dire, de faire... et d'être
prudent, de ne pas utiliser ces termes, de ne pas commencer cela. M.
le... poursuivez la question, s'il vous plaît.
M. Bérubé :
M. le Président, rien ne dure toujours. Le premier ministre l'apprendra un
jour. Récemment, le premier ministre a eu un invité, puis il lui a dit
que l'Union nationale, maintenant, ça s'appelait la CAQ. Je l'invite de ne pas s'inspirer des pratiques de l'époque où on
envoyait nos meilleures ressources aux grandes entreprises étrangères. Je lui
demande également de ne pas confondre le nationalisme et l'affairisme.
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, ça serait venu de Québec solidaire de dire : Je refuse 450 emplois en région, j'aurais été
moins surpris. Est-ce que le PQ est en train de négocier une fusion avec Québec
solidaire? Ça a tout l'air de ça.
Le
Président : Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent. Je vous demande à nouveau votre attention.
On poursuit la période de questions.
Des voix : ...
• (10 h 40) •
Le Président : S'il vous
plaît! Ne vous interpellez pas. La parole appartient maintenant à la députée de
Saint-Laurent. À vous la parole, madame.
Évaluation des apprentissages des élèves
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Pendant des années, le ministre de l'Éducation a dénoncé le gonflage de notes. Dans l'opposition, il l'a dénoncé. Lorsqu'il est devenu ministre, il l'a dénoncé. Au mois
d'avril, il a envoyé une directive, il a fait la tournée des médias, il a dit : C'est fini, au Québec,
le gonflage de notes. La FAE a dit : Bravo! C'est déjà un
premier geste, mais on aimerait ça
que vous alliez plus loin. Pourquoi, M.
le Président? Parce qu'il y a
un enseignant sur 10 qui subit des pressions pour augmenter ses notes afin d'atteindre des
cibles de résultat. La réponse du ministre dans sa réforme de l'éducation, dans son projet de loi mammouth, c'est de venir consacrer le droit de
gonfler les notes par les directions d'école. C'est insultant pour ses
ex-collègues.
Où est ce
ministre, celui qui était supposé d'être un ancien enseignant, qui est supposé
de défendre ses ex-collègues? Où est ce ministre? Tout le monde le
cherche.
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge : M. le
Président, ma collègue veut parler du
projet de loi n° 40, le projet
de loi qui va moderniser notre gouvernance scolaire, qui va éliminer les élections
scolaires. Les Québécois disent : Enfin, un projet de loi qui va permettre d'avoir moins de bureaucratie, plus de services
aux élèves.
Mais je suis
content qu'elle s'intéresse à d'autres éléments parce qu'il y a
un paquet de bonnes mesures dans ce projet
de loi là, et là, aujourd'hui, elle s'intéresse aux articles qui viennent valoriser et reconnaître
l'expertise des enseignants. Et je
suis très content de voir que, dans ce projet
de loi là, on a des articles qui
viennent consacrer le fait qu'on ne peut pas changer...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le ministre, poursuivez votre réponse.
M. Roberge : Oui. Mon Dieu! Je pense qu'ils ne veulent pas de maternelle quatre ans, on comprend pourquoi, là.
Des voix :
...
Le
Président : Non, non,
mais, à nouveau, je vais vous demander... Il y a une question
qui a été posée, je vous ai demandé d'être attentifs. Il y a une réponse
qui est donnée, je vous demande d'être attentifs et je vous demande à nouveau
votre collaboration sans commentaire. M. le ministre, poursuivez votre réponse.
M. Roberge :
Merci. Alors, on a des articles, dans ce projet de loi là, qui vont venir
consacrer l'expertise professionnelle des enseignants, leur reconnaître que le
geste d'enseigner, mais le geste d'évaluer, c'est un geste professionnel
qui va être dévolu aux enseignants et qu'une
direction d'école, une commission
scolaire — puis le ministre, bien sûr, il ne s'en
mêlera pas — mais
ne pourrait pas, sans consulter...
Le Président :
En terminant.
M. Roberge : ...un enseignant ou une enseignante, toucher à
ses notes. Et ça, c'est ce qui se fait depuis des années...
Le Président :
Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Marwah
Rizqy
Mme Rizqy : C'est pauvre, mais c'est pauvre en argument.
C'est déconcertant. Non seulement il ne l'a pas écrit, son projet
de loi, il ne l'a même pas
lu. 34, paragraphe 2°, «in fine» : Bien oui, on va consulter. Puis,
quand on se fie à la CAQ, si le passé
est garant de l'avenir, leurs consultations, c'est : Eh! on vous a entendus, mais on ne
vous écoutera pas, hein?
Donc, ici, M. le
ministre, si vous avez un petit peu de respect pour vous-même, retirez ce
projet.
Des voix :
...
Le Président :
Non! Encore une fois, M. le leader du gouvernement...
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, on s'adresse à vous et on devrait faire preuve de respect
entre collègues, M. le Président.
Le Président :
Ah! bien, vous aurez compris...
Des voix :
...
Le
Président : Non, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Ce n'est pas ce que l'on souhaite, je pense.
Évitez ce genre de propos. Continuons
la période de questions en collaboration et, de fait, de se permettre de bien entendre et
de comprendre ce qui est dit de part et d'autre. Mme la députée... M.
le...
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge : Bien oui, j'attendais la question.
M. le Président, c'est quand
même quelque chose d'entendre le
Parti libéral se lever pour dénoncer deux choses qu'ils n'ont pas faites quand ils
étaient là. D'abord, une directive très claire qui s'est appliquée dans
la première année du mandat. Donc, dès juin 2019, on est venus arrêter le
gonflement automatique des notes par le gouvernement lui-même. Pendant des années au gouvernement libéral, puis le
dernier ministre de l'Éducation était d'accord avec ça, les
58 % et 59 % aux examens ministériels, peu importe l'évaluation
des profs, peu importe ce qu'avaient
dit les profs, c'était augmenté artificiellement. Ce n'est plus le cas. Et là,
en plus, on arrive avec une loi qui vient donner davantage d'autonomie
aux enseignants, mais ils sont contre ça. J'essaie de les suivre.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Marwah
Rizqy
Mme Rizqy :
Pendant ce temps-là, les enseignants aussi essaient de le suivre, M. le
Président. Unanimement dénoncé, le tripotage de notes par les directions
d'école serait désormais parfaitement légal, moyennant une simple consultation
des enseignants et enseignantes concernés. C'est à mille lieues de ce que les
enseignants et enseignantes demandaient au ministre de l'Éducation. Ça, c'est
la Fédération autonome de l'enseignement, M. le Président.
Est-ce
que le ministre de l'Éducation peut être conséquent avec lui-même, avec sa
tournée des médias, puis dire qu'effectivement il s'est trompé, et qu'il
reconnaît, et qu'il retire ce passage de sa loi?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge :
Bien, M. le Président, c'est un excellent article, c'est un excellent passage
de la loi qui vient donner plus d'autonomie aux professionnels et aux
enseignants, qui vient consacrer l'expertise des enseignants. J'ai hâte aux auditions particulières, j'ai hâte à l'article par
article. Si on peut bonifier cet article-là ou d'autres, on va le faire lors de
l'étude du projet de loi, bien sûr, mais le
principe fondamental, il est là et il est là pour la première fois. On est là
pour la première fois. Les gens ne
peuvent plus, en toute impunité, changer les notes sans passer par les
enseignants, et ça, c'est une première et c'est une belle avancée dont
je suis très fier.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Verdun.
Sauvegarde des bâtiments
patrimoniaux
Mme Isabelle
Melançon
Mme Melançon :
Dans plusieurs régions du Québec, des bâtiments à valeur patrimoniale sont
délaissés, mal entretenus puis démolis une
fois leur sécurité compromise. On appelle ça une démolition par abandon.
Récemment, la maison Pasquier à
Neufchâtel, dans la région de Québec, a été démolie en pleine nuit. On pouvait lire
dans le Journal de Québec : 300 ans d'histoire rayés de la carte. Cette maison
ancestrale a survécu à la Conquête, mais elle n'a pas survécu à
l'inaction de la CAQ. La ministre aurait pu agir. Elle aurait dû agir, mais
elle a refusé de le faire.
Cet
été, j'ai proposé que soit réalisé un grand inventaire de tous les bâtiments
avec un intérêt patrimonial afin qu'on puisse être proactifs dans leur protection et
éviter des destructions par abandon. Aucun retour. Pas vraiment
de surprise de ma part.
Alors, je demande ici
à la ministre : Fera-t-elle cet inventaire, oui ou non?
Le Président :
Mme la ministre de la Culture et des Communications.
Mme Nathalie
Roy
Mme Roy :
Merci, M. le Président. Je suis heureuse d'avoir la question parce
qu'effectivement, à l'égard du patrimoine
bâti, ça bouge beaucoup sur le terrain et ça bouge beaucoup également au sein
de mon cabinet et du ministère de la
Culture parce qu'on est en train de revoir la loi qui avait été adoptée en 2011
par la députée de l'Acadie. Et nous sommes
en train de voir dans quelle mesure cette loi, lorsqu'on l'applique, la Loi sur
le patrimoine culturel, eh bien, elle n'est pas parfaite. Il y a des
limites.
Par
ailleurs, à cet égard, j'aimerais vous souligner, M. le Président,
qu'actuellement — c'est
une nouvelle qui est passée sous le radar — depuis le
11 février dernier, la Vérificatrice générale du Québec est dans les
bureaux du ministère de la Culture et des
Communications pour enquêter sur la gestion du patrimoine immobilier au
ministère de la Culture et des
Communications, et son étude s'étend également à la Loi sur le patrimoine
culturel. Et, vous savez, dès son arrivée,
ça faisait 111 jours que j'étais là, j'étais ravie parce que j'ai
dit : Il y a des choses avec cette loi-là qui soulèvent des
questions, et j'ai donné toute ma collaboration à la vérificatrice.
Le Président :
En terminant.
Mme Roy :
Et nous avons hâte de voir ses recommandations parce que je pense qu'il y aura
des modifications à apporter.
Le
Président : Première complémentaire. Encore une fois, la parole
n'appartient qu'à la députée de Verdun. Nous voulons tous entendre la
question.
Mme Isabelle
Melançon
Mme Melançon :
L'inventaire, oui ou non? Pas de réponse. Alors, les Québécois sont à même de
constater la lente agonie de notre
patrimoine. Il faut agir de façon structurante. La dernière année, là, les cas
s'empilent : la villa Livernois à Québec,
la maison Legendre à Sainte-Croix, l'église Saint-Coeur-de-Marie sur Grande
Allée, la maison Pasquier, rasée en pleine nuit. Des grands pans de
notre histoire disparaissent.
Après
un an, la ministre a-t-elle un plan de match, des mesures concrètes à elle?
Peut-être arrêter d'être ravie et passer enfin à l'action?
Le
Président : Mme la ministre de la Culture et des
Communications, votre réponse. Vous êtes la seule à avoir la parole.
Mme Nathalie
Roy
Mme Roy : Oui. Mme la
députée me cite des cas. Je pourrais lui souligner plusieurs autres cas où son
ancien collègue le ministre Fortin a
lui-même autorisé la démolition des bâtiments. Cela dit, je suis prise avec ça,
hein? Quand les
libéraux ont autorisé des démolitions, il y a un moment où on ne peut pas
revenir à l'encontre de ce qui a été
annoncé par le ministère.
Cela
dit, j'ai pris des actions très proactives. Depuis mon arrivée en fonction, M. le Président, j'ai signé des avis d'intention de
classement pour plusieurs édifices, plusieurs terrains, parce que c'est
important de les protéger...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
Mme Roy :
Ça ne semble pas les intéresser.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
Mme Roy :
Parce que c'est important de les protéger.
Le Président :
En terminant.
Mme Roy :
Je vais vous revenir, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire...
Des voix :
...
Le
Président : Encore
une fois, je vous demande d'être attentifs tant aux questions qu'aux réponses.
Continuez de cette façon-là en collaborant. Mme la députée, à vous la
parole.
Mme Isabelle
Melançon
Mme Melançon : Merci
beaucoup. Alors, M. le Président, je veux juste vous rappeler, là : pas de plan de match, on vient de l'entendre. Pas de réponse à ma
première question. On n'en a pas, de plan. Vous ne faites rien ces
temps-ci.
Puis
là je vais vous donner l'occasion de faire quelque chose, d'agir. Pour le
monastère des Moniales dominicaines de Berthierville, il y a des audiences du Conseil du patrimoine culturel
qui ont eu lieu en juin. Vous attendez quoi pour agir? L'hiver s'en
vient, tout se dégrade actuellement.
Alors, qu'attend
la...
Le Président :
M. le leader du gouvernement, je...
M. Jolin-Barrette : C'est la troisième complémentaire de la députée
de Verdun, M. le
Président, qu'on ne s'adresse
pas à vous puis qu'on s'adresse directement au ministre.
Le
Président : Je comprends. Vous le savez, vous vous adressez à la présidence. Terminez votre question,
s'il vous plaît. Réponse par
la suite.
Mme Melançon : Merci. Alors, M. le Président, invoquez le
principe de précaution, classez ce bâtiment, je vous appuie là-dedans...
Le Président :
Mme la ministre de la Culture et des Communications.
Mme Nathalie
Roy
Mme Roy : Écoutez, j'ai déjà manifesté un avis d'intention, et ça nous vaut actuellement une poursuite en cour. Alors,
la députée, elle est députée depuis assez longtemps
pour comprendre que l'exécutif ne se mêle pas du judiciaire. Je ne vais pas commenter ce qui se passe à
Berthierville, il y a un procès en cours actuellement, mais, vous savez
quoi, la loi, je l'applique. J'ai mis un avis d'intention de classement
pour ce bâtiment, et nous voulons préserver le monastère de Berthierville.
Des voix :
...
• (10 h 50) •
Le Président :
S'il vous plaît!
Mme Roy : Et mon plan
d'action, M. le Président, est aux impressions, j'allais dire, puisque je travaille actuellement avec ma collègue la ministre
des Affaires municipales, et vous
serez ravi de voir ce que nous préparons pour le patrimoine bâti d'ici
peu.
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît!
Mme Roy : Vous serez
ravie, madame.
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Merci à toutes et à tous. Cela met fin à la période de questions et réponses orales.
Motions sans préavis
Le Vice-Président (M. Picard) :
Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons procéder... nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis. En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis,
je reconnais maintenant un membre du groupe formant l'opposition officielle. M.
le député de Robert-Baldwin.
M. Leitão : Merci beaucoup, M.
le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de
présenter la motion suivante conjointement avec le député de Chomedey :
«Considérant les propos récents du ministre
de l'Économie concernant les investissements de la Caisse de dépôt
et placement du Québec dans l'entreprise WeWork;
«Que l'Assemblée
nationale réitère solennellement l'importance de préserver l'indépendance de la Caisse
de dépôt et placement du Québec et ce, conformément aux dispositions de l'article 4
de sa loi constitutive.»
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y
a consentement pour débattre de cette motion?
M.
Caire : Il y a
consentement, sans débat, M. le Président.
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Picard) :
Pas de consentement?
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Donc, je reconnais maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition.
Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal :
Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre
de la motion suivante conjointement avec la députée de Maurice-Richard, le député de Jonquière, le député
de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :
«Que
l'Assemblée nationale rappelle que le premier ministre a affirmé à plusieurs
reprises depuis son élection qu'il n'était "pas achetable", qu'il était "hors de
question de reculer devant des groupes de pression" ou de céder à la
pression des lobbys ;
«Qu'elle prenne acte de la
rencontre entre le premier ministre et trois grandes entreprises québécoises
liées à l'industrie des circulaires, qui tentent de se soustraire à des
réglementations adoptées ou en discussion dans certaines municipalités du
Québec ;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'agir en conformité avec les
affirmations précédentes du premier ministre, et de
respecter les décisions des municipalités concernant la distribution des
circulaires.»
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il
y a consentement pour débattre de cette motion?
M.
Caire :
Pas de consentement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) : Pas de consentement. Je reconnais maintenant un
membre du troisième groupe d'opposition. Mme la députée de Gaspé.
Demander au gouvernement d'exiger des plateformes numériques étrangères
de faire
doubler au Québec les productions
tournées au Canada et d'utiliser la version
québécoise du doublage en français pour les contenus
diffusés au Québec
Mme
Perry Mélançon : M. le Président, je sollicite le consentement des
membres de cette Assemblée afin de présenter,
conjointement avec la députée de Verdun, le député de Rosemont, le député de
Chomedey et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de prendre les moyens pour
obliger Netflix ou autres plateformes numériques étrangères à faire doubler au
Québec leurs productions originales tournées en sol canadien;
«Qu'elle
demande au gouvernement de prendre les moyens pour obliger Netflix ou autres
plateformes numériques étrangères
à utiliser la version québécoise du doublage en français lorsqu'elle est
disponible, et ce, pour l'ensemble de leurs contenus diffusés au
Québec.»
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il
y a consentement pour débattre de cette motion?
M.
Caire :
Consentement, sans débat, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Consentement, sans débat. Oui, M. le
leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet : Oui, merci, M. le Président. Je vous
demande d'appeler le vote par appel nominal, s'il vous plaît.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Donc, il y aura vote par appel
nominal. Est-ce que, Mme et MM. les whips, ça va?
Mise aux voix
Que les députés en faveur de cette
motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Bérubé (Matane-Matapédia),
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Hivon (Joliette),
M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine),
Mme Perry Mélançon (Gaspé).
M. Jolin-Barrette
(Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), M. Girard
(Groulx), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne),
Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), M. Martel
(Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain),
M. Bonnardel (Granby), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Caire
(La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), Mme Laforest
(Chicoutimi), Mme Rouleau
(Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Samson
(Iberville), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Lacombe (Papineau),
Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi),
Mme Girault (Bertrand),
M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx
(Côte-du-Sud), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle
(Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger
(Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle),
M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois),
Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Tremblay
(Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget),
Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice),
M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard
(Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines),
M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac),
M. Lamothe (Ungava), M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette
(Roberval), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont), M. Tanguay (LaFontaine), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière),
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Rousselle
(Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte), M. Fortin
(Pontiac), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan),
M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent),
M. Ciccone (Marquette).
M. Nadeau-Dubois
(Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont),
Mme Labrie (Sherbrooke), Mme Lessard-Therrien
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), M. Zanetti (Jean-Lesage).
M. Ouellette
(Chomedey), Mme Fournier (Marie-Victorin).
Le Vice-Président (M. Picard) : Que les
députés contre veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? M. le
secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 104
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. La motion est adoptée.
Oui, M. le leader du troisième groupe
d'opposition.
M. Ouellet : Oui. Merci,
M. le Président. J'aimerais qu'une
copie de cette motion soit envoyée à la présidence de l'Union des
artistes, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Ce sera fait, M. le député.
Je reconnais maintenant un membre du groupe
formant le gouvernement. M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur.
Souligner la cinquième Semaine québécoise
des directions d'établissement scolaire
M. Roberge :
M. le Président, je veux saluer la présence de l'Association des directions
d'école dans les tribunes et je
sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion
suivante conjointement avec la députée de Saint-Laurent, la députée de Sherbrooke, la députée de Joliette, la
députée de Marie-Victorin et le député de Chomedey :
«Que
l'Assemblée nationale souligne la cinquième édition de la Semaine québécoise
des directions d'établissement scolaire, qui se déroule du 21 au
25 octobre sous le thème Engagées pour la réussite;
«Qu'elle souligne la contribution structurante des
directrices et directeurs d'établissements d'enseignement dans l'organisation scolaire, au soutien
du personnel-école et dans la persévérance et la réussite de nos jeunes;
«Qu'elle reconnaisse la rigueur, le dévouement
et la compétence de ces leaders pédagogiques essentiels pour nos écoles;
«Qu'enfin,
elle reconnaisse le dévouement et l'engagement quotidiens de ces acteurs auprès
des élèves, des parents et de la communauté pour permettre à chaque
enfant de se développer à son plein potentiel.»
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le ministre.
Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de
cette motion?
M.
Caire :
Consentement, évidemment, M. le Président, sans débat.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Picard) :
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Adopté.
Avis touchant les travaux des
commissions
À la rubrique Avis touchant les travaux des
commissions, M. le leader du gouvernement.
M.
Caire :
Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission de l'économie
et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 15, Loi sur la Société de développement et de mise en
valeur du Parc olympique, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission de l'aménagement du territoire
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 16, Loi visant principalement
l'encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le
remplacement de la dénomination de la
Régie du logement et l'amélioration de ses règles de fonctionnement en
modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine
municipal, aujourd'hui, après
les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à
18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission
de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 34,
Loi visant à simplifier le processus d'établissement des tarifs de distribution
d'électricité, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures
et de 15 heures à 18 heures, à la salle Pauline-Marois;
La Commission des finances entreprendra les
consultations particulières sur le projet de loi n° 37,
Loi visant principalement à instituer le
Centre d'acquisitions gouvernementales et Infrastructures technologiques
Québec, aujourd'hui, de 15 heures à 18 h 15, à la salle Marie-Claire-Kirkland.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le leader du gouvernement.
Pour ma part,
je vous avise que la Commission des transports et de l'environnement se réunira
en séance de travail le jeudi 24
octobre, de 8 h 30 à 9 heures, à la salle RC.161, afin de
statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat
d'initiative concernant le bureau de projet du tunnel Québec-Lévis.
Renseignements sur les travaux
de l'Assemblée
Nous sommes
maintenant à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le
leader de l'opposition officielle.
• (11 heures) •
M. Tanguay :
Oui, M. le Président. Et, à l'instant, j'allais vous demander de suspendre
quelques instants pour permettre au
président de l'Assemblée nationale de nous entendre sur cette importante
question, Renseignements sur les travaux
de la Chambre, mais on vient de m'informer, en toute honnêteté, qu'il a
d'autres engagements. Alors, on en prend acte, et je l'apprends à l'instant, et je serais heureux, donc, de
procéder devant vous, dans ce contexte particulier là, où des engagements empêchent notre président à nous,
les 124 autres députés, qu'il vienne présider ici. Mais je le comprends
puis j'en prends acte à la seconde même.
Alors, Renseignements sur les travaux,
M. le Président, je vous réfère aux pages 21 et suivantes du Feuilleton
et préavis, le sujet et le préavis qui a été donné par le gouvernement
d'une motion, d'une motion, soit dit en passant, M. le Président, qui n'a pas été débattue et sur laquelle l'Assemblée
nationale n'a pas statué depuis 15 ans, excusez du peu, motion pour fixer de façon péremptoire, puis c'est
tout à fait en ligne avec le règlement de l'Assemblée nationale, M. le Président, l'article 146, mais on pourra nous
le plaider puis dire : Bien, c'est justement en ligne avec
l'article 146, on respecte le
règlement. Mais je vous situe dans un contexte où c'est un véhicule procédural
qui n'a pas été débattu et sur lequel on n'a pas statué depuis 15 années, M. le Président, et je vous réfère
entre autres, et j'y vais de mémoire, à l'article 180 du règlement de l'Assemblée nationale qui est à
l'effet suivant : «Au besoin, la procédure est déterminée en tenant compte
des précédents et des usages [à] l'Assemblée [nationale].»
Ici,
c'est l'article 146, mais il y a des façons de faire, il y a des
décisions, et c'est pour ça que l'appel a été lancé à notre président pour être là, des décisions qui
ont été rendues notamment au début de l'année 2019, de cette année, qui
faisaient en sorte que de nous dire, à tout
le monde autour de la table, les oppositions, mais aussi, aussi au
gouvernement : Parlez-vous, entendez-vous, il faut que l'Assemblée,
l'institution qu'on représente fonctionne.
Alors, ce préavis, M.
le Président, a été donné dans le contexte du projet de loi n° 40,
le projet de loi 40, loi modifiant la
Loi sur l'instruction publique relativement à l'organisation et à la
gouvernance scolaires. Le projet de loi n° 40, c'est sur les commissions scolaires, notamment. Il
a été présenté le 1er octobre dernier. Il y a eu, dès le lendemain... et, lors de sa présentation, les trois oppositions et
les collègues indépendants avaient dit : On veut des consultations
générales, c'était très clair, parce
que ce n'est pas anodin. À notre sens, c'est important de faire... sur des
aspects démocratiques, d'administration
de nos écoles, fondamental d'avoir une consultation générale. Le gouvernement,
le 3... bien, le lendemain, le
3 octobre, M. le Président, le gouvernement a décidé qu'il limitait... et
ça a été confirmé, excusez-moi, le 2 octobre, limitait : Ça ne sera
pas des consultations générales, ça va être des consultations particulières.
Nous avons déposé une liste de
116 groupes à entendre, Québec solidaire, 40 groupes, Parti
québécois, 16 groupes. Et là, M. le Président, neuf jours se sont écoulés sans que l'on n'ait aucun signal.
Nous avons reçu, donc, le 12 octobre une première proposition, où là
il y avait 19 groupes proposés.
Pendant
ce temps-là, M. le Président, sur un projet de loi tout à fait fondamental,
qu'est-ce qu'il arrive? Il y a des groupes, même, qui appellent au secrétariat
de la commission pour dire : Bien, nous, on veut être entendus, on
aimerait ça être là, est-ce qu'on
peut être entendus?, et ainsi de suite. On en dénombre, la dernière fois que
j'ai regardé, une cinquantaine, de groupes
qui ont sauté sur le téléphone, envoyé des courriels : On veut être
entendus. Ce n'est pas anodin. Et, à tous les jours, il y a des ajouts. On n'a pas eu de retour sur des propositions
qui a fait en sorte, M. le Président, pour nous, de passer de 116 à un
nombre un peu plus restreint. Nos demandes sont légitimes, ne sont pas
excessives.
Le
18 octobre dernier, le gouvernement... et l'accord n'a pas été conclu,
mais le gouvernement avait une liste de 40 groupes. Le gouvernement veut réduire la liste, ne veut pas
entendre tout le monde, il arrive avec une liste de 40 groupes. Et
nous avons eu l'occasion, nous, de revenir au gouvernement rapidement pour
dire : Bon, on pourrait-u inclure ces personnes-là,
et ainsi de suite? Là, ce matin, M. le Président, coup de théâtre, coup de
théâtre ce matin, la motion, qui n'a pas
été débattue, sur laquelle on n'a pas statué depuis 15 ans, fait en sorte,
de façon péremptoire, par ce véhicule qui est prévu, oui, à l'article 146... mais vous avez compris que je ne
suis pas là, je suis sur le fait qu'il faut se parler, il faut se
comprendre, puis la jurisprudence récente de notre président actuel en faisait
notamment écho, on est passés de la proposition
de 40 groupes, à matin, avec un préavis, ça ne sera pas 40, ça va être 31,
puis ça va finir là. Donc, on a retiré neuf groupes. J'ai la liste, pas
besoin de vous les mentionner, M. le Président.
Alors, en ce sens-là, M. le Président, il y a une
procédure, la procédure d'exception, qu'on appelle le bâillon. Puis le bâillon,
c'est un poids politique. Le bâillon, ce n'est pas anodin. Il y a des semaines,
il y a des sessions qu'on n'en fait pas, des bâillons. Et ça, oui, c'est un
véhicule procédural qui est prévu à notre
règlement, mais ce n'est pas anodin et on ne perd aucune occasion pour le dénoncer. L'article 146,
cette motion-là qui nous fait passer de consultations générales à particulières, à 116, à 40, à 31, c'est un débat
d'une heure, ils vont user de leur majorité, puis c'est un véhicule qui est prévu. Ça, M. le Président, c'est un
bâillon parlementaire, pas juste pour les collègues députés, mais pour
les groupes qui voulaient être
entendus. Je vous ai référé à 50, jusqu'à maintenant, qui lèvent la
main, puis ça s'ajoute à tous les jours. Bien, ces 50 là, vous pouvez être assuré, plus que la moitié ne seront
pas là, là, parce qu'il y en a juste
31 puis il y en a beaucoup qui ne seront pas inclus.
Alors,
M. le Président, c'est important pour nous, comme groupe parlementaire, de le
souligner. Au-delà de la procédure, au-delà du véhicule, il y a des
éléments qui ne sont pas anodins. Puis bâillonner les parlementaires, M. le Président, c'est une chose, mais bâillonner les
groupes... Est-ce que le gouvernement peut donc confirmer qu'il n'appellera
pas la motion? Parce qu'il l'a déjà fait. Le
gouvernement a déjà déposé une motion sur le projet de loi n° 9, a déposé
une motion sur l'immigration et le
projet de loi n° 2 en matière de cannabis. Il l'avait déposée comme outil
de négociation, si vous voulez. Quand
j'ai dit que ça fait 15 ans que ça n'avait pas été débattu, ça fait
15 ans que ça n'a pas été débattu, il n'avait pas appelé la motion.
Alors,
M. le Président, quand on dit entre groupes, puis je conclus là-dessus, entre
députés, entre groupes parlementaires, nous
avons à nous faire confiance, on a à travailler ensemble... Rappelez-vous,
première proposition, ça a pris neuf jours, le 12 octobre, après le 3 octobre, pour avoir une réponse
là-dessus, et là on refait d'autres offres, silence radio et, boum! arrive la motion, l'épée de Damoclès. Ça, c'est
bâillonner, entre autres, les groupes. Le gouvernement, et c'est ma question,
peut-il confirmer qu'il n'appellera pas,
comme il l'a fait — puis
c'était un outil qui était déplorable et je le déplore — la motion et ne restreindra pas le
débat sur le projet de loi n° 40, qui est un projet de loi fondamental?
Le Vice-Président
(M. Picard) : M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, le député de LaFontaine
vient de faire une démonstration de pourquoi on a des difficultés dans
cette Assemblée, M. le Président. Parce que, M. le Président, on souhaite
s'entendre avec les oppositions. Dans la majorité des projets de loi, on
s'entend.
Vous savez, M. le
Président, dans ce cas-ci, je suis capable de m'entendre avec la deuxième
opposition, de m'entendre avec la troisième
opposition, je vous le dis, M. le Président. Par contre, pour l'opposition
officielle, qu'est-ce qui arrive? On a présenté une première motion avec
19 groupes, 14 des 19 groupes étaient demandés par l'opposition
officielle. Une deuxième proposition, 31 groupes, 20 d'entre eux étaient
de l'opposition officielle. Troisième motion, 40 groupes,
24 d'entre eux étaient de l'opposition officielle. La dernière motion qu'on a
présentée, M. le Président, avec 40 groupes,
qui est une consultation qui est substantielle en termes de nombre de groupes,
M. le Président, vous en conviendrez si vous faites l'historique des
consultations que nous tenons... D'ailleurs, je les réfère aussi à l'époque de
2014‑2018, une consultation avec 40 groupes, c'est une grande
consultation, M. le Président.
Je
comprends que l'opposition officielle souhaiterait avoir des consultations générales
sur ce projet de loi là. Nous n'allons
pas vers des consultations générales, ce sera des consultations particulières.
À partir du moment où ce sont des consultations
particulières, ce que l'opposition officielle tente de faire, c'est d'avoir,
d'une façon détournée, des consultations générales. M. le Président, 113 groupes. L'opposition officielle,
là, c'est ce qu'ils veulent, 113 groupes. Autrement dire, M. le Président, qu'ils souhaitent paralyser le
Parlement, hein? Ils souhaitent paralyser le fait qu'il y ait étude du
projet...
Le Vice-Président
(M. Picard) : Non, je vous demanderais d'être prudent dans vos
propos, M. le leader du gouvernement, s'il vous plaît. Il n'y a pas de
paralysie ici, là.
• (11 h 10) •
M. Jolin-Barrette : D'accord, M. le Président. M. le Président, à 113 groupes, c'est... comment je pourrais le qualifier? C'est
discutable, à tout le moins, discutable, discutable, mais c'est la stratégie
du Parti libéral. Plutôt que de vouloir s'entendre avec le gouvernement, avec les autres groupes d'opposition, ça fait en sorte, M. le
Président, qu'on est forcés,
si nous souhaitons pouvoir étudier les projets de loi, de déposer une motion
prévue à l'article 146.
Alors,
moi, M. le Président, ce que je dis au leader de l'opposition officielle, c'est que nous avons jusqu'à demain pour nous entendre. Écoutez, M. le Président, la dernière motion à 40 groupes, ce que le Parti libéral nous dit : 23 de plus. C'est
ça, la position du Parti libéral, toujours plus. M.
le Président, on demande de faire
preuve de raisonnabilité du côté du Parti libéral. Et, si, si, M. le
Président, le Parti libéral faisait preuve de raison, on réussirait à
s'entendre. Parce que l'autre point, M. le Président, que je vous ai mentionné, c'est que je pourrais m'entendre avec le
deuxième et le troisième groupe d'opposition, mais la motion que nous déposons nous force, à mon grand désarroi, par
la force des choses, à pénaliser le deuxième et le troisième groupe d'opposition, M. le Président.
Alors, voyez-vous, si on avait une bonne collaboration du Parti libéral, si le Parti libéral voulait faire
fonctionner le Parlement, s'ils mettaient de l'eau dans leur vin, M. le
Président...
Des voix :
...
Le Vice-Président
(M. Picard) : Écoutez, là, il y a une personne...
Des voix :
...
Le
Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît! Il y a une personne
qui a la parole, c'est le leader du gouvernement. Tout à l'heure, nous avons entendu le leader de
l'opposition officielle. Je vous demanderais d'être calmes, on s'écoute.
M. Tanguay :
Question de règlement, M. le Président. M. le Président, il y a une ligne fine,
quand on plaide sur le fond, qu'il ne
faut pas traverser. Je n'ai pas eu de rappel au règlement, puis j'ai toujours
la réflexion de dire : Je ne veux pas
nuire à mon propos en allant au-delà de ce qui est accepté. Là, on nous prête
des intentions. Il dit : Si on ne voulait pas nuire, nous autres, comme si on voulait nuire. Je vous en prie, je
vous le demande très respectueusement, qu'il fasse son argument sur le
fond sans nous insulter, il n'a pas besoin de ça.
Le Vice-Président
(M. Picard) : M. le leader du gouvernement, soyez prudent dans
vos propos.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je suis prudent, mais les propos
du député de LaFontaine dénotent une ironie certaine, je pourrais dire ça ainsi. M. le Président, d'ici demain, là,
on est capables de s'entendre avec le Parti libéral s'ils font preuve de raisonnabilité. Alors, je tends la
main au Parti libéral du Québec pour dire : Nous pouvons ensemble
constituer une liste de groupes qui sera à la satisfaction à la fois de
la deuxième opposition, et de la troisième opposition, et de l'opposition
officielle, et du gouvernement. Nous tiendrons des consultations particulières
qui sont larges, élargies à 40 groupes.
C'est très large, M. le Président. Alors, j'en appelle, M. le Président, à la
collaboration des collègues dans ce Parlement
parce que, M. le Président, pour les trois prochaines années, on est ensemble,
puis il faut que ça fonctionne ensemble.
Alors, j'appelle à mon collègue de l'opposition officielle à nous revenir
aujourd'hui avec une proposition qui est sensée pour qu'on puisse
s'entendre, de consentement.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. M. le leader du deuxième groupe
d'opposition.
M. Nadeau-Dubois :
Bon, M. le Président, le leader de l'opposition est un fin plaideur, mais...
Une voix : ...
M. Nadeau-Dubois :
... — pardon,
c'est l'attitude, des fois on confond — mais, je veux dire, le leader du gouvernement, le leader du gouvernement est
habituellement un fin plaideur, mais là, sur ce coup-là, vraiment, sa stratégie
rhétorique a la subtilité et la délicatesse
d'un lutteur sumo dans un magasin de porcelaine. La stratégie est assez grosse,
là, il nous dit : C'est à cause
du Parti libéral qu'on est obligés de marcher sur les pieds des deux autres
oppositions. Tout le monde voit ici la volonté du leader du gouvernement de
diviser les oppositions sur cette question-là. J'ai des mauvaises nouvelles pour lui. Je ne ferai pas tout
l'historique que le leader du gouvernement a fait parce que les dates qu'il a
nommées, elles sont objectives, mais je veux insister sur trois
éléments.
Premier élément,
les trois oppositions ont demandé des consultations générales sur ce projet de
loi là, ça a été refusé par le
gouvernement. Pourquoi est-ce qu'il y avait une demande de consultations
générales de ce côté-ci de la Chambre? Parce
que ce n'est pas un projet de loi technique, ce n'est pas un projet de loi
banal, c'est un projet de loi majeur, pour reprendre un adjectif qu'aime
bien le premier ministre, c'est un projet de loi qui va réorganiser
complètement notre réseau d'éducation et qui
touche directement un des paliers de notre démocratie, palier de notre
démocratie qu'on peut ne pas aimer,
qu'on peut aimer, ça reste quand même un palier de démocratie. Donc, ce n'est
pas un projet de loi banal, d'où cette demande unanime des trois
oppositions de consultations générales.
Deuxième
élément sur lequel je veux insister, il y a eu des discussions entre les
bureaux de leader parlementaire dans
les derniers jours, les dates ont été données par le leader du gouvernement, et
ces discussions-là n'étaient pas plus difficiles
et n'étaient pas plus longues que ce qui est la norme entre bureaux du leader,
c'est-à-dire, oui, les oppositions en
demandent un peu plus, le gouvernement serre un peu la vis. Ça, M. le
Président, là, c'est «business as usual», c'est comme ça que ça se passe, et les oppositions finissent par mettre de
l'eau dans leur vin, le gouvernement aussi, il y a une négociation qui a lieu,
et on finit généralement par s'entendre. Et ces discussions-là, elles n'ont pas
été plus longues que d'habitude dans le cas du projet de loi n° 40,
ce n'est pas vrai.
Troisième
élément sur lequel je veux insister, en déposant la motion, comme le
gouvernement l'a fait, il vient couper court
aux discussions. Il vient, encore une fois, avec une subtilité franchement...
en fait, avec aucune subtilité, là, il vient se créer un rapport de force pour dire : Vous êtes mieux de mettre
de l'eau dans votre vin, sinon demain le party est fini, on adopte la
motion. Ce n'est pas très subtil comme stratégie, là, on va dire les choses comme
elles sont. Les fils sont un petit
peu gros. C'est genre des gros câbles d'acier, là, les fils qui organisent
cette fine stratégie de la part du gouvernement, et là
on essaie donc de mettre de la pression sur les oppositions pour que les
oppositions cassent et puis qu'on ait moins de groupes en commission
parlementaire. C'est ça, la
stratégie. On est même allé tellement loin dans cette stratégie qu'on
avait une motion qui était discutée avec une quarantaine de groupes et que, là,
ce qu'on retrouve dans le feuilleton ce matin,
c'est une trentaine, en fait 31 groupes pour être exact. Donc, on a même
rembobiné par rapport à où on s'était entendu avec certaines formations
de l'opposition. Donc, encore une fois, la stratégie n'est pas très subtile.
En terminant,
j'ai entendu le leader du gouvernement dire : Il n'y a rien là d'exceptionnel, une
trentaine de groupes, c'est quand même pas pire. Allons voir, allons
voir dans les projets de loi récents qu'on pourrait comparer au projet de loi n° 40 pour voir combien de groupes avaient été entendus et combien de
séances d'auditions particulières s'étaient tenues.
Prenons un exemple, le projet de loi n° 86, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance des
commissions scolaires en vue de rapprocher l'école des lieux de décision et
d'assurer la présence des parents au sein de l'instance décisionnelle de la commission scolaire. Non, non, ce n'est pas un
extrait du communiqué de presse du gouvernement actuel, c'est le titre d'un projet de loi déposé par le précédent
gouvernement qui, comme le titre nous le montre bien, avait un objectif semblable, similaire. On n'est pas sur
des projets de loi qui sont dans deux univers différents. C'est des projets
de loi qui portent sur la même chose, l'organisation et la gouvernance du
réseau scolaire.
Combien de
groupes avions-nous entendus, M. le
Président, en 2016, lors du dépôt de
ce projet de loi? Combien? La réponse : 61 groupes, le
double, le double de ce qui est dans la motion actuellement au feuilleton, deux
fois plus.
Deuxième exemple, projet de loi n° 10,
pour lequel on avait peu d'affection, c'est le moins qu'on puisse dire, à Québec
solidaire, un projet de loi qui venait réorganiser un autre réseau de services publics, le réseau
de la santé. Combien de groupes avaient été entendus, M. le Président, à
l'époque? 61 groupes, le double, le double de ce qu'il y a dans le feuilleton
ce matin.
Alors là, je
veux bien qu'on veuille procéder rapidement au niveau du projet de loi n° 40. C'est un projet de loi
qui enthousiasme le ministre.
Il est au pouvoir, c'est son droit. Mais, quand on se fie, d'une part, aux
coutumes qu'on a généralement lorsqu'il vient le temps de négocier la liste des
groupes qui vont aller en auditions particulières et, d'autre part, quand on se fie à des projets de loi similaires qui ont été débattus dans cette Assemblée à la précédente législature,
ce qu'on remarque, c'est que, là, le gouvernement pousse le bouchon un peu trop
loin.
Donc,
j'invite, moi aussi, le leader du gouvernement à faire preuve de modération, à s'asseoir avec
les oppositions, à s'entendre sur une
liste de groupes qui pourrait être bien davantage semblable au nombre
de groupes qui ont été entendus dans
le cas du projet de loi n° 10 et du projet
de loi n° 86
à la précédente législature. Les exemples, ils sont là. Et pourtant, et pourtant c'est un gouvernement, le gouvernement précédent, qui n'était pas reconnu pour ses grandes vertus de
consultation, on se rappellera plusieurs bâillons à l'époque. Mais, même
ça, il y avait une soixantaine de groupes. Alors,
s'il vous plaît, là, qu'on se rassoit, qu'on discute et qu'on
s'entende sur une motion beaucoup plus raisonnable, beaucoup moins exagérée.
Parce qu'on soit pour ou contre le projet de loi, M. le Président, je me
répète, c'est un projet de loi important, c'est un projet de loi majeur, il y a
des précédents dans notre processus puis à la précédente législature.
Il me semble qu'on est capables de se rapprocher de la moyenne plutôt que
d'aller avec une motion qui est extrêmement restreinte à l'heure
actuelle, M. le Président.
• (11 h 20) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de prendre la parole. Évidemment, je ne ferai pas toute la nomenclature du droit et des jurisprudences qui nous gouvernent. Le collègue de
l'opposition officielle a démontré la
prétention des oppositions, que nous partageons. Même chose du côté du collègue
de la deuxième opposition concernant l'ampleur des discussions que nous
avons eues.
J'aimerais quand même apporter la précision
suivante, M. le Président : c'est la troisième fois qu'on nous met de la pression avec une motion déposée en
feuilleton. La première fois, c'était pour le p.l. n° 2
sur le cannabis et la deuxième fois
sur le p.l. n° 9 sur l'immigration. Donc, on est rendus à une
troisième épée de Damoclès sur nos têtes pour arriver à négocier une
entente pour entendre des groupes.
Je veux juste
vous rappeler, M. le Président, le dépôt du projet de loi se fait le
1er octobre, nous envoyons nos groupes le 3 octobre, première
motion reçue du gouvernement le 12 octobre, on a eu d'autres propositions
le 16 et le 18 octobre. M. le
Président, nous sommes en discussion, et je pense que le temps que nous avons pris, il était nécessaire,
légitime. Il ne faut pas faire les choses à moitié. L'abolition des commissions scolaires, on enlève un droit démocratique à nos citoyens et citoyennes. Je
pense que l'Assemblée nationale est tout
à fait dans son droit de demander
d'avoir un débat juste, avec rigueur
avec les groupes qui sont concernés pour avoir l'ensemble de la population
du Québec concernée par ce projet de loi qui va leur
enlever des droits.
La précision
que je voudrais rajouter, M. le
Président, c'est que, dans les discussions
que nous avons eues avec le gouvernement, on nous dit, et j'ai preuve à l'appui, que, dans les discussions
que nous aurons, soyez assurés que les groupes
qui seront consultés, qui seront ici en commission parlementaire,
auront un délai de deux semaines pour pouvoir se préparer. Quand je lis
la motion et je regarde à quelle date nous serons convoqués, M. le Président, seulement
une semaine sera laissée aux groupes pour se présenter et se préparer. Ce n'est
pas ce qui nous avait été annoncé.
Donc, j'ai beaucoup
de misère aujourd'hui d'entendre le gouvernement nous dire :
Bien, écoutez, c'est l'opposition
officielle, les méchants, j'ai
l'opportunité d'avoir une entente avec la deuxième et la troisième opposition.
À ce que je sache, M. le Président, on n'a pas donné notre consentement encore. Nous avions des discussions. Évidemment, dans les groupes qui avaient
été proposés par le gouvernement, il y en avait certains avec lesquels on était
d'accord, peut-être pas à 116, mais, à certains, on était d'accord. Donc, il y
avait des discussions qui se menaient.
Ce qui
m'horripile le plus aujourd'hui dans cette motion, M. le Président, c'est que, si
on l'adopte, bien, on va siéger un
lundi. Donc, en plus de se voir imposer un nombre de groupes moindre que ce qui
était en négociation, M. le
Président, on va commencer à siéger encore un lundi. Et là, M. le Président, j'entends la vice-première
ministre nous dire que c'est important d'avoir une conciliation travail-politique,
c'est important de faire la place à la famille en matière de vie politique. Là, on va siéger, encore une fois, possiblement
un lundi, imposé par le gouvernement. Donc, évidemment, M. le
Président, on est en désaccord avec
la motion, d'une part, parce
que ce n'est pas le nombre de groupes
avec lequel on s'attendait. Et je pense
que le gouvernement pourrait avoir une oreille attentive sur
certaines demandes de la société
civile, notamment de se faire entendre, parce que,
oui, tel que le leader de
l'opposition officielle nous a fait
mention, le téléphone sonne et les courriels rentrent de gens intéressés
à participer au débat. Mais surtout, M. le Président, de se faire imposer dans la motion, encore une fois, l'opportunité que le gouvernement saisit d'utiliser dans le règlement
le fait qu'on puisse siéger un lundi,
pour nous, c'est un immense préjudice. Encore une fois, pour les
députés de régions, qui doivent être
dans leur comté à rencontrer leurs citoyens d'être malheureusement... être obligés d'être déplacés à Québec pour faire les commissions
parlementaires, évidemment on est totalement en désaccord.
Donc, je
terminerais là-dessus, M. le
Président : si le climat est
mauvais, si l'ambiance, elle est putride, la seule et unique responsabilité
incombe au gouvernement. C'est à lui de décider de la façon dont nos travaux se
gouvernent et d'être capable de trouver,
dans cette ambiance, un semblant d'air frais. M. le Président, je suis tanné
que ça sente mauvais. J'ai hâte que le gouvernement mette un peu de
pouche-pouche dans ses actions. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Oui?
M. Tanguay : ...M. le
Président, trois, quatre points.
Premier élément, on a demandé... Parce
que le leader du gouvernement a dit
113, 113. On a demandé des groupes, on a commencé la discussion, on couperait
court à la discussion. À la
fin, M. le Président, nous étions rendus, sur les 40 qu'ils
proposaient, à en ajouter 23, ça aurait fait 63, 63 groupes.
Premier élément.
Mon collègue
leader du deuxième groupe
d'opposition l'a bien dit, a cité des
exemples. Je vais rajouter un seul exemple,
le projet de loi n° 157, à l'époque, présenté par notre collègue
de Soulanges, sur le cannabis, ils avaient entendu 60 groupes. Puis savez-vous — je
vous le donne en mille — qui
était porte-parole de la CAQ? C'était l'actuel leader du gouvernement, puis ils avaient
entendu 60 groupes, M. le Président.
Les consultations, ce n'est pas pour les oppositions
d'empêcher le gouvernement de danser en rond, c'est pour entendre le
monde qui ont de quoi à dire puis qui lèvent la main. Je ne me répéterai pas,
mais à répétition ils veulent s'inscrire
dans le débat. Ils ont de quoi à dire, on peut-u les écouter? Puis les
consultations, c'est pour bonifier un projet de loi. Je ne prétends pas que le gouvernement affirme que son projet de
loi, il est final, puis qu'il ne veut pas débattre, puis qu'il ne veut pas le bonifier, puis qu'il
n'est pas perfectible. Si c'est ça, qu'ils le disent. Mais c'est pour le
bonifier, c'est le processus.
Et
finalement, M. le Président, je suis content que notre collègue leader adjoint
du gouvernement soit là, le collègue de
La Peltrie, parce que je vais le
citer puis lui lever mon chapeau. Le 6 avril 2017, qu'a-t-il dit? Je le cite : «Mme la Présidente, une institution comme l'Assemblée
nationale doit vivre de son règlement, c'est clair, mais doit vivre aussi
de la façon dont il s'applique, de ses us et
de ses coutumes. [...]Attention, il y a la lettre du règlement et il y a
l'esprit du règlement.» Fin de la citation.
M.
le Président, on ne peut pas travailler comme ça. On se parle, on est rendus à
63, il y a d'autres discussions à y
avoir. Le gouvernement peut-il confirmer qu'il ne va pas exécuter ce qui,
procéduralement parlant, se résume à un bâillon des oppositions puis à
un bâillon du monde qui ont de quoi à dire?
Le Vice-Président (M. Picard) :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Bien, M. le
Président, la réponse à cette question-là, et je lui ai répondu tout à l'heure,
M. le Président, à l'effet que, d'ici
demain, nous pouvons toujours échanger et arriver à une situation de compromis,
il n'en va que de la bonne foi de l'opposition officielle.
M. le
Président, par ailleurs, vous savez, quand le leader de l'opposition officielle
dit : Le gouvernement fait un bâillon,
bon, premièrement, non. Deuxièmement, c'est prévu dans nos dispositions, hein?
Quand le leader de l'opposition officielle
dit : Écoutez, ce n'est pas l'esprit, la lettre, tout ça, l'article, il
est très clair, à 146, M. le Président, et je sais que le leader de l'opposition officielle le connaît. Mais
au-delà de ça, lorsqu'on parle de consultations, le projet de loi n° 40, l'idée derrière le projet
de loi n° 40 faisait partie intégrante des engagements du
gouvernement lors de la dernière campagne électorale. Le fait de respecter nos engagements, le fait de livrer à la
population ce qu'elle désire, ce pour quoi elle a voté, le message
qu'elle a envoyé au Parti libéral, je pense que vous l'avez eu, votre consultation
à ce moment-là. Alors, M. le Président, M.
le Président, nous entendrons de nombreux groupes, nous entendrons de nombreux
groupes, et, d'ici demain...
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît! Il y a une personne
qui a la parole. M. le leader du gouvernement, allez-y.
M. Jolin-Barrette : Oui. Et, d'ici demain, M. le Président, moi, je
suis ouvert, le leader de l'opposition officielle a mon numéro de téléphone
cellulaire, M. le Président, je demeure à sa disposition, M. le Président. Et
je peux vous dire, par contre, que
l'action du gouvernement sera toujours liée en conformité avec ce à quoi on
s'est engagés pour les citoyens du Québec, et nous, on va respecter nos
engagements.
Le Vice-Président (M. Picard) :
M. le leader de l'opposition officielle.
M. Tanguay :
Il dit qu'il est ouvert, prêt à négocier, parfait. Je pourrais déposer la
liste, c'est 63, puis on s'entend, puis on fonctionne là-dessus. Ça a
toujours été, dans des projets de même, 60, dans ces environs-là, c'est 63.
Bravo!
Le
Vice-Président (M. Picard) : M. le leader du gouvernement. Mais,
pour la négociation, je vous demanderais de faire ça à l'extérieur.
M. Jolin-Barrette : Je suis d'accord avec vous, M. le Président. Je
suis d'accord avec vous, M. le Président, mais le leader de l'opposition officielle m'invite tellement à discuter avec
lui, alors je vais simplement lui répondre, M. le Président. Lorsqu'on
nous dit : C'est ça ou ce n'est rien, je ne pense pas, M. le Président,
que c'est faire preuve de...
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) : Je pense qu'on a fait le tour de la
question, là. L'article 146 est clair, il permet l'inscription au feuilleton d'une telle motion
pour tenir des consultations. Ça, c'est très clair. Mais, comme le président
l'a déjà indiqué, nous vous encourageons à
vous parler, à vous entendre. Parce qu'il est vrai que nous sommes encore
ici pour trois ans, et j'ai bien, aussi,
senti un appel, un appel au dialogue du leader de l'opposition officielle, et
le même appel a été senti de tous les
leaders, incluant le leader du gouvernement. Donc, je vous encourage fortement
à discuter au cours des prochaines
heures, des prochains jours et de vous entendre parce que la population du
Québec regarde ce qui se passe ici et la population veut que le
Parlement fonctionne correctement. Merci. C'est tout.
M. le leader du gouvernement, pour la...
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Picard) :
Oh! oui, Mme la leader adjointe de l'opposition officielle.
Mme Melançon :
J'ai aussi une requête à vous faire, M. le Président. Donc, c'est une
intervention en lien avec l'organisation des travaux parlementaires.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Allez-y.
• (11 h 30) •
Mme Melançon :
Merci, M. le Président. Alors, le 11 septembre, la députée de Westmount—Saint-Louis ainsi que le député de Marquette ont adressé une demande de mandat
d'initiative à la Commission de la santé et des services sociaux
concernant les services offerts aux personnes autistes, notamment lorsqu'elles
atteignent l'âge de la majorité. Le 1er octobre dernier, j'ai interpelé le leader... le leader du
gouvernement, pardonnez-moi, à cette même rubrique. On nous avait indiqué qu'il y aurait des échanges
entre les groupes parlementaires et que ça pourrait avoir lieu prochainement.
Mais le «prochainement», M. le Président,
honnêtement, on n'a pas la même définition. Ça fait déjà 42 jours que la
députée de Westmount—Saint-Louis a formulé sa demande. Et on n'a
toujours pas de réponse en ce sens. M. le Président, comme vous le constatez, ce n'est pas toujours facile de
faire affaire avec le leader du gouvernement. Alors, je vous demanderais, s'il
vous plaît, de peut-être vérifier, avec le leader, à quel moment on appellera
cette commission pour pouvoir justement vérifier si un mandat
d'initiative peut être appelé à ce... à ce sujet, dis-je.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la leader de l'opposition
officielle. Mais, dans un premier temps, je dois vous dire que cette question
relève de la commission. Et ça reviendra au président de la commission de
convoquer la commission.
Mme Melançon :
M. le Président, je vais être assez directe, là, mais je pense que c'est le
leader aussi qui peut quand même
offrir certaines opportunités pour que la commission puisse siéger. On sait
comment ça fonctionne, et vous et moi.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Oui, M. le leader de l'opposition... du
gouvernement. Excusez.
M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, ça ne peut être soulevé à
cette rubrique parce que ce n'est pas inscrit au feuilleton. C'est ce
que prévoit notre règlement. Alors, j'entends les propos...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette : Non. J'entends les propos de la députée de
Verdun, mais je ne pense pas que c'est le forum approprié et la bonne
rubrique.
Le
Vice-Président (M. Picard) : C'est tout? Donc, comme j'ai indiqué,
ça relève de la présidence de la commission.
Pour la suite de nos
travaux, M. le leader du gouvernement.
M.
Caire :
Je vous demande d'appeler l'article 1, M. le Président.
Affaires du jour
Projet
de loi n° 27
Reprise
du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président
(M. Picard) : À l'article 1, l'Assemblée reprend le débat
ajourné le 22 octobre 2019 sur l'adoption
du principe du projet de loi n° 27, Loi concernant principalement
l'organisation gouvernementale en matière d'économie et d'innovation.
Est-ce
qu'il y a des interventions? Il restait du temps à Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel. Je comprends qu'elle ne le
prend pas. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, la parole est à vous.
Mme
Kathleen Weil
Mme Weil :
Merci, M. le Président. Donc, il me fait plaisir, à mon tour, de m'inscrire
dans le cadre de ce débat sur
l'adoption du principe du projet de loi n° 27, Loi concernant
principalement l'organisation gouvernementale en matière d'économie et d'innovation, qui a été déposé en
cette Chambre le 12 juin dernier. Il s'agit d'une pièce législative qui
propose de nombreux changements à la
structure de plusieurs ministères, au premier chef, celui de l'Économie et de
l'Innovation, ainsi qu'au
fonctionnement d'Investissement Québec, dans le but d'offrir une sorte de
guichet unique en matière d'aide au développement économique.
Plus
spécifiquement, le projet de loi édicte d'abord la Loi sur le ministère de
l'Économie et de l'Innovation en précisant
la mission et les responsabilités du ministre, notamment en matière de commerce
international. Il réunit, sous le
chapeau du ministère de l'Économie, les dispositions relatives au Fonds de
recherche du Québec et à la Commission de l'éthique en science et en
technologie, et qui sont actuellement prévus dans la Loi sur le ministère de
l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie.
Le projet de loi
modifie ensuite la Loi sur Investissement Québec afin de réunir, sous un seul
chapeau, les responsabilités de soutien à la
croissance des entreprises, l'attraction des investissements et des talents
internationaux et d'appui à
l'exportation pour les entreprises québécoises. Cela impliquera notamment un
important transfert de personnel du ministère de l'Économie et de
l'Innovation vers Investissement Québec.
Finalement, le projet
de loi modifie le rôle de coordination du ministère des Relations
internationales et de la Francophonie en ce qui concerne l'action du Québec à
l'étranger et clarifie le rôle et les responsabilités des délégués généraux,
des délégués et des personnes responsables à l'étranger au sein de leur
représentation.
Comme
vous êtes à même de constater, M. le Président, c'est un projet de loi qui a
une portée large, très large, et qui
contient de nombreuses modifications. En effet, il ne modifie pas moins de
16 lois, il en abroge une et en remplace une autre tout en
modifiant trois règlements.
Les
consultations particulières ont permis le dépôt de 22 mémoires et
l'audition de 19 groupes, qui ont
éclairé l'ensemble des parlementaires
sur les tenants et aboutissants de cette vaste réforme et de la vision du gouvernement en la matière. Et, si la
volonté de concentrer les leviers de développement
économique et d'aide aux entreprises
au sein d'Investissement Québec a reçu une bonne part d'intérêt,
plusieurs zones d'ombre ont été signalées, signe qu'un
travail de bonification du projet de loi sera nécessaire lors de son
étude détaillée.
Tout d'abord, il y a
lieu de s'inquiéter quant à une possibilité de perte d'expertise au sein du ministère
de l'Économie. Selon les informations dont nous disposons, actuellement,
près de 500 employés seraient transférés du ministère vers
Investissement Québec. Il s'agit tout de même, M. le Président, d'un transfert
très, très important, qui représente possiblement
près des deux tiers des effectifs du ministère. Ceci soulève un certain
questionnement au sujet de l'expertise qui va demeurer au sein du
ministère de l'Économie pour assurer, notamment, la supervision de toutes ces
nouvelles fonctions et responsabilités dévolues à Investissement Québec.
En même
temps, le changement proposé soulève des enjeux de gestion de ressources
humaines. Une opération d'une telle
envergure doit être évidemment menée avec beaucoup de délicatesse, de finesse,
beaucoup de suivi, et d'ajustements, et de corrections au besoin.
D'ailleurs,
le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, lors des
consultations, est venu justement s'adresser
à cette question et souligner l'impact du transfert sur les employés, et je
cite leur mémoire : «Les articles 51 à 55 du projet de loi traitent du transfert de personnes employées au
ministère de l'Économie et de l'Innovation vers Investissement Québec. Selon les articles 51 et 54, les personnes
transférées devront être identifiées [...] le 30 juin 2020 et le transfert
sera effectif au plus tard le 1er octobre 2020», donc dans un an.
Et, selon le
syndicat, «bien que plusieurs personnes soient vraisemblablement identifiées
plus tôt que la date butoir du 30 juin 2020, certaines personnes pourraient
avoir moins de trois mois pour décider de leur avenir et réorganiser leur vie personnelle et familiale en raison d'un
changement de leur lieu de travail». Et ça, c'est le commentaire, donc, du
syndicat.
Et le syndicat anticipe aussi que les directions
régionales du ministère seront touchées et déménagées vers les bureaux régionaux d'Investissement Québec, ce qui
pourrait causer des difficultés. Prenons, par exemple, la région de la Côte-Nord, où le bureau régional du ministère est
situé à Baie-Comeau, et le bureau d'Investissement Québec, qui est situé à
Sept-Îles, à 200 kilomètres de distance. On ne pourra pas simplement transférer
les employés, évidemment, d'une ville à l'autre.
Il faudra faire oeuvre, donc, de grande prudence
puisque la main-d'oeuvre de ces organisations constitue évidemment une grande richesse pour le Québec, et je pense que tous les
gouvernements et tous les parlementaires sont bien sensibles à l'importance de la stabilité d'un milieu de travail, et
ça passe, dans un premier temps, par s'assurer que les employés soient
bien là où ils sont et que ça convient à leur vie de famille, la vie
professionnelle et la vie de famille.
Il s'agira,
en fait, donc, de répondre à l'appel à la prudence formulé par le Conseil du patronat dans son mémoire, et je cite : «Fusionner des sociétés ou des organismes qui offrent
des milieux de travail et des cultures organisationnelles différents n'est pas une tâche facile. Une gestion
prudente et intelligente de ce changement s'impose pour que cette fusion
soit un succès. Il est impératif de faire de
cette fusion une occasion d'enrichissement pour l'une et l'autre des
composantes, plutôt qu'une source de conflits potentiels.»
Un autre aspect du projet de loi qui mérite que
l'on s'y attarde, M. le Président, et ma collègue la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne
en a parlé, il s'agit de l'enjeu de la complémentarité — d'ailleurs,
plusieurs groupes l'ont évoqué — soit de faire attention à un potentiel de
dédoublement des actions dans le domaine de l'investissement de risque
et la nécessité d'agir en complémentarité.
• (11 h 40) •
Historiquement,
les fonds d'investissement privés, comme le fonds Desjardins pour le
développement régional ou encore le fonds d'investissement de la FTQ,
ont relativement bien couvert l'ensemble des secteurs économiques non couverts par les sociétés étatiques. En occupant ce terrain de façon plus marquée, il
faudra s'assurer d'une approche de
complémentarité entre Investissement
Québec et les acteurs déjà
présents sur le terrain, M. le
Président, afin de multiplier les investissements plutôt que de les placer en compétition. Évidemment,
ce n'est pas l'intention du gouvernement, mais c'est
des enjeux comme ça auxquels les parlementaires devront s'adresser pour trouver des
modifications, des amendements qui pourraient stabiliser... rassurer
tous et chacun qui agit dans ce domaine.
Et c'est d'ailleurs
l'avertissement que nous fait le Fonds de solidarité de la FTQ par la
voix de Gaétan Morin, qui disait,
dans Le Devoir, et je cite : «La mesure de complémentarité
[...] est enchâssée dans la loi, mais, dans les faits, sur le terrain, j'ai beaucoup, beaucoup
[...] d'exemples que je pourrais vous donner.» Puisque le gouvernement est en mesure de réaliser des
prêts à 0 % d'intérêt, ce que
les fonds privés ne peuvent évidemment pas faire, il faut être prudent de
s'assurer que l'on ne vient pas faire
compétition à ces fonds, qui pourrait provoquer un recul de leurs
investissements, ce qui ne servirait évidemment personne.
On se pose
aussi beaucoup de questions, M. le Président, au sujet de l'impact du projet de
loi sur le ministère des Relations
internationales. Ma collègue la députée de Bourassa-Sauvé en a d'ailleurs
parlé, elle a évoqué cet enjeu. Bien que
le gouvernement parle d'une consolidation des pouvoirs du MRI, la nature des
changements proposés semble plutôt aller vers une fragilisation et
réduction importante de son rôle.
Par exemple, alors que, jusqu'à ce jour, les
accords commerciaux entre le Québec et les autres juridictions relevaient du ministère des Relations
internationales, les modifications proposées laissent entendre que ce serait
désormais Investissement Québec qui
serait le mandataire des activités commerciales hors Québec. Il y a là, à notre
sens, un transfert de responsabilités
d'un ministère vers un organisme gouvernemental. Le projet de loi prévoit
toutefois l'établissement d'un comité
de liaison auquel doivent participer des représentants du ministère des
Relations internationales, du ministère de l'Économie et de l'Innovation et ainsi
qu'Investissement Québec, et le but de ce comité est de favoriser une meilleure
synergie d'actions économiques à l'international.
Moi,
ce que je vous dis, je pense que les parlementaires devront, lorsqu'ils
parleront du rôle du ministère, du MRI... c'est de bien comprendre l'importance d'avoir un ministère, ce
ministère, qui historiquement a joué un rôle très, très, très important d'affirmation, si on veut, de présence
québécoise partout dans le monde... joue bien son rôle aussi auprès des investisseurs, des entreprises pour promouvoir
leur présence dans toutes les régions du globe, et il ne faudrait pas
fragiliser, donc, ce rôle-là.
Alors, lors des consultations,
le Conseil du patronat a d'ailleurs recommandé que les
agences économiques régionales, qui ont une
expertise internationale sur le terrain, comme Montréal International et Québec
International, soient incluses dans
ce comité, une proposition qui tombe sous le sens et à laquelle le gouvernement
devrait accorder sa considération.
Le projet de loi
n° 27 propose aussi de transférer du ministère de l'Éducation supérieure
au ministère de l'Économie la responsabilité
des fonds de recherche du Québec. La vocation économique de ce dernier soulève
des enjeux et certaines inquiétudes quant à un possible impact sur les projets
de recherche qui seront financés. Il ne faudrait pas que la recherche
fondamentale, qui ne rapporte évidemment pas directement des bénéfices
comptables, fasse les frais d'une philosophie
de recherches uniquement axées sur la commercialisation. Par le fait même,
gardons en tête que des problèmes éthiques
dans le domaine de la recherche ont été soulevés par le passé parce que des
chercheurs se retrouvent en forte compétition
pour l'obtention de financement. Il y aura donc aussi lieu, lors de l'étude
article par article, de soupeser ces risques lors de l'étude détaillée.
M.
le Président, un autre point soulevé, d'une grande, grande importance, qui a
été soulevé et souligné par notre collègue la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne avec beaucoup de passion, je vous
dirais, M. le Président, j'ai eu l'occasion
de l'écouter ici, en Chambre... en effet, cette pièce législative s'accompagne d'un
décret qui soustrait Investissement
Québec à de nombreuses mesures de reddition de comptes et de transparence. Le gouvernement argumente que le Conseil du trésor pourra toujours requérir certaines informations, comme les
rapports d'investissement, le nombre d'employés à Investissement Québec et le salaire de ceux-ci, mais aucune garantie
n'est offerte que ces informations seront rendues publiques.
J'ai
eu l'occasion d'avoir des responsabilités en la matière,
et je sais comment ça fonctionne, et je vous dirais que le Québec a évidemment beaucoup de travail à faire pour une transparence
proactive. Et voici un exemple où on va dans le sens inverse. Il y a de la transparence statutaire, et, ici, on réduit
cette obligation de transparence. Donc, l'absence de transparence est en train de s'imposer, comme dans
plusieurs dossiers, ici avec le gouvernement, et c'est des reculs, et c'est
important qu'il y ait une voix forte du côté du gouvernement pour promouvoir cette question. Et d'ailleurs, à l'opposition, la CAQ jouait son rôle pour faire la promotion... donc, un projet de loi a été déposé. Donc, je pense que nous, on a une inquiétude ici, puis on le voit aussi dans le dossier des
trop-perçus d'Hydro-Québec, encore
une fois, l'impossibilité d'avoir l'heure juste dans
ce dossier et le dossier du troisième lien.
Donc,
la transparence, et la transparence proactive, est vraiment
le meilleur gage d'une saine gestion des fonds publics. Je suis convaincue que cet enjeu fera partie des discussions,
des échanges avec le ministre pour trouver une façon de s'assurer que, dans ce domaine-là, Investissement Québec sera toujours sous la loupe de la... comment dire, de
l'inspection et de la... comment dire, imputabilité qu'exige la loi.
Par ailleurs,
mentionnons que l'inquiétude formulée par la Protectrice du citoyen, puisque le
transfert de responsabilités du ministère
de l'Économie et de l'Innovation vers
Investissement Québec a pour effet net de soustraire les services aux entreprises du périmètre
juridictionnel de la protectrice... Je cite son mémoire, elle dit que, «dans
l'état actuel du projet de loi n° 27, des activités actuellement exercées par le personnel
du ministère de l'Économie et de l'Innovation, notamment dans les bureaux
régionaux, ne seront plus soumises à la compétence du Protecteur du citoyen
en vertu de la Loi sur Protecteur du citoyen».
Alors,
elle poursuit en disant que «considérant la nature des activités de la société
Investissement Québec et leur élargissement,
[compte tenu de] sa mission d'intérêt général, [compte tenu] le fait qu'elle
offre plusieurs services directs aux
citoyens et qu'elle exécute des mandats que lui confie le gouvernement en
matière d'administration de programmes d'aide financière, le recours au
Protecteur du citoyen permettrait à des citoyens — personnes morales ou autres — éventuellement lésés par les actes ou omissions de cette société,
de trouver un remède adéquat, et ce, sans nécessité d'un recours judiciaire».
Moi, je pense que ça, c'est une
intervention... évidemment, toutes les interventions étaient bonnes lors de
cette consultation, mais très, très important, je pense que le
gouvernement devrait être très sensible à cette recommandation.
Et, juste avant de
conclure, M. le Président, j'aimerais aborder l'enjeu plus global de la
compétitivité de nos entreprises, car, oui,
le projet de loi vise à faciliter l'aide au développement économique de nos
entreprises, mais l'accès aux capitaux n'est pas le seul frein auquel
elles sont confrontées. Plusieurs groupes en ont fait mention, la pénurie de main-d'oeuvre, un dossier que j'ai eu à piloter,
en tant que ministre de l'Immigration, pendant des années, est donc une pénurie qui s'aggrave actuellement au Québec et
qui freine le développement de nos entreprises. Moi, je suis convaincue que le ministre de l'Économie est très sensible à
cette question. On connaît un peu son parcours, ce serait le premier à reconnaître que le gouvernement devrait mettre
toutes ses énergies pour trouver des solutions et des stratégies. Alors, les
manufacturiers exportateurs du Québec soulignent d'ailleurs qu'au premier
trimestre de 2019 près de 16 500 postes étaient à combler uniquement dans le secteur manufacturier. Le manque de
travailleurs constitue donc un défi constant pour les manufacturiers qui, faute de main-d'oeuvre, retardent de plus
en plus leurs projets d'investissement, et donc, ça, ça doit être une grande préoccupation pour le
ministre. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante révélait
d'ailleurs, dans son mémoire, que le manque
de main-d'oeuvre qualifiée est le principal obstacle en matière d'augmentation
de la production des entreprises.
Alors, après
une année au pouvoir, le gouvernement tarde toujours à mettre de l'avant une
approche globale et cohérente pour
faire face à la pénurie de main-d'oeuvre, une approche qui s'appuierait non
seulement sur la formation, mais aussi sur la rétention des travailleurs
expérimentés ainsi que sur l'apport des travailleurs issus de l'immigration, et
j'inclurais là-dedans les étudiants étrangers
et les travailleurs temporaires étrangers, qui sont une source extraordinaire
de talents pour nos entreprises.
• (11 h 50) •
Il
existe actuellement de nombreuses études qui font l'alliance, le mariage entre
immigration, diversité et innovation. Tout le secteur économique le
sait. J'ai eu l'occasion de participer à la conférence de Montréal, où des
études ont été présentées, et d'ailleurs...
Donc, c'est quand même un pilier important de l'innovation. L'argent, oui, mais
les ressources humaines, ça mène,
donc, toute cette innovation. Et d'ailleurs je cite la Conference Board de
2010 : «At every level we examined — individual, organizational, national and
global — immigrants
were associated with increased innovation in Canada.» C'est clair,
immigration et innovation vont de pair.
Alors,
je suis convaincue que le ministre de l'Économie et de l'Innovation comprend
parfaitement cette vérité et j'invite
donc le gouvernement à prendre la pleine mesure du potentiel des travailleurs
immigrants pour notre économie.
M.
le Président, vous me permettrez de conclure en mentionnant que, devant ce
projet de loi, nous devrons juger l'arbre
à ses fruits et nous espérons que la transparence élémentaire sera au
rendez-vous pour en faire une bonne évaluation. Notre collègue la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne a déjà eu l'occasion de faire part de
nos intentions face au projet de loi,
et je suis convaincue que l'étude détaillée du projet de loi permettra de
débattre de nombreuses bonifications afin d'en assurer le plus grand succès. C'est certainement dans cette attitude
constructive que l'opposition officielle s'y présentera. Alors, merci,
M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Est-ce
qu'il y a d'autres interventions? Oui, Mme la ministre.
Mme
Nadine Girault
Mme
Girault : Merci, M. le Président. Je souhaiterais adresser à cette
Chambre quelques mots sur projet de loi n° 27 de mon collègue le ministre de l'Économie et de
l'Innovation. D'abord, évidemment, je tiens à souligner et à saluer la participation active et enrichissante de nombreux
acteurs aux dernières consultations, plus particulièrement aux groupes à
vocation internationale, avec qui mon ministère a une longue tradition de
collaboration.
Le 18 octobre
dernier, le premier ministre Legault m'a confié un mandat de donner une
nouvelle impulsion économique au sein du ministère des Relations
internationales et de la Francophonie ainsi que dans le réseau des représentations du Québec à l'étranger. Depuis ce
moment, le ministère de l'Économie et de l'Innovation et moi-même travaillons ensemble sur un projet de loi qui nous
permettra d'en faire ainsi. Notre approche, depuis le début, est axée sur le développement économique du Québec,
l'attraction d'investissements étrangers, la diversification de l'économie
québécoise et l'accompagnement d'entreprises de toutes les régions qui ont des
projets d'investissements.
Alors, comme il est
stipulé dans le projet de loi, et comme vous l'expliquait mon collègue, les
ressources du ministère de l'Économie et de
l'Innovation qui sont chargées d'accompagner les entreprises en matière
d'exportation et de commerces
extérieurs se joindront à une équipe dédiée à l'international au sein
d'Investissement Québec. Ce projet de loi apporte, de ce fait, des changements très positifs pour le ministère des
Relations internationales et de la Francophonie.
Quatre modifications
importantes devraient plus particulièrement attirer votre attention.
Le
projet de loi, d'abord, vient concrétiser et renforcer le rôle de coordination
de mon ministère sur toute l'action internationale
du Québec. Cela sera notamment intégré dans un prochain plan de déploiement que
je vais souhaiter dévoiler en 2020, soit la stratégie internationale de
conquête des marchés étrangers.
De
plus, le projet de loi n° 27 vient renforcer le rôle des chefs de postes en
matière de diplomatie d'influence et de diplomatie économique. Le projet de loi n° 27
leur reconnaît un rôle de collaborateurs dans l'établissement des cibles et des
objectifs économiques sur leurs
territoires respectifs. Ainsi, les chefs de poste deviendront de véritables
chefs d'orchestre dans tous les
domaines affectant l'exercice de leurs fonctions. C'est une excellente nouvelle
pour mon ministère, M. le Président, et cela donne un mandat fort aux
femmes et aux hommes qui mettent à profit leurs talents pour accroître la
prospérité du Québec.
Le
projet de loi prévoit également la mise en place d'un comité de liaison qui
permettra une meilleure collaboration et
l'échange de plus d'informations entre mon ministère, Investissement Québec et
le ministère de l'Économie et de l'Innovation. Avec ces modifications, toutes les conditions sont réunies pour
favoriser une meilleure synergie dans l'action économique du Québec à
l'étranger.
Ce
projet de loi crée aussi l'obligation d'intégrer les nouveaux employés d'Investissement Québec qui
oeuvreront à l'étranger prioritairement au sein des représentations du Québec.
Ces dernières vont conséquemment augmenter leurs effectifs. Cela contribuera à augmenter la force de frappe économique du
ministère des Relations internationales et de la Francophonie dans le réseau des représentations du Québec à l'étranger, tel que s'était engagé à le faire le premier ministre.
Voici,
en résumé, les principaux changements qui seront apportés dans le projet de loi n° 27 et qui auront un impact positif sur la
loi du ministère des Relations internationales et de la Francophonie.
Finalement, comme je
l'ai dit plusieurs fois déjà, je travaille présentement à la mise à jour de la Politique
internationale du Québec. Ce n'est pas un
secret, le virage économique du ministère des Relations internationales et de
la Francophonie sera notamment le
noyau de cette mise à jour. Mais ce n'est pas tout, M. le Président, cette
prochaine mise à jour confirmera
également que nous allons poursuivre le travail actuel qui a permis depuis un
peu plus de 50 ans au Québec de s'affirmer sur la scène
internationale.
Pour le gouvernement,
l'appartenance du Québec à la francophonie et la promotion de sa culture
constituent les éléments centraux de son
action à l'étranger. La spécificité du Québec sur le plan linguistique ainsi
que l'originalité et le dynamisme de sa culture demeurent des atouts
historiques qui sont le socle de notre affirmation nationale.
Rappelons
que, sur le plan multilatéral, le Québec est membre de plein droit de l'Organisation internationale de la Francophonie. Il bénéficie également d'une représentation au
sein des délégations du Canada, auprès de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et
la culture, l'UNESCO, et du Conseil de l'Arctique. De plus, le Québec est impliqué activement auprès de l'Organisation
des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO. Il tisse
des liens avec l'Union européenne.
Je vous
l'assure, nous allons continuer à travailler en ce sens et à développer des
liens avec les nombreux États qui
sont friands du Québec et qui, plus que jamais, veulent collaborer avec nous
dans plusieurs domaines, dont l'éducation, la culture, l'environnement
et, oui, l'économie.
M. le
Président, je conclurai ainsi mon intervention en vous disant que ce projet de
loi nous permettra de faire des
avancées significatives. Mais, surtout, je crois fermement que ce projet de loi
nous permettra enfin de finalement briser le travail en silo qu'ont
connu nos deux ministères depuis beaucoup trop longtemps. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre des Relations internationales
et de la Francophonie. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mise aux voix
Puisqu'il n'y
a pas d'autre intervention, est-ce que le principe du projet de loi n° 27, Loi concernant principalement l'organisation gouvernementale
en matière d'économie et d'innovation... est-il adopté?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission de
l'économie et du travail
M.
Caire : M. le
Président, conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion
afin que le projet de loi n° 27, Loi concernant principalement l'organisation gouvernementale en
matière d'économie et d'innovation, soit déféré à la Commission de
l'économie et du travail pour son étude détaillée.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Picard) :
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix : Adopté
Le Vice-Président (M. Picard) :
Adopté. M. le leader du gouvernement, pour la suite de nos travaux.
M.
Caire : M. le
Président, pourriez-vous appelez l'article 18 du feuilleton, s'il vous
plaît.
Projet de loi n° 5
Prise en considération du
rapport de la commission qui en a fait
l'étude détaillée et des amendements transmis
Le Vice-Président (M. Picard) : À
l'article 18 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport
de la Commission de la culture et de l'éducation sur le projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi
sur l'instruction publique et d'autres dispositions à
l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux enfants âgés de 4
ans ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du
règlement par M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et
par Mme la députée de Saint-Laurent. Ces amendements sont déclarés recevables.
Y
a-t-il des interventions? M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur.
M.
Jean-François Roberge
M. Roberge : M. le Président, une question de
précision avant, juste pour être certain. Est-ce qu'on intervient sur les amendements à ce moment-ci ou on fait nos remarques sur le
projet de loi lui-même?
Le
Vice-Président (M. Picard) : C'est sur l'ensemble.
• (12 heures) •
M. Roberge : O.K., merci beaucoup. Alors, M. le
Président... On recommence. M. le Président — je vais retrouver mes repères — ça fait bien plaisir de faire une
intervention ici sur le projet de loi n° 5, qui va nous permettre de
déployer, à la grandeur du Québec, le programme exceptionnel des maternelles
quatre ans. Quand je dis : Déployer à la grandeur du Québec, non, malgré ce que certains en disent,
ce n'est pas ce qu'on appellerait mur à mur, parce qu'en réalité on va
offrir ce service. Il ne sera pas obligatoire, mais il va être enfin
accessible.
Beaucoup de gens ont discuté de plein
de manières du comment, comment on va y arriver, comment on va trouver le personnel, comment on va bâtir les classes,
comment on va aménager les locaux. On a un plan solide à cet égard, et
d'ailleurs en témoigne très bien l'implantation réussie de 250 classes
supplémentaires cette année. 250 classes de plus, une hausse de plus de 60 % en une seule
année. C'est assez rare qu'un gouvernement augmente un service, déploie un
service et l'augmente de plus de 60 %
en une seule année. Donc, on voit bien que le gouvernement est prêt à mettre
les ressources et qu'il y a les locaux nécessaires et le personnel
nécessaire. Il faut y aller tout simplement dans l'ordre.
Mais j'ai le goût de
vous parler, M. le Président, du pourquoi on fait ça. Pourquoi on déploie notre
service de maternelle quatre ans? D'abord, parce qu'on est convaincus qu'il
faut agir tôt. Il ne faut pas seulement agir tôt, il faut agir tout le long du primaire, tout le long du
secondaire, en formation générale des adultes, en formation professionnelle.
Mais il est capital d'agir rapidement auprès de nos tout-petits. On sait bien
qu'un dollar investi plus tôt dans la petite enfance
va rapporter beaucoup plus. On sait bien qu'un geste posé auprès de nos
tout-petits va nous permettre de préparer ce jeune-là à ses
apprentissages scolaires puis à prendre sa place dans la société. Il y a un
chercheur bien connu au Québec qui dit qu'il
est préférable de faire des enfants forts que de réparer des adultes brisés. Et
je suis bien d'accord avec lui. Et c'est pour ça que le gouvernement
travaille en équipe, à trois ministères, trois ministres, à trois équipes,
Santé, Famille, Éducation, pour agir tôt et
de manière concertée et efficace.
Et,
en faisant ça, on ne fait pas figure de pionniers, malheureusement. J'aimerais
bien dire qu'on fait figure de pionniers,
mais, non, on est en rattrapage. On est en rattrapage sur ce que font nos
voisins, sur ce qui se passe en Europe. D'ailleurs, au mois de juillet dernier, j'étais à Paris pour la
rencontre des G7, des ministres de l'Éducation qui préparaient le G7 de Biarritz, et la déclaration finale des
ministres de l'Éducation du G7 était à l'effet que nous nous engagions tous à
déployer le service préscolaire de qualité dans le réseau de l'éducation, pas
dans des services de garde, mais dans le réseau
de l'éducation parce que c'était la meilleure façon de lutter contre les
inégalités, c'était la meilleure façon de garantir la réussite éducative et scolaire du plus grand
nombre. Alors, ça, c'est le consensus scientifique, c'est le consensus
politique, le G7 s'en va dans cette direction-là tout au complet.
Et
maintenant il faut le faire correctement, et c'est pour ça qu'on travaille si
fort à élaborer un cycle du préscolaire, un programme, pas un programme
d'apprentissage formel avec des bulletins chiffrés, avec succès, échecs. Non,
un programme de développement, de
stimulation, de soutien, de repérage auprès de nos tout-petits, mais un
programme qui soit cohérent, en un
cycle de deux ans pour les enfants de quatre ans et de cinq ans. Et je précise
que ça ne devient pas obligatoire pour autant, mais ça devient drôlement
intéressant.
Qu'est-ce
qu'il y aura, dans ce cycle du préscolaire qu'on est en train d'élaborer? Bien,
il y aura évidemment ce qu'on appelle une approche mixte, où on y va
avec ce qu'on appelle le développement global, et une stimulation aux apprentissages. Et, non, ça ne veut pas dire
d'asseoir nos tout-petits de quatre ans, là, sur des chaises derrière des
pupitres puis de leur faire des
dictées. Une approche mixte, c'est une approche équilibrée qui dit qu'on va
évidemment aider les jeunes à
apprivoiser les lettres. Donc, ce qu'on appelle, au début, de la prélittératie.
Même chose pour apprivoiser les chiffres, de la prénumératie, mais tout ça toujours par le jeu, avec des
comptines, avec de la danse, avec des bricolages, avec toutes sortes de
façons de s'amuser et d'apprendre par le jeu.
On
va faire du développement émotionnel et social. On va faire du développement
moteur global, mais aussi de la motricité
fine. Et, à mesure qu'on va déployer toutes ces stimulations, bien, on pourra
voir lesquels de ces enfants ont peut-être
un petit retard, une petite difficulté, puis on aura des professionnels pour
les aider, parce que ça, c'est l'essentiel aussi. La stimulation précoce, le
repérage des difficultés, de retard, de retard développemental, ou de troubles
de langage, ou de troubles
neurologiques vont nous permettre d'agir tôt, encore, comme je l'ai dit, en collaboration, Santé, Famille,
Éducation.
Et
on va pouvoir agir tôt, de manière exceptionnelle, dans les classes de maternelle quatre ans parce qu'on va avoir ce que j'appelle mon duo de feu, on va avoir l'enseignant,
bien souvent une enseignante, et l'éducateur, bien souvent une éducatrice. Donc, enseignante, éducatrice, quelqu'un
qui est allé quatre ans à l'université en psychopédagogie, en didactique, épaulé par quelqu'un qui est allé trois
ans au collégial, soit pour avoir une technique en éducation
spécialisée ou alors une technique à l'enfance.
Et
on va avoir ce qu'on ne retrouve nulle part ailleurs dans le réseau, parce
qu'en plus de ça il y a toute l'équipe de professionnels qu'on
retrouve dans nos écoles aussi. Et là on a les orthopédagogues, les
orthophonistes, les psychologues, les psychoéducateurs.
Et tout ce monde-là supervisé par un leader pédagogique, une direction d'école.
C'est cette semaine, la semaine des
directions d'école. Parlons-en un petit peu, de la plus-value d'avoir une
équipe dirigée par une direction d'école. Bien, c'est très important, parce qu'une direction d'école, c'est un
enseignant ou une enseignante expérimentée qui, après ça, devient un
leader pédagogique avec un diplôme de maîtrise en administration scolaire.
Alors,
quand on additionne tout ça, M. le Président, un programme cycle avec une
approche mixte, équilibrée, stimulante, un repérage des retards,
troubles, difficultés, une intervention avec des enseignantes et des techniciennes,
supportée par une équipe de professionnels, dirigée par une direction d'école,
on est en affaires.
Et
c'est pour ça qu'on veut déployer ce service-là, et c'est pour ça que vient le
projet de loi n° 5. Parce qu'en ce moment on ne peut pas déployer le programme à la grandeur du Québec, on
est contraints, par une loi qui a été adoptée il y a maintenant à peu près six ans, à n'offrir ce service-là qu'en
milieu défavorisé. Ce n'est pas un problème d'offrir le service en milieu défavorisé, c'est une excellente
chose, d'offrir le service en milieu défavorisé. C'est un problème de ne
l'offrir qu'à cet endroit-là. Et la science
nous le dit bien, il y a des évaluations qui se font, ce n'est pas lié au
salaire des parents si un enfant a un
trouble du spectre de l'autisme. Ce n'est pas lié au salaire des parents si un
enfant a un problème de langage, une dysphasie, une dyspraxie. Il n'y a
pas de rapport avec ça.
Et
pire, en ce moment, non seulement on est contraints de le déployer seulement en
milieu défavorisé, mais il y a des
gens qui veulent qu'on reste juste en milieu défavorisé, parce qu'ils
disent : Bien, les vulnérabilités sont plus grandes là. C'est vrai qu'à certains égards les vulnérabilités
sont plus grandes en milieu défavorisé, mais l'écart est très petit. Il y a à peu près un enfant sur quatre, mais je vais être
plus précis que ça, il y a 27 % des enfants qui arrivent à cinq ans en
étant vulnérables dans un domaine de
développement. 27 % des enfants arrivent avec un retard. En milieu
défavorisé, c'est à peu près
32 %. Et, dans le reste du Québec, c'est autour de 24 %, 25 %.
Donc, en gros, peu importe où on va au Québec, peu importe qu'on soit en ville, en campagne, peu importe que nos
parents soient sur l'aide sociale, travaillent à 10 $ de l'heure... non, au salaire minimum, à 15 $ de
l'heure ou à 35 $ de l'heure, bien, grosso modo, quand on prend 10 enfants
de cinq ans, il y en a entre deux et trois qui arrivent à cinq ans avec une
difficulté, avec un retard dans un domaine de développement.
Donc, voilà
ce qui justifie d'un point de vue clinique... à lui seul, ça justifie le dépôt
du projet de loi n° 5. Parce que,
si on ne voulait faire de la maternelle quatre ans que pour les enfants en
difficulté, bien, déjà, il faudrait avoir un projet de loi n° 5 qui nous dirait
qu'il faut offrir le service à la grandeur du Québec, et pas seulement dans des
codes postaux dits défavorisés. Il y
a aussi le fait que des enfants qui vivent dans des familles plus vulnérables
n'habitent pas nécessairement dans
des quartiers défavorisés. On peut avoir un appartement, on peut avoir un HLM
mais dans un quartier plus de classe moyenne, et, à ce moment-là, la loi
actuelle nous empêcherait d'aider ces enfants-là.
• (12 h 10) •
Mais on va
plus loin que ça. Ce qu'on dit, en réalité, c'est que le programme du cycle du
préscolaire, c'est que l'offre de la
maternelle quatre ans, c'est une offre de grande qualité qui vient en
complément avec ce qu'offre le service de
garde éducatif à l'enfance et qu'il faut donc offrir le choix aux parents. Ce
n'est pas des classes spécialisées, ce n'est pas des classes d'adaptation qui sont dédiées exclusivement à aider des
jeunes qui auraient un retard de développement ou qui seraient des dyslexiques, les classes de
maternelle quatre ans. Bien sûr, ça va aider ces enfants-là à avoir les
services s'ils en ont besoin, mais c'est un service qui est bon, qui est
favorable à tous les enfants de quatre ans.
Ce n'est pas tous les enfants qui vont y aller, parce qu'on respecte le choix des parents. Parce qu'un parent peut dire : Bien, moi, je le garde, mon enfant, à
la maison. J'ai bien le droit, je peux m'occuper de mon enfant. L'école n'est
pas obligatoire à quatre ans ni à cinq ans au Québec, elle
est obligatoire à six ans, et le projet de loi n° 5 ne
change pas ça. Un parent pourrait
dire : Non, moi, je préfère le laisser en CPE. Il y a à peu près
un enfant sur quatre de quatre ans qui est
en CPE en ce moment. Il faut se le dire, hein? C'est important de se
rendre compte de ça, parce que, souvent, les gens disent : Bien, voyons! Il ne faut pas faire la maternelle quatre ans, les enfants sont en CPE, vous allez les sortir des
CPE. M. le Président, trois enfants sur quatre ne sont pas en CPE à
l'âge de quatre ans. Alors, il faut cesser cette campagne de peur disant que la maternelle quatre ans, ce
serait quelque chose contre les CPE. Mais des parents, comme j'ai dit,
pourraient dire : Bien, moi, je
garde mon enfant chez moi. Des parents pourraient dire : Bien, moi, mon
enfant est au CPE, ça va très
bien, il se développe bien, je n'ai
pas envie de le changer. Bien, c'est correct. Un parent pourrait dire :
Bien, moi, c'est la garderie privée,
ça fait mon affaire, je suis satisfait de ce qu'il y a. Puis en plus il a peut-être
un petit frère ou une petite soeur.
Un parent pourrait dire : Bien, non, nous, on a une garderie en milieu
familial, c'est tout près de la maison, on a confiance en la personne qui
s'occupe des enfants. On peut les laisser là, bien sûr, bien sûr.
Mais on offre un réel choix, on offre une
nouvelle politique publique, et c'est ça qui est important quand même. Parce
qu'à terme, ultimement, quand on aura déployé suffisamment de places — et
c'est là la... voilà la petite révolution — ce sera un service offert de manière
universelle. Ça veut dire que, comme pour la maternelle cinq ans, et personne ne s'en étonne... Si vous voulez inscrire
votre enfant à la maternelle cinq ans, on ne peut pas imaginer qu'une école dise : Non, on n'a pas de place pour
votre enfant, arrangez-vous. Bien non! Si on veut inscrire notre enfant en
maternelle, on sait bien qu'il va y
avoir une place pour notre enfant, la plupart du temps dans l'école du
quartier, juste à côté. Parfois, bien,
l'enfant prend l'autobus, va un peu plus loin, mais il a une place. On veut que
ça soit la même chose pour la maternelle quatre ans, qu'un parent qui
dit : Hop! Moi, je veux envoyer mon enfant à la maternelle quatre ans,
bien, obligatoirement on lui
dise : Certainement, on a une place pour votre tout-petit, pour votre
toute-petite, on va l'accueillir avec plaisir dans un service de grande qualité. On va le faire parce
qu'on croit à l'éducation, on va le faire parce qu'on croit à l'importance
d'agir tôt puis on va le faire parce qu'on
croit aussi à la liberté de choix des parents. C'est une valeur qu'on a, de ce
côté-ci de la Chambre.
Donc, il faut
lever l'obstacle législatif en ce moment qui nous empêche de déployer cette
offre de service. C'est pour ça que le projet de loi n° 5 est là.
Mais je précise quand même que, lors des travaux en commission, lors des
discussions, on a apporté des ajustements, des bonifications au projet de loi.
Je vais en nommer quelques-uns.
D'abord, on a
précisé... on a modifié un article pour vraiment écrire noir sur blanc, pour
que ça soit bien clair, qu'il est
possible de moduler le service de la maternelle quatre ans, de moduler
l'horaire en fonction des besoins particuliers de certains élèves, notamment des enfants qui pourraient être handicapés
et qui ne seraient pas, donc, forcés de fréquenter à temps plein le service s'ils ne sont pas
capables, si ce n'est pas un service qui est bon pour eux. Alors, on l'a
précisé lors de l'étude article par article ensemble.
On a précisé
aussi que, quand les ressources sont disponibles — puis on va les rendre disponibles — bien, on va d'abord déployer encore en milieu défavorisé. Donc, ce que le projet de
loi, en ce moment... ce que la loi nous oblige en ce moment, c'est de ne le déployer qu'en milieu
défavorisé et nulle part ailleurs. Avec le projet de loi, on va dire :
Bon, bien, on va d'abord l'offrir en milieu défavorisé, mais on va le déployer
aussi partout ailleurs et dans un horizon global de cinq ans. Mais on va quand même prioriser les milieux défavorisés,
dans la mesure du possible, au départ, parce qu'on reconnaît cette
préoccupation.
Et un autre
ajustement qu'on a fait dans le projet de loi, c'est pour davantage de
transparence. Pour répondre aux questions,
aux préoccupations des gens par rapport à ce service-là, donc, on s'est engagés
à rendre publics... sans que les journalistes, les
groupes, les oppositions, peu importe, n'aient à formuler des demandes, bien,
d'être transparents puis de dire
combien de classes exactement, avec des indicateurs de qualité, quel est le
ratio enseignant-élèves pour chaque année, combien il y a de techniciennes qui sont dans les classes, de quelle
nature sont les ressources professionnelles, ensuite qu'est-ce qu'on a fait pour améliorer le transport
scolaire, des informations sur le service de garde, parce que nos enfants, à
l'école, côtoient évidemment le personnel des services de garde, qui est très
important.
Donc, ça, ce sont des modifications qu'on a faites
lors de l'étude article par article, qui, je pense, sont venues bonifier le projet
de loi. On avait un bon projet de loi, on a maintenant un excellent projet de
loi. On avait un bon service de maternelle
quatre ans, mais, avec les bonifications qu'on fait au point de vue matériel pour aménager les locaux et avec l'ajout de
professionnels, on va avoir un excellent service.
Alors, il ne
nous reste plus maintenant qu'à adopter le projet de loi et à déployer un
peu plus chaque année, sur un horizon de cinq ans, ce service de grande
qualité. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le
Président. Alors, il faut remonter à 2018, campagne électorale. On se rappelle
qu'à ce moment-là la CAQ promettait des maternelles quatre ans pour tout le
monde, mur à mur au Québec, maternelles
quatre ans. Et à l'époque le premier
ministre, qui est aussi comptable,
avait chiffré dans son cadre financier les
maternelles quatre ans et il a dit : Écoutez, ça ne coûtera pas
trop cher, là, c'est environ 122 000 $
par classe. C'est une question de
quelques millions de dollars. Et nous, durant la campagne électorale, je m'en
rappelle encore, j'avais eu des discussions avec le ministre des
Finances de l'époque, le député de Robert-Baldwin, on s'est dit : Bien,
voyons! Comment qu'ils comptent, eux autres?
Et on a fait le calcul et, à l'époque, on a dénoncé en disant : Bien,
cette promesse électorale, ce n'est
pas les vrais chiffres. Et nous avions fait le calcul à leur place et nous
avons dit : Ça va coûter 2 milliards.
Lors du débat
télévisé des chefs, le premier ministre Legault a décidé que c'était la
promesse la plus importante, pour
laquelle il mettait son siège... Et là, tout à coup, on a commencé à avancer
dans ce dossier des maternelles quatre ans à vitesse grand V et on a dit au ministre de l'Éducation... Et là-dessus
je ne lui en veux pas du tout. Je comprends que la commande était très, très importante. Évidemment,
quand on doit préserver le siège de son premier ministre, nous devons tout
faire. Mais la commande était trop importante.
Rapidement,
nous avons dénoncé, un, le chiffre — ça, c'est une chose — mais, deux, la réalité, M. le Président.
Plusieurs fois, on a questionné la capacité
du réseau à accueillir autant de classes de maternelle quatre ans. Le chiffre
qui circulait à l'époque, c'était environ 5 200 classes de
maternelle quatre ans qu'on devait ajouter. Et savez-vous quoi? À chaque fois
qu'on s'est levés pour dire : En ce moment, dans le réseau de l'éducation
au Québec... J'aime ça dire «Québec», hein?
Parce que, souvent, le ministre nous fait référence à New York, Paris, Toronto,
là. Mais restons au Québec, si vous
le permettez. À chaque fois qu'on lui a dit qu'il manquait des enseignants,
qu'il y avait une pénurie d'enseignants, savez-vous qu'est-ce qu'il faisait? Ah non, les épouvantails! Arrêtez de
nous parler de la pénurie d'enseignants, vous nous empêchez d'avancer. Quand on lui parlait de la
pénurie de locaux : Non! Ça n'existe pas, ça, des classes qui débordent.
Voyons donc! On n'a pas ça au Québec. Il y a 700 classes au Québec qui
apparemment, selon le ministre de l'Éducation... — bonne fin de journée. Vous permettez? Non, mais c'est la politesse, M. le Président.
Le ministre de l'Éducation me disait : Mais il y a 700 classes qu'on chauffe pour rien l'hiver.
On lui a dit : Parfait. On a apporté une belle carte du Québec.
Pouvez-vous nous situer exactement où
sont ces 700 classes que vous dites qu'on chauffe pour rien l'hiver?
Est-ce possible que, si on les chauffe
pour rien, c'est qu'il n'y a pas d'enfant dans ces régions-là et que, par
conséquent, ça ne sert à rien de mettre une classe de maternelle quatre ans s'il n'y a pas d'enfant? Le ministre de
l'Éducation : Non, inquiétez-vous pas, on va vous en trouver quelque part, des enfants. Et là ce qu'on
disait : D'accord, mais vous savez qu'il manque aussi des professionnels
de soutien, puis, le personnel de soutien, pensez à tous les orthopédagogues,
orthophonistes. Ah, non, non, non! Encore des épouvantails.
• (12 h 20) •
Alors, on
avançait. On est allés de l'avant rapidement, M. le Président. Et savez-vous
quoi? On a dressé une liste de gens que nous aimions entendre. L'objectif pour
nous, les partis d'opposition, puis je parle pour l'ensemble des partis d'opposition, on s'est dit : Parfait,
la réussite éducative, Agir tôt, on y croit. On va essayer de bonifier ce
projet de loi du mieux qu'on peut. Alors, on a soumis des listes
d'experts québécois, des docteurs, et ces docteurs ont été refusés, à notre grande surprise. Pourtant, nous avons des
experts en neurosciences qu'on aurait aimé entendre. Que pouvons-nous faire aujourd'hui pour améliorer le service à ces
enfants? Est-ce que la réussite
éducative, ça commence à quatre ans ou, agir tôt, on peut agir encore plus tôt, dès les débuts, vers un an, vers
deux ans, vers trois ans? Ça, le ministre
de l'Éducation a refusé d'entendre les experts.
Par contre, à ses frais, le ministre de
l'Éducation a fait venir des pseudo-experts de New York. Le ministre de
l'Éducation, c'était la première fois que
c'était arrivé ici, au parlement, M. le Président... D'ailleurs, il s'est fait
réprimander par le président de
l'Assemblée nationale parce que c'est la première fois qu'on a un ministre qui
paie pour faire entendre des experts, autrement dit, qu'on paie pour
faire entendre ce qu'on a envie d'entendre. Ça ne s'est jamais vu, et ça, M. le Président, c'est un précédent, là, qu'on
espère sincèrement que le ministre de l'Éducation ne répétera jamais et qu'il a
tiré des leçons.
Mais
savez-vous quoi? Il a aussi pris l'avion pour aller à New York. À son retour,
nous, on avait des questions puis on s'est dit : Tant qu'à aller à New
York, sûrement qu'il a appris quelque chose. Parce qu'un des enjeux dans
ce dossier des maternelles quatre ans, c'est
les ratios. La très grande majorité des experts entendus, québécois, ont dit
qu'il fallait
réduire le ratio, car, en ce moment, il se situe d'un enseignant pour
17 élèves avec une aide additionnelle à temps partiel, et ça, c'est important de le souligner,
elle est à temps partiel, l'aide additionnelle. La très grande majorité des
experts entendus nous ont dit :
Un pour 10, une enseignante pour 10 élèves, c'est le ratio idéal si on
veut atteindre la cible d'Agir tôt, c'est-à-dire
reconnaître des problèmes d'apprentissage, des problèmes langagiers ou des
troubles de comportement. Des ratios
plus bas nous permettent d'atteindre la cible. Et la cible est noble, Agir tôt,
on y croit. Mais le ministre n'a jamais voulu nous accorder le ratio
d'un pour 10.
Alors là, on
s'est dit : Attendez, tant qu'à aller voir les New Yorkais qui trouvent...
Même dans son discours, il nous parlait de New York, à quel point c'est
des exemples assez bons. On lui a posé la question : Mais, à New York, le ratio est de combien? Il nous regarde :
Bien, je ne le sais pas. Donc, vous, vous allez visiter des écoles à
l'étranger, vous ne prenez pas de
note, vous ne posez pas de question, vous jouez au «kid kodak»? Qu'est-ce que
vous faites exactement quand vous
payez à grands frais des voyages à New York ou à Paris? Vous ne posez aucune
question sur le système? On ne paie pas pour des visites de communication, on
va se renseigner. Alors, on a dû lui apprendre, au ministre, que le ratio,
savez-vous quoi, M. le Président, il est d'un pour 10.
Alors, tant
qu'à vanter le système américain de New York, pourquoi que les Québécois n'ont
pas le droit d'avoir un système aussi
bon, un pour 10? La question se pose, M. le Président. Après, quand même, des
heures de négociation, il nous a dit : Bon, parfait, on va mettre
le ratio dans le règlement. On lui accorde d'aller faire une dernière ronde de négociations avec les enseignants et on espère que
le ministre va être conséquent avec les experts qui ont été entendus ainsi que ses pseudo-experts new-yorkais, et que,
oui, il accordera un ratio d'un pour 10 aux enseignants. Et je vous répète
aussi, M. le Président, que valoriser des
enseignants, ce n'est pas juste une question de salaire, c'est important, le
salaire, mais aussi d'entendre et
écouter leurs préoccupations. Et, lorsque ces enseignants nous disent que les
ratios sont trop élevés, bien, il faut donner suite. Ça, c'est un des
éléments.
Tantôt, le
ministre parlait des codes postaux et dire qu'il ne fallait pas nécessairement
développer les maternelles quatre ans
en raison des codes postaux, parce que la pauvreté, hein, c'est partout.
Toutefois, M. le Président, il oublie une chose, c'est vrai que la pauvreté est un petit peu partout, mais des
fois, et souvent même, c'est qu'il y a des poches de population plus
vulnérables. Il a fallu qu'on lui montre des études, Direction de santé
publique, des statistiques qui démontrent rapidement qu'effectivement, dans
certains quartiers, par exemple, prenons Montréal-Nord, le taux de
vulnérabilité oscille autour de 40 %, d'autres quartiers à Montréal,
autour de 15 %, 19 %. Alors, nous, nous lui avons proposé : Tant qu'à déployer, mettez-en plus
dans les quartiers défavorisés, ça ne vous empêche pas non plus d'en déployer
dans les quartiers qui sont de classe moyenne ou même les quartiers mieux
nantis. Non, non, non.
Et savez-vous qu'est-ce qui est magnifique, M.
le Président, avec des gens comme le ministre de l'Éducation lorsqu'ils sont à court d'arguments? Ils sortent
une boîte à outils, la boîte à outils des insultes, et là c'est le club-école,
le club-école des libéraux. Alors, il
voulait insulter mes collègues... Parce que, vous savez, nous, on travaille
pour de vrai en équipe, parce que je n'ai pas eu l'occasion de pouvoir échanger
énormément avec les gens du ministère de la Famille lors des consultations ni lors de l'étude
détaillée. Par contre, nous, on avait... Effectivement, le club-école est venu.
Mais c'est grâce au
club-école...
Alors, je
vais me faire plaisir, je vais parler de mon club-école. Dans notre club-école,
on a aussi une ancienne ministre qui, avant d'être ministre et députée, bien,
elle était, oui, présidente de commission
scolaire, la députée de
Mille-Îles. La députée
de Mille-Îles est intervenue plusieurs
fois, à juste titre, pour expliquer c'est quoi, être défavorisé, c'est quoi,
devoir prendre des décisions pour choisir où est-ce qu'on va mettre plus de
services pour aider des enfants qui partent de plus loin, de beaucoup plus loin. Ça a pris trois semaines, mais,
savez-vous quoi, après trois semaines, le ministre de l'Éducation a finalement entendu le message de ma collègue,
puis, oui... et celui des députés des autres propositions, la députée
de Sherbrooke, la députée de Joliette, et finalement, après un travail concerté
de trois semaines, le ministre a finalement admis qu'effectivement au Québec
nous devons continuer à prendre soin des plus vulnérables.
Par la suite,
la députée de Westmount—Saint-Louis, une autre membre du club-école, est arrivée puis a parlé des enfants handicapés. Et savez-vous quoi? Le ministre de l'Éducation, obnubilé par le projet de loi des maternelles quatre ans, a
oublié qu'effectivement, dans le réseau de l'éducation, il y a effectivement déjà des enfants avec des handicaps, et ces
enfants doivent être accompagnés, et qu'on doit avoir un souci du détail.
Alors, j'ai posé la question au ministre de l'Éducation : Présentement, il y a combien d'écoles maternelles quatre ans temps
partiel? Il nous regarde. Et, vous savez, dès qu'on parle de chiffres, c'est un
petit danger. Alors, il se tourne vers son équipe ministérielle : Il y en a combien, d'écoles
avec des classes de temps partiel? Panique totale dans la salle! Tous en train de regarder. Personne ne sait combien il y a de maternelles quatre ans temps partiel. Ils veulent abolir les maternelles quatre ans temps partiel, ils ne savent même pas où est-ce
qu'ils vont les fermer. Le chiffre, M. le Président, a été simple, 644. Ils sont revenus plus tard avec le chiffre.
Puis là on
leur a posé : Avez-vous fait une étude d'impact pour savoir est-ce que
vous faites un bris de service dans
le réseau de l'éducation? Bien non, on n'a pas réfléchi à ça. Parfait.
Alors, la députée de Westmount—Saint-Louis leur fait la démonstration suivante : Est-il possible qu'un enfant
qui a un handicap, que le parent souhaite faire une entrée à l'école à
temps partiel, plus souple, plus flexible... est-ce que ça, c'est possible que
ce besoin est rempli grâce aux maternelles
quatre ans temps partiel? Ah! bien là, le ministre de
l'Éducation réalise qu'effectivement, en abolissant les maternelles
quatre ans temps partiel, il
commettait une erreur et pouvait faire
en sorte de faire un bris de service
pour les enfants encore plus vulnérables, ceux qui ont un handicap.
Alors, finalement,
grâce au travail des oppositions, de tous les partis d'opposition, encore une fois il a dû amender son projet de loi. Et, oui, grâce à nous, on a eu un gain là-dessus.
Et ça nous a permis de maintenir des services pour les enfants qui ont
un handicap.
Et, vous
savez, la reddition de comptes au
ministère de l'Éducation, ce n'est
pas toujours fameux. Ça a pris un certain temps, mais il nous a finalement
accordé la reddition de comptes. Donc, nous allons être en mesure dans quelques
années de pouvoir
mesurer si, oui ou non, nous serons en mesure d'avoir atteint la cible, c'est-à-dire aider les enfants les plus vulnérables et dépister.
• (12 h 30) •
Ça, c'est des
gains, M. le Président, mais j'aimerais revenir sur certaines affaires
qui sont assez troublantes, qui sont arrivées durant ce projet de loi.
Première des
choses. Vous savez, les chiffres, ça compte. Lorsqu'on se présente devant
les Québécois, et qu'on leur fait une promesse, et qu'on
présente des cadres financiers, le respect veut qu'habituellement on s'assure
de nos chiffres. Tout au long du projet de loi portant sur les maternelles
quatre ans, les chiffres ont changé. Chaque semaine, il y avait des nouveaux
chiffres, M. le Président. Je vous le dis, là, c'était déconcertant. Tellement
qu'il fallait que je fasse des
tableaux pour essayer de suivre. Le premier tableau, 122 800 $ pour une classe. Par la suite, au mois
d'avril, 800 000 $. Ça,
c'est durant le budget. Quelques semaines après le budget, c'est révisé à
1 million de dollars. Là, on se dit : O.K. Ils vont finir par
l'avoir, là. C'est six fois plus cher à ce moment-là. Puis là, M. le Président,
là, on n'est même pas encore au
printemps, là. On est encore... Ah non, non! Pardon, on est au printemps. On
n'est même pas encore l'été, parce que, durant l'été, ça monte encore. Après ça, j'ai modifié mon tableau. On
était rendus à 1,3 million de dollars. On se disait : O.K. 1,3 million de dollars, il devrait
l'avoir, là, cette fois-ci. Eh bien, non, M. le Président. Il faut que je fasse
un autre tableau, 2 millions de
dollars. Ça ne vient pas de moi, ces chiffres. Ça vient du comptable en chef du gouvernement, le premier ministre.
Puis
savez-vous qu'est-ce qui m'a le plus
déconcertée, qui m'a troublée, même? 18 septembre, le premier ministre
qui se lève et qui dit la chose
suivante : Moi, j'ai été ministre de l'Éducation pendant trois ans, puis
tout le monde sait ça, que ça coûte 800 000 $, construire une classe,
puis ça peut varier entre 100 000 $ puis 2 millions. On a
vraiment des échelles très
différentes, lui puis moi, là, de toute évidence, mais, M. le Président,
comment ose-t-il, comment ose-t-il dire qu'effectivement il sait? Et, je vous rappelle, il a été ministre de
l'Éducation au début des années 2000. Alors, qu'est-ce qui est arrivé entre 2000 et 2018? Est-ce qu'il a
sciemment inscrit 122 800 $, sachant pertinemment que le vrai
chiffre, c'était 800 000 $?
C'est inquiétant. Puis c'est lui, aujourd'hui, là, qui devrait rendre des
comptes aux Québécois, parce que se
tromper, c'est une chose, mais d'admettre qu'on le savait, que sciemment les
chiffres étaient erronés, dans le cadre financier, c'est tout autre
chose, M. le Président.
Parlons de
chiffres toujours. Je sais qu'à chaque fois qu'on a présenté des chiffres le
ministre de l'Éducation était un peu fâché, mais c'est à défaut que lui
nous en présente.
Ils nous ont
parlé de 5 000 classes, c'est rendu 2 600 classes. Puis
après ça c'était rendu 1 256 nouvelles classes. Là, c'est précis, ça nous en prend 1 256.
Mais ce qui est un peu bizarre, c'est le taux de fréquentation. Il a dit :
Vous allez voir, là, panacée, c'est
la solution divine à tous nos problèmes, les maternelles quatre ans, mur à mur,
90 % de taux de participation,
de fréquentation. Par la suite, le ministre de l'Éducation a dit : Bah! On
ne s'attend pas à avoir 90 %, là, des
parents qui vont amener leurs enfants en maternelle quatre ans, ça va être
autour de 50 %. Finalement, en étude détaillée, il est arrivé avec le nouveau chiffre : Ah!
40 %. Je comprends qu'il veut diminuer les attentes parce que finalement
il a réalisé ce que tout le monde savait, c'est qu'il n'y en a pas,
d'enseignant dans le réseau.
Il avait aussi promis de ne pas aller piger dans
les CPE puis d'amener, au fond, les CPE dans les maternelles quatre ans, dans
les écoles. Mais, M. le Président, quand que finalement il a réalisé qu'au
Québec, pour la pénurie de main-d'oeuvre,
c'était réel, qu'est-ce qu'il est allé faire? Bien, il est allé chercher les
éducatrices dans les CPE pour les mettre dans les écoles, c'est ça qu'il
a fait.
Savez-vous
quoi? L'autre chose qu'il a faite aussi, à part ne pas faire ses devoirs, là,
il est allé chercher aussi les enfants
des réseaux de garde, CPE, pour les mettre dans les maternelles quatre ans.
Là-dessus, c'est là que le bât blesse. Agir
tôt, pour les maternelles quatre ans, le ministre de l'Éducation ainsi que le
premier ministre disaient qu'il y a 20 000 enfants qui n'ont aucun service, qui ne sont ni dans un
CPE ni dans un réseau de garde, privé ou subventionné, qui ne sont nulle
part. Mais qu'a-t-il fait pour rejoindre ces
20 000 enfants? Absolument rien. Zéro, ajoutez une barre. Pourtant,
si c'est ça, l'urgence, moi, je
m'attendais à ce que le ministre de l'Éducation cible les enfants qui ne sont
dans aucun réseau, les rejoigne et s'assure que ces enfants ont un
service, soit les CPE soit les maternelles quatre ans.
Mais
savez-vous quoi? On arrive, et, lorsqu'il y a eu la rentrée scolaire... Et, je
vous le dis, M. le Président, lorsqu'on est un nouveau ministre de l'Éducation, habituellement on s'assure que
sa première rentrée scolaire, elle soit fantastique, mais au Québec ça a été la rentrée scolaire qui a
été qualifiée la plus chaotique. C'est la première fois qu'on a vu une mère
prendre son Bixi pour faire le tour des
écoles pour pouvoir inscrire ses deux enfants. C'est incroyable, une rentrée
scolaire qui a été aussi lamentablement manquée par un ministre de
l'Éducation, trop occupé à nous rentrer dans la gorge les maternelles quatre
ans.
Mais revenons
à la rentrée scolaire. Lui, il est arrivé, il a dit : Vous voyez, il y a
eu plus d'inscriptions dans les maternelles quatre ans. Alors, parfait. On lui
a posé la question : Dans vos inscriptions pour les maternelles quatre
ans, il y en a combien qui proviennent du
bassin de 20 000 enfants qui n'a aucun service? Encore une fois, sans
surprise, le ministre de l'Éducation
a dit : Bien, je ne sais pas. Vous n'avez pas demandé? Vous n'êtes pas
allé chercher l'information? Comment
ça se fait que vous ne savez pas ça? Le ministre ne sait pas d'où proviennent
les enfants. Donc, nous avons sondé le terrain. 70 % des enfants ne proviennent
pas du bassin de 20 000 qui n'ont aucun service, proviennent des CPE, des milieux
familiaux, des milieux privés subventionnés ou non subventionnés, M. le
Président, on est loin de l'urgence. Habituellement, lorsqu'on veut atteindre une cible, on se donne les moyens
de nos ambitions. Encore une fois, ici, le ministre
a failli à la tâche.
M. le Président, il est arrivé une situation très problématique lors de l'étude
détaillée. Nous avons parlé d'un
enjeu très important
que le ministre semble souvent vouloir banaliser : les
milieux défavorisés. Alors, on lui a dit : Cette fois-ci, vous allez être content, on ne parlera pas de
milieu défavorisé, on va parler du revenu. Parce qu'au Québec nous avons environ
230 000 familles qui sont sous le seuil de la pauvreté, c'est énorme.
Mais savez-vous quoi? Ça fait des années que plusieurs gouvernements ont travaillé pour réduire ce nombre, et il a été réduit grandement.
En 2017, il y a eu un plan de lutte contre la pauvreté qui a été lancé, budgété, l'argent est là et disponible. Ce plan, M. le Président, il est
crucial. Il est de 2017 à 2023, il n'a qu'un seul objectif : lutter
activement contre la pauvreté par des mesures concrètes qui changent la vie des gens tous les jours, qui a un impact
direct sur les parents, sur les enfants. Parce que, la pauvreté, M. le
Président, les enfants peuvent voir
la détresse financière, psychologique dans les yeux de leurs parents. Alors,
c'est pour cela que, ce plan, on veut s'assurer d'aider tous les parents avec
leurs enfants, peu importe où ils se situent, peu importe leur code
postal, car il est basé sur leurs revenus déclarés.
Dans ce
plan, il y a une exemption de base pour les milieux de garde. Grosso modo, M.
le Président, je vous l'explique, si
on a... un parent qui a de l'aide de dernier recours, communément appelée
l'aide sociale, envoie son enfant en CPE, toutes les journées sont exemptées,
le parent n'a pas à débourser le 8,05 $ pour ce service. Ça permet à
l'enfant de pouvoir fréquenter un
CPE, ou, par exemple, un service de garde régi, ou, par exemple, un milieu
familial. C'est extraordinaire parce
que ça, ça permet aux parents d'envoyer cet enfant dans un milieu où est-ce
qu'il va pouvoir socialiser et développer d'autres compétences.
Alors, nous
avons demandé au ministre de l'Éducation de prendre cette mesure, de
l'extensionner pour les CPE mais aussi pour les maternelles quatre ans,
car on vise les mêmes enfants, les quatre ans. La mesure dans la lutte contre
la pauvreté vise les enfants de 0-5 ans.
C'est un droit. On veut leur donner des outils, on veut lutter contre la
pauvreté. Alors, cet outil est magnifique, mais encore faut-il
l'utiliser.
Alors, nous avons demandé au ministre de
l'Éducation de prendre l'argent qui est déjà disponible puis de le transférer
vers les maternelles quatre ans pour que les parents n'aient pas besoin de
payer le service de garde et qu'ils soient
exemptés, c'est une exemption de base. Et là le ministre nous sort un
argument : Mais non, ça va coûter de l'argent. Bien, voyons! Un, l'objectif, c'est d'aider les
enfants les plus vulnérables. Deux, le premier ministre a dit : Ça coûtera
ce que ça coûtera. Ma compréhension, c'était
que, le premier ministre, bien, oui, on peut dépenser 2 milliards de
dollars pour du béton, mais qu'on va
quand même dépenser de l'argent pour des services. Ma compréhension, c'est que
le premier ministre voulait aussi
aider les plus vulnérables. Qu'est-ce qui est arrivé en chemin? Parce qu'à ce
jour on ne comprend pas le refus d'ajouter notre amendement.
• (12 h 40) •
Alors, quand
le ministre de l'Éducation me dit... nous dit que ça va coûter trop cher, je
lui ai demandé : Est-ce que vous
savez combien d'enfants sont visés par cette mesure? Non, évidemment. Environ
11 000 enfants de 0-5 ans sont visés par cette mesure, donc, pour
les quatre ans, M. le Président, c'est autour de 2 000,
2 200 enfants qui seront visés par cette mesure. Alors, je dis au
ministre de l'Éducation : Êtes-vous conscient que l'argent est déjà au
ministère de l'Emploi et de la
Solidarité sociale et que vous n'avez qu'à prendre cet argent et le transférer
vers votre portefeuille à vous? On
vient en aide aux mêmes enfants.
Sa réponse : Non. Non. Un non catégorique. Alors, on s'est quand même
obstinés. Tous les partis d'opposition, on était assez estomaqués de
voir ce refus catégorique du ministre de l'Éducation, il n'a même pas pris l'engagement pour dire
qu'effectivement il va le corriger à courte échéance. Et là il peut le faire,
l'amendement est encore sur la table. On y tient.
Mais l'injure
à l'insulte, M. le Président, savez-vous c'est quoi? C'est qu'après avoir dit
non à notre amendement il nous en
sort un, amendement, puis il a du front tout le tour de la tête. Dire non aux
enfants les plus pauvres au Québec mais
dire oui aux enfants qui vont dans les écoles privées, ça, ça prend du front.
Ça, ça prend vraiment du front. Nous sortir
un amendement de dernière minute, à une heure moins cinq, pas minuit moins
cinq, une heure moins cinq, puis dire : Ah! on a un petit amendement, là, tenez, je vous le lis... Puis il était
tellement bien préparé, le ministre de l'Éducation, qu'il nous a juste lu le premier paragraphe,
pensant que les autres paragraphes, c'étaient juste des commentaires, mais, non, le commentaire était de l'autre côté. Puis là
il pensait nous en passer une vite. Pas nous autres. On a pris le temps de lire. On a dit : On aimerait ça suspendre
pour comprendre. Non, non, non, on n'a pas le temps de suspendre. Aïe! Ça fait
qu'on a quand même pris le temps de le lire,
même s'il n'a pas voulu suspendre pour qu'on puisse lire son amendement.
Mais, son amendement, savez-vous c'était
quoi? Venir consacrer que, les maternelles quatre ans, bien, venez demander
des subventions, des agréments, vous allez
pouvoir en demander, on les attend pratiquement. Là, on a dit : Êtes-vous
sérieux? Réalisez-vous qu'au Québec
ça fait 12 ans qu'il y a un moratoire, que les gouvernements précédents
qui se sont succédé ont dit non parce
qu'en ce moment on veut investir dans l'école publique? Puis savez-vous c'est
quoi, le plus injurieux dans sa
manoeuvre? Il l'a faite un mercredi, jour de motion. Et cette motion-là visait
quoi cette journée-là? La semaine de l'école
publique. Mon école publique, je l'aime, a-t-il dit de son siège. Et une heure
plus tard ils viennent mettre un coup à l'école publique. Méchante
jambette!
Je n'en
reviens pas. Ça, là... Souffler le chaud puis le froid, c'est une chose, mais
jamais je ne pourrais tolérer qu'on dise
non aux enfants les plus vulnérables puis du même souffle, là, on peut
dire : Bien, écoutez, hein, ce n'est pas grave, on n'a pas d'argent pour les plus pauvres — ce qui est le contraire de la vérité — mais on a de l'argent pour venir
subventionner les écoles privées. Bien, voyons donc! Est-il tombé sur la
tête?
Avant de
donner de l'argent aux écoles privées, je l'invite à consolider le système
public, je l'invite à faire ses devoirs puis je l'invite à accepter
notre amendement puis de s'assurer que, oui, nous allons donner l'exemption de base aux enfants qui en ont le plus besoin, parce
que ce n'est pas vrai qu'on va envoyer des factures à des parents qui ne sont même pas capables de payer cette facture, M.
le Président. Pensez-vous sincèrement qu'une mère ou un père monoparental
qui va recevoir une facture de
1 500 $ pour des services de garde va être en mesure de le payer
quand il est sur l'aide sociale? Là,
à un moment donné, il faut qu'on arrête de se mentir. Il y en a, des gens
vulnérables, au Québec. Puis de l'argent, il y en a, et l'argent date de 2017,
c'est budgété. L'expression, là, permettez-moi l'expression : Il est
décaissé, l'argent. Alors, qu'il s'occupe du vrai monde avant de
s'occuper de l'école privée.
Et
ça, M. le Président, là, vous comprendrez, là, que, dans ce projet de loi,
rebondissement après rebondissement, chiffre
après nouveau chiffre, improvisation après improvisation, nous, on
n'improvisera pas puis on votera contre ce projet de loi.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Mme la députée de
Sherbrooke, je vous cède la parole.
Mme
Christine Labrie
Mme
Labrie : Merci, M. le Président. J'aimerais ça commencer par remercier
mes collègues de l'opposition, avec
qui j'ai eu beaucoup de plaisir à travailler sur ce dossier-là. Vraiment, je
pense qu'on a travaillé de manière très, très constructive tout au long du
projet de loi, depuis le début. On a travaillé ensemble pour poser des
questions au ministre, pour clarifier
son projet. On n'a pas obtenu les réponses qu'on voulait, mais, contrairement à
ce qu'il a sous-entendu en matière
d'obstruction, je pense que vraiment c'est du travail constructif qui a été
fait de la part de l'opposition et vraiment sous le ton de la
collaboration.
Je voudrais
aussi remercier le ministre, qui a fait preuve quand même de plus d'ouverture
et de plus d'écoute que ce qu'on
avait vu dans le passé sur un précédent projet de loi, le p.l. n° 12, pour être exacte. Et sincèrement j'aimerais que ça se poursuive, cette attitude-là, de sa
part, de faire preuve d'un petit plus d'ouverture. Ce n'est pas ce que je sens
qui s'en vient, en ce moment, pour le
prochain projet de loi, malheureusement, ce n'est pas le signal qu'il envoie, mais je reconnais qu'il avait fait un
effort d'ouverture pour l'étude du projet de loi n° 5
et j'aimerais que ça se poursuive.
Donc, évidemment,
nous, on l'a dit depuis le début, on n'était pas contre les maternelles quatre
ans. Par contre, ce qu'on déplorait,
c'est le projet de les rendre universelles au lieu de rendre universel le
réseau des CPE, qui a déjà fait ses preuves
et pour lequel il y a une demande réelle avec
42 000 personnes, en ce moment, sur les listes d'attente à la
grandeur du Québec, qui attendent une place.
Donc, les experts, ils nous l'ont dit à plusieurs
reprises en commission parlementaire, agir tôt, ça commence avant même la
naissance, et quatre ans, c'est tard. Donc, si on avait vraiment voulu agir
tôt, on aurait pu, on aurait dû investir
dans un service public qui est offert aux enfants dès les premiers mois de vie
et reconnaître le droit à un service d'éducation à la petite enfance
public, ce que le gouvernement s'est refusé à faire jusqu'à maintenant.
Évidemment,
on était inquiets par rapport à ce projet
de loi là parce qu'il y avait beaucoup d'incertitude. Et, avec ce qu'on connaît de
l'état du réseau de l'éducation, en ce moment, avec les difficultés qu'on
connaît d'offrir des services adéquats
aux enfants qui sont déjà dans nos écoles, on trouvait ça préoccupant, voire
irréaliste d'ajouter des milliers de nouveaux
élèves dans le réseau de l'éducation. On est toujours très inquiets parce qu'il reste énormément d'incertitude, notamment sur les ratios dans
les classes, en service de garde, pendant la surveillance du dîner, le transport.
Et on craint aussi que ce projet-là
monopolise les ressources en éducation, notamment les budgets
d'infrastructure. On n'a pas été rassurés.
Par contre,
il semble que le gouvernement a reconnu que c'était irréaliste. Alors, ils ont
reculé sur l'ampleur du projet, et
ça, c'est très important. On est passé d'un projet de
5 000 classes à 3 400 classes, au fil de l'année, puis maintenant on parle d'un projet de
2 600 classes. On est aussi passé d'une estimation de 90 % à une
estimation de 50 % de fréquentation,
voire un peu moins. Ce que ça veut dire, et c'est rassurant, c'est que le ministre
s'est ouvert les yeux sur les autres
besoins du réseau, il a entendu les questions qu'on lui posait. Donc, je pense
que, ce recul-là, on le doit au travail de l'opposition qui a été fait conjointement avec mes collègues. On le
doit aussi à la vaste mobilisation citoyenne qu'il y a eu, au mouvement qui s'est
créé pour dénoncer un projet mur à mur.
Donc,
heureusement, on a réussi à aller chercher cette preuve de réalisme du ministre
et quelques autres gains. Un des plus importants, c'est la reconnaissance du ministre
qu'il faut implanter les maternelles quatre ans en priorité en milieu
défavorisé. Oui, on le sait et on l'a dit, il y a des enfants vulnérables
partout, ça ne dépend pas du code postal, c'est
clair, mais on sait aussi que, dans les milieux défavorisés, les
vulnérabilités, elles sont encore plus importantes, et que les parents de ces milieux-là ont beaucoup moins de ressources
pour pallier aux vulnérabilités de leurs enfants, pour les soutenir. Donc, c'était fondamental de s'assurer
que les ressources, elles vont être déployées en priorité pour ouvrir des
classes dans ces milieux-là, ce qui n'empêchera pas par ailleurs d'en
déployer dans d'autres endroits.
On a aussi
fait inscrire dans la loi la possibilité pour les commissions scolaires de se soustraire aux exigences du ministre
si elles démontrent qu'elles ne sont pas en mesure d'offrir un service de
qualité, et ça, c'était fondamental pour moi
parce qu'on veut absolument éviter
que des commissions scolaires soient obligées d'ouvrir une classe avec un
local mal adapté, par exemple un local sans
fenêtre, ou avec un titulaire qui ne serait pas formé, seulement pour répondre
à l'exigence du ministre, pour que le
ministre puisse faire un crochet à côté de sa promesse. Donc, avec cette
garantie-là, les commissions
scolaires vont pouvoir se soustraire si elles se rendent compte qu'elles n'ont
pas les conditions nécessaires réunies pour ouvrir une classe.
On a aussi sécurisé l'offre de services pour les
quatre ans dans le réseau de services de garde. C'était une inquiétude qui était très répandue,
qu'éventuellement le gouvernement en vienne à insidieusement réduire le
financement aux groupes de quatre ans dans les CPE pour orienter les
enfants de quatre ans dans le réseau scolaire. Donc, on a réussi à faire en sorte que la loi soit claire.
Les deux services doivent coexister. Et ça, ça a rassuré beaucoup de monde.
• (12 h 50) •
On a aussi obtenu du ministre une reddition de
comptes annuelle pendant l'implantation des maternelles quatre ans, qui va nous permettre de savoir beaucoup de choses qu'on
aimerait savoir en ce moment mais qu'au moins on pourra savoir pour l'avenir, notamment le type de service éducatif à
l'enfance qui était fréquenté par l'élève avant son admission, le nombre d'élèves par enseignant, les
services fournis en appui à l'enseignant par une personne spécialisée, les services complémentaires offerts, par exemple,
en psychologie, orthophonie, orthopédagogie, en éducation spécialisée, la façon dont est
organisé le service de garde en milieu scolaire, incluant le nombre d'élèves
par membre du personnel de garde,
l'organisation du transport scolaire, incluant les mesures de sécurité. Donc, c'est toutes des choses, qui, évidemment, devraient être connues, à l'heure actuelle, avant d'implanter le reste
du réseau. Malheureusement, ce ne l'est pas. Mais au moins on va
avoir accès, à partir de l'année prochaine, à ces informations-là.
Je
ne comprends pas, sincèrement, pourquoi on déploie un réseau sans connaître déjà les
modalités, je me l'explique très mal.
Mais la garantie qu'on a, c'est qu'on va pouvoir faire un suivi de ça, et on va
être très assidus sur ce suivi-là, parce que les problèmes, ils ont été énoncés
par les groupes qui sont venus nous rencontrer. On le sait, qu'il y a des
choses à mieux organiser dans les services
de maternelles quatre ans actuelles, qui existent déjà depuis plusieurs
années, ça a été nommé très
clairement, par exemple le transport scolaire, qui n'est pas adapté aux
enfants de quatre ans, qui sont trop
petits, qui s'endorment, qui glissent sous les bancs. C'est quand même
assez problématique. C'est factuel, ça a été rapporté par les transporteurs scolaires. C'est des enjeux comme celui
des ratios également. On parle d'un ratio d'un pour 60 pour la surveillance du dîner, M. le Président. Un pour 60, là, quand il y a des enfants de quatre ans là-dedans, ce
n'est clairement pas adéquat. Puis
ça, le ministre, il le sait, il l'a reconnu, il a même formé des
comités pour étudier la question et
trouver des solutions. Bien, on aurait aimé ça qu'il le fasse avant de
commencer à déployer des nouvelles classes. C'est tard, mais, bon, au
moins il va le faire.
On
déplore, malheureusement, le refus du ministre d'inscrire les ratios
dans la loi. On déplore également qu'il ait ouvert une porte aussi grande à du
financement au privé pour offrir la maternelle
quatre ans, pour qu'elle... Ça fait
des années qu'il n'y a aucun ministre de l'Éducation qui a octroyé des nouvelles subventions aux
écoles privées, et le ministre,
il a ouvert la porte, il a dit qu'il allait regarder les demandes de
financement des écoles privées pour offrir la maternelle quatre ans
et s'est montré très ouvert, alors qu'on sait qu'on a cruellement besoin
d'investir dans notre réseau public. Chaque dollar qui est investi en éducation au Québec devrait absolument
être investi dans notre réseau public, c'est clair. En ce moment, il y a déjà des fonds qui sont détournés vers le
privé, c'est inacceptable, et c'est encore plus inacceptable qu'il veuille en détourner davantage.
Je ne pense pas que c'est le type de changement que les citoyens
voulaient quand ils ont élu la CAQ, l'automne dernier.
Donc,
je fais une mise en garde au ministre à cet effet-là. Je l'encourage à refermer cette
porte aussi rapidement que possible. C'est un service public universel
qu'il veut déployer. Ce service public là, il devrait rester public et être
offert dans notre réseau d'éducation public.
Je
déplore aussi que le ministre ait refusé d'offrir le service de garde gratuitement aux enfants qui reçoivent des prestations d'aide sociale alors que pourtant ces
mêmes familles là ont accès aux CPE gratuitement. On parle des mêmes enfants, donc ce n'est pas... ça n'a pas
d'incidence budgétaire. L'enfant, il est admissible si son parent
choisit le CPE; il ne sera pas
admissible si son parent choisit la maternelle
quatre ans. Donc, c'est un manque de
cohérence flagrant, que je déplore. Et j'espère que le ministre de la Solidarité sociale et le ministre
de l'Éducation vont pouvoir se parler de ça. Puis ça n'a pas été intégré dans la loi, mais il ne
sera jamais trop tard pour corriger ce manque de cohérence là. Donc, on va
poursuivre nos démarches là-dessus.
Et,
pour conclure, je dirais que ce que je déplore le plus, c'est d'avoir devant
moi un ministre de l'Éducation puis un
gouvernement en général, on va se le dire, là, qui gouvernent avec des «on
verra». Et ça, pour moi, c'est inacceptable. Le ministre, il l'a déjà dit dans le passé, là, le train est en marche,
puis là on va prendre les décisions après. Mais on ne lance pas un train sans avoir mis les rails. On ne
peut pas déployer un réseau de cette ampleur, dépenser des milliards de fonds publics dans un réseau sans avoir défini
tous les paramètres, sans avoir étudié quels seront les impacts de ce
projet-là. Je trouve que c'est de la
très mauvaise gouvernance. J'aimerais voir un gouvernement qui étudie l'impact
de ses politiques, qui prend le temps
de répondre à toutes les interrogations, de résoudre les problèmes avant de
poursuivre le développement d'un
projet, quel qu'il soit. Mais là on l'a vu très clairement sur ce cas-ci. Il a
reconnu les problèmes, il a formé des comités pour chercher à les résoudre et il a quand même décidé de poursuivre
l'implantation de la maternelle quatre ans à toute vitesse, sans avoir
encore trouvé de réponse. Il ne les a pas encore, les réponses, au moment où on
se parle.
Ce
sera très important qu'il trouve ces réponses-là le plus rapidement possible et
qu'il les fasse connaître, parce que,
là, on a des parents, en ce moment, en janvier, février, qui vont commencer à
vérifier qu'est-ce qu'ils veulent faire avec leurs enfants de quatre ans l'année prochaine, qui vont devoir
faire un choix. On veut donner le libre choix aux parents, mais, à ce moment-là, ces parents-là, en janvier
et février, au moment où on se parle, ils ne sauront pas quel sera le ratio
dans une classe de maternelle quatre ans,
ils ne sauront pas comment seront transportés ces enfants-là, ils ne sauront
pas quel sera le ratio à la
surveillance du dîner. Donc, ce n'est pas un choix éclairé qu'on permet aux
parents, et ça, moi, je trouve ça très problématique.
Le
ministre lui-même a dénoncé des campagnes d'information qui ont été faites par d'autres groupes, il a appelé ça de la désinformation, mais lui-même ne
transmet pas l'information aux parents sur ça va être quoi, les modalités de
la maternelle quatre ans. Donc, à
ce moment-là, c'est difficile de
reprocher aux autres groupes de diffuser de l'information qui serait
erronée. On ne les a pas, les réponses, les parents ne les ont pas non plus. Et
ça, moi, je trouve ça très décevant de la part d'un gouvernement, en particulier de la part d'un gouvernement qui se présente
comme un bon gestionnaire. C'est de la mauvaise gestion. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée de Sherbrooke. Je cède la parole à Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Oui,
merci beaucoup, M. le Président.
Donc, je pense que, pour les quelques minutes que j'ai avant la pause, je vais simplement continuer sur la
lancée de ma collègue de Sherbrooke pour dire que vous vous rappelez sans doute qu'on a demandé à plusieurs occasions le dépôt d'un
plan, d'un plan de déploiement de la part du ministre de l'Éducation, qui pourrait se faire en collaboration avec son collègue de la Famille, avec aussi le président du Conseil du trésor, pour qu'on sache où on
s'en va en termes à la fois du rythme d'implantation de ce projet-là, des
coûts, de la faisabilité, des ressources humaines qui pourront être au rendez-vous autant pour ce qui est des enseignants que du
personnel pour le service de garde — qui est essentiel quand on
parle des enfants de quatre ans — que l'on parle des ressources spécialisées, des professionnels qui vont arriver
en renfort, que l'on parle de la faisabilité matérielle. Où on va trouver les
locaux? Combien de classes vont être
construites? Combien de classes existent déjà? Combien de nouvelles
écoles vont être agrandies? Comment
la complémentarité va se vivre avec le déploiement des services de garde éducatifs à la petite enfance, principalement des CPE?
Donc, on a
demandé ça de manière répétée. On a même déposé deux motions ici qui faisaient
l'unanimité, du côté des
oppositions et des députés indépendants,
pour qu'il y ait un tel plan avant qu'on commence à étudier le projet de loi.
On a donné une chance, on a dit : O.K.,
on va faire les consultations publiques, peut-être qu'à la lumière des
consultations publiques le ministre
va peaufiner son plan et qu'on pourra l'avoir avant de commencer l'étude
détaillée. On ne l'a pas eu. On en a fait une deuxième pour l'avoir
avant l'étude détaillée; on ne l'a pas eu. Et force est d'admettre qu'on a dû commencer à étudier un projet de loi dans le
détail — ça le
dit, c'est le détail, donc on devrait être capables d'avoir des réponses à toutes nos questions — sans non seulement qu'il y ait un plan
d'ensemble pour le projet des maternelles, qui est le projet phare du gouvernement en matière d'éducation, mais qu'il
n'y ait même pas de réponse claire à une foule de nos questions, alors
qu'on était au stade de l'étude détaillée article par article.
Donc, je
poursuis dans la veine de ma collègue pour dire que c'est quelque chose qui est
non seulement surprenant, mais qui
est profondément déconcertant, parce que la loi qu'on est en train de modifier,
ça va être la base, l'assise pour faire en sorte que ce projet-là va pouvoir se déployer. Donc, même s'il y a
des choses qui ne sont pas de la nature à intégrer dans une loi, on le comprend bien, qui peuvent
être de nature réglementaire ou juste de nature plus administrative, quand
on adopte le projet de loi qui va permettre
la création de ce tout nouveau réseau, que l'on veut universel, des maternelles
quatre ans, quand on adopte la loi qui va
permettre à ce projet-là d'exister, bien, la moindre des choses, c'est qu'on
soit capables d'avoir des réponses à nos questions.
Donc, ça a été extrêmement décevant de naviguer
depuis le mois d'août à tâtons, en n'ayant pas l'impression que le ministre sait précisément où il s'en va
alors que c'est son projet. C'est un projet qui a fait l'objet d'un engagement
formel du premier ministre lors d'un débat
en campagne électorale, qui a fait l'objet de promesses répétées depuis un an,
quand la Coalition avenir Québec est arrivée
au gouvernement, et là on est rendus un an plus tard et on n'a toujours pas
de réponse à un nombre impressionnant de questions.
Donc, je vais poursuivre sur pourquoi c'est si...
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Oui, vous pourrez
poursuivre lors de la reprise du débat. Mais, compte tenu de l'heure et
afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une affaire inscrite par les
députés de l'opposition, le présent débat
sur la prise en considération du rapport de la Commission de la culture et de
l'éducation sur le projet de loi n° 5 est ajourné.
Les travaux sont suspendus jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 1)
Le Vice-Président (M. Picard) :
Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires inscrites par
les députés de l'opposition
Motion proposant que
l'Assemblée réitère que l'île d'Anticosti est un joyau naturel dont
la valeur du patrimoine géologique et paléontologique est mondialement reconnue
et qu'elle demande au gouvernement de s'engager à protéger l'île d'Anticosti,
à conserver son caractère naturel exceptionnel et à soutenir sa
candidature au patrimoine mondial de l'UNESCO
À l'article 39
du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition,
Mme la députée de Maurice-Richard
présente la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale réitère solennellement que l'île d'Anticosti est un joyau naturel qui
recèle un patrimoine géologique et paléontologique dont la valeur universelle
et exceptionnelle est mondialement reconnue;
«Qu'elle rappelle que l'ensemble des claims pétrolier et
gazier ont été rachetés dans le passé par l'État afin de préserver la
beauté et le patrimoine unique de cette île;
«Qu'elle rappelle que suite à la demande du gouvernement du
Québec en 2017, le gouvernement fédéral a inscrit l'île d'Anticosti sur la liste des sites du
patrimoine mondial au Canada et que cette étape est celle qui précède la
candidature officielle au patrimoine mondial de l'UNESCO;
«Qu'elle prenne acte
que le ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs a soumis à plusieurs
reprises des recommandations défavorables à la création d'une bande de
protection des berges de l'île;
«Qu'enfin,
l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de mettre en place une
bande de protection des berges de
l'île sans tarder et de s'engager formellement à protéger l'île d'Anticosti, à
conserver son caractère naturel exceptionnel et à soutenir sa
candidature au patrimoine mondial de l'UNESCO en prenant les mesures
nécessaires.»
Je vous
informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la
motion inscrite par Mme la députée
de Maurice-Richard s'effectuera comme suit : 10 minutes
sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, 53 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement,
31 min 52 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle,
11 min 23 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition,
10 min 15 s sont
allouées au troisième groupe d'opposition. Chaque député indépendant dispose
d'un temps de parole de 1 min 30 s. Toutefois, lorsqu'un
seul député indépendant participe à un débat, il dispose d'un temps de parole
de deux minutes.
Dans le cadre
de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des
groupes parlementaires sera
redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies
précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront
soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle aux députés indépendants
que, s'ils souhaitent intervenir au cours du débat, ils ont 10 minutes à
partir de maintenant pour en aviser la présidence.
Et je cède la parole à Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie Montpetit
Mme
Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Je vais me permettre...
la motion, je pense, campe bien, puis vous
venez de la lire, donc je ne la relirai pas, mais campe bien l'intention
derrière le texte, dans le fond. Mais je tiens quand même à faire... à camper, pour qu'on parte tous sur la même
longueur d'onde de l'enjeu qui est devant nous aujourd'hui.
Il faut bien
comprendre que, quand on dit que l'île d'Anticosti recèle un patrimoine
géologique puis paléontologique exceptionnel,
il n'est pas seulement mondialement reconnu, il est unique. Il y a des sites
fossilifères qui datent de 445 millions
d'années, qui témoignent de la première extinction massive de vie animale à
l'échelle mondiale. Et c'est pour ça que je dis, c'est non seulement
exceptionnel, c'est absolument unique.
On retrouve
aussi, le long de la côte d'Anticosti, des vestiges de la présence autochtone
qui remontent à plus de 3 500 ans. Donc, vous comprenez que ça a
une valeur universelle complètement exceptionnelle, puis c'est tellement exceptionnel que la candidature de l'île
d'Anticosti a été soumise, justement, pour être reconnue au patrimoine mondial.
Et ce qui nous amène en cette Chambre
aujourd'hui, c'est que cette candidature-là, elle est compromise. On apprenait... Le Devoir rapportait, il
y a quelques jours, que le ministre de la Faune, de la Forêt et des Parcs a
refusé le plan de protection du
territoire qui est proposé par le maire de l'île d'Anticosti qui, lui, souhaite
faire avancer sa candidature, justement,
auprès de l'UNESCO. Et donc Le Devoir rapportait que le ministre de
la Forêt aurait rendu non pas un seul, mais
deux avis défavorables à la création d'une bande de protection le long du
rivage de l'île. Il faut bien comprendre que, sans cette zone de protection, c'en est fini de la candidature de
l'UNESCO. Et c'est en ce sens que je dépose ma motion.
Et je veux
faire un certain historique pour voir d'où on part puis où on est rendu
aujourd'hui. Mais je ne peux pas... souligner
le fait que, pour moi, c'est non seulement incongru, mais complètement incohérent de voir un gouvernement, qui plus est un gouvernement qui se dit nationaliste dans la protection du Québec
et dans la fierté du Québec... Bien, quand on est fier de sa nation, on devrait être d'autant plus fier qu'une
partie de celle-ci puisse être reconnue au patrimoine mondial de l'UNESCO et on devrait faire tout ce qui est en
notre pouvoir pour pouvoir, justement, favoriser cette candidature-là et non lui mettre des bâtons dans les roues. Et, à l'heure actuelle, ce qui est fait par le ministre de la Forêt, c'est de mettre des bâtons dans les
roues à cette candidature. Et je trouve ça pas seulement déplorable, je trouve
ça... En tout cas, j'ai bien hâte
d'entendre les intervenants du gouvernement pour venir nous expliquer cette
décision, parce qu'honnêtement je la trouve
non seulement inexplicable, mais je trouve que c'est vraiment un manque de
considération et de compréhension du
joyau patrimonial et historique qu'est l'île d'Anticosti. Mais, en plus de ça,
c'est un manque complètement d'écoute non
seulement aux 200 insulaires de l'île d'Anticosti, mais au maire qui, lui,
demande, justement, d'être aidé, demande d'avoir cette zone de
protection pour l'aider dans sa candidature.
Et, pour bien
comprendre d'où on est parti, je pense que c'est important de faire un retour
historique dans le dossier de l'île d'Anticosti. Parce qu'il faut
comprendre qu'en février 2014, rappelons-nous que le gouvernement péquiste de Pauline Marois avait à l'époque annoncé une aide
de 115 millions pour favoriser l'exploration des entreprises
pétrolières sur l'île d'Anticosti. Ça fait
cinq ans, ça ne fait pas très longtemps, là. Et, par chance — moi, je vais dire «par chance» — ce
gouvernement-là n'est pas resté très longtemps au pouvoir. Donc, ça nous a permis, nous, d'être
élus en 2014. Et, très rapidement, Philippe Couillard, le premier ministre à l'époque, avait annoncé pas juste son manque d'enthousiasme, mais
son désintérêt complet pour l'exploration et l'exploitation pétrolière et gazière
sur l'île d'Anticosti. En 2017, je rappellerai
que notre gouvernement avait racheté l'ensemble des droits d'exploration
et d'exploitation gazière et pétrolière de l'île d'Anticosti afin d'empêcher toute exploration et toute
exploitation sur l'île, justement, en considérant l'aspect patrimonial, et l'aspect historique, et l'importance pour le patrimoine mondial qu'a l'île d'Anticosti. Et, bien évidemment,
cette décision-là, elle avait reçu l'aval du maire de L'Île-d'Anticosti, parce qu'on travaillait avec lui
à venir l'aider, justement, pour favoriser la vitalité de son île.
Puis je veux
rappeler à cette Chambre — parce que c'est important, on fait notre discussion — qu'à l'époque la CAQ s'était farouchement opposée à notre décision
de venir racheter ces claims pétroliers et gaziers. Et on se
rappellera — pour
ceux qui ne s'en rappellent pas, je vais quand même le mentionner parce que je
pense que c'est important, encore là, aux
fins de notre discussion — que la porte-parole de la CAQ en matière d'énergie, la députée de
Saint-Hyacinthe, avait déploré la décision
du gouvernement libéral, et je la cite, là, elle dit : «Pourquoi rejeter
bêtement la possibilité de connaître
le potentiel gazier et pétrolier de l'île?» Puis elle avait ajouté que
l'histoire n'était pas terminée. Bien, je vous informe qu'effectivement
elle n'est pas terminée parce que la CAQ est revenue au gouvernement, et maintenant on se retrouve encore... on refait un pas en
arrière dans cette histoire, alors qu'on pensait qu'on avait pris la bonne
direction pour venir valoriser le patrimoine de cette île.
Et donc on se
retrouve aujourd'hui avec un gouvernement qui non seulement met en péril ce
patrimoine, mais met aussi en péril... puis c'est bien important de le
comprendre parce que les deux sont vraiment liés, met en péril la candidature de l'île au niveau du patrimoine
mondial de l'UNESCO. Puis on le sait, que le premier ministre, il a déjà
indiqué qu'il n'était pas très chaud
à cette candidature-là. Donc, j'ai bien hâte d'entendre les commentaires qui
seront faits par le gouvernement et
la direction qu'ils prendront par rapport à notre motion, parce que, pour moi,
il y a plusieurs drapeaux rouges qui ont été soulevés au cours des derniers
mois, mais là encore plus au cours des dernières semaines, par rapport à la volonté de réellement aider l'île
d'Anticosti.
• (15 h 10) •
Et c'est
important aussi de comprendre que le maire d'Anticosti, avec qui, nous, on a beaucoup
travaillé à l'époque, justement, lui, il se bat pour que sa municipalité figure au patrimoine mondial de l'UNESCO. Parce qu'au-delà de l'intérêt de conservation il y a aussi un intérêt au niveau
du fait que la désignation, évidemment, va venir stimuler le tourisme sur l'île, va contribuer à la relance de l'île puis à
la survie de cette communauté-là, qui est quand même, somme toute,
relativement isolée.
Puis, à
preuve, ce qui est intéressant de constater, c'est que, dès qu'on a pris cette
décision-là, justement, de cesser l'exploitation,
l'exploration pétrolière et de mettre le cap, de mettre l'accent davantage sur un
tourisme écosystémique en lien avec
la biodiversité, on voit qu'à partir du moment où l'industrie, dans le fond,
s'est retirée de l'île d'Anticosti, on
a vu 65 % d'augmentation de la fréquentation de l'île. Puis, au niveau de
la fréquentation du parc national de l'île, en ce moment, ce qu'on voit, c'est une augmentation de 362 % pendant
cette période-là, de 2015 à 2017. Donc, c'est énorme. On voit à quel point, justement, d'avoir misé sur
le caractère unique, sur le caractère patrimonial, historique, écologique,
paléontologique, est venu créer une relance
au niveau de l'île, et on est à même de supposer que le fait d'avoir,
justement, une reconnaissance au niveau de l'UNESCO va venir encore davantage
favoriser cette relance.
Et je profite
de l'occasion qui m'est donnée pour soulever un autre enjeu, puisque j'ai les
gens du gouvernement qui sont devant
nous, puis c'est toujours en lien, M. le Président, avec l'île d'Anticosti. Il
va falloir que le gouvernement en profite
aussi pour nous dire qu'est-ce qu'il advient de la création des trois zones,
des trois réserves de biodiversité sur l'île
d'Anticosti, un projet qui avait été annoncé aussi par notre gouvernement pour
faire passer de 8 % à 22 % la partie protégée sur l'île. La délimitation des trois aires protégées a été
faite. Elle avait été faite par le passé, elle avait été arrêtée. On attend un décret ministériel qui ne vient pas.
Et ça, moi, ça m'inquiète beaucoup de savoir que le gouvernement n'est
pas en train de procéder présentement, justement, à la protection de ces aires
protégées, parce que ça me questionne justement
sur leur volonté, de façon générale, par rapport à l'île, de mettre l'accent
sur la biodiversité et non de favoriser l'industrie forestière, alors
que c'est assez marginal, là, ce qui se fait présentement comme industrie
forestière.
Donc, je vois
le temps qui file, M. le Président, mais je veux profiter vraiment de
l'occasion... puis je ne comprends pas,
puis j'imagine que le ministre de la Forêt viendra nous expliquer exactement
son argumentaire puis comment il peut être
convaincu que ça vaut la peine de refuser... ou comment ça vaut la peine
d'aller exploiter de la forêt là, alors qu'on parle de la préservation
de sites qui ont 445 millions d'années, qui sont uniques.
Moi, je suis
extrêmement fière de ce qu'a fait notre gouvernement pour l'île d'Anticosti, je
suis extrêmement fière qu'on ait
décidé de ne pas permettre l'exploitation et l'exploration pétrolières. Je suis
extrêmement fière qu'on ait soutenu, dans toutes les étapes, le maire de
l'île d'Anticosti pour porter, justement, sa candidature au niveau de l'UNESCO.
Et j'invite,
mais j'invite vraiment le gouvernement à revoir sa position. J'invite le
ministre de l'Environnement à parler à son collègue parce que je ne peux
pas croire que le ministre de l'Environnement n'est pas sensible à toutes ces questions, à tout cet argumentaire. Que la
ministre des Relations internationales aussi, si elle saisit l'importance du rayonnement à l'international, qu'elle intervienne
auprès de son collège aux Forêts et que le premier ministre également en fasse autant. Parce que, quand on est fiers,
quand on est nationalistes, on essaie de rayonner à l'international, M. le Président.
Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le ministre de
l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.
M. Benoit Charette
M. Charette : Merci, M. le Président. Je suis particulièrement
heureux de participer à cet échange cet après-midi, ne serait-ce que pour apporter plusieurs
correctifs aux propos de ma collègue qui, manifestement, est mal renseignée et
à plusieurs égards sur l'enjeu de l'île d'Anticosti.
Pour ce qui
est du gouvernement, ça a été réitéré à plusieurs reprises, l'importance que
l'on accorde à l'environnement, il
est manifeste. On a tenu un conseil national sur cet enjeu il y a quelques mois
à peine. On est sur le point de démontrer, à travers une série de
nouvelles orientations, les changements que l'on souhaite apporter. Et, au niveau de l'île d'Anticosti aussi, il y a
plusieurs engagements qui ont été pris et réitérés. Donc, ce que mentionne la
collègue mérite certainement certaines précisions.
Elle a, à
juste titre, mentionné le caractère unique de l'île d'Anticosti, caractère que
nous reconnaissons, c'est bien certain.
Elle aurait... Elle a fait référence, à juste titre, à la richesse au niveau
paléontologique, géologique. Elle a mentionné une donnée qui, moi, m'a interpellé, qui m'a intéressé la première fois
que je l'ai lue, c'est-à-dire qu'on y retrouve des fossiles aussi vieux que 45 millions
d'années. Ce que l'on reconnaît aussi, par contre, c'est qu'il y a une diversité,
une biodiversité qui se mérite d'être
protégée. Il y a 2 200 espèces, notamment d'oiseaux, de plantes, des
espèces qui sont souvent
rares, sinon uniques à l'île. Donc, c'est tout un patrimoine que l'on
reconnaît, et on reconnaît naturellement cette notoriété, que l'on veut
voir étendue à l'échelle internationale.
Et là où elle
fait faux pas, malheureusement, c'est dans la séquence ou dans l'évolution des
dernières années. Moi, je pourrais, avec grand plaisir, rappeler un
propos du premier ministre qui date du 25 octobre dernier. Je vais le
citer textuellement pour ne pas qu'il y ait
de confusion : «Il n'y a aucun intérêt de notre part pour relancer le
projet d'exploration pétrolière sur
l'île. Il n'y a pas de projet sur la table. [Nous] allons suivre le processus
de l'UNESCO.» Donc, à travers cette déclaration, à travers la
démonstration que je compte faire avec mes collègues cet après-midi, je suis
tout à fait confiant que l'on puisse, si la
bonne foi est présente du côté de l'opposition officielle, arriver à un libellé
qui puisse être adopté à l'unanimité, que ce soit cet après-midi ou
demain.
Cette
reconnaissance au niveau de l'UNESCO, elle a plusieurs mérites. Il est vrai que
l'on peut espérer, oui, cette reconnaissance
internationale, mais qui aurait des bienfaits au niveau économique, au niveau
du tourisme, au niveau de la protection de la biodiversité. Cependant, c'est un
processus qui est relativement complexe, qui ne se fait pas du jour au lendemain. Mais, pour ce qui est du processus
lui-même, je vais laisser la chance à mes collègues de l'expliquer au cours
des prochaines minutes.
Mais d'abord,
peut-être vous mentionner là où on se situe à travers un sujet qui est
nettement plus inclusif, soit celui
des aires protégées. Parce qu'on ne peut pas distinguer le dossier de l'île
d'Anticosti du dossier des aires protégées. Et là je vous ferais, si vous me le permettez, M. le Président, un petit
retour dans le temps. Le gouvernement du Québec s'est commis dès 2009 au niveau de la protection d'aires protégées. En
2011, il y a une cible qui a été établie à 15 % pour
l'année 2015. Et, plus récemment, les gouvernements se sont engagés à
atteindre la cible de 17 % de protection du territoire terrestre et eau douce. Ça, c'est l'objectif, l'objectif
auquel on souscrit. On a eu l'occasion de le mentionner.
Cependant, on vit avec un héritage assez lourd,
c'est-à-dire 15 années de gouvernance libérale, où plusieurs engagements ont été pris, mais très peu de moyens
pour les rencontrer, ces objectifs-là. Pour ce qui est de l'objectif de 17 % dont je vous parle, on se devait de
l'atteindre pour l'année 2020, un engagement qui a été pris il y a
plusieurs années, et malheureusement, au 31 mars dernier, la
dernière donnée en date, nous étions plutôt à 10 % essentiellement.
Donc, c'est ce qui résume la gouvernance
libérale. Beaucoup d'engagements. On veut démontrer un intérêt. Mais, lorsque vient le temps d'agir,
malheureusement, les résultats ne sont pas au rendez-vous. En comparaison, la
Colombie-Britannique, aujourd'hui, est essentiellement à 15,3 %, donc un
5 % d'avance sur le Québec. Donc, on est conscients, on doit prendre les
bouchées doubles à ce niveau-là, et c'est l'engagement qu'on a pu réitérer
encore ces dernières semaines et ces derniers mois.
Ce qu'il faut
savoir, c'est qu'il faut corriger certaines lacunes qui nous empêchent de
procéder, ce que n'a pas fait le
gouvernement précédent. C'est-à-dire d'élaborer une stratégie conjointe entre
les différents ministères, d'une part, mais aussi consulter les populations concernées, de sorte que
l'identification de ces terrains-là, de ces sites-là, de ces aires-là puisse se faire nettement plus rapidement et que
le processus décisionnel puisse aussi se faire de façon nettement plus
marquée. Et c'est le travail qu'on est en train de faire actuellement.
• (15 h 20) •
Et je dois vous avouer que le milieu concerné,
les organismes touchés par la question des aires protégées sont plutôt enthousiastes sur l'exercice auquel ils
sont associés, auquel ils participent actuellement, ce qui me permet d'être
très confiant, dans les prochaines semaines, de pouvoir annoncer des mesures
précises qui nous permettront d'atteindre le plus rapidement possible l'objectif de 17 %
d'aires protégées, mais en réitérant malheureusement que nous avons des bouchées doubles
à prendre parce qu'on stagne. Dans les faits, les aires protégées que j'ai eu à
confirmer au cours des derniers mois, notamment une série le printemps
dernier, le processus avait été initié, dans certains cas, il y a de cela 10
ans; dans certains cas, il y a
de cela 15 ans. Donc, c'est dire à quel point la volonté politique,
au cours des dernières années, n'était pas présente à ce niveau-là.
Donc, pour bientôt, des nouvelles mesures qui seront confirmées.
Les oppositions,
je les assure d'une collaboration de notre part, mais on va espérer qu'elles se
mettent également de la partie pour nous permettre d'adopter le plus
rapidement ces mesures qui sauront faire la différence. Et,
quand je dis, maintenant, espérer la collaboration... parce que, oui, vraisemblablement,
ça va nécessiter le dépôt d'un projet de loi. Ça
va nécessiter des consultations, ça va nécessiter une étude rigoureuse article par article, et c'est à travers la collaboration
qu'on pourra démontrer, souhaitons-le, le réel intérêt des oppositions à nous
voir progresser sur cette question-là.
Une des
embûches que nous avons à résoudre, c'est la question de la détermination
des catégories pour chacun des sites visés. Au Québec, au cours des dernières années, on s'est limité à
cinq catégories, alors que d'autres organisations internationales, et surtout
l'Organisation des Nations unies, qui accréditent les critères
de référence pour chacun des États, nous
trouvent trop restreignants. On pourrait effectivement protéger des
aires en permettant une certaine activité, qu'elle soit touristique, dans certains cas, certaines
activités traditionnelles dans d'autres cas, et c'est des pas qu'on s'est
refusé de faire au cours des dernières années.
Bref, très
confiant, je ne doute pas de la collaboration des collègues, mais, en
même temps, j'espère qu'ils pourront
reconnaître le retard que l'on accuse, actuellement, non pas de par notre faute, mais bien par l'inaction et l'absence de
volonté au cours des dernières années.
Là où je
voudrais apporter certaines corrections, c'est au niveau des intentions qu'on
nous prête. On prête des intentions à
mon collègue à la
Forêt, à la Faune et aux Parcs, notamment un refus de collaborer. On m'indique
des avis défavorables qui auraient été transmis au ministère de
l'Environnement. Or, c'est faux. C'est faux, M. le Président. La collaboration entre nos deux ministères, elle est
exemplaire. On réitère cette volonté, non seulement avec son ministère
et le mien, mais avec tous les autres
ministères concernés, ce souhait de voir la reconnaissance par l'UNESCO de ce
patrimoine international là le plus
rapidement possible. Donc, je ne sais pas, honnêtement, d'où ils tiennent leurs
informations. Ils ne nous ont certainement pas questionnés.
D'ailleurs,
c'est la première fois aujourd'hui, et je trouve qu'il se fait tard.
L'opposition officielle, si elle avait démontré
un réel intérêt pour l'île d'Anticosti, aurait pu nous questionner bien
d'avance ou bien à l'avance sur cet enjeu-là, et on aurait pu les rassurer par rapport à la collaboration qui existe. On
parle de bande riveraine, on parle d'un territoire à déterminer, puis c'est toutes des discussions qui
ont cours, présentement, et avec l'assurance autant du ministère de la
Faune, de la Forêt et des Parcs, que de l'Environnement, que des propos du
premier ministre lui-même. La citation à laquelle
je faisais référence il y a quelques minutes à peine, elle ne date pas de
10 ans, elle ne date pas de 15 ans, de 20 ans, elle date d'à peine une année. Donc, c'était tout
à fait facile pour l'opposition officielle, s'ils s'étaient donné la peine, de
faire ces vérifications-là et s'assurer de notre intérêt pour la question.
Maintenant, je vous parlais de confiance par rapport
au vote qui va se tenir vraisemblablement plus tard aujourd'hui, sinon demain. Ça va nécessiter un petit amendement pour
corriger l'erreur très, très factuelle énoncée, là, par ma collègue de l'opposition officielle. Donc, dans
un premier temps, si vous me permettez, M. le Président, je vais vous faire la lecture de l'amendement et du libellé
complet que l'on souhaite voir adoptés à l'unanimité pour démontrer, là,
cette préoccupation que nous avons.
Donc, au
niveau de l'amendement, ce serait tout simplement de retirer l'alinéa 4, tel qu'il se lit maintenant, pour le remplacer par le
suivant :
«Qu'elle
prenne acte que le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs a transmis au
ministère de l'Environnement et de la
Lutte contre les changements climatiques son approbation pour l'inscription de
l'île comme site du patrimoine mondial de l'UNESCO, et de prendre des
mesures en ce sens.»
Le libellé entier se lirait comme suit :
«Que l'Assemblée nationale réitère
solennellement que l'île d'Anticosti est un joyau naturel qui recèle un
patrimoine géologique et paléontologique dont la valeur universelle et
exceptionnelle est mondialement reconnue;
«Qu'elle
rappelle que l'ensemble des claims pétrolier et gazier ont été rachetés dans le
passé par l'État afin de préserver la beauté et le patrimoine unique de
cette île;
«Qu'elle
rappelle que suite à la demande du gouvernement du Québec en 2017, le
gouvernement fédéral a inscrit l'île d'Anticosti sur la liste des sites
du patrimoine mondial au Canada et que cette étape est celle qui précède la
candidature officielle au patrimoine mondial de l'UNESCO;
«Qu'elle prenne acte que le ministère des Forêts, de
la Faune et des Parcs a transmis au ministère de l'Environnement et de
la Lutte contre les changements climatiques son approbation pour l'inscription
de l'île comme site du patrimoine mondial de l'UNESCO, et de prendre des
mesures en ce sens;
«Qu'enfin
l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de mettre en place une
bande de protection des berges de l'île sans tarder et de s'engager
formellement à protéger l'île d'Anticosti, à conserver son caractère
naturel exceptionnel et à soutenir sa candidature au patrimoine mondial de
l'UNESCO en prenant les mesures nécessaires.»
Donc, vous allez me permettre de déposer
l'amendement ainsi que le libellé entier de la motion.
Donc, ça ne
dénature pas, bien au contraire, cette volonté que semble avoir l'opposition
officielle. On le saura à travers la collaboration qu'ils nous offriront pour
déterminer le libellé lui-même. Mais le libellé lui-même, l'esprit est
tout à fait conforme à la motion initiale,
et surtout cette petite modification corrige une erreur, sans doute de bonne
foi, mais une erreur commise par
l'opposition officielle qui semblait croire ou nous prêter une intention de ne
pas protéger ou de ne pas poursuivre
la démarche au niveau de la reconnaissance de l'île d'Anticosti comme
patrimoine mondial aux yeux de l'UNESCO.
Donc, la
nuance, elle est importante ici. Imaginons ceci, si nous sommes en mesure
d'adopter à l'unanimité cette motion au moment du vote, quel autre
signal très fort que nous enverrons aux instances décisionnelles pour voir la
reconnaissance de cette île qui nous est très précieuse aux yeux du
gouvernement, mais également, souhaitons-le, de l'ensemble de l'Assemblée
nationale?
Donc, je vais
m'arrêter dans les prochains instants pour laisser la parole à mes collègues.
Ils auront l'occasion d'expliquer, dans les prochaines minutes, quelles
sont les étapes à franchir, comment bien les franchir pour s'assurer de ne pas perdre cette occasion unique qui est la
nôtre, et par la suite je vais espérer très, très sincèrement que l'on puisse
appuyer de façon unanime le libellé proposé
et parler d'une seule voix pour reconnaître l'importance qu'on accorde non
seulement à l'île d'Anticosti, mais à la
volonté du Québec tout entier, à travers son Assemblée nationale, pour les
aires protégées, qui, oui, doivent
être augmentées en nombre, ne serait-ce que pour rencontrer les objectifs
internationaux qu'on s'est donnés,
mais aussi pour permettre à cette belle biodiversité qui est la nôtre de
continuer d'évoluer. Merci, M. le Président.
• (15 h 30) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le ministre. Donc, votre amendement est reçu sous réserve de la permission de l'auteur pour que la motion soit
amendée. On va la distribuer. Tout à l'heure, Mme la députée de Maurice-Richard, vous nous indiquerez qu'est-ce que vous faites
avec l'amendement.
Donc, je suis prêt à reconnaître d'autres
intervenants. M. le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs.
M. Pierre Dufour
M. Dufour :
Bonjour, M. le Président. Donc, bien important, je pense, lorsqu'on est
interpellé sur une motion, c'est quand même intéressant de pouvoir
expliquer un peu la situation.
Je comprends ma collègue de Maurice-Richard,
lorsqu'elle mentionne qu'elle a été surprise, lorsqu'elle a vu l'article du Devoir. Et naturellement c'est
quelque chose que je m'ai adressé immédiatement, lorsque, moi aussi, j'ai vu l'article parce que ça venait un petit peu en
contradiction avec ce qui se travaillait, justement, au ministère, mon
ministère et le ministère de l'Environnement, naturellement.
Donc, ce que j'ai fait immédiatement, c'est que j'ai pris le téléphone et j'ai
appelé, justement, le maire de l'endroit, M. Pineault, et avec lequel j'ai discuté un peu de la situation,
qu'est-ce qui en était. Et je peux vous dire une chose, très belle
conversation qu'on a eue, pour m'expliquer comment ça se fait qu'on avait cet
article-là dans le journal et cette perception-là
à ce moment-là. Comme vous le savez, il y a
un projet qui était mis de l'avant par l'opposition par le passé avec, naturellement, des enjeux. Il y a des enjeux de foresterie,
il y a des enjeux d'UNESCO, il y a des enjeux de planification de chasse, de pêche, etc.
Dans
cette dynamique-là, maintenant, ce qu'il fallait regarder, c'étaient les
modalités. Ici, je peux peut-être répondre
à la question de ma collègue. Lorsqu'elle dit qu'on avait fait des avis défavorables, je
pense que le détail est dans les
mots. Ce n'est pas des avis défavorables. Mais, lorsqu'on approche le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs
pour lui demander la situation
de la foresterie, bien, on fait une revendication où on dit un avis sur la situation
de la forêt. Dans ce cas-là, je pense que c'est important de le
préciser et que l'opposition comprenne exactement quel genre d'avis qu'on
a présenté au ministère de l'Environnement.
Donc,
de ce côté-là, pour nous, on était très à l'aise avec le type d'avis qu'on
présentait. Par contre, comme le disait le maire Pineault de l'endroit, de L'Île-d'Anticosti, ce qu'il
m'expliquait, il m'a dit : M. Dufour, on a un problème.
Il dit : On a un beau projet, et là ces
avis-là font en sorte qu'on ne peut peut-être pas avancer dans le projet. Maintenant,
j'ai dit : C'est correct, je vais
prendre le tout en libellé et je vais adresser le tout à ma... la situation
à mon personnel chez nous, au ministère.
Et là, avec le ministère, ce qu'on a regardé justement,
c'est quelle était la capacité de pouvoir continuer à faire de la
foresterie de façon intelligente tout en étant capable de respecter un beau
projet pour l'UNESCO, pour l'île d'Anticosti. C'est ce qu'on s'est adressé et
c'est ce qu'on a travaillé avec les différents intervenants.
Il
faut comprendre une chose, la capacité forestière de cette île-là, elle a une
valeur si on la respecte à un certain niveau.
Donc, on parle normalement 212 000 mètres
cubes par année, que, si on arrive avec un projet trop large, on vient éliminer complètement notre foresterie. Et, comme
le maire m'a dit, il dit : M. le ministre, il dit, je comprends très bien
la situation. Il dit : Je ne suis quand
même pas un gars qui ne veut pas de développement économique chez nous. La
pêche, la chasse, l'aménagement
forestier durable, c'est des choses sur lesquelles on tient. Et c'est important
pour nous d'avoir ces environnements-là économiques pour développer,
pour continuer à garder une île économique quand même très intéressante au niveau de l'île d'Anticosti. Mais
on a un projet de qualité internationale, reconnu justement par l'aspect
fédéraliste, par le Canada, mais aussi on a
besoin que notre Québec soit là. Et c'est ce qu'on s'est bien entendu. Et j'ai
dit : Comment qu'on est capables de trouver les chemins de passage pour
être capables de faire un beau projet? Et c'est ce qu'on a regardé encore une fois avec les gens de chez nous. Et on est
arrivés à une situation où est-ce qu'on se dit : On est capables de faire un projet avec une bande
qui va représenter un kilomètre et non deux kilomètres. Et je vais vous
expliquer un petit peu la situation, qu'est-ce que c'est qu'un kilomètre.
Une voix :
...
M. Dufour :
On va prendre le document. L'île d'Anticosti subit présentement, entre autres,
une épidémie de tordeuse de bourgeons
d'épinette. Comme on connaît le dommage que fait la tordeuse de bourgeons à
l'épinette, on n'a pas le droit
présentement d'arroser dans la bande de protection. Donc, ça, c'est un élément
qu'il faut tenir compte. En se limitant
à un kilomètre tout autour de l'île, on est en mesure quand même d'enrayer
l'épidémie. Puis ça, c'est un élément qui est important.
Le
site d'intérêt ensuite. Au cours des dernières années, plusieurs options
étaient sur la table, mais une bande de protection d'un kilomètre est
l'approche que nous privilégions. Cela représente plus de 400 kilomètres
carrés. Ce 400 kilomètres carrés est
l'équivalent de... plus vaste que les îles Saint-Vincent-et-les-Grenadines et
20 fois la taille de Monaco.
Donc, je pense qu'avec un kilomètre on peut arriver à une situation
gagnant-gagnant pour l'ensemble, pour la foresterie, pour le projet
UNESCO, pour le maire de L'Île-d'Anticosti et les citoyens et aussi, naturellement,
pour la population, mais aussi pour l'ensemble du développement de cette île-là, pour ne pas non plus tuer le potentiel économique de la forêt que l'île
d'Anticosti produit.
Donc,
à ce niveau-là aussi, ce qu'il est important de préciser, vous
le savez, l'activité économique de l'île
d'Anticosti est basée principalement sur la chasse, la pêche, l'aménagement durable, l'écotourisme. Tantôt
on le parlait, on parlait de 362 % d'augmentation. Ça aurait été le fun
d'avoir les chiffres, qu'est-ce que ça représente, parce que dépendamment,
une personne qui s'additionne à quatre,
c'est déjà 25 %. Donc, ça aurait été le fun de savoir d'où on tire un
chiffre de 362 %. Mais, au-delà
de ça, ce qu'il est important de comprendre, c'est que, pour nous, l'île
d'Anticosti, elle a une valeur sur sa totale. Et c'est sur cet aspect-là
qu'on travaille présentement, à arriver avec un projet, avec des modalités qui
soient permises, et gagnant pour tout le
monde. Même principe, vous le savez, mon collègue de l'Environnement, on a
différentes catégories pour justifier
des secteurs. Et ça aussi, c'est important de se l'adresser. Donc, quand on
regarde l'ensemble du projet, il faut faire les choses correctement.
De
l'autre côté, je comprends parfaitement le maire, qui lui, à un moment donné,
il sent que le projet n'avance plus
et il veut avoir un peu un projet qui va se réaliser. Et c'est ça que je
m'étais adressé à lui dire : M. Pineault, on va s'occuper de réaliser votre projet parce que nous
aussi, comme l'opposition, on croit parfaitement au projet de l'île d'Anticosti
comme projet UNESCO.
Donc, pour nous, je peux juste vous dire une
chose, on est très heureux de la manière qu'on fonctionne présentement, à arriver à avoir un juste milieu
entre les développements économique, forestier, aménagement durable et
tout l'aspect protection parce que, oui, il y a une valeur fossilifère
archéologique qui risque d'être des avenues de développement économique pour le futur de l'île. Et je peux vous dire
une chose, et je peux le dire à M. Pineault, je suis droit devant lui
présentement au niveau de la caméra s'il nous regarde, je peux vous le dire,
M. Pineault : On a confiance d'arriver à une résultante
positive pour votre projet. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le ministre. Oui, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Paule Robitaille
Mme Robitaille :
Oui. Bon après-midi, M. le Président. J'ai parlé amplement, hier et il y a deux
semaines, de mon inquiétude par
rapport à la perte de pouvoirs du ministère des Relations internationales. On a
parlé des différents décrets qui ont été... qui ont vu l'existence, si
je puis dire, en octobre 2018 et qui enlevaient des petits morceaux au ministère des Relations internationales au profit
du ministre de l'Économie. Et là il y a le projet de loi n° 27
qui, encore plus, enlève des pouvoirs
à la ministre des Relations internationales. Et on faisait état de nos
craintes. On ne voudrait pas voir le ministère des Relations internationales
devenir un bureau de commerce ou un comptoir du commerce international
parce que le ministère des Relations internationales, c'est beaucoup plus que
ça. C'est une cinquantaine d'années de déploiement,
de travail à l'échelle internationale pour que le Québec rayonne. Évidemment
qu'on veut que le Québec soit
prospère puis que les relations commerciales, bien, que ça soit important. Et
c'est très, très important, les relations commerciales au niveau international, et il faut aider nos entreprises,
on s'entend là-dessus. Mais ce ministère-là ne devrait pas voir son
pouvoir diminuer.
Et là, dans
toute cette histoire de la candidature d'Anticosti à l'UNESCO,
bien, quand j'entends la CAQ et quand je
vois cette volonté d'aller avec des coupes de bois et de développer l'industrie
forestière là-bas, qui remet en péril tout ce travail-là, en amont, du ministère des Relations internationales pour
faire en sorte que l'île d'Anticosti devienne partie du patrimoine mondial, bien, je m'inquiète énormément
et puis je me dis : Qu'est-ce que la ministre fait? Et qu'est-ce qu'elle
peut faire, justement, notre ministre des
Relations internationales, pour faire en sorte que cette candidature-là, du
Québec, de l'UNESCO, perdure? Et c'est extrêmement
fondamental.
On lisait
justement dans Le Devoir, et je vais citer, et nos inquiétudes, à nous,
sont partagées par plein de monde, on
lisait Alexandre Shields, dans Le Devoir du 12 octobre, qui
disait : «Soucieux de
protéger les intérêts de l'industrie forestière, le gouvernement de François Legault
menace directement la candidature de l'île d'Anticosti pour une inscription
au patrimoine mondial de l'UNESCO, selon les
informations obtenues par Le Devoir. Le maire de la municipalité craint
même pour la survie de sa communauté si l'obstruction de Québec se poursuit.»
Donc, c'est très, très grave. Et quelle belle occasion, pour notre ministre des Relations internationales,
d'asseoir son autorité et de faire en sorte... et de protéger notre
volonté de faire en sorte qu'Anticosti devienne partie du patrimoine mondial et
soit reconnue par l'UNESCO!
• (15 h 40) •
Vous savez,
cette candidature-là de l'île d'Anticosti a été portée par la ministre des
Relations internationales de l'époque
et le gouvernement de l'époque en 2017, un gouvernement de ma formation
politique. Et il y a eu énormément de
travail en amont. On s'est... on a... Et j'aimerais vous faire un petit peu la rétrospective de ce qui s'est passé. Et c'est important
de mettre dans le contexte, de voir les dates, de mettre en contexte qu'est-ce
qui s'est passé, qu'est-ce qu'on a fait, et les craintes qu'on a aujourd'hui,
et ce qu'on peut perdre.
Rappelons-nous
qu'en 2011 il y a eu une étude qui évalué le potentiel pétrolier sur
Anticosti à plus de 40 milliards
de barils. Et là, en février 2014, le gouvernement du Parti québécois est au pouvoir, et ce gouvernement-là s'engage à investir 115 millions de dollars pour réaliser un projet d'exploration en partenariat avec des grosses multinationales, Pétrolia et Corridor
Resources. Et donc la beauté de l'île, et tout ça, est mise en péril par cette
exploitation-là, par ces forages potentiels
là. Et heureusement, en décembre 2015, Philippe Couillard déclare
qu'il n'a aucun, aucun enthousiasme pour le pétrole et, par là, le projet
de l'île d'Anticosti. Alors, ouf! on respire. On veut protéger l'île
d'Anticosti, qui, je le rappelle, est la plus grande île du Québec,
peut-être même du Canada, et qui est un joyau, un joyau pour le Québec. Alors, Philippe Couillard arrête, protège l'île, et c'est
très bien. Et en 2017, en juillet 2017, le gouvernement met fin carrément
au projet d'Anticosti et offre des millions
de dollars pour compenser ces compagnies-là qui étaient engagées dans le
projet.
Et, du même coup, la ministre de l'époque, la
ministre des Relations internationales, la députée actuelle de l'Acadie, commence son lobbying auprès de
l'UNESCO, d'abord auprès du gouvernement canadien parce que la candidature,
elle doit être aussi endossée par le
gouvernement canadien. Alors, elle commence son lobbying et elle veut faire en
sorte que cette magnifique île qu'est l'île d'Anticosti devienne
patrimoine mondial de l'UNESCO.
Alors, on
travaille très fort là-dessus, et le gouvernement... Et il y a d'autres projets
aussi. On pense... Il y a d'autres régions du Québec qui sont aussi sur
sa liste, entre autres, le fjord du Saguenay. Et c'est proposé au gouvernement fédéral, et le gouvernement fédéral s'arrête sur
cette candidature de l'île d'Anticosti parce qu'encore une fois ce n'est pas
juste un joyau pour le Québec, mais c'est un
joyau aussi pour le Canada tout entier. Et donc le projet chemine, et, juin
2018, le gouvernement de Philippe
Couillard annonce la mise sur pied d'un comité interministériel pour aider la
municipalité d'Anticosti à préparer
son dossier de candidature à l'UNESCO. Alors là, on travaille très fort avec
plein d'intervenants, plein de partenaires, tous ensemble, pour justement faire
en sorte que ça aboutisse et puis que l'île d'Anticosti devienne finalement
patrimoine mondial de l'UNESCO.
Et là ce
qu'on voit, c'est que le gouvernement actuel, à cause de ses projets
forestiers, serait en train de défaire tout ça. Et donc ça me cause une énorme
peine. Et puis j'espère que, justement, le gouvernement de la CAQ va revenir
sur ces positions-là. Et je ne suis pas la
seule, et mon parti n'est pas le seul à s'inquiéter. Le maire d'Anticosti a
crié très fort. C'est un cri du
coeur, là, qu'il fait, qui dit : Non, non, non, ça ne peut pas aller de
l'avant, tout ça, ce projet forestier là. Il faut arrêter ça. Gouvernement de
la CAQ, reprenez vos sens et arrêtez tout ça. Et de là l'importance de la
ministre des Relations
internationales de mettre son pied à terre et puis de dire : Eh! ça
suffit. Il faut absolument continuer ces efforts-là du précédent gouvernement et continuer ces efforts
pour justement faire en sorte qu'Anticosti demeure candidat ou, en tout
cas, que ça ne mette pas en péril la candidature de l'île d'Anticosti à
l'UNESCO.
Je
voulais justement vous lire, j'essaie
de trouver, oui, une petite déclaration
du maire de L'île-d'Anticosti. Il disait, et c'est une citation, c'est
vraiment un cri du coeur, comme je le disais tout à l'heure, il nous dit,
John Pineault : «Le gouvernement
met non seulement en péril la relance de l'île, mais aussi la survie de la
communauté.» La communauté de l'île
d'Anticosti, c'est 200 personnes, mais ces 200 personnes là ont
besoin de ça. Et c'est un projet magnifique et ça doit rester.
Alors, il dit, le
maire John Pineault : «C'est tellement décevant — cette
approche-là du gouvernement de la Coalition
avenir Québec — surtout
que le fait d'avoir une île comme Anticosti qui serait classée au patrimoine
mondial de l'UNESCO, ce serait une très belle vitrine pour le Québec à
l'international.» Évidemment, c'est une façon pour nous, encore une fois, de
montrer la beauté et la grande beauté de notre province du Québec.
Il
dit aussi : «On fait notre possible — hein, à l'île d'Anticosti — pour développer des projets
touristiques — et ce
n'est pas facile sur l'île d'Anticosti — pour diversifier notre économie, mais tout
ce qu'on reçoit, ce sont des coups de bâtons de baseball dans les
genoux...»
Alors,
quand un maire, hein, quand le maire d'Anticosti nous dit ça, je pense qu'il
faut penser deux fois, et puis il faut peut-être faire en sorte...
peut-être revenir sur sa décision et avoir la sagesse de continuer toutes les
démarches qui ont été faites, toutes les
démarches qui ont été entreprises pour faire en sorte qu'Anticosti demeure une
candidate et rien ne sois mis en
péril pour qu'elle devienne officiellement patrimoine mondial. Je vous remercie
beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais M. le député de
Bourget.
M. Richard
Campeau
M. Campeau :
Merci, M. le Président. D'abord, merci à notre collègue de Maurice-Richard de donner l'occasion de parler de nouveau
d'environnement. On a beaucoup parlé de réduction du gaz à effet de serre, on a
parlé de la gestion des matières
résiduelles, on s'apprête à faire des annonces à ce sujet-là prochainement, au
cours... Et, dans les derniers mois,
c'est de ces sujets-là dont on parlait. Et là, maintenant, pour la première
fois, on se parle de la protection du patrimoine naturel du Québec. Un petit peu surpris de voir que c'est extrêmement
important. Comme mentionnait mon collègue du ministère de l'Environnement... pardon, le ministre de l'Environnement,
je suis un petit peu surpris, moi aussi, de voir qu'on en parle
aujourd'hui, après un an.
Quand
on parle de protection du patrimoine naturel du Québec, d'une façon plus
simple, on parle d'aires protégées. Ça, je pense que ça parle plus à l'ensemble
des gens. Un petit peu d'histoire là-dessus. C'est en l'an 2000 que le Québec s'est doté d'un cadre d'orientation pour
avoir une stratégie de maintien et de protection de la diversité biologique.
Et, à ce moment-là, la visée était de 8 %. En 2002, ce cadre-là s'est traduit dans
un projet de loi qui s'appelle la Loi
sur la conservation du patrimoine
naturel. Et c'est là qu'on est venus encadrer la création de réserves
aquatiques, de réserves de
biodiversité, de réserves écologiques, de paysages humanisés et ainsi que la
reconnaissance de réserves naturelles en milieux privés.
Alors, la Loi sur la
conservation du patrimoine naturel, c'est notre principal outil législatif pour
atteindre nos objectifs de protection du
territoire. On parlait, comme je le disais, de 8 % en l'an 2000.
C'étaient les objectifs associés à la
Convention sur la diversité biologique des Nations unies, et l'acronyme utilisé
est le CDB. Maintenant, on parle plutôt de 17 % d'aires protégées en milieu terrestre et de 10 %
d'aires marines protégées. C'est très bien, mais le problème, c'est d'ici l'an 2000. Ce sont des objectifs qui
ont été ajustés à la conférence de la CDB en 2010 à Nagoya, qu'on appelle les objectifs
d'Aichi, en espérant que je dis bien le nom.
Il
y a un caractère alarmiste dans les commentaires que j'ai entendus de la part
de l'opposition officielle. Moi, je vois plutôt que c'est une excellente
chose parce qu'on est tous en train de dire qu'on est d'accord sur l'importance
de l'île d'Anticosti et qu'on est tous en
accord sur le fait qu'on veut qu'elle soit protégée sous l'égide de l'UNESCO. Alors, pour une fois qu'on a
un assentiment, profitons-en.
• (15 h 50) •
C'est une bonne
chose, d'avoir des objectifs ambitieux en environnement, il faudrait aussi
avoir les moyens ambitieux pour les
atteindre. Depuis 2010, il y a des bons coups qui ont été effectués. Exemple,
la protection de 20 % du
territoire du Plan Nord. Mais, même là, on reste quand même loin de nos
objectifs visés jusqu'à ce jour. Actuellement, on est, comme le ministre de l'Environnement le mentionnait, à 10 % environ pour les aires protégées, dont
1,3 % en milieux marins. On est
quand même assez loin. Et le problème, c'est que 2020, bien, c'est comme
l'année prochaine. Alors, comment on va faire pour arriver là? C'est un
constat d'incapacité d'y arriver.
Ce
qui complique la tâche, c'est une chose qui est souvent critiquée quand on
vient parler de ce sujet-là, c'est les longs délais de désignation,
comment, pour qu'un territoire soit vraiment reconnu comme une aire protégée,
ça prend beaucoup de temps. En un an au
pouvoir, il aurait été impossible d'atteindre ces objectifs, vu le retard pris
et surtout vu les longs délais impliqués. On se rend compte que
plusieurs enjeux territoriaux ne peuvent être solutionnés avec les outils disponibles et avec la loi actuelle sur la
conservation du patrimoine naturel, qui ne peuvent pas être faits de façon
satisfaisante. Il faut tenir compte des besoins régionaux, des collectivités
locales, des nations autochtones.
Si
on en revient plutôt au sujet de ce jour précisément, c'est-à-dire
l'inscription de la protection de l'île d'Anticosti comme site du patrimoine mondial de l'UNESCO,
bien, ces sites doivent faire l'objet de mesures de protection adéquates
en raison des critères d'exception du site,
et en particulier il faut regarder l'aspect paléontologique des berges de l'île.
La mise en place de mesures de protection
prend du temps et ne plaît pas à tout le monde parce qu'il y en a qui ont des
intérêts divergents. Alors, il faut regarder
l'ensemble des mesures. C'est un processus, encore une fois, qui prend du temps.
Ce qu'on souhaite tous, c'est protéger
l'île, la mettre en valeur le plus rapidement possible, favoriser la gestion
et l'appropriation des aires protégées par la population. Pour y arriver, un
allégement des processus répondrait aux préoccupations des populations
relativement aux délais de création des aires protégées. D'une façon plus
générale, le ministre a déjà exprimé sa
volonté que le Québec se dote d'outils de conservation d'avant-garde pour
assurer une plus grande crédibilité au niveau international.
Il
ne faut pas oublier que ceci doit aller de pair... comme le ministre Forêts,
Faune et Parcs le mentionnait, il y a un aspect de développement économique qui ne doit pas être mis de côté,
comme le maire de l'île le mentionnait aussi. Alors, développer un réseau d'aires protégées devient
encore plus intéressant quand on s'assure que les mesures déployées vont
maximiser les bénéfices rendus par la nature à la société.
Donc,
pour mettre les pendules à l'heure au niveau de l'île d'Anticosti, quand on parle
de relancer le projet d'exploration
pétrolière, est-ce qu'on peut arrêter d'en parler? On a déjà dit que c'était
mis de côté. Le premier ministre l'a
exprimé de façon très claire, qu'il n'y avait aucun intérêt en ce sens-là.
Alors, c'est un sujet qu'on pourrait oublier, tout simplement. Terminé.
On
veut juste s'assurer que les activités qui sont en cours sur l'île puissent
continuer, comme la chasse au chevreuil, et ne soient pas affectées par des
mesures trop contraignantes pour les gens qui vont y aller, pour ne... donc, ne
pas affecter le tourisme. C'est une activité
nécessaire parce que les chevreuils d'Anticosti n'ont pas de prédateurs
naturels, alors, ce qui veut dire que
leur surpopulation, ça a un effet sur le sapin baumier. Alors, il faut faire
attention encore une fois, l'effet
sur la forêt, l'effet sur le chevreuil et qu'est-ce que l'être humain vient
faire là-dedans. Il faut se rappeler que c'est l'intervention de Henri Menier qui a permis l'implantation des
chevreuils en 1895. Et, depuis ce temps-là, les chevreuils ont
vraiment... c'est un endroit de croissance énorme.
Si
le ministère de la Forêt, Faune et Parcs s'est gardé jusqu'à maintenant de
recommander la mise en place de bandes de protection des berges, c'est qu'on
est encore à l'étape des solutions envisageables pour la protection optimale
du territoire de l'île. L'implantation de
bandes de protection, ce n'est pas exclu. Mais le fait de prendre une taille de
bande unique qui ferait tout le tour
de l'île n'est peut-être pas la solution optimale, et c'est ça qui fait que ça
peut prendre plus de temps à mettre
en place. La priorité d'action doit
être de protéger ce qui fait le caractère
exceptionnel de l'île auprès de
l'UNESCO, c'est-à-dire les zones à haut potentiel paléontologique. Pour ce qui
est du reste de l'île, je crois qu'il est pertinent de laisser au
ministère la latitude pour décider, encore une fois, d'une complémentarité de
solutions.
Pour
le mot de la fin, j'aimerais revenir sur le mot «fierté». Bien, la fierté? Ho
oui! Et j'en entends parle énormément, en particulier dans mon comté.
Fierté retrouvée, qui n'était pas là il y a un an. Mais la fierté, ça ne va pas
avec la précipitation parce qu'il faut se
donner le temps de réfléchir et de considérer toutes les facettes d'un
problème. La pire réaction qu'on
pourrait avoir à un problème urgent, c'est de précipiter une action qui va
engendrer d'autres problèmes par la suite.
Alors,
je vais terminer avec un mot qui va finir par me coller à la peau. Encore une
fois, ici, il faut faire preuve de pragmatisme. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y
a d'autres interventions? Mme la députée de Taschereau.
Mme Catherine
Dorion
Mme Dorion :
Merci, M. le Président. La cathédrale d'Aix-la-Chapelle en Allemagne, la Grande
Muraille de Chine, le parc national
de Yellowstone aux États-Unis, le Mont-Saint-Michel en France, le parc national
d'Iguazú au Brésil, Persépolis en
Iran, Robben Island en Afrique du Sud, notre Vieux-Québec, ça, c'est une liste
non exhaustive des sites du patrimoine mondial de l'UNESCO. Et ces
joyaux appartiennent à l'humanité au complet. Ce sont des traces de nos civilisations, de notre nature, de nos cultures à
travers l'histoire. Et, s'il y aurait tout un débat à faire sur la protection
du patrimoine ici, au Québec, et ce
débat viendra, vous allez voir, aujourd'hui, c'est du patrimoine de l'humanité
dont on discute. Et les choses les
plus locales sont aussi les plus universelles. C'est comme ça dans la littérature
et c'est comme ça pour le patrimoine
bâti, pour le patrimoine naturel. Voilà pourquoi la liste du patrimoine mondial
de l'UNESCO s'adresse à nous tous et
à toutes. Le Taj Mahal est à nous tous, pas juste aux Indiens. Le Monument
national du Grand Zimbabwe aussi est
à nous. Et le parc national de Miguasha, en Gaspésie, appartient donc aussi aux
Népalais, aux Colombiens, aux Catalans.
Et
maintenant le temps est venu d'offrir à l'humanité, à travers l'UNESCO, une
autre partie de notre magnifique territoire, qui est l'île d'Anticosti.
Cette île est un trésor. C'est un peu une île mythique au Québec. Je sais qu'il
y en a plusieurs qui ont voulu en faire un genre de Fort McMurray en tentant
d'autoriser l'exploration et l'exploitation d'hydrocarbures.
Je pense que c'est une erreur politique de ne pas vouloir interdire tout projet
d'exploitation ou d'exploration pétrolière ou gazière sur le territoire du
Québec, parce que c'est l'urgence climatique qui nous le demande, mais on peut être en désaccord avec ma posture.
Cependant, je pense qu'il demeure inacceptable qu'on pense autoriser
l'exploitation du pétrole sur cette île-là précisément, notre île d'Anticosti.
Pour
reprendre une phrase célèbre française, c'est pire qu'un crime, c'est une faute
parce que la CAQ, depuis son élection, souffle le chaud et le froid sur
la candidature de l'île d'Anticosti au patrimoine mondial de l'UNESCO. Le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles
dit qu'il n'est pas fermé à l'idée d'extraire du pétrole sur Anticosti, mais le
premier ministre dit appuyer la candidature
de l'UNESCO. On est en droit de demander un peu plus de clarté parce qu'il
s'agit de quelque chose d'essentiel et de magnifique qui est sous notre
responsabilité à nous.
Je comprends que c'est une stratégie
politique, de tirer partout à la fois, des fois, mais, en ce moment, par
rapport à ce sujet-là, disons que ça
se rapproche de la malhonnêteté. Je reprends les mots de John Pineault, maire
d'Anticosti : «Les Québécois ont
payé trop cher l'aventure pétrolière désastreuse sur Anticosti pour avoir le
goût d'y retourner. Il faut maintenant
obtenir l'inscription d'Anticosti comme joyau du patrimoine de l'UNESCO,
protéger [notre île] et en faire une destination touristique mondiale.»
Maintenant,
je vais vous citer quelques chiffres. L'exploration pétrolière a coûté plus de
92 millions de dollars en fonds
publics sur cette question-là. De ce montant, 30 millions de dollars ont
été dépensés pour les travaux d'exploration sur l'île. 62 millions de dollars de fonds publics ont été versés
en compensation aux entreprises impliquées dans le projet Hydrocarbures Anticosti, mais aussi à deux
entreprises détenant des permis d'exploration sur l'île. C'est de l'argent, ça.
C'est de l'argent qui appartient aux Québécois et c'est de l'argent mal
investi.
• (16 heures) •
Le
développement économique d'un milieu, ça ne passe pas juste par capacité à
fournir des deux-par-quatre. Ça ne
peut pas juste être par une économie extractiviste. On est parmi les peuples les plus créatifs au monde, on est
capables de penser en dehors de cette
boîte-là. Je comprends que, récemment,
le premier ministre a dit qu'aujourd'hui, l'Union nationale, c'est la CAQ, mais j'espère que ça ne
va pas jusqu'à reprendre les méthodes de développement économique de
Duplessis, avec son une cent la tonne.
L'industrie
touristique va carburer de plus en plus à ces paysages intacts. Tout le monde a
soif de ces merveilles-là et ça
aussi, c'est payant pour l'environnement et pour nos communautés aussi. Comme
le disait ma collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue : Est-ce qu'on pourrait être un
brin visionnaire pour les régions du Québec, s'il vous plaît?
Donc,
la position du premier ministre, qui appuie la candidature d'Anticosti au
patrimoine mondial de l'UNESCO, est-ce
que c'est une position officielle? On peut-u le savoir? Soyons bons joueurs,
pensons que oui, mais qu'en est-il vraiment derrière les portes closes? Parce que les bâtons que le gouvernement
place dans les roues de la candidature d'Anticosti en lui refusant une
zone tampon de un kilomètre tout le tour de l'île n'a rien de convaincant.
Pourquoi
ce sabotage? Autre question, ce serait le fun d'avoir une réponse un jour.
Est-ce que, secrètement, la CAQ rêve
encore qu'un jour les conditions d'acceptabilité sociale soient réunies pour
relancer l'aventure pétrolière, gazière sur Anticosti? Est-ce que c'est ça? Quand on n'a pas de réponse, on se
pose des questions. Est-ce que c'est pour protéger les intérêts particuliers des compagnies
forestières? En ce qui nous concerne, le gouvernement caquiste manque
d'honnêteté et de transparence dans le dossier Anticosti, et ce n'est
pas rassurant.
Ça
me fait penser au conte de Cendrillon. La méchante marâtre dit à Cendrillon
qu'elle va pouvoir aller au bal, mais seulement si elle réussit à compléter une
liste interminable de travaux à temps. Même les tout petits enfants qui
écoutent ce conte comprennent que la marâtre ne veut pas que Cendrillon
aille au bal et qu'elle fait travailler très fort Cendrillon pour rien. C'est ainsi que le gouvernement caquiste agit avec
Anticosti. Il dit : Ah! oui, vas-y. Il soutient la candidature, mais donne
des consignes à son ministre pour que ce rêve reste hors de portée. À un moment
donné, il va falloir arrêter de prendre les gens pour des artichauts.
La reconnaissance de
l'île d'Anticosti comme patrimoine mondial de l'UNESCO devrait être une question
de fierté nationale. C'en est une. Nous
devrions tous et toutes être derrière la communauté anticostienne pour ce
projet. C'est aussi ça, donner de la valeur, de l'importance aux
régions; c'est aussi ça, écouter les régions.
Après
toute la saga pétrolière et gazière sur Anticosti, leur refuser cette
reconnaissance afin de protéger les intérêts particuliers de quelques compagnies forestières est d'une bassesse
inimaginable. Il n'y a pas juste des arbres dans cette bande riveraine, il y a des sites fossilifères
de qualité exceptionnelle datant de 445 millions d'années, il y a des vestiges de
la présence autochtone qui peuvent dater de 3 500 ans.
La
zone tampon dont le projet a besoin n'empêcherait pas la poursuite des
activités de chasse et ne mettrait pas un
terme à l'exploitation forestière sur l'île. La désignation d'Anticosti au
patrimoine mondial de l'UNESCO, en stimulant le tourisme, contribuerait à la relance de l'île et à la survie de la
communauté. Parce que les Anticostiens, comme source de revenus, comptent bien davantage sur la chasse
et la pêche, et donc le tourisme, que les coupes à blanc. Est-ce que leur voix,
leurs idées sur leur propre île a une importance dans cette Chambre ou non? En
rendant deux avis défavorables à la création
d'une bande de protection du rivage de l'île, le ministère des Forêts, de la
Faune et des Parcs joue avec le feu. Sans
zone de protection, c'en est fini de la candidature à l'UNESCO. Est-ce que
c'est ce que le Conseil des ministres de la CAQ veut?
J'annonce
donc que ma formation politique se prononcera en faveur de cette motion, mais,
en terminant, je veux rappeler que,
dans ce processus de candidature à l'UNESCO, il faut, encore une fois, passer
par le fédéral, parce que c'est lui
qui a le dernier mot. Je ne suis pas en train de juger s'il a bien ou mal agi
dans le dossier, mais je veux réitérer que ça devrait être à nous et
seulement à nous de décider. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. D'autres
interventions? Madame... Monsieur? M. le député de Jonquière.
M.
Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Je suis un monsieur, oui.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Non, non, c'est parce que Mme la députée
de Roberval s'est levée en même temps, là. Un petit peu avant vous.
M. Gaudreault : Aux dernières
nouvelles, en tout cas, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Allez-y, M. le député de Jonquière.
M.
Gaudreault : Merci. Écoutez,
je suis heureux de me lever sur cette motion et, tout de suite, je vous dis que
nous allons être favorables, pour plusieurs
raisons, mais il y a un angle que moi, je veux faire ressortir de
cette motion, qui va nous amener à proposer un amendement minime, mais néanmoins
significatif.
Avant
d'aller plus sur le fond, je veux quand
même corriger un élément amené par la députée
de Maurice-Richard sur
les interventions du gouvernement du Parti québécois entre 2012 et 2014 sur
Anticosti. Simplement une chose, M. le
Président, là, puis on peut bien
essayer de refaire l'histoire, là... on sait que, dans plusieurs
pays, il y a des gens qui ont essayé de refaire l'histoire, mais finalement la vérité rattrape toujours
les faits historiques. Et la vérité, c'est que le gouvernement de Pauline Marois a corrigé l'erreur historique commise par les
libéraux de Jean Charest, qui a été de vendre les droits d'Hydro-Québec gaz et pétrole à des firmes privées autour de
2008, 2010. Alors, l'intervention du gouvernement
auquel j'ai appartenu visait d'abord à
corriger cette erreur historique et savoir, d'abord et avant tout, qu'est-ce
qu'il y avait dans
le sous-sol d'île d'Anticosti. Ça fait que, quand on part sur des grands chevaux,
là, en disant que le Parti québécois
voulait quasiment démanteler l'île d'Anticosti, puis la couper en petits morceaux, là, puis l'envoyer dans la
moulinette, là, ce n'est pas ça du
tout. Et, d'abord, si on veut bien contrôler notre territoire,
il faut savoir ce qu'il y a dans ce territoire
et corriger cette erreur historique qui visait, par le gouvernement de M.
Charest, à vendre, à vendre des droits qui appartenaient aux Québécois via la
filiale gaz et pétrole d'Hydro-Québec. J'ai dit.
Maintenant,
sur la motion que nous avons devant nous, il manque un gros élément, et c'est
le volet historique. Donc, quand on
plaide pour qu'un site devienne patrimoine
mondial de l'UNESCO, il faut plaider
aussi pour la valeur historique. On parle ici de la valeur géologique et
paléontologique, que j'appuie, et on parle également du caractère naturel de l'île d'Anticosti. Mais moi,
j'ai une ancienne ville de compagnie, dans ma circonscription, qui a été
reconnue 13e site historique du Québec,
pour lequel il y a une démarche également d'inscrire au
patrimoine mondial de l'UNESCO, c'est
la ville d'Arvida, l'ancienne ville d'Arvida, qui était intégrée à Jonquière, maintenant
dans la ville de Saguenay, pour qu'elle
soit intégrée dans le patrimoine de l'UNESCO pour les raisons historiques. Et
la démarche pour Anticosti a aussi une valeur historique. Bien sûr,
géologique, bien sûr, paléontologique, bien sûr, naturelle, mais il y a un
patrimoine historique unique qui évoque beaucoup
sur le Québec du XIXe siècle, le Québec du début du XXe siècle,
et c'est la période riche d'Henri
Menier, bien, qui a donné le nom à Port-Menier. Port-Menier, ce n'est pas sorti
d'une boîte de Cracker Jack, là, ça a un sens historique.
Avant,
je veux quand même vous dire que la plus ancienne mention du nom
d'Anticosti se trouve sous la forme natiscosti sur la carte de Levasseur
en 1601, dont une partie est reproduite dans un document que je pourrai
déposer, M. le Président, qui vient de la revue Saguenayensia
mai-juin 1969. Sur les cartes précédentes, 1601, avant 1601, c'était...
le nom de l'île était Assomption, et parfois l'île Ascension. Il en est de même
sur des cartes des années suivantes. On retrouve
le nom d'Anticosti pour la première fois, bien écrit, Anticosti, sur la carte
de Champlain, 1612. Alors, là aussi, on est dans l'histoire, M. le Président, ça aussi, ça mérite d'être reconnu par l'UNESCO. Alors, je pourrai
déposer, à la fin de mon intervention, cet article de la revue Saguenayensia.
• (16 h 10) •
1895
arrive, et un riche Français excentrique s'appelant Henri Menier décide de
sortir de Paris pour s'acheter un paradis. Pas fiscal, mais naturel. Henri
Menier prenait la succession de son père pour gérer une compagnie
extraordinaire qui s'appelait les
chocolats Menier. Alors, moi, je vous demande d'aller sur Google images, de
taper chocolats Menier, vous allez
voir une série d'affiches très belles, très vintage, il y a des gens qui s'en
commandent pour décorer. Alors, les chocolats
Menier, qui était la propriété d'Henri Menier. Et savez-vous quoi, M. le Président? Et c'est là qu'on tombe dans une interprétation intéressante de
l'histoire du Québec, parce que c'est de la féodalité, XIXe siècle.
Henri
Menier achète, à ses fins propres, l'île d'Anticosti en 1895 parce que lui, il
est riche en France puis il a un peu une
vision du bon sauvage, vision idyllique de l'île d'Anticosti. M. le Président,
vous et moi, aujourd'hui, on serait morts de rire parce qu'il l'a payée
125 000 $ en 1895. Évidemment, en dollars constants, les 125 000 $,
c'est des millions à l'époque, mais ça vous
montre à quel point Henri Menier était un homme d'envergure. Et, en 1895, donc,
il achète l'île à des fins privées et
il passe un acte notarié à Québec devant notaire, le notaire William Noble
Campbell. Alors, moi, je n'invente
pas ça, là, ça vient du fameux livre de Charlie McCormick, Anticosti. Et
pour vous dire que c'est presque du Moyen
Âge, il fait adopter un règlement de l'île d'Anticosti pour y vivre. C'est une
vie... c'est comme son domaine... pas
comme, c'est son domaine privé avec des censitaires qui y vivent. Puis il fait
construire un magnifique manoir dans lequel
il met des meubles d'une beauté incroyable, un manoir en bois, qui,
malheureusement, sera incendié volontairement en 1953, après une
trentaine d'années de règne de la famille Menier. Ensuite, ils ont quitté. Le
manoir a été laissé à l'abandon. Je pourrai
déposer un article... un autre article de la revue Saguenayensia dans
laquelle il y a une photo du manoir. Écoutez, si on avait ça
aujourd'hui, ça serait magnifique, si on l'avait gardé comme bâtiment
historique.
Savez-vous
par qui, volontairement, a été incendié ce manoir? L'industrie forestière,
l'industrie forestière, qui avait acheté,
pour 6 millions de dollars fin des années 30, début des
années 40, l'île d'Anticosti à la famille Menier pour faire de l'exploitation forestière. Alors, dans
leur vision purement affairiste... parfois ça me rappelle un peu le
gouvernement actuel, avec une vision
purement affairiste... mais, à ce moment-là, l'industrie forestière avait
dit : On n'en a rien à cirer d'un manoir
puis on va mettre le feu dedans. De là la photo couverture de ce livre, Anticosti,
où on voit le manoir brûler de flammes
assez intenses, tel l'enfer. Ils ont quand même été capables de sauver quelques
meubles, qu'on retrouve dans des musées aujourd'hui heureusement.
Notamment, ça a passé par une vieille auberge à Grand-Mère, en Mauricie.
Donc,
tout ça pour dire, M. le Président, que, l'histoire d'Anticosti, c'est une
valeur paléontologique, c'est une valeur
géologique, c'est une valeur naturelle, c'est une valeur aussi historique que
nous devons préserver. Puis, aujourd'hui, de dire qu'on va protéger quelques kilomètres le long de la berge, c'est
envoyer un beau pied de nez à une industrie forestière qui a foutu le
feu à un patrimoine historique extraordinaire.
Motion
d'amendement
Donc, je propose l'amendement suivant :
Que la motion de la députée de Maurice-Richard
soit amendée en :
a) ajoutant dans le premier alinéa et après les
mots «recèle un patrimoine», le mot «historique, »;
b) en remplaçant, dans le dernier alinéa, les
mots «son caractère naturel [et] exceptionnel» par les mots «ses caractères
naturel et historique exceptionnels».
Donc, la notion de patrimoine historique en soi,
M. le Président, est une notion importante parce qu'elle fait référence à l'histoire à partir de l'occupation
coloniale, ce qui est différent de l'histoire géologique et paléontologique,
vous me comprenez. Et, en incluant par
l'Assemblée nationale, une notion au patrimoine historique, on vient renforcer
l'argumentaire face à l'UNESCO quand elle
aura, cette UNESCO, à décider si elle donne son caractère de protection à
l'île d'Anticosti. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Donc, votre
amendement, M. le député, est déposé. Nous allons attendre la permission
de l'auteure de la motion.
Documents déposés
Aussi, est-ce qu'il y a consentement pour les
deux documents que M. le député veut déposer? Consentement.
Maintenant, je cède la parole à M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Gregory Kelley
M. Kelley :
Merci, M. le Président. On parle souvent ici, dans la Chambre, des donneurs de
leçons, mais je veux juste dire merci
au député de Jonquière pour la leçon d'histoire sur l'île d'Anticosti. C'était
vraiment fascinant puis tellement une histoire extraordinaire. Alors,
merci beaucoup pour ça.
Le député de Bourget a dit qu'il est tellement
surpris quand on parle pour la première fois... la protection de territoire ici, dans la Chambre. Ah! mais ce n'est
pas vrai, M. le Président, parce qu'ici, en Chambre, on a parlé souvent
de ce sujet-là d'Anticosti. Puis moi, je me souviens très, très bien quand la
CAQ a eu une position très différente sur cet enjeu-là.
Et c'est important de toujours rappeler ça, parce que le ministre,
Environnement, présentement, parle souvent des anciennes actions du gouvernement, qui n'ont été jamais bonnes, puis
etc. Mais, M. le Président, moi, je me souviens, le 1er juin 2016, quand la députée de Saint-Hyacinthe a envoyé un
communiqué de presse, a publié un communiqué de presse, Exploration pétrolière et gazière au Québec : Le virage
vert de Philippe Couillard nuit à l'industrie. Ah oui? O.K., bien
intéressant.
Puis je veux
juste continuer, M. le Président, et je veux citer la députée de
Saint-Hyacinthe : «Ce n'est plus un secret pour personne que l'économie, ce n'est pas la passion de ce
gouvernement. Il est contre Anticosti, contre Old Harry. À force de tourner en rond, les libéraux
[étourdissant] le milieu des affaires. M. Arcand : vous êtes ministre des
Ressources naturelles, pas un ministre délégué à l'Environnement. Il est
temps pour vous de reprendre les commandes de votre ministère.» Ça, c'est une citation d'une députée qui est maintenant
partie du gouvernement. Alors, je pense, je sais pourquoi la députée de Taschereau, des fois, pose des
questions. O.K., le gouvernement sort avec une position, mais c'est quoi,
leurs vraies intentions?
Et, quand
même, ce n'était pas juste l'ancien gouvernement, le gouvernement de
l'opposition, sur le sujet d'Anticosti, M. le Président. Le 18 octobre 2018, l'attaché de presse du premier
ministre... Et je vous cite un article, Le Journal de Montréal : «La CAQ aurait aimé que les Québécois aient toutes les
informations en main, afin de prendre une décision éclairée et collective sur l'exploitation du
pétrole et du gaz sur l'île d'Anticosti.» Ça, c'est un membre qui travaille
toujours pour le premier ministre,
qui a dit : Ouf! La porte ne s'est pas complètement fermée, M. le
Président. Eh oui, en politique, les
gens peuvent changer position, mais, encore, je reviens sur ce fait-là que
certains membres du gouvernement ont fait la campagne sur cet enjeu-là. Oh! oui, oui, le gouvernement allait trop
loin sur l'environnement, trop loin sur lutte contre les changements
climatiques. Ce n'est pas bon pour l'économie des régions.
Nous avons...
Et l'ancien premier ministre a pris des actions concrètes pour protéger l'île
d'Anticosti, et, quand même, on a été critiqués sévèrement par le
gouvernement, mais... je parle bien, par le gouvernement présentement.
Mais ça
n'arrête pas là, parce qu'il y a une longue histoire du premier ministre sur
les questions d'Anticosti et le développement
de l'industrie ici, au Québec. Et je veux juste citer un article de
Radio-Canada où, le 2 avril 2014... «Il faut [exporter] les ressources pétrolières d'Anticosti et d'Old Harry,
ça fait partie [...] pour rétablir la balance commerciale.»
Encore, on
est tous fiers que notre premier ministre ait écrit un livre, Cap sur un
Québec gagnant. Et là le premier ministre
a parlé souvent de l'enjeu du développement de l'industrie ici, au Québec. Je
vais prendre un extrait du livre de M.
le premier ministre, qui a été publié en 2013 : «Le fait d'extraire du
pétrole [dans] région maritime du golfe procurera un grand avantage au Québec, celui de la proximité
de l'océan et [...] l'accès à celui-ci, ce qui [faciliterait] grandement le
transport et l'exportation.»
• (16 h 20) •
Je peux continuer, M. le Président, parce qu'il
y a des autres choses très intéressantes sur l'île d'Anticosti. Le premier ministre a parlé souvent, le développement
de cette industrie-là. Et, concernant les 241 habitants de l'île d'Anticosti,
et je vous cite : «Si c'était Old
Harry, dans la mer, ça pourrait peut-être poser des questions, qui sont
possiblement[...], mais, quand on
pense [l'exportation] sur une île où il y a seulement 240 habitants, je pense
que c'est tout à fait possible [d'aller] par fracturation.» Moi, j'ai trouvé ça,
juste parce qu'il y a 240 personnes, on peut passer un projet, forcer ça dans
la gorge de certains citoyens, ça
reflète un petit peu la mentalité de notre premier ministre et comment il pense
de certaines choses.
Alors, oui,
peut-être, maintenant, peut-être, c'est «no», mais, si quelqu'un qui, depuis
environ huit ans, a lutté pour le
développement pétrolier... Old Harry est quand même sur l'île d'Anticosti. Moi,
je vais toujours garder des réserves, et
je suis très, très fier que la députée de Maurice-Richard a déposé une motion sur le sujet, parce que notre rôle comme une opposition officielle, c'est faire notre
travail et notre devoir de poser des questions, poser des questions au ministre
de l'Environnement : Nous avons rendu
où? Et je comprends qu'il y a une industrie forestière sur l'île, mais, quand
même, il y a autres opportunités et
développements économiques qu'ils ont être capables de faire sur l'île. Et une
chose, c'est le tourisme
éco-environnement, et de faire des trucs comme ça, où c'est déjà un volet très
important pour les habitants de l'île et une façon que le maire de cette
île-là veut développer sa propre économie.
Mais encore,
je veux juste parler pourquoi c'est très important de protéger l'île d'Anticosti :
c'est notre image et notre réputation
sur la scène internationale. Le présent ministre est tellement fier quand... Oh
wow! Le Québec a gagné un prix sur
nos positions sur la lutte contre les changements climatiques. Mais, M. le
Président, ce n'est pas grâce à des actions
que ce gouvernement a prises juste dans un an d'un gouvernement majoritaire, ce
n'est pas à cause de ça, c'est le
travail qui a été fait, oui, par le Parti libéral, oui, aussi par le Parti
québécois pour protéger notre territoire et aussi de lutter contre les
changements climatiques, et la bataille, ce n'est pas terminé.
Quand même,
aujourd'hui, M. le Président, Donald Trump a décidé de poursuivre l'État de
Californie sur notre marché de
carbone. Mes collègues, de l'autre côté... Bon, O.K., c'est une affaire des
États-Unis, ce n'est pas tellement important.
Mais moi, je me souviens, quand le bureau du premier ministre est tellement
fier d'avoir une rencontre avec quelqu'un
dans la Maison-Blanche, c'était une réussite pour le Québec. Est-ce que ça,
c'est des résultats d'une rencontre avec
les gens de la Maison-Blanche? C'est une attaque contre notre marché de
carbone, sur notre prix sur le carbone, la façon qu'on fait ça ici, au Québec,
une décision que nous avons prise, qui a forcé le gouvernement fédéral de
prendre des actions sur tout le
territoire du Québec et de mettre un prix sur le carbone, quelque chose qui est
tellement important dans lutte contre
les changements climatiques. Et c'est quoi? J'espère présentement qu'il y a des
rencontres avec le ministre, l'Environnement,
le bureau, le premier ministre, et notre ministre responsable pour les
Relations internationales, puis on va appeler M. le premier ministre du Canada,
M. Trudeau, lui dire : Ça, c'est inacceptable. Il y a quelqu'un qui doit
parler avec la Maison-Blanche, parce
que, si ça, c'est juste avec notre marché de carbone, bien, j'ai un autre
message pour le gouvernement :
si le marché de carbone est présentement sur le radar du président des
États-Unis, c'est fortement possible que notre plan de vendre
l'électricité à des États est aussi maintenant en question.
Et ça, c'est
pourquoi c'est toujours important pour le Québec, et ma collègue de
Bourassa-Sauvé a bien exprimé ça,
l'importance de toujours lutter pour une vision plus verte ici, au Québec,
pourquoi c'est important que tout le monde ici, en cette Assemblée nationale défende l'île d'Anticosti... et
continuer de lutter pour un Québec qui veut faire plus pour la lutte
contre les changements climatiques.
Again, I just want to quickly repeat
that we can always go through and look back on the past and what has been done, and I have cited, on
several occasions now, what the current Premier of Québec thinks about the
development of petroleum in the Anticosti region and Old Harry. It's
clear, it's written, it's well documented, it's even in a book. So, that's why, on our side, we're always going to be
very vigilant on this question, and, for us, it's extremely important that
we keep and hold this Government
accountable. And we'll be there, and I understand that they're working on
things, but, on our side here, we
have a job to do as the Official Opposition, and we're going to stand up and
we're going to always fight for a Québec that will be present in the
fight against climate change.
Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. D'autres interventions? Mme la députée de Roberval.
Mme Nancy Guillemette
Mme
Guillemette : Merci, M. le Président. Je suis heureuse, aujourd'hui, de prendre part à
cette discussion et je tiens à remercier la collègue, la députée de Maurice-Richard, de me permettre de le faire aujourd'hui. J'ai
beaucoup entendu parler de l'île
d'Anticosti, mon père ayant travaillé plusieurs, plusieurs années à l'île
d'Anticosti, et, pour lui, c'était un joyau.
Donc, comme
vous le savez, je suis une députée de région, et les régions du Québec, c'est
quoi? C'est des forêts majestueuses,
des plans d'eau immenses, une nature abondante, une nature qui coupe le souffle
par sa grandeur. Les régions, c'est
surtout les gens qui l'habitent, les Premières Nations qui occupent certains
territoires depuis des siècles, des travailleuses
et des travailleurs qui vivent grâce à la forêt, grâce aux ressources
naturelles, grâce au tourisme généré par la beauté et la grandeur des paysages et des espaces naturels. M. le
Président, être une députée de région, c'est donc inévitablement être attachée à son territoire et évidemment à sa
protection. Et, quand on parle de protection du patrimoine naturel, que ce soit sur l'île d'Anticosti ou ailleurs au
Québec, ça doit se faire en concertation avec tous les acteurs du territoire,
avec les gens qui y vivent, les communautés autochtones, les municipalités, les
entreprises. On doit prendre en compte les réalités de tous et chacun.
Je l'ai
mentionné plus tôt, je suis une députée de région, mais aussi je viens du
milieu communautaire, donc je connais bien ce genre de détails. La concertation
et la collaboration, ça me connaît. Je sais à quel point c'est délicat et
je sais à quel point également ça prend du
temps. M. le Président, le ministère de l'Environnement, de la Lutte contre les
changements climatiques travaille depuis plusieurs années sur de
nombreux projets qui permettront d'atteindre les cibles d'aires protégées qu'elle s'est fixées, et
ce, d'ici 2020. Il s'agit de projets de longue haleine qui prennent du temps.
C'est important de le comprendre.
Pour vous imager mon propos, j'aimerais vous
parler de la protection des aires marines. Le Québec compte deux aires marines protégées, soit le parc marin
Saguenay—Saint-Laurent
et la réserve aquatique protégée de Manicouagan. Le parc marin Saguenay—Saint-Laurent a été créé en 1998. Il compte 1 245 kilomètres
carrés. Quant à la réserve aquatique protégée
de Manicouagan, elle a été désignée en 2013 et compte 712 kilomètres
carrés. Ces deux aires marines protégées couvrent environ 1,35 % de
la superficie marine du Québec.
Depuis 2007,
les aires protégées marines dans l'estuaire et le golfe du Saint-Laurent sont
en discussion au sein du groupe
bilatéral sur les aires marines protégées au Québec. Ce groupe est coordonné
par le ministère de l'Environnement au
Québec ainsi que Pêches et Océans au Canada. Ce groupe réunit également, au
Québec, le ministère de l'Énergie, le ministère
de l'Agriculture, le ministère des Forêts au Québec, le ministère de
l'Environnement, ainsi que l'agence des parcs. S'ajoutent à cela le
secrétariat du Québec aux relations canadiennes, le secrétariat de la stratégie
maritime et le Secrétariat aux affaires
autochtones, qui participent, quant à eux, aux discussions avec les ministères
de Québec. Ce groupe bilatéral a pour
mandat le développement de manières conjointes et coordonnées d'un réseau
d'aires protégées maritimes.
Vous
comprendrez toute la complexité de la chose quand je vous annonce la liste des
ministères et organismes gouvernementaux
qui sont concernés par ces projets. C'est important d'atteindre les cibles qui
ont été fixées en matière de
protection du patrimoine naturel. Toutefois, cela doit se faire en concertation
avec tous les intervenants afin que tous les enjeux soient pris en considération et que tout soit bien fait. Ça
n'enlève rien à l'importance et à l'urgence de la chose. Toutefois, il
n'est pas judicieux de se presser si ce n'est pas pour être bien fait.
• (16 h 30) •
Pour ne nommer que deux exemples, on doit
s'assurer de respecter les compétences du Québec en matière de conservation et d'exploitation de nos ressources
naturelles dans notre milieu marin.
On doit également s'assurer d'harmoniser les démarches visant la création de réseaux d'aires marines protégées
par le ministère de l'Environnement à celles qui sont prises par le ministère de l'Énergie visant la mise en valeur des
hydrocarbures en milieu marin. Cela demande du temps, d'autant plus que nous sommes un gouvernement pragmatique, qui
gouverne avec prudence, et j'en suis très fière, M. le Président.
Par ailleurs, j'ajouterais que, le plan économique
du Québec 2018‑2019, un budget de 150 millions sur cinq ans a été octroyé au ministère de l'Environnement pour
mener à bien le projet d'aire marine protégée, ce qui permet au ministère
de se doter des outils pour atteindre les
cibles. Ceci étant dit, nous allons gérer les protections de notre patrimoine
naturel de la même manière que nous
gérons notre environnement, soit de manière pragmatique et prudente, puisqu'il
s'agit de la vision de notre
gouvernement, mais c'est d'autant plus important de le faire puisqu'il s'agit de
quelque chose qui doit se voir sur un long terme.
La motion que
nous discutons présentement demande à cette Assemblée nationale de réitérer que
l'île d'Anticosti est un joyau
naturel qui recèle un patrimoine géologique et paléontologique dont la valeur
universelle, exceptionnelle et inestimable
est mondialement reconnue. On ne peut qu'être d'accord. Protéger notre
territoire, protéger notre nature, c'est notre devoir, en tant qu'élus.
La motion,
telle qu'amendée par notre collègue le ministre de l'Environnement, demande au
gouvernement de mettre en place une bande de protection des berges de
l'île sans tarder et de s'engager formellement à protéger l'île d'Anticosti, à conserver son caractère naturel
exceptionnel et à soutenir sa candidature au patrimoine mondial de l'UNESCO
en prenant les mesures nécessaires. Encore une fois, on ne peut qu'être
d'accord.
En tant
qu'élus, chaque jour on demande notre aide, il y a nos concitoyens qui viennent
nous rencontrer dans nos bureaux en
circonscription pour nous demander un coup de main. Chaque semaine aussi, on
travaille en commission afin de faire
les meilleures lois possible. Oui, bien sûr, on change la vie des gens, on fait
des lois qui vont marquer le Québec pour
parfois plusieurs décennies. Cependant, c'est plutôt rare qu'on ait la chance
de faire une action qui marquera le Québec pour toujours. En protégeant
Anticosti, c'est ce qu'on fera. En soutenant la candidature d'Anticosti au
patrimoine de l'UNESCO, c'est ce qu'on fera aussi. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant,
je suis prête à reconnaître M. le député de Saint-Jean. La parole est à
vous.
M. Louis Lemieux
M. Lemieux :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, il faut que je vous dise que ce
n'est pas faute d'avoir essayé puis
d'être passé très près, mais malheureusement je n'ai jamais mis les pieds sur
l'île d'Anticosti. Et pourtant j'ai foulé
le territoire québécois d'un bout à l'autre, pour ne pas dire le territoire
canadien. Malheureusement, pas Anticosti. Mais je l'ai quand même vue du haut des montagnes de la Gaspésie, de
l'autre côté, sur la Côte-Nord — c'était à Havre-Saint-Pierre — et en passant par navire pas loin. N'empêche que c'est quand même,
comme pour tous les Québécois, un
symbole pour moi, Anticosti. Tout ça pour dire que je ne fais donc pas partie
des chanceux qui ont pu vivre l'expérience de l'île, mais ça ne m'empêche pas de vouloir, moi aussi, comme la
plupart des Québécois, il me semble, en tout cas... vouloir que l'île
d'Anticosti soit inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO.
Remarquez,
Mme la Présidente, que, lorsque la députée de Bourassa-Sauvé nous parle des
autres sites potentiels, ceux qu'on a déjà remarqués, comme le Vieux-Québec,
mais ceux qui sont potentiels aussi, comme le fjord du Saguenay, le seul fjord en Amérique du Nord, évidemment que
le bleuet d'adoption en moi a un petit faible. N'empêche. Revenons à
Anticosti et parlons d'Anticosti, puisque c'est le sujet qui nous occupe
aujourd'hui et qu'il y a beaucoup à dire.
D'ailleurs,
au sujet de ce que la camarade de Bourassa-Sauvé avait à dire au sujet du maire
de L'Île-d'Anticosti, M. Pineault,
en le citant, une citation qui était un petit peu difficile à prendre parce
qu'on sentait son inquiétude, moi, j'ai plutôt trouvé dans la revue de presse une citation de lui, il n'y a pas
longtemps, où il disait qu'il était tellement fier que Parcs Canada lui ait confirmé que son dossier
était en avance. Et Parcs Canada l'avait même invité à aller présenter son
dossier parmi les 11 sur la table en ce
moment à l'UNESCO le 21 février 2021. Vous me direz que c'est loin. Oui,
c'est long, ces choses-là, mais ça
remet quand même les choses un peu en perspective. Tout n'est pas toujours
noir... et tout n'est pas toujours blanc, j'en conviens. La politique,
ce sont les zones de gris.
Toujours
est-il que, pour bien comprendre ce dont on parle, il faut savoir où on en est,
effectivement, et il faut comprendre le contexte.
Le gouvernement du Québec a donné son consentement officiel, le
25 janvier 2017, au dépôt du dossier Anticosti en vue d'inscrire l'ensemble de l'île, soit environ
8 000 kilomètres carrés, sur la liste indicative — c'est comme ça qu'on l'appelle — des sites du patrimoine mondial au Canada. Le patrimoine mondial de l'UNESCO désigne un
ensemble de biens culturels et/ou
naturels présentant un intérêt universel et exceptionnel pour l'héritage commun
de l'humanité. Il y en a beaucoup. M. le
député de Jonquière
nous suggérait d'aller voir Port-Menier et le chocolat Menier sur Google.
Passez par le site du patrimoine de
l'UNESCO, c'est un beau voyage à faire et c'est assez long, je vous le dis,
parce qu'il y a beaucoup
de belles choses. Et, avec un peu de chance, il y aura aussi très bientôt l'île
Anticosti.
Mais je
continue dans le contexte parce que c'est important. C'est important parce que
c'est de ça dont on parle quand on a cette conversation tous ensemble.
L'île d'Anticosti, donc, a été inscrite, car elle rencontrait — inscrite
sur la liste canadienne — au moins un des critères de l'UNESCO lui conférant une valeur
exceptionnelle universelle et, j'en conviens, historique, j'en conviens avec
le député de Jonquière. Cependant, les sites doivent faire l'objet de mesures
de protection et de gestion adéquates.
Le principal
critère retenu, Mme la Présidente, le numéro VIII, pour l'inscription de
l'île d'Anticosti sur, comme on l'appelle, la liste indicative du
Canada, c'est d'être un exemple éminemment représentatif des grands stades de l'histoire de la terre. Et là on a un gagnant dans
la rangée D, ne dérangez pas vos cartes en cas d'erreur. L'île d'Anticosti
constitue le meilleur laboratoire naturel du
monde pour l'étude des fossiles et des strates sédimentaires issus de la
première extinction de masse du vivant, c'est comme ça que les
spécialistes et les scientifiques l'appellent. On y retrouve le témoignage fossile le plus complet de la vie marine,
couvrant 15 millions d'années de l'histoire de la terre il y a donc de cela, comme le disait le ministre de
l'Environnement, quelque 435 ou 450 millions d'années, pour être précis.
L'abondance, la diversité et l'état
de la conservation des fossiles sont, bien évidemment, exceptionnels et
permettent un travail scientifique de
classe mondiale, ce qui, pour le Gaspésien en moi, n'enlève rien à Miguasha,
évidemment, comme le disait la députée de Taschereau.
Toujours
est-il qu'il faut comprendre, maintenant qu'on a le contexte, où on s'en va
avec ça et où on est rendus. Faisons
donc le point. Et c'est important, parce que j'ai consulté pas juste les
archives d'entrevues, mais j'ai consulté le dossier, avant de venir vous voir, puisque j'étais invité à prendre part
à ce débat, que je considère, moi aussi, fondamental, parce qu'il touche à tellement de choses. Il
touche à notre fierté, comme le disait le député tout à l'heure. Il touche à
nos ressources, comme le disait le ministre du MFFP. Il touche à ce que nous
sommes, ce que nous avons été. Bref, c'est important qu'on fasse le point pour
bien le comprendre.
Le montage du
dossier d'inscription, c'est un processus, vous l'avez deviné quand je vous ai
parlé de 2021, tout à l'heure... un
processus long et complexe. Un dossier mal monté ou ne répondant pas à la
totalité des critères entraînerait non
seulement un refus, mais peut-être même qu'Ottawa ne déposerait même pas la
candidature à l'UNESCO, et là on aurait
tout fait ça et tout espéré ça pour rien. Ce dossier doit notamment démontrer
hors de tout doute que le bien répond au
critère VIII par de solides preuves scientifiques. Il doit aussi démontrer
que le bien est intègre et qu'il est protégé et géré de façon adéquate.
Dans ce cas-ci, le bien, vous l'aurez compris, c'est l'île d'Anticosti.
L'échéancier
actuel prévoit que les mesures de protection et de gestion soient identifiées
le plus rapidement possible et que,
d'ici le 30 septembre 2020 — c'est demain, presque, considérant le
calendrier — une
ébauche de la proposition d'inscription ainsi qu'un avis d'intention de
déposer un dossier complet soient transmis à Parcs Canada pour qu'en février 2021, comme le maire Pineault a déjà été
invité à le faire, une ébauche de la proposition et que le dossier soient déposés
au Centre du patrimoine mondial.
Actuellement,
il y a 26 aires protégées qui se situent sur l'île d'Anticosti ou ses
côtes. C'est important, ça, je le répète parce que ça a vraiment beaucoup
d'importance. Actuellement, 26 aires protégées se situent sur l'île
d'Anticosti ou ses côtes. Les
principales sont le parc national Anticosti, 571 kilomètres carrés, deux
réserves écologiques, du Grand-Lac-Salé, 23 kilomètres carrés, et
la Pointe-Heath, de 19 kilomètres carrés, et deux écosystèmes forestiers
exceptionnels sur 1,3 kilomètre carré.
• (16 h 40) •
Le Groupe
bilatéral sur les aires marines... Oui, je sais, c'est compliqué, mais c'est
une grosse machine, qu'est-ce que
vous voulez. Alors, on l'appelle le Groupe bilatéral sur les aires marines
protégées Canada-Québec. Pour les intimes, c'est le GBAMP. Comment ils
font pour s'y retrouver, je ne le sais jamais. Ils ont identifié, toujours
est-il, que des territoires d'intérêt pour
des projets conjoints d'aire marine protégée dans le golfe Saint-Laurent et au
moins un territoire d'intérêt étaient associés à l'île d'Anticosti.
Le 17 août 2018, ce n'est pas si loin que
ça, l'autre gouvernement, le gouvernement du Québec de l'époque, annonçait son
intention de créer trois réserves de biodiversité sur l'île d'Anticosti, ce qui
ferait passer de 7,75 à 22,46 — c'est presque le quart — la superficie terrestre protégée de l'île.
Il s'agit de la réserve de biodiversité protégée de la Pointe-Ouest, de la réserve de la biodiversité projetée de la
Rivière-Jupiter et de la réserve de biodiversité projetée de la
Pointe-Est, lesquelles cumulent une superficie totale de
1 187 milles... kilomètres carrés.
Mme la Présidente, le gouvernement du
Québec annonçait aussi la création du Comité interministériel — attention, c'est des acronymes, ça
aussi — pour
l'inscription d'Anticosti au patrimoine mondial, le CIAPM, pour les intimes. Coordonné par le ministère de l'Environnement et
de la Lutte aux changements climatiques et par le ministère des Relations
internationales et de la Francophonie, le
comité interministériel est composé de représentants de sept autres ministères
et organismes, et, à n'en pas douter, le MFFP en tête de liste, évidemment. Ce
comité s'est réuni une première fois le 27 septembre
2018 et travaille notamment à déterminer les mesures de protection et de
gestion adéquates préalables à l'inscription de l'île sur la liste du
patrimoine mondial de l'UNESCO.
C'est
lassant, tout ça, mais en même temps c'est tellement important et fondamental
parce que c'est là-dessus que le Canada
puis l'UNESCO, et nous aussi, allons travailler pour se rendre là où on veut
aller : la reconnaissance d'Anticosti au patrimoine mondial.
Étant
donné qu'aucune des mesures envisagées pour la protection de l'ensemble du
territoire insulaire ne permet de respecter l'échéancier de février 2020‑2021,
l'équipe responsable de l'inscription avait donc, à l'époque, proposé
d'orienter les travaux vers l'ajout d'une réserve de biodiversité correspondant
aux secteurs non protégés du pourtour de
l'île. Selon le responsable du comité scientifique et professeur de
l'Université d'Ottawa en géologie, l'ajout de cette réserve de biodiversité aux aires protégées
existantes et annoncées permettrait de protéger les éléments représentatifs des
caractéristiques du bien ayant
potentiellement une valeur universelle exceptionnelle. Ai-je besoin de vous
rappeler que le bien, c'est l'île?
C'est un enjeu
politique, oui, parce que la preuve, c'est qu'on en parle ici aujourd'hui, mais
c'est un enjeu économique aussi. La protection d'un site d'une superficie de
près de 8 000 kilomètres, ça constitue un défi de taille. Deux options proposées sont compatibles avec les
principales activités économiques de l'île, la chasse et l'aménagement forestier, et on tient aux deux. Une déclaration
de site patrimonial pouvant être appliquée immédiatement, en vertu de la
Loi sur le patrimoine culturel, un site
patrimonial déclaré permettrait la protection de la valeur scientifique des
fossiles et des strates sédimentaires
tout en permettant la coupe forestière nécessaire à l'aménagement de l'habitat
du cerf de Virginie et une aire
protégée de catégorie VI de l'Union internationale pour la conservation de
la nature — je vous
entends insister, Mme la Présidente,
c'est l'UICN — qui
requiert cependant et au préalable une refonte de la Loi sur la conservation du
patrimoine naturel. Ce type de statut permettrait la protection du bien et de
la biodiversité tout en encadrant la coupe forestière au bénéfice du cerf de
Virginie. Et est-il besoin de rappeler le bénéfice du cerf de Virginie pour
l'industrie touristique et toutes les activités patrimoniales?
Au mois d'avril
2019 — on
y était il y a quelques semaines à peine — après avoir appuyé
verbalement la décision d'entamer une
démarche vers la déclaration de site patrimonial, la municipalité de
L'Île-d'Anticosti, du maire Pineault
dont on parlait tout à l'heure, a refusé de s'engager par résolution, préférant
revoir le choix des mesures avec ses partenaires, ce qui est tout à fait
légitime. Le comité interministériel pour l'inscription de l'île d'Anticosti au
patrimoine mondial va donc mettre sur pied,
en collaboration avec les parties prenantes, une table de concertation et de
consultation, de façon à assurer la concertation et la participation des
résidents, des communautés autochtones et des utilisateurs
concernés lors des prises de décision d'importance. L'option de protection
retenue par le comité interministériel pour
l'inscription de l'île d'Anticosti au patrimoine mondial sera ensuite, et seulement
à ce moment-là, proposée à la table de concertation et de consultation.
Donc,
pour se résumer, un processus de révision de la loi à l'automne 2019 ne
permettra pas de constituer une aire protégée
de catégorie VI d'ici le dépôt de la proposition d'inscription au
patrimoine mondial de l'UNESCO. Mais toutefois un engagement du gouvernement du Québec à protéger ultérieurement la
totalité de l'île d'Anticosti pourrait être joint au dossier de
candidature.
Donc, on a fait quoi et on fait quoi? Le comité interministériel pour l'inscription de l'île
d'Anticosti doit se réunir de
nouveau à l'automne 2019 pour discuter des tenants et des aboutissants de
l'orientation proposée par le comité scientifique.
Oui, je sais, c'est long, comité scientifique, consultation, concertation,
mais il faut faire ça. On parle, après tout,
d'un patrimoine mondial. Le ministère
de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques a entamé déjà un processus de révision de la Loi sur la conservation du
patrimoine naturel qui permettrait de doter le Québec d'un statut
d'aire protégée de catégorie VI. Le ministre se fera un plaisir de vous
expliquer les détails du catégorie VI. L'intégration d'un statut d'aire protégée de catégorie VI
dans la loi, je peux vous le dire quand
même, permettrait de disposer
d'un outil de protection pour compléter la protection de l'ensemble de l'île.
La création de cette
réserve de biodiversité, Mme la Présidente, sera, à terme, bonifiée par l'ajout
d'une aire protégée qui viendrait compléter
la protection de l'ensemble du territoire de l'île et ainsi
respecter la volonté initiale. Cette nouvelle
réserve de biodiversité constitue donc une première étape vers la protection
de l'ensemble de l'île d'Anticosti. Un
dossier complet présentant une preuve scientifique et des mesures de protection
et de gestion adéquates de l'île serait donc déposé par le maire à l'UNESCO,
par les autorités de Parcs Canada, en février 2021, au Centre du patrimoine
mondial. Le comité interministériel pour l'inscription de l'île d'Anticosti au
patrimoine mondial mettra sur pied, en collaboration avec les parties prenantes, une table de
concertation et de consultation — une
autre — de façon à assurer la concertation et
la participation des résidents des communautés, des autochtones
et des utilisateurs concernés lors des prises de décision d'importance à venir. L'option de protection
retenue par le comité interministériel pour l'inscription de l'île au patrimoine
sera ensuite proposée à cette même table.
C'est
là où on en est et c'est là, et je pense que c'est très clair après ce débat
qui s'achève, où on veut aller et où on
s'en va. Et ça, bien, en acceptant l'amendement proposé par le ministre et en étant unanimes
dans ce qu'on va se résoudre ici à
voter ensemble, bien, ce qu'on va faire ensemble, Mme la Présidente, c'est de se donner et de donner au patrimoine mondial l'île
d'Anticosti pour toujours. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres
interventions? Mme la députée de Maurice-Richard, je vous informe qu'il restait
1 min 30 s à votre formation
politique. Alors, je ne sais pas si
vous voulez la prendre ou... Pour votre droit de réplique? Parfait.
Alors, je vous cède la parole pour votre droit de réplique. Et n'oubliez pas de nous dire si vous acceptez les
deux amendements qui ont été proposés, un par le gouvernement et l'autre par la troisième opposition, dans votre réplique.
Merci.
Mme Marie Montpetit
(réplique)
Mme Montpetit : Je vous
remercie. Je vous remercie, Mme la Présidente. J'espérais que les deux heures de débat qu'on aurait aujourd'hui donneraient
l'occasion à la CAQ de nous... bien, que la CAQ profiterait, en fait, de cette
occasion pour nous rassurer sur, justement, tous les éléments qui ont été émis publiquement
dans les derniers jours. Puis, moi, ce que
je peux vous dire, c'est qu'avec ce que je viens d'entendre je ne suis non seulement pas rassurée, ça soulève encore plus de questions.
On a entendu le ministre de la Forêt, qui est en
poste depuis un an, faut-il le rappeler, hein, qui nous dit, finalement, qu'il ne sait pas trop exactement
où il s'en va encore dans le dossier de l'île d'Anticosti, avec une
zone, pas de zone de protection. Il nous a parlé beaucoup de l'industrie, de l'importance de faire des compromis. Donc, je comprends
qu'il ne sait pas où il s'en va... ou il a eu des avis négatifs ou pas.
On a entendu
le député de Bourget, qui est venu nous dire que l'application d'une bande de protection, ce n'était pas forcément la solution pour
l'île d'Anticosti.
On a eu le ministre de l'Environnement qui comme d'habitude, pour faire changement, nous
a critiqués, alors que l'île
d'Anticosti... J'aurais aimé qu'il
fasse comme hier, dans son intervention en Chambre, et qu'il fasse la
chronologie des événements
des quatre dernières années. Et je ne suis pas surprise qu'il ne l'ait pas fait
parce que, les quatre dernières années, ce qu'il a dit, c'est que, l'île d'Anticosti, justement, il n'y
en a plus, d'exploration pétrolière,
puis il n'y en a plus, d'exploitation
non plus, il n'y en aura pas, parce
que justement on a pris les mesures, comme Parti libéral du Québec, pour ça. Et on a soutenu la candidature pour l'île
d'Anticosti à l'UNESCO. Et c'est ça que l'histoire nous dit des dernières
années.
• (16 h 50) •
Et, le
ministre de l'Environnement, aussi, comme d'habitude, je n'ai pas eu de réponse
à mes questions sur les aires
protégées. Je présume, peut-être
à tort, mais je le souhaite, qu'il profitera de l'occasion, dans les prochains
jours, pour venir clarifier cette question-là, parce que nous lui
reposerons la question. Est-ce que le décret ministériel se fera pour les aires protégées sur l'île d'Anticosti?
Parce que ça viendra permettre justement de soutenir sa candidature au niveau
du patrimoine mondial de l'UNESCO.
Et, dans les
interventions qui ont été faites, on a terminé avec le député de Saint-Jean qui
nous dit que la discussion qu'on a
aujourd'hui, c'est un enjeu politique. Je trouve ça extrêmement déplorable. Ça
nous dit exactement le contexte dans
lequel on se situe. Et j'aurais souhaité, espéré... mais ça traduit bien sa
pensée et, je présume, la pensée de ses collègues que la protection du patrimoine, pour lui et pour
son gouvernement, c'est un enjeu qui est politique, alors que la protection du
patrimoine, la conservation aussi de ce patrimoine, de cette biodiversité, de
cette histoire ne devraient pas être politique.
On parle d'un bien commun. Et, dans un bien commun, on ne devrait pas faire de
la politique, on devrait travailler tous dans la même direction.
Donc là, Mme la Présidente, je ne suis pas
rassurée par ce que j'ai entendu. Le ministre de la Forêt a parlé énormément de compromis, et, avec un site qui est
aussi exceptionnel que celui de l'île d'Anticosti, on ne devrait pas faire
de compromis. Et ça a été cité à plusieurs
reprises, on parle d'un joyau, d'un joyau au niveau de la paléontologie, au
niveau de son histoire. Et d'ailleurs, je vous en informe, au niveau de
l'amendement du collègue du troisième groupe d'opposition, je le recevrai, parce qu'évidemment ça a une valeur
historique autant que patrimoniale. Donc, ça ne vient pas changer le fond de la motion, donc je recevrai
cet amendement-là. Mais il n'y a pas de compromis à faire avec, donc, un
site qui est aussi exceptionnel que celui de l'île d'Anticosti.
Et ce qui
m'inquiète beaucoup, puis on l'a rementionné tout à l'heure, c'est qu'il y a
encore quelques mois le ministre des
Ressources naturelles, je suis presque surprise qu'on ne l'ait pas sorti
aujourd'hui, qui aurait pu... qui nous parlait, lui, de son ouverture, justement, à reparler d'exploration pétrolière. Donc, ça nous dit combien il y a beaucoup
de drapeaux rouges qui se lèvent par rapport à l'île d'Anticosti et que
nos inquiétudes, elles sont louables.
Je l'ai souvent mentionné, on est face à un gouvernement
qui n'a pas de plan, qui ne sait pas où il s'en va, en environnement, donc ce n'est
pas rassurant. Puis ce qu'on vient d'entendre comme interventions, justement, c'est assez
peu de réponses. Puis le peu d'information
qu'on nous a donné, c'est pour nous dire que, finalement, on est encore en
train d'y réfléchir puis qu'on ne savait pas
exactement où on allait aboutir, mais
que ça n'allait certainement pas être une bande de protection de deux kilomètres
comme le demande le maire d'Anticosti.
Pour ce qui
est de l'amendement qui a été proposé par le ministre de l'Environnement, je comprends que ce qu'il souhaite faire, c'est retirer le passage sur...
qui mentionne les déclarations défavorables qui ont été faites par le ministre de
la Forêt. Le ministre de l'Environnement, donc, a mentionné que ce qui avait été rapporté
par le journaliste du Devoir
était erroné, était faux, qu'il n'y avait
pas eu d'avis défavorable. Donc, écoutez, si c'est effectivement le cas, j'invite
le ministre de la Forêt à déposer ses avis ministériels, à les rendre
publics, comme ça on sera tous fixés. Si c'est effectivement le cas, bien,
je... puis s'il n'était pas défavorable à la bande de protection,
bien, comme ça, on sera tous fixés, et ça montrera beaucoup de transparence
de la part du gouvernement par rapport aux discussions qui ont lieu présentement.
J'invite
aussi le ministre de la Forêt à profiter des prochaines heures pour venir
clarifier sa position avant le vote que
nous aurons sur la motion, à préciser ses intentions, parce que
malheureusement, en 10 minutes, il n'a pas réussi à le faire.
Je ne sais pas s'il y a des gens ici qui ont compris où il s'en allait, où il
s'en allait avec la bande de protection. Je pense qu'il ne le sait pas lui-même.
Mais, s'il le sait, moi, je veux bien être de bonne foi — je
suis certaine qu'il l'est aussi — je
l'invite à venir le clarifier. Comme ça, ça nous permettra de prendre une
décision éclairée, à chacun des membres de cette Assemblée, sur le vote qu'ils prendront sur la motion. Est-ce qu'il ira de l'avant, oui ou non, avec les demandes du maire de l'île d'Anticosti, demandes
qui sont très claires? Donc, nous, ce qu'on veut savoir, c'est : Le ministre de la Forêt, est-ce qu'il viendra
appuyer ces demandes-là?
Moi,
je pense que, pour résumer... Bon, évidemment, je vous invite à voter pour la
motion, ça va de soi. Comme Québécois,
on doit être très, très fiers d'avoir l'île d'Anticosti sur notre territoire et
on devrait être très, très fiers d'une possible
reconnaissance au patrimoine mondial de l'UNESCO. Je pense qu'on doit
travailler dans cette direction-là, je pense qu'on doit réunir vraiment
toutes les conditions gagnantes.
Puis,
nous, ce qui est certain, c'est qu'on ne donnera pas un chèque en blanc au
gouvernement en fonction de la motion.
On me demande de retirer une partie de l'amendement parce que visiblement il y
a un malaise par rapport à ça. Donc,
moi, je les invite, s'ils veulent qu'on aille plus loin, qu'ils clarifient la
situation, ce qu'ils n'ont pas fait durant les deux dernières heures,
qu'ils déposent les avis, qu'ils le clarifient dans un «hot room», dans un
point de presse, qu'ils viennent le donner,
mais qu'ils clarifient leurs intentions
de façon ferme par rapport à l'île
d'Anticosti, parce que ce n'est
pas vrai qu'on va leur donner un chèque en blanc sur ce dossier-là. Merci, Mme
la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la députée. Le débat étant maintenant terminé,
conformément au règlement,
je dois d'abord mettre aux voix la motion d'amendement présentée par M. le député de Jonquière, avant de procéder au vote sur la motion
principale.
La motion de Mme la
députée de Maurice-Richard se lit comme suit :
«Que l'Assemblée nationale réitère
solennellement que l'île d'Anticosti est un joyau naturel qui recèle un
patrimoine géologique et paléontologique dont la valeur universelle et
exceptionnelle est mondialement reconnue;
«Qu'elle rappelle que l'ensemble des
claims pétrolier et gazier ont été rachetés dans le passé par l'État afin de
préserver la beauté et le patrimoine unique de cette île;
«Qu'elle rappelle que suite à la
demande du gouvernement du Québec en 2017, le gouvernement fédéral a inscrit
l'île d'Anticosti sur la liste des sites du
patrimoine mondial au Canada et que cette étape est celle qui précède la
candidature officielle au patrimoine mondial de l'UNESCO;
«Qu'elle
prenne acte que le ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs a soumis à
plusieurs reprises des recommandations défavorables à la création d'une bande
de protection des berges de l'île;
«Qu'enfin,
l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de mettre en place une
bande de protection des berges de
l'île sans tarder et de s'engager formellement à protéger l'île d'Anticosti, à
conserver son caractère naturel exceptionnel et à soutenir sa
candidature au patrimoine mondial de l'UNESCO en prenant les mesures
nécessaires.»
L'amendement... La
motion d'amendement de M. le député de Jonquière se lit comme suit :
a) en ajoutant, dans
le premier alinéa et après les mots «recèle un patrimoine», le mot
«historique,»;
b) en remplaçant,
dans le dernier alinéa, les mots «son caractère naturel exceptionnel» par les
mots «ses caractères naturel et historique exceptionnels».
Alors,
je mets d'abord aux voix la motion d'amendement de M.
le député de Jonquière
que je viens tout juste de vous lire. Cette... Mme la députée de Verdun.
Mme
Melançon : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais vous demander un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Je vais commencer par poser la question : Cette motion est-elle adoptée?
Alors, on me demande
un vote par appel nominal. M. le leader du gouvernement.
M.
Schneeberger :
Oui. Alors, Mme la Présidente, je vous demanderais de reporter ce vote à
demain, jeudi, lors des affaires courantes.
Votes
reportés
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Comme demandé par le leader du gouvernement, nous allons reporter le vote demain, aux
affaires courantes. Donc, la poursuite de nos travaux, M. le leader du
gouvernement.
M.
Schneeberger :
Oui. Alors, je vous demanderais d'appeler l'article 18 du feuilleton, Mme
la Présidente.
Projet
de loi n° 5
Reprise
du débat sur la prise en considération du rapport de la commission
qui en a fait l'étude détaillée et des amendements transmis
La Vice-Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le leader. Alors, à l'article 18 du
feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt aujourd'hui
sur la prise en considération du rapport de la Commission de la culture et de
l'éducation qui a procédé à l'étude du projet de loi n° 5,
Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation
préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans, ainsi que sur les amendements
transmis en vertu de l'article 252 du
règlement par M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et
par Mme la députée de Saint-Laurent.
Y a-t-il des interventions sur ce
rapport ainsi que sur ces amendements? Mme la députée de Joliette, la parole
est à vous.
Mme Véronique Hivon (suite)
Mme
Hivon : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Donc, je suis heureuse d'intervenir à l'étape de la prise en considération du rapport de commission de l'étude détaillée du projet
de loi concernant les maternelles quatre ans.
• (17 heures) •
D'entrée de jeu, je veux
souligner que, comme je l'ai mentionné à plusieurs reprises, nous aurions
souhaité avoir un plan
de match, un plan de déploiement, un plan de complémentarité entre le
déploiement de ce projet-là et les services de garde éducatifs. On aurait aimé savoir où le gouvernement s'en allait
en termes de rythme d'implantation, de coûts, de disponibilité d'espace, de faisabilité. Malheureusement, malgré deux
motions que nous avons présentées ici avec l'appui de l'ensemble des collègues de l'opposition et des
députés indépendants, le gouvernement a continué de refuser de présenter
un plan. Donc, de deux choses l'une :
ou bien un tel plan n'existe pas, ce qui est profondément inquiétant quand on
s'engage dans un projet aussi
fondamental qui est supposé être une priorité du gouvernement, et qu'on va y investir plus de
2 milliards d'argent public, ou
bien il existe sur, je dirais, un brouillon et que, vu qu'il est difficile à
implanter, on n'ose pas le rendre public. Mais que ce soit l'un ou
l'autre des scénarios, ce n'est pas rassurant pour la suite des choses. Et ça
n'a pas été rassurant, cette étude détaillée
du projet de loi sur les maternelles quatre ans, parce qu'on se serait
attendus, rendus à ce stade-là, après
plus d'un an de cet engagement-là, là, même un an et quelques mois, puisque
c'est un engagement qui a été pris
solennellement en campagne électorale, à avoir des réponses précises aux
nombreuses questions que nous avons posées au gouvernement.
Et
puis ce n'est pas un caprice de poser des questions quand on a un projet de
cette envergure-là. C'est plutôt une nécessité,
c'est une responsabilité de l'opposition de s'assurer qu'on sait dans quoi on
s'embarque. Parce qu'au-delà des enjeux
financiers, qui sont réels, c'est toute l'approche, c'est toute notre
perspective sur les services éducatifs à la petite enfance qui est modifiée par ce projet de loi du
gouvernement. Donc, c'est la moindre des choses de pouvoir savoir c'est quoi, les détails, comment ça va se concrétiser,
comment la complémentarité va se vivre sur le terrain. Or, à notre plus grande
déception et, je dirais même, consternation,
on n'a pas eu de réponse à nos questions. Et, plutôt que de voir le mystère,
je dirais, des maternelles quatre ans se
réduire, ce qu'on aurait souhaité, on l'a plutôt vu s'épaissir au fur et à
mesure des semaines de discussion sur
le projet de loi des maternelles quatre ans, dont nous avons discuté à partir
du mois d'août jusqu'au début du mois d'octobre.
Et
ce qui est très, très frappant, Mme la Présidente, c'est que les incohérences
dans le discours, le changement de
cap du gouvernement a été vraiment substantiel depuis les premiers moments où
il a parlé du projet de loi, mais tout ça se fait toujours comme si tout était correct, puis qu'il n'y avait pas
de problème, et puis qu'il s'ajuste simplement parce que c'est la chose à faire. Or, dans les faits, on
est partis d'un engagement, en campagne électorale, où on voulait rendre
la maternelle quatre ans disponible, voire quasi obligatoire, puisqu'on visait
90 %, minimum, des enfants de quatre ans, à maintenant une fréquentation visée de 50 %. On est partis d'un
projet où, donc, on voulait faire en sorte que ce soit le lieu pour les enfants de quatre ans, à maintenant
plaider le libre choix; je vais y revenir. On est partis d'un projet qui était
évalué à des coûts de 122 000 $
par classe à un projet où les coûts sont, en moyenne, évalués à
800 000 $ par classe, avec une
déclaration du premier ministre qui a dit qu'il ne fallait pas se surprendre
qu'à Montréal ça avait pu coûter 1,3 million puis que ça pourrait même coûter jusqu'à
2 millions pour une classe. Donc, on en est rendus à sept, huit,
10 fois le prix original.
Et
on nous dit toujours de ne pas s'énerver et qu'il n'y a pas de bonnes bases
pour réclamer un plan. Et on nous reproche même, le gouvernement nous reproche
même, le ministre de l'Éducation, de réclamer ce plan-là pour savoir où le gouvernement s'en va. Mais je pense qu'il
devrait se regarder un petit peu dans le miroir et se dire : S'il y a
autant d'inquiétudes, de questions et
de demandes par rapport au projet de loi sur les maternelles quatre ans, c'est
peut-être le fait même du
gouvernement qui, lui-même, a changé, dans ses évaluations, du tout au tout,
qui a même changé le projet.
Et je veux revenir à ça parce que
ce n'est pas anodin. Nous, évidemment, on est heureuses que les cibles soient revues à la baisse, parce que non seulement c'était irréaliste de créer 5 000 classes,
c'est toujours irréaliste de vouloir en créer 2 600, on a réduit de moitié, mais c'était aussi, je dirais,
non souhaitable, sur le fond des choses, de faire en sorte que tous les enfants de quatre ans doivent se
diriger vers la maternelle quatre ans. Et je pense que ce n'est pas pour rien
qu'on a assisté à un changement de discours
de la part du gouvernement sur ce qui concerne les cibles, parce qu'ils se
sont bien rendu compte, et rapidement, que
ça ne tenait juste pas la route d'un point de vue de faisabilité, mais aussi
d'un point de vue de ce que les
parents souhaitaient pour leurs enfants et de ce que bon nombre d'experts
recommandent aussi pour les tout-petits.
Donc, ce n'est pas
pour rien que, tranquillement, on a vu le gouvernement essayer de revoir un peu
comment il présentait le projet, en passant
de 5 000 classes à 3 200 classes, ensuite à
2 600 classes, en disant que, les coûts, bien, on avait mis ça, 122 000 $, mais, dans
le fond, on a toujours su que c'était 800 000 $, ce qui n'est pas
rassurant non plus parce qu'ou bien
on a voulu berner les Québécois pendant la campagne électorale en diminuant les
coûts substantiellement et donc... ou bien on a découvert ça après,
alors qu'on vient prétendre qu'on le savait déjà.
Donc,
beaucoup de questionnements, puis une évolution significative sur le discours,
qui dit maintenant : Bien, c'est
le libre choix des parents. Bien, nous, on est bien d'accord avec ça, mais le
problème, c'est qu'on entend le ministre nous plaider comment c'est le projet, la meilleure chose qui peut
exister pour les enfants de quatre ans, puis en même temps il nous
dit : Oui, oui, mais c'est le libre choix. Chaque famille, chaque parent
va pouvoir décider ce qu'il en est.
Nous, vous
connaissez notre position. On pense que de développer en parallèle deux
réseaux, c'est vraiment quelque chose
qui ne tient pas la route, autant sur le fond des choses pour le bien-être des
tout-petits, pour l'aspect éducatif, que sur le plan de la faisabilité. Comment pouvez-vous
prévoir correctement les choses quand vous dites que vous allez déployer
deux systèmes parallèles qui s'adressent aux mêmes enfants de quatre ans, en
même temps, qui auraient des visées supposément
similaires? Comment le gouvernement va-t-il pouvoir faire sa planification,
alors que lui-même est complètement à
côté de ses cibles, puisqu'il nous avait dit, au-delà des aspects financiers,
de disponibilité de ressources, de fréquentation, que c'était d'abord et avant tout pour les enfants
qui ne fréquentaient aucun service de garde éducatif et pour lesquels on
souhaitait ardemment diminuer les
vulnérabilités à l'entrée à l'école? Or, qu'est-ce qu'on a appris? Bien, c'est
que 70 % des enfants qui fréquentent
la maternelle quatre ans à la rentrée qui vient de passer en septembre dernier
proviennent de services de garde
éducatifs. Donc, c'est des enfants... et en bonne partie dans des
CPE. C'est des enfants qui fréquentaient déjà un milieu stimulant,
un service éducatif à la petite enfance.
Donc, le
gouvernement lui-même passe complètement à côté des cibles qu'il avait lui-même
mises de l'avant et des discours qu'il avait lui-même mis de l'avant pour
essayer de convaincre que c'était une bonne idée, son projet de maternelle
quatre ans.
Puis il n'y a
personne ici qui va être contre l'idée d'essayer d'aller chercher les enfants
qui ne fréquentent aucun service de
garde. À l'origine même du projet d'avoir des maternelles quatre ans en milieu
défavorisé, qui a été porté par notre
gouvernement... Donc, quand le ministre actuel dit qu'on est contre les
maternelles quatre ans, on n'est pas contre les maternelles quatre ans dans l'absolu. C'est nous-mêmes qui avons
fait un projet de loi pour permettre
la possibilité de la cohabitation des maternelles quatre ans avec
les centres de la petite enfance. Mais, quand on met ça de l'avant, c'est justement
pour savoir quel est le but recherché, quels enfants on souhaite vouloir voir
intégrer ce réseau-là, et non pas dire : On va y aller un peu comme le
vent va nous pousser, selon la saveur du jour, à voir, bien, peut-être
qu'il faut développer plus de places
en service de garde, peut-être plus en maternelle quatre ans. Ça n'a
aucun sens, d'un point de vue
de politique publique et de saine, je dirais, gestion des finances publiques
aussi, de dire : On va développer deux réseaux en parallèle, et donc on
verra bien ce qui arrive.
Donc, ce
n'est pas surprenant de voir le gouvernement essayer de se réajuster dans son discours. Mais
le problème, c'est qu'il refuse de
mettre le projet, je dirais, en attente, le temps de faire toutes les analyses
qui s'imposent, le temps de voir où
il s'en va vraiment avec ça, le temps de faire, je dirais, le tour
des besoins pour les maternelles quatre ans versus des places en CPE, en
service de garde éducatif. Ce serait la chose responsable à faire. Mais le gouvernement
fonce tête baissée avec son entêtement, qui devient de plus en plus proverbial
dans ce dossier-là, du moins — je ne généraliserai
pas aujourd'hui, mais dans ce dossier-là pour le moins — de dire : Non, non, non, on continue,
on va de l'avant, on adopte le projet
de loi, puis là on va pouvoir développer les maternelles quatre ans n'importe où
dans l'ensemble des milieux défavorisés, pas défavorisés au Québec.
• (17 h 10) •
Et notre
crainte, qui est fondamentale, c'est qu'à partir du moment où tu décides que tu
priorises le réseau des maternelles
quatre ans, que tu en fais un droit... Il y a un droit qui est créé dans le
projet de loi n° 5, c'est quand même sérieux, il y a un droit à la fréquentation de la maternelle quatre ans
qui est créé. Alors, qu'est-ce qui va arriver quand il va y avoir un défi de ressources, quand il va y
avoir des enjeux économiques, quand il va y avoir des ressources qui vont apparaître au gouvernement comme étant limitées?
Bien, qui qui va pâtir de ça? Bien, c'est le réseau des CPE puis c'est
le réseau des services de garde éducatifs, évidemment, parce que malheureusement
le corollaire, malgré les beaux discours sur
le libre choix, de la fréquentation d'un CPE, il n'existe pas, lui, il n'y en a
pas, de droit qui est créé pour que les
parents puissent avoir une place dans un service de garde éducatif de qualité,
alors qu'il y a 42 000 parents, 42 000 familles, en ce moment au Québec, qui attendent une
place en CPE, au moment où on se parle, au minimum. Ça, c'est simplement ceux qui sont inscrits au guichet
unique et qui attendent une place, et je vous passe les 20 000 enfants
qui ne sont dans aucun service régi, qui
sont dans des milieux de garde non régis, pour lesquels il n'y a aucune
exigence de formation, pour lesquels
il n'y a aucun programme éducatif qui est appliqué, pour lesquels il n'y a
aucun contrôle du ministère de la Famille.
Donc, vous imaginez le besoin qu'on a d'avoir
des places en service de garde éducatif et l'inquiétude qui est présente quand les parents souhaitent ces
places-là mais que ce qu'on leur dit, c'est : La priorité va aller aux
maternelles quatre ans, puis, oui, on
va développer une dizaine de milliers de places en CPE, mais les besoins sont
probablement de six à sept fois plus
grands, mais, pour ça, il n'y aura pas de droit de créé. Mais, par exemple,
pour les maternelles quatre ans, même
si ça veut dire qu'on dédouble et qu'on fait deux réseaux parallèles, bien, ça,
on va le faire, parce que, voyez-vous, on a pris un engagement en
campagne électorale, puis le premier ministre est allé mettre son siège en jeu
là-dessus.
C'est vraiment
déplorable, Mme la Présidente, parce que, quand on parle de quelque chose
d'aussi fondamental que la petite
enfance, je pense qu'ici tout le monde s'entend sur la nécessité d'en faire une
énorme priorité. Mais, quand
on veut en faire une priorité puis le faire correctement, ça veut justement
dire qu'on ne s'enferme pas dans un carcan idéologique
et qu'on ne s'enferme pas dans un entêtement pour pouvoir honorer une promesse
électorale qui ne tenait pas la
route. Et eux-mêmes, dans leur changement de cap, le démontrent très bien, ça
devait vouloir dire qu'on va prendre les meilleurs moyens pour y
arriver.
Et là on a eu
une soixantaine d'heures, des semaines de travaux qui nous ont permis de mettre
au défi le ministre de nous montrer que c'était le meilleur moyen, et
force est d'admettre que cette démonstration-là n'a pas pu être faite. Au contraire, moi, je ressors avec beaucoup plus
de questions que j'en avais au départ et avec beaucoup plus d'inquiétudes
que j'en avais au départ.
Puis je vous
donne juste quelques exemples. Les enfants en maternelle quatre ans, ils
passent moins de temps qu'un enfant
du primaire dans leurs classes parce qu'il y a 1 h 15 min de
moins d'enseignement par jour. Ce qui veut dire que, quand votre enfant doit rester à l'école, qu'il
doit aller au service de garde, bien, il va probablement passer autant de temps
au service de garde de l'école qu'en classe.
Donc, c'est formidable de nous dire qu'en classe il va y avoir un duo de feu,
qu'il va y avoir une
enseignante et une éducatrice pour s'occuper des enfants — là, je vous passe la question du ratio dont
mes collègues ont parlé précédemment — mais qu'est-ce qu'on fait après de l'enfant
de quatre ans qui va passer la moitié de
sa journée en service de garde, où le ratio, là, il n'est pas de 1-10 comme en
CPE, il n'est pas d'un pour 17 comme dans
la classe de maternelle quatre ans, mais qu'il peut être de 20, de 30, de
40 enfants sur l'heure du dîner? Vous vous imaginez, Mme la
Présidente, pour des enfants de quatre ans?
Puis c'est ça qu'on semble complètement mettre
de côté, ça et plusieurs autres enjeux qui concernent la fréquentation
généralisée des enfants de quatre ans à l'école. C'est toute cette
adaptation-là qui est nécessaire. Et, à partir
du moment où tu en crées un, droit universel, parce que le ministre nous répète
que c'est un droit universel qui est créé
dans la loi, bien entendu, bien, imaginez toutes ces cohortes d'enfants là de
quatre ans qui vont arriver à l'école, qui vont nécessiter des services
de garde en période de pénurie.
Donc, vous
savez, dans les services scolaires, la grande majorité des éducatrices en
service de garde n'ont pas la formation
du niveau collégial qui est souhaitée et souhaitable parce qu'il y a déjà une
pénurie, et la majorité des éducatrices formées au niveau collégial se retrouvent dans les CPE ou les services
de garde éducatifs de manière générale. On l'a vu, là, à la rentrée, comment il y a une pénurie
importante, où on prend beaucoup, beaucoup de monde pour essayer de combler
des trous dans les services de garde en milieu scolaire.
Donc, ça,
c'est juste un exemple pour vous dire : Comment on peut penser que ça va
être gagnant pour tous les enfants de
les amener en milieu scolaire quand ils vont passer la moitié de la journée non
pas dans une classe, mais dans un service de garde où les ratios sont
quatre fois, trois fois, deux fois plus élevés que ce qu'on a dans les services
de garde éducatifs? Ça, c'est le genre
d'élément auquel on n'a pas eu de réponse. Puis, quand on a voulu aborder ce sujet-là
et vouloir l'inclure dans la loi, on a eu une fin de non-recevoir du
ministre.
Et l'autre
chose qui est importante, c'est que, quand tu t'embarques dans une réforme
aussi substantielle, c'est qu'il faut que tu sois certain qu'une fois
que tu as mis le bras dans le tordeur, parce que tu changes complètement la manière de voir les services éducatifs à la petite
enfance au Québec, tu vas être capable de réaliser ton projet. Or, en ce
moment, les conditions ne sont aucunement réunies pour que le projet soit
réalisé.
Ça fait que, juste pour vous donner un petit
exemple de l'improvisation du ministre dans le dossier, j'en ai parlé ici à la période des questions une fois, mais je pense que ça vaut la peine
d'y revenir, j'ai dit : O.K., mais là vous nous dites que le ratio, ça peut aller jusqu'à 17 enfants... Parce qu'on a abondamment parlé de la question des
ratios, parce que les experts nous
ont dit : Vous savez, 17, ce n'est vraiment pas l'idéal. Donc, on a
beaucoup questionné le ministre sur ça. Il me dit : Oui, c'est 17, le ratio, mais la moyenne, ça va être
14, parce que ça peut aller jusqu'à 17, mais, sur un territoire donné, dans une région donnée, il va falloir que
la moyenne soit 14. Tout le monde est content, plus le ratio va être bas,
mieux c'est.
Mais là j'ai
dit : Ah! c'est drôle, parce que vous ne nous disiez pas ça avant, vous
parliez toujours de 17. C'est intéressant,
on est rendus à 14, on aimerait ça que ce soit plus bas. Mais j'ai dit :
Moi, je fais les calculs, j'ai dit, quand je calcule pour arriver à 2 600 classes avec le nombre
d'enfants de quatre ans qu'il y a au Québec, ça arrive à 2 600 classes,
mais, si on en compte 14, ça va faire un
nombre de classes plus élevé. Puis je vous le donne dans le mille, Mme la
Présidente, ça donnait donc 3 200 à 3 300 classes.
Donc, tout de
suite, on avait un 600 classes de plus qui devaient être créées.
600 classes de plus à 800 000 $ par classe, ça fait 480 millions de plus juste
parce que le ministre nous a donné une nouvelle information comme ça, pendant
le cours des travaux, en nous disant : Oui, c'est 17, mais, dans le fond,
ça va plus être 14.
Ça fait que,
là, j'ai dit : O.K., mais ce 500 millions là qui sort d'on ne sait
où, comment vous allez le provisionner? Comment ces nouvelles 600 classes vont être créées? Vous revenez
donc à 3 200 classes. Puis là le ministre m'a dit : Ah! mais là la députée de Joliette, là, elle est
vraiment tannante avec ses chiffres, elle veut trop de détails, parce que,
franchement, c'est un objectif, là,
mais est-ce que ça va être 2 600, 2 400, 3 200, 3 400,
2 000? O.K., mais ce n'est pas moi qui les ai inventées, les cibles, c'est vous. C'est le
ministre de l'Éducation, c'est le premier ministre, c'est eux qui ont mis ces
cibles-là au jeu, qui ont dit :
C'est 2 600 classes qu'on veut d'ici 2023. Puis là, quand je vous pose des
questions puis que, là, ça devient
embarrassant parce que, finalement, les chiffres changent encore une fois, vous
dites : Bien, dans le fond, les chiffres puis les cibles, ce n'est
pas vraiment important.
Moi, en tout
cas, Mme la Présidente, ça ne me rassure pas. Puis c'est ça que j'ai trouvé
vraiment désolant de l'étude détaillée, c'est qu'on se serait attendus
que le ministre ait fait ses devoirs en profondeur, surtout parce qu'il n'y a
pas d'urgence d'adopter ce projet de loi là,
surtout parce que les besoins sont déjà énormes en milieu défavorisé et qu'on
pourrait se dire : Le projet de
loi, il le permet déjà, donc on va continuer comme ça puis on va continuer à
creuser avant de demander un chèque en blanc à l'Assemblée nationale
pour pouvoir développer ce réseau-là à la va-comme-je-te-pousse, sans connaître les impacts sur les services de garde
éducatifs, sans connaître les impacts financiers, sans savoir si on va être
capables de se rendre au bout de la démarche.
• (17 h 20) •
Parce que,
moi, là, si dans deux ans le gouvernement nous dit : Excusez, là, mais
finalement ça ne marche pas pantoute,
notre affaire, on a déjà engrangé des centaines de millions dans ce projet-là,
mais on n'y arrive pas, les parents ne sont pas satisfaits, ce n'est pas
ça qu'on pensait qui se produirait, on manque d'espaces, on manque de
ressources humaines... Nous, on peut leur
dire tout de suite : Ils vont manquer d'espaces, ils vont manquer de
ressources humaines, ils vont manquer
d'argent, ils vont manquer de professionnels. Ça fait qu'on peut leur dire tout
de suite, mais, mettons qu'ils nous
le disent dans deux ans, le problème, c'est que, pendant ces deux ans-là, on
n'aura pas mis les ressources où elles doivent aller pour la petite enfance.
Parce que la petite enfance, ça ne commence pas à quatre ans, ça commence
au plus jeune âge. Puis, si on travaille
avec les ressources puis avec le réseau existant, de qualité, que sont les
centres de la petite enfance, bien, on pourrait travailler dès le plus jeune
âge puis on pourrait faire en sorte qu'on donne les meilleures chances pour nos
tout-petits de s'épanouir, de se développer et d'arriver à l'école avec le
moins de vulnérabilité possible. Mais
là qu'est-ce qu'on va faire dans deux ans si c'est un fiasco? Qu'est-ce qu'on
va faire si les parents ne sont pas au rendez-vous,
comme ça semble déjà être le cas, parce qu'on a eu du mal à en créer
juste 250 pour la rentrée? Puis combien il faut en créer? Il faut en créer
2 000 — 2 000,
Mme la Présidente, imaginez — pour pouvoir faire un crochet à côté
d'une promesse électorale. Donc, bref, cette étude-là ne nous a pas du tout
rassurés.
En
terminant, vous allez quand même me permettre de remercier, pour une chose, le
ministre. C'est qu'après des jours, et des jours, et des jours de débats et
après tous les avis d'experts qui demandaient la même chose — ça a été long, mais on a fini par l'avoir — il a accepté que le réseau se développe prioritairement
dans les endroits avec un indice de défavorisation
élevé. Donc, au moins, ça ne se développera pas complètement de manière
anarchique. On n'a pas eu toutes les
garanties qu'on voulait, mais, au moins, il y a cet élément-là sur lequel on a
pu, avec l'ensemble des experts, gagner notre point. Mais je ne vous
fais pas la nomenclature de tous les autres enjeux qui étaient essentiels sur
lesquels, malheureusement, on n'a eu droit à aucune ouverture de la part du
ministre.
Donc,
ce que je souhaite, parce que je continue à le souhaiter ardemment, c'est que
le gouvernement ne s'entête pas,
qu'il fasse ses devoirs, qu'il dépose, en toute transparence, un plan de match
pour rassurer tout le monde. Il n'y a rien qui presse encore pour adopter le
projet de loi, donc qu'il nous le fasse, et qu'après on puisse s'assurer que
les choses vont pouvoir se faire pour le bien-être de nos tout-petits,
parce que c'est leur intérêt supérieur qu'on doit défendre.
Et vous me permettrez
de remercier mon recherchiste, Étienne Richer, qui m'a accompagnée pendant
les nombreuses heures de ce travail, de
remercier, bien sûr, mes collègues des autres oppositions, avec qui on a bien
travaillé, une collaboration au féminin qui s'exprime dans toute sa force, et
de remercier aussi le ministre pour les éléments pour lesquels on a pu débattre plus en profondeur,
l'ensemble de son équipe, et je lui demande de rester très vigilant. Et je lui
dis qu'il n'est pas trop tard pour
faire ses devoirs, pour faire preuve de transparence, parce qu'on n'a pas deux
chances de réformer notre système
d'éducation à la petite enfance et de mettre autant d'argent. On est rendus à
plus de 2 milliards pour nos
tout-petits. Donc, je pense que la moindre des choses, c'est de le faire avec
sérieux, en collaboration et en écoutant les experts. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres interventions?
M. le député de Marquette, la parole est à vous.
M.
Enrico Ciccone
M. Ciccone : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je débuterai en disant ceci :
promesse électorale, 5 000 classes mur à mur, maternelle
quatre ans universelle, sinon le premier ministre a dit qu'il mettait son siège
en jeu. On est ici aujourd'hui justement à
cause de cette promesse-là. Et je tiens à souligner que, Mme la Présidente, le
premier ministre va me manquer
beaucoup. Honnêtement, il va me manquer beaucoup. Faire une promesse puis ne
pas être capable de la livrer de cette
façon-là... J'aimais sa présence. C'était un gars qui était en Chambre, qui
nous parlait, qui était très démonstratif,
a un sens du débat extraordinaire. Honnêtement, Mme la Présidente, je ne sais
pas quand est-ce qu'il va avancer qu'il va quitter le salon bleu, mais
je souhaite le remercier de tout ce qu'il a fait pour cette Assemblée, son expérience. Il a changé de parti, mais ça a été
quand même un moment privilégié, Mme la Présidente, d'avoir travaillé
avec le premier ministre.
Ceci dit, les maternelles quatre ans universelles
mur à mur, moi, si je vous parle d'entrée
de jeu de mon comté, c'est impossible, c'est impossible d'avoir des
maternelles quatre ans dans mon comté parce
que, premièrement, il nous
manque de classes, il nous manque d'écoles. Il nous manque deux écoles dans mon
comté de Marquette. Ce n'est pas évident, c'est difficile.
Et
ce qui est encore plus difficile, Mme
la Présidente, c'est que, justement,
initialement, les maternelles quatre ans avaient été proposées, avaient été
amenées sur le plancher dans des secteurs un peu plus défavorisés pour
donner, justement, la chance à des enfants de se développer, pour
leur donner aussi une chance dans la vie d'être au même diapason que les
jeunes autres de leur âge. Dans mon comté, il y a une zone qui est un peu
précaire qui pourrait bénéficier de ces
maternelles quatre ans là. C'est facile de le dire, mais, quand les infrastructures ne sont pas là, alors, c'est nos petits bouts de chou qui en
paient le prix.
Moi,
il y a un élément qui me dérange beaucoup.
Parce que, un, les CPE, qui ont été
établis ici, au Québec, c'est vraiment... on a vraiment fait figure de proue, on a été des pionniers en cette matière. C'est vraiment un système qui a
fait ses classes — et c'est sans jeu de mots, Mme la
Présidente — qui a
fait ses classes, qui amène un certain développement. Oui, ce n'est pas une école, oui, on utilise
beaucoup le jeu. Il y a des programmes dans les CPE, c'est bien établi, on a vu
ce que ça faisait chez nos jeunes. Et là on vient mettre... un CPE, un
programme qui est extraordinaire, et on vient les mettre en compétition avec les maternelles quatre ans. Pourquoi? Je me
pose la question.
Maintenant,
ce qu'on dit, du côté de la partie gouvernementale, c'est qu'il faut les
prendre tôt, il faut vraiment les prendre tôt pour les aider et déceler
certains problèmes de développement. Mais le problème, c'est qu'on peut les prendre tôt dans les CPE. On veut amener des
professionnels, on veut mettre deux professionnels par classe, mais pourquoi
que, tout simplement, on ne développe pas un
programme qui va faire le tour des CPE, qui peut venir travailler avec les
jeunes, cibler les jeunes en difficulté au niveau du développement?
Parce
que, je rappelle, Mme la Présidente, il y a des programmes de développement
dans des CPE. Et, soit dit en
passant, je lève mon chapeau, justement, aux jeunes femmes et aux jeunes hommes
qui travaillent dans des CPE, parce que
ce n'est pas évident de travailler avec des jeunes. On le sait, à la maison, on
s'arrache les cheveux quand on en a deux en bas de cinq ans. Eux autres, ils en ont six, sept, huit, 10, 12 puis ils
font un travail exceptionnel, et aujourd'hui j'aimerais leur rendre
hommage.
On
parle de quatre ans, les déceler tôt. Cependant, Nathalie Bigras, qui est
professeure du Département de didactique de l'UQAM et directrice d'une équipe de recherche en petite enfance,
nous dit : «Les enfants doivent être diagnostiqués beaucoup plus tôt si on veut les aider.» C'est
beau, sortir un chiffre de quatre ans, mais il y a une professionnelle qui est
ici qui nous dit qu'il faut les prendre plus tôt. «À quatre ans — et je la cite — c'est déjà [très] tard.» Alors, si c'est
déjà très tard, pourquoi que, justement, on n'amène pas des
professionnels dans des CPE pour faire le travail et déceler une problématique?
On sort des
chiffres comme ça, quatre ans. On aurait pu arriver, Mme la Présidente, et
dire : Bien, on veut une maternelle
trois ans. On sait que c'est de l'improvisation depuis le début de cette
législature-là à la CAQ. Chez la CAQ, c'est
comme ça. On sort le chiffre de quatre ans. C'est le même chiffre qu'on a sorti
avec les 122 800 $ par classe. Par la suite, on s'est rétracté, on s'est réajusté et, pour des murs, un
tableau, des chaises, des tables, là, on est rendu à 800 000 $.
Mais ce n'est pas fini, Mme la Présidente,
on continue. Puis là je sais que je me répète, parce que je suis persuadé que tout le monde l'a dit, mais ce n'est pas grave, je
n'étais pas là, on a monté ça à 1 million de dollars, 1,3 million de
dollars, et, jusqu'à récemment, jusqu'à récemment, le premier ministre a
même dit 2 millions de dollars. J'ai ce petit tableau didactique, parce que vous connaissez ma collègue
de Saint-Laurent, qui aime sortir ses tableaux, qui est ma collègue de
banquette. Alors, on ne sait jamais quel chiffre qui va nous tomber sur la
tête.
Maintenant,
est-ce que sortir 250 quelques classes cette année, ça vaut le prix de
dépenser? Quel est le résultat? Avant
d'investir, moi, j'aime au moins être capable de savoir qu'est-ce qui s'en
vient, qu'est-ce qui va être l'investissement, le retour sur l'investissement. Je ne dis pas que les maternelles quatre
ans, ce n'est pas bon, ce n'est pas ça qu'on dit, mais, de les mettre
mur à mur et de les mettre en compétition avec un système qui marche déjà, je
trouve que c'est un peu contre-performant.
• (17 h 30) •
Maintenant, on a vu des groupes qui sont venus nous parler
ici, puis je trouve ça dommage qu'on a empêché ou on n'a pas accepté d'écouter, de rencontrer des professionnels
qui sont chez nous. On a le Dr Jean-François Chicoine, qui est un pédiatre reconnu de Sainte-Justine, je
pense qu'il n'a plus de preuve à faire, là, aurait aimé ça venir nous parler,
on ne l'a pas écouté. La commission
scolaire de Montréal,
on ne l'a pas écoutée, Mme la
Présidente, puis, je veux dire,
s'il y a bien quelqu'un qui connaît le système d'éducation au Québec... Bien, peut-être que le
ministre et son équipe pensent qu'ils sont plus qualifiés que des commissions
scolaires, peut-être. Mais en même temps il faut parler à des gens du milieu, des professionnels du milieu qui
connaissent le tabac. La commission scolaire Marie-Victorin également, on
l'a mise de côté. Plusieurs associations de
garderies privées aussi, ils n'ont pas eu la chance de venir s'exprimer en
raison du refus du ministre.
Mais, Mme la
Présidente, on a fait venir des spécialistes de New York. Le ministre s'est
déguisé en agence de voyages, on a
décidé... non seulement agence de voyages, mais tout inclus, Mme la Présidente,
un tout inclus. Vous connaissez ça, un tout inclus? Justement, je me
cherche un petit voyage avec ma famille, moi, pendant le temps des fêtes, je
vais peut-être demander au ministre de
l'Éducation, qui va peut-être me donner quelques suggestions, justement. Et, encore
plus intéressant, Mme la Présidente, il va
payer pour à part de ça. Je lui dis tout de suite, là, on est trois chez nous,
ma femme puis mon gars de 21 ans.
Ceci dit, Mme
la Présidente, en terminant, là, je n'irai pas plus loin, là, mais je veux juste
dire une chose, je veux soulever aussi mon chapeau aux collègues qui ont été là
sur la commission, ma collègue de Saint-Laurent, qui a fait un travail
remarquable. Je ne les nommerai pas toutes parce que je ne veux pas les
oublier. Je sais que ma collègue de Westmount—Saint-Louis aussi a été là un petit peu, qui a été
sur cette commission-là, ma collègue de Joliette également a été sur cette
commission-là. Elles ont fait un travail remarquable, et je veux juste leur
dire qu'il y a quand même eu des avancées
sur les milieux défavorisés, on a priorisé le déploiement — alors, bravo! — sur les enfants handicapés, parce que les enfants handicapés étaient à temps
partiel. Le ministre voulait l'éliminer, mais, en même temps, les collègues
ont réussi, avec leurs commentaires, de
faire changer d'idée le ministre, les ratios également, un pour 10, sous forme
de règlement. Bravo! C'est quand même une avancée.
Et les
redditions de comptes du ministre... Là, les redditions de comptes du ministre,
Mme la Présidente, j'ai hâte de lire
ça. Il va s'apercevoir... parce que, souvent, une reddition de comptes, c'est
après le fait. C'est là qu'on doit prouver, c'est là qu'on doit établir un rapport, écrire un rapport et c'est là
que, justement, on est capable de voir si ça fonctionne et si ça ne fonctionne pas. Et en terminant, Mme la
Présidente, la seule chose qu'il reste à faire — et je vous laisse cinq secondes pour
me remettre à l'ordre — c'est
un chèque en blanc, Mme la Présidente. Merci.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, la parole est à vous.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil :
Oui, merci, Mme la Présidente. Donc, à mon tour de prendre la parole à cette
étape du projet de loi, soit celle de
la prise en considération. Donc, c'est un projet de loi qui modifie
principalement la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé relativement à l'offre du service de
l'éducation préscolaire, et c'est un projet de loi qui a fait couler beaucoup, beaucoup d'encre. C'est, en
fait, assez incroyable. Moi, évidemment, je veux dire, la plupart d'entre
nous, on n'a pas participé directement à ce
projet de loi ni à, évidemment, toutes les étapes de ce projet de loi, mais on
a entendu parler de ce projet de loi.
Et ce qui me
frappe... et c'est rare de voir l'unité, comme on a vu, des oppositions contre
un projet de loi dès que ce projet de
loi... bien, même lors de l'annonce du projet de loi, lors de l'annonce de la
promesse du gouvernement. Moi, je
vous dirais que j'étais en campagne électorale, donc on parle de
l'été 2018, et cette promesse-phare de la CAQ avait été rendue publique avec les
chiffres qui ont, depuis, changé plusieurs fois. Et je ne pense pas que je
rentrerai dans ça parce que c'est un
brouillon total, quant à moi, un chaos. Je pense qu'une chatte ne retrouverait
pas ses petits quand on parle des chiffres,
et tout le reste, et du développement de ce projet de loi. Et, savez-vous,
quand je faisais du porte-à-porte, je me souviendrai toujours, à plusieurs reprises, je suis tombé sur... Il y a
beaucoup de jeunes familles dans Notre-Dame-de-Grâce, beaucoup de jeunes familles. Donc, soit
que les enfants sont déjà en maternelle quatre ans ou c'est des parents qui se
préparent à enregistrer leurs enfants dans
une maternelle... dans un CPE. Et là, donc, c'était dans l'air. Ce n'était
pas une promesse que les libéraux avaient
faite, mais, parce que la CAQ l'avait annoncé, il y avait vraiment une
inquiétude, et c'est là que j'ai été vraiment sensibilisée. J'ai toujours su,
parce qu'on a quand même eu des débats au cours des dernières années, que c'est un réseau performant, rassurant
pour les familles. Il y a une flexibilité, c'est bien organisé et ça permet...
et d'ailleurs c'est une des raisons qu'on
donne pour expliquer pourquoi la croissance des femmes sur le marché du travail
a connu une croissance beaucoup plus
importante au Québec que l'Ontario. On a dépassé l'Ontario et on pointe du
doigt le réseau des CPE. C'est quand même intéressant.
Donc,
l'attachement des Québécois et Québécoises... et on l'a vu avec les trois
braves, comment dire, députées qui se
sont ralliées avec une vision commune, avec une compréhension profonde, c'est
vraiment ça, une compréhension profonde
de ce que ça prend pour assurer le développement optimal d'un enfant, et ça
commence très jeune. Maintenant, on a
toujours dit, au Parti libéral, qu'on est pour la maternelle quatre ans. Moi,
j'ai deux sur quatre de mes enfants qui sont allés à la maternelle quatre ans, puis ça a été une expérience
extraordinaire, deux autres qui n'ont pas fait de maternelle quatre ans,
qui ont eu aussi une expérience extraordinaire, donc.
Mais on n'est
pas du tout fermés. Ce qui, depuis le début... Et j'ai écouté, bon, ma
collègue, j'ai écouté la députée de
Joliette, de Marquette aussi, je l'ai trouvé extraordinaire, et toutes les
interventions, et, quand on fait la revue de presse, les manchettes partout, on voit, du début à la
fin, l'improvisation, l'improvisation, le manque d'orientation. Comme on dit
en anglais, «make it up as you go». Il y a
une expression qui dit «make it up as you go», on invente au fur et à mesure.
On essaie de combler et de répondre aux
questions extraordinaires de ma collègue de Saint-Laurent et qui, chaque jour,
soit en période de questions ou en
commission, soulève d'autres problèmes avec ses collègues, et l'inquiétude que
ça suscite et que ça continue à
susciter beaucoup d'inquiétude, évidemment. Et plus ça allait et plus il y
avait de l'inquiétude parce qu'on voyait que le plan changeait constamment.
Il n'y avait pas de plan, en fait. En fait, c'est ça, la critique, c'est qu'il n'y avait pas de plan. Imaginez, imaginez
quelque chose d'aussi fondamental, les deux grands réseaux qui sont la responsabilité d'un gouvernement, ces deux grands
réseaux publics qui font qu'on est une société extraordinaire, hein,
c'est le réseau public de l'éducation et le réseau public de la santé. Ces deux
grands réseaux nécessitent une attention particulière, une planification fine.
Je vois le
ministre des Finances devant moi, et je ne peux pas imaginer comment un
ministre des Finances peut vivre dans
cette incertitude. Je ne peux pas imaginer les conversations qu'ils ont eues.
Parce que j'ai quand même été au gouvernement
huit ans sur 10 ans, alors je sais à quel point c'est bien important que
le Trésor et les Finances voient clair dans
le plan que le ministre présente, et ça, c'est d'entrée de jeu, avant même
qu'on aille au Conseil des ministres. Alors, je ne sais pas comment ils ont réussi à essayer de voir clair dans tout
ça et planifier l'avenir. Parce que c'est bien beau de dire qu'il y a un trou sans fond, là, dans les
finances publiques, je n'y crois pas. Je n'y crois pas que c'est un trou sans
fond. Ça ne se peut pas, c'est impossible.
Alors,
commençons par un plan, un plan logique, cohérent, chiffré, hein, des chiffres
qui ne changent pas à chaque fois
qu'on pose la question. Et je refuse d'aller là-dedans, parce que j'ai essayé
de... et ma collègue m'a bien expliqué, mais les chiffres changent et le plan change, et c'est un déploiement
partout, partout au Québec. Et ce qui m'a beaucoup frappée, c'est ce commentaire que le premier
ministre a fait quand il a dit : Bon, bien, si on veut que, vraiment, les
enfants réussissent, c'est évident
qu'il faut qu'ils aillent à la maternelle quatre ans parce que, là, il y a les
ressources nécessaires humaines et
les spécialités pour faire en sorte que cet enfant va s'épanouir, puis, bon,
bien, si on fait un autre choix, c'est des techniciens mais qui n'ont
pas nécessairement de connaissances en matière de développement des enfants.
• (17 h 40) •
Moi, j'ai une
garderie... il y a un CPE juste en face de chez moi, et il y a un parc juste en face de chez moi, et ça
fait 25 ans, depuis le début des CPE — puis moi, je suis toujours à la même maison — que
je vois... juste la... ce qu'on appellerait
la sortie, c'est comme leur récréation, à quel point ces enfants sont quand même
heureux et chanceux d'avoir l'attention
et l'éducation, parce
que je l'entends dans leurs paroles,
etc. Alors donc, on tout de suite compris que... Ma collègue a parlé
d'idéologie, essentiellement, puis je pense que la députée de Joliette s'est
référée aussi à cette notion d'idéologie, donc ça part d'une certaine vision de
la vie et certaines... comment dire, des erreurs d'évaluation quant à qu'est-ce
qui est quoi puis qu'est-ce qui fait en sorte qu'un enfant puisse bien réussir
dans la vie.
Alors, je pense qu'essentiellement ce que...
Donc, on a compris que... Je ne sais pas combien de semaines les vaillants députés, vaillantes députées ont poussé
pour avoir des modifications, et tout ça, des changements, des améliorations,
et je comprends, en bout de ligne, donc,
qu'il y a eu, donc, des progrès. Et donc, évidemment, on s'en réjouit qu'il y
ait eu des progrès, surtout, je
pense, de tenir en considération les milieux défavorisés. Et ça, c'est depuis
le début. Ça fait longtemps, des
années qu'on sait que les CPE, c'est leur... la priorité et que c'est une
chance de donner une chance aux enfants qui sont dans des milieux
défavorisés.
Mais il y a aussi quelques accommodements pour
les enfants handicapés, quel sera, donc, un règlement qui viendra pour le ratio éventuellement et d'autres
améliorations, les gens sont contents de ça. Mais le brouillard dans lequel le
gouvernement et la société québécoise vont avancer et notamment les parents et
les familles, ça, c'est inadmissible. Je trouve ça totalement inadmissible. Je ne peux pas comprendre qu'un
gouvernement puisse fonctionner de cette façon. Et donc je pense que l'inquiétude qui a été exprimée par toutes les
collègues et les collègues... oui, «toutes», j'en suis, j'en suis, j'ai
cette même préoccupation.
Donc,
on comprend, en bout de ligne, qu'évidemment nous, on n'appuiera pas ce projet
de loi. On a beaucoup d'inquiétudes,
mais on va suivre, évidemment, le développement de ce développement des places
en maternelle quatre ans, et je pense que la volonté d'être très
critiques et aux aguets pour essayer peut-être, dans certains cas... corriger
le tir, s'il y a lieu, certainement, au
besoin parce que ça, on peut le prévoir qu'il y aura des corrections à
apporter. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant,
nous poursuivons avec Mme la députée de Verdun.
Mme Isabelle Melançon
Mme Melançon :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de prendre la parole pour
la prise en considération du projet
de loi n° 5 sur ces fameuses maternelles quatre ans, où on a longuement
discuté. Je veux simplement rappeler
que, pour notre formation politique, les maternelles quatre ans, c'est une
bonne chose, très bonne chose dans les milieux
défavorisés, on l'a souvent dit, parce qu'il y avait une stratégie dans le
déploiement des maternelles quatre ans. Cette stratégie-là, c'était de prioriser le milieu défavorisé parce
qu'il n'y avait pas de services pour les petits bouts de chou qui voulaient et qui devaient, entre autres, socialiser,
certes, mais aller apprendre dans des classes, dans des écoles. Et je peux vous dire, je peux en témoigner, du travail
qui est fait dans ces maternelles quatre ans, puisque j'ai des maternelles
quatre ans à Verdun, milieu défavorisé. Je
pense notamment à
Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, Notre-Dame-de-Lourdes, deux écoles, là,
qui ont des classes de maternelle quatre ans, et c'est très bien ainsi.
Cependant,
pour de l'entêtement, actuellement, du côté du gouvernement, on investit des sommes... puis je ne peux pas les qualifier parce que même eux ne sont
pas capables de les qualifier, mais des sommes astronomiques, alors que
l'argent devrait être investi à l'intérieur du réseau de centres de la petite
enfance.
Hier, Mme la
Présidente, il y a eu un débat de fin de séance, et ma collègue de Westmount—Saint-Louis a interpelé le ministre de la Famille. Et, à la fin, le
ministre de la Famille a dit : Donc, si je comprends bien, là, je vais
couper ça, moi, les CPE à Verdun puis
je vais couper ça, les CPE dans Westmount—Saint-Louis. J'espère qu'il n'était pas sérieux, puis j'espère que ce n'étaient pas des menaces qu'il
nous faisait ici, au salon bleu parce
que vous savez quoi? Dans Verdun, là,
on a besoin de places en CPE. Et j'ai des
gens de Pause Parents-Enfants qui attendent justement de pouvoir
développer des places. Et l'argent, là, qu'on est en train de dépenser
pour de l'entêtement — et
pas parce qu'on est contre les maternelles
quatre ans, loin de là, mais c'est parce que, là, là, on ne sait même plus
comment la calculatrice peut aller du côté de la CAQ — bien,
il devrait peut-être aller à développer ces places en CPE que nous avons
besoin.
En campagne
électorale, je vais le rappeler aussi à mon tour, bien sûr, le premier ministre
a mis en jeu son siège. Il l'a dit au
débat des chefs, s'il y a un thème sur lequel il mettait son siège en jeu,
c'était pour les maternelles quatre ans. Dès lors, on avait compris, on avait compris que c'était pour se faire
peu importe le prix, peu importe de la façon. Même si c'est dans le
chaos le plus complet, ça va se faire.
Bien, je veux
juste vous rappeler, Mme la Présidente, qu'en campagne électorale le premier
ministre a dit qu'une classe, c'était
122 000 $. Ça a été dit. Ça a même plus qu'été dit, ça a été budgété
à l'intérieur de leur plateforme du côté de la CAQ. Bien, le 18 septembre dernier, le premier ministre a laissé
savoir candidement, et je vais quand même le citer : «...j'ai été
ministre de l'Éducation pendant trois ans puis je peux vous dire [quelque] chose :
en moyenne, [...]une classe au Québec, ça
fait longtemps que ça coûte autour de 800 000 $...» Fin de la
citation. C'est le premier ministre qui a dit ça. Le chat est sorti du sac, Mme la Présidente. Le premier ministre
savait, savait qu'il ne disait pas la vérité... pardon, je m'excuse, je
me fais moi-même... je m'excuse, donc il a dit le contraire de la vérité aux
Québécois, et je trouve ça déplorable. Puis
de la façon dont il l'a dit candidement ici, dans le salon bleu, c'est qu'il le
savait. Le premier ministre aurait pu, aurait dû laisser entendre qu'il
le savait et que pour pouvoir faire passer le tout plus facilement auprès des
Québécois, disons qu'il a joué un peu avec les chiffres.
Notre
ministre de l'Éducation, qui aime faire des imitations, hein, vous le savez, en
Chambre... Vous l'avez vu, j'imagine
que tout le monde l'a vu, il a un
certain talent, en tout cas, dans l'imitation, certes, pour faire
M. Poudrier. On l'a vu ici le
faire deux fois, là, au salon bleu. Mais savez-vous c'est quoi, la différence
entre le ministre de l'Éducation puis M. Poudrier, Mme la
Présidente? M. Poudrier, lui, il
savait compter. Clairement, ce n'est pas la force du ministre de
l'Éducation parce que de 122 000 $ qu'on nous disait en campagne électorale que c'était pour coûter par classe, on est montés à 800 000 $, c'est le premier ministre qui l'a dit, puis après ça on est montés à 1 million de dollars par classe, puis après ça à 1,3 million de
dollars par classe. Puis savez-vous
le dernier chiffre? 2 millions
de dollars par classe. C'est 16 fois
plus que ce qu'on avait budgété, du côté de
la CAQ, par classe. Ça, là, ce n'est pas de faire à peu près
de l'improvisation, là.
Je veux juste
vous rappeler, Mme la Présidente, qu'en plus de ne pas savoir calculer, ils n'ont
pas été capables de voir qu'il y avait un manque de main-d'oeuvre au Québec.
5 200 classes étaient donc promises du côté de la CAQ, 5 200 professeurs nécessaires,
minimalement, là. C'est assez simple, là. Bien, savez-vous quoi? Ils ne sont
pas capables d'y arriver, on n'a pas
de professeurs, on n'a pas de classes. On fait quoi? Bien, on va continuer. On
va continuer à en mettre puis on va
continuer quand même sur un projet
de loi qui n'a ni queue ni tête.
C'est de l'entêtement, ça, Mme la
Présidente.
• (17 h 50) •
Le taux de
fréquentation. Aïe! Non, nous autres, on était certains qu'on avait fait les
devoirs, du côté de la CAQ, en
disant : Il va y avoir beaucoup de fréquentation. Eux qui aiment tant les
sondages, là, c'est plus de 65 % des parents qui préfèrent les CPE
aux maternelles quatre ans. Bien, savez-vous quoi? On est passés d'une
fréquentation qui serait autour de
90 %... Parce que rappelons-nous une chose, le premier ministre a mis son siège sur l'universalité de la maternelle quatre ans, 5 200
classes. Là, on est passés du taux de fréquentation de 90 % à moins de
50 % parce que savez-vous quoi, Mme la Présidente? Les parents, là,
ils préfèrent les CPE. Les parents ne veulent pas nécessairement des maternelles
quatre ans. Quand on continue à réfléchir, à dire : O.K.,
5 200 classes, là le ministre, il a dit : Non, non, non, ce ne sera pas
ça, on va diviser par deux, on va être à
2 600 classes environ. Puis là, après ça, il a dit : Non, non,
non, on va rediviser par deux, parce
que, là, on est rendus à 1 256 classes, 1 256 classes. Savez-vous
quoi? Le premier ministre, là, qui a mis son siège en jeu pour
l'universalité, là, bien, il vient d'échouer, il vient d'échouer.
Moi, je veux
faire un coup de chapeau à ma collègue de Saint-Laurent, qui a été capable de poser des questions,
des questions qui devaient être posées, parce que c'est aussi
ça, le travail de l'opposition. Puis savez-vous quoi? On a vu clair dans le jeu grâce aux questions
de ma collègue de Saint-Laurent. Alors, chère collègue, bravo pour tout le
travail, toutes les heures, mais
surtout il fallait être patiente parce que ce n'était pas facile d'avoir des
réponses. Bravo pour votre travail! Bravo aussi à ma collègue de
Westmount—Saint-Louis!
Donc, si on fait un petit... en tout cas, si on
revient rapidement, là, on récapitule, on se dit qu'on a pris des engagements, qu'on savait qu'on avait mal évalué,
on savait qu'on était pour être plongés dans une pénurie de main-d'oeuvre, mais
on a dit : Ce n'est pas grave, on va le faire quand même.
On a dit que ça devait être universel avec 5 200 classes, on est rendus à 1 200 classes. Bref, on n'a
même pas de plan de déploiement, Mme
la Présidente. Pour toutes ces
raisons-là et encore plusieurs,
là, on va être plusieurs à vouloir se faire entendre aujourd'hui, bien, vous comprendrez qu'on va voter contre ce projet de loi.
Et, bien qu'il y ait eu des avancées, honnêtement, il ne serait pas trop tard,
il serait tout à fait responsable, du côté gouvernemental, de dire : On va
prendre un peu de temps pour bien faire les choses. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. La parole est maintenant à Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, à mon tour... Après l'éloquence de mes collègues, c'est bien difficile de prendre la parole, mais je vais
le faire avec grand plaisir parce que c'est important de ramener les choses, l'état de situation, le projet des maternelles quatre ans et l'improvisation du gouvernement. Alors, oui, ça me fait grand plaisir de prendre à mon tour le micro pour parler
de la prise en considération du projet
de loi n° 5 pour le déploiement
universel des maternelles quatre ans. Ma collègue députée de Verdun a rappelé, à juste
titre, que le Parti libéral n'est pas contre le déploiement des maternelles
quatre ans, puisque l'ex-collègue qui était ministre de l'Éducation a permis le
déploiement de maternelles quatre ans en milieu défavorisé.
Alors, on est
devant ce projet, ce projet pour l'ensemble des jeunes du Québec, des enfants, du mur-à-mur
improvisé sans vision, du mur-à-mur qui est sans respect de ce que les parents
ont à dire. Il y a eu un sondage — on en a largement
parlé — auprès
des parents de la commission scolaire de Laval. Alors, sans respect pour eux, sans
respect pour les CPE, sans respect
pour les commissions scolaires... Et, plus on s'approche de l'adoption
du projet de loi, Mme la
Présidente, plus on vit un triste
jour pour nos tout-petits du Québec, un bien triste jour pour leurs futurs
succès scolaires. Steve Fortin écrivait dans Le Journal de
Québec : «L'entêtement idéologique du gouvernement dans le dossier des
maternelles quatre ans est tout simplement inquiétant.» Je pense que ces mots résument
très, très bien les débats des derniers mois.
À mon tour, Mme la Présidente, de souligner,
avec toute mon admiration, le travail exceptionnel de notre porte-parole et députée de Saint-Laurent, qui non seulement a eu à affronter vents et marées, pour ne pas
dire un tsunami, mais elle a vraiment,
avec beaucoup, beaucoup de ténacité, beaucoup d'argumentaires et beaucoup
de volonté... de ramener le principal
enjeu du déploiement des maternelles
quatre ans : nos tout-petits de
quatre ans au Québec. Elle l'a fait avec toute cette détermination qu'on lui connaît à nommer l'inacceptable
entêtement du ministre, l'improvisation au budget, l'improvisation du déploiement, l'improvisation sur la qualité
des services, et j'en passe, parce
que, bien sûr, on l'a dit et
on doit le redire, il n'y avait pas de plan.
Nous avons
tous été témoins des chiffres du financement des maternelles en montagnes russes. On est
rendus, bien sûr, au montant impressionnant qu'on a nommé. Mais je
vous dirais que, de façon toute personnelle, la palme d'or de l'aberration revient toutefois au premier ministre, qui a
affirmé en cette Chambre qu'il n'avait pas inclus le coût des corridors et des espaces publics dans le budget
du projet. Nous avons tous été témoins du non-partenariat avec les CPE et son ministre de la Famille. Nous avons tous été témoins du débat essentiel
lié au ratio des éducateurs et la parité nécessaire entre ce ratio et
celui des CPE.
Merci à notre
collègue porte-parole qui a permis des avancées qui ont déjà été nommées, des
valeurs très chères à nos coeurs,
nous, au Parti libéral, que sont de prendre en considération la réalité
des jeunes handicapés, de prendre en considération
la qualité de cette éducation auprès des jeunes avec le propos sur les ratios.
Et bien sûr, comme mon collègue de Marquette, je serai très curieuse de
voir la reddition de comptes du ministre.
Alors, pourquoi la maternelle quatre ans? J'ai toujours,
après ces mois de réflexion et de débats, à chercher la réponse. Bien sûr, bien
sûr, on dit : Pour la réussite éducative, parce que la maternelle quatre
ans, ça sera la panacée universelle pour
l'avenir des jeunes. Et là, Mme la
Présidente, je sens que je vais
m'emporter, alors je vous préviens, mais je vais tenter de contrôler un peu mes ardeurs parce que ça me tient
bien à coeur quand on parle de réussite éducative. Et dire que le premier ministre a pris le
pari de mettre son siège en jeu au nom de la réussite éducative. Mais la
réussite éducative, c'est à tous les
âges. Et, quand je me promène dans mon comté et que j'en rencontre à tous les
ans, les directeurs d'école primaire,
et que je jase avec eux, vous savez, la réalité de leur quotidien, c'est de se
demander le matin s'ils vont avoir
assez d'enseignants. C'est ça, la réalité au quotidien. Et à travers
le Québec, là, quand on parle de réussite éducative puis qu'on est juste focussé sur les maternelles quatre ans, bien, pendant ce temps-là, il y a des directeurs
d'école qui sont obligés
de trouver une solution miracle pour assurer non pas l'éducation et le cursus
scolaire aux enfants, mais la surveillance des enfants dans la classe. Et ce sont, au quotidien, des milliers
d'enfants qui n'ont pas accès à la matière qui doit leur être enseignée. Ça, c'est de la réussite éducative
aussi, ça, c'est la pénurie des enseignants,
et ça, on n'est pas en train de le régler.
Mais
qu'est-ce que je suis en train de dire là? Mais oui, on a une solution. Mais
oui, le ministre a pensé à tout ça, la
pénurie. Alors, il a fait un règlement, un règlement pour aller chercher des
éducatrices dans le réseau des services de garde. Bravo! Il le faut pour être capable d'ouvrir des classes de
maternelle quatre ans, déshabiller un pour habiller l'autre, on connaît bien. Ou, comme le titre Le
Devoir : Les CPE crient au pillage des ressources, et des
régions comme l'Outaouais, l'Estrie,
la Côte-Nord, Québec ont déjà de la difficulté à maintenir les ratios à cause
des problèmes de recrutement, mais c'est
la solution pour le ministre de l'Éducation. D'ailleurs, je pense que ce serait
une bonne idée qu'il puisse parler un peu
à son collègue ministre de l'Emploi, qui, lui, a quand même un plan d'action
pour la main-d'oeuvre. Alors, je pense que, quand vient le temps de
parler de pénurie, il faudrait qu'il y ait, encore une fois, un plan, qui n'est
pas là.
Vous savez,
quand on travaille à la réussite éducative, on se soucie de ça, on se soucie de
l'étape scolaire du jeune à travers
le primaire, à travers le secondaire et pour la suite. J'ai nommé le manque
d'enseignants, bien sûr, dans les écoles, mais je veux aussi nommer les jeunes qui, au secondaire, et c'est un
phénomène très, très important au Québec, les jeunes garçons qui quittent le secondaire au secondaire IV sans diplôme.
Le marché du travail étant ce qu'il est, Mme la Présidente, ces jeunes sont sollicités et vont sur le marché du travail. C'est une cohorte de milliers de jeunes du Québec
dont on ne se soucie pas et qui
débutent leur métier, leur carrière et leur parcours professionnel sans aucun
diplôme entre les mains. Alors, ça, c'est la réussite éducative aussi,
et on ne s'en soucie pas...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée, je suis obligée de vous couper, compte tenu de l'heure,
mais, si vous n'avez pas fini votre intervention, vous allez pouvoir la
reprendre à la reprise des travaux.
Ajournement
En conséquence, j'ajourne les travaux jusqu'à
demain, jeudi 24 octobre 2019, 9 h 40.
(Fin de la séance à 18 heures)