(Treize heures quarante et une
minutes)
Le Vice-Président (M. Picard) :
Bon lundi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous débutons nos travaux à la rubrique Déclarations
des députés. M. le député de Saint-Jean.
Féliciter
Mme Véronique Tougas, nommée Personnalité d'affaires de l'année
par la Chambre de commerce et de l'industrie du Haut-Richelieu
M. Louis Lemieux
M. Lemieux :
Merci, M. le Président. La CCIHR, la Chambre de commerce et d'industrie du
Haut-Richelieu, tenait ce printemps sa 55e soirée gala des prix
excellence, qui est toujours un grand événement, et sachez que les
organisateurs se sont encore dépassés cette année.
Le clou de la
soirée est toujours la nomination de la Personnalité d'affaires de l'année. Je
veux donc saluer celui qui complétait son règne, en quelque sorte, Steve
Trinque, de l'agence totale MXO, et féliciter celle qui à son tour va incarner l'entrepreneuriat et le dynamisme
économique de notre région. Il s'agit de Mme Véronique Tougas, qui est la
présidente du Groupe Cambli, une entreprise familiale qui fabrique des camions
blindés et des véhicules spécialisés. Et il
est pertinent d'ajouter, je pense, que Mme Tougas est aussi la présidente
du conseil économique du Haut-Richelieu, qui vient d'ailleurs de faire peau neuve, pour ainsi dire, en devenant
NexDev, à qui je souhaite donc longue vie de même qu'une excellente
année, à notre nouvelle personnalité d'affaires du Haut-Richelieu, Véronique
Tougas.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Mille-Îles.
Souligner le
50e anniversaire de l'Escadron de cadets de
l'Aviation royale du Canada 784 Saint-Vincent-de-Paul
Mme Francine
Charbonneau
Mme Charbonneau :
Merci, M. le Président. M. le Président, je suis fière de souligner le
50e anniversaire de la fondation de l'Escadron de cadets de
l'Aviation royale du Canada, le 784 de Saint-Vincent-de-Paul.
Le
17 avril 1969, l'escadron 784 prenait place auprès des jeunes de
Saint-Vincent-de-Paul de Laval. Depuis, nos jeunes travaillent leur confiance en soi, leur autodiscipline ainsi que
leur leadership. Ces jeunes de 12 à 18 ans participent à diverses activités dans la communauté et
développeront leurs compétences et aptitudes dont ils auront besoin pour leur avenir.
Je rends hommage tout particulièrement à
M. Robert Bergeron, capitaine Alain Thibodeau ainsi que tout le personnel, les bénévoles et les parents qui ont
oeuvré auprès de l'escadron 784 Saint-Vincent-de-Paul au fil des années.
Par votre dévouement exceptionnel, vous avez contribué au mieux-être de la
collectivité et de notre communauté. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Je cède la parole à Mme la députée de Berthier.
Souligner le
70e anniversaire de l'Association des hôtels du Grand Montréal
Mme Caroline Proulx
Mme Proulx
(Berthier) : Merci, M. le Président. À l'occasion du
70e anniversaire de l'Association des hôtels du
Grand Montréal, j'aimerais souligner le travail remarquable de cette
organisation.
Depuis maintenant sept décennies, cette
association et ses membres jouent un rôle de premier plan pour positionner notre métropole en tant que
destination touristique incontournable et de calibre international. Je salue
leur leadership, leur détermination à se réinventer sans cesse et à
toujours maintenir les plus hauts standards de qualité de services. Ils assurent ainsi le rayonnement de
notre industrie hôtelière et, par le fait même, font la fierté non seulement
des Montréalais, mais de tous les Québécois.
Alors, bon
anniversaire à l'Association des hôtels du Grand Montréal pour ce 70 ans
d'excellence! Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Maintenant,
je cède la parole à M. le député de Nelligan.
Rendre
hommage à Mme Debra «Debbie» Magwood, fondatrice et
directrice générale du Centre de bien-être de l'Ouest-de-l'Île
pour personnes atteintes de cancer
M. Monsef Derraji
M. Derraji :
Merci, M. le Président. Après avoir triomphé à deux reprises du cancer, Debbie
Magwood fondera le Centre de
bien-être de l'Ouest-de-l'Île pour personnes atteintes du cancer, un endroit où
les personnes sont prises en charge
dans un environnement chaleureux et attentionné. En sa qualité de psychologue,
elle comprend mieux que quiconque les
réels besoins auxquels font face celles et ceux qui se battent contre le
cancer. Nichée au coeur de Nelligan, la maison jaune rayonne par l'éclat
de ses services et dessert l'ensemble de l'Ouest-de-l'Île de Montréal.
Debbie Magwood was the driving force
behind the 3-million-dollar facility in Kirkland 11 years ago. Recently, the center has been offered a new house to be launched the West
Island cancer wellness retreat center.
Mais ce qui distingue
Debbie Magwood est qu'elle a travaillé fort pour la création d'une journée
nationale pancanadienne de sensibilisation
au bien-être pour personnes atteintes du cancer, dont la première aura lieu le
26 juin prochain.
Thank you, Debbie, for all what you are
doing and keep up the great work. Nelligan believes in you and is proud of you.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, M. le député. Je cède la parole à M.
le député de Taillon.
Souligner la Semaine
québécoise des personnes handicapées
M. Lionel Carmant
M. Carmant : Merci, M.
le Président. Je suis fier de
souligner la 23e édition de la Semaine québécoise des personnes
handicapées, qui se tient du 1er au 7 juin.
Sous le thème Ensemble, bâtissons une société
plus inclusive, la semaine invite l'ensemble de la population québécoise à
poser un geste pour réduire les obstacles que peuvent rencontrer les personnes
handicapées et ainsi leur permettre de participer pleinement à la vie en société.
Notre gouvernement sera partie prenante de ce mouvement. Nous travaillons activement avec
l'OPHQ à développer une stratégie
concertée qui va permettre d'améliorer le support aux personnes handicapées et leurs familles tout au long de leur parcours de vie. Cette nouvelle stratégie
nationale va inclure une aide aux parents d'enfants handicapés mais doit
aussi inclure des programmes
pour les plus de 21 ans, que ce soit l'intégration et le maintien en
emploi, pour le maintien en milieu
scolaire ou aux activités sociocommunautaires. Le soutien apporté aux familles
et aux proches aidants d'une personne adulte handicapée est également au
coeur de nos priorités.
La semaine,
je le rappelle, sera soulignée partout au Québec. Les personnes handicapées sont une richesse dont nous ne pouvons
nous passer, et leur contribution à notre société est essentielle. Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. La parole est à M. le député de Rosemont pour
la prochaine déclaration.
Souligner le
20e anniversaire du Technopôle Angus SEC
M. Vincent Marissal
M. Marissal : Merci, M.
le Président. Il y a
un peu plus de 20 ans, le CP abandonnait ses activités aux Shops Angus
dans Rosemont, laissant derrière un
immense site dévasté, dévalorisé et surtout lourdement contaminé. En
20 ans, la Société de développement Angus a réussi à transformer cette zone dévastée en un des plus beaux
et des plus recherchés quartiers de Montréal.
Avec la seconde phase de développement du technopôle, la SDA lance un projet unique d'écoquartier qui commence
à prendre forme et qui sera complété dans cinq ans. Concrètement, c'est
360 unités résidentielles, dont 20 % en logements sociaux et
60 % en logement abordable, 45 000 mètres carrés d'espaces de
bureaux et commerces qui accueilleront plus de 1 500 personnes,
une école moderne et essentielle ainsi que deux CPE. J'insiste sur «école»
et «essentielle».
Chapeau,
donc, à Christian Yaccarini et à son équipe, qui poursuivent le travail de développement! On ne fabrique plus de train
aux Shops Angus, mais ce quartier est assurément devenu une locomotive pour
l'est de Montréal. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. La prochaine déclaration est pour M. le député de Beauce-Sud.
Rendre hommage à
Mme Joanne Boivin pour ses 40 ans de carrière
dans le monde des médias et des communications
M. Samuel Poulin
M. Poulin : Merci beaucoup, M. le
Président. J'aimerais souligner ce
matin un élément très rare dans le paysage radiophonique québécois, soit 40 ans de radio pour Mme Joanne
Boivin, une résidente de la région de Chaudières-Appalaches.
Elle
a fait ses débuts à la radio au Saguenay—Lac-Saint-Jean, à CJAB, avant de se joindre à une
radio en Outaouais et, finalement, à
Québec, à CHIK FM, aujourd'hui Énergie 98,9. Elle enfile les
émissions à différentes antennes, dont, entre autres, le FM 93 et, bien
entendu, pendant 22 ans, à CITF Rock Détente. Elle donne le ton à la
station de radio de Québec et devient
la référence de bien des auditrices et des auditeurs pendant de nombreuses
années. Aujourd'hui, elle est animatrice à M FM 102,9.
Elle n'a jamais hésité à s'impliquer dans de
nombreuses causes, dont la lutte au cancer du sein et le YMCA. Humble, dévouée,
elle transmet sa passion de la musique, de la culture mais surtout sa passion
de la radio à la relève radiophonique au Québec.
Alors, longue
vie à Joanne Boivin! Merci pour ces nombreuses heures radiophoniques et à très
bientôt. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Je cède la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.
Souligner le
50e anniversaire de l'organisme Carrefour Le Moutier
Mme Catherine
Fournier
Mme Fournier :
M. le Président, c'est cette année que le Carrefour Le Moutier fête ses
50 ans d'existence au sein de la communauté longueuilloise.
Basé dans
le secteur du métro Longueuil depuis sa fondation, le Carrefour constitue un
lieu d'aide et de ressourcement pour
toute personne vivant un moment difficile ou une période de transition. En plus
d'être une oasis d'écoute, d'information et de référence, l'organisme offre différents services d'accueil aux
nouveaux arrivants et a mis en place en 2006 le réseau Sentinelles, une
alternative citoyenne à la prévention de la détresse.
Depuis un an,
le Carrefour est également la pierre angulaire d'un comité formé afin de
travailler sur un cadeau à offrir à
la communauté dans le cadre du 50e. Portant le nom de maison d'accueil et basé
au coeur du futur centre-ville de Longueuil,
ce lieu regrouperait les locaux de différents autres organismes et un CPE, en
plus d'offrir des lieux de rencontre et d'ancrage pour les citoyens. Je
tiens d'ailleurs à réitérer mon appui à ce projet structurant.
En terminant,
en mon nom et en celui de mes concitoyens de Marie-Victorin, je remercie
l'équipe de travail, le conseil d'administration de même que tous les
bénévoles pour le travail accompli au fil des ans. Merci.
• (13 h 50) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Je cède la parole à Mme la députée de Montarville.
Souligner le
40e anniversaire du Centre de conservation du Québec
Mme Nathalie Roy
Mme Roy : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, j'invite l'Assemblée à se joindre à moi
aujourd'hui pour souligner le 40e anniversaire du Centre de conservation
du Québec, le CCQ.
En 1979, le ministère des Affaires culturelles
constituait une équipe de professionnels de la restauration du patrimoine. Cette équipe se voyait confier un
mandat primordial, soit assurer l'intégrité d'éléments précieux du patrimoine
québécois au profit des générations futures.
Ce groupe est devenu le Centre de conservation du Québec, une institution
reconnue mondialement, M. le Président.
Jour après jour, son équipe accumule les petits
miracles afin que les oeuvres et témoins du patrimoine nous livrent un pan de notre histoire. Pensons, entre
autres, au sauvetage délicat et spectaculaire du rempart palissadé de Beaucours,
dans le Vieux-Québec. C'était l'automne dernier.
Je tiens à souligner aussi le civisme des
propriétaires publics et privés qui confient au CCQ leurs biens patrimoniaux.
Au nom de
tous les Québécois, je remercie l'équipe du CCQ pour leur expertise
unique et leur dévouement au service de notre patrimoine. Bon 40e!
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Mme la députée de Saint-Laurent.
Souligner le succès du
35e Gala Alpha de la Chambre de commerce
et d'industrie de Saint-Laurent—Mont-Royal
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Merci,
M. le Président. Le 23 mai
dernier, la Chambre de commerce et d'industrie de Saint-Laurent—Mont-Royal organisait la 35e édition du Gala
Alpha. Cette année, le choix du thème était la persévérance, une valeur
fondamentale qui est le terreau de la réussite de chaque entreprise québécoise.
Durant cette soirée, une vingtaine de prix
furent remis, appuyant la réussite d'entreprises dans, notamment, le commerce de détail, la manufacture de produits
industriels ainsi que la recherche et le développement. La réussite de ces
entreprises mérite d'être célébrée, car elle
est le moteur d'une économie qui se porte bien, qui permet à des millions de
travailleurs québécois d'améliorer leur niveau de vie.
Toutes mes
félicitations à la Chambre de commerce et d'industrie de Saint-Laurent—Mont-Royal et à toutes les personnes qui
ont participé à l'organisation de cette soirée mémorable! Félicitations à vous
tous!
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Cela met fin
à la rubrique Déclarations de députés.
Et je suspends les
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
13 h 52)
(Reprise à 14 h 2)
Le Président :
Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir. Bon début de semaine à toutes et à tous.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation
de projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet :
Merci beaucoup, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article b,
s'il vous plaît.
Projet
de loi n° 203
Le
Président : À l'article b du feuilleton, j'ai reçu le
rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 203, Loi concernant
l'établissement d'un régime fiscal particulier pour la Corporation de gestion
du port de Baie-Comeau. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des
projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport.
En
conséquence, M. le député de René-Lévesque présente le projet de loi d'intérêt
privé n° 203, Loi concernant l'établissement d'un
régime fiscal particulier pour la Corporation de gestion du port de
Baie-Comeau.
Mise
aux voix
Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi
à la Commission de l'aménagement du territoire
M.
Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le
projet de loi d'intérêt privé n° 203, Loi concernant l'établissement d'un régime fiscal
particulier pour la Corporation de gestion du port de Baie-Comeau, soit renvoyé pour consultation et étude détaillée à la
Commission de l'aménagement du territoire et que la ministre des Affaires
municipales et de l'Habitation soit membre de ladite commission pour la durée
de ce mandat.
Mise
aux voix
Le Président :
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté.
Il n'y a pas de dépôt
de documents.
Dépôt
de rapports de commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission
des institutions et député de Richmond.
Étude
détaillée du projet de loi n° 19
M.
Bachand : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la
Commission des institutions qui, le 31 mai 2019, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de
retraite des membres de l'Assemblée
nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le
Parlement du Canada. La commission a adopté le texte du projet de loi
sans amendement. Merci.
Le Président : Ce rapport est
déposé.
Dépôt
de pétitions
À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député
de Jonquière.
Rembourser les trop-perçus par
Hydro-Québec
M.
Gaudreault : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une
pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
13 590 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du
Québec.
«Les faits invoqués sont les
suivants :
«Considérant que, depuis 2005, les consommateurs
québécois ont payé près de 1,7 milliard de dollars de trop-perçus à la
société d'État Hydro-Québec;
«Considérant
que, depuis 2017, un mécanisme existe pour ne retourner que 50 % des
trop-perçus aux consommateurs;
«Considérant
l'engagement de la Coalition avenir Québec de rembourser les trop-perçus
lorsqu'ils étaient dans l'opposition;
«Considérant
les interventions répétées en Chambre par la députée de Saint-Hyacinthe
réclamant le remboursement des trop-perçus;
«Considérant
la pétition signée par plus de 47 000 pétitionnaires présentée en
2017 au ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles de l'époque
par la députée de Saint-Hyacinthe;
«Considérant
que la Loi sur la Régie de l'énergie prévoit la possibilité de se doter d'un
mécanisme afin de rembourser la totalité des trop-perçus aux Québécois;
«L'intervention réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons que le gouvernement du Québec donne une suite positive
aux demandes répétées de la députée
de Saint-Hyacinthe en remboursant ces trop-perçus aux Québécois et qu'il
modifie la loi afin que 100 % des trop-perçus futurs soient
retournés aux Québécois et Québécoises.»
Je certifie que cet extrait est conforme à l'original
de la pétition.
Le Président : Cet extrait de
pétition est déposé. M. le député de Laurier-Dorion.
Réformer la Régie du logement
M.
Fontecilla : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une
pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
1 530 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du
Québec.
«Les faits invoqués sont les
suivants :
«Considérant que la Régie du logement s'est
détournée de sa mission sociale;
«Considérant
que la régie est devenue une agence de recouvrement de loyer et expulse
massivement les locataires;
«Considérant
que la régie met en péril les parcs de logements locatifs et le droit au
maintien dans les lieux des locataires;
«Considérant
que la régie est de plus en plus inaccessible — fermetures de bureaux, augmentation
constante des frais d'ouverture [des dossiers], procédures complexes,
manque d'assistance des juges;
«Considérant
que la régie entend les causes dans des délais inacceptables, allant souvent
au-delà de la durée d'un bail;
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous,
soussignés, [soussignées,] demandons au gouvernement du Québec une réforme de
la Régie du logement pour :
«Que la régie cesse l'expulsion massive de
locataires pour non-paiement de loyer en favorisant des solutions
alternatives — entente
de paiement;
«Que la régie
assure réellement la protection du parc [des] logements locatifs et du droit au
maintien dans les lieux des locataires;
«Que la régie contrôle véritablement les loyers;
«Que les
causes urgentes soient entendues dans un délai de 72 heures et que toute
autre cause soit entendue par ordre d'ouverture dans un délai maximum de
trois mois;
«Que les services de la régie soient gratuits et
facilement accessibles partout au Québec;
«Que le service d'information de la régie soit
adapté à la vulnérabilité des ménages locataires — pauvreté, violence,
santé mentale, analphabétisme, etc.;
«Que la régie
donne pleine assistance aux locataires et que les juges facilitent la
compréhension des procédures.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition.
Le
Président : Cet extrait de pétition est déposé. J'ai reçu une
demande de M. le député de Laurier-Dorion pour la présentation d'une pétition non conforme. Y a-t-il consentement pour
la présentation de cette pétition? Consentement. M. le député de
Laurier-Dorion.
M.
Fontecilla : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une
pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
8 771 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du
Québec.
«Les faits invoqués sont les
suivants :
«Considérant
que la Régie du logement s'est détournée de sa mission sociale;
«Considérant que la
régie est devenue une agence de recouvrement de loyer et une machine à expulser
les locataires;
«Considérant que la
régie met en péril le parc de logements locatifs et le droit au maintien dans
les lieux des locataires;
«Considérant que la
régie est de plus en plus inaccessible — fermetures de bureaux,
augmentation constante des frais d'ouverture [des dossiers], procédures
complexes, manque d'assistance des juges;
«Considérant que la
régie entend les causes dans des délais inacceptables, allant souvent au-delà
de la durée d'un bail;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, [soussignées,] demandons au gouvernement du Québec une
réforme de la Régie du logement, notamment :
«Que
la régie cesse l'expulsion massive de locataires pour [le] non-paiement de
loyer en favorisant des solutions alternatives — entente
de paiement;
«Que
la régie assure réellement la protection du parc de logements locatifs et du
droit au maintien dans les lieux des locataires;
«Que la régie
contrôle véritablement les loyers;
«Que
les causes urgentes soient entendues dans un délai de 72 heures et que
toute autre cause soit entendue par ordre d'ouverture dans un délai
maximum de trois mois;
«Que les services de
la régie soient gratuits et facilement accessibles partout au Québec;
«Que le service d'information
de la régie soit adapté à la vulnérabilité des ménages locataires — pauvreté,
violence, santé mentale, analphabétisme, etc.;
«Que
la régie donne pleine assistance aux locataires et que les juges facilitent la
compréhension des procédures.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
• (14 h 10) •
Le
Président : Cet
extrait de pétition est également déposé. J'ai reçu une demande de Mme la députée de Gaspé pour la présentation
d'une pétition non conforme. Y a-t-il consentement pour la présentation de cette
pétition? Consentement. Mme la députée de Gaspé.
Hausser
les budgets alloués pour intégrer des intervenants
en loisirs dans les résidences pour personnes aînées
Mme
Perry Mélançon : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
420 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les
faits invoqués sont les suivants :
«Considérant
que, faute de budget dans les hébergements de personnes aînées, plusieurs
n'ont pas d'intervenant en
loisirs pour offrir des activités sociales adaptées aux besoins des personnes
aînées;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, de concert avec la FADOQ région Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, réclamons une hausse des budgets alloués pour intégrer des intervenants en loisirs dans les hébergements pour personnes aînées afin de respecter
leurs droits fondamentaux dans leur intégrité, leur choix et leurs habitudes de
vie.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Cet extrait de pétition est également déposé.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
violation de droit ou de privilège.
Questions
et réponses orales
Nous en sommes maintenant
à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef
de l'opposition officielle.
Négociations du gouvernement avec ses partenaires économiques
et politiques
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, déjà, en campagne
électorale, le chef de la CAQ se
qualifiait de premier ministre
économique. Il se décrit d'ailleurs lui-même comme étant quelqu'un
qui fait des deals. On attend toujours d'ailleurs de voir ces premiers deals comme tels. Dans le dossier du tramway de Québec,
on a patienté pendant des mois et on attend toujours ce deal qui sera
conclu avec la ville de Montréal. En novembre dernier, le chef de la CAQ a rendu
visite au premier ministre
de l'Ontario pour parler d'hydroélectricité et, comme il
savait que Doug Ford n'était pas très chaud à l'idée de faire un deal, il a
offert 50 % des emplois à des travailleurs ontariens pour la construction de barrages au
Québec. Ça n'a rien changé au refus de l'Ontario, mais ça nous
donne l'heure juste sur la façon de négocier du chef de la CAQ. Lors de votre passage à New York, vous avez offert
l'électricité du Québec à rabais, même, selon certaines rumeurs, en bas du
prix coûtant. Vous promettez de multiplier
les investissements privés, mais on attend toujours. Le seul qui a fait un deal
jusqu'à présent, M. le Président, c'est le nouveau président d'Investissement
Québec, qui, lui, a doublé son salaire.
Le
premier ministre peut-il avouer qu'en matière économique, actuellement, son
gouvernement nage en pleine improvisation?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président,
toute une macédoine qu'on a en ce lundi après-midi!
Le tramway de
Québec, bon, j'attends toujours les propositions du Parti libéral.
Actuellement, il y a des discussions, effectivement,
avec la ville de Montréal pour qu'on puisse utiliser des fonds dans le fonds
fédéral de 5,2 milliards. Je pense, c'est la meilleure alternative pour régler ce problème-là. Je ne sais
pas si les libéraux ont le début du commencement d'une autre solution.
Concernant
New York, M. le Président, c'est un dossier qui est complexe. Il faut savoir
qu'il y a un intermédiaire, pour
l'instant, qui s'appelle Blackstone, qui a acheté une compagnie qui s'appelle
TDI. Actuellement, dans le prix qui serait facturé à la ville de New
York, il y aurait plus de la moitié du prix qui viendrait de la rémunération de
celui qui construira la ligne de
transmission, qui est Blackstone. Donc, on est en train de voir si on peut
réduire la rémunération qui est donnée à Blackstone ou de regarder
quelqu'un d'autre qui pourrait construire cette ligne.
Pour ce qui
est du prix qui est facturé par Hydro-Québec, ça sera un prix qui sera
comparable à ce qui a été négocié au
Massachusetts. Ça amènerait 800, 900 millions de dollars de plus de
revenus pour le gouvernement du Québec. Moi, je trouve que ça vaut la
peine de faire des efforts. Et actuellement, bien, je rappelle que le
gouvernement libéral s'est retrouvé, avec
Hydro-Québec, en surplus, puis on a jeté pour plus de 700 millions
d'électricité l'année dernière à cause des mauvaises décisions du Parti
libéral.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M. Arcand : Je
dois vous dire que nous, on a fait une première entente avec l'Ontario. Dans le
cas de votre gouvernement, vous avez
déclaré, à l'issue de votre conseil général, là, sur l'économie verte, vous
avez déclaré que vous alliez proposer à Doug Ford un deal qu'il ne
pourra pas refuser en matière d'hydroélectricité.
Est-ce que
vous pouvez nous donner plus de détails sur cette offre exceptionnelle? Est-ce
que, cette fois-ci, vous allez
offrir 100 % des emplois aux
Ontariens?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M.
Legault : Oui. Quand on parle de deal, moi, c'est plus fort que moi,
je pense toujours au deal où le gouvernement
libéral a donné 1 milliard de dollars de trop par année aux médecins
spécialistes. C'est le pire deal que j'ai entendu dans toute ma carrière
politique.
M. le
Président, pour ce qui est de l'Ontario, on sait que l'Ontario s'apprête à
investir 20 milliards de dollars pour rénover des centrales nucléaires à un coût qui serait supérieur à la
construction d'un nouveau barrage et d'une nouvelle ligne de transmission Québec-Ontario. Donc, je
continue à croire que les Ontariens vont souhaiter avoir une énergie propre,
une énergie qui coûte moins cher...
Le Président : En terminant.
M. Legault : ...et, oui, je vais
continuer de me battre pour défendre notre proposition.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, dans
la récente mission du premier ministre à Washington, il a rencontré le P.D.G.
d'Alcoa. Alcoa, c'est le principal
investisseur de l'aluminerie ABI à Bécancour. On sait que vous voulez vous
mettre les deux mains dans le dossier.
Est-ce que vous avez réussi à obtenir un deal
pour régler le conflit de travail chez ABI?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, on a appris une bonne nouvelle en fin de
semaine : Alcoa a réglé une convention collective de six ans pour 700 employés à Baie-Comeau. On espère
que les gens de Bécancour vont être aussi ouverts. Mais moi, je suis très surpris de voir que le
Parti libéral défend la position d'un syndicat qui demande
10 000 heures de libération
syndicale, qui demande des salaires plus élevés, qui demande que la
contribution de l'employeur, de 60 %, soit augmentée. Raymond
Bachand avait raison, le Parti libéral n'est plus le parti de l'économie.
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand :
Le chef de la CAQ avait dit d'ailleurs en campagne électorale qu'une fois qu'il
serait premier ministre, il arracherait des
pouvoirs au fédéral. Vendredi, le premier ministre du Canada a annoncé qu'il
contournerait Québec pour négocier directement avec les villes.
Est-ce que vous
pensez que laisser le fédéral négocier avec les villes, c'est un bon deal pour
les Québécois?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, ma collègue la ministre de la Justice a
négocié une belle entente pour que le Québec participe à la nomination des juges, ce que n'avait pas réussi le Parti
libéral. Aujourd'hui, ma collègue responsable de la Métropole a annoncé
la contribution fédérale pour la rénovation du tunnel La Fontaine.
M.
le Président, on ne laissera pas le fédéral aller directement négocier avec les
municipalités, on va y aller selon les priorités
des Québécois. Le gouvernement des Québécois sait ce qui est le mieux pour les
Québécois, on n'a pas besoin du fédéral pour décider à notre place.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Rémunération
du président-directeur général d'Investissement Québec
Mme
Dominique Anglade
Mme
Anglade : Merci, M. le Président. Alors, dans le dossier d'Investissement
Québec, on a assisté à beaucoup de
tergiversations depuis l'arrivée du gouvernement actuel. Alors, on a eu un P.D.G. qui a été absent
de la période de crédits. On a maintenant
deux P.D.G. qui sont payés, un qui travaille, l'autre qui ne travaille pas. On
a la Commissaire à l'éthique qui doit se pencher sur des enjeux avec Investissement Québec, avec le
ministre de l'Économie. Et, lorsqu'il y a eu la nomination du P.D.G., il
y a eu également une augmentation de salaire importante : la rémunération
est passée de 500 000 $ à
1 million de dollars. Or, lorsque l'on lit le rapport de la Vérificatrice
générale, on constate que la proposition qui est faite pour la
rémunération du P.D.G. va à l'encontre des recommandations de la Vérificatrice
générale.
Alors, comment est-ce
qu'on peut réconcilier les deux? La question se pose, et je demande au président
du Conseil du trésor s'il peut y répondre.
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M.
Christian Dubé
M. Dubé : Alors, M. le Président, ça va me faire plaisir de prendre la question de
la députée parce que, premièrement,
le rapport de la Vérificatrice générale, que nous avons eu la semaine dernière,
je l'ai dit clairement ici, en Chambre,
et je l'ai dit dans un point de presse, nous souscrivons à l'essentiel des
recommandations qu'elle a faites dans son
rapport. Donc, il y avait deux grands éléments, puis je pourrai y revenir, il y
avait toute la question de l'encadrement, où il y avait des faiblesses
qui avaient besoin d'être non seulement déclarées, mais d'être réglées, et il y
avait toute la question aussi de s'assurer que la transparence était là.
Et
je l'ai dit, je l'ai dit clairement lors de ma réponse, la semaine passée, puis
je peux le répéter, c'est quand même des
années qui sont sous le gouvernement libéral, où on a dit qu'il n'y avait pas
d'encadrement du Conseil du trésor de la bonne façon et où justement on avait besoin de plus de transparence. Je
me suis engagé à le faire, et c'est pour ça que nous allons travailler très
fort, au cours des prochains mois, sur la Loi de l'administration publique qui
va traiter la question de transparence
et la question de l'encadrement. Et ça, ça inclut ce que le ministre de
l'Économie fait en ce moment avec Investissement Québec.
• (14 h 20) •
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Dominique Anglade
Mme
Anglade : Merci, M. le Président. Alors, si je comprends bien la
réponse, il va se plier aux recommandations de la Vérificatrice générale. La portion incitative recommandée par la
Vérificatrice générale pour le salaire, c'est 21 %. Or, ce qui était attribué au nouveau P.D.G. d'Investissement
Québec, c'est 90 %. 90 % que vous avez accepté pour le nouveau P.D.G.
d'Investissement Québec, 20 %, la recommandation de la Vérificatrice
générale.
Est-ce que ça veut
dire que vous allez revoir la rémunération actuelle du P.D.G. d'Investissement
Québec?
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M.
Christian Dubé
M.
Dubé : Bon, bien, si on va un petit peu plus loin, M. le Président,
j'aimerais mentionner une chose qui est très importante. Je pense que la députée se souvient très bien qu'elle-même a
nommé la présidente du conseil d'administration d'Investissement Québec alors qu'elle était ministre au gouvernement et
que cette personne-là, que je connais très bien, Mme Leroux, a justement accepté toute la position de rémunération qui a
été recommandée par le conseil d'administration d'Investissement Québec envers le nouveau président. Alors, peut-être ma
question que je peux lui poser aujourd'hui : En quels points n'est-elle pas d'accord avec la
recommandation du conseil d'administration d'Investissement Québec?
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Dominique Anglade
Mme Anglade :
Réponse un peu facile, M. le Président.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
Mme Anglade :
Alors, M. le Président, lorsque l'on lit la réaction d'Investissement Québec
par rapport à la recommandation de la
Vérificatrice générale, on lit que «la recommandation de considérer davantage
la fonction publique dans
l'échantillon de balisage va à l'encontre des principes de définition de marché
de référence». En fait, Investissement Québec dit une chose, la
Vérificatrice générale dit autre chose.
Que va faire le
président du Conseil du trésor et de quel côté va-t-il pencher?
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M.
Christian Dubé
M. Dubé :
Alors, je vais aller encore un petit peu plus loin. Ce que j'ai expliqué...
D'ailleurs, je continue de dire que,
le rôle du gouvernement lorsqu'il nomme des personnes à des conseils
d'administration, il devrait avoir le respect de laisser ces conseils d'administration faire les bonnes choses. C'est
ce que j'ai expliqué avec Mme Leroux, qui a fait, à mon sens, un excellent travail au cours des
dernières années. Mais je pense que notre ministre de l'Économie a bien dit
qu'il voulait amener Investissement Québec
ailleurs. D'ailleurs, un projet de loi est en préparation, qui adressera
exactement ces points-là, autant sur
la transparence que sur l'encadrement des salaires qui devraient être payés à
l'intérieur d'Investissement Québec. Alors, je pense que la ministre doit être
patiente. Puis entre-temps on fait confiance au conseil d'administration
d'Investissement Québec. Merci.
Le Président :
Question principale, M. le député de La Pinière.
Processus
d'appel d'offres pour le traitement des
données informatiques gouvernementales
M.
Gaétan Barrette
M. Barrette :
M. le Président, le gouvernement veut concentrer les centres de données
informatiques. C'est une bonne idée, on voulait le faire. Un projet
d'investissement de 150 millions de dollars. Un appel d'intérêt menant à
la qualification est en cours. L'appel,
évidemment, permettra aux entreprises sélectionnées d'avoir accès à un
catalogue de contrats gouvernementaux.
Les entreprises doivent détenir la norme SOC 2, un genre de norme ISO dans
le monde des technologies de
l'information. Vendredi dernier, La Presse Affaires révélait
qu'une entreprise québécoise, parfaitement compétente et performante, allait être exclue parce qu'elle n'a pas
complété la certification SOC 2. Pourtant, le gouvernement se vante
de vouloir développer l'économie québécoise.
Puisque
les entreprises québécoises détenant cette norme sont très rares, le ministre
va-t-il faire preuve de souplesse dans ses règles pour s'assurer que
toutes les entreprises québécoises aient, en octobre, accès à ce grand marché
de 150 millions de dollars?
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
M. le Président, j'aimerais commencer à répondre à cette question-là, puis
peut-être que mon collègue pourra
compléter par la suite. Mais je voudrais juste être certain, M. le Président,
je voudrais juste être certain que le député de La Pinière ne nous amène pas sur un terrain où il recommande que la
sécurité soit mise de côté lorsqu'on va choisir les fournisseurs, parce que nous avons bien dit,
lorsque nous avons expliqué la stratégie de transformation que nous voulons faire, notamment dans le cadre des centres de
traitement informatique, que notre
plus grande priorité était de s'assurer que les fournisseurs qui seraient retenus le seraient de façon
sécuritaire et sur des critères internationaux, ce que nous avons fait
depuis le début. Alors, je repose la question au député de La Pinière :
Est-ce qu'on devrait sacrifier la sécurité des fournisseurs dans le processus
que nous avons enclenché en ce moment? Si c'est ça qu'il nous demande, je pense
qu'on devrait le savoir de sa part.
Deuxièmement, nous avons bien expliqué que le catalogue de fournisseurs qui va être
signé au cours des prochains mois va
être un processus qui va être soit biannuel ou en continu pour s'assurer que
les fournisseurs qui ne répondent pas aux critères actuellement pourront
le faire par la suite. Alors, je voudrais bien savoir...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...s'il trouve que la sécurité, c'est important.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de La Pinière.
M.
Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, la norme SOC 2, ce n'est pas une norme technologique, c'est une
norme administrative qui est
attribuée par des firmes comptables. Le ministre a écrit son devis, il peut le
changer, et, oui, il peut rendre un
élément du devis conditionnel. La solution est donc très simple : il
s'agit de permettre aux entreprises qui sont dans un processus
d'obtention de la norme SOC 2 d'être sélectionnées conditionnellement à
son obtention avant le dévoilement du catalogue. Le ministre va-t-il appliquer
cette seule solution raisonnable pour les entrepreneurs...
Le Président :
M. le ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale.
M.
Éric Caire
M.
Caire : Alors, M. le Président, il faut bien comprendre que le type 1, c'est une norme théorique.
Donc, l'entreprise fait une démonstration théorique de sa capacité à
assurer la sécurité de nos données. Le type 2 s'obtient suite à un audit. Donc, les gens qui certifient l'entreprise
sont sur place pendant six mois, vont faire un audit au quotidien pour
s'assurer que non seulement les
pratiques, mais les résultats sont conformes à l'obtention de la certification
et... à s'assurer que les données
sont bel et bien en sécurité. Donc, là-dessus, non, on ne fera pas de
compromis, parce qu'on veut s'assurer que les entreprises qui vont se
qualifier...
Le Président :
En terminant.
M.
Caire : ...seront aptes à assurer la sécurité de nos
données. Il n'y a pas de compromis à faire sur la sécurité.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de La Pinière.
M.
Gaétan Barrette
M. Barrette :
Ça tombe bien, M. le Président, parce que La Presse nous
révélait aussi que le ministre n'a pas appliqué la norme maximale de sécurité,
qui est la norme ISO 27001, mais l'a descendue plus bas pour que des compagnies québécoises aient accès à ce marché de
150 millions. N'est-ce pas extraordinaire? Au moment où on se parle,
il y a au moins une compagnie au Québec qui
est en processus d'audit pour faire ça, et, si la norme était conditionnelle
avant — parce que je le dis clairement — avant le dévoilement du catalogue, il
pourrait participer à l'offre. Vous ne développez pas les entrepreneurs
québécois.
Le Président :
M. le ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale.
M.
Éric Caire
M.
Caire : Alors, il est inexact de dire qu'on a descendu plus
bas. La norme ISO 27001, elle est très contraignante sur les résultats et sur la façon de les obtenir.
La norme SOC 2, elle est contraignante sur les résultats, mais plus souple
sur la façon de les... Mais le
résultat final, c'est que les données seront en sécurité. Ça, il n'y a
pas de compromis à faire là-dessus.
Sur
le reste, M. le Président, nous regardons, et je suis content que le député
en parle parce que, justement, on est souples sur un paquet d'éléments
pour permettre à des entreprises québécoises de se qualifier, et on va
s'assurer d'amener un élément biannuel...
Le
Président : En terminant.
M.
Caire : ...encore
là, pour permettre encore plus de souplesse, pour permettre aux entreprises
de se qualifier, mais, encore une fois, pas...
Le Président :
Question principale, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
Traitement
des données informatiques gouvernementales
confié à des entreprises étrangères
M.
Pascal Bérubé
M.
Bérubé : M. le Président, le gouvernement persiste dans sa volonté
d'envoyer des données gouvernementales sensibles chez Google, Amazon,
IBM, des entreprises qui vont pouvoir héberger ces données et les rendre
hautement vulnérables. Première erreur, nos données personnelles s'en vont chez
le privé; deuxième erreur, dans des entreprises étrangères qui vont pouvoir
stocker nos données. J'informe le gouvernement qu'avec les agences de
renseignements américaines elles pourront
accéder à nos données parce qu'avec le CLOUD Act c'est clair comme ça. Même si
elles sont hébergées au Québec par ces entreprises, ils ont accès aux
données.
Ma
question au premier ministre : Nous, on trouve que ce n'est pas une bonne
idée de faire ça, est-ce qu'il pourrait garder les informations
personnelles des Québécois au Québec, en sécurité, et renoncer à ce projet?
Le Président :
M. le ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale.
M.
Éric Caire
M.
Caire :
Bon, M. le Président, on va démystifier un paquet d'affaires. Premièrement, on
ne donne pas nos données à des entreprises
privées. On va avoir des échanges de services avec des entreprises, et, oui,
effectivement, il y aura des
entreprises américaines, je suppose, européennes, québécoises, je le souhaite
évidemment. Mais une chose est sûre, M.
le Président, c'est qu'on va faire les choses de façon à s'assurer que les
données sont en sécurité. Premièrement, ne pas accéder à la demande du
député de La Pinière, ça, c'est le premier élément.
Deuxièmement,
on va catégoriser nos données. Je rappelle au chef du troisième groupe
d'opposition que 20 % des données du gouvernement du Québec vont être
mises dans un nuage privé. Donc, les données très sensibles seront dans un nuage privé. Ça a toujours été prévu comme
ça. On parle de 80 % de nos données qui vont aller en infonuagique publique, et vous comprendrez, M. le Président,
qu'en catégorisant nos données on va s'assurer que ce qu'on met dans le nuage public, ce ne sont pas des données
extrêmement sensibles des Québécois, dont fait mention le chef du troisième
groupe d'opposition. Encore une fois, on
veut de l'efficacité, on veut de l'économie, on veut s'assurer du service le
plus efficace possible, mais...
Le Président :
En terminant.
M.
Caire :
...sans faire de compromis sur la sécurité. Il n'en est pas question.
• (14 h 30) •
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M.
Pascal Bérubé
M.
Bérubé : La question était importante, c'est pour ça que j'aurais aimé
que le premier ministre puisse nous livrer son appréciation du dossier.
Envoyer
nos données sensibles à l'étranger, ce n'est pas très nationaliste puis ce
n'est pas très prudent. Et, 20 % des mesures sensibles, j'en
prendrais 100 % des mesures sensibles et, comme le ministre veut me faire
un rappel, je rappellerais également qu'il
souhaitait, lorsqu'il était assis ici, faire une vaste enquête dans le domaine
informatique pour s'attaquer aux
contrats, aux extras, puis on dirait que sa seule présence nous dispense d'une commission d'enquête
telle qu'il réclamait. Alors, je veux lui réaffirmer que c'est important...
Le Président :
M. le ministre responsable de la Transformation numérique gouvernementale.
M. Éric Caire
M.
Caire : M. le Président, encore une fois, ce n'est pas parce
qu'on répète quelque chose qui est faux que ça va devenir vrai comme par
magie, là, hein? Les données qui sont sensibles, les données qui sont sensibles
vont être...
Le Président :
M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M.
Ouellet : M. le Président,
le député de La Peltrie a déjà joué dans ce film-là, il sait très bien
qu'on ne peut pas prêter des intentions. Il dit que mon chef dit le
contraire. S'il vous plaît, qu'il retire ses paroles.
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, le député de La Peltrie et ministre délégué à la Transformation
numérique n'a pas fait ce que prétend
le leader du troisième groupe d'opposition. Alors, il parlait en général, M. le
Président, je pense qu'il faut bien écouter les propos du collègue de
La Peltrie.
Le
Président : J'ai demandé au ministre d'être prudent, je lui
demande de prendre la parole du chef du troisième groupe d'opposition.
Poursuivez, s'il vous plaît.
M.
Caire :
M. le Président, d'abord, jamais je n'aurais prêté des intentions à qui que ce
soit quand j'étais dans l'opposition.
Non, mais, M. le Président, ce qu'il est vrai d'affirmer, c'est que les données
qui sont très sensibles seront dans le nuage du gouvernement du Québec.
Le Président : En terminant.
M.
Caire : Ce qu'il est vrai de dire, c'est que, par
l'obtention... l'exigence des normes de certification, nous assurons que...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M.
Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
M. le Président, à travers vous, je veux m'adresser aux Québécois. Toutes les
données sensibles du gouvernement du
Québec et des citoyens, votre gouvernement veut les envoyer à des entreprises
privées américaines, Amazon, Google,
IBM. Je ne trouve pas ça nationaliste, je ne trouve pas ça prudent, je trouve
que c'est une mauvaise idée, j'aimerais
ça qu'il renonce à ça au nom des données personnelles qui doivent être
protégées au Québec. Il me semble que c'est le gros bon sens.
Le Président : M. le ministre
délégué à la Transformation numérique gouvernementale.
M.
Éric Caire
M.
Caire :
Alors, je vais m'adresser aux Québécois, moi aussi. L'état actuel des choses,
c'est ça qui met à risque les données
des Québécois. C'est ça, c'est cette situation-là, la dégradation de nos
centres de traitement de l'information, la multiplication dont vous êtes, vous, les responsables, c'est à ça
qu'on va mettre fin. On va s'assurer que les données des Québécois sont gardées de façon sécuritaire, dans
des endroits qui répondent à des certifications, les plus hautes normes de certification en matière de sécurité. On ne
fera pas de compromis là-dessus, on ne fera pas de compromis non plus sur le fait que les Québécois ont le droit d'avoir
accès aux technologies à la fine pointe, ont le droit d'avoir les dernières versions des applications de
sécurité. On ne fera pas...
Le Président : En terminant.
M.
Caire : ...de
compromis sur l'efficacité, sur la sécurité et sur les économies qu'on va
faire.
Le Président : Question
principale, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Position
du gouvernement sur l'exportation
du gaz naturel de l'Alberta
Mme
Manon Massé
Mme Massé : Merci,
M. le Président. Il y a
10 jours, le premier ministre a convenu avec Dominic Champagne de mettre la science au coeur des décisions politiques.
Mais plus on avance, plus on a l'impression que le seul pacte qui compte
pour le premier ministre, c'est le pacte qu'il veut bien faire avec Jason Kenney
et l'Alberta pour écouler leur gaz sale à
l'étranger. Ce matin, plus de 160 scientifiques québécois
signent une lettre ouverte pour réfuter les prétentions écologiques du projet GNL Québec. Non seulement GNL Québec va effacer à elle
seule, en une année, la totalité des efforts du Québec en matière de réduction, non seulement le corridor
Legault-Kenney menace l'habitat de 17 espèces vulnérables menacées ou en voie de disparition, menace les
bassins versants, menace la survie même des bélugas du Saint-Laurent, mais en plus les scientifiques affirment noir sur
blanc que l'exportation du gaz de l'Alberta va renforcer la dépendance
mondiale à l'égard des combustibles fossiles et ralentir le développement des
énergies renouvelables.
Avant sa
conversion surprise aux changements climatiques, le premier ministre répétait
la cassette des lobbyistes
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, GNL, c'est un projet important. C'est un projet qui, au total,
va réduire les GES sur la planète. Et
ça, c'est important de le dire, là, parce qu'on ne peut pas laisser les gens
dire n'importe quoi sur l'impact sur
les GES, incluant le député de Jonquière. M. le Président. Le projet, en
quelques mots, c'est de prendre du gaz naturel qui vient de l'Ouest canadien, de le liquéfier à Saguenay et de
l'exporter en Europe pour remplacer du mazout et du charbon. Au total, on parle d'une réduction très importante
des émissions de GES pour notre planète. Donc, M. le Président, c'est un projet important. C'est un projet, en plus, qui
va créer des milliers d'emplois très payants en région. Pour nous, c'est
important. Je ne le sais pas pour la cheffe
de la deuxième opposition, mais, pour nous, c'est important. Donc, je voudrais
savoir pourquoi est-elle contre un projet qui va réduire les émissions de GES
sur notre planète.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme Manon Massé
Mme Massé :
Le premier ministre est très fier de dire qu'il va diminuer les GES des
Américains quand il vend notre électricité parce que les GES, ça n'a pas
de frontière. Mais j'ai une petite nouvelle pour lui. Ce qui est vrai pour l'hydroélectricité est aussi vrai pour GNL Québec.
Pire, le gaz de l'Alberta pourrait remplacer des énergies propres. On
n'a aucun pouvoir là-dessus, GNL va vendre à qui il veut. Ce sont les faits.
Est-ce que le premier
ministre accuse nos scientifiques d'avoir tort?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : Je veux bien comprendre ce que dit la cheffe du deuxième
groupe d'opposition. Est-ce qu'elle est en train de nous dire que d'avoir un barrage au Québec pour envoyer de
l'hydroélectricité aux États-Unis, qui va réduire le nombre de centrales au charbon, c'est une mauvaise
chose pour la planète? Est-ce que c'est ça qu'elle est en train de nous dire?
M.
le Président, ce qui est important, c'est de considérer le gaz naturel comme
une énergie de transition. Ça va réduire, au total, les émissions de
GES. Soyons pragmatiques, pas dogmatiques.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Je suis totalement d'accord avec lui, pas dogmatique. Selon
les scientifiques, la combustion du gaz exporté va émettre 30 millions de tonnes de CO2 en
un an. Ça, c'est 17 fois la cimenterie McInnis, dont vous avez dénoncé, quasiment à chaque jour, l'aspect
polluant de cette industrie-là quand vous étiez sur les banquettes de
l'opposition.
Maintenant
que vous êtes au pouvoir, pouvez-vous expliquer pourquoi 17 cimenteries
McInnis, ce n'est pas grave?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, je voudrais bien comprendre la position de
la cheffe du deuxième groupe d'opposition. Si on augmente, d'un côté, les GES en produisant du gaz dans l'Ouest
canadien, mais qu'on réduit trois fois, quatre fois plus les émissions
de GES en Europe en fermant la production de charbon de mazout, si je prouve ça
à la cheffe du deuxième groupe, va-t-elle être d'accord avec le projet ou si
elle va continuer d'être dogmatique?
Le Président :
Question principale, M. le député de Pontiac.
Fermeture de la Clinique d'échographie de l'Outaouais
M. André Fortin
M. Fortin : M. le Président, ce matin, plusieurs patients se sont butés à une porte
fermée à la Clinique d'échographie de
l'Outaouais, des futurs parents qui s'attendaient à entendre battre le coeur de
leur enfant pour la première fois, des patients en attente depuis 12 mois
d'une échographie pelvienne ou abdominale qui avaient espoir qu'aujourd'hui
leur attente qu'ils savent, c'est que la
clinique est maintenant fermée, parce qu'à partir d'aujourd'hui la RAMQ ne rembourse plus les soins.
Et
la ministre de la Santé, elle connaît la situation depuis
longtemps. La députée de Hull l'avait informée de l'enjeu. Le CISSS de l'Outaouais lui a répété à plusieurs
reprises qu'il y référait des centaines de patients, que le CISSS ne savait
pas comment il organiserait les soins si la
clinique fermait et que la fermeture augmenterait nécessairement les temps d'attente dans la région. Les patients ont
aujourd'hui deux options, M. le Président : attendre encore ou aller en
Ontario et payer.
Qu'est-ce que la ministre va faire?
Le
Président : Mme la ministre déléguée à la... Mme la ministre de
la Santé et des Services sociaux, je m'excuse.
Mme Danielle
McCann
Mme
McCann : Bien, M. le Président, la population de l'Outaouais a une
autre option aujourd'hui. En fait, dès demain,
elle va pouvoir aller à la Clinique de radiologie de Gatineau. Cette clinique
de radiologie va augmenter son offre de
service de façon considérable pour prendre en charge tous les citoyens ou
citoyennes qui avaient besoin de services à la Clinique d'échographie de
l'Outaouais.
Maintenant,
pour la Clinique d'échographie de l'Outaouais, cette clinique n'est pas dirigée
par un radiologiste propriétaire, et,
depuis au moins deux ans, cette clinique savait que, selon la loi et les règles
en vigueur, elle ne peut pas continuer
d'offrir des services sans qu'il y ait un radiologiste propriétaire.
D'ailleurs, on a eu des demandes de prolongation du permis de cette clinique. Même si elle n'était pas dans le cadre de
la loi puis des règlements, on a donné quelques chances jusqu'à maintenant. Là, il faut vraiment
régulariser la situation. Mais ce que je veux dire, et ce qui est le plus
important...
• (14 h 40) •
Le Président : En terminant.
Mme
McCann : ...c'est que les citoyennes et les citoyens qui ont besoin de
services vont pouvoir aller, dès demain, à la clinique...
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Pontiac.
M.
André Fortin
M. Fortin : M.
le Président, à Gatineau, il y a un appareil d'imagerie médicale; à la clinique
de l'Outaouais, il y en a quatre. Dans sa
dernière lettre, M. le Président, le CISSS de l'Outaouais disait avoir
communiqué à plusieurs reprises avec
la ministre de la Santé concernant l'impact de la fermeture sur
l'accessibilité. Elle mentionnait avoir parlé de la qualité des services à la clinique, elle demandait à la ministre de
prendre des actions rapidement. Tout le monde est d'accord, la clinique,
elle fonctionne et elle fonctionne bien.
Est-ce qu'elle peut écouter son premier ministre
et être pratique plutôt que dogmatique?
Le Président : Mme la
ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Danielle
McCann
Mme
McCann : Bien, j'écoute beaucoup mon premier ministre, je suis très
pragmatique. Et, je vais vous dire, la
population va avoir accès, dès demain, à des services d'échographie à la
Clinique de radiologie de Gatineau, dès demain, et l'ensemble des gens
qui allaient à la Clinique d'échographie de l'Outaouais vont avoir du service.
C'est
vraiment un dossier qui a été travaillé aujourd'hui même, M. le Président...
quand on est capables d'être efficaces,
dans le réseau de la santé et des services sociaux... aujourd'hui même, on a
démontré qu'il y a une offre de services augmentée à la Clinique de
radiologie de Gatineau, et le CISSS aussi, le CISSS de l'Outaouais est
impliqué.
Le Président : En terminant.
Mme McCann : Les citoyens vont avoir
les services.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Pontiac.
M.
André Fortin
M.
Fortin : M. le Président, je
suis content qu'aujourd'hui enfin la ministre se penche sur l'enjeu. Ça fait
des mois que la députée de Hull lui en parle, ça fait des mois que le CISSS de
l'Outaouais lui en parle, M. le Président, et aujourd'hui elle réfère les patients à une clinique qui a un
appareil d'imagerie médicale, alors qu'il y en avait quatre à la clinique de
l'Outaouais, M. le Président. Tous ces citoyens-là, ils se posent des
questions.
Est-ce qu'ils vont avoir accès aux soins dès
demain, comme le dit la ministre? Comment ils vont faire, M. le Président? Comment ils vont faire pour prendre en
charge tout le volume de la Clinique d'échographie de l'Outaouais?
Le Président : Mme la
ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Danielle
McCann
Mme
McCann : Bien, M. le Président, ils vont avoir les services à la
Clinique de radiologie de Gatineau parce qu'ils ont rénové, augmenté
leur espace. Ils ont deux radiologistes. Ils ont embauché des technologues,
même des technologues autonomes. Ils sont
capables d'augmenter leur offre de services dès demain et pour le reste de
l'année. Et même en juillet ça va
augmenter à nouveau parce qu'ils vont avoir un nouveau radiologiste ou un
nouveau technologue qui va entrer. Alors, les services pour la population vont être assurés,
et on régularise une situation. Ça n'a pas été fait par le précédent
gouvernement. Nous, on le fait maintenant puis on le fait en préservant l'offre
de services...
Le Président :
En terminant.
Mme McCann :
...aux citoyens.
Le Président :
Question principale, M. le député de Rimouski.
Prestations d'aide
sociale versées aux personnes handicapées
M. Harold LeBel
M.
LeBel : «Je veux avoir ma liberté, ma vie. Ce n'est pas parce qu'on
est handicapé qu'on n'a pas le droit à l'amour.»
Mélanie Dumais qui nous dit ça. Mélanie est handicapée intellectuelle. Elle
veut demeurer avec son chum et vivre en couple. Mais, comme elle a besoin
d'aide sociale pour payer ses médicaments... et là, comme elle va vivre en
couple, plus d'aide sociale. On va lui
couper son aide sociale. Et ce qu'on va faire : on peut l'obliger à aller
demeurer chez ses parents, chez sa
mère, qui demeure une heure plus loin de sa résidence. Ou, l'autre alternative,
c'est d'aller habiter dans un centre
d'hébergement pour femmes en difficulté. C'est une situation qui n'a pas de
sens, qui est inhumaine. Là, on parle
vraiment un peu de la proche-aidance, même, de son conjoint. C'est une
situation qui est inhumaine. La Loi à l'aide sociale manque de coeur.
Est-ce que le
gouvernement peut regarder... est-ce qu'on peut faire en sorte, notamment pour
les personnes handicapées, de donner un peu
plus d'humanisme à cette loi et de pouvoir répondre à cette dame qui veut juste
pouvoir vivre en paix avec son chum?
Le Président :
Mme la ministre des Affaires municipales.
Mme Andrée Laforest
Mme
Laforest : Oui. Alors, je vais prendre la réponse. Je remercie mon
collègue. Pour Mme Mélanie, justement, elle
est passée à mon bureau de comté, c'est quelqu'un de notre région. Elle est
allée également au bureau de comté de ma collègue députée de Roberval, Nancy Guillemette. Écoutez, c'est une
situation vraiment préoccupante. On a discuté avec le ministre du Travail, et il est en train de se
pencher sur la situation pour essayer d'aider les conjoints qui vivent certains
handicaps à vivre en couple dans le même appartement.
Ceci
étant dit, étant ministre de l'Habitation, vous considérerez que j'essaie
également de trouver un logement ou deux
logements côte à côte pour essayer que le couple habite un à côté de l'autre.
Alors, comme j'ai dit à Mme Mélanie, je ne peux pas être au bureau de
comté...
Des voix :
...
Mme
Laforest : Oui, on essaie de trouver des solutions parce qu'elle est
désemparée. Alors, ceci étant dit, je travaille avec la députée de
Roberval pour cette situation.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Rimouski, vous avez toute notre
attention.
M. Harold LeBel
M. LeBel :
Est-ce que j'ai bien compris? Deux loyers? On va faire un tunnel entre les
deux? On va payer deux loyers? On va faire
un trou quelque part pour qu'ils puissent se voir? C'est quoi, ça...
Pour moi, ils vont se reprendre pour la prochaine réponse, parce qu'on ne peut
pas accepter des choses du genre, puis ce n'est pas la première fois que
ça arrive. Le député de Drummond—Bois-Francs le sait, le cas de Marc-Alexandre Gaudreau, c'est le même cas. Lui, il
a deux tumeurs au cerveau, il fait des crises d'épilepsie, il a l'aide sociale,
il est tombé en amour, qu'est-ce que tu veux que tu fasses, il est avec
sa blonde, ils ont un enfant, et là on leur coupe l'aide...
Le Président :
Mme la ministre des Affaires municipales.
Mme Andrée Laforest
Mme Laforest : Bien, écoutez, pour répondre à votre question,
vous avez totalement raison, ça peut paraître assez particulier, sauf qu'il y a quelqu'un
qui demeure au Lac-Saint-Jean et l'autre personne demeure au Saguenay. Alors,
c'est évident que le premier geste, quand on
veut rapprocher un couple, c'est de les mettre dans la même municipalité en premier. Alors, c'est pour ça qu'on essaie de trouver un
moyen pour les aider.
Et, oui, moi,
j'aimerais bien vous dire que, dans le passé, c'est une situation qui se
répétait fréquemment, mais on a la chance
d'avoir un ministre du Travail qui va sûrement essayer d'aider ces personnes
en difficulté. Merci, M. le Président.
Le
Président : Deuxième complémentaire.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! L'attention appartient au député de Rimouski. Il est le seul à
avoir la parole.
M. Harold LeBel
M.
LeBel : Bon, on se
rapproche, là, au moins, c'est dans la même ville, mais on pense que ce serait
mieux pour un couple d'être dans la même maison. À mon avis, ça serait
plus logique.
Un autre cas, dans le
comté de ma collègue de Joliette, et là ce n'est pas un couple, c'est quelqu'un
qui a des problèmes graves de santé, qui a
besoin de l'aide sociale. Il vit avec un ami qui est, dans le fond, un proche aidant, et là ce qu'on
fait... les enquêteurs sont passés, on va lui couper son aide sociale
à elle aussi, parce qu'on dit qu'elle vient... son copain vient l'aider,
c'est un aidant naturel. Et, en conclusion, ils vont dire : Non seulement
on coupe...
Le Président :
La ministre des... M. le leader du gouvernement.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, la situation qui est soulevée par le collègue
de Rimouski, c'est une situation
à laquelle le gouvernement est sensible. Mon collègue responsable du Travail,
de l'Emploi et de la Solidarité sociale a
procédé à une étude du programme, également à une réforme. Il est en train de
regarder le tout pour que l'ensemble des situations qui sont soulevées
comme ça... parce qu'on en a tous, dans nos bureaux de comté, on en a tous, des
cas de citoyens comme ça, et il faut
s'assurer que les différents programmes du gouvernement du Québec répondent aux
besoins et à la réalité des services à la population, et c'est ce qu'on
va faire. On est un gouvernement qui est à l'écoute de la population pour faire
en sorte que les enjeux...
Le Président :
En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...qui sont soulevés, comme ceux-ci, on puisse les
régler tous ensemble.
Le Président :
Question principale, M. le député de Robert-Baldwin.
Projections de croissance
économique
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Merci, M. le Président. Alors, pour en cinquième mois
consécutif, l'indice précurseur de Desjardins est à la baisse. Cet indice permet de saisir, dans l'économie
du Québec, les changements de tendance susceptibles d'annoncer l'arrivée soit d'un ralentissement profond
ou même d'une récession. Donc, avec une diminution constante de cet indice depuis novembre 2018, nous pouvons
anticiper une baisse de la performance de l'économie du Québec.
Il est inquiétant de constater que la croissance économique semble
vouloir se détériorer dès l'arrivée de ce gouvernement. Pourtant, en campagne
électorale, on allait faire plus, on allait faire mieux.
Bon,
comment le ministre des Finances explique-t-il l'échec du gouvernement à maintenir le taux de croissance économique qui prévalait en
2017 et 2018?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Eric Girard
M.
Girard (Groulx) : C'est vraiment
une question particulière, M. le Président. O.K. L'économie
mondiale, c'est synchronisé. Le sommet de la croissance mondiale était
en 2017, année où le Canada a eu 3 % de croissance et le Québec,
2,8 %. 2018, une autre bonne année, mais moins fort. 2017, nous observons
un ralentissement...
Des voix :
...
M.
Girard (Groulx) : ...2019 — merci — un ralentissement mondial synchronisé, mais
pas de récession. Et la Banque du
Canada a récemment réduit ses perspectives de croissance pour l'ensemble du
Canada, mais pas pour le Québec parce
que le Québec fait très bien. D'ailleurs, lorsque nous avons eu les derniers
chiffres d'emploi, nous avions d'excellents chiffres d'emploi au Québec pour les 12 derniers mois. Et
Statistique Canada, un organisme indépendant, nous informait que toute
la création d'emplois de la dernière année s'était faite dans les six derniers
mois. Merci, M. le Président.
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît! Première complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Bravo, M. le Président, mais le ministre ne peut pas ignorer les faits, et les
faits sont clairs. Nous constatons un ralentissement de la croissance
économique dans les données de Desjardins.
Est-ce
que la CAQ, c'est ça, pour vous, faire plus, faire mieux, un ralentissement
économique? Alors, avec ce constat d'échec, comment allez-vous rassurer
les investisseurs? C'est maintenant le moment d'investir au Québec.
• (14 h 50) •
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Eric Girard
M.
Girard (Groulx) : Bien, d'abord, M. le Président, je vais rassurer les
investisseurs en leur parlant, ce que j'ai fait dans l'Ouest canadien et ce que
j'ai fait à New York vendredi dernier. Et je tiens à vous souligner que les
investisseurs apprécient énormément
notre choix d'avoir une stratégie pour augmenter le potentiel économique du
Québec à long terme, des choix
structurels. C'est-à-dire qu'on veut investir en éducation, favoriser les
investissements privés avec l'amortissement accéléré et la réforme d'Investissement Québec, favoriser l'offre de
travail avec les travailleurs de plus de 60 ans, une politique d'immigration où chaque immigrant aura
un parcours personnalisé. Et finalement nous continuons à réduire la dette...
Le Président :
En terminant...
M. Girard
(Groulx) : ...ce que l'agence DBRS a souligné avec un «outlook»
positif.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin. Vous avez toute notre
attention.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Encore une fois, les faits sont les faits, M. le Président. Le premier ministre
parlait, lors de son assermentation et à
d'autres reprises, qu'il voulait faire exploser l'investissement privé. Or,
dans les chiffres de Desjardins, ce qui baisse, c'est la composante entreprise.
Les consommateurs dépensent, les entreprises n'investissent pas.
Comment
allez-vous les convaincre maintenant
que c'est le moment d'investir au Québec, investissements directs?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Bon. M. le Président, encore une fois, je veux rappeler à tout le monde que l'économie mondiale, c'est corrélé. Alors, ce qui se passe,
c'est qu'on a une guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis,
puis ça influence l'ensemble de l'économie mondiale.
On
a quand même eu d'excellentes nouvelles avec la réduction des
tarifs sur l'aluminium et l'acier. Les chiffres d'emplois sont bons au Québec.
La confiance est là. Nous avons des bonnes politiques structurelles pour
augmenter le potentiel du Québec à long terme. Les agences de notation
reconnaissent la qualité du travail que nous faisons.
Alors,
nous allons poursuivre ce travail, et, toutes choses étant égales par ailleurs,
oui, il y a l'économie mondiale, mais ce que nous voulons faire, c'est
amener le Québec vers un autre niveau...
Le Président :
En terminant.
M. Girard
(Groulx) : ...c'est-à-dire augmenter le potentiel économique du Québec
de ce qui vous satisfaisait, 1,3 %, à 1,8 %.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Vaudreuil.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît, tout le monde, votre attention.
Développement immobilier
en milieux humides
Mme Marie-Claude Nichols
Mme Nichols :
Les récentes inondations ont forcé plus de 10 000 évacuations. Ce
sont des drames humains importants. Tous
s'accordent pour dire qu'il faut revoir la question des zones inondables. Le
premier ministre parle même de
déménager des quartiers entiers. Toutefois, le message du gouvernement ne
semble pas passer partout. Les municipalités, voyant ce gouvernement leur refuser des revenus additionnels, cherchent
désespérément à augmenter leur assiette foncière.
À Hudson,
dans le comté de Soulanges, le conseil de ville a approuvé un important projet
de construction pour 114 maisons
en plein dans un milieu humide qui a servi de zone tampon lors des dernières
inondations. Pire encore, cet endroit est traversé par un cours d'eau. Mais ce
n'est pas tout. Entre deux versions de ce projet contesté, le cours d'eau
est devenu par magie un fossé, ce qui
dispense le promoteur d'obtenir des autorisations auprès du ministère de
l'Environnement.
La ministre des
Affaires municipales compte-t-elle donner une directive plus claire pour
encadrer le développement en milieu humide et va-t-elle intervenir dans ce
dossier?
Le Président :
Mme la ministre des Affaires municipales.
Mme Andrée Laforest
Mme Laforest :
Bon, alors, je suis très heureuse de prendre la question, en fait, parce que,
quand je suis arrivée, il y a sept
mois, j'ai regardé, il y a 65 % des schémas d'aménagement qui datent de
plus de 10 ans. Alors, au niveau des milieux humides, vous me posez la question, ça me fait plaisir d'y
répondre parce qu'en 2018 l'ancien gouvernement a enlevé 555 milieux humides, des milieux
humides qui ont disparu en 2018. Et, en 2017, l'ancien gouvernement en a
enlevé le double.
Alors,
si vous me posez la question aujourd'hui, si vous êtes sensible pour les
milieux humides, je ne comprends pas
que, dans les deux dernières années, vous avez enlevé autant de milieux humides
pour accepter des nouveaux projets.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Marie-Claude Nichols
Mme
Nichols : À
Sainte-Marthe-sur-le-Lac, dont nous avons abondamment parlé les dernières
semaines dans la foulée de la rupture
de la digue, imaginez-vous que là aussi il y a un projet de
90 appartements sur le bord de l'eau, sur le terrain de l'ancienne marina. Questionnée lors de l'étude des crédits budgétaires, la ministre
des Affaires municipales avait pourtant affirmé qu'il y aurait zéro
construction en zone inondable.
Qu'est-ce qu'elle
attend pour intervenir?
Le Président :
Mme la ministre de la Sécurité publique.
Mme Geneviève Guilbault
Mme
Guilbault : M. le Président, la situation
dans laquelle on se trouve aujourd'hui, effectivement, elle est complexe. Ma collègue vient d'énoncer notre
volonté de mieux faire les choses que ce qui a été fait auparavant. Mais cette
situation-là, elle est due aussi, et il faut se le dire, à des années
d'aveuglement volontaire. Le caractère récurrent et affligeant des inondations,
M. le Président, ça fait des années qu'il est connu. Mais, dans le temps des
précédents gouvernements, nommément des
gouvernements libéraux, on débarquait là à chaque printemps avec nos bottes,
et, dans votre cas, c'est vrai de le
dire, quand les caméras étaient parties, on ne vous revoyait plus jusqu'à la
prochaine saison.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Mme Guilbault : Entre-temps, des maisons se construisaient en zone inondable? Ce n'est
pas grave. Les dossiers de réclamation
ne se réglaient pas? Ce n'est pas grave. Nous avons le courage de prendre les
décisions qui s'imposent, et c'est ça, un vrai gouvernement responsable
qui...
Le Président :
Deuxième complémentaire. La parole appartient...
Des voix :
...
Le Président :
Je vous demande le silence, s'il vous plaît! La parole appartient à la députée
de Vaudreuil.
Mme Marie-Claude Nichols
Mme
Nichols : On est en 2019. Les caméras sont parties, puis on vous
cherche encore. J'étais sur le terrain en fin de semaine. Les gens vous
cherchent.
Toujours dans la même
veine, à Dorval, un important terrain boisé sera bientôt remblayé pour faire
place à 31 maisons de luxe sur le bord
de l'eau. Quand le premier ministre parlait de ne pas vouloir payer pour des
maisons de riches, je ne sais pas
s'il avait ce projet en tête, mais ces maisons à 2 millions de dollars
l'unité seront situées, vous l'avez bien deviné, en zone inondable. Les
demandes d'autorisation sont en cours auprès du ministère.
Est-ce que le
gouvernement compte se tenir debout et refuser un tel développement en zone
inondable?
Le Président :
Mme la ministre de la...
Des voix : ...
Le Président :
S'il vous plaît! Mme la ministre de la Sécurité publique. Votre attention pour la
réponse, s'il vous plaît!
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît!
Mme
Geneviève Guilbault
Mme
Guilbault : M. le Président,
la symbiose est telle entre ma collègue et moi qu'on se lève en simultané parce
qu'on travaille tellement main dans la main pour cette importante question
qu'on est toutes les deux avides de pouvoir partager l'information. Mais
le fait est, M. le Président, je l'ai dit, que la construction en zone
inondable, c'est une problématique qui
existe depuis très longtemps, qui aurait dû être prise en charge bien avant.
Mais nous prenons enfin les décisions courageuses qui s'imposent. Je le fais avec
ma collègue des Affaires municipales, avec mon collègue de l'Environnement aussi. Nous allons enfin mettre en
place une vision lucide de l'aménagement du territoire et protéger nos
municipalités et nos citoyens contre les inondations récurrentes.
Le Président : Cela met fin à
la période de questions et réponses orales. Merci.
Motions
sans préavis
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions
sans préavis.
En fonction
de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je
reconnais maintenant un membre du troisième groupe
d'opposition. M. le député de Jonquière.
M.
Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec le député de Laval-des-Rapides, la
députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, le député de Chomedey
et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de s'assurer que le promoteur de GNL-Québec
démontre que ce projet, et toute la
filière qui y est liée, incluant les émissions fugitives de méthane, est
compatible avec les objectifs québécois de réduction de gaz à effet de
serre.»
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
M.
Schneeberger : Pas
de consentement.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Pas de consentement. Maintenant, un membre du groupe formant le gouvernement. M. le député de Vachon.
Souligner
la Journée des Forces armées
M.
Lafrenière : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. À titre de militaire réserviste, je suis particulièrement fier de déposer cette motion aujourd'hui pour souligner le travail des Forces armées. Je
tiens à saluer les militaires qui sont avec
nous aujourd'hui. Alors, dans les tribunes, on a le... colonelle Marie-Christine Harvey, adjudant-chef
Luc Lacombe, caporal Ouellet, soldat
Lacoursière, soldat Lucas, soldat Nantel, soldat Caron, caporal-chef
Gauthier-Wong, caporal Boivin, caporal Fournier, et pour représenter nos
vétérans, M. Denis Perrier.
Alors, M. le Président, je demande le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion
suivante conjointement avec la
députée de Vaudreuil,
le député d'Hochelaga-Maisonneuve, la
députée de Duplessis,
le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :
«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée
des Forces armées canadiennes, célébrée cette année le [...] 3 juin, en
reconnaissance du travail des militaires québécois;
«Qu'elle
rende hommage à la contribution [des] femmes et [des] hommes au maintien de la
paix et de la sécurité, dans nos communautés, comme ailleurs;
«Qu'elle
souligne leur rôle crucial lors des récentes inondations où plus de
1 000 militaires ont été déployés sur le terrain dont la
moitié sont des réservistes soit des citoyens soldats et des membres de nos communautés;
«Qu'enfin, elle remercie les
120 000 vétérans, les 15 000 membres réguliers et
réservistes des Forces armées canadiennes au Québec et leurs familles pour
leurs services et [pour] leurs sacrifices.»
(Applaudissements)
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
• (15 heures) •
M. Schneeberger :
Il y a consentement, sans débat.
Mise aux voix
Le Vice-Président
(M. Picard) : Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
Maintenant, je reconnais un membre du groupe formant l'opposition officielle. M. le député de Laval-des-Rapides.
M.
Polo : M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la
motion suivante conjointement avec la
députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, le chef du troisième groupe
d'opposition, le député de Chomedey et la députée de
Marie-Victorin :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse l'importance que la population ait accès aux parcs du
Québec;
«Qu'elle rappelle que
le parc des chutes [de] Montmorency, un des principaux attraits touristiques de
la Capitale-Nationale, est le seul parc administré par la SEPAQ en milieu
urbain;
«Qu'elle
dénonce la décision de la SEPAQ d'imposer un tarif à l'entrée du parc des
chutes [de] Montmorency;
Qu'elle demande au
gouvernement de revenir sur sa décision et de remettre l'accès gratuit
immédiatement.»
Le Vice-Président
(M. Picard) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de
cette motion?
M. Schneeberger :
Pas de consentement.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Pas de consentement.
Maintenant je
reconnais un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la cheffe.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre
de la motion suivante conjointement avec le député de Jonquière, la
députée de Marie-Victorin :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte du contenu de la lettre adressée au premier
ministre et signée par plus de 160 scientifiques, intitulée Le
projet GNL Québec doit être rejeté;
«Qu'elle reconnaisse
que le gaz naturel issu de la fracturation hydraulique, qui circulera dans le
gazoduc GNL Québec, est constitué à
95 % de méthane, un gaz à effet de serre 84 fois plus puissant que le
CO2 sur un horizon de
20 ans, et qu'en ce sens il n'est pas une énergie de transition
énergétique viable pour l'avenir du Québec et de la planète;
«Qu'elle reconnaisse
que le projet GNL Québec constitue une menace sérieuse pour la
biodiversité;
«Qu'elle
reconnaisse non seulement l'absence d'acceptabilité sociale de la population du
Québec envers le transport par
oléoduc et gazoduc des énergies fossiles polluantes de l'Ouest canadien, mais
aussi sa réelle volonté de s'en affranchir sans délai en s'engageant
dans une transition énergétique fondée sur [des] réelles énergies
renouvelables;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de donner suite à la demande des
scientifiques signataires, de rejeter
sans plus attendre le projet GNL Québec et d'offrir des projets de
développement économique plus durables à la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean.»
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la cheffe du deuxième
groupe d'opposition. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de
cette motion?
M. Schneeberger :
Pas de consentement.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Pas de consentement.
Je reconnais
maintenant Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme
Fournier : M. le Président, je sollicite le consentement des
membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la ministre de
la Justice et le député de Chomedey, la motion suivante :
«Considérant
que les Québécois forment une société distincte du Canada et une nation à part
entière;
«Considérant que la
Colombie-Britannique possède sa propre constitution au sein du Canada;
«Considérant que le
Québec ne dispose pas d'une telle constitution qui lui soit propre;
«Considérant la
position nationaliste du gouvernement du Québec;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de travailler, en
collaboration avec la société civile,
à doter le Québec d'une constitution définissant ses institutions, les droits
et les devoirs de ses citoyens, ainsi que les valeurs et les principes
propres à la nation québécoise.»
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre
de cette motion?
M. Schneeberger :
Consentement, sans débat.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Consentement, sans débat. Oui, M. le leader de
l'opposition officielle.
M. Proulx :
Pas de consentement.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Pas de consentement? Pas de consentement.
Avis touchant les travaux des commissions
Donc,
nous sommes maintenant rendus aux avis touchant les travaux des commissions. M.
le leader du gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui, alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission des
relations avec les citoyens poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du
marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que le
mardi 4 juin 2019, de 10 à midi, à la salle des Premiers-Ministres;
La
Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée du
projet de loi n° 2, Loi resserrant l'encadrement du cannabis, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que le mardi
4 juin 2019, de 10 à midi à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission de
l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi
n° 16, Loi visant principalement
l'encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le
remplacement de la dénomination de la
Régie du logement et l'amélioration de ses règles de fonctionnement et
modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine
municipal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
18 heures, ainsi que le mardi 4 juin 2019, de 10 à midi, à la
salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission
de la culture et de l'éducation
poursuivra les consultations particulières et auditions publiques du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions
à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés
aux élèves âgés de 4 ans, le mardi 4 juin 2019, de 10 h 15
à 11 h 45, à la salle Pauline-Marois du pavillon d'accueil. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. M.
le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
Oui. M. le Président, à moins d'avoir mal compris, je comprends que la
Commission sur les relations avec les citoyens va siéger à la salle 1.38, qui est la salle des
Premiers-Ministres. La question que je me posais, M. le Président, c'est la suivante. On avait annoncé, lorsque le
gouvernement a transmis l'horaire dès les premières fois, pour aujourd'hui
qu'on siégerait dans la salle Kirkland, dans nos nouvelles salles de
commission.
Vous savez, M. le Président,
la salle 1.38 est une salle où il n'y a pas de télédiffusion. Nous avons
deux nouvelles salles de commission que nous pouvons
utiliser pour le bénéfice de ceux et celles qui nous écoutent.
La question, c'est la
suivante, M. le Président : Pour quelle raison nous utilisons, encore une
fois, une salle qui n'est
pas appropriée? Dans la mesure où, avant, lorsqu'on n'en avait pas d'autre, on
l'utilisait, c'est clair, mais aujourd'hui, alors que nous avons ces nouvelles salles fonctionnelles, prêtes à
fonctionner, pourquoi on est au 1.138 pour le projet de loi
n° 9 ?
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. M.
le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, on siège à la
salle 1.138, c'est une des salles qui est notamment disponible. Et, vous savez, le gouvernement
libéral nous a fait abondamment siéger à la salle 1.38. Ça fait partie des
salles qui sont disponibles, et le gouvernement a décidé qu'on allait
siéger à cet endroit.
Le Vice-Président (M. Picard) : M. le
leader de l'opposition officielle.
M. Proulx : Oui, rapidement, M. le
Président, pour répondre un peu à l'argumentaire du collègue leader du gouvernement, nous n'avions pas, jusqu'à la
semaine dernière, deux nouvelles salles de commission. Les gens doivent savoir qu'il y a maintenant une salle Kirkland-Casgrain,
Kirkland, il y a une salle Mme Marois, alors il faut utiliser ces salles-là lorsqu'on n'a pas d'autres salles
disponibles. Je comprends qu'on utiliserait le 1.138, mais, vous savez, on est
limité à cinq commissions. On a maintenant
cinq salles, elles sont disponibles, les travaux sont télédiffusés à
l'intérieur de celles-ci. Alors, je
veux bien qu'on ne puisse pas le changer dans quelques minutes, mais je
comprends, M. le Président, que le gouvernement n'a pas l'intention
d'utiliser les nouvelles salles alors que nous les avons.
Alors, ce que je lui demande,
c'est : Est-ce qu'on peut amener les projets de loi en commission dans ces
salles qui ont été
conçues pour ça et qui sont télédiffusées plutôt que d'aller au 1.138 où qu'on
n'a que le son pour ceux et celles qui veulent nous écouter?
Le Vice-Président (M. Picard) : M. le
leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'entends la suggestion
du leader de l'opposition officielle puis je vais en...
prendre en considération, je vais en tenir compte.
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Aux
avis de la présidence, pour ma part, je vous avise que la Commission des institutions se réunira en séance
de travail le mardi 4 juin 2019, de midi à 12 h 30, à la salle RC.161,
afin de déterminer les observations,
conclusions ou recommandations à la suite de l'audition du Directeur général
des élections du Québec.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
À la rubrique Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée...
Je vais suspendre quelques
instants. On m'a avisé que vous vouliez demander au président un avis, une
directive, donc je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 9)
(Reprise à 15 h 11)
Le
Président : M. le
leader du gouvernement a demandé mon retour pour entendre ses propos. M.
le leader du gouvernement, je
suis à votre écoute... de l'opposition officielle, je m'excuse.
M. Proulx :
Oui, M. le Président, le leader de l'opposition officielle qui vous a demandé,
cette fois-ci, d'être entendu.
Alors,
deux choses. La première concerne le projet de loi n° 26.
La demande a été faite dernièrement, je la réitère pour le collègue, projet de loi qui touche le
système de transport structurant à Québec. Des groupes ont été transmis. Je
vois le calendrier qui va passer assez
rapidement. J'avais entendu le ministre des Transports indiquer, à ce
moment-ci, qu'il fallait voir le
p.l. n° 17 avant le projet de loi n° 26.
Vous aurez compris que, vu la grosseur et l'épaisseur, si vous voulez,
du projet, un de 275 articles et l'autre d'à peu près 20 articles, avec des
consultations qu'on pourrait tenir rapidement...
Le message que je veux retransmettre, encore une fois, au leader du
gouvernement, c'est que, dans le cadre du projet de loi n° 26,
celui qui touche le transport structurant, nous sommes en attente de son
retour.
Demande de directive
concernant la tenue d'une commission
parlementaire spéciale sur la prostitution juvénile
M. Sébastien
Proulx
Maintenant,
je voulais, M. le Président, comme, malheureusement, c'est l'habitude, faire
auprès de vous une question de
directive concernant la commission sur la prostitution juvénile, commission qui
est dans l'air, bien entendu, en discussion avec les différents collègues et avec les différents cabinets. Notre
collègue députée, ici, d'Anjou—Louis-Riel a travaillé, d'ailleurs,
avec le collègue de Vachon à élaborer et réfléchir à ce mandat depuis la
première version qui nous avait été soumise, de mémoire, en mars, et sous
peine, là, de me tromper de quelques jours, mais, je pense, en mars. Alors,
il y a eu tout un travail qui a été fait par
les différentes personnes. Je pense sincèrement, M. le Président, que, mis à
part quelques éléments, on pourra
bientôt s'entendre si on est capables de trouver l'équilibre qu'il faut à
l'intérieur de la commission, mais il y a encore des éléments avec
lesquels il faut travailler.
Cette
fin de semaine, la députée de Repentigny, M. le Président, a donné une entrevue
dans les médias et a repris, si vous voulez,
son propos dans les médias sociaux disant, à toutes fins pratiques, M. le
Président, que cette commission-là, elle
va avoir lieu, que cette commission-là va aller de l'avant, que c'est une
commission itinérante du gouvernement qui débutera sous peu.
M.
le Président, j'ai déjà eu l'occasion d'en parler. On l'avait fait au moment où
la ministre de la Culture avait également
parlé de la commission qui touchait l'avenir des médias. Nous sommes dans la
situation, M. le Président, où les commissions
sont indépendantes du gouvernement. J'ai déjà eu à le dire ici, à le plaider
devant vous. Vous avez même rendu une
décision où vous aviez dit, à ce moment-là, M. le Président, que vous
souhaitiez que le message soit entendu. Clairement, M. le Président, on se retrouve encore à la case départ,
dans une situation où cette commission-là est annoncée. Elle existe dans l'espace public sans que les
partis, unanimement, parce que c'est le cas, M. le Président, partis et députés
indépendants aient convenu du mandat avec lequel cette commission-là, si elle
est créée, travaillera dans l'avenir.
Alors,
M. le Président, on est au même point. C'est une question de respect
élémentaire. Cette Assemblée est guidée par des principes, un règlement et des pratiques, et, dans ce cas-ci, il
faut respecter tout cela à la fois. Alors, on a eu au début des échanges, et c'est vrai que ça avait été
un peu plus long de notre côté, M. le Président, dès le début pour en venir à
un travail régulier, je vous dirais, sur le mandat qui touche la prostitution
juvénile, pour l'appeler ainsi. Mais ce n'est pas vrai, M. le Président, que, depuis un certain
temps, et notamment parce que des députés ici, dans cette Assemblée, ont
pris du leadership pour tenter de trouver ce terrain d'entente, il n'y a pas du
travail qui se fait.
Maintenant,
M. le Président, à cette date-ci, en date d'aujourd'hui, cette commission-là ne
peut être créée ni même annoncée comme telle parce qu'elle n'existe pas,
parce qu'elle n'a pas reçu l'assentiment de l'ensemble des élus de l'Assemblée nationale. Alors, qu'il y ait des
propositions en circulation, c'est une chose, mais on ne peut pas, de son
propre chef, annoncer à la population
que la commission aura lieu, que la commission va partir en tournée, que la
commission est créée, alors que ce n'est pas le cas.
Alors, je
veux bien vous reciter, M. le Président, des citations que je vous ai déjà
données, des décisions que je vous ai
déjà données, mais vous avez rendu une décision à cet égard-là. Et je suis
encore une fois pris avec la responsabilité de venir devant vous rappeler cette situation que je déplore. Je le déplore, M. le Président, parce que c'est un enjeu de respect. Et dit très, très,
très simplement, nous sommes dans
une situation où on met la charrue devant les boeufs et on
place l'Assemblée nationale et les élus de l'Assemblée nationale devant un fait
accompli, comme si les commissions parlementaires étaient l'extension du gouvernement
et de l'Exécutif, ce qui n'est pas le cas, M. le Président. Cet espace-ci, c'est cet espace de démocratie
législatif, cet espace de neutralité où il y a
égalité entre les parlementaires. Il y
a des forces représentées différemment, il y a un gouvernement
qui est majoritaire, il y a une opposition officielle, et des oppositions, et des députés indépendants, mais
nous sommes dans la situation, M. le Président, où nous ne pouvons pas
accepter, encore une fois, de se retrouver dans cette situation où on est
placés devant le fait accompli.
Vous
avez rendu une décision à cet égard. Vous avez rappelé ces principes-là, M. le
Président, à quelques occasions. Dans
vos propos, et j'essaie de m'en rappeler pour vous citer à la virgule près,
vous aviez dit : J'espère avoir été clair, j'espère avoir été entendu. Alors, nous sommes dans cette situation, M.
le Président, où je me dois encore une fois de revenir vous en parler,
revenir encore décrier cette situation.
Je
vais déposer cet article, je vais déposer la publication dans les médias
sociaux, et vous verrez, M. le Président, que, pour la députée de Repentigny, il n'y en a pas, d'ambiguïté :
cette commission-là, elle aura lieu, elle est mandatée, il ne reste que des détails à attacher. Mais, M.
le Président, tant et aussi longtemps que le dernier détail n'est pas attaché,
cette commission-là, elle n'existe pas ici,
alors, elle est en discussion, respectueusement, entre les différentes
formations politiques.
Je
pense que les propositions qui sont mises de l'avant... Et un jour, quand on en
fera la genèse, vous verrez que les
choses s'améliorent et que nous sommes en voie, je pense, d'y arriver. Mais,
lorsqu'on est dans une situation comme celle-là,
lorsque c'est en ouvrant le journal Le Soleil que je le vois, comme
les collègues, le samedi matin, bien, je me dis, M. le Président, notre collaboration n'est peut-être même pas nécessaire
dans l'esprit du gouvernement, alors qu'elle est essentielle et
obligatoire pour créer une telle commission.
Alors,
c'étaient mes propos, encore une fois. Bien malheureux de devoir le faire une
autre fois encore ici, devant cette
Assemblée. On a ces enjeux de règlement, on a ces enjeux de planification, on a
ces enjeux à l'égard de la commission. Alors, bien, écoutez, je vais
écouter le collègue du gouvernement donner ses explications. Mais, en toute
bonne foi, M. le Président, convenir avant
le fait que cette commission-là existera, convenir avant le fait que cette
commission-là, avec un mandat qui est
presque décrit, se retrouvera sur la place publique prête à travailler avec des
députés qui quitteront l'Assemblée pour aller faire ce mandat, ce n'est
pas juste mettre la charrue devant les boeufs, M. le Président, c'est manquer
de respect envers notre institution. Voilà.
Documents
déposés
Le
Président : Merci, M. le leader de l'opposition officielle.
Vous avez demandé l'autorisation de déposer, bien sûr. Alors, d'accord pour déposer les documents? Les
documents déposés. J'écoute maintenant le leader du gouvernement.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'entends bien le leader de
l'opposition officielle. Je vais vous transmettre les propos suivants, M. le Président. Dans un premier
temps, la députée de Repentigny, à ma connaissance, ne fait pas partie
du Conseil exécutif, donc elle ne fait pas partie du pouvoir exécutif, premier
élément.
Deuxième
élément, M. le Président, vous-même, vous avez siégé lors de la
41e législature, le député de Jean-Talon, leader de l'opposition officielle ainsi que la députée d'Anjou—Louis-Riel ont siégé dans la 41e législature,
ils ont pu être à même de constater toute l'importance que la députée de
Repentigny accorde à la lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs, à la lutte contre la prostitution
juvénile. J'entends, M. le Président, de l'autre côté, du côté du Parti
libéral, me dire : Ça n'a pas
rapport, ce que vous dites, M. le leader du gouvernement. Respectueusement, M.
le Président, ça a tout à fait rapport.
• (15 h 20) •
Savez-vous
quoi, M. le Président? Je comprends que le député de Jean-Talon souhaite que
nous puissions adopter rapidement
cette motion-là. C'est ce que j'entends. Cela étant dit, M. le Président, vous
ne trouverez pas personne ici, au
gouvernement, qui souhaite plus que la députée de Repentigny que la motion soit
adoptée pour enfin qu'on constitue une
commission spéciale sur la prostitution juvénile. Savez-vous quoi, M. le
Président? La première proposition qui a été formulée au Parti libéral du Québec pour la création de cette
commission-là, elle s'est faite le 4 mars 2018, 4 mars. Je
regarde la date devant moi, c'est le 3 juin. Mars, avril, mai, juin,
quatre mois, M. le Président, pour la création d'une commission spéciale. Elle n'est toujours pas avérée, cette
commission-là. M. le Président, je sens qu'on y touche presque, à cette commission. Je sens qu'on est à la veille de
s'entendre. Quatre mois pour réussir à s'entendre, M. le Président, je
trouve que, dans nos usages parlementaires, c'est extrêmement long.
C'est extrêmement
aussi déplorable, M. le Président, que des partis ne soient pas capables de
travailler mieux ensemble que ça. Et
savez-vous quoi, M. le Président? Je souhaiterais même, personnellement, que ça
se règle cette semaine, cette
commission-là sur la prostitution juvénile, sur l'exploitation sexuelle.
Savez-vous pourquoi, M. le Président? Parce qu'on est à l'aube d'un événement international, à Montréal, qui va
survenir, le Grand Prix du Canada. Et savez-vous quoi? Il y a des gens
qui profitent de cet événement-là pour exploiter sexuellement les filles du
Québec, les jeunes femmes, particulièrement les mineures.
M.
le Président, je pense que, du côté du Parti libéral, on devrait être sensibles
à cette réalité-là et de faire en sorte, M. le Président, qu'on puisse adopter, tous ensemble, une motion qui va
faire en sorte que la commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs, sur la prostitution juvénile aille
de l'avant. Ce dossier-là, ce dossier-là, il est extrêmement important.
Ça peut toucher toutes les jeunes femmes de toutes les familles...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette : ...et les hommes aussi, mais vous conviendrez, M.
le Président, que ça touche principalement les jeunes femmes,
principalement les jeunes femmes de toutes les familles, de tous les milieux.
Et ça, M. le
Président, à partir du moment où on propose une motion en mars 2019 et qu'on
est rendus en juin 2019, M. le Président,
que dire de la conduite de la députée de Repentigny de dire qu'elle souhaite
que ce soit adopté rapidement? Je pense, à juste titre, que la députée
de Repentigny souhaite faire avancer les choses et elle respecte les institutions. Cela étant dit, M. le Président,
tout le monde nous regarde, on devrait procéder, aller de l'avant avec la
dernière version qui a été envoyée
par la motion sur la commission spéciale plutôt qu'avoir des débats ici pour
dire : Écoutez, la députée de Repentigny a donné une entrevue.
Le Président :
M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M. Gabriel
Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois :
Très, très brièvement, M. le Président, parce que je ne répéterai pas ce que le
leader de l'opposition officielle a dit, la
motion à laquelle fait référence le leader du gouvernement n'est pas encore
adoptée, et c'est en effet dommage.
Nous, on a contribué aux négociations et à la rédaction de cette motion-là. Les
arguments invoqués par le leader du
gouvernement concernant l'importance de l'enjeu, c'est des arguments valables,
on les partage, mais, comme toute
autre motion à cette Assemblée, comme toute autre affaire en cette Assemblée,
le gouvernement ne peut pas présumer
de l'adoption de cette motion-là. Les règles sont ce qu'elles sont, et puis ce
n'est en effet pas la première fois que
ça se produit. Alors, sans reprendre un à un les arguments qu'a fait valoir le
leader de l'opposition officielle, on aimerait également, du côté de la
deuxième opposition, vous entendre sur cette question. Merci.
Le Président :
M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Martin
Ouellet
M. Ouellet : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Je serai bref aussi. Je m'inscris
en faveur des arguments du leader de
l'opposition officielle, du leader du deuxième groupe d'opposition. Mais je
vais juste rappeler au gouvernement que
la transpartisanerie, ce n'est pas un logo, ce n'est pas une marque de commerce
qu'on peut utiliser, c'est un processus, c'est une façon de fonctionner. Ma formation politique a mis beaucoup
d'efforts à trouver les détails qui allaient faire que nous allions adopter rapidement cette motion, M.
le Président. Tout le monde est d'avis qu'il faut agir promptement et correctement. Mais évidemment, tel qu'il est
stipulé dans les journaux, c'est comme si on mettait de la pression sur une
acceptation rapide et que les moyens de discussion étaient, dans certains cas,
rompus.
Donc,
je veux juste rappeler au gouvernement que la transpartisanerie, c'est un
processus, c'est une façon de faire et ce n'est pas un logo, une marque
de commerce qu'on peut affubler facilement. Merci.
Le Président :
M. le député de Chomedey.
M. Guy
Ouellette
M. Ouellette : Merci, M. le Président. M. le Président, vous êtes le gardien des
droits de tous les parlementaires en
cette Chambre. J'entendais le leader du gouvernement nous mentionner que la
première mouture était le 4 mars. Il y a effectivement eu beaucoup d'échanges entre les différents parlementaires
et les députés indépendants qui, pendant longtemps au cours de cette
motion, ont été oubliés, M. le Président, dans le cadre de cette motion.
J'entendais M. le leader parlementaire parler de l'intérêt de la députée de
Repentigny pour ce sujet. Je pense que le mien ne se démord pas, M. le Président. Ça fait partie de ma vie
antérieure, une carrière de 32 ans à la Sûreté du Québec, et j'ai autant
d'intérêt que la députée de Repentigny dans cette motion et dans cette
commission.
Cependant,
M. le Président, je me questionne, pour une commission transpartisane, sur les
droits et sur l'implication des
députés indépendants, que je suis. Dans
la motion, il est fait état que la participation des députés indépendants pourra être permise sans droit de motion et sans droit de vote, et l'avant-dernière mouture, il
n'y avait même pas de temps de parole, M. le
Président, pour les consultations à l'intérieur de l'Assemblée
nationale. Je pense que c'est
important de le porter à votre
attention parce que vous êtes le gardien des droits de tous les parlementaires. Et, comme je l'ai mentionné dans
le cadre du projet de loi n° 1, il semble se dessiner, au gouvernement, deux classes de parlementaires, les députés indépendants étant la
deuxième classe de parlementaires, M. le Président.
Une voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! M. le leader de l'opposition
officielle, évitez de vous
interpeller. Je pense qu'on s'adresse
à la présidence dans le cadre de plaidoiries, qui vont bien jusqu'à maintenant. Je vous entends. J'aimerais qu'on vous entende tous. M. le
leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien
Proulx
M. Proulx : Bien, deux choses, M.
le Président. Je trouve ça... Je vais le qualifier de particulier, ce qu'a dit
le collègue leader du gouvernement. Lier
le Grand Prix de Montréal qui s'en vient à la conclusion d'une entente sur
la motion, me faire dire : Pense à ces
jeunes, parce que je ne voulais pas qualifier, comme il l'a fait en parlant de
cette motion... M. le Président, le sujet n'appartient pas à la députée de
Repentigny, là. Le sujet, il appartient à la communauté, il
appartient à la société. C'est un enjeu extrêmement important, et je ne
voudrais pas, M. le Président, que quelqu'un ose même qualifier... vouloir donner une température ou une intensité à la
volonté des membres de l'opposition
officielle de traiter d'un sujet comme celui-là. Sincèrement, ce serait odieux, M. le Président.
C'est le seul mot qui me vient en
tête, ce serait odieux de vouloir qualifier l'intensité des volontés
ici, dans cette Assemblée.
Maintenant,
si je me souviens de la première mouture, M. le Président, au mois de
mars, là, il y a plus que du chemin de fait, là. Je veux dire, on
était complètement à côté de ce que c'est, un processus comme
celui-là. Il manquait des éléments extrêmement importants pour même traiter correctement de travaux comme ceux-là et
surtout, M. le Président, sur la
préparation des élus devant un tel processus, pour reprendre les paroles du
collègue, devant un tel travail si important. Alors, moi, M. le Président, qu'on n'ait pas convenu d'une entente encore,
là, je trouve ça triste aussi, mais je pense que, de bonne foi, on peut y arriver. Et, si les versions puis les moutures s'accumulent
dans les dernières 24 heures, là, c'est peut-être parce qu'on va
peut-être finir par y arriver plus rapidement qu'on le souhaitait, tant mieux.
Maintenant,
M. le Président, le temps d'avant, là, il appartient à tous les parlementaires,
pas à l'opposition officielle seulement.
Et je réitère, M. le Président, la question de directive qui vous est
posée : Est-ce que c'est une façon de faire, d'annoncer une telle
commission?
Je
termine en disant : Si la députée de Repentigny n'est pas membre de
l'Exécutif, c'est ce qui explique qu'elle puisse poser des gestes comme ceux-là dans l'espace public, M. le
Président, il y a un whip au gouvernement, qu'il fasse sa job, lui
aussi.
Le Président : MM. les leaders, je vous ai bien entendu sur la base de
ce que vous avez annoncé et énoncé. M. le leader de l'opposition officielle, vous allez me permettre d'analyser
votre demande sur la base aussi des documents qui ont été déposés et dont je prendrai connaissance.
Soyez convaincus que je répondrai rapidement à vos demandes sur cette
question de directive. Je vous remercie pour votre argumentaire, j'y reviendrai
très rapidement.
Décision
de la présidence sur la demande de directive soulevée le 29 mai 2019
concernant la présence requise d'un ministre lors du débat sur l'adoption
du projet de loi n° 7, Loi concernant certaines conditions de travail
applicables aux cadres du réseau de la santé et des services sociaux
Le
Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît! Je suis maintenant prêt à rendre ma directive sur la question
soulevée par le leader du gouvernement lors de la séance du 29 mai
dernier. Sa question concerne les circonstances ayant entouré la mise aux voix de la motion d'adoption
du projet de loi n° 7, Loi
concernant certaines conditions de travail applicables aux cadres du réseau de la santé et des services sociaux, survenues plus tôt au cours de cette même
séance.
Au
terme du débat sur l'adoption du projet
de loi n° 7,
au moment où la présidence mettait aux voix la motion, le leader de l'opposition officielle a demandé une suspension des travaux afin de
permettre à un ministre d'être présent pour la mise aux voix. À la
reprise des travaux, alors qu'il n'y avait toujours pas de ministre
présent en Chambre, le leader
de l'opposition officielle a référé à une décision du président Saintonge de
1992 pour affirmer qu'il était impossible, en pareilles circonstances,
de procéder à la mise aux voix de la motion.
Revenant
sur cette situation, le leader
du gouvernement m'a soumis la
présente question de directive. En s'appuyant également sur la décision de
1992 mentionnée précédemment, il m'a demandé de trancher la question de savoir
s'il est nécessaire qu'un ministre soit présent lors de la mise aux voix
d'une motion d'adoption d'un projet de loi.
À
ce sujet, la leader adjointe de
l'opposition officielle a réitéré
que, selon elle, la décision de 1992 était claire et obligeait la
présence d'un ministre en Chambre à ce moment.
• (15 h 30) •
La
question qui m'est soumise est donc
de déterminer si la présence d'un ministre en Chambre est requise lors de la mise aux
voix à l'une ou l'autre des étapes du processus législatif.
Au
soutien de leurs allégations, tant le leader du gouvernement que le leader et
la leader adjointe de l'opposition
officielle me réfèrent à la décision du président Saintonge de 1992.
Voyons
maintenant ce qu'affirme cette décision. J'en cite ici
l'extrait pertinent : «...la présence d'un ministre est obligatoire pour présenter la motion d'adoption
d'un projet de loi d'intérêt public du gouvernement. Mais aucune disposition
du règlement ne rend obligatoire la présence
d'un ministre lors du débat portant sur une étape de l'étude d'un tel projet
de loi.» Fin de la citation.
La
question est donc de savoir comment doit-on interpréter la
notion de présentation de la motion. Est-ce
lorsque le débat débute ou lorsque le débat est terminé et que la motion
est mise aux voix?
Après analyse du Journal
des débats de l'époque, voici comment s'exprimait plus précisément à ce
sujet le président Saintonge. Je le
cite : «...la présence d'un ministre est obligatoire, évidemment, pour
présenter, pour introduire la motion d'adoption du projet de loi.» Fin
de la citation. On peut donc en conclure que, selon cette décision, c'est au moment où on entame le débat que le ministre
responsable du projet de loi ou, en vertu de l'article 189 de notre
règlement, un autre ministre doit être présent pour initier le débat.
Précisons
que ce principe n'est pas uniquement valable pour l'étape d'adoption d'un
projet de loi. En effet, cette décision du projet de loi Saintonge a aussi été
réitérée en 1996, cette fois à l'étape de l'adoption du principe d'un
projet de loi.
Ainsi, bien que la présence d'un ministre
en Chambre soit nécessaire pour initier un débat à l'une ou l'autre des étapes du processus législatif, rien dans notre
règlement n'exige qu'un ministre soit présent pendant la durée du débat.
C'est d'ailleurs ce qu'expliquait la présidence dans sa décision de 1992.
De
plus, rien dans notre règlement ne rend obligatoire la présence d'un ministre
lors de la mise aux voix d'une motion.
D'ailleurs,
si, au moment où la motion est mise aux voix, le ministre auteur du projet de
loi est absent, le leader du gouvernement
a toujours la faculté de reporter le vote afin de lui permettre d'y participer,
conformément à l'article 223 de notre règlement.
Bien
entendu, on peut comprendre l'intérêt que peuvent avoir les députés de
l'opposition à ce qu'un ministre qui présente
un projet de loi soit en Chambre lors de son étude. Par contre, à ce sujet, je
reprendrai les propos du président Saintonge,
qui disait, en rendant sa décision, que, bien que ce ne soit pas nécessairement
souhaitable qu'il n'y ait aucun ministre présent, rien dans notre
règlement n'interdit cette situation.
Pour
résumer, lorsque débute un débat sur une étape du processus législatif, le
ministre qui présente le projet de loi ou
un autre ministre doit être présent en Chambre pour que ce débat soit initié.
Par la suite, l'Assemblée est considérée être saisie de l'affaire, et, au cours du débat qui s'ensuit, de même que
lors de la mise aux voix de la motion, rien n'oblige un ministre à être
présent sur le strict plan de la procédure parlementaire.
Ainsi,
si l'on revient sur les circonstances ayant entouré l'adoption du projet de loi
n° 7, on constate que la ministre de la Santé et des Services sociaux était présente
pour initier le débat et qu'elle est d'ailleurs intervenue à cette occasion.
Le fait que, par la suite, aucun ministre
n'était présent en Chambre lors de la mise aux voix de la motion ne constituait
donc pas un obstacle, en termes de procédure parlementaire, pour procéder au
vote sur cette étape du projet de loi.
Pour
le bénéfice de tous, j'espère que cette décision aura le mérite de clarifier la
situation pour le futur. Et je vous remercie de votre attention.
Affaires
du jour
La
période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer
aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.
M.
Schneeberger : Oui. Alors, M. le Président, on est bien
contents de la décision de la présidence. Je pense que ça va être
beaucoup plus clair, dorénavant, et puis il n'y aura pas d'interpellation au
niveau de ce règlement-là.
Maintenant, pour
débuter nos affaires du jour, je vous demande d'appeler l'article 7 du
feuilleton.
Projet de loi n° 21
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci. À l'article 7, l'Assemblée
reprend le débat ajourné le 30 mai 2019 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 21,
Loi sur la laïcité de l'État. Y a-t-il des interventions? Mme la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme Paule Robitaille
Mme
Robitaille : M. le Président, je me permets de prendre la parole
aujourd'hui pour traiter d'un projet de loi crucial pour la société
québécoise, le projet de loi n° 21.
Avant de traiter des enjeux juridiques, éthiques, sociétaux et philosophiques
que soulève ce projet de loi, je voudrais poser à tous mes collègues une question que je me pose moi-même chaque
jour en tant que députée mais aussi en tant que simple citoyenne. Depuis
le début des consultations, que j'ai suivies assidûment, M. le Président, ma
question est simple : À quoi donc peut
bien servir cette loi? Je vous le demande à tous. Quelle est l'utilité réelle
d'une telle loi? Pensons-y ensemble un instant. En quoi le port de
signes religieux menace-t-il l'identité québécoise? Quel est donc l'immense péril que semble courir notre société?
De quoi veut-on nous protéger? Quelle catastrophe veut-on prévenir? Depuis le début de l'histoire migratoire du
Québec, a-t-on jamais senti ou vécu une quelconque menace provenant dudit
port religieux?
Je
ne peux que m'étonner de cette soudaine urgence à légiférer et, de façon plus
grave, je ne peux m'empêcher de
m'inquiéter en pensant aux répercussions que cette loi aura sur la cohésion de
notre société. Ce projet de loi, s'il est adopté, aura l'effet inverse de ce que le gouvernement clame haut et
fort, c'est-à-dire l'égalité hommes-femmes, parce que la majorité de ses
victimes seront des femmes, M. le Président. Il discriminera d'abord et avant
tout les femmes musulmanes, qui auraient tout avantage à être accueillies dans
nos communautés.
Nous
sommes tous d'accord, nous voulons la cohésion sociale, nous voulons que les
immigrants s'intègrent, nous voulons
que toutes les femmes prennent leur place dans notre société québécoise. Et,
bien sûr, nous n'accepterons rien qui pourrait mettre en péril nos
valeurs, ce que l'on a construit depuis des siècles.
Cette
loi-là ne va pas combattre l'intégrisme. Elle ne va pas aider à l'émancipation
des musulmanes, elle ne va pas contrer
l'injustice sociale ou la violence domestique, elle ne va surtout pas dynamiser
le Québec. Elle favorisera plutôt le ghetto et le repli, elle nuira à
notre volonté d'aller recruter les meilleurs talents à l'étranger.
Le ministre
veut enchâsser la notion de laïcité dans la charte québécoise des droits et
libertés, une charte qu'il veut, en passant,
suspendre pour appliquer sa loi. Mais de quelle laïcité parle-t-il? Parce que
le Québec est déjà laïque. La séparation de l'État et de la religion, ça existe depuis une bonne
soixantaine d'années, M. le Président. Il faut lire l'arrêt Saumur, de la Cour suprême, qui date de 1953, pour
constater que la séparation de l'Église et de l'État, ça existait déjà à cette époque-là. Les congrégations religieuses
ne gèrent plus nos écoles et nos hôpitaux depuis les années 60. Ainsi,
comme l'ont dit nombre de juristes durant les
consultations, Mes Lampron, Bosset, Maclure, Bouazzi, ceux de la Commission des droits de la personne, la laïcité
existe de fait par une série de décisions et par une jurisprudence qui vient
en établir les balises.
Le
ministre et ceux qui l'ont appuyé durant les consultations ont vanté un modèle
de laïcité à la française, loin de
notre culture juridique, de notre culture nord-américaine. Vous pensez
vraiment, M. le Président, que c'est un modèle à suivre? Est-ce réellement un modèle d'intégration mieux que le nôtre,
mieux que le modèle d'ouverture et de tolérance que suit présentement la
société québécoise?
Le
sociologue et coauteur du fameux rapport Bouchard-Taylor, M. Bouchard, a
qualifié ce projet de loi de radical. Son
coauteur, le philosophe Charles Taylor, l'a qualifié de dangereux. Pour Charles
Taylor, un tel modèle de laïcité fermée présente de nombreux
inconvénients. Il casse les carrières, rend très difficile l'intégration des
immigrants, il crée un sentiment
d'aliénation et de division. Dans un tel univers, le gouvernement ne ferait
qu'encourager les préjugés, dit-il, ainsi
qu'un sentiment anti-islam stupide et dangereux. Taylor opte donc pour une
laïcité fondée sur les chartes, où l'État est neutre et les individus
sont libres de leurs choix. C'est à cette laïcité que j'adhère, M. le
Président.
Comme
le disait la Fédération autonome des enseignants, le seul fait de porter un
signe religieux ne remet pas en question la laïcité de l'État. La
liberté de religion est un droit fondamental et ça fait partie de l'identité
intrinsèque de chacun de nous. Là, on veut suspendre cette liberté garantie par
nos chartes des droits.
Dans
son mémoire, la Commission des droits de la personne écrit : Les chartes
des droits protègent la démocratie, offrent
un rempart contre cette menace de tyrannie de la majorité. «...les
législateurs, qui doivent agir dans l'intérêt public, ne peuvent plus, à l'ère des chartes, confondre
cet intérêt avec celui de la seule majorité puisque "l'idée de la
démocratie transcende la règle de la
majorité". Les gouvernements doivent "tenir compte des minorités et
de leurs intérêts" et écouter "la voix des personnes
vulnérables".»
• (15 h 40) •
Je
tiens à rappeler, M. le Président, que la charte québécoise, adoptée à l'unanimité
en 1975, adoptée avant la charte canadienne, garantit cette société
québécoise libre, ouverte et démocratique. Nous y tenons, M. le Président.
Lors
des consultations, Me Bosset nous a expliqué, en consultations, que, si on a
utilisé la clause dérogatoire, si on a
suspendu la charte, dans le passé, dans la très, très grande majorité des cas,
c'était pour accroître les droits des citoyens dans certaines circonstances, rendre notre bureaucratie plus efficace en
ne pénalisant personne. Là, on suspend la charte pour suspendre un droit fondamental, pour retirer un droit, pour retirer
le droit de vivre sa religion comme on le veut. Ça, ce n'est pas rien.
MM.
Taylor et Bouchard et la grande majorité des juristes qui sont venus aux
consultations suivent tous le grand courant de la jurisprudence de nos
tribunaux qui dit que, pour suspendre un droit fondamental comme la liberté de
vivre sa foi, il faut une urgence, un
motif supérieur. Or, M. le Président, tous ceux qui travaillent sur le terrain,
les fonctionnaires, les syndicats des
enseignants, les représentants des commissions scolaires, les agents de la
faune, nous ont tous dit qu'il n'y
avait pas d'urgence. Le sociologue Gérard Bouchard nous disait, et je cite ses
mots exacts : C'est difficile de suspendre un droit fondamental. Dans les années 80, on a reconnu les
objectifs de la loi 101 qui étaient de garantir l'avenir même de la francophonie québécoise, c'était un motif
supérieur. Il faut un motif supérieur. Ici, je ne le vois pas, disait-il. Moi,
non plus, M. le Président, je ne le vois pas.
De
quoi nous protège le projet de loi n° 21? L'urgence de quoi?
La menace de quoi? D'être envahis par des gens qui portent des signes religieux? Croyez-moi, je représente
Bourassa-Sauvé, c'est Montréal-Nord, où il y a une importante communauté
musulmane, et, pour être très, très honnête avec vous, M. le Président,
savez-vous quoi, il n'y en a pas, d'invasion
islamiste, il n'y en a pas. Chacun a sa façon de pratiquer l'islam, chacun a sa
façon de vivre sa spiritualité. On se focalise sur des détails, M. le
Président.
Le
porte-parole du syndicat des avocats et des notaires de la fonction publique me
racontait, après la consultation, que,
durant ses 30 années de pratique, il n'a connu qu'un avocat qui portait un
signe religieux, une kippa, et il était très compétent. Il n'y en avait
pas, de problème.
La
mairesse de Montréal aussi constate que, dans sa ville, où les appartenances
religieuses s'affichent librement, aucun
problème notoire n'est à déplorer. C'est quand même à Montréal où se trouvent
70 % de l'immigration et donc la grande majorité des gens qui portent les
signes religieux.
La
commission scolaire de mon comté, la commission scolaire Pointe-de-l'Île, nous
dit dans son mémoire qu'il n'y a
jamais eu de plainte écrite contre une quelconque enseignante voilée. À la
Fédération des commissions scolaires du Québec, qui représente 49 commissions scolaires,
49 commissions scolaires, une seule plainte recensée depuis 2016, et l'affaire s'est réglée rapidement. La CSN, qui
représente une bonne partie des enseignants, nous a dit la même chose : Il
n'y en a pas, de problème. Dans les écoles, aucun impact négatif de ces femmes
qui portent des signes religieux sur les enfants, aucun prosélytisme. Les enfants retiennent de leurs
enseignantes ce qu'elles leur enseignent et l'amour qu'elles leur
donnent.
La
Commission des droits de la personne, qui gère les accommodements raisonnables
et qui se trouve sur la ligne de front, dit exactement la même chose. Il
n'y a aucune urgence. Aucune urgence, aucune menace.
Alors, pourquoi poser
un geste grave, suspendre les chartes des droits, nos droits fondamentaux,
fragiliser la cohésion sociale chez nous? Je ne comprends vraiment pas.
La ville de
Montréal nous dit qu'il faut que cette loi passe le test des tribunaux, que les
citoyens sachent qu'ils peuvent se
défendre. Elle a raison. En effet, il ne faut pas banaliser la clause
dérogatoire, parce que demain ça va être quoi, quelle autre communauté?
Je me pose la question.
Un
autre problème pour le moins sérieux : Qu'est-ce qu'un signe religieux? Il
n'y a pas de définition dans la loi, et c'est bien mosus, M. le Président. À
Montréal, il y a 108 différentes religions, alors essayez de déterminer
c'est quoi, un signe religieux, avec
108 religions. C'est pour ça que la ville de Montréal dit que
l'application de cette loi-là n'est vraiment pas évidente. Qui tranchera? Qui va sévir? Et, si on ne sévit pas,
quelles seront les conséquences? On nage dans l'inconnu.
Est-ce que la
perruque de la femme juive hassidique est un signe religieux? Est-ce que ma
conseillère municipale qui est juive
hassidim va être bloquée à un moment donné dans sa carrière parce qu'elle porte
une perruque? Avouez, M. le Président, c'est un peu absurde.
C'est un casse-tête
dont les commissions scolaires de Montréal n'ont vraiment pas besoin. Le manque d'espace
dans les écoles, la pénurie d'enseignantes, donner à déjeuner à des enfants qui ont faim,
lutter contre le décrochage scolaire, ça, ce sont des priorités. Ça, ce
sont les vraies urgences, nous disent-ils, pas le port de signes religieux.
On comprend
que les enseignantes qui portaient le voile au dépôt du projet de loi auront un droit acquis, mais elles ne pourront ni être promues ni
changer de commission scolaire. Par ailleurs, toutes les jeunes stagiaires et
les étudiantes en enseignement qui
portent le voile et qui sont compétentes ne pourront être recrutées. Pour ces commissions scolaires qui ont
parmi leur personnel des enseignants qui portent le voile et la kippa et contre qui
elles n'ont jamais, jamais reçu de plainte, c'est absurde, alors même
qu'elles font face, en ce moment, à une pénurie d'enseignants, une pénurie
sévère d'enseignants. Surtout que le
paysage de l'école ne changera pas. Les enfants seront toujours
en contact avec des femmes voilées :
les enseignantes qui auront un droit acquis, les employés du
service de garde, les employés du personnel de soutien comme les psychologues et les ergothérapeutes.
Alors, à quoi sert cette loi à part compliquer la vie de l'administration? C'est ce qu'ils se
demandent. C'est donc pour cela que la Fédération des commissions scolaires du Québec a carrément demandé que des commissions
scolaires soient soustraites du projet de loi.
J'aimerais
aussi citer l'exemple de Taran Singh, membre de la coalition Québec
inclusif, que l'on a entendu lors des consultations. Cet homme éloquent nous a
livré un témoignage poignant dans le plus pur accent québécois, un gars qui habite Le Plateau-Mont-Royal,
un homme brillant. Le seul problème, c'est qu'il porte le turban. Alors, vous
allez me dire que ce gars-là, s'il
était avocat, ne pourrait pas travailler au contentieux d'une commission
provinciale, ne pourrait pas
travailler comme greffier, greffier adjoint, arbitre, enseignant,
agent de la faune, policier ou juge? Vraiment? Vraiment, ce n'est pas
sérieux?
Le turban
sikh n'est pas une blague, ce n'est pas un accessoire que Taran peut laisser
dans son garde-robe pendant sa
journée de travail et remettre quand il rentre à la maison. Ce turban fait
partie intégrante, M. le Président, de son identité. C'est donc dire que l'État québécois ne pourra pas bénéficier de
l'intelligence de cette personne-là, que Taran ne pourra pas devenir notaire ou avocat du gouvernement provincial, qu'il ne pourra pas, par exemple, devenir avocat à
l'Assemblée nationale.
Pourquoi, M. le
Président? Pourquoi
l'Assemblée nationale se priverait de bons juristes parce qu'ils
portent un signe religieux? Pourquoi
l'école de mes enfants doit se priver de professeures aimantes et généreuses
parce qu'elles portent le foulard?
Qu'est-ce que ça change? Vraiment, ça n'a pas de bon sens. C'est une immense
perte pour notre fonction publique, plus encore pour la société
québécoise en général.
Et surtout
c'est incohérent. Si on regarde la loi, si Taran Singh est avocat, il ne pourra
pas travailler à l'Assemblée nationale
ou à la Régie des marchés agricoles et alimentaires. Il pourra, par contre,
travailler comme avocat à la Régie de
l'assurance maladie et à la Régie des rentes du Québec. Voulez-vous m'expliquer pourquoi? Bien, ça n'a aucun sens.
Regardez
l'annexe II du projet de loi, ça n'a plus rien à voir avec l'interdiction
des personnes en autorité de porter des signes religieux. Qu'est-ce
qu'une position d'autorité au sens de ce projet de loi? C'est à n'y rien
comprendre, M. le Président.
• (15 h 50) •
J'aimerais
réitérer que l'objectivité et la compétence ne sont pas tributaires du port
d'un signe religieux. Ça, le droit, nos cours de justice l'ont maintes
et maintes fois répété.
Et quel
message envoie-t-on à la communauté sikhe, à la communauté juive, à la
communauté musulmane, aux femmes
musulmanes ou à n'importe quelle communauté dont les membres porteraient un
signe religieux? Ce n'est pas ça, M. le Président, le Québec. Le projet
de loi va contre l'intégration, le projet de loi n° 21
va contre l'intégration. C'est irresponsable
dans le contexte actuel où le vieillissement de la population donne à
l'immigration tout son sens. Il faut que nos immigrants s'intègrent bien, qu'ils soient bien accueillis. Ce n'est
pas ce que propose ce projet de loi. C'est troublant dans une société
comme la nôtre qui, de toute son histoire, a valorisé la différence,
l'innovation et l'intelligence.
Le
psychiatre, Eric Jarvis, de l'hôpital juif de Montréal, responsable du Service
de consultation culturelle, explique dans
une lettre écrite à la commission que la religion est souvent la seule source
de soutien principal pour les nouveaux arrivants.
En ciblant explicitement des symboles
religieux et en suggérant qu'il est mal de les porter dans un environnement
public, on envoie le mauvais message, on ne
favorise pas le processus d'intégration à la société québécoise. Est-ce
vraiment ce que l'on veut?
Je me permettrais
de reprendre les propos de Me Bouazzi, venu témoigner lors des
consultations. Selon lui, le projet
de loi va toucher bien plus de
citoyens que ceux appartenant aux corps de métier mentionnés, le projet de loi va pousser un repli
communautaire. Me Bouazzi craint même que la tendance ne s'inverse et
qu'on ne se mette à envoyer les enfants dans des écoles confessionnelles. Il
pense également que... Il pense également à ces jeunes qui
vont voir leurs parents stigmatisés.
Il dit qu'il faudra du temps, du temps pour panser les blessures, et qu'un tel
modèle de laïcité ne fera qu'empoisonner notre société. Malheureusement,
je crois qu'il a raison.
D'ailleurs,
les écoles confessionnelles continueront à être financées par le gouvernement et elles ne seront pas touchées par le projet de loi. Ça aussi,
c'est incohérent.
Et il ne faut pas oublier que les premières
victimes seront surtout des femmes, des enseignantes musulmanes. Par là, plusieurs soutiennent que ce projet de loi est sexiste. La
mairesse de Montréal nous indique
d'ailleurs que cette loi n'aidera pas les femmes immigrantes parce qu'elle limite leur accès
au travail, et ces femmes-là ont besoin d'ouverture parce qu'elles
subissent un taux de chômage deux fois plus élevé que d'autres Montréalaises.
Ces
femmes vivent déjà les contrecoups de ce projet de loi, la montée d'une
certaine islamophobie. Samira Laouni, consultante
en rapprochements culturels, féministe convaincue, porte le voile. Elle est
venue en consultations, et voilà ce
qu'elle déclare : «[Depuis l'annonce du projet de loi,] ce qui se passe
sur le terrain est atroce», nous dit-elle. Il faudrait voir ce qui se
passe «à tous les jours comme haine, comme rejet». C'est comme ça qu'elle se
sent. Et je continue : «[J'étais] venue
au Québec [...] pour cette empathie[...]. [Mais] si on enlève cette notion
d'humanité, qu'est-ce qu'il nous [reste]?»
Il
faut comprendre que l'immense majorité de ces femmes portent le voile par choix
ou par habitude culturelle. C'est
leur façon de vivre leur foi. L'ironie, c'est que cette loi sur la laïcité
risque d'être invalidée parce qu'elle va contre l'égalité hommes-femmes
qu'elle prétend prôner, parce qu'elle va contre l'article 28 de la charte
canadienne, qui échappe à la clause
dérogatoire. L'article 28 est une avenue de contestation devant les
tribunaux, il y en aura d'autres. Ainsi,
nous nous embarquerons dans un maelstrom de contestations judiciaires. Autant
dire qu'au-delà du fait de ne rien régler ce type de contestation va
coûter cher aux contribuables.
En
conclusion, M. le Président, ce projet de loi n'est pas dans la suite logique
de l'histoire du Québec. Au-delà de
toutes les incohérences que ce projet de loi soulève, au-delà de tous les
amalgames rapides et disproportionnés que ce projet de loi induit, j'aimerais me tourner vers l'avenir. Quand
j'essaie d'imaginer la société québécoise de demain, celle qui vivra dans 10 ans, 20 ans,
50 ans, je me plais à rêver d'une société où chaque citoyen sera libre de
choisir la façon dont il s'habille,
où le port d'un voile, d'une kippa ou d'un turban ne signifiera rien de plus
que ce qu'il est, la liberté d'être qui
on veut. Je rêve à nos jeunes Québécois, alors devenus adultes, qui verront
tous ces signes comme des anecdotes parce qu'ils auront compris en les côtoyant que ce ne sont pas les signes
religieux qui déterminent la valeur d'un être humain ou sa compétence.
Le
Québec a toujours été fier et avec raison d'être un modèle de tolérance,
d'acceptation des différences au-delà de la couleur de peau ou des choix de
culte. Pourquoi le gouvernement de la CAQ cherche-t-il à changer un modèle qui
fonctionne?
Dans
un État de droit, la cohésion sociale est un objet précieux et délicat, que
l'on se doit de chérir, de protéger et de
défendre, et c'est exactement ce que je m'engage à faire lors de l'étude de ce
projet de loi. Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais
maintenant M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : Merci, M. le Président. Lorsque mes collègues du caucus du
Parti québécois m'ont désigné comme chef parlementaire, j'ai demandé à
conserver le dossier de la laïcité. C'est un dossier important au plus haut
niveau. Je veux réitérer la position du Parti québécois, la formation qui est
la mieux préparée à ces enjeux.
La première formation
politique qui a voulu légiférer en matière de laïcité, c'est le Parti
québécois, sous le gouvernement de Pauline
Marois. J'ai eu le grand privilège d'en faire partie. Et notre volonté, c'est essentiellement de poser un geste législatif
que les sociétés normales font : s'assurer de la séparation de l'Église de
l'État. C'est de ça qu'il est question. Si on adhère à ce principe,
bien, il faut poser les gestes en conséquence. Et la société québécoise est une
société qui, bien qu'elle ait à bien des
égards pris ses distances avec la religion, demeure toutefois... Dans l'espace
public, à travers les gens qui
travaillent pour la fonction
publique, qui travaillent pour l'État, se retrouvent encore des gens qui
décident de porter des signes religieux.
Alors,
il y a bien des façons de l'aborder. Nous l'avions fait avec notre
gouvernement, avec un dossier étoffé qu'on appelait la charte. Nous étions un gouvernement minoritaire; malheureusement,
nous n'avons pas pu faire adopter cette législation. Si nous avions été majoritaires, ce projet de loi aurait
été adopté, et on n'aurait peut-être pas le débat qu'on a aujourd'hui.
Ceci
étant dit, est arrivé un autre gouvernement qui était, lui aussi, fiduciaire du
rapport Bouchard-Taylor, comme nous
l'étions, et qui a choisi de poser un geste tardivement dans son mandat,
l'adoption du projet de loi n° 62 sur la prestation de services à visage découvert. C'est un minimum,
on en conviendra. C'est une oeuvre inachevée, répondre au rapport Bouchard-Taylor. Et le nouveau
gouvernement de la Coalition avenir Québec s'était engagé à aborder cette
question rapidement sur la base du rapport et aussi de sa conception de
ce que devrait être la laïcité à travers un premier geste législatif. Le Parti québécois a décidé de
poursuivre son engagement, d'aborder cette question avec beaucoup de sérieux,
de professionnalisme, de rigueur, surtout beaucoup de cohérence, et c'est ce
que je vais vous exposer aujourd'hui.
La
cohérence, c'est de maintenir ses principes parce qu'on y tient, pas parce
qu'ils sont populaires, pas parce qu'ils répondent à des attentes de certains groupes ou d'un certain électorat,
non, parce qu'on y croit. Et à l'époque c'est ce qui nous guidait. Bien sûr, il y avait de
l'opposition, mais nous étions convaincus qu'on faisait la bonne chose, qu'on
proposait la meilleure loi possible.
Et notre participation, comme députés du Parti québécois, vise le même
objectif : l'adoption de la meilleure loi possible.
Le
gouvernement a fait ses choix. Il propose que les personnes en autorité — juges, procureurs, policiers, gardiens
de prison — ne portent pas de signes religieux parce
qu'ils sont en position d'autorité, ils peuvent poser des gestes coercitifs.
Il ajoute également les enseignants et
enseignantes mais dans le réseau public seulement. Il ajoute les directeurs
d'école, proposition que le Parti québécois a faite. Il fait également
le choix d'indiquer que les personnes qui pourraient assumer votre rôle de président de l'Assemblée nationale ou de
vice-président devraient se poser des questions à savoir s'ils
priorisent leurs fonctions ou le port de signes religieux. Ça, c'est une
nouveauté.
Le Parti québécois a une position très
claire depuis son congrès de 2017. Cette position, il l'a portée en campagne
électorale, il la porte encore aujourd'hui. C'est important de le réitérer
parce que notre position avant la campagne électorale, pendant la campagne électorale et après la campagne
électorale, c'est la même. On ne peut pas en dire autant de toutes les
formations politiques à l'Assemblée nationale.
À
titre d'exemple, si on avait aujourd'hui à proposer une motion seulement à
l'effet de réitérer que la prestation de
services se fait à visage découvert, il y a au moins une formation politique
qui serait en défaveur. Il y a des positions qui ont changé, la nôtre
demeure la même.
Pourquoi
il faut faire un projet de loi sur la laïcité? Pour que les règles soient
claires pour tout le monde, que ce soit inscrit dans une loi. Et nul n'est censé ignorer la loi. Alors, on
envoie un message fort que le Québec, dans la modernité, choisit la laïcité, comme d'autres l'ont fait bien
avant, bien avant elle, bien avant la société québécoise. On peut évoquer
la France, mais plusieurs pays occidentaux ont choisi, à juste raison, de
séparer l'Église de l'État.
• (16 heures) •
C'est
un premier pas, un premier pas important dans notre société, mais un premier
pas qui nous amène vers plus de laïcité,
plus d'encadrement, une volonté que l'espace public, notamment les écoles, soit
dépourvu de signes religieux qui pourraient
ressembler à certains égards à du prosélytisme, par exemple. Il ne fait pas de
discrimination, quant à nous. On croit
que les personnes qui travaillent pour l'État, ce qui est un privilège,
devraient s'assurer que, lorsqu'ils enseignent ou lorsqu'ils offrent une prestation de services
publics, il n'y a pas de signes religieux, pour aucune religion, d'ailleurs,
aucune religion. C'est le choix qu'on fait, c'est le minimum.
La
religion, c'est dans l'espace privé. Lorsqu'on a posé la question aux Québécois dans un sondage Léger, les Québécois
de toutes les régions du Québec ont répondu. 82 % des Québécois et Québécoises souhaitent que la religion s'exerce essentiellement dans l'espace privé. Nous
sommes de cet avis. Mais on a une responsabilité comme parlementaires à l'égard de l'État du Québec et nous souscrivons
au projet de loi essentiellement pour ce qu'il est, une réponse au rapport
Bouchard-Taylor, une réponse bien
incomplète, je vous dirai pourquoi, mais une réponse, une législation, une
volonté politique affirmée. Et moi, je salue cela.
Ce
qui me permet de réitérer que c'est un projet de loi totalement légitime. C'est
important de dire ça parce que j'ai entendu bien des choses. Quand j'entends le
maire d'une ville qui a refusé de se fusionner à l'île de Montréal, pour
ne pas la nommer, Hampstead, le maire
Steinberg dire que c'est une loi qui est indigne, voire raciste, je trouve
qu'on n'a pas la même lecture de la
société québécoise. De vouloir encadrer les signes religieux, c'est un choix de
société, un choix qui est porté par une majorité de Québécois.
Et
vous savez quoi? Il n'est pas interdit pour une société de faire des choix en
fonction de la majorité. On peut décider systématiquement d'exclure tout
débat où un lobby, où des individus, où des juristes disent : On ne peut
pas le faire parce que moi, je me sens
brimé. Bien, si on pouvait réhabiliter le nous, le nous inclusif, le nous qui
fait en sorte que, dans nos
institutions, il n'y a personne qui a un droit plus que d'autres, c'est la même
chose pour tout le monde. Nous croyons à ça au Parti québécois et depuis
longtemps.
De
la fondation de notre grande formation politique avec René Lévesque jusqu'à
aujourd'hui, plusieurs gestes ont été posés réaffirmant d'abord la
souveraineté de l'Assemblée nationale, hein, et ça se manifeste de façon
cyclique. L'autodétermination des peuples,
ça s'exprime à travers l'Assemblée nationale. La capacité d'intervenir sur des
aspects importants de notre vie
collective, ça a été le cas avec la Charte de la langue française en 1977, une
loi qui était abondamment contestée, souvent par les mêmes qui
contestent cette loi.
S'il
avait fallu attendre l'unanimité des membres de l'Assemblée nationale en 1977,
quand le grand Camille Laurin a proposé la loi 101, on n'aurait pas de
loi 101 aujourd'hui parce que les libéraux s'y opposaient. Ils disaient :
On est l'opposition officielle, ça prend une loi unanime, on est contre. Alors,
non, vous n'allez pas aller plus loin dans la préservation
du français. N'adoptez pas cette loi. Et, M. le Président, je vous fais grâce
de tout ce que René Lévesque, Camille Laurin et leur fantastique équipe
ont dû subir en termes d'attaques. Est-ce qu'ils ont eu raison de légiférer? La réponse est oui. Plus de 40 ans plus tard,
n'eût été la loi 101, le visage québécois et surtout le langage québécois ne
seraient pas le même. C'était une loi nécessaire.
Le
gouvernement actuel considère que c'est une loi qui est nécessaire, une loi qui
est légitime et une loi qu'on est
capable d'adopter entre parlementaires. On ne va pas s'en remettre aux juges.
Les parlementaires sont capables d'adopter une loi. Nous sommes de cet
avis.
Qu'est-ce
qu'il va arriver au lendemain d'une loi adoptée sur la laïcité? Les règles vont
être précises pour tout le monde, et
ça ne sera pas prématuré. Tout le monde saura à quoi s'en tenir. Si on choisit
la fonction publique, on connaîtra les
règles. Et vous savez quoi? Il y a plein de domaines où les gens peuvent
exprimer leurs talents. Les personnes qui sont déjà en emploi, notamment dans l'enseignement, et qui portent des signes
religieux vont continuer de porter les signes religieux. Les personnes qui envisagent d'enseigner et qui n'ont pas
commencé leur parcours même de formation sauront qu'elles auront un choix à faire entre le port des signes religieux et
l'emploi qu'elles souhaitent occuper. C'est ça, le débat qu'on a, c'est
un débat nécessaire, mais c'est un débat qu'il faut fermer. Je suis de cet
avis.
Et
je suis convaincu qu'on est capables d'adopter la meilleure loi possible, avec
le concours de tout le monde, la
bonne foi de tout le monde, dans le temps qui est imparti dans cette session
parlementaire, donc d'ici le vendredi 14 juin prochain. Nous sommes d'avis qu'on peut même adopter cette loi sans
mesure d'exception, ce qui serait souhaitable. Nous sommes opposés à une mesure expéditive qu'on
appelle un bâillon, qui ferait en sorte de terminer une loi aussi importante
sous la contrainte. Alors, nous offrons
notre concours pour bien travailler sur ce projet de loi pour qu'il soit adopté d'ici la fin de la
session parlementaire et nous réservons notre choix quant à son adoption.
Nous aurons des propositions à faire, évidemment, mais la table est
mise : un projet de loi nécessaire; un projet de loi légitime; un projet de loi qui repose sur la souveraineté
de l'Assemblée nationale; une volonté claire d'envoyer un message à toutes ces
personnes qui attendent que le Québec finisse par poser un geste, et le
gouvernement veut poser ce geste, nous voulons poser un geste également.
Et
il y aura un après, et l'après, ça sera la nécessité pour l'ensemble des
parlementaires d'inviter la population québécoise
à respecter cette loi. Ça, c'est fondamental. Quelle ne fut pas ma surprise ou
demi-surprise d'entendre, lors de la commission parlementaire, des
représentants de commissions scolaires anglophones nous dire que non, nous,
c'est à la carte, la société québécoise, on
fait ce qui fait notre affaire. Ce projet de loi là, on ne va pas le respecter
puis on ne va pas inviter nos membres
à le respecter. Vraiment? La même communauté, qui est une communauté qu'on
respecte, qui a énormément
d'institutions au Québec — je serais prêt, moi, à comparer les institutions anglophones
québécoises sur notre territoire aux institutions francophones dans les
autres provinces n'importe quand, M. le Président — communauté anglophone qui ne voulait pas aussi qu'on légifère
sur le français et qui ne voulait pas non plus d'une île, une ville, qui
était le projet du Parti québécois.
Bien, je veux
dire à la communauté anglophone qu'au Québec, société libre, démocratique, avec
un parlement dûment élu avec 125
représentants et représentantes, on est capables de faire des choix pour la
nation. Et il arrive qu'une nation
décide pour son avenir — et c'est ce que fera le projet de loi, il va prévoir un cadre pour
l'avenir, prévoir l'évolution de la société québécoise — et, par prévention, arrive avec une
législation qui peut paraître à certains égards non avenue pour plusieurs en disant : Il y a très peu de cas,
mais, si on la regardait en disant : C'est une loi qui nous prépare à une
pluralité des cas possibles pour
l'avenir de la société québécoise? Je pense vous avoir exposé la nécessité
d'une loi, dans quel cadre elle
s'exprime. Elle est légitime, elle repose sur la souveraineté de l'Assemblée
nationale, elle est nécessaire, c'est un pas important, mais il y aura
un après.
Cette loi,
évidemment, d'entrée de jeu, le gouvernement pourrait la faire adopter
lui-même, il est majoritaire; avec notre système électoral, il est
majoritaire. Si on était dans un autre mode de scrutin, bien la Coalition
avenir Québec, avec 37 % des voix et
60 % des sièges, ne serait pas dans la même position. Il faut croire que
c'est un système qui la favorise pour l'instant. Mais ils ont eu la grandeur
d'esprit de dire : On va ouvrir sur l'enjeu de la proportionnelle, et je
les remercie, ça montre leur souci de
la démocratie, puis on aura des débats là-dessus. Ce sera une autre grande loi
qu'on pourra voter ensemble. Mais il pourrait faire adopter la loi seul, mais
je pense qu'il souhaite avoir le plus grand assentiment possible.
Alors, comment y arriver? Il y a l'opposition
officielle, il y a la deuxième opposition, il y a le Parti québécois puis il y
a deux députés indépendants. Le Parti québécois, je vous l'ai dit, a une
position très arrêtée, très claire, très cohérente,
que je vais vous exposer, sur ce projet de loi et sur ce qui manque au projet
de loi pour qu'on puisse l'adopter. Je
ne crois pas que le gouvernement va faire l'unanimité. J'ai suivi les débats,
j'ai suivi les positions du Parti libéral du Québec et de la formation Québec solidaire, et, franchement, bien malin
qui pourrait voir la plus grande différence entre les deux, sinon que le Parti libéral assume
totalement le projet de loi n° 62 sur le visage découvert, ils l'ont fait adopter,
ce qui n'est plus le cas pour Québec
solidaire. Donc, il y a cette différence-là. Pour le reste, les interactions
avec les groupes, avec les individus
ont démontré qu'ils sont contre ce projet de loi, et c'est leur droit le plus
strict, et ils sont certainement au diapason de ce qu'ils entendent dans leur
circonscription, et c'est bien ainsi, et ça repose sur la régie interne de
chacun des caucus. Alors, j'ai peu d'espoir,
en fait, et, probablement, le leader du gouvernement a encore moins d'espoir
qu'il puisse rallier le Parti libéral et Québec solidaire.
• (16 h 10) •
Quant à nous,
il y a trois points, trois éléments fondamentaux qui pourraient être changés et
faire en sorte de recevoir notre plein assentiment. Je les expose.
Si on considère que les enseignants et les
enseignantes sont des personnes en autorité... C'est ce qu'expose le gouvernement en disant : Il y a 69 % des
Québécois qui disent que non seulement ils sont en autorité, mais ils devraient
être assujettis à la loi, donc ne pas porter de signes religieux. Ces données
proviennent d'un sondage commandé par le gouvernement et rendu public dans Le Journal de Montréal et Le
Journal de Québec au printemps dernier. 69 %, il s'appuie là-dessus, donc le gouvernement, il dit : Ça
devrait s'appliquer aux enseignants et enseignantes parce que c'est des
personnes en autorité. Soit. On est
d'accord avec ça, c'est pour ça qu'on a dit : Les directeurs d'école
aussi. Ça a été accepté, c'est bien.
Mais les éducateurs et éducatrices en garderie, est-ce que ce n'est pas des
gens en autorité avec les tout-petits? On croit que oui.
Lorsque le
gouvernement a sorti son sondage, il était très heureux de dire : Écoutez,
nos mesures sont appuyées par deux
tiers de la population. Mais il a fait une erreur, il a oublié de retirer du
sondage la question qu'il avait posée sur les CPE. On l'a vue. Nous, c'était déjà notre position, puis ça nous a
confortés. 69 % des Québécois en faveur de l'interdiction des signes religieux pour les enseignants et enseignants.
Combien pour les éducateurs et éducatrices en CPE, services de garde?
67 %. La question que la CAQ avait oublié d'enlever du sondage avant de le
publier.
Étonnant, ils ne veulent pas, ils ne veulent pas
que... ils veulent une liberté de conscience au primaire puis au secondaire, mais pas pour la petite enfance, dans
le préscolaire. Ça ne tient pas debout. S'il y a les enseignants, il y a les
services de garde, ça m'apparaît une nécessité.
Donc, services de garde à l'école, centres de la petite enfance, ça devrait
s'appliquer là, je trouve ça important.
Alors, question de cohérence, ils vont se le faire dire, hein, jusqu'à la fin.
Ça va un de nos amendements, je l'annonce. Je l'ai déjà annoncé
d'ailleurs.
Un autre
enjeu. Ça s'applique aux enseignants, mais du secteur public. O.K., c'est
normal. Donc, liberté de conscience pour
les enfants, pour leurs parents dans le secteur public. Liberté de conscience,
ça devrait être pour tout le monde? Non, M. le Président, pas dans le secteur privé, oh que non! Le gouvernement
a un préjugé favorable pour les écoles privées et, au courant de ce mandat, vous allez vous en rendre
compte à plusieurs occasions, moi, je le sais. Alors, ils ont choisi de ne
pas les accabler avec ça : Non, non,
non, la loi ne s'appliquera pas à vous, mais non, vous avez une belle grande
tradition, il y a plusieurs des nôtres qui sont allés dans vos écoles,
on ne fera pas ça. Le gouvernement d'affaires, bien on sait reconnaître les grandes institutions :
Inquiétez-vous pas, ce n'est même pas dans la loi, puis, quand le Parti
québécois va en parler, là, on s'est
trouvé une ligne, là, ça devrait tenir, là, ce n'est pas directement des
employés de l'État, puis c'est correct.
Les écoles confessionnelles, aïe, embarquez pas là-dedans, là, on s'en occupe.
C'est à ça que ça ressemble pour l'instant.
Les écoles privées au Québec, ça
pourrait être l'objet d'un fantastique débat. D'ailleurs, moi, personnellement,
c'est un des enjeux qui me touche le plus
depuis mon entrée en politique. Ça, je pourrais vous en faire un long discours d'une heure uniquement là-dessus. Les écoles
privées au Québec, ce n'est pas des écoles privées, c'est des écoles
semi-privées. Pourquoi? Je pourrais
nommer plein d'exemples. Là, je regarde les députés qui sont là, puis je
reconnais des institutions privées
qui sont dans les différentes régions et je sais très bien que les élèves sont
financées à 60 %, voire à 70 % — ce n'est pas très privé, ça — que l'État injecte 500 millions de
dollars, annuellement, dans les écoles privées, des écoles qui, dans bien des cas, choisissent leurs
étudiants. J'ai dit ça au premier ministre. Il me dit — puis le ministre de l'Éducation
répète la même chose, hein, c'est la même ligne : Oui, mais ils ont choisi
les écoles privées parce qu'ils offrent un enseignement
religieux. Ils disent ça sans rire, hein, c'est pour ça que les gens vont à
Brébeuf, c'est pour ça qu'ils vont aux eudistes à Rosemont, c'est pour
ça qu'ils vont à Saint-Bernard à Drummondville, c'est pour ça qu'ils...
Moi,
je ne crois pas ça. Il y a plein de raisons : la qualité des programmes,
le prestige que ça peut apporter... Je ne juge pas, je dis juste que si, moi, j'envoie de l'argent, comme
contribuable, aux écoles privées, si on accepte l'argent de l'État dans les écoles privées, on accepte les
lois aussi. Si la liberté de conscience, c'est important pour les enfants du
public, ça devrait l'être pour le
privé aussi. Puis, quand je vous dis qu'il y a un débat à faire là-dessus, là,
au Québec, je vous ai dit 500 millions
de dollars, 60 % à 70 % par élève. C'est combien chez nos voisins? En
Ontario, 0 %. Au Nouveau-Brunswick, 0 %. Mais, au Québec, on a choisi
de maintenir ce système semi-privé qui est à l'abri même d'une loi fondamentale
du Québec sur la laïcité. Ah bien, ça, ça va
être dur à expliquer pour le gouvernement. Même Gérard Bouchard a dit que
ça ne tenait pas le coup. Pourquoi vous
faites ça? Pourquoi vous avez un genre de rente corporatiste avec le privé? Au
nom de quoi? Au nom de quelle discussion que vous avez eue? C'est une clientèle
que vous voulez favoriser? Moi, je veux que ça s'applique à tout le
monde, la loi. Là-dessus, je suis assez persistant.
Troisième
et dernier élément, qui ne relève pas de la loi, on en a discuté en Chambre,
j'ai posé des questions : le cours
d'éthique et culture religieuse, cours qui existe depuis un peu plus de 10 ans,
qui se veut essentiellement un apprentissage continu, dans le cursus
scolaire, des religions, notamment une représentation des religions qui est
très stéréotypée. Notamment, c'est la
religion musulmane, la religion juive, c'est très stéréotypé. C'est vraiment,
là, une vision qui va à l'encontre de
ce qu'on a ici, au Québec, parce que je ne crois pas qu'on fasse la promotion
du multiculturalisme. Au pire, certains
adopteront l'interculturalisme. Je pense qu'on a une vision inclusive où une
personne ne se définit pas d'abord par
sa religion, par sa dévotion, sa spiritualité, se définit comme étant un homme,
une femme, un député, un enseignant, un
ouvrier. Alors, j'ai demandé, comme bien d'autres l'avaient fait avant, qu'on
modifie le cours, et le ministre a fini par répondre oui.
Alors,
je profite de l'occasion pour réitérer aux gens qui m'écoutent, du
gouvernement, qu'il serait plutôt avisé de nous fournir l'échéancier de changements de ce cours avant la fin du
processus législatif au projet de loi n° 21. Ça serait de nature à nous conforter à l'idée qu'ils vont le
faire. J'ai demandé au ministre, encore récemment : Je veux un échéancier.
Vous allez le changer quand puis comment?
Ça, il peut le faire, là, c'est dans sa cour à lui, puis le temps avance, hein,
ce n'est pas pour rien qu'on siège un lundi,
là, même s'il y a l'absence de plusieurs ministres, là, parce que le
gouvernement veut que ça avance puis on veut que ça avance.
Donc,
trois éléments : école privée, services de garde, éthique et culture
religieuse. C'est nos trois demandes. On va en faire... sauf pour le dernier élément, on ne peut pas en faire un
amendement, parce que ce n'est pas dans le projet de loi, mais les deux autres,
on va en faire des amendements, le gouvernement en disposera, on va essayer de
le convaincre. Il me semble que le
projet de loi serait plus cohérent. De toute façon, je lui demande de renoncer
à avoir l'appui d'autres formations
politiques, il dénaturerait trop son projet de loi. On part de tellement loin.
À moins qu'il ait des discussions que je
ne connais pas, qui lui permettent de croire qu'il pourrait arriver, à terme,
avec un appui de l'ensemble des parlementaires ou des deux tiers des parlementaires en changeant son projet de loi.
Alors, moi, au lieu d'aller vers le bas en disant : Bien, on va enlever des éléments, je lui dis : Complétez
des éléments. L'idée, ce n'est pas de dire que le Parti québécois va plus loin,
c'est qu'on est plus cohérents, puis j'aimerais ça qu'on se dise, ensemble,
qu'on est plus cohérents avec cette loi une fois qu'elle aura été
modifiée. Alors, je vais vouloir des modifications au projet de loi à travers
des amendements.
La
position sur l'école privée ne tient pas la route, et, quand les Québécois vont
apprendre, au cours des prochains jours, sur quoi se base l'argumentaire du
gouvernement quant aux écoles privées, ils vont se poser des questions
eux aussi. Même chose pour les services de
garde, appui à 67 % des Québécois. Alors, quand moi, je parle des services
de garde qui seraient assujettis au projet
de loi n° 21, je parle au nom des deux tiers des Québécois.
La CAQ fait le choix de ne pas retenir cette position-là, on ne sait
toujours pas pourquoi.
Le ministre n'a pas
dit grand-chose dans le projet de loi. Il y a des éléments qui ont été évoqués
par d'autres formations politiques, par
exemple qu'en est-il de la définition d'un signe religieux, notamment un signe
invisible, comment définir un signe
invisible? Il est invisible. Quelles sont les sanctions? Le ministre a ces
réponses-là, mais il a choisi de ne pas les mettre au jeu pour l'instant,
ce qu'il devra faire dans le cadre de l'étude du projet de loi.
• (16 h 20) •
Donc,
on souhaite adopter la meilleure loi possible, on va être attentifs aux
réponses qui vont nous être données. La
loi sera adoptée, hein, avec ou sans nous, du Parti québécois. Quel sera
l'après? Je l'ai évoqué à quelques reprises tout à l'heure pour vous maintenir en intérêt, là, puis pour voir qu'il y
avait un chapitre qui serait ajouté. Mais l'après, c'est que quelle que soit la loi qu'on vote ici, elle
n'est pas à l'abri de contestations de gens qui pensent que, le Québec, on ne
peut pas le laisser faire tout seul, là. Non, ne les laissez pas faire des lois
qui conforteraient l'idée qu'ils peuvent, à la majorité, prendre des décisions
pour l'avenir de leur nation. Ah non! Les tribunaux sont là pour ça.
Alors, il y a des gens, là, qui observent ça et
qui nous le disent, ils ne sont pas gênés : On va tout faire pour la contester. Puis ça part de loin. Le premier ministre du Canada, l'honorable Justin Trudeau, quelques minutes
après qu'il a été saisi de la volonté
du gouvernement d'avoir un projet de loi à cet égard, a refusé ça d'emblée. Même chose pour ses ministres.
Le gouvernement du Canada, c'est non.
Puis
il y aura des contestations
judiciaires. Ça nous prend la clause dérogatoire pour pouvoir appliquer la loi
pour cinq ans. Qu'est-ce qui arrivera
dans cinq ans? Je ne le sais pas, mais, vous voyez, c'est le seul bouclier
qu'on a. La nation québécoise qui
s'imagine qu'elle est totalement souveraine, même à l'intérieur du Canada, ce
qui n'est pas ma conviction, qui se
dit : Bien, on peut tout faire, là, même dans le cadre de... on est une
province, puis on peut aller bien loin, puis on peut même aller nationaliste à l'intérieur du Canada — ça, c'est fort — bien je pense qu'on va réaliser que, oui, on
va adopter la meilleure loi possible.
Il y a des contraintes. Le Canada ne laissera pas faire ça. Oh non! Puis pas
nécessairement les gouvernements, les
tribunaux. Parce que qu'est-ce qu'on contrôle en fait? Notre parole, nos lois,
nos tribunaux qui relèvent du Québec.
Mais la Cour suprême, là, un peu somme la tour de Pise, est pas mal du même
bord. Elle penche du même bord quand vient le temps de parler de la
nation québécoise.
Le Québec est
confronté en permanence aux limites de son statut de province. On peut
l'accepter ou on peut en tirer des
conclusions politiques et agir en conséquence. Je suis un indépendantiste. Et
voici un argument supplémentaire qui
va nous heurter de plein fouet. Lorsque les Québécois réaliseront, le
14 juin prochain, ou un peu plus tard, que l'Assemblée nationale a adopté démocratiquement un projet de
loi et qu'il se pourrait qu'elle ne puisse jamais l'appliquer compte tenu
des contestations, ils vont se dire :
Mais pourquoi ils ne respectent pas notre loi? Bien, parce qu'on est une
province. On vous l'a dit déjà. On l'a dit plusieurs fois. On peut
l'accepter ou on peut en tirer des leçons politiques.
Alors, dans
ce domaine-là comme dans d'autres, le premier ministre pourra placer le drapeau
le plus gros qu'il veut — d'ailleurs, c'est déjà fait, là, le record
est établi, là, ça a été fait à la mise à jour économique, il était
gigantesque, il l'envisage pour le
prochain toit du Stade olympique, M. le Président — ça ne suffira pas. Une cage, aussi dorée
soit-elle, demeure une cage. Les
aspirations québécoises, elles se heurtent aux limites qu'on nous impose, ce
carcan qu'on nous impose. On va
l'adopter, la loi. Ça va être la meilleure possible. Puis, moi, je veux y
contribuer, comme je le fais depuis le
début, avec une bonne attitude, avec des propositions. Mais elle va être
contestée. Et qu'est-ce qu'on va faire quand elle va être contestée? On va se
dire : Bon, on l'a essayé, mais, finalement, le Canada ne veut pas. Ça
fait que : Go, Team Canada! On
continue. On est à l'aise avec le Canada. On est réconcilié avec le Canada. Je
veux dire ça tout de suite parce que je l'aurai dit. Et je veux qu'on
sache dans quel état d'esprit ça va se passer, une fois que ça sera voté ici.
Alors, est-ce
que l'exercice est futile? Certainement pas. Que la nation québécoise, à
travers ses parlementaires, décide de
se donner une loi, c'est un geste fort. C'est important, ça. Quand on se lève
pour voter, là, c'est fort. D'ailleurs, il devrait y avoir encore plus
de poids là-dessus. D'ailleurs, on aura une initiative au cours des prochains
jours qu'on proposera aux parlementaires,
qui va valoriser davantage le rôle du député et qui va marquer davantage
l'importance du vote. Ça va être
important. Il y a des gens qui vont voter pour, des gens qui vont voter contre,
des gens qui vont peut-être s'abstenir.
Ça va être un vote important. Ça va être un vote qui, en partie, mettra fin, en
tout cas, à beaucoup d'attention médiatique au cours des dernières
années et qui sera le début de l'application d'un nouveau vivre-ensemble, où on
continuera de se respecter, on continuera de
se réjouir de la richesse du Québec qui est constitué de gens dont les ancêtres
sont arrivés ici il y a 400 ans et
d'autres il y a 40 jours. Ce sont des Québécois à part entière au même
titre que tout le monde.
Mais la
laïcité, je ne peux pas croire que c'est un obstacle si important. Pourquoi il
faudrait que, dans toutes les valeurs
progressives, progressistes d'une
société, on marque le retour du religieux? C'est ça qui se passe, là. La
société québécoise a avancé, elle a laïcisé ses institutions de
santé, scolaires, puis on a continué d'avancer, puis la quête d'égalité des
femmes... puis on a fait des pas importants. Et là, moi, j'assiste, comme
parlementaire, dans le Parlement de ma nation,
à des discours qui tendent à prioriser le religieux, la foi religieuse devrait
avoir préséance sur les droits collectifs. C'est grave, ça. On est de retour là-dessus. C'est ce qui doit être mis
de l'avant à tout prix. Mais à quel moment les progressistes ont-ils
choisi de placer la foi religieuse au sommet des valeurs cardinales qui nous
guident? C'est un recul. J'ai peine à croire ça, peine à croire ça.
Moi, je crois
aux gestes collectifs. Je crois aux moments de l'histoire où il faut parler
d'une seule voix. Je pense aussi aux
opportunités historiques qui nous sont données d'adopter des lois qui nous
survivront. Et c'est à ça qu'on assiste présentement. Le sens du projet de loi, ne vous leurrez pas, M. le
Président, ce n'est pas seulement un projet de loi sur la laïcité, c'est un projet
de loi... à tout le moins comment il
est perçu, ça inquiète que la nation québécoise prenne une décision importante où elle sera majoritaire. Ça inquiète pour vrai beaucoup
de monde. Comment peuvent-ils? Ils avaient renoncé à tout ça pendant 15 ans avec un sursaut pendant
18 mois, le gouvernement du Parti
québécois? Ils avaient renoncé à
ça. On était totalement alignés sur le gouvernement fédéral. Totalement. Puis là ils veulent adopter, un nouveau gouvernement, puis des indépendantistes, une loi qui dirait : Les Québécois
veulent ça, on va leur donner ça. Ça, c'est inquiétant puis c'est
suspect.
Mais j'espère
qu'on en posera d'autres, des gestes comme ceux-là, parce que
j'ai quelques idées, notamment dans le
domaine linguistique. Parce que ça, un gouvernement nationaliste devrait avoir ça dans sa liste de
choses à faire. À date, là, je
cherche toujours la date que le nationalisme va commencer, là, parce que,
nous, on est prêt, hein? Mais on va bien terminer ce projet de loi.
Donc, pour le
principe, on est d'accord. On n'est pas d'accord avec tout, mais c'est
légitime, c'est démocratique, c'est
un gouvernement élu qui le propose, il le fait correctement, il
l'a amené correctement en commission
parlementaire, il y a eu des échanges. Moi, je suis satisfait de la
conduite des travaux parlementaires. Si ça n'avait pas été le cas, il serait
légitime pour un groupe parlementaire de
dire : Bien, écoutez, ils ne nous laissent pas parler, ça s'est mal passé,
on est méprisés. On devrait prendre plus de temps. On devrait
recommencer. Je pourrais croire ça. Mais je n'ai pas vu ça en commission
parlementaire.
Alors, au nom
de ma grande formation politique, le message que je suis venu vous livrer, au
nom de mes huit autres collègues, au nom de toutes ces personnes qui croient en
nous, qui ont de l'espérance pour nous, qui ont de l'affection, pour les 700 000 personnes qui ont voté pour
notre formation politique, je leur dis : On n'a pas changé. On voulait
légiférer sur la laïcité, avec le gouvernement de Mme Marois, on n'a pas pu le faire. Le
contexte minoritaire a fait en sorte qu'on n'a pas été capable de le faire. Mais on veut toujours
le faire. Ce n'est pas nous qui avons l'initiative du projet de loi, mais on y collabore puis on
y travaille. Et on veut, à travers nos propositions, avoir la meilleure loi
possible parce que c'est là que
ça se passe. Si on veut mettre des éléments, il vaut mieux le faire maintenant
qu'attendre plus tard pour une autre loi puis l'amender. Je pense que
c'est là que ça se passe.
Les
enseignants, enseignantes du réseau privé, aucune raison ne justifie qu'ils
soient exemptés de ce projet de loi.
J'aurais aimé les entendre. Je suis prêt à
aller les rencontrer. Ça ne tient pas la route. Les privilèges du privé sont déjà
trop importants, ce n'est pas vrai qu'ils vont être dispensés d'offrir
la liberté de conscience aux jeunes et à leurs parents. Je m'en fais un devoir,
de rappeler ça en commission parlementaire.
• (16 h 30) •
L'assujettissement des éducateurs, éducatrices des services de garde et des CPE
au projet de loi, même chose. Si on choisit de dire que les enseignants, enseignantes ont une position
d'autorité, c'est la même chose pour les éducateurs, éducatrices des services de garde et des CPE,
c'est exactement la même chose. Sinon, le gouvernement pourrait enlever les
enseignants, tant qu'à ça. Mais, comme il y tient, il ne semble pas... il n'a
pas de volonté de changer ça, bien il
faut qu'il rajoute les services de garde. Ça va être cohérent. Alors, il n'y aurait pas de liberté de conscience
jusqu'à tant qu'on rentre à l'école? Pourtant, on est en contact avec
des personnes de confiance, des personnes d'autorité. Ça me paraît important.
Ce
projet de loi, il nous amène à nous questionner sur notre
conception actuelle du Québec mais aussi sur le Québec à venir. Quelle sera la réalité des écoles du Québec,
quelle sera la réalité de notre société dans un contexte où la religion catholique n'est plus hégémonique, où il y a une
diversité religieuse, qui est une richesse et qui doit s'exprimer dans le
privé, dans les lieux de culte, dans la foi
intérieure? Vous savez, c'est possible aussi d'exercer sa foi de façon
intérieure. On est tous animés d'une
certaine spiritualité, mais vous ne pourriez pas dire aujourd'hui quelle est celle qui m'anime, je n'en fais pas l'étalage, je ne
marque pas par un vêtement ou un signe religieux en disant : Je vous donne
un indice, regardez-moi. Je ne crois pas que
c'est nécessaire. Alors, c'est ce qu'on veut pour nos enfants. La liberté de
conscience, c'est important. Le gouvernement l'a compris mais doit aller
plus loin pour être totalement cohérent.
Ce que je souhaite
pour le Québec, c'est une loi aussi qui sera applicable, parce que, jusqu'à maintenant,
les principes sont exposés, les positions,
les personnes sont identifiées, mais le côté de l'application de la loi, c'est
perfectible, hein, la définition des
signes religieux, les sanctions. Il faut savoir si c'est applicable. Si la loi
n'est pas applicable, elle est inutile.
Si on n'est pas capable de prévoir ce que ça va faire comme impact, il nous
manque quelque chose d'important. Alors,
une loi qui est applicable aussi. Une loi qu'on va adopter durant cette
session, qui va nous permettre, bien, de la voir évoluer au cours des cinq
prochaines années. Puis, bien sûr, l'expérience servira pour reconduire ou non
la clause dérogatoire, dans cinq ans,
avec le gouvernement qui sera là à ce moment-là. Fort de l'expérience
vécue, il pourra voir si c'est
nécessaire. Il se pourrait qu'un autre gouvernement, dans cinq ans, décide de faire différemment. Il
se pourrait que le même gouvernement, s'il était là, décide de faire différemment ou pas, on ne le sait pas.
Mais on aura un cinq ans pour voir aller les choses à l'abri, à l'abri
de contestations importantes, quoiqu'il va y en avoir quand même.
D'ailleurs,
on se rend bien compte qu'on a bien peu de choses qui nous préservent des
attaques extérieures de ceux qui
voudraient faire dérailler les votes de l'Assemblée nationale. Il y a
des gens pour qui c'est un combat, l'Assemblée
nationale n'est pas si légitime que ça à tous égards, c'est à la carte, selon les
lois qu'elle adopte. On a connu ça, hein? On a connu ça avec la Charte
de la langue française, on a connu ça avec la loi n° 86
chez les libéraux, on a connu ça avec le
bill 22, on a connu ça avec les commissions scolaires linguistiques, on a
connu ça même avec la loi sur les soins de fin de vie. Il y a des
oppositions qui relèvent parfois de convictions très profondes, réelles et
sincères, et elles se sont exprimées.
D'ailleurs,
on vante souvent la loi sur les soins de fin de vie. Qui se souvient qu'il y
avait plusieurs parlementaires qui
ont voté contre? Ça a été une grande surprise. En tout cas, pour moi, ça a été
une grande surprise qu'il y en avait autant. Et ils ont voté selon leur conscience sur quelque chose d'extrêmement
sensible, et c'était un geste éminemment démocratique, et je suis fier d'avoir participé à ça. Ça ne pouvait pas
être unanime. Et il y a eu l'expression là d'une des rares fois où un vote sur une conscience, sur
quelque chose de très personnel s'est exprimé à l'Assemblée nationale. On a
vécu ça en 2013. Et, pour ceux qui étaient
là, bien, ils se souviennent que c'était un moment très fort, très privilégié.
Vous étiez là, Mme la Présidente, je m'en souviens.
Donc,
que retenir de nos échanges? Le Parti québécois a été le premier à vouloir
légiférer à travers la charte. Je réitère
que le Parti québécois, majoritaire, l'aurait fait adopter, et ce projet de loi
n'existerait pas. Nous voulons toujours contribuer à la meilleure loi possible. Nous sommes convaincus que nous
sommes du bon côté de l'histoire, que la société québécoise s'attend des parlementaires qu'ils adoptent une loi qui
encadre le port des signes religieux, qu'elle est prête à embrasser la laïcité,
mais une laïcité réelle qui ne s'incarne pas seulement par la neutralité de
l'État, mais par les gens aussi qui l'animent, c'est important.
Alors, j'ai bien vu de toutes les façons comment
on a voulu nous faire dire que, bien, l'État est neutre, donc fermez les livres, hein, ce n'est pas nécessaire
d'aller plus loin. Bien non. Les individus, là, pourquoi la liberté de
conscience de l'enseignant ou de
l'enseignante qui porte un signe
religieux aurait préséance sur celle
de l'enfant ou celle de ses parents? Ça,
c'est une question à laquelle on n'a pas répondu. À tout le moins,
les opposants n'y ont pas répondu très clairement. Ça m'apparaît essentiel, c'est vraiment
une question qui est importante.
Et,
si on donne le choix entre porter un signe
religieux ou choisir une carrière où
c'est balisé, est-ce que les gens vont
vraiment faire le choix de ne pas enseigner? En tout cas, il leur restera l'alternative. Sous la CAQ, ils pourront aller à
l'école privée. L'école privée, c'est une
grande corporatiste que la CAQ maintient, là, très jalousement, ce ne sera pas
appliqué à eux.
Mais j'ai
espoir qu'ils changent. Ça n'a aucun sens. 500 millions de dollars dans
le réseau privé, 60 % à 70 % de
financement par élève. C'est un choix légitime d'aller à l'école privée. Vous
acceptez l'argent du Québec, vous acceptez les lois du Québec, point. Sinon, financez
à 100 %, puis on s'en reparlera, vous suivrez le cursus scolaire. Moi,
là-dessus, aucune concession. La
liberté de conscience, c'est pour tout
le monde, on ne peut pas s'acheter
une liberté de conscience parce qu'on
a les moyens d'aller à l'école privée. Moi, fier élève d'une école publique,
fils d'un enseignant d'école publique, mon travail, c'est de valoriser l'école
publique. D'autres personnes ont fait des choix, bien sûr,
qui leur apportent un certain nombre
d'avantages. Moi, il n'y en avait pas, d'école privée, dans ma région, je
n'aurais pas pu en fréquenter. Mais, si vous acceptez l'argent du Québec,
vous acceptez les lois du Québec aussi.
Et,
quant aux écoles confessionnelles,
bien, c'est un autre chantier qu'il faudrait ouvrir, et d'autres formations
politiques en ont parlé, avec raison, là où l'enseignement religieux a une
place importante.
Puis
on pourrait aller plus loin, hein? On a découvert en cours de route, en
commission parlementaire, qu'il y a plein de choses qui nous rappellent que, si on est vraiment sérieux dans ce
qu'on entreprend, il faut poser d'autres gestes. Quand le premier ministre indique, suite à un débat avec
son caucus un matin, que le prix à gagner, si on adopte son projet de loi,
c'est que le crucifix va quitter l'Assemblée
nationale, juste en haut de votre tête, Mme la Présidente, façon assez
expéditive d'aborder la question,
mais on pourrait aborder ça d'autres façons. La fiscalité pour les lieux de
culte, tous les lieux de culte, il y
a une fiscalité, disons, plutôt favorable aux lieux de culte par les
municipalités, il y a ça. Puis il y en a bien d'autres aussi, des enjeux qui touchent la religion. Par
exemple, la capacité de l'État de financer des lieux de culte, c'en est un
autre. Et il y a plusieurs façons
d'aborder ces questions-là, mais c'est partout, la place de la religion est
partout. L'important, c'est que, lorsque c'est l'État, bien, il faut que
ce soit clairement à part. Reste le privé, restent les lieux de culte pour
exprimer sa religion.
Donc, que
restera-t-il de nos échanges suite à ce débat? On est à l'étape du principe.
J'ai de l'espoir que le gouvernement accepte nos deux amendements, qui
assujettit les enseignants des écoles privées et les éducateurs et éducatrices de service de garde. C'est une
question de cohérence. C'est le moment de le faire, là, le projet de loi est
ouvert. On nous a dit qu'on allait
écouter les bonnes idées, ce sont des bonnes idées, et que le gouvernement
aimerait bien avoir l'enthousiasme et
l'appui à la fois d'une vaste majorité des parlementaires. Alors, moi, mes
demandes, elles sont connues, je les
ai livrées et j'espère qu'elles seront retenues. Et, au bout du compte, bien,
on regardera ça avec notre équipe puis on décidera comment on aborde la
suite des choses, mais c'est comme ça.
• (16 h 40) •
Alors, en conclusion,
Mme la Présidente — je
croyais faire une heure, mais, si l'inspiration me revient, je rajouterai
15 minutes — le
Parti québécois, depuis le début de son histoire, a été très sensible aux
institutions, à leur indépendance, à l'enjeu
de la laïcité, et il l'a fait en remplaçant une grande tradition politique
religieuse qui est l'Union nationale,
pour qui la politique et la religion, ça pouvait se marier notamment à travers
des symboles, notamment celui qui est
juste en haut de vous, Mme la Présidente, qui n'est rien d'autre qu'une marque
d'amitié, de fraternité entre l'Église et l'État, ce n'est que ça. On en a fait
vraiment un symbole occidental de notre tradition chrétienne. On peut l'évoquer
mais pas nécessairement de cette façon-là. Donc, le Parti québécois a été
confronté à ça, il avait en son sein des gens radicalement
républicains, laïques et à la fois des religieux, avec Louis O'Neill, l'abbé
Louis O'Neill, avec Jacques Couture, et ces personnes étaient éprises
aussi d'une nécessité pour le Québec non pas de renier ses racines, non pas,
pour les Québécois, de renier le catholicisme, la religion musulmane,
ou juive, ou orthodoxe, mais que l'État ne soit pas sous influence.
Déjà, les premiers gouvernements
de René Lévesque trouvaient que, s'il y avait une influence qui était indue et qui était ostentatoire, sur le territoire du Québec,
c'était celle du Canada. Et ça, ça n'a pas tellement changé, Mme la Présidente. Ces symboles-là nous le rappellent partout.
Quand je vois la masse qui est juste là, je sais que le pouvoir réel,
c'est le pouvoir royal. Je sais que le premier ministre du Québec est le chef
du gouvernement, il n'est pas le chef de l'État.
Le chef de l'État, la reine Elizabeth II est chef de l'Église anglicane.
Et, si on pouvait compléter jusqu'au bout le raisonnement, on sortirait
du Commonwealth. Et, si ça ne suffit pas, pour certains, on sortira du Canada.
Le Canada, ce n'est pas un contrat à vie. Ça
a été créé pour quoi, essentiellement? L'accord d'immigration, un chemin de
fer, des accords de commerce,
24 Pères de la Confédération dans la même salle, ça tient là-dessus.
Je pense que la volonté populaire, ça
va être pas mal plus fort que
ça dans l'histoire, Mme la Présidente.
Alors,
on a une chef d'État qui est la chef de l'Église anglicane, dont tous les
symboles nous rappellent que nous sommes
de loyaux sujets du Commonwealth. Notre serment nous rappelle ça. Bien, moi, je
ne me considère pas comme un loyal sujet de la reine d'Angleterre, un pays qui
nous a conquis. Je considère que je suis un élu du peuple québécois et je réponds au peuple québécois dans toute sa diversité, celle de ma circonscription, celle de l'ensemble de notre territoire, c'est important. Et
je considère en ce sens que, toutes les lois qui sont adoptées ici, toutes les
lois sont légitimes, sont nécessaires, que le Parlement est souverain et que, quand il faut parler fort
pour faire adopter des lois qui nous apparaissent essentielles pour l'avenir de
la nation québécoise, on pose des gestes de souveraineté, les premiers
gestes de souveraineté. Et ça donne envie d'en poser d'autres parce
qu'on réalise que le pouvoir donne du talent, qu'on est capables d'en faire bien plus que ça, qu'on est capables, au Québec,
de gérer nos institutions, qu'on est capables de vivre ensemble, qu'on est
capables d'arbitrer nos différends de façon
démocratique et pacifique, qu'on est capables, au Québec, d'inventer une façon
de vivre où la médiation ou le dialogue, les excuses, les retours sont
possibles. Moi, je crois à ça.
Alors,
je crois à notre Parlement. Je crois aux hommes et aux femmes qui font cette
législation, qui vont adopter une loi
bientôt, je le sens. Et, cette loi-là, je suis assez convaincu que, dans son
application, même les opposants diront : Je n'étais pas en faveur,
mais c'est une loi du Québec, c'est une loi de notre Parlement. Quand on voudra
l'invalider à Ottawa, ailleurs au Canada,
dans une cour de justice, on sera là pour dire : Non, on n'était pas
d'accord, mais le Québec sait faire
et le Québec a le droit de décider de son avenir. Et c'est l'attente que j'ai à
l'égard de tous les parlementaires de l'Assemblée
nationale, l'ensemble des parlementaires, de défendre la souveraineté de
l'Assemblée nationale, sa capacité de faire les lois, de faire respecter
les lois également.
Personne ne
devrait tolérer qu'un groupe ou des individus viennent à notre Assemblée
nationale et disent : Je ne respecterai pas la loi, je vous annonce
que je vais la contester. J'ai trouvé ça stupéfiant. J'aurais aimé une réponse beaucoup plus forte de
l'ensemble des collègues. Moi, ça m'a touché beaucoup. Et je le redis parce
que, dans bien des cas, c'est des quérulents professionnels, des plaideurs
vexatoires d'habitude, pour qui on en fait toujours trop.
Je
terminerai avec les vers d'un poète et d'un cinéaste que j'aime beaucoup, qui
traduisent bien le sentiment que j'ai quand
toutes ces personnes me disent qu'on ne devrait pas faire ça, que c'est
raciste, que c'est xénophobe, que c'est inconstitutionnel. Ce cinéaste, Pierre Falardeau, qui nous a quittés
beaucoup trop tôt, disait : «On va toujours trop loin pour ceux qui
ne vont nulle part.» Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le chef du troisième groupe
d'opposition. Et maintenant je vais reconnaître M. le député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M.
Alexandre Leduc
M.
Leduc : Merci, Mme la Présidente. Quand on a demandé, au caucus, s'il
y a des gens qui voulaient intervenir sur
le projet de loi n° 21, j'ai levé la main parce que je voulais
contribuer au débat d'une manière qui, je pense, n'a pas été faite
beaucoup à date, sur le prisme du changement d'idée.
Lorsque
le projet de loi a été présenté en Chambre, ici, que les premières questions
ont été posées, le leader du gouvernement,
qui est le ministre en charge du projet de loi, pour répondre à une question de
mon collègue le député de Jean-Lesage,
a utilisé un extrait d'un billet de blogue qu'il avait rédigé il y a quelques
années, en 2013 ou 2014, si je me rappelle
bien, qui faisait état de sa position à l'époque, qui était relativement
sympathique à ce qu'on pouvait retrouver dans la charte des valeurs du PQ, en tout cas dans Bouchard-Taylor plus
les enseignants, ce qui est aujourd'hui un peu la position de la CAQ qu'on nous présente dans le projet de loi n° 21. Et il citait ce billet de blogue là un peu pour se moquer, et ça riait de bon coeur, de l'autre côté des
banquettes du Parlement, ça riait de bon coeur sur l'idée que ha, ha! il a dit
ça à l'époque, aujourd'hui il dit
l'inverse, et c'est drôle. Or, moi, Mme la Présidente, je n'ai pas trouvé ça
drôle, d'une part. J'ai encore trouvé ça moins drôle quand j'ai lu des dizaines
d'éditoriaux, des dizaines de chroniques qui reprenaient un peu la même ligne : Ha, ha! il a dit ça en
2014, aujourd'hui il a changé d'idée, des gens qui ont dit des choses très
méchantes comme quoi ça aurait été
une clause pour la fusion entre Option nationale et Québec solidaire, que mon
collègue change d'opinion, il y a
toutes sortes de choses qui se sont dites qui ne se répéteraient pas ici, en
lien avec ce débat-là. Mais là où je veux atterrir, Mme la Présidente, c'est
que c'est normal de changer de position et ce n'est surtout pas l'apanage
exclusif de mon collègue le député de
Jean-Lesage. Et, pour expliciter mon propos, j'ai demandé à un recherchiste de
mon équipe, de notre équipe ici, de
faire une petite liste non exhaustive de personnes présentes dans cette Chambre
et présentes dans l'histoire du
Québec qui ont historiquement, à un moment ou un autre, changé d'avis. Je vous
en fais une petite liste ici.
Le
premier ministre, Mme la Présidente, a changé d'avis sur plusieurs choses,
notamment sur l'indépendance du Québec.
C'est lui qui avait déposé un budget du Québec indépendant qui démontrait des
gains de 17 milliards sur cinq ans en 2005. Force est de constater
qu'il a changé d'avis sur cette position.
Ont
changé d'idée également sur la question de l'indépendance le ministre de
l'Environnement, le ministre de l'Éducation,
le député de Montmorency, le député de Chauveau, le député de Blainville, sans
parler de plusieurs employés de
cabinet des différents ministères qui proviennent du Parti québécois. Tous ces gens-là
ont changé d'avis sur la question de l'indépendance. Ils ont le droit,
c'est quelque chose qui est normal.
Ont
aussi changé d'idée sur leur affiliation politique de manière plus générale la
ministre des Aînés, la députée de Louis-Hébert, la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne,
le député de La Pinière, le député de Jean-Talon, la députée de
Portneuf. Des gens qui ont changé d'allégeance à l'issue de rencontres, à
l'issue d'échanges.
Si
je vais un peu plus dans l'histoire, Mme la Présidente, René Lévesque lui-même
a changé plusieurs fois d'idée, entre
autres sur le statut politique du Québec. On se rappelle tous du «beau risque»
qui a suivi l'échec du référendum.
Jean
Lesage a changé d'idée sur la nationalisation de l'hydroélectricité. Une chance
qu'il l'a fait, d'ailleurs. Il l'a fait
suite à un débat au fameux lac à l'Épaule entre son Conseil des ministres et
lui. M. Lévesque a donc fait changer d'idée M. Jean Lesage sur
cette idée-là.
Ça
a été mentionné il y a quelques instants, les libéraux ont changé d'idée par
rapport à la Charte de la langue française. Ils étaient opposés à
l'origine, aujourd'hui ils la défendent.
Et
tous les partis, à l'exception de Québec solidaire, ont changé d'idée à un
moment ou un autre sur la réforme du
mode de scrutin. Et j'espère qu'ils ne changeront pas de nouveau d'idée d'ici
la fin de la présente législature et que le consensus qui s'est
construit restera le même jusqu'à la fin.
Mais, Mme la
Présidente, la validité d'une idée, elle ne repose pas sur la prise de position
passée de ceux qui l'appuient aujourd'hui, elle repose sur des arguments, elle
repose sur une démarche philosophique. Et la raison pour laquelle je voulais vous en parler, également,
c'est que je voulais un peu vous raconter mon changement de position sur la
question des signes religieux, qui a, entre autres, été influencé par mon ami
le député de Jean-Lesage.
• (16 h 50) •
Moi,
au tout début de ce débat-là, si on remonte, là, dans les années 2000, les
accommodements raisonnables, etc., si
on m'avait posé la question, j'aurais probablement été assez favorable à une
loi aussi dure que voulait l'être la charte des valeurs du Parti québécois de Pauline Marois, de Mme la première
ministre de l'époque, parce que c'était quelque chose qui me semblait
juste, c'était une réponse qui se présentait comme une réponse forte à un
problème de société, à une crise qui avait
éclaté, du moins dans le milieu médiatique. Mais ensuite j'ai changé. J'ai parlé à des amis qui avaient étudié sur la question, j'ai lu des articles,
je me suis mis à réfléchir, j'ai échangé beaucoup, avec plusieurs
personnes, sur le sujet et je me suis intéressé à ce que Bouchard-Taylor
avait écrit.
D'ailleurs, ça, c'est
intéressant aussi. On parle de changement de position; je vous confirme que,
quand le rapport Bouchard-Taylor a été déposé, il n'y a pas grand monde qui
était sympathique à ce rapport-là dans cette Chambre,
Mme la Présidente, au contraire, il y a plusieurs railleries qui étaient dites
alentour du rapport. Aujourd'hui, on
s'en réclame, tout le monde s'en réclame, mais je vous dirais qu'à l'époque
c'était regardé avec très peu de sérieux par la classe politique au sens
large.
Mais tout ça
pour vous dire qu'en étudiant, donc,
le rapport Bouchard-Taylor avec des amis, notamment pour mon ancien travail, entre autres, dans les milieux
syndicaux, bien, je me suis mis à me poser des questions. Est-ce que
c'est essentiel, par exemple, comme le projet de la charte des valeurs le
voulait, que la préposée qui me donne mon permis de conduire, à la Société de
l'assurance automobile du Québec,
n'ait pas de signe religieux? Bien, je me suis dit, bien, peut-être que
ça ne change pas grand-chose, en fait. Si je me présente au comptoir pour
obtenir mon permis, pour payer mon permis, aux deux ans, si je ne me trompe
pas, on me corrigera si c'est le cas, ce n'est pas essentiel qu'une personne soit obligée de n'avoir aucun signe religieux. La question, c'est : Est-ce qu'elle peut me faire sa prestation de services sans qu'il ait été question de religion
dans notre échange, sans qu'il y ait une tentative de conversion religieuse
de sa part envers moi?
Et on
atterrit donc sur cette question-là du prosélytisme, hein, c'est souvent
là-dessus que les débats finissent par tourner
alentour. C'est qu'on a peur que le signe religieux, en soi, soit un instrument
de prosélytisme pour convertir une autre
personne, comme si l'affichage public, la démonstration publique de quelque
chose était nécessairement la tentative de convertir la personne devant
nous.
Ce qui
m'inquiète, Mme la Présidente, là-dedans, et ce qui a participé à ma propre
conversion de position, d'abord en
faveur de quelque chose qui ressemblait à la charte des valeurs vers
Bouchard-Taylor et de Bouchard-Taylor vers la position de Québec solidaire aujourd'hui, c'est que je me suis inquiété
du message que ça enverrait, que l'État décide de légiférer sur cette chose-là, qu'il sous-entende
ce qui est clairement sous-entendu dans le projet de loi n° 21,
Mme la Présidente, que le signe
religieux est un instrument de prosélytisme. Si c'est ça que ça sous-entend, le
message que ça envoie, il est assez
inquiétant pour l'ensemble de la société, et en particulier pour l'entreprise
privée, parce que, si la personne qui dit : Je ne veux pas que l'enseignante, le juge, le gardien de prison — ou toutes les personnes qui sont nommées
dans le projet de loi n° 21 — ne porte
de signe religieux parce que, ce faisant, il ne respecte pas son engagement de
neutralité, bien, qu'est-ce qui ferait qu'une entreprise, peu importe
laquelle, de McDonald à IBM, à peu importe... à un préposé qui travaille dans une usine, Mme la Présidente,
qu'est-ce qui ferait qu'une entreprise ne déciderait pas d'appliquer le même
raisonnement à ses propres employés, en se
disant : J'ai des employés qui travaillent dans un service à la clientèle,
qui sont en interaction avec des gens
du public, et je considère, moi, l'entreprise privée, tout comme l'État, que,
si elle porte un signe religieux,
elle porte en elle un peu le désir... l'image de l'entreprise et elle enfreint
sa neutralité en matière de rendement de services à la population?
Et ça
m'inquiète parce que souvent l'État, ou en tout cas c'est le souhait, qu'on
veut, doit se donner en exemple. C'est
pour ça que c'est l'État qui a commencé avec l'équité salariale, par exemple,
c'est l'État qui se met des normes de rentabilité plus élevées que dans le
secteur privé. Et, si, dans le secteur public, donc l'État, on décide que les
signes religieux, c'est un mauvais
signal parce que c'est un instrument de prosélytisme, qu'est-ce qui va
empêcher, demain matin, une ou des
entreprises privées d'adopter ce raisonnement, qui aura été validé par cette
Chambre, et de le mettre en pratique dans
leur propre milieu du travail? Et ça, c'est très inquiétant. En milieu syndiqué
ou non syndiqué, ce sera la même chose. Et il y aura là, je pense, un glissement, un glissement de société où on
aura fait en sorte que, pour soi-disant protéger la neutralité de l'État, on donne le signal que les
personnes qui portent des signes religieux ne peuvent en aucun cas, peu importe où ils travaillent, pour l'État, ou dans
le privé, ou dans du milieu communautaire comme bénévole, si ça se trouve...
ne pourront pas être des personnes neutres
qui seront capables de représenter l'organisation pour laquelle ils dédient
temps et énergie.
Donc, j'en
suis arrivé, Mme la Présidente, à changer d'opinion, je vous dirais, à peu près
au même rythme que mon parti, où j'en suis venu à l'idée que c'est bien d'avoir
la position actuelle où est-ce que, finalement, il faut le dire, là, on réclame en quelque sorte le statu quo, parce
qu'il n'y en a pas, d'interdiction, actuellement, et il n'y en a pas, de crise,
actuellement. Et c'est là-dessus que mon collègue de Jean-Lesage m'a convaincu,
moi, personnellement, dans une discussion
qu'on avait en groupe, en groupe restreint de Québec solidaire, sur la
question : Elle est où, la crise? Il
est où, le dossier avec les dizaines
de cas problèmes que ça aurait créé, d'avoir quelqu'un quelque part en position de coercition, voire d'autorité, là, le principe qui est un
peu discutable qui est utilisé par le gouvernement? Où ça a causé des problèmes? Peut-on n'en nommer
qu'un seul? Une plainte d'un parent d'une école où il y a
une enseignante voilée, pour
reprendre le fameux exemple, en existe-t-il
un seul, exemple où il y a eu une plainte pour dire : Cette femme-là qui
enseigne à mes enfants a tenté de les convertir par le simple signe
religieux qu'elle portait?
Parce que, on
s'entend, qu'il n'y ait pas de signe religieux, la conversion de peu importe
quel sujet est possible, hein? Ce
n'est pas parce qu'on ôte le signe religieux que tout d'un coup quelqu'un qui
veut vous convaincre d'une idéologie va
cesser de le faire. Et, si c'est le cas, bien, heureusement, il existe des lois
très claires et des règlements également, en matière de droit du travail entre autres, pour discipliner l'employé qui
voudrait faire de la conversion dans son milieu de travail envers soit des personnes dont il a la
charge ou le grand public avec qui il interagit dans son travail. Il existe
très clairement des lois actuellement
dans le droit du travail. Il peut y avoir des sanctions, des avertissements
verbaux, des avertissements écrits,
des suspensions d'une journée, trois journées, suspensions d'une semaine, bref,
une gradation de sanctions, ou, si
l'offense est tellement grave, on peut aller directement au congédiement. Ça
arrive, ça, Mme la Présidente, et ça existe déjà quand c'est le cas.
Et, moi,
c'est un peu l'argument qui a fini par achever ma conversion à la nouvelle
position de Québec solidaire, c'est
de dire : Je n'en ai pas vu, de cas concret. On ne m'a pas fait la
démonstration ni dans l'espace médiatique, ni dans les audiences parlementaires, ni dans le débat
public, depuis 15 ans, on ne m'en a pas fait la démonstration, d'un
problème de base, un problème de
société. J'ai des problèmes de perception que j'entends, il y a des crises
médiatiques, ça existe, mais, un vrai
problème de société où on peut me montrer un dossier épais comme ça, qui
mériterait, là, une intervention législative, je ne l'ai pas vu, Mme la
Présidente.
Et, quand
j'ai été élu, le 1er octobre dernier, mon mandat, moi, ce n'était pas,
ici, de venir faire des lois sur des problèmes
de perception. Mon mandat, ici, de c'est venir faire des lois pour régler des
vrais problèmes au Québec. Et, le problème
de perception, je ne veux pas le regarder de haut, il est clairement là, là, il
faut le traiter, et je le prends très au sérieux, Mme la Présidente, mais c'est une très mauvaise idée de penser
qu'on va tout régler avec cette loi-là, le projet de loi n° 21, et
que tout d'un coup le problème de perception sera réglé. Si c'est ça qu'il faut
être traité, le problème de perception, ce
n'est pas la bonne solution. Ça va empirer les choses. Ça va pouvoir créer un
glissement, comme j'évoquais tantôt, par rapport au secteur privé.
Donc, moi, je
me dis que le projet de loi n° 21 repose sur pas grand-chose de concret,
finalement. Il repose sur des craintes, qui peuvent légitimes ou pas, mais qui
sont là, il faut le reconnaître. Il repose sur des craintes, il repose sur
une intégration qui se fait tranquillement.
Et, ayant
étudié moi-même en histoire, Mme la Présidente, en histoire du Québec, pour
être plus précis, bien, ce n'est pas
la première fois dans l'histoire du Québec qu'il y a des craintes reliées à la
question de l'immigration, reliées à
la question de l'intégration. Au début du siècle, c'étaient d'autres personnes
qui étaient alentour de ces craintes-là. On n'a qu'à parler de l'immigration de
l'Europe de l'Est. Même, si on remonte au XIXe siècle, l'immigration
irlandaise générait des craintes.
L'immigration juive a créé des craintes aussi. Mais, à chaque fois, est-ce
qu'on a commencé à créer des lois ici pour se dire : On devrait
peut-être réparer des pots... des choses avant qu'elles se brisent?
Je me suis
fait dire ça parfois. Je vois ça souvent sur le Net, des gens qui disent :
Bien, il n'y a peut-être pas de problème
maintenant, mais, avec une loi comme ça, ça va en éviter dans le futur. Oui,
sauf que, là, on est en train de parler de suspendre la Charte des droits et libertés de la personne, là,
suspendre des articles, là. Ce n'est pas banal du tout, là, ce n'est pas... On ne suspend pas la Charte des
droits et libertés parce que peut-être il y aurait des problèmes dans le futur.
S'il y a des véritables problèmes qui se présentent et que ça crée une
véritable crise sociale, au-delà d'une crise médiatique,
bien là on en rediscutera. Là, je serai ouvert. On s'assoira puis on
dira : Bien, voici l'étalage complet des faits, il y a eu x, y problème dans telle, telle région,
puis, quand on additionne ça, ça nous fait un dossier assez solide pour venir
s'asseoir ici, puis réviser la loi, puis s'adresser
à la question, puis traiter la question des droits et libertés de la personne.
• (17 heures) •
La
loi 101, c'était ça, Mme la Présidente. On a décidé de jouer dans les
droits collectifs, de mettre un droit collectif au-delà d'un droit individuel, le droit de vivre dans une société en
français, mais parce qu'il y avait un problème, parce qu'il n'y avait pas de scolarisation française
suffisante dans certaines populations, parce qu'on voyait s'éroder le français
au Québec. C'était documenté, c'était clair,
ce n'était pas juste ressenti. Là, dans le projet de loi n° 21, dans la
question des signes religieux, ce
n'est pas le cas. Ce n'est pas documenté, ce n'est pas clair. Le dossier n'est
pas fait sur le véritable problème.
Puis j'ai
entendu et je me suis fait dire trop souvent que c'était un droit collectif, le droit à la laïcité. Bien, c'est
vrai, mais le droit collectif de la laïcité,
ce n'est pas un droit collectif de ne pas voir de signes religieux un peu
partout quand on va travailler ou
quand on va rencontrer des agents de l'État. Ça, ce n'est pas un droit
collectif, de ne pas voir de signes religieux. Ça, c'est quelque chose
d'autre.
Le droit
collectif à la laïcité concerne les institutions, et les institutions sont, pour l'essentiel, Mme la Présidente, laïques depuis quelques années déjà. Les écoles, ça fait, quoi, une trentaine
d'années à peu près qu'on les a laïcisées comme pour de bon. Mais l'État est laïque, donc il n'y a pas de panique. Et,
si on veut vraiment traiter la question de la laïcité, ça a été évoqué par d'autres présentations avant
moi, bien, traitons-la. Parlons des subventions aux écoles religieuses, parlons des congés fiscaux aux organisations
religieuses. Là, heureusement, on va traiter la question du crucifix qui, lui
aussi, traîne depuis beaucoup
trop longtemps. Ça, c'est un symbole de l'État, en effet, laïque ou religieux.
Le débat est pertinent alentour de
cette question-là. Mais, sur les droits individuels de porter ou non un signe
religieux à la grandeur du Québec, ce n'est pas ça, le droit à la laïcité.
Ce n'est pas ça, le droit collectif à la laïcité.
Je
terminerais, Mme la Présidente, mon intervention sur la question de
l'indépendance, et je voudrais répondre à quelques arguments qui ont été
avancés par mes collègues du Parti québécois, qui veulent faire un trait
d'union entre l'indépendance et la laïcité,
comme si c'était la même bataille. Moi, Mme la Présidente, je trouve
que c'est deux batailles distinctes et je suis particulièrement content,
dans ce scénario actuel qu'on vit en ce moment, d'adoption du projet de loi n° 21, qu'en tant qu'indépendantiste ne pas être obligé d'être représenté
par un parti qui est... qui veut aller plus loin que le projet de loi n° 21, mais plutôt être dans un parti qui est à la
fois indépendantiste et à la fois pour une laïcité ouverte et
inclusive.
Et, si on veut vraiment parler de trait d'union
entre indépendance et laïcité, parlons-en, Mme la Présidente. Parlons-en de la stratégie laïcité-indépendance.
Si on veut être sérieux dans notre ambition, en tant qu'indépendantistes,
de reconstruire une large coalition pour
aller conquérir, convaincre les mentalités au Québec et aller chercher une
majorité de personnes en appui à ce
projet-là, il va falloir qu'on sorte, en quelque part, de la vieille
rengaine canadienne-française, là. Il
y a le coeur, évidemment, du Québec
qui bat en français. Ça, c'est sûr. Il va falloir aller au-delà, il va falloir
aller tendre la main.
Ça a été fait
à différents niveaux, dans les différentes expériences des référendums de 1980,
1995, mais là il y a une chose
qui est assez claire, c'est qu'il y a des portes qui se ferment. Et, à mesure
qu'on continue à faire le trait d'union entre laïcité et indépendance — laïcité, je l'entends style sauce p.l. n° 21 — bien, on
continue à fermer des portes, parce que, là, il y a des gens, particulièrement des jeunes, Mme la Présidente...
Je suis en train de... À chaque fois que je parle à des jeunes dans des
rencontres, des groupes dans le quartier, souvent ils me disent spontanément
apprécier Québec solidaire, mais, le
volet indépendance, ils ne sont pas certains, entre autres parce qu'ils ont
fait le trait d'union entre l'indépendance puis laïcité sauce p.l. n° 21. Ils ont fait ce lien-là. Pour eux, c'est la même
chose. Et là on a toute la misère du monde à
détricoter ça et leur expliquer : non, à notre sens, l'indépendance n'est
pas la même chose que ce projet de loi de laïcité. Il peut être deux
choses distinctes.
Qu'on
soit indépendantiste et qu'on ait... Qu'on soit pour ou contre le projet de loi
n° 21, c'est correct. Je ne suis pas
en train de dire l'inverse de ce que les gens du Parti québécois disent. Moi,
je reconnais le droit d'être indépendantiste et pour le projet de loi
n° 21. C'est correct, mais il faut être sérieux, il faut le voir aussi de
l'autre angle. Il y a des indépendantistes
qui sont contre le projet de loi n° 21. Ils ne sont pas
moins indépendantistes parce qu'ils sont contre le projet de loi n° 21.
Et notre analyse de la chose, c'est que, pour la suite du mouvement, stratégiquement, s'il faut parler de ça, Mme
la Présidente, là, s'il faut aller en
termes stratégiques, ça serait beaucoup plus logique d'y aller avec une position de laïcité ouverte pour tendre la main à tout le monde et dire que ce projet-là inclut tout le monde, et qu'il soit
disponible, qu'on puisse sentir que
la main est tendue pour l'ensemble des communautés, notamment la communauté
arabo-musulmane, qui a cet héritage
de la langue française à partager avec nous déjà et qui a des sympathies
pour le processus d'indépendance, évidemment,
connaissant l'histoire de décolonisation de l'Algérie, notamment, pour la
nommer, mais beaucoup d'autres pays du Moyen-Orient et du
Maghreb.
Donc,
encore une fois, Mme la Présidente, je souhaite que ce débat-là atterrisse plus
respectueusement de l'ensemble des
positions, de l'ensemble des parlementaires qui ont eu, dans le passé ou dans
le présent, des positions sur ce sujet, et qu'on fasse en sorte qu'au Québec
on soit capables de discuter intelligemment et respectueusement. Merci beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député d'Hochelaga-Maisonneuve. Et
maintenant je vais céder la parole à M. le député de LaFontaine.
M.
Marc Tanguay
M.
Tanguay : Merci beaucoup,
madame... merci beaucoup, Mme la
Présidente. J'hésitais avant de me
lever, que vous reconnaissiez...
parce que j'aurais aimé ça peut-être qu'un collègue — ils sont 75 ici, à l'Assemblée nationale — de
la Coalition
avenir Québec se lève sur un important
projet de loi. J'ai vu que personne ne s'est levé. Alors, par
application du principe d'alternance,
j'aurais cédé volontiers ma place, mais ça a de l'air qu'il n'y a pas un député
de la CAQ qui veut s'inscrire ici
dans le débat. C'est correct. Alors, on va continuer le débat parce qu'il y a
des choses importantes... Et même les
collègues de la CAQ ne viendront pas dire que le projet de loi n° 21 est anodin. Personne ici, autour de la table, ne va dire : Le projet de loi n° 21 est anodin. Il ne mérite pas qu'on se lève puis
qu'on le justifie ou qu'on dise pourquoi on va voter contre. Alors, si
ce n'est pas anodin, je me serais attendu à ce que des collègues se lèvent.
Par
contre, nous, de notre côté, on va dire clairement pourquoi nous sommes contre,
Mme la Présidente. Et, durant le 20 minutes qui m'est alloué, j'aurai beaucoup
de citations, beaucoup de références à des faits historiques, à des déclarations venant d'acteurs qui ont été au coeur
de ces débats et de ces préoccupations-là. Parce que le projet de loi n° 21, ce
n'est pas anodin, parce que nous croyons qu'il aurait, si d'aventure il était
adopté, un impact néfaste sur le vivre-ensemble. Et ça,
c'est important, le vivre-ensemble. Nous sommes, au Québec, une société ouverte,
confiante, accueillante. Nous voulons
qu'elle le demeure et nous craignons que, si d'aventure le projet de loi n° 21 était adopté, nous viendrions faire en
sorte d'attaquer cette ouverture, cette confiance et cette diversité, Mme la
Présidente.
D'abord,
premier point, premier point, Mme la
Présidente, que je vous soumets,
c'est qu'en regard du rapport Bouchard-Taylor, en regard du rapport
Bouchard-Taylor pour ce qu'il est, en regard de M. Bouchard et de
M. Taylor, le projet de loi n° 21 n'a aucune assise. Le projet de loi n° 21
ne tient pas la route quand on regarde le rapport Bouchard-Taylor et
quand on analyse ce que les deux acteurs qui étaient signataires du rapport
sont venus dire par la suite.
Alors,
premier élément, on entend : Ah! les libéraux n'ont rien fait pendant
10 ans, pendant 15 ans. Ils ont laissé traîner la situation, et aujourd'hui on vient ramasser
les pots cassés. Mme la Présidente, celles et ceux qui nous écoutent à la
maison, il est important de mentionner que le rapport, lorsqu'il a été déposé
en mai 2008, il contenait 37 recommandations, et plus de 90 % des recommandations ont
été... plus de 90 % ont été mises en application par les gouvernements
successifs. Il y en a une qui était
exclue de ma statistique, Mme la Présidente, puis c'était le crucifix, qu'on
disait qu'il fallait le retirer. C'était
dans le rapport Bouchard-Taylor. Il y a une motion unanime qui a été adoptée
récemment, il y a quelques semaines. Et ça, ajoutez ça encore. Alors, on
part du 90 %, on s'approche du 100 % des recommandations
Bouchard-Taylor.
Une des recommandations des 37 n'est pas du tout la recommandation qui serait ici devant nous sur le projet de loi n° 21. La recommandation G2 disait : Pour les agents coercitifs, qu'il soit interdit
de porter des signes religieux pour les
juges, procureurs de la couronne, policiers, gardiens de prison et président et
vice-présidents de l'Assemblée
nationale.
Et l'on sait...
j'aurai l'occasion de citer quelqu'un qui était à l'interne, qui faisait partie
des discussions, des délibérations, Jocelyn
Maclure, mais le rapport en son essence même, Mme la Présidente, parce qu'aujourd'hui on le sait de M. Taylor, on le sait de M. Bouchard et on le
sait de Jocelyn Maclure — j'aurai des citations à vous soumettre — le rapport en soi contenait les
questionnements extrêmement importants et non anodins sur lesquels j'aurais
aimé entendre d'autres collègues, qui sont les suivants.
Page 149
du rapport. Et de façon très, très rapide, cette recommandation-là avait été
vue comme étant un compromis, mais un
compromis pris excessivement rapidement et qui contenait même, à l'intérieur du
rapport, dans le verbatim du rapport, les sources de contestation de ce
compromis-là. Je vous fais une citation, page 149, les signataires du
rapport Bouchard-Taylor :
«Il
[est important] à ce stade de rappeler, avant d'examiner cet argument de plus
près, que l'interdiction pour les agents
de l'État de porter des signes religieux a un double prix, à savoir la
restriction de [...] la liberté de conscience et de religion des personnes visées et, éventuellement,
[...]l'égalité dans l'accès aux emplois de la fonction publique et
parapublique.
«[...]Pourquoi penser que la personne qui porte
un signe religieux serait moins susceptible de faire preuve d'impartialité, de
professionnalisme et de loyauté envers l'institution que la personne qui n'en
porte pas?»
Alors, en ce
sens-là — fin de
la citation — c'était
une question qui était soulevée par le rapport Bouchard-Taylor et qui détonnait, qui faisait en sorte... pas qui
détonnait, mais qui traduisait les préoccupations, les discussions qui avaient
eu lieu à l'interne. Aujourd'hui, on le
sait, ce n'était pas évident, cette recommandation-là, ce qui fait en sorte
que, nous, durant les années où nous
étions au pouvoir, ce n'est pas l'approche que nous avons priorisée, parce
qu'il ne s'agissait pas, selon nous, d'un compromis rassembleur et qui
avait des effets potentiellement négatifs très tangibles.
• (17 h 10) •
Page 150
du rapport, juste pour démontrer encore une fois, une autre citation, qu'à
l'interne même du rapport il détient lui-même les éléments de contestation, je
cite le rapport Bouchard-Taylor : «...pourquoi penser a priori que ceux
qui affichent leur appartenance religieuse
sont moins capables de faire la part des choses que ceux dont les convictions
de conscience ne sont pas extériorisées ou
qui sont extériorisées de façon moins visible — pensons au port de la croix catholique?» Questionnement. Alors, ça, ça fait
partie des discussions à l'interne. On a dit, à l'époque, Bouchard-Taylor :
On va faire un compromis et on va
l'interdire aux agents coercitifs, policiers, juges, procureurs de la couronne
et également président et vice-présidences de l'Assemblée nationale.
Nous avons
vu, Mme la Présidente, Jocelyn Maclure, entre autres le 27 mars 2019,
qui remettait un texte. Il a été l'un des rédacteurs du rapport
Bouchard-Taylor. Le titre de son texte était très évocateur. Je le cite : La
fragilité originelle du
compromis Bouchard-Taylor. Fin de
la citation. Je n'aurais pas eu besoin de Jocelyn Maclure pour vous en faire la
démonstration. Aux pages 149 et 150, je
vous ai fait des citations qui étaient au coeur des délibérations. Et finalement,
bien, il fallait arriver... puis je reviendrai tantôt avec M. Taylor, il
fallait arriver à un compromis, puis ça a été fait rapidement là-dessus, rapidement, de trouver un compromis, et la
fragilité originelle du compromis Bouchard-Taylor, on le voit...
Que dit M.
Maclure? Et je cite, je vais vous citer des extraits de sa lettre d'opinion, il
parle et il dit ce qui suit : «Cette
recommandation — celle
dont on parle — est depuis
devenue la pierre de touche de notre débat. [...]Pour un dernier groupe, dans lequel je me situe, elle ne
résiste pas à une analyse sobre et soutenue.» Il parle des débats à l'interne,
là, présidant la rédaction du rapport
Bouchard-Taylor. Je continue : «Personnellement, ayant participé à la
rédaction du rapport et ayant écrit les premiers jets du chapitre sur la
laïcité, j'ai été forcé de constater en cours d'écriture que la
justification de l'interdiction
limitée du port de signes religieux était bancale et, surtout,
incompatible avec l'argument général sur la neutralité défendue dans le rapport, à savoir que la neutralité
s'incarne dans les actes professionnels des agents de l'État, et non dans leur apparence.» Dernier extrait :
«Que certains agents aient plus d'autorité ou un pouvoir de coercition ne
change strictement rien à
l'affaire : c'est leur conduite professionnelle qui nous permet d'évaluer
s'ils respectent l'exigence de neutralité des institutions publiques.»
Fin de la citation.
Alors, la fragilité originelle, on l'a vue dans
les citations même du rapport. Fragilité originelle du compromis Bouchard-Taylor, on le voit même d'un témoin de
fait qui a participé au débat. Il y avait une réelle division, et le compromis
comme tel, on a pu voir, n'a pas tenu la
route bien longtemps. Le compromis, on peut voir M. Taylor,
14 février 2017, du fameux
compromis Bouchard-Taylor, il se dissocie, et je le cite : «"On
commence à surmonter les divisions, à combler les fossés et à recoudre les déchirures de notre tissu social, des
clivages ayant en outre été causés par [le débat] des dernières années", [...]montrant du doigt — et là il est cité — "l'effet secondaire de
stigmatisation" qu'a eu le débat sur la charte "des valeurs" [du Parti québécois] sur
"certaines classes [citoyennes]".» Et je le cite, M. Taylor :
«C'est le temps de mieux se connaître
et de se réconcilier. Plus on donne d'espace à des peurs non fondées, plus on
crée [de la division profonde]. Ce
n'est pas comme ça qu'on va rapprocher les gens.» Fin de la citation. Taylor
reniait ce qui avait été un élément des recommandations, soit cette
recommandation-là où il était proposé d'interdire les signes religieux pour
certains, de catégories ciblées d'agents, soit celles et ceux qui ont un
pouvoir coercitif. Ça, Taylor s'en est dissocié par la suite.
M. Bouchard,
lui, ne se dissocie pas de la recommandation, mais se dissocie du projet de loi
n° 21 parce qu'il va beaucoup trop large. Il va au-delà de ce qui était proposé dans un
compromis qui était déjà fracturé à sa base même, à la lecture du
rapport, à l'analyse du témoignage de Jocelyn Maclure, Taylor qui s'en
dissocie, de tout le compromis. Et Bouchard
qui vient dire des mots très, très durs. Et je le cite, M. Bouchard : «En
entrevue à l'émission 24/60, l'historien et sociologue
Gérard Bouchard estime que le gouvernement de la Coalition avenir Québec a
accouché d'un projet de loi "radical" — je le cite — sur
la laïcité — je
le cite toujours — "qui
ne ressemble pas aux Québécois"...»
On le
cite : «"On entend, par exemple, que les femmes qui portent le hidjab
pratiquent le prosélytisme auprès des élèves,
que le seul fait de porter le hidjab est une forme d'endoctrinement, que ça
peut traumatiser les élèves. Mais rien de
cela n'a été prouvé. Il n'y a jamais eu d'études pour appuyer ces
assertions"[...]. "Il y a un malentendu; la majorité des Québécois se réfèrent à la séparation de l'Église
et de l'État, bien sûr que c'est important, mais en quoi le port de signe
religieux pourrait-il compromettre cette séparation?"»
Plus tard,
dans un article de La Presse — je cite toujours M. Bouchard,
5 avril 2019 : «[Le premier ministre] erre gravement
[...] en assimilant le pouvoir extraordinaire de coercition à l'autorité
pédagogique que détient le personnel enseignant — il parle vaguement, à ce propos, de
"personnes en position d'autorité". C'est une confusion regrettable
qu'il importe de dissiper.» Fin de la citation.
Alors, Mme la
Présidente, quand le gouvernement de la Coalition avenir Québec vient nous
dire : Bien, le projet de loi n° 21, on fait écho du consensus Bouchard... du compromis Bouchard-Taylor,
on peut voir que le projet de loi n° 21 n'a plus aucune assise, premier élément, parce que le
compromis Bouchard-Taylor, de façon interne, il participait et il traduisait
davantage une fracture
qu'un compromis rassembleur. J'en veux pour preuve que, Bouchard-Taylor, le
deuxième acteur, M. Taylor, a renié sa signature et il l'a fait de
façon éloquente et très claire sur un élément très précis, qui était cette
recommandation-là. Donc, il n'y a plus de compromis Bouchard-Taylor, premier
élément.
Deuxième
élément, le gouvernement dit : Bien, nous, on fait écho à ce compromis-là.
M. Bouchard, M. Taylor, exit. M.
Bouchard, exit parce qu'il dit : Le gouvernement, il prend ça, ce
compromis-là, puis il va de façon très, très, large, il inclut les directeurs d'école et les
enseignants, enseignantes, Mme la Présidente. Et là M. Bouchard-Taylor n'est
plus du tout là. Alors, qu'est-ce
qu'il reste au projet de loi n° 21 pour le soutenir? Il ne reste rien. Il ne reste
pas le rapport, il ne reste pas Bouchard, il ne reste pas Taylor. Alors,
si c'est ça, Mme la Présidente, le compromis du gouvernement, qui veut rassembler et qui veut unifier, et que ceux
qui ne pensent pas comme lui, bien, que voulez-vous, ne veulent pas de vivre-ensemble sur ces bases-là, Mme la
Présidente... On vient de démontrer... Qu'on arrête de parler, du côté du
gouvernement, de Bouchard-Taylor. Ils
ne sont plus du tout là, plus personne n'est là, et il n'y a aucun fondement à
ce qu'ils proposent.
Il
y a un autre élément important sur lequel j'aimerais attirer votre attention,
le concept extrêmement flou de signe religieux. J'étais le porte-parole
de l'opposition officielle dans les années 2012-2013, lorsque le
gouvernement du Parti québécois avait déposé
sa charte des valeurs. Vous vous rappelez, on disait que c'était la charte de
la chicane. Là, ça se chicanait parce
que, là, on ne savait pas ce qu'ils voulaient faire, où est-ce qu'ils s'en
allaient, puis c'étaient les interdictions, puis que c'était très large,
puis qu'on ne savait pas trop ça allait être appliqué comment, il n'y avait pas
de définition suffisamment intéressante d'un signe religieux. Puis, vous
rappelez-vous, à ce moment-là, le porte-parole, le ministre responsable, il avait ses photographies, ses
dessins de ce qu'était un signe religieux, puis tout ça. Mais, encore une fois,
ça a été rejeté. Ça a été la charte de la
chicane, puis on a vu par la suite qu'il n'y a personne qui a repris le
flambeau pour reprendre ce projet-là.
Mais
savez-vous quoi, Mme la Présidente? Il y a un avantage, aussi minime soit-il,
qu'avait la charte de la chicane du
Parti québécois, c'est qu'il essayait, il essayait, à l'article 5, de
définir c'était quoi, un signe religieux. La définition qu'il disait, c'était, et je le cite, «un objet,
tel un couvre-chef, un vêtement, un bijou ou une autre parure, marquant
ostensiblement, par son caractère
démonstratif, une appartenance religieuse». Fin de la citation. Ça, ce n'était
pas clair. Ça, ça ne tenait pas la
route. Puis ça, Mme la Présidente, on n'a pas fait avancer le Québec en
adoptant ça. On ne l'a pas fait adopter, puis le Québec s'en trouve encore
mieux aujourd'hui. C'était flou, ce n'était pas clair, c'était dangereux, mais
ça, au moins, c'était quelque 20 mots pour essayer de définir un
signe religieux, article 5.
Article 6
du projet de loi n° 21, Mme la Présidente, qu'est-ce qu'on dit? Quelle
définition, quelle clarté avons-nous? «Est
interdit les signes religieux». Fin de la citation. Ah! bien, excusez-moi,
c'est un peu court. Mme la Présidente, il y a le ferment même, il y a la bougie d'allumage vers des chicanes. Qui va
décider c'est quoi, un signe religieux? Ce sera la directrice, le directeur d'école, par rapport à un
enseignant ou à une enseignante. Qui, basé sur un tel jugement de valeur
ou sur un tel jugement où on n'a pas... je
ne voudrais pas être cette personne-là, je ne le saurais pas, moi, Mme la
Présidente.
Puis
on ira voir que Fatima Houda-Pepin, ex-collègue, elle, elle dit que le hidjab,
le voile, ce n'est pas un signe religieux. Alors, si Fatima Houda-Pepin, c'est
une autorité, s'il faut l'écouter parce qu'elle connaît ça puis qu'elle
a vu ça, elle, bien, à ce moment-là, moi, si
je suis directeur d'école puis je vois une dame qui arrive avec le voile,
visage découvert mais le voile, le
hidjab, bien, je vais dire : Bien, basé sur la doctrine Fatima
Houda-Pepin, rentrez, venez travailler, c'est parfait, vous n'avez pas un signe religieux. Ça, si c'est une autorité.
Allo, Mme la Présidente, les chicanes et les applications.
Autre
élément, le ministre a essayé, lui, tant bien de mal de nous définir c'était
quoi. Et je le cite, 28 mars 2019 : «...un signe religieux, c'est selon le sens commun
d'un signe religieux.» Ah! bien là, je suis bien avancé. Je continue :
«...le critère n'est pas ostentatoire. Le
critère, c'est l'interdiction de port de signes religieux[...]. [...]c'est le
sens commun des choses.» Elle arrête là, la citation, Mme la Présidente,
je ne peux pas vous aider plus que ça.
Je
vous en ai trouvé une autre, 4 avril 2019, une semaine après,
ministre de l'Inclusion, porte-parole du gouvernement pour le projet de loi n° 21,
je le cite : «...si la croix [...] est portée sous le vêtement, elle n'est
pas permise non plus. [...]Nous, on a
choisi d'avoir une mesure claire[...], contrairement à l'époque où le Parti
québécois avait présenté son projet de loi[...], où il fallait sortir le
"tape" à mesurer.» Fin de la citation.
• (17 h 20) •
Alors,
Mme la Présidente, si le ministre voulait nous donner un éclairage, là, il nous
dit : Bien, c'est le sens commun. Quand
vous allez en voir un, vous allez le savoir. Même si la croix est sous la chemise, même s'il est invisible, visible
ou invisible, ce qui est interdit, c'est le
signe religieux, faites appliquer la loi, il n'y aura pas, voyons, de chicane
et de contestation. Mme la Présidente, il y en aura précisément, des chicanes et des
contestations, parce qu'on ne sait même pas de quoi on parle, on ne sait même pas... «Invisible ou visible», Mme la Présidente, si jamais un collègue apprend que j'ai une croix, moi, sous ma chemise, qu'est-ce qui va arriver? Je vais
me faire avertir, hein? Alors, en ce sens-là... Et, le cas échéant, Mme la Présidente, ça a des
impacts très tangibles. C'est extrêmement
tangible. Vous ne pourrez pas être embauché
comme enseignant ou enseignante si vous avez un signe religieux, selon
l'interprétation que la directrice ou le directeur d'école fera. Vous vous
verrez refuser une promotion ou un changement de poste, parce que, là, il y a
une notion de droits acquis.
Ça,
c'est une autre affaire, Mme la Présidente — je pense que je vais manquer de
20 minutes. J'aurais pris une heure, j'aurais pris deux heures.
Alors, il y a une notion de droits acquis. Pas besoin d'être un grand
constitutionnaliste pour savoir, quand
on parle de droits et libertés, ce n'est pas un droit acquis, c'est un droit.
Tu l'as ou tu ne l'as pas, indépendamment du calendrier, Mme la Présidente. Premier élément. Vous avez le droit de
vote. Vous avez le droit de vote, Mme la Présidente. Jusqu'à la fin de vos jours, vous avez le droit de
vote. Ce n'est pas un droit acquis. Vous avez le droit de vote sur cette
élection-là, mais, les prochaines élections,
vous n'aurez plus le droit de vote, là. Je vous l'annonce, indépendamment de
votre situation personnelle, on ne peut pas
avoir de date de péremption sur les droits et libertés, parce que ce n'est pas
des yogourts, Mme la Présidente. Il n'y a
pas de droits acquis en matière de droits et libertés. Ça, c'est clair comme de
l'eau de roche. Premier élément.
Deuxième élément, les droits et
libertés, Mme la Présidente, c'est à l'individu. Charte des droits et libertés
de qui? De la personne. Pas charte
des droits et libertés des postes à pourvoir. Parce que là on dit : Là,
vous avez un droit acquis sur la
personne, vous pouvez porter un signe religieux parce qu'en date de sanction de
la loi vous en aviez un. Parfait. Vous
avez un droit acquis. Mais ne vous avisez pas d'accepter une promotion, ne vous
avisez pas de changer de commission scolaire,
parce que là le siège dans lequel vous êtes assis, lui, il va garder le droit
acquis, mais vous, là, vous allez le perdre. Alors, c'est comme si c'est les postes qui avaient le droit acquis.
Alors, charte des droits et libertés, pas de la personne, mais des
fonctions et des sièges. Ça, là, Mme la Présidente, juste ça, là, ça ne tient
pas la route, mais pas du tout.
On
veut également modifier la Charte des droits et libertés de façon unanime.
C'est l'objectif, de façon historique, et
c'est le Pr Bosset qui nous a fait la démonstration par a plus b, lorsque l'on
veut modifier la Charte des droits et libertés de la personne au Québec, il y a une règle très claire que l'on doit
viser l'unanimité. Il y a seulement deux cas d'espèce où on n'avait pas eu l'unanimité, Mme la
Présidente. C'est un cas où, je peux même vous le dire de façon très
précise, on voulait ajouter
comme motif de discrimination l'orientation sexuelle. Bien, c'est malheureux,
hein, mais il y a deux députés, à
l'époque, qui avaient voté contre. On n'avait pas eu l'unanimité, mais on avait
eu probablement 120 députés sur 122, à l'époque, ce qui était extrêmement
large. Deuxième cas, Mme la Présidente, on voulait faire une reformulation
d'un droit existant, droit des parents sur
l'éducation religieuse et morale de leurs enfants, sur les... En 2005, c'était
125 députés, sur 125, il y en a
un ou une qui a voté contre, 124 contre 125. Ça, c'était l'unanimité qui était
recherchée. Il y avait les deux cas d'espèce. Le reste, ça a été
unanime, à part ces deux éléments-là, de un.
Donc,
quand le gouvernement dit : Bien, que l'opposition officielle, les
29 députés, que la deuxième opposition, les 10 députés — ça fait 39 — que peut-être un indépendant — ça ferait 40 — bien, qu'ils votent contre, nous, le
bulldozer passe, et, en ce sens-là,
que ça pourrait même se faire sous bâillon, Mme la Présidente, ça, c'est le
bris d'une règle, je vous dirais, de
pratique très tangible. Et, qui plus est, quand il y avait amendement aux
modifications de la charte des droits et libertés du Québec, c'était pour protéger davantage, ce n'était jamais
pour retirer des droits. Jamais, Mme la Présidente, ce n'était pour
retirer des droits.
Et
là je passe les éléments. Moi, il y en a une que j'aurais aimé entendre dans ce
débat-là, c'est la ministre de la Justice,
ministre de la Justice qui a répondu à une de mes questions en disant, et je la
cite : «...sur les concepts juridiques, je ne peux pas intervenir ici, en Chambre...» Bien, Mme
la Présidente, je pense que c'est malheureux. J'avais même sorti des extraits de Marc-André Bédard. Dans le temps
où la loi 101 était débattue, Marc-André Bédard, le ministre de la Justice,
répondait aux questions puis il nous donnait toutes les assurances que les
droits et libertés allaient être protégés. Et la Charte de la langue française a été adoptée, Mme la Présidente, mais il
n'y avait pas de clause, il n'y avait pas de clause dérogatoire. Elle n'a pas été adoptée de façon à
retirer l'équilibrage des tribunaux à la lumière de nos droits et libertés. La
première mouture, la loi 1, il y avait
une clause dérogatoire. René Lévesque — et ça a été cité par M. Bosset,
professeur de l'Université
Laval — avait
dit, et M. Bosset nous en fait état, que ça n'avait pas été l'idée du
siècle. Et ça avait été retiré, et la loi 101 n'en contenait pas.
Alors,
tout ça, Mme la Présidente, on aura l'occasion de faire valoir nos
représentations en article par article. Mais, très clairement, pour
toutes ces raisons, nous allons voter contre le projet de loi n° 21.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de LaFontaine. Et maintenant je reconnais M. le député de Rosemont.
M.
Vincent Marissal
M. Marissal :
Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de noter le silence de nos amis
d'en face sur un projet de loi pourtant phare de leur gouvernement,
c'est du moins ce qu'ils nous ont dit. Je constate, comme le député de LaFontaine, qu'on va finir plus de bonne heure
parce que les gens du gouvernement ne parlent pas. Je peux bien comprendre
qu'ils soient tous d'accord parce qu'il y a la ligne de parti pour ça, mais que
personne l'autre bord ait quelque chose à
dire sur un projet de loi aussi fondamental, c'est troublant. Je trouve ça un
peu troublant. Puis on ne peut pas parler de débat, là, parce qu'en plus
personne n'écoute, ça fait que je vais parler ici, puis on n'aura pas de
débat — non,
vous, Mme la Présidente, vous m'écoutez,
c'est sûr, j'en conviens. Je trouve ça troublant. Je trouve ça particulier
comme façon de fonctionner. Ce n'est
pas tout à fait dans l'idée que je me faisais d'un débat. Mais enfin, bref, je
suis assez nouveau ici, je vais finir par comprendre, peut-être, comment
ça fonctionne.
Je
vais commencer en disant que le projet de loi n° 21, c'est un des premiers
projets de loi déposés par le gouvernement,
et, comme le projet de loi n° 9 sur l'immigration et comme le projet de
loi n° 17 sur l'industrie du taxi, il touche beaucoup les immigrants, et le statut des immigrants, et même le
statut économique des immigrants, et, je dirais même, particulièrement
des immigrantes, parce qu'évidemment ce sont trois sujets... trois projets de
loi qui touchent profondément l'économie,
celle du Québec, bien sûr, mais surtout celle de certaines familles, qui seront
touchées, qui seront frappées de
plein fouet par un projet de loi qui privera de l'accessibilité au travail
certaines femmes. Et évidemment ça a été dit et redit, je parle ici
évidemment de femmes musulmanes en particulier.
D'ailleurs, ce n'est
pas un hasard si le projet de loi n° 21 a attiré l'attention à
l'international. Tous les grands journaux dignes de ce nom aux États-Unis et en
France ont fait des articles là-dessus. Et pas besoin d'avoir étudié en
journalisme très longtemps, ou en sociologie, pour comprendre que ce n'étaient
pas des articles élogieux envers le Québec,
et ça, ça ne peut pas être bon pour l'économie du Québec puisqu'on donne
l'impression, et c'est ce que les journaux ont retenu, d'une société qui veut se refermer sur elle-même plutôt que
de s'ouvrir, ce qui est pourtant une de nos plus belles qualités
communes ici, au Québec.
La laïcité, c'est un mot. C'est un mot important
dans l'histoire occidentale et un mot avec des définitions, il peut y avoir plusieurs modes d'application. La
question de la laïcité, croyez-moi, je sais de quoi je parle, il faut l'aborder
avec nuance. Il faut voir l'application qui en est faite. Comme
chroniqueur à La Presse et ailleurs, j'ai bien dû écrire une centaine de chroniques sur le sujet à des moments
où c'était particulièrement chaud
dans l'actualité au Québec. Puis je peux
vous dire une affaire que j'ai remarquée assez rapidement là-dedans, c'est
qu'il y a deux camps, deux clans qui sont malheureusement irréconciliables, ce pour quoi nous avons le devoir,
nous, en tant que législateurs, en tant qu'élus, de trouver un terrain d'entente, un terrain central.
On pourrait même tracer une ligne ici, au milieu, là. On va être capables
de se rejoindre, de se serrer la main puis
dire : C'est ça qu'on est capables de faire ensemble. C'est un compromis
qu'on est capables de bâtir politiquement, pas «j'ai raison, vous
avez tort», pas «tu es raciste, toi, tu es xénophobe, toi, tu es multiculturaliste». Et la guerre des étiquettes
qui se poursuit, tellement qu'on se croirait dans une vente chez Jean Coutu,
tout le monde s'accole des étiquettes partout là-dedans puis on n'avance pas
dans le débat.
Ça, c'est
malheureusement la conclusion à laquelle j'en suis arrivé après de trop
nombreuses chroniques sur le sujet, qui m'ont, je dois dire, assez épuisé,
même, intellectuellement, parce que ces deux clans irréconciliables n'arrivent
pas à se parler. Alors, je répète, c'est à
nous ici, en cette enceinte, que revient le devoir de trouver un terrain
d'entente acceptable. Et, quant à
moi, quant à nous, à Québec solidaire, le projet de loi n° 21
n'est pas ce compromis acceptable.
Ma formation
politique a longtemps défendu le compromis Bouchard-Taylor, lequel compromis a
volé en éclats à partir du moment où
un des deux, soit Taylor, s'est retiré, ensuite Bouchard aussi a fait un pas de
recul. Le compromis n'existait plus,
mais c'était un compromis. On l'a défendu pendant un moment. On a décidé qu'il
ne tenait plus la route et que les droits fondamentaux étaient plus importants
que de s'accrocher à un processus et à un compromis qui n'existait plus,
Mme la Présidente.
• (17 h 30) •
Nous sommes donc revenus à la base. La laïcité
s'applique à l'État, pas aux individus. La laïcité, c'est la séparation des pouvoirs entre l'Église et l'État.
C'est un mot important de cette phrase. Le mot important de cette phrase est «pouvoirs», au pluriel. Ça a été dit, mais je
me permets de le redire, en quoi des signes religieux portés par des employés
de l'État du Québec compromettent la
laïcité? Une personne qui porte une croix influencerait comment le pouvoir
entre l'Église et l'État? Ça reste à voir, ça n'a pas été démontré
d'aucune façon, pas plus en commission parlementaire qu'auparavant, pendant la
campagne électorale.
Par ailleurs,
il y a un principe assez simple qui veut que se baser sur la majorité de la
population en matière de droit, ce
n'est jamais une bonne idée quand on l'applique à des minorités. C'est pour ça
qu'on a un État de droit, c'est pour ça qu'on a des tribunaux. On a une
charte québécoise qui fait notre fierté aussi. Je questionne donc la légitimité
d'utiliser la disposition de dérogation
contre notre propre charte. C'est pourtant là où s'en va le projet de loi n° 21.
Ça a été dit, d'abord une application
vraisemblablement ici par bâillon et ensuite la clause dérogatoire pour
finir... l'application et l'adoption de cette loi.
Mais quelle
démonstration, Mme la Présidente, a été faite pour justifier le recours à cette
mesure exceptionnelle? Quand on l'utilise, la clause dérogatoire, il
doit y avoir péril en la demeure. C'est loin d'être le cas, et ça n'a pas été démontré. La clause dérogatoire, c'est un frein
d'urgence. On actionne ce frein d'urgence non pas sans raison valable et
urgente. Or, cette démonstration, encore une fois, n'a pas été faite. Et,
malgré l'utilisation des dispositions de dérogation, il y aura des
recours devant les tribunaux. C'est écrit dans le ciel, c'est garanti, ça a été
dit d'ailleurs.
Ce projet de
loi va avoir de nombreux effets collatéraux, spécialement sur notre économie et
même sur l'occupation de notre
territoire. C'est paradoxal, d'ailleurs, parce qu'en ce moment à Montréal, sur
les abribus, est apparue une campagne publicitaire menée, je crois, si
j'ai bien vu, par les chambres de commerce du Québec, les chambres de commerce
du Québec qui écrivent, noir sur blanc,
qu'on a besoin urgemment de 60 000 immigrants pour combler des postes
partout au Québec. Alors, les
chambres de commerce du Québec font de la publicité, placardent des abribus de
Montréal pour dire aux
immigrants : Venez, venez, venez travailler ici. On a plein de postes pour
vous. Par ailleurs, le gouvernement ferme
une porte, d'abord en disant : On va en accueillir moins, ce qui n'est pas
l'idée du siècle, surtout pas en ce moment, et ensuite en disant : Bien, savez-vous, vous pouvez bien venir au
Québec, infirmières, enseignantes, policières, juristes, mais malheureusement, si vous portez un signe
religieux, bien, vous ne pourrez pas travailler. Alors, c'est légèrement
contradictoire. Visiblement, les gens des
chambres de commerce et le gouvernement n'ont pas travaillé cette campagne
de publicité ensemble.
On a besoin
des immigrants pour l'économie, c'est vrai, mais on en a besoin aussi, et ils
ont démontré qu'ils sont un ajout, un
ajout réel, pour notre société. Et on n'a pas besoin d'ajouter dans leurs
parcours de nouvelles embûches. C'est déjà plus difficile — on va
le reconnaître, hein? — pour
les immigrants, en particulier les immigrants de minorités visibles, c'est déjà plus difficile pour ces gens
de faire leur petit bonhomme de chemin dans notre société, puis là on va en
rajouter une couche avec un projet de loi en
leur disant : Non, toi, tu ne peux pas travailler là, là ou là pour une
raison, ma foi, assez floue et même ésotérique, quant à moi.
Le chercheur
Paul Eid, à travers une de ses recherches, nous dit que les chercheurs
d'emploi de la région de Montréal avaient 60 % plus de chance d'obtenir
une entrevue d'embauche s'ils avaient un nom franco-québécois plutôt qu'africain, arabe ou latino-américain. Une
recherche similaire, qui a été faite en 2018 à Québec par Jean-Philippe
Beauregard de l'Université Laval, a
révélé qu'avec un nom maghrébin un chercheur d'emploi avait deux fois moins de
chance d'être convoqué en entrevue. Pourtant, on le sait, il y a
beaucoup de personnes issues de l'immigration qui sont bardées de diplômes. Les femmes maghrébines de plus de
25 ans sont diplômées à 32 %, alors que la moyenne québécoise est de
21 %.
Je repose la
question : Pourquoi diable rajouter des embûches sur le chemin de ces gens
qui en ont déjà tellement, et qui
veulent venir ici, et qui veulent travailler? Une jeune femme musulmane qui
porte le voile, qui fait trois ans, cinq ans, six ans, parfois huit ans
d'université pour enseigner, elle n'étudie pas en théologie dans une université
musulmane au Maghreb, elle étudie ici pour
enseigner, pas pour faire du prosélytisme. Quelle est cette drôle d'idée que,
parce que vous avez un signe religieux, vous êtes nécessairement
radioactif?
Mme la Présidente, je vais vous
raconter une petite anecdote. Mes parents sont arrivés ici, de France, en 1965.
Ils se sont installés à Granby, Québec, «of
all places», en 1965. Moi, je suis né en 1966. Faites le calcul, je suis allé à
la petite école au début des
années 70. C'était pas mal encore catho dans les écoles au début des
années 70. Pour tout vous dire, mon école s'appelait Ave Maria. Ça ne
s'invente pas, ça ne peut pas tromper. Vous savez où vous êtes. Et, dans
l'école de 400 enfants, il y avait deux
enfants pas baptisés : mon frère puis moi. Pourtant... Et en plus il n'y
avait pas, à l'époque, de ce qu'on
appelait de cours de religion, ou d'E.C.R., ou quoi... Pendant la prière le
matin puis pendant l'heure de religion, tous les jours, on faisait juste me
mettre dans le fond de la classe avec un livre, puis je ne dérangeais personne,
puis c'était comme ça que ça fonctionnait.
Au moins, on respectait ma liberté de conscience. Mais il n'y avait pas de
cours de morale et il n'y avait pas
de solution de rechange. Mais on faisait... on faisait, pas moi, mais on
faisait, dans cette école, la prière
tous les matins. Souvent, c'est même le directeur qui faisait la prière, à travers l'intercom, dans toutes les
classes. Je me souviens même quand le
pape Jean-Paul I est mort subitement, tout s'est arrêté dans l'école, le
directeur a sauté sur le micro puis
il nous a annoncé ça à tout le monde dans l'école, que le pape Jean-Paul I
était mort. Je pense qu'on a fait au moins une heure d'arrêt des travaux
de l'école parce que c'était un événement majeur.
En
sixième année, mon enseignante, religieuse défroquée mais néanmoins fervente et
croyante, toujours, faisait la religion avec un zèle, ma foi,
impressionnant, au point où, pendant les récréations, elle gardait les deux,
trois petits turbulents, là — il y en avait toujours deux, trois, là, dans
chaque classe — et non
pas qu'elle les mettait en retenue, non pas qu'elle leur faisait faire une dictée, non pas qu'elle leur donnait
une punition quelconque, non, Mme la Présidente, elle leur imposait les mains. Oui, oui, j'ai vu ça de mes propres yeux.
On était en 1974... 1970, 1972, 1973, 1974. Ma prof de sixième année, là, elle imposait les mains, en
sixième année, aux petits turbulents. Bon, ça marchait-u, ça marchait-u
pas, je ne suis pas sûr, mais je sais, par exemple, une chose, ça, je suis sûr,
sûr, sûr, ces élèves-là ne sont pas devenus religieux. Pas plus, non, puis moi
non plus.
Et
le zèle de ces enseignantes qui imposaient les mains, qui nous faisaient la
catéchèse tous les jours... Moi, je marchais
tous les midis pour retourner manger à la maison parce que je n'habitais pas
loin. Le curé marchait comme ça, en long,
en large, dans son parking d'église, puis il lisait son bréviaire, puis, tous
les midis, il m'arrêtait en me disant : Toi, là, il faudrait que tu te fasses baptiser. Toi, là, il faudrait que
tu te fasses baptiser. Je pense qu'il avait une idée, là. Il aurait bien aimé ça baptiser un grand, tu sais,
parce qu'ils baptisent tout le temps des bébés. Ça fait que, là, il a dû se
dire : C'est un grand de sixième
année... En plus, j'étais déjà pas mal grand. Tellement qu'à un moment donné ma
mère s'est arrêtée sur le chemin du
retour à la maison puis elle a dit : Là, M. le curé, vous n'avez pas
compris encore, là. Nous autres, on ne fait baptiser personne. C'est
notre choix, puis arrêtez d'embêter mon fils avec ça.
Voyez-vous,
tout ce zèle religieux dans lequel j'ai baigné toute ma jeunesse n'a pas fait
de moi quelqu'un de plus religieux.
Et je respecte très bien les gens qui sont religieux. Mais d'où vient encore
une fois cette idée que, parce que tu
portes un signe religieux, tu vas nécessairement contaminer un enfant qui va
nécessairement devenir... Mes enfants, Mme
la Présidente, là, ils ont grandi à Montréal. Dans les CPE qu'ils ont
fréquentés et au service de garde qu'ils fréquentent, là, au moins la moitié
des éducatrices portent le voile. Aux dernières nouvelles, il n'y en a pas un
qui s'est converti à l'islam. En tout
cas, ils ne me l'ont pas dit. Mes enfants ont l'air aussi peu religieux que moi
et que le milieu dans lequel ils vivent. Alors, cette idée, là, qu'il y a nécessairement un effet de contagion,
je ne peux pas l'accepter sur une base intellectuelle. Et ça ne se vérifie pas sur une base scientifique
et encore moins sociologique. Alors, si c'est ça, la base, ça ne tient pas.
Alors,
quelle est la base? Que l'État est laïque? Mais oui, mais bien sûr, l'État est
déjà laïque. L'État est laïque. Il y
a des gens qui ne sont pas laïques. Et prenez d'autres situations assez
absurdes où Fatima, nom fictif, ne pourra pas devenir infirmière. Mettons, là, qu'elle décide, là,
qu'elle veut aller travailler en région, là, à Amos, puis il y a une job
d'infirmière là-bas. Elle ne pourra
pas devenir infirmière parce qu'elle porte un voile. Elle ne pourra pas. Moi,
je comprends qu'une infirmière qui
n'est pas infirmière pendant 20 ans, ça cause un problème quand on finit
par découvrir le pot aux roses, mais une infirmière qui porte un voile? Moi,
j'en ai déjà, des infirmières, au CLSC de Rosemont, qui m'ont fait des prises de sang. Elles portaient le voile, puis ça
n'a pas fait plus mal ni moins mal, puis ça a été correct, puis la prise de
sang s'est rendue au laboratoire. Puis elle ne m'a pas parlé de religion pour
me calmer mes angoisses devant l'aiguille qu'elle allait me planter dans
le bras. Ce n'est pas de même que ça marche.
• (17 h 40) •
Mais Fatima, elle, ne pourra pas devenir
infirmière. Mais son mari Mohamed, qui porte la barbe, lui va pouvoir
travailler, y compris dans la fonction
publique, y compris comme
fonctionnaire, même peut-être comme enseignant, s'il est enseignant, ou infirmier s'il est infirmier. Mais il y a
des gens, au Québec, qui portent la barbe de façon religieuse.
La mienne, elle est laïque. J'ai une barbe
laïque, parfaitement laïque. Il y a des gens qui portent une barbe religieuse ici.
C'est connu. Est-ce qu'on va demander à ces gens-là de raser leur barbe?
Bien, sinon, ce n'est pas cohérent parce
que, si le voile de Fatima est un problème, la barbe de Mohamed
devrait en être un aussi. Moi, je pense qu'il n'y a pas de problème
dans les deux cas, mais, auquel cas,
c'est de la discrimination envers Fatima parce qu'elle, elle porte un
voile. Mohamed, il porte une barbe. Et certains musulmans très, très
croyants ont la barbe très, très fervente, et c'est connu, c'est su, c'est vu.
Je
m'égare un peu parce que ce sujet... En fait, pas tant que ça. Je ne suis
pas parfaitement dans le sujet, mais ce sujet crée beaucoup de passions,
crée beaucoup de passions. Et je vous ai dit, moi, j'ai écrit je ne sais pas
combien de dizaines, peut-être
des centaines de chroniques sur le sujet, et c'était toujours
les chroniques pour lesquelles j'avais le plus de courriels le lendemain, et, croyez-moi, ils n'étaient pas tous
élogieux. Ils n'étaient pas tous élogieux. Pour quelques fleurs, j'ai eu pas mal, pas mal de pots. En fait, beaucoup
plus de pots. C'était violent, ça dégénérait. Et c'est là aussi, je... Et parlez-en à mon ex-collègue Rima Elkouri,
de La Presse, qui, à chaque fois qu'elle écrit là-dessus...
Elle est forte, mon ex-collègue Rima,
de supporter ça parce que c'est épouvantable, ce que ça crée, c'est
épouvantable, le feu que l'on crée à chaque fois qu'on veut parler de
ça, même de façon posée.
Alors, je
répète, c'est ici, en cette Assemblée
nationale, entre élus, qu'on a le
devoir de trouver des compromis qui
ne mettront pas le feu aux poudres. Déjà, il y a des statistiques qui
démontrent qu'il y a des cas d'intolérance envers, notamment, des femmes voilées. Les cas augmentent.
Parlez-en au groupe Justice Femmes, notamment. Et même dans le
privé, on est en train de le documenter, il y a
des femmes qui se voient refuser des emplois parce qu'elles portent le
voile, même dans le privé. C'est bon
pour pitou dans l'État, c'est bon pour minou dans le privé. C'est
l'image que le gouvernement envoie, c'est le message que le gouvernement envoie. On légitimise une forme de discrimination, ce qui n'a pas de
sens.
J'ai
rencontré récemment, à Montréal, dans une consultation non officielle qui a été
faite de plusieurs groupes qui auraient voulu venir parler ici, en commission parlementaire, mais qui n'ont pas été invités, j'ai rencontré
beaucoup de gens, des juifs, des musulmans,
des sikhs, notamment cette jeune femme qui est en train de terminer
son baccalauréat en éducation, jeune
femme sikhe qui porte le turban sikh pour femme, dont j'oublie le nom. J'en
suis désolé, je ne suis pas un spécialiste des religions ni des signes
religieux. Et cette jeune femme est au désespoir, Mme la Présidente, littéralement parce qu'elle est en train de
finir d'étudier pour devenir prof. C'est ça qu'elle veut faire. C'est ça
qu'elle ferait. Elle contribuerait à
l'économie du Québec, elle contribuerait au mieux-être au Québec.
Puis là, arrivée au fil d'arrivée, alors qu'elle a étudié là-dedans, on
lui dit : Bien, c'est bien de valeur, il va falloir que tu l'enlèves, ton
turban.
Voulez-vous
bien me dire où est-ce qu'on a pris l'idée qu'une jeune femme enseignante
sikhe avec un turban est dangereuse pour les enfants? Au contraire. Au
contraire, en quoi est-ce que ce serait dangereux pour notre système d'éducation que d'avoir plus de diversité, sachant
que ces gens n'ont pas étudié le prosélytisme, là? Elle, elle n'est pas bachelière en prosélytisme, là, elle est
bachelière en éducation. Elle veut enseigner aux enfants. C'est ça qu'elle veut
faire. Et on va lui dire : Bien
non. Sais-tu quoi? Malheureusement, ou bien donc tu te conformes, puis tu fais comme
tout le monde,
puis tu suis la voie de la majorité, ou bien donc, bien, il va falloir... tu
vas devoir te trouver autre chose. Ça a déjà été dit, ça, par la partie ministérielle. Ça a déjà été
dit : Il va falloir que tu te trouves autre chose.
Moi, je
trouve que c'est un geste de repli sur nous-mêmes. C'est un geste de peur. Et
je peux vous dire, parce que mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, tout à l'heure, parlait de perceptions, moi, je vous parlerais de malaise, on ne
légifère pas sur un malaise. On le gère, son malaise parce que, je vais vous
dire une affaire, si on avait légiféré, à une certaine époque à Ottawa, sur des
malaises, là, il n'y en aurait pas eu, de mariage gai parce qu'il y avait un
paquet de monde qui était bien mal à l'aise
avec ça. À un moment donné, il y a quelqu'un qui a dit : Les droits, c'est les droits.
Les homosexuels, comme les autres, ils ont les mêmes droits. Alors,
allons-y, légalisons. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Rosemont.
M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Schneeberger :
...j'écoute attentivement les conversations qui se disent ici. Par contre,
j'aimerais juste mentionner qu'avec le projet de loi une infirmière peut porter
le hidjab. Ce n'est pas problématique, ce n'est pas une personne en poste
d'autorité. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. M. le leader
adjoint du gouvernement, vous savez
que vous devez soulever des questions
de règlement et non pas commenter les interventions de vos collègues. Je vous
remercie.
Maintenant, pour la prochaine intervention, je
vais céder la parole à Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit :
Je vous remercie, Mme la Présidente, et je vais commencer en disant que j'ai
presque eu un bref espoir en voyant le
leader adjoint se lever. Je pensais qu'il avait l'intention de prendre la
parole, comme nous tous ici, à l'opposition,
sur cet important projet de loi. Puis je vais reprendre les paroles des trois
députés qui m'ont précédée et qui ont mentionné à quel point c'était
navrant, désolant, très questionnable de voir qu'il n'y a aucun député de la
CAQ présentement qui a quelque chose à dire
sur ce projet de loi qui va venir remettre en question des droits fondamentaux
du Québec. Et, si ce n'était, à tout le
moins, pour venir le soutenir, c'est quand même très questionnable et ça
soulève aussi beaucoup de questions, avec ce qu'on a vu aujourd'hui, sur
leur liberté de parole également.
En tout cas,
dans mon cas, je comprends que ce n'était peut-être pas important pour eux
d'aborder ce projet de loi là et de
prendre la parole, le temps qu'ils ont comme parlementaires pour le faire,
mais, pour moi, c'est très important de le faire. Et j'en reviens à mes débuts, à mes premières journées ici comme
parlementaire. Ça me ramène là parce que, comme d'autres parlementaires de cette Assemblée, la raison pour laquelle je
me suis présentée aux élections générales de 2014, c'était dû à la charte des valeurs. Vous savez, ça
fait très longtemps que je m'impliquais déjà très activement en politique
et, à l'époque, j'avais trouvé désolant de
voir la société québécoise qui se dessinait et qui se profilait à l'horizon. Et
j'avais alors fait le choix de ne pas
rester sur les banquettes à voir le déroulement de cette saga plus longtemps.
Et c'est la raison pour laquelle je
m'étais présentée en 2014. Et l'histoire dira que c'était quand même pour une
bonne raison qu'on l'avait
fait parce qu'on avait mis un terme à cette fameuse charte.
Mais
malheureusement on y revient encore aujourd'hui, puis le premier ministre a
beau présenter son projet de loi comme
un projet de loi modéré, je peux juste souligner, Mme la Présidente, que je ne
partage pas son opinion sur cette question-là
parce qu'aussitôt qu'on retire un droit fondamental à une personne, je vois mal
comment on peut qualifier cette
action de modérée. Et le fait que le projet de loi n° 21
vise peut-être moins de monde que la charte du PQ, ça n'en fait pas pour
autant un projet qui est modéré.
On va
commencer par le commencement. Puis l'une des raisons pour lesquelles,
justement, je ne trouve pas du tout que c'est un projet modéré, le
projet de loi n° 21, il est clairement discriminatoire. Et j'ai beaucoup,
beaucoup, beaucoup de difficulté à vivre
avec le fait que des parlementaires puissent endosser ça. On peut être pour le
projet, on peut être contre le projet, mais ça, c'est un fait
indéniable, c'est un projet qui est discriminatoire.
Puis en preuve je vais me permettre de
citer la commission des droits et libertés de la personne et des droits de la
jeunesse du Québec qui a dit : «La
discrimination, c'est lorsqu'un individu ou un groupe d'individus est traité
différemment en raison de
caractéristiques personnelles.» Donc, caractéristiques personnelles, hein, les
signes religieux. On parle, entre autres, de signes qui sont visibles.
Puis cette commission ajoute que «la discrimination crée des inégalités
entre les individus et empêche l'individu ou
le groupe d'individus qui subit la discrimination d'exercer pleinement ses
droits.» Et c'est à ça qu'on fait face présentement.
• (17 h 50) •
Et,
quand on parle de motifs de discrimination qui sont interdits par la charte
québécoise des droits de la personne, par notre charte, on y retrouve la
religion, hein? Puis je vous le lis, là, pour qu'on soit tous à la même page
ici, là, la religion est un motif interdit
de discrimination et de harcèlement. Cela signifie qu'on ne peut pas vous
traiter différemment du fait de votre
religion ou de vos croyances. Dans notre charte, c'est écrit noir sur blanc, et
on est en train de bafouer ouvertement cette charte avec le projet de
loi qui est présenté par le gouvernement.
Donc,
à la lumière, là, des informations qui sont fournies par la commission, il ne
fait aucun doute sur la nature discriminatoire
de ce projet-là. Et après ça il reste à savoir, là... je me dis, c'est... Les
députés de la CAQ, le gouvernement, ils doivent se dire que cette
discrimination-là, elle est justifiable dans une société démocratique comme la
nôtre. Moi, évidemment, je vais être franche avec vous, je ne partage pas du
tout cette opinion. Puis je n'ai pas encore rencontré quelqu'un qui a su me
démontrer que la laïcité est actuellement en danger au Québec, hein?
Depuis la Révolution
tranquille, on a un État québécois qui est exempt de l'influence du clergé. Nos
lois, nos institutions, ça ne suit plus des principes cléricaux. Elles se
basent sur des principes qui sont laïques. On y garantit la neutralité religieuse de sorte qu'aucune
confession ne soit favorisée par rapport à une autre. Et ça, c'est un des
grands héritages de la Révolution tranquille.
Puis je vais me
permettre de retourner justement aux fondements. Je me permets une petite
digression sur les fondements, dans le fond,
de qu'est-ce qu'il y avait derrière l'esprit de cette Révolution tranquille
parce que je crois que c'est
extrêmement important. L'autre jour, je marchais aux abords de l'Assemblée
nationale, puis j'invite les députés de la CAQ qui sont ici, parce qu'il y en a beaucoup d'entre eux qui sont
nouveaux, qui arrivent dans cette législature-là, et c'est toujours un exercice intéressant d'aller voir ce
qui nous entoure, les statues qui nous entourent, et surtout d'aller voir les
plaques commémoratives, les messages qui
sont sur ces statues-là. Et mes pas m'ont menée à la statue de Jean Lesage, père du Québec moderne.
Et qu'est-ce qui est écrit sur la plaque commémorative de Jean Lesage? Je vous
en fais la lecture parce que c'est fort pertinent dans le débat qu'on a aujourd'hui.
Alors, il est écrit, puis c'est une citation, évidemment, de Jean Lesage, il dit : «Nous ne
résoudrons pas nos problèmes en cherchant des solutions qui divisent à une
époque où, partout, des efforts sont faits
pour chercher les raisons d'unir. Nous devons envisager les changements dans le
contexte d'une situation mondiale. Demain,
les communications et les besoins auront rapproché, comme jamais auparavant,
les hommes de toutes langues, [de toutes] races ou [de toutes] religions.»
Donc,
j'invite vraiment à prendre une
marche parce qu'il y a plusieurs statues qui ont des plaques commémoratives,
les grands, les grands de ce monde,
Québécois, qui nous ont précédés, qui sont à l'origine justement des grandes
révolutions du Québec, des projets de
loi qui ont été déposés et qui justement rappellent toute cette question-là de
l'importance de l'ouverture. Et c'est
des mots qui sont très puissants, qui sont certainement un discours
nationaliste, un discours ouvert, un
discours qui est progressiste. Mais ça, c'est un nationalisme que je suivrais
sans gêne, Mme la Présidente. Et je crois que le premier ministre, son ministre de l'Immigration et l'ensemble des
députés du caucus caquiste auraient avantage à s'imprégner davantage de ces paroles de façon générale, mais particulièrement
dans les réflexions qu'ils feront autour du projet de loi n° 21.
Et
c'est faux, Mme la Présidente, de penser aussi qu'en divisant on va mieux
régner, hein? On l'entend souvent, cette
expression-là. Bien non, quand on divise, on fracture, on brise, et c'est ça
qui va arriver avec le projet de loi n° 21. C'est un héritage important que le projet de loi n° 21, justement, va venir briser de cet héritage de la Révolution
tranquille. Puis je reviens à la Révolution tranquille parce que c'est
un gouvernement qui se dit nationaliste, mais je pense qu'il faut qu'il
s'imprègne de ces questions-là puis qu'il le fasse dans une grande tradition
historique. Et favoriser le non religieux,
l'athéisme, diaboliser les croyants, ce n'est certainement pas encourager la
laïcité, mais vraiment au contraire. Ce
n'est pas favoriser la neutralité religieuse non plus que de refuser l'accès à
certains emplois de la fonction publique à des personnes parce qu'on
n'aime pas le symbole religieux qu'elles portent.
Et
le gouvernement nous propose une loi qui divise, qui bafoue notre charte des
droits et libertés, une charte, là, je le
rappelle, qui a été évidemment adoptée à l'Assemblée, à l'unanimité à l'Assemblée
nationale. Et c'est un texte de loi qui devrait être une part
essentielle de notre identité collective parce qu'elle garantit que la liberté,
que l'ouverture, deux qualités qui ont
toujours été au coeur de ce que nous sommes comme nation, sont protégées. Et je
pense que ça doit vraiment, vraiment, vraiment nous habiter dans tous
les projets de loi, justement, sur lesquels on travaille comme parlementaires. Et ça, bien, bien entendu, c'était
bien avant le PQ de Pauline Marois et avant la CAQ parce que ce sont
deux projets, la charte des valeurs à
l'époque, le projet de loi n° 21 aujourd'hui, qui viennent remettre en question
ces valeurs profondes. C'est deux
partis qui auront démontré que ces droits qu'on croyait immuables ne sont pas à
l'abri ni de raccourcis intellectuels, ni de démagogie, ni de populisme
non plus.
Et
je sais, Mme la Présidente, que j'utilise des mots qui sont forts, mais, à
quelques semaines d'un projet de loi qui s'approche de la sanction royale, je pense que le temps des demi-mesures
est complètement... puis ça fait longtemps qu'on l'a dépassé dans ce cas-là.
Puis je vois que le ministre de l'Immigration, il est complètement imperméable
à toute pensée critique. Il y a de
nombreux arguments qui ont été faits pour vraiment... contre ce projet de loi,
puis on en est au même point. On a à peine, à peine, avancé.
Et
le gouvernement continue de pousser une loi qui est discriminatoire, mais je
n'arrive pas à comprendre au nom de
quoi parce qu'il n'y a pas de rationnel derrière cette décision-là. Comme mon
prédécesseur, le député de LaFontaine, j'ai
quelques citations aussi dans mon texte parce que c'est l'occasion aussi de
reprendre... Je regardais M. Bouchard aussi parce qu'on en parlait
beaucoup, hein, on parle toujours du consensus Bouchard-Taylor, consensus
Bouchard-Taylor. Il n'y en a plus, de
consensus Bouchard-Taylor. Il n'y en a plus. Les deux sont venus en commission,
les deux sont venus nous dire :
Écoutez, si c'était à refaire, si c'était à réécrire, ce n'est pas comme ça
qu'on l'aurait fait. On l'a fait dans un autre contexte. On se sent trahis par ce qui est déposé aussi. Je pense
que c'est bien important. Et M. Bouchard, je le cite, dit : «...il me semble qu'on ne peut pas
restreindre ou supprimer un droit fondamental sans pouvoir invoquer un motif
supérieur — ordinairement
un autre droit.»
Donc, j'en
reviens vraiment à la question de c'est quoi qui pousse, qu'est-ce qui
pourrait, à la limite, justifier ce projet
de loi qui est discriminatoire. Là, j'apprends des enseignants : «Le
gouvernement ne nous a fourni aucune étude crédible ni basée sur la science, ni sur des recherches, ni sur des
données empiriques qui pourrait venir le moindrement nous donner un début d'indication qu'un signe
religieux empêche un enseignant de bien rendre la matière, de bien faire
son travail ou qu'il a pour conséquence
l'endoctrinement ou le prosélytisme.» Donc, c'est quand même... Puis on n'en a
pas davantage, d'ailleurs, ni pour les
juges, ni pour les gardiens de prison, ni pour les policiers. Donc, les
arguments du gouvernement, au mieux,
sont théoriques. Il n'y a rien qui est ancré dans le réel. C'est extrêmement
idéologique comme façon d'avancer.
Et, Mme la
Présidente, je pense que mon temps commence à tirer à sa fin, hein, si je ne me
trompe pas. Bien, moi, j'aurais envie
de vous laisser... parce que j'aime bien nous parler des gens, justement, qui
nous... J'avais énormément de choses
à dire encore sur ce projet-là, mais j'aurai d'autres occasions de le faire.
Puis je réinvite, je réinvite vraiment, je réinvite les députés de la CAQ à regarder derrière leurs épaules, à
regarder l'histoire derrière eux. Puis je les ai laissés la dernière fois sur une citation de Gilles
Vigneault. Je vais les laisser sur une autre citation de Gilles Vigneault parce
qu'elle m'apparaît importante puis
elle décrit vraiment ce qu'on est nous-mêmes. Puis il disait, dans une de ses
chansons, il disait :
«Dans ce pays de poudrerie
Mon père a fait bâtir maison
Et je m'en vais être fidèle
À sa manière, à son modèle
La chambre d'amis sera telle
Qu'on viendra des autres saisons
Pour se bâtir à côté d'elle.»
Pour moi,
c'est ça, le Québec, c'est un Québec d'ouverture. Donc, il n'y a aucune raison
d'aller de l'avant avec ce projet de loi, mais vraiment aucune raison. Et je
vous invite à voter contre le principe. Je vous invite à revoir la façon
dont on veut se gouverner comme Québec et à
quel point on veut bâtir des murs ou s'ouvrir sur le reste du monde. Merci,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, Mme la députée de Maurice-Richard.
Et, compte tenu de l'heure,
je vais suspendre nos travaux jusqu'à 19 h 30.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 19 h 31)
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Bonsoir. Vous pouvez vous asseoir.
Alors, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption
du principe du projet de loi n° 21, Loi
sur la laïcité de l'État.
Alors, je suis prête à céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier.
La parole est à vous.
M. Gregory Kelley
M. Kelley : Merci,
Mme la Présidente. Québec
est une société distincte et une société interculturaliste.
Mais d'être une société interculturaliste, c'est quoi exactement?
Québec
est un arbre toujours en croissance. Le tronc de l'arbre, c'est notre
langue, notre culture et notre Charte des
droits et libertés. Sculpté sur l'écorce, c'est le slogan Je me souviens.
Notre arbre a vécu beaucoup dans son histoire : arrivée des Européens, la Conquête, les
révolutions des Patriotes, la naissance du Canada, deux guerres
mondiales, une révolution tranquille,
plusieurs négociations constitutionnelles, deux référendums,
une guerre en Afghanistan et en Irak, et la mondialisation, et les changements climatiques. Les branches sont les
Québécois. Nous avons conçu une société
libre avec des programmes sociaux
ambitieux pour créer une société plus égale pour tout le monde. Nous sommes les
porteurs des souvenirs de notre
histoire collective et nous avons toujours le devoir de s'assurer que notre arbre est en
croissance, mais je pense que présentement nous sommes en train de
donner un bon coup de hache à notre tronc.
We are able to flourish because we can
live in a society that is equal and just, where all citizens are treated
equally by their Government. We are on the verge of making a major change to individual
freedoms where citizens will no longer be
placed on equal footing, because of their religious beliefs. Religion is of
conscience and can't be separated from a person. If someone who wears a
large cross, a kippa, a turban or a hijab wants to, one day, sit as a Speaker
of this National Assembly democratically
elected by a proud and free people, it does not pick my pocket nor break my
leg. Rights are
bridges that unite people together and build societies up. This bill is a step
towards tearing bridges down, what my family has contributed to this
collective memory. Why are rights such an important issue for myself?
Mais, Mme la Présidente, je veux juste commencer avec un petit peu de l'historique de quelque chose qui est passé dans les années
1940, quand M. Frank Roncarelli, il a eu son «liquor licence» enlevé par le gouvernement de M. Duplessis. Pourquoi M. Duplessis, l'ancien premier ministre du Québec, a décidé de faire ça? C'est parce que
M. Roncarelli a décidé de payer des
cautionnements d'environ 300 différents Témoins de Jéhovah. F.R. Scott, le fils
de F.G. Scott, prêtre anglican ici, à
Québec, juste à l'église de Saint-Mathieu, sur la rue, ici, Saint-Jean, a
décidé de lutter pour les droits individuels et pour une charte ici, au Québec, et au Canada. C'était M. F.R. Scott qui a plaidé pour M.
Roncarelli. La Cour suprême a tranché en faveur des droits de M. Roncarelli et
aussi des Témoins de Jéhovah. Un fils de quelqu'un qui était un prêtre
de la religion anglicane. C'était quelqu'un
qui a vraiment à son coeur tout l'esprit des droits des
individus. Alors, ça, c'est pourquoi, après ça, il a décidé de lutter pour une charte
des droits des personnes ici, au Québec, puis aussi
au Canada.
Mon
grand-père a servi comme pilote dans la Deuxième Guerre mondiale. Après ça, il
a toujours travaillé avec des
réfugiés partout dans le monde pour s'assurer que Québec et Canada étaient une
terre d'accueil pour les plus vulnérables dans notre monde. Ma grand-mère a lutté pour les droits des anglophones.
Et, quand le Québec a décidé d'introduire une charte pour la langue française, ma grand-mère a travaillé avec le
gouvernement du Québec pour s'assurer que le droit et l'accès à des services en santé pour la
communauté anglophone étaient présents dans notre charte. Ces clauses restent
toujours là. C'était une génération qui,
après la Deuxième Guerre mondiale, a décidé de lutter pour les droits des
personnes.
Puis on est
rendus juste avec la Déclaration universelle des droits de l'homme, that was
passed by the United Nations. And I'm not going to say that the United Nations have necessarily lived
up to everything that is in that charter, but I can stand here before you and say that some
of those ideas that were brought forth by the politicians and by the men and
women who had suffered and fought during World War II remain just as important
as ever today. For example, article 3 :
«Everyone has the right to life, liberty and security of person.»
Article 5 : «No one shall be subjected to torture or to cruel, inhuman or degrading treatment or punishment.» I could go down the
list for a lot longer time just to remind everyone that, in that document, some of those very basic freedoms that
we don't always remember and perhaps take for granted were put together by a group of extraordinary people who were
inspired by that charter and who brought some of those ideas back here,
to Québec, and back here, to Canada.
Notre formation politique, Mme la Présidente, a
une très longue histoire d'être une partie de ces groupes qui a lutté pour les droits. Je peux juste parler d'une couple
de gestes que les gouvernements libéraux ont posés. We can look in 1961, when the first woman was elected as an MNA. We can look en 1964, quand nous avons adopté...
excusez-moi, la Loi sur la capacité
juridique de la femme mariée, permettant à des femmes mariées d'exercer des
actes juridiques sans le consentement de
leurs maris. C'était quelque chose que Mme Marie-Claire Kirkland-Casgrain a travaillé
là-dessus. Le 12 décembre 1972, Marie-Claire Kirkland-Casgrain, l'ancienne députée et ministre des
Affaires culturelles, alors seule femme membre de l'Assemblée nationale, dépose
le projet de loi n° 63, Loi sur le
Conseil du statut de la femme. Le 25 avril 1940, sous le gouvernement libéral de M. Godbout, le
gouvernement a octroyé le droit de vote aux femmes, il a été adopté par
l'Assemblée nationale. Le
29 octobre 1974, le ministre de la Justice, Jérôme Choquette, a déposé un
projet de loi à l'Assemblée nationale sur
la Charte des droits et des libertés de la personne, qui a été adoptée le
27 juin 1975. En 2008, la ministre de la Condition féminine, l'actuelle
députée de l'Acadie, a fait ajouter à l'unanimité, dans la Charte des droits et
libertés de la personne, l'égalité femmes-hommes. Le 18 avril 2007, le
premier ministre Jean Charest a annoncé le premier cabinet ministériel
paritaire de l'histoire du Québec. Et, en 2016, la ministre de la Justice, l'ancienne
députée Stéphanie Vallée, a ajouté l'identité ou l'expression de genre
comme motif de discrimination à l'article 10 de la charte.
Tout ça, Mme
la Présidente, pour dire que notre formation politique est vraiment fière de
toujours lutter pour les libertés des personnes et on va continuer de
faire ça. Mais c'est très facile juste de lister des différents points dans un discours, mais il y a aussi un côté humain. J'ai
parlé tantôt des différents gestes, des différents actes de ma famille, des
personnes comme mon grand-oncle arrière,
M. F.R. Scott, quand il a lutté pour les personnes ici, au Québec, quand
j'ai parlé de ma grand-mère. Mais ils ont créé puis on a passé des
chartes qui protègent des gens.
• (19 h 40) •
And there are some people in my
family from the LGBT community who were put on equal
footing after we adopted laws here, in Québec, and adopted laws here, in Canada, that made them equal before the eyes of the law
and before the eyes
of the State. And that is something that touches myself, because I could easily
look at this bill today and say,
«Well, it doesn't affect me personally, I'm not someone who wears a very large
cross everyday in my functions, I'm not
someone that has a religious symbol that is evident or clearly, you know, seen
by the people, so it's something that, I
can say, doesn't affect me, so it doesn't matter.» But, if I had that reflex
every time we were about to tinker with charters of rights, then what would be the point in really ever caring all that
much? And, in reality, when you start to look around, some of the things that we are doing now could
have an impact on people that I do know. So, to be completely ignorant just
because it doesn't impact me and might only
impact a small segment of our population is not
really a reason for me to be ignorant to the fact of what's going on. It's
quite the inverse, it's a time for me to step up as an MNA and to speak about why this is important to myself and is important to my political
party.
Des fois, sur l'autre côté du banc, j'ai entendu
que le projet de loi n° 21, c'est un projet de société.
Mais moi, je pose la question : Pourquoi la journée même du dépôt
du projet de loi un sondage était partagé avec certaines chaînes médiatiques? Puis là on a eu le chiffre des Québécois
qui étaient pour et contre. O.K. C'est correct. Mais après ça on a une autre partie du sondage qui dit qu'il y a
une division basée sur des francophones puis des non-francophones. Si c'est
vraiment un projet de société, pourquoi quand même commander un
sondage où la question est posée qu'il y a une division entre les différents Québécois?
Nous sommes tous partis du même tronc, nous sommes tous des Québécois,
et, juste parce qu'il y a
certains d'entre nous... et je parle de nous, la communauté anglophone, on est
contre, maintenant, est-ce qu'on n'est pas des bons Québécois? C'est où que j'ai un petit peu de misère, que, dans les communications après ça, il y a le spin : Il y a des gens qui sont contre, les francophones sont
pour, les autres ne sont pas pour. Alors, est-ce que nous n'avons pas droit à une opinion, nous autres? Et pourquoi,
comme je dis, et je veux répéter ça, pourquoi quand même juste commencer
avec un sondage? Si on veut gouverner par les sondages, il y a des sondages qui
étaient commandés qui disent : Des Québécois appuient la charte des droits et libertés
canadienne massivement, un fort appui à ça. Alors, quand même,
sur l'autre côté, quand on parle des
droits individuels, il y a un appui pour ça aussi, Mme la Présidente. Et ça, c'est pourquoi, quand je regarde ça, je trouve que ce
n'est pas un projet vraiment de société.
Puis
maintenant je vais commencer un petit peu sur des éléments
dans le projet de loi. Le projet
de loi ne présente pas une définition d'un signe
religieux. Je ne sais pas si le ministre
peut dire clairement c'est quoi, un signe religieux. Est-ce que ça
s'applique à quelqu'un qui porte un hidjab? Est-ce que ça, c'est un signe religieux? Et je ne parle pas juste dans une
discussion générale, je pose la question : Est-ce qu'il y a une jurisprudence qui
démontre que c'est un signe religieux? C'est
juste une question, mais je ne pense pas qu'on a reçu une réponse
très claire à ce stade ici. Mais c'est quelque
chose de très basique, parce qu'on parle d'un projet de loi sur les signes
religieux. Au minimum, l'ancien gouvernement, le Parti québécois, essaie de
démontrer c'est quoi, exactement, un signe
religieux, mais présentement c'est absent dans notre projet de loi.
Une
autre problématique, c'est la clause grand-père. Pour ça, est-ce que
ça va sauver des emplois pour certaines personnes? Peut-être,
mais ça va aussi créer deux classes de citoyens : certains citoyens qui ont le droit à
porter des signes religieux dans une école; puis les autres, qui n'ont pas le
droit de faire ça, et ça va mettre des restrictions sur des personnes
qui travaillent pour notre État, qui sont limitées à leur position. Tu ne peux
pas avancer, tu ne peux pas changer, il
faut rester dans votre place. Encore, Mme la Présidente, c'est très, très
différent... difficile, excusez-moi, d'appuyer un projet de loi qui va
clairement créer deux classes de citoyens.
Une
autre chose que je pose la question : C'est quoi, la logique que certaines personnes
dans les écoles privées peuvent
porter ça, mais pas dans des écoles publiques? Encore, c'est une contradiction
énorme, selon moi. Puis, quand
même,
si quelqu'un va essayer de tester ça devant la cour, clairement,
il y a une inégalité, là, qui existe, et ça va être très, très intéressant de voir qu'est-ce
que la cour va trancher là-dessus.
Quand même,
juste sur notre territoire, un policier de la sécurité du Québec, on va interdire ça, pas le droit de porter un turban, mais, quelqu'un qui travaille pour la
GRC, c'est correct pour eux autres. On va avoir des personnes qui ont un
droit, s'ils travaillent pour un différent
niveau du gouvernement, puis les autres, qui n'ont pas ce droit-là. On va
pousser certains Québécois de faire
un choix entre le Québec et le Canada pour leurs emplois, de faire un choix
entre deux différents gouvernements.
Moi, ça pose certaines questions. Et quand même, présentement, notre ministre
de la Défense à Ottawa porte un
turban, quelque chose qu'il a porté pendant la guerre en Afghanistan. Il a
servi le Canada et le Québec avec fierté. Encore, ça pose une question : Pourquoi c'est correct pour nos
forces militaires mais pas pour quelqu'un pour la sécurité du Québec?
These are some things that just clearly
bring contradictions to the forefront when we are looking at this bill as a whole, and that is why quite
simply we have at times been attacked of trying to slow things down, but no, we
are trying to do our job, as the
Opposition, to ask questions, to try to bring to light : Is there possible
ways that amendments could be made? Of course, on our side, we're
against it, but that doesn't mean that we cannot continue to work in the
interest of all Quebeckers to make something
that we're against at least a little bit more coherent to the public. That is
the duty of a government and of an
Opposition. That is the duty that we have, as parliamentarians. We understand
we do not have the votes to vote down
this bill, but we do have a duty to put our thoughts and our beliefs forward
for consideration. And this is going to be the first time, it
seems — we are not arrived there yet, Madam Speaker — that it is possible we will invoke closure on something that
will modify our charter, the Québec Charter of Rights, where there will be no
consensus amongst us on this bill if it remains in its present form.
Ça, Mme la Présidente, ça, c'est pour moi une erreur majeure, parce
qu'au minimum, quand nous avons changé notre
charte sur plusieurs autres occasions, on a eu le consensus de tous les élus
dans cette Chambre ici. Alors, c'est juste un autre exemple pourquoi ça
va être très, très difficile pour nous d'appuyer ce projet de loi ici.
And I would just like to continue on a
little bit more about how, when we look at these different contradictions, it will create some uncertainty
in some of our schools, how some people who are on the private side will be
able to work as a principal, work as
a vice-principal and wear you a turban, a kippa, but people in the public side
won't have access to that. Will it
create and force more people to go to the private sector, create certain types
of schools that are in favour of having more religious symbols for teachers? I do not know, but it's something
that you have to ask the question because it's in the bill and it is there. In my mind, it would be
easier just to take teachers completely out of this bill, at least minimally
create something that provides
coherence for those and not push people to one system or to the other. And,
when we currently have a system where
even on my territory it is extremely hard in my riding to find teachers who
want to work in the system, it's really important for us to make sure
that we are trying to encourage as many of them to stay in the system.
And, when I hear the Premier of Québec
say, «Well, make a choice, either you will work in the system by our rules, or it's up to you to leave», I
find that incredible. And I also do ask, for those who decided to go to school
here, who went to
l'Université de Montréal, who went to l'UQAM, who studied to become a teacher,
who went to McGill, who, after they spent all that money in becoming a teacher,
investing in themselves to participate in our society and to contribute
to our society... but «no longer you can be
a teacher, or, while you're studying, find another profession, find another
school, move to another province», at
least, at minimum, if you're going to do that, reimburse them. I mean, it's the
least you can do.
It's unfair to them. When they entered
into that, they thought they were going to have the same rights as everyone
else.
Alors, Mme la Présidente,
je vais juste terminer sur ça. Je suis tellement fier du travail que la députée
de Marguerite-Bourgeoys a fait juste à ce stade-ci, elle a porté
notre voix en commission ici, dans la Chambre, avec beaucoup de fierté puis compassion pour des personnes qui
vont être touchées par ce projet de
loi. Mais une lutte n'est jamais
terminée. S'il y a une leçon qu'on peut apprendre puis à tirer de
nos anciens Québécois qui ont fait la lutte pour les droits individuels
dans les années 50, 60, 70, 80, 90,
2000 et... on va continuer de faire la lutte, on ne va jamais arrêter, parce que,
comme je le dis, c'est très important
pour moi, les droits sont des ponts. It's how we build our society, it's how
we unit our society. So, I will be
voting against this bill. Je vais voter contre le projet
de loi n° 21. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
• (19 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres interventions? Mme la cheffe
de la deuxième opposition, la parole est à vous.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente. Bonsoir, chers collègues. Vous avez déjà
entendu mes collègues démonter point par point le faible argumentaire du gouvernement pour justifier
qu'on suspende dans l'urgence les droits du peuple québécois.
L'un après l'autre, ils et elles ont eu droit aux réponses cassettes
habituelles du ministre, mais jamais de réponse sur la question
fondamentale de ce débat, Mme la Présidente : De quelle urgence
parle-t-on?
J'espère que
le premier ministre aura la franchise d'admettre ce que tout le monde sait déjà : l'urgence, on ne la trouve pas dans les données scientifiques sur le port des signes
religieux au Québec
ou sur une quelconque menace du pouvoir
religieux sur la laïcité de nos institutions. S'il avait pu démontrer qu'une telle urgence
existait, le premier ministre l'aurait fait connaître dès le jour 1, mais
il n'a déposé aucun élément de preuve. Non, contrairement à la crise
climatique, à la montée des inégalités sociales, à l'état lamentable de nos hôpitaux,
nos écoles, à la réalité des autochtones, cette urgence-là ne se
démontre pas, elle se ressent.
Si vous
voulez saisir le sentiment d'urgence derrière le projet de loi n° 21, il
ne faut pas aller lire le projet de
loi lui-même, il faut aller lire les milliers de commentaires qui sont
laissés sur son passage sur les réseaux sociaux, il faut lire les chroniques des faiseux d'opinions. Ce qu'on entend parler,
ce qu'on ressent, c'est la peur, et je peux comprendre ça. Je peux comprendre ça, Mme la Présidente. En fait, à peu près le seul contact que la plupart des Québécois
et Québécoises ont avec le monde islamique, c'est-à-dire
avec les gens de confession musulmane, c'est cette image de violence répétée à
l'infini, les guerres, les émeutes, les bombes, les attentats qui n'en
finissent plus, l'attentat du World Trade Center, le marathon de Boston, c'est
aussi l'image de la subordination des femmes aux hommes et de la violence qu'on leur inflige lorsqu'elles tentent de s'en dégager. Et le réflexe, bien, il est bien
évident : ce qu'on voit là, ce qu'on
voit perpétrer par les islamistes, bien, on n'en veut pas chez nous et on
comprend ça. Mais, voyez-vous, Mme la
Présidente, ce n'est pas ça que moi, je vois ici, au Québec. Je
côtoie des Québécoises et des Québécois à part entière qui parlent la même langue que nous, qui paient leurs impôts comme nous tous
et toutes, dont les enfants vont à l'école avec les nôtres mais qui se
font refléter qu'ils sont des étrangers chez eux.
Alors, cette
urgence-là, à mon sens, Mme la
Présidente, c'est l'urgence de
définir ce qu'on est, ce qu'on vit, ce qu'on veut faire au Québec,
c'est l'urgence existentielle de s'affirmer collectivement à titre de nation québécoise. Je comprends
tellement ça, tellement ça. Moi aussi j'ai vécu l'échec de 1980, le vol de
1995, le lac Meech, le combat qu'il faut
recommencer chaque jour pour faire vivre notre langue, notre culture, faire
respecter nos droits dans une fédération canadienne qui s'en fiche un
peu comme dans l'an 40.
Maintenant
que le Canada a vendu son avenir pour un pipeline, que même le droit à
l'avortement est remis en cause par
des conservateurs de plus en plus sûrs d'eux, il n'a jamais été aussi urgent
qu'on se tienne debout au Québec, qu'on
se tienne ensemble debout au Québec. Mais debout pourquoi? Debout face à quoi?
Debout par fierté ou debout par peur?
En 1975, les
parlementaires québécois réunis en cette Chambre ont adopté unanimement la
charte québécoise des droits et
libertés de la personne. Avant même que le Québec se pose la question du pays,
cette charte québécoise des droits et libertés a formé quelque chose qui
ressemblait à une citoyenneté du Québec. Pendant que le Canada continuait
à chercher des façons d'exclure ce qui était
francophone ou autochtone, notre nation québécoise faisait de l'ouverture sa
pierre fondatrice. Je cite : «Nous
devons former avec les communautés culturelles un monde nouveau, une société
modèle, meilleure, libre, ouverte et
accueillante, car la diversité culturelle est garante de l'enrichissement et de
l'ouverture d'esprit d'une nation.»
Ça, c'est Gérald Godin qui disait ça, un homme reconnu partout au Québec pour
sa grande créativité mais aussi comme étant un fier Québécois et qui
souhaitait plus que tout voir son Québec devenir un pays.
Et, en 1977,
dans cette même Chambre, le gouvernement le plus nationaliste de l'histoire du
Québec étendait cette citoyenneté à
la communauté LGBTQ. Ce jour-là, tous les partis se sont mis d'accord pour
accorder les mêmes droits à tous les Québécois et à toutes les
Québécoises, peu importe qui ils choisissent d'aimer.
Aujourd'hui,
le gouvernement veut suspendre la Charte des droits et libertés de la personne,
notre charte québécoise, pour retirer
des droits au peuple québécois. Il le fait sans l'appui de deux partis
d'opposition. Il le fait en se fondant sur un consensus qui sonne un peu
faux : premièrement, une majorité parlementaire écrasante, 75 sièges,
accordée par seulement 37 % des
électeurs; des sondages qui, loin de montrer l'unanimité, parlent surtout des
blessures infligées par 15 ans de débat identitaire. Les fractures
entre Montréal et le reste du Québec, entre les deux souches, et les enfants de la loi 101, entre les jeunes et les gens
de ma génération, c'est ce qui arrive quand on se laisse gouverner par la peur.
On crée des cases. Et, en créant des cases, on exclut, on divise.
• (20 heures) •
La chercheure
Rosa Pires peut nous en dire long sur ce. Elle est née à Montréal de parents
portugais. Elle est allée à l'école en français. Elle a travaillé comme
attachée politique au Parti québécois. Elle a milité au sein du comité du Oui
lors du référendum de 1995. Elle est
féministe et, pour la connaître, elle est vraiment féministe et
indépendantiste. Bref, Mme Pires est le plus
pur produit du nationalisme civique que Gérald Godin... et c'est une femme qui
porte en elle à la fois son identité de fille immigrante, de fille
d'immigrants, elle-même étant née au Québec, et son identité de fière Québécoise.
Le premier ministre devrait lire le dernier livre de Mme Pires. Il nous
plonge dans l'univers d'une autre génération
d'immigrantes, le produit d'un autre nationalisme qui n'est
pas celui de la charte des valeurs ou du projet de loi n° 21. Ces jeunes femmes sont féministes, elles sont
allées à l'école en français, mais, Mme
la Présidente, elles ne se
sentent plus Québécoises. Et je la cite : «J'ai longtemps cru et j'ai longtemps
revendiqué [que le] Nous — avec
un n majuscule — et je voulais faire partie de ce Nous — avec le n majuscule. Mais à un moment donné,
la réalité te rattrape. Le Nous ne
veut pas de toi.». C'est ça, l'exclusion, Mme la Présidente. C'est ça, diviser
le peuple. C'est ce qui poussait aussi
M. Balthazar, encore là, grand nationaliste bien reconnu, à dire que nous
assistons présentement à l'échec d'une nation québécoise, qu'avec la CAQ
nous sommes redevenus des Canadiens français.
Mais ce qui
me donne espoir, Mme la Présidente, c'est que ça ne ressemble pas au Québec que
moi, je connais. Le Québec que je
connais tient à ses droits et libertés. Quand on lui dit franchement que le
projet de loi n° 21 va suspendre la Charte des droits et libertés, ah! tout d'un coup, l'appui au
gouvernement diminue, il diminue de façon assez importante. On y tient, on y croit, à notre charte. C'est une
charte fondatrice, et voire même peut-être l'élément central d'un Québec
indépendant. En fait, ce n'est pas pour rien. Le Québec que je connais sait que
de voir ses droits bafoués, parce qu'on a
longtemps bafoué ses propres droits de l'autre côté de la frontière... qu'on
continue à le traiter comme un enfant qui a besoin de la supervision des
adultes.
Le Québec que
je connais sait que la véritable menace entre l'égalité hommes-femmes, ce n'est
pas Salima de Brossard, là, celle qui
enseigne le français avec son foulard, c'est les conservateurs d'Andrew Scheer,
qui n'ont pas besoin de porter de
signe religieux pour vouloir nous ramener 50 ans en arrière, notamment sur
l'avortement, c'est des politiciens qui
ne sont pas assez courageux pour faire une analyse différenciée selon les
sexes, faire cette analyse-là sur leur projet de loi, bien sûr, parce que ça touche beaucoup les femmes. Mais, si on ne
fait pas l'analyse, comment pouvons-nous savoir comment, de façon
spécifique, ça touche les hommes et comment, de façon spécifique, ça touche les
femmes?
Le Québec que
je connais, Mme la Présidente, il appuie sans réserve la séparation de l'État
et des religions, la neutralité religieuse de l'État, l'égalité de tous
les citoyens et toutes les citoyennes, et la liberté de conscience, et la liberté de religion. Nous l'avons inscrit dans notre
charte, dans notre charte québécoise, et ici, sur le parquet, ça a été adopté
à l'unanimité. Mme la Présidente, il se rend
bien compte que le reste du projet de loi n° 21
contrevient aux principes qu'il est censé défendre.
C'est vrai,
il y a une réelle urgence, mais cette urgence-là, c'est celle qu'on se tienne
debout, c'est celle d'un Québec qui
se tient debout et qui va affirmer qui il est, ce à quoi il ressemble et ce
qu'il veut être ensemble, pas divisé, ensemble. Il va être assez fier de sa culture pour entrer en dialogue avec les
autres cultures, parce que, quand on est fier de qui on est, quand on a confiance en qui on est, quand on
est convaincu que ce qu'on est est légitime d'exister, bien, on n'a pas peur de l'autre, on rentre en dialogue avec
l'autre. D'ailleurs, M. Lévesque, M. Godin étaient des
hommes qui, constamment, allaient
vers les autres par curiosité, par ouverture, pour comprendre, tout en se
disant clairement que le Québec a un tronc commun, le Québec a une langue commune, le Québec a
une charte des droits de la personne qui nous unit, vous savez, ce Québec-là
que j'aime tant.
Et moi, j'en
côtoie beaucoup, de gens de différentes confessions. En tant que
lesbienne, je suis toujours bienvenue à leurs partys, je suis toujours acceptée dans leurs familles. On est entrés en
dialogue. Je ne dis pas que la
première fois qu'ils m'ont vue, ils n'ont pas fait comme plusieurs
d'entre nous, d'entre vous : ils ont levé le sourcil, ils se sont demandé
un peu c'est quoi, cette bibitte-là. Mais,
ceci étant dit, quand on est rentrés en dialogue, quand on a pu s'expliquer...
Moi, je ne comprenais pas leurs affaires, ils ne comprenaient pas mes
affaires. Bien, on s'est parlé. C'est fou, mais on s'est compris. D'ailleurs, j'ai déjà dit à une des participantes du centre
des femmes où je travaillais, Mme la
Présidente, qui portait le
hidjab : Le geste le plus subversif qu'on peut faire, Khadija, c'est de se
promener bras dessus, bras dessous, ça va défaire tous les préjugés. On l'a
fait souvent, mais moins depuis que je suis ici, au Parlement, vous vous en
doutez bien.
Alors,
ce Québec-là va être fier de sa culture, va entrer en dialogue. Il va être
assez fier de son histoire pour poursuivre le riche héritage que nous ont légué
les bâtisseurs de la Révolution tranquille. Le jour où le Québec va se tenir debout, il n'y aura plus de guerre entre les
minorités ou les majorités sur les réseaux sociaux, il va y avoir un peuple,
un peuple qui veut marcher dans le même
sens. Et vous savez quoi? La charte des droits de la personne du Québec, c'est
un bel enlignement, Mme la Présidente. C'est
pour ça qu'il ne faut pas soutirer pour n'importe quelle raison l'application
de cette charte-là. Cette charte-là, elle
est là, on peut la bonifier. J'étais très heureuse lorsqu'on a intégré à la
charte la réalité des personnes trans, par exemple. Ça, rajouter des
droits parce qu'il y a des pans de notre société qu'on ne connaissait pas ou qu'on a oubliés en cours de
route, bien oui. Mais en retirer? Aïe, aïe, aïe! Ce n'est définitivement pas le
Québec que je souhaite. Et, je vous le dis, pour en côtoyer beaucoup, de gens
notamment de confession musulmane, ils ont
choisi le Québec pour cette raison-là. Et là on leur dit : Non, désolé,
vous ne faites plus partie de la gang. Ah! oui, oui, vous faites partie de la
gang, mais vous n'avez pas le droit de changer de job si vous êtes une femme
puis enseignez, vous n'avez pas le
droit d'être commissaire si vous portez une kippa, vous ne pouvez pas... Oui,
oui, ça, ça veut dire des Québécois
et Québécoises de deux ordres. Puis ça, bien, ça ne fitte pas bien, bien, Mme
la Présidente, avec le Québec que je vois, que je porte et auquel j'ai
confiance.
• (20 h 10) •
Alors, à ce
moment-là, le jour où on va arriver là, qu'on va marcher dans le même sens,
qu'on va demander à nos professeurs
non pas de porter ou non un signe religieux, mais de dire : Vous savez, la
charte des droits de la personne, c'est ça qu'on doit enseigner à nos enfants,
peu importe... parce qu'il y a bien du monde qui ne portent pas de
signes religieux qui sont bien mal à l'aise
avec ce qu'il y a dans cette charte-là. Moi, j'aimerais mieux qu'on se rallie
autour de cette charte-là. Alors, à
ce moment-là, la peur, elle, va changer de bord. Elle ne servira plus à diviser,
elle va se retrouver dans la cour des véritables adversaires du Québec. Le jour où on va
reprendre des droits au lieu de les enlever, le Canada n'arrivera plus à nous imposer sa religion
pétrolière, son Parlement ne pourra jamais revenir sur le droit des femmes, le
pouvoir de l'argent ne régnera plus en Dieu
et maître. Nous pourrons enfin affirmer ce que nous sommes avec toute la
fierté d'un peuple libre. Et, Mme la
Présidente, je souhaite profondément que tous mes collègues caquistes
réfléchissent à cette question de se
faire retirer les droits, parce qu'au-delà des frontières du Québec,
présentement, il y a des femmes, il y
a des gens de la communauté LGBT où on brandit... où, carrément, on leur retire
des droits fondamentaux, et moi, je ne voudrais jamais que ça arrive
dans mon Québec. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il
d'autres interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, la parole
est à vous.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil :
Oui, bonsoir. Merci, Mme la Présidente. À mon tour de prendre aujourd'hui la
parole dans le cadre du débat sur
l'adoption du principe du projet de loi n° 21, Loi sur la laïcité de
l'État. Le projet de loi propose d'affirmer la laïcité de l'État au sein des institutions québécoises, notamment par
une modification à la charte québécoise des droits et libertés de la personne,
alors que la laïcité est déjà reconnue comme un état de fait et de droit au
Québec. Le projet de loi définit la laïcité en évoquant la séparation de
l'Église et de l'État ainsi que la neutralité religieuse de l'État. Il y ajoute
les notions d'égalité de tous, de tous les
citoyens et de la liberté de religion. Jusque-là, ça va bien, tout le monde est
en faveur de ces principes et de ces valeurs. Le problème réside dans
les mesures contenues dans le projet de loi, qui viennent contredire la
définition même de la laïcité proposée à l'article 1. On y avance
l'égalité de tous les citoyens, mais on s'empresse
de les brimer. On y parle de liberté de religion, mais pas pour tous. On y
parle de neutralité religieuse de l'État, mais on oublie que la neutralité s'applique aux actes, non pas aux
apparences, comme l'a confirmé récemment la Cour suprême dans le dossier
Mouvement laïque québécois contre Ville de Saguenay.
Nous avons
devant nous un projet de loi qui s'inscrit en porte-à-faux avec notre histoire.
Le Québec a une longue histoire de
pluralisme qui fait notre force et notre fierté. Rappelons-nous un instant,
comme l'a si bien souligné la société de droit Lord Reading, que le Québec est
devenu, dès 1832, la première juridiction de l'Empire britannique à accorder la
pleine émancipation aux personnes professant la religion juive, il y a
180 ans, dans la foulée de l'élection d'Ezekiel Hart comme député de Trois-Rivières et son expulsion de
l'Assemblée par deux fois, car la loi l'obligeait à jurer sur la Bible
et sur sa foi chrétienne, ce qu'il a refusé
de faire, évidemment, Mme la Présidente. Le Québec s'est élevé en précurseur en
corrigeant cette injustice, un legs de Louis-Joseph Papineau.
Et plus
particulièrement, depuis la Révolution tranquille, l'État québécois s'est
distancé de l'Église catholique pour
graduellement mettre en place une réelle séparation entre l'État et les
Églises, instaurant dans les faits la laïcité de l'État. Cette laïcité, que l'on qualifie d'ouverte, est fondée sur les
mêmes principes que ceux définis dans le projet de loi, c'est-à-dire que les Églises et l'État sont
séparés, que l'État ne favorise ni ne défavorise aucune religion ou l'absence
de religion, qu'il respecte la liberté de culte de ses citoyens et qu'il
leur offre un traitement égal. La laïcité ouverte fait place à la différence, à l'expression des convictions personnelles,
s'assurant ainsi que l'État demeure neutre, c'est-à-dire que ses décisions soient libres d'influences
religieuses. Tous ceux qui oeuvrent au nom de l'État, quelles que soient leurs
fonctions, ont toujours pu porter un signe
religieux, tels une croix, un voile, une kippa, parce que le secteur public est
le reflet de la diversité de notre
population et parce que le port d'un signe religieux n'a pas d'impact sur les
décisions rendues par un fonctionnaire. Toutefois, ce que propose le
projet de loi, c'est une autre vision de la laïcité, un virage vers une laïcité
qui aseptise et qui exclut, une vision de la
laïcité qui brime les droits de ceux et celles qui souhaitent tout simplement
exercer leur métier avec professionnalisme et neutralité.
Soudainement,
voilà qu'un gouvernement du Québec décide d'imposer sa loi, faisant la sourde
oreille à tous ceux qui en seront
victimes, à tous ceux qui plaident pour le respect des droits et libertés des
Québécois, qui plaident pour le respect
de la primauté du droit. On passe donc d'une laïcité qui traite tout le monde
sur un pied d'égalité à une laïcité qui fait des victimes à qui l'on demande de choisir entre l'avancement de
leur carrière et même leurs rêves et leurs convictions profondes. Il
s'agit de tout un virage pour une société, et il faut s'y opposer avec vigueur.
L'opposition
au projet de loi est manifeste. Plusieurs ont pu s'exprimer en commission
parlementaire, d'autres sur la place publique, par les médias ou lors de
conférences ou rassemblements et d'autres encore préparent le débat juridique devant les tribunaux. On souligne le
flou entourant ce qu'est un signe religieux et les multiples problèmes que
pose le projet de loi, notamment dans le
secteur de l'éducation. En effet, les représentants du secteur de l'éducation
ont fait la file en consultations
pour dénoncer le projet de loi : difficulté d'application, impossibilité
d'uniformité, non-respect de l'esprit
du programme de formation de nos jeunes, qui vise à les préparer pour la
diversité de notre société plutôt que de la masquer. Ce n'est que quelques-unes
des critiques que nous avons entendues.
Et quant à la
clause de droits acquis, quel non-sens quand on parle de droits fondamentaux.
Nous avons tous des droits acquis.
Ils sont d'ailleurs codifiés dans nos chartes de droits et libertés. Nous avons
ces droits durant toute notre vie. Mais
ici le gouvernement vient nous dire que ces droits sont à géométrie variable,
que ces droits seront anéantis, à moins que vous restiez figé dans votre poste, même si votre ambition vous
amenait plus loin et ailleurs et même si votre employeur a des ambitions pour vous. En effet, une personne
bénéficiant de cette clause pourrait la perdre si elle déménage, change de commission scolaire, est promue, si son poste
est aboli, et j'en passe. C'est une clause d'immobilisme, de précarité
et d'angoisse.
Depuis
plusieurs mois, le gouvernement saisit toutes les tribunes pour présenter son
projet de loi comme étant modéré, en
phase avec l'identité des Québécois et avec notre histoire. Rien n'est plus
faux. Gérard Bouchard, d'ailleurs, le qualifie de
radical. En effet, il vient retirer des droits, il vient briser des rêves et
sacrifier des opportunités pour des Québécoises
et des Québécois. De nombreux intervenants ont souligné que le projet de loi
retire des droits sans aucune justification.
Ils ont rappelé que le fardeau de la preuve incombe à celui qui propose de
limiter un droit garanti par la charte et que l'arrêt Oakes de la Cour suprême nous indique la voie à
suivre : il faut être en présence d'un objectif réel et urgent, qu'il
existe un réel problème à régler.
Dans le cas
du p.l. n° 21, est-ce que le gouvernement a démontré que le
port de signes religieux par des personnes en position d'autorité
représente un problème? Non. Est-ce qu'il a rendu publiques des études démontrant
que les fonctionnaires prennent des décisions sur la base d'une religion? Non.
Est-ce que, par exemple, le gouvernement a documenté
des problèmes avec le port de la kippa par des avocats et la qualité de leurs
interventions? Non. Est-ce qu'il a étayé un lien entre le port du voile par une
enseignante et un quelconque effet de prosélytisme induit chez des jeunes
élèves? Non. Le gouvernement échoue à
démontrer l'urgence. Le professeur de droit de l'Université Laval,
Louis-Philippe Lampron, a d'ailleurs
clairement démontré ce point en prenant l'exemple des professeurs, et je le
cite : «Les motifs avancés pour justifier l'interdiction imposée
aux enseignants des établissements publics d'enseignement primaire et
secondaire tourneraient essentiellement autour de l'importance de protéger les
[...] élèves de l'influence indue d'enseignants qui chercheraient, par le simple port de signes, à les influencer en ce qui
a trait à leurs convictions religieuses. Les enseignants étant en
"situation d'autorité" — je mets ça entre guillemets — sur les enfants, il conviendrait de protéger
la liberté de conscience de ces
derniers par l'interdiction du droit des enseignants de porter des signes
religieux sur le lieu de travail.
«La
principale faiblesse — selon M. Lampron — de cet argument tient sans doute au fait que
le droit québécois protège déjà les
[...] élèves contre des actes de prosélytisme qui seraient posés à leur égard
par des enseignants. Pour le tourner autrement : l'état actuel du droit
prévoit déjà que les enseignants ne peuvent agir de manière prosélyte à l'égard
de leurs élèves sans violer leur obligation
de neutralité religieuse et le devoir de réserve qui en découle.» Fin de la
citation.
• (20 h 20) •
L'arrêt Oakes
exige par ailleurs que les moyens soient proportionnels. Avec son impact disproportionné sur les femmes, notamment
les femmes musulmanes, qui devront choisir entre leur carrière et leur liberté
de religion, il est clair que le projet de
loi échouerait à cet égard aussi. La restriction des droits proposée n'ajoute
rien à l'objectif de laïcité de l'État, puisque l'État est déjà laïque.
Encore ici, ça ne passe pas la rampe.
Le projet de
loi n° 21 limite des droits fondamentaux sans
justification suffisante, c'est évident. C'est tellement évident que le
gouvernement n'essaie même pas de prétendre que son projet de loi tient
juridiquement la route. Il choisit donc de le soustraire à l'application
des chartes canadienne et québécoise via le recours à la clause dérogatoire. On
invoque la dérogation d'entrée de jeu pour
tenter d'empêcher que le projet de loi soit soumis à l'interprétation des
tribunaux. Or, comme le rappelle la
Coalition Inclusion Québec, «un gouvernement [qui respecte] la primauté du droit
ne cherchera pas à exclure la sphère
judiciaire du domaine de la résolution des différends». Elle s'inquiète aussi
de la banalisation que l'usage de la
clause dérogatoire entraînerait : «Le projet de loi n° 21 est
particulièrement dangereux, disent-ils, car une fois la clause dérogatoire utilisée pour protéger une atteinte aux
droits aussi directe et flagrante, son emploi deviendra normalisé et il
sera plus facile de la faire valoir dans l'avenir.»
Mme la
Présidente, devant le sérieux de l'atteinte aux droits proposée, plusieurs
juristes experts en droit constitutionnel ont affirmé, soit lors des consultations ou par des textes d'opinion,
que la clause dérogatoire n'empêchera pas un examen judiciaire de ce
projet de loi.
Le
Pr Lampron, de l'Université Laval, comme d'autres, est catégorique dans
son mémoire lorsqu'il nous dit «qu'il n'existe
pas de scénario, disposition de dérogation ou pas, qui empêchera la
contestation judiciaire des dispositions proposées dans le projet de loi n° 21 devant les tribunaux».
Il pourrait y avoir des recours judiciaires, notamment en vertu de
l'article 28 de la Charte
canadienne qui interdit la discrimination basée sur le sexe. Avec un impact
disproportionné sur les femmes, le projet de loi prête flanc à une
contestation en vertu de cet article qui n'est pas soumis à la clause
dérogatoire.
Le doyen de
la Faculté de droit de l'Université McGill, Robert Leckey, ainsi que les
juristes Grégoire Webber et Eric Mendelsohn ont aussi affirmé, dans la
revue Options politiques, que le recours à la clause dérogatoire ne crée
pas un trou noir constitutionnel et ne
pourra soustraire le projet de loi à un examen judiciaire. Ils affirment que le
premier ministre sera dans l'impossibilité d'éviter une longue procédure
judiciaire.
L'avocat
criminaliste réputé Jean-Claude Hébert, dans un article publié dans La Presse
le 2 mai dernier, fait état que les
droits contenus dans la charte canadienne ne font pas abstraction des droits
reconnus faisant partie de notre jurisprudence. Ainsi donc, la liberté de religion est un principe qui est présent au
Canada depuis bien avant l'avènement de la charte. Elle ne saurait être
aisément mise de côté. Il conclut d'ailleurs que «le recours à la disposition
dérogatoire pourra difficilement faire
barrage à des contestations judiciaires» et que «chose certaine, le débat ne
sera pas clos prochainement».
Il existe
néanmoins une porte de sortie honorable pour le gouvernement, il pourrait
lui-même soumettre son projet de loi
à l'appréciation des tribunaux. D'ailleurs, parce que le premier ministre aime
les sondages, un récent sondage mené pour le compte de l'Association des
études canadiennes démontre que beaucoup de Québécois souhaiteraient obtenir l'opinion des tribunaux avant de prendre leur
décision quant à ce projet de loi, qu'ils soient en faveur ou contre le projet
de loi. Quant à moi, Mme la Présidente, il
s'agit ici d'une marque de confiance envers notre système judiciaire et la
règle de droit.
J'aimerais maintenant aborder un autre point
très inquiétant. Le gouvernement propose de modifier la charte québécoise des droits et libertés de la personne
afin d'y insérer la notion de laïcité d'État, et ceci, sans consensus, alors
que c'est la norme pour toute modification à
la charte. La Commission des droits de la personne a d'ailleurs exprimé sa
grande préoccupation à cet égard et indiqué dans son mémoire que la charte a
été modifiée à de très nombreuses reprises
par le passé et qu'à chaque fois ces modifications visaient à ajouter des
protections et non pas à les affaiblir. Toutes ces modifications,
d'ailleurs, étaient adoptées à l'unanimité.
Pourquoi
est-ce si important de procéder par consensus en cette matière? Parce que la
charte est au-dessus de nos lois.
Elle constitue un élément fondamental de notre corpus législatif, un point de
rassemblement et d'unité pour l'ensemble des Québécois. En modifiant la charte sans unanimité, le gouvernement se
retrouvera à l'affaiblir irrémédiablement en causant un précédent qui brisera le principe de la modification à l'unanimité,
ce qui est grave de conséquence, ahurissant et tout à fait inacceptable.
Mme la
Présidente, on a entendu, tout au long de ce débat, le gouvernement faire état
d'un appui majoritaire pour sa
position et faire référence à des sondages. Les droits et libertés des
minorités ne peuvent être déterminés sur la base de sondages et de majorités. Les minorités sont, par leur nature,
minoritaires. Leurs droits ne peuvent être tributaires de l'opinion de la
majorité, un point soulevé à plusieurs reprises lors des consultations. C'est
précisément pourquoi nous avons des chartes des droits et libertés.
Mme la
Présidente, parlons un instant des impacts concrets de ce projet de loi. Il
faut être clairs d'emblée et se rendre
compte que, s'il est adopté, ce projet de loi viendra instaurer une forme de
discrimination directe à l'encontre de certaines
minorités religieuses et cible majoritairement et principalement des femmes, et
plus spécifiquement les femmes musulmanes.
Il vient fragiliser la vie de ces femmes. Il vient leur fermer des portes
plutôt que de les ouvrir. Il met des bâtons
dans les roues à leur pleine participation. Quelle perte, quel gâchis pour ces
femmes, leurs familles et la société québécoise tout entière.
Et parlons un
instant des avocats juifs portant la kippa ou bien encore des avocates voilées.
Le projet de loi viendra les empêcher
de prendre certains mandats pour le gouvernement. Avons-nous un problème, comme
société, qu'un avocat de la Régie du
logement porte la kippa ou encore qu'un avocat du secteur privé qui prend un
mandat à la régie porte la kippa? Cela fait des années que cette réalité
existe, et jamais, jamais il n'y a eu de plaintes à ce sujet. L'heure est grave
non seulement parce que les rêves et la
quiétude des citoyens issus de ces minorités seront brisés, mais aussi parce
que le gouvernement risque d'instaurer une forme de discrimination
systémique.
Les études
démontrent que les employeurs du secteur privé s'inspirent souvent des
pratiques du secteur public. Par un
effet d'entraînement, le gouvernement s'apprête à donner le signal qu'une
certaine forme de discrimination est acceptable,
surtout par rapport aux femmes voilées. Le gouvernement a fait le choix, alors
qu'aucune urgence ne le justifie, de mettre de l'avant ce projet de loi
divisif et très émotif. Il devra rester très vigilant à l'endroit de tout
dérapage qui découlerait de ce choix, il en
va de sa responsabilité. Comme l'a rappelé ma collègue la députée de
Marguerite-Bourgeoys, le groupe
Justice Femme constate une augmentation anormale des incidents malheureux et
une détérioration du climat social.
Mme la
Présidente, vous me permettrez de conclure en exprimant, bien évidemment, mon
opposition à l'adoption du principe
de ce projet de loi. Je suis opposée au projet de loi parce qu'il ne tient pas
compte de l'évolution historique du Québec,
qui s'est toujours faite dans la reconnaissance du pluralisme et dans
l'addition des forces pour notre développement et prospérité. Il est mal conçu et propose une solution à un problème inexistant.
Il s'agit d'un projet de loi divisif qui aura des impacts très négatifs
dans la société à court, moyen et long terme.
Mme la Présidente, prenez un instant, comme tous
les Québécois, pour regarder autour de vous. La situation est-elle à ce point grave qu'il faille passer une
telle pièce législative en toute urgence, en ignorant les nombreuses voix
discordantes qui mettent le gouvernement en
garde contre ses effets néfastes? Où sont les faits? Où sont les études? Nos
droits et libertés méritent plus de sérieux.
Le premier
ministre a résumé la pensée de son gouvernement quand il a dit : Au
Québec, c'est comme ça qu'on vit. Je
veux dire très respectueusement au premier ministre que je suis en désaccord
total avec ses propos. Nous sommes une société
de droit, d'inclusion et d'égalité. Nous sommes une société dans laquelle la
diversité est une force et la différence, une occasion de découvertes, une société qui additionne les talents, qui
mobilise les coeurs, les bras, les têtes pour l'avancement de tous. Je dis au premier ministre : Le respect des
droits et libertés de tous, c'est aussi comme ça qu'on vit au Québec.
Merci, Mme la Présidente.
• (20 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Mme la
députée de Mercier, la parole est à vous.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal :
Merci, Mme la Présidente. Mon intervention ce soir ne portera pas sur des
aspects précis du projet de loi
n° 21 comme la définition de la laïcité, son applicabilité dans les
milieux de travail ou l'utilisation de la disposition dérogatoire. Je ne parlerai pas non plus du
rapport Bouchard-Taylor ni des autres rendez-vous manqués de notre histoire récente. Non, j'ai envie d'intervenir de façon
plus personnelle, je dirais même plus intime. Même si on n'a pas l'habitude de le
faire, j'ai envie de donner un titre à mon intervention, et, croyez-le ou
non, le projet de loi n° 21 m'a inspiré le titre suivant : Lettre
d'amour au Québec d'une enfant de la loi 101. Je suis reconnue
auprès de mes proches comme une grande
amoureuse du Québec. J'en parle avec les yeux pétillants, pleine
d'admiration pour son histoire de résistance et sa force tranquille.
Cet
amour que j'ai pour le Québec n'a pas toujours existé, et c'est tout à fait compréhensible, je
suis arrivée au Québec à la fin des années 80, à l'âge de
10 ans. Je ne parlais pas le français, je ne connaissais rien du Québec.
Cet amour pour cette terre s'est forgé en moi tranquillement,
patiemment, au fil de mes expériences, mais surtout au fil de mes rencontres marquantes.
Je pense à mon prof en classe d'accueil, Gilles Lachambre, que j'aimerais tellement
un jour retrouver et qui m'a donné le goût
du français. Je pense à mes lectures de livres jeunesse, et
surtout à ma fascination le jour où
j'ai rencontré Robert Soulières, un de mes auteurs préférés, lors d'une sortie
scolaire au Salon du livre de Montréal. Je
pense à mes lectures de jeune adulte qui m'ont fait entrer dans des univers
très éloignés du mien, ceux de Réjean Ducharme, Gabrielle Roy ou Marie-Claire Blais. Je pense aux longues heures que je
passais à regarder les documentaires
et films québécois pour découvrir et comprendre ma
société d'accueil, que ce soit à travers le regard aigu que portait sur sa
société Gilles Groulx, le rapport à la nature et au territoire de Pierre
Perrault ou la force des images de Michel Brault. je pense aussi à mes rencontres avec ces militants et militantes
infatigables, ces héritiers et ces héritières des batailles sociales et politiques de la Révolution tranquille que sont
Françoise David, François Saillant, Lorraine Guay, sources d'inspiration
de mon engagement politique d'aujourd'hui.
Sans eux et sans elles, je ne saurais pas qui je suis. Et évidemment je pense
aussi à ces rencontres quotidiennes qui ne
sont ni littéraires ni artistiques ou politiques, ces gens qui traversent nos
vies, nos collègues, nos amis, nos
connaissances. Certains ne sont que de passage, alors que d'autres y restent
plus longtemps et finissent même parfois par faire partie de notre
famille.
Toutes
ces rencontres se sont déroulées au cours des 30 dernières années et ont
façonné mon identité québécoise. Mais les années les plus importantes de
la naissance de mon identité québécoise, je crois, sont les premières années. L'accueil extraordinaire que ma famille a reçu au
Québec, la générosité, la curiosité pour nos origines, l'ouverture à nous
connaître, tout ça nous a amenés à notre tour à nous intéresser de plus près à
notre nouvelle société. Et cet intérêt va au-delà
de l'apprentissage du français, d'ailleurs, le français, une langue que je
considère comme ma langue maternelle aujourd'hui.
Est-ce
que la naissance de mon identité québécoise s'est faite sans heurt et sans
difficulté? Bien sûr que non. Posez la
question à n'importe quel enfant d'immigrant, il vous parlera des déchirements
que fait naître le choc entre sa culture familiale et celle de sa société d'accueil. C'est dur à entendre, mais
parfois j'avais l'impression qu'il fallait que je choisisse mon camp, celui de ma famille et de sa culture
d'origine ou celle de ma société d'accueil. Les enfants d'immigrants ne sont
pas les seuls à évoluer dans ce processus, il y a aussi les parents. Ces
derniers font énormément de sacrifices pour leurs enfants, et leurs exigences envers eux et elles sont très élevées.
Ces parents aussi vivent des déchirements intérieurs. Tout ce processus prend
beaucoup de temps. J'appelle ça le processus d'intégration des immigrants, que
je connais de façon personnelle et
intime. Certes, ça passe par le travail, les études, l'apprentissage du
français, mais aussi par l'affrontement
des cultures, qui ne doit pas être vu de façon péjorative seulement. De cet
affrontement naît souvent quelque chose
de nouveau, une sorte de nouvelle identité riche pour les personnes issues de
l'immigration, mais aussi pour l'ensemble de la société, puisqu'elle
aussi change au contact de ces cultures.
Je
veux ici insister sur quelque chose d'extrêmement
important, et c'est le temps. Tout ça prend beaucoup de temps. Il faut
laisser le temps... En fait, laisser le temps à cette nouvelle identité
d'éclore est fondamental
Je
me mets à la place aujourd'hui d'une
jeune fille issue des communautés arabo-musulmanes comme moi. Cette jeune qui est déjà prise au milieu de
questionnements et de déchirements tout à fait naturels comme ceux auxquels
j'ai été confrontée il y a plusieurs années, comment est-ce qu'elle
réagit aujourd'hui aux discours négatifs envers sa culture d'origine, qui durent depuis de trop nombreuses
années? Je pense à cette jeune fille et je suis inquiète. Elle voit sa mère
se faire refuser un travail à cause du voile
qu'elle porte sur sa tête. Elle entend le premier ministre qui décrit fermement
et avec un manque de sensibilité comment on
vit ici, au Québec. Elle lit les commentaires hostiles et parfois violents sur
les réseaux sociaux. Son sentiment
d'appartenance envers le Québec est-il ébranlé? Pense-t-elle qu'elle doit
choisir son camp entre sa culture
d'origine et sa société d'accueil? Saura-t-elle un jour qu'elle n'a pas besoin
de choisir et qu'il existe une troisième voie, celle décrite par Amin
Maalouf qui nous apprend dans son livre Les identités meurtrières
comment additionner nos appartenances au
lieu de les soustraire? Développera-t-elle un jour cet amour que j'ai pour le
Québec?
Le
projet de loi n° 21 réduit la laïcité au port des signes religieux. Et, en
plus, ce projet de loi mal ficelé arrive dans un contexte où les gouvernements précédents ont laissé pourrir le
discours public. Même si ça fait longtemps que ça dure, nous avons collectivement la responsabilité
de contrer ce discours. Notre discours est polarisé parce que, depuis de trop nombreuses années, il mise sur ce qui nous
sépare, la majorité versus les minorités, les femmes qui portent le voile
versus celles qui ne le portent pas, les
croyants versus les agnostiques ou les athées. Nous faisons trop souvent
l'éloge de nos différences. Apprendre
à miser sur nos ressemblances est, selon moi, une piste de solution pour
apaiser les esprits. Oui, bien sûr,
il faut célébrer la diversité, mais il est temps plus que jamais de faire place
à ce qui nous unit, ce qui fait de
nous une société, une nation. On a beaucoup plus en commun, mais on en parle
tellement peu souvent qu'on l'oublie. Nos
aspirations, nos rêves pour nous-mêmes, pour nos enfants, nos familles et pour
notre société se ressemblent, aimer et être aimé, vivre en sécurité dans
un pays en paix, faire un travail qui nous inspire et qui nous passionne, ne
pas percevoir d'hostilité dans le regard de l'autre, mais plutôt de la bienveillance.
Vous savez, c'est
quand je vois mes neveux et nièces métissés, moitié arabes, moitié
canadiens-français ou québécois de souche que
j'ai le plus d'espoir. Ils appellent leurs grands-parents de souche mamie et
papi et leurs grands-parents — ça veut dire mes parents — Téta et Géddo. Leurs grands-parents, ceux
nés dans le Québec profond et ceux
nés au Moyen-Orient, partagent le même amour incommensurable pour les mêmes
petits-enfants. Ils partagent aussi pour eux les mêmes inquiétudes pour
leur avenir.
Le
Québec d'avant la charte des valeurs et des débats identitaires me manque. Le
Québec qui a fait de moi une Québécoise
métissée serré, comme le dirait Boucar Diouf, me manque. Le Québec hérité de
René Lévesque, Camille Laurin et Gérald Godin et qui a fait de moi une
indépendantiste convaincue me manque.
Je
sais que ce Québec sommeille en nous, qu'il est là, qu'il existe toujours. Il
est dans ceux et celles qui se tiennent debout face aux ABI, Uber et autres multinationales sans foi ni loi. Il
est dans ceux et celles qui veillent à préserver notre territoire de l'assaut des marchands de sables
bitumineux. Il est dans ces jeunes qui marchent dans les rues, la peur au
ventre, pour l'avenir de leur planète. Retrouvons ce Québec. Retrouvons le
Québec de Godin, député de Mercier, et rappelons-nous ses paroles : «Nous
devons former avec les communautés culturelles un monde nouveau, une société modèle, meilleure, libre, ouverte et accueillante,
car la diversité culturelle est garante de l'enrichissement et de l'ouverture
d'esprit d'une nation.»
C'est cet esprit de Godin qui a fait de moi,
enfant de la loi 101, une grande amoureuse du Québec. Merci.
• (20 h 40) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce
qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Saint-Laurent,
la parole est à vous.
Mme Marwah Rizqy
Mme
Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. «L'identité québécoise, c'est aussi la liberté. Et, si on recule
sur la liberté au Québec,
c'est tout le Québec qui va reculer. Je suis persuadé qu'une société
se juge à la façon dont elle traite
ses minorités.» Il s'agit ici des paroles du 31 premier ministre du Québec, M. le premier ministre... M. Philippe Couillard, qui a toujours
défendu avec beaucoup, beaucoup de conviction les libertés individuelles.
Aujourd'hui,
on se lève ici, en Chambre, pour parler du projet de loi n° 21,
et ça fait maintenant quelques heures que
ce ne sont que les groupes du parti d'opposition qui se lèvent et il n'y a
personne du gouvernement de la CAQ qui se
lève pour parler sur ce dossier. Ça me préoccupe, étant donné qu'il s'agit,
pour eux, d'une grande priorité, mais il n'y a pas qui que ce soit qui se sent assez convaincu pour se lever pour nous
expliquer à quel point c'est important pour eux ce projet de loi n° 21,
et pourquoi qu'ils sont si pressés d'aller de l'avant avec ce projet de loi,
pourquoi qu'ils se sentent si pressés
d'invoquer aussi la clause dérogatoire. Et personne qui n'est capable de nous
expliquer l'urgence d'agir, la problématique à régler. Pourquoi cette
solution qui cherche toujours un problème?
Vous me permettrez, là, de revenir quelque peu
en arrière. J'entendais tantôt certains groupes de deuxième et troisième opposition se demander : C'est
quoi, la différence avec nous et les autres groupes d'opposition? Bien, c'est
simple, nous avons toujours été les
garants de libertés individuelles. Nous avons toujours été le garant des droits
fondamentaux de tous les Québécois.
Alors, quand j'entends dire des précédents gouvernements qu'«ils ont empoisonné
les débats», je m'excuse, au
contraire, s'il y a un parti qui a toujours été constant depuis la création de
la charte des droits et libertés québécoises, c'est le Parti libéral.
Alors,
j'apprécierais, s'il y a des gens qui se sentent émus par le débat, bien, aussi
qu'ils prennent la pleine mesure de
leurs propres propos, parce qu'il me semble que, lorsqu'on écrit des lettres
ouvertes dans la presse écrite pour dire aux femmes quoi porter ou ne
pas porter, on est un petit peu mal venu par la suite de venir donner des
leçons aux autres, parce qu'au Parti libéral on ne donne pas de leçons
là-dessus. Chez nous, c'est simple : la liberté de conscience ou de
non-croyance, on le respecte.
Et vous savez
qu'est-ce qui est un peu plus difficile pour moi, aujourd'hui, de me lever?
C'est que, pendant des semaines, ma
collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys ainsi que ma collègue de
Côte-des-Neiges, ma collègue de Bourassa-Sauvé,
mon collègue de LaFontaine ont tenté par tous les moyens possibles de chercher,
là, une raison auprès du gouvernement de la CAQ. Rien, silence radio,
pas capables d'avoir une petite justification. Ça prend une grande patience, et je ne peux que souligner la patience
de la députée de Marguerite-Bourgeoys parce que, sincèrement, c'est très
difficile de s'asseoir devant un mur et de
ne pas être en mesure de réagir et de faire réagir le gouvernement pour leur
faire comprendre que, dans l'histoire du Québec, il ne s'agit pas d'une
avancée, mais d'un recul, que nous allons devenir la seule juridiction en Amérique du Nord qui va priver le droit de
certaines personnes de pouvoir travailler, de rêver et d'aspirer à
toutes les positions qui soient possibles au Québec, la seule juridiction. Ils
veulent nous comparer avec la France? Je
rappelle que la France n'est pas vraiment un modèle d'exemple à suivre, bien au
contraire, maintenant les Français viennent voir ce qui se passe ici, au
Québec. D'ailleurs, parmi les premiers arrivants, ils sont Français, au Québec,
et qu'est-ce qu'ils notent chez nous? Bien, c'est ce désir de vivre ensemble
dans cette paix.
Pendant les
quatre dernières années, le précédent gouvernement libéral s'est assuré qu'il y
ait une paix sociale. Il n'y en a pas
eu, de manifestations. Je n'ai pas vu de chaînes humaines devant le palais de
justice. À moins de six mois d'avec le gouvernement de la CAQ, première
chose qu'on voit, des chaînes humaines devant le palais de justice de
Montréal : Ne touchez pas à nos droits. Et savez-vous qui qui était
présent? Ce n'étaient pas juste des gens avec des symboles religieux, c'étaient des jeunes, des moins jeunes et des gens
plus expérimentés, de tous horizons, tous unis avec Québec inclusif pour dire qu'au Québec, quand le
premier ministre dit : C'est comme ça chez nous, bien, ça ne répond pas, ça
ne trouve pas écho chez tous les Québécois. La grande majorité des Québécois
croient qu'on additionne.
Et, quand on
parle d'un projet de société, habituellement ce n'est pas un projet de société
qui vient suspendre des droits. Quand le premier ministre dit qu'il va régler
une fois pour toutes le dossier, bien, ce n'est pas dire la vérité aux
Québécois, parce que la clause dérogatoire...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Saint-Laurent, je vous
demanderais de faire attention à vos propos...
Mme Rizqy : Bien, je n'ai pas dit
qu'il mentait, hein, j'ai juste dit qu'il ne disait pas la vérité.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Écoutez, on ne peut pas dire... on ne peut pas...
Mme Rizqy : Vous avez tellement
raison!
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Premièrement, vous mettez des propos... des intentions,
pardon, au premier ministre.
Faites attention. Je vous demande simplement de faire attention à vos propos.
Mme Rizqy : Merci, Mme la Présidente.
Oui, c'est vrai que c'est difficile. Vous avez raison. Parce qu'en ce moment, lorsqu'on dit : Ça règle une fois
pour toutes le dossier, alors que tout le monde sait que la clause dérogatoire,
ça dure cinq ans... Si
ce n'est pas vrai, j'imagine que c'est faux? Je pose juste la question. Mais,
dans cinq ans, on revient encore avec la même question. Est-ce qu'on va devoir
réutiliser la clause dérogatoire dans cinq ans? Donc, est-ce qu'on va
revenir encore se poser des questions ici à savoir si c'est vrai ou faux?
Qu'est-ce qu'on va faire dans cinq ans?
Et, quand on
revient juste d'un côté pratico-pratique, j'ai noté que le ministre de
l'Immigration avait beaucoup de
difficultés à expliquer de façon pratique comment qu'on allait faire cela. À
partir de quand les écoles vont devoir dresser une liste de ceux qui portent un symbole religieux et pour qui le droit
acquis est acquis? Quand est-ce qu'ils commencent à faire ça? Est-ce
qu'on va vraiment avoir la police de la religion dans nos écoles?
Et une chose
qui m'a heurtée, c'est quand j'ai entendu la vice-première ministre de
dire : Bien, on va envoyer la
police si jamais les gens ne se conforment pas. La police dans nos écoles? Ce
n'est pas ça qu'on a besoin. On est en pleine
pénurie d'enseignants, puis, nous, qu'est-ce qu'on dit : Bien, on n'a pas
besoin de vous? Mais, ah! non, non, non, mais vous pouvez aller dans le privé. Allez dans le privé, là-dedans il
n'y en a pas, de problème dans les écoles privées. Et, si jamais dans les écoles privées il y a un
problème, inquiétez-vous pas, en ce moment l'Ontario fait des publicités
pour venir attirer nos talents québécois. Il
n'y a pas juste l'Ontario qui fait de la publicité. Il y a aussi le Nouveau-Brunswick
qui veut nos talents québécois.
On n'a pas le
luxe de diviser une société. On n'a pas le luxe de dire au revoir à nos talents
québécois, à nos cerveaux québécois.
Et, ces enseignantes, peu importe ce qu'elles portent ou ne portent pas, la
seule chose qui nous intéresse, c'est leur désir et leur conviction
d'enseigner, leur amour de l'enseignement, leur passion pour nos enfants.
Et c'est très
difficile de suivre comment qu'on va être en mesure avec le gouvernement de la
CAQ d'assurer à tout le monde une
saine égalité des chances dans notre réseau de l'éducation parce qu'en fait,
maintenant, on leur dit : Si vous avez à une date fixe un droit
acquis mais vous changez de commission scolaire, oups! vous perdez votre droit.
Mais inquiétez-vous pas. Vous êtes bien
mieux de rester dans votre école. Mais ne rêvez pas de devenir directrice ou
directeur d'école, ça ne fonctionnera
pas, là. Donc, on veut mettre un frein à leurs aspirations. Et ça, c'est assez
alarmant dans notre société.
Et sincèrement
de dire à d'autres enseignantes qui vont intégrer l'école : Il va y avoir
deux catégories d'enseignants, droits
acquis, pas de droits acquis, donc des gens qui ont le droit de porter un
symbole religieux, d'autres qui n'ont pas le droit de porter leurs symboles religieux... qu'on leur dit, en
fait : Bien, entre 8 heures et 4 heures de la journée, votre
religion, le gouvernement de la CAQ
ne s'en préoccupera pas. Votre droit de croire est suspendu, comme si une
personne pouvait se dissocier de ses
valeurs, de sa foi, de ses croyances. C'est impossible à faire. Alors, vous
comprendrez, Mme la Présidente, que, pour nous, c'est inacceptable.
Et on dit
souvent que la vérité sort de la bouche des enfants. Bien, il y a des jeunes
dans le comté de mon collègue le
député de Viau... Louis-Joseph-Papineau, très belle école, avec de très beaux
programmes. Et d'ailleurs, de temps en temps,
on a la chance d'entendre certains de leurs étudiants, de leurs élèves à la
radio 98,5, qui débattent tellement de façon articulée que certains devraient même prendre des
notes. Alors, ce que pensent des adolescents de Montréal : «Ces jeunes
filles de l'école secondaire
Louis-Joseph-Papineau à Montréal croient que la laïcisation de l'État ne passe
pas par l'interdiction du port des signes religieux.»
Victoria
Delima, élève de l'école Louis-Joseph-Papineau... «Même si elle ne porte pas le
voile, Asma Mokhtari, une jeune
musulmane, se sent atteinte par cette loi. Elle pense à ses amies qui désirent
devenir enseignantes et devront réfléchir
à leur choix de carrière advenant l'adoption [du projet de loi n° 21].
"J'aimerais que tout le monde ait le droit de rêver et de faire le
métier de leur rêve."
«Le projet de loi prévoit que les
enseignants des écoles primaires et secondaires du réseau public ne pourront
pas porter de symboles religieux au travail.
• (20 h 50) •
«"Les
signes religieux ne représentent pas seulement qu'une démonstration de
foi", selon Christopher Jean, un
jeune Québécois d'origine haïtienne. "Ça fait vraiment partie d'eux, et
leur demander de l'enlever, c'est comme leur demander
de rejeter une partie d'eux-mêmes."» Ça, Mme la Présidente, c'est les paroles d'un jeune élève du secondaire. «Pour
Christopher Jean, le gouvernement abuse de son autorité en exigeant le retrait
des signes religieux pour les employés de l'État en position d'autorité. Le
port de signes religieux et la foi sont profondément reliés à la question
identitaire pour cet adolescent d'origine haïtienne», et je cite : «Plus
équitable pour tout le monde si la laïcité [était] présente.» Ça ne fonctionne pas. Alors, vous comprendrez, Mme la Présidente, qu'on a quand même plusieurs jeunes de Montréal qui se sentent vraiment
troublés par ce projet de loi n° 21.
On en a même
une de Matane : «À l'instar des jeunes Montréalais, la Matanaise
Léa Gauthier s'est prononcée contre
le projet de loi. Elle estime qu'il est inconcevable d'exiger
d'une personne qu'elle renie ses valeurs. "Moi, je ne mange pas de viande, ça fait partie de ma
personnalité. [...]La personne qui porte un voile, eh bien,
ça rejoint ses valeurs, et nos
valeurs, ça fait partie de notre personnalité." Léa Gauthier, élève de la
polyvalente de Matane.» Alors, il faut croire que ce n'est pas juste à Montréal,
là, même en région on en parle.
Mais
savez-vous quoi? Ce n'est pas juste au Québec qu'on parle du projet de loi n° 21. La CAQ a réussi à faire parler
de nous à l'international, et pas pour les bonnes raisons. À New York aussi, on
parle de nous. D'ailleurs, on a eu la chance d'avoir deux représentants de New York dans le cadre des consultations particulières sur les maternelles quatre ans. À la toute fin, j'ai posé la question à ces deux
New-Yorkais : Vous, là, vos enseignantes, est-ce qu'elles ont le droit
de porter le voile? Estomaqués, ils
m'ont regardée, ils m'ont dit : Bien, bien oui! Ils ne comprenaient pas ma
question. Je comprends qu'ils ne
comprenaient pas ma question. D'une
part, le gouvernement de la CAQ les
invite au Québec pour nous
parler à quel point que leur modèle à eux d'éducation est tellement
bon, le modèle new-yorkais, là, des maternelles quatre ans mur à mur, c'est superbon, on devrait s'inspirer du modèle
new-yorkais. Mais le ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur a oublié de mentionner, là — bonjour, M. le ministre — qu'à New York on n'interdit pas aux enseignantes qui portent des symboles religieux de faire
leur métier. Alors, les représentants de New York, là, étaient abasourdis et ils m'ont confié qu'ils trouvaient
ça abject, abject, et que c'était inconcevable, et qu'avoir su, là, ils
auraient peut-être repensé à deux
fois avant de venir témoigner pour le gouvernement, parce que ça ne rejoint pas
les New-Yorkais. En fait, là, en
Amérique du Nord, ça ne rejoint pas grand monde, à part évidemment le premier
ministre, qui veut absolument marquer l'histoire.
Il va la
marquer, l'histoire. Ça, je le lui accorde. Il va la marquer parce qu'il est
entêté, entêté à ne pas vouloir entendre
raison, entêté à dire des affaires qui divisent la population québécoise. Quand
on est rendu à commander des sondages,
là... Des fois, je me pose la question : Les sondages qu'il commande puis
que, des fois, il diffuse, est-ce qu'il en a d'autres qu'il ne diffuse pas qui sont moins, disons, favorables au
gouvernement? Parce qu'à un moment donné on entendait le ministre au secrétariat... pardon, le responsable du
secrétariat anglophone qui disait : Les anglophones sont pour le projet de loi n° 21.
Je peux vous dire qu'on est tous restés surpris, là. Finalement, il y a un vrai
sondage qui est sorti, et non.
Si on revient
encore dans le réseau de l'éducation, plusieurs sont venus à mon bureau de
comté. Pourquoi? Parce qu'elles sont étudiantes en ce moment à l'université,
elles veulent devenir enseignantes. Et elles posent la question : Moi, en
ce moment, je suis rendue à mon année trois, il me reste une autre année à
compléter plus mon stage. Qu'est-ce qui se passe? Est-ce que je vais
avoir le droit de travailler? Elles sont inquiètes. Puis dire «inquiètes»,
c'est un euphémisme. Certaines parlent de quitter le Québec. Elles ne se
sentent plus les bienvenues.
Qu'est-ce qui
est arrivé en sept mois... Ah! pardon, on sait qu'est-ce qui est arrivé, le
gouvernement de la CAQ a été élu, là.
Mais, de façon plus concrète, pourquoi que le gouvernement de la CAQ ont décidé
que diviser le Québec était une
priorité et qu'à la place de s'occuper de d'autres dossiers, puis tout aussi
urgents, que nous, on considère davantage urgents, ils ont décidé que c'était celui-là, le projet de loi
n° 21, qui était une priorité? S'occuper du monde vulnérable, ça, on va attendre un peu. Parler des enfants
handicapés, ça aussi, on va attendre. Régler la question pour les enfants
autistes, on va attendre. Mais le projet de loi n° 21, ça, là, il
faut avancer à un pas de régime militaire, excessivement rapide.
Maintenant, si on passe à l'autre question,
les policiers, donc, au Québec. Si on comprend bien, sur le territoire
québécois, on va voir des policiers de la GRC qui vont
pouvoir porter des symboles religieux, mais, tout ce qui est policier Montréal
ou la SQ, Laval, eux, non, ça va être interdit, donc deux classes de policiers.
Qu'est-ce qui se passe dans les centres
judiciaires, pénitenciers, prisons, centres de détention? Au niveau fédéral,
vous avez le droit de porter vos symboles religieux. Au niveau du Québec, vous
n'avez pas le droit. Ah! tribunaux, cour municipale, Cour du Québec, pas le droit de porter les symboles
religieux, mais Cour supérieure, Cour d'appel du Québec, est-ce qu'eux
vont avoir le droit de porter des symboles religieux? Ça, je me pose
sincèrement toutes les questions pratico-pratiques. Est-ce qu'ils ont
véritablement réfléchi aux conséquences de leur projet de loi?
Plusieurs ont
changé d'opinion au cours des 10 dernières années, mais nous, on est
restés constants, on est restés le grand phare et défenseur des libertés
individuelles. Tel est notre rôle. Les centrales syndicales sont venues ici, en
commission, elles ont évolué, leur position.
Parce que ce que les gens parlaient, de consensus Bouchard-Taylor, nous,
on a toujours dit : Il n'y en a jamais
eu, de consensus, c'est un faux consensus, c'est un compromis. Et aujourd'hui
tant M. Bouchard que M. Taylor se
sont distancés de leur propre rapport pour différentes raisons. Mais les centrales
syndicales, qui représentent leurs
membres, tant la FAE, la Fédération autonome des enseignants, la CSN, CSQ, tout
le monde dit : On est rendus ailleurs. Mais ça, le gouvernement de
la CAQ n'en parle pas, refuse d'écouter.
Alors, vous
comprendrez que c'est difficile pour nous lorsqu'on entend le gouvernement
dire : On est à l'écoute, on
travaille pour tous les Québécois. C'est drôle parce que les centrales
syndicales qui représentent les enseignants ne sont pas du tout écoutées
par le gouvernement de la CAQ, ni dans le projet de loi n° 21 puis encore
moins dans le projet de loi des maternelles
quatre ans puis des projets de loi sur les frais facturés aux parents. Donc, la
grande constance au gouvernement de la CAQ, c'est d'avancer sans
écouter. On a une promesse, advienne que pourra, nous, on livre la marchandise,
peu importe ce que ça coûte, même si c'est le gros prix. Parce que suspendre
les libertés individuelles, Mme la
Présidente, ça, il y a un coût à payer, mais clairement ce n'est personne au
gouvernement de la CAQ qui va le payer, ce sont des femmes et des hommes
qui vont être ciblés, majoritairement des femmes et, ici, sans aucun motif
légal.
Parce
qu'évidemment le gouvernement de la CAQ ne peut pas procéder par renvoi, aller
devant les tribunaux, parce que, s'il avait l'audace d'aller devant les
tribunaux, il devrait préparer un dossier, un dossier de cour. Dans ce dossier de cour, il devrait démontrer
factuellement quelle est la problématique à laquelle le projet de loi
n° 21 tente de répondre, quelle
est l'urgence du projet de loi n° 21, quel est le motif supérieur qui
commande que le gouvernement vienne suspendre
des droits fondamentaux. Évidemment, c'est pour cela que le ministre de
l'Immigration ne procède pas par renvoi,
parce qu'il se ferait ramasser par les tribunaux, comme ça a déjà été le cas
lorsqu'il a déposé son projet de loi n° 9 sur l'immigration. Les tribunaux... Moi, j'ai rarement vu, puis je suis
toujours avocate, mais j'ai rarement vu dans une décision de la cour un paragraphe de quatre mots : Le gouvernement
a tort. Je pense qu'on pourrait reprendre ce passage de cette décision
du gouvernement... du tribunal de la Cour supérieure de Montréal puis ramener
ça pour le projet de loi n° 21, quatre mots : Le gouvernement a tort,
encore une fois.
Dès que j'ai
été élue, rapidement j'ai eu un moment de télévision avec la nouvelle
vice-première ministre. Elle a dit en ondes : Ah! la clause
dérogatoire a été utilisée un paquet de fois. Ça m'a tout de suite ébranlée,
puis je lui ai demandé : De quel
article vous parlez? Elle n'était même pas dans la capacité de me dire le
numéro d'article. Pourtant, l'article 33, ce n'est pas facile,
hein? Habituellement, tout le monde le connaît quand on veut l'invoquer. Et ça,
je me suis rendu compte que dire et répéter des affaires plusieurs fois, dans
la tête des caquistes ça devenait vrai. Pourtant, l'article 33, la clause dérogatoire pour suspendre les droits et
libertés fondamentaux, dans l'histoire du Québec, une fois, ça a été
appliqué, dans le reste du pays, deux autres fois. Alors, lorsqu'on dit «un
paquet de fois», là, c'est de la désinformation. Pour venir bonifier des
droits, oui, ça a été utilisé, de façon préventive, mais jamais pour suspendre.
Alors, Mme la Présidente, l'information est cruciale, et, pour nous, au Parti libéral du Québec, ce projet de loi, on ne pourra jamais
voter en faveur de celui-là.
• (21 heures) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis,
la parole est à vous.
Mme
Jennifer Maccarone
Mme Maccarone :
Merci, Mme la Présidente. I
would like to say that I'm pleased to have an opportunity to raise my voice in opposition to
proposed Bill 21, but quite frankly I question the fact that we're
discussing a bill that proposes a solution to a problem that doesn't
exist. To suspend a fundamental right, there needs to be a reason, a threat,
and an emergency, you cannot suspend
fundamental rights just to please the majority, and it's clear that there is no
threat to our Québec nation, to our identity or to our province that
requires us to discuss and pass proposed Bill 21.
But don't take my word for it. The
legal experts who presented briefs at the parliamentary commission were very clear that there is no threat,
Madam Speaker. The education groups that presented made it clear that there's
no issue in our schools. The fact
that two school boards, the English Montréal School Board and the Lester B.
Pearson School Board, went so far as
to say that they would not implement this bill, if passed, is proof that there
is no problem in our system.
Mais
pourquoi? Parce qu'ils savent que le projet de loi n° 21
ne protège pas l'identité québécoise.
Comme
eux, le Parti libéral du Québec a des principes. Nous croyons à l'importance
des libertés individuelles et nous ne
pouvons pas être en accord avec la volonté du gouvernement. Un gouvernement
responsable est un gouvernement responsable
envers la population, et non une partie de la population mais la totalité de la
population. Cela signifie qu'il doit
écouter. Il devrait faire des compromis. Il devrait penser non seulement à la
majorité, mais à la minorité. Ils doivent agir dans le meilleur intérêt
pour tous les citoyens.
Malheureusement, le projet de loi n° 21 ne respecte pas tous les citoyens. Le projet de loi n° 21 crée du profilage religieux, particulièrement envers les femmes
musulmanes. Ça va à l'encontre de la Charte des droits et libertés.
As a
multicultural riding with thriving communities who support various religious
symbols, predominantly Muslim and Jewish, it is impossible not to see the
richness that diversity brings to the «québécoise» society. I invite Members of the Government to come to my riding of
Westmount—Saint-Louis to visit with the leadership of Muslim and Jewish communities as I have had the privilege to do on a
regular basis. In fact, the Canadian Council of Muslim Women happens to be in the riding of Westmount—Saint-Louis.
They visit my office on a regular basis. They have offered to help educate the community,
they have offered to help go on missions so that we can demystify, so that we
can share their values, so that they
can explain what's fundamental and important to them, so that they can build
the bridges that my colleagues have spoken too about today.
Et ils ont des questions, Mme la Présidente, telles que : Aurais-tu
une plainte quelconque d'une enseignante causée par le port de son voile? Car, vous savez, Mme la Présidente, il faut
faire la différence entre une hypothèse gratuite et la réalité. Et je n'aborde pas les autres professions
qui seront fermées pour ces femmes car elles portent le hidjab. Je me répète :
Le gouvernement propose des solutions à un problème qui n'existe pas.
Cependant,
le message implicite que la communauté entend, surtout la communauté des femmes
musulmanes, c'est qu'on ne peut pas
faire confiance à ces femmes. Que disons-nous à la communauté musulmane native
du Québec? Savez-vous que la moitié
de cette communauté, Mme la Présidente, au Québec, est native? Peut-on dire à
toutes celles-ci de retourner chez vous ou d'adopter des valeurs
québécoises?
Justement,
comme Québécoise de souche, Mme la Présidente, moi-même, je crois fermement que
l'ouverture à l'autre et la
tolérance, ce sont des valeurs québécoises. Notre culture distincte en tant que
Québécois est profondément enracinée dans l'expérience d'être une minorité. D'après notre expérience de l'exclusion, nous ne
devrions pas prendre de revanche sur
les autres mais rester des défenseurs contre la persécution. Nous avons une
identité forte, au Québec, et nous, le
Parti libéral du Québec, nous continuerons de le défendre, surtout que,
comme, malheureusement, d'autres mesures présentées par le gouvernement,
ce projet de loi divise au lieu de rassembler. Mme la Présidente, des questions
fondamentales sont en jeu, et nous nous assurerons de les protéger jusqu'au
bout.
Je dois vous
mentionner non seulement mes craintes au projet de loi n° 21, mais surtout
ceux des citoyens de Westmount—Saint-Louis. D'ailleurs, durant la semaine en
circonscription, j'ai eu l'opportunité de rencontrer différents groupes dans mon comté. J'ai aussi participé à
l'activité Ma députée dans ma classe à l'école Westmount High, où nous avons abordé plusieurs sujets, notamment celui de
la laïcité. Ainsi, je leur ai demandé, à ces élèves, ce qu'ils pensaient
du projet de loi n° 21, et voici la réponse qu'ils avaient pour moi et les
questions.
Numéro 1 :
«Le projet de loi n'est pas juste et équitable, car les groupes minoritaires se
font imposer des lois par le gouvernement.» Et je veux rappeler aux gens
ici, dans cette salle, qu'on parle de des élèves de 16 et 17 ans.
«Si
une personne a le droit de se dévêtir, pourquoi n'aurait-elle pas le droit de
se vêtir comme elle le veut? Est-ce que c'est juste que le gouvernement
nous dise comment s'habiller?
«Nous sommes dans un
pays, une province qui est libre et démocratique. En agissant ainsi, nous
venons non seulement ternir notre réputation, mais nous effaçons l'une de nos
valeurs de base qui est la liberté individuelle.»
Numéro 4 :
«Comment avoir un signe religieux empêche une personne d'enseigner?»
Et
numéro 5 : «Nous pensons que le projet de loi est plutôt dirigé vers
un groupe de personnes plutôt que la population générale.» Et j'en passe. Il y
en avait plusieurs, des discussions que nous avons, et plusieurs questions.
Malheureusement,
les gens de l'école Westmount High n'ont pu exercer leur droit de vote lors de
l'élection, le 1er octobre 2018,
à cause de leur âge. D'ailleurs, les jeunes ne se sentent pas écoutés,
puisqu'ils ne sont pas en âge de voter. Ils se sentent comme des
minorités, où ils ont les mains liées.
And this is wrong. We're taking actions today,
here, in this Government, that are going to have an impact on the students and the children that
are going to inherit these laws that we are going to be passing. How is it that
their teacher can dress inappropriately, but the Government will
prohibit them from wearing a kippa or a kirpan?
I'm impressed with their maturity.
They were clear in expressing their ideas and understanding that what people wear will not stop them from
having religious beliefs, because that's something that you carry in your heart
and in your head, and it's not something that you wear on your head
that's going to fundamentally change what you believe in.
Je tiens à souligner également que nous avons reçu énormément de
courriels, à mon comté, et ce, à tous les jours, concernant le projet de
loi n° 21. Les gens sont inquiets, anxieux et veulent des réponses mais
aussi des solutions. D'ailleurs, si vous me
permettez, Mme la Présidente, j'aimerais vous lire un courriel d'une étudiante
de Dawson College, aussi dans le
comté de Westmount—Saint-Louis,
concernant ses inquiétudes et les inquiétudes de ses camarades concernant
le projet de loi n° 21 : «My name is Samantha, and I'm a Law, Society
and Justice student at Dawson College. This semester, in the framework of my introduction to
politics class, I was asked to take action on an issue I hold to be important.
In the face of the tabling of Bill 21, the issue would choose to become clear
to me.
«I have a deepest appreciation for the
value of diversity of thought, belief, religion, culture, and opinion. It seems unreasonable to me that a
government who claims to stand for those same values could ever support such a
xenophobic bill. While secularism is an important part of our society,
Bill 21 goes beyond those barriers and boundaries of the concept, using it as nothing more than a mere
excuse, justifying the harassment and discriminatory treatment of minority
groups, in particular minority religious groups.
«We,
Dawson students, do not approve of Bill 21.»
• (21 h 10) •
I also had the opportunity to visit
The Study, another school in the riding of Westmount—Saint-Louis, with my colleagues the Deputy of
Jacques-Cartier and the Deputy of Saint-Laurent to discuss proposed Bill 21.
How did these students get three MNAs
to visit their school all at once? They wrote a letter, a great letter, and in
it the young woman of The Study who
ensured that everybody came to her school to talk to her and her colleagues
about Bill 21. It says : «It's terrifying to think that my generation, the next generation of workers,
has to reconsider their career paths or their futures as Québec citizens so they can protect their basic
rights and freedoms. Laicity of the State is not laicity of the individual.
It is people who represent our Government,
people who have likes, dislikes, families, and beliefs. This is what makes our society strong.»
Je
suis tellement fière de la relève qui nous suit, Mme la Présidente! Ça démontre
que nous avons une jeunesse forte,
qui comprend que les décisions puis les actions de notre gouvernement puis de
nous tous ici, à l'Assemblée nationale, vont avoir un impact sur eux dans le futur. Et je suis fière d'eux parce
qu'ils lèvent leurs voix et j'appuie cette position.
Et
juste la semaine dernière j'ai reçu une lettre ouverte signée par des étudiants
et professeurs de la Faculté de droit
de McGill, contre le projet de loi n° 21, et je cite :
«Nous, soussignés, en tant qu'étudiants et professeurs de la Faculté de
droit de McGill, désirons porter à l'attention de l'Assemblée nationale du
Québec les points suivants :
«Que
le projet de loi n° 21 porte atteinte aux libertés de conscience et de
religion ainsi qu'au droit de l'égalité garanti par la Charte canadienne des droits et libertés et la Charte des
droits et libertés de la personne du Québec. Le respect des minorités
religieuses est la marque d'une société pluraliste et multiculturelle;
«Que le contexte
mondial actuel est caractérisé par une forte croissance de l'islamophobie et
que le projet de loi n° 21
ne fera que perpétuer la discrimination envers les minorités. Ici, au Québec,
nous connaissons les effets dévastateurs de l'islamophobie. Six
personnes ont perdu la vie lors de l'attaque de la grande mosquée de Québec, en
2017;
«Que
la notion de neutralité religieuse de l'État n'est pas mise à mal lorsque des
personnes en situation d'autorité reflètent la diversité de la société;
«Qu'il
est faux de prétendre qu'un employé ou agent de l'État dont l'identité
religieuse est apparente ou constatable ne peut s'acquitter à ses
fonctions avec neutralité et impartialité;
«Que
d'empêcher des minorités religieuses d'accéder à des emplois de la fonction
publique va à l'encontre de la neutralité
religieuse de l'État, un aspect fondateur du constitutionnalisme canadien qui
ne peut pas être suspendu par la clause "nonobstant" de la
charte canadienne;
«Que
nous nous opposons vivement au projet de loi n° 21.»
That we strongly oppose
Bill 21. Therefore, we call upon the CAQ Government to
withdraw Bill 21 immediately. «C'est pourquoi nous demandons au
gouvernement du Québec de retirer immédiatement le projet de loi n° 21.»
End of citation.
It's a powerful message when those
that inherit the earth from us, the ones that are watching us closely, reach
out to those that represent them and implore them to
hear them, implore them to pay attention to the messages that are important to
them. How many more examples do we need? And will the Government listen to
them?
Et
parlons-en, de la clause dérogatoire, Mme la Présidente. En plus de brimer les
droits fondamentaux, de nombreux
intervenants en commission parlementaire ont souligné que ce projet de loi
serait contesté devant les tribunaux, malgré le recours aux clauses
dérogatoires.
L'emploi de la clause
dérogatoire envisagé par le gouvernement est aussi de nature à susciter
d'importantes craintes pour le régime québécois des droits et libertés de la
personne. Non seulement la clause dérogatoire projetée vise-t-elle l'ensemble des dispositions du projet de loi n° 21,
mais elle suspendrait l'application des articles 1 à 38 de la charte.
Even the Canadian Bar Association calls
on Québec to remove the notwithstanding clause from proposed Bill 21. And, quite frankly, if the Government is convinced its law is
constitutional, then it should let the court do its job. By invoking the notwithstanding clause, the
Government is depriving citizens of the ability to make an enlightened decision
about legislation that limits the right of religious minorities such as Muslims
and Jews.
Puisque nous ne
sommes pas en mesure de passer l'exigence de la première étape, la loi n° 21 ne devrait pas passer. Si
la loi, au sens large, échoue au test Oakes, ce que... dans lequel que j'y
crois fondamentalement, sur un seul des points ci-dessus... Comme le savez, Mme la Présidente, notre système de justice est très chargé. Ainsi, je me pose la question : Pourquoi le gouvernement n'est pas plus ouvert aux discussions sur le projet
de loi n° 21,
si nous savons fort bien qu'il terminera devant les tribunaux?
Le ministre
nous répète que son projet de loi est applicable. Pourtant, si les courtes consultations parlementaires, telles
que décrites par ma collègue la
députée de Marguerite-Bourgeoys, nous ont démontré quelque chose, c'est bien ses
difficultés d'application. Le professeur de
droits et libertés Louis-Philippe Lampron nous a entretenus clairement
que les difficultés d'application, particulièrement chez les enseignants, de
l'article 6 du projet de loi. La CSQ nous a exposé que le projet de loi recèle une série d'imprécisions
importantes, et, dans ce contexte, il y a fort à parier que l'application du
projet de loi au sein des établissements d'enseignement sera, au mieux,
variable; au pire, arbitraire.
It's no wonder school boards have said
no to the application of this bill. How could they explain the dichotomy to their staff? You have
seniority, so you can wear a hijab. You are a new employee, so you can't, so
you have less worth. Is that what
we're saying to our teachers? Is that what we're saying to our society? How is
it that one person's fundamental right
is worth more that another's? How can we make this distinction? And the bill
certainly does not do that for our society.
And
how will they police the inequity? Are we going to literally call the police?
Are we going to sanction them? Are we going to fire
them? Is this what we're saying?
What
message are we teaching our youth and our students? In our schools, we have
ethics, religion, and culture courses, ERC — our Minister of Education was
actually a former teacher of ERC — where we teach diversity, we
teach multiculturalism,
we teach inclusion, and a variety of schools of thought, because that is the
strength of our society, and it's quite an oxymoron to teach one thing
and practice the opposite.
Mme
la Présidente, something is fundamentally broken in our system when the
Government proposes his Members of Parliament and the
National Assembly make changes to the Charter of Rights and Freedoms by way of
closure, «un bâillon». It's unconscionable,
and it is an insult to the population of Québec, and it screams that the
Government does not take their
rights, and my rights, and the rights of everyone in this room seriously. I'm
fearful of what my children and our citizens will be faced with in the future
with a government that takes such little notice and regard of our rights,
rights that have been hard-fought, that they callously toss them aside and
remove debate and discussion. That is not who we are, we are better than
that.
Le Québec a une belle histoire en termes de
protéger et promouvoir des droits de notre population québécoise. Le 25 avril 1940, sous le gouvernement libéral
d'Adélard Godbout, la loi octroyant le droit de vote aux femmes était adoptée
à l'Assemblée nationale. En 1961, nous avons
élu la première députée et ministre femme dans une équipe libérale, dans
la circonscription de Jacques-Cartier. Elle
a contribué à l'adoption des lois progressistes pour les droits des femmes. En
1964, elle fait adopter la Loi sur la
capacité juridique de la femme mariée, permettant aux femmes mariées d'exercer
des actes juridiques sans le
consentement de leurs maris. En 1969, elle fait adopter la loi concernant les
régimes matrimoniaux et l'établissement
de la société d'acquêts. En 1972, Mme Marie-Claire Kirkland-Casgrain,
ministre des Affaires culturelles, alors
seule femme membre de l'Assemblée nationale, a déposé le projet de loi n° 63, Loi sur le Conseil du statut de la femme.
Et je
continue, Mme la Présidente. Il y a presque 44 ans, l'Assemblée nationale
a adopté à l'unanimité, je répète, à l'unanimité
la Charte des droits et libertés de la personne. Malgré l'adoption de la charte, le gouvernement veut enlever
les droits que les élus de tous les partis
politiques confondus ont votés. Aujourd'hui, avec l'avancement et l'évolution de la société,
les droits de la personne devraient être pleinement protégés, et même qu'ils
devraient être définis davantage
pour justement éviter l'abus d'un gouvernement envers les minorités.
The treatment of minorities by a
government is indicative of far more than just the treatment of one group. It
is a microcosm of the Government's commitment to the
protection of all of our individual rights and freedoms. Merci, Mme la
Présidente.
• (21 h 20) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Alors, je suis prête à reconnaître un autre intervenant. Il n'y a pas d'autres intervenants?
Alors, le principe du projet de loi n° 21, Loi
sur la laïcité de l'État, est-il
adopté? Alors, adopté...
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx : Merci, Mme la
Présidente. Je demanderais un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
M. le leader du gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui. Je demanderais qu'on reporte le vote à demain, lors des affaires
courantes.
Vote reporté
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, le vote sera reporté à demain, aux affaires courantes. M. le leader du gouvernement.
M. Schneeberger : Mme la
Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 17 pour la suite de nos travaux.
Projet
de loi n° 12
Adoption
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, à l'article 17 du feuilleton, M. le ministre de l'Éducation et
de l'Enseignement supérieur propose
l'adoption du projet de loi n° 12, Loi
visant à préciser la portée du droit à la gratuité scolaire et à
permettre l'encadrement de certaines contributions financières pouvant être
exigées.
Y a-t-il des
interventions? M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, on
vous écoute.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge : Merci bien, Mme la Présidente. Alors, le projet de loi n° 12, comme vous l'avez dit, c'est une loi visant à préciser la portée du droit à la
gratuité scolaire et à permettre l'encadrement de certaines contributions
financières pouvant être exigées.
Donc, j'espère que ce projet de loi va franchir ce soir ou alors demain l'étape
cruciale de son cheminement, c'est-à-dire l'adoption. C'est beau,
l'espoir, hein, on vit tous d'espoir.
Donc,
avant de procéder, je vais vous dire simplement que ça a été un long processus.
En 2007, la commission des droits de
la personne et de la jeunesse rappelait dans un mémoire, dans un rapport
important que la loi actuelle, la Loi sur l'instruction publique, était
floue, n'était pas claire, était bafouée régulièrement parce qu'elle n'était
pas claire, et qu'il y avait des commissions
scolaires qui l'interprétaient de façon, disons, créative, et que ça pouvait
occasionner des frais aux parents
mais surtout des iniquités d'un endroit à l'autre. Et ça a duré pendant presque
12 ans comme ça alors que les anciens partis se sont succédé, sachant que
la loi n'était pas claire, était incomplète, ce qui nous a menés à devoir
éponger plus de 150 millions de dollars lors d'un recours collectif. On a
été obligés de payer, comme gouvernement, 150 millions
de dollars pour absence de leadership des deux partis qui se sont succédé,
150 millions de dollars qu'on aurait eu besoin, évidemment, pour améliorer les services directs aux élèves,
des millions qui ont été détournés de leur mission première.
Alors, on n'a pas
attendu 11 ans, on a attendu, quoi, quelques mois avant de rédiger ce
projet de loi, selon trois principes :
équité, clarté, accessibilité. Équité et clarté parce qu'il faut que la loi
soit simple et que son règlement soit limpide,
qu'il puisse être interprété dans les 72 commissions scolaires par tous
les légistes du monde, dans les plus de 2 500 écoles, dans tous les conseils d'établissement de la
même manière, et accessibilité parce que, il faut bien le dire, rien de ce qui était gratuit ne sera chargé, à
l'avenir, mais plusieurs choses qui étaient facturées seront gratuites. Donc,
c'est important de le mentionner, parce que bien des gens essaient de faire
peur aux citoyens et puis essaient même, disons,
de leur faire croire que le principe même de la gratuité serait attaqué avec ce
projet de loi là. Rien n'est plus faux. Il y aura plus d'accessibilité à nos écoles, à nos programmes
particuliers, dès septembre, que ce qu'il y a eu cette année, sans
compter, évidemment, que ce sera plus clair et que ce sera plus équitable parce
que ce sera partout pareil.
Alors,
je ne m'étendrai pas longtemps parce qu'on en a déjà beaucoup parlé et que les
parents dans les conseils d'établissement,
les directions d'école, les enseignants, les directions générales de commission
scolaire ont trouvé déjà que ça a beaucoup,
beaucoup trop traîné, parce qu'ils
sont en train de retarder tous les envois, de retarder les adoptions des
frais qui seront facturés ou qui ne seront pas facturés parce qu'ils vivent un
flou, en ce moment, ils ne savent pas à quoi s'attendre pour septembre prochain. Et tout ça doit être adopté dans les
conseils d'établissement, avalisé par les commissions scolaires. Et certains qui, disons, ont répété
plusieurs fois les mêmes mots, c'était peut-être dans le but de faire du temps...
ou en tout cas ça en a fait pas mal, bien,
ça a retardé de quelques semaines l'adoption de ce projet de loi là, et ce sont
les élèves, les directions, les enseignants et les parents qui en ont
payé le prix.
Je veux simplement
rappeler que les manuels scolaires, le matériel d'art, le matériel d'éducation
physique, le matériel de sécurité sera
gratuit, que les factures qui seront envoyées aux parents devront être claires
et détaillées, qu'en aucun cas on ne pourra plus facturer, à l'avenir, pour des
frais administratifs, pour des frais d'examen liés, parfois, à des sélections, pour des frais d'administration. C'est
terminé. Il n'y aura plus de flou, il n'y aura plus de recours collectif.
Il y aura plus d'accessibilité et il y aura
une plus grande décentralisation parce que les frais qui pourront être chargés,
par exemple, pour un cahier
d'exercices ou pour une sortie scolaire, au-delà des deux sorties scolaires
gratuites qui ont été annoncées la
semaine dernière avec ma collègue la ministre de la Culture, lorsque des frais pourraient
être chargés pour une troisième
sortie scolaire, pour une sortie sportive, eh bien, à chaque fois, ça devra
être appuyé, validé par le conseil d'établissement,
sur lequel, je rappelle, les parents sont majoritaires. Donc, évidemment
qu'avant qu'une facture puisse être envoyée elle devra être claire, limpide,
respecter des critères qui seront bien définis, et ça devra être appuyé par
le conseil d'établissement.
Le
règlement qui viendra préciser et donner les détails suite à ce projet de loi
là devra obligatoirement être révisé dans
un délai de deux ans. Et ça, c'est extrêmement rare, que dans la loi on inscrit
que le règlement devra être éprouvé, testé
sur le terrain et ensuite revalidé à l'intérieur de deux ans pour être bien
certain que les balises que l'on donne pour les frais chargés aux parents, mais particulièrement, je vous dirais, pour
les services de garde et pour le transport, puisque de nouvelles balises
seront données dans les prochaines années, seront à jour.
Donc,
je suis très content que nous terminions l'étude de ce projet de loi là et que
nous l'adoptions très bientôt. Le
milieu scolaire le demande, les directions d'école, les directions de
commission scolaire, les présidents, présidentes de commission scolaire
et les fédérations des comités de parents. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Y a-t-il des interventions?
Mme la députée de Saint-Laurent, la parole est à vous.
Mme Marwah
Rizqy
Mme Rizqy :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Vous comprendrez que je vais commencer, mais
que je vais devoir continuer la prochaine fois.
Le ministre de l'Éducation parle, pour son
projet de loi n° 12, de trois principes cardinaux : équité, clarté, accessibilité. Mais il faut croire qu'il a perdu
le Nord parce que la valeur numéro un, en matière d'éducation, c'est d'abord
l'égalité des chances. Alors, avant de nous
parler d'équité, clarté, accessibilité, parlons tout d'abord de la gratuité
scolaire pour avoir l'égalité des
chances de tous les enfants québécois et non pas seulement les enfants
québécois dont les parents ont les
moyens d'avoir accès à une éducation. Alors, c'est pour ça que, Mme la
Présidente, je trouve ça un peu inusité de parler ici de valeurs... de principes cardinaux, alors qu'il manque
d'abord le principe même de l'éducation au Québec.
Prenons
d'abord clarté. Le projet de loi n° 12 nous demande, en fait, ni plus ni
moins qu'un chèque en blanc. Dès le départ, on a demandé, pendant
plusieurs semaines, on a talonné le ministre pour avoir son règlement, son
projet de règlement. Or, ça a pris des
semaines avant qu'on l'ait. Alors, quand qu'on parle de clarté, pour nous,
c'était tout sauf clair, on nageait en plein, plein brouillard.
En matière
d'équité, comment on peut parler d'équité alors que ce n'est pas tous les
enfants qui auront accès à des programmes,
des projets particuliers. Le ministre dit : Ce n'est pas grave, ils
n'auront pas accès aux projets pédagogiques particuliers, mais ils
pourront faire, après l'école, des heures avec d'autres programmes. C'est comme
si, au fond, il y avait deux catégories
d'élèves : ceux que les parents ont de l'argent peuvent faire des projets
pédagogiques particuliers, ceux qui n'ont pas l'argent vont faire du
parascolaire.
Le ministre
parle de dire que qui était gratuit va rester gratuit, ce qui ne l'était
pas, gratuit, ne le restera pas, gratuit...
Ajournement
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Saint-Laurent, compte tenu de l'heure, les travaux de
l'Assemblée sont ajournés à demain, mardi le 4 juin, à 13 h 40.
(Fin de la séance à 21 h 30)