(Neuf
heures quarante minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Bon jeudi à tous et toutes. Vous pouvez
prendre place.
Affaires
courantes
Déclarations
de députés
Et
nous débutons notre séance avec la rubrique des déclarations de députés. Et,
sans plus tarder, je cède la parole
à M. le député de Chapleau.
Rendre
hommage aux bénévoles des inondations printanières
de 2019 pour leur engagement envers leur communauté
M. Mathieu
Lévesque
M. Lévesque
(Chapleau) : Merci, Mme la Présidente. Je tenais à m'exprimer en cette Chambre afin d'offrir mes pensées et mes voeux de rétablissement les
plus sincères à tous les sinistrés des inondations, qui vivent une situation
dramatique depuis plusieurs semaines, particulièrement dans mon comté de Chapleau,
à Gatineau.
Je souhaite également
remercier et féliciter tous les bénévoles qui ont donné de leur temps et qui se
sont engagés envers nos concitoyens
dans le besoin. Vous avez fait preuve d'abnégation de vous-mêmes
et d'empathie. Pour cela et pour votre solidarité, je vous remercie.
Ensemble et avec
l'appui des intervenants publics, comme la ville de Gatineau, le ministère de
la Sécurité publique et l'armée canadienne, nous avons réussi
un tour de force. Cet accomplissement n'aurait pas été possible sans votre incroyable générosité. J'ai été touché par
l'appui et l'humanité dont vous avez fait preuve envers les sinistrés. C'est
pour cette raison que je tenais à vous rendre hommage à l'Assemblée nationale.
Je suis conscient
qu'il reste encore à faire, et c'est pour cela que je désire vous remercier
d'avance pour votre générosité lors de la
grande corvée de nettoyage, à Gatineau, du 1er et 2 juin prochain. Merci pour vos
actions et votre beau travail. À tous les bénévoles, merci beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Chapleau.
Et maintenant je vais
céder la parole à Mme la députée de Huntingdon.
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Si vous n'êtes pas prête, je peux passer à la
prochaine...
Mme IsaBelle :
Non, c'est beau, c'est beau.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Non, ça va? Alors, Mme la députée, la parole
est à vous.
Rendre
hommage au jeune Loïc Girard pour son
engagement dans la collecte de fonds au
profit d'Opération Enfant Soleil inc.
Mme Claire
IsaBelle
Mme IsaBelle :
Mme la Présidente, en 2017, il n'avait que sept ans lorsque Loïc Girard, de
Lacolle, a décidé de participer à la levée de fonds d'Opération Enfant
Soleil, qui vient en aide aux enfants malades au Québec. Il a remis 350 $.
Deux
ans plus tard, Loïc est très fier de solliciter des dons en argent ou en
bouteilles et cannettes consignées pour atteindre son objectif de 2019,
soit de remettre 6 000 $.
Il
est vaillant, notre Loïc, car, pour y arriver, il a participé à différentes
activités : déjeuners du club de l'âge d'or, dîners communautaires. Il a même organisé une
journée barbecue, sollicité des grandes entreprises de la communauté, et
surtout il a ramassé des cannettes, des cannettes et des bouteilles consignées.
Loïc mérite toute
notre admiration pour son dévouement et pour sa conscientisation à aider
d'autres jeunes. D'ailleurs, dimanche le
2 juin, Loïc a été invité à remettre son chèque lors du téléthon Opération
Enfant Soleil, à Québec. Félicitations à Loïc Girard!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la
députée. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de
Jean-Talon.
Souligner
le 40e anniversaire de l'organisme Entraide Sainte-Foy
M. Sébastien Proulx
M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais féliciter un
organisme bien présent dans Jean-Talon qui célèbre cette année son
40e anniversaire. C'est l'organisme Entraide Sainte-Foy.
Fondé en
1979, Entraide Sainte-Foy a pour mission d'aider des gens à maintenir leur
autonomie en véhiculant et en
accompagnant des personnes en perte d'autonomie, notamment aînées, pour
l'obtention de leurs soins de santé dans un environnement qui est
sécuritaire, de courtoisie et de discrétion.
Alors, c'est
des visites d'amitié qui sont rendues possibles pour briser la solitude. Du
répit-gardiennage est offert aussi afin d'offrir un répit aux aidants
naturels. C'est dire à quel point c'est un organisme qui peut compter sur des
bénévoles, Mme la Présidente, qui sont extraordinaires.
Je désire aujourd'hui rendre hommage à tous ces
bénévoles ainsi qu'aux membres du personnel d'Entraide Sainte-Foy, qui, au fil des ans, ont fait preuve d'un dévouement qui est
remarquable afin d'aider de nombreuses personnes à maintenir leur autonomie. Qu'ils reçoivent ma reconnaissance la plus
vive et toutes mes félicitations. Mme la Présidente, merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Jean-Talon. Maintenant, je reconnais M. le député de Beauce-Nord.
Féliciter cinq
entreprises de la circonscription de Beauce-Nord lauréates
du Gala de l'entreprise beauceronne et des Grands Prix du
tourisme Desjardins de la Chaudière-Appalaches
M. Luc Provençal
M. Provençal : Mme la Présidente, lors des dernières semaines,
deux importants événements visant à récompenser des entreprises de la Beauce et de la Chaudière-Appalaches ont eu lieu.
Je profite de cette tribune pour féliciter les différents lauréats de
Beauce-Nord.
D'abord, le 27 avril dernier se tenait la
31e édition du Gala de l'entreprise beauceronne. Trois entreprises de mon comté ont mérité des prix : Revtech
Systèmes, de Saint-Joseph-de-Beauce, Nouvelle entreprise; Safari Condo, de
Saint-Frédéric, Investissement, industriel;
et le Woodooliparc, de Scott, Tourisme et Jarret d'or, c'est-à-dire le grand
prix de la soirée toutes catégories confondues.
Quelques jours plus tard, soit le 2 mai,
lors du Gala des Grands Prix du tourisme, Chaudière-Appalaches, la maison d'Élyse, de Beauceville, remportait le prix
de la catégorie Hébergement, gîtes, et le Village Aventuria, de Saint-Jules,
méritait le titre d'attraction touristique de l'année.
Mes plus
sincères félicitations à vous cinq pour ces reconnaissances, et bon succès pour
vos projets futurs! Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Beauce-Nord. Et maintenant je cède la parole à M. le député de
Matane-Matapédia.
Souligner le
35e anniversaire de la Fondation de l'Hôpital de Matane inc.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé :
Mme la Présidente, aujourd'hui, je tiens à souligner le 35e anniversaire de la Fondation de
l'Hôpital de Matane, un organisme qui contribue à l'amélioration et la
qualité des soins de santé offerts en Matanie.
C'est le
5 juin 1984, sous la présidence de M. Gérard Lavoie, que la fondation
commença ses activités. Depuis sa création, les bénévoles, le personnel
et les administrateurs travaillent
activement afin de conserver des soins de santé de proximité et de qualité pour les gens de chez nous, un besoin et un
enjeu toujours d'actualité dans notre région. Par l'organisation
d'événements et de campagnes de financement et par l'engagement de l'ensemble
des bénévoles et partenaires de la
fondation, c'est près de 3 millions de dollars qui furent réinvestis dans
notre milieu afin d'acquérir de nouveaux équipements médicaux et de
bonifier l'aménagement des infrastructures de santé.
À tous celles et ceux qui, au cours de ces
35 dernières années, ont contribué au succès de la Fondation de l'Hôpital de Matane, je tiens à vous remercier et à saluer votre dévouement. Bon
35e anniversaire! Et continuons ensemble à veiller au bien-être des
gens de chez nous. Et surtout continuons à donner pour notre santé chez nous.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député. Et maintenant je vais reconnaître M. le...
Une voix : ...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Pardon? Ça va? M. le député de Rousseau.
Rendre hommage à M. Robert Perreault pour
sa contribution à l'essor du monde agricole
M. Louis-Charles
Thouin
M. Thouin :
Mme la Présidente, ma déclaration de député, aujourd'hui, vise à souligner
l'apport remarquable d'un citoyen
d'exception de la municipalité de Saint-Alexis qui a contribué de façon
exceptionnelle, et ce, pendant plus de 30 ans, à l'essor du monde
agricole dans ma circonscription. Il s'agit de M. Robert Perreault.
M. Perreault
a quitté ses fonctions d'administrateur et de président qu'il occupait depuis
2006 à La Coop Novago, le 27 mars dernier.
Son expérience, sa vision, son expertise du monde agricole ont contribué au
succès de la coopérative pendant 31 ans.
Maire
de la municipalité de Saint-Alexis, agriculteur, avec à son actif de grandes
cultures de blé, de soya et de maïs, il est depuis deux ans également
acériculteur, souhaitant poursuivre la tradition familiale.
Cher
Robert, de Québec je te lève mon chapeau et je te remercie sincèrement pour le
legs exceptionnel que tu laisses pour le monde agricole ainsi que pour
les générations futures. Rousseau, Montcalm, Saint-Alexis, soyons fiers.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Rousseau. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de
Taschereau.
Présenter
des mesures prises par les villes en matière de transport
Mme Catherine
Dorion
Mme Dorion :
Merci, Mme la Présidente. Je voudrais simplement rappeler des choses
intéressantes à cette Chambre qui se passent ailleurs dans le monde.
À Copenhague, la
moitié des citoyens vont travailler à vélo. Berlin construit des autoroutes à
bicyclettes.
À Bruxelles, le
transport en commun est gratuit les jours de smog. Dans plusieurs autres villes
d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Asie, des petites et des grandes, c'est en
tout temps que le transport en commun est gratuit.
À
Madrid, seuls peuvent circuler au centre-ville les voitures des résidents du
centre-ville, le transport en commun et les taxis, les camions de
marchandises, les véhicules scolaires et les forces de sécurité et d'urgence. À
Londres, à Stockholm, à Milan, les automobilistes doivent payer pour accéder au
centre historique des villes.
À Tallinn, le transport public gratuit a permis à
la ville de faire de l'argent parce
que ça a attiré de nouveaux résidents.
Ça
a boosté ses taxes. Le trafic a significativement
diminué, et donc la pollution de l'air aussi, et tout ça a contribué à attirer
encore plus de monde.
San Francisco a
démantelé une autoroute, Séoul en a démantelé une autre pour créer des places
publiques. Ce n'étaient pas des petites
villes, mais c'est des villes qui se sont adaptées et qui ont donné une
meilleure qualité de vie à tous les gens qui y vivaient.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Taschereau. Et maintenant je vais céder la parole à M. le
député de Chutes-de-la-Chaudière.
Souligner
le 40e anniversaire du Centre de la petite enfance du Bois-Joli inc.
M. Marc
Picard
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. Le Centre de la petite enfance du Bois-Joli célèbre
cette année son 40e anniversaire.
Située
dans le quartier Saint-Nicolas, la garderie a ouvert ses portes officiellement
en janvier 1979 et recevait à l'époque
une quarantaine d'enfants. Depuis 2003, 110 enfants fréquentent
annuellement ce CPE. L'implication du conseil d'administration, la participation des parents, conjuguées au travail
dévoué du personnel, permettent d'offrir aux enfants un milieu de vie de qualité, sécuritaire,
stimulant et respectueux des valeurs qui déterminent les actions éducatives du
CPE.
Je
veux souligner la présence de Mme Sylvie Nadeau, directrice générale,
Mme Audrey Charbonneau, présidente du conseil d'administration, et tout particulièrement Mme Sylvie
Carrier, éducatrice depuis 38 ans, et Mme Sylvie Leclerc, depuis 40 ans, que je félicite pour leur
dévouement exceptionnel auprès de tous les enfants du CPE du Bois-Joli. Merci.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci, M. le député. Et
nous vous souhaitons la bienvenue à l'Assemblée nationale.
Pour la prochaine
déclaration, je me tourne vers Mme la députée de Saint-François. Et la parole
est à vous.
Rendre
hommage à Mme Patricia Gauthier pour ses 45 années
de service au sein du réseau de la santé et des services sociaux
Mme Geneviève
Hébert
Mme Hébert :
Merci, Mme la Présidente. Je souhaite souligner le parcours exceptionnel d'une
gestionnaire chevronnée du réseau de la santé
et des services sociaux. Mme Patricia Gauthier tire sa révérence après
45 ans de dévouement au sein du réseau. Quelle brillante carrière!
Elle a laissé sa marque en Estrie et
ailleurs au Québec par son approche humaine, sa grande capacité à rassembler
et son leadership. Elle a pu démontrer son
professionnalisme notamment au cours des 10 ans comme directrice générale du
centre hospitalier de Sherbrooke et de ses quatre ans comme P.D.G. du CIUSSS de
l'Estrie-CHUS.
De
belles réalisations, elle en a beaucoup à son actif. Elle a initié la mise en oeuvre du projet OPUS AP visant la
réduction d'antipsychotiques chez les personnes âgées. Elle a brillamment
piloté plusieurs projets d'agrandissement, de partenariat, de
valorisation de la recherche et d'amélioration de la performance.
Merci,
Mme Gauthier, d'avoir tant donné, ces dernières décennies, pour améliorer
la santé et le mieux-être de la population. Bravo pour vos réalisations
et bonne retraite!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée. Maintenant,
pour clore cette rubrique de déclarations de députés, je cède la parole
à Mme la députée de Mille-Îles.
Souligner
le 40e anniversaire du Comité de protection
de l'environnement de Saint-François
Mme Francine
Charbonneau
Mme Charbonneau : Merci, Mme
la Présidente. Mme la Présidente, l'environnement est un sujet très discuté dans la société d'aujourd'hui. Depuis plus de 40 décennies, le comité de
protection de Saint-François innove et s'investit, font la promotion de la préservation et de la
restauration de milieux naturels. C'est avec beaucoup de fierté que je
souligne le 40e anniversaire d'existence du Comité de protection de
l'environnement de Saint-François, de Laval.
Ainsi, grâce au
travail de toute l'équipe, ils sont devenus un pilier environnemental
incontournable et font rayonner notre
région. Je rends hommage tout particulièrement à Mme Lyne Moreau, la présidente, qui
s'implique avec beaucoup de coeur pour la réussite du comité depuis tant
d'années avec sa formidable équipe. Leur persévérance devrait être un exemple
à suivre.
Merci au comité de
protection de Saint-François de protéger et de s'investir pour l'environnement.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée. Alors, ceci met fin à la
rubrique des déclarations de députés.
Et je suspends nos
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 52)
(Reprise à 10 h 4)
Le Président :
Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir. Bonne journée à toutes et à tous.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation
de projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : Bonjour, M. le Président. Je vous demande d'appeler
l'article a, s'il vous plaît.
Projet
de loi n° 26
Le Président :
À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le
projet de loi n° 26, Loi concernant le Réseau
structurant de transport en commun de la Ville de Québec. M. le ministre.
M.
François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le Président, je suis très heureux de déposer
le projet de loi n° 26, Loi concernant le Réseau structurant de
transport en commun de la Ville de Québec.
Ce projet de loi vise
à permettre la réalisation, par la ville de Québec, du projet de transport
collectif annoncé publiquement par celle-ci
comme le Réseau structurant de transport en commun de la ville de Québec,
lequel inclut un tramway.
À
cette fin, le projet de loi donne compétence exclusive à la ville pour qu'elle
réalise le réseau et précise qu'elle devra consulter la Société de transport de Québec avant de prendre certaines
décisions.
Le
projet de loi prévoit plusieurs allègements concernant les formalités à
accomplir en vue d'acquérir par
expropriation les biens nécessaires à la réalisation du réseau. Il contient
aussi certains allègements en matière contractuelle. Par ailleurs, il impose à la ville, lors de
l'acquisition de véhicules de transport en commun, l'obligation d'exiger du fournisseur que 25 % de la valeur du
marché soient confiés en sous-traitance au Canada.
Le projet de loi prévoit également
l'établissement de servitudes en faveur du réseau lorsqu'une route ou un
immeuble sous la gestion du ministère des Transports ou d'une municipalité est
traversé ou longé par les voies ferrées du tramway de ce réseau.
Par ailleurs, le
projet de loi prévoit les modalités de transfert du réseau à la Société de
transport de Québec afin qu'elle l'exploite.
En conséquence, il énonce expressément que cette société a pour mission
d'exploiter un tramway et, à cet égard, lui applique un cadre juridique
similaire à celui applicable à la Société de transport de Montréal pour
l'exploitation du métro.
Le
projet de loi énonce certaines règles en matière de financement, notamment en
précisant que tout emprunt à long
terme nécessaire au financement de la réalisation du réseau doit être contracté
par la Société de transport de Québec lorsque son paiement fait l'objet
d'une subvention octroyée par le gouvernement du Québec ou l'un de ses
ministres.
Le projet de loi
stipule qu'aucuns frais, de quelque nature que ce soit, ne sont opposables à la
ville et à la Société de transport de Québec
pour la délivrance d'un certificat d'approbation, d'un permis de construction
ou d'un permis d'occupation à l'égard du réseau.
Le
projet de loi précise que les travaux accessoires nécessaires à la réalisation
du réseau, à son exploitation, à sa modification ou à son prolongement
sont des matières qui intéressent l'ensemble formé par les municipalités liées
de l'agglomération de Québec.
Le
projet de loi prévoit que la Loi sur
les chemins de fer et la section
portant sur les travaux de construction de la Loi sur la sécurité du transport
terrestre guidé ne s'appliquent pas au réseau. Il maintient toutefois
l'obligation pour la ville et pour la Société de transport de Québec de
transmettre au ministre des Transports, à la fin de tous travaux de
construction, une déclaration de l'ingénieur responsable des travaux attestant
qu'ils ont été réalisés en conformité avec les normes d'ingénierie reconnues.
Le projet de loi
énonce enfin qu'un terrain est, en certaines circonstances, protégé par droits
acquis lorsqu'il constitue le résidu d'un
terrain dont une partie a été acquise par la ville ou par la Société de
transport de Québec aux fins de la réalisation, de l'exploitation, de la
modification ou du prolongement du réseau. Merci, M. le Président.
Le
Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce
projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.
M.
Proulx : Merci, M. le Président. Bien entendu, nous acceptons d'être
saisis du projet de loi. Est-ce que le leader du gouvernement peut
s'engager à ce que nous puissions tenir des consultations particulières sur ce
projet?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Il y aura des consultations particulières. Nous
attendrons la liste des groupes des différentes formations politiques
avant de pouvoir convoquer les consultations particulières.
Mise
aux voix
Le Président :
Alors, l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté. M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article c
du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet
de loi n° 391
Le
Président : À l'article c du feuilleton, M. le député de
Jonquière présente le projet de loi n° 391, Loi modifiant la
Loi sur la qualité de l'environnement afin
d'affirmer la primauté de la compétence du Québec en cette matière. M. le
député.
M.
Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi
affirme la primauté de la compétence du Québec
en matière d'environnement afin que l'État du Québec exerce pleinement les
pouvoirs liés à sa compétence sur le territoire québécois.
Pour
ce faire, le projet de loi accorde une priorité d'application aux règles
découlant de la compétence législative et constitutionnelle du Québec en
matière d'environnement.
Enfin,
le projet de loi prévoit que le gouvernement peut désigner un projet, une
activité ou une entreprise, notamment des
secteurs du transport, des ressources naturelles et de l'environnement pour
lequel, en matière d'environnement, le Québec a compétence exclusive.
Mise
aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.
À la rubrique Dépôts... M. le leader du
troisième groupe d'opposition.
M.
Ouellet : Merci beaucoup, M.
le Président. Je vous demande de procéder au vote par appel nominal pour se
saisir de ce projet de loi, s'il vous plaît.
• (10 h 10) •
Le Président : Le vote par
appel nominal est donc demandé.
Que les députés qui sont pour se lèvent, s'il
vous plaît.
Le Secrétaire adjoint :
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard
(Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette),
M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).
M. Legault (L'Assomption),
M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé
(Châteauguay), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne),
Mme Roy (Montarville), M. Lemay
(Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny),
M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain),
M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance
(Bellechasse), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon),
Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé
(La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau
(Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose),
Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Proulx
(Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Boulet (Trois-Rivières),
Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin
(Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond),
Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré),
M. Bélanger (Orford), Mme Picard
(Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin
(Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau
(Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau),
M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau
(Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf),
Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean),
Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean),
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava),
M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal
(Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
M. Arcand (Mont-Royal—Outremont),
M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce),
M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys),
M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit
(Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte),
Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac),
Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau), M. Derraji
(Nelligan), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger),
Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone
(Marquette).
M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal
(Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke),
M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau),
M. Zanetti (Jean-Lesage).
Mme Fournier
(Marie-Victorin).
Le Président : Y a-t-il des députés qui
sont contre? Y a-t-il des abstentions? M. le leader du troisième groupe
d'opposition.
M. Ouellet : M. le Président, je demanderais le consentement pour enregistrer le
vote de mon chef, s'il vous plaît.
Le Président :
Consentement? Consentement accordé.
Le Secrétaire
adjoint : M. Bérubé (Matane-Matapédia).
Le Président :
Les trois questions ayant été posées, le résultat, M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 110
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Président :
Donc, adopté à l'unanimité.
Dépôt de documents.
M. le leader du
gouvernement, à la rubrique Dépôt de documents.
Réponses à des pétitions et
à des questions inscrites au feuilleton
M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, je dépose les réponses du gouvernement aux
pétitions présentées en Chambre le 3
avril par la députée de Repentigny et le député de Beauharnois, le 1er mai
par le député de Drummond—Bois-Francs
ainsi qu'aux questions inscrites au feuilleton le 9 avril par le député de
Jonquière et le 1er mai par la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Le Président : Ces documents
sont déposés.
Rapport
annuel du Vérificateur général
Pour
ma part, je dépose le rapport du Vérificateur général à l'Assemblée nationale
pour l'année 2019‑2020, tome de mai 2019.
Rapport
annuel 2017-2018 de la Fondation Jean-Charles-Bonenfant
Je
dépose enfin le rapport d'activité 2017‑2018 de la Fondation
Jean-Charles-Bonenfant.
Il
n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.
Dépôt
de pétitions
À
la rubrique Dépôt de pétitions, Mme la députée de Repentigny.
Clarifier la notion de dangerosité pour les
ordonnances de traitement obligatoire
Mme
Lavallée : Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une
pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
1 205 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du
Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant que la notion de
dangerosité lors de l'application de la Loi sur la protection des personnes
dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui
doit être bonifiée davantage par le Code civil du Québec;
«Considérant que la notion de
dangerosité n'est pas perçue de la même façon par tous les professionnels de la
santé, qui ne l'appliquent pas de manière uniforme et systématique;
«Considérant qu'il en va de la
responsabilité des psychiatres d'appliquer l'ordonnance de traitement
obligatoire, qui permet d'obtenir les meilleurs soins, comme la thérapie
fermée, d'une durée maximale de trois ans;
«Considérant que, lors d'une
ordonnance de traitement, on doit demander le témoignage d'un membre de la
famille, si le patient est inapte, et celle de deux psychiatres;
«Considérant que le nombre de personnes
ayant des problèmes de santé mentale et souffrant de troubles concomitants
augmente. Souvent, la psychose affecte la personne qui, parfois, devient
suicidaire et se suicide;
«Considérant qu'avec la légalisation du cannabis l'Association
des médecins psychiatres du Québec prévoit une hausse importante [des] consultations
suite à des psychoses chez les personnes vulnérables;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'inclure, dans le Plan d'action en santé mentale 2020‑2025, un volet dans le Code civil du Québec pour assurer une
application systémique concernant l'ordonnance de traitement obligatoire
émise par un juge de la Cour supérieure du Québec.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Cet extrait de pétition est déposé. Mme la députée de Maurice-Richard.
Installer des stations de remplissage de liquide lave-glace
Mme
Montpetit : Merci, M. le Président. Donc, je dépose l'extrait d'une
pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 833 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les
faits invoqués sont les suivants :
«Considérant
que, selon la SAAQ, il y a 5 490 000 véhicules automobiles au
Québec sur la route et en estimant que chaque véhicule utilise [entre] quatre à
cinq bidons de lave-glace par année — donc 22 à 25 millions de bidons par
année — si l'on mettait bout à bout ces bidons, nous
parcourrions la distance de 4 068 kilomètres, soit plus que la
distance entre Québec et Calgary;
«Considérant que nous
utilisons trop de plastique à usage unique;
«Considérant que nos
nombreux emballages plastiques ne rejoignent pas le recyclage, se retrouvant
ainsi à la poubelle ou, pire encore, dans notre environnement;
«Considérant que nous
utilisons de nombreux bidons de lave-glace chaque hiver;
«Considérant qu'il
existe des systèmes de remplissage de lave-glace, évitant ainsi l'usage de
bidons;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement d'obliger les bannières de produits
pétroliers à installer une station de
remplissage de lave-glace en vrac accessible pour tous en facturant au
remplissage ou à la quantité, selon l'installation choisie.»
Et je certifie que
cet extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Cet extrait de pétition est maintenant déposé. M. le député de Chauveau.
Modifier la Loi sur l'assurance automobile afin que les
victimes de
la négligence de fabricants et de réparateurs d'automobiles
puissent intenter des recours en responsabilité civile
M.
Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
265 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les
faits invoqués sont les suivants :
«Attendu que les
victimes de la route au Québec sont privées de tout recours civil en
responsabilité depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'assurance automobile
le 1er mars 1978;
«Attendu
que les victimes d'accident de la route découlant de la négligence des
fabricants automobiles ou des réparateurs
de véhicules ou de leurs pièces constituantes n'ont aucune raison de bénéficier
de l'interdiction de recours en responsabilité applicables aux
victimes — "no-fault";
«Attendu
que ces entreprises sont parfaitement solvables et que les recours de leurs
victimes seraient, en général, de nature à permettre la réparation
intégrale des dommages rattachés aux blessures et aux décès;
«Attendu[...], entre
autres, Mme Nancy Leblond vit une injustice du fait qu'elle n'a jamais pu
poursuivre le fabricant automobile responsable de blessures graves et permanentes
causées lors d'un accident et qui ont ruiné sa vie;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement
du Québec de modifier la Loi sur
l'assurance automobile pour réviser
le mode de cotisation des fabricants automobiles et [des] pièces d'automobile
ainsi que des réparateurs de celles-ci afin
qu'il reflète fidèlement le risque qu'ils représentent sur les routes du
Québec; permettre aux victimes de ces fabricants et réparateurs de poursuivre ces derniers en responsabilité civile pour tout dommage découlant d'une mauvaise conception,
construction ou réparation d'un véhicule ou d'une pièce.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Cet extrait de pétition est déposé. Mme la députée de Soulanges.
Mettre en pratique la
démarche de santé intégrative
Mme Picard : Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 9 176 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant que des enquêtes documentées ont démontré que les
approches complémentaires axées sur la santé globale et la prévention
permettent de traiter plus efficacement la douleur et les maladies chroniques;
«Considérant qu'un travail de collaboration
interdisciplinaire entre la médecine conventionnelle et les approches alternatives, tel que préconisé en santé
intégrative, est fortement recommandé par l'Organisation mondiale de la santé afin d'offrir des soins de
santé plus pertinents;
«Considérant qu'une majorité
des Québécois utilise déjà des approches de santé complémentaires;
«Considérant la législation de provinces canadiennes, dont le Medicine
Act 1991 de l'Ontario, amendement n° 33-11, a permis l'instauration réussie de
la démarche de santé intégrative;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement
du Québec d'amender la loi régissant
les soins de santé afin que soit respectée l'autonomie du patient concernant
[les] objectifs de soins de santé et décisions de traitement; les médecins
ne puissent pas être reconnus coupables de
faute professionnelle ou d'incompétence parce qu'ils recommandent ou pratiquent une
thérapie non conventionnelle ou qui s'écarte de la pratique médicale en
vigueur, sauf s'il est démontré que la thérapie complémentaire pose un plus grand risque pour la santé du patient que la
pratique de la médecine conventionnelle; les associations de thérapeutes formés de façon rigoureuse en santé
intégrative puissent obtenir plus facilement justice pour la reconnaissance d'un statut
professionnel qui permettrait ainsi de mieux protéger le public; les soins de
première ligne puissent être
décentralisés et administrés par
d'autres groupes de praticiens de médecine intégrative formés en ce sens.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
• (10 h 20) •
Le
Président : Cet extrait de pétition est maintenant déposé. J'ai reçu une demande de M. le député de Chauveau pour la présentation d'une pétition non conforme. Y
a-t-il consentement pour la présentation de cette pétition?
Des voix :
Consentement.
Le Président :
Consentement. M. le député de Chauveau.
Modifier
la Loi sur l'assurance automobile afin que les victimes de la
négligence de fabricants et de réparateurs d'automobiles puissent
intenter des recours en responsabilité civile
M.
Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
18 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits
invoqués sont les suivants :
«Attendu que
les victimes de la route au Québec sont privées de tout recours civil en
responsabilité depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'assurance
automobile le 1er mars 1978;
«Attendu que
les victimes d'accident de la route découlant de la négligence des fabricants
automobiles ou des réparateurs de
véhicules ou de leurs pièces constituantes n'ont aucune raison de bénéficier de
l'interdiction de recours en responsabilité applicables aux
victimes — "no-fault";
«Attendu que
ces entreprises sont parfaitement solvables et que les recours de leurs
victimes seraient, en général, de nature à permettre la réparation
intégrale des dommages rattachés aux blessures et aux décès;
«Attendu que,
entre autres, Mme Nancy Leblond vit une injustice criante du fait
qu'elle n'a jamais pu poursuivre le fabricant automobile qui l'a blessée
grièvement, de façon permanente, et qui a ruiné sa vie;
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons à l'Assemblée nationale de modifier la Loi sur
l'assurance automobile pour réviser le
mode de cotisation des fabricants automobiles et de pièces d'automobile ainsi
que les réparateurs de celles-ci afin qu'il reflète fidèlement le risque
qu'ils représentent sur les routes du Québec; permettre aux victimes de ces fabricants
et réparateurs de poursuivre ces derniers en
responsabilité civile pour tout dommage découlant d'une mauvaise conception,
construction ou réparation d'un véhicule ou d'une pièce.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition. Et permettez-moi, M. le Président, de saluer
Mme Leblond et son conjoint, qui sont ici présents à l'Assemblée
nationale. Merci.
Le Président : Cet extrait de
pétition est maintenant déposé.
Il n'y a pas
de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation
de droit ou de privilège.
Je vous avise
qu'après la période de questions et réponses orales seront tenus les votes
reportés sur la motion du député de
Robert-Baldwin débattue hier aux affaires inscrites par les députés de
l'opposition puis sur l'adoption du projet de loi n° 7.
Questions et réponses
orales
Nous en sommes maintenant à la période de
questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition
officielle.
Traitement des demandes d'immigration
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, je
tiens à remémorer au chef de la CAQ l'objectif d'une commission parlementaire.
Elle constitue le forum tout désigné pour
examiner en détail les projets de loi, et les députés y jouent un rôle de
contrôle de l'activité
gouvernementale et de consultation publique. Dans le cas du projet de loi sur l'immigration, c'est plutôt un monologue auquel on assiste. C'est un
projet de loi qui a été présenté dans la précipitation et l'improvisation. Le ministre de l'Immigration agit d'ailleurs de façon
doctrinaire. Rappelez-vous l'abandon des 18 000 dossiers en immigration.
Tout le monde lui disait que ça n'avait pas
de bon sens, mais il a fallu l'intervention du tribunal pour corriger la
situation. Notre porte-parole en
matière d'immigration a formulé trois propositions au ministre pour bonifier
son projet de loi : assurer le
traitement des 18 000 dossiers, préciser le test des valeurs et faciliter
la vie des entreprises. Actuellement, ce projet fait tout le contraire
et impose un fardeau administratif supplémentaire. Le milieu des affaires
partage nos inquiétudes.
Est-ce que le
premier ministre, qui refuse d'entendre nos voix dans ce dossier, peut au moins
entendre celle du milieu des affaires?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, le
système actuel d'immigration ne fonctionne pas bien.
D'abord, je
rappelle qu'on parle des immigrants économiques. 60 % des immigrants qui
arrivent au Québec sont des
immigrants économiques. Déjà, on pourrait se poser la question : Est-ce
que ça devrait être plus que 60 %? Mais restons avec le 60 %.
Actuellement,
dans le système, il y a une série de critères, entre autres la connaissance du
français, entre autres les qualifications,
et il y a un système de points qui sont accordés, et c'est un système de
premier arrivé, premier servi. Or, actuellement,
il y a beaucoup d'entreprises qui sont en pénurie d'employés qualifiés. Donc,
ce qu'on souhaiterait, c'est de
mettre en place un nouveau système qui permettrait de choisir en premier les
employés qui répondent aux besoins des entreprises.
Bon, malheureusement, le Parti libéral veut qu'on continue à traiter les
50 000 personnes qui sont dans les 18 000 dossiers selon la
formule premier arrivé, premier servi.
Donc, M. le
Président, je pense que notre projet de loi répond à une nécessité. Bon, je
comprends que le milieu des affaires
ne souhaite pas qu'on mette en place un test de français puis un test de
valeurs, dans un deuxième temps. Moi, je
pense, c'est important que les nouveaux arrivants apprennent le français,
apprennent nos valeurs et réussissent ce test. Donc, je comprends que les libéraux sont contre le test de français,
contre le test des valeurs. C'est leur choix, mais moi, je suis très à
l'aise...
Le Président :
En terminant.
M. Legault : ...avec notre position.
Des voix : ...
Le Président : Première
complémentaire. La parole n'appartient qu'au chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, les
conditions d'embauche de ces nouveaux arrivants, a-t-il dit hier, ça va être
connu dans un règlement ultérieur.
C'est assez fondamental, il me semble, les conditions d'embauche de nouveaux
arrivants.
Ma question
est simple : Est-ce que vous pouvez demander à votre ministre de mettre de
côté son intransigeance bien connue et enfin de faire preuve d'ouverture
et de flexibilité?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, le système qu'on propose, c'est un système
qui avait même commencé à être mis en place par le gouvernement libéral,
le système Arrima.
En gros,
c'est qu'on dit, c'est que, si, dans les 100 000 personnes — il
y en a 100 000 actuellement qui ont déposé leurs candidatures — il
y en a trois qui répondent aux besoins spécifiques d'une entreprise,
ces trois personnes-là, on veut qu'elles passent devant tout
le monde parce que c'est ça
qui devrait être la priorité : répondre aux besoins des entreprises.
Malheureusement, actuellement, il y a 40 000 personnes qui attendent à Ottawa,
un autre 50 000 personnes qui sont dans les 18 000 dossiers,
qui attendent au ministère de l'Immigration.
Le Président : En terminant.
M. Legault : Il faut accélérer. Il
faut changer les critères. C'est ça qu'on veut.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Il me semble que nos propositions sont raisonnables, M. le
Président. Il me semble qu'il n'y a
pas juste nous qui avons dit ça. Plusieurs
groupes sont venus également dire la même chose. On dirait que les commissions parlementaires, pour le gouvernement,
c'est une mise en scène.
Ma question
est simple : Est-ce que le premier
ministre peut nous dire à quoi, selon
lui, servent ces commissions
parlementaires?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président, le Parti
libéral pose deux conditions qui ne sont pas acceptables pour nous.
D'abord, le Parti libéral demande qu'on traite premier arrivé, premier servi les 18 000
dossiers, 50 000 personnes. Il y
en a déjà 40 000 en attente. Ça veut dire que, pour
répondre aux besoins du marché du
travail, il va falloir attendre
deux ans avant de commencer à se concentrer là-dessus. Il y a une urgence
d'agir. Les groupes patronaux le disent.
Puis, dans un deuxième temps, on veut un test de français puis un test de
valeurs. Ce n'est pas important pour les libéraux, le test de français
puis le test des valeurs. C'est important pour les Québécois.
Le Président : Troisième
complémentaire.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! Toujours votre attention. M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Il me
semble qu'on fait valoir des points importants qui sont appuyés, M. le
Président, par les entreprises. Le premier ministre nous répond toujours de la même façon. Il ne nous donne jamais,
en fait, de vraies réponses.
Je vais lui donner un choix de réponses :
a, est-ce qu'il souhaite adopter un projet de loi mal ficelé par une idéologie
ou, b, un projet de loi où les ingrédients gagnants pour la prospérité du Québec
sont réunis?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, les ingrédients gagnants pour la prospérité économique,
c'est de commencer le plus vite
possible à choisir les candidats qui répondent le mieux au marché du travail, pas y aller comme c'est proposé par les libéraux, traiter
18 000 dossiers, 50 000 personnes premier arrivé, premier servi.
Deuxièmement,
le français sera toujours vulnérable au Québec. On veut exiger, dans les trois
premières années, un test de français
puis un test de valeurs. Ce n'est pas important pour le Parti libéral. C'est
important pour les Québécois. Les Québécois sont avec nous.
• (10 h 30) •
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Intégration des immigrants au marché du travail
Mme
Dominique Anglade
Mme
Anglade : Oui. Merci, M. le Président. Alors, vous savez, M. le Président, dans un bon projet de loi, il y a
d'abord un objectif qui doit être clair puis des moyens qui vont
avec. Et, dans le projet de loi sur l'immigration, l'objectif
qui est d'avoir plus de régionalisation,
plus d'intégration des immigrants, on
est d'accord. Mais c'est dans les moyens qu'il y a véritablement un
problème.
Et là, hier,
on a vu à quel point le ministre souhaite imposer un fardeau aux milieux
économiques. Et les milieux économiques — ils sont venus nous rencontrer il y a
plusieurs semaines — l'avaient
déjà dénoncé. Et là, hier, ils ont été obligés de sortir pour dire que
ça n'avait pas de sens. Et ce qu'ils disent, la Fédération des chambres de
commerce du Québec : Ça va être
contre-productif. Le Conseil du patronat et les Manufacturiers et exportateurs
sont sortis pour dire que ça allait
être un alourdissement non nécessaire, que ce n'était pas dans la bonne
direction que l'on allait. Les milieux se sont réunis pour dire que ça
ne tenait pas la route.
Alors, quand
est-ce que le ministre va sortir de son entêtement pour comprendre que, dans
les moyens dont il se dote, il nuit à l'économie du Québec?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, il y a quelques rectificatifs à apporter ici. Il y a une chose que
je vais faire, par contre, je vais
donner raison au chef de l'opposition officielle sur l'intransigeance sur mes
principes. Effectivement, je suis
intransigeant sur mes principes. L'objectif que j'ai, en politique, c'est de
réussir à faire en sorte d'améliorer les choses, et c'est ce que je fais dans le cadre du projet de
loi n° 9. Et surtout je vais toujours servir les
Québécois, fidèlement à mes valeurs, et là-dessus je peux vous assurer
que je serai, en tout temps, intransigeant.
M. le Président, pour ce qui est de la question
de la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne,
il y a une chose qu'il est important de
mentionner. On est en commission parlementaire sur le projet de loi n° 9 depuis plus de 35 heures. L'article auquel elle fait référence,
M. le Président, vise à faire en sorte d'avoir une assise législative pour que
les employeurs participent, eux aussi, à l'intégration des personnes
immigrantes, notamment en matière de francisation. Est-ce que le Parti libéral
est contre le fait que tous les acteurs de la société québécoise participent à
l'intégration des personnes immigrantes? Honnêtement, je suis un peu surpris.
Deuxièmement,
M. le Président, à la fois la Fédération des chambres de commerce, la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, le Conseil du
patronat demandent au Parti libéral que le projet de loi soit adopté...
Le Président : En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...le plus
rapidement possible pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre dans toutes les
régions du Québec. Vous nuisez à l'économie.
Le
Président : Première complémentaire, Mme la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne.
On est attentifs et aux questions et aux réponses. Madame.
Mme
Dominique Anglade
Mme
Anglade : M. le Président, clairement, il n'a pas vu la sortie qu'ont
faite hier les trois organismes auxquels il fait référence. Je l'invite à lire ce qu'ils ont dit. Mais nous, on
veut aider le ministre, M. le Président, et c'est la raison pour laquelle, hier, on a proposé un amendement qui
disait la chose suivante : On aimerait que, dans les pouvoirs dont il se dote, il puisse y avoir une perspective
d'allègement réglementaire pour les entreprises. Le ministre a dit quoi par
rapport à l'allègement réglementaire?
Il a dit non à cet amendement. La nuit porte conseil, M. le Président. Je suis
sûre qu'en se levant il pourra nous dire qu'il va être d'accord avec
l'amendement qu'on propose dans l'intérêt économique.
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, savez-vous où j'étais ce matin avant de venir ici? J'étais à
l'Association des économistes du Québec.
Savez-vous qui était assis à ma gauche? Le président de la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Et que m'a-t-il dit? Il m'a dit : Simon, il faut que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible. Alors...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! Évidemment, vous-même ne pouvez vous appeler par votre nom.
Des voix : ...
Le
Président : Avec le
sourire. M. le ministre de
l'Immigration, poursuivez, s'il vous plaît, votre réponse. Attention, tout le monde, s'il vous plaît!
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, la Fédération des chambres
de commerce souhaite que le projet de loi soit adopté. Le Parti libéral nuit à l'économie du Québec en refusant de
faire en sorte de passer d'un système d'immigration qui va prendre en compte
les besoins du marché du travail. Ce n'est pas dur à comprendre, M. le
Président, il faut que le projet de loi soit adopté pour aider les
entreprises du Québec.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Dominique Anglade
Mme
Anglade : M. le Président, il faut que le ministre de l'Immigration se
ressaisisse. Il faut qu'il se ressaisisse parce qu'honnêtement c'est lui
qui nuit présentement à l'économie du Québec. Dans sa forme actuelle, dans sa
forme actuelle, le projet de loi fait en sorte que le Québec est moins
concurrentiel.
Alors, est-ce
que le ministre pourrait faire preuve, je ne veux pas lui en demander beaucoup,
mais d'un peu, d'un peu d'humilité et de reconnaître qu'il doit faire
des modifications pour faire en sorte que le projet puisse être adopté dans
l'intérêt de tous les Québécois?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration. Encore une fois, votre collaboration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, moi, je pense à toutes les régions du Québec, je pense à toutes les
entreprises, je pense à tous les
entrepreneurs qui ont des offres d'emploi qui ne sont pas comblées dans toutes
les régions du Québec. Le projet de loi n° 9,
il a été déposé le 9 février pour faire en sorte d'accompagner les personnes
immigrantes pour qu'elles se trouvent un emploi à la hauteur de leurs
compétences.
M. le
Président, cet été, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne va probablement faire la tournée de
toutes les régions du Québec pour aller rencontrer les membres du Parti libéral
à la recherche d'appuis. M. le Président, je serais gêné à sa place. Si jamais le projet de loi n'est
pas adopté, le projet de loi n° 9,
qu'est-ce qu'elle va dire aux différents entrepreneurs du Québec qu'elle va rencontrer?
Elle va se présenter comme une candidate économique, alors qu'elle nuit
elle-même à l'économie en refusant de faire l'adoption du projet de loi
n° 9.
Joignez-vous à nous, pensez aux
intérêts supérieurs du Québec et faisons en sorte d'adopter le projet de loi.
Le Président :
Question principale. M. le député de Pontiac, à vous maintenant la parole.
Aide
aux victimes outaouaises des inondations printanières de 2019
M. André Fortin
M.
Fortin : M. le Président, les gens de l'Outaouais affectés par les
inondations sont fatigués, ils sont épuisés. Depuis des semaines, ils vivent chez des parents,
chez des amis avec leurs enfants, leurs animaux, couchent sur des divans
inconfortables, reviennent épuisés du
travail en pensant constamment à l'état de leur résidence qui est encore
inondée, à où la famille va habiter
et à comment ils vont vivre les prochains mois. Et, devant eux, il y a la tâche
brutale du nettoyage. Installer
des sacs de sable avec des bénévoles pour tenter de sauver la maison, c'est une
chose, mais enlever des centaines, des milliers de sacs de sable pesants,
mouillés, contaminés, qui sentent mauvais, qui sont déchirés, le faire seuls
parce qu'il n'y a plus de bénévoles... Pour des gens forts mais affaiblis, pour des
gens résilients mais épuisés, enlever ces sacs de sable là sans aide, c'est impensable, c'est impossible. D'apprendre
aujourd'hui que les Forces armées n'aideront pas à enlever ces sacs de
sable, pour tous ces gens, c'est comme si le ciel leur tombait sur la tête une
deuxième fois.
Est-ce que quelqu'un, au gouvernement, va
intervenir?
Le
Président : M. le ministre de l'Immigration, leader du
gouvernement.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, la situation à laquelle fait face l'ensemble
des sinistrés relativement aux
plus récentes inondations est difficile, et le gouvernement est là, en support
aux sinistrés des différentes régions du Québec. D'ailleurs,
ma collègue ministre
de la Sécurité publique est actuellement à pied d'oeuvre sur le terrain, à Rigaud, pour rencontrer les différents intervenants. Vous pouvez être sûr que le gouvernement
du Québec va accompagner les sinistrés. Déjà, on l'a fait avec le
programme qui a été mis en place par ma collègue, avant les inondations
de cette année, justement en termes de prévisibilité, pour s'assurer
qu'on puisse accompagner le mieux possible les personnes qui se retrouvent dans
cette situation-là.
Il y a une chose qui
est sûre, M. le Président, présentement, la ministre de la Sécurité publique
aussi est en discussion avec la brigadière-générale,
au niveau des Forces armées, et les discussions se
poursuivent. Mais la volonté du gouvernement du Québec est très certainement d'accompagner toutes les personnes qui font face
à ces difficultés-là. Il faut savoir que le fait d'être inondé, de
perdre sa maison, de devoir effectuer des travaux, c'est une charge physique
et mentale extrêmement importante,
et sachez que le gouvernement du
Québec est là pour accompagner toutes
les personnes. Et d'ailleurs... et je dois, à ce titre, souligner le
travail de ma collègue qui a été présente sur le terrain...
Le Président :
En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...jour et nuit et elle va continuer de le faire.
J'ai confiance qu'elle va le continuer.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Pontiac.
M. André Fortin
M. Fortin : Aujourd'hui, là, ce qu'on dit aux sinistrés, ce qu'on dit aux inondés,
c'est que l'armée ne les aidera pas à nettoyer leur terrain, l'armée ne
sera pas là pour les aider. On les comprendra, M. le Président, quand ils
disent qu'ils se sentent abandonnés par leur gouvernement parce que les
priorités des Forces armées, ce sont celles qui sont établies avec le ministère
de la Sécurité publique. La ministre des Affaires municipales a entendu
l'appel, l'appel des municipalités rurales de l'Outaouais pour que l'armée soit
disponible pour aider ces gens-là.
Puisqu'elle n'a pas
été entendue par son gouvernement, qu'est-ce qu'elle dit à ces gens-là? Comment
ils sont supposés nettoyer leur terrain?
Le Président :
Mme la ministre des Affaires municipales.
Mme Andrée Laforest
Mme
Laforest : Je remercie mon collègue pour sa question puis les
questions concernant la Croix-Rouge. Je crois que notre vice-première
ministre s'en est très...
Des voix :
...
Mme
Laforest : ...oui, pour ce qui s'est passé avec les inondations. Concernant
votre région, l'Outaouais, j'étais là la
semaine passée, il y a deux semaines en fait. J'ai visité les lieux, j'étais en
discussion avec votre maire, d'ailleurs, et ce que je peux vous dire, c'est que, pour la région de l'Outaouais — je suis d'ailleurs allée à Pontiac rencontrer la mairesse — ce
que je peux dire, c'est que les deux, et la mairesse et le maire, m'ont dit
qu'ils étaient très entendus, très bien
écoutés. Ils m'ont même remerciée
pour les nouvelles places qu'on a octroyées en hébergement pour la région de
l'Outaouais. En ce qui concerne l'habitation, pour l'Outaouais,
on a pris le contrôle et on a eu des remerciements de la part de la mairesse.
Le Président :
Deuxième complémentaire.
Des voix :
...
• (10 h 40) •
Le Président :
S'il vous plaît, votre attention! La parole appartient au député de Pontiac.
M. André Fortin
M.
Fortin : On ne parle pas de
Croix-Rouge. On ne parle pas d'hébergement. On parle de sacs de sable. À
Waltham, là, M. le Président, la population, c'est 384. Au bureau municipal,
il y a un seul employé à temps partiel. À
Waltham, près de la moitié des gens sont soit sinistrés, inondés, isolés ou
évacués, et l'autre moitié les hébergent, et ce, depuis six semaines. C'est des gens forts, des
gens fiers, des gens qui n'aiment pas demander de l'aide, qui ne veulent
pas être un fardeau, mais ils sont épuisés. M. le Président, tout le monde est
épuisé, les 384. Ils ont besoin de l'armée.
Qu'est-ce que la ministre
va faire?
Le Président :
Mme la ministre des Affaires municipales.
Mme Andrée Laforest
Mme
Laforest : Bien, je vais redire encore qu'est-ce que je dis. J'ai très
bien joué mon rôle. Mon rôle est l'habitation,
évidemment. En ce qui concerne l'armée, vous le savez, on a
eu des annonces de semaine en semaine pour soutenir les sinistrés. Alors, ceci étant dit, ne soyez pas inquiets. On
est tout à fait à l'écoute. On a notre comité d'action qui est fait avec la vice-première ministre.
On prend notre rôle au sérieux. Qu'est-ce que je pourrais vous dire au niveau
de l'hébergement pour votre région, on a
octroyé des PSL, les PSL d'urgence pour reloger les gens inondés. Et, pour les
PSL d'urgence, on a doublé le nombre de PSL d'urgence. Alors, en habitation, on
a répondu à la demande.
Le Président :
Question principale, M. le député de Rosemont.
Allocations de départ de gestionnaires du réseau de la
santé
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : Oui, merci, M. le Président. On s'apprête ici, en cette Chambre, éventuellement, à voter le projet de
loi n° 7,
qui va faire passer de 24 mois à 12 mois les allocations de départ
des gestionnaires du réseau de santé qui ont perdu leur job à cause de la réforme. On est d'accord avec ça, malgré le
côté rétroactif de la loi. Pourquoi? Parce que la norme, normalement, c'est 12 mois. C'est comme ça que ça
devrait fonctionner. C'est comme ça qu'on traite bien les gens.
Or,
la norme, elle ne s'applique pas pour tout le monde. La Vérificatrice générale nous apprend ce matin que,
pour certains vice-présidents de
certaines sociétés d'État, c'est un véritable bar ouvert, M. le
Président : gros salaires, bonis de
signature, primes de rendement automatiques et, la cerise sur le sundae, des
primes de départ plantureuses, hors normes selon la Vérificatrice
générale, jusqu'à 18 mois de salaire.
Ça, M. le
Gouvernement, est-ce que... M. le Gouvernement!
Est-ce
que le gouvernement reconnaît qu'il entérine ainsi et encourage la pratique des
bars ouverts avec sa politique de business?
Le Président :
M. le Président du Conseil du trésor.
M. Christian Dubé
M.
Dubé : Alors, M. le Président, moi, j'apprécie beaucoup la
question du député de Rosemont. Je pense que la plupart de nous ont soit
déjà pris connaissance du rapport du Vérificateur général... Et moi, je l'ai
regardé pas mal en détail et j'aimerais
rappeler la période qui est couverte par ça, par ce rapport-là, qui est la
période de 2016 à 2018. Qui était au gouvernement à ce moment-là? C'est
le Parti libéral. Puis je pense que les pratiques qui sont soulevées par le vérificateur... par la Vérificateur général,
pardon, c'est gênant. C'est excessivement gênant pour des gens qui, par exemple,
étaient au Conseil du trésor pendant les
dernières années, n'avaient pas la rigueur nécessaire de regarder, M. le
Président, qu'est-ce qui se faisait en matière de transparence et
d'encadrement.
Alors, moi, je
souscris exactement avec le point du député de Rosemont que ces pratiques-là
sont totalement inacceptables. Et c'est pour
ça, notamment, que nous avons annoncé, dans les dernières semaines, que nous
allons travailler très fort sur la
Loi de l'administration publique pour mettre en place des pratiques de
transparence et d'encadrement qui respecteront la Loi de
l'administration publique.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Rosemont.
M. Vincent Marissal
M.
Marissal : M. le Président, les sociétés d'État visées cachent de
l'information volontairement. Ce n'est pas nous qui le disons. Elles cachent de l'information, c'est la
Vérificatrice générale qui l'a dit. On peut ne pas la croire, mais elle
a fait des audits. Ces sociétés d'État cachent des informations volontairement.
Alors,
au-delà des belles paroles, est-ce que le gouvernement va mettre fin au bar
ouvert des fonds publics dans les sociétés d'État?
Le Président :
M. le président du Conseil du trésor.
M. Christian Dubé
M.
Dubé : Écoutez, en fait, je pourrais répondre 12 fois à la question du
député de Rosemont. Je suis d'accord avec
lui, c'est inacceptable, ce qui a été fait dans les dernières années. Il y
avait notamment un Conseil du trésor qui devait être
responsable, M. le Président, de s'assurer qu'il y avait de la transparence,
mais qu'il avait aussi... dans toutes les publications,
que l'information était là... Qu'on décide de payer des primes de départ, c'est
une chose, mais il ne faut pas avoir la peur ou la crainte de divulguer
cette information-là.
Alors, je
vais vous dire, je peux répondre encore plusieurs fois, je suis d'accord avec
vous. Ces pratiques-là sont inacceptables,
et on est train de mettre en place tout ce qu'il faut pour que l'information
soit divulguée dans les différents rapports annuels de gestion.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Rosemont.
M.
Vincent Marissal
M. Marissal : C'est bien mal parti,
M. le Président, si on considère la nomination du chum du ministre de l'Économie à Investissement Québec. Alors,
visiblement, les babines n'ont pas suivi les bottines ici ou les bottines n'ont
pas suivi les babines. Ça ne marche
pas. Alors, on ne peut pas juste prendre la parole du président du Conseil du
trésor comme ça. Ça va prendre des résultats.
Qui doit
dicter? Qui doit dicter les bonnes pratiques en matière de fonds publics?
Est-ce que c'est des sociétés d'État
cachottières qui cachent de l'information à la Vérificatrice générale ou le
gouvernement, dictées par la Vérificatrice générale?
Le Président : M. le
président du Conseil du trésor.
M.
Christian Dubé
M.
Dubé : Écoutez,
là, on tombe dans une deuxième question, M. le
Président, et ce que j'aimerais dire
au député de Rosemont,
c'est très clair. J'en ai parlé avec mon collègue le ministre de l'Économie. Je pense qu'il est important de comprendre comment les règles sont faites, c'est-à-dire qu'il y a des sociétés
d'État qui ont des conseils d'administration, qui doivent
s'occuper de la rémunération, mais ça n'empêche pas d'avoir la transparence et l'encadrement.
Donc, par exemple, ce qui est dans le cas d'Investissement
Québec, ici, il y aura
toute la transparence et l'encadrement
nécessaires pour que l'information, en termes de rémunération, de bonification et de conditions de travail,
soit clairement déclarée avec
les objectifs de performance qui auront été mis en place par le ministre de
l'Économie.
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Joliette.
Plan
de déploiement des maternelles quatre ans
Mme
Véronique Hivon
Mme
Hivon : On a tous constaté, au cours de derniers mois,
que d'un projet de maternelle quatre
ans qui devait inclure tous
les enfants avec 5 000 classes, on est passés à 3 300 et,
maintenant, à 2 600 classes.
Ce n'est pas
surprenant, parce que les données probantes de la science pour soutenir l'idée
d'une généralisation de la maternelle
quatre ans ne sont tout simplement pas là. D'ailleurs, des experts ont été très
éloquents, à cet égard, en commission
parlementaire. Les spécialistes, les enseignants, les classes ne sont pas là,
et la demande et l'intérêt des parents ne
sont pas là non plus. D'ailleurs, même Égide Royer, l'architecte derrière l'idée
du gouvernement, est venu hier nous dire que les conditions actuellement
pour le succès du projet des maternelles quatre ans ne sont pas réunies.
Aujourd'hui,
les deux grands syndicats qui représentent les enseignants demandent carrément,
vont demander, en commission, au
gouvernement de mettre de côté son projet et son projet de loi. C'est l'inverse
du corporatisme, je ne pense pas qu'on est face au lobby des CPE quand
on parle des enseignants.
Est-ce que le ministre peut prendre acte et
reculer?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M.
Roberge : Merci bien, M. le Président. La liste des gens qui sont
venus nous dire d'appuyer et d'adopter le projet de loi n° 5 pour
déployer de manière accessible, mais non obligatoire... de le déployer, le
projet de maternelles quatre ans, c'est
incroyable : le Conseil supérieur de l'éducation, l'Association des
directions générales des commissions scolaires, la Fédération des
comités de parents, l'association québécoise du personnel de direction
d'établissement, la fédération québécoise des directions d'école, l'association
des orthopédagogues, Pierre Potvin, prof de l'UQTR; Michel Janosz, prof de l'Université de Montréal, et des sommités
reconnues par tout le monde dans le réseau de l'éducation, qui viennent
de l'Université Laval, de l'UQAC, de l'Institut national de recherche scientifique,
de l'UQAM, je parle de
M. Égide Royer, M. Michel Perron, une sommité reconnue au
Saguenay, M. Guy R. Brisson, M. Joël Monzée,
Mme Yolande Brunelle, M. Richard Leonard, qui est venu faire un témoignage
incroyable, Mme Huguette Drouin, Danielle Boucher,
Monique Brodeur. La science, les spécialistes, ceux qui administrent le réseau,
ceux qui l'utilisent. Qu'est-ce que vous voulez de plus?
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme
Véronique Hivon
Mme
Hivon : Ça serait le fun que le ministre
soit un petit peu à l'écoute parce qu'il y a au moins la
moitié des groupes ou des personnes
qu'il a nommés qui sont venus dire : Bien, ça peut être une bonne idée,
les maternelles quatre ans, mais il ne faut surtout pas oublier les centres de la petite enfance, il ne faut surtout pas oublier la complémentarité. Puis, quand on leur dit : Où vous investiriez le 2 milliards en priorité?, c'est drôle, la plupart nous disent : Dans le
0-4 ans parce qu'il ne
faut pas juste régler une vulnérabilité ou un problème, il faut le prévenir.
Alors, est-ce que le ministre peut arrêter de
foncer tête baissée dans cette idée fixe à 2 milliards et mettre la
priorité au bon endroit?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M.
Roberge : M. le Président, c'est vrai qu'il y a certaines des
personnes qui nous disent : Nous appuyons le projet de loi n° 5, nous appuyons la volonté du
gouvernement, qui nous suggère des façons de réussir l'implantation. C'est ça,
l'objectif des auditions, d'écouter les gens, d'améliorer notre projet, de
faire mieux pour nos enfants. Alors, on est très contents de voir que les gens appuient notre politique et nous suggèrent
des façons de mieux faire les choses pour les enfants. On accueille ces
commentaires-là avec beaucoup d'ouverture.
Et j'invite
les collègues à arrêter d'opposer les bonnes idées. Pourquoi il faudrait soit
investir chez les 0-3 ans, 4 ans, comme on fait avec Agir tôt
et mon collègue, et opposer ça à investir pour les quatre ans?
Le Président : En terminant.
M. Roberge : On est capables de
prendre soin de tous nos enfants.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme
Véronique Hivon
Mme
Hivon : Il n'y
a pas juste les chiffres qui ont
changé, hein, il y a aussi le discours. On est passé d'un discours
où tous les enfants devraient aller en maternelle quatre ans au libre choix. Bien, parlons-en, du libre choix
des parents. Comment il peut
s'exercer, le libre choix des parents, quand, en ce moment, on en connaît
tous, des parents qui attendent depuis des années une place en CPE, 42 000 enfants
en attente sur le guichet unique?
Est-ce que le
ministre de la Famille peut nous dire aujourd'hui si le libre choix, et le
premier choix des parents qui, oui,
est pour les CPE, va être au rendez-vous et qu'il a le mandat de compléter le
réseau et de développer des dizaines de milliers de places?
• (10 h 50) •
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M.
Roberge : C'est bien. Alors, oui, c'est vrai, on veut le libre choix.
Pour ça, ça veut dire qu'il faut qu'il y ait de la place dans les deux
réseaux. Savez-vous ce qu'on va faire? On va déployer les deux réseaux. Mon
collègue s'est engagé à déployer plus de
10 000 places, plus de 10 000 places dans le réseau des CPE
au cours des prochaines années. Ça,
c'est les bottines qui suivent les babines. On va le faire. Puis on va déployer
aussi le réseau des maternelles quatre
ans pour offrir le choix aux parents entre deux services de qualité parce qu'on
pense que c'est ça qui est le mieux pour les parents, c'est ça qui est
le mieux pour les enfants.
Puis j'invite
les collègues à travailler à améliorer le système pour les parents, pour les
enfants, et en respectant la science, la science qui nous dit d'aller de
l'avant. Je vous invite à relire l'avis du Conseil supérieur de l'éducation.
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Saint-Laurent.
Impact
de l'implantation de la maternelle quatre ans sur les services de garde
Mme
Marwah Rizqy
Mme
Rizqy : M. le Président, le problème, c'est que nous, on a sérieusement
lu l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, puis ce n'est pas aussi
tranché que le ministre de l'Éducation le prétend. Au contraire, il y a des
bémols.
Le problème
qu'on a, c'est que le ministre de l'Éducation prend congé de la réalité québécoise.
Il refuse de voir l'étendue de la
situation du Québec. Il refuse d'entendre le Dr Chicoine et Dre Drouin. Il
refuse d'entendre la CSDM, alors que
la CSDM est la première commission scolaire qui a implanté les maternelles
quatre ans au Québec et qu'elle
est la plus grande commission scolaire. Il refuse d'entendre les centrales syndicales des enseignants. La CSQ
reprend même leur slogan : En
prendre moins, en prendre soin. Ils ne sont même pas capables d'entendre
leur propre slogan. Il faut le faire!
M. le Président, nous, la seule chose qu'on demande... pas du mur-à-mur, on veut du sur-mesure,
on ne veut pas avoir 2 milliards que pour les quatre ans, la vie commence bien avant quatre ans, on veut
qu'on prenne soin aussi de nos
tout-petits en complémentarité. Le problème que nous avons, c'est que ce n'est
pas la Pre Côté qui a un billet, c'est le ministre de l'Éducation
qui a un billet pour ses maternelles quatre ans.
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M.
Roberge : Oui, bien,
j'invite la collègue à être des nôtres après-midi parce qu'on va les
entendre, les syndicats, ils sont là
cet après-midi, alors soyez au rendez-vous, ils vont être là, hein, il n'y a pas de... il
n'y a pas personne qui sera bâillonné là.
Écoutez,
il faut arrêter, c'est important, là, il faut arrêter d'opposer les bonnes idées,
il faut arrêter d'opposer notre réseau de services de garde avec les maternelles
quatre ans, il faut arrêter d'antagoniser les oppositions comme ça, d'antagoniser
les réseaux. Ce n'est pas comme ça qu'on va faire avancer les choses, ce n'est
pas comme ça qu'on va améliorer les services
aux enfants puis qu'on va répondre aux besoins des parents. La Fédération
des comités de parents nous a dit : Nous autres, là, on est en
faveur du déploiement, on veut avoir le choix. Il y a certains de nos parents
qui disent : Non, non, nous autres, on
n'enverra pas notre enfant en maternelle
quatre ans. Il y en a d'autres qui
disent : Oui, oui, oui, on veut
l'envoyer. La Fédération des comités de parents dit : Est-ce qu'on
pourrait avoir le choix, s'il vous
plaît?
Il y a
plus de 42 000 enfants qui sont sur des listes d'attente en ce moment à cause de la négligence des vieux partis. C'est quand même quelque
chose de se faire faire la leçon par ces gens-là.
Le Président : Première
complémentaire.
Des voix : ...
Le Président : Je vous
demande également d'être attentifs, toujours et en continu. Mme la députée de
Westmount—Saint-Louis.
Mme
Jennifer Maccarone
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Le ministre de la Famille, il a dit qu'il n'y aura pas de maternelle
quatre ans à côté des garderies. Pourtant,
plus que la moitié des classes qui vont ouvrir en septembre sont à un kilomètre
d'un CPE ou d'une garderie. Je comprends que
le ministre, il n'est pas au courant, M. le Président, il est absent des
commissions, son ministère, il est absent des discussions, et il est
absent de la place publique.
Que répond le ministre d'un gouvernement au réseau...
Des voix : ...
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, je pense que le leader de l'opposition devrait indiquer à sa
collègue qu'on ne peut pas faire
référence à l'absence ou à la présence ou non d'un collègue ici, hein, au salon
bleu, ça fait partie de nos règles, M. le Président.
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! On entend. Je
vous demande, madame, de poursuivre votre question.
Mme Maccarone :
Que répondent le ministre et le gouvernement au réseau des services de garde
qui sont à la veille de fermer leurs portes? Ce n'est pas de fermer nos
yeux, c'est d'ouvrir nos oreilles.
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge : Oui. Alors, le
travail de collaboration entre Famille et Éducation n'a jamais été aussi grand.
Peut-être qu'ils font de la projection parce
que ça travaillait plus en silo ces dernières années. Ce n'est pas notre façon
de travailler. On travaille Santé, Famille,
Éducation, les ministres se rencontrent, les cabinets se rencontrent et les
sous-ministres se rencontrent, donc
les fonctionnaires aussi, les ministères travaillent en collaboration. On nous
dit qu'on ne se rencontre pas.
Écoutez, on ne fait pas des procès-verbaux à chaque rencontre, hein, qu'on
rendrait publics, mais je peux vous dire qu'on travaille ensemble. Et il y a un document conjoint qui a été fait,
et je pense que c'est une des rares fois que l'analyse d'impact réglementaire
pour un projet de loi a été faite par deux ministères à la fois. Mais, dans le
cas de Famille-Éducation, ça a été fait ensemble lors du dépôt du projet
de loi n° 5. C'est une des preuves qui montre bien qu'on travaille en
complémentarité.
Le Président :
Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Jennifer Maccarone
Mme Maccarone :
Merci, M. le Président. Le gouvernement ne croit pas dans la complémentarité.
Ce que vous voyez ici en jaune sont
toutes les maternelles quatre ans qui vont ouvrir dès le 1er septembre qui
sont à une minute de marche d'un CPE.
Il y en a plusieurs. Qu'une maternelle quatre ans s'ouvre en face d'un CPE
à Amqui, à Saint-Fulgence et à Chambord, ça fait mal, M. le Président. Et le
ministre de la Famille, il est absent, il n'est pas à l'écoute de son réseau.
Personne n'a évalué l'impact des maternelles quatre ans sur le réseau de
services de garde.
Qui, au gouvernement,
va défendre le réseau de services de garde?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge :
M. le Président, c'est vrai, ça se peut qu'il y ait des maternelles quatre ans
proches de là où sont les familles,
ça se pourrait que ça arrive. Ça se pourrait qu'il y en ait dans les écoles,
c'est là qu'elles vont être, M. le Président. Et, si on veut laisser le libre choix aux parents, bien, il faut que les
deux soient accessibles. On ne va pas bâtir un CPE à 50 kilomètres dans le bois ou une école à
50 kilomètres dans le bois pour protéger des marchés. On ne parle pas
d'une entreprise avec un contrat
d'exclusivité, on parle d'une offre de services publics. Une offre de services
publics pour les parents et pour la
réussite scolaire de nos enfants. J'invite tout le monde à se rappeler à
l'essentiel : la réussite scolaire de nos jeunes.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Sherbrooke.
Impact de l'implantation de la maternelle quatre ans
sur le réseau de services de garde
Mme Christine Labrie
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. On sait déjà que les maternelles quatre ans
universelles ne passent pas le test de
la réalité. Et, en plus de tout le reste, on apprend même que les enfants de
quatre ans posent déjà problème dans les autobus parce qu'ils
s'endorment puis qu'ils glissent en dessous des bancs. Pire, hier, en
commission, un des seuls spécialistes en faveur de la maternelle quatre ans,
Égide Royer, est venu défendre son point, et on a constaté que tout l'argumentaire repose sur un énorme raccourci
intellectuel. On nous dit qu'entre 2012 et 2017 les enfants sont devenus
plus vulnérables quand ils entrent à
l'école. C'est vrai. Mais M. Royer et M. le ministre concluent que c'est
parce qu'on n'offre pas les bons
services éducatifs et qu'on a besoin de la maternelle quatre ans. Mais d'où ça
sort, ce raisonnement-là? Nulle part.
Ça pourrait aussi bien être à cause de l'austérité ou de la réforme en santé,
qui sont justement arrivées pendant ces
années-là, et une experte l'a même dit, que l'austérité était l'explication la
plus probable. C'est un projet de milliards de dollars qui repose sur un
raisonnement absurde.
Avant
d'imposer une solution, on ne serait pas mieux de s'assurer d'avoir compris le
problème comme il faut?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, une des études, une des données probantes qui a été mise sur la table
par M. Égide Royer, c'est incontestable, c'est les résultats des évaluations
à cinq ans pour vérifier si les jeunes sont vulnérables ou pas à cinq ans dans
un des domaines de développement. De notre côté, au Québec, malheureusement, le
statu quo nous fait régresser. Ces dernières
années, il y a de plus en plus d'enfants qui arrivent à cinq ans vulnérables
dans un domaine de développement, et
ça, ça compromet leur réussite scolaire, rien de moins. Ce qui s'est passé en
Ontario, c'est que, dans les dernières années... Du côté francophone, ça
fait plus de 20 ans qu'ils font la maternelle quatre ans. Du côté anglophone,
s'inspirant de ce qui se fait de bon, ils l'ont développée. Le résultat, aux
mêmes évaluations qu'on a passées ici, au
Québec, et en Ontario, c'est qu'on a vu que la vulnérabilité des enfants qui
ont bénéficié de ce service-là a été
coupée de moitié. Ça, c'est les faits. On s'inspire de ce qui se fait de bon.
On ne fait pas copier-coller. On s'inspire de ce qui se fait de bon et
on l'interprète à notre façon pour offrir le meilleur à nos enfants. Qui
pourrait nous reprocher ça?
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Christine Labrie
Mme
Labrie : Ce n'était pas le
statu quo, ici, c'est les coupures. Hier, il y a une spécialiste qui est venue nous présenter la courbe de Heckman, qui nous apprend
que plus on investit tôt pour le bien-être de nos enfants, mieux c'est.
Et je vais le répéter pour le premier
ministre. 1 $ investi dans la première année de vie d'un enfant a plus de
retombées pour le bien-être de cet enfant-là et pour la collectivité que
1 $ investi n'importe quand dans la vie d'un enfant. Ça tombe bien. On a
un réseau de CPE ici qui a fait ses preuves et qui nous permet d'agir vraiment,
vraiment tôt.
Pourquoi on
n'investit pas au moins autant dans notre réseau de CPE que dans le projet de
maternelles quatre ans?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M.
Roberge : Ce tableau
présenté par ma collègue est très pertinent. J'étais content de le voir hier.
Ça renforce notre conviction puis
notre nécessité de travailler en équipe, Famille, Santé, Éducation. Ça renforce
encore une fois la légitimité de ce
que fait mon collègue de la Famille, qui fait un excellent travail, de ce que
fait mon collègue le ministre délégué
à la Santé, qui fait un excellent travail, pour qu'ensemble on arrive à
éliminer les vulnérabilités de nos enfants, pour qu'ils arrivent le plus préparés possible pour réussir leur
parcours scolaire en étant confiants, en étant appuyés, puis en ayant diagnostiqué ou repéré les
vulnérabilités, puis en commençant à agir tôt, parce que diagnostiquer pour
diagnostiquer, ça ne sert à rien. Il faut outiller nos gens à aider nos
jeunes.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.
Mme
Christine Labrie
Mme
Labrie : Merci. L'attitude du ministre rappelle de très, très mauvais
souvenirs aux Québécois. On a déjà vu
ça ici, un ministre qui veut imposer une réforme malgré tous les signaux
d'alarme. L'arrogance, le manque d'écoute des besoins du milieu, on
reconnaît ça.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
• (11 heures) •
Mme
Labrie : Le ministre nie la
réalité. Il refuse de voir de ce que les études nous disent et il persiste à
imposer sa promesse électorale. Et
pourtant tout nous montre qu'on pourrait utiliser beaucoup plus efficacement
les milliards qu'on veut investir en petite enfance.
M. le Président, est-ce que le ministre est en train
de devenir un Gaétan Barrette 2.0?
Des voix : ...
Le Président : Je m'excuse...
Des voix : ...
Le Président : Non, je
m'excuse...
Des voix : ...
Le Président : Non. Laissez-moi...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Du calme. Vous ne pouvez nommer les gens que par
le titre. Je vous demande votre calme.
Des voix : ...
Le Président : Du calme, s'il
vous plaît! Je vous rappellerai cependant...
Des voix : ...
Le
Président : Est-ce que
vous pouvez, s'il vous plaît, avoir quelques secondes d'attention? Nous n'avons pas terminé. Je rappellerai cette règle que l'on
connaît tous : nous ne pouvons nommer quelqu'un ici que par son
titre. Je pense que je suis tellement clair. M. le leader du...
M. Proulx :
Vous avez répondu, M. le Président.
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, je pense que tout un chacun, on se doit respect ici, en cette Chambre.
Tout le monde a été élu par ses concitoyens, et je pense que, dans ce cas-ci, la députée
de Sherbrooke devrait retirer ses propos et s'excuser auprès du député de
La Pinière. Je crois que ça serait tout à fait de bon ton que l'ensemble des collègues parlementaires se respectent ici, dans
cette Chambre.
Le
Président : Vous
connaissez la règle. Honnêtement, il ne faut pas blesser un collègue.
Les excuses seraient souhaitables. Mme la députée.
Mme Labrie : Je m'excuse auprès du député
de La Pinière.
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation, en réponse...
Des voix : ...
Le Président : Votre
attention, s'il vous plaît! On continue de belle façon.
M. Jean-François
Roberge
M.
Roberge : Merci bien. M. le Président, je veux rassurer les gens, on travaille en concertation. Les
250 classes qu'on ajoute au
réseau, parce qu'il y en a 394 en ce
moment, les 250 classes ont été choisies vraiment dans un esprit de
collaboration avec chacune des commissions
scolaires, qui nous ont dit qu'ils avaient les locaux nécessaires, les
enseignants nécessaires, les
professionnels nécessaires. C'est en travail de collaboration que les
250 places ont été ciblées et c'est de cette façon-là qu'on veut
travailler.
C'est pour
ça, je pense, que nos partenaires, comme l'Association des directions d'école,
comme l'Association des comités de
parents, comme les syndicats, avec qui on discute fréquemment, aiment le ton
qu'on utilise et la façon dont on débat et dont on gouverne.
Le Président : Question
principale, M. le député de LaFontaine.
Droits et libertés de la personne abordés dans le
projet de loi sur la laïcité de l'État
M.
Marc Tanguay
M. Tanguay :
Oui. M. le Président, la ministre de la Justice préside le Comité de
législation. À ce titre, elle doit comprendre
la portée et les conséquences de tous les projets de loi, et elle a la
responsabilité de s'assurer, à terme, de la cohérence législative et
juridique de toutes les lois du Québec. Elle doit en répondre en cette Chambre.
En regard,
par exemple, du projet de loi n° 21, sur une question toute simple d'application ou
pas de la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi, la ministre a refusé de
répondre à nos questions. Sur cet important enjeu, mardi, après plusieurs appels, la ministre s'est finalement
levée pour uniquement répondre, et je la cite : «...sur les concepts
juridiques, je ne peux intervenir ici, en Chambre...» Fin de la
citation.
La ministre
ne peut pas s'absenter d'un débat qui touche les droits et libertés des
Québécois, Charte des droits et libertés pour laquelle elle est la
ministre responsable de l'application, elle est la gardienne.
Pourquoi a-t-elle abdiqué son rôle?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, le projet de loi n° 21, la Loi sur la laïcité de l'État,
qu'est-ce que ça fait, le projet de
loi? Ça vise à faire en sorte d'insérer, premièrement, dans le corpus
législatif la laïcité de l'État, mais, deuxièmement, de l'inscrire dans la Charte des droits et
libertés de la personne, le fait qu'au Québec la laïcité, c'est une valeur
fondamentale de la société québécoise.
Ça me
surprend que le Parti libéral ne soit pas en accord avec cela, M. le Président,
le fait de faire en sorte que tous les
citoyens et toutes les citoyennes québécois soient traités équitablement, peu
importent leurs appartenances religieuses,
peu importe leur foi, peu importe leur liberté de conscience, M. le Président.
On place toutes les religions sur le même pied d'égalité.
Aussi, M. le Président, pour certains postes
particuliers en situation d'autorité, durant les heures de travail, certaines
personnes ne pourront pas porter de signes religieux. Ça s'applique autant aux
femmes qu'aux hommes. Ça s'applique à tout
le monde et à toutes les religions de la même façon. Même chose, M. le
Président, le service public à visage découvert et la réception de service à
visage découvert pour des motifs de sécurité et d'identification. Est-ce que
le député de LaFontaine est en désaccord avec ce qu'on fait dans le cadre du
présent projet de loi?
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M.
Tanguay : Alors, M. le Président, si c'est le leader qui se
lève sur ma prochaine, ça va être gênant. Je parle de quoi? Je parle de la charte des droits et
libertés des Québécoises et Québécois, c'est la ministre de la Justice qui est
responsable. Je parle de la Loi sur l'accès
à l'égalité en emploi, article 34, c'est la ministre de la Justice qui est
responsable; lorsque la ministre de
la Justice dit : À toutes les fois que vous allez poser une question qui
implique un concept juridique, ne venez pas me voir, je ne répondrai
pas.
M.
le Président, si elle ne répond pas sur les concepts juridiques, qu'est-ce
qu'elle fait assise ici un micro devant elle?
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre de
l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, les parlementaires peuvent poser les questions qu'ils
veulent en cette Chambre. Le député
de LaFontaine décide d'aller dans ce sens-là et dans l'expression qu'il
choisit. Une chose est sûre, c'est que nous,
on travaille en équipe, ici, au gouvernement du Québec, et le projet de loi
n° 21 fait en sorte de clarifier le concept de laïcité de l'État
parce que, dans nos lois, M. le Président, ce n'était pas prévu.
Souvent,
il y a des politiciens, il y a des formations politiques qui disent que l'État
québécois, il est laïque. Bien, M. le
Président, ce n'était pas vrai jusqu'au dépôt du projet de loi n° 21. Le
député de LaFontaine devrait être fier qu'on inscrive la laïcité de l'État dans nos lois et qu'on puisse tourner la
page sur ce débat qui a divisé le Québec pendant plus de 10 ans.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
M. le Président, une personne, ça ne fait pas une équipe. C'est juste le leader
qui se lève pour répondre à nos questions.
Le collègue de Jean-Lesage, le 1er mai dernier, a posé la question
suivante à la ministre de la Justice :
Est-ce que vous considérez que la Charte des droits et libertés de la personne
est un élément essentiel de l'identité québécoise?
Très facile. Réponse : Je n'ai pas d'opinion ou de réponse à formuler à
cette question-là. Alors, M. le Président, on ne peut pas lui parler de droits. On ne peut pas lui parler de
libertés. On ne peut pas lui parler de concepts juridiques.
Qu'est-ce qu'elle
fait assise ici, en cette Chambre?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
Des voix :
...
Le Président : Votre attention à tous, s'il vous plaît! La parole
n'appartient qu'au ministre de l'Immigration. S'il vous plaît!
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, le projet de loi n° 21
vise à s'assurer de séparer l'État des religions, de modifier la Charte des droits et libertés de la personne
pour inclure le concept de laïcité de l'État. Est-ce que le député de
LaFontaine considère que ce n'est pas important, la laïcité de l'État,
autant que l'égalité entre les femmes et les hommes?
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle.
M.
Proulx : M. le Président, c'est la troisième occasion qu'a le leader
du gouvernement de prendre la place de la ministre de la Justice pour répondre. Vous connaissez l'article 79.
On lui a posé une question très simple. À micro fermé, la ministre a dit : Qu'est-ce que je fais
ici? Je fais du temps. Bien là, le même temps, là, le temps qui reste,
peut-être qu'on pourrait lui donner, M. le Président.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader, veuillez poursuivre.
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est inscrit à notre
charte. La laïcité, c'est tout aussi
important, M. le Président. Alors, ce qu'on fait, c'est qu'on modifie la loi,
la Charte des droits et libertés de la
personne, pour faire en sorte d'ériger en termes de valeur fondamentale la
séparation entre l'État et les religions. Ça m'étonne que le Parti
libéral soit contre ça, d'autant plus qu'il y a plusieurs personnes chez vous
qui sont d'accord.
Le
Président : Question principale, M. le député de Nelligan. Vous
êtes le seul à avoir la parole ici en ce moment.
Financement de l'innovation
en région
M. Monsef
Derraji
M.
Derraji : Merci, M. le Président. Je ne pense pas devoir rappeler le
nombre de fois que j'ai intervenu en cette Chambre pour m'assurer que la ministre soit consciente de la force
d'impact que pouvait représenter le Réseau national des pôles régionaux d'innovation. L'accueil que
j'ai reçu de la part de la ministre était une fin de non-recevoir. Eh bien,
M. le Président, jeudi dernier, nous avons
su pourquoi. La ministre, pour des raisons politiques, a préféré mettre la
hache dans un modèle, un modèle bénéfique pour les régions du Québec et
qui a fait ses preuves, en France notamment. Actuellement,
le Digihub de Shawinigan, le pôle national d'innovation par excellence, est en
France. Malheureusement, la décision
insensée de la ministre a pour conséquence que l'ensemble des régions du Québec
ne pourront pas profiter de ce partenariat et de leur expertise.
M. le
Président, ma question à la ministre est simple : Pourquoi mettre à
mal le développement économique des régions pour des raisons politiques
qui ne trouvent aucune justification d'un point de vue économique?
Le
Président : Mme la ministre des Affaires municipales? Non. Mme
la ministre du Développement régional.
Mme Marie-Eve
Proulx
Mme Proulx
(Côte-du-Sud) : Merci, M. le Président. J'ai presque complété ma
tournée des régions au Québec. J'ai
pu être à même de constater tout le dynamisme et la volonté des régions de
prendre leur développement en charge, chose que l'ancien gouvernement
n'a jamais faite.
Donc, ce qu'on
a fait cette semaine, c'est de mettre fin à une centralisation du mouvement sur
le développement régional. Ce qu'on
veut, c'est respecter les spécificités de chacune des régions. Donc, on va
continuer d'investir dans chacun des
pôles, dans chacune des régions, puis l'argent qui était prévu au niveau
national va être redistribué en région. Il ne sera pas centralisé, chose
que l'ancien gouvernement faisait.
Qui est
politique dans cette histoire? C'est l'ancien gouvernement, puisqu'en
février 2018 ils ont décidé qu'ils allaient créer les pôles régionaux d'innovation comme stratégie
électoraliste pour vite se sauver la face face aux régions. C'est inacceptable, cette attitude-là. Nous, ce
qu'on fait, c'est réparer les pots cassés, on réinvestit, on écoute, on
développe des partenariats avec les
acteurs des régions pour travailler avec eux pour vraiment qu'on investisse
dans les régions puis qu'on occupe
notre territoire au Québec, qu'on s'assure que même la ruralité... — est-ce qu'ils savent c'est quoi, la ruralité
au Québec? — donc
pour que même la ruralité soit représentée...
• (11 h 10) •
Le Président : En
terminant...
Mme Proulx (Côte-du-Sud) : ...puis
qu'il puisse y avoir des concertations qui se fassent pour assurer un
développement économique cohérent au Québec.
Le Président : Cela met fin à
la période de questions et de réponses orales.
Votes
reportés
Motion
proposant que l'Assemblée reconnaisse l'importance du crédit d'impôt
RénoVert et qu'elle demande au gouvernement sa reconduction
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Nous en sommes maintenant à la rubrique des votes reportés et, comme annoncé précédemment,
nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le député
de Robert-Baldwin débattue hier aux affaires inscrites par les députés de
l'opposition, qui se lit comme suit :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance du crédit d'impôt RénoVert pour
la rénovation domiciliaire et sur le plan de l'efficacité énergétique;
«Qu'elle
demande au gouvernement caquiste de revenir sur sa décision et de reconduire
dès maintenant le crédit d'impôt RénoVert pour l'année
financière 2019-2020.»
Et que les députés en faveur de cette motion
veuillent bien se lever.
Le
Secrétaire adjoint : M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon),
M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette
(La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce),
M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard
(Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne),
M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols
(Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo
(Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent),
M. Ciccone (Marquette).
M. Nadeau-Dubois
(Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont),
Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla
(Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Dorion (Taschereau),
M. Zanetti (Jean-Lesage).
M. Bérubé (Matane-Matapédia),
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard
(Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette),
M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).
Mme Fournier
(Marie-Victorin).
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Maintenant, que les députés contre cette
motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint :
M. Legault
(L'Assomption), M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay),
Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy
(Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency),
Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour),
M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel
(Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse),
M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson),
M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre
(Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles),
M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour
(Abitibi-Est), Mme Proulx
(Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
Mme Girault (Bertrand),
M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud),
M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand
(Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme),
Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré),
M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte
(Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin
(Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau
(Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin
(Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest),
M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin
(Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean),
Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean),
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava),
M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal
(Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y
a-t-il des abstentions? Pour le résultat du vote, M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 44
Contre : 65
Abstentions :
0
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est rejetée. Oui, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx : Je sais que le vote est terminé, mais il y a
deux élus qui sont sur le côté. Est-ce
que c'est possible d'enregistrer après coup leurs votes, même si je comprends que le vote a été donné? Avec votre permission, j'en vois de
deux formations politiques, le député de D'Arcy-McGee de ma...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Vous savez qu'avec un consentement nous pouvons tout. Alors, y a-t-il consentement pour permettre l'enregistrement de ces deux
votes? Consentement. Alors, vous
pouvez prendre place. Alors, je comprends que c'est un vote en faveur de
cette motion, de la part des deux députés?
Le Secrétaire
adjoint : M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve).
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, pour le résultat du vote, M. le secrétaire
général.
Le Secrétaire : Pour : 46
Contre : 65
Abstentions :
0
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, la motion est rejetée.
Adoption du projet de loi n° 7
Et
nous allons maintenant procéder au vote sur la motion de Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux proposant
que le projet de loi n° 7, Loi concernant certaines conditions de travail
applicables aux cadres du réseau de la santé et des services sociaux,
soit adopté.
Et que les députés en
faveur de cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption),
M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay),
Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson),
M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly),
Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque
(Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon),
Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé
(La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete
(Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est),
Mme Proulx (Berthier),
Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
Mme Girault (Bertrand), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud),
M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond),
Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger
(Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle),
M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois),
Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque
(Chapleau), M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais
(Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin
(Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean),
Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean),
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava),
M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal
(Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, que les députés contre
cette motion veuillent bien...
Des voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Pour? Pardon. Excusez-moi
Le Secrétaire adjoint :
M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon),
M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel),
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine),
Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont),
Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun),
Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil),
Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau),
M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger),
Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone
(Marquette).
M. Nadeau-Dubois
(Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont),
Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion),
Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti
(Jean-Lesage).
M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Ouellet
(René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis),
M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault
(Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).
Mme Fournier
(Marie-Victorin).
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il
des députés contre cette motion ou des abstentions? Alors, pour le
résultat du vote, M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 111
Contre :
0
Abstentions :
0
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est adoptée, et,
en conséquence, le projet de loi n° 7 est adopté.
Motions
sans préavis
Nous en
sommes maintenant à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de
nos règles et de l'ordre de présentation, je vais céder la parole à Mme
la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
• (11 h 20) •
Mme
Lessard-Therrien : Merci, Mme la Présidente. Je demande le
consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la députée d'Acadie, la députée
de Marie-Victorin et le député de Chomedey :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse que le désastre survenu à
Sainte-Marthe-sur-le-Lac a été provoqué par le bris d'une
infrastructure, ce qui lui confère un caractère exceptionnel;
«Qu'elle
prenne acte qu'une nouvelle cartographie en préparation par la Communauté
métropolitaine de Montréal place le territoire de cette municipalité en
zone inondable;
«Que l'Assemblée
nationale demande au gouvernement d'offrir à tous les sinistrés de Sainte-Marthe-sur-le-Lac la possibilité
de quitter leur propriété, et ce, en bénéficiant d'un dédommagement suffisant
tenant compte de la valeur foncière de leur propriété avant les inondations du
printemps 2019.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Y a-t-il consentement pour débattre de
cette motion?
M.
Schneeberger : Pas
de consentement.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement. Maintenant, pour la prochaine motion, je vais
reconnaître un membre du troisième groupe d'opposition, et ce sera Mme la
députée de Duplessis.
Rappeler
au gouvernement l'urgence de compléter la route 138 en
Basse-Côte-Nord en y associant les sommes et l'échéancier requis
Mme
Richard : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement des membres de
cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de La Pinière, la députée
de Mercier, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin,
la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale rappelle au gouvernement qu'encore aujourd'hui, aucune route
terrestre ne relie la Basse-Côte-Nord au reste du Québec;
«Qu'elle lui rappelle également que les élus,
les chefs autochtones ainsi que les maires et mairesses de la Côte-Nord sont
unanimes : il est urgent de compléter la route 138 jusqu'à
Blanc-Sablon;
«En ce sens,
qu'elle demande au gouvernement de fournir rapidement un échéancier ambitieux
associé aux sommes requises pour terminer la route 138 dans un
délai raisonnable.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Y a-t-il consentement pour débattre de
cette motion? Alors, M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M.
Ouellet : Oui, merci, Mme la
Présidente. Je vous demanderais d'appeler le vote par appel nominal, s'il vous
plaît.
Mise
aux voix
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, nous sommes
prêts pour le vote, et que les députés en faveur de cette motion
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Bérubé
(Matane-Matapédia), M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski),
Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon
(Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine).
M. Jolin-Barrette
(Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel),
Mme Chassé (Châteauguay), Mme McCann
(Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville),
M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée
(Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly),
Mme LeBel (Champlain),
M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance
(Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne
(Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost),
M. Lefebvre (Arthabaska), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete
(Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Charest (Brome-Missisquoi),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Boulet (Trois-Rivières),
Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin
(Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu),
M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin
(Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré),
M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte
(Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid
(Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau),
M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais
(Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin
(Argenteuil), M. Girard
(Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux
(Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe
(Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé),
M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin),
M. Barrette (La Pinière),
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun),
Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac),
Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles),
Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier),
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo
(Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent),
M. Ciccone (Marquette).
M. Nadeau-Dubois
(Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont),
Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion),
Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti
(Jean-Lesage).
Mme Fournier
(Marie-Victorin).
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Maintenant, y a-t-il des députés contre cette motion ou des abstentions?
Alors, M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.
Le
Secrétaire : Pour : 108
Contre :
0
Abstentions :
0
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien, la motion est
adoptée.
Pour
la prochaine motion, je vais reconnaître un membre du groupe formant le
gouvernement, et ce sera M. le député de Rousseau.
M.
Thouin : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi d'abord de saluer les
membres du conseil d'administration ainsi que le P.D.G. du CEFRIO, qui
sont avec nous aujourd'hui.
Je
demande le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion suivante
conjointement avec le député de Rosemont, le député de René-Lévesque, le
député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :
«Que l'Assemblée
nationale souligne l'apport
inestimable du CEFRIO et le rôle clé qu'il joue depuis plus de 30 ans
en matière de développement économique, de démocratisation des technologies numériques ainsi
que dans l'avancement de l'innovation sociale au Québec;
«Que l'Assemblée
[nationale], au moment où le gouvernement du Québec s'apprête à enclencher une transformation numérique sans précédent,
souligne l'importance des approches collaboratives et transversales qui
visent à optimiser les services numériques de proximité;
«Qu'elle salue son
rôle de pionnier en matière de soutien à l'appropriation et à la valorisation
des services numériques par les milieux publics et privés ainsi qu'auprès des
partenaires de l'État.» Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Avant de demander s'il y a
consentement pour débattre de cette motion, je crois que M. le leader du
troisième groupe d'opposition aimerait intervenir.
M.
Nadeau-Dubois : Oui. Il y a probablement eu une erreur de
communication, mais simplement aviser que le député de Rosemont n'est
pas conjoint sur la motion. C'est des choses qui arrivent.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Oui. M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
Pas de consentement.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je n'ai même pas eu besoin
de le demander. Alors, il n'y a pas de consentement.
Nous
allons maintenant passer à la prochaine motion sans préavis, et ce sera au tour
de Mme la députée de Vaudreuil de présenter la motion.
Mme Nichols :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je sollicite le consentement de cette
Assemblée afin de présenter la motion
suivante conjointement avec la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, le député de Chomedey et la
députée de Marie-Victorin :
«Que l'Assemblée
nationale rappelle que plus de 10 000 personnes ont été évacuées dans
la foulée des crues printanières [...] 2019;
«Qu'elle rappelle que, faute d'entente avec la
Croix-Rouge et le gouvernement du Québec, et [ce,] contrairement à 2017, les
municipalités doivent prendre des ententes particulières avec la Croix-Rouge
pour assurer des services aux personnes sinistrées;
«Qu'elle
rappelle que les coûts d'hébergement, d'alimentation et de prise en charge de
ces personnes représentent des dépenses et une pression logistique
importante pour les municipalités sinistrées du Québec;
«Qu'elle
demande au gouvernement caquiste de prendre en charge l'entièreté des dépenses
liées à la logistique de l'hébergement et de l'alimentation des
personnes victimes des crues printanières [...] 2019.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M.
Schneeberger :
Il n'y a pas de consentement.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement.
Maintenant, je vais
céder la parole à M. le leader du gouvernement.
Proposer que l'Assemblée se réunisse le lundi 3 juin 2019,
à compter de 13 h 40
M. Jolin-Barrette : Oui, Mme la Présidente. Conformément à
l'article 21 de notre règlement, je présente la motion suivante :
«Que l'Assemblée se
réunisse le lundi 3 juin 2019, à 13 h 40.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Est-ce que cette
motion est adoptée? M. le leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien Proulx
M.
Proulx : Oui, Mme la Présidente. Je pense que, vu la nature de cette
motion, on peut faire quelques représentations, puisque c'est une motion qui pourrait être contestée. J'ai quelques
représentations à faire, Mme la Présidente, je pense que je ne serai pas
le seul, mais je vais parler pour moi et ma formation politique d'entrée de
jeu.
D'abord,
Mme la Présidente, sur le fond de la motion, sur cette convocation, c'est la
prérogative du gouvernement, et je ne
la conteste pas. Nous serons ici, à l'Assemblée nationale, lundi pour
travailler au salon bleu et en commission lorsque les commissions seront convoquées. C'est sur la forme, Mme la
Présidente, que j'ai des questions, interrogations, non pas sur la motion, parce que c'est le moyen
procédural pour le faire, mais c'est sur ce qui devrait accompagner une
telle motion.
Vous savez,
Mme la Présidente, je l'ai dit à plusieurs occasions puis je vais le répéter,
pour le succès d'une bonne collaboration,
il y a des ingrédients. C'est un peu comme faire de la pâtisserie, il y a des
ingrédients qui sont essentiels, sinon
le gâteau, il ne lèvera pas. Dans le cas actuel de notre collaboration, il
manque, Mme la Présidente, je pense, un ingrédient essentiel. Il y en a qui pourraient s'améliorer, de tous
bords tous côtés, mais il y a un ingrédient qui, pour moi, est
essentiel, qui n'est pas présent, c'est la prévisibilité pour de la
préparation.
J'ai entendu
et on m'a rapporté... pardon, je ne l'ai pas entendu, on m'a rapporté que le
leader du gouvernement, pour donner
un exemple, tout à l'heure, à la population, a dit : Les Québécois, ils
travaillent le lundi, l'Assemblée peut travailler
le lundi. D'abord, Mme la Présidente, s'il y a quelqu'un ici, dans cette
Assemblée, qui pense qu'un député, ça ne travaille pas le lundi quand ce n'est pas ici, sincèrement, c'est
malheureux, je trouve, ces propos-là qui sont imagés. Je comprends que c'était une image pour faire
comprendre que ce n'était pas inhabituel ni extraordinaire de convoquer le
lundi, je l'entends. Maintenant, Mme
la Présidente, vous le savez, vous êtes députée, le leader du gouvernement
l'est également, les députés, ça travaille souvent, presque tout le
temps. Ça, je pense que c'est très clair.
• (11 h 30) •
Deuxièmement,
les Québécois qui vont aller travailler lundi, ils savent ce qu'ils vont faire
lundi. Moi, je ne suis pas capable de
dire à mon groupe parlementaire ce qu'ils vont faire lundi, j'ai de la misère à
savoir ce qu'on va faire demain puis
je ne suis même pas sûr de l'horaire de cet après-midi. Alors, sincèrement, Mme
la Présidente, comment voulez-vous vous préparer adéquatement si on n'a
pas l'ensemble des informations pour pouvoir travailler?
Vous
souhaitez, les gens souhaitent, Mme la Présidente, des débats qui sont étoffés,
veulent que les gens ici prennent la parole de façon constructive, ils
veulent qu'on débatte d'arguments de fond et qu'on laisse de côté la forme,
pour reprendre des exemples du leader du gouvernement. Alors, j'en appelle à cette collaboration qui doit être présente. Il
faut, Mme la Présidente, avoir ce temps nécessaire pour se préparer.
Les collègues, ils viennent de l'extérieur pour la grande
majorité d'entre eux. On n'est pas nombreux à habiter Québec, Mme la Présidente. Ce n'est pas le cas de ma formation
politique seulement, c'est le cas de l'ensemble des députés ici, à l'Assemblée
nationale.
Alors là, les
gens savent qu'ils doivent être ici lundi. Parfait, nous y serons pour
travailler, Mme la Présidente.
Mais j'invite le collègue
à être le plus prévoyant possible avec les autres parce que
lui, il le sait, ce qu'il va faire lundi. Il sait ce qu'il veut faire demain. Il sait ce qu'il va faire cet après-midi.
Mais nous, Mme la Présidente, on ne le sait pas. Alors, si on ne peut pas bien se préparer, si on
ne peut pas se préparer adéquatement, bien, on ne peut faire un travail à la hauteur des attentes des gens. C'est vrai pour l'opposition officielle. C'est vrai pour les autres groupes d'opposition. C'est aussi vrai pour le gouvernement. Alors, ça fait partie de cette bonne collaboration. Ça fait partie
des éléments essentiels pour qu'on puisse travailler avec tout le
respect nécessaire pour notre institution. Le leader du gouvernement l'a dit à plusieurs
occasions, c'est important, cette institution-ci.
Bien, il faut en faire la démonstration. Il faut y vivre dans une vraie
cohabitation.
Alors, qu'il nous convoque lundi, pas de problème
pour moi. Que les commissions siègent le lundi et le vendredi, on a déjà fait des représentations à cet égard-là.
Nous sommes ici pour travailler, mais maintenant il faut de la disponibilité,
de la préparation et du sérieux dans notre collaboration. Voilà.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
leader. Maintenant, je cède la parole à M. le leader du deuxième groupe
d'opposition.
Des voix : ...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Évitez de vous interpeler d'un côté et de
l'autre, s'il vous plaît! M. le leader.
M. Gabriel
Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois :
Je ne répéterai pas ce que le leader de l'opposition officielle a dit. Je vais
ajouter trois choses.
La première,
les motivations du gouvernement dans le dépôt de cette motion-là, elles sont
dures à comprendre et surtout elles ne nous sont pas annoncées. Donc, on
nous dit : On va siéger lundi. C'est, en effet, la prérogative du gouvernement. Mais il n'y a aucun des trois partis
d'opposition qui sait dans quel objectif, pour faire avancer quels projets
de loi et surtout qu'est-ce qui justifie une
telle mesure qui sort de l'ordinaire. Donc, il y a un enjeu ici de savoir
quelles sont les motivations du gouvernement. On aimerait bien les
connaître.
Deuxièmement,
cette décision... bien, cette motion du gouvernement, je me permets de dire
qu'elle a un aspect relativement
paradoxal dans la mesure où, si le salon bleu n'était pas convoqué lundi, les
commissions pourraient siéger de
14 heures à 18 heures, donc faire leur travail, et, comme le souhaite
et le répète souvent le leader du gouvernement, faire avancer les projets de loi. En appelant le salon bleu, on ampute
1 h 30 min sur le travail des commissions. Donc, très dur à comprendre en quoi ça va faire cheminer
plus vite les projets de loi si les commissions commencent après les affaires courantes plutôt que simplement à
14 heures. Donc, on va perdre du temps de commission. Je me demande en
quoi ça aide l'avancement de l'agenda législatif du gouvernement.
Et, troisième élément, puis c'est
peut-être le plus important, Mme la Présidente, je veux revenir également sur
cette déclaration du leader du gouvernement
qui nous dit que, si les gens ordinaires travaillent, si les Québécois,
Québécoises travaillent le lundi, bien, les parlementaires devraient le faire
aussi. Moi, quand j'entends cette déclaration-là, je me dis : Il y a deux interprétations
possibles. La première, c'est que le ministre ne travaille pas le lundi, et ça,
ça m'apparaît une interprétation complètement loufoque parce que je suis
convaincu qu'il travaille le lundi.
La
deuxième interprétation, c'est : Donc, il juge que, si on n'est pas au
salon bleu, on ne travaille pas. Et ça, ça m'apparaît une déclaration vraiment problématique, qui me semble
diminuer la valeur du travail des députés lorsqu'ils ne sont pas au salon bleu, notamment en
circonscription. Je me permets même de me tourner vers les députés de la
majorité gouvernementale en me
disant : Comment interprètent-ils le fait que le leader du gouvernement
leur dit : Bien, venez lundi pour
travailler? Donc, quand ils ne sont pas ici, ils ne travaillent pas. Je veux
dire, ce n'est pas juste un problème pour les oppositions. Ça me semble
être une déclaration problématique pour l'ensemble des députés. On peut même
faire l'hypothèse que, pour certains
députés, leur circonscription, ça nécessite de travailler aussi fort, voire
plus fort lorsqu'ils sont en circonscription que lorsqu'ils sont au
salon bleu.
Alors,
je pense que c'est une très mauvaise manière de mettre la table, pour cette
motion-là et pour les débats de lundi,
que de dire que c'est pour travailler, sous-entendant implicitement que, si ce
n'était pas le cas, on ne travaillerait pas.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
leader. Maintenant, je cède la parole à M. le leader du troisième groupe
d'opposition.
M. Martin
Ouellet
M. Ouellet : Merci, Mme la Présidente. Je serai très bref, mais je m'inscris en collaboration avec les deux autres leaders sur la discussion que nous avons sur
la pertinence d'obtenir cette motion. Oui, c'est la prérogative du gouvernement. Mais j'ai les mêmes préoccupations quant au fait que, ce lundi, nous
serons ici. Et je suis convaincu que les 125 députés ici ont dû annuler des rencontres, des rendez-vous, des groupes de citoyens qu'on devait rencontrer dans nos circonscriptions.
Mme la Présidente, il ne reste que deux semaines à notre calendrier parlementaire. On a beaucoup de pression en circonscription justement
pour attacher les dernières ficelles avant que tout le monde reparte dans
leur circonscription, que ça soit plus difficile, dans certains cas,
d'avoir accès aux différents cabinets ministériels pour régler certaines problématiques qui
causent, dans certains cas, des préjudices et qui indisposent nos concitoyens
et concitoyennes.
Mme la Présidente, ma formation politique est beaucoup aussi dans l'Est du Québec, et vous
comprendrez que ces déplacements-là,
aussi, nous amènent, dans certains cas, à ne pas juste canceller la journée de
lundi, mais à être aussi peut-être sur la route dimanche pour être prêts
dès lundi.
Alors,
mon commentaire sera le dernier et le suivant : J'aimerais
juste savoir qu'est-ce que j'ai à dire aux gens que je vais appeler aujourd'hui. Pourquoi
je dois être à Québec lundi? Qu'est-ce
qu'il y a de si urgent, alors que la
session intensive commence dès la
semaine prochaine? Nous allons siéger tard en soirée jusqu'à
aller vendredi. Donc, j'aimerais avoir
la réponse rapidement parce
que je vais faire les appels pour
canceller tout ça. Je veux savoir pourquoi, quelle est l'urgence et quel en sera le
sujet. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader du troisième
groupe d'opposition. Maintenant, je cède la parole à M. le leader du gouvernement.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, plusieurs
choses ont été dites par mes collègues. Et, Mme la Présidente, j'ai l'impression de vivre un bal de
l'hypocrisie. Mme la Présidente...
Des voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant! M. le leader, vous avez beaucoup d'expérience en cette Chambre et vous
savez très bien que c'est un mot inapproprié que vous venez
d'utiliser. Inapproprié. Alors, est-ce
que vous allez le retirer?
Des voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bien, vous connaissez les règles, M. le leader. Alors,
j'aimerais, s'il vous plaît...
Vous avez...
Des voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Premièrement, assoyez-vous, s'il vous plaît.
Vous connaissez nos
règles, M. le leader. Vous avez un cinq minutes, vous disposez d'un temps de
parole de cinq minutes. Alors, nous sommes
disposés à vous entendre, mais j'espère que vous allez choisir les bons termes
et je vous demande de retirer le mot que vous venez de prononcer.
M. Jolin-Barrette : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie.
M. Jolin-Barrette : ...démonstration de ce que j'affirme, Mme la Présidente. À la fois le leader de l'opposition
officielle, à la fois le leader du deuxième
groupe d'opposition ont souligné
qu'ils n'étaient pas informés. Mme la
Présidente, hier, leurs chefs
de cabinet respectifs ont été informés de l'horaire de la semaine prochaine jusqu'à
jeudi prochain, Mme la Présidente. Avez-vous entendu la même chose que moi? Mme la Présidente, lorsqu'on affirme des choses en cette Chambre et que ce n'est pas vrai, ça m'amène des questionnements
parce qu'ils ont l'information et ils disent à la population québécoise : On n'est pas au courant. Or, c'est faux, Mme la Présidente, ça a été envoyé par courriel. Ayez l'honnêteté de le dire.
Mme la Présidente, vous ne trouverez personne en cette Chambre qui va défendre plus que moi le
travail des députés et pour m'assurer
que les députés soient outillés dans leur fonction. Le rôle du député, c'est de
représenter sa population, c'est d'être législateur et c'est d'être
contrôleur de l'action gouvernementale. Deux des trois rôles s'exercent principalement ici. On a un calendrier, on a un règlement qui permet de siéger
jusqu'à la fin de la session, au 14 juin, le lundi. La population québécoise nous a tous élus
pour qu'on améliore le Québec, pour qu'on modernise le Québec. Et ça se fait, Mme la Présidente, notamment, au-delà des politiques
gouvernementales, au-delà de l'argent qu'on dépense,
au-delà des budgets, ça se passe...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, j'ai cinq minutes, je crois.
Des voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Oui, M. le leader du troisième groupe
d'opposition.
M. Nadeau-Dubois : ...en fait, je vous demande de juger si le leader
du gouvernement a induit la Chambre en erreur dans la mesure où il mentionne que nous
avons reçu, disons... appelons ça le menu de la journée de lundi. C'est
vrai dans le cas des commissions parlementaires, mais ce n'est pas vrai dans le
cas des travaux au salon bleu. Or, les interventions
des leaders de l'opposition portaient spécifiquement sur les travaux
au salon bleu, et, de ça, nous n'avons pas reçu l'horaire.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, M. le leader, vous pouvez poursuivre.
• (11 h 40) •
M. Jolin-Barrette : ...Mme
la Présidente. Sur la question
rattachée au travail des députés, les députés travaillent tout le temps, Mme la Présidente, vous le savez comme moi. Mais le rôle de législateur
est fort important. Et, si on veut avancer
les travaux parlementaires ici, bien, ça se passe à l'Assemblée nationale. Les Québécois s'attendent à ce qu'on vote des lois, et
nous le ferons.
D'ailleurs,
Mme la Présidente, j'invite à ce que tous les collègues aient la
réflexion ici, dans cette Chambre, dans toutes les formations politiques,
sur les outils que les parlementaires doivent avoir à leur disposition pour
faire leur travail de député adéquatement et
les ressources au soutien de leur travail. Je crois que c'est pertinent que
tous les députés aient les moyens
d'exercer leurs fonctions de député parce
que la majorité des députés et, je
crois, même la totalité des députés se dévouent corps et âme à leurs
électeurs, à la nation québécoise et à l'adoption des lois québécoises pour
qu'on puisse les adopter.
Mme
la Présidente, l'objectif est de faire en sorte qu'on puisse, d'ici le
14 juin, faire avancer différents projets de loi : la loi sur l'immigration, la Loi sur la laïcité, la loi
sur le cannabis, la loi sur le taxi. Alors, Mme la Présidente, on donne
toujours l'horaire à l'avance, et les leaders...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Un instant. M. le leader de l'opposition
officielle.
M. Proulx :
Oui, très rapidement, ça sera une question de règlement, Mme la Présidente. Je
m'inscris dans la même veine que l'a fait le
collègue de la deuxième opposition. La question qui vous a été posée et la
réponse qu'il doit nous donner,
c'est : Avons-nous reçu hier, ce matin, dans la nuit, l'horaire du salon
bleu? La réponse, c'est non, Mme la Présidente.
Alors,
il reste 30 secondes. Je ne le coupe pas par plaisir, c'est parce que, si
je le fais à frais, son cinq minutes est terminé. Il lui reste
30 secondes pour dire la vérité.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : M. le leader du gouvernement, il vous reste
encore 30 secondes.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, on vote sur la motion, ça va
nous faire plaisir d'envoyer l'horaire de lundi, mais ayez la décence de
dire aux Québécois que vous avez l'horaire plus d'une semaine à l'avance des
commissions parlementaires.
Et
autre point, Mme la Présidente, le député de Gouin nous disait tout à
l'heure : Écoutez, je ne comprends pas, on coupe du temps de commission. Mais savez-vous quoi, Mme la
Présidente? Pour le bénéfice du député de Gouin, le processus législatif, ce n'est pas juste les
commissions parlementaires. Après autant d'années ici, il devrait le savoir,
hein? Présentation, adoption des projets de loi, l'étude détaillée,
prise en considération, adoption finale, puis ensuite le lieutenant-gouverneur.
C'est ça, le processus législatif.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Ceci
met fin à ce débat.
Mise
aux voix
Alors, cette motion
est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Adopté. Très bien.
Avis
touchant les travaux des commissions
Nous en sommes
maintenant à la rubrique des avis touchant...
Des voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : S'il vous plaît! Nous n'avons pas terminé.
Alors, nous en sommes
maintenant aux avis touchant les travaux des commissions, et je vais céder la
parole à M. leader adjoint du gouvernement
et demander aux membres qui doivent quitter le salon bleu de le faire en
silence, s'il vous plaît.
M. Schneeberger :
Oui, alors, Mme la Présidente, sur un air un peu plus léger, j'avise cette
Assemblée que la Commission des relations avec les citoyens poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à
répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration
réussie des personnes immigrantes,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à
18 heures, à la salle du Conseil législatif;
La Commission de
l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi
n° 16, Loi visant principalement
l'encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le
remplacement de la dénomination de la
Régie du logement et l'amélioration de ses règles de fonctionnement et
modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine
municipal, aujourd'hui, après
les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 heures,
à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission de la culture et de
l'éducation poursuivra les consultations particulières et auditions publiques
du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur
l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés
de 4 ans, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à
18 h 15, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission de la santé et des
services sociaux poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 2, Loi
resserrant l'encadrement du cannabis,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à
18 heures, à la salle des Premiers-Ministres, ainsi que le vendredi
31 mai 2019, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : C'est moi qui vous remercie, M. le leader
adjoint du gouvernement. Alors, y
a-t-il consentement pour déroger à l'article 143 du règlement, concernant
l'horaire des travaux des commissions? Il y a consentement? Très bien.
Maintenant, pour ma part, je vous
avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance
de travail aujourd'hui, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine, à 13 heures pour une durée d'environ
45 minutes, afin de statuer sur
la possibilité que la commission réalise le mandat conféré par la Loi sur les
établissements d'enseignement de niveau universitaire puis, à partir de 13 h 45 ou dès la fin de la
première séance de travail jusqu'à 14 h 45, afin d'organiser le
mandat d'initiative portant sur l'avenir de l'information;
Je vous avise
également que la Commission de l'aménagement du territoire se réunira en séance
de travail aujourd'hui, de 13 heures à 13 h 45, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, afin de procéder à l'organisation des travaux de la
commission.
Renseignements
sur les travaux de l'Assemblée
Nous
en sommes maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux
de l'Assemblée, et, s'il n'y a pas de demandes
de renseignements, je vous rappelle
que, lors de l'interpellation prévue pour demain, vendredi 31 mai 2019,
M. le député de Laurier-Dorion s'adressera à Mme la ministre des
Affaires municipales et de l'Habitation sur le sujet suivant : L'absence du plan global du
gouvernement caquiste pour lutter contre la crise du logement.
Affaires
du jour
Maintenant,
la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer
aux affaires du jour. Et je vais céder la parole à M. le leader adjoint
du gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui. Alors, Mme la Présidente, afin de débuter nos affaires du jour, je vous
demanderais d'appeler l'article 6 du feuilleton.
Projet de loi n° 19
Reprise du débat sur
l'adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Alors, à l'article 6
du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2019 sur l'adoption du principe... Monsieur? Oui,
non, je n'ai pas terminé la lecture. Très bien. Parce que c'est
seulement les membres de l'Assemblée qui peuvent... Je vous remercie.
Alors, je
reprends la lecture. C'est parce qu'il y avait une personne qui n'est pas
membre de l'Assemblée qui désirait entrer
ici, au salon bleu, et c'est interdit. Alors, c'est pour ça que je me suis
interrompue. Je reprends la lecture. Voilà.
L'Assemblée reprend le débat ajourné le
29 mai 2019 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la
Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de
l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption
de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada. Et je crois que,
lorsque nous avons interrompu ce débat,
c'était M. le leader du deuxième groupe d'opposition qui avait la parole. Il
vous reste encore 45 min 26 s. Alors, la parole est à
vous.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
(suite)
M. Nadeau-Dubois :
Merci, Mme la Présidente. Lorsque mon intervention a été malheureusement
interrompue par l'horaire de nos
travaux, j'étais en train de faire, je dirais, le bilan de 40 ans de
débats au Québec sur la rémunération des
élus de l'Assemblée nationale, parce qu'une erreur qu'il ne faudrait pas faire
en adoptant ce projet de loi là, c'est penser que c'est un débat purement conjoncturel, purement ponctuel, un débat
qui se présente à nous ces jours-ci, et c'est tout. Dans les faits, c'est
seulement, en fait, le nouvel épisode d'une longue série de débats qui ont eu
lieu ici sur la question de la rémunération des députés québécois.
Et, lors de
cette intervention, donc, je vous avais parlé des différents comités qui ont
été mis sur pied à partir du début de
notre institution pour revoir cette question-là. Je vous avais parlé notamment
du comité Bonenfant, qui, en 1974 déjà,
recommandait que la rémunération des députés soit confiée à un comité
indépendant, donc externe, un comité qui permettrait donc que les députés ne soient plus juge et partie quand
arrive le moment de fixer leur rémunération. Un comité qui permet donc aux députés de se retirer de la
situation d'apparence de conflit d'intérêts quand ils se trouvent... lorsqu'ils
sont en train de voter des lois qui fixent leur propre rémunération et leurs
propres conditions de travail.
Ce comité,
donc, Bonenfant, a remis son rapport en 1974, mais ce n'est pas le seul. Je
vous ai également parlé du comité
Lavoie, qui, en 1987, a émis des recommandations très similaires, le comité
Lavoie qui était, encore une fois, un
comité extraparlementaire mandaté par le bureau de l'Assemblée nationale pour
faire une étude du mode de rémunération des députés et pour faire des recommandations. Et une des
recommandations de ce comité Lavoie en 1987,
c'était de fixer la rémunération des députés, de l'arrimer, en fait, à celle, la rémunération, des cadres supérieurs de la fonction publique. Et c'était
motivé, donc, dans le rapport du comité Lavoie, par les mêmes arguments que
ceux qui motivaient le comité Bonenfant une quinzaine d'années plus tôt, c'est-à-dire
l'idée selon laquelle, si on arrime le salaire des députés à un indicateur externe, bien, on permet encore une fois aux députés de se retirer de la situation d'apparence de conflit d'intérêts dans laquelle ils se
trouveraient en votant leur propre rémunération. Donc, j'étais rendu là.
• (11 h 50) •
On a parlé du
comité Bonenfant en 1974, du comité Lavoie en 1987, mais je reprends donc où je
l'avais laissé. Ce n'est pas la fin
de cette série. Il y a d'autres épisodes. Il y aura, en 1992, donc cinq
ans après le comité Lavoie, en 1987, une
loi qui va venir modifier le régime de retraite des députés de l'Assemblée nationale du Québec, une loi spécifique qui vient modifier le régime
de retraite, mais qui ne touche pas au reste des paramètres de rémunération.
Le prochain
épisode, je dirais, significatif dans la saga entourant la rémunération des députés, il a lieu en 2000. En 2000, c'est le comité Godin qui est mis sur pied, qui est, disons, à peu près
sur le modèle du comité Lavoie et du comité Bonenfant. Et ce comité Godin va faire encore une fois une analyse
globale de la rémunération des députés, va en venir à plusieurs
recommandations, mais il va arriver à... je ne ferai pas la
liste, quand même, de toutes les recommandations, mais, vous me voyez venir, je vais insister sur
une des recommandations. Il y
a, à la fin du rapport du comité
Godin, un plaidoyer franchement
convaincant, j'invite mes collègues à le lire. Mais le comité Godin, son rapport se
termine par un plaidoyer en faveur,
devinez quoi, en faveur d'un comité indépendant permettant un examen périodique
des conditions de travail des
députés.
Donc là, on a
un premier rapport, en 1974, du comité Bonenfant, un deuxième rapport, en 1987,
du comité Lavoie et un troisième
rapport, en 2000, du comité Godin. Et ces trois rapports-là ont des
différences, là, mais ils ont tous un point en commun, et ce point en commun, c'est quoi? C'est de
mettre le doigt sur le gros bobo et de dire : Oh! il y a
un problème avec le fait que les députés votent leur propre rémunération
à travers une loi. Il faut régler cette apparence de conflit d'intérêts.
Il faut un comité indépendant pour examiner la rémunération des députés.
Donc, trois comités qui, trois fois, font des recommandations très,
très, très similaires.
Et tout cela,
cette série de comités de travail, de recommandations, tout ça culmine, si j'ose dire, Mme la Présidente, par un quatrième comité en 40 ans, le comité L'Heureux-Dubé de
2013, qui est probablement le plus connu de cette longue série de comités
qui se sont penchés sur cette question-là. Et, avant de vous parler des recommandations du comité L'Heureux-Dubé, en même temps, je suis sûr que tout le monde me
voit venir avec mes très, très gros sabots, mais, juste avant de vous parler des
recommandations du comité L'Heureux-Dubé, un des travaux qu'a faits le comité L'Heureux-Dubé, c'est justement de se pencher sur les travaux précédents. Et je
vous lis un extrait du rapport :
«L'évolution
des recommandations formulées par tous les comités précédents sur les
conditions de travail du député québécois permet de dégager un fil
conducteur important. Les changements proposés ont toujours été guidés par la volonté d'offrir aux élus une rémunération globale
juste.» Mais, et là ça devient intéressant, «pour des raisons conjoncturelles
ou à cause du malaise que les législateurs ont toujours éprouvé à fixer eux-mêmes
leur rémunération, les propositions de ces comités n'ont été que
partiellement appliquées».
Donc là,
l'historique que je viens de vous faire et puis l'analyse que je viens de vous
partager, Mme la Présidente, à
l'effet qu'il y a un malaise lancinant dans l'histoire de nos débats sur notre
rémunération, ce n'est pas mon analyse, ce n'est pas l'analyse des
méchants radicaux ou, comme on l'entend parfois du côté du gouvernement, des
méchants communistes de Québec solidaire, c'est l'analyse du comité
L'Heureux-Dubé.
Le comité
L'Heureux-Dubé, en 2013, nous refait l'histoire et nous dit : Ce n'est pas
la première fois, là, les amis, que
vous mandatez un comité. À chaque fois, ces comités-là vous ont proposé la même
affaire ou à peu près, puis, à chaque fois, vous avez eu, je les cite,
un malaise à aller de l'avant avec cette recommandation-là.
Alors, vous
comprendrez, Mme la Présidente, que cette analyse du fait qu'on a
historiquement pelleté le problème de notre rémunération vers l'avant, là, on
n'en est pas propriétaires, à Québec solidaire, on ne l'a pas sortie de notre
chapeau. On s'inspire de l'histoire des
débats qui ont eu lieu ici et qui ont tous dit à peu près la même chose. Et malheureusement le projet de loi n° 19, si la
tendance se maintient, va n'être qu'un épisode de plus dans ce long historique
de malaises et d'indécisions de la part de l'Assemblée nationale du Québec.
Mais, avant
de parler du projet de loi n° 19, parlons justement de ce comité
L'Heureux-Dubé, qui, en 2013, reprend du
service, refait une analyse encore une fois globale de l'ensemble des
composantes de la rémunération des députés. Et ce comité, mandaté en juin 2013 par le Bureau de
l'Assemblée nationale, accouche, lui, d'une trentaine de recommandations.
Encore une fois, je vais épargner à mes
collègues la liste et l'analyse de toutes ces recommandations-là, mais, au
travers de toutes ces
recommandations-là, il y en a une qui retient mon attention. Cette
recommandation, c'est quoi? C'est de créer
un comité indépendant et exécutoire, donc un comité qui aurait les pouvoirs de
décréter les conditions de travail des députés.
Donc là, on
est rendus, si je calcule bien, au quatrième rapport qui dit exactement la même
chose. D'ailleurs, le comité regrette
l'inaction du passé. Le comité dit : «Il eut pourtant été souhaitable que
les autorités politiques [donnent suite
aux rapports précédents], évitant ainsi les exercices périodiques de rattrapage
sur le plan de leur rémunération.» Les exercices
périodiques de rattrapage sur le plan de leur rémunération. Si je voulais
définir la nature du projet de loi n° 19, je pourrais citer le rapport L'Heureux-Dubé et
dire : C'est un projet de loi qui constitue un exercice périodique de
rattrapage sur le plan de notre rémunération.
Mais donc, quand est publié le rapport
L'Heureux-Dubé, comment réagissent les partis politiques toujours représentés en cette Chambre? Ça, c'est
intéressant. On pourrait se dire : C'est un rapport qui a été reçu avec
une volée de bois vert. Hein, les
députés de la Coalition avenir Québec, du Parti québécois, de Québec solidaire,
du Parti libéral ont dû dire :
On ne veut pas ça, un comité indépendant exécutoire. Mais non. Agnès Maltais, à
l'époque leader parlementaire adjointe
de l'opposition officielle : «Les membres du Parti québécois ont toujours
voulu faire applique le rapport L'Heureux-Dubé. [...]On a toujours cru que le rapport L'Heureux-Dubé était la véritable
solution[...]. [...]Il fallait avoir un comité indépendant. C'était le
rapport L'Heureux-Dubé.» Leader de l'opposition officielle, à l'époque, du
Parti québécois.
Un autre du
Parti québécois, Marjolain Dufour, à l'époque whip, donc, de cette formation
politique : «...le comité recommande [...] un comité permanent et
décisionnel[...]. [C'est] la position qu'on a, M. le Président[...]. Voilà.»
François
Legault... Oh! pardon. La personne qui est actuellement premier ministre du
Québec et qui, à l'époque, était chef
de la deuxième opposition, qui, par voie de communiqué, dit : Pas
d'augmentation de salaire pour les députés sans retour à l'équilibre
budgétaire.
Et bien sûr
Françoise David, ma prédécesseure dans Gouin. Je vous épargne la citation, elle
est pas mal plus longue. C'est
souvent comme ça à Québec solidaire. Mais grosso modo elle dit : Le rapport
L'Heureux-Dubé, c'est une bonne affaire,
il faudrait l'appliquer. Il faudrait absolument aller de l'avant là-dessus
plutôt que morceau par morceau, départ par départ, prime par prime. Il
est vraiment temps qu'on donne suite au rapport L'Heureux-Dubé. On va
contribuer à la discussion à cet effet.
Bon, ça fait
qu'à l'époque tous les partis ici disent : L'Heureux-Dubé, c'est une bonne
base de discussion. Alors là, on se
dit : Bien, si tous les partis étaient d'accord, on est allés de l'avant.
Mais non, ce n'est pas arrivé. Et je ne distribuerai pas les blâmes, à savoir c'est la faute exactement
de qui qu'on ne soit pas allé de l'avant, mais, dans les faits, on n'est
pas allé de l'avant. On n'est pas allé de l'avant avec L'Heureux-Dubé.
• (12 heures) •
À l'époque,
dans la foulée, disons, dans les années suivant le dépôt du rapport, il y a eu
deux projets de loi qui ont été
déposés pour donner suite au rapport L'Heureux-Dubé : le projet de loi
n° 78, déposé le 12 novembre 2015, dans lequel le gouvernement
libéral à l'époque dit : On va retirer l'allocation de transition à un
député qui démissionne s'il n'y a pas de
raisons de santé ou... en fait, s'il n'y a pas de raisons de santé, ce qui
était un pas dans la bonne direction. À l'époque, je ne sais pas si on se rappelle, mais il y avait beaucoup de
scandales dans l'espace public, il y avait beaucoup d'indignation parce que les primes de départ
étaient utilisées, en tout cas... bien, il y avait eu beaucoup de démissions
dans les derniers mois, les députés
démissionnaires empochaient des grosses primes de départ. Ça a créé un malaise
dans la population. L'Assemblée
nationale en a pris acte puis a adopté un projet de loi qui disait : On va
modifier les critères qui permettent à un député de bénéficier d'une
telle allocation de départ. Et ça a été adopté, et je pense que tout le monde
reconnaît aujourd'hui que c'était un pas dans la bonne direction.
Mais
il y avait un deuxième projet de loi, le projet
de loi n° 79,
qui, lui, met en application, met en application... en fait, aurait mis en application le rapport
L'Heureux-Dubé. Ce projet de loi là, malheureusement, malheureusement,
est mort au feuilleton. On avait l'occasion,
là, avec ce projet de loi là de tourner la page sur 40 ans de débats
stériles. Et, si ce projet de loi là avait été adopté, le projet de loi n° 19 n'existerait pas. Pourquoi? Parce qu'il y aurait un comité indépendant
exécutoire qui aurait pris acte de la modification de la fiscalité au fédéral,
qui aurait dit : Oh! ça pose un enjeu
quand même, révisons la rémunération, ou, en tout cas, ce comité-là aurait pris
une décision sur la situation qui nous occupe
actuellement, et on n'aurait pas eu le malaise, que je présume que je ne suis
pas le seul à avoir, de devoir voter un
projet de loi sur notre propre salaire. On aurait été libéré de ce fardeau-là.
Un comité indépendant exécutoire aurait examiné ça en toute indépendance et, si vous voulez mon humble avis, Mme
la Présidente, aurait probablement jugé que baisser le salaire brut... le salaire net des députés, ce n'est pas une
bonne chose. Probablement qu'un comité indépendant exécutoire en serait
venu à cette conclusion-là.
Le
problème, c'est que ce projet de loi, il est mort au feuilleton et
qu'aujourd'hui, rebelote, les députés de l'Assemblée nationale doivent à nouveau se prononcer sur leur propre
rémunération. Et ça, Mme la Présidente, vous me voyez venir, ça pose un problème sur le processus,
sur la forme beaucoup plus que sur le fond, hein? Sur la forme, il y a un
problème, puis ce problème de forme là, on
ne l'a jamais réglé après 40 ans. Donc, nous, à Québec solidaire, on se
dit : Bien là, un moment donné,
il serait peut-être temps de donner un petit coup, de la faire, cette réforme
globale, de le créer, ce comité
indépendant exécutoire et qu'on en finisse avec cette situation d'apparence de
conflit d'intérêts. Je le répète, l'idée
d'apparence de conflit d'intérêts, ce n'est pas mon opinion, c'est ce que la
Commissaire à l'éthique a dit en 2015. Bon,
la Commissaire à l'éthique, en 2015, disait : C'est un conflit d'intérêts,
le fait que les députés votent leur propre salaire. Bien, on n'aurait pas à faire ça si on avait donné
suite au rapport L'Heureux-Dubé, si on avait adopté le projet de loi
n° 79. On n'est pas allés de l'avant.
Ce
qui s'est plutôt produit, c'est qu'en décembre 2017, quelques jours avant la
fin des travaux parlementaires, le gouvernement de l'époque... en fait, pardon, en décembre 2017, donc,
quelques jours avant la fin des travaux parlementaires, il y a deux scénarios qui avaient été proposés pour
essayer de régler le problème qui, à l'époque, s'en venait, celui, donc, des changements de la
fiscalité au fédéral. Et un de ces scénarios-là était de dire : On va
neutraliser la perte de rémunération à court terme et on verra pour la
suite de L'Heureux-Dubé plus tard.
Donc,
vous voyez, Mme la Présidente, là, quand on dit : On va régler ce
problème-là tout de suite puis on verra plus tard pour le comité indépendant exécutoire,
qu'est-ce qu'on est en train de faire? Exactement la même chose qu'ont faite les parlementaires au Québec depuis le
premier débat sur la question en 1974. On rejoue le même film constamment.
C'est ça qu'on a fait à l'époque, donc, pas
plus tard qu'en 2017. Et à l'époque Québec solidaire s'était objecté, donc, à
ce qu'on fasse ce qu'on est en train
de faire ici, c'est-à-dire faire une réforme à la pièce en pelletant la réforme
plus globale par en avant.
Janvier 2018, maintenant, donc
quelques semaines plus tard, Jean-Marc Fournier, qui est à l'époque leader parlementaire du gouvernement libéral à l'époque,
écrit une lettre. Il dit : Bon, là, là, on a un problème, il va y avoir
une baisse de salaire au net pour les députés, qu'est-ce qu'on fait avec ça? Et
il propose, à ce moment-là, deux scénarios. Le premier, donc, nouvelle tentative, étudions le projet de loi n° 19
L'Heureux-Dubé, adoptons-le, créons ce comité indépendant et décisionnel
et on en sera quittes pour ce débat.
Mais,
il fait aussi une deuxième proposition, et je vais vous lire, Mme la
Présidente, la lettre que Jean-Marc Fournier... une lettre ouverte qui est bien connue, lettre
ouverte que M. Fournier, donc, envoie à l'ensemble des députés. Premier
scénario, il dit que c'est son préféré.
M. Fournier dit : Moi, mon scénario préféré, c'est : on étudie L'Heureux-Dubé,
on adopte le projet de loi n° 79
et enfin on se libère de ce débat franchement agaçant. Mais, il fait une
deuxième proposition, il
dit : «Une autre approche envisageable — je le cite, donc — serait d'ajouter, dans cette législation
ciblée...» En fait, je vais mettre en
contexte la citation. Il dit : L'autre approche, on pourrait faire un
projet de loi pour compenser l'effet de la fiscalité fédérale, donc exactement
ce que fait le projet de loi n° 19, mais en même temps, en fait, du même coup, on
crée tout de suite le comité indépendant et
décisionnel. Comme ça, bon, on corrige l'impact de la fiscalité fédérale, mais
c'est la dernière fois, tu sais. C'est comme
si on dit : Là, on va le faire, mais après on ne le fait plus, puis dans
la loi, on met le comité indépendant exécutoire, comme ça, c'est
vraiment la dernière fois qu'on se met les mains dans notre rémunération puis,
pour la suite, on donne ça à un comité indépendant exécutoire pour en être
débarrassé.
Et donc je
vous lis la citation dans laquelle il fait cette proposition : «Une
approche envisageable serait d'ajouter, dans cette législation ciblée qui se limite à neutraliser les effets de
la nouvelle règle fiscale fédérale sur la rémunération, des dispositions établissant pour l'avenir un
comité indépendant et permanent avec force exécutoire.» Donc, à ce moment-là,
M. Fournier essaie de trouver un
compromis. Bon, probablement que M. Fournier, à ce moment-là, commence un
peu à faire le deuil de l'application
globale du rapport L'Heureux-Dubé, alors il dit : Bien, au moins, on va
prendre la dernière et ultime recommandation et, si vous voulez mon avis, la
plus importante de L'Heureux-Dubé, on va mettre ce comité indépendant et décisionnel sur pied dans le
même geste, dans le même projet de loi que l'on compense l'effet de la fiscalité fédérale. Et cette proposition-là, M. le
Président, c'est intéressant, parce que, dans les discussions qui ont eu lieu
au Bureau de l'Assemblée nationale dans les
derniers mois, devinez quelle formation politique a repris à son compte la
proposition de Jean-Marc Fournier? C'est
Québec solidaire. C'est Québec solidaire, Mme la Présidente. C'est Québec
solidaire.
Jeudi le 14
février 2019, la députée de Mercier écrit au comité qui est en charge de
réviser les conditions de travail des
députés. Et, dans cette lettre, la députée de Mercier dit : «Québec
solidaire acceptera donc...» En fait, il y a une phrase avant qui dit : «...dans [un] esprit de
compromis [...] Québec solidaire acceptera la majoration temporaire des
allocations de dépenses pour
compenser les effets de l'imposition fédérale à condition que soit mis sur pied
un comité indépendant de révision des
conditions de travail des député-e-s et que ce dernier respecte les paramètres
minimaux suivants : le comité doit avoir un caractère exécutoire — donc, ça, c'est L'Heureux-Dubé; la
nomination des membres du comité doit être approuvée par le Bureau de
l'Assemblée nationale à l'unanimité — c'est plutôt normal comme
manière de procéder; [troisièmement,] le
comité doit avoir un échéancier clair durant la législature, avec une date
[préétablie pour remettre son rapport] — bon, on lui donne un
échéancier, dans le fond, à ce comité-là, ce n'est pas la fin du monde;
et — dernière
condition — [que
cette] transition vers une rémunération transparente et juste [se fasse] à coût
nul...»
On aurait pu
discuter de cette proposition de compromis là, mais cette proposition de
compromis, Mme la Présidente, elle a
été refusée par les autres formations politiques. Et là je le répète, là, cette
proposition de compromis là, elle ne
sort pas de l'esprit machiavélique du politburo de Québec solidaire, là, comme
le disent certains, cette proposition de
compromis, elle est inspirée de ce que Jean-Marc Fournier, le leader libéral du
gouvernement, proposait. Je veux juste dire
une... Je ne m'étendrai pas sur ce que des députés de Québec solidaire ont déjà
dit de Jean-Marc Fournier, il y a des déclarations
bien connues à cet effet. Mais, je veux dire, vous n'entendrez pas souvent
Québec solidaire dire : Bonne idée de M. Fournier sur le plan de l'éthique, disons ça comme ça. Ce
n'est pas des déclarations qu'on a entendues souvent. Or, dans le cas du débat sur le projet de loi n° 79, on dit : Reprenons son idée de compromis, et cette idée de compromis
a été refusée par les autres formations politiques.
• (12 h 10) •
Donc là, moi,
la question que je me suis posée quand ma collègue de Mercier m'a dit :
J'ai envoyé la lettre au BAN...
D'ailleurs, je peux la déposer pour le loisir des membres de l'Assemblée, il
n'y a pas de problème, là. Et même ça,
ça a été refusé. Parce que ce n'était pas la position de départ de Québec
solidaire. La position de départ de Québec solidaire, c'était la même position qu'en 2017, une position, disons, un
peu plus ferme qui disait : On ne touche pas à la rémunération des députés s'il n'y a pas de réforme
globale, point final. Entre 2017 et le dépôt du projet de loi n° 19, on a
fait un compromis, on a pris un pas de
recul, on a dit : O.K., on n'est pas en guerre pour que les députés voient
leur salaire diminuer. Ce n'est pas ça qu'on veut, nous autres, dans la vie,
là, que les députés fassent moins d'argent, là. Ça fait qu'on va accepter qu'il y ait
une compensation de l'effet de la fiscalité fédérale, mais on va au moins
mettre en application une et
la plus importante des recommandations de L'Heureux-Dubé, c'est-à-dire, au moins, assurons-nous que ce soit la dernière fois qu'on le fasse.
Ça fait que,
vous voyez, Mme la Présidente, là, que, contrairement à ce qu'on pourrait
le penser, là, la position de Québec solidaire, là, ce n'est pas une position dogmatique, populiste. J'ai même
entendu, à micros fermés, certains élus
du gouvernement qualifier la proposition de démagogique.
Vous le voyez, là, ce n'est pas une démarche démagogique ou populiste de
la part de Québec solidaire, au contraire, c'est une démarche empreinte de
compromis puis empreinte de pragmatisme, c'est-à-dire : Aïe! Là, ça fait 40 ans qu'on répète les mêmes erreurs, on
peut-u ne pas, encore une fois, rejouer dans
cette série-là? On peut-u avoir la fierté de dire : Bon, O.K., on
compense l'effet de la fiscalité fédérale, mais c'est la dernière fois?
Et, Mme la Présidente, si nous faisions ça comme Assemblée, là, moi, je suis convaincu qu'on
en serait fiers, qu'on en serait
fiers d'avoir eu le courage que nos prédécesseurs n'ont pas eu, il faut
le reconnaître, là, de mettre fin à la situation
de conflit d'intérêts qui nous rend mal à l'aise. En tout cas, elle me rend mal
à l'aise et elle rend le caucus de Québec solidaire mal à l'aise. Et j'ai tendance à croire qu'il y a
d'autres députés qui partagent ce malaise-là, parce qu'on le sait bien que
les gens normaux, au Québec, ils ne peuvent pas voter leur propre salaire. Même
s'ils sont syndiqués, il faut qu'ils négocient avec un patron. De la
même manière, quand les gens normaux, là, les gens ordinaires, les
travailleurs, les travailleuses, quand
l'impôt change, ils subissent l'effet de l'impôt. Le changement fiscal qui est
annoncé par le fédéral, il ne touche
pas juste les députés, il touche aussi certaines catégories de travailleurs et
de travailleuses. Ces travailleurs et
travailleuses là, on a-tu adopté une loi pour les exempter? Non. Or, on va le
faire pour nous. Et ça, Mme la Présidente, ça crée, à Québec solidaire, un réel malaise sur la forme, sur le
processus démocratique, d'où notre compromis de dire : O.K., on va
le faire, mais on va le faire une dernière fois et on va se doter d'un comité
indépendant exécutoire.
Et là je sais
ou, en tout cas, je présume que des collègues des autres formations politiques
vont dire : Bien, il y en a un,
comité indépendant exécutoire dans le projet de loi n° 19. C'est vrai,
mais il est dans le préambule. C'est un souhait, c'est une déclaration d'intention, mais ça n'a pas de force légale. Le
préambule des projets de loi n'a pas force légale, c'est un fait. Il suffisait de le mettre en
article dans le projet de loi, et Québec solidaire joignait le consensus. Et je
vous le dis tout de suite, Mme la
Présidente, en étude détaillée, nous allons déposer cet amendement, et je vais
continuer à essayer de convaincre les
autres formations politiques d'accepter l'amendement. Et, s'il est accepté, on
va voter pour ce projet de loi là
avec grand, grand enthousiasme, pour vrai, je le dis ici, tout le monde pourra
reprendre mes propos par la suite, parce
qu'on n'est pas en guerre pour faire baisser le salaire de personne, on refuse
que l'Assemblée continue de répéter les erreurs du passé.
Avant de conclure, j'aimerais ajouter quelques arguments
en faveur, donc, de cette manière de procéder, c'est-à-dire le fait de dire : On le fait une dernière fois, mais
on met un comité indépendant exécutoire. Une des bonnes raisons de procéder comme ça, c'est que le
Québec... en fait, le Parlement québécois est à la traîne par rapport à ce qui
se fait dans d'autres Parlements similaires.
Il y a, au Canada, plusieurs Parlements qui se sont dotés de ce type de comité
là. On pourrait s'en inspirer et on devrait s'en inspirer. Ce n'est pas
un modèle qu'on a à inventer de toutes pièces. Il y a quatre rapports qui ont été déposés au courant des dernières années, il
y a des exemples dans le reste du Canada. Il y a aussi des exemples à l'international. Ces exemples-là
existent, il faut aussi s'en inspirer. On n'a pas, bref, à inventer un modèle
un peu byzantin, là, on peut s'inspirer de
pratiques, de bonnes pratiques de gouvernance qui existent ailleurs. Ils
existent, ces comités, au
Royaume-Uni, en Australie, en Nouvelle-Zélande, des Parlements, donc, qui sont sur le même modèle,
celui du parlementarisme britannique. Pas que ce soit un modèle pour lequel
j'ai une affection débordante, mais c'est quand
même notre modèle. Et donc, quand on
regarde ces Parlements-là qui fonctionnent à peu près comme nous, on se
dit : Bien, c'est possible
d'appliquer cette recommandation de L'Heureux-Dubé. Au Canada,
ça existe à l'Île-du-Prince-Édouard, ça existe au Manitoba, ça existe en Nouvelle-Écosse, hein, des comités. Au Manitoba, il s'appelle le Comité sur les traitements, les allocations et les prestations
de pension des députés. Ces comités-là sont indépendants, sont décisionnels,
révisent périodiquement les rémunérations
des députés, leurs différentes conditions de travail, rendent des
recommandations qui sont appliquées.
Évidemment,
ce comité-là, Mme la Présidente, là, il ne déciderait pas ça, tout seul dans
son coin-là, c'est un comité qui consulterait les parlementaires : C'est
quoi, vos difficultés? C'est quoi, vos défis? C'est quoi, les éléments de votre
rémunération qui fonctionnent mal? Et les parlementaires pourraient dire :
Bien, écoutez, moi, je suis le député, par exemple, d'une circonscription éloignée, très grande, tels mécanismes de
rémunération, c'est complètement décalé par rapport à ma réalité. Et ce comité-là, certainement, tiendrait en
considération ces représentations-là de la part des députés.
Je vois ma collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue se joindre à nous. Bien, ma collègue
me parlait, l'autre fois, du fait
qu'étant députée d'une circonscription plutôt loin du Parlement, ayant un jeune
enfant, elle trouve que, par exemple,
le nombre de déplacements entre sa circonscription et Québec, un nombre de
déplacements qui sont permis pour sa
famille... Quand on a des jeunes enfants, c'est cinq déplacements, si je ne me
trompe pas, ce n'est pas assez. Comment on peut demander à un jeune père ou une jeune mère de famille, de
dire : Tu vas amener juste cinq fois dans l'année ta famille avec toi à Québec? Ça, c'est le genre de
chose qu'il faudrait revoir. Mais quelle est la meilleure manière de le revoir?
Est-ce que c'est de se voter ici,
nous-mêmes, une loi pour bonifier juste ce petit morceau-là? Bien sûr que non.
La bonne manière de revoir ça, c'est
quoi? C'est de mettre sur pied un mécanisme indépendant, périodique et
décisionnel de nos conditions de travail, de notre rémunération.
Alors, le fait que
Québec solidaire s'oppose à ce projet de loi là, ce n'est pas parce qu'on aime
le mode de rémunération actuel, puis qu'on
le trouve bien, puis qu'on le trouve parfait, puis qu'on trouve que tout va
bien pour les députés, notamment les députés qui font face à des défis
de conciliation travail-famille. Et là je prends la conciliation travail-famille, c'est un exemple, mais il y a
d'autres aspects problématiques dans notre rémunération. Donc, ce n'est pas un appui à comment ça marche, notre opposition au
projet de loi, c'est, bien au contraire, un souhait qu'on le réforme, ce mode de rémunération là, mais qu'on le réforme
de manière transparente, de manière indépendante et, pour reciter encore
la Commissaire à l'éthique, de manière à éviter l'apparence de conflit
d'intérêts.
Donc,
oui, il y a des choses à revoir. Je parlais de la conciliation travail-famille,
je pourrais parler du régime de retraite.
Il y a eu plusieurs députés, dans les dernières années, qui ont émis un
malaise. Est-ce que le taux de cotisation actuel pour le régime de retraite, qui est de 21 %, je crois, si je
ne me trompe pas... Est-ce que c'est équitable par rapport aux autres travailleurs, travailleuses que, comme
députés, on cotise juste à 21 %? Beaucoup de députés, je pense, seraient
tentés de dire : Oh! ce n'est pas
beaucoup par rapport aux gens qu'on représente, ceux qui ont des régimes de
retraite, hein? Même chose sur les
assurances collectives. On cotise à peu près à hauteur de 12 % à notre
régime d'assurance. Bon, je pense
que, si on faisait un sondage anonyme en demandant aux députés :
Trouvez-vous que c'est représentatif de la population?, je pense que plusieurs
membres de l'Assemblée diraient : Bien, c'est vrai que ça pourrait être un
petit peu plus équitable.
• (12 h 20) •
Bien,
ce genre de débats là, c'est des débats importants. Je vous parle de
l'assurance collective, je vous parle du régime de retraite, je vous ai parlé des mesures de conciliation
travail-famille, ces débats-là sont importants. Bien, est-ce qu'on va les régler un après l'autre en adoptant à
chaque fois un projet de loi à la pièce qui va nous rendre super mal à l'aise
parce qu'on va être en train de décréter nos propres conditions? Nous, on pense
que c'est une mauvaise manière de fonctionner.
De un, ça va être très long; de deux, à chaque fois, ça va créer des
controverses, des malaises, des inconforts. Quelle est la manière de faire cette réforme dont on a tant besoin, je
dirais même, en fait, cette modernisation dont on a tant besoin dans notre mode de rémunération? C'est par
un comité indépendant, périodique et décisionnel. Et ce n'est rien d'autre, Mme la Présidente, que propose Québec
solidaire. Ce n'est pas une solution farfelue, ce n'est pas une solution
radicale, ce n'est pas une solution
saugrenue, comme diraient certains, c'est une solution qui nous vient, dans
l'ordre, de Jean-Marc Fournier, du rapport L'Heureux-Dubé, du comité
Godin, du comité Lavoie et du comité Bonenfant. Donc, j'espère ne pas entendre des gens dire : Québec solidaire sont radicaux, sont populistes, sont démagogiques, ils sont en guerre contre la classe politique.
Ce n'est pas ça, là. Je ne l'ai pas entendu encore, puis j'espère que je ne
l'entendrai pas, parce que, je veux dire, on n'est pas là-dedans, là, on
n'est pas là-dedans du tout, bien au contraire.
Mme la Présidente, pendant que j'ai encore une capacité physiologique de m'exprimer à
vous, je vais aller vers la
conclusion. Le volume... J'entends quelqu'un me dire «ça baisse». Je dirais : Le volume
de ma voix, mais la force des arguments,
par contre, est ascendante, est ascendante. En terminant,
donc, j'aimerais sérieusement faire un appel, je dirais, à deux choses, puis c'est des thèmes que j'ai
entendus de la part du gouvernement, et là je l'entends ici sans aucune ironie,
sans aucune mauvaise foi et sans aucune
volonté d'embarrasser quiconque, là, vraiment. Moi, j'ai entendu un gouvernement parler de courage et de fierté. J'ai aussi entendu un gouvernement parler de changement et j'ai entendu un gouvernement dire : Le
1er octobre, les Québécois, là, ont choisi de tourner la page sur beaucoup
de choses, notamment sur des manières de faire de la politique, sur des comportements éthiques douteux qui ont malheureusement marqué la vie politique québécoise
dans les dernières décennies. Et on est assez peu souvent d'accord avec le
parti politique qui forme le gouvernement, mais, sur ça, Mme la Présidente, on l'est et
l'on a été à l'époque où nous étions tous deux de ce côté-ci de la Chambre. On a mené des batailles ensemble,
le gouvernement et Québec
solidaire, sur les enjeux d'éthique,
sur les enjeux de moeurs politiques
et on peut encore continuer à en mener, j'en suis convaincu. Et ce gouvernement, donc, qui se prétend...
bien, qui se prétend... non, qui se réclame, à juste titre, d'une forme de
changement, moi, j'aurais tendance à faire
une parenthèse et dire : Il y a certains changements qu'on n'aime moins que
d'autres dans l'agenda de changement, mais, certes, il y a du changement
sur plusieurs choses.
Bien, un des
changements dont on a besoin, là, c'est le changement par rapport à cette quarantaine d'années d'une classe politique qui, malheureusement, n'a pas osé faire le pas, n'a pas osé rompre avec
la situation de conflit
d'intérêts. Et,
nous, c'est ce qu'on propose et, je vous le répète, on propose ça sans qu'il n'y ait aucun impact financier sur aucun député en cette Chambre parce
qu'on est d'accord de bonifier de manière provisoire l'allocation afin
d'annuler les effets de la fiscalité
fédérale. On est d'accord. Donc, il n'y a pas personne qui perd d'argent, Mme
la Présidente, si l'amendement de
Québec solidaire est adopté et qu'on dit : O.K., on règle ça, mais à
condition qu'on mette en place un comité décisionnel périodique
indépendant.
Donc, ce
qu'on propose, là, ce n'est pas désavantageux pour personne. En fait, c'est
avantageux pour tout le monde et
surtout c'est avantageux pour l'institution, pour la confiance que les gens
nous portent. Et un parti porté au pouvoir par un vent de fatigue à l'égard de la classe politique traditionnelle
devrait comprendre ça. Un parti porté au pouvoir par un vent, même d'une certaine écoeurantite devant
certains privilèges, devant certaines attitudes devrait, je pense, être
sensible à la proposition que Québec
solidaire fait. Et je m'adresse à eux en priorité, bien sûr, parce qu'ils
détiennent la majorité en cette
Chambre, et, en dernière instance, ce sera à eux de décider du sort de ce
projet de loi. Donc, le changement... Je pense qu'en termes de
changement, tout y est dans la proposition de Québec solidaire pour qu'on aille
de l'avant.
Mais j'ai
parlé aussi de courage et de fierté. Quel courage? Bien, le courage, justement,
de poser le geste que nos prédécesseurs
n'ont pas eu le courage de poser. Le courage de dire : On va se sortir les
mains de notre propre rémunération, on
va cesser d'être, comme le disait la Commissaire à l'éthique, en position d'apparence de conflit d'intérêts,
on va cesser d'être
juge et partie. Et ça, tous nos successeurs en cette Chambre vont nous en
remercier parce qu'ils vont dire : Enfin, on a un comité indépendant décisionnel qui prend ça en charge puis qui
ne nous impose pas le fardeau éthique de devoir nous-mêmes décider sur notre rémunération. Ce courage-là, je pense qu'on
en est capables en cette Chambre. Je souhaite qu'on en soit capables, Mme la Présidente. Et,
en terminant, la fierté, bien, la fierté de se dire : Aïe! Ça fait depuis
1974 au moins, depuis
le comité Bonenfant de 1974,
que cette question-là est discutée. Et puis vous savez quoi? Bien, c'est
notre législature, la 42e, qui a fait le pas, qui a fait le saut puis qui a
mis fin à ce malaise de plusieurs décennies. Moi, si on allait de
l'avant, là, je ressentirais cette fierté-là, de dire : On a été capables.
Et les
circonstances, elles sont là, Mme la Présidente. On est en début de mandat. On
peut faire une compensation temporaire
sur l'allocation des députés. Tout est en place, là, c'est la tempête parfaite.
Il faut saisir l'occasion. Et, je le répète,
le fait qu'il y ait un comité indépendant exécutoire dans le préambule, ce
n'est pas suffisant. Oui, c'est un beau souhait, oui, c'est un engagement moral et symbolique, certes, mais
ayons le courage, je dirais, de s'attacher nous-mêmes les mains. Votons-nous un projet de loi qui va
nous contraindre nous-mêmes à se lancer dans ce processus de réforme
indépendant, périodique et exécutoire. Mais ayons le courage de le mettre dans
le projet de loi puis de le dire à la population
du Québec : Vous voyez, on l'a prise, la décision, puis on en a discuté en
caucus, puis on s'est dit : Crime! On est capables de se contraindre nous-mêmes dans ce processus-là,
duquel on va sortir grandis, au final, comme classe politique, j'en suis
convaincu.
Et je sais que, quand on parle de ces choses-là,
la rémunération des députés, et tout ça, rapidement il y a des malaises, des inconforts, rapidement il y a des
craintes aussi. On va-tu se faire traiter de pourris? On va-tu se faire traiter
d'hypocrites? On va-tu se faire traiter de
plein de soupe, tu sais? Bon. Je les comprends, ces craintes-là, et c'est
justement pour nous en libérer que la
proposition de Québec solidaire est pertinente, parce que cette proposition-là,
elle dit : On n'aura plus jamais à vivre ce qu'on vit en ce moment.
Alors, Mme la
Présidente, je vais m'arrêter ici, mais simplement dire, donc, réitérer une
dernière fois que nous allons déposer
un amendement à ce projet de loi lors de l'étude détaillée, et cet amendement
sera calqué sur la proposition qu'avait
faite la députée de Mercier au Bureau de l'Assemblée nationale par lettre le
14 février 2019, une proposition qui dit oui à la majoration des
allocations de manière provisoire, en attendant qu'un comité indépendant,
décisionnel et périodique fasse son examen,
nous arrive avec des recommandations qui seront appliquées. On donne au comité
un mandat, on donne au comité un
échéancier, et, comme ça, personne ne voit ses conditions de travail
détériorées, parce que ce n'est pas
ce qu'on souhaite, et en même temps on a des garanties d'avoir une réforme
globale de la rémunération. Et on discutera du mandat de ce comité-là, Mme la Présidente, on trouvera un consensus
au Bureau de l'Assemblée nationale. Mais nous allons déposer cet amendement au projet de loi, et je ne perds pas
espoir de convaincre les autres formations politiques d'appuyer un tel
amendement qui ferait du projet de loi une pièce législative historique qui
permettrait de tourner la page sur
40 ans de débats malheureusement improductifs sur le sujet de la
rémunération des députés. L'Assemblée nationale du Québec joindrait ainsi le rang des Assemblées les plus transparentes
à travers le Canada, parce que je vous ai parlé plut tôt d'autres
Parlements canadiens qui ont de tels comités, comme le proposait le comité
L'Heureux-Dubé.
Donc, les
circonstances sont les bonnes, les recommandations des différents comités sont
claires, la proposition est raisonnable et pragmatique. Il manque un
ingrédient pour que la recette soit réussie, et c'est la volonté politique, Mme la Présidente. Et je vais utiliser les
occasions qui vont m'être présentées dans le cheminement de ce projet de loi
pour tenter d'inspirer cette volonté politique aux autres formations
représentées en cette Chambre. Merci.
Document déposé
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader
du deuxième groupe d'opposition. Alors, d'abord, est-ce qu'il y a consentement pour permettre à M. le leader de
déposer son document auquel il faisait référence tout à l'heure? Il y a
consentement.
• (12 h 30) •
Et, avant de
poursuivre ce débat, je vais vous informer que deux débats de fin de séance se
tiendront aujourd'hui : le premier débat sur une question adressée par M.
le député de Pontiac à la ministre de la Sécurité publique concerne
l'absence d'entente entre le gouvernement et l'armée pour enlever les sacs de
sable des terrains des gens sinistrés en Outaouais;
et le deuxième débat portera sur une question adressée par M. le député de Nelligan à la ministre déléguée au Développement économique régional, concerne l'abolition insensée et
antiéconomique du réseau national des pôles d'innovation.
Maintenant, nous revenons à notre débat, et je
vais céder la parole à M. le leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien Proulx
M. Proulx :
Merci, Mme la Présidente. Vous me permettrez d'abord de remercier le collègue
leader de la deuxième opposition, qui
avec de plus en plus de difficultés me semblait vouloir terminer son propos. Je
lui concède, et je lui ai déjà dit,
de toute façon, qu'il n'y a pas d'enjeu au niveau de ses convictions, il les
défend toujours très bien, avec beaucoup d'éloquence. Et sincèrement je veux le remercier parce que, moi, ça m'a
permis de me remémorer une partie de ce débat-là autour de la rémunération, et c'est bien qu'il en soit ainsi. Je pense,
ça fait partie du travail qu'on doit faire ici, dans cette Assemblée.
Maintenant, qu'on
soit d'accord ou pas sur les finalités, je pense qu'il était nécessaire, puis
c'est intéressant pour ceux et celles
qui nous écoutent mais pour nous aussi, de voir également qu'un jour ou l'autre
il faudra convenir, là, d'une façon
de déterminer ces conditions de travail, ce salaire et de faire en sorte que,
c'est vrai, on ne se retrouve plus avec la situation dans laquelle nous
évoluons, c'est-à-dire décider soi-même, soit, mais en même temps se voir
imposer des moments où il faut réagir comme nous le faisons actuellement.
Le projet de
loi qui est déposé, qui a été déposé et qui sera vraisemblablement débattu dans
les prochaines heures ou dans les
prochaines journées, Mme la Présidente, ne vise qu'une chose, je pense qu'il
faut le rappeler. Bien sûr, il est porté
par des formations politiques. Bien sûr, c'est de l'initiative du gouvernement
de le présenter, mais appuyé également par
notre formation politique. C'est de dire quoi? Il y a un régime d'imposition fédéral qui fait en sorte que nous
serons désavantagés, pénalisés, vu la structure ou la façon dont nous
sommes rémunérés. Le collègue leader de la deuxième opposition a dit : Bien,
c'est vrai pour vous, c'est vrai pour nous, ce n'est pas vrai pour d'autres. Il
a raison, nous ne sommes pas soumis à
la même structure de rémunération que d'autres dans la société. Et moi, je
n'accuse pas ni Québec solidaire
ni ceux et celles qui porteront un jugement
sur ce projet de loi de quelconque
chose. Ce que je dis, par rapport à ça, c'est que j'entends que, de tous et
chacun, il y a cette volonté que cette iniquité ou cette situation très
particulière où nous nous retrouvons
imposés sur cette allocation non imposable qui fait partie de notre structure
de rémunération et de conditions de
travail change. Et, dans ce contexte-là, nous devons, je pense, pour maintenir
cette rémunération, poser un geste comme celui-là.
Alors, je
comprends et j'entends, Mme la Présidente, que, sur le fond, d'agir maintenant
pour pallier à cette situation, qui
était théorique, même si on savait qu'elle arrivait l'an dernier, aujourd'hui
nous touche directement. Je n'ai pas
les statistiques, Mme la Présidente, mais je sais que, dans
plusieurs lieux de débats chez les municipalités ou dans d'autres lieux où il y a une démocratie, il y a cette
structure. Ce n'est pas tout le monde qui est payé pareil, vous allez me dire,
mais il y a dans d'autres lieux, dans le
milieu municipal et d'autres, des allocations comme celles-ci qui sont touchées
par Revenu Canada également. Et je sais que,
dans plusieurs lieux, dans plusieurs conseils municipaux ailleurs, ils ont
fait ce que nous allons faire. Certains différemment, certains de la même
façon, mais ce que j'entends et ce qu'on me dit, Mme la Présidente, c'est que, dans plusieurs endroits, on s'est gouverné
en conséquence et on a préservé la rémunération des élus en ajustant
ainsi cette allocation, si elle n'est pas transformée, en l'ajustant en
fonction de la partie qui sera imposable, donc de cette somme que nous devrons
verser en impôt, plutôt que la conserver librement et entièrement.
Alors, c'est
ce qu'il fait, le projet de loi. Il n'y a pas un député, Mme la Présidente, qui
va s'enrichir de la situation, qui va
voir sa rémunération augmenter. N'eût été de cette situation, de l'imposition
par le gouvernement fédéral de cette allocation,
allocation qui, en passant, est en partie sous l'autorité et la responsabilité
de la Loi de l'Assemblée nationale et
une autre partie sur la réglementation qui émane du Bureau de l'Assemblée
nationale, bien, n'eût été de cette situation, Mme la Présidente, ce
projet de loi là ne serait pas devant nous et devant vous aujourd'hui.
La preuve en
est, c'est que, de ce que je comprends... Et c'était le cas, à l'époque, et la
volonté du ministre des Finances de
l'époque, qui est à mes côtés, mais je pense que c'est le cas également d'une
décision prise par le ministre des
Finances aujourd'hui et Revenu Québec, de ne pas imposer celle allocation-là.
Donc, le projet de loi, il vise que... La
situation créée par Revenu Canada, et non par Revenu Québec. Pourquoi? Parce
qu'il n'y a pas eu de décision prise d'appliquer
les mêmes arguments ou les mêmes façons de faire par Revenu Québec. Donc, c'est
de cette situation qu'il est question.
J'ai dit
d'entrée de jeu, Mme la Présidente, je ne parlerai pas pour les autres
formations politiques, je vais parler pour
la nôtre et je vais parler pour moi, j'ai dit d'entrée de jeu que cette
situation ne pouvait pas durer dans le temps. Je l'entends, je la conçois. Je connais aussi l'historique. Je siège dans
cette Assemblée de façon intermittente depuis assez longtemps pour comprendre la situation dans
laquelle on vit. Une chose qui, pour moi, est certaine, Mme la Présidente,
c'est qu'il faut s'engager dans un
processus, il faut s'engager dans ce processus où on va mettre en place les
conditions pour qu'on puisse régler cette situation-là une fois pour
toutes.
L'enjeu, Mme
la Présidente, c'est le suivant. C'est qu'actuellement les conditions pour y
arriver, bien, elles ne sont pas
inscrites sur la table. Il n'y a pas entente sur ce que serait cette nouvelle
tentative, quelles seront les conditions qui amèneraient tous et chacun ici à s'engager autour de ça. Même de
L'Heureux-Dubé, il sort, oui, le début de quelque chose, mais il ne sort pas unanimité des parlementaires
autour des solutions qui ont été proposées. Alors, c'est la preuve, encore
une fois, qu'il reste du travail à faire
pour y arriver. Quelle sera cette solution optimale qui sera mise de l'avant,
acceptée par tous, et qui aura des
conditions, imposées ou non, mais qui se retrouvera étant la formule choisie
par les élus pour arriver à ce que
plus tard, dans l'avenir, nos conditions de travail ne soient pas déterminées
aux aléas des députés, selon leur bonne volonté, ou en réaction comme on
le fait actuellement?
Alors,
les considérants qui se trouvent au projet de loi, bien, ils sont importants.
Puis, moi, Mme la Présidente, c'est
ma proposition, les considérants, c'est la proposition que j'ai faite au
gouvernement, d'inscrire les considérants, en disant : Je pense que ça vient donner force de loi... je comprends
les arguments du collègue, mais vient donner la force à ce projet de loi là en disant d'abord, d'entrée de
jeu, qu'on le fait pour «ajuster, par la présente mesure, l'allocation que
reçoit chaque député dans l'exercice de ses
fonctions afin de tenir compte de la décision en matière fiscale adoptée par le
Parlement du Canada». Donc, ce n'est pas un
enrichissement. C'est une situation pour régler une conséquence, je dirais,
de la situation créée par le Parlement du
Canada, par Revenu Canada. Mais le deuxième considérant, c'est : «...que
les parlementaires conviennent de la
nécessité que le Bureau de l'Assemblée nationale soit mandaté afin de mettre
sur pied un processus visant à
assurer périodiquement, en toute indépendance, la détermination de l'ensemble
des conditions de travail des
députés.» Ce que le collègue souhaite, ça se retrouve dans les considérants du
projet de loi. Et, pour ma formation politique,
Mme la Présidente, c'est notre volonté qu'on soit en mesure, dans cette
législature... Et les gens, chez nous, qui
siègent au Bureau de l'Assemblée nationale, ont cette volonté également, qu'on
soit capables de s'entendre sur cette formule qui nous amènera dans
l'avenir à faire les choses différemment. Mais aujourd'hui nous avons la
capacité de travailler sur cette situation
que le collègue qualifie de temporaire, qui, quant à moi, je ne sais pas
lorsqu'elle terminera, mais, pour
l'instant, ne peut pas être qualifiée de temporaire parce que c'est le présent.
Nous pouvons tous ensemble travailler sur
cette situation et nous pouvons nous engager effectivement à le faire devant
vous, le faire publiquement pour que le Bureau de l'Assemblée nationale
y travaille très sérieusement.
Le défi est
le suivant, c'est que les conditions qui entoureraient ce comité, les
conditions qui sous-tendent ce que serait
cette entité qui prendrait en charge les conditions de travail des députés ou
sa détermination, bien, ça, ce débat-là, ici, on ne l'a pas fait dans la
42e législature. Les députés qui sont ici, autour de nous, là, n'avons pas
eu ces discussions-là. Puis il y a
des gens qui siègent ici pour la première fois, d'autres qui sont là depuis
longtemps. Bien, les débats du passé, oui,
nous inspirent, mais moi, je ne suis pas en mesure de dire que ces débats-là
ont été faits dans toutes les formations politiques, que, chez nous, ce débat-là est terminé à l'égard des façons
dont on voudra convenir dans l'avenir de la rémunération des députés. Alors, Mme la Présidente, pourquoi mettre en
péril ce que nous pouvons faire aujourd'hui, alors que cette volonté est
exprimée autant dans le projet de loi que verbalement par l'ensemble des
députés?
Alors, je
serai très bref en vous disant, Mme la Présidente, qu'on va, bien sûr, appuyer
le projet de loi, que, pour nous, c'est une question d'équité, dans ce
cas-ci, parce qu'il y a une conséquence directe, que, de notre côté, on veut
travailler à cette réflexion, à cette élaboration des conditions qui, dans
l'avenir, nous amèneront à voir les choses différemment,
et que, dans ce contexte, pour nous, ce projet de loi là doit être adopté et
assez rapidement, Mme la Présidente, vu la fin de cette session.
Alors, je
réitère mon appui au gouvernement et au leader du Parti québécois, qui, tous
les deux, ont dit vouloir aller de
l'avant dans ce débat-là. Et j'invite le collègue de la deuxième opposition à
ne pas bloquer ce projet de loi là ou à ne pas s'inscrire en faux avec le projet de loi alors que, sur le fond,
il est d'accord sur ce que nous faisons. Mais il nous invite, Mme la Présidente, et je le vois et je
l'entends, comme cette invitation, à ce qu'on puisse, dans cette législature,
dans la 42e, faire les choses différemment
que ce qui s'est fait dans le passé. Alors, je l'ai entendu, cet appel. Il se
trouve dans les considérants, c'est
notre contribution à ce débat. Et nous souhaitons qu'il soit adopté, Mme la
Présidente, pour, je le rappelle, ne
pas créer un enrichissement chez les élus, ne pas modifier de notre propre chef
notre rémunération, mais de faire
face à une situation, Mme la Présidente, qui fait que, dans la structure
actuelle de rémunération, nous sommes pénalisés par cette décision de Revenu
Canada. Voilà.
• (12 h 40) •
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader de l'opposition
officielle. Et maintenant je vais céder la parole à M. le
leader du troisième groupe d'opposition.
M. Martin Ouellet
M. Ouellet : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Donc, à mon tour de prendre la parole à cette adoption de principe pour le projet de loi n° 19.
Tout comme le
collègue leader parlementaire de l'opposition
officielle, je veux aussi saluer le
travail historique fait par le leader de la deuxième opposition
officielle. Ça nous a permis, effectivement, d'avoir un exhaustif retour en arrière sur ce qui a été fait et de nous permettre
d'apprécier ce pourquoi on en est rendus, aujourd'hui, à avoir à prendre
une décision sur nos conditions de travail. Et je suis content aussi parce que
le collègue en question a parlé d'évolution
de positions à travers les différentes
années. Et le collègue de Québec
solidaire ne m'en voudra pas, effectivement, si je surligne que, dès 2013,
lorsque le rapport Claire L'Heureux-Dubé a été déposé, la chef, à l'époque,
Mme Françoise David, avait dit qu'elle était d'accord avec les
mesures d'équité et de transparence, mais qu'elle rejetait les augmentations suggérées sur le revenu disponible. Donc, je crois
comprendre que la position ou la réflexion a évolué, du côté de Québec solidaire, et c'est la même chose, Mme
la Présidente, du côté du Parti québécois.
Lorsque
j'entendais, tout à l'heure, le député
de... le leader parlementaire, pardon, du deuxième groupe
d'opposition, il faisait référence,
dans certains cas, à un comité décisionnel et, dans d'autres cas, à un comité
exécutoire. La nuance, elle est
importante, alors j'aimerais... Puis probablement
qu'on pourra approfondir lors des
discussions en étude article par
l'article, quelle est la différence qu'il voit ou si c'est juste peut-être une
erreur de choix de mot, mais moi, je vois une différence
entre un comité exécutoire et un comité décisionnel parce que les deux ne sont
pas pareils. Le comité exécutoire va
nous lier, nous, ici, à l'Assemblée nationale, et je vois difficilement, comme
le leader de l'opposition officielle, de quelle façon on peut arriver à ça présentement dans les lois qui nous gouvernent,
parce que, oui, notre rémunération est sous la gouverne de la Loi sur l'Assemblée nationale et, dans certaines
allocations, sous le Bureau de l'Assemblée nationale, donc, tôt ou tard, peu importe
ce qui sera recommandé, décidé ou exécutoire, il va falloir, tôt ou tard,
remettre ça dans les mains de
l'Assemblée nationale et procéder à un vote. Donc, il y aura aussi un travail
si on veut effectivement aller plus loin dans cette volonté d'avoir un comité indépendant, oui, permanent, oui,
évaluation périodique, oui, mais, dans ses recommandations, qu'elles soient décisionnelles ou exécutoires,
vous aurez compris que, tôt ou tard, peu importent les décisions qui seront
prises, elles devront être resoumises à l'Assemblée nationale, aux
125 députés. Donc, peu importe ce qu'on fera, il pourrait y avoir un
député sur les 125 qui décide de se lever contre, et ce sera dans son droit,
malgré le fait que les recommandations soient exécutoires ou, dans certains
cas, décisionnelles.
Je n'ai pas
une longue expérience ici, à l'Assemblée nationale, mais j'étais là lors des
dernières discussions pour la mise en
application du rapport Claire L'Heureux-Dubé et je me souviens d'une chose, je
me souviens effectivement du malaise des gens, qu'ils avaient, d'avoir à
légiférer sur leurs propres conditions de travail. Mais il y avait quand même quelque chose d'intéressant, lors de la
dernière législature, c'est qu'on allait légiférer pour des conditions de
travail qui allaient toucher les
collègues de la 42e législature. Donc, techniquement, personne des
125 élus qui auraient voté ces recommandations-là
n'était garanti d'avoir eu un impact, puisque nous allions tous être en
élection. Et je suis convaincu, Mme
la Présidente, que personne n'a prétendu, lors de la 41e législature, être
encore garanti d'être assis ici lors de la 42e.
Donc, dans
certains cas, il est faux de prétendre que, lorsqu'on légifère, on peut
légiférer pour nous. On peut légiférer pour les autres qui suivront. Et donc ça
donne effectivement, dans certaines proportions, une notion de... oui, de transparence, mais pas nécessairement de conflit
d'intérêts direct, puisque les conditions qui seront votées seront appliquées
à une autre législature qui... pour laquelle aucun des 125 n'ont été décidé
avant l'élection.
C'est important de le souligner, Mme la
Présidente, puisque... — et
j'aimerais utiliser le terme «les règles d'engagement»,
puisque, lorsqu'on s'est tous présentés à l'élection du 1er octobre
dernier, nous avions tous ou pour la plupart
pris connaissance, effectivement, des conditions de travail, la rémunération,
les allocations, les indemnités, bref, quelles
seraient les sommes qui nous seraient attribuées pour faire notre travail.
Alors, en connaissance de cause, les 125 ont décidé de s'engager à faire
de l'action politique, en connaissant ces règles-là qui allaient nous
gouverner.
Or, arrive,
le 1er janvier, une décision émanant d'un autre gouvernement, le
gouvernement canadien, qui vient avoir
un impact direct sur les allocations qui nous sont offertes pour faire notre
travail, donc d'où la pertinence de se poser ici la question, en
Chambre, de quelle façon nous devons réagir à ce changement de règles
d'engagement.
Donc, techniquement,
il y a des gens qui se sont engagés en fonction de faits, de rémunération
offerte, et là ce ne sont plus les
mêmes. Et, dans certains cas, Mme la Présidente, ça peut causer une certaine
disparité de traitement, notamment pour des circonscriptions comme la
mienne qui sont couvertes par un groupe plus grand, qui fait qu'on a des sommes
supplémentaires pour faire le travail dans
une grande circonscription qui nous amène à nous déplacer, qui nous amène
aussi, comme députés de circonscriptions
dans l'Est du Québec... Donc, on doit se rendre à Québec ou à Montréal pour
rencontrer des groupes, rencontrer des gens
qui veulent nous faire valoir leurs positions sur les différents projets de
loi. Bref, ça nous amène à nous
déplacer, et ces déplacements-là nous amènent effectivement à dépenser des
sommes pour être présents.
Donc, les
allocations qui nous sont offertes, que ce soit celle de déplacement en
circonscription mais celle aussi qui nous permet de faire notre travail,
évidemment, elle est impactée, présentement. Et, dans certains cas, ça peut
représenter, dans les circonscriptions... je
ne veux pas dire un manque à gagner, mais une dépense, un déboursé
supplémentaire de 10 000 $.
Mme la
Présidente, il est évident que ces allocations-là sont non imposables, et les
députés en question n'ont pas à présenter des pièces justificatives,
mais je suis convaincu, Mme la Présidente, que les 125 députés ici
pourraient fournir leurs factures d'essence,
leurs factures de repas, leurs factures de pneus, leurs factures d'assurances,
bref, tout ce que ça a coûté pour
faire leur travail dans leurs circonscriptions, et la plupart de nos citoyens
et citoyennes du Québec verraient
qu'au final, cette allocation qui nous est versée, elle est en deçà de ce que
ça peut nous coûter pour faire notre travail.
Et donc,
sur ces règles d'engagement là, sachant que, lors de l'élection, il avait été
convenu qu'une certaine allocation nous
serait offerte pour faire notre travail, je pense qu'il est convenable,
aujourd'hui, d'avoir cette discussion-là franche et ouverte devant les caméras à l'Assemblée nationale
pour se poser la question : Est-ce qu'effectivement il est opportun
de corriger cette anomalie qui est apparue
lors du 1er janvier et qui change la façon de faire les compensations pour
le travail qu'on a à faire en circonscription?
Alors, je
m'inscris effectivement dans la même logique du leader parlementaire de
l'opposition officielle, à savoir de
la pertinence d'avoir à colliger aujourd'hui cette situation-là pour être
certains que les députés qui sont touchés, dans certains cas, ne voient pas un certain appauvrissement pour faire notre
travail en circonscription ou de se déplacer sur le territoire.
Une chose
importante que le leader de l'opposition officielle a soulevée, c'est
qu'effectivement, dans la loi en question,
dans les principes, il est effectivement inscrit que les parlementaires
conviennent de la nécessité de mandater le Bureau de l'Assemblée nationale pour «mettre sur pied un processus
visant à assurer périodiquement, en toute indépendance, la détermination de l'ensemble des conditions de
travail des députés». Mme la Présidente, j'ai fait plusieurs projets de
loi par le passé, et, à chaque fois qu'on s'assoit en étude article par
l'article, on discute et on entérine l'ensemble des dispositions qu'il y a dans le projet de loi. Et ça va même jusqu'au
titre, Mme la Présidente. Donc, si on pouvait avoir des amendements au titre, on pourrait le faire.
Donc, chacune des dispositions qui sont inscrites, que ce soient des articles,
ou des considérants, ou des titres, peuvent être amendées, discutées. Et c'est
ce qui fait, Mme la Présidente, que, présentement,
comme le soulignait le collègue de l'opposition officielle, leader
parlementaire, il est à propos pour nous, à cette étape-ci, dans les considérants, d'inscrire notre volonté de la
création de ce comité-là et de commencer les discussions, effectivement, sur la composition de ce comité,
sur son mandat, sur sa durée, sur sa périodicité mais aussi et surtout se
poser la question, sur
la volonté qu'il soit exécutoire ou décisionnel, si c'est la volonté des
parlementaires qu'il en soit ainsi,
quelles seraient les autres modifications législatives que nous devrions
apporter, notamment les lois à modifier qui nous gouvernent à
l'Assemblée nationale mais aussi les lois issues du Bureau de l'Assemblée
nationale.
• (12 h 50) •
Donc,
il reste encore un certain travail à faire, parce que moi, je n'ai pas la
réponse. Je l'ai cherchée, Mme la Présidente. Si un comité exécutoire ou décisionnel nous imposait des conditions de
travail, est-ce qu'on serait tenus tout de même de le soumettre à l'Assemblée nationale? Et les réponses que j'ai,
présentement, la réponse, c'est oui. Donc, en rien un des 125 ou une des 125 députés, aujourd'hui,
ne pourrait s'inscrire en faux et décider de voter contre les recommandations.
Qu'est-ce qui se passerait à ce moment-là?
Bien, la majorité, effectivement, pourrait s'appliquer, mais, dans certains
cas, il y aurait une dissension. Et
je pense que tout le monde ici, à l'Assemblée nationale, lorsque vient le temps
de discuter des conditions de
travail, des conditions d'exercice, leur rémunération... Je pense qu'il faut
aller chercher l'unanimité des 125 collègues ici, à l'Assemblée
nationale, puisque nous faisons à peu près tous le même travail avec le même
degré d'intensité, le même degré de fierté,
le même degré de volonté. Et je pense
que, dans l'espace public, la seule façon de trancher un trait définitif sur le passé et garantir une façon différente,
pour l'avenir, de travailler, c'est d'y aller de façon unanime pour la suite.
Donc,
Mme la Présidente, vous ne serez pas surpris, on a demandé un consentement pour apparaître, nous aussi, notre
formation politique, comme étant codépositaire du projet de loi en question, donc nous allons être effectivement pour ce projet de loi. Nous allons voir... Nous allons quand même
étudier... Nous allons prendre le temps, pardon, d'étudier quand même
l'amendement du député
de Gouin sur les propositions, et peut-être, à force de discuter, nous aurions peut-être une façon de trouver des terrains
d'entente pour que toutes les formations politiques arrivent au même constat,
mais il devra me faire la démonstration ou du moins m'expliquer en toute honnêteté
quelle est la différence entre le comité décisionnel
ou le comité exécutoire. Et effectivement, lorsqu'on prend le dernier projet de
loi, le projet de loi n° 79 qui avait été déposé lors de la
dernière législature, on n'en faisait pas mention, de la qualité exécutoire ni
décisionnelle.
Donc,
je comprends que la pensée a évolué. Je comprends qu'effectivement nous devons
légiférer pour le bien de nos
concitoyens, pour offrir une meilleure transparence, une meilleure équité. Et
je pense que, pour le moment, considérant qu'on a changé les règles d'engagement suite à l'élection... je pense
qu'il est opportun d'abord de circonscrire cette première allocation et de décider de procéder à son
rehaussement pour compenser son imposition par le gouvernement fédéral, qui
amène à coût nul pour les citoyens et
citoyennes du Québec, pour nous aussi amène à coût nul... pas à coût nul,
pardon, mais amène une certaine égalité dans les dépenses que nous
aurons à faire pour faire notre travail en circonscription.
Donc,
je ne serai pas plus long, Mme la Présidente. Donc, nous allons avoir
assurément des débats intéressants, assurément, subséquemment sur ce
projet de loi. Alors, là-dessus, merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader
du deuxième groupe... troisième groupe d'opposition, pardon. Et
maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Mme Émilise
Lessard-Therrien
Mme Lessard-Therrien :
Merci, Mme la Présidente. Comme mon collègue de Gouin l'a mentionné
précédemment, les membres de notre
formation politique ressentent un profond malaise face au projet de loi
n° 19. Comment on peut accepter,
en cette Chambre, d'être juge et partie de ses propres conditions de travail et
surtout de manquer cette fenêtre d'opportunité pour parler de ces
conditions de travail là en général?
Mme
la Présidente, il est temps qu'un sujet prenne une plus grande importance dans
cette Assemblée, et c'est celui de la conciliation
travail-famille. Vous savez, depuis que je suis élue, la question qui m'est la
plus fréquemment posée, c'est :
Et puis comment gères-tu ta conciliation famille-travail? Comment va ton coeur
de maman? Ce que je réponds, Mme la
Présidente? Que je gère bien la situation parce qu'à la maison j'ai un conjoint
formidable et un entourage qui me soutient au quotidien. Toutefois,
depuis mon entrée en poste, inutile de vous dire que les défis de conciliation
sont considérables, particulièrement lorsque j'exerce mes fonctions à Québec, à
950 kilomètres de chez moi.
Vous
n'êtes pas sans savoir que les membres de la nouvelle génération, qui prennent
une place de plus en plus grande sur le marché du travail et dans notre
société, accordent une très grande valeur à la flexibilité de leur horaire professionnel et à des conditions de travail leur
permettant de remplir leurs responsabilités familiales et maintenir leur
qualité de vie. Également, considérant les
aléas et les exigences de notre travail de parlementaire, il serait, à notre
avis, bien temps d'ajuster les
conditions de travail des députés pour rendre possible une réelle conciliation
entre les responsabilités familiales
et les responsabilités de député. Il n'y a aucune raison pour que l'Assemblée
nationale ne prenne pas acte de ce nouveau
contexte et agisse en ce sens. Doit-on rappeler que les conditions de travail
des députés, tout comme l'organisation des
travaux parlementaires, d'ailleurs, a été pensé à une époque pendant laquelle
l'implication des deux parents dans la gestion familiale était bien
différente? Avec le projet de loi n° 19, nous avons une fenêtre
d'opportunité tout à fait à propos pour
réfléchir à l'ensemble des conditions de travail des députés. Et pourquoi
s'arrêter uniquement à la rémunération? Il serait temps de s'atteler à une réelle réforme globale des conditions
de travail et de la rémunération des membres de cette Chambre, et ce, à
travers un processus adéquat et surtout transparent.
À
Québec solidaire, plus de la moitié de notre caucus est composé de parents, et
même très majoritairement de parents
ayant de jeunes enfants. Ma petite fille n'a pas encore deux ans, et, si la
nature le veut bien, je souhaite bien avoir un autre enfant avant la fin de la présente législature. Mais je ne vous
cacherai pas que les mesures de conciliation sont un élément clé dans ma prise de décision. À ce
chapitre, je ne peux m'empêcher de penser à toutes ces femmes que je rencontre et qui me partagent leurs appréhensions à faire de
la politique avec des jeunes enfants. L'enjeu de la conciliation, c'est
un des facteurs les plus déterminants dans la prise de décision à s'engager en
politique ou pas.
En ce sens, il serait à propos qu'un éventuel
comité indépendant au pouvoir exécutoire se penche sur les conditions de travail des députés sous un axe de conciliation
travail-famille. Et pourquoi un
comité indépendant? Non seulement parce
que nous ne devrions pas être juge et partie d'une telle décision, comme on l'a
abondamment répété, mais aussi parce
que nous avons besoin de recul pour réfléchir aux meilleures mesures à adopter
en termes de conciliation. Les situations et les besoins peuvent tellement différer d'un député à un autre. Et
nous avons besoin que les mesures déployées soient durables dans le temps
et pas uniquement en fonction des besoins du moment.
Par exemple,
actuellement, mon collègue de Gouin en a parlé, les députés disposent d'une
banque de déplacements payés selon
leur type de circonscription. Dans mon cas, je dispose d'une possibilité de
60 déplacements pour moi-même et
seulement cinq déplacements pour les membres de ma famille. Vous comprendrez
qu'avec une enfant en bas âge, une circonscription
éloignée et des obligations à Québec il est nécessaire de faire régulièrement
voyager ma famille jusqu'à moi. Ainsi,
un comité indépendant pourrait se pencher sur la possibilité de permettre un
plus grand nombre de déplacements payés pour les députés avec des jeunes
enfants.
D'ailleurs,
au chapitre des déplacements, vous comprendrez qu'en cas de grossesse il y a
des enjeux de santé dont il faut
tenir compte lors de longs déplacements. Or, cette expertise-là, moi, je ne
l'ai pas. C'est pourquoi il est fondamental d'impliquer des gens compétents dans le processus. Vous comprendrez que
je vous présente un exemple bien personnel pour illustrer des besoins
qui pourraient concerner bien d'autres députés.
Aussi, des
meilleures conditions de conciliation travail-famille pourraient encourager des
jeunes parents et des jeunes mères à
faire leur entrée en politique, définitivement. Il faut donc le voir comme une
manière d'améliorer l'accès à ce
Parlement à un plus grand nombre de Québécoises et de Québécois. Ou même des
meilleures conditions pourraient permettre
à plus de femmes de prendre de plus grandes responsabilités dans cette Chambre
et faire craquer graduellement le persistant plafond de verre. N'est-ce
pas ça, la démocratie, Mme la Présidente?
En terminant, je souhaite réitérer l'opposition
de notre groupe parlementaire à ce projet de loi, qui manque de légitimité et qui passe à côté d'une vraiment
belle opportunité de revoir l'ensemble de nos conditions. Et j'espère, pour
l'avenir, que les parlementaires feront de
meilleurs choix, qui reflètent une volonté de transparence et de hauts
standards éthiques. Cela me semble
être une forme de respect élémentaire envers les citoyennes et les citoyens qui
nous ont élus. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Et maintenant je vais céder la parole à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Alexandre Leduc
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Étant moi-même un jeune parent, je ne peux que
souscrire entièrement aux propos de
ma collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. C'est quelque chose sur lequel j'aimerais qu'on travaille
également.
L'essentiel
de ma présentation, qui ne sera pas très longue, va faire... ou en tout cas
tenter de faire un parallèle entre le projet de loi n° 19
et le dossier d'ABI. Surprenant, peut-être, mais, vous allez voir, on va
s'amuser ensemble.
En effet, les
parallèles sont nombreux à faire, à commencer par le fait que, dans un conflit
de travail comme celui-là, on
s'attend à ce que le gouvernement et son premier ministre en particulier
fassent preuve d'une certaine neutralité ou, en tout cas, jonglent avec ce concept de neutralité. Et, dans le cas du
projet de loi n° 19, le premier ministre refuse, en quelque sorte, de confier la rémunération des
députés à un comité neutre comme on le demande. Et, dans le cas d'ABI, on
l'a vu, malheureusement ça n'a pas été facile pour le premier ministre de faire
preuve de neutralité.
Et mes
collègues du Service de la recherche m'ont sorti quelques exemples de citations
qui démontrent, en quelque sorte,
cette absence de neutralité, et je vais vous les lire. Donc, il a été dit, soit
en cette Chambre soit ailleurs dans les médias, en référence, bien sûr, au dossier d'ABI : «Ça n'a pas de bon
sens.» «Un syndicat qui en demande trop.» «Il y a un problème.» «Il y a exagération du côté syndical.» «On joue
avec le feu.» «C'est important d'être raisonnable.» Et : «Le syndicat
devrait faire plus de compromis.» Et
là, Mme la Présidente, ce que je vais faire, c'est que je vais faire un
discours alentour du projet de loi n° 19 en
insérant ces expressions qui ont été utilisées par le premier ministre. C'est
parti.
Mme la
Présidente, ce que plusieurs de nos concitoyens trouvent qui n'a pas de bon
sens, c'est que ce soient les députés
qui fixent eux-mêmes leur propre rémunération. S'ils voyaient un employeur
conférer une telle prérogative à ses travailleurs,
on est pas mal sûrs qu'avec sa philosophie le premier ministre qualifierait ça
de stoff de junior. Déjà, avec une
rémunération de plus du double de la moyenne de leurs commettants, certains
citoyens considèrent que ce sont les députés
qui en demandent trop. Comment ne pas comprendre nos citoyens qui considèrent
qu'il y a un problème avec le mode de fixation actuel de rémunération
des députés et qui craignent qu'il y ait exagération?
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député, compte tenu de
l'heure, je me dois de vous demander si vous avez terminé votre
intervention. Vous ne l'avez pas terminée?
Alors, je vais suspendre nos travaux jusqu'à
15 heures, et vous pourrez terminer à notre retour.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 1)
Le Vice-Président (M. Picard) : Bon après-midi
à tous. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
L'Assemblée
poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 19, Loi
modifiant la Loi sur les conditions de
travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la
suite de l'adoption de certaines mesures
fiscales par le Parlement du Canada.
Il reste maintenant 17 min 50 s à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Veuillez poursuivre.
M.
Leduc : Merci, M. le Président. Pour remettre un peu en contexte, j'étais en train de faire un parallèle, du moins essayer
de faire un parallèle entre l'adoption du projet
de loi n° 19
et le dossier ABI alentour du concept de la neutralité. Parce
que ce qu'on cherche à faire, évidemment,
avec le projet de loi n° 19, du moins dans notre intention, à Québec solidaire, en y attachant un amendement
avec le comité indépendant exécutoire, c'est d'apporter un élément de
neutralité. Et le parallèle à faire avec
ABI, le dossier ABI, c'est que le premier
ministre s'est sorti lui-même
d'une position de neutralité qu'il
aurait dû avoir alentour du dossier. Alors, ce qu'on s'est amusés à faire, on
est allés chercher des citations qui
ont été dites soit ici en Chambre ou
ailleurs, là, dans ses différentes prises de position alentour de ce dossier-là
et on les a remis en contexte alentour, donc, d'arguments pour valider
notre position quant au projet de loi n° 19.
Donc,
je fais la liste des citations et ensuite je vous ferai le discours. Bon, ce
qui a été dit en matière de déclarations du premier ministre sur le dossier ABI, les voici : «Ça n'a pas de
bon sens!» «C'est du stoff de junior.» «Un syndicat qui en demande trop.» «Il y a un problème, il y a
exagération.» «On joue avec le feu.» «C'est important d'être raisonnable.» Et
«le syndicat devrait faire plus de compromis».
Alors,
M. le Président, ce que plusieurs de nos concitoyens trouvent qui n'a pas de
bon sens, c'est que ce soient les
députés qui fixent eux-mêmes leur propre rémunération. S'ils voyaient un
employeur conférer une telle prérogative à leurs travailleurs, on est pas mal sûrs qu'avec sa philosophie, le
premier ministre qualifierait ça de stoff de junior. Déjà, avec une rémunération de plus du double de la
moyenne de leurs commettants, certains citoyens considèrent que ce sont les
députés qui en demandent trop. Comment ne pas comprendre nos concitoyens et
concitoyennes qui considèrent qu'il y a
problème avec le mode de fixation actuel de rémunération des députés et qui
craignent qu'il y ait exagération? Avec
le niveau de confiance actuel envers les élus, on joue avec le feu, M. le
Président. Et, pour les travailleurs d'ABI, le PM ne trouve pas
raisonnable de vouloir conserver sa rémunération par le biais d'une entente
négociée dans un contexte équitable, alors
comment peut-il aujourd'hui nous dire qu'il est raisonnable que les députés
fassent la même chose pour ajuster leurs salaires au taux octroyé?
M.
le Président, nous ne nous opposons pas à ce que le salaire des députés soit
révisé, mais peut-être lui, le premier ministre,
peut-il faire un compromis et se rallier à notre proposition de confier la
question à un comité neutre indépendant et dont les recommandations
seraient exécutoires? Voilà pour le petit exercice, M. le Président.
J'aurais
deux autres points en lien avec l'intervention aujourd'hui sur ce dossier-là.
Le premier, c'est : une des premières
choses que j'ai eu à faire ici, lorsque je suis arrivé en novembre, peu après
notre élection, ça a été d'aller écouter les détails d'une présentation sur un rapport qui concernait la
rémunération des juges. Et ça a été assez instructif, je ne connaissais pas ce système-là. Et on s'est fait
expliquer assez bien qu'il y a donc évidemment séparation des pouvoirs entre le pouvoir législatif exécutif et le pouvoir
judiciaire. Pour cette raison, ce n'était pas le législatif, c'est-à-dire nous,
ici présents, qui votons le salaire des
juges. En même temps, ce ne sont pas, donc, les juges eux-mêmes qui se
décrètent leurs propres salaires,
leurs propres conditions de travail. Donc, qu'est-ce qu'il se passe? Bien, il
se passe quelque chose d'intéressant. Il se passe qu'il y a un comité
d'anciens juges, des ex-juges à la retraite, qui est formé, qui ont la tâche
d'entendre des représentations de l'association des différentes cours, des
différents types de juges qui leur font des représentations
en lien avec leurs conditions de travail, ce qu'ils souhaiteraient, etc. Ils
font des comparaisons et ensuite ils
font un rapport où ils décrètent les conditions de travail des juges. Donc, ce
ne sont pas les juges eux-mêmes, malgré la séparation des pouvoirs, qui
décident de leurs propres salaires, de leurs propres conditions de travail.
Et,
dans cette Chambre, alors que je suis
responsable du dossier de la justice pour ma formation politique, j'étais
appelé à commenter ce dépôt-là, cette
motion-là qui était déposée par la ministre de la Justice. Et, dans mon intervention, j'ai fait un parallèle, donc
je disais que c'était un système intéressant, qui pourrait nous faire réfléchir sur la façon
dont nous-mêmes, ici, les députés,
déterminons notre salaire. Et, au moment où je faisais ce parallèle-là, plusieurs
des collègues des
différentes formations politiques ont hoché de la tête en disant : C'est vrai,
c'est intéressant. C'est quelque
chose qui pourrait nous alimenter dans notre réflexion.
C'est un peu triste qu'aujourd'hui ces hochements de tête là ne se transforment
pas en une conversation plus en détail sur
la proposition qu'on met sur la table, parce qu'il y a
lieu, en effet, de se poser la question de l'indépendance des députés
quant au décret de leurs conditions de travail.
Et
mon deuxième exemple que je veux utiliser, M. le Président, parvient de mon expérience. Avant d'être élu ici, le 1er octobre, j'étais un conseiller syndical,
c'est l'essentiel de mon parcours professionnel jusqu'à aujourd'hui, M. le Président, j'étais dans le milieu syndical. Et les grandes
centrales, bien sûr, sont des employeurs, j'étais, donc, moi-même
un employé de la centrale syndicale, de la
FTQ, pour la nommer, et, à titre de conseiller syndical, j'avais un syndicat.
Bon, ça commence à être un peu
kafkaïen, mais les conseillers syndicaux ont un syndicat, eux autres aussi, et
on avait, donc, une relation
patron-employé avec les élus, le président, le secrétaire général de la FTQ.
Donc, tout ça, c'est normal, c'est assez standard dans plusieurs
milieux de travail. Mais donc il y avait une relation, une convention collective, il y avait un échange.
Mais qui détermine les conditions de
travail de la tête de la centrale syndicale,
des élus de la FTQ? Bien, je vous apprends
peut-être, M. le
Président, que ce ne sont pas
eux-mêmes qui se lèvent le matin, le président, le secrétaire général de la FTQ, et qui décrètent eux-mêmes leurs conditions de travail. Il y a un processus, avec des membres du syndicat, soit nommés de la base ou avec des gens de
l'externe qui sont à la retraite et qui entendent des représentations, qui font des comparatifs et qui déposent un rapport
concernant la hausse de rémunération des dirigeants en séance, dans les
instances, pour que ça soit ratifié par les membres.
Donc, dans
une organisation démocratique comme celle-là, comme un syndicat l'est, les
élus, qui sont élus par la base, ne
décrètent pas eux-mêmes leurs conditions de travail. Donc, un parallèle
intéressant qui est à faire ici, avec des adaptations,
bien sûr, ce n'est pas la même réalité. Mais, encore une fois, nous, comme élus
du peuple québécois, auquel nous sommes redevables, il y a quelque chose
à se poser comme question que nous soyons tout seuls à décréter nos conditions de travail. Il faudrait certainement
s'intéresser à d'autres manières de faire. On a un amendement qui est sur la
table, on a des choses qui sont débattues,
je pense qu'il y a là une porte ouverte, mon collègue de Gouin tantôt parlait
de la tempête parfaite, je suis d'accord avec lui, bien sûr.
Et je
terminerais en faisant un petit clin d'oeil au passé. On a référé au fait que
ça faisait depuis les années 70, si je ne
me trompe pas, que ce débat-là est dans cette enceinte et qu'on n'arrive jamais
à la conclure à la direction que tout le monde pense consensuelle,
c'est-à-dire un comité indépendant et exécutoire.
Mais moi, je
demeure un optimiste, M. le Président, et alors que je prenais conscience de la
vie politique et de ses enjeux, je
m'étais fait à l'idée que, de mon vivant, je ne verrais jamais le nouveau CHUM.
Or, il est construit à Montréal, on
peut y aller, j'y suis d'ailleurs allé il y a quelques semaines pour une
intervention d'une personne que je connais. Je ne pensais pas, de mon vivant, voir la 30. Or, en
Montérégie, la 30 est bel et bien construite, je l'utilise régulièrement pour
aller voir ma famille dans le Suroît. Donc,
on ne pensait jamais voir le mode de rémunération des députés être réformé,
j'y crois, M. le Président, je le verrai de
mon vivant, alors j'espère que ce sera peut-être pendant cette législature.
Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. D'autres interventions? Mme la députée de Mercier.
Mme Ruba Ghazal
Mme
Ghazal : Merci, M. le Président. J'espère qu'aussi de mon vivant on va
pouvoir voir peut-être des lignes de métro bleue, et rose, et d'autres
couleurs.
Donc, quelque
temps après mon élection, j'ai eu le plaisir d'être nommée whip par ma
formation politique, et ce plaisir-là
s'accompagne par le fait que je siège au Bureau de l'Assemblée nationale. Et,
très rapidement, après quelques réunions au Bureau de l'Assemblée
nationale, donc à l'automne passé, on a commencé à discuter de la question des allocations des députés, donc de les compenser, de
compenser l'imposition fédérale de la portion des allocations qui ne l'était pas. Et, en tant que nouvelle députée,
honnêtement, ça ne faisait pas très longtemps que j'ai appris qu'on recevait
un montant dans notre compte en banque
régulièrement et que ce montant-là, bien, il n'était pas imposé. J'étais
extrêmement étonnée et je suis certaine de ne pas avoir été la seule. C'est la
même chose, il y a beaucoup, dans cette législature, de nouveaux députés, de nouvelles députées qui ont eu
la même surprise que moi, parce que, dans la population, même si on parle du
salaire des députés dans les médias de temps en temps, souvent de façon
négative, ce genre de détail là échappe à la population et échappait
même à moi-même avant d'être élue.
• (15 h 10) •
Et donc, même
juste pour illustrer cette incompréhension-là de ces montants-là, ne sachant
pas exactement à quoi ça sert, je me rappelle, lors de la journée
d'accueil, il y avait... donc, on était là puis on se faisait expliquer
nos conditions de travail, et il y
avait même des collègues qui, aujourd'hui, sont ministres, à l'époque, ils ne savaient pas qu'ils allaient
l'être, ils ont posé beaucoup
de questions pour comprendre à quoi servait ce montant-là. Pourquoi est-ce qu'on
l'a? Pourquoi, par exemple, on ne le déclarait pas comme une dépense? Parce
que, venant du monde de travail ordinaire, si je peux dire, bien, c'était tout à fait normal que, quand
on a des dépenses, qu'on les déclare puis, après ça, qu'on réclame le remboursement, c'était dans la logique des choses, c'était habituel.
Mais,
avec le temps, après ça, bien, on s'est habitués, on a des montants qui sont
destinés à des dépenses particulières, que ce soit le transport ou
d'autres dépenses de représentation que notre travail nous amène à faire, et
qui ne sont pas imposés, pas du tout. Même qu'au fédéral, si le fédéral a
décidé maintenant de dire : Bien, on va arrêter cette vieille pratique là puis on va l'imposer... parce que,
pour eux, la logique, c'est que ce n'est pas juste des dépenses, que des
dépenses directes, mais c'est un salaire, c'est considéré comme un
salaire.
Donc, on peut
comprendre que ce soit une surprise aussi pour la population générale, qui ne
le savent pas d'ailleurs qu'on ne se
fait pas imposer, peut-être que ce débat-là qu'on a va allumer une lumière dans
la tête des gens en disant : Oups! O.K. Les salaires... reçoivent
des montants d'argent pour lesquels ils ne sont imposés.
Donc, ça, ce
n'est pas une anomalie. Tout à l'heure, j'entendais le leader du troisième
groupe d'opposition qui disait que c'était une anomalie, le fait qu'on
reçoive moins d'argent et qu'il fallait la corriger. En fait, ce qui est une anomalie, c'est plutôt le contraire, c'est le fait
qu'on ne soit pas imposés pour un montant qu'on reçoit dans notre compte
en banque.
Donc, pour me
préparer à cette discussion-là, j'ai pris connaissance des débats, des
discussions qui ont eu lieu dans la
législature passée, et je ne vais pas les résumer, mon collègue le député de
Gouin l'a très bien fait tout à l'heure. J'ai aussi eu le plaisir de lire le
rapport L'Heureux-Dubé, et j'invite vraiment sincèrement tous les députés que
cette question-là intéresse, qui se
demandent pourquoi aujourd'hui on est encore à discuter de notre salade et
pourquoi est-ce qu'on est imposés au
fédéral, pas au provincial, et tout ça, de le lire parce que ça trace vraiment
un très, très bel historique, ou peut-être aussi d'écouter
l'enregistrement de l'allocution du député de Gouin.
Donc, suite à
ces discussions-là, c'est là que j'ai déposé une lettre, et je vous invite
aussi à en prendre connaissance, ceux
qui ne sont pas membres du Bureau de l'Assemblée nationale n'ont peut-être pas
lu cette lettre-là, dans laquelle on disait :
Très bien, on va faire ce compromis-là d'accepter d'augmenter nos salaires pour
ne pas avoir à subir l'effet de l'impôt du fédéral, mais à une
condition, une condition dans laquelle on va être très, très sérieux, c'est de
mettre en place ce comité exécutoire,
décisionnel et pas seulement de dire : On aimerait bien le mettre en
place, parce que ça, ça a été nommé,
ça a été nommé aussi dans les anciennes législatures, ça a été nommé dans tous
les rapports d'experts qui ont étudié la question, mais pas seulement
une intention, mais que ce soit réellement un comité qui soit mis en place.
Puis, si ce n'est pas possible
légalement à cause des lois actuelles... parce que, si ce comité-là prend des
décisions, comme aussi je l'ai
entendu tout à l'heure dans les autres interventions, le comité prend des
décisions, il arrive en Chambre, et
il va falloir que nous, on décide si on entérine ces décisions-là ou pas, bien,
il est possible qu'on n'ait pas à toucher à ces décisions-là, ne serait-ce qu'en changeant la législation, et, dans
le projet de loi n° 19, de mettre explicitement un article qui dit que ce comité-là sera mis en place et que
les députés, nous n'aurons plus de droit de regard une fois qu'il aura émis
ses décisions et ses recommandations, parce
qu'il sera exécutoire. Mais, évidemment, avant, ce comité va faire tout le
travail de consultation qui doit être fait pour comprendre la réalité du
travail des députés.
Et
d'ailleurs, moi, je tenais aussi à prendre la parole aujourd'hui parce qu'il y
a quelques députés, sachant que je
suis intervenue quand je siégeais au bureau... bien, pendant que je siégeais au
Bureau de l'Assemblée nationale et que ce
sujet-là était à l'ordre du jour, qui sont venus m'interpeler, qui m'ont
dit : Mais nous, on habite dans des circonscriptions très, très
grandes. On fait énormément de kilométrage, et même le montant qu'on reçoit
actuellement, non imposé, c'est-à-dire même
s'il n'y avait pas l'impôt fédéral, il n'est pas suffisant, il n'est pas
suffisant, on dépasse largement. Et honnêtement
je le dis, en toute honnêteté : Moi, j'ai beaucoup d'empathie pour cette
situation-là, et je la comprends, même si,
moi, je vis dans une circonscription à Montréal, j'ai aussi notre députée, la
collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue,
qui, aussi, vit la même chose, qui a
beaucoup de déplacements à faire, parce qu'elle a une très, grès grande
circonscription avec deux bureaux,
donc c'est tout à fait compréhensible. Même, je dirais même qu'il faudrait
peut-être même augmenter ce montant-là s'il n'est pas suffisant pour les
députés qui vivent cette situation-là.
Donc,
l'idée, ce n'est pas de faire de la démagogie,
de dire que nous, bien, on va juste politiser le sujet, pas du tout, ça fait 40 ans qu'on vit avec ce
sujet-là. Malheureusement, comme je l'ai dit à mes collègues qui m'ont
interpelé, il y a peut-être des décisions, pour toutes sortes de
raisons, je ne vais pas jeter le blâme aux députés des anciennes législatures
ou au ministre, je ne vais pas leur jeter le blâme pour toutes
sortes de raisons comme ce qu'on est en train de vivre en ce moment,
mais ils repoussaient cette décision-là, cette responsabilité-là à plus tard,
et c'est ce qui fait qu'aujourd'hui on est encore en train d'en parler.
Donc,
l'idée ici, derrière ça, c'est de le régler parce que, là, aujourd'hui, ça va être l'impôt fédéral, demain, ça va être, peut-être, autre chose, après-demain, ça va être une autre
situation. Il va toujours avoir des raisons qui vont faire...
On
a parlé aussi de la conciliation travail-famille, parce que ça évolue, on a beaucoup
plus de femmes dans cette législature. Les pères aussi, les nouveaux jeunes pères
aussi vont vouloir en bénéficier. Et, à chaque fois, il va y avoir des besoins différents parce que, dans une législature
à travers les années, la réalité change, et nos conditions de travail n'en
tiendront pas compte. Et il va falloir que
nous, on décide à la pièce de les changer pour qu'on en tienne compte à chaque
fois.
Et,
à chaque fois, il va avoir ce malaise. Il va avoir aussi cette incompréhension
dans la population. Parce que, dans
la population, quand ces genres de décisions là sont prises, à moins que
quelqu'un regarde textuellement tous les débats qu'on a eus, qu'il voit que tout le monde est de bonne foi, ce que
moi, je suis sûre, ça passe très mal, très, très, très mal. Essayez d'expliquer, dans un souper de
famille, votre salaire, essayez de l'expliquer, puis les gens ne comprendront
pas pourquoi
nous, on n'est même pas imposés au niveau provincial, alors que... Hier, je me
rappelle, pour RénoVert, lors de la
discussion sur la motion du mercredi, on parlait aussi que RénoVert, un des
avantages qu'il avait, c'est qu'il permettait
d'éviter le travail au noir, et donc pour que l'État puisse percevoir des
taxes. Donc, on s'attend... et le ministre des Finances avait dit : Bien, on s'attend à ce que les citoyens...
on n'a pas besoin d'un programme RénoVert pour que les citoyens fassent leur devoir de citoyen qui
est de payer leurs taxes. Ça, c'est leur obligation, et je m'attends à ce que
les citoyens le paient. Bien, c'est
la même chose, les citoyens s'attendent à ce que nous aussi, on ait les mêmes
conditions puis qu'on n'ait pas de privilège qu'eux n'ont pas. Eux, le
seul pouvoir qu'ils ont, c'est de négocier leur salaire pour améliorer leurs conditions, mais ce ne sont pas
eux et elles à la fin qui prennent la décision, et c'est tout à fait une
question de transparence, et de justice, et d'équité avec le reste de la
population.
Quand
on fait des sondages, j'en parlais aussi tout à l'heure avec un collègue
député, par rapport au métier, on n'arrive pas en haut de la liste, et
ce n'est pas pour rien. Ce n'est pas pour rien. Et, malheureusement, ce genre
de décision là qu'on va prendre maintenant,
même si elle est explicable puis on peut l'expliquer, le fait qu'on ne veuille
pas mettre dans le projet de loi...
et qu'on se contraigne dans le projet de loi que ce comité exécutoire soit mis
en place puis que nous, on enlève les mains des conditions de travail,
bien, si on ne le fait pas, ça ne démontre pas notre sérieux, bien, le cynisme dans la population ne va faire
que s'agrandir, s'agrandir et s'agrandir, et ce n'est pas une bonne chose pour
nous et pour notre démocratie.
Je
voudrais terminer avec un dernier point, qui est la fierté, la fierté qu'on a
de siéger, ici, au salon bleu. Je suis sûr que les nouveaux comme les
anciens députés, vous sentez cette fierté-là de dire que nous, on est des
représentants du peuple, qu'on est là, qu'on
a une charge, une fonction qui est très, très humble, qu'on ne fait pas ça
uniquement pour l'argent ou pour la
gloire, j'espère, mais on le fait vraiment pour les bonnes raisons. Et moi, je
la sens, cette fierté, je la sens aussi auprès de mes collègues de tous les partis. Et ce qui est important,
c'est que... c'est important aussi, si on veut que les gens aussi soient aussi fiers de nous, de notre
travail, il faut que nous aussi, on soit fiers de ce qu'on fait puis qu'on le
démontre. Et c'est par des gestes comme ceux-là qu'on peut le démontrer.
Si
on regarde ce qui se fait ailleurs, neuf parlements sur 14 au Canada disposent
d'un comité de rémunération qui soit
indépendant et exécutoire. Il y en a d'autres qui ont d'autres sortes de
comités qui sont mis en place de façon temporaire. Moi, j'aimerais ça qu'on fasse partie... qu'on
soit à l'avant-garde, qu'on ne soit pas parmi les derniers et qu'on suivre...
qu'on regarde ce que les autres font et
qu'on ne soit pas fiers. J'aimerais ça que nous, on fasse, cette fois-là, avec
ce projet de loi, de le modifier, de
ne pas le voter tel qu'il est mais de mettre la condition que j'ai adressée au
Bureau de l'Assemblée nationale, avec
ce comité exécutoire, qu'on le mette en place puis qu'on soit fiers puis qu'on
soit à l'avant-garde dans notre Assemblée nationale. Je pense que les
gens s'attendent à ça.
Donc,
après 40 ans de tergiversations, cette Chambre a l'occasion de marquer
l'histoire en étant la première à légiférer pour qu'une fois pour toutes on n'ait plus jamais à décider à la pièce de
nos conditions de travail. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M.
Picard) : Merci, Mme la députée. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, je vais mettre aux
voix.
Donc,
le principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur
les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la suite de
l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada
est-il adopté? Oui, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Nadeau-Dubois : On va demander un vote par appel nominal, s'il vous
plaît.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Que l'on appelle les députés.
• (15 h 20
—
15 h 30)
Le Vice-Président
(M. Picard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci.
Mise aux voix
Nous
allons maintenant procéder à la mise aux voix du principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les
conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée
nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le
Parlement du Canada.
Que les députés en
faveur de cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Jolin-Barrette (Borduas),
M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay),
M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée
(Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge
(Chambly), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau),
Mme Lachance (Bellechasse),
M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson),
M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest
(Chicoutimi), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François),
M. Dufour (Abitibi-Est),
Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin
(Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond),
Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger
(Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle),
M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois),
Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin
(Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest),
M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin
(Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours
(Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau),
M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques
(Mégantic).
M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão
(Robert-Baldwin), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce),
M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys),
M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard),
Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil),
Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé),
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis),
M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti
(Jeanne-Mance—Viger),
Mme Sauvé (Fabre), M. Ciccone (Marquette).
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski),
M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine).
Le
Vice-Président (M. Picard) : Que les députés contre veuillent bien se
lever.
Le
Secrétaire adjoint : M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal
(Mercier), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla
(Laurier-Dorion), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion
(Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).
Le
Vice-Président (M. Picard) : Y a-t-il des abstentions? M. le
secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 83
Contre :
7
Abstentions :
0
Le Vice-Président
(M. Picard) : Le principe est adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission des institutions
M.
Schneeberger : Oui. Alors, M. le Président, conformément à
l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 19, Loi
modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des
membres de l'Assemblée nationale à la
suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada,
soit déféré à la Commission des institutions pour son étude détaillée.
Mise
aux voix
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Adopté. M. le leader du gouvernement, pour la suite de nos travaux.
M.
Schneeberger : Oui.
Alors, M. le Président, veuillez appeler l'article 8 du feuilleton.
Projet de loi n° 21
Reprise
du débat sur l'adoption du principe
Le
Vice-Président (M. Picard) : À l'article 8 du feuilleton,
l'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2019 sur
l'adoption du principe du projet de loi n° 21, Loi sur la laïcité de
l'État. Y a-t-il des interventions?
Je vais suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 34)
(Reprise à 15 h 35)
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Donc, nous reprenons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 21, Loi
sur la laïcité. Hier, lorsque nous avons terminé, il restait
21 min 13 s à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. La
parole est à vous, Mme la députée.
Mme
Hélène David (suite)
Mme
David : Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, hier, on a
quand même fait un 40 minutes pour un projet de loi d'une très, très, très grande importance. On a parlé
des signes religieux, juste pour se remettre un peu en mémoire, des imprécisions, des incohérences, du
manque de balises du projet de loi n° 21, de
l'inapplicabilité du projet de loi au
réseau de l'éducation, aux fonctionnaires, de l'interdiction aux enseignants et
enseignantes, évidemment de la notion
de prosélytisme, d'endoctrinement, de la Loi sur l'instruction publique, du
Programme de formation de l'école québécoise, qui balise et sanctionne les
enseignants qui tenteraient d'endoctriner les élèves. On a touché à beaucoup,
beaucoup de points. Nous étions rendus à un point important, et non le moindre,
qui est le recours à la disposition de dérogation.
Alors, il est
clair, M. le Président, que nous ne sommes pas d'accord avec de nombreux
aspects de ce projet de loi, mais le plus choquant et inquiétant demeure
l'utilisation, aux articles 29 et 30, de ce qu'on appelle la clause
dérogatoire. Alors, ce faisant, le
ministre choisit de soustraire son projet de loi au contrepoids essentiel des
tribunaux. Le gouvernement aime dire
que son projet de loi est démocratique, car appuyé par la majorité, mais la
démocratie comme nous la connaissons, ce
n'est pas que le pouvoir de la majorité, c'est aussi la protection des
minorités et le droit fondamental — fondamental — de s'adresser aux tribunaux.
Le
gouvernement banalise l'utilisation de cet outil exceptionnel en répétant le
plus souvent possible que ce genre de clause fut maintes fois utilisée
par le passé. Mais il passe trop souvent sous silence que les exemples donnés
par le gouvernement réfèrent à des
dérogations techniques préventives qui ne sont pas contestées et qui
passeraient le test de l'article 1
de la charte. Plusieurs estiment d'ailleurs que l'adoption d'une clause
dérogatoire de cette importance, sans l'unanimité, je le répète, sans
l'unanimité de l'Assemblée nationale, marquerait un précédent très, très
important.
«De même, la
Commission [des droits de la personne et de la jeunesse] a précisé que le
recours à la clause dérogatoire de la
charte constituait un geste grave — ce sont leurs mots — qui ne doit être entrepris qu'avec la plus
grande circonspection et qui n'est justifié que dans des circonstances
exceptionnelles.
«[...]Le
recours à la clause dérogatoire devrait notamment être justifié par la
nécessité de protéger d'autres droits ou
libertés reconnus. Ce fut d'ailleurs le cas de la majorité des dérogations à la
charte québécoise survenue depuis son adoption.
La commission a ainsi répertorié 35 lois qui, depuis l'adoption depuis
1975, ont inclus une clause permettant de déroger à la celle-ci.
«[...]Pour
les fins de son application, le projet de loi n° 21 envisage plutôt la
suspension des droits protégés aux articles 1
à 38 de la charte sans qu'on ait démontré que la situation exigeait un geste
d'une telle gravité. Au contraire, les données dont dispose la
commission eu égard aux demandes relatives à la liberté de religion, au droit à
l'égalité ou à l'obligation d'accommodement
raisonnable démontrent que la charte répond adéquatement aux problèmes qui
peuvent survenir ponctuellement en
cette matière et assure la protection du droit à l'égalité comme des autres
droits qu'elle garantit.
«Le recours à
la clause dérogatoire apparaît en outre difficilement justifiable en regard des
objectifs poursuivis par le projet de
loi n° 21. [...]le principe de laïcité est au Québec interprété comme un
moyen visant deux finalités, à savoir la protection du droit à l'égalité
puis la liberté de conscience et de religion protégés par la charte.
L'article 2 du projet de loi n° 21
le confirme d'ailleurs. Devoir déroger aux droits protégés par la charte afin
d'assurer la laïcité de l'État québécois
semble donc contradictoire avec les finalités mêmes de ce principe. Cela
illustre plutôt que les moyens choisis pour
mettre en oeuvre la laïcité de l'État ne correspondent pas à ses finalités et
qu'ils le traduisent de façon erronée. Le même commentaire s'applique d'ailleurs à propos de la primauté des
dispositions du projet de loi n° 21 prévue à l'article 11 de
celui-ci. Les articles 11 et 29 du projet de loi permettraient ainsi de
faire prévaloir ses dispositions sur toutes lois postérieures à son adoption ainsi que sur la
charte. L'effet pratique de ces articles serait d'écarter les dispositions de
la charte qui ont permis d'assurer la
laïcité de l'État et de confirmer l'effectivité juridique de celle-ci. En fait,
le projet de loi propose d'affirmer
la laïcité de l'État de façon concurrente au modèle actuel de laïcité
respectueux des droits et libertés, sans
égard aux problèmes de cohérence que cela pourrait entraîner quant à la mise en
oeuvre des principes sur lesquels elle se fonde.»
• (15 h 40) •
Le Pr Louis-Philippe Lampron indique aussi avec
justesse : «...ce que je tente de mettre de l'avant — je le
cite — [c'est qu'il] est insuffisant de référer à
la simple majorité de la population pour être capable de justifier toutes les
mesures législatives. Ça, c'est l'esprit même des droits et libertés fondamentaux, et les droits et libertés
fondamentaux, ça ne se résume pas à
la Charte canadienne des droits et libertés. Alors, on peut, bien sûr, avoir
des problèmes avec la légitimité d'application
de la charte canadienne au Québec en raison du fait que le Québec n'a toujours
pas signé la Constitution de 1982,
mais les droits et libertés de la personne, ça va beaucoup plus loin que ça et
ça s'inscrit dans un processus international qui implique un socle de
légitimité en deçà duquel on n'est pas censé être capable d'aller, même si on a
l'appui de la population, et ça, ça implique l'examen des décisions par un
tiers indépendant.» Cette citation devrait être mûrement réfléchie, M. le
Président.
Dans son mémoire présenté à la commission, le
professeur de droit Pierre Bosset faisait remarquer que les articles 29 et 30 ne faisaient pas que
déroger au droit à la liberté religieuse, mais également à l'entièreté des
droits et libertés protégés par la
charte québécoise. «Québécoise». Comme il le souligne si bien : «La liste
des droits et libertés touchés par
cette dérogation donne le vertige.» «Donne le vertige». Je le cite :
«L'ampleur des dérogations prévues dans le projet de loi est hors de proportion par rapport à
l'objectif de celui-ci : "affirmer la laïcité de l'État et préciser
les exigences qui en découlent".
Elles affectent des droits ou libertés dont l'exercice, on le voit, ne menace
aucunement de compromettre la laïcité. Il n'est pas inutile de noter
que, lorsque des dérogations ont été faites dans le passé au nom d'intérêts
jugés supérieurs, en l'occurrence la protection du visage français du Québec
dans l'affichage commercial — on y réfère souvent — ces
dérogations se sont limitées aux droits les plus pertinents et ne visaient pas
alors l'ensemble des droits auxquels
il serait théoriquement possible de déroger. Le projet de loi n° 21 n'a
pas ce sens de la mesure.» Je cite toujours Pierre Bosset.
Le Pr Pierre
Bosset nous disait, sagement, que recourir à la clause dérogatoire était une
forme de monologue, que le
gouvernement refusait ainsi tout dialogue entre le pouvoir politique et
judiciaire. Comme plusieurs groupes entendus ou experts qui se sont exprimés depuis le dépôt du projet de loi, nous
considérons que l'inclusion de ces clauses dans le projet de loi est l'aveu de son
inconstitutionnalité. Si ce n'est pas le cas, que le gouvernement accepte de
redonner ces droits aux citoyens et soumette rapidement son projet de
loi à la Cour d'appel par le processus de renvoi. Sinon, nous considérons que le ministre admet qu'il viole les
droits fondamentaux que cette même Assemblée a votés pour ses citoyens
et ses citoyennes, et ce, à l'unanimité en juin 1975.
Vous savez,
faire le choix du vivre-ensemble, de l'acceptation et de l'ouverture, c'est
probablement un choix plus exigeant que celui de prôner l'interdiction,
M. le Président. Oui, s'ouvrir à l'autre dans tout ce que cela implique de nouveauté, de curiosité, mais aussi d'inconfort,
voire quelquefois de malaise, c'est probablement un choix plus exigeant que prôner l'interdiction, mais c'est un noble
choix. Alors que beaucoup de sociétés sont actuellement traversées par des
positions d'exclusion et d'intolérance, les
choix que nous faisons ne sont pas banals. Les opinions passent, mais les
chartes et leurs droits fondamentaux traversent le temps et les
décennies.
Dire que
le gouvernement est légitime de légiférer sur la laïcité, c'est une démarche de
laquelle on peut tous convenir, mais
c'en est une autre de prétendre que c'est légitime de le faire de façon
précipitée, sans cohérence épistémologique ni fondement solide avec un
recours à la disposition de dérogation.
Je suis inquiète des conséquences qu'aura ce
projet de loi sur les minorités. Je suis très inquiète. Certaines dispositions risquent de contribuer à une
détérioration du climat social déjà difficile par moments. Il envoie des
messages inquiétants sur la place que
notre société accorde aux femmes. La CSN nous a dit s'inquiéter d'un repli, un
retour à la maison de certaines
femmes qui participent actuellement pleinement à la société, et, finalement, à
une certaine forme de ghettoïsation de certaines communautés.
Donc, ce que
le projet de loi essaie de combattre, il risque fort bien de l'accentuer
lui-même. Le projet de loi du ministre
a d'ailleurs commencé à produire des effets. Le groupe Justice Femme a constaté
une augmentation anormale des
incidents ainsi qu'une détérioration du climat social. Elle a reçu un nombre
inquiétant de plaintes et d'appels depuis le dépôt du projet de loi n° 21, allant des regards méprisants ou
agressions verbales, passant par des cas de harcèlement au travail, allant jusqu'à l'agression physique,
et ce, même dans des milieux de travail qui ne sont pas visés par le projet
de loi. La CSN, en commission parlementaire,
a mentionné que plusieurs de leurs membres leur ont rapporté que,
quand le débat sur la laïcité recommence, elles sont stigmatisées, elles reçoivent des injures, et
c'est très difficile à vivre.
Donc,
juste le fait d'en débattre crée une stigmatisation de ces femmes, imaginons
quand la loi sera adoptée et que des femmes vont se faire refuser certains emplois ou quand, et je le
crains fort, il y aura confusion dans la population quant à
savoir quels types d'emplois couvre le projet de loi.
L'introduction
de mesures discriminatoires additionnelles à l'entrée en emploi en éducation aura pour effet de créer une fracture sociale et du ressentiment dans
les communautés ainsi marginalisées pour des décennies à
venir. Même si le projet de loi ne vise que certains secteurs d'emploi, il semble
ouvrir la porte à beaucoup plus d'hostilité à l'égard des femmes qui portent le voile et qui ont déjà beaucoup de difficultés à trouver
un emploi à la hauteur de leurs compétences. Il est
indéniable que ce projet de loi aura
des impacts majeurs pour très longtemps.
J'interpelle
à nouveau le ministre et la ministre de la Condition
féminine — j'ai bien essayé — pour qu'ils prennent conscience de
l'importance que leur projet de loi aura sur les femmes du Québec. L'emploi est
le meilleur facteur d'intégration
sociale et d'autonomie. Pourtant, le gouvernement s'apprête à en limiter
l'accès. Je réitère encore une fois que
je demande, comme plusieurs groupes, d'ailleurs, notamment la CSN et la ville
de Montréal, que le gouvernement réalise une ADS, une analyse
différenciée selon les sexes, sur le projet de loi.
Qu'est-ce que
l'ADS? Petite parenthèse. Le Secrétariat à la condition féminine définit
l'analyse différenciée selon les
sexes comme «un processus d'analyse favorisant l'atteinte de l'égalité entre
les femmes et les hommes par l'entremise des orientations et des actions
des instances de la société [tant]
sur le plan local, régional, national».
La définition
ajoute que l'analyse différenciée selon les sexes «a pour objet de [cerner] de
façon préventive les effets distincts sur les femmes et les hommes que
pourra avoir l'adoption d'un projet à l'intention des citoyennes et [...]
citoyens, et ce, sur la base des réalités et des besoins différenciés des
femmes et des hommes.
«L'analyse différenciée selon les sexes est
[...] un outil qui vise la prévention des inégalités entre les sexes en
proposant une lecture plus éclairée des phénomènes sociaux.
«Le traitement identique des individus — et
ça, c'est important — n'assure
pas nécessairement des résultats similaires :
les lois, les politiques et les pratiques, malgré leur apparente neutralité,
produisent ou maintiennent des inégalités entre les hommes et les femmes. L'objectif de l'analyse différenciée
selon les sexes est d'aller au-delà de l'égalité de droit pour atteindre l'égalité de fait par la mise en
lumière des réalités et des besoins différenciés des femmes et des hommes.
«[L'analyse différenciée selon les sexes] est
utilisée pour comprendre et prévenir le fait que les contextes socioéconomiques, les politiques et institutions
ainsi que les règles organisationnelles peuvent avantager ou désavantager
certains groupes.»
Alors, on est
exactement dans cette situation ici, du projet de loi n° 21,
qui... On l'a dit et redit, et ce n'est pas que nous, beaucoup de groupes sont venus le dire, particulièrement en
enseignement, que les femmes vont être beaucoup plus touchées que les hommes, parce qu'en partant
75 % du corps enseignant, c'est un corps d'enseignantes. Et les
enseignantes sont donc beaucoup plus
touchées, et il y a beaucoup plus, évidemment, de femmes qui, entre autres,
portent des signes plus visibles, et on pense évidemment au hidjab.
• (15 h 50) •
Le
gouvernement nous dit vouloir passer à autre chose, qu'il faut procéder
rapidement, sous prétexte que le débat a
assez duré. D'autres acteurs de la société parlent d'un débat qui a assez
traîné. Et le vivre-ensemble, c'est le fondement même de ce projet de loi, le vivre-ensemble, c'est vieillir ensemble,
c'est rire ensemble, c'est pleurer ensemble, c'est être fier ensemble du Québec que nous construisons pour
l'avenir. Au contraire d'utiliser l'expression, comme on l'entend trop souvent — plus souvent en dehors de la Chambre qu'ici,
d'ailleurs — d'un
«débat qui traîne», utilisons plutôt celle de «débat qui construit», qui
devrait construire. Et, pour cela, aucune date de péremption ne doit être
fixée. Le vivre-ensemble est et a
été, de tout temps, à toutes les époques et partout sur la planète, un défi
colossal, le défi de l'humanité, celui du passé, mais aussi, et cruellement souvent, celui de l'avenir. Faisons en sorte que le Québec
soit du côté du rapprochement, de l'écoute et de l'humanité, comme il
l'a toujours fait.
Le projet de loi, tel que présenté, apporte une foule de nouvelles questions sur
lesquelles la société et les parlementaires ne se sont pas penchés jusqu'ici. Il est profondément faux de prétendre
que l'adoption de ce projet de loi dans la hâte va mettre fin au débat. Le gouvernement
sait très bien qu'il s'engage dans des années de débats judiciaires.
Le gouvernement est majoritaire. Le ministre est décidé. Ce projet de loi sera adopté
coûte que coûte. Nous allons jouer
notre rôle de parlementaires adéquatement et jusqu'au bout. Nous avons entendu
la voix des gens inquiets. Nous savons
que ce projet de loi comporte des lacunes importantes. Nous ferons
tout, tout en notre pouvoir pour amoindrir ses effets, pour faire de ce projet
de loi un projet de loi le moins restrictif possible pour nos droits
fondamentaux, pour protéger l'égalité
hommes-femmes, pour s'assurer que notre État demeure un endroit accueillant et
ouvert à l'autre, où tous les enfants ont une chance égale et peuvent
partager les mêmes rêves. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Merci. Est-ce
qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Jean-Lesage.
M.
Sol Zanetti
M. Zanetti :
Merci, M. le Président. Ce projet de loi là, ce n'est pas un projet de loi sur
la laïcité, en fait. Je ne suis pas
le seul à dire ça. Certains intervenants l'ont dit aussi. C'est un projet de
loi sur l'interdiction des signes religieux. Du point de vue de la laïcité de l'État, ce n'est pas un projet de loi qui
va changer quelque chose de concret, qui va loin, qui fait quelque chose de significatif pour éloigner
le pouvoir politique des institutions religieuses. C'est un projet de loi qui
vise principalement à interdire les signes religieux en prétendant que cela
aura un impact sur la laïcité au Québec, ce qui est une erreur.
Ce projet de
loi là est aussi présenté comme un projet de loi qui est modéré. Dans la
réalité, c'est un projet de loi qui
est radical. Il n'est pas modéré, ce projet de loi là, d'une part parce qu'il
se soustrait à la charte québécoise des droits et libertés de la personne, et
pas à l'unanimité, là, et, clairement, il y aura des dissensions là-dessus. Il
est très loin de ce que proposait le
rapport Bouchard-Taylor, duquel par ailleurs il tente de se réclamer aussi
souvent que possible. Il impose une
interdiction de porter des signes religieux qui touchera beaucoup de
Québécoises et de Québécois. Il va modifier la charte sans l'unanimité
de la Chambre, et, s'il était adopté sous bâillon, on ne peut pas le présumer,
mais ce serait un précédent inquiétant pour le Québec.
Ce projet de
loi là ne fait pas consensus non plus, malgré que ce soit présenté comme ça. Je
vais faire une liste des groupes qui
sont venus en audition nous dire qu'ils étaient contre ce projet de loi là.
Évidemment, on pourrait en nommer bien
plus. Mais il n'y a pas eu tous les groupes possibles qui sont venus non plus
dans les consultations, les audiences publiques.
Mais, si on se restreint à la courte liste de ceux qui sont venus nous exprimer
leur désaccord, bien, on peut nommer la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le Centre
consultatif des relations juives et israéliennes,
l'Association des musulmans et des Arabes pour la laïcité au Québec, les Prs
Charles Taylor et Jocelyn Maclure, M. Gérard Bouchard, Pr
Louis-Philippe Lampron également, l'Organisme de communication pour l'ouverture
et le rapprochement interculturel, la Centrale des syndicats du Québec,
l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec, la ville de Montréal, la Fédération autonome de
l'enseignement, l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, la Confédération des syndicats
nationaux, Me Pierre Bosset, la Fédération des femmes du Québec, la Coalition Inclusion Québec et la
Ligue des droits et libertés. Et j'ajouterais aussi la Fédération des
commissions scolaires du Québec, qui émettait des réserves importantes à
l'égard du projet de loi.
Ces personnes
et ces groupes représentent beaucoup de monde, et, si le projet de loi du
ministre faisait consensus, bien, il
ne susciterait pas tant d'opposition. Si c'était vraiment là qu'était rendue,
là, la société québécoise, de dire : On va faire ça, il n'y aurait
pas eu toute cette opposition.
Un sondage Léger, par ailleurs, publié récemment
nous informait qu'une majorité des Québécois et des Québécoises n'appuieraient
pas l'interdiction des signes religieux si celui-ci brimait les droits de la
personne et contrevenait à la charte québécoise. Or, cette interdiction brime les droits de la
personne et contrevient à la charte québécoise. Et une preuve même que le ministre
reconnaît ça, bien, c'est qu'il veut soustraire son projet de loi à l'application
de la charte des droits québécoise, des droits et libertés.
Alors, ce projet de loi là, il a l'air consensuel, il est représenté comme s'il était modéré,
il ne l'est pas. Et, si on le montrait
vraiment sous son vrai jour, bien, ses appuis fondraient énormément.
Dans le sondage, ce que ça dit, c'est... quand on dit : Êtes-vous pour l'interdiction des signes religieux si ça va à
l'encontre de la Charte des droits et libertés, là, des droits et libertés de la personne?, bien, l'appui
descend de 20 %, et on se
retrouve donc avec quelque chose qui n'a absolument pas les caractéristiques nécessaires pour être
appelé un consensus ou même un mandat fort, ou quoi que ce soit. On dit que, bon, ça va brimer les droits de la personne
et donc qu'il va y avoir des contestations judiciaires qui vont nous en faire
prendre conscience collectivement, même si, en ce moment, il y a des gens qui
prétendent que ce n'est pas le cas.
Si c'était un
projet de loi sur la laïcité, au lieu de focaliser sur ce que les gens
portent, sur les signes religieux, bien,
on aurait parlé d'autre chose. On aurait mis dans ce projet de loi quelque chose qui est vraiment en lien avec la laïcité, c'est-à-dire qu'on aurait remis en question le financement public qu'on accorde à 138 écoles
religieuses subventionnées au Québec,
qui ont une mission de faire un enseignement confessionnel, payé par des fonds publics. C'est
un non-sens qu'un État laïque subventionne
un enseignement qui est religieux. Mais, évidemment, bon, ce n'est pas un
projet de loi qui, nécessairement,
vise la laïcité, donc on ne va pas dans cette direction-là.
C'est vrai
que le débat sur les signes religieux au Québec dure depuis longtemps — donc
je n'ai pas dit ici «laïcité», mais
«sur les signes religieux» — et
beaucoup de gens sont tannés d'en entendre parler, et on
comprend ça parfaitement. On aimerait que ça arrête, on aimerait que la
chicane cesse, on aimerait que les clivages se dissolvent, et ce projet de loi est présenté comme un
antidote à la chicane, comme si on allait adopter ce projet de loi, et que, là,
on allait mettre ce débat-là derrière nous, et qu'on allait pouvoir passer à
autre chose. Mais la réalité est complètement autre.
D'abord,
bien, il y a plein de groupes qui appuient ce projet de loi là qui disent que c'est une excellente première étape. Ensuite de ça,
on va pouvoir aller plus loin, étendre l'interdiction des signes religieux et étendre aussi la privation
des droits qui va en découler. Alors, il
y aura des débats qui vont continuer.
Ceux qui veulent l'interdiction des signes
religieux aujourd'hui, il y
en a beaucoup qui vont dire :
C'est quoi, la prochaine étape? Et par
ailleurs ceux qui vont voir leurs droits brimés par ce projet de loi là, bien, ils ne vont pas s'arrêter là, ils vont, à juste titre,
contester devant les tribunaux, ce projet de loi qui leur enlève des
droits importants. Alors, ça ne se terminera pas là.
Ce qu'on va
faire, là, c'est qu'on va justifier une atteinte aux droits, et puis on va
faire pourrir davantage un débat duquel,
au Québec, tout
le monde est tanné. Et, si ce projet de loi là n'avait pas été déposé, là, bien, il ne se serait pas rien passé de particulier, on n'aurait pas particulièrement parlé de signes religieux parce qu'il n'y a pas de menace
posée au Québec par les signes
religieux. Quand je demandais, dans
les audiences publiques, aux groupes qui soutenaient le projet de loi de me dire quelle était la
menace, là, au Québec, qui est liée aux signes religieux, qu'est-ce qui se
passe si on n'interdit pas les signes
religieux, bien, les réponses étaient souvent confuses et pas très concrètes.
On me parlait des autres pays où il y a
des théocraties, on me parlait de choses qui sont déjà
interdites au Québec, on nous a parlé d'excision, de mariage forcé et, quoi d'autre encore, de crime
d'honneur. C'est surréaliste, je pense qu'il
y a eu une exagération énorme,
ou, disons, une panique par rapport à la question des signes
religieux. C'est comme si on avait
répandu, là, cette insécurité, ici, au Québec, là, que l'égalité entre
les femmes et les hommes était atteinte, alors qu'elle est protégée par les
lois.
• (16 heures) •
Et, à cause
que cette peur-là qui est, tu sais, je veux dire... L'attachement à l'égalité
entre les femmes et les hommes, c'est
essentiel, tout le monde partage ça, ça, c'est un vrai consensus au Québec,
mais, à cause qu'il y a du monde qui fait miroiter que ça, c'est en danger, bien là, tout à coup, on se dit : On se range derrière l'interdiction de signes
religieux, mais c'est une illusion, parce que
ça ne menace pas rien. Et tout ce que les gens qui sont venus en auditions ont
dit qui était menacé, là, un retour
du religieux, une reconfessionnalisation du Québec, bien, ce sont des
choses qui ne nous menacent pas et
qui ne menacent pas la laïcité de l'État québécois. Donc, on dit que
c'est ce que ça va faire. On dit que ça mettre fin à ce débat-là, mais
ça ne mettra pas fin au débat, il va y avoir des contestations judiciaires.
Il y a
aussi des choses qu'on nie, par
rapport à ce projet de loi là, du côté du ministre, là, c'est qu'il va dire que ce projet
de loi là ne touche pas particulièrement les femmes. Il dit : Bien non, regardez, dans le texte, ça
s'applique à tout le monde
égal, cette loi-là ne va pas viser en particulier
une religion ni un genre. Bien, c'est faux de dire ça. C'est vrai que le texte, il est écrit comme ça, mais, si on
analyse les conséquences de l'application de ce projet de loi là, il est clair
qu'il y a des gens, des catégories qui vont
être beaucoup plus visés que d'autres, puis là, bien, on entend, évidemment,
les femmes, les
musulmans. Pourquoi? Simplement parce qu'il y en a plus qui portent des... et
ils sont plus représentés dans le
groupe des Québécoises et Québécois qui portent des signes religieux. Alors,
c'est sûr que ça va viser plus certaines personnes que d'autres, et, le
nier, bien, il y a quelque chose là-dedans qui est injuste.
Il
y a une étude aussi qui a été faite par deux chercheuses de l'Université
Stanford, aux États-Unis, qui a analysé les conséquences de la loi
française interdisant le port du voile qui a été appliquée en 2004 en France.
Parce qu'il y a beaucoup de gens qui
disent : Ah! non, mais ce projet de loi là, il est modéré. Regardez dans
d'autres pays, regardez ce qu'on
fait, regardez la France. Mais, la France, là, ça ne va pas bien. Ça ne va pas
bien en France. Si on disait : Regardez la France, c'est formidable, il n'y a plus de tensions sociales, je veux
dire, il n'y a comme pas de tension interreligieuse, et puis ça, c'est à cause... je dirais : Bon.
Mais ce n'est pas ça qui se passe. En France, après 15 ans d'application de ce
règlement-là, qui, il faut le dire, n'est
pas pareil comme le projet de loi n° 21 — mais il y a des analogies, on interdit des
signes religieux — bien, ce qu'ils disent, c'est que les femmes
qu'on voulait libérer et émanciper avec cette interdiction-là, en réalité, aujourd'hui, bien, elles sont, de
façon générale, moins autonomes. Elles sont plus à la maison, elles travaillent
moins, elles ont plus d'enfants, elles
dépendent plus de leurs maris. Alors, est-ce que c'est ça qu'on veut? Bien, je
pense que personne ici ne veut ça. Je
ne suis pas capable de prêter ces intentions-là au ministre, puis ce n'est pas
une question de règlement, c'est
juste sincère. Je pense vraiment qu'il ne veut pas ça, puis personne ne veut
ça. Mais alors pourquoi est-ce qu'on
le fait? Bon, la question restera en suspens. J'aimerais bien qu'on y réponde
un jour, mais j'aimerais surtout qu'on
n'aille pas dans cette direction-là et qu'on regarde les faits, qu'on regarde
ce que les études montrent par rapport à ces politiques publiques et à
ce genre de politiques publiques là.
Par
rapport au fait que ce projet de loi là touche particulièrement les femmes,
d'ailleurs, on a demandé, nous... mais
pas juste nous, même la ville de Montréal aussi, dont tous les élus se sont
rassemblés contre ce projet de loi là... Ce n'est pas rien, hein? Tu sais, tu ne peux pas dire : Tous les élus
de Montréal sont contre quelque chose, puis tu ne peux pas dire après
ça : Ça fait consensus. C'est presque la moitié de la population du Québec
qui est là, représentée par ces gens-là.
C'est énorme. On ne peut pas dire que ça fait consensus. Et, quand on dit que
ça ne touche pas particulièrement les femmes et puis, là, on dit :
Ah! non, regardez le texte, il n'est pas mention de rien comme ça, bien, alors
pourquoi est-ce qu'on ne fait pas une
analyse différenciée selon les sexes qui soit sérieuse par rapport à ça? À
moins qu'elle ait été faite puis
qu'on ne soit pas au courant. Ça, c'est une autre affaire, il faudrait voir.
Est-ce qu'une analyse a été faite pour affirmer
que ça ne touche pas les femmes plus que les hommes? Est-ce qu'on a vérifié ça
avant de «pondre», je n'ai pas de
meilleur verbe, cette politique publique? Bien, ça serait intéressant qu'on le
fasse. Et, je pense que, si on la faisait, ça ferait réfléchir beaucoup
de monde, et je pense que ça dégonflerait beaucoup l'appui des gens qui
appuient ce projet de loi là pour des raisons féministes.
On
ne peut pas dire : Au nom de la
liberté des femmes, on va appliquer des politiques publiques
interdisant le port de signes
religieux, qui vont réduire leur autonomie et qui vont les discriminer plus que
les hommes. On ne peut pas dire ça, on ne peut pas faire ça avec comme
motivation ou comme raison le féminisme.
Quand,
en commission, on demandait aux gens, pour essayer de saisir le
problème qui justifiait une telle solution, une solution si radicale, on demandait aux gens : Qu'est-ce qui va
se passer, qu'est-ce qui se passe si on n'interdit pas les signes religieux, est-ce que vous avez des
plaintes, est-ce qu'il y a des problèmes comme ça sur le terrain?, et ce
qu'on nous a dit essentiellement, c'est qu'il n'y a pas vraiment de problème avec les signes religieux,
spécialement dans le secteur de l'éducation,
où pourtant il y a beaucoup de personnes qui portent des signes religieux. Donc, entre
2016 et 2019, là, les plaintes liées aux signes religieux déposées par
des parents, des tuteurs, des étudiants et des enseignants, d'autres employés
ou des cadres dans nos écoles, pour la commission scolaire de la Capitale c'est
zéro plainte; pour la commission scolaire de Charlevoix, c'est zéro plainte;
pour la commission scolaire des Premières-Seigneuries, c'est zéro plainte; pour
la commission scolaire des Chênes, du Centre-du-Québec, zéro; pour la commission
scolaire des Rives-du-Saguenay, c'est zéro,
puis on pourrait continuer comme ça longtemps, parce que ce n'est pas quelque chose qui pose problème.
On
a parlé aussi, dans ce projet de loi là, du danger du prosélytisme. On s'est
dit : On fait ce projet de loi là pour la
liberté des femmes, et, après ça, aussi pour éviter le prosélytisme, et au nom
de la liberté de conscience des enfants. La liberté de conscience des enfants, tout le monde est d'accord
avec ça, ça fait consensus, ça, c'est clair. Mais en quoi la liberté de conscience des enfants est-elle mise
en cause parce qu'une de ces enseignantes ou un de ces enseignants porte
un signe religieux? La définition
de la liberté de conscience, là, la voici, juste pour qu'on se rappelle, là...
Dans la charte québécoise des droits
et libertés, là, on dit : Vous êtes libre de choisir... La liberté de
conscience, c'est quoi? C'est : Vous êtes libres de choisir les
valeurs, les convictions et les principes qui guident votre vie. Vous êtes
libres de choisir les principes qui guident
votre vie. En quoi le port d'un signe religieux soutire à
quelqu'un sa liberté de choisir les principes qui guident sa vie? Ce qu'on a eu, les échos du terrain, des gens qui
ont cette expérience-là parce que leurs enfants ont eu des enseignants excellents qu'ils adorent, qui
portaient des signes religieux, bien, essentiellement, ce qu'ils disent,
c'est : Ça les ouvre à la
différence. Et ça veut dire quoi, les ouvrir à la différence? Ça ne veut pas
dire qu'ils vont devenir... à chaque
année, changer de religion comme ils changent de professeurs. Ça veut dire
qu'ils réalisent que cette personne-là devant
eux, qui est, avec elle, avec eux, généreuse, qui veut son bien, qui lui
transmet un savoir, qui éveille sa conscience et sa curiosité à plein de phénomènes, bien, cette personne-là, elle
porte un signe religieux, et puis, bien, c'est un humain comme elle. Elle porte des signes religieux, puis
ça n'en fait pas quelqu'un de bizarre, de fermé, de dogmatique, qui fait
du prosélytisme, qui méprise les valeurs
occidentales, qui est contre la liberté, qui te dit quoi penser. Ça ne fait
rien de tout ça, un signe religieux. Alors, il faut protéger la liberté
de conscience de nos enfants, mais ce n'est pas en ne les exposant pas aux humains autour d'eux qui sont là
dans la société, bien, qu'ils vont être plus libres de choisir les convictions,
les valeurs et les principes qui guident leur vie.
Alors, le
problème de prosélytisme supposé, bien, il n'y en a pas. Et par ailleurs, s'il
y en avait un véritable, si vraiment des enseignantes ou des enseignants
allaient dire aux enfants : Il faut que vous croyiez ça, sinon vous allez avoir des mauvaises
notes, ou encore, s'ils leur faisaient des peurs en disant, je ne sais
pas : Vous allez aller en enfer, ou quelque chose comme ça, bien, ce serait interdit. Il y a des lois qui
empêchent ça déjà, des lois qui n'ont absolument aucun rapport avec l'interdiction des signes religieux.
La liberté de conscience des enfants, là, en ce moment, là, sur ce sujet-là,
elle est protégée au Québec. Et, s'il y
avait une démonstration qu'elle ne l'était pas, évidemment qu'on voudrait faire
des politiques publiques pour ça, mais en ce moment ce n'est pas le cas.
• (16 h 10) •
Ce qui est
particulier aussi là-dedans, là, c'est toute la question du mélange qu'on fait
avec nos relations avec le Canada.
C'est comme si, je ne sais pas, certains commentateurs ont réussi à cadrer le
débat, là, de façon à ce que ça nous donne
l'illusion qu'en interdisant les signes religieux on faisait une affirmation nationale, comme si on allait dégager là, en niant des libertés, un espace de liberté, comme
si on développait un modèle qui était, disons, plus fidèle à ce que nous
sommes et différent de ce que propose le Canada.
Bon, évidemment, c'est différent de ce que propose le Canada,
mais c'est différent de ce que
proposent bien des pays, de toute
façon. Mais moi, j'aimerais amener l'idée
que c'est différent de ce que nous sommes nous-mêmes. Parce que ceux qui
utilisent cet argument-là disent : On va déroger à la Charte canadienne des droits et libertés, et c'est formidable, parce qu'elle nous a été imposée. Ça, je suis parfaitement d'accord avec
ça, la Charte canadienne des droits
et libertés, elle nous a été imposée,
elle n'a pas la légitimité
démocratique que devrait avoir une charte qui est dépositaire de nos
droits, on ne l'a jamais accepté.
Mais on
oublie de parler de la charte québécoise des droits et libertés, qui, elle, est
un acte que nous avons posé nous-mêmes ici, dans cette Assemblée, à
l'unanimité, tous les partis d'accord, en 1975, un rare geste d'unanimité transpartisane, un geste politique, un geste
collectif qui marque notre identité, qui fait de nous ce que nous sommes
vraiment, et, cette charte-là, on est en train d'y déroger et de faire
comme si c'était exactement la même affaire que la Charte canadienne. Mais, en pilant sur la charte
québécoise, bien, on pile sur ce qu'on a fait nous-mêmes, avec un bien moins
grand appui politique ou populaire que ce qu'il y avait en 1975 pour mettre la
charte sur pied. Alors, on n'est pas en train
de se distinguer des autres en faisant ça et de s'affirmer nous-mêmes, on est
en train de se nier nous-mêmes et on est en train de suivre une espèce de tendance qui n'est pas propre au
Québec, une espèce de tendance à vouloir interdire les signes religieux, qui vient d'ailleurs, elle
aussi, de toute façon. Alors, sur cette question-là, je trouve qu'on erre, si
on pense faire un acte d'affirmation nationaliste.
Et, par
rapport à la question du pays que nous voulons former... bon, je sais qu'ici ce
n'est pas l'opinion de tout le monde
encore, dans la salle — un jour, peut-être, ça viendra — mais, même si on est dans un Parlement
provincial avec, juste au-dessus du
président, oui, le crucifix... mais aussi c'est marqué Dieu est mon droit,
puis là il y a comme la couronne britannique,
qui est par ailleurs la chef de l'Église anglicane — ce n'est pas très laïque, ça, non plus — avec une licorne enchaînée, et tout ça, des symboles monarchiques,
bon... bien, même si on est dans cet environnement-là, moi, je considère
qu'on est ici pour préparer le pays et qu'à
un moment donné on va le faire, le pays. Il faut réfléchir à quel genre de pays
on veut. Est-ce qu'on veut un pays où on va
avoir une charte des droits et libertés qu'on respecte, un pays où le peuple
sera souverain, où le peuple sera libre et
où les individus qui le composent le seront aussi ou est-ce qu'on veut un pays
où il y a des gens qu'on va faire se sentir pas à leur place? Parce que
c'est ça qui se passe.
Quand on
parle aux personnes touchées par ce projet de loi là, les femmes qui portent le
hidjab par exemple... c'est probablement
les plus nombreuses, mais on ne peut pas le savoir, parce que le gouvernement
ne veut pas faire une analyse
différenciée selon les sexes, donc il faudrait avoir la certitude de ça, mais
ce qu'on entend, c'est qu'elles sentent qu'elles ne sont pas les bienvenues, et elles se disent : Ça va
être quoi, la prochaine étape? Là, moi, je ne pourrai pas être directrice d'école, par exemple, je ne pourrai pas
aller en enseignement si je n'y suis pas toujours, je ne pourrai pas être
procureure, je ne pourrai pas faire toutes
ces choses-là. Et, en restant au Québec, bien, j'assume que mes filles, si
elles décident de porter un signe
religieux, un jour seront soumises à ces mêmes restrictions. Pourquoi est-ce
que je voudrais limiter leur avenir à
l'avance, d'une part? Puis aussi, le jour où ces enfants-là seront grandes,
bien, quelle autre interdiction sera
venue s'ajouter à ça? Y en aura-t-il d'autres? Et le sentiment qu'on leur fait
vivre... et ce n'est pas notre intention, à personne, ce n'est pas l'intention du ministre, ce n'est pas l'intention
d'aucun Québécois ou d'aucune Québécoise, mais ce qu'on leur fait vivre, c'est un sentiment de rejet et c'est le fait
qu'elles se sentent sur un siège éjectable comme si, là, elles étaient en stand-by, excusez-moi l'expression
latine, et qu'elles n'étaient pas les bienvenues.
Est-ce que c'est un pays comme ça qu'on veut? Bien, non. On veut un pays
où tout le monde se sent bien.
Le Québec,
c'est un endroit au monde qui est extrêmement accueillant, c'est un endroit où on se sent bien,
où on se sent accueillis, où on a des
libertés extraordinaires et c'est un
endroit qu'on est chanceux d'habiter et qui a été construit de manière formidable. Et moi, j'ai l'impression
qu'avec ce projet de loi là on est en train de perdre du terrain là-dessus, on est en train de faire de notre pays en devenir un
endroit qui est moins accueillant, un endroit où on va faire se sentir que
les gens, ils ne sont pas à leur place, et
ça, je suis vraiment très mal à l'aise avec ça, et ce n'est pas juste moi,
c'est beaucoup de monde, beaucoup de Québécoises, beaucoup de Québécois.
Un autre
problème aussi avec ce projet de loi là, c'est la question de l'applicabilité.
Il y a des gros problèmes qui ont
surgi, là, dans les audiences publiques, et on nous a fait bien comprendre que
ça n'allait pas être applicable, entre autres, à cause de la définition absente de ce que c'est, un signe religieux. On
se retrouve dans une situation complètement absurde où le projet de loi
ne définit pas ce qu'est un signe religieux. Donc là, bien, comment est-ce
qu'on va l'appliquer? Si quelqu'un arrive
avec un signe religieux, bien, le directeur d'école va dire : Enlève ton
signe religieux? Et, la personne, si
elle dit : Bien, ce n'est pas un signe religieux, c'est une coutume, c'est
une tradition, c'est une habitude, c'est un choix personnel, avec quel problème on laisse le
directeur d'école, qui, lui, va être obligé de trancher un débat qui est
essentiellement théologique? Tu sais, qui est le directeur ou la
directrice d'école, là, pour dire : Ce que tu portes est une obligation religieuse, donc tu dois l'enlever? C'est
complètement absurde. Et puis là on se dit : Et, si le gouvernement
définit le signe religieux, je veux
dire, bonne chance! Mais, si le gouvernement définit le signe religieux dans
son projet de loi, il se méprend pour un théologien plutôt qu'un ministre. Il va
devoir, quoi, étudier les différentes écoles d'interprétation coraniques et des
hadiths de l'histoire, et puis, là, lire ce
que dit l'école égyptienne, et puis, là, lire ce que dit telle autre école
d'interprétation, et puis là
dire : Il y en a qui disent que ce n'est pas un signe religieux, le
hidjab, il y en a qui disent que c'en est un, et nous, gouvernement du Québec, là, nous, ministère, là,
nous, on va dire : Bien, c'est telle école coranique qui a raison. Je veux
dire, c'est complètement absurde.
Est-ce qu'un
État laïque tranche des débats théologiques? C'est justement ce qu'on veut éviter
en faisant quelque chose au sujet de
la laïcité. Et, si on contourne la difficulté en faisant une liste, parce que
c'est ce qui s'est passé en France, bien
là, on a un autre problème. Récemment... bien là, pas si récemment que ça, mais
dans les années dernières — je ne me souviens pas de
la date exacte — un cas
se révélait en France, où il y avait une jeune femme à l'école qui se voyait
interdire de porter une certaine jupe
considérée comme étant une jupe religieuse parce qu'elle était noire et longue.
Bien là, c'est problématique. Je veux
dire, là, est-ce qu'on va interdire... Jusqu'où ça va aller? Alors, il y a un
problème avec la question des listes, il y a un problème avec la
question de la définition d'un signe religieux, et c'est pour ça que non seulement l'interdiction des signes religieux
n'est pas pertinente pour l'application de la laïcité, mais en plus elle est à
peu près impossible à faire. Bien,
impossible... c'est possible, mais, dans un État de droit, ça va susciter des
contestations devant les tribunaux.
Alors, j'allais dire «bonne chance», mais, en fait, je ne souhaiterai pas bonne
chance pour l'application de cette
affaire-là inapplicable, on ne veut pas que ça s'applique, mais il va y avoir
des problèmes qui vont nous rattraper. Une autre raison pour dire que ce
débat-là, il n'est pas fini, il va juste s'enfoncer, puis il va s'enfoncer dans
des absurdités sans fond qu'on ne pourra pas
trancher ici et qu'il n'est pas dans notre rôle de trancher, c'est-à-dire la
définition du signe religieux.
• (16 h 20) •
Une autre
chose aussi que soulignait, cette fois-ci, des experts de l'ONU qui analysent
ce qui se passe au sujet des droits
et libertés dans tous les pays du monde, et tout ça... donc, ce n'est pas
l'Arabie saoudite ou la Chine qui a envoyé une lettre, là, au Québec et au Canada pour faire un avis de ça, ce sont
des experts désignés qui ont fait ça, puis eux, ils ont dit : Le fait que le signe religieux ne
soit pas vraiment défini, bien, ça laisse la porte ouverte à une application discrétionnaire
de la loi qui pourrait être abusive, parce que, là, on pourrait avoir des gens
qui vont dire, d'une part : Ah! bien,
ça, porte ton signe religieux parce que ce n'en est pas un, et puis ça, bien,
tant mieux, mais il pourrait y avoir des
gens qui diraient : Ah! mais là, toi, ce que tu portes là, qui n'est pas
sur la liste ou je ne sais pas trop quoi... ou, ça, je considère que c'est un signe religieux, alors que
ce n'en est pas. Alors, ça va poser des problèmes extrêmement importants.
On a peu
abordé la question du p.l. n° 21 du point de vue du droit du travail, mais ça
pose aussi des problèmes concernant
le droit au travail. Les syndicats l'ont souligné, là, que l'application de ça,
ça va poser problème. Comment les syndicats
vont pouvoir défendre un employé, alors que la loi permet son congédiement,
rend impossible le recours aux chartes pour plaider le caractère
discriminatoire de ce geste et que les autres outils juridiques se heurteront,
là, inévitablement aux clauses dérogatoires? Comment est-ce qu'on va pouvoir
défendre ces personnes-là? La tâche sera pour le moins titanesque et risque de
déplacer le débat vers une application individuelle d'une mesure qui se voulait
collective et même sociétale. La CSQ
recommande même au gouvernement que l'article 29 du projet de loi, la
dérogation à la charte québécoise, soit retiré. Alors, c'est quelque
chose qui est une préoccupation, disons, très répandue.
Concernant la
clause dérogatoire; ce projet de loi déroge à la Charte canadienne ainsi qu'à
la charte québécoise des droits et
libertés de la personne. La clause dérogatoire a été utilisée à plusieurs
reprises dans l'histoire du Québec. On
n'est pas de l'école du tout de ceux qui disent qu'il ne faut jamais utiliser
la clause dérogatoire contre la charte des droits et libertés
canadienne, par exemple, évidemment, dont nous ne reconnaissons pas la
légitimité, mais ce qu'on trouve
questionnable, c'est de déroger à notre propre charte, la charte québécoise,
qui défend nos valeurs à nous, pas celles qu'on nous a imposées, celles qu'on a choisies, qu'on a choisies
nous-mêmes. Et le grand constitutionnaliste québécois Henri Brun, là, il explique que la dérogation peut
être justifiée lorsqu'il s'agit, pour une collectivité fragile comme le Québec,
d'exercer sa liberté collective, lorsqu'il
s'agit de défendre sa langue et sa culture, son identité, par exemple. Et on
est tout à fait d'accord avec ça. Mais aujourd'hui, là, devant le projet
de loi n° 21, on ne comprend pas cette justification-là. Contre qui nous nous défendons? De quoi
exactement, là, avons-nous peur? Est-ce que nous sommes réellement en train de défendre notre identité et notre culture? Bien,
pas du tout. Notre identité et notre culture, là, les menaces qui planent
sur elles sont autres. Ce n'est pas le port
des signes religieux. Et il faut qu'on s'attaque à ça absolument. En
interdisant de porter des signes
religieux principalement à des femmes, quel pan de notre identité est-ce que
nous défendons? Est-ce que ça vaut le coup? Est-ce que ça vaut la peine
de faire ça?
Je
pense que l'enjeu névralgique ici, c'est justement, là, l'identité et l'unité.
L'enjeu, c'est de défendre notre identité et de défendre l'unité nationale, et pour ça il
faut donner les mêmes droits à tout le monde et donner une liberté plus grande
à tout le monde. Qu'est-ce qu'on est,
exactement? Est-ce qu'on va se définir comme un peuple qui craint les signes
religieux ou comme un peuple qui voit
dans la diversité une forme de richesse, et qui est confiant de son identité,
et qui sait que, pour avoir une
identité, ça prend des projets collectifs et que, pour avoir des projets
collectifs, ça prend l'unité? Et, pour avoir
de l'unité nationale et un sentiment d'appartenance au Québec, bien, il faut
que tout le monde se sente à sa place, il faut que personne ne se sente comme une espèce d'indésirable qui est sur
un siège éjectable, qu'on ne sait jamais quand est-ce qu'on va
restreindre ses droits encore plus.
Pour
résumer, là, on pourrait dire que ce projet de loi là, là, il aurait pu porter
davantage sur la laïcité, il aurait pu laisser de côté complètement les signes
religieux, qu'il n'est pas pertinent d'interdire dans l'enjeu de la laïcité de l'État, mais il est allé complètement dans le sens
contraire.
On va faire
notre travail, nous, de parlementaire et on va faire valoir nos convictions. On
va minimiser les dégâts. On va
proposer des amendements qui vont retirer, là, le plus de personnes possible
des effets dévastateurs que va avoir dans
leur vie ce projet de loi là. Évidemment, si le gouvernement reculait
là-dessus, ce serait extraordinaire, mais il semble assez déterminé à faire ce qu'on estime être une
erreur, une erreur collective qu'il va falloir, un jour, réparer. Ce projet
de loi aurait très bien pu être écrit
autrement. Il aurait pu être rassembleur, il aurait pu être modéré, il aurait
pu ne pas viser en particulier les
femmes, il aurait pu ne pas viser en particulier certaines religions, mais ce
n'est pas ce qu'il fait. Et là le gouvernement fonce tête baissée
là-dedans, et ça laisse un goût amer et une certaine tristesse.
Quoi
qu'on souhaite par rapport à l'avenir de ce débat-là, il est clair qu'il n'est
pas fini. Alors, on peut émettre des souhaits par rapport à la façon
dont ce débat-là va évoluer et à la façon dont nous, on va prendre conscience
des conséquences de ce qu'on est en train de faire. Et j'espère qu'on va
réaliser à un moment donné que c'est une erreur et j'espère qu'on va revenir en arrière. Et j'espère qu'on va redonner à
la charte québécoise des droits et libertés, qui fait partie de notre identité, ses lettres de noblesse
et qu'on va lui faire honneur, faire honneur à ce que nous sommes, faire
honneur à ce pays qu'on veut construire et
qu'on va vraiment faire en sorte que tout le monde se sente bien ici parce que
c'est ça, la clé de l'unité nationale. C'est
ça, la clé de l'appartenance, c'est ça, la clé d'une culture et de valeurs
communes, c'est quand tout le monde
se sent bien, c'est quand les gens ont envie de faire des choses ensemble et
qu'ils sentent qu'ils sont reconnus pour leur apport qu'ils donnent à
notre collectivité. Je vous remercie, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a
d'autres interventions? M. le député de Robert-Baldwin.
M.
Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour
de prendre quelques minutes pour parler du projet de loi n° 21.
Je n'ai pas assisté aux commissions parlementaires, je ne faisais pas partie de
cette commission, mais j'ai suivi
quand même les travaux de la commission. J'en ai lu quelques mémoires qui ont
été soumis à cette commission parlementaire, et bien sûr j'ai suivi ce
débat d'assez près, et un débat qui m'interpelle beaucoup.
Bon.
On va y aller dans l'ordre, M. le Président. Et je commencerais en disant que,
ce projet de loi, moi, je ne pense pas que ce soit un projet de loi sur
la laïcité de l'État, mais c'est un projet de loi sur les signes religieux, sur
les vêtements, sur ce qu'on porte sur la tête. C'est ça qu'on est en train de
légiférer au Québec au XXIe siècle. Bravo! Et pourquoi on fait ça? Pourquoi on fait ça? Quelle est l'urgence? Pourquoi
ce projet de loi qui nous est présenté? Quelle est l'urgence? Quel est le problème qu'on essaie de régler? Je n'ai pas
vu de réponses à ces questions-là. On le dit souvent, le ministre nous a
dit qu'il a l'appui de la population et que probablement... enfin, je ne sais
pas, les sondages le disent, qu'il s'agit
d'un projet de loi qui est populaire. Mais être populaire, ce n'est pas
nécessairement la même chose qu'être bon,
qu'être bien, qu'être dans l'intérêt public. Je pense, dans une société
développée comme la nôtre, le rôle de l'État, le rôle du gouvernement, c'est de gouverner pour tous et particulièrement,
justement, de mettre les minorités à l'abri des désirs de la majorité. C'est ça, le rôle d'un État moderne du
XXIe siècle. Alors, de dire qu'on va faire ça et la population est
derrière nous, c'est populaire, bon, très bien, alors oups! on y va, je trouve
que c'est vraiment très, très réducteur, Mme la Présidente.
• (16 h 30) •
Donc,
le rôle du gouvernement, c'est de
gouverner pour tous et particulièrement de tenir toujours en considération l'intérêt des minorités. Ce projet de loi, à mon avis, c'est un projet de loi qui constitue un
recul historique pour le Québec,
un pas rétrograde et vraiment un recul historique pour le Québec.
Permettez-moi
maintenant de faire un petit retour, beaucoup
de choses que nos collègues, tant de Québec solidaire que notre formation politique, ont mentionnées, et que je suis d'accord, mais permettez-moi
de faire un petit recul historique. Savez-vous,
Mme la Présidente, le député
de Robert-Baldwin, dans le West Island de Montréal, a connu, et a parlé, et a discuté avec des gens tels que Jacques Couture ou
Gérald Godin, des nationalistes québécois, et qui étaient au pouvoir, d'ailleurs,
dans les années 70. Et on a discuté bien avec ces personnes-là pour qui
j'ai une très grande estime. On n'était pas de la même famille politique, mais on pouvait discuter de ces enjeux-là. Et vraiment,
sous l'impulsion de cette génération-là de nationalistes québécois, le Québec
a fait de grands pas, a fait de grands pas dans cette nouvelle conception de c'est quoi, une nation, c'est quoi,
la nation québécoise. Et, dans l'esprit de Godin, la nation québécoise,
c'était une nation inclusive et
que... comme d'ailleurs il le disait très bien, autant de façons
d'être québécois. Et la vie culturelle québécoise
montréalaise des années 70 et des années 80 était extrêmement riche
et, justement, elle gagnait à avoir l'apport de toutes ces différentes
communautés.
Comme l'a dit
récemment M. Louis Balthazar, un politologue très reconnu au Québec, dans
un article dans Le Devoir du 29 mai, il ne parlait pas du projet
de loi, mais il parlait de la nation québécoise, l'évolution de la nation québécoise, et il dit que, bon, que la
collectivité s'enrichissait oui, sous l'effet de la diversité, et, disait-il,
le boulevard Saint-Laurent à
Montréal, autrefois frontière entre les anglophones et les francophones,
devenait un lieu de convergence et de vitalité
culturelle par excellence. C'est ça, le Québec que j'ai connu. C'est ça, le
Québec qui m'a accueilli. C'est ça, le Québec où j'ai grandi. C'est ça,
le Québec que j'apprécie, Mme la Présidente.
Et
ce Québec accueillant et divers, on a continué à faire tout un grand progrès
tout le long du deuxième... de la dernière partie du XXe siècle,
les années 80, les années 90, où, donc, le Québec divers et
multiethnique faisait de très grands
progrès, Mme la Présidente. Mais, au tournant du siècle, malheureusement, à mon
avis, on a commencé à aller un peu de
l'autre côté, malheureusement, et nous voilà maintenant avec le projet de loi
n° 21, qui est, en fin de compte, le
point culminant de toute une série de développements sociopolitiques de cette
première partie du XXIe siècle, et donc qui constitue, à mon avis, un pas en arrière, un énorme pas en arrière,
et donc un tort incroyable pour le Québec, pour le Québec de Gérald
Godin que j'ai connu puis apprécié.
Alors,
parlons donc de laïcité, très bien. Soyons clairs, en commençant, que la
laïcité n'exige absolument rien de
l'interdiction des signes religieux. Ce n'est pas ça, là. Je pense qu'il y a un
énorme flou, une énorme confusion entre laïcité et signes religieux. Ça, c'est le choix du
gouvernement, c'est le choix du ministre de l'Immigration de nous imposer
ce choix-là et ce n'est pas un bon choix,
donc, de faire l'équation entre laïcité et interdiction de signes religieux. Et ce n'est pas bon, ce n'est
pas un bon choix parce que c'est profondément injuste et profondément
discriminatoire.
Maintenant,
le ministre aussi nous dit à plusieurs reprises que son projet de loi c'est un projet de loi modéré, un projet de loi pragmatique. Non, Mme la Présidente, ce projet
de loi n'est ni modéré, ni cohérent,
ni applicable. Donc, on a beaucoup
parlé de laïcité. Comme j'ai dit tantôt, la laïcité,
on fait l'équation avec l'interdiction de signes religieux. Et le ministre
dit s'inspirer beaucoup, s'inspirer
beaucoup, de l'expérience et de la
tradition française, donc la France. Et ça, par opposition au méchant
multiculturalisme canadien. Ça, ça pose plusieurs problèmes, Mme la Présidente.
Alors,
commençons avec le fait qu'on s'inspire de l'expérience française. Comme l'a
dit notre collègue tantôt, est-ce que
ça va tellement bien en France? Donc, c'est ça, le modèle qu'on va adopter au Québec?
Vraiment? C'est ça vraiment qu'on veut adopter au
Québec? Et puis d'où ça vient? D'où ça vient, ce modèle français de laïcité?
Bon, on ne va pas faire un très grand
cours d'histoire, je n'ai quand même pas beaucoup de temps, le temps
est quand même limité, mais
rappelons-nous quand même, Mme la
Présidente, que toute cette question
de laïcité française, à la française, bien, vient de la
Révolution française, vient de cette période des années 1789 à 1799, la
période qui a mis fin à l'ancien régime
et a donc mené à la création de la République. Et donc un de ses objectifs
était, bien sûr, de mettre fin au pouvoir et à l'abus de l'Église. Donc, c'était ça, la grande cassure, c'était la
Révolution française. Littéralement, des têtes ont roulé à cause de ça,
et donc une fin tragique et brutale à l'ancien régime.
150 ans plus tard, à peu près, ce concept
de laïcité a été embourbé dans tout l'historique, l'histoire coloniale française et le processus de décolonisation, particulièrement en Afrique du Nord. Ça n'a
rien à voir avec le Québec, ça n'a rien
à voir avec l'expérience québécoise. La Révolution tranquille au Québec,
c'était tranquille. Ce n'est pas du tout la même chose que la Révolution
française. Donc, notre contexte est très différent. En fin de compte, notre
contexte est beaucoup plus proche du contexte canadien.
Encore une
fois, je reviens à Gérald Godin et au nationalisme québécois. La définition de
la nation québécoise, qui était
inclusive et multiculturelle, ce n'est pas tellement aux antipodes du
multiculturalisme canadien, ça n'a absolument rien à voir avec la laïcité à la française. Et pourtant, maintenant, on
se dirige vers un modèle de laïcité complètement fermé, profondément antireligieux, qui est la laïcité à
la française. Encore une fois, est-ce que ça va tellement bien en France?
Est-ce que c'est le modèle qu'on veut adopter ici? Je ne pense pas.
Deuxième
problème avec le projet de loi, c'est qu'évidemment on mélange beaucoup la
laïcité de l'État avec la laïcité de
l'individu. Oui, l'État doit être laïque, et je pense que l'État du Québec est
laïque, mais ce n'est pas nécessaire que
les individus, eux, qu'on les force à être laïque aussi. Donc, ça, c'est un
problème, à mon avis, qui est extrêmement... qui est tellement important
et qu'il faudrait adresser à un moment donné.
• (16 h 40) •
Évidemment, dans cet ordre d'idées, il y a un
troisième très grand problème, à mon avis, c'est l'inclusion des enseignants, donc de l'éducation, dans le projet
de loi. On nous parle beaucoup du rapport Bouchard-Taylor, on nous parle
beaucoup qu'on s'inspire du rapport Bouchard-Taylor puis ce qu'on veut faire,
c'est Bouchard-Taylor. Ah! mais ils n'ont jamais parlé d'enseignants, du
secteur de l'éducation.
Et d'ailleurs
permettez-moi de quand même citer un
peu ce que le rapport Bouchard-Taylor disait. Il disait ceci : «Les
agents de l'État doivent [être à notre avis] évalués à la lumière de leurs
actes. Font-ils preuve d'impartialité dans l'exercice de leurs fonctions? Leurs croyances religieuses
interfèrent-elles, dans les faits, avec l'exercice de leur jugement professionnel?
La restriction de la liberté de conscience et de religion de certains citoyens
constitue une solution de dernier recours.
Dans le cas qui nous occupe, il est possible d'évaluer la neutralité des actes
des agents de l'État sans restreindre leur liberté de
conscience et de religion.»
Ce qu'on
s'apprête à faire avec le projet de
loi n° 21 est très loin de ce
que Bouchard-Taylor proposait à l'époque. Donc, ça, c'est un problème
très important dans ce projet de loi,
et donc l'inclusion des enseignants, surtout les enseignantes, toute la discussion qu'on a déjà eue ici sur le port du
hidjab, parce qu'en fin de compte c'est de ça qu'il s'agit, là. On peut
très bien prétendre que ça s'applique à tout le monde, mais, dans les faits, en
réalité, on vise les femmes musulmanes qui
portent un hidjab. Mais c'est quoi, le problème? Est-ce que porter un hidjab va
perturber nos enfants ou porter un
turban sikh, ça va perturber nos enfants? Est-ce que nos enfants sont si
fragiles que ça, franchement? Je trouve ça extrêmement, extrêmement
problématique, Mme la Présidente.
Mais le grand
problème, quatrièmement, vraiment, là, le coeur de l'objection que j'ai à ce
projet de loi, c'est le fait qu'on va
invoquer la clause dérogatoire tout de suite, «up front», comme diraient les
Chinois. Et donc on va suspendre les
droits fondamentaux de nos citoyens. Et ce qui est encore plus incroyable, à
mon avis, c'est qu'on fait ça au nom — c'est ce qui nous est dit — de la
défense des valeurs québécoises.
Alors, on
suspend les droits individuels, on suspend les droits des minorités, les droits
fondamentaux au nom de la protection des valeurs québécoises. Alors, ça veut
dire, si c'est ça, vraiment, ce qu'on s'apprête à faire, ça veut dire que les valeurs québécoises sont incompatibles
avec les droits fondamentaux. Ça, c'est absurde de penser... Non, ce n'est
pas ça. Les valeurs québécoises ne sont pas
incompatibles avec les droits fondamentaux. Mais, dans l'esprit du gouvernement,
ça semble être ça, le cas, puisqu'on va
suspendre les droits fondamentaux pour protéger les valeurs québécoises. Quelle
soupe, Mme la Présidente!
Donc, de
court-circuiter le processus de recours juridique qui existe dans un État de
droit comme c'est le cas de l'État du
Québec, c'est grave, c'est très grave. On ne doit pas faire ça à la légère. Ça
a été fait dans le passé dans des circonstances très particulières. Ma
collègue, notre porte-parole, a bien indiqué, bien résumé cela... pourquoi cela
a été fait dans le passé. Et ce qu'on s'apprête à faire ici, ça n'a rien à voir
avec ce qui a été fait dans le passé, et donc ça démontre, à mon avis, que c'est un projet de loi qui n'est pas
modéré du tout. C'est un projet de loi qui est très, très radical. Encore
une fois, on semble
vouloir plaire à une majorité sans nécessairement se rendre compte du tort que
cela fait aux minorités et surtout du
tort que cela fait à notre société, à notre société de droit, à notre
réputation et à notre identité. C'est une identité, encore une fois, je
nous ramène tous à Gérald Godin, une identité plurielle.
Alors, avant de
passer, Mme la Présidente, à certaines incohérences dans ce projet de loi, il y
a quand même certaines autres instances que
je trouve que c'est intéressant de constater, de citer plusieurs juristes. Moi,
je ne suis pas juriste, donc je me
remets aux travaux de certains
juristes éminents, comme le Pr Pierre Bosset, qui nous disait d'ailleurs très sagement que recourir à la clause
dérogatoire, c'est une forme de monologue, que le gouvernement, donc, refusait ainsi tout dialogue entre les pouvoirs
politique et judiciaire. Dans une société de droit comme la nôtre, ce
dialogue-là entre le politique et le
judiciaire, entre le législatif et le judiciaire, ce dialogue-là doit avoir
lieu en tout temps. Et ici on va court-circuiter
ça, et donc ce n'est pas pertinent dans le point de vue du gouvernement. Aussi,
le Pr Lampron nous a dit plusieurs fois que de mettre de l'avant, donc, la
simple majorité de la population pour justifier une telle action, c'est tout à
fait inapproprié, et donc ça ne devrait pas être fait.
Et
donc je vois que le temps passe, le temps passe vite, Mme la Présidente, mais
je vais quand même vous parler un petit peu, avant de passer à la conclusion,
je vais quand même vous parler un petit peu des énormes incohérences qu'on trouve dans ce projet de loi. Par exemple,
même si c'est un projet de loi sur les signes religieux, on ne définit pas
c'est quoi, un signe religieux. On ne parle
pas de... on ne prouve pas que le prosélytisme existe. L'État est neutre, oui,
mais les individus ne sont pas neutres. Donc, Mme la Présidente, beaucoup
d'incohérences.
Mais,
en conclusion, Mme la Présidente, le gouvernement est majoritaire, donc il
pourra décider ce qu'il veut. Nous
allons faire notre travail, notre travail de parlementaires, pour essayer de
bonifier ce projet de loi. Et juste pour la petite histoire, Mme la Présidente, je vous rappelle, je nous rappelle à
nous tous que le projet de loi n° 62 de l'ancienne législature a pris à peu
près 40 heures de travail en commission parlementaire lors de l'étude
détaillée. Donc, c'est un travail qui doit
être fait, c'est un travail qu'on va faire et un travail qu'on va le faire
rigoureusement, et on ne va pas se laisser bousculer par le
gouvernement. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y
a d'autres interventions? Mme la députée de Taschereau, la parole est à
vous.
Mme Catherine
Dorion
Mme Dorion :
Merci. Il y a quelques jours, le professeur et politologue québécois bien connu
Louis Balthazar écrivait dans Le Devoir une chose dont
j'avais commencé à me rendre compte depuis un petit bout. Il nous expliquait qu'entre la «grande noirceur» et la Révolution
tranquille, les Canadiens français ont pris leur nationalisme, qui en était
un de repli et de survivance, et l'ont
transformé en nationalisme québécois d'émancipation qui était construit non pas
autour d'une origine ethnique ou
religieuse, mais autour du territoire québécois, un nationalisme d'émancipation
qui voulait inclure tous ceux qui
vivaient sur le territoire québécois, un nationalisme d'émancipation qui est
devenu extrêmement porteur et fertile.
Et
j'ajouterais, pour avoir étudié les mouvements sociaux d'alors, qu'il y avait
sur le terrain une explosion d'identités individuelles diverses, un encouragement à être soi-même à fond la
caisse pour chaque personne. Et, par cette libération individuelle, le peuple entrait en relation intime
avec lui-même. Il prenait de la force à s'ouvrir à lui-même dans une grande
acceptation de ce qu'il était devenu dans la réalité et non selon ce que les
élites cléricales disaient qu'il devrait être. Il gagnait une confiance nouvelle et, par là, comme chaque fois qu'on a
plus confiance en nous, il gagnait aussi le goût d'entreprendre de grands projets. Et c'est ce qui a donné naissance au
puissant mouvement indépendantiste de l'époque, qui est, par essence, un mouvement révolutionnaire. Je vous rappelle
qu'il s'agit quand même d'aller chercher toute notre liberté politique
des mains d'un État du G7, ce n'est quand même pas rien, et il y a encore une
importante frange de Québécois qui portent
en eux ce désir révolutionnaire assez peu orthodoxe. Et moi, juste de penser à
ça, je nous trouve un peu punks, ça
me fait un peu plaisir. Et donc ce projet indépendantiste là n'était pas un
projet qui pouvait être basé sur la peur du changement, ou sur la peur
de l'autre, ou sur la peur tout simplement.
• (16 h 50) •
Mais
ce qu'écrit Louis Balthazar de vraiment intéressant, c'est qu'il dit : On est en
train en ce moment de reculer sérieusement du point de vue de notre nationalisme. Dans sa lettre au Devoir,
il nous rappelle qu'à la suite de sa cuisante défaite de 2007, le Parti québécois a décidé de jouer, à l'instar de l'ADQ, qui
l'avait doublé aux élections, la carte identitaire, lui aussi. Cela nous a valu la charte des valeurs
de 2013 et toutes les tensions que ça a créées et le projet de loi n° 21 contre les signes religieux s'inscrit aujourd'hui
clairement dans cette tendance-là.
Il
faut dire aussi que, depuis le 11 septembre, plusieurs médias, plusieurs
faiseurs d'opinion ont décidé de faire de
cette carte leur principale marque de commerce et avaient déjà,
pas juste ici, ailleurs dans le monde aussi, fortement participé à transformer le climat social en quelque chose de plus aigri, en quelque
chose de plus négatif, en quelque chose qui n'avait plus rien à voir
avec une quelconque idée d'émancipation individuelle et collective ni avec la
foi ou le positivisme nécessaire à la
réalisation des grands projets, d'un grand projet ambitieux comme faire naître
un État sur la carte du monde.
Et
ce que ça a fait, tout ça, c'est que la conception du nous québécois,
après s'être explosée en ouverture, atteint énormément de gens, crée un nationalisme civique sur le territoire québécois,
cette conception-là du nous québécois
a commencé à régresser, à opérer, en fait,
le mouvement inverse de celui qu'elle avait opéré entre la «grande noirceur» et
la Révolution tranquille. La conception du
nous dans les dernières années a rétréci, et on s'y sent aujourd'hui de plus en plus à l'étroit.
Et je cite
encore Louis Balthazar une dernière fois. Il écrit : «La Coalition avenir Québec représente la forme la plus pure de ce recul vers l'appartenance
canadienne française — en
opposition à "québécoise", qui est arrivé pendant la Révolution tranquille, donc. Rarement a-t-on vu un gouvernement
aussi peu représentatif des minorités. Le présent gouvernement est pratiquement
absent de la métropole et d'autres centres urbains du Québec.
Il s'en remet exclusivement à la
majorité francophone pour faire des lois qui déplaisent aux minorités. Aucun
véritable dialogue avec ces minorités. On
oublie qu'une démocratie libérale ne repose pas que sur la loi de la majorité,
mais aussi sur les droits des minorités.»
C'est la base
de toute la pensée derrière la démocratie occidentale depuis les débuts. C'est
la base. Moi, j'aime mieux dire ça
comme ça : La démocratie, c'est plus que deux loups et un agneau qui
votent ensemble sur ce qu'ils vont manger
pour souper. Et sur ce principe-là que les démocraties, jusqu'à présent, ont
fonctionné. Et donc, ce que je veux amener
ici, c'est que le projet de loi n° 21, en opposant nationalisme québécois
à communauté religieuse, nuit, va nuire, va continuer de nuire profondément au projet indépendantiste québécois.
Le chemin enthousiasmant d'ouverture à nous-mêmes, tous autant que nous sommes, sur le territoire qui
a mené vers les luttes pour l'indépendance du Québec, nous sommes en
train de le prendre, ce même chemin, mais à rebours.
Et ça me fait
personnellement quelque
chose, ça ne touche pas tout le monde ici de façon égale, et je le comprends, mais je me sens personnellement héritière de ces luttes indépendantistes des
femmes et des hommes qui ont été là avant moi, ma mère, ma grand-mère,
mes oncles. Ma circonscription du centre-ville de Québec, qui a voté à
60 % pour l'indépendance en 1995, des politiciens d'envergure qui ont
marqué notre histoire, dont on a des statues autour de cet édifice-là, qui ont milité ici même pendant des
heures, pendant des semaines, pendant des années pour que ce rêve puisse
prendre forme dans la réalité, ce n'est quand même pas n'importe quoi. C'est quelque
chose qui a une importance fondamentale dans l'histoire québécoise.
Et il est
clair et évident qu'en empruntant ce chemin-là à rebours, ce même chemin vers
un nationalisme de repli et de
protection plutôt que vers un projet enthousiasmant, ouvert, qui a confiance en
lui et qui crée de l'identité plutôt que de se replier sur un truc qui est
perdu dans le passé, il est clair qu'en empruntant ce chemin-là le projet de loi contre les signes religieux
va continuer d'entacher ce merveilleux projet d'indépendance politique du Québec, qui est à la fois un projet historique et un projet d'avenir, tout
comme la charte des valeurs, en 2013, l'a entaché. Ça nous ramène à un nationalisme qui sonne comme survivance, ne pas
changer rien, avoir peur du nouveau, alors qu'on devrait aller, comme on a déjà été à de meilleurs moments de notre
histoire, vers un nationalisme qui sonne comme libération collective, comme
se remettre à créer notre histoire, notre identité, nos projets à nous.
Alors, on peut
regarder dans notre passé ce à quoi peut ressembler ce type de nationalisme là
puisqu'on l'a déjà vécu. C'était quoi,
la «grande noirceur»? C'était quoi, le nationalisme conservateur fédéraliste de
Duplessis? Évidemment,
l'époque a bien changé. Énormément de choses sont incomparables, mais il y a
des similitudes avec aujourd'hui.
Sous Duplessis, on parlait beaucoup de
patronage. C'était quoi, ça? C'est qu'on avait une espèce de sorte de ministère
de l'expansion économique pour les comtés qui votaient du bon bord. Moi, ça me
fait penser à l'histoire du troisième lien
qui va nuire à Québec et qui va permettre d'augmenter les taxes foncières au
sud dans les comtés qui ont voté pour
CAQ. Ça me fait penser à l'histoire du transport en commun où on fait jouer les
centres-villes de Québec et de Montréal l'un contre l'autre comme s'il
s'agissait de les punir de ne pas avoir voté comme il faut.
Duplessis concédait aussi de grands avantages aux compagnies
étrangères. Aujourd'hui, le nationalisme de la CAQ se plie en quatre pour faire plaisir à Uber, à
Amazon et à bien d'autres. Et sur l'identité, maintenant, comme aujourd'hui on travaillait alors à une définition plutôt rétrécie du peuple québécois,
qui était alors canadien-français. Il y
avait ceux qui sont avec nous, il y a
ceux qui sont contre nous. Il y a ceux qui protègent notre identité, qui sont nous,
puis il y a ceux qui ne sont pas nous, ceux qui
détruisent notre identité. On décourageait la diversité. On tapait sur la diversité.
On considérait comme dangereux d'être différent les uns les autres. On
considérait que mieux valait forcer les différents à rentrer dans la norme à
coup de lois discriminatoires.
Oui, il y a
des similitudes avec aujourd'hui. Ça ne se fait pas de la même manière, évidemment,
mais il y a quelque
chose dans l'essence qui vient de là. Notre histoire, ce n'est pas juste la
Révolution tranquille, c'est aussi d'autres moments moins roses. Et tout ça, je trouve, ce vers où on
s'en va avec ce projet de loi là, ça montre qu'on est en train de quitter cette belle
conception de notre identité où on se disait qu'un peuple, ce n'est pas nécessairement du monde qui sont tous pareils,
mais que c'est du monde qui sont tous ensemble dans un même projet collectif. C'est
comme un couple. Tu n'as pas besoin
d'être pareil pour que ça aille bien. Ce qui est important, c'est que tu aies
des projets ensemble puis que tu sois capable
de te respecter l'un l'autre dans tes différences. Être pareil, ça ne nous
donne pas de force. Ça donne de la force à ceux qui veulent qu'on soit prévisibles, utilisables, des petites
unités fabriquées en série qui vont pouvoir servir les besoins d'une
quelconque industrie et ne pas se mettre à avoir des idées qui remettent le
pouvoir en cause.
Être
ensemble, par contre, ça libère la force collective, ça libère la
création, l'inventivité, la fierté. Être ensemble, ça libère le courage, l'énergie de faire des
projets de société qui nous donnent envie au lieu de nous écoeurer
chaque fois qu'on ouvre la télé. Puis
tant mieux si nos talents, si nos personnalités, si nos façons d'être, si nos
façons de paraître diffèrent. C'est comme
ça que fonctionnent les musiciens d'un orchestre, c'est comme ça que
fonctionnent les joueurs d'une équipe de
hockey. On a besoin de s'accepter les uns les autres pour être capables de
créer des liens forts. Puis c'est dans notre différence qu'on trouve notre force. Puis ces liens forts là, c'est
précisément ça, la culture, puis c'est précisément ça, la force d'un peuple. Alors, quand on s'attaque aux
liens entre nous, on attaque notre culture puis on attaque notre identité.
L'identité, ce n'est pas un truc inscrit dans les airs qu'on peut mettre dans
un projet de loi. C'est quelque chose qui se
vit entre nous, jour après jour, et qu'on adapte continuellement. Les êtres
humains changent. Ce qui est important, c'est qu'on fasse ça ensemble. C'est ça, une culture. Une culture, c'est
vivant. Ça évolue à travers les époques. Pourquoi faire comme si
le Québec était autre chose que ce qu'il est dans la réalité avec toutes ces
composantes différentes?
Lorsque je
vois les dommages que la charte des valeurs du PQ a fait subir à l'adhésion des
membres des communautés ethnoculturelles à l'idée d'indépendance, je ne
demande pourquoi on tient à continuer ça avec le projet de
loi n° 21, pourquoi
on tient à stigmatiser des minorités. Alors qu'on doit rassembler, on divise. Évidemment,
moi, je cherche à travailler au renouveau du mouvement
indépendantiste. Alors, pour moi, c'est clair que ça veut dire se battre
contre le projet de loi n° 21. Ça
veut dire accueillir des gens de partout. Puis ça veut dire leur dire : Le
jour où on va faire l'indépendance,
nous serons tous les cofondateurs d'un pays. Il n'y a personne qui va être
moins qu'un autre un représentant
de la nation québécoise et de ses valeurs.
Mon
espoir aujourd'hui vient du fait que je vois bouillonner, sous le
couvercle de la marmite conservatrice qui marque notre époque, toute une
panoplie de mouvements. On voit les luttes pour le climat, on voit les luttes
des infirmières, on voit toutes sortes de luttes qui, en ce moment, sont en
train de se renforcer. Et ça me fait penser à ce qu'il y avait dans les
années 40, dans les années 50, juste avant, finalement,
cette révolution tranquille là où on avait... il y avait le Refus global,
la grève d'Asbestos, Madeleine Parent, les grèves, le textile. Il y avait
un couvercle conservateur, mais ça
bouillonnait déjà. Puis, même si le couvercle conservateur
disait : On n'a pas besoin de vous écouter. De toute façon, les médias sont avec nous, bien, peu après, finalement,
ces gens-là, sous le couvercle, ont créé une nouvelle culture qui a pris
de la force et qui est devenue la culture québécoise de la Révolution
tranquille.
Et
c'est là qu'au lieu d'exclure les différents pour protéger une identité figée
par le clergé à l'époque on a levé à bout
de bras, avec tous ceux qui voulaient nous suivre, un projet enthousiasmant, un
projet positif qui acceptait tout le
monde, un projet qui n'avait pas peur de l'avenir, qui n'avait pas peur des
autres, en fait, un projet qui n'avait pas peur. Pour moi, le Québec, dans ce que ça a de plus beau, c'est un peuple
qui n'a pas peur. Et, quand je le vois avoir peur et se replier, vouloir
mettre des barrières partout, je suis triste. Merci beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le
député de Robert-Baldwin, la parole est à vous.
Une voix :
...
• (17 heures) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : D'Arcy-McGee, excusez-moi. Allez-y.
M. David
Birnbaum
M. Birnbaum : Merci,
Mme la Présidente. J'ai eu, il y a peut-être trois semaines, dans ma
circonscription, mon bureau de
circonscription, une visite, une visite d'un enseignant de ma communauté, un
enseignant, père de famille, un enseignant
qui porte la kippa, un enseignant qui est dans une école publique française à
l'est de l'île de Montréal, et on a eu
une belle conversation très révélatrice. J'ai tiré au moins trois messages de
notre conversation : un d'espoir, un qui m'inquiète et un troisième
qui me met en colère.
Le
message d'espoir... Il porte, comme je dis, la kippa, en plus le taleth, que
portent des hommes juifs croyants, avec
des franges, alors clairement identifiable, identifié avec sa foi. Il me parle
de ses jeunes élèves, beaucoup Québécois, Québécoises de souche, d'autres de toutes origines, qu'il adore, qui lui
posent des questions : Ah! monsieur, c'est quoi que vous portez sur la tête, là? Est-ce que vous
portez ça toute la journée? Est-ce que vous dormez avec ça? Comment ça
fonctionne? Puis ils avaient d'autres questions en parlant avec leur prof,
comme n'importe quel prof, parce qu'ils l'aimaient, parce qu'il leur inculquait
de bonnes valeurs qui n'avaient rien à faire avec ce qui était sa tête, qui
leur enseignait en maths et sciences parce
qu'il était bon... il est bon prof. Message d'espoir, n'est-ce pas, M. le
premier ministre, M. le ministre? Ces enfants-là n'ont appris de lui que
des choses qu'on souhaiterait qu'ils apprennent.
Deuxième
message, plus inquiétant, qu'il m'a transmis, il m'a dit qu'il hésite de
s'identifier, même pas donner son
nom. Et moi, j'avais des discours à faire, je cherchais des opportunités pour parler
publiquement de ce projet de loi que
je n'aime pas et j'aurais aimé l'invoquer et parler de lui avec son nom. Il m'a
dit : Écoutez, je suis père de famille, j'ai trois enfants, je me
sens mal à l'aise.
Troisième
message qui me met en colère... Moi, j'ai eu le privilège de travailler dans
l'école publique pour 16 ans. Je connais du talent quand je le vois et
je sais que la pierre angulaire, évidemment, vous le savez comme parents, de l'enseignement de nos enfants, c'est la qualité de
l'enseignant et l'enseignante. J'avais devant moi un prof d'évidente grande
qualité qui va être interpelé ou qui aurait été interpelé par les cadres, les
hauts cadres de sa commission scolaire sur l'île
de Montréal pour devenir directeur d'école. Cet individu m'a fait comprendre
qu'il souhaiterait continuer sa carrière ainsi. «Sorry», le projet de loi du gouvernement de la CAQ mettra ce
Québécois juif croyant devant un choix inutile et, qu'on le dise, illégal — si on oublie, on va en parler, de la cause
dérogatoire — illégal.
Enlevez votre kippa ou oubliez
ce poste de directeur. À la jeune femme qui
porte le hidjab et ne rêve, elle aussi, que de partager son expérience,
sa passion, son talent avec les jeunes élèves du Québec, elle qui
voudrait faire apprendre à ces jeunes des principes de liberté, de l'ouverture, de l'égalité, qui font, oui, des
pierres angulaires de notre société
québécoise, la porte se ferme jusqu'à
tant qu'elle décide de se plier aux exigences de ce mauvais projet de
loi et de cacher ses croyances les plus profondes.
M. le premier ministre, M. le
ministre, ça, ce n'est pas mon
Québec. Ce n'est pas le Québec que j'ai la fierté de défendre au nom de mes concitoyens
de D'Arcy-McGee à Assemblée
nationale. It's not the modern, confident, distinct Québec that I am proud to
represent and defend every time I'm in this Chamber, I'm in the rest of Canada or traveling anywhere in the world. L'Association de droit Lord Reading est la voix
collective des juristes juifs au Québec, fondée en
1948. Sa mission, et je les cite : «Nous sommes dédiés à la promotion des
droits de la personne et des libertés fondamentales et nous visons à desservir la communauté
juridique, la communauté juive et la communauté en général.»
L'association se donne la mission primordiale de défendre les
droits de la personne dans le contexte distinct du Québec. Elle
a soumis un mémoire. Elle aurait aimé avoir l'opportunité de le défendre devant
les quelques jours d'audiences parlementaires accordés par ce gouvernement,
mais ils n'étaient pas invités.
Une
citation : «Et il est par le présent déclaré et statué par ladite autorité
que toutes personnes professant le judaïsme, et qui sont nées sujets britanniques, et qui
habitent et résident en cette province ont droit, et seront censées,
considérées et regardées comme ayant droit à tous les
droits et privilèges des autres sujets de Sa Majesté, ses héritiers et
successeurs, à toutes intentions, interprétations et fins quelconques, et sont
habiles à pouvoir posséder, avoir ou jouir d'aucun office ou charge de
confiance quelconque en cette province.» L'extrait que je viens de lire n'est
pas, évidemment, du projet de loi n° 21, mais d'une loi adoptée ici, au Québec, en
1831, quand nous, nous sommes devenus la première juridiction de l'Empire britannique à accorder la pleine
émancipation des Juifs, laquelle garantissait leur droit d'obtenir et d'exercer
toutes les fonctions au sein de la société,
dont celle de député élu à l'Assemblée législative du Bas-Canada, maintenant notre Québec.
Là, je cite
Lord Reading : «La description de "toutes les personnes professant la
religion juive" est délibérée — je
vous rappelle, en 1832. Elle
reconnaît que les droits de "posséder, avoir ou jouir d'aucun office ou
charge de confiance en cette
province" sont fondamentaux, et ce, nonobstant leur — son — affirmation
ouverte et démonstrative de la conviction religieuse. En adoptant cette législation, le Québec a érigé le pluralisme à titre de valeur fondamentale.» Fin de la citation de Lord Reading. Mais, il continue, en
conclusion, donc : «Le projet de
loi n° 21
propose aux Québécois un retour à l'ère pré-1832; il propose
d'abroger et de retirer à des minorités des droits acquis depuis maintenant
plus de 187 ans.»
Bon, si
j'écoute les arguments, que je ne caractériserai pas comme arguments de grande
rigueur du côté ministériel, ils se
résument en trois ou quatre principes : neutralité, identité, le fait qu'il y ait supposément un consensus au sein de notre Québec sur le projet.
Neutralité,
bon, laïcité, c'est le mot préféré. Pour moi, il n'y a
pas grande distinction là-dedans, peu
importe. Quelle distorsion de dire que la laïcité
exige qu'on efface nos différences. Quelle absurdité que la laïcité
fait en sorte que chaque prof soit pareil. Le programme même de formation
de l'école québécoise dit le contraire. I've had the pleasure of defending
cette formation lors des conférences dans les autres coins de notre pays, aux États-Unis
et en Afrique à deux reprises en tant
qu'adjoint parlementaire à l'ancien ministre de l'Éducation, maintenant
député de Jean-Talon, à défendre notre programme de formation des jeunes qui se distingue par sa reconnaissance
de la diversité, de l'égalité hommes-femmes, l'interpellation à nos enfants, justement, de questionner, développer leur esprit critique,
d'apprendre à faire la part des choses. La laïcité n'est pas... on n'arrive
pas là par le déni, l'aveuglement, la fermeture volontaire.
• (17 h 10) •
Identité, oui, notre identité. Allow me
to spend a minute on what I find a deplorable and absolutely false dichotomy that the Premier, the Minister
and many others continue to propagate : if you're in favor of this law,
it's because you share and defend our
Québec identity; if you oppose it, you ignore collective rights and are somehow
stuck in some multicultural time
warp. Quel constat banal et
insultant! Et je prends ça très personnel, comme Québécois d'expression
anglaise, membre de la communauté
juive, et fier de l'être, mais fier d'être Québécois à part entière en même
temps, fier de défendre, oui, notre langue commune, le français,
nationaliste de ma façon. Alors, de suggérer que moi, que des gens de la CSDM, voyons donc, que plein de membres de notre société
civile, Québécois francophones
de souche font un choix de mettre à
côté notre identité pour défendre une autre approche ouverte d'esprit, légale, réaliste de notre dite laïcité... ça se
fait autrement.
Consensus.
Dans un premier temps, René Lévesque
lui-même a dit qu'on ne juge pas les gouvernements que par leur
traitement des minorités. Il ne se levait pas le matin pour regarder qu'est-ce
qui fait le consensus du monde. La démocratie serait beaucoup plus simple
ainsi, mais ce n'est pas comme ça.
J'ajouterais
qu'on va continuer à juger sévèrement le gouvernement, qui remplace leur devoir
de leadership par une adhérence
simpliste et, j'ose dire, une myopie volontaire des sondages. Ce projet de loi
n'est pas correct, pas digne de nos
traditions démocratiques, pas respectueux de l'égalité des femmes, pas fidèle à
notre, oui, identité québécoise. Et qu'on
arrête de suggérer que ceux qui opposent à ce projet de loi sont surtout et
uniquement issus de ces mêmes minorités. Qu'on n'oublie pas non plus que ce gouvernement impose, et même avant
l'adoption de la loi, la clause dérogatoire, la clause «nonobstant» pour
éviter, éviter l'analyse légale et essentielle.
Autrement
dit, ce gouvernement, de façon explicite, reconnaît le fait que ce projet de
loi abroge les lois les plus fondamentales.
Et qu'on n'oublie pas qu'il y a d'autres marges de manoeuvre qui auraient été
disponibles à ce gouvernement avant
de se prévaloir de la clause «nonobstant». Des limites dites raisonnables sur
les droits fondamentaux sont permises. Donc,
la CAQ constate elle-même que ce projet dépasse ses limites, impose des limites
déraisonnables parce qu'ils décident qu'ils ont besoin d'avoir recours à
cette clause «nonobstant». Alors, c'est des limites déraisonnables que constate
implicitement ce propre gouvernement. Là, pour une rare fois, je suis d'accord
avec eux.
This Government plans to adopt this law
by impending, by imposing closure. And furthermore, it will impose by simple-majority vote of this
National Assembly a major modification to our most fundamental of laws, la
charte québécoise des droits et libertés de la personne. History
will solemnly record this arbitrary and unprecedented gesture.
Laïcité dans
notre charte? Bon, peut-être bien, mais pas rédigée sur le coin de la table et
pas aux dépens des autres droits
fondamentaux. Ces droits ne sont pas classés en hiérarchie, c'est un principe
très clair en droit, ils sont un ensemble, un n'est pas supérieur à
l'autre.
As a true champion of this
Legislature, Clifford Lincoln once said here : Rights are rights are
rights.
Bon, nonobstant, si je peux utiliser ce mot triste, nonobstant tout ça,
même si, en quelque part, il y avait un encadrement d'arguments
idéologiques défensibles, et je soumets qu'on ne voit aucun tel encadrement,
même proposé par le côté ministériel, comment faire une fois adopter une telle
loi? Comme je l'ai dit, j'ai oeuvré en éducation. J'imagine nos directrices, nos directeurs d'école, qui font
d'ailleurs un travail formidable, Mme la Présidente, qui auraient devant eux,
comme j'ai suggéré va être le cas, un prof formidable qui devrait être sur la
voie de devenir directrice d'école, soudainement, sous peine, en quelque
part, j'imagine — on
parle d'une loi, ce n'est pas un petit discours, un voeu pieux — va
être obligé de dire à ce prof : Je m'excuse, vous restez dans la salle de
classe.
D'autres exemples, même plus banals et moins
évidents : Ah mon Dieu! Il y a un prof dans l'autre classe de quatrième année qui doit aller en congé maternel,
elle est enceinte. Ce petit transfert, ce prof avec le hidjab, qui enseigne
aussi en quatrième
année, peut-être ce serait à propos qu'elle prenne la relève. On utilise le mot
«fonction» dans la loi. Évidemment,
comme souvent l'autre côté, le tout va se régler par règlement. Mais ça veut
dire quoi? Est-ce que ça, c'est un
changement latéral? Est-ce que c'est une promotion? Bon, le directeur d'école,
qui est leader pédagogique de son école, intermédiaire avec les parents, motivateur de son équipe, va devenir
agent policier, agente policière et va passer une moitié de son temps en
évaluant comment déployer son équipe.
Et, je m'excuse, le ministre, quand notre
porte-parole a posé quelques questions de cet ordre pratique, a eu l'effronterie de suggérer que, bon, mais, voyons
donc, ça va être le gros bon sens qui va s'imposer. Bon, j'aimerais bien
trouver ce principe-là dans la
jurisprudence. Une loi est à implanter, à implémenter, donc qu'on soit
cohérents. Ce même directeur, cette
même directrice d'école dont je parle aurait à agir si elle ou il découvre
qu'il y a un prof qui porte le crucifix de façon très discrète. Il ou elle n'aurait pas à se questionner s'il y
a un prof musulman très, très, croyant avec une longue barbe — évidemment, je défends son droit de
l'avoir — mais
non, rien à faire là, mais la femme, oui. J'imagine qu'il va, ce directeur, se gratter la tête quand il y a un
prof avec des tatouages partout sur le corps. Est-ce qu'il ou elle va demander
de regarder de plus près pour voir si
peut-être il y a un crucifix sur un tatouage qui est moyennement caché?
L'absurdité totale, mais pas juste
absurde, quand on pense... quand on parle de la vie des personnes qui cherchent
à faire leur avenir ici, au Québec.
Donc, M. le
Président, c'est avec fierté mais tristesse pour le Québec que j'adore que je
vais voter contre ce projet de loi que je déplore.
• (17 h 20) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de
D'Arcy-McGee. Maintenant, je suis prête à reconnaître M. le député de
Laurier-Dorion.
M. Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
Merci, Mme la Présidente. Donc, le projet de loi que nous avons devant nous
d'emblée est un projet qui va trop
loin et qui, sous sa forme actuelle, est inacceptable pour notre formation
politique. C'est un projet de loi qui
sort de la logique d'un compromis acceptable, un compromis qui a été avancé
après mûre réflexion par le rapport Bouchard-Taylor,
qui a consulté des centaines, voire des milliers de personnes et aussi beaucoup
d'experts. Sous prétexte de vouloir
clore un débat qui dure depuis plus d'une décennie, ce projet de loi fait déjà
la preuve, par les interventions qu'il soulève dans l'espace public,
qu'il va au contraire alimenter les tensions déjà exacerbées auxquelles on
assiste parce que, oui, c'est un débat qui
se fait, en ce moment, sur le dos des minorités culturelles, religieuses, des
minorités issues de l'immigration, dans la très grande majorité. Mais ne
nous racontons pas d'histoires, Mme la Présidente, ces communautés sont pointées du doigt et stigmatisées dans les médias et
dans l'espace public par les débats suscités par le projet de loi
présenté par le gouvernement.
À Québec solidaire, nous avions toujours adopté
une posture de compromis acceptable sur l'enjeu des signes religieux en
reprenant la philosophie du rapport Bouchard-Taylor, qui incarnait ce
compromis, un certain consensus québécois
sur la question. Notre ancienne députée Françoise David avait même déposé, il y
a cinq ans, un projet de loi directement
inspiré du compromis Bouchard-Taylor pour régler cette question-là en plein
milieu de la crise, on va s'en rappeler,
de la charte des valeurs qui a profondément divisé le Québec. C'était une main
tendue pour faire preuve de raison autour
d'un consensus établi par des experts reconnus sur la base des consultations
partout au Québec. On aurait pu s'entendre sur un projet de loi consensuel. Or, le ministre a décidé d'aller aux
extrêmes, d'aller beaucoup, beaucoup plus loin que le rapport Bouchard-Taylor. En effet, les autres
partis, y compris la Coalition avenir Québec, qui forme l'actuel gouvernement,
ont successivement décidé de se retirer de
ce compromis et de laisser traîner ce débat qui s'est, bien sûr, envenimé en
faisant prendre à un non-problème une ampleur complètement démesurée et
injustifiée.
Oui, Mme la
Présidente, on s'attaque à un faux problème, à un problème inexistant. On
légifère sur quelque chose qui n'est
pas problématique dans la société dans laquelle nous vivons. Constat de la
Confédération des syndicats nationaux, de
la CSQ, de l'association des policiers et policières du Québec, des avocats, de
notaires, etc., la liste est longue : il n'y a pas de plaintes, il n'y a pas de cas répertoriés
de prosélytisme, pas tant, il y a seulement des perceptions, des préjugés et,
il faut se le dire, il y a de la
peur. On ne peut pas retirer des droits à des gens sur la base des perceptions
sans un préjudice démontré.
Parlons-en un peu plus, des symboles religieux
portés par les enseignants qui seraient interdits sous peine de congédiement par la loi actuelle. Encore une fois,
ce projet de loi va trop loin. Il est fondé sur des préjugés en interdisant les symboles religieux pour les enseignants. Il n'y a
toujours aucune preuve démontrée que les signes religieux
affectent les enfants, les
perturbent, qu'ils constituent du prosélytisme patent auprès des enfants. Il ne
faut pas donner raison à la peur
injustifiée que les enfants soient contaminés par les enseignants et
enseignantes issus des communautés culturelles et qui portent des signes religieux visibles. Parce qu'il se peut très bien, Mme la
Présidente, qu'il y ait des enseignants, des
enseignantes qui portent des signes religieux qui ne sont pas visibles mais qui
font du prosélytisme. Il n'y a pas de plaintes
dans les écoles en ce moment. Le seul cas répertorié est celui d'une
enseignante qui s'est fait demander par un enfant... ce qu'était son voile par ses élèves, ce qui est tout à fait acceptable. Nous vivons dans une société, de plus en plus, qui accepte la diversité, et nos enfants doivent côtoyer cette
diversité-là et ils ont le droit de se poser des questions sur cette
diversité.
L'école a pour mission, on le sait, dans la Loi
sur l'instruction publique, de socialiser les élèves, ce qui inclut l'exposition à la différence pour qu'ils
apprennent à vivre avec cette différence, avec cette diversité. On ne peut pas
faire de l'école un endroit où la
diversité — la
diversité religieuse, dans le cas qui nous concerne — est de
facto interdite. Le message envoyé
par le projet de loi, c'est que la présence de la différence dans les
écoles est une mauvaise chose, que les profs différents sont une menace pour les
élèves. La multiplication des bagages culturels et des regards sur le monde que
côtoient les élèves à l'école ne peut qu'ouvrir leurs esprits et leur permettre
une compréhension et de grandir de façon harmonieuse avec le monde qui
les entoure. On doit encourager la curiosité des élèves et un rapport sain et
respectueux par rapport à la différence. La différence enrichit l'éducation,
l'homogénéité appauvrit l'éducation.
Aujourd'hui, on se pose la question sur le port de signes religieux par les
professeurs dans les écoles, mais demain, inévitablement, on va se poser la question aussi sur d'autres
métiers qui sont présents dans les écoles, qui peuvent... qui portent
des signes religieux qui sont permis par la loi en ce moment, on parle des
orthopédagogues, des éducatrices spécialisées,
des concierges. Pour vous donner un exemple, Mme la
Présidente, le personnel
de service de garde. Mon enfant, qui
vient d'avoir sept ans, il fréquente un service de garde, et évidemment,
en tout cas, dans ma circonscription
et dans la grande région de Montréal,
on voit énormément de personnes, des femmes en particulier, qui
portent des signes religieux, le
hidjab, pour être plus précis. Et moi, je n'ai pas peur que mon enfant côtoie
ces femmes-là. Est-ce qu'on va un jour
légiférer... puisqu'on a commencé avec les profs dans les écoles, bien,
demain ça peut être les orthopédagogues, les éducatrices spécialisées, les femmes qui travaillent dans les services de garde. Jusqu'où va-t-on aller, là? Une fois qu'on a mis le pied dans
ce processus-là, on peut aller beaucoup plus loin.
Le port de
signes religieux n'est pas du prosélytisme. Il n'y a pas d'intention de
prosélytisme chez l'écrasante majorité des gens qui en portent. Ils les portent tout simplement
parce que, à tort ou à raison, ce n'est pas à nous de le
dire, ils croient qu'ils doivent les
porter, c'est une prescription religieuse. Le fait d'afficher son identité, sa culture, sa religion ne veut pas dire adopter les mêmes que moi. On impute
des motifs aux personnes qui en portent. On fait des procès d'intention.
Le problème, ce n'est pas le signe religieux
en tant que tel, c'est la stigmatisation et les préjugés envers les personnes
qui en portent.
Si on veut
s'attaquer réellement au prosélytisme, on devrait tout simplement appliquer les
outils légaux dont on dispose
actuellement. On n'a pas besoin d'interdire les signes religieux. Je vous
rappelle, Mme la Présidente, que, déjà, la Loi sur l'instruction publique
interdit expressément le prosélytisme au personnel enseignant, et les mêmes
dispositions doivent se trouver sur
la Loi sur la fonction publique, etc. Le prosélytisme est interdit. On a déjà
les outils juridiques pour régler cette fameuse question du
prosélytisme.
Face à la
position extrême et à l'entêtement du gouvernement à légiférer à coups de
massue sur cette question en utilisant
d'emblée la disposition de dérogation de notre propre charte québécoise pour
retirer des droits à des personnes, en
grande partie issues de l'immigration ou des minorités culturelles, je n'ai pas
d'autre choix que de m'opposer fermement au principe de ce projet de
loi.
Pour nous,
dans notre formation politique, à Québec solidaire, notre position a toujours
été et demeure la même, à savoir que
c'est l'État qui est neutre et non pas les individus. Notre position en est une
d'ouverture et de tolérance inspirée par
la longue tradition humaniste qui traverse notre histoire au Québec pour
garantir un sain vivre-ensemble. Et nous avons un certain niveau d'expérience historique dans ce savoir-vivre-ensemble.
Nous avons cohabité avec les Premières Nations. Nous avons longuement cohabité avec nos compatriotes de langue anglaise.
Plus tard, nous avons cohabité avec des gens issus de la communauté juive ou, aujourd'hui, des gens qui portent des
turbans. Notre position en est une de laïcité, la vraie, celle qui consiste à garantir la neutralité
religieuse de l'État envers toutes les religions pour garantir la liberté de
conscience et le même accès pour tous et toutes à la vie citoyenne et publique
dans le respect des convictions de chacun et chacune.
Et dire ça, ce n'est pas adhérer au
multiculturalisme canadien. Pour nous qui sommes fiers de notre identité québécoise et pour le mouvement progressiste et
indépendantiste que nous incarnons, notre modèle, c'est le modèle de l'interculturalisme qui doit être mis de l'avant
pour s'opposer au «free-for-all» culturel canadien qui relègue la nation
canadienne et aussi les nations autochtones à un rang de minorités parmi tant
d'autres. Le multiculturalisme canadien engendre,
on le constate, la ghettoïsation des communautés culturelles, tout comme le
sentiment d'exclusion qui sera assurément le résultat de ce projet de
loi. L'interculturalisme québécois est le seul modèle qui permet réellement
l'intégration.
• (17 h 30) •
Dans le
modèle interculturaliste... et il vaut la peine de dire que c'est le «made in»...
il est fait maison, c'est un modèle
que nous avons développé ici, à Québec, oui, il y a eu des intellectuels, des
philosophes qui ont contribué, comment dire, à le schématiser, à le définir,
etc., mais il s'est construit sur la base du quotidien, en quelque sorte. C'est
un projet qui est issu de la
coexistence, du vivre-ensemble de toutes les communautés au quotidien. Il s'est
construit à chaque jour. C'est un
modèle, en quelque sorte, empirique, ce n'est pas un modèle... on a créé une
théorie et on l'a appliquée. Au contraire,
on s'est inspirés de la réalité et on l'a formalisée dans une théorie, dans une
approche qui s'appelle l'interculturalisme.
Dans ce
modèle-là, l'interculturalisme, tout le monde, peu importe d'où on vient,
apporte sa propre contribution à une
même identité commune, à un tronc commun en français, dans le cas du Québec. Il
y a dans ce modèle-là un métissage culturel
enrichissant. Nous sommes forts de notre différence et nous sommes plus que nos
différences. Affirmer une identité québécoise plurielle, inclusive,
fondée sur un nationalisme civique.
Vous savez,
la culture, notre identité, il faut la protéger, oui, mais elle n'est surtout
pas figée. Ce n'est pas une statue qui demeure telle quelle à travers le
temps, c'est quelque chose d'éminemment en mouvement, dynamique. À tous les jours elle se transforme, elle devient
autre chose. Et la culture québécoise, oui, elle existe, elle est réelle et
elle est appelée à se transformer
comme elle s'est transformée tout au long de son histoire. Et les communautés
qui viennent d'ailleurs, qui ont une
autre confession religieuse contribuent à forger cette culture commune qu'est
l'interculturalisme, à fonder la culture de demain.
Les gens qui
viennent ici, au Québec, nous choisissent et veulent participer à ce mouvement,
à la construction d'une nouvelle société,
d'une culture qui va être plus forte et qui va être l'addition et beaucoup plus
que l'addition de toutes nos
différences. Dans ce sens-là, Mme la Présidente, il faut cesser d'avoir peur de
l'autre. Il ne faut pas céder aux craintes de ce que les
autres représentent. Plus les gens sont en contact avec des gens qui portent
des signes religieux, qui portent la
différence, moins ils sont en faveur du bannissement des symboles religieux.
Moins on est en contact avec la différence, plus on la craint. L'ignorance engendre la peur, qui attise la haine à
son tour, et on le voit malheureusement trop souvent dans notre société et
ailleurs aussi. Apprendre à connaître les minorités culturelles et religieuses
est un atout essentiel pour briser les préjugés. Les communautés
culturelles ou les minorités religieuses ne sont pas une menace, elles sont un
enrichissement pour la culture québécoise.
Le projet de
loi n° 21 contribue à envoyer un message de fermeture et d'exclusion qui
ne fait pas honneur à la tradition, à
l'histoire, à la culture québécoise telle que nous la vivons aujourd'hui. Le
message envoyé par le gouvernement, c'est
le suivant : Au Québec, nos droits et libertés ne s'appliquent pas quand
on légifère pour viser les minorités religieuses. Au Québec, on n'accommode pas les minorités, on
n'est pas prêts à respecter les compromis proposés par tant de gens et
parmi les plus éminents de notre propre société.
C'est
malheureux parce que le projet de loi n° 21 n'est pas tout seul
dans l'oeuvre du nouveau gouvernement. Il y a d'autres éléments qui s'ajoutent,
qui, une fois mis ensemble, commencent à former une sorte de tableau, un
tableau qui n'est pas très
réjouissant, reluisant et qui ne parle pas en bien de la majorité
gouvernementale, selon moi. Le projet de
loi n° 21 s'ajoute aux dossiers d'immigration jetés à la poubelle par le
projet de loi n° 9. Ça s'ajoute à la baisse des seuils d'immigration qui a été annoncée il y a
quelques mois, comme si, encore une fois, il y avait trop d'immigrants au
Québec. Ça s'ajoute au scandale de
l'abolition des permis de taxi, qui touche beaucoup, de nombreux... des
minorités issues de l'immigration,
qui, dans le cas du taxi, est une industrie refuge pour les gens issus de
l'immigration qui n'ont pas réussi à
se faire reconnaître leurs diplômes, leurs compétences pour qu'ils puissent
travailler selon ce qu'ils ont appris dans leur vie, c'est un secteur refuge. Et, encore une fois, le gouvernement
s'attaque à un secteur composé en grande majorité, à tout le moins dans
la grande région de Montréal... composé par des immigrants.
À Québec
solidaire, nous ne voulons pas d'un Québec qui envoie un message de fermeture
et d'exclusion, qui finit par
sacrifier le concept d'identité commune, un concept d'identité ouvert et
inclusif, en le noyant dans la multiplication des identités comme le fait le multiculturalisme. Mais il y a un juste
milieu. Il y a une approche qui nous est propre, qui est faite ici, chez nous, c'est
l'interculturalisme. Et le projet de loi n° 21 vient justement s'attaquer
à ce modèle-là qui fait notre fierté.
Nous, à
Québec solidaire, nous voulons d'un Québec où tout le monde apprend à se
connaître, où on s'inspire les uns
des autres, où on se transforme, on s'influence mutuellement. Nous voulons d'un
Québec où on apprend à dire à tous nos concitoyens, à toutes nos
concitoyennes, comme Saint-Exupéry : «Si tu diffères de moi, mon
frère — ma
soeur — loin de me léser, tu m'enrichis.» Le hidjab,
la kippa, le turban, ce n'est pas une menace, c'est quelque chose qui nous enrichit. C'est une question d'humanisme de
base, d'ouverture minimale à ce qu'est la différence. Et cette différence-là,
elle ne s'effacera pas, elle va continuer à
exister ici, au Québec, et elle va s'accentuer, parce que, oui, le flux
migratoire devient la norme dans
toutes les sociétés comme la nôtre, et aussi au Québec, donc nous devons
apprendre à vivre avec cette diversité-là. Et nous devons faire un
effort majeur pour tendre vers l'inclusion. Malheureusement, c'est tout le contraire du projet de loi que nous avons devant
nous. Et, pour ça, c'est notre devoir de nous y opposer. Merci beaucoup.
• (17 h 40) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y
a d'autres interventions? M. le député des Îles-de-la-Madeleine, la parole
est à vous.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau :
Merci. Monsieur mon collègue, est-ce que je pourrais avoir votre... Merci
beaucoup, Mme la Présidente.
Alors,
d'entrée de jeu, j'aimerais faire un petit retour sur les éléments du projet de
loi, sur ce qu'il représente pour nous, en fait, ce que l'on en
comprend, pour commencer mon allocution.
Donc, le projet
de loi, dans certains de ses
éléments, de ses articles, va modifier la Charte des droits et libertés de la personne afin d'y inscrire
que les libertés et droits fondamentaux doivent s'exercer dans le respect de la
laïcité de l'État. Et nous croyons que c'est
une bonne chose que l'on puisse inscrire le principe de la laïcité de l'État
dans la Charte des droits et libertés
de la personne, et nous l'appuierons tout au cours de l'étude qui se poursuivra
sur le projet de loi n° 21.
Nous savons
aussi, et on en a parlé depuis le début des travaux, qu'il, aussi, prévoit
d'inscrire l'interdiction du port de
signes religieux pour plusieurs catégories de personnes représentant l'État du
Québec. Ce débat-là a cours depuis longtemps,
et il est temps, aujourd'hui, de faire un pas décisif dans le sens de ce que
les Québécois veulent, c'est-à-dire de
poursuivre et de compléter la séparation de l'Église et de l'État, qui a été
amorcée, comme on le sait tous, durant les années 60 et
malheureusement n'a pas atteint la finalité que les Québécois souhaitaient la
voir atteindre au cours des dernières
années. Donc, le port des signes religieux, pour certains, peut paraître
anodin, mais, pour nous, nous souscrivons à l'idée, en fait, de façon
totalement égalitaire, que les gens puissent avoir, même dans leur apparence
physique ou vestimentaire, la neutralité totale dans les services qui sont
offerts à la population et aux citoyens du Québec.
Alors, comme
vous le savez, le président et les vice-présidents de l'Assemblée nationale
devront ne pas afficher de signes
religieux; les juges de paix, les greffiers, les shérifs, registraires des
faillites; également tous ceux qui doivent prendre des décisions de façon neutre et objective, comme les juges
administratifs, les commissaires régisseurs de la Régie du logement; lorsqu'il
est question, également, de commission d'enquête, un commissaire qui serait
nommé ne devrait pas avoir de signes
religieux qui soient visibles de la part des gens avec qui il est en
interaction; un arbitre nommé par le
ministre du Travail, le ministre de la Justice — on comprend bien pourquoi — le Procureur général, le Directeur des
poursuites criminelles et pénales ainsi
qu'une personne qui exerce la fonction d'avocat, de notaire ou de procureur aux
poursuites criminelles et pénales et qui
relève d'un gouvernement; un avocat, un notaire de pratique privée pour des
mandats qu'il a
reçus du gouvernement ou d'un organisme public; un agent de paix exerçant des
fonctions principalement au Québec; un
directeur, une directrice, un directeur adjoint, directrice... ainsi qu'un
enseignant d'un établissement d'enseignement public, on y reviendra tout
à l'heure, mais il s'agit d'un établissement d'enseignement public...
Bien, en fait, je vais le mentionner tout de
suite. Il est quand même à noter que les établissements privés et le personnel non enseignant des écoles publiques ne
sont pas visés par la loi à l'heure actuelle. Nous aurons des questions à poser sur cet aspect. Par contre, tout le
personnel scolaire, tant privé que public, est assujetti à l'obligation de
services publics à visage découvert.
Les CPE et garderies subventionnées ne sont pas assujettis à l'interdiction des
signes religieux, ce que l'on a déploré, mais le sont pour les services à
visage découvert, ainsi que les bureaux coordonnateurs de garde en
milieu familial.
Le projet
de loi, enfin, introduit une clause
de droits acquis relativement restreinte, qui ne vise que les personnes qui conservent les mêmes fonctions dans le même organisme
public. Tout changement de poste, d'organisme, de commission
scolaire ou promotion fera perdre le droit acquis. Nous saluons d'ailleurs le
fait que cette idée du droit acquis ait été
retenue par le législateur, par le gouvernement, pour les fins de son projet de loi, pour éviter la mise à pied de
gens qui sont déjà à l'emploi du gouvernement et qui verraient
ainsi leurs conditions de travail modifiées de façon, disons,
discutable.
Le projet de loi introduit une clause dérogatoire aux deux chartes des droits et
libertés, celles du Québec et du Canada, en précisant que le projet de loi est fait indépendamment de certaines dispositions de la Charte des
droits et libertés de la personne, de la Loi constitutionnelle de 1982.
Alors, pour ce qui est de l'opinion et du point
de vue de notre formation politique, eh bien, il est clair que la séparation de l'État et des religions est non
seulement nécessaire, mais absolument fondamentale. Nous croyons que c'est la base même
de la société, d'une société qui se veut libre et neutre, où
tous les citoyens et les citoyennes sont égaux et où la liberté de
conscience et la liberté de religion sont de mise.
Et ça, on ne le discute pas. Il y a beaucoup de
discours qui portent sur cet élément-là, nous le reconnaissons. La liberté de conscience et de religion demeurera.
Elle a été inscrite dans les chartes de droits et libertés et elle est là pour
durer, cette liberté qu'on accorde à tout un
chacun de choisir sa religion, de croire en son Dieu et d'y adhérer sur une
base personnelle, dans son intimité,
ou en public, dans l'espace public. Mais évidemment, et c'est une
condition stricte pour le projet de
loi, lorsqu'il est question de
fournir des services au nom de l'État du Québec, eh bien, évidemment, là, la perspective est
totalement différente.
Je reviens
donc sur le fait qu'il existe des principes et des concepts de la laïcité de
l'État qui sont mis de l'avant dans le projet de loi, et il nous
apparaît essentiel que les institutions parlementaires, gouvernementales et
judiciaires respectent ces principes de
neutralité et de laïcité, de liberté de conscience, oui, et de liberté de
religion. Nous reconnaissons donc les
efforts du gouvernement pour légiférer enfin sur cette question sensible
et tenter de mettre fin à ce débat de société qui dure, comme on le sait
tous, depuis nombre d'années.
Nous saluons également
l'interdiction du port de signes religieux pour les enseignants et les
enseignantes. Il y a eu une réflexion là-dessus au gouvernement qui a été, j'imagine, aussi influencée ou alimentée par le point de vue que nous avions exprimé dans
le débat public, et qui finalement a été retenu pour, donc, que ce soit appliqué
dans le système scolaire public au Québec.
Et évidemment, on le sait, cet
élément-là va plus loin que la recommandation du rapport Bouchard-Taylor,
qui est utilisé comme référence par à peu près tous les intervenants au
dossier.
Cependant,
on doit quand même mentionner — et on pourra évidemment argumenter et questionner
le gouvernement sur ses
intentions — certains
éléments qui nous semblent révéler des incohérences, dans le projet de loi.
D'abord,
il est entendu que le projet de loi est affaibli par le fait que l'on ne prenne pas
la peine de définir les signes
religieux dont il est question dans le projet
de loi. Il s'agit,
de notre point de vue, d'une lacune majeure au projet de loi, qui le fragilise, qui le
rend plus vulnérable à la contestation ou à l'interprétation.
On omet
également d'en dire davantage ou de préciser quelles sont les sanctions ou les
conséquences dans le cas où les personnes ne se soumettraient pas à la
loi. Évidemment, lorsque l'on met de l'avant un projet de loi et qu'il a force de loi, les gens qui y sont soumis se
poseront la question à savoir s'ils doivent en tout temps respecter les
éléments de la loi et quelles sont
les conséquences si on ne le fait pas, et, à ce stade-ci, il n'est pas clair à
savoir qui sera responsable de faire
appliquer la loi et quelles seront les conséquences ou les sanctions si on ne
respecte pas les éléments de la loi par rapport, par exemple, aux signes
religieux. C'est un élément qui est important et qui est d'autant plus
inquiétant que plusieurs personnes, morales
ou physiques, déjà, dans le dossier, dans l'espace public, à travers les
médias, ont signifié leur intention de ne pas respecter ces éléments de
la loi, donc d'organiser de façon plus ou moins concertée une désobéissance civile en ce qui concerne
l'application de ce qui deviendra loi, on le suppose bien, au cours des
prochaines semaines. Même après avoir questionné le ministre lors des audiences
ou des auditions publiques et des consultations particulières, ces questions ne sont toujours pas résolues, elles sont
toujours en suspens. Il faudra bien que l'on puisse avoir des
précisions, des clarifications pour l'ensemble des parlementaires, bien
entendu, mais également et de façon beaucoup plus importante pour la population
et les citoyens du Québec.
• (17 h 50) •
La plus
grande incohérence, parce que c'est de ça dont il s'agit, et nous l'avons déjà
mentionné, l'incohérence, donc, du
projet de loi n° 21 est celle d'interdire le port de signes religieux pour
les enseignantes et les enseignants du secteur public, des écoles qui sont financées à 100 % par le gouvernement
du Québec, mais ne pas l'appliquer aux écoles privées, les écoles privées qui,
comme on le sait, bénéficient du soutien de l'État et d'un soutien important, à
hauteur de 60 %, ce qui, pour
nous, est à ce point significatif que la différence ne doit pas, finalement,
avoir pour conséquence de les considérer de façon distincte dans le cadre d'un projet de loi comme celui-là. Si
l'on veut véritablement que la laïcité de l'État soit affichée, soit présente dans le milieu scolaire,
évidemment, le milieu scolaire privé, largement financé par l'État, devrait également
en faire partie. C'est, pour nous, un non-sens,
qu'un État qui se veut laïque subventionne des écoles religieuses. Il y a près de 140 écoles religieuses
subventionnées au Québec, à l'heure actuelle, et on devra un jour se pencher
sur cet élément-là. Et j'en profite
quand même pour mentionner que, si l'État s'affirme laïque, il devra considérer
la possibilité de cesser le
financement d'écoles qui ne seraient pas laïques, qui ne se conformeraient pas,
donc, à la loi que l'on adoptera.
Plusieurs groupes sont venus témoigner pour
l'abolition de tout financement public aux écoles privées conventionnelles... confessionnelles, je devrais
dire : Pour les droits des femmes du Québec, le Mouvement laïque québécois,
Rassemblement pour la laïcité, Ligue d'action nationale, Centrale des syndicats
du Québec. Même le sociologue Gérard
Bouchard, malgré son récent, comment dire, changement de position, s'étonnait
de l'exclusion des écoles privées, pourtant largement financées par
l'État. Il a affirmé que ces milieux-là devraient être visés également. De son
côté, la Fédération autonome de
l'enseignement, en faveur de la neutralité religieuse, a relevé également
l'incohérence, voire même l'injustice
selon laquelle seules les écoles publiques doivent assumer cette
responsabilité. La Fédération des commissions scolaires du Québec était
aussi du même avis.
Alors, en
plus de ce qu'on pourrait appeler le double standard entre le privé et le
public, le projet de loi interdit également
le port de signes religieux pour les enseignantes et les enseignants ainsi que
pour les directeurs d'école, mais pas
pour le reste du personnel scolaire, qui pourtant est tout aussi important dans
le fonctionnement de l'école, du système scolaire. Et ces gens-là, les dévoués
membres du personnel scolaire, sont des gens tout aussi significatifs pour les
jeunes du Québec en milieu scolaire que
peuvent l'être des enseignants, les enseignantes et les directeurs. Ce
personnel a un impact, fort
heureusement, un impact important dans le cheminement scolaire des élèves, dans
la vie de nos enfants. Et c'est là où le
projet de loi crée une certaine inégalité dans le traitement des membres du
personnel des écoles, à savoir une enseignante, un enseignant se verra dans l'obligation de retirer les signes religieux
qu'il pourrait ou qu'elle pourrait porter, par exemple une enseignante qui porterait le voile devrait le
retirer lorsqu'elle est en fonction, alors que son collègue qui pourrait être
éducateur spécialisé pourra, lui, porter sa kippa sans aucune autre
préoccupation.
Selon nous, l'interdiction devrait être étendue
à toute personne qui, dans le cadre scolaire, interagit avec les enfants. L'enseignant n'est pas le seul à agir
auprès des élèves, on en conviendra. Il
faut donc que l'école soit un domaine complètement neutre pour les enfants, pour l'ensemble
des élèves dans leurs relations, donc, avec le personnel de soutien comme avec le personnel enseignant. Les professionnels
qui complètent le travail de l'enseignant
ne devraient donc pas être soumis à
une norme différente. Les adultes qui exercent une autorité morale sur les
enfants, qui représentent des modèles pour
eux ont, selon nous, le devoir de mettre en place les conditions favorables à
la construction de leur jugement, de leur identité, de leurs convictions et permettre à chaque enfant de se forger
sa propre vision du monde. Les enseignants doivent être neutres dans une
école, qui doit l'être aussi.
Alors, je
pourrais mentionner que, de plus, on s'interroge, à savoir : Pourquoi
interdire le port de signes religieux pour
les enseignantes et les enseignants mais pas pour les éducatrices ou les
éducateurs en centre de la petite enfance, en garderie privée ainsi qu'en service de garde? C'est, encore une fois,
une incohérence du projet de loi, on en conviendra. La nécessité d'assurer une neutralité réelle et
apparente des enseignantes et des enseignants est cruciale, considérant que
l'école a un rôle fondamental dans la
formation de l'esprit citoyen et du développement de l'autonomie de la pensée
des élèves. Mais alors comment ne pas s'étonner qu'il n'y a rien dans le
projet de loi sur les éducatrices ou éducateurs en milieu de la petite enfance?
Je voudrais
également manifester un autre élément qui nous a étonnés, à savoir qu'il n'y a
rien dans le projet de loi sur l'abolition ou minimalement la réforme
des cours d'éthique et culture religieuse. Nous l'avons déjà mentionné ici, au salon bleu, que ce cours devait être
aboli. Nous ne sommes pas les seuls, d'ailleurs, à nous questionner sur la
partie culture religieuse de ce cours. En commission parlementaire,
c'était également le cas de Nadia El-Mabrouk, Pour les droits des femmes, Ligue
d'action nationale, le Mouvement laïque québécois, le Rassemblement pour la
laïcité.
Alors, je
pense, en terminant, qu'il faut enfin franchir une étape déterminante dans ce
débat, qui dure depuis nombre d'années.
Je crois qu'il faut se mettre au diapason de la majorité de la population du
Québec, qui est en faveur de la laïcité de l'État. Et nous travaillerons à bonifier ce projet de loi au cours
des prochaines semaines, des prochains jours et des prochaines semaines.
Je vais terminer là-dessus, Mme la Présidente.
Je vous remercie de votre attention.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Compte tenu de
l'heure, je vais suspendre les travaux pour procéder aux deux débats de
fin de séance.
Alors, je suspends les travaux quelques
instants.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 18 h 4)
Débats de fin de séance
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux
deux débats de fin de séance.
Le premier débat, qui se fera entre M. le député
de Pontiac et Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation, concerne l'absence d'entente entre le gouvernement et l'armée pour
enlever les sacs de sable des terrains des gens sinistrés en Outaouais.
Je
vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le
député qui a soulevé le débat et le ministre qui
lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député
a ensuite un droit de réplique de deux minutes.
M. le député de Pontiac, je vous cède la parole
pour une durée de cinq minutes.
Aide aux victimes
outaouaises des inondations printanières de 2019
M. André Fortin
M.
Fortin : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Effectivement, c'est un peu un suivi, là, de la discussion qu'on
a eu ce matin entre, bien, moi-même
et le leader parlementaire du gouvernement ainsi que la ministre des Affaires
municipales, et je sais que la ministre des Affaires municipales sait
exactement de quoi je parle.
Je le sais qu'elle le sait parce que la mairesse
de Pontiac lui en a parlé quand elle est allée dans la région. La mairesse de Pontiac lui a dit : Ce serait
important pour nos citoyens, pour notre communauté, pour notre municipalité,
ce serait primordial que les Forces armées
soient disponibles pour enlever les sacs de sable. Pourtant, ce matin, la
réponse qu'on a eue de la ministre...
et c'est pour ça qu'on est ici, Mme la Présidente, la ministre a parlé
d'hébergement, a parlé d'hébergement
des sinistrés, et ce n'était pas ça, la question du tout. On parlait de sacs de
sable. Vous l'avez noté d'entrée de jeu, là, dans votre introduction.
Et pour ceux
qui ont déjà fait un sac de sable, pour ceux qui ont déjà installé un sac de
sable... savent exactement de quoi je
parle. Les sinistrés savent exactement de quoi on parle. C'est du travail...
c'est un dur labeur, disons, c'est pesant, ce n'est pas évident à manoeuvrer, c'est... il y en a, on n'en fait pas
un, sac de sable, on en fait des centaines, des fois des milliers. J'ai vu un reportage récemment sur une
résidence dans la municipalité de Pontiac où il y avait 30 000 sacs
de sable d'installés, Mme la
Présidente. 30 000 sacs de sable, c'est une chose de les faire avec
des bénévoles, c'est une chose de le faire quand on a de l'adrénaline,
on essaie de protéger notre maison. Les inondations commencent, l'eau monte, il faut absolument faire ce qu'il faut faire pour protéger nos
avoirs, pour protéger notre résidence, pour protéger là où on élève notre famille, pour protéger un lieu qui est
cher dans notre coeur pour nous, pour notre famille, pour nos enfants. Puis, quand il y a des gens autour... Il y en a eu
des centaines, il y en a eu des milliers, de bénévoles, en Outaouais,
au cours des dernières semaines.
Alors, c'est
une chose de faire des sacs de sable, d'installer les sacs de sable quand on a
de l'aide, quand on a de l'énergie,
quand on commence une aventure malheureuse comme celle-là. Mais, au stade où on
est rendus aujourd'hui, Mme la
Présidente, après six semaines... on est dans la sixième ou la septième
semaine, là, si je ne me trompe pas, Mme la
Présidente, d'inondations... Il y a
des gens qui ont de l'eau dans leur cuisine depuis six semaines, puis ça
commence à baisser. Il y a des
endroits où ça a diminué beaucoup. Il y a des endroits où ça n'a pas diminué tant
que ça encore. Il y a des gens qui
habitent chez leur beau-frère, chez leur belle-soeur, chez leur cousin, chez
leurs amis, chez leurs parents. Je ne sais pas pour vous, Mme la
Présidente, mais, moi, passer quelques semaines chez ma belle-mère dans un
petit appartement avec les enfants, avec les
animaux, avec tous nos avoirs, disons que ce n'est pas facile pour la personne
qui nous héberge, puis ce n'est pas
facile pour nous autres non plus. Ce n'est pas toujours évident à vivre, une
situation... ce n'est jamais évident à vivre, une situation comme
celle-là.
Puis, dans les petites municipalités — la ministre
nous parlait d'hébergement, là — dans les toutes petites municipalités, il n'y en a pas, d'hôtel. Des gens
habitent avec leur famille. Et là ils sont épuisés. Là, ils sont tannés. Ça
fait des semaines qu'ils essaient de pomper
l'eau de leur sous-sol. Ils ont tout fait pour protéger leur maison. Ils se
rendent compte que peut-être
qu'ils y sont arrivés, peut-être qu'ils n'y sont pas arrivés, peut-être
que leur maison, c'est une perte totale,
mais il faut quand même, quand ils arrivent chez eux, là... L'eau s'en va
un peu, ils arrivent chez eux, ils regardent ça puis ils se disent : Ouf! J'ai de la job à faire, hein, ça ne
sera pas facile. J'ai de la job à faire. Là, ils retournent dans la
maison, ils voient ce qui est dehors, là, les centaines de sacs de sable qui
n'ont pas fonctionné. Ça n'a pas protégé la résidence, l'eau est passée
par-dessus. Ils sont rendus contaminés, hein, le sable est contaminé. Ça ne
sent pas bon, Mme la Présidente, parce qu'il y a toutes sortes de contaminants
qui ont affecté ces sacs-là. Ils sont mouillés, ils sont pesants.
Puis pesant,
on parlait de pesant, là... Quand on commençait les sacs de sable qui étaient
secs, des sacs de 50 livres, Mme la
Présidente, j'en ai vu dans mon
comté, des sacs de 50 livres secs, ça va, imaginez mouillés, ces sacs-là. Il y
en a qui sont déchirés. Il y en a
qui... Les citoyens ne sont simplement pas capables. Imaginez, enlever
30 000 sacs de sable de votre terrain, Mme la Présidente. Ça ne se
fait pas, et c'est pour ça que l'armée a été appréciée en 2017. C'était une
immense partie de ce qu'ils ont fait pour
les citoyens de notre région, mais des citoyens de beaucoup
d'endroits au Québec, des
citoyens, là, qui se retrouvaient au dépourvu.
Et le gouvernement n'a pas d'entente avec les Forces armées. Pourquoi? On ne le sait pas,
c'est ce qu'on demande à la ministre, aujourd'hui, c'est : Entendez-vous, s'il vous plaît, avec les Forces armées
canadiennes, parce que nos citoyens, là, nos citoyens, ils n'ont pas l'énergie,
ils sont épuisés, ils sont fatigués, ils n'ont pas le temps. Ils ne veulent pas
que leurs enfants jouent autour de ce
sable contaminé là quand l'eau va rebaisser puis ils n'auront pas eu le temps
de les enlever. Ils ne veulent pas,
Mme la Présidente, mettre à risque leurs familles. Ils veulent retrouver une
quiétude, éventuellement, et ça, ça
passe par avoir l'aide de l'armée. Les gens n'ont pas les ressources, que ce
soit... les petites municipalités n'ont pas les ressources pour le faire, il va y avoir moins de bénévoles, ça
va être une situation, on le sait, qui va être difficile, pour des semaines et des semaines. Pourquoi le
gouvernement n'a pas exigé de l'armée d'avoir de l'aide pour les sacs de
sable?
• (18 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède
la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation.
Mme Andrée Laforest
Mme
Laforest : Merci, Mme la Présidente. Alors, ce matin, oui, j'ai pris
la réponse pour ma collègue à la Sécurité publique et puis je peux vous dire qu'on a travaillé ensemble, toutes
les deux, depuis le début. Elle, depuis le 10 avril, avec son programme d'indemnisation qui était très,
très, très bien apprécié. Oui, je suis allée à Pontiac rencontrer votre mairesse, je suis allée à Gatineau aussi, et vous
comprendrez que les Affaires municipales et l'Habitation, avec la Sécurité
publique, on a vraiment été proactifs, si je peux dire.
L'armée est arrivée
très, très rapidement. Oui, vous parlez maintenant de sacs de sable. Moi, j'ai
tout de suite discuté, parce que, oui, on a
discuté ensemble, Sécurité publique, Affaires municipales et Habitation, on a
discuté ensemble, puis on a un
programme, aux Affaires municipales, un programme qu'on peut mettre en commun
les services d'une autre municipalité qui est tout près. Moi, j'ai communiqué
avec toutes les municipalités qui étaient problématiques, si je peux
dire, ou qui avaient besoin d'aide, et... Merveilleux, parce que nos directions
régionales sont en place, communiquent ensemble
et elles se sont partagé des services, des services au niveau des besoins
matériels, des services au niveau des ressources humaines. La
communication a très bien été.
Ce matin, d'ailleurs,
je suis arrivée à mon travail et j'ai posé la question, j'ai appelé dans
certaines directions régionales. Le travail
se fait vraiment en collaboration. Qu'est-ce qui s'est passé, peut-être, dans
le passé? Écoutez, moi, ce qu'on m'a
dit, c'est que toutes les demandes arrivaient et toutes les demandes étaient
acceptées. Nous, ce qu'on fait, vous
avez raison, on fonctionne... on y va, par exemple, aux deux semaines, on
demande à l'armée. Ne soyez pas inquiet, nos demandes sont là, notre
travail est vraiment important, on fait des pressions. Mais, ceci étant dit, il
faut que les directions régionales
travaillent avec les municipalités qui sont ensemble, là, on appelle ça de la
mise en commun, et, quand les directions régionales nous disent que ça
va bien, par exemple, avec les cols bleus, le travail se fait bien, bien, à ce
moment-là, on est plus que satisfaits.
Ce matin, je voulais
amener le point d'hébergement, parce que l'habitation, quand je suis allée en
Outaouais, l'habitation, vraiment... je sais
que cette région-là a des besoins en habitation. J'ai rencontré, comme je le
disais encore ce matin, le maire de
Gatineau. Et ce qu'on m'a dit, c'est qu'on avait la chance d'avoir les PSL
d'urgence, les programmes au soutien
au loyer d'urgence. On en a encore. On est toujours en communication. Même, ce
que je peux dire, c'est qu'on a
libéré 70 unités AccèsLogis pour la région de Gatineau. Vous allez me
dire : Ça ne se construit pas tout de suite. Sauf qu'on a des
possibilités avec des logements privés, avec les PSL, d'offrir de l'aide.
Alors,
si je peux dire, ce matin, j'étais très heureuse de prendre la question, parce
qu'on est toujours en communication, ma collègue et moi, par rapport aux
inondations. Et également ce que je pourrais vous... comment je pourrais vous rassurer, c'est que, même
aujourd'hui, ma collègue était à Vaudreuil-Soulanges. Parce qu'on l'a entendu
hier, les demandes.
Sainte-Marthe-sur-le-Lac, j'ai été là, je suis allée quatre fois. Alors, ne
soyez pas inquiet, la mairesse de
Sainte-Marthe, la mairesse de Pontiac, le maire de Gatineau, on discute
ensemble. Les demandes se font parfois par texte. Alors, si on dit que ce n'est pas rapide, ça... je
pense qu'on ne peut pas aller plus rapidement que ça. On a un gouvernement
qui a demandé l'aide de l'armée beaucoup plus rapidement que par les années
passées.
Ceci étant dit, Il ne
faudrait pas vivre ça, 2017, 2019, 2020. Alors, mon rôle, moi, qui est
l'aménagement du territoire... on a notre
comité d'action, qui est essentiel. On est huit ministres. On va s'associer
d'experts. On va, par exemple, se
concentrer sur les futurs événements pour ne plus que ça revienne. Et, si ça
revient... L'aménagement du territoire, on n'en parle pas beaucoup, parce que la loi sur l'aménagement du
territoire a 40 ans. Alors, vous allez comprendre que nos actions vont être centrées sur l'aménagement du
territoire. On va regarder les zones qui sont inondables, les zones qui sont zéro-20 ans, les zones de 2017 qui ont été
inondées, les zones de 2019. Alors, on va se concentrer sur ce travail-là.
Puis, ceci étant dit, ne soyez pas inquiet, ce n'est pas parce que vous ne
voyez pas toutes les demandes, et tous les événements,
et toutes les démarches qui se font pour aider les municipalités... Mais je
peux vous dire que la différence entre 2017 et 2019, c'est que la
communication a été tout à fait franche, transparente, honnête, et on n'a eu
que des remerciements — de votre mairesse, du maire de Gatineau.
Puis je peux vous rassurer, ça va me faire plaisir demain, avec plaisir, de recommuniquer avec votre mairesse
parce que, quand je suis passée, elle m'a dit : Je suis vraiment
impressionnée de la vitesse dont
votre gouvernement a agi pour les inondations. La sécurité du public, c'est
essentiel. Oui, l'armée est arrivée tout de suite. Les directions
régionales des affaires municipales ont avancé. Et ne soyez pas...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. M. le
député de Pontiac, la parole est à vous
pour votre droit de réplique de deux minutes.
M.
André Fortin (réplique)
M. Fortin : Mme la
Présidente, je pose une question
à la ministre sur des sacs de sable, elle me répond avec des
logements subventionnés puis elle me
répond avec la réponse globale du gouvernement sur les inondations. J'ai l'impression, quand elle va au restaurant, là, elle s'assoit, on
lui demande ce qu'elle veut manger, elle dit : Bien, j'aimerais commander
une paire de souliers. Ça ne marche pas, son affaire.
Je lui demande une question
simple et elle me répond sur autre chose complètement. Elle nous dit, Mme la Présidente,
elle nous dit : Inquiétez-vous pas, nos demandes sont là. Bien, la grande
corvée à Gatineau, là, c'est en fin de semaine. À ce que je sache, il va y avoir des citoyens,
des bénévoles qui vont être là, qui vont aider, qui vont aider à nettoyer, mais il n'y en aura pas autant qu'il y avait
des bénévoles il y a quelques semaines pour installer ces sacs de sable là. Ce serait, sans mauvais jeu de mots, se
mettre la tête dans le sable de penser ça, Mme la Présidente. Il va y en
avoir, des bénévoles, mais jamais
ils ne vont être capables de ramasser tout ce qu'il y a à ramasser. C'est en
fin de semaine, c'est maintenant, c'est là qu'on a besoin
des Forces armées. Ce n'est pas plus tard, c'est maintenant.
Alors,
nos demandes sont là. Elle est où, la réponse? Est-ce qu'ils vont voir les
Forces armées, les citoyens, bientôt? Je ne pense pas, Mme la Présidente, parce que, quand la ministre me dit : Bien, peut-être
que vous ne voyez pas, M. le député,
tout ce qui se fait au gouvernement, bien, elle a peut-être raison, mais les citoyens,
en fin de semaine, là, ils ne verront pas les Forces armées les aider. Ils vont regarder le gros tas
de sacs de sable puis ils vont se dire : Comment je fais ça? Comment je vais faire pour nettoyer ça?
Ils vont être découragés encore plus qu'ils sont présentement découragés.
Mais savez-vous
quoi? Mme la ministre me dit : Bien, je ne voudrais pas qu'on
revive ça en 2020. Mais, au rythme où
on est partis, là, les sacs de sable, ils vont encore être là en 2020 pour les citoyens.
Ils ne les auront jamais bougés, ils n'ont jamais pu les déplacer, Mme la Présidente.
Alors, réellement,
là, je m'attendais à une réponse toute simple, et ça ne demande rien au gouvernement du Québec, ça demande un appel, ça demande un appel au gouvernement fédéral de dire : Pouvez-vous, s'il
vous plaît, aider les citoyens
qui sont sinistrés, qui sont évacués, qui
sont fatigués, qui sont inondés puis qui n'ont pas les moyens, qui n'ont pas
les ressources, qui n'ont pas la force pour ramasser ces sacs
de sable là? Pouvez-vous envoyer l'armée? C'est tout ce qu'ils avaient
besoin de faire. Ça ne leur aurait rien coûté, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Maintenant, nous allons procéder au second débat entre
M. le député de Nelligan et Mme
la ministre déléguée au Développement économique régional concernant l'abolition insensée et antiéconomique du réseau national des
pôles d'innovation. M. le député de Nelligan, je vous cède la parole pour une durée de
cinq minutes.
Financement de
l'innovation en région
M. Monsef Derraji
M.
Derraji : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je ne
pense pas devoir rappeler le nombre
de fois que j'ai pu me lever dans cette Chambre pour poser la question à Mme
la ministre responsable du Développement économique régional sur l'avenir des pôles. J'ai eu toute une panoplie
de réponses : Je vais faire la tournée, je vais consulter les acteurs du
milieu...
Tout a
commencé, Mme la Présidente, le jour
de l'annulation du lac-à-l'épaule. À l'époque, on disait que la
facture dépassait les 100 000 $, 80 000 $ ou
100 000 $. J'ai eu l'occasion de questionner Mme la ministre pendant
l'étude de crédits. J'ai demandé à ce
qu'on nous dévoile cette facture, qu'on nous met au courant de cette facture,
et il n'y avait pas de facture. Il y
avait une réponse verbale que les coûts... et le coût était faramineux. C'est
pour cela, on annulait le lac-à-l'épaule.
Pourtant, Mme
la Présidente, les acteurs du milieu voulaient un organisme de coordination
nationale. Les acteurs du milieu et
les pôles travaillaient déjà ensemble, et vous savez pourquoi? Ce qui
m'attriste aujourd'hui, ce qui m'attriste énormément aujourd'hui, c'est que... le vote de non-confiance que la
ministre a envoyé à toute la région de la Mauricie, toute la région de la Mauricie... parce que ce que
le Digihub a réussi, ce que la région a réussi depuis les dernières années
est un exemple de succès pour l'ensemble des
régions du Québec. Et ce n'est pas en tant que de donneurs de leçons que ces gens voulaient aider le Québec; au contraire,
ces gens voulaient accompagner. C'est comme ça qu'on travaille, au Québec. Ensemble, on tisse des liens, surtout au
niveau de l'innovation. C'est pour cela que notre gouvernement a mis en
place les pôles.
Et la
ministre avait l'opportunité de signer et de lâcher le financement depuis le
début de son mandat. Ça n'a pas été
fait, Mme la Présidente. Ça n'a pas été fait. Encore sur la table de son
ministère, il y a des projets, et, encore, on traîne ça.
• (18 h 20) •
Et qu'est-ce
qu'on fait, Mme la Présidente? Mme la Présidente, la ministre a décidé
finalement de fermer la porte d'un
réseau national. Vous savez quoi? C'est comme si on coupe la tête et on sépare
le corps de la tête. C'est exactement ce qui a été fait.
L'organisme accompagnait les pôles, les aidait.
Et vous savez quoi? Le réseau était en France, maintenant, Mme la Présidente. Et je vais vous lire un texte.
Le jour même que Mme la ministre a annulé le réseau, le D.G., l'ex-D.G. du RNPRI participait, en France, à une mission, et
il voulait faire profiter l'ensemble des régions, par visioconférence, et il
partageait : «"Nous avons un outil de cartographie qui permet
d'afficher les besoins particuliers d'entreprises", explique-t-il. "En temps réel, nous pourrons
prévoir, par exemple, ce que sera l'industrie du drone dans trois ou six mois,
avec des chiffres pour tous les métiers reliés à cette industrie."
«M. Nadeau précise que cet outil sera déployé
gratuitement aux régions intéressées. Il est complété par un cryptoposte, un genre de contrat intelligent qui
facilite la recherche selon les besoins. "Avec l'intelligence artificielle
et la ‘blockchain', ça permet de positionner des gens qui veulent aller en région,
de les envoyer au bon endroit, au bon moment, avec les bons
interlocuteurs..."»
Ces
innovations, Mme la Présidente, n'ont finalement pas été présentées en visioconférence. Vous savez
pourquoi? Parce que
Mme la ministre a décidé un jeudi soir d'envoyer un communiqué de
presse pour fermer le réseau national.
Et donc notre
cheval de bataille, notre expert en innovation qu'ont vanté depuis plusieurs
années l'exemple parfait d'une région et non pas de Québec
et de Montréal, d'une région qui s'est levée pour changer
l'économie régionale ont dit :
On ferme le réseau et on laisse les pôles à leur plein essor. Ça veut
dire : on ne va pas les accompagner. Et, à date, au lieu d'avoir 18
pôles, on a quatre ou cinq pôles.
Mme la Présidente, le maire, le maire de Shawinigan a, à plusieurs dit que le but du
réseau national n'était pas d'imposer une méthode mais d'aider au
développement, et, peut-être, si la ministre a pris le temps d'écouter ces gens
réellement, pas une seule fois,
probablement, le réseau va continuer d'exister et va jouer son rôle
d'accompagner les pôles et, en parallèle, encourager l'innovation dans
nos régions.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède
la parole à Mme la ministre déléguée au Développement économique
régional. La parole est à vous pour une durée de cinq minutes.
Mme Marie-Eve Proulx
Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci,
Mme la Présidente. J'apprécie énormément la question du collègue de Nelligan puisque ça fait plusieurs fois que je lui
rappelle et je lui répète les éléments par rapport au réseau national des
pôles d'innovation. Mais, en même temps, je
sais que ça peut prendre 17 fois avant qu'un message, en moyenne, soit intégré.
Donc, je dois être rendue à cinq. Donc, on va continuer dans ce sens.
Je veux juste
rappeler à mon collègue de Nelligan qu'en janvier dernier j'ai reçu une lettre,
le gouvernement a reçu une lettre de la Fédération québécoise des municipalités
qui nous indiquait se questionner sur
le rôle que pouvait jouer le réseau
national des pôles régionaux d'innovation, ce qui nous a amenés à valider
certains éléments directement avec le
pôle. On a d'ailleurs des preuves écrites du réseau national, qui nous indique
qu'ils organisaient, à ce moment-là, un événement rassemblant les pôles
régionaux d'innovation pour des coûts, un budget total de 70 000 $.
Ça m'a
préoccupée, comme ministre responsable du Développement économique
régional, puisque j'ai constaté qui
avait seulement cinq pôles de légitimés par une entente
gouvernementale. Donc, cinq pôles, 70 000 $.
Utiliser des fonds publics sans avoir
d'acteurs à mobiliser, ça m'a préoccupée, comme ministre, comme responsable des
fonds publics.
C'est donc à
partir de ce moment-là qu'on a agi avec leadership puis qu'on a mis fin à cet
événement qui n'avait pas de
légitimité à ce moment-là. Toutefois, j'ai donné une chance au coureur. J'ai
dit : Je vais aller faire une tournée, rencontrer l'ensemble des
acteurs des régions. J'ai aussi décidé d'aller rencontrer ce fameux réseau
national, parce qu'il y avait quand même
sûrement quelque chose d'intéressant. L'intérêt était de voir qu'est-ce qu'il y
avait d'intéressant là-dedans. Donc,
à partir de là, ça nous a amenés à faire une tournée dans les régions. Ce que
j'ai pu constater, puis ça, même mon
collègue de Nelligan l'a reconnu le 3 mai dernier lors de l'interpellation,
l'ancien gouvernement a saccagé et abandonné
les régions. Il n'y avait plus d'infrastructure, il n'y avait plus d'organisme
qui accompagnait. On cherchait un
sens au développement. Toutefois, j'ai rencontré, dans cette fameuse tournée,
des gens motivés, une volonté d'agir, un dynamisme pour faire vivre les
régions, pour propulser les régions. Puis c'est ça qui m'a stimulée à pouvoir
dire qu'on travaille en développant par le
bas. C'est ça, la base du développement, Mme la Présidente, c'est qu'on ne
commence pas par en haut pour imposer
à la base, mais on commence à la base, puis c'est la base qui décide de se
rassembler ou non.
Donc, ce
qu'on a constaté par rapport au réseau, il y a eu trois constats. D'abord,
qu'on a commencé par en haut. Donc,
que le sens du réseau n'avait pas de sens parce que, d'abord, les pôles
n'étaient pas constitués officiellement. Donc, en n'ayant pas de légitimité, comment le réseau pouvait agir?
Deuxièmement, on a eu beaucoup de difficultés à obtenir des états financiers.
On a eu beaucoup de difficultés à obtenir cette reddition de comptes.
L'utilisation des fonds était douteuse. Puis
ça, ça me préoccupe. Encore une fois, avec l'utilisation de fonds publics,
c'est questionnable. L'autre élément, c'est que c'était assez
désorganisé dans les actions, puisque la légitimité... les pôles n'étaient pas
constitués. Donc, comment pouvaient-ils être
structurés, organisés? Il y avait plusieurs objectifs, puis on ne savait pas
trop où est-ce que ça s'en allait.
Notre philosophie,
comme gouvernement, au niveau du développement économique régional, est claire.
On veut s'assurer que chaque région
puisse se développer en fonction de ses spécificités régionales. On veut
également s'assurer qu'on ne fasse
pas de mur-à-mur. Ce n'est pas vrai qu'on va avoir un seul modèle, qu'on prenne
le modèle, par exemple, de la
Mauricie puis qu'on le reproduise partout au Québec. Il est temps au Québec que
chaque région puisse se développer en fonction de ses spécificités, de
ses couleurs, de ses façons de faire, de sa culture. Puis c'est ce qu'on veut
faire au niveau du développement économique
régional. Pour nous, c'est clair, puis c'est à partir de là aussi qu'on va
pousser la créativité, l'innovation puis assurer que le développement du
Québec soit prospère.
Donc, notre objectif est d'abord : l'argent
va s'en aller en région. Ça, je peux le garantir comme ministre. On l'a déjà garanti
d'ailleurs par le budget, ces fonds-là vont aller en région pour les
pôles. Cet argent-là aussi qui devait être prévu au réseau national va
s'en aller en région. Si les régions sont intéressées, une fois que ces fameux
organismes seront créés, s'ils sont
intéressés à se regrouper au niveau national, nous les supporterons. Mais nous
n'agirons plus à l'inverse comme l'a faite la stratégie électoraliste du
dernier gouvernement de créer, à la dernière minute, un réseau et des
pôles sans trop savoir pourquoi
et comment. Donc, nous, on part des besoins des régions, on part des besoins du
milieu pour assurer un développement économique prospère et cohérent, et ce, partout au Québec.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la ministre. M. le
député de Nelligan, vous avez un
droit de réplique de deux minutes. On vous écoute.
M. Monsef Derraji
(réplique)
M.
Derraji : Merci, Mme la Présidente. Je pense que, finalement, j'ai ma réponse à la question : À qui
la ministre est-elle redevable? À qui la ministre
est-elle redevable? La ministre, pour la première fois, déclare en Chambre, au
salon bleu, qu'elle a reçu une lettre
de la FQM. Donc, si j'ai bien compris, la ministre a écouté la FQM en
fermant le réseau national et
non pas écouté les régions pour voir si elles ont besoin d'un pôle national.
Donc, la
ministre répond à une commande, Mme la Présidente. La commande venait de la
FQM, qui pensait que le réseau national, il n'est pas bon, et donc la
ministre exécute le voeu de la FQM en fermant le réseau national.
Bien, vous
savez pourquoi, Mme la Présidente, j'évoque cette question? Parce que, depuis
le début, je questionnais Mme la
ministre sur son leadership réel pour promouvoir l'innovation. Aujourd'hui,
j'ai la confirmation que, si on veut promouvoir
quelque chose, on n'écoute pas un groupe ou un lobby, on écoute nous-mêmes, nos
fonctionnaires, nos agents avec qui on travaille, et les régions, c'est comme
ça qu'on bâtit des stratégies économiques. Je tiens à rappeler à Mme la ministre, Mme la Présidente, que le maire
de Shawi, qui est le président de C.A., que Mme la ministre connaît très bien, a dit que le but du réseau national des
pôles régionaux d'innovation n'était pas d'imposer une méthode, mais d'aider au développement. Ce que Mme la ministre
nous explique aujourd'hui, c'est qu'elle refuse de l'accompagnement d'un incubateur qui a démontré sa plus-value.
Aujourd'hui, Mme la ministre refuse, et on voit un vote de non-confiance
à l'ensemble de la région de la Mauricie. C'est triste, ce qui se passe, Mme la
Présidente, parce que, finalement, Mme la
ministre a écouté un groupe, Mme la ministre a écouté la FQM et n'a pas écouté
les régions. Et c'est pour cela que, depuis le début je dis... et je me
questionne sur son réel leadership. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député.
Ajournement
Compte tenu de l'heure, les travaux de
l'Assemblée sont ajournés au lundi 3 juin 2019 à 13 h 40.
(Fin de la séance à 18 h 30)