(Treize heures quarante et une
minutes)
Le Vice-Président (M. Picard) : Bon
mardi après-midi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires courantes
Déclarations de députés
À la rubrique Déclarations de députés, Mme la
députée de Verchères.
Souligner le 40e
anniversaire de La Maison de l'entraide de Sainte-Julie inc.
Mme Suzanne Dansereau
Mme Dansereau :
Merci, M. le Président. J'aimerais souligner le 40e anniversaire de La
Maison de l'entraide, située à Sainte-Julie.
Mme Denyse
Labrecque est la fondatrice de l'organisme, et qui a vu le jour en 1976 par le
biais de la guignolée. L'organisme a été incorporé le 4 juillet
1979 afin de poursuivre leur mission. Aujourd'hui, l'organisation apporte un soutien
moral et financier aux plus démunis de la communauté de Sainte-Julie.
En janvier dernier, j'ai rencontré des membres
de l'équipe, et je peux vous assurer qu'ils font un travail remarquable. J'aimerais saluer la présence dans nos
tribunes de Mme Nathalie Garand, Mme Hélène Pelletier,
Mme Louise Dore et M. Serge Christin. Félicitations pour ce
40e anniversaire et bonne continuité!
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Je cède la parole à Mme la députée de Vaudreuil.
Souligner le travail de
l'organisme Arc-en-ciel Vaudreuil-Soulanges
Mme Marie-Claude
Nichols
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Je souhaite
la bienvenue à l'organisme Arc-en-ciel de Vaudreuil-Soulanges, qui sont
présents aujourd'hui et qui sont accompagnés de Mme Micheline
Paquin. Bienvenue à l'Assemblée
nationale.
Alors,
Arc-en-ciel est un organisme
communautaire qui offre des services
en santé mentale. Il offre un programme
d'insertion sociale, de relation d'aide, d'accompagnement, le tout afin de
mettre un terme à l'isolement et permettre d'accéder à une meilleure qualité de
vie.
D'ailleurs,
je tiens à féliciter l'organisme
Arc-en-ciel pour tout ce qu'il apporte à notre communauté, autant par son
implication lors d'activités de médiation culturelle, des kiosques de
sensibilisation. Et même l'animation que vous créez dans les locaux de la gare de Vaudreuil-Dorion rend ce lieu
unique. Sachez que je considère comme un privilège d'être invitée pour
échanger lors de vos déjeuners et aussi prendre part à vos activités.
Encore
félicitations pour votre apport au comté de Vaudreuil, lequel est bien choyé!
Je vous souhaite une belle journée à l'Assemblée nationale, la maison du
peuple, la maison de tous les Québécois.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Mme la députée de Bertrand.
Rendre hommage à Mme
Laurence Haguenauer,
consule générale de France à Québec
Mme Nadine Girault
Mme Girault :
Merci, M. le Président. En tant que députée à l'Assemblée nationale et au nom
du gouvernement du Québec, je tenais
à souligner l'important travail d'une grande diplomate, Mme Laurence Haguenauer, consule générale de France à Québec, qui a fortement
contribué à soutenir la relation directe, stratégique, privilégiée et
structurelle entre le Québec et la France.
Mme Haguenauer
a propulsé à un autre niveau les relations entre nos deux nations grâce à son
dynamisme, son énergie
et son amour du Québec. Elle a su mettre de l'avant dans son action quotidienne
nos priorités communes telles que la
langue française, la culture, l'économie, l'éducation et l'innovation dans les
start-up et le numérique. Elle a aussi parcouru
toutes les régions du Québec pour y animer avec exploit le réseau France-Québec
et également mettre en valeur les succès québécois.
Mme la consule, Laurence, vous
avez créé une complicité unique qui restera chère au coeur des Québécois. Nous
reconnaissons en vous, certes, une grande diplomate, mais surtout une grande
amie du Québec, et nous vous souhaitons le meilleur pour l'avenir.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant Mme
la députée de Hull.
Souligner
le 30e anniversaire de l'organisme
Les Diabétiques de l'Outaouais inc.
Mme Maryse Gaudreault
Mme Gaudreault :
Merci, M. le Président. Cette année marque le 30e anniversaire de
l'association des Diabétiques
de l'Outaouais, un organisme à but non lucratif qui s'est démarqué par sa
capacité d'informer, sensibiliser et prévenir le diabète
en Outaouais. Je me permets de souligner aujourd'hui le travail remarquable qui
est fait par son équipe de personnes dévouées et passionnées pour l'éducation,
la prévention, le soutien et le traitement apportés aux personnes vivant avec
le diabète.
L'association
est plus présente que jamais et connaît de plus en plus de succès grâce à ses
bénévoles et membres du
conseil d'administration. Leurs nombreux rallyes, conférences, activités de
réseautage et cours de cuisine ont remporté un grand succès et ont clairement démontré qu'une personne diabétique
bien informée, bien entourée et bien traitée vit en meilleure santé et
plus longtemps.
Félicitations à cette grande équipe pour son excellent travail! Et bon
30e anniversaire à l'association des Diabétiques de l'Outaouais. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Je cède la parole à Mme la députée de Soulanges.
Souligner le 25e
anniversaire de la municipalité des Coteaux
Mme Marilyne Picard
Mme Picard : Merci,
M. le Président. Le 18 mai 1994
naissait la nouvelle municipalité de Les Coteaux. Cette municipalité est née de la fusion de
Coteau-Station et Coteau-Landing. Elle occupe une place importante du canal de Soulanges
avec plusieurs espaces verts et une belle piste cyclable reliée aux réseaux
local et régional. Plus de 5 500 Coteaulois
et Coteauloises bénéficient d'un milieu de vie exceptionnel, d'une qualité de
vie, et ce, dans un environnement
privilégié au niveau des activités nautiques.
Samedi dernier, j'ai participé au souper du
25e anniversaire de la fusion. Ce souper soulignait, entre autres, l'implication
des conseillers municipaux qui ont réalisé la fusion. Je remercie la mairesse
des Coteaux, Mme Denise Godin-Dostie,
ainsi que les organisateurs, qui ont mis de l'avant un beau programme
diversifié d'activités qui se déroulera jusqu'à la fin novembre. J'invite donc tous mes concitoyens et concitoyennes
à y participer. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Je cède la parole à M. le député de Blainville.
Souligner le 40e anniversaire du Club de patinage
artistique
de Lorraine inc. et la fin de ses activités
M. Mario Laframboise
M. Laframboise : M. le
Président, aujourd'hui, je veux
rendre un hommage tout particulier au CPA de Lorraine à l'occasion de
son 40e anniversaire de fondation, mais également à la fin de ses activités.
Encourageant l'enseignement et la pratique de tous les aspects du patinage pour tous ses membres au
cours des 40 dernières années,
des centaines de jeunes se sont entraînés et ont partagé des moments
inoubliables à travers leur passion.
Le
14 avril dernier, le Club de patinage artistique de Lorraine présentait sa
40e et dernière revue sur glace sous le thème Il était une fois...
40 ans de succès et offrait un spectacle haut en couleur avec des
numéros époustouflants qui mettaient en valeur la créativité et le
talent de tous. Cette 40e revue sur glace fut remplie d'émotion et de
nostalgie.
À titre de député de
Blainville, je félicite et remercie chaleureusement les
membres du conseil d'administration
et tous les parents pour leur dévouement
exemplaire à cette belle organisation au cours des 40 dernières années,
qui ont permis d'offrir à ces jeunes de vivre des moments grandioses. Je
vous remercie.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Je cède la parole à Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice.
Rendre hommage à M. Lucien
Mongrain, maire de Trois-Rives
Mme Marie-Louise
Tardif
Mme Tardif :
Aujourd'hui, je veux rendre hommage à un homme qui se dévoue pour sa
municipalité à titre de maire, et ce, depuis plus de 37 ans.
M. Lucien
Mongrain a été élu pour la première fois en 1981. Depuis ce temps, il a été
réélu sans opposition lors de huit élections à la mairie de Trois-Rives,
en Mauricie.
Malgré ses 87 ans, il demeure toujours
aussi passionné et intéressé à développer sa belle municipalité de 400 habitants. Il est reconnu comme un maire
très disponible et respectueux, lui qui siège sur différents comités à la table
de la MRC de Mékinac. Il a plusieurs réalisations à son actif : la
rénovation de l'hôtel de ville, de la bibliothèque, l'ajout d'équipement
pour les personnes à mobilité réduite, l'accessibilité à de nombreux lacs pour
les villégiateurs.
M. Mongrain, le mot «merci» est faible pour
vous signifier toute la reconnaissance que nous avons envers une personne de
votre qualité pour le développement de Trois-Rives, de la Mauricie et, par le
fait même, du Québec. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède la parole à M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Souligner le 75e
anniversaire de la Coopérative
de transport maritime et aérien
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Je suis très heureux de souligner en cette Chambre l'anniversaire de
fondation de la Coopérative de transport maritime et aérien le 28 mai
1944, il y a 75 ans jour pour jour.
La CTMA a été
fondée dans l'objectif de désenclaver la communauté des Îles-de-la-Madeleine et de lui offrir un service de transport adapté à ses besoins,
régulier, fiable et sécuritaire.
Pour
traverser le golfe et les époques, les sociétaires et les dirigeants de la CTMA
ont dû faire preuve d'audace et de résilience. Ils ont aussi pu compter sur
l'engagement des équipages et d'un personnel compétent et dévoué, au
service de leur communauté.
La
coopérative est ainsi devenue non seulement un moteur de l'activité économique
et touristique de l'archipel, mais
elle constitue un fleuron de l'industrie maritime québécoise
et canadienne détenu, géré et opéré par des Madelinots. À son 75e anniversaire, la CTMA représente le
symbole par excellence de la volonté et de la capacité des Madelinots à
s'occuper de leurs propres affaires avec compétence, ambition et avec succès.
• (13 h 50) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Je cède la parole à Mme la députée de Repentigny.
Souligner le 30e
anniversaire de l'organisme Regard en elle
Mme Lise Lavallée
Mme Lavallée : Merci, M.
le Président. C'était en juin 1989.
Regard en elle déployait ses ailes afin d'aider les femmes victimes de
violence conjugale à reprendre le pouvoir sur leur vie.
Ces
30 dernières années, la maison d'hébergement est devenue une oasis de paix
pour des milliers de femmes et d'enfants souhaitant être accompagnés
sans jugement dans un environnement où règnent la bienveillance, le respect, la justice et l'entraide, un cocon qui leur a
permis d'entrevoir de nouveaux horizons et de déployer leurs ailes. C'est donc
un privilège pour ma région de compter sur
une ressource aussi essentielle que Regard en elle. Même si l'organisme
n'est que passager dans le parcours de ces femmes et de ces enfants, son
empreinte sur leur vie est durable.
Merci aux
intervenantes et aux bénévoles pour votre support dans votre communauté. Par
votre mission de soutien et de
sensibilisation, vous êtes des actrices de changement. Certaines d'entre vous
êtes présentes aujourd'hui, et j'en suis honorée. Merci beaucoup.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. La 10e déclaration est à M. le député d'Abitibi-Est.
Féliciter l'équipe de hockey des Huskies, de
Rouyn-Noranda,
gagnante de la coupe Memorial
M. Pierre Dufour
M. Dufour : M. le
Président, à titre de ministre
responsable de la région de l'Abitibi-Témiscamingue et en tant qu'ancien dirigeant des Foreurs de Val-d'Or, je suis fier de
déclarer que le titre de meilleure équipe junior majeure au Canada
revient à une équipe de ma région, soit les Huskies de Rouyn-Noranda, champions de la 101e coupe Memorial.
Cet honneur
vient mettre la touche finale à une saison d'exception, avec un total de
79 victoires en 93 parties, le tout agrémenté de plusieurs records.
Composés...
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) : M. le député, attendez un
petit peu. Ça va? O.K., allez-y. C'est parce que c'était bruyant, là. J'aime bien vous entendre.
M. Dufour : Composés de
20 joueurs sur 23, développés par l'organisation, dont Jacob Neveu, que
j'ai eu le plaisir de diriger lors des Jeux du Québec de 2013, les Huskies sont
un modèle pour les petits marchés qui évoluent dans la LHJMQ. Intégrés à la
ligue en 1996, je tiens à souligner l'excellence de la direction, sous la
présidence de M. Jacques Blais, et de l'équipe hockey, dirigée de main de
maître par Mario Pouliot.
D'ailleurs, j'ai le privilège de
porter, dans cette déclaration, le chandail d'un ancien joueur aussi que j'ai
entraîné, soit leur ancien capitaine, M. Jeremy Lauzon,
récipiendaire de la Coupe du président avec les Huskies de 2016 et aujourd'hui
un membre des Bruins de Boston.
Comme leurs partisans
le crient : Go, Huskies, go! Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y
a consentement pour permettre à M. le député de Mégantic de faire une
11e déclaration? Consentement. M. le député.
Rendre
hommage à M. Jean-Guy Cloutier, ex-maire de Lac-Mégantic
M. François
Jacques
M. Jacques :
Merci, M. le Président. Aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à un grand
Méganticois et concitoyen, M. Jean-Guy Cloutier, décédé le 13 mai
dernier.
M. Cloutier
a été élu maire de Lac-Mégantic à deux reprises, soit de 1985 à 1989 et de 2015
à 2017. Entrepreneur en construction
bien connu dans la région, M. Cloutier s'est dévoué pour le développement
économique de sa municipalité en tant
que maire et puis administrateur de la société d'aide au développement
économique des collectivités de Mégantic. Son implication comme bénévole au
sein de divers organismes s'est échelonnée sur quelques décennies et atteste de
son profond attachement à Lac-Mégantic.
Lors de son deuxième
mandat, M. Cloutier a travaillé à l'obtention de la voie de contournement
ferroviaire. L'aboutissement actuel de ce
dossier ainsi que le développement économique de Lac-Mégantic font partie de
l'héritage qu'il a légué à ses concitoyens. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. Cela met fin à la rubrique Déclarations de
députés.
Et je vais... je
suspends les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 13 h 53)
(Reprise à 14 h 3)
Le Président :
Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie.
Heureux de vous revoir toutes et tous. Veuillez vous asseoir.
Alors, bon mardi à
toutes et à tous.
Présence de la consule générale de France à
Québec, Mme Laurence Haguenauer
D'abord, j'ai le
plaisir de souligner la présence, dans les tribunes, de la consule générale de
France à Québec, Mme Laurence Haguenauer, à l'occasion de sa visite d'adieu.
Je
tiens également à souligner le retour du député de Gatineau en pleine forme.
Heureux de vous revoir, M. le député. Il m'a confié avoir rajeuni de
20 ans.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Bonjour, M. le Président. Je vous demande
d'appeler l'article a, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 15
Le
Président : À l'article a du feuilleton, Mme la ministre
du Tourisme présente le projet de loi n° 15, Loi sur la Société de développement et
de mise en valeur du Parc olympique. Mme la ministre.
Mme Caroline Proulx
Mme Proulx (Berthier) : Merci, M. le Président. Ce projet de loi institue la Société de
développement et de mise en valeur du Parc olympique, laquelle est
substituée à la Régie des installations olympiques.
Le projet de loi
prévoit que la société a pour mission de développer, de gérer, de promouvoir et
d'exploiter le Parc olympique et de mettre en valeur le patrimoine et
l'héritage olympiques.
Le
projet de loi permet entre autres à la société de fournir des services reliés à
son savoir-faire et à son expérience.
Le projet de loi établit les règles
d'organisation et de fonctionnement de la société, notamment quant à la
composition de son conseil d'administration et aux mesures de gouvernance
qu'elle devra appliquer en constituant notamment un comité des immobilisations. Il établit
également des règles relatives au financement de la société, à ses
comptes et à ses rapports.
Enfin, le projet de loi comporte des
dispositions transitoires et de concordance nécessaires entre autres à la
création de la société.
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader
de l'opposition.
M. Proulx : Bien
sûr, M. le Président, nous
acceptons la saisie. Peut-être informer le collègue que nous souhaiterons
des consultations particulières sur ce projet.
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : D'accord, M. le
Président, j'accepte les
consultations particulières. Le leader de l'opposition officielle nous soumettra très certainement une
liste de groupes dans les meilleurs délais.
Le Président :
Alors, je comprends que le projet de loi est donc adopté.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, Mme ministre de la Justice.
Plan stratégique 2019-2023 de la Commission d'accès à
l'information
Mme LeBel :
Merci, M. le Président. Je dépose le plan stratégique 2019-2023 de la
Commission d'accès à l'information. Merci.
Le Président :
Ce document est déposé. Mme la ministre de la Culture et des Communications.
Plan stratégique 2018-2022 de la Société de télédiffusion du
Québec
Mme Roy :
M. le Président. Alors, permettez-moi de déposer le plan
stratégique 2018-2022 de la Société de télédiffusion du Québec,
Télé-Québec.
Le Président :
Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.
Réponses à des pétitions et à des questions inscrites au
feuilleton
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je dépose les réponses du
gouvernement aux pétitions présentées en Chambre le 2 avril par la députée de Westmount—Saint-Louis, le 2 avril et le 2 mai par
la députée de Sherbrooke, le 3 avril par le député de Gatineau, le 16 avril par la députée de Vaudreuil, le
2 mai par le député de Gouin, ainsi qu'aux questions inscrites au feuilleton le 9 avril par la députée de
Taschereau et le député de Jean-Lesage, le 30 avril par la députée de
Marie-Victorin et le 2 mai par le député de Chomedey. Merci, M. le
Président.
Le Président :
Ces documents sont déposés.
Lettre du président de l'Assemblée nationale française en
réponse à la
motion concernant l'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris
Pour ma part, je
dépose une lettre que m'a adressée M. Richard Ferrand, président de
l'Assemblée nationale française, en réponse à
la motion adoptée par l'Assemblée le 16 avril 2019 concernant
l'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Préavis d'une motion des députés de l'opposition
J'ai reçu préavis
d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires
inscrites par les députés de l'opposition, conformément à l'article 97.1
du règlement. Je dépose copie du texte de ce préavis.
Dépôt de rapports de commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission
des finances publiques et député de Montmorency.
Étude détaillée du projet de loi
n° 13
M. Simard :
Oui, M. le Président. Les vaillants députés de la Commission des finances
publiques...
Des voix :
...
M.
Simard : ...ils sont jaloux — les députés se sont à nouveau surpassés.
Voilà pourquoi je dépose le rapport de cette
commission qui, les 9, 15 et 16 mai 2019, a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi n° 13, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du
Québec et d'autres dispositions législatives. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.
Le
Président : Ce rapport
est déposé. M. le Président de la Commission
des institutions et député de Richmond.
Consultations particulières sur le projet de loi n° 21
M.
Bachand : Merci, M. le Président. Et député de Richmond avec plaisir, effectivement. Je dépose le rapport de la Commission des institutions qui, les 7, 8, 9, 14, 15 et
16 mai 2019, a tenu des audiences publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 21, Loi sur la
laïcité de l'État. Merci.
• (14 h 10) •
Le Président :
Ce rapport est également déposé.
Il n'y a pas de dépôt
de pétitions.
Il n'y a
pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions
portant sur une violation de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes
maintenant à la période de questions et de réponses orales. Et je cède la
parole au chef de l'opposition officielle.
Position
du gouvernement en matière d'environnement
et d'électrification du transport collectif
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
Merci, M. le Président. Le chef de la CAQ a promis en fin de semaine de mettre
de l'avant un vaste chantier
d'électrification des transports. C'est une initiative qui découle du plan
d'électrification des transports que nous avons présenté, le plan 2015-2020, et c'est d'ailleurs dans cette
optique qu'on avait appuyé le projet du REM à Montréal et également le
projet de tramway à Québec. Maintenant, je constate aussi qu'il adhère aux
objectifs de la politique énergétique que j'ai moi-même dévoilée ici, cette
politique énergétique, il y a déjà trois ans, une politique qui était assortie
d'un plan d'action qui, je l'espère, sera mis de l'avant, continuera d'être mis
de l'avant par le gouvernement.
Vous
êtes évidemment beaucoup plus discrets parce qu'à l'époque ce que vous disiez,
c'est que vous vouliez avoir un
programme qui prévoyait qu'au Québec l'exploration et éventuellement
l'exploitation des ressources pétrolières et gazières pourraient contribuer, en fait, à l'enrichissement collectif.
C'est ce que vous disiez à l'époque. Maintenant, vous êtes convertis et, en fin de semaine, vous avez
fait un parallèle entre Dominic Champagne et Dieu. C'est toute une conversion.
Et
donc, pour obtenir sa bénédiction, est-ce que le premier ministre compte
accéder à cette volonté de M. Champagne pour que soient abandonnés les projets de GNL Québec au Saguenay,
d'usine IFFCO à Bécancour et le projet du troisième lien à Québec?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : Oui, M. le Président. Peut-être que la plus grande
différence entre le Parti libéral et la CAQ, c'est une question de résultats. On a beau faire des
discours, mais on juge avec les résultats. Les résultats, c'est qu'au cours des dernières années les émissions de GES ont
augmenté au Québec. Donc, malgré les beaux discours libéraux, les résultats
n'étaient pas là.
Donc, on va prendre
les moyens, on va déposer au cours des prochains mois un plan 2030 pour
atteindre les objectifs, contrairement à ce qui avait été fait par le Parti
libéral.
Maintenant, je suis surpris d'apprendre que le Parti libéral, qui a déjà été le parti de l'économie, se dit qu'il est contre un projet de 14 milliards
de dollars, le projet GNL, et je vois aussi un virage. On a toujours été clair
qu'on est pour le troisième lien à Québec. Donc,
voilà que le Parti libéral n'est plus pour le troisième lien à Québec.
Je ne sais pas si le leader libéral est d'accord avec ça, mais je suis
surpris.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Le premier
ministre sait très bien
que ce n'est pas vrai. Le premier
ministre sait très bien et, s'il croit vraiment à l'électrification des transports,
pourquoi tarde-t-il encore à donner le feu vert au projet de tramway de Québec?
Pourquoi est-ce que c'est si compliqué, ce
projet, et aussi simple pour le troisième lien? Peut-il d'ailleurs nous confirmer,
en passant, qu'il va prendre l'argent directement de la ville de Montréal?
C'est ça actuellement, les négociations que vous avez.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, faut-il rappeler que le fédéral a mis en
place deux fonds : un fonds pour les infrastructures vertes, un fonds de 1,8 milliard qui est
surutilisé. En tout cas, il y a une demande pour plus que 1,8 milliard
de l'ensemble des municipalités. Il y a un
autre fonds de 5,2 milliards qui, pour l'instant, est sous-utilisé. Il n'y
a pas de projet, à 40 %
d'utilisation par le fonds fédéral, qui nous permettrait d'utiliser pleinement
le 5,2 milliards. Donc, on essaie actuellement de s'entendre pour
qu'on utilise non pas 400 millions de ce fonds, mais 1,2 milliard.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
Des montants que vous allez prendre, d'ailleurs, à la ville de Montréal, si
j'ai bien compris. D'ailleurs, vous
aviez même promis que vous étiez pour partager à parts égales les
investissements pour le transport collectif et les projets routiers.
Pourquoi
vous n'avez pas respecté cet engagement dans le dernier budget, de faire 50-50,
si le transport collectif était à ce point une priorité pour vous?
Le
Président : Je vous rappelle toujours qu'on s'adresse toujours
à la présidence. M. le premier ministre, s'il vous plaît.
M. François Legault
M.
Legault : Oui. M. le Président, une nouvelle découverte, donc, le
Parti libéral s'oppose à certains projets de transport routier qui ont été déposés. J'aimerais qu'il m'en nomme
seulement un, projet de transport routier avec lequel il n'est pas d'accord. Il
vient juste de nous dire que c'était faux, qu'il est maintenant toujours
d'accord avec le troisième lien. Donc, peut-il nous donner un projet de
transport routier avec lequel il n'est pas d'accord?
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
J'ai beaucoup de difficultés à suivre le premier ministre, surtout, en plus,
quand, en fin de semaine, il a parlé d'une urgence pragmatique en
matière environnementale.
Est-ce
que le premier ministre peut me dire
ce que ça veut dire au juste? Est-ce
qu'on doit comprendre qu'il va
tenir compte de l'environnement seulement si ça fait son affaire?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, on a deux grands défis au Québec : un défi climatique, réduire les GES par habitant,
malgré le fait qu'on est déjà
premiers sur les 60 États et provinces en Amérique du Nord, mais on a et
surtout... on a surtout le défi de
créer de la richesse, de devenir aussi riches que le reste du Canada,
de se débarrasser de la péréquation, de créer des jobs payantes, ce que
vous n'avez pas fait pendant 15 ans.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mesures pour faciliter la mise
en oeuvre de projets environnementaux
Mme Marie Montpetit
Mme
Montpetit : Merci, M. le Président. La fin de semaine dernière, lors
de son conseil général, la CAQ a décidé enfin de parler d'environnement et d'économie verte. J'ai entendu
beaucoup de discours, beaucoup de généralités, mais assez peu de mesures
concrètes.
Chanceux, le ministre, vendredi
dernier je lui ai justement proposé une mesure pragmatique comme il dit les
aimer, une voie accélérée pour les
projets environnementaux. C'est une mesure, M. le Président, qui est demandée
par le milieu et qui pourrait être mise en place rapidement.
Les
entreprises qui veulent innover et aider à faire face à notre environnement
font face à plein d'embûches au niveau
du financement au gouvernement. Si on veut relever le défi climatique et
atteindre nos cibles de diminution de GES, il faut donner à ces
entreprises une voie accélérée pour traiter leurs projets efficacement et
rapidement.
Si le ministre de
l'Environnement est vraiment sérieux dans sa volonté de faire de la lutte aux
changements climatiques une priorité, est-ce qu'il peut s'engager à mettre en
place rapidement une voie accélérée pour les projets environnementaux?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. Benoit Charrette
M.
Charette : Merci, M. le Président. J'ai accueilli avec joie la proposition de la collègue la semaine
dernière. Cependant, cette proposition arrive 15 ans trop tôt, essentiellement... trop tard, c'est-à-dire. Si la réglementation
est à ce point complexe, si les
entreprises qui ont une technologie environnementale susceptible d'aider notre
lutte aux changements des... au
niveau des changements climatiques, c'est sans doute parce que les
administrations précédentes n'ont pas su être à l'écoute.
Pour
ma part, un des premiers mandats que j'ai reçus du premier ministre, c'est de
travailler toute la question des évaluations environnementales et de
cette bureaucratie qui, souvent, retarde de belles initiatives. Dès mon entrée
en fonction, ce sont des consignes qui ont
été transmises aux gens qui m'accompagnent dans ce travail quotidien, et je
peux vous assurer qu'on arrive avec
des propositions drôlement intéressantes et, dans certains cas, dès les
prochaines semaines, sinon les prochains mois.
Donc, dommage que
cette belle idée n'ait pas été mise de l'avant alors que le Parti libéral était
au pouvoir.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie Montpetit
Mme
Montpetit : C'est un petit peu toujours le même discours, hein, M. le
Président, mais on va revenir à cette question-là.
Donc, il y a des entreprises en environnement, là, elles font face à des
difficultés très, très concrètes à l'heure actuelle dans l'appareil gouvernemental. En ce moment, on se retrouve,
au Québec, avec plein d'entreprises de nouvelles technologies, pas d'il y a 15 ans, hein, d'aujourd'hui, qui
pourraient nous aider à faire face à la lutte aux changements climatiques mais dont les projets attendent
quelque part dans une pile, sur le bureau, parce que ça ne rentre pas dans la bonne case ou parce
que ça tombe entre deux ministères.
Administrativement, là, ce dont on a besoin, c'est
une voie rapide, une voie accélérée. Est-ce que le ministre peut
s'engager à la mettre en place?
Le Président :
M. le ministère de l'Environnement.
M. Benoit Charette
M. Charette :
Tout ce que ma collègue met de l'avant, c'est ni plus ni moins le bilan libéral
des dernières années, et ce bilan-là
a été obscurci, noirci il y a quelques jours encore avec le dépôt du rapport du
Commissaire au développement durable
par rapport au Fonds vert, notamment, qui aurait pu être un superbe outil pour
favoriser notre lutte aux changements climatiques en appuyant notamment des
projets porteurs en matière de technologie. Mais le Commissaire au développement durable dit ceci :
Malheureusement, au cours des cinq dernières années, donc, suite à un précédent
rapport, on constate encore des problématiques importantes, des conflits
de...
Le Président :
En terminant.
M. Charette :
...des conflits avec le ministère de l'Environnement. Donc, c'est ça, le bilan
du Parti libéral. Et la problématique...
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit :
Et le premier ministre disait hier qu'il était fier que le Québec soit un
leader au Canada. C'est ça, le bilan du Parti libéral, M. le Président. Pour
soutenir le développement des technologies vertes, nous avions annoncé 147,5 millions. La CAQ ne l'a pas reconduit.
Vous parlez de mesures concrètes, vous parlez de mesures pragmatiques.
On vous en met une sur la table. Elle est demandée par Écotech, elle est
demandée pas le CETECH.
Pouvez-vous
vous engager à la mettre en place rapidement ou vous voulez dire non aux
entreprises de technologie verte?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M.
Benoit Charette
M. Charette :
Ce qui est amusant à travers la question de la collègue, c'est qu'elle semble
découvrir les vertus environnementales
depuis peu. Mais j'ai des citations, ici, de son président de la commission
jeunesse, qui se bat littéralement pour
que le Parti libéral ajoute comme neuvième priorité l'environnement. Lui-même a
déploré à plusieurs reprises que, pendant
la dernière campagne électorale, le Parti libéral n'a pas parlé
d'environnement, sinon, naturellement, les fameuses pailles de plastique. Donc, cette révélation qui
est faite aujourd'hui à la collègue aurait pu survenir bien plus tôt. Et le
Québec s'en serait porté mieux.
• (14 h 20) •
.15725 Le
Président : Question principale.
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Votre attention, s'il vous plaît.
La parole appartient à la députée de Saint-Laurent.
Consultations sur le projet de déploiement de
maternelles quatre ans
Mme
Marwah Rizqy
Mme Rizqy : M. le Président,
lorsqu'on veut investir 2 milliards de dollars dans l'éducation,
habituellement on s'assure d'avoir un plan
de match. Plus on avance dans la maternelle quatre ans, plus on se rend compte
que ça n'a jamais été attaché comme
il faut puis que ça va dans toutes les directions, sauf les bonnes,
c'est-à-dire regarder ce que la science nous propose.
Hier, on a
commencé des consultations particulières. Le député de Richelieu nous a un peu
surpris. Il nous a dit : J'ai
envie d'entendre la science. Et pourtant nous n'avons pas beaucoup... nous
avons fait beaucoup de pressions pour entendre des scientifiques
québécois — pas
new-yorkais, québécois : Dr Jean-François Chicoine, pédiatre à l'Hôpital Sainte-Justine, refus de la CAQ; Carmen Dionne,
Département de psychoéducation de l'UQTR, refus de la CAQ; Mylène
Drouin, directrice régionale de la santé publique de Montréal, refusée par la
CAQ.
Est-ce que la science que la CAQ veut entendre, c'est seulement leur science à eux? Parce que, l'autre
fois, j'ai regardé les scientifiques,
là, de New York, là, ceux qui sont venus hier, ce n'étaient pas des
scientifiques. Et malheureusement ils
ont oublié aussi une autre étude, celle du Tennessee, qui dit que finalement la
maternelle pour tous a été un échec pour tous.
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M.
Roberge : M. le Président, en fin de semaine, on a eu un bel exercice
démocratique sur l'énergie verte à la Coalition
avenir Québec. Puis il y a des rendez-vous comme ça, des conseils nationaux qui
sont intéressants parce qu'ils découlent de choses intéressantes.
Donc, moi, je me souviens d'une résolution, en
2016 à Drummondville, qui disait : «Que le gouvernement du Québec travaille à augmenter la fréquentation
scolaire et l'engagement de l'élève dans son parcours scolaire en généralisant
le déploiement de la maternelle quatre ans
le plus rapidement possible, et ce, d'ici 2025, sur l'ensemble du territoire
[...] en révisant la progression du
cursus scolaire en conséquence.» Et ça, c'est une résolution du conseil général
du Parti libéral du Québec, adoptée en 2016 à Drummondville.
Alors, c'est
quand même particulier. C'est son parti. On dirait qu'elle vient de
découvrir... Elle ne l'a pas fondé, ce
parti-là, là. C'est son parti. Et elle nous reproche de ne pas écouter les
experts. Elle n'écoute même pas ses membres. Alors, peut-être devrait-elle se reconnecter plutôt que de nous
reprocher de développer une offre de service extraordinaire pour amener
les jeunes à aller au bout de leurs rêves.
Le Président : Première
complémentaire.
Des voix : ...
Le Président : Je vous
demande encore une fois votre silence et votre attention. La parole est à la
députée de Saint-Laurent.
Mme
Marwah Rizqy
Mme
Rizqy : Excusez-moi, M. le Président, mais je n'ai pas entendu un
début de commencement de réponse. Dr Jean-François
Chicoine, Carmen Dionne, Mylène Drouin. Vous avez beau nous sortir des affaires
de 2016, mais ce que vous oubliez de
mentionner, c'est que c'est une proposition que nous, on est capables de
quantifier. Quand vous avez décidé
d'aller de l'avant avec votre maternelle quatre ans, vous avez décidé à quelque
part que ça allait coûter 250 millions. Vous n'avez tellement pas fait vos devoirs que c'est
l'ancien ministre des Finances qui vous a répondu en campagne électorale que ça va coûter
2 milliards. Vous avez refusé le chiffre de 2 milliards. Et
aujourd'hui tout le monde au Québec sait que c'est 2 milliards de
dollars, sauf vous autres.
Le
Président : M. le ministre de l'Éducation. Je vous demande de
vous adresser à la présidence et de faire en sorte de ne pas vous
interpeler.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, il y a un collectif pour la réussite
éducative qui a publié une lettre ouverte en début de semaine avec des gens extraordinaires qui ne
font pas partie de groupes de pression, de groupes de lobby qui ont intérêt
à ce que ça ne marche pas, la maternelle
quatre ans. Il y a l'association québécoise du personnel aux directions
d'école, la Fédération québécoise des directions d'établissement
d'enseignement, l'Institut des troubles d'apprentissage, des professeurs de l'Université du Québec à
Trois-Rivières, l'Université de Montréal, l'Université du Québec à Chicoutimi,
l'Université Laval, l'Institut national de recherche scientifique — ça
doit être quelque chose comme de la science, ça — le directeur de l'institut du développement
de l'enfance et de la famille. Tous ces spécialistes, tous ces gens qui ne
font pas partie de groupes de pression appuient la maternelle quatre ans.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Jennifer Maccarone
Mme
Maccarone : Oui. Merci, M. le Président. Chaque fois que j'ai posé une question
au ministre de la Famille sur l'impact des maternelles quatre ans sur le
réseau des services de garde, il me répondait qu'eux, ils travaillent en
équipe. Hier, on apprenait que le ministre de la Famille et son ministère sont complètement absents des discussions entourant la maternelle
quatre ans, entre autres, en commission parlementaire aussi.
M. le Président, je
suis inquiète. C'est qui, l'équipe du ministre?
Le Président :
M. le ministre de la Famille, la parole vous appartient.
M. Mathieu Lacombe
M. Lacombe :
Merci, M. le Président. Oui, on travaille en équipe, M. le Président. Je vous
donne le meilleur exemple. Il y a quelques
minutes, ce matin, rencontre de travail avec mon collègue ministre de
l'Éducation, le ministre délégué à la
Santé et aux Services sociaux, regroupements de CPE, gens du milieu de
l'éducation, gens du milieu de la santé
pour voir comment est-ce qu'on peut faire en sorte qu'on offre les meilleurs
services à nos tout-petits. Ça, on appelle ça travailler en équipe. Je
peux vous dire qu'entre ministres, entre cabinets, on travaille en équipe.
Parallèlement
à tout ça, je vais vous parler quand même du réseau des services de garde
éducatifs, qu'on continue de développer, et je suis très heureux de le dire,
parce que, si on arrêtait d'investir, si on arrêtait d'investir du jour
au lendemain, je comprendrais l'inquiétude. 400 millions de dollars, c'est
ce qu'on va investir tout bientôt.
Le Président :
Question principale, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Position du gouvernement concernant l'exploration
et l'exploitation des gaz de schiste
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, M. le Président. En fin de semaine dernière, le premier
ministre a pris de bonnes résolutions pour lutter contre les changements
climatiques; je serais bien la dernière à cracher dans la soupe. Mais, vous
savez, l'important, ce n'est pas de prendre
des résolutions, c'est de les tenir. Lorsque des choix sont difficiles, lorsque
les choix difficiles vont se présenter, est-ce que le premier ministre
va faire les bons choix?
Alors, aujourd'hui,
je vais demander au premier ministre de faire un premier choix, M. le
Président. Je vais commencer tranquillement
par quelque chose de pas trop compliqué. Quand les entreprises pétrolières se
sont retirées d'Anticosti, le
gouvernement du Québec a dû leur verser 62 millions pour compenser
l'abandon des titres miniers, les fameux
claims. Aujourd'hui, Pétrolia, qui a été, bien sûr, grassement compensée, est
devenue Pieridae, comme vous le savez,
Energy. Saviez-vous que Pieridae Energy veut abandonner 21 claims, M. le
premier ministre, dans la péninsule gaspésienne?
M.
le Président, les gens de la Gaspésie qui nous écoutent présentement retiennent
leur souffle parce que ces claims-là, s'ils se retrouvent sur le marché
des enchères, pourraient relancer l'exploration, alors que le gouvernement,
actuellement, a le plein pouvoir, là. Il a le plein pouvoir, ça ne coûterait
pas un sou.
Est-ce
que le premier ministre peut aujourd'hui faire un premier choix, passer un premier test et dire : On ne remettra
pas ces claims-là sur le marché parce que, dans le fond...
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, je suis content que la cheffe
du deuxième groupe d'opposition dise
qu'elle ne va pas cracher dans la soupe. Ce n'est pas le fun non plus
d'avoir des poils dans la soupe. M. le Président...
Des voix : ...
M.
Legault : M. le Président, actuellement, il y a au Québec un système qui permet de s'assurer que tous les
projets, incluant les projets
miniers, soient faits dans le respect de l'environnement. Ça s'appelle le BAPE. Et donc tous les projets devront passer par le BAPE, subir les questions du
BAPE. Donc, on va s'assurer, M. le Président, peu importe qui sont les propriétaires des claims, que ce soient les
propriétaires actuels ou des nouveaux propriétaires, que les lois et le BAPE
fassent son travail.
Le
Président : Je vous demanderais d'être prudent dans
l'utilisation de certains mots, s'il vous plaît. Première
complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme
Manon Massé
Mme
Massé : M. le Président, retirer les claims de Pieridae, qui est une
entreprise gazière, c'est bon pour le climat, c'est bon pour nos
finances publiques. Quand l'économie du combustible fossile va s'effondrer,
va-t-il falloir tout rembourser ces claims-là à tout le monde?
Le premier
ministre a répété maintes fois qu'Anticosti, c'est un échec lamentable. Il a
l'opportunité d'éviter un deuxième Anticosti sans que ça nous coûte
quelque chose. Il va-tu le faire?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, quand on travaille sur un plan de
transition énergétique, il y a des énergies qui ne sont pas idéales, mais qui sont préférables à
d'autres formes d'énergie. J'ai parlé la semaine dernière de l'hydroélectricité
versus le charbon. On pourrait parler aussi du gaz versus le pétrole ou versus
le charbon. Donc, il y a des énergies de transition
qui peuvent permettre de réduire les GES. Et, M. le Président, tous les projets
vont être réalisés après un BAPE, donc après avoir fait les études
environnementales requises.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme
Manon Massé
Mme
Massé : En fait, ce que je comprends de mon premier test, c'est que le
premier ministre est en train d'ouvrir la
porte à l'exploitation gazière et/ou pétrolière, ce que tous les scientifiques
considèrent... comme quoi on ne doit pas faire ça.
Alors, M. le
premier ministre, est-ce que vous êtes en train de me dire que vous êtes en
faveur de l'exploitation gazière dans la péninsule gaspésienne?
• (14 h 30) •
Le Président : Je vous
demanderais encore une fois de vous adresser à la présidence. M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : Oui, M. le Président. D'abord, il n'y aura pas
d'exploitation de gaz de schiste au Québec. Ça, c'est important de le dire. Parce que, quand on regarde
ce qui se passe aux États-Unis, c'est du gaz de schiste. Il y a un risque
effectivement pour l'environnement, pour
l'eau. Nous, ce qu'on parle, c'est peut-être d'un projet de gaz naturel,
peut-être, si ça respecte le BAPE, si
ça respecte toutes les évaluations environnementales. Il faut voir le gaz comme
étant une énergie de transition qui
permet de réduire les GES, puis on va le faire seulement si, en bout de ligne,
on réduit les GES. On va arriver à des résultats.
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Joliette.
Priorités
dans le financement des services en milieu scolaire
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon :
Alors que, dans le débat sur la maternelle quatre ans, le ministre de
l'Éducation répète comme un de ses
principaux arguments que les enfants de quatre ans doivent aller à la
maternelle parce qu'il y aura dépistage et qu'ils pourront recevoir les
services spécialisés, voilà qu'aujourd'hui deux médias rapportent deux
situations profondément choquantes pour des élèves actuels.
D'une part, on apprend qu'à Montréal
des enfants autistes se voient envoyés dans des placards lorsqu'ils font une
crise, faute d'espace adapté, qu'on a invité le ministre à venir visiter
l'école il y a deux mois, mais il a préféré aller à New York. D'autre part, on apprend qu'un garçon de 11 ans atteint
de dyslexie ne sait toujours ni lire ni écrire, en Montérégie, parce
qu'il n'arrive pas à recevoir les services adaptés à sa situation.
Est-ce que le
ministre peut admettre que les besoins sont criants en ce moment dans le réseau
de l'éducation? Est-ce qu'il peut s'engager
aujourd'hui que tous les enfants qui ont des besoins, à l'heure actuelle, qui
sont là en ce moment, vont les recevoir, avant de se lancer tête baissée
dans cette idée fixe des maternelles quatre ans?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, les deux situations nommées par ma collègue
sont deux situations inacceptables, inacceptables.
Il ne faut plus que ça se produise ni dans un cas ni dans l'autre. Quand j'ai
vu les photos dans le reportage, ce matin, j'étais très choqué.
J'ai
eu à travailler avec des enfants qui ont un trouble du spectre de l'autisme
puis j'ai eu à intervenir sur de tels enfants
en crise. Il faut le faire avec tact en prenant soin d'eux, même s'ils sont en
crise. Ils ont besoin qu'on prenne soin d'eux, et de les envoyer dans un placard à balais, dans un endroit où il
y a des dispositifs électriques, des vis apparentes, c'est dégueulasse.
Ce n'est pas une façon de faire acceptable au Québec.
Quand
je l'ai su, j'ai rapidement communiqué avec la présidente de la CSDM pour
comprendre comment on en était
arrivés là, pour apprendre qu'il y avait eu une classe qui s'était ajoutée en
cours d'année. Mais, pour moi, ce n'est pas une excuse. J'ai eu l'assurance que ça allait être réglé dans les
prochains jours, non pas cet été, mais dans les prochains jours, au maximum d'ici lundi prochain. Et j'ai
dit que, si c'était une question d'argent, on pouvait trouver de l'argent
dans ces cas-là. Ce n'était pas une question d'argent.
Pour ce qui est de la
lettre...
Le Président :
En terminant.
M. Roberge :
...avec la demande de la visite, je ne pense pas qu'il y a de lien, même si
j'avais visité le lieu. Il fallait que la commission scolaire agisse.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Je veux juste rappeler au ministre qu'il n'y a pas
juste les situations qu'on voit dans les médias. À tous les jours, il y a des
manques graves de services.
Est-ce
qu'on peut parler de consolider les services avant de se lancer dans un nouveau
projet encore toujours mal ficelé,
avec des nouveaux chiffres hier? Est-ce que le ministre va accepter de voir
qu'hier les représentants des centres de la petite enfance nous ont dit : On en fait, du dépistage, mais,
quand on demande des services, les services ne suivent pas? Comment le
ministre des Services sociaux et le ministre de la Famille peuvent accepter que
leur gouvernement mette 2 milliards dans les maternelles quatre ans, alors
qu'ils ne peuvent pas donner les services à leurs propres enfants?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : Pour ce qui est de la question d'ajout de services, mais
c'est ce qu'on fait. C'est dans le budget qu'a déposé mon collègue. On
fait précisément ça alors qu'il y a eu des années de compressions lors des deux
derniers gouvernements. Parce qu'il faut le
dire aussi, lors du dernier gouvernement du Parti québécois, il y a eu des
compressions dans le réseau de
l'éducation aussi. Ça n'a pas commencé sous le règne libéral. Mais nous, on
rajoute plus de 47 millions dès
notre première année de mandat, et ça continuera, pour embaucher plus de 650
professionnels qui vont aider nos enfants, qui vont aider nos enseignants à aider nos enfants et qui vont donner
des services directs aux élèves. Ce n'est pas de l'argent qui va dans la bureaucratie. C'est de l'argent qui
va dans les classes. Et on est au travail pour soutenir les enfants qui sont
en difficulté pour qu'ils n'aient pas besoin d'aller au privé pour se faire
aider.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Je rappelle au ministre que, selon les syndicats
d'enseignants, c'est 2 000 spécialistes qu'il manque en ce moment. Mais je veux revenir au ministre des
Services sociaux. Moi, j'aimerais ça l'entendre comme expert dans la
commission sur les maternelles quatre ans.
J'aimerais ça
qu'il nous dise «agir tôt», ça veut dire quoi. Est-ce que ça veut dire
seulement agir à quatre ans en envoyant
les enfants à la maternelle quatre ans pour des services qu'ils ne pourront pas
avoir ou ça veut dire d'avoir les services, d'avoir des passerelles avec les CPE,
avec les services de garde à un an, à deux ans, à trois ans, à quatre ans?
Est-ce qu'il peut nous dire aujourd'hui que
son engagement, il est ferme, et que ces services-là vont être là en septembre?
Le Président :
M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M.
Carmant : J'aimerais remercier la députée de Joliette de sa question.
Ça me fait vraiment plaisir de répondre. Donc, Agir tôt, ça commence à zéro mois, à la naissance, dès qu'il y a
une identification d'un retard de développement. J'ai même demandé que le programme soit précédé et que les affichages
débutent dès le mois de juin pour qu'on puisse commencer le plus rapidement possible, à tous les CIUSSS de faire cette
exception-là, qu'ils n'affichent pas normalement pendant l'été. Je prévois faire une tournée de tous les CISSS et les
CIUSSS du Québec pendant l'été pour m'assurer que les choses vont
bon train et qu'on peut commencer dès le mois de septembre. On commence à agir
tôt le plus tôt possible, M. le Président.
Le Président :
Question principale, M. le député de Laval-des-Rapides.
Plan du gouvernement pour
augmenter les exportations d'électricité
M. Saul Polo
M.
Polo : M. le Président, depuis le début du gouvernement, le premier
ministre nous a habitués à des séances d'improvisation.
Mais, une fois de plus, la semaine dernière, il nous a montré qu'il en était le
maître. Lorsque le premier ministre
est allé en Ontario, il a offert au premier ministre de l'Ontario un deal sur
l'achat d'électricité qui comprenait une participation dans les nouveaux
barrages au Québec, des emplois au Québec pour les travailleurs ontariens et de
l'électricité pas chère pour les Ontariens. Mais le deal a été refusé. La
semaine dernière, le premier ministre est allé à New York et il s'est réessayé. Il a proposé de leur vendre de
l'électricité juste au-dessus de zéro, M. le Président. Ça veut dire quoi, M. le Président? Ça veut dire de vendre
vraiment pas cher juste pour écouler les surplus. C'est bon pour qui,
une proposition comme ça? C'est bon pour la ville de New York, c'est bon pour
les entreprises de New York.
Nous
voulons tous nous enrichir et enrichir le Québec, mais est-ce que c'est vendre
à rabais, la seule façon de s'enrichir? M. le Président, est-ce que
c'est ça, la vision économique de la Coalition avenir Québec?
Le Président :
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M. Julien :
Oui, merci, M. le Président. Écoutez, le premier ministre a effectué une
mission sur New York, une mission sur
Washington, tellement en cohérence avec ce que notre gouvernement a annoncé. Et
c'est une mission que je qualifierais, honnêtement, de fantastique. M.
le premier ministre est allé à la rencontre, en réalité...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Julien :
...des plus hautes autorités de New York pour discuter avec eux de notre plan,
de notre plan conjoint. Et, quand je parle
de cohérence, M. le Président... Nous avons, au Québec, une richesse
extraordinaire. On en convient tous
et effectivement on a des surplus. On a des surplus qui peuvent à la fois
servir au développement économique du Québec
et à la fois servir, par cette énergie renouvelable, cette énergie propre,
servir, M. le Président, à faire la réduction des GES chez nos voisins.
Alors,
c'est un terreau fertile. C'est un terreau, en réalité, qu'on compte bien
exploiter, et le premier ministre a pavé la voie à des discussions.
M. Martel, d'Hydro-Québec, continuera les négociations pour le bénéfice
économique du Québec.
Le Président :
Première...
Des voix :
...
Le
Président : Première complémentaire. Je vais vous demander
votre attention également, s'il vous plaît. Moi, je trouve ça bruyant. Alors, attention aux questions, attention aux
réponses. M. le député de Laval-des-Rapides, vous êtes le seul à avoir
la parole.
M. Saul Polo
M. Polo :
Merci beaucoup, M. le Président. Elle a été tellement fantastique, la mission,
que le P.D.G. d'Hydro-Québec n'était
même pas présent. Elle était tellement fantastique que le premier ministre est
revenu pas de deal.
M. le
Président, est-ce que le gouvernement va vraiment laisser... devrait laisser
Hydro-Québec faire les négociations? Pour
essayer de nous rassurer, le premier ministre a dit que, dans son deal, le prix
de vente augmenterait dans le temps. Le test de la réalité, M. le premier ministre,
c'est... lorsqu'on regarde les données d'Hydro-Québec, on se rend compte que la
valeur de chaque térawattheure vendu par Hydro-Québec diminue d'année
après année. C'est ça, le test de la réalité.
Alors, comment
pouvez-vous...
Le Président :
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M. Julien :
Oui, merci, M. le Président. Je pense que mon collègue de Laval-des-Rapides a
une très mauvaise compréhension d'un processus de négociation. Alors,
essentiellement...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Julien : ...Hydro-Québec travaille depuis des mois. Parce
que le maire de Blasio l'a clairement mentionné : On est intéressés par
l'énergie du Québec. Naturellement, «the tone from the top», là, quand le
premier ministre va rencontrer les autorités pour avoir ces discussions-là,
c'est essentiel. C'est essentiel pour asseoir notre crédibilité puis pour paver
la voie des négociations qui vont mener leurs fruits. Hydro-Québec travaille
inlassablement, comme au Massachusetts, pour trouver un prix économique, rentable pour le Québec. Ça va être un contrat qui
va nous donner beaucoup de retombées économiques et surtout...
Le Président :
En terminant.
M. Julien :
...qui va contribuer à la réduction des GES. C'est tellement cohérent avec
notre mandat.
Des voix :
...
Le
Président : Deuxième complémentaire... Encore
une fois, je suis obligé de vous
rappeler, s'il vous plaît, un peu de silence et d'attention. Je vous
entends tenter de le faire. Bien, faisons-le ensemble, attentifs aux questions,
attentifs aux réponses. La parole est au député de Laval-des-Rapides.
M. Saul Polo
M.
Polo : M. le Président, ce sur quoi j'ai une très bonne compréhension, c'est le manque de
confiance du premier ministre
envers son ministre de l'Énergie, puisqu'il était absent en Ontario, tout comme
il était absent à New York. Plusieurs secteurs économiques établis ici, au Québec,
demandent, eux aussi, à avoir des tarifs plus avantageux. Le gouvernement doit faire des choix. Si le gouvernement pense qu'il peut vendre à rabais l'électricité du
Québec, pourquoi ne pas en faire bénéficier aux entreprises
d'ici? Comment le ministre va-t-il expliquer aux entreprises
qui emploient des Québécois, des gens d'ici, qu'ils n'auront pas accès à
ces mêmes tarifs? Merci.
• (14 h 40) •
Le Président :
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.
M. Jonatan Julien
M.
Julien : Oui. M. le Président, encore là, quand on regarde la négociation qui se fait avec
le Mass. actuellement, on
parle de 0,088 $ en tarif médian sur la durée du contrat. C'est la même
nature de contrat qu'on va négocier avec New
York, et naturellement tout le travail reste à faire pour venir le peaufiner.
Et un n'empêche pas l'autre. C'est comme de venir dire qu'au Québec on a des surplus qu'on peut vendre et
exporter et qu'on n'aura plus suffisamment d'énergie pour développer l'industrie du Québec. C'est
n'importe quoi. La grande différence avec le Parti libéral, c'est qu'on ne
manque pas d'ambition de ce côté-ci de la Chambre. Et, oui, on va exporter
notre énergie pour le développement économique du Québec, et ce n'est pas vrai
qu'on va se laisser impressionner par des commentaires de leadership.
Le Président :
Question principale...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Mme la députée de Sherbrooke.
Effets des pénuries de locaux
sur les élèves vivant
avec un trouble du spectre de l'autisme
Mme Christine Labrie
Mme
Labrie : Merci, M. le Président. La pénurie de locaux à la commission scolaire de Montréal est tellement
grave que des enseignants sont forcés
d'isoler des élèves autistes dans une garde-robe. L'école primaire de
l'Étincelle, qui
accueille 134 élèves atteints des troubles les plus graves du spectre de
l'autisme, leur nombre de classes a tellement
augmenté, dans cette école-là, qu'il manque
de locaux d'apaisement, et ils sont parfois obligés d'utiliser la garde-robe
d'à peine plus de 2 mètres carrés sans
fenêtre, sans aération, avec des tuyaux, des panneaux électriques, des vis
exposées. Même dans une prison, il y a
des fenêtres dans les cellules d'isolement, M. le Président. En mars, la commission scolaire de Montréal et le
personnel de l'Étincelle ont écrit au ministre pour l'inviter à constater
l'urgence et la gravité de la situation, et, en deux mois, ils n'ont obtenu absolument
aucune réponse du ministère. Et ce
matin, comme par magie, on apprend que le ministre est en mode solution
et que les travaux vont commencer dès ce soir.
Comment
ça se fait que les profs doivent interpeler les journalistes pour que les
solutions arrivent? Est-ce qu'on doit
envoyer Radio-Canada faire une tournée de toutes les écoles pour que le
ministre prenne conscience de tous les feux qu'il a à éteindre et qu'il
puisse mieux gérer ses priorités?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, ce qu'on a appris ce matin, c'est quelque chose qui n'a pas de
bon sens, je le répète, d'envoyer des
enfants qui sont en crise dans un local exigu, mais surtout qui n'est pas
adapté et qui peut même être dangereux. C'est supposé être un local d'apaisement pour que les jeunes passent à
travers leur crise et retrouvent leur calme et c'est un local qui est mésadapté, dans lequel ils
peuvent se blesser puis dans lequel les adultes qui interviennent peuvent aussi
se blesser. Ça n'a pas de bon sens.
Ceci
étant dit, de m'envoyer une lettre, envoyer une lettre au ministre
en disant : Venez visiter le local dangereux, ce n'est pas la bonne technique.
Il y a des gens dans les écoles qui constatent ça. Il y a
des commissions scolaires dont
le travail, c'est de s'assurer que les bâtiments sont en bon état.
Alors,
j'ai un message, là, pour l'ensemble des administrations scolaires, pour les élus scolaires, là, qui disent :
Nous autres, on est des élus scolaires, on
est bien importants, là, c'est nous autres qui gérons les commissions scolaires. S'il y a un problème, un
local est dangereux, n'appelez pas le ministre, appelez l'ébéniste. Quand il y
a un problème, ne me demandez pas d'aller visiter l'école, réparez-la.
Et, si vous avez besoin d'argent, faites-nous des demandes, on ne laissera pas
les enfants dans des locaux dangereux.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke, à vous la parole.
Mme Christine Labrie
Mme
Labrie : La prochaine fois qu'il y a le mot «urgence», dans une
lettre, ce serait le fun que le ministre rappelle pour dire c'est quoi,
la bonne façon de procéder pour avoir des services d'urgence.
Comme
dans bien des écoles au Québec, l'Étincelle est pleine à craquer. La population
de cette école-là a doublé dans les
15 dernières années. Bien, dans cet endroit-là en particulier, ça pose un
problème de danger physique immédiat aux
élèves et au personnel parce que les élèves autistes ont besoin de calme; le
bruit peut faire augmenter leurs crises. Depuis le début de l'année scolaire, il y a 12 membres du personnel
qui sont partis en arrêt de travail parce qu'ils ont subi des blessures
aussi graves qu'un pied cassé ou une commotion cérébrale.
Est-ce que le
ministre va intervenir pour imposer un plafond sécuritaire à la population de
l'Étincelle?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation, à vous la parole.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, oui, on va intervenir, on intervient déjà.
On va mettre en place des politiques qui découlent du budget. Parce que
faire des discours, avoir des grandes intentions, c'est bien intéressant, mais,
si on est dans une période où on coupe dans
les services, ça ne fonctionne pas. Nous, on investit dans les services directs
aux élèves. On investit là où ça
compte, dans le capital humain, dans les professionnels qui vont donner des
services directs aux élèves ou qui vont aider les enseignants à aider
les élèves.
Et, quand il y a des profs ou des intervenants qui
se font blesser parce qu'ils ne sont pas assez nombreux ou parce qu'ils sont
dans des locaux inadéquats, moi, ça m'interpelle. Je veux que les ressources
soient là. Et notre PQI est suffisamment élevé...
Le Président :
En terminant.
M.
Roberge : ...pour répondre aux besoins de rénovation. Notre budget est
assez élevé pour répondre aux besoins de personnel.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Christine Labrie
Mme
Labrie : Ça va aussi prendre un plafond, M. le Président. Les
diagnostics du trouble du spectre de l'autisme sont en augmentation. Un
enfant sur 66 reçoit un diagnostic d'autisme au Canada. Le gouvernement veut agir tôt pour
diagnostiquer, mais, quand on voit ce qui se passe dans nos écoles, on se
demande ils sont où, les services.
C'est
quoi, le plan du ministre pour offrir des services adéquats au nombre croissant
d'élèves autistes et à tous les
autres enfants à besoins particuliers dans le réseau d'éducation? Parce qu'eux
aussi méritent de grandir et d'apprendre dans la dignité.
Le Président :
M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M.
Carmant : J'ai parlé du diagnostic précoce du trouble de l'autisme,
qui... la plupart des parents sont inquiets, dès l'âge de deux ans, donc, bien avant l'entrée à l'école. Nous, ce
qu'on veut mettre sur pied, c'est un système qui va permettre de repérer et dépister le plus tôt
possible ces enfants-là et intervenir le plus rapidement possible. On pense que
l'intervention avant d'entrer à l'école peut
permettre même de dévier le parcours de ces enfants-là et leur permettre
d'aller dans un parcours scolaire normalisé.
Maintenant,
là, je vais mettre mon point sur la maternelle quatre ans, là, qui est superimportant.
C'est qu'il y a des enfants qui ont
des problèmes sévères, qui seront non modifiables, même après l'intervention
précoce. Donc, ces enfants-là vont
avoir besoin de ressources qui sont beaucoup plus abondantes que celles qu'on a
actuellement et qui nous sont offertes par la maternelle quatre ans,
avec des professionnels qui vont être sur place.
Le Président :
Question principale, M. le député de LaFontaine. Encore une fois, votre
attention.
Accès à l'égalité en
emploi
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Oui, M. le Président. Au Québec, la discrimination en emploi est certes
interdite par la charte québécoise des
droits et libertés de la personne, mais aussi, depuis 2000, nous avons une loi
qui vise à assurer une meilleure représentation
des personnes issues de groupes qui sont victimes de discrimination sur le
marché du travail. Il s'agit de la Loi
sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics. Cette loi a
notamment pour objectif d'assurer que les femmes, puissent-elles porter
un signe religieux, soient mieux représentées au sein des organismes publics.
Avec
son projet de loi n° 21, on sait que le gouvernement veut, par la
clause dérogatoire, suspendre tous les droits et libertés prévus à notre charte québécoise. Par contre, pour ce qui
est des autres lois du Québec, telles que la Loi sur l'accès à l'égalité
en emploi, il y a un dangereux flou.
La
ministre de la Justice peut-elle assumer les choix de son leader et nous dire
si le projet de loi n° 21 aura pour effet de mettre au rancart la
Loi sur l'accès à l'égalité en emploi?
Le Président :
M. le leader du gouvernement, ministre de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, dans le cadre du projet de loi n° 21,
ce qu'on fait, c'est qu'on sépare l'État des religions. On s'assure également, M. le Président, que, pour
certains emplois bien précis dans la société québécoise, pour les gens qui sont en situation de position
d'autorité, des gens qui ont un pouvoir extraordinaire, notamment les juges,
les policiers, les agents de services
correctionnels, les enseignants, les directeurs d'école, qu'ils ne pourront pas
porter de signes religieux durant leur prestation de travail.
Je
pense qu'au Québec M. le Président, après 10 ans de débats, après la
commission Bouchard-Taylor, après le projet
de loi n° 94 qui a été déposé, le projet de loi n° 60 qui a été déposé par le Parti québécois, après le projet de loi n° 394 qui a été déposé par la
précédente députée de Gouin, on est arrivés, au Québec, avec un projet de loi
qui est un projet de loi qui est modéré, qui est applicable, qui est
consensuel, qui vise autant les hommes que les femmes, qui vise toutes les
religions, qui fait en sorte qu'on va avancer au Québec, pour une fois, en
termes du débat sur la laïcité de l'État.
Et donc je suis très
fier...
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...de la proposition que le gouvernement a choisi de déposer et
j'espère que vous allez nous appuyer dans cette démarche-là.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
M. le Président, le leader du gouvernement ne peut pas être fier de la
discrimination en emploi, ne peut pas
être fier du fait qu'on va mettre de côté cette loi qui vise, entre autres, les
groupes de femmes, M. le Président. Et
ça, c'est un effet direct de son projet de loi. Est-il au courant? Est-ce que
la ministre est au courant de cela? C'était une des
préoccupations soulevées par la Commission des droits de la personne, qui est
chargée d'appliquer cette loi d'égalité en emploi, M. le Président.
La
ministre de la Justice peut-elle enfin se lever? On aimerait entendre sa voix
nous rassurer. Au Québec, y a-t-il toujours un accès à l'égalité à
l'emploi?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
Des voix :
...
Le Président :
Encore une fois, prudence et attention, s'il vous plaît!
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, le député de LaFontaine fait une
campagne de peur comme c'est toujours le
cas pour les collègues du Parti libéral. On le sait, on se retrouve dans une
situation où la laïcité de l'État, c'est important pour la nation
québécoise. L'objectif du projet de loi est de s'assurer que les services
publics soient donnés à visage découvert et
soient reçus à visage découvert. J'aimerais savoir, M. le Président, est-ce que
le député de LaFontaine est contre ça, le fait qu'on donne les services
publics à visage découvert.
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
M. le Président, j'ai laissé le leader et ministre répondre la première fois.
Je lui en donnais l'occasion pour le
début de sa deuxième réponse. Vous connaissez le règlement. La question, elle
est très claire, s'adressait à une collègue. C'est une question d'ordre
juridique, pas le blabla du ministre.
Des voix :
...
Le Président :
Faites attention aux propos blessants, de un. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, sur la question de règlement, M. le
Président, écoutez, je sais que le leader de l'opposition officielle est un gentilhomme. Et, comme vous le
dites, c'est blessant d'utiliser des propos comme «blabla». Alors, j'aimerais
qu'il retire ses propos blessants, tels que vous les avez qualifiés.
Le Président :
Je vous demande de faire attention évidemment aux propos que vous utilisez. M.
le ministre, veuillez poursuivre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, le projet de loi, ce qu'il fait,
c'est qu'il s'assure de mettre toutes les religions sur le même pied d'égalité et que, pour certaines
fonctions bien particulières dans le cadre de l'État, en raison de leur pouvoir
particulier, on interdit le port de signes religieux.
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : Il me semble que ce n'est pas compliqué à
comprendre. M. le Président, il est temps que le Parti libéral appuie ce
projet de loi là.
• (14 h 50) •
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
M. le Président, une conception dépassée de l'égalité, c'est de dire : On
a la même norme pour tout le monde.
Ça, c'est discriminer. Ça, ce qu'il vient d'affirmer, c'est de la discrimination,
M. le Président. Quand on a une même règle pour tout le monde...
M. Jolin-Barrette :
Question de règlement.
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Oui. On est en train de prêter des intentions aux
propos que je tiens en cette Chambre. On qualifie une situation qui n'a pas lieu d'être. Honnêtement, je crois
que le député de LaFontaine devrait être très prudent dans ses propos lorsqu'on tente de me prêter des
intentions qui ne sont aucunement le cas. Et, à la lecture du projet de loi,
M. le Président, le député de LaFontaine pourrait constater...
Des voix :
...
M. Jolin-Barrette : C'est sur
la question...
Des voix :
...
Le Président : ...compris, je
m'excuse, là. Il y a des...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Il y a des opinions qui peuvent
être exprimées dans une question. Je viens de vous entendre comme leader du gouvernement. J'entends
le leader de l'opposition officielle, pour ensuite poursuivre la discussion.
M. Proulx :
Oui, M. le Président. Deux
choses : la première, c'est que le leader réponde à une question
de règlement, c'est une chose, qu'il réponde à la question,
c'en est une autre. Deuxièmement, la décence, dans ce dossier-là, M. le Président, implique que ça devrait être le leader adjoint. Il
est directement interpelé comme ministre et il rend lui-même
sa propre décision parce qu'il se sent touché.
M. le Président, soyons très clairs. La question du collègue est une question juridique. Il exprime ce qu'a dit le ministre
dans sa réponse. Alors, maintenant, laissez-le terminer sa question
parce que c'est du temps pour l'opposition qui est amputé en ce moment.
Le Président : Je vous
demande votre collaboration. On poursuit sur le fond de la question, M. le
ministre, poursuivez la... M. le député...
Des voix : ...
Le Président : Non, écoutez!
Des voix : ...
Le Président : Non, non. M.
le député, poursuivez, s'il vous plaît.
M. Tanguay : M. le
Président, je suis sur l'aspect
juridique et je suis sur l'aspect où on aimerait tous entendre la voix de la ministre. En vertu de la loi
dont je vous parle, M. le Président, l'article 34, c'est qui, la ministre
responsable? C'est la ministre de la Justice.
Est-ce qu'on peut l'entendre enfin pour nous...
est-ce qu'elle peut assumer ses fonctions, M. le Président? C'est ce
qu'on demande.
Le Président : Mme la
ministre de la Justice.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! Vous souhaitez entendre une réponse. On écoute la ministre de la
Justice.
Mme Sonia LeBel
Mme LeBel : Est-ce qu'on est prêts à
m'écouter, M. le Président? Alors, merci, merci, surtout qu'on a passé l'avant-midi ensemble dans une autre commission
parlementaire. Merci de me donner l'occasion de m'exprimer. Alors, je
rassure tout le monde, mes parents, mes proches, mes amis, je ne suis pas
disparue. Alors, tout va bien.
Mon collègue, toutefois, porte-parole en
Justice, membre du Barreau et avocat, sait pertinemment que, sur les concepts juridiques, je ne peux intervenir ici, en
Chambre, et je ne peux vous faire valoir mon opinion. Par contre, je rassure
tout le monde. Mon opinion, je pense qu'on l'a
entendue, on l'a vue, hein, en fin de semaine, je la fais valoir. On travaille
en équipe, autant avec mon collègue
le ministre de l'Immigration et tous mes autres collègues. Je suis là pour les
aider à faire en sorte que les projets de loi soient les mieux possible,
mais dans l'intérêt des Québécois.
Le Président : Question
principale.
Des voix : ...
Le Président : Question
principale. La parole appartient maintenant au député de Pontiac.
Dispositions pénales du projet de loi visant
à resserrer l'encadrement du cannabis
M. André Fortin
M.
Fortin : M. le Président,
amendes, judiciarisation, le projet de loi cannabis va avoir un impact majeur
pour bien des citoyens. Pourtant, des fois, on a l'impression que la
première vraie réflexion, elle se fait en commission parlementaire. Première version qu'on a entendue,
M. le Président, la loi proposée indiquait qu'un adulte de 19 ans en
possession de cannabis aurait une amende de
100 $. Deuxième version, la semaine dernière, le ministre nous disait que
c'était le policier sur place qui jugeait si
le jeune avait les moyens ou non de payer l'amende. Troisième version, cette
semaine, le ministre avoue que c'est le
jeune qui décidera lui-même s'il paye ou s'il suit une formation ou, s'il n'a pas
les moyens de la payer, qu'il fasse du bénévolat.
Et la fameuse formation, M. le Président, n'est
pas prête. Quand est-ce qu'elle va être prête? On ne sait pas. Qu'est-ce qu'elle va inclure? Le ministre ne le
sait pas — ça, M.
le Président, du ministre qui voulait que son projet de loi soit adopté en mars. Enfin, M. le Président, le
ministre refuse d'inclure sa fameuse formation dans sa loi. Elle va parler
d'amende, point.
Pourquoi on adopterait une loi quand le ministre
lui-même avoue qu'il va faire le contraire de ce qu'il a dit?
Le Président : M. le ministre
délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M.
Carmant : M. le Président, comme je m'efforce d'expliquer au député de
Pontiac en commission parlementaire, notre
but, c'est vraiment de ne pas judiciariser les jeunes. Ce n'est pas de les
pénaliser financièrement, mais c'est vraiment d'aller avec des processus
d'éducation.
Maintenant,
le projet de loi antérieur a été approuvé, devait permettre de faire de
l'éducation, de la prévention. Mais rien n'est actuellement en place
dans le projet de loi. Je m'efforce jour et nuit de travailler pour améliorer
les conditions, pour permettre aux jeunes,
tant les mineurs que les jeunes adultes, d'avoir accès au plus possible à une
réduction des méfaits du cannabis.
Maintenant, encore une fois, là, le projet de
loi n° 2, c'est un projet de prévention de la santé mentale de nos adolescents. Vous irez voir, aujourd'hui... depuis
qu'on est ici, on a eu des articles sur l'augmentation du risque de psychose,
de l'augmentation du risque de dépression,
augmentation du risque de syndrome amotivationnel, et, aujourd'hui, on lit
qu'une seule dose de cannabis peut affecter les fonctions cognitives de nos
jeunes.
Maintenant, est-ce qu'on peut aller de l'avant,
et aller avec la commission, et permettre d'adopter ce projet de loi n° 2 qu'on puisse protéger la santé...
Le Président : En terminant.
M. Carmant : ...mentale de nos
enfants? Merci, M. le Président.
Le Président : Cela met fin à
la période de questions et de réponses orales. Merci.
Motions sans préavis
Le
Vice-Président (M. Picard) : Comme il n'y a pas de votes reportés,
nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis.
En fonction
de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je
reconnais un membre formant le gouvernement. M. le ministre de la
Famille.
Souligner la Semaine des services éducatifs en CPE et en
milieu
familial et la Journée mondiale des parents
M.
Lacombe : Merci beaucoup, M. le Président. Je demande le consentement
de cette Assemblée pour déposer la motion
suivante conjointement avec la députée de Westmount—Saint-Louis, la députée de Sherbrooke, la députée
de Joliette, le député de Chomedey et la députée de
Marie-Victorin :
«Que
l'Assemblée nationale souligne la tenue de la Semaine des services éducatifs en
CPE et [en] milieu familial, qui se déroule à travers le Québec, du
26 mai au 1er juin[...];
«Qu'à cette
occasion, elle souligne l'expertise et la bienveillance dont le personnel des
services de garde éducatifs à l'enfance fait preuve quotidiennement dans
son travail avec les enfants;
«Qu'elle
exprime sa reconnaissance envers ces personnes qui ont à coeur le bien-être des
tout-petits et qui mettent tout en oeuvre pour leur offrir des milieux
de vie accueillants et stimulants;
«Qu'elle
reconnaisse leur grande contribution à la qualité des services de garde
éducatifs offerts aux familles au Québec, qui permettent aux enfants de
se développer et qui représentent pour les parents un appui important;
«Que l'Assemblée
nationale souligne également
la tenue de la Journée mondiale des parents qui est célébrée le
1er juin de chaque année;
«Qu'à cette occasion, elle souligne le rôle
essentiel que jouent les parents dans l'éducation, la protection et le
développement global des enfants;
«Qu'elle
réaffirme l'engagement du gouvernement de soutenir les parents du Québec aux
différentes étapes de la vie et, notamment, dans l'atteinte d'un
meilleur équilibre entre leurs nombreuses responsabilités.»
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger :
Alors, consentement, sans débat.
Mise aux voix
Le Vice-Président
(M. Picard) : Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Adopté. Un membre du groupe formant
l'opposition officielle, M. le député de Pontiac.
Exiger que le gouvernement mette
en place des mesures supplémentaires
pour lutter contre le tabagisme et le vapotage dans les écoles
M. Fortin : M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin
de présenter la motion suivante conjointement
avec le député de Jean-Lesage, la députée de Joliette, le député de Chomedey et
la députée de Marie-Victorin :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse que le tabagisme est, encore aujourd'hui, un enjeu majeur
de notre société;
«Qu'elle
considère que les mini-cigarettes électroniques sont un véritable fléau pour
les jeunes, particulièrement dans nos écoles;
«Qu'elle
exige que le gouvernement mette en place des mesures supplémentaires pour
lutter contre le tabagisme et le
vapotage dans les écoles, notamment, avec une campagne de sensibilisation et de
prévention et ce, d'ici la prochaine rentrée scolaire.»
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion?
M. Schneeberger :
Consentement, sans débat.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Oui, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
Oui, M. le Président, je vous demanderais un vote par appel nominal, s'il vous
plaît.
Mise aux voix
Le
Vice-Président (M. Picard) : Donc, nous allons procéder au vote
par appel nominal. Que les députés en faveur de cette motion veuillent
bien se lever.
• (15
heures) •
Le Secrétaire
adjoint :
M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon),
M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette
(La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce),
M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys),
M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard),
Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade
(Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil),
Mme Charbonneau (Mille-Îles),
Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier),
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin
(Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti
(Jeanne-Mance—Viger),
Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone
(Marquette).
M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault
(Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay),
M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon
(Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson),
M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Roberge (Chambly), M. Bonnardel (Granby),
M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Lamontagne
(Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost),
M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau
(Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert
(Saint-François), M. Dufour
(Abitibi-Est), M. Lacombe (Papineau), Mme Proulx (Berthier),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
Mme Girault (Bertrand), M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet
(Trois-Rivières), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud),
M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), M. Chassin
(Saint-Jérôme), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges),
Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid
(Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau),
M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais
(Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf),
Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean),
Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau),
M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval),
M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin),
Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie
(Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau),
M. Zanetti (Jean-Lesage).
M. Bérubé (Matane-Matapédia),
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard
(Duplessis), M. Roy
(Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière),
M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), Mme Perry Mélançon
(Gaspé).
M. Ouellette
(Chomedey), Mme Fournier (Marie-Victorin).
Le Vice-Président (M. Picard) : Que les
députés contre veuillent bien se lever. Est-ce qu'il y a des abstentions?
M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 112
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Président : Merci. La
motion est adoptée. Maintenant, un membre du deuxième groupe d'opposition. Je
reconnais Mme la députée de Sherbrooke.
Demander au ministre de
l'Éducation d'honorer son engagement d'investir
de nouveaux fonds gouvernementaux afin d'assurer la pérennité
des mesures d'aide alimentaire dans les écoles
Mme Labrie : M. le
Président, je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec le ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur, la députée de Saint-Laurent, la députée
de Joliette, la députée de Marie-Victorin et le député de Chomedey :
«Que l'Assemblée nationale prenne acte des
propos tenus vendredi dernier par le ministre de l'Éducation, qui s'engageait à ce que de nouveaux fonds soient
investis par le gouvernement afin d'assurer la pérennité des mesures d'aide
alimentaire dans les écoles du Québec à
l'automne prochain, y compris dans celles qui ont récemment subi un changement
à leur indice de défavorisation;
«Que l'Assemblée
nationale demande au ministre de l'Éducation d'honorer cet engagement, en ajoutant le plus rapidement
possible les sommes nécessaires
afin qu'aucun élève ne perde son aide alimentaire durant la prochaine année
scolaire.» Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger :
Consentement, sans débat.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Consentement, sans débat. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M. Nadeau-Dubois : Oui, merci,
M. le Président. Je vais vous demander qu'on procède à un vote par appel
nominal, s'il vous plaît.
Mise aux voix
Le
Vice-Président (M. Picard) : Donc, nous allons procéder au vote. Que les députés en faveur de cette
motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques),
M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke),
M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau),
M. Zanetti (Jean-Lesage).
M. Jolin-Barrette
(Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé
(Châteauguay), M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet),
M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville),
M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée
(Repentigny), M. Roberge (Chambly),
M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance
(Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant
(Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre (Arthabaska),
M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest
(Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete
(Sainte-Rose), Mme Samson (Iberville), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est),
M. Lacombe (Papineau), Mme Proulx (Berthier), M. Schneeberger
(Drummond—Bois-Francs),
Mme Girault (Bertrand), M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet
(Trois-Rivières), M. Lafrenière (Vachon),
M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand
(Richmond), M. Chassin (Saint-Jérôme), M. Bélanger
(Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle),
M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois),
Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin
(Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest),
M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin
(Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours
(Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau),
M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval),
M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre
(Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine),
Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont),
Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun),
Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil),
Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau),
M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger),
Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone
(Marquette).
M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Ouellet
(René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis),
M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault
(Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), Mme Perry Mélançon
(Gaspé).
M. Ouellette
(Chomedey), Mme Fournier (Marie-Victorin).
Le Vice-Président (M. Picard) : Que les
députés contre veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? M. le
secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 113
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. La motion est adoptée. Maintenant, je reconnais un membre du troisième
groupe d'opposition. M. le député de Jonquière.
Rappeler que tout projet de transport
d'hydrocarbures doit être soumis à la
procédure québécoise d'évaluation environnementale et reconnaître que
la Colombie-Britannique a la légitimité d'en appeler de la décision
rendue sur l'application de ses lois environnementales
M. Gaudreault : Oui, M. le
Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le ministre de
l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, le député
de Laval-des-Rapides, la députée de Mercier et la députée de Marie-Victorin, la
motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale réitère que la nation
québécoise est souveraine sur son territoire;
«Qu'elle
rappelle que par conséquent, tout projet pouvant avoir un impact
environnemental, notamment ceux ayant trait au transport
d'hydrocarbures, doit être soumis à la procédure québécoise d'évaluation
environnementale;
«Qu'elle
rappelle également que ces projets ne peuvent aller de l'avant sans l'accord du
gouvernement du Québec;
«Enfin,
qu'elle reconnaisse que le gouvernement de la Colombie-Britannique a toute la
légitimité pour aller en appel de la décision de sa cour d'appel dans
son renvoi sur l'application de ses lois environnementales.»
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de... Oui, M. le leader.
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) : Oui, attendons. Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger :
Juste vérifier, est-ce que c'est bien «qu'elle accorde son appui au
gouvernement de la Colombie-Britannique»?
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Picard) :
S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Je vais
vous demander de suspendre une minute, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Je suspends les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 7)
(Reprise à 15 h 9)
Le Vice-Président (M. Picard) :
Nous reprenons.
Donc, est-ce qu'il y a consentement pour
débattre de cette motion?
M. Schneeberger :
Alors, M. le Président, il y a consentement, sans débat.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Consentement, sans débat. M. le leader du troisième
groupe d'opposition.
M. Ouellet : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Donc, je
vous demanderais d'appeler le vote par appel nominal, s'il vous plaît.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Picard) :
Donc, nous allons procéder à la mise aux voix de la motion présentée par M. le
député de Jonquière. Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien
se lever.
• (15 h 10) •
Le Secrétaire adjoint : M. Bérubé (Matane-Matapédia),
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski),
Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon
(Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine), Mme Perry Mélançon (Gaspé).
M. Jolin-Barrette
(Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé
(Châteauguay), M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet),
M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville),
M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée
(Repentigny), M. Roberge (Chambly),
M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance
(Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne
(Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre
(Arthabaska), M. Dubé (La Prairie),
Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles),
M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Samson (Iberville),
Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Lacombe
(Papineau), Mme Proulx (Berthier), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Julien
(Charlesbourg), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud),
M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), M. Chassin
(Saint-Jérôme), M. Bélanger (Orford),
Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif
(Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin
(Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau
(Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau),
M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget),
Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice),
M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard
(Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux
(Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe
(Ungava), M. Bussière (Gatineau),
M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval),
M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière),
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun),
Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac),
Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles),
Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier),
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides),
Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent),
M. Ciccone (Marquette).
Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques),
Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion),
Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti
(Jean-Lesage).
M. Ouellette
(Chomedey), Mme Fournier (Marie-Victorin).
Le Vice-Président (M. Picard) : Que les
députés contre cette motion veuillent bien se lever. Est-ce qu'il y a des
abstentions? M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 111
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. La motion est adoptée. Maintenant je reconnais Mme la députée de Marie-Victorin.
Oui, M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet : Merci,
M. le Président. Donc, on aimerait
transmettre cette motion au premier
ministre du Canada, au premier ministre de la Colombie-Britannique
ainsi que le premier ministre de l'Alberta.
Le
Vice-Président (M. Picard) : O.K., la motion sera transmise, tel que votre demande
a été effectuée. Maintenant,
je reconnais Mme la députée de Marie-Victorin.
Demander au gouvernement
que le mois de mai devienne, à partir de l'année 2020, le
Mois de sensibilisation et de prévention des violences à caractère sexuel au
Québec
Mme Fournier : Oui, merci,
M. le Président. Je tiens d'abord à souligner la présence, dans nos tribunes,
de Mme Myriam Jouglard, représentante de la Fondation Marie-Vincent, un organisme qui vient en aide
aux enfants et aux adolescents victimes de violences à caractère sexuel
et qui vise à les prévenir.
Je sollicite maintenant le
consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la ministre
de la Justice, la députée de
Marguerite-Bourgeoys, la députée
de Sherbrooke, la députée de
Joliette et le député de Chomedey, la motion
suivante :
«Que
l'Assemblée nationale souligne que, notamment grâce au financement public du
milieu communautaire, le Québec est un leader dans la sensibilisation et
la prévention des violences à caractère sexuel;
«Que
l'Assemblée nationale prenne néanmoins acte des statistiques troublantes à
l'effet qu'encore de nos jours au Québec,
une fille sur cinq et un garçon sur dix rapportent avoir été victimes d'une
agression sexuelle avant l'âge de 18 ans;
«Qu'elle prenne acte que dans plusieurs
législatures voisines, le mois de mai est reconnu comme le Mois de sensibilisation
et de prévention des violences à caractère sexuel;
«Qu'elle
reconnaisse l'importance de faire en sorte qu'au Québec, les décideurs, les
professionnels de divers milieux et
la population en général se mobilisent et agissent formellement au moins une
fois par année pour prévenir les violences à caractère sexuel sous
toutes leurs formes qui touchent encore trop d'enfants, d'adolescents et
d'adultes;
«Qu'elle
demande par conséquent au gouvernement du Québec que le mois de mai devienne, à
partir de l'année 2020, le Mois de sensibilisation et de prévention
des violences à caractère sexuel au Québec.»
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il
y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger :
Il y a consentement, sans débat.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Consentement. Oui, M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet : Oui, M. le Président, au nom de la collègue de
Marie-Victorin, je vous demande d'appeler le vote par appel nominal,
s'il vous plaît.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion
présentée par Mme la députée de Marie-Victorin. Que les députés en faveur de
cette motion veuillent bien se lever.
Le
Secrétaire adjoint : Mme Fournier
(Marie-Victorin).
M. Jolin-Barrette
(Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé
(Châteauguay), M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet),
Mme Roy (Montarville), M. Lemay
(Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny),
M. Roberge (Chambly), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque
(Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes),
M. Lamontagne (Johnson),
M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre
(Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest
(Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete
(Sainte-Rose), Mme Samson (Iberville), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est),
M. Lacombe (Papineau), Mme Proulx (Berthier), M. Schneeberger
(Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Julien
(Charlesbourg), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud),
M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), M. Chassin
(Saint-Jérôme), M. Bélanger (Orford), Mme Picard
(Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid
(Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau),
M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais
(Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf),
Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean),
Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux
(Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe
(Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé),
Mme Guillemette (Roberval), M. Provençal (Beauce-Nord),
M. Jacques (Mégantic).
M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière),
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun),
Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols
(Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan),
M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent),
M. Ciccone (Marquette).
Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques),
Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion),
Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti
(Jean-Lesage).
M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Ouellet
(René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis),
M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault
(Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine),
Mme Perry Mélançon (Gaspé).
M. Ouellette
(Chomedey).
Le Vice-Président
(M. Picard) : Que les députés contre cette motion veuillent bien
se lever. Est-ce qu'il y a des abstentions? M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 110
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. La motion est adoptée.
Avis touchant les travaux
des commissions
À la rubrique Avis touchant les travaux des commissions,
M. le leader du gouvernement.
M. Schneeberger : Oui, alors, M. le Président, j'avise cette
Assemblée que la Commission des
relations avec les citoyens poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la
prospérité socio-économique du Québec
et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration
réussie des personnes immigrantes, aujourd'hui, après les affaires
courantes jusqu'à 18 heures et de 19 h 30 à 21 h 30, à
la salle du Conseil législatif;
La Commission de la culture et de l'éducation poursuivra les
consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi
n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres
dispositions à l'égard des services de l'éducation
préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans, aujourd'hui, de
16 h 15 à 17 h 45 et de 19 h 30 à
21 h 15, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission de la santé et des services sociaux poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi n° 2, Loi resserrant l'encadrement du cannabis,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de
19 h 30 à 21 h 30, à la salle des
Premiers-Ministres. Voilà, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci. Pour ma part, je vous avise
que la Commission de l'agriculture, des pêcheries,
de l'énergie et des ressources naturelles se réunira en séance publique
aujourd'hui, de 15 h 30 à 18 h 30 et de 19 h 30 à 21 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau. L'objet de cette séance est de procéder à des
consultations particulières et de
tenir des auditions publiques dans le cadre du mandat d'initiative portant sur
les impacts des pesticides sur la
santé publique et l'environnement ainsi que les pratiques de remplacement
innovantes disponibles et à venir dans les secteurs de l'agriculture et de
l'alimentation, et ce, en reconnaissance de la compétitivité du secteur
agroalimentaire québécois.
Renseignements
sur les travaux de l'Assemblée
Aux renseignements
sur les travaux de l'Assemblée, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx : Oui, M. le Président. Très
rapidement, alors, je voulais informer la partie gouvernementale que, la semaine dernière, j'ai proposé,
dans le cadre du projet de loi n° 25, M. le Président, que nous puissions
tenir rapidement des consultations
particulières. Nous avons soumis, dans la même journée, je pense bien, quelques
groupes. Nous avions même proposé, M.
le Président, que nous puissions tenir ces consultations le 28 mai
dernier... bien, présent, même, dans les
faits. Alors, écoutez, M. le Président, je voulais connaître les intentions du
gouvernement à l'égard de ce projet de loi là. J'avais entendu la ministre de la Sécurité publique dire à plusieurs
occasions qu'il fallait une entente, qu'il fallait discuter avec les oppositions de ce projet de loi pour
permettre son adoption. Alors, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas eu de
retour. Alors, je voulais connaître les
intentions du gouvernement à l'égard de ce projet de loi là, puisque nous
devons, et nous le souhaitons, M. le
Président, tenir des consultations quand même assez courtes autour de ce projet
de loi là qui modifie le registre. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci. M. le leader du gouvernement.
•
(15 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Écoutez, le
processus va suivre son cours. On a reçu la liste de groupes du Parti libéral du Québec. Vous
savez, il y a plusieurs projets de loi, notamment, qui doivent être adoptés
d'ici la fin de la session, il y a
nécessairement un engorgement aussi au niveau des commissions parlementaires.
Donc, plus rapidement les projets
de loi qui sont à l'étude dans les
différentes commissions
parlementaires vont pouvoir être adoptés,
notamment le projet de loi n° 9 en matière d'immigration, notamment
le projet de loi n° 17 sur le taxi, il y en a plusieurs,
M. le Président...
Alors, nous verrons à la bonne marche des
travaux, le tout en collaboration avec les collègues de l'opposition officielle,
je l'espère, et c'est ce que j'irai constater dans quelques
instants l'autre côté, au salon rouge, avec mes collègues de Saint-Henri—Sainte-Anne,
de Nelligan et de Bourassa-Sauvé, la bonne foi du Parti libéral.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. M. le leader de l'opposition.
M. Proulx : Oui, M. le
Président, je ne veux pas faire de débat, puis je ne voulais surtout pas
qualifier les intentions de l'un et de l'autre. Ce que je voulais porter à
votre attention, M. le Président, c'est que l'intention a été démontrée par le gouvernement, la ministre
l'a dit à quelques occasions, et c'est dans la revue de presse,
qu'elle souhaitait une adoption
rapide de ce projet de loi là. Encore faut-il commencer les consultations. Je ne vois pas le lien à faire avec le projet de loi n° 9, on n'est même pas dans les mêmes forums.
Ce
que je dis, c'est : Si le gouvernement veut tenir ces consultations, qu'il nous
revienne. Si on peut le faire, on donnera
le coup de main nécessaire pour le faire, mais on ne va pas, M. le Président, mettre en opposition les différents projets. On ne parle pas des mêmes ministres, on ne parle pas des mêmes commissions.
On parle ici d'un projet de loi que nous
souhaitons aussi... avec lequel collaborer. Et j'ai présumé, jusqu'à maintenant, de la bonne foi du ministre dans bien des dossiers. Je lui demande de
faire la même chose dans notre travail au quotidien. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Bien, bien
sûr, M. le Président, je présume de
la bonne foi du Parti libéral du
Québec. Cela étant dit, vous savez, M. le Président, il y a plusieurs projets
de loi qui sont présentement à l'étude. Donc, ça va suivre son cours, et le leader de l'opposition
officielle sera le premier informé
lorsque nous tiendrons les consultations en lien avec le projet de loi n° 25. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Je vous informe que demain, lors
des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera
débattue la motion inscrite par M. le député de Robert-Baldwin. Cette motion se lit comme suit :
«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance du crédit d'impôt RénoVert pour la rénovation domiciliaire et sur le
plan de l'efficacité énergétique;
«Qu'elle demande au gouvernement caquiste de revenir sur sa
décision et de reconduire dès maintenant le crédit d'impôt
RénoVert pour l'année financière 2019‑2020.»
Affaires du
jour
La période des affaires courantes étant terminée, nous
allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.
M. Schneeberger : Oui, alors,
M. le Président, pour débuter nos affaires du jour, je vous demanderais
d'appeler l'article 15 du feuilleton.
Projet de
loi n° 12
Reprise du débat sur la
prise en considération du rapport de la commission
qui en a fait l'étude détaillée et des amendements transmis
Le Vice-Président (M. Picard) : Merci.
L'Assemblée reprend le débat ajourné le 14 mai 2019 sur la prise en considération du rapport de la
Commission de la culture et de l'éducation sur le projet de loi n° 12, Loi
visant à préciser la portée du droit
à la gratuité scolaire et à permettre l'encadrement de certaines contributions
financières pouvant être exigées, ainsi
que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par
Mme la députée de Saint-Laurent et par Mme la députée de Sherbrooke.
Lorsque nous avons mis fin à nos travaux, il restait
8 min 20 s à M. le député de Rimouski. Vous avez la chance de poursuivre votre intervention.
M. Harold LeBel
(suite)
M.
LeBel : Merci, M. le
Président, pour cette chance. Bon, je vais essayer de... Je ne me souviens plus
trop de mes deux premières minutes, mais je vais me
rattraper.
Dans le fond, ce que je voulais parler, c'était d'égalité
des chances. Puis ce que je voulais parler, essayer d'expliquer, c'est que, dépendamment de la
richesse des familles, dépendamment d'où tu viens, il y a des différences, et
ces différences-là, c'est sûr que ça
n'amène les mêmes chances pour avoir accès à certaines formations. Et ce qu'on
nous propose, ça ne vient pas améliorer la situation.
Ce que j'ai aussi lu, c'est le Conseil supérieur de
l'éducation, qui, eux-mêmes, dans leur rapport qu'ils déposaient, ils disaient que le projet de loi
n° 12 «peut constituer un recul préoccupant pour les acquis du Québec en
matière de justice sociale». Ce n'est
quand même pas rien comme affirmation. «Selon le conseil[...], un élève sur
cinq de l'école secondaire publique
est inscrit à un programme particulier reconnu par le ministère, ce qui ne
comprend pas les concentrations ou profils
lancés à l'initiative de l'école.» Ces programmes commandent des frais de
scolarité de 1 000 $,
3 000 $, et plus quand on parle de programmes sport-études.
La présidente du Conseil supérieur de l'éducation disait
aussi que «seulement 16 % des écoles secondaires publiques dont l'indice [sociodémographique] est faible proposaient
à leurs élèves des programmes particuliers, contre 43 % pour les
écoles dans des milieux à revenus moyens ou élevés.» C'est assez clair, quand
on regarde ça, qu'il y a des jeunes, dépendamment
d'où ils sont venus au monde, ou dans quelle famille, ou la richesse de leurs
parents, qui n'ont pas accès... même
si ça peut être des excellents sportifs, des gens superintelligents qui
pourraient être dans des programmes d'éducation à l'international, entre autres, les PEI, c'est des gens qui n'auront
jamais accès à ça à cause de leur situation financière.
Et des fois on a l'impression que tout va bien puis qu'il
n'y a pas de pauvreté au Québec. Mais on lisait récemment que... puis, quand tu lis ça dans Le Devoir... les plus grands utilisateurs des banques alimentaires sont les
enfants et les célibataires. Ça dit
que les enfants totalisent 35,2 %
des personnes ayant recours aux banques alimentaires. Je ne suis pas sûr qu'on doit accepter
ça comme société. Et ces 35 % d'enfants de familles qui ont recours aux
banques alimentaires, c'est clair qu'ils n'ont pas le 1 000 $,
ou 2 000 $, ou 3 000 $, ou 4 000 $ pour aller
dans des programmes particuliers sport-études ou d'autres concentrations.
Quand
j'ai terminé l'autre jour, j'ai essayé de démontrer... Selon le dernier rapport
de Statistique Canada, par MRC, les
MRC où le taux de familles en situation de pauvreté... on fait un moyen saut à
des places : Les Jardins-de-Napierville, 20 % de la population qui a de... de taux de familles en situation
de pauvreté; L'Île-d'Orléans, pourtant je le... 20 %, 20,5 % des familles qui sont en situation de pauvreté,
c'est énorme; Le Haut-Saint-Laurent, 15 %; La Tuque, 13 %; Avignon,
11 %; Pontiac, 11,5 %; La
Haute-Gaspésie, 10 %; la Minganie, 9 %. Il y en a 16, MRC qui ont un
sur 10 de familles qui sont en
situation de pauvreté. C'est une situation qui est claire, qui est là, et c'est
certain que ces familles-là, selon le Conseil supérieur de l'éducation,
n'ont pas accès à des écoles qui ont des formations particulières.
Dans
d'autres statistiques, on voyait que des familles, des ménages locataires qui
consacrent 50 % et plus du revenu à
leurs dépenses de logement... Dans Terrebonne, 13 % qui dépensent plus que
50 % de leur revenu pour leur logement; Salaberry-de-Valleyfield, 13 %; Saint-Jérôme, 17 %;
Saint-Eustache, 16 %, c'est beaucoup; Rimouski, 14 %, chez nous,
de familles qui consacrent 50 % de leur
revenu à leur logement; Montréal, 17 %, c'est beaucoup de monde, Montréal,
c'est 86 000 personnes, au-delà de
86 000 ménages qui consacrent 50 % de leur revenu au logement;
Longueuil, 14 %; Laval,
15 %; Châteauguay, 17 %. C'est des situations qui existent
aujourd'hui où on voit la pauvreté. Et, quand le Conseil supérieur de
l'éducation vient nous dire que le projet de loi qui est déposé consacre une
différence entre ces gens-là ou ne ramène pas... renonce au concept de
l'égalité des chances, je pense que, là, on le voit que ça touche vraiment du
monde.
Et
ce que j'expliquais aussi, c'est, quand on demeure en région... Un jeune, je ne
sais pas, moi, de Gaspé, ou de Percé,
ou de la Gaspésie en général qui veut faire un sport-études en hockey, il est
obligé de se déplacer à Rivière-du-Loup, peut-être Mont-Joli, mais c'est clair qu'il se déplace, ça fait que ça
coûte au-dessus de 3 000 $, puis il faut qu'il soit déplacé dans une autre école, c'est des frais pour les
parents, c'est énorme. C'est la même chose pour la Côte-Nord, qu'il faut qu'ils
se déplacent au Lac-Saint-Jean. Ça fait qu'il
y a aussi un impact au niveau des... Si on veut donner l'égalité des chances
non seulement par rapport au revenu mais par
rapport aux régions où tu veux vivre, bien, par ces formules-là, c'est sûr
que tu ne donnes pas l'égalité des chances.
Les
parents qui doivent faire ça parce qu'ils ont un enfant qui veut absolument
faire du sport-études, le ministre dit : Bien, ils n'ont qu'à se
virer vers des fondations. Je suis loin d'être certain que c'est un... Ce n'est
pas une façon de gérer, ce n'est pas une façon de prendre soin de nos enfants,
de dire : Toi, tu viens de la Gaspésie, tu veux faire du sport-études,
bien, contrairement à celui qui vient de la ville, bien, si tu veux en faire,
du sport-études, bien, mets-toi à vendre du
chocolat, mets-toi à faire une fondation, va quêter, va essayer de chercher de
l'argent à quelque part pour payer tes frais. Ça aussi, c'est des situations
qui existent, qui sont là. Puis les parents sont pris souvent avec ça. Ils
veulent envoyer leurs enfants dans
ces écoles-là. Un enfant qui a du talent au niveau des arts, il voudrait bien
faire ça, mais, quand tu n'as pas les moyens ou quand tu demeures dans
une région éloignée, des écoles qui donnent cette formation-là, bien, tu n'y
arrives pas.
• (15 h 30) •
Derrière ce projet de
loi, derrière cette idée-là d'égalité des chances puis derrière ce phénomène
qu'il y a là, il y a un choix de société.
Quelle sorte de société qu'on veut? Est-ce qu'on veut une société qui accepte
ça, qui accepte ce clivage entre des familles
plus pauvres — puis il
y en a, je viens de le démontrer — le clivage entre des familles qui vivent dans les régions, qui n'ont les mêmes chances d'avoir accès à des écoles ou à des
formations que les gens qui vivent en
ville? Je me dis : C'est une décision, c'est un choix de société.
C'est plus loin encore que le projet
de loi. Est-ce qu'on accepte un Québec cassé en
deux? Est-ce qu'on accepte un Québec qui va être à deux vitesses? Est-ce qu'on
accepte qu'il va y avoir des écoles à deux ou à trois vitesses? C'est ça, le
fond de la question.
Et
moi, je ne peux pas croire qu'on arrive là. Moi, je pense qu'on est capables de
faire en sorte que les jeunes qui soient dans les milieux défavorisés, qu'ils
peuvent avoir accès à la même formation que ceux qui vivent en milieu plus favorisé. Je pense que des jeunes qui vivent
en Gaspésie ou sur la Côte-Nord, dans le Bas-du-Fleuve, en Abitibi doivent avoir les mêmes services, avoir les mêmes droits, les mêmes pouvoirs de
s'émanciper que les autres qui vivent dans les villes ou ailleurs. C'est
ça, le Québec de demain. C'est un Québec
qu'on va occuper dans l'ensemble du territoire... qu'on va permettre aux jeunes d'étudier dans l'ensemble
du territoire puis qu'on va permettre à ceux qui sont peut-être
exclus par la malchance ou
autrement... mais d'avoir accès à des services ou avoir accès à de la formation
pour s'en sortir. C'est le Québec que je rêve. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, M. le député de Rimouski. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
S'il n'y a pas
d'autre intervention, je vais mettre aux voix l'amendement proposé par Mme la
députée de Saint-Laurent. Oui, Mme la députée de Verdun?
Mme
Melançon : Alors, M. le Président, je vous demanderais, s'il
vous plaît, de faire un appel par
vote nominal, en faisant la lecture, bien sûr, de l'amendement de la députée
de Saint-Laurent, s'il vous plaît.
Le Vice-Président
(M. Picard) : M. le leader du gouvernement.
M.
Schneeberger :
Alors, M. le Président, je demanderais de reporter les votes à la
prochaine période des affaires
courantes.
Votes
reportés
Le Vice-Président (M. Picard) :
Donc, le vote est reporté à demain, durant la période des affaires courantes. M. le
leader du gouvernement, pour la suite des choses.
M.
Schneeberger : Oui. Alors, pour la suite de nos travaux, je vous
demanderais d'appeler l'article 3 du feuilleton, M. le Président.
Projet de loi n° 17
Reprise du débat sur
l'adoption du principe
Le
Vice-Président (M. Picard) :
À l'article 3, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 16 mai 2019 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 17, Loi concernant le transport rémunéré des personnes
par automobile. Il restait 7 min 5 s à Mme la députée de Saint-Laurent.
Donc, si vous voulez poursuivre, la parole est à vous.
Mme Marwah Rizqy (suite)
Mme
Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Je me permets de quand même résumer mes propos
de la dernière fois pour ceux
qui se joignent à nous puis qui nous écoutent pour la première fois dans ce
dossier fort important.
Il y a
quelques semaines, mes collègues et moi sommes allés à une rencontre au sommet
avec les taxis. Il y avait
d'ailleurs ma collègue qui est ici présente, la députée d'Anjou—Louis-Riel,
ma collègue de Bourassa-Sauvé, mon collègue de Viau, mais aussi le porte-parole
en matière de transports chez nous, le député de La Pinière. Nous avons
rencontré environ 1 000 chauffeurs de taxi. Puis évidemment vous
comprendrez qu'il n'y avait aucun représentant du gouvernement qui était présent lors de cette rencontre parce que, s'il y
en avait juste eu un seul de présent, il aurait pu sentir dans cette salle l'émotion, la détresse que
nous avons vue, qui était véhiculée, la charge émotive de ces gens qui ont
vu leur vie anéantie, parce que, bien au-delà de la licence de taxi, on parle
d'êtres humains.
Ces
chauffeurs nous l'ont dit : Quand on est arrivés ici, en achetant cette
licence, on s'est acheté un droit de travailler, on s'est acheté, en quelque sorte, un emploi. L'un d'entre eux est venu
me voir et m'a dit : Mme Rizqy, regardez bien ma dentition, regardez mes dents. Il en manquait
puis il me les montrait. Il me dit : Je ne me suis jamais payé de dentiste
parce que moi, là, j'étais occupé à payer
mon hypothèque, le prêt que j'ai contracté, j'ai tout fait pour que mes deux
enfants aient une scolarité. Puis il
a réussi, hein, parce qu'un de ses enfants est rendu en médecine, M. le
Président. Mais lui, en attendant, il est arrivé bientôt à l'âge de la
retraite. Que fera-t-il? C'est quoi, lui, son bas de laine?
C'est
sincèrement, là, désolant de voir qu'il n'y a pas une seule personne du
gouvernement qui a osé se présenter pour
vraiment comprendre la situation. Certains nous ont parlé avoir des idées
suicidaires. Certains nous ont dit : Nous, là, notre vie s'arrête ici, comment que je fais pour
annoncer à mes enfants, là, qu'on va peut-être tout perdre, incluant la
maison familiale? J'aurais bien aimé avoir un début d'une réponse du
gouvernement de la CAQ, de l'un de leurs représentants,
qui ne parle pas uniquement de licences mais qui parle des êtres humains, ceux
qui sont derrière le volant. C'est
eux autres qui comptent parce que ces gens-là, M. le Président, là, ils s'occupent aussi non seulement des gens
qui font le transport, mais, vous savez, ceux qui ont du transport
adapté pour se rendre, par exemple, à un CLSC ou à un hôpital, c'est les
chauffeurs de taxi qui font ça. Ce n'est pas les chauffeurs Uber ou Lyft.
La réponse du porte-parole de la CAQ en matière
de transport a été : Bien, savez-vous quoi? On va mettre de l'argent, puis
ça suffit. Puis savez-vous qui qui va payer cet argent pour le rachat, cette
compensation? C'est tous les Québécois. Comment?
Avec la nouvelle taxe Bonnardel. La taxe, M. le Président, cette
nouvelle taxe, c'est-à-dire que pour
chaque course de taxi, non pas faite uniquement chez Uber ou Lyft, mais même
les chauffeurs de taxi dits traditionnels, c'est tous les Québécois qui la paient. Alors que nous, là, on leur a
proposé une autre solution. On a dit : Savez-vous quoi? Lorsqu'Uber, par exemple, fait des courses
de taxi, il y a un pourcentage qui va au chauffeur mais un autre pourcentage
qui va dans les coffres de cette entreprise
étrangère, une entreprise multinationale étrangère. Ce pourcentage qui va dans
les coffres de cette entreprise étrangère, M. le Président, là, il
n'aboutit pas dans les coffres de l'État québécois. Ça aboutit ailleurs dans le monde, loin de chez nous, où
est-ce qu'on n'en paie pas, d'impôt, alors que les profits étaient générés ici,
en territoire québécois.
Nous, ce
qu'on demande, M. le Président, c'est, quand ils disent qu'ils veulent plus et
faire mieux que nous autres, là, bien
je les réinvite à faire plus et faire mieux que nous autres. Bonne chance, par
contre, parce qu'en matière d'équité fiscale,
nous avons agi. Ils nous font toujours des leçons du passé, alors permettez-moi de leur
faire une vraie leçon du passé.
2014, un nouveau gouvernement a été élu, le gouvernement
libéral. Dès lors qu'il a été élu, une commission parlementaire a été enclenchée pour parler de fiscalité, la commission
Godbout. Je le connais bien, j'étais collègue avec lui à l'université. Savez-vous qu'est-ce qu'ils ont fait
dans cette commission? Ils ont donné des tâches à tout le monde pour revisiter, là, notre fiscalité québécoise. Il
était grand temps de le faire. J'ai même écrit là-dedans un rapport avec
d'autres de mes collègues. On parlait de quoi? Bien, de la fiscalité numérique.
On parlait de qui? Des Uber, des Amazon, des Netflix de ce monde, et on disait que ça prenait davantage
de mordant dans nos lois. On disait quoi aussi? Bien, on veut de
l'équité fiscale.
Alors,
savez-vous qu'est-ce que le gouvernement libéral a fait, de l'époque? Bien, il a pris les
recommandations, il ne les a pas
tablettées, il les a mises dans son budget.
C'est ça qu'il a fait. Il y a
d'autres gouvernements qui tablettent des rapports, pas celui-là. Donc, dans ce rapport-là, on disait que ça
prenait des modifications législatives. Savez-vous quoi? Pendant qu'Ottawa a
dit : On ne peut rien faire, c'est tellement difficile de courir après les
entreprises multinationales, bien,
notre collègue le ministre des Finances de l'époque, le député de Robert-Baldwin, a dit : Vous ne voulez pas, vous autres, agir à Ottawa? Nous, on va s'en occuper parce que nous sommes
autonomes en matière de fiscalité et nous avons toute la latitude pour
agir, et on va aussi donner les ressources nécessaires à Revenu Québec. Ça, ça
a été fait. Des modifications législatives ont été aussi entamées pour
s'assurer de collecter la taxe de vente.
Maintenant,
qu'est-ce qui reste à faire, c'est de collecter les impôts. Puis inquiétez-vous
pas, M. le Président, ils n'ont pas
besoin de chercher de midi à 14 heures, le libellé législatif, je l'ai
écrit. Le projet de loi n° 997, ils peuvent le retrouver, ils peuvent le reprendre, ils peuvent un petit peu le mettre à
la saveur caquiste en autant qu'ils gardent l'essentiel, mais l'important, c'est d'agir, c'est d'arrêter de
parler puis c'est surtout d'arrêter de taxer les Québécois. Il faut qu'on
s'occupe des entreprises qui n'en paient pas
d'impôt. C'est eux autres le problème. Moi, les entreprises qui ne paient pas
d'impôt, s'ils veulent faire des affaires
ici, ce ne sera pas sur le dos des entreprises québécoises, sur nos
entrepreneurs québécois, pas sur les familles québécoises.
Je vois que
la ministre de la Culture est présente, puis ça l'a fait sourire, ça a fait
même réagir. Alors, je l'invite à
répondre si elle trouve ça drôle de savoir qu'on a des entreprises québécoises
qui, elles, paient des impôts, mais qu'on a des entreprises étrangères qui n'en paient pas, d'impôt, et qu'à la
place le ministre du Transport, lui, dit aux Québécois : C'est vous qui allez payer pour ça. Pour moi, ce
n'est pas aux Québécois de payer, c'est aux entreprises comme Uber de
payer et de s'acquitter de leurs charges fiscales dans leur entièreté. Merci,
M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée, je vous demanderais à
l'avenir de faire attention. Il ne faut pas susciter de débat, des
réactions des autres parlementaires aussi. Oui, Mme la députée.
Mme
Rizqy : M. le Président, vous comprenez que, si j'ai une ministre qui
rit d'une situation précaire et importante, je vais demander qu'elle
intervienne puis qu'elle réponde puis je peux en faire une question de
règlement.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée, il reste que, si une
personne sourit, ça ne veut pas dire qu'elle sourit suite à vos propos.
Est-ce que... M. le leader du gouvernement.
• (15 h 40) •
M.
Schneeberger :
Regardez, on a laissé la députée de Saint-Laurent intervenir dans les règles.
Il y a des députés ici... je pense
que c'est normal qu'on ait des sourires ou à moins qu'ils veuillent qu'on ait,
comme on dit, la gueule de boeuf, hein? On peut faire ça aussi. Mais je
pense qu'on est sourires et puis on écoute attentivement les propos.
Le
Vice-Président (M. Picard) : ...la collaboration de tous les
parlementaires, surtout. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur... Oui, Mme la députée. Mais,
avant de vous céder la parole, je vous informe que trois débats de fin de
séance se tiendront aujourd'hui.
Le premier
débat, sur une question adressée par M. le député de Laval-des-Rapides au
ministre de l'Énergie et des Ressources
naturelles, concerne l'absence de vision du gouvernement caquiste en matière de
vente d'hydroélectricité.
Le deuxième
débat, sur une question adressée par Mme la députée de Saint-Laurent au
ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, concerne
l'improvisation du gouvernement caquiste dans le dossier des maternelles.
Et le
troisième débat, sur une question adressée par M. le député de LaFontaine à la
ministre de la Justice, concerne le
silence de la ministre sur la contradiction entre le projet de loi n° 21
et la Loi sur l'accès à l'égalité à l'emploi dans les organismes
publics.
Je cède maintenant la parole à Mme la cheffe du
deuxième groupe d'opposition.
Mme Manon Massé
Mme Massé : Merci, M. le Président.
Alors, vous savez, depuis l'avènement du néolibéralisme, dans les années 1980, le rôle de l'État a changé continuellement. La façon dont pensent les gens qui
prennent les décisions gouvernementales,
elle-même, a changé. Le recul de la classe moyenne, l'accroissement des
inégalités en sont une des preuves.
Qui paie le plus cher le prix des déréglementations — parce qu'il y en a eu plusieurs — des privatisations — parce qu'il y en a encore plusieurs — des optimisations, parce que ça existe
encore? C'est toujours les plus vulnérables, M. le Président.
Quand tu ne
possèdes pas grand-chose, quand tu as de la misère à joindre les deux bouts, tu
as tendance à défendre ce que tu as
parce que ce que tu as, c'est si peu. Cette tendance-là, elle est fondamentale
et c'est normal. Et, quand tu es en situation...
quand tu vis avec un handicap, la vie est vraiment plus difficile. La mobilité
devient un enjeu à chaque jour, à chaque heure du jour.
Dans les
dernières années, avec l'austérité, on n'a pas beaucoup pris soin des plus
vulnérables. Le gouvernement leur a
tellement enlevé qu'ils n'ont plus confiance au gouvernement. On dit
souvent : Chat échaudé craint l'eau froide. Et c'est ce que vivent les personnes qui vivent en situation de handicap
et qui s'appuient sur le transport adapté pour pouvoir se déplacer, pour aller à l'école, pour aller
travailler, pour aller aux rendez-vous médicaux, pour aller ne serait-ce que
voir un film.
Pourquoi ces personnes vivent cette insécurité,
M. le Président? C'est parce qu'encore une fois elles ont été oubliées. Et, cette fois-ci, c'est plutôt
flagrant. Le projet de loi n° 17 du ministre du Transport omet
complètement la question du transport adapté. C'est une réforme qui est
évidemment injuste pour les chauffeurs, les chauffeuses de taxi. Mes collègues vont vous en parler, vous en ont parlé à
plusieurs reprises. Mais mon propos, cet après-midi, porte et portera plus sur la question du transport adapté et sur les
personnes vivant en situation de handicap qui vont très probablement
vivre une injustice à cause de ce projet de loi là. Je vous explique.
Je tente de
comprendre ce que le ministre veut faire avec son projet de loi n° 17. Je
n'y arrive pas. Est-ce qu'en déréglementant
l'industrie du taxi, il pense que les personnes vivant en situation de handicap
vont en bénéficier? On ne peut pas laisser la main invisible régler tout
ça, M. le Président, parce que, je vous le dis tout de suite, si on fait ça, de
laisser la main invisible régler tout ça,
bien, encore une fois, ce sont les plus vulnérables qui vont recevoir une
claque en arrière de la tête. Le
projet de loi est muet sur le transport des personnes vivant en situation de
handicap. Et le ministre n'a rassuré personne avec ses propos. Les gens
se posent encore une multitude de questions.
Ce qui va
rassurer les gens vivant en situation de handicap, M. le Président, c'est des
mesures législatives. C'est du concret que les personnes ont besoin. C'est du
concret que les personnes vivant en situation de handicap... pour les rassurer, pour qu'elles puissent réellement se
dire qu'elles ne vont pas perdre leurs services. M. le Président, ils en ont
besoin pour vivre. En fait, ce n'est pas eux qui vivent avec un handicap, c'est
tout ce qu'on n'a pas développé comme
société qui les limite dans ce qu'ils vivent.
Alors, en ce moment, dans le projet de loi, c'est le flou total. Je le répète, il faut
rassurer ces gens-là. Sans nos lois,
ils seront 120 000 personnes
inquiètes à chaque jour qu'on va avancer dans le développement de ce projet de
loi là, 120 000 personnes au
Québec qui utilisent le transport adapté, 120 000 personnes qui ont besoin
que leurs législateurs se rappellent qu'ils sont des Québécois et des
Québécoises à part entière, M. le Président.
L'industrie
du taxi réalise plus de 70 % des déplacements des personnes admises au
transport adapté sur l'ensemble du
Québec. 70 %. Il y a très peu de sociétés de transport maintenant qui ont
les outils nécessaires, qui ont le financement nécessaire aussi, pour pouvoir
assumer un financement public des déplacements des personnes vivant en
situation de handicap. Donc, 70 % de leurs déplacements se font par
taxi, ce qui n'est pas rien. Alors, quand le ministre s'attaque à la loi sur le taxi, au transport des personnes,
70 % des déplacements des personnes vivant en situation de handicap, ces
gens-là ont des craintes, ils ont peur. Ça,
c'est près de 6 millions de déplacements par année. C'est normal, ces
gens-là travaillent, vont à des rendez-vous médicaux, vont manger avec
leurs parents un week-end. Ces gens-là ont une vie et ils ont besoin que le projet de loi qui est sur la table leur assure
que, dans le fond, leurs 6 millions de déplacements par année,
bien, on ne va pas les abandonner là-dessus.
Et d'ailleurs
on ne va pas laisser aller... Je recommence. On ne peut pas laisser ça, comme
disait ma mère, au plus fort la
poche, donc à ceux qui, comme Uber, ont beaucoup de moyens, mais n'ont pas les
responsabilités qui viennent avec,
parce qu'on le sait, avec la déréglementation, c'est exactement ce qui est en
train de se passer présentement avec ce projet de loi là, moins de chauffeurs de taxi vont être intéressés à
assurer le service de transport adapté, ça demande de... En fait, je veux juste être sûre d'être bien
comprise, là, c'est moins de chauffeurs et non pas moins de chauffeurs de taxi
parce que les chauffeurs de taxi répondent
aux exigences du transport adapté présentement. Il y a de la formation qui est
nécessaire, de l'adaptation de véhicules, etc. Ce n'est pas simple, ça, là, là.
Il faut y arriver.
Alors, le
ministre répète toujours qu'il a à coeur le sort des usagers. Il répète sans
cesse qu'il a écrit sa réforme en pensant aux consommateurs. D'ac. Mais
qu'en est-il des usagers les plus vulnérables? Ils ne sont pas que des consommateurs. Ils sont de nos concitoyens,
desquels nous devons assurer que les lois ne viennent pas les pénaliser. Alors,
qu'en est-il de ces usagers et usagères du
transport adapté? Est-ce que le ministre fait confiance à Uber pour prendre
soin des personnes vivant en situation de handicap, des personnes
extrêmement vulnérables?
Moi, je veux que le gouvernement se tienne la
colonne vertébrale bien drette face à cette multinationale qui fait ce qu'elle veut à travers la planète et je
veux qu'on ait des modèles d'affaires... je ne veux pas, pardon, qu'on ait des
modèles d'affaires basés sur l'exploitation. Il faut maintenir un système de
gestion de l'offre dans l'industrie du taxi. C'est
ça qui a permis d'offrir un revenu décent aux chauffeurs et aux chauffeuses.
C'est pareil partout. C'est pareil en agriculture, etc. Il faut
maintenir une gestion de l'offre du taxi pour nous assurer que ces gens-là
puissent vivre dans la dignité. L'idée, là,
ce n'est pas juste de s'assurer que tous les salaires vont diminuer. Les gens
de chez Uber, ce n'est pas pour rien
qu'ils commencent à sonner l'alarme puis dire : Nos conditions, là, ne
sont pas faciles, nos conditions ne sont
vraiment pas faciles. C'est sûr, il y a une multinationale, là, qui tire les
ficelles, alors que les gens sur le terrain, eux autres, se retrouvent
dans des situations malaisées et parfois malaisantes.
• (15 h 50) •
Pour
reprendre les mots de ma collègue de Mercier, dont je salue la fougue et la détermination dans
ce dossier-là, elle disait : «On
ne fait pas d'argent avec le transport adapté. La crainte, c'est que ce ne soit
pas assez rentable et qu'on n'offre
plus [le] service aux personnes les plus vulnérables [de notre société].»
Ça, c'est une responsabilité collective. Et là-dessus elle a complètement
raison.
Il ne faut jamais oublier que le transport
adapté, c'est plus qu'un simple lift qu'on donne à quelqu'un entre deux places. C'est un service d'accompagnement. Il
s'établit une relation, une relation d'aide, M. le Président, avec le
chauffeur ou la chauffeuse. Maintenant, est-ce que l'abolition des territoires
d'agglomération auxquels les chauffeurs et
chauffeuses sont soumis pourrait permettre aux villes et aux municipalités d'améliorer les services dans la région? Sur ce point, je suis
prête à discuter. Il faudrait être à l'écoute. Il faudrait être à l'écoute du
milieu aussi et il faudrait être aussi à l'écoute des gens qui utilisent
les services de transport adapté. Il faut protéger les consommateurs, certes,
mais spécialement les plus vulnérables
contre les fluctuations de tarifs lorsque la demande croît. C'est ça, un
service public. Et je réitère, je réitère, et ça, le ministre doit
l'entendre, le transport adapté devrait être un transport public. Mais malheureusement ou heureusement — malheureusement, ce n'est pas d'adon — mais ce transport-là, à 70 %, est
offert par les chauffeurs et les chauffeuses de taxi.
Alors donc,
c'est une responsabilité qu'on a. Et, inévitablement, dans des propositions
comme celle d'Uber, on le voit
partout à travers la planète, quand il y a une forte demande, c'est de valeur,
là, mais tu n'as pas le choix. Souvent, quand tu es une personne vivant en situation de
handicap, tu n'as pas le choix de prendre le transport adapté. Tu ne peux pas
prendre ton vélo. Tu ne peux pas prendre, dans bien des endroits, des autobus.
Tu n'as pas le choix, ça te prend un transport
adapté. Alors donc, inévitablement, ces gens-là ont besoin qu'on les rassure
que le projet de loi qui est sur la table développe des filets de
sécurité pour ces gens-là.
Autre question
importante, toute la question de la formation, M. le Président, la formation
des chauffeurs, chauffeuses de taxi. Ceux et
celles qui utilisent le transport adapté ont besoin qu'ils soient formés, les
gens qui les conduisent. Mais il n'y
a rien dans le projet de loi sur la question de la formation particulière des
chauffeurs et chauffeuses. Bien sûr, Uber,
il veut qu'il y ait le moins de cadres possible. Mais ces gens-là sont en
droit. Lorsque tu as l'ataxie de Friedreich, tu as besoin que la personne qui va te conduire d'un point a à un point
b se sente à l'aise, qu'elle n'ait pas de difficulté à se mettre à ton
écoute puisque tu as des défis d'élocution. Et ça, bien, ça s'appelle la
formation.
On
a le droit de se demander si on ne retourne pas, dans le fond, un peu au far
west, où les inquiétudes du milieu sont tout à fait compréhensibles. On
ne peut pas laisser le transport adapté à n'importe qui, n'importe quand, c'est
un service public, alors parce que le
transport adapté, au fond, c'est quoi? C'est une mesure indispensable pour
soutenir la participation sociale des personnes vivant en situation de
handicap. Ce type de transport sert à l'accès au marché du travail, à l'éducation, M. le Président, à l'accès
au système de santé ou toute autre activité. Il faut maintenir ce mode de
transport et il faut l'améliorer — ça fait tellement longtemps qu'on le
dit — pour
qu'il soit accessible partout au Québec. Mais le projet de loi n° 17 n'en parle pas. Il omet la question.
Pourtant c'est une question fondamentale quand on a à coeur les services
publics.
Maintenant,
je veux aborder le projet de loi de façon plus générale dans les minutes qui me
restent. Le géant Uber doit être mort
de rire, M. le Président, mort de rire en voyant que l'industrie du taxi,
industrie à qui on a nous-mêmes, collectivement, donné des cadres, des
règles, des lois, un cadre légal, que cette même industrie-là doit se compenser
elle-même parce qu'Uber débarque en ville,
parce que ce n'est même pas seulement Uber qui va payer les compensations,
parce que, pour nous, ça devrait être Uber qui compense les chauffeurs de taxi.
C'est lui qui veut changer les règles. C'est une multinationale. «Come on.» Il change les règles, il veut qu'on
change les règles, il veut que le gouvernement change les règles pour lui, bien il me semble que c'est
lui qui devrait financer, lui étant la symbolique de cette multinationale-là.
Ces multinationales
profitent de la concurrence déloyale depuis trop longtemps, et ce, avec l'aide
de l'ancien gouvernement libéral et
maintenant avec le gouvernement caquiste. Pendant ce temps-là, les taxis, eux
autres, subissent des impacts. C'est
au tour d'Uber de faire sa juste part, M. le Président. Les chauffeurs et
chauffeuses de taxi ont déjà donné et
ont donné en masse. Ça prend une étude d'impact précise ainsi qu'une évaluation
indépendante de la valeur des permis
de taxi. Le ministre nous dit et il n'arrête pas de se vanter de compenser
correctement, mais avec des chiffres qui ne concordent pas du tout avec
ceux de l'industrie du taxi.
Au
lieu de persister dans son entreprise d'élimination de l'industrie du taxi au
profit de la multinationale Uber, le
ministre du Transport devrait plutôt faire preuve d'écoute. Les chauffeurs et
chauffeuses de taxi ne demandent pas que l'on fasse payer les contribuables
québécois pour les dégâts causés par Uber. Ils demandent seulement d'assurer
leur avenir, de pouvoir cohabiter sur
des bases équitables avec les Uber de ce monde et ils demandent aussi que
justement les Uber de ce monde respectent les règles du jeu, ce qu'ils ne
font pas depuis des années.
Pour
cela, ça prend une évaluation, une évaluation rigoureuse, transparente des
impacts du projet de loi n° 17. Il faut sortir de la logique du plus fort et adopter une approche humaine
pour une sortie de crise satisfaisante pour tout le monde, parce que, pour côtoyer plusieurs
chauffeurs de taxi et une chauffeuse, c'est une réelle crise, M. le Président.
C'est une réelle crise. Ces gens-là,
pour plusieurs, avaient dans leur pays des formations, ils ont travaillé
parfois pour l'État, ils ont été
enseignants, ils ont été ingénieurs, puis, parce qu'on n'est pas capables de
les intégrer, se sont trouvé une autre façon
de le faire, notamment en respectant les règles puis en achetant des permis de
taxi. Et aujourd'hui on leur dit : Désolés, on sort puis on change
les règles. Bien, ça crée une crise, ça. Ça crée une crise.
Puis
je pense, là, à mon vieux chum chauffeur de taxi dans Hochelaga-Maisonneuve
qui, lui, a acheté ça, je pense que
ça fait 30 ans, puis pas riche, c'est clair, pas scolarisé non plus, mais
convaincu que, parce qu'il a fait un bon placement voilà une couple d'années, bien il va pouvoir
avoir une retraite digne de ce nom, parce que chauffeur de taxi, là, ça n'a
pas de fonds de retraite, ça, là, là. Bien,
lui, là, sa famille, on leur dit : Ah! on va donner une compensation. Tu
l'as payé tant, voilà tant. M. le
Président, ça ne tient pas la route. Uber, il n'en a pas de problèmes de
retraite. Le P.D.G. d'Uber, là, combien de millions déjà qu'il gagne?
Pas de problèmes de retraite, lui.
Alors, je le répète
et je ne le dirai jamais assez, ce n'est pas une économie de partage. On parle
d'Uber, une multinationale milliardaire, protégée par les paradis fiscaux, qui
a profité pendant des années du laisser-faire libéral pour imposer ses méthodes déloyales puis prendre le contrôle du marché.
Il n'y a aucune, aucune raison pour qu'on se mette à plat ventre pour une multinationale qui, en plus de créer une
nouvelle classe de cheap labor, n'engendre aucune retombée économique là
où elle s'installe, puisqu'Uber c'est ailleurs. Le chauffeur de taxi du coin de
la rue, M. le Président, là, c'est ici qu'il
les investit, ses dépenses quotidiennes, les dépenses de ses enfants, de sa
famille. Uber, c'est ailleurs, d'ailleurs dans un ailleurs où le
management fiscal profite généralement aux multinationales.
Alors,
M. le Président, je terminerais là-dessus, je veux vraiment, vraiment, vraiment
dire aux chauffeurs et aux chauffeuses
de taxi : Ne lâchez pas. Et je dis au ministre, yeux dans les yeux, il est
assis en face de moi : Ne laissez pas tomber, M. le ministre, les personnes vivant en situation de handicap.
Le transport adapté, c'est essentiel pour ces personnes-là, et c'est
important qu'on les protège. Merci, M. le Président.
• (16 heures) •
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais
maintenant Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Jennifer Maccarone
Mme
Maccarone : Merci, M. le Président. À mon tour d'intervenir sur le
projet de loi n° 17, Loi concernant le transport rémunéré de
personnes par automobile, une loi où la compensation proposée est inéquitable
avec la valeur réelle des permis de taxi. Le
projet de loi n° 17 propose de la modernisation. Et je suis
d'accord que nous désirons améliorer le
système de transport de personnes rémunéré, mais je crois qu'une trop grande
déréglementation pourrait aussi être négative.
Le projet de
loi prévoit l'abolition du système actuel de permis de taxi, et ce, sans offrir
de formule de rachat du permis de
taxi. Notre suggestion a été d'utiliser le processus d'expropriation qui existe
déjà au gouvernement du Québec afin de déterminer le montant final à
octroyer aux chauffeurs propriétaires. Le gouvernement, lui, choisit d'établir
un montant maximal à dépenser de
250 millions de dollars, en plus d'introduire une redevance de 0,90 $
par course afin de rembourser les
pertes des chauffeurs. Comme l'a dit mon collègue le député de La Pinière,
cette méthode est inéquitable car
elle détermine le niveau de compensation, de manière arbitraire, à la valeur
d'achat du permis et non pas à sa valeur marchande. Ainsi, elle avantage grandement les chauffeurs propriétaires
qui ont acquis leur permis dans les dernières années à gros prix.
Le projet de
loi n° 17 ne dit pas grand-chose sur ce que sera
l'industrie du transport de personnes rémunéré. C'est un projet de loi qui est un projet de loi de
déréglementation. Partout, on fait des déréglementations massives. On a fini
par revenir avec un minimum de réglementation. La déréglementation,
M. le Président, absolue n'est pas un principe économique viable. Il est viable pour les peu nombreux qui y trouvent
leur compte. Mais il y a trop de gens qui sont lésés d'une manière ou d'une autre, et ce, ce n'est pas
quelque chose qui est acceptable. La déréglementation établie dans ce projet de loi aura des lourdes conséquences
humaines et financières de manière irréparable. La ville de New York fait
actuellement marche arrière pour avoir
déréglementé l'industrie du taxi. J'ai de la misère à comprendre pourquoi nous
prenons un pas vers l'arrière au lieu d'avancer.
Dans mon comté de Westmount—Saint-Louis,
j'ai l'honneur de représenter le centre-ville de Montréal. L'industrie du taxi, dans mon comté, est non
seulement nécessaire, elle est incontournable. Moi-même, j'utilise régulièrement des taxis pour me déplacer aux
réunions car je ne peux pas marcher. Alors, j'ai eu l'occasion de parler aux
chauffeurs propriétaires et aussi aux
utilisateurs de taxis, ainsi que des Uber. Voici quelques inquiétudes que ces
personnes ont partagées avec moi par
rapport au projet de loi n° 17 : numéro un, aucune exigence envers les
conditions de travail des chauffeurs,
aucune protection des clients en ce qui concerne la sécurité et fiabilité des
voitures, aucune exigence à propos du transport adapté destiné aux
personnes à mobilité réduite, aucune exigence réelle de formation pour les chauffeurs, aucune exigence en matière de code
d'éthique ou de discipline, aucune exigence envers les véhicules permis
pour exécuter le transport de personnes.
Ce sont des
préoccupations sérieuses et valables, auxquelles le ministre doit répondre dans
son projet de loi. Ce sont des préoccupations qui concernent non seulement les
chauffeurs et les propriétaires, mais également les utilisateurs, les
citoyens et les électeurs, que le ministre représente également.
Mais ça n'arrête pas ici. C'est quoi, les autres
enjeux par rapport au transport de taxi et ce projet de loi? Les consommateurs préfèrent utiliser une application
mobile pour commander leur transport, notamment en raison de la facilité
d'accès à ces technologies et aussi car le cours des courses est connu à
l'avance.
Je peux vous
dire une expérience personnelle. Très récemment, ça fait cinq semaines, mon fils Samuel a pris le
mauvais autobus pour se rendre à l'école. Il
prend le transport municipal. J'étais en retard pour mon caucus cette
journée-là parce qu'il m'a appelée en
mode panique pour dire : Maman, j'ai pris l'autobus, mais on prend un
pont. Je ne reconnais pas où je suis.
Alors, je lui ai dit de débarquer tout de suite, et c'est la première fois où
j'ai téléchargé l'application de Uber
parce que, pour moi, c'était beaucoup plus sécuritaire, étant donné que mes
enfants ont quand même des difficultés intellectuelles
et autres. C'était facile pour moi de payer, je savais quelle voiture, j'ai pu
le diriger, j'ai pu le rassurer pour dire
c'était une voiture blanche, c'était une Toyota Corolla, puis ça serait à telle
heure que ça va arriver, voici le nom du monsieur, puis c'est tout payé, puis je savais même le chemin qu'il
était pour prendre pour amener mon garçon à l'école.
Alors, je
raconte cette histoire-là parce que j'aurais aimé aussi comme consommateur,
surtout québécoise, avoir le choix d'une entreprise québécoise. Ça m'aurait plu
de le faire. J'aurais aimé supporter les gens d'ici et je comprends que les chauffeurs, eux, collaborent d'une bonne foi
pour moderniser leur industrie. Mais maintenant qu'ils font face à encore
plus d'obstacles qui vont sûrement emmener
des retards... et des consommateurs comme moi qui auraient choisi local
et québécois, il faut attendre.
Alors, encore
plus longtemps avant d'avoir une vraie concurrence de choix, parce que le
projet de loi n° 17 ne va pas
aider l'industrie du taxi à se moderniser. On ne prévoit pas une façon d'aider
les chauffeurs de taxi actuels pour faire ce qu'ils font aujourd'hui, Uber, pour aider des personnes comme moi,
comme mon fils dans des cas urgents, quand on veut s'assurer une
sécurité, pour les parents, par exemple, pour aider nos enfants.
Et, en
parlant des personnes handicapées ou à mobilité réduite qui ne sont pas prises
en compte de ce projet de loi, M. le
Président, j'aimerais parler un peu de ceci. En effet, dans les 76 pages
du projet de loi n° 17, le mot «adapté» est absent et le terme «accessibilité» n'est présent
que dans deux des 235 articles. Quant à l'analyse d'impact réglementaire
préliminaire, document également produit par
le ministère des Transports, c'est le terme «accessibilité» qui est absent,
tandis que celui de «transport adapté» n'est
mentionné que dans la narration de l'évolution passée de l'entreprise de taxi,
non comme une préoccupation pour la suite.
Le projet de loi n° 17
vise à offrir des services efficaces et modernes, mais oublie pourtant de tenir
compte de l'ensemble des usagers, y compris
les personnes ayant des limitations. Rappelons que le transport adapté est une
mesure adaptative essentielle et
indispensable pour soutenir la participation sociale des personnes handicapées
qui y sont admises. Sous la
responsabilité des municipalités et des organismes de transport adapté, ce type
de transport permet notamment l'accès au marché du travail, à l'éducation, aux
activités de la communauté pour de nombreuses personnes handicapées. M. le Président, je vous rappelle l'importance du
maintien de l'amélioration continue des services de transport adapté partout au Québec. Pour une personne ayant des
limitations fonctionnelles, l'utilisation de taxis est ainsi une nécessité
qui demande une planification anticipée,
généralement la veille, souvent avant le midi, le jour précédant la course
demandée.
• (16 h 10) •
I
have a large riding, it's a very interesting riding, it's a very diverse
riding. We have many poor sectors and we certainly have areas because people in general
don't have cars and we do have individuals that require the use of adapted
taxis or those kinds of supports. I see, on
a regular basis, people that require the support, people that require this
help. And only as recently, as last
week, when we had our week in the riding, there was a woman that I saw getting
out of a taxi. She had a walker, and
she had bags, and as she got out, before she even had a chance to get out, the
taxi driver got out, the taxi driver
helped her up, the taxi driver opened up her walker, made sure that she was
safe and secure on the sidewalk.
She waited for him. He
helped her up the stairs. He went and got her groceries and her bags. He opened
the door for her and he placed them inside.
This
is something that needs to continue. This is an essential service. And I could
not imagine this woman having the flexibility, the liberty, the dignity that she has right now, the
independence to be able to live her life and do what she needs to do, if
she didn't have access to this kind of service. And that's the training that
these people received. It is particular, and it's useful, and it's necessary.
And I don't imagine us being able to move forward with a bill of this magnitude, that will have a direct impact on her
life. I worry about this. I worry about her and I don't know her. It's
door-to-door service, «porte-à-porte». There's nothing to replace this.
70 %
des courses pour le transport adapté au Québec sont assumées par des taxis, et
aucune mesure n'est apportée dans le projet de loi pour favoriser la desserte
de transport adapté. Dans la région de Montréal, comme dans mon comté de
Westmount—Saint-Louis, 80 % des services de transport
adapté sont assumés par des chauffeurs de taxi. Le projet de loi n° 17, M. le Président, propose
l'introduction d'un régime unique pour l'ensemble des services de mobilité
ainsi que la mise en place de mesures visant la fin des permis de propriétaire
de taxi, dont les permis pour besoins particuliers, les permis restreints. La mise en place des permis
restreints vise à répondre à un besoin particulier de la population comme
le transport des personnes handicapées. Le titulaire d'un permis restreint
devrait exploiter son service avec un véhicule accessible aux fauteuils roulants motorisés et ne desservir uniquement
que les personnes handicapées, les personnes à mobilité réduite ayant des
besoins d'assistance ainsi que leur accompagnateur. L'abolition des permis,
dont ceux pour besoins
particuliers... Les chauffeurs pourront utiliser leur véhicule accessible pour
le transport rémunéré de personnes par
automobile sans être restreints à une clientèle spécifique. Une absence
d'obligation en la matière résultera sûrement en une réduction de
service.
Par contre,
M. le Président, le projet de loi n° 17 évoque la formation
des chauffeurs, mais sans énoncer précisément en quoi elle consistera. L'article 9 se lit : «...complété une
formation sur les matières et selon les modalités prévues par règlement du ministre.» Dans le cadre des
transports publics et privés de personnes ayant des limitations fonctionnelles,
l'ensemble des chauffeurs doit être formé aux différentes limitations, aux
besoins particuliers qui peuvent en découler et en outils utilisés pour pallier le handicap, comme je décrivais tantôt.
Selon la Confédération des organismes de personnes handicapées du
Québec, actuellement, la formation de sept heures obligatoire pour obtenir un
permis de classe 4C est insuffisante pour
envisager une autre grande variété de situations telles que limitations
motrices, organiques, neurologiques, intellectuelles,
visuelles, troubles d'apprentissage, de langage, du spectre de l'autisme, etc.
Pourquoi ne pas bonifier cette formation
de base puisque toute personne qui conduit une automobile dans le cadre du
transport rémunéré de personnes doit
être apte à intégrer, avec discrétion, respect, dignité et patience... pour
assurer le bien-être des usagers, notamment ceux qui ont des limitations
fonctionnelles?
En plus
d'approfondir les connaissances quant aux besoins particuliers, cette formation
devrait tenir compte des aspects techniques et humains des interactions.
Des personnes ayant des troubles du comportement se sont vu refuser l'admission au transport adapté en raison de
l'inaptitude du chauffeur à intervenir dans une telle situation. La principale
utilisatrice du transport adapté étant la
clientèle ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de
l'autisme, il importe de mieux former
les chauffeurs du transport adapté. Mieux outillés, ils seront également plus
enclins à maintenir leur engagement
et à contribuer à la pérennité du transport adapté. De fait, pour des personnes
qui peuvent être les plus vulnérables à certaines situations, par
exemple celles qui ont une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre
de l'autisme, des difficultés de
communication ou de troubles de comportement, il est plus sécurisant de se
faire transporter par des chauffeurs
qui les connaissent. Malheureusement, on sait, puis même un cas, c'est trop, M.
le Président, il y a des chauffeurs
mal intentionnés, abusent de la vulnérabilité des personnes ayant des
limitations. Il importe donc d'établir des moyens efficaces, divers pour
prévenir d'éventuels abus par la formation.
J'ai parlé de
mon fils, je vais parler de ma fille qui est également sur le spectre
d'autisme. Je peux vous dire que je ne
me sens pas en sécurité de savoir... parce qu'ils sont totalement différents.
Elle a beaucoup de difficulté de compréhension expressive. C'est une enfant qui se fait abuser d'elle-même parce
qu'elle comprend mal des situations. Je ne peux pas imaginer de la mettre dans un taxi puis de sentir
en sécurité sans avoir cette formation pour les chauffeurs, une formation
de sensibilité pour ces personnes-là, une façon pour moi de faire comme j'ai
fait autrement avec mon fils, de savoir ce serait quoi, le chemin, de payer
d'avance, de savoir qu'il y aura une mesure de sécurité pour elle aussitôt
qu'elle va embarquer dans un type de
transport tel que les taxis.
Je n'ai pas
d'espoir qu'elle va conduire, alors je présume, pour elle, que ce serait une
des mesures de transport pour elle
pour se rendre que ce soit au travail, aux activités... j'aimerais sentir en
sécurité, savoir que ces personnes-là ont
eu une formation de comprendre puis qu'il y a des examens, qu'il y a des
mesures disciplinaires, de savoir qu'on peut protéger ces personnes qui sont vraiment vulnérables. Je sais que je ne
suis pas seule, je parle au nom de plusieurs personnes qui
ont la même inquiétude. Alors, ce serait un élément que je pense qu'il faut
vraiment prendre en conséquence et sérieux, et on devrait prendre du recul pour en discuter plus profondément au nom
de ces personnes vulnérables. L'implication des personnes ayant des limitations est importante pour assurer une
formation pertinente et de qualité et elle pourrait inclure des mises en
situation pour faciliter la compréhension des différentes réalités.
I said it once before in this room,
it's different not less. These are people that require our support, our
attention, and I know
that, in their name and in their families' names, they would be grateful. It is
not just something that would be nice
to do, it's necessary and it's time. And while we have an opportunity to
address it and to support them today, I find it very difficult to know that we're not moving forward, and we're
not mobilizing for them, and we're not meeting their needs or addressing
their concerns, when we have a perfect opportunity to do so.
De plus, changement de propos, M. le Président, l'implantation de
tarifications variables amène un certain sentiment d'incertitude
concernant les coûts futurs des courses, notamment lors des fortes périodes de
pointe. Ça, c'est un autre élément que les
chauffeurs ont amené pendant qu'on... je me promène partout à mon comté de
Westmount—Saint-Louis
en taxi, parce qu'il n'y a vraiment pas de
stationnement, M. le Président, puis je peux marcher, mais je ne peux pas
marcher vraiment partout, mais c'est
quand même une autre inquiétude. Comment que ça va être géré? Ce n'est pas
adressé. Alors, c'est un autre élément manquant dans le projet de loi
n° 17.
Alors,
en résumé et en terminant, M. le Président, tel qu'il est bien décrit dans
le mémoire du regroupement des taxis
du Grand Montréal, ce projet de loi permettra à n'importe qui de transporter
les clients avec n'importe quel véhicule contre rémunération sans établir les exigences minimales à propos de la
sécurité des clients, de la congestion routière, de l'environnement, de la pérennité du service ou des
conditions de travail des chauffeurs. On met les personnes les plus vulnérables
à risque, qui ont absolument besoin de ce transport. Pour ces raisons, M. le
Président, je vais voter contre le projet de loi n° 17. Merci.
• (16 h 20) •
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais
maintenant M. le député de Rosemont.
M. Vincent Marissal
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de commenter le projet de loi
n° 17, projet de loi n° 17 qui
était probablement parti d'une bonne intention, mais qui s'est perdu en chemin,
c'est-à-dire que le projet de loi n° 17 voulait faire ce qu'on voulait
faire depuis longtemps au Québec, c'est-à-dire moderniser l'industrie du taxi,
une industrie, il est vrai, qui avait
bien besoin d'un certain coup de fraîcheur. Les chauffeurs et les chauffeuses,
moins nombreuses, seront probablement les premiers et les premières à le
dire.
Mais,
dans les faits, le projet de loi n° 17, ce qu'il fait, c'est qu'il va
trucider l'industrie du taxi telle qu'on la connaît, sans ménagement. Le gouvernement, en quelque
sorte, se rend complice d'Uber, Uber
qui est le «bully» ici, qui débarque dans
le marché, qui ne respecte pas les lois, qui change les règles du jeu. Dans mon
ancien métier, ce que le gouvernement de la
CAQ fait envers Uber, il y a une expression pour ça : le gouvernement de la CAQ a acheté le «spin» d'Uber. Les plus méchants diraient même
que le gouvernement de la CAQ a bu le Kool-Aid d'Uber. Ce n'est pas
bon signe; Uber qui affirme faire dans l'économie de partage.
Si
ce n'était pas si triste pour les gens qui vont perdre leur job, peut-être
même leur famille — on a vu des gestes terribles en
direct à la télévision de gens qui sont acculés à la faillite, qui sont désespérés — si ce
n'était pas de ces gens-là, ça me ferait
presque rire que d'entendre des gens dire qu'Uber, c'est du partage. Voyons!
Retournons s'il vous plaît, tout le
monde, quelques minutes, à nos dictionnaires. Dans le mot partage, là — le mot partage, c'est un beau mot,
c'est un beau mot — il
y a quelque chose de généreux, il y a quelque chose d'ouvert, il y a quelque
chose d'humain, il y a surtout, M. le
Président, quelque chose de désintéressé. C'est ça, le partage. Il y a quelque
chose de respectueux, mais il y a quelque chose de désintéressé. C'est
tout le contraire, Uber : ils sont parfaitement intéressés par ce qu'ils viennent faire ici. Et ensuite ils le font selon
leurs propres règles du jeu. Le partage, M. le Président, ce n'est pas
d'envahir un marché au mépris des
lois, à commencer par les lois fiscales, au mépris des acteurs en place, pour
s'imposer et étouffer toute forme de concurrence, selon le bon vieux
principe de prédation économique, à la vie à la mort, direct sur la jugulaire, puis tant que l'adversaire ou le
concurrent va gigoter, on ne le lâchera pas. C'est ça qu'Uber fait. Il débarque
dans le marché, étouffe les concurrents sans respect, même primaire, pour les
lois fiscales du Québec.
Le
partage, pour parler spécifiquement d'Uber, M. le Président, ce n'est pas
d'attendre des événements fortuits, des
événements sur lesquels on n'a pas de contrôle, pour hausser les tarifs jusqu'à
la limite de l'arnaque. C'est ça qu'Uber fait constamment. Une panne
majeure du métro à Montréal? Quelle aubaine! Uber en profite automatiquement
pour jacker ses prix, je dirais même de
façon qui s'approche de l'arnaque. Les pluies diluviennes, ça va arriver, l'été
va revenir, ne désespérons pas :
on jacke les prix. Il y a affluence au supermarché, les personnes âgées ont des
sacs à porter : quelle aubaine!
On jacke les prix. Même le jour de l'An, M. le Président, est une occasion pour
Uber. S'il y a bien une journée dans l'année où on devrait justement partager
et pratiquer le partage, c'est bien le 31 décembre au soir. Bien non! Uber
jacke les prix, il en profite. Vous savez, M. le Président, comme moi, qu'à
chaque fois qu'il y a une panne dans le métro de Montréal, les prix d'Uber grimpent systématiquement,
systématiquement. Et on en profite avec des gens qui doivent se rendre à des rendez-vous médicaux, ou qui sont
en retard à leurs cours, ou qui doivent aller rendre visite à quelqu'un puis qui sont à pied, qui n'ont pas de vélo, qui
ne sont pas capables de se déplacer rapidement et qui vont parfois à des
distances assez grandes. Uber passe tout
d'un coup ses prix d'une course moyenne de 14 $ à 42 $. C'est des
faits vécus, c'est documenté. Ce n'est pas de la fiction, ça existe.
Ce n'est pas
du partage, ça, M. le Président, c'est du parasitage, au mettre titre que,
d'ailleurs, les autres géants du Web
et de la soi-disant nouvelle économie qui se donne des airs, des grands airs de
modernité, mais qui, dans le fond, je l'ai dit, ne font que pousser
encore un peu plus loin le bon vieux concept de prédation économique.
Je
cherchais une image pour illustrer Uber et autres créatures de cette économie
nouvelle. Il y a une image qui m'est
revenue. Elle n'est pas sympathique. Si vous avez suivi un peu l'actualité
cette dernière décennie, ça va vous dire quelque chose, surtout si vous n'êtes pas trop loin d'un lac. Uber et
les géants de la nouvelle économie, ce sont les moules zébrées de
l'économie. Ce sont des moules zébrées. Je regarde mon collègue d'Orford, il
sait de quoi je parle avec le lac
Memphrémagog, la baie Missisquoi pas très loin. Uber, c'est une moule zébrée.
La moule zébrée est entrée ici en douce. Au début, tout le monde la pensait inoffensive. En fait, on ne la voyait
même pas parce qu'elle était sous la coque des bateaux. Tout d'un coup, on se rend compte que la bibitte, on s'en rend
compte trop tard, n'est pas inoffensive, elle n'est pas du tout inoffensive, que derrière son aspect
peu menaçant, elle étouffe et elle était effectivement en train d'étouffer
l'écosystème d'adoption. C'est exactement ce
que Uber est en train de faire ici et ailleurs : rentrer en douce, se la
jouer cool, se la jouer «cute», se la
jouer nouvelle économie puis utiliser les bons vieux trucs les plus connus du
grand livre pour étouffer la concurrence.
Le pire, M.
le Président, c'est que c'est nous qui allons payer. C'est nous qui allons
payer pour permettre à notre moule
zébrée, là, à Uber, de s'implanter durablement ici et de tuer comme il faut
l'industrie du taxi telle qu'on la connaît. 770 millions pour le rachat des permis. Qui va payer ça? Les fonds
publics évidemment. Le reste, bien, c'est les usagers d'Uber. Parlez-moi de partage. Je n'ai pas compris
la définition de partage. Je n'ai vraiment pas compris, mais je pense
que je ne suis vraiment pas tout seul.
En plus, c'est
le pire des deux mondes parce que le rachat des permis à 770 millions, ce
n'est pas suffisant pour contrer les
pertes de ces permis de taxi, de ces propriétaires de permis de taxi qui
perdent ainsi leur gagne-pain et qui font face à des problèmes financiers
extrêmement graves.
En plus,
toujours pour rester dans le domaine du partage, Uber ne paie pas d'impôt.
C'est sûr, ils ne font pas de profits,
alors ils ne paient pas d'impôt. Ils s'en foutent, de toute façon, des
juridictions fiscales nationales, ils font partout pareil. En fait, Uber ne paie rien, comme ma moule
zébrée de tantôt qui est entrée, là, pour la première fois en dessous de
la coque d'un bateau, puis qui a proliféré,
puis qu'on a considérée comme inoffensive jusqu'au jour où on se rende compte
qu'elle est en train de tuer nos lacs. C'est exactement ce qu'Uber est en train
de faire.
Je vous
rappelle qu'Uber, l'an dernier, Uber n'a pas fait d'argent, mais ils ont les
poches profondes puis ils sont patients.
Uber, l'an dernier, a déclaré des pertes de 4 milliards de dollars...
2017, pardon. Lyft, le petit concurrent, presque 1 milliard, 910 millions de pertes en 2017. Ça, ça ne veut pas
dire que ça ne sera pas profitable, Uber et Lyft. Ça ne veut pas dire
que ce n'est pas un bon modèle d'affaires pour faire de l'argent. Ça veut juste
dire qu'ils sont très, très, très patients
et qu'ils savent qu'avec la complicité de certaines juridictions, de certains
gouvernements, comme malheureusement le nôtre, ils vont pouvoir
tranquillement s'implanter ici et, un jour, ils récupéreront sur leurs pertes.
Que le
gouvernement, M. le Président, de la CAQ laisse proliférer Uber au nom du
service aux usagers, c'est navrant et c'est
aussi un manque de sensibilité frappant, saisissant envers les artisans d'une
industrie qui ont assisté impuissants à l'arrivée du nouveau joueur qui a bouleversé les règles du jeu à son
profit avec, je le répète, la complicité du gouvernement.
Alors,
évidemment, le cas Uber soulève d'autres questions puisqu'il y a d'autres moules
zébrées. Il y a d'autres parasites de
la nouvelle économie qui rôdent et certains sont même déjà en train d'ubériser
l'économie à leur façon. Je pense évidemment à Airbnb, un autre cas
galopant de parasitage.
Il y a eu des mesures annoncées la semaine
dernière, notamment sur Airbnb. On les salue, quoiqu'elles sont certainement incomplètes, et on encourage le
gouvernement à ouvrir très grand les yeux, d'aller voir en dessous de la coque
du bateau le nombre de moules zébrées qui vont entrer dans nos marchés, dans
nos économies selon leurs propres règles pour foutre le bordel et
s'approprier des marchés en irrespect total de nos juridictions.
En fait, le
projet de loi n° 17, M. le Président, et je termine là-dessus, c'est la
capitulation du gouvernement devant Uber
et ce n'est pas bon signe parce que ça nous rappelle un peu ce qui se passe
aussi à Ottawa avec le gouvernement fédéral
qui, depuis quelques années, est en pâmoison devant les Facebook, Google, Uber
de ce monde, qui a abdiqué ses juridictions
fiscales et qui est même prêt à donner des terrains aux Google de ce monde pour
faire des expérimentations aux frais des contribuables.
Alors, évidemment, sans grande surprise, nous
voterons contre le projet de loi n° 17. Merci, M. le Président.
• (16 h 30) •
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. D'autres
interventions? Oui. Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.
Mme Lise Thériault
Mme Thériault : Merci, M. le
Président. M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur le
projet de loi n° 17 qui est, comme vous
l'entendez depuis que nous avons terminé la période de questions, des
interventions sur le projet de loi qui a été déposé par le ministre des
Transports concernant l'industrie du taxi.
Vous savez, M. le Président, quand on prend la
parole sur un projet de loi, il y a toujours le porte-parole mon collègue de La
Pinière qui a suivi tous les débats, qui a rencontré différents intervenants,
qui a écouté les groupes en commission
parlementaire, les collègues députés qui ont siégé sur la commission
parlementaire, il y a les autres députés qui, comme nous, regardent, écoutent, mais qui ne participent pas
activement aux débats, ce qui nous
oblige à faire certains devoirs avant de prendre la parole, M. le Président,
pour ne pas dire n'importe quoi, évidemment.
Donc, M. le Président, vous savez, je suis une femme de dossier de fond. Je vais voir, je
m'informe, je lis énormément. Et je me suis posé la question : L'industrie du taxi existe depuis quand? Et pourquoi
c'est une industrie qui est
réglementée? Quelle est l'histoire de
l'industrie du taxi, M. le Président? Pourquoi sommes-nous aujourd'hui à parler
d'un projet de loi qui libéralise et qui
vient changer complètement les règles de l'industrie? Toutes des questions
aussi pertinentes et intéressantes les unes que
les autres, Mme la Présidente, puisqu'il y a eu un changement de président. Je n'ai pas un problème de vision. Nous sommes
rendus avec Mme la présidente maintenant. Et, vous savez, ça m'a permis
vraiment d'aller m'approprier un peu plus le dossier.
Je dois dire
d'entrée de jeu, Mme la Présidente, que je n'ai jamais pris Uber, ni ici, ni à
Québec, ni à Montréal, ni en Floride, ni à New York, ni nulle part
ailleurs dans le monde. Je n'ai jamais pris Uber, jamais. Par contre, Mme la Présidente, je dois dire également que dans mon
magnifique comté d'Anjou—Louis-Riel,
sur la rue Beaubien, j'ai une compagnie
de taxi, Taxis Hochelaga/Beaubien, qui a son siège social dans mon comté, et
que des chauffeurs de taxi, j'en rencontre
régulièrement, je les vois régulièrement, je les prends régulièrement aussi,
Mme la Présidente. Et, à chaque fois que j'ai l'occasion de prendre le
taxi, je pose la question suivante à la personne qui conduit : Est-ce que
vous êtes un propriétaire de votre permis ou si vous êtes un chauffeur? Que
pensez-vous de la loi que vous avez devant vous présentement? Mme la Présidente, je ne répéterai pas tout ce qu'on m'a
dit ici parce qu'il y aurait certainement beaucoup de propos antiparlementaires. Pas besoin de vous
dire qu'il y a les chauffeurs de taxi, les propriétaires de taxi et il y a
Uber. On a devant nous, vraiment, une formule qui est un peu hybride.
Vous savez,
Mme la Présidente, quand Uber est arrivé puis qu'il y avait un gouvernement
libéral, ce qu'on a décidé de faire,
ce n'est pas de déréglementer et de libéraliser le tout. On a décidé de faire
un projet pilote. Savez-vous pourquoi on fait des projets pilotes, Mme
la Présidente? On fait des projets pilotes pour être capable de voir les bons
côtés, les mauvais côtés, être capable de
voir comment on peut changer les règles dans une industrie. Et, à partir du
projet pilote, si c'est concluant, on
peut aller de l'avant. Si ce n'est pas concluant, on peut prolonger un projet
pilote, on peut modifier un projet
pilote. Qui décide des règles? Évidemment, Mme la Présidente, sans surprise
aucune, je vous dirai : Le gouvernement du Québec, puisque
l'industrie est réglementée par le gouvernement du Québec, donc le ministre des
Transports, Mme la Présidente.
Donc,
évidemment, lorsque le projet pilote est arrivé, bien, on a testé des affaires.
Puis il y avait des choses qui étaient
bonnes puis il y a des choses qui étaient moins bonnes. Puis je ne dis pas que
c'est une panacée puis je ne dis pas vraiment
qu'on avait la meilleure solution, mais toujours est-il, Mme la Présidente,
qu'on n'a pas pensé à déréglementer complètement cette industrie-là.
C'est une option qui n'avait pas été envisagée. En tout cas, pas à ma
connaissance, Mme la Présidente. Et il est
évident que, lorsqu'on fait face à une déréglementation totale d'une industrie,
il faut se poser la question :
Pourquoi on déréglemente? Qu'est-ce qu'on déréglemente? Quelle règle nous
venons changer? Est-ce qu'il y a quelque
chose qui ne fonctionne pas dans l'industrie présentement? Mais vous
comprendrez, Mme la Présidente, que, pour
être capable de répondre à ces questions-là, il faut être capable de voir d'où
est-ce qu'on est partis, c'est quoi, l'historique.
Et là, Mme la
Présidente, je vais faire un petit survol historique avec vous. J'ai du temps
devant moi. Vous allez me permettre de faire un peu de lecture parce
qu'évidemment je n'ai pas eu l'occasion de tout apprendre ça par coeur,
mais il y a eu un texte qui a été publié par les taxis de Montréal, qui avaient
108 ans d'histoire, et ça a été publié en décembre...
ne bougez pas, en décembre 2016, Mme la Présidente. Donc, ça relate quand même
assez bien l'historique.
Vous savez
qu'en 1909, Mme la Présidente, 110 ans exactement, «le premier permis de
taxi automobile a été émis pour la
compagnie Bernu Motors and Taxi Auto Limited. [Et c'était] sur la rue
Saint-Jacques que le premier client [a monté] à bord d'un véhicule [de
taxi]», Mme la Présidente.
«En 1922, la
Diamond Taxi Association est créée alors qu'elle ne compte que sept membres.
[Et] à cette époque, le tarif de base par course est de 0,05 $»,
Mme la Présidente.
«Pendant les
années qui suivent, le nombre de permis monte en flèche pour atteindre
3 000 permis en 1929 — en à
peine sept ans de différence. Malheureusement, la crise économique fait en
sorte qu'il ne reste plus que 1 500 permis à la fin de cette
même année. [Et] un an plus tard, le nombre de permis décline encore [environ]
à 800.
«En 1936, c'est au tour de l'Association Lasalle
de voir le jour, avec plus de 350 voitures.
«Mais la
situation est difficile. L'économie de la ville n'est pas encore tout à fait
remise de la récession, les taxis sont
trop nombreux. Les chauffeurs peinent alors à faire le salaire
"légal" de l'époque, soit 11,25 $ par semaine — le salaire légal de l'époque.
«En 1941,
Montréal compte 840 permis. La guerre améliore ironiquement la situation
économique des chauffeurs, qui vont jusqu'à retrouver une certaine
prospérité.
«À la fin de
la guerre, la demande est forte, et les permis sont émis avec plus ou moins de
contrôle. [Donc] en 1945, leur valeur
est de 16,20 $ chacun. Une seule petite année plus tard, elle grimpe à
162 $!» Je vous parle de ça, on est en 1945, Mme la Présidente. Un
an, on a bondi de 1 000 %.
À l'été
1947 : «Les taxis sont propulsés dans l'avenir avec l'arrivée des premiers
radiotéléphones.» Tiens donc, nouvelle
technologie. «"L'appareil est déjà très au point, et l'on songe maintenant
à éliminer l'usage du cornet téléphonique, qui sera remplacé par un microphone qui laissera au conducteur le libre
usage de ses deux mains", peut-on lire dans un article de La Presse.
Une étrange ressemblance avec notre Bluetooth [d'aujourd'hui], n'est-ce pas?»
Il y a beaucoup de parallèles à faire
entre ce qui s'est passé avant et ce qui se passe maintenant, Mme la
Présidente. C'est pour ça que j'ai trouvé intéressante cette petite
recherche là. Et je me permets vraiment de vous lire.
«Toutefois, au début des années 1950, les taxis sont encore une fois trop nombreux. L'industrie replonge dans le marasme, et les hommes refusent de travailler pour des salaires aussi
bas. À titre de comparaison, la ville américaine de Chicago, qui compte 3,5 millions d'habitants en 1952, dispose de 3 000 taxis. Au même moment, Montréal
concentre 4 295 voitures de
taxi pour 1,2 million de population.» Donc, la ville a gelé l'émission des
permis. On comprend pourquoi on a des permis, Mme la Présidente, on
comprend qu'on a régulé un domaine complet qui ne l'était pas.
Ça, ça va vous intéresser, Mme la Présidente.
Alors, que les taxis de Montréal s'apprêtent à vivre une autre révolution, c'est les femmes qui font leur entrée
dans le métier. «Mademoiselle Ève Laws est probablement la toute première
"femme chauffeur". Engagée par l'Association Diamond, elle effectue
son premier quart de travail en mai 1951. La Presse
couvre l'événement et publie un article dans lequel on peut lire :
"Un règlement municipal qui interdit aux femmes de s'asseoir sur la banquette avant avec un
chauffeur a dû, pour les besoins de la cause, être inverti. [Et] dorénavant, si
une femme est au volant, ces
messieurs devront être conscients des distances et s'asseoir sur la banquette
arrière."» Les temps ont bien changé, Mme la Présidente.
«Le
mois suivant, 14 autres femmes joignent les rangs de Diamond, ce qui fait
titrer au Petit Journal : L'invasion des femmes jette l'émoi dans le monde du taxi. En effet, selon l'article, les
4 000 gaillards de l'industrie "ne cachent pas leur désapprobation et espèrent que cette
situation ne sera que temporaire". [Et] même la vignette, [qui est]
inscrite au bas de la photo d'une chauffeuse [de taxi] au volant de sa
voiture pour accompagner l'article est du plus mauvais goût — et on
disait : "L'un des jolis minois qui sillonnent maintenant Montréal,
en quête de clients pour son taxi." Heureusement, les temps ont beaucoup changé.» Mme la Présidente, vous faites bien de
lever les yeux au ciel. De tels propos aujourd'hui seraient tout à fait
inacceptables, Mme la Présidente.
• (16 h 40) •
«Tout
au long des années 1950, les commissions et les rapports sur la problématique
du taxi s'enchaînent. Au sein de l'industrie, les associations,
coalitions, regroupements et comités [s'en] font et [s'en] défont. Puis, en
1952, le maire Drapeau légifère pour limiter
le nombre de taxis qu'un propriétaire peut obtenir, tout en conservant les
droits acquis. À l'époque, un seul propriétaire peut posséder jusqu'à 500 taxis!
«Les
années 1960 et [70] sont relativement stables. En 1971, sur un total de
4 400 permis de taxi dans Montréal, on compte environ
1 400 chauffeurs propriétaires.
«Les
années 1980 : vers une professionnalisation du métier.
«Dès
1983, la Communauté urbaine de
Montréal décide de prendre les choses
en main. Les cours de formation sont
dorénavant obligatoires pour l'obtention du permis. C'est aussi l'année de
l'apparition du "pocket" — "pocket
number", comme on dit, Mme la Présidente — cette
pochette "plastifiée, inaltérable, avec une photo couleur renouvelée
chaque cinq ans". La tarification, les règles [...] les obligations
des chauffeurs sont affichées à l'intérieur des véhicules. Les taximètres sont régis par règlement, tout comme d'ailleurs le poste d'attente. Il faut
compter deux années pour que ce nouvel encadrement se mette en place.
«À la même époque, le
gouvernement du Québec met sur pied un plan de rachat des permis excédentaires.
L'industrie se prononce en faveur de cette
opération.» Donc, vous voyez, Mme la Présidente, que même dans les
années 80, le gouvernement du
Québec a compensé et a racheté les permis pour faire en sorte que les gens
puissent gagner dignement leur vie.
Tout au long de ce que je vous ai lu, c'est de ça dont il est question, Mme la
Présidente : la quantité de permis de taxi pour que les gens
puissent gagner leur vie correctement.
«Quatre années plus
tard, la ville de Montréal ouvre son Bureau du taxi.
«[Cette dernière]
célébrera d'ailleurs ses 30 ans d'existence. Le mandat du BTM, auparavant
concentré sur l'encadrement réglementaire, est étendu au développement de
l'industrie depuis 2014.
«La première
politique sur l'industrie du taxi est d'ailleurs publiée par la ville de
Montréal à l'été 2014 et est toujours en cours d'implantation.»
Mme
la Présidente, je vous ai lu un petit document que j'ai trouvé sur Internet
puis je vais rajouter à l'histoire, Mme la Présidente, parce que je
pense que c'est important aussi de comprendre.
En
1900... Ça, c'est un texte qui a été fait par Radio-Canada, et c'est Claude
Brunet de Radio-Canada qui a produit ce texte-là.
«Le
dépôt du projet de loi n° 17 visant [de] réglementer l'industrie du taxi
[...] a suscité des vives réactions des artisans au cours des derniers jours.
Ce n'est toutefois pas la première fois que les chauffeurs se mobilisent. Cela
a été le cas à la fin des
années 1960, au début des années 1970 au sein du Mouvement de
libération du taxi. Retour sur ces années fertiles en rebondissements», parce que je pense que c'est important de
comprendre notre histoire aussi, Mme la Présidente. Donc, évidemment, le
dépôt du projet de loi, comme je vous dis, a fait en sorte qu'il y a eu des
rebondissements.
Donc : «En 1968,
[les] chauffeurs et des petits propriétaires de taxis se regroupent au sein de
Mouvements de libération du taxi. Leur
première lutte vise la compagnie Murray Hill, qui détient l'exclusivité de la
desserte de l'aéroport international
de Montréal, située à Dorval.» Donc, ce qui veut dire que les chauffeurs de taxi
ne pouvaient pas aller à Dorval pour aller chercher les gens. C'était
une compagnie qui détenait l'exclusivité des droits.
«Les
chauffeurs des autres compagnies peuvent y amener des passagers, mais n'ont pas
le droit d'en prendre. Cette situation — évidemment, vous
comprendrez — fait
monter la tension.
«Le
30 octobre 1968, 400 chauffeurs et un millier d'étudiants manifestent
violemment à l'aéroport de Dorval. [Les]
véhicules de la Murray Hill sont vandalisés. Des cocktails Molotov sont lancés.
La circulation est bloquée pendant trois heures.»
Mme
la Présidente, Robert Bourassa intervient à ce moment-là : «Le député de
la circonscription de Mercier à Montréal — puisqu'il n'était pas encore premier
ministre — demande
au gouvernement fédéral de mettre fin au monopole de la Murray Hill.»
Un
peu plus tard, M. Bourassa, maintenant chef du Parti libéral du Québec,
qui est devenu premier ministre de la province
le 29 avril 1970, donc moins de trois mois après son élection, «demande au
député de Dorion, Alfred Bossé, d'enquêter sur la situation des
chauffeurs de taxi.
«"L'objectif
que vise le premier ministre est d'abord d'améliorer les conditions des
chauffeurs de taxi. Le milieu demande des changements en profondeur",
expliquait à l'époque M. Bossé.
«Le
député conclut qu'il y a trop de permis à Montréal. Tandis qu'il y a un taxi
pour 660 habitants à New York, la métropole compte un taxi pour
326 habitants.
«"Il n'est pas étonnant que les
propriétaires et chauffeurs crèvent de faim même en fournissant une somme
inouïe de travail." — issu
du rapport de M. Bossé.
«Le
gouvernement [libéral] retire le monopole de la Murray Hill à l'aéroport
international de Montréal le 3 septembre 1970. Les chauffeurs de taxi
peuvent maintenant y prendre leurs clients.
«Le gouvernement du
Québec n'a toutefois pas le temps d'agir», Mme la Présidente, et j'ai appris
une page d'histoire ici. «Le 5 octobre
1970, l'attaché commercial britannique à Montréal, James Richard Cross, est
enlevé par le Front de libération du
Québec — ce qu'on
appelle le FLQ. Ce kidnappage est l'oeuvre de la cellule de libération, une
bande formée par un chauffeur de taxi : Jacques Lanctôt.
«"[Jacques] Lanctôt
était le rédacteur en chef de la revue du Mouvement de libération du
taxi", explique Jean-Philippe Warren.
"Il a dit qu'il était venu au FLQ parce
qu'il était chauffeur de taxi. Le contraste entre l'opulence, d'un côté,
et la misère de l'autre a été le déclencheur qui l'a mené au FLQ."»
Vous comprendrez
qu'avec la Loi sur les mesures de guerre la police et l'armée écrasèrent la
contestation, l'attaché commercial britannique a été libéré, et Jacques Lanctôt
a été exilé à Cuba, Mme la Présidente.
«Une industrie qui
continue de connaître des moments difficiles.
«L'industrie du taxi
va continuer de vivoter pendant plusieurs années. Les chauffeurs sont
exploités, [...]leurs conditions de travail
sont misérables. Il y a beaucoup trop de permis de taxis en circulation. Québec
intervient et propose un plan de
rachat des permis. Objectif : diminuer le nombre de permis afin
d'augmenter les revenus des chauffeurs et des propriétaires.
«Michel Trudel était
à l'époque responsable de l'industrie du taxi au ministère des Transports du
Québec. [Et] la proposition gouvernementale
visait à "augmenter la rentabilité des exploitants qui [poursuivent] leur
carrière dans le taxi", explique-t-il.
«Les
propriétaires financent le rachat des permis. Ce plan de rachat sera en vigueur
de 1985 à 1990 à Montréal. [Et] au terme du processus, 24 % des
permis sont éliminés.
«Cette
opération a permis d'équilibrer l'offre et la demande, mais a également
entraîné une explosion de la valeur des permis.
«[Et]
en 2014, un permis de taxi à Montréal valait en moyenne 189 810 $.
[Et] depuis l'arrivée d'Uber, sa valeur n'a cessé de diminuer.»
Pourquoi
j'ai bon de faire une page d'histoire, Mme la Présidente? Pour qu'on puisse
comprendre qu'à chaque fois que le gouvernement du Québec décide de
changer les règles du jeu dans une industrie, ça revient à faire une expropriation, carrément. L'histoire nous prouve,
Mme la Présidente, que les gens qui sont dans l'industrie du taxi depuis
plus de 110 ans le sont pour y gagner
leur vie dignement, correctement, et c'est le lot d'un bon nombre de
propriétaires de permis de taxi. Ce
sont des entrepreneurs, ce sont des petites PME qui ont décidé d'investir dans
leur avenir. L'arrivée d'Uber,
évidemment, a bouleversé le tout, Uber, qui est un fort mauvais payeur,
évidemment. Sa réputation à l'international, je n'ai pas besoin de
m'étendre là-dessus, je n'ai pas le temps non plus, Mme la Présidente, puis je
ne le ferai pas.
Mais,
chose certaine, ce que le ministre propose, c'est carrément une expropriation
de toute l'industrie. Il y a des règles qui existent. Pourquoi y a-t-il des
règles? Il y a des règles de sécurité, il y a des règles pour que les gens ne
puissent pas faire n'importe quoi.
Comme dans n'importe quel secteur, domaine, si le gouvernement juge bon de
changer les règles du jeu, bien,
c'est à lui d'indemniser, Mme la Présidente. Et je pense que le député de
La Pinière a été fort éloquent dans toutes les occasions qui se sont présentées à lui pour pouvoir
s'exprimer au nom de notre formation politique sur le dossier de
l'industrie du taxi.
Ce
que je sais, Mme la Présidente, c'est que, dans mon comté, il y a des hommes et
des femmes qui vivent de leur permis
de taxi. C'est leur fonds de pension, en quelque sorte. Ils ont hypothéqué leur
maison, leur avenir, ils ont voulu se
donner la possibilité de créer, très souvent, un avenir meilleur pour leurs
enfants. Et évidemment, Mme la Présidente, vous ne serez pas surprise de m'entendre dire que je suis aux côtés des
chauffeurs de taxi qui réclament plus, et à juste titre, Mme la
Présidente.
Quand le gouvernement
fait le choix de mettre fin à une industrie et de déréglementer, il y a des
dommages collatéraux. Rappelez-vous la
fermeture de Gentilly, Mme la Présidente, il y a eu un fonds qui a été créé
pour créer de l'activité économique.
Rappelez-vous quand le gouvernement a décidé de mettre fin à l'amiante, Mme la
Présidente, on a compensé également.
Bien, si on décide de changer toutes les règles du jeu dans l'industrie du
taxi, Mme la Présidente, il est tout
à fait normal que le gouvernement assume ses responsabilités et compense le
juste montant pour les permis de taxi. Et
c'est ce que le député de La Pinière revendiquera au cours des prochaines
étapes pour le projet de loi n° 17 qui est devant nous, Mme la Présidente.
Et vous avez compris que nous sommes évidemment contre le projet de loi.
• (16 h 50) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres
interventions? Alors, oui, Mme la députée des Mille-Îles. La parole est à vous.
Mme Francine
Charbonneau
Mme Charbonneau :
Merci. J'étais absorbée par le cours d'histoire que j'avais de ma collègue. Je
trouve qu'elle a fait un tour
d'horizon vraiment exceptionnel. J'ai appris des choses et j'ai compris des
choses. Des fois, il faut aller un petit peu plus loin.
De
mon côté, je vais me permettre de vous lire une lettre que j'ai reçue. Et je
pense que plusieurs personnes ont reçu
cette même lettre puisqu'elle commence par : «MM. et Mmes les députés.»
Puis, je vais vous mettre tout de suite aux aguets, Mme la Présidente, cette
lettre vient de Coop propriétaires Taxi Laval, qui nous
sensibilise de façon particulière sur différents points. Je
trouvais que c'était une belle entrée en matière. Donc, permettez-moi.
«Depuis
plus de 45 ans, la Coop des propriétaires de taxi de Laval dessert la population
de Laval et compte plus de 300 emplois directs dans la région de Laval.
D'année en année, la population prend
de l'âge, et le nombre de courses pour le transport adapté augmente. Ces personnes
ayant différentes déficiences allant du problème de la motricité à la déficience intellectuelle en passant par
l'autisme, et autres, comment ces personnes pourront recevoir l'aide nécessaire
lors de leur transport? Cette clientèle sera-t-elle en sécurité sans une
formation adéquate des chauffeurs? Le projet de loi n° 17 ne couvre aucunement ces aspects de la réalité [de nos
chauffeurs de taxi, ceux qui le vivent] au quotidien. La formation continue des chauffeurs pour cette
clientèle, que nous mettons en place avec nos partenaires, améliore la qualité
et la sécurité des services.
«La
classe requise pour les chauffeurs de taxi, soit le 4C, nécessitait un examen
visuel, un examen médical, un examen
théorique et une expérience de 12 mois avec un permis de classe 5. Avec le
projet de loi, seule l'expérience de 12 mois
de classe 5 sera exigée. Où sera la sécurité de la clientèle qui montera à bord
d'un véhicule avec un chauffeur ayant à peine 12 mois d'expérience
sur la route?
«En
plus, nos chauffeurs ont suivi une formation de taxi, une formation de
chauffeur de taxi, une formation de toponymie,
une formation de transport adapté. Les chauffeurs de taxi ont investi temps et
argent pour suivre les formations exigées.
Quelle sera cette formation uniforme que vous proposez? Comment un client
peut-il se sentir en sécurité avec un chauffeur qui n'a eu qu'une
formation partielle de quelques heures?
«En
réduisant les exigences de la formation, vous ne faites qu'augmenter
l'insécurité des usagers. Qu'arriverait-il si nous réduisons la formation des infirmières, des professeurs, du
professionnel des services d'urgence, et j'en passe? La question se
pose.
«Que
dire sur l'inspection annuelle du véhicule de transport des personnes? Cette
inspection doit être faite par un garage
recommandé et mandaté par la SAAQ. Nous sommes partis de deux inspections annuelles,
ensuite une inspection avec le projet Uber, et maintenant aucune avec le
projet de loi. En négligeant l'inspection annuelle du véhicule, cette décision pourrait, a des graves conséquences sur
la qualité des véhicules et, par le fait même, sur la sécurité des personnes
en augmentant le risque d'accidents sur la route. Comment réagirait la
population si vous réduisez les inspections périodiques des avions, des trains,
des véhicules d'urgence, et j'en passe?
«L'industrie
du taxi a toujours respecté toutes les lois concernant le transport rémunéré
des personnes, que ce soit l'inspection biannuelle des véhicules par un
garage recommandé et mandaté par la SAAQ, l'âge et l'empattement du véhicule, les vérifications biannuelles des
taximètres, la formation obligatoire de taxi, la toponymie, sans obliger celle
du transport adapté, les permis de classe 4C, le permis de chauffeur de taxi et
de tarification.
«Notre
industrie, que le gouvernement dit ne pas être à l'ère de la nouvelle
technologie, eh bien, c'est faux. Avant l'arrivée des multinationales, nous utilisions la répartition
automatique, les traces GPS. Nous utilisons des applications mobiles et un service de prise d'appels
automatisé, un service de réservation par Internet et même un estimé pour le
coût de leur course.
«Plus
de 80 % de la population préfère avoir un contact humain pour commander un
taxi. Les personnes âgées, qui nous
appellent régulièrement, qui représentent 18,5 % de la population du
Québec en 2018, ne seront pas à l'ère de la nouvelle technologie,
préférant également le contact humain.
«Le projet de loi n° 17 élimine du revers de la main, sans aucun respect
envers la clientèle régulière et handicapée, toutes les obligations concernant
les véhicules et les chauffeurs pour leur sécurité, [...]soit la formation des chauffeurs, la réglementation concernant le
véhicule, l'inspection, un tarif réglementé, peu importe l'achalandage.
«Le
projet de loi n° 17 est prêt à sacrifier l'emploi, l'investissement et le fonds de pension de plusieurs milliers de
personnes. En fait, l'adoption du projet
de loi n° 17 dans sa forme
actuelle signifie sans aucun doute, pour plusieurs membres de la Coop des propriétaires de taxi de Laval,
la faillite.
«L'abolition
des valeurs de permis représente une forme d'expropriation où le gouvernement se trouve à fixer arbitrairement
une compensation fixée unilatéralement. Le gouvernement agit ainsi comme
juge et bourreau, et ce, tout en sous-évaluant de façon importante la
valeur des permis de taxi.
«Nous considérons
primordial que des modifications à la loi n° 17
soient apportées pour que la clientèle qui utilise
le transport de personnes le soit dans un environnement sécuritaire,
avec des chauffeurs ainsi que [les véhicules].
«Nous
vous remercions...» Et là vous avez compris, Mme la Présidente, que
j'arrive au bout où on nous remercie de notre écoute et qu'on porte une
attention particulière à tous les débats qui auront lieu en Chambre.
Mme la Présidente, pendant quatre ans et demi, j'ai eu un privilège extraordinaire. J'ai eu à ma responsabilité, partagée avec l'ensemble de cette
Chambre, les aînés du Québec. Et plus souvent qu'autrement, quand on parle de modernisation, on touche une corde sensible chez nos aînés puisqu'ils sont toujours dans cette zone grise de... certains
sont très habiles, certains le sont moins.
Plusieurs choisissent de ne pas avoir de téléphone intelligent parce que le
doigté, la manipulation devient un
petit peu plus difficile. Par contre, ils ont encore des téléphones, puis ça me
fait toujours un peu sourire, des
téléphones qui s'ouvrent, vous savez. Parce que, dans le fond, entre la
sécurité puis avoir un contact direct avec
quelqu'un avec un téléphone puis un téléphone intelligent, eux, leur souci,
c'est d'avoir un téléphone d'accès rapide. Mais en même temps, à chaque
fois qu'ils prennent un taxi, ils ont cette façon-là de l'appeler sur le
téléphone, soit le téléphone qui est encore
au mur, ce qui est de plus en plus rare, ou le téléphone qu'ils ont dans leur
bourse ou dans leur poche pour pouvoir avoir accès à un service.
Donc,
je vous dirais que j'en suis, pour le principe du service et de la
modernisation. Je pense qu'on se doit, comme société, de regarder toute cette évolution et tout ce qui arrive avec
l'Internet et la documentation, qui fait en sorte qu'on a l'obligation de se moderniser. Mais on a aussi
l'obligation de respecter ces gens qui, dans le quotidien, ne vont pas à la
même vitesse que nos jeunes en ce moment.
Nos jeunes sont à une vitesse exponentielle avec l'ensemble des instruments
qu'on peut avoir. J'ai trois enfants, dont
un qui est en génie informatique, et laissez-moi vous dire, Mme la Présidente,
ça va vite. Les nouvelles technologies nous emmènent à un endroit complètement
ailleurs.
Mais on se
doit de garder cette proximité-là avec une clientèle qui, à tous les jours,
augmente. La clientèle aînée va augmenter
de jour en jour jusqu'en
2023, où on va atteindre un sommet qu'on n'aura jamais atteint au niveau de la
clientèle. Le
service — j'ai des
collègues qui en ont parlé — à la clientèle des chauffeurs de taxi et ce
qu'ils ont développé est
extraordinaire. Quand on fait un appel à Taxis Coop et qu'on demande un service
de transport, on nous demande souvent quels
sont nos besoins. Est-ce qu'on a besoin de plus que deux places dans le
véhicule? Est-ce qu'on a des valises? Où est notre trajet pour s'assurer qu'on se rend à la bonne place? Et
est-ce que la personne a besoin d'un soutien pour pouvoir être
accompagnée adéquatement?
Je ne suis
pas sûre, Mme la Présidente, que, dans notre volonté de moderniser, tous les
petits transports ou tous les
transports autres que les grandes entreprises de taxi ou les chauffeurs de taxi
vont avoir ce même souci d'accompagner les gens, de faire en sorte que
la sécurité de la personne qui embarque et qui débarque du véhicule sera
conservée.
Je nous
souhaite d'avoir une loi qui pourrait venir à cette possibilité-là, mais, de la
façon qu'elle est écrite en ce moment, je vous dirais que j'ai des
grandes inquiétudes.
Nécessairement,
un peu comme mes collègues, je prends un taxi, je vais vous dire en quelle
occasion, Mme la Présidente, parce
que je conduis ma propre voiture, mais, quand je vais dans un restaurant et que
je sais qu'il y aura du vin, ce qui
me plaît toujours, d'en prendre un verre ou deux, bien, je prends un taxi pour
être sûre que je ne me mets pas à risque juste pour un verre de vin ou
pour le plaisir de partager avec les collègues ou des amis un moment de
festivités.
• (17 heures) •
De ce fait,
quand j'embarque dans le taxi, moi, je ne regarde pas... je ne demande pas si
les gens sont d'accord avec un projet
de loi. Par contre, je leur demande leur nom, leur provenance. Ils ont habituellement,
Mme la Présidente, du moins ceux de Laval, toujours un accent vraiment
charmant. Ils viennent de partout. Ils viennent de partout et ils connaissent Laval comme le fond de leur poche.
Quelquefois, même, je propose un chemin plus court, puis ils me disent :
Non, non, non, madame, ce chemin-là, il n'est pas plus court, il est plus long.
Je vais prendre le chemin plus court.
Mais chacun
d'eux a une histoire. En arrière de chaque permis, il y a un homme ou une
femme, il y a une famille et il y a une
histoire de passion et de relation humaine qui se fait et un échange qui est
fort intéressant. Il y a toujours une petite
histoire d'accueil, hein, quand ils sont arrivés, pourquoi ils ont choisi
d'être... conduire un taxi, à quelle heure ils ont commencé. Ils ont quand même des heures assez ardues. Ils finissent
très tard ou ils commencent très tôt et, quelquefois, font affaire avec
des êtres humains complètement différents. Il y a les gens que je qualifierai
de bien ordinaires, qui font une course, qui
vont du point a au point b. Mais il y a aussi ces gens qui ont des marchettes.
Ils ont fait des courses, donc ils
ont des sacs. Il y a des gens qui se rendent à Dorval avec une valise ou deux.
Il y a des familles qui se déplacent ensemble
pour aller à des compétitions ou des activités quelconques. Et, à chaque fois,
les chauffeurs de taxi s'ajustent à la clientèle qu'ils ont.
La crainte
que j'ai, personnellement, mais aussi que j'ai échangée avec plusieurs gens de
ma circonscription, c'est quand le
service arrive du coin de la rue. C'est-à-dire que, quand je fais mon numéro ou
mon appel sur mon téléphone cellulaire
pour avoir un Uber et qu'on ne me demande pas quels sont mes besoins, la
voiture arrive devant chez moi ou devant
l'endroit où je dois faire mes courses, et elle n'est pas adaptée pour pouvoir
donner un service adéquat ou le service dont j'ai besoin, je trouve que
ça amène une possibilité de mise en insécurité bien des gens.
De ce fait,
la responsabilité d'un ministre et de cette Chambre, c'est de faire en sorte
que, si on modifie une règle, si on modernise une règle, si on veut améliorer
l'état des lieux, bien, on a la responsabilité d'ajuster correctement. Puis, vous savez, Mme la Présidente, dans cette
Chambre, il n'y a pas juste un ministre des Transports. Il y a un ministre
de la Famille. Il y a une ministre
responsable des Aînés, une ministre responsable des Proches aidants, qui est
une première au Québec, et je le
salue, mais il faut aussi être préoccupé par leur transport. Il faut aussi regarder
cette possibilité-là d'offrir le
meilleur service. Et nos chauffeurs de taxi, en quelque sorte, ils sont aussi
nos yeux puis nos oreilles sur les gens qu'ils embarquent. Si quelqu'un a un problème de santé mentale, embarque dans
un taxi, le chauffeur de taxi peut le détecter, peut amener cette personne-là à avoir une piste de solution. S'il y a un
aîné qui est seul, embarque dans un taxi parce qu'il a des malaises, le
chauffeur de taxi peut prendre la responsabilité.
Saviez-vous,
Mme la Présidente, qu'un chauffeur d'Uber peut choisir d'embarquer ou ne pas
embarquer quelqu'un? Il peut
stationner sa voiture, voir la personne sortir, trouver qu'elle est un peu
amochée : Peut-être qu'elle pourrait vomir dans mon auto, ça fait que je vais juste continuer tout droit, puis je
ne vais pas l'embarquer. De ce fait, il y a quelque chose d'injuste là-dedans. On vient jouer dans une règle
du jeu qui fait en sorte qu'un chauffeur de taxi, qui a payé son permis,
qui a suivi les règles, qui fait surveiller
sa... qui fait vérifier sa voiture, qui s'assure de sa propre formation pour
pouvoir accompagner des gens aînés,
des gens qui ont besoin de transport adapté, va laisser la course à quelqu'un qui peut, en quelque sorte, laisser un mauvais goût à la personne qui a appelé
le service.
Ah! il y a
des gens qui m'ont dit : Bien, écoute, il n'y
a pas de problème, on ne prendra plus Uber, c'est tout. Oui,
mais il y a quand même cette première
expérience. Il y a quand même cette première expérience où j'aurai appelé un
service, et, pour toutes sortes de
raisons, je n'aurai pas accès à ce service-là. Ou, encore mieux, Mme la
Présidente, je prends toujours un
taxi pour faire la même course, puis, il y a une journée, bien, j'ai le goût
d'essayer puis de faire l'expérience, j'essaie Uber, puis je me retrouve
avec une course qui me coûte 15 $ de plus.
Il y a quand
même une logique à avoir, en se disant : Il faudrait qu'on ait des règles
justes. Il faudrait qu'on ait les mêmes règles pour tout le monde, la
même formation pour tout le monde, la même obligation pour tout le monde, un véhicule sécuritaire, un conducteur qui me donne
un sens de la sécurité et avec qui je sais que j'embarque, hein? Quand
j'embarque dans un taxi, on le disait un peu plus tôt, il y a toujours cette
petite affiche qui dit : Je suis Gérard, et je conduis ce véhicule, et voici mon identification. Bien, dans un véhicule
Uber, je ne crois pas que le chauffeur va appliquer son permis de
conduire sur le bord de la porte pour que je puisse m'assurer de ma sécurité ou
avec qui j'embarque.
J'écoutais mon collègue, un peu plus tôt, de
Québec solidaire qui revenait sur le principe des impôts. Bien, effectivement, il faut se questionner. Je veux
croire qu'il y a des gens qui ne vont peut-être pas juste arrondir leurs fins
de mois. Mais je pense que, si les règles
sont injustes pour le principe même de payer ses impôts, bien, on met la
sécurité des
gens en danger en disant : Je vais faire ça juste pour régler ma fin de
mois, je vais faire ça juste pour régler mes comptes, puis après ça je
vais arrêter, puis je vais passer à autre chose.
Je le sais
que vous le savez, Mme la Présidente, parce qu'on s'est déjà parlé de
commission scolaire, il y a un service qui
se partage entre le service adapté de certaines commissions scolaires pour
venir boucler un peu le fait qu'un étudiant qui habite très loin et où l'autobus jaune ne passera pas va avoir un
service adapté avec les taxis. C'est des partenariats qui sont importants. Et je vous le dis parce que
je pourrais l'entendre de la voix du ministre, ils ne sont pas en danger par
rapport à la volonté que le projet de loi
n° 17 met en place. C'est des partenariats qui sont faits avec les taxis
et les commissions scolaires ou les
villes, même, parce que les villes aussi font des contrats de service. Où je
veux en venir, c'est toujours sur le
principe de la formation, Mme la Présidente. Je vous le dis, j'ai des enfants
qui conduisent, j'ai des voisins qui
conduisent, et, si j'ai bien compris, si je suis une classe 5, je peux
faire du Uber, même moi. Il n'y aurait pas de souci, j'aurais la bonne
classe sur mon permis de conduire, et tout irait bien, mais n'en vient pas qu'à
ce principe d'une classe de permis. On se
doit d'être vigilant par rapport à la sécurité des citoyens qui embarquent pour
un transport. Un peu comme on le fait
quand on prend un transport en commun, un peu comme on le fait quand on veut
mettre nos enfants dans un véhicule
parce que quelqu'un le transporte pour aller faire du sport à quelque part, on
se doit d'être très vigilant sur le principe de la sécurité.
Et, si tout le monde était debout sur ses deux
jambes, avait toute sa tête et n'avait pas de souci, je ne serais même pas debout en train de vous parler. Mais,
parce qu'on a une clientèle qui peut être fragilisée, parce qu'on a des aînés
qui peuvent avoir une demande tout à fait particulière et parce qu'on a
eu jusqu'ici des gens dans les coops et des conducteurs
de taxi que se sont préoccupés de cette volonté-là, parce que, pour... parce
que, jusqu'ici, Uber n'a pas fait
ses preuves comme telles sur l'ensemble
de l'oeuvre, parce qu'on croyait sincèrement que faire un projet pilote pouvait nous aider à mieux voir les perspectives par rapport à l'implication d'Uber ici, parce
qu'à l'extérieur du Québec Uber a fait des dommages... Ce n'est pas qu'ici. Si
ce n'était qu'ici, je vous dirais, on est chauvins un peu. Mais, non, pas juste
ici, à l'extérieur du Québec, Uber a posé
des marques qui ont blessé des communautés. Parce que la sécurité des gens est
plus importante que la volonté que nous
avons de moderniser, on se doit de regarder avec beaucoup d'attention ce qui
va arriver au moment où on va permettre à
quelqu'un qui a un permis de classe 5, après 12 mois, de faire de la
conduite de taxi et du transport de la communauté.
Mme la
Présidente, je joins ma voix à celle de mes pairs pour vous dire : J'ai de
grandes inquiétudes et, pour cette raison, je voterai contre le projet
de loi n° 17.
• (17 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant,
un autre intervenant, M. le député de Marquette, la parole est à vous.
M. Enrico Ciccone
M. Ciccone : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Quel bonheur
d'être ici aujourd'hui. Ce n'est pas un bonheur cependant de parler du projet de loi n° 17, un projet de loi qui
touche directement les gens, qui touche directement les familles,
l'humanité également.
Il n'y a pas
si longtemps, Mme la Présidente, j'étais au gymnase de l'Assemblée nationale,
et il y a un député qui m'a
dit : Nous sommes tous ici pour le pouvoir; on a attendu assez longtemps,
nous sommes tous ici pour le pouvoir. Ça va peut-être vous surprendre, là, mais moi, j'ai dit : Non, moi, je ne
suis pas d'accord avec ça. Je ne suis pas d'accord avec ça parce que moi, j'ai dit, je suis ici en
mission pour aider les gens, pour essayer d'améliorer le sort des gens, pour
tenter de m'assurer que le Québécois de souche ou même un immigrant puisse être
au Québec, ici, et grandir, pour qu'une personne puisse faire du sport comme il veut, puisse être capable de
manger également. Faciliter la vie, faciliter la vie des gens, c'est la
mission première pourquoi moi, j'ai décidé de me présenter en politique.
Maintenant,
ce député-là qui me dit : Moi, oui, mais c'est le fun, être au pouvoir,
c'est vrai, mais, quand tu es au pouvoir,
des fois tu ne prends pas toujours des bonnes décisions. Tu prends des
décisions, mais tu ne comprends pas la répercussion.
La répercussion est que, souvent, ce qui est une question mécanique, ce qui est
une question de déréglementation, ça se retrouve, en devenant... une
question humaine. Même si, tu sais, moi, j'ai tout le temps eu la prétention de penser que... Je m'avance sur un
sujet, je vais présenter quelque chose, je vais avoir un commentaire — parce que j'ai été dans le domaine de la communication, Mme la Présidente, et
souvent on dit des choses, on fait des choses — et après
je me dis : Je n'ai jamais eu la prétention de toujours avoir raison. Je
me suis dit : Non, peut-être que je me suis trompé. Là, je pensais que c'était plus mécanique, mais
mon commentaire a blessé quelqu'un, est allé chercher quelqu'un au niveau
personnel. Puis ça, dans le fond, bien, ça revient un peu sur tes épaules.
Puis, moi, ça
ne paraît pas, Mme la Présidente, si vous regardez la chaîne Youtube, là, mais
je suis une personne sensible.
Honnêtement, je suis une personne sensible, je suis une personne qui est
touchée facilement. Et, quand je vois ça,
bien, un, je suis touché et je trouve ça dommage que le ministre qui a déposé
le projet de loi n° 17 n'est pas aussi touché que moi à ce
niveau-là, parce que je comprends qu'on veut déréglementer l'industrie du taxi,
je comprends qu'il y a 8 000 permis de taxi qui ont été donnés dans
le passé, maintenant on veut ouvrir le marché à n'importe qui pour faire justement du taxi transport... Ma collègue, un peu
plus tôt, de Mille-Îles en parlait, n'importe qui peut embarquer dans sa voiture et faire du taxi, n'importe qui,
n'importe qui, puis ça, ça devient... Quand on donne, justement, l'appellation
de transport à quelqu'un ou qui fait ce
travail-là, bien, il doit avoir quand même un minimum de conscience, doit quand
même avoir un minimum de sécurité, et ça, ça prend de la formation. Il y a un
minimum de formation que tu dois donner,
puis tu ne peux pas laisser ça dans les airs. Là, il y a peut-être des taxis
qui vont devenir comme des Uber, comme des Lyft, tout le monde va être
sur le pied d'égalité.
Les
permis de taxi, Mme la Présidente, je ne sais pas s'il y en a qui ont fait
l'historique, parce que je n'ai pas écouté nécessairement tout ce qui s'est dit ici, là, mais l'historique des
permis de taxi vient après la Deuxième Guerre mondiale. Quand les vétérans revenaient, la job la plus
facile, c'était de donner... Ceux qui avaient des véhicules, bien entendu, à un
moment donné, au fil du temps, bien là, se lançaient dans le taxi puis
donnaient... vraiment, là, faisaient du transport à des gens, mais de façon privée. Et là, à un moment donné, il y en a eu
tellement... parce que c'était une des choses les plus faciles à faire, mais il y en avait tellement
que, là, à un moment donné, on a décidé de réglementer ça, on a décidé
de donner des permis de taxi, et là on s'est rendu à 8 000 taxis à
travers la province de Québec.
Et là, si on
parle de valeur, un permis, bien, pour faire rouler l'industrie, pour mettre un
peu d'argent dans les coffres du
gouvernement également, ça prend quand même un prix à ça, ça prend un prix à
ça. Maintenant, le prix initial des permis de taxi et le prix qu'ils se
sont vendus à travers le temps... Je n'ai pas besoin de vous expliquer comment
fonctionne l'économie, l'économie 101,
l'offre et la demande, les hausses du marché, et ça descend. Quand il y a moins
de demande, bien, les... Quand
l'industrie va un peu moins bien, quand, la charte, on voit que ça descend,
elle est en baisse, les permis vont se vendre un peu moins cher. Et
c'est là où...
Quand on
dit : On vient toucher à des personnes, ce sont des personnes qui ont fait
le sacrifice, des personnes qui, même avant d'être au Québec — ils
étaient outre-mer, ils étaient au Moyen-Orient, ailleurs — avaient
déjà pris la décision de justement faire du
taxi, ou acheter du taxi, ou acheter l'industrie du taxi et d'en faire du
transport, parce que plusieurs
d'entre eux, Mme la Présidente, se sont retrouvés à faire du taxi, pas parce
qu'ils le voulaient. Il y a des gens qui ont dit : Parfait, on veut investir. Comment on va faire? Il y a
d'autres nationalités, Mme la Présidente, qui investissent dans le monde
des dépanneurs, dans le monde de la vente. Plusieurs immigrants vont investir
dans le monde du taxi et là prennent la
décision de dire : Voici ce qu'on a, on a un bas de laine, ce qu'on a
ramassé. Un, il faut en ramasser assez pour
amener la famille chez nous, chez nous au Québec, qu'il devienne chez eux, et
là il faut investir, il faut s'acheter une job. Bien, tu t'achètes une job pourquoi? Parce que tu arrives ici avec
des qualifications, tu arrives ici avec des diplômes, puis ils ne sont pas
reconnus. Alors, tu te dis : O.K., mais je dois faire manger ma famille.
Je ne peux pas retourner nécessairement
à l'école, parce qu'il faut que je fasse manger ma famille, je veux subvenir
aux besoins de ma famille, alors ce
que je fais, c'est que je vais me lancer dans l'industrie du taxi parce que
j'ai un petit peu d'argent, je vais investir, je vais emprunter, et, ce que je vais faire, bien, je vais m'acheter un
taxi, puis je vais être capable de faire manger ma famille. Non
seulement ça, mais je vais être capable de laisser quelque chose en héritage.
Et c'est là
que ça devient archipersonnel, parce que, du jour au lendemain, le ministre des
Transports dit : Bien là, votre
héritage, votre fonds de pension, votre gagne-pain, ça s'en va dans les
poubelles, ça n'existe plus. Ce que vous aviez, là, votre cote que vous
avez payée pour entrer dans l'industrie du taxi n'existe plus. Ça n'existe plus
et, à partir de maintenant, ça ne vaut plus rien, mais on va vous donner un
petit quelque chose. Au début, c'était 500 millions, dont 250 millions
qui avaient été convenus déjà par le Parti libéral, on a doublé jusqu'à
500 millions.
Et là il y a
une façon de négocier, Mme la Présidente. Il y a une façon de négocier, puis
j'ai travaillé aussi dans le domaine
de la négociation : un, tu ne mets jamais tes cartes sur table en partant.
Ça, c'est la première des choses, parce que, pour avoir une bonne négociation,
il faut que tu sois capable de sortir de cette négociation-là puis que la
partie adverse, même si c'est une compétition, elle soit un peu gagnante,
au moins. Tu sais, tu n'es pas pour détruire la... Je comprends qu'en business c'est différent, je comprends que, du côté
gouvernemental, on fait vraiment de la politique en business, puis c'est de la business, puis on sait
que des fois on peut devenir très, très froid en affaires. Je comprends que
ça peut fonctionner comme ça, mais en même temps, là, on gère des...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député, juste faire attention aux
comparaisons que vous faites, juste faire attention pour ne pas porter
d'intentions à quiconque. Merci.
M. Ciccone : Je retire tout ce que j'ai dit d'intentions, Mme
la... J'étais parti sur un élan oratoire. Merci beaucoup.
Une voix : ...
• (17 h 20) •
M. Ciccone : J'étais parti. Quand on fait, justement, une négociation, on veut
s'assurer que la partie adverse aussi va
être gagnante puis va être capable de sortir quand même avec un sentiment du
devoir accompli, d'avoir fait une bonne négociation. Comme ça, ça, c'est à long terme, ça fait qu'on peut garder
ce partenaire-là ou ce partenaire d'affaires là pour d'éventuelles
négociations ou faire des affaires.
Le
26 mars 2019 : «"C'est une offre finale", dit le
ministre Bonnardel.» Oups! «Dit le ministre des Transports», parce que je citais un article de journal.
«Reprochant aux chauffeurs de taxi de pénaliser leurs clients en faisant la
grève, le ministre des Transports
[...] prévient d'ores et déjà que les 500 millions offerts en guise de
compensation représentent une offre
finale.» Je veux dire, on sort déjà les gants de boxe avant que ça commence,
c'est une offre finale. La sensibilité, elle n'est même pas là, ce n'est même
pas : on va s'asseoir, on va discuter, je veux vous entendre. Je comprends
qu'on va aller de l'avant avec ce projet de loi là maintenant. Parce que c'est
comme ça qu'on voit les choses.
C'est
précipité depuis le début de cette législature-là. On le voit, là, sur
plusieurs projets de loi qui sont déposés, c'est précipité. Tu lis le projet de loi, mais tu dis : Où c'est
qu'on s'en va, c'est plein de zones grises? Puis on dit : Ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave, au fur et à mesure,
on va rectifier le tir, puis on va arranger les choses, puis on va arriver
avec un produit qui est final. Puis non seulement ça... Ça serait le fun s'il y aurait de
l'ouverture de temps en temps, mais ce n'est pas ça, c'est : Voici
ce qu'on pense, ça va rester comme ça, puis on ne bouge pas. Souvent, c'est
comme ça.
Alors, on
aurait peut-être dû, justement, parce
que c'est archihumain, ce projet de loi n° 17 là, dire : Regardez,
là, je comprends, O.K., ça a fait des
vagues, mais on va en discuter puis on va prendre notre temps, on va prendre
notre temps avant
de vraiment mettre ça en oeuvre. On l'a déposé, c'est parfait. Avant de
l'adopter, on va écouter les gens, on va se rasseoir. On n'est pas obligés de le régler dans les trois, quatre
prochaines semaines. Parce que je ne vois pas l'urgence, un, de déréglementer ça, déréglementer l'industrie
du taxi, parce que ça fonctionnait quand même assez bien à l'époque. Ça fonctionnait bien dans le transport adapté. Il
y avait une formation, l'accessibilité universelle aussi. Je pense que les
gens étaient contents du produit.
Alors,
je ne vais pas faire de cours sur la négociation, mais en même temps, là, tu as
des chauffeurs de taxi... Puis j'en
ai négocié, quelques contrats, dans ma vie, Mme la Présidente, puis, je vais
dire une chose, quand quelqu'un te disait : «C'est terminé, non, c'est la
dernière offre» en partant, bien, tu disais : Il n'y a pas d'ouverture, ça
va être plate. Parfait, je vais aller
voir ailleurs ou je vais mettre un peu plus de pression, tout simplement. La
pression, comment on la met? Bien, on
l'a vu dans les derniers temps, puis je ne dirai pas comment parce que je ne
veux pas suggérer comment mettre de la pression.
Je ne le dirai pas, il y a de la pression qui a été faite, puis je ne veux pas
être complice de ça, je n'embarquerai pas là-dedans. Ça, ça leur
appartient.
Maintenant, ça
ressemble étrangement... puis, encore là, je ne sais pas si ça s'est dit, mais
étrangement un Mirabel 2. C'est une
expropriation, tout simplement. Parce que, là, on dit : On met un chiffre,
on va vous mettre un chiffre sur ce
que ça vaut; moi, ici, le ministre ou le gouvernement, je sais combien votre
permis vaut, voici ce qu'on va vous donner.
Que ce soit Montréal, Québec, dans les régions, que ce soit le nombre de temps
que tu as eu ton permis, combien d'argent
tu as fait avec ton permis dans le passé... Ça fait-u 20 ans, ça fait-u cinq
ans que tu as ton permis? C'est sûr que, si ça fait deux ans que tu as ton permis, trois ans que tu as ton permis,
tu n'as pas été capable de faire grandir ton investissement et de rembourser ton prêt, si tu ne l'as pas payé
d'un trait. La plupart, je suis persuadé qu'ils ont fait des prêts, puis ils
ont des hypothèques sur ces prêts-là,
justement. Alors là, on ne sait même pas comment déterminer... Il y en a
8 000. Là, on est rendus, à peu
près, alentour de 700 millions, là. Comment est-ce qu'on va diviser ça?
Comment est-ce qu'on va diviser ça?
J'ai
pris le taxi dernièrement, Mme la Présidente, puis j'ai posé la question,
justement, comment ça touchait... Quand
j'ai posé la question, là, j'ai eu un regard de feu, premièrement, j'ai eu un
regard de feu. Et là je me suis dit : Oui, peut-être que je n'irai
pas poser trop de questions puis peut-être que... Mais je me suis assuré de
leur dire que j'étais du côté libéral, Mme
la Présidente, et ça, ça m'a fait plaisir de leur dire. J'ai-tu le droit de
dire ça? Oui? Parce que je vous vois
le visage, je ne suis plus sûr, là, vous m'avez inquiété. Alors, je me suis
assuré de leur dire que je faisais partie de l'Assemblée nationale, mais j'étais du côté... alors, s'ils avaient des
messages, s'ils voulaient que, justement, je parle en leur nom, bien, que
j'étais pour le faire.
Puis
c'est ce que je vais faire pour les cinq, six dernières minutes qui restent,
Mme la Présidente. Parce qu'on dit que cette Chambre, ici, la maison où on
travaille, c'est la maison du peuple et que toutes les sphères de la société
doivent être représentées. Cependant, le peuple, ce qu'on voit
dernièrement, là, n'a pas le droit de parole, n'a pas le droit de parole. Alors,
ce que je vais faire, je vais me faire le porte-parole de certains
propriétaires, encore propriétaires, de taxi avant que, justement, ces propriétaires-là se fassent exproprier pour
un montant d'argent qui n'est pas la réelle valeur de leurs permis.
Aziz, je ne dirai pas
le nom de famille pour le protéger : Pourquoi le ministre des Transports
favorise une multinationale qui ne paie pas les taxes, les impôts et invite ses
multinationales... bénéfices, pardon, dans des paradis fiscaux au détriment des chauffeurs de taxi qui sont des citoyens qui
ont respecté les lois, les réglementations en vigueur depuis très
longtemps? En agissant de la sorte, vous avez détruit la vie de
22 000 familles.
Ce
sont des citoyens du Québec. Ce n'est pas une minorité visible. Moi, je
n'aime pas le mot «minorité visible» parce
qu'à l'époque mon père était une minorité visible, mais c'était un Québécois.
C'est un Québécois, c'est un Canadien. Ce
n'est pas une minorité visible. De notre côté ici, de la Chambre, là, ça
n'existe pas les minorités visibles. Tout le monde est Québécois. Tout
le monde est Québécois, dont les chauffeurs de taxi et Aziz.
Rachid :
Bonjour. Je suis un chauffeur de taxi. Je paie 320 $ par semaine pour
louer un permis de taxi. Vous avez tort
lorsque vous dites que nous, les chauffeurs, on va économiser
15 000 $ par année. Si vous allez nous pousser à travailler avec des compagnies d'application mobile, je dois
fournir une voiture avec toutes les charges qui viennent avec, et, en
plus, le 25 % que ces compagnies chargent est non déductible d'impôt.
Alors, on n'a que des chauffeurs... on est des chauffeurs et on est perdants.
Patricia :
En permettant la loi n° 17, vous ne vous rendez même pas compte de
l'injustice que vous créez pour les propriétaires
de taxi. C'est vous-même, le gouvernement, qui avez imposé ces permis il y a
plus de 40 ans. Pourquoi? Pour
acheter le monopole, trouver une façon d'aller chercher de l'argent aux
citoyens. L'industrie du taxi a changé depuis plusieurs années déjà.
Sylvain :
M. le ministre, je suis extrêmement bouleversé par ce que représente ce projet
de loi du point de vue de la
responsabilité de l'État québécois envers ses citoyens. Je ne connais aucun
chauffeur de taxi, ni même ne prend le taxi ou Uber, mais ce projet de
loi m'interpelle profondément.
Ici :
Je suis endetté de 87 000 $. J'ai des enfants à faire vivre. Je suis
au bord de la faillite. Paul, un chauffeur de taxi en furie qui a
préféré taire son nom.
Quand on parle de
valeurs du côté du gouvernement, on prétend connaître la valeur justement de ce
qu'on va donner. Mais, quand tu demandes la
question à un père de famille ou peut-être une mère de famille, ou un père
monoparental, ou une mère
monoparentale : Combien vaut ta famille, tu es prêt à donner quoi pour ta
famille?, il n'y a pas de prix. Il
n'y a aucun prix. On ne peut pas mettre un prix là-dessus. C'est impossible de
mettre un prix sur la valeur d'une famille.
Là, ce qu'on
fait, c'est ça, on met le prix justement, qu'on va déterminer... Je ne sais pas
qu'est-ce qu'on va faire, je ne sais
pas. Mon Dieu, on va-tu faire une règle de trois? Je ne sais pas, le ministre
des Finances, peut-être qu'il va me le
dire, là. Il est là, il me fait un petit signe... j'aimerais ça qu'il me donne
la formule. J'espère qu'elle est déjà faite puis j'espère au moins qu'on
va penser pas juste aux chauffeurs de taxi, mais aux familles également.
Marie-Ève : Je suis contre le projet de loi n° 17 présenté pour moderniser les taxis et permettre
l'arrivée d'Uber et d'autres pour les raisons suivantes : le gouvernement
ne peut pas décider de ne plus connaître la valeur des permis d'exploitation de taxi sans payer la valeur réelle
avant de l'abolir. Il pourrait au moins payer le coût défrayé par chacun
de propriétaires.
C'est sûr que
ça coûterait très, très, très cher, mais en même temps tu ne peux pas
arriver du jour au lendemain, comme
on a fait à Mirabel... Parce que ça a laissé des traces. Puis on aurait peut-être
dû, justement, se fier sur ce qui s'est passé dans les années passées, justement,
pour essayer... pour bâtir un aéroport qui n'existe pratiquement même plus, qui
n'est même plus apte à recevoir des avions.
On devrait peut-être y penser parce
que, justement, avec l'adoption
de ce projet de loi n° 17 là, Mme la Présidente, bien, ça risque de laisser des traces. Laisser
des traces, oui, peut-être sur l'industrie,
peut-être qu'on va s'apercevoir aussi que le transport adapté n'est pas à la hauteur. Mais en
même temps j'espère que le
tout va bien se dérouler et que ce n'est pas les gens qui vont payer pour.
Et je m'oppose à ce projet de loi n° 17, Mme
la Présidente. Merci.
• (17 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, y
a-t-il d'autres interventions? M. le député de Jacques-Cartier.
M. Gregory Kelley
M. Kelley : Merci, Mme
la Présidente. Je suis très content aujourd'hui de prendre la parole, pour
environ 20 minutes, pour discuter le projet de loi n° 17. C'est le premier projet
de loi où j'ai participé au début et sur la fin des consultations publiques. Et, un petit peu comme
tout le monde, quand on parle de l'industrie de taxi et Uber, moi, je suis
quelqu'un qui... J'habite dans le comté de
la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne
depuis plusieurs années. Alors, je suis quelqu'un qui utilise Uber, le
service Uber puis le taxi depuis plusieurs années, mais je n'ai jamais vraiment
réfléchi un petit peu sur le contexte qui
existe partout au Québec. J'étais plus au sein des questions comme un client,
sur le prix et tout ça, mais, après plusieurs heures en commission,
quand on a entendu plusieurs différents groupes, j'ai vraiment eu une occasion juste de réfléchir sur leurs
positions, mais aussi de mieux comprendre le contexte et réalité dans les
régions du Québec, pour des gens à
Montréal, pour des gens à Québec, pour des gens dans les autres villes, partout
au Québec, sur comment ce projet de
loi va changer des choses, et, sur certains éléments, peut-être pour le mieux,
sur des autres éléments, peut-être pas pour le mieux.
Je veux aussi
juste... parce que je sais qu'il y a des gens au ministère qui écoutent nos
échanges, ici, en Chambre, aujourd'hui, puis je veux juste, oui, dire
merci pour leur travail, parce que, quand même, la préparation d'un projet de loi comme ça, c'est un gros travail. Puis ce
n'est pas facile. Il y a un équilibre qu'il faut faire entre des gens qui...
des clients, des chauffeurs de taxi, des personnes qui sont des
chauffeurs d'Uber, des personnes qui utilisent le transport adapté. Alors, c'est vraiment un enjeu de notre
société qui est complexe. Et aussi c'est un petit peu un projet de loi qui
représente les défis d'un gouvernement dans un monde où la technologie
développe très rapidement.
Je me
souviens quand Uber a arrivée ici. C'était tellement facile, charger une
application sur son téléphone, puis tu
es maintenant capable de commander un lift au bar, au concert, au match de
hockey, «whatever». Alors, c'était un gros changement. Puis, au début, tout le monde dit : Oui, ça, c'est
formidable, incroyable. Mais on n'a pas vraiment réfléchi sur c'est quoi, l'impact de ça sur l'industrie du
taxi. Alors, ça, c'est pourquoi l'ancien gouvernement a déposé un projet pilote pour essayer de
mieux encadrer ça puis aussi aider l'industrie du taxi d'évoluer un petit peu, de s'adapter à la réalité d'un monde qui bouge vite, parce
que ce n'est pas juste pour les gens dans l'industrie du taxi, mais on peut
regarder un petit peu Airbnb, on peut
regarder des autres instances où la technologie a vraiment avancé l'économie.
Et est-ce qu'on a pris le temps de
penser un petit peu des travailleurs, et tout ça? Et la réponse, c'est
comme : C'est sûr, dans le projet de loi, il y a des éléments, et c'est évident qu'on va réfléchir à ça, mais il y
a aussi un grand aspect, qu'on va laisser «the free market array». Des fois, ce qu'on dit : Ah!
ça, c'est l'innovation. Oui, c'est sûr qu'Uber puis Lyft et d'autres
entreprises ont mis beaucoup d'argent
dans la recherche et développement pour créer une application qui marche. C'est
très simple à utiliser, c'est facile.
Mais, en même temps, ce n'était pas développé ici, au Québec. Ce n'est pas
quelque chose qui a été créé par des
Québécois. C'est une entreprise de Californie qui a fait ça, puis ils arrivent
ici, puis ils changent nos règles de jeu.
Alors, j'ai
entendu plusieurs fois pendant nos discussions que, oui, avec ce projet de loi
ici, nous avons vraiment à mettre
tout le monde sur la même patinoire. On aime utiliser des références de hockey
ici, dans la Chambre, souvent, mais c'est
O.K., on a une patinoire maintenant, mais les règles sont quoi, exactement?
Comme, quand j'ai entendu un petit peu de chauffeurs qui viennent des régions, des personnes qui ont besoin de
transport adapté, comme j'ai dit, je répète, je suis un petit peu... Est-ce
que c'est vraiment un projet de loi qui répond à tous les besoins? Et je pense
que non. Il n'y a jamais un projet de loi
qui arrive qui est parfait, ça, c'est certain. On répète ça ici souvent.
J'étais content de dire que le ministre
était vraiment à l'écoute. Je pense qu'on a eu des bons échanges, le ministre a
posé des bonnes questions. Les collègues de l'autre côté ont posé des
bonnes questions. Mes collègues de ma formation politique puis les autres ont posé des bonnes questions, parce qu'on a eu des
personnes qui ont vraiment des inquiétudes, puis on est là pour essayer
de faire les modifications dans la prochaine suite des choses, dans ce projet
de loi, puis faire des amendements. Puis je pense
qu'on est capables de trouver des solutions puis arriver avec un projet de loi
qui va protéger les plus vulnérables de notre société.
C'est là que
je veux vraiment juste commencer un petit peu des interventions qui m'ont
vraiment frappé, c'était pour le
transport adapté. Quand je regarde le projet de loi, c'est sûr qu'il n'y a pas
beaucoup qui encadre cette partie-là, quand
on parle des services comme Uber et Lyft, et plusieurs groupes ont intervenu
pour parler un petit peu de la réalité que,
si Uber et Lyft arrivent puis après ça il y a une réduction du nombre des taxis
en service, des flottes partout au Québec sont dans une réduction majeure à cause d'une
compétition entre les deux, c'est possible qu'il va y avoir des impacts sur le
transport adapté. Puis, pour moi, ça, c'est
vraiment des personnes des plus vulnérables de notre société, mais c'est aussi
des personnes qui, j'ai compris, utilisent
des services de taxi pour juste faire leur routine dans leur vie, c'est d'aller
voir un film, d'aller voir des amis,
n'importe quoi, là, faire un petit peu de tourisme aussi. On a entendu ça d'un
groupe. Alors, le transport adapté a un rôle très important partout au
Québec.
Alors,
je veux juste qu'on réfléchisse un petit peu sur ça, parce qu'on a entendu des
groupes qui disent : On n'est pas
sûrs que, concernant la formation, c'est adéquat, ce projet de loi. On a parlé
beaucoup qu'il y a des heures minimales de formation qui sont là, et des gens
ont dit : Bien, ce n'est pas une question d'avoir une formation minimale,
c'est important d'avoir une formation qui continue dans la vie d'un chauffeur
ou dans leur carrière. Alors, ça, c'est une chose qu'on a entendue, que
la formation, c'est très important.
La
députée de Westmount—Saint-Louis a
raconté une histoire très intéressante de quelqu'un qui a sorti d'un taxi,
puis le chauffeur a guidé la madame vers sa
maison puis a déposé des sacs, et tout ça. Alors, c'est des gens qui ont dit
qu'on reçoit un service présentement de l'industrie du taxi qui est formidable.
Mais,
si on regarde la réputation d'Uber et Lyft concernant le transport adapté,
juste regarder, faire une recherche de
Google, puis présentement, à Washington, un groupe a lancé une poursuite contre
Uber, parce qu'ils ont dit : Bien, le service n'est pas égal. Et une chose qu'ils ont dite : Ça prend
environ... je pense, excusez-moi, le chiffre était... c'est huit fois plus long d'attendre pour un lift d'Uber
si vous... besoin d'un transport adapté. Alors, ils disent : Le service
existe, c'est offert, mais ce n'est
pas égal. Et ça, ce n'est pas correct. Alors, une poursuite a été lancée contre
Uber, puis c'est après ça qu'Uber a
commencé dans les États-Unis, c'était en 2017, a commencé des différents
projets pour le transport adapté,
mais on dit : Uber est en existence maintenant depuis plusieurs années et
ils n'ont vraiment jamais réfléchi là-dessus, ce n'était pas une priorité pour eux autres. Et, pour moi, ça, c'est où
j'ai vu un «flag», comme on dit en anglais, j'étais comme : Wo! c'est quoi, ça, exactement?
Pourquoi Uber, il ne veut pas ça, ou Lyft? Puis après ça on a posé des
questions. J'ai eu l'occasion de
poser des questions directement à Lyft puis j'ai dit : Bien, pour vous
autres, est-ce qu'on peut mettre comme un chiffre là-dessus, c'est
8 % de votre flotte totale quand l'opération doit être adaptée pour le
transport des personnes handicapées qui ont besoin d'un lift? Puis ils ont
dit : On ne veut pas faire ça, parce qu'on laisse nos chauffeurs faire leurs choix. C'est vraiment,
comme je dis, le «free market reigns». Alors, ils ont dit : Non, non,
partout dans le reste du monde, on
n'a pas vraiment un niveau de nombre de véhicules qui doivent être en service
en transport adapté. Et moi, j'ai dit : Bien, ça, c'est une chose.
Puis j'ai quand même posé des questions. Est-ce que Lyft était prête à payer
pour une flotte puis des chauffeurs de faire le transport adapté à temps plein?
Puis la réponse n'était pas vraiment un oui.
C'était comme : Non, ça, ce n'est pas notre modèle d'affaires. O.K.,
encore, «fine», ça, c'est votre choix.
Mais,
quand on regarde puis on parle de nos chartes puis nos lois, moi, je crois, si
moi, je suis capable d'avoir un service qui est moins cher puis est
efficace, tous les Québécois doivent avoir le même droit. Ça, c'est pourquoi on
a des chartes des droits des personnes. Et
quand même je veux juste citer la Charte canadienne, où il y a une partie, là,
qui parle de l'égalité entre tout le monde, et je veux juste rappeler que des
personnes avec des déficiences mentales ou
physiques sont partie des personnes qui sont incluses, qui doivent avoir un
service juste. Je sais que je parle plus des lois d'un gouvernement, mais quand même des chartes puis des
constitutions dans les sociétés sont là parce que, si quelque chose... on aspire que notre société est comme ça.
Et c'est le gouvernement qui prend l'exemple, c'est le gouvernement qui prend le leadership. Ça, c'est pourquoi moi,
quand je regarde ça, moi, j'ai l'accès à Uber et Lyft, d'avoir un excellent
service, mais quelqu'un dans une chaise roulante n'a pas la même opportunité ou
accès à un service que moi.
• (17 h 40) •
And that's where I do find it a little
bit disappointing, because
perhaps, and you can look Uber and Lyft... recently went public, they made it pretty clear that their objective and how they want to be
successful is offer the best price, push out a lot of the competitors and then, at some
point, because they're not making any profits at this point in time, raise the
rates on people, and that's where they'll
gain some profit. I mean, that's just the kind of business, one-to-one model,
they don't hide it, that's what they want to do, that's how they believe
that they will be successful in the future. But again, I come back to the fact that people who need a transport that is
adapted, they're not super keen on doing that. So, maybe that is where the Government does have to step up and
present whether it is a percentage of vehicles that always have to be in operation, perhaps force certain
companies to make sure that the service is being offered. I think that is at
least the minimum we can do.
Et je suis très content de voir que la ministre des Aînés est présente
dans la salle parce que, je sais, c'est quelqu'un, au sein de leur caucus, qui lutte toujours pour
les plus vulnérables de notre société, puis je pense qu'elle va faire la même
chose concernant le transport adapté. Et ce
n'est pas une critique. Je sais que le ministre des Transports était vraiment
ouvert, il a vraiment écouté tous les
groupes qui ont présenté leurs inquiétudes concernant le transport adapté.
Alors, je sais que je peux compter
sur certains des députés de l'autre côté de faire le point avec le ministre au
sein de leur caucus, au sein du
Conseil des ministres pour s'assurer qu'il y a quelque chose dans le projet de
loi qui veut mieux encadrer le service de transport adapté. Mais encore, c'est
juste important, puis, si le gouvernement arrive et dit : C'est pour tout
le monde, il faut avoir une flotte
disponible à 8 %... Je prends juste un chiffre. Je ne sais pas s'il va
être 8 %. Je vais laisser les
gens du ministère de préparer quelque chose. Quand même, sur notre côté, on va
faire notre recherche, mais quand même,
si c'est 8 % puis Uber dit : Non, avec un taux de 8 %, on ne
vient pas, on quitte le Québec, bon, bien là, il faut faire un choix. Est-ce qu'on veut avoir un système
où, oui, la majorité des gens peut avoir un service à Uber puis Lyft qui est formidable, et tout ça, je répète un petit
peu, mais moi, je veux juste faire une réflexion sur les personnes les plus
vulnérables de notre société, alors c'est quelque chose de très important pour
moi.
Je
veux parler un petit peu de l'industrie du taxi maintenant, parce que, quand
même on a entendu un petit peu plusieurs
compagnies de taxi qui ont parlé d'accès à des fonds verts. Alors, tout le
monde comprend, oui, il faut être plus moderne,
avoir un meilleur service pour des clients, l'industrie du taxi est vraiment
là, mais je veux juste rappeler que l'ancien gouvernement a présenté des différents
programmes qui sont disponibles pour l'industrie du taxi de vraiment moderniser dans notre monde présentement, qui est
très compétitif. Alors, il y a un volet qui est sur l'électrification, et
amélioration, et efficacité énergétique pour des parcs de véhicules de taxi.
Alors, après la fin de semaine, on a parlé beaucoup de l'environnement puis
l'économie, puis c'est sûr qu'une chose pour réduire nos gaz à effet de serre,
c'est important qu'on a moins de véhicules
sur nos routes qui consument le gaz, c'est important d'avoir de plus grandes
flottes de véhicules électriques.
Alors, on peut commencer avec des taxis, c'est sûr, à Montréal, et quand même,
les flottes de Uber puis de Lyft au
centre-ville, c'est sûr, des gens utilisent ce type de service pour aller au
point a à point b souvent. Alors,
si on est capables d'avoir une plus grande volonté du gouvernement de rendre
disponibles des fonds verts à différentes compagnies, pas juste les grands joueurs, mais peut-être aussi des
petites et moyennes entreprises dans les régions, c'est quelque chose qui est très intéressant pour toute
notre société. Alors, j'espère qu'on va continuer de parler un petit peu
de ça, de comment on peut avoir une industrie qui est plus verte.
Un
autre volet, c'était le développement des technologies. Alors, on parle
toujours des différents types d'application sur un cellulaire, puis
finalement la création d'une image de marque. C'est sûr, avec une
multinationale comme Uber et Lyft, eux
autres sont des compagnies avec des milliards de dollars. Alors, ils sont
capables de faire des campagnes de publicité
et ils ont plus de moyens, c'est juste simple. Ce n'est pas facile pour des
entreprises québécoises de compétitionner avec quelqu'un qui a des
ressources énormes comme ça.
Alors,
ça, c'est trois choses que l'ancien gouvernement a présentées qui restent toujours en existence et toujours sur le site du ministère des Transports. Alors, je souhaite que des joueurs dans
l'industrie de taxi vont continuer de profiter de ces programmes-là puis continuer de... leurs services parce que,
c'est sûr, c'est un énorme défi. Et ça, c'est un autre élément que je veux juste discuter un petit peu,
c'est que, comme quelqu'un qui utilise les taxis à Montréal
puis des fois à Québec, je ne peux pas vraiment utiliser des services
de taxi en région. Alors, quand on a entendu des différents groupes partout au Québec qui ont dit : Moi,
c'est des petites et moyennes entreprises, on a sept chauffeurs qui travaillent
pour nous, c'est sûr que, si Uber
arrive, ça va être très, très difficile, dans des régions, pour ces petites, moyennes
entreprises de compétitionner avec
une multinationale comme Uber, comme Lyft. Alors, ça, c'est une chose pour
réflexion, parce qu'il faut protéger ces entreprises-là. Quand on a
discuté un petit peu avec Uber et Lyft, comment leur modèle d'affaires marche, c'est sûr que le service est vraiment
disponible sur des heures de pointe, pendant des gros événements dans les
villes. Mais dans les régions, si on fait
ça — il y a
un petit festival au centre-ville, quelque chose comme ça — peut-être qu'on va avoir des gens qui travaillent à temps partiel qui... faire du
Uber qui vont être disponibles. Mais, au milieu de la journée, est-ce qu'on va voir un service qui est
là, qui est présent? Quand même, pour moi, dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal,
le service d'Uber n'est pas toujours
disponible. Des fois, ça prend un petit peu plus de temps, parce qu'il n'y a
juste pas aussi des chauffeurs qui
font du Uber dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal. Alors, j'imagine, dans les
régions, ça va être un gros défi. Ce n'est pas juste des chauffeurs partout qui
vont faire le travail à temps plein. Des fois, c'est possible qu'on va avoir
des ruptures de service. Il faut juste
regarder puis poser des questions comme ça, des questions sur les régions avec
des petites et moyennes entreprises,
pour s'assurer que le service va rester là, disponible pour tout le monde,
parce que c'est toujours,
particulièrement pour nos aînés, une façon très, très importante de faire les
différents voyages entre l'épicerie ou quand même visiter des amis.
Alors, c'est juste quelque chose qu'il faut faire une réflexion là-dessus.
Puis
je reviens un petit peu sur ce point-là, des différentes courses qui sont
faites au Québec. Depuis qu'Uber est arrivée,
ils mangent présentement 10 millions des 50 millions de courses qui
sont faites partout au Québec. Ça, c'est un chiffre très impressionnant. Puis moi, c'est sûr que j'ai des craintes. Comme j'ai parlé, le modèle d'affaires
pour Uber est clair :
we are going to make sure the price remains low and, once we have less
competition and we have a monopoly or a good chunk of that, we will raise our prices, because, if everyone is
already involved and already using our technology and is using our service, that's our pathway to
creating revenues for their company. But, when we look at that, we ask the
question about : How much are your drivers being
paid? And the MNA from La Pinière was very good on this point, because Uber and Lyft both said,
«Well, roughly, they make $20 an hour.» OK, that's
great, but that was not after we considered
the other costs that are taken off for whatever be the charge that has to go to
Uber, the charge that has to go to gas. So, when we look at it, it's
possible that people might actually make anywhere in between $8 to $12, which I
am not critiquing, because there are people
that drive for Uber and potentially, one day, will drive for Lyft or for other
companies that do this because they want to just have that extra
200 bucks a month to potentially pay for theirs cars or whatever it may be. But, if we go to that point, studies
also show that Uber drivers only stay in the industry for two years; we're just
going to have a continuing door of low-wage, low-paying jobs, which we do have
to be concerned about, because a lot
of these people that are driving these cars I see are students or people who
are a little bit younger. So again, to have access to this service that is at a lower cost, perhaps, right now than
the taxi industry, what is the overall price that we are paying and what
type of jobs are we creating?
Alors, c'est sûr qu'il y a beaucoup de travail à faire dans les
prochaines étapes du projet de loi. Je sais qu'avec le député de La Pinière puis le député de
Viau on va travailler très, très fort pour proposer des amendements au projet
de loi, première chose, pour s'assurer que
le projet de loi est mieux encadré pour protéger les personnes qui ont besoin
de transport adapté. Alors, à ce
stade-ci, je ne suis pas capable de dire que je vais voter pour le projet de
loi n° 17. Et je suis prêt à travailler avec le
gouvernement pour faire des améliorations. Merci, Mme la Présidente.
• (17 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, je
reconnais maintenant la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme
Paule Robitaille
Mme Robitaille :
C'est bien ça. Bonjour, Mme la Présidente. Je lisais il n'y a pas longtemps un
article dans le journal Le Soleil
daté de janvier 2019, Mme la Présidente, et je me suis attardée à une
citation. On lit : «...M. Bonnardel a promis qu'il allait dès cette année "déposer
une loi qui va amener tous les acteurs du taxi, que ce soit Uber, que ce soit
Eva, que ce soit [Netflix], à jouer sur une
patinoire où tout le monde — tout le monde, Mme la Présidente — trouvera son compte".» Ah oui?
Tout le monde trouvera son compte?
Bien,
écoutez, moi, je suis la députée de Bourassa-Sauvé, Montréal-Nord, où il y a
beaucoup de chauffeurs de taxi, où il
y a beaucoup de chauffeurs de taxi qui, en ce moment, angoissent, pour qui, en
ce moment, c'est extrêmement difficile.
Il y a eu des gens qui ont essayé de se suicider. Il y a des gens qui ont
divorcé. Ça va très, très mal pour ces gens-là. Ils sont très angoissés. Alors, quand j'ai lu cette citation-là puis que
j'ai vu «à jouer sur une patinoire où tout le monde trouvera son compte», je me suis vraiment posé des
questions. Ce n'est pas l'impression que j'ai eue, ça, lorsque je suis allée dans le quartier Saint-Michel, à Montréal,
lors d'une grosse manifestation, une grosse assemblée de chauffeurs de
taxi fin mars dernier, après le dépôt du projet de loi n° 17.
Quand je suis allée à ce grand rassemblement de
chauffeurs de taxi des...
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...il y a une personne ici qui a la
parole, et j'aimerais bien l'entendre, alors je vous demanderais de
garder le silence, s'il vous plaît.
Mme Robitaille :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je vous disais que, bon, tout le monde
trouverait son compte. Et puis, bien,
en tout cas, ce n'est pas l'impression que j'ai eue en mars dernier quand je
suis allée à la grande assemblée des
chauffeurs de taxi et des propriétaires de permis de taxi dans
l'Est-de-Montréal. La salle, Mme la Présidente, était bondée, il devait y avoir au moins un millier de
personnes. J'ai entendu des gens alarmés qui avaient peur de tout perdre,
tout perdre le travail d'une vie, perdre toute la valeur d'un permis de
chauffeur de taxi qu'ils remboursent, Mme la Présidente, à la sueur de leur
front.
Ce n'est pas
une impression que j'ai eue non plus lorsque je suis allée à Rimouski avec le député de
La Pinière, lorsqu'on a
écouté les doléances d'une centaine de propriétaires de permis de taxi et des
chauffeurs de la région du Bas-du-Fleuve qui avaient les mêmes inquiétudes, les
mêmes angoisses, qui sentaient la même injustice, Mme la Présidente,
que leurs collègues de Montréal devant le manque d'empathie, la froideur, le
manque d'humanisme du ministre
des Transports de la CAQ. Depuis, l'angoisse, comme je vous disais tout à l'heure, ne se calme pas. Alors que je lis que le ministre
veut jouer sur une patinoire où tout
le monde trouvera son compte, je me
dis que c'est un peu raté, c'est très,
très triste.
J'ai parlé récemment à un chauffeur de taxi que
je connais bien, qui vient de Rivière-des-Prairies, il s'appelle Jacques Claude Hernande. C'est un Haïtien
d'origine, qui vient de Hinche, en Haïti, et qui est arrivé ici en 1979 et qui
fait du taxi depuis. Parce que,
Mme la Présidente, vous savez, le taxi pour ces gens-là, quand ils
arrivent au Canada... Des fois,
c'est difficile de se trouver un emploi, et il faut se trouver un emploi et il
faut se trouver un emploi rapidement. Alors, l'option
pour M. Hernande en 1980, c'était de s'acheter un permis de taxi, et là il
a emprunté, il a emprunté à la banque, il a emprunté à ses amis, il s'est acheté un permis de taxi et il a
commencé comme ça sa carrière. Et M. Hernande maintenant, c'est un pilier de la communauté taxiste du Nord-Est de Montréal,
c'est un des leaders de la communauté. Et, en
ce moment, il y a... puis c'est un monsieur qui a cinq enfants,
11 petits-enfants, 13 arrière-petits-enfants. Il a 80 ans,
M. Hernande, et il fait encore du taxi et il comptait là-dessus
pour sa retraite. Maintenant, c'est son fils, tranquillement, qui prend la relève, et tout ce qui arrive, là, tout ce qui
arrive en ce moment, ça l'angoisse énormément. Il y a quelques
années, il a dû vendre son auto, se débarrasser
de son vieux taxi pour en acheter un nouveau, pour répondre aux normes. Ça lui
a coûté extrêmement cher, ça lui a coûté environ 76 000 $, et puis, le permis de taxi qu'il
avait, il devait encore 100 000 $ dessus. Alors, il a une dette de près de
200 000 $, M. Hernande. Et là, avec tout ce qui arrive, bien,
évidemment, mettez-vous à sa place, ce n'est pas simple, puis il ne sent
pas qu'il est écouté non plus par le gouvernement en place.
J'ai
rencontré aussi, récemment, Pierre Maxime, qui est un gars de Montréal-Nord.
Lui, il a acheté son permis en 2003.
Ça lui a coûté 170 000 $, 170 000 $, ça, Mme la Présidente,
en 2003. Et puis, savez-vous, il a emprunté pour payer ce permis de taxi là et là il doit 200 000 $ en intérêts
à la banque. Cet homme-là, il a quatre enfants, il a une femme enceinte. Alors, pour lui, ce qui arrive en ce
moment, l'adoption de ce projet de loi n° 17 là, c'est une catastrophe
pour lui.
Ailleurs,
dans les Cantons-de-l'Est, par exemple, un endroit que je visite régulièrement,
où je passe tous mes étés, il y a un
chauffeur que tout le monde connaît dans la région, qui s'appelle Michael. Il
connaît tout le monde, il connaît toutes
les petites dames qui doivent aller un peu partout, qui doivent aller au CLSC.
Il dépanne notre famille depuis des
années. Quand il y a une urgence... Je me
souviens, j'ai eu un fils qui s'est cassé la clavicule. Bien, c'est lui qui l'a
amené à l'hôpital. Alors, il rend des
services à tout le monde et il a un permis de taxi. Et là, bien, le fait
que ça soit complètement déréglementé, eh bien, Michael, il ne sait pas ce
qui va arriver. Lui aussi, comme les gens de Montréal-Nord, comme les
gens de Rivière-des-Prairies, comme
les gens de Rivière-du-Loup, comme les gens de Rimouski, il a peur, il ne
sait pas ce que l'avenir va lui réserver.
Pierre,
Jacques Claude, Michael et des milliers de propriétaires de taxi vont devoir
continuer à payer le prêt à la banque pour leurs permis de taxi comme
s'ils payaient une hypothèque pour une maison qui n'a plus aucune valeur.
Imaginez, payer un prêt pour quelque chose qui ne vaut pratiquement plus rien.
C'est quelques milliers de personnes qui ont
investi toutes leurs économies, là, dans ce projet-là, dans le projet d'une
vie. C'est brutal, ce n'est pas rien. Et là pas de compensation équitable. Ce n'est pas assez. 250 millions, ce n'est pas assez. Ce n'est pas assez pour ces gens-là. On est tous pour la modernisation, mais il faut quand même
compenser d'une façon humaine ces gens-là. Moi, je pense aux gens de mon comté, ces gens-là qui ont tout donné
pour leur industrie, pour cette industrie-là, et qui maintenant,
bien, se font dire : Bien,
écoutez, ça va être ça, et puis, là, c'est déréglementé, puis, bien,
arrangez-vous. Est-ce que c'est comme ça qu'on reconnaît tout ce qu'ils ont
donné pour le Québec, tous les efforts qu'ils ont donnés, tout ce
qu'ils ont servi, ce qu'ils ont donné pour servir le Québec? Alors, avec l'adoption du projet de loi n° 17, ce sera, bien, la faillite pour plusieurs. Et puis comment ils vont se sortir de ce calvaire-là? L'industrie du
taxi, on l'a dit, on l'a répété ici, c'est quand même 1 milliard de dollars. Parmi ces gens-là, il y a 55 % des gens qui sont issus de l'immigration.
Est-ce qu'il y a eu des études pour amener ce projet-là, pour comprendre
la portée de ce projet-là? Je me pose des questions.
Alors, comme
je le dis, évidemment, on est tous pour la modernisation, pour des applications
mobiles, pour que ça soit efficace,
mais à quel prix? Il faut absolument une compensation équitable. Malgré
l'adoption de ce projet de loi là, il
faut une compensation équitable. Et là, après ça, il va y avoir des chauffeurs
de taxi qui vont travailler sous le salaire minimum. Il faut s'en souvenir, de ça. Des gens qui vont travailler sous
le salaire minimum, c'est extrêmement difficile. Quand on a une famille de quatre, quand il faut payer son hypothèque,
quand il faut payer le vieux prêt pour le permis de taxi, ce n'est presque pas faisable. Il faut être sensibles à ça. Et
pour les clients, bien, qu'est-ce que ça veut dire? Bien, moi, je
m'inquiète. Moi, je m'inquiète, parce que, là, si je comprends bien, un
chauffeur de taxi va pouvoir avoir sa formation
rapido-presto sur l'Internet. Il va y avoir des contrôles qui vont être faits
rapido-presto sur la vérification, par exemple,
des antécédents judiciaires. Comment ça va fonctionner, tout ça? Pour le
consommateur, ce n'est pas évident. Et puis pour tout ce qui touche le
transport adapté c'est aussi crucial.
• (18 heures) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Mme la députée, vous pourrez compléter votre
intervention à la reprise des
travaux, à 19 h 30. Vous aurez compris qu'il faut passer aux trois débats
de fin de séance.
Alors, je vais suspendre les travaux quelques
instants...
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, on me dit que le député est arrivé.
Débats de fin de séance
Alors, tel
qu'annoncé précédemment, nous allons procéder aux trois débats de fin de séance. Le premier débat se fera entre M. le député de Laval-des-Rapides et M. le ministre
de l'Énergie et des Ressources naturelles concernant l'absence de vision du gouvernement caquiste en
matière de vente d'hydroélectricité.
Je vous
rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a
soulevé le débat et le ministre
qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député a
ensuite un droit de réplique de deux minutes.
M. le député de Laval-des-Rapides, je vous cède
la parole pour une durée de cinq minutes.
Plan
du gouvernement pour augmenter les exportations d'électricité
M. Saul Polo
M. Polo :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vous remercie ainsi que vos collègues
d'avoir accepté, là, le débat de fin de séance sur cet enjeu-là. Je
salue le ministre responsable de l'Énergie et des Ressources naturelles.
Écoutez, je
pense que c'est un thème qui vaut ce débat, Mme la Présidente, parce que non
seulement aujourd'hui, mais à de
multiples reprises je ne suis levé ici, en Chambre, pour questionner le
ministre sur la vision de son gouvernement... ou, je devrais dire,
l'absence de vision de son gouvernement.
Écoutez, nous
sommes tous fiers d'Hydro-Québec, en fait, de notre société. Et vous êtes, je
pense, une ancienne employée
d'Hydro-Québec, si je ne me trompe pas, Mme la députée... Mme la Présidente. Et
à ce titre-là on a souligné, je pense
qu'on a tous souligné, et en premier lieu le ministre de l'Énergie, les
75 ans d'Hydro-Québec il y a quelques semaines. Il y a même quatre anciens premiers ministres qui
se sont réunis avec... trois anciens avec le premier ministre actuel pour
souligner, justement, l'apport, le rôle important, le rôle primordial de cette
société d'État, qui, selon moi et selon beaucoup
de gens, est un peu au centre de la Révolution tranquille, est un peu au centre
de cette fierté des Québécois d'être non
seulement reconnus comme un peuple qui a su exister et continuer d'exister en
Amérique du Nord comme étant le seul
peuple francophone, mais aussi qui est de renommée mondiale et qui est la
fierté des Québécois à l'international, la fierté de ce savoir-faire que nous avons développé grâce à ces nombreux
projets hydroélectriques dans le Grand Nord, grâce à, justement, cette
émancipation du peuple québécois, de vouloir être maître chez lui, maître de
ses décisions, notamment de son potentiel et
de sa capacité à non seulement assurer son destin, mais surtout et avant tout
aussi à pouvoir l'exporter.
Et à de
multiples reprises j'ai questionné le ministre sur cette vision, parce qu'on
parle... le gouvernement parle d'alliance énergétique. Le premier
ministre en a brièvement parlé il y a quelque temps déjà, il y a de cela deux
ans, auprès des militants de la Coalition
avenir Québec. Mais, au fur et à mesure que ce gouvernement prend place, au fur et à mesure que ce gouvernement assume ses responsabilités, bien, nous
découvrons peu à peu un peu cette vision sans qu'elle ait été complètement
détaillée.
On s'entend,
on veut tous pouvoir écouler les surplus, on est tous pour ça. Et je veux, en
fait, préciser auprès du ministre... Parce
qu'il a à quelques reprises essayé de faire... un peu interprété mes propos comme étant fier ou
étant content de pouvoir dire que le premier ministre n'a pas réussi son deal en Ontario ou que le premier ministre n'a pas
réussi son deal à New York. Loin de là. Je pense que tous les Québécois,
on souhaite, un, pouvoir justement exporter nos surplus et, encore plus, pouvoir exporter encore plus d'hydroélectricité auprès de nos voisins. On est fiers. On est fiers parce que c'est
une énergie verte, une énergie renouvelable. Donc, loin de moi de me satisfaire
ou, enfin, de pouvoir prendre plaisir au fait que le gouvernement échoue ou doive
patienter de pouvoir aller encore plus loin à ce niveau-là. Au contraire,
on souhaite tous la réussite d'Hydro-Québec. Mais ce qu'on souhaite
aussi, c'est d'avoir une vision, une vision qui est cohérente, d'avoir... de recevoir des explications ou, en fait, de voir
une vision qui se tient, une vision qui, avant tout, permet de pouvoir pleinement
exploiter cette ressource-là.
Et donc ce que je
remarque et ce que je questionne aujourd'hui à nouveau le ministre, c'est cette
stratégie du premier ministre... Et je dis bien du premier ministre parce que, malheureusement, et je l'ai souligné aujourd'hui, ce n'est
pas par manque de respect envers le collègue,
c'est qu'à chaque fois, le premier
ministre, lorsqu'il
s'est déplacé, que ce soit en Ontario, que ce soit à New York, malheureusement, et je vous l'ai dit en période de crédits, malheureusement, il ne s'est pas déplacé en
compagnie du ministre de l'Énergie, qui est le premier garant, si on
peut dire, le premier responsable, le premier à assumer cette responsabilité,
comme ministre, de pouvoir, justement, mener à terme cette vision.
Et
ce que je déplore, c'est la stratégie du gouvernement, du premier
ministre de mettre sur la table en
partant la meilleure offre possible. En Ontario, c'était quoi? En Ontario,
c'était de dire aux Ontariens : Achetez nos surplus, en contrepartie on vous offre des emplois pour vos Ontariens
chez nous, plutôt que des emplois pour des Québécois,
on vous offre d'être copropriétaires,
partenaires de nouveaux barrages au Québec. Et, malgré tout ça, malgré d'avoir mis sa
chemise sur la table, le premier ministre de l'Ontario a refusé son
deal.
Qu'est-ce qu'on a entendu la semaine dernière? C'est le premier ministre dire aux New-Yorkais :
Bien, toute entente signée au-dessus de 0,00 $ le kilowattheure va déjà
être un gain pour le Québec. Excusez-moi, Mme la Présidente — je sais qu'il reste très peu de temps — on n'est pas prêts à faire des ventes à
rabais. Au contraire, ça nous a coûté tellement cher, pouvoir développer
cette expertise-là, nous, ce qu'on souhaite, c'est que les Québécois puissent
pleinement...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède
la parole à M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles. Et
je vous rappelle que vous disposez d'un temps de cinq minutes.
M.
Jonatan Julien
M.
Julien : Oui, merci, Mme la Présidente. Merci, cher collègue, de nous
donner l'occasion, en ce débat de fin de session, de partager,
justement, sur le sujet que vous amenez.
Parlons
de vision, Mme la Présidente. Parlons-en, justement, de vision. Notre vision
est on ne peut plus claire, et on l'a
énoncée dans les premiers jours de notre gouvernement justement pour rétablir,
rétablir l'absence de vision du gouvernement précédent. On faisait des
projets de développement électrique au Québec alors qu'on était en surplus
important chez Hydro-Québec. Et ce qu'on a dit au Québec, c'est que dorénavant
tous nos efforts seront mis, au gouvernement,
pour faire de l'exportation de l'énergie renouvelable, de l'énergie propre du
Québec, avant de poursuivre, le cas échéant, le développement électrique
au Québec. Et on a fait un terme à certains projets de développement qui
étaient dus à un manque de vision. On est en surplus, on a trop d'énergie et on
continue, en réalité, de financer du développement.
Et ce qu'on veut faire, c'est le plus rapidement possible, Mme la Présidente,
faire en sorte que nos surplus soient
bien utilisés, parce que la réalité, au Québec, c'est que, dans les 10
dernières années, la consommation énergétique, hydroélectrique et électrique du Québec a stagné, ça n'a pas augmenté,
rien. Pourtant, on a fait des projets de développement. Et aujourd'hui
on a des surplus qu'on veut exporter.
Alors,
je salue, premièrement, cette vision-là et je salue le leadership du premier
ministre. En mission économique à New York, à Washington, il a eu
l'occasion de rencontrer les plus grandes autorités, les plus hautes autorités
pour, justement, discuter de cette
volonté-là. Naturellement, une négociation, ça prend du temps. Hydro-Québec
négocie déjà depuis un certain temps
avec New York. Et le mois dernier, quand le maire de Blasio a nommé
le Québec comme étant la piste de
solution pour sa transition énergétique, on en est très fiers. Et ce n'est pas
arrivé comme ça, comme pour rien, c'est
parce qu'Hydro-Québec travaille déjà avec des partenaires à New York
justement pour assurer la possibilité d'exporter nos surplus à un tarif
négocié qui sera économiquement rentable pour le Québec.
Alors, la vraie vision, on l'a annoncée au jour 1.
On veut exporter nos surplus, nos surplus qui sont abondants, avant de faire du
développement électrique au Québec, et on va le faire le plus rapidement
possible par de la négociation.
Ce
qu'on a au Québec, c'est quoi? C'est une énergie propre, une énergie
renouvelable, qui fait en sorte que nos voisins, s'ils bénéficient de ces exportations-là, vont être en mesure
également, eux, de faire le virage vers la réduction des GES soit par la réduction de l'utilisation du
gaz soit par la réduction de matières fossiles comme le mazout. Et on va
continuer de travailler au Québec, là. On a un plan de transition énergétique
justement pour que l'industrie passe du mazout
au gaz naturel, du gaz naturel à l'électricité. On a suffisamment
d'hydroélectricité pour subvenir aux besoins internes du Québec et de
favoriser l'exportation.
• (18 h 10) •
Mais
ce qui est le plus important dans tout ça, Mme la Présidente, quand on parle de
vision, c'est, puisqu'on l'a clairement
énoncé, puisqu'on a dit nos intentions de vouloir exporter, puisque le premier
ministre, en réalité, va rencontrer les
grandes autorités, les hautes autorités des États concernés... Et moi, je
rencontre le ministre de l'Énergie Rickford la semaine prochaine à Toronto, on va continuer d'avoir des échanges avec
les autorités pendant qu'Hydro-Québec, lui, avec ses équipes, sur le terrain, font de la négociation avec les
partenaires. Et à terme on va réussir, on va réussir parce qu'on est ambitieux. On va réussir, parce qu'on est
fiers de notre richesse, justement à faire en sorte que cette vision-là qu'on a
énoncée au premier jour de notre
gouvernement... La priorité, c'est l'exportation. La priorité, c'est de faire
du développement économique pour le
Québec en exportant, d'augmenter la richesse. Alors, on ne peut pas avoir une
vision plus claire que celle-là.
Et on ne fera
pas, a contrario, Mme la Présidente, du développement électrique,
hydroélectrique ou éolien, si on est
en période de surplus, mais le plus rapidement possible on souhaite retourner
en développement. Mais notre priorité, notre vision : exporter. Et on va travailler
avec le Mass, avec New York et on va effectivement continuer d'avoir des discussions avec l'Ontario, qui aujourd'hui
ont des centrales nucléaires, mais qui, à terme, vont s'apercevoir que la vertu
est de notre côté et que c'est nous qui
avons la meilleure ressource énergétique pour faire de l'exportation, au
bienfait de l'ensemble de leur communauté. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, M. le
député de Laval-des-Rapides, je vous cède la parole pour votre droit de
réplique de deux minutes.
M. Saul Polo (réplique)
M.
Polo : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Écoutez, j'écoute notre
collègue ministre de l'Énergie et puis je lui souhaite... Parce qu'en fait on se souhaite tous du succès à travers
Hydro-Québec. Ceci dit, un peu d'humilité, lorsqu'il fait référence au passé, parce qu'il n'y a pas
trop longtemps de ça, Mme la Présidente, c'est quand même notre gouvernement
qui a non seulement lancé, mais, quand même,
signé l'entente la plus importante au niveau des exportations vers le
Massachusetts. Donc, je veux bien
prendre... j'entends le ton utilisé par le collègue de se lancer des fleurs,
mais, ceci dit, je pense que, le passé, on peut en être très fiers, le
passé pas si lointain de ça, on peut en être très fiers, nous aussi.
Ceci dit, quand on parle de nationalisme, Mme la
Présidente, j'aimerais aussi le souligner... Parce que notre argument, mon point, et le ministre
ne l'a pas abordé de cette façon-là, mon argument, notre point, c'est qu'à
chaque fois que le premier ministre s'en va négocier à
l'extérieur il met tout de suite en partant la meilleure offre possible. Et, nous, ce qu'on dit, c'est : Si vous êtes vraiment
un gouvernement nationaliste, si nos voisins ne sont pas capables
actuellement d'accepter vos offres, vos meilleures offres,
regardez aussi comment cous pouvez aider nos industries, soit nos industries
établies ou soit nos industries naissantes.
Quand on regarde, par exemple, l'industrie du
«blockchain», il y a un intérêt palpable, et vous le savez, M. le ministre,
il y a un intérêt palpable de différentes industries de pouvoir avoir
accès à une plus grande capacité, une plus grande offre de la part d'Hydro-Québec. Ces industries-là souhaitent s'établir au Québec,
souhaitent développer encore plus de
projets ici, au Québec, et c'est là une opportunité de pouvoir, justement,
être un gouvernement nationaliste qui aide à créer des emplois au Québec, qui aide à soutenir cette industrie-là,
par exemple, ou d'autres industries, qui aide justement
à créer des emplois payants, comme votre gouvernement se plaît à dire.
Quand on
parle de nationalisme, il faut aussi respecter tout ce qu'on a fait, tout ce
qu'on a fait pour bâtir ce capital, ce capital positif pour le Québec,
et non pas le donner à rabais. Et c'est ça, le fond de notre argument, M. le
ministre. Aujourd'hui, là, ce qu'on vous dit, c'est : Non seulement faites
votre travail, mais allez le faire en respect de tout...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Merci, M. le député. Alors, nous allons maintenant procéder au second débat, entre Mme la députée de Saint-Laurent et M. le ministre
de la Famille, en remplacement de M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, concernant l'improvisation du gouvernement caquiste dans le dossier des maternelles. Mme la députée de
Saint-Laurent, je vous cède la parole pour une durée de cinq minutes.
Consultations
sur le projet de déploiement de maternelles quatre ans
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Je suis un peu
surprise de ce remplacement, compte tenu que nous sommes présentement, aujourd'hui, en consultations particulières pour
le projet de loi n° 5 qui porte sur les maternelles cinq ans et que tous
les deux, nous aurons terminé de siéger dans cette consultation particulière,
mais je suis assez surprise parce que même le ministre de la Famille n'est pas dans cette commission pour entendre les
différents groupes. Mais la question que j'ai posée aujourd'hui en
Chambre, c'était la suivante. Moi, je voulais savoir, puisque le député de
Richelieu, qui est dans les consultations
particulières, il dit : On aime la science... Nous autres aussi, on aime
la science. Nous, pendant des semaines, nous avons fait des demandes pour avoir différents groupes, différentes
personnes, différents intervenants, pour avoir une variété d'opinions.
Et au Québec,
Mme la Présidente, nous avons la chance d'avoir des experts. On n'a pas besoin
de voyager ni à New York ni à
Toronto pour les trouver, ils sont ici, chez nous. Et ils connaissent
parfaitement notre réseau d'éducation mais aussi notre réseau de la
petite enfance, ils ont fait des recherches sur le 0-7 ans.
Ici, par exemple, on a insisté,
Dr Jean-François Chicoine, au CHU de Sainte-Justine. On a demandé Carmen
Dionne, Département de
psychoéducation de l'UQTR; Mylène Drouin, directrice régionale de la santé
publique de Montréal, qui d'ailleurs
a publié un rapport, en février dernier, qui portait sur les maternelles cinq
ans et qui disait : Il y a encore des lacunes, consolidons d'abord nos acquis, et qui mentionnait à ce
moment-là, il n'y a pas... juste en février dernier, qu'avant d'aller davantage dans les maternelles quatre ans,
pouvons-nous d'abord nous occuper de la situation actuelle? À ce jour, le
gouvernement de la CAQ refuse de les entendre, alors qu'il y a des plages
horaires qui se sont libérées.
On a aussi
demandé la présence de la CSDM, la plus grande commission scolaire au Québec.
Un refus, alors que, Mme la
Présidente, savez-vous quoi?
Initialement, la maternelle quatre ans, ça s'est développé où, déployé où? À la
CSDM, où moi-même, j'ai pu en
bénéficier. Et c'était sous l'égide de la CSDM. Alors, c'est étonnant de
vouloir refuser d'entendre la première commission qui a mis en place les
maternelles quatre ans.
Je trouve ça un peu dommage aussi parce qu'en
réponse à mes questions le ministre de l'Éducation, lors de la période des questions, a parlé de lobby. Moi,
j'aimerais vraiment savoir, et j'espère avoir une réponse de la part au moins du ministre de la Famille : Est-ce qu'il considère le
Dr Chicoine un lobby? Est-ce qu'on considère la Direction régionale
de la santé publique de Montréal un lobby?
Est-ce qu'on considère Carmen Dionne, du Département de la psychoéducation
de l'UQTR, un lobby? J'aimerais vraiment
avoir une réponse. S'il y a une seule question aujourd'hui que j'aurais, ce
serait celle-ci. Alors, j'aimerais avoir au moins une réponse là-dessus.
Par la suite,
l'échange s'est poursuivi parce que mes autres collègues aussi ont posé des
questions, à juste titre, par rapport
aux maternelles quatre ans, parce que, lorsqu'on veut engager 2 milliards
de dollars de fonds publics, de l'argent durement gagné par les Québécois, en éducation, nous autres, on est
d'accord en autant que, un, on ait un plan et qu'on ait des besoins réels. On n'a toujours pas de plan
du déploiement. On ne sait pas où est-ce qu'ils vont les mettre, comment
qu'ils vont les mettre. On sait juste qu'ils
ont tellement mal compté qu'une classe qui devait coûter 122 800 $ à
construire va peut-être coûter
800 000 $ et, si on est chanceux ou pas trop chanceux, 1 million
de dollars par classe. Ça commence à
coûter cher, sauver le siège du premier ministre, Mme la Présidente.
Mais ce qui
m'a un peu heurtée, aujourd'hui, et «un peu» est un euphémisme, c'est à une des
questions posées par rapport aux priorités, parce qu'on a parlé d'enfants autistes. On a parlé plus précisément de
l'école l'Étincelle parce que, l'école
l'Étincelle, qui est aussi à la CSDM, il y a une situation assez troublante qui
a été révélée par Radio-Canada, les enseignants
ont fait appel aux médias parce qu'après avoir écrit une lettre conjointe,
les syndicats, avec la présidente de la commission scolaire de Montréal, au mois de mars, qui invitait le
ministre à venir visiter l'école l'Étincelle, cette lettre est restée lettre morte, pas de réponse, signal
radio. Alors, les syndicats se sont tournés vers les médias pour interpeler
le ministre. Et là, sa réponse à lui, en
scrum, il a dit la chose suivante : N'appelez pas le ministre, appelez un
ébéniste. Je me suis dit : Bien,
voyons donc! Mais il a osé le répéter en Chambre, ici : N'appelez pas le
ministre, appelez l'ébéniste.
La lettre qui a été signée par les syndicats
ainsi que par la CSDM demande tout simplement au ministre de l'Éducation : Venez nous voir, venez
constater notre réalité, venez comprendre les véritables besoins de nos enfants
québécois. Pas besoin d'aller à Toronto ni à New York. Venez chez
vous, au Québec, s'il vous plaît.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je
cède la parole au ministre de la Famille pour un temps de parole de cinq
minutes.
M. Mathieu Lacombe
M.
Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'entends ma
collègue dire qu'elle est surprise que je
sois ici ce soir. Moi, je ne suis pas surpris, Mme la Présidente. On vous l'a
dit, on travaille en équipe. On a une autre belle preuve ce soir de ce travail
d'équipe. Si je suis ici, capable de répondre à ces questions-là, je pense que
c'est parce que ça témoigne du fait
qu'on travaille étroitement ensemble sur tout ce qui entoure le déploiement et
les prématernelles quatre ans.
J'entendais
des critiques à l'effet qu'on n'est pas en consultations notamment sur le
projet en question. J'ai souvent entendu
aussi la critique que le ministère de la Famille n'a pas participé à l'analyse
d'impact réglementaire. Je prends quelques
secondes, parce que ma collègue l'a abordé, pour dire que je comprends bien
l'idée du Parti libéral, là, de semer de
la confusion en disant que c'est épouvantable qu'on n'ait pas participé à la...
hier, que c'est épouvantable qu'on ne soit pas à la consultation, je comprends. Je comprends, on fait de la
politique avec ça, ça crée de la confusion. Mais en même temps je pense que tous ici, nous sommes des
parlementaires, et on sait que ce n'est pas comme ça que ça fonctionne et que
c'est tout à fait normal que ce soit le
porteur du projet de loi, c'est-à-dire le ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur, qui participe à tout ça.
• (18 h 20) •
On a parlé de
plan et de déploiement aussi, je vais y revenir rapidement, mais, vous savez,
Mme la Présidente, on peut critiquer
le projet de loi, on peut parler du projet de loi, on peut améliorer le projet
de loi, si on le souhaite, si on veut y
apporter de bonnes idées, mais il y a une chose qui est certaine, et cette
chose-là, c'est que la vision du gouvernement, c'est de tout faire, de tout faire et d'investir l'argent nécessaire
pour faire en sorte que tous les enfants au Québec pourront développer leur plein potentiel. Ça, ça passe
notamment par les prématernelles quatre ans, mais ça passe aussi, quand on
parle de travail d'équipe, par plus de
ressources, notamment avec le ministre délégué à la Santé et aux Services
sociaux, pour qu'on puisse diagnostiquer plus rapidement, pour qu'on
puisse avoir le traitement plus rapidement.
Ça passe aussi par les services de garde éducatifs à l'enfance, où on va continuer d'investir. Et on ne le fera
pas timidement, on va le faire de
façon massive. J'ai la prétention de dire, Mme la Présidente, qu'il n'y a
pas un gouvernement au Québec depuis 10 ans qui aura développé, concrétisé en
bonne et due forme autant de places que nous en CPE et puis en garderie subventionnée, pas un gouvernement au Québec depuis 10 ans. Donc, dire qu'on abandonne les services de garde éducatifs à l'enfance,
c'est tout à fait faux.
J'ai aussi
envie de dire que les prématernelles
quatre ans, je suis ici pour
représenter mon collègue, pour parler en son nom, bien, ça va venir nous aider, ça va venir nous aider, au Québec, parce que
les besoins sont criants. 42 000
enfants, présentement, qui sont en attente de services, sur la liste
d'attente. On parle de services de
garde éducatifs, évidemment. Mais, parmi ces 42 000
enfants là, il y en a beaucoup, il y en a beaucoup qui sont âgés de quatre ans
et qui attendent une place, qui
aimeraient avoir accès à un service éducatif, ce qui n'est pas le cas
présentement. Donc, bien évidemment, la prématernelle, ça nous aidera.
On travaille
ensemble, donc, pour assurer le déploiement des prématernelles quatre ans.
Donc, quand on parle d'improvisation, encore une fois, le Parti libéral
a tout faux.
Une des façons, par exemple, de travailler
ensemble, c'est de faire en sorte que les ministres se parlent, bien évidemment, c'est de faire en sorte que les
cabinets se parlent, bien évidemment, et c'est aussi de partager nos
informations. Et
ça, surprise! Ça ne fait pas tellement longtemps que vous avez quitté le
gouvernement, que le Parti libéral est maintenant dans l'opposition. Donc, je peux vous dire qu'on a
fait des découvertes. Quand on parle de ministères qui ne se parlent pas, on a appris de bien belles choses. On a
appris que les ministères ne se parlaient vraiment pas. Donc là, en ce moment,
on se bat contre 15 années de silo, je ne
vous conseille pas de vous lancer dans l'industrie de la construction de silo,
là, on est en train de se battre contre 15 années d'héritage, là, où les
ministères travaillaient en silo parce que les ministères ne se parlaient pas. Et là on demande à nos
fonctionnaires de se parler, et je vous dirais que c'est nouveau pour eux.
Donc, on le fait tranquillement mais
sûrement. Et je vous dis que ça apporte des résultats. On partage des données
notamment sur les besoins.
Quand on
parle de besoins, au ministère de la Famille, on a de bonnes informations sur
les endroits, les régions du Québec où il y a des besoins, où il y a des
enfants qui sont en attente, notamment des enfants de quatre ans, pour obtenir une place en service de garde éducatif.
Donc, on est capables de croiser les données et de faire en sorte de démontrer
sur une carte, bien, à quel endroit est-ce que, sur les territoires de
commission scolaire, il y a davantage d'enfants qui attendent une place dans un service de garde éducatif, ce qui nous
laisse présager, évidemment, qu'il y a des besoins aussi pour la prématernelle
quatre ans. C'est un des exemples, je pourrais en nommer d'autres, mais tout ça
pour vous dire, Mme la Présidente, qu'on travaille ensemble.
Je martèle
cette donnée : 27,7 % d'enfants au Québec qui commencent la
maternelle avec au moins une vulnérabilité dans un des cinq domaines de leur développement. Ça fait des années, ça
fait des années, au Québec, qu'on fait toujours tout de la même façon. Ça ne fonctionne pas. Cette proportion-là, elle
ne diminue pas, elle augmente. Je pense qu'on fait les choses différemment. Et je pense que les
Québécois, depuis le 1er octobre, nous démontrent qu'ils aiment bien notre
façon différente de faire les choses.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je
cède la parole à Mme la députée de Saint-Laurent pour son droit de
réplique de deux minutes.
Mme Marwah Rizqy (réplique)
Mme
Rizqy : Merci beaucoup. Vous savez, Mme la Présidente, le ministre de
la Famille siège sur 57 comités interministériels. Et j'espère qu'il
sait que ces comités interministériels existaient bien avant le 1er octobre,
soit bien avant votre arrivée en poste. Alors, côté silo, je pense qu'il n'y en
a pas tant que ça.
Mais par
contre j'aurais apprécié peut-être que vous répondiez à une des questions.
Comment ça se fait que vous ne siégez
sur aucun comité interministériel pour les maternelles quatre ans, alors que
c'est la priorité de votre gouvernement? Pourquoi vous avez refusé de répondre à la question? Est-ce que, oui ou
non, il reste des plages horaires, là, de disponibles? Jean-François Chicoine, docteur à Sainte-Justine,
Carmen Dionne, UQTR, Mylène Drouin, directrice régionale de la santé publique de Montréal. Il reste des places.
Invitez-les, si vous croyez à la science, invitez-les. Ou au moins
répondez-nous : Oui ou non, sont-ils des lobbys?
La CSDM, et là je sais que c'est important pour
vous, quand on parle...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la Présidente, juste vous adresser...
Mme la Présidente! Mme la députée, juste vous adresser à la présidence.
J'ai laissé passer, là, à deux reprises. Alors, adressez-vous à la présidence.
Merci.
Mme Rizqy :
Merci, Mme la Présidente. Ça, je sais que c'est important pour le ministre de
la Famille, je sais aussi que c'est
important pour la ministre de la Santé, mais je pose la question : Est-ce
que c'est important pour le ministre de l'Éducation, ce qui se passe avec les jeunes avec des troubles
d'apprentissage ou ceux qui souffrent d'autisme? Est-ce que c'est
important? Parce qu'une lettre a été écrite, une lettre, là, très importante a
été écrite par la présidente avec les syndicats.
Pourquoi qu'il n'y a eu aucun suivi de la part de votre gouvernement? Pourquoi
que, lorsqu'il est question des enfants
les plus vulnérables, c'est toujours nous, l'opposition, qui devons absolument
attirer votre attention là-dessus et vous forcer la main à prendre le
dossier et à faire quelque chose?
Moi, là,
je trouve inacceptable que le ministre de l'Éducation ose dire : N'appelez
pas le ministre, appelez un ébéniste. Il
fait une blague sur un dossier aussi important. On parle d'enfants vulnérables
qui sont mis dans des placards. Si on est rendus, au Québec, qu'on doit
appeler l'ébéniste au lieu de notre ministre, là, aussi bien le congédier.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la députée.
Nous allons
maintenant procéder au troisième débat, entre M. le député de LaFontaine et Mme
la ministre de la Justice, concernant
le silence de la ministre sur les contradictions entre le projet de loi
n° 21 et la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics. M. le député de LaFontaine, je
vous cède la parole pour un temps... pour une durée de cinq minutes.
Accès
à l'égalité en emploi
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Jano Bergeron, Jano Bergeron était celle qui a écrit la chanson — et qui l'a évidemment popularisée — Recherché : «Dans les rues de la
ville, mon appel a été lancé.» Et aujourd'hui Jano Bergeron et le député
de LaFontaine ont été entendus, nous avons trouvé Mme la ministre, qui, ce
soir, viendra répondre
à une importante question juridique en lien avec le projet de loi n° 21
qui veut interdire les signes religieux. Alors, c'était notre façon, également, de rendre hommage à cette
chanteuse qui a popularisé cette chanson.
Alors, une
fois qu'on a trouvé une ministre de
la Justice et qu'elle va répondre à
notre question, Mme la
Présidente, j'aimerais réellement
que l'on ait un débat juridique ici. Et je ne demande pas à la ministre de
rendre publiques des opinions juridiques
puis j'aimerais que Mme la ministre m'écoute. Elle a sûrement copie du projet de loi n° 21, sinon j'en ai une copie ici, je peux lui prêter la mienne. C'est sur un aspect
important qui n'est pas anodin, qui est juridique et qui n'appelle pas une opinion juridique pour y répondre, c'est
une question toute simple de compréhension de rédaction de la
loi qui est devant nous, et elle est la première conseillère juridique,
j'aimerais qu'elle me suive.
Projet de loi n° 21, on le sait, avec l'article 29
de la loi, le projet de loi n° 21 dit : Il n'y aura plus d'accommodement raisonnable pour les signes
religieux, ça va être interdit. Il n'y aura même plus possibilité de déposer
une demande d'accommodement, et les signes
religieux, article 6, seront interdits pour certaines catégories,
annexe II de la loi, seront interdits. O.K.
On dit à l'article 29 : La charte
québécoise des droits et libertés, tous les articles que l'on peut, soit les articles 1 à 38, même des articles qui visent
l'égalité hommes-femmes, tous les articles sont suspendus. O.K. On est contre,
on trouve que ça va contre l'esprit, mais ça, au moins, c'est clair. C'est
l'article 29.
Maintenant,
la compétition ou le conflit qu'il pourrait y avoir entre le projet de loi
n° 21 et d'autres lois du Québec demeure,
la question demeure. C'est l'article 11. Qui nous indique quoi?
L'article 11, premier alinéa, très clair. Deuxième alinéa,
extrêmement ambigu, danger par rapport à des lois antérieures, des lois qui
existent déjà.
Article 11
nous dit : «Les dispositions de la présente loi — projet de loi n° 21 — prévalent sur celles de toute loi postérieure.» Alors, celles et ceux qui nous
écoutent à la maison, les dispositions de la présente loi, projet de loi
n° 21, prévalent sur toutes les
lois postérieures. Ça veut dire que, toutes les lois qui vont être adoptées dans
l'avenir, le projet de loi n° 21
a préséance, qui leur serait contraire, à moins que cette dernière loi, la loi
future, n'énonce expressément qu'elle s'applique malgré la présente loi.
Ça, c'est clair, alinéa un de l'article 11.
• (18 h 30) •
Alinéa deux,
maintenant, pour les lois... Ça, c'est pour les lois dans l'avenir. Pour les
lois dans le passé, qu'en est-il?
«Les dispositions des articles 1 à 3 [de la loi] ne prévalent pas sur
celles de toutes autres lois antérieures qui [lui] sont contraires.» Donc, pour
les lois antérieures, puis je veux qu'on se comprenne puis je veux une réponse
juridique, là, ce n'est pas... Je
n'ai pas besoin d'opinion, là, c'est juste une simple question de compréhension
de texte. Pour les lois postérieures,
les lois à venir, c'est clair, le projet de loi n° 21
va prévaloir, sauf si c'est dit de façon contraire dans ces lois futures. Pour les lois antérieures, on dit : Les dispositions des articles 1
à 3 du projet de loi ne prévalent pas sur les lois antérieures. Bien, ça veut donc dire que pas juste
les articles 1 à 3 ne prévalent pas, ça veut dire que
tous les articles de la
loi... parce que là s'arrête l'article. Il n'y a
pas d'autre indication. Pour les lois antérieures, on nous dit, Mme la Présidente... puis je vois que vous également,
vous essayez de comprendre ce qu'on dit, puis je ne veux pas vous donner des
intentions, mais moi, j'essaie de
comprendre, j'essaie de comprendre. Les lois antérieures qui seraient
contraires au projet de loi n° 21, qu'est-ce qui arrive? Il n'y a pas de
réponse.
Ce que j'ai soulevé, moi, c'est la loi de 2000,
une loi antérieure, Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics, qui vise les commissions
scolaires, les écoles, les services de police des municipalités qui ont plus
de 100 employés. Ces trois entités-là,
ces trois types d'organismes là sont visés par le projet de loi n° 21.
Cette loi-là serait contraire. Elle
est antérieure, elle est plus vieille, elle est de 2000. Elle est contraire au
projet de loi n° 21 parce qu'elle dit :
Tu ne peux pas discriminer les groupes minorisés, notamment les femmes, et tu
ne peux pas... et tu dois les dénombrer, tu dois être proactif et t'assurer qu'ils soient plus représentés dans
l'embauche dans les organismes publics. Or, le projet de loi n° 21,
Mme la Présidente, dit : Non, non, non, tu ne dois pas les engager,
engager notamment des femmes qui pourraient
porter, par ailleurs, des signes religieux. Alors, on est en pleine
contradiction. J'aimerais juste que la ministre nous aide à comprendre.
La Commission des droits de la personne l'a souligné à la page 12 de son
mémoire, elle ne comprend pas non plus. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Mme la
ministre de la Justice, je vous cède la parole pour une durée de cinq
minutes.
Mme Sonia LeBel
Mme LeBel :
Merci, Mme la Présidente. Je serais fort étonnée d'avoir besoin du cinq minutes
au complet pour répondre à cette question. Mon collègue cite une
chanson, moi, je vais citer un film, j'ai l'impression de vivre le jour de la marmotte. C'est la troisième ou quatrième
fois que je suis... troisième fois que je suis interpelée sur la question du
projet de loi n° 21, alors que ce
projet de loi est porté par mon collègue ministre de l'Immigration. Alors, si
mon collègue porteur de dossier, qui
est le mieux placé pour répondre aux questions de mon collègue, d'ailleurs,
député de LaFontaine... c'est lui qui
est le ministre en charge du dossier, pourra répondre, j'imagine, à l'article
par article, pourra répondre aux consultations.
Il y a plusieurs endroits où le ministre de l'Immigration ici, qui est dans le
salon bleu, ici, peut répondre à ces questions-là.
Donc, à
partir du moment où on interpelle la ministre de la Justice sur un dossier qui
n'est pas le sien et qu'on lui
demande de discuter de concepts juridiques, de trouver une question de
compréhension de texte juridique ou de donner une réponse juridique alors qu'elle n'est pas le porteur du dossier,
c'est parce qu'on lui demande une opinion juridique.
Pourquoi on
ne le fait pas avec le ministre de la Santé? Pourquoi on ne le fait pas avec le
ministre de l'Énergie, de l'Économie?
Pourquoi on ne le fait pas avec la ministre de la Culture? Si c'est une
question de débat, c'est une question de débat juridique et si on interpelle la ministre
de la Justice sur cette question-là, c'est parce qu'on veut avoir une réponse
juridique, donc, par le fait même, un avis
juridique. Et à plusieurs reprises... D'ailleurs, pour reprendre mes anciennes expressions,
si je pouvais verser les réponses que j'ai données antérieurement dans cette interpellation, on
pourrait quitter plus rapidement.
Mais à
plusieurs reprises mon collègue, fort de ses effets de toge, très bien
maîtrisés d'ailleurs, m'a interpelée sur
cette question-là à grands frais de discours — où est la ministre? Où est la ministre? On
recherche la ministre — alors qu'antérieurement j'ai déjà répondu à cette
question-là, que ce soit en interpellation, que ce soit dans le salon bleu à quelques reprises, pas à toutes les fois, c'est
exact, pas à toutes les fois. Pourquoi? Parce que c'est mon collègue le
ministre de l'Immigration qui est
porteur du projet de loi n° 21. Alors, à chaque fois qu'il y a... Selon
l'opinion de mon collègue le député
de LaFontaine ou d'un autre de mes collègues de l'opposition, à chaque fois
qu'il y aurait une question juridique ou
un problème juridique, si je me lève à chaque fois comme ministre de la
Justice, bien, ça ne fonctionne pas. Il y a des ministres qui sont
porteurs des dossiers, ils sont là pour répondre aux questions.
Alors, à
partir du moment où on me demande une opinion ou on me demande de discuter d'un
concept juridique au salon bleu dans
un dossier qui ne m'appartient pas, c'est parce qu'on me demande de donner une
opinion juridique. Et ce n'est pas un
hasard que c'est la ministre de la Justice qu'on interpelle sur cette
question-là. Alors, je vais reprendre, reprendre ce que j'ai déjà dit. Alors, je vais être, malheureusement pour les
gens à la maison, probablement très plate, monotone et un peu soporifique, mais
la ministre de la Justice est également le Procureur général et jurisconsulte
du gouvernement. À ce titre-là, je n'ai pas la même fonction que mes autres
collègues. Je suis le conseiller juridique du gouvernement. Les projets de loi
sont travaillés de concert avec moi, avec les juristes du ministre de la
Justice.
Mon collègue,
d'ailleurs je l'en remercie, semblait inquiet pour moi. Il semblait inquiet à
savoir si je faisais mon travail. Il
semblait inquiet de savoir si je prenais la peine d'émettre les opinions que
j'ai à émettre. Et j'ai pris la peine, dans
plusieurs forums, dans plusieurs instances, de préciser que ce n'est pas parce
que je ne partage pas mon opinion que je n'en ai pas, hein? On a pu voir
un certain entrefilet, cette fin de semaine, qui exposait justement le fait que
j'avais peut-être trop d'opinions. Donc, ce
n'est pas parce que je ne les expose pas que je n'en ai pas. Et le propre de
garder une opinion confidentielle,
c'est de ne pas divulguer cette opinion quelle qu'elle soit, qu'elle soit
favorable, qu'elle ait des nuances,
que j'aie émis des avertissements ou non dans un dossier quelconque. Le fait de
simplement discuter de cette opinion, c'est d'en faire état, et je ne
peux pas en faire état, elle est confidentielle.
Alors, pour rassurer mon collègue,
naturellement, je fais part de mes opinions avec mes collègues, je travaille sur tous les projets de loi. Je suis d'ailleurs
présidente du comité législatif également. Je travaille à chaque fois dans le
but de l'objectif gouvernemental,
c'est-à-dire l'intérêt des Québécois, et fournir, avec la participation de mes
collègues, le meilleur projet de loi possible pour rencontrer cet
intérêt. Merci.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à M. le député de
LaFontaine pour votre droit de réplique de deux minutes.
M. Marc Tanguay (réplique)
M. Tanguay :
M. le Président, quelques éléments. Premier élément, on vient d'entendre le ministre
de la Famille dire et déplorer :
Ça fait 15 ans qu'on marche en silo au Québec; moi, je travaille main dans la
main avec mon collègue de
l'Éducation, et il a répondu au nom, entre autres, de son collègue de
l'Éducation. Alors, je pense que la ministre de la Justice, elle peut
nous répondre sur une question qui touche la Charte des droits et libertés de
la personne, premier élément.
Deuxième
élément, mon petit doigt me dit, Mme la Présidente, que j'aurai l'occasion de
revenir devant vous, si d'aventure le
projet de loi est adopté. L'article 28 dit : «Jusqu'à ce que le
gouvernement prenne un décret désignant le ministre responsable», c'est le ministre de l'Immigration, leader du
gouvernement, qui en est responsable. Je vous fais déjà une annonce qui
est écrite dans le ciel : ce sera la ministre de la Justice qui va
ramasser cette loi-là et qui en sera responsable, l'article 28 le laisse
grandement présager.
Également, la
ministre, et je la cite, elle dit qu'elle n'est pas la mieux placée que le
ministre de l'Immigration et leader
pour répondre à ces questions-là. Elle dit, et je cite, «un dossier qui n'est
pas le mien», fin de la citation, et «elle n'est pas concernée», fin de la citation, par cette question-là. Mme la
Présidente, ce dont je parle, c'est de l'application ou pas, de la mise au rancart ou pas de quoi? De
la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics. Qui
est responsable de l'application de cette
loi-là? Nulle autre que la ministre de la Justice, pas le ministre de la
Famille, pas le ministre de
l'Éducation, pas le leader du gouvernement. Qui est responsable de cette
loi-là? L'article 34 le dit en toutes lettres : La ministre de la Justice est responsable de
l'application de la présente loi. Alors, si elle me dit que je ne pose pas
la question à la bonne personne, donc je
dois dire que cette loi-là ne trouve plus application. Il n'y a plus personne
qui répond présent lorsqu'on
dit : Aïe! Vous, gouvernement, Loi sur l'accès à l'égalité en emploi, ce
n'est pas n'importe quoi. Il ne faut
pas discriminer, il faut qu'on ait plus de femmes, plus de gens qui participent
des groupes minorités visibles. Ça,
il n'y a personne qui vient répondre à nos questions. Ce n'est pas une opinion
juridique. J'ai lu l'article 11. Est-ce que l'on a toujours une telle loi? La ministre responsable a dit : Ce
n'est pas moi à répondre. Je pense qu'elle fait fausse route.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député.
Compte tenu de l'heure, je suspends les travaux
jusqu'à 19 h 30.
(Suspension de la séance à 18 h 39)
(Reprise
à 19 h 30)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, bonsoir à vous tous et toutes. Vous
pouvez prendre place.
Projet
de loi n° 17
Poursuite
du débat sur l'adoption du principe
Et
nous allons poursuivre notre débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 17,
Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile. Et, au moment
de suspendre nos travaux, Mme la députée de Bourassa-Sauvé,
c'est vous qui aviez la parole. Vous n'aviez pas terminé votre
intervention ?
Mme
Paule Robitaille (suite)
Mme Robitaille :
Non, non.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Non?
Alors, je vais vous inviter à poursuivre, et il vous reste un temps de parole de 9 min 47 s.
Mme Robitaille : Merci, Mme la Présidente.
Eh bien, on avait parlé du drame des propriétaires de permis de taxi et puis on en est venus aussi à
parler des conséquences pour le consommateur. Évidemment, on est tous pour la modernisation.
C'est ce que je disais. On est pour
l'efficacité. Mais, moi personnellement, mon expérience avec un taxi GPS, ça me
trouble particulièrement. J'aime
avoir un être humain qui me conduit quelque part, qui connaît la ville, qui
sait où il s'en va, qui est capable de réagir et s'adapter, et c'est
important pour moi d'être avec quelqu'un qui connaît la ville.
Or,
maintenant, avec ce qui va nous arriver, avec cette déréglementation, on dit
que la formation va se faire rapidement.
Souvent, avec les chauffeurs Uber, là, ils se laissent guider par le GPS de
leurs téléphones intelligents. Or, pour
moi, un chauffeur de taxi, c'est bien plus qu'une application d'un téléphone
intelligent. Et ça, je trouve ça décevant, ce côté humain du chauffeur de taxi est tellement important, et je ne
voudrais pas perdre ça à cause du projet de loi n° 17.
Et, bon, il y a encore plus important, toute la question du
transport adapté, Mme la Présidente. Au Québec, les organismes de défense des personnes handicapées
s'inquiètent, s'inquiètent de l'avenir du transport adapté avec la réforme
de l'industrie du taxi qui s'annonce. Ils
craignent une hausse des tarifs à certaines heures et une pénurie de chauffeurs
prêts à offrir ce service. Ils ont fait entendre leurs voix, d'ailleurs, en
commission parlementaire.
Dans un reportage
de Radio-Canada, on racontait, entre autres, puis ça m'a touchée beaucoup,
Mme la Présidente, la vie
d'Anik Larose et sa fille. Anik Larose est la mère d'une jeune femme
de 24 ans qui est atteinte de trisomie 21. Le taxi adapté permet à sa fille de participer à l'éducation
des adultes ou à des stages en milieu de travail. Ça lui permet de sortir de chez elle, d'avoir une vie à peu près
normale. Mais sera-t-elle toujours... mais ce chauffeur de taxi là, là, est-ce qu'il va être toujours au rendez-vous matin et soir après l'adoption du projet de loi n° 17 sur le transport rémunéré? Je pose la question, et puis je ne suis pas sûre. Et
puis Anik Larose, elle, s'inquiète, s'inquiète sérieusement, puis je pense qu'elle n'est
pas la seule. Si l'industrie du taxi est déréglementée, avec une modulation des
tarifs selon l'affluence, les chauffeurs de taxi voudront travailler aux
heures de pointe et prendre le plus de clients possible, a-t-elle expliqué dans le reportage. Si l'idée du chauffeur est de
vouloir faire plus de sous, ce n'est sûrement pas avec ces clientèles-là, hein,
les clientèles qui ont besoin de transport
adapté, qu'on va gagner du temps. On est loin d'être dans la performance et
dans la rentabilité.
À Montréal, 89 %
des déplacements du transport adapté sont réalisés par l'industrie du taxi et
11 % par les minibus de la Société de
transport de Montréal, la STM. Ainsi, la STM a renouvelé récemment une entente
de trois ans avec neuf intermédiaires de l'industrie du taxi. Mais rien
dans le projet de loi, rien dans le projet de loi ne garantit un seuil minimal de services. Alors, les handicapés,
comme la fille de Mme Larose, les personnes âgées, hein, des fois, qui n'ont pas de téléphones intelligents, qui sont
chez eux puis qui dépendent du téléphone de la maison, les gens à mobilité
réduite, ils vont faire quoi lorsque les
chauffeurs de taxi, des gens qui ont une formation, qui ont de l'expérience,
vont avoir délaissé l'industrie pour
survivre, pour trouver un nouveau gagne-pain ailleurs, qui n'a rien à voir avec
le taxi? On va perdre toute cette
expertise-là, tout ce savoir-faire-là, et on va le remplacer par quoi? On
aimerait que le ministre nous rassure,
mais il ne nous rassure pas. Puis on aurait aimé que le projet de loi
n° 17 nous rassure, mais il ne nous rassure pas du tout non plus.
Alors,
j'en reviens à M. Hernande, à M. Pierre, à Michael et tous les autres
chauffeurs de taxi que j'ai rencontrés sur
mon chemin et qui m'ont raconté leur drame. Parce que, Mme la Présidente, c'est
un drame pour ces gens-là, pour ces gens-là qui nous regardent et qui vont
voir, là, bientôt, passer le projet de loi n° 17. Ils font face à un
drame. Ils vont faire quoi?
Bien
sûr, il faut moderniser, arrimer,
faciliter la vie des usagers, mais, encore là, je me demande quels usagers.
Évidemment, moi, vous, les gens actifs, mais les gens, là,
qui sont à mobilité réduite, les gens qui sont handicapés, comme je
disais, des personnes âgées et des gens qui n'ont juste pas de téléphone
intelligent, des gens comme moi aussi, qui aiment,
durant une course en taxi, se sentir avec quelqu'un qui connaît ses
affaires, qui connaît la ville, qui n'est pas juste guidé par un GPS.
Tout ce monde-là, on va faire quoi? On regarde ce qui arrive puis on n'est vraiment
pas sûrs.
Et ces
chauffeurs de taxi qui ont bâti leur vie sur cette profession-là,
qui comptaient sur leurs taxis pour leur retraite, qui ont des permis qui ne valent plus rien, Mme la Présidente, ils vont faire quoi? 250 millions à partager pour des milliers de
chauffeurs, de propriétaires de permis de taxi, c'est bien peu puis ça ne règle
absolument rien.
La
proposition de la CAQ, c'est un manque, je pense, Mme la Présidente, c'est un
manque de respect pour ces individus-là qui ont travaillé à la sueur de
leur front. Comme je l'ai dit au début de ma prise de parole, il y a des gens là-dedans qui sont dans l'industrie depuis 1980,
depuis 1979, le taxi, pour eux, ça leur a permis de voir grandir leurs familles.
Ils ont travaillé très, très fort, ils ont
servi notre communauté, et ces gens-là avaient ce permis de taxi là, et ce
permis de taxi là leur assurait une
retraite. Maintenant, qu'est-ce qu'on fait avec ces gens-là? Comment on les
récompense de ce qu'ils ont donné à
notre société? Est-ce que c'est avec le projet de loi n° 17, vraiment? Je
me pose la question. Je ne crois pas.
Nous croyons que la compensation proposée par le gouvernement de la CAQ dans le
cadre de ce projet de loi là est inéquitable avec la valeur réelle des
permis de taxi. Il faut que le gouvernement trouve une solution raisonnable.
Pour ce qui
est de la modernisation, il faut améliorer le système de transport de personnes
rémunéré, mais une trop grande déréglementation est négative, autant
pour ses chauffeurs que pour les contribuables. Ce projet de loi est quand même radical, il faut le dire. Ce projet de
loi, on l'a dit, c'est de l'improvisation, c'est du brouillon, omet de prendre
en compte l'humain. On votera donc contre le
principe de ce projet de loi, Mme la Présidente. Je vous remercie beaucoup.
• (19 h 40) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie de votre intervention, Mme la
députée de Bourassa-Sauvé. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Gouin.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M.
Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. Je voulais intervenir ce
soir parce que, dans le cadre du débat sur
le projet de loi n° 17, on entend beaucoup d'arguments qui présentent ce
projet de loi comme un projet de loi d'innovation, tu sais, c'est un projet de loi qui innove, c'est
un projet de loi, donc, qui constitue un progrès. Et on va même jusqu'à dire :
C'est donc un projet de loi qui est au diapason avec la jeunesse du Québec.
Récemment, le premier ministre a même répondu à
une question de la cheffe de la deuxième opposition en disant que la députée, donc, de Sainte-Marie—Saint-Jacques était déconnectée de la jeunesse québécoise
parce qu'elle s'opposait au projet de
loi n° 17. Déjà, il y a quelque chose de profondément ironique d'entendre
le chef de la CAQ reprocher à la
co-porte-parole de Québec solidaire d'être déconnectée des jeunes. Il y a
quelque chose d'un peu ironique dans cette attaque du premier ministre à
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mais, au-delà
de l'aspect ironique, je trouve que c'est un argument auquel il faut répondre,
parce que c'est très facile de faire
équivaloir Uber, technologie, modernisation de l'industrie du taxi et intérêts
de la jeunesse. On dit : Tout ça, c'est
la même chose, les jeunes, ils aiment ça, les affaires sur leurs téléphones. Ça
fait qu'Uber, c'est pour les jeunes. Ça fait que, le projet de loi, Uber est content, ça fait que les jeunes,
ils vont être contents du projet de loi. Bien sûr, je caricature, mais on entend souvent cette équation simpliste,
et ça vaut la peine d'y répondre, parce que moi, comme membre de la génération
qui est censée être émerveillée par Uber, bien, devinez quoi, Mme la
Présidente, je ne le suis pas, bien au contraire.
Les débats
qu'on est en train d'avoir au Québec autour du projet de loi n° 17, on
n'est pas les seuls ni les premiers à
les avoir. Plusieurs pays dans le monde, plusieurs législations dans le monde
ont eu à avoir ces débats-là, parce que la manière dont se comporte Uber
au Québec, c'est exactement la même manière qu'Uber s'est comporté dans
d'autres législations à travers le monde, et les dilemmes, les problèmes, les
enjeux politiques et législatifs qui découlent de la présence d'Uber sur le marché québécois, c'est exactement les mêmes
enjeux, les mêmes dilemmes, les mêmes problèmes que ceux qui ont eu lieu
dans d'autres législations qui ont dû gérer Uber.
Il y a une organisation de protection des
consommateurs, qui s'appelle SumOfUs, qui a étudié la question et qui a décrit ce qu'ils appellent la recette Uber,
une recette en sept étapes, qui vise à décrire quelle est la manière de procéder
d'Uber, comment procède cette industrie-là pour entrer sur des marchés et rapidement
les dominer. Une recette, donc, en sept étapes, et je vais la résumer
pour le bienfait de l'Assemblée nationale.
Première
étape. Première étape : Uber entre sur un marché cavalièrement, sans
obtenir d'autorisation préalable, et, une fois qu'il est bien
installé, donc, brise les lois en place parce que ces lois-là n'ont pas été
écrites à une époque où Uber existait. Donc,
Uber arrive, s'installe sur le marché sans demander permission, en faisant
valoir que ces législations-là sont inadaptées à la nouvelle
réalité technologique.
C'est exactement
ce qui s'est passé au Québec. On se rappellera notamment d'un porte-parole de Tout le monde en parle qui était... qui avait
été invité à Tout le monde en parle et qui avait dit, en toute candeur
sur le plateau de Guy A. Lepage, que, bien,
en effet, ils ne respectaient pas les lois, mais que, vous savez quoi, ces
lois-là, de toute façon, c'étaient des vieilleries, hein, des affaires écrites
à une autre époque. Ça fait que nous autres, on est jeunes, cools et branchés, ça ne s'applique pas à nous, quand même. Je caricature à peine. C'est ça, la
première étape : s'installer sur un marché, ignorer les lois et se revendiquer de la jeunesse et de
l'innovation pour pouvoir ignorer les lois en toute... comment dire, à
visage découvert.
Deuxième
étape. Deuxième étape, c'est attirer dans ces marchés-là des chauffeurs,
souvent des gens précaires, des gens
qui cherchent à arrondir leurs fins de mois, mais les attirer dans le modèle
Uber en leur faisant miroiter des gains faciles, en leur disant : Ça va être une manière de faire de
l'argent rapidement et simplement. On va même parfois leur offrir des incitatifs pour les attirer dans le
modèle d'affaires. Et je le répète, les gens qui sont attirés sur ces
emplois-là... ce ne sont pas tout à
fait des emplois, mais qui sont attirés par cette entreprise, par ce modèle
d'affaires, c'est des gens qui ont des fins de mois serrées, sont
précaires, parfois aux études, parfois issus de l'immigration et qui cherchent
à venir compléter leur budget.
Troisième
étape. Troisième étape : Uber investit pour se faire une bonne image
auprès du public. Et, cette bonne image
là, il se la crée notamment en cassant leurs prix, en s'assurant d'avoir des
prix tellement bas que ça vient, dans le fond, casser la concurrence. Bien sûr, ce
modèle-là n'est pas rentable, on ne peut pas casser les prix comme Uber le fait
et être rentable. D'ailleurs, en
2018, Uber a perdu plus de 3 milliards de dollars américains, hein? Donc,
de l'aveu même de la compagnie, Uber
est déficitaire d'à peu près 0,58 $ sur chacune de ses courses. Donc, le
fait qu'Uber casse ses prix, ce n'est pas parce qu'ils sont capables... ce
n'est pas parce qu'ils ont un modèle d'affaires exceptionnel et rentable, c'est
parce qu'ils sont tellement gros comme
joueurs qu'ils sont capables d'encaisser des pertes que les autres joueurs ne
sont pas capables d'encaisser.
Ça, Mme la
Présidente, encaisser les pertes pour tuer la compétition, là, cette stratégie
économique là, là, elle n'a rien
d'innovante, elle n'a rien de nouvelle, elle n'a rien de révolutionnaire. C'est
une stratégie qui existe depuis longtemps, et le gouvernement de la Coalition avenir Québec, qui se prétend le
gouvernement de gestionnaire, doit connaître le nom de cette stratégie, ça s'appelle du dumping. Et
ces pratiques de dumping, c'est des pratiques largement répandues au sein
du système capitaliste depuis très longtemps maintenant. Il n'y a rien de
nouveau dans cette stratégie d'Uber.
Quatrième
étape. Quatrième étape, Uber achète de l'influence politique en recrutant un
bataillon de lobbyistes pour aller
convaincre les élus qu'il faut adapter le cadre législatif à son modèle
d'affaires à lui. Aux États-Unis, par exemple, seulement l'an dernier,
Uber a dépensé 2,3 millions de dollars en dépenses de lobbying, comme pas
rien.
Cinquième
étape. Cinquième étape, Uber ignore les tentatives de régulation de son
activité ou même les combats en
cours, hein? Au Québec, par exemple, Uber a multiplié, je veux dire, sans gêne,
les infractions aux règles du projet pilote qui avait été mis en place par le
gouvernement précédent, un projet pilote qui était considérablement permissif,
mais, malgré ça, c'était déjà trop. C'était déjà trop de réglementation pour
Uber. Ils ont pratiquement ignoré ce projet pilote là, ont multiplié, en tout
cas, les infractions dans le cadre de ce projet pilote.
Sixième
étape. Sixième étape, Uber se sert de la misère qu'elle a ainsi créée, se sert
du fait que sa compétition est en
déroute, est en faillite pratiquement, parce qu'elle ne peut, je le répète,
encaisser les pertes provoquées par Uber sur le marché. C'est une compétition qui est souvent endettée jusqu'au cou, et,
lorsqu'on a donc affaibli, comme ça, la compétition, bien, on profite de
cette faiblesse qu'on a nous-mêmes créée.
Je vous donne
un exemple, Mme la Présidente. Quand les chauffeurs de taxi ont fait des moyens
de pression, ont fait une grève récemment, au même moment où les
chauffeurs de taxi faisaient des moyens de pression, Uber était à l'aéroport de Montréal en train de distribuer des
pamphlets pour dire aux voyageurs : Vous voyez comment ce n'est pas
bon, le service de taxi aujourd'hui, vous
voyez comment c'est tout croche. Bien, prenez un Uber. Là, vous voyez à quel
point c'est à la fois ingénieux et pervers,
parce qu'on crée une crise sociale par sa présence sur le marché, on provoque
des moyens de pression et on se sert par la
suite de ces perturbations-là pour dorer son blason et dire : Vous voyez comment les chauffeurs de taxi, c'est des gens qui
vous servent mal. Ils font la grève aujourd'hui. Ce genre de tactiques là, de
profiter de faiblesses de la compétition, qu'on a nous-mêmes
créées, c'est des tactiques qui ont été utilisées par Uber dans plusieurs
législations. Ce n'est pas la première fois qu'on voit ça au Québec.
Septième
étape. À ce stade-ci de la recette... (Interruption) Pardon. À ce stade-ci de la recette, donc — j'en
perds la voix — Uber...
(Interruption) Est-ce
qu'on va se rendre à la septième
étape? C'est ça, la question. Maintenant qu'Uber, donc,
domine le marché à cette septième étape, ils sont en mesure de radicaliser
cette démarche, de maximiser le nombre de
courses, de maximiser le nombre de chauffeurs, d'augmenter — excusez l'expression — la «cut» qu'Uber prend sur chacune de ces courses-là, ce qui rend les emplois
qu'on a initialement ouverts beaucoup moins alléchants qu'au début. On tire vers le bas les conditions de travail,
donc, des chauffeurs associés à Uber, et le résultat, bien, c'est ce qu'on a vu
la semaine dernière ou il y a deux
semaines au Québec : des chauffeurs d'Uber qui eux aussi commencent à
faire des moyens de pression, qui eux
aussi commencent à se plaindre de leurs conditions de travail. On a vu, aux
États-Unis notamment, des mouvements
assez combatifs et assez importants de chauffeurs d'Uber, qui se retournent
contre le modèle qui les avait initialement
séduits, en disant : Aïe! Dans le fond, ce modèle-là, là, jeune, cool et
branché, là, bien, finalement, là, on est perdants, puis ça nous fait
travailler à des conditions qui sont inacceptables dans une société développée.
• (19 h 50) •
Donc, au
terme de cette recette en sept étapes, Mme la Présidente, où en est-on? Où
est-ce qu'on est rendus? Bien, on est
rendus dans une situation où les chauffeurs de taxi ont tout perdu, où
l'industrie est déstructurée, où les chauffeurs d'Uber eux-mêmes commencent à déchanter. On est rendus dans une
situation où les jeunes pousses québécoises, là, que le ministre des Transports prétend vouloir aider avec
son projet de loi, bien, en vertu des stratégies de dumping d'Uber, ne sont pas capables de compétitionner la
multinationale américaine. Ce n'est juste pas vrai. C'est illusoire de penser
qu'Uber, mégamultinationale, va
perdre la concurrence contre des jeunes entreprises québécoises, aussi
ingénieuses et innovantes soient-elles,
parce que la compétition est juste déloyale. Donc, on se retrouve dans une
situation où tout le monde perd, sauf Uber.
Alors, l'avenir radieux dont nous parle le ministre
des Transports quand il nous dit que c'est un projet de loi d'avenir, en fait,
il n'a absolument rien d'intéressant, y compris pour ma génération. Ce que le
modèle d'Uber, qui se présente comme un
modèle d'économie du partage, là, puis d'économie
innovante, là... Quand on gratte un
peu, là, en dessous du vernis, là, ce
qu'on découvre, c'est un modèle économique qui n'a rien de nouveau et qu'on connaît très bien,
c'est le modèle du capitalisme sauvage.
Quel est ce
modèle-là? C'est un modèle qui ressemble à s'y méprendre à ce qu'on a connu au
tout début du système capitaliste,
à une époque où l'État n'avait pas encore instauré de réglementation, de régulation sociale pour protéger les travailleurs, travailleuses, hein? Parce qu'on a d'un côté, donc,
dans ce modèle-là, des travailleurs, des travailleuses qui sont supposés autonomes, hein, puisque
c'est techniquement le statut des chauffeurs chez Uber. Ce sont des
travailleurs autonomes, ce sont des gens libres qui choisissent de
s'associer à Uber.
Ces gens-là
doivent s'endetter pour acheter leurs voitures, c'est-à-dire doivent
s'endetter pour acheter leurs outils de travail. Des salariés, au sens
normal, lorsqu'ils se présentent dans une entreprise pour travailler, ce n'est
pas eux qui paient
pour leurs outils, ce n'est pas eux qui paient pour la machinerie de l'entreprise. Mais, dans le cas d'Uber, il
y a un tour de passe-passe très
ingénieux qui permet de dire : Bien non, mais ces gens-là sont des
travailleurs autonomes, alors ils
vont acheter eux-mêmes leurs voitures, donc ils vont s'endetter pour
acheter leurs outils de travail pour travailler chez Uber. Donc, Uber se débarrasse de ce coup-là, même
pas besoin de payer pour la voiture. En plus de ça, ces chauffeurs-là, en vertu de leur soi-disant statut de travailleur autonome, n'ont pas ou très, très
peu de protections sociales. Régime de retraite, assurances
et compagnie, oubliez ça, c'est des travailleurs autonomes, soi-disant.
Ajoutez à ça
le fait que c'est des travailleurs, travailleuses qui gagnent des salaires à la
fois misérables et très, très, très
instables, hein? Ils sont complètement soumis, en
vertu de la tarification dynamique, à la fameuse main invisible du marché, hein? Ils peuvent faire une très bonne soirée en travaillant
quelques heures, travailler le lendemain pendant une demi-journée et ne faire
pas la moitié de l'argent qu'ils ont fait la veille. Donc, des salaires, je
le répète, miséreux et instables.
Donc, pour
résumer, là, on a des gens qui sont présumés indépendants, qui s'endettent pour
pouvoir aller travailler, qui n'ont
pas de protections ou peu de protections sociales et qui
font des salaires très bas et instables. Ça, c'est ce qu'on a d'un côté,
du côté des travailleurs, travailleuses.
Et, de
l'autre côté, qu'est-ce qu'on a? On a une multinationale pour qui c'est, comme
disent les Français, tout bénef. Uber, là, dans ce modèle-là, là, ils ne
paient... ils n'investissent pas pour les outils de travail de leurs
travailleurs, travailleuses. Ils n'investissent pas sur les voitures. C'est les
chauffeurs qui paient leurs voitures. Ils n'ont pas de permis à payer. Ils n'ont pas de dépenses essentielles à
faire, à part, bien sûr, d'avoir conçu une application. Chapeau! Ce n'est
pas les seuls à concevoir des applications au Québec ni dans le monde. Ils ont
conçu une application. Ils donnent accès à l'application.
Ils prennent une cote. Ils se départissent de toutes leurs responsabilités
sociales en tant qu'employeur à l'égard de leurs salariés. Uber est mort
de rire dans ce modèle-là.
Puis, encore une fois, si vous y pensez bien,
là, ce scénario-là, d'un côté, une entreprise qui ne prend aucune responsabilité envers ses travailleurs,
travailleuses en leur faisant porter l'ensemble des risques inhérents au
métier, et la même entreprise qui
fait de... et, en fait, de l'autre côté, des travailleurs, travailleuses qui
sont présumés autonomes, hein... C'est leur libre choix d'aller
travailler là. Ils prennent tous les risques sur eux. Ils reçoivent très peu de
bénéfices. Ce modèle-là, là, l'ubérisation
de l'économie qu'on nous vante, là, ce n'est pas un modèle d'avenir. C'est
exactement le vieux modèle capitaliste dont on pensait s'être sorti avec
la social-démocratie, avec les lois du travail, avec l'ensemble des
réglementations de l'économie. Moi, je fais partie de la génération qui est
venue au monde après l'État-providence, après
la social-démocratie, en se disant : Maintenant, je vais faire carrière
dans un marché du travail réglementé, où il y a un État de droit, où les entreprises ont des devoirs et des
responsabilités corporatives. Je fais partie de la génération qui a
peut-être même fait l'erreur de prendre ça pour acquis.
Mais cette
ubérisation de l'économie qu'on nous vend aujourd'hui... Uber est un exemple,
mais on pourrait parler de Foodora,
par exemple. Il y a une grève qui est en train de démarrer à Toronto chez les
jeunes employés de Foodora, qui sont
des livreurs de nourriture à vélo. Foodora fonctionne exactement sur le même
modèle qu'Uber en disant : Vous êtes
des travailleurs autonomes, vous fournissez votre vélo, on vous donne une cote,
prenez l'application et allez travailler. Ce modèle-là d'ubérisation de l'économie, qu'on vend dans l'espace
public comme quelque chose de très cool, très moderne et très branché, dans les faits, c'est une
régression en termes de conditions de travail, et beaucoup de gens qui font les
frais de cette régression-là, Mme la Présidente, ce sont les jeunes. Ce sont
les jeunes.
Alors, quand
on vient me dire ici qu'à Québec solidaire, on est déconnectés de la jeunesse
parce qu'on est contre le projet de
loi n° 17, j'ai un peu de difficultés à l'avaler, Mme la Présidente,
parce que, bien au contraire, ce qu'on est en train de faire en s'opposant au projet de loi n° 17
et à l'hégémonie d'Uber dans le marché du taxi, c'est défendre la jeunesse
et c'est défendre la possibilité que la
jeunesse continue à être dans une société où le marché du travail est balisé,
où les entreprises ont des devoirs et où ce n'est pas le far west
économique.
Donc, non, il n'y a aucun paradoxe, Mme la Présidente, dans le fait de s'opposer à ce projet de loi là qui, tout le monde le dit, hein, consiste essentiellement à dérouler le tapis rouge à la multinationale Uber. Il n'y a
aucune contradiction entre cette
position-là et le fait de prendre parti pour la jeunesse, de prendre parti pour
l'innovation, de prendre parti pour le progrès. Certains
progrès sont en fait des régressions sociales. Le progrès technologique en soi,
ce n'est pas garant d'avancer pour le bien
commun. La crise écologique qu'on vit actuellement en est une belle preuve. Il
y a plusieurs des innovations
technologiques des dernières années qui, au départ, ont été présentées comme
des grandes avancées et dont on se rend compte aujourd'hui que,
collectivement, socialement, on a perdu dans ces progrès-là. Vous savez, Mme la
Présidente, parfois, on dit qu'un cancer
progresse. Bien, ce n'est pas parce qu'un cancer progresse que la santé du
patient s'améliore.
Le progrès
technologique, le progrès même, la notion de progrès, en soi, n'est pas
garante, n'est pas synonyme de bien
commun. Certains progrès peuvent être des régressions, et, dans le cas du
projet de loi n° 17, qui nous est vendu sous les oripeaux de la modernisation, bien, on
est dans une situation comme celle-là. C'est peut-être une modernisation,
c'est peut-être techniquement ou
technologiquement parlant un progrès, mais socialement c'est une régression
avant tout pour les générations qui actuellement font les frais de
l'ubérisation de l'économie et les générations qui vont suivre.
Non, ce n'est
pas vrai que la jeunesse du Québec est juste intéressée par des affaires qui se
passent sur son téléphone, Mme la
Présidente. Je fais aussi partie d'une génération qui veut un marché du travail
équitable, juste, où les conditions de travail
sont garanties et où les entreprises ont des responsabilités sociales. Ça
aussi, c'est jeune, cool et branché, pas juste des applications sur nos
téléphones. Merci, Mme la Présidente.
• (20 heures) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de
Gouin. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de
l'Acadie.
Mme Christine
St-Pierre
Mme
St-Pierre :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis très heureuse de prendre la parole ici
ce soir pour parler de cet important
dossier du taxi. C'est un dossier qui fait la manchette depuis plusieurs mois,
plusieurs, plusieurs mois, lorsqu'Uber est arrivé dans l'univers ici, au
Québec. On savait que ça s'en venait, mais je pense qu'on n'avait pas compris à
quel point cette entreprise-là pouvait venir changer la donne pour plusieurs
chauffeurs de taxi qui avaient commencé leur
travail de façon très modeste, et qui se sont accumulés, avec la valeur de
leurs permis de taxi, un certain pactole pour préparer leur retraite, et
qui voient aujourd'hui tout ça s'effondrer.
Mme la
Présidente, je pense que les
analystes politiques vont un jour, et je l'espère, faire l'analyse
des projets de loi que
ce gouvernement a déposé depuis qu'il est entré en fonction. Mme la Présidente, on voit des projets de loi qui sont étonnamment
dirigés vers des gens qui sont issus de l'immigration. Le projet de loi n° 21 sur la laïcité, il est clair que ce sont les femmes immigrantes qui sont visées dans
ce projet de loi là, même si, de l'autre côté, on nie cette
affirmation.
Le projet de loi sur l'immigration, bien, on a vu tous les dossiers, les milliers de
dossiers qu'on ne veut pas traiter, des
gens qui sont désespérés, qui ont fait tout le parcours, et qui ont voulu, et
qui veulent, venir partager la vie que nous avons au Québec, et qui veulent venir ici pour élever leur
famille, contribuer à l'économie du Québec et aussi avoir un meilleur avenir pour
elles, ces familles, parce que plusieurs viennent de pays où ce n'est pas la
stabilité qui règne.
Mme la Présidente, il y a ce projet
de loi sur le taxi. On voit qu'il
touche aussi beaucoup, beaucoup d'immigrants
et on a vu des commentaires pendant la commission parlementaire, qui s'est...
lorsque les audiences en commission parlementaire
se sont tenues, de gens qui sont venus dire à quel point ce projet de loi là
était inhumain. Et ça m'a touchée quand
le premier ministre, dans son discours, lors de sa prestation du serment, a
parlé à ses députés puis à ses ministres, en disant : Bien, il faut avoir de l'humanité, il faut être plus
humain, et tout ça, j'ai trouvé que c'était un discours assez touchant. Mais, lorsqu'on voit la façon dont il se
comporte depuis le début de son mandat, je vais dire qu'on déchante un peu, parce que le discours qui a été lancé, ou
qu'a lancé cette ère, ce nouveau gouvernement, bien, ce discours-là manque
totalement d'humanité.
Mme la
Présidente, j'ai présidé la commission parlementaire qui a tenu les audiences,
qui a entendu les différents commentaires,
qui a reçu les différents mémoires. Et j'ai été frappée par plusieurs choses.
Tout d'abord, il y a, dans ce projet
de loi là, des gens qui sont venus dire à quel point ça venait, évidemment,
heurter leur travail, leur avenir. Et on a vu très peu d'écoute de la part du ministre, très peu de volonté de vouloir
améliorer le projet de loi ou de vouloir discuter avec ces gens.
Mme la Présidente, j'ai aussi été frappée par
les témoignages des personnes handicapées. Il y a eu quelques groupes qui sont venus pour parler de la situation
des personnes handicapées et des personnes qui l'utilisent, le transport
adapté. Et ces personnes-là ont dit au
ministre : Bien, faites attention, parce que, dans la loi, on ne se
retrouve pas, et ça va mettre en
danger le transport adapté. Uber, c'est peut-être bien beau... on appelle
peut-être une économie de partage — moi, j'appelle ça du faux partage — mais les chauffeurs d'Uber n'ont pas la
formation pour faire du transport adapté et ils vont entrer dans ce marché-là. Les personnes
handicapées ou à mobilité réduite ne sont pas prises en compte dans ce projet
de loi. En effet, 70 % des courses pour
le transport adapté au Québec sont assumées par des taxis et aucune mesure
n'est apportée dans le projet de loi pour favoriser la desserte de
transport adapté. Donc, ça, ça a été assez frappant.
Et j'espère
que, lorsqu'on arrivera à l'analyse, à l'étude
article par article, on va tenir
compte de ces inquiétudes-là, parce
que ce sont des inquiétudes réelles.
Une personne qui a besoin d'avoir un transport
adapté pour aller dans une clinique
pour son traitement de dialyse, bien, cette
personne-là, elle ne peut pas attendre au lendemain, ou elle ne peut pas
attendre l'après-midi, ou ça lui prend quelqu'un qui est professionnel,
qui va l'amener directement à sa clinique, puis cette personne-là est habituée à prendre un transport spécialisé pour y aller,
même chose pour quelqu'un qui est à mobilité réduite ou des gens qui ont
besoin absolument du transport adapté.
Donc, Mme la Présidente, moi, je lève ce drapeau. Je dis au ministre : Attention — puis
je vois la ministre de la Santé,
qui est devant moi — attention! Il faut absolument tenir compte
de cet aspect-là dans le projet de loi. Comment le bonifier? Je pense que le ministre a toute l'équipe autour de lui, a
des fonctionnaires autour de lui qui vont être capables de le conseiller
là-dedans.
Il y a aussi,
pendant cette commission parlementaire, des groupes comme Desjardins, il y a eu
la FTQ qui est venue, FinTaxi, puis
il y a eu Desjardins aussi qui est venu dire au ministre, parlant des
propriétaires : Bien, faites attention, on dit que le ministre agit injustement auprès des
propriétaires de permis. «On ne peut pas taxer le Mouvement Desjardins de
biais politique — je cite ici mon collègue de La Prairie
dans ce dossier-là — puis je
ne pense pas dans d'autres dossiers non
plus, on ne peut pas taxer le groupe Desjardins, on ne peut pas le taxer de
vouloir faire telle ou telle manoeuvre, avoir telle influence pour aller chercher des gains additionnels. C'est un
mouvement coopératif, ils sont habitués dans la finance, ils sont habitués d'intervenir avec l'entreprise,
ils connaissent ça et ils veulent, bien sûr, que le ministre agisse autrement.»
Ça, ça, c'est la citation de mon collègue parlant du Mouvement Desjardins
pendant la commission parlementaire.
Donc, c'est important d'écouter ce que ces
gens-là ont à dire. Et aussi on voit que la façon dont on traite les
propriétaires de taxi, c'est une forme d'expropriation. Donc, lorsqu'on
exproprie, bien, il faut exproprier à la valeur, on n'exproprie pas à la valeur si vous vous êtes acheté une maison, il y
a 25 ans, puis on vous dit : On va vous exproprier, vous avez payé 100 000 $ il y a 25 ans,
puis, aujourd'hui, elle en vaut 300 000 $. Je ne pense pas que vous
allez être très, très heureuse de
prendre le 100 000 $, vous allez dire : Ma maison, elle vaut
300 000 $. Et, si vous voulez m'exproprier, bien, vous allez
être tenu de me verser le montant de la valeur de ma maison. C'est exactement
la même chose.
Ce
qui a frappé dans tout ce dossier-là depuis le début, tout d'abord, c'est...
Lorsque le projet de loi a été déposé, ça
a été vraiment : c'est une offre finale, il n'y a rien de négociable
là-dedans. Oui, on peut bien vous parler, mais on ne vous écoutera pas
très longtemps. Et ça, bien sûr, c'est une bizarre d'attitude pour quelqu'un
qui parle d'humanité. Parce
qu'on a vu des gens désespérés faire des commentaires devant les médias, on a
vu des gens qui ont dit : Bien, vous êtes en train de briser tout ce que j'ai bâti pendant des années, et ça,
c'est absolument injuste et c'est inacceptable dans une société riche
comme la nôtre. Le gouvernement croule sous les surplus budgétaires grâce à
l'administration et les finances que nous
avons rendues saines, et j'ai, du coin de l'oeil, mon collègue, ancien ministre
des Finances, qui en sait quelque
chose et qui a participé à ramener l'équilibre budgétaire au Québec et qui a
aidé le gouvernement et l'ensemble de
la société québécoise. Il a fait en sorte que la cote de crédit du Québec se
soit améliorée. Il a fait en sorte qu'on puisse donner au Québec des leviers, qu'on puisse donner de l'oxygène sur le
plan des finances publiques. Bien, il faut aussi partager : quand on parle de partage de richesse, bien, il faut
partager ça. Puis il faut écouter ce que les chauffeurs de taxi ont à
dire.
Ici,
je regardais la revue de presse pour me préparer, il y en avait à peu près 500
pages, parce qu'il y a eu beaucoup, beaucoup
d'encre qui a coulé, et les titres sont : Le gouvernement nous laisse
tomber. Uber ajoute l'insulte à l'injure. Des cris de désespoir. Appui aux taxis, parce qu'il y a des gens qui appuient fermement
les chauffeurs de taxi. Offre finale, encore ici, Cris de désespoir. Les titres, là, Offre finale,
dit le ministre, Offre finale, c'est toujours le terme «offre finale»,
donc pas d'ouverture, pas de discussion. On va vous rentrer ça dans la
gorge puis vous allez retourner chez vous puis vous irez panser vos
plaies, puis il n'y a personne qui va s'intéresser à vous.
Ici,
il y a le commentaire d'un fils d'un chauffeur de taxi qui dit : «Je lis
les commentaires laissés par des gens, je vois le manque d'empathie[...]. [...]Mon père a acheté son permis de
taxi il y a plus de 20 ans. De nombreuses fois, mon père a conduit des gens qui
n'avaient pas assez d'argent, ou même qui n'avaient rien. [...]Il y a environ 9 000 propriétaires de permis de taxi au Québec, [9 000 familles
qui seraient touchées]. Nous pouvons convenir que la plupart d'entre eux
ont émigré ici. — La plupart d'entre eux ont émigré ici. — Pour ces familles, le projet de loi ne crée
pas d'inconvénient pour un simple trajet ou une journée, mais pour le
reste de leur vie!»
• (20 h 10) •
Alors,
c'est le fils d'un propriétaire de taxi qui a fait ce commentaire, et il y en a
des milliers, de commentaires, qui
vont dans ce sens-là. Désarroi, détresse, dépression, c'est ce qu'on sent,
c'est ce qu'on voit, c'est ce qu'on entend. Et ceux qui créent ce
désarroi, cette détresse, cette incompréhension, ils sont assis là puis ils
n'écoutent pas, ils sont sourds, ils ne veulent pas entendre ce que les
chauffeurs de taxi et ces familles-là ont à dire.
Je
peux vous dire, Mme la Présidente, que, pour nous, c'est essentiel de convaincre le
ministre d'avoir une meilleure écoute lors de l'article par article.
C'est important d'analyser. Oui, il faut, bien sûr, revoir certaines choses
dans l'industrie parce que, bon, on veut
vivre dans la modernité, puis il faut avancer, il faut progresser, il faut
s'améliorer. Mais, d'accabler ces
personnes-là qui ont bâti leur petit commerce ou le fonds de pension à la sueur
de leur front, je trouve que c'est totalement
injuste. Et je pense que nous allons travailler très, très fort, et je suis
sûre que mon collègue va arriver avec des arguments qui sont porteurs et
qui... Et j'espère qu'il y aura une ouverture de leur côté.
Dans
ma vie précédente, j'ai fait plusieurs projets
de loi et j'ai toujours
essayé, dans mes projets de loi ou dans les
projets de loi qu'on présentait, d'avoir une attitude
d'ouverture ou d'arriver avec des changements pour bonifier les projets
de loi. Et un projet de loi, c'est perfectible. Ce n'est pas parfait quand ça
arrive sur la table. Il faut en discuter, il faut
en parler, il faut approfondir. On a des échanges, et c'est sain, et c'est ça
qu'il faut. C'est ça, la démocratie, et c'est comme ça qu'il faut
travailler dans une société libre et démocratique.
Alors,
Mme la Présidente, je pense qu'il faut, ce soir, se dire qu'on doit
avoir un voeu, si je peux m'exprimer ainsi, et de dire : Bien, arrivons en commission parlementaire et
ayons l'esprit ouvert. Pensons à ces gens qui sont venus exprimer leur
désarroi, leur détresse. Pensons également... et ça aussi, c'est... comme je
l'ai dit tout à l'heure, ça m'a beaucoup frappée.
Il y a eu plusieurs groupes qui représentent les personnes
handicapées et transports collectifs qui sont venus exprimer leurs
inquiétudes, et ça, c'est vraiment important, et ce n'est pas inclus dans le projet
de loi. On n'aborde pas cette question-là dans le projet de loi, et ça, c'est vraiment,
vraiment important.
Alors,
nous allons travailler fort en espérant que le tout soit bonifié et nous
allons... Nous nous opposons au projet de
loi n° 17. Nous offrons évidemment la collaboration au
ministre et nous lui demandons d'avoir une certaine compréhension et de faire en sorte que ces personnes-là qui,
dans beaucoup de cas, sont venues ici avec 0,05 $ ou 0,10 $ dans
leurs poches pour se bâtir une vie et
qui ont réussi à le faire, bien, puissent au moins avoir la tranquillité
d'esprit. Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de
l'Acadie. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de
Robert-Baldwin.
M.
Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de
prendre la parole pour parler un peu du projet de loi n° 17,
projet de loi qui a pour objet la surveillance et le contrôle du transport
rémunéré de personnes par automobile en vue
d'assurer la sécurité des passagers et la transparence du prix des courses.
Wow! Après avoir écouté un peu tout le monde et après avoir lu le projet
de loi lui-même et les discussions qui ont eu lieu en commission parlementaire, moi, j'ai beaucoup de problèmes à
voir comment le projet de loi fait ces choses qui sont décrites dans son
préambule.
La
surveillance et le contrôle du transport rémunéré de personnes... Mais il me
semble que, ce que le projet de loi fait,
c'est une déréglementation radicale. Donc, au contraire, on va diminuer
beaucoup le contrôle et la surveillance du transport rémunéré de personnes. En vue d'assurer la sécurité des
passagers... Ah oui? Si on diminue la réglementation, si on élimine toute une série de règles qui
aujourd'hui balisent très bien ce système de taxi, comment est-ce qu'on va
améliorer la sécurité des passagers? Donc, il y a beaucoup d'incohérence,
à mon avis, dans ce projet de loi.
Ça
me donne un peu l'impression que c'est un projet de loi qui peut-être n'a pas
été... dont toutes les conséquences n'ont
pas été bien examinées. C'est pour cela qu'on a des commissions parlementaires.
C'est pour cela qu'on invite des groupes
à nous proposer, à déposer des mémoires. C'est pour cela qu'on a les débats que
nous avons ici présentement. Et, après,
il y aura la prochaine étape, donc, l'analyse, l'étude détaillée de ce projet
de loi, où je suis sûr que notre collègue le député de La Pinière
va certainement proposer un certain nombre d'amendements.
Parce qu'une
chose que nous souhaitons tous, quand on dépose un projet de loi, c'est de
minimiser du mieux qu'on peut le
nombre de perdants, le nombre de personnes qui sont affectées négativement par
un projet de loi. Et malheureusement, quand
on regarde les faits de ce projet de loi, en tout cas, moi, je constate qu'au
contraire il y a beaucoup, beaucoup de perdants
avec ce projet de loi, ce qui est tout à fait contre... tout à fait à l'envers,
à l'opposé d'un objectif de politique publique, qui est d'améliorer la situation de tout le monde et de minimiser le
nombre de perdants. Et là il y en a pas mal, de perdants.
Maintenant,
le contexte de ce projet de loi, il faut le reconnaître, il faut l'admettre,
c'est que les consommateurs, aujourd'hui,
préfèrent utiliser des applications mobiles pour commander leur transport par
taxi, le transport par automobile, et les consommateurs aussi aiment
bien connaître d'avance quel va être le prix de la course, connaître
d'avance... va choisir la voiture qu'ils vont utiliser, le modèle, tout ça, de
savoir exactement quand est-ce que la voiture qu'ils ont commandée... quand est-ce qu'elle va arriver.
Donc, toutes ces modifications technologiques qui existent maintenant, là... le marché, on a beaucoup parlé d'une entreprise
ici, et il y en a plein qui offre ce genre de service, et c'est clair que
l'industrie va s'adapter à cette nouvelle façon de faire. Ça, on est
tous d'accord là-dessus.
Et, en effet,
les consommateurs sont déjà rendus tout à fait ailleurs dans leurs habitudes de
consommation. Et ça ne veut pas dire
qu'on doit absolument démolir l'industrie, ça ne veut pas dire qu'on doit
absolument déréglementer de telle
façon à ce que ça devienne une espèce de nouveau far west, où tout le monde,
n'importe qui peut s'improviser chauffeur de taxi et peut fournir ces
services-là seulement quand ça leur tente.
Si cette
industrie est tellement réglementée, c'est pour d'abord une raison. Plusieurs
de nos collègues aujourd'hui ont fait
un peu l'historique de l'évolution de la réglementation de l'industrie du taxi.
Je ne vais pas faire ça maintenant. Ce
n'est pas nécessaire, ça a déjà été fait. Mais c'est quand même important de se
rappeler qu'on a toujours un souci non seulement d'équité, mais aussi de
sécurité.
Et donc
l'industrie traditionnelle, comme on l'appelle, les chauffeurs et les
propriétaires de taxi doivent suivre toute
une série de processus d'approbation, d'obtention de permis, de tests,
d'inspections. Et, très bien, c'est dans l'intérêt public, qu'on fasse ces choses-là. Avec le projet
de loi tel que proposé, beaucoup de ces demandes-là, beaucoup de ces
restrictions disparaissent, tombent. Et donc moi, j'ai des sérieuses questions
quant à la sécurité du public une fois ce projet de loi adopté, s'il est adopté
tel quel.
Alors, à mon
avis, il y a surtout... moi, j'ai deux enjeux que j'aimerais soulever ici.
D'abord, je vais parler un peu, donc,
de l'aspect financier de la question, mais, après, j'aimerais aussi parler de
l'aspect purement humain de cet enjeu très important.
• (20 h 20) •
Alors,
parlons du premier, donc, l'aspect financier. Le projet de loi, donc, prévoit
l'abolition du système actuel de permis.
On abolit, on abolit le système de permis. Bang! Comme ça, du jour au
lendemain. Et ça, Mme la Présidente, c'est une déréglementation radicale, et surtout que cela se fait sans
compensation. Donc, déréglementation sans compensation, sans compensation adéquate, je devrais dire, et
compensation arbitraire déterminée par le gouvernement. Mais, à l'origine,
donc, c'est cette volonté d'abolir le système de permis.
Donc, ce
système a été mis en place il y a déjà plusieurs années de ça, et tous les
joueurs dans l'industrie, jusqu'à récemment,
tout le monde a suivi les règles. Donc, on savait qu'il fallait obtenir un
permis pour pouvoir exploiter un taxi. Donc,
ce ne sont pas les détenteurs de permis actuels qui ont demandé à avoir un tel
système, c'était le système qui existait à l'époque, un système qui
réglementait l'industrie. Et donc les gens se sont soumis à ce système-là. Ils
ont acheté leur permis parce que c'était une
imposition du gouvernement. N'était pas chauffeur de taxi qui voulait. Il
fallait donc passer par toute une série d'étapes et acheter son permis.
Le nombre de permis était limité pour éviter toutes sortes de problèmes qui existaient auparavant. Et donc les
détenteurs de permis actuels ont suivi toutes les règles, ont obéi aux lois,
ont obéi aux règlements, ont acheté leur
permis, souvent en demandant des efforts financiers substantiels pour pouvoir
acheter ce permis-là. Et puis là maintenant,
du jour au lendemain, on abolit les permis. C'est fini, il n'y en a plus, et
donc ça, sans explication et sans compensation adéquate.
Le
gouvernement a, dans le projet de loi, soumis que, bon, il y aurait un
250 millions de dollars de compensation qui serait distribué parmi les détenteurs de permis actuels et, comme ma
collègue de l'Acadie l'a dit plusieurs fois, que c'était l'offre finale, «that's it», c'est fini. Nos gouvernements
précédents avaient donné 250 millions. Le gouvernement actuel
ajoute 250 millions, donc 500 millions, un demi-milliard. «That's
it», c'est suffisant. Basé sur quelle analyse? Comment on arrive... Est-ce que c'est trop d'argent? Est-ce que ce n'est
pas assez? Pas besoin de faire une analyse. On décide, 500 millions, 250 plus 250, ça a l'air où le vent tourne.
Donc, on fait un peu ce type d'examen et on décrète ça de façon unilatérale. Donc, ce que je veux dire,
c'est que... Quelle est la justification? Pourquoi 250 millions? Ça aurait
pu être 300, ça pourrait être 500, ça
pourrait être 600 millions. Mais pourquoi? Comment on est arrivés à
déterminer ce montant-là?
Mais ce qui
est encore, à mon avis, le plus choquant de cette décision, c'est que le
gouvernement a décidé qu'on va
compenser les permis qu'on va abolir, et on va le faire au coût d'achat, et non
à la valeur marchande de ce permis. Et ça, Mme la Présidente, en termes financiers très, très élémentaires, c'est
incompréhensible. Pour beaucoup de ces personnes-là, ce permis, c'est un actif. Et il y en a d'autres,
exemples, dans la société québécoise où on a mis en place, au Québec, la
société distincte, des mécanismes de gestion
de l'offre. Comme par exemple, dans le domaine de l'agriculture, dans le
domaine laitier, par exemple, il y a aussi un système de permis, un système de
quotas, et donc les producteurs doivent acheter ce permis-là, ce quota-là pour pouvoir produire. Et, si, un jour,
on décide de changer quoi que ce soit, évidemment, tout le monde s'attend à ce qu'une
compensation éventuelle se fasse à la valeur marchande de cet actif-là, et
non pas à la valeur du coût d'achat initial parce que, dans certains cas, le
coût d'achat était extrêmement bas.
Mais
pour beaucoup de personnes, cet actif-là était leur patrimoine. Donc, elles
comptaient sur la valeur de cet actif-là
pour éventuellement le vendre, et ce serait ça qui financerait leur retraite,
leurs vieux jours. Et, comme ça, du jour au lendemain, on leur dit : Non, bon, fini, cette compensation sera
limitée seulement au coût d'achat. Les
personnes qui ont acheté dernièrement, eux, ils vont être un peu mieux
compensés, mais ceux qui ont acheté le permis il y a cinq, 10, 15 ans et qui avaient vu une bonne
appréciation de la valeur de ces permis, là, se trouvent vraiment dans
une situation très difficile.
Un
exemple, un parallèle qu'on pourrait faire, Mme la Présidente, c'est avec
la situation actuelle des inondations. Le gouvernement a proposé à certaines personnes, donc, de
compenser de, donc, la perte de valeur de leur propriété qui est inondée et
qui serait détruite. Évidemment, cette compensation devrait se faire à la valeur
marchande de la propriété, et pas au
coût d'achat. Une personne qui aurait acheté une maison il y a
30 ans, peut-être à 30 000 $,
si la maison est détruite maintenant, je ne pense pas qu'elle va vouloir
se faire compenser au prix d'achat. Donc, on comprend, tous, cela.
Donc, c'est une
proposition de déréglementation qui, à mon avis, est radicale et qui est non
seulement contre-productive mais très, très arbitraire, c'est le mot que je
cherchais. Et donc, à mon avis, moi, je suis, s'il faut avoir une
déréglementation, il faut que cette déréglementation soit accompagnée d'une
compensation adéquate.
Maintenant,
j'aimerais passer un peu de temps, quand même, à parler, comme ma collègue a
mentionné tantôt, de la présentation
qui a été faite, du mémoire qui a été fait par Desjardins. Le Mouvement
Desjardins est venu en commission
parlementaire pour nous expliquer un peu leur position en ce qui concerne ce
projet de loi, parce que Desjardins, comme
d'ailleurs le Fonds de solidarité FTQ... mais Desjardins est un prêteur
important dans ce domaine. C'est, en fin de compte, Desjardins qui a financé, en grande partie, les acheteurs de
permis de taxi. Et c'est intéressant de constater que Desjardins s'est lancé dans ce créneau
d'activité en grande partie à la demande ou à la suggestion du gouvernement.
Parce que le gouvernement s'est rendu compte
qu'il y avait des prêts usuraires qui se faisaient. Donc, beaucoup de personnes
qui voulaient acheter un permis de taxi devaient
malheureusement recourir à des prêteurs plus ou moins corrects, et avec
des taux d'intérêt extrêmement élevés. Et donc le gouvernement souhaitait que
quelqu'un avec une bonne réputation comme
Desjardins puisse rentrer dans ce marché et financer l'achat de ces permis à
des conditions commerciales normales. Donc,
Desjardins est entré dans cela. Et, maintenant, ils nous disent qu'avec
l'abolition sommaire, comme ça, des permis, que cela aura un effet
financier catastrophique pour les personnes qui détiennent ces permis-là.
Donc,
parce que ces permis-là constituaient, en grande partie, pour ces personnes-là,
un actif important. Et c'était leur plan de retraite. Beaucoup d'entre nous,
bon, avons soit des plans de pension fournis par les employeurs ou, alors,
l'épargne personnelle avec des plans d'épargne retraite, des REER, etc. Et,
pour beaucoup de personnes qui oeuvrent dans
le taxi, c'était la valeur du permis qui était leur plan de retraite. Et là, du
jour au lendemain, ça tombe. Ça tombe presque à zéro. Et donc c'est vraiment catastrophique pour ces personnes-là. Et,
comme j'ai dit tantôt, Desjardins est entré dans ce marché-là suite à des demandes du gouvernement,
des suggestions, et aussi parce que c'était un marché qui était quand même bien
encadré. C'était un marché qui était contingenté. Et donc, d'un point de vue
affaire, c'était quand même une proposition intéressante, de pouvoir
faire ces choses-là.
• (20 h 30) •
Alors,
l'abolition est proposée maintenant dans le projet de loi, mais, encore une fois,
quelles sont les études, quelle est
l'analyse qui nous démontre que l'abolition
des permis est la chose à faire? Encore une fois, je n'ai pas vu d'analyse
de cas qui nous explique pourquoi cela est maintenant nécessaire.
Plusieurs projets
pilotes avaient été faits par le gouvernement précédent suite à l'arrivée
d'Uber et suite au développement de nouvelles technologies sur le marché. Mais
c'est quand même intéressant et vraiment étonnant de voir
que, parce qu'il y a eu plusieurs projets pilotes, le ministère des
Transports a dit ceci avec les documents d'analyse d'impact
réglementaire sur le projet de loi. Alors, le ministère des Transports dit que,
«bien que ces projets pilotes aient pour finalité
d'étudier différentes avenues, il est important de noter que beaucoup
des données recueillies sont confidentielles et ne peuvent donc pas être diffusées dans le contexte de la présente
analyse». Bien, voyons donc! Alors, on fait des projets pilotes pour essayer d'évaluer les alternatives,
mais on ne peut rien vous dire, c'est confidentiel. Là, franchement, je pense que, là, ce n'est pas
acceptable. On ne fonctionne pas comme ça dans une société de droit comme notre
société.
Donc, puisque le
gouvernement veut absolument déréglementer, très bien, mais il faut prévoir une
indemnité, il faut prévoir une compensation
juste et équitable. Et c'est ce qui manque dans ce projet de loi, Mme la
Présidente. Cette abolition
s'apparente à une expropriation, mais une expropriation sans compensation, et
cela, c'est encore une fois, c'est inacceptable.
Aussi, on devrait
avoir un peu plus de... et là je vais manquer de temps, je vais parler des
personnes et pas seulement d'aspects
financiers, d'expropriation sans compensation, mais les personnes qui oeuvrent
et qui ont travaillé de longues
heures dans cette industrie se trouvent maintenant abandonnées par ce
gouvernement. C'est des drames humains vraiment
incroyables. Et comme plusieurs, dans plusieurs médias, j'avais lu...
disaient : «M. le ministre, please have a heart.» «Ayez un peu de coeur.» Et c'est ce qu'on ne
trouve pas dans ce projet de loi, donc un projet de loi qui n'a pas de coeur.
On pourrait dire que c'est un projet de loi
écoeurant, parce qu'il n'a pas de coeur, mais ça manque un peu d'humanité,
et c'est pour cette raison-là que je vais voter contre le principe de ce projet
de loi.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de
Robert-Baldwin. Et nous poursuivons
ce débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 17,
et je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et je vais prendre la balle au bond de mon
collègue de Robert-Baldwin, qui vient de
parler d'éléments importants, vient de faire l'analogie entre l'abolition des
permis, ni plus ni moins, l'abolition
d'un permis, d'un droit de travail, l'abolition d'une propriété, l'abolition
d'une propriété qui... Soit dit en passant, un permis a une valeur, un
permis a une valeur marchande. Tous ici autour de la table, on s'entend sur ça.
Des
permis étaient vendus et achetés au gré des années qui passaient. Et il y avait
de perçu pour chaque vente de permis...
quand on parle de l'État du Québec, qui a permis justement que des gens
puissent pratiquer cette profession-là... pour chaque vente de permis, que ce soit 100 000 $,
150 000 $ ou 200 000 $, il y avait quoi? Il y avait un gain
de capital qui était imposé, il y
avait TPS, TVQ qui étaient imposées. Donc, pour chaque vente de permis — ça, j'aimerais ça avoir le chiffre — l'État, bon an, mal an, à tous les ans,
combien d'argent il mettait dans ses coffres sur les ventes, reventes et
reventes de permis? Parce qu'il était
loisible à une personne qui avait fait 20 ans, 25 ans, 30 ans de
permis de dire : Bien, je vais
prendre ma retraite. Mon permis que j'ai acheté en 1975 vaut aujourd'hui, si je
le vends en 1995, 20 ans après, ou,
si je le vends en 2005, 30 ans après... il ne vaut plus
15 000 $, mais il vaut tout près de 200 000 $. Je le vends,
c'est mon REER. Parce qu'il n'a pas
de fonds de pension et, en ce sens-là, il était imposé sur le gain en capital.
Alors, l'État prenait sa part là-dessus, plus, pour l'État du Québec, la
taxe de vente du Québec.
Alors,
ça, c'est important, je pense, de remettre ça également, parce qu'on dit
beaucoup : Ah! ce sont des montants astronomiques. On parle d'un
premier 250 millions qui avait été donné comme étant... et c'était déjà la
logique dans laquelle le gouvernement libéral de la 41e législature s'inscrivait, c'était un premier 250 millions de dollars qui allait être distribué,
là, pour éponger une partie — c'était
une partie — des
pertes. Un deuxième 250 millions a été proposé par le gouvernement de la CAQ, plus, maintenant, une redevance de 0,90 $, et ce qui est demandé, bien, c'est de
poursuivre dans l'indemnisation, parce que, là, on ne peut pas s'arrêter en si
bon chemin. Certains parlent de 1,3, 1,4 milliard de dollars, ce qui est à compenser, mais ça, il
faudra être au rendez-vous, Mme la Présidente, parce que, du jour au lendemain,
vous avez des gens qui ne peuvent plus pratiquer.
Du
jour au lendemain, le lendemain de quoi?, de l'adoption du projet de loi
n° 17, l'article 234 vient faire quoi? La loi en vertu de laquelle les permis étaient octroyés, la Loi
concernant les services de transport par taxi, est abrogée. Boum! Du jour au lendemain, Mme la Présidente, on
vient vous dire : Bien, la valeur que vous aviez sur votre permis,
bien, elle n'existe plus, parce que le permis ne vaut même plus le papier sur
lequel il est imprimé.
On
a souligné un triste anniversaire pas plus tard que le 28 mars dernier :
le 28 mars 1969. Donc, le 28 mars 2019, ça faisait 50 ans de l'injustice de l'expropriation de Mirabel. Ça
faisait 50 ans que, Mirabel, depuis le 28 mars 1969, du jour au lendemain, il y avait, évidemment, une
expropriation, et on a dit que ça avait été fait de façon extrêmement directe
et radicale, et les compensations,
évidemment, n'étaient... en plus de la façon dont ça avait été fait, les compensations
n'avaient pas été au rendez-vous. Et par la suite non seulement il y a eu des
excuses, mais il y a eu, par la suite, des indemnités
additionnelles, au cours des ans, qui ont été octroyées, et, dans plusieurs
cas, les terres ont été restituées aux membres
de la famille. Alors, il ne faudrait pas, Mme la Présidente... puis je ne veux
pas comparer un malheur à l'autre. Un
malheur est un malheur, chacun le vit et en est frappé, pas juste les
chauffeurs de taxi, les hommes et des femmes, mais également leurs familles, et je ne compare pas les malheurs. Mais
il y a là une triste analogie pour un triste anniversaire qu'on a
souligné fin mars 2019, parce que ça faisait 50 ans de Mirabel.
Il
ne faudrait pas, et c'est le cri du coeur qui est lancé aujourd'hui au
gouvernement, il ne faudrait pas avoir un Mirabel 2 avec le projet de loi n° 17, parce qu'aujourd'hui on
pourrait dire : Bien là, contrairement à Mirabel, ce n'est pas dans la
nuit, ce n'est pas du jour au lendemain, le projet de loi, ça fait longtemps,
c'est écrit dans le ciel, depuis 2014,
qu'on voit Uber arriver dans le portrait. Les gens le savaient déjà, Mme la
Présidente. Quand vous avez un permis qui,
parce qu'il est sous menace et là, encore plus, sous menace avec l'article 234
du projet de loi n° 17... la valeur diminue, diminue, diminue, vous n'avez plus de pouvoir pour
le vendre, plus de pouvoir de négociation. Et qu'allez-vous faire? Allez-vous vous départir d'un permis que peut-être
vous avez acheté il y a 20 ans? Vous l'avez peut-être payé 50 000 $.
Il vaut peut-être 230 000 $
aujourd'hui. Allez-vous le vendre à 100 000 $? Ça ne tient pas la
route. Vous allez vous accrocher non
seulement à ce qui est : Est-ce que Desjardins... Puis mon collègue de
Robert-Baldwin a fait référence au mémoire de Desjardins. Desjardins le soulignait très clairement dans son
mémoire. On parle de quoi? On parle non seulement d'un droit de travail... Moi, si, demain matin... et,
les gens qui nous écoutent à la maison, on vous dit qu'on va abolir votre
capacité de gagner votre croûte, de mettre du beurre sur la table, bien, du
jour au lendemain, si on vous interdit ça, Mme la Présidente, si on vous en empêche, ce sera le
désespoir et ce sera une injustice que plusieurs pourront souligner. Donc,
on abolit quoi? Un droit de travail. On
abolit un fonds de commerce, un permis d'exercer un commerce, qui est une
fonction noble, fonction de chauffeur de taxi, et le fonds de pension.
Desjardins
a bien, je pense, Mme la Présidente, souligné dans son mémoire... et, je vous
dirais, je vais subdiviser mon
intervention en, essentiellement, deux grands volets. Le premier volet, je
viens déjà de le débuter, c'est : l'expropriation signifie indemnisation. Et, 234, lorsqu'on dit, du
jour au lendemain : Vous n'avez plus la capacité d'avoir un permis, le permis ne vaut plus rien, il est aboli, il est
abrogé, ça, c'est assimilable... ce n'en est pas une au sens stricto sensu de
la loi, mais c'est assimilable à une
expropriation. Expropriation égale indemnisation, ce sera le premier des deux
points que je vais développer.
• (20 h 40) •
Le
deuxième point que je vais développer, Mme la Présidente, qui est un petit peu
en périphérie mais qui n'est pas
anodin et qui moi personnellement... Mme la Présidente, on en connaît tous, des
gens qui ont une mobilité réduite. Le
projet de loi a passé, malheureusement, sous silence les personnes handicapées,
qui sont, entre autres, de grands oubliés dans ce projet de loi là. Et je veux prendre le temps, quelques minutes
minimalement, pour faire écho, entre autres, de ce que la Commission des
droits de la personne a déploré, et c'est un terme qu'elle utilisé, a déploré
cet oubli-là.
Alors,
je reviens sur le premier point 2 : expropriation égale indemnisation. Le
Mouvement Desjardins, Mme la Présidente,
a référé à deux articles du Code civil. Le premier article
auquel elle réfère, c'est l'article 947 du Code civil. Le Code civil, c'est ce qui régit, nous, nos relations entre personnes
et les liens que nous avons avec les biens, qu'ils soient immeubles ou
meubles. Et l'article 947 se lit comme suit : «La propriété est le droit
d'user, de jouir et de disposer librement et
complètement d'un bien, sous réserve des limites et des conditions d'exercice
fixées par la loi.» Vous pouvez jouir de votre bien — ici, le permis de taxi — sous
réserve des limites et conditions d'exercice fixées par la loi. Ça, ça
ne s'applique pas. Ça, quand on vous dit, du
jour au lendemain : Votre propriété, elle n'existe plus, on n'est pas en
train de parler de certaines limites
ou de certaines conditions. Donc, clairement, il y a la perte d'un droit, d'un droit qui fait partie,
entre autres, d'un de nos pans. On est dans une société qui n'est pas
communiste. On est dans une société où chaque personne,
dans un capitalisme, qu'il soit socialement acceptable et que l'on veut qu'il
soit acceptable, a loisir de se partir en entreprise, de créer son
propre emploi, d'être, en quelque sorte, un travailleur autonome puis d'avoir
un permis de chauffeur de taxi. Du jour au
lendemain, cette propriété-là qu'il acquiert, pour laquelle l'État du Québec,
de toutes les années, a ramassé les
gains d'impôt, a ramassé les taxes de vente, bien, ça, du jour au lendemain, ça s'appelle : Redonnez-nous une indemnisation qui soit
juste.
Deuxième article du Code civil qui est à
mentionner, l'article 952 : «Le propriétaire ne peut être contraint de céder sa
propriété, si ce n'est par voie d'expropriation — je
l'assimile ici — faite suivant la loi pour une cause d'utilité publique...» Moyennant
quoi? «Une juste et préalable indemnité», une juste et
préalable indemnité. La justesse de l'indemnité?
Tout le monde s'entend pour dire que les montants qui sont déjà sur la table
sont nettement insuffisants. Ça, tout
le monde s'entend, puis je ne veux pas mettre des mots dans la bouche du
ministre, mais je pense que le ministre aussi se casse la tête pour en mettre plus et trouver des façons d'augmenter
l'indemnité. Donc, la justesse n'est pas encore atteinte, et l'indemnité, elle aurait dû être préalable. Mme
la Présidente, avant d'abolir un droit, avant de vous retirer le bien dont
vous jouissez, il faut vous indemniser au
préalable, pas dire : Je vous l'enlève, puis, après ça, ça prendra
quelques semaines, quelques mois, années, sait-on jamais.
Dans
le cas de Mirabel, ça a été ça, en plus des drames familiaux, qui s'est vécu,
l'attachement à la terre. L'attachement à la terre, à la maison familiale, Mme la
Présidente, il en a été écho, quand on fait l'analogie avec Mirabel, à
l'attachement des personnes qui, entre
autres, sont issues de l'immigration, entre autres, qui participent de notre
belle grande communauté haïtienne à
Montréal. Et j'ai lu et je me suis fait un devoir, Mme la Présidente... Je
représente
Rivière-des-Prairies, dans l'est de Montréal. J'ai beaucoup de
chauffeurs de taxi qui sont de la communauté haïtienne, qui sont
arrivés ici et qui ont dit : Bien, moi,
je veux travailler. Moi, la terre d'accueil, le Canada, le Québec, moi, je veux
participer, apporter ma pierre puis je veux vivre dignement, puis je
veux travailler, je veux gagner mon pain.
Et j'ai lu le mémoire de
l'industrie du taxi, Réflexions et recommandations, de l'Association
haïtienne des travailleurs de taxi. Ils
évaluent — et cette
association a été fondée depuis 1982, ça ne date pas d'hier — eux ensemble, les chauffeurs de taxi
d'origine haïtienne, un portefeuille de 350 millions de dollars de la communauté haïtienne
investis dans l'industrie du taxi. Cette communauté-là — et je vous le dis, Mme la Présidente, là, je vous le dis honnêtement, il y a des mots qui seraient antiparlementaires et
je ne les lirai pas — mais je pense que c'est important d'y faire écho. Il y a là des cris du coeur. Ils assument ce
qu'ils disent, ils choisissent les mots, ça sort de façon, je dirais, très, très
directe, un langage
parfois dur mais qui mérite d'être entendu, et je vais vous citer deux, trois
extraits choisis pour respecter notre procédure parlementaire, ne vous
en faites pas.
Ils
disent quoi, les cris du coeur des chauffeurs de taxi haïtiens ?
«Toutes ces victimes qui ont hypothéqué leurs maisons,
leurs biens, voire même leurs vies pour se procurer cette licence de travail
contingentée par l'État ne sont-elles pas
nos grands-pères, nos pères, nos oncles, nos frères, nos neveux, nos
cousins ou nos amis? [...]Pour l'amour du bon Dieu, allons-nous encore enfoncer le clou dans leurs cercueils en
leur [enlevant] le peu qu'ils ont pu accumuler?» C'est un langage dur, c'est un cri du coeur qui doit être, Mme la
Présidente, entendu, et ça, on l'a entendu et on l'a entendu ici avec
les chauffeurs d'origine haïtienne, mais l'entend d'autres chauffeurs de taxi.
Également,
j'ai eu l'occasion de lire, comme mes
collègues, le mémoire des chauffeurs du taxi du Grand Montréal, des chauffeurs de taxi de la région de Québec, et c'est le même cri du
coeur que l'on entend. On parle, à Montréal, entre autres, dans la grande
région de Montréal, de 22 000 familles qui sont touchées. Ce n'est
pas juste le père, le grand-père, l'oncle, le frère, la soeur, la mère,
le chauffeur de taxi qui est touché par cela, c'est toute la famille qui est
touchée.
Et on a pu
rencontrer et j'ai pu rencontrer, moi, Mme la Présidente, des chauffeurs de
taxi qui avaient deux lettres parce qu'ils n'avaient pas respecté les
échéances de leurs hypothèques, n'avaient pas respecté l'échéance de leurs hypothèques mobilières sur leurs voitures de taxi.
Quand tu n'as plus de clients, quand les clients diminuent tel bien que tu ne peux pas faire face à tes paiements... j'ai
eu, moi, Mme la Présidente, dans mes mains, dans mon bureau de comté,
une lettre où un chauffeur de taxi a dit : Regarde, la banque me dit que
je suis en retard, ça ne va pas bien, je ne suis pas capable de faire mon paiement sur mon auto. Autre chose également, ce
même chauffeur de taxi là, il avait hypothéqué, il avait emprunté sur son permis de taxi. C'est un
bien meuble. Il l'avait hypothéqué, il l'avait offert en garantie. Mais, à ce
moment-là, il avait une lettre disant qu'il ne respectait pas les échéances.
Ça, c'est tangible,
ça, c'est concret, et on se doit très clairement d'y faire écho et
d'accélérer... Oui, on reconnaît que,
l'indemnité, il y a encore des discussions à y avoir. On parlait, mon collègue
de... mon collègue de Robert-Baldwin, pardon,
parlait d'une indemnité et qu'il n'y avait pas, à l'heure actuelle, accès aux
données, on n'avait pas accès aux données pour déterminer de façon
sûre... Alors, qu'on les demande, qu'on les rende publiques. Il parlait de la
publicité des renseignements. C'est
important pour que l'on puisse, on s'entend tous, indemniser de façon préalable
et juste et de façon complète, parce
que, Mme la Présidente, je suis certain que, le ministre, là, ce n'est pas de
gaité de coeur qu'il, du jour au lendemain,
dit : Vos permis, là, oubliez ça, ils ne valent pas le papier sur lequel
ils sont imprimés. Ce n'est pas de gaité de coeur, puis il le sait d'ailleurs, et c'est en ce sens-là où je
voulais faire écho, dans mon premier point, à ces propos très durs, très sévères — puis, encore une fois, je n'ai pas tout lu,
parce que je veux respecter notre règlement — et des propos qui pourraient être
antiparlementaires, mais ça, c'est le langage qu'on a sur le terrain, et ça, ça
a été important de l'entendre, de le
comprendre et d'y donner suite. Premier élément : expropriation égale
indemnisation. On veut, on demande que le gouvernement soit au
rendez-vous et qu'il indemnise de façon juste, équitable et complète.
Mon
deuxième point de deux, Mme la Présidente, honnêtement, honnêtement — puis je présume de la bonne foi du ministre des Transports, puis, à la fin de ce
point-là, vous allez voir, il a fait son mea culpa — on a oublié, dans le projet de loi n° 17, on a oublié les
personnes qui ont des limitations, des personnes handicapées qui ne peuvent pas
se déplacer si ce n'est que par
transport adapté. Dans la loi que l'on abroge, la loi quant aux permis de taxi,
et dans tout le cadre législatif, il y
avait déjà un service minimal qui devait être assuré, et on s'assurait donc
que, par la loi, les règlements et par la mise en pratique, les personnes puissent appeler... à
mobilité réduite, handicapées, en fauteuil roulant, et puissent avoir un
service minimal. Et, en ce sens-là,
on peut voir qu'avec le projet de loi n° 17, bien, ça, c'est le
bébé qui est parti avec l'eau du bain,
Mme la Présidente, parce que force est de constater qu'il n'y a pas eu de
suite. On n'a pas assuré qu'il y ait du transport adapté. Et là je pense
que c'est important.
Ce
n'est pas d'hier que l'on a mentionné, qu'on s'est donné, au Québec, des
mesures très tangibles pour s'assurer que
nos personnes handicapées et à mobilité réduite puissent avoir un service. Ça
date, entre autres, de 1978, et là j'ai des extraits du mémoire de la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 1978, Loi
assurant l'exercice des droits des
personnes handicapées. 1978, Loi assurant l'exercice des droits des personnes
handicapées; j'avais cinq ans, Mme la Présidente, quand cette loi-là a
été adoptée. Premier élément.
Deuxième
élément, quand on remonte dans le temps, on peut voir qu'en 1991, à la page 11
du mémoire... Donc, 1978, on se dote
d'une loi au Québec. En 1991, dans un avis qu'elle avait rendu public, la
commission s'était penchée sur l'offre de services en transport
collectif et elle avait fait écho à l'importance que le transport collectif...
oui, transport par taxi, qui est collectif,
mais, lorsqu'on l'appelle, on l'exerce de façon privée la plupart du temps,
mais le transport collectif, que les
sociétés de transport puissent s'adapter. Par la suite, Mme la Présidente, en
2006, à la page 4 du mémoire de la Commission
des droits de la personne et des droits de la jeunesse, en 2006, il y a la
Convention relative aux droits des personnes
handicapées, et celle-ci renferme des principes... convention internationale,
renferme des principes universels qui ont été intégrés dans le droit
canadien et dans le droit québécois.
• (20 h 50) •
Autre
élément. En 2010, à la
page 13 du mémoire de la commission, «selon une étude réalisée par l'Institut
de la statistique en 2010, un peu
plus du quart des personnes ayant une incapacité utilisent [des] services de
taxi pour répondre à leurs besoins de déplacement [de taxi]». Dès 2010, on
avait des études à l'appui qui disaient qu'un peu plus du quart des personnes
ayant une incapacité utilisent les services
de taxi. C'est leur moyen de se déplacer, parce qu'honnêtement, Mme la Présidente, ce n'est pas toutes les
personnes qui avaient aussi les moyens de pouvoir se procurer une voiture
adaptée à leurs besoins.
Il
y a eu, en 2012 — vous
voyez, là, l'évolution historique, elle est là — une décision majeure de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Via Rail — ça va peut-être vous rappeler des
éléments — où l'on
disait, en vertu de l'article 15 de
la charte des droits et libertés du Canada : Nul ne peut être discriminé
ou on ne peut l'empêcher d'avoir accès à un moyen de transport et d'y obtenir
les biens et services qui y sont disponibles. On disait : «La Cour suprême
a reconnu que les personnes ayant une
déficience ont le droit de voyager avec les autres passagers, et non d'être
confinés dans des installations distinctes.» Elle a conclu que le fait que des
trains soient accessibles sur certains parcours ne justifie pas la présence des
trains inaccessibles sur d'autres parcours. Autrement dit, vous offrez le
service pour tout le monde, pour tous les
parcours, et ce n'est pas vrai qu'une personne à mobilité réduite devra changer
son horaire, modifier ses heures parce que le service ne sera pas
disponible avant 1 heure, 2 heures, 3 heures ou demain matin.
Dernière
date, page 20 du mémoire, on parle de 2018. On parle de quoi? On parle de la
politique, sous la 41e législature du
gouvernement libéral du Québec, Transporter le Québec vers la modernité, politique
de mobilité durable. C'était une politique
qui nous projetait dans l'avenir jusqu'en 2030, ça, c'était en 2018, et on
s'engageait à continuer à offrir les services personnalisés pour
personnes à mobilité réduite.
Là,
Mme la Présidente, je viens vous brosser un tableau très rapide. Et ça, ça fait
suite du mémoire de la commission des
droits de la personne et de la jeunesse. En 1978, 2006, 1991, 2010, 2012, 2018,
ça a toujours été un réflexe, l'importance d'assurer un service, et là force
est de constater que la Commission des droits de la personne, et je vais vous
en lire un extrait, a eu, elle
également, des mots durs par rapport au projet de loi n° 17 :
«C'est avec grand étonnement qu'elle a constaté que le projet de loi [...] ne
prévoit aucune disposition qui vise à encadrer spécifiquement le transport par
taxi de ces personnes. Elle ne
comprend pas pourquoi le gouvernement ne reconduit pas les dispositions qui se
trouvent dans la loi actuellement...»
Et, la commission, toujours, je la cite : «Cette omission est déplorable,
sachant que ces services constituent une importante alternative aux
services réguliers de transport collectif...»
Le
ministre, il l'a dit, il l'a dit, entre autres, dans un article du Devoir,
je pense, du 13 mai dernier. Il l'a dit dans ses propos. Quand, à l'adoption de principe, il a
dit : On va corriger le tir, il a fait son mea culpa. Mais, Mme la
Présidente, le fait que le ministre
et que le gouvernement, dans la rédaction du projet de loi, l'aient échappé,
ça, Mme la Présidente, je pense que c'est important de le souligner pour
ne pas que ça se reproduise encore une fois, pas en 2018.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de
LaFontaine, et maintenant je vais céder la parole à M. le député de
Viau.
M.
Frantz Benjamin
M.
Benjamin : Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente,
20 minutes, ce n'est pas assez. 20 minutes, ce n'est pas assez, dans la mesure où mes collègues et moi,
nous sortons tout juste de longues consultations particulières où nous avons entendu plusieurs
groupes ayant des réserves importantes concernant le projet de loi n° 17. Je tiens donc à remercier, dans un premier temps, tous les
groupes qui ont participé à cet exercice primordial dans le processus législatif.
Ces consultations ont été l'occasion de nous
rappeler l'importance de ne pas évoluer dans un vase clos ici même, à
l'Assemblée nationale. Nous nous
devons, en tant qu'élus, d'être à l'écoute de la population, et c'est ce que
mes collègues... du côté de l'opposition officielle, c'est ce que nous
avons tenté de faire lors de ces consultations.
Mais
il est encore plus important, lorsqu'une partie de la population sera affectée
directement et lourdement par un projet de loi, ce projet de loi, le projet de
loi n° 17, le projet de loi concernant le transport
rémunéré de personnes par automobile,
que j'appelle le projet de loi de l'expropriation, car c'est de cela dont il
s'agit... Pour plusieurs intervenants, le dépôt de ce projet de loi a été vécu comme un choc, voire une trahison.
À ce sujet, Mme la Présidente, comme élu de la circonscription de Viau,
je peux vous confirmer que le dépôt de ce projet de loi a créé une onde de choc
dans ma circonscription. Comme député de la
circonscription de Viau...
dans ma circonscription vivent des dizaines de personnes qui vivent de l'industrie du
taxi, principalement comme propriétaires chauffeurs et comme chauffeurs aussi.
Et,
parlant de ces personnes, qui sont-elles, ces personnes?
Ce sont des personnes d'origine haïtienne, d'origine maghrébine, mais, au-delà de
ma circonscription, rappelons ce que l'industrie du taxi est et a
représenté pour beaucoup de personnes
d'origine immigrante. Je pense, entre
autres, à la communauté grecque, je pense
aussi aux communautés du Sud-Est
asiatique, beaucoup de communautés du Pakistan. Ce sont des personnes,
lorsqu'elles sont arrivées au
Québec... Pour eux, l'industrie du
taxi, face aux obstacles que plusieurs d'entre eux vivaient en termes de
discrimination, d'accès à un emploi,
l'industrie du taxi a été pour eux une voie qui leur a permis de gagner
dignement leur vie comme citoyennes et comme citoyens, voire comme
entrepreneurs. Pour d'autres aussi, l'industrie du taxi a été pour eux, face
aux obstacles, notamment par rapport
à la non-reconnaissance de leurs diplômes... des personnes qualifiées qui se
sont retrouvées dans l'industrie du
taxi pour oeuvrer comme propriétaires chauffeurs ou comme chauffeurs. Et,
lorsque je suis en circonscription, une
grande partie de mes rencontres porte sur la question de l'industrie du taxi,
Mme la Présidente. Mon équipe reçoit quotidiennement
son lot d'appels, depuis plusieurs semaines, de chauffeurs dans l'incertitude
pour eux, mais surtout pour leurs familles.
Et
parlons des impacts immédiats de ce projet de loi sur ces personnes :
stress, détresse psychologique, dépression et impact aussi dans les
familles.
Comme
Québécois d'origine haïtienne, la communauté haïtienne, c'est une communauté...
lorsque s'en prend à l'industrie du taxi, on s'en prend à toute la
communauté haïtienne, car c'est une communauté, comme l'a rappelé tout à l'heure mon collègue député de LaFontaine.
Donc, l'industrie du taxi, c'est un peu le bas de laine de la communauté
haïtienne. C'est quelque 300 millions,
la valeur des permis. Et je sais que, dans plusieurs circonscriptions
québécoises, vivent des chauffeurs-propriétaires de cette communauté, mais
aussi des communautés maghrébines, des communautés libanaises. Que ce soit à Laval, à Montréal, un
peu partout sur la Rive-Sud, vivent ces personnes. Ce sont des citoyens
à qui, aujourd'hui, on est en train de tout
simplement, à travers ce projet de loi, nier ce qu'ils possèdent, de les
exproprier, car c'est une expropriation, et je le rappelle encore.
Lors
des consultations particulières, le témoignage des représentants de l'industrie
du taxi et de certains propriétaires était de véritables cris du coeur
pour aider près de 22 000 familles menacées par ce projet de loi. Sur ce
point, je suis totalement solidaire de ces travailleurs de cette industrie.
20
minutes, ce n'est pas assez, Mme la Présidente, pour parler du transport
adapté. Je dois dire que ces consultations m'ont permis de confirmer notamment que les chauffeurs de taxi étaient
extrêmement lésés par ce projet de loi, mais aussi de prendre conscience
d'autres types d'injustice. J'ai personnellement été touché par le plaidoyer
des groupes luttant pour le transport
adapté. Je pense à des groupes comme l'Alliance des regroupements des usagers
du transport adapté du Québec, à la Confédération des organismes de personnes
handicapées du Québec, la COPHAN, à Kéroul et à d'autres, ces organismes qui travaillent depuis plusieurs
années à ce que les personnes handicapées puissent utiliser le transport,
peu importe sa forme, comme tous les autres
citoyens du Québec, et ce, dans les mêmes conditions d'accessibilité sur tout
le territoire québécois. Ces personnes qu'ils défendent à travers ces
organismes nous ont rappelé qu'ils ont été oubliés
par ce projet de loi. L'incertitude qui pèse déjà sur toute l'industrie et que
j'ai pu sentir comme élu est aussi très lourde sur une partie de cette population la plus vulnérable, Mme la
Présidente, la population des personnes vivant avec un handicap.
• (21 heures) •
Sur
ce point, j'espère que le ministre des Transports portera une attention
particulière aux recommandations de ces
différents groupes. Ces groupes ont été unanimes, unanimes, Mme la Présidente,
à rappeler que ce projet de loi les a complètement
oubliés. On n'a pas fait mention des besoins particuliers des personnes vivant avec un handicap. Il faut qu'une
garantie légale inscrite dans la loi soit offerte à ces gens pour lesquels le transport adapté est une nécessité quotidienne.
Malheureusement,
comme l'ont souligné plusieurs groupes, aucune étude d'impact digne de ce nom
n'a été produite non plus. Comme l'a aussi souligné l'un des intervenants dans
son mémoire à propos de l'étude à l'analyse d'impact
réglementaire, c'est le terme «accessibilité» qui est absent... que celui de
«transport adapté». Alors que le ministre répète qu'il a mis le client au centre de son projet de loi, il faut
absolument qu'une insistance soit mise sur la clientèle la plus
vulnérable.
Vous
comprendrez que je suis d'avis qu'on ne tient pas assez compte des réalités de
ces personnes, les personnes les plus
vulnérables, Mme la Présidente. Cela est nécessaire pour ne pas que ces gens
subissent une perte de leurs acquis. Ce
serait chose simple à ajuster en étude détaillée en reconduisant les
dispositions de la loi actuelle qui permettent d'offrir une protection
aux personnes en situation de handicap, car il est important de rappeler que le
transport est un besoin essentiel pour répondre adéquatement à tout ce que
demande une pleine inclusion sociale de toutes et de tous.
Les personnes ayant des limitations et
nécessitant du transport adapté ont plusieurs obstacles qui restreignent la
gamme des choix disponibles. Qu'il s'agisse d'obstacles physiques,
psychologiques, de communication ou encore financiers, pour une personne ayant des
limitations fonctionnelles, l'utilisation du taxi est ainsi une nécessité qui
demande une planification anticipée.
D'ailleurs, tout porte à croire qu'avec le vieillissement de la population ce
genre de service risque d'être de
plus en plus en demande. Malheureusement, l'avènement du libre marché ne répond
pas à ces besoins.
Mme
la Présidente, ils ont été aussi plusieurs représentants de services municipaux
de transport adapté qui sont venus
rappeler la satisfaction de la clientèle offrant le transport adapté par
rapport aux services de l'industrie du taxi. Or, je le rappelle encore,
ce projet de loi est muet sur les besoins des personnes vivant avec un
handicap.
Après
avoir parlé du transport adapté, j'aimerais revenir sur un deuxième élément que
ces consultations nous ont permis de bien cerner, Mme la Présidente, c'est le
choc. C'est le choc que vivent, que vivront les chauffeurs propriétaires
au lendemain de l'adoption de ce projet de
loi. Ils vivent déjà avec ce choc, mais l'adoption de la loi viendra
sanctionner leur sort.
Je
veux citer le représentant de Desjardins, qui a dû rappeler au ministre, lors
des consultations, que nous vivons dans une société de droit, que le Québec est
une société de droit, qu'on ne peut pas exproprier des personnes qui ont
travaillé dur durant des années, durant des
décennies. C'était leur gagne-pain, c'était leur bas de laine, c'était leur
pension, leur fonds de pension. C'était peut-être aussi l'héritage
qu'ils pensaient donner à leurs enfants.
On
ne peut pas les exproprier de cette façon, et pour permettre quoi? Pour
permettre à Uber de s'implanter, car le
projet de loi n° 17 met fin à la gestion de l'offre et à son corollaire,
soit le permis de taxi, Mme la Présidente. Ce faisant, cette décision de mettre fin à la gestion de
l'offre a rendu la valeur des permis nulle. Cette façon de faire, je le
rappelle, porte un nom, c'est
l'expropriation. Mon collègue de LaFontaine a rappelé, a fait le parallèle, et
parallèle très juste d'ailleurs, avec la situation qu'ont vécu, il y a
quelques décennies, les citoyennes et citoyens de Mirabel.
Si le gouvernement
veut mettre fin à la gestion de l'offre, il a la responsabilité de racheter
l'entièreté des permis et pas seulement
d'offrir une compensation à la valeur de l'achat. Pour de nombreux
propriétaires de permis, cet achat était vu comme un investissement sûr,
pas nécessairement comme un investissement pouvant rapporter gros, Mme la Présidente, mais plutôt comme un
investissement sûr, une forme de placement garanti. La garantie, c'était celle
que le gouvernement encadrait correctement
l'industrie du taxi. Les lois étaient garantes de cet investissement. Comme
l'a très bien souligné, en consultations,
M. Hubert Thibault, donc, du Mouvement Desjardins, le Québec est une
société de droit. Nous vivons dans une société de droit.
J'aimerais
ici, Mme la Présidente, rappeler que l'indemnisation, telle qu'elle existe
présentement, fera en sorte que les propriétaires de permis de longue
date, c'est-à-dire ceux qui ont acquis leur permis il y a plusieurs années,
recevraient une fraction seulement de la valeur de leur permis. À l'inverse,
pour les nouveaux détenteurs entrés récemment dans l'industrie, les pertes
seraient relativement mineures.
Pourtant, les
chauffeurs qui ont le plus besoin de cette compensation sont ceux qui ont
acheté un permis il y a plusieurs années. Ce sont eux qui seront plus affectés
par la perte de la valeur de leur permis et qui auront le plus de difficulté à trouver un autre emploi pour assurer
leur retraite. Exproprier les travailleurs âgés revient à les condamner à une
retraite misérable et précaire, alors qu'ils se sont investis toute leur vie
dans l'industrie du taxi. En vérité, l'abolition, l'expropriation aura pour
effet d'appauvrir les chauffeurs propriétaires.
La
valeur de ces permis, Mme la
Présidente, était jusqu'à maintenant
tellement sécuritaire que le permis lui-même pouvait servir de garantie pour
faire un emprunt à une banque. Vous savez, des fois, il y a des propriétaires
chauffeurs qui allaient à la banque, Mme la Présidente, qui voulaient, par exemple, soit faire venir, s'ils sont d'origine
immigrante, faire venir un parent de
l'étranger et qui pouvaient demander un prêt sur la base de cette garantie-là.
Mais maintenant tout ça devient
caduc avec cette expropriation en vue. Cette valeur est en quelque sorte une
garantie, ce qui nous permet encore de parler d'expropriation. Il n'est que
normal, juste et équitable de voir cela comme une expropriation. Il faut donc
indemniser les propriétaires de permis selon la valeur marchande afin de
réparer le tort fait à ces gens. De nombreux intervenants
qui ne sont pas propriétaires ont d'ailleurs spécifié, Mme la Présidente, l'importance d'une indemnisation sur la valeur marchande.
Il
y a aussi une légende urbaine, Mme la
Présidente, une légende urbaine qui
circule, portée, colportée par le ministre
des Transports, sur l'idée que ce projet de loi se voudrait un projet de loi de la modernisation. Parlons de modernisation. Contrairement à ce que l'on affirme parfois, ces chauffeurs ont été des
leviers importants de modernisation, et l'industrie au complet est loin d'être réfractaire à cet
exercice d'innovation. À ce titre, rappelons, le Bureau du taxi de Montréal est
un exemple de ce qui peut se faire en termes de modernisation dans
l'industrie du taxi.
Depuis
sa fondation, le Bureau du taxi de Montréal a piloté de nombreux projets de
modernisation structurants pour
l'industrie et pour le service donné aux clients. À ce chapitre, on peut
évoquer l'instauration de la formation continue pour les chauffeurs, le
registre des taxis ou l'image de marque Bonjour. Moi, je suis très fier, comme
Québécois, comme Montréalais quand je visite, quand je circule dans la ville,
de voir des taxis avec cette image, Bonjour, parce que c'est pour nous... c'est une avancée importante pour
l'industrie du taxi, car l'idée de modernisation va beaucoup plus loin qu'une
application ou qu'un téléphone cellulaire.
Et, sur le point de modernisation du cadre législatif, même l'industrie du taxi
voit sa nécessité. Par contre, cette modernisation doit se faire dans le
respect en évaluant les changements et leurs impacts,
visiblement ce qui n'a pas été fait dans le cadre de ce projet de loi. Sur ce
point, le gouvernement a beaucoup de rattrapage à faire.
J'ai
rappelé tout à l'heure, Mme la Présidente, qu'il n'y a pas d'étude d'impact qui
a été réalisée, aucune étude qui a
été déposée, notamment.
Lorsqu'à plusieurs reprises mon collègue le député de La Pinière a sans cesse
demandé de mettre, de déposer les études, motus, bouche cousue de la part du
ministre des Transports. On ne se fie que sur la présomption d'Uber, Mme la Présidente, et son
application, qui représenterait le futur. Pourtant, le seul futur que l'on peut
entrevoir à partir des cas concrets des
villes où Uber s'est déjà implanté, c'est une hausse des prix pour le client ou
une baisse des
redevances aux chauffeurs, alors que l'industrie du taxi a permis à de nombreux
chauffeurs, jusqu'à maintenant, de mener une vie, une bonne vie quand
même, malgré tout.
• (21 h 10) •
L'arrivée
d'Uber vient chambouler complètement ce milieu, d'abord avec toutes les
questions du coût des permis de taxi qui est rendu nul, ensuite en mettant sur un pied d'égalité des
gens qui conduisent une voiture jouant le rôle de taxi et des gens ayant fait du taxi leur métier, parce
que les statistiques montrent bien que les chauffeurs d'Uber le font à temps
partiel et souvent pour quelques semaines ou
quelques mois. Force est de constater que le projet de loi n° 17 fragilise
de nombreuses personnes. D'ailleurs, plusieurs personnes, que je connais
d'ailleurs, que je connais, qui habitent ma circonscription,
qui ont déjà tenté Uber, ont quitté Uber à cause des conditions, Mme la
Présidente. On pourra bien dire que le libre marché fera qu'Uber sera délaissé
par les clients sur la base de
leur liberté de choix et sur l'existence d'une offre diversifiée. L'erreur,
c'est de penser qu'Uber n'a pas les moyens, comme je l'évoquais précédemment, de faire baisser ses prix
drastiquement pour combler cette baisse de clientèle et couper l'herbe sous les
pieds des compétiteurs.
20 minutes, je vous le disais, Mme la
Présidente, ce n'est toujours pas assez. Tout bien considéré, le projet de loi n° 17 a été fait trop rapidement, et de manière cavalière, et sans véritablement prendre en compte la réalité terrain du transport. Il sera primordial, lors de la suite des choses, de prendre
en considération les personnes vulnérables dans ce projet de loi. Et, dans la situation dans laquelle ils sont, les chauffeurs
propriétaires sont aussi des personnes vulnérables.
Les derniers
mots, Mme la Présidente. Puisque, pour moi, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, l'industrie du taxi, ce ne sont pas des numéros, ce
sont des personnes, ce sont des visages, ce sont parfois des amis, des
personnes que je côtoie au quotidien dans ma
circonscription, dans la communauté haïtienne, dans la communauté maghrébine, dans la
communauté libanaise... Je pense, entre autres, à des personnes comme Kamal,
M. Max Rosalbert, Jacques-Claude Hernande, Jean-Claude Fonrose.
Je peux en
nommer plusieurs d'entre eux, mais je veux vous parler d'un de
manière particulière, Mme la
présidente. Il s'appelle Stanley. Il
s'appelle Stanley Bastien. Il est diplômé en... Il est technicien en électronique, Mme la Présidente, et c'est un passionné d'auto. Il a décidé, dès
1996, de mettre de côté son diplôme pour embrasser l'industrie du taxi. Il a
passé cinq semaines de formation. Il a eu son permis. Il est devenu
propriétaire. Pour lui, c'est une forme d'héritage, me dit-il, qu'il voulait laisser à ses enfants. Sa
priorité, c'est sa clientèle. Il aime tellement ce qu'il fait, Mme la
Présidente, qu'il a tatoué un
véhicule taxi sur sa poitrine. C'est un passionné du taxi. Aujourd'hui, je le
cite, il me dit : Frantz, je suis tout nu. Le ministre des Transports m'a appauvri. Il n'a jamais échoué
une inspection, Mme la Présidente. Il n'a jamais eu de plainte non plus
comme chauffeur propriétaire.
Des cas comme
celui-là, j'aurais pu en évoquer beaucoup d'autres, beaucoup d'autres et
partout. Je pense, entre autres, au
président de l'Association des taxis des régions. Je l'ai rencontré un dimanche
à Montréal. Il venait d'aussi loin que
du Saguenay pour venir manifester à Montréal. Ce sont des cas. Lorsqu'on fait
des projets de loi, ce sont des personnes, ce ne sont pas des numéros. Et je suis sûr que d'autres collègues dans
d'autres circonscriptions montréalaises, qui connaissent autant que moi, aussi bien que moi ces personnes,
peuvent, de tous partis confondus, tous bords, parler au nom de ces
gens-là. J'invite ces collègues à parler de ces gens-là, à parler de leur
réalité, de ce qu'ils ont vécu, de ce qu'ils...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Viau. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de
Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Mme Émilise
Lessard-Therrien
Mme Lessard-Therrien :
Merci, Mme la Présidente. Dans la présentation du projet de loi n° 17, le
ministre des Transports a énoncé à plusieurs reprises qu'il visait à
réformer l'industrie du taxi afin d'offrir un système égalitaire. C'est donc l'égalité, le principe qui a guidé la
formulation de ce projet de loi. Bien, je prends la parole aujourd'hui en
cette Chambre pour dénoncer la triste absence de considération des régions.
Dans
l'analyse d'impact réglementaire réalisée par le ministère du Transport, la
seule ligne qui parle de l'extérieur de
Montréal est celle où l'on statue que, parmi les 17 500 chauffeurs au
Québec, plus de la moitié opèrent à l'extérieur de la métropole, 9 000 chauffeurs pour être exact. C'est donc
de manière tout à fait légitime que je me demande où sont les mesures d'impacts spécifiques de ce projet de
loi pour les régions, comment est-ce que le projet de loi aura un impact
sur les services de transport dans les
milieux ruraux, sur les travailleurs et sur les clients, parce que les taxis en
région, ils ont une réalité bien
différente que ceux des grands centres urbains. Puisque le projet de loi
n° 17 vise à imposer en mur-à-mur,
encore, ses dispositions sans égard aux diverses réalités, je prends mon temps
de parole aujourd'hui pour vous démontrer les impacts nocifs qu'aura le
p.l. n° 17 sur les taxis opérant en région.
En ouvrant le
marché grand aux nouveaux joueurs comme Uber, le ministre des Transports semble
croire que le service s'en verra
bonifié, mais, en fait, il n'y a rien de moins sûr, d'abord pour la simple et
bonne raison que le déploiement actuel
du réseau cellulaire et de l'Internet dans les régions du Québec est déficient.
Vous vous douterez que l'application ne sera pas fonctionnelle sur une
bonne partie du territoire.
Actuellement,
sans le projet de loi n° 17, la prémisse de base du service de transport
rémunéré des personnes repose sur le principe d'accessibilité au service
en continu, et ce, sur l'ensemble du territoire. En région, ce principe est fondamental. Il permet, par exemple, d'assurer à
Ginette d'avoir un taxi, même si elle habite dans le rang 3 de son village.
Les chauffeurs s'y engagent lorsqu'ils
entrent dans la profession. C'est un véritable pacte social que le gouvernement
veut briser en instaurant le projet de loi n° 17 et son abolition
des agglomérations.
Il faut
reconnaître que les agglomérations ont leurs défauts. L'obligation de faire des
retours à vide, notamment lorsque le
chauffeur a dépassé sa zone, est un exemple patent. Mais pas besoin de détruire
l'industrie pour régler cet enjeu. Tout le monde s'entend pour dire qu'il faut revoir
les agglomérations, même l'industrie du taxi traditionnel, et la solution
du gouvernement, c'est de tout abolir. C'est
une solution qui est trop facile. Les différents regroupements ont proposé
des alternatives beaucoup plus
intéressantes. Par exemple, on pourrait faire des agglomérations qui
s'appliquent aux limites des villes
et des MRC dans le cas des régions. On assurerait alors un service continu et
omniprésent sans menacer une industrie fonctionnelle. En abolissant les
agglomérations, les clients, si chers au ministre des Transports, s'inquiètent plutôt de savoir s'ils auront une garantie d'une
couverture 24 heures sur 24, sept jours sur sept, et ce, partout en
province. Si le ministre présente
cette abolition comme une ouverture à l'accroissement des services, plusieurs
études démontrent que c'est vrai,
mais seulement dans les milieux déjà bien desservis. A contrario, les usagers
des territoires moins rentables verront une diminution des services.
C'est ça, l'égalité, Mme la Présidente?
C'est impossible de déterminer l'effet de ce
projet de loi sur nos régions parce que l'étude d'impact n'est pas rigoureuse et nous oublie. Le gouvernement va
quand même de l'avant avec son projet de loi. Je me permettrai ici de citer
l'Association des taxis des régions du Québec, qui, dans leur mémoire,
propose, et je cite : «...de mettre sur la glace la disparition de
certaines agglomérations tant et aussi longtemps qu'une étude d'impacts sur la
clientèle ne sera pas réalisée. Si le
ministre veut passer de la parole aux actes et mettre au centre de cette
réforme le client, il se doit de procéder d'abord et avant tout à une étude d'impacts afin d'éviter que celui-ci
soit pris en otage et qu'il voie la couverture de services se dégrader
en région.» Fin de la citation.
Si des
personnes demeurent sceptiques face à la découverture éventuelle due à
l'abolition des agglomérations, il demeure que la solution de la logique
des marchés, c'est-à-dire de permettre la tarification dynamique qui vise à solliciter les gens à sortir leur véhicule lorsque
l'offre est basse, n'aurait comme effet que de gonfler artificiellement les
prix. Encore une fois, le client n'en sort certainement pas gagnant, et c'est
un enjeu d'accessibilité aux services qui apparaîtra.
Et, en
région, j'aimerais attirer votre attention sur une utilisation très courante du
taxi. Les gens qui vont beaucoup souffrir
de cette potentielle diminution de services, ce sont les personnes les plus
vulnérables. On n'a qu'à penser aux personnes
en situation de handicap, les personnes âgées qui ne conduisent plus, celles
qui ont besoin d'un accompagnement pour
aller à l'hôpital. Ce sont ces personnes-là qui souffriront des carences qui
seront inévitablement observées en région parce qu'en région, malheureusement, il n'y a pas d'alternative. Le
transport collectif est très peu développé, et il n'y a rien, dans les orientations actuelles du gouvernement
qui mise sur le développement du transport collectif dans les régions du
Québec.
• (21 h 20) •
Les personnes en situation de handicap craignent
aussi les répercussions de ce projet de loi sur l'offre des transports adaptés en région. Seront-ils soumis à
la tarification dynamique, alors qu'ils ont droit à des tarifs fixes? Est-ce
que tous les nouveaux joueurs offriront du
transport adapté comme le fait l'industrie du taxi? Comment assurer que les
chauffeurs de taxi n'aillent pas faire du
taxi traditionnel dans les centres pour payer leurs comptes au lieu de faire
des contrats pour des personnes à
mobilité réduite? Présentement, une compagnie de taxi qui compte plus de
20 véhicules est obligée d'avoir, minimalement, un taxi accessible.
Le projet de loi n° 17 écarte complètement cette considération. Comment
s'assurer d'offrir un service de transport à cette population?
Steve Leblanc,
qui est directeur du Regroupement des organismes de personnes handicapées de la Mauricie illustre
bien les conséquences possibles. Lui, il ne
peut pas se déplacer sans son fauteuil, ça lui prend obligatoirement un véhicule adapté. S'il n'y en a pas, il doit rester chez
lui. L'isolement est un phénomène social et sociétal qui est grave. Est-ce que
c'est ça, l'égalité du projet de loi n° 17? M. Leblanc a même expliqué, dans un article du Nouvelliste,
qu'il y a déjà un manque à gagner
dans le transport adapté en région. «Il n'y a pas beaucoup d'avantages à faire
adapter son véhicule.» C'est très
coûteux, malgré les subventions. Je le cite : «Si le peu qu'on a, on nous
l'enlève, c'est un retour en arrière de 40 ans.»
Le
gouvernement dit avoir placé l'usager au centre du projet de loi, mais il
demeure que des enjeux importants de sécurité
demeurent également. Ce projet de loi menace notamment la sécurité des usagers
du taxi en région, puisqu'on ne s'assure
pas d'améliorer l'accessibilité aux formations, qui se donnent dans peu de
lieux et dans des horaires contraignants, sans parler de la formation pour le transport adapté, qui est
complètement absente du projet de loi n° 17. Malgré cette
réalité grandement décriée, rien dans le projet de loi n° 17
n'assure la formation à distance. Aussi, l'abolition de la vérification mécanique annuelle peut diminuer le sentiment de
sécurité des usagers. Enfin, l'absence d'accessoires uniformes et de plaque T
est également un facteur réduisant la sécurité des passagers. Comment les
clients pourront s'assurer qu'ils et elles embarquent dans un véhicule certifié
si les accessoires le démontrant sont différents d'un répondant à l'autre? Ne serait-il pas plus sécuritaire de maintenir
l'obligation d'identification d'un taxi avec une plaque T, une
identification pochette bien visible pour tous et un numéro de
lanternon? Poser la question, c'est y répondre.
Enfin, c'est
la question des travailleurs de l'industrie en région qui m'inquiète.
Georges El-Assaad de la région de
Châteauguay dit ne pas comprendre pourquoi, après leur avoir demandé de se
moderniser, le gouvernement, d'un coup, les abandonne. C'est ça que ressentent les chauffeurs et chauffeuses de
l'industrie du taxi, un abandon. Au profit de qui? De multinationales
voyoutes.
L'Association des taxis des régions du Québec
affirme en effet que le projet de loi n° 17 poussera
plusieurs artisans à la faillite. Mme Dallaire, du Saguenay, a vendu ses
14 permis de taxi à son fils il y a un an et demi. Elle se demande, si le projet de loi est adopté, s'il doit
continuer à la rembourser ce qui va valoir zéro dollar ou est-ce qu'elle
lui dit de laisser faire et de se retrouver
sans fonds de pension. Je me demande ce que le ministre du Transport aurait à
répondre à cela.
Il faut
penser aussi qu'en région il y a beaucoup de gens qui sont devenus avec des
limitations au travail à force d'avoir
travaillé physiquement dans des domaines qui sont très exigeants, dans le
domaine de l'extraction des ressources naturelles, par exemple, qui ont été
pris avec des douleurs au niveau du dos ou au niveau des bras, qui se sont
recyclés dans
l'industrie du taxi, où ils ont pu continuer d'avoir une fierté au travail, s'acheter
une flotte de véhicules, et là, tout d'un coup, on leur envoie un chèque de 1 000 $ pour les
50 000 $ qu'ils ont investis pour leur permis puis on leur dit :
Arrangez-vous. Est-ce que c'est ça, l'égalité, Mme la Présidente? Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Et
maintenant je vais céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee.
M. David Birnbaum
M. Birnbaum :
Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 17, Loi concernant le transport rémunéré de personnes par
automobile.
Qu'on se
rappelle que ce projet de loi a pour objet la surveillance et le contrôle du
transport rémunéré de personnes par automobile en vue d'assurer la sécurité de
passagers et la transparence du prix des courses, mais également à favoriser l'émergence de moyens technologiques
et de modes de mobilité. Entre autres, le projet de loi prévoit qu'une personne qui fournit des services de répartition
de demandes de courses doit être enregistrée auprès de la commission.
Le projet,
aussi, renferme des dispositions relatives à la détermination du prix des
courses et des autres frais qui peuvent
être exigés des clients. Entre autres, il prescrit que le calcul du prix d'une
course soit déterminé conformément au
tarif établi par la commission, sauf si la demande de course est faite par
certains moyens technologiques qui permettent au client d'en connaître le prix maximal et d'y consentir avant que le
chauffeur ne soit informé à la demande. Bon, voilà quelques-unes des
dispositions du projet de loi défensibles, mais, dans la pratique, il y a des
inquiétudes.
Bon, moi, j'ai eu l'honneur de participer dans
le gouvernement participant, qui s'est mis devant ce défi qui se dessinait avec
responsabilité, en connaissant les enjeux et à comprendre qu'il y avait un
équilibre à chercher. Comme plusieurs secteurs, ce secteur de transport public,
finalement, se voit modifié et modernisé avec... des fois légitime, des fois inquiétante, mais des technologies qui changeaient, des consommateurs qui exigeaient plus, les habitudes
qui changeaient. Le Québec
n'est pas à l'abri, il ne veut pas être à l'abri des avances technologiques et
des avances sur la façon de faire, d'offrir des services. Donc, il
fallait réconcilier plusieurs propriétés, plusieurs priorités.
Uber, entre
autres, se présentait comme nouveau joueur. Il ne fallait pas mettre la tête
dans le sable, il fallait réagir. Mais,
en même temps, quand
même notre fierté au Québec,
il fallait veiller à l'équité, il fallait veiller au sort des gens qui travaillent déjà dans cette industrie, il fallait protéger les chauffeurs de
taxi en région ainsi qu'en métropole, voilà les considérations légitimes et normales, et il fallait trouver l'équilibre.
Il y a des considérations environnementales, évidemment. Il y a, et on va en parler comme plusieurs autres l'ont
fait, les priorités et les services de nécessité pour les gens handicapés,
les gens en difficulté. Il y a tous les
enjeux qui touchent aux régions du Québec. Bon, tout cela pour dire qu'il y
avait des choses à réconcilier.
Ce n'est pas
nous qui vont suggérer que le ministre et le projet de loi devant nous ne
s'adressent pas à un sujet pertinent. Il faut et il fallait compléter cette
transformation qui nous est imposée et qui est imposée par la nécessité
de la modernisation. Et ce n'est pas nous
qui vont questionner nécessairement la bonne foi de ce projet de loi, ni du
ministre, ni du gouvernement. Les
objectifs, comme quelques-uns que j'ai énumérés, sont des objectifs que nous,
on peut partager. Mais c'est dans les
moyens et des façons de trouver cet équilibre que les questions se posent. Et
il y a de grandes questions, comme je
dis, en termes d'équité, en termes de notre devoir collectif de protéger
l'égalité d'accès aux services et l'égalité de l'offre ainsi que
l'équité des conditions de travail pour les gens qui oeuvrent dans l'industrie.
C'est très
beau de parler de déréglementation. Faite de façon contextuelle, humaine, c'est
une stratégie que nous, on peut partager. Mais il faut trouver
l'équilibre, il faut le faire de façon très intéressante et très contextuelle,
qui va assurer, là, une industrie rentable,
qui va protéger l'utilisateur, qu'il ou elle soit en région ou en métropole, va
protéger le contribuable, pas
nécessairement usager, mais le contribuable, et évidemment — et voilà un des enjeux clés — protéger le monde qui, en bonne foi, a choisi ce domaine comme carrière, souvent
en conditions difficiles, souvent comme responsable d'une famille. Souvent, comme nouvel arrivant au
Québec, ce n'est pas facile, ce n'est pas facile. Et c'est normal qu'on
se donne, Mme la Présidente, la tâche de s'occuper de leur sort ainsi que le
sort de nous tous au Québec.
Alors, si j'ai bien compris, ça va être à
suivre.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, vous avez très bien compris, M.
le député. Alors, je comprends
que vous n'avez pas terminé votre intervention?
M. Birnbaum : Non, je n'ai pas
terminé.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, vous pourrez la poursuivre lors de la
reprise de ce débat.
Ajournement
Et, compte tenu de l'heure, j'ajourne nos
travaux au mercredi 29 mai à 9 h 40.
(Fin de la séance à 21 h 30)