(Neuf heures quarante minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Bon mercredi à vous tous et toutes. Vous
pouvez prendre place.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Et nous
allons débuter notre séance avec la rubrique de déclarations de députés, qui sera ouverte par M. le député de
Chauveau.
Rendre hommage à
Mme Monique Doyon-Villeneuve, récipiendaire
de la Médaille de l'Assemblée nationale
M. Sylvain Lévesque
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Nous sommes dans la
Semaine de l'action bénévole, l'occasion
de souligner le dévouement et l'implication de citoyens engagés qui offrent
leur temps et leur argent au bénéfice de notre collectivité. C'est donc
dans cette optique que, lundi soir dernier, j'ai eu le grand plaisir de
remettre le prix de Bénévole de
l'année de Chauveau à Mme Monique Doyon-Villeneuve. Lors de
cette soirée, je lui ai remis la Médaille de l'Assemblée nationale pour
ses 23 ans de bénévolat.
Nous soulignons,
bien sûr, son travail passé mais aussi son implication actuelle puisqu'à
75 ans elle est toujours active
au sein de la Saint-Vincent-de-Paul et au Comptoir entraide de
Notre-Dame-des-Laurentides pour faire ce qu'elle préfère : apporter aide et soutien aux familles moins favorisées.
Compassion et empathie, voilà ce qui guide son engagement depuis toutes
ces années.
Monique
Doyon-Villeneuve, vous êtes une communicatrice et une rassembleuse qui aimez
les gens et la vie. Vous n'avez d'égal que la grandeur de votre coeur.
Merci pour tout.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député. Et nous vous souhaitons la bienvenue à l'Assemblée nationale.
Maintenant, pour la prochaine déclaration, je me
tourne vers Mme la députée de Saint-Laurent.
Féliciter les joueurs de l'équipe cadette de
basketball
l'Express, champions provinciaux
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. En fin de semaine dernière, c'était le tournoi de basketball
provincial au séminaire Saint-Joseph de Trois-Rivières, et je tiens à souligner les champions, les cadets de l'Express de
Saint-Laurent, qui, devant l'adversité, ont su élever leur jeu pour encore
triompher et être nos grands champions non seulement à Saint-Laurent, mais
partout au Québec.
Et je m'en
voudrais aussi de ne pas souligner l'équipe juvénile féminine, qui, savez-vous
quoi, a remporté pour la 11e fois
les grands honneurs. Alors, elles sont définitivement
trop fortes pour la ligue, mais nous en sommes très fiers.
Et j'en profite pour dire un grand merci à tous
les entraîneurs, qui vont bien au-delà que de tout simplement entraîner et encadrer nos jeunes. Ils les
accompagnent dans leur parcours scolaire, ils les accompagnent dans leurs rêves
et ambitions.
Et cet été
ils vont prendre, évidemment, la route pour faire d'autres tournois, pour
toujours élever leur jeu, et faire preuve
de rigueur et de discipline, le tout avec le travail en équipe. Et, grâce à
eux, nos jeunes persévèrent à l'école, et nous en sommes fiers.
Bravo à tous les jeunes de l'Express
Saint-Laurent!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Saint-Laurent. Et maintenant je cède la parole à M. le député
de Drummond—Bois-Francs.
Souligner le 40e anniversaire
du Centre d'action bénévole Drummond
M. Sébastien Schneeberger
M. Schneeberger :
Merci, Mme la Présidente. Alors, aujourd'hui, je veux souligner le
40e anniversaire du Centre d'action bénévole Drummond, voué au
bien-être et à la sécurité des personnes aînées et en perte d'autonomie.
Le centre
compte sept permanents et plus de 250 bénévoles, qui, l'an dernier, ont
posé 24 000 gestes et totalisé 34 000 heures. Le
Centre d'action bénévole Drummond a emménagé dans de nouveaux locaux trois fois
plus grands pour
augmenter et répondre aux services. Il sert 20 000 repas par année.
80 bénévoles remplissent près de 10 000 rapports d'impôt.
Ce
carrefour d'information aide les 55 ans et plus à s'y retrouver, notamment
dans les boîtes vocales et sur Internet. Son travailleur du milieu fait le lien avec les autres organismes et
services disponibles. Une cuisine collective et dîners communautaires
sont en développement. D'autres services consistent en du gardiennage, visites
d'amitié, des appels sécurisants, de l'accompagnement au transport.
Alors,
aujourd'hui, je veux dire merci à sa directrice générale et toute son équipe,
Mme Andrée Ouellet, pour ce que vous faites. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de
Drummond—Bois-Francs.
Maintenant, je cède la parole à M. le député de Jean-Talon.
Souligner
le 20e anniversaire de l'organisme La Baratte
M. Sébastien
Proulx
M. Proulx :
Merci, Mme la Présidente. J'aimerais féliciter un organisme de Jean-Talon qui
célèbre cette année son 20e anniversaire. Il s'agit de La Baratte.
Fondé en 1999, cet
organisme à but non lucratif qui est engagé dans la communauté offre à la
grandeur de la Capitale-Nationale une réponse concrète aux besoins alimentaires
et sociaux des personnes qui sont vulnérables.
Je
désire aujourd'hui rendre hommage, bien sûr, aux bénévoles et aux membres du
personnel de La Baratte, qui, au fil des ans, ont fait preuve d'un
dévouement qui est remarquable afin d'aider des gens à se nourrir sainement et
à maintenir leur autonomie. Grâce à leur
implication, certains citoyens ont plus facilement accès à des repas sains et
équilibrés. D'autres réussissent également grâce à un programme
spécifique de réinsertion sociale.
Alors,
j'aimerais exprimer à toutes les personnes engagées dans la réussite de La
Baratte ma reconnaissance la plus vive et, bien sûr, toutes mes
félicitations. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Jean-Talon. Maintenant, au tour de Mme la députée d'Argenteuil de nous faire sa déclaration d'aujourd'hui.
Souligner l'engagement de
Madeleine, jeune
bénévole de la circonscription d'Argenteuil
Mme Agnès
Grondin
Mme Grondin : Merci,
Mme la Présidente. En cette Semaine
de l'action bénévole, je choisis aujourd'hui de mettre en lumière le bénévolat généreux
et enthousiaste de la belle Madeleine.
Depuis près de deux ans, elle offre son temps deux
matins par semaine dans une école primaire de mon comté, où elle a participé
à servir près de 9 300 déjeuners santé dans le cadre des Bons
Déjeuners d'Argenteuil. Madeleine fait preuve
d'une assiduité exemplaire, elle est toujours la première arrivée. Et le plus
merveilleux, c'est que, pour elle, son implication bénévole est un
privilège.
J'ai
oublié de vous préciser, Mme la Présidente, Madeleine a six ans. Cette puce est
la preuve que la relève bénévole est dynamique.
Madeleine, merci du
fond du coeur de t'impliquer. Merci à ceux et à celles qui l'encouragent.
Merci, Mme la députée.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée
d'Argenteuil. Et maintenant je vais reconnaître M. le député de
Jean-Lesage.
Exprimer
de la solidarité envers les chauffeurs de taxi
M.
Sol Zanetti
M. Zanetti :
Merci, Mme la Présidente. Ralph
Hadad: 135 000 $. Mehdi Batani: 135 000 $. Moustafa Fahimi: 142 000 $. Pierrot Bagula :
138 000 $. Nizar Abbuh : 128 000 $. Ce sont le nom et
le montant des hypothèques de cinq
chauffeurs de la centrale de taxi du coin de la 4e Rue et 2e Avenue
dans Jean-Lesage. Ils ont respecté les règles, ils ont toujours été bons
joueurs, et là le gouvernement change les règles et leur envoie le message que
leur investissement ne vaut plus
rien, qu'ils vont devoir passer les cinq, 10, 15 prochaines années à
travailler pour rembourser un prêt dans le vide.
Je
voudrais exprimer ma sympathie et ma solidarité envers tous les propriétaires
de taxi du Québec et inviter du même geste le gouvernement de la CAQ à
revoir son projet de loi pour prendre en considération la réalité de Ralph,
Mehdi, Moustafa, Pierrot, Nizar et tous les autres. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Jean-Lesage.
Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Sanguinet.
Souligner
le Mois de la sensibilisation
à la maladie de Parkinson
Mme Danielle McCann
Mme McCann :
Merci, Mme la Présidente. Chaque année, le mois d'avril est consacré à la
sensibilisation à la maladie de
Parkinson. Il s'agit de la deuxième maladie neurodégénérative la plus fréquente
au Québec. Elle affecte la vie de plus de 25 000 personnes.
La maladie de
Parkinson apparaît de façon progressive, de manière différente chez chaque
personne et demeure chronique. Elle n'est pas mortelle mais peut avoir
des conséquences notables sur la qualité de vie.
Les personnes atteintes de cette maladie nécessitent souvent
l'utilisation d'aides techniques et de réadaptation fonctionnelle en raison
des déficiences motrices et cognitives qui pourront s'installer graduellement
au cours de la progression de la maladie.
Heureusement, il existe des médicaments qui permettent de contrôler adéquatement les symptômes de la maladie
et de conserver une bonne qualité de
vie pendant plusieurs
années. Une prise en charge précoce de la personne permet de mieux intervenir en ce sens.
Rappelons également
que divers outils sont à leur disposition, dont de l'information, des services, du soutien et des activités, outils soutenus par
des organismes tels que Parkinson Québec
et L'Appui national. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Sanguinet.
Maintenant, je cède la parole à M. le député de Bonaventure.
Rendre hommage à l'auteur
et historien Christian Blais
M. Sylvain Roy
M. Roy : Mme la
Présidente, notre société est peuplée d'acteurs de l'ombre qui font l'histoire
et qui font notre histoire. Ces gens ont pour mission de mettre en lumière les
événements que nous avons vécus afin de guider ceux que nous vivrons.
Les historiens sont des êtres passionnés. Ils
donnent une dimension à notre existence qui nous invite à dépasser le souci de
notre destinée individuelle. Aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à l'un
d'eux, et j'ai nommé M. Christian Blais.
Christian
Blais est historien à l'Assemblée nationale. Je souligne qu'il fut le premier
Gaspésien à être élu membre de la Société des Dix, une organisation
renommée qui oeuvre depuis les années 30 à mettre en valeur notre
histoire. Il est aussi, entre autres, coauteur de L'histoire du Québec à
travers ses lieutenants-gouverneurs, paru en 2005, et de Québec, quatre siècles d'une capitale, paru en 2008. Il a aussi collaboré à la
troisième édition de l'ouvrage La procédure parlementaire du
Québec, publié en 2012.
M. Blais,
en mon nom et en celui des Gaspésiennes et Gaspésiens, bravo et merci! Recevez
nos hommages et notre reconnaissance et sachez que nous sommes
extrêmement fiers de vous, qui êtes le gardien de notre mémoire.
Je partage
avec vous cette idée que s'occuper du passé n'est pas une perte de temps, bien
au contraire. Merci de faire rayonner la Gaspésie par votre contribution
significative à l'histoire de notre société. Merci, Mme la Présidente.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de
Bonaventure. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Masson.
Rendre hommage à
M. Richard Mercier dans le
cadre de la Semaine de l'action bénévole
M. Mathieu Lemay
M. Lemay :
Mme la Présidente, dans le cadre de la Semaine de l'action bénévole, sous le
thème Le facteur bénévole pour
élever les collectivités,
célébrons les efforts collectifs des bénévoles et songeons aux innombrables
actions prises localement dans le but d'aider des gens.
À Mascouche,
nous avons la chance de côtoyer un grand bénévole qui consacre toute son
énergie à venir en aide aux plus
fragiles de notre société. Il a donc choisi d'épouser la cause des aînés et se
dévoue maintenant pour leur bien-être.
M. Richard
Mercier est un des membres fondateurs du club FADOQ de Mascouche et il en est
le président depuis 2010. Grâce à sa
vision positive, il a fait de la Journée internationale des aînés du
1er octobre la Semaine des aînés, pendant laquelle plusieurs activités
sont mises à la disposition de nos aînés.
Au cours des huit dernières années, sous sa
gouverne, le Cercle d'or de Mascouche a franchi le cap des
3 200 membres. Les heures de bénévolat données par M. Mercier et
les membres de son équipe ne se comptent plus, Mme la Présidente. Je veux donc saluer chaleureusement le dévouement
sans borne de M. Richard Mercier et lui dire un grand merci pour
tout ce temps précieux donné à nos aînés. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Masson. Et maintenant, pour clore cette rubrique de déclarations de
députés, je cède la parole à M. le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata.
Rendre hommage à Mme Raymonde Michaud, nommée
Bénévole de l'année par Golf Canada
M. Denis
Tardif
M. Tardif : Mme la Présidente, merci. Dans le cadre de la semaine bénévole, je
désire vous parler d'une citoyenne bien
engagée dans son milieu depuis plus de 30 ans. Il s'agit de
Mme Raymonde Michaud, de Rivière-du-Loup, qui a reçu le prix de
Bénévole de l'année 2018 par Golf Canada.
Capitaine de la
division féminine de son club avant de joindre le conseil d'administration,
Mme Michaud est devenue également
première femme à devenir membre du Club Optimiste de Rivière-du-Loup. Ainsi,
elle a joué sans équivoque un rôle déterminant dans la création de
nouveaux partenariats entre Golf Québec et l'ensemble des clubs Optimiste du
Québec.
Par
son engagement et son leadership, Mme Michaud a contribué activement au
rayonnement de notre milieu. Les gens comme Mme Michaud, sont, à
mon avis, dans notre milieu, un stimulant où il fait bon de vivre.
Merci
beaucoup, Mme Michaud, de Rivière-du-Loup, pour votre implication et pour
avoir tissé un meilleur tissu social.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député.
Maintenant, à ce
point-ci, je me dois de vous demander le consentement pour permettre la
présentation d'une 11e déclaration par
notre collègue députée de Mille-Îles. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.
Alors, Mme la députée, la parole est à vous.
Souligner
la Journée rose
Mme
Francine Charbonneau
Mme Charbonneau :
Merci, Mme la Présidente, et merci aux membres de la Chambre. J'invite
l'Assemblée à souligner avec moi la Journée rose comme c'est le cas à
chaque deuxième mercredi du mois d'avril, une journée pour accroître la sensibilisation de la population à la
discrimination, le harcèlement, l'homophobie, la transphobie, la transmisogynie à travers le monde. Voilà une
occasion de rappeler que toute forme d'intimidation est inacceptable, qu'elle
vise l'orientation sexuelle d'une personne,
son identité de genre ou ses caractéristiques personnelles. Les Québécoises
et les Québécois sont invités à célébrer la
diversité en portant un vêtement rose, témoignant ainsi de leur participation
à la construction d'une société toujours plus inclusive et respectueuse.
Je
profite de l'occasion pour rendre hommage aux personnes et aux organismes qui
contribuent à créer des milieux de vie sécuritaires, ouverts et
égalitaires. Votre engagement est une source d'inspiration.
Je
vous invite donc à prendre part à cette grande manifestation de solidarité en
portant du rose, car ensemble on est plus forts que l'intimidation.
Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Mille-Îles. Et ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.
Et je suspends nos
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 54)
(Reprise à
10 h 2)
Le
Président : Mmes et MM. les députés, nous allons nous
recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez
vous asseoir.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique Présentation
de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, je vous demande d'appeler l'article a,
s'il vous plaît.
Projet de loi n° 18
Le
Président : À l'article a
du feuilleton, M. le ministre de la Famille présente le projet de loi n° 18, Loi
modifiant le Code civil, le Code de
procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en
matière de protection des personnes. M. le ministre.
M.
Mathieu Lacombe
M. Lacombe :
Merci, M. le Président. Ce projet de loi propose principalement une révision
des dispositions législatives relatives à la protection des personnes inaptes.
Ainsi, le projet de
loi propose de modifier la Loi sur le curateur public afin notamment de changer
le nom du Curateur public pour celui de directeur de la protection des
personnes vulnérables.
Le
projet de loi propose de supprimer les régimes de protection du majeur que sont
la curatelle au majeur et le conseiller au majeur.
Le projet de loi
propose de modifier la tutelle au majeur afin de prévoir que le tribunal doit,
dans tous les cas, déterminer si les règles
relatives à l'exercice des droits civils qui s'appliquent généralement au
majeur en tutelle doivent être
modifiées ou précisées, compte tenu des facultés de celui-ci. Il prévoit la
possibilité pour le tribunal de réduire le nombre de personnes à convoquer à l'assemblée de parents,
d'alliés ou d'amis et il assouplit les règles relatives au remplacement d'un tuteur. Il prévoit, en outre, que les délais
de réévaluation médicale et psychosociale du majeur doivent être déterminés
compte tenu de la nature de l'inaptitude du
majeur, de l'étendue de ses besoins et des autres circonstances de sa
condition. Il ajoute, aux motifs de mainlevée d'une tutelle au majeur,
la cessation du besoin de représentation.
Le
projet de loi permet à un majeur qui, en raison d'une difficulté, souhaite être
assisté pour prendre soin de lui-même, administrer
son patrimoine et, en général, exercer ses droits civils de se faire
reconnaître un assistant par le directeur de la protection des personnes
vulnérables. Cet assistant au majeur, dont la reconnaissance est inscrite dans
un registre public, peut agir comme intermédiaire entre le majeur et les
tiers.
Le projet de loi
propose d'instituer la représentation temporaire du majeur inapte, laquelle
permet au tribunal d'autoriser une personne
à accomplir un acte déterminé au nom d'un majeur s'il est établi, par une
évaluation médicale, que l'inaptitude
de celui-ci est telle qu'il a besoin d'être représenté temporairement pour
l'accomplissement de cet acte. L'incapacité
qui en résulte est alors temporaire et ne porte que sur l'acte pour lequel le
représentant a été autorisé par le tribunal. Le tribunal fixe les modalités
et conditions d'exercice des pouvoirs conférés au représentant temporaire.
Le projet
de loi propose de modifier les règles
relatives au mandat de protection. Il en précise certains effets. Il énumère certains éléments que peut contenir un tel
mandat et impose de nouvelles obligations au mandataire. Il précise de plus les
critères à considérer lors de l'homologation ou de l'exécution du mandat, les
éléments qui doivent guider le mandataire
pour assurer le bien-être moral et matériel du mandant ainsi que les
recours possibles lorsque le mandataire n'exécute pas fidèlement le
mandat.
Le
projet de loi propose des modifications concernant la
tutelle au mineur. Il introduit, pour les tutelles datives, une possibilité de dispense par le tribunal des obligations de constituer un conseil de tutelle et
de rendre un compte de gestion
annuel. Il prévoit également que le directeur de la protection des personnes
vulnérables devra, au moins 20 jours avant la transmission de biens ou le paiement d'une indemnité au
bénéfice d'un mineur, en être avisé. Il permet aussi au directeur de déterminer la nature et l'objet de la
sûreté, s'ils n'ont pas été fixés dans les délais prescrits. Il précise
également les règles applicables à la rémunération du tuteur datif.
Enfin, il établit le droit du tuteur aux biens d'ester en justice.
Le
projet de loi propose aussi des changements dans la constitution des conseils
de tutelle en remplaçant le quorum de participation par une convocation
minimale à l'assemblée de parents, d'alliés ou d'amis.
Enfin,
le projet de loi prévoit des modifications de concordance et des mesures
transitoires. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le
Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce
projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
Oui, M. le Président. On accepte, bien entendu, d'être saisis du projet. Est-ce
que je peux compter sur la
collaboration des collègues pour qu'on puisse tenir des consultations? On
échangera les groupes avec vous le plus rapidement possible, bien
entendu.
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, ça sera avec plaisir.
Le Président :
Adopté.
Dépôt de documents
Donc, à la rubrique
Dépôt de documents, Mme la ministre de la Sécurité publique.
Ententes sur la prestation des
services policiers dans certaines communautés
autochtones et avenant à l'entente sur la prestation des services
policiers dans la communauté de Listuguj
Mme Guilbault : Merci, M. le Président. Permettez-moi de déposer
les ententes sur la prestation des services policiers dans les
communautés de Mashteuiatsh, d'Akwesasne, de Listuguj et pour la région
Kativik.
Entente
de financement complémentaire pour la prestation de services
policiers sur le territoire de l'Administration régionale Kativik
Je
dépose également l'entente sur le financement complémentaire pour la prestation
des services policiers 2018-2023 entre l'Administration régionale
Kativik et le gouvernement du Québec. Merci.
Le Président :
Ces documents sont déposés. M. le ministre des Transports.
Entente relative à la mise en
oeuvre du Plan Nord à l'horizon 2035,
plan d'action 2015-2020 entre la Société du Plan Nord
et le ministre des Transports
M. Bonnardel :
M. le Président, je dépose l'entente 2018-2019 relative à la mise en oeuvre
du Plan Nord à l'horizon 2035,
plan d'action 2015-2020 du gouvernement du Québec entre le ministère des
Transports et la Société du Plan Nord.
Le Président :
Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.
Réponse à des pétitions
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je dépose la réponse du
gouvernement à la pétition présentée
le 21 mars 2019 par le député de Bonaventure. Merci.
Le Président :
Ce document est également déposé.
Il n'y a pas de dépôt
de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt
de pétitions, Mme la députée de Repentigny.
Enseigner des compétences
pratiques aux jeunes du secondaire
Mme
Lavallée : Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par 96 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec :
«Les
faits invoqués sont les suivants :
«Considérant
que le but de l'école secondaire québécoise est de préparer ses étudiants le
mieux possible à la vie adulte qui les attend à leur graduation;
«Considérant
qu'au fil des années, l'éducation donnée aux étudiants du secondaire est
devenue de plus en plus abstraite et ne leur permet [pas] d'être
préparés aux défis que le marché du travail moderne réserve;
«Considérant
qu'avec l'omniprésence croissante de la technologie dans le monde, la
capitalisation du par coeur a de moins en moins sa place dans les
écoles;
«Considérant qu'il
est crucial d'apprendre aux jeunes à développer leur créativité et de leur enseigner
les compétences de base pour devenir des individus accomplis;
«Considérant
qu'il est nécessaire d'ouvrir la discussion sur l'utilité réelle de ce qui est
enseigné au secondaire et sur la meilleure façon de préparer les jeunes
à ce qui les attend dans le monde de demain;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement du Québec de prendre les moyens
nécessaires pour enseigner aux jeunes des compétences pratiques telles
que la création et le maintien de relations harmonieuses, la motivation
personnelle, les premiers soins et autres, par exemple sous la forme de
capsules de 15 minutes par semaine.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
• (10 h 10) •
Le Président :
Cet extrait de pétition est déposé.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
violation de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je
cède la parole au chef de l'opposition officielle.
Stratégie
de développement économique et de création d'emplois
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, le
premier ministre peut bien essayer de définir la CAQ comme le parti de
l'économie, mais plusieurs des mesures qu'il propose sont des mesures
totalement antiéconomiques. M. le Président, avant de se vanter, le
premier ministre devrait s'assurer d'avoir quelques réalisations à son actif.
Je
vous rappelle que c'est nous qui avons redonné aux Québécois la capacité de
rêver avec quatre budgets équilibrés. En
fait, les seules ententes d'exportation d'électricité avec nos voisins
ontariens, c'est nous. Également, lorsqu'on a parlé de la cible de
250 000 emplois sur cinq ans, en 2014, vous trouviez ça loufoque. Eh
bien, nous avons rencontré notre engagement.
Mais, M. le
Président, qu'est-ce que la CAQ fait depuis le début de son mandat? On entend
seulement la cassette du leader du
gouvernement, une cassette franchement antiéconomique, sans parler des vieilles
chicanes du premier ministre avec le
reste du Canada, ses projets de loi divisifs qui n'augurent rien de bon pour
l'économie. M. le Président, ce manque de
vision du premier ministre, particulièrement en matière de main-d'oeuvre,
dirige clairement le Québec vers un recul économique.
Est-ce que c'est pour ça que son ministre des
Finances prévoit une croissance aussi faible pour le Québec?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, le chef de l'opposition
officielle mélange finances publiques
et économie. C'est vrai
que le Québec, ça a commencé avec Lucien Bouchard puis ça s'est
poursuivi avec les gouvernements qui se sont suivis, on a réussi à réduire la dette du Québec. On
va bientôt être comparable avec l'Ontario en pourcentage du PIB. Donc, on peut dire
qu'on est sur la bonne voie en matière de finances publiques.
Là où on a un immense problème, un immense défi,
c'est du côté des revenus, la richesse des Québécois. Malheureusement, le Québec a
toujours un écart de richesse de 17 % avec l'Ontario. Si on compare avec le
reste du Canada, c'est plutôt
20 %, avec les États-Unis, c'est 40 %. D'ailleurs, c'est pourquoi le
Québec reçoit actuellement 13 milliards de péréquation, parce que le Québec, malheureusement, est plus pauvre que
le reste du Canada. Donc, on travaille actuellement avec le ministre de l'Économie, le ministre des
Finances à mettre un plan économique pour attirer beaucoup plus
d'investissements au Québec, attirer
des emplois beaucoup mieux payés au Québec, parce que le problème au Québec
comme à beaucoup d'endroits, ce n'est
pas le nombre d'emplois, c'est la qualité des emplois. Donc, on va être
capables d'améliorer la situation de la richesse du Québec, ce que n'a
pas été capable de faire le gouvernement libéral.
Des voix : ...
Le Président : Première
complémentaire. La parole appartient au chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Pour ça, ça prend des
investissements privés, et les investisseurs regardent le climat politique
avant d'investir. Pensez-vous
vraiment qu'un gouvernement qui nie la pénurie de main-d'oeuvre les encourage?
Pensez-vous vraiment qu'un premier
ministre qui s'ingère dans les conflits de travail les investisseurs privés
aiment ça? Pensez-vous vraiment qu'un gouvernement qui change une
industrie en abandonnant tous ceux qui ont respecté les règles, ça les
intéresse? C'est quoi, votre vision?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, au cours des cinq dernières années, les
investissements des entreprises ont augmenté de 25 % aux États-Unis. Au cours des cinq dernières années, les
investissements des entreprises ont augmenté de 30 % en Ontario. Au cours des cinq dernières années, les
investissements des entreprises ont diminué de 10 % au Québec. C'est catastrophique, M. le Président. Il faut augmenter
les investissements privés pour être capable d'augmenter la productivité,
pour augmenter le salaire moyen. Le défi au Québec, là...
Le Président : En terminant.
M. Legault : ... c'est de faire
passer le salaire moyen de 47 000 $ à 52 000 $. C'est
là-dessus qu'on travaille, M. le Président.
Le Président : Deuxième complémentaire,
M. le chef de l'opposition officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : En tout
cas, les Québécois savaient une chose, qu'avec nous l'économie allait beaucoup
mieux.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît!
M.
Arcand : Le premier ministre ne comprend pas l'impact des
actions idéologiques de son gouvernement. Même
Gérard Bouchard a dit que votre projet de loi est trop radical et qu'il n'est
pas à l'image des Québécois. Des grands journaux à travers le monde
publient chaque semaine des articles incendiaires sur votre gouvernement.
Quand allez-vous
comprendre que c'est votre responsabilité d'instaurer un climat propice au
développement économique du Québec?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, au cours des cinq dernières années, la
richesse par habitant a augmenté de 20 % aux États-Unis, 16 % en Ontario, seulement 15 % au Québec.
Donc, non seulement on n'a pas réussi à réduire notre écart de richesse avec
nos voisins, on l'a augmenté. L'approche économique du Parti libéral, ça a été
un échec. M. le Président, on va
mettre en place une politique pour créer des emplois payants au Québec. C'est
ça qui est important. Il ne faut pas juste
regarder le nombre d'emplois. Il faut regarder la qualité des emplois. C'est
comme ça qu'on va garder nos jeunes au Québec.
Des voix :
...
Le
Président : Troisième complémentaire. Je vous demanderais, s'il
vous plaît, d'être attentifs à la question du chef de l'opposition
officielle.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
Un tel échec avec des milliards et des milliards de surplus. Encore une fois,
il peut répéter tous ces chiffres-là, mais
comment, vraiment, il peut penser aider l'économie quand il fait tout pour
amplifier la pénurie de main-d'oeuvre et limiter, pour des raisons
idéologiques, le nombre de travailleurs dont nos entreprises ont besoin?
Pense-t-il vraiment
que c'est comme ça qu'on va créer de la richesse?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, le chef de l'opposition officielle se vante
d'avoir fait des gros surplus. Ce n'est pas de l'argent qui vient du Parti libéral. Ça vient de deux endroits :
on a trop augmenté les revenus, donc trop augmenté les impôts, puis on a
trop coupé dans les dépenses.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M.
Legault : Le chef de l'opposition officielle puis l'ancien ministre
des Finances trouvent ça drôle d'avoir trop augmenté les impôts puis trop coupé dans les services à la population.
On va gérer, M. le Président, de façon responsable puis on va créer de
la richesse au Québec, ce que n'a pas été capable de faire le Parti libéral.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Respect de l'égalité hommes-femmes et de la neutralité
religieuse de l'État
Mme Hélène David
Mme
David : Bonjour, M. le Président. Encore le même projet de loi.
Évidemment, tout le monde le dit, il y a certainement un consensus là-dessus, ce projet de loi aura des impacts
majeurs chez les femmes, particulièrement chez les enseignantes. Le
rapport Bouchard-Taylor, que le premier ministre lui-même décrivait comme ayant
été écrit par deux professeurs émérites qui
ont fait un travail sérieux et documenté, recommandait textuellement de ne pas
inclure les enseignants. Gérard Bouchard lui-même écrivait cette semaine :
«Le premier ministre erre...» Il a insisté hier soir en qualifiant le projet de
loi de radical, qui ne ressemble pas aux Québécois et qui aurait avantage à
être redéfini.
Vous
savez, M. le Président, une valeur chère aux Québécois
est l'égalité d'accès en emploi. Depuis plus de 50 ans, les Québécoises se sont battues pour pouvoir occuper une juste
place sur le marché du travail et dans la société. Ce projet de loi vient ébranler ces acquis.
Comment
le ministre peut-il freiner la lutte acharnée des femmes
depuis des décennies pour l'accès en emploi?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, plusieurs éléments dans la question de ma collègue
de Marguerite-Bourgeoys. Le
premier, il est vrai que M. Bouchard et M. Taylor sont deux éminents
universitaires, et le gouvernement libéral de l'époque
les avait mandatés pour faire une commission de consultation relativement à la
situation ambiante qui avait cours à l'époque. Ils ont produit un
rapport qui a servi de large inspiration au projet de loi n° 21.
Parce
que, quand vous regardez le rapport de la commission Bouchard-Taylor,
pratiquement toutes les recommandations
qui sont dans le rapport Bouchard-Taylor se retrouvent dans le projet de loi,
notamment le fait d'interdire le port de signes religieux pour les
personnes comme les juges, les policiers, les procureurs, les agents
correctionnels. Ça, M. le Président, je
pense que la députée de Marguerite-Bourgeoys va être en accord avec moi. Même,
également, dans le projet... dans le rapport Bouchard-Taylor, on
recommandait que le président et les vice-présidents de l'Assemblée nationale
ne puissent pas porter de signes religieux, ce que j'ai fait également dans le
projet de loi.
Notre position a
toujours été claire, nous, à la CAQ. Depuis 2013, on a toujours dit que les
enseignants ne pourraient pas porter de signes religieux parce qu'ils
représentent une figure d'autorité. C'est ce qu'on a dit avant la campagne
électorale...
Le Président :
En terminant...
M.
Jolin-Barrette : ...pendant la campagne électorale, et c'est ce qu'il
y a dans le projet de loi.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Hélène David
Mme
David : Quand on parle d'enseignants, on parle très, très
majoritairement d'enseignantes. Être ministre de la Condition féminine,
c'est porter la voix et assurer la pleine participation de toutes les femmes à
la société.
Comment
la ministre de la Condition féminine peut-elle concilier son rôle de
porte-parole de toutes les femmes avec
la position du projet de loi, qui cautionne des rêves brisés ou des promotions
empêchées pour des femmes enseignantes?
• (10 h 20) •
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, c'est très clair que nous avons
cette sensibilité pour s'assurer que tous puissent
accéder à un emploi. Ce que nous faisons avec le projet de loi n° 21, c'est d'avoir un équilibre entre les droits collectifs et les droits individuels. Et le
gouvernement choisit de mettre en place une clause de droits acquis pour faire
en sorte que toutes les personnes,
femmes et hommes, qui portent un signe religieux et qui seraient des
enseignants ou des enseignantes
pourront conserver leurs emplois. Je vous l'ai dit tout à l'heure, M. le
Président, c'est un équilibre entre les droits individuels et droits
collectifs.
Relativement
à l'accès en emploi, nous avons fixé une balise sur le fait qu'à partir du
dépôt du projet de loi il ne sera plus possible...
Le Président :
En terminant...
M.
Jolin-Barrette : ...de porter un signe religieux. C'est le choix que
le gouvernement a fait.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Hélène David
Mme
David : Décourageant, M. le Président, vraiment décourageant. Laissez-moi exprimer ma grande
déception de constater que, pour un
sujet aussi important — on
parle juste des femmes après tout — le
leader du gouvernement ne juge
même pas opportun de permettre à sa collègue la ministre de la Condition féminine de répondre à cette question.
Est-ce
que la ministre de la Condition
féminine peut se lever et regarder droit dans les yeux les femmes et les jeunes
filles qui seront éventuellement touchées
par ce projet de loi et leur dire, avec la même indifférence que son premier
ministre, qu'il y a d'autres emplois de disponibles?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! La parole n'appartient qu'au
ministre de l'Immigration. Je vous demande votre attention, tous, s'il
vous plaît.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, il y a une grande différence des deux côtés de la Chambre. Nous, on
souhaite rassembler, vous souhaitez
diviser. Vous souhaitez encore une fois diviser la société québécoise sur un
débat qui a eu cours...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
M.
Jolin-Barrette : ...depuis
plus de 11 ans, M. le Président. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il n'y aura
pas de port de signes religieux pour toutes les personnes qui occupent la
fonction d'enseignant. Ça vise autant les femmes que les hommes, c'est le port de signes religieux qui est
interdit. Il y a un consensus au Québec pour aller de l'avant là-dessus.
Ça fait depuis 2013 que la position de la
CAQ, elle est connue. Elle a été validée lors des dernières élections. C'est un
équilibre qui est légitime relativement aux droits de la nation québécoise et
en rapport des droits individuels.
Le Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : Admettez que
nous avons trouvé le juste équilibre, ralliez-vous à nous.
Le Président : Question
principale, M. le député de La Pinière.
Compensation aux détenteurs de permis de taxi
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, je reviens sur le dossier du taxi. Je
pense que les manifestations qu'on constate aujourd'hui et qui ne ralentissent pas sont vraiment le reflet du drame
que ces gens-là vivent. Et, à date, on ne peut pas dire que les
rencontres avec le ministre ont fait avancer quoi que ce soit.
M. le
Président, ce matin, même l'Institut économique de Montréal, qui n'est pas
exactement QS, qui est certainement
pro-Uber, va proposer un modèle de compensation complète de la valeur des
permis. Ça veut dire qu'il y a certainement des solutions. Je ne fais
pas de leur proposition la mienne, mais clairement il y a des solutions.
Pourquoi le
ministre ne se lève-t-il pas ce matin pour envoyer un vrai message d'espoir à
ces gens-là et leur dire simplement
ceci : On vous a compris, on va vous compenser entièrement, on va trouver
une formule, on va le faire ensemble et, au bout de la ligne, on va vous
compenser?
Le ministre va-t-il aujourd'hui saisir cette
occasion?
Le Président : M. le ministre
des Transports.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le
Président, vous savez, cette loi a
été préparée, dans les derniers mois, pour l'usager, pour le client,
autant pour les personnes démunies que les personnes handicapées.
Maintenant,
cette industrie, qui n'a pas eu de modernisation en termes de loi depuis les
50 dernières années, oui, va
vivre des changements. Quand il y a des changements, il y a des bouleversements nécessairement,
il y a de l'insécurité, il y a de la peur. Dans ces conditions, vous
comprendrez qu'on a gardé un canal ouvert avec l'industrie.
J'ai
rencontré l'industrie, plusieurs d'entre eux dans les dernières semaines, encore une fois lundi dernier. On a un demi-milliard, M. le Président, sur la table,
250 millions additionnels que notre gouvernement a décidé de déposer. Je veux
trouver un terrain d'entente avec eux pour nécessairement être capable de
dévoiler les modalités de ce 250 millions. Il y a, oui, de l'autre côté, une redevance de 0,20 $ où on est
capables d'aller chercher un montant entre 10 et 12 millions de dollars sur une période de trois ans. Avec,
déjà, le fonds de modernisation, à hauteur de 44 millions, je prévois, sur
trois ans, à peu près 80 millions de dollars additionnels.
Au-delà de la
question du député, M. le Président, oui, je souhaite recevoir des propositions
de la part de l'industrie du taxi. Ça
prend un canal de communication ouvert. C'est ce que je souhaite, et je vais
continuer de discuter avec eux.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de La Pinière.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : Occasion ratée, M. le Président. En commission
parlementaire sur le budget, le ministre des Finances nous a dit que le montant
qui a été déterminé, le montant compensatoire inscrit au budget, avait été le
résultat de l'utilisation de trois formules, deux formules qui étaient
neutres et qui compensaient entièrement les permis et une formule qui les désavantageait. Je répète :
deux formules, deux neutres, une qui les désavantage. Laquelle le ministre a
choisie? Celle qui désavantage les propriétaires de taxi.
Est-ce que le ministre peut se lever aujourd'hui
et nous dire...
Le
Président : M. le ministre des Transports.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le Président, le premier ministre l'a
mentionné et je l'ai mentionné, on ne laissera personne faire faillite. Il y a un 250 millions sur la
table, additionnel, qu'on doit verser. Nécessairement, il faut que l'industrie
souhaite travailler avec moi.
Présentement, on me dit : Bien, prépare le plan de match, les modalités,
puis on acceptera peut-être ou, sinon,
on ne veut même pas en parler. Bien, je vous dirais une chose, M. le
Président : Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de propriétaires de taxi dans les régions du
Québec qui m'interpellent, qui m'appellent, qui veulent participer puis qui
veulent savoir comment cet argent va être versé. Ils ont reçu seulement
1 000 $ lors de la première compensation.
Donc,
oui, on va préparer les modalités dans les prochains jours. Je vais rencontrer
encore une fois l'industrie. Je souhaite que ce canal de communication
reste courtois et serein. Puis on va continuer de travailler avec eux.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de La Pinière.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, les consultations sur le p.l. n° 17 commencent ce matin. Le ministre a sciemment choisi d'exclure les compensations de son projet
de loi. Le ministre sépare deux dossiers qui ne peuvent pas être séparés,
comme s'il voulait qu'on en oublie un, et ça
ressemble à ça ce matin. C'est une belle manoeuvre. Mais là je le dis haut
et fort : Pas de déréglementation sans entière compensation.
Le
ministre s'engage-t-il aujourd'hui à mener les deux dossiers de front et qu'à
la fin de la période de l'étude du projet de loi on aura légiféré et
entièrement...
Le Président :
M. le ministre des Transports.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le Président, il y a un demi-milliard
d'argent sur la table. C'est un montant qui respecte la capacité de
payer des Québécois. Encore une fois, je veux bien discuter avec eux des
modalités futures.
Maintenant,
il y a plusieurs propriétaires de taxi qui ont reçu seulement 1 000 $
lors de la première compensation. Eux m'appellent, eux m'interpellent.
Ils me disent : De quelle façon vous allez verser ce prochain montant,
prochain montant qui, majoritairement, a été
versé à Québec, Montréal et Gatineau? Dans les circonstances, je l'ai
mentionné, on va prendre en
considération ceux qui ont acheté un permis voilà trois, quatre, cinq ans, qui
ont amorti le moindrement, vous comprendrez,
l'achat de ce permis, comparativement à ceux qui l'ont acheté voilà 10,
15 ans. Je vais continuer de discuter avec eux. Il y a une redevance importante aussi qui peut être discutée
avec l'industrie du taxi. J'attends leurs propositions.
Le Président :
Question principale, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Conséquences financières de l'implantation
de la multinationale Uber au Québec
Mme Manon Massé
Mme Massé :
Merci, M. le Président. En 2015, la CAQ proposait un nouveau projet
nationaliste pour le Québec. Depuis qu'il est au pouvoir, le premier ministre
le répète, le nationalisme, il l'a tatoué sur le coeur. Je ne veux pas
casser le party, mais on va faire un petit
bilan. Sur le rapport d'impôt unique, M. Trudeau a dit non. Sur les
transferts en santé, M. Trudeau a dit non. Sur les contrats de la
Davie, M. Trudeau a encore dit non.
Alors,
le premier ministre n'arrive pas à se faire respecter par Ottawa puis il se
laisse carrément marcher dessus par
les multinationales. On l'a vu avec ABI dernièrement, 14 mois de lock-out,
puis il n'est même pas gêné de prendre le
bord du P.D.G. d'Alcoa à 13 millions. Puis maintenant il se met à genoux
devant Uber puis son P.D.G. à 200 millions. Coudon, si Jeff Bezos
se pointait le nez à Québec, il lui donnerait-u les clés du gouvernement?
Laisser le champ libre aux multinationales, M. le
Président, puis faire plier les genoux au monde en bas de l'échelle,
c'est-u ça, le nationalisme de notre premier ministre?
• (10 h 30) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault :
Bon. Donc, je comprends que la cheffe de Québec solidaire n'aime pas les
multinationales, même les
multinationales qui créent des emplois à 90 000 $ par année. M. le
Président, je veux revenir sur le conflit d'ABI. La cheffe de Québec solidaire, la cocheffe de Québec
solidaire devrait savoir qu'actuellement les conditions de marché sont difficiles dans le domaine de l'aluminium. Il y a
des alumineries chinoises qui inondent le marché. Il y a une surcapacité. Il y
a un risque réel que l'aluminerie de
Bécancour reste fermée pour longtemps. J'ai rencontré le syndicat. Ils m'ont
dit que leurs deux plus importantes
demandes, c'était d'avoir plus de libérations syndicales puis d'avoir plus que
60 % comme part de l'employeur sur le fonds de
pension. J'ai dit tout simplement aux gens du Syndicat des métallos qu'il
fallait être prudent dans le contexte
de marché actuel. Il y a des gens en Mauricie, il y a des gens dans le
Centre-du-Québec qui ont des contrats, des sous-contrats. Il y a des
retombées : 500 millions de dollars pour les deux régions. Je pense
que les syndiqués doivent faire des
compromis. À 90 000 $ par
année, ce sont des emplois payants, des emplois intéressants pour les
Québécois.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme
Manon Massé
Mme Massé :
Je n'ai pas trop compris, là, mais ce n'est pas grave. Je vous parlais, entre
autres, des chauffeurs de taxi, parce que, vous savez, quand on parle
d'Uber, on ne parle pas d'ABI, puis on parle d'une multinationale où son P.D.G., lui, gagne 200 millions. Et pourtant
les Québécois et Québécoises qui conduisent présentement des taxis ne se
sentent pas réellement défendus par le gouvernement qui est en face de moi,
ici.
Alors, est-ce que le premier ministre peut nous
dire si son nationalisme inclut les chauffeurs de taxi?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, je comprends que la cheffe de Québec solidaire pense que les
applications d'économie de partage, que ça soit avec des entreprises de
l'extérieur ou des entreprises comme on a eu ici, comme Téo, ou des entreprises comme Eva, québécoises, qui offrent de
l'économie de partage... Québec solidaire pense qu'on va reculer dans le
temps puis il va seulement y avoir les anciennes façons de faire.
Maintenant, M. le Président, le gouvernement
offre 500 millions de dollars, c'est en moyenne 70 000 $ par
personne. Il y a beaucoup de chauffeurs de taxi qui ont payé moins que
70 000 $...
Le Président : En terminant.
M. Legault : ...il y en a qui
ont payé plus. On veut s'asseoir puis négocier.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme Manon
Massé
Mme Massé :
Alors, voyez-vous, quand on cherche des solutions du côté de la CAQ, on ne
regarde jamais du côté des
gagne-petit. L'exemple, le fameux 0,20 $ dont nous parlait le ministre
tantôt, il n'est pas pris à Uber, il est pris dans les poches des clients et
des clientes. Le 500 millions dont vous parlez tant n'est pas pris à Uber,
il est pris dans les poches des contribuables. Alors, Uber, combien il
met? Pas une cent, M. le Président. C'est de ça que je parle.
Est-ce que vous allez défendre les Québécois et
Québécoises?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, si demain matin le gouvernement mettait une taxe de 5 $
ou 10 $ par course à Uber, qui
vous pensez qui paierait en bout de ligne? Le consommateur québécois. Je sais
que ça ne dérange pas la cocheffe de Québec solidaire de charger plus
pour les Québécois, les consommateurs. Moi, je l'invite à parler avec des
jeunes à Montréal puis de leur demander si
ça serait une bonne idée de fermer Uber, de fermer l'économie de partage, de
doubler les tarifs d'Uber. Je pense que la cheffe est un petit peu
déconnectée.
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Joliette.
Encadrement des frais
scolaires
Mme Véronique
Hivon
Mme Hivon :
M. le Président, alors que le projet de loi n° 12
devait venir consacrer le droit à la gratuité
dans le réseau public et baliser
très, très strictement les exceptions pour lesquelles des frais pourraient être
imposés aux parents, eh bien, c'est exactement l'inverse qui se passe.
Avec les
éléments du projet de règlement déposé hier, on constate avec stupéfaction que
c'est plutôt un véritable bar ouvert
pour la facturation que le ministre est en train de mettre en place. Absolument tous
les projets pédagogiques particuliers,
sport-études, arts-études, programme international, tous les projets de
concentration, profils, options développés par les écoles vont pouvoir
faire l'objet de facturation auprès des parents, et ce, sans aucune balise,
aucun plafond.
Comment
le ministre peut-il prétendre vouloir l'égalité des chances?
Et il est en train de consacrer noir sur blanc un régime public à deux vitesses pour les parents qui peuvent payer et
les enfants dont les parents ne peuvent pas payer.
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge : M. le
Président, c'est quand même
surprenant d'entendre des fois mes collègues de l'opposition dire des choses qu'ils n'ont
jamais dites au fil des dernières années et même pendant la campagne
électorale.
Écoutez, il y avait,
depuis des années, une absence de clarté. La Loi sur l'instruction publique n'était pas claire, ce qui a amené des parents à déposer un recours
collectif qui a mené à une entente qui nous a coûté 153 millions de
dollars. Ça, là, c'est le coût du
flou et de l'absence de clarté qui a été enduré depuis 2007 parce que la
commission des droits de la personne
et de la jeunesse avait déjà dit en 2007, alors que ces gens-là sont passés au
pouvoir depuis ce temps-là, qu'il fallait clarifier la loi. Ils ne l'ont
pas fait. Ça a coûté 153 millions de dollars.
Nous, on s'apprête à le faire, et, en plus, avec
la modification qu'on fait, il n'y aura plus de recours collectif, il y aura une clarté. Les projets pédagogiques
particuliers, qui sont appréciés des enseignants, des élèves, des parents, vont
continuer d'exister, mais, plus que ça, il
va y avoir plus de gratuité que jamais. On va permettre que le matériel d'art,
qui était parfois chargé, ne soit
plus chargé, même chose pour le matériel d'éducation physique, même chose pour
le matériel de sciences.
Le Président : En terminant.
M. Roberge : Il y aura plus
d'accessibilité, plus de clarté.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique
Hivon
Mme Hivon :
Tout est une question de choix, M. le Président. Plutôt que la véritable
gratuité dans le réseau public, le
gouvernement va nous faire voter aujourd'hui sur un projet de loi qui va coûter
800 millions pour uniformiser la taxe scolaire. Il aurait pu
décider, plutôt que d'aller au taux le plus bas, de dire : On va mettre le
taux moyen et d'avoir le 400 millions
qui est estimé requis pour offrir à tous les enfants la véritable gratuité
scolaire. Il aurait pu décider de ne pas mettre 1 milliard dans les
maternelles quatre ans puis de mettre l'argent pour le réseau public.
Pourquoi, M. le ministre, faire le choix du deux
vitesses et non pas de l'égalité des chances?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge :
Bien, M. le Président, quand ma collègue parle d'imposer le taux moyen de taxe
scolaire, ça veut dire des hausses de
taxe pour la moitié des Québécois. C'est ça que ça veut dire. Il faudrait
qu'elle aille dans les comtés où elle propose de hausser les taxes,
qu'elle aille demander aux contribuables si c'est une si bonne idée que ça.
Ensuite, d'aucune façon, d'aucune façon le budget
qu'on a déposé ne comporte de baisse ou de coupure en éducation. On augmente le budget de 5,1 %.
C'est un raccourci, c'est une tentative maladroite de faire croire qu'on coupe en
éducation parce qu'on baisse les taxes. C'est juste faux.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée Joliette.
Mme Véronique
Hivon
Mme Hivon :
On s'attendait, M. le Président, minimalement que, dans cette consécration du
droit de facturer dans la loi, le
ministre, au moins, aurait mis des balises, des plafonds. C'est d'ailleurs ce
qu'il avait laissé entendre. Or, hier en commission parlementaire, il a
refusé de s'engager à mettre des plafonds pour tout projet particulier au
Québec.
Comment
peut-il demander un tel chèque en blanc aux oppositions mais surtout à tous les
parents du Québec et à tous ceux qui croient dans le régime public et
dans l'égalité des chances?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge :
M. le Président, le projet de loi qu'on amène vient régler des problèmes. On s'est
fait poursuivre parce que la loi
n'était pas claire. Les parents n'étaient pas satisfaits parce qu'ils se
faisaient surfacturer. Des fois, on recevait des factures qui étaient floues; elles seront claires. Des fois sur la
facture, les parents voyaient qu'il y avait «contribution volontaire»,
mais elle n'était pas tellement volontaire, elle était incluse dans la facture;
ce sera interdit. Des fois, on facturait davantage que le coût; ce sera interdit. On vient améliorer la
clarté, la prévisibilité, l'accessibilité, sincèrement, et l'ensemble
des acteurs nous demandent d'adopter ce projet de loi rapidement...
Le Président :
En terminant.
M. Roberge :
...pour planifier la prochaine rentrée scolaire. Je demande votre
collaboration.
Le Président :
Question principale, Mme la députée Fabre.
Financement
des Initiatives de travail de milieu auprès
des aînés en situation de vulnérabilité
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : M. le Président, en janvier dernier, la ministre responsable des Aînés
a dit : «On n'a pas le droit de négliger les personnes les plus
vulnérables de notre société.» La devise du Québec est Je me souviens.
Je me souviens de la
ministre des Aînés du gouvernement libéral, en 2009, aujourd'hui ministre des
Aînés de la CAQ. Je me souviens de sa fierté
à mettre en place le projet de recherches-actions pour la reconnaissance des
ITMAV, qui sont des Initiatives de
travail de milieu auprès des aînés en situation de vulnérabilité. 154 ITMAV
dans les 17 régions du Québec qui n'ont aucune idée s'ils ont
encore un emploi aujourd'hui. Leur financement se terminait le 31 mars.
Trois demandes de rencontre avec la ministre, aucune nouvelle, même pas un
simple accusé de réception.
Je
me souviens de la ministre de 2009, si fière du travail extraordinaire des
ITMAV pour les aînés les plus vulnérables de notre société. M. le
Président, où est-elle passée?
Le Président :
Mme la ministre responsable des Aînés.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président, nous sommes toujours aussi fiers d'avoir
mis en place des intervenants de
milieu à la suite de la consultation publique
sur les conditions de vie des aînés, ces intervenants de milieu qui brisent
l'isolement social des personnes aînées. Je
voudrais justement réconforter la députée de Fabre,
ainsi que la présidente du conseil d'administration de l'Association québécoise
des centres communautaires pour aînés, Mme Osborne, et le directeur général, M. Guérard, qui a fait parvenir une lettre, et leur dire et vous
dire à toutes et à tous qu'actuellement nous avons terminé l'évaluation,
parce que c'étaient deux ans pour
évaluer le projet. Nous l'avons terminée. Les lettres sont pratiquement
rendues sur mon bureau.
C'est
6,9 millions de dollars, dans ce programme, pour embaucher des intervenants de milieu qui
reçoivent 45 000 $ par année. Il y en a 153. Et on ne doit pas
s'inquiéter, M. le Président, parce que j'aurai un bonheur immense à signer
toutes ces lettres-là pour aider nos aînés les plus vulnérables de la
société.
• (10 h 40) •
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : Malheureusement, ils sont malgré tout inquiets. Le 20 mars
dernier, j'ai rencontré le directeur général de l'Association québécoise des
centres communautaires pour aînés, qui représente les ITMAV du Québec et les
131 organismes qui les accueillent. Il était très inquiet. Il l'était encore,
très inquiet hier et toujours sans nouvelle. Jamais, auparavant, il n'a
vécu ce silence radio entre eux et le Secrétariat des aînés. Je rappelle
l'échéance du 31 mars.
Est-ce que la
ministre, au-delà de l'évaluation, s'engage aujourd'hui à confirmer leur
financement?
Le Président :
Mme la ministre responsable des Aînés.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président, il y a eu des élections. Il y a peut-être
des programmes qui ont été différés de
quelques semaines, mais la reddition de comptes concernant les intervenants de
milieu est terminée. Il y avait une entente faite par le précédent gouvernement pour un financement sur deux ans.
C'est normal d'avoir une reddition de comptes pour des organismes. Cette reddition de comptes là a été faite au mois
de janvier. Les lettres sont pratiquement arrivées sur mon bureau. C'est faux de prétendre que le
canal de communication avec le Secrétariat des aînés est fermé. Bien au
contraire, et je veux vous rassurer toutes et tous, chers députés, que...
Le Président :
En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : ...6,9 millions de dollars, c'est signé pour 153...
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : M. le Président, la
réponse de la ministre, ça s'appelle une rupture de service auprès des aînés vulnérables, zéro retour des nombreux appels, zéro
retour sur les demandes écrites de rencontre avec la ministre, zéro
communication tout court.
Pourquoi ce silence
de la ministre auprès de l'Association québécoise des centres communautaires
pour aînés? Pourquoi elle ne leur répond pas? Pourquoi elle ne les
rencontre pas et ne respecte pas l'échéancier du financement?
Le Président : Mme la
ministre responsable des Aînés.
Mme Marguerite
Blais
Mme Blais
(Prévost) : J'ai beaucoup de difficultés, M. le Président, à
réentendre la troisième question, qui est la même question, finalement,
alors que je viens de dire que...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
Mme Blais
(Prévost)
: ...le 6,9 millions de dollars pour soutenir
les intervenants de milieu était là. Ça a passé au Conseil du trésor,
les lettres sont pratiquement arrivées au bureau pour les signer. J'ai comme
l'impression que M. Guérard et Mme Osbourne entendent très bien ce
qui se passe ici, au salon bleu de l'Assemblée nationale.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
Mme Blais
(Prévost) : Je vous le confirme, les lettres seront signées, et ça va
me faire plaisir de vous rencontrer pour qu'on puisse continuer à améliorer ce
programme, qui est un programme extraordinaire pour briser l'isolement social de nos aînés. J'étais contente
auparavant...
Le Président : En terminant.
Mme Blais
(Prévost)
: ...je suis toujours contente aujourd'hui.
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Sherbrooke.
Des voix : ...
Le Président : C'est la seule
à qui appartient la parole. Votre attention, s'il vous plaît!
Orientations
gouvernementales en matière d'éducation
Mme Christine
Labrie
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. Tout le monde était content quand le ministre de
l'Éducation est arrivé en poste. On
se disait : Enfin, un ministre qui vient du milieu de l'éducation, qui
connaît la réalité du terrain. Enfin quelqu'un qui va comprendre la réalité des profs et des parents. Mais, après
quelques mois, on commence déjà à déchanter. Le ministre a beau venir du
milieu, il improvise, il impose des choses sans savoir si c'est réalisable.
En décembre,
il s'engageait à maintenir le financement des écoles qui avaient perdu leur
indice de défavorisation. Quelques
mois plus tard, les écoles touchées n'ont toujours pas eu de nouvelles. En
février, il décrétait qu'à partir de la prochaine rentrée il y aurait deux récréations obligatoires de
20 minutes par jour. Comme on s'en doutait, c'est beaucoup plus
compliqué que prévu. En mars, il disait vouloir imposer un plafond aux frais
pour les programmes particuliers. Cette semaine,
bien, il change d'idée. On ne sait toujours pas comment il va appliquer sa
mesure pour le parascolaire. Il lance une idée par mois sans réfléchir.
Est-ce que le
ministre de l'Éducation sait qu'il n'est pas en train d'animer une séance de
brainstorming, mais qu'il est à la tête du ministère de l'Éducation, et
un des plus importants du Québec?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge :
M. le Président, c'est intéressant de se faire rappeler toutes les bonnes
mesures qu'on a mises en place depuis
notre arrivée. C'est formidable. Les deux récréations de 20 minutes au
primaire, il faut se souvenir qu'il y avait à peu près... il y a encore, en ce moment, à peu
près 15 % des écoles primaires qui n'ont pas de récré l'après-midi. C'est
quand même incroyable, 15 % des écoles primaires, des élèves — laissons
faire les écoles — qui
n'ont pas de récré l'après-midi. Alors, on a
tenu compte de l'avis des experts, on a déposé un projet de règlement, on est
dans la période de consultation. On a
reçu un avis intéressant du Conseil supérieur de l'éducation dont on va tenir
compte, pas pour reculer, mais pour réussir l'implantation de cette
bonne mesure. Parce que l'avis est intéressant, on va en tenir compte, on va réussir cette implantation. Je rassure ma
collègue, il y aura deux récrés de 20 minutes dans toutes les écoles
primaires. Surtout, je rassure les parents et les enseignants qui
veulent être certains qu'on va aller de l'avant.
Par rapport
au parascolaire, bien, je suis très content qu'elle ramène cette idée-là parce
qu'il y aura, dès septembre prochain, à peu près 140 écoles
secondaires qui verront leur offre vraiment s'améliorer pour améliorer le
sentiment d'appartenance des élèves à
l'école, pour améliorer leur motivation. Il y aura du parascolaire, donc des
activités sportives, culturelles, scientifiques...
Le Président : En terminant.
M. Roberge : ...gratuites.
C'est une belle amélioration dont je suis très fier.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Christine
Labrie
Mme Labrie :
Merci. Les programmes particuliers sont reconnus par tout le monde pour
favoriser la réussite et la persévérance scolaire. Et, en commission
parlementaire, tout le monde nous l'a dit, l'idéal à atteindre, c'est que ces programmes-là soient gratuits pour tout le monde
pour les rendre accessibles à tous les élèves. En 2019, c'est un service
de base pour permettre aux jeunes de
développer leurs passions. La Fédération des commissions scolaires nous dit que
ça coûterait maximum
400 millions pour offrir tous les programmes gratuitement à la grandeur du
Québec. C'est deux fois moins cher que la réduction de la taxe scolaire.
L'éducation,
c'est supposé d'être la priorité numéro un de la CAQ. Est-ce que vous pouvez
envoyer le mémo au Conseil du trésor?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge :
M. le Président, l'éducation, c'est définitivement la priorité de notre
gouvernement. Évidemment qu'on prend soin de plusieurs missions,
l'environnement, les aînés, l'économie, pas seulement l'éducation, mais, oui,
l'éducation, c'est une priorité.
Et ma collègue
fait référence au projet de loi n° 12, et dont on a parlé
tantôt avec mon autre collègue. C'est un projet dont il faut être très fiers — on est en train de faire l'étude article par
article — qui va
nous prémunir contre d'autres recours
collectifs, qui va clarifier les choses, qui répond vraiment aux préoccupations
du milieu, de la Fédération des comités de parents, qui veulent arrêter d'avoir des factures disparates d'une
école, d'une commission scolaire à l'autre, arrêter d'être surfacturés,
qui veulent de la clarté, de la prévisibilité et de l'accessibilité.
Le Président : En terminant.
M. Roberge : On va leur donner
tout ça.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Christine
Labrie
Mme Labrie :
Merci. Hier, justement, en étude détaillée, le ministre a dit aux partis
d'opposition que vouloir la gratuité
scolaire, c'est vivre dans un monde de licornes. J'aimerais lui rappeler que la
gratuité des programmes particuliers est
réclamée notamment par le Conseil supérieur de l'éducation, la Commission des
droits de la personne et des droits de
la jeunesse, la Fédération autonome de l'enseignement, l'Association
provinciale des enseignantes et enseignants du Québec, la Centrale des syndicats du Québec, le mouvement Debout pour
l'école! et d'autres. Il y a 68 % des Québécois qui appuient la
gratuité scolaire.
Est-ce que le ministre pense que tout ce monde-là
vit dans un monde de licornes?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Jean-François
Roberge
M. Roberge :
M. le Président, la gratuité scolaire, elle existe pour la formation de base.
Quand on va à l'école publique, on ne paie pas le salaire du professeur,
on ne paie pas les ballons de basketball, on ne paie pas les frais de construction de l'école.
On peut faire notre parcours pour se rendre jusqu'en secondaire V, en formation
professionnelle, décrocher un diplôme. C'est ça.
Maintenant,
est-ce qu'on peut rendre gratuit le sport au Québec partout? Vous savez, il y a
bien des jeunes qui font, supposons,
un sport-études, qui jouent au hockey, mais à l'école. S'ils ne jouaient pas à
l'école, ils joueraient avec l'équipe
municipale, et les parents paieraient des frais pour que leur enfant joue 40,
50 matchs par année. Excusez-moi, mais c'est juste normal.
Le Président : Question
principale, M. le député de Chomedey.
Arrêt des procédures dans
le dossier Amaya
M. Guy
Ouellette
M. Ouellette : Merci, M. le Président. L'Autorité des marchés
financiers fait souvent les manchettes et pas toujours pour les bonnes raisons. Récemment, c'est un
jugement de la Cour du Québec qui critique sévèrement l'AMF. On parle de laxisme et d'un manque de rigueur évident et
inacceptable, d'une répétition et une accumulation d'erreurs déraisonnables
et, finalement, d'une insouciance qui
nécessite une suspension de procédures. Le jugement officiel dit, et je
cite : «Le protocole suivi par
l'AMF afin de protéger les documents potentiellement privilégiés était
inadéquat, incomplet, voire inexistant, et son application déficiente.»
Suite à ce
dossier, l'AMF a fait le choix de ne pas aller en appel, et les conséquences
sont importantes. L'AMF fait maintenant face à une énorme poursuite due
à son incompétence.
M. le
Président, est-ce que le ministre pourrait nous dire qui, selon lui, est
imputable de ce fiasco et pourquoi l'AMF n'a pas les compétences et l'expertise pour respecter les règles en
vigueur au Québec afin de mener à terme une enquête aussi importante que
celle du dossier d'Amaya?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Eric
Girard
M. Girard
(Groulx) : M. le Président, la réglementation des marchés financiers,
c'est extrêmement important pour la
confiance des marchés financiers. L'AMF est une institution québécoise dont
nous sommes fiers. Et, quant au dossier auquel le député de Chomedey
réfère, je vais en prendre connaissance et je lui donnerai une réponse précise
concernant celui-ci.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Chomedey.
M. Guy
Ouellette
M. Ouellette : Merci, M. le Président. Saviez-vous, M. le
Président, que l'avocat du principal intéressé dans le dossier Amaya est l'ancien directeur des enquêtes
de l'AMF, comme le cas du conseiller juridique de SNC-Lavalin qui est devenu directeur des enquêtes à l'AMF pendant
que celle-ci enquêtait SNC-Lavalin? Ce qui m'amène à interroger M. le
ministre quant aux pratiques de recrutement et de promotion de l'AMF.
Est-ce que le
ministre pourrait nous expliquer sur quelles bases les directeurs des enquêtes
de l'AMF sont recrutés ou promus?
• (10 h 50)
•
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Eric
Girard
M. Girard
(Groulx) : Encore une fois, la réglementation des marchés financiers,
c'est extrêmement important. Et, pour
assurer la confiance, l'AMF est indépendante. Alors, c'est l'AMF qui prend les
décisions d'embauche des directeurs.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Chomedey.
M. Guy
Ouellette
M. Ouellette : M. le Président, l'organigramme de l'AMF démontre
que l'organisation compte sur les services d'un département d'audit
interne.
Est-ce que le
ministre pourrait nous dire quand et à quelle fréquence le département des
enquêtes est audité? Et, afin d'améliorer la reddition de comptes, à
quelle date remonte la dernière vérification interne, compte tenu des nombreuses anomalies citées dans le jugement? Et
quelles mesures ont été prises pour corriger la situation? Pourrait-il déposer
les rapports d'audit du département des enquêtes?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : M. le Président, l'audit interne, c'est un processus
continu. Il s'agit d'une fonction interne de l'AMF. Alors, l'audit interne, c'est chaque jour. L'audit interne est
une partie prenante de l'AMF, et il n'y a pas d'action spontanée. C'est un processus continu et c'est
sous la responsabilité de l'AMF. Et je n'ai pas accès à ces documents internes là.
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Maurice-Richard.
Projet de loi sur le
suremballage
Mme Marie
Montpetit
Mme Montpetit :
Je vous remercie, M. le Président. Nous avons été nombreux à être déçus du
budget de la CAQ, qui a obtenu,
rappelons-le, la note de C moins en environnement. Pas de vision, pas de plan,
pas de mesures concrètes pour la
lutte aux changements climatiques, mais beaucoup de beaux discours, par contre.
Et ce n'est pas juste de ce côté-ci de la
Chambre qu'on le dit, M. le Président. Dans ce dossier-là, on peut affirmer
qu'il y a un réel consensus. Le budget en matière d'environnement a déçu
l'ensemble des groupes.
M. le
Président, la semaine dernière, le ministre mentionnait qu'il souhaitait qu'on
lui propose des idées. C'est sûr qu'on comprend que la CAQ, qui n'a
jamais vraiment parlé d'environnement, a peut-être besoin d'un petit coup de pouce de ce côté-là, et on se sent très généreux,
alors je le prends au mot puis je lui propose quelque chose. Je vais déposer
aujourd'hui une motion afin que le Québec se
dote d'une loi sur le suremballage. On le sait, M. le Président, ce sont des
milliers de tonnes de déchets qui se retrouvent dans les sites d'enfouissement
et dans nos océans.
Comme le
meilleur déchet, c'est celui qu'on ne crée pas, est-ce que le ministre peut
s'engager à faire une priorité de l'encadrement du suremballage et
déposer un projet de loi rapidement?
Le Président : M. le ministre
de l'Environnement.
M. Benoit
Charette
M. Charette :
Merci, M. le Président. La question me surprend, pour tout dire. Et, oui, j'ai
pu lire le projet de motion qui sera
présenté tout à l'heure, et la bonne foi, malheureusement, du Parti libéral est
difficile à deviner dans ce dossier-là. On a fait une proposition
d'amendement pour la motion, précisant que le dernier budget qui a été présenté
par mon collègue offrait plus de 12 millions de dollars pour justement
contrecarrer le suremballage, accompagner les entreprises
à modifier leurs façons de faire, et ce projet d'amendement a été refusé. Donc,
encore une fois, le Parti libéral, en matière de crédibilité
environnementale, est plutôt mal placé pour faire la critique aux autres.
On a mis dans
ce budget des mesures précises, on ne reconnaît pas cet effort-là du côté du
Parti libéral et on essaie de nous coincer à travers une motion. Appuyez notre
amendement, et on approuvera votre libellé de motion par la suite.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie
Montpetit
Mme Montpetit : ...l'amendement, enlevez le mot «loi sur [le]
suremballage», qui est le propos même de la motion.
Alors, on le
sait, que la CAQ aime beaucoup se fier aux sondages pour prendre des décisions.
Bien, ça tombe bien, j'en ai un à porter à leur attention. La semaine dernière,
un sondage Léger révélait que 86 % des Québécois sont en faveur de la mise en place d'une loi pour
encadrer le suremballage. À 86 %, on parle clairement d'une forte majorité
de Québécois.
Alors, est-ce que le ministre peut s'engager à
écouter les Québécois et à légiférer sur le suremballage?
Le Président : M. le ministre
de l'Environnement.
M. Benoit
Charette
M. Charette :
...les Québécoises et Québécois souhaitent, c'est que le gouvernement agisse en
matière de suremballage et ce n'est
pas nécessaire de toujours passer par l'adoption d'une nouvelle loi. Nous avons
des outils, nous en avons confié de nouveaux à travers le dernier budget, donc
ce n'est pas une loi qui nous empêchait,
par le passé, d'agir en la matière,
mais bien l'absence de volonté politique du gouvernement précédent, qui
avait toute la latitude nécessaire pour faire des avancées remarquables
dans le sujet.
Donc, 12 millions de dollars supplémentaires autant pour éliminer, dans la
mesure du possible, le suremballage et surtout accompagner les entreprises...
Le Président : En terminant.
M. Charette : ...afin qu'elles
développent de nouvelles techniques de mise en marché de leurs produits.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie
Montpetit
Mme Montpetit : Merci, M.
le Président. Alors, je comprends que
le ministre aura l'occasion, en sortant de cette Chambre, d'aller dire
non aux Québécois qui vous demandent de légiférer sur le suremballage. On
comprend bien la direction qui sera prise dans la motion.
En quelques
mois, ça fait déjà plusieurs occasions que la CAQ rate de démontrer son
engagement, son leadership en environnement.
On leur donne une autre occasion, aujourd'hui, de démontrer un engagement ferme de faire de
l'environnement une priorité, mais on comprend que ce n'est pas
une priorité pour le gouvernement de la CAQ, une fois de plus.
Le Président : M. le ministre
de l'Environnement.
M. Benoit
Charette
M. Charette : ...ce qui est amusant, c'est qu'on n'a pas
attendu la question, justement, posée aujourd'hui ou encore le dépôt, dans les prochains instants, d'un libellé de motion. Le
budget, déposé il y a quelques jours maintenant, quelques semaines, en fait, prévoit plus de sommes que
jamais en matière de lutte au suremballage et à l'usage de plastique unique,
notamment.
Donc, ce
n'est pas une question que nous attendions, ce n'est pas une motion que nous
attendions pour bouger. Déjà, le
budget déposé il y a quelques semaines donne des réponses précises et qui
sauront satisfaire, j'en suis convaincu, les Québécois et Québécoises
qui nous demandent d'agir en la matière et qui ont été déçus ces dernières
années...
Le Président : En terminant.
M. Charette : ...par le manque
d'action du gouvernement précédent.
Le Président : Cela met fin à
la période de questions et de réponses orales. Merci de votre collaboration.
Motions
sans préavis
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, puisqu'il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la
rubrique des motions sans préavis. Et, selon
nos règles et l'ordre de présentation, je vais céder la parole à M. le député
de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme
la Présidente. Je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre de la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse que le hockey
est le sport national du Québec et que les séries éliminatoires sont un élément
important de la culture populaire québécoise;
«Qu'elle reconnaisse que le conflit commercial
opposant actuellement Québecor et Bell prend en otages les consommateurs;
«Que l'Assemblée
nationale invite les géants de la
câblodistribution à assurer une offre de service permettant aux Québécoises
et aux Québécois de profiter pleinement de cette tradition dans les prochaines
semaines.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Gouin. Y a-t-il consentement pour débattre de
cette motion?
M. Schneeberger :
Il n'y a pas de consentement.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement.
Pour la
prochaine motion, je vais reconnaître un membre du groupe formant la troisième
opposition, et ce sera M. le chef du troisième groupe d'opposition.
Réitérer
l'importance des mécanismes de négociation,
de conciliation et de médiation des conflits de travail
M.
Bérubé :
Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec
le député de Vimont, le député d'Hochelaga-Maisonneuve, le député de Chomedey
et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale réitère l'importance des mécanismes de négociation, de conciliation
et de médiation des conflits de travail entre les employeurs privés et
les syndicats;
«Qu'elle
rappelle au gouvernement du Québec la nécessité de ne pas favoriser une des
deux parties, mais plutôt de favoriser le dialogue entre celles-ci afin
d'obtenir une entente négociée.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger :
Consentement, sans débat.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, M. le leader du troisième groupe
d'opposition.
M. Ouellet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, on
demanderait de procéder au vote par appel nominal, s'il vous plaît.
Mise
aux voix
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous avons une demande
de vote par appel nominal. Est-ce que nous sommes prêts à procéder au vote?
Alors, nous sommes prêts. Je ne relirai pas la motion et je vous demande que
les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
• (11 heures) •
Le Secrétaire adjoint : M. Bérubé (Matane-Matapédia),
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski),
Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon
(Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine), Mme Perry Mélançon (Gaspé).
M. Jolin-Barrette
(Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme Chassé (Châteauguay),
M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne),
Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard
(Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel
(Nicolet-Bécancour), M. Roberge
(Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel (Granby),
M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne
(Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost),
M. Caire (La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé
(La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete
(Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est),
M. Lacombe (Papineau),
Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Boulet
(Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon),
M. Poulin (Beauce-Sud),
M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle
(Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard
(Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid
(Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau),
M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget),
Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf),
Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard
(Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux
(Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac),
M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval),
M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière),
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit
(Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard
(Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne),
M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols
(Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo
(Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent),
M. Ciccone (Marquette).
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin),
Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie
(Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau),
M. Zanetti (Jean-Lesage).
M. Ouellette
(Chomedey), Mme Fournier (Marie-Victorin).
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des députés contre cette
motion ou des abstentions? Alors, M. le secrétaire général, pour le
résultat du vote.
Le
Secrétaire : Pour : 114
Contre :
0
Abstentions :
0
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est adoptée. Nous en sommes toujours
à la rubrique des motions sans préavis, et je vais maintenant
reconnaître M. le député de Bourget.
Reconnaître l'apport du
Dr Camille Laurin dans l'histoire du Québec moderne,
rappeler l'importance de la protection du français et réitérer
le statut du français comme langue d'usage au Québec
M.
Campeau : Mme la Présidente, je demande le consentement de
la Chambre pour déposer la motion suivante conjointement avec le député de Viau, la députée de Taschereau, le chef du troisième groupe d'opposition, la députée de
Marie-Victorin et le député de Chomedey :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse l'apport du Dr Camille Laurin dans
l'histoire du Québec moderne, particulièrement ses travaux dans le domaine de
la psychiatrie et de la santé mentale, notamment son expertise dans la
modernisation des établissements psychiatriques;
«Que l'Assemblée souligne le 20e anniversaire de
la disparition de [M.] Laurin, qui a représenté les intérêts des électeurs [du comté] de Bourget pendant
4 mandats entre 1970 et 1998 et qui fut ministre dans le gouvernement Lévesque;
«Que l'Assemblée reconnaisse l'importance de la
loi 101, qui établit et définit les droits linguistiques de tous les
citoyens du Québec et qui confirme le français comme langue officielle du Québec;
«Qu'enfin
l'Assemblée rappelle l'importance de la protection du français dans les médias,
la culture, l'éducation et l'affichage et réitère le statut du français comme
langue d'usage au Québec.» Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de
Bourget. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M.
Schneeberger : Oui. Alors, il y a consentement pour un débat
de deux minutes par intervenant, dans l'ordre suivant : le député de Bourget, le député de Viau, la députée de
Taschereau, la cheffe du troisième groupe d'opposition... le chef,
excusez, du troisième groupe d'opposition et la députée de Marie-Victorin.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Alors, M. le
député de Bourget, la parole est à vous.
M.
Richard Campeau
M. Campeau :
Merci, Mme la Présidente. Camille Laurin est un homme qui a joué un rôle
important comme politicien et comme
psychiatre au Québec. M. Laurin est né à Charlemagne le 6 mai 1922 et est
décédé depuis déjà 20 ans, en
mars 1999, mais nous nous rappelons encore de lui et de ce qu'il a fait pour le
Québec. Il est reconnu, bien sûr, comme le père de la loi 101 ou le père de la Charte de la langue
française. C'est lui qui a fait en sorte que le français obtienne le
statut de la langue officielle au Québec. Ceci a contribué à créer de l'unité
au Québec autour de la langue d'usage.
Pour nous mettre en
contexte : en 1943, M. Laurin s'inscrit en médecine à l'Université de
Montréal. C'est un homme doté d'une
intelligence remarquable, et on dit même qu'il n'avait que des notes parfaites.
Il s'est ensuite spécialisé en
psychiatrie à Boston et à Paris dans les années 50, ce qui n'était
vraiment pas traditionnel. Il a rapporté de ses études à l'étranger une conception innovatrice de la
psychiatrie et de la santé mentale. Le Dr Laurin voyait dans la médecine
et la psychiatrie de puissants instruments
de transformation sociale. C'est ce qui l'a amené fort probablement à s'engager
dans la politique québécoise. Il a été député de Bourget durant quatre mandats,
soit entre 1970 et 1998. Il s'est joint à l'équipe
de René Lévesque en 1968 pour fonder le Parti québécois. C'est en 1970 qu'il a
été l'un de sept députés élus du Parti
québécois à l'Assemblée nationale du Québec. En 1976, le Parti québécois a pris
le pouvoir, et le Dr Laurin a été nommé
ministre d'État au Développement culturel. Il a été chargé de créer une
nouvelle loi linguistique au Québec qui remplacerait la loi, à ce
moment, contestée du précédent gouvernement de Robert Bourassa. C'est donc en
1977 que Camille Laurin a déposé à
l'Assemblée nationale son projet de loi que l'on connaît aujourd'hui sous le
nom de Charte de la langue française, ou loi 101.
Merci, M. Laurin,
pour votre très grand apport à la société québécoise. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Bourget.
Maintenant, je cède la parole à M. le député de Viau.
M.
Frantz Benjamin
M. Benjamin :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Écoutez, au nom de mes collègues de notre formation
politique, je suis très heureux d'appuyer cette motion.
Vous
savez, la connaissance du français est un indicateur important sur la vitalité du français
au Québec. Et, au Québec, 94 %
de la population a déclaré pouvoir soutenir une conversation en français en
2016, ce qui représente un peu plus
de 7,6 millions de la population. Et, si je j'évoque ces chiffres, Mme la
Présidente, justement, c'est en lien avec la contribution du travail du Dr Camille Laurin. Je vais laisser
peut-être à ma collègue députée de Marguerite-Bourgeoys le soin de parler de la contribution du
Dr Laurin en santé mentale. Quant à moi, je vais m'attarder davantage pour
parler de sa contribution au niveau de la langue française.
Lorsqu'en
1977, précisément au mois d'août 1977, le gouvernement du Parti québécois
adopte la Charte de la langue
française, c'est le Dr Camille Laurin qui a eu à porter ce projet de loi et
cette loi qui a été adoptée, et il devenait ainsi le père de la loi 101.
Mais, si je dois faire l'histoire, si je dois remonter au fil du temps, il
faudrait évidemment, Mme la Présidente, que
je remonte jusqu'à 1974, là où le gouvernement libéral de Robert Bourassa fait
adopter le projet de loi 22, projet de loi qui, pour la première fois,
fit de la langue française la langue officielle du Québec.
Le
Dr Camille Laurin a eu non seulement des enfants, mais il a eu aussi des
petits-enfants. Et il est important pour nous aujourd'hui de maintenir le cap, de maintenir le cap vers
l'objectif qui est celui fondamental de la Charte de la langue française, qui consiste à continuer à faire du
français la langue de l'État et de la loi mais aussi que ce soit aussi la
langue normale et habituelle du travail, de l'enseignement, des communications,
du commerce et des affaires. Il appartient aujourd'hui aux héritiers, enfants et petits-enfants de M. Laurin
de porter cette langue-là, d'en faire non seulement une langue de communication, mais aussi une langue qui
doit passer par des actions concrètes pour assurer une juste présence du français dans l'ensemble de toutes les
plateformes, aussi bien au Québec qu'à l'étranger. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Viau, et maintenant je
cède la parole à Mme la députée de Taschereau.
Mme
Catherine Dorion
Mme
Dorion : Merci, Mme la Présidente. Je voudrais inviter les députés à
faire avec moi un exercice d'uchronie aujourd'hui
et qu'on imagine qu'est-ce qui se serait passé si le Québec n'avait jamais
adopté la loi 101. Imaginez le nombre de crises de Saint-Léonard qu'on
aurait eu. Imaginez la ségrégation qu'on aurait si le Dr Laurin n'avait pas
réussi à convaincre René Lévesque du
bien-fondé de sa loi, parce qu'il a travaillé fort. 90 % des enfants issus
de l'immigration iraient à l'école
anglaise, adopteraient la langue anglaise. Et là je ne veux pas blâmer les
nouveaux arrivants qui, avant la loi
101, envoyaient massivement leurs enfants à l'école anglaise, parce que, pour
eux, à cette époque-là, ils immigraient avant tout au Canada et ils quittaient leur pays. Ça doit déjà être une
cicatrice à l'âme. Alors là, loin de moi l'idée de les pointer du doigt,
mais c'était l'état des choses avant la loi 101.
Donc,
sans la loi 101, la face du Québec aurait été différente. Non seulement la
langue française aurait écopé, mais ce
que nous sommes aussi aurait écopé. Notre identité n'aurait pas pu s'enrichir
des apports des Nguyen, des Tomeo, des Abdelmalek,
des Velenosi. La loi 101 fait la quasi-unanimité aujourd'hui. Quand même
Stéphane Dion dit que c'est une grande
loi, ça veut dire que ça rassemble pas mal. Mais ce n'était pas le cas en 1977,
pas du tout. En ce sens-là, Camille Laurin était vraiment un visionnaire. L'idée maîtresse de la loi 101 est
pourtant simple : les enfants des personnes immigrantes vont à l'école en français. L'idée, c'est qu'on
puisse vivre ensemble. Et aujourd'hui on s'éloigne de ça avec un projet de loi
qui menace de faire en sorte que certaines personnes issues de l'immigration ne
puissent pas travailler dans nos écoles. Bon.
• (11 h 10) •
Mais
ce que voulait le plus M. Laurin, du fond de son coeur, c'était quoi? C'était
un Québec indépendant, parce que Camille
Laurin, c'est avant tout un indépendantiste radical, assumé. C'est l'homme qui
a refusé le «beau risque» de René Lévesque, visionnaire, comme je disais
plus tôt, et l'histoire lui aura donné raison plus d'une fois.
Maintenant,
on pourrait imaginer ce que serait le Québec s'il était devenu indépendant en 1980, comme 40
autres États qui sont venus au monde depuis cette date-là. Le
Québec n'aurait pas englouti des milliards dans les sables bitumineux. Le Québec
n'aurait pas une menace de pipeline qui lui pend au-dessus de la tête à chaque
changement de gouvernement au fédéral. Le Québec serait probablement un leader mondial dans la lutte aux changements climatiques. On
ferait un seul rapport d'impôt. Il y a bien des travailleurs autonomes qui seraient contents. Tous nos traités
de libre-échange auraient été
négociés selon nos intérêts et non pas selon ceux des industriels
de l'Ouest. On aurait depuis longtemps une équipe nationale au Championnat du
monde de hockey. Peut-être que le
député de Marquette
aurait joué dedans. D'ailleurs, c'est sa
fête aujourd'hui, alors bonne fête au député de
Marquette. Et ça aurait été bon pour notre psychologie
collective. Et ça, ce n'est pas moi
qui le dis, c'est Camille Laurin qui le disait : Je suis indépendantiste parce que
je suis un psychanalyste.
Alors,
voilà, au nom de ma formation
politique, je tiens, en ce 20e
anniversaire de sa disparition, à saluer la mémoire du grand Camille Laurin. Merci, docteur.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Taschereau.
Et maintenant je cède la parole à M. le chef du
troisième groupe d'opposition.
M.
Pascal Bérubé
M.
Bérubé : Mme la Présidente, ce n'est pas sans émotion que je participe à cet hommage aujourd'hui. Le nom du Dr Camille Laurin est l'un des plus importants de
l'histoire moderne du Québec et de notre formation politique, le Parti
québécois.
L'hommage
qui lui est rendu aujourd'hui par l'ensemble des formations
politiques démontre l'héritage de
l'homme et la force de l'homme qu'il
a été, la force de ses convictions. Il est profondément associé à l'affirmation
de notre identité nationale. Il est indissociable de l'une des lois qui
distinguent le Québec des autres États d'Amérique, la Charte de la langue française, la loi 101. Il en a fallu, du
courage, pour faire adopter sa loi, qui a été largement contestée. M. Laurin
en a souffert, mais il a tenu le cap, et le
Parti québécois a su faire adopter cette loi-phare pour l'avenir du Québec, et
c'est à ce titre d'ailleurs qu'on l'a honoré le plus souvent.
Pourtant, la
contribution du Dr Laurin va bien au-delà de la sphère linguistique, faut-il le
rappeler. C'est un éminent psychiatre. Il a
considérablement fait progresser la réflexion entourant la façon de dispenser les
soins en santé mentale au Québec.
Professeur, conférencier, témoin expert, auteur respecté, même sans considérer
sa carrière politique, le Dr Laurin
demeure une figure importante de la communauté intellectuelle québécoise du XXe
siècle, l'un de nos grands penseurs,
de nos grands sages, de nos grands esprits. Il nous faut le souligner. Mais,
pour lui, cela ne suffisait pas. Il a poussé
encore plus loin son engagement social, participant activement à la fondation
du Mouvement souveraineté-association. La
suite est davantage connue. Il fut l'un des hommes les plus influents du
gouvernement de René Lévesque. Il portera pour toujours le titre
honorifique de père de la loi 101. Il en a fait d'ailleurs le plus grand
combat de sa vie.
En sa mémoire, nous
devons, en tant que parlementaires, nous assurer que l'esprit de cette grande
loi soit respecté, qu'il cesse, à tout le
moins, d'être dilué. Le Dr Laurin a déjà déclaré : «Je voulais faire une
loi qui répare, qui redresse et qui
redonne confiance, fierté et estime de soi à un peuple qui tenait à sa langue
mais qui était devenu résigné et passif.» Je nous invite tous à
réfléchir sérieusement à cette citation. Je la considère toujours, voire plus
que jamais d'actualité. Le travail
d'affirmation doit se poursuivre. Même que nous avons du rattrapage à faire. Et
le plus bel hommage que le
gouvernement pourrait lui rendre, c'est d'abord de reconnaître que le français
recule, notamment à Montréal, et de renforcer la loi 101 pendant ce
mandat. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Je vous remercie, M. le chef du troisième groupe
d'opposition. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme
Catherine Fournier
Mme
Fournier : Mme la Présidente, peu d'hommes ont eu un effet
aussi grand sur leurs pays que le Dr Camille Laurin, lui qui est probablement le Québécois à avoir
réalisé la plus formidable odyssée à l'intérieur de notre psyché collective.
En
plus d'avoir été une sommité pour ses travaux en psychiatrie, le Dr Laurin
a marqué le Québec à jamais en donnant aux Québécois une loi qui protège
nos droits linguistiques dans un contexte où notre situation minoritaire en
Amérique menaçait la transmission de notre langue française. Un aspect méconnu
mais fondamental est également la consécration des droits de la minorité
historique anglophone dans cette même loi. En somme, la loi 101 a permis aux Québécois de se sentir chez eux. En effet,
l'assurance de pouvoir vivre, s'éduquer et travailler dans sa langue est pour
un peuple l'un des gages de son épanouissement. Pour preuve, regardons tout
le chemin qui a été parcouru pour le français
au Québec depuis l'adoption de la loi 101 et qui fait en
sorte qu'aujourd'hui les jeunes Québécois n'ont plus aucun
complexe par rapport à leur langue.
Grâce
au Dr Laurin et à son travail, nous sommes fiers de parler français
et n'avons pas peur pour son avenir. Cela n'empêche pas qu'il est toujours de notre devoir de travailler à promouvoir notre
langue à travers nos médias, notre culture, le travail ou les études
pour que l'héritage du Dr Laurin puisse continuer à traverser le temps.
En
définitive, il faut également reconnaître que rien ne nous donnera autant
d'assurance que de faire du Québec
un pays, le seul pays francophone d'Amérique du Nord et le plus grand pays francophone du monde en termes
de superficie.
Bref, en mon nom et
en celui de mes concitoyens de Marie-Victorin, je vous dis merci, Dr Camille
Laurin.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Marie-Victorin.
Mise
aux voix
Maintenant, je me
dois de vous demander si cette motion est adoptée.
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Adopté.
Pour la prochaine
motion, je vais maintenant me tourner vers Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme
Montpetit : Mme la Présidente, je sollicite donc le consentement de
cette Assemblée afin de présenter la motion
suivante conjointement avec la députée de Mercier, le député de Jonquière, le
député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse que l'utilisation d'emballage de plastique et
de polystyrène est dommageable pour l'environnement;
«Qu'elle
reconnaisse que l'accumulation de plastique sur nos terres et dans les océans crée
une pression néfaste sur les écosystèmes et la biodiversité;
«Qu'elle prenne acte
que plusieurs pays dans le monde ont déjà entamé ce virage;
«Qu'elle demande au
gouvernement caquiste de faire preuve de leadership en déposant un projet de
loi sur l'élimination du suremballage d'ici l'automne 2019.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de
Maurice-Richard. Y a-t-il consentement pour débattre de
cette motion?
M.
Schneeberger :
Pas de consentement.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement.
Avis
touchant les travaux des commissions
S'il
n'y a pas d'autre motion sans préavis, je vais maintenant céder la parole à M.
le leader adjoint du gouvernement pour les avis touchant les travaux des
commissions.
M.
Schneeberger :
Merci, Mme la Présidente.
Alors,
j'avise cette Assemblée que la Commission des transports et de l'environnement
entreprendra les consultations particulières
sur le projet de loi n° 17, Loi concernant le transport rémunéré des
personnes par automobile, aujourd'hui, après
les affaires courantes pour une durée de 1 h 15 min et de
15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La
Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 1, Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la
corruption, du directeur général de la Sûreté du Québec et du directeur
des poursuites criminelles et pénales...
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant! Un instant, M. le
leader adjoint. S'il vous plaît, je vous demande de quitter l'enceinte
du salon bleu en silence, puisque nos travaux se poursuivent. M. le leader
adjoint.
M.
Schneeberger :
... — merci — aujourd'hui,
après les affaires courantes jusqu'à 12 h 15 et de 15 heures à
18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission des relations avec les citoyens
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 9,
Loi visant à accroître la prospérité
socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du
travail par une intégration réussie des personnes immigrantes,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de
15 h 45 à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;
La Commission de la culture et de l'éducation
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 12,
Loi visant à préciser la portée du droit à la gratuité scolaire et à permettre
l'encadrement de certaines contributions financières pouvant être exigées, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle des
Premiers-Ministres. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement.
Renseignements sur les
travaux de l'Assemblée
Avis de sanction du projet
de loi n° 10
Maintenant, nous en sommes à la rubrique des
renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Et, s'il n'y
a pas de demande de renseignements, je vous informe qu'il y aura sanction du
projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité
salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité
salariale, aujourd'hui, à 14 heures, au bureau de Son Honneur le
lieutenant-gouverneur.
Affaires du jour
Maintenant,
la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer
aux affaires du jour, et je vais céder la parole à M. le leader adjoint
du gouvernement.
• (11 h 20) •
M.
Caire : Merci, Mme
la Présidente. Pouvez-vous appeler l'article 13, s'il vous plaît?
Projet de loi n° 3
Reprise du débat sur la prise
en considération du rapport de la commission
qui en a fait l'étude détaillée et de l'amendement de la députée de Joliette
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. À
l'article 13, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le mardi 9 avril 2019, sur la prise en
considération du rapport de la Commission des finances publiques sur le projet
de loi n° 3,
Loi visant l'instauration d'un taux unique de taxation scolaire, ainsi que sur
l'amendement transmis en vertu de l'article 252 du règlement par
Mme la députée de Joliette.
Et je suis prête à céder la parole au prochain
intervenant, et ce sera M. le député de Vimont.
M. Jean Rousselle (suite)
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Comme j'avais commencé hier soir, écoutez,
voilà un an, notre collègue le député
de Jean-Talon et ancien ministre de l'Éducation déposait un projet de loi, la loi n° 166, Loi portant réforme au système
de taxation scolaire. L'objectif était d'éliminer les inégalités régionales au niveau de la taxation scolaire, du même coup de diminuer la taxe scolaire
pour tous les Québécois. On y allait avec une équité vraiment importante.
Vous savez,
chaque région a sa particularité, chaque région a ses besoins, chaque région
vit sa réalité. Juste, moi, à Vimont — je
vais parler juste de Vimont, je ne parlerai même pas de Laval, je vais vous
parler de Vimont — dans
mes écoles — je
vais prendre un exemple — l'école
Terry Fox, de la commission
scolaire anglophone,
ou des autres écoles francophones que
j'ai — j'en ai
plusieurs — mais je
vais en prendre une en particulier, l'école Père-Vimont — j'aime ça m'en servir, de l'école Père-Vimont, c'est mon ancienne école, à moi, au
primaire — deux
réalités différentes, parce qu'à l'école
Père-Vimont tu peux te présenter à l'école à pied. Tu n'as pas besoin de
transport scolaire. Donc, la commission scolaire n'a pas besoin de défrayer pour le transport scolaire. Par
contre, l'école Terry Fox, le côté anglophone, ont un secteur vraiment plus grand, et ils n'ont pas le
choix d'avoir du transport scolaire. Vraiment, quand vous allez à l'entrée
des classes, vous avez juste à vous
présenter à cette école-là, vous pouvez voir les autobus qui sont enlignés. Ils
n'ont pas le choix, parce que les enfants
ne sont pas... Bien, il y en a quelques-uns qui sont à proximité de cette
école-là, mais c'est vraiment rare.
Donc, la majorité sont plus éloignés. Donc, l'autobus n'a pas le choix. Donc,
il y a une dépense supplémentaire.
Les écoles de
chez nous... Actuellement, il y a une école qui est en construction dans le
secteur Auteuil, parce que Vimont
comprend Vimont et Auteuil, et, dans le secteur Auteuil, tu as une école qui
est en construction actuellement. Elle
devrait ouvrir ses portes bientôt. On a ajouté... puis ça, bien, ça va retarder
l'ouverture à cause de ça, on a ajouté des classes, et ça, c'est pour les maternelles quatre
ans. Où que je ne comprends pas, c'est qu'il nous manque des classes déjà.
Il nous en manque, des classes. Ce que je ne
comprends pas : pourquoi que ces maternelles quatre ans là arrivent?,
parce qu'on a un besoin dans le
secteur de ces classes-là. Donc, on devrait, oui, faire plus de classes, mais
vraiment faire des classes qu'on a de
besoin, donc, pour des gens, actuellement, des francophones qui, eux, de temps
en temps, sont obligés de prendre
l'autobus aussi. Puis, vous le savez comme moi, on le sait tous, on a besoin
des professeurs, des spécialistes.
J'arrive avec
ça, parce qu'on a eu la chance d'avoir un ministre, mon collègue de
Robert-Baldwin, qui a fait un travail
incroyable. Budget équilibré, vraiment notre... On disait que notre carte de
crédit était pleine. Il a vidé notre carte de crédit. On a remis de l'argent sur notre dette. Et on s'est donné
justement une marge de manoeuvre monétaire. Qu'est-ce que je trouve, puis là je suis inquiet, c'est que,
de la manière qu'on se sert de ces surplus-là, Mme la Présidente, bien, on
s'en sert d'une manière... Je ne suis pas
sûr que c'est la bonne manière. Les surplus; je comprends que la CAQ a promis
de remettre l'argent dans les poches des Québécois, mais je ne suis pas sûr que
c'est la bonne manière, parce que, là, actuellement,
qu'est-ce qu'on fait? On perd 800... Parce qu'à un moment donné on parlait de
800 millions, 900 millions, là, puis je ne sais pas si on n'est pas rendu à 1 milliard, là, mais,
ces argents-là, qu'on va donner aux contribuables, bien, je pense qu'on aurait pu y aller d'une manière...
avec une équité vraiment meilleure, parce que, là, actuellement, on crée
une iniquité. On aurait dû y aller tout
simplement sur les impôts, parce qu'actuellement tous les locataires ne
recevront pas ces argents-là. Puis,
bien souvent, les locataires, c'est eux qui ont moins de sous. Puis, je
regardais, justement, il y a des gens...
Puis il y a 40 % des Québécois qui sont locataires. Donc, imaginez-vous,
il y a seulement 60 % de la population qui vont recevoir de l'argent. Il y a un gros complexe, là, Sagard, vous
savez à qui ça appartient. Ils font des économies monstres vraiment incroyables. Une propriété qui
vaut — puis là
je me fie aux journaux — 59 millions. Écoutez, ils vont sauver
111 000 $ de taxe scolaire. C'est incroyable. C'est de ça qu'on
parle, d'équité.
En plus, je vais aller plus loin, parce que, là,
tous les commerçants, les commerces qui, eux, paient des taxes scolaires vont
avoir des baisses. Donc, on va baisser, pour les...
Une voix : ...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : ...Mme la leader adjointe de l'opposition
officielle.
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, écoutez, on va vérifier.
Une voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Vous devez repartir? Alors, attendez un instant, on va faire le compte.
Moi, je fais
partie du quorum. Je suis là. Alors, le quorum est atteint. Alors, vous pouvez
poursuivre, M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, juste pour vous dire
qu'effectivement, dans les choix qu'ils font, il y a une iniquité qui se fait par cette loi-là, parce que les
plus riches vont sauver de l'argent et les plus pauvres n'en recevront pas, et je trouve ça incroyable. Puis
là, vous savez, on sauve de l'argent, mais je sais qu'il y en a aussi... Puis
là je ne commencerai pas à nommer les
ministres qui vont sauver beaucoup d'argent de l'autre côté, je ne commencerai
pas à jouer à ce jeu-là, mais bizarrement
c'est toujours des gens qui ont beaucoup d'argent qui vont en sauver. Les investisseurs étrangers qui ont des bâtiments chez
nous, au Québec, ils vont faire quoi? Bien oui, ils vont sauver des taxes.
Donc, les gens de chez nous, ils ne sauveront pas de taxe.
Pendant ce
temps-là, nous autres, on a besoin d'argent. Comme je vous disais tantôt, on a
fait un travail incroyable sur les
finances publiques, mais justement il faudrait s'en servir correctement, et je
vous dirais que s'en servir correctement, ça serait de redonner aux gens cet argent-là. Actuellement, il y a un
projet de loi qui est en train d'être discuté aussi dans une autre salle, je pense, la loi n° 12, sur justement la gratuité des activités scolaires, et ils sont en
train de regarder ça. Bien, c'est là
qu'on aurait dû mettre l'argent. On veut en donner aux gens. Moi, quand j'ai
fait mon porte-à-porte pendant mes élections, les gens disaient :
Bien, moi, je voudrais avoir plus de services. Bien, c'en est, ça, et ça, bien,
les gens, actuellement, les parents, ils
paient justement les sorties scolaires. Ça, c'en est, justement, des argents
qui auraient pu être dépensés correctement et d'une manière plus
correcte.
Donc, il ne
me reste pas beaucoup de temps, hein, une minute. Bon. Juste pour vous dire que
c'est sûr qu'on va voter contre,
parce que ça n'a vraiment pas d'allure, ce projet de loi là. Et, malheureusement,
que ça soit présenté par un ministre...
pas par le ministre de l'Éducation lui-même, aussi, je trouve ça comme un peu
ordinaire, je dirais. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Vimont. Et maintenant je vais céder
la parole à M. le député de Jacques-Cartier.
M. Gregory Kelley
M. Kelley : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je veux juste commencer, parce que je pense que c'est
toujours important pour les gens qui sont
chez eux présentement, qui écoutent l'Assemblée nationale présentement... que,
pendant nos
débats en commission sur le projet de loi, c'est le rôle de l'opposition, pas
juste d'opposer, mais de proposer certaines choses, et c'est toujours
apprécié quand le gouvernement est à l'écoute.
Alors, je
peux toujours souligner qu'on a eu certains éléments qui ont été ajustés par le
ministre des Finances puis je pense, c'est important juste de mentionner ça,
qu'il a consenti à ajouter à la somme de la subvention d'équilibre entre les commissions scolaires. Alors, c'est
quelque chose qui est important pour Montréal. Ce changement de la taxe scolaire, c'est sûr que ça va avoir des impacts
très différents sur la région de Montréal puis dans les autres régions, mais,
quand même, que le ministre est à l'écoute
des députés qui ont soulevé certains enjeux pour des commissions scolaires
sur l'île de Montréal... Alors, c'est juste
une place... On peut discuter au début que, oui, effectivement, on a eu des
bons échanges puis une discussion là-dessus pour essayer d'améliorer des
choses. Mais, en même temps, le gouvernement n'accepte
pas tous les amendements et propositions de l'opposition. Alors, je sais que ma
collègue la députée de Westmount a
proposé d'autres éléments pour peut-être sauver des coûts pour les commissions
scolaires concernant la construction de
différents bâtiments, une façon de récupérer certaines sommes. Ça n'a pas
marché, mais quand même, je comprends bien,
ils ont eu une bonne discussion ensemble là-dessus. Alors, dans tout ce débat
présentement, c'est dans les médias, on
joue ce jeu politique, rien n'avance dans les commissions parlementaires, rien
ne passe. Mais ce n'est pas vrai, on a des discussions. Tout le monde a un rôle à jouer dans ce processus d'avoir
une discussion sur nos projets de loi pour s'assurer qu'ils respectent puis ils reflètent toutes les
demandes des différents groupes puis des différents citoyens de notre province.
• (11 h 30) •
Mais il y a
une chose, c'est sûr... puis je sais que plusieurs de mes collègues, pas juste
dans notre formation politique, mais
dans les autres formations politiques, ont parlé beaucoup du fait que cette
réduction des taxes va vraiment, vraiment seulement aider des personnes
qui sont des propriétaires d'une
maison. Ça va toucher des gens qui sont plus riches. C'est eux autres qui vont recevoir plus d'argent dans
leurs poches. Puis il y a environ 40 % de la population... que rien n'est
changé pour eux autres.
So, when the past budget from the
Finance Minister was released, the first thing all my friends questioned me
was: Greg, am I going to see a difference in my
paycheck, did you guys reduce my taxes? And I say: No, we didn't, your paycheck is going to be the same pre and post,
there's no reduction in your taxes. So, for a lot of my friends who are young
professionals starting up, who have
families, for my friends who are still living in condos, or in apartments, or
leasing, for them, there's not going to be much of a change for them. There
was no tax cut for them.
Et, quand je
pense aussi de certains citoyens, quand même, dans le comté de Jacques-Cartier,
et beaucoup des aînés, beaucoup des
personnes qui n'habitent pas dans leur résidence, elles habitent... elles sont
des personnes qui louent un appartement ou un condo, rien ne va... il
n'y a aucun... dans ce projet de loi, pour eux autres.
They're going to continue to have to
stretch out that budget, stretch out that pension to continuing to pay for gas prices that, according to
experts, will skyrocket this summer, which will have an impact on the price of
foods and services. All that gets
taxed on to the most vulnerable in our society, taxed on to those who are
already trying to make ends meet. So, at a time when experts are
predicting that things are going to get a lot harder for those who have the
less means, they're going to continue to get
squeezed. And this budget did not deliver on a promise that I have heard many,
many, many times when the Government
was in the opposition, many attacks that there's nothing in this for the middle
class or for the working class. I cannot say that this tax cut over four
years will necessarily go to affect those people in the middle class or in the
working class. And it's something that, as a society, we're going to have to
continue to discuss because, once again,
there's going to be more and more pressure on the most vulnerable people in our
society and the most vulnerable organizations to deliver services that
the Government is not necessarily delivering on.
Alors, ce projet de loi, ce changement de taxe va
coûter, le gouvernement du Québec, environ 800 millions de dollars. C'est beaucoup d'argent. Puis, si on
regarde, avec 800 millions de dollars, qu'est-ce qu'on peut faire sur
quatre ans avec ça... Pour moi, j'ai
eu le plaisir de participer à un échange entre les étudiants au cégep de
John-Abbott sur la lutte contre les
changements climatiques. Et c'est sûr que, pour la prochaine génération, il y a
beaucoup d'inquiétudes. Moi, j'ai parlé avec une jeune madame qui a dit :
Greg, je veux être une infirmière, mais, honnêtement, est-ce qu'on va avoir
une planète qui est verte, qui... Est-ce
qu'on va avoir la même nature qui existe présentement sur notre planète? Je
vais habiter dans quel monde dans 20 ans?
Alors, elle a
vraiment posé plusieurs questions sur : Le gouvernement du Québec fait
quoi exactement sur la lutte contre
les changements climatiques? Puis, c'est sûr, je viens juste de parler du prix
de l'essence qui va augmenter. Ça va chuter
encore cet été selon plusieurs experts. Alors, une chose que je peux parler, et
c'est sûr, ici, au Québec, on aime nos
chars. We love to drive,
we love to take our cars. Il y a une
réalité là pour plusieurs d'entre nous. Comme moi, de me rendre ici, à
l'Assemblée nationale, ça prend environ 2 h 45 min de route.
C'est une réalité. Je ne peux pas prendre l'autobus
ni le train tout le temps. Alors, des fois, je vais prendre mon char. Et ça,
c'est juste une réalité de notre société, des gens qui doivent aller à la garderie pour déposer leurs enfants
avant le travail. C'est juste : Oui, on doit prendre les autos. C'est une réalité, mais, en même temps, avec cet
argent-là, si je parle de 800 millions de dollars, si on peut faire un
plus grand investissement dans des
bornes électriques pour des chars électriques, peut-être que ça, c'est une
chose, on peut faire de plus. Oui, je sais que c'est déjà là, il y a des
éléments, mais il faut accélérer ça plus rapidement.
Because it's the greenhouse gas
emissions that come from transport which is the biggest part, in Québec, right now, of our contribution to
adding GHGs into our atmosphere. So, if we can transition over to cars which
are more electric more quickly,
invest in that infrastructure and accelerate that, accelerate the tax credit
that you get for that and encourage more
people to drive electric cars... It's all by leading by example, but also by
consumer example. The more people see: Hey!
That person has a car on the road that's electric, that person does... I
noticed that there's a charging station two streets over. People rethink their investments when they
go to buy a car. What can I do? I don't want to have to always pay $1.45 for a
litre of gas if I can get something that's much more reasonable and affordable
in a car. If I can drive my kids to the daycare and then to school in an electric car, why
not? And, of course, these things take time, we can't just say we're going
to change the world tomorrow and it's snap
of a finger, it's going to be done, but I do believe that we are making
progress, but we can continue to make more progress.
Aussi, pour cet argent-là, quand je parle quand même avec mes collègues
dans des régions, le transport en commun reste toujours une priorité pour eux autres, ce n'est pas juste Montréal
qui a besoin de transport en commun. Si on veut encore enlever plus les chars de nos routes et partout au Québec, ça
prend d'autres options. On ne peut pas toujours marcher partout, ici, au Québec, alors, ça, c'est une
autre chose, des transports en commun dans les régions, c'est quelque chose,
on peut utiliser cet argent-là pour. Une
autre chose que je pense, c'est très important, et un élément que j'ai toujours
eu beaucoup de respect pour l'ancien
premier ministre M. Couillard, et, quand même, l'ancien premier ministre
Jean Charest, c'était le leadership
mondial du Québec dans la lutte contre les changements climatiques. On était
présents, on était fiers de qu'est-ce que nous avons fait.
And it's true that not every
jurisdiction in this world has the blessings of hydroelectricity at the
capacity that we have,
but we were never afraid to go out there and start a carbon market with
California. We were never afraid to go knock on the doors of our neighbours to try and sell what we had, to try to
find ways to put a price on carbon before Canada and the United States
was even having the conversation. That's extremely important.
Alors,
ça, c'est juste une discussion parce que c'est une question, comment on veut
dépenser 800 millions de dollars. Et,
moi, quand je regarde ça, il y a plusieurs besoins, partout au Québec. Et c'est
sûr qu'on veut réduire des impôts de tous
les Québécois, mais ce projet de loi là est vraiment ciblé :
environ 60 % de la population, ce n'est pas une réduction des
impôts pour tout le monde.
Alors,
pour ces raisons-là, moi, personnellement, je sais que je vais voter contre ce
projet de loi. Je sais que notre formation
politique va voter contre ce projet de loi. Alors, ça, c'est tout pour moi, Mme
la Présidente. Merci beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie de votre
intervention, M. le député de Jacques-Cartier. Et, maintenant, je crois
que, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, c'est à votre tour de prendre la
parole.
Mme
Jennifer Maccarone
Mme
Maccarone : Merci, Mme la Présidente. À mon tour d'intervenir sur le
projet de loi n° 3. C'est sûr et certain, il n'y a personne qui est contre la
vertu, Mme la Présidente, il n'y a personne qui est contre mettre plus d'argent
dans les poches des contribuables, mais pas avec ce projet de loi, Mme la
Présidente, un projet de loi qui met les services et notre réseau
d'éducation en péril avec des coupures en éducation.
Alors,
j'aimerais souligner mes inquiétudes par rapport au projet de loi n° 3, qui n'explique pas comment... où on va chercher l'argent qui serait privé de notre réseau avec la baisse de
taxes scolaires, puis c'est sûr qu'il y aura un impact sur le réseau
tranquillement, «little by little», on va voir des difficultés dans le réseau,
je peux vous le confirmer. Des difficultés
qu'eux vont avoir avec le manque de financement des taxes scolaires puis de la
liberté que les commissions scolaires, eux, ont à débourser ces sommes
pour supporter leurs réseaux.
En uniformisant les
taxes scolaires, j'ai peur que c'est son seulement le fardeau fiscal qui va
réduire, c'est vraiment la qualité de
l'éducation pour nos enfants. On coupe dans les taxes scolaires pour rajouter
des lourdeurs dans les impôts des contribuables
ailleurs. Il n'y a rien qui est gratuit, Mme la Présidente, dans la vie, puis
on sait qu'il y a des choses qui nous
aiment, qui nous tiennent à coeur, entre autres, l'éducation. Il y a un coût
associé à ça, alors, si on coupe quelque
part pour alléger une taxe scolaire, c'est clair qu'on va créer une autre taxe,
un autre impôt ailleurs pour supporter un réseau qui nous tient à coeur.
Pour
moi, le p.l. n° 3 n'amène aucune assurance, aucun plan, et des
promesses qui vont nous coûter cher, et surtout qu'il n'aura rien dedans
qui va améliorer les services aux élèves, ni améliorer les besoins pour nos
enseignants ni améliorer nos écoles. Puis
c'est sûr et certain, on l'a entendu à plusieurs reprises, Mme la Présidente,
que c'est la priorité numéro un de
notre premier ministre, notre ministre de l'Éducation puis notre gouvernement.
Alors, je tiens à leur faire rappeler qu'il faut vraiment soutenir ce
réseau.
• (11 h 40) •
Je
peux vous dire que, dans le comté de Westmount—Saint-Louis, nous avons des besoins criants en
éducation où réduire dans la taxe
scolaire ne va pas nous aider à avoir des écoles. Nous avons besoin de trois ou
plus d'écoles. Nous avons le centre-ville de Montréal. On est en
croissance pour des jeunes familles qui viennent, puis aucune école pour recevoir tous ces jeunes-là. Alors, on a besoin
d'infrastructures, on a besoin de support dans notre réseau d'éducation,
on a besoin de nos professionnels puis, avec
une coupure dans les taxes scolaires, on aura beaucoup de difficultés à rejoindre
ces besoins.
L'actuel projet de
loi n° 3 sur la taxe scolaire à un taux unique du
gouvernement caquiste est à l'avantage des entreprises, des industries et des grands propriétaires, au détriment des
Montréalais, dont une forte population sont des locataires. Le projet de loi, dans le fond, est inéquitable. Les revenus
de la taxe scolaire servent notamment à payer l'entretien des bâtiments, une partie de transport scolaire
pour nos enfants, des services aux élèves, les salaires des directeurs et des
secrétaires d'école. C'est des frais incontournables, que les commissions
scolaires devront assumer maintenant, quoi qu'il
arrive, au même budget de fonctionnement. Même si on leur amène un allègement,
on n'a pas de plan, on n'a pas de financement qui est accordé pour les
années qui suivent, avec des baisses continuelles des taxes scolaires.
La taxe
scolaire aussi génère actuellement des millions de dollars de revenus d'intérêt
qui sont ensuite redistribués dans
nos écoles des milieux les plus pauvres, Mme la Présidente, et subventionnent
des services pour nos enfants à risque. Ça, c'est quelque chose qui nous tient à coeur. Puis évidemment, parce
qu'on n'a pas de pérennité, on sait que ces élèves-là sont à risque, et
la communauté est à risque.
Et
je rajoute aussi que la réalité que nous avons, les besoins dans les régions,
comparés... urbaines, sont totalement différents.
Alors, de dire qu'on aura une taxe unique quand ils ne reçoivent pas les mêmes
services, ça aussi, ça représente une
autre inéquité. Et ça me fait réfléchir que peut-être on devrait aller vers
l'avant autrement pour s'assurer qu'on rejoint les besoins de tous et
toutes dans une façon qui est équitable et une façon qui va supporter le réseau
de l'éducation.
Les
commissions scolaires doivent remettre au ministère la taxe supplémentaire
perçue au cours de l'année sur les
nouvelles constructions ou les augmentations de valeur non présentées au rôle
d'évaluation lors du calcul de cette taxe. Cette façon de faire ne favorise pas l'autonomie locale car les
commissions scolaires perçoivent de la taxe scolaire à leurs contribuables, mais doivent remettre cette taxe
supplémentaire au ministère. À l'instar du Comité de gestion de la taxe scolaire de l'île de Montréal, le CGTSIM, ou
maintenant le conseil de gestion de taxe de Montréal, qui peut conserver
ses revenus additionnels de taxe pour les redistribuer aux milieux
défavorisés...
Puis je
trouve ça vraiment dommage que, même si nous avons déposé un amendement quand
on discutait puis on se débattait
pour ce projet de loi... que le gouvernement a refusé des ententes de même type
pour les autres commissions scolaires,
pour les autres régions, afin d'assurer une équité de services entre les élèves
du Québec, quel que soit le territoire où
ils se trouvent. Alors, ça veut dire que tout ce qui est perçu pour les
nouvelles constructions, les taxes pour ces nouvelles constructions pour l'île de Montréal reviennent au
CGTSIM. Mais, quand on parle de Laval, quand on parle de Québec, quand on parle des autres régions, eux, ils sont
mis de côté, une inégalité. Quand on parle de mettre une équité dans le
réseau, je trouve ça particulier.
Puis on sait
que, par exemple, cette somme-là représente 27,6 millions de dollars pour
l'année scolaire 2015‑2016, puis, seulement pour la commission scolaire
de Laval, ça aurait représenté une somme de 2 millions de dollars, qu'ils pourraient utiliser pour aider ces enfants qui
sont défavorisés, qui en ont vraiment un besoin réel. Pour les commissions
scolaires anglophones de cette région-là, ça
représente un 300 000 $, mais 300 000 $, pour eux, qui est
surtout nécessaire pour aider des
enfants, rester après l'école pour jouer au basket. Pour la persévérance
scolaire, c'est vraiment un besoin réel.
Et je soumets
que nous venons tout juste de faire une réforme sur la taxe scolaire, Mme la
Présidente, avec le projet de loi n° 166, ceci qui a corrigé une
inéquité dans le réseau, pour la taxe scolaire, dans toutes les régions, alors
pour éviter que le
monde faisait du magasinage de commission scolaire en commission scolaire quand
leur enfant ne fréquentait pas une
école. Ça veut dire que... puis que ce soit anglophone ou francophone. On sait
que, dans la région de l'Outaouais, Mme
la Présidente, les contribuables, eux, ils cherchaient à aller vers les
commissions scolaires anglophones, parce que leur taux de taxe était beaucoup moindre, comparé aux commissions
scolaires francophones de cette région-là, où, partout ailleurs au Québec, c'était vraiment l'inverse, au
détriment d'une commission scolaire pour l'autre. Alors, je félicite le gouvernement,
le Parti libéral du Québec qui avait corrigé cette iniquité.
Puis ce n'est pas les communautés qui sont
venues ici pour dire : Nous avons besoin d'une autre réforme de la taxe scolaire. On sait que, même quand j'ai fait
la campagne, quand j'étais présidente de la commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier puis c'était ma première
campagne, je faisais du porte-à-porte, puis c'est sur le sujet de taxes
scolaires. Parce qu'on parle des
poches de nos contribuables, on parle de leur compte de banque : Pourquoi
il faut que je paie la taxe scolaire?
Quand on explique : L'éducation nous appartient, l'éducation appartient à
la communauté, ils comprenaient très rapidement. Ils savaient pourquoi
qu'ils dépensaient leur argent, ils connaissaient où leur argent allait. Alors,
c'était sécuritaire. Ils savaient que, si je
débourse ces sommes-là pour les taxes scolaires, c'est clair que je suis en
train de supporter mon réseau de
l'éducation, je sais comment que vous allez dépenser cet argent-là. Ce n'est
pas la communauté qui demandait
d'avoir une uniformisation de notre taxe scolaire. C'est une idée qui a été
proposée, puis, maintenant, vraiment, au déficit de notre réseau de
l'éducation.
Puis, comme on dit souvent :
Education is a priority, education belongs to everybody, education is part of
the community. There is no issue when we are
recovering our taxes. Our schoolboards have a 98% success rate in terms of
tax recovery. There is not a problem. There was no reason to move forward with
this because we're not correcting a problem.
We're, in fact, going to be creating more problems later on for a group that,
really, was doing very well. It's going to have an impact that will be
substantial on who we are.
Et, si je parle aussi de la démocratie, Mme la
Présidente, avec le une minute qu'il nous reste de parler de ce projet de loi, j'ai aussi une crainte : No taxation
without representation. J'ai peur que ceci représente un pas vers l'avant pour
l'abolition de la démocratie dans nos
commissions scolaires, pour le réseau scolaire, une démocratie qui nous tient à
coeur, la démocratie qui est la
responsabilité de tous et toutes, la démocratie qui est bonne pour les
anglophones, les francophones, pour
tout le monde, où, partout dans le monde, on voit qu'il y a des gens qui sont
en train de mourir pour avoir le droit de vote. Alors, j'ai une crainte que
voici un pas vers l'avant pour abolir nos droits de vote, nos droits pour la
représentation locale, qui est vraiment liée aussi avec les taxes
scolaires.
Alors,
j'aurais beaucoup plus à dire, Mme la Présidente, mais malheureusement j'ai
seulement 10 minutes. Alors, merci
pour votre belle écoute. Et, évidemment, avec tout ceci, puis en support de mon
équipe, ma formation politique, je voterai contre le projet de loi n° 3. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de
Westmount—Saint-Louis.
Et, pour la prochaine intervention, je crois que ce sera Mme la députée
de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme
Sauvé : Merci, Mme la
Présidente. J'écoutais ma collègue de Westmount—Saint-Louis, avec toute son expertise, sa passion pour ce dossier, et je la
remercie aussi d'avoir pris le temps d'expliquer la réalité qui me tient bien
à coeur, celle de Laval. Alors, je l'en remercie.
Vous savez, à cette étape-ci du
processus et devant l'adoption du projet de loi n° 3,
je ne suis toujours pas plus enthousiaste
que je l'étais au début. Alors, ça n'a pas changé. Alors, je veux vous rassurer
là-dessus parce qu'évidemment il y a
eu un grand travail qui s'est fait aux différentes étapes en commission
parlementaire. Mais, en même temps, j'entends aussi que les collègues de la commission ont amené des amendements, ont
voulu bonifier, ont voulu amener les impacts de cette loi, et, bien sûr, il n'y a pas eu toute l'écoute, bien
évidemment. Tous mes collègues de l'opposition officielle ont été, au fil des étapes, excessivement
éloquents à dénoncer l'improvisation du gouvernement qui, plus que toute autre
chose, vise à donner suite à ses engagements, l'engagement du premier ministre,
en campagne électorale.
Moi,
aujourd'hui, je vais vous parler de la réalité régionale, de l'impact sur
l'offre de services aux élèves, de la réalité lavalloise. Et, pour la
députée de terrain que je suis, à chaque année, je fais la tournée de mes
écoles, Mme la Présidente. Et, pas plus tard
que lundi, j'ai rencontré la direction d'une école primaire, qui m'a parlé,
bien sûr, des services offerts aux
élèves, des choix de la commission scolaire de Laval et de l'impact, bien sûr,
que pourrait avoir une telle initiative que le projet de loi n° 3 tel qu'adopté.
• (11 h 50) •
Alors,
le projet de loi n° 3, tout le monde égal. Pourquoi? Un simple
argument : l'allègement du fardeau fiscal de toutes les familles du Québec. Oui, mais encore.
Alors, peu importe la région, peu importe la dynamique du territoire,
peu importent les commissions scolaires en présence — et, nous, à Laval, on a deux commissions
scolaires : la commission scolaire
de Laval, la commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier — peu importe aussi le profil des étudiants et
peu importe l'indice de défavorisation socioéconomique.
Alors,
on dit pourtant de ce gouvernement : Il s'attribue, bien sûr, ce souci de
ces régions et c'est un gouvernement qui
devrait comprendre la réalité de chacune des régions, cette géométrie variable,
cette réalité bien distincte d'une région à l'autre. Alors, Lanaudière, Montréal, Bas-Saint-Laurent,
Abitibi-Témiscamingue, du pareil au même, même réalité de territoire et mêmes prestations de services aux
élèves? Je ne crois pas, Mme la Présidente. Et, certainement, pas question de
véritablement écouter les commissions scolaires du Québec, puisque le
gouvernement rêve, de toute façon, de les abolir.
J'ai devant moi, juste devant moi, l'excellent
ex-ministre de l'Éducation. Et le précédent gouvernement avait, lui,
dans son choix à lui, consulté pour la loi n° 166, consulté tous les acteurs de la société civile, les institutions et, bien sûr, les commissions scolaires sur la réforme du système de taxation scolaire.
Il a été, nous avons été à l'écoute des régions et de ces commissions
scolaires. Quand on y regarde de plus
près, que ce soient pour les taxes municipales, les nombreux budgets des ministères octroyés aux régions, à chaque fois, il y a soit
une réalité de marché ou une réalité de territoire.
Alors,
je vais vous parler de la région de Laval et de ma fameuse visite de lundi, qui
est, pour moi, excessivement importante.
Il y a un aspect très unique à l'offre de services aux élèves en difficulté à
Laval, et ça s'appelle l'approche d'intégration.
C'est près de 14 millions par année, c'est un choix de la commission scolaire
d'offrir des heures additionnelles aux
enfants qui ont soit des troubles de la personnalité, des troubles
d'apprentissage et qui se voient donc bénéficiaires d'une offre scolaire éducative avec des
professionnels à l'extérieur des classes à chaque semaine. Ça a un tel impact
sur la performance scolaire de
l'élève que, bien sûr, je vous dirais que déjà que Laval est la région la plus
attirante du Québec, mais, avec cette
offre de services aux élèves, il y a, je vous dirais, même un exode des élèves des
régions de la couronne nord. Alors,
il y a une reconnaissance de la clientèle étudiante à Laval qui a amené ces
choix très pertinents, très distinctifs et qui font une différence pour
les jeunes, entre autres les jeunes du primaire.
Mais
le projet de loi n° 3, c'est zéro équité d'une région à l'autre.
Alors, l'élève, c'est le grand oublié de ce projet de loi, parce qu'avec un taux unique pour tout le
Québec c'est, par exemple, ignorer la différence entre la commission
scolaire des Phares avec ses 3 200 élèves au secondaire, la région du
Bas-Saint-Laurent, et la réalité lavalloise des 14 300 élèves de la
commission scolaire de Laval, et, je le dis, la réalité qui est bipartite avec
la commission scolaire anglophone Sir-Wilfrid-Laurier.
Vous savez, dans mon ancienne vie et comme
députée, j'ai été témoin privilégié de l'évolution de services aux élèves des deux commissions scolaires de ma région
face aux différents et nouveaux défis des étudiants. À Laval, nous avons
connu, il y a quelques années, l'arrivée des Syriens. Il y a aussi l'évolution
du diagnostic lié à la santé mentale, l'ampleur
des troubles d'apprentissage et l'augmentation de la jeune clientèle à
l'éducation des adultes, une augmentation phénoménale. La clientèle a
complètement changé.
Ce
ne sont là, Mme la Présidente, que quelques exemples qui sont des exemples
porteurs de défis. Avec ces nouvelles réalités
des jeunes élèves arrive l'obligation pour les commissions scolaires d'adapter
les services scolaires pour eux; très, très important, avec le taux
unique, la géométrie variable du service de l'élève, non pas seulement la
dynamique du territoire et de la région, et
la réalité des commissions scolaires, et les choix qui sont en lien avec les
besoins des élèves, mais cette géométrie variable qui est si essentielle
pour le déploiement des services.
M.
le Président... Mme la Présidente, pardon, en conclusion, vous aurez compris que, dans mon manque d'enthousiasme, bien sûr que je ne donnerai
pas mon appui au projet de loi
n° 3. Parce qu'il
y a ce respect pour les services aux
élèves adaptés à leurs besoins, le respect du dynamisme des régions, le respect
des commissions scolaires qui, après tout, auront le gros boulot de la réforme alors qu'ils se feront bientôt
montrer leur 4 %, Mme la Présidente,
parce que, sur le terrain, les
parents nous parlent, parce que, sur le terrain, les commissions scolaires, les
écoles primaires, secondaires nous
parlent, parce qu'il y avait ce grand travail qui avait déjà été fait par
l'ancien gouvernement, parce qu'il y a cette réalité très importante
d'une souplesse nécessaire et d'une reconnaissance de la personnalité unique
des clientèles étudiantes dans chaque
localité et chaque région du Québec, il ne faut absolument pas donner notre
appui au projet de loi n° 3. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Fabre. Et
maintenant je suis prête à reconnaître un prochain intervenant s'il y en a un.
Je ne crois pas.
Mise
aux voix de l'amendement
Alors, l'amendement proposé par Mme la députée
de Joliette est-il adopté?
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Adopté. Maintenant, le rapport...
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Adopté ou non? Rejeté? Alors, il est rejeté.
Mise aux voix du rapport
Maintenant, le rapport de la Commission des
finances publiques portant sur le projet de loi n° 3, Loi visant
l'instauration d'un taux unique de taxation scolaire, est-il adopté?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Adopté. Merci. Vous ne parliez pas fort. Parlez un peu plus fort.
Maintenant, pour la suite de nos travaux, je
vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Schneeberger : Oui. Alors,
Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 3 du
feuilleton.
Projet de loi n° 6
Adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 3 du
feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 6,
Loi transférant au commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre des
lobbyistes et donnant suite à la recommandation de la Commission Charbonneau
concernant le délai de prescription applicable à la prise d'une poursuite
pénale. Et, Mme la ministre, je vous cède la parole.
Des voix : ...
Mme Sonia LeBel
Mme
LeBel : Merci, Mme la Présidente. Et merci de l'enthousiasme délirant
que ma présence soulève. Et c'est surtout
un enthousiasme que je partage parce que c'est ma première intervention sur un
projet de loi que je porte. C'est mon
premier projet de loi. D'ailleurs, c'était également ma séance de baptême et
d'ouverture en commission parlementaire sur cette période de
consultation.
Le projet de
loi. Donc, avant toute chose, j'aimerais remercier effectivement tous les gens
qui sont venus témoigner, tous les
groupes qui sont venus présenter des mémoires et apporter leurs commentaires
sur le projet de loi n° 6, et aussi remercier mes collègues députés autour de la table, à la Commission des
institutions, que ce soit du côté gouvernemental ou du côté des oppositions. Nous avons eu droit à des échanges
constructifs. C'était franchement fort agréable, et je dois vous dire
que ça m'a réconciliée avec une certaine partie des travaux parlementaires.
Donc, avant
toute chose, j'aimerais vous parler d'abord du projet de loi, effectivement. Le
projet de loi n° 6, c'est un
projet de loi technique, somme toute très simple, qui comporte deux éléments
prioritaires ou essentiels, c'est-à-dire qu'on parle du transfert, d'abord et avant tout, au Commissaire au
lobbyisme de la responsabilité du registre des lobbyismes et priorise également la modification qui veut que
la spécification d'un délai de prescription pour la prise d'une poursuite
pénale de trois ans à compter de la connaissance par le poursuivant de
l'infraction, sans excéder sept ans... suivant... sept ans, pardon, suivant sa perpétration, tel que le recommande la
Commission d'enquête, d'ailleurs, sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de
la construction, communément plus connue sous le nom de la commission
Charbonneau, à laquelle j'ai participé un petit peu.
Alors, ces deux modifications constituent,
d'abord et avant tout, des demandes prioritaires, je vous dirais, du Commissaire au lobbyisme, Me Jean-François
Routhier. Ce sont des modifications qui ont déjà fait partie d'un projet de loi
précédent, qui était beaucoup plus vaste
dans sa volonté de vouloir réformer le régime du lobbyisme au Québec, mais
qui étaient prioritaires pour deux raisons : elles sont urgentes parce
qu'elles vont permettre, d'ailleurs, un registre des lobbyistes plus efficace, plus performant, et des délais de prescription
plus étendus qui permettront, donc, de poursuivre les contrevenants dans
un délai meilleur.
• (12 heures) •
On doit
comprendre, sur cet aspect-là particulier, que les enquêtes en matière de
lobbyisme sont des enquêtes qui peuvent s'avérer parfois complexes pour en établir la preuve, et le délai d'un an, qui
était le délai prévu au Code de procédure pénale, était clairement
insuffisant pour permettre d'aller au bout des enquêtes.
Pour
ce qui est du transfert de la responsabilité du registre, je pense qu'un petit peu d'histoire ici pour mettre les gens en contexte sur la raison de ce transfert-là
est nécessaire. Au moment de l'adoption de la loi en 2002, la responsabilité
de tenir le Registre des lobbyistes avait
été confiée, à l'époque, à l'Officier de la publicité des droits personnels et
réels mobiliers, qui agit encore aujourd'hui à titre de conservateur du Registre des lobbyistes. Le conservateur
ayant, à l'époque, en 2002, une
expérience sur la tenue de registres, il était fort approprié à l'époque, quand
on a installé, là, le Registre des lobbyistes, de confier la gestion de
ce registre-là, effectivement, au conservateur.
Par contre,
je vous dirais que, depuis cette époque-là, le Québec fait pratiquement
cavalier seul. En effet, partout au Canada,
à l'exception de Terre-Neuve, l'ensemble des responsabilités qui concernent le
lobbyisme est confié à une seule et
même entité. Or, dès 2007, on avait déjà souligné... dans un rapport sur la mise en oeuvre
de la loi, le ministre de la Justice de l'époque avait relevé ce problème
et recommandait déjà de confier la tenue du registre au commissaire. Le commissaire avait également proposé que la
responsabilité du registre lui soit confiée dès 2008. En plus, le commissaire
mentionnait, dans son rapport de 2012,
qu'une importante mise à niveau de l'actuel Registre des lobbyistes devait être
réalisée en raison de sa désuétude technologique imminente. On parle de 2012.
De nombreux
problèmes, d'ailleurs, ont été soulignés de par sa décision prise à l'époque.
Elles ont été soulignées également,
ces problématiques-là, par les différents groupes qui ont été entendus mardi
dernier. En effet, à titre d'exemple, certaines
personnes ne savent pas à qui s'adresser concernant les modalités d'application
de la loi ou l'inscription au
registre, car plusieurs personnes
confondent le conservateur, qui est sous le ministère de la Justice, et le
commissaire au lobbying. Au sein même des offices du bureau du
conservateur, il s'avère parfois difficile de bien différencier les limites des
pouvoirs respectifs de chacun, ce qui peut
entraîner, pour les usagers du registre, un va-et-vient entre ces deux entités,
ce qui complique grandement l'expérience et
la... l'enregistrement — mon Dieu, mot simple. Finalement, le commissaire souligne que le conservateur et le commissaire assument des rôles et
poursuivent des objectifs distincts. Cela peut entraîner des situations
qui ne sont pas en parfaite cohérence.
Du même coup,
le transfert au commissaire de la responsabilité du registre prévu dans le projet de loi comporte donc plusieurs avantages qui ont été également soulevés
par plusieurs des groupes qui sont venus témoigner lors des consultations. Tout d'abord, ce transfert permet
de régler les problèmes reliés au partage des responsabilités. Ensuite, il
permet aux lobbyistes ainsi qu'aux titulaires d'une charge publique de
simplifier le processus en désignant un seul interlocuteur qui serait responsable à la fois de l'application de la
loi et du Registre des lobbyistes. Finalement et essentiellement, il permettra la mise
en place d'une nouvelle plateforme technologique pour le registre, ce qui est
une des raisons pour lesquelles le transfert
se fait avant même que le commissaire puisse nous faire part de ses suggestions
quant à la réforme de la loi sur le lobbyisme.
Je tiens d'ailleurs à rassurer l'Association québécoise
des lobbyistes, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et la Fédération des chambres de
commerce du Québec que le
commissaire, dans ce transfert, n'obtient pas de plus grands pouvoirs. Il n'a pas le pouvoir de modifier les exigences
de l'enregistrement. Il n'a qu'un pouvoir de gestion du registre et un
pouvoir de mettre en place une plateforme technologique plus conviviale, si on
veut.
D'ailleurs,
concernant la mise en place de cette nouvelle plateforme pour le registre,
c'est un élément central du transfert
au commissaire de la responsabilité. En effet, aucune mise à niveau du registre
actuel n'a été effectuée depuis sa mise
en place en 2002. Et, malgré les époques subséquentes où on a souligné le fait
que ce transfert serait approprié, aucune modernisation n'a été mise en place parce qu'on attendait toujours que
le transfert soit fait pour donner au Commissaire au lobbyisme
l'occasion de faire lui-même ses propres ajustements.
Selon le commissaire,
une nouvelle plateforme pour le registre permettrait de simplifier le processus
d'inscription, notamment en éliminant
les nombreux va-et-vient que les projets d'inscription doivent actuellement
effectuer entre les lobbyistes et le
conservateur avant qu'une inscription ne soit effectivement portée au registre.
Ce transfert de responsabilités ainsi
que la création d'une nouvelle plateforme pour le registre contribuera à
diminuer le fardeau administratif des lobbyistes. La procédure reliée à
la déclaration au Registre des lobbyistes sera facilitée, plus accessible, plus
rapide et gratuite. Vous savez, l'objectif
est de faciliter l'inscription, de faciliter l'adhésion, de faciliter la consultation. L'objectif du registre aux lobbyistes est un registre qui se veut un outil de transparence pour être sûr que les relations entre les citoyens
et les détenteurs de l'État,
les détenteurs du pouvoir et les élus soient claires pour les citoyens,
soient clarifiées. C'est l'objectif
du registre et c'est l'objectif
de vouloir mettre une plateforme beaucoup plus conviviale pour les usagers, entre autres.
Quant au délai
de prescription, Mme la Présidente, j'en ai un peu établi la raison tantôt d'entrée de jeu. Actuellement, je dois vous dire que la loi prévoit un délai de
prescription qui est le délai de prescription prévu au Code de procédure pénale dans les
circonstances, qui est un délai d'un an. Ce délai est beaucoup trop court pour
compléter les enquêtes, de façon générale,
en matière de lobbyisme. Les enquêtes débutent parfois, souvent par le biais
d'une dénonciation qui peuvent
survenir plusieurs mois après la perpétration de l'infraction, ce qui pose
déjà, d'entrée de jeu, un problème. À
l'heure actuelle, je dois dire que — c'est important de le mentionner — 60 % des manquements indiqués au
rapport d'enquête du Commissaire au
lobbyisme n'ont pas pu être poursuivis parce que dépassaient le délai de
prescription. Je pense qu'en matière
d'accès à la justice ce n'est pas ce qu'on veut favoriser. D'ailleurs, lors de
la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics,
la commission Charbonneau, le Commissaire au lobbyisme et plusieurs intervenants sont venus témoigner également pour
expliquer que ça pourrait favoriser l'application de la loi, donc le contrôle
du lobbyisme au Québec, bien que la
coercition ne soit pas toujours l'instrument privilégié. Il s'agit d'une loi de
nature pénale, donc il faut quand même lui donner les... quand elle a un outil
d'application, tel que la possibilité de déposer des constats d'infraction, encore faut-il lui donner, au Commissaire au
lobbyisme, la possibilité d'appliquer sa loi et de faire ses enquêtes de
façon adéquate.
Donc,
c'est dans ce contexte que la commission, duquel j'ai déjà fait partie à l'époque,
le Commissaire au lobbyisme lui-même
proposaient d'augmenter les délais de prescription. Je dois vous dire que cette
demande a été faite également, en matière de
délai, par le commissaire par une proposition, en 2012, qui était intitulée Proposition
de modifications à la Loi sur la
transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. Il recommandait déjà, à l'époque, de prévoir
un délai de trois ans. Alors, le
délai actuel qui est prévu est un délai de trois ans de la connaissance par le poursuivant, donc, de la connaissance par le Commissaire au lobbyisme, et d'un délai maximum de sept ans de la
perpétration de l'infraction. Ce qui fait en sorte que, si avant que quelqu'un dénonce l'infraction, il prenne un, deux ou trois
ans, le commissaire, au moment où il
prend connaissance de l'infraction, où on lui rapporte l'infraction,
a quand même trois ans pour l'enquêter, mais ça ne peut pas dépasser sept ans du moment de la
perpétration. Je dois vous dire que ça a fait l'objet de quelques commentaires en commission parlementaire lors des consultations, mais, de
façon générale, je ne pense pas me tromper et induire l'Assemblée en erreur en
disant que ça fait partie d'un large consensus et que ça tombe, je vous dirais,
sous le sens.
Donc,
dans les prochains jours, nous entamerons l'étude détaillée, et cela permettra
de revoir dans son fond le projet de
loi, projet de loi qui est une première étape à une refonte ou une réforme de
la loi sur le Commissaire au lobbyisme. Plusieurs, d'ailleurs, des commentaires qui ont été soulevés en
commission parlementaire lors des consultations étaient des commentaires, je vous dirais, de nature
préventive et prospective nous mettant en garde ou nous donnant des indications
en quoi la réforme pourrait avoir l'air.
Mais, sur le projet de loi n° 6 lui-même, je dois dire que tout le monde
était quand même assez satisfait et
enthousiaste de pouvoir, dans un avenir de moins en moins lointain, bénéficier
d'une plateforme plus conviviale et
plus moderne — plus
2019, comme dirait ma fille — pour le registre du Commissaire au
lobbyisme. Alors, merci de votre attention, Mme la Présidente.
• (12 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
ministre de la Justice. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la
députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Mme Émilise
Lessard-Therrien
Mme Lessard-Therrien :
Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'intervenir au nom de mon groupe parlementaire sur le projet de loi n° 6. Nous
en sommes donc à nous prononcer aujourd'hui quant à l'adoption du principe
de ce projet de loi. Évidemment, cela pose
la question de la définition dudit principe. Dans le cas présent, le principe
du projet de loi n° 6 est, tel
que le proclame son titre, de transférer la responsabilité du Registre des
lobbyistes au Commissaire au
lobbyisme et de suivre la recommandation de la commission Charbonneau en ce qui
a trait à l'allongement du délai de
prescription applicable à la prise d'une poursuite pénale. Notre formation
politique est en accord avec ce principe et nous allons, conséquemment,
voter en faveur à cette étape-ci du processus législatif.
Ceci
dit, quoique nous soyons en accord avec ce principe, nous allons solliciter la
collaboration du gouvernement afin de
bonifier le projet de loi. En effet, si ce projet de loi concerne
principalement un changement technique qui était demandé depuis longtemps par les utilisateurs du Registre des lobbyistes
ainsi que le suivi d'une recommandation de la commission Charbonneau, il
y a toujours place à la bonification.
Les différents
groupes qui sont venus nous présenter leurs points de vue sur ce projet de loi
en consultations particulières ont été assez
unanimes sur la désuétude technologique de l'actuel registre. Il est grand
temps, selon eux, d'en faire un outil
facile à utiliser. Il y a un enjeu de transparence et de conformité aux
exigences légales dans la réforme du registre.
En effet, l'inscription est actuellement une opération si complexe et tortueuse
que cela pourrait en décourager plus d'un et même occasionner des cas
d'infraction pour les lobbyistes.
Il y a d'ailleurs un
consensus sur le fait que le Commissaire au lobbyisme est l'instance la mieux
placée pour administrer ce registre. Ce transfert de responsabilités permettra
notamment de simplifier l'ensemble du processus d'inscription et également de n'avoir qu'un seul interlocuteur sur les
questions en lien avec les activités de lobbyisme.
En
ce qui a trait à l'allongement du délai de prescription applicable à la prise
d'une poursuite pénale à sept ans, plusieurs
groupes étaient en faveur d'une telle mesure. Nous partageons également cet
avis. Cette prolongation permettra au commissaire d'avoir plus de temps
pour ses enquêtes, et cela permettra également au Directeur des poursuites criminelles et pénales de pouvoir entreprendre les
poursuites requises. Cela évitera des situations de rejet ou d'abandon
de poursuite pour cause de prescription.
Rappelons tout de même que le registre se veut un outil de transparence et non
de surveillance. Nous considérons toutefois que l'objectif derrière ce
changement dans le délai de prescription est louable et, rappelons-le,
c'est également une recommandation de la commission Charbonneau.
Aussi,
des représentants des groupes communautaires et des organismes sans but
lucratif sont venus réitérer leur souhait que soit, une fois pour
toutes, éliminée toute ambiguïté quant à l'application de la Loi sur la
transparence et l'éthique en matière de
lobbyisme aux OSBL, dont la majorité des membres sont également des OSBL ou des
personnes qui ne représentent pas des
entreprises à but lucratif. Ces représentants mènent un combat depuis de
nombreuses années à cette fin et
désirent ne pas avoir à recommencer perpétuellement. Quoique nous ne croyons
pas que le projet de loi n° 6 soit le
bon outil pour le faire, nous considérons qu'il serait donc à propos de
réfléchir à inclure une disposition les excluant clairement des
exigences de cette loi, éventuellement.
Nous
comprenons que ce projet de loi est une première étape dans une éventuelle
réforme de la Loi sur la transparence
et l'éthique en matière de lobbyisme. D'ailleurs, nous avons appris avec grande
satisfaction que le Commissaire au
lobbyisme allait déposer prochainement un document de réflexion à cet effet.
Nous espérons que le cas des OSBL fasse partie de cette réflexion et d'une recommandation de la part du
commissaire. Ainsi, à la lumière des problématiques et enjeux soulevés, il apparaît clairement qu'il y
aura place à améliorer le projet de loi n° 6 et à clarifier
certaines dispositions.
Ceci
étant dit, tel qu'annoncé d'entrée de jeu, nous voterons en faveur du principe
du projet de loi n° 6, Mme la Présidente. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Et la prochaine intervenante sera, oui, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil :
Merci, Mme la Présidente. Alors, il me fait plaisir, à mon tour, de prendre la
parole dans le cadre du débat sur
l'adoption du principe du projet de loi n° 6, Loi transférant au
commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation de la
Commission Charbonneau concernant le délai de prescription applicable à la prise d'une poursuite pénale. Et je dois
vous dire, Mme la Présidente, je suis très contente que la ministre de la Justice ait pu déposer ce projet
de loi en début de mandat — essentiellement, on est encore en début de mandat — car, en effet, comme le confirme le
commissaire, lors de la 41e législature, il avait sondé les différents
partis politiques, qui se sont tous
déclarés en faveur du transfert du registre au Commissaire au lobbyisme et
qu'il y avait aussi urgence d'agir à
ce sujet, la révision en profondeur de la loi pouvant se faire dans un deuxième
temps. On a échangé sur cette question lors de la consultation.
Et je connais
bien l'objet de ce projet de loi, puisque j'ai eu l'occasion, à deux moments
distincts de mes fonctions gouvernementales, d'être sensibilisée à toute
cette question de l'encadrement du lobbyisme : tout d'abord, lorsque j'ai occupé les fonctions de ministre de la
Justice et Procureur général de 2008 à 2010, puisque le Registre des lobbyistes
est présentement logé au sein du ministère
de la Justice, mais aussi, plus récemment, à titre de ministre responsable de
l'Accès à l'information et de la Réforme des
Institutions démocratiques, où j'ai eu l'occasion, dans la foulée de la
nomination de M. Jean-François
Routhier au poste de commissaire, d'échanger avec le commissaire et d'apporter
ma contribution aux discussions qui ont précédé le projet de loi sous sa
forme actuelle.
Nous avons eu
l'occasion, lors des consultations, d'avoir des échanges très intéressants sur
l'enjeu fondamental de la
transparence, notamment en lien avec la légitimité des activités de lobbyisme,
et la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante a voulu nous rappeler des principes. Et je pense que c'est
important de les mentionner, même si ça
ne fait pas nécessairement partie de ce projet de loi, ça fait partie du grand
portrait quand on parle de lobbyisme, que les gens saisissent ces principes. Et c'est des principes qui sont enchâssés
dans le préambule de la loi fédérale sur le lobbyisme. Évidemment, la fédération nous demande de
réfléchir à inclure ces principes dans un éventuel projet de loi ici, et donc
je pense que les principes peuvent nourrir
nos réflexions, notamment quand viendra la réforme plus globale de la Loi sur
la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme.
Donc, pour le bénéfice des citoyens, des
collègues ici, à l'Assemblée nationale, ces grands principes sont les suivants : un, la liberté d'accès aux
institutions de l'État est une importante question d'intérêt public; deux, le
lobbyisme auprès des titulaires d'une
charge publique est une activité légitime; trois, il est souhaitable que les
titulaires d'une charge publique et le public puissent savoir qui se
livre à des activités de lobbyisme; que le système d'enregistrement des lobbyistes rémunérés ne doit pas faire obstacle à
la liberté d'accès aux institutions de l'État. Et c'est vraiment ce dernier
principe dont on traite quand on parle de transférer le registre du registraire
actuel, sous le ministère de la Justice, au commissaire.
Ce sont donc, comme je le disais, des principes qui guideront sans doute les
réflexions de la ministre et des parlementaires
lorsque viendra le temps de revoir en profondeur la Loi sur la transparence et
l'éthique en matière de lobbyisme.
Tel que
mentionné par le commissaire, le projet de loi que nous débattons aujourd'hui
ne constitue pas une réforme large de
la loi sur la transparence et l'éthique sur le lobbyisme, il s'agit plutôt d'un
projet de loi de nature technique visant essentiellement deux objets : d'une part, le transfert de la
responsabilité du Registre des lobbyistes d'un responsable qui se nomme,
et le titre vous en dit sur la complexité de la chose, l'Officier de la
publicité et des droits personnels et réels mobiliers
de la Direction des registres et de la certification du ministère de la
Justice — ça,
c'est le titre actuel — vers le Commissaire au lobbyisme — même
le titre sera simplifié, Mme la Présidente; et, d'autre part, la ministre l'a
bien mentionné, de donner suite à la recommandation de la commission
Charbonneau concernant le délai de prescription applicable à la prise d'une
poursuite pénale.
Le Registre
des lobbyistes a été créé en 2002. La technologie qui le supporte a rendu de
fiers services au fil des années,
mais elle n'a pas beaucoup évolué en 17 ans, et c'est vraiment là le grand
problème. Je pense que tous les citoyens qui nous écoutent sont à même de constater à quel point tout ce qui est
technologique a bien changé autour de nous pendant cette période. D'ailleurs, un collègue de mon
bureau m'a dit que... et puis, imaginez, Mme la Présidente, ça date de 2002,
c'était cinq ans avant la sortie du tout
premier iPhone. Alors, ça vous dit à quel point la technologie évolue et à quel
point, donc, ce registre a besoin
d'être modernisé. On comprend donc bien que la modernisation technologique du
registre est plus que nécessaire.
• (12 h 20) •
Dans son
mémoire, le Commissaire au lobbyisme mentionne d'ailleurs que le système est,
je cite, «un système obsolète qui ne
répond ni aux besoins des citoyens ou de la clientèle ni à ceux du commissaire
dans l'accomplissement de son mandat de surveillance». Alors, les trois
clientèles, si on veut, ne sont pas bien desservies par ce registre. Il est urgent d'agir. Alors, d'un côté, l'environnement
technologique du registre rend difficile sa consultation par les citoyens,
puisque la présentation d'informations n'est
pas du tout conviviale. Cela nuit, comme le mentionnait le commissaire, au
mandat premier du registre, soit d'informer la population. De l'autre côté, la
désuétude du registre rend son utilisation ardue pour les lobbyistes, comme cela nous a été démontré par divers
exemples dans le cadre des consultations. Le simple changement de nom d'un ministère, d'ailleurs, il y
a plusieurs intervenants qui nous l'ont dit, et vous savez qu'on change de nom avec un changement de gouvernement, mais on
change de nom s'il y a des changements même à l'intérieur d'un
gouvernement, eh bien, ça cause beaucoup de maux de tête pour les lobbyistes
parce qu'ils doivent changer toute l'inscription.
Il y en a qui ont plusieurs mandats, toutes ces inscriptions qui doivent être
changées. On pensait que ça pouvait être quelque chose de bien simple, mais
imaginez-vous, juste un changement comme ça, à quel point ça crée des problèmes
pour les lobbyistes. Donc, une modernisation
technologique du Registre des lobbyistes est la bienvenue, surtout si elle
donne vie aux principes mis de l'avant par
le commissaire pour guider celle-ci, et je les nomme : la simplicité, la
clarté, la pertinence et l'efficacité, le tout afin d'atteindre une
transparence optimale.
Le transfert
du Registre des lobbyistes viendra aussi régler un second irritant, cette
fois-ci découlant d'un enjeu lié au partage des responsabilités
administratives. Lors de sa création, du Registre des lobbyistes, dans la
foulée de l'adoption de la Loi sur la
transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, en 2002, il a été décidé que
celui-ci serait placé sous la
juridiction du ministère de la Justice afin de mettre sur pied rapidement le
registre. C'était ça, l'objectif à l'époque,
il fallait agir rapidement. Alors, ce faisant, le Commissaire au lobbyisme, qui
est responsable de l'application de
la loi, s'est retrouvé en quelque sorte éloigné de la gestion du registre, qui
est l'outil principal de son travail de vérification et de contrôle. Le commissaire, dans son mémoire,
fait d'ailleurs ressortir les problématiques découlant de cette confusion
et partage de responsabilités, qu'il
qualifie poliment de non optimales, et qui a entraîné beaucoup de confusion au
fil des ans, car la clientèle ne sait
pas à qui s'adresser lorsqu'ils ont des questions d'information et
d'interprétation de la loi et des modalités de fonctionnement du
registre.
D'ailleurs,
j'aimerais souligner que le Québec, tout comme Terre-Neuve-et-Labrador, nous
sommes les seuls endroits au Canada
où le Registre des lobbyistes n'est pas sous la responsabilité directe du
commissaire. C'est évident qu'il est bien temps de corriger cette
situation et de moderniser notre approche.
Les consultations particulières ont aussi permis
de confirmer qu'il n'est pas de l'intention de la ministre ni du commissaire
que le pouvoir réglementaire relié à la Loi sur la transparence et l'éthique en
matière de lobbyisme soit transféré du
gouvernement vers le commissaire. D'ailleurs, la ministre de la Justice a bien
voulu rassurer les intervenants qui
sont venus en commission parlementaire : non, la réglementation sera
toujours sous la gouverne et entre les mains du gouvernement.
Mme la
Présidente, le projet de loi vient aussi donner suite à une recommandation de
la commission Charbonneau qui touche
le rehaussement du délai de prescription pour une infraction à la Loi sur la
transparence et l'éthique en matière de
lobbyisme. Actuellement, toute poursuite pénale envisageable à l'encontre d'un
manquement aux dispositions de la loi se
prescrit par un an à compter de la date où l'infraction est perpétrée. Il
s'agit d'un délai que le commissaire qualifie de trop court, puisque les infractions ne sont souvent découvertes que
plusieurs mois après avoir été commises. Les enquêtes ne pouvant être réalisées
à si brève échéance, cela aurait pour effet de neutraliser le mécanisme de
sanction pénale prévu à la loi. Et,
de son propre aveu, le commissaire doit donc, malgré lui, renoncer à plusieurs
poursuites pénales à l'encontre de
lobbyistes ayant contrevenu à la loi chaque année, et ce, parce que le délai de
prescription est écoulé. C'est donc pourquoi la commission Charbonneau a exprimé, dans sa recommandation 37, la
nécessité de rehausser le délai de prescription de trois ans à partir de l'infraction, sans dépasser
un délai total de plus de sept ans depuis la perpétration de l'infraction, et
c'est exactement ce qui est repris dans le projet de loi.
Alors, en
conclusion, Mme la Présidente, permettez-moi de rappeler que le transfert du
Registre des lobbyistes du ministère de la Justice vers le commissaire
est un changement qui est attendu et qui pave la voie à de nécessaires
améliorations informatiques qui seront réalisées dans les prochaines années. De
même, l'augmentation du délai de prescription
pénale d'un an à trois ans est à même de permettre une meilleure application de
la loi, ce qui est aussi bénéfique. C'est donc pourquoi, Mme la
Présidente, nous voterons avec plaisir en faveur du principe de ce projet de
loi. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Notre-Dame-de-Grâce. Et, pour la prochaine intervention, je
vais céder la parole à M. le député de Rimouski.
M. Harold LeBel
M.
LeBel : Merci, Mme la
Présidente. Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de problèmes avec ce projet de
loi là. Je pense qu'il y a d'autres
ministres qui seraient jaloux de l'autre côté, qui aimeraient que ça aille
aussi bien pour leurs projets de loi.
On parle, nécessairement, de la Loi transférant au commissaire au lobbyisme la
responsabilité du registre des
lobbyistes et donnant suite à la recommandation de la Commission Charbonneau
concernant le délai de prescription applicable à la prise d'une
poursuite pénale. Nous comprenons que le projet de loi n° 6 n'est pas une
copie du défunt projet de loi n° 56 de
la législature précédente et qu'il est moins ambitieux, mais nous y voyons,
dans l'équipe du Parti québécois, une modification urgente et attendue
par le milieu et par le Commissaire à l'éthique pour répondre à une
problématique très précise.
Le registre
actuel remonte à un autre siècle. Il est manifeste qu'il devait être modernisé,
compte tenu de l'évolution des
technologies. Et les gens qui sont venus nous parler en commission parlementaire, c'était assez clair, là. Comme nous disait ma collègue, juste le changement d'un nom
d'un ministère, il fallait tout recommencer l'inscription. Il y avait des
problèmes assez majeurs pour entretenir ce
registre-là. Mais j'ai eu quand même des questionnements, là. Ce qu'on nous
disait, c'est... ça aurait été assez simple, là, que ceux qui sont déjà
inscrits au registre puissent ne pas recommencer toute leur inscription avec un nouveau registre, avec des nouvelles
technologies, et ce n'est pas clair que ça pourra se faire comme ça. Il y aura beaucoup... Il faudra probablement tout recommencer, et il me semble
qu'on aurait pu trouver des solutions
pour que ce transfert de nouvelle technologie puisse se faire avec le moins de
problèmes possible pour les gens pour
réinscrire. Il me semble qu'on est assez avancés dans les nouvelles
technologies pour réussir ça, et c'est un questionnement que nous avions, en espérant que le nouveau registre
vienne s'introduire d'une façon plus facile, sans trop en demander aux
gens qui s'inscrivent.
Le projet de loi, aussi,
permet une certaine flexibilité au Commissaire à l'éthique pour qu'il puisse
définir les modalités du registre et les
modifier si l'évolution des technologies et/ou des pratiques devait le
justifier. Là-dessus aussi, les
modalités présentées par le commissaire, certains auraient aimé qu'on puisse en
discuter ensemble, que ces modalités-là soient plus déterminées par la ministre, par le gouvernement lui-même,
qu'en laissant au commissaire, il était un peu juge et partie. Bon, est-ce
qu'on peut faire autrement? Moi, ce que j'invite, c'est le commissaire à être
très transparent quand il va nous déposer ses modalités pour qu'on
puisse en discuter avec lui.
On a espoir aussi qu'il ne faudra pas encore 15
ans pour moderniser le registre à l'avenir, si de nouvelles modifications s'avéraient nécessaires. Et là-dessus,
pour avoir participé aux réunions du Bureau de l'Assemblée nationale depuis longtemps, il faut comprendre que le
Commissaire au lobbyisme vient présenter ses besoins au Bureau de l'Assemblée.
Ce que j'espère, c'est que nous allons
pouvoir répondre aux demandes du commissaire pour s'assurer qu'il puisse faire
son travail, et moderniser ce registre, et
moderniser ses façons de faire pour qu'on puisse... pour que ça soit plus utile
puis plus facile pour tout le monde de s'inscrire au Registre des
lobbyistes.
Nous croyons
aussi que de placer la tenue du Registre des lobbyistes sous la responsabilité
du Commissaire au lobbyisme permettra
de s'assurer d'une plus grande adéquation entre les besoins des praticiens du
lobbyisme et de l'équipe du
commissaire. On a vu, là, qu'il y a beaucoup de... depuis une quinzaine
d'années, ils ont appris à se connaître, il y a beaucoup d'échanges,
mais qu'il y a encore beaucoup de choses à améliorer, et on espère que tout ça
va faciliter les échanges entre ces gens-là
pour s'assurer que le registre soit plus pratique, s'assurer qu'il y a un
meilleur fonctionnement puis que la gestion du registre lui-même... pour
en assurer une meilleure efficacité.
Nous saluons
le passage du délai de prescription pour les poursuites pénales à trois ans,
comme le recommandait le rapport de
la commission Charbonneau. Ça, c'est très, très, très important. Nous gardons
aussi à l'esprit que le commissaire et
la ministre travaillent sur une réforme et une modernisation plus en profondeur
de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière du lobbyisme. Nous attendons avec impatience le constat et
les propositions du commissaire à cet effet, et que ça soit
prochainement pour nous mettre au travail.
• (12 h 30) •
Il y a
beaucoup d'éléments là-dedans qui, moi, m'interpellent. Vous connaissez mes
dossiers comme porte-parole. Je suis le porte-parole dans le dossier de
la pauvreté, l'habitation sociale, l'action communautaire, et il y a beaucoup d'inquiétudes dans les groupes communautaires sur
une éventuelle obligation de s'inscrire au Registre des lobbyistes. Vous savez, le mouvement, c'est le mouvement
populaire, le mouvement communautaire, c'est un mouvement qui s'organise pour améliorer les situations de vie,
améliorer la qualité de vie des Québécois. Je pense, entre autres, à l'ensemble
du mouvement qui travaille par rapport à
l'environnement, à la protection de l'environnement. Tout ce que je veux, c'est
que, dans une éventuelle discussion sur un
registre des lobbyistes, il faudra s'assurer que cette mobilisation citoyenne
ne soit pas trop encadrée. Il faut laisser
la place à cette mobilisation citoyenne. Il faut laisser la place à la
mobilisation des gens qui veulent
changer leur milieu de vie sans les impliquer et sans les embarquer dans un cadre
qui pourrait être étouffant. Moi, ça
m'inquiète beaucoup. J'en rencontre beaucoup, des gens qui s'occupent
d'environnement dans mon coin de pays, j'en
rencontre régulièrement, et je ne pourrais pas comprendre que je dois les voir
comme des lobbyistes, parce que je les vois
comme des citoyens mobilisés qui veulent améliorer leurs conditions de vie. Je
pense qu'il y aura des jugements à se donner
ou des cadres à se donner là-dessus. C'est sûr que, si je parle de Greenpeace,
là on parle d'un autre niveau, mais est-ce
qu'on est capables... être plus prudents quand on va arriver dans ces
discussions-là? Ça inquiète beaucoup les groupes communautaires, les groupes populaires, les mobilisations de citoyens et
citoyennes. Ça les inquiète depuis des mois et des mois. Ce projet de loi là ne
vient pas changer la situation, mais on sait que ça va venir un jour et on a
hâte de voir les propositions pour
pouvoir mieux... en tout cas, mieux encadrer puis faire porter le message de
ces gens-là qui, sur le terrain, se mobilisent jour après jour pour
améliorer les conditions de vie des personnes ou de leur environnement.
Ça fait que, bref, c'est un projet de loi qui
s'est bien fait. On a vu, les gens qui sont venus nous rencontrer, la majorité... bien, la totalité sont plutôt
favorables à l'adoption du projet de loi. On a entendu beaucoup de commentaires
sur... des critiques par rapport au registre actuel. Ce qu'on voudrait, c'est
que le nouveau registre va répondre à ces commentaires-là,
que les gens vont pouvoir y travailler; entre autres, quand je parle des
modalités que le commissaire va mettre en place, qu'on pourra, à travers
ces modalités-là, simplifier tout le registre.
Et, bref, on
va avancer rapidement dans l'adoption. Et on est, bien entendu, d'accord avec
l'adoption du principe du projet de loi. Merci. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de
Rimouski. Et je suis prête à reconnaître le prochain intervenant. M. le
député de LaFontaine.
M.
Marc Tanguay
M. Tanguay : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Et je suis toujours heureux de constater que mon fan est présent aujourd'hui et fait en sorte de garder le
cap, maintenir le fort. Puisse-t-il être seul, Mme la Présidente, mon collègue
de Montmorency sera toujours là pour
m'épauler, et je le salue et je le remercie très chaleureusement. Et c'est
réciproque, Mme la Présidente, c'est tout à fait réciproque.
Alors,
aujourd'hui, intervention sur le projet de loi n° 6.
Quand même beaucoup de choses à dire sur un projet de loi qui a fait... Le projet de loi n° 6, là, Mme la Présidente, est le résultat d'un cheminement collectif de
mise à niveau de notre loi sur le
lobbyisme, de mise à niveau de notre façon de la faire vivre via le registre
auquel doivent s'inscrire, évidemment,
les trois types de lobbyistes, mais on y reviendra un peu plus tard, et faire
en sorte que nous pouvons aujourd'hui, comme
société... Et nous sommes... D'entrée de jeu, ça a été évoqué par ma collègue
de Notre-Dame-de-Grâce, nous allons être, de l'opposition officielle, en accord sur le
projet de loi n° 6, on va voter pour, évidemment, le principe. Il y
aura des amendements, il y aura une
étape d'article par article, parce que nous avons fait le travail
collectivement, là, les membres de la Commission des institutions, nous
avons fait le travail et nous avons entendu en Chambre des représentants qui
ont à vivre à tous les jours avec la loi, ses impératifs. Et comment faire en
sorte, oui, de mieux faire, mais également d'assurer
un encadrement qui soit quand même efficace, qui atteigne les objectifs de la
loi, qui est de faire en sorte que cette
activité soit encadrée, soit transparente? Mais également, et vous allez le
voir dans mon intervention, il y a d'autres impératifs.
J'aurai
l'occasion de revenir sur la notion, entre autres, de confidentialité, parce
qu'il arrive des fois qu'un projet, un
projet, peu importe sa nature, ça pourrait être un projet immobilier
d'envergure, nécessite un changement de règlement — parce
que la loi sur le lobbyisme, ce n'est pas uniquement au niveau provincial, mais
c'est au niveau des municipalités — un changement au règlement d'urbanisme, un
projet immobilier, Mme la Présidente. Et là c'est des gros investissements. Est-ce que le groupe va acheter
ou pas le terrain? Est-ce qu'ils vont agrandir davantage le terrain? Est-ce
qu'il y a un changement de zonage? Ils
peuvent faire des représentations auprès de l'autorité municipale, mais ils ne
voudront pas être... Parce que la loi
fait en sorte que, dans les 30 jours d'une activité de lobbyisme, vous
engagez un lobbyiste, qui fait les
représentations, puis c'est tout à fait correct, transparent, vis-à-vis les
élus municipaux, mais là vous avez l'obligation, 30 jours après, maximum, de vous inscrire puis de dire : Bien,
nous avons été rencontrer tel élu municipal, nous voulons développer tel secteur, nous voulons acheter les
terrains, puis tout ça. Donc, il y a une notion de confidentialité. La demande
peut être faite au Commissaire au lobbyisme, il la juge au cas par cas, mais donc
faire en sorte...
Et ça,
c'était une application tangible, Mme la Présidente, lorsque l'on parle d'un
équilibre de l'exercice, de la fonction.
Le lobbyisme, l'expression du lobbyisme, ça vient, Mme la Présidente, de
Washington, un hôtel qui est près de
la Maison-Blanche, où, là, on disait «faire du lobbyisme» parce qu'ils
rencontraient les élus américains dans le hall d'entrée, dans le «lobby», ils rencontraient les membres du congrès, les
sénateurs, les représentants, c'était au XIXe siècle, et là on disait : Ils font du lobbyisme. Ils étaient dans le «lobby», et c'était l'endroit
pour les rencontrer. Alors, Mme la
Présidente, ça a été encadré
par des législations, par des lois, par des réglementations, par des
directives, donc, chez nos voisins américains.
Et ici, au Québec, au Canada, nous avons eu l'occasion de faire cet encadrement. Mais c'est toujours intéressant
de voir l'étymologie, l'origine du terme «lobbyisme». C'est de là que ça vient.
Et ce qui
nous a été dit, et ça, elle l'a dit très fermement, Martine
Hébert, qui représentait la
Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante, Martine Hébert est venue nous dire : N'oubliez pas une
chose, là — puis
elle voulait même qu'on modifie la
loi sur le lobbyisme pour qu'on le mette dans le préambule puis dans
l'article 1 — le
lobbyisme est un droit. Le lobbyisme,
là, ce n'est pas un mal nécessaire, qu'on donne une permission, puis, si c'est
correct, vous allez le faire, mais on
va vous surveiller, puis au départ on vous regarde croche un peu. Non, non,
non, c'est un droit, Mme la Présidente.
C'est un droit parce que l'on ne peut pas préjuger des représentations. On ne
peut pas dire au départ : Bien, celles
et ceux qui vont venir faire des représentations aux élus ou aux décideurs,
provincial, municipal, dans le cas de la loi qui nous préoccupe, bien, eux autres, de facto, d'entrée de jeu, c'est
suspect, c'est louche. Qu'est-ce qu'ils ont d'affaire à aller parler aux élus? Qu'est-ce qu'ils ont
d'affaire à essayer de changer un règlement, changer une loi? Et là il y a
toutes les définitions. Alors, ça,
Mme la Présidente, c'est un droit fondamental, et on ne peut pas préjuger de
cette activité en disant : Bien,
c'est un mal nécessaire, on ne peut pas l'interdire, on va l'encadrer. Non,
non, non, c'est un droit fondamental.
Et le plus bel
exemple, c'est notre collègue de Rimouski qui est venu exprimer la
préoccupation quant aux organismes
sans but lucratif. Il y a eu, Mme la Présidente, un débat, j'aurai l'occasion
d'y revenir, notamment lors du dépôt
du ministre, à l'époque, responsable, le projet de loi n° 56, où, là, on
disait : Bien, il y aurait peut-être lieu — puis, je veux dire, c'était de bonne foi, c'était un débat qui faisait suite à
certaines études préalables — on devrait peut-être... Puis le projet de loi n° 56, qui n'a pas été
adopté sous la 41e, disait : Bien, est-ce qu'on peut encadrer d'une
certaine façon les organismes sans
but lucratif? Et on a reçu ici, en commission parlementaire, Mme la Présidente...
Le projet de loi ne vise pas à
changer la clientèle, la définition, à qui s'applique la loi sur le lobbyisme.
Est-ce que ça s'applique aux organismes sans but lucratif ou juste ceux qui sont visés présentement? La loi ne
vise pas ça. Mais, à titre de frappe préventive, sans référer à la doctrine Bush, «Bush Doctrine», la
frappe préventive, mais, à titre de frappe préventive... Puis ils ont bien
raison parce que ce n'est pas anodin. Nous
avons entendu la Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles, qui, eux, très
clairement, puis dans leur langage très direct, franc, nous ont dit... deux
représentantes nous ont dit
carrément : Faites attention. Et nous avons en annexe de leur mémoire, Mme
la Présidente, puis je fais écho de ce
que vient de dire mon collègue de Rimouski... nous avons une liste de
1 105 signataires. En plus des 425 signataires individuels, les 139 organismes nationaux
signataires. Et là on a la liste, ça passe du À coeur d'homme, Réseau d'aide
aux hommes pour une société sans violence, à Association des gestionnaires des
établissements de santé et services sociaux,
à Coalition Solidarité Santé, Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi.
On parle ici de la Fédération des
associations de familles du Québec. Alors, ces deux représentantes-là, dans le
contexte du projet de loi n° 6, sont venues nous dire : Faites attention, faites attention de ne pas tomber...
Parce que ça pourrait être un amendement. Dans le contexte du débat article par article, on peut déposer des
amendements. Là, on n'ouvrira pas ici un débat éventuel qu'il pourrait y avoir sur la recevabilité d'un amendement qui
viserait d'aller au-delà du principe du projet de loi n° 6, qui est
essentiellement deux choses, qui est de modifier le délai de prescription,
de un, et, de deux, qui est de transférer la responsabilité
du registre du directeur du RDPRM, le registre des droits personnels mobiliers,
RDPRM, qui est maintenant en charge,
et qui gère, et qui a en ses lieux le registre des lobbyistes... bien, que ça,
ce soit transféré au Commissaire au lobbyisme. Donc, la loi a deux
objectifs : transférer ce registre-là du RDPRM au Commissaire au
lobbyisme, sous sa responsabilité, qui est notre expert nommé aux deux tiers de
l'Assemblée nationale — je
pense que, ces jours-ci, Mme la Présidente, à moins que je me trompe, mais on
parle beaucoup des nominations aux deux tiers, je referme la parenthèse — c'est un premier objectif, puis le deuxième
objectif, c'est de modifier le délai de prescription. Alors, elles sont venues nous dire, ces deux représentantes, de ne pas tomber, à ce stade-ci, dans... et de ne pas ouvrir ce
débat sur est-ce qu'on élargit ou pas et comment, le cas échéant,
l'application de la loi sur le Commissaire
au lobbyisme, la loi sur la transparence et le lobbyisme, au Québec, et
elles sont venues nous dire : Ce n'est pas anodin.
• (12 h 40) •
Pourquoi
je réfère à ça? Parce que je voulais
faire écho aux propos de mon collègue de Rimouski. Ça a été le dernier groupe, le dernier mais non le moindre, Mme la Présidente. Et, encore une fois, 425 signatures individuelles, 139 organismes
nationaux. Ils sont venus dire : N'allez pas jouer là-dedans.
À
cette demande, nous avons entendu la ministre de la
Justice, qui est responsable du projet de loi n° 6, dire que ce n'était pas son intention. Je la paraphrase, mais je pense qu'elle conviendra avec moi que je ne lui
impute pas des propos qu'elle n'a pas
prononcés. Ce ne sera pas l'intention du gouvernement d'ouvrir ce débat. Et,
nous, de notre côté, Mme la Présidente,
ce ne sera pas notre intention non plus de déposer un amendement qui ferait en
sorte d'attaquer cette question-là.
Par
contre, ce qui a été dit, par contre, ce qui a été dit, c'est que, dans un
deuxième temps, la ministre de la Justice était en réflexion, et puis
elle me corrigera si je la cite mal ou si je résume mal son propos, mais que
c'était dans un moment ultérieur que, le cas échéant... et j'ai cru comprendre,
puis elle pourra nous le confirmer, qu'il y avait une réflexion en cours à ce sujet-là, j'ai cru comprendre, donc, qu'il y
aura lieu, sous la 42e, de se poser la question, comme le faisait de
façon tout à fait justifiée le projet de loi n° 56, comme il le faisait,
de se poser la question, est-ce qu'on élargit
ou pas, et à qui, et comment, et quand, l'obligation de s'enregistrer, la
définition de «lobbyisme», et de faire en sorte que les organismes sans but non lucratif soient assujettis à cette
loi. Donc, je referme la parenthèse, Mme la Présidente. Mais ce n'est
pas anodin.
Et
ça, ça nécessitait, Mme la Présidente... cet exemple-là était nécessaire en ce
qu'il vient illustrer les propos de Martine
Hébert, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Quand Martine
Hébert, Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante, vient nous dire, Mme la Présidente : Le lobbyisme, là, c'est
un droit, c'est un droit, et on mériterait peut-être... Et là on pourrait l'ajouter comme amendement dans la loi.
Ça sert à ça, les consultations. Elle dit : Vous pouvez amender le préambule, vous pouvez même le mettre
dans l'article 1. Moi, je vous dirais, Mme la Présidente, si on peut,
mettons-le dans l'article 1, parce que
le préambule... Quant à l'interprétation des lois, les préambules, les
tribunaux, ce n'est pas là qu'ils
vont aller pour les... comme réflexe quant à interpréter et appliquer une loi.
Le préambule, ça fait partie de la
loi, certes, mais les règles impératives, quand le législateur parle, c'est
dans les articles. Alors, moi, je lui dirais, on aura l'occasion de faire le débat avec Mme la ministre, mais que nous
avons peut-être un amendement à l'article 1 qui viendrait
enchâsser, qui viendrait déclarer que c'est un droit.
Et
ça, Mme la Présidente, ça a été dit par la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante, mais ça a également été souligné par les autres intervenants : l'Association québécoise
des lobbyistes, la Fédération des chambres de commerce du Québec, l'Alliance des cabinets de relations
publiques du Québec, le Conseil du patronat du Québec, la table, évidemment, des organismes communautaires. Eux,
j'en ai parlé. Mais ces organismes que je viens de nommer, en leurs mots, le message qui était lancé, c'est que c'est
important de reconnaître ce principe-là, article 1, parce que, de tout le
reste, quand on dit, nous, comme
législateurs, dans le travail qu'on va faire, quand les acteurs, le Commissaire
au lobbyisme, qui est mandaté par nous aux deux tiers pour gérer la loi
et qui, si d'aventure le projet de loi n° 6, auquel nous allons ajouter notre voix pour le faire adopter, est
adopté... bien, à ce moment-là, ce n'est pas anodin que tous ces acteurs-là
aient comme prémisse de basse :
C'est un droit, parce que du reste découlera l'application, la coopération, la
collaboration du Commissaire au
lobbyisme, des gestionnaires du Registre des lobbyistes et des lobbyistes, qui
se retrouvent en trois catégories, Mme la Présidente, parce qu'ils ont
un rôle à jouer, et le rôle qu'ils ont à jouer est fondamental.
Il
y a trois types de lobbyistes, Mme la Présidente, et c'est défini dans la loi.
Le premier titre... Il y a, au Québec, là,
grosso modo 14 000 lobbyistes, au Québec. Ah!
14 000 lobbyistes. Il y en a trois types. Combien les trois types regroupent-ils de lobbyistes? La première
catégorie, les lobbyistes d'entreprise, des gens salariés au sein des
entreprises qui s'enregistrent au
sein... qui s'enregistrent auprès du Commissaire au lobbyisme à titre de
lobbyistes, des lobbyistes d'entreprise, sur les 14 000, au
Québec — sans
être trop précis, là, c'est 13 759, on arrondit à 14 000 — des
14 000 il y en a 9 309 qui sont
lobbyistes d'entreprise. Donc, déjà là, ça nous donne un peu... C'est des
entreprises. Ce sont des entreprises...
il peut y avoir des entreprises d'économie sociale, il peut y avoir des
multinationales, il y a tout type... des PME, des grosses entreprises, tout type d'entreprise. Il y en a près de
10 000. C'est 9 309 lobbyistes d'entreprise, qui, eux, s'inscrivent parce que légitimement ils
disent : Bien, nous, nous, on participe de la réussite économique du
Québec puis on est des corporations, nous sommes des personnes morales, nous
représentons des personnes morales qui voulons agir en respectant la loi, on s'inscrit. Puis nous, bien, on a des
projets de développement, on veut éveiller le gouvernement par rapport à tel, tel, tel aspect de
l'application d'une loi ou d'un règlement ou on veut seulement connaître les
informations quant à l'octroi d'une subvention, d'un permis, et ainsi de
suite.
Ce
sont, je vous dirais, Mme la Présidente, ce sont, pour le gouvernement, pour
l'Assemblée nationale, qui nomme aux
deux tiers le Commissaire au lobbyisme, mais, pour le gouvernement, ce sont...
il faut les voir comme des partenaires, des partenaires, parce que le gouvernement n'agira jamais en vase clos
et dire : Bien, ce qui se passe sur le terrain, moi, là, ne venez pas m'en parler, je ne veux pas le
savoir. Le gouvernement se veut être pertinent. Et ce que je dis dans mon
comté : La pertinence naît de la proximité. Vous ne pouvez pas être
pertinent si vous n'êtes pas proche pas du monde. La proximité vous assure d'être pertinent. Et, en
ce sens-là, ces lobbyistes, 9 309 sur les près de 14 000 qui
représentent les entreprises, doivent pouvoir compter sur une loi qui
reconnaît leurs droits et qui encadre, oui, efficacement leurs représentations, mais qui ne les voit pas comme
étant des empêcheurs de danser en rond, ou des proposeurs de troubles, ou des gens qui pratiquent un aspect de la
profession qui est peu enviable ou recommandable. Non, ils ont un rôle important
à jouer. Donc, première catégorie, lobbyistes d'entreprise, 9 309.
Deuxième
catégorie, lobbyisme d'organisation, lobbyisme d'organisation au compte
d'associations, de certains regroupements
à but non lucratif qui ont dit : Nous, on va s'inscrire au registre du
lobbyisme et on va faire part de nos revendications, de nos idées, de nos propositions.
De ça se nourrit les 125 élus de l'Assemblée nationale mais au premier
titre, je vous dirais, le gouvernement
provincial du Québec, le gouvernement du Québec, et également les élus
municipaux, et la fonction publique,
municipale et provinciale, qui gravite autour des élus. Ça, ces organismes-là,
ont voix au chapitre.
Et ce que certains pourraient dire les
lobbyistes lobbyistes, là, les professionnels du lobbyisme, les lobbyistes lobbyistes, c'est 6 %, c'est 6 % du
13 759, 6 % sont des lobbyistes-conseils, sont des
lobbyistes-conseils. C'est un petit peu
plus de... un peu moins de 800 personnes, 770 personnes. Alors, vous
voyez, une fois qu'on a dit ça, là, Mme la Présidente, là, on touche aux entreprises, on touche aux
organismes puis, oui, les lobbyistes-conseils, mais, sur le lot des
14 000, ils sont 6 %.
Alors, quand
on dit : On va faire en sorte d'adopter un projet de loi, le projet de loi
n° 6... Et nous en sommes, nous allons
voter en faveur du projet de loi n° 6. Quand on dit, on vient dire... on
vient faire deux choses. Puis, avant d'y aller, Mme la Présidente, c'est
important de regarder l'historique, d'où on vient.
En mai 2012,
le Commissaire au lobbyisme a déposé un rapport intitulé Propositions de
modifications à la Loi sur la
transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. Ça, c'est en mai 2010. Ce rapport recommandait
une révision complète de la loi et proposait un projet de loi visant à
remplacer la loi actuelle. Donc, mai 2012, on commence déjà à en parler, Mme la
Présidente, et on voulait une refonte complète de la loi sur le lobbyisme,
d'où, évidemment, le gouvernement de l'époque,
mai 2012, dépôt du rapport. On a eu les élections en septembre 2012,
18 mois du Parti québécois. C'est
un fait, il n'y a pas de partisanerie. Après ça, 2014, de mémoire, c'est en
avril, mars ou avril 2014, avril 2014... Et je remercie mon collègue qui a été ministre des Finances sous la 41e et qui
se rappelle de ce grand jour pour le Québec, jour de l'élection d'un
gouvernement...
Une voix : ...
• (12 h 50) •
M. Tanguay :
Le 7 avril? 7 avril 2014. Mais fermons la parenthèse, parce que je ne
suis pas sûr que l'on pourrait faire adopter une motion unanime saluant ce
grand jour ici aujourd'hui. Mais, donc, le 12 juin 2015, le gouvernement,
41e législature, prend acte de ça, dépose le projet de loi n° 56, Loi
sur la transparence en matière de lobbyisme.
Et là on
s'est rendu compte, Mme la Présidente, puis je vais le dire comme ça, les gens
à la maison vont comprendre, on s'est
rendu compte que... Puis c'était à la suggestion, mai 2012, Commissaire au
lobbyisme, il dit : Faites donc une refonte complète. On a embarqué là-dedans, on a pris le temps de
consulter. Il y avait eu des préconsultations, et tout ça. On dépose un projet de loi qui était costaud. Et
là on s'est rendu compte qu'entre autres on venait toucher à la définition,
à l'application du lobbyisme, puis là on pouvait, oui, aller
toucher les OSBL, les organismes sans but lucratif. Là, on s'est rendu compte que peut-être, socialement, dans
une question comme ça, qui trop embrasse mal étreint. On s'est
rendu compte que, oui, il fallait modifier
la prescription, puis c'était prévu, oui, il fallait améliorer nos façons de
faire quant à la tenue du registre,
c'était prévu, mais pas juste ça, il
y avait l'assujettissement, oui, j'en ai parlé, des OBNL — je
dis encore les OSBL, mais c'est les OBNL, peut-être que je trahis mon âge, je ne sais pas — l'enregistrement
des activités du lobbyisme avant la
tenue de celles-ci, l'obligation de produire un bilan trimestriel, une
obligation pour les titulaires d'une charge publique ainsi que le
transfert du registre, et ainsi de suite.
Correction de
ma part : On ne parlait pas, à ce moment-là, on me corrigera si j'ai tort,
mais de délai de prescription. On ne
parlait pas de délai de prescription pourquoi? Parce que ça, c'est juin 2015.
Qu'est-ce qui s'est passé le 15 novembre 2015? Un rapport, un rapport qui a fait couler un peu d'encre, qui
s'appelle le rapport de la commission Charbonneau, et qui demandait, et
j'ai les extraits du rapport, que l'on vienne modifier le délai de
prescription.
Là, je vous
passe, Mme la Présidente, très rapidement ce qui a été fait par la suite parce
que, là, dépôt du projet de loi
n° 56, 12 juin 2015, à la suite du dépôt du projet de loi les OBNL
étaient inquiets. Et beaucoup d'OBNL auraient été... pour ne pas dire tous les OBNL auraient été
assimilés à des lobbyistes, alors qu'ils visaient à préserver et défendre des
biens publics. Là, il y a eu tout un débat.
Puis on n'a pas fait, à l'époque, comme gouvernement, Mme la Présidente, de
dire : Nous, on passe le bulldozer puis
on va là-dessus, parce qu'on fait écho de ce que le Commissaire au lobbyisme a
dit, puis on avait beaucoup consulté,
et puis là le projet de loi n° 56 est là, les oppositions, prenez-le,
prenez-le pas. On a écouté et on a
fait en sorte de mettre de côté le projet de loi n° 56, et il y a eu
d'autres initiatives par la suite. Et je sais que ma collègue qui a pris la parole deux intervenants
avant moi, de Notre-Dame-de-Grâce, avait également gravité autour de ces
questions-là dans ses fonctions, qui sont fondamentales.
Bref, juin
2015 : dépôt du projet de loi n° 56. Novembre 2015 : commission
Charbonneau. Que dit la commission Charbonneau?
À la recommandation 37 de la commission Charbonneau, on vient dire :
Ce serait important de modifier le
délai de prescription. Pourquoi? La loi, telle que rédigée, dit que, lorsqu'il
y a des infractions... Exemple, vous allez voir un élu pour un projet domiciliaire puis vous n'êtes pas enregistré au
registre du lobbyisme, bien là, vous êtes en infraction en vertu de la loi. Vous devez soit faire affaire
avec un lobbyiste-conseil ou vous, vous inscrire à titre de lobbyiste, si vous
êtes au sein d'une entreprise ou d'une
organisation. Vous devez entrer dans l'une des trois cases et vous inscrire en
ce sens-là. Si vous ne le faites pas,
puis que vous ne le faites pas dans les 30 jours de l'intervention que
vous avez faite, vous êtes en infraction.
Puis, la Loi
sur la transparence, bien, on s'est donné une loi avec des dents. C'est ça
qu'on veut, nous, les élus, on veut
que les lois aient des dents. Puis, dans d'autres contextes... On parle du
projet de loi n° 21, on se demande quelle sorte de dents elle pourra avoir puis on est préoccupés par ça, mais
c'est un autre débat, puis je vais m'arrêter là, parce que, Mme la
Présidente, on parle des droits fondamentaux. Je ferme la parenthèse. Donc,
cette loi-là crée des pénalités.
Le
commissaire... La prescription n'est pas spécifiquement dite dans la loi, n'est
pas spécifiquement précisée dans la loi. Qu'est-ce qui se passe? Bien, c'est le
Code de procédure pénale et la règle du un an qui s'applique, la règle du un an qui dit que vous devez... le délai de
prescription s'applique donc par défaut pour toutes les lois, c'est un an à
partir de la date où est perpétrée une infraction, un an à partir de la
date où est perpétrée l'infraction. Ce que la commission Charbonneau
est venue nous dire puis ce que le Commissaire au lobbyisme est venu nous
confirmer, c'est que ça, là, Mme la
Présidente, changer ça, ce n'est pas un luxe. On est rendus là. Puis on va le
faire puis on va appuyer le gouvernement. C'est l'un des deux objectifs du projet de loi n° 6. L'autre
objectif du projet de loi n° 6, c'est de transférer la responsabilité du registre, la tenue du registre, du RDPRM, au
Commissaire au lobbyisme. Deuxième objectif, on est d'accord, on va
voter pour.
On
va faire notre travail en article par article parce qu'il y a beaucoup, dans
l'application, dans la loi, là, on dit que le diable est dans les détails... il y a beaucoup une notion de délai.
Je vais vous en donner un, délai, j'y vais de mémoire. La dernière
disposition du projet de loi n° 6 fait en sorte que le projet de loi entre
en vigueur... Puis ça, je veux dire, il y a
des semaines où on voit des projets de loi qui n'ont pas ce délai d'application
là. Le projet de loi n° 6 entre en vigueur après 30 mois de son adoption, ça, ce n'est pas banal, comme
certains disent dans certains autres dossiers aussi : La présente
loi entre en vigueur le (indiquer ici la date qui suit de 30 mois celle de
la sanction de la présente loi)... Là, il y a des lobbyistes, lobbyistes
d'organisme, lobbyistes-conseils, lobbyistes d'entreprise qui sont venus nous
dire : Nous, on trouve ça long, parce
qu'eux vivent à tous les jours...
Puis ils sont venus nous raconter... on ne dira que c'est des histoires
d'horreur, là, il faut relativiser, mais ils sont venus nous raconter comment
c'est difficile. Puis là on n'est pas en train de pointer personne du doigt, on n'est pas en train de pointer personne
du doigt au RDPRM. Puis on a même parlé d'une certaine Mme Jean au
RDPRM, on est venu dire : Bien, Mme Jean, là, on l'a à tout bout de
champ au téléphone, puis elle essaie, puis
elle essaie, puis c'est difficile parce que la structure, la technologie
utilisée n'est pas adaptée, ce qui fait, puis je vais vous donner un exemple qui est parlant... ce qui fait qu'un
lobbyiste, lobbyiste-conseil, peut avoir à inscrire aujourd'hui plus d'un mandat, il va aller dans le
système, il va aller dans le réseau et faire en sorte d'inscrire son mandat,
mais il y a un certain délai de traitement,
puis, s'il y a des questions, le mandat est suspendu; bien, le système ne vous
permet pas d'en ajouter une deuxième. Vous
ne pouvez qu'en inscrire un et vous ne pouvez pas en inscrire un deuxième
tant que le premier n'est pas reçu, confirmé comme étant inscrit validement et,
si d'aventure il y avait des questions d'éclaircissement,
que vous y ayez répondu. Alors là, il y a une question de délai. Arrangez-vous,
donc, lobbyistes-conseils, pour inscrire... Même si la loi vous donne
30 jours, si vous le faites le 23e jour, ne comptez pas sur une
garantie à l'effet que le système va vous
permettre, après ça, d'enregistrer un deuxième, qui pourrait vous faire mettre
hors délai, Mme la Présidente. Donc, ça, tout le monde le dit très
clairement, il y a une nécessité de modifier et de transférer, transférer la
responsabilité et la tenue du registre.
Et on a même ici...
j'ai la Fédération des chambres de commerce du Québec qui a même mis en annexe Modifications
proposées pour simplifier l'utilisation de la plateforme d'inscription, et
là ils nous ont fait une liste... ce n'est pas une liste d'épicerie, c'est une
liste très tangible : ajout de fonctionnalités pratiques, numérotation des
mandats — il n'y a même pas de numérotation des
mandats, alors, quand on veut référer à un mandat, on essaie d'y référer
par le titre, une chatte y perdrait ses
petits — changement
au nom des ministères suivant une élection. Lorsqu'il y a un changement... Lorsqu'il y a une élection, puis
c'est de la prérogative du Conseil exécutif du gouvernement, il peut changer
les noms des ministères. Bien, si vous
changez les noms des ministères, Mme la Présidente, là, vous venez d'affecter
toutes les inscriptions qui avaient
jadis, sous l'ancien nom, une référence auxdits ministères, et là, encore une
fois, c'est compliqué. Bref, ce n'est pas un luxe de modifier et de
transférer, donc, le registre.
Et on a posé la
question au Commissaire au lobbyisme, on a posé la question. Lui, il est déjà à
pied d'oeuvre. Il ne présume pas de
l'adoption de la loi, mais il est déjà à pied d'oeuvre. Il a déjà des
conversations et des discussions avec
un organisme qui s'appelle l'expertise du secteur des registres de l'État et
qui, eux... Je cite : «Dans le contexte du dépôt du projet de
loi n° 6, le commissaire et le SRE ont repris
les travaux en vue d'actualiser l'étude d'opportunité et de réaliser un dossier de conception de la future plateforme...» On
lui a posé la question. Ça, ça pourrait coûter, en bout de piste, entre
1,4 et 2,8 millions. Ce sera, le cas échéant, de l'argent bien investi.
Au niveau de la
prescription, je vous l'ai dit, à l'heure actuelle c'est un an. Du moment où
vous faites une infraction, il faut que vous soyez poursuivi dans l'année,
sinon si c'est prescrit, on ne pourra pas vous poursuivre. C'est bien trop court. Beaucoup d'autorités sont
venues dire : On l'apprenait même un an après les faits, puis c'était déjà
prescrit au moment où on l'apprenait. On
apprenait deux choses : il a commis une infraction, puis c'est prescrit,
tu ne peux pas poursuivre.
Ce qui est proposé,
et nous en sommes, c'est que dans les trois ans de la connaissance vous devez
poursuivre, et, si l'infraction a eu lieu il y a plus de sept ans, c'est
prescrit. Ce n'est pas plus compliqué que ça. Au fédéral, c'est cinq ans et
10 ans. Dans bien des provinces, c'est deux ans. Moi, je pense — on
aura l'occasion de faire le débat, Mme la
Présidente — je pense
que nous sommes à un bon endroit. Et ça, c'est la recommandation 37 de la
commissaire Charbonneau, du rapport Charbonneau, je ne devrais pas dire
«la commissaire», c'est le rapport de la commission Charbonneau, c'est la recommandation 37, et nous en sommes. Donc,
important, Mme la Présidente, de soulever que nous devons faire cette
mise à niveau, mise à niveau de la loi.
Et il y a d'autres
personnes qui sont venues, Mme la Présidente, nous informer d'écueils...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de LaFontaine, à ce
moment-ci, je me dois de vous demander,
d'abord, si vous avez terminé votre intervention. Il n'a pas terminé.
Alors,
compte tenu de l'heure et afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une affaire inscrite par les députés de l'opposition, le présent débat
sur l'adoption du principe du projet de loi n° 6 est ajourné.
Et je suspends nos
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à
13 heures)
(Reprise à 15 heures)
Le Vice-Président (M. Picard) : Bon
après-midi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires
inscrites par les députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée
nationale reconnaisse l'importance de la
Charte des droits et libertés de la personne et la nécessité d'étudier
le projet de loi sur la laïcité de l'État dans un délai raisonnable
À
l'article 21 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition,
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys présente la motion
suivante :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse l'importance de la Charte des droits et libertés de la
personne, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en 1975;
«Qu'elle reconnaisse qu'il a toujours été dans nos pratiques
de modifier la charte québécoise des droits et libertés de la personne à
l'unanimité ou à la suite d'un large consensus au sein de notre Assemblée;
«Qu'elle reconnaisse le caractère sensible du projet de loi
n° 21, présenté le 28 mars dernier par le ministre de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, qui notamment restreint la
liberté de religion de certaines personnes;
«Qu'elle reconnaisse
que ce projet de loi nécessite que les parlementaires puissent entendre en
commission parlementaire les différents
points de vue exprimés dans la société et qu'ils puissent par la suite en faire
l'étude et l'analyse dans un délai raisonnable;
«Qu'enfin, elle
demande au gouvernement caquiste de permettre aux parlementaires de procéder à
l'étude du projet de loi n° 21, sans imposer un bâillon législatif à la
fin de la présente session parlementaire.»
Je vous
informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la
motion inscrite par Mme la députée
de Marguerite-Bourgeoys s'effectuera comme suit : 10 minutes
sont réservées à l'auteure de la motion pour sa réplique,
53 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le
gouvernement, 32 min 19 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, 11 min 9 s
sont allouées au deuxième groupe
d'opposition, 10 min 2 s sont allouées au troisième groupe d'opposition. Chaque député indépendant dispose d'un temps de parole de 1 min 30 s. Toutefois, lorsqu'un seul député
indépendant participe à un débat, il dispose d'un temps de parole de deux
minutes.
Dans le cadre
de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis
à part ces consignes, les interventions ne seront soumises à aucune
limite de temps. Enfin, je rappelle aux députés indépendants que, s'ils
souhaitent intervenir au cours du débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant
pour en aviser la présidence.
Je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme
Hélène David
Mme
David : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, les deux heures que nous avons à passer ensemble à débattre
de ce sujet sont deux heures d'une grande importance,
d'une grande importance parlementaire, d'une grande importance pour la société
et d'une immense importance pour les individus qui seront touchés, particulièrement pour les femmes, comme je l'ai dit ce matin, en période de
questions.
C'est probablement le sujet, oui, le plus sensible, le plus divisif, même si, et j'en suis — le
ministre le sait, porteur de ce projet
de loi, à quel point on essaie — on
essaie de garder une grande sérénité dans le débat. On essaie de garder notre
calme, on essaie de garder les esprits plutôt
froids, mais on touche à des choses extrêmement chaudes. Alors, le contraste est dangereux, et on doit déplorer des excès de
toutes sortes de côtés dans la société, et on ne veut pas ça, personne,
moi la première. Alors, j'essaie de
rester la plus rigoureuse, la plus calme, mais en même temps je veux être la
plus convaincue possible, mais aussi la plus convaincante possible.
Je ne pense
pas que je vais convaincre le ministre de certaines choses, mais je pense qu'on peut
s'entendre aussi sur certaines autres
choses. Je pense que le ministre est un homme responsable, je pense qu'il est certainement travaillant, parce qu'avec
tout ce qu'il a dans les chaudrons en
ce moment je pense que... Heureusement, il a l'énergie de la jeunesse, mais il a un dossier dont il... Je ne sais pas s'il est conscient, mais
je pense que oui, de la responsabilité que nous partageons, lui, et moi, et nos
formations politiques, pour construire un Québec qu'on aime, dont on sera tous
fiers. Quand on dit «l'inclusion»,
l'inclusion, c'est tout le monde. Et le Québec est une grande nation, le Québec
est une société enviée partout dans le monde, le Québec a fait ses preuves dans le milieu culturel, dans
le milieu économique, dans le milieu de l'éducation. On n'a jamais
eu autant d'étudiants internationaux, les gens veulent venir au Québec,
et nous voulons tous et toutes qu'ils continuent
à vouloir venir au Québec, que les nouveaux
arrivants soient heureux ici, que les
gens installés depuis plus longtemps les accueillent et soient heureux
de les accueillir.
Et c'est de
tout ça dont il est question à travers quelque 22, 23 petits articles
de loi, où on dit, on dit beaucoup : Ça fait 12 ans que ça traîne.
Excusez-moi, à chaque fois, mon coeur s'arrête quand j'entends ce mot-là :
Ça «traîne». Il n'y a rien qui traîne dans un débat de société.
Au contraire, ça va toujours être vivant. Puis je le dis au ministre
et je le dis à tout le monde, et les gens le savent : C'est l'histoire de l'humanité, le vivre-ensemble,
ce n'est pas l'histoire 2019 d'un
hidjab, d'une kippa ou d'un turban, c'est l'histoire de l'humanité, cette
question de vivre-ensemble, et c'est une histoire planétaire.
On a un astronaute extraordinaire en ce moment, qui s'appelle David Saint-Jacques — lui, on peut le nommer, ce n'est pas un élu — qui
est très loin en haut, qui a fait une sortie fabuleuse, encore une fierté pour
le Québec, qui a fait une sortie de six heures. Et les journalistes étaient là pour dire à
quel point, à quel point c'était dangereux. Mais c'est un homme exceptionnel, formé dans nos universités
québécoises, c'est un être d'une immense générosité aussi,
qui est allé pratiquer au Nunavik.
Enfin, on ne fera pas tout le pedigree de David Saint-Jacques. Mais il
regarde la planète et il dit d'en haut : Regardez comme cette
planète est petite vue d'en haut, et tout le monde doit vivre ensemble.
Alors,
arrêtons de penser que c'est un problème québécois. La question du vivre-ensemble, c'est un enjeu qui fait qu'on
est plusieurs milliards de personnes sur cette planète et que
nous devons, surtout avec les méthodes de communication, les réseaux
sociaux, les avions... On n'a jamais tant voyagé, la population n'a jamais été
aussi mobile. Avec les changements climatiques,
on n'a rien vu encore — la migration climatique. Alors, on est en train, dans notre Québec
en ce moment, de parler de choses qui
sont malheureusement sous le couvert de tout ce qui se traîne se salit, puis on
va arrêter, puis on va régler ça vite. On est en train de diviser de
façon, moi, qui m'attriste beaucoup.
En
2013, j'avais un emploi universitaire qui était formidable, formidable. Et
j'écoutais tous ces débats déchirants pour
la société et là je me disais : O.K., là, arrête de faire la gérante
d'estrade, et peut-être que tu dois te décider à faire le saut pour dire :
Qu'est-ce que je peux apporter?, mon petit moi de ce que je pouvais apporter.
Mais au moins j'aurais la conscience de faire quelque chose pour
redonner l'immense privilège que j'ai eu de naître dans une famille où tout a relativement très bien été, et très privilégiée
par rapport à tellement d'autres. Et j'étais loin, loin, loin de penser qu'un
jour je me retrouverais ici un mercredi, au
mois d'avril, à faire une motion, à porter un dossier sur la laïcité, qui est
le dossier qui m'a convaincue de
faire le saut en politique. Donc, ce n'est pas un dossier comme les autres pour
à peu près tout le monde, ce n'est pas une banalité, c'est comment on
veut définir le Québec de demain.
• (15 h 10) •
Faisons
un peu d'histoire. Les gens disent : La charte, c'est quoi, ça, la Charte
des droits et libertés? Et je ne suis pas
juriste, je le répète. Je parle avec le plus de rigueur possible, j'ai lu
énormément, puis, si je dis des bêtises, je suis sûre que le ministre me rabrouera très rapidement, mais
je vais essayer de ne pas en dire. La charte, parce que ce sont des faits,
la charte québécoise... Arrêtons de parler
du multiculturalisme canadien, on a une charte québécoise, qui a précédé la
charte canadienne, qui elle-même
s'est beaucoup inspirée de notre charte, parce que, savez-vous quoi, ils la
trouvaient pas mal bonne.
Donc, nous sommes en 1975. La charte québécoise
des droits et libertés est adoptée à l'Assemblée
nationale, ici même. Par qui?
Par quelqu'un qui était le député d'un comté dont j'étais députée jusqu'à tout
récemment. C'était Jérôme Choquette, pour mémoire,
qui était aussi ministre de la
Justice, et qui a fait adopter la Charte des droits et libertés de la personne. Et je le cite : «L'adoption
de la Charte des droits et libertés
[...] constitue un moment historique dans la vie du Québec et signale, de sa part, une maturité certaine — une
maturité. La charte permettra de définir avec précision un idéal de justice qui fera, j'en suis sûr, l'unité
du Québec autour de valeurs démocratiques que nous voulons garantir contre toute
violation.»
Ça,
c'était il y a 44 ans. Jacques-Yvan Morin, qui n'est pas
réputé être un grand libéral, il était... À ce moment-là, quel était son rôle? Je ne fais pas un quiz, il
était chef de l'opposition officielle. Ce n'est quand même pas rien. Voilà,
ici, ce qu'il dit : Ce projet de loi, «je dois dire qu'il sera fort utile, comme un rappel constant des
droits et libertés que nous souhaitons
conférer aux citoyens du Québec». La table était mise, M. le Président, pour que, tous ensemble, nous puissions protéger nos minorités.
Qu'est-ce qu'on a fait dans les années qui ont suivi? Bien, on l'a modifiée souvent.
Mais savez-vous dans quel esprit nous
l'avons modifiée? Et l'approbation a été unanime à peu près tout le temps, sauf une ou deux fois, où il
y a eu un ou deux députés qui ont rompu l'unanimité à l'Assemblée nationale. Alors, depuis l'adoption de la charte, il y a
eu beaucoup de modifications, mais ce n'était pas pour enlever des
droits. Je pense que les gens doivent le savoir et être sensibles à ça. Ce n'était pas pour enlever des droits comme il se passe
malheureusement en ce moment, et c'est grave. Disons-nous que c'est grave, d'enlever des droits.
Comme disait une collègue tout à
l'heure, un projet de loi qui enlève des droits n'est jamais
modéré, n'est jamais modéré. Et de là la grande difficulté,
je pense, que... Et mon collègue qui porte la loi et moi qui essaie de dialoguer avec lui, on
est toujours en train de dire : Soyons sereins, soyons
calmes. Mais comment être modéré
quand on enlève des droits aux gens? C'est sûr que les gens vont réagir, et
nous, dans notre for intérieur, aussi.
Donc,
ça a toujours été pour ajouter des droits, alors pour
renforcer, par exemple, la lutte contre la transphobie, pour... Vous le savez, là, la charte... Pour ceux
qui ne savent pas trop à quoi ça sert, la charte québécoise des droits et
libertés, c'est pour protéger les
minorités. Parce que ce ne sont pas les majorités qui ont besoin
d'être protégées, habituellement
c'est les minorités, alors la protection
de la transphobie, la protection des personnes handicapées, la protection
des homosexuels. Donc, selon Pierre
Bosset et Michel Coutu, bon, ce sont des experts, des juristes, elle a été
modifiée pas moins de 27 fois. C'est
vrai quand on dit : Elle a été modifiée souvent, mais — creusons — modifiée
pour l'améliorer. Elle a été modifiée 27 fois,
mais, chaque fois, hormis deux exceptions marginales, savez-vous quoi,
l'approbation a été unanime. Unanime, ça,
ça veut dire tout le monde ici qui se lève et qui dit : Oui, on veut
faire la lutte à la transphobie, on veut protéger les personnes
handicapées, on veut protéger les homosexuels.
Évidemment que la
charte comporte aussi d'autres protections, dont celle qui nous occupe particulièrement
aujourd'hui, la liberté religieuse. C'est une liberté au même rang que les autres
libertés. On a fait des luttes incroyables pour l'égalité hommes-femmes. On a
fait des luttes incroyables pour arrêter le racisme. On a fait des luttes
vraiment pour qu'il n'y ait pas de ségrégation en fonction de la couleur de la
peau, de l'orientation sexuelle et évidemment de l'orientation religieuse.
Alors, ça, c'étaient des droits qui étaient à protéger. Ils ont été protégés et
ajoutés au fil des ans.
Alors,
à quoi ça sert, une charte, dans notre société? Et c'est quoi, les impacts que ça peut avoir de
vouloir retirer des droits qu'on a
chèrement acquis, chèrement parce
qu'il y a eu des luttes derrière ça?
Pensons à des grands, grands droits
aux États-Unis, la ségrégation raciale par exemple, la lutte des femmes pour accéder au plein-emploi. On ne compte plus dans l'histoire les luttes qui ont dû être
faites pour ajouter des droits. Alors là, on est en train de vouloir en
enlever.
Alors,
je cite Francine Pelletier, le 3 avril, ça ne fait pas longtemps. Le rôle des chartes... Elle
dit : «C'est précisément pour permettre à la liberté de s'exercer,
à l'encontre même de celle de la majorité, que les chartes des droits sont
nécessaires.»
«...on met le
paquet ici pour tenter de faire oublier la véritable cible — elle parle de ce projet-ci — les femmes voilées, seront traités comme des citoyens de seconde catégorie à cause
de leurs croyances religieuses. Ce
n'est ni respecter la liberté de religion ni traiter tout citoyen
également, deux principes supposément garantis par le projet de loi.»
Le
27 mars, Francine Pelletier continue : «Alors que la définition du
bien commun change selon l'époque et les gouvernements, les droits
individuels sont au coeur même d'une existence qui vaut la peine d'être vécue.»
Alors là, excusez-moi, mais je ne peux pas
m'empêcher d'être la professeure de psychologie que j'ai longtemps été et celle
qui a évidemment eu énormément de
détresse psychologique à aider à accompagner, à soigner — je n'aime pas le mot — dans mon bureau de psychothérapeute, mais l'existence qui vaut la peine
d'être vécue, là... Je ne veux pas en faire un grand débat ici, mais l'importance de la religion,
personne ne peut nier, de la spiritualité, c'est une importance capitale pour
des gens qui, entre autres, cherchent un
sens à la vie, qui cherchent un sens à l'existence. Parce que, «tu seras
poussière et tu retourneras en
poussière», je pense qu'il y en a qui ont appris ça dans les catéchismes, et
dans la Bible, et tout ça, puis c'est
vrai, quand on se lève le matin puis on se dit : Tu es poussière, tu as
été poussière, tu vas retourner en poussière, c'est passablement angoissant. Et savez-vous quoi? Il y a toutes sortes
de réponses à la difficulté de vivre. Une des réponses, et ce n'est pas
la seule, pour avoir des convictions religieuses, c'est aussi de donner un sens
à sa vie.
Les valeurs,
la CAQ aime beaucoup parler des valeurs, mais les valeurs de charité, on dit
souvent les valeurs de charité
chrétienne, par exemple, les valeurs de charité de telle ou telle religion,
bien, les valeurs de charité, ça veut dire de penser à l'autre. Mais c'est des choses qui nous sont inculquées à
travers nos parents, ou à travers l'école, ou à travers un enseignant, mais ça peut aussi être à travers
une religion. Et ça veut dire quoi, «religion»? C'est «religare». «Religare»,
ça veut dire «relier», relier les gens. La religion, pour le meilleur et pour
le pire, et pour le pire, a relié les gens.
Alors là, on
essaie de dire : Ton existence s'exprime, ton sens de la vie, ton goût de
vivre, ton goût d'être généreux, d'être
charitable, de t'impliquer dans la société, bien, ça fait partie de ta
religion. Ta religion vient avec ou pas, et c'est le choix et la liberté, et on revient à la charte
des droits et libertés, le port ou non d'un signe religieux. Et ça s'adonne
qu'au Québec c'est beaucoup la
religion catholique. Puis on a des débats. Vous êtes en dessous d'un crucifix,
et puis on n'y pense plus, on pense : c'est un objet patrimonial,
mais ça a voulu dire quelque chose, là.
La religion
catholique a voulu dire énormément, et, cette religion catholique, ça s'adonne
que peut-être le signe religieux, et
j'en parle beaucoup avec mon collègue qui porte le projet de loi, et non la
kippa ou le turban, mais il porte le projet de loi... Alors, ça s'adonne
qu'un signe religieux catholique est souvent plus discret. Ça s'adonne bien,
dans le projet de loi, il est discret. Puis
il y a d'autres signes religieux, est-ce que c'est mieux, est-ce que c'est
pire? Ils sont moins discrets, pour
dire la chose comme elle est. Alors, un turban sikh, un hidjab, n'importe quoi,
une kippa ou d'autres signes sont des
signes plus visibles. Ça ne veut pas dire que la croix catholique veut moins
dire quelque chose. N'essayez pas de l'enlever
à quelqu'un pour qui, et je suis beaucoup revenue là-dessus, ça a une valeur
importante, et se défaire de ça... Il y
en a d'autres qui ne se défont jamais de leurs bagues de mariage, par exemple.
Il faudrait leur couper le doigt pour l'enlever, pas parce qu'ils ont grossi, parce qu'ils y croient beaucoup. Mais
d'autres, ça peut être le crucifix, ça peut être de porter quelque
chose.
• (15 h 20) •
Et cette
idée, philosophiquement partant, parlant... Là, j'essaie de ramener le débat à
quelque chose d'un peu plus fondamental de l'existence humaine, pas
parce que j'aime ça, j'adore ça parler de ça, justement, mais c'est parce que le projet de loi nous amène directement là, cette
philosophie qui dit, et ça a été dit presque textuellement : tu peux
l'enlever avant d'entrer à l'école
pour enseigner et tu le remets en sortant. Bien, malheureusement, la foi
religieuse, l'expression de la foi religieuse ne fonctionne pas comme
ça. Tu ne peux pas décider de porter tes convictions à temps partiel. Ça ne marche pas comme ça. Je ne veux pas faire de
comparaison boiteuse, parce qu'il n'y a rien qui équivaudrait à ça, mais ça
ne marche pas, entre 9 et 5, de porter ou de
ne pas porter, puis de reporter, puis de déporter. Comme j'ai dit, tu le portes
pendant que tu prends ta douche, que tu es
dans ton salon. La foi religieuse est quelque chose, et j'aimerais qu'on en
parle avec respect, de beaucoup plus
profond que ça. Ce n'est pas pour
rien que des gens qui ont des signes disent : Moi, j'aime mieux quitter mon emploi. Vous allez dire :
Ils sont fanatiques. Ils ne sont pas fanatiques, ils croient à ce qu'ils
portent parce que ce qu'ils portent veut dire quelque chose. Et c'est là qu'on revient, au sens de l'existence qui vaut la peine
d'être vécue.
Parlons de quelqu'un
qui, ma foi, a le respect unanime de l'ensemble des citoyens québécois, et, s'il
y en a qui n'ont pas de respect pour
cette personne-là, qu'ils lèvent la main, je pense qu'il n'y en a pas beaucoup. Elle s'appelle Louise Arbour et elle déclarait des choses importantes,
entre autres le 7 février 2014, parce qu'on était aussi dans des enjeux comme ça : «...il faut garder à l'esprit à
quel point il est facile...» «Il est facile», on va faire ça vite, le
14 juin, on va avoir un bâillon,
ça va être réglé. «...il est facile — et je cite Louise Arbour — de restreindre la liberté des autres,
surtout lorsque cette initiative ne
coûte rien — ne coûte
rien — à celles
et ceux qui la préconisent». Ne coûte rien à la majorité, et c'est ça, la Charte des droits et libertés, c'est que ça
coûte aux minorités, donc on veut les protéger, parce que c'est très, très,
très facile de référer à une majorité.
Je répète,
Louise Arbour : «Il faut garder à l'esprit à quel point il est
facile — par un
coup de 23 articles dans un projet de loi, 14 juin, on a tout
réglé, ça traîne, on règle ça — de restreindre la liberté des autres,
surtout lorsque cette initiative ne coûte
rien à celles et ceux qui la préconisent. [...]Il est facile de dénoncer le
pouvoir décisionnel des juges...» Elle fait référence évidemment à on va aller en clause dérogatoire.
Donc, les juges, c'est facile de dénoncer leur pouvoir «ou de tourner en ridicule les méandres des analyses
juridiques. Pourtant, le concept de droit fondamental est plutôt simple — elle aurait fait une bonne
politicienne. Avoir des droits, c'est un peu comme avoir un parapluie. C'est
surtout utile quand il pleut.» Eh bien, voilà, la charte est utile pour
protéger les minorités quand elles se sentent en danger.
Et
je poursuis ce qu'elle dit : «La liberté de religion ne veut rien dire si
elle est complètement — puis c'est un mot que la
CAQ aime — privatisée
et donc à peu près jamais menacée.» C'est surtout utile quand il pleut, le
parapluie. «La liberté de religion ne
veut rien dire si elle est complètement privatisée et donc à peu près jamais
menacée.» «Privatisée» dans le sens
d'on ramène ça... la vie privée, on ramène ça en dehors du 9 à 5. «Privatisée»,
M. le ministre, ce n'est pas du tout
«privatisée» au sens capitaliste du terme, c'est au sens... «Privatisée» veut
aussi dire : de la vie privée. «Il en va de même de tous les autres
droits fondamentaux. En fait, le plus difficile dans la reconnaissance des
droits, c'est de leur donner effet quand
cela dérange, et plus cela dérange, plus on doit être prudent avant de les
écarter.» C'est difficile, c'est exigeant,
là, ce que Louise Arbour nous dit, mais c'est essentiel. «Pour bien vivre en
société, il faut faire preuve d'une certaine
empathie politique — "empathie", "empathie
politique" — qui nous amène à véritablement voir le monde
du point de vue des autres. [...]Mais, pour certaines, comme pour moi, la
protection de ces acquis ne rend pas pour autant acceptable que l'on poursuive la lutte vers
l'égalité en exerçant une coercition sur celles que l'on souhaite voir
s'émanciper.» «On veut
leur bien», autre phrase qu'on est porté à entendre, «on veut leur bien».
Alors, que
Louise Arbour parle comme ça et que nous, on parle, j'oserais dire, d'autorité,
et j'y reviendrai parce que le temps
passe vite, mais l'autorité... Je termine sur le fameux rapport
Bouchard-Taylor, que j'ai lu en long et en large, et qui se lit vraiment de façon très, très, très
intéressante et même, j'oserais dire, facile : «...pourquoi penser que la
personne qui porte [...] un signe
religieux [serait] moins susceptible de faire preuve d'impartialité, de
professionnalisme [...] de loyauté envers l'institution que la personne
qui n'en porte pas? [...]pourquoi [...] penser, a priori, que ceux qui
affichent leur appartenance religieuse sont
moins capables de faire la part des choses que ceux dont les convictions de
conscience ne sont pas extériorisées ou le sont de façon moins
visible...»
Ça, c'est un immense débat de philosophes et
de... qu'est-ce que l'apparence a à voir avec ce qui a entre les deux oreilles. Et c'est une équation
intellectuelle que fait la CAQ, dans son projet de loi, qui, pour moi, ne tient
pas la route parce que l'autorité, ce n'est pas en rapport, d'une part, avec la
neutralité religieuse et ce n'est certainement pas en rapport avec la façon
dont on porte ou ne porte pas de signes religieux. On peut avoir entre les deux
oreilles des pensées ou un construit
psychologique et social extrêmement homophobes, ça va paraître bien moins que
quelqu'un qui s'affiche avec une
conviction religieuse, on le sait. Et tout le monde va surveiller si elle fait
du prosélytisme, etc., et il n'y a — et je termine là-dessus — jamais
eu aucune plainte par rapport à ça.
Donc, c'est
un construit de l'esprit que la CAQ a fait, une rhétorique des droits des
majorités pour être bien sûr des
droits de la majorité au Québec, pour être bien sûr qu'ils ont des sondages
avec eux. Mais ils n'ont certainement pas à coeur le respect de ceux qui ont fait tant de luttes et qui sont dans
les minorités. Je vais m'arrêter ici, et on reviendra plus tard. Merci
beaucoup, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant
la parole à M. le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur la motion inscrite par la
députée de Marguerite-Bourgeoys. Dans
son allocution, tout à l'heure, elle disait : On n'est que poussière
et on ne quittera le monde que
poussière. Et elle faisait référence au caractère chrétien de ce terme-là. Je
pourrais lui proposer quelque chose de plus laïque : «Rien ne se perd, rien ne se crée, mais tout se
transforme», alors, de Lavoisier, un grand scientifique français. Alors,
ça pourrait aussi être une formule qu'on pourrait employer et ça revient au
même.
Alors, M. le Président, on est ici parce que le
Parti libéral décide de déposer une motion en lien avec le projet de loi n° 21, que j'ai déposé et
dont je suis très fier parce qu'on a réussi à faire l'équilibre, M. le
Président, entre les droits collectifs et les droits individuels.
Et, si on
résume le projet de loi, les trois éléments importants du projet de loi, dans
un premier temps, on inscrit la laïcité dans nos lois pour la première
fois. Et le titre de la loi, il est éloquent, c'est la Loi sur la laïcité de
l'État. Le premier article du projet de loi,
je vais vous en faire la lecture, M. le Président : «L'État du Québec est
laïque.» Donc, on vient inscrire
formellement que les religions et l'État, c'est séparé, c'est deux choses. Il y
a 50 ans environ, on l'a fait dans les faits, maintenant on le fait
concrètement dans nos lois.
Deuxièmement,
on vient définir c'est quoi, la laïcité de l'État. Ça repose sur quels
principes? Premier principe, l'État
et les religions, c'est séparé. Deuxième principe, la neutralité religieuse de
l'État. Je suis convaincu que mes collègues d'en face ne seront pas en désaccord avec ce principe-là parce qu'eux-mêmes,
dans le cadre du projet de loi n° 62, ils ont déposé la Loi sur la neutralité
religieuse de l'État. D'ailleurs, j'utilise certains passages de la loi pour la
bonifier, la loi n° 62,
et je l'insère dans la Loi sur la laïcité. Donc, sur ce passage-là, je pense
que les collègues d'en face vont être d'accord
avec nous. Troisième critère, l'égalité de tous les citoyens et citoyennes
devant la loi, notamment, un des critères qui étaient dans les
recommandations du rapport Bouchard-Taylor. Et, quatrièmement, M. le Président,
la liberté de conscience et la liberté de
religion. Ça, c'est une composante de la laïcité de l'État. Qu'est-ce que ça
signifie? C'est que toutes les religions au Québec sont sur un même pied
d'égalité. Donc, l'État doit traiter tous les individus qui ont des confessions
religieuses distinctes sur le même pied d'égalité. On ne peut pas défavoriser
ou favoriser quelqu'un qui pratique une religion ou une autre. C'est ça, le
concept de la laïcité de l'État, et c'est une séparation qui est formelle.
• (15 h 30) •
Deuxième
élément important dans le projet de loi, M. le Président, c'est l'interdiction
de port de signes religieux pour
certaines personnes qui sont en situation d'autorité, qui exercent un pouvoir
de l'État, qui représentent l'État, avec des pouvoirs très particuliers. On parle de juges, de policiers,
d'agents correctionnels, des gardiens de prison, de procureurs, d'enseignants, de
directeurs d'école, qui représentent une figure d'autorité. Dans le rapport
Bouchard-Taylor, M. le Président, on recommandait d'interdire le port de
signes religieux à l'ensemble de ces personnes-là, sauf les enseignants et les directeurs d'école, qui n'étaient pas visés. Nous,
à la CAQ, on a pris le rapport, on s'en est inspiré, et le contenu de la loi
fait état du consensus Bouchard-Taylor. On
s'en inspire, on prend ce qu'il y a dedans. Également, président,
vice-présidents de l'Assemblée
nationale qui ne devraient pas porter de signes religieux, on le met dans notre
loi. Et on rajoute les enseignants, directeurs d'école parce que, depuis 2013,
on considère, et ça a été notre position, qu'il y a un lien particulier entre les enfants, et les enseignants, et les directeurs d'école. Et on
a décidé que ces personnes-là, en raison de la relation privilégiée, la relation particulière et la figure
d'autorité qu'ils représentent... de les insérer également dans les personnes
qui sont visées par l'interdiction de port
de signes religieux. Et, il faut le dire, on interdit le port de signes
religieux durant la prestation de travail. Donc, ça, c'est très clair.
Troisièmement, et ça, les collègues d'en face, je pense qu'ils vont être d'accord
avec moi parce que la précédente ministre de la Justice avait déposé un projet de loi, le projet de loi n° 62, sur la neutralité religieuse de
l'État qui comprenait notamment le fait de donner des services à visage découvert pour l'ensemble des fonctionnaires de l'État québécois et le fait de recevoir des services à visage découvert, et, M. le Président, j'ai inséré ça dans le projet de loi n° 21, notamment pour des questions d'identification ou de
sécurité.
Alors, j'ai un projet de loi qui est applicable,
qui est modéré, qui est pondéré.
La députée
de Marguerite-Bourgeoys nous dit : Écoutez, la Charte des droits et libertés de la personne, la charte québécoise, a été adoptée à
l'unanimité en 1975, effectivement, par Jérôme Choquette, un de ses prédécesseurs.
On salue d'ailleurs sa mémoire. À
l'époque, M. Choquette, lorsqu'il a présenté la loi, il faisait état des
valeurs et des principes de la société québécoise. Il rassemblait tout ça dans la Charte des droits et libertés de la personne. Il disait : Ça, là, c'est la base de la société québécoise,
c'est le ciment de la société québécoise. Ce qu'on met comme valeurs, comme principes,
comme valeurs sociales dans la charte, ça représente la société québécoise,
et j'en suis.
Et c'est pour
ça que, lorsque la députée de Marguerite-Bourgeoys nous dit : On enlève des droits...
Aucunement. Les modifications que nous apportons à la Charte
des droits et libertés de la personne,
c'est afin de bonifier les droits de tous les Québécois, notamment en insérant un considérant dans le
préambule : «Considérant l'importance fondamentale que la nation québécoise accorde
à la laïcité de l'État...» On vient inscrire que la laïcité de l'État, c'est
une des valeurs importantes de la société
québécoise. Je ne pense pas qu'il y a personne de l'autre côté qui va dire que
la laïcité de l'État, ça ne doit pas être une valeur qui est inscrite
dans la charte. Ça fait consensus, ça, que la laïcité... La séparation entre
l'État et les religions, est-ce qu'on est contre? Je ne crois pas. Est-ce qu'on
est contre le fait que l'État soit neutre religieusement?
Je ne crois pas. Et je regarde le député de Robert-Baldwin pour tenter de
comprendre son propos. Je pense qu'il
est d'accord avec moi sur le fait que l'État doit être neutre religieusement.
D'accord. Je crois comprendre aussi que...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Je crois
comprendre...
Le Vice-Président
(M. Picard) : Vous parlez à moi, M. le ministre. Une seule
personne a le droit de parole, s'il vous plaît!
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je tente de convaincre
l'ensemble des collègues pour qu'ils puissent voter avec le gouvernement sur cette motion-là et j'ai
bon espoir de rallier le député de Robert-Baldwin à mon propos suite à mon
intervention.
Ainsi, M. le
Président, si nous continuons, je suis convaincu aussi qu'on souhaite, du côté
du Parti libéral, que les citoyens soient égaux devant la loi. C'est une
des composantes de la laïcité. Et je suis convaincu aussi qu'on souhaite qu'il y ait une séparation formelle entre l'État
et les religions et aussi qu'on s'assure de faire en sorte que, lorsqu'il y a
un traitement avec les agents de l'État, bien, on puisse garantir la
liberté de conscience et la liberté de religion.
Alors, ces
quatre éléments-là, M. le Président, je suis convaincu que le Parti libéral est
en accord avec ça. Et ça, ces quatre composantes-là, M. le Président, ce sont
les composantes de la laïcité de l'État. Alors, en disant ça, je constate
une adhésion forte, de l'autre côté, à ces principes d'inscrire la laïcité de
l'État.
Alors, on
donne davantage de droits, M. le Président. Également, on insère à la Charte
des droits et libertés de la personne,
à l'article 9.1, que «les [droits et libertés] fondamentaux s'exercent dans le
respect des valeurs démocratiques», on rajoute «de la laïcité de l'État,
de l'ordre public et du bien-être général des citoyens.
«La loi peut, à cet égard, en fixer la portée et
en aménager l'exercice.»
M. le
Président, on rajoute des droits à la charte. On s'assure que la laïcité de
l'État, la valeur de la société québécoise,
soit insérée à l'intérieur de la Charte des droits et libertés de la personne.
Et d'ailleurs on dit dans la motion que
la charte a toujours été modifiée à
l'unanimité ou suite à un large consensus. Mais, écoutez, à l'époque, en 1975,
oui, la charte a été adoptée à
l'unanimité, mais elle a été souvent modifiée aussi, puis il n'y avait pas
l'unanimité. Et, vous savez, la
charte, bien que toutes les lois doivent être conformes, les lois québécoises
ici votées doivent être conformes à la charte,
eh bien, celle-ci peut être modifiée. Il
n'y a pas de procédure complexe de modification à la charte, comme c'est le cas
pour la Charte canadienne, hein? Puis vous voyez toutes les difficultés
que ça amène, la modification de la Charte canadienne ou la Constitution canadienne. Même le Québec
ne l'a même pas signée. Ce n'est pas le choix du législateur québécois.
On peut modifier la charte ici. On ne veut pas mettre en place un carcan.
Et ce que
ça signifie, M. le Président, si on mettait un carcan, comme le souhaite la députée
de Marguerite-Bourgeoys, ça voudrait dire qu'on ne pourrait pas faire
avancer les valeurs du Québec, les valeurs sociales du Québec, des
valeurs sociales
distinctes, parce que la Cour
suprême s'est prononcée là-dessus, M. le Président, récemment, en 2013, je crois, en
disant qu'il y a des spécificités aux valeurs québécoises dans un
jugement de la Cour suprême. On avait cette discussion-là tout à
l'heure au projet de loi n° 9 aussi et on a fait ce choix-là.
Alors, la loi a été modifiée à plusieurs
reprises sans que ce soit à l'unanimité. Écoutez, en 1977, on a ajouté
l'orientation sexuelle comme motif de discrimination interdit à
l'article 10. Ça ne s'est pas fait unanimement. On a modifié, en 2000, la loi. L'opposition officielle,
à l'époque, qui était le Parti libéral, a voté contre. En 2004, l'instauration
d'un programme d'égalité en emploi, le Parti québécois a voté contre. Dans la
charte encore une fois, en 2005, le Parti
libéral remplace l'article 41 sur le droit des parents d'assurer
l'éducation religieuse et morale de leurs enfants, il y a des députés qui ont voté contre. Et ça, c'est un
précédent parce que le Parti libéral a retiré un droit en matière religieuse,
M. le Président. Le droit d'exiger des
parents, dans les écoles publiques, un enseignement religieux ou moral conforme
à leurs convictions a été remplacé par le
droit d'assurer l'éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément
à leurs convictions. Alors, je ne pense pas
avoir besoin de recevoir les leçons du Parti libéral quand eux ont retiré un
droit qui était prévu à la charte, alors que moi, j'en ajoute un au
niveau de la laïcité de l'État.
M. le
Président, entre autres, le projet de loi, ce qu'il prévoit, c'est de s'assurer
qu'une des valeurs importantes de la
société québécoise, qui a été établie il y a plusieurs années, la séparation
entre l'État et les religions, s'y retrouve, dans la charte.
Il y a
d'autres éléments dans la motion de la députée de Marguerite-Bourgeoys,
notamment quant aux processus de consultation. On nous dit : «Qu'elle
reconnaisse que [le] projet de loi nécessite que les parlementaires puissent
entendre en commission parlementaire les
différents points de vue exprimés dans la société et qu'ils puissent par la
suite en faire l'étude et l'analyse dans un délai raisonnable.» Eh bien,
c'est ce que nous faisons, M. le Président.
On a déposé
le projet de loi le 28 mars et nous souhaitons avoir la collaboration de
l'ensemble des formations politiques — je sais qu'elle est déjà acquise de la part
du Parti québécois — pour
faire en sorte de cheminer rondement, dans
le cadre de l'étude du projet de loi, avec les consultations. D'ailleurs, on
est toujours à l'étape d'échanger les groupes que nous souhaitons
entendre, mais j'ai bon espoir qu'on va réussir à pouvoir déjà annoncer à cette
Assemblée et aux différents groupes qui
l'Assemblée invite en commission parlementaire à venir présenter leurs
mémoires. Et je souhaite que ça se fasse rapidement pour que les gens
aient le temps de se préparer.
Cela étant
dit, on va tenir des consultations, on va avoir l'étude détaillée du projet de
loi, et moi, je suis convaincu qu'on
va réussir à adopter le projet de loi d'ici la fin de la session. Mais ça, M.
le Président, ça nécessite la collaboration de l'ensemble des collègues parlementaires. Et, vous savez, la date
limite pour déposer un projet de loi à l'Assemblée pour qu'il soit adopté à la présente session,
c'est le 15 mai. Aujourd'hui, on est le 10 avril, et j'ai déposé le
projet de loi sur la laïcité un mois
et demi avant la date limite des dépôts et deux mois et demi avant la date
finale pour adopter les projets de loi.
On a déjà
beaucoup de discussions. La collègue de Marguerite-Bourgeoys me pose une
question par jour, pratiquement à toutes les périodes des questions, et
donc on en discute. On va en discuter davantage amplement, on va entendre les différents groupes. Je sais qu'elle a fait ses
consultations de son côté, j'ai fait mes consultations également de mon côté.
Mais là les prochaines consultations qu'on va faire, on va les faire ensemble.
• (15 h 40) •
Cela étant
dit, M. le Président, le projet de loi que j'ai déposé, le projet de loi
n° 21, vient répondre à une situation qui a cours depuis 2007, qui vient formellement séparer l'État et les
religions. Et là-dessus je ne peux pas comprendre que le Parti libéral soit contre le fait d'inscrire la
laïcité de l'État dans nos lois. Honnêtement, le Parti libéral a toujours été
contre le fait d'interdire le port de signes religieux à certaines personnes en
situation d'autorité. Mais, vous savez, M. le Président, il ne faut pas
jeter le bébé et l'eau du bain, hein? Il ne faut pas mettre tout dans le même
panier. Alors, j'apprécierais recevoir du
Parti libéral des explications relativement au fait que pourquoi ils sont
contre la laïcité de l'État parce que
les principes répondent clairement à une volonté de leur part. Sur le visage à
découvert, je ne les ai pas entendus, M.
le Président, non plus. D'ailleurs, j'ai repris en partie leurs propres mots
dans le projet de loi de la précédente ministre de la Justice. Je ne les
ai pas entendus là-dessus.
Alors, M. le
Président, je suis fier d'avoir déposé ce projet de loi là et je suis convaincu
qu'on va pouvoir continuer de
travailler ensemble, de se poser des questions... bien, en fait, de me faire
poser des questions et que je puisse y répondre à la période des questions, que les travaux parlementaires vont se tenir
le plus rapidement possible et le plus rondement possible pour qu'on puisse enfin inscrire formellement la séparation de
l'État et des religions dans nos lois, le principe de laïcité d'État également dans la Charte des
droits et libertés de la personne, et ce, je le souhaite, de façon
consensuelle.
Cela étant
dit, M. le Président, je dois dire que j'apprécie le ton des débats ici, à
l'Assemblée, avec la collègue de Marguerite-Bourgeoys, surtout avec les
événements qu'il y a eu cours au cours des derniers jours. Je pense que ça démontre très clairement qu'on peut débattre. On
est en désaccord, manifestement. Je vais tenter de convaincre la collègue.
On est en désaccord sur certains points,
mais on est capables de se parler dans le respect puis d'échanger des points de
vue opposés sur un sujet qui est fort important, et qui est vrai, et qui
est sensible pour de nombreuses personnes.
Alors, je vous remercie, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le ministre. Je reconnais
maintenant M. le député de Jean-Lesage.
M. Sol Zanetti
M. Zanetti : Merci, M. le
Président. Une des choses les plus difficiles à faire en ce moment au Québec,
c'est probablement de débattre au sujet des
signes religieux. Tout le monde a ses raisons pour trouver ça difficile. Les
raisons diffèrent.
Tout le monde ne comprend pas tout le monde. C'est correct, c'est normal, mais
tout le monde voit qu'il y a beaucoup de colère. La majorité du monde
ont la mèche courte. La discussion commence, le blogue ou la publication commence à s'écrire, puis, tout de suite, on en
vient aux coups de gueule, tout de suite, on se juge les uns les autres. On se
juge les uns les autres, et ensuite on se
juge de se juger. Et ça part dans une boucle infinie et c'est la foire
d'empoigne. Chaque fois, on creuse un
peu plus des fossés tout autour de nous, alors qu'on devrait bâtir des ponts et
s'aimer les uns les autres. C'est
plus hippie que politique, dire ça, mais j'ai l'impression que ça manque.
S'aimer les uns les autres comme Québécoises,
comme Québécois, là, quelle que soit notre origine, ça ne veut pas
nécessairement dire se trouver sympathiques puis avoir envie de passer toutes nos vacances ensemble. Ça veut juste
dire se donner une chance puis être généreux entre nous, se donner le
bénéfice du doute, s'écouter et respecter nos désaccords.
Mais là on
n'en est pas là parce qu'il y a trop de colère dans l'air. Je comprends que les
gens... Je comprends les gens qui sont en colère. Tout le monde est sur
la défensive parce que tout le monde se sent menacé pour des raisons différentes. Parmi les choses qui nous
maintiennent braqués les uns contre les autres en ce moment, il y a qu'on
s'apprête à limiter nos droits et
libertés de manière expéditive. Le gouvernement donne l'impression que,
quoiqu'on dise et quoiqu'on fasse, ça
ne changera rien, son idée est faite. Quand les paroles ne servent plus à rien,
c'est quoi, l'alternative? Comment se surprendre
que les débats deviennent violents? Tout le monde est dans les câbles. Il n'y a
pas de négociation, il n'y a pas d'écoute,
juste une grosse menace, une menace qui garde son calme, une menace qui parle
sur un ton égal, mais une menace quand même.
Quoiqu'il
arrive à la fin de ce débat sur l'interdiction des signes religieux, ça ne sera
pas durable si c'est adopté dans un contexte de débats violents. Toute liberté
a une limite quelque part. La vie en société est faite comme ça. Mais, quand on limite la liberté d'une personne, il me
semble qu'il faut avoir une bonne raison. La raison pour limiter les droits, là,
ça ne peut pas être juste la volonté de la
majorité. Limiter les libertés des gens, ce n'est pas une politique
gouvernementale comme les autres. C'est plus lourd de conséquences.
Si
l'expression d'une liberté menace la sécurité publique ou rend nos institutions
dysfonctionnelles, alors limitons-la. Mais
est-ce que c'est le cas pour le port des signes religieux chez les policières et les policiers, chez les
enseignantes et les enseignants et
chez toutes les autres personnes visées par le projet de loi n° 21? Cette loi vient-elle résoudre un problème réel et avéré? Pour beaucoup trop de Québécoises et de Québécois, là, ce n'est pas
clair du tout. Elles se sentent menacées pour rien, sans raison. Comment voulez-vous qu'elles ne soient pas en
colère? Comment peut-on garder son calme dans un contexte pareil?
Vous savez
c'est quoi, le grand drame quand on est une minorité? Bien, c'est qu'on n'est
pas majoritaire. Et le caractère
minoritaire d'une minorité a tendance à être chronique. Et c'est pour ça qu'il
y a des chartes des droits. La charte québécoise des droits et libertés
de la personne, que nous avons élaborée en 1975, bien avant celle du
Canada, elle sert à protéger les minorités.
Protéger les minorités, c'est quelque chose qui fait partie de l'identité
québécoise depuis plus longtemps que
l'identité canadienne. Quand on protège les minorités, on n'est pas en train de
perdre notre identité, on est simplement fidèles à nous-mêmes.
Ce qui nous
fait perdre notre identité, M. le Président, là, ce qui nous canadianise,
mettons, c'est de demeurer une province
au Canada. C'est financer les pipelines qu'Ottawa va finir par nous passer
dessus qui nous canadianise, c'est de laisser le gouvernement canadien
légiférer sur nos télécommunications, lui laisser contrôler notre fleuve, c'est
d'aller aux Olympiques avec ses couleurs sur
le dos, le laisser parler en notre nom à l'international. C'est ça,
l'aliénation qui nous guette. S'il y
a une chose qui menace l'identité québécoise, c'est de laisser les autres
prendre nos décisions à notre place. Il n'y a pas un peuple sur la terre qui a
avantage à faire ça. Les décisions que les autres prennent à notre place nous
éloignent de nous-mêmes.
Alors, si on
se sent menacés par le multiculturalisme canadien, qui tend à nier le caractère
distinct de la nation québécoise et
l'autodétermination de tous les peuples du Québec, il ne faut pas interdire les
signes religieux. Il faut faire un
pays pour vrai, tous ensemble, avec les autochtones, avec les Québécoises et
les Québécois de toutes les origines, sans discrimination. C'est pourquoi nous appuyons aujourd'hui la motion de
l'opposition officielle. Si son application pouvait permettre un débat plus serein au sein de notre
propre peuple, je pense que ce serait bon pour tout le monde. Merci beaucoup.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Jean-Lesage.
Je cède maintenant la parole au chef du troisième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé :
Merci, M. le Président. En ma qualité de chef parlementaire du Parti québécois
mais aussi de porte-parole en matière
de laïcité, je souhaite exprimer le fond de notre pensée, de façon générale,
sur cet enjeu parce que c'est de ça qu'il s'agit.
Cette motion
présentée par le Parti libéral vise essentiellement à commencer le débat dès
maintenant en Chambre. Avant, la
commission parlementaire indiquait une position formelle, une position forte
qui ne changera pas. Le Parti libéral, tout
comme Québec solidaire, ne sera pas convaincu par les interventions en
commission parlementaire. C'est acquis. Le ton est déjà donné. Ils sont contre la capacité du gouvernement du
Québec d'intervenir sur un certain nombre de choses. Les droits
collectifs, c'est de ça qu'il est question ici.
Le Parti québécois a été le premier à vouloir
légiférer sur la question de la laïcité lors du gouvernement de Pauline Marois, et j'en étais membre. J'étais
d'accord avec ça. Je suis toujours solidaire, d'ailleurs. Et le gouvernement
de la Coalition avenir Québec a annoncé ses
couleurs en campagne électorale, une volonté de régler cette question, et elle
propose un projet de loi, le projet de loi n° 21, qui vise à aborder la question des signes religieux. C'est une
intention qui est
légitime. C'est une intention qui est nécessaire. C'est un projet de loi qui a
toutes ses raisons d'être. Et notre volonté, c'est d'y collaborer pour adopter la meilleure pièce législative
possible, parce qu'elle sera adoptée, et nous souhaitons qu'elle soit
adoptée durant cette session parlementaire.
Ceci étant
dit, si notre collaboration est acquise, ce n'est pas le cas pour notre vote,
et je vous explique pourquoi.
Dans la
motion proposée par le Parti libéral, on oppose un certain nombre de choses,
les droits individuels aux droits
collectifs ou à la nécessité nationale d'intervenir pour le mieux être
ensemble. Pour le Parti libéral, ça ne me surprend pas. De tout temps, ils ont un guide des valeurs,
d'ailleurs qui est inscrit, là, dans le livre de Claude Ryan qu'on remet
aux nouveaux adhérents du Parti libéral, où on parle des grandes valeurs
libérales, comme, par exemple, les libertés individuelles.
Alors, ça, ce n'est pas une surprise pour moi. Ça fait partie du credo libéral.
Quant à Québec solidaire, on en apprend davantage maintenant.
Mais, en ce
qui a trait à notre position, moi, je suis d'avis qu'au Québec, société
distincte, État national mais pas complet,
avec notre Parlement de l'Assemblée nationale, on peut adopter un certain
nombre de législations qui sont nécessaires.
• (15 h 50) •
Par exemple,
ce matin, on a rappelé le
20e anniversaire du décès de Camille Laurin, le grand Camille Laurin. Mais
souvenons-nous qu'à l'époque, quand est venu
le temps d'adopter la loi 101, ça ne s'est pas fait avec l'unanimité, mais
c'était nécessaire. En 1977, le Parti libéral a voté contre la loi 101. Ça n'a pas été rappelé, ça, ce matin.
Ils ont voté contre une loi qu'ils considèrent maintenant si
essentielle. Il fallait le faire, là! Il fallait entendre les propos qui
étaient tenus à l'égard de Camille Laurin à l'époque. C'était odieux, M. le
Président. On l'accusait de tous les maux.
Et Camille
Laurin a voulu pour son peuple une loi importante, une loi qui était nécessaire
pour faire en sorte que le français soit la langue officielle du Québec,
que les nouveaux arrivants puissent la parler et qu'ainsi de suite les
générations qui suivent puissent faire de la langue française quelque
chose d'important au Québec. Moi, je suis fier de ça. C'est l'héritage de ma formation politique et c'est maintenant
un héritage qui est partagé. Je n'ai entendu ce matin que des bons mots
sur la loi 101, de toutes les formations politiques. J'en suis heureux.
Aujourd'hui, un gouvernement avec lequel je partage énormément
de différends, notamment leur volonté obstinée de demeurer des locataires à l'intérieur du Canada, bien que je sais qu'en privé bien des députés
disent : Non, ce n'est pas vraiment
ça, mais, vous savez quoi, ça me permettait de me faire élire... Ça, c'est une
réalité. Ils se reconnaîtront. Certains sont là présentement, d'ailleurs.
Nous, on
pense qu'en matière de laïcité c'est la même chose. Qu'est-ce qui est
essentiel? La primauté du français, l'égalité des hommes et des femmes,
la laïcité, c'est des valeurs québécoises. Mais on ne le fait pas pour des
raisons identitaires, la laïcité. Là-dessus,
j'ai une critique à faire au premier ministre. Quand il dit : Ça fait
partie de notre identité, non, je
pense que c'est une volonté qu'on se donne d'avoir un État qui est laïque. Puis
l'État, il est incarné notamment par
les personnes. Alors, là-dessus, on diffère. Ça ne fait pas partie de
l'identité québécoise. C'est universel, ça, la laïcité. Il y a des pays qui ont fait ça bien avant nous. On
les évoque rarement, d'ailleurs. Mais c'est une nécessité, puis on est
d'accord avec ça.
Ensuite,
bien, s'opposent les chartes versus le rôle des parlementaires. Les
parlementaires, ils sont investis d'un pouvoir
important, ils peuvent légiférer. Et, si des députés ici, à l'Assemblée
nationale, se disent : Vaut mieux les tribunaux, vaut mieux la charte, même dans des aspects aussi
fondamentaux pour notre société, on est mal barrés, M. le Président.
Moi, je crois
au pouvoir politique, je crois au pouvoir des élus d'une Assemblée nationale
qui peuvent faire la différence.
Alors, là-dessus, il y a des moments où il est nécessaire de légiférer. C'était
nécessaire de le faire pour la loi 101. Est-ce qu'on voudrait revenir en arrière? Je ne crois pas. Est-ce qu'il
est nécessaire de légiférer pour la laïcité? Bien sûr. Comment on va le faire? Avec des débats civilisés,
comme on est capables de les tenir, en commission parlementaire, en Chambre, sur toutes les tribunes. C'est pour ça
que nous, on va collaborer. On sera une force de collaboration, on ne
sera pas une force d'obstruction, puis ça va paraître.
Ceci étant
dit, il y a un test pour le gouvernement. Ce n'est pas un test de surenchère
pour savoir qui va le plus loin, mais qui est le plus cohérent. Puis, à la
rigueur, pas quel groupe parlementaire. Est-ce qu'au bout de l'exercice
on sera satisfaits de la loi qui aura été adoptée, qu'on soit en faveur ou pas,
qu'on ait obtenu ce qu'on souhaitait ou pas? Le
Parti québécois va faire des propositions d'amendement pour améliorer le projet
de loi, notamment sur les personnes en autorité.
Et, quand le gouvernement dit : Les
enseignants, enseignantes sont en autorité, pourquoi pas les éducatrices,
éducateurs en CPE? C'est quoi, la différence? Les services de garde en milieu
scolaire, le gouvernement dit : On va appliquer
ça en milieu scolaire, mais pas les écoles privées. Pourquoi? Réponse :
Les gens vont dans les écoles privées pour
les valeurs religieuses. Sans rire, là. Ça, c'est du corporatisme pur. C'est
une clientèle qu'ils aiment beaucoup, les écoles privées. On va découvrir ça pendant les quatre prochaines années.
Je le connais assez bien, le premier ministre. Ils ont choisi d'épargner les écoles privées. Ça, c'est le genre
d'entente qui se fait. Ça ne tient pas la route, d'accord? Alors, on va
proposer un amendement, puis il y aura un test de cohérence là-dessus.
Le
gouvernement dit également, et ça, je pense que c'est une erreur, en début de
débat, il dit... il a lui-même, là, évoqué
la question de bâillon. Écoutez, M. le Président, vous le savez, j'ai été
leader parlementaire, je suis très attaché à nos pratiques. C'était une erreur, ça aussi. On ne peut pas évoquer un
bâillon au début du débat. C'est une admission d'échec, c'est la
dernière procédure possible, là, pour faire adopter une législation. Bien sûr,
on a cinq semaines pour débattre, puis il y
a un nombre de groupes qui vont
passer puis d'individus. Ça va être serré, mais on est capables d'y arriver.
Où résiderait l'intérêt à ce qu'on prolonge
cet automne? Moi, je n'en vois pas. Nous, on va être prêts à légiférer puis on
va être prêts à adopter sereinement
ce projet de loi là. On espère qu'il sera modifié puis on
réservera notre jugement pour la fin.
Donc, j'ai
des critiques à faire sur l'action du gouvernement en
matière de laïcité puis je considère également
que, dans ce printemps de la laïcité québécois,
bien, le cours d'éthique et culture religieuse, ce n'est pas inclus dans le projet de loi, il
puisse y avoir des modifications importantes dans sa partie Enseignement des
religions. Puis on pourrait allez plus loin que ça.
Alors, qu'est-ce que je dis? Je dis que l'intention du Parti libéral... il ne
faut pas prêter d'intentions, mais c'est de commencer le débat dès maintenant en disqualifiant d'avance, en disant : Nous,
on a un veto là-dessus parce
que vous n'avez pas un grand consensus, le Parti libéral n'est pas là, puis Québec
solidaire n'est pas là. D'ailleurs, c'est le même veto qu'ils
veulent appliquer à la réforme du mode de scrutin en disant : Ah non! Vous
n'avez pas l'unanimité. Nous, on n'est pas là. Bien, s'il avait fallu attendre
après le Parti libéral, on n'aurait pas de loi 101, M. le Président. Puis, s'il aurait fallu
attendre après le Parti libéral, là, on n'aurait pas eu de réforme des
institutions démocratiques qui fait en sorte qu'on a assaini les moeurs
électorales au Québec avec Robert Burns, un autre grand du Parti québécois.
Alors, je dis
aujourd'hui et je le répète haut et fort, je suis de ce
côté-ci de la Chambre, mais il y a une chose que je reconnais : un gouvernement légitimement élu qui amène un projet de loi qui n'est pas révolutionnaire, mais qui indique très clairement qu'au Québec on a le droit de faire des choix,
c'est légitime, c'est un débat nécessaire. Nous allons collaborer à ce projet
de loi, et je trouve
que cette motion m'apparaît comme une mesure qui vise à disqualifier la
démarche de la Coalition avenir Québec. Et moi, je ne participerai pas à
ce genre de procès qui précède l'exercice qu'on va faire en commission
parlementaire.
Alors, je
suis heureux de pouvoir vous livrer ma position, celle de ma formation politique, mais je
ne souhaite pas participer à ce genre
d'échange. Le Parti québécois va collaborer pour adopter une bonne loi, la
meilleure possible. Et retenez une
chose, M. le Président, le Parti
québécois, sous mon leadership
par intérim ou pour le reste du mandat, sera une force de collaboration, pas une force d'obstruction parce
que le Québec peut, le Québec est
capable et le Québec fera ses choix,
et c'est les députés de l'Assemblée
nationale qui vont décider, pas les
tribunaux, pas les groupes de pression. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je
cède maintenant la parole à M. le député de Rousseau.
M. Louis-Charles
Thouin
M. Thouin : M. le
Président, comme parlementaires, on a parfois des dossiers délicats à traiter. C'est notre rôle
en tant qu'élus de représenter les citoyennes
et les citoyens du Québec et de collaborer le plus possible entre partis afin
de prendre des décisions le plus près possible des valeurs des Québécois et de
le faire avec sensibilité.
Le parlementarisme comme nous le pratiquons
présentement est un élément essentiel à toute saine démocratie. La démocratie, on le sait, ce n'est pas seulement
aller aux urnes aux quatre ans. La démocratie, elle s'exerce à chaque fois que des citoyens s'expriment publiquement sur
un enjeu, à chaque fois que des élus prennent le temps de les écouter. La démocratie, nous l'exerçons chaque jour ici, à
l'Assemblée nationale du Québec, quand on discute avec nos collègues respectifs en caucus, quand on se rencontre pour
des séances de travail, quand on se met à discuter dans un corridor entre
élus de différents partis pour tenter de trouver un terrain d'entente. La
démocratie, nous l'exerçons en commission parlementaire
quand on rencontre des citoyens et des groupes, lorsque nous travaillons tous
ensemble en étude détaillée des
projets de loi. Et, bien sûr, c'est probablement ce que la population connaît
le plus de notre travail, la démocratie, nous l'exerçons à chaque fois
que nous entrons ici, dans le salon bleu.
Ici même
s'exerce la démocratie depuis le 27 avril 1886. Avant nous,
41 législatures ont siégé dans cette salle. M. le Président, depuis 133 ans, les élus du peuple du Québec se
réunissent ici pour discuter et débattre des enjeux qui concernent les Québécois. Il y en a eu, dans ce
salon, des désaccords, des sujets délicats débattus, des moments où la tension
était palpable. Mais, dans ce salon, il y a
surtout eu, je crois, des moments fort heureux, des lois qui ont été votées et
qui ont profondément changé la
société québécoise et amélioré la vie des gens. Il y a eu, M. le Président, des
applaudissements, des accolades et de la franche camaraderie.
• (16 heures) •
En bref, M.
le Président, depuis 133 ans, ce salon bleu est devenu, tout comme le
reste du Parlement, le symbole de la démocratie. Et, je crois parler
pour l'ensemble de mes collègues ici présents, c'est un privilège et un honneur
d'y entrer à chaque jour pour y exercer
notre devoir de parlementaires. C'est ce que nous faisons aujourd'hui en discutant de cette motion présentée par la députée de Marguerite-Bourgeoys.
M. le Président, j'ai fait un long préambule sur la démocratie et sur la façon dont
nous l'exerçons. Une fois cela dit, il y a des évidences. Nous allons entendre
différents groupes en commission. Nous allons faire l'étude et l'analyse du projet de loi ici, à l'Assemblée nationale. Nous le faisons toujours. J'ai pu constater, M. le Président, la bonne foi de mon gouvernement lors de ces exercices où il n'est pas rare qu'un amendement inspiré par
des rencontres avec des groupes consultés
se glisse dans un projet de loi à l'étude et il n'est pas rare que nous ajustons
en fonction des réalités de ces groupes. Mon gouvernement est conscient
de l'importance de traiter avec sensibilité les différents sujets qui composent
nos projets de loi. M. le
Président, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys parle, justement, dans sa motion du caractère
sensible du projet de loi n° 21. Je lui réponds ici que tous les élus ont des responsabilités face à
un projet de loi sensible. Oui, il revient aux élus du gouvernement d'assumer leurs responsabilités et d'écouter la population.
Mais cette responsabilité d'être à
l'écoute ne doit pas se limiter uniquement au gouvernement, elle doit aussi
être partagée par nos collègues de l'opposition, eux aussi des élus, qui
doivent donc être à l'écoute des Québécois.
Depuis
plus de 10 ans, la population s'est prononcée en faveur de la laïcité à maintes
reprises. Il y a plus de 10 ans, après — et j'insiste sur ce fait, M. le
Président — 31 jours
d'audiences publiques, la Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences
culturelles, mieux connue sous le nom de la commission Bouchard-Taylor, déposait son rapport final de 310 pages
ouvrant la voie à des pistes de solution pour le Québec. Cette commission a
fait couler beaucoup d'encre depuis. On en parle encore
aujourd'hui comme si c'était hier. On oublie que cette commission historique est désormais âgée de plus de
10 ans tellement elle est encore proche des Québécois dans l'imaginaire
national. On ne parle pas ici d'un enjeu mort, on parle d'un enjeu qui
suscite toujours des débats chauds. Pourtant, depuis Bouchard-Taylor, la volonté des Québécois d'en arriver à une solution
sur le plan des accommodements religieux et de la laïcité de l'État est restée lettre morte. Plusieurs tentatives
d'accomplir cette volonté ont été effectuées, mais toujours sans succès. Le Parti québécois a présenté, en
novembre 2013, le projet de Charte affirmant les valeurs de laïcité et de
neutralité religieuse de l'État ainsi que
d'égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes
d'accommodement. Le gouvernement
péquiste de l'époque avait refusé la main tendue de la CAQ, qui proposait une
position de compromis inspirée du
rapport Bouchard-Taylor, en fait la même proposition qui fait l'objet du
présent projet de loi. M. le Président, nos collègues libéraux ont, eux aussi, échoué à plusieurs reprises
depuis 2008 à régler ce dossier. La loi n° 62 constitue le
dernier échec en liste, une loi dont l'application est actuellement en partie
suspendue par les tribunaux.
La CAQ a été élue
pour réussir où les autres ont échoué. Nous défendons la même position de
compromis depuis 2013. L'heure est venue de
poser un geste d'affirmation en faveur de la laïcité de l'État et, enfin, de
tourner la page. M. le Président,
après nous être dotés d'un État résolument francophone en 1977, nous allons,
42 ans plus tard, nous doter d'un
État résolument laïque. Il s'agit
d'une autre affirmation de notre caractère distinct à l'échelle canadienne et
nord-américaine.
Dans
cette motion, M. le Président, la députée affirme que «ce projet de loi
nécessite que les parlementaires puissent entendre en commission parlementaire les différents points de vue
exprimés dans la société et qu'ils puissent par la suite en faire l'étude et l'analyse dans un délai
raisonnable». Comme je l'ai mentionné au cours des dernières minutes, depuis
plus de 10 ans les Québécois ont
eu maintes occasions de s'exprimer sur le sujet, et l'Assemblée nationale et
les précédentes législatures ont accordé
beaucoup de temps à consulter la population. Je le répète encore une fois, en
2007, M. le Président, 31 jours
d'audiences pour Bouchard-Taylor, un rapport de 310 pages, 310 pages.
En 2010‑2011, 90 heures pour le projet de loi sur les accommodements. En
2014, 13 journées, 70 heures pour la charte des valeurs. En 2016‑2017,
75 heures de débat sur le projet
de loi n° 62. Les Québécois se sont exprimés. Les Québécois sont en faveur
de la laïcité et appuient massivement le projet de loi
n° 21.
En ce qui concerne le
caractère sensible de ce projet de loi, j'aimerais rappeler à ma collègue de Marguerite-Bourgeoys
que la laïcité n'est pas un droit en soi, mais plutôt
un régime d'organisation des rapports entre les religions et l'État. La laïcité telle que définie dans
le cadre du projet de loi repose sur
quatre principes qui devront être considérés en concordance : d'abord, la séparation de l'État et des religions;
deux, la neutralité religieuse de l'État; trois, l'égalité de tous les citoyens
et citoyennes; et quatre, la liberté de conscience et la liberté de religion.
Le modèle québécois de laïcité qui
est proposé tient compte de l'histoire, tient compte des valeurs sociales et de
la spécificité du Québec, notamment en privilégiant
un équilibre entre les droits collectifs et les droits individuels. M. le
Président, avec le projet de loi, la charte québécoise sera modifiée
pour inclure l'importance fondamentale que la nation québécoise accorde à
laïcité et pour clarifier que les libertés
et droits fondamentaux s'exercent dans le respect des valeurs démocratiques,
dont la laïcité de l'État. Ces
dispositions vont notamment aider les juges à revoir leurs interprétations de
la jurisprudence relative à la liberté de conscience et de religion à la
lumière de ces nouvelles considérations interprétatives.
Le
projet de loi traduit, certes, dans la loi le caractère distinct de la société
québécoise dans l'ensemble canadien. En
aucun cas, cependant, il ne s'avère antireligieux ou ne brime les droits des
minorités ethnoculturelles. Le projet de loi rappelle plutôt la
nécessaire interaction, au Québec, entre la laïcité de l'État et la liberté de
conscience et de religion. Il n'appelle pas
à une hiérarchisation des droits, mais à une complémentarité fondée sur les quatre
principes de la laïcité et impose ainsi la recherche d'un point
d'équilibre entre les droits individuels et l'intérêt collectif. L'un de ces
quatre principes est la liberté de
conscience et de religion. Cette liberté est donc une partie intégrante du
concept même de laïcité. L'affirmation de la laïcité dans la charte
québécoise consacre une fois de plus le Québec comme société distincte à l'échelle canadienne et nord-américaine.
L'affirmation de la laïcité dans la charte québécoise consacre en définitive le
droit de chacun d'exprimer ses croyances ou non croyances dans le respect de
celles des autres.
M. le Président, il est prévu dans le projet de
loi de faire appel à la clause dérogatoire. Je sais que la simple mention
de cette clause fait frémir les membres de
l'opposition. Je sais qu'ils y voient une insensibilité de la part du
gouvernement. J'aimerais prendre un moment pour faire un peu de
pédagogie sur cette clause parce que l'incompréhension de ce qu'elle représente contribue à nourrir les contestations
envers ce projet de loi. L'utilisation des clauses de dérogation assure la capacité du Parlement de légiférer au nom de
l'intérêt collectif de la population qu'il représente sans subséquemment
avoir à soumettre son projet de loi à celui
des juges. Un choix aussi fondamental, spécifique au Québec et qui interpelle
les questions de vivre-ensemble et de
cohésion sociale ne pourrait pas être arrêté, en définitive, par neuf juges de
la Cour suprême du Canada, dont
seulement trois sont Québécois. Il est de juridiction québécoise d'encadrer le
rapport entre l'État et la religion.
Le Parlement est le forum le plus apte à forger un compromis social sur cette
question. L'utilisation des clauses dérogatoires
est perçue à tort comme une mesure exceptionnelle. Les dispositions
dérogatoires ont été utilisées plus d'une centaine de fois dans plus de 40 lois distinctes. Si ces clauses
ont été inscrites dans les chartes, c'est pour qu'on les utilise. L'objectif
est de mettre autant que possible la loi à l'abri de contestations judiciaires.
• (16 h 10) •
En
ce qui concerne la Charte canadienne, la dérogation est valide pour une durée
maximale de cinq ans et doit conséquemment être réintroduite au bout de
cette période, ce que nous n'hésiterons pas à faire dans un éventuel deuxième mandat. La clause dérogatoire est un
outil légitime à notre disposition. Nous ne sommes pas gênés de marcher dans les traces des Lévesque, Bourassa et autres
premiers ministres qui l'ont invoquée avant nous, d'autant plus, M. le Président, que la laïcité fait partie de
l'histoire du Québec. L'idée de la séparation de l'État et des églises figurait
dans les demandes des Patriotes dès 1838. Le principe a, par la suite,
été défendu par l'Institut canadien avec des Papineau, Dessaulles, Doutre et Buies. Plus tard, le premier ministre Adélard
Godbout, soutenu par son ministre Télesphore-Damien Bouchard, défendra
l'indépendance de l'État, accordera le droit de vote aux femmes
et adoptera une loi sur l'instruction obligatoire. La laïcité
fut aussi un des combats de la Révolution tranquille. En 1975, le Québec
adopte la Charte des droits et
libertés, qui reconnaît la liberté de conscience et l'égalité des religions,
deux notions essentiellement laïques, et récemment la
déconfessionnalisation des structures scolaires a été complétée.
M. le Président, le projet de loi n° 21 s'inscrit dans la longue marche du peuple québécois
vers la laïcité de l'État. Il respecte les valeurs du Québec, notamment la fondamentale égalité hommes-femmes. M. le Président, le Québec est un
État laïque, c'est un fait, son parcours historique en témoigne. Le Québec
est mûr pour affirmer cette valeur fondamentale dans ses lois, et c'est
ce que nous faisons.
J'ai
commencé mon allocution en parlant de l'importance de la démocratie,
de l'importance du travail que l'on fait. M. le Président, j'aimerais aujourd'hui que l'opposition officielle écoute aussi la population du Québec.
Ce n'est pas le temps de faire des déclarations
sensationnalistes, c'est le temps de travailler ensemble dans le respect pour
régler ce dossier cher, très cher aux Québécois.
M. le Président, je
crois qu'effectivement la Charte des droits et libertés de la personne, telle
qu'adoptée par l'Assemblée nationale en 1975, est assez unanime et consensuelle au Québec,
pas seulement au point
de vue des libertés individuelles, mais bien sur tous les points de vue. Je tiens d'ailleurs à débuter en citant l'article 3 de la
partie I de la charte, car je
crois qu'il s'agit du sujet vers lequel la députée de Marguerite-Bourgeoys veut nous amener. Ça va comme suit, donc : «Toute personne
est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la
liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, la
liberté de réunion pacifique et la liberté d'association.»
Je
me permets également de citer l'article 10, qui se trouve à être dans le même esprit : «Toute personne a
droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et
libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence
fondée sur la race, la couleur, le sexe, l'identité ou l'expression de genre,
la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état
civil, l'âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les
convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la
condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce
handicap.» Bien honnêtement, absolument personne à l'Assemblée
nationale ne peut sous-entendre que d'autres parlementaires ne seraient pas favorables aux articles qui viennent
d'être évoqués. Nous sommes tous pour l'inclusion, nous sommes tous pour l'égalité, et la liberté des individus est
une valeur fondamentale que nous devrons toujours défendre en tant que société.
Nous savons, ce ne sont pas toutes les
sociétés dans le monde qui ont la chance d'avoir les droits dont il est
question. Nous nous devons, en fait, d'être reconnaissants et conscients
des privilèges que nous avons.
Par
ailleurs, le projet de loi n° 21 vient baliser certaines situations
conflictuelles concernant le personnel de la fonction publique pouvant se trouver en position
d'autorité. Selon nous, cette proposition est tout à fait raisonnable et
respectable. Il n'y a pas lieu de
remettre en question nos engagements envers la Charte des droits et libertés de
la personne, car tout le monde vivant au Québec est et demeurera toujours libre
d'exercer sa religion. C'est pourquoi j'invite nos adversaires à se méfier de quelque forme d'exagération à
laquelle ils pourraient être tentés de s'adonner, étant donné que nous sommes
de bonne foi et que les gens sauront faire
la différence entre ceux qui tentent de faire le débat de manière constructive
et les autres qui cherchent à faire de la politique qui divise. Il s'agit d'un
débat qui s'étend sur la place publique depuis plusieurs années, et notre gouvernement est celui qui a
enfin le courage politique de mettre ce projet de loi de l'avant.
Je
suis d'accord avec le libellé de la motion à l'effet que nous devons
effectivement, en tant que parlementaires, entendre les points de vue divergents de la société afin de se faire une
tête et de prendre collectivement les bonnes décisions. Toutefois, si on
remonte un peu dans l'histoire, on se rend compte que les consultations
publiques de la commission Bouchard-Taylor
remontent déjà à plus de 10 ans. Je ne suis pas du tout d'avis que cet
exercice est à reproduire. Je crois sincèrement
que nous sommes à un point dans le débat où plusieurs gouvernements se sont
succédé sur la question avec différentes approches et chaque
gouvernement a pris le temps d'entendre à sa manière les différents points de
vue.
Le
processus législatif qui s'amorce avec le dépôt du projet de loi n° 21 est
la dernière étape donnant suite à près d'une
décennie de débats concernant les questions relatives à la laïcité au Québec.
Le débat que nous avons aujourd'hui et que nous allons continuer d'avoir
jusqu'à l'adoption du projet de loi est final et sans appel.
Finalement,
je suis fier d'appartenir à un pays
qui défend et qui défendra toujours des valeurs aussi fondamentales que le droit d'avoir les croyances religieuses de
son choix, de pouvoir pratiquer et exprimer celles-ci publiquement sans jamais
avoir à craindre les critiques ou les représailles des autres, un pays où nous
avons en fait le droit de pratiquer une religion ou non et surtout où l'État
n'impose aucune religion à ses citoyens, car il est laïque, c'est-à-dire religieusement neutre. En
effet, chaque personne est libre de ses convictions et de mener sa vie comme
bon lui semble, selon ses propres principes,
qu'ils soient philosophiques, spirituels ou religieux. Chaque personne a le
droit de penser ce qu'elle veut et de l'exprimer,
et ce, même si vous êtes en désaccord avec ses propos. Vous pouvez donc
exprimer les mêmes opinions que d'autres
personnes ou avoir des opinions contraires. De plus, les
droits dont nous bénéficions garantissent les idées et les opinions que je suis en train d'émettre à l'heure
actuelle, que ce soit de manière orale, écrite, artistique, sous forme de
discours ou même sous forme de
manifestation, comme parfois dans ce dossier-ci. Il est légitime de manifester
et de critiquer un projet de loi, c'est pourquoi il est faux d'affirmer que notre gouvernement n'est pas à l'écoute. Nous entendons et étudions les propositions des divers intervenants, tout en donnant
l'opportunité à ceux qui ont des idées ou des opinions à les faire
entendre dans l'espace public. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je reconnais maintenant Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Paule
Robitaille
Mme Robitaille : Bonjour, M.
le Président. La motion de ma collègue
aujourd'hui est importante. Ce projet
de loi n° 21 qui vise à interdire le port de
signes religieux pour les personnes d'autorité aura des conséquences très, très
sérieuses sur la société québécoise.
Ce n'est pas un projet de loi modéré, c'est un projet de loi qui enlève des
droits, qui sera
très difficile à appliquer. Ce sera une loi antiéconomique qui va à l'encontre
de la stabilité. C'est une loi qui divise, c'est une loi qui exclut puis c'est une loi qui, ultimement, va faire
fuir, fuir les immigrants, qui vont vouloir aller... en tout cas, qui ne seront pas charmés, disons-le, par le Québec
dans ce sens-là. Et donc ce n'est pas une loi qui sera très, très porteuse. C'est une loi, donc, qui restreindra des droits à une
minorité, qui va aller à l'encontre de la liberté de religion, et qui va faire ça avec une clause dérogatoire, et
qui sera probablement passée par un bâillon. Donc, c'est très, très important d'en parler et
d'en parler autant qu'on peut.
Pour
nous, il n'y a pas de menace, il n'y a pas d'urgence. Puis c'est très, très
important de le comprendre puis de
revenir sur terre, de voir ce qui se passe sur le plancher des vaches parce
que, des fois, on part dans des théories, et puis là on est complètement théoriques, on imagine des choses, et je pense
qu'il faut voir, sur le terrain, ce qui se passe. Moi, je suis la députée de Bourassa-Sauvé, c'est
Montréal-Nord. Il y a une énorme population immigrante et il y a une population musulmane. Et, au sein de cette
population musulmane, il y a des femmes, et il y a des jeunes femmes qui ont
des rêves, qui veulent devenir policières,
qui veulent devenir enseignantes. Il y a aussi plusieurs enseignantes qui sont
musulmanes dans Bourassa-Sauvé, et ce projet
de loi là aura des conséquences directes pour ces femmes-là. Et donc il
faut en parler, il faut voir qu'est-ce que ça fait pour ces femmes-là, un
projet de loi comme celui-là qui, à toutes fins pratiques, est, finalement,
inutile parce qu'il n'y en a pas, de menace.
• (16 h 20) •
Je
vais vous raconter l'anecdote d'une jeune fille dans Bourassa-Sauvé. J'étais
dans un centre communautaire pour les
jeunes, le centre communautaire L'Escale, et j'étais là, et puis il y a une
jeune fille avec une chevelure volumineuse noire qui vient me voir, une jolie jeune fille, intelligente, et puis
elle me dit : Oh! Mme Robitaille, merci d'être intervenue à la défense des femmes qui portent le voile.
Parce que c'était suite à une déclaration de la ministre des Sports et de la
Condition féminine, qui avait dit que le
signe religieux est un signe d'oppression, et moi, j'avais pris la parole et
j'avais essayé d'expliquer comment un
signe religieux n'est pas un signe d'oppression. Et alors la jeune fille vient
me voir puis elle me dit :
Madame, merci, merci énormément. Merci
parce que ça m'a fait chaud au coeur, ce que vous avez dit,
et puis c'est rare que les gens
prennent la parole pour nous. Et là je la regarde puis je lui dis : Mais
toi, tu ne portes pas le voile. Puis
elle a dit : Non, moi, je ne porte pas le voile, mais ma mère le porte, et
puis, à chaque jour, ma mère, bien, elle reçoit des insultes, et puis c'est difficile pour elle. Vous ne pouvez pas
imaginer comment c'est difficile pour elle, parce que les gens ne comprennent pas. Et vous, quand vous sortez
puis vous expliquez, bien, ça fait toute la différence et puis ça nous touche énormément. Et donc ça m'a
fait chaud au coeur puis ça m'a rendue tout émue parce que j'ai vu que, sur
le terrain, on parle, on parle, nous, les
politiciens, mais, dans la vraie vie, il
y a des gens qui écopent, il y a
des gens qui vivent les conséquences,
des fois, des décisions qu'on prend, nous. Et donc, j'ai vu que c'est important,
justement, que la réalité est autre que ce qu'on peut
s'imaginer parfois.
Je
vais vous amener un autre exemple, un exemple important, parce
que cette femme-là m'a aidé à
comprendre mieux ce qu'était l'importance de vivre sa foi en portant un voile, et c'est important
de comprendre. Je passe du temps là-dessus parce
que, justement, on ne peut pas
enlever son voile comme ça puis décider d'aller travailler. Des fois, ça fait
partie de l'individu, le signe religieux fait partie de l'individu. Moi, j'ai deux garçons, et, quand ils
étaient petits, c'étaient des pestes, c'étaient des terreurs. Alors,
toutes les gardiennes qui venaient chez nous étaient découragées et nous, on rentrait le soir, mon mari et moi, et la maison
était toute à l'envers. Alors, j'ai décidé d'aller chercher l'artillerie lourde et j'ai demandé à la chef des surveillantes de l'école de mes fils si
elle voulait venir garder chez nous. Et la surveillante a dit : Pas de problème, j'adore vos fils, je
vais venir chez vous. Alors là, j'ai fait : Ouf! Ouf! Ouf! Enfin, il y a
quelqu'un qui va me permettre de
sortir, puis je vais revenir chez nous, puis la maison va être en ordre. Et
cette femme-là, c'était une Algérienne — c'est toujours une
Algérienne — qui
porte le voile et qui est très pratiquante. C'est une femme qui est divorcée. Ses parents étaient agnostiques, ne
pratiquaient pas vraiment, et elle, en venant au Québec, a redécouvert la foi et a commencé à porter le foulard. Et avec elle,
on a eu des discussions incroyables. Et elle gardait les enfants, puis elle
faisait la prière, tout ça, et les enfants
ont vécu avec elle, elle a travaillé chez nous pendant huit ans. Et elle fait
partie, maintenant, de la famille.
C'est un peu la tante, c'est un peu ma soeur spirituelle. Et elle a vraiment
déconstruit les préjugés qu'on avait
de tout ce qui était musulman. Et cette femme-là, si cette femme-là ne pouvait
pas enseigner, si cette femme-là ne
peut enseigner, c'est une injustice flagrante. Une femme comme celle-là devrait
pouvoir donner à la société québécoise.
Et donc je pense
qu'il y a une incompréhension. Je pense qu'on aurait avantage à essayer de
comprendre un peu plus et puis de voir que,
finalement, ces femmes-là ne vont pas faire du prosélytisme, ne vont pas
convertir les étudiants. Vous savez,
moi, à l'école, c'est des soeurs qui m'ont enseigné, et puis, vous voyez, je ne
suis pas devenue une bonne soeur du tout, du tout. Et donc c'est très,
très important de se ramener à ça, de comprendre ça.
Et
donc ce débat-là est fondamental, M. le Président. De là l'importance de garder
les pieds sur terre, de garder en tête
que ce projet de loi aura des répercussions directes sur des individus, des
femmes musulmanes notamment, sur le droit fondamental à la liberté de vivre sa religion. Il faut garder en tête
que ce projet de loi, M. le Président, changera l'image du Québec. Bien plus, la société québécoise est une
société d'immigration, une société d'accueil. Avec ce projet de loi qui divise, qui est tout sauf inclusif, ce sont les
bases mêmes de notre société qui sont en jeu, et donc c'est très, très
important de faire un débat comme il se doit. Merci beaucoup.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais
maintenant M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, en vous indiquant qu'il
vous reste 5 min 30 s.
M. Alexandre
Leduc
M. Leduc :
Merci, M. le Président. On lit des commentaires, ces jours-ci, en lien avec le
projet de loi n° 21 qui cassent
du sucre sur le dos des chartes des droits. Certaines personnes dans les
milieux nationalistes et indépendantistes ont en
effet une opinion très négative des chartes. Or, la Charte canadienne n'est pas
la même chose que la charte québécoise.
J'aimerais donc profiter des quelques minutes qui sont offertes pour expliquer
la différence entre les deux chartes
et en quoi la charte québécoise est plus intéressante, et plus généreuse, et
qu'elle devrait être une source de fierté pour les nationalistes et
indépendantistes du Québec.
La Charte
canadienne existe depuis 1982, on le sait bien. Elle s'applique sur le
territoire canadien et fait partie de
la Constitution. Elle a été adoptée dans le cadre du rapatriement de cette
Constitution, et donc de la fameuse et triste «nuit des longs couteaux».
Même si le Québec n'a jamais ratifié la Constitution canadienne, la charte est
maintenant enchâssée dans la Constitution et elle s'applique quand même ici,
chez nous, au Québec.
La charte
québécoise, elle, a été adoptée en 1975, donc plusieurs années avant la Charte
canadienne. Elle n'est pas enchâssée
dans la constitution québécoise parce qu'on n'en a pas ici, de constitution
québécoise, principalement en raison
du fait qu'on n'est pas encore un pays. La charte québécoise a quand même
préséance sur les autres lois adoptées à l'Assemblée nationale, même si
on n'a pas encore de constitution. J'insiste encore une fois sur le fait que la
charte québécoise a été adoptée avant la Charte canadienne. Il faut donc
célébrer, par exemple, le fait que le Québec a été la première région
d'Amérique du Nord à avoir interdit, en 1978, la discrimination fondée sur
l'orientation sexuelle.
Comme les juristes fédéraux se sont largement
inspirés de la charte québécoise pour rédiger la nouvelle Charte canadienne, le contenu des deux chartes est
assez semblable, mais il y a quand même des différences de fond et de forme entre les deux documents. Sur le fond, la
charte québécoise couvre plus de personnes. Alors que la Charte canadienne
ne couvre que les rapports entre l'État et
les individus, la charte québécoise, elle, couvre, en plus, les rapports entre
les individus. Ça fait en sorte, par exemple, que, si une personne en quête de
logement est discriminée sur la base de son orientation sexuelle, de son sexe, de sa religion ou de sa condition
sociale, par exemple, elle peut faire une plainte en fonction de la
charte québécoise, mais elle ne pourrait pas faire une plainte en fonction de
la Charte canadienne.
Sur la forme, maintenant, la plus importante
différence concerne la manière de modifier la charte. La Charte canadienne est
très difficile à modifier. Il faut en effet passer par la formule 7-50,
c'est-à-dire avoir l'approbation de sept
provinces comptant pour au moins 50 % de la population du Canada. C'est
très complexe et, dans les faits, ça rend très difficile l'expression de la collectivité québécoise. À l'autre
extrême, la charte québécoise est peut-être un peu trop facile à
modifier. Un simple vote à majorité ici, au salon bleu, peut revenir jouer dans
les droits fondamentaux des Québécois et
Québécoises. Un maigre 63 députés suffit pour retirer des droits à
l'entièreté du Québec. Ce n'est pas banal.
Alors qu'on
s'apprête à voter une loi qui va faire en sorte de nommer le directeur de
l'UPAC, de la SQ et du DPCP aux deux
tiers des membres de l'Assemblée, c'est quand même ironique de voir que le
gouvernement de la CAQ s'enligne pour
modifier la charte québécoise à simple majorité et peut-être même sous bâillon.
Même si QS est d'accord sur le fond avec
la modification à la charte prévue par le projet de loi n° 21,
nous croyons en effet que de le faire à la majorité simple de cette
Assemblée est une avenue glissante qu'il faut à tout prix éviter. Lorsque le
Québec sera un pays, on aura l'opportunité
de réviser le contenu de la charte québécoise pour renforcer l'application de
certains droits ou pour en ajouter des nouveaux. On pourra faire ça dans
le cadre d'une nouvelle constitution de la république du Québec. Ce sera aussi l'occasion de prévoir un mécanisme de modification
de la charte québécoise pour qu'on puisse la réviser plus facilement que la Charte canadienne, mais tout en ayant un
cran de sûreté plus solide qu'un simple vote majoritaire ici, au salon bleu.
En conclusion, la protection des droits prévue
dans la charte québécoise est et devrait être une source de fierté pour l'ensemble des Québécois et
Québécoises, particulièrement les nationalistes et les indépendantistes. Et,
dans le cadre du présent débat et des
autres à venir, je nous invite, tout un chacun, à cesser de parler de la charte
à Trudeau, la Charte canadienne, et à
davantage chérir, défendre et mettre en valeur notre charte québécoise des
droits et libertés de la personne. Merci, M. le Président.
• (16 h 30) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député. Je cède la parole à M. le député de Portneuf.
M. Vincent Caron
M. Caron :
Merci, M. le Président. M. le Président, la Loi sur la laïcité de l'État que
notre gouvernement désire voir
adoptée n'est pas l'aboutissement d'une consultation populaire, ses opposants
ont bien raison là-dessus. Au lieu d'une démarche supplémentaire
prétendant posséder la science infuse de ce qui compose le désir personnel des
8 millions d'habitants de cette province, il symbolise l'essence même des valeurs
du Québec. Ces valeurs, nous les vivons, toutes
et tous, au quotidien et nous voulons que chaque citoyen chasse... sache,
pardon, qu'elles sont également codifiées. Pour y parvenir, nous
choisissons la manière la plus simple, celle du mandat décisionnel qui nous est
conféré par la population, que nous, députés, représentons.
M. le Président, nous ne sommes pas ici cet après-midi pour discuter en détail du
contenu, du fond, des détails du projet de loi, nous sommes ici pour défendre son existence. Ce projet de loi constitue un enjeu de société dans son essence avant même qu'il soit question de débattre de ce qu'il contient. Ce projet de loi se discutera, se révisera, se défendra. Nous avons le temps de le faire. Ce dont nous parlons
ici, M. le Président, c'est du fait que nous ne pouvons pas différer
éternellement la date de son adoption.
Ce projet de loi, M. le Président, constitue un véritable enjeu de société.
Le débat sur la laïcité est probablement l'un de ceux qui préoccupent le plus les Québécois
et les Québécoises actuellement. Ce débat a lieu depuis des années. C'est à ce débat que la commission
Bouchard-Taylor avait déjà tenté de répondre en 2008. Ça fait plus de 10
ans. Et, en 10 ans, qu'avons-nous
fait, qu'ont fait nos opposants politiques? Rien de concret. Qu'ont fait les libéraux, les
péquistes lorsque, tour à tour, ils
étaient au pouvoir? Rien, M. le
Président. Des tentatives avortées,
des questions sans réponse, de grandes idées, de grandes intentions, mais aucune action.
Les Québécois et les Québécoises attendent des réponses depuis trop longtemps. Or, personne n'a répondu à l'appel, n'a même
daigné donner la moindre explication. Ce projet
de loi, c'est enfin une
réponse, c'est la réponse qu'attendent nos concitoyennes et concitoyens.
Le
principe de la laïcité est un principe important du monde occidental,
et personne ne peut contester ce point. Même nos adversaires politiques sont d'accord sur ce principe. Il ne s'agit d'ailleurs
pas d'un simple principe, mais d'un véritable
pilier. Le problème, M. le Président, ne réside pas dans la reconnaissance de ce
principe de laïcité, mais bien dans son application pratique. Ce défi pratique, c'est à ça que tente de
répondre notre nouveau gouvernement par l'adoption
de ce projet de loi. Il s'agit aujourd'hui d'apporter des réponses concrètes, des solutions pratiques afin de
trouver les moyens de faire respecter
un principe qui rejoint toutes nos concitoyennes et tous nos concitoyens. M. le Président, la laïcité n'est pas
un débat québécois, elle est un débat mondial, et particulièrement dans le monde occidental, en Europe, aux États-Unis.
Désormais, de très
nombreux pays sont confrontés à la question du vivre-ensemble. Or, le vivre-ensemble,
M. le Président, c'est l'assurance qu'on puisse être respecté
dans ce que l'on est, mais aussi dans ce auquel on croit. Le Québec
est désormais une province aux cultures plurielles, aux valeurs plurielles, aux
enjeux pluriels. Or, quelle est la seule
manière de s'assurer que tous les Québécois et les Québécoises puissent être respectés dans leurs valeurs et
dans leurs croyances? C'est de leur
permettre d'être considérés, toutes et tous, sans exception, peu importe qu'ils
croient ou qu'ils ne croient pas, peu
importe qu'ils pratiquent ou qu'ils ne pratiquent pas, peu importe qu'ils ont
envie de s'exprimer ou pas, et pour
cela, M. le Président, il faut leur garantir un État qui les protège,
qui, en affirmant de telles valeurs, s'engage à les respecter,
finalement un État juste, un État laïque.
Cependant,
dans le domaine du vivre-ensemble, le Québec a toujours fait office de précurseur, il a toujours
été un exemple pour les autres
provinces, pour les autres pays. C'est le Québec qui, parmi les
premiers, s'est prononcé pour défendre
le droit au mariage libre pour toutes et tous, c'est le Québec
qui, aux côtés du Manitoba, a été la première province canadienne à se préoccuper de l'indemnisation de
ses victimes, cela, M. le Président, parce que le Québec défend depuis toujours
les valeurs de la liberté mais aussi celles de l'égalité. Mais, M. le Président, la liberté et l'égalité ne vont jamais l'une sans l'autre, elles sont les deux piliers d'un même
édifice social. À laisser s'exprimer les libertés, on touche en plein coeur le droit à l'égalité. À imposer à tous
l'égalité, on restreint pour toujours la liberté. Ce projet de loi tient compte
de l'équilibre délicat sur lequel doivent
reposer ces deux principes, M. le Président. Il est la proposition qui permet,
en considérant les nécessaires libertés, de garantir le respect de
l'égalité au Québec.
Mme la Présidente, la motion présentée par la députée de Marguerite-Bourgeoys n'est pas
conforme à la réalité, et c'est bien
dommage. Certains propos relatés dans les médias déforment la portée, les
modalités et même le principe intégral
au texte du projet de loi n° 21. Le libellé de la motion dont nous débattons aujourd'hui forcerait le gouvernement
à prétendre pouvoir prédire le futur. La volonté
du peuple québécois se traduit par la légitimité que possèdent au Parlement
les députés, qui représentent tous les
citoyens. Je fais partie de ces gens, qui ont le devoir démocratique de se
faire la voix du peuple. J'ai
l'honneur de parler au nom des Portneuvois, qui me disent sans cesse : Ne
lâchez pas. J'ai à coeur leurs intérêts
politiques, qu'ils aient décidé de m'appuyer aux urnes ou non. Nous devons donc
faire confiance au processus démocratique auquel nous avons tous choisi
de nous conformer. Certes, certaines modifications au règlement de l'Assemblée nationale peuvent être effectuées de temps à autre afin de
faciliter et d'accommoder le processus législatif à de nouvelles
réalités. Ce que propose ici la députée de Marguerite-Bourgeoys, par contre,
serait de faire fi d'un mécanisme dont nous nous sommes dotés, en tant que
parlementaires, afin de bien transporter la volonté du peuple.
Nous
croyons sincèrement en la qualité intrinsèque de notre projet de loi sur la laïcité de l'État, nous ne comptons pas reculer. Mme la
Présidente, la motion d'aujourd'hui comprend le mot «bâillon». Spécifiquement,
et je cite, «elle demande au gouvernement caquiste de permettre aux parlementaires de procéder à l'étude du projet de loi n° 21, sans imposer un bâillon législatif à la
fin de la présente session parlementaire».
Premièrement,
depuis le début de la 42e législature, l'opposition utilise le syntagme «gouvernement caquiste», encore et encore, lorsqu'il veut parler de notre gouvernement,
le gouvernement de tous les Québécois et de toutes les Québécoises. Il n'y a rien de péjoratif à l'adjectif «caquiste», bien au
contraire, mais il serait plus juste pour nos collègues des groupes parlementaires formant les oppositions
de simplement désigner le gouvernement par ce mot. Qu'ils désirent y adjoindre une
quelconque épithète, c'est leur choix. Un jour, prochainement, on l'espère, nos
collègues réaliseront que le nouveau gouvernement est également le leur et que, s'ils perpétuent un discours de division
partisane, ils ne font qu'encourager le morcellement de la confiance des
citoyens envers leurs représentants élus et favorisent, malheureusement,
l'apathie.
Cela
dit, Mme la Présidente, bien que la forme de la motion pourrait être
davantage critiquée, attardons-nous, un instant, sur son fond. Nous comprenons que la députée de Marguerite-Bourgeoys, au nom de sa formation politique, le Parti libéral du Québec,
associe le concept de procédure d'exception à quelque chose de nécessairement
négatif, puisqu'elle propose de ne pas y
recourir. Il est évident que tous les groupes parlementaires privilégient
l'harmonie et le consensus. Aucun gouvernement, par le passé, n'avait comme objectif initial une dérogation pour faire
avancer efficacement l'agenda
législatif. Tous préféraient l'approche, au départ, d'un dialogue aboutissant à
un consentement unanime, et votre nouveau gouvernement n'y fait pas
exception.
Dans
un monde idéal, nous serions en mesure de dialoguer entre parlementaires et
d'entendre les groupes invités à venir
se prononcer sur les enjeux du projet
de loi en commission parlementaire. C'est encore notre but. Les commissions parlementaires sont l'endroit
tout désigné pour débattre, dans le fond, de chaque initiative législative
article par article, et le Québec
détient un fort historique de temps passé en commission. Ceci ne changera pas.
Comme l'a déjà répété à maintes reprises le leader du gouvernement, toutes les parties
prenantes agissent de bonne foi dans l'étude de chaque projet de loi.
Il
est, par contre, particulier, Mme la Présidente, que l'on discute aujourd'hui
d'une éventualité future, alors que les
députés n'ont même pas encore eu l'occasion de s'asseoir en commission
parlementaire pour échanger sur le projet de loi. Le libellé de la motion présume donc d'une
situation qui, bien qu'envisageable au niveau de la procédure parlementaire,
est très loin d'être une certitude.
• (16 h 40) •
En parlant des
procédures prévues au règlement de l'Assemblée nationale, il faut prendre avec
beaucoup de prudence cette mesure, car ce
qu'il est convenu d'appeler un bâillon est une interpellation d'une démarche de
l'Exécutif. Par exemple, la tenue
d'une séance extraordinaire pour l'adoption d'un projet de loi en dehors du
calendrier, en dehors des règles et
procédures habituelles, mais d'un commun accord entre les partis ne pourrait
pas être considérée comme un
bâillon.
Mme la Présidente, je vous souligne à titre indicatif seulement que, depuis 1985, le
Parti québécois a eu recours à cette mesure 70 fois.
Le Parti libéral du Québec, quant à lui, a eu recours à cette procédure
85 fois.
L'estimée
collègue de l'opposition auteure de la motion d'aujourd'hui est membre d'un parti qui a utilisé un bâillon 85 fois dans l'ère moderne de l'Assemblée nationale, depuis que nous avions apporté des changements au
règlement au milieu des années 1980. Ceci, Mme la Présidente, ce sont les faits. Ces chiffres ont été vérifiés par le Service de
recherche de la Bibliothèque de l'Assemblée nationale, qui a accès à
toutes les sources officielles et les documents statistiques. Nous ne porterons pas de jugement de valeur sur le
nombre de cas de procédure d'exception. Nous nous contentons de vous dire que nous privilégions les procédés
habituels, qui recherchent le consensus. Les analystes politiques auront la chance de commander... de commenter, pardon, ce
que l'ancien gouvernement a fait lorsqu'il fut confronté à l'adoption de projets de loi à la fin de l'échéancier, et c'est leur prérogative. Nous avons décidé,
en avril 2019, il y a exactement 10 ans, de modifier le règlement afin
d'empêcher qu'une multitude de projets de loi soient adoptés par procédure législative
d'exception. Depuis ce temps, un seul projet de loi peut être lié par mesure. Peut-être
que la députée de Marguerite-Bourgeoys sera amenée à se prononcer sur les raisons
derrière les 85 fois où le bâillon fut exposé par les libéraux dans
le passé récent, mais je ne saurais commander... commenter, pardon, le futur
proche.
Nous
avons choisi d'exclure l'influence de la religion des lois démocratiques dont nous nous prémunissons. Par
exemple, le droit à l'avortement a subi et continue de subir des pressions de
la part des détracteurs religieux, et auparavant
c'était l'accès aux contraceptifs. Il serait
désormais hors de question que nous revenions sur la loi autorisant, par exemple, l'interruption volontaire de
grossesse. Cela en va du respect et de l'égalité de la femme et du principe de
laïcité, qui est déjà en place dans l'aspect des soins de santé. Nous
voulons l'étendre formellement à toutes les sphères du gouvernement.
Mme la Présidente, l'État a un devoir de neutralité. Tout le monde est bien d'accord,
ce principe nous est hérité du siècle
des Lumières, et personne n'oserait contredire son fondement. Et, les
interdictions, tout le monde les connaît. On en vit à chaque jour, des interdictions. Pourquoi voudrions-nous en
ajouter? Pourquoi le gouvernement voudrait-il enfreindre nos droits et libertés? Vous avez sûrement
entendu ces arguments. L'opposition les ressasse ici, en Chambre, et ils sont distribués sur les médias sociaux. Certaines personnes
s'imaginent donc à tort que nous n'avons rien de mieux à faire que d'entraver
activement le loisir des gens. C'est faux, c'est complètement faux.
La
mondialisation et le contexte actuel font qu'il est désormais
essentiel que nous mettions à l'écrit ces principes. Nous voyons que des pays beaucoup plus populeux
que le nôtre ont déjà légiféré en ce sens — la France, la Belgique et la Suisse, par
exemple. Nous possédons des lois et
des politiques publiques qui sont en place dans le but
d'empêcher des discours haineux et
toute forme de répression ou de persécution des minorités. Nous avons légiféré
afin de nous prémunir contre la
discrimination dans le monde du travail. Votre gouvernement vous défend
ardemment et entendra toujours le faire.
Pour y arriver, des balises sont en place pour que chacun et chacune sachent ce
que la collectivité attend de l'individu.
Certes,
les libertés individuelles demeureront à jamais au centre de nos
préoccupations. Il a été démontré par des fins penseurs politiques modernes que ces libertés individuelles ne sont
pas à l'opposé de notre pensée libérale, y compris au sens «multiculturalisme». Les droits
individuels ne sont pas incompatibles avec les principes fondamentaux de notre
société, Mme la Présidente. La laïcité de l'État en fait partie.
Je
vous disais un peu plus tôt que le concept de neutralité, lorsque
nous parlions de l'État, pouvait paraître flou pour certains. Le signifié de ce mot, pour reprendre la distinction
sémantique qu'en fait Fernand de Saussure en linguistique, possède un sens pour tous les locuteurs du français.
Ce concept de neutralité existe dans nos têtes, qu'il se retrouve ou non physiquement dans la réalité, et est déterminé en opposition
avec les autres concepts. Nous pouvons ainsi déduire qu'au concept de
neutralité, qui se veut, par définition, un effacement ou la non-promotion de
quelque motif, nous pouvons y apposer un concept tel que la partialité ou
encore l'ingérence, le parti pris.
Nous
voulons prouver hors de tout doute que notre gouvernement s'efforce d'être
au-delà de tout soupçon. Nous avons la responsabilité indéniable d'être
impartiaux et de prendre les meilleures décisions au nom du peuple.
Voici
un exemple probant pour bien situer le concept de
neutralité. Imaginez un enfant, il peut être catholique, musulman, Juif, bouddhiste, hindou. Il peut être
athée aussi, car la laïcité englobe aussi les athées. Elle se veut neutre,
encore
une fois. Elle ne fait pas la
promotion d'une religion en particulier, mais elle ne l'interdit pas non plus
dans la sphère privée. Alors, prenez
cet enfant, qui est exposé, en grandissant, à une religion particulière.
Lorsqu'il va à l'école publique, cet
endroit représente pour l'enfant un lieu d'émancipation où aucun signe ne
devrait lui faire croire que l'État supporte une religion en faveur
d'une autre.
La
neutralité, bien qu'elle soit en retrait, vu l'obligation qu'elle a à ne pas
prendre part à la partisanerie, se doit d'agir concrètement pour être
préservée. Mme la Présidente, le but n'est pas d'évacuer la personnalité propre
des individus de la sphère publique. Nous ne
voulons aucunement édulcorer la société pour créer un État robotique. Nous
devons composer avec les identités
multiples des membres qui composent nos communautés et qui prennent part à la
fonction publique. Ce que nous désirons promouvoir se veut un compromis
par lequel une distinction nette existe entre la responsabilité de neutralité
religieuse de l'État québécois, et c'est l'individualité de ses représentants.
Le désir de
la majorité des Québécois et des Québécoises est d'aller de l'avant dans ce
dossier. Il serait contre leur
volonté que d'éviter indéfiniment l'attente qui précéderait l'adoption, en
Chambre, de ce projet, édifiant pour le collectif de la société du Québec. Loin de moi l'idée de
présumer de l'intention de mes collègues ou de vouloir prédire le résultat
d'un... le résultat, pardon, éventuel d'un vote sur ce projet de loi tel que
nous le connaissons actuellement.
À l'opposé de
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, donc, je ne prétends pas connaître le
futur. J'espère uniquement que nous ne retournerons pas vers le passé.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, je suis
prête à reconnaître un autre intervenant. Pour votre information, il
restait seulement quelques secondes.
Alors, je
peux tout de suite passer maintenant au droit de réplique de Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys. La parole est à vous.
Mme Hélène David (réplique)
Mme
David : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Écoutez,
malheureusement, je ne me souviens plus du nom de la circonscription du
député qui vient de parler.
Une voix : ...
Mme
David : Portneuf. Ah! oui, Portneuf, où il y a la maison de Mme
Plamondon. J'étais allée à l'inauguration, avec Luc Plamondon, dont on célèbre évidemment Starmania... On va
essayer d'avoir un peu de divertissement dans ce dossier quand même très
sérieux, très lourd. J'ai pris tellement de notes et j'ai tellement été citée
souvent comme députée de Marguerite-Bourgeoys
par le député de Portneuf que je n'ai jamais aussi souvent entendu,
effectivement, «la députée de Marguerite-Bourgeoys». Alors, ça m'a donné
le goût de revenir à quelque chose.
Pensez-y deux
secondes, Mme la Présidente. «La députée de Marguerite-Bourgeoys». Alors, qui
est Marguerite Bourgeoys? Alors, j'ai
seulement un petit 10 minutes puis je veux dire plein d'autres choses.
Mais, comme par hasard, elle est née
en 1620. Elle a immigré à ce qu'on appelait, à l'époque, Ville-Marie, qui est
devenu Montréal. Elle est morte en
1700. Et savez-vous quoi, Mme la Présidente? Elle a été la première enseignante
au Québec, la première enseignante. Il
faut le faire! On parle d'enseignement, on parle d'enlever des droits. Et je
vous supplie de faire le Google. Écoutez-moi, faites semblant de m'écouter, mais soyez sur vos appareils comme
d'habitude — bien, on
l'est tous — et puis
allez faire «Marguerite Bourgeoys».
Vous avez une photo, évidemment, d'une religieuse avec la cornette, avec
l'énorme croix, mais ça a été la
première religieuse tellement célébrée qu'on l'a béatifiée, d'une part, et que
nous, au Québec, on en a fait le nom
d'une circonscription dont je suis la députée. Ce n'est pas extraordinaire, ça?
Je suis tellement fière. Et c'est le legs, soyons sérieux, c'est le legs religieux, qu'on le veuille ou pas, tout
le monde est d'accord. Il y a un crucifix au-dessus de votre tête, Mme la Présidente, je l'ai dit. Mais,
si les religieuses n'avaient pas été là, on n'aurait pas eu nécessairement
de système d'éducation puis, savez-vous quoi?, on n'aurait pas eu de système de
santé non plus.
• (16 h 50) •
Alors, je
suis la fière, oui, M. le député, la fière députée de Marguerite-Bourgeoys, qui est une femme en plus. Et la première
députée femme au Québec a été Claire Kirkland-Casgrain, en 1961. Elle était
députée de quoi?, de la circonscription de Marguerite-Bourgeoys. Alors, je
pense qu'on parle de femmes et je pense
qu'on parle de femmes aussi dans ce projet de loi là, mais vraiment on
parle très sérieusement de femmes.
Et le député
de Portneuf... puis là ne croyez pas que je veux seulement
parler de ce qu'il a dit, mais quand
même, c'était tellement
gros de parler du droit à l'avortement, qui était équivalent à un droit à la laïcité. Moi, je vais redire les choses de l'autre façon. Le droit à l'avortement a
été tellement chaudement gagné par des luttes des femmes pour leurs propres corps... et décider elles-mêmes — et là on peut dire «sans la présence de
l'Église, sans la présence du mari» : Mon corps, mon choix. C'est en ce moment, d'ailleurs, le thème de la
Fédération des femmes du Québec, Mon corps, mon choix. Alors, d'oser faire une comparaison intellectuelle
entre le droit à l'avortement et la perte de droits qu'on s'apprête à faire
envers les femmes — le droit de s'habiller et de porter ce
qu'elles veulent — c'est
inimaginable intellectuellement. Alors, je demande un peu de rigueur intellectuelle, tout comme quand on
dit : Non, non, non, on ne veut pas évacuer la personnalité des
individus.
Je pense que
j'ai passé beaucoup de temps, dans le premier 23 minutes où j'ai parlé, à
dire : La religion fait partie de
la personnalité de... La CAQ aime beaucoup le mot «identité». La religion fait
partie de notre identité quand nous avons une religion particulière à laquelle nous adhérons, tout comme on a
d'autres valeurs, d'autres croyances, d'autres spiritualités qui font partie de notre identité. Alors, oui, on
évacue une partie de la personnalité de l'individu quand on lui demande,
entre 9 heures et 5 heures, de devenir
supposément laïque, parce que, là, on se retrouve avec un débat énorme, énorme.
Et même la cheffe de la deuxième opposition,
d'autres qui ont parlé de laïcité n'arrêtent pas parler de laïcité, de laïcité
de l'État. On en est, pour la laïcité de
l'État. Ce n'est pas ça dont il est question. C'est d'oser faire une équation
entre la laïcité de l'État et la laïcité individuelle. Ce n'est pas la même
chose du tout, du tout. Alors, quand on parle de chartes des droits et libertés, de droits des minorités,
on parle de laïcité, ou non, individuelle. Ce n'est pas la même chose. Donc,
le raisonnement qui prévaut est assez, je dirais, tordu.
«L'État
laïque passe par les personnes», a dit un intervenant. Comment définit-on une
personne laïque? C'est quoi, ça, une personne laïque? Ça n'existe pas. Un État
laïque, ça existe, puis on pourrait prendre toutes les minutes qui restent
pour dire c'est quoi, mais on ne les prendra
pas. Mais on sait que ça existe, un État laïque. Mais est-ce qu'il y a un continuum
d'une personne religieuse qui s'en va
tranquillement vers une personne laïque? Et pire que ça : le ministre de
l'Immigration a dit : On va les
laisser cheminer. Il était à la TV, il a dit ça : On va les laisser cheminer. Savez-vous quoi? Dans les
pires moments de l'oppression des
femmes par les hommes, on disait — les
hommes : Bon, elles vont finir par comprendre qu'elles doivent rester à la maison pour s'occuper
de nous, pour l'éducation des enfants. Les hommes savaient quoi penser
au nom des femmes. Alors, j'avais
l'impression que le ministre, en tout respect, disait : Je vais leur
permettre de prendre le temps de
réaliser, de cheminer, que la laïcité, c'est d'être laïques elles-mêmes — ce
qui ne veut rien dire, théoriquement — va être la lumière au bout du tunnel,
et qu'elles verront je ne sais pas quoi à la fin, un Québec extraordinaire.
Ça ne tient pas, intellectuellement, la route et
c'est ça qui me dérange. Comment peut-on créer une formule intellectuelle qui affirme que l'État laïque passe
par la personne laïque? Ça ne tient pas la route, puis je ne suis pas la seule
à le dire, il y a beaucoup, beaucoup,
beaucoup de gens qui écrivent ça. Pourquoi le marqueur social de la laïcité de
l'État passerait par le port
individuel d'un signe religieux? Le marqueur social de l'État ne passe pas par
un marqueur individuel. Ça ne tient
pas la route, ça aussi. Puis je vais pouvoir vous dire, dans les dernières
minutes, quand même des gens qui sont bien plus connaissants que moi.
Et puis je vais
continuer sur celui qui, depuis quelques jours, revient à la charge et donne sa
position : je parle de Gérard
Bouchard. Le 9 avril, il parlait d'un débat cadenassé — «cadenassé»,
c'est un cadenas — d'un
débat fermé, une absence de compromis
qui pourrait conduire «à une adoption du projet
de loi sous le bâillon — là,
ce n'est pas la députée de Marguerite-Bourgeoys, c'est Gérard Bouchard qui parle de ça, un projet de loi sous le bâillon — et à
une relance du débat», alors que tout le monde pense que, le 15 juin, on aura tous cheminé, que la vie va être extraordinaire, que la laïcité va être partout, que la religion va rester dans
nos salons, dans nos sous-sols puis dans notre douche. Ça ne sera pas le cas.
Je ne veux pas décevoir personne. Et Gérard Bouchard dit : «...[la]
relance du débat pour quelques années encore.» Pauvres vous, c'est bien
dommage, mais c'est là pour rester.
Gérard
Bouchard continue, il dit : Pour faire un projet de loi qui altère ou supprime des droits — hein, on parle d'ajouter des droits, on n'ajoute pas des droits,
ce n'est pas vrai, on supprime des droits — il faut avoir un fondement plus solide. «Selon lui, le projet de loi du
gouvernement Legault, qui invoquera des dispositions de dérogation pour le
soustraire à des articles des chartes canadienne et québécoise des droits et
libertés, ne s'appuie pas sur des "données rigoureuses".» Alors, on en parle, des données. Le premier ministre a été questionné pas plus tard que ce
matin : Sur quelles données
vous basez-vous pour dire des choses qui sont difficilement applicables ? Alors, «on entend, par exemple — et je continue M. Bouchard — que les femmes qui portent le hidjab pratiquent le prosélytisme auprès
des élèves — voyons donc! qu'il y a un lien de cause à effet entre les deux, ça n'a
aucun bon sens — que le seul fait de porter le hidjab est une forme d'endoctrinement, que ça peut traumatiser
les élèves». Bon Dieu!, justement. Bon Dieu!
Nos enfants, on les protège, supposément, de tout. Il y a une différence entre les protéger en leur
demandant de mettre un casque de ski, quand ils font du ski, pour pas qu'ils se fassent des
commotions cérébrales et l'ouverture à la diversité. Ce n'est pas du tout sur
le même niveau. Alors, il dit : «Mais rien de [ça] n'a été prouvé — cet endoctrinement. Il n'y a jamais eu d'études pour appuyer ces assertions.» C'est quand même celui qui a écrit le rapport dit Bouchard-Taylor, qui était supposé être le consensus, mais, c'est
drôle, là, on a juste ajouté, juste ajouté les enseignants et, oserons-nous
dire, les enseignantes, parce que c'est de ça dont il est question.
Alors,
Mme la Présidente, je suis très heureuse, avec mes collègues et même avec les collègues des autres partis, qu'on ait ce débat. Je sais qu'il y en a qui trouvent qu'on est un peu trop vite, qu'on en parle trop. On en
parlera jamais trop, parce qu'aux yeux de ceux qui vont perdre ces
droits-là c'est un très grave jour pour la société du Québec. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je vais
maintenant mettre aux voix la motion de Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys, qui se lit comme suit :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse l'importance de la Charte des droits et libertés de la
personne, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en 1975;
«Qu'elle reconnaisse qu'il a toujours été dans nos pratiques
de modifier la charte québécoise des droits et libertés de la personne à
l'unanimité ou à la suite d'un large consensus au sein de notre Assemblée;
«Qu'elle reconnaisse le caractère sensible du projet de loi
n° 21, présenté le 28 mars dernier par le ministre de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, qui notamment restreint la
liberté de religion de certaines personnes;
«Qu'elle reconnaisse
que ce projet de loi nécessite que les parlementaires puissent entendre en
commission parlementaire les différents
points de vue exprimés dans la société et qu'ils puissent par la suite en faire
l'étude et l'analyse dans un délai raisonnable;
«Qu'enfin, elle demande au gouvernement caquiste de
permettre aux parlementaires de procéder à l'étude du projet de loi
n° 21, sans imposer un bâillon législatif à la fin de la présente session
parlementaire.»
Cette motion est-elle
adoptée ? Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Je vous
demanderais, s'il vous plaît, d'appeler un vote par appel nominal.
La Vice-Présidente (Mme
Soucy) : M. le leader du gouvernement.
M.
Schneeberger : Oui. Mme la Présidente, je vous demanderais
de reporter le vote lors de notre prochaine période des
affaires courantes, c'est-à-dire demain, jeudi.
Vote reporté
La Vice-Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le leader adjoint.
Alors,
conformément à la demande du leader adjoint du gouvernement, le vote sur la
motion de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys sera tenu à la période
des affaires courantes de demain.
Pour la
suite des choses, M. le leader adjoint du gouvernement.
• (17 heures) •
M.
Schneeberger :
Alors, Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 5 du
feuilleton.
Projet de loi n° 13
Adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, à l'article 5 du feuilleton, M. le ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi
n° 13, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la
taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il
des interventions? M. le ministre des Finances, la parole est à vous.
M. Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Merci, Mme la Présidente. Je soumets à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 13, intitulé Loi modifiant la Loi sur les
impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions
législatives.
Ce projet de loi, Mme la Présidente, a été présenté le 26 février 2019. Il modifie 28
lois et six règlements, dont la
Loi sur les impôts, la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec et la
Loi sur la taxe de vente du Québec. Il donne
suite principalement à des mesures fiscales annoncées lors des discours
sur le budget du 27 mars 2018 et du 28
mars 2017, et donc du gouvernement
précédent. Même s'il peut sembler
singulier que nous présentions un projet
de loi qui touche au budget d'un autre gouvernement, il est nécessaire
de le faire pour que soient inscrites, dans les lois, les mesures annoncées et qui sont, dans les faits, déjà en
vigueur. Il donne également suite à des mesures fiscales annoncées à l'occasion
du point sur la situation économique et financière du Québec, présenté le 3 décembre
2018, ainsi que dans divers bulletins d'information.
Mme la Présidente, ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin d'y modifier
ou d'y introduire plusieurs mesures fiscales
propres au Québec. Ces mesures sont regroupées en différents
sujets. Je ne vous en ferai pas la présentation, de tous les sujets, aujourd'hui, à plus forte raison qu'elles ne sont pas toutes issues de nos actions,
mais permettez-moi d'en souligner quelques-unes.
Il y a, notamment : dans le cadre du crédit
d'impôt remboursable pour le soutien
aux enfants, lequel devient le crédit
d'impôt accordant une allocation aux familles, la bonification du montant
maximal pour les deuxième et troisième enfants
et l'assouplissement des critères d'admissibilité au supplément pour enfants
handicapés nécessitant des soins exceptionnels;
2° l'instauration d'un crédit d'impôt
remboursable pour le soutien aux aînés;
3° la
bonification de certains crédits d'impôt visant à améliorer la qualité de vie des
aînés, tel que le crédit d'impôt pour les travailleurs d'expérience;
4° la bonification des crédits d'impôt
remboursables pour les aidants naturels d'une personne majeure;
5° la
bonification des crédits d'impôt
remboursables visant l'incitation au
travail, soit le bouclier fiscal, le crédit d'impôt attribuant une prime
au travail et le crédit d'impôt pour frais de garde;
6° la bonification du crédit d'impôt
remboursable pour stage en milieu de travail;
7° l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour encourager la formation des travailleurs en
emploi dans les petites et moyennes entreprises.
Ce projet de loi modifie aussi la Loi sur les impôts, la Loi concernant les paramètres
sectoriels de certaines mesures fiscales
et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec afin de bonifier les
congés fiscaux pour la réalisation de grands projets d'investissement.
Ce projet de loi modifie aussi la Loi sur les impôts et la Loi sur l'administration
fiscale afin de mettre en oeuvre certaines
mesures du plan d'action pour assurer l'équité fiscale, notamment
en matière de lutte aux planifications fiscales agressives.
Par ailleurs, ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts et la Loi sur la
taxe de vente du Québec afin d'y apporter des modifications semblables à
celles qui ont été apportées à la législation fédérale.
Enfin, ce
projet de loi apporte des modifications à caractère technique,
de concordance ou de terminologie à diverses lois.
Je vais m'abstenir d'énumérer les autres mesures
contenues dans le projet de loi n° 13, puisque ses
notes explicatives en font état et que nous aurons l'occasion de l'examiner
plus en détail en commission parlementaire.
J'invite
donc, Mme la Présidente, les membres de cette Assemblée à adopter le
principe du projet de loi n° 13.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le ministre. Maintenant, je suis prête à entendre un autre intervenant.
M. le député de Robert-Baldwin.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Très bien, merci beaucoup, Mme la Présidente.
Alors, nous voilà, oui, à l'adoption du principe du projet de loi n° 13, un projet de loi qui est volumineux, donc, que nous
aurons le plaisir de discuter en commission parlementaire.
Alors, il s'agit d'un projet de loi fiscal,
c'est-à-dire un projet de loi qui modifie les lois fiscales existantes conformément aux mesures fiscales contenues dans
le budget ou dans les budgets. Et, dans ce cas-ci, comme M. le ministre l'a mentionné, ce sont des mesures fiscales
comprises dans au moins deux budgets, deux excellents budgets, je dirais, du 27 mars 2018 et
du 28 mars 2017, ainsi qu'aussi d'une bonne mise à jour économique de
décembre 2018. Alors, bon, puisqu'un
bon nombre de ces mesures proviennent de ces budgets-là, je vais quand même
prendre un peu de temps pour parler
un peu de ces mesures-là, pas toutes les mesures parce que ce serait beaucoup
de temps. Parce que, un, juste ça, c'est
juste... un de ces budgets était assez volumineux aussi. On ne va pas faire
tout ça aujourd'hui. Mais, quand même, quelques mesures que je trouve
qui sont dignes de mention.
D'abord,
donc, le crédit d'impôt remboursable pour soutien aux enfants. C'est très
intéressant, ce qui a été fait avec
ce crédit d'impôt, parce que deux amendements ou deux changements ont été
apportés. Un, c'est d'établir, bon, le montant maximal pour le deuxième
et troisième enfant, très bien, mais aussi un supplément de 100 $ qui est
déjà en vigueur, donc, les familles l'ont
déjà reçu, de 100 $ par enfant pour l'achat de fournitures scolaires.
Donc, c'était un enjeu qui nous a été mentionné plusieurs fois avant,
oui, la hausse du coût des fournitures scolaires. Et un des moyens d'essayer d'amoindrir un peu le coût de cette
facture, ça a été de mettre en place ce crédit d'impôt, ce supplément de 100 $
par enfant en âge scolaire. Et donc cela, je
pense que ça a été très bien reçu. C'est déjà en vigueur, mais il s'agit
maintenant de le codifier dans nos lois.
Aussi, pour ce crédit d'impôt, et je lui dis ça
parce que c'est maintenant beaucoup dans les médias, dans les nouvelles, nous avions déjà, à l'époque, procédé à
un certain assouplissement des critères d'admissibilité au supplément pour enfant handicapé nécessitant des soins
exceptionnels. Donc, c'est un programme qui avait été mis en place. Évidemment,
comme tout nouveau programme, il faut avoir des critères. Bon, on s'est rendu
compte que ces critères n'étaient pas très souples et donc on avait déjà,
en mars 2018, procédé à un certain nombre d'assouplissements de ces critères-là. Et j'ai l'impression que le
gouvernement actuel a aussi l'intention d'aller encore plus loin dans ce
processus. Parce qu'en effet c'est un
programme qui était nécessaire, qui est nécessaire. Il a été mis en place, il
était administré, donc, par Retraite
Québec. Ce sont des spécialistes, des
médecins qui établissent les critères, ce n'est pas le politique
et c'est très bien comme ça. Donc, il faut le codifier, il faut
tracer une ligne. Évidemment, quand on trace une ligne, il y a toujours des
personnes qui peuvent rester juste à côté de la ligne, et
il n'y avait pas beaucoup de capacité d'adapter, donc... procéder à un certain assouplissement, mais je comprends bien
qu'il faut aller plus loin et j'ai l'impression que le gouvernement actuel veut aussi aller plus loin.
Un autre
crédit d'impôt qui a été amélioré, qui a été bonifié, c'est le crédit d'impôt
pour les travailleurs d'expérience, et ça, Mme la Présidente, c'est très important, parce qu'un des
enjeux que nous avons au Québec, c'est justement un taux de
participation au marché du travail des personnes de 60 ans et plus qui est nettement
inférieur à celui de nos voisins, particulièrement en Ontario, mais ailleurs en Amérique du Nord. Et donc, si
on peut trouver des moyens qui font en sorte qu'on a un plus grand nombre de personnes de ces groupes d'âge là qui
restent ou qui reviennent sur le marché
du travail, je pense que ce serait très utile qu'on le fasse.
Et, justement,
dans le budget de mars 2018, c'est là où on avait mis cela en
place, c'est très bien et donc c'est une bonification
de ce crédit d'impôt. C'est quand
même des montants importants,
c'est 32 millions de dollars cette année, l'année passée, 2018‑2019,
et puis 30 millions... à
peu près 30 millions par année, et je pense que c'était quelque chose, quand même, d'important et significatif. Parce que là on parle... donc,
ça peut arriver à 5 000 $ pour un travailleur âgé de
62 ans, même 7 000 $ pour un travailleur âgé de
63 ans, 9 000 $ pour un travailleur âgé de 64 ans et 11 000 $
pour un travailleur âgé de 65 ans. Donc, surtout pour les travailleurs
plus âgés, c'est certainement... ce sont des montants intéressants. Ce sont des
montants qui, à notre avis, peuvent constituer l'incitatif nécessaire
à ce que ces personnes-là puissent revenir ou rester sur le marché
du travail. Donc, c'était une mesure
qui était très attendue et, je pense, aussi très efficace.
• (17 h 10) •
Dans ce même
crédit d'impôt et dans ce même ordre d'idées aussi, on a bonifié un crédit
d'impôt remboursable visant
l'incitation au travail. C'est le fameux bouclier fiscal. Le bouclier fiscal
qui avait été mis en place par le gouvernement précédent,
par notre gouvernement, c'était une mesure fiscale qui faisait en sorte
que... les travailleurs au bas de l'échelle, souvent, quand ils recevaient une augmentation salariale, cette augmentation salariale là était pratiquement totalement absorbée par une hausse du taux d'imposition, parce qu'ils passaient à
un taux d'imposition plus élevé. Et ce qui était surtout pénalisant, c'est que des personnes,
donc, au bas de l'échelle et qui avaient droit à certains transferts
sociofiscaux, de l'aide gouvernementale, bon, perdaient cette aide aussi, ces
avantages aussi. Alors, une augmentation de salaire, en fin de compte, se
trouverait à être pénalisante, parce qu'au bout de la ligne, en termes de
revenus disponibles, cette personne-là se
trouvait soit à la même place ou alors même avec moins d'argent net. Alors, en
mettant en place le bouclier fiscal, ce bouclier fiscal là protège une partie de cette hausse salariale pour que
le revenu disponible augmente réellement. Et donc cela aussi, c'était mis en place déjà
avant et puis ça a été bonifié, ça a été amélioré dans le budget
de mars 2018, et donc c'est aussi une mesure que je pense qui était très
bonne et qui a été maintenue, et donc cela est très bien.
D'autres
choses, Mme la Présidente. Aussi, on a mis en place, dans ce budget, un
crédit d'impôt non remboursable pour
l'achat d'une première maison. Bon, c'est relativement modeste. On parle ici
d'un maximum, je pense, de 750 $. Mais c'est quand même très utile parce que, souvent, quand on achète
une première maison, il y a toujours des dépenses qu'on n'a pas tout à fait bien prévues, que ce soient les frais de notaire,
que ce soient les frais d'évaluation de la propriété, etc. Et donc c'est ces dépenses-là qui peuvent
constituer des surprises pour les acheteurs de maison. Et, alors là, avec ce
crédit d'impôt, le montant est
modeste. Bien sûr, 750 $, ce n'est pas énorme, mais cela... Il y a un
programme fédéral équivalent. Donc
là, on parle de 1 500 $ les deux ensemble. Bon, ça commence à être
intéressant. Et c'est une mesure pour faciliter l'achat d'une première
maison, pour faire face à ces dépenses qui souvent ne sont pas prises en
considération.
Il y avait
aussi des mesures dans le budget, qui sont dans le projet de loi, concernant le fonds Capital régional et coopératif Desjardins. Je pense, c'est important parce que ce
fonds-là, c'est un fonds, donc, qui est investi et géré par le Mouvement Desjardins, et qui vise le développement
économique régional, et qui a un très bon succès. Évidemment, ce fonds-là, il y a certains avantages de nature
fiscale. C'est pour ça que les citoyens peuvent investir dans ce fonds-là. Et là il y avait plusieurs problèmes ou questions
opérationnelles qui rendaient ce fonds moins attrayant, ce qui serait dommage,
parce que le fonds a atteint une vitesse de croisière qui est très bonne et
qui, donc, contribue vraiment au développement
économique régional. Et c'était utile de procéder à ces ajustements pour qu'il
puisse continuer à aller chercher de
l'épargne des particuliers, et qui soit investie de façon très proactive et
très efficace dans le développement économique régional. Une bonne façon
pour l'État de participer aussi à cet effort.
Aussi, bon,
on en a beaucoup parlé, on continue de parler encore de cela, un autre crédit
d'impôt remboursable pour la
transformation numérique de la presse écrite. Nous sommes tous au courant que
la presse écrite, surtout la presse régionale
mais la presse écrite en général, fait face à des défis importants, fait face à
des enjeux vraiment de nature quasi existentielle.
Et donc, si l'État peut apporter un certain soutien à la transformation
numérique, cela pourra contribuer à les
pérenniser. Et donc je pense que la mesure qui a été mise en place va dans
cette direction et je pense qu'elle a été aussi bien accueillie par
l'industrie.
On continue.
Et on a, donc, aussi changé la Loi sur les impôts et la Régie de l'assurance
maladie. Ce dont on parle ici, c'est
tout simplement, tout simplement mais ce n'est pas si simple que ça, donc, la
diminution du FSS. C'est quoi, le FSS,
Mme la Présidente? Bon, c'est le fonds de santé et services sociaux. Donc,
c'est une taxe. C'est une taxe sur la masse salariale des entreprises. Et nous savons tous qu'une taxe sur la masse
salariale, c'est une taxe qui est très dommageable pour n'importe quelle entreprise, grande ou
petite. Mais, pour les PME, c'est particulièrement dommageable parce que
ce que cela veut dire, c'est que cette
entreprise-là... C'est une taxe par tête de pipe, donc par personne, par
employé, donc ça décourage l'emploi,
et une taxe qui doit être payée avant même que l'entreprise puisse générer
quelque profit que ce soit. Alors, c'est souhaitable de baisser cette taxe sur
la masse salariale. D'ailleurs, c'est aussi une taxe où le Québec se distingue de ses voisins, malheureusement. C'est beaucoup plus élevé ici, au Québec, les taxes sur la masse
salariale, que dans la province voisine de l'Ontario, par exemple, ou ailleurs
au Canada.
Donc, c'est
une taxe qui est mauvaise, qui ne donne pas les bons incitatifs à l'emploi et
qui est plus élevée qu'ailleurs.
Donc, si on peut la réduire, on doit le
faire, et c'est ce que nous avons fait avec le budget de mars 2018. Et ce
n'est quand même pas
insignifiant, Mme la Présidente, parce
que, donc, on avait déjà
commencé la réduction et là on a continué, et c'est quand même 155 millions
de dollars l'année passée. Cette
année, 2019‑2020, on va atteindre presque 200 millions de dollars, et ça, c'est dans
l'allégement fiscal direct pour les PME du Québec, et on cible cette réduction
du FSS aux PME, pas aux grandes entreprises, 228 millions l'année
prochaine, etc.
Donc, c'est quand même
une mesure intéressante qui s'ajoute aussi à une réduction graduelle, qui
continue, du taux d'imposition des
PME. Donc, les PME québécoises, avec les mesures mises en place depuis les
dernières années, font maintenant
face à une charge fiscale qui commence à être assez compétitive avec ce qui se
fait ailleurs au Canada
et surtout avec ce qui se fait dans la
province voisine. Et donc, là aussi, c'est un pas dans la bonne direction pour
stimuler l'investissement et la création d'emplois partout au Québec.
Une petite
mesure, mais qui était très importante, ça nous avait été mentionné par plusieurs
personnes, et je pense qu'on l'a fait... On aurait dû le faire avant. Je pense
que, oui, on aurait dû le faire avant, mais, bon, on l'a fait, donc, l'année
passée, c'est l'admissibilité des
allocations de sécurité du revenu de retraite versées aux vétérans des forces canadiennes,
donc de rendre ça admissible au fractionnement du revenu de retraite entre
conjoints et au crédit d'impôt pour revenu de retraite. C'est une mesure qui est déjà en vigueur
ailleurs au Canada, mais qu'au Québec ce n'était pas le cas. Et là,
bon, on le rend aussi... et je pense
que les vétérans des forces canadiennes... les Québécois vétérans des forces canadiennes
avaient aussi le droit de pouvoir bénéficier de ce même crédit d'impôt, de cette même facilité de fractionner le revenu que les vétérans ailleurs au Canada. Donc, on l'a fait. On aurait dû le faire avant,
mais, bon, on l'a fait, et donc c'était très bien.
Donc, voilà,
c'est un projet de loi fiscale qui comporte beaucoup plus de mesures que
ça. J'ai juste mentionné celles qui, à mon avis,
sont les plus intéressantes et les plus importantes. Bien sûr,
comme un très grand nombre de ces mesures
étaient contenues dans les deux derniers budgets, évidemment...
et comme c'étaient majoritairement des mesures que nous avions mises en place, ça ne serait pas une surprise que je
vous dise, Mme la Présidente, que nous sommes en faveur de ce projet de loi et que nous allons voter pour ce projet
de loi. Merci beaucoup.
• (17 h 20) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je reconnais la parole au député de Rosemont.
M. Vincent Marissal
M. Marissal : Merci,
Mme la Présidente. Chers collègues,
alors, on se lance aujourd'hui dans l'étude du p.l. n° 13,
qu'on nomme p.l. n° 13
dans le jargon. On pourrait tout aussi bien renommer ce projet de loi
XXL 13, étant donné la taille extra,
extra large. Il y a quoi, 623 articles... 663 articles, pardon, là-dedans.
Je sais que c'est une pratique à laquelle on nous a habitués et j'ai vu
passer quelques-uns de ces projets de loi XXL dans mon ancienne vie de
journaliste.
Je ne peux
pas passer sous silence, par contre, mon étonnement face à de tels projets de
loi omnibus qu'on nous demande
d'adopter sans grande consultation. Il me semble que cette façon de faire
devrait être revue. On appelle parfois ce type de projet de loi des projets de loi mammouth. Un mammouth, c'est
comme un éléphant, ça se mange une bouchée à la fois. Dans ce cas-ci, on
voudrait qu'on l'avale rapidement, d'un coup, ce qui est nécessairement
indigeste.
Non pas que
tout soit mauvais là-dedans, au contraire. Mais, au-delà des difficultés de
traitement d'analyse, une telle
brique de 663 articles, souvent cryptiques, on nous force à nous
positionner en même temps sur un ensemble d'éléments disparates avec
lesquels on peut être bien d'accord dans certains cas, fortement en désaccord
dans d'autres.
Par exemple,
je cite quelques bons éléments du projet de loi n° 13,
notamment la bonification des crédits d'impôt remboursables pour les aidants naturels d'une personne majeure.
Évidemment, lorsqu'une personne devient aidant naturel auprès d'une personne ayant des besoins
d'assistance, cela a souvent une influence financière. On a vu tellement
d'histoires dans
les médias là-dessus. Il est donc juste qu'on lui donne ou qu'on lui donne à
elle un coup de main pour compenser un peu.
Autre exemple, la
bonification temporaire du crédit d'impôt remboursable pour les titulaires d'un
permis de chauffeur de taxi. C'est dans
l'actualité, ça aussi. Évidemment, on ne peut pas s'empêcher de penser qu'après
le coup de Jarnac que les chauffeurs
de taxi et les propriétaires de... titulaires de permis sont en train de subir,
c'est bien la moindre des choses que l'on pouvait faire pour eux.
Je
poursuis sur les notes positives, la détaxation de la naloxone pour le
traitement d'une surdose aux opioïdes. Malheureusement,
Mme la Présidente, au Québec comme ailleurs dans le monde, la crise des
opioïdes sévit et fait des ravages
dans nos communautés. La naloxone, qui agit en quelque chose comme antidote,
permet de sauver des vies. Il est donc
juste d'en favoriser la diffusion et d'en diminuer le coût en ne taxant pas ce
produit. On dit souvent à la blague que, dans la vie, il y a deux choses qu'on ne pourra pas éviter, c'est-à-dire
les taxes et la mort. Taxer la survie dans ce contexte avait donc un
côté un peu cynique.
Je
poursuis sur la note positive, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable
pour la transformation numérique de
la presse écrite, un sujet, vous l'aurez compris, qui me tient à coeur un peu
plus que les autres. On le sait, la presse écrite fait face à toutes sortes de bouleversements dans
le cadre de la révolution numérique. On peut dire bien des choses des médias, et des journalistes, et même des
chroniqueurs, mais je pense qu'on sera tous d'accord pour reconnaître le rôle
indispensable qu'ils jouent en démocratie. On ne peut donc que souscrire à une
telle aide permettant de maintenir un minimum
de diversité de voix dans l'espace public. J'en fais une affaire personnelle,
j'en ai déjà parlé au ministre et je ferai un suivi diligent. Le collègue de
Robert-Baldwin parlait, tout à l'heure, d'une crise existentielle dans les
médias du Québec. Je confirme que, dans toutes les salles de rédaction
du Québec, mes anciens collègues se posent de lourdes questions existentielles
et depuis déjà un bon moment.
Alors,
comme nous le disions, tout n'est pas mauvais dans ce projet de loi. Cependant,
ce dernier comporte, par ailleurs, certaines mesures avec lesquelles
nous ne pouvons être d'accord.
Ce
projet a notamment pour effet de modifier la Loi sur les impôts et la loi sur
la Régie de la... maladie du Québec afin
d'uniformiser les taux d'imposition des PME et de prévoir la réduction
graduelle du taux de cotisation des employeurs au Fonds des services de santé pour l'ensemble des PME. Qu'on se
comprenne bien, comme je l'ai dit hier, on considère que les PME sont le poumon économique du Québec,
constituent le maillage de notre tissu économique. Elles doivent faire, donc, l'objet d'une fiscalité soutenable. Mais elle doit également
être équitable, chacun au Québec doit faire sa part. Or, les recettes de l'impôt
des sociétés devraient diminuer cette année de 5,8 %,
alors que celles de l'impôt des particuliers va augmenter de 4 %. Ça, ça veut dire que la proportion des impôts
des sociétés par
rapport à celle des particuliers
continue de diminuer. L'équité
fiscale, Mme la Présidente, ça veut aussi dire qu'il faut être à même de
moduler selon les secteurs et la
taille des entreprises. Une entreprise de huit employés et une entreprise
de 450 employés, ce n'est évidemment pas la même chose. Un taux uniforme n'en
tient pas compte.
Ce projet de loi
contient également la reconduction et la bonification de crédits d'impôt
remboursables visant à encourager la
création de nouvelles sociétés de
services financiers. Bref, un nouveau cadeau corporatif dont la nécessité
et le rapport coûts-bénéfices ne nous a pas
été démontré, dans un secteur qui, on en conviendra, participe davantage du
problème que de la solution et qui tire très
bien son épingle du jeu tout seul. En effet, l'économie casino-capitaliste
telle qu'on la connaît n'est pas sans
lien avec la crise médiatique, sur laquelle on n'a de cesse d'interpeler le
gouvernement. Il ne faut pas compter sur nous pour jouer passivement
dans ce film-là.
Je
signale au passage, Mme la Présidente, que l'expression économie casino ou
climat casino n'est pas de moi. Elle
vient notamment de l'économiste William Nordhaus, prix Nobel d'économie de 2018
et prof émérite à Yale, Yale, qui n'est pas exactement un centre de
rééducation marxiste.
Cerise
sur le sundae, Mme la Présidente, ce projet de loi prévoit également la
réduction des taux de taxe compensatoires
des institutions financières. Dans le cas du crédit d'impôt dont je viens de
parler juste avant, il y avait au
moins, bien que ça n'a pas été démontré, l'idée que ça puisse entraîner la création
de nouvelles entreprises et, surtout, de
nouveaux emplois. Dans le cas de cette baisse de taxes, il s'agit, encore là,
d'un cadeau fait aux banques et aux compagnies d'assurance. À terme, ça pourra
représenter des dizaines de millions de dollars à des institutions qui font
déjà, on va s'entendre là-dessus, des
profits mirobolants, plus de 40 milliards de dollars, juste pour les six
grandes banques canadiennes.
Cette
mesure avait été annoncée par un ministre libéral et elle est aujourd'hui
reconduite par un ministre caquiste. Ça
met bien en lumière une chose : au-delà des divergences de vues mises en
évidence aujourd'hui, dans le cadre des débats identitaires, la CAQ et le PLQ,
c'est souvent blanc bonnet, bonnet blanc devant la haute finance — vous comprendrez que nous ne sommes pas de cet avis — et ce, au détriment même des services
publics, de l'environnement et, au final, de nos concitoyens, Mme la
Présidente.
Ainsi,
tant en considération des problèmes liés à la passation même d'un omnibus, dont
j'ai parlé au début de mon intervention, qu'en considération de ce qui
précède, nous voterons contre, Mme la Présidente. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je reconnais la parole
au député de René-Lévesque.
M.
Martin Ouellet
M. Ouellet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, à mon tour de prendre la
parole sur l'adoption de principe du p.l. n° 13.
Dans ce projet de loi, Mme la Présidente, on retrouve des mesures relatives au
budget de 2017 du gouvernement libéral, 2018
du gouvernement libéral et aussi de la mise à jour économique du gouvernement
de la Coalition avenir Québec récemment élu.
Bref, Mme la Présidente, dans ce projet
de loi là, il y a
coexistence d'harmonie parfaite entre la CAQ et les libéraux. Alors, j'ai la preuve que ça peut fonctionner ici,
au salon bleu, Mme la Présidente. Et j'espère qu'on le verra de plus en plus pour le bien-être de nos
travaux.
Trêve
de plaisanteries, Mme la Présidente, à
l'intérieur de cette pièce législative,
il y a, effectivement, plusieurs mesures, qui, si on les prend à la pièce, peuvent
sembler intéressantes pour les Québécois, les Québécoises.
Quand on les regarde une à une, si on
les décortiquait, pour la plupart, on pourrait être pour, pour notre formation
politique; dans certains cas, on pourrait contre. Mais, globalement, ce qu'il
faut comprendre, Mme la Présidente, c'est que ces mesures-là viennent aussi... venaient, plutôt, à l'époque, avec un budget,
avec une vision économique, avec une vision fiscale. Et ça, Mme la Présidente, les citoyens, citoyennes ne l'ont pas oubliée,
cette vision-là de 2017, on surfait encore sur les mesures d'austérité,
et le budget de 2018, le retour des plaines verdoyantes en vue de l'élection,
et la mise à jour économique, les surplus accumulés,
et les difficiles décisions de la Coalition
avenir Québec de faire des choix qui
allaient avoir un impact sur les services des Québécois, Québécoises.
Donc,
Mme la Présidente, vous ne serez pas surprise si je vous dis que, lorsqu'on
va faire l'étude article par article de ce projet
de loi là, nous allons effectivement poser des questions judicieuses sur les impacts réels qu'auront ces
modifications-là pour les contribuables du Québec, pour les familles du Québec,
pour les entreprises du Québec, pour les différents secteurs d'activité
qui seront touchés à l'intérieur de cette pièce législative.
Mais
vous serez d'avis, Mme la Présidente, que nous allons garder en tête aussi dans quel
contexte ces mesures-là sont apparues et quels sacrifices, dans certains cas,
les citoyens et citoyennes du Québec ont dû faire pour voir apparaître ces
différentes mesures, en 2017, en 2018 et lors de la mise à jour économique de
décembre 2018.
• (17 h 30) •
Cela
étant dit, Mme la Présidente, je ne m'attarderai pas très longtemps
puisqu'on a beaucoup de travail à faire, beaucoup
de questions à poser en commission parlementaire. On
va le faire de façon judicieuse, nous allons travailler promptement. Parce que je suis convaincu que la
plupart des Québécois, Québécoises qui trouvent intéressantes plusieurs mesures
à l'intérieur veulent les voir appliquées le plus rapidement
possible, donc ils vont s'attendre à ce que les législateurs puissent, effectivement,
les mettre en pratique le plus rapidement possible.
Donc,
pour toutes ces raisons, Mme la
Présidente, nous avons hâte de se
lancer en consultations particulières... pas en consultations particulières,
pardon, mais en étude détaillée, pour aller dans les fins détails de chacune de
ces mesures-là.
Mais
vous comprendrez, Mme la Présidente, que, sur ce principe, et pour les raisons que
ces mesures prises une par une
relèvent de décisions fiscales et économiques des anciens gouvernements, nous allons
sûrement être contre ce principe. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Maintenant, je suis prête à reconnaître un autre intervenant. M. le ministre... Non? Aucun
autre intervenant?
Mise
aux voix
Alors,
le principe du projet de loi n° 13, Loi
modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec
et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Mme la députée de Verdun.
Mme
Melançon : J'aurais besoin
d'une suspension, Mme la Présidente, pour quelques instants, on m'indique qu'on a besoin
d'une suspension quelques instants, s'il vous plaît.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Bien, écoutez, est-ce qu'on peut terminer... On peut terminer, peut-être,
là. J'ai demandé si le projet de loi n° 13
était adopté. Nous pouvons terminer ça. Après ça, on suspendra les travaux?
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Parfait. Alors, cette motion est adoptée sur division.
Alors, je vais
suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 32)
(Reprise à 17 h 33)
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : ...pour la suite des choses.
Une voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, exactement, M. le leader adjoint. Vous étiez rendu à la
motion de renvoi à la commission. Alors, je vous laisse la parole.
M. Schneeberger :
Oui, bien, je viens de la faire, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Refais-la.
Renvoi à
la Commission des finances publiques
M. Schneeberger : Alors, Mme
la Présidente, on reprend. Conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 13, Loi
modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et
d'autres dispositions législatives, soit déféré à la Commission des finances
publiques pour son étude détaillée.
Mise aux
voix
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Cette motion est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Motion adoptée. Maintenant, Mme la
députée de Verdun, est-ce que
vous avez toujours besoin de suspendre les travaux?
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Ça va?
Mme Melançon :
...le député est arrivé.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : M. le leader adjoint du gouvernement, pour la suite
des travaux.
M. Schneeberger :
Alors, Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 3 du
feuilleton.
Projet
de loi n° 6
Reprise
du débat sur l'adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, pour l'article 3 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt, aujourd'hui, sur l'adoption
du principe du projet de loi n° 6, Loi transférant au commissaire au
lobbyisme la responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la
recommandation de la Commission Charbonneau concernant
le délai de prescription applicable à la prise d'une poursuite pénale. Y
a-t-il des interventions? M. le
leader.
M. Marc
Tanguay (suite)
M. Tanguay :
Le leader?
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Excusez-moi!
M. Tanguay :
Le député de LaFontaine.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Excusez-moi. Je pourrais vous aider un peu.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Allez-y. La parole est à vous.
M. Tanguay : Oui. Ah! Mme la
Présidente, heureux de savoir maintenant
que mon collègue de Montmorency
a fait un adepte de la banquette libérale.
Alors, nous n'aurons pas de petites victoires, Mme la Présidente, et nous
allons tout prendre.
Et,
vous savez, ce matin, j'ai eu l'occasion d'entretenir mes collègues sur notre
position quant au projet de loi
n° 6, et est arrivé 13 heures, et nous avons dû
suspendre. Mais il me restait des choses à dire. C'était important pour moi de
les dire. Et je vous remercie beaucoup
de me céder la parole sur le projet
de loi n° 6 parce qu'il y a des éléments qui sont
importants, que je voulais mentionner.
Juste
pour celles et ceux qui n'étaient pas là ce matin, Mme la Présidente, nous
sommes sur le principe du projet de loi n° 6. Le principe du projet de loi
n° 6 vise la loi... Le titre est assez explicatif : Loi transférant
au commissaire au lobbyisme la
responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation
de la Commission Charbonneau concernant le délai de prescription
applicable à la prise d'une poursuite pénale. C'est le titre du projet de loi
n° 6.
Le projet de
loi n° 6, j'en ai parlé abondamment ce matin, peut-être pas abondamment
mais suffisamment ce matin, quant à l'importance d'améliorer le
registre, la façon, la technicalité, le support technique, là où les
lobbyistes, qu'ils soient
d'organismes, qu'ils soient des lobbyistes-conseils ou des lobbyistes
d'entreprise, ils doivent s'enregistrer, de un, de deux, doivent enregistrer leur mandat, et doivent le faire en
respectant les impératifs de la loi, entre autres les délais d'enregistrement, les amendements qu'ils portent à
leur mandat et les personnes additionnelles ou pas qu'elles auraient rencontrées. On sait tous qu'en vertu de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, c'est la loi qui est
visée par le projet de loi n° 6, les lobbyistes, de quelque
catégorie soient-ils, doivent s'inscrire dans les 30 jours qu'ils
ont fait une démarche de lobbyisme.
Donc, le
registre, il y aura un transfert,
c'est au RDPRM, au Registre des droits personnels et réels mobiliers. Le
RDPRM, Mme la Présidente, a été l'endroit où
le premier... on pourra l'appeler premier, qui est là depuis le début des
années 2000, 2002, 2003, si ma mémoire
est fidèle, où là ont été inscrits et logés les premiers éléments du premier
registre. Là, s'il n'y a pas
unanimité, il y a un très, très large consensus, et il y a unanimité, je
pourrais même le dire, Mme la Présidente, sur le fait qu'on doit faire
mieux que le registre tel qu'il est, puis ce n'est pas la faute de personne,
c'est les supports techniques et les impératifs de la loi... n'est pas
suffisamment performant, ce n'est pas efficace.
Et, en ce
sens-là, Mme la Présidente, c'est important de mentionner que nous aurons
l'occasion de permettre au Commissaire
au lobbyisme de recueillir... de reprendre contrôle de ces informations. Il y
aura donc transfert d'information. Le Commissaire au lobbyisme va créer
ni plus ni moins qu'un nouveau registre, plus efficace, plus convivial, plus performant pour celles et ceux qui doivent
s'inscrire. Celles et ceux qui pratiquent quoi, Mme la Présidente? Qui
pratiquent ce que Martine Hébert, de
la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, disait, entre autres,
lorsqu'elle est venue nous parler en consultations particulières, que le
lobbyisme, c'est un droit. Donc, on propose même de le mettre dans l'article 1 de la loi, c'est un droit. Une
fois qu'on a dit ça, bien, on s'organise pour que les gens puissent exercer ce
droit de façon efficace et que l'on ne leur mette pas des bâtons dans les
roues. Ça, c'est le premier des deux objectifs du projet de loi n° 6.
Le deuxième
objectif, Mme la Présidente... et, c'est pour ça, j'ai annoncé, puis ma
collègue de Notre-Dame-de-Grâce a
également eu l'occasion de se prononcer ce matin sur le principe, que nous
allons voter en faveur du principe.
Nous sommes confiants que nous aurons l'occasion de déposer, et de débattre, et
de faire adopter des amendements, parce
que nous sommes d'accord sur le principe, mais nous voulons voir le projet de
loi bonifié quant, entre autres, aux délais.
Et ce qui frappe l'imaginaire, puis pour les
collègues ici présents, Mme la Présidente, un article qui frappe l'imaginaire et qui n'est pas anodin... Tout le
monde reconnaît que l'on doit améliorer le registre. Tout le monde est d'accord
ou, sinon, l'énorme consensus vise à ce que
la responsabilité du registre soit transmise au Commissaire au lobbyisme pour
qu'il en crée un de toutes pièces, un
nouveau. Il nous a dit, à la question que j'ai posée... J'ai dit : Combien
que ça va coûter? Bien là, ils sont déjà en train de discuter avec les
spécialistes de l'État quel type de registre, quel type de support
informatique, et on veut que ce soit convivial, et là il y a un demi-million
qui a été engagé là-dessus, tout près d'un demi-million, et qu'à terme ce
serait entre 1,4 million et 2,8 millions, le coût du registre. On
aura les crédits, on aura l'occasion
peut-être... le projet de loi ne sera pas adopté, mais on aura l'occasion
peut-être d'aller un peu plus en détail que nous n'avons pu le faire en consultations particulières. Mais là
tout le monde s'entend pour dire que, oui, c'est une bonne chose, ce
premier élément là, de créer un registre.
• (17 h 40) •
Et tout le
monde s'y entend... Et là je voulais vous donner un exemple où, là, il y aura
nécessairement une discussion. Je ne suis pas en train de vous annoncer
un amendement formel. Mais imaginez, Mme la Présidente, je le disais de cette façon-ci ce matin, il y a des
semaines qu'à l'Assemblée nationale il y a des projets de loi qui sont déposés
et que l'on n'a pas un article similaire à celui du 28, où on y peut
lire : «La présente loi entre en vigueur le — entre
parenthèses — indiquer
ici la date qui suit de 30 mois celle de la sanction de la présente loi».
Fin de la citation.
Alors, on va
avoir un nouveau registre. On comprend que ça prend du temps, il faut laisser
le temps au temps. Et, dans les
discussions avec la ministre, ce qui nous a été confirmé, parce qu'il y a déjà
en amont des consultations qui ont été
faites, qui ont été effectuées, le Commissaire au lobbyisme est déjà actif pour
déjà imaginer ce à quoi ressembleraient le coût et le support technique additionnels, les ressources humaines
qu'il devra engager. Il y a déjà beaucoup de travail fait en amont, et, jusqu'à maintenant, ce qui nous
a été confirmé, c'est que je pense qu'il va falloir transférer les informations,
si vous me permettez l'expression, à la
mitaine, entre guillemets. À cette question-là, on a demandé au Commissaire au
lobbyisme : Est-ce réellement le cas,
on devra transférer manuellement? Il a dit : Pas tout. On est encore en
train d'évaluer le type de données
que nous pourrions verser de façon efficace, mais, pour beaucoup, ça se fera
manuellement. Donc, un délai, un coût, nouvelle approche.
Mais là, dans
la rédaction, puis c'est correct, dans la rédaction du projet de loi n° 6, de ce que j'ai compris, puis on
me détrompera, mais le Commissaire au lobbyisme a été questionné, puis ce qui
était proposé, c'est de faire en sorte que le nouveau registre soit en vigueur trois ans après l'adoption de la
loi. Alors là, on disait : 36 mois, on n'aimait pas trop ça, alors on a mis 30 mois dans la loi.
Bon, 30 mois, c'est déjà un pas dans la bonne direction. Et, juste pour
vous dire comment le registre actuel... puis on ne vise personne,
puis tout le monde est de bonne foi, puis on ne parle pas d'incompétence ici,
on parle réellement de problèmes techniques.
Les gens de
l'Association québécoise des lobbyistes, on a reçu également l'association...
l'alliance des lobbyistes du Québec,
ils sont venus nous dire... Parce que, là, je leur posais une question :
Vous, là, attendre le nouveau registre, là, attendre 30 mois, deux ans et demi, est-ce que vous trouvez ça
anormalement long? Il y a tellement, Mme la Présidente, un désir d'avoir un nouveau registre qui
fonctionne puis qui soit convivial, qu'ils n'ont pas depuis 2002-2003, puis que
ce n'est pas de la faute de personne ni d'un
de nos gouvernements en particulier, qu'ils disent : Savez-vous quoi? Si
le prochain registre fonctionne bien,
là, on va l'attendre deux ans et demi, mais au moins dites-nous qu'on va voir
la lumière dans un an et demi. Ceci
dit, je pense qu'on aura l'occasion de peut-être diminuer un peu cette période
de 30 mois et de nous appeler à des standards de livrable un peu
plus serrés, un peu plus élevés, et ça, ce sera un des éléments.
L'autre élément sur lequel j'aimerais
évidemment insister, il y a deux volets. Le deuxième, c'est qu'à l'heure
actuelle, puis ça, là, tout le monde va comprendre
ça, imaginez-vous — puis
ça, on pourra peut-être refaire une réflexion — dans les lois où il y a des pénalités
d'imposées... si la loi, que ce soit une loi sur l'environnement, une loi
dans le domaine municipal — ici, c'est la loi sur la transparence, donc
sur le Commissaire au lobbyisme — s'il y a des pénalités, mais qu'il n'y a pas de délai de prescription, c'est le délai
de prescription usuel du Code pénal qui est utilisé.
Ah!
Quel est ce délai de prescription là? Autrement dit, il y a une infraction qui
est commise, nous pouvons être poursuivis
dans quel délai? Passé ce délai-là, on ne peut plus faire l'objet de poursuite.
On dit que c'est un an de l'infraction. Alors, c'est un an de l'infraction. Je commets aujourd'hui une
infraction, Mme la Présidente, et, le 10 avril 2020, c'est prescrit. Il n'y a même pas la notion de
connaissance. On aurait pu dire : Dans l'année de la connaissance de
l'infraction, vous pouvez être poursuivi. Parce que, dans cette
année-là, qu'est-ce qu'on va faire? Bien là, il y a une dénonciation, il y a une infraction potentielle. On va faire en
sorte de faire enquête puis on va se donner une année... Non, non, c'est
une année franche. Du moment où je fais mon
infraction, si personne ne le sait
puis qu'il s'écoule un délai de 12 mois, je passe go, et il n'y a pas de problème. Et ça, ça fait suite à la recommandation Charbonneau. Et le rapport de la commission
Charbonneau faisait état de plusieurs lois, disait : Ça, ce délai-là, là,
il faudrait l'uniformiser.
Pour ce qui est du Commissaire
au lobbyisme et au lobbyiste qui ne respecte pas les impératifs de la loi,
c'est important d'augmenter ça, plus «à un
an de la commission de l'infraction», plus «à un an de l'infraction»,
c'est maintenant trois et sept ans. Les deux notions s'imbriquent.
Trois ans pour quoi? Dans les trois ans de la connaissance que quelqu'un a commis une infraction, il peut y avoir une poursuite. Dans les trois ans
de la connaissance qu'une infraction a été commise, il peut y avoir une poursuite. Et, si je ne poursuis
pas dans les trois de la connaissance, c'est prescrit, ne peut plus poursuivre.
On rajoute un autre élément, un autre volet. Si, d'aventure, dans les trois ans...
du moment où j'ai connaissance de l'infraction,
ça fait plus de sept ans — plus
un an — ça
fait plus de sept ans que l'infraction
a été commise, c'est prescrit dans
tous les cas d'espèce. Alors, le fameux trois ans, sept ans vient faire en
sorte de donner beaucoup plus de dents, je vous dirais, tangibles.
Et
il y a eu des témoignages à la commission Charbonneau... Parce que la
commission Charbonneau demandait à ce
que les critères, les délais de prescription soient modifiés dans plusieurs
lois, et, ces critères-là, Mme la Présidente, on touchait quelles lois? On touchait la Loi sur les contrats des
organismes publics, ça a été changé; la Loi électorale, en matière de financement politique, ça a été changé;
Loi sur les relations de travail, formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction,
aussi, ça a été changé; Code des professions. Ce qu'il restait, ça a été
partiellement appliqué, concernant la
section des lois municipales traitant des contrats. Mais la seule qu'il reste à
modifier, c'est la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de
lobbyisme.
Et,
juste pour nous donner un ordre de grandeur, certains vont dire : C'est
trop peu. Certains vont dire : C'est trop court. Certains vont dire : C'est trop long. Au Canada, la loi
canadienne sur le lobbyisme met une prescription. Ce n'est pas trois ans, sept ans. Ce n'est pas : Trois
ans de la connaissance, si tu ne poursuis pas, c'est prescrit, mais il ne faut
pas que l'infraction soit plus
vieille de sept ans. Au Canada, c'est cinq ans, 10 ans. Ah! Donc, on est
un petit peu plus généreux au Québec.
Mais ça, c'est avec le fédéral. Mais, quand on se compare avec d'autres
provinces, c'est deux ans. Alors, on est un petit peu plus sévères. Alors, je crois que nous sommes... Et c'est
ce que recommandait la commission Charbonneau, qui, elle, avant d'en arriver à la
recommandation 37, avait fait une analyse de ce qui se fait ailleurs au
Canada et de ce qui se fait ailleurs aussi au Québec, dans d'autres lois, en
termes de délais de prescription. Bien, ça, je pense, Mme la Présidente...
À
prime abord, à prime abord, on aura des discussions. Ça tient la route, ce
trois ans, sept ans, tout comme... Non seulement ça tient la route d'avoir un
registre qui soit transféré sous la responsabilité du Commissaire au lobbyisme...
Nous aurons l'occasion, donc, de peut-être
étayer de quelle manière le Commissaire au lobbyisme, et surtout selon quels
délais, va-t-il mettre en pratique, va-t-il
mettre en marche ce registre qui est attendu par tout le monde, Mme la
Présidente. On va travailler de façon très efficace avec la ministre de la
Justice, qui est responsable du projet de loi n° 6. Nous sommes en faveur du principe, puis, je pense, sur
ce projet de loi, on va faire avancer le Québec. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de LaFontaine.
Maintenant, je suis prête à reconnaître un autre intervenant. Alors, M. le
leader adjoint du gouvernement?
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Oui.
Mise aux
voix
Alors,
comme il n'y a pas d'autre intervenant, est-ce que cette motion est adoptée? Le
principe, excusez-moi. Alors, le principe du projet de loi n° 6, Loi transférant au commissaire au lobbyisme la
responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation
de la Commission Charbonneau concernant le délai de prescription applicable à
la prise d'une poursuite pénale, est-il adopté?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission des institutions
M.
Schneeberger :
Oui. Alors, Mme la Présidente, alors, conformément à l'article 243 de
notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 6,
Loi transférant au commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation
de la Commission Charbonneau concernant le délai de prescription... — voyons! — applicable à la prise d'une poursuite
pénale, soit déféré à la Commission des institutions pour son étude
détaillée. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le leader adjoint, c'est la fin de la journée.
Mise aux
voix
Alors, cette motion
est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
• (17 h 50) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté. Alors, motion adoptée. M. le leader adjoint.
M.
Schneeberger :
Oui. Alors, Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 1
du feuilleton.
Projet
de loi n° 2
Reprise
du débat sur l'adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, à l'article 1 du feuilleton,
l'Assemblée reprend le débat ajourné le 19 mars 2019 sur
l'adoption du principe du projet de loi n° 2, Loi
resserrant l'encadrement du cannabis. Y a-t-il des interventions? M. le député
de D'Arcy-McGee, la parole est à vous.
M. David
Birnbaum
M.
Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'intervenir
et poursuivre notre débat sur le projet de loi n° 2, Loi resserrant l'encadrement du cannabis. Bien,
on se permet un petit résumé des points les plus saillants de ce projet
de loi.
On
parle, dans un premier temps, évidemment, de l'interdiction pour toute personne
âgée de moins de 21 ans de posséder du cannabis, d'en donner, d'en acheter
ou d'accéder aux points de vente; l'interdiction de fumer du cannabis
sur la voie publique dans tous les lieux
extérieurs qui accueillent le public et sur les terrains sur lesquels sont
situés les lieux fermés assujettis à
l'interdiction de fumer; troisièmement, l'interdiction, en sus de celle qui est
déjà en vigueur, pour toute personne
de posséder du cannabis sur les terrains, dans les locaux ou les bâtiments d'un
établissement d'enseignement collégial et universitaire.
Je
crois qu'il y a un consensus parmi les formations politiques, le public sur les
enjeux, les préoccupations très importantes,
préoccupations surtout partagées par ma formation, pour protéger les jeunes,
minimiser la consommation, assurer la
sécurité de la population, éliminer, au moins limiter autant que possible
l'implication du marché noir, l'élément criminel et tous les dangers qui s'associent à ça, de miser sur
l'éducation et la prévention, de mettre en place, en collaboration — très important — avec les forces policières, des mesures, des
protocoles responsables pour cibler l'élément criminel et donc optimiser
des ressources de ces forces policières pour faire d'autres choses.
Bon, dans le comment, comment les lois sont
censées d'engendrer une efficacité, une cohérence avec les objectifs... et là-dessus, avec tout le respect au ministre délégué de la Santé et
des Services sociaux, c'est là où le bât blesse. Les lois sont là
solennellement pour s'adresser aux objectifs, qui sont partagés, et, comme je
dis, les objectifs sont partagés, d'en arriver à la sécurité de nos
jeunes, à notre santé collective, à l'utilisation, l'emploi, le déploiement de
nos forces policières de façon responsable
et réaliste, éduquer et miser sur la prévention, des objectifs qui sont
louables et nécessaires. Mais comment on arrive, quand toutes les
études, tous les experts... Les individus les plus concernés, ils ne vont pas comparaître devant la commission parlementaire,
mais des jeunes de 18 à 21 ans, dont on estime, dans les études crédibles,
qu'il y en a des milliers au Québec... Ce
n'est pas en niant la réalité qu'on va trouver des solutions aux réels
problèmes. Comme je dis, ces jeunes,
à titre d'exemple, ne témoignent pas devant nos commissions parlementaires,
mais vous savez comme moi qu'ils ne
vont pas dire : Ah mon Dieu! Une loi vient d'être adoptée. Moi, j'ai
19 ans et demi, là, je m'abstiens. Voyons donc. Voyons donc! Le
monde ne marche pas comme ça.
Une
autre cible, vous allez convenir avec moi, ils ne vont pas être invités à la
commission parlementaire, c'est, comme d'habitude, un monsieur avec des
tatouages partout ou, je ne sais pas, des fois une madame, le pusher, la
personne qui, malheureusement,
continue à fournir, mais qui voit peut-être avec un oeil préoccupé la
légalisation. Nous avons eu, tous,
nos problèmes avec, on se rappelle, une loi fédérale imposée, en quelque part,
sur les provinces, mais l'idée, et là je
crois qu'on va s'entendre aussi, l'idée de la légalisation, c'était de
régulariser une réalité et de protéger nos jeunes comme il faut. Bon,
là, le monsieur, madame qui se tient au parc, au bar pour fournir les usagers
n'aurait pas l'opportunité de témoigner
devant nous, mais, quand il ou elle voit la proposition de passer l'âge légal
de 19 à 21, j'ai peur... se frotter les
mains puis là dit : Ah bon! Mon marché me revient. Je comprends que ce
n'est nullement l'objectif du ministre ni du côté ministériel, mais
c'est l'opinion de plusieurs experts.
Quand
on parle d'un objectif très louable et partagé, c'est-à-dire la prévention et
l'éducation, notre gouvernement misait
beaucoup là-dessus dans son projet de loi qui a été adopté. Et je comprends la
bonne foi du projet devant nous en ce qui
a trait à la prévention et l'éducation. Nous sommes ensemble là-dessus. Les dangers, personne,
personne ne va dire le contraire, quand on parle — et
ce n'est pas moi, l'expert en santé, c'est plutôt le ministre — de
la vulnérabilité des jeunes jusqu'à l'âge de 25, en train de se développer, de se préparer pour leur
vie après, entendu, mais c'est quoi, les moyens réalistes et réalisables pour protéger ces jeunes-là? Voilà la question.
Et, pour nous, la réponse n'est pas tout
simplement d'ordonner un changement dans l'âge où on peut fumer.
Deuxième chose, une autre chose qui, pour moi,
comme objectif, est intéressante, mais comment ça s'insère dans la réalité? Qu'on s'entende que nous sommes pris,
peu importent les conditions qu'on va appliquer, nous sommes pris avec
la légalisation du cannabis. Comment est-ce qu'on peut donc suggérer... Oui,
c'est légal, mais je vous invite de trouver
un endroit où vous pouvez exercer votre droit légal. L'espace public? Non.
Votre logement? Non. Dans les lieux publics?
Non. Chez vous, dans le sous-sol, si vous êtes propriétaire? Oui. Bon. Et là
les enfants vont subir les impacts de la
fumée secondaire, et tout ça. Une autre fois, c'est : Est-ce qu'on peut
responsablement parler de la préoccupation partagée pour la sécurité de nos jeunes, pour qu'ils
approchent cette problématique avec les yeux grand ouverts, mais, une autre
fois, avec une approche réaliste et normale?
Et, pour nous, c'est ça qui n'est pas du tout clair dans le projet de loi
devant nous.
Troisième
chose, qui est, en quelque part, un petit peu auxiliaire, mais je me permets de
terminer là-dessus, parce que
malheureusement c'est une tendance qui a l'air de se répéter avec le
gouvernement actuel, c'est-à-dire l'idée que les consultations peuvent se faire vite, dans le calendrier qui convient
dans les plans du gouvernement. Ce n'est pas ça qui devrait gouverner nos délibérations, c'est les
besoins du public d'intervenir, c'est leurs intérêts. Et voilà, sur les
consultations aussi, je crois que les plans du gouvernement actuel ne
concordent pas avec les réalités.
Alors, pour
ces raisons, entre autres, notre formation va continuer à opposer au projet de
loi devant nous. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député.
Ajournement
Compte tenu de l'heure, les travaux de
l'Assemblée sont ajournés à demain, jeudi le 11 avril 2019, à
9 h 40.
(Fin de la séance à 17 h 59)