(Neuf heures quarante minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Bon mercredi à tous. Vous pouvez vous asseoir.
Affaires
courantes
Déclarations
de députés
Nous sommes aux affaires courantes, aux déclarations de députés. Alors, le premier intervenant, je cède la parole à Mme la députée de Sanguinet.
Souligner
la visite à l'Assemblée nationale de membres du regroupement
Partenaires neuro, maladies neurologiques évolutives
Mme Danielle
McCann
Mme McCann :
Merci, Mme la Présidente. J'ai le plaisir, ce matin, de prendre la parole afin
de souligner la présence des membres de
Partenaires neuro, maladies neurologiques évolutives, une initiative de la
division du Québec de la Société canadienne de la sclérose en plaques.
Les
Partenaires neuro nous tendent la main pour qu'ensemble nous posions des gestes
concrets afin d'améliorer la qualité
de vie des personnes aux prises avec une maladie neurologique évolutive et de
leurs proches aidants. Les personnes atteintes de ces maladies
neurologiques évolutives peuvent, bien sûr, compter sur notre réseau de santé
et de services sociaux pour leur offrir un
ensemble de services spécialisés de réadaptation. Collectivement, nous devons
également nous assurer d'offrir à ces personnes des milieux de vie
encore mieux adaptés à leurs besoins.
Ils
sont à l'Assemblée nationale aujourd'hui, et j'invite mes collègues à les
rencontrer et à échanger avec eux afin de mieux comprendre l'effet
dévastateur des maladies neurologiques évolutives. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant,
je cède la parole au député de D'Arcy-McGee.
Rendre
hommage à Mme Doreen Cons pour
ses 35 années d'engagement bénévole
M.
David Birnbaum
M. Birnbaum :
Soyez bons dès que possible. C'est toujours possible.
Mme la Présidente, the Dalai Lama offers
that very simple but profound advice to all of us. Evidently, Doreen Cons has led her life, her long life, and
enriched the lives of so many others by acting each day upon that very
good advice.
Doreen is now 86 years old and
only recently concluded some 35 years of active volunteer service on
behalf of hearing-impaired children and adults.
Back in 1975, she started by
giving time to CHIP, Communicaid for Hearing Impaired Persons, at the
MAB-Mackay Center in Montreal. She went on to serve for many years as the president of the organization.
She
continues to attend the annual general meetings and to sport a smile for
everyone she meets. That kind of communication knows no boundaries.
«Gut
arbet», Doreen. Travail bien accompli. Félicitations! And continued good
health!
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole au député de Chauveau.
Rendre
hommage à M. Helder Duarte, entraîneur-chef
de l'équipe féminine de soccer du Rouge et Or
M.
Sylvain Lévesque
M.
Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est avec consternation que nous avons appris,
la semaine dernière, le décès, à l'âge de 56 ans,
de l'entraîneur-chef de l'équipe de soccer féminine de l'Université Laval, M. Helder Duarte, résident de Lac-Beauport.
Entraîneur
du Rouge et Or depuis sa fondation, en 1995, impliqué dans l'Association régionale de soccer de Québec
depuis 1996, M. Duarte a été une figure
extrêmement importante dans le développement du soccer de la
région. Il a été élu cinq fois entraîneur de soccer de l'année au Québec
et à deux reprises au Canada, en plus de cumuler 300 victoires
en carrière.
Mais, bien
au-delà de ces statistiques et trophées, ce qu'on entend le plus souvent, ce
sont les témoignages sur ses grandes
qualités humaines. On souligne notamment sa bonté, sa bonne humeur et aussi son grand sens
de l'humour.
À
sa conjointe France, à ses deux filles, Amélie et Emanuelle, ainsi qu'à toute
sa famille, parents et amis, j'offre mes sincères condoléances. Merci, Helder
Duarte.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole au député
de Robert-Baldwin.
Rendre
hommage à M. Auguste Choquette pour son engagement politique
M.
Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Très bien. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Alors,
qui ne connaît pas ou ne connaissait pas M. Auguste Choquette? Tous,
autant sur la colline Parlementaire
de Québec qu'à Ottawa ou encore dans un congrès ou conseil général, ont
croisé son chemin. D'ailleurs, il ne manquait pas... il ne manquait
jamais un tel congrès, tout, d'ailleurs, comme mes budgets, qu'il considérait
les meilleurs.
Une
vie aussi remplie peut difficilement
se résumer en quelques secondes. C'est pourquoi je me limiterai à vous dire merci, M. Choquette. Merci pour tous ces
conseils, merci pour vos encouragements, merci pour votre engagement.
Merci d'avoir été un député à l'écoute de vos concitoyens. Enfin, merci pour
vos sourires, qui nous motivaient tous.
Mes pensées
accompagnent maintenant vos frères, vos soeurs, vos nièces et neveux, à qui je
transmets mes sincères sympathies. Encore une fois, merci, M. Choquette.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole au député de Bourget.
Souligner
le 30e anniversaire du Groupe vocal Turbulence
M.
Richard Campeau
M.
Campeau : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, j'aimerais souligner les 30 ans d'existence
de la troupe musicale Turbulence.
Essentiellement
présente dans la circonscription de Bourget, elle regroupe 75 choristes
sous la direction expérimentée de
M. Stéphane Dufour. Turbulence intègre dans ses spectacles un répertoire
presque exclusivement francophone.
Annuellement, la
formation présente devant plus de 5 000 personnes à guichet fermé, en
plus d'appuyer les initiatives locales et les levées de fonds. Le groupe
intègre des éléments modernes à ses concerts, appuyé notamment
par l'école de Métissage ou avec des narrations.
C'est
plusieurs vagues de choristes qui se sont succédé depuis
que le groupe La Ritournelle est devenu Turbulence. Ils ont aussi pu
partager la scène avec plusieurs artistes québécois de renom.
Finalement, je vous
invite à assister à leur présentation, qui aura lieu du 24 au 26 mai
prochain au centre Leonardo Da Vinci, à Montréal.
Bravo aux membres de
Turbulence! Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Mercier.
Saluer
le travail du collectif d'artistes Nos ateliers
Mme
Ruba Ghazal
Mme
Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Je veux aujourd'hui saluer le travail du collectif d'artistes Nos
ateliers, mis sur pied en décembre
dernier et qui se mobilise pour pérenniser la présence d'ateliers d'artistes au
coeur de l'île de Montréal, notamment
dans Mercier.
C'est
d'ailleurs dans la circonscription de Mercier que vit la plus grande concentration
d'artistes et d'artisans, et qui est
10 fois plus élevée que la moyenne canadienne. Ces peintres, photographes
ou vidéastes font rayonner la réputation de Montréal à l'international
et bénéficient grandement aux industries d'ici.
Paradoxalement, ces
artistes qui rendent attractifs nos milieux en subissent eux-mêmes trop souvent
les contrecoups. Pendant que les artistes
créent, des requins de l'immobilier, eux, continuent leur oeuvre de spéculation
massive.
Au
collectif Nos ateliers, je vous dis : Continuez votre combat, vous n'êtes
pas seuls. J'invite d'ailleurs tout
le monde à signer leur pétition. Et je presse le gouvernement à soutenir financièrement le programme de soutien des ateliers d'artistes à Montréal.
Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Côte-du-Sud. La parole est à vous.
Souligner
la tenue de l'assemblée générale annuelle de La Coop fédérée
Mme Marie-Eve
Proulx
Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, Mme
la Présidente. Demain, La Coop fédérée, fondée en 1922, la plus importante
entreprise agroalimentaire du Québec, tiendra sa 97e assemblée
générale annuelle. La Coop, qui représente plus de
120 000 membres partout au Canada, regroupe près de
60 coopératives réparties dans plusieurs provinces canadiennes, annoncera
ses résultats financiers.
Seul groupe
coopératif agroalimentaire du genre à exister au Canada, La Coop fédérée
contribue de manière considérable à
l'économie québécoise et canadienne avec des ventes consolidées de plus de
6,5 milliards de dollars en 2018. Quelque
14 000 personnes travaillent pour l'une des trois divisions, soit
Olymel, Sollio Agriculture ou Le Groupe BMR. Toutes les régions du Québec bénéficient de la présence de La Coop
fédérée depuis près de 100 ans, et je lui souhaite tout le succès
pour autant d'années à venir.
Je tiens à saluer la
présence des membres du conseil d'administration, MM. Ghislain Gervais,
Paul Noiseux, Mathieu Couture, Richard
Ferland ainsi que Nicolas Poirier-Quesnel et Christian Lévesque. Bonne
assemblée générale annuelle aux membres de La Coop fédérée!
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je
cède la parole à M. le député de Chomedey.
Rendre
hommage à M. Hratch Der Sarkissian, récipiendaire
de la Médaille de l'Assemblée nationale
M.
Guy Ouellette
M. Ouellette :
Merci, Mme la Présidente. L'automne dernier, Laval accueillait les
100es jeux Homenetmen, rassemblant des
troupes scoutes et des sportifs de la communauté arménienne de plusieurs villes
du monde. Cet événement
survenait près de 50 ans après le premier cross-country du Mont-Royal, événement
scolaire d'envergure.
Aujourd'hui, je souligne l'implication, le professionnalisme et le dévouement de Hratch Der Sarkissian,
président de ces jeux et concepteur de ce cross-country, un homme particulièrement
admirable et attachant.
Engagé
dans diverses associations et regroupements sport-études, toujours
à la recherche de nouveaux défis, tantôt
enseignant, conseiller pédagogique, directeur d'école, initiateur et concepteur
de multiples événements scolaires, M. Der
Sarkissian a toujours transmis, tout au long de sa vie, son amour et sa
passion pour l'activité physique. Il a su faire une différence, la
différence auprès de nos institutions et de notre jeunesse québécoise.
Décédé
le 29 décembre dernier, je tenais à lui rendre cet hommage et cette reconnaissance en remettant, le 22 février,
à son épouse Pierrette, son fils Shant, sa fille Karen et ses trois
petits-enfants, Alexandre, Anthony et Sareena, la Médaille de l'Assemblée
nationale...
• (9 h 50) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : En terminant.
M.
Ouellette : ...dont la remise restera gravée dans nos mémoires
collectives. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Saint-François.
Féliciter
le Centre d'initiatives en agriculture de la
région de Coaticook pour son dynamisme
Mme
Geneviève Hébert
Mme
Hébert :
Merci, Mme la Présidente. J'ai le bonheur d'avoir dans ma magnifique circonscription
de Saint-François des organismes qui se démarquent, qui rayonnent
par leur dynamisme et leur forte capacité à innover. C'est le cas du
Centre d'initiatives en agriculture de la région de Coaticook, communément
appelé le CIARC.
D'abord,
je me dois de souligner la beauté du site et le caractère exceptionnel de sa
grange, qui fut construite en 1912. Une grange centenaire, un monument
historique, un caractère patrimonial à préserver avec soin. Une merveille,
rien de moins.
Le
CIARC a mis en place des initiatives telles un incubateur d'entreprises maraîchères biologiques et un jardin pédagogique. Il y a aussi
une ferme-école, un lieu extraordinaire de formation pour notre relève
agricole.
Finalement, le CIARC
a un nombre impressionnant de réussites à son actif, et ce, avec très peu
d'aide gouvernementale.
Chère
équipe du CIARC, à l'aube de votre 30e anniversaire, c'est un plaisir de
travailler avec vous, pour vous, afin
de développer votre plein potentiel. Je suis déterminée à vous soutenir, à
trouver des leviers qui permettront de réaliser vos objectifs et de
briller encore davantage. Félicitations à toute votre équipe! Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je
cède la parole à Mme la députée de Montarville.
Souligner
le départ à la retraite de M. Jean-Marie Villeneuve, photographe
Mme
Nathalie Roy
Mme Roy : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Vous savez, le grand photographe américain Ansel Adams disait de son art qu'il ne s'agit pas de
transmettre une vision, mais de toucher les gens à travers une image. C'est exactement ce qu'a fait, en près de 50 ans, le
photographe de presse M. Jean-Marie Villeneuve. Je souhaite donc aujourd'hui souligner le départ à la retraite de cet amoureux de son art
respecté et apprécié de tous.
C'est
au ministère des Communications que
M. Villeneuve a fait ses débuts. À l'époque, par passion, il travaillait
les fins de semaine pour le journal Le Soleil,
qui allait rapidement devenir son principal employeur. Politique, faits divers,
spectacles. Au cours de sa prolifique
carrière, il a constitué un vaste inventaire de photos témoignant des grands
événements de l'actualité qui ont marqué notre histoire.
Alors,
rendons hommage à M. Jean-Marie Villeneuve. Merci pour ces cinq décennies
au service de la photographie et de
l'information, merci d'avoir touché tant de Québécois à travers vos images.
Nous vous souhaitons une très belle retraite. Merci pour ces images.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Ceci met fin à la rubrique
des députés.
Alors, je vais
suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 53)
(Reprise à 10 h 2)
Le Président :
Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir.
Présence
de M. Jean-Martin Aussant, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale
J'ai
le plaisir de souligner la présence, dans les tribunes, de M. Jean-Martin
Aussant, ancien député de Nicolet-Yamaska.
Présence
de M. Jean Habel, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale
Je souligne également
la présence de M. Jean Habel, ancien député de Sainte-Rose.
Nous poursuivons les
affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.
Dépôt
de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation.
Rapport
annuel et états financiers de l'Administration régionale Baie-James
Mme Laforest :
Oui, M. le Président. Conformément à l'article 21.14 de la Loi sur le ministère
des Affaires municipales, des Régions et de
l'Occupation du territoire, je dépose le rapport annuel 2017-2018 ainsi
que les états financiers au 31 mars 2018 de l'Administration
régionale de la Baie-James. Merci, M. le Président.
Le Président :
Ces documents sont déposés.
Il n'y a pas de
rapports de commissions ni de dépôt de pétitions.
Donc,
je disais, il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions
portant sur une violation de droit ou de privilège.
Questions
et réponses orales
Nous
en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales, et je cède
la parole au chef de l'opposition officielle.
Réforme
du système d'immigration
M.
Pierre Arcand
M. Arcand :
M. le Président, la confusion du gouvernement en immigration perdure depuis
maintenant des mois. Chaque jour, le
gouvernement alimente cette confusion. Il faut traiter les
18 000 dossiers et puis il faut les déchiqueter. La poursuite judiciaire, on dit qu'elle est
saugrenue, mais ils perdent en cour. Il faut aller vite, mais pas question de
mettre des ressources
supplémentaires. Une journée, c'est la faute du Parti libéral, l'autre jour,
c'est le Parti libéral qui a mis en place
le nouveau système qui va régler tous les problèmes. Là-dessus, M. le
Président, ils ont raison, nous avons mis en place ce nouveau système. Ça ne veut cependant pas dire qu'il faut
abandonner tous les gens qui ont suivi les règles de l'ancien système et qui attendent une réponse du
gouvernement. M. le Président, le plus ridicule de la situation, c'est que
des hauts fonctionnaires nous ont démontré
que les 18 000 dossiers pourraient être traités en six mois, et ce,
en parallèle avec le système Arrima.
M. le Président, est-ce que le
gouvernement pense que gaspiller 19 millions de dollars et briser des
milliers de rêves est un meilleur deal qu'investir 4 millions pour
traiter rapidement les dossiers?
Le Président :
M. le premier ministre.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. François
Legault
M. Legault :
Ils sont tellement prévisibles. M. le Président, durant toute la campagne
électorale, et je sais que le chef de l'opposition officielle était là, a bien
suivi la campagne électorale, on a été très clairs, on a dit :
Actuellement, le système pour choisir
les nouveaux arrivants ne fonctionne pas. Il y a beaucoup trop de nouveaux arrivants qui ne trouvent
pas d'emploi à la hauteur de leurs
qualifications puis il y a beaucoup trop de nouveaux arrivants qui ne parlent pas
français, et, à l'avenir, le plus
rapidement possible, si on devient le gouvernement, on va changer ce système, puis, à l'avenir, on
va s'assurer que les nouveaux
arrivants répondent aux besoins du marché du travail et que les nouveaux
arrivants parlent français.
Ce
n'est pas vrai qu'on va aller prendre, pendant un an... Parce que,
là, n'oubliez pas, il y a 40 000 dossiers en attente, à Ottawa, qui ont été accumulés, il y en a
un autre 40 000 personnes que les dossiers n'ont pas encore été
traités. Puis là l'opposition
nous dit : Continuez à traiter premier arrivé, premier servi, ne tenez pas
compte des critères qui sont proposés
pendant toute la campagne électorale, c'est-à-dire répondre aux besoins du marché du travail puis
parler français. Donc, le chef de l'opposition officielle ne devrait pas
être surpris qu'on essaie...
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
...d'ajuster le système pour être capables de mieux intégrer...
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand :
Hier, à 24/60, un ex-fonctionnaire, il a été clair, on peut faire les
deux.
La question, elle est
très simple, M. le premier ministre : Est-ce que c'est 19 millions
qu'on va dépenser pour déchiqueter 18 000 dossiers
ou est-ce que c'est 4 millions qu'on va dépenser pour les analyser
rapidement? Je pense que, M. le
Président, le premier ministre, il a un passé d'homme d'affaires. Qu'est-ce qui
est mieux pour l'économie du Québec?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, selon l'ancien système des libéraux, on
demandait à quelqu'un qui veut venir au Québec de donner 1 000 $. Il y en avait la moitié qui était
refusée, l'autre moitié qui était acceptée, 53 % ne parlaient pas
français. Nous, on a de la difficulté avec ça.
Ce
qu'on fait, c'est qu'on rembourse ou on veut rembourser, dès que le projet de
loi n° 9 sera adopté, le 1 000 $ qui a été déboursé par les personnes. Je ne sais pas ce que... Est-ce
que le chef de l'opposition officielle a un problème avec le fait qu'on
rembourse 1 000 $...
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
...à ceux qui ont payé le 1 000 $?
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand : Bien, d'abord, déchiqueter des dossiers, dépenser
19 millions de dollars pour déchiqueter des dossiers, alors qu'on pourrait, avec 4 millions, les analyser rapidement... Et, en plus, c'est miner la crédibilité du Québec à
l'international.
Je pense que le premier
ministre, il est comptable. C'est quoi, le meilleur deal?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, on ne dépense pas 19 millions
de dollars pour déchiqueter des
dossiers, là. On remet 1 000 $ à ceux qui ont payé le 1 000 $ et, plus que ça, M. le Président, on les invite à appliquer dans le nouveau système
Arrima gratuitement.
C'est un système
qui a été mis en place par les libéraux. C'est un bon système,
celui-là. L'ancien système, ce n'est pas un bon système. Pourquoi le gouvernement libéral a mis en
place Arrima, si ce n'est pas pour l'utiliser avant un an ou deux? C'est
quoi, le problème?
• (10 h 10) •
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand :
M. le Président, tout le monde est d'accord avec nous, les experts sont
d'accord avec nous, les fonctionnaires sont
d'accord avec nous. Même, je dirais, je suis sûr que, si vous parlez à votre ministre
de l'Économie, votre ministre des Finances, le président du Conseil du
trésor, qui voient le bon sens, ils disent que c'est une mesure antiéconomique,
c'est clair.
Pourquoi vous refusez
de prendre la meilleure décision pour l'économie du Québec?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, le chef de l'opposition
officielle pourrait dire : Pour
des raisons autres qu'économiques, c'est
mieux de traiter les dossiers selon l'ancien système, premier arrivé,
premier servi. Mais il ne peut pas nous dire : Pour des raisons économiques, c'est mieux,
l'ancien système. Le nouveau système met toute la priorité
sur répondre aux besoins des vraies entreprises
dans toutes les régions du Québec. Ça, c'est économique. Nous, de notre
côté, on est un gouvernement économique.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Legault :
Je comprends que le Parti libéral est rendu très proche de Québec solidaire...
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
...mais ça, c'est leur choix.
Le Président :
Question principale, M. le leader de l'opposition officielle.
Recours
judiciaire concernant le traitement
des demandes d'immigration en attente
M. Sébastien
Proulx
M. Proulx :
Oui. M. le Président...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Proulx :
Lundi, le gouvernement a reçu une gifle au visage. C'est ça qui s'est passé. Et
hier le premier ministre et le ministre de l'Immigration avaient l'occasion de faire
preuve d'humilité et de se repentir, et, sincèrement, nous aurions
salué ce geste. Il ne s'est rien passé, M. le Président. On a écouté
le premier ministre à plus d'une occasion hier, et, à chaque
fois, c'est comme s'il niait que le jugement avait été rendu.
Pourtant,
M. le Président, le jugement de la cour, là, ce n'est pas une
décision qui est banale, pour reprendre les termes du collègue de Santé
et Services sociaux. C'est une
décision qui est grave, c'est une décision qui est importante.
C'est une décision qui va teinter, M. le Président, l'avenir de ce gouvernement.
Bien, ce qu'on comprend, c'est que l'intention,
il est assez clair : on va faire le strict minimum pour ne pas se faire
condamner une autre fois. C'est comme si on se dit, M. le
Président : On a été punis puis on va faire le minimum en réparation.
La question qu'on pourrait poser, c'est : Est-ce que
le ministre reconnaît d'abord qu'il a transgressé
des lois? Est-ce qu'il va faire ce que la société civile lui demande, ce
que les parlementaires lui demandent, c'est de traiter les 18 000 dossiers?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, j'ai eu l'occasion de dire publiquement et dès lundi soir que nous
respections le jugement de la Cour
supérieure en injonction interlocutoire provisoire. Le leader de l'opposition
officielle connaît la procédure judiciaire, sait qu'il s'agit d'une première étape dans le
déroulement d'un processus judiciaire. La requête qui a été présentée
prévoit trois étapes. Cela étant dit, j'ai indiqué que nous allions traiter les
dossiers, comme c'était le cas préalablement au dépôt du projet de loi.
Ceci
étant dit, la volonté du gouvernement du Québec, elle ne change pas
relativement au fait qu'il faut réformer le système d'immigration au Québec, qu'il faut faire en sorte de s'assurer
d'arrimer les besoins du marché du travail avec le profil des candidats. Écoutez, le chef de l'opposition officielle
nous dit : Il faut répondre à la pénurie de main-d'oeuvre dans les différentes régions du Québec.
L'immigration peut être une solution, mais, si on continue avec le système que
vous avez mis en place durant des années,
avec l'inventaire de dossiers que vous avez fait accumuler à la fois au Québec
et à la fois, également, à Ottawa, en
traitant tous les dossiers en fonction du premier arrivé, premier dossier
traité, on se retrouve dans une
situation où ça ne répond pas à la pénurie de main-d'oeuvre, ça ne répond pas
aux besoins de toutes les régions du Québec, à Baie-Comeau, en Abitibi,
au Saguenay, dans le Bas-du-Fleuve.
Honnêtement,
un gouvernement économique va prendre des décisions basées sur la nécessité de
l'économie du Québec et de façon à
s'assurer aussi qu'on puisse mieux intégrer les immigrants et mieux arrimer
avec les besoins du marché du travail.
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : Alors, le projet de loi n° 9, ce qu'il fait
aussi, c'est qu'il prend soin des immigrants. On veut s'assurer...
Le Président :
Première complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien
Proulx
M. Proulx :
Oui. M. le Président, on va prendre un peu de temps sur la décision de la cour.
Pourquoi un recours judiciaire? Bien,
parce qu'il y a une décision politique qui a été prise. Pourquoi la justice
s'en est mêlée, M. le Président? Bien, parce qu'il y avait de l'arbitraire dans
la décision du ministre, parce que des gens étaient placés devant une situation
qui n'est pas viable, parce que leurs droits
étaient transgressés, M. le Président, et qu'ils ne pouvaient pas se faire
entendre autrement. Alors, c'est comme si, M. le Président, on se
retrouvait devant la situation où ici ce n'était pas assez.
Pourquoi...
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, c'est très clair, le système
d'immigration que nous avons actuellement ne répond pas à la nécessité des emplois disponibles dans les différentes
régions du Québec. Vous le savez, vous avez mis en place Arrima pour répondre à cette question-là. Il
faut faire en sorte de s'assurer que, lorsqu'on accueille une personne immigrante, elle puisse travailler dans un emploi
qui correspond à la hauteur de ses compétences. Écoutez, les immigrants depuis moins de cinq ans... qui sont au Québec,
59 % de ceux-ci sont dans un emploi pour lequel ils ont une
surqualification.
Est-ce
que vous trouvez ça normal que le marché de l'emploi soit comme ça? Que les
gens qu'on a accueillis ici, au Québec, n'occupent pas un emploi à la
hauteur de leurs compétences? Moi, je ne suis pas satisfait de votre bilan.
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : Je vais travailler à réformer ça et j'espère que
la main tendue de la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne,
c'est une vraie main tendue.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien
Proulx
M.
Proulx : Oui, M. le Président. Force est de constater que ce que répond ici le ministre,
en Chambre, est soit démenti ou
démonté dans l'espace public dans les 24 heures qui suivent. À chaque
fois, on a l'occasion d'entendre des gens pour dire l'inverse de ce qu'il a dit. Est-il dans l'intérêt
des Québécois, M. le
Président, de poursuivre ce recours
judiciaire? Il faut l'accepter, il a été rendu...
Quelles
instructions a-t-il données à ses procureurs? Va-t-il continuer ce
recours ou y mettre fin et traiter les dossiers?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, le député de Jean-Talon est assez expérimenté en cette Chambre pour savoir que l'article 35.3 s'applique ici et que l'affaire est devant la justice. Alors, pour
éviter tout préjudice à toutes les parties, vous savez que je ne peux
pas commenter là-dessus.
Cela étant dit, la volonté du gouvernement du Québec est la même, s'assurer de réformer le système d'immigration. Et j'espère que vous allez nous accompagner dans cette modification-là du système d'immigration afin de le bonifier. Vous ne pouvez pas nier la réalité que partout au Québec il y a
des entreprises qui ont besoin de travailleurs. Les régions
du Québec, il
faut s'assurer de leur vitalité. Il faut
s'assurer que, les gens qu'on accueille, on puisse les envoyer en région
et qu'il y ait un établissement durable.
Le Président :
En terminant.
M.
Jolin-Barrette : Sur le fond du dossier, pouvez-vous affirmer que vous
êtes en accord avec la position du gouvernement et que c'est la voie à suivre?
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Délai
de traitement des demandes d'immigration
Mme
Dominique Anglade
Mme
Anglade : Merci, M. le Président. Alors, depuis des semaines, le premier ministre nous a dit que demander aux
gens de refaire une demande dans le nouveau système Arrima était la bonne
approche. Encore hier, le premier
ministre nous a dit que ce que
préfère le PLQ, c'est traiter 18 000 dossiers,
ce qui va prendre plus d'un an. Ce n'est pas le choix qu'on a fait,
allons dans le nouveau système. Ceci implique donc que le nouveau système sera
beaucoup plus rapide.
Lors des audiences
devant le tribunal la semaine dernière, nous avons appris quelque chose qui n'a
jamais été présenté aux parlementaires. Dans
une déclaration sous serment, le sous-ministre adjoint du ministère de
l'Immigration, Eric Gervais, déclare
que seulement 400 dossiers seront traités dans le nouveau système en 2019.
Le ministre était-il trop gêné pour nous le dire en Chambre? C'est
devant les tribunaux qu'on l'a appris.
Alors,
la question est simple : Est-ce que le ministre peut nous confirmer que
l'intention du ministère est de traiter 400 dossiers en 2019 dans
le nouveau système?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, peut-être que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne devrait avoir
une discussion avec la députée de
Notre-Dame-de-Grâce pour savoir comment fonctionnent les inventaires, parce
qu'il y a eu une accumulation de dossiers.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Jolin-Barrette : Et, vous savez, actuellement au Québec, on se retrouve avec deux façons
de procéder. La première façon de
procéder, c'est au niveau du Programme de l'expérience québécoise. Les gens qui
sont sur le territoire québécois
obtiennent leurs CSQ beaucoup plus rapidement. L'autre élément aussi, c'est
dans le système Arrima, la gestion de la demande qui a été chaotique
sous votre gouvernement, parce que la réalité, là, c'est qu'on se retrouve avec
un inventaire de 40 000 personnes au gouvernement fédéral.
Alors,
M. le Président, lorsque la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne nous dit : Traitez les dossiers,
traitez les dossiers, vous voulez
faire gonfler l'inventaire au fédéral pour s'assurer aussi de créer des délais
supplémentaires. Moi, ce que je veux
faire, c'est réduire les délais en matière d'immigration, s'assurer également
qu'on peut faire en sorte que les gens
soient accueillis beaucoup plus rapidement au Québec. Ils vont être en emploi
dans les différentes régions du Québec. On ne veut pas de la méthode
libérale qui a été un chaos au cours des dernières années. Honnêtement,
rendez-vous à l'évidence, votre bilan n'est pas très bon.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Dominique Anglade
Mme
Anglade : C'est une habitude, M. le Président, le ministre ne répond
pas à la question, mais une chance que nous avons une déclaration sous
serment du sous-ministre adjoint.
Vous savez, vous avez
recommandé à des gens qui font partie des 18 000 dossiers d'aller
dans le nouveau système.
18 000 dossiers en 2019, 18 000 dossiers, vous allez en
traiter 400. À ce rythme-là, ça va prendre 45 ans pour traiter les
18 000 dossiers.
Est-ce
que, oui ou non, le ministre de l'Immigration peut confirmer que c'est
400 dossiers qui vont être traités dans le nouveau système en 2019?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le
Président, il y a quelque chose que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne ne comprend pas. À chaque année, à chaque année, le Québec
établit ses cibles en matière d'accueil en matière d'immigration. La réalité,
M. le Président, c'est que le gouvernement de
la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne a
laissé s'accumuler 40 000 dossiers, 40 000 personnes au
fédéral, en plus d'avoir 45 000 demandeurs également sur le volet
québécois.
Nous, ce
qu'on veut faire, c'est s'assurer de faire en sorte qu'on puisse accueillir ces
40 000 personnes là et pour démarrer
le nouveau système. Mais vous comprendrez qu'on a des cibles en matière
d'immigration, et il faut s'assurer de
faire en sorte de bien accueillir les gens. Mais, oui, il y a des délais, puis
les délais sont causés par qui? Par votre incurie d'avoir traité les
dossiers...
Le Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...d'avoir fait
une mauvaise gestion de la demande. Admettez-le, reconnaissez vos torts.
Des voix : ...
Le Président : Votre
attention, s'il vous plaît! Deuxième principale, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme Dominique Anglade
Mme
Anglade : M. le Président, on parle de pénurie de main-d'oeuvre, et ils veulent traiter 400 dossiers en 2019
dans le nouveau système.
Ils n'ont pas eu le courage de nous le dire ici, en Chambre. Ça fait trois
semaines qu'on pose des questions, M. le Président, ça fait trois
semaines qu'on n'a aucune réponse.
La question
est claire : Est-ce que, oui ou non, vous allez traiter 400 dossiers
dans le nouveau système Arrima en 2019? Oui ou non? Ça ne prendra
pas 45 secondes pour répondre.
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne devrait arrêter de faire des campagnes de peur et être honnête
avec les gens.
Des voix : ...
• (10 h 20) •
Le Président : Votre
attention, s'il vous plaît!
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
M. Jolin-Barrette : Actuellement, il
existe deux systèmes au Québec : le PEQ, pour les gens qui sont sur le territoire
québécois, qui répondent aux besoins du marché du travail, qui parlent
français; le programme régulier des travailleurs
permanents, le PRTQ, le programme régulier des travailleurs qualifiés, qui,
lui, a des délais et que vous avez accumulé
un inventaire de dossiers à la fois au provincial, à la fois au fédéral. La députée
de Notre-Dame-de-Grâce le sait très bien.
Le volume
de personnes qu'on va accueillir en fonction d'Arrima va dépendre nécessairement du nombre de personnes qu'on accueille dans le PEQ.
Le Président : En terminant.
M.
Jolin-Barrette : Alors, il
faut faire en sorte d'inviter les gens à déclarer leur intérêt dans Arrima, de
façon à ce qu'on puisse les traiter.
Le Président : Question
principale, Mme la députée de Marie-Victorin.
Processus de traitement des
demandes d'immigration
Mme Catherine Fournier
Mme
Fournier : M. le Président, ça fait trois semaines que le ministre
de l'Immigration a déposé le projet de loi
n° 9, ça fait trois semaines
qu'il est sur la sellette sur la question des 18 000 dossiers annulés et ça fait trois semaines que je lui propose une voie de passage. Puisque je
suis une éternelle optimiste et que j'ai bon espoir que le ministre puisse la
considérer, je vais la répéter. Son ministère pourrait traiter en priorité les
dossiers des gens qui sont déjà au Québec,
qui parlent déjà français et qui occupent déjà un emploi, puis transférer les
autres dans le programme Arrima, en
demandant le consentement des demandeurs pour l'utilisation des données
personnelles. C'est la solution logique. On l'a vu hier aux
consultations, tant l'association des avocats en droit d'immigration que la
Fédération des chambres de commerce et Québec International s'y rallient, pour
ne nommer que ceux-là.
Le ministre est-il
prêt à se rendre au compromis que je lui propose?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je remercie la députée de Marie-Victorin pour sa
question. Dès le départ, j'ai indiqué
que nous souhaitions inviter en priorité les gens qui se retrouvaient sur le
territoire québécois et qui étaient en
emploi. Pour ce faire, on doit cependant adopter le projet de loi n° 9.
Alors, je l'invite à collaborer avec nous lors de l'adoption du projet de loi. Présentement, on est
en auditions particulières, on entend les différents groupes. Par la suite,
il va y avoir le principe, et on se
retrouvera en étude détaillée fort probablement au mois de mars, si on a la
collaboration de tous.
Cela
étant dit, pour les gens qui sont sur le territoire québécois, qui sont en
emploi et qui parlent français, il y a une voie rapide, le Programme de l'expérience québécoise. Ça, il faut le
dire, ils peuvent appliquer en 20 jours ouvrables, ils ont leurs CSQ. Pour
les autres qui ne sont pas... qui ne répondent pas à ces critères-là, je les
invite à déclarer leur intérêt, et notre intention, ça a toujours été de
les traiter en priorité par le biais du système Arrima.
Alors,
j'invite la députée de Marie-Victorin à travailler en collaboration avec nous
dans le cadre de l'élaboration du
projet de loi et de façon à faire en sorte qu'on puisse s'assurer de réformer
le système d'immigration rapidement pour enfin pouvoir avoir un système
qui va être performant.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme
Catherine Fournier
Mme
Fournier : M. le Président, la collaboration, ça va dans
les deux sens. Et le premier ministre l'a bien dit : C'est déjà assez difficile de recruter des gens
qui parlent français et qui sont en mesure d'occuper un emploi à la hauteur de leurs compétences. Là, on a des gens qui sont
déjà ici, qui parlent déjà français et qui occupent déjà un emploi, et on
leur demande de recommencer leurs démarches d'immigration à zéro. C'est
totalement illogique.
Pourquoi
le ministre s'entête-t-il à leur compliquer la vie, alors qu'il pourrait
facilement accepter mon compromis?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, je saisis la question de la députée de
Marie-Victorin, et, pour faire ça clair, pour les gens dont elle parle, qui
parlent français, qui sont en emploi — 12 mois au cours des 24 derniers
mois, ce sont les critères du Programme
d'expérience québécoise — toutes ces personnes-là, je les invite à déposer leur candidature
dans le Programme d'expérience québécoise.
Il
est vrai que certaines personnes qui ont appliqué dans le PRTQ, au moment où
elles l'ont fait, elles n'étaient pas
admissibles au PEQ. Exemple, quelqu'un qui vient avec un permis de vacances,
travail, qui était ici, qui a appliqué un mois après son arrivée, bien,
désormais, elle parle français, elle est en emploi depuis 12 mois, elle
est admissible.
Alors, je l'invite à
communiquer le message comme moi...
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...pour les inviter à déposer dans le PEQ pour avoir son certificat de
sélection à l'intérieur de 20 jours.
Le Président :
Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme
Catherine Fournier
Mme
Fournier : M. le Président, je répète qu'on pourrait traiter
ces dossiers des gens qui parlent déjà français, qui sont déjà au Québec et qui occupent déjà un emploi avec le système
actuel, rapidement. Deuxièmement, on prend les autres dossiers, on les envoie dans la plateforme Arrima, on leur envoie
un courriel, aux demandeurs, pour leur demander leur consentement. On
n'est pas loin, M. le Président, là, on est à un clic de s'entendre.
Est-ce que le
ministre peut admettre qu'on a trouvé la voie d'un compromis?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, comme je l'ai toujours dit, dans un premier temps, pour les
candidats francophones et pour ceux qui
travaillent, il y a le PEQ, c'est la voie rapide, 20 jours ouvrables.
Là-dessus, Mme la députée de Marie-Victorin, je crois que nous nous
entendons. Pour les autres candidats qui sont des candidats qui ne sont pas admissibles au PEQ, on les invite à déclarer leur
intérêt rapidement dans Arrima, et j'ai toujours dit... et c'est mon intention
de les inviter en priorité s'ils sont sur le
territoire québécois et qu'ils occupent un emploi. Alors, je ne peux pas être
plus clair que ça. Et, pour tous les
autres candidats qui souhaitent venir au Québec, je les invite à déposer leurs
demandes de déclaration d'intérêt dans le système Arrima également.
Alors, pour les personnes qui avaient fait leurs demandes...
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette :
...au Québec, il faut déposer leurs demandes ou appliquer dans le PEQ.
Le Président :
Question principale, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.
Orientations
budgétaires en matière d'environnement
Mme
Manon Massé
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Hier, on a appris la date du budget et on a aussi
appris que ça allait être un budget
économique. Un budget, on le sait, ce n'est pas seulement des colonnes de
chiffres, c'est aussi le moment où un parti ou un gouvernement annonce ses
vraies couleurs, où il parle de sa vision de l'avenir du Québec.
Justement,
depuis trois semaines, il y a des jeunes qui nous en parlent, eux autres, de
leur vision. Ils marchent dans la rue
chaque vendredi pour nous appeler... pour nous parler de leurs inquiétudes face
à l'avenir. Le premier ministre n'a pas encore commenté ces manifestations,
alors, pour l'aider à se faire une tête, je vous présente Nicolas, 16 ans,
qui nous dit, et je le cite :
«Je suis ici parce qu'on veut que le gouvernement Legault prenne ses
responsabilités. C'est le problème le plus pressant de notre génération, on nous a légué une terre malade. Les
rapports disent qu'il [nous] reste moins de deux ans avant
que les changements deviennent quasiment irréversibles, donc on doit faire des
actions concrètes maintenant. [...]La semaine
prochaine, on va être 10 écoles, j'espère que ça va faire réaliser à M.
Legault que c'est maintenant que ça se passe.»
Est-ce
que le premier ministre pense à ces jeunes quand il décide de ses orientations
budgétaires? Lui qui a parlé de ses enfants, dans son discours
inaugural, pense-t-il à l'avenir de ses petits-enfants dans son budget?
Alors,
ma question au premier ministre : Est-ce qu'il donne des orientations
claires à son ministre des Finances pour faire le virage nécessaire vers
une économie faible en carbone?
Le Président :
Je vous rappelle que, même en citant, on doit quand même utiliser le titre et
non le nom de la personne citée, s'il vous plaît, par mesure de rappel. M. le
premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
Oui, M. le Président. Effectivement, il y aura un budget qui va être déposé le
21 mars. Je pense que la cheffe
de la troisième opposition sera contente de voir les mesures, entre autres, en
matière d'environnement. C'est important de se dire qu'au Québec on s'est donné un mécanisme,
avec le Fonds vert, pour être capable d'agir. On a des montants importants. Malheureusement, au cours des dernières années, le Fonds vert est
devenu un fonds qui était utilisé par une dizaine de ministères
pour finir leurs fins de mois, si je peux dire, sans rapport avec les impacts
pour réduire les GES. Le nouveau ministre
de l'Environnement est en train de rectifier le tir. Il y aura
des mesures d'annoncées dans le budget le 21 mars. Vous allez comprendre que ce
n'est pas possible pour moi à ce moment-ci de vous en dire plus long. Je
demande à la cheffe de la troisième opposition d'être patiente, mais je pense
qu'elle devrait être contente.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.
Mme
Manon Massé
Mme
Massé : Vous savez, quand on
annonce un budget économique, oui, on peut parler du Fonds vert, dont c'est le
mandat de financer du soutien pour la transition énergétique. Mais moi, je me
rappelle du premier ministre qui critiquait sans arrêt le PQ et le PLQ
qui finançaient la cimenterie de Port-Daniel, le projet le plus polluant.
Alors,
ma demande au premier ministre, c'est : Est-ce qu'il va répéter les erreurs
des anciens partis et financer, par exemple, le projet de gazoduc présentement
sur la table?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, le projet de gazoduc GNL est un projet de 14 milliards de dollars, 14 milliards de
dollars, qui créerait des emplois très payants au Saguenay—Lac-Saint-Jean.
Évidemment, on va s'assurer d'abord qu'il y
ait de l'acceptabilité sociale au Saguenay—Lac-Saint-Jean, ce qui semble être le cas.
Maintenant, il faut rappeler qu'il s'agit d'un oléoduc de gaz, hein, pas
de pétrole, mais bien de gaz. On va s'assurer que toutes les vérifications
environnementales soient faites.
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
Mais on a besoin d'investissement comme celui-là au Québec.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.
Mme
Manon Massé
Mme
Massé : Alors, voyez-vous,
c'est exactement ça, le problème. Économie et environnement, on
glisse souvent dans ces affaires-là.
Alors, il n'a pas vraiment répondu à ma question, parce que le budget
doit donner l'orientation claire. Les jeunes nous le demandent. D'ailleurs,
je demande au premier ministre de répondre à ces jeunes-là.
Peut-il
vraiment s'engager envers eux de présenter un budget
de transition énergétique et économique qui effectue un vrai virage vers une économie
faible en émissions de GES?
• (10 h 30) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président,
d'abord, c'est important de se le dire, au Québec, on est déjà la
province, l'État, en Amérique du Nord où on a le moins d'émissions de GES par habitant. Donc, on est déjà les
meilleurs, notre objectif,
c'est d'être encore plus meilleurs, comme disait l'autre.
Donc, oui, on veut
investir, entre autres, dans le transport en commun, mais, vous savez, pour investir
des milliards dans le transport en commun, il faut créer de la richesse. Donc, il
faut arrêter de mettre en opposition l'économie,
la création de richesse puis les investissements en environnement. On va
s'occuper d'environnement.
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
On va s'occuper aussi de créer de la richesse pour les Québécois.
Le Président :
Question principale, M. le député de Robert-Baldwin.
Projections de croissance
économique
M. Carlos
J. Leitão
M. Leitão : Merci,
M. le Président. Alors, le Québec
est en très bonne santé financière. Cette santé financière se manifeste
dans des surplus substantiels, et ça, je vous avoue, c'est la faute des
libéraux, M. le Président.
Encore la semaine
dernière, l'Institut du Québec, après analyse minutieuse, mentionnait qu'un
surplus de 3 à 5 milliards de dollars était possible, et cela, après versement au Fonds des générations. Le premier
ministre, lui, il parle toujours
d'un surplus de 2 milliards de
dollars. Le ministre des Finances, lui, il parle d'une accélération de dépenses
pendant que le président du Conseil du trésor passe des commandes
d'optimisation de ces dépenses-là, bon.
Alors,
après toute cette valse des milliards et par souci de transparence, est-ce que
M. le ministre des Finances
peut nous donner, à trois semaines du budget, l'heure juste sur le surplus?
Combien de surplus en 2018‑2019?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Eric
Girard
M. Girard
(Groulx) : M. le Président, je peux certainement vous donner l'heure juste, mais pas le chiffre.
C'est lors du dépôt du budget
que je donnerai le chiffre précis et, comme je l'ai mentionné plusieurs
fois... et je veux revenir sur l'institut économique auquel vous faites
référence.
Ces
gens-là utilisent les données du ministère, et nous avons publié un rapport
mensuel le 8 février, bien avant eux, qui faisait état du surplus. Il
n'y avait absolument aucune nouvelle information dans ce rapport. Et, oui, les dépenses sont en retard par rapport à ce qui avait été prévu, notamment dans le budget, dans le rapport préélectoral et dans Le point.
Alors,
on est en train d'étudier si, d'une
part, les dépenses vont s'accélérer et, d'autre part, s'il y a des gestes
concrets qu'on peut faire pour améliorer la qualité des services des
Québécois et faire une différence.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.
M. Carlos
J. Leitão
M. Leitão :
Comme, par exemple, un surplus additionnel pour le ministère de l'Immigration
pour traiter les cas. Ça serait très utile.
Maintenant,
le ministre, hier, a levé le suspense quant à la date du budget. Très bien,
bravo! Mais il nous a aussi réservé
une belle petite surprise. Il nous a aussi annoncé par communiqué que le
rapport mensuel dont il a fait allusion, qui devait être publié le 8
mars, le sera seulement lors du budget.
Alors, M. le ministre, pourquoi un tel manque de transparence? Pourquoi
un rapport à date fixe devient un rapport à quand ça me plaît?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Merci pour la question.
Simplement parce
que, dans un souci de transparence,
nous nous sommes engagés, à tous les
trois mois, à réviser la prévision annuelle du solde budgétaire,
qui, je crois, était l'objet de votre
première question. Donc, après neuf mois et le dépôt du budget,
il nous fera plaisir de réviser le solde budgétaire pour l'année 2018‑2019.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão : M. le
Président, une chose n'empêche pas
l'autre. Le rapport mensuel, d'ailleurs, est un outil précieux pour les parlementaires,
et donc pour le public, de suivre régulièrement l'évolution des revenus et l'évolution
des dépenses. D'ailleurs, le Québec est le
seul État... la seule province, pardon, à avoir un tel rapport. Quand nous
sommes... en 2014, transformé ce
rapport à date fixe, l'actuel président du Conseil du trésor trouvait ça
une excellente idée, il nous a chaudement applaudis.
Est-ce que
le président du Conseil du trésor trouve ça une bonne idée qu'une date fixe
devienne une date à quand ça me plaît?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Nous nous sommes
engagés à améliorer ce rapport. Ce rapport fait seulement état du fonds
général, c'est un des problèmes. Les autres
entités, les fonds, ne nous fournissent pas cette information mensuelle. Le rapport est
incomplet et le rapport ne fournit pas d'estimation du solde annuel, ce pourquoi
nous nous sommes engagés, à tous les
trois mois maintenant, à fournir une estimation du solde annuel, ce que
nous ferons, lors du dépôt du budget, avec le rapport mensuel et le dépôt du budget.
Le Président : Question
principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Mesures pour la protection et la promotion du
français
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Avant les fêtes, mon collègue de Rimouski a questionné la ministre responsable de la Langue française sur le renforcement de la loi 101. Elle nous
a répondu que son gouvernement n'y ferait pas de modification.
Pourtant, en campagne électorale, la CAQ proposait de renforcer l'Office québécois de la langue française afin d'en faire un acteur majeur de la francisation du Québec. Elle
promettait même la création d'un poste de commissaire à la langue française. Or, la création d'un poste de commissaire nécessite de rouvrir la loi. Le gouvernement de la CAQ se
plaît à dire qu'il sera le gouvernement qui respectera toutes ses promesses. Pour être cohérent avec sa
promesse qu'il a faite aux Québécoises et aux Québécois, le gouvernement
doit donc modifier et renforcer la loi 101.
Est-ce que
la ministre responsable de la
Langue française va revenir sur ses
propos et accepter de rouvrir la loi?
Le Président : Mme la
ministre responsable de la Langue française.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy : Oui. Je remercie le collègue
pour sa question. Vous savez, en matière de langue française, M. le Président, le gouvernement, et, je pense, tous les parlementaires, et toutes les sociétés d'État ont un devoir d'exemplarité. La langue française, c'est notre langue commune. C'est la langue
officielle du Québec.
Je
comprends que la question de mon collègue porte, entre
autres, sur un rapport que nous
avions déposé lors de la dernière législature,
fait par une de mes collègues, un excellent rapport, d'ailleurs. Et, vous
savez, ce qui est important pour nous, c'est que l'Office de la langue française applique la loi 101 parce que vous comme moi
constatons que, depuis des années,
voire plus d'une quinzaine d'années, il
y a eu un certain laxisme à l'égard
de l'application de la loi 101. Et je pense que ce que les Québécois qui
nous écoutent veulent, c'est que la loi 101 soit appliquée.
Alors, nous
allons commencer par bien l'appliquer. Et, vous allez voir, d'ailleurs, il y a déjà quelques
changements qui ont été effectués au sein même de l'Office québécois de
la langue française. Nous avons une toute nouvelle présidente-directrice
générale. Et je pense que vous allez voir qu'il y a des choses intéressantes
qui s'en viennent.
Le Président : En terminant.
Mme Roy : Alors,
surtout... Je vous reviens.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci, M. le
Président.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
M. Arseneau : On veut bien croire à la préoccupation sincère de la ministre pour l'application de la loi 101, mais on
sent également la responsabilité qu'elle veut remettre à l'office plutôt que ce
soit le gouvernement qui prenne ses responsabilités et respecte ses promesses. En septembre dernier,
le premier ministre lui-même disait que le français devait
être une priorité nationale, et la solution que vous proposez, c'est la
création d'un poste de commissaire.
Alors, encore une fois, pour créer le poste, il faut rouvrir la loi. Est-ce que vous allez le
faire, Mme la ministre?
Le Président : Mme la
ministre responsable de la Langue française.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy : Oui. Alors, je poursuis et je vous dis que nous
avons maintenant une nouvelle présidente-directrice générale à l'Office québécois de la langue
française. Nous sommes en train de voir de quelle façon il y a eu du laxisme. Il
y a eu des articles de la loi 101 qui
n'ont pas été respectés, nécessairement, ou appliqués. Et, vous savez quoi, M. le député, nous allons commencer par l'appliquer, cette Charte de la langue française. Nous allons commencer par l'appliquer et par maximiser l'efficacité
des organes qui sont constitués par la loi 101.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci, M.
le Président. On peut décider
d'appliquer la loi. On peut aussi décider de respecter ses promesses et modifier la loi, passer à l'action.
L'Office québécois de la langue
française peut agir. Le gouvernement doit agir. C'est sa responsabilité.
Encore une fois, pourquoi ne pas accepter de reculer sur vos propos, et d'ouvrir la
loi, et de mettre en place le poste de commissaire que vous avez
promis?
Le Président : Mme la
ministre responsable de la Langue française.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy : Alors, il
n'est pas question de reculer sur quoi que ce soit. Je vous dis depuis le
début, depuis ma nomination, que la loi 101,
la Charte de la langue française, nous serons là pour l'appliquer. Il y a eu du
laxisme au cours des 15 dernières
années. Il y a eu, entre autres, de l'affichage, de l'affichage en anglais, en
chinois, en n'importe quelle langue, sauf en français. Nous allons y
remédier.
Nous avons une nouvelle présidente-directrice
générale, et j'ai demandé un beau portrait de ce qui se passe. Nous attendons d'ailleurs ces travaux à cet égard.
Nous allons bouger, mais nous allons appliquer la loi 101, contrairement
à ce qui n'a pas été fait au cours des dernières années.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! Question principale, Mme la députée de Taschereau.
Productions québécoises sur
Netflix
Mme Catherine Dorion
Mme Dorion : M. le
Président, j'aime beaucoup
les séries. Moi, ça a commencé dans mon enfance. J'écoutais Passe-Partout,
Watatatow. Après ça, ça a été Les filles de Caleb, Chambres en
ville, Lance et compte.
Bon, maintenant,
je n'ai plus la télé, mais j'ai Netflix, ça fait que j'écoute House
of Cards, j'écoute Game of Thrones, The Handmaid's Tale. Puis, comme j'aime les séries, je me suis
dit : Tiens, ma question sur Netflix, il y a deux semaines, a eu une pas pire cote d'écoute sur les réseaux
sociaux. Je pourrais en faire une série et puis créer des nouveaux épisodes
tant qu'il n'y aura pas un dénouement
clair qui mette fin à toute l'histoire. Tu sais, que ça finisse mal ou que ça
finisse bien, mais qu'il y ait un dénouement clair, la série est finie.
Alors,
deuxième épisode aujourd'hui, ma question est pour la ministre de la Culture. Que pense-t-elle de l'idée
de s'inspirer de l'Union européenne et d'imposer à Netflix qu'il mette
dans son catalogue québécois au moins 30 % de productions québécoises?
• (10 h 40) •
Le Président : Mme la
ministre de la Culture.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy :
Oui. Bien, je suis ravie de pouvoir continuer notre entretien avec la députée
de Taschereau, ravie parce que, vous savez, il faut faire un petit peu
de pédagogie ici, hein?
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Mme Roy :
Eh bien, légalement, je vous dirai qu'actuellement la grande problématique,
c'est qu'Internet et le contenu
d'Internet sont de compétence fédérale en vertu des articles 91 et 92 de la Loi
constitutionnelle de 1867, que vous devez sûrement connaître.
Actuellement
à Québec, vous allez me dire : Mais oui, mais pourquoi ne légifère-t-on?
Actuellement, le Québec a un pouvoir
de taxation, ce qu'il a fait en janvier dernier, mais n'a pas le pouvoir sur le
contenu des fournisseurs de services Internet,
et ça, c'est triste. C'est triste, mais cependant vous me parlez de séries et
vous me parlez de séries, justement les séries de nos créateurs que nous
devrions voir davantage.
Ça me déçoit
un petit peu de voir que ma collègue semble faire la promotion de Netflix
plutôt que la promotion de nos propres plateformes, ici, québécoises.
Vous savez, il y a...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
Mme Roy :
...Télé-Québec, M. le Président, qui est un grand succès, une magnifique
plateforme. Il y a Tou.tv. On y voit là beaucoup...
Le Président : En terminant.
Mme Roy : ...de
créations de nos producteurs, de nos réalisateurs. Pourquoi pas Illico tant
qu'à y être?
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Taschereau.
Des voix : ...
Le Président : Votre
attention, s'il vous plaît!
Mme Catherine Dorion
Mme Dorion :
Le contenu québécois est bon. Les gens en redemandent. Il y a 700 000
personnes qui ont écouté Passe-Partout cette semaine. Sur Tou.tv, c'est la même chose.
On les aime, ces plateformes-là, mais ça serait le fun que ça ne soit
pas toujours l'État qui paie, que ce ne soit pas toujours nos taxes qui paient.
Quand il
y a des compagnies qui viennent faire beaucoup d'argent chez nous, pourquoi
est-ce qu'on ne leur demande pas de
participer à l'économie québécoise, d'autant plus qu'on a un gouvernement qui
se dit nationaliste en face de nous?
Des voix : ...
Le Président : S'il vous plaît!
Mme Dorion : Alors, j'aimerais savoir c'est quoi, son plan
quand le fédéral va la revirer de bord par
rapport à la négociation?
Le Président :
Mme la ministre des Communications.
Des voix :
...
Le Président :
Restez attentifs pour écouter tant les questions que les réponses. Merci.
Mme Nathalie
Roy
Mme Roy : Vous savez, vous parlez de l'expérience
européenne ou, du moins, des réflexions qui sont faites en Europe. Je vous disais qu'on a un pouvoir de taxation,
mais on n'a pas un pouvoir sur le contenu. Le fameux contenu, on n'a pas de contrôle là-dessus.
Cependant, vous savez qu'il y a actuellement une révision
qui est en train de se faire à Ottawa,
et moi, je mets de la pression sur mon homologue à Ottawa
pour justement valoriser notre contenu, faire en sorte qu'il puisse y avoir quelque
chose.
Il y a quelque chose d'intéressant que j'ai vu passer en Europe, entre autres en France, plus précisément. On est en train de se poser la question :
Pourquoi ne pas taxer le chiffre d'affaires de Netflix?, ce qui est possible.
Alors, cette réflexion-là moi, j'en suis, je
trouve ça très intéressant, et je mets de la pression actuellement sur mes homologues fédéraux...
Le Président :
En terminant.
Mme Roy : ...pour qu'on puisse faire quelque chose pour que nos créateurs y retrouvent justement leur part et se
battent à armes égales.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taschereau.
Mme Catherine
Dorion
Mme Dorion : Historiquement, la culture ne fait pas partie, dans la
Constitution canadienne, des compétences d'un bord ou de l'autre, et, historiquement,
le Québec a décidé d'occuper une part vraiment importante dans cette zone grise là. On a toujours été extrêmement combatifs, beaucoup plus combatifs que les autres provinces, pour une
raison très claire, on a une culture
à protéger. Là, j'ai l'impression qu'il
y a un virage qui se prend, que maintenant
on abandonne ça. On se soumet un peu au fédéral puis on change, sur
cette trame-là, l'histoire.
Donc,
j'aimerais savoir, si je reviens dans,
peut-être, trois semaines, un mois, avec la même question, de savoir où
on est rendu...
Le Président :
Mme la ministre des Communications et de la Culture.
Mme Nathalie
Roy
Mme Roy :
Oui, je vous remercie. Inquiétez-vous pas, je serai toujours là pour me battre.
Nous nous battons pour nos créateurs...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
Mme Roy :
...nous faisons de la pression sur le fédéral parce qu'il y a une réalité, M.
le Président, nous vivons dans un État de droit, et tout ce qui est
Internet est de compétence fédérale. Je ne l'ai pas inventé, c'était la Loi constitutionnelle de 1867, c'est les Pères
de la Confédération qui ont pensé à ça. Cependant, il faut se battre...
Des voix :
...
Le Président :
Votre attention, s'il vous plaît! Deux secondes. Ça va très bien. On est
attentifs aux questions. Attention! On est
attentifs aux réponses. Je vous demande simplement votre collaboration pour poursuivre cette période de questions. Merci. Mme la
ministre.
Mme Roy :
Vous savez, M. le Président, moi, je travaille pour la mise en valeur des
contenus québécois, effectivement. La création, la diffusion, on travaille là-dessus.
Et, vous savez, il y a d'autres choses que Netflix dans la vie, Mme
la députée. Nous allons travailler pour aider nos producteurs...
Le Président :
En terminant.
Mme Roy : ...sur toutes
les plateformes. Merci.
Le Président :
Question principale, M. le leader de l'opposition officielle.
Projet de loi sur la réforme de l'immigration
M. Sébastien Proulx
M. Proulx : Oui, M.
le Président. Il l'a dit tout à l'heure, puis il l'a répété depuis deux semaines, le ministre a dit :
On ne va pas traiter tous les dossiers, on va traiter seulement quelques
dossiers, d'ailleurs, la volonté également du premier ministre, il l'a répété.
Alors, le gouvernement n'en a pas envie, c'est le PM qui l'a dit.
Alors, ça va
poser des questions, M. le
Président, d'abord,
parce qu'ils vont traiter quelques dossiers, mais on ne sait pas lesquels, mais
on ne sait surtout pas comment. Alors, comment ça va se faire, M. le Président? Est-ce que c'est une
loterie? Est-ce qu'ils vont faire des choix? Est-ce qu'ils vont suivre l'ancien modèle? Je ne le sais pas, M. le Président. Mais les gens qui
écoutent, les gens qui attendent, eux non plus ne le savent pas.
M. le Président, jusqu'à maintenant, le ministre a donné beaucoup de leçons. Il a inventé des histoires. Il a mis
la faute sur les autres. Il n'a pas
pris acte correctement, je pense, du jugement. Une chose est certaine, c'est
qu'il est en colère parce qu'en commission parlementaire c'est palpable,
M. le Président, et les groupes qui viennent ont à goûter à sa médecine.
Alors, M. le Président, va-t-il prendre acte de ce dossier? Et combien de dossiers va-t-il
traiter pendant l'adoption de
son projet de loi?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, j'ai eu l'occasion
d'indiquer que le traitement normal des dossiers allait suivre son cours. Il faut comprendre qu'en matière de traitement des dossiers tout dépend en fonction du nombre de
dossiers que nous recevons dans les
différents programmes. Alors, tout
à l'heure, j'avais l'échange avec la députée de
Marie-Victorin et ensuite avec la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne relativement au fait que nous traiterons les dossiers en fonction du Programme de l'expérience québécoise et en vertu
du Programme régulier des travailleurs qualifiés, et ce, jusqu'à ce que
cette Assemblée se prononce sur le contenu du projet de loi.
Et, d'entrée
de jeu, M. le Président, il faut dire que le projet de loi n° 9 ne change
absolument rien au statut des gens qui
étaient sur le territoire québécois. Ça, c'est important de le dire et de le
répéter. Cela étant dit, j'invite les gens à déposer leurs demandes dans
le PEQ ou dans le système Arrima.
Une chose qui est sûre, M. le Président, c'est
que le système d'immigration au Québec ne fonctionne pas en fonction, notamment, de la pénurie de main-d'oeuvre, de l'adéquation entre les besoins du marché du travail et
le profil de compétence des candidats.
Ça, le député de Jean-Talon ne peut pas le nier. Il doit l'affirmer. Et ça doit
être très clair qu'il doit également
cesser de faire une campagne de peur. Il faut bien renseigner les gens. C'est
ce qu'on fait du côté du gouvernement. Et j'invite le Parti libéral à
collaborer en commission parlementaire...
Le Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...et
surtout, lorsqu'il questionne les intervenants, à s'assurer de la validité des
propos.
Le Président : Première
complémentaire, M. leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien Proulx
M. Proulx : Oui, M. le
Président. Ce manque de flexibilité, cette rigidité de laquelle fait état le
ministre et le gouvernement a un prix, M. le
Président. Et mon inquiétude, c'est la suivante, c'est que, puisqu'il y a des
gens qui vont payer parce que leurs
dossiers ne seront pas traités, et on ne sait pas combien, bien, c'est que le
gouvernement n'ait pas envie que ça dure longtemps parce qu'il ne voudra
pas traiter beaucoup de dossiers.
Alors, la
question qui va se poser, c'est : Quelle sera l'attitude du gouvernement
dans le cadre du projet de loi? Va-t-il nous bousculer? Aurons-nous le
temps nécessaire pour traiter de ce dossier?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, l'étude d'un projet de loi en
commission parlementaire dépend de la bonne volonté de l'ensemble de la députation, incluant la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne et
les députés que vous allez déléguer à
cette commission. Moi, j'aborde les travaux de la commission dans un esprit de
collaboration, comme je l'ai toujours fait. On peut bonifier le projet
de loi.
Cela étant
dit, je demande au leader de l'opposition officielle : Est-ce qu'il est
prêt à se joindre à nous et à inviter prioritairement les gens qui sont sur le
territoire québécois
et qui auront déposé leurs demandes
dans le système Arrima? Est-ce qu'il veut favoriser le fait que ces gens-là qui sont au Québec,
qui sont en emploi, puissent être invités prioritairement dans le
système Arrima? Je lui pose la question parce qu'honnêtement c'est la
position...
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...du gouvernement depuis le début, et j'aimerais
bien l'entendre, connaître sa position à lui.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien
Proulx
M. Proulx : Oui, M.
le Président. Je réitère notre
inquiétude. La colère du ministre va toucher les gens, elle va toucher les gens qui sont dans cette liste de
personnes, qui, malheureusement, ne seront pas traitées ou ça va
arrêter avant eux parce que
le projet de loi sera adopté, parce
qu'ils n'ont pas l'intention de le faire. Mais ça risque aussi de toucher
les parlementaires. Moi, mon impression, M.
le Président, c'est que le gouvernement veut aller très vite. Bien, je ne l'ai
pas inventé, ce sont les mots du premier ministre.
Alors,
qu'est-ce que ça veut dire, aller vite? Ça veut dire nous imposer le projet de
loi? Ça veut dire couper court aux consultations et au débat...
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, dans un premier temps, je ne
sais pas où le leader de l'opposition voit de la colère. Je suis très zen et, comme leader du gouvernement, je tente de
faire fonctionner le Parlement. Alors, lorsque le leader de l'opposition officielle nous dit :
Couper court aux consultations, écoutez, sur les 22 groupes qu'on entend
en commission parlementaire sur le
projet de loi n° 9, 20 ont été sollicités par le Parti libéral du Québec.
Je trouve, M. le Président, que c'est
une bonne moyenne au bâton pour le Parti libéral. 20 des 22 groupes nous
proviennent de vos demandes. Alors, peut-être que j'aurais dû vous en donner 22
sur 22, avoir 100 % des groupes. La prochaine fois, je tenterai de
faire un effort supplémentaire pour vous accommoder encore plus. Mais, vous savez,
il faut faire avancer le Parlement.
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette :
La job du Parlement, c'est d'adopter des lois, et c'est ce qu'on va faire.
Le Président :
Cela met fin à la période de questions et réponses orales. Merci à tous.
(Applaudissements)
Le Président :
Pas d'applaudissements, s'il vous plaît!
• (10 h 50) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, je vous demanderais de garder le silence,
s'il vous plaît.
Motions
sans préavis
Alors,
comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des
motions sans préavis. En fonction de
nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais
maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Fournier :
Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement des membres de cette
Assemblée afin de présenter, conjointement
avec le député de La Pinière, la députée de Mercier, et le député de
Chomedey, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de mettre en place, dans les plus
brefs délais, [des] réelles mesures
de mitigations pour permettre aux 18 000 usagers des lignes de train
Deux-Montagnes et Mascouche de se
rendre au centre-ville de Montréal en moins d'une heure.»
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre de cette motion?
M. Schneeberger :
...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, comme il n'y a pas de
consentement, nous allons passer à la deuxième motion sans préavis. Alors,
je reconnais un membre du troisième groupe d'opposition. La parole est à vous.
Mme Lessard-Therrien : Merci, Mme
la Présidente. Je demande le
consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante
conjointement avec le député de Chomedey :
«Que l'Assemblée nationale
reconnaisse le danger sur la santé et l'environnement de l'utilisation
systémique des pesticides en agriculture;
«Qu'elle
constate que la stratégie phytosanitaire du Québec a échoué à atteindre sa
cible de réduction d'utilisation des pesticides;
«Qu'elle
demande au gouvernement de mettre en place, dans les meilleurs délais, un plan
de transition afin de réduire la dépendance des agriculteurs québécois
envers les pesticides;
«Que ce plan
soit axé sur un meilleur accompagnement des producteurs agricoles, notamment
par l'ajout de services agronomiques publics et indépendants.»
Merci.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement pour en débattre?
M. Schneeberger :
Pas de consentement.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il n'y a pas de consentement, je reconnais maintenant
un groupe formant le gouvernement. Mme la ministre de la Justice, la
parole est à vous.
Souligner
le 120e anniversaire du Jeune Barreau de Montréal
Mme LeBel : Alors, merci, Mme la Présidente. Je vous
demande le consentement pour déposer la motion suivante. Cette demande est faite conjointement avec le député
de LaFontaine, la députée de
Joliette, le député d'Hochelaga-Maisonneuve et le député de Chomedey.
Donc :
«Que l'Assemblée nationale souligne le 120e
anniversaire du Jeune Barreau de Montréal, qui s'est déroulé le 4 novembre [dernier];
«Qu'elle soit
reconnaissante des services bénévoles de consultation et d'information
juridique auprès de différents segments de la population;
«Qu'elle remercie les bénévoles, membres de
comité, anciens présidents et administrateurs qui ont contribué à son succès;
«Qu'enfin,
elle encourage le Jeune Barreau de Montréal à continuer de travailler pour
l'amélioration de l'accessibilité à la justice et de contribuer au
bien-être collectif.»
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci. Merci, Mme la ministre. Consentement pour en débattre?
M. Schneeberger :
Il y a consentement, sans débat.
Mise aux voix
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, motion adoptée. Maintenant, nous allons passer au membre... Excusez-moi. Cette motion est adoptée. Le membre
de l'opposition officielle. Alors, je reconnais... M. le député, la parole est à
vous.
Souligner
le Mois de l'histoire des Noirs et la Décennie
internationale des personnes d'ascendance africaine
M. Benjamin :
Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin
de présenter la motion suivante conjointement avec le ministre de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, la députée de Marie-Victorin,
le député de Laurier-Dorion et le député de Chomedey :
«Que l'Assemblée nationale souligne le Mois de
l'histoire des Noirs ainsi que la Décennie internationale des personnes d'ascendance
africaine, proclamée par l'Assemblée générale [des Nations unies] en décembre
2014 et qui a pour but de protéger et
de promouvoir les droits des peuples descendants d'Afrique et de reconnaître
leur participation à l'enrichissement d'autres cultures;
«Qu'elle rappelle l'enracinement des personnes issues des
communautés noires, établies au Québec depuis plus de quatre siècles, ainsi que
leur engagement à faire du Québec une société prospère, égalitaire et
inclusive;
«Qu'elle
souligne, notamment, l'élection historique de M. Jean Alfred en 1976, premier
député noir à siéger au sein de cette Assemblée;
«Qu'elle
prenne acte que selon la Commission canadienne des droits de la personne, les
crimes visant les Noirs sont demeurés le type le plus répandu de crimes
haineux motivés par la race ou l'origine ethnique;
«Qu'elle rappelle qu'en mars 2018, le
Secrétariat à la jeunesse a développé une stratégie pour les jeunes des
communautés noires, en partenariat avec les organismes des communautés noires
réunis dans le cadre du sommet socioéconomique des jeunes des communautés
noires;
«Qu'elle
reconnaisse l'importance de travailler pour une société plus égalitaire,
notamment par la mise en place des
mesures visant la lutte contre toutes les formes de discrimination et
d'exclusion dont sont victimes des membres des communautés noires;
«Qu'enfin,
l'Assemblée nationale appuie les objectifs de la Décennie internationale des
personnes d'ascendance africaine et
qu'elle l'invite à travailler avec les acteurs des communautés noires, afin de
trouver des solutions durables visant à améliorer la qualité de vie des
personnes visées par cette déclaration.»
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de Viau. Est-ce
qu'il y a consentement pour en débattre?
M. Schneeberger : ...Diversité et de l'Inclusion, la députée
de Marie-Victorin et le
député de Laurier-Dorion.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il y a consentement pour débattre de cette motion d'une durée de
deux minutes, alors je vais reconnaître le député de Viau. La parole est à
vous.
M. Frantz Benjamin
M. Benjamin :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis très heureux et ému en même temps de
présenter cette motion ici, au sein de cette Assemblée. Ils sont, selon le
dernier recensement de Statistique Canada, quelque 320 000 Québécoises et
Québécois membres des communautés noires. Et ils ont toujours été là, ils ont
toujours été là depuis les quatre
derniers siècles. Rappelons Mathieu da Costa, accompagnateur et interprète de
Samuel de Champlain. Ils étaient Marie-Josèphe-Angélique,
esclave à Montréal. Elles étaient la Dre Yvette Bonny, médecin québécoise qui a
réalisé la première greffe de moelle
osseuse en 1980 au Québec. Ils étaient aussi Oscar Peterson, Oliver Jones, Paul Fehmiu-Brown, plus près de nous, Dany Laferrière. La
contribution des membres des communautés noires au développement de la société québécoise est connue.
Mais
aussi, je dois rappeler que des épisodes, malheureusement, comme celui dont nous avons tous été témoins hier viennent nous rappeler
l'importance d'être non
seulement vigilants, mais
d'être aussi actifs sur le front de la lutte contre le racisme et contre toutes les formes de
discrimination. Donc, je fais allusion à cet épisode dont a été victime, donc,
Jonathan Diaby. Et aujourd'hui ce sur quoi il faudra que nous travaillions
tous et toutes ensemble au sein de cette Assemblée,
c'est que non
seulement, non seulement dans nos arénas, dans nos cours d'école, dans les
milieux de travail, un peu partout, partout dans la société québécoise, l'engagement soit
collectif, les efforts soient déterminés afin que la lutte contre le racisme et toutes les formes de
discrimination... que nous soyons tous et toutes des champions au sein de la
société québécoise.
Je veux, pour terminer, saluer plusieurs
organismes. Je pense, entre autres, à la Maison d'Haïti, sommet socioéconomique pour les jeunes des communautés
noires. Je pense aussi à Desta, qui est un organisme dans Côte-des-Neiges—Notre-Dame-de-Grâce.
Je pense aussi à la Table ronde du
Mois de l'histoire des Noirs, qui
nous permet de souligner ensemble cet événement combien important pour
nous tous. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de Viau. Maintenant, je reconnais la parole au ministre de l'Immigration. La parole est à
vous.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je
souhaite remercier le député de Viau pour sa motion. Je pense que c'est important de souligner le Mois de l'histoire
des Noirs. D'ailleurs, au début du mois de février, j'étais dans une cérémonie à la ville de Montréal
pour le lancement, et on a honoré 12 femmes de communautés noires impliquées dans leur communauté, et je trouvais ça
important de souligner leur apport au rayonnement de la communauté.
Quelques mots
également pour souligner que les récents événements qui ont lieu dans un aréna
du Québec sont totalement
inacceptables dans notre société, inadmissibles. Le gouvernement du Québec
dénoncera toujours ce genre de geste, et ce genre de geste là n'a pas sa place
au Québec. Le Québec est une société qui est ouverte, qui est respectueuse,
et je pense que, tous ensemble, nous dénonçons les événements qui sont arrivés
à ladite aréna.
• (11 heures) •
Alors, Mme la
Présidente, le Mois de l'histoire des Noirs, en février, nous permet de
reconnaître l'importance de la
contribution des Québécoises et des Québécois des communautés noires à
l'histoire du Québec et à son développement économique, social et culturel, en particulier les femmes noires, qui
sont au centre du rayonnement de leur communauté. Le Mois
de l'histoire des Noirs s'inscrit dans la Décennie internationale des personnes
d'ascendance africaine, proclamée par
les Nations unies, de 2015‑2024.
C'est l'occasion de s'éduquer collectivement et de se remémorer, en plus
d'enseigner à nos jeunes générations l'héritage historique des
communautés noires du Québec et de s'engager à poursuivre les idéaux de justice, d'égalité et de dignité. Alors,
j'invite les Québécoises et les Québécois de toutes origines à saisir cette
occasion pour bâtir des ponts et créer des
liens de confiance et de solidarité afin de combattre les préjugés, les
manifestations de racisme et de
discrimination sous toutes les formes... et afin de favoriser la pleine
participation de toutes et de tous à la vie en société. J'aimerais aussi souligner la présence et l'enracinement
des personnes des communautés noires établies au Québec depuis plus de 400 ans ainsi que leur implication à faire
du Québec une société plus inclusive et plus ouverte.
En terminant, Mme la Présidente, j'aimerais
remercier toutes les personnes impliquées dans l'organisation d'activités qui
ont lieu dans plusieurs régions du Québec pour souligner le Mois de l'histoire
des Noirs. Je félicite les institutions et les organismes
qui ont à coeur et travaillent à reconnaître la richesse et l'importance de
l'apport des personnes des communautés noires au développement du Québec.
Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je reconnais la
parole à la députée de Marie-Victorin.
Mme
Catherine Fournier
Mme Fournier :
Merci, Mme la Présidente. Que ce soit à travers l'implication communautaire,
sociopolitique, artistique, les communautés noires contribuent au
rayonnement du Québec, et chaque année nous soulignons l'apport historique et
social de cette communauté.
Nous
savons cependant que la marche vers l'égalité n'est pas encore terminée. Même
si le Québec est une terre de
tolérance, les jeunes Noirs ont encore aujourd'hui quatre fois plus de chances
de se faire interpeler par la police, moins de chances de se trouver un emploi à talent égal et plus de chances
d'être discriminés lorsqu'ils essaient d'avoir accès à un logement, par exemple. On ne peut pas non plus
passer sous silence les événements de la fin de semaine dernière, comme
l'a brillamment rappelé le député de Viau. Nous devons donc demeurer vigilants
pour assurer une réelle égalité des chances à tous.
Je
voudrais également souligner la difficulté d'être une femme noire encore de nos
jours au Québec. Peu de place est
faite à la contribution de ces femmes dans notre société, et peu de visibilité
leur est également donnée. Que ce soit dans
les milieux politiques, médiatiques ou artistiques, je veux souligner
l'importance d'être conscient de cette double discrimination, de cette double difficulté que vivent encore aujourd'hui
les femmes noires. Plusieurs femmes noires ont, malgré tout, réussi à marquer l'histoire du Québec. Pensons, entre
autres, à Mme Amina Gerba, arrivée au Québec en 1986. 28 ans après son arrivée en provenance du
Cameroun, elle était à la tête de trois entreprises prospères. Elle est
aujourd'hui chevalière de l'Ordre
national du Québec. Pensons également à Mme Mariam Sy Diawara, originaire
de la Côte d'Ivoire. Elle fut la
fondatrice de la Maison de l'Afrique et contribua grandement à développer la
relation d'amitié entre le Québec et plusieurs pays d'Afrique, relation
que nous chérissons tant aujourd'hui et qui ne cesse de se développer.
Un
des rôles de l'Assemblée nationale est de perpétuer la mémoire des
personnalités importantes du Québec. À ce jour, malgré leur grande contribution à l'histoire de notre pays, il n'y
a aucune personnalité noire qui fait partie du décor de notre Parlement. Il faut changer cette réalité.
Nous pourrions commencer avec Mathieu Da Costa, un des premiers Noirs à avoir laissé sa marque sur notre pays. Arrivé au
Québec au tout début du XVIIe siècle, il oeuvra comme traducteur entre
les Français et les Premières Nations. Nous
pourrions également penser à Jean Alfred, le tout premier Noir élu à
l'Assemblée nationale en 1976 sous la
bannière du Parti québécois, qui a d'ailleurs été honoré la semaine dernière
alors qu'un pont a été nommé en son nom en Outaouais.
Bref, j'offre ma
collaboration au gouvernement, qui, je l'espère, ira de l'avant avec ces
propositions. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de
Marie-Victorin. Maintenant, je cède la parole au député de
Laurier-Dorion.
M.
Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
Merci, Mme la Présidente. Je remercie mon collègue le député de Viau d'avoir
fait en sorte que la communauté noire soit présente aujourd'hui ici, à
l'Assemblée nationale.
Louis-Joseph
Papineau, Marguerite Bourgeoys, Jeanne Mance, Samuel de Champlain, Jacques
Cartier, Marie-Claire Kirkland, ces
noms sont connus de tous et toutes. Ils font partie du panthéon de notre
nation. Mais il y a des noms qui sont
moins connus et qui mériteraient d'avoir une plus grande reconnaissance. Je
pense à Olivier Le Jeune, le premier esclave acheté et résidant en
Nouvelle-France. Je pense à Marie-Josèphe-Angélique, cette esclave de Montréal
qui a été mise à mort en 1734, car elle
avait supposément mis le feu à la maison de sa propriétaire. Sa condamnation
rapide ne tenait que par les dires
d'une fillette de cinq ans. C'est pour vous dire. Je pense aussi, il a été
nommé, à Jean Alfred, le
premier député noir à l'Assemblée nationale. Il y en a d'innombrables autres
qui pourraient être cités ici.
C'est
donc un honneur pour moi de prendre la parole pour souligner le Mois de
l'histoire des Noirs. Nous avons tendance à oublier qu'il y a une
présence noire au Québec depuis le début de la colonie et nous avons aussi
tendance à occulter le fait qu'il y a bel et
bien eu des esclaves ici même. Le Québec d'antan n'était pas une société
esclavagiste, mais il y avait bel et
bien des esclaves. Le grand historien qu'était Marcel Trudel a beaucoup
écrit sur le sujet. Pas plus tard que la semaine dernière, les membres
de l'aile parlementaire de Québec solidaire avons suivi une formation sur le sujet avec l'historien Webster. C'est une histoire fascinante que nous devons connaître.
Dans le contexte, je tiens aussi à souligner l'appui de ma formation
politique au jeune joueur de hockey Jonathan-Ismaël Diaby, qui a subi
d'horribles commentaires racistes cette
semaine. Comme quoi nous avons encore du chemin à faire pour éliminer le
racisme au Québec.
Je
remercie encore une fois le député de Viau pour sa motion, mais je rappelle que
c'est son gouvernement qui a refusé la tenue d'une commission sur le
racisme systémique. C'est dommage. Mais nous sommes ici pour célébrer le Mois de l'histoire des Noirs. Donc, en terminant,
j'aimerais inviter les membres de cette Chambre à aller visiter l'exposition
Fugitifs! au Musée national des beaux-arts du Québec du
10 avril au 10 mai prochains. Cette exposition donne un visage
à 10 esclaves décrits dans des annonces publiées dans la Gazette du
Québec. Bonne visite à tout le monde! Merci.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député.
Mise
aux voix
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Motion adoptée.
Avis touchant les travaux
des commissions
Maintenant, nous allons passer à la rubrique des
avis touchant les travaux des commissions. M. le leader.
M. Schneeberger :
Oui. Alors, Mme la Présidente, j'avise cette Assemblée que la Commission des
relations avec les citoyens poursuivra les consultations particulières
sur le projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement
aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, aujourd'hui, après les
affaires courantes jusqu'à 13 h 15 et de 15 heures à
18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission
des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 3,
Loi visant l'instauration d'un taux
unique de taxation scolaire, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle des
Premiers-Ministres, 1.38, de l'édifice Pamphile-Le May;
La Commission
de l'économie et du travail poursuivra les consultations particulières du
projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale
afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale,
aujourd'hui, de 15 h 45 à 18 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Est-ce qu'il y
a consentement pour déroger à l'article 143 du règlement concernant
l'horaire des travaux des commissions?
Des voix : Consentement.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Consentement. Parfait. Il y a consentement.
Alors, pour
ma part, je vous avise que la Commission des institutions se réunira en séance
de travail demain, le jeudi 28 février 2019,
à 7 h 15, pour une durée de 1 h 15 min, à la salle des
Premiers-Ministres, à l'édifice Pamphile-Le May, afin de statuer sur la possibilité que la
commission se saisisse d'un mandat d'initiative portant sur la possibilité que
des actes illégaux soient commis par des groupes à dérives sectaires et
d'un mandat d'initiative portant sur le dossier du congédiement du lanceur
d'alerte Louis Robert.
Affaires du jour
La période
des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux
affaires du jour. M. le leader du gouvernement.
• (11 h 10) •
M. Schneeberger :
Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article n° 6 du feuilleton.
Projet de loi n° 8
Adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la ministre de la Sécurité publique propose l'adoption
du principe du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur la
sécurité civile concernant l'assistance financière.
Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault : Merci, Mme
la Présidente. Alors, Mme la Présidente, chers collègues, bonjour à nouveau. On faisait le même exercice hier sur un autre projet de loi tout aussi emballant et on le fait aujourd'hui sur le projet de loi n° 8.
C'est donc
avec enthousiasme et beaucoup d'optimisme que je me présente devant vous aujourd'hui pour l'adoption du
principe du projet de loi n° 8, intitulé projet de loi modifiant la Loi
sur la sécurité civile. Ce projet de loi, Mme la Présidente, a fait l'objet d'un mandat prioritaire qui m'a été confié
par notre premier ministre lors de mon arrivée en tant que ministre de la Sécurité publique. Il est, à
notre avis, une autre pièce maîtresse visant à placer les citoyens du Québec
au coeur de nos préoccupations et de nos
actions. En effet, son principal objectif est de permettre au gouvernement
d'établir un programme général d'indemnisation à l'égard des sinistres
réels ou imminents qui simplifierait la gestion de l'assistance financière aux
sinistrés. Et je suis d'autant plus enthousiaste de voir ce projet de loi
cheminer que la problématique des sinistres au Québec est totalement
transpartisane et requiert la collaboration de nos collègues des oppositions
pour que les solutions proposées puissent être mises en oeuvre dès ce
printemps.
Permettez-moi,
Mme la Présidente, de revenir tout d'abord sur le contexte qui a rendu
nécessaires des modifications à la Loi sur la sécurité civile. Cette
loi, qui a été adoptée en 2001, permet d'établir des programmes généraux d'aide
financière qui s'appliquent, par exemple,
lors de sinistres réels ou imminents ou lors d'autres événements qui
compromettent la sécurité des
personnes. Elle fixe les conditions d'admissibilité, les barèmes et les
modalités de versement de ces programmes. Comme il est difficile de prévoir tous les cas éventuels, la loi permet
également au gouvernement d'établir des programmes d'indemnisation ou
d'aide financière ponctuels dits spécifiques. Cependant, actuellement, la loi
ne prévoit pas de programme général
d'indemnisation qui permettrait de simplifier la gestion de l'assistance
financière aux sinistrés pour des événements d'envergure et récurrents
comme les inondations.
Depuis l'adoption de la Loi sur la sécurité
civile, le Québec a subi plusieurs sinistres qui ont mobilisé de nombreuses ressources. On peut penser aux
inondations du printemps 2011 en Montérégie et bien sûr aux inondations historiques du printemps 2017. Ces événements ont
entraîné l'établissement de programmes d'aide financière spécifiques afin de répondre aux besoins particuliers de la
situation. Toutefois, les délais entre l'occurrence des sinistres causent
parfois des difficultés de gestion et
de mise en application rapide et efficiente de ces programmes, et, pour le
personnel du ministère de la Sécurité
publique, des situations de ce genre engendrent une tâche colossale, ne
serait-ce que pour le traitement des réclamations d'aide financière,
qu'il s'agisse de particuliers, d'entreprises ou de municipalités.
Il importe de
mentionner qu'au cours des dernières années les catastrophes naturelles ont
engendré un nombre croissant de
réclamations et que celles-ci sont devenues de plus en plus complexes. Ainsi,
en 2011, près de 4 000 demandes d'aide
financière ont été transmises par les sinistrés, ce qui représente des réclamations
de 93,4 millions de dollars. Les inondations du printemps 2017,
quant à elles, ont généré plus de 6 100 réclamations provenant de 293
municipalités désignées. Pour ce sinistre...
pour ces sinistres, plutôt, l'aide versée à ce jour est de 245,7 millions,
et le ministère estime que l'aide
totale pourrait atteindre 285 millions de dollars. C'est ce dernier
événement qui a véritablement mis en lumière la très grande complexité du traitement des réclamations d'aide financière.
En effet, le personnel du ministère est tenu d'analyser de nombreuses
pièces justificatives avant de pouvoir verser une aide, ce qui représente un
long processus.
Bien que
certaines procédures administratives aient été modifiées et que du personnel
additionnel ait été embauché, les
délais de traitement demeurent importants. C'est donc dans ce contexte que nous
en sommes venus à la conclusion que la
Loi sur la sécurité civile ne correspond plus à la réalité vécue sur le terrain
lors de sinistres de grande envergure. Nous souhaitons donc la modifier
afin que le gouvernement puisse établir un programme général d'indemnisation
pour les inondations, puisque, selon de
nombreux experts, ce type de sinistre devrait augmenter en nombre et en
intensité, notamment, en raison des changements climatiques.
Concrètement, s'il est adopté, ce projet de loi
élargira l'éventail des possibilités pour le gouvernement lors de sinistres réels ou imminents. Premièrement, le
gouvernement pourrait verser des indemnités pour les mêmes sinistres et
événements que ceux prévus dans la loi actuelle, pour lesquels une aide
financière est prévue. Un programme général d'indemnisation permettrait ainsi
de compenser la perte d'une partie du patrimoine d'un sinistré par une
indemnité. Pour recevoir cette somme, le demandeur
n'aurait pas à soumettre les pièces justificatives démontrant, par exemple, la
réparation d'un bâtiment essentiel, comme
c'est le cas actuellement pour obtenir une aide financière, parce que, dans le
cas d'une aide, le ministère a l'obligation
de procéder à la vérification de l'utilisation de l'aide versée, conformément à
ce que prescrit la loi.
Deuxièmement,
le gouvernement bénéficierait d'une plus grande flexibilité lors de
l'établissement d'un programme général
d'aide financière ou d'indemnisation. Le champ d'action des programmes généraux
pourrait ainsi être élargi en fonction des circonstances.
Troisièmement, le projet de loi n° 8 permettrait de mettre en place des programmes
spécifiques afin de pouvoir intervenir dans des cas particuliers. Il
donnerait, par exemple, la possibilité au gouvernement d'offrir une assistance financière à un sinistré pour un risque, même si
son bâtiment essentiel n'a subi aucun dommage et qu'il n'est pas menacé par un danger imminent, car, dans certains cas,
même si le bâtiment ne se trouve pas en situation de danger imminent,
il est évident qu'il sera affecté dans un avenir rapproché.
Quatrièmement, s'il est adopté, ce projet
de loi rendrait possible l'application des critères d'inadmissibilité prévus par la loi actuelle à l'ensemble des programmes. En ce moment, la loi précise les catégories de personnes qui ne sont pas admissibles à un programme pour la réparation
de dommages causés aux biens par un sinistre. La modification proposée
aurait pour effet d'étendre l'application à tous les types de programme, ce qui
inclut ceux qui visent la réparation des dommages
causés aux biens par un sinistre. Le but d'un tel ajustement est de responsabiliser les personnes pour une saine
gestion des fonds publics. Le gouvernement
pourrait aussi prévoir des exceptions, par exemple un programme pour la
réalisation de mesures préventives ou de préparation des interventions.
Enfin, le
projet de loi n° 8 donnerait au gouvernement plus de latitude pour
prévoir, dans les programmes qu'il établit, d'autres cas
d'inadmissibilité à une assistance financière que ceux déjà précisés dans la
loi actuelle.
La Loi sur la
sécurité civile de 2001 était une conséquence directe de la crise du verglas de
1998 et de la Commission scientifique et technique chargée d'analyser les
événements relatifs à la tempête de verglas survenue entre le 5 et le 9 janvier 1998, communément appelée
commission Nicolet, du nom de son président, l'ingénieur Roger Nicolet. Dans son rapport, la commission soulignait que la
protection des personnes et des biens constitue une fonction essentielle
de l'État. C'est d'ailleurs probablement la première fonction qu'une société
décide d'assumer collectivement.
C'est dans cet
esprit, donc dans la reconnaissance de la responsabilité fondamentale de l'État
en matière de protection de la population, que nous avons réévalué la
question de l'aide apportée aux victimes de sinistre par le gouvernement du Québec. Les sinistrés des
inondations du printemps 2017 étaient unanimes sur les principaux
obstacles auxquels ils ont fait face
lors de leurs demandes d'aide financière. D'une part, ils se sentaient impuissants
devant la lourdeur bureaucratique.
Déjà fragilisés par les événements, sortis littéralement de leur zone de
confort, ils auraient voulu qu'on leur facilite les choses. D'autre part, la
longueur des délais pour recevoir de l'assistance financière leur a souvent
semblé interminable, alors que leur
souhait le plus cher était de retrouver une vie aussi normale que possible.
Nous avons écouté ces gens et tiré
des leçons des derniers sinistres. Le Québec doit mettre en place des outils
adaptés aux nouvelles réalités qu'il
doit affronter. En conséquence, il convient d'ajuster la législation en
fonction de l'apparition de nouveaux facteurs de risque associés à l'urbanisation, aux développements technologiques
et aux effets des changements climatiques. Un programme d'indemnisation
découlant de la modification de la loi permettrait aux sinistrés de connaître
d'avance les montants auxquels ils ont droit et de recevoir des sommes beaucoup
plus rapidement qu'avec un programme d'aide financière.
Le projet de
loi n° 8 s'inscrit donc dans une volonté d'élargissement des services
offerts en matière de sécurité publique,
et notre gouvernement a la ferme conviction que le projet de loi qui est devant
vous aujourd'hui répond aux attentes de la population du Québec. Je vous
remercie, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de
Vaudreuil. La parole est à vous.
Mme Marie-Claude Nichols
Mme Nichols : Merci, Mme la
Présidente. Il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui, au nom de ma formation politique, dans le cadre du débat sur
l'adoption du principe du projet de loi n° 8, soit la Loi modifiant la Loi
sur la sécurité civile concernant l'assistance financière.
Nous
comprenons que ce projet de loi vise à permettre au gouvernement d'établir un
programme général d'indemnisation à
l'égard, notamment, des sinistrés réels ou imminents ou d'autres événements qui
compromettent la sécurité des personnes.
Mme la
Présidente, si nous débattons, aujourd'hui, de ce projet de loi, c'est parce
qu'il y a eu, dans les dernières années,
des sinistres de grande ampleur qui ont démontré les limites pratiques des
programmes d'indemnisation actuellement en place. Évidemment, je fais ici référence aux inondations du
printemps 2017, qui ont été exceptionnelles du point de vue de leur ampleur, de leur durée et de leur étendue.
On se le rappelle, ce sont plus de 4 000 personnes qui ont dû quitter
leurs domiciles entre la fin février
et le début de juin 2017. Ce sont 291 municipalités,
5 300 résidences et 400 routes réparties dans 15 régions administratives du Québec qui
ont été touchées par ces inondations, et ce, sans compter les
180 glissements de terrain.
• (11 h 20) •
Je peux vous
dire que, dans ma circonscription, Vaudreuil, nous avons été frappés de plein
fouet. Et je sais que plusieurs
collègues ici, dans cette Chambre, ont vécu cette situation similaire. J'aurai
l'occasion de revenir sur ce sujet plus tard dans mon intervention.
Un autre événement qui motive visiblement le
dépôt du projet de loi est le passage des tornades à Gatineau le 21 septembre dernier. En effet, ce sont trois
tornades qui ont frappé la région d'Ottawa et de Gatineau avec des vents allant
jusqu'à 265 kilomètres-heure qui ont causé des dégâts très importants : on
parle ici de 200 immeubles endommagés sérieusement, particulièrement dans le quartier Mont-Bleu de Gatineau. Nous
avons tous été choqués, j'en suis sûre, par les images de désolation que l'on a pu voir à la télévision ou sur le
terrain, pour les collègues qui y étaient. Les événements de cette ampleur mettent évidemment
une pression très grande sur les programmes d'indemnisation découlant de la Loi sur
la sécurité civile.
Le projet de
loi n° 8 n'est pas une initiative isolée, il semble plutôt être
l'aboutissement d'un travail entamé par l'ancien ministre de la Sécurité publique, mon collègue Martin Coiteux,
dans la foulée des inondations printanières 2017.
En effet, en
décembre 2017, le ministre Coiteux, accompagné de plusieurs députés et
ministres, avait tenu une journée
d'échange avec les différents acteurs concernés par les inondations
printanières. Cette journée, intitulée Inondations du printemps 2017 — Bilan et perspectives, avait pour objectif
de dresser le bilan des événements et de porter un regard sur les pistes
d'amélioration pour l'avenir. Des travaux ont aussi été menés par notre
collègue le député de Vimont, notamment,
auprès des partenaires municipaux, des partenaires de sécurité civile et des
personnes sinistrées. Dans la foulée de
cette journée, des consultations et de ces travaux, le Plan d'action en matière
de sécurité civile relatif aux inondations a été dévoilé le 1er mars
2018.
Je suis convaincue que la ministre est très
familière avec ce document, mais, pour le bénéfice des citoyens ou ceux qui
suivent nos débats, j'aimerais brièvement en expliquer le contenu.
Ce plan
d'action comprenait 24 mesures regroupées sous trois thèmes principaux. Le
premier thème, qui s'intitulait Pour
un niveau accru de la mobilisation : un accroissement de la préparation,
de la prévention et de la connaissance, regroupait des
mesures telles que l'obligation pour les municipalités d'avoir un plan de
sécurité civile, l'offre d'outils et un
soutien financiers pour améliorer la préparation municipale aux sinistres, la
mise en place d'une veille particulière sur un dégel printanier. Le second thème, Pour un accompagnement
personnalisé : une nouvelle gestion du rétablissement, proposait, notamment,
la révision du Programme général d'aide financière, la délégation de la
gestion de ce programme aux municipalités, la mise
en place d'un guichet unique pour les personnes sinistrées. Finalement, le troisième thème, Pour faire face aux défis actuels et futurs :
une évolution des pratiques,
proposait, entre autres, de documenter les bonnes pratiques municipales
en matière de sécurité publique.
Le plan d'action
était accompagné d'un investissement de près de 50 millions de dollars
répartis ainsi : soit 20 millions pour soutenir financièrement les municipalités dans l'élaboration de leurs plans de sécurité civile; 20,5 millions de dollars pour actualiser la cartographie des
zones inondables avec la Communauté métropolitaine de Montréal, la Communauté métropolitaine
de Québec, la MRC de Maskinongé, la ville de Gatineau et
d'autres municipalités; 6,9 millions
de dollars pour des travaux de recherche sur les zones inondables, par exemple, l'organisme Ouranos, qui aura comme mandat de réaliser les études exhaustives des crues
historiques ainsi que des
simulations, des scénarios et des analyses climatiques permettant de
considérer les incidences des changements climatiques.
De plus, le 13 avril 2018, nous avons annoncé une
bonification du programme d'aide financière, une simplification des démarches administratives et un investissement additionnel de 40 millions de
dollars pour les mesures prévues dans le plan d'action.
À
la lumière des actions que je viens d'énumérer, l'on peut constater le sérieux
qui a été accordé par le précédent gouvernement aux enjeux reliés aux
inondations. D'ailleurs, lors des consultations particulières, la ministre a
elle-même témoigné de son
appréciation pour le travail réalisé par notre gouvernement et a positionné son
projet de loi en continuation avec
celui-ci. Je me permets de la citer : «Je pense que le gouvernement
précédent puis mon prédécesseur en particulier, M. Coiteux, avaient quand même fait un bon travail pour essayer de faire
le maximum possible dans les limites de la Loi sur la sécurité civile dans sa forme actuelle et pour réduire, autant
que possible, pour faire des aménagements administratifs autant que possible, pour simplifier la vie des
gens autant que possible. Mais, la loi étant ce qu'elle est, on est arrivés, je
pense, à la limite de ce qu'on pouvait faire
en termes de simplification, d'où le projet de loi d'aujourd'hui, d'ailleurs.»
Le
comté de Vaudreuil a été durement touché par les inondations du printemps 2017.
Sur les huit villes qui formaient le
comté de Vaudreuil, sept ont été touchées par les inondations. 295 dossiers ont
été ouverts, dont 25 d'entreprise. J'ai encore des images terribles de
ces journées, qui nous paraissaient sans fin. On comparait, entre autres, la petite municipalité
de L'Île-Cadieux à une ville sous-marine. On
circulait dans les avenues de Terrasse-Vaudreuil en chaloupe. Les gens ne voulaient pas quitter leurs domiciles. C'était tellement
triste. Les citoyens se sont mobilisés de façon spectaculaire pour
venir en aide à ceux dans le besoin. Nous avons
fait des repas, des boîtes à lunch, des poches de sable, érigé des murs.
Il
n'y a rien qu'on n'a pas fait pour
venir en aide à ces citoyens dans le besoin. Et le plus impressionnant,
c'est : malgré cette catastrophe, quelle fierté de voir les gens de
notre comté se mobiliser! C'était une solidarité incroyable.
Je
me permets de rappeler que dame Nature est souvent imprévisible et que des
catastrophes météo risquent de se reproduire,
et ce, de façon extrême : des pluies torrentielles, des vents extrêmes,
des chaleurs insoutenables, et pire encore.
Mme la Présidente, ce que le projet de loi vient faire en son essence, c'est de donner au gouvernement un ancrage législatif un peu plus large pour mettre sur pied un
nouveau programme d'indemnisation. Vous comprendrez que les parlementaires se retrouvent aujourd'hui devant un projet de loi qui est bref, quelques
articles à peine, mais qui ne peut être
réellement jugé qu'à la lumière des détails du programme
d'indemnisation qui sera rendu public suite à l'adoption du présent projet de loi. Je réitère que nous sommes très intéressés, de ce côté ici de la Chambre, à
entendre la ministre nous expliquer
les grandes orientations de son programme à venir. D'ailleurs, lors du point de
presse qu'elle a réalisé au dépôt du
projet de loi il y a déjà trois semaines, la ministre a confirmé l'avancement
de l'élaboration du programme, et je la
cite : «Le travail est très, très avancé dans l'élaboration du programme.
Il reste de petites choses à attacher, des consultations à faire, mais l'essentiel, l'esprit du programme est déjà
vraiment mis en place.» Il va donc sans dire que la ministre saura nous
en dire davantage sur les principes et les mécaniques de son programme envisagé
afin de nous apporter l'éclairage nécessaire
quant aux dispositions législatives qu'il requiert. Cela faciliterait
grandement le travail qui nous attend
lors de l'étude article par article. Ainsi, j'invite la ministre à prendre
cette suggestion en considération.
Nous
avons tenu des consultations particulières sur le présent projet de loi le 21
février dernier lors desquelles nous avons pu entendre la fédération des
municipalités du Québec, la Croix‑Rouge canadienne, section Québec, la Protectrice du citoyen, l'Union des municipalités
du Québec et le Bureau d'assurance du Canada, qui ont aussi fait parvenir
à la commission leurs commentaires au sujet
du projet de loi. Les groupes ont certainement salué la volonté de poursuivre
les efforts d'amélioration des programmes d'indemnisation adoptés lors de la
précédente législature sans pouvoir se prononcer
sur le contenu de l'éventuel programme, pour le moment, toujours inconnu et non
rendu public. Toutefois, un message très clair a été envoyé autant par
la FQM que l'UMQ : ils s'attendent à être consultés dans l'élaboration du programme. Ainsi, j'invite la ministre à le faire,
puisque les municipalités ont un point de vue unique et une contribution
importante à apporter. Après tout, ils ont
été, dans les dernières années, si on remonte, entre autres, au printemps 2017,
aux premières loges de la gestion de ces
programmes et ont été à même d'en observer les lacunes et les limites dans leur
application sur le terrain.
Mme
la Présidente, nous sommes le 27 février. Le printemps cogne à nos portes dans
moins d'un mois... enfin, on espère
qu'il cogne à nos portes. Avec les précipitations abondantes que nous avons
connues cet hiver, je crois que de nombreux citoyens regardent les cours
d'eau à proximité de leurs résidences avec une certaine appréhension et, très
franchement, de l'inquiétude. Nous comprenons d'ailleurs tout à fait leurs
états d'âme. Je comprends de même que la ministre
soit... je recommence, souhaite faire adopter le projet de loi rapidement afin
de pouvoir déployer son nouveau programme
à temps pour la saison des inondations. C'est un objectif tout à fait légitime,
auquel nous souscrivons, et ce, pour
le bien-être de tous les citoyens du Québec. C'est pourquoi je fais miens les propos
de ma collègue la députée de l'Acadie,
qui, lors des consultations, a exprimé la volonté de collaboration de notre
formation politique pour l'adoption du projet de loi.
En
terminant, je réitère que, pour nous, l'action gouvernementale incarnée par le
projet de loi n° 8 se situe dans le continuum des actions et améliorations que nous avons apportées lorsque
nous étions au gouvernement. En ce sens, nous allons voter en faveur de
l'adoption du principe du projet de loi n° 8. Merci, Mme la Présidente.
• (11 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée de
Vaudreuil. Maintenant, je reconnais la parole à Mme la députée de
Duplessis.
Mme Lorraine Richard
Mme Richard : Merci, Mme la Présidente. Nous sommes ici aujourd'hui afin d'adopter le principe du projet de loi n° 8, Loi modifiant la
Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière.
Ce projet de loi, Mme
la Présidente, il vise à permettre au gouvernement d'établir un programme
général d'indemnisation à l'égard
notamment des sinistres réels ou imminents ou d'autres événements
qui compromettent la sécurité des personnes.
Il vise également à permettre au gouvernement d'établir des programmes
d'aide financière ou d'indemnisation
spécifiques lorsqu'il existe un risque qu'un sinistre ou qu'un autre événement
qui comporte la sécurité des personnes survienne.
Le projet de loi introduit, en outre, une disposition qui confirme le caractère de dernier recours de l'assistance financière versée en application du programme
d'aide financière ou d'indemnisation, qu'il soit général ou spécifique. De plus, le projet
de loi habilite le gouvernement à prévoir, dans ses programmes, d'autres cas d'inadmissibilité que ceux
prévus par la loi.
En
réalité, Mme la Présidente, ce que le projet de loi n° 8
va venir faire... va venir faire une concordance dans différents
articles, mais il va venir, en fait, mieux soutenir les victimes qui sont
victimes de sinistres par différents moyens,
on va le voir, obtenir de l'aide
financière plus rapidement, et que les gens connaissent, à l'avance, les
montants auxquels ils ont droit. Donc, vous comprenez que personne ne
peut être contre ça. Moi, je ne l'ai pas vécu, des sinistres, comme tels, par des inondations, mais, vous savez, des
problèmes d'érosion des berges, dans mon coin de pays... Ce n'est jamais facile pour les gens qui ont à
vivre des difficultés telles que voir leurs maisons, que ce soit par l'érosion
des berges, partir, ou que ce soit à cause de pluies diluviennes. Souvent, bon,
déjà, la perte des biens, tout ce que ça occasionne,
le stress que ça occasionne pour certaines familles, déménager, résider à
l'hôtel, des fois pendant des semaines, des mois, c'est un stress quotidien, il faut réorganiser notre vie. Et
qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, Mme la Présidente, l'argent, on en a besoin pour vivre au
quotidien, et c'est un stress important, quand vous avez des centaines
et des centaines de milliers de dollars qui
sont partis comme ça, toute votre vie, des fois, est anéantie, parce que vous
avez tellement mis d'efforts et d'amour dans votre chez-vous.
Donc,
le projet de loi n° 8, en arrangeant des articles de concordance, va
permettre, par la suite, à ce que la ministre... Bon, elle nous dit
qu'elle a travaillé sur le programme, je n'en doute pas... et qu'on puisse
arriver avec un règlement.
Mais,
vous savez, Mme la Présidente, fort intéressant... parce que, lors des
auditions du projet de loi n° 8, on a écouté, entre autres, la Fédération québécoise des municipalités, le
Protecteur du citoyen, la Croix-Rouge canadienne. Puis la plupart des gens, là, ils ont évoqué la
même chose, hein, c'est que, quand arrive un sinistre, bien, les médias se
déploient sur place, ils trouvent des moyens
extraordinaires, mais ils sont là. Mais on a des gens, des bénévoles, on a des
gens de la Sécurité publique, différents...
que ce soient les pompiers, les ambulanciers, la Croix-Rouge est omniprésente,
ils sont sur place, on s'occupe des sinistrés, on fait des gestions de crise,
on leur apporte tout le soutien nécessaire.
Mais
il y a des personnes pour qui ça ne se règle pas dans l'espace d'une semaine,
et ces gens-là, qui sont venus en
commission, ils l'ont répété à la ministre. Puis je pense, sincèrement, Mme la
Présidente, que la ministre en est consciente que ces gens-là, ils doivent être accompagnés du début à la fin. On ne
peut pas juste s'en occuper pendant trois semaines, un mois, puis qu'après on les laisse à eux-mêmes
dans l'appareil gouvernemental. Je suis convaincue que tous mes collègues,
comme députés depuis... c'est un nouveau
gouvernement, mais, même quand on est au gouvernement, on a à appeler un
tel ministère, ce n'est pas la bonne
personne qui nous répond, faites le un, faites le deux, faites le trois avant de
trouver quelqu'un. Ça fait que,
imaginez-vous, là, plusieurs mois après qu'un sinistre est arrivé à un endroit,
ces gens-là, là, bon, ils appellent le maire, ils appellent leur conseiller
municipal, après, ils appellent, s'ils ont des numéros de téléphone, bien,
la Sécurité publique. Ils appellent partout
pour avoir de l'aide, puis, sûrement, c'est difficile, c'est complexe. Les
rôles, des fois, sont plus ou moins
définis. La Sécurité publique, des fois, elle veut en faire plus, mais elle aussi, elle a des balises.
Ça
fait que je sais que la ministre semblait avoir une très grande sensibilisation
face à ces gens, ces sinistrés, elle veut
faire les choses autrement. Donc, moi, je ne pense pas, Mme la Présidente, qu'avec le projet de loi
n° 8 il va y avoir beaucoup
de gens... je pense qu'il n'y en aura pas du tout qui vont être en désaccord.
C'est
sûr que, bon, écoutez, comme deuxième opposition, moi, comme porte-parole pour
mon parti au niveau de la sécurité publique, on va collaborer. Mais j'ai bien
hâte, Mme la Présidente, de voir le règlement, comment tout ça va se
concrétiser sur le terrain parce que, comme on le dit souvent, hein, le diable est
dans les détails. Et que je vais demeurer vigilante.
Moi,
j'ai abordé... c'est sûr, le problème d'érosion des berges ne fait pas partie,
là, de ce programme qu'on va viser à établir plus les sinistrés qui vivent des
inondations ou une tragédie comme il s'est passé au Lac-Mégantic, hein, on
l'a tous en souvenir.
Donc,
si, au moins, malgré tout ce que les gens peuvent vivre dans ces moments-là qui
sont extrêmement difficiles, on peut
leur éviter, tout au moins, les problèmes financiers puis qu'on peut accélérer
les choses. Soyez assurée, Mme la Présidente,
qu'on va collaborer. Et je souhaite que la réglementation, que le programme
fasse en sorte que ces gens-là soient soutenus du début à la fin.
Puis
moi, je pense que ça va aller rapidement parce qu'on veut tous... puis on le
sait, ma collègue l'a dit avant moi,
il a neigé beaucoup cet hiver, on pourrait en jaser longtemps. Donc, je suis
sûre que, on ne le souhaite pas, mais ça va être ainsi, hein? On va
avoir des endroits où il va y avoir des inondations. Vous vous levez un matin,
l'eau est dans le sous-sol, là, hein? Vous
appelez votre assurance, puis, après, là, ça déboule, puis vous êtes des mois,
là, dans un processus. Donc, soyez
sûrs qu'on va agir rapidement, mais on va agir en pensant aux gens qui ont
besoin qu'on fasse notre travail pour
les sécuriser davantage, puis faire ça vraiment selon les règles de l'art pour
leur enlever le plus de soucis possible. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée de
Duplessis. Maintenant, je reconnais la parole à Mme la députée de
Taschereau.
Mme Catherine Dorion
Mme
Dorion : Merci. Ce projet de loi est bienvenu. Il va faciliter la vie
des citoyens qui sont victimes de sinistres. Et on a vu, lors des consultations particulières, que le projet de loi
était bien reçu, que les oppositions lui étaient favorables. J'aimerais
quand même, rapidement, là, discuter de quelques éléments qui me semblent
importants.
Chaque fois qu'il est question des inondations
ou autres sinistres, ce qui revient souvent, c'est la question des assureurs. Je sais que le projet de loi porte sur
la création d'un programme gouvernemental, mais j'aimerais ça juste ne pas
passer ce sujet sous silence : on sait
que plusieurs personnes ont eu des problèmes avec leurs assureurs après
sinistre, et pas seulement lors de
sinistre, c'est quelque chose qui n'est pas nouveau, qui est fréquent. On a
tous déjà entendu des histoires d'horreur
en lien avec des assureurs qui refusent de payer, alors que ça aurait vraiment
été attendu qu'ils le fassent. Puis je
veux soulever la question parce que, tôt ou tard, il va falloir évaluer la
question du resserrement des balises qui entourent les assureurs. J'espère que ça va venir parce
qu'un assureur qui décide de revenir sur sa parole, donc sur le contrat signé
avec un citoyen, ça brise des vies, ça met
du monde en dépression, ça a vraiment des conséquences qui peuvent être très,
très lourdes.
En 2017,
notre ancien député Amir Khadir avait appelé, à tout le moins, à une assistance
juridique ou à une autre forme
d'intervention gouvernementale qui pourrait ressembler à ça auprès des
compagnies d'assurance pour les forcer à
respecter rapidement leurs responsabilités sans plonger les citoyens qui sont
déjà dans la misère d'un sinistre, là... à se dépatouiller avec ça. Ces
compagnies d'assurance, souvent, essaient de minimiser leurs responsabilités
financières, mais il y a aussi, face à ça,
une responsabilité gouvernementale. Donc, à titre de députés, je pense que
notre gouvernement doit être
responsable, dans ce sens-là, doit rappeler aux assureurs privés les
engagements pris par contrat. Je propose donc peut-être que ce débat-là
se fasse ultérieurement dans un autre cadre. Mais, comme ça touche de très près
à ce qu'on regarde là, je pense qu'il faut vraiment amener ça à la conscience
des parlementaires.
L'ancien
député de Mercier me rappelait par ailleurs que le Canada était le seul pays du
G7 à ne pas compter un programme
national d'assurance pour les cas d'inondation, autre truc à réfléchir. Et je
comprends aussi que le programme gouvernemental
d'aide aux sinistrés couvre des éléments que généralement l'assureur privé ne
couvre pas, sauf que notre action à
titre de législateurs doit et peut en plus aller plus loin dans l'encadrement
des assureurs pour le bien-être des citoyens.
• (11 h 40) •
Maintenant, là, je ne suis pas une experte des
affaires municipales, mais j'ai aussi remarqué la demande des municipalités d'être incluses le plus souvent
possible dans le processus de décision quant au programme et à toutes les
modalités. Il y a des réalités différentes dans chaque région, il y a des
modalités différentes, même, dans chaque ville, fait que ça serait logique, pour moi, d'acquiescer à
ces demandes de concertation avec le milieu municipal. Il faudrait trouver une façon de mettre ça dans le projet
de loi. Il en va du principe de
subsidiarité, qui est un concept important pour notre gouverne collective.
Et je
voudrais finalement finir ça sur le point qui, selon moi, est le plus
important, les changements
climatiques. Je note que le mémoire
de la Fédération québécoise des
municipalités commence en nommant cet
enjeu. C'est quelque chose qui
devient de plus en plus «mainstream», excusez mon québécois. Et ça, c'est vraiment
de la clairvoyance, de commencer en nommant
cet enjeu-là. C'est même ce que j'appellerais du réalisme, là. C'est là qu'on
est rendus. C'est le grand défi de notre génération, la lutte aux changements climatiques. Et on sait tous que, si on ne fait pas, en même temps, des politiques pour s'attaquer aux changements climatiques, on peut avoir autant de programmes
qu'on veut, à un moment donné, on ne sera plus capables de payer. On va frapper un mur. Et, quand ça va
arriver à tout le monde en même
temps, il n'y a personne qui va pouvoir répondre à la demande d'assurance.
Alors, évidemment,
je vais avoir quelques propositions d'amendement pour bonifier ce projet de loi. Et j'annonce
que les membres de ma formation allons voter en faveur du principe de ce projet
de loi là. Merci beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la
députée de Taschereau.
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Il n'y a pas
d'autre intervenant.
Mise aux voix
Alors, le
principe du projet de loi n° 8, Loi
modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière,
est-il adopté?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, c'est adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission des
institutions
M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion
afin que le projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile
concernant l'assistance financière,
soit déféré à la Commission des institutions pour son étude détaillée.
Mise aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté. Alors, la motion, adoptée. M. le leader du
gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui. Alors, Mme la Présidente, j'appelle le... En fait, appelez l'article 1
du feuilleton.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Je vais suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
11 h 42)
(Reprise à 11 h 48)
Projet
de loi n° 1
Reprise
du débat sur l'adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, l'Assemblée reprend le débat ajourné le mardi 26
février 2019 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 1,
Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du
commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de la Sûreté
du Québec et du directeur des poursuites criminelles et pénales.
Alors, M. le député
de Jacques-Cartier n'avait pas terminé son intervention. Alors, je reconnais la
parole... M. le député, la parole est à vous.
M.
Gregory Kelley (suite)
M. Kelley :
Merci, Mme la Présidente. Alors, juste de continuer après une longue pause.
C'est
sûr que ce projet de loi touche certaines institutions qui sont très, très importantes. Si on pense juste à la
sécurité du Québec, ça sert à environ
1 039 municipalités partout au Québec. C'est environ
7 800 personnes qui travaillent pour la sécurité du Québec. Alors, c'est quand même une institution très
grande et très importante au sein du Québec. Quand même, on sait très,
très bien que l'Unité permanente de l'anticorruption, c'est une autre
institution très, très importante dans notre
société qui fait un travail très important. Puis le Directeur des poursuites
criminelles et pénales, qui est en
place depuis 2007, c'est aussi encore une autre institution qui joue un rôle
très important dans notre société. Alors, je veux juste souligner ça,
que ce débat parle vraiment et touche des institutions importantes pour notre démocratie.
• (11 h 50) •
I'm
delighted that this Government wants to continue to work on being more transparent. As you recall,
the previous Government created the Web site transparence.gouv, a place
that allows the public to know where ministers have been, who they have been meeting, which is
something that had been asked for from civil society for many, many years.
So, for sure, that was just one example of advancement in being more transparent.
So coming back to this debate, where
we are discussing a check on the executive, an ability to perhaps bring names to the limelight, where they
will be discussed in this house before nomination... is in that light, which is
why I think my party is extremely keen to continue the discussion going
forward in the adoption of this bill. But, at the same time, something that is
extremely fundamental to our core beliefs is that the judiciary remains
separate from political interference. So that is something that, of course,
going forward, we're going to be very upfront and vocal about.
La notion de transparence telle qu'évoquée par le nouveau gouvernement
consiste à modifier le mode de nomination de directeur général de sécurité du Québec, du Commissaire à la lutte
contre la corruption et du Directeur des poursuites criminelles et pénales afin d'assurer que ces
officiers de la justice reçoivent l'appui de deux tiers des membres de
l'Assemblée nationale avant d'occuper des fonctions importantes dans
notre société.
Mme
la Présidente, cette façon de procéder pourrait, à première vue, paraître
transparente, mais, quand même, le
gouvernement garde toujours beaucoup de pouvoirs discrétionnaires avec leur
majoritaire. Puis, juste avec l'ajout... députés, l'autre côté, il y a
toujours vraiment le contrôle de la majorité dans ce processus.
Et
c'est juste quelque chose encore de continuer notre réflexion. Puis,
présentement, la députée de l'Acadie a fait un travail extraordinaire puis
aussi la députée d'Anjou a fait un travail extraordinaire en 2014 quand elle a
mis en place différents processus de nomination de ces trois postes
qu'on discute aujourd'hui.
Alors, juste de
rappeler un petit peu, dans le cas du directeur général de la sécurité du
Québec, il y a déjà un processus très
robuste, avec un comité de sélection composé d'un sous-ministre de la Sécurité
du public, l'ancien directeur de
police recommandé par l'association des directeurs des policiers du Québec,
d'une personne recommandée par des organismes représentant le milieu
municipal, des administrateurs d'État désignés par le secrétaire général
associé aux emplois supérieurs du Conseil exécutif et, finalement, du directeur
général de l'École nationale de police du Québec. Alors, quand même, dans notre processus, il y a un processus en place,
et ça implique des personnes qui travaillent pour l'État, qui ont des bonnes
intentions.
Alors,
le comité évalue des candidats avant de remettre un rapport au ministre de la
Sécurité publique, avec les noms des candidats. Des processus de
sélection similaires existent présentement pour la fonction de Directeur des
poursuites criminelles et pénales ainsi que pour la fonction de commissaire à
la lutte à la corruption.
La nouveauté
introduite par le projet de loi est la suivante : suite à une
recommandation du comité de sélection, le premier ministre met de l'avant une
candidature déclarée apte pour la considération de divers partis reconnus
à l'Assemblée nationale. Un représentant de
chacune des formations politiques peut rencontrer à huis clos le ou la candidat
proposé avant de faire connaître son opinion
au premier ministre dans un rapport. La nomination doit ensuite recevoir
le vote de deux tiers de l'Assemblée nationale.
Alors,
Mme la Présidente, lorsque le processus de sélection est terminé et les bonnes
personnes sont en place, celles-ci doivent
jouer de la confiance absolue de la population. Pour ce faire, elles doivent
être en mesure de mener leurs enquêtes sans crainte d'être démises de leurs fonctions. L'ancienne loi prévoit que
ces gens ne pouvaient être démis pour cause... qui vient de dire pour cause,
Mme la Présidente, le fait d'avoir commis une faute grave dans l'exercice de
leurs fonctions. Si l'Assemblée
nationale, aux deux tiers des voix, aura le pouvoir d'enlever une charge
publique à une personne qui a agi avec loyauté ou dévouement envers nous
tous, Mme la Présidente, comment est-ce que son prédécesseur pourra faire
son travail? Ont vraiment un DPCP qui prenne des décisions pour des raisons
politiques. Comme l'Association des policiers provinciaux a dit en commission
parlementaire : «En effet, il est reconnu que l'apparence d'indépendance
et d'impartialité est au moins aussi importante qu'une réelle indépendance et
impartialité.» L'association souhaite le maintien d'un processus de sélection, d'évaluation
qui aurait pour effet de promouvoir une diminution de cynisme ambiant de notre société
envers certaines de nos institutions et la classe politique en général.
Again, the SQ is the largest
police force in Québec. It is
also the only one which has the authority and impact throughout the entire province. The SQ, it is huge, the Director
General's work is from one corner of Québec to the other, and
30 local police forces depend on the SQ for police services. Employees with
highly technical skills were assigned by Revenu Québec, la Régie du bâtiment and la
Commission de la construction to assist UPAC in fulfilling its mandate. Yet, if the Government has their way, they can throw the whole network
in a total chaos by adopting a simple two-thirds motion. That is not democracy, Ms. Speaker. Only a few of us in this
Assembly have the experience with policing. We would be flying blind if we were
to vote on a motion which would essentially censure a high-ranking office for
not doing their job, for serving and
protecting in the best way they know how, and this is the best way to manage
the SQ. Why is it not the same procedure as being recommended for the
Montréal police force?
Motion de scission
Alors, c'est
sûr que ce projet de loi touchant le domaine des forces policières et touchant
le domaine de la judiciaire, alors, c'est pour ces raisons que je
souhaite présenter la motion suivante, Mme la Présidente :
«Qu'en vertu
de l'article 241 du règlement le projet de loi n° 1, loi modifiant les
règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la
lutte contre la corruption, du directeur général de la [sécurité] du Québec et
du directeur des poursuites criminelles et
pénales, soit scindé en deux projets de loi : un premier intitulé [la] Loi
modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à
la lutte contre la corruption et du directeur général de la [sécurité] du
Québec, comprenant les articles 1 à 8, le 2e alinéa de l'article 12,
ainsi que les articles 13, 14 et 16; [...]un
second intitulé [la] Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la
destitution du directeur des poursuites criminelles et pénales, comprenant les
articles 9 à 11, le 1er alinéa de l'article 12, ainsi que les articles 13, 15
et 16.»
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Je vais suspendre
quelques instants les travaux pour vérifier la recevabilité de la motion
de M. le député de Jacques-Cartier.
Alors, je suspends les travaux quelques
instants.
(Suspension de la séance à 11 h 58)
(Reprise à 12 h 12)
Débat sur la recevabilité
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je suis maintenant prête à entendre
des arguments sur la recevabilité de la motion de scission présentée par M. le député de Jacques-Cartier et je
cède la parole à M. le leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien
Proulx
M. Proulx :
Merci, Mme la Présidente. Alors, vous me permettrez de, d'abord, vous saluer et
saluer les collègues qui sont
présents, vous dire que j'aurai l'occasion, dans les prochaines minutes, de
vous faire part de cette motion qui est présentée par notre collègue, motion que je vais lire, Mme la
Présidente, d'entrée de jeu pour bien situer les gens, mais, je pense,
qui a été partagée avec l'ensemble des gens intéressés ici, dans cette
Assemblée. Alors :
«Qu'en vertu de
l'article 241 du règlement — qui prévoit, Mme la Présidente, qu'on
peut faire ce que nous proposons aujourd'hui — le projet de loi n° 1,
Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur
général de la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites criminelles et pénales, soit scindé en deux
projets de loi : un premier intitulé Loi modifiant les règles encadrant la
nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption et
du directeur général de la Sûreté du Québec, comprenant les articles 1 à
8, le 2e alinéa de l'article 12, ainsi que les
articles 13, 14 et 16; [...]un second intitulé [la] Loi modifiant les
règles encadrant la nomination et la destitution du directeur des poursuites
criminelles et pénales, comprenant les articles 9 à 11, le 1er alinéa
de l'article 12, ainsi que les articles 13, 15 et 16.»
Alors, Mme la Présidente, je vous rappelle que
le projet de loi qui a été présenté par la ministre de la Sécurité publique vise distinctement trois organismes qui
sont indépendants, actuellement. Vous les connaissez, il y a le Commissaire
à la lutte contre la corruption, le
directeur général de la Sûreté du Québec et le Directeur des poursuites
criminelles et pénales.
Alors, ce que
nous proposons, Mme la Présidente, avec la motion qui a été présentée il y a
quelques instants, c'est de scinder
ce projet de loi là en deux parties distinctes, soit une première qui touche le
système policier et une deuxième partie
qui touche le système judiciaire, qui est le DPCP. J'ai déjà lu quels sont les
titres proposés de ces projets de loi.
Vous savez,
Mme la Présidente, qu'à cette étape-ci on n'a pas à discuter du fond des
choses, de la pertinence, voire des
amendements à proposer sur chacun des articles qui se trouvent dans le projet
de loi ni même de sa finalité, vous avez à vous prononcer sur la recevabilité de cette motion. Et, selon la
procédure parlementaire et plusieurs décisions que je vais vous citer, les critères, Mme la Présidente,
qui sont essentiels pour que cette motion soit jugée recevable, sont les
suivants. D'abord, pour la recevabilité de
la motion, un premier critère est que, dans sa forme, la motion doit indiquer
de quelle façon la scission s'effectue.
Alors, vous le trouvez au texte. Vous constaterez qu'elle respecte ce critère
et est conforme à notre règlement.
Un autre
critère important qui doit être considéré pour la recevabilité, c'est qu'il
doit contenir plus d'un principe. Le projet de loi pour lequel une
motion est déposée doit contenir plus d'un principe.
Et là, bien,
Mme la Présidente, pour interpréter ce qu'est un principe, bien, je vous amène
aux décisions suivantes, une première
qui a été rendue par une prédécesseure, Mme Houda-Pepin, en 2011, et je la
cite : «Dans la détermination de ce qu'est un principe, la
présidence ne doit ni rechercher ni tenir compte de l'intention de l'auteur du
projet de loi. L'analyse est basée uniquement sur les dispositions contenues
dans le projet de loi.»
Maintenant, pour déterminer si ce projet de loi
contient un ou plusieurs principes, il y a d'autres décisions, Mme la Présidente, qui peuvent vous éclairer. Le
président M. Brouillet, le 1er juin 1995, je le cite : «Pour
déterminer si un projet de loi contient un ou plusieurs principes, il faut se
référer au contenu même du texte législatif», donc travailler avec le
texte qui est déposé.
Je poursuis
également la citation : «...chaque série de mesures forme en soi un tout
cohérent qui peuvent exister distinctement. De plus, bien qu'elles
n'aient pas de valeur juridique en soi, les notes explicatives sont en l'espèce
révélatrices de l'existence des deux principes.»
Or, dans le projet de loi qui est devant nous,
les notes explicatives indiquent que le projet de loi apporte des modifications aux modes de nomination et de
destitution des trois organismes distincts. Alors, je lis un extrait desdites
notes : «Ce projet de loi apporte des
modifications aux modes de nomination et de destitution du Commissaire à la
lutte contre la corruption, du
directeur général de la Sûreté du Québec et du Directeur des poursuites
criminelles et pénales.»
Alors, dans
une décision rendue par le président
M. Pinard le 7 juin 2000, vous me permettrez de la citer également :
«Lorsque la présidence a à décider de la
recevabilité d'une motion de scission, elle s'en tient au texte du projet de
loi. Elle n'a pas à rechercher tous
les effets qui pourraient découler en pratique de l'application du projet [...]
une fois celui-ci adopté.» Ça fait référence aux remarques que j'avais
d'entrée de jeu avec vous
Dans le même
ordre d'idées, je me permets de vous référer à une décision également du
11 décembre 2007 : «Il ne faut pas confondre le ou les principes qu'un projet de loi peut contenir
avec le domaine sur lequel il porte. En venir à une conception différente de la notion de principe
ferait en sorte que la plupart des projets de loi ne pourraient faire l'objet
d'une motion de scission, en raison du fait qu'ils portent sur un domaine
précis.»
Alors, M. le
Président... Mme la Présidente, pardon, je répète, à sa lecture, vous
conviendrez que ce projet de loi est rédigé en trois sections
distinctes. Si vous le prenez et vous l'analysez, vous le verrez. La première
section traite de la Loi concernant la lutte
contre la corruption, la deuxième, sur la Loi sur la police et la troisième,
pour la Loi sur le Directeur des
poursuites criminelles et pénales. Alors, dans le projet de loi n° 1,
je constate, Mme la Présidente, qu'il y a trois principes.
Alors, il est
établi, à mon avis, qu'il y a plus d'un principe dans ce projet de loi, mais il
faut aller au-delà de ça. Pour que
vous puissiez reconnaître la recevabilité de cette motion, il faut aller
au-delà des nombreux principes et ajouter des conditions. Et là-dessus
je vous cite encore le président Pinard, ancien député de Saint-Maurice, qui
disait, en décembre 1997 : «...le
fait qu'un projet de loi comporte plus d'un principe ne signifie pas qu'il peut
être scindé. Les conditions suivantes
ont été aussi élaborées par la jurisprudence — et là je vous les donne : chaque partie
du projet de loi scindé doit pouvoir
être considérée distinctement; chaque partie du projet de loi scindé doit
constituer plus qu'une modalité; les projets de loi qui résulteraient de
la scission doivent constituer des projets de loi cohérents en eux-mêmes.»
Et je poursuis dans la décision : «Par ailleurs,
la présidence n'a pas à porter d'opinion juridique sur le fond du projet
de loi.» Ça ne sera pas non plus le cas dans mes remarques. «Elle n'a pas non
plus à rechercher l'intention du législateur, mais plutôt se limiter à la
lecture du texte sans l'interpréter.»
Une autre
décision qui a été rendue par le président Pinard le
3 juin 1998 : «...un principe est un élément essentiel du
projet de loi par rapport à une simple modalité qui, elle, est un accessoire à
un principe.» Or, est-ce qu'on peut considérer
le Commissaire à la lutte contre la corruption, le directeur général de la
Sûreté du Québec et le Directeur des poursuites
criminelles et pénales comme de simples modalités? Je ne pense pas, Mme la
Présidente. C'est une question à laquelle on peut facilement répondre.
Le président Brouillet avait également
établi, dans sa décision du 1er juin 1995, que chaque série de
mesures doit former un tout cohérent
et peut exister distinctement. Alors, les mesures qui sont contenues au projet
de loi n° 1, je l'ai dit, Mme la
Présidente, c'est trois organismes distincts : deux de notre système
policier, un de notre système judiciaire. Et, si vous prenez ces deux projets de loi proposés dans notre motion de
scission, bien, vous verrez et vous pourrez constater, comme je l'ai fait, qu'ils peuvent exister
distinctement, sont cohérents en eux-mêmes. Ce sont des projets de loi qui sont
autonomes et qui pourraient vivre indépendamment l'un de l'autre.
Alors, je pense, Mme la Présidente, avoir fait la démonstration que cette motion est recevable, puisqu'elle remplit les critères de recevabilité de la jurisprudence.
Il y a une autre
décision que je voulais vous citer, qui date du 3 décembre 1992, et
du président Lefebvre, à l'époque, qui
indiquait : «...ce n'est pas parce
que les principes propres à chacun
des projets de loi qui résulteraient
de la scission pourraient être regroupés sous un même thème, [...]qu'on
peut les ramener au niveau de simples modalités.»
Je
cite cette décision, Mme la Présidente, en prévention d'un argument qui
pourrait venir de la part du gouvernement. Il pourrait prétendre que le projet de loi n° 1 ne vise qu'un thème
qui est soit le processus de nomination et de destitution. Mais je pense
avoir fait la démonstration, Mme la Présidente, que les trois organismes ne
constituent pas des simples modalités, comme le demande notre jurisprudence.
• (12 h 20) •
Et
le critère qui est le dernier mais qui est très important lorsque vous... et
qui devra vous amener, je pense, à prendre une décision comme je le propose, c'est que chaque principe doit pouvoir
faire l'objet d'une motion distincte et complète en soi. Il doit y avoir un exercice parlementaire pour chacun de
ces projets de loi qui puissent vivre ici, dans cette Assemblée.
Et la motion de scission qui est proposée,
bien, elle est rédigée de façon à ce que tous les articles du projet de loi initial soient intégralement
redistribués dans les projets de loi proposés sans devoir les modifier, donc je pense
répondre à ce critère.
Je veux apporter une
précision, Mme la Présidente, parce qu'il y a deux articles, les articles 13
et 16, qui se retrouveraient dans les deux projets de loi. Certains pourraient penser qu'en redistribuant les articles et/ou en
répétant deux articles on se retrouve
à aller à l'encontre des critères que j'ai évoqués précédemment, notamment
l'article 13, il concerne les
modalités liées au processus entourant la sélection des candidats. Et, à cet
égard, je vous réfère à une décision du
29 novembre 2000 du président Brouillet, à l'époque : «Le fait que quelques
articles se retrouvent dans les deux projets
de loi proposés n'a pas pour effet de rendre la motion irrecevable. Ces
articles peuvent être dans les deux projets
de loi, puisqu'ils concernent des modalités [qui sont]
compatibles avec les deux principes qui se retrouvent dans chacune des parties
scindées.»
En
ce qui a trait à l'article 16, Mme
la Présidente, je ne m'étendrai pas
très longtemps parce que c'est l'article qui est relatif à l'entrée en vigueur. Alors, je
vous rappelle qu'il y a plusieurs décisions qui ont dit et qui ont reconnu une
motion recevable lorsque cet article se
retrouvait redistribué dans plus d'un projet
de loi lorsqu'il y avait
scission. Il y a des décisions
importantes, notamment de notre ancien collègue le député François Gendron,
président.
Alors,
je conclus, Mme la Présidente, en faisant les remarques suivantes : les projets de loi issus de la scission, ils
sont complets, ils sont cohérents, ils peuvent vivre indépendamment les uns des
autres. Le président Ouimet, le 3 novembre 2015, reprend ces éléments dans la jurisprudence, puis je vais le citer : «La jurisprudence
parlementaire a plusieurs fois reconnu
que, pour qu'une motion de scission
soit déclarée recevable, un projet de
loi doit comporter plus d'un principe
et chaque projet de loi résultant de la
scission doit être cohérent, complet et pouvoir vivre indépendamment l'un de
l'autre. Il a également
été établi qu'il faut distinguer un principe, qui est un élément essentiel du projet de loi, d'une modalité qui est plutôt accessoire à ce principe. De plus, la jurisprudence parlementaire a établi que dans la détermination de ce qu'est
un principe, la présidence ne doit ni
rechercher ni tenir compte de l'intention de l'auteur du projet de loi, l'analyse devant uniquement se baser sur les dispositions qu'il
contient.»
Alors,
je vous rappelle, Mme la Présidente, et c'est le
député François Gendron, qui a été
notre doyen ici, à l'Assemblée, qui
l'a dit dans une décision importante le 15 avril 2015 : «Le
but d'une motion de scission est de favoriser la libre expression des députés afin qu'ils puissent s'exprimer et voter
sur chacun des projets de loi qui en résulteraient plutôt que
de le faire sur un tout alors qu'ils pourraient être en accord avec l'une des
parties mais en désaccord avec l'autre. Le rôle de la présidence à cette étape-ci est de vérifier si les conditions
prévues au règlement sont remplies pour permettre un débat à ce sujet. Ensuite, à l'issue de ce
débat, il appartiendra à l'Assemblée
[nationale] de se prononcer sur
l'opportunité ou non de scinder le projet de loi tel [qu'il est]
proposé.»
Alors,
Mme la Présidente, à la lumière des nombreuses décisions que je
vous ai proposées, de la démonstration que
tous les critères nécessaires pour que vous puissiez juger recevable cette
motion, je pense avoir fait le démonstration, Mme la Présidente, que vous
pouvez en accepter la présentation, que vous pouvez la reconnaître et la
recevoir et que nous pourrions tenir
un débat sur cette motion pour proposer à l'Assemblée nationale de scinder
ce projet de loi, le projet
de loi n° 1, en deux projets de loi, tel qu'inscrit à la motion.
Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci. Merci, M. le leader.
Maintenant, je
reconnais la parole au leader du gouvernement.
M. Sébastien Schneeberger
M. Schneeberger : Oui, alors, Mme la Présidente, je vais
être très bref. Je vous demande de rejeter cette motion parce que, de ce côté-ci, on pense que cette
motion de scission est irrecevable, étant
donné que le projet de loi a un seul et même principe, c'est-à-dire elle vise l'intégrité, la neutralité et la transparence de trois institutions qui sont différentes, certes,
mais qui, dans le projet de loi, sont soumises aux mêmes réglementations. Alors, je vous demande de refuser
cette motion et de poursuivre le débat. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Je vais
suspendre les travaux afin d'analyser la recevabilité de la motion.
Compte tenu
de l'heure, les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures afin de tenir le
débat prévu aujourd'hui aux affaires inscrites par les députés
d'opposition. Alors, je vais suspendre les travaux.
(Suspension de la séance à 12 h 25)
(Reprise à 15 heures)
Le Vice-Président (M. Picard) :
Bon après-midi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires inscrites par les députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement
d'abolir le cours d'éthique et culture religieuse
À l'article 17
du feuilleton, aux affaires
inscrites par les députés de l'opposition, M. le chef du deuxième groupe
d'opposition présente la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale
demande au gouvernement d'abolir le cours d'éthique et culture religieuse.»
Je vous
informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la
motion inscrite par M. le chef du deuxième groupe d'opposition
s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la
motion pour sa réplique, 49 min 15 s sont allouées au groupe
parlementaire formant le gouvernement, 28 min 23 s sont allouées
au groupe parlementaire formant l'opposition officielle,
21 min 4 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, et 9 min 47 s
sont allouées au troisième groupe d'opposition, 1 min 30 s sont
allouées au député indépendant.
Dans le cadre
de ce débat, le temps non utilisé par le député indépendant ou par l'un des
groupes parlementaires sera
redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies
précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront pas
soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle au député indépendant
que, s'il souhaite intervenir au cours du débat, il a 10 minutes à partir
de maintenant pour en aviser la présidence.
Je cède maintenant la parole à M. le chef du
deuxième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé :
Merci, M. le Président. La laïcité, la nécessaire distinction entre le
religieux et l'État. Au Québec, on
croyait qu'une grande partie de cet enjeu était réglée avec la Révolution
tranquille. Mais jusqu'à aujourd'hui persistent des pratiques qui
démontrent le contraire. Depuis quelques années, la société québécoise s'est
intéressée davantage à cet enjeu, notamment
à travers la crise des accommodements raisonnables, et ça a mené à des
consultations. Ça a mené à une pièce
législative que le gouvernement de ma formation politique a proposée, pièce qui
n'a pas pu être adoptée, nous étions
un gouvernement minoritaire. Donc, nous sommes toujours en attente de gestes
forts pour réaffirmer la laïcité de l'État dans toutes les sphères
d'activité.
Le
gouvernement précédent est arrivé avec un projet de loi qui est arrivé
essentiellement au résultat qu'il faut offrir les services à visage découvert. Mais la question des personnes en
autorité, issue de Bouchard-Taylor, n'est toujours pas réglée. Le gouvernement du Québec actuel a
proposé, avant la campagne, pendant la campagne et après, c'est important
de le préciser parce que parfois les
propositions changent avant, pendant et après, qu'on allait encadrer : les
personnes en autorité ne porteront
pas de signes ostentatoires. Ça, c'est la proposition du gouvernement, qui
pourra se valider à travers le projet de loi, qu'on ne connaît toujours
pas.
Nous, on
pense que, si c'est la session parlementaire de la laïcité, il faut aborder
l'ensemble de ces questions. Et on propose
que le cours d'éthique et culture religieuse puisse être abordé aussi. Ce
cours, essentiellement, M. le Président, c'est un biais sexiste. C'est un cours de propagande multiculturaliste.
C'est un cours qui repose sur des préjugés. Et ce n'est pas d'hier qu'on
est contre, c'est au moins depuis 2009. On l'a affirmé de toutes sortes de
façons possibles.
Je ne
prendrai pas tout mon temps. Je veux seulement indiquer quelques principes qui
sont importants pour nous, notamment
que l'enseignement de la religion dans les écoles, ça n'a pas sa place,
notamment qu'on a le droit d'être athée, qu'on a le droit d'être agnostique, qu'on a le droit à une liberté de
conscience pour les enfants et pour les parents, qu'on a le droit d'avoir une représentation de l'Église
qui ne repose pas sur des préjugés, sur l'habillement, notamment. On a le
droit de réclamer que l'État mise davantage
sur l'éducation à la citoyenneté. On a le droit de demander que, si on veut
régler les questions de laïcité, le moment
est venu d'aborder toutes ces questions de façon franche parce qu'il y a bien
plus d'enfants qui vont être touchés et qui
le sont toujours par le cours d'éthique et culture religieuse que de personnes
qui seront touchées par la loi telle qu'elle
s'appliquera. En tout cas, à tout le moins, tel qu'on le soupçonne lorsqu'on la
connaîtra.
Les parents
ont été nombreux à indiquer des problèmes évidents avec le cours, avec les
manuels. Même les concepteurs initiaux du programme ont indiqué qu'il y avait
des failles majeures. Et ça a été noté rapidement par notre formation politique
et ça a été noté rapidement par la formation politique qui forme le
gouvernement. Dès 2012, dès le premier
congrès de la Coalition avenir Québec,
le député de La Peltrie s'était réjoui que la CAQ, nouvellement créée,
était contre le programme d'éthique et
culture religieuse, que, dès le primaire, on allait l'abolir. Mais ça, M. le Président, ça a tenu jusqu'en décembre
dernier, où le ministre de l'Éducation a annoncé, dans une entrevue à
l'émission Les francs-tireurs, que
lui, il avait enseigné puis il avait trouvé que c'était bien correct. Et
manifestement c'est ça, la position maintenant. Je vous le dis, M. le Président, j'ai parlé avec plusieurs membres de
son caucus. C'est vrai qu'ils sont mal à l'aise, parce qu'ils sont venus me voir, dans bien des cas,
aujourd'hui, ils m'ont indiqué : Je ne comprends pas pourquoi on va devoir
voter pour ça tout à l'heure. Alors, s'il y avait un vote libre, je pense qu'on
aurait des surprises, M. le Président.
Mais je vais poursuivre sur l'enjeu de la
cohérence. L'enjeu de la cohérence, c'est de faire en sorte que... «Personnes
en autorité», nous, on est d'accord. Ça
s'impose, puis il y aura des débats. Le Parti libéral, jusqu'à maintenant,
c'est : ça ne s'applique à
personne. Québec solidaire a sa position, elle est toujours en réflexion. Puis
le gouvernement va arriver avec son
projet de loi. La nôtre est claire. On ajoute les enseignants, on rajoute les
services de garde et on ajoute aussi l'abolition du cours d'éthique et
culture religieuse, parce qu'il faut être cohérents, il faut aborder l'ensemble
de ces questions-là.
La
cohérence, c'est également d'appliquer les lois pour tout le monde. Quand
j'entends le gouvernement dire, avant même le dépôt du projet de loi sur
la laïcité, que ça ne s'appliquera pas aux écoles privées, mais pourquoi? Réponse du gouvernement : parce que les gens
qui choisissent d'aller dans les écoles privées, c'est pour les valeurs
religieuses. Faites-moi rire. Il y a
toutes sortes de raisons : pour l'encadrement, pour le prestige social que
ça offre, pour la proximité, pour des programmes spéciaux. Les gens ne vont pas
dans les écoles privées pour les valeurs religieuses en 2019. Moi, je ne crois pas à ça, M. le Président. Bien, par
clientélisme, là, ils s'en vont vers ça, pour préserver l'appui des parents
puis des jeunes, qui deviendront adultes, qui vont dans ces écoles-là.
Ça, c'est le choix de la Coalition avenir Québec.
Nous,
on fait le choix de la cohérence. On a offert notre collaboration au
gouvernement pour adopter la meilleure pièce
législative possible. On va y contribuer, on va y participer, on a des propositions
à faire. On ne sera pas nécessairement d'accord,
mais on aimerait ça pouvoir l'adopter puis en être fiers, d'être allés le plus
loin qu'on peut pour régler une bonne partie
des enjeux actuels et des enjeux à venir, parce qu'une loi, c'est pour prévoir
également. Ça, c'est pour la loi sur la laïcité, et on aura l'occasion
d'y revenir à travers le débat.
Mais,
sur Éthique et culture religieuse, c'est depuis 2008 que ça dure. Il y avait eu
le rapport Proulx en 1999. Je m'en
souviens, j'étais au cabinet du ministre de l'Éducation, maintenant premier
ministre. On ne l'a pas appliqué. En 2008, le gouvernement libéral a décidé de l'appliquer. Évidemment, je ne
m'attendais pas à ce qu'il l'abolisse. Ils l'ont créé, c'est leur créature. J'avais des attentes très
modérées, puis, même sur la modification, le député de Jean-Talon parlait d'une
révision, mais il n'y croyait pas vraiment.
Quand
le gouvernement de la CAQ est arrivé, je me suis dit : Aïe! Le
gouvernement qui se veut, là, de la laïcité, qui va régler ça rapidement. C'est une des premières choses qu'il a
dites. Alors, j'ai dit : Ils vont finir par parler du cours, parce
qu'il s'est passé beaucoup de choses. Il y a eu des contestations
d'enseignants, les créateurs initiaux ont dit qu'il
y avait plein de lacunes. Puis surtout c'était dans leur programme, y compris
pendant la dernière campagne électorale, l'abolition au primaire. Bien,
j'ai réalisé que tout ce qu'ils nous ont présenté avant, moi, j'y croyais.
C'est comme les trop-perçus d'Hydro-Québec.
Je pensais qu'ils étaient sincères quand ils parlaient de ça. Puis ils l'ont
dit en campagne. J'ai dit : La main sur le coeur, ça doit être
sérieux. Ça ne tient plus.
Alors,
aujourd'hui, je fais un appel à la cohérence. La loi sur la laïcité, là, le
gouvernement peut compter sur notre collaboration,
c'est acquis. Je l'ai dit en privé au premier ministre, je l'ai dit en public
au premier ministre. On va le faire, le débat, puis c'est moi qui serai
le représentant de ma formation politique.
Mais
abordons un enjeu qui touche les enfants du primaire et du secondaire pendant
des années. Particulièrement tout le
volet culture religieuse, c'est épouvantable. Et, si vous ne prenez pas mes
mots, M. le Président, pour toute personne qui se prétend féministe en cette Chambre, que ce soit un homme ou une
femme, prenez l'avis du Conseil du statut de la femme en 2016, qui dit : «Le cours ne "remet pas en question
les pratiques sexistes au sein des religions" et se contente de
décrire les récits religieux sans offrir de mise en contexte critique...» Pas
mal, hein? «Aucun élément de contenu ne permet
aux élèves de comprendre que les religions sont des institutions sociales
certes significatives pour un grand nombre de personnes, mais qui ont été et demeurent responsables d'un grand
nombre de violences envers les femmes, ainsi que du maintien de
pratiques et de représentations inégalitaires.»
Enfin,
«si le corps enseignant peut tenir compte de ces différences, dues à la
socialisation différentiée des garçons et des filles, il ne devrait pas
les consolider[...]. Au contraire, l'école devrait contribuer à contrecarrer
les effets de la socialisation de genre en
évitant de réserver certaines approches pédagogiques ou certaines activités aux
filles et aux garçons.»
• (15 h 10) •
Je suis assez
convaincu que c'est ce que la députée de Rouyn-Noranda voulait dire hier pour
ajouter à mon argumentaire. Parce que
quiconque se prétend féministe, et qui a lu l'avis du Conseil du statut de la
femme, et qui ignore ce qui est là-dedans, je pense, se prive d'une
connaissance importante de ce qui se passe dans les classes du Québec
présentement pour ce qui est de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Il
y a plus que ça encore. Ce programme rend suspecte la critique de toute
religion. Il y a des dogmes religieux qui sont érigés. Ça rend même le nationalisme suspect. M. le Président, je
vous le dis sans ambages, ce cours a été conçu par des idéologues qui voulaient instaurer au Québec
un prolongement de la politique multiculturaliste du gouvernement du Canada. Et ça a réussi pendant 11 ans. Et, en
ce qui me concerne, je pense que ce temps est révolu. Je pense qu'il est temps
d'abolir ce cours et je suis convaincu que
le ministre a entendu tous ces appels-là, y compris dans son propre programme
politique.
Alors,
je ne sais pas si c'est lui qui a convaincu l'ensemble de ses collègues. Je lui
indique que, même s'ils vont tous se lever tout à l'heure, plusieurs
d'entre eux — ils
se reconnaîtront, il y en a au moins deux qui sont devant moi présentement — vont lui dire que ça n'a aucun sens.
Maintenez votre position. Le gouvernement se dit à l'écoute, mais au nombre... Présentement, là, au rythme où ça va, il
y a plus de reculs de ce gouvernement que de dossiers d'immigration qui sont traités. Je vous le dis, là, c'est
fascinant. J'étais convaincu qu'on pourrait s'entendre rapidement là-dessus,
c'était dans leur programme. Peut-être que la position va changer tout à
l'heure. Je le souhaite.
L'abolition de ce cours pourrait se
faire en faisant notamment, bien, un constat de ce que je viens d'indiquer en
matière d'égalité entre les femmes et les
hommes, la discrimination, la liberté de conscience des enfants et des parents,
le fait que les gens doivent se
révéler : Quelle est ta religion? C'est une des questions qu'on pose. Mais
vous savez qu'il y a des gens qui
sont athées, puis des gens qui sont agnostiques, puis il y a des gens qui ne
veulent pas révéler leurs religions, puis
il y a des gens qui sont... C'est une question qui est sensible, chez eux, puis
c'est une question qui est sensible pour eux, aussi, leurs propres
croyances religieuses. Est-ce le rôle de l'école de perpétuer ce genre
d'enseignement?
Dans
la revue de presse ce matin, on peut lire toutes sortes d'analyses très
intéressantes. On peut lire également Nadia El-Mabrouk, dont on a
beaucoup entendu parler dans l'actualité au cours des dernières semaines,
elle-même d'origine maghrébine, indiquer
comment ce cours contribue à stigmatiser des communautés, à ostraciser des
gens, à faire en sorte que l'école
québécoise est devenue la prolongation d'une idéologie qui nie la spécificité
québécoise, qui fait en sorte qu'on
n'est pas une société, on est un regroupement de communautés, souvent
religieuses, et c'est ce qu'il faut encourager. Mais, moi, ce n'est pas le Québec que je veux, M. le Président. L'espace
religieux, c'est chez soi ou dans les lieux de culte. La connaissance de l'Église, la connaissance des
grands courants religieux, la connaissance des grands mouvements, elle
peut se faire notamment dans les cours d'histoire. Mais, de la manière que
c'est enseigné jusqu'à maintenant...
Je
vous le dis, je n'avais pas d'espoir que le gouvernement précédent modifie ça,
mais je fondais des espoirs dans le gouvernement du Québec, qui va nous expliquer
tout à l'heure pourquoi, jusqu'au 1er octobre 2018, c'était sa
position et pourquoi ça a changé maintenant. Ça repose sur quoi? Moi, je
ne suis pas convaincu que le député de La Peltrie a changé d'idée. Je les ai retrouvées, ses déclarations où il trouvait que
c'était une bonne affaire. Je ne comprends pas. Pourquoi maintenant
c'est une bonne idée? Comment il va expliquer ça aux gens qui ont...
J'ai
vu tantôt des gens qui m'ont écrit, qui ont voté pour cette formation
politique, ils disent : C'est une des raisons pour lesquelles on a voté pour eux, parce qu'ils
voulaient abolir ce cours-là. J'avais envie de leur dire : On proposait la
même chose, puis vous ne l'avez pas fait,
là. Mais je respecte ça. Mais ils l'ont cru. Je ne les blâme pas. Un engagement
dans une campagne, ça a quand même du sens.
Puis ce qu'on dit en cette Chambre, ça doit avoir du sens, qu'on soit dans
l'opposition ou en campagne électorale. On a
eu un exemple tout à l'heure sur les trop-perçus, mais on aura l'occasion
d'en reparler. Mais, sur cet enjeu-là, si on
est sérieux dans ce qu'on entreprend, si on veut vraiment la laïcité de la
société québécoise, on est capables
d'aborder l'ensemble de ces questions. Des personnes en autorité, il n'y en a
pas tant que ça. Et on s'entend qu'on
va légiférer surtout pour l'avenir puis on va prévoir. Dans le cas des
enseignants, ça s'applique maintenant.
Dans le cas des éducatrices, éducateurs en garderie, en CPE, maintenant. Là, on
va toucher davantage de gens. Mais,
dans le cas du cours d'ECR, c'est toutes les écoles qui sont assujetties à ce
cours-là. Il y a des gens qui ont voulu contester. On ne peut pas s'en sortir. Avant, on avait enseignement
religieux puis enseignement moral. Les gens qui ne voulaient pas enseignement religieux, ils allaient
en enseignement moral. On a changé ça. Et ce cours, il est plein de failles.
Le ministre le dit lui-même, il n'est pas prêt à
l'abolir. Et là il a indiqué hier qu'on est prêt à le modifier. N'eût été de mon intervention d'hier... Je ne l'ai
jamais entendu dire ça. Il n'en a jamais parlé avant. Il était tellement à
l'aise aux Francs-tireurs, et ça allait bien, et puis il parlait de sa
fierté, là, d'être ministre de
l'Éducation, puis, non, il va rester
là, le cours. Parfait. J'ai pris acte
de ça puis j'ai dit : Entre ce moment-là et aujourd'hui, il va finir par
en parler, sincèrement. Puis je crois à sa bonne foi. Ça fait longtemps
qu'on se connaît, lui puis moi. On est passés par le mouvement étudiant tous les deux. Mais je ne m'attendais pas à ça, vraiment,
là. Alors, qu'est-ce qui a changé? Pourquoi c'est une bonne chose? Pourquoi il ne faut plus l'abolir? Nous, on veut
l'abolir. Notre position est claire. Je sais que le Parti libéral ne veut pas l'abolir. Ça rejoint leur idéologie
multiculturaliste. Ce n'est pas à l'index, c'est un mot qui existe.
Dans le cas du gouvernement,
je veux bien croire que c'est une coalition, mais vous n'êtes pas obligés
d'aller à l'autre bout, qui est celui
multiculturaliste, des gens qui sont entrés dans la coalition, là. On peut être
plus en phase avec la société québécoise. Et je suis pas mal convaincu qu'il y a
pas mal de monde qui trouve que ce cours-là ne rejoint pas les objectifs qu'il devrait rejoindre. Il rejoint les objectifs
des idéateurs idéologues libéraux qui l'ont monté, ça, oui. Ça, c'est une réussite totale. Puis, pendant
11 ans, les enfants ont eu ce cours-là puis ils l'ont eu à chacune des
années. Mais, de la part de la CAQ, ah! bien là, ça, c'est un étonnement
total. Je ne m'attendais pas à ça.
Alors,
si on est sérieux avec la laïcité, on va aborder cette question-là
aussi, et toutes les questions de laïcité. C'est un
test de cohérence qu'il a aujourd'hui, le gouvernement. Je
m'adresse à la caméra, M. le Président. S'ils se lèvent puis ils votent contre l'abolition, bien, ils seront
allés à l'encontre de la promesse qu'ils ont faite. C'est ça qui est en train
de se passer. Mais je suis un éternel
optimiste. Je pense qu'ils devraient changer de position. En fait, ne pas
changer, revenir à leur position. On a une chance unique, là, d'une
majorité québécoise, de poser un geste qui démontre le sérieux du gouvernement.
J'ai regardé les
positions de chacune des formations politiques tout à l'heure puis j'ai regardé
la cohérence. Je pense qu'on va être jugés là-dessus.
Ce n'est pas d'hier qu'on parle de laïcité, bien avant la CAQ, et c'est eux qui
sont au pouvoir. Et notre bonne foi, c'est de contribuer à régler cette
question-là dans un cadre temporel, pendant cette session parlementaire. La collaboration est acquise. Je
l'ai dit au leader, qui a le double rôle de ministre et de responsable des
travaux. Mais je lui dis
également : Votre gouvernement a une responsabilité à l'égard de ce qui
est le plus engageant présentement en
matière de laïcité, ce qui est le cours d'éthique et culture religieuse.
Qu'est-ce qui est plus engageant : gardien de prison, procureur,
policier, juge ou l'enseignement qui se fait dans les écoles du Québec chaque
jour sur la base de manuels épouvantables? On a une représentation qui se fait
qui est à faire frémir, M. le Président.
J'ai
sorti des extraits tout à l'heure que j'ose à peine croire qu'ils sont
véridiques, notamment la représentation qu'on se fait, par exemple, des musulmans ou des musulmanes, où,
nécessairement, elles ont un voile. Bien, ce n'est pas toutes les musulmanes qui ont un voile. Ce n'est
pas tous les religieux catholiques qui ont une grande croix ou qui sont
des moines. Ce n'est pas l'ensemble des juifs qui portent la kippa, les hommes.
C'est très stéréotypé.
Et, en plus,
en plus, l'évocation qu'on fait de la place des femmes dans ces religions est
épouvantable, va à l'encontre de tout
ce qu'on défend à l'Assemblée nationale. Et, en plus, les différents
enseignements nous indiquent qu'il ne faut pas
contester ça. Au contraire, il faut défendre ça jusqu'au bout. On ne peut
contester, par exemple, que, dans certaines
religions, la femme n'est pas pleinement l'égale de l'homme. Pourtant, on fait
des résolutions ici. On se déclare féministes.
Le 8 mars, tout le monde va se lever, avec raison, pour parler des femmes.
Mais là, quand ça compte, là, auprès des enfants, dans un cours, on ne fera
rien? Et puis il y a des parlementaires qui vont se dire féministes une journée
pendant l'année puis qui vont oublier
aujourd'hui d'appliquer la même logique? Non, je ne croirais pas. Nous, on va
être cohérents.
Alors,
une loi sur la laïcité, vous pouvez compter sur nous, M. le Président. On va
contribuer à adopter la meilleure loi
possible. Il n'y a pas tant de choses que ça... En tout cas, je dis ça, mais en
même temps je n'ai pas vu le projet de loi. Mais je soupçonne que ça se ressemble un peu. Puis on va contribuer à
l'adopter cette session parlementaire. Le gouvernement peut compter sur nous. Il y a eu une parole
là-dessus. J'ai été leader parlementaire, je sais ce que ça implique en termes
de planification des travaux. Et j'ai encore parlé au ministre tout à l'heure,
et leader parlementaire, puis je lui ai dit : Comment on peut aménager les
travaux pour bien faire les choses, d'accord?
• (15 h 20) •
Mais
éthique et culture religieuse, je ne devrais pas avoir à convaincre le
gouvernement de ça. Comment se fait-il que
ça se retrouve dans leur programme? Réforme, certes, le ministre va le dire,
mais abolition au primaire, ça, c'est dans le programme. Ça fait que, là, ça a changé d'idée parce que le ministre,
lui, il l'a enseigné puis il a aimé son expérience. D'ailleurs on l'entend : Moi, j'ai eu le cours, puis
j'ai aimé mon expérience, puis moi, je l'ai enseigné, puis j'ai aimé
mon expérience. Ça peut-u reposer sur autre chose que l'expérience personnelle? Est-ce
que ça peut reposer notamment sur
une réflexion plus collective? Le Conseil du statut de la femme, là, c'est une organisation qui est importante. On ne peut pas juste prendre ce qui fait
notre affaire. C'est dévastateur, l'analyse sur le cours d'éthique et culture
religieuse, dévastateur. Juste sur cet
enjeu-là, ça mériterait que ce cours-là soit aboli. Mais ce n'est pas tout. La
vision multiculturaliste qu'on nous a
inculquée par les idéologues qui sont à l'origine de ce programme-là
a fait mal à la préparation civique des élèves du Québec. J'en suis
convaincu.
M. le Président, je veux assurer la population de la cohérence du Parti québécois. Nous sommes
pour une loi sur la laïcité. Nous sommes pour l'abolition du cours
d'éthique et culture religieuse au nom de la laïcité, au nom de la séparation de l'Église de l'État, au nom d'une
volonté de mettre fin à des stéréotypes qui sont enseignés à nos enfants.
M. le Président, je demande au gouvernement du Québec, de la
CAQ, qui s'est présenté comme un gouvernement qui allait régler l'enjeu de la laïcité, à respecter son engagement
électoral et à voter en faveur de la motion. Et, si ce n'est pas le cas,
ils seront jugés là-dessus. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Maintenant, je
cède la parole à M. le ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge : Merci bien, M. le Président. Il me fait
plaisir de venir prendre la parole dans ce débat d'aujourd'hui. Mais je veux commencer par déposer une proposition d'amendement au député de Matane-Matapédia sur le cours d'éthique et culture religieuse. Donc, je propose de remplacer
«d'abolir» par «de revoir en profondeur». Donc, la motion amendée se
lirait ainsi :
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement de revoir en profondeur le cours
d'éthique et culture religieuse.»
Je dépose l'amendement
ici.
Le
Vice-Président (M. Picard) : O.K., merci. Vous savez que, l'amendement, si le proposeur l'accepte, on pourra le voter tout à l'heure,
mais on va le prendre ici, actuellement.
M. Roberge : Je vous remercie bien. Donc, c'est un amendement
qui est extrêmement important, M. le Président, parce qu'il y a des points sur lesquels je suis d'accord avec mon collègue
de Matane-Matapédia, le chef du deuxième groupe d'opposition. Certains des éléments qu'il a dénoncés dans le
cours d'éthique et culture religieuse méritent d'être dénoncés, et donc le cours d'éthique et culture
religieuse devrait être réformé en profondeur. Le premier ministre s'est engagé ici même, au salon bleu, hier, à ce que ce soit
fait à l'intérieur du mandat. Donc, c'est assez clair.
Ceci étant dit, l'abolir de manière pure et simple serait, je pense,
une erreur. La logique de toute ou pantoute ne fait pas place aux nuances, et on vit dans un monde de
nuances. Encore faut-il savoir, au-delà des éditoriaux et des analyses que d'autres ont faits, encore faut-il savoir ce qu'il y a
dans ce cours-là. Et donc on a un peu de temps, M. le Président, je vais vous présenter ce qu'il y a
dans le cours d'éthique et culture religieuse actuel, pas pour le défendre dans
son intégralité. Je viens de le dire,
il y a des problèmes dans ce cours, il
y a des problèmes dans les manuels,
mais le cours en lui-même
n'est pas au complet un problème.
Alors, la première
des compétences, parce que le cours est rédigé en compétences, non plus en
objectifs, c'est réfléchir sur des
questions éthiques. C'est la première des compétences. Donc, ce que ça vise,
c'est l'apprentissage et la réflexion
éthique qui se fait à partir de situations simples et familières. Donc, ce
n'est pas théorique. On essaie de partir de situations vécues par les enfants ou les adolescents dans le cadre du
secondaire, des situations simples et familières. Les élèves sont invités à réfléchir sur des sujets qui
les touchent, par exemple les besoins qu'ils ressentent eux-mêmes, eux, leurs
amis, leur fratrie, leurs pères, leurs mères, les avantages et les désavantages
de la vie de groupe, les exigences de la vie en société. D'un cycle à l'autre, ils réinvestissent leurs
connaissances et développent leur compétence à réfléchir sur des
questions éthiques. Des fois, on appelle ça aussi faire de la philosophie
pour enfants ou pour adolescents.
Compétence deux, et je
pense que c'est ici... manifestement, c'est ici que ça pose problème, autant
pour ma formation politique, évidemment pour la deuxième opposition,
donc : Manifester une compréhension du phénomène religieux. Une compréhension, il ne s'agit pas de transmettre la foi non
plus, quand même. Donc, pour soutenir le développement de cette compétence, «les élèves doivent acquérir des
connaissances relatives aux traditions religieuses présentes au Québec
ainsi qu'aux représentations du monde et de l'être humain qui définissent le
sens et la valeur de l'expérience humaine en
dehors des croyances et des adhésions religieuses». Donc, tout ne passe pas par
le prisme des religions.
Ça peut poser
un problème ici, il faut faire attention. On est sortis d'un système
confessionnel. Quand j'ai commencé à
enseigner, et, sans doute, quand mes collègues qui siègent ici sont passés par l'école primaire
et secondaire, peut-être ne s'en rendaient-ils
pas compte, mais on avait des commissions
scolaires confessionnelles, donc
religieuses, hein? Il y avait le réseau des commissions scolaires
catholiques. D'ailleurs, à Montréal, on l'appelait la CECM, la Commission des écoles catholiques de Montréal. On l'oublie, là, ce n'était pas CSDM, c'était la
CECM. Et il y avait les écoles protestantes. La plupart des écoles catholiques étaient
francophones, la plupart des écoles protestantes étaient anglophones. Mais ce
n'était pas le cas tout le temps et partout. Et on est sortis de ce système confessionnel pour
dire : Il faut arrêter de transmettre la foi, ce n'est pas le travail de l'école de transmettre la foi,
d'accueillir des animateurs de pastorale dont la mission est d'apprendre aux jeunes comment prier un dieu plutôt
qu'un autre. Et donc on s'est dit : Il faudrait plutôt
comprendre les religions, savoir qu'est-ce que c'est, connaître les mythes fondateurs. Parce qu'on vit sur une planète
où il y a des gens qui
ont toutes sortes de fois différentes, et on les accueille ici, chez nous, puis
il faudrait comprendre, donc manifester une compréhension du phénomène religieux pour davantage savoir, pour
davantage comprendre. C'est la base de la compétence 2. J'ai de l'air de la défendre, mais je suis en train de dire qu'elle est utile, mais mal présentée dans le cours actuel et
surtout, et là je rejoins mon collègue, mal représentée
dans les manuels. Je le concède, dans les manuels, il y a bien souvent des
stéréotypes, et on s'engage à revoir ça à l'intérieur du mandat.
Compétence 3,
je m'en confesse, c'est ma préférée : Pratiquer le dialogue. Le dialogue,
là, ça ne veut pas dire : Je jase
avec quelqu'un. C'est au sens philosophique du terme. Ça veut dire que, pour
réfléchir sur les questions religieuses, pour réfléchir sur les questions éthiques, il faut d'abord apprendre à
nos jeunes à réfléchir, point, à s'extraire et à ne pas tout passer par son filtre à soi, à s'extraire d'une
question, à analyser un concept. Ce n'est pas évident, mais c'est ô combien
instructif, M. le Président. Donc, on leur
demande de s'initier à la pratique du dialogue : «Pour ce faire, ils
s'approprient des connaissances
relatives aux formes de dialogue, aux conditions qui le favorisent ainsi qu'aux
moyens à utiliser pour élaborer [un point de vue,] pour interroger un
point de vue» soutenu par quelqu'un d'autre. Donc, on va plus loin que débattre ou s'obstiner. «Les élèves apprennent à
utiliser ces connaissances de manière graduelle — évidemment, c'est une compétence qui
est assez complexe. C'est pourquoi l'apprentissage se poursuit» tout le long du
cours.
Et je veux
vous présenter le coeur du programme ECR, qui est la pratique du dialogue à la
fois sur les questions éthiques et à
la fois sur les questions religieuses. Donc, pour bien pratiquer le dialogue,
sans simplement s'obstiner, se chicaner,
s'insulter ou même simplement débattre, bien, il faut reconnaître les entraves
au dialogue. Et je vais passer avec vous,
puisque j'en ai le temps, l'essentiel de la matière du cours ECR, ce qui
devrait rester dans une réforme. Parce qu'on va le réformer, ce cours imparfait. Mais ce qui doit rester, c'est
l'apprentissage des jeunes sur l'art de s'interroger sur des concepts et
surtout l'art d'éviter les entraves au dialogue.
Première entrave au dialogue... Et ça fait
partie d'un enseignement explicite qui se fait dans nos écoles. Ils apprennent à reconnaître ceux-ci de manière à ne
pas les utiliser. La première, évidemment, entrave au dialogue, l'attaque
personnelle, hein, «consiste à attaquer une
personne de manière à détruire sa crédibilité plutôt que son argumentation».
Je pense que c'est une bonne chose que nos
jeunes apprennent à éviter l'attaque personnelle. Ça serait une erreur d'abolir
ça. Je ne sais pas ce que vous en
pensez. Moi, je pense que c'est une erreur de cesser d'enseigner que c'est une
mauvaise idée, des attaques personnelles. Réformons le cours, ne
l'abolissons pas.
• (15 h 30) •
Deuxième
entrave au dialogue, appel à la popularité. C'est quoi, ça? «Consiste à
justifier l'idée que quelque chose est
vrai ou acceptable par le simple fait qu'un grand nombre de personnes l'affirme
[mais] sans en avoir vérifié l'exactitude.» L'appel à la popularité, qui
est souvent utilisé par ma collègue de Saint-Laurent dans le dossier des maternelles quatre ans,
on nous cite un paquet de personnes qui supposément sont d'accord avec son point
de vue plutôt que le nôtre.
Troisième,
l'appel au préjugé. Alors, évidemment, c'est une entrave importante au dialogue. Un des
objectifs du cours
d'ECR, c'est de combattre les préjugés. Le préjugé «consiste à faire appel à
une opinion préconçue, favorable ou défavorable,
et qui est souvent imposée par le milieu, l'époque ou l'éducation». Évidemment, les préjugés évoluent dans le temps. On n'a pas
les mêmes préjugés qu'on avait en 1970, en 1950, mais ils ne sont pas
meilleurs, ceux qu'on a aujourd'hui. Donc, il faut apprendre à les reconnaître pour
ensuite dénoncer les préjugés pour les jeunes puis aussi éviter de les
utiliser comme un argument valable.
L'argument
d'autorité «consiste à faire appel incorrectement ou abusivement à l'autorité
d'une personne pour appuyer un argument». Des fois, on dit : Faire
du «name-dropping». Bien, c'est une entrave au dialogue. Quel est ton argument
à toi? devrait être la question la plus pertinente.
Généralisation
abusive : «Consiste à passer d'un jugement portant sur un ou quelques cas
à une conclusion générale, sans
s'assurer que l'échantillonnage est assez représentatif pour que la conclusion
soit valide.» Mon fils a eu un cours d'ECR
aujourd'hui, là, puis il m'a dit qu'ils ont vu telle, telle
affaire. Il faudrait l'enlever partout. Si lui l'a vu en classe, tout le
monde l'a vu. Si son prof a commis une faute, tous les profs la font. Voilà une
généralisation abusive.
Une autre
entrave au dialogue qu'on apprend à déceler dès le primaire, et que ça continue
tout le secondaire, et qu'on veut éliminer... la fausse causalité «consiste en
une argumentation qui s'appuie sur un lien douteux de cause à effet entre deux phénomènes». On a eu un exemple tout à
l'heure quand mon collègue a dit : N'eût été de son intervention, jamais le ministre de l'Éducation n'aurait dit
qu'il veut revoir le cours ECR. Alors, on a assisté, tantôt, à une fausse
causalité. C'est
faux. C'était prévu qu'à l'intérieur du mandat nous allions réformer le cours Éthique
et culture religieuse. Mais donc il y
aurait peut-être une autre entrave au dialogue, je ne le sais pas, la paternité
exagérée. C'est de se donner, tout à coup, la paternité à l'idée de quelqu'un d'autre. Donc, on va rajouter un
élément de plus. Semble-t-il que mon collègue a ça.
Le 7, la
double faute «consiste à tenter de justifier un comportement en signalant que
d'autres font la même [chose] ou pire encore». Exemple, tout le monde le
fait.
Le 8, l'appel
au clan — ça,
c'est souvent utilisé — «consiste à faire accepter ou rejeter un argument parce qu'il
est endossé par une personne ou un groupe de personnes jugés estimables ou non
estimables». Encore une fois, on l'a entendu tout à l'heure.
Le 9, l'appel
au stéréotype, parce que le stéréotype, c'est un objet d'étude, dans le cours
ECR, important pour le reconnaître,
le dénoncer, éviter d'y avoir recours, parce que, dans le stéréotype, il y a
parfois le racisme, il y a le sexisme, et,
quand on a du racisme et du sexisme, il peut y avoir de l'intimidation, de la
médisance. Ça revient très souvent. Donc, l'appel au stéréotype «consiste à
faire appel à une image figée d'un groupe de personnes en ne tenant pas compte
des singularités. Cette image est
généralement négative et basée sur des renseignements faux ou incomplets». Et,
là-dessus, le cours ECR est bien imparfait, et surtout les manuels,
parce que, paradoxalement, il pourrait y avoir des appels aux stéréotypes dans
les manuels d'ECR. Or, le cours vise à combattre les stéréotypes. Pour cette
raison-là, il ne faut pas défendre le cours
dans sa version actuelle, défendre les manuels dans leur version actuelle et
dire qu'il n'y a rien de plus beau
que le statu quo. On n'ira pas là, M. le Président, parce que, malheureusement,
et, là-dessus, je suis d'accord avec mon
collègue, il y a des stéréotypes véhiculés dans les manuels. C'est pour ça
qu'on veut revoir le cours. Cependant, on ne veut pas l'abolir, parce
qu'il a du bon, comme je l'ai démontré depuis tout à l'heure.
Et je
continue avec ma liste d'entraves au dialogue qui sont enseignées aux jeunes du
primaire et du secondaire et dont on serait bien fous de se priver. Cet enseignement
est utile.
La caricature
«consiste à déformer la position ou la pensée de quelqu'un, notamment
en la radicalisant ou en la simplifiant [à outrance pour] la rendre non
crédible». Exemple, quand des collègues, ici, disent : Là, là, avec votre maternelle quatre ans mur à mur... Ce n'est pas du
mur-à-mur puisque nous voulons l'offrir et non pas l'imposer. Si
c'était mur à mur, eh bien, ce serait
dans toutes les écoles primaires et ce seraient tous les élèves qui devraient y
passer. Or, ce n'est pas le cas.
C'est une caricature que de faire ça. Et, manifestement, ceux qui utilisent ça
n'ont pas bénéficié de ce cours d'éthique et culture religieuse.
Le faux
dilemme «consiste à ne présenter que deux possibilités pour faire un
choix. Comme l'une est indésirable, l'autre est inévitablement le choix
à faire.» On l'a vu tout à l'heure, hein, si j'écoute mon collègue, il faut
l'abolir, le cours, ou bien le laisser tel
quel. Vous avez le choix, là, les Québécois, on abolit le cours ou bien on le laisse tel
quel. C'est un faux dilemme, M. le Président. On peut le réformer en profondeur. On n'est pas obligés de l'accepter
avec ses erreurs ou bien de l'abolir au complet. Bien non, c'est un faux
dilemme. Ne tombons pas dans ce piège.
12, la
fausse analogie «consiste à tenter de justifier une conclusion à l'aide d'une
analogie établie entre deux phénomènes qui ne
sont pas suffisamment semblables pour justifier ce procédé». Exemple,
la lutte féministe et l'abolition du cours ECR, de dire que ces deux-là vont ensemble,
vont de pair, c'est une fausse analogie, d'autant plus qu'à l'intérieur
du cours ECR on veut combattre les préjugés,
on veut combattre les stéréotypes et on veut reconnaître la valeur de l'autre.
Il y a, dans ce que je viens de dire, évidemment, beaucoup de la lutte féministe et beaucoup
de choses qu'on peut utiliser pour
avoir une vraie égalité
hommes-femmes. Donc, c'est une fausse analogie de dire qu'au nom de la lutte
féministe il faut abolir le cours
ECR. Moi, je dirais qu'au nom de la lutte féministe il faut réformer le cours
ECR. Il faut le purger de ses erreurs tout en gardant ce qu'il y a de
bon.
La pente
fatale. Il en reste deux, M. le Président. La pente fatale «consiste à affirmer
qu'une action entraînera une situation épouvantable en raison d'un
enchaînement de causes et d'effets qui, après examen, se révèle douteux, voire
impossible». La pente fatale, c'est lorsque
le président du parti qui est aujourd'hui à l'opposition officielle a dit que,
si la coalition formait le gouvernement, ce serait le chaos social. Je me
souviens d'avoir dit ça en campagne électorale, et c'était vraiment ce qu'on appelle une pente
fatale, c'est qu'avec l'élection, que le gouvernement de la CAQ, ça allait
glisser vers quelque chose
d'abominable, alors qu'on voit bien, au fond, les Québécois nous suivent, sont
satisfaits. On est bien, bien loin du
chaos social. La dernière fois qu'il y a eu un chaos social, c'est quand ça a
brassé beaucoup, beaucoup, beaucoup et que les citoyens se sont élevés
contre un gouvernement quelque part vers 2003. Souvenez-vous qui avait été élu.
Complot — le dernier — «consiste à conclure qu'une personne ou un
groupe de personnes [...] profitent d'une situation, en sont l'origine
ou [...] la cause». Je n'ai pas entendu ça aujourd'hui.
Donc, M. le
Président, je ne prétends pas que ce cours-là est parfait. Il ne l'est pas,
parfait, O.K.? Le programme n'est pas parfait. Le programme est bien
pensé, mais le diable est dans les détails. On peut réformer le programme,
définitivement. Est-ce qu'il fait trop de place au religieux, au phénomène
religieux, à la culture religieuse? Fort probablement.
Fort probablement qu'il y en a trop. Est-ce qu'il transmet la foi? Pas du tout.
Mais probablement qu'il y a une trop grande place au religieux dans le cours Éthique
et culture religieuse. Peut-être même est-il mal nommé, ce cours. Il laisse croire, d'ailleurs, que... Avec éthique
et culture religieuse, c'est comme si l'éthique était religieuse, la culture
religieuse. On a l'impression que c'est un cours de religion. Ce n'est pas le
cas.
Donc, il faut
le revoir, certainement, le réformer en profondeur. Ça va soulever des débats
parce que, quand on touche au
religieux, on touche à des valeurs qui sont fondamentales. Mais il ne faut pas
faire l'économie de ce débat-là. Je
pense que, quand les gens ont voulu amener de la laïcité au Québec, ont voulu
sortir du système confessionnel, donc religieux,
ils ont sorti l'enseignement religieux catholique, ils ont sorti l'enseignement
religieux protestant. Pour instaurer ce
cours, ils étaient animés des bonnes intentions. Et c'était probablement une
étape nécessaire d'y aller avec le cours d'éthique et culture religieuse qu'on connaît aujourd'hui. Maintenant,
il faudra passer à une autre étape en allant encore plus loin, en revoyant ce cours-là pour le purger
de ses erreurs, surtout en s'assurant que, dans les manuels, il n'y ait plus
de manifestation
stéréotypée, souvent des femmes, mais pas seulement des femmes. Mais on peut le faire ensemble,
et surtout je nous invite, en le faisant, en évitant les entraves au
dialogue. Merci.
• (15 h 40) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Merci, M. le ministre.
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît! Merci,
M. le ministre. Tel que stipulé à l'article 98.1
du règlement, une motion présentée aux affaires inscrites par
les députés de l'opposition
ne peut être amendée, sauf avec la permission de son auteur. Vous avez
reçu copie de l'amendement, M. le...
M. Bérubé : ...
Le Vice-Président
(M. Picard) : Mais je sais
que vous pouvez le dire seulement à la réplique, mais pour bonifier...
M. Bérubé : ...
Le Vice-Président (M. Picard) : O.K.
Si vous pouvez nous donner la réponse sur l'amendement.
M. Bérubé :
M. le Président, au nom de nos convictions et au nom de leur engagement
électoral, nous refusons.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci. Je suis prêt à reconnaître
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Hélène David
Mme David :
Oui. Merci, M. le Président. Je suis heureuse, oui, je suis heureuse de
participer à ce débat-là parce que
c'est un débat de fond. C'est une question extrêmement tranchée, je pense, que
nous propose le chef par intérim du Parti
québécois, c'est abolir, abolir, abolir. «Abolir», c'est un mot qui a beaucoup,
beaucoup de poids. C'est vraiment... on
fait une chose ou son contraire. Abolir le cours d'éthique et culture
religieuse pour toutes sortes de raisons, si j'ai bien compris, politiques, d'engagement, engagement de
ci, de ça, désengagement... Moi, je ne vais pas aller vers la politique,
je vais aller sur comment on éduque nos enfants.
À quoi sert
le mot «éthique» dans l'éducation des enfants? Je pense que j'y ai consacré pas
mal de temps, dans ma vie, à l'éducation.
C'étaient des grands enfants, vous allez dire, mais ils avaient quand même
intérêt à avoir eu un peu d'éthique
et, j'oserais dire, de culture religieuse. Et je vais être d'accord avec la
Coalition avenir Québec. Nous sommes d'accord
avec le fait de revoir le cours. D'ailleurs, votre prédécesseur, le député de
Jean-Talon, a fait... vous avez fait de nombreuses interventions, et il
avait mis en place un processus de révision. Donc, nous sommes pas mal sur la
même longueur d'onde.
Mais, comme
je ne suis pas tout à fait le même genre que le ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur, je ferai
peut-être moins de politique avec ça ou d'exemples d'ici. Je vais essayer de
prendre des exemples de la vie courante, M., Mme Tout-le-monde qui nous écoutent, et qui sont chez eux et
puis qui disent : Bon, ils se chicanent encore! Oui, on se chicane
encore, mais cette fois-ci, là, c'est un vrai débat, c'est un vrai débat avec
des conséquences importantes parce que, si
la Coalition avenir Québec, le ministre de l'Éducation, disait : O.K., on
va l'abolir, je pense qu'il faudrait y penser à deux fois, puis à trois
fois, puis à quatre fois.
Qu'est-ce
qu'on veut de nos enfants? Pourquoi? D'ailleurs, ça fait des années et des
années que cette question-là se pose,
et il y a des choses qu'il faut dire sur le mot «culture religieuse». Le
collègue, le ministre de l'Éducation a beaucoup parlé du côté éthique, et je
suis d'accord avec tout ce qu'il a dit. On a vu un exemple désolant, encore,
d'un joueur de hockey de 24 ans — on a vu le vidéo — qui se fait attaquer, littéralement, traiter
de babouin. C'est épouvantable. Et là on pourrait dire : Où est son cours d'éthique et de culture religieuse? Parce que
je pense qu'il y
a un mélange de choses où vraiment
le racisme a été déployé dans sa plus sordide expression.
Donc, dans ce
cours, c'est éthique et culture religieuse, culture religieuse. Si tant est que
le mot «culture» veuille dire quelque chose, nous voulons des enfants cultivés. Mais qu'est-ce que la culture? Il y a
des écrits, des centaines de milliers
de pages sur ce qu'est la culture. Alors, la culture, c'est l'essence des
civilisations. Sans culture, on redevient des animaux. On dit que la différence entre l'homme et l'animal, c'est la
culture, c'est le concept de penser, de réflexion. Et là on touche à l'éthique, le concept de sublimation.
Si on est capables de faire ça, c'est comme ça qu'on peut espérer — et
Dieu sait qu'à travers les âges on a
souvent raté notre coup — avoir
un monde pacifique, un monde sans guerre. Un monde qui n'a pas de guerre
de quoi? De religion.
Il y a eu
beaucoup de guerres de religion, à travers les âges, et c'étaient des guerres
qui, sous le couvert de la religion, étaient des guerres de toutes sortes, de
territoires, de pouvoirs, et c'est effectivement le côté le plus triste de la religion, c'est
quand on accole le mot «pouvoir». Et ça, on
aura l'occasion peut-être d'en discuter éventuellement dans un autre
débat, éventuellement, sur la laïcité.
Mais, quand
on parle de former nos jeunes à la culture religieuse, ça veut dire de former
nos jeunes à une réalité qui existe
depuis des milliers d'années. On ne peut pas complètement nier le fait que
le seul fait d'être un être humain...
Puis là je ne suis pas une grande philosophe
qui a eu... même si j'ai un Ph. D., ce qui veut dire philosophiae doctor, ce
n'est pas pour de la philosophie que je veux
faire ça aujourd'hui. Mais c'est un fait, depuis des milliers d'années, la
religion est un ciment des sociétés. Pourquoi?
Pourquoi on cherche à donner un sens à notre vie? Pourquoi on naît, on est une poussière et que... de poussière, tu retourneras
en poussière, dit une religion. D'autres religions le disent d'une autre façon,
mais on se crée un sens à notre vie, et, si on n'a pas de sens à notre vie, ça
donne des conséquences très graves, des conséquences...
Quand la vie n'a plus de sens, c'est la dépression, c'est toutes sortes de
choses, et on ne voit pas pourquoi on se lève le matin puis on veut
vivre.
La religion a
donné, pour le meilleur et pour le pire, des réponses à ça. Alors, les
religions, je dis bien... je ne dis pas
la religion catholique, la religion bouddhiste, la religion musulmane, la
religion juive, mais les religions ont été très longtemps et sont encore
des ciments de société. On l'a vécu au Québec, on va dire pour le meilleur et
pour le pire, des fois. Il y a encore un
crucifix au-dessus de vous, M. le Président. C'est une réflexion qu'il faut se
faire, mais il est là, et on est
aussi peut-être déchirés entre l'enlever ou ne pas l'enlever, mais on a un
patrimoine aussi. Mais les religions servent à quoi? Quand un être humain se lève le matin puis qu'il dit : Mon
Dieu, aidez-moi à passer la journée, ou l'autre va parler à un autre dieu, etc., on ne peut pas passer une
vie sans savoir que, depuis 2 000 ans, 3 000 ans, il y a des
religions qui ont guidé des peuples entiers.
Et qu'est-ce
qu'on fait quand il arrive des choses épouvantables? Je pensais, parce que le
collègue, le chef intérimaire du
Parti québécois a donné des exemples de stéréotypes, mais qu'est-ce qu'on fait
quand il y a une tuerie à Pittsburgh
le 28 octobre 2018 et que le tueur tue 11 Juifs dans une synagogue et qu'il
dit : Je vous tue parce que vous êtes des Juifs? On est allés à la synagogue à Montréal, on a fait une veillée
de quoi? De prière. Tous les hommes, des politiciens, des gens qui
étaient venus en support, portaient tous la kippa.
Alors, quand
j'entends le collègue du Parti québécois dire : On enseigne des
stéréotypes, tous les hommes portent la
kippa, ce n'est pas vrai que c'est ça qui est enseigné. C'est que la façon de
montrer ta religion juive quand tu vas à des événements religieux comme des... appelons ça des funérailles, bien, tu
portes la kippa, c'est ton signe religieux. Ça ne veut pas dire qu'ils portent
la kippa toute la journée, ça ne veut pas dire que... etc. Alors, il y a des
signes religieux qui peuvent être une partie intégrante, à temps plein,
temps partiel, temps très, très, très partiel, ou pas du tout, les signes
religieux peuvent faire partie d'une religion.
• (15 h 50) •
Mais ne pas
enseigner rien de ça à nos enfants, que, depuis 2 000 ans, il existe des
religions qui ont essayé d'expliquer ce qu'on fait sur la Terre... C'est
souvent ça qui fait en sorte que les gens se retrouvent, sont en communauté
et disent : Bien, on partage la même
vision. Et ça a été le cas du IVe siècle, du VIIIe siècle, du XIIe siècle, du
XVIIe siècle. Les religions sont
partout, et, qu'on le veuille ou pas, il y a encore, de nos jours, beaucoup de
sociétés qui sont guidées beaucoup par les religions. On peut essayer de
dire : Nous, on est contre ça, on n'enseignera même pas l'histoire des
religions. Parce que culture religieuse, c'est enseigner l'histoire des
religions. Comme a dit le collègue le ministre de l'Éducation, il a dit : Nous ne voulons pas transmettre une foi.
Moi aussi, je suis passée par une école catholique, et c'était clair qu'ils voulaient nous transmettre une foi.
Bien, ils se sont un peu fourvoyés, justement, parce que les Québécois
ont beaucoup perdu la foi, et pourtant... peut-être
même vous, M. le Président, vous avez eu des cours, et c'était par, souvent,
des religieux. On ne va pas trop longtemps partir là-dedans, mais les religieux ont aussi apporté un système d'éducation, et particulièrement les femmes religieuses au Québec ont joué des
rôles importants, importants dans la création des écoles et la scolarisation. Ça, c'est autre chose. Mais,
oui, ils voulaient nous transmettre une foi en laquelle ils croyaient sincèrement ou peut-être, dans le fond de
leur coeur, moins sincèrement, mais, en tout cas, ils nous transmettaient une
foi.
Ce n'est plus ça qu'on veut faire au Québec. On
a voulu faire, avec éthique et culture religieuse, deux choses essentielles à la vie en société.
La première, c'est le savoir-vivre ensemble. Quand on parle d'un cours d'éthique, c'est
l'éthique de vivre ensemble,
et n'entendez pas ça seulement sous le sens des communautés culturelles, le
eux et nous. Le vivre-ensemble, comme
le ministre a référé à
un moment donné aux cours d'école, à
l'intimidation, bien, si on n'est pas
capables de vivre ensemble, ça peut donner justement de l'intimidation,
du racisme, etc. Alors, le dialogue dont il a parlé, qui est un des critères du cours d'éthique... mais la façon de se
comporter, je ne peux pas imaginer que le Parti québécois ne veuille plus qu'on enseigne ça à nos élèves.
Il va peut-être me dire, le chef : Bien là,
j'exagère un peu puis je suis démagogique quand je dis une affaire comme ça, mais abolir le cours... Il y a quand même
le mot «éthique» dans cette abolition. Mais, si on abolit le cours, bien,
moi, je présume, c'est parce qu'il n'y aurait plus d'éthique et il n'y
aurait plus de cours de culture religieuse. Mais donc abolir l'éthique, ça veut dire abolir ces moments
précieux dans une école où tu te poses des questions avec tes copains et
copines de classes et un enseignant, une enseignante, pour dire :
Qu'est-ce que c'est que l'éthique?
Ça a l'air
d'un grand mot comme ça, l'éthique, mais l'éthique, c'est avoir des principes
de vie en communauté. Et Dieu sait
que, sur la planète, on en a de plus en plus besoin, de principes de vie en
communauté. Le vivre-ensemble, là, arrêtons de penser que c'est
seulement : Bien là, il faut accueillir l'autre parce que c'est une
communauté culturelle, puis on va se forcer,
puis on va essayer d'aller manger telle chose, telle chose. C'est accueillir
l'autre avec un a majuscule parce que
l'autre a autant le droit de vivre que toi, puis il faut que tu comprennes que
la planète... Et nous, au Québec, Dieu sait qu'on est privilégiés, on est dans
un endroit... un des plus privilégiés au monde, bien, on peut peut-être se
permettre d'accueillir les autres, et puis
ça, ça se passe à tous les niveaux. Puis un jeune qui apprend ça, ça peut
éviter des problèmes majeurs dans les relations humaines, puis je pense à la
violence conjugale, je pense à la violence tout court, je pense à l'intimidation, je pense au harcèlement, je pense à
plein de choses. Avoir une éthique dans la vie, là, bien, l'école en est pas mal responsable de pouvoir
enseigner ces choses-là, et je suis contente que, dans notre système québécois,
on enseigne ça.
La
culture religieuse, je l'ai dit, il y a le mot «culture», et c'est comme si on
disait à nos jeunes à l'université en sciences
politiques : On n'enseignera plus la Russie communiste du
XIXe siècle, début du XXe siècle, savez-vous pourquoi? Parce que c'est communiste, puis on ne veut pas
que nos jeunes en sciences politiques deviennent tous une gang de communistes.
Bien, je regrette,
quand tu es dans un processus éducatif, il faut que tu sois ouvert, justement,
à l'histoire des civilisations, à
l'histoire des mouvements politiques et à l'histoire des religions, parce que
l'histoire des religions a façonné pendant des siècles l'histoire des peuples.
Alors, la culture religieuse, c'est comme ça que je l'entends et c'est comme
ça que ça a été voulu, c'est la culture des
religions. Ce n'est pas que ton enfant sorte avec une kippa sur la tête ou un
hidjab, ce n'est pas vrai... ou une
croix catholique. C'est pour que ton enfant sache qu'il n'est pas tout seul sur
la planète, qu'il y a des pays, il y
a plein, plein, plein de pays dans le monde. On donne des cours de géographie,
on n'est pas rendus à abolir les cours de
géographie, mais la géographie, c'est incarné par des peuples, des peuples qui
ont des religions, et, si on fait fi de ça, c'est encore plus se
refermer au Québec face à la mondialisation. C'est de comprendre que la planète...
puis on a un astronaute extraordinaire,
David Saint-Jacques, qui a fait des déclarations non moins extraordinaires en
disant : Plus on regarde ça de
loin, plus on s'aperçoit qu'on a une petite planète, et cette planète-là, on
n'en a pas, de plan B, là. On a une planète, et c'est tout, puis il faut
qu'on réussisse à s'entendre ensemble.
Alors, de dire :
On n'enseigne plus culture religieuse, donc on fait fi de l'existence du
phénomène religieux, je trouve que c'est un recul digne du temps, excusez-moi
de le dire comme ça, mais de Duplessis et de la «grande noirceur». Au lieu de
s'ouvrir et de dire : Ça existe, les religions, partout dans le monde, on
se ferme puis là on dit : Il n'y en a plus, de religion, non, non, non,
puis on ne parlera même pas de catholicisme. Dieu sait que je ne suis plus nécessairement pratiquante, mais ce n'est pas vrai que je vais renier tout l'enseignement que j'ai vécu puis ce n'est pas vrai que je ne veux pas que mes enfants, mes petits-enfants, un jour, ne
sachent pas qu'il y a eu, au Québec, tout ce parcours de religion puis qu'il y a eu ce parcours de moins de religion dans les
années 60. Comme disait le ministre, il y avait la Commission des écoles catholiques, les écoles protestantes. Maintenant,
on va tous dans les écoles de nos comtés, et, dans toutes les écoles de
nos comtés, il y a vraiment beaucoup, beaucoup... et une belle diversité
culturelle. Alors, dans la diversité culturelle, il y a la culture religieuse.
Alors,
moi, je ne rentrerai pas dans leur débat : Tu as dit ci en campagne, tu as
dit ça, tu as dit ça. Le problème est beaucoup plus sérieux que ça. L'enjeu... et je le
remercie, le collègue, pour ça, de nous permettre de parler d'un enjeu
fondamental, comment on veut traiter
l'histoire, l'histoire avec un grand H, pas seulement du Québec,
de la planète. Puis, moi, les
histoires de : Si on est pour ça, on est pour le multiculturalisme, etc.,
qu'est-ce que c'est que cette façon d'intellectualiser,
faussement d'après moi, le fait que c'est parce que c'est le débat nationaliste
versus multiculturaliste ou séparatiste, fédéraliste?
Ce n'est pas ça. C'est la question de l'être humain dans son essence même, la
question du vivre-ensemble planétaire. Moi, je ne pense pas aux gens de
Toronto quand je parle de ça, je ne pense pas aux gens de Paris, je pense à
l'ensemble des êtres humains sur la planète.
Alors, il y a eu des
guerres de religion. Il y a des mouvements... En Inde, on peut avoir la
religion sikhe, par exemple, qui a toute son histoire, mais la religion
sikhe, c'est formidable. Allez lire dans n'importe quoi sur l'histoire
des religions, il y a
une histoire derrière ça qui est importante. Puis on en a, des concitoyens
sikhs. J'en ai. J'ai le plus gros temple sikh dans mon comté à moi. J'y
étais encore la semaine dernière. Des gens d'une très grande humanité. Et ça devrait... Au contraire, les enfants, qui
aiment tant apprendre... ça devrait être formidable de pouvoir enseigner c'est
quoi, un sikh par rapport à la religion bouddhiste, par rapport à la religion
catholique, par rapport... C'est quoi, le monothéisme,
c'est quoi, le polythéisme? C'est de la culture autant que... Quand je vois le ministre de la Santé et Services sociaux,
bien, il a fait un cours de médecine. Moi, j'ai fait un cours de psychologie.
On a tous fait des cours x ou y. Bien, il
aimait ça, apprendre la médecine — j'espère,
mais je pense que oui — la
neurologie, etc. La soif de savoir doit habiter nos enfants, sinon ça va donner une société, d'abord, très
dépressive, une société qui n'a plus de... on appelle ça l'anomie sociale, qui n'a comme plus de sens. On veut, nos
enfants sont pleins de motivation à apprendre si tant est qu'on est capables
de les intéresser. Ça, c'est une autre chose, sur la pédagogie.
Maintenant,
est-ce qu'on veut ou pas modifier le cours? Bien oui, M. le
chef intérimaire du PQ, on veut modifier le cours. Mon collègue l'a dit.
Une voix :
...
Mme
David : Non, non, mais c'est
parce qu'entre l'abolition et puis le
maintien dans le statu quo il y a peut-être...
Le
Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée, on s'adresse à la présidence
et on évite les débats. M. le député de Matane, s'il vous plaît!
Mme
David : Alors, il y a peut-être une voie entre les deux. Donc,
effectivement, il y a des choses, il y a toujours des choses à améliorer. Puis, moi, un prof qui
donnerait le même cours depuis 20 ans, je dirais : Bien, peut-être
que, chaque année, tu devrais être
sûr que le cours est encore pertinent. On sait que le réseau primaire,
secondaire, c'est énorme, puis les cours sont plus normés, etc. Ça ne veut pas
dire qu'il ne faut pas suivre l'évolution de la société puis suivre l'évolution
des meilleures pratiques puis des contenus.
Alors,
on est extrêmement d'accord de pouvoir justement modifier, réviser ce cours-là,
tellement, M. le Président, que, sans
se parler avec la Coalition avenir Québec, on va vous déposer à peu près le
même amendement. Donc, peut-être qu'on
en sait déjà le destin puisque le destin a été prononcé tout à l'heure par
l'amendement de la CAQ. Alors, je vous dirais :
«Que la motion du
chef du 2e groupe d'opposition soit amendée de la manière suivante :
«[Aux 1ere et 2e
lignes, après le mot "gouvernement"], remplacer les mots
"d'abolir [...]" par les mots "de poursuivre la révision
du";
«À la deuxième ligne,
après le mot "religieuse", ajouter les mots "amorcée par le
précédent gouvernement."»
La motion
telle qu'amendée se lirait ainsi : «Que l'Assemblée nationale
demande au gouvernement de poursuivre la révision du cours d'éthique et
de culture religieuse amorcée par le précédent gouvernement.»
Donc, j'en fais le dépôt.
Et je ne sais pas si j'ai le droit de continuer à parler ou pas, là, quand on
fait ça. Oui? J'en fais le dépôt. Mais je
vais laisser mon collègue aussi
pouvoir intervenir. Alors, M. le
Président, on est contre la motion,
mais on est pour le progressisme. Et, si,
dans ce cours-là, il y a des choses à modifier, qu'on les modifie, puis on
sera très satisfaits avec ça. Merci beaucoup, M. le Président.
• (16 heures) •
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, Mme la députée. Sous réserve de la permission de l'auteur de la motion... Tout à l'heure, on va distribuer votre amendement, et, tantôt, je demanderai à M. le député de Matane-Matapédia s'il veut amender sa motion.
Je reconnais maintenant Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Mme Émilise
Lessard-Therrien
Mme Lessard-Therrien : Merci,
M. le Président. Hier, le chef du Parti québécois m'a dérangée en réclamant l'abolition du cours d'éthique et culture religieuse du programme
de formation de l'école québécoise. J'ai été choquée parce que, visiblement, le chef du Parti québécois ne sait
pas trop de quoi il parle quand il s'attaque au cours d'éthique et culture religieuse. Rares sont les élus, dans
cette Chambre, qui ont même reçu des cours d'ECR au cours de leur parcours
scolaire depuis son implantation en 2008.
M. le Président, non seulement je fais partie de
ces élus qui ont eu la chance de suivre ces cours, mais je suis probablement la seule élue dans cette Chambre qui
a suivi une formation universitaire spécifiquement dans ce domaine. Permettez-moi donc d'abord de vous dire ce qu'est
le cours d'ECR. Dans mon parcours, j'ai souvent eu à vulgariser mon sujet d'étude, que j'ai toujours décrit comme une
prémisse des cours de philosophie au cégep. En campagne électorale, j'ai parlé de mon parcours scolaire en vantant les
finalités de ce programme : la reconnaissance de l'autre et la poursuite
du bien commun. J'aimerais le répéter encore
une fois pour être certaine que le chef du Parti québécois, qui a insisté sur
le fait que le cours d'ECR véhicule
des valeurs qui ne sont pas les nôtres, comprenne bien : la reconnaissance
de l'autre et la poursuite du bien commun.
Par ailleurs,
les compétences visées avec ce cours sont : manifester la compréhension du
phénomène religieux, réfléchir sur
des questions éthiques et la pratique du dialogue. Vous comprendrez ici qu'on
est loin de vouloir endoctriner nos
jeunes à une quelconque religion. Au contraire, et je cite le programme :
«En réunissant dans un même programme l'éthique
et la culture religieuse, deux dimensions essentiellement distinctes mais
renvoyant l'une et l'autre à des zones d'expression
particulièrement sensibles de la diversité, on compte aider les élèves à mener
une réflexion critique sur des questions
éthiques et à comprendre le fait religieux en pratiquant, dans un esprit
d'ouverture, un dialogue orienté vers la recherche du vivre-ensemble.» Esprit d'ouverture, recherche du
vivre-ensemble, poursuite du bien commun. Si ça, ce ne sont pas des valeurs chères au Québec, M. le
Président, je me demande vraiment à quoi peut bien aspirer le Parti québécois.
D'ailleurs,
je pense que nous avons là un élément clé du programme, la réflexion critique.
Ne trouvez-vous pas important, M. le
Président, que nos jeunes développent sans plus attendre la réflexion critique
pour qu'ils puissent faire des choix
éclairés tout au long de leur vie? Le cours d'ECR est le cours où on amène les
élèves à comprendre le raisonnement de
leur propre raisonnement, le seul endroit où on amène l'élève dans un processus
de métacognition, c'est-à-dire de penser sur leur propre pensée. Bien sûr,
d'autres cours ont une portion de critique, mais jamais aussi approfondie qu'en
ECR où on enseigne les fonctionnements du
raisonnement et surtout le pouvoir de recul face aux organisations qui nous
entourent.
Le phénomène religieux est abordé dans ce même
esprit : d'un point de vue historique, certes, mais aussi en décomposant les différents éléments qui
structurent les traditions religieuses. Il ne s'agit pas d'un cours de
religion, mais de culture religieuse, un cours où on amène une vision
multidimensionnelle du phénomène religieux. On va utiliser l'histoire, on va utiliser l'art, l'architecture,
la littérature, et autres, pour analyser sous différents angles ce phénomène.
Ce n'est pas pour rien que le libellé de ce
cours est culture religieuse. On enseigne la culture religieuse comme on
enseigne la culture artistique ou la
culture musicale. Parler de la culture religieuse, ce n'est pas une
contradiction avec la laïcité.
La laïcité,
M. le Président, c'est la séparation entre l'Église et l'État. C'est
l'impartialité et la neutralité de l'État à l'égard des confessions religieuses. Ça ne veut pas dire qu'on ne peut
pas parler de culture et d'histoire religieuse dans nos écoles, voyons! Ça veut dire que l'enseignant ne
juge pas la validité ou la véracité. Il interprète des faits qu'il présente
à ses élèves : Voici ce que disent et
font les croyants pour telle et telle raisons, et non : Je crois ou je ne
crois pas, j'accepte ou je n'accepte pas ce que disent les croyants.
Nous sommes donc loin, je le répète, de l'idée que se fait le chef du Parti québécois, qui en parle comme un cours qui
stigmatise les enfants en fonction d'une pratique religieuse et propage des stéréotypes. S'il veut vraiment travailler
pour la laïcisation de l'État, qu'il
commence par demander de mettre fin au financement public des écoles
confessionnelles.
Par ailleurs,
le chef du Parti québécois semble oublier la troisième compétence de ce
cours : la pratique du dialogue. C'est
dans le cours d'ECR que les élèves sont initiés à la rhétorique et à l'art de
savoir bien communiquer. C'est dans ce
cours qu'on enseigne les entraves au dialogue et les rudiments d'un
argumentaire solide, pertinent et efficace, comme nous a présentés M. le
ministre. N'est-ce pas là un apprentissage précieux, de doter nos futurs
décideurs d'outils de communication qui
permettent des débats sains et constructifs? Pour ma part, M. le Président, ce
sont des connaissances que j'utilise judicieusement à tous les jours
depuis mon élection.
Est-ce que le
programme d'ECR peut être amélioré? Absolument. Est-ce que nous devons nous
assurer de la qualité de
l'enseignement? Certainement, comme toutes les autres matières, d'ailleurs.
Mais est-ce que nous devons jeter aux poubelles
un cours qui permet aux jeunes d'exercer leur esprit critique et de comprendre
les phénomènes qui les entourent?
Vous serez d'accord avec moi que ce n'est pas la voie à prendre.
En
terminant, M. le Président, j'en ai un peu marre du ton paternaliste que
j'entends dans cette Chambre depuis quelque
temps. D'un côté, on pense que le cours d'ECR joue dans la tête de nos enfants,
de l'autre, on pense que d'avoir une
enseignante portant un voile va influencer les croyances de nos enfants et on
va même jusqu'à remettre en cause la capacité
d'une nouvelle classe d'enfants âgés de 18 à 21 ans de faire les bons choix
pour eux-mêmes. Dans tous ces cas, je suis persuadée que nos enfants ont
plus de jugement que ça et j'ai bien envie de leur faire confiance.
La CAQ et le
PQ ont peur de leur ombre. Eh bien, qu'ils sachent que les Québécois ne sont
pas des marmottes.
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée. Est-ce
qu'il y a d'autres interventions? M. le député de D'Arcy-McGee, il vous
reste 9 min 10 s à votre formation.
M. David Birnbaum
M.
Birnbaum : Merci, M. le Président. Je me permets de commencer avec une
définition qui vient de Larousse sur le mot «laïcité» : «Conception et organisation de la société
fondée sur la séparation de l'Église et de l'État et qui exclut les Églises de l'exercice de tout pouvoir
politique ou administratif, et, en particulier, de l'organisation de
l'enseignement.» Bon, ça vient de l'édition française.
Par contre,
deux choses qui me frappent. Dans un premier temps, il n'y a rien là qui nous
interpelle à inviter nos enfants de
fermer les yeux aux réalités du monde. Et, deuxièmement, si je me fie à la
définition, est-ce qu'on peut reconnaître un succès collectif jusqu'à date au Québec? Bon, on va avoir nos longs
débats qui continuent sur le port des symboles religieux. Ça, ce n'est
pas notre débat d'aujourd'hui. Est-ce qu'on peut regarder d'où on est venu dans
notre système d'éducation?
Je peux
commencer par des réflexions. L'enfant de sept ans en deuxième année, à l'école
Crestview School du réseau public des
écoles protestantes, chaque année, comme juif non croyant, me levant, avec la
plupart de mes amis de la classe, quelque 35 dans le temps, les ratios
étaient différents, juifs comme moi, presque chacun des 35 qui chantaient Jésus m'aime. J'aime la mélodie, mais, en quelque part, ça a accroché. On est venu
de loin. L'école est déconfessionnalisée. La commission scolaire est déconfessionnalisée. Nous avons compris que
le Québec se modernisait et nous avons fait du progrès. Alors, est-ce
qu'on peut en constater?
Maintenant,
de faire la part des choses d'une motion : «Que l'Assemblée nationale
demande au gouvernement d'abolir le
cours d'éthique et culture religieuse.» Abolir. Je ne veux pas... J'ai la
tentation de tomber dans l'hyperbolie. Est-ce
qu'on dit ça en français? Hyperbole. Mais est-ce qu'on va... et je me permets
de caricaturer le geste, mais est-ce qu'on
va brûler les livres après? Abolition d'un cours. Et je vous invite de me dire
si la description sur le site du ministère de l'Éducation vous invite à
avoir peur d'un endoctrinement.
• (16 h 10) •
Bon, pour
vivre ensemble, je le cite, dans le Québec d'aujourd'hui — très menaçant, ça, comme départ :
«L'école québécoise a pour mission
d'instruire, de socialiser et de qualifier. Pour ce faire, elle doit notamment
ouvrir les horizons, développer les talents et donner à chaque individu
les outils nécessaires pour évoluer dans le monde en tant qu'adulte accompli, libre et responsable. Or, la société québécoise
change : les défis collectifs concernent autant les centres urbains
que les régions éloignées; les mentalités
évoluent au gré des influences multiples; les valeurs ou les convictions
s'affirment; les questions
se [multiples] sans cesse. L'école doit s'ajuster à cette transformation. C'est dans ce contexte que le programme Éthique et culture
religieuse est offert à tous les élèves du primaire et du secondaire.»
Deuxième volet, je cite toujours : «Le programme
Éthique et culture religieuse permettra à votre enfant :
«D'acquérir
ou de consolider, le cas échéant, la notion selon laquelle toutes les personnes
sont égales sur le plan des droits et de la dignité;
«D'apprendre à réfléchir de façon responsable;
«D'explorer, selon son âge, différentes
manifestations du patrimoine religieux québécois [présent] dans son environnement immédiat ou éloigné — là,
j'entends un gros complot des multiculturalistes, agents qui se cachent
derrière les bancs d'école;
«De s'épanouir dans une société où se côtoient
plusieurs valeurs et croyances.»
Et ça continue sur le volet éthique, et je cite
une autre fois : «Votre enfant apprend à :
«Réfléchir
avec rigueur sur [les] aspects de certaines réalités sociales et sur [les]
sujets tels que la justice, le bonheur, les lois et les règlements;
«Ainsi — je cite encore — il lui est de plus en plus facile de
rassembler ses idées et de les exprimer avec respect et conviction.»
Là, on a la
motion du Parti québécois, et je réaffirme, d'abolir ce cours-là. Et je me
demande si, bon, Mathieu Bock-Côté, ce matin, était inspiré par le Parti
québécois ou vice versa, mais est-ce que la motion est inspirée par ce que ce
chroniqueur propose?
«L'ECR — je cite — dans les faits, instrumentalise la culture
religieuse pour faire la promotion active du multiculturalisme au nom de la "diversité". Il entend pousser
les jeunes Québécois vers une forme de relativisme extrême, où ils devront accepter tous les symboles
religieux [...] identitaires, et, au premier rang, le voile islamique, du
simple hidjab jusqu'au niqab.» Et il conclut : «Pourquoi les jeunes
Québécois apprendraient-ils à l'école à détester leur peuple?» Wo! Wo! Wo!
Bon,
en tout cas, moi, avec tout respect au député... chef intérimaire de la
deuxième opposition et avec tout respect au ministre de l'Éducation, qui a l'air pas mal réceptif au propos, pas
aller jusqu'à l'abolition, le programme a à être révisé, on en convient. Y a-t-il
des choses à faire pour mieux refléter l'équilibre social ici, au Québec?
Est-ce qu'on doit accompagner nos
enseignantes et enseignants, tellement professionnels, pour qu'ils soient à la
taille de présenter ce cours comme il
faut? Oui, mais de là à abolir... Et qu'on remette les pendules à l'heure. Nous
sommes en train, fondamentalement, de
parler de notre confiance comme collectif ensemble. Est-ce qu'on a la
confiance, tout dans nos réalités fières et très particulières ici, au Québec, notre langue commune, le français, nos
valeurs collectives, l'égalité hommes-femmes, est-ce qu'on a la confiance d'éviter comme exemple à nos
enfants de s'ouvrir sur le monde avec un cours, oui, à réviser, mais un cours qui les invite à réfléchir sur les
réalités du monde ou est-ce qu'on veut abolir ça? Est-ce qu'on a besoin de se
fermer sur soi pour exprimer notre confiance dans nos belles réalités du
Québec?
Écoutez,
dans ma vie... Bon, dans le mandat précédent, j'ai eu l'honneur de représenter
notre ministre de l'Éducation à deux
reprises lors des congrès du CONFEMER, qui est l'instance de l'Organisation
internationale de la Francophonie pour
l'éducation. Et, comme État francophone, nous sommes fièrement présents. Et,
dans mes fonctions antérieures, j'ai eu
à représenter des commissions scolaires aux congrès partout au Canada, au
Québec et aux États-Unis, et j'ai été très fier, très fier de me faire dire souvent comment le monde était
impressionné par notre Québec, notre système d'éducation, qui misait sur ces nouveaux régimes pédagogiques,
qui ont eu leurs difficultés, mais qui misait sur la compétence, ainsi que la connaissance. Et c'est tout à fait pertinent à la discussion actuelle, c'est de miser
sur l'esprit critique, sur la curiosité
innée de nos enfants, sur l'innocence et la
confiance de nos enfants, et de miser sur les voeux de leurs parents que leurs
enfants soient formés pour le Québec de
demain. Rien de ce cours, dans ses objectifs, dans ses détails... oui, mon
collègue le député de Jean-Talon a
été au rendez-vous en tant que ministre pour la révision du programme. Mais,
dans ses principes fondamentaux, on
devrait avoir fiers et confiants comme société, confiants dans l'habileté de
nos enseignantes et enseignants, confiants
dans l'innocence, comme je dis, et l'intelligence innée de nos enfants de faire
la part des choses. Oui, de comprendre le
monde dans lequel on se situe, c'est à notre honneur. Alors, d'abolir ce cours
irait à l'encontre de toutes ces valeurs dont on tient cher. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci. Avant de céder la parole à
notre prochain intervenant, M. le député de Matane-Matapédia, est-ce que
vous avez pris connaissance de l'amendement pour la suite de notre débat?
M. Bérubé :
M. le Président, au nom de nos convictions, de notre engagement électoral et du
respect des gens qui ont voté pour leur engagement électoral, nous
refusons.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. Nous continuons notre débat. M. le
député de Beauce-Nord.
M. Luc
Provençal
M. Provençal :
Merci. Comme vous le savez, M. le Président, notre réseau scolaire se
caractérise par la laïcité puisque
nous sommes à la suite d'une époque où nos écoles étaient résolument de
confession religieuse. Il faut le rappeler parce que l'histoire est une mémoire
essentielle, tout comme la maîtrise de l'éthique et la connaissance des
religions sont également des matières
essentielles à la formation scolaire et personnelle d'un jeune. La diversité et
la liberté de conscience sont
d'autant plus des valeurs qui doivent toujours être mises de l'avant tout au
long du cursus qui accompagne nos futurs citoyens dans leur
développement interpersonnel.
Il
faut maintenir, dans le processus de formation générale et globale de nos
jeunes, une fenêtre d'opportunité pour leur
apprendre à réfléchir avec rigueur sur des aspects de certaines réalités
sociales et sur des sujets tels que la justice, le bonheur, les lois, les règlements, à se poser des
questions telles que : Quelles valeurs devraient me guider dans mes
relations en société? Qu'est-ce qui
caractérise un comportement acceptable et un comportement inacceptable? Comment
peut-on reconnaître ces
comportements? Il faut outiller, par une formation commune, nos jeunes pour
qu'il leur soit de plus en plus facile
de rassembler leurs idées et de les exprimer avec respect et conviction. C'est
un fondement de notre école québécoise.
À
des fins historiques, rappelons que la métamorphose de nos institutions remonte
aussi loin qu'aux années 1960, entre autres avec la publication du
rapport Parent, la création du ministère de l'Éducation et du Conseil
supérieur de l'éducation, la création des collèges d'enseignement
général et professionnel, l'instauration de la loi privée ou encore la Loi de l'Université du Québec. Il ne s'agit là
que d'une mince énumération des nombreux éléments qui façonnent les étapes du fondement de la société québécoise,
alors que l'on doit absolument prendre en considération que l'évolution des mentalités collectives va de pair avec notre
parcours historique. En effet, nous continuons à avoir pour objectif de réformer la laïcité de l'État québécois et des
institutions publiques tout en tenant compte du processus de laïcisation déjà
amorcé.
• (16 h 20) •
Fondamentalement,
l'esprit derrière cet exercice se destine à offrir aux enfants une avenue où
les valeurs et les principes
fondamentaux sont enseignés. Mis à part les vestiges religieux qui nous
préoccupent, nous oublions trop souvent de souligner que le tournant de
l'éducation au Québec se précise au cours des années 2000 justement avec
l'avènement éventuel du programme
dont il est question aujourd'hui. Au grand déplaisir de certains, la
Constitution du Canada octroie des
droits au Québec, dont le droit d'instaurer une organisation des écoles
primaires et secondaires sur une base linguistique plutôt que religieuse, et ce, depuis 1997. Cette
modification constitutionnelle faisait non seulement progresser le Québec
sur le plan éducationnel et social, mais
aussi sur le plan linguistique et du nationalisme, puisque c'est cette même
année que le gouvernement remplaçait
les commissions scolaires confessionnelles par des commissions scolaires
linguistiques. Finalement, ce n'est
qu'en l'an 2000 que nous complétons concrètement l'abolition des structures
confessionnelles, telles que le poste
de sous-ministre associé à la foi catholique et protestante, le service
scolaire d'animation pastorale ou encore le statut confessionnel des
écoles.
C'est un peu plus tard, en 2005, que
le gouvernement de l'époque présentait le projet de loi n° 95, aussi
appelé Loi modifiant diverses dispositions
législatives de nature confessionnelle dans le domaine de l'éducation.
L'adoption de cette loi instaurait, pour la rentrée scolaire 2008, la mise en
place d'un programme de formation commun d'éthique et de culture
religieuse. Plus précisément, la loi supprime la possibilité de choisir entre
l'enseignement moral, religieux, catholique
ou protestant et influence le droit des parents d'inculquer une éducation
religieuse ou morale à leurs enfants. Cette loi, qui instaurait la
création du cours d'éthique et culture religieuse, est aujourd'hui la raison
pour laquelle on s'en parle.
Dans
le cas qui nous intéresse, les règles sont déjà existantes et l'encadrement
nécessaire est déjà en place en vue d'assurer
que les enfants reçoivent un service adéquat. Concrètement, cela signifie que
nous devons aller plus loin dans nos
actions, tout en évitant de réanimer des tensions qui sont issues de débats qui
ne sont plus à l'ordre du jour depuis déjà plusieurs années.
Instauré depuis 2008,
le cours se scinde en deux volets distincts de formation en éthique et culture
religieuse tout en conservant une
spécialisation particulière. Ce jumelage des matières dans un même programme se
trouve à pallier en continuité aux
éléments qui se trouvaient malheureusement facultatifs selon les paramètres du
cursus précédant les changements de
2005. Quoi qu'il en soit, les points de rupture que le programme optionnel
pouvait constituer forment l'évolution ainsi que l'amélioration de
nouvelles notions nécessaires au développement global de l'individu.
Nous
nous attendons et souhaitons à ce que le personnel enseignant continue de
collaborer pleinement à la mise en oeuvre
de ce programme, et ce, malgré les exigences croissantes quant au niveau du
professionnalisme dont il faut faire preuve lorsqu'on enseigne un sujet
aussi délicat. Les valeurs de respect, de dignité de la personne s'imposent, et
les opinions émises sont toutes les
bienvenues, tant qu'elles sont en collégialité avec les orientations que nous
mettons de l'avant dans l'optique d'un bien commun et d'une réflexion
collective.
C'est pourquoi nous
sommes à l'écoute des préoccupations des intervenants, mais surtout des élèves
qui nous exhortent de faire des choix
intelligents qui se baseront sur des valeurs de respect, d'équité, de diversité
et de justice sociale. La moralité,
telle que notre gouvernement la conçoit, ne se limite pas à adopter un projet
de loi de manière moralisatrice. Nous
souhaitons exercer le pouvoir d'influence que la politique nous donne afin
d'accroître la compréhension des traditions religieuses et réduire les tensions sociales. Toutefois, il est
important de souligner que le gouvernement n'accompagne pas les élèves dans une quête spirituelle quelconque.
Le rôle du gouvernement se destine plutôt à assister les élèves dans un
processus d'intégration à une société pluraliste et démocratique.
L'aspect
éthique du cours d'éthique et culture religieuse est plus pertinent que jamais
dans le Québec moderne, car il
contribue au développement du sens moral de nos jeunes. Il est un outil clé
dans leur socialisation et la construction de leur tolérance. Un enseignant du cours d'ECR décrivait, dans Le Devoir
il y a quelques années, l'éventail de sujets qu'il abordait dans le cadre de son cours. Il disait commencer
l'année en parlant de tolérance, en donnant l'exemple de Nelson Mandela.
Suivaient ensuite l'intolérance et ses victimes, les gens discriminés ou tués
pour leur couleur, leur orientation
sexuelle, leur croyance religieuse. C'était l'occasion pour lui de parler de nazisme, forme la plus
extrême de xénophobie.
Venaient
ensuite les inégalités sociales, le manque de respect envers la nature, les
défis à confronter pour assurer l'avenir de l'humanité. La question du sens de
la vie, de la justice et de l'ambiguïté humaine, le dopage sportif, la tricherie, et autres, étaient également
au menu de ce professeur, qui a compris la portée qu'il pouvait donner à un
cours sur l'éthique qu'il appuyait
par la pensée d'Hubert Reeves, de Pierre Dansereau et de Michel Jordan. Son
cours d'ECR, il le traitait en
précurseur aux cours de philosophie que les jeunes ont au cégep, ce qui est
très intéressant quand on considère... le développement moral de
l'individu se met en marche très tôt dans sa vie.
Pour
reprendre la pensée de Jürgen Habermas, un des grands théoriciens de l'éthique
du XXe siècle, c'est vers l'âge de
sept ans que les enfants entrent dans ce qu'il appelle la période
conventionnelle, pendant laquelle s'effectue une intériorisation des
normes sociales régulant leur monde. C'est le moment où ils développent un sens
de la totalité des interactions tenues pour
légitimes dans un groupe social parce qu'elles émanent d'un ordre
institutionnel qui constitue l'axe
autour duquel les perspectives sociales tournent. Dans d'autres mots, c'est là
que se construit leur compréhension des
choses acceptables et inacceptables dans un groupe social donné, le moment où
ils apprennent à justifier leurs actions en se basant sur un contexte normatif existant. C'est donc là qu'ils
forgent leur propre idée des valeurs qui régulent la société québécoise. Cette période conventionnelle
se termine quand le jeune atteint ses 15 ans et qu'il entre dans la période
postconventionnelle pendant laquelle on le
juge mature pour prendre des décisions morales plus complexes, pendant laquelle
on s'attend à ce que son sens critique dépasse le simple respect des
conventions.
C'est
là le territoire du cours de philosophie, territoire qu'il faut bien préparer,
puisqu'un individu qui n'aurait pas été
doté des bases conventionnelles appropriées verrait sa perspective de l'éthique
en décalage avec celle que veut mettre en
place le Québec. Sans le respect de l'enseignement des enjeux éthiques et de la
manière normale dont ils doivent être traités,
on prend le risque d'affecter le développement du sens critique de nos jeunes.
En se gardant de faire la démonstration d'une éthique québécoise généralisée, on nuit potentiellement à leur
capacité de socialiser. J'en conclus que le cours d'ECR doit être maintenu dans le cursus de formation
générale de nos jeunes. Cependant, ce programme mérite d'être repensé,
révisé, réinventé, bonifié ou reconsidéré dans son contenu.
Je ne peux terminer
sans saluer le travail des enseignants de ce cours qui, au quotidien, amènent
nos jeunes à découvrir l'ensemble des cultures de notre société québécoise dans
une approche d'ouverture et de respect. Merci de votre attention.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci. Je cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke.
3 min 30 s.
Mme
Christine Labrie
Mme
Labrie : Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais faire un
constat. Le cours d'éthique et culture religieuse n'est pas parfait, ça a été mentionné souvent ici,
mais est-ce que ça veut dire qu'il faut l'abolir? Certainement pas, comme
on ne devrait pas non plus abolir la démocratie scolaire sous prétexte que la
participation est trop faible.
Vous savez,
M. le Président, moi, je pense qu'on peut améliorer ce qui fonctionne mal, et
même que c'est notre mandat ici de chercher des solutions ensemble. Ma
collègue, qui a elle-même enseigné le cours d'éthique et culture religieuse, a déjà démontré la pertinence des
objectifs de la formation de ce cours, qui, je le rappelle, sont la
reconnaissance de l'autre et la
recherche du bien commun, ce qui correspond tout à fait aux valeurs québécoises
et aux valeurs que devrait transmettre notre système d'éducation.
• (16 h 30) •
Moi, je veux
répondre au député de Matane-Matapédia, qui a fait allusion au rapport du
Conseil du statut de la femme. Le Conseil du statut de la femme a
recommandé une réforme du contenu pour que la présentation des récits religieux soit accompagnée d'une mise en contexte
critique, notamment en matière de sexisme. C'est une recommandation qui est très pertinente, et j'aimerais rappeler au
député de Matane-Matapédia que, dans ce même rapport, le Conseil du statut de la femme dénonçait aussi des éléments
sexistes dans le programme d'histoire. Est-ce que, selon lui, on devrait
le retirer du programme? Je ne pense pas que c'est son intention, du moins je
l'espère. Il faut plutôt prendre acte de ces
critiques-là et voir comment on peut y remédier. Et, dans ce cas-ci, les
critiques portaient sur du matériel
pédagogique et non sur les objectifs
du cours. C'est clairement la responsabilité du ministère de l'Éducation de s'assurer que le matériel
pédagogique est adéquat et qu'il est
constamment mis à jour, comme on le fait d'ailleurs pour le matériel utilisé en
histoire et dans toutes les autres matières.
Par ailleurs, un des problèmes principaux avec ce cours est que trop peu
d'enseignants sont formés pour le donner. Dans toute leur formation au baccalauréat en éducation au primaire, préscolaire, les enseignants ne
reçoivent qu'un ou deux cours sur
leur programme de quatre ans pour enseigner l'éthique et la
culture religieuse. Et, pour le secondaire, le programme spécialisé n'est
offert que dans quelques universités. Et les premiers diplômés sont sur le marché du travail depuis quelques années seulement,
ils ne sont certainement pas assez nombreux pour répondre à la demande.
Donc, moi,
j'ai une proposition à faire au ministre de l'Éducation, ce
serait d'envisager que le programme spécialisé soit aussi offert ailleurs au Québec et qu'on y forme des enseignants qui pourraient
enseigner à la fois au primaire et au secondaire
pour que le cours soit toujours donné par des spécialistes. C'est ce qu'on fait déjà
d'ailleurs pour l'anglais, la musique
et l'éducation physique, par exemple, donc pourquoi pas
pour l'éthique et la culture religieuse? Ça nous permettrait de nous assurer que le matériel choisi par les
enseignants est adéquat et que le contenu est enseigné avec toutes les nuances
nécessaires.
Vous savez, M. le Président, le cours d'éthique et de culture religieuse est un excellent véhicule
pour aborder avec les élèves des
enjeux comme l'égalité des sexes, qui inquiète mon collègue,
et pour permettre aux élèves de développer leur esprit critique. Moi, je suis
rassurée que le gouvernement ait annoncé son intention de l'améliorer et non
de l'abolir. Et ma formation aurait voté en faveur des amendements qui
ont été proposés si le Parti québécois avait accepté le dialogue. Je pense qu'on doit offrir, dès le primaire, un cours qui
permet aux enfants d'apprendre à réfléchir de manière critique sur le monde dans lequel ils vivent. On a
besoin d'un cours qui donne les outils aux jeunes pour apprendre à vivre
ensemble, et je dirais même qu'on en a
besoin plus que jamais. Je rappelle qu'on était unanimes, ce matin, à dénoncer
le racisme ici. Et d'ailleurs le fait que
très peu de personnes de cette Assemblée ont pu bénéficier de ce
cours-là explique peut-être les difficultés qu'on a ici à faire
fonctionner l'Assemblée nationale. Je ne vous cacherai pas que je suis très souvent déçue par les prises de position
idéologiques qui vont à l'encontre du bien commun, et je pense à des exemples
qui viennent de chaque côté de la Chambre. Des entraves au dialogue, on en voit
très souvent ici. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Merci, Mme la députée.
Je cède la parole à Mme la députée de Soulanges,
en vous rappelant qu'il reste 18 minutes au gouvernement.
Mme Marilyne Picard
Mme Picard : Merci beaucoup, M.
le Président. Intervenir sur le sujet aujourd'hui, c'est pour moi une belle occasion de démontrer que le cours d'éthique et
culture religieuse n'est pas qu'un cours de remplissage pour nos jeunes.
Ce n'est pas non plus, comme certains le prétendent, un lieu où nos enfants
sont endoctrinés.
Permettez-moi
de revenir un instant sur le grand objectif poursuivi par ce cours : préparer nos
enfants à vivre dans une société démocratique et diversifiée. En fait, c'est assez simple, on veut former des jeunes
lucides et critiques. Dans notre société, vous le savez, l'immigration est très présente.
Il est donc absolument nécessaire pour nos jeunes de connaître les grandes
religions du monde et les gens qui les pratiquent.
Mais le cours
d'éthique et culture religieuse, comme son nom le dit, ce n'est pas seulement
un endroit où on parle de religions,
c'est aussi un cours d'éthique, comme l'a mentionné la collègue.
On y apprend donc à mieux vivre en société, à traiter les autres avec respect, à
faire de meilleurs choix dans nos comportements, à acquérir des valeurs de
partage et d'entraide. Tout cela n'a rien à
voir avec les religions, ce sont des aspects de la vie en groupe qui sont
valables dans tous les milieux et dans toutes les cultures.
Le cours d'éthique
et culture religieuse, c'est tout ça, bien
sûr, mais, pour moi, M. le Président, c'est encore plus que ça.
Pour moi, c'est aussi une invitation pour les jeunes à développer leur
acceptation de la différence pas seulement
sur le plan des religions et de la culture,
mais aussi sur les particularités de chacun d'entre nous : l'apparence
physique, la façon
de s'exprimer ou bien un handicap, par
exemple. Grâce au cours d'éthique et
culture religieuse, les jeunes apprennent que la différence peut être une richesse si on la regarde avec les yeux
de l'acceptation, ils y développent leur jugement et leur sens critique, ils y apprennent que les
différences d'une personne lui accordent de la valeur en tant qu'être
humain. Quand on élargit ses horizons
et qu'on apprend à connaître la diversité sous toutes ses formes, on ne peut
pas faire autrement, on devient plus
tolérant, et je suis parfaitement convaincue qu'un cours comme celui-là peut
grandement aider en ce sens. On parle
beaucoup d'intimidation, de la lutte contre
l'intimidation. Voilà un cours qui ouvre les jeunes à se rendre compte
que nous sommes tous différents, et heureusement que nous le sommes.
M. le
Président, le programme d'éthique et culture religieuse n'est certainement pas
parfait. Il faut quand même souligner
l'importance de ce moment où nos enfants sont assis sur les bancs d'école et
qu'ils peuvent parler de différences entre
eux et avec leur enseignant ou enseignante,
parce que c'est bien de ça qu'on parle actuellement, de la différence, à
quel point, dans notre société pourtant moderne, nous avons encore de la
difficulté à l'accepter.
Si on
considère la définition même de l'identité, c'est l'ensemble des traits
physiques, personnels et culturels qui font qu'une personne est ce
qu'elle est, en d'autres termes, qui font qu'elle est différente d'une autre
personne. Notre identité est déterminée en
bonne partie par le type d'environnement dans lequel on grandit. Chaque être
humain est capable d'apprendre
n'importe quel langage ou se conformer à n'importe quel modèle culturel. Et
c'est en grandissant qu'on prend racine dans la société, qu'on développe
un ensemble de préférences, de croyances et de règles de conduite que nous
partageons largement avec le groupe auquel on appartient.
La nature
humaine a horreur du vide. Aucune personne ne peut vivre sans groupe de
référence. Nous imitons ceux que nous
admirons, et c'est à force d'être stimulés dans nos interactions quotidiennes
que nous adoptons des coutumes qui
finissent par nous rassembler. C'est pourquoi il est important d'apprendre à
nos enfants, sur les bancs d'école, que leur groupe de référence est une
construction. Et cette construction, bien que solide, doit être totalement
flexible pour accepter ceux qui ne sont pas
tout à fait pareils ou ceux même carrément très différents dans leur
environnement. Je dis «accepter», mais ce qu'il faut surtout, c'est
penser à les intégrer complètement.
Je vous dis
tout cela, M. le Président, parce que j'ai vécu, et je vis encore actuellement,
et je vivrai peut-être encore longtemps
cet énorme défi que représente l'acceptation des différences. Je milite pour
qu'on accueille la différence à bras ouverts
tous autant que nous sommes, et j'inclus les membres de l'Assemblée nationale
ainsi que l'ensemble des citoyens qui nous écoutent. Ceci fait partie de mon
ADN, et c'est pourquoi je vous parle depuis cette banquette du salon bleu.
C'est avec la volonté d'améliorer le sort de
mes enfants, de tous nos enfants, M. le Président, que je me suis lancée en
politique pour défendre les positions de la
Coalition avenir Québec. Je veux faire la différence pour ma petite fille,
Dylane, mais aussi pour tous les
autres petits et petites Dylane du Québec qui sont différents. Les enfants sont
les plus curieux et sans filtre.
J'entends souvent quelqu'un me dire : Pourquoi elle a un fauteuil?
Pourquoi elle ne parle pas? Pourquoi elle ne mange pas? Il est important de répondre aux curiosités des enfants.
Et je peux aussi vous dire que mon fils de neuf ans est arrivé à l'école un jour en me disant :
Maman, j'ai appris c'était quoi, Hanoukka, aujourd'hui. J'étais contente qu'il
ait cette connaissance, et je lui n'aurais peut-être pas appris à la
maison.
Faire la
différence pour qu'on accepte la différence, faire la différence pour qu'on
intègre la différence, faire la différence
pour qu'on l'aime, cette différence, parce que l'acceptation des différences,
M. le Président, c'est beaucoup plus
que la tolérance, c'est beaucoup plus que la simple connaissance des
différences, c'est vivre ensemble en harmonie et avec respect, empathie.
Sans rentrer
dans les débats sémantiques, je peux faire une différence entre ce qu'on
appelle le vivre-ensemble et vivre
ensemble, sans trait d'union, les deux mots, «vivre» et «ensemble». On partage
tous un quartier, une ville, une province,
un pays et une toute petite planète bleue. On doit s'accepter, sans égard à
notre apparence, notre origine ou nos croyances.
C'est pourquoi je crois en cette initiative pour nos enfants qui prend la
forme, actuellement, d'un programme d'éthique
et culture religieuse. Et, pour moi, ce n'est ni le nom du programme ni son
contenu à la virgule près qui m'importe. Ce qui compte vraiment, M. le Président, c'est d'en parler, de la
différence, à l'école, certainement, et à la maison, assurément. Merci.
• (16 h 40) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée.
Un autre intervenant? M. le député de Vachon.
M. Ian Lafrenière
M. Lafrenière :
Merci, M. le Président. Alors, je suis très heureux de me lever dans cette
Chambre, ici, aujourd'hui, pour la
première fois, afin de prendre part à un débat, d'autant plus que le sujet
d'aujourd'hui n'est pas de moindre importance
pour notre société. Au contraire, c'est un sujet qui m'interpelle beaucoup. En
effet, la proposition de notre collègue
de Matane, le chef de la deuxième opposition, qui propose d'abolir le cours d'éthique
et de culture religieuse, bien, ça
mérite une franche réflexion, une franche discussion. Certains peuvent se
demander — puis
j'en suis, en passant, M. le
Président : Est-ce que le contenu est à jour? Est-ce que le contenu est
adéquat? Donc, a priori, je suis d'accord avec le collègue de Matane, on doit revoir le contenu. C'est une question qui
est pertinente, et je suis content de pouvoir en discuter devant vous
aujourd'hui, M. le Président.
Je vais l'aborder, cette discussion-là,
aujourd'hui, M. le Président, en prenant en compte mes expériences personnelles et professionnelles, mon expérience
comme policier, comme communicateur, où j'ai passé une vingtaine d'années à travailler pour le Service de police de
la ville de Montréal, donc sur l'île de Montréal, une île qui compte plus de 80 communautés culturelles, mon expérience comme formateur pour
l'UNESCO, les Nations unies, mais surtout mon expérience comme député pour
la merveilleuse circonscription de Vachon et aussi mon expérience en tant que papa de
deux magnifiques
filles de neuf ans et 11 ans. C'est avec tout ce bagage-là que
j'aborde la discussion aujourd'hui parce
que
l'ensemble de mes expériences personnelles et professionnelles, comme c'est le cas de plusieurs
d'entre nous, bien, c'est mes expériences où j'ai dû aller à la
rencontre des autres, M. le Président.
Comme
je l'ai mentionné plus tôt, j'ai exercé le métier de policier pendant près de
26 ans et je peux vous dire que les relations humaines, les relations
entre les citoyens, les relations entre les gens de divers milieux, de diverses
cultures, c'est ça qui est au coeur
du travail des policiers terrain, des policiers de première ligne. C'est un
enjeu de cohabitation entre les citoyens, et ça, c'est de plusieurs
façons qu'ils sont différents.
Vous
savez, depuis plusieurs semaines, on parle beaucoup d'immigration dans cette Chambre. Au Québec, on en parle. Notre gouvernement a proposé une réforme du système pour mieux arrimer l'immigration avec les besoins
du marché du travail et donc mieux intégrer les gens qu'on accueille
ici, chez nous. Parce qu'au fond
l'essentiel dans tout ça, c'est quoi?
C'est qu'on devrait toujours... ce qui devrait toujours nous intéresser, M. le
Président, c'est le vivre-ensemble, c'est la cohabitation.
M.
le Président, si j'en reviens à notre discussion principale qui nous réunit
aujourd'hui, une des façons de mieux vivre
ensemble, c'est de connaître l'autre. Les gens ont souvent peur de l'inconnu,
c'est un réflexe qui est normal. Alors, il faut, comme société, faciliter les opportunités pour que les gens
puissent apprendre à se connaître davantage, apprendre à apprivoiser les
différences.
À ce sujet, dans leur
cours d'éthique et de culture religieuse, mes filles reçoivent de très belles
informations, notamment sur les Premières
Nations. Et je vous dirais que, personnellement, je trouve qu'au Québec... moi,
j'aime beaucoup l'histoire et je
trouve qu'on est dans un déficit de connaissances historiques. Dans leur cours,
mes filles apprennent aussi à mieux connaître les cultures, les valeurs
de plusieurs de leurs camarades de classe.
Et
je l'ai mentionné dès le début de mon intervention, est-ce qu'il y a des choses
à revoir dans cette formation, à repenser,
à mettre à jour? Certainement, M. le Président. Il y a une chose qui est
certaine : le savoir, la connaissance de l'autre, ça ne peut pas être
mauvais. Je vous dirais même, pour les émissions pour enfants... J'écoutais ma
collègue de Taschereau, ce matin, qui
me parlait de Passe-Partout. Moi, je vais oser vous parler d'une autre
émission que mes filles écoutent beaucoup, qui est Subito texto.
Et, suite à ces émissions-là, elles ont été en mesure de chanter Bonne fête
en arabe et de me parler du ramadan. Donc,
c'est des émissions que nos enfants écoutent, et, encore là, la connaissance de
l'autre, mais ça passe parfois par les émissions aussi.
M.
le Président, j'ai envie de vous donner un autre exemple tangible. Comme
policier, j'ai eu le privilège de servir la population pendant plusieurs
années et à Montréal, je l'ai dit plus tôt, ça, c'était dans... une île où il y
a plusieurs communautés culturelles.
Certaines communautés vivent plus de difficultés, et comme porte-parole du
SPVM, j'ai dû, à de nombreuses
reprises, gérer des situations délicates. Mes connaissances et surtout mes
informations sur chacun, ça m'a permis
de mieux informer les médias, la population et de choisir les bons mots pour ne
pas blesser les uns et les bons mots pour ne pas stigmatiser les autres.
Pour
éviter le profilage racial, M. le Président, pour la police de Montréal, nous
avons instauré une formation qui a été donnée à tous les employés afin
d'augmenter le niveau de connaissance de l'autre. La connaissance, la
découverte, la main tendue vers
l'autre, c'est comme ça qu'on peut concrètement régler des problèmes très
complexes, M. le Président. Mon
collègue de Matane a parlé hier de l'importance de la police dans la société.
Bien, justement, cette police doit être bien formée, elle doit être le reflet de la société, et, en ce sens, je
ne crois pas qu'il serait opportun ou à propos de couper dans la
formation de nos jeunes, puisque ces jeunes-là, ce sont nos adultes de demain,
M. le Président.
J'ai
également eu la chance, comme formateur pour les Nations unies, d'aller faire des
missions dans près d'une dizaine de
pays sur trois continents, donc plus de 26 formations, et mon travail
était de faire en sorte que les médias et les forces de l'ordre travaillent
mieux ensemble. Mon plan de cours était assez simple : j'essayais de faire
en sorte que les gens en connaissent plus sur le métier de l'autre. Et
d'ailleurs ce qui avait un grand succès, c'est... je demandais à des forces de
l'ordre de jouer le rôle de journalistes et à des journalistes de jouer le rôle
de forces de l'ordre. Et, quand je leur demandais, à la fin de la journée, ce qu'ils trouvaient difficile, c'est
exactement ce qu'ils reprochaient à l'autre. Alors, quand on vit un peu dans les souliers de
l'autre... et ce n'est pas une grande expression que j'ai inventée moi-même,
avant de le juger, il faut avoir
marché un mille dans ses souliers. Et je vous dirais, M. le Président, quand on
en apprend davantage sur l'autre, c'est plus facile de le comprendre.
Afin d'améliorer le
vivre-ensemble, afin d'assurer la paix sociale, il faut augmenter les
connaissances sur l'autre, M. le Président.
Oui, la formation doit être bonifiée, puis je le redis encore à mon collègue de
Matane, améliorée, mise à jour, et
merci à ma collègue, aussi, de Marguerite-Bourgeoys qui nous l'a bien mentionné tout
à l'heure. Cependant, je suis d'avis que ça serait une grande erreur de ne pas éduquer nos
jeunes sur la diversité que l'on retrouve dans la société dans laquelle ils évoluent. Je le
répète, le danger, c'est la peur de l'inconnu, M. le Président.
Pas
plus tard que cette semaine, puis on en a parlé, l'actualité nous montre que
nous avons encore du chemin à faire
comme société. Vous avez tous vu ce qui est sorti dans les
médias, ce jeune hockeyeur qui a été victime d'insultes racistes, des partisans s'en sont pris à sa
famille dans les estrades. Oui, en 2019, au Québec, c'est arrivé. Ce genre
d'incident est déplorable, et malheureusement ça se fait encore. Et je regardais ces déclarations dans les médias,
et, M. le Président, mon Québec avait mal ce matin. Je ne pouvais pas croire
qu'on était encore comme ça, que des gens s'en prennent même à sa famille. Quand je vous dis ça, ce n'est pas le
député qui vous parle, ce n'est pas l'ex-policier, c'est un père de famille,
et ça m'interpelle. Je ne veux pas que nos
enfants, nos jeunes grandissent dans une société où les gens ont peur
de l'autre, M. le Président. Je ne veux pas que mes filles grandissent dans une société
où les différentes communautés évoluent en parallèle. Au contraire, j'aimerais les voir vivre dans un Québec
où les gens font preuve d'ouverture, où les gens n'ont pas de difficulté
à s'intégrer.
On
peut se questionner sur le comment transmettre ces valeurs
d'ouverture à nos enfants. On peut se questionner sur
ce qui doit être transmis, de quelle façon ça devrait être fait. On peut se questionner
sur ce qui devrait être appris à l'école.
Mais, M. le Président, jamais on ne devrait mettre en doute l'importance de
transmettre ces valeurs fondamentales à nos
enfants. La connaissance de l'autre, ça évite d'avoir des préjugés, puis
ça fait de nous de meilleurs citoyens, et ça aide à maintenir la paix sociale, M.
le Président. Nos jeunes doivent être
plus connaissants, mieux renseignés afin d'avoir des citoyens, demain,
qui seront plus critiques.
Et d'ailleurs tout à l'heure je vous parlais de
notre jeune hockeyeur qui a été ciblé, et j'ai lu certaines de ses déclarations. Je vais vous en citer quelques-unes, M. le
Président, quand il dit : «Les
gens de ma famille n'étaient plus en
sécurité dans les estrades, et j'ai pu le sentir sur la glace.» Ça, c'est un
hockeyeur qui nous dit ça, un bagarreur en plus. «On est en 2019, il
faut que les gens acceptent la différence, et c'est juste déplorable, ce qui
s'est passé.» Mais ça, M. le Président, c'est arrivé ici en 2019.
Et vous allez
me permettre, M. le Président, étant
donné qu'il est question
d'une formation avec un volet éthique, je me permets de souligner que
cette formation est importante pour nos jeunes, mais il en va de même pour les parlementaires aussi, M. le Président. Je prends pour exemple le débat d'hier dans
cette Chambre sur le projet de loi
n° 1. Nous avons assisté hier, M. le Président, à un autre bel épisode des Beaux malaises ici, dans cette
salle. Hier, le mauvais théâtre d'été était encore en place. Et, pour
les gens qui nous écoutent qui n'ont pas eu le bonheur de voir ça hier, les collègues
de l'opposition ont décidé d'utiliser ma circonscription, de me cibler à plusieurs reprises. Et, M. le Président, je dois vous avouer une chose, je suis coupable parce que
j'ai même rigolé, j'ai même trouvé ça drôle au début. Je l'avoue, je ne suis pas fier de ça, mais pas du tout. Ça
m'a amusé sur le coup, j'ai même souri. Et même, pendant un bout de temps,
je me suis dit : Merci à l'opposition, ils m'ont aidé à remplir mon
mandat. J'avais promis aux gens de Vachon qu'on parlerait souvent de ma circonscription,
alors hier, c'était un très beau placement publicitaire. Je vous en remercie.
Mais, une
fois que ça, c'est dit et que je suis revenu chez moi, je me suis rendu compte
que d'avoir gardé le silence hier,
j'avais encouragé cette mascarade-là hier. Alors, en cette journée aujourd'hui qui est une journée spéciale, c'est la journée de sensibilisation à l'intimidation,
je rappelle à mes distingués collègues de l'opposition que ce n'est pas ça,
faire de la politique autrement. Je
pense qu'on devrait monter notre débat, notre discours d'un niveau pour éviter
ces dérives-là. Alors, je pense qu'on
pourrait faire une petite pensée, on pourrait faire une introspection sur le
sujet. Et je propose à mes distingués
collègues aussi des sujets de lecture. Je rappellerais que la commission
Chamberland a existé, qu'il existe de beaux livres, il existe aussi des
extraits sur le Web, et je les invite à aller l'écouter.
Vous savez,
M. le Président, la devise Je me souviens ne devrait pas se retrouver
uniquement sur nos plaques de véhicules, on devrait aussi s'en rappeler
à tous les jours. On a le devoir de mémoire. M. le Président, je me souviens.
• (16 h 50) •
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci, M. le député de Vachon.
Je cède maintenant la parole à M. le chef du
deuxième groupe d'opposition pour sa réplique de 10 minutes.
M. Pascal Bérubé
(réplique)
M. Bérubé : Merci,
M. le Président. Ce à quoi on est
conviés maintenant, c'est un test de cohérence en matière de laïcité. M. le
Président, ma motion s'adresse essentiellement au gouvernement. Je n'entretiens pas beaucoup d'espoir sur la capacité du Parti libéral du Québec et de Québec solidaire d'avancer davantage sur
la nécessaire laïcité et les moyens
pour y parvenir. Je m'adresse essentiellement au gouvernement du Québec pour
lui dire qu'il y a là une opportunité exceptionnelle.
D'abord, une volonté politique exprimée du gouvernement et de ma
formation politique pour régler cette question durant cette session
parlementaire.
D'abord, la
question d'une loi sur le port des signes religieux chez les personnes en
autorité. Je réitère notre volonté de
collaborer et de contribuer à adopter la meilleure pièce législative possible.
J'indique également que c'est l'occasion d'aborder l'enjeu de la laïcité de façon plus large,
parce que cette question-là est abordée au quotidien dans
toutes les écoles du Québec, au primaire et au secondaire.
J'indique que
l'enseignement du cours Éthique et culture religieuse cause de nombreux
problèmes, essentiellement dans sa partie culture religieuse. Alors, tout ce
qu'on a évoqué sur la nécessité de l'éthique, j'en suis, mais je pense qu'on
doit abolir ce cours pour le refonder sur de nouvelles bases.
Alors, je
suis d'accord avec le côté éthique, tout ce qui a été dit. Sur le côté culture
religieuse, j'ai trouvé qu'on a occulté beaucoup de choses. D'abord, des
dérives importantes dans le matériel scolaire. Qui a dénoncé ça ici, là? Des chrétiens en soutane et grosse croix, des
musulmanes portant le voile, des Autochtones avec des plumes sur la tête, des
questions comme «quelle est ta religion?», on demande la religion de tes
amis, des questions inquisitoires, à la limite inconstitutionnelles, les
enfants appelés à dévoiler leur religion et la façon dont ils la pratiquent,
régime alimentaire, prière, circoncision, ce qui constitue une intrusion dans
l'intimité des familles.
Comment ignorer en particulier l'inquiétude
formulée par les parents musulmans à travers de nombreux témoignages, selon qui ce cours exerce une
pression sur leurs enfants en les présentant... une version fondamentaliste de
l'islam et le voilement des femmes
musulmanes comme une norme? Ça, c'est ce qu'on retrouve dans les manuels. Qui a
dénoncé ça tout à l'heure? Il faut croire
qu'à bien des égards le discours que j'ai entendu de certaines formations
politiques, Justin Trudeau aurait pu le prononcer de ce côté-ci de la
Chambre, excluant le Parti québécois, mot pour mot.
Aucune place
pour les non-croyants. Il y a des gens, au Québec, qui sont non-croyants,
qui sont athées, qui sont agnostiques.
Aucune place pour ces personnes-là dans le programme. Aucune réelle critique
des religions. Ah non! Ça, c'est suspect. On ne peut pas critiquer les
religions, on est des intolérants. Ça fait partie également
de l'essentiel de ce cours. Manque de formation des enseignants, ils
nous le disent eux-mêmes, manque de formation.
Tous
ces enjeux-là concourent pour arriver à une conclusion, cette volonté politique
manifeste du Parti libéral, en
2008, d'instaurer un cours qui, en plus,
fait l'apologie d'une vision qui s'appelle le multiculturalisme canadien à
travers l'endroit le plus vulnérable,
les cours de classe au primaire, s'applique... Je ne suis pas surpris du Parti libéral, mais surpris de la Coalition avenir Québec. Qu'est-ce
que le ministre omet de dire? De 2012
jusqu'au 1er octobre 2018, leur position, c'était l'abolition du programme au primaire, mais ce n'est plus le cas. Alors,
toutes les personnes qui ont cru qu'ils étaient sincères se retrouvent bien déçues de l'abandon d'un autre engagement
électoral, un autre, ça s'accumule, mais il n'y a pas de conséquences.
On trouve un autre argumentaire, on trouve des vertus qu'on n'a jamais trouvées
avant, on écrit des lignes pour les députés, qu'ils ont lues, auxquelles
ils croient à moitié.
L'engagement
de la Coalition avenir Québec d'abolition, c'est le même que le nôtre. Il y a
une différence : il y a une cohérence puis une conviction profonde qu'on a
depuis 2009, qu'on a réaffirmé à maintes fois en Chambre à travers des questions, à travers des motions, à travers
des propositions. Cet intérêt soudain de la Coalition avenir Québec pour
ce cours-là est très particulier. Il tient essentiellement à l'expérience personnelle du ministre. Il l'a exprimé en toute candeur : il
a aimé ça, lui, il trouve ça correct. Mais moi, je ne trouve pas ça correct.
Quand le Conseil du statut de la femme nous indique qu'il y a des dérives quant à la
représentation de l'égalité entre les
femmes et les hommes, c'est préoccupant. Est-ce qu'on devrait s'y attarder? Bien sûr. Alors, on peut repartir
ce cours sur d'autres bases en conservant
les éléments sur le vivre-ensemble, sur l'éthique, sur la participation
citoyenne, qui sont importants. Mais,
sur la place de la religion à l'école de cette façon-là, non. En tout cas, pas
au Parti québécois. C'est incroyable.
Le ministre, là, je le connais depuis près de 25
ans. On a milité ensemble dans le mouvement étudiant, au Parti québécois, puis maintenant on se voit à
l'Assemblée nationale, d'accord? Il est toujours disponible. Il est tellement
content de nous dire qu'il est ministre de
l'Éducation, vous ne pouvez pas savoir, et il nous le répète de toutes les façons possibles,
et il a quelque chose à dire sur absolument tout. Quand il
indique que : Oui, oui, on y avait pensé, je n'en crois pas un mot, M. le Président. N'eût été
notre intervention d'hier, on
n'aurait pas appris la volonté soudaine du premier ministre de réformer le programme et d'abandonner sa
promesse, le fait échéant, puis du ministre de dire : Effectivement, il
faudrait changer ça. Il n'y avait pas
de notes d'écrites dans son cahier, le ministre, avant que je n'en parle hier.
Je suis sûr de ce que j'annonce. Je le dis de mon siège, M. le
Président, je suis convaincu de ça.
Alors, est-ce
qu'il dénonce ce qu'on retrouve dans le programme? Plus ou moins. Ce qu'il
veut... Il a été très ferme pour dire
aux gens : Votez pour nous, on est pour ça. Mais, maintenant qu'ils sont
élus, ils ont changé bien des affaires. D'ailleurs, ce n'est pas la première. Aujourd'hui, là, sur les
trop-perçus d'Hydro-Québec, c'en est un autre, puis ça a l'air qu'il y
en a un autre qui s'en vient demain. Ça s'accumule.
Mais moi, je crois à la cohérence. Si on est
sérieux dans ce qu'on entreprend, on va aborder toutes ces questions-là. On va collaborer au projet de loi
sur la laïcité. Mais on dit au gouvernement : Abordez cette question qui
touche les enfants, elle est importante.
C'est un test de cohérence. Si on réalise que ce gouvernement n'est pas prêt à
aborder cette question-là, il se
retrouvera seul, au bout de la session parlementaire, à essayer de nous faire
adhérer à ses principes, et je ne pense pas que c'est dans son intérêt.
Le gouvernement se plaît aussi de nous rappeler
sa majorité parlementaire, 75 sièges. Je lui réitère qu'il est le gouvernement élu majoritaire avec le moins
d'appuis de l'histoire contemporaine du Québec. Ça invite à l'humilité,
à l'ouverture et au partage.
Tout à l'heure, j'ai été interpelé de tous côtés par une coalition spontanée qui veut maintenir ce cours : Coalition avenir Québec, Parti libéral et Québec solidaire.
Puis on m'a interpelé de toutes sortes de façons : Est-ce que le Parti québécois réalise ce qu'il dit? C'est à l'encontre
de principes, il ne faut pas stigmatiser. Je veux bien dire, très humblement,
en me tournant vers la députée de
Rouyn-Noranda—Témiscamingue :
Je n'ai pas de leçons à recevoir de stigmatisation. Je croyais qu'elle aurait utilisé son temps
peut-être, peut-être pour revenir sur ses propos malheureux qui stigmatisent
les Sino-Québécois — ils sont 100 000 au Québec. Elle a
proposé des propos qui, quant à moi, portaient justement à la
stigmatisation d'une communauté. Je n'ai pas entendu d'excuses là-dessus. C'est
son choix. Et je n'ai pas de leçons à recevoir
là-dessus, d'accord? Le Parti québécois est cohérent sur ces enjeux-là, il
choisit de maintenir ses convictions. C'est
comme ça qu'on fonctionne, nous, et on pense qu'on a là un élément essentiel
sur lequel il faut intervenir au nom de la liberté de conscience des
enfants et des parents. C'est important de le faire.
Puis on m'a
lancé un autre défi, on m'a dit : Ah! mais il faudrait mettre fin au
financement des écoles privées. M. le
Président, ça tombe drôlement bien, en ce qui nous concerne, parce qu'une de
mes convictions les plus profondes en
politique, personnelle, je l'ai déjà dit puis je vais le révéler à nouveau, en
ce qui me concerne personnellement — ça n'engage
pas ma formation politique — si c'était juste de moi, pas un sou n'irait
dans les écoles privées, d'accord, comme au Nouveau-Brunswick, comme en Ontario, parce qu'il n'y a pas de
véritable choix. Il n'y en a pas, d'écoles privées dans ma région, et tout le monde paie pour ça. Et je
suis fils d'enseignants du réseau public, formé moi-même en enseignement,
cette conviction-là, je la porte personnellement depuis des années et,
lorsqu'on a des débats là-dessus, c'est ça que j'exprime. Alors, la Chambre est au courant, puis les gens de ma
circonscription aussi, c'est une de mes convictions les plus profondes.
Alors, il va
falloir trouver autre chose pour nier cette nécessité d'intervenir pour
protéger les enfants d'une vision établie
par des idéologues multiculturalistes qui implantent au Québec, dans les
programmes scolaires, dans les classes, auprès des enfants, une vision qui tend à banaliser le vivre-ensemble, à
stéréotyper des religions, à faire en sorte d'avoir une vision passéiste de ce que représente la
société québécoise, à nier la nécessité de critiquer, même, les religions. Non,
ça suffit. Après 11 ans, le Parti québécois, je réalise, sera le seul
parti à souhaiter l'abolition de ce programme et aura été cohérent jusqu'au bout. Et je regrette
puissamment, pour les gens qui ont appuyé cette formation politique,
qu'aujourd'hui ils réalisent bien tristement qu'ils ont abandonné leur engagement
électoral et qu'ils se rallient à ceux qui veulent le maintien de ce programme. M. le Président, c'est triste, mais moi, je suis heureux d'être debout et cohérent comme je l'étais avant l'élection, pendant l'élection, et encore
maintenant avec mes collègues du Parti québécois. Quand on va se lever,
on saura que nous sommes les seuls qui auront été cohérents jusqu'au bout, M.
le Président.
• (17 heures) •
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, M. le député.
Je
vais mettre maintenant aux voix la motion de M. le chef du deuxième groupe
d'opposition, qui se lit comme suit :
«Que l'Assemblée
nationale demande au gouvernement d'abolir le cours d'éthique et [de] culture
religieuse.»
Cette motion est-elle
adoptée? M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M. Ouellet :
On demande le vote par appel nominal, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Schneeberger :
M. le Président, je demanderais de reporter le vote demain, jeudi, aux affaires
courantes.
Une voix :
...
Le
Vice-Président (M. Picard) : Non, non, on a demandé le vote nominal.
Là, on demande le report du vote, tout simplement. C'est correct, là.
Parce que, la demande du député de René-Lévesque, on aurait pu exécuter le vote
immédiatement. C'est la prérogative du gouvernement de demander le report.
Vote
reporté
Donc, alors,
conformément à la demande du leader du gouvernement, le vote sur la motion de M.
le chef du deuxième groupe d'opposition sera tenu à la période des affaires
courantes de demain.
M. le leader du
gouvernement.
M.
Schneeberger :
Oui, M. le Président. Alors, je vous demande d'appeler l'article 1 du
feuilleton.
Projet
de loi n° 1
Reprise
du débat sur l'adoption du principe
Le
Vice-Président (M. Picard) : À l'article 1 du feuilleton,
l'Assemblée reprend le débat, ajourné au cours de la présente séance, sur la motion de Mme la ministre
de la Sécurité publique proposant l'adoption du principe du projet de loi n° 1, Loi modifiant les règles encadrant
la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption,
du directeur général de la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites
criminelles.
Je
vais suspendre quelques secondes pour permettre à la deuxième vice-présidente
de rendre sa décision sur la demande de motion de scission.
(Suspension de la séance à
17 h 2)
(Reprise à 17 h 5)
Décision de la présidence
sur la recevabilité de la motion de scission
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Dans le contexte du débat sur l'adoption de principe du projet de loi n° 1,
je vais maintenant rendre ma décision
sur la recevabilité de la motion de scission présentée par le député de
Jacques-Cartier.
Selon
le leader de l'opposition officielle, cette motion de scission divise le projet de loi en deux parties, soit une première qui concerne le système
policier et une seconde qui concerne le système judiciaire.
En
se basant sur les critères établis par la jurisprudence, il rappelle que, pour juger la recevabilité d'une motion
de scission, la présidence doit examiner les
notes explicatives et le contenu du projet de loi. Il souligne également qu'en
le faisant la présidence ne doit pas tenir compte de l'intention de l'auteur du
projet de loi.
Selon
le leader de l'opposition officielle, tant les notes explicatives que les
différentes sections du projet de loi démontraient qu'il contient trois
principes distincts, soit un principe par organisme visé par le projet de loi.
Il
fait valoir que, dans les organismes visés par le projet de loi, ils ne peuvent
être considérés comme de simples modalités, et ce, même s'ils pourraient
être regroupés sous un même thème.
Il
allègue finalement que, puisque la motion de scission remplit tous les autres
critères de recevabilité d'une telle motion, elle doit être déclarée
recevable.
Pour
sa part, le leader adjoint du gouvernement affirme que le projet de loi ne
contient qu'un seul et même principe, soit
l'intégrité, la neutralité et la transparence des trois institutions. Pour
cette raison, il est d'avis que le projet de loi ne peut être scindé.
Je remercie les leaders pour leurs
arguments, dont j'ai pris connaissance pour l'analyse de la recevabilité de la
motion.
Je rappelle d'abord que la jurisprudence
parlementaire a plusieurs fois reconnu que, pour qu'une motion de scission soit déclarée recevable, un projet de loi
doit comporter plus d'un principe. De plus, chaque projet de loi résultant
de la scission doit être cohérent, complet et pouvoir vivre indépendamment l'un
de l'autre.
La présidence
a aussi mentionné à plusieurs occasions que l'analyse de la recevabilité d'une
motion de scission ne peut se baser
sur l'objectif du projet de loi. Il faut plutôt en considérer leurs
dispositions pour déterminer s'il contient ou non plus d'un principe.
À la lumière
de ces critères, la présidence a pris connaissance du projet de loi afin de
déterminer s'il contient plus d'un
principe. Je dois maintenant décider s'il peut être scindé de la manière prévue
dans la motion de scission présentée par le député de Jacques-Cartier.
Après lecture
des dispositions du projet de loi et analyse, la présidence constate la
présence de plus d'un principe dans le projet de loi.
En effet, comme le mentionne la jurisprudence parlementaire, ce n'est pas parce que des principes peuvent
être regroupés sous un même thème qu'ils doivent être considérés comme
simples modalités.
Une fois que
l'on constate qu'un projet de loi contient plusieurs principes, il reste à déterminer si la manière
dont les articles sont répartis dans
les différents projets de loi résultant de la scission en fait des projets de loi distincts, cohérents en eux-mêmes, et peuvent être considérés de
manière autonome.
La motion de
scission propose de scinder le projet
de loi en deux, à savoir un premier projet de loi concernant le Commissaire à
la lutte contre la corruption et le directeur
général de la Sûreté du Québec et un second qui concerne le Directeur des poursuites
criminelles et pénales.
Je constate
que les deux projets de loi qui résulteraient de la scission sont cohérents,
complets et pourraient vivre indépendamment l'un de l'autre, comme le
prévoit la jurisprudence.
Comme l'a
mentionné le leader de l'opposition
officielle, il est vrai que les
articles 13 et 16 du projet de
loi se retrouveraient dans les deux projets
de loi issus de la scission. Tel que
l'a établi la jurisprudence, cela n'a toutefois pas pour effet de rendre la motion irrecevable,
puisque ces articles concernent des modalités compatibles avec les projets de loi qui se trouvent dans chacune
des parties scindées.
Considérant
ce qui précède, je viens donc à la conclusion que la motion de scission, telle
que présentée, respecte les critères
énoncés par la jurisprudence. Je déclare donc la motion de scission présentée
par le député de Jacques-Cartier
recevable.
En vertu de
l'article 241 du règlement, cette motion fait donc l'objet d'un débat restreint
de deux heures. Je vous informe que
la répartition du temps de parole pour ce débat restreint s'effectuera comme
suit : 59 min 15 s sont allouées au groupe
parlementaire formant le gouvernement,
35 min 4 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle,
12 min 6 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition,
12 min 6 s sont allouées au troisième groupe d'opposition et
1 min 30 s sont allouées au député indépendant. Dans le cadre de
ce débat, le temps non utilisé par le député indépendant ou par l'un des
groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon
les proportions établies précédemment. Mis à
part les consignes mentionnées précédemment, les interventions ne seront pas
soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle au député indépendant
que, s'il souhaite intervenir au cours de ce débat, il a 10 minutes
à partir de maintenant pour en aviser la présidence.
Débat sur la motion de scission
Je cède maintenant
la parole à un député... à Mme la
ministre de la Sécurité publique.
Madame, la parole est à vous.
Mme Geneviève Guilbault
Mme
Guilbault : Oui, merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente. Alors, je prends note, évidemment, de votre décision, j'en prends acte aussi. Nous en prenons tous
acte, d'ailleurs. Et, bien sûr, je la respecte. Vous l'avez étayée notamment
en vous basant sur les critères, les articles qui sont prévus, la jurisprudence évoquée par les collègues à l'origine de... qui ont motivé,
finalement, cette motion qui a été déposée. Alors donc, je respecte votre
décision.
• (17 h 10) •
Évidemment,
de notre côté, nous sommes en désaccord avec les arguments avancés pour
justifier cette motion qui a été
déposée par le collègue de Jacques-Cartier. Il a toujours été très clair pour nous que ce projet de loi ne contient qu'un seul
principe, qui est celui d'assurer la neutralité, la transparence, l'indépendance des processus de nomination et de destitution de trois postes névralgiques,
dont j'ai déjà abondamment parlé, d'ailleurs : le directeur
général de la Sûreté du Québec, le commissaire de l'Unité permanente anticorruption, le Directeur des poursuites
criminelles et pénales. Et donc,
pour nous... Et ajoutons l'enjeu d'harmonisation, qui est en filigrane partout
dans ce projet de loi là. On a eu ce souci d'harmonisation
à la fois dans le processus de nomination et de destitution de ces trois
postes-là, et ce souci d'harmonisation, à notre sens, ajoute à l'unicité
du principe qui est fondateur de ce projet de loi.
Alors, tout
en respectant la décision que vous venez de rendre, je me devais de faire cette
précision, du moins ce commentaire à
l'égard du fait que nous maintenons le principe selon lequel il n'y a qu'un
objectif derrière ce projet de loi. Bien
sûr, bon, on parle de trois postes distincts, mais par contre, comme je le
disais, que ce soit dans la nomination ou dans la destitution, on sent vraiment qu'il y a une harmonisation et
qu'il y a une communauté dans les intentions qui touchent les trois
postes qui sont concernés.
Et,
vous savez, Mme la Présidente, encore une fois, en tout respect de cette
décision et en tout respect des collègues qui sont ici, je vous dirais
que je déplore les motivations qui sont peut-être aussi à l'origine du dépôt de
cette motion, c'est-à-dire que... Vous
savez, le député de La Pinière l'a dit hier lui-même, c'est un projet de
loi qui a valeur de symbole, c'est le projet de loi n° 1 déposé par
notre gouvernement. Ce n'est pas un hasard s'il porte sur la nomination aux deux tiers de trois postes névralgiques pour
l'administration publique. C'est un projet de loi qui, entre autres, a pour
objectif, outre ce qu'on a déjà
énoncé, de cristalliser le rôle des députés de l'Assemblée nationale dans le
processus de nomination et de
destitution de trois institutions policières et judiciaires très importantes
dans l'administration publique. C'est un projet de loi qui, à notre sens, devrait rallier l'adhésion,
la collaboration de tous les collègues en ce qu'il, justement, leur confère
un rôle accru dans ce processus de
nomination et de destitution de trois postes importants de l'administration
publique.
Combien de
fois avons-nous dit, Mme la Présidente — vous étiez d'ailleurs des nôtres — dans les dernières années, qu'il est crucial de rétablir la confiance du
public à l'endroit de ces trois postes-là? Et une des façons évidentes pour
nous de le faire était de modifier le
mode de nomination de ces trois personnes-là, de ces trois dirigeants-là
d'organisations importantes au Québec.
Aussitôt arrivés au gouvernement, que
faisons-nous? Le 29 novembre... On a été assermentés le 18 octobre comme gouvernement. Le 29 novembre, je
déposais le projet de loi n° 1, qui a valeur de symbole, comme on l'a dit,
et qui porte sur la réforme de ce
fameux processus de nomination des trois personnes. Alors donc, nous joignions
l'action aux intentions. Nous
faisions un pas important vers cette conquête, cette reconquête de la confiance
du public en nos institutions policières et judiciaires.
Et, pour
avoir discuté avec certains collègues ici, pour avoir eu toutes sortes de
conversations, à gauche, à droite, là-dessus,
j'avais l'impression qu'on avait vraiment, en toute collégialité, une adhésion
généralisée ici, dans la Chambre, sur
la pertinence et, je dirais même, la noblesse des intentions qui sont
sous-jacentes à ce projet de loi. Or, on s'aperçoit, depuis hier, depuis qu'on a amorcé l'adoption de principe, l'étape importante
qu'est l'adoption de principe du projet de loi n° 1, on s'aperçoit, à travers, je dirais,
l'abondance et la diversité des interventions des collègues de la première opposition, que... on
sent une volonté, je dirais, d'exploiter...
Une voix : ...
Mme Guilbault : ...de l'opposition officielle, on sent une volonté d'exploiter
au maximum les outils qui leur permettent de retarder l'adoption de principe de
ce projet de loi là...
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
...
M. Tanguay :
Très clairement, la ministre déplore les motivations en parlant de
notre action, nous impute des motifs
de retarder alors qu'on fait juste notre travail de députés. Si vous me
reconnaissez la parole, c'est parce que j'ai le droit de parler, puis on va parler. Alors, je vous demande, s'il vous
plaît, de la rappeler à l'ordre, en vertu de l'article 35.6°.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Mme la ministre... M. le leader adjoint du gouvernement, allez-y.
M. Schneeberger :
Mme la Présidente, la ministre ne fait juste énumérer ce qui se passe
actuellement, alors c'est tout à fait...
L'opposition officielle a tout à fait le droit de procéder ainsi, mais c'est la
conséquence, qu'on va... le projet de loi sera retardé.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader adjoint.
Écoutez, nous savons tous que nous ne devons pas imputer des motifs, alors je vous demanderais à tous votre
collaboration et de faire attention à ne pas imputer des motifs aux
autres partis.
Alors, Mme la ministre, je vous redonne la
parole.
• (17 h 20) •
Mme Guilbault : Merci, Mme la Présidente. Alors, loin de moi
l'idée d'imputer des motifs, je vais reformuler. Mais je ne peux pas m'empêcher de constater, effectivement, l'abondance
et la diversité des interventions depuis hier. Et je ne crois pas me tromper en disant qu'un des
députés de l'opposition officielle a même amorcé son intervention en parlant,
peut-être par inadvertance, du projet de loi n° 2, ce qui me fait demander...
me fait m'interroger sur le sérieux et la concentration
des collègues quand il s'agit de débattre de l'adoption de principe du projet
de loi n° 1. Parce que, Mme la Présidente,
je sais qu'on dispose des outils parlementaires qui sont les nôtres, que les gens
doivent faire leur travail, et c'est
tout à fait à leur honneur de le faire, d'avoir resté jusqu'à 21 h 30
hier soir pour intervenir puis partager leurs réflexions. La question n'est pas là. Mais, quand je discute
avec d'autres collègues et quand je regarde la façon générale dont ça se passe, je vous dirais que, quand on a eu les
consultations particulières, je ne pouvais pas présumer de la suite, mais,
quand je regarde la façon dont ça se
passe depuis qu'on a amorcé cette étape importante qu'est l'adoption de
principe, j'ai la malheureuse
impression qu'on n'est peut-être pas tous sur la même longueur d'onde et qu'on
ne souhaite pas tous le meilleur pour
cette réforme, nécessaire à notre sens, pour le mode de nomination aux deux
tiers de ces trois postes, encore une fois, névralgiques pour
l'administration publique.
Et,
sans présumer, encore là, des intentions de qui que ce soit, mais j'ai eu des
indices qui me portent à croire que la
deuxième opposition va aller dans le sens du principe, va voter en faveur du
principe du projet de loi n° 1. Je ne présumerai pas de la troisième opposition, mais
les indices, à date, me portent à croire qu'ils sont, eux aussi, favorables
du moins à l'adoption de principe du projet
de loi n° 1. Parce que rappelons que, par la suite, il y aura l'étude
détaillée. Donc, laissons-nous au
moins le temps, la chance d'aller vers l'étude détaillée, et après on aura des
discussions sur place, peut-être, sur
des questions d'amendement, des questions d'articles précis. Mais, si déjà à l'adoption
de principe on se bute à une certaine
opiniâtreté de la part d'un des groupes parlementaires — je n'étais pas certaine si le terme
«opiniâtreté» est accepté, tant
mieux — donc, si
on se bute déjà à une certaine opiniâtreté de la part de l'opposition
officielle, je vais vous dire, Mme la
Présidente, c'est extrêmement malheureux, et pas seulement... évidemment, pas
seulement pour ma petite personne,
moi, la députée de Louis-Hébert, et pas pour mon collègue, et pas pour nous
ici; pour la population du Québec.
Et
là je vais en arriver à un passage obligé, soit le rappel, pour le bénéfice,
entre autres, des collègues de l'opposition officielle, de l'issue de la dernière élection, Mme la Présidente, le
1er octobre dernier. Et là c'est difficile de s'opposer ou de contredire les propos que je vais tenir
parce que ce sont les chiffres qui parlent. De manière tout à fait objective,
nous avons, bien humblement, accueilli une victoire assez importante. Nous
avons un nombre de collègues ici qui ont été élus démocratiquement et qui sont tenus de représenter, bien sûr, les
citoyens des circonscriptions dans lesquelles ils ont été élus et de participer à la mise en place, à la
réalisation de l'ambitieux programme que nous avons présenté pour changer
le Québec.
Évidemment,
on voit grand, on voit loin, nous, pour le Québec, je n'embarquerai pas dans
tous les volets de ce qu'on veut
faire pour faire progresser le Québec, mais un de ces volets-là importants
touchait l'intégrité, touchait la confiance du public, touchait l'indépendance des institutions, la séparation des
pouvoirs judiciaire, exécutif, législatif. Toutes ces suspicions, tous ces questionnements, toutes ces
inquiétudes, légitimes ou non, mais qu'on a sentis, qu'on a entendus dans
les médias, dans les débats publics, dans
les dernières années, tous ces éléments-là nous ont poussés à faire de cette
promesse de réformer le mode de
nomination aux deux tiers de l'Assemblée nationale une promesse-phare de notre
programme politique. Et nous avons
été élus avec cette forte majorité. Alors, on tient pour acquis que les gens
sont d'accord avec la réforme de ces
modes de nomination et de destitution de trois postes névralgiques. On
considère, comme je l'ai dit dès le départ,
que c'est noble, que c'est pertinent, que c'est approprié de vouloir non
seulement rétablir la confiance du public, mais donner un rôle accru aux
députés de l'Assemblée nationale dans ces mêmes processus.
La
deuxième opposition est déjà d'accord sur le principe. La troisième, on ne le
sait pas. Et là on se bute à l'opposition
officielle, qui pourtant, ce même 1er octobre, a, elle aussi, reçu un fort
message de la population mais dans le sens
inverse. La population, qui était tannée de cette attitude, de cette attitude
de fermeture, d'opposition, d'arrogance — est-ce que j'ai le droit,
«arrogance»? — d'opposition,
d'opposition...
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : ...
M. Tanguay :
O.K. Bien, Mme la... faire un rappel au règlement...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Je vous écoute. Je vous écoute, monsieur.
M.
Tanguay : ...demander à la ministre de retirer, parce que vous
lui avez demandé, mais ce n'était pas... Le mot «arrogance» a été prononcé, et ce sera dans les galées. J'aimerais que
vous le demandiez et que ce soit dans les galées, qu'elle retire ce mot-là. Si, son projet de loi,
elle commence avec ce ton-là, Mme la Présidente, ce ne sera pas un gage
de sérénité de nos débats. Elle est capable d'en faire; on est capables de répliquer.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Écoutez, je vous invite à faire attention à vos
propos, tel que je l'ai mentionné, et je
vous invite à poursuivre. Et tout va bien jusqu'à maintenant. Il faut continuer
de faire attention, s'il vous plaît, à vos propos. Merci.
M.
Schneeberger :
Mme la Présidente, hier, lors des...
Une voix :
...
M.
Schneeberger :
Comment?
Une voix :
...
M.
Schneeberger :
Bien, moi, je veux répondre...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Non, mais c'est correct, je viens tout
juste de... À moins que vous ayez autre chose à rajouter. Sinon, bien,
je pense que...
M.
Schneeberger : ...j'aurais pu aussi intervenir à plusieurs
reprises quand le député de La Pinière, notamment, est intervenu.
Alors, je pense qu'on va, tout le monde, se calmer...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : O.K. Merci, M. le leader adjoint. Là, on perd, actuellement, un petit peu de temps. Et j'invite la ministre à poursuivre et
je l'invite également à faire attention à ses propos. Mme la ministre.
Mme Guilbault : Donc, je vais retirer «arrogance». Mais cette
attitude de fermeture, d'opposition, d'une certaine suffisance... Est-ce
que ça, c'est permis? Bon, disons un dérivé, que je ne nommerai pas. Et donc
cette attitude, cette attitude... Notez
bien, Mme la Présidente, que moi, je suis en toute bonne foi ici ce soir.
Je réplique à une motion qui a été déposée par l'opposition officielle,
que vous avez jugée recevable, alors on se doit de répliquer, et je réexplique
très sereinement et très objectivement la réalité des choses.
Alors
donc, revenons au 1er octobre. L'opposition
officielle a, elle aussi, reçu un
message très clair à l'effet que cette
attitude, qu'ils ont depuis des mois, des années, déplaît aux Québécois.
Les Québécois étaient justement tannés de ce genre de comportement là. Et ça vaut pour tous les
parlementaires. Les Québécois sont saturés de ce genre de comportement :
s'opposer pour s'opposer, bloquer des
projets et des idées qui peuvent être bénéfiques pour la population sous
prétexte de partisanerie, de caprice, de je ne sais trop.
Une voix :
...
M.
Tanguay : Mme la Présidente, rappel au règlement. En vertu d'une décision rendue le
20 novembre 2013, page 5776,
de Carole Poirier, «bloquer» les projets de loi, c'est antiparlementaire. Je
vous demanderais, encore une fois, de rappeler la ministre à l'ordre.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Je vous rappelle, Mme la députée, qu'il faut faire attention à nos propos,
ne pas porter des intentions aux autres. Je vous invite à poursuivre en faisant
attention et ne pas employer d'autres adjectifs qui veulent dire la même chose.
Alors, je vous redonne la parole.
Mme Guilbault : Merci, Mme la Présidente. Alors, qu'est-ce que je disais? Parce qu'avec toutes ces interruptions je finis par perdre le fil. Mais on en revient
toujours à la même chose, de toute façon, Mme la Présidente, donc, cette attitude
pour laquelle les Québécois ont une
aversion. Et, encore une fois, ça vaut pour tous les parlementaires, les
parlementaires qui, en 2018, en 2019,
adoptent ce genre d'attitude qui va à l'encontre de la souhaitable
collaboration, qui va à l'encontre
de la collégialité à laquelle les gens s'attendent de nous.
On
a tous été élus, M. le Président, dans nos 125 circonscriptions. Donc,
indépendamment du fait qu'on soit au gouvernement ou dans l'opposition,
là, on est tous des députés, et les gens s'attendent à ce qu'on les représente.
Par
contre, le nombre de députés élus, et ça, c'est la responsabilité ministérielle
dans sa plus simple et primaire expression,
la responsabilité ministérielle est faite d'une manière telle que le parti qui
élit le plus grand nombre de députés forme
le gouvernement. Alors, en ce sens-là, nous, on prend notre
responsabilité et on réalise le programme qu'on a présenté aux Québécois et pour lequel ils nous ont majoritairement élus.
Et ces mêmes Québécois sont tannés de ce genre d'attitude.
Moi,
j'ai déposé un projet de loi n° 1, on l'a dit, symbolique, mais vraiment
en toute bonne volonté. Et, je vais vous
dire, très sincèrement, Mme la
Présidente, je suis surprise du
comportement de l'opposition officielle. Je croyais sincèrement et peut-être même naïvement que ce projet de loi là pourrait cheminer sans encombrement, sans désagrément, sans
chicane, sans agressivité latente, sans problème, quel qu'il soit. Je pensais
qu'on pourrait cheminer, en arriver à l'adoption
de ce projet de loi là et, je vais en profiter pour le rappeler parce qu'il y a une certaine urgence en ce qui me
concerne, pour la simple et bonne raison que
je dois nommer un nouveau commissaire à l'Unité permanente anticorruption
au maximum le 3 novembre prochain.
Donc, j'en réinforme les collègues, si ça les intéresse. Si on n'a pas adopté le projet de loi actuel et que je n'ai pas eu le temps de lancer l'appel de candidatures — il y a un premier comité qui doit le rencontrer,
le deuxième comité éventuellement formé de parlementaires, et tout ça — et que tout ça n'a pas le temps de se faire avant le 3 novembre, je devrai, Mme la Présidente, et là les gens concernés devront en prendre la coresponsabilité...
je devrai nommer moi-même un commissaire à
l'UPAC pour une durée d'au moins un an. Puis normalement c'est au moins
trois ans, parce que, là, les gens aiment
ça avoir... savoir un peu à quoi ils s'attendent. On ne nomme pas des postes
aussi importants pour des durées trop brèves, donc. Et là les
gens devront vivre avec la conséquence
d'une nomination faite par le
gouvernement, alors qu'on a tellement protesté, on s'est tellement dit qu'on
veut des commissaires nommés par l'Assemblée
nationale, qu'on veut tasser le politique, le... c'est-à-dire le policier du
gouvernement, du politique. On a une occasion en or, là, sous les yeux,
à portée de main, Mme la Présidente. On a une urgence temporelle, parce qu'on
sait comment fonctionne le Parlement, il y a des étapes à franchir pour
l'adoption d'un projet de loi. Il y a des étapes à franchir pour un appel de candidatures, pour la sélection d'un candidat,
etc., la nomination, l'entrée en poste. Et on a une échéance : le
3 novembre. Donc, je voulais redéposer ça ici pour alimenter la réflexion
des collègues, parce que cette échéance-là,
elle existe, indépendamment de nous, de l'amour ou non qu'on peut avoir l'un
pour l'autre, indépendamment des désaccords qu'on peut avoir. Ça n'a
rien à voir. Cette réalité-là, elle existe.
Et
donc c'est ça, alors, je vous le disais, j'ai été très surprise, très
franchement surprise de cette attitude parce que je croyais bien
humblement, bien naïvement, encore une fois, que le projet de loi allait
pouvoir cheminer rapidement, facilement,
aisément et, je dirais même, agréablement, parce que j'estimais que, pour un
premier projet de loi, non seulement nous
en sommes fiers parce que ça vient opérationnaliser un engagement-phare qu'on a
pris depuis longtemps, mais que ça pourrait être un projet de loi qui aurait pu
nous rallier puis donner un peu le ton à une collaboration de bon augure, une
collaboration franche, respectueuse, qu'on aurait pu maintenir pour la
suite des quatre années. Parce qu'on va passer quatre ans ensemble, Mme la Présidente. Donc, comme le dit le collègue
de LaFontaine, le temps pourrait être long si on adopte des attitudes
qui ne sont pas de nature à favoriser l'avancement des dossiers.
Et
donc, dans ce sens-là, c'est ça, comme je vous dis, je suis déçue. J'espère...
Parce qu'évidemment, à la façon dont
les choses sont faites, il y aura un vote sur cette motion-là, et qui, selon
toute vraisemblance, ne sera pas retenue, parce que nous allons voter contre, mais on aura pris ces deux heures
encore pour débattre de ça. Et je présume que, par la suite, il y aura
d'autres interventions sur le principe. Je veux juste rappeler aux collègues
que ce projet de loi là...
Vous
savez, on a des sujets qui nous divisent de manière beaucoup plus manifeste, de
manière évidente et de manière connue
depuis longtemps. Prenons l'exemple de la laïcité. On s'attend à ce qu'au dépôt
du projet de loi sur la laïcité... qui
est piloté par mon collègue, dont je ne veux pas me mêler outre mesure, mais on
s'attend à ce qu'il y ait de l'opposition de la part du Parti libéral. Mais on n'en sera pas surpris parce que
c'est bien connu, c'est historique que nos positions sur la laïcité sont
diamétralement opposées. Ça fait que je ne me lèverai pas sur un tel projet de
loi pour avoir le même discours que je peux
avoir là, parce qu'on s'y attendrait puis on jugerait, jusqu'à un certain
point, que c'est normal. On sait que...
On connaît leurs valeurs, on connaît, disons, le créneau très circonscrit dans
lequel ils logent sur cette question, et donc on n'en serait pas
surpris.
• (17 h 30) •
Par contre,
encore une fois, je m'attendais à ce que, sur un projet de loi comme celui
qu'est le projet de loi n° 1, qui porte sur un sujet qui devrait
être transpartisan entre autres parce qu'il, justement, vise à rendre les
nominations transpartisanes puis à permettre
le concours des députés des oppositions dans le processus... je m'attendais, bien
sincèrement, à ce qu'on puisse
procéder plus rondement, parce que je pense que les citoyens s'attendent à
mieux de nous. Je pense que les
citoyens voient d'un très bon oeil qu'on puisse nommer ces trois personnes-là
aux deux tiers de l'Assemblée nationale.
Encore une
fois, des collègues ont une opinion favorable connue, alors j'encourage, Mme la
Présidente, l'opposition officielle à
se rallier, je dirais, à notre groupe majoritaire de députés qui sont
favorables à ce projet de loi, qui se demandent pourquoi ça a été si
long avant qu'on se donne des moyens concrets pour rétablir la confiance du
public envers des institutions aussi
importantes que l'UPAC, le DPCP, la Sûreté du Québec et qui, en toute bonne
foi, et même avec bonheur, peut-être,
jusqu'à un certain point, vont voter pour le principe, vont participer à
l'étude détaillée, vont voter pour l'adoption finale, et qu'enfin on puisse procéder sur ces fameuses nominations aux
deux tiers une fois pour toutes. Et, vous savez, à la même
époque où nous, dans notre formation politique — dont vous étiez, Mme la Présidente — on a demandé inlassablement ces nominations aux deux tiers... dont vous étiez,
mais maintenant vous êtes tout à fait indépendante, là, je veux le noter...
Et donc, à l'époque où on faisait ces
inlassables demandes, quelle réponse avions-nous du précédent gouvernement, qui
forme actuellement l'opposition officielle? Nous avions, pour toute réponse, un
refus, un refus catégorique. Et j'ai rappelé,
la semaine dernière, là, dans le cadre d'une question ici que j'ai reçue de la
collègue d'Acadie, j'ai rappelé les propos du précédent premier
ministre, qui était le chef du Parti libéral, qui insinuait ni plus ni moins
que ce peut être dangereux, inusité pour une démocratie de laisser une
assemblée législative se mêler de la nomination d'une charge publique telle que le commissaire de l'UPAC. Je ne
l'invente pas. Le précédent premier ministre, qui était assis ici, là,
l'a répété autant comme autant. À chaque
fois qu'on a pu avoir des questions ou des motions là-dessus, le premier
ministre disait : Ça ne se fait
nulle part, puis il n'y a personne qui fait ça, puis ce serait dangereux, puis
ça n'a pas de bon sens.
Donc, on sait que le Parti libéral a toujours
été contre les nominations aux deux tiers, mais, au moment où on est arrivés au
gouvernement et au moment où on a déposé notre projet de loi n° 1, comme
je vous dis, sur la base des premières
discussions, des premières impressions, le ton, le climat dans les
consultations particulières, j'avais l'impression, encore une fois, probablement naïvement, qu'on
pensait tous à peu près la même chose, qu'on s'en allait tous dans le même
sens et qu'on avait tous même hâte de
pouvoir adopter ce projet de loi et procéder à une première nomination
incessamment, le commissaire de l'UPAC, comme je vous l'exposais tout à
l'heure. Donc, j'avais vraiment cette impression qu'on allait procéder rondement. Et là, force est de nous
demander : Est-ce que finalement le Parti libéral serait toujours contre
les nominations aux deux tiers? Est-ce qu'ils sont contre le principe de ce
projet de loi? Parce que ce n'est pas clair à date. Il y a eu diverses interventions, dont une qui a fini
explicitement en disant : Comme mes collègues, je ne dirai pas si je vote
pour ou contre, mais on va continuer de parler.
Bon. Alors, on ne sait pas à quelle enseigne
exactement loge le Parti libéral officiellement sur le principe de ce projet de
loi là. J'ai pensé qu'il y serait favorable, et je m'en réjouissais, on s'en
réjouissait tous. Et donc, là, je me demande
si finalement cette ancienne opposition aux nominations aux deux tiers n'est
pas en train de ressortir à travers toutes
ces procédures et cette utilisation, disons, maximale de toutes les façons de
faire disponibles ici dans le cadre de chacune
des étapes du cheminement d'un projet de loi. Donc, je me dois encore une fois
de le déplorer. Mais, en même temps...
j'ai l'air négative peut-être, Mme la Présidente, mais, en bout de ligne, on va
y parvenir. Dans tous les cas, ce projet
de loi va être adopté un jour. Ça,
c'est certain, là. Et donc, ce jour-là, on sera bien heureux puis on va
s'applaudir, on va s'en réjouir, les collègues
de la deuxième opposition et peut-être de la troisième
aussi, on sera tous très heureux, puis,
si on est chanceux... de pouvoir procéder bientôt, dans les prochains mois, à
la nomination du prochain commissaire de l'UPAC.
Mais, en
attendant, Mme la Présidente, c'est mon travail... L'opposition officielle
passe leur temps à dire que c'est leur
travail d'intervenir les uns après les autres. Donc, moi, c'est mon travail,
aujourd'hui, comme ministre de la Sécurité publique qui a déposé ce projet de
loi, et au nom, bien sûr, de tous mes collègues du gouvernement, c'est mon
travail de déplorer le fait que je ne puisse
compter sur la collégialité espérée, l'adhésion espérée, le ralliement de tous
les collègues autour de ce projet de loi, qui aurait pu être non
seulement un premier projet de loi symbolique pour notre gouvernement — déjà, évidemment, nous, ça nous satisfait,
puis on en est heureux — mais ça aurait pu être un premier projet de loi symbolique pour toute l'Assemblée législative, pour toute
l'Assemblée nationale, pour tous les collègues ensemble. Imaginons, Mme la Présidente, qu'on vote tous pour à
l'adoption finale du projet de loi, qu'on vote tous en faveur de ce projet de loi là et que, par la
suite, on désigne tous ensemble ces trois postes-là aux deux tiers. C'est quand
même un pas immense pour la démocratie.
Et là je vais
reprendre des propos qu'on a entendus en consultations particulières, d'une
chaire de recherche, des gens qui sont venus, trois personnes qui sont
venues, d'éminents chercheurs d'une chaire de recherche universitaire, évidemment, donc, et l'un d'eux précisait que
c'est rare de voir un gouvernement qui accepte de délaisser de son pouvoir
au profit du législatif, parce que le
pouvoir de nommer ces trois personnes-là, actuellement, là, est entièrement
sous la responsabilité de l'exécutif, donc du
gouvernement, et, nous, ce qu'on veut faire avec le projet de loi n° 1,
c'est une translation d'une partie de ce pouvoir-là vers le législatif, vers
l'Assemblée législative, vers les 125 collègues qui représentent les 125 circonscriptions qui forment le Québec, pas
uniquement les 75 qui forment le gouvernement. Et cet éminent chercheur
disait mot pour mot que c'est rare de voir ça de la part d'un gouvernement. Ce
n'est quand même pas rien, là, Mme la
Présidente. On parle d'une personne qui a une grande expertise, qui a fait de
la recherche, qui enseigne, fort
probablement... ou, en tout cas, du moins, qui participe à une chaire de
recherche sur les institutions parlementaires, le parlementarisme, et tout ça, et qui vient nous
dire ça. Puis évidemment les collègues savent comment ça fonctionne, les
consultations particulières. Il n'y a rien qui est arrangé avec, comme on dit,
le gars des vues, là, les gens viennent, ils ont leur point de vue, l'exposent. Et, tout bonnement, cette personne-là dit
ça. Alors, moi, ça m'a réjouie d'entendre ça. Je ne savais pas que cet homme-là allait venir dire ça. Et, quand j'ai
entendu ça, ça m'a confortée, ça nous a confortés dans l'impression
qu'on fait foncièrement la bonne chose en déposant le projet de loi n° 1,
en cherchant à départir le gouvernement du
seul pouvoir de nommer ces trois postes-là, à conférer une partie du pouvoir de
nomination, de destitution aux collègues des oppositions, aux collègues
de l'Assemblée nationale.
Des
chercheurs le disent, Mme la Présidente. On est, au minimum, 85 députés ici à
être d'accord, sur 125, avec ça, avec ce principe-là, Mme la Présidente.
Le public, en général, est avide, avide de gestes qui vont lui permettre de retrouver sa confiance, oui, en les trois
institutions qui sont l'objet du projet de loi n° 1, mais en leur
gouvernement en général, en leurs députés en général, en la classe
politique.
• (17 h 40) •
On a souvent
évoqué le fameux cynisme ambiant. Le cynisme, je peux vous dire qu'il est
ambiant et il est intense, mais je
pense qu'en posant des gestes comme celui qu'on a fait en déposant ce projet de
loi là c'est de nature à ramener un
certain optimisme dans la population, qui se dit : Ah! bien, regardez.
Parce que, là, on va tous s'entendre sur le fait que ce projet de loi
là, un, ce n'est pas un projet politique. Ce n'est pas un projet avec lequel on
veut faire de la politique, avec lequel on veut créer des guerres, des
chicanes, essayer de se faire valoir au détriment d'un autre groupe. Bien au contraire, c'est un projet de loi qui enchâsse une
fois pour toutes le pouvoir de tous les partis représentés à l'Assemblée nationale dans des processus de
nomination, de destitution de gens très importants dans l'administration
publique.
Alors, que voulez-vous de plus, Mme la
Présidente? Je cherche d'autres arguments pour vous convaincre du caractère
merveilleux de ce projet de loi. Je pourrais en trouver, j'imagine, jusqu'à la
fin de cette heure, je pense. Je pense, j'ai 59 minutes qui me sont dévolues. Mais
il m'apparaît évident, évident, Mme
la Présidente, que, pour toutes les
raisons que j'ai abondamment évoquées et détaillées, le projet
de loi n° 1 est un excellent projet de loi symboliquement, factuellement.
Il accomplit le premier devoir qu'on devrait tous avoir comme députés, c'est-à-dire reconquérir, mériter et
conserver la confiance de nos concitoyens, les gens qui nous ont élus, les gens
qui nous élisent, Mme la Présidente. Évidemment,
il y a beaucoup de gens qui sont allés voter en ne pensant pas nécessairement au projet de loi n° 1, en ne pensant pas nécessairement à la nomination de l'UPAC ou du D.G. de la Sûreté du Québec, là. Ça, on en est tous bien conscients.
Par contre — on
en a souvent parlé, dans les dernières années, des nominations aux deux tiers — je
dirais, de manière presque
subliminale, ça fait partie des propositions de la CAQ qui sont ancrées dans l'imaginaire
collectif, ça fait partie... et tout
le thème de l'intégrité, d'ailleurs, je vous dirais, Mme la Présidente, mais
nommément cet élément-là des
nominations aux deux tiers, tout comme les propositions qu'on a faites
sur la laïcité, tout comme la grande priorité qu'on a voulu faire de l'éducation, tout comme ce qu'on veut faire pour nos aînés qui sont dans des conditions innommables dans certains CHSLD, l'ensemble de ces
propositions-là qu'on a répétées, encore une fois, inlassablement dans les
dernières années, malgré les
oppositions, malgré les revers, malgré, des fois, le temps qui nous paraît
long, parce qu'on veut avoir les moyens de pouvoir mettre en place
toutes ces belles propositions là.
Et là on a
cette chance-là, depuis le 1er octobre, d'être au gouvernement, d'avoir la
possibilité de réaliser tous ces
engagements. Et on commence, comme je le disais, par ce projet de loi
n° 1, qui fait référence à un engagement de très longue date mais qui touche, comme je le disais, le thème plus
général de l'intégrité. Les gens sont saturés de tous les scandales qu'on a connus dans les dernières
années. Je ne reviendrai pas sur la commission Charbonneau, mais on sait tous
que ça a laissé ses traces dans la confiance de la population. Il y a eu
d'autres commissions, il y a eu d'autres scandales,
il y a eu d'autres histoires déplorables qui sont sortis dans les médias aussi.
Je pense, sous toute réserve, et c'est mon opinion bien personnelle de
citoyenne, je pense que toutes ces histoires-là ont concouru à l'issue de la
dernière élection. Je pense, encore une
fois, que les gens sont avides de députés, de ministres, de représentants
politiques... à tous les paliers de gouvernement d'ailleurs, mais
parlons pour celui qui nous concerne ici, au provincial, sont avides de représentants politiques qui leur ressemblent, qui
parlent pour eux, qui comprennent leurs préoccupations, qui agissent en conformité avec ces préoccupations, qui
travaillent pour leurs intérêts et qui s'occupent beaucoup plus de faire
avancer des projets de loi comme le
projet de loi n° 1, transpartisans, objectivement pertinents et bons, qui
devraient rallier tout le monde, donc
qui s'occupent à faire avancer des éléments comme des projets de loi n° 1
plutôt que de faire des guerres, plutôt que d'alimenter l'animosité
qu'on peut sentir, des fois, entre partis, entre collègues, plutôt que de
chercher la confrontation. Les gens ont envie que les députés, que les ministres,
que les partis travaillent ensemble.
Et on l'a vu — vous
l'avez peut-être vu, Mme
la Présidente — récemment, ma collègue ministre
de la Justice est allée à
l'émission Tout le monde en parle avec la collègue de
Marguerite-Bourgeoys... je ne sais pas si c'est encore Marguerite-Bourgeoys...
Une voix : ...
Mme
Guilbault : ...oui,
Marguerite-Bourgeoys, de Sherbrooke et de Joliette. Elles sont allées
ensemble... pas débattre,
c'est-à-dire, mais discuter d'un tout autre sujet qui concerne les agressions
sexuelles, et tout le monde a salué cette tribune-là, ce panel-là transpartisan à
quatre, où, encore une fois, tous les partis représentés à l'Assemblée
nationale se mettent ensemble pour
l'avancement d'une cause qui est noble, qui dépasse nos petites personnes
respectives, qui dépasse un parti, qui dépasse un statut à l'Assemblée
nationale mais qui vise à faire avancer une cause qui est noble et qui est salutaire pour l'ensemble de la population, entre
autres pour les femmes, en l'occurrence, pour ce sujet-là, parce qu'on sait qu'elles sont énormément touchées par la
problématique en question. Mais donc tout le monde a salué cette façon-là
de travailler ensemble.
Et moi, Mme
la Présidente, je caresse encore le rêve de pouvoir faire de même dans les
dossiers qui me concernent, donc avec
mes vis-à-vis, avec les collègues en général, d'ailleurs, mais plus
particulièrement avec mes vis-à-vis, donc la députée d'Acadie, la députée de Duplessis et le député
d'Hochelaga-Maisonneuve. Et donc, c'est ça, je caresse ce rêve de pouvoir travailler de manière collégiale et
transpartisane sur des dossiers qui nous sont chers. Et je caressais le rêve
que ce projet de loi n° 1 puisse être
ce premier dossier qui allait permettre de jeter les bases d'une collaboration
agréable, voire amicale et qui aurait
pu s'étirer sur les quatre prochaines années tout en satisfaisant la
population, qui, encore une fois, est
assoiffée de gestes concrets pour rétablir l'impression d'intégrité et la
confiance du public envers nos institutions policières et judiciaires.
Alors, je
vais, je pense, terminer là-dessus, Mme la Présidente, parce que je crois avoir
un collègue qui, lui aussi, a envie
d'intervenir sur la question. Mais, pour terminer sur ce qui est à l'origine de
mon intervention, à savoir la motion en
question, bien, j'invite les collègues... évidemment, là, on a deux heures de
débat là-dessus, mais j'invite, par la suite, les collègues... encore une fois, qui ne risque rien n'a rien, j'invite
les collègues de l'opposition officielle, par la suite, à faire preuve, disons, de concision... ou, en tout
cas, tout en faisant leur travail, évidemment, mais à se rallier à ce principe
du projet de loi n° 1, à voter en
faveur du principe du projet de loi n° 1, à participer avec nous, en toute
collégialité, à l'étude détaillée,
qui, de toute façon, devra avoir lieu. On pourra avoir des discussions. Et
sachez, Mme la Présidente — et j'espère que le
collègue de LaFontaine écoute — que je ne tiens pas rigueur au collègue de
ce qui se passe en ce moment et je ne
veux pas partir sur des mauvaises bases. Je fais un dernier appel à leur
collaboration, mais, en même temps, Mme la Présidente, il faut tenir compte du fait qu'on a été élus pour certaines
promesses et qu'on se doit, par responsabilité de député, de ministre, de gouvernement, par
responsabilité ministérielle politique, de réaliser les engagements pour
lesquels les gens nous ont élus, et ce serait irrévérencieux envers la
population de chercher à nous dissuader ou à faire en sorte qu'on ne puisse pas
réaliser les engagements pour lesquels nous avons été portés au gouvernement.
Sur ce, Mme
la Présidente, je vous remercie de votre patience, je remercie tous les
collègues et je cède la parole à mon successeur.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre de la Sécurité
publique. Maintenant, je cède la parole au député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vais reprendre la balle au bond de la
ministre de la Sécurité publique :
je pense, en ce qui nous concerne, qu'il serait irrévérencieux envers la population
du Québec de ne pas faire notre
travail de député, la motion de scission qui est l'objet du débat, qui est
devant vous aujourd'hui et qui ouvre un débat de deux heures, puis je
vais revenir sur le bien-fondé de cette motion de scission là, qui existe en
vertu de nos règles parlementaires, qui a été utilisée bien avant nous
aujourd'hui.
Le
parlementarisme québécois a force au Québec depuis 1792. Il y en a eu une et
d'autres, Mme la Présidente, des
motions de scission, et j'en veux pour preuve ce que disait notre collègue
député et évidemment ministre du Transport sur une motion de scission
qu'avait présentée son collègue aujourd'hui ministre de l'Éducation, mais, à
l'époque, ils étaient dans l'opposition. Le
ministre du Transport disait, et je le cite : «La motion de scission
existe depuis fort longtemps, comme
vous le savez, dans notre système parlementaire, et prévoit que toute motion de
fond qui contient plus d'un principe peut
être scindée, sauf exception qui est prévue au règlement.» Des motions de
scission — Mme la
Présidente, on n'a jamais remis en cause la bonne foi des collègues de
l'opposition, lorsqu'on était au pouvoir dans la 41e, parce qu'ils déposaient des motions de scission — ça fait partie de nos débats parlementaires.
Et, si on ne le faisait pas dans des cas qui, comme aujourd'hui... est jugé recevable, parce que vous l'avez jugé
recevable... Ça prend évidemment l'expression de plus d'un principe. Vous avez déclaré et reconnu qu'il y avait, dans
le projet de loi, plus d'un principe. Ça, c'est un élément important qu'il faut soulever, et j'aurai
l'occasion, lors de mon intervention, Mme la Présidente, d'aller au fond
des choses.
• (17 h 50) •
Pourquoi
c'est pleinement justifié, la motion de scission? Parce que deux choses sont en
cause aujourd'hui par le projet de
loi n° 1 : le mode de nomination des policiers que sont le directeur,
la directrice de la Sûreté du Québec et le directeur, la directrice de l'Unité permanente anticorruption. UPAC, SQ,
c'est la police. DPCP, le Directeur, la directrice des poursuites criminelles et pénales, ça, ce
n'est pas la police, c'est le quasi-judiciaire. Et on voit ce qui se passe à
Ottawa présentement. Les gens, les
femmes et les hommes, les citoyens et citoyennes qui nous écoutent à la maison savent
ce qui se passe à Ottawa, savent
l'importance de distinguer l'exécutif du judiciaire. Ça fait des semaines qu'à
Ottawa le débat fait rage, et
aujourd'hui l'ex-ministre de la Justice est devant un comité parlementaire à
Ottawa pour venir, entre autres, donner sa version quant à ce qui s'est
passé dans un contexte où il y avait, semble-t-il, des discussions, il y avait
des discussions à savoir : Est-ce que, dans un dossier donné, la ministre
de la Justice, de laquelle relève la directrice des poursuites pénales au
fédéral, parce qu'au fédéral c'est la directrice des poursuites pénales... Au
Québec, c'est la directrice des poursuites
criminelles et pénales. Dans le cas d'Ottawa, la ministre de la Justice, de
laquelle, donc, relève la directrice des poursuites pénales, elle devait conserver évidemment
une distance avec l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire qui relève d'abord de la directrice des poursuites
pénales et qui, ultimement, en vertu de la loi, en vertu de la constitution,
lui permet de passer outre et de donner des indications : Vous poursuivez
ou vous ne poursuivez pas dans un certain dossier donné.
Et
là, le débat qui fait rage, et aussi évident qu'il faut être sur une autre
planète pour ne pas savoir ce qui se passe à Ottawa, aussi évident que l'on sait tous qu'il y a une distinction nette
entre l'exécutif et le judiciaire, bien, Mme la Présidente, on peut, par analogie... toute analogie est
imparfaite par définition, mais on peut, par analogie, venir justifier la
motion de scission aujourd'hui, où on
vous dit, sous le même souffle, on dit : La directrice des poursuites
criminelles et pénales, le
quasi-judiciaire, c'est une chose, et la police, également, c'est une autre
chose. La motion de scission vient faire en sorte que l'on veut distinguer ces
deux institutions-là. Et, sur le fond des choses, sur le fond du mécanisme, Mme
la Présidente, ce serait de faire en
sorte donc d'aborder par nature deux institutions distinctes, de faire un débat
qui soit, je vous dirais, efficace et
cohérent. La ministre veut de l'efficacité. Bien, mal lui en prit, Mme la
Présidente, nous avons, chacune et chacune d'entre nous, le droit de parler et nous allons utiliser notre droit de
parole. Et nous ne ferions pas notre travail si nous ne le faisions pas,
Mme la Présidente, et c'est pour ça.
Et,
sur le même souffle, je me rappelle, moi, mon collègue député, à l'époque où il
était leader adjoint du deuxième groupe
d'opposition... aujourd'hui, il est leader adjoint du gouvernement, et il
disait, et je le cite, sur une motion de scission qui avait été présentée par notre collègue député
de Lévis, qui est aujourd'hui président de notre Assemblée nationale... mon collègue de la CAQ leader du gouvernement
disait, et je le cite, sur la même motion de scission qui aujourd'hui est décriée par la ministre, en ces termes... ministre
de la Sécurité publique, il disait, le collègue leader adjoint du gouvernement,
qu'il fallait préserver, et je le cite,
«préserver le droit des parlementaires à exprimer leurs opinions». Plus loin — ça, c'était dans un débat en 2015 — il dit, et je le cite toujours : «Et
donc de faire un amalgame de deux choses qui sont totalement
distinctes...» Parce qu'il parlait de deux éléments d'un projet de loi qui,
selon lui... dépôt de motion de scission. La présidence
avait reconnu qu'il y avait là deux principes et que la motion de scission
était débattable. Après ça, les collègues voteront. Mais la motion de scission était débattable parce qu'il y
avait deux principes : possibilité de faire deux projets de loi distincts, et ainsi d'augmenter notre
efficacité, puis c'est justement à ce souci d'efficacité là auquel faisait
écho, donc, le leader adjoint du gouvernement en 2015 et auquel,
aujourd'hui, la ministre de la Sécurité publique aimerait nous rappeler à l'ordre en disant : Bien, soyez
efficaces. Bien, l'efficacité passe, entre autres, parfois par une motion de
scission. Mon collègue de l'époque
disait : «Et donc de faire un amalgame de deux choses qui sont totalement
distinctes l'une de l'autre dans un seul
projet de loi restreint mon privilège, comme parlementaire, d'exprimer non
seulement par les opinions, mais par
mon vote... parce que — M. le Président, n'oublions pas une chose — nous sommes tous ici, comme législateurs,
appelés à voter, et ça, c'est l'expression
ultime qu'on peut avoir par rapport à un projet de loi, car, par le vote qu'on
va s'exprimer ultimement, donc, là,
on restreint ma capacité d'expression en faisant cet amalgame-là.» Fin de la
citation.
Donc,
le leader, aujourd'hui, adjoint du gouvernement l'avait bien compris en 2015, à
l'époque, quand il était toujours leader adjoint mais de la deuxième
opposition, en disant que ça participe de l'efficacité de nos débats, ça participe également de l'expression pleine et
entière de nos droits de parlementaire que de pouvoir aborder un sujet, un
principe qui tient debout par lui-même et
qui appelle des institutions qui, par définition, par nature, ne se mélangent
pas, Mme la Présidente. Tout comme, encore une fois, l'analogie avec ce
qui se passe à Ottawa. On dit : La ministre de la Justice et la directrice des poursuites pénales ne devaient pas subir de
pression de l'exécutif, du premier ministre et du cabinet. C'est le débat qui fait rage là-dedans.
Je ne me prononce pas sur le fond des choses, on n'était pas là, personne,
puis ils sont capables de faire le débat,
mais tout le monde reconnaît, peu importe la position qu'ils ont, tout le monde
reconnaît qu'effectivement il ne peut pas y avoir ingérence, on ne peut pas
faire en sorte que l'exécutif vienne court-circuiter,
court-circuiter l'expression du pouvoir discrétionnaire. Ça, c'est à Ottawa,
c'est l'exécutif, d'une part, et la ministre de la Justice et la directrice des poursuites pénales, d'autre part. À
Québec, aujourd'hui, le projet de loi met dans le même bain... Mon collègue
leader adjoint du gouvernement, à l'époque, le disait : On met dans le
bain deux principes différents,
distincts. Moi, je dois aborder les deux en même temps. Par définition, on ne
peut pas aborder les deux en même temps. Et, dans les représentations que l'on fait,
que ce soit à l'article par article, sur le principe ou sur les autres étapes, dépôt du rapport de la commission
et ultimement sur l'adoption finale, Mme
la Présidente, la façon de s'exprimer
sur un projet de loi pourrait nous faire dire : Bien, sur cette
partie-là, on est pour puis, sur cette partie-là, on est contre, Mme la Présidente.
Et
donc, en ce sens-là, il est important de le souligner, que la motion de
scission vise justement à quoi?, à faire en sorte de ne pas mélanger deux choses qui ne se mélangent pas. On le
voit à Ottawa, jusqu'à quel point ça ne se mélange pas. La police, d'un côté, et la directrice des
poursuites criminelles et pénales, de l'autre. En ce sens-là, ils participent
donc de l'expression de notre travail de député et de pouvoir se prononcer sur
ces éléments-là, et qui, le cas échéant, Mme la Présidente, amènera des amendements d'une certaine nature,
dans certains cas, et d'une tout autre nature, dans d'autres cas. Et ça, c'est faire avancer le Québec. Et les
signaux qu'elle a eus justement par
rapport à l'UPAC, par rapport à la Sûreté du Québec
et à l'ouverture qu'il y a en ces matières... Elle dit qu'il faut absolument
qu'elle remplace l'actuel directeur intérimaire, je crois, de l'UPAC
d'ici novembre. Mais, si d'aventure ce projet de loi là était mis sur les rails
de façon distincte après avoir voté et adopté la motion de scission, je peux
vous dire que là-dessus il y aurait de très, très forts consensus qui seraient exprimés, toujours en prenant sous
réserve le fait qu'il faut faire attention parce que ce n'est pas parce que
c'est la police qu'il n'y a pas évidemment une préoccupation d'indépendance, préoccupation, donc, de perception également d'indépendance
et de neutralité et d'exercice pleinement discrétionnaire de son pouvoir de
mener des enquêtes à son rythme — des
enquêtes, parfois, c'est court, des enquêtes souvent c'est long — et
faire en sorte, donc, de
compléter les dossiers sans avoir de pression partisane, médiatique, ou autre.
Et ça, c'est important.
Donc, en faisant en sorte que ce train-là avance
et que le DPCP, qui participe d'une tout autre nature, Mme la Présidente... mais ça, c'est important de le
souligner, et d'où le débat que nous avons sur la motion de scission. Puis son
problème qu'elle a, de
dire : Bien, il faut que je le nomme en novembre... si on y va avec ce
premier projet de loi là, je peux
vous le dire, que, Mme la Présidente, le débat serait assez circonscrit. Faire
en sorte que l'on puisse, donc, faire avancer le Québec sur cet élément-là, toujours en ayant des débats constructifs.
Ça veut dire qu'il va y avoir des amendements, puis il y aura discussion
il y aura vote, ultimement, mais on a voix au chapitre.
Puis, Mme la
Présidente, tous mes collègues, que je défendrai, des collègues des
125 comtés... les 124 comtés — je suis
le 125e — les
124 comtés, Mme la Présidente, ont le droit de prendre leur temps,
d'utiliser leur temps. Ils ne le font pas
en vain. Ils ont des choses à dire, des femmes et des hommes, oui, qui ont mis
leur face sur le poteau puis qui ont des opinions également. Puis l'unanimité, Mme la Présidente, dans une
démocratie, là, des fois, c'est antinomique. Il faut faire en sorte, oui, d'entendre des gens qui ne pensent
pas comme nous autres puis des gens qui... C'est peut-être un peu plus
long, mais, vous savez, on va plus vite quand on est seul, mais, quand on est
en groupe, on va plus loin.
Et, avec
votre permission — je vois
que vous me faites signe, l'heure avance — j'aurai l'occasion de poursuivre sur
cette lancée demain.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député de LaFontaine.
Ajournement
Alors, compte
tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés et ils reprendront
demain, jeudi le 28 février 2019, à 9 h 40. Merci.
(Fin de la séance à 18 heures)