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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le lundi 11 juin 2018 - Vol. 44 N° 348

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Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner la tenue de l'exposition en plein air Ma ville, mon quartier, ma rue

M. Jean-Denis Girard

Souligner le 50e anniversaire de L'Ordre des Filles d'Isabelle, Saint-Jovite, Cercle n° 1158

M. Sylvain Pagé

Rendre hommage à Mme Line Lebrun pour son engagement dans la lutte contre le cancer

Mme Marie-Claude Nichols

Souligner la tenue du 15e Relais pour la vie de Repentigny

Mme Lise Lavallée

Souligner l'initiative de L'Association des étudiants noirs en droit du Canada qui offre
des services juridiques gratuits à Montréal-Nord

Mme Rita Lc de Santis

Faire entendre la voix des femmes de la Coalition du 8 mars de La Petite-Patrie à l'Assemblée
nationale

M. Gabriel Nadeau-Dubois

Féliciter l'équipe du projet Tuning-moteur de persévérance, primée au salon Auto sport
de Québec

Mme Caroline Simard

Féliciter l'école polyvalente La Samare de Plessisville pour sa collecte de sang record

M. Éric Lefebvre

Souligner le 30e anniversaire de la Cidrerie du Minot inc.

M. Stéphane Billette

Remercier Mme Elsa Lambert pour son travail au bureau de circonscription de Rimouski

M. Harold LeBel

Présence de Mme Danielle St-Amand, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Dépôt de documents

Plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétiques 2018-2023

Rapport concernant la reconnaissance et le financement de Zecs Québec pour les
années 2016, 2017 et 2018

Réponses à des pétitions

Lettre du député de Groulx concernant le rapport du comité directeur de la Commission
de l'Assemblée nationale


Dépôt de rapports de commissions

Étude détaillée du projet de loi n° 141 — Loi visant principalement à améliorer l'encadrement
du secteur financier, la protection des dépôts d'argent et le régime de fonctionnement
des institutions financières

Consultations particulières sur l'accès aux services financiers de proximité en région

Dépôt de pétitions

Donner le mandat à la Commission des institutions d'examiner le phénomène des groupes
à dérive sectaire


Questions et réponses orales

Protection de la gestion de l'offre en agriculture

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

Bilan du ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport

Mme Carole Poirier

M. Sébastien Proulx

Mme Carole Poirier

M. Sébastien Proulx

Mme Carole Poirier

M. Sébastien Proulx

Indemnisation des résidents et des commerçants touchés par les manifestations lors du
Sommet du G7

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Services aux élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

Frais imposés aux parents par les commissions scolaires

M. Jean-François Roberge

M. Sébastien Proulx

M. Jean-François Roberge

M. Sébastien Proulx

M. Jean-François Roberge

M. Sébastien Proulx

Application d'une disposition de la Charte de la langue française

Mme Martine Ouellet

Mme Marie Montpetit

Mme Martine Ouellet

Mme Marie Montpetit

Mme Martine Ouellet

Mme Marie Montpetit

Mesures de sécurité durant le Sommet du G7

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Martin Coiteux

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Martin Coiteux

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Martin Coiteux

Lutte contre l'exploitation sexuelle

Mme Lise Lavallée

Mme Lucie Charlebois

Mme Lise Lavallée

Mme Stéphanie Vallée

Mme Lise Lavallée

M. Martin Coiteux

Accès à un médecin de famille

Mme Diane Lamarre

M. Gaétan Barrette

Motions sans préavis

Nommer M. Jean-François Gauthier membre de la Commission d'accès à l'information

Document déposé

Mise aux voix

Nommer Mme Guylaine Giguère membre de la Commission d'accès à l'information

Document déposé

Mise aux voix

Nommer Mme Rady Khuong membre de la Commission d'accès à l'information

Document déposé

Mise aux voix

Nommer M. Marc-Aurèle Racicot membre de la Commission d'accès à l'information

Document déposé

Mise aux voix

Nommer Mme Martine Riendeau membre de la Commission d'accès à l'information

Document déposé

Mise aux voix

Réitérer l'appui de l'Assemblée nationale aux travailleurs et aux entreprises du secteur de
l'aluminium et de l'acier et réaffirmer son soutien au maintien du système de gestion
de l'offre en agriculture

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 400 — Loi modifiant la Loi concernant la succession de l'honorable Trefflé
Berthiaume et la Compagnie de Publication de La Presse, Limitée

Adoption du principe

Mme Marie Montpetit

M. Pascal Bérubé

Mme Claire Samson

M. Gabriel Nadeau-Dubois

Mme Martine Ouellet

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de la culture et de l'éducation

Mise aux voix

Projet de loi n° 157 — Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant
le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière

Adoption

Mme Lucie Charlebois

M. Sylvain Pagé

M. Simon Jolin-Barrette

M. Amir Khadir

Mme Martine Ouellet

M. Marc Bourcier

Mme Lise Lavallée

Mme Lucie Charlebois (réplique)

Vote reporté

Projet de loi n° 150 — Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions
des discours sur le budget du 17 mars 2016 et du 28 mars 2017

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et
des amendements du député de Rousseau

M. Carlos J. Leitão

M. Nicolas Marceau

M. François Bonnardel

Mise aux voix des amendements

Mise aux voix du rapport amendé

Projet de loi n° 176 — Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions
législatives afin principalement de faciliter la conciliation
famille‑travail

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et
des amendements du député de Gouin

Mme Dominique Vien

M. Guy Leclair

M. Marc Picard

M. Gabriel Nadeau-Dubois

Mise aux voix des amendements

Mise aux voix du rapport

Adoption

Mme Dominique Vien

M. Guy Leclair

M. Marc Picard

M. Gabriel Nadeau-Dubois

Mme Dominique Vien (réplique)

Vote reporté

Projet de loi n° 170 — Loi modernisant le régime juridique applicable aux permis d'alcool et
modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons
alcooliques

Adoption

M. Martin Coiteux

M. Stéphane Bergeron

M. André Spénard

Vote reporté

Projet de loi n° 128 — Loi visant à favoriser la protection des personnes par la mise
en place d'un encadrement concernant les chiens

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

M. Martin Coiteux

M. Stéphane Bergeron

Mme Sylvie D'Amours

Mise aux voix du rapport

Ajournement

Journal des débats

(Treize heures quarante minutes)

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, chers collègues, je vous souhaite une très bonne séance. Veuillez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous en sommes à la rubrique de la déclaration de députés, et je cède la parole à M. le député de Trois-Rivières.

Souligner la tenue de l'exposition en plein
air Ma ville, mon quartier, ma rue

M. Jean-Denis Girard

M. Girard : Merci, M. le Président. Jusqu'au 1er octobre, plusieurs artistes sculpteurs exposeront 31 oeuvres le long des rues Nérée-Beauchemin, des Bouleaux et des Frênes à Trois-Rivières. Le projet Ma ville, mon quartier, ma rue est une exposition extérieure qui permet de contempler l'art public et mettre en valeur de nombreux artistes de la région.

Depuis maintenant trois ans, l'instigatrice du projet, Mme Thérèse Thibodeau-Paquin, travaille à rassembler des artistes pour créer des oeuvres uniques et les exposer en plein air afin d'embellir le quartier. C'est une belle collaboration entre les propriétaires et les artistes et qui offre une grande visibilité à ce beau quartier de Trois-Rivières. Nombreux sont les visiteurs qui se déplacent pour admirer les oeuvres.

Je tiens à souligner la mémoire de M. Pierre Landry, sculpteur trifluvien, décédé le mois dernier. Une de ses oeuvres fait d'ailleurs partie de l'exposition.

Thérèse, je te félicite, toi et ton équipe, pour votre travail, votre dévouement pour l'art ainsi que votre désir de mettre en valeur des artistes d'ici. Bravo! Et longue vie à ce beau projet!

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Trois-Rivières. M. le député de Labelle, à vous la parole.

Souligner le 50e anniversaire de L'Ordre des
Filles d'Isabelle, Saint-Jovite, Cercle n° 1158

M. Sylvain Pagé

M. Pagé : Merci, M. le Président. Alors, L'Ordre des Filles d'Isabelle, Cercle 1158 de Saint-Jovite, célèbre cette année son 50e anniversaire. C'est sous la devise Unité, amitié et charité que, depuis de nombreuses années, ces femmes catholiques viennent en aide à un nombre incalculable de personnes de notre communauté grâce à leur implication dans des oeuvres charitables, sociales et éducatives. 50 ans et tellement de chemin parcouru depuis la création de l'organisation en 1968! Elles ont toutes les raisons de célébrer.

Le succès de cette longévité, M. le Président, provient de leur dynamisme, de leur dévouement et de la générosité, bien sûr, de celles qui s'y impliquent. De plus, elles font la promotion et encouragent une qualité de vie enrichissante, le développement et le progrès personnels.

Au nom de la population que je représente à l'Assemblée nationale, j'adresse donc mes plus sincères remerciements à toutes les bénévoles pour leur engagement exemplaire. Bravo! Je les félicite.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Labelle. Mme la députée de Vaudreuil, à vous la parole.

Rendre hommage à Mme Line Lebrun pour son
engagement dans la lutte contre le cancer

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci, M. le Président. Jeudi dernier, entourée de ses proches, une très grande citoyenne de Vaudreuil s'est éteinte à la maison des soins palliatifs de Hudson. Mme Line Lebrun, une femme de coeur, laisse derrière elle l'image d'une battante, qui a lutté de façon remarquable, sans jamais baisser les bras, pendant plus de 20 ans, contre le cancer.

Récemment, le 25 mai dernier, elle a participé toute la nuit jusqu'à l'aube pour paver la voie à tous ceux qui marchaient à ses côtés dans le cadre du Relais pour la vie de Vaudreuil-Soulanges, et ce, pour une 15e année consécutive, alors qu'elle savait que ses jours étaient comptés.

À toute sa famille et ses amis, sachez que vous êtes privilégiés d'avoir accompagné cette grande dame. Elle a été une source d'inspiration pour nous tous. L'héritage demeure et continuera. Line sera maintenant et pour toujours un luminaire qui brillera sur notre parcours.

Mes sincères condoléances à ses parents, son conjoint Marc, ses deux fils, Kenny et Karl, ainsi qu'à l'ensemble de sa famille, de ses amis, de ses fidèles collaborateurs de la Société canadienne du cancer. Mes sympathies à vous tous.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de Vaudreuil. Mme la députée de Repentigny, à vous la parole.

Souligner la tenue du 15e Relais pour la vie de Repentigny

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : Merci, M. le Président. Pour une 15e année consécutive se tiendra le Relais pour la vie de Repentigny, et ce, au magnifique parc de l'Île-Lebel. Durant toute une nuit, des centaines de personnes marcheront, unies pour une seule et même cause : le cancer.

Au cours de cette marche, nous célébrerons les personnes qui ont gagné leur combat contre le cancer, nous rendrons hommage à celles qui nous ont quittés et nous soulignerons notre engagement à continuer notre lutte contre le cancer en encourageant la recherche. Pour y avoir participé pendant sept ans, je peux vous assurer que cette marche en est une d'espoir et qu'elle nous marque à jamais.

M. Jean-Claude Lelièvre, président du relais, est entouré d'une équipe de bénévoles chevronnés qui se distinguent par leur dévouement, leur apport inestimable et leur implication remarquable. Au cours de toutes ces années, plus de 3 millions ont été versés à la Société canadienne du cancer par le relais Repentigny.

Bravo et merci aux organisateurs et aux marcheurs qui rendent l'événement unique année après année! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Repentigny. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, je vous cède la parole.

Souligner l'initiative de L'Association des étudiants noirs en droit du
Canada qui offre des services juridiques gratuits à Montréal-Nord

Mme Rita Lc de Santis

Mme de Santis : M. le Président, le monde juridique est d'emblée difficile d'approche. Si des barrières supplémentaires comme la langue, la pauvreté ou le niveau de scolarisation viennent entraver davantage notre accès, il se peut que nous baissions les bras. Et souvent nous restons aux prises avec ces enjeux sans vraiment savoir vers qui nous tourner.

C'est pour offrir des solutions à ces problèmes que, depuis le 12 mars dernier, L'Association des étudiants noirs en droit de l'UQAM offre des cliniques juridiques gratuites au Centre communautaire multi-ethnique de Montréal-Nord. Toute la communauté nord-montréalaise peut venir consulter un étudiant bénévole, qui profite de l'occasion pour mettre en oeuvre ses connaissances.

Le centre communautaire, qui avait déjà offert ces services dans le passé, veut poursuivre ce partenariat gagnant-gagnant; un exercice enrichissant pour les élèves et de l'aide et des conseils pour la communauté. Il suffit de passer le mot pour en profiter.

Merci à L'Association des étudiants noirs en droit de l'Université du Québec à Montréal et au Centre communautaire multi-ethnique...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. M. le député de Gouin, à vous la parole.

Faire entendre la voix des femmes de la Coalition du
8 mars de La Petite-Patrie à l'Assemblée nationale

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. J'aimerais prendre un instant aujourd'hui pour porter la voix des femmes de mon comté à l'Assemblée nationale du Québec.

En effet, lors d'une soirée-spectacle féministe organisée par les groupes membres de la Coalition 8 mars de La Petite-Patrie, 135 participantes ont signé un manifeste. J'aimerais vous en lire quelques extraits.

«Pour chacune des femmes habitant La Petite-Patrie[...], nous sommes l'écho de ces voix [...] qui foncent et qui dénoncent : Non aux violences faites aux femmes!

«#etmaintenant, les femmes de La Petite-Patrie réclament :

«Un quartier sécuritaire[...];

«Une volonté et un engagement politiques qui s'attaquent au patriarcat afin d'abattre ce système qui tolère et légitimise le harcèlement de rue, les agressions verbales, physiques et sexuelles, les viols et l'inceste[...];

«Des lieux qui nous permettent d'échanger, de témoigner, [...]d'être crues et entendues et d'organiser nos luttes[...];

«Des alliés sur qui chacune peut compter au quotidien [...] et en public, en famille et au travail[...].

«Ensemble, nous pouvons transformer notre quartier, notre société... le monde!» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Gouin. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, à vous la parole.

Féliciter l'équipe du projet Tuning-moteur de persévérance,
primée au salon Auto sport de Québec

Mme Caroline Simard

Mme Simard : Merci, M. le Président. Je suis heureuse de souligner le succès de la sixième présentation du projet Tuning-moteur de persévérance qui a été mis en place à l'école secondaire du Mont-Sainte-Anne par le Carrefour jeunesse-emploi Charlevoix—Côte-de-Beaupré. Les membres de l'équipe, composée de huit élèves confrontés à des difficultés d'apprentissage, ont vécu de beaux moments au 49e salon de l'Auto sport de Québec, se méritant la troisième place dans la catégorie M-Built.

Après d'innombrables heures consacrées à restaurer une Porsche 917K, une réplique de cette voiture de course mythique connue pour avoir remporté les 24 heures du Mans en 1970, les participants ont appris et compris également que les efforts mènent bien souvent à des résultats et que, s'ils mettent les mêmes efforts dans leurs études, les résultats devraient suivre, une façon de penser, d'ailleurs, qu'ils pourront reproduire dans tous les aspects de leur vie.

Je tiens à féliciter les jeunes pour ce bel accomplissement et remercier les mentors du projet, MM. Christian Fortin, Christian Lajeunesse et Alain Tremblay. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré. M. le député d'Arthabaska, je vous cède la parole.

Féliciter l'école polyvalente La Samare de
Plessisville pour sa collecte de sang record

M. Éric Lefebvre

M. Lefebvre : Merci beaucoup, M. le Président. Le 30 avril dernier, la polyvalente La Samare de Plessisville a accueilli pas moins de 1 091 donneurs dans le cadre de sa huitième collecte de sang d'Héma-Québec. L'organisation a ainsi établi un record mondial pour une collecte de sang organisée dans une école secondaire. L'exploit a d'ailleurs été reconnu dans le cadre d'un congrès des centres de prélèvement de sang américain à Dallas en mai dernier. Il s'agissait de la toute première mise en nomination d'Héma-Québec lors de cet événement international.

Vous comprendrez que c'est avec une immense fierté qu'aujourd'hui je rends hommage à l'instigateur de la collecte de sang, l'enseignant M. François Gagnon, qui est avec nous ici, ainsi qu'à l'enseignante Mme Nathalie Fillion, également présente. Et j'en profite pour féliciter tous les élèves, tout le personnel de la polyvalente La Samare de Plessisville ainsi que tous les généreux donateurs. Merci du fond du coeur.

• (13 h 50) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député d'Arthabaska. M. le député de Huntingdon, à vous la parole.

Souligner le 30e anniversaire de la Cidrerie du Minot inc.

M. Stéphane Billette

M. Billette : Merci beaucoup, M. le Président. Je profite de la tribune qui m'est offerte aujourd'hui pour souligner le 30e anniversaire de la Cidrerie du Minot.

Établie à Hemmingford depuis 1987, cette entreprise familiale est un incontournable au Québec. Avec une expertise de plus de 150 ans, la famille Demoy est lauréate de nombreux prix et de reconnaissances nationales et internationales pour leur savoir-faire et la grande qualité de leurs produits. En plus d'offrir une dizaine de cidres, la famille Demoy a à coeur la communauté et organise depuis maintenant quatre ans une foire estivale en plein air.

Je tiens donc aujourd'hui à féliciter M. et Mme Demoy ainsi que la relève familiale pour le développement de leur entreprise à travers ces 30 années. Votre travail exemplaire offre une très belle visibilité à la région et au cidre québécois.

En terminant, je souhaite à la Cidrerie du Minot beaucoup de succès dans les années à venir. Merci.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Huntingdon. Enfin, M. le député de Rimouski, à vous la parole.

Remercier Mme Elsa Lambert pour son travail
au bureau de circonscription de Rimouski

M. Harold LeBel

M. LeBel : Merci, M. le Président. En cette fin de session parlementaire, permettez-moi de saluer Elsa Lambert, attachée politique à mon bureau de comté.

Elsa, c'est une collaboratrice exceptionnelle qui nous quittera pour d'autres projets. Elle nous a annoncé il y a quelque temps qu'elle partira en octobre prochain pendant un an en Haïti avec l'UPA Développement international dans le cadre du programme Les Savoirs des gens de la terre en Haïti. Elle fera de la formation pour permettre aux communautés de se développer autour de l'agriculture, pour réduire la pauvreté en accroissant leurs revenus.

Elsa, c'est une féministe qui refuse les injustices. C'est à mon bureau de comté qu'elle reçoit des cas, entre autres, de l'aide sociale ou d'autres cas comme ça. C'est elle qui travaille sur ces dossiers-là d'une façon acharnée pour trouver des solutions. Puis elle le fait pour mon bureau de comté, mais elle reçoit des appels de partout au Québec. Des gens qui la connaissent ou par mon dossier de porte-parole pauvreté la rejoignent pour les aider, et elle le fait partout, partout, partout.

Elsa, tu es une femme de coeur, puis des femmes comme toi, avec du coeur autant, ça donne de l'espoir pour l'avenir. Et j'espère que tu vas avoir une belle mission en Haïti, et on a hâte de te revoir. Salut!

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Rimouski. Voilà qui met un terme à la rubrique Déclarations de députés.

Et je suspends les travaux de l'Assemblée quelques instants.

(Suspension de la séance à 13 h 52)

(Reprise à 14 h 1)

Le Président : Mesdames messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci.

Présence de Mme Danielle St-Amand, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale

Je voudrais souligner la présence, dans nos tribunes, de Mme Danielle St-Amand, notre ancienne collègue de Trois-Rivières. Et maintenant vous pouvez vous asseoir.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Des voix : ...

Le Président : C'est mieux.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre de l'Énergie.

Plan directeur en transition, innovation et
efficacité énergétiques 2018-2023

M. Moreau : Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le premier plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétiques du Québec. Il couvrira la période 2018-2023.

Le Président : Ce document est déposé. M. le ministre des Forêts.

Rapport concernant la reconnaissance et le financement
de Zecs Québec pour les années 2016, 2017 et 2018

M. Blanchette : Alors, M. le Président, permettez-moi de déposer le rapport du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs concernant la reconnaissance et le financement de la Fédération québécoise des gestionnaires de zecs pour les années 2016, 2017 et 2018.

Le Président : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Fournier : M. le Président, je dépose les réponses du gouvernement aux pétitions présentées par la députée de Repentigny le 25 avril 2018, la députée de Taillon le 1er mai, le député de Matane-Matapédia le 3 mai, le député de Granby le 8 mai et le député de Gaspé le 10 mai dernier.

Le Président : Ces documents sont déposés.

Lettre du député de Groulx concernant le rapport du comité
directeur de la Commission de l'Assemblée nationale

Pour ma part, je dépose une lettre que j'ai reçue concernant le rapport du comité directeur de la Commission de l'Assemblée nationale sur les suites du mandat d'enquête découlant de la motion présentée par le député de Groulx en vertu des articles 324 à 327 du règlement.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission des finances publiques et député de Montmorency.

Étude détaillée du projet de loi n° 141

M. Bernier : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission des finances publiques qui, les 20, 21 et 22 février, 13, 14, 15, 20, 21 et 22 mars, 17 avril, 3, 8, 9, 10, 17, 29, 30 et 31 mai et 5 et 6 juin 2018, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 141, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d'argent et le régime de fonctionnement des institutions financières. La commission a adopté le texte du projet de loi avec de nombreux amendements.

Le Président : Ce rapport est déposé. M. le président de la Commission de l'aménagement du territoire et député de Chomedey.

Consultations particulières sur l'accès aux
services financiers de proximité en région

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission de l'aménagement du territoire qui, le 14 mai 2018, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le mandat d'initiative portant sur l'accès aux services financiers de proximité en région. La commission s'est également réunie en séance de travail les 15 mars, 14 mai et 7 juin relativement à ce mandat. Ce rapport contient quatre recommandations.

Le Président : Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, Mme la députée de Taschereau.

Donner le mandat à la Commission des institutions d'examiner
le phénomène des groupes à dérive sectaire

Mme Maltais : M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 2 570 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que tous les citoyens sont égaux et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi;

«Considérant qu'il est inadmissible que, sous le couvert de la liberté de religion, des gestes illégaux puissent être posés par des groupes à dérives sectaires sans être sanctionnés;

«Considérant que nos lois sanctionnent l'incitation au suicide et la non-assistance à une personne en danger;

«Considérant qu'il est nécessaire d'examiner l'impact de l'endoctrinement sur la validité du consentement libre et éclairé;

«Considérant que nos lois protègent les citoyens de fraudes ou d'extorsions, mais que sont tolérées les pressions pour financer certaines organisations;

«Considérant que certains enfants se retrouvent sans protection en raison de la difficulté d'intervention de la DPJ;

«Considérant que des groupes conviennent de tribunaux internes et appliquent une justice parallèle, notamment en cas d'abus sexuel;

«Considérant que nous ne pouvons tolérer que des enfants n'aient pas accès à l'éducation;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons que la Commission des institutions se saisisse d'un mandat d'initiative pour examiner la possibilité que, sous le couvert de la liberté de religion, des gestes illégaux puissent être posés par des groupes à dérives sectaires sans être sanctionnés et qu'elle entende à cette fin tous les groupes qu'elle jugera pertinents.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : L'extrait de cette pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.

J'ai toutefois été avisé qu'après la période de questions et de réponses orales il pourrait y avoir un vote ou des votes requérant l'approbation des deux tiers des membres de l'Assemblée.

Questions et réponses orales

Entre-temps, nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Protection de la gestion de l'offre en agriculture

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Une chose a été confirmée en fin de semaine, c'est que le président américain a une obsession contre le système de gestion de l'offre canadien et où le Québec a beaucoup à gagner et beaucoup à perdre. Pourquoi est-il obsédé par ça en particulier? Parce que c'est le maillon faible, et il a bien vu qu'à chaque fois qu'une négociation internationale est devenue chaude Ottawa a laissé tomber des morceaux de la gestion de l'offre. C'est-à-dire, ils disent : On est pour le système, mais on ouvre la porte à plus d'importations de lait étranger.

Le premier ministre, libéral, a laissé passer, avec l'accord européen, une perte de 250 millions de dollars non compensée par année pour nos producteurs de lait. Le premier ministre libéral actuel n'a rien dit lorsque M. Trudeau a signé l'entente transpacifique qui ajoute une perte annuelle de 300 millions pour nos producteurs. La semaine dernière, M. Trudeau a déclaré qu'il allait faire preuve de flexibilité avec les États-Unis sur la question du lait. Ça, ça veut dire des importations laitières supplémentaires.

Est-ce que le premier ministre va dire ici aujourd'hui que c'est terminé, il y aura zéro dollar supplémentaire d'importation de lait accepté par son gouvernement et cette Assemblée?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Non seulement, M. le Président, je vais le dire ici, mais je suis même persuadé que la grande majorité des Québécoises et des Québécois vont également être solidaires envers leurs agriculteurs et leurs agricultrices. Pourquoi avons-nous un système de gestion de l'offre? Est-ce que c'est par une affection particulière pour un système de gestion quelconque? Non. Parce que ça indique le type d'agriculture que nous voulons développer chez nous, qui est une agriculture à taille humaine, à visage humain et à nom humain — n-o-m. Mon collègue le ministre de l'Agriculture a eu cette belle formule l'autre jour, lorsqu'on a lancé la politique bioalimentaire : Chez nous, les fermes ont un nom de famille. Et ça, on veut tous et toutes le garder. Je suis persuadé qu'on est tous unis d'ailleurs, ici, à l'Assemblée, autour de cette question.

Ça va être important parce que le président américain, à travers toutes sortes de déclarations intempestives, a décidé clairement qu'il allait, entre autres, cibler le domaine de la gestion de l'offre. On n'est pas à la veille, je crois, de reprendre les négociations là-dessus, compte tenu de l'ambiance dans laquelle s'est déroulé le G7.

Mais cependant il est très, très important... D'ailleurs, j'aurai une motion conjointe avec mes collègues, qui réaffirme notre soutien entier au système de gestion de l'offre, et on aura l'occasion de la faire parvenir ensemble, comme témoin de la volonté collective des Québécois. Je dis «collective» parce que ce n'est pas uniquement les gens des villes ou des campagnes, c'est tous les Québécois, tous les Québécois qui vont vouloir manifester leur soutien envers leurs agriculteurs, et le type de gestion de l'agriculture que nous voulons mettre en place, et, au-delà de ça, le type d'agriculture que nous voulons au Québec.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Vous comprenez mon inquiétude, parce que, sous le gouvernement libéral actuel, l'industrie laitière québécoise a perdu 500 millions par année à cause des concessions qui ont été faites sans résistance du gouvernement libéral. Et là, cette motion que vous avez déposée, M. le premier ministre, je vous le dis, M. le Président, nous avons voulu ajouter les mots «refus absolu de toute concession sur les importations laitières», votre parti a refusé de mettre ça dans la motion.

Pourquoi voulez-vous ne pas refuser toute concession dans les importations?

• (14 h 10) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : C'est quand même un peu surprenant sur le plan historique, alors que c'est le Parti québécois qui, le premier, a donné son accord à l'accord de libre-échange européen, y compris la chose très explicite qui était contenue sur les produits laitiers. Je le signale en passant.

Mais, au-delà de ça, je pense que ce qu'il faut dire aux Américains, par l'intermédiaire de cette Assemblée et autrement également, c'est que, s'il y a un pays qui soutient massivement son agriculture par des subventions et des tarifs, c'est bien les États-Unis d'Amérique. Il y a des tarifs massifs sur les arachides, sur le tabac, sur le sucre. Dans le domaine laitier, on estime que trois quarts des revenus des producteurs laitiers sont directement ou indirectement liés au soutien gouvernemental que le gouvernement américain et les États apportent à cette industrie.

Le Président : En terminant.

M. Couillard : Ils n'ont pas de leçons à donner à personne là-dessus.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Ils n'ont pas de leçons, mais le premier ministre non plus. Je lui ai demandé ici, notre parti lui a demandé, à lui, de ne pas ratifier l'accord commercial avec l'Europe tant que nous n'avions pas une compensation entière de notre industrie laitière. Il a dit : Je vais signer de toute façon. Exactement comme le chef de la CAQ, qui a dit : Je vais signer de toute façon.

Là, pourquoi refuse-t-il de mettre dans sa motion le «refus absolu de toute nouvelle augmentation des importations laitières»? Pourquoi?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Je continue mon petit rappel historique. Ici, dans Le Devoir, le 19 octobre 2013, je cite le titre, et il y a une fort jolie photo de notre collègue député de Marceau : Libre-échange Canada-UE : un appui sans réserve du Québec. Sans réserve. Sans réserve, c'est sans réserve. Alors, je pense qu'il n'y a pas de leçons à donner à quiconque maintenant de la part du Parti québécois. «Sans réserve», c'est bien ce qui est marqué.

Alors, M. le Président, on va bien sûr veiller aux intérêts du Québec. Je pense que le premier ministre Trudeau a bien fait son travail en fin de semaine en résistant à M. Trump avec un mélange de fermeté et en évitant également l'escalade verbale, ce qui m'apparaît utile dans ce contexte-ci. Mais nous, on va veiller particulièrement aux intérêts du Québec, dont la question de la gestion de l'offre et l'exception culturelle, en passant.

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Alors, ceux qui savent se souvenir des choses savent qu'à la motion de ratification de l'accord avec l'Europe le gouvernement a voté pour, la CAQ a voté pour, le Parti québécois a voté contre parce qu'il n'y avait pas de compensation de nos agriculteurs, comme nous nous étions engagés lorsque nous étions au gouvernement.

Mais pourquoi le premier ministre continue-t-il à jouer sur les mots? On est pour le maintien de la gestion de l'offre, mais on ne veut pas mettre dans notre motion un refus de toute augmentation des importations. Pourquoi?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Bien, il ne faut pas jouer non plus sur l'histoire. Le collègue... Je m'excuse, la photo manque de perspective un peu, mais je vais quand même montrer l'article. Le titre disait : Un appui sans réserve du Québec. «Entrevoyant des "gains significatifs" pour l'économie québécoise, le gouvernement péquiste appuie sans réserve l'entente de principe — sans réserve — sur le vaste accord de libre-échange conclue...»

Alors, c'est un exemple, encore une fois, de double discours : le discours de l'opposition et le discours du gouvernement. On a pris l'habitude, on le voit dans nos nombreux secteurs. Tiens, les services de garde, l'autre jour, c'était exactement ça.

Le Président : C'est une belle photo, mais ce n'est pas un tableau. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, en principale.

Bilan du ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Alors, M. le Président, le bilan de ce gouvernement en éducation ne passera pas à l'histoire, ça, c'est le moins qu'on puisse dire. Rappelons-nous la chaise musicale du début de mandat, où les ministres se sont succédé, ensuite les deux projets de réforme proposés par le gouvernement qui ont été des échecs monumentaux. Les deux premières années ont été celles des coupures : 375 professionnels en moins, des coupes dans l'aide aux devoirs, des coupes dans les organismes de décrochage scolaire, on a même vu des chaînes humaines autour des écoles pour dire au gouvernement d'arrêter de couper.

Le ministre actuel est arrivé avec ses bonnes intentions. Il a pris quelques mois pour faire une consultation, il a sorti son plan sur la réussite. Les mêmes observateurs qui ont souligné les bonnes intentions du ministre à l'époque sont en train de dégonfler. En effet, dans les 10 mesures-phares de sa politique, seulement qu'une — une, M. le Président — est pleinement réalisée, pas d'institut national d'excellence, rien sur la qualité du français de nos enseignants, rien sur l'âge de fréquentation scolaire, rien sur les élèves en difficulté dans nos écoles.

Ça, c'est votre bilan, M. le ministre...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation. Merci.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Depuis 2016, on a fait passablement de choses, puis je vais prendre quelques instants pour l'expliquer, M. le Président. D'abord, dans cette première année où on a fait le projet de loi n° 105, on a fait une réelle décentralisation puis un changement au niveau de la gouvernance, M. le Président. On a fait, effectivement, cette consultation pour la Politique sur la réussite éducative. Dans la même année, M. le Président, on a consulté partout au Québec, on a travaillé avec l'ensemble des gens.

Vous savez on a fait quoi? On a rédigé cette politique et on l'a présentée. Depuis, M. le Président, il y a 12 mois d'écoulés à peu près, 12 mois sur 13 ans d'une politique. Pourtant, dans cette même période, M. le Président, on a fait ceci. On s'est donné les moyens financiers de mettre de l'avant nos mesures, il y a des budgets importants et récurrents, plus importants en éducation. On a mis de l'avant, M. le Président, des mesures pour embaucher du personnel, des professionnels et des enseignants, un plan sur cinq ans. On a mis de l'avant des mesures pour pouvoir rénover des écoles, M. le Président, et en construire de nouvelles, c'est en cours, ça va se faire. Le changement, M. le Président, à l'égard des élèves avec des besoins particuliers, juste la façon de financer leurs services, M. le Président, qui devait être faite, c'est fait, ce sera prêt à l'automne.

M. le Président, sincèrement, les gens veulent que ça aille rapidement. J'en suis. Est-ce qu'on peut tout faire dans la même année? La réponse, c'est non. Est-ce qu'en éducation des fois c'est plus long? La réponse, c'est oui. Pourquoi? Parce que les changements, ils sont très importants, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : À écouter le ministre, M. le Président, une chance qu'ils ont fini par avoir ce ministre-là, sinon il n'y aurait absolument rien marché dans ce gouvernement-là.

Alors, un autre caillou dans le soulier du ministre, on se rapproche de la fin de l'année scolaire et on ne sait toujours pas ce qui va arriver avec le cours d'éducation à la sexualité, M. le Président. On ne sait même pas encore qui va enseigner, on n'a toujours pas le bilan des projets pilotes.

Alors, M. le Président, est-ce que le ministre peut nous dire ce qui va se passer en septembre avec les cours d'éducation à la sexualité ou c'est encore un autre échec de son gouvernement?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Je constate que la collègue change de sujet, parce que j'ai raison, au niveau de la politique, ça va prendre des années pour tout mettre en application. Les cours d'éducation à la sexualité, M. le Président, sont une autre réalisation concrète de ce qu'on a fait. On en a discuté avec la collègue, il y avait un momentum pour agir. Ils ont été coupés par le chef de la deuxième opposition, il n'y en a plus, M. le Président, dans nos écoles. Il y en aura, à partir de septembre, dans toutes les écoles du Québec. Pourquoi? D'abord, parce que ces apprentissages-là ont été proposés, ont été enseignés, et aujourd'hui tous les conseillers pédagogiques, M. le Président, qu'ils veulent couper, en passant, ont été formés dans chacune des commissions scolaires pour pouvoir le faire. Et ceux qui restent, M. le Président, s'il en restait, ce sera fait dans les prochaines semaines. Les écoles peuvent choisir, M. le Président, ce sera des enseignants, des professionnels, des organismes communautaires.

Le Président : En terminant.

M. Proulx : En septembre, M. le Président, éducation à la sexualité pour tout le monde.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Et, comme si ce n'est pas suffisant, M. le Président, après 15 années de gouvernement libéral, nos enfants ont plus de chances de tomber dans une école vétuste que dans une école saine. Ah! Puis j'oubliais, d'ailleurs, la plus grande réalisation du ministre. Savez-vous c'est quoi, M. le Président, son legs? Bien, c'est d'avoir donné la plus haute baisse de taxe scolaire, qui fait en sorte que c'est : aucun service à nos enfants. C'est la plus haute baisse de taxe...

Une voix : ...

Mme Poirier : Oui, c'est ça. En tout cas, la plus grosse baisse de taxe scolaire — on va l'avoir. M. le Président, M. le Président, le legs de ce ministre-là, ça va être d'avoir coupé les taxes scolaires, pas d'avoir augmenté la réussite de nos enfants.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Respectueusement dit, je vais continuer à répondre aux questions. Très honnêtement, nous sommes dans la situation suivante : il y a de la mobilisation, M. le Président, il y a des gens qui adhèrent actuellement... il y a des gens, tout un milieu, qui se sont mis en mouvement. Ce que fait la collègue, c'est nier ce qui se passe dans les écoles, M. le Président. Il y a de l'espoir, il y a de la confiance. Oui, il y a encore des défis, oui, il y a encore des choses à régler. Vous savez quoi? On a initié le mouvement, et ça va continuer avec le gouvernement libéral, M. le Président.

Le Président : Principale, Mme la députée de Taschereau.

Indemnisation des résidents et des commerçants touchés
par les manifestations lors du Sommet du G7

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : M. le Président, je m'apprêtais ce matin à poser une question sur l'encadrement des groupes à dérive sectaire, un sujet important, mais une remarque du ministre de la Sécurité publique m'amène à d'abord faire ce pour quoi je suis élue, c'est-à-dire représenter les gens de Québec et les gens de Taschereau. Il a dit ce matin refuser de s'engager à ce que les commerçants qui ont perdu des revenus à cause du G7 soient dédommagés. Il y aura donc 650 millions de dollars pour assurer la sécurité et rien pour les commerçants qui ont vécu cette fin de semaine dans une ville déserte. Ce qui devrait être la norme, c'est que le fédéral accepte de payer toute la facture. C'est son G7, c'est à lui à le payer.

Est-ce que le ministre peut enfin prendre fait et cause pour les commerçants de Québec et leur dire qu'ils vont se battre pour qu'ils soient complètement compensés pour cette fin de semaine?

• (14 h 20) •

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Ce n'est pas seulement cette semaine, M. le Président, qu'on va prendre fait et cause pour les citoyens et les commerçants de Québec. La semaine dernière, on prenait fait et cause pour eux alors que la députée de Taschereau anticipait du vandalisme partout. Et j'ai toujours dit qu'avant de constater des dégâts je pense que la priorité devait être de prévenir ces dégâts. Alors, la députée de Taschereau, aujourd'hui, devrait se réjouir du fait que les stratégies policières en place ont non seulement permis aux gens de manifester dans l'ordre et la paix, mais qu'en plus on a évité de la casse, on a évité des dommages, et c'était la principale préoccupation des commerçants. Et on va rester aux côtés des commerçants. Il existe des programmes fédéraux, puis on va être là pour appuyer les commerçants dans toute demande à cet égard. Ceci dit, ce qui leur importait beaucoup, c'était d'éviter la casse, et nous l'avons évitée.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Justement, hier, Joël Lightbound, le ministre fédéral, a déclaré... Il est ministre? Il est député. Il a déclaré que seuls les commerces qui ont été fermés pourraient être compensés dans le programme fédéral.

Alors, la question, c'est : Est-ce que vous allez vous battre ici pour que les commerces qui ont été désertés en fin de semaine, comme je l'avais prévu, soient compensés? C'est ça, la question.

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Je ne sais pas si la députée de Taschereau avait bien prévu les événements, parce que, la semaine dernière, elle nous annonçait une casse monumentale à Québec et elle nous accusait de ne pas prendre les moyens pour la prévenir. Et j'ai insisté sur le fait qu'on prenait tous les moyens pour la prévenir et qu'on s'était assurés, avec le gouvernement fédéral, que les coûts en matière de sécurité nous soient remboursés.

Je répète, et on était en mode préventif, là aussi, avec les commerçants, mon collègue, qui n'est pas seulement ministre de l'Éducation, mais ministre de la Capitale-Nationale, était aux côtés de la ville de Québec pour annoncer qu'on allait s'occuper des commerçants aussi, le cas échéant où il y aurait de la casse. On va toujours rester du côté des citoyens, du côté des commerçants. Il existe des programmes fédéraux, on va appuyer les commerces.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Le programme fédéral... Ce que vous évitez de dire, ce que le ministre évite de dire, je vais le dire. Le programme fédéral renvoie, un, aux assurances, deux, ne s'adresse qu'aux commerces qui ont été fermés. Or, la grande majorité des commerces, comme je l'avais dit à la ville de Québec, ont voulu rester ouverts, parce qu'il y a des gens qui vivent, qui résident puis qui sont touristes dans cette ville-là.

Or, la semaine dernière, je lui ai posé la question. Il a refusé de dire : Oui, on va se battre pour qu'ils soient dédommagés, ceux qui sont restés ouverts. Allez-vous le faire?

Le Président : On s'adresse à la présidence. M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : J'ai été très clair. La députée de Taschereau nous disait : Puis, s'il y a du vandalisme, allez-vous être aux côtés des commerçants? J'ai dit oui. Mon collègue ministre responsable de la Capitale-Nationale était aux côtés de la ville de Québec. On avait attaché des choses pour s'assurer qu'effectivement on n'allait laisser personne tomber.

La députée de Taschereau nous parle des programmes fédéraux. Il existe effectivement des programmes fédéraux, et nous, on va appuyer les commerçants. Mais, à ce titre, je pense que ce qui était le plus important, puis je pense qu'elle doit le reconnaître, c'est qu'on a évité la casse et c'était la principale crainte des commerçants. Les stratégies ont fonctionné, nous avons été préventifs, mission accomplie.

Le Président : Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Services aux élèves handicapés ou en difficulté
d'adaptation ou d'apprentissage

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, la semaine dernière, la Commission des droits de la personne a sorti un rapport accablant sur les services aux enfants qui ont des difficultés d'apprentissage au cours des 15 dernières années. On apprend dans ce rapport, entre autres, qu'il y a des enfants qui ont attendu deux à trois ans pour avoir un diagnostic, que d'autres parents ont dû payer des coûts exorbitants au privé pour avoir un diagnostic.

On apprend que le nombre de plaintes sur les services pour les enfants qui ont des difficultés d'apprentissage ont augmenté substantiellement au cours des 15 dernières années, et la Commission des droits de la personne conclut que plusieurs élèves en difficulté n'ont pas reçu les services auxquels ils avaient droit, ce qui a compromis leur réussite scolaire. C'est ça, la négligence des 15 dernières années. Il y a des enfants qui auraient dû avoir des services, qui ne les ont pas eus, et ça a compromis leur réussite.

Est-ce que le premier ministre a pris connaissance du rapport de la Commission des droits de la personne? Est-ce qu'il peut reconnaître aujourd'hui qu'à cause de ses décisions il y a des enfants qui n'ont pas reçu les services auxquels ils avaient droit?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, je vais répondre à mon collègue par un discours qui a déjà été le sien — en passant, on a même des citations — que la chose qu'il fallait faire, c'est redonner au Québec les moyens de ses ambitions, parce que, comme il le disait, on ne peut pas, d'un côté, parler de nos enfants dans les écoles puis, de l'autre côté, leur laisser un déficit qui va limiter notre capacité d'agir. J'ai la citation complète, on pourra la reprendre tantôt. Alors, il faudrait quand même qu'il parle du même côté de la bouche, selon les périodes dans lesquelles il s'exprime, parce qu'il y a une époque où il était... les coupes, laissez-moi vous dire, étaient vraiment sérieuses, on ne parlait pas de ralentissement des croissances de dépenses, on parlait d'amputation.

Maintenant, on a réussi, nous, à mettre 2,4 milliards de dollars dans le système d'éducation. Ça veut dire quoi, pour les parents qui nous écoutent? Ça veut dire qu'en septembre 2018 il y aura 3 100 enseignants de plus, et enseignantes, et, dans quatre ans, 7 700 de plus. Ça, c'est des gens qu'on voit, des personnes qui sont là pour s'occuper de nos enfants, pour leur réussite. Alors, il fallait retrouver les moyens de notre ambition, c'est ce qu'on a fait au Québec, d'ailleurs, en santé, en éducation et pour notre économie. Les résultats sont là pour le démontrer.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : Je veux mettre les choses bien claires : jamais je n'ai coupé dans l'aide aux enfants qui ont des difficultés d'apprentissage et jamais — je mets le premier ministre au défi — je n'ai appuyé les coupes dans l'aide aux enfants qui ont des difficultés d'apprentissage.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Legault : Le premier ministre nous dit : Dans les premières années, j'ai coupé et maintenant je remets l'argent. Bien, il est trop tard pour ces enfants-là.

Est-ce que le premier ministre comprend que c'est lui qui a compromis l'avenir de milliers d'enfants?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : On va faire jouer le vidéo encore pour pouvoir... regarde. Alors, je le cite, là, 5 mai 1999 : «Au cours des dernières années, le ministère de l'Éducation, comme la plupart de ministères au gouvernement du Québec, a dû procéder à des compressions pour réduire à zéro le déficit, une chose qui était souhaitable pour tous les jeunes du Québec. On ne peut pas, d'un côté, travailler pour l'avenir des jeunes dans nos écoles et continuer à leur laisser un déficit annuel important.» Est-ce qu'il prétend qu'à cette époque il n'y a pas eu de compressions dans les écoles? Il vient de dire qu'il a dit le contraire.

Maintenant, nous, ce qu'on a fait avec l'argent qu'on a pu réinjecter, grâce au rétablissement de la santé de nos finances publiques, c'est de nous donner plus de professeurs, offrir des services plus tôt pour les élèves en difficulté. Notre collègue a annoncé qu'il intervenait dès le début, dès le signalement, avant même que les diagnostics aient été complétés.

Le Président : En terminant.

M. Couillard : C'est ça, agir pour l'avenir de nos enfants, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : Je répète, jamais je n'ai coupé dans l'aide aux enfants les plus vulnérables. Il y a une différence de parler en général de l'éducation puis de parler de l'aide, des services aux enfants qui ont des difficultés d'apprentissage...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Des voix : ...

Le Président : Bon, ça va?

Des voix : ...

Le Président : Je vous demande d'être moins bruyants, c'est clair? M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Il ne faut jamais, jamais couper dans les services aux enfants qui ont des difficultés d'apprentissage, ce sont des gens vulnérables. Honte au premier ministre.

Des voix : ...

Le Président : Bon...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Des voix : ...

Le Président : Là, j'attends que tout le monde se soit calmé, là. M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, le collègue crie. Moi, je vais garder mon calme. Je vais lui répéter que les citoyens et citoyennes pourront porter un jugement sur quelqu'un qui vient de dire ce qu'il a dit, alors qu'il disait exactement le contraire. Là, je comprends qu'il a ajusté le message : il a coupé en général. Alors, ce n'est pas pareil, il nous a bien expliqué la différence. Mais il a très bien dit, il y a quelques années... et, à moins qu'il ait dit ça dans une autre incarnation, il a dit exactement ce qu'il est en train de nous reprocher, il l'a fait.

Maintenant, moi, je me souviens, et c'est plus près de son époque à lui, quand je suis arrivé comme ministre de la Santé et des Services sociaux, les parents des enfants autistes poursuivaient le gouvernement du Québec — tiens, c'était le ministère de la Santé, ça, d'ailleurs — parce qu'il y avait zéro service pour les autistes, ils poursuivaient le gouvernement. On a réparé ça, on a mis de l'argent, on a créé le système...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...alors on n'a pas rien à apprendre de lui, M. le Président.

Le Président : Principale, M. le député...

Une voix : ...

Le Président : M. le leader. Principale, M. le député de Chambly.

Frais imposés aux parents par les commissions scolaires

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, en septembre 2017, le ministre de l'Éducation a promis de régler le problème des frais scolaires abusifs facturés aux parents. Jeudi dernier, neuf mois plus tard, le ministre nous a encore promis de régler le problème dans un éventuel prochain mandat. Ça, c'est l'inaction libérale dans toute sa splendeur, un chef-d'oeuvre de pelletage par en avant, je pense que ça leur a pris une souffleuse. Il n'y a pas eu de conférence de presse à 60 000 $ cette fois-là, pas de robot, pas de vedette, pas de son et lumière, il était peut-être gêné un petit peu. Le ministre a dévoilé une directive qui entretient la confusion et qui laisse même planer la menace de nouveaux recours collectifs de la part des parents. Le ministre a tenu une consultation qui aboutit sur une directive floue et une promesse de consultation. On n'avance pas, M. le Président.

Est-ce que le ministre reconnaît qu'il s'est traîné les pieds et qu'il entretient le flou sur ce qui pourra ou ne pourra pas être chargé aux parents en septembre prochain?

• (14 h 30) •

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : M. le Président, ce qu'on a fait en matière de gratuité, c'est ce qu'il fallait faire. La première chose, c'est interpréter la loi, parce qu'on ne peut pas, par une directive, aller au-delà de la loi. Vous allez me donner raison, vous qui connaissez la procédure, M. le Président. Alors, on a interprété la loi de façon à ce que ce soit clair pour l'an prochain.

Ce qu'on a également dit, M. le Président, c'est qu'il y avait des questions à se poser, puis, socialement, ce débat-là, il va falloir le faire. Mais on va le faire quand? On va le faire à partir et à compter de la prochaine session, quand le ministère de l'Éducation va initier une démarche administrative qui deviendra une démarche parlementaire et consultative. Qui va nous amener à quoi? À préparer et à déposer des modifications à la Loi sur l'instruction publique pour qu'on puisse convenir ensemble de ces zones, M. le Président, où la décision, on ne peut pas la prendre maintenant.

Alors, ce qu'on a fait, M. le Président, c'est ce qui est attendu par le milieu, c'est ce qui est reconnu par les parents, c'est ce qui est reconnu par le milieu scolaire. Et on l'a fait au moment où ce recours collectif, qui n'est pas réglé en passant, mais pour lequel il y a des ententes, M. le Président, va bientôt connaître sa fin, et tant mieux si cela arrive dans les meilleurs délais.

Alors, ce qu'on a fait, M. le Président, c'est d'être responsables. Le collègue, il a déposé un projet de loi, il ne règle rien. Il ne parle pas des sorties scolaires, il ne parle pas des fournitures. Il parle du transport, des affaires qui existent déjà.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, on vient d'assister à un aveu d'échec. Mais, dès 2007, la Commission des droits de la personne sonnait l'alarme, et je cite le rapport : «...il devient impératif pour les commissions scolaires qui imposent de tels frais de les abolir immédiatement et de mettre fin aux pratiques illégales exercées par certaines d'entre elles.» Ça fait 11 ans, et le ministre, jeudi dernier, nous a annoncé des consultations, on n'avance pas.

Est-ce que le ministre reconnaît que son gouvernement et lui-même ont échoué à protéger le portefeuille des familles et à clarifier la situation?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : M. le Président, on l'a dit maintes et maintes fois ici, on ne peut pas intervenir dans ces recours juridiques, on ne peut pas intervenir. Le collègue peut, s'il veut, là, il peut s'inscrire, il peut même s'inscrire comme parent. Il pouvait faire tout ça, M. le Président, c'est son choix.

Ce qu'on a fait, c'est de se dégager l'espace, M. le Président, où, au moment où ça a été réglé... Parce qu'en passant on a fait ce qu'il fallait pour permettre au milieu d'être capable de s'entendre, nous avons déposé cette directive. Directive qui dit quoi, M. le Président? Voici la loi, voici ce qu'on a le droit de faire, voici ce qu'on va faire l'an prochain. Et on met même en place, M. le Président, des ressources pour accompagner les milieux, pour être capables de s'assurer qu'il n'y ait pas de débordement. On fait ce qu'il faut, on est à l'intérieur de nos limites.

Le Président : En terminant.

M. Proulx : Il faudra modifier la loi, on le fera dès la prochaine session. Peut-être...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, le ministre va déployer une escouade d'experts en interprétation de règlements flous. C'est quand même quelque chose. Ce que les familles voulaient, c'était une loi claire qui allait empêcher les commissions scolaires, encore une fois, de facturer des frais abusifs, mais le ministre n'a pas livré.

Est-ce que le ministre peut nous garantir que son règlement flou sera interprété de la même manière dans toutes les écoles et qu'aucun parent ne se fera imposer des frais abusifs? Moi, je ne pense pas.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : M. le Président, vous regarderez les communications de la Fédération des comités de parents du Québec, c'est 18 000 parents impliqués dans toutes les écoles, ils sont satisfaits. Ça, c'est la réponse au collègue, M. le Président. Moi, je les rencontre, ces gens-là, je vais dans leurs associations, je vais dans leurs assemblées ou leurs congrès. Vous savez quoi? Ils voulaient une directive qui mette les choses au clair, mais ils voulaient aussi qu'à terme on soit capables de s'entendre et de faire en sorte qu'il n'y en ait plus, des recours comme ceux-là. C'est ce qu'on va faire, M. le Président. Ça prend deux étapes pour s'y rendre. On est responsables, on va faire les deux étapes. Vous savez quoi? Je vais la faire, la consultation. Elle débutera en automne, et, au printemps prochain, on aura réglé ça une fois pour toutes.

Le Président : Principale, Mme la députée de Vachon.

Application d'une disposition de la Charte de la langue française

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Merci, M. le Président. Le français au Québec, c'est important et sérieux. 9 751 citoyens ont exigé le respect de la décision unanime des élus du peuple québécois ici, en cette Chambre, en mettant en vigueur les dispositions de l'article 1 de la loi n° 104 modifiant la Charte de la langue française pour mettre fin au bilinguisme institutionnel de l'administration publique dans ses communications écrites avec les autres gouvernements et les personnes morales, donc les corporations établies au Québec. M. le Président, je dépose ici le document, la pétition des 9 751 citoyens qui l'ont signée. Le 13 février dernier, j'appuyais Maxime Laporte, de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, qui a lancé cette pétition avec les Partenaires pour un Québec français, le Syndicat pour la fonction publique et aussi le Parti québécois et Québec solidaire. Il serait juste normal que l'appareil de l'État fonctionne uniquement en français avec les corporations établies ici.

Est-ce que le gouvernement libéral va dire oui aux 9 951 citoyens et appliquer l'article 1 de la loi n° 104, tel qu'il s'était engagé à le faire en votant pour le projet...

Le Président : Mme la députée, une question comme cela, est-ce que le document que vous voulez déposer est une pétition?

Mme Ouellet : C'est un document qui est une pétition électronique, mais qui n'est pas, malheureusement, admissible à la section des pétitions. Donc, je le dépose en document ici, donc, qui est déposé.

Le Président : Je ne pourrai pas la recevoir, madame, parce que, justement, elle n'est pas admissible comme une pétition ici, mais on vous reviendra. Mais je ne pourrai pas la recevoir ni même avec le consentement des gens. À moins qu'il y ait consentement, mais, normalement, notre règlement ne le prévoit pas, prévoit qu'on ne peut pas le recevoir.

Mme la ministre de la Culture, j'imagine?

Une voix : ...

Le Président : Oui, Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : M. le Président, c'est un document. Je ne le dépose pas en tant que pétition, je le dépose en tant que document. Donc, c'est pour témoigner...

Des voix : ...

Le Président : Ça va, ça va, ça va. Je vais régler ça moi-même. Mme la députée de Vachon, c'est que notre jurisprudence est très claire sur cette question-là, on ne peut pas déposer une pétition qui n'a pas été acceptée pour le dépôt ici. Alors, dans un sens ou dans l'autre, je ne peux pas faire le contraire de ce qu'on ne pourrait pas me permettre. Et, en principe, vous pourrez la déposer... si vous pouviez la déposer, vous pourrez la déposer au moment du dépôt des pétitions.

Mme la ministre de la Culture.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bien, d'entrée de jeu, je pense, ce n'est pas la première fois qu'on a des échanges là-dessus avec la députée de Vachon. Donc, je vais lui rappeler encore une fois que, depuis le dépôt de ce projet en 2002 sous un gouvernement péquiste, aucun gouvernement n'a appelé et n'a mis en oeuvre les dispositions de ce projet de loi, non plus sous le gouvernement du Parti québécois en 2012‑2013. Donc, il y a des raisons pour lesquelles ça n'a jamais été appelé. Tout le monde reconnaît que le français est la langue officielle du Québec, tout le monde reconnaît que c'est la langue de travail au Québec également. Il n'y a pas de question de bilinguisme institutionnel. Au contraire, les ministères et les organismes communiquent exclusivement en français, et ça, la députée de Vachon le sait très bien, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Vachon.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Malheureusement, M. le Président, ce que dit la ministre, ce n'est pas exact. Ce n'est pas vrai que l'administration publique communique uniquement en français avec les corporations, et c'est pour ça que cet article 1 était là.

Et je trouve ça dommage que la ministre répète encore la même réponse. Il n'est pas trop tard pour bien faire, M. le Président. Ce n'est pas parce que ça n'a pas été fait dans le passé que ça ne peut pas se faire aujourd'hui. Et je ne crois pas qu'il y ait de bonnes raisons pour lesquelles ça n'a pas été fait. Je pense que c'était une question de temps, et il n'est pas trop tard pour le faire aujourd'hui. Ça fait 15 ans que ça a été voté à l'unanimité, c'est notre responsabilité de parlementaires de respecter notre parole, M. le Président.

Le Président : Je pense qu'au départ il faut accepter la parole de chacun des membres de cette Assemblée. Mme la ministre de la Culture.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président, de le souligner, effectivement, parce que je pense qu'entre parlementaires... Je prends les questions, je pense qu'il faut écouter les réponses et prendre la parole également des élus quand on y répond.

Donc, c'est malheureux, je veux dire, j'ai été interpelée à plusieurs reprises, oui, je réponds la même chose parce que c'est toujours la même question qui m'est posée par la députée de Vachon, et, oui, les correspondances par les gouvernements se font de façon exclusive en français. Je pense que la nuance qu'elle veut y apporter... Si elle connaissait son article, l'article, ce qu'il dit, c'est «uniquement en français», ce n'est pas «exclusivement en français». Ce que la loi prévoit présentement, c'est «exclusivement en français», et c'est ce qui se fait, M. le Président, le français...

Le Président : En terminant.

Mme Montpetit : Et c'est ce qui se fait, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Vachon.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : M. le Président, vous me voyez très surprise de voir c'est quoi, la nuance entre «exclusivement» et «uniquement». Pour moi, ça veut dire que c'est seulement qu'écrit... seulement qu'en français, qu'il n'y a pas aussi une communication en anglais, donc, sinon, ça devient bilingue. Donc, ce qu'on demande, c'est que ça soit soit «exclusivement» ou «uniquement». Pour moi, ça veut dire la même chose, ce sont des synonymes. La ministre n'a pas l'air de trouver que c'est un synonyme, elle a l'air de trouver une différence entre ces deux choses-là. Donc, ce n'est pas vrai, ce n'est pas exact qu'actuellement les communications sont exclusivement, uniquement en français, et c'est ça qu'on veut changer, M. le Président.

Le Président : Mme la ministre de la Culture.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bien, écoutez, je pense que la députée de Vachon essaie de nous amener dans un débat où, de toute évidence, aucun gouvernement, aucun parlementaire n'a jamais voulu... à part elle, où elle continue de nous amener dans ces questions-là. Il y a des raisons pour lesquelles, depuis 2002, il n'y a pas de gouvernements qui ont adopté cette disposition, qui ne l'ont pas mise en oeuvre. Je le répète, il y a des raisons pour lesquelles c'est comme ça. Il y a des raisons pour lesquelles, effectivement, on n'a pas adopté «uniquement», mais le «exclusivement», ça permet de mettre des lettres de courtoisie, entre autres, qui accompagnent des correspondances en français pour des pays étrangers. Notamment, il y a plein de dispositions qui permettent d'avoir certaines exceptions qui permettent de communiquer dans certaines occasions... Mais, de façon générale, il n'y a pas de bilinguisme institutionnel...

Le Président : En terminant.

Mme Montpetit : ...et on répond en français, au gouvernement du Québec. Merci.

• (14 h 40) •

Le Président : Principale, M. le député de Gouin.

Mesures de sécurité durant le Sommet du G7

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. On va se le dire, les gens de Québec, les gens de la ville de Québec se sont fait avoir en fin de semaine. On leur avait dit : Barricadez-vous, tous aux abris, il y a une horde de méchants manifestants violents qui s'en vient vous envahir. On a rempli les rues de milliers de policiers, on a fermé le Parlement, on a mis 10 000 fonctionnaires en congé, on a fermé une douzaine d'écoles et de garderies, on a fait voler des hélicoptères pendant trois jours en empêchant les gens de dormir à Québec. Tout ça pour quoi, M. le Président? Tout ça pour des manifestations très, très majoritairement pacifiques. 400 millions de dollars plus tard, le ministre de la Sécurité publique a des comptes à rendre en termes d'évaluation de la menace. C'est une exagération...

Des voix : ...

Le Président : Est-ce que...

Une voix : ...

Le Président : Non, non, j'aimerais entendre la fin de la question, j'ai de la misère à l'entendre. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : En termes d'évaluation de la menace, M. le Président, c'est une exagération spectaculaire, un ratage total.

J'aimerais savoir comment le ministre de la Sécurité publique...

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

Des voix : ...

Le Président : Excusez-moi, excusez-moi. Je m'excuse, M. le député de Gouin, dans ma tête, j'étais en complémentaire. Allez, M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : La troisième fois sera la bonne, M. le Président.

Très mauvaise évaluation de la menace. Comment le ministre explique-t-il une situation aussi gênante, une aussi grande disproportion entre les moyens sécuritaires et la menace réelle?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Dans l'une des tentatives — parce qu'il y a eu trois reprises, malheureusement, pour que la question me soit posée, M. le Président — le député de Gouin m'a demandé de rendre des comptes. Bien, je suis assez heureux de rendre des comptes aujourd'hui, bien honnêtement, là, je suis très, très, très heureux de rendre des comptes parce que, la semaine dernière, tout le monde s'ameutait ici en annonçant, effectivement, du vandalisme, de la casse, des dégâts monumentaux, et la grande question était : Qui va payer? Qui va payer?

Bien, savez-vous quoi, M. le Président? Les comptes à rendre sont les suivants. On a évité une telle situation, on a permis aux gens de manifester en respectant les lois, on a permis aux gens d'énoncer leurs opinions sur ce qu'ils pensaient de ce G7, de ce qu'ils pensaient de certaines injustices qu'ils voulaient identifier. Et, en même temps, ils l'ont fait dans le calme, dans l'ordre, et les commerces n'ont pas été saccagés et n'ont pas été vandalisés, il n'y a pas eu de violence. Alors, on a tout lieu d'être heureux de cette situation. Et ce n'est pas sans lien avec les mesures policières qui ont été mises de l'avant, et je dis bravo aux forces policières, qui ont fait un travail remarquable.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Gouin.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, le ministre ne répond pas à ma question. On a paralysé la région pendant trois jours, il y a des gens qui ont vu leur ville, leur quartier transformé en forteresse militaire. Je ne niaise pas, M. le Président, il y avait des mitraillettes, là, des vraies mitraillettes dans les rues de Québec.

Est-ce que le ministre trouve ça normal? C'était ma question. Est-ce qu'il trouve ça normal, en démocratie, une aussi grande disproportion entre la manifestation de force des forces policières et les manifestations, qui, elles, étaient très, très majoritairement pacifiques?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Et une démocratie, M. le Président, une démocratie en santé permet à ses citoyens de s'exprimer librement et évite la violence et la casse. Et c'est exactement le type de démocratie qu'on a au Québec, et, effectivement, il n'y a pas eu personne qui a été brimé dans ses droits. Il y a des itinéraires qui ont été annoncés, il y a des gens qui ont manifesté dans la paix, dans l'ordre, qui ont émis leurs opinions. Les gens qui regardaient à la télévision, ils étaient interviewés, ils pouvaient exprimer toutes leurs opinions. Mais il n'y a pas eu de casse, il n'y a pas eu de violence, et ce n'est pas sans lien avec les stratégies policières qui ont été mises en place. Alors, encore une fois, on doit se réjouir. Si le collègue de Gouin ne se réjouit pas, je me demande qu'est-ce qu'il aurait souhaité?

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : Mais, en fait, on a maintenu la paix.

Le Président : M. le député de Gouin, en deuxième complémentaire.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : M. le Président...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît, j'aimerais l'entendre, le député de Gouin. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, le caractère prévisible des allusions du ministre me fait sourire. On est en démocratie, la liberté d'expression, c'est fondamental, et, à La Malbaie, on a organisé, on a aménagé un enclos à manifestants.

Est-ce que c'est ça, pour le ministre de la Sécurité publique, un exercice sain de la liberté d'expression en démocratie, un enclos à manifestations? Est-ce qu'il est fier de ça, lui?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Je ne sais pas, M. le Président, pour le député de Gouin, ce qu'est une manifestation réussie. En ce qui me concerne, comme ministre de la Sécurité publique, une manifestation réussie, c'est une manifestation au cours de laquelle les gens ont exprimé leurs opinions en toute liberté et qu'on ait, en même temps, évité de la violence, qu'on ait évité de la casse et qu'on ait protégé les manifestants qui se sont exprimés librement de ceux et celles qui auraient voulu s'infiltrer pour faire de la casse et qui sont tout le contraire, qui sont tout le contraire, selon moi, d'une manifestation réussie. Ça aurait été une manifestation ratée. Alors, on a préservé la paix...

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : ...l'ordre puis la sécurité, et les manifestants se sont exprimés.

Le Président : Principale, Mme la députée de Repentigny.

Lutte contre l'exploitation sexuelle

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : M. le Président, l'année 2018 aura été marquée par une prise de conscience collective concernant la triste réalité de la prostitution juvénile. Plusieurs groupes sont d'avis que nous n'avons pas de portrait de ce phénomène grandissant à la grandeur du Québec. Selon la stratégie pour prévenir et contrer les violences sexuelles, il est de la responsabilité du ministre de la Sécurité publique de produire un portrait de la situation. Un an et demi après l'annonce de la stratégie, rien. Pire, le ministre, lors de l'étude des crédits, n'était même pas au courant que c'était sa responsabilité. Force est de constater que le gouvernement, dans ce dossier, navigue à vue, sans plan, sans boussole et sans destination.

Comment le gouvernement peut-il affirmer être préoccupé par le sort des victimes d'exploitation sexuelle et de prostitution juvénile s'il ne cherche même pas à connaître l'ampleur du problème à la grandeur du Québec?

Le Président : Mme la ministre déléguée à la Réadaptation.

Mme Lucie Charlebois

Mme Charlebois : Bien là, ici, M. le Président, il faut savoir que c'est un travail de plusieurs ministères qui sont interpelés — le mien à commencer — par tout ce qui concerne la réadaptation dans les centres jeunesse, les fugues, et tout ça, et nous avons déposé, M. le Président, un plan de fugue qui était audacieux et qui nous a permis de, justement, faire davantage de prévention.

Mais, avec mon collègue de la Sécurité publique, vous vous souviendrez qu'on a aussi annoncé ensemble le programme Prévention jeunesse, qui faisait en sorte que les forces policières et les forces des services sociaux pouvaient travailler ensemble, communiquer davantage pour faire en sorte que nos jeunes filles puissent demeurer dans les centres de réadaptation.

Mais il y a eu aussi beaucoup de prévention qui a été faite auprès des parents pour faire en sorte d'être bien à l'écoute de ces jeunes filles. Il y a eu multiples gestes. Il y a eu ma collègue ici, à la Condition féminine, qui a aussi annoncé des mesures pour prévenir et contrer l'exploitation sexuelle, et tout ça.

Alors, M. le Président, ce n'est pas un ministre, ce n'est pas une ministre, c'est un ensemble de gestes posés par plusieurs ministères qui font en sorte que nous pouvons mieux protéger ces jeunes filles, mais aussi les femmes dans l'ensemble, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Repentigny.

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : M. le Président, nous avons fait adopter ici une motion pour demander la signature du décret fédéral pour la loi C-452 afin d'imposer des peines plus sévères contre les proxénètes. La ministre de la Justice nous a répondu d'aller défendre nous-mêmes notre motion à Ottawa. Nous avons déposé un projet de loi pour faciliter l'accès à l'IVAC aux victimes d'exploitation sexuelle. La ministre de la Justice n'a pas daigné donner suite à notre projet de loi.

Est-ce que le gouvernement reconnaît qu'il a échoué à protéger davantage les victimes d'exploitation sexuelle et de prostitution juvénile?

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, je vais juste rappeler, notre collègue nous a interpelés en 2018 sur cette question-là. Moi, j'avais écrit en 2016 à la ministre fédérale. Depuis plusieurs années, nous n'avons cessé de poser des gestes pour soutenir non seulement les victimes de traite, mais les victimes d'agression sexuelle de façon générale.

Nous avons déposé, avec ma collègue députée d'Anjou et ministre responsable de la Protection des consommateurs, à l'époque où elle était à la Condition féminine, un plan sans précédent en matière de lutte aux agressions sexuelles qui interpelle l'ensemble des intervenants, l'ensemble des ministères. Et le ministère de la Justice a posé des gestes sans précédent en investissant plus de 50 millions de dollars...

Le Président : En terminant.

Mme Vallée : ...pour modifier l'IVAC et apporter un support direct.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Repentigny.

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : M. le Président, ce n'était pas important pour le gouvernement de se doter d'un portrait de la situation, ni d'agir plus sévèrement contre les proxénètes, ni de faciliter l'accès à l'IVAC aux victimes d'exploitation sexuelle et de traite des personnes. Le Québec tout entier a fait une prise de conscience collective, mais les libéraux, eux, sont restés lymphatiques. La CAQ ne tolérera jamais que nos filles puissent être considérées...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Lavallée : ...comme des proies faciles à des arrêts d'autobus, dans les rues du Québec et dans les médias sociaux. Nous allons agir.

Des voix : ...

• (14 h 50) •

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Je pense que la collègue omet un certain nombre d'actions importantes. Et puis je pense qu'on a indiqué ici que c'était le travail de tout gouvernement, mais on a mis sur pied au ministère de la Sécurité publique, avec le concours des corps policiers, une escouade de lutte contre le proxénétisme, et ça donne des résultats, M. le Président. Ça donne des résultats. À ce jour, l'équipe intégrée de lutte contre le proxénétisme a reçu 91 dossiers d'enquête, 91 depuis sa création, des enquêtes qui ont mené déjà à 31 arrestations, 31 arrestations.

J'aimerais, M. le Président, si vous pouviez maintenir l'ordre de l'autre côté, j'entends un peu de bruit.

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : Au dépôt de 200 chefs d'accusation...

Le Président : Principale, Mme la députée de Taillon.

Accès à un médecin de famille

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : 35 % des citoyens à Montréal sont orphelins, 35 %. En Montérégie, 25 % qui n'ont pas de médecin de famille. Au Saguenay—Lac-Saint-Jean, il y a 10 000 personnes qui sont sur le guichet d'accès...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Lamarre : ...dont 4 500 orphelines juste à Jonquière, comme l'a documenté mon collègue de Jonquière. En plus, aucun médecin ne peut venir s'y établir parce que le PREM est complet à Jonquière. Dans l'est de Montréal, 40 médecins ont pris leur retraite, ils vont être remplacés par six, 80 000 personnes vont être orphelines. Des gens vulnérables sont bloqués hors des CLSC qui ferment leur sans rendez-vous, hors des GMF qui n'ouvrent plus leurs portes, hors des supercliniques qui sont saturées et qui ont moins d'offres de places sans rendez-vous qu'avant. La seule assurance que ces orphelins ont, ce n'est pas l'assurance médicale, c'est l'assurance d'être bloqués des années sur un guichet.

Est-ce que le ministre reconnaît qu'il a bloqué tous les accès pour ces patients?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : 1,2 million de personnes qui ont accès à un médecin de famille, M. le Président, grâce à des lois que nous avons adoptées, contre lesquelles se sont opposées toutes les oppositions, c'est un résultat. 45 supercliniques qui donnent accès partout sur le territoire du Québec à la clientèle orpheline. Le Saguenay—Lac-Saint-Jean, prenons l'exemple de notre collègue, qui a dépassé largement ses taux d'inscription et son taux d'assiduité.

M. le Président, la réalité est que les changements que nous devions apporter dans le réseau l'ont été. Évidemment, il faut continuer dans cette direction-là. Je pense que nous avons pris les bonnes décisions qui nous amènent vers la bonne destination.

Le Président : Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Et nous en sommes à la rubrique des motions sans préavis.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Il faudrait la collaboration des collègues. Alors, M. le premier ministre...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : C'est pour une motion? Donc, c'est une motion qui requiert le vote des deux tiers des...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Oui, alors, il y a cinq motions.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : D'accord. Alors, je rappelle aux membres de l'Assemblée que, pour être adoptées, ces cinq motions doivent être approuvées par au moins les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale et elles doivent donc être suivies d'un vote par appel nominal.

Alors, M. le premier ministre, je vous cède la parole.

Nommer M. Jean-François Gauthier membre
de la Commission d'accès à l'information

Document déposé

M. Couillard : Pour la première, bien sûr. On les fait une par une, hein? Alors :

«Que, conformément aux articles 104, 104.1 et 105 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et la protection des renseignements personnels, Me Jean-François Gauthier, greffier et directeur des services juridiques [à] ville de Saint-Sauveur, soit nommé, suivant la procédure de sélection des personnes aptes à être nommées membres de la Commission d'accès à l'information établie par règlement du Bureau de l'Assemblée nationale, membre de la Commission d'accès à l'information, affecté à la section juridictionnelle, pour un mandat de cinq ans à compter du 26 juin 2018, et que sa rémunération et ses autres conditions de travail soient celles contenues dans le document ci-annexé que je dépose.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le premier ministre.

Mise aux voix

Alors, je mets aux voix la motion de M. le premier ministre, qui requiert un vote aux deux tiers des membres.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe : M. Couillard (Roberval); M. Fournier (Saint-Laurent); M. Billette (Huntingdon); Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel); M. Leitão (Robert-Baldwin); M. Arcand (Mont-Royal), M. Coiteux (Nelligan), Mme David (Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), Mme Charlebois (Soulanges), M. Barrette (La Pinière), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Moreau (Châteauguay), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), Mme Vien (Bellechasse), Mme Ménard (Laporte), M. Fortin (Pontiac), Mme Tremblay (Chauveau), M. Fortin (Sherbrooke), M. Reid (Orford), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Boulet (Laviolette), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Tanguay (LaFontaine), Mme Melançon (Verdun), M. Blais (Charlesbourg), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Bolduc (Mégantic), M. Simard (Dubuc), M. Matte (Portneuf), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Girard (Trois-Rivières), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Rousselle (Vimont), M. Auger (Champlain), M. Boucher (Ungava), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), Mme Sauvé (Fabre).

M. Lisée (Rosemont), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Hivon (Joliette), M. Marceau (Rousseau), M. LeBel (Rimouski), Mme Maltais (Taschereau), Mme Lamarre (Taillon), M. Bergeron (Verchères), Mme Richard (Duplessis), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Gaudreault (Jonquière), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Therrien (Sanguinet), M. Rochon (Richelieu), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Bourcier (Saint-Jérôme), Mme Jean (Chicoutimi), M. Ouellet (René-Lévesque), M. Villeneuve (Berthier), Mme Fournier (Marie-Victorin), M. Traversy (Terrebonne), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Roy (Bonaventure).

M. Busque (Beauce-Sud), M. Lelièvre (Gaspé).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Y a-t-il des abstentions?

La Secrétaire adjointe : M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée (Repentigny), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Paradis (Lévis), M. Spénard (Beauce-Nord).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), M. Khadir (Mercier), Mme Ouellet (Vachon).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, nous en sommes en train de compiler les résultats. Sommes-nous prêts? M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  84

                     Contre :             0

                     Abstentions :   21

Le Vice-Président (M. Ouimet) : En conséquence, la motion, elle est adoptée.

Pour une deuxième motion, M. le premier ministre.

Nommer Mme Guylaine Giguère membre de
la Commission d'accès à l'information

Document déposé

M. Couillard : Alors, M. le Président, la motion se lit comme suit :

«Que, conformément aux articles 104, 104.1 et 105 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, Me Guylaine Giguère, secrétaire générale, Commission scolaire des Navigateurs, soit nommée, suivant la procédure de sélection des personnes aptes à être nommées membres de la Commission d'accès à l'information établie par règlement du Bureau de l'Assemblée nationale, membre de la Commission d'accès à l'information, affectée à la section juridictionnelle, pour un mandat de cinq ans à compter du 16 juillet 2018, et que sa rémunération et ses autres conditions de travail soient celles contenues dans le document ci-annexé [que je dépose].»

857 Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci, M. le premier ministre. Donc, que les députés en... M. le leader adjoint... M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Vous étiez à le dire, M. le Président, mais je suis informé que le vote sera à peu près identique, à moins que j'aie des signaux contraires, auquel cas on pourrait enregistrer le même vote, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, y a-t-il consentement pour enregistrer le même vote? Consentement. Pour le résultat, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  84

                     Contre :             0

                     Abstentions :   21

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, la motion, elle est adoptée. Pour la présentation d'une troisième motion, M. le premier ministre.

Nommer Mme Rady Khuong membre de la
Commission d'accès à l'information

Document déposé

M. Couillard : Motion qui se lit comme suit :

«Que, conformément aux articles 104, 104.1 et 105 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, Me Rady Khuong, avocate associée chez Stein Monast, soit nommée, suivant la procédure de sélection des personnes aptes à être nommées membres de la Commission d'accès à l'information établie par règlement du Bureau de l'Assemblée nationale, membre de la Commission d'accès à l'information, affectée à la section juridictionnelle, pour un mandat de cinq ans à compter du 26 juin 2018, et que sa rémunération et ses autres conditions de travail soient celles contenues dans le document ci-annexé [que je dépose].»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, M. le premier ministre. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Avec les mêmes regards, je proposerais le même vote.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, y a-t-il consentement pour procéder au même vote? Consentement. Pour le résultat, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  84

                     Contre :            0

                     Abstentions :   21

Le Vice-Président (M. Ouimet) : En conséquence, la motion, elle est adoptée. Pour une quatrième motion maintenant, M. le premier ministre.

Nommer M. Marc-Aurèle Racicot membre
de la Commission d'accès à l'information

Document déposé

M. Couillard : M. le Président :

«Que, conformément aux articles 104, 104.1 et 105 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, Me Marc-Aurèle Racicot, syndic adjoint, Chambre de la sécurité financière, soit nommé, suivant la procédure de sélection des personnes aptes à être nommées membres de la Commission d'accès à l'information établie par règlement du Bureau de l'Assemblée nationale, membre de la Commission d'accès à l'information, affecté à la section juridictionnelle, pour un mandat de cinq ans à compter du 26 juin 2018, [...]que sa rémunération et ses autres conditions de travail soient celles contenues dans le document ci-annexé [que je dépose].»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le premier ministre. M. le leader du gouvernement.

• (15 heures) •

M. Fournier : J'ai l'impression d'être un peu répétitif, mais je vous demanderais d'enregistrer le même vote.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, il y a consentement pour procéder au même vote? Oui. Pour le résultat, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  84

                     Contre :            0

                     Abstentions :   21

Le Vice-Président (M. Ouimet) : En conséquence, la motion, elle est adoptée. Pour une autre motion sans préavis, M. le premier ministre.

M. Couillard : Oui. La dernière des cinq, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : La cinquième.

Nommer Mme Martine Riendeau membre
de la Commission d'accès à l'information

M. Couillard : «Que, conformément aux articles 104, 104.1 et 105 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, Me Martine Riendeau, avocate, soit nommée, suivant la procédure de sélection des personnes aptes à être nommées membres de la Commission d'accès à l'information établie par règlement du Bureau de l'Assemblée nationale, membre de la Commission d'accès à l'information, affectée à la section juridictionnelle, pour un mandat de cinq ans à compter du 26 juin 2018, en remplacement de Me Christiane Constant, et que sa rémunération et ses autres conditions de travail soient celles contenues dans le document ci-annexé — que je dépose.»

Document déposé

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le premier ministre. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Même vote, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Consentement pour procéder au même vote? Consentement. Résultat, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  84

                     Contre :             0

                     Abstentions :   21

Le Vice-Président (M. Ouimet) : En conséquence, la motion, elle est adoptée.

Nous tombons maintenant dans la rubrique des motions sans préavis, et je cède la parole à nouveau à M. le premier ministre.

Réitérer l'appui de l'Assemblée nationale aux travailleurs
et aux entreprises du secteur de l'aluminium et de
l'acier et réaffirmer son soutien au maintien du
système de gestion de l'offre en agriculture

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de l'Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Sanguinet, le chef du deuxième groupe d'opposition, le député de Gaspé et la députée de Vachon :

«Que l'Assemblée nationale rappelle le haut niveau d'intégration de toutes les économies nord-américaines, dont celle du Québec;

«Qu'elle se prononce en faveur du maintien de relations commerciales ouvertes avec les États-Unis;

«Qu'elle déclare qu'elle s'attend à une saine collaboration provenant des élus américains dans le cadre des négociations commerciales qui ont le but d'avantager les travailleurs et les entrepreneurs de nos deux pays;

«Qu'elle réitère son appui à l'ensemble des travailleurs et entreprises du secteur de l'aluminium et de l'acier québécois;

«Qu'enfin elle réaffirme son soutien entier au maintien intégral du système de gestion de l'offre et aux agriculteurs qui y participent.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le premier ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Nous proposons de l'adopter sans débat et de procéder par un vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, il y a consentement pour procéder sans débat?

Mise aux voix

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe : M. Couillard (Roberval), M. Fournier (Saint-Laurent), M. Billette (Huntingdon), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Arcand (Mont-Royal), M. Coiteux (Nelligan), Mme David (Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), Mme Charlebois (Soulanges), M. Barrette (La Pinière), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Moreau (Châteauguay), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), Mme Vien (Bellechasse), Mme Ménard (Laporte), M. Fortin (Pontiac), Mme Tremblay (Chauveau), M. Fortin (Sherbrooke), M. Reid (Orford), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Boulet (Laviolette), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Tanguay (LaFontaine), Mme Melançon (Verdun), M. Blais (Charlesbourg), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Bolduc (Mégantic), M. Simard (Dubuc), M. Matte (Portneuf), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Girard (Trois-Rivières), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Rousselle (Vimont), M. Auger (Champlain), M. Boucher (Ungava), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), Mme Sauvé (Fabre).

M. Lisée (Rosemont), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Hivon (Joliette), M. Marceau (Rousseau), M. LeBel (Rimouski), Mme Maltais (Taschereau), Mme Lamarre (Taillon), M. Bergeron (Verchères), Mme Richard (Duplessis), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Gaudreault (Jonquière), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Therrien (Sanguinet), M. Rochon (Richelieu), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Bourcier (Saint-Jérôme), Mme Jean (Chicoutimi), M. Ouellet (René-Lévesque), M. Villeneuve (Berthier), Mme Fournier (Marie-Victorin), M. Traversy (Terrebonne), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Roy (Bonaventure).

M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée (Repentigny), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Paradis (Lévis), M. Spénard (Beauce-Nord).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), M. Khadir (Mercier), M. Busque (Beauce-Sud), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Ouellet (Vachon).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Que les députés contre veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? Sinon, pour le résultat du vote, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  105

                     Contre :               0

                     Abstentions :       0

Le Vice-Président (M. Ouimet) : En conséquence, la motion, elle est adoptée.

Toujours à la rubrique des motions sans préavis, M. le député de Labelle.

M. Pagé : Merci, M. le Président. Donc, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de Borduas, le député de Gouin, le député de Gaspé, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance qu'elle accorde à la protection des renseignements personnels des électeurs ainsi que les préoccupations de la population du Québec à cet égard;

«Que l'Assemblée nationale prenne acte que le Directeur général des élections a, dans une lettre datée du 5 avril 2018, suggéré l'adoption au cours de la présente session parlementaire d'une loi accordant temporairement un mandat et les pouvoirs nécessaires afin que soient évaluées les pratiques des [bonnes pratiques] quant à la collecte, à l'utilisation, à la communication, à la conservation et à la sécurité des renseignements personnels des électrices et des électeurs;

«Que l'Assemblée nationale prenne acte que ces travaux du Directeur général des élections permettraient de dresser un état de situation et de proposer par la suite un encadrement législatif quant à la protection de la vie privée des électeurs;

«Que l'Assemblée nationale rappelle que les partis politiques représentés à l'Assemblée nationale ont tous exprimé publiquement leur appui à la suggestion du Directeur général des élections;

«Que le Directeur général des élections demande immédiatement aux partis politiques de s'engager à signer un guide des bonnes pratiques qui respectera les renseignements personnels des électeurs;

«Que l'Assemblée nationale demande au Directeur général des élections de proposer au comité technique un protocole d'évaluation des bonnes pratiques;

«Qu'à la suite de l'acceptation de ce protocole l'Assemblée nationale procède à l'étude du projet de loi n° 188 d'ici la fin de [la] présente session parlementaire.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, M. le député de Labelle. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Tanguay : Il n'y a pas de consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas de consentement. M. le député de Deux-Montagnes, à vous la parole.

M. Charette : Merci, M. le Président. Je demande le consentement pour déposer la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance du libre-échange pour l'économie mondiale;

«Qu'elle souligne la force des liens économiques existant entre le Québec et les États-Unis;

«Qu'elle donne son appui au premier ministre canadien dans la défense des intérêts du Canada suite aux déclarations du président américain tenues en marge du Sommet du G7.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Deux-Montagnes. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Nous proposons de l'adopter sans débat, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, cette motion est-elle...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Ah! il n'y a pas de consentement. Désolé. Très bien. Pas de consentement. M. le député de Gouin, pour la présentation d'une autre motion sans préavis.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, écoutez, il n'y a aucun commentaire à faire sur le fait qu'il n'y ait pas de consentement. M. le député de Gouin, vous avez la parole.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de l'Assemblée pour...

Des voix : ...

M. Nadeau-Dubois : Il y a de la fébrilité aujourd'hui, hein, ça parle.

Alors, M. le Président, je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec le député de Verchères, la députée de Vachon, le député de Gaspé :

«Que l'Assemblée nationale affirme que les manifestations sont un moyen légitime pour les citoyens de faire connaître leur point de vue et que les mesures de sécurité ne doivent pas avoir pour effet de limiter ce droit;

«Que l'Assemblée nationale dénonce les coûts astronomiques pour l'organisation et la sécurité liées au G7 ainsi que les effets négatifs vécus par les citoyens et les pertes encourues par les commerçants.»

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, M. le député de Gouin. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Tanguay : Pas de consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas de consentement. Y a-t-il d'autres motions sans préavis? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui, M. le Président. Alors, je sollicite pour une seconde fois le consentement afin de présenter une deuxième motion qui touche la tenue de consultations particulières quant au projet de loi n° 88, et qui donne suite à ce que demande le DGEQ, et pour lequel nous avons le consentement de la deuxième opposition et de Québec solidaire.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, y a-t-il consentement pour déroger à l'article 84.1 et permettre la lecture d'une autre motion sans préavis? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bérubé : Pas pour cette fois.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, il n'y a pas de consentement. Très bien. Y a-t-il d'autres motions sans préavis? Pas d'autre motion sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous allons maintenant passer aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

• (15 h 10) •

M. Tanguay : Oui. M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles entreprendra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 184, Loi favorisant l'établissement d'un service public de recharge rapide pour véhicules électriques, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle du Conseil législatif;

Finalement, M. le Président, la Commission de la culture et de l'éducation entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 239, Loi concernant la subdivision des lots situés dans l'aire du site patrimonial de Percé, le jeudi 14 juin 2018, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Merci.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le leader adjoint du gouvernement, pour ces avis.

À la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée...

Affaires du jour

Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Pour la suite des choses, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui. M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 23, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 400

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Ouimet) : À l'article 23 de notre feuilleton, Mme la ministre de la Culture et des Communications propose l'adoption du principe du projet de loi n° 400, Loi modifiant la Loi concernant la succession de l'honorable Trefflé Berthiaume et la Compagnie de Publication de La Presse, Limitée. Alors, Mme la ministre de la Culture et des Communications, à vous la parole.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Alors, le monde des médias traverse une période de défis importants. Alors que les revenus de publicité fondent au profit des géants du Web américain, les entreprises doivent trouver des façons innovantes d'y faire face et ainsi assurer une offre d'information diversifiée et de qualité pour tous les citoyens.

Le quotidien La Presse, comportant la plus grande salle de presse francophone en Amérique du Nord, fait partie des entreprises ayant décidé de transformer leurs modèles d'affaires pour faire face aux nouveaux défis de notre époque. En l'occurrence, son actionnaire principal, le groupe Power Corporation, souhaite se départir de ses actifs investis dans La Presse.

La Presse, M. le Président, contrairement aux autres médias du Québec, constitue un cas unique en raison de lois privées adoptées uniquement pour elle en 1955, 1961 et 1967. La loi de 1967 a conservé son article qui prévoit notamment qu'«aucune vente, cession, transport ou nantissement de droits ou d'un nombre d'actions de toute compagnie qui aurait pour objet ou comme résultat de déplacer le contrôle de la compagnie de publication de La Presse Limitée ne peut être validement fait ou consenti sauf avec l'autorisation de la législature». En raison de cette loi privée du siècle dernier, La Presse ne peut se donner de nouveaux propriétaires ou disposer de ses biens sans que nous lui donnions les moyens juridiques de le faire, contrairement à tous les autres médias du pays.

Ces derniers jours, M. le Président, nous avons clairement entendu les représentants du quotidien La Presse nous demander de leur assurer leur indépendance. Ils nous demandent d'être traités comme tous les autres médias du Québec. Le président de La Presse, M. Pierre-Elliott Levasseur, nous a rappelé que, comme tous les médias écrits, le plus grand journal francophone d'Amérique est menacé par la crise qui secoue l'industrie. Ils veulent innover pour préserver l'une des plus grandes salles de rédaction au pays et plus de 500 emplois. Il nous a souligné que le rôle des élus est de favoriser l'innovation, non pas de s'ingérer dans la gouvernance et dans les opérations d'un média écrit. Par une loi que la Fédération professionnelle des journalistes du Québec a qualifiée d'anachronisme historique, le quotidien La Presse s'est retrouvé à devoir demander l'aval des élus de l'Assemblée nationale pour pouvoir décider de son avenir. Et c'est dans ce contexte particulier que La Presse, Power Corporation, la Fédération nationale des communications, affiliée à la CSN, le Syndicat des travailleurs de l'information de La Presse, le Syndicat des travailleurs et travailleuses du Québec, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec et Le Devoir nous ont tous vivement encouragés à abroger la loi rapidement et sans réserve. En levant ces dispositions d'un autre temps, nous permettons tout naturellement à La Presse d'évoluer mais aussi de demeurer à jamais la propriété d'une institution québécoise à part entière. Et, comme nous l'a rappelé la Fédération nationale des communications, notre responsabilité, comme élus, n'est pas d'attester de la qualité du modèle d'affaires qui est proposé par La Presse, pas plus que nous avons la responsabilité de trancher à savoir si le bon modèle est celui du Devoir ou de Québecor.

Nous avons, par ce projet de loi, un média qui nous demande de lui donner la liberté nécessaire pour décider de son avenir, un quotidien qui s'est présenté à l'Assemblée nationale en ayant l'appui de ses dirigeants, actionnaires, employés et syndicats pour aller de l'avant. M. Crevier, éditeur de La Presse, nous a assuré que, tout au long du processus, ils ont communiqué et partagé toute l'information nécessaire avec les employés et le syndicat. Il y a donc une compréhension profonde de la part des syndicats et employés, et ils adhèrent à la position des dirigeants tout comme ils appuient la stratégie qui est mise en place.

La Fédération professionnelle des journalistes du Québec nous a sagement rappelé que La Presse estime devoir transformer sa structure pour assurer sa pérennité et que l'État n'a pas à se prononcer sur ce choix tout comme il n'est pas appelé à se prononcer sur les choix stratégiques et organisationnels que font ses 89 concurrents. D'autres quotidiens québécois nous ont partagé leurs inquiétudes sur le respect de la ligne devant séparer le politique des médias. Brian Myles, directeur du Devoir, a dit : «...il vous appartient [, comme parlementaires,] de déterminer ce que vous allez faire de cette loi privée de 1967, mais[...], à mon avis, [...]cette loi-là a épuisé son utilité et n'a plus sa raison d'être dans le contexte de 2018.» Il ajoutait que «je ne souhaiterais pas être obligé de venir témoigner de l'indépendance de [sa] structure devant des parlementaires».

Nous nous sommes aussi questionnés, M. le Président, sur l'urgence de la demande de La Presse. On sait que les revenus publicitaires des médias ne cessent de fondre au profit de géants étrangers et qu'en peu de temps la part des revenus se déplaçant chez eux est passée de 50 % à 80 %. Mme Pascale St-Onge, présidente de la Fédération nationale des communications, a souligné qu'en moins de 10 ans près de 50 % des emplois dans les médias ont disparu et qu'il y a une accélération importante ces dernières années. Elle nous a rappelé qu'une année dans la vie d'un média, c'est très long et qu'actuellement nos médias se trouvent dans un contexte précaire. Nous avons entendu que ce qui inquiète les employés de La Presse, ce ne sont pas les enjeux que certains ont tenté de mettre de l'avant. Ce qui inquiète vraiment les employés, c'est de savoir s'ils seront capables de se transformer rapidement. M. Charles Côté, président du Syndicat des travailleurs de l'information de La Presse, nous a présenté le sentiment partagé par les artisans de la salle de rédaction, les journalistes, photographes, graphistes, réviseurs, éditeurs photo et recherchistes de La Presse. Ces employés vivent dans l'urgence depuis longtemps. Ils comprennent très bien la recherche de solutions de leurs patrons et les appuient. Le statu quo pour les syndicats n'est décidément plus une option, nous a-t-il rappelé.

Il m'apparaît clair que, dans le contexte actuel, il y a urgence d'agir, urgence de donner à La Presse la liberté de prendre ses décisions comme c'est le cas pour l'ensemble des médias au Québec. Il faut éviter de faire l'erreur que semblent faire certains. Nous ne sommes pas ici pour étudier ou octroyer le statut de charité à qui que ce soit. Nous ne faisons ni de nouvelles règles de financement pour La Presse et n'intervenons pas dans les conditions fédérales. Nous nous penchons uniquement sur l'obligation à laquelle seule La Presse est soumise, soit celle d'obtenir l'autorisation de l'Assemblée nationale pour se départir d'un actif.

Nous avons pu entendre Mme St-Onge affirmer fermement : «La pire chose qui puisse nuire à la démocratie, c'est l'impression que le politique a la mainmise ou empêche le libre exercice de la justice ou de la liberté de presse. [...]Il peut y avoir des gens en désaccord avec la ligne éditoriale de La Presse, mais ce n'est certainement pas à l'Assemblée nationale d'en imposer une autre.»

Alors, je rappelle à mes collègues que les dirigeants de La Presse ont jugé avoir trouvé le meilleur moyen pour assurer la pérennité de La Presse, assurer qu'ils pourraient poursuivre leur mission de poursuivre de produire une information de qualité accessible aux Québécois. Il est de notre devoir, comme parlementaires, de ne pas s'ingérer dans la gestion d'un groupe de presse, et nous ne devons pas franchir la ligne devant séparer le politique des médias.

Le projet de loi n° 400 a pour unique but de corriger une situation fondamentalement inéquitable et d'assurer la totale liberté des groupes de presse de déterminer leur avenir. C'est donc un projet qui vise à rendre plus autonome et indépendant le plus grand média d'information francophone en Amérique du Nord, un média qui désire assurer sa pérennité et s'affranchir d'une contrainte législative injustifiée dans une saine démocratie. Je vous invite donc à appuyer non seulement le principe de ce projet de loi, mais aussi un principe fondamental de toute société démocratique : l'indépendance des médias. Merci, M. le Président.

• (15 h 20) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la ministre de la Culture et des Communications. Je cède maintenant la parole à M. le leader de l'opposition officielle et député de Matane-Matapédia.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, M. le Président. Alors, aujourd'hui, en ma qualité de leader parlementaire de l'opposition mais également de porte-parole en matière de communications, je vais vous livrer l'essentiel de la réflexion du caucus de l'opposition officielle, du Parti québécois, quant au projet de loi n° 400, portant sur le journal La Presse.

D'abord, rappeler le caractère particulier de ce projet de loi, qui aurait dû être un projet de loi privé, à l'origine, et qui arrive en fin de session parlementaire et vient presser l'ensemble des élus de l'Assemblée nationale d'une adoption. Ce projet de loi, nous ne l'avons pas réclamé, et certainement pas La Presse non plus. Mais La Presse a fait le choix de changer sa structure. C'est son choix. Or, il apparaît que, pour changer sa structure, il faut passer par une loi de l'Assemblée nationale. Alors, ne comptez pas sur les parlementaires du Parti québécois pour abdiquer leurs responsabilités de parlementaires.

La ministre notamment nous indique que le politique ne devrait jamais s'occuper des médias, qu'il faut rester loin. À la rigueur, il ne faudrait même pas parler ici et laisser passer ce projet de loi, de ne pas faire le travail pour lequel on a été élus, c'est-à-dire d'étudier les projets de loi et de poser des questions. Je rappelle à la ministre, qui a cette sensibilité que le politique ne se mêle pas des médias, que son gouvernement, en décembre dernier, a accordé un prêt de 10 millions de dollars à Capitales Médias moins d'un an avant l'élection. Alors, ça, c'est le choix que le gouvernement a fait. Et je n'ai pas entendu, à l'époque, le gouvernement dire qu'il ne fallait pas se mêler de ça. Et aujourd'hui on voudrait dire aux parlementaires dûment élus de l'Assemblée nationale qu'il ne faudrait pas trop poser de questions. Et pourquoi et au bénéfice de qui?

Rappelons un certain nombre de concepts, d'entrée de jeu. Le Parti québécois est en faveur, évidemment pour une saine démocratie, de la pluralité des voix, qui sont différentes, qui sont essentielles. On a besoin de médias forts, notamment dans le domaine de la presse écrite, des médias forts, des médias indépendants qui sont capables de faire en sorte que leurs artisans puissent rapporter les faits, nous informer, nous faire réfléchir, faire en sorte d'évoluer, faire évoluer notre société à travers différents courants de pensée, différents courants de pensée.

Mon propos aujourd'hui va porter sur la nécessité des médias, nombreux au Québec, leur indépendance, leur transparence, voire même leur saine gouvernance.

À partir du moment où Power Corporation, une grande entreprise, décide de se départir de son journal, plusieurs questions se posent d'abord sur ses motivations. On a appris par Power Corporation, en privé, avec le chef de l'opposition, avec une rencontre commune des parlementaires, et mercredi dernier, lors des auditions, qu'il apparaît que ce n'est plus un journal qui est rentable ou qui est viable pour l'avenir de Power Corporation. Ainsi donc, on se départit du journal avec un legs de 50 millions de dollars et une nouvelle structure. Parlons-en. On a posé des questions sur cette structure. De quoi serait-elle faite? Qu'est-ce qu'elle permettra de faire? Elle permettra notamment de recueillir des fonds qui étaient autrefois inaccessibles au journal.

Et là je veux faire une distinction, parce que je sais que de nombreux artisans de l'information nous suivent, entre toutes ces personnes qui travaillent à l'information — ils sont plus de 500 — et les patrons. D'abord, notre sympathie totale, entière et notre concours, nous les apportons aux artisans de l'information, ces gens qui, quotidiennement, font un travail remarquable au service de l'information. D'ailleurs, on est en contact, nous, quotidiennement, à l'Assemblée nationale, avec la presse parlementaire, les représentants, sur la colline Parlementaire, du journal La Presse. Alors, à ces personnes, nous leur souhaitons ce qu'il y a de mieux pour l'avenir. Nous souhaitons le maintien du journal La Presse, évidemment. Nous souhaitons que cette grande institution puisse demeurer une des voix au Québec dans le domaine de l'information, une grande tradition mais aussi un produit de qualité en termes d'information. Alors, à toutes ces personnes qui sont des artisans de l'information de La Presse, nous leur disons que notre questionnement ne touche pas leur travail à eux. Notre questionnement s'adresse ailleurs, s'adresse aux patrons de Power Corporation, et là on a des questions importantes.

On nous a rappelé en auditions que ça faisait 50 ans, 50 ans que Power Corporation avait acquis le journal La Presse. Alors, voilà un clin d'oeil de l'histoire : la propriété de la famille Desmarais, du journal La Presse, accompagne les 50 années d'existence du Parti québécois.

Or, il se trouve que les militants du Parti québécois sont de fins observateurs. Ils ont remarqué une chose, et ça explique peut-être pourquoi la ministre est si entichée à l'idée que rien ne change avec La Presse et qu'on se rende invariablement aux arguments de La Presse, à chacune des élections, M. le Président, invariablement, 1970, 1973, 1976, 1981, 1985, 1989, 1994, 1998, 2003, 2007, 2008, 2012 et 2014, plus le référendum de 1980, plus le référendum de 1995, invariablement, La Presse a appuyé le Parti libéral du Québec et l'option fédéraliste. Pas de marge d'erreur, toujours le même résultat, la pièce tombe toujours du même côté. C'est un choix éditorial et c'est ce que le propriétaire de La Presse appelle le droit du propriétaire. Est-ce qu'on peut poser des questions sur une telle orientation à partir du moment où l'État consent un statut d'organisme à but non lucratif? Le droit de propriétaire, il s'exerce par celui qui paie.

La famille Desmarais aurait pu faire un choix différent, aurait pu décider d'acheter le journal et de l'opérer. Je pense qu'ils en ont les moyens. Ils ont fait un autre choix. Alors, à partir du moment où, devant les parlementaires, on nous dit : Pour l'avenir de notre journal, on a besoin d'une nouvelle structure, nous disons : Oui, nous allons l'étudier. À partir du moment où on nous dit : Ça va nous permettre d'aller chercher des revenus supplémentaires, aidez-nous, on répond présent, mais on pose des questions.

Alors, j'ai posé la question de l'orientation idéologique de ce journal et, encore une fois, sans remettre en cause les 500 fiers artisans de l'information, et on m'a dit au salon rouge de l'Assemblée nationale du Québec que, oui, il y avait une position depuis 1972, de l'époque de Roger Lemelin, et, candidement, M. Desmarais m'a dit qu'il souhaitait que ça puisse se poursuivre et puis qu'il avait bon espoir, en plus. Et on m'a également indiqué que La Presse était une organisation qui était là notamment pour défendre le fédéralisme et aussi faire en sorte que jamais, et je cite, un parti séparatiste ne soit élu, d'accord? Alors, le député indépendantiste que je suis, du parti de René Lévesque, un parti avec une grande tradition démocratique qui n'a pas un héritage déshonorant, de se faire dire ça à l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président, j'avoue qu'au nom de toutes les personnes que je représente qui soutiennent cette option et toutes ces personnes qui ne la soutiennent pas mais la respectent cette remarque était d'une autre époque et elle mérite d'être entendue. Elle a le mérite, à tout le moins, de démontrer quelles étaient les prédispositions, pendant 50 ans, d'une famille qui a été propriétaire d'un journal et qui a exercé, à juste titre, c'est son choix, son droit de propriétaire. Mais, à partir du moment où on change de structure et qu'on vient devant les parlementaires, qu'on ne nous dise pas qu'on ne peut pas poser des questions, parce que moi, je n'abdiquerai pas mon rôle de parlementaire. Et il se trouve que certains journalistes ont critiqué les questions que j'ai posées et celles de ma formation politique parfois avec insistance, devenant le coup d'un tweet ou d'un message Facebook des éditorialistes. Je leur dis la chose suivante : On a un immense respect pour le travail que vous faites. Jamais il ne me viendrait à l'idée d'indiquer à un chroniqueur ou à un journaliste quoi faire. J'espère que jamais des chroniqueurs ou des journalistes ne diront aux députés quoi faire. On sait quelle est notre responsabilité. On sait quels sont les enjeux pour La Presse, pour les journalistes, pour leurs familles, pour l'avenir. On sait à quels défis sont confrontés les médias électroniques et les médias écrits. On le sait. On le vit. On est dans un monde très médiatisé où les choses ont changé pour des années. Ça ne sera plus jamais la même chose.

Alors, oui, on a posé la question de la position éditoriale. On avait cette occasion. On l'a posée. Oui, on a posé les questions de gouvernance et on a demandé — puis on l'avait demandé même dans la rencontre privée — comment on va nommer le conseil d'administration. Parce que, si Power Corporation et la famille Desmarais veulent rompre ce lien à travers un legs de 50 millions, à travers le fait qu'ils se départissent de La Presse — puis on sent que c'est un déchirement, puis avec raison, ça faisait partie de la tradition d'entreprise et de la tradition familiale — il faut que la rupture soit réelle. Quand je pose la question, qui est une question de saine gouvernance, et c'est des enjeux qu'on aborde ici régulièrement, à savoir : Comment sera nommé le président du conseil d'administration?, et on m'indique que c'est le patron actuel, Pierre-Elliott Levasseur, qui va nommer le président du conseil d'administration, donc son patron, il m'apparaît qu'il y a là un manque de distance si le patron nomme le président du conseil d'administration. C'est des règles élémentaires, élémentaires de gouvernance. J'ai posé la question à M. Desmarais. Il m'a indiqué qu'il avait pleinement confiance dans l'administration de M. Levasseur, et qu'il va nommer le président du conseil d'administration, et que le président va nommer le reste des membres du conseil d'administration.

• (15 h 30) •

Alors, quant à l'indépendance du conseil d'administration, je me pose des questions. M. Desmarais a nommé M. Levasseur, et il se trouve... et c'est une information que je n'avais pas, qui est essentielle quant à son indépendance, M. Levasseur est dans la famille de M. Desmarais, et je ne parle pas de la famille d'affaires seulement, il est dans sa famille. Alors, sur l'indépendance, je ne sais pas s'il y a des sujets qui vont être proscrits lors des rencontres familiales, mais c'est une réalité, et je l'ai déjà fait dans d'autres domaines où il faut évoquer l'ensemble du tableau. Je le fais encore aujourd'hui.

Alors, l'orientation idéologique d'une publication de presse, oui, nous avons posé la question, n'en déplaise à ceux que ça agace, et, manifestement, ça agaçait la ministre. 40 ans et plus d'appui systématique au Parti libéral du Québec, il m'apparaît que c'est particulier. Donc, doit-on comprendre que le prochain éditorial est déjà écrit pour l'automne prochain? D'autres journaux... Et heureusement ils sont venus à l'Assemblée nationale nous le dire parce que, n'eût été des invitations du Parti québécois, jamais on n'aurait entendu Le Devoir. Mais Le Devoir, qui avait comme éditorialiste Claude Ryan en 1976, mais lui a choisi de faire un choix différent, et Claude Ryan, dans un éditorial en 1976, a indiqué que son journal appuyait une formation politique qui s'appelle le Parti québécois, ce qui ne l'a pas empêché ensuite d'être un candidat à la direction du Parti libéral du Québec, choix qu'il a fait, et d'en devenir chef. Alors, ce n'était pas systématique. Le Devoir a une grande tradition de réflexion, et ils sont arrivés à ce choix-là.

Et, lorsque j'ai entendu son fils, Me André Ryan, qui était là comme président du conseil d'administration, qui poursuit l'engagement familial dans Le Devoir, et beaucoup Brian Myles... S'il y a une intervention qu'il faut écouter, c'est Bryan Miles, le caractère exceptionnel de son analyse sur la situation. Ce n'est pas rien, accorder un tel statut à La Presse, parce qu'il faut savoir les efforts considérables qui ont été consentis par les artisans du journal Le Devoir. Le journal Le Devoir s'est structuré d'une façon, je dirais, humble, modeste, mais sincère. Ils font appel aux lecteurs. Ils font appel à la philanthropie. Ils font appel aussi à une collaboration où chacun des artisans se sent impliqué dans les décisions et connaît, je dirais, de façon générale, la situation financière du journal. C'est une structure qui a beaucoup de mérite. Et j'espère que, lorsque Le Devoir aura besoin d'aide à Ottawa, on sera là aussi pour eux parce que ce qu'on nous propose avec La Presse, c'est, entre autres, une structure qui va permettre d'aller chercher des fonds, notamment à Ottawa, et peut-être que les critères changeront, mais ça, c'est un des objectifs.

Donc, la ligne éditoriale, nous avons posé la question — je sais que ça agace des personnes, je l'ai fait, je l'assume, M. le Président — la transparence également, la contribution aussi des artisans de l'information dans cette administration pour la pluralité des voix puis pour les échanges, je dirais, intellectuels sur l'organisation. Alors, est-ce qu'on peut garantir des places aux journalistes sur le conseil d'administration, aux lecteurs qui sont à la base de ce journal-là? C'est un journal qui est là pour les lecteurs. Il n'y a pas de garantie là-dessus, puis on nous a dit qu'on allait négocier, et même, à la rigueur, certaines personnes nous ont dit que ce n'était pas de nos affaires. Ce n'était pas une bonne idée de nous dire ça, M. le Président. Ce n'était pas une bonne idée parce que, pour chaque pièce législative...

Puis vous me connaissez, M. le Président, vous êtes un observateur attentif, là, de mes discours en Chambre. C'était le cas l'automne dernier dans un enjeu pas mal plus tendu que ça. N'eût été des questions que j'ai posées, je peux vous dire qu'il y a bien des choses qui ne seraient pas arrivées, puis on a peut-être empêché des choses d'arriver. Mais, dans ce cas-là, qu'on ne blâme pas les parlementaires d'exercer leur rôle de parlementaire. Et, encore une fois, jamais il ne me viendrait à l'idée de dire à d'autres corps de métier quoi faire, et je suis convaincu qu'ils ne le feront pas.

On a posé d'autres questions parce qu'on a été interpellés aussi. Il y a 500 travailleurs, plus de 500 travailleurs, artisans de l'information — j'aime beaucoup cette expression-là, moi, artisans de l'information — à La Presse, mais il y a 1 100 retraités. Et certains d'entre eux nous ont fait part d'inquiétudes qu'ils avaient, et j'en ai parlé lors des auditions, de la situation des retraités. Et j'étais heureux d'apprendre, il y a quelques jours, qu'il y avait des engagements qui avaient été pris de la part de La Presse pour les rassurer, et je les en remercie. Alors, si une de mes questions a contribué à ce résultat, ce sera déjà ça parce qu'ultimement c'est la majorité qui décidera, mais le gouvernement a déjà annoncé que, quant à La Presse, ils peuvent compter sur eux, c'est le moins qu'on puisse dire. Alors, ils assument leur position, mais nous, on va poser des questions.

Il ne faut pas s'inquiéter des questions des parlementaires, M. le Président. Ce qui est préoccupant pour l'avenir de La Presse, ce n'est pas les questions que le leader parlementaire de l'opposition pose, ou que mes collègues posent, ou que le chef de l'opposition pose. Le défi, il réside dans la nouvelle structure et sa capacité à faire face aux défis qui sont les siens dans un environnement nouveau, avec le caractère très compétitif qu'on retrouve avec les médias et aussi de grandes organisations sur Internet qui accaparent une grande partie des revenus publicitaires.

Alors, moi, je souhaite bonne chance à La Presse. Je dis aux artisans de l'information — alors, s'ils ne le savent pas, ils le sauront : On est capables de dire à la fois qu'on veut maintenir les emplois, qu'on a du respect pour eux, que nous n'avons rien à dire sur la qualité de l'information qui est... C'est partagé, ça. Tous les artisans, qu'ils soient journalistes, qu'ils soient chroniqueurs, qu'ils contribuent dans le domaine de la photo, de l'édition, l'éditeur, toutes ces personnes-là ont notre respect, comme c'est le cas pour l'ensemble des médias, d'accord? Mais laissez-nous poser ces questions aux patrons. Nous comprenons qu'il y a front commun, mais je connais assez bien les centrales syndicales pour vous dire que je serais surpris qu'ils nous reprochent de poser des questions lorsqu'il y a des enjeux de cette nature-là. Je comprends leur position, mais ils doivent comprendre la nôtre également.

Alors, nous posons ces questions avec un sens des responsabilités, avec une volonté que La Presse puisse obtenir, je dirais, la poursuite de son aventure, pas nécessairement un nouveau départ, mais une nouvelle impulsion, avec des idées nouvelles, avec une façon de voir le monde qui n'est plus celle qu'on retrouvait lors de l'achat, en 1967. Et ce journal-là a tellement de talents, tellement de talents à travers ses artisans, qu'il est une voix essentielle.

D'ailleurs, c'est le premier journal que je lis le matin, M. le Président. Et moi, j'aime bien, là, personnellement, j'aime bien cette formule qui me permet de lire sur un appareil électronique. Je pense que beaucoup de collègues, juste à voir, là, à l'Assemblée nationale, aiment bien lire ça. Il me semble que c'est un modèle qui a été un pari audacieux, qui n'a pas remporté le succès estimé, mais le produit est un produit de qualité. C'est un produit de qualité que moi, j'apprécie, en tout cas, M. le Président, je peux vous le dire.

Alors, les gens qui nous écoutent vont se dire : Qu'est-ce que recherche le Parti québécois à travers ça? Pourquoi il questionne, par exemple, la politique éditoriale? Est-ce de ses affaires? Réponse : Tout projet de loi qui est soumis à un parlementaire, c'est sa responsabilité de l'étudier, surtout lorsqu'un changement de structure ouvre la porte à l'obtention de fonds publics. Donc, ultimement, l'ensemble des citoyens du Québec pourraient financer une position éditoriale qui n'est pas partagée par tous ses lecteurs. Puis ce n'est pas obligé, aujourd'hui, M. le Président, pour un journal, d'avoir une position éditoriale. Le Globe and Mail, dans l'élection ontarienne qui s'est terminée jeudi dernier, a fait le choix de ne pas prendre position. Alors, ultimement, c'est La Presse qui va décider, mais je voulais poser la question. J'ai été heureux de la candeur de la réponse. Ça m'a donné des indications. Ils vivront avec, mais je suis convaincu que la nouvelle génération de journalistes et d'éditorialistes aura certainement des réflexions à apporter sur le rôle d'un journal quant à des choix éditoriaux. Et j'ai confiance en ces équipes compétentes, quels que soient les médias.

Ensuite, sur la gouvernance, c'est évident que, si on peut contribuer, à travers notre expertise de parlementaires, voire même des amendements, à améliorer le projet de loi, bien, il y a des gens qui seront gagnants.

On nous invoque parfois qu'il faut procéder rapidement. Ça aussi, j'invite à la prudence. Je n'utiliserai pas le terme «bousculer», mais presser les parlementaires sur un projet de loi, ce n'est pas une bonne idée. Ce n'est jamais une bonne idée. Les 125 élus de l'Assemblée nationale sont des gens qui ont été choisis pour faire un travail minutieux d'analyse, sans précipitation ni somnolence. Ils font ce travail sachant qu'au-delà de ce qu'on voit dans les circonscriptions, le rôle qu'on a d'intermédiaires et de représentants de nos concitoyens, lorsqu'on est à Québec, on a un rôle d'étude minutieuse des conséquences de nos paroles, de nos propositions et de notre vote. Ça va nous suivre.

D'ailleurs, au Québec, réflexion personnelle, je pense qu'on devrait surveiller davantage le bilan des votes que les parlementaires prennent. Aux États-Unis, c'est une tradition qui est bien établie. Par exemple, au Sénat ou au Congrès, on peut dire : Telle représentante ou tel représentant a voté en faveur de telle pièce législative et contre telle pièce législative. Il n'y a pas vraiment de compte au Québec. À ma connaissance, ça serait quelque chose qui serait intéressant.

• (15 h 40) •

Alors, moi, quand je vais voter, je peux vous dire une chose, M. le Président, je veux être assuré qu'on a la meilleure pièce législative possible pour l'atteinte des objectifs qui sont ceux de La Presse. Et je les comprends. Il aurait pu en être autrement parce qu'à l'origine, si ça avait été un projet de loi privé, donc déposé mi-février à peu près, bien là, c'est adopté avec la majorité, et puis ça se passe habituellement les dernières journées, les dernières journées de la session, puis c'est comme un projet de loi privé qui touche une municipalité ou, des fois, des enjeux très complexes. J'en ai vu de toutes natures avec 11 ans de parlementarisme.

Alors là, c'est comme ça, on va faire pour le mieux. Les questions sont posées. Les questions, je les ai posées aux auditions, puis ensuite je suis retourné dans mon caucus et j'ai parlé à mes collègues, et ils m'ont exprimé ce qu'ils en pensaient. Et cette riche tradition de débat démocratique au Parti québécois s'est exprimée encore ce matin, M. le Président. Et je vous en livrerai la conclusion dans quelques minutes. On a échangé là-dessus, on a échangé sur l'impact de cette pièce législative qui se veut... et c'est un acte de foi, c'est un acte de foi pour tout le monde, là, puis particulièrement pour les artisans de l'information. C'est un acte de foi qui dit... On nous l'a présenté, puis Dieu sait que, s'il y a des gens qui peuvent poser des questions de qualité, c'est des journalistes. Imaginez, ils étaient tous dans la même salle lorsqu'on leur a présenté ça. Soyez assuré d'une chose, M. le Président, c'est des gens aguerris qui savent poser des questions puis faire de l'analyse. Je n'ai aucun doute qu'ils ont fait un exercice rigoureux puis qu'ils ont posé des questions qui s'imposaient. Et ils ont décidé de faire confiance, et je respecte cela.

Mais je me permets quand même de poser des questions au nom de mon groupe pour ne pas personnaliser les affaires, puis en même temps je veux souligner le fait que jamais je n'ai senti chez les intervenants de La Presse, en ce qui me concerne, quelconque empressement à connaître notre position. Ça a été très respectueux. J'ai eu des échanges avec la direction, des échanges avec les artisans de l'information. Je sens leur volonté de commencer cette transition, d'accord? Et je n'ai que de bons mots à dire sur cette relation que j'ai là. Mais ces questions-là, on ne pouvait pas les occulter. C'était important. C'est des questions qu'on me soumet, d'observateurs, qu'ils soient dans ma circonscription ou ailleurs, et je n'ai pas l'habitude de poser des questions dont les réponses n'auront pas une contribution au débat. Et déjà on a vu une contribution au débat. D'ailleurs, je pense que, de façon générale, les parlementaires sont préoccupés par l'avenir des sources d'information parce que chaque matin, les gens ne le savent peut-être pas, là, mais on a une publication, que je n'ai pas ici à portée de main... ah! oui, qui s'appelle L'Argus. L'Argus, une publication qui est à la disposition des parlementaires, où l'ensemble, disons, des articles significatifs, en politique, de la presse écrite sont consignés. Alors, on y travaille. On sait que ce travail-là qui est fait donne un miroir de ce qui se passe avec une rigueur, une méthode puis une analyse, puis on en tient compte. D'ailleurs, combien des questions posées à l'Assemblée nationale originent du travail rigoureux des journalistes de la presse de la colline Parlementaire ou des différents départements des médias?

Lors des auditions, évidemment, on a appris ce front commun, qui est rare quand même, des centrales syndicales, des artisans de l'information, des patrons et des retraités. Nous le constatons, nous en tenons compte. Mais certaines voix se sont fait entendre aussi pour nous mettre en garde sur l'impact que ça pourrait... ou le précédent. D'ailleurs, quand La Presse nous dit : Il faut agir avec équité parce que, sur plus de 80 quotidiens, on est les seuls qui sont liés à cette disposition, disons, à cette contrainte de passer par un projet de loi... Oui, mais ce n'est pas la faute des parlementaires de la 41e législature, ça. Puis bien sûr qu'on est dans un processus, puis tôt ou tard, tôt ou plus tard, ce projet de loi sera modifié. Je ne sais pas quel sera son sort cette semaine, mais je pourrais vous dire une chose : nous aurons posé des questions qui s'imposaient. Nous aurons indiqué à maintes reprises que notre préoccupation est pour les artisans en information. Et, oui, on a un sens critique à l'égard des patrons de Power Corporation, et je les remercie de leurs réponses parce qu'ils m'ont répondu avec beaucoup de clarté.

À partir de ça, ça engage la parole des patrons face à leurs employés. Ce n'est plus l'opposition officielle, là. On ne sera pas un acteur, là, pour la suite de la vie de La Presse. Ça va être la parole qui a été donnée, ça va être la loi qui sera peut-être modifiée, adoptée, et on devra vivre avec. Alors, j'espère que jamais, jamais on ne doutera de cette volonté des parlementaires de l'opposition officielle et d'autres parlementaires, notamment la députée de Vachon, avec qui j'ai travaillé sur la commission, de poser des questions, ce qui nous a attiré autant de critiques que de félicitations, mais ce n'était pas l'objectif. L'objectif, c'était d'avoir l'assurance de faire notre travail correctement.

En conséquence, après avoir analysé l'ensemble des éléments qui ont été soumis relativement... simplement et clairement lors des rencontres privées, lors des auditions de mercredi dernier, lors de nos discussions en caucus encore tout à l'heure, à la lumière des commentaires reçus d'observateurs, mais également de personnes qui sont directement impliquées, compte tenu de l'aspect précipité de l'adoption de ce projet de loi, considérant les implications quant au précédent que ça pourrait créer quant au choix qui a été fait par l'entreprise, qui aurait pu être différent — le patron aurait pu décider d'acheter le journal et de l'opérer — plusieurs questions subsistent, et, malgré tout ce respect que nous avons pour les artisans de l'information et artisanes de l'information de La Presse, pour cette première étape, qui est l'adoption de principe du projet de loi n° 400, j'annonce, au nom de ma formation politique, au nom de l'opposition officielle, que nous allons voter contre le principe du projet de loi n° 400.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le leader de l'opposition officielle, pour cette intervention. Mme la députée d'Iberville, je vous cède la parole pour votre intervention.

Mme Claire Samson

Mme Samson : Merci, M. le Président. Dès le début du processus, nous avons annoncé être en faveur du dépôt et ultimement de l'adoption du projet de loi n° 400 d'ici la fin de la session parlementaire parce que nous comprenions l'urgence d'agir pour permettre à La Presse de procéder à sa transformation en OBNL le plus rapidement possible. Attendre la prochaine législature pourrait faire mal à l'entreprise et à ses employés. Une année dans le monde des médias, ça peut être très long, d'autant plus que la situation devant laquelle nous sommes découle d'une chicane de famille lors de la succession de l'honorable Trefflé Berthiaume en 1912.

La loi de 1967 répondait, à l'époque, certes à des craintes légitimes exprimées par les élus, soit de voir passer à des mains étrangères la propriété d'un journal francophone et indépendant. Or, aujourd'hui, en 2018, il semble que cette loi crée des contraintes excessives pour La Presse. En effet, cette loi fait en sorte que La Presse est la seule entreprise de presse au Canada qui doit obtenir l'aval des parlementaires pour aller de l'avant avec une modification à sa structure d'entreprise. C'est une situation qui, admettons-le, est inéquitable.

Cela dit, nous avons eu de nombreux questionnements à l'égard de la solution mise de l'avant par La Presse et Power Corporation. Nos questionnements portaient sur deux aspects essentiellement, soit l'indépendance du nouvel organisme à l'égard de ses anciens actionnaires et le traitement des employés retraités et actuels de La Presse. Heureusement, les consultations fort intéressantes que nous avons eues la semaine dernière, mercredi dernier, nous ont permis d'obtenir des réponses plutôt satisfaisantes.

Il nous apparaît clair que la nouvelle entité sera tout à fait libre de toute attache avec Power Corporation, comme l'a confirmé M. Desmarais devant la commission. Son engagement a été on ne peut plus clair et sans équivoque, et, en ce sens, sa réponse nous a satisfaits.

Par ailleurs, M. Levasseur, président de La Presse, nous confirmait que les fiduciaires seraient nommés parmi une sélection de trois juges retraités, proposition devant être soumise par le Barreau du Québec à La Presse et qui fait rapport de sa décision à Power Corporation. Cette façon de procéder nous semble la bonne, puisqu'elle permet une réelle indépendance entre le nouvel actionnaire, la fiducie d'utilité sociale et Power Corporation.

Sur la question des relations de travail, nous avons également obtenu des réponses satisfaisantes, d'autant plus que l'ensemble des syndicats appuie la requête de La Presse.

• ( 15 h 50) •

Tout d'abord, il est important de souligner que les conditions de travail des employés syndiqués de La Presse seront maintenues dans leur entièreté, et, en effet, de toute façon, le Code du travail prévoit déjà, dans le cas de transfert d'entreprises... le nouveau propriétaire est lié par les accréditations syndicales et les conventions collectives existantes au sein de l'entreprise.

Concernant les régimes de retraite des employés de La Presse, Power Corporation s'est déjà engagée à continuer de financer les régimes de retraite existants pour les employés actuels et retraités de l'entreprise, et M. Desmarais nous a expliqué sa décision voulant qu'il souhaitait que Power Corporation et son conseil d'administration... étaient d'accord pour s'assurer à continuer de payer les rentes sur une façon... de business, et là je le cite : «La continuité qu'on fera pour s'assurer que tous les gens qui ont travaillé pour nous pendant toutes ces années auront la retraite qu'ils méritent, et alors c'est pour ça qu'on l'a fait...» Donc, non seulement cette décision nous semble juste et socialement responsable, mais elle a été saluée par le représentant des retraités syndiqués, M. Yvan Berthelot. D'ailleurs, l'ensemble des syndicats de La Presse appuie la démarche de La Presse.

On peut certainement douter sur la viabilité du modèle que La Presse a privilégié, mais peut-on vraiment priver La Presse d'une chance nouvelle de survivre et peut-on vraiment en priver les Québécois? Je le dis depuis le début du processus, M. le Président, le cas de La Presse n'est que la pointe de l'iceberg quand on parle de l'impact du numérique sur nos institutions culturelles et médiatiques.

Le milieu de la musique a été frappé fortement par l'arrivée d'Internet et du numérique dès le début des années 2000, et, depuis quatre, cinq ans, avec les plateformes d'écoute en continu, la crise s'accentue. Les revenus vont encore une fois dans les mains d'une poignée d'individus, ce qui a fait mal à tous nos producteurs et à tous nos artistes. On a vu dernièrement les difficultés rencontrées par les gens du commerce du détail en ce qui a trait au commerce électronique, et maintenant c'est le milieu des médias qui subit fortement l'impact de l'arrivée du numérique. Et je m'attends à ce que la télévision et la radio soient les prochains domaines touchés dans quelques années.

Ça fait 15 ans qu'on voit la situation avancer, qu'on voit les problèmes arriver, mais qu'il n'y a pas grand-chose qui a été mis de l'avant par le gouvernement libéral. Il est temps que le gouvernement prenne ses responsabilités et nous propose des solutions concrètes pour aider nos artistes à faire face au GAFA. D'ailleurs, demain, la ministre va déposer sa nouvelle politique culturelle. Malheureusement, le projet de politique déposé par son prédécesseur en juin, l'an dernier, ne proposait rien à cet égard. Il s'agit probablement d'un voeu pieux, mais j'espère sincèrement que la ministre va nous surprendre demain en proposant des mesures spécifiques pour accompagner nos artistes et nos industries dans ce nouvel environnement d'affaires. Le milieu a pourtant fait plusieurs demandes à cet égard lors des consultations menées par le ministère pour le développement de la nouvelle politique. J'espère que leurs demandes seront entendues.

Je tiens à vous indiquer, M. le Président, que nous formulerons un seul amendement au projet de loi et que cet amendement visera simplement à préciser l'objectif du projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée d'Iberville, pour cette intervention. M. le député de Gouin, la parole est à vous.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Combien de temps ai-je à ma disposition, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Vous disposez de 20 minutes.

M. Nadeau-Dubois : 20 minutes? Merci, M. le Président.

J'aimerais commencer en faisant écho à certains arguments mis de l'avant par le leader de l'opposition officielle. J'aimerais y faire écho de deux manières, d'abord en rappelant que Québec solidaire a été, dans les dernières années, extrêmement critique des positions éditoriales tenues par le journal La Presse. En fait, je pense même qu'on peut dire que, dans une très, très, très grande majorité des cas, Québec solidaire s'est opposé aux positions éditoriales de La Presse, que ce soit durant les campagnes électorales ou avant les campagnes électorales, entre les campagnes électorales, des positions éditoriales qui ont généralement défendu le fédéralisme canadien, un cadre constitutionnel auquel Québec solidaire s'oppose et duquel on souhaite sortir le Québec.

Québec solidaire s'est bien sûr opposé aux prises de position éditoriales de La Presse lorsqu'ils ont appuyé quasi systématiquement, lors de plusieurs élections générales, le Parti libéral du Québec. Québec solidaire s'est bien sûr opposé également souvent aux positions éditoriales de La Presse lorsque ce journal a souvent appuyé des mesures antisyndicales ou qui venaient limiter la liberté d'expression et de manifestations au Québec. Et j'ajouterais même sur une touche personnelle que c'est probablement dans les pages de La Presse que les critiques les plus virulentes ont été écrites à mon égard lorsque je militais au sein du mouvement étudiant québécois.

Québec solidaire a été également critique et sera critique pendant longtemps de l'influence des grands groupes économiques, des grandes entreprises, sur les décisions politiques qui se prennent au Québec. Power Corporation fait partie, M. le Président, de ces grandes entreprises qui étendent leurs tentacules partout dans les réseaux d'influence au Québec. Mon collègue de Mercier en a d'ailleurs fait état directement à M. Desmarais lors de la commission parlementaire.

Tout ceci étant dit, on souhaite rappeler que le débat qui se tient actuellement à l'Assemblée nationale, ça ne porte pas, justement, sur le bien-fondé des positions éditoriales de La Presse. Ce débat-là, il ne porte pas sur l'opinion que les formations politiques peuvent avoir de ces positions éditoriales. Je le répète, vous ne trouverez que très rarement d'archives, M. le Président, où vous verrez Québec solidaire d'accord avec des positions de La Presse. Or, ce n'est pas l'objet de notre débat. Notre débat ne porte pas sur : Est-ce que le gouvernement, l'opposition officielle ou Québec solidaire est sympathique ou antipathique aux positions éditoriales de La Presse? Et, lorsque j'ai eu l'occasion de parler avec les gestionnaires de La Presse dans le cadre des discussions autour de ce projet de loi là, je l'ai d'ailleurs systématiquement mentionné, qu'on n'avait aucune sympathie particulière à l'égard des positions éditoriales du journal et qu'on n'en aurait fort probablement pas dans l'avenir, mais que, nonobstant toutes ces réserves-là, nous allions voter en faveur du projet de loi n° 400 parce que le débat ne porte pas là-dessus, le débat porte sur une réorganisation interne à La Presse. Et, dans le cadre de ce débat-là, les artisans de l'information, les journalistes, la direction sont venus nous dire, d'un ton et avec un propos unanime, qu'ils croient en cette nouvelle structure et à ce nouveau plan.

Ça ne nous a pas empêchés de poser des questions. Et là-dessus, également, je veux faire allusion aux remarques du leader de l'opposition officielle. On en a posé, des questions, même qu'il nous en reste encore quelques-unes sur la présence des employés au sein du nouveau conseil d'administration, sur la prise en charge des retraites et des passifs par la nouvelle structure. Des questions également sur l'indépendance de la salle de rédaction, sur la nomination du premier président du C.A., sur la préservation des emplois également au sein de La Presse. Ces questions-là sont pertinentes, on les a posées, M. le Président, puis on va continuer à les poser dans les étapes subséquentes de l'étude de ce projet de loi là. Il ne s'agit pas ici d'abdiquer notre rôle de parlementaires, il ne s'agit pas non plus de valider, directement ou indirectement, les positions éditoriales du journal, il s'agit de souscrire à un plan de réorganisation qui est appuyé par l'ensemble du monde journalistique, par l'ensemble du monde des médias et, avant tout, par les gens qui font vivre le journal La Presse au quotidien, c'est-à-dire, non pas ses gestionnaires, mais ses journalistes, ses artisans, ses employés, qui sont venus nous demander notre collaboration. Et il n'y a rien de honteux ou de gênant. Ça ne représente aucune abdication de nos prérogatives comme parlementaires que d'écouter ces voix-là qui nous demandent d'agir avec rapidité et de voter en faveur du projet de loi n° 400. Ce n'est pas du tout contradictoire, M. le Président, à nos responsabilités comme parlementaires.

Je ne m'étendrai pas plus longtemps, mais je veux terminer en redisant ce que j'ai dit d'entrée de jeu : Le vote qu'on a à prendre ici sur le principe et ensuite sur l'adoption du projet de loi n° 400, ce n'est pas un vote pour appuyer ou encourager les positions éditoriales passées de La Presse, c'est un vote pour s'assurer de la survie, de la poursuite d'un organe médiatique avec lequel on peut avoir des désaccords. Puis je vous ferai remarquer, M. le Président, que c'est même sain, dans une société démocratique, qu'il y ait de tels désaccords, c'est même souhaitable qu'il y ait un jeu de tension ou de contre-pouvoir entre les organes de presse et les différents partis politiques. Tout ça, c'est normal, c'est souhaitable. Et vous allez pouvoir toujours compter sur Québec solidaire, M. le Président, pour critiquer ouvertement l'influence de Power Corporation, pour critiquer ouvertement les positions éditoriales de La Presse avec toute la virulence que vous nous connaissez.

Ceci étant dit, nous allons voter pour ce projet de loi là parce qu'il est issu d'un consensus du milieu journalistique, du milieu médiatique, et surtout un consensus à l'intérieur du journal, qui nous demande d'agir promptement pour leur permettre de se réorganiser. Merci, M. le Président.

• (16 heures) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Gouin, pour cette intervention. Mme la députée de Vachon, à vous la parole.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Oui, merci, M. le Président. Tout un dossier que celui de la transformation de La Presse.

Je voudrais d'entrée de jeu, M. le Président, dire que je suis totalement en appui pour la diversité journalistique. Je pense que d'ailleurs on devrait avoir un grand débat, on devrait arrêter d'escamoter les débats, arrêter de faire du cas par cas, parce que ce n'est pas vrai qu'actuellement ce qu'on est en train de regarder va permettre de répondre à la situation vécue actuellement au Québec mais un peu partout dans le monde. Donc, moi, je crois qu'il y a des solutions qui sont beaucoup plus larges. Je pense que c'est important, la liberté de presse, c'est important, l'indépendance des journalistes par rapport au gouvernement, mais aussi important, l'indépendance des journalistes par rapport au grand capital, surtout quand c'est payé par le gouvernement. Donc, je pense que tous ces éléments-là doivent être pris en considération. Et c'est pour ça que j'ai proposé dans une motion, qui a été refusée, malheureusement, par le Parti libéral, appuyée par le Parti québécois, appuyée par Québec solidaire mais pas appuyée, malheureusement, par la CAQ, qu'on mette en place un crédit d'impôt sur la masse salariale des journalistes, parce que, là, ce qu'on vient financer, c'est vraiment le travail de journalisme, de rigueur, d'information. Dans le monde actuel des «fake news», d'avoir des salles de presse, «presse» terme générique, pas La Presse mais salles de presse en général, dont celle de La Presse, qui ont des journalistes qui vont fouiller de l'information, de l'information articulée, c'est essentiel à la santé de la démocratie. Et ça, c'est vrai pour les quotidiens comme La Presse, c'est vrai aussi pour les hebdomadaires régionaux, qui sont extrêmement importants, c'est vrai pour les radios, c'est vrai pour les télévisions. Donc, je pense qu'il y a un débat qu'on a à faire sur la question de l'information. Et je crois et je suis tout à fait d'accord qu'il y ait des investissements publics dans l'information, mais je dis bien dans l'information.

Et là je veux revenir au cas de La Presse, parce qu'on essaie de nous faire croire qu'on n'a pas à se prononcer, qu'on n'a pas à regarder, que, là, c'est juste une loi particulière puis que ce n'est pas d'autre chose. Ce n'est pas vrai, M. le Président, parce que cette loi-là, elle enlève l'obligation de La Presse de continuer telle qu'elle est, donc elle lui permettra soit de vendre soit de se transformer en OBNL ou en OSBL — j'y reviendrai — fiducie, etc., mais ça lui permettra aussi d'aller chercher des dons de charité, c'est un ensemble. Parce que La Presse, actuellement, elle est déficitaire. Sortons certains chiffres qui circulent : 25 millions de dollars par année, peut-être, depuis deux ans. Je ne sais pas si c'est vrai, La Presse ne veut pas nous répondre, mais c'est les chiffres que moi, j'entends. Mais, M. le Président, il va bien falloir qu'ils aillent chercher de l'argent à quelque part s'ils veulent maintenir les emplois des journalistes. Et donc c'est par des dons de charité. Et là c'est là qu'on voit que, quand on a la division entre le fédéral puis le provincial, on n'est pas capable de voir la question dans son ensemble, et c'est essentiel pour nous, les parlementaires, de la voir dans son ensemble, parce que, là, on crée de la concurrence déloyale. Les dons de charité ne seraient seulement qu'admissibles à une structure du côté d'OSBL ou OBNL, et non pas une structure privée. Donc, on crée de la concurrence déloyale, et je pense que ce n'est pas notre rôle, M. le Président, comme parlementaires, de créer de la concurrence déloyale.

Et je pense que... Pour la question des employés, moi, je suis extrêmement préoccupée. Et j'ai posé plusieurs questions soit au conseil d'administration de La Presse soit à Power Corporation, avec jamais de réponse. Comment une organisation qui n'était pas rentable, qui a créé des déficits, puis qui n'était pas rentable pas seulement à cause des Facebook et Google de ce monde puis par les géants... Puis, en passant, Power Corporation est aussi un géant, 52 milliards de revenus par année. Plus que Facebook, un petit moins que Google. Comment, s'ils n'étaient pas rentables avant, vont-ils être plus rentables en se transformant en OSBL? Pas de réponse, M. le Président. S'ils ne sont pas plus rentables puis ils sont encore déficitaires, l'OSBL n'a pas de poches profondes, ne pourra pas éponger les déficits comme l'a fait La Presse avec Power Corporation année après année, donc les emplois vont être encore plus précaires après qu'avant. Donc, ça va complètement à l'encontre de notre objectif de maintenir les emplois des journalistes. Je ne comprends pas comment on peut croire que cette transformation-là va aider les emplois des journalistes, c'est exactement le contraire.

Et, M. le Président, je voudrais revenir au projet de loi lui-même, projet de loi qui a un seul article, à part celui de la mise en vigueur — il y en a deux — qui est l'abrogation de l'article 3 de la loi... du chapitre, là, 168, là, de la loi de 1967, chapitre qui oblige Power Corporation à passer devant les parlementaires. Et c'est assez bizarre, M. le Président, d'entendre un peu tout le monde mais Power Corporation, qui le répète, et qui le répète, et qui le répète ad nauseam, avec le Parti libéral et d'autres, que ce n'est pas l'affaire des parlementaires, puis que cette loi-là, c'est une loi désuète, puis qu'on n'a pas besoin de s'en occuper, puis qu'on a juste à voter ça les yeux fermés. En fait, M. le Président, s'il n'y avait pas eu cette loi-là, jamais Power Corporation n'aurait pu acquérir La Presse, parce que, selon les testaments, ça aurait dû rester dans la famille, l'autre famille, la famille des Berthiaume, Trefflé Berthiaume. Donc, c'est grâce à l'Assemblée nationale si Power Corporation a pu mettre la main sur La Presse. Puis là, tout d'un coup, parce qu'il faut revenir, ils disent : Ce n'est plus de vos affaires. C'était vraiment de vos affaires en 1967, puis on avait vraiment besoin de vous autres, mais maintenant, rendu en 2018, on ne veut plus rien savoir de vous autres, vous n'avez pas d'affaire à vous ingérer. Je m'excuse, M. le Président, ça ne marche pas, ça, comme genre de logique, ça ne marche pas.

Et juste vous dire que, si on votait ça... Power Corporation, là, nous a fait des bien belles promesses qu'ils ont écrites dans leur journal, La Presse. M. le Président, j'en ai vu, des bien belles promesses. Moi, j'en ai vu, des bien belles promesses libérales inscrites dans La Presse qui ne se sont jamais réalisées. Les paroles s'envolent, les écrits restent. Il n'y a rien, dans le projet de loi qui nous est déposé, qui nous dit que ça va être transformé en OSBL ou en OBNL, rien du tout. Si nous votons ça, La Presse aurait le droit de vendre à l'étranger, ce qui était l'objet du projet de loi, qu'on ne puisse pas vendre à l'étranger. Si nous votons ça, La Presse pourra vendre à l'étranger, elle sera libre de faire tout ce qu'elle veut, de respecter sa promesse verbale ou pas, de vendre à l'étranger ou pas. Et nous, on accepterait ça? Si, en 1967, l'Assemblée nationale a jugé que c'était important de faire un vote pour garder la propriété ici, au Québec, pourquoi ce ne serait plus important aujourd'hui, en 2018? Je ne comprends pas.

Donc, le projet de loi est vraiment incomplet. Et je vous annonce tout de suite, M. le Président, que j'aurai plusieurs amendements, plusieurs amendements qui vont venir concrétiser les engagements pris par Power Corporation, mais, plus que ça, qui vont venir clarifier plusieurs éléments. Et je vais en présenter plusieurs, M. le Président.

Je commencerais par la question de la structure. Dans la question de la structure, c'est un peu compliqué, c'est un peu technique, M. le Président, puis malheureusement on n'a pas été si bien informés. On a été tellement mal informés que même Power Corporation puis M. Pierre-Elliott Levasseur, que j'ai appris aujourd'hui qu'il était lié à la famille Desmarais directement, il nous dit, dans l'article du 2 juin, que ce sera une transformation en structure à but non lucratif, OBNL, 2 juin. Le 9 mai, ils nous disent que c'était sans but lucratif. Donc, c'est-u OBNL ou OSBL? Ce n'est pas pareil, M. le Président, parce que, dans un cas, on a le droit d'avoir des actionnaires puis, dans l'autre cas, on n'a pas le droit. Donc, déjà là, ce n'est pas clair, la structure qu'ils veulent mettre en place.

Puis en plus il y a une fiducie qui vient chapeauter tout ça. Et là le problème de la fiducie, M. le Président, c'est que la fiducie peut avoir un certain contrôle sur les choses qui vont se passer. Puis ça, on va le savoir rien qu'après, parce qu'ils ne veulent pas prendre d'engagement, ils n'ont pas voulu du tout nous déposer les papiers. Et ce contrôle-là, fiducie, qu'ils disent, quelque chose sociale, là, donc ça, ça donne la possibilité d'élargir beaucoup le contrôle et la surveillance. Ça fait que l'indépendance, là, avec Power Corporation, là, elle n'est pas là, elle n'est pas là d'aucune espèce de façon. Ils ne peuvent pas dire qu'il y aura une indépendance du conseil d'administration quand la fiducie peut s'octroyer des pouvoirs de contrôle, de surveillance, quand les dirigeants qui sont là sont directement liés à la famille. Et là je ne parle pas des employés, mais je parle de la famille proche de Desmarais. Il n'y a pas d'indépendance.

• (16 h 10) •

Et là, M. le Président, moi, je veux bien qu'une entreprise comme Power Corporation se dote d'un véhicule comme La Presse. Comme l'a dit très candidement d'ailleurs M. Desmarais en commission parlementaire... Il disait : Mon père, il dit, avec La Presse, c'était son véhicule pour s'impliquer dans la société québécoise. Puis on l'a vu, que sa façon... Je pense que le collègue de Matane l'a très bien dit, hein, sa façon de s'impliquer dans la société québécoise, bien, c'était avec des positions très précises, donc des positions très anti-indépendantistes et des positions aussi assez, en général, puis ce n'est pas écrit directement dans leur mission, mais assez grand capital, hein, toujours pro le grand capital. Mais qu'il se paie ça lui-même, c'est une chose, M. le Président, mais là, actuellement, ce qu'il nous demande, à travers ce projet de loi là, mais qui va s'enligner avec des dispositions dans le budget fédéral, il nous demande que ce soient les contribuables qui paient, qui épongent la dette année après année à travers les dons de charité, qui sont remboursés à, il me semble, 40 quelques pour cent — c'est à valider — par les gouvernements. Est-ce que c'est le rôle des contribuables de payer pour des lignes éditoriales et un contrôle d'une entreprise sur l'orientation d'un journal?

Parce que les journalistes, d'un côté, c'est une chose, mais il y a aussi les chroniqueurs puis il y a aussi les éditorialistes, c'est une autre chose. Moi, je pense que le gouvernement, là, il doit financer... c'est les journalistes, c'est l'information factuelle. L'information d'opinion, je ne crois pas que ce soit le rôle du gouvernement de financer de l'information d'opinion. Et c'est pour ça, la proposition des crédits d'impôt sur la masse salariale des journalistes, pas des chroniqueurs, pas des éditorialistes, parce que ça, c'est la question d'opinion, et je ne pense pas que c'est le rôle du gouvernement de financer ça.

Donc, c'est le rôle du gouvernement de s'assurer qu'à travers son argent il y ait une indépendance. Et, oui, c'est notre rôle de s'occuper de la structure, tout à fait, comme ce l'était à l'époque. À l'époque, quand il y a eu la loi qui a été votée, c'était le rôle du gouvernement de s'assurer que ça reste au Québec, puis c'était à travers la structure, puis il y a même des dispositions qui ont été mises à l'intérieur. Donc, on devra avoir des précisions. Est-ce que c'est un OBNL ou un OSBL? La question de la fiducie, il faudra vraiment... Moi, je ne suis pas si certaine si c'est nécessaire d'avoir une fiducie. Pourquoi l'argent n'est pas directement transféré? J'aimerais bien ça avoir une implication. Et donc je pense que, oui, c'est tout à fait notre rôle, comme ce l'était à l'époque, de s'ingérer dans la gouvernance. Ça l'est. Ce n'est pas le rôle du gouvernement de dicter des lignes éditoriales, je suis tout à fait d'accord, et là l'indépendance du gouvernement doit être là, mais c'est le rôle du gouvernement de s'assurer qu'effectivement il y a une indépendance qui est là.

Et c'est le rôle du gouvernement aussi de s'assurer du maintien des emplois, et c'est supposé d'être pour ça qu'on est là. Et actuellement, comme je vous le dis, avec ce qui nous a été présenté, là, c'était tellement... Il n'y a pas de transparence, il y a un manque d'information. Si Power Corporation avait été présenter le plan d'affaires qu'elle a présenté aux parlementaires aux dragons, là, il n'y a pas un dragon qui aurait investi, c'est clair, ça aurait été un échec monumental. Et ils nous demandent, à nous, de dire O.K. et de passer la loi pour qu'après ça ils puissent aller chercher l'argent des contribuables? Puis c'est ça, de l'argent, là. Nous, on est comme la première étape pour aller chercher des investissements, M. le Président. Moi, je vous le dis, si M. Crevier et M. Desmarais s'étaient présentés aux dragons avec le plan d'affaires qu'ils nous ont présenté, aux parlementaires, là, ça aurait été un échec total. Pourquoi qu'on devrait dire oui alors qu'on n'a aucune information? Et on a même plutôt l'information contraire, que c'est déficitaire.

Et là ils nous demandent, en plus, sur le conseil d'administration... Ils viennent dire : C'est le même conseil d'administration qu'avant. Le conseil d'administration d'avant, ça a été un échec, là. Leur transformation avec la tablette puis leur idée, c'est un échec. Il y a d'autres médias qui ont réussi, mais, eux autres, c'est un échec. Ils ont fait des déficits puis ils disent : Nous autres, on le sait, quoi faire. Ils ont fait un échec, puis il faudrait les croire qu'ils savent quoi faire pour le futur? Puis ils vont changer, puis tout d'un coup ça va devenir une réussite, avec le même monde?

Ça me fait penser, ça, M. le Président, au problème des banques en 2008. On a gardé le même monde, avec le papier commercial, après puis avant. Ce n'est pas normal, ça, M. le Président.

Donc, ils viennent nous voir, ils veulent avoir accès à l'argent des contribuables. Moi, je suis d'accord qu'on donne de l'argent pour La Presse puis pour d'autres médias, pas juste La Presse, puis il faut que ce soit équitable pour tout le monde, mais aussi La Presse. Mais pas avec ceux qui ont vécu l'échec, là, parce que clairement le choix qu'ils ont fait, de la tablette, la façon dont ils l'ont développée, avec les coûts informatiques — puis encore là on n'a aucun détail — c'est un échec. C'est pour ça qu'ils sont devant nous, parce qu'ils trouvent que ça leur coûte trop cher d'éponger les déficits année après année. Si c'était une réussite, ils ne seraient pas là aujourd'hui devant nous.

Donc, moi, je suis très inquiète pour les employés, parce que ça va être la même mauvaise équipe de gestion qui va être là encore après, celle qui a fait des échecs, celle qui a fait des déficits. Puis nous, on accepterait que ces gens-là restent en place? J'ai de la misère avec ça, M. le Président.

Et, sur le contrôle, bien, très clairement, Power Corporation, et M. Desmarais, et M. Crevier ont complètement échoué à nous démontrer qu'il y avait une indépendance du côté du conseil d'administration. C'est le contraire, ils veulent garder la mainmise, ils veulent garder la mainmise sur La Presse. Ils veulent le beurre puis l'argent du beurre. Ils veulent garder la mainmise sur La Presse, mais ils ne veulent pas payer pour, ils veulent nous le faire payer, aux contribuables, puis cette décision-là nous appartient, aux parlementaires. Donc, je pense qu'il y a plusieurs amendements liés à l'indépendance du conseil d'administration.

Sur les dons de charité, je pense que ce n'est vraiment pas la bonne façon de financer l'information. Premièrement, l'information, ce n'est pas de la charité, puis les dons de charité, ça permet de financer une seule structure d'entreprise. Mais, plus que ça, et, dans ce cas-ci, je pense que la présentation de Pierre Karl Péladeau a été assez éloquente, ça peut amener des effets pervers où, à un moment donné, il y a des dons qui sont tellement importants que les journalistes n'osent pas critiquer ce donateur-là dans leurs pages par peur de perdre le don. Ce ne sera jamais écrit nulle part, ça, M. le Président, mais on le sait, que ça arrive. Et là, bien, on a des effets pervers qui risquent d'arriver, s'il y avait des dons importants qui étaient donnés. Et donc la sacro-sainte — et je suis d'accord qu'elle soit sacro-sainte — indépendance journalistique, elle ne serait plus là à cause des dons de charité. Donc, je pense que ce n'est vraiment pas la bonne façon de financer les médias et je pense qu'on devrait discuter des autres façons de financer les médias.

Je voudrais aussi dire que — je pense que c'est important que les gens le sachent — au niveau du financement, j'ai validé, et un seul... tous sauf un des administrateurs de La Presse ont financé le Parti libéral du Canada, le Parti libéral du Québec : le Parti libéral du Québec, 97 000 $ depuis 2000 puis, dans les années où c'était possible, à coups, régulièrement, de 3 000 $; le Parti libéral du Canada, depuis 2005, à hauteur de 60 000 $. Ils n'ont pas financé aucun autre parti politique. Donc, je pense que ça, c'est important.

Et finalement je vais terminer sur la question de l'urgence. On nous dit qu'il y a une urgence, ils nous sont arrivés après les délais, mais, c'est bizarre, M. le Président, ils ont eu leur assemblée des actionnaires le 11 mai et, le 11 mai, ils ont parlé de cette volonté-là de transformer La Presse en OBNL ou OSBL, on ne sait pas trop, ce n'est pas clair, mais ils ont attendu après le 15 pour venir nous en parler. Moi, je trouve ça très bizarre. Et c'est un bizarre de hasard et ça ressemble à une tactique, une astuce pour mettre de la pression sur les parlementaires, pour qu'on fasse les affaires à la sauvette, et, je pense, ce n'est jamais la bonne façon.

Donc, je pense qu'il faut prendre le temps de discuter des amendements. Et donc nous aurons une commission parlementaire, et j'aurai plusieurs amendements à déposer. Et je pense qu'il y aura tout un travail qui devra être fait pour permettre à ce projet de loi là de pouvoir être en lien avec les objectifs visés, c'est-à-dire le maintien des emplois, l'indépendance des journalistes et s'assurer de la survie de ce journal-là. Moi, c'est à ça que je vais travailler, mais je vais travailler dans une perspective où vraiment on va pouvoir avoir les informations, où les choses vont être écrites. Je crois que ce n'est pas suffisant, les engagements qui ont été écrits dans les médias, il faut que ce soit dans nos lois. Et j'espère qu'il y aura une ouverture, une collaboration de la part du Parti libéral dans ce sens-là pour nous permettre d'avancer dans ce dossier-là.

Et donc je pense que c'est tout un débat qui malheureusement, actuellement, est escamoté, parce qu'on aurait avantage à le faire de façon beaucoup plus large parce que la survie de l'ensemble de la presse écrite, et des médias, et de l'information est essentielle pour la démocratie. Mais ce n'est pas ça qu'on retrouve actuellement dans le projet de loi. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Vachon, pour cette intervention. Y a-t-il d'autres intervenants sur le principe du projet de loi n° 400? S'il n'y en a pas, le principe du projet de loi n° 400, Loi modifiant la Loi concernant la succession de l'honorable Trefflé Berthiaume et la Compagnie de Publication de La Presse, Limitée, est-il adopté?

• (16 h 20) •

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Sur le vote, Mme la leader adjointe du gouvernement? Non? Alors, adopté sur division. Très bien.

Pour la suite des choses, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la Commission de la culture et de l'éducation

Mme Vien : Bien sûr. Merci, M. le Président. Alors, conformément à l'article 243 du règlement, je fais motion afin que ce projet de loi soit déféré à la Commission de la culture et de l'éducation pour l'étude détaillée, s'il vous plaît.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Adopté. Pour la suite des choses, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vien : Avec plaisir, M. le Président. Merci d'appeler l'article 32, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 157

Adoption

Le Vice-Président (M. Ouimet) : À l'article 32 de notre feuilleton, Mme la ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse, à la Santé publique et aux Saines habitudes de vie propose l'adoption du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière. Alors, Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Lucie Charlebois

Mme Charlebois : Oui. Alors, merci beaucoup, M. le Président. C'est un moment important dans notre législation. Je suis heureuse de présenter en vue de l'adoption la version finale du projet de loi n° 157, le projet de loi qui constitue la Société québécoise du cannabis, et qui édicte la Loi encadrant le cannabis, et qui modifie diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Ce projet de loi positionne et prépare le Québec à l'entrée en vigueur prochaine de la légalisation du cannabis, imposée, je le rappelle, M. le Président, imposée unilatéralement par le gouvernement fédéral. Il est important ici de prendre une pause pour dire que le Québec encadre, je vous l'ai dit, mais que la légalisation s'effectue par le gouvernement fédéral.

Alors, comme on sait, la légalisation, c'est un enjeu de sécurité majeur. Et, vous le savez, M. le Président, le cannabis ne constitue pas un produit de consommation ordinaire. Bien entendu, dans un monde idéal, les gens n'en consommeraient pas, du cannabis, ne consommeraient pas de drogue, ne prendraient pas d'alcool. Toutes ces choses-là ne sont pas nécessairement... on n'a pas besoin de ça pour vivre. Mais, ceci étant dit, on ne vit pas dans un monde idéal, alors c'est pour ça qu'on vous présente aujourd'hui le fruit de tout le travail qui a été réalisé par l'ensemble des collègues.

Alors, le projet de légalisation, vous le comprendrez, M. le Président, devait être traité de façon très prudente et rigoureuse. Et, tout cela, nous devions tenir compte tant des expériences des États qui avaient légalisé le cannabis, mais aussi tirer des leçons que ces États-là ont apprises à travers le temps, mais aussi tirer des leçons de ce que nous avons acquis comme compétences en matière d'alcool, de tabac et de cannabis thérapeutique, qui est déjà existant.

Je vous rappelle, M. le Président, le 13 avril 2017, le gouvernement fédéral a déposé un projet de loi qui vise à légaliser le cannabis. Eux autres appellent ça légaliser le cannabis récréatif. Vous avez compris qu'au Québec on n'appelle plus ça comme ça, on appelle ça du cannabis non thérapeutique, et c'est fait à escient parce qu'on veut bien que les gens comprennent que ce n'est pas banal que de consommer du cannabis et que ce n'est pas récréatif, c'est vraiment du cannabis non thérapeutique. Alors, le projet de loi a été déposé le 13 avril 2017, et le gouvernement, à l'époque, fédéral de M. Trudeau avait annoncé l'entrée en vigueur au plus tard le 1er juillet 2018. Vous voyez que ce n'était pas très, très long comme laps de temps entre le dépôt du projet de loi par le gouvernement fédéral et la mise en vigueur.

Alors, en vertu de projet de loi qui a été déposé par le gouvernement fédéral, il fallait créer et maintenir un cadre national rigoureux déterminant la réglementation de la production, l'adoption de normes de sécurité et de santé et l'établissement d'interdictions criminelles. Ça, c'était du champ de compétence fédéral, M. le Président. Mais, pour les gouvernements provinciaux et territoriaux, nous, ce qu'on avait comme responsabilités, c'est d'assurer, justement, la distribution, la vente mais aussi un respect de la réglementation. Alors, les provinces devaient aussi traiter de la question de l'âge légal, la possession, les lieux d'usage et la production à des fins personnelles.

Alors, suite au dépôt du projet de loi à Ottawa, on a mis en place un comité qui regroupait une douzaine de ministères. Mais là je veux ici prendre deux secondes pour vous dire, M. le Président, que ce comité-là s'est mis au travail de façon plus régulière, mais on avait déjà amorcé du travail auparavant sur les choses qui nous apparaissaient comme inévitables. Écrire un article, il reste juste l'âge à écrire, bien, on pouvait déjà commencer des réflexions mais déjà travailler à la rédaction de cet article-là, et ainsi de suite. Alors, on avait déjà du travail de réflexion mais aussi du travail de rédaction pour ce qui nous apparaissait, pour l'ensemble des parlementaires, inévitable, il restait juste, mettons, le chiffre de l'âge à mettre, et, en fonction de comment on allait évoluer, on allait pouvoir mettre cette disposition-là. Mais il y avait d'autres articles semblables à cela, M. le Président.

Alors, suite au projet de loi, comme je vous le disais, on a mis en place un comité qui regroupait plus d'une dizaine de ministères. Je vous les énumère : ministère de la Santé et des Services sociaux, ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation, ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, ministère du Conseil exécutif, ministère de la Sécurité publique, ministère des Finances du Québec, ministère de la Justice du Québec, ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification du transport, ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, ministère de l'Enseignement supérieur, Secrétariat aux affaires autochtones et Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes. Vous comprenez, M. le Président, qu'à la lumière de tous les ministères dont je viens de vous faire mention... tous ces ministères-là avaient de près ou de loin des choses qui touchaient l'environnement de chacun des ministères, alors donc on a eu besoin d'avoir recours à toutes les compétences qu'il y avait dans chacun des ministères.

Mais qu'est-ce qu'on a cherché tout au long de tout ça? Bien, on avait le souci, M. le Président, de développer un projet de loi sur l'encadrement du cannabis qui était basé sur certaines prémisses. La première, c'est sur les meilleures pratiques. La deuxième, c'était sur les connaissances scientifiques. Il y avait aussi sur les expériences d'États qui ont déjà légalisé cette substance-là. Et évidemment on voulait répondre aux préoccupations de la population.

Alors, le but ultime, le même pour nous tous depuis le départ — j'allais dire pour notre gouvernement, mais, en fait, je vous dirais que c'est pour l'ensemble des parlementaires — le but ultime, c'était d'offrir le meilleur encadrement possible à cette substance sur notre territoire, compte tenu des enjeux qu'il comporte. Je tiens à le répéter, M. le Président, le cannabis, ce n'est pas une substance banale et inoffensive, notre action se doit d'être réfléchie et ferme. Puis je vais même vous ajouter que, pour les jeunes, j'ai le goût de leur dire : Prendre du cannabis, le fumer ou de toute autre manière, ce n'est pas génial, ce n'est pas essentiel à la vie. Alors, M. le Président, je reviens dans mon texte. La légalisation du cannabis interpelle donc une multitude d'acteurs, et nous nous devions d'être à l'écoute des citoyens et de diverses organisations.

Alors, le gouvernement du Québec s'est engagé à amorcer un processus de consultation, et ce processus a été effectué dans le but d'alimenter nos réflexions sur l'encadrement du cannabis relevant de notre juridiction. Alors, le processus de consultation mis en place par le gouvernement du Québec a d'abord pris la forme d'un forum d'experts sur l'encadrement du cannabis. Nous l'avons tenu à Montréal le 19 et le 20 juin 2017. Cet événement a réuni plus de 200 participants provenant de divers secteurs d'activité et des milieux universitaires, publics et privés. Ce forum visait à entendre les experts sur des enjeux concrets de l'encadrement fondé sur des principes de santé et de sécurité publiques.

• (16 h 30) •

Ensuite, nous avons eu un processus de consultation régionale qui s'est déplacé dans les villes de Rimouski, Québec, Saguenay, Trois-Rivières, Granby, Montréal et Gatineau. Au total, M. le Président, 128 mémoires ont été déposés par les organisations et 570 citoyens se sont inscrits aux consultations publiques.

Enfin, les Québécois ont été invités à répondre à une consultation en ligne, entre le 21 août et le 12 septembre 2017, à laquelle 12 600 personnes, exactement 12 594 personnes, M. le Président, ont répondu. Et pas faire une partie du questionnaire puis laisser en plan le restant du questionnaire. La majorité des gens ont rempli l'entièreté du questionnaire. Alors, c'est dire que ça a vraiment suscité l'intérêt des gens de nous donner leur opinion.

On a aussi consulté les municipalités, M. le Président, le 5 septembre dernier. Évidemment, le Secrétariat à la jeunesse a tenu des consultations, dont nous avons eu le résultat, auprès des jeunes le 26 septembre. Et finalement il y a eu aussi une consultation auprès des communautés autochtones le 29 septembre dernier.

Il est ressorti de ces consultations que la principale préoccupation soulevée par les citoyens concerne la banalisation de la substance. Ça, ça a été unanime, M. le Président, tout le monde ne veut pas que ce produit-là soit banalisé dans notre société. Tant les citoyens que les organisations réclament un accès à des informations justes, non biaisées et non dramatisantes sur la substance, ses effets, ses bienfaits, ses risques et des conseils pour un usage responsable et sécuritaire. Les consultations m'ont aussi permis de comprendre que les gens, à l'unanimité, M. le Président, souhaitaient que nous mettions en place des activités de prévention, et de sensibilisation, et d'éducation sur la consommation de cannabis.

Et je peux vous dire, M. le Président, qu'on a fait des constats, tout le monde ensemble, mais je pense qu'il y a une chose qui est arrivée à la population, c'est que plein de gens ont fait le constat que tout le monde a autour d'eux autres quelqu'un qu'ils connaissent qui a déjà consommé du cannabis et/ou qui en consomme encore. Ceci étant dit, je pense que les gens ont fait le constat qu'on n'a jamais peut-être vraiment, comme société, pris le temps de réfléchir à tous les impacts que ça peut engendrer. Et là, bien, on n'avait pas le choix, là, avec la légalisation, tout le monde était assis puis on faisait des remarques, des commentaires, tous et chacun, là, ce n'est pas plus un que l'autre. Mais c'est comme si ça venait d'arriver. Bien non, ça fait longtemps que ça existe, là, la consommation de cannabis, sauf qu'avons-nous déjà eu un moment pour s'asseoir et en discuter comme on en discutait là? Pas vraiment. Pas comme législateurs, M. le Président.

Alors, la sécurité publique et notamment la sécurité routière ont constitué un enjeu important auquel nous avons dû porter une attention particulière.

Alors, toujours dans l'optique de respecter l'échéancier avec lequel nous devions composer, je vous l'ai dit un petit peu tantôt, M. le Président, c'était assez court comme délai, nous avons effectué un suivi constant des travaux du gouvernement fédéral afin de nous ajuster en conséquence et d'optimiser les travaux en cours de notre côté. Et je rappelle par ailleurs que la loi n'est toujours pas adoptée par le gouvernement fédéral à ce jour.

Suite à tout cela, nous avons déposé, en novembre dernier, le projet de loi n° 157 qui, à notre avis, répondait aux préoccupations que nous avions, mais également à celles des groupes entendus et de la population. L'encadrement que nous souhaitions donner au cannabis devait nous permettre de réagir promptement à toute nouvelle orientation qui aurait pu être dévoilée par le gouvernement fédéral, raison pour laquelle notre projet de loi nous donnait divers pouvoirs réglementaires nous permettant de nous ajuster rapidement.

À l'instar des autres provinces canadiennes, nous avons saisi l'opportunité que nous avons d'occuper ces champs de compétence et d'évoluer dans un cadre législatif et réglementaire à la hauteur de nos priorités, de nos préoccupations et de nos attentes.

Ensuite, M. le Président, après avoir déposé le projet de loi n° 157, bien, on a mené des consultations particulières, en décembre et janvier, dans le cadre des travaux de la Commission de la santé et des services sociaux, où pas moins de 55 groupes ou experts ont été entendus et 70 mémoires ont été reçus et analysés. Puis s'est amorcée évidemment l'étude du projet de loi, que nous avons voulue sous le signe de la collaboration et de la conciliation.

Sans vous dire, M. le Président, que l'étude a toujours été rose — je vous mentirais un petit peu si ça avait été le cas — mais je tiens tout de même à remercier mes collègues de l'opposition officielle et de la deuxième opposition, avec qui j'ai eu, au cours des 136 heures et 45 minutes de l'étude, des échanges parfois musclés, mais généralement enrichissants. Plus d'échanges enrichissants que d'échanges musclés. J'ai bien dit le mot «parfois» parce que ce n'était pas si souvent que ça.

Vous comprenez, M. le Président, que ce projet de loi là nous a touché tous et chacun à notre façon et c'était un projet de loi qui faisait appel à beaucoup de rigueur, à beaucoup d'intellect, mais aussi à beaucoup d'émotions. On est des êtres humains, hein, les politiciens, là, on est du monde comme tout le monde dans la société, et on pense à notre environnement, puis ça fait en sorte que, parfois, ça a donné des échanges musclés, mais parfois ça a donné des échanges très intéressants.

Ce travail-là ne se serait pas fait sans le support de mes collègues du gouvernement, évidemment, qui m'ont accompagné tout au long de l'étude, puis je le disais, souvent on pense que les députés, parce qu'ils ne parlent pas pendant que la ministre parle, qu'ils n'ont pas eu la chance de... non, non ils ont eu la chance, notamment pendant les caucus. Si je n'avais pas eu mon caucus de ma formation politique, on n'aurait pas eu un aussi bon projet de loi, M. le Président, mais aussi, pendant toute l'étude article par article et pendant les consultations, mes collègues ont enrichi mes pensées tout au long du processus. Je pense au député de... M. Giguère... Saint-Maurice — j'ai donc de la misère à me souvenir de son comté, ça ne veut pas — alors le député de Saint-Maurice m'a parlé du chanvre, qu'il ne souhaitait pas voir le chanvre être dans la législation et s'assujettir à la légalisation du cannabis. Dès qu'il m'a saisi, j'ai dit: Explique-moi davantage. Mais, c'est parce que la production du chanvre industriel, M. le Président, ça sert à produire plein de choses, sauf pour consommation — fumer — parce qu'il faudrait une telle concentration pour avoir un petit peu d'effet, parce que le chanvre, il n'y a pas tout le THC puis tout ce qu'il faut pour avoir des effets, mais, par contre, on peut faire des tissus, on peut faire plein de choses avec du chanvre. Il m'a sensibilisé à ça. Bien, on a retiré le chanvre de la légalisation du cannabis pour permettre aux agriculteurs de continuer à produire leur chanvre pour en arriver aux fins que chacun le vende, puis chacun fait bien ce qu'il veut avec, mais il y a plein de produits dérivés qui peuvent être faits avec le chanvre.

Alors, vous savez bien, M. le Président, qu'on n'a pas réussi à en arriver à un consensus sur tous les points de vue. J'aurais aimé ça, mais c'est difficile d'arriver à des consensus sur tous les points de vue. L'opposition officielle aurait bien souhaité permettre la mise en place de «coffee shops» ou la culture à domicile, mais, de notre côté, notre approche était diamétralement opposée. Notre objectif, de notre côté, c'était d'éviter la banalisation. Or, on considérait qu'en allant vers les «coffee shops», c'est de remettre en place le geste de fumer, premièrement, puis je sais qu'on ne fume pas ça comme une cigarette, là, je ne suis pas nouille à temps plein, mais il n'en demeure pas moins qu'on porte quelque chose à notre bouche...

Une voix : ...

• (16 h 40) •

Mme Charlebois : ...vous ne connaissez pas ça? Ah! O.K. Et ce que je voulais dire, M. le Président, c'est qu'on ne veut pas reproduire le geste de fumer. Vous savez que des salons de cigares et de tout ça, là, ces produits-là, il en reste de moins en moins, hein, il en reste une vingtaine au Québec, puis à chaque fois qu'il s'en ferme un, on ne renouvelle pas les permis, comme ils fonctionnent sur des droits acquis. Alors, on est en voie d'éliminer ça parce qu'on veut restreindre le tabac de plus en plus. Pourquoi? Parce qu'on veut en arriver à réduire de 10 % la consommation de tabac, des usagers de tabac. Bien, on ne va pas commencer à rétablir ce geste-là dans la consommation de cannabis.

Et, pour ce qui est de la culture à domicile, de ce que j'entends, puis j'en ai encore parlé en fin de semaine avec des citoyens de mon comté, honnêtement, ça serait l'affaire la plus facile à faire pour banaliser la substance, et nous croyons que, pour le départ, à la première ébauche, il n'était pas utile d'avoir une production de cannabis à domicile. Les gens vont pouvoir s'en procurer à bas prix avec la Société québécoise du cannabis. Alors, c'était vraiment, vraiment... nous, on a travaillé dans l'objectif d'éviter la banalisation et, pour nous, «coffee shops» et culture à domicile n'étaient pas souhaitables.

Pour ce qui concerne la deuxième opposition, bien, aux autres, ils auraient souhaité interdire la vente et la possession aux moins de 21 ans et interdire toute consommation dans les lieux publics. Comme je vous dis, M. le Président, on n'est pas arrivé à un consensus sur cette affaire-là non plus parce que, de notre côté, on est d'avis que, si un citoyen est assez mature pour voter à 18 ans, si un citoyen est assez mature pour acheter de l'alcool et en consommer et gérer sa consommation à l'âge de 18 ans, bien, il devrait avoir la maturité pour gérer sa consommation de cannabis. Nous croyons que faire confiance aux jeunes, c'est une bonne idée, M. le Président. J'ai déjà eu 18 ans, puis je pense que j'étais capable d'assumer mes décisions. Puis je pense qu'à 18 ans nos jeunes, aujourd'hui, avec toutes les connaissances qu'ils ont, et on va faire davantage de prévention, moi, je pense que, quand on va les avoir informés comme il se doit, quand la prévention sera faite à tous les niveaux, je pense que nos jeunes seront en mesure de prendre leurs décisions.

Mais il y a plus que ça, M. le Président, 44 % de la population totale des consommateurs de cannabis, savez-vous quel âge ils ont? Entre 18 et 22 ans. C'est presque la moitié, M. le Président. Or, on fait le choix : ou bien on leur dit : Viens vers un marché légal, un marché licite où on va t'expliquer ce qu'il y a dans les produits, on va t'expliquer c'est quoi, les effets, on va t'expliquer s'il y a des conséquences, etc., parce qu'on aura du personnel formé dans les boutiques de cannabis, ou bien on fait ça ou bien on leur dit : Continue ou, si tu veux commencer, parce que de toute façon c'est ça qui arrive, inévitablement, pour 44 % de nos jeunes, bien, va sur le marché illégal, puis ils pourront t'en vendre avec un pourcentage de THC important, puis tu pourras commencer tes contacts avec le marché illégal, puis tu n'auras pas la chance d'avoir des conseils, et peut-être que ça ne leur tentera plus de revenir sur un marché légal. Alors, nous autres, on se donne la possibilité d'avoir des échanges avec les jeunes à partir de 18 ans parce qu'on considère qu'à 18 ans, en tout cas, moi, ceux que je rencontre, là, ils sont capables de faire des choix, puis je vous le dis, là, s'ils sont capables de voter, ils sont capables d'acheter de l'alcool, ils sont capables d'acheter du tabac, ils sont capables de gérer leur consommation, alors je ne vois pas pourquoi, pour le cannabis, ça serait différent. Il ne faut pas sous-estimer les capacités de nos jeunes, qui sont de plus en plus instruits puis que nous allons former, et faire de la prévention davantage auprès d'eux autres.

Alors, moi, tout ce que je veux, c'est les ramener vers un marché légal, je ne veux pas leur en vendre plus, mais je veux leur donner des ressources s'ils en ont besoin. C'est la seule façon qu'on va pouvoir le faire, M. le Président, en ayant des échanges avec eux. Pas en les repoussant vers le crime organisé, en les amenant vers nous. Moi, j'ai toujours cru, avoir la main tendue, que c'était plus profitable que de repousser les gens.

Ensuite, on a la conviction profonde, comme je vous le dis, que la prohibition, c'est la seule approche qui s'est avérée inefficace, alors à tous les points de vue hystériquement... historiquement, pas hystériquement, mais historiquement. Alors, moi, je maintiens ma position sur le 18 ans.

Ceci étant dit, bien que nous soyons différents à certains égards, notre travail a également été teinté de bons coups et il y a des travaux qui ont mené à des discussions qui nous ont permis la bonification de notre projet de loi à plusieurs égards, notamment l'interdiction d'une mesure transitoire pour les locateurs, donc les propriétaires, parce qu'il faut... la prononciation est importante, là, donc pour les propriétaires de permettre d'interdire la consommation de cannabis, fumer, là, on parle de fumer du cannabis dans les logements. Donc, les propriétaires auront 90 jours après la légalisation ou, en tout cas, après l'entrée en vigueur de notre loi, dès qu'il y a légalisation, notre loi pourra entrer en vigueur, et les propriétaires pourront modifier leurs baux pour faire en sorte que fumer du cannabis, ce soit interdit dans leurs logements.

On a aussi effectué une modification, une bonification en mettant en place une distance minimale pour l'implantation des succursales de la Société québécoise du cannabis. On a dit : Ça va prendre une certaine distance autour des écoles primaires et secondaires.

On a aussi clarifié les droits et les obligations des employeurs et des travailleurs eu égard aux substances psychoactives, dont notamment le cannabis, sur les lieux de travail. On est venus préciser ça, M. le Président.

On a aussi effectué l'ajout de profils de compétences, après des discussions avec l'ensemble des collègues, pour les membres du C.A., du conseil d'administration de la Société québécoise du cannabis, mais aussi pour le comité de vigilance, et on est venus, à la fin de tout, après plusieurs discussions, suspensions de plusieurs jours de l'article 55, on en est arrivés au retrait des projets pilotes en matière de vente au détail, ce qui a réjoui mes collègues des oppositions notamment.

Cette collaboration, donc, nous a permis d'en arriver avec un projet de loi qui n'est probablement pas parfait, M. le Président, puisque, je tiens à le rappeler, nous n'avons pas, l'ensemble des collègues, la prétention de connaître tout ce qui va se dérouler avec cette légalisation, aucun d'entre nous n'a de boule de cristal pour prédire l'avenir, mais nous croyons que notre approche est saine et est arrimée aux objectifs que nous nous étions fixés dès le départ.

Je le mentionnais plus tôt, l'apport des groupes et de la population aux consultations a été vraiment important et je leur en suis très reconnaissante. Eh bien, cette contribution, M. le Président, ne s'est pas arrêtée une fois les consultations terminées. Nous avons été constamment interpelés par différents groupes et un impressionnant nombre de citoyens, parfois pour nous féliciter pour le travail que nous accomplissions collectivement, en tant que parlementaires, d'autres fois pour nous dire que nous faisions fausse route, ce qui nous amenait à réfléchir tous pour parfois ajuster notre tir. Cette contribution est saine et est une partie intrinsèque de notre démocratie, dont je suis si fière.

Tout ce travail, ai-je besoin de vous le rappeler, s'est évidemment traduit par une importante couverture médiatique, et nous avons le privilège de vivre dans un pays et une province où la province... où la presse — excusez-moi, pas la province mais la presse — est libre d'aborder les sujets qu'elle désire avec l'angle qu'elle désire, et ce pouvoir est essentiel qu'a la presse de porter des enjeux de société à la connaissance de la population, et cette connaissance qu'ils ont apportée à la population a assurément contribué, dans le présent dossier, à enrichir le débat et à faire évoluer la réflexion de tous. Moi, je suis convaincue de ça, M. le Président. Je salue également nos homologues du fédéral qui, bien que nos positions n'aient pas toujours été arrimées, ont aussi contribué à la réflexion collective.

Bien entendu, un tel travail n'aurait pu se faire sans l'inestimable apport, et là je tiens à les remercier, je ne sais pas s'ils m'entendent, j'espère qu'ils écoutent, mais je tiens à le dire, sans l'inestimable apport des fonctionnaires de tous les ministères impliqués, et Dieu sait, M. le Président, qu'on a vu des juristes de je ne sais pas combien de ministères qui sont passés, à chaque fois qu'on changeait de section du projet de loi, on avait plusieurs juristes expérimentés, et ces juristes-là ont travaillé d'arrache-pied du début à la fin, parce qu'ils ont eu peu de temps pour produire le projet de loi qu'on a demandé, et en chemin, bien, les discussions suscitaient beaucoup d'amendements, beaucoup de réflexions et beaucoup d'améliorations. Alors, merci pour tout le travail que vous avez accompli. Sans vous, on ne serait pas arrivés à la finale qu'on a maintenant.

Maintenant, M. le Président, nous ne le répéterons jamais assez, on a la chance d'avoir une excellente fonction publique au Québec, et le projet de loi que nous souhaitons adopter aujourd'hui en est certainement une grande preuve. Alors que se conclut pour nous ce marathon législatif, parce que c'était un marathon législatif, le travail est loin d'être terminé pour ces derniers, pour nos fonctionnaires, puisque, dois-je vous le préciser, cette loi doit être maintenant mise en oeuvre tant à la mise en place de la Société québécoise du cannabis qu'au niveau des mécanismes de prévention et de surveillance. Nous avons martelé, au cours des derniers mois, notre intention de mettre une grande emphase sur la prévention. Eh bien, il est à présent temps que ce casse-tête, parce que, oui, M. le Président, c'est bien un casse-tête dont il est question, bien, il faut que ce casse-tête-là prenne forme, la prévention que nous voulons donner.

À l'aube d'une nouvelle ère, une ère que nous n'avons pas choisie, je vous le rappelle, M. le Président, mais à l'égard de laquelle nous avons assumé les responsabilités qui s'imposaient, je suis fière d'en arriver à l'adoption de ce projet de loi et je le fais avec le sentiment du devoir accompli. Je l'ai dit à de nombreuses reprises, M. le Président, et là vous me voyez venir certain, mais, au risque de me répéter, ce travail, je l'ai fait, tout au long du projet de loi, à partir du jour 1, à mes huit petits-enfants, tout le long et, de façon générale, à la plus grande richesse de notre société, les jeunes.

Ici, vous allez me permettre de vous nommer mes huit petits-enfants, M. le Président. J'ai pensé à Summer Blake, James Patrick, Taylor Elizabeth, Logan Alexander, Noah, Elohan, Savannah et India. Ce sont les huit personnes qui ont motivé mon action tout au long du projet de loi, et, à travers leurs yeux, je voyais plein d'autres jeunes, je voyais toute notre jeunesse québécoise puis je me disais : Si moi, comme grand-maman de huit beaux petits-enfants, je suis concernée, bien, je ne suis pas la seule, dans la société, qui est concernée par ce projet de loi là. Alors, je les salue et je les remercie parce que, vous savez, M. le Président, tout au long... je vous l'ai dit, là, on a commencé bien avant les consultations, le forum d'experts, puis on a préparé tout ça, je vous dirais que ça fait un an et demi que mes petits-enfants, ils ont moins la chance de côtoyer grand-maman Lucie. Mais il y a aussi mes enfants, ils ont dû se priver parfois de la grand-mère gardienne, mais aussi de leur mère. Puis il y a aussi mon mari, qui parfois disait : Bien, coudon, elle n'a pas l'air patiente, on va la laisser tranquille. Bien là, c'est correct, là, on va revenir sur terre.

Merci pour votre grande collaboration, parce que, de temps en temps, j'avais des points de vue aussi qui arrivaient à la maison : C'est quoi, ça?, bien là j'avais besoin d'expliquer. Puis, de temps en temps, j'ai eu des échanges... je vais vous dire, on n'était pas toujours d'accord, même à la maison, mais ça a été enrichissant parce que ça nous a tous fait cheminer. Honnêtement, ça nous a tous fait cheminer.

• (16 h 50) •

Une voix : ...

Mme Charlebois : Non, toi, tu n'es pas mon fils.

Alors, ces jeunes sont non seulement à une étape plus que déterminante dans leur vie, mais ce sont notamment eux qui auront à vivre avec les conséquences des décisions que nous prenons aujourd'hui, ces petits-là, là, que je vous parle, mais aussi mes enfants, qui vont voir leurs enfants devenir adolescents, vont aussi vivre avec ces décisions-là. Et c'est comme ça pour l'ensemble de la société, pas juste pour les miens.

M. le Président, vous allez me permettre de vous dire... parce que la dernière fois que je l'ai fait, il n'était pas ici parce qu'il était retenu en commission, mais là il est avec nous, le député de La Prairie, qui a été notre président de commission — Mme la Présidente, je vous accueille — qui a fait un travail remarquable, qui a su nous ramener — oui, ça mériterait presque une main d'applaudissements, oui — ...

Des voix : ...

Mme Charlebois : ...il a su nous ramener dans nos débats parfois impressionnants, mais aussi garder une certaine rigueur parce que, même si parfois ce n'étaient pas des débats vigoureux — de temps en temps, la fatigue y étant, il y avait un petit peu plus de rires — normalement, le président, il nous ramenait à l'ordre. Et moi, savez-vous ce qu'il me disait pour me tenir tout le temps concentrée? Quand il voyait que la madame commençait à s'échauffer un peu ou être un peu plus animée, là il me disait... il m'envoyait des petits papiers ou, de temps en temps, je l'entendais me dire : Summer, Summer. Ça, c'est ma petite-fille, Summer Blake, que je vous parlais tantôt. Quand il me nommait ma petite-fille, ça me désarmait complètement. Je me disais : Oh! là, je suis en train de donner l'exemple à quelqu'un. Ça fait que je me calmais tout de suite ou je revenais tout de suite au grand calme, alors... Mais je veux, farce à part, remercier le président pour son travail, et toute son équipe, le personnel de commission : il y avait la secrétaire, mais il y a l'autre personne qui est en arrière, qui chronomètre le temps. Je ne sais jamais son titre. C'est quoi, son titre, déjà?

Une voix : ...

Mme Charlebois : L'adjointe au secrétariat, c'est aussi simple que ça. Il y avait les pages, les techniciens au son, tout le monde. Tu sais, ça n'a l'air de rien, Mme la Présidente, mais, à chaque fois qu'on fait un amendement de dernière minute, ça prend quelqu'un pour recevoir l'amendement, l'imprimer, le rédiger, le passer, en tout cas, s'informer si c'était recevable ou pas recevable, l'autre, en arrière... En tout cas, ça a bougé dans notre commission, alors je veux les remercier beaucoup.

Je veux aussi remercier les Soulangeoises et les Soulangeois de m'avoir inspirée tout au long de ce projet de loi là et de m'avoir dit ce qu'ils pensaient tout au long. Même si on ne pensait pas pareil, ils me le disaient. Si on pensait pareil, bien, c'était clair qu'ils venaient me le dire, mais tout au long du projet de loi j'ai senti que les Soulangeoises et les Soulangeois étaient avec moi, francs, directs, et j'ai apprécié leur aide, je veux les remercier.

Je veux, comme je vous ai dit, remercier ma famille, mais aussi mes amis, qui ne m'ont pas vue beaucoup depuis les deux dernières années. Ils se sont passés de moi et de ma belle personnalité attachante, Mme la Présidente, c'est quand même quelque chose qu'il faut faire. Non, je niaise, là, c'est... Non, mais c'est vrai que je suis gentille. Alors, ils s'ennuient, puis moi aussi, je m'ennuie de mes amis.

Tout ça pour vous dire, Mme la Présidente, que je suis très, très fière du travail accompli : 136 h 45 min, 32 séances, on a fait le tour de toutes les salles ici, même le salon bleu, 197 articles, 138 amendements. Mme la Présidente, l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale ont bien travaillé. On a un produit, en tout cas, un projet de loi qui, à mon sens, est mature, qui est bien équilibré et qui va faire bien son travail, mais qui va être perfectible. On en est tous conscients ici, et c'est pour ça que, dans trois ans, on dit : Revoyons cette loi rapidement pour pouvoir nous ajuster. Mais je dis à la population : On s'est gardé des pouvoirs réglementaires pour réagir rapidement.

Alors, je veux remercier tout le monde, parce que ça a été vraiment enrichissant de travailler avec tout le monde, et remercier la présidence pour son écoute, et remercier tout le monde. Je suis tellement contente qu'on arrive à la fin, Mme la Présidente. Sur ce, je vais écouter mes collègues avec beaucoup de passion, comme depuis le début, pour voir comment ils vont nous interpeler, mais je sais que, même si la CAQ vont voter contre, ils sont quand même majoritairement en faveur de plusieurs des articles dans le projet de loi. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la ministre. Maintenant, je vais céder la parole à M. le député de Labelle.

M. Sylvain Pagé

M. Pagé : Merci, Mme la Présidente. Alors, on se revoit. Vous étiez assise au même endroit lors de l'adoption de principe la semaine dernière, aussi à la prise en considération, et aujourd'hui à l'adoption finale.

Alors, effectivement, on a entendu parler assez souvent des enfants et des petits-enfants de la ministre lors de notre tournée et de ces longues heures de débat, et une chance qu'elle en a, parce qu'à chaque fois qu'on parlait de ses petits-enfants ça permettait de calmer le ton. Mais heureusement aussi que ce soit ainsi parce qu'effectivement il faut trouver des façons, à l'occasion, de respirer un peu plus fort pour être capables de reprendre nos esprits et bien faire nos travaux.

Effectivement, je pense, c'est important de rappeler que ce projet de loi, c'est un projet de loi qui nous a été imposé, qui nous a été imposé par le gouvernement fédéral. Personne ici n'avait ça dans ses cartons. Personne ici, lors de l'élection d'avril 2014, ne s'est fait élire en promettant quoi que ce soit, un encadrement quelconque, et pourtant nous nous sommes retrouvés... On pensait puis on était nombreux à penser : Ah! il va revenir en arrière, hein? C'est un engagement, mais il ne le fera pas, comme le mode de scrutin, hein? Il ne le fera pas. Mais finalement, en avril 2017, le gouvernement du premier ministre Justin Trudeau a déposé son projet de loi et qui, là, nous forçait à aller de l'avant avec une réglementation, à l'encadrement, parce que, souvent, comme nous disait la ministre, si on n'encadre pas, bien, qu'est-ce qui arrive? C'est que c'est la loi fédérale qui s'applique. Et sans encadrement, bien, évidemment, ça aurait été un peu bordélique, et on se devait d'être responsables et on se devait de se doter d'une loi à la fois responsable en termes de santé et de sécurité publique.

Et, là-dessus, je peux dire, peu importe le parti politique qui est assis dans cette Chambre, tout le monde, tout le monde sans exception, même si on peut avoir des divergences d'opinions à certains égards, sur l'âge, sur la consommation dans un lieu public, moi, j'ai senti que tout le monde a fait son travail de façon sérieuse en se disant : Il faut que la santé et la sécurité publique soient au coeur de nos échanges, soient au coeur de notre vision des choses. Alors, indépendamment qu'à certains cas on a déposé des amendements qui n'ont pas été acceptés, que ce soit la deuxième opposition, ou encore comme Québec solidaire, qui a participé également, ou nous, ou encore que des choses qu'on a suggérées que le gouvernement n'a pas acceptées, mais on avait tous à coeur, quand même, la santé et la sécurité publique, et c'est vraiment ce qui a guidé nos travaux pendant toutes ces heures.

Quand le gouvernement fédéral a déposé, en avril, très rapidement, ce que l'on a dit, c'est qu'il fallait consulter la population, parce qu'on se souviendra, le ministre des Finances est ici aujourd'hui, sa première réaction, évidemment : Voir si le Québec va vendre du pot. Alors, évidemment, nous, très spontanément, ce que nous avions souhaité et ce que nous avions dit, c'est qu'il fallait justement que toute cette vente soit contrôlée par une société d'État. Pourquoi? Parce qu'une société d'État est à but non lucratif, parce qu'on voulait une société d'État à but non lucratif pour ne pas qu'il y ait cette notion de profit derrière le cannabis, pour ne pas qu'on souhaite en vendre plus et encore plus, parce que, si on l'avait laissé aux mains du privé, bien, c'est ce qui serait arrivé.

• (17 heures) •

Alors, pour arriver à cela, je pense qu'il fallait consulter. On a demandé, dès le jour 1, qu'il y ait des consultations, une tournée à travers le Québec. Le gouvernement est allé de l'avant, a accepté. On a fait six, sept régions, je ne me souviens jamais, six ou sept régions. D'ailleurs, on est allés à Gatineau, dans votre charmante ville, Mme la Présidente. Et tout cela était précédé aussi par la consultation des experts, en juin, 19 et 20 juin, que je veux remercier aussi, les experts qui sont venus alimenter notre réflexion, des experts pas seulement du Québec et du Canada, mais d'ailleurs à travers le monde, qui, par vidéo ou visioconférence, nous ont entretenus sur comment ils ont vécu la légalisation dans leur pays. Et ça a été très instructif parce qu'il y a des choses, qu'on n'aurait probablement pas imaginées dès le départ, que l'on a incluses dans le projet de loi et qui sont venues nous convaincre que, oui, il fallait peut-être avoir une loi qui serait assez rigoureuse, assez encadrante, assez sévère dans un premier temps, quitte à ce que, par la suite, on soit un peu plus libéral.

Et c'est vraiment dans ce sens-là que nous avons fait notre réflexion en se disant : Encadrons plus et mieux, et par la suite, au fil des années, si on pense qu'on peut laisser du lousse, comme dirait l'autre, on le fera. Et effectivement ça a été ce qui a guidé toute notre réflexion. Ça, c'était la rencontre avec les experts, la tournée des régions, sept régions, huit journées. Pourquoi huit? Parce qu'à Montréal il y avait tellement de gens qui voulaient participer qu'on a passé deux jours à Montréal.

Et ensuite, bien, évidemment, il n'y avait pas de projet de loi lorsque nous avons consulté. Il y avait bien un petit document qui soulevait des questions, qui alimentait la réflexion des gens qui venaient nous rencontrer lors des consultations, mais il n'y avait pas de projet de loi. Donc, quand le gouvernement a déposé, quand la ministre a déposé son projet de loi n° 157, en novembre dernier, je ne me souviens pas de la date exacte, on a demandé très rapidement qu'il y ait des consultations, et ça a donné lieu à quelques négociations parce qu'on nous proposait huit ou 10 groupes. La deuxième opposition en proposait quelques autres, sept ou huit également. Nous, on en avait une liste de plus d'une centaine. Au final, on s'est entendus pour une soixantaine de groupes, 60, 65. 55 ont participé, et 128 ont déposé des mémoires.

Pourquoi nous souhaitions ces consultations? C'est que, la ministre l'a dit tantôt, on interpelle 10 ministères, 10 ministères, et nous avons écrit, nous écrivons présentement un droit nouveau, comme nous avons écrit en 1921, lorsqu'ici même on a adopté une loi légalisant l'alcool. Et, à l'époque, hein, on se souvient qu'à la Commission des liqueurs c'était pas mal plus serré que ce l'est aujourd'hui. Et probablement que, dans quelques années, on dira : Ah! quand ils ont adopté la loi n° 157, en 2018, eh! qu'ils étaient sévères. Bien, tant mieux. Tant mieux parce qu'on veut quand même un cadre plus serré au départ, quitte à ce que, par la suite, on puisse ouvrir un peu plus.

Donc, ce qui a vraiment été au coeur de notre réflexion depuis le tout début pour l'ensemble des collègues, ça a été vraiment tout le volet de la santé et de la sécurité publique. Je vous dirais qu'on est passés par toutes sortes d'émotions à travers ce projet de loi parce qu'on avait des convictions profondes, les uns et les autres. Et là je ne suis pas en train de débattre qui a les meilleures convictions dans cette Chambre parce que, d'un côté comme de l'autre, nous avons tous notre perception des choses, puis on essaie d'alimenter les travaux pour qu'ils se fassent le mieux possible. Mais il y a une chose que je peux dire, moi qui dis toujours qu'il faut faire beaucoup plus de la politique de collaboration qu'une politique de confrontation. C'est vraiment dans cet esprit que se sont déroulés tous nos travaux depuis la tournée à travers le Québec. C'en était même, à un moment donné, un peu rigolo parce que la ministre et moi, on se croisait à chaque événement, et tu finis par développer une certaine complicité.

Alors, c'est avec beaucoup de plaisir que nous avons collaboré vraiment en mode partenariat et recherche de solutions, donc en mode collaboration et non en mode confrontation. Il y aura eu, comme je l'ai dit, 128 mémoires, des consultations, 137 heures. On nous dit que ça serait probablement même, de la présente législature ou la présente session parlementaire, un des projets de loi sur lequel nous aurons passé le plus d'heures. Le défi, ce n'était pas de passer le plus d'heures possible. Le défi, c'était d'avoir le meilleur projet de loi possible. Est-ce que nous sommes satisfaits, Mme la Présidente? La réponse est non parce qu'on aurait voulu aller plus loin, on aurait voulu appeler plus loin à certains égards.

La semaine dernière, nous avons fait une nouvelle tentative de redéposer certains amendements pour nous permettre d'aller un peu plus loin. Par contre, on sait, quand on arrive un peu à la dernière minute, c'est encore permis de le faire, mais les chances de résultat, évidemment, sont très minces, et malheureusement les quatre amendements pour lesquels nous tenions vraiment beaucoup, malheureusement, ces amendements n'ont pas été acceptés. Mais, pour les gens qui se demandent s'il y a eu quand même... si ça valait la peine de consulter, si ça valait la peine de déposer des amendements, alors, pour les gens qui nous écoutent, là, les 138 amendements que nous avons adoptés sur les 197 articles, c'était véritablement... Bien sûr, il y en a quelques-uns là-dedans que c'est des amendements de concordance, bon, c'est à la marge, mais il y a de nombreux amendements là-dedans qui sont quand même sur le fond des choses, sur le fond des choses, et cela, les amendements, faisait la démonstration que toutes ces consultations étaient justifiées parce que, si on n'avait pas fait ces consultations en amont et ensuite, après le dépôt du projet de loi, je pense qu'on n'aurait pas eu autant d'amendements et je pense que nous n'aurions pas eu le même projet de loi qui nous est déposé aujourd'hui.

Un mot parce qu'il ne faut pas éviter la question, parce que la question, elle est importante : la question de l'âge. La question de l'âge, la deuxième opposition a déjà dit clairement que, s'ils étaient élus, ils voulaient revenir sur l'âge. C'est leur droit, tout à fait. C'est tout à fait légitime. Par contre, ce qu'il faut savoir, c'est que, de toutes les législations, que ce soient les États américains, que ce soient les provinces canadiennes ou encore de tous les pays du monde, sauf un endroit, une province, et d'ailleurs c'est une première mondiale, Manitoba, je pense, Manitoba aura 18 ans pour l'alcool, 19 ans pour le cannabis, ce serait le seul endroit, à notre connaissance, et tous les autres endroits au monde, quand c'est 18 ans pour l'alcool, c'est 18 ans pour le cannabis, quand c'est 19 ans pour l'alcool, c'est 19 ans pour le cannabis, pour les raisons qui ont été énumérées également par la ministre tantôt, à savoir que, bien, quand vous avez 18 ans... En fait, la question fondamentale, je pense, qu'il fallait se poser, que nous nous posons, et ça fait partie du débat aussi que nous avons eu au caucus, là, qu'ils ont eu dans leur caucus, qu'ils ont eu également dans le caucus du gouvernement, je suis convaincu qu'on a tous eu ce débat-là, à savoir : Oui, mais à quel âge on va fixer? Parce que, c'est vrai, quand l'ordre des psychiatres nous dit : Le cerveau est en évolution jusqu'à l'âge de 25 ans, alors, avec cette logique, on aurait pu dire : Bien, 25 ans. On aurait pu dire 25 ans, mais le problème c'est que les plus grands consommateurs sont justement dans la brochette d'âge des 18-21 ans. Ce sont les plus gros consommateurs.

Et la question qu'il fallait se poser, c'est : Est-ce qu'on veut les laisser... parce qu'aujourd'hui, là, s'il y a un projet de loi puis qu'on légalise, c'est qu'il n'y a à peu près aucun pays au monde, aucun endroit au monde où on a réussi à enlever ce fameux crime organisé sur la vente de drogues, la vente de cannabis. Alors, on se dit : Bien, tant qu'à le laisser dans les mains du crime organisé, la main de la mafia, la main des gens qui ont comme seul but de vous en vendre le plus souvent possible, puis souvent de vous vendre n'importe quoi et même de la scrap, et nuire à votre santé de façon très grave, alors aussi bien envoyer ces gens qui veulent consommer à un endroit où ils pourront consommer un produit de qualité, d'une part, et, d'autre part, où on pourra en même temps faire de la prévention, faire de la sensibilisation, parce qu'à la SQDC il y aura des dépliants pour informer les gens. Les vendeurs, ça ne sera pas des vendeurs, ça va être des conseillers qui auront aussi une mission préventive.

Alors, est-ce qu'on voulait laisser ces jeunes de 18-21 ans sur la rue, avec le marché au noir, à acheter n'importe quoi? Alors, nous avons fait le débat, comme les autres formations politiques, et nous en sommes venus à la conclusion qu'il était préférable finalement d'amener ces jeunes de 18 ans à la légalisation. Et aussi, comme le dit la ministre, aussi, à 18 ans, on a l'âge de voter, on peut se marier, on peut s'enrôler dans l'armée, il y a plein de choses qu'on peut faire. Pourquoi? Parce que collectivement, comme société, nous avons fait le choix que 18 ans, c'est un âge où on a atteint un niveau de maturité qui nous permet de prendre ces décisions. Alors, si on a l'âge de la maturité pour la décision de prendre de l'alcool, ou encore de voter, ou quoi que ce soit d'autre, bien, je pense qu'on devrait avoir cette même maturité pour consommer ou non le cannabis... je ne dirais pas récréatif, on va dire non médical parce qu'on n'aime pas dire récréatif.

• (17 h 10) •

Je veux revenir sur quelques gains sur lesquels nous sommes satisfaits. À la toute fin, à la toute fin, le gouvernement a accepté de retirer de l'article 55, qui prévoit des projets pilotes, le fait de permettre la vente via des projets pilotes, donc une vente qui aurait forcément été au privé. Et là, évidemment, vous auriez eu une SQDC sans but lucratif, qui évidemment a des contraintes, aussi, différentes d'une petite entreprise privée où probablement les gens n'auraient pas été syndiqués, où les conditions auraient été fort différentes, et qui aurait voulu en vendre plus. Et ça, on y tenait vraiment mordicus et on se réjouit du fait que, oui, il pourra y avoir des projets pilotes, mais pas sur la vente au détail. Et ça, pour nous, c'était un gain qui était très important, et on se réjouit de ce gain.

Quand je vous ai dit, Mme la Présidente, qu'il fallait éliminer cette notion de profit, on se réjouit également que nous avons même fait disparaître totalement du projet de loi l'article qui disait qu'il aurait pu y avoir un retour sous forme de dividendes dans les coffres de l'État. On nous disait : Oui, mais on écrit toujours ça dans la loi, mais ça ne veut pas dire qu'on va s'en servir. Non, non. Est-ce qu'on peut l'enlever, si on ne veut pas s'en servir? Mais finalement l'article a été complètement supprimé du projet de loi. Donc, il n'y a plus d'ambiguïté. Et justement la ministre se souviendra également que l'État de Washington nous avait dit, via une vidéoconférence, au forum des experts, le 19 au 20 juin dernier, que : Ne faites pas l'erreur que nous avons faite. Eux, ils ne l'avaient pas écrit dans leur loi, de telle sorte que, bien aujourd'hui, compte tenu que c'est relativement profitable, bien, on se sert d'une partie des profits pour quoi? Bien, pour faire des routes ou pour faire autre chose. Et ce n'est pas ce que l'on souhaite. Pas à ce moment-ci.

Est-ce qu'un jour on pourra revenir là-dessus? Bien, peut-être. Peut-être. Peut-être qu'un jour, hein? De toute façon, on dit qu'on a déjà inscrit dans l'agenda de revoir la loi dans trois ans. Moi, je pense que, dès l'année prochaine, elle risque d'être revue ou corrigée de quelconque façon, et, à preuve, le Colorado, qui est souvent cité en exemple parce qu'ils ont été un peu les premiers en Amérique du Nord, ils ont modifié leurs lois et règlements 23 fois en l'espace de cinq ans. Donc, il est tout à fait normal qu'on corrige le tir en cours de route, et, à cet égard-là, les règlements aussi permettent de faire ces corrections assez rapidement sans ouvrir la loi.

Parlant de règlements, d'ailleurs, on a obtenu aussi que le gouvernement dépose les premiers règlements à l'égard de la consommation des produits dérivés, et ça aussi, on se réjouit. D'ailleurs, je vois le ministre de la Santé, qui est ici. Ça avait été le même genre d'exercice à l'intérieur de la loi n° 10 aussi qui avait été accepté par le gouvernement, de se donner quelques heures pour observer, commenter et bonifier les règlements qui seront déposés.

Évidemment, je me réjouis aussi beaucoup du fait que ce sera une société d'État filiale de la SAQ. C'est exactement ce que nous avions voté dans notre formation politique au congrès de septembre dernier, que ce soit une société filiale de la SAQ. Je vais vous dire qu'au début, moi, spontanément, comme plusieurs, on se disait : Bien, ça pourrait être même la porte à côté, hein? On va sauver des locaux, on va agrandir, on va aménager, même. Et les consultations nous ont permis justement de réaliser que ce n'était pas la solution, il ne fallait pas faire ça. Pourquoi? Parce qu'on aurait trop envoyé un message de banalisation : alcool, cannabis, bien, ça peut aller ensemble. Et, à force de se le faire dire un peu partout à travers le Québec et de se le faire répéter, bien, finalement, on s'est tous laissés convaincre qu'il était préférable d'avoir la vente du cannabis dans des locaux à part de la SAQ.

SAQ, d'ailleurs, par ailleurs, moi, je l'ai dit à quelques occasions, je souhaite qu'un jour on puisse aussi refaire un certain débat sur la promotion peut-être un peu abusive que l'on fait du produit d'alcool, hein? Juste avoir une carte Inspire, pour recevoir des courriels à tous les jours, je me demande, des fois, si on n'est pas rendus un peu trop loin. C'est un petit aparté, Mme la Présidente.

Je me réjouis, mais, en même temps, je ne suis pas tout à fait satisfait de la distance que nous nous sommes donnée entre les comptoirs de la SQDC et les écoles primaires, secondaires, entre autres, les CPE également, parce que, partout à travers la tournée du Québec quand on posait la question, on était toujours beaucoup plus dans une distance de 800 mètres, un kilomètre. Pourquoi? Pour que des jeunes qui sont sur le bord de l'âge de... aient une distance suffisamment importante, de les décourager, sur l'heure du dîner, d'aller s'en procurer, d'aller s'en acheter. Alors, nous, on souhaitait une distance beaucoup plus importante que le 250 mètres que, finalement, le gouvernement a accepté. Mais, entre vous et moi, Mme la Présidente, on peut prendre une petite marche, là, tantôt, là, puis 250 mètres, là, on fait ça à peu près en 2 min 30 s. Ce n'est pas tellement dissuasif. Ce n'est pas tellement dissuasif. Alors, on aurait préféré que ça soit plus que 250 mètres, évidemment. Il y a même eu un amendement pour Montréal parce que, là, il y a une densité, c'est un peu compliqué. Ça sera même 150 mètres à Montréal.

On se réjouit également que... la bonification au sein du conseil d'administration, au sein du comité de surveillance... comité de vigilance, plutôt... des amendements que nous avons proposés.

Tolérance zéro, on l'a demandée dès le départ. On l'a demandée dès le départ, et le gouvernement a accepté aussi la tolérance zéro.

Ce qui nous réjouit beaucoup moins, par contre, je pense qu'il est important de le dire parce que, si jamais nous étions au gouvernement cet automne, on apporterait très rapidement certaines modifications, une qui... modification qui nous apparaît comme fort importante, quelques-unes, mais je vous en nomme une, entre autres : la consommation dans les lieux publics.

La consommation dans les lieux publics et laisser aux municipalités cet encadrement de consommation dans les lieux publics, Mme la Présidente, vous aurez compris que tantôt, quand la ministre parlait d'éviter la banalisation, là-dessus, là, on est profondément en désaccord, en désaccord parce que, Mme la Présidente, vous et moi, on pourrait marcher sur la rue, déambuler sur la rue et, s'il n'y a aucune réglementation municipale, bien, on pourrait être sur le coin de la rue et consommer notre cannabis à côté d'une famille, des enfants. Et vous ne pensez pas que ce n'est pas un signe de banalisation, cela? On ne se promène pas sur la rue en consommant de l'alcool parce que c'est interdit partout. Quand on veut consommer de l'alcool, on va dans un bar, un endroit prévu pour la consommation.

Alors, c'est la raison pour laquelle nous, on souhaitait avoir des... on a appelé ça des «coffeepots» pour que les gens aient un endroit bien spécifique pour aller consommer. Je l'ai dit, je le répète, je suis allé quatre jours au Colorado il y a trois ans... deux ans, trois ans, et, même si on nous dit parfois que c'est quasiment un endroit qui en fait la promotion, bien, je vais vous dire que, pendant les quatre jours, je me promenais dans plein de coins touristiques, il y avait des bars partout, il n'y a pas un endroit où j'ai senti l'odeur du cannabis, pas un seul endroit où j'ai senti l'odeur du cannabis. Alors, là-dessus, on a vraiment un profond désaccord, d'autant plus que, pour les gens de Gatineau, quand vous allez traverser le pont, vous allez aller en Ontario, bien, ne cherchez pas les affiches si c'est permis ou interdit en Ontario, ça va être interdit partout. Nos voisins au Nouveau-Brunswick, interdit partout. Terre-Neuve—Labrador, tous nos voisins immédiats, c'est interdit partout.

Alors, là-dessus, quand on parle d'éviter la banalisation, je pense qu'on a fait fausse route. Et c'est la raison pour laquelle nous avons déjà annoncé que, si nous étions au gouvernement à partir de cet automne, c'est un endroit où on voudrait rouvrir la loi pour interdire dans les lieux publics. Les gens vont dire : Oui, mais à quel endroit ils pourraient... Alors, le pouvoir que l'on voudrait donner aux municipalités, c'est qu'elles définissent des endroits bien précis à partir d'une réglementation claire, évidemment, les distances avec les écoles et tout ce que vous voulez, mais certains endroits bien précis. Et là ça serait le même style de réglementation partout à travers le Québec parce que, je vous le dis, Mme la Présidente, il y a déjà des municipalités où c'est déjà annoncé. Chez nous, c'est non partout. N'essayez pas de consommer, là, ça va être non partout. Il y a déjà des municipalités qui l'ont dit parce qu'elles savent qu'elles vont avoir le pouvoir de réglementer et de l'interdire partout. D'autres municipalités ont dit complètement l'inverse. D'autres municipalités, ça va peut-être être permis dans les parcs, interdit sur la rue; dans l'autre, permis sur la rue, interdit dans les parcs.

• (17 h 20) •

Alors, vous voyez dans quelle situation plutôt bordélique on va se retrouver, là. Et ils auront l'obligation en plus de l'afficher, de l'annoncer. Alors, comme citoyen, comme citoyenne, quand vous allez vous promener à travers le Québec, là, cherchez les affiches, là. Bon, quand vous vous stationnez, on regarde, woups, il n'y a pas d'affiche ici, je peux stationner, bon. Est-ce qu'on va se mettre à faire des affiches partout? Est-ce que ça va être à l'entrée de la ville? Nous, on pense qu'il y a vraiment là une erreur importante qui a été faite, et, en termes de banalisation, je le dis, je le répète, pour moi, ici, il y a vraiment une erreur importante. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle on a passé une semaine complète à argumenter sur toutes les façons, de toutes les façons, de tous bords tous côtés. En fait, on a commencé en début de semaine puis on a fini la semaine là-dessus. On a passé en tout 18 h 30 min, le président va s'en souvenir, à discuter de cela parce que, véritablement, il y a là quelque chose qui ne va pas, à mon avis, à mon humble avis, dans le sens de l'objectif de la loi, qui est de ne pas banaliser.

On souhaitait aussi qu'il y ait un observatoire, puis, pour qu'un observatoire soit efficace, c'est de se doter de cet observatoire dès le début, dès le jour 1. Malheureusement, là-dessus, le gouvernement n'a pas accepté.

On aurait souhaité aussi que le gouvernement fasse une bien plus grosse bataille à l'égard de la production, à l'égard de la production, parce que, vous le savez, on a légalisé la consommation de cannabis pour des fins thérapeutiques, pour des fins médicales, en 2001, et là c'était normal que ça soit Santé Canada qui donne les permis d'autorisation. Pourquoi? Parce que c'était pour des fins médicales. Mais, à partir du moment où ce n'est plus pour des fins médicales, là, je veux vous dire que les producteurs en serre du Québec, là, le premier mémoire que nous avons... les premières personnes qui sont venues nous déposer un mémoire, qui représentent les 900 producteurs en serre, ont dit : Nous, faire pousser des tomates, des concombres ou du cannabis, là, ce n'est pas tellement plus compliqué, là. Et vous savez que vaut une production annuelle moyenne de légumes, tomates, concombres ou autres? Savez-vous c'est combien, Mme la Présidente? 150 $. Ça, c'est la production annuelle au pied carré. Cannabis, combien? 5 000 $. 5 000 $. Alors, il y a une opportunité d'affaires qui est drôlement intéressante. Et la production en serre dépend, entre autres, du coût énergétique, qui est fort important. Et ici, au Québec, on a le coût énergétique le moins cher en Amérique du Nord.

Alors, il y avait une opportunité d'affaires importante, et, avec une politique québécoise sur la production en serre où on aurait pu dire : Voici, c'est le MAPAQ qui s'en occupe, on va s'organiser pour déployer à la grandeur du Québec des petits producteurs, des petits producteurs dans un premier temps, où la SQDC n'achètera pas plus qu'une ou deux tonnes par année... Mais non! Présentement, là, Santé Canada contrôle tout ça, et là on donne des contrats, parce qu'il n'y a pas beaucoup de producteurs, de 15 000, 20 000, 25 000 tonnes par année. Alors, c'est quelques gros qui sont en train de prendre le contrôle de la production. Et qui dit contrôle de la production... bien là, vous voyez qu'il y a du gros argent en jeu. Et là-dessus nous aurions vraiment souhaité qu'on aille le plus loin possible à l'égard du financement des entreprises via les paradis fiscaux. Et ça, là-dessus, on a fait un long et large débat avec mon collègue député de Mercier, la collègue de Vachon, également, qui est venue à cet égard-là parce que... Je répéterai, là, quelques articles, là, qu'on a vus dans les médias, là : Le coup «fumant» des paradis fiscaux. «...35 des 86 producteurs — ça, c'était en début d'année, là, aujourd'hui il y en a plus, là — autorisés par Santé Canada, soit 40 % — 40 % — d'entre eux, ont obtenu du financement extraterritorial...»

Les paradis fiscaux dans le cannabis inquiètent le Sénat. Le sénateur Joyal : «...cela démontre que le crime organisé peut passer par des stratagèmes comptables pour continuer de tirer les ficelles de l'industrie du pot légal.» Alors, on est en train de faire par la porte d'en arrière ce qu'on ne voulait pas faire par la porte d'en avant, là. On est en train de légaliser ce qui est illégal, des gens qui ont fait de l'argent avec le cannabis dans le marché au noir qui passent ça via les paradis fiscaux puis, aujourd'hui, qui vont introduire le marché via une production légale. Alors, on aurait voulu qu'on aille beaucoup plus loin à l'égard de paradis fiscaux. On a bien obtenu des petits gains, mais on aurait voulu aller beaucoup plus loin.

D'ailleurs, j'ai cité à quelques occasions aussi l'article de Claude Villeneuve, et la question qu'il pose, pour moi, c'est la question la plus fondamentale : «Le scandale politico-financier de la prochaine décennie est-il en train de se déployer sous nos yeux?» Le scandale politico-financier de la prochaine décennie est-il en train de se déployer sous nos yeux? Parce que c'est exactement cela. Et, quand on se demande pourquoi le fédéral a décidé de finalement garder la mainmise, garder le contrôle sur qui je vais autoriser pour la production... Et je vais vous dire que ça ne sent pas tellement bon, ça ne sent pas tellement bon parce que, quand on regarde qui sont les gens qui sont derrière les producteurs, bien, on ne peut pas faire autrement que d'être très mal à l'aise parce que, vous l'avez vu comme moi dans les médias... plusieurs, plusieurs amis du Parti libéral du Canada. Alors, quand on dit qu'on veut se garder la mainmise sur qui on autorise, quand on voit que ces gens, c'est essentiellement des amis du premier ministre canadien et quand on voit tout l'argent qu'il y a là-dedans, je pense que, là-dessus, il faudrait continuer à faire une bataille pour rapatrier tous ces pouvoirs d'autorisation et mieux contrôler les autorisations.

Je vais finir, Mme la Présidente... évidemment, on finit toujours par des remerciements. Puis là c'est toujours bête et méchant parce qu'on a peur d'en oublier. C'est avec beaucoup d'émotion aussi qu'on va compléter ce projet de loi, comme je l'ai dit, qui n'est pas parfait. Je peux vous dire que, dans notre caucus, comme dans tous les autres, je vais vous dire que nous avons de très bons et de très gros débats parce qu'il y a des choses là-dedans qui sont bonnes, on a fait des gains, mais il y a des choses également qui nous déplaisent et pour lesquelles on voudrait intervenir le plus rapidement possible.

Bien, remercier, dans un premier temps, mon collègue et ami le député de Saint-Jérôme, qui m'a accompagné pendant presque les 137 heures. Il m'a fait faux bond une ou deux séances, mais pas beaucoup. Il était pas mal toujours avec moi. L'ensemble des collègues parlementaires qui ont pris part aux travaux. Dans la deuxième opposition, le collègue de Mercier est venu à l'occasion, la collègue de Vachon, la deuxième opposition, je l'ai dit, les collègues aussi de la partie gouvernementale, le président, qui, on ne le dira jamais assez... Mme la Présidente, c'est le meilleur président de commission parlementaire que j'ai vu, ce n'est pas compliqué. Non, très sincèrement, le député...

Des voix : ...

M. Pagé : Oui, absolument. Puis je vais vous dire que, là, il met la barre très haute parce que moi aussi, je suis président d'une commission parlementaire. Puis je regardais comment il agissait, comment il était à ses affaires, comment, à chaque fois, il avait le tour de nous ramener à l'ordre, mais toujours avec beaucoup de diplomatie, et comment... Alors, en tout cas, je vais vous dire que, là, il a mis la barre très haute parce que, comme président de commission, éventuellement, j'aurai aussi, à l'occasion, à faire le même travail. Et là je dois dire que, même si j'ai plus de temps parlementaire que lui, j'ai appris du travail qu'il a fait, et il l'a très bien fait. Fort sympathique, le député de La Prairie. Félicitations pour son travail!

Tous les gens qui nous entourent, ils sont tellement nombreux. Puis là c'est difficile parce que... Tiens, je vais commencer par les pages, qui sont à côté de nous, qui sont toujours un peu dans l'ombre, qui nous donnent des coups de main à gauche et à droite parce qu'on a toujours besoin de plein de choses. Ils étaient toujours présents pour nous aider. Les gens qui sont au son et qui font la retranscription. Et des fois on parle vite. Des fois, woups! ah! j'ai oublié d'attendre que le micro soit ouvert. Et là le président de nous rappeler à l'ordre.

Évidemment, la ministre l'a dit, on a touché à 10 ministères. C'est bien cela, je pense, hein? Je pense que c'est 10 ministères qu'on interpellait. Donc, il y a eu plusieurs équipes, plusieurs équipes. Et ça, je l'ai dit lors de mes remarques, lorsque nous avons conclu l'étude article par article, et je le répète très souvent, à chaque fois que j'ai l'occasion, Mme la Présidente, je le dis, je le répète : Nous devons être fiers de la fonction publique québécoise. Nous avons une excellente fonction publique. Trop souvent, nous avons la critique beaucoup trop facile à leur endroit. Et ces gens, ils sont dévoués. Ces gens, ils sont passionnés par le travail qu'ils font, ils sont expérimentés et ils nous alimentent. Quand on est aux affaires de l'État, si on n'est pas alimenté, là, par des gens qui sont dans l'ombre pour bien faire la réflexion, nous faire des suggestions, évidemment, on ne peut pas faire le même travail. Alors, si on a une démocratie qui fonctionne bien, c'est entre autres, entre autres, parce que nous avons une excellente fonction publique.

Des juristes qui se sont succédé les uns après les autres et qui effectivement sont venus alimenter notre réflexion et répondre à toutes nos questions. Il y avait beaucoup de questions. Et pourquoi qu'il y avait beaucoup de questions? Parce que, je l'ai dit, on écrivait un droit nouveau puis on voulait le faire le plus correctement possible. Et ils ont été très patients parce qu'effectivement des fois on ne comprend pas du premier coup, parce que nous, en politique, on est plus des généralistes, mais ce sont nos experts, et ils sont venus bien nous alimenter.

Les gens aussi, à travers la tournée des régions, qui avaient préparé des mémoires, les citoyens, soit qui ont répondu via Internet ou encore qui sont venus dans les soirées publiques, on veut les remercier. Les experts, le 19 et le 29 juin dernier.

Là, je ne sais pas si j'en ai oublié, mais il y a peut-être une personne, qui est Mme la ministre. On a développé une belle amitié autour de... tout au cours de cette dernière année, et je m'en réjouis. J'ai découvert quelqu'un de très attachant. Et, je le dis, comme le député de Borduas aussi, on a vraiment fait ce travail-là en se disant que c'était la santé et la sécurité publiques qui devaient être au coeur de notre réflexion. Et aujourd'hui, bien, on arrive à l'étape finale de ce projet de loi. Je veux la saluer, la remercier pour sa patience aussi parce que je le sais que ça... parfois ça a pu sembler long, surtout sur l'espace de consommation dans les lieux publics où, là, on a passé 18 h 30 min, une semaine complète. Mais, à un moment donné, on s'est parlé, puis je lui ai dit : Bien, n'ayez crainte, on va l'adopter, le projet de loi, parce qu'on était conscients qu'il fallait adopter le projet de loi. Ça aurait été irresponsable de ne pas adopter le projet de loi avant la fin de la session parlementaire. J'avais donné ma parole, nous adoptons le projet de loi aujourd'hui.

Bien sûr, comme je vous dis, il n'est pas parfait. Il y aura des pour, il y aura des contre. Mais, une chose est certaine, on aura vraiment donné le meilleur de nous-mêmes. Merci, Mme la Présidente.

• (17 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie de votre intervention, M. le député de Labelle. Et maintenant au tour de M. le député de Borduas de prendre la parole.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Donc, à mon tour d'intervenir sur l'adoption finale du projet de loi n° 157, donc la Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Mme la Présidente, vous n'êtes pas sans savoir que le projet de loi n° 157, c'est celui qui a requéri le plus de temps en commission parlementaire de la présente législature, que... Le député de Labelle a souligné à juste titre le nombre d'amendements qui ont été déposés, acceptés, le nombre d'articles qui ont été adoptés. Et donc, lorsque le gouvernement fédéral adoptera lui-même son projet de loi, le Québec sera prêt avec un encadrement relativement à la vente de cannabis. Pour ça, Mme la Présidente, je suis content qu'on puisse adopter le projet de loi avant la fin de la session, pour que le Québec ait un cadre au niveau de la vente de cannabis.

Cela étant dit, Mme la Présidente, il faut dire que le cadre adopté ne reflète pas ce que nous souhaiterions avoir, au niveau de la CAQ, au niveau du deuxième groupe d'opposition, parce que nous trouvons que le cadre qui est adopté est trop permissif et pourrait avoir une certaine banalisation en lien avec la consommation de cannabis.

Alors, tout au long du projet de loi, ma collègue de Repentigny et moi-même, qui avons assisté aux travaux parlementaires, avons tenté d'être le plus constructifs possible, Mme la Présidente, en déposant des amendements, en faisant en sorte d'expliquer notre position à la partie gouvernementale, à Mme la ministre, pour faire en sorte de combler les trous qui existaient à l'intérieur du projet de loi n° 157 et d'amener le gouvernement vers une approche qui est la plus responsable et la plus restrictive possible dès le départ, chose que nous avons réussi, Mme la Présidente, à exprimer. Il y a certains amendements qui ont été acceptés par la partie gouvernementale. D'autres n'ont pas été acceptés, et cela nous déçoit, parce qu'en matière de cannabis, en matière de stupéfiants, et les experts nous l'ont dit lors des différentes consultations, lors du forum également, il faut faire très attention, il faut y aller à pas de bébé, dans le fond, Mme la Présidente, y aller de façon progressive. À partir du moment où on décide de légaliser la substance, il faut faire en sorte que le cadre entourant cette vente, cette gestion de ce produit-là, du cannabis, bien... dès le départ, dès le début de l'expérience, en matière de vente, il faut que ce soit le plus restrictif possible pour par la suite voir comment est-ce qu'on peut faire des ajustements, donc c'est mieux de partir plus serré dès le départ et, par la suite, ouvrir. Alors, dans le cadre qui nous occupe, dans le cadre du projet de loi n° 157, il y a certaines mesures qui le font, mais il y a d'autres mesures qui ne le font pas, et j'aurai l'occasion d'y revenir, notamment au niveau de l'âge et au niveau de la consommation dans les lieux publics.

Alors, l'ensemble de nos interventions, Mme la Présidente, depuis le début, depuis le 13 septembre dernier, lorsque nous avons présenté le plan de la CAQ relativement à l'encadrement du cannabis, que ma collègue de Repentigny et moi-même avons présenté, nos préoccupations ont été toujours versées vers la santé publique, vers la santé de la population, vers la sécurité publique et vers l'absence de banalisation de la consommation de cannabis, parce que, vous savez, Mme la Présidente, ça a des conséquences sur la santé de la population, le fait de consommer du cannabis. Et l'ensemble des experts du monde de la santé nous l'ont dit, quelles sont les conséquences de cette consommation-là, notamment au niveau du développement du cerveau chez les jeunes. Et à la base les intervenants nous le disaient tous : Idéalement, pour votre santé, vous ne devriez pas consommer, peu importe l'âge à laquelle vous êtes rendus dans la vie, c'est préférable de ne pas en consommer.

D'ailleurs, chez les plus jeunes, ça a un impact encore plus marqué parce que, lorsque le cerveau est en développement, Mme la Présidente, bien, ça peut avoir des conséquences notamment sur le développement du cerveau. Ça peut créer notamment des risques de psychose, ça peut être un facteur aggravant du déclenchement des maladies mentales. Alors, tout au long des derniers mois, on l'a spécifié à de nombreuses reprises. Et, vous savez, du côté de la CAQ, c'est ce qui a guidé notre orientation en matière de légalisation du cannabis, au niveau de l'encadrement au niveau du cannabis.

Et tout à l'heure j'entendais mes collègues discourir à propos de l'âge. Dès le départ, nous, nous avons dit : Il faudrait que ce soit 21 ans, Mme la Présidente, pour retarder le plus possible le premier épisode de consommation de cannabis mais aussi les risques associés au déclenchement de psychoses. Et l'association des psychiatres nous l'a très bien établi, ils disaient : Écoutez, jusqu'à 25 ans, le cerveau est en formation; nous, on vous recommande 21 ans. Alors, pour répondre aux questions des collègues, pourquoi avoir choisi... pourquoi avoir proposé 21 ans, bien, notamment parce que l'association des psychiatres recommandait... parce que ceux-ci, dans leur travail quotidien, voient des gens qui ont été victimes des conséquences de la consommation de cannabis. Et, pour ça, Mme la Présidente, pour nous, c'est vraiment ce qui nous a guidés, dans l'optique où, lorsqu'on développe une politique de santé publique en la matière, on doit penser aux conséquences sur la santé également.

Et tout à l'heure ça me faisait un petit peu rire parce qu'on nous disait : Écoutez, au Québec, on a décidé que c'est le même âge que l'alcool parce que, si vous avez le droit de vous acheter une bière, bien, vous devriez avoir le droit de vous achetez un joint. Vous êtes habilité à faire des choix raisonnables et raisonnés. Vous avez le droit de voter, vous avez le droit de faire tout ce qui est permis, de vous marier, à l'âge de 18 ans. Je dirais, Mme la Présidente, ce n'est pas une question d'être raisonné, d'être raisonnable, de faire ce choix-là, c'est une question de prévention, c'est un principe de précaution, Mme la Présidente. Et on n'est pas mieux que certains autres États, et je ne pense pas que les gens du Québec sont nécessairement plus intelligents que les gens du reste du monde, on a tous nos défis, et on se retrouve dans des situations où certains autres États dans le monde ont choisi de retarder l'âge. Aux États-Unis, c'est 21 ans. C'est vrai que c'est 21 ans pour consommer de l'alcool également aux États-Unis, ils ont arrimé l'âge à ce niveau-là, mais par contre ça ne prend pas 21 ans pour voter aux États-Unis.

Même chose dans les autres provinces canadiennes. Le collègue de Labelle nous disait : Écoutez, c'est 19 ans dans les autres provinces canadiennes pour consommer de l'alcool, et, bien, on a arrimé ça avec l'âge pour consommer du cannabis. Par contre, ce n'est pas 19 ans pour voter dans les autres provinces canadiennes. Alors, voyez-vous, l'État, le gouvernement, l'Assemblée peut faire des choix, peut décider de dire : Écoutez, il s'agit d'une nouvelle substance, j'ai décidé de fixer l'âge un peu plus vieux parce qu'il y a des risques pour la santé.

Et notamment, et je pense que je l'ai exposé tout au long du débat, au cours des derniers mois, il va y avoir des conséquences pour le Québec que de fixer ça à 18 ans alors que ses deux voisins limitrophes, le Nouveau-Brunswick et l'Ontario, c'est 19 ans, Mme la Présidente. Et, vous le savez, à chaque fois... C'est un adon, mais c'est vous qui présidez. Vous connaissez les conséquences pour l'Outaouais que ça va avoir, que l'âge légal soit 18 ans et que, l'autre côté de la rivière des Outaouais, ça va être 19 ans. Il va y avoir une migration temporaire de la population, je crois, lors de certains événements.

L'Alberta, c'est 18 ans. Le Manitoba : 19 ans pour la consommation de cannabis, 18 ans pour l'alcool. Voyez-vous, il y a des distinctions, ça aurait été possible de le faire.

• (17 h 40) •

Et tout le monde nous a dit également que l'alcool est aussi dommageable que le cannabis, mais peut-être, lorsqu'on a les études qu'on a aujourd'hui, on aurait pu se questionner à savoir est-ce que l'âge de 18 ans est approprié aussi. Mais ce n'était pas ça, la question.

Mais, lorsqu'on se dit... Si le facteur est uniquement le fait de dire : Bien, l'âge légal est à 18 ans pour l'alcool, on va mettre le même âge pour le cannabis, je pense qu'il y a une partie du raisonnement qui manque, notamment celui au niveau de la préoccupation au niveau de la santé des jeunes. Et, lorsqu'on me dit : Écoutez, dans les autres provinces, c'est 19 ans, l'alcool, puis ils ont mis 19 ans, le cannabis, alors nous, nos jeunes, bien, ils peuvent faire la distinction avec les deux.

Et on nous dit comme argument : Écoutez, on veut amener les jeunes du marché noir vers le marché licite, alors c'est pour ça qu'on abaisse l'âge le plus possible, donc, à l'âge de la majorité, à 18 ans. Je vous dirais : Est-ce que les autres provinces sont irresponsables de fixer ça à 19 ans ou de fixer ça à 21 ans? Est-ce que tous les autres sénateurs américains représentant les différents congrès des États sont irresponsables de fixer ça à 21 ans? Est-ce que nos confrères des autres provinces canadiennes, de fixer ça à 19 ans, sont irresponsables, de fixer l'âge pour acheter du cannabis à 19 ans? Parce que, durant la période de 15, 16, 17, 18 ans, où vont-ils s'approvisionner, les jeunes? C'est ça, la question.

L'objectif, c'est de ne pas faire de banalisation et de faire de la prévention, de la sensibilisation, Mme la Présidente. Alors, je pense que, même si on fixe à 18 ans, bien, les jeunes de 14, 15, 16, 17 ans vont consommer quand même du cannabis, et ceux-là n'auront pas accès à la substance vendue à la Société québécoise du cannabis. Voyez-vous l'incohérence de la position gouvernementale? On nous dit : Ah! il y a 40 % des jeunes dans cette tranche-là qui consomment. Oui, mais il y en a une panoplie d'autres aussi qui sont plus jeunes que 18 ans qui consomment puis qui n'auront pas plus accès à cette substance-là. Il faut travailler en prévention, il faut faire en sorte d'expliquer pourquoi, quelles sont les conséquences de la consommation. Mais, si, comme société, on veut envoyer un message qui fait en sorte qu'on ne banalise pas la consommation, bien, on aurait dû fixer ça à 21 ans, Mme la Présidente, parce qu'en fixant à 18 ans ça vient banaliser la consommation de la substance.

Cela étant dit, Mme la Présidente, il y a un autre élément important aussi avec lequel on est en désaccord, c'est au niveau de la consommation dans les lieux publics. Dès le départ, on a dit, Mme la Présidente qu'il fallait être restrictif, il ne faut pas faire en sorte que ce soit banalisé. Et là, du côté du gouvernement, on a dit : Bien, écoutez, on va laisser ça aux municipalités, de réglementer dans l'espace public, à part certains éléments. Bien, ça fait en sorte que, sur l'ensemble du territoire québécois, vous allez pouvoir vous retrouver avec 1 100 règlements différents, 1 100 règlements municipaux, et les gens vont pouvoir fumer, si ce n'est pas réglementé, dans des parcs, sur le trottoir, sur la voie publique. À la période des questions, je vous l'avais démontré, Mme la Présidente : sur la piste cyclable, ce n'est pas possible de fumer, en vertu de la législation provinciale, mais par contre actuellement c'est possible de fumer sur le trottoir et sur la piste cyclable... sur la route. Voyez-vous, Mme la Présidente, c'est un autre des aspects qui me chicotent dans le projet de loi, parce que le gouvernement, l'État québécois aurait dû réglementer l'espace public pour consommer du cannabis. Vous vous retrouvez dans une situation où, si on ne veut pas que ce soit banalisé, il ne faut pas non plus que ce soit facilement accessible, et, par l'absence d'intervention législative, ça fait en sorte qu'on banalise. Surtout, au niveau de l'application de la loi, on se retrouve dans une situation où c'est difficile pour les policiers. Vous allez vous retrouver dans le secteur de Gatineau, ça va est correct, mais dans le secteur de Hull-Aylmer ce ne sera pas correct de consommer... ou peut-être j'ai des petites notions de géographie à améliorer au niveau de l'Outaouais, mais vous me l'expliquerez. Mais vous comprenez la teneur de mes propos, Mme la Présidente.

Alors, Mme la Présidente, on a fait des gains dans le cadre du projet de loi, notamment au niveau du fait que les entreprises qui vont vendre du cannabis à la SQDC devront passer à travers le filtre de l'AMF et, par la suite, le filtre de l'Autorité des marchés publics. C'était une demande qu'on avait dès le départ du projet de loi, le gouvernement a accepté de déposer un amendement en ce sens-là.

C'est important de rappeler que le Québec s'est positionné pour interdire la culture à domicile. Et on souhaite que le gouvernement fédéral entende très fortement la voix de l'Assemblée nationale à ce niveau-là, parce qu'on a la juridiction pour le faire.

L'utilisation des revenus, également, qui doit servir uniquement en matière de prévention des substances psychoactives, c'est un bon élément du projet de loi.

Également, la suppression des projets pilotes pour la vente au détail dans le cadre de l'article 55. Je pense que, dès le départ, il faut avoir le souci de bien faire les choses. Et donc la filiale de la société d'État va être en mesure de bien contrôler le fait de gérer la vente de cannabis.

Et il faut dire, Mme la Présidente, également que le gouvernement a permis la vente en ligne. Nous étions contre cet élément également, parce que, dans un souci d'accessibilité toujours au niveau de la substance, je pense que ça aurait été préférable de voir la première expérience, comme on pourrait dire, progressive, à pas de bébé.

Alors, Mme la Présidente, un dernier point sur l'âge. Vous savez, l'automne dernier, on a beaucoup parlé des boissons sucrées avec un fort taux d'alcool. D'ailleurs, la ministre est intervenue et a demandé au gouvernement fédéral d'agir en ce sens. On se souvient qu'une jeune femme est décédée suite à une consommation excessive de ce type de boisson, en vente dans de nombreux détaillants. Et le taux d'alcool est particulièrement élevé, et, avec le sucre, ça constitue une quantité importante, et les effets sur la santé, lorsque c'est consommé, c'est l'équivalent de si vous consommiez plusieurs consommations variées. Et là on intervient pour pratiquement interdire ce genre de boisson là. Et ce genre de boissons là sont accessibles aux 18 ans, et on vient réglementer.

Et là vous ne pouvez pas m'empêcher de faire le parallèle avec le cannabis. On est face à une nouvelle substance qui n'est pas encore sur le marché, on avait la possibilité de dire : Écoutez, cette substance-là va avoir des conséquences. Et là, pour ces boissons sucrées, là, alcoolisées, on le fait à rebours. Et on s'est rendu compte que, bien, peut-être que c'était trop accessible, et il y a eu une levée de boucliers. Alors, il faut se questionner. Lorsqu'on adopte le projet de loi n° 157 avec l'âge de 18 ans, est-ce qu'on fait la bonne chose? Respectueusement, je ne pense pas, et c'est ce que j'ai tenté d'expliquer et c'est ce que ma collègue a tenté d'expliquer tout au long du projet de loi.

L'âge et la consommation dans les lieux publics font en sorte que ma formation politique va voter contre le projet de loi. On a fait un travail sérieux, on a fait en sorte de faire cheminer le projet de loi, on a proposé des amendements de façon constructive avec la ministre. Ça n'a pas toujours été facile de part et d'autre, mais ultimement on arrive avec un projet de loi qui somme toute va permettre d'avoir un encadrement. Mais encore faut-il le rappeler, Mme la Présidente, que ces deux éléments sur lesquels je vous ai entretenus font en sorte qu'à mon avis ça favorise la banalisation. Alors, Mme la Présidente, ma formation politique votera contre le projet de loi.

Je voudrais remercier ma collègue de Repentigny, qui a fait un travail exceptionnel tout au long de la commission, qui a été extrêmement vigilante. Je voudrais remercier également Me Justine Savard, qui nous a accompagnés tout au long des débats parlementaires, également le collègue de l'opposition officielle, le collègue de Labelle, et le collègue de Saint-Jérôme; de remercier Mme la ministre pour son travail, d'avoir livré un projet de loi. Comme je le disais, le projet de loi n'est pas parfait, n'est pas à notre entière satisfaction. Tout de même, je reconnais son travail d'avoir organisé des consultations, d'avoir organisé des journées de, je cherche le mot... le forum, avec son équipe, au niveau du ministère, d'avoir fait le tour des experts internationaux, d'avoir un forum sérieux, d'avoir invité les gens à venir nous parler, de différents horizons, des gens qui sont dans le domaine des stupéfiants, en santé publique, en santé mentale, tout ça, on a eu un bon portrait; les consultations également qui ont été organisées par son ministère.

Vous savez, Mme la Présidente, on est en désaccord avec le fond sur certains éléments, mais, au niveau de la forme et du travail qui a été effectué par la ministre, je dois la féliciter, parce que ce n'était pas un dossier facile. C'est un dossier qui a requéri énormément de temps, qui a requéri énormément de travail, et je pense que... Vous savez, Mme la Présidente, parfois on est un en face de l'autre, à l'Assemblée, mais on peut reconnaître l'investissement en temps qui a été effectué et en travail qui a été effectué par nos collègues. Et je pense que tout le monde va reconnaître que la ministre des Saines habitudes de vie a travaillé très fort au cours de la dernière année, quoiqu'on n'est pas d'accord avec le résultat final et les amendements qui n'ont pas été acceptés. Cela étant dit, je tiens quand même à lui rendre hommage pour le travail qui a été effectué au cours de la dernière année, parce que, on le sait, on a été loin de nos familles, de part et d'autre. Il y a beaucoup de travail qui a été effectué, puis on a beaucoup échangé en commission parlementaire. Puis on apprend à connaître les collègues davantage lorsqu'on passe 136 heures de commission parlementaire ensemble. Donc, on connaît la personnalité un peu plus de chacun, puis ça nous permet de nous apprécier davantage par la suite. Alors, félicitations, Mme la ministre, pour le travail que vous avez accompli, quoique je ne suis pas en accord totalement avec ce que vous avez proposé. Et de remercier les collègues de la partie gouvernementale qui ont été présents, le personnel de l'Assemblée qui nous a accompagnés, Mme la secrétaire également, et de remercier M. le président de la commission, qui a présidé pendant 136 heures.

Alors, ma formation va voter contre le projet de loi, Mme la Présidente, parce qu'on considère que ça banalise trop la substance. Et j'invite la ministre à y réfléchir encore une fois avant l'adoption finale.

• (17 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Borduas. Maintenant, je vais céder la parole à M. le député de Mercier. Et je vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Mme la Présidente, on voit bien qu'un bel esprit d'entente et de, je dirais, franche collaboration semble animer cette dernière semaine de l'Assemblée nationale. Et j'entends donc mon collègue de la CAQ presque en venir à la conclusion qu'il fallait en quelque sorte, sous réserve de quelques réflexions de la part de la ministre que je suis certain qu'elle va faire... en fait, la CAQ pourrait presque voter en faveur de... Non? Il n'en est pas... Très bien. Je ne voudrais pas mettre des mots dans la bouche de mon collègue et lui prêter des intentions qu'il n'a pas.

Mais c'est sûr que, pour Québec solidaire, la légalisation du cannabis est une chose souhaitée depuis longtemps. Nous avons été le premier parti à l'Assemblée nationale, il y a une dizaine d'années, à formuler l'idée qu'il fallait absolument décriminaliser. Et très rapidement nous nous sommes aperçus, en confrontant nos idées avec les acteurs du milieu, notamment les acteurs de la santé, qu'il fallait distinguer, dans la consommation du cannabis, l'usage récréatif et les problèmes de dépendance, qui sont de véritables problèmes à la fois de santé individuelle et de problèmes sociaux.

Pour le bénéfice, je dirais, de mon collègue qui vient de parler, parce qu'il est quand même beaucoup plus jeune que moi, je lui rappellerais, secondaire III, 1974, école secondaire typique de Montréal, l'usage récréatif du cannabis était, pour le meilleur ou pour le pire, déjà parfaitement banalisé. Ce qui n'est jamais banal, cependant, ce sont les conséquences individuelles sur le plan de la santé mais aussi les conséquences familiales et sociales désastreuses que peuvent avoir une dépendance à n'importe quelle substance, et en particulier au cannabis, mais également l'alcool. Nous savons à quel point la dépendance à l'alcool et les problèmes de santé liés à l'alcool sont par ailleurs beaucoup plus importants en termes de coûts sociaux, en termes de conséquences pour la santé des gens mais aussi des conséquences mortelles pour les autres. Et ça, c'est des données brutes, ça n'a rien à voir avec nos jugements, c'est des données brutes de santé publique. Donc, il faut bien, lorsqu'on discute de ces choses-là, distinguer ces deux éléments-là. Et donc, quand on consulte les mêmes experts, qui nous renseignent sur leur connaissance de comment on fait pour aborder ces problèmes et, donc, dans le but de réduire les méfaits d'une substance qui peut causer des problèmes de dépendance, on nous renseigne qu'il n'y a rien dans la loi, dans la répression qui peut aider et qu'il faut consacrer énergie et efforts ailleurs.

Et, ce projet de loi, l'esprit qui gouverne la légalisation de la consommation à usage récréatif du cannabis, l'esprit qui gouverne ça est tout à fait souhaitable socialement, et Québec solidaire, donc, va appuyer ce projet de loi, notamment parce qu'en plus on a pris... Et je veux remercier la ministre et le gouvernement en général, hein? Nous sommes souvent très critiques de ses actions, il faut reconnaître lorsqu'un bon geste est posé. Et donc le fait de confier à la Société québécoise du cannabis, à une société publique la mise en marché, la vente de ces produits est déjà un pas considérable et appréciable, que nous soutenons, non seulement parce qu'il faut ça pour mieux contrôler la circulation de cette substance, mais il est intéressant d'avoir ça également pour ne pas qu'il y ait une pression de mise en marché comme on voit dans certains États américains, où la vente du cannabis devient un secteur très profitable et donc une espèce d'engrenage, une pression économique pour augmenter sa consommation, et surtout pour que les recettes directes et indirectes de cette consommation puissent être utilisées par l'État pour mieux s'adresser aux problèmes sociaux engendrés par la consommation du cannabis, surtout la dépendance au cannabis.

Nous avons déjà mentionné à quel point quelques occasions importantes ont été ratées par le refus du gouvernement d'accepter divers amendements qui ont été proposés soit par l'opposition officielle, soit par nous-mêmes, soit par ma collègue de Vachon; d'abord, d'interdire tout commerce entre la société du cannabis du Québec et des producteurs qui auraient des investissements en provenance des paradis fiscaux pour bien contrer aussi l'influence des cartels, des cartels, des nouveaux cartels dans la mise en marché du cannabis qui se forment au Canada, donc des cartels, entre guillemets, légaux pour remplacer des cartels qui étaient autrefois sous le contrôle du crime organisé.

Deuxième élément, tout aussi important : pour être cohérents, non seulement pour briser ces cartels, mais pour être cohérents dans la reconnaissance du fait que la dépendance au cannabis est un problème de santé individuel et un problème social affectant familles et société, pour être cohérents, il faut réduire les problèmes causés à la dépendance, et un des problèmes causés par la dépendance, c'est l'aspect financier. Quand en plus on fragilise quelqu'un — ou sa famille — qui est aux prises avec un problème de dépendance, on aggrave tous les risques de problèmes sociaux liés à la dépendance. Donc, il aurait été conséquent et cohérent que la ministre accepte notre proposition de légaliser et d'accepter que, pour usage personnel, les gens puissent faire pousser leurs propres plantes, je le répète, pour diminuer les conséquences néfastes, sur le plan social, de l'aggravation des problèmes sociaux liés à la fragilisation économique lorsque quelqu'un a des problèmes de dépendance.

Donc, dans ce contexte-là, bien sûr, le projet de loi aurait été amélioré, et la ministre s'en serait trouvée certainement aidée, d'être plus ouverte à nos propositions. Mais, comme je l'ai dit, comme c'est un pas en avant appréciable, c'est un changement de paradigme social et ça va contribuer à mieux apporter des solutions aux problèmes sociaux que vivent les personnes qui vivent avec la dépendance au cannabis, nous allons appuyer le projet de loi qui va être mis au vote. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Mercier. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Vachon. Et vous disposez, vous aussi, d'un temps de parole de 10 minutes.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Oui, merci, Mme la Présidente. Moi, je voterai contre le projet de loi sur le cannabis, Mme la Présidente, parce que le vote qu'on s'apprête à faire sur le projet de loi sur le cannabis va être le prélude, probablement, au pire scandale politico-financier de corruption, de collusion auquel on pourra assister ici, à l'Assemblée nationale. Tous les ingrédients, Mme la Présidente, sont réunis, les ingrédients liés à des anciens du Parti libéral du Canada liés aux entreprises de cannabis. Et là je parle du volet de la production. Ce volet-là, Mme la Présidente, il y a tellement d'argent en jeu! Je vais vous dire, juste la firme Hydropothecary, c'est 1 milliard de contrats qu'elle a reçus déjà, 1 milliard, c'est beaucoup d'argent. Et on aurait pu ici, Mme la Présidente, empêcher ça, on aurait pu... Et j'ai été la première à le soulever, cette problématique d'éthique, de corruption, de collusion, de retour d'ascenseur, Mme la Présidente. On aurait pu le faire en nationalisant la production, et ça, ça aurait créé des emplois au Québec, à tous nos producteurs de serre du Québec. Ça aurait pu faire en sorte que tous les revenus générés, les profits générés reviennent à l'ensemble des citoyens, et on parle de centaines de millions, je répète, centaines de millions en profits, et ça n'aurait coûté rien aux contribuables.

Et, quand j'entends : Bien, on pourra continuer à réfléchir sur cette question-là, le problème, Mme la Présidente, c'est que, si on ne le fait pas maintenant et qu'on veut le faire plus tard, ça voudra dire nationaliser les entreprises qui auront eu des contrats, et là ça va coûter très, très cher aux contribuables, parce qu'il faudra compenser les compagnies qui auront eu les contrats. Ça fait que c'est maintenant, Mme la Présidente, qu'on a l'occasion de nationaliser.

Et, lorsque j'ai proposé cette idée-là, de nationaliser la production pour que ce soient les producteurs du Québec qui en profitent à travers la SAQ, la Société des alcools du Québec, qui aurait donné des contrats de sous-traitance à nos producteurs de serre, on m'a traitée de farfelue, Mme la Présidente, que c'était une idée qui était hurluberlue puis que ça allait contre la saine concurrence des entreprises et le libre-marché, blablabla. C'est drôle, Mme la Présidente, quand Justin Trudeau propose, lui, de nationaliser un pipeline, un pipeline de pétrole bitumineux, le plus polluant de la planète, bien là on ne le traite pas d'hurluberlu, on ne le traite pas de mauvais investissement, puis là c'est pour enrichir une pétrolière américaine, Mme la Présidente. Moi, je proposais de nationaliser pour enrichir l'ensemble des contribuables québécois, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la députée de Vachon, j'imagine que vous n'avez pas terminé votre intervention.

Mme Ouellet : Non.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, en conséquence, je vais suspendre nos travaux jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 19 h 30)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bonsoir à vous tous et toutes. Vous pouvez prendre place. Et nous allons poursuivre notre débat, et, au moment de suspendre, Mme la députée de Vachon avait la parole, et je lui recède la parole, tout en vous indiquant que vous disposez d'un temps de parole de 7 min 13 s.

Mme Ouellet : Merci, Mme la Présidente. Donc, je disais donc, avant la suspension, Mme la Présidente, que je voterai contre le projet de loi sur le cannabis, principalement à cause du volet production, le volet production dont il n'a pas été beaucoup question, le volet production qui va générer des milliards de revenus. Et le vote qu'on s'apprête à prendre, étant donné qu'on laisse le volet production au privé, va être le prélude probablement au pire scandale politico-financier de corruption, de collusion qu'on va voir dans les prochaines années, parce que c'est un marché qui est en très, très forte croissance, Mme la Présidente.

Et on peut se poser la question : Qu'est-ce que le gouvernement canadien fait dans le cannabis? Parce que c'est une loi canadienne, et il y a aussi une loi québécoise pour la mise en application, mais qu'est-ce que le gouvernement canadien fait là-dedans, puisque le cannabis est une plante? Donc, c'est de l'agriculture, une plante, d'ailleurs qui pousse très bien, on l'a déjà vu dans nos champs. Donc, c'est de l'agriculture, donc, normalement, les permis devraient être émis par le ministère de l'Agriculture du Québec. Mais, non, Mme la Présidente, le gouvernement canadien, et particulièrement Justin Trudeau, s'est gardé la mainmise sur les permis parce que c'est la clé pour les retours d'ascenseur, et on l'a vu, que, dans les gens qui sont liés aux conseils d'administration des principales entreprises dans le cannabis thérapeutique, qui sont les premiers à être sur le marché du cannabis dit récréatif, bien, beaucoup sont liés au Parti libéral du Canada, Mme la Présidente : Adam Miron, qui est avec Hydropothecary, qui est lié au Parti libéral du Canada, on a rien qu'à penser à André Cauchon, Pierre Pettigrew, Alain Dubuc, Chuck Rifici, et bien d'autres, tous liés au Parti libéral du Canada.

Mais, Mme la Présidente, on a vu aussi dernièrement que le Parti libéral du Québec est aussi lié aux gens du côté des entreprises de cannabis, et donc on a Lloyd Mitchell Segal, qui est un très proche du premier ministre actuel, donc, qui a bénéficié de subventions, la seule entreprise qui a bénéficié de subventions pour la production de cannabis, qui n'est même pas une entreprise québécoise, et qui a des contrats de la SAQ déjà.

Donc, on voit qu'il y a un lien très direct avec le Parti libéral du Canada et le Parti libéral du Québec, et c'est beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent. Donc, c'est une clé, les permis de production, pour, malheureusement, Mme la Présidente, des retours d'ascenseur. Je pense qu'un jour il y aura probablement une commission d'enquête...

M. Tanguay : Mme la Présidente...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant, Mme la députée de Vachon. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Clairement, on ne peut pas avoir d'exemple plus patent que de prêter des intentions, à l'article n° 35, qui est de tenir des propos blessants et injurieux, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la députée, je vais vous demander un peu plus de prudence. Il vous faut faire attention, ça allait bien jusqu'à maintenant. Et vous avez encore près de cinq minutes, alors je vous recède la parole.

Mme Ouellet : Oui, je parlais donc des permis de production qui sont la clé, les permis de production qui sont la clé pour de potentiels retours d'ascenseur et je crois qu'un jour...

M. Tanguay :... elle ne vous écoute pas, visiblement, «de possibles retours d'ascenseur», c'est exactement...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Si on interrompt comme ça, Mme la députée, vous n'aurez pas le temps de faire votre point, alors je vous invite à la prudence une fois de plus.

Mme Ouellet : Donc, Mme la Présidente, il y aura probablement, un jour, une enquête comme on a vu dans l'enquête Charbonneau. Et donc je pense qu'on aurait eu l'occasion maintenant de pouvoir tout de suite faire de la prévention et de ne pas aller vers cette tendance-là.

 Mais, pire que ça, Mme la Présidente, ces entreprises-là qui sont dans le cannabis, liées au Parti libéral du Canada ou au Parti libéral du Québec, la plupart d'entre elles sont liées aux paradis fiscaux, Mme la Présidente. Donc, à partir des paradis fiscaux, on ne sait pas d'où provient l'argent, et là je dis : L'argent pourrait — j'utilise bien le conditionnel — pourrait donc provenir du crime organisé pour financer les entreprises de cannabis dit récréatif. Et c'est exactement le contraire de l'objectif de la légalisation du cannabis et de sortir le crime organisé de la production de cannabis. Bien là, par la porte d'en arrière, en fait par la porte des paradis fiscaux, ce serait possible qu'il... Et il y a eu des articles dans les journaux, ce n'est pas juste moi qui le dis, Mme la Présidente. On ne peut pas garantir qu'il n'y aura pas de financement du crime organisé dans les entreprises de cannabis thérapeutique. Et c'est pour ça d'ailleurs qu'il y a eu des amendements, pour qu'il ne puisse pas y avoir de financement des paradis fiscaux, amendements, malheureusement, qui ont été refusés. Et donc, si — si, je dis bien «si» — il y avait de l'argent du crime organisé qui finançait les paradis fiscaux qui, eux-mêmes — on le sait, ça, c'est démontré — finance le cannabis, bien, à ce moment-là, ça pourrait — j'utilise encore le conditionnel, Mme la Présidente — devenir du blanchiment d'argent. Donc, on se rend compte que tout le volet production, actuellement, de laisser ça entre les mains des entreprises privées, c'est vraiment, c'est vraiment ouvrir la porte à la corruption, Mme la Présidente.

On a une solution. On a une solution actuellement, qui est de nationaliser, de faire en sorte que la production soit gérée par le public, à travers la SAQ puis la société cannabis du Québec, et donner des contrats aux entrepreneurs de production de serre au Québec. Donc, à ce moment-là, on s'assure de ne pas tomber dans la corruption, on s'assure de ne pas tomber dans les paradis fiscaux, on s'assure qu'il n'y ait pas de financement du crime organisé, on s'assure de créer des emplois au Québec, on s'assure que les revenus, les profits reviennent à l'ensemble des contribuables, que ce soit pour de la sensibilisation ou pour n'importe quel autre service public. L'éducation et la santé, on sait qu'on manque d'argent, et là, au lieu que cet argent-là revienne à l'ensemble des citoyens et des citoyennes, bien, cet argent-là va revenir à quelques individus plus souvent qu'autrement liés aux partis libéraux.

Donc, c'est pour ça que je dis : Je ne peux pas être pour ce projet de loi là. Il y a d'autres éléments qui ont été discutés, puis une chance que la distribution se fait par la SAQ. Mais le volet production est le volet le plus gros, le plus impactant, et ce volet-là passe complètement en dessous de la couverte, et malheureusement, avec la façon dont ça fonctionne actuellement, je trouve ça extrêmement inquiétant. Et je trouve dommage que, du côté, ici, de l'Assemblée nationale, on ne se donne pas les moyens, parce qu'on est là pour la population, pour les représenter, qu'on ne se donne pas les moyens pour assurer une meilleure sécurité puis pour assurer aussi des revenus qui vont revenir à l'ensemble de la population plutôt qu'à quelques individus qui, malheureusement, ne sont pas là souvent pour les bonnes raisons.

Donc, je voterai donc contre ce projet de loi là. Et je trouve ça vraiment triste que la légalisation... Parce qu'en soi je suis d'accord avec la légalisation, mais, de la façon dont ça se fait actuellement, comme c'est prévu et par le gouvernement canadien et par le gouvernement québécois, c'est vraiment la pire chose. Merci, Mme la Présidente.

• (19 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Vachon. Maintenant, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Jérôme et je vous indique, vous aussi, que vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes.

M. Marc Bourcier

M. Bourcier : Merci, Mme la Présidente. Alors, comme je l'ai déjà précédemment mentionné, jamais je n'aurais imaginé, lorsque j'étais enseignant au primaire, en fait de toute ma vie, me retrouver ici, au salon bleu de l'Assemblée nationale, dans cette situation : me prononcer à propos d'un projet de loi aussi complexe, impliquant beaucoup de ministères, près d'une dizaine, et qui touche un si grand nombre de citoyens, en fait qui touche tous les Québécois. C'est, il va sans dire, une très grande responsabilité, car il faut se préoccuper des enfants et, en ma qualité d'ex-enseignant, me préoccuper de tous les élèves du Québec.

Mais, ne l'oublions pas, Mme la Présidente, c'est à cause d'Ottawa, du gouvernement fédéral que nous sommes ici à légiférer sur le cannabis, une des trop rares promesses tenues par le gouvernement du premier ministre Justin Trudeau, sinon la seule, avec un échéancier trop rapide. C'est ce que j'ai appelé le malaise fédéral tout au long des travaux de la commission, affectueusement, Mme la Présidente.

Lorsque j'ai rencontré des parlementaires du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario l'automne dernier, j'ai constaté le même malaise chez leurs parlementaires au sujet du projet de loi C-45 du gouvernement fédéral : imposition de force, échéancier serré, préoccupations de leurs municipalités, points de vente loin des écoles, magasinage frontalier problématique avec les États-Unis et le Québec, qui n'ont pas le même âge de consommation d'alcool, ces parlementaires, qui voulaient prioriser les profits des ventes sur la prévention et l'éducation donnée à leurs jeunes, garder les profits dans leurs provinces, leur crainte de ne pas avoir des tests de dépistage adéquats, la répartition des recettes avec les villes, les consultations publiques, une application plus rigoureuse de la loi, la culture à domicile, etc., toutes des choses qui ont été évoquées en commission et qui ont été discutées, négociées par mes collègues des autres formations politiques, qui, à l'instar de ceux des autres provinces, n'étaient pas prêtes à le faire à ce moment-là. On n'était pas prêts, Mme la Présidente. Mais, grâce au bon travail parlementaire, nous avons passé au peigne fin tout le projet de loi n° 157, malgré le fait que certains articles dépendent encore de ce que le gouvernement d'Ottawa va décider. C'est à nouveau le malaise fédéral.

Les parlementaires autour de la table étaient en accord sur la majorité des articles du projet de loi n° 157, sauf certains, dont celui qui donne la permission de consommer du cannabis dans les lieux publics, plus précisément dans les rues et sur les trottoirs. Nous, du Parti québécois, de l'opposition officielle, voulions l'interdire, mais le gouvernement a pelleté ce pouvoir dans la cour des municipalités, ce qui créera, sans l'ombre d'un doute, toutes sortes de situations loufoques. Par exemple, une ville permettra la consommation dans ses rues, et la ville voisine, non. Une autre situation, c'est : puisque c'est interdit sur les pistes cyclables, un cycliste pourrait s'arrêter pour fumer du cannabis sur le trottoir à sa droite ou dans la rue à sa gauche, mais ne pourra pas le faire sur sa bicyclette en mouvement. Un adulte pourrait se faire accompagner par son enfant dans une succursale de la SQDC, mais, sur le trottoir extérieur, en sortant, après son achat, pourra consommer en lui tenant la main, de son enfant. En attendant son enfant après l'école sur le trottoir, un parent pourra consommer du cannabis en toute légalité si les municipalités ne légifèrent pas en la matière. Il est certain que le Parti québécois, l'opposition officielle, une fois au pouvoir le 1er octobre, réglera cette situation ambiguë en modifiant la loi.

Dans un des articles, nous étions en désaccord avec la partie gouvernementale. Nous aurions aussi préféré que le projet de loi aille plus loin notamment en ce qui concerne la production québécoise, qui aurait pu être plus favorisée, alors que la très vaste majorité de producteurs de cannabis ne sont pas Québécois.

Au début de l'étude du projet de loi n° 157, nous avons aussi demandé qu'une tournée du Québec soit organisée afin d'entendre la population, ce qui fut fait dans sept grandes régions du Québec, et ce, d'une manière très professionnelle et minutieuse. Nous avons entendu aussi à l'Assemblée nationale plus de 55 groupes et reçu encore plus de mémoires, soit près de 128.

Une note discordante toutefois, Mme la ministre : la deuxième opposition a déjà annoncé, dès le départ, qu'elle voterait contre le projet de loi en raison de leur prise de position idéologique et conservatrice en faveur de l'âge légal de consommation à 21 ans. Tous les États américains qui ont légalisé le cannabis ont choisi le même âge légal que celui de la consommation de l'alcool, de même que toutes les provinces canadiennes, sauf le Manitoba, les seuls au monde. À 18 ans au Québec, Mme la Présidente, on est majeurs, on est en mesure de décider de se marier, de conduire une auto, de produire une déclaration d'impôt, et même avant, de faire du service militaire et de boire de l'alcool, au Québec. Du jour au lendemain, la deuxième opposition dirait aux jeunes de 18, 19 et 20 ans qu'ils ne sont pas aptes à faire leurs propres choix, leurs propres déductions, et qu'ils ne peuvent assumer leurs responsabilités? Il faut savoir que tous les États américains ont fixé l'âge légal de consommation d'alcool à 21 ans suite à une décision du président Ronald Reagan dans les années 1980. Ce n'est donc pas un argument valable pour les gens de la deuxième opposition. De plus, si on les écoute, entre 18 et 21 ans, les jeunes devraient plutôt se procurer du cannabis sur le marché noir, avec les dangers que cela comporte d'avoir affaire au crime organisé.

À part ce fait, il s'est fait de la bonne politique entre les députés lors des travaux, sans partisanerie, ce qui a réjoui l'ex-enseignant que je suis, Mme la Présidente. Nous avons tous travaillé pour le bien commun, et j'insiste, pour le bien commun, même avec nos divergences d'opinions. C'est du droit nouveau, et j'ai beaucoup appris. J'imagine ceux qui ont vécu la fin de la conscription, en 1921, qui ont changé la loi sur la consommation et la vente de l'alcool. On semble être dans les mêmes eaux. Mais c'est important de le répéter, Mme la Présidente, le vote sur ce projet de loi porte sur l'encadrement du cannabis, et non sur sa légalisation. Parce que la légalisation, c'est l'affaire d'Ottawa et le problème qu'il nous envoie. Je vous l'ai dit, Mme la Présidente, Ottawa nous a légué 100 % des problèmes avec cette légalisation forcée, et il se garde 25 % des profits. Sans compter les amis du gouvernement fédéral qui se sont associés, comme par hasard, à la production de cannabis, un univers très lucratif, semble-t-il. Le projet de loi C-45 d'Ottawa est un parfait exemple du fédéral qui nous impose ses vues, ses lois, et il faut les accepter. C'est le principe de la carpette. Il s'essuie les pieds sur le Québec, et, nous, il faut accepter sans rien dire. Nous, de la deuxième... de la première opposition, au Parti québécois, on répète toujours que, si on contrôlait notre destinée et nos institutions, ce serait beaucoup plus simple, et on garderait notre fierté, notre autonomie. On a une noble cause, nous, sous-jacente à notre désir d'aider les gens.

En terminant, Mme la Présidente, les parlementaires siégeant sur cette commission ont effectué du travail non partisan en se préoccupant de la santé et de la sécurité publiques, et ça, ça me rend très fier d'être ici avec nous... avec vous, plutôt, oui. Trop souvent lors de la période de questions ou dans d'autres circonstances, la partisanerie s'installe. Lors de mes 18 mois parmi vous en tant que député de Saint-Jérôme, dont je suis très fier, j'ai rencontré des gens formidables de toutes les formations politiques. J'ai apprécié cette expérience politique de droit nouveau, le projet de loi n° 157, qui aura marqué, de par sa nature, ma carrière de parlementaire. Je salue tous les collègues parlementaires, d'ailleurs, de la partie gouvernementale et le personnel qui ont participé à l'élaboration de ce projet de loi. Je salue aussi le président de la commission et député de La Prairie, qui fut un excellent pédagogue et modérateur, et finalement Mme la ministre, députée de Soulanges, avec qui il fut très agréable de discuter et d'argumenter. C'est une vraie de vraie, c'est une dame de coeur. Un coup de chapeau aussi aux collègues des autres oppositions.

Et, pour conclure, je voudrais aussi souligner tout le travail de mon collègue député de Labelle, qui s'est littéralement dévoué dans ce projet sans compter ses heures et ses fort nombreux déplacements, tout en collaborant avec le gouvernement du mieux qu'il pouvait afin de faire avancer les choses pour la société. C'est ça, Mme la Présidente, faire de la politique autrement, et, à Saint-Jérôme, on aime ça. Ce fut un plaisir de légiférer à ses côtés. Je salue tous les parlementaires présents ce soir. Merci, Mme la Présidente.

• (19 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est moi qui vous remercie, M. le député de Saint-Jérôme. Et, pour la prochaine intervention, je vais céder la parole à Mme la députée de Repentigny, et vous disposez, vous aussi, d'un temps de parole de 10 minutes.

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : Merci, Mme la Présidente. Mon allocution va être brève parce que, lorsqu'on a terminé le travail de l'étude article par article, nous avons déjà échangé, conclu sur le travail que nous avons fait. Et je dois admettre que c'est un travail qu'on a pris au sérieux, l'ensemble des parlementaires qui ont siégé sur cette commission-là. Pour moi qui suis une juriste, ça a été un privilège de travailler sur un projet de loi qui concerne la légalisation d'une substance qui était là de façon illégale mais qui, dans les prochaines semaines, prochains jours, va devenir une substance légale. C'est sûr que, malgré tout le travail que nous avons fait, malgré les échanges que nous avons eus, force est de constater qu'il y avait des désaccords, les mêmes désaccords qu'on retrouve, dans le fond, dans la société, parce que ce n'est pas un sujet sur lequel les gens s'entendent ni dans la société mais ni ici, à l'Assemblée nationale. Nous avons chacun nos valeurs et nos divergences de vues.

Mon collègue de Labelle, tout à l'heure, disait que... on parlait qu'il y avait plusieurs endroits dans le monde qui avaient arrimé l'âge de la légalisation du cannabis avec l'âge de la majorité, l'âge à laquelle on a le droit de se marier et l'âge à laquelle on a le droit de poser plusieurs gestes. Et je rappellerai une chose, c'est que ce n'est pas tout à fait ça, puis je pense qu'il y a des endroits aux États-Unis puis il y a des endroits dans les provinces... dans d'autres provinces canadiennes qui ont réfléchi avec un souci de santé publique. Et c'est ce qui les a fait prendre certaines positions. Puis je vous donnerais comme exemples, juste aux États-Unis, la Californie, Massachusetts, Colorado, Washington, Maine, Oregon et New Jersey. Tous ces états-là, l'âge de la majorité est 18 ans. Et pourtant tous ces états-là, pour l'âge légal du cannabis, ils l'ont fixé à 21 ans. Donc, leur souci était nettement différent. Même au niveau du tabac, la Californie, le Maine, l'Oregon, le New Jersey ont décidé d'appliquer l'âge de 21 ans. Puis, pour l'alcool, tous ces états-là ont mis 21 ans.

Donc, on ne peut pas penser que, parce que l'âge de la majorité est 18 ans, on n'a pas le droit, comme gouvernement, de légiférer, de fixer des âges plus élevés lorsqu'on considère que l'enjeu est important, surtout l'enjeu de santé publique. On a eu la légalisation, bien... On a autorisé les jeunes à acheter du tabac dès l'âge de 18 ans, puis on s'est rendu compte qu'au fil des années on investissait énormément d'argent pour faire des campagnes antitabac. Et là, ici, je trouve que ça aurait été une belle occasion de légaliser, de permettre d'acheter du cannabis à 21 ans, qui était l'âge pour lequel beaucoup de groupes s'entendaient, et afin d'éviter d'avoir ces investissements d'argent là pour faire des campagnes anticannabis qui nous auraient coûté quand même beaucoup de sous, parce qu'on n'aura pas le choix de toute façon de faire ces campagnes-là.

Donc, oui, il y a des États qui ont réfléchi à ça. Cette année, on avait des collègues de l'Ontario qui sont venus parler justement de la légalisation du cannabis ici, à l'Assemblée nationale, et même eux autres me disaient qu'au niveau du tabac ils réfléchissent à remettre l'âge à 21 ans. Donc, même si la majorité est de 18 ans, ils font cette réflexion-là pour le tabac. J'imagine qu'éventuellement on va avoir à faire la réflexion au niveau du cannabis.

Souvent, la ministre nous a dit : De toute façon... Parce que les associations médicales s'étaient entendues sur les dangers avant 25 ans, mais il y avait une acceptation, un compromis qu'ils étaient prêts à faire, de permettre l'achat du cannabis à partir de 21 ans. Donc, c'était notre position, qui était sévère. Puis, dans un contexte où c'était une nouvelle légalisation, il m'apparaît qu'il aurait été prudent d'être plus dur au début, quitte à s'assouplir avec le temps. Parce qu'actuellement ce qu'on a constaté avec les rencontres, c'est qu'il n'y a même pas d'étude de faite. Donc, on permet d'acheter du cannabis, de consommer du cannabis à partir de 18 ans sans qu'on ait des fondements, sans qu'on soit appuyé par des études sérieuses. Et, pour moi, je trouve ça un peu malheureux qu'on ait facilité trop vite l'usage du cannabis.

Donc, c'était un peu ma préoccupation première, parce que, pour moi, le gouvernement, sa première priorité, c'est de protéger sa population, protéger la santé de la population, faire de la prévention. Et, lorsqu'on dit qu'on légalise à partir de 18 ans parce qu'on veut sortir les jeunes des milieux criminels puis on veut les protéger, bien, à ce compte-là, il aurait fallu légaliser le cannabis à partir de 13 ans, parce qu'entre 13 et 18 ans il y a plein de jeunes qui prennent du cannabis. Donc, les dangers sont là pour tout le monde. Pourquoi on le légalise à 18 ans puis pourquoi on ne le légalise pas à 13 ans, 14 ans? Donc, les raisons pour lesquelles on va justifier notre décision, je ne trouve pas que c'est pertinent dans cette situation-ci.

Mais, de toute façon, force est de constater qu'on est arrivés quand même à un consensus. Le projet de loi va possiblement être adopté, même si nous, à la Coalition avenir Québec, on va voter contre. Le travail a été fait de façon sérieuse. Mme la ministre a fait... a bien géré ce travail-là avec toute l'équipe ministérielle, avec tous les juristes de l'État, les sous-ministres qui sont venus nous expliquer des choses. Donc, malgré les divergences qu'on avait, on a été capables de se respecter là-dedans et on est prêts. C'était ça qu'on voulait, c'est qu'avant la fin de la session on soit prêts à encadrer cette légalisation qui s'en vient dans les jours et les semaines qui viennent, malgré les divergences sur lesquelles on n'est pas arrivés à s'entendre.

Donc, je vous remercie et je remercie tous les gens qui ont travaillé sur le projet de loi.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Repentigny. Alors, y a-t-il d'autres interventions? Alors, je crois que Mme la ministre voudrait profiter de sa possibilité de répliquer, et vous disposez d'un temps de parole de 20 minutes.

Mme Lucie Charlebois (réplique)

Mme Charlebois : Bien, en fait, Mme la Présidente, je vous remercie, mais je ne prendrai pas les 20 minutes, parce que, vous avez entendu l'ensemble des parlementaires, tout le monde s'entend pour dire : On ne peut pas être d'accord sur tout, mais tout le monde a travaillé dans le même intérêt, soit la santé et la protection de la population, la sécurité de notre population. Tout le monde s'entend pour dire que nous avons travaillé, au cours de ces 136 h 45 min, d'arrache-pied à protéger la santé de notre population, la sécurité de notre population, tout le monde ensemble. On convient, là, qu'il y a certains éléments sur lesquels on ne s'entend pas, on n'est pas d'accord, mais, sur l'ensemble de l'oeuvre, je pense que vous avez vu qu'il y avait quand même du travail qui a été fait en collaboration.

Cependant, je dois vous dire que la seule raison qui me fait me lever, Mme la Présidente, c'est la députée de Vachon. Je suis désolée d'entendre des propos comme j'ai entendu. Ce n'est pas vrai que tout est noir dans la société et ce n'est pas vrai que tout est effrayant, puis, tu sais... J'aurais aimé ça... je le sais, que je n'ai pas le droit de parler de l'absence d'un parlementaire, mais j'aurais aimé ça qu'elle soit là plus souvent, Mme la Présidente, parce qu'elle aurait vu... Parce que, là, j'ai entendu dans son discours qu'on pouvait, à la limite, dire que ça serait bar ouvert, que ça serait pour tout le monde qui veulent profiter d'un blanchiment d'argent, le projet de loi était là pour ça.

Mme la Présidente, je suis obligée de vous dire que je suis en profond désaccord avec elle, je suis en profond désaccord puis je suis certaine que les autres députés qui ont travaillé au projet de loi pourraient dire la même chose. Je vous explique pourquoi. Parce que, quand on a travaillé ce projet de loi là, on a dit : La prémisse numéro un, c'est qu'avant d'acheter du cannabis de qui que ce soit la Société québécoise du cannabis devra s'assurer que Santé Canada aura émis un permis aux gens qui produisent le cannabis. Deuxième élément, Mme la Présidente, c'est qu'en plus de ça le gouvernement du Québec s'est doté de moyens pour s'assurer que justement on ne puisse pas faire par la porte d'en arrière ce qu'on fait par la porte d'en avant, bref, permettre au marché du crime organisé, qui vend actuellement impunément à nos gens, devant notre visage, sans qu'on puisse faire quoi que ce soit parce qu'on n'est pas capables de les prendre... bien, qu'on s'assure qu'ils ne viennent pas par la porte d'en arrière.

Bien, on a toutes pris les mesures pour ça, Mme la Présidente. Il y a l'Autorité des marchés financiers, l'autorité qui est là, qui va s'assurer... c'est l'AMF qui va devenir l'AMP, qui va s'assurer de l'intégrité des producteurs, non seulement des actionnaires qui sont dans ces compagnies-là, mais aussi des sources de financement, au préalable, quand on commence à acheter. Ils vont déjà vérifier... Après que Santé Canada, un, a émis la condition numéro un, donner son permis, deux, il y aura une vérification de faite au préalable par l'AMF, ou l'AMP, quand l'AMP sera créée.

Mais, de plus, Mme la Présidente, savez-vous qu'en cours de transaction, quand on s'entend avec une entité comme la Société québécoise du cannabis, s'il y a un changement d'actionnaire majeur, au-delà de 10 %, ça arrive dans les registres, et il y a une vérification automatique. S'il y a un changement majeur dans le système de financement de cette entreprise-là qui va vendre à la Société québécoise du cannabis, on va le voir. Mme la Présidente, on s'est assurés de la probité des compagnies qui vont vendre du cannabis au Québec.

Alors, moi, je ne peux pas laisser la députée de Vachon dire des choses comme elle a dit, alors que nous avons tous travaillé ensemble, de concertation, pour faire de notre mieux. Ce n'est pas vrai que ce n'est pas un bon projet de loi. Si elle veut voter contre, elle a le loisir de le faire, c'est ça, notre bénéfice parlementaire. Mais, de là à dire qu'on n'a pas pris les moyens, je regrette, mais je ne l'accepte pas, Mme la Présidente, et je tenais à le signaler. Il aurait fallu qu'elle soit là plus souvent. Merci, Mme la Présidente.

• (20 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la ministre.

Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, le projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière, est-il adopté?

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui. Je vous demanderais un vote par appel nominal et, conformément à l'article 223 du règlement, de reporter le vote à la période des affaires courantes du mardi 12 juin 2018.

Vote reporté

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est très bien, le vote sera reporté au mardi 12 juin, après les affaires courantes.

Maintenant, pour la suite de nos travaux, je recède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui. Je vous demanderais, s'il vous plaît, d'appeler l'article 29, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 150

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude
détaillée et des amendements
du député de Rousseau

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 29 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des finances publiques sur le projet de loi n° 150, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions des discours sur le budget du 17 mars 2016 et du 28 mars 2017, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le député de Rousseau.

Il importe de préciser qu'il s'agit d'un contexte particulier, car ces amendements visent à réintroduire dans le projet de loi les articles 6 à 55 proposés initialement par le ministre des Finances et qui en ont été retirés lors de son étude détaillée. Certains de ces articles impliquent le principe de l'initiative financière de la Couronne. En effet, les amendements ajoutant les articles 8, 11, 23, 32, 43 à 45, 48 et 55 imposent une charge aux contribuables en créant une obligation de payer des frais ou des tarifs, en fixant le montant de frais exigibles pour l'obtention de certaines autorisations de la part de la Société de l'assurance automobile du Québec et en prévoyant l'indexation de ces frais.

De même, l'amendement ajoutant l'article 46 au projet de loi est contraire au principe de l'initiative financière de la Couronne, puisqu'il prévoit que certaines sommes collectées par la Société de l'assurance automobile du Québec ne sont pas acheminées au fonds consolidé du revenu, mais deviennent plutôt la propriété de la société. Or, la jurisprudence parlementaire a déjà établi que l'affectation de fonds publics relève exclusivement de l'initiative financière de la Couronne.

Ainsi, si ces articles pouvaient être présentés initialement par le ministre, ils ne peuvent être réintroduits sous la forme d'amendements par un député qui n'est pas membre de l'Exécutif. Par conséquent, les amendements transmis par le député de Rousseau que je viens d'énumérer sont déclarés irrecevables. Les autres amendements qu'il a transmis sont, pour leur part, déclarés recevables.

Alors, y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur ces amendements? Et je crois que M. le ministre des Finances souhaite intervenir, et la parole est à vous.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Très bien, Mme la Présidente. Merci beaucoup. Alors, nous procédons aujourd'hui à la prise en considération du rapport de la Commission des finances publiques suite à l'étude détaillée du projet de loi n° 150, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions des discours sur le budget du 17 mars 2016 et du 28 mars 2017.

Le calendrier législatif étant bien rempli, et dans un souci d'efficacité et de bonne collaboration, et dans l'intérêt général nous avions eu des discussions avec les collègues des oppositions afin de présenter un projet de loi n° 150 revu et allégé qui ne présentait que certaines mesures faisant consensus.

Alors, parmi les mesures retenues, je suis ravi et honoré de pouvoir donner suite aux travaux de la Commission des finances publiques et du plan d'action gouvernemental pour l'équité fiscale, puisque les amendements nécessaires pour assurer la mise en oeuvre des mesures permettant la perception de la taxe de vente du Québec aux services numériques ont été déposés et étudiés lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 150.

Ainsi, les amendements proposés et adoptés par les membres de la commission afin de modifier la Loi sur la taxe de vente du Québec en matière de commerce électronique prévoient modifier le régime de la TVQ afin que les fournisseurs n'exploitant pas d'entreprise au Québec et n'ayant pas d'établissement stable aient l'obligation de s'inscrire auprès de Revenu Québec selon un nouveau système d'inscription aux fins de la perception et du versement de la TVQ applicable sur leurs fournitures taxables de biens meubles incorporels et de services effectués au Québec à des consommateurs québécois. De plus, ces mêmes amendements prévoient que, dans le cas des fournisseurs situés au Canada n'exploitant pas d'entreprise au Québec et n'ayant pas d'établissement stable au Québec, cette obligation d'inscription s'appliquerait également aux fins de la perception et du versement de la TVQ à l'égard des fournitures taxables de biens meubles incorporels... effectués au Québec à des consommateurs québécois.

Cette mesure donne suite à des recommandations de la commission dans le cadre du mandat d'initiative concernant le recours aux paradis fiscaux et met en oeuvre nos actions proposées dans le document intitulé Paradis fiscaux : Plan d'action pour assurer une équité fiscale.

Mme la Présidente, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi n° 150, j'ai également soumis pour étude les mesures suivantes. Des articles concernant notamment l'inspection et la perception de taxes dans le secteur de l'hébergement touristique en vue de permettre... comme des mesures pour permettre au ministère de la Famille d'effectuer des inspections et des enquêtes en vue d'assurer le respect des dispositions de la Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance. Ce projet de loi permettra à Revenu Québec de lui communiquer certains renseignements contenus dans un dossier fiscal.

Aussi, des modifications législatives sont apportées afin de permettre la mise en place d'un programme pour subventionner les organismes qui, dans le cadre de programmes de bénévoles, viennent en aide aux personnes qui ne peuvent remplir la déclaration de revenus.

Le projet de loi prévoit aussi la mise en place de la facturation obligatoire et des systèmes d'enregistrement de ventes dans le transport rémunéré de personnes afin d'assurer l'équité fiscale.

Le projet de loi permettra à l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec de donner accès à un programme de formation de niveau universitaire, d'établir un centre collégial de transfert des technologies et de prévoir, dans les règles budgétaires applicables aux programmes d'études collégiales, l'allocation de subventions à l'ITHQ pour l'établissement et le maintien d'un tel centre.

Le projet de loi apportera les changements législatifs nécessaires au suivi des propriétés achetées et vendues par des investisseurs étrangers au Québec. Nous nous donnerons donc les moyens d'assurer un suivi régulier et complet de l'évolution du marché résidentiel au Québec afin de pouvoir agir au moment opportun.

Enfin, suite à une disposition prévue à notre règlement, comme vous l'avez mentionné, Mme la Présidente, l'opposition officielle a proposé de ramener la section supprimée dans l'étude détaillée concernant la Société de l'assurance automobile du Québec. Ces mesures permettraient d'améliorer la performance de la SAAQ en introduisant notamment la possibilité d'obtenir des plaques d'immatriculation personnalisées, de moderniser les activités de la société en synchronisant le paiement des droits de permis de conduire et des frais d'immatriculation et en mettant en place le renouvellement automatique du permis de conduire et d'immatriculation d'un véhicule routier. Je peux vous confirmer que, comme il s'agit de nos mesures gouvernementales initialement prévues à notre projet de loi, nous serons en faveur de ces ajouts.

Alors, en conclusion, voilà pour les grandes lignes du projet de loi n° 150. Comme vous pouvez le constater, il contient plusieurs mesures importantes et il est de l'intérêt général qu'il puisse être adopté le plus rapidement possible.

Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le ministre des Finances. Et, maintenant, je cède la parole à M. le député de Rousseau.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Oui. Merci, Mme la Présidente. Ça me fait plaisir d'intervenir sur la prise en considération du rapport de la commission sur le projet de loi n° 150. Tout simplement pour que l'histoire soit bien claire pour tous, le projet de loi n° 150, initialement, c'était un projet de loi budgétaire qui donnait suite à deux budgets. Et, dans ce contexte, nous nous étions opposés au principe, puisqu'il découlait de budgets avec lesquels nous étions, au départ, en désaccord.

Cependant, le temps ayant manqué, le ministre, et le député de Granby, et moi-même avons eu des discussions qui ont permis de retirer du projet de loi n° 150 les dispositions que nous trouvions embêtantes, avec lesquelles nous étions en désaccord. Et, par exemple, parmi les dispositions qui ont été retirées, il y avait l'abolition du poste de Commissaire au bien-être, cet observateur indépendant du système de santé, que, de notre côté, en tout cas, nous apprécions et que nous voulions maintenir. Si bien que, quand on retire l'abolition, on maintient le Commissaire à la santé, et nous nous félicitions du fait que le projet de loi, donc, a été modifié, amendé de manière à conserver le Commissaire au bien-être.

• (20 h 10) •

Enfin, vous comprenez le principe. Donc, on a retiré les éléments qui n'étaient pas consensuels et on a maintenu les plus importants, ceux qui étaient les plus pressants, et le résultat, Mme la Présidente, est un projet de loi qui nous convient, de notre côté, avec lequel nous sommes favorables, même. Et, par exemple, le fait qu'on puisse désormais avoir des échanges d'informations qui vont permettre de mieux enquêter sur le crédit d'impôt pour services de garde, ça nous semble quelque chose de souhaitable dans le contexte où les montants accordés en crédits d'impôt on crû de manière spectaculaire ces dernières années. Les MEV dans les taxis, ça a été discuté, et l'industrie est d'accord. Évidemment, le fait de permettre à l'ITHQ d'offrir des programmes universitaires, c'est quelque chose de hautement souhaitable pour cette institution et pour le Québec en entier.

Sur la TVQ, la taxation, donc, du commerce électronique, sur la TVQ, le projet de loi, désormais, va permettre la taxation des biens incorporels, des biens intangibles. Évidemment, nous sommes favorables à cette mesure. J'aurais souhaité que ça aille plus loin et que les biens tangibles aussi, hein, les biens corporels, les livres, les vêtements, les bijoux, les souliers, les ordinateurs... Enfin, les biens corporels, j'aurais souhaité que, pour eux aussi, on s'assure de la taxation du commerce électronique de ces biens. Ça n'a pas été retenu, mais, quand même, il y a une première étape qui a été franchie cette fois-ci, et je pense que c'est une bonne chose.

Finalement, Mme la Présidente, pour ce qui est des mesures concernant la Société de l'assurance automobile du Québec, nous, on croit que c'est une bonne idée de permettre aux Québécois de se procurer des plaques personnalisées. Il s'agit, évidemment, d'une mesure facultative, hein? Les gens qui veulent continuer à utiliser des plaques qui leur sont fournies, qui sont numérotées de manière aléatoire par la SAAQ, bien, si les gens en sont heureux, ça ne changera rien pour eux. Cependant, il existe un nombre de Québécois significatif qui aimerait pouvoir personnaliser sa plaque, et ça permettra donc de satisfaire ce besoin et ce désir de certains Québécois, et ça permettra d'augmenter les revenus de la Société de l'assurance automobile du Québec, et donc de mieux financer les activités de la SAAQ et nos services publics, Mme la Présidente. Donc, c'est quelque chose avec lequel nous sommes très favorables. Et, en fait, c'est quelque chose que nous avions introduit, le gouvernement auquel j'appartenais, à l'époque, mais qui n'avait pas pu obtenir de suites, alors, très heureux de voir que ça va arriver.

Alors, Mme la Présidente, essentiellement, c'est ce que je voulais vous dire, et donc je reçois ce rapport avec satisfaction. Voilà. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie de votre intervention, M. le député de Rousseau. Maintenant, je vais céder la parole à M. le député de Granby.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour d'intervenir sur la prise en considération du projet de loi n° 150, projet de loi qui a été déposé voilà quelques semaines, sinon quelques mois déjà. Le ministre des Finances et son équipe ont eu des idées de grandeur avec le projet de loi n° 141 et le projet de loi n° 150, qui ont été déposés de façon pas simultanée, là, mais 141 avait été déposé quand même avant les fêtes, et, avec le 150, comme mon collègue de Rousseau l'a mentionné, calendrier qui nous amenait à devoir prendre des décisions, et je pense que le ministre l'a bien mentionné, on a réussi à trouver un consensus avec les oppositions, avec nous, pour être capables de trouver une voie de passage pour que ce projet de loi puisse être adopté. Mais il faut comprendre, à la base, que ce projet de loi amène des mesures fiscales, quand même, du budget. Vous comprendrez que nous avons voté contre ce budget. Oui, il y a une forme de consensus pour les points que nous allons adopter ou voter, mais à la fin, quand même, nous restons sur notre position concernant notre vote initial.

Il est certain que, sur les points qui ont été mentionnés par mon collègue de Rousseau et le ministre des Finances... Je vous énumère aussi quelques-uns de ces points, là. Échange d'informations entre l'Agence du revenu et le ministère de la Famille pour certains crédits d'impôt et la CNESST.

L'implantation d'une solution technologique exploitant les possibilités d'enregistrement des ventes dans le secteur du transport rémunéré, donc on parle de MEV dans les taxis au Québec. Je pense que c'est une bonne chose, tout comme on l'a fait dans les restaurants dans les dernières années.

L'encadrement de l'hébergement touristique, un point extrêmement important. Je pense que beaucoup de gens ont été interpelés par l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec pour être capables de donner plus de pouvoirs à l'institut, leur donner accès à un programme universitaire, d'avoir des diplômes qui seront équivalents aux autres endroits dans le monde qui donnent ces mêmes formations. Donc, on comprendra qu'à Trois-Rivières, en Mauricie, c'est important, cet institut. Et, à quelque part, d'être capable de donner aujourd'hui ces pleins pouvoirs à cet institut, qui est unique au Québec, bien, je pense que c'est de bonne foi que nous le faisons aujourd'hui pour être capables, encore une fois... Comme Mme Frulla était venue nous le mentionner avec son équipe, de donner aujourd'hui plus de pouvoirs additionnels, c'est une reconnaissance importante qu'on leur donne aujourd'hui pour ces étudiants et pour l'institut au complet.

On parle aussi du Fonds pour la promotion sur les saines habitudes de vie, le Fonds pour le développement du sport et de l'activité physique. On sait très bien qu'ici, comme parlementaires, nous sommes interpelés plus souvent qu'autrement par nos municipalités, nos villages, nos villes qui souhaitent obtenir de l'argent de ce fonds, qui est immensément populaire, pour être capables de bâtir arénas, terrains de tennis, terrains synthétiques pour soccer, football, et j'en passe. Donc, on sait que ce fonds, qui était à hauteur de 50 millions dans les premières années, a été augmenté par le ministère des Finances. Donc, on comprendra que, pour ces municipalités, ces élus, bien, c'est extrêmement important de voir et de reconduire ce fonds.

On a aussi... Bon, le projet de loi va nous amener aussi enfin à une loi sur la taxe de vente au Québec pour ce qui est du commerce électronique. Pour les produits intangibles, bien, on pourrait l'appeler la «taxe Netflix». On a entendu parler de cette fameuse taxe, là, dans les dernières semaines, les derniers mois, le fédéral qui ne voulait pas embarquer avec nous, le ministre des Finances qui a dit : J'irai de l'avant. On peut comprendre que c'est important pour... Quand je parle de l'industrie, pour les concurrents comme Illico, comme Tou.tv qui voyaient Netflix travailler dans un contexte où ils ne chargeaient pas les taxes, hein, vous comprendrez que, pour les produits intangibles, je pense que c'est un pas en avant important pour la concurrence.

Et, dans ce cas-ci, de voir aujourd'hui le ministre ne pas aller plus loin que de vouloir essayer de percevoir la taxe pour les produits tangibles... Comme mon collègue l'a mentionné, que ce soient tous les produits qu'on consomme, qu'on achète sur Internet, les souliers, peu importe, le linge, et autres, produits électroniques, bien, vous comprendrez que, plus souvent qu'autrement, certains de ces produits ne sont pas taxés. Alors, ce sont des pertes, oui, de revenus qui sont extrêmement importantes pour le gouvernement. Si je ne me trompe pas, on parlait d'à peu près 270 millions de dollars. Donc, je posais la question, je me souviens, au ministre des Finances, qui me disait : Bien, avec l'Agence frontalière du Canada, on va essayer d'aller chercher, par les colis qui entrent à la pelletée, vous comprendrez, à Montréal... bien, d'aller chercher le maximum de taxes. Je ne pense pas que ça va être évident de le faire dans la prochaine année, mais, bon, il y aura des ressources additionnelles avec l'agence, et tout ça, pour être capable d'améliorer la perception de ces taxes et de ces produits qui vont transiter par le Québec. Mais, au-delà de tout ça, on peut dire que c'est un pas dans la bonne direction quand même.

Et, dans ce contexte, il y a les amendements aussi pour la SAAQ qui ont été déposés par mon collègue de Rousseau. On peut se réjouir, je pense, que pour beaucoup d'automobilistes... Même moi, j'ai été interpelé par certains de mes citoyens qui me disaient : À quand le jour au Québec où on pourra, finalement, acheter une plaque automobile, et indiquer le numéro et le nom qu'on souhaite, puis payer pour, comme plusieurs États américains ou l'Ontario l'ont permis dans les dernières années. Alors, je leur dis : Enfin, vous aurez cette possibilité, c'est particulier... mais de payer, si vous le souhaitez, pour avoir une plaque identifiée à... peu importe, à ce que vous souhaitez. Donc, vous comprendrez qu'on ne sera pas contre l'adoption de ces amendements.

Alors, voilà, Mme la Présidente, je mets fin à mon intervention pour cette prise en considération, et on se revoit demain pour l'adoption finale. Merci.

Mise aux voix des amendements

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Granby. Maintenant, y a-t-il d'autres interventions? Alors, il n'y en a pas. Alors, les amendements proposés par M. le député de Rousseau sont-ils adoptés?

Des voix : Adopté.

Mise aux voix du rapport amendé

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Le rapport, tel qu'amendé, de la Commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 150, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions des discours sur le budget du 17 mars 2016 et du 28 mars 2017, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Nous poursuivons nos travaux, et je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

• (20 h 20) •

M. Tanguay : Oui. Merci, Mme la Présidente. Je vous prierais d'appeler l'article 30, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 176

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude
détaillée et des amendements
du député de Gouin

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : À l'article 30 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives afin principalement de faciliter la conciliation famille‑travail, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article n° 252 du règlement par M. le député de Gouin.

Alors, ces amendements sont déclarés recevables. Y a-t-il des interventions? Oui. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre du Travail.

Mme Dominique Vien

Mme Vien : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Très contente d'être ici avec vous ce soir pour la prise en considération du projet de loi sur la révision des normes du travail. C'est comme ça qu'on a eu l'habitude d'appeler ce projet de loi très important. Vous savez, la loi sur les normes du travail, c'est une loi d'ordre public qui a été mise en vigueur en 1980, qui n'a connu que deux grandes modifications, en fait en 1990 et en 2002. Alors, de ce côté-ci de la Chambre, bien sûr, les collègues ont été bien d'accord avec ça. On voit l'évolution du marché du travail, on voit les familles aussi qui se modifient. Alors, on a, évidemment, pensé que c'était une excellente idée de pouvoir procéder avec un aménagement nouveau, un oeil nouveau que l'on porterait, tout le monde ensemble, ici sur la Loi sur les normes du travail. Il faut se rappeler ici aussi et se remettre dans le contexte du Rendez-vous national sur la main-d'oeuvre en février 2017, où le premier ministre du Québec a clairement indiqué son intention, là, d'avoir une révision de la Loi sur les normes du travail. À l'époque, c'était une révision ciblée, mais, ma foi, c'est devenu quelque chose à plus grande portée. Je pense que c'est une révision qui a été plus grande que ce que l'on anticipait au départ.

Au fil des mois, une quarantaine de groupes ont été rencontrés par les gens chez nous, les gens du cabinet, et différentes modifications, donc, ont été apportées. Nous avons eu, comme j'ai eu l'occasion de le dire au cours d'une présentation ici, au salon bleu, des consultations particulières qui ont eu lieu. C'était au mois de mai, Mme la Présidente. Ce sont six journées qui ont été réservées pour entendre 32 groupes. 60 mémoires ont été entendus. Essentiellement, Mme la Présidente, ce que nous faisons ce soir, c'est donc de présenter le dernier segment du cheminement, si vous voulez, du projet de loi n° 176.

Alors, de quoi il est question à l'intérieur de ce projet de loi, Mme la Présidente? Alors, pour mémoire, pour se le rappeler, là, un projet de loi qui a été déposé... Bonsoir, M. le Président. Vous avez changé un peu d'allure. Je ne passerai pas de commentaires. Alors, bonsoir, M. le Président. On est, vous le savez, sur la prise en considération du projet de loi n° 176, un projet de loi qui a été déposé ici le 20 mars dernier. Alors, qu'est-ce qu'on fait exactement? On vient encadrer les agences de placement de personnel et les agences de recrutement de travailleurs étrangers temporaires. C'est important, M. le Président. C'est un domaine qu'on a appris à connaître, on s'est aperçu qu'il y avait différents éléments qui étaient troublants à l'intérieur des opérations de ces types d'agences là, M. le Président, et on a décidé, donc, de venir encadrer tout ça. Comment? Par l'émission d'un permis qui sera émis par la Commission des normes, de l'équité salariale et de la santé et sécurité au travail, d'ailleurs, la CNESST, qui aura beaucoup de boulot au cours des prochains jours, des prochaines semaines, puisque nous avons de grandes attentes par rapport à cette grande organisation là, notamment pour l'organisation, la mise en application du règlement, hein, qui va venir, si vous voulez... Ce qui est la base de l'émission des permis, c'est la CNESST qui va s'en occuper.

Bien sûr, les interdictions des disparités créées en fonction de la date d'embauche en ce qui a trait aux régimes de retraite et également de d'autres avantages sociaux, c'est important. Au Québec, on est figure de proue à ce niveau-là, M. le Président. Pas besoin de vous dire qu'on est les seuls aussi au Canada à agir de la sorte. On a fait un choix. On a fait un choix à l'effet que les disparités de traitement qui étaient existantes actuellement dans les conventions collectives, notamment, qu'on n'irait pas jouer là-dedans, qu'on ne permettrait pas une rétroactivité pour respecter ce qui avait été négocié à l'époque, donc, entre deux parties. Il y a eu du donnant, donnant, comme on dit par chez nous. Alors donc, il nous apparaissait un peu périlleux d'aller jouer là-dedans. Mais ce qu'on dit, à la date de sanction de la loi, il ne sera plus possible de permettre ce genre de disparités.

On vient, bien sûr, renforcer toute la question du harcèlement psychologique en venant spécifier nommément tout ce qui a trait au harcèlement sexuel, que c'est chose, bien sûr, interdite. On comprenait que c'était inclus à l'intérieur du harcèlement psychologique, mais on vient nommément le dire pour être encore plus clair. Et ce qu'on vient ajouter, M. le Président, c'est l'obligation, pour chaque entreprise, de se munir d'une politique contre le harcèlement sexuel et de la diffuser.

On a aussi prévu, et ça, c'est grâce à des amendements qui ont été apportés par des collègues notamment... Je ne passerai pas à travers toutes les nouveautés, mais la loi sera révisée aux sept ans, M. le Président, là, je pense que c'est une bonne chose. Puis on a regardé l'ensemble du corpus législatif, dans plusieurs lois, c'est marqué cinq ans, hein, on révise la loi aux cinq ans, mais il nous semblait, nous, que cinq ans, c'était un peu serré, là, pour voir les effets des éléments que nous apportions. Alors, on se donne un bon délai, sept ans, pour faire en sorte qu'on soit bien en mesure d'avoir une bonne lecture de ce que nous amenons puis voir les effets sur le terrain.

Il y a une chose que j'ai oublié de dire et c'est très important, c'est qu'actuellement, à la CNESST, on a 90 jours pour porter plainte. Dorénavant, ce qui sera permis, c'est deux ans. Donc, on allonge le délai pour permettre aux victimes de pouvoir porter plainte et d'avoir toute la latitude possible pour le faire également.

Bien sûr, on vient ajouter du temps pour les travailleurs, les familles, trois semaines de vacances supplémentaires après trois années de service continu, plutôt que les cinq ans, actuellement, qui sont nécessaires.

On vient aussi accorder au travailleur un droit de refus de travailler s'il n'a pas été informé cinq jours à l'avance de son horaire de travail. Évidemment, il y a des exceptions à ça, tout le monde le comprend bien. Si, par exemple, vous êtes dans le domaine agricole, si vous êtes dans des milieux où c'est difficile de prévoir à l'avance, alors, bien sûr, on comprend les situations à ce niveau-là.

Il y a 10 jours de congé qui existent actuellement, M. le président, et on vient de permettre qu'il y en ait deux... En fait, ce n'est pas des congés pour faire des loisirs, là, ce sont des congés soit pour prendre soin de quelqu'un de la famille ou encore pour soi-même si on est dans un contexte de maladie. Donc, deux journées seront rémunérées dorénavant, et la protection du lien d'emploi est garantie à ce moment-là.

On vient aussi permettre d'accorder un congé compensatoire au salarié lorsqu'un jour férié ne coïncide pas avec son horaire habituel de travail en remplacement de l'indemnité. Ça aussi, c'est de la souplesse, M. le Président, que nous apportons dans le monde du travail, de la même façon que nous allons permettre l'étalement des heures de travail autrement que sur une base, donc, hebdomadaire. On va le permettre sur une plus longue portée.

Et, bien sûr, cette reconnaissance du proche aidant qui est une nouveauté, une première dans le corpus législatif québécois, qui est une bonne nouvelle. Donc, si vous vous absentez pour quelqu'un, un ami, un colocataire avec vous, que vous êtes un proche aidant, vous êtes reconnu par un professionnel de la santé qui appartient à un ordre professionnel, eh bien, vous pourrez vous absenter du travail comme les autres parents s'absentent, là, pour leur enfant ou un parent, donc, proche, et vous ne serez pas pénalisé au niveau de votre lien d'emploi, M. le Président.

Alors, essentiellement, c'est les grandes lignes de ce que nous avons adopté, tout le monde ensemble, M. le Président. J'en suis évidemment très, très fière, de ce projet de loi là. C'est un projet de loi qui a du coeur. C'est un projet de loi qui est progressiste. C'est un projet de loi qui nous positionne, je pense, au bon endroit. C'est du temps aux familles. C'est du temps aux travailleurs. C'est de la compassion. C'est aussi du temps, de la souplesse que l'on donne aux employeurs pour bien gérer leur entreprise. Les temps changent, le monde du travail change également. Alors, employés comme employeurs doivent s'adapter, et je pense qu'on vient répondre ainsi aux uns et aux autres, M. le Président.

Alors, je ne serai pas beaucoup plus longue que ça, puisque nous pourrions avoir une suite ce soir. Je me garderai donc des commentaires pour un peu plus tard. Merci beaucoup, M. le Président.

• (20 h 30) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci. Alors, je vous remercie de votre intervention, Mme la ministre. Et, pour la poursuite du débat, je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. M. le député, à vous.

M. Guy Leclair

M. Leclair : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, à mon tour pour la prise en considération du projet de loi n° 176 sur les normes du travail. Bien, bien entendu, la ministre vient de faire un topo, un tour du jardin du projet de loi. Je tiens à réitérer, M. le Président, que je l'ai dit dès le départ, je le répète ce soir, je trouve dommage qu'on ait eu peu de temps pour légiférer sur un projet de loi des normes du travail qui fait plus de 20 ans qu'il demandait d'avoir une mise à jour. On aurait pu toucher plusieurs autres aspects. Comme le temps manquait, donc, on a resté dans le cadre de ce qu'il y avait exactement dans le projet de loi, mais j'aurais aimé qu'on regarde plus large les normes du travail.

Je pense qu'on aurait pu faire un travail plus sérieux, parce que, les normes du travail, comme la ministre l'a dit elle-même, elle a été renouvelée seulement que deux fois depuis le début de son existence. Puis c'est tellement vrai que ce n'est pas suffisant que la ministre a quand même dit : Bien, on va tenter, à chaque sept ans, de regarder, de faire un rapport sur les normes du travail et tenter de réouvrir les normes du travail pour faire des ajustements, vu que, surtout dans les deux dernières décennies, le monde du travail a passé du noir au blanc, parce qu'il y a tellement une grande évolution dans le monde du travail. Donc, je crois qu'on aurait mérité de prendre encore plus de temps pour que les groupes s'expriment encore plus et qu'on puisse aller plus large dans ce contexte-là.

Mais, ceci étant dit, M. le Président, bien entendu, les normes du travail, ce qu'il y a dans le projet de loi, on ne peut pas dire que c'est un recul. Bien au contraire, c'est une avancée. C'est un avancement pour les travailleurs, travailleuses du Québec. Plusieurs gains ont été faits. Bien entendu, les PME, les entreprises, eux, crient à l'aide, parce qu'eux disent que le fardeau fiscal vient d'augmenter de plus ou moins 600 à 700 millions pour eux, puis eux s'attendaient à un allègement fiscal de la part du gouvernement, peut-être pas directement dans les normes du travail, mais au moins dans un autre aspect, avec les collègues de la ministre soit au Revenu soit la ministre aux PME pour voir ce qu'on peut faire pour alléger ces gens-là. Eux aussi trouvent les temps durs puis disent : Écoutez, c'est bien beau, donner deux journées de congé férié, ça a certains avantages, oui, c'est bon pour la conciliation travail-famille, mais, en bout de piste, pour eux c'est des coûts, c'est des coûts qui viennent se rajouter à ce qu'ils ont déjà.

Beaucoup de gens nous ont parlé de la paperasse, tout ce qui est la paperasse administrative. Les gens se plaignent, surtout les plus petites entreprises. Lorsqu'on parle d'une grosse organisation, c'est complètement un autre monde, M. le Président. Ces gens-là ont vraiment l'équipe pour être capables de faire face à ce qu'on demande à tous les niveaux. Mais, quand on parle de plus petites entreprises, des plus petites PME qui, eux, ont la chance de tenter de faire affaire avec le MIDI pour essayer d'avoir des subventions et faire des échanges avec d'autres pays, bien, eux disent : Bien, on ne peut même pas y penser, le fardeau fiscal est beaucoup trop lourd pour nous. Alors, ils s'attendaient à avoir des allègements. Malheureusement, ils ne semblent pas avoir été entendus de la part du gouvernement qui est en place actuellement.

Alors, les PME, je le dis encore une fois, je pense qu'on aurait aimé, en parallèle, entendre quelque chose pour un allègement pour ces gens-là, parce qu'eux se sentent complètement délaissés, bien que, lorsqu'on parle des normes du travail, bien entendu, le coeur de ça, c'est d'augmenter le niveau et la qualité pour nos travailleurs et travailleuses du Québec. Ça fait qu'indirectement, c'est sûr, via les normes, on n'est pas capables de compenser, mais le gouvernement aurait pu compenser via d'autres projets de loi dans d'autres ministères.

Alors, moi, je vous dirais, la plus grande surprise de ce projet de loi là, c'est de venir dire : La disparité de traitement, il faut que ça cesse. Bien entendu, tout le monde est d'accord, la disparité de traitement, il faut que ça cesse. Il y a eu des motions unanimes à l'Assemblée nationale. On a dit : Il faut que ça cesse, la disparité de traitement. Il y a des gens qui se sentent discriminés juste à cause qu'ils ont une date d'embauche différente des autres. La ministre vient corriger ça, mais elle vient aussi légaliser cette discrimination-là, parce qu'elle dit : Ce qui s'est fait dans le passé, dans les dernières années, bien, on le laisse comme ça. Alors, il y a des jeunes, des groupes de jeunes qui ont venu en commission parlementaire nous dire : Bien, nous, on s'attend à ce qu'il n'y en ait plus, de disparité de traitement, alors que la ministre, dans son projet de loi, dit non. À partir de la déposition du projet de loi, qui sera accepté, à partir de là, il n'y aura plus de disparité de traitement. Mais, ceux qui existent, on vient les légaliser. Ça fait que moi, je trouve ça encore pire. Alors, moi, j'aurais aimé, comme la plupart des groupes ont suggéré, toutes les oppositions l'ont suggéré aussi, de dire : Donnons un laps de temps, que ça soit à la prochaine convention collective... On aurait pu être encore plus large que ça et dire : On se donne un maximum de sept, huit ans pour dire qu'il n'y en aura plus, de disparité de traitement, dans aucune convention collective. Malheureusement, la ministre et le gouvernement actuel ont pris cette position-là, et on va vivre avec ça jusque dans le futur pour voir si c'est vivable, si c'est tenable.

Alors, bien entendu, les agences de placement, les agences de placement, M. le Président. Je pense que la plupart des collègues autour de la table, autant gouvernementaux que les oppositions... bien, je pense que tout le monde, on a été très, très surpris de voir les agissements de certaines agences. Bien entendu, on ne peut pas toutes les mettre dans le même panier, mais, certaines agences, on se croirait en 1920, parfois, au Québec, malgré que nous sommes en 2018. Alors, je crois que, les interdictions et les obligations d'avoir un permis d'attribué, une possibilité de retirer des permis et de faire fermer certaines agences parce qu'elles ne suivent même pas les normes minimales du travail, donc, je crois, ça, c'est une avancée, encore une fois, pour les travailleurs les moins bien nantis de notre société, parce que, il faut se le dire franchement, M. le Président, lorsqu'on dit qu'on se bataille avec les normes du travail, c'est le minimum qu'on s'attend d'avoir lorsqu'on travaille au Québec. Alors, il y a des gens qui n'ont même pas ce minimum-là, alors c'est encore triste d'apercevoir ça aujourd'hui en 2018.

Alors, pour la prise en considération, bien entendu, nous serons pour cette prise en considération là, M. le Président. Et on aura la chance, un peu plus tard, de faire des remarques finales. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat, je reconnais maintenant M. le député des Chutes-de-la-Chaudière pour son intervention toujours sur le même rapport. À vous, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard : Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole à la prise en considération pour le projet de loi n° 176, matière qui m'intéresse grandement, M. le Président. J'ai déposé deux projets de loi durant la dernière année : un qui traitait de la reconnaissance des proches aidants — on le traite dans le projet de loi de la ministre — et aussi il y avait un autre projet de loi sur les clauses de disparité. Cette fois-ci, là, la ministre le touche mais de façon très, très légère, et, en tout cas, tantôt je vais l'expliquer.

Dans un premier temps, je tiens à remercier la ministre, les parlementaires et toutes les personnes qui ont contribué à nos travaux, qui se sont bien déroulés, l'équipe de fonctionnaires à qui nous avons causé peut-être quelques maux de tête, là, par nos interventions, par les recherches, par les propositions que nous avons amenées durant l'étude du projet de loi.

Oui, M. le Président, c'est un projet de loi qui propose certaines avancées, certaines avancées pour la protection des travailleurs. Et il faut se rappeler que, comme le disaient tout à l'heure Mme la ministre et mon collègue de Beauharnois, depuis 2002 il n'y avait pas eu de changement. Le monde du travail a évolué beaucoup depuis les 16 dernières années, et ça va de plus en plus vite, les changements dans le monde du travail. Donc, on se serait attendus... en tout cas, moi, je m'attendais à une véritable réforme, parce que j'étais au rendez-vous national en janvier 2017 et les propos que j'avais entendus du premier ministre et de la ministre étaient... pour moi, j'avais saisi que c'était une grande réforme, et là on se ramasse avec une révision. C'est mieux que rien. C'est mieux que rien, parce que, lorsqu'on est habitués à un gouvernement qui ne bouge pas beaucoup, une avancée, c'est déjà quelque chose de positif.

Une voix : ...

M. Picard : C'est bon? M. le Président, nous nous étions donné, lors de la prise... Lors de la première étape, on avait dit : On va aller en commission parlementaire, on va travailler correctement, on va bonifier le projet de loi, et c'est ce qui s'est fait. On a travaillé de façon assidue et on a eu de bonnes discussions avec la ministre, avec tous les parlementaires et disons que nous avons eu une étude détaillée qui était très efficace.

Nous avons entendu aussi lors des consultations, là... il y avait une idée générale qui s'est dégagée, là, peut-être revoir un peu le rôle de la CNESST, parce que, il faut être conscient, depuis plusieurs années, la CNESST met beaucoup d'emphase sur les accidents de travail, mais aussi il ne faut pas oublier les normes du travail, parce qu'on s'est aperçus, lors des consultations, en discutant avec les témoins que, oui, on a des normes, mais on a peut-être de la difficulté à les faire respecter. Souvent, c'est des jeunes qui sont assujettis aux normes du travail, puis ils ne connaissent pas les droits puis même, des fois, ils ont peur de revendiquer leurs droits, donc je pense qu'il y a un travail à faire. Aussi, il y a même quelqu'un qui a dit, là, qu'il y avait six inspecteurs pour les normes pour la grandeur du Québec et ils sont tous basés à Montréal, ça fait qu'ils ne sont pas sur le terrain beaucoup. En tout cas, ça, ça a été dit par quelques personnes.

Autre commentaire sur la CNESST, c'est au niveau de... lorsque des gens appellent, il y a peut-être un manque de formation auprès du personnel, pas de formation académique, mais plutôt de savoir-être, parce qu'il a été dit à quelques reprises que des gens qui appellent pour du harcèlement ne se sentent pas écoutés ou crus. Un, les gens qui dénoncent du harcèlement, c'est... ça prend déjà beaucoup de courage de le faire. Si on ne se sent pas écouté, là... Mais la CNESST fait un bon travail, mais il faudrait peut-être qu'il y ait une préoccupation sur le service pour améliorer le service.

• (20 h 40) •

Dans le projet de loi, il y avait des bonnes choses, inclure le harcèlement sexuel. En incluant le harcèlement sexuel, on lance un message clair comme de quoi le harcèlement sexuel, c'est inacceptable au Québec. Tantôt, la ministre indiquait : Oui, j'ai déposé... On a eu un amendement pour modifier le délai pour que les gens puissent porter plainte. Il était de 90 jours. Après discussion, on a obtenu que ça soit maintenant deux ans. C'est très important. On se colle sur le même délai que la charte. Là, ce qu'il faut comprendre, lorsqu'il y a du harcèlement entre employés-employés, c'est la charte qui s'applique, la Charte des droits. Lorsque c'est employés-employeurs, bien là, c'est la CNESST. Donc, on a le même délai pour porter plainte. On comprend, parce que, lors des discussions, il a été dit : Bien, il faut porter plainte le plus rapidement possible. Mais il faut toujours se mettre dans la peau de la victime : ce n'est pas évident de porter plainte rapidement ou il y en a que ça va être très rapidement puis il y en a que ça prend un certain cheminement. On a vu, dernièrement, des victimes qui, après plusieurs années, sont sorties dans les médias. Donc, pour moi, là, c'est un gain important, on donne du temps, on s'assure d'échapper le moins de cas possible de gens qui ont subi du harcèlement.

Un autre ajout que nous avons introduit dans le projet de loi. Le projet de loi, il reconnaissait les violences conjugales. On est venus rajouter, suite à une recommandation de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, de préciser des violences à caractère sexuel. On pouvait penser que, dans la violence conjugale, ça incluait les violences à caractère sexuel, mais, en le précisant, on clarifie vraiment pour les personnes leurs droits.

Autre sujet, les proches aidants. Oui, on est venus reconnaître les proches aidants. J'avais déposé un projet de loi. On a repris des grands bouts du projet de loi. L'essentiel est là pour l'instant. Mais, dans le projet de loi de la ministre, on a introduit un formulaire, là, qui va être émis par quelqu'un du réseau... je vais dire, du grand réseau de la santé. Il faut quand même être aux aguets pour s'assurer, là, qu'il n'y aura pas de frais éventuels puis voir comment ça va se gérer, ces choses-là. On a sensibilisé la ministre, qui s'est dit aussi qu'elle allait être aux aguets concernant ça.

Les agences de placement, drôle de découverte, là. Les agences de placement, pour moi, là, je n'imaginais pas qu'est-ce que j'ai entendu. Il y a des conditions de travail, là, entre guillemets, inhumaines qu'on ne doit pas accepter au Québec en 2018. Là, dans le projet de loi, on prévoit qu'il va y avoir des permis. C'est correct. Donc, on va venir les encadrer, on va s'assurer que les bonnes agences perdurent et celles qui ne font pas le bon travail disparaissent. Dans les agences de recrutement des travailleurs étrangers, il y a un règlement, là, qui va être révisé pour les conditions d'hébergement des gens, parce que, malheureusement, j'ai appris, parce que, bien honnêtement, je n'étais pas au courant de ces choses-là... des gens qui vivent, là, peut-être 10, 12 personnes, dans un trois et demie avec une salle de bains pour 10, 12 personnes. C'est inacceptable, là, donc, ça aussi, là. Mais là le règlement va être en révision dans les prochains mois, parce que c'est important, M. le Président. Au niveau des agences de placement, il y en a entre 800 et 1 000 au Québec, donc c'est important qu'elles soient encadrées. Un autre point important que nous avons soulevé aussi pour les agences de placement, là : Lorsqu'une agence de placement va se faire retirer son permis, il se passe quoi avec les employés? Qui les avise, là, qu'ils n'ont plus d'employeur, là? Mais, en tout cas, on a sensibilisé la ministre. Les fonctionnaires sur place étaient là aussi pour prendre bonne note de nos recommandations.

C'est certain que ma grande déception — M. le Président, vous ne serez pas surpris — c'est les clauses de disparité, on vient légaliser ce qui était illégal. Mais il y a toujours quelque chose de positif, même dans les choses négatives comme ça, puis c'est un message que... puis ça adonne bien, on va être en période préélectorale bientôt. Et il faut faire toujours attention au vocabulaire libéral, parce que c'est important, parce qu'on a dit : On va abolir les clauses orphelin, mais, en pratique, ce n'est pas ça, on légalise ce qui était inacceptable, parce que les clauses orphelin habituellement touchent 150 000 personnes, mais, avec le projet de loi, tous les nouveaux travailleurs vont avoir des clauses orphelin jusqu'à tant que les bonnes clauses, que je vais dire, n'existent plus. Ça veut dire dans 20, 30 ans. Donc, on vient légaliser, donc c'est important, mais c'est le côté positif, faire attention aux promesses du gouvernement libéral, parce que les mots comptent beaucoup puis souvent ils ont des significations qu'on ne peut pas imaginer. Et, quand je dis ça, j'ai en tête un troisième lien qu'on a entendu en 2014, mais on ne parlera pas de ça ce soir, là. Mais c'est important, les gens, de bien saisir qu'est-ce que le gouvernement propose.

Des voix : ...

M. Picard : Y a-tu un problème? Non.

En terminant, M. le Président, ça a été dit, oui, on a obtenu, bien, avec des discussions, là, que la loi soit révisée. Comme je disais d'entrée de jeu tout à l'heure, le monde du travail change rapidement, et on ne peut pas attendre 10, 12, 15 ans avant de modifier... puis je pense que le prochain gouvernement devra même se mettre à la tâche beaucoup plus tôt qu'avant les sept ans.

En conclusion, une très bonne collaboration, une belle atmosphère de travail, et je pense qu'on va réussir le but qu'on s'était donné. Je crois que, dans quelques minutes, on devrait adopter le projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : On vous remercie de votre intervention, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Et, toujours pour la poursuite du débat sur le rapport, je cède maintenant la parole à M. le député de Gouin pour son intervention.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je suis très content d'intervenir à ce stade-ci du cheminement du projet de loi, parce que je vais vous confesser que j'ai fait partie de ceux qui, jusqu'à tout récemment, ne croyaient pas qu'on s'y rendrait, parce que le projet de loi a été déposé bien plus tard que ce à quoi tout le monde s'attendait. On a bien eu peur de ne pas avoir le temps. On a réussi à l'étudier et à l'améliorer un peu dans les très courts délais que nous avions, mais, comme le disait le collègue de l'opposition officielle, ça s'est fait au prix de plusieurs débats qu'on aurait pu et qu'on aurait dû avoir et qui ont été sacrifiés par cette précipitation imposée par les circonstances.

On aura l'occasion d'intervenir à nouveau tout à l'heure, M. le Président, alors, pour le moment, je vais me concentrer sur les quatre amendements que j'ai déposés, quatre améliorations que Québec solidaire souhaite voir apportées au projet de loi, et on les redépose parce qu'on est encore... on a encore espoir, en fait, que la ministre du Travail va entendre raison et va se rendre aux arguments de Québec solidaire, qui, comme à l'habitude, M. le Président, sont d'excellents arguments.

Alors, les deux premiers arguments que j'ai déposés portent sur la situation des jeunes sportifs. Vous savez qu'à l'article 1 de ce projet de loi on vient exclure de l'application des normes du travail les jeunes athlètes qui fréquentent une ligue sportive et dont l'appartenance à cette ligue est conditionnelle à la poursuite d'un parcours de formation scolaire. M. le Président, cet article-là vient trancher de manière brusque un débat qui est en cours depuis longtemps dans le milieu du hockey au Québec sur le statut de ces jeunes hommes qui travaillent plusieurs dizaines d'heures par semaine au sein d'équipes de la ligue junior majeur du Québec, des équipes qui sont des entreprises privées, dont certaines font des profits. Je vous donne trois exemples : on peut penser aux Remparts de Québec, qui appartiennent à Québecor; aux Wildcats de Moncton, qui appartiennent à la grande famille Irving; aux Sea Dogs de Cap-Breton, qui, eux, appartiennent à la famille McCain. C'est des entreprises profitables qui rémunèrent l'ensemble de leurs salariés. Or, le projet de loi déposé par le gouvernement libéral va venir exclure certains jeunes employés de l'application de cette norme, de cet ordre public de direction. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, qu'il y a des recours collectifs en cours en Ontario et en Colombie-Britannique, il y en a un en préparation au Québec.

Ce n'est qu'une question de temps avant que cette loi-là ne soit contestée devant les tribunaux. Et on a tenté, en commission parlementaire, d'initier un dialogue avec la ministre sur cette question-là. Il y a plusieurs voix qui se sont fait entendre dans la société civile, également dans le monde du sport pour demander à la ministre de suspendre l'amendement et de continuer ce débat, qui est si important pour plusieurs régions du Québec. Malheureusement, la ministre, jusqu'à maintenant, n'a pas entendu ces arguments-là. Mais je vais redéposer, et je le fais à l'instant, donc, cet amendement de Québec solidaire qui propose tout simplement d'abroger le paragraphe en question du projet de loi pour se donner le temps d'examiner réellement la situation de ces jeunes hommes là et se donner le temps de consulter tous les partenaires, tous les acteurs dans ce dossier-là, puis d'arriver avec un encadrement légal spécifique à ces jeunes-là. On peut faire mieux que de les exclure des normes du travail. Les normes du travail, M. le Président, c'est un ordre public de direction, c'est une loi de protection sociale fondamentale.

Ça prend d'excellentes raisons pour exclure une catégorie de la population de l'application d'une loi comme celle-là. Ces raisons-là, elles ne sont pas rencontrées. La ministre a eu assez peu de réponses en commission parlementaire, lorsque je lui ai demandé les motivations profondes qui motivaient cette exclusion-là, à part de dire que peut-être certaines équipes n'auraient pas les moyens. Encore une fois, la ligue junior majeur du Québec a toujours refusé d'ouvrir ses livres. Alors, très, très dur à dire, en fait, quelle équipe n'aurait pas les moyens.

• (20 h 50) •

Malheureusement, ce débat-là, nous ne l'aurons pas, parce qu'un projet de loi qui vient avoir un effet discriminatoire sur les jeunes sportifs du Québec va peut-être être adopté si l'amendement que je dépose à l'instant n'est pas accepté par la ministre.

Mais on lui donne une deuxième chance, M. le Président, parce que je dépose également un deuxième amendement sur ce thème-là qui conserve le paragraphe en question mais qui instaure un comité consultatif pour traiter de cette question-là et tenter, dans les prochains mois, les prochaines années, de trouver une solution plus durable. Je dépose également ce deuxième amendement là.

Mon troisième amendement, M. le Président, porte sur les clauses de disparité de traitement. Quelle déception, M. le Président, quelle déception à la lecture de ce projet de loi là! Il y a un consensus social tellement large au Québec. Je l'ai dit souvent, je vais le redire, ce n'est pas quand même tous les jours, là, que le mouvement syndical, la Coalition avenir Québec, le Parti québécois, Québec solidaire s'entendent sur quelque chose. Je veux dire, c'est signe qu'il y a un consensus social réel et il y en avait un, consensus social, sur la réelle abolition des clauses de disparité de traitement au Québec. Ces clauses-là représentent une iniquité intergénérationnelle inacceptable. Ces clauses-là, M. le Président, sont un poison pour la solidarité entre les travailleurs et les travailleuses au Québec. Le consensus était là, la table était mise pour vraiment les abolir. Il y a une motion qui avait été déposée ici. Je l'avais déposée, nous l'avions adoptée à l'unanimité. À ce moment-là, je me rappelle de m'être dit : Bon, bien, et voilà, on va régler une des grandes injustices historiques à l'égard des jeunes travailleurs, des jeunes travailleuses au Québec, on y est, on va y arriver, tout le monde ensemble, dans le consensus. J'y ai cru, j'y ai cru. Malheureusement, à la lecture du projet de loi, on s'est rendu compte que, comble de l'ironie, il y avait, dans ce projet de loi, pour abolir les clauses de disparité de traitement... Qu'est-ce qu'il y avait? Bien, une clause de disparité de traitement en disant : Si vous l'avez signée, cette clause orphelin, avant la sanction de la loi, elle est toujours valide. Bref, c'est une clause orphelin.

Sur les clauses orphelin, c'était une grande déception. Mais je vais déposer un amendement pour donner une dernière chance à la ministre de rattraper cette petite erreur dans le projet de loi puis compléter le chemin qu'elle a entamé. Il y a une première moitié du chemin qui est faite. Je dépose un amendement, M. le Président, pour lui permettre de compléter le chemin et de réellement mettre fin à cette discrimination inadmissible à l'égard des jeunes travailleurs puis des jeunes travailleuses du Québec. Il ne devrait pas y avoir deux catégories de travailleurs, travailleuses au Québec, il devrait y en avoir une seulement. La ministre a encore l'occasion de marcher dans le bon sens de l'histoire et d'adopter cet amendement-là.

En terminant, M. le Président, je veux déposer un quatrième et dernier amendement sur la question des vacances. Ça a été un thème et un slogan préélectoraux des libéraux pendant les dernières semaines, les derniers mois. On a parlé de redonner du temps aux familles. Le premier ministre lui-même en a parlé. La ministre en a parlé. On s'attendait donc, dans ce projet de loi là, à avoir une bonification significative en termes de vacances pour les 60 % de salariés non syndiqués qui sont soumis aux normes du travail, M. le Président. Encore une fois, à écouter les paroles, on avait presque envie d'y croire. En entendant même les nouvelles étiquettes dont se pare le Parti libéral, notamment l'étiquette de progressiste, on s'est dit : Ah! eh bien, on aura peut-être un projet de loi intéressant sur la question spécifique des vacances. Malheureusement, encore une fois, la déception a été totale. On s'attendait à quelque chose de significatif pour redonner du temps aux familles. Finalement, le projet de loi ne fait que baisser la barre, pour avoir trois semaines de vacances, de cinq à trois ans.

Bref, M. le Président, en tout et pour tout, sur la vie au complet d'un salarié au Québec, sur sa carrière au complet, c'est deux semaines de vacances de plus, pas deux semaines par année, deux semaines de plus sur toute sa vie. Alors, vous me permettrez, M. le Président, de douter qu'une mesure aussi timide que celle-là va vraiment redonner du temps aux familles, va vraiment permettre aux salariés du Québec de souffler un peu plus, de prendre du temps avec leurs enfants, d'améliorer leur qualité de vie. Deux semaines sur toute la vie — ce n'est même pas une blague, M. le Président — deux semaines sur toute la vie, ce n'est pas suffisant pour redonner du temps aux familles du Québec, d'autant plus que le Québec est un des pays développés dans le monde où il y a le moins de vacances garanties, un des pays de l'OCDE où c'est le plus décevant, un des pays développés où c'est le plus décevant. La moyenne en Europe est de cinq ou six semaines. La moyenne de jours de vacances prises au Québec, M. le Président, est de 16 jours. 16 jours, ce n'est, sur toute l'année, pas grand-chose pour prendre soin de sa famille, se reposer et retourner au travail motivé et productif.

Alors, voilà, M. le Président, le dernier amendement que je dépose... quatrième et dernier afin de faire en sorte de donner la quatrième semaine de vacances aux Québécois est aux Québécoises après six ans de service continu. Vous remarquerez, «six ans». Alors, on a mis de l'eau dans notre vin, un compromis. La main est tendue, bien sûr, vers la ministre pour qu'elle saisisse cette opportunité-là, qui est devant elle ce soir. Il y a également plein de belles choses dans ce projet de loi, M. le Président, je l'ai dit à plusieurs reprises en commission parlementaire et, pour la poursuite du débat, je ne manquerai pas de les souligner, mais la dizaine de minutes que j'avais arrive à sa fin.

Alors, je vous remercie et j'invite la ministre à accepter ces amendements, qui ont le potentiel de transformer ce projet de loi presque progressiste en un projet de loi progressiste.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je ne vois pas d'autre demande de parole. Alors, ça met fin au débat.

Mise aux voix des amendements

J'ai l'information qu'il y a consentement pour procéder dès maintenant au vote des amendements, mais un par un, sans les lire. Alors, je ne lirai pas les amendements, je vais juste faire référence à l'article.

Alors, les amendements proposés — il y en a quatre — par M. le député de Gouin sont-ils adoptés? Je commence par le premier amendement, deuxième paragraphe de l'article 1. Je tiens à dire aux gens qui nous écoutent : Les gens ici savent très bien ce à quoi je fais référence. Donc, on n'a pas nécessairement besoin de les lire.

Alors, je répète, est-ce que l'amendement proposé au deuxième paragraphe de l'article 1 est adopté?

Des voix : Rejeté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, j'ai entendu «rejeté».

Je mets aux voix maintenant le deuxième amendement mais, cette fois-là, de l'alinéa de l'article 1. Est-ce que cet amendement-là est adopté?

Des voix : Rejeté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, j'ai entendu «rejeté».

Le troisième amendement, c'est à l'article 11.2°. Est-ce que cet amendement-là est adopté?

Des voix : Rejeté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, l'amendement est rejeté.

Et le quatrième amendement, c'est à l'article 46 du projet de loi. Est-ce que cet amendement-là est adopté?

Des voix : Rejeté.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, les amendements étant rejetés, le rapport de la Commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives afin principalement de faciliter la conciliation famille‑travail, est-ce qu'il est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, le projet étant adopté, je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement pour son intervention. À vous.

M. Tanguay : Oui. M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 30, s'il vous plaît.

Adoption

Le Vice-Président (M. Gendron) : À l'article 30, c'est Mme la ministre qui est responsable du Travail qui propose l'adoption du projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives afin principalement de faciliter la conciliation famille‑travail. Y a-t-il consentement, parce qu'il faut le demander puis le ratifier, là, pour déroger à l'article 230 du règlement, prévoyant que l'adoption d'un projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte de celle de la prise en considération du rapport que nous venons de faire? Y a-t-il consentement de procéder?

Des voix : Consentement.

• (21 heures) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Il y a consentement de procéder. Donc, je suis prêt à entendre les interventions s'il y en a. Mme la ministre, vous voulez intervenir. À vous la parole.

Mme Dominique Vien

Mme Vien : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, évidemment, très contente ce soir de pouvoir mettre un terme à ces travaux concernant la Loi sur les normes du travail, qui est une loi importante au Québec. Je l'ai mentionné tout à l'heure lors de mon discours sur la prise en considération du projet de loi.

Malgré ce que le député de Gouin laisse entendre, et d'autres aussi, ce projet de loi, c'est un projet de loi qui est majeur, c'est un projet de loi qui a suscité beaucoup, beaucoup d'intérêt, c'est un projet de loi pour lequel on a reçu beaucoup de demandes pour aller de l'avant, M. le Président, c'est un projet de loi qui est, oui, progressiste, parce qu'il fait des avancées majeures dans plusieurs éléments qui ne figuraient même pas dans la Loi sur les normes du travail. Évidemment, toute la question de l'encadrement des agences de placement de personnel ou des agences de recrutement de travailleurs étrangers, c'est majeur, là, c'est important, et on va venir réguler ce secteur-là, on va venir imposer une surveillance accrue.

D'ailleurs, pour les agences de placement, pour corriger mon collègue qui disait : Il n'y a à peu près pas d'inspecteurs, je pense qu'il y en a six pour l'ensemble des normes du travail, bien, ce n'est pas vrai, puis on a eu l'occasion de le dire en commission parlementaire. Alors, je vois mal comment on peut répéter une information qu'on sait qu'on a corrigée, là. C'est six inspecteurs pour uniquement les agences de placement de personnel. Ce sont 96, au total, qui existent pour les normes du travail, selon les données que nous avons de la CNESST au 31 décembre 2017, M. le Président. Donc, ce sont des avancées qui sont majeures, toute la question du harcèlement sexuel, toute la question également de la reconnaissance des proches aidants, les jours de vacances que l'on donne, les semaines de vacances qu'on a beaucoup plus rapidement aujourd'hui. Le collègue dit : Ce n'est rien, ça ne vaut rien, ce n'est pas important. Bien, quand c'est l'entreprise, là, qui est au bout puis qui paie, là, il faut penser à lui aussi, il faut penser à cet entrepreneur-là, il faut penser à cette femme entrepreneure là aussi.

Vous savez, M. le Président, là, les entreprises vont faire des efforts importants. C'est la raison pour laquelle notre collègue des Finances a consenti dans son dernier budget... M. le ministre des Finances, c'est 2,2 milliards, si je ne me trompe pas. Quand le député de Beauharnois dit : On n'a rien fait pour eux autres, à lui aussi, on a eu l'occasion de lui dire pendant la commission parlementaire quelle était la situation exactement pour les entreprises, que nous sommes là pour les accompagner, que nous sommes là pour mettre en place des mesures pour justement venir atténuer les effets des normes du travail. Alors, on a eu de la considération pour les travailleurs, M. le Président, ceux qui sont sous le coup de la Loi sur les normes du travail, qui... on le dit, ce sont des normes minimales de travail. On est là aussi pour les entreprises, parce que, les entreprises, c'est toujours elles à la fin de la journée qui paient. Ça aussi, il faut être conscient de ça, là. Ces hommes puis ces femmes qui mettent leur argent sur la table pour faire marcher leurs entreprises, il faut penser à eux autres aussi.

Alors, je pense qu'on a devant soi un projet de loi qui est ambitieux, qui est audacieux puis, oui, M. le Président, qui est progressiste. Mais on a un projet de loi aussi qui est à la bonne place, parce qu'on pense aux employés puis on pense aux entreprises. Et j'ai la ferme conviction ici ce soir qu'avec cette pièce législative là on fait avancer le Québec, M. le Président, très sincèrement. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup d'éléments, j'en ai nommé plusieurs tout à l'heure, dans mon premier discours, d'éléments qui sont à l'intérieur de ce projet de loi là, franchement, qui sont historiques, là, je veux dire. Puis les collègues ne le nient pas, ils l'ont dit, là. Il faut le répéter. Mais ce n'est pas vrai, aussi, en même temps, qu'on peut ouvrir les valves au complet, on ne peut pas faire ça. Puis en même temps, bien, ce qu'on offre aux travailleurs, bien, quand on relativise ça, c'est 0,4 % à 0,45 % de la masse salariale au Québec. Je pense qu'on est à la bonne place pour tout le monde.

Alors, je peux vous dire que le gouvernement du Québec, auquel j'appartiens avec beaucoup de fierté d'ailleurs, comme tous mes collègues ici, on est pas mal contents, nous autres, ce soir. C'est un projet de loi qui est important, c'est un projet de loi qui va changer la vie des familles, la vie des travailleurs, de ces personnes qui, grâce aux normes du travail, ont des normes du travail, justement, qui sont intéressantes puis qui vont leur permettre d'avoir une meilleure qualité de vie. Alors, moi, je dis bravo! J'ai évidemment hâte que cette loi-là entre en vigueur pour faire en sorte que nos concitoyens du Québec puissent profiter de tous ces fruits qui sont à l'intérieur de ce projet de loi là.

Merci beaucoup, M. le Président. J'aurai l'occasion de revenir tantôt.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie de votre intervention sur l'étape finale du projet de loi n° 176 et je cède à nouveau la parole au porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. Alors, à vous la parole, M. le député de Beauharnois.

M. Guy Leclair

M. Leclair : Merci, M. le Président. Alors, nous revoilà pour l'adoption finale du projet de loi n° 176 sur les normes du travail. Alors, au risque de me répéter, bien entendu, je répète encore une fois que les normes du travail, malheureusement, ont été faites à la hâte. On aurait pu aller beaucoup plus large et vraiment restructurer les normes du travail dans un plus grand ensemble, une plus grande variété des normes du travail. Alors, on a resté prescrit à ce que la ministre avait suggéré dans le projet de loi dû au manque de temps. Bien entendu, depuis déjà près de 20 ans que les normes du travail n'avaient pas été réouvertes, alors je m'aurais attendu que, dans la dernière législation, on n'ait pas attendu au dernier mois pour déposer le projet de loi, on aurait eu quatre ans pour débattre intelligemment, rouvrir en profondeur les normes du travail. Malheureusement, ça n'a pas été le choix du gouvernement actuel. N'empêche, n'empêche qu'il y a quand même des avancées dans ce projet de loi là pour les travailleurs, les travailleuses du Québec, et je tiens à le dire.

La ministre tantôt, lors de la prise en considération, m'a dit que le député de Beauharnois disait que les PME sont choquées. Ça ne vient pas de moi, M. le Président. On a juste à lire les journaux. Les PME du Québec, les plus petites entreprises sont choquées, sont outrées de ce qu'on a fait. La ministre nous apporte un calcul très simple, très simple. Elle dit : Le ministre des Finances a allégé pour les entreprises du Québec 2 milliards au dernier budget. Nous, ce qu'on dit, via les normes du travail... On sait que les normes du travail, ça ne touche pas à toutes les entreprises. Il y a un paquet d'entreprises qui donnent déjà beaucoup plus que les normes du travail, et nous en sommes très fiers. C'est ce que nous souhaitons, que les travailleurs du Québec et les travailleuses travaillent au-delà des normes. Ça, c'est le minimum, ces normes du travail là. Nous, ce qu'on aurait aimé, puis on a demandé lors de la commission parlementaire, c'est de dire vraiment c'est quoi, le coût. Lorsque la ministre, elle nous dit : C'est 0,4 % de la masse salariale, ça, c'est global. Elle inclut ceux qui gagnent 28 $ de l'heure, 32 $ de l'heure, 16 $ de l'heure. Moi, ce que j'aurais aimé savoir, c'est ceux qui vraiment sont à la base, là, des normes du travail, qu'on leur augmente les coûts à deux journées... Parce qu'il y en a déjà qui les ont, ces deux journées-là de maladie, ils en ont déjà huit de prévues. Donc, ces gens-là, ça ne les affecte pas, ils ont déjà plus. Donc, eux, ça ne change absolument rien sur leur masse salariale. Nous, ce qu'on voulait savoir, c'est de dire... Les plus petites entreprises, elles, sont affectées directement. Combien de pourcentage? Je suis sûr que ça serait beaucoup plus haut que 0,4 %.

Et ce n'est pas moi qui chiale, c'est les PME qui nous disent : Ça va nous coûter 600 à 700 millions, les nouvelles règles qu'il y a là. Donc, les gens qui évaluent ça, 600, 700 millions, ce n'est pas sur la masse salariale du Québec, c'est ceux qui sont directement affectés. Alors, je croyais que c'était important de le redire à la ministre, qui, malheureusement, s'imagine que la loi fiscale que le ministre des Finances a sortie lors de son budget pour l'entièreté des entreprises au Québec... bien, il y en a un paquet là-dedans, peut-être 90 %, qui ne sont même pas affectées par les nouvelles normes du travail, parce qu'ils étaient déjà au-delà de ça.

Alors, ceci dit, M. le Président, bien entendu, les gens dans les agences, bien, pour ceux qui y travaillent, je leur dis ce soir : N'ayez pas peur de lire les normes du travail, tentez de faire respecter vos droits. Vos droits sont rendus équitables. Vous ne pouvez aller travailler pour une agence, aller travailler dans une entreprise cliente et être payé moins que l'autre personne qui fait la même tâche que vous. Exceptionnellement, bien entendu, si la personne a 10 années d'expérience, et vous, vous êtes à votre première, ça sera au prorata de ça. Mais, au minimum, c'est impossible que quelqu'un arrive dans une entreprise puis dise : Ce salaire-là, là, si bas que ça, il n'existe pour personne dans l'entreprise, juste moi qui fais partie de l'agence. Alors, j'invite ces gens-là à aller voir les normes du travail, les nouvelles normes. Parce que je dois féliciter la ministre et les collègues qu'on a travaillé sur ce projet de loi là pour dire que les agences sont beaucoup plus encadrées, et ces gens-là devraient avoir de meilleures normes de travail et des meilleures conditions de travail, bien entendu.

Alors, je terminerai en disant que je trouve quand même triste qu'après quatre ans on ait attendu, pour les normes du travail, dans le dernier mois de la législation, M. le Président. Puis on a même réussi à faire tabletter un rapport sur la CSST, qui, elle aussi, est attendu par le monde, le milieu du travail, les travailleurs, les travailleuses et les entreprises. C'est sur le bureau de la ministre depuis déjà plus d'un an. Et on va finir la législation, et les cas de maladie industrielle, les nouvelles maladies, parce que, là aussi, ça évolue, comme les normes du travail, bien, c'est encore tabletté sur le bureau de la ministre. J'aurais aimé que la ministre ait plus de leadership dans son quatre années pour s'assurer, justement, qu'on aille plus en profondeur avec les normes puis qu'on travaille très fort à tenter d'éliminer les accidents de travail sur tous les milieux de travail. On n'aura pas touché à ça pendant la législation. Je trouve ça quand même très triste. Mais, dans l'ensemble, le projet de loi, bien entendu, nous allons voter pour, parce qu'il y a des améliorations nettes dans ce projet de loi là. Merci, M. le Président.

• (21 h 10) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député de Beauharnois, de votre intervention et je cède la parole, pour la poursuite de l'étape finale de ce projet de loi là, à M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. À vous la parole.

M. Marc Picard

M. Picard : Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole pour l'adoption du projet de loi n° 176, qui, malheureusement, n'est pas une véritable réforme. Rappelons-nous le rendez-vous national de janvier 2017, où tout était permis pour les travailleurs, en tout cas dans des discours que nous avions entendus à la fin.

Mais il y a des avancées, M. le Président, message clair dans le projet de loi : ça sera inacceptable... le harcèlement est inacceptable, au Québec, sur les lieux de travail et partout dans la société, mais ce soir on parle des milieux de travail. On veut mettre de l'ordre dans les agences de placement et de recrutement des travailleurs étrangers. Il y avait besoin... il n'y avait pas de balises et là il va y avoir des balises. Donc, ça, c'est positif.

Enfin, une reconnaissance des proches aidants, des proches aidants, des gens qui sont importants dans notre société, parce qu'on a besoin d'eux pour s'occuper des personnes qui ont besoin d'aide. Pour les proches aidants, tout à l'heure, la ministre disait que j'avais erré dans mes propos, six inspecteurs, 800... 800? J'espère que je n'ai pas erré, parce que, là, Mme la ministre a dit : 90 inspecteurs pour 800 entreprises. Là, ça fait un pour 10, là. Ça commence à coûter cher, là. En tout cas, on ne s'obstinera pas là-dessus, Mme la ministre, on va finir la soirée correctement.

Mais c'est vrai que c'est un projet de loi historique. Historique, c'est un recul historique pour les clauses de disparité. On vient légaliser, on vient normaliser ce qui est inacceptable. Je dirais même qu'on vient sacrifier une génération de jeunes en jouant sur les mots, en modifiant le sens. Tantôt, j'écoutais mon collègue le nouveau député de Groulx depuis quelques mois, quelques années déjà...

Des voix : Gouin.

M. Picard : ...Gouin, excusez, de Gouin, et qui apprend maintenant c'est quoi, le vocabulaire libéral.

Une voix : ...tous les jours.

M. Picard : Vous apprenez à tous les jours, vous allez voir, vous allez apprendre encore. Mais ça, c'est pour ça, pour moi, c'est inacceptable, là. Nous avons dit... La ministre l'a dit lorsqu'elle a présenté qu'elle voulait abolir les clauses orphelin, les clauses de disparité de traitement. Ça fait des années qu'on entend parler de ce problème-là, une génération de 150 000 travailleurs qui ont été sacrifiés lors de négociations. Lors de nos travaux, il a été proposé de permettre un délai, prévoir un délai d'un, deux, trois renouvellements de conventions collectives pour que les parties puissent s'entendre. La ministre nous a... a été très franche, elle a dit : C'est un choix politique. C'est un choix politique avec lequel le gouvernement libéral devra vivre, devra vivre pour les prochaines années, la prochaine campagne électorale surtout. Aussi, les 150 000 travailleurs... et nous devrons, nous, propager cette nouvelle, ce n'est pas seulement les 150 000 travailleurs, c'est tous les nouveaux travailleurs qui seront engagés dans les entreprises.

Et je termine là-dessus, M. le Président, nous allons voter pour le projet de loi parce qu'il y a quand même des avancées, mais on n'a pas fait tout le bout de chemin qu'on devait faire comme société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci. Je veux juste amicalement vous dire qu'il vous appartient toujours de décider quand vous terminez. Ça vous appartient tout le temps. Alors, pour la poursuite du débat, je cède la parole à M. le député de Gouin pour le temps qui lui est imparti, c'est-à-dire maximum 10 minutes. À vous la parole.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. On est enfin rendus à l’adoption de ce projet de loi n° 176, où, je dirais, il y a deux grandes catégories d'articles, il y a des déceptions, des grandes déceptions, et il y a des avancées. Et je vais d'abord parler de la principale déception pour ma formation politique à l'intérieur de ce projet de loi là, c'est sur la question des vacances.

M. le Président, le Parti libéral, le premier ministre, la ministre du Travail parlent depuis plusieurs semaines, plusieurs mois déjà, de leur nouvelle orientation, de leur nouvelle philosophie, leur nouvelle inspiration soi-disant progressiste. On a dit : On veut redonner du temps aux familles. C'est ce discours-là qui a accompagné, par exemple, le dévoilement de la politique de mobilité durable. C'est un discours qu'on trouve un peu partout dans les communiqués de presse, dans les conférences de presse du gouvernement. Alors, on se serait attendus que, dans le projet de loi qui vient réviser les normes du travail, cette volonté de redonner du temps aux familles, elle s'incarne de manière exceptionnelle. On s'attendait à une cohérence exceptionnelle de la part des libéraux, on s'attendait à ce qu'on nous dise : On veut redonner du temps aux familles, bien, faisons-le en révisant les normes du travail, ce projet de loi qui détermine les conditions de travail de 60 % des salariés du Québec, M. le Président, ceux et celles qui ne sont pas représentés par les organisations syndicales.

Qu'est-ce qu'il y a, dans ce projet de loi, sur la question des vacances? Il n'y a pas grand-chose. Il y a, en fait, le fait de donner droit à une troisième semaine de vacances après non pas cinq ans de service continu, comme à l'heure actuelle, mais trois ans de service continu. Spontanément, on peut dire : Ah! c'est quand même deux semaines de plus par année. En fait, non, M. le Président, on ne rajoute pas des semaines de vacances en faisant ça. On fait seulement devancer de deux ans la date à laquelle on a accès à cette troisième semaine de vacances. Qu'est-ce que ça veut dire, ça, M. le Président? Ça veut dire que, résultat des courses, là, à la fin de toute une carrière, un salarié aura deux semaines de vacances de plus au total grâce à la réforme sur les normes du travail. Une personne qui travaillait dans une entreprise avant l'adoption de ce projet de loi là et une personne qui va travailler après, pour la même période de temps, c'est deux semaines de plus sur toute la vie. C'est largement insuffisant, M. le Président, c'est moins que ce que les salariés du Québec méritent.

Pourquoi est-ce qu'ils méritent plus de jours de vacances, les salariés du Québec, M. le Président ? Parce qu'au cours des 20 dernières années l'absentéisme a monté en flèche au Canada, on parle d'une augmentation de 24 % des jours d'absence au Canada, dans le secteur privé. C'est une crise d'absentéisme qui coûte cher aux entreprises. C'est le Conference Board, ce n'est quand même pas un institut socialiste, là, qui chiffrait les coûts directs liés à l'absentéisme à 2,4 % de la masse salariale au Canada. L'IRIS a ramené ce chiffre-là au Québec, on parle de 3,5 milliards de dollars en 2016, les coûts de l'absentéisme au travail.

Et d'où vient cette montée de l'absentéisme, M. le Président? C'est une tendance qu'on voit dans l'ensemble des économies développées. D'où ça vient, est-ce que ça tombe du ciel? Non. Ça vient de la montée des épuisements professionnels, du surmenage, du stress au travail, cette épidémie de burn-out qui grève l'économie québécoise, comme plusieurs autres économies développées un peu partout à travers le monde.

En révisant les normes du travail, on avait l'occasion de redonner du temps à ces salariés-là pour souffler, ça aurait été bon pour leur qualité de vie, ça aurait été bon pour leur conciliation travail-famille, mais ça aurait aussi été bon pour l'économie du Québec, M. le Président. Les études l'ont montré, des travailleurs, des travailleuses plus reposés et moins stressés, c'est des travailleurs et des travailleuses plus productifs. Les exemples européens sont éloquents à cet égard-là. La moyenne en Europe, c'est cinq, six semaines de vacances. Ici, on est à 16 jours en moyenne par année. 16 jours par année, M. le Président ce n'est pas assez pour prendre soin de sa famille, ce n'est pas assez pour avoir une qualité de vie qui fait en sorte que, quand on rentre au travail, on est motivés, on est frais et dispos, et donc on est plus productifs. Plusieurs pays européens l'ont compris, et ça a eu des impacts importants en termes de productivité, parce qu'un travailleur reposé, M. le Président, c'est un travailleur qui est content de faire sa job, qui travaille mieux puis qui est plus productif. Donc, ce n'est pas juste une bonne mesure de conciliation travail-famille, augmenter le plancher minimal des vacances, c'est aussi une bonne mesure économique.

Pour les 60 % des salariés non syndiqués au Québec, il y avait donc cette attente qui avait été créée par les slogans et les promesses libérales de leur redonner du temps. Ces espoirs-là, M. le Président ont été déçus. La proposition, dans ce projet de loi, en matière de vacances est une proposition qui est timide et qui est largement insuffisante, deux semaines sur toute une vie, M. le Président, on peut même se demander si ce n'est pas insignifiant.

On avait besoin d'un remède de cheval pour faire face à la crise d'absentéisme puis à l'épidémie d'épuisements professionnels, et ce qu'on a, c'est une pilule homéopathique. Voilà la plus grande déception, M. le Président, de Québec solidaire en ce qui a trait à projet de loi là, et je voulais prendre le temps ce soir de le répéter pour que ce soit bien clair que, lorsqu'on nous parlera en campagne électorale du bilan en matière de conciliation travail-famille, il ne faudra pas oublier cette minimale bonification des normes du travail où on vient ajouter deux semaines sur toute une vie.

Il y a néanmoins des bonnes choses dans ce projet de loi et c'est ces avancées-là qui vont nous motiver à l'appuyer. La ministre commence à me connaître, je suis ferme dans mes critiques, mais je suis aussi juste dans ma capacité à reconnaître les bons côtés de ce projet de loi là. Je pense notamment à la question du harcèlement sexuel où il y a des avancées importantes qui ont été faites. C'est un combat qu'on mène depuis longtemps, à Québec solidaire, c'est tous ensemble qu'on va adopter ce projet de loi là où il y a des vraies avancées en matière de harcèlement sexuel. On a même bonifié cette partie-là du projet de loi en commission parlementaire avec la collaboration de la ministre, et je voulais la remercier pour ça.

• (21 h 20) •

Sur les agences de placement également, sur les agences de placement, il y a des belles avancées. C'est un combat qu'on menait depuis plusieurs années, à Québec solidaire. C'est des travailleurs, travailleurs qui sont les plus précaires, les plus isolés de notre société, souvent des gens, également, qui ont des statuts migratoires précaires. Donc, c'est parmi les gens qui sont les plus fragiles du Québec de 2018, et ce projet de loi va venir améliorer leurs conditions de vie en balisant les agences de placement, probablement en en fermant plusieurs qui sont des agences délinquantes. Le principe de coresponsabilité notamment, qui est inscrit dans le projet de loi, est un principe qui a été appliqué un peu partout dans le monde où on a voulu baliser les agences de placement, et ça a marché, parce qu'on s'assure qu'aucun employeur, que ce soit l'entreprise cliente ou l'agence de placement, ne puisse se défiler à l'égard de ses responsabilités envers les travailleurs et les travailleuses, et ça, c'est une belle avancée en matière d'encadrement des agences de placement.

Il y a deux absences dans ce projet de loi là. D'abord, la ministre avait l'occasion d'introduire le droit à la déconnexion, qui est un principe qui fait de plus en plus jaser dans le monde du travail un peu partout à travers le monde. Il y a des groupes qui lui en avaient fait des représentations. Elle s'était montrée ouverte, le premier ministre aussi. Dans une conférence devant des jeunes, elle avait dit : Ah! je trouve ça très intéressant comme débat, il faudrait réfléchir à ça. Et, encore une fois, l'occasion était là de l'inclure dans la réforme des normes du travail, occasion ratée malheureusement. C'est dommage parce que, la Loi sur les normes du travail, on ne l'ouvre pas souvent. Elle a été écrite à une époque où, quand on sortait du bureau, on arrêtait de travailler. Tout le monde sait, à commencer par les gens de ma génération, M. le Président, que ce n'est plus vrai. Malheureusement, les outils électroniques font en sorte que la vie professionnelle empiète de plus en plus sur la vie personnelle. On avait le moyen, avec les amendements de Québec solidaire, de venir inscrire cette notion de droit à la déconnexion numérique dans le projet de loi, sans que ce soit trop contraignant, sans qu'on fasse du mur-à-mur, mais on aurait pu au moins ouvrir cette porte-là. C'est très dommage qu'on ne l'ait pas fait, et c'est une absence que je voulais mentionner.

La deuxième absence, je l'ai mentionnée dans mon intervention précédente, c'est la question des clauses de disparité de traitement, on fait vraiment seulement la moitié du chemin. On peut se dire : C'est mieux que rien du tout. C'est vrai, sauf qu'on oublie 150 000 travailleurs, travailleuses, plus tous ceux et toutes celles qui s'en viennent aussi dans les prochaines années. C'est une grande injustice, M. le Président, qui a été commise, historiquement, à l'égard des jeunes travailleurs, travailleuses. Puis je ne peux pas vous mentir, le fait d'être de la même génération que ces jeunes-là, ça me rend particulièrement sensible à ça, puis je trouve ça triste, je trouve ça triste qu'on n'y soit pas arrivés, M. le Président.

Donc, je dirais : Une grande déception, deux absences et quelques avancés, en politique, on dit que c'est des compromis, n'est-ce pas? Alors, résultat de cette formule mathématique, Québec solidaire va appuyer le projet de loi de la ministre parce que, malgré tout, il y a des pas dans la bonne direction, et il faut savoir saisir ces occasions-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le député de Gouin. Pour votre droit de réplique, Mme la ministre. Allez.

Mme Dominique Vien (réplique)

Mme Vien : Merci beaucoup, M. le Président. Je vais quand même prendre le temps aussi, tantôt, de remercier quelques personnes. Je pense, quand on arrive à l'issue d'un processus comme nous avons entamé il y a plusieurs mois, c'est de bon aloi aussi de prendre le temps de remercier certaines personnes, des gens.

Je veux revenir sur certains points qui ont été soulevés, d'abord du côté du PQ, avec le député de Beauharnois. Je pense que, de son côté, ça vaudrait la peine qu'il puisse avoir un devoir de mémoire puis de retourner dans les archives qui concernent son propre parti politique, le Parti québécois, auquel, d'ailleurs, le chef de la CAQ actuel... auquel il était membre, le chef de la CAQ, à cette époque-là. Et le député de Beauharnois nous reprochait d'avoir déposé un projet de loi vite, auquel les gens n'avaient pas eu le temps... avec lequel ils n'avaient pas eu le temps de se familiariser, en tout cas... Ce qui est totalement faux, M. le Président, parce qu'on a pris la peine, au cabinet, au ministère, de rencontrer une quarantaine de groupes avant même de rencontrer publiquement avec... en commission parlementaire, 32 groupes, là. Donc, les commentaires, nous sommes allés les chercher, nous avons entendu les groupes.

En 2002, le Parti québécois avait déposé donc le projet de loi, cette deuxième réforme, hein, de la Loi sur les normes du travail, en 2002, 88 articles. Le nôtre en avait 44. C'était en 2002, ça a été déposé le 7 novembre 2002, adopté le 19 décembre 2002. C'est 42 jours après, alors il ne peut pas nous faire la morale, là. Ils avaient écouté 33 groupes, nous, 32. C'est exactement la même situation dans laquelle nous sommes actuellement.

On a pris le temps qu'il fallait, M. le Président, pour aller voir les groupes, pour aller s'enquérir de leurs réflexions, de faire l'état des lieux, c'est quoi, le portrait du monde du travail actuellement. La situation des normes du travail, quelle est-elle actuellement? C'est le temps que nous avons eu, c'est le temps que nous avons pris. Quand nous avons déposé le projet de loi sur les normes du travail, M. le Président, on n'avait pas commencé la semaine d'avant à travailler là-dessus, là, ça fait longtemps qu'on travaille là-dessus, puis on a pris le temps pour faire les choses comme il faut. Alors, j'inviterais le collègue du Parti québécois à retourner dans les archives et à se renseigner. Quand on habite une maison de verre, on ne lance pas de roche, M. le Président.

Par ailleurs, sur les disparités de traitement, j'aimerais rappeler à cette Chambre qu'on est allés plus loin, plus loin qu'on pouvait, M. le Président. Actuellement, je rappellerais au collègue que nous sommes les seuls au Canada à interdire les disparités de traitement sur les régimes de retraite et les avantages sociaux. Il n'y a pas personne, au Canada, qui fait ça, là, on est les premiers à le faire. Et ce qu'on me disait au... le ministère me disait : Mme Vien, on est probablement parmi les seuls au monde aussi. Alors, ce n'est pas rien, là. De dire que ce n'est pas une avancée, que... c'est n'importe quoi, je veux dire, ce n'est pas sérieux, que de dire ça ici, aujourd'hui, là. Ça a pris de l'audace et du courage que d'aller dans ce sens-là.

Au député des Chutes-de-la-Chaudière... je l'invite aussi à propager toutes les bonnes nouvelles qui se trouvent à l'intérieur du projet de loi et évidemment d'en vanter tous les mérites, parce que c'est un excellent projet de loi, c'est un bon projet de loi, M. le Président. C'est la troisième révision que nous faisons, comme Assemblée nationale, depuis son adoption, en 1980. Alors, je pense qu'on n'a pas à rougir du tout, du tout, du tout des avancées que nous faisons aujourd'hui pour tous les concitoyens du Québec, puisque ça concerne évidemment tout le monde, les normes du travail. Ce sont des normes en deçà desquelles on ne peut pas aller.

Alors, moi, ça va conclure, M. le Président. Je conclurai en remerciant quand même les collègues de l'opposition. Oui, oui. Merci, on a fait du bon travail. Honnêtement, je pense qu'on avait tous de l'ouverture. Il y a des points de vue qui ont été exprimés. À un moment donné, il fallait tracer la ligne, et j'étais là pour la tracer, mais je pense que, dans l'ensemble, nous avons très bien travaillé ensemble, et je les en remercie. Les membres des... les députés du côté ministériel, merci infiniment d'avoir également été avec nous durant tous ces travaux.

J'aimerais remercier les groupes qui se sont donné la peine, dans un premier temps... les 40 groupes, une quarantaine de groupes qu'on a rencontrés de façon ad hoc, donc merci beaucoup de votre contribution. Également, ces 32 groupes qui sont venus nous rencontrer en commission parlementaire, il fallait se préparer, hein, déposer des mémoires, etc., alors merci infiniment d'avoir alimenté notre réflexion sur ce projet de loi là.

J'aimerais remercier également les gens du ministère du Travail : Normand Pelletier, notre sous-ministre, également notre sous-ministre Anne Racine, Louis Tremblay, Antoine Houde. Merci beaucoup de votre grande contribution et surtout de votre grande intelligence. Et remerciez pour moi, aujourd'hui, toutes vos brigades, elles ont été géniales, elles ont été formidables. Également, je m'en voudrais de ne pas remercier Pierre Milette, chez nous, au cabinet, le chef de cabinet, mes collaborateurs, Florent et Isabelle, merci infiniment, vous avez été d'une grande générosité, d'un grand dévouement, également. Alors, voilà, c'est la fin, M. le Président, merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, je vous remercie pour votre intervention.

Est-ce que le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives afin principalement de faciliter la conciliation famille‑travail, est adopté?

M. Tanguay : M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Est-il adopté?

M. Tanguay : Non.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ah! il n'est pas adopté.

M. Tanguay : J'attends que vous me reconnaissiez...

Le Vice-Président (M. Gendron) : On vous écoute.

M. Tanguay : Alors, je vous demanderais un vote par appel nominal et, conformément à l'article 223 du règlement, de reporter le vote à la période des affaires courantes du mardi 12 juin 2018.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Gendron) : Vous aviez une bonne raison, merci d'avoir... Alors, tel que le règlement le prescrit, il y aura un vote nominal à un moment donné.

Alors, pour la suite de nos travaux, M. le leader.

• (21 h 30) •

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je vous prierais d'appeler l'article 33, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 170

Adoption

Le Vice-Président (M. Gendron) : À l'article 33 du feuilleton de ce soir, c'est M. le ministre de la Sécurité publique qui propose l'adoption du projet de loi n° 170, Loi modernisant le régime juridique applicable aux permis d'alcool et modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques. Alors, je vous cède la parole, M. le ministre.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Merci, M. le Président. Alors, on en est rendus au stade final concernant le projet de loi n° 170. C'est un projet de loi qui a été déposé le 21 février dernier. C'est un projet de loi qui, au départ, visait trois objectifs : simplifier la vie des citoyens en matière de relations avec les titulaires de permis d'alcool, simplifier la vie des titulaires de permis, encourager également une consommation responsable des produits contenant de l'alcool et, avec les travaux que nous avons faits et un certain nombre d'amendements, je dirais qu'il y a un quatrième objectif qui s'y est greffé, qui est celui également de simplifier la vie des fabricants.

Il y a eu des consultations particulières sur le projet de loi au mois d'avril, et la Commission des institutions l'a étudié au cours de cinq journées d'étude détaillée. Et je dois dire que, si on est arrivés à ce résultat aujourd'hui, puis je vais décrire les principales avancées, c'est bien sûr parce que le projet de loi en soi proposait des choses extrêmement intéressantes, mais c'est aussi parce qu'on a pu compter sur une exceptionnelle collaboration des oppositions. Et de cette façon on a pu finalement — et on en est arrivés à ce stade aujourd'hui — présenter un projet de loi encore amélioré.

Alors, il y a un certain nombre d'amendements qui ont été adoptés. Je ne reviendrai pas sur chacun d'entre eux parce que j'en ai déjà traité lors de la prise en considération, mais j'aimerais rappeler un certain nombre de choses qui vont se mettre en effet, les effets que va produire l'adoption de ce projet de loi.

D'abord, dès la sanction du projet de loi prendront effet les mesures qui permettent de restreindre la distribution des boissons à forte teneur en sucre et en alcool de plus de 7 % et en particulier d'en empêcher la vente dans les dépanneurs et les épiceries. Dès l'adoption également, dès la sanction, les pouvoirs additionnels d'intervention de la régie pourront être mis en oeuvre concernant les produits qui sont non conformes.

Les assouplissements dans la vie des fabricants, notamment la possibilité de faire déguster leurs produits sur place, pourront aussi entrer en fonction dès la sanction.

Je reviens sur la question des boissons à plus de 7 % d'alcool, les mélanges de bière qu'on appelle, à plus de 7 % d'alcool. On voulait absolument envoyer un message très fort et immédiat, ça sera le cas. La régie pourra en outre ordonner à un fabricant de cesser immédiatement la fabrication de ces boissons et d'en empêcher la vente et la distribution. Et la régie aura aussi le pouvoir de procéder au rappel, à la mise sous scellé. Elle pourra même ordonner la destruction de boissons alcooliques qui sont non conformes.

Il y a un certain nombre d'assouplissements qui visent les fabricants. Alors, dès la sanction prendront également effet un certain nombre de mesures, comme le fait que les producteurs artisanaux de bière pourront maintenant vendre directement à un titulaire de permis de réunion leurs produits. Les distillateurs industriels pourront aussi vendre leurs produits sur leurs lieux de fabrication, alors qu'actuellement ils ne peuvent le faire qu'auprès de la SAQ. Mais en même temps, pour protéger la marque Vins artisanaux du Québec, le vin artisanal du Québec, dès la sanction du projet de loi, il sera interdit d'avoir le double permis artisanal et industriel lorsqu'on utilise exactement les mêmes matières premières pour fabriquer les deux types de produits. Alors, il y aura quand même une transition ici. Ceux qui actuellement ont deux permis auront un an pour se départir de l'un d'entre eux.

De plus, dès le 1er juillet 2018, donc peu de temps après la sanction du projet de loi, plusieurs mesures pourront devenir réalité, par exemple la prolongation des heures pour la présence de mineurs avec leurs parents sur les terrasses. C'est 20 heures actuellement, ça pourra aller jusqu'à 22 heures, ce qui va avoir un impact de simplification de la vie des familles, évidemment. Ça va avoir un impact aussi, positif, sur le tourisme.

Il y aura, dès le 1er juillet également, la possibilité pour la régie de délivrer un permis de réunion sur les lieux de fabrication, par exemple pour un vigneron. La vente de boissons alcooliques dans les épiceries et les dépanneurs sera autorisée dès 7 heures le matin au lieu de 8 heures le matin. La préparation à l'avance des carafons et des mélanges de boissons alcooliques sera permise. L'autorisation d'utiliser des boissons alcooliques à des fins éducatives dans des programmes de formation, notamment des formations sur la gestion des bières artisanales, la fabrication de bière artisanale — on a des programmes comme ça qui ont été créés, notamment dans les cégeps — ça pourra se faire.

Et ensuite il y a un autre processus qui va se mettre en branle, qui va être la préparation des outils informatiques nécessaires au lancement des nouveaux permis. Une grande simplification des permis en matière d'alcool qui va être mise en oeuvre par cette loi une fois qu'elle sera adoptée et sanctionnée. Donc, au cours des mois qui vont suivre son adoption, le nouveau régime va entrer en vigueur. Ça va être par décret du gouvernement dès qu'on va être prêts et ça va permettre notamment de mettre en place un nouveau permis accessoire, un nouveau permis de livraison, la nouvelle option Traiteur, la nouvelle option Fabrication domestique. Ça permettra d'avoir des permis qui sont délivrés sur une base saisonnière, avec une tarification adaptée. Il y aura plus de souplesse dans les permis de réunion. Ce ne sera plus nécessaire de demander nécessairement un repas pour pouvoir prendre un verre dans un restaurant. Et la consommation d'une boisson alcoolique sera permise également dans les lobbys des hôtels. Alors, on voit à quel point ce projet de loi, à travers le temps, va engendrer une grande simplification dans la vie des gens et la vie des titulaires de permis.

Par ailleurs, une autre chose qui va être rendue obligatoire, et c'est important, c'est une autre avancée en matière de consommation responsable, un an après l'entrée en vigueur du projet de loi, il y aura une formation obligatoire pas seulement strictement pour les titulaires de permis et le gérant, mais il faudra qu'en tout temps une personne présente à l'intérieur de l'établissement ait suivi une telle formation sur la consommation responsable.

Autre avancée extrêmement importante liée aux travaux que nous avons eus ensemble, entre les oppositions et nous : deux ans après la sanction du projet de loi, il y aura l'abolition du système de timbrage, le fameux marquage des produits d'alcool, qui est un irritant majeur pour l'industrie. Plusieurs groupes ont décrié le système lorsqu'ils sont venus en consultations. On considère effectivement que c'est un système qui peut être remplacé par quelque chose de beaucoup plus moderne, et c'est ce qu'on va mettre en oeuvre d'ici deux ans, le temps nécessaire pour la régie, les corps policiers et l'industrie de trouver les meilleurs moyens de s'assurer qu'on lutte contre la contrebande des produits d'alcool, qu'on lutte contre l'évasion fiscale en matière de vente de boissons alcooliques, mais en ayant beaucoup moins d'impacts négatifs en imposant un fardeau excessif par le biais d'un système qui n'a plus sa raison d'être. Alors, c'est une autre importante avancée que le projet de loi propose.

Il y a un autre chantier qui attend la régie également, qui est celui de moderniser le Règlement sur la promotion, la publicité et les programmes éducatifs en matière de boissons alcooliques. Dans le projet de loi, on prévoit l'introduction de sanctions administratives et pécuniaires en cas de manquement à ce règlement, mais il faut réviser le règlement, et on a donc annoncé qu'un groupe de travail va être mis en place pour revoir en profondeur ce règlement. Il y aura, à l'intérieur de ce groupe de travail, des joueurs de l'industrie, mais également des acteurs de la santé publique, les ministères concernés et, bien entendu, des gens qui s'intéressent particulièrement à la protection des jeunes, au sexisme en publicité, etc. Tout ça pourra être considéré. Et on pourra intégrer les médias sociaux dans les considérations en matière de respect du règlement en matière de promotion et de publicité, ce qui est un facteur extrêmement important, notamment pour protéger les jeunes.

Évidemment, on n'en serait pas arrivé là sans le travail très important qui a été fait par notre collègue député de Jean-Lesage. Le député de Jean-Lesage a littéralement inspiré, je dirais, ce projet de loi, a mené des consultations auprès de nombreux groupes, de joueurs de l'industrie, et les discussions avec le député de Jean-Lesage ont permis l'élaboration du projet de loi, qui a ensuite été discuté avec les oppositions. Et j'aimerais encore une fois souligner son apport, qui a été extrêmement important.

Alors, en conclusion, M. le Président, l'objectif du gouvernement avec ce projet de loi est de simplifier la vie des gens, la vie des titulaires de permis, la vie des fabricants, tout en encourageant une consommation responsable des boissons alcooliques. Je pense qu'il s'agit d'un projet de loi qui va avoir un impact positif et très concret dans la vie des gens. On a réussi à avancer rapidement avec ce projet de loi. Il y a eu plusieurs tentatives dans le passé qui, malheureusement, n'avaient pas abouti. Je crois bien, puisqu'on arrive, là, à la toute dernière étape, que cette fois-ci, donc, est la bonne. Et je tiens encore une fois à remercier les oppositions, l'opposition officielle, la deuxième opposition, qui ont travaillé avec nous pour faire en sorte que ce projet de loi, qui était éminemment souhaitable, va pouvoir devenir réalité. Et, pour l'ensemble des Québécois, je pense que c'est une avancée très positive. Merci.

• (21 h 40) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le ministre. Alors, merci de votre intervention.

Je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. M. le député de Verchères, à vous la parole.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : M. le Président, si vous me le permettez, je vais amorcer mon intervention par les quelques derniers mots qui ont été prononcés par le ministre en ce sens que l'objectif à travers ce projet de loi, c'est de simplifier la vie des détenteurs de permis, des titulaires de permis, les propriétaires d'établissement, de simplifier la vie des consommateurs, des consommatrices, de faire en sorte finalement que ce cadre législatif, qui était, à maints égards, pour le moins vétuste, puisse s'adapter aux moeurs de l'heure, puisse faire en sorte de répondre aux besoins non seulement de l'industrie, mais des consommateurs et consommatrices, faire en sorte que tout le monde puisse s'y retrouver, parce que l'actuelle législation est pour le moins kafkaïenne souvent à la fois pour les détenteurs de permis, mais également pour la clientèle, qui n'arrive pas à faire la distinction, de moins en moins, je dirais, entre un bar et un restaurant, puisque les restobars, ou les bars-restos, ou les restopubs... En fait, il y a comme un mélange des genres qui fait en sorte que le client qui débarque dans un de ces établissements ne fait pas la distinction entre les règles qui s'appliquent à un bar, les règles qui s'appliquent à un restaurant. Alors, tout cela aura pour effet de simplifier la vie de tout le monde et d'amener le cadre législatif, je dirais, au XXIe siècle parce que certaines dispositions, puis je me plais à le rappeler, datent même de l'époque de la prohibition, M. le Président.

Mais l'important, outre le fait de simplifier la vie des gens, le ministre l'évoquait il y a quelques instants... de faire en sorte de favoriser la consommation responsable d'alcool. Et là je dois dire, M. le Président, que ça a été une préoccupation qui nous a animés tout au long de nos travaux, mais qu'à cet égard je pense que l'usage nous permettra de voir si nous avons atteint l'objectif de ce côté-là parce qu'un certain nombre d'intervenants nous ont mis en garde dès le début des travaux quant à un certain nombre de choses.

Par exemple, Éduc'alcool nous a dit que le Québec, qui était certainement la juridiction la plus exemplaire au Canada il y a de cela quelques années, est devenue l'une des juridictions les moins performantes, là où la consommation d'alcool est devenue peut-être la moins responsable. Alors, ça, ça doit nous interpeler, d'autant que la santé publique nous indiquait que la consommation, même modérée, d'alcool — je répète, M. le Président — la consommation même modérée d'alcool est un facteur important de maladie, des maladies graves, probablement aussi important qu'un certain nombre de facteurs qui nous apparaissent comme évidents, c'est-à-dire la sédentarité, le tabac, ainsi de suite. M. le Président, on a été bercés de l'illusion qu'un petit verre de vin rouge par jour, c'était bon pour le coeur, mais ces études qui nous amènent à cette conclusion, qui ont amené l'industrie à nous faire adopter cette conclusion, elles ne s'appliquaient qu'à une catégorie d'hommes d'un certain âge. Lorsqu'on examine les études de façon plus approfondie, on réalise que la consommation, même modérée, d'alcool est un facteur de maladie.

Donc, l'important, pour nous, au long de nos travaux, c'était de s'assurer que, tout en modernisant la législation, tout en faisant en sorte de simplifier la vie des gens, qu'on ne fasse pas en sorte également de banaliser la consommation d'alcool ou de la banaliser encore davantage de telle sorte que les gens se disent : Bof! Il n'y a pas de problème à boire de l'alcool. Regardez, ils ont simplifié la législation. Et, comme je vous le disais, M. le Président, ça, je pense que c'est à l'usage qu'on pourra le voir. Je suis convaincu que les organismes comme la santé publique, comme Éduc'alcool, qui vont suivre attentivement l'évolution des choses suite à l'adoption du projet de loi n° 170, si tant est que c'est le choix de l'Assemblée nationale, dans quelques instants ou dans quelques heures... ça, on pourra le voir à l'usage.

Mais, chose certaine, je pense qu'il y a eu une volonté maintes fois réitérée par cette Assemblée au cours des dernières années de moderniser enfin ce cadre législatif pour le moins vieillot. Eh bien, le ministre l'évoquait tout à l'heure, puis je ne veux surtout pas minimiser l'apport du député de Jean-Lesage, qui a bien défendu, je dirais, les intérêts de l'industrie dans la préparation de ce projet de loi, mais je pense qu'il y a eu du travail qui a été fait en amont à la fois par la régie des alcools, des loteries et des courses et par le ministère de la Sécurité publique, qui ont donné lieu à un premier projet de loi, qui avait été déposé par mon prédécesseur le ministre Robert Dutil, qui, comme j'ai eu l'occasion de le dire, avait le défaut de ce dicton qui dit : Qui trop embrasse mal étreint.

Alors, il a retiré le projet de loi en se disant : On va le retravailler, mais est arrivée une élection qui a mené un nouveau titulaire en poste, à savoir moi-même, M. le Président, et le fait est que j'ai un peu manqué de temps pour être en mesure d'aller au bout de la démarche. J'aurais bien voulu, effectivement, poursuivre le travail qui avait été amorcé par mon prédécesseur, mais, qu'à cela ne tienne, M. le Président, on a quand même travaillé. On a quand même effectué du travail, notamment au niveau de la modernisation de la réglementation.

Et à l'arrivée du nouveau gouvernement, en 2014, après quelques titulaires, il y a eu également des choses qui ont été faites du côté de la réglementation, et le projet de loi n° 170 a été déposé. Et, à cet égard, M. le Président, je salue l'ouverture d'esprit, je dirais l'écoute et la grande collaboration dont a fait preuve le ministre pour nous permettre d'arriver au résultat que nous avons aujourd'hui. Il a souligné, et je l'en remercie, l'extrême grande collaboration des oppositions, disait-il, mais je pense qu'on doit lui rendre le compliment. Il a été très ouvert, et je réitère, M. le Président, que j'avais exprimé, lors de l'adoption du principe du projet de loi, un certain nombre de réserves. J'avais une liste d'à peu près sept réserves, notamment sur la question du respect du pouvoir municipal, sur le fait d'avoir en tout temps minimalement une personne formée sur la consommation responsable d'alcool.

Alors, j'avais exprimé un certain nombre de réserves et je dois dire que, sur l'ensemble de ces réserves, à part peut-être une où on a finalement trouvé une explication pouvant répondre à mon inquiétude sur le fait de permettre la vente d'alcool à sept heures le matin dans les épiceries et les dépanneurs, soi-disant pour favoriser les pêcheurs... mais il n'en demeure pas moins que, pour le reste, M. le Président, je salue la grande ouverture dont le ministre a fait preuve.

Bien sûr, l'idéal, l'idéal, aurait été que, par exemple, sur la question de la formation à la consommation responsable d'alcool, l'ensemble des employés dans le domaine de la restauration, dans le domaine des bars, suive cette formation. C'était le souhait expressément avancé par Éduc'alcool. Il y avait une réticence de la part du gouvernement d'aller jusque-là. Au départ, on voulait se limiter uniquement aux titulaires de permis et aux gérants. Mais on nous a fait comprendre que les titulaires de permis sont rarement sur place, ce qui ne laissait donc que les gérants possiblement concernés. Mais il arrive que les gérants ne soient pas non plus sur place. Alors, on a adopté cette motion, qui... cet amendement, dis-je, qui constitue pour ainsi dire un compromis qui vise à faire en sorte qu'en tout temps il y ait une personne formée pour assurer la consommation responsable d'alcool.

Cela dit, M. le Président, le ministre y faisait référence, on a également parlé de la formation, la formation au niveau secondaire, au niveau du cégep, au niveau des centres de formation professionnelle, au niveau de l'ITHQ, la formation en restauration et la formation au niveau des bars. Et là, M. le Président, on a avancé l'idée que la formation sur la consommation responsable d'alcool puisse être de facto intégrée dans tous les programmes de formation touchant la restauration, les bars, la préparation de cocktails, et ainsi de suite.

• (21 h 50) •

Alors, évidemment, le ministre a exprimé une certaine réceptivité à l'égard de cette idée, mais, disait-il, on manque de temps, résultat du fait qu'on arrive un peu tardivement avec le projet de loi, mais on manque de temps. Ça implique le ministère de l'Éducation, le ministère de l'Enseignement supérieur. On n'est pas en mesure de faire ça à travers ce projet de loi, mais le ministre a manifesté, je dirais, une ouverture qui, je l'espère, trouvera écho, dans la prochaine législature, auprès de quiconque occupera la fonction de ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, puisqu'il y a là une façon, je dirais, M. le Président, de s'assurer qu'il y ait, en amont, formation de personnel qualifié en matière de consommation responsable d'alcool, de telle sorte que ça puisse lever l'hypothèque que représentent les coûts pour les propriétaires de devoir former du personnel. Si tu embauches du personnel qui est déjà formé, évidemment, ça évite aux établissements de devoir ajouter au niveau des coûts de formation. Donc, je pense qu'on répondrait là à plusieurs préoccupations, celles exprimées par Éduc'alcool, qui veut qu'on ait le plus grand nombre de membres du personnel qui soient formés, et celles exprimées par les propriétaires qui disent : Bien, nous, on veut bien, mais il y a des coûts associés à ça.

Alors, si, de facto, dans les formations touchant à la restauration et les bars, il y avait cette formation sur la consommation responsable d'alcool, bien, on formerait en amont des gens qui arriveraient en poste tout à fait en mesure d'appliquer les connaissances en matière de consommation responsable d'alcool. Et la raison pour laquelle j'insiste là-dessus, M. le Président, puis je vous ramène au début de mon intervention, c'est que l'objectif est de faire en sorte, bien sûr, de simplifier la vie des gens, mais de faire en sorte également, M. le Président, qu'on n'ait pas, par l'adoption de ce projet de loi, banalisé la consommation d'alcool dans notre société, considérant les effets pervers qui découlent de la consommation d'alcool.

Alors donc, j'exprime à nouveau, en présence, entre autres, de la ministre responsable de l'Enseignement supérieur, j'exprime à nouveau ce souhait que cette formation sur la consommation responsable d'alcool puisse être intégrée dans les formations dans les centres de formation professionnelle, dans les cégeps, à l'ITHQ, cette formation qui touche la restauration, les bars, la préparation de cocktails, ainsi de suite, qui permettrait de former en amont des gens à la consommation responsable d'alcool et, comme je le disais, qui répondrait à un certain nombre de souhaits qui ont été exprimés à la fois par ceux qui veulent restreindre et ceux qui sont bien contents qu'on étende, qu'on libéralise, si je puis dire, les dispositions de la Loi sur les permis d'alcool.

Alors, M. le Président, je termine tout simplement en réitérant mes remerciements au ministre d'avoir été réceptif aux préoccupations et aux attentes des partis d'opposition, non seulement d'avoir été réceptif, mais d'avoir trouvé les moyens de faire en sorte que nous puissions trouver des terrains d'entente et, à cet égard, je le crois, améliorer le projet de loi, et ce, pour le bénéfice de la société québécoise. Je veux remercier le ministre, certes, mais les collègues ministériels, notamment et particulièrement le député de Jean-Lesage, qui, comme je le disais il y a quelques instants, a fait un travail formidable pour actualiser, si je puis dire, le travail qui avait été fait jusqu'à présent en tenant compte et en se faisant le porte-voix assez efficace de l'industrie.

Je salue et remercie la formidable équipe de la RACJQ, une équipe composée en grande partie de femmes extrêmement efficaces, rigoureuses, l'équipe du ministère de la Sécurité publique, du cabinet du ministre. Et vous me le permettez en terminant, comme j'ai l'habitude de le faire dans ce genre de circonstances, M. le Président, de remercier la toute petite équipe, mais ô combien compétente, qui m'a accompagné pour l'étude de ce projet de loi. Je pense notamment à Louis Lyonnais, qui est conseiller au cabinet du chef de l'opposition officielle, et à mon attaché parlementaire, M. Denis Fortin. Sur ce, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie pour votre intervention, M. le député de Verchères.

Pour la poursuite du débat, je cède maintenant la parole à M. le député de Beauce-Nord. À vous la parole.

M. André Spénard

M. Spénard : Merci, M. le Président. Je vais essayer d'être assez bref parce que, vous comme moi, M. le Président, à nos âges respectifs, on devrait être au lit à cette heure-là.

Alors, évidemment, le projet de loi n° 170, la Loi modernisant le régime juridique applicable aux permis d'alcool et modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques, est, somme toute, un bon projet de loi. Je pense que le travail de débroussaillage, le travail, si on veut, de terrain a été fait par le député de Jean-Lesage, que j'en profite aussi pour remercier, mais il était temps qu'on revoie les permis d'alcool, la demande des permis, l'existence des permis comme tels, pourquoi un tel permis, un permis de bar, un permis de restaurant, permis de terrasse, permis de spectacle, permis... Alors, je pense que ça vient tout fermer. Je ne vous dis pas que c'est parfait, mais ça vient, en tout cas, remettre au XXIe siècle les permis d'alcool. Ça revoit les limites d'application des permis existants aussi, ainsi que la création de deux nouveaux types de permis.

Les permis pourront aussi être assortis de précisions concernant des activités connexes, ce qui est bien. Il permet au titulaire d'un permis de restauration de servir des boissons alcoolisées à une personne qui ne consomme pas d'aliments. On va pouvoir aller au restaurant maintenant, soit accompagner quelqu'un, on ne mange pas, on pourra prendre un verre de vin avec cette personne-là sans nécessairement encourir de sanctions.

Mon confrère de Verchères parlait aussi d'étendre le temps d'ouverture d'un permis d'épicerie pour vendre de l'alcool, c'est-à-dire qu'il passe de 8 heures du matin à 7 heures du matin. Je peux vous dire que les bons pêcheurs, à 7 heures du matin, ils sont déjà sur le lac. Alors, ils sont mieux d'en acheter la veille, avant 11 heures le soir, parce qu'à 7 heures du matin... mais c'est quand même... Les épiciers sont contents, surtout les dépanneurs.

Il permet aussi au titulaire d'un permis de fabrication de boissons alcoolisées de participer à des salons de dégustation sans permis additionnel, ce qui est un plus aussi. Ça prenait un permis additionnel pour pouvoir faire ça.

Évidemment, il y a d'autres choses. Qu'est-ce qui retient le plus de mon attention dans ce projet de loi là, c'est surtout deux choses. Premièrement, quelqu'un de formé sur le plancher en tout temps lorsque le débit de boisson sera ouvert, je pense que c'est Éduc'alcool qui nous le demandait, c'est une avancée. Lui, il demandait que tout le monde soit formé, mais il faut être bien conscients qu'il y a énormément de roulement de personnel dans cette industrie-là, et puis il y a au-dessus de 32 000 serveurs de restaurant, et tout. Alors, tout le monde ne peut pas être formé, mais je pense que c'est déjà un bon début que soit le titulaire du permis soit le gérant, mais au moins tout le temps quelqu'un sur place, soit formé pour limiter la consommation abusive d'alcool.

Et l'autre chose aussi, c'est les boissons sucrées. Il est arrivé une malencontreuse aventure voilà à peu près deux mois et demi, trois mois, sur des boissons sucrées mélangées qu'on vendait dans les dépanneurs, facilement accessibles, et qui étaient rendues qui contenaient des taux d'alcool de 11 %, 12 % et que ça ne goûte pas l'alcool. Alors, quelqu'un peut en prendre deux, trois, c'est comme un jus de fruits, mais à un moment donné, quand il en a calé deux, trois, bien, boum! Il arrive ce qu'il arrive, et puis il arrive des accidents très malheureux, surtout que c'est des jeunes. Alors, là-dessus, M. le Président, je pense que c'est une avancée importante, de limiter ça pour la protection du public, pour la protection surtout de nos jeunes, parce que ces boissons-là, alcoolisées, mêlées, c'est surtout adressé aux jeunes. Je pense que nous, on prend surtout du vin pur.

Alors, là-dessus, ça a été pour moi... On a reçu une trentaine de mémoires, on a reçu 21 groupes en commission parlementaire, des groupes très intéressants, des propriétaires de bars, Éduc'alcool, des avocats, etc., qui venaient nous dire comment était bâti le projet de loi. J'ai vu, en tout cas, dans l'ouverture du ministre, une avancée importante.

Je pense que j'ai travaillé deux ans, avec un mandat apolitique, sur les paradis fiscaux avec le député de Montmorency et le député de Rousseau et, durant deux ans de temps, j'ai eu beaucoup de plaisir sur un mandat apolitique. Et je pense que cette loi n° 170 là, l'étude en commission parlementaire et l'aboutissement de cette loi-là s'est fait pratiquement dans une atmosphère apolitique. Tout le monde voulait arriver à l'objectif de rafraîchir le projet de loi, de rafraîchir les permis comme tels. Et ça, pour un parlementaire qui termine, c'est toujours intéressant de terminer sur un projet de loi, là, où est-ce qu'on met la politique partisane de côté et qu'on étudie un projet de loi avec honnêteté, avec franchise et avec un ministre — que je tiens à remercier — qui a démontré beaucoup d'ouverture pour les amendements.

En terminant, je voudrais remercier aussi toutes les personnes du cabinet ministériel qui nous ont aidés, les différents députés, qui étaient là, du parti gouvernemental, le député de Verchères aussi, et mon recherchiste, M. Romain Vignol, qui m'a donné un bon coup de main là-dessus. Et évidemment je félicite le ministre pour son projet de loi qui est un bon projet de loi qui fait avancer le Québec. Merci, M. le Président.

• (22 heures) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, vous avez contribué vous-même... à décider d'aller vous reposer plus tôt que prévu, alors félicitations! Alors, je vous remercie de votre intervention.

Est-ce que le projet de loi n° 170, Loi modernisant le régime juridique applicable aux permis d'alcool et modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, M. le leader, pour la poursuite de nos travaux.

M. Tanguay : Non, pas pour la poursuite.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ah non! C'est ma référence.

M. Tanguay : Je vous demanderais un vote par appel nominal et, conformément au règlement, l'article 223, de reporter le vote à la période des affaires courantes du mardi 12 juin 2018, s'il vous plaît.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Gendron) : Tel que le prévoit le règlement, c'est ce qui sera fait. Alors, tout le monde a entendu. À vous.

M. Tanguay : Merci beaucoup. Je vous prierais d'appeler l'article 28, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 128

Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Gendron) : À l'article 28, c'est M. le ministre de la Sécurité publique, je crois, qui va poursuivre avec le rapport de la Commission des institutions sur le projet de loi n° 128, Loi visant à favoriser la protection des personnes par la mise en place d'un encadrement concernant les chiens. À vous.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Oui. M. le Président, je ne sais pas si la soirée est jeune. Je ne pense pas, mais la soirée continue. La soirée continue.

Alors, on procède aujourd'hui, ce soir, à la prise en considération du projet de loi n° 128 visant à favoriser la protection des personnes par la mise en place d'un encadrement concernant les chiens. On vient de parler du projet de loi n° 170, et j'ai eu l'occasion de dire à quel point on peut avancer lorsqu'on a la collaboration des oppositions, et c'est encore une fois le cas. Je pense que, dans le sillage de ce que nous avons fait avec le projet de loi n° 170, on a réussi, avec le projet de loi n° 128, à aller de l'avant avec un projet de loi qui, je pense, est extrêmement important pour la sécurité des personnes. Et je dois aussi saluer ici non seulement la collaboration du député de Verchères et celle de la députée de Mirabel, mais également la redoutable efficacité du président de la Commission des institutions, le député de Champlain, qui a présidé de main de maître cette commission et l'étude de ce projet de loi.

On a eu des discussions franches et ouvertes avant même de commencer l'étude détaillée. Je pense que c'était important pour assurer le succès de cette étude, et j'ai été... J'ai expliqué là où je voyais une voie de passage, et, je dois le reconnaître, là, j'ai eu la collaboration des deux oppositions là-dessus, et ce que ça va nous permettre de faire, si le projet de loi est adopté, c'est d'en arriver avec un projet de loi consensuel qui va permettre un encadrement minimal, mais sévère à l'égard des chiens qui pourraient être potentiellement dangereux, notamment.

Retournons un petit peu en arrière. Il y a eu les consultations particulières sur ce projet de loi, qui ont été tenues du 20 au 22 mars dernier, et, à l'occasion, on a eu l'occasion de discuter avec 18 groupes, mais, en plus de ces 18 groupes, M. le Président, on a reçu plus de 1 000 commentaires sur différents aspects du projet de loi. Et il y a un certain nombre de constats qui sont apparus à la lecture de l'ensemble de ces commentaires, avec les échanges que nous avons eus avec les différents groupes, c'est que, surtout lorsqu'on en vient à la désignation de races particulières considérées a priori comme présentant une menace, d'une part, et, d'autre part, la mise en application d'une telle approche qui désigne des races particulières pour l'encadrement des chiens, ce double aspect, on s'est aperçus très rapidement qu'il n'existait pas de consensus dans notre société pour aller de l'avant et qu'il n'existait pas de consensus à l'effet que ça pourrait fonctionner.

Je vais vous donner un exemple, et qui m'a frappé particulièrement en ce qui me concerne. Vous savez qu'en Ontario ils ont une législation qui désigne les pitbulls comme un type de chien présentant des dangers particuliers et qui l'interdit sur le territoire de l'Ontario. Or, nous avons reçu, lors de la commission, Mme Hartig, qui est responsable de l'application des règlements de la ville d'Ottawa, notamment de ces règlements en matière d'encadrement des chiens, qui est venue nous parler des difficultés entourant l'identification de races particulières, difficultés qui avaient déjà été soulignées par plusieurs intervenants plus scientifiques, et elle nous disait que la ville d'Ottawa utilisait son pouvoir discrétionnaire pour ne pas appliquer une réglementation dans la ville d'Ottawa, basée sur l'identification d'une race, malgré le fait qu'il existe, en Ontario, une loi qui désigne les pitbulls de façon particulière.

Alors, c'est clair que pour moi, lors de l'étude de ce projet de loi, il devenait essentiel d'avoir une approche qui aurait une base scientifique solide d'une part ou, à tout le moins, qui ne viendrait pas heurter les constats de la plupart des gens qui ont une orientation scientifique en la matière, d'une part. Et, d'autre part, il fallait s'assurer que la réglementation que nous allions adopter serait appliquée, dans les faits, par les villes. C'est une chose de légiférer et de réglementer, mais ce qui est important, c'est que la réglementation, aussi stricte soit-elle, soit réellement appliquée dans les villes.

Donc, ce double souci là m'a amené à faire une proposition pour qu'on puisse démarrer l'étude article par article, proposition qui a été reçue par les oppositions, et on a pu donc faire ce travail. Ça montre à quel point c'est important de tenir des consultations. Ça montre à quel point c'est important d'être à l'écoute et, si on ne l'avait pas fait ainsi, bien, je pense qu'on ne serait pas rendus à l'étape où on est rendus aujourd'hui, qui est la prise en considération du rapport de la Commission des institutions concernant l'étude détaillée du projet de loi n° 128.

Alors, qu'est-ce que nous avons fait lors de l'étude détaillée? Essentiellement, on a retiré les dispositions du projet de loi qui touchaient l'identification d'une race particulière, mais on a maintenu, on a maintenu ce qui comptait le plus, c'est-à-dire les articles et le cadre réglementaire qui suit l'habilitation qu'on donnerait, avec ce projet de loi, au gouvernement d'établir un cadre réglementaire pour l'ensemble des villes. On a retenu ce qui est l'essentiel, ce qui est important, c'est-à-dire la nécessité et la possibilité d'avoir un encadrement très sévère sur l'ensemble du territoire québécois.

Ça veut dire quoi? Ça veut dire que, de façon générale, l'enregistrement des chiens sera obligatoire. Ça veut dire qu'ils devront être identifiés clairement par une médaille partout. Ça veut dire qu'en public ils vont toujours devoir être tenus en laisse. Ça veut dire ça, notamment, mais on va plus loin parce que les villes pourront déclarer, sur la base d'un comportement avéré, un chien comme étant potentiellement dangereux et auquel cas des normes encore plus sévères vont s'appliquer, notamment le port du licou ou du harnais, la stérilisation, le micropuçage. Bien entendu, l'obligation qu'un chien qui présenterait un danger à cet égard soit sous la supervision constante de son propriétaire en présence d'un enfant, le terrain à l'intérieur duquel ce chien pourrait être gardé en laisse doit être clôturé adéquatement.

Il y a également, dans le projet de loi, avec les habilitations qu'il donne au gouvernement d'édicter les règles par règlement, il y aura le signalement des morsures, le pouvoir d'inspection des villes, la saisie et les enquêtes des municipalités et le pouvoir pour les villes de déclarer un chien potentiellement dangereux. Tout ça se retrouve dans le cadre réglementaire que nous avons déposé en même temps que nous avons fait l'étude détaillée, et c'est ça qui va dicter la rédaction du règlement.

On a été également fortement interpellés, lors des consultations, sur la nécessité de mieux encadrer l'élevage et la vente d'animaux. Ça a été une constante, ça, dans nos consultations. On a dit qu'il y a des éleveurs qui mettent sur le marché des chiens qui pourraient présenter des risques ou qui ont été maltraités à ce stade-là de leur vie et qui pourraient présenter des risques sur le plan comportemental. Alors, avec mon collègue du ministère de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation du Québec, on s'est engagés à mettre sur pied très rapidement un groupe de travail qui aura pour mission de nous fournir des recommandations dans les 12 mois suivant sa formation justement pour viser un encadrement des éleveurs, de manière à concilier les objectifs de respect du bien-être animal avec ceux de la sécurité des personnes. Et on a même inscrit cette nécessité de faire de telles recommandations dans un article de la loi. Donc, ce n'est pas rien non plus.

Alors donc, on est rendus à l'étape de la prise en considération. L'objectif, évidemment, c'est d'aller de l'avant avec deux objectifs principaux en tête : d'abord, assurer la sécurité de la population par un encadrement rigoureux, mais en même temps un encadrement rigoureux qui va être applicable et appliqué par les villes sur l'ensemble du territoire du Québec. Il fallait absolument agir, il fallait donc légiférer en la matière. Et on vient de se donner, à travers les travaux que nous avons faits ensemble — et je tiens à réitérer encore une fois à quel point j'ai apprécié la collaboration des oppositions à cet égard — on s'est donné la capacité effectivement de légiférer au cours de cette session, de cette législature, et donc on s'est donné la possibilité de mieux protéger notre population. Alors, voilà, je vais terminer là-dessus, M. le Président. Merci.

• (22 h 10) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie de votre déclaration. On est toujours sur le rapport de la commission, et je cède maintenant la parole à M. le député de Verchères pour son intervention.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : Alors, M. le Président, il n'y a comme pas de hasard dans la vie. Ça fait déjà deux fois qu'on discute coup sur coup des projets de loi n° 170 et n° 128, qui sont, je pense, deux exemples de collaboration exemplaire entre le gouvernement et les partis d'opposition pour faire en sorte d'améliorer une loi, et ce, pour le bénéfice des citoyennes et des citoyens du Québec. L'histoire ne nous dira jamais jusqu'à quel point le sentiment d'urgence, compte tenu de la fin imminente de la session, a pu jouer dans cette ouverture manifestée par le gouvernement. J'aime à penser que le ministre s'est montré ouvert à la fois sur le 170 et le 128 simplement parce qu'il a jugé que les points de vue qui avaient été amenés non seulement par les témoins, mais également par les partis d'opposition méritaient d'être pris en considération et d'être intégrés d'une façon ou d'une autre dans le projet de loi.

Dans le cas qui nous intéresse, je dois vous dire que j'ai des sentiments partagés à l'égard de ce que nous avons sous les yeux présentement. D'abord, un sentiment de satisfaction et de soulagement parce que nous étions pour ainsi dire confrontés à devoir réaliser la quadrature du cercle, c'est-à-dire de procéder en peu de temps à l'adoption d'un projet de loi d'une cinquantaine d'articles dont certains étaient éminemment controversés. Et je dois dire que, sur la question de l'interdiction de races en particulier, il y avait clairement des positions totalement irréconciliables. Et j'étais pour le moins pessimiste quant à la possibilité que nous puissions trouver un terrain d'entente, une voie de sortie pour nous permettre de faire en sorte que notre travail sur le projet de loi concernant les chiens potentiellement dangereux ne se termine par un échec. Nous avons appelé de tous nos voeux, du côté de l'opposition officielle, l'adoption d'un projet de loi sur les chiens potentiellement dangereux, et ça aurait été pour nous un cruel échec que de ne pas pouvoir procéder à l'adoption de cette loi avant la fin de la présente législature. Mais je dois dire que je ne savais pas trop comment on allait y arriver. Et donc soulagement, satisfaction à l'effet que nous ayons vraisemblablement, au terme de l'adoption du projet de loi qui est présentement à l'étude, d'ici quelques heures, si tel est le souhait de l'Assemblée nationale, nous ayons un cadre minimal.

Et ça m'amène à mon deuxième sentiment, M. le Président. Parce que, je le dis, il s'agit d'un cadre minimal et ça suscite chez moi une certaine déception. Une certaine déception parce que je sais qu'il y a des gens qui sont et qui seront amèrement déçus, également, de nous avoir vus pour ainsi dire précipiter le travail. On a dû précipiter le travail parce qu'on n'avait pas d'autre choix que de précipiter le travail, pour la simple et unique raison qu'on s'est mis au travail à la toute fin de la législature. Dans les circonstances, je reviens à ce que je disais tout à l'heure, on ne voyait pas comment on pouvait, sans charcuter le projet de loi, trouver un terrain d'entente. Et c'est ce qu'on a dû faire, on a dû charcuter littéralement le projet de loi. On est passé d'un projet de loi d'une cinquantaine d'articles à un projet de loi d'une douzaine d'articles. Par un seul amendement, on a pour ainsi dire, M. le Président, scrapé pas loin d'une trentaine d'articles dans le projet de loi. Alors, il y a évidemment une très grande déception. Et la mienne est moindre comparativement à celle de membres de familles de victimes de chiens dangereux, dont certaines sont décédées de leurs blessures atroces, et qui doivent se dire : Les parlementaires, bon, oui, il y aura une loi, mais ils ne sont pas allés au bout de la démarche, et ils en conserveront une amère déception.

Mais une fois qu'on a exprimé ça, M. le Président, une fois qu'on a exprimé le fait qu'on est déçus qu'on se soit pris si tard puis qu'on ait été obligés de faire ce qu'on a fait, il n'en demeure pas moins qu'il faut reconnaître qu'on est parvenus à cela, M. le Président. On est parvenus à cela grâce à l'ouverture du ministre, grâce à l'ouverture des partis d'opposition qui nous permettent de faire en sorte qu'on ne termine pas cette session, et conséquemment cette législature, sans avoir adopté un cadre minimal qui va s'appliquer sur l'ensemble du territoire québécois. Je dis bien «l'ensemble du territoire québécois», du moins je l'espère, puisqu'il y a une disposition dans le projet de loi qui dit que ça ne s'applique pas sur les territoires autochtones. Il y a un engagement de la part du ministre de faire en sorte que ça puisse s'appliquer partout, parce qu'entre vous, puis moi, puis la boîte à pain, M. le Président, la distinction entre le territoire d'Oka puis le territoire de Kanesatake, là, à sa face même, c'est difficile à définir, hein? Le ministre nous a dit qu'un chien qui franchirait la frontière de Kanesatake pour se retrouver à Oka serait tout à coup sujet aux dispositions de la loi, alors qu'il pourrait ne pas l'être sur le territoire de Kanesatake. Alors donc, il y a une volonté de la part du ministre de faire en sorte que ce cadre minimal s'applique sur l'ensemble du territoire avec les ajustements nécessaires, il va sans dire, compte tenu des différences culturelles qui existent dans certaines communautés autochtones par rapport à la société québécoise en général.

Alors, on a au moins ce cadre minimal. Et là où pour moi il était important, M. le Président, puis je vais terminer là-dessus, qu'on aille plus loin, qu'on fasse un pas de plus, c'était sur la question des élevages, des usines à chiots, parce qu'invariablement, peu importent les positions des gens, qu'ils aient été en faveur ou contre l'interdiction de races de chien ou de soi-disant races de chien, parce que ça, c'est une autre difficulté, M. le Président, qu'est-ce qui est une race de chien puis qu'est-ce qui ne l'est pas, mais, indépendamment de cela, je pense que l'ensemble des intervenants s'entendaient pour dire : Il faut aller plus loin et ce qu'il faut faire, c'est réglementer la question des élevages pour s'assurer de la qualité des chiens qui en sortent, puisque les intervenants nous ont dit que la personnalité, le comportement d'un chien étaient définis dans les premiers mois de la vie. Alors, si, les premiers mois de la vie, il y a des êtres humains qui leur font vivre l'enfer, ça va nécessairement avoir une incidence sur le comportement de cet animal par la suite. S'il s'agit d'un chien d'une petite race, comme celui que j'ai à la maison, ça n'a pas beaucoup d'incidence, mais, s'il s'agit d'un chien puissant, ça peut s'avérer extrêmement dangereux, donc il faut réglementer. Et là encore on était pris par les contraintes de temps. Compte tenu des contraintes de temps, on ne pouvait pas y arriver.

Et là j'insistais pour qu'on trouve une solution. Et le ministre l'a évoqué, on a trouvé une solution. On a introduit dans le projet de loi un article qui nous projette vers l'avant, qui dit que, dans les 12 mois suivant la mise en place d'un comité de travail conjoint par le ministre de la Sécurité publique et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, dans les 12 mois, il y aura des recommandations qui devront être faites aux deux ministres. Mon inquiétude, c'était : Bon, bien, si le comité est mis en place dans 10 ans, 12 mois plus tard, ça nous mène dans 11 ans. Donc, quelle assurance qu'on a que ça va se mettre en branle rapidement? J'ai demandé au ministre : Est-ce que ce sera mis en branle dans le cadre de la présente législature? Il m'a répondu oui. C'est donc dire, M. le Président, que, d'ici un an, à peu près, les futurs ministres de la Sécurité publique et de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation auront des recommandations qui nous permettront, je l'espère, d'apporter des modifications à la loi sur la question des élevages. Alors, je pense que, sur ce, on a fait un travail considérable.

Alors, je pourrais en dire encore long, M. le Président, mais je vais laisser un peu de temps à ma collègue, puisqu'on veut, autant que faire se peut, terminer la prise en considération aujourd'hui. J'aurai probablement l'occasion de m'épancher plus longuement lors de l'adoption finale. Je vous remercie, M. le Président.

• (22 h 20) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : C'est une bonne idée parce qu'on finit à 10 h 30, quoi qu'il advienne. Alors, je vous remercie pour votre intervention, et je cède la parole maintenant à Mme la députée de Mirabel pour son intervention.

Mme Sylvie D'Amours

Mme D'Amours : Merci, M. le Président. C'est le projet de loi le plus édulcoré que j'aurai vu durant la 41e législation. On passera de 53 articles environ à une douzaine d'articles dans le cadre réglementaire, puis c'est un cadre... avec un cadre réglementaire, et, pour moi, c'est un cadre réglementaire irrésolu, puis je m'explique : quand on regarde le cadre réglementaire et qu'on lit attentivement chaque phrase, on ne voit pas le mot «doit». Je m'explique, là : «Tous les chiens de plus de six mois devraient être enregistrés dans le délai prévu...» Ce n'est pas marqué «doit être enregistré». «Pour enregistrer un chien, les renseignements suivants devraient être fournis...» Ce n'est pas marqué «doit être fourni». Et je pourrais descendre comme ça tout au long du cadre réglementaire.

Si on considère, M. le Président, que les chiens potentiellement dangereux... Et vous en conviendrez avec moi que, si on dépose un projet de loi, c'est qu'il y a une considération à cet égard. Pensez-vous vraiment qu'un projet de loi et ce cadre réglementaire... nous allons atteindre l'objectif, qui est de rendre sécuritaire tous les endroits au Québec? Bien, permettez-moi d'en douter.

Le Québec compte plus de 1 100 municipalités, et je suis d'accord avec le fait que nous devons respecter l'autonomie municipale, puis je tiens à le préciser ici, mais, lorsqu'il s'agit de sécurité publique, nationale, cela ne doit pas être une raison de se dégager de la responsabilité qu'un ministre de la sécurité civile doit avoir envers la population québécoise. Il faut se rappeler qu'un maire et son conseil municipal adoptent des règlements et que, dans un éventuel changement lors d'élections municipales, le maire ou la mairesse nouvellement élue peut changer tout règlement au gré de sa volonté. Nous en avons été témoins, à la ville de Montréal, de changements de règlements au sujet des chiens dangereux lors des dernières élections municipales.

Vous savez, oui, on a discuté avec le ministre, avec mon collègue de Verchères pour arriver à une entente possible, pour arriver à un projet de loi qui soit déposé avant la fin de la législation, oui. Mais, si nous avions voulu régler la situation par un projet de loi, nous aurions eu besoin de temps pour discuter, nous aurions eu besoin de temps pour réfléchir, nous aurions eu besoin de temps pour analyser surtout ce qu'on avait entendu en commission. Moi, je déplore le temps — et je l'ai dit au ministre — je déplore le temps entre le travail de la commission et le dépôt du projet de loi actuel. Ce temps aura fait son oeuvre. Malheureusement, ce temps aura été vide de sens.

Quel était l'objectif premier de ce projet de loi? Nous avions devant nous, au tout début, un projet de loi visant à favoriser la protection des personnes, des aînés, des enfants du Québec par la mise en place d'un encadrement concernant les chiens dangereux. Pourquoi ce projet de loi était si important et nécessaire? Parce qu'il y avait eu blessures, il y avait eu blessures graves, il y avait eu décès de personnes. Nous avons perdu le contrôle de notre gestion animalière. Et, au fait, en y réfléchissant bien, est-ce qu'on l'a déjà eu, le contrôle?

Donc, nous devions, par ce projet de loi, assurer la protection des citoyens du Québec en déterminant un cadre responsable et sécuritaire pour l'ensemble du territoire québécois. Mais, en déposant un projet de loi comme celui-ci et en remettant la responsabilité aux municipalités, ce que je crains, c'est qu'il s'installe un faux sentiment de sécurité au Québec.

En partant du principe que le Québec s'est doté d'une loi sur la santé et le bien-être animal, nous devions, au Québec, passer d'une juridiction des plus laxistes en Amérique du Nord en matière de règles sur le bien-être animal à une des plus strictes. Le manque de responsabilité de certains propriétaires, la méconnaissance du comportement de l'animal, la négligence envers les animaux, l'absence de contrôle et de surveillance des élevages et de la vente d'animaux et l'absence de programmes d'éducation nous donnent ce bilan peu reluisant qu'a présentement le Québec, et c'est pour ces raisons que nous devions légiférer afin d'avoir une loi qui nous redonne le contrôle dont nous avions besoin comme société afin de passer à une prochaine étape.

Nous devrons collectivement, comme société, aller vers une gestion éthique et efficace des animaux de compagnie au Québec où tous trouveront leur autonomie dans cette démarche. Si nous avions eu le temps et la chance de travailler sur le projet de loi initial afin que tous comprennent l'enjeu de la sécurité, je suis convaincue que nous aurions réussi à tous nous entendre, car moi, j'avais confiance que les propriétaires de chiens comprennent la démarche de ce projet de loi et qu'ils fassent partie eux aussi de la solution. Cela aurait été drôlement intéressant comme projet de société.

Maintenant, il est minuit moins une pour ce projet de loi. Nous terminons de siéger dans quatre jours ici, à Québec. Nous serons tous dans nos comtés respectifs pour l'été. Et j'espère, du plus profond de mon coeur, qu'il n'y aura plus d'accidents graves ou de mortalité, au Québec, causés par des chiens potentiellement dangereux. Oui, nous avons des discussions entre nous. J'ai mentionné au ministre que ma formation politique allait être d'accord avec ce projet de loi. Ce projet de loi est-il parfait? Non. Ce projet de loi va-t-il répondre au besoin initial? Non. Mais, au moins, même édulcoré, il y a ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie de votre intervention et... C'est-à-dire que le projet de loi n° 170 modernisant le régime juridique applicable aux permis d'alcool et modifiant diverses... la prise en considération du rapport... et modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons... Ce n'est pas ça pantoute. J'ai tourné la page trop vite, alors, puis c'est l'autre projet de loi.

Mise aux voix du rapport

Le rapport de la Commission des institutions portant sur le projet de loi n° 128, Loi visant à favoriser la protection des personnes par la mise en place d'un encadrement concernant les chiens, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, adopté. M. le leader.

M. Tanguay : Oui. Pour le temps qu'il reste, M. le Président, conformément à la déclaration du président du 5 juin dernier en début de séance, je fais motion pour ajourner nos travaux au mardi 12 juin 2018, à 9 h 40.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, nos travaux sont ajournés tel qu'indiqué. Merci.

(Fin de la séance à 22 h 28)