(Neuf heures quarante et une
minutes)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, chers collègues, je vous souhaite une très bonne séance. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous en
sommes à la rubrique de la déclaration des députés, et je cède la parole à M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Féliciter MM. Camille Cormier et Éric Solomon
pour leur engagement communautaire
M. Germain Chevarie
M. Chevarie :
Merci, M. le Président. Je tiens aujourd'hui à souligner l'initiative
communautaire de deux citoyens
des Îles, MM. Camille Cormier et Éric
Solomon. En effet, ces deux messieurs ont rassemblé autour d'eux quelques
citoyens et entreprises bénévoles et ont mis en terre, entretenu, et
récoltent maintenant des pommes de terre qu'ils fournissent gratuitement à la banque alimentaire des Îles. Celle-ci peut donc en faire
la distribution aux personnes dans le besoin qui feront appel à leur
service.
C'est dans un
souci d'offrir aux plus démunis un accès à des produits alimentaires frais et naturels que ces messieurs
se sont impliqués de la sorte aux Îles-de-la-Madeleine.
Une excellente initiative qui fait une différence dans la communauté et
qui mérite d'être applaudie. Merci et bravo à MM. Cormier et Solomon! Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. M. le député d'Abitibi-Ouest
et vice-président de l'Assemblée, je vous cède la parole.
Féliciter M. Pierre
Tremblay, lauréat du prix Thérèse-Pagé
M. François Gendron
M.
Gendron : Bonjour, M.
le Président. Vendredi dernier, dans le cadre des Journées de la culture, le prix Thérèse-Pagé était décerné à une personnalité qui a marqué le monde des
arts et de la culture d'Amos, M. Pierre Tremblay.
Ce retraité
de l'enseignement a toujours craqué pour le patrimoine et l'histoire. Il a
fondé la Société du patrimoine Harricana,
défendu ardemment la préservation de la maison Hector-Authier. Agent des
terres, c'est par les arts et la culture qu'il s'est impliqué. Au fil de son implication, M. Tremblay a toujours
mis en valeur l'histoire du milieu. Qu'aurait été le spectacle La folle odyssée de Bernadette
sans sa généreuse contribution? Il a également participé aux textes et à la mise en scène de Ce sera une cathédrale et Le
chemin de Geneviève. Pierre possède plus d'une corde à son arc, avec
l'artiste peintre Claude Ferron, il laisse sa marque en poésie dans un
livre sur les églises abitibiennes.
Mon cher
Pierre, je te félicite très chaleureusement. Savoure cet hommage bien mérité et surtout reste
comme tu es, un passionné des arts et de la culture! Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Mme la députée de Repentigny, à vous la parole.
Rendre hommage à Mme
Rose Dufour pour son
engagement auprès des femmes en difficulté
Mme Lise Lavallée
Mme
Lavallée : Merci, M. le Président. Il y a de ces femmes qui font un travail exceptionnel,
faisant oeuvre utile pour toute notre
société. À travers le travail que j'ai fait au cours des derniers mois, un nom
revenait sans cesse, celui de Rose Dufour.
J'ai eu la
chance de rencontrer cette femme volontaire, énergique, déterminée, radieuse,
lumineuse, passionnée, mais, d'abord et avant tout, une femme d'une grande humanité. Alors, qu'elle
aurait pu profiter d'une retraite douce et tranquille, Mme Dufour a décidé de consacrer son temps à la cause de
certaines femmes trop souvent oubliées parce
que leur réalité est trop dure, troublante, dérangeante, confrontante.
Nous n'honorerons jamais assez cette femme d'une grande humilité, fondatrice de
La Maison de Marthe, qui ne laisse personne indifférent sur son passage.
Je souhaite
donc que ma déclaration soit pour elle un hommage, que je lui rends en
mon nom, mais aussi au nom de toutes
ces femmes qui ont eu la chance de croiser son chemin. Je terminerais en lui
disant : Je vous salue, Rose Dufour. Merci.
Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée de Repentigny. M. le
député de Maskinongé,
à vous la parole pour votre déclaration.
Rendre hommage à M. Jules Baribeau, fondateur
du Festival de la galette de sarrasin inc.
M. Marc H. Plante
M. Plante :
Merci beaucoup, M. le Président. Donc, aujourd'hui, je souhaite rendre hommage
à un homme d'exception qui nous a malheureusement quittés la semaine dernière, soit M. Jules Baribeau, reconnu comme le père
Sarrasin.
M.
Baribeau est un homme de coeur, un passionné qui s'est démarqué par ses
nombreuses implications au sein de notre
communauté. Il est un des membres fondateurs du Festival de la galette de sarrasin,
où il a personnifié, bien sûr, le père
Sarrasin durant les 30 dernières années. Il a aussi agi à titre
d'ambassadeur de sa communauté et a contribué à faire rayonner notre ville, notre festival, mais surtout
nos produits du terroir à travers le monde. D'ailleurs, lors des nombreux
voyages en Belgique, il a importé l'idée de créer des confréries visant à unir
tous les gens en faisant la promotion de produits
du terroir. Aujourd'hui encore, La Confrérie des sarrasins est dédiée à
la promotion du sarrasin. La Confrérie de la Nouvelle-France, dédiée à la promotion de la bière brassée dans notre
coin, et la Confrérie des dames de Gerlaise, dédiée à la promotion de la
culture de fruits des champs, sont encore des acteurs présents de son héritage.
Donc, M. Baribeau, aujourd'hui
je rends hommage, en mon nom, au nom de notre communauté...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Je vous remercie, M. le
député de Maskinongé, pour cette déclaration. M. le
député de Verchères, à vous la parole pour votre déclaration.
Souligner le 30e anniversaire du Club Lions
Sainte-Julie-de-Verchères
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron :
M. le Président, c'est le 28 mai dernier qu'était souligné le 30e anniversaire
du Club Lions Sainte-Julie-de-Verchères.
Voilà maintenant 30 ans, en effet, que les membres du
Club Lions Sainte-Julie-de-Verchères,conformément à l'objectif fondamental poursuivi par cette remarquable organisation à l'échelle internationale, s'emploient avec dévouement à l'amélioration constante de la
qualité de vie dans leur milieu, et ce, de diverses façons. Faisant preuve
de la noblesse, de la détermination et du
courage qu'incarne leur animal emblématique, ils viennent ainsi en aide à des
personnes avec lesquelles le destin a pu se
montrer moins clément en accordant notamment une attention particulière aux
non-voyants ainsi qu'aux personnes âgées
souffrant d'isolement ou en soutenant, entre autres, le centre de soins
palliatifs de La Maison Victor-Gadbois ainsi que l'organisme pour jeunes
handicapés La Clé des champs.
Félicitations
et merci, donc. Bon 30e anniversaire
et longue vie au Club Lions Sainte-Julie-de-Verchères et à ses membres!
Je vous remercie, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Verchères. M. le
député de Sainte-Rose, à vous la parole.
Souligner le 20e anniversaire de la Corporation pour
la mise en valeur du Bois de l'Équerre
M. Jean Habel
M.
Habel : Oui, merci, M. le Président. Il me fait plaisir de souligner les 20 ans du Bois de l'Équerre. En effet, en
1997, un regroupement de citoyens fonda la Corporation pour la mise en valeur du Bois de l'Équerre. Cet organisme
à but non lucratif s'est donné pour mission
de poser des gestes et d'engager des démarches nécessaires à la conservation
et à la mise en valeur de ce merveilleux milieu naturel. La corporation
travaille jour après jour à l'atteinte des objectifs suivants : la protection d'un périmètre qui respecte la capacité de
support des écosystèmes, la conservation de ce riche écosystème, la mise en valeur par l'aménagement du
site et la programmation d'activités, la sensibilisation et l'éducation
citoyenne.
Je
tiens à souligner le travail et l'engagement des bénévoles qui, depuis
20 ans, favorisent la préservation de ce joyau naturel à Laval.
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Sainte-Rose. M. le député de Blainville, je vous cède la parole pour
votre déclaration.
Souligner le 25e anniversaire du Club Lions Blainville
M. Mario Laframboise
M.
Laframboise : M. le
Président, merci. Aujourd'hui, je veux souligner le travail exceptionnel d'un
organisme qui, depuis un quart de
siècle, se dévoue au mieux-être des Blainvillois et Blainvilloises, le Club Lions de Blainville, fondé par M. Gaëtan Cayer en 1992. Présidente du Club
Lions de Blainville, Mme Pierrette Aubin compte 11 ans de bénévolat
au sein de cette organisation qui se donne comme mission notamment de venir en aide aux non-voyants, aux personnes
atteintes du diabète et aux démunis de notre
collectivité locale. Des fonds sont également remis pour la recherche sur le cancer, les maladies du coeur et l'autisme. Au fil
des ans, le Club Lions de Blainville a réalisé quelques petits miracles, entre autres d'avoir sauvé de la
cécité deux jeunes enfants grâce à une clinique ophtalmologique.
Toute
l'organisation n'a ménagé ni son temps ni son énergie au cours
de toutes ces années. À titre de député
de Blainville, permettez-moi de féliciter tous les membres du Club Lions
de Blainville, passés et présents, ainsi que sa présidente, Mme Pierrette
Aubin. Vous pouvez être fiers de votre engagement et de votre dévouement au
sein de la communauté blainvilloise. Bon 25e anniversaire et longue vie au
Club Lions de Blainville!
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci, M. le député de Blainville. Mme la
députée de Gatineau,
à vous la parole.
Souligner le 50e anniversaire de la bibliothèque
J.-R.-L'Heureux
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : Alors, M. le Président, c'est avec plaisir que je joins ma voix à celles des citoyens de
Maniwaki pour souligner le
50e anniversaire de la bibliothèque J.-R.-L'Heureux. Ce jalon important
dans l'histoire de la bibliothèque
nous rappelle son rôle de premier plan au
sein de la communauté val-gatinoise. 50 ans à favoriser la
lecture, la littératie, l'apprentissage
et la créativité tant chez les tout-petits que chez les adultes et les aînés de
la communauté. 50 ans à faire rayonner et découvrir la culture d'ici et d'ailleurs,
et à mettre en valeur notre patrimoine. Le sanctuaire culturel qu'est devenu cet établissement aura marqué la
vie de nombreuses personnes dans La Vallée-de-la-Gatineau, du moins celle
de mes enfants, et demeurera au coeur de la
vie culturelle locale pour encore de très nombreuses années. Le fait d'y avoir
un accès facile contribue sans aucun doute à la qualité de vie des
citoyens de chez nous.
À
tous ceux et celles qui ont été impliqués dans l'histoire de cette belle
réussite que célèbre la bibliothèque, je dis un sincère merci et longue vie à
la bibliothèque J.-R.-L'Heureux! Merci, M. le Président.
• (9 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, Mme la députée de Gatineau.
Alors, M. le député d'Abitibi-Est, vous regagnez votre siège rapidement, et je
vous cède la parole pour votre déclaration de député. À vous la parole.
Souligner le 40e anniversaire de l'usine Uniboard Canada
inc.
M. Guy Bourgeois
M.
Bourgeois : Merci, M. le Président. Aujourd'hui, je tiens à souligner
les 40 ans d'existence de l'usine de panneaux
d'Uniboard Canada à Val-d'Or. Cette usine est un acteur important
dans le développement économique de notre région. Elle permet à
200 familles de contribuer à la vitalité de notre municipalité et aussi à l'ensemble
de l'Abitibi-Témiscamingue.
Je
tiens d'ailleurs à saluer l'initiative de l'entreprise à devenir plus performante tout en diminuant son empreinte environnementale. Son projet de modernisation lui permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 9 000 tonnes
de CO2 annuellement. Cette
volonté démontre qu'Uniboard est un leader dans la transformation de la
ressource. Et je suis fier de mon gouvernement puisqu'il a soutenu ce
projet. Cet investissement laisse présager un avenir prometteur non seulement
pour la consolidation d'emplois, mais pour la création d'emplois de qualité.
Bravo aux travailleurs et à la direction d'Uniboard à Val-d'Or! Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député
d'Abitibi-Est. Alors, voilà qui met un terme à la rubrique Déclarations
de députés.
Et je suspends les
travaux de l'Assemblée quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 51)
(Reprise à 10 h 1)
Le Président :
Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Merci. Je ne vous ai
pas dit de vous asseoir.
Présence d'une délégation de parlementaires bavarois
dirigée
par la présidente du Landtag, Mme Barbara Stamm
J'ai
le plaisir de souligner la présence, dans nos tribunes, d'une délégation de parlementaires bavarois à l'occasion
de la 10e session de la Commission parlementaire mixte Québec-Bavière, dirigée par la présidente du Landtag,
Mme Barbara Stamm. (S'exprime en allemand).
Nous poursuivons les affaires
courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
À la rubrique Présentation de projets de loi...
Des
voix : ...
Présentation de projets de loi
Le Président :
S'il vous plaît! À la présentation de projets de loi, M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois :
Merci, M. le Président. S'il vous plaît, veuillez appeler l'article a du
feuilleton.
Projet de loi n° 891
Le
Président : À l'article a du feuilleton, M. le député de Gouin
présente le projet de loi n° 891, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail afin de modifier
la procédure de fixation et de révision du salaire minimum. M. le député
de Gouin.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois :
Merci, M. le Président. Ce projet de loi prévoit que le salaire minimum est
fixé par l'Assemblée nationale. Pour
ce faire, il modifie la Loi sur les normes du travail en remplaçant l'article
qui prévoit que le salaire minimum
est fixé par règlement du gouvernement par des dispositions qui édictent une
procédure de fixation et de révision du salaire minimum par l'Assemblée
nationale.
Ce
projet de loi prévoit qu'un comité composé de membres du personnel du ministre
du Travail soumet au ministre du
Travail un rapport proposant les
facteurs à considérer pour fixer les taux du salaire minimum pour les trois
prochaines années. Le ministre dépose ensuite ce rapport à l'Assemblée
nationale.
Ce
projet de loi édicte également que le rapport du comité doit faire l'objet de consultations publiques tenues par la commission
compétente de l'Assemblée nationale. À l'issue de ces consultations, un débat d'une
durée minimale de 10 heures est
tenu par la commission compétente. Ce projet de loi énonce que,
suivant ce débat, la commission compétente dépose un rapport final à l'Assemblée nationale dans lequel elle recommande
les taux du salaire minimum ainsi que leur majoration pour les trois prochaines années. L'Assemblée
nationale procède ensuite au vote sur ce rapport.
Ce
projet de loi prévoit également qu'au plus tard le 31 mars de chaque année
le ministre du Travail soumet une analyse de l'impact du salaire minimum
en vigueur sur le marché du travail, les conditions de vie des salariés et les inégalités sociales. La commission compétente de
l'Assemblée étudie ensuite cette analyse d'impact et peut recommander à
l'Assemblée nationale une augmentation des taux du salaire minimum.
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, M. le ministre de la Santé.
Rapport annuel du ministère de la Santé et
des Services sociaux
M.
Barrette : M. le Président, permettez-moi de déposer le rapport annuel de gestion 2016‑2017
du ministère de la Santé et
des Services sociaux.
Le Président :
Alors, ce document est déposé. M. le ministre de l'Environnement.
Rapport annuel de RECYC-QUÉBEC
M.
Heurtel : ...permettez-moi
de déposer le rapport annuel 2016‑2017 de la société
d'État RECYC-QUÉBEC.
Le Président :
Alors, ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.
Réponses à des pétitions
M.
Fournier : M. le Président, je dépose les réponses du gouvernement
aux pétitions présentées par le député de Richelieu le 18 mai 2017, la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques le 31 mai, le député de Labelle le 1er juin, le député de
René-Lévesque le 7 juin, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques le 7 juin, le député de Granby le 7 juin, la députée de Crémazie le
13 juin, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques le 14 juin et le
député de Saint-Jérôme le 15 juin 2017.
Le Président :
Alors, ces documents sont déposés.
Rapport
annuel de la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse
Pour ma part,
je dépose le rapport d'activité et de gestion 2016‑2017 de la Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse.
Dépôt de rapports de
commissions
À la rubrique
Rapports de commissions, M. le
Président de la Commission des finances publiques et député
de Montmorency.
Consultations
particulières sur le projet de loi n° 135
M.
Bernier : Merci, M. le
Président. Je dépose le rapport de la Commission
des finances publiques qui, les 26,
27, 28 septembre et le 3 octobre
2017, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet
de loi n° 135, Loi renforçant la gouvernance et la gestion des
ressources informationnelles des organismes publics et des entreprises
du gouvernement. Merci.
Le Président : Alors, ce
rapport est déposé.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt de pétitions, Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve.
Appuyer les employés touchés par les compressions
budgétaires dans le
domaine de la numérisation de la mémoire collective et du patrimoine
Mme
Poirier : Merci, M.
le Président. Je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale, signée par
309 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant que ces coupures visent plus de 25 pertes
d'emploi dans le secteur de la numérisation et d'autres services à la
BANQ;
«Considérant que plusieurs vieux documents audio, audiovisuels, papiers et autres supports
de notre patrimoine collectif québécois doivent être numérisés très rapidement;
«Considérant l'investissement de plus de 3 millions de dollars en équipement pour numériser notre patrimoine;
«Considérant
l'importance de protéger et de numériser notre patrimoine, notre histoire et
notre mémoire collective québécoise;
«Considérant que la BANQ représente le coeur de
la conservation du patrimoine du Québec;
«[...]l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du
Québec de ne pas couper dans le secteur de la culture, et particulièrement à la
BANQ, de conserver le budget de la numérisation afin de préserver des emplois
de qualité et de continuer le travail de préservation et de numérisation de la
mémoire collective ainsi que du patrimoine du Québec.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition.
Le Président : Alors,
l'extrait de cette pétition est déposé. M. le député de Chambly.
Suspendre l'implantation d'un centre
d'injection supervisée dans les
locaux de l'organisme Spectre de rue et instaurer des balises
claires quant à l'établissement de tels centres
M. Roberge : M. le Président, je
dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par
135 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant l'ouverture prévue d'un centre
d'injection supervisée dans les locaux de l'organisme Spectre de rue, à
Montréal;
«Considérant
que ces locaux sont sur un corridor scolaire desservant deux écoles primaires
et une école secondaire et à 200 mètres de l'école primaire
Marguerite-Bourgeoys;
«Considérant la plage horaire d'ouverture
envisagée, calquée sur celle des écoles;
«Considérant les grandes inquiétudes suscitées
dans la communauté;
«Considérant le
non-respect de nombreuses considérations identifiées par le comité de pilotage
rassemblant élus, SPVM, Santé publique, Spectre de rue et acteurs clés
dans le secteur pour s'assurer de l'acceptabilité sociale;
«Considérant
que, dès 2011, la commissaire scolaire avait émis des réserves claires sur
l'implantation d'un centre d'injection supervisée à proximité de l'école
Marguerite-Bourgeoys;
«Considérant
le manque d'analyse précise quant à ce site et l'absence de mise à jour des
données depuis 2011;
«Considérant que, le
22 février 2017, la commissaire scolaire a réitéré son besoin de balises
claires pour l'établissement d'un site
d'injection supervisée à proximité d'une école pour la sécurité des élèves,
tout comme le besoin d'en informer les populations locales;
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement du Québec de suspendre sans attendre
l'implantation d'un centre d'injection
supervisée dans les locaux de l'organisme Spectre de rue et d'instaurer des balises
claires pour l'établissement d'un
site d'injection supervisée à proximité d'une école, d'une garderie, d'un parc,
d'un centre de sports et de loisirs ou d'un corridor scolaire comprenant
un mécanisme de consultation publique [...] avant de prendre une décision.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition.
• (10 h 10) •
Le Président : Alors,
l'extrait de cette pétition est déposé. J'ai reçu de la part de M. le député de
Mercier une demande de dépôt d'une pétition
qui est non conforme. Est-ce que j'ai un consentement pour le dépôt? Consentement. M. le député de Mercier, c'est à vous la
parole.
Introduire des cours d'exercice
physique
dans les écoles
M. Khadir : Merci, M. le Président. Je
dépose donc l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale,
signée par 15 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant qu'il est prouvé scientifiquement
que nos enfants pourraient améliorer leurs résultats scolaires avec des
exercices pratiqués deux fois par jour;
«Considérant que nos jeunes apprendraient une
routine qu'ils pourraient conserver à l'âge adulte;
«Considérant que, bien sûr, les récréations
doivent demeurer libres pour les enfants;
«[Et] qu'il est vital que nos enfants bougent
tous les jours et c'est pour cette raison que nous demandons aux professeurs
des écoles de s'impliquer avec les professeurs d'éducation physique;
«Considérant
que cette requête est faite après plusieurs années d'observation et d'études
scientifiques. Plusieurs enfants n'aiment pas les sports, mais une
routine d'exercices individuels pratiquée en groupe, oui;
«Considérant
qu'il n'est pas nécessaire de passer par des commissions scolaires pour étudier
la situation. Nous avons l'expertise
nécessaire dans chaque école. Nos professeurs d'éducation physique qui ont
étudié longtemps à l'université sont des spécialistes pour nos enfants;
«[...]l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du
Québec : d'amputer le temps des exercices aux autres matières enseignées; [et] d'introduire des cours
d'exercices aux enfants dans les écoles, et ce, à tous les jours, à raison de
15 minutes le matin et de 15 minutes à la fin de la journée.»
M. le Président, je certifie que cet extrait est
conforme à l'original.
Le Président : Alors,
l'extrait de cette pétition est déposé.
Il n'y a pas
de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de
droit ou de privilège.
Je vous avise qu'après la période de questions
et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de Mme la ministre déléguée à la Réadaptation, à la
Protection de la jeunesse, à la Santé publique et aux Saines habitudes
de vie proposant que le projet de loi
n° 99, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres
dispositions, soit adopté.
Questions et réponses
orales
Alors, nous en sommes maintenant rendus à la
période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à M. le chef
de l'opposition officielle.
Consultation sur la
discrimination systémique et le racisme
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
M. le Président, hier, deux députés du Parti libéral ont dit que la proposition
du premier ministre et de sa ministre d'organiser une commission sur le
racisme et la discrimination a été très mal reçue par la population au Québec, dans Louis-Hébert en particulier. Le
premier ministre, ce matin, a dit : On a entendu le message, il faut bien
réfléchir ensemble à la façon d'aller
aux résultats les plus concrets, il faut réfléchir profondément à ramener ça
dans la bonne direction.
Je suis content d'entendre le premier ministre
le dire maintenant, mais je tiens à lui dire qu'en février dernier je lui ai proposé d'être rassembleur en faisant en
sorte d'adopter ensemble des mesures concrètes contre le racisme et la discrimination dans la session du printemps dernier.
Nous en avons proposé plusieurs. Il les a rejetées. C.V. anonymes, c'est bon en Grande-Bretagne, c'est bon à Ottawa,
ce n'est pas bon pour lui. D'empêcher les employeurs d'écarter des demandeurs d'emploi étrangers parce qu'ils n'ont
pas d'expérience de travail au Canada, c'est ce que fait l'Ontario. Ce
n'est pas bon pour lui. Je lui ai dit aussi qu'on aurait pu, dès le printemps
dernier, unanimement voter un projet de loi sur la laïcité et les accommodements religieux s'il
voulait juste mettre un peu d'eau dans son vin puis accepter
Bouchard-Taylor. Il a refusé ça. Bien, c'est ça, la bonne direction.
Va-t-il enfin prendre
la bonne direction?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Évidemment, il y a plusieurs sujets qui se sont entremêlés. Mais, vous
savez, en politique, il faut savoir,
bien sûr, recevoir les messages de la population mais jamais, jamais aux dépens
de ses principes. Le jour où on fait ça,
on entre dans un domaine très, très négatif, et ce n'est pas le domaine dans
lequel moi, je veux me situer. Sur la question de la laïcité, je pense qu'on a, au contraire, l'occasion d'adopter à
l'unanimité ici un projet de loi, j'espère, qui fait le reflet de ce sur
quoi nous nous entendons tous et toutes. On y reviendra.
Sur
la question de la proposition de la commission, je vais répéter encore une fois
ce que j'ai dit ce matin, mais, par
rapport à ce qui a été dit, il s'agit de mesures concrètes. Il a raison, il
n'est pas du tout exclu que plusieurs de ces mesures se retrouvent dans
les actions que nous poserons au moment venu, c'est-à-dire au moment où on aura
donné aux personnes touchées, aux personnes qui sont profondément blessées, qui
sont malheureuses en raison de ce sentiment d'exclusion
qu'ils vivent ou qu'elles vivent, la possibilité de s'exprimer, la possibilité
d'entendre des experts sur la question, de faire état des expériences internationales et d'aller dans la
direction la plus efficace possible quant au résultat souhaité, qui est quoi?, qui est le fait que tous les
Québécois et les Québécoises, quelles que soient leur origine ethnique — et je sais qu'il est d'accord avec
ça — la
couleur de leur peau, leur religion, aient les mêmes accès au travail, au
logement, à une représentation dans les
médias qui témoigne de leur présence dans la société. Je pense qu'il s'agit là
d'enjeux concrets sur lesquels on est capables d'agir au Québec.
Je
vais répéter, en terminant, que je ne crois pas du tout que le Québec soit plus
à blâmer que d'autres sociétés sur cette
question, même on est peut-être un peu mieux que d'autres sociétés, mais ça ne
nous empêche pas de pouvoir mener cet exercice à terme. On y réfléchit
ensemble.
Le Président :
En terminant.
M. Couillard : Il est clair que moi-même, je ne suis pas entièrement satisfait de la
tournure actuelle. On va regarder comment mettre ça dans la bonne
direction.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
Alors, d'abord, les personnes malheureuses, il y en a beaucoup dans son caucus,
alors j'espère qu'il va les écouter. La «laïcité»...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M. Lisée :
...ce n'est pas un mot qui est utilisé dans son projet de loi. S'il
l'acceptait, s'il acceptait Bouchard-Taylor, s'il acceptait des propositions que l'opposition a faites, on pourrait
avoir un vote unanime. C'est encore possible. Mais ce que je lui dis,
c'est que, sur la discrimination et le racisme, ça fait trois ans qu'il aurait
pu adopter des mesures.
S'engage-t-il à en
adopter d'ici Noël?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : C'est possible. Ça dépendra de la collaboration de l'opposition, parce que certaines de ces mesures peuvent être adoptées juste de façon
exécutive ou par réglementation, mais
d'autres pourraient nécessiter des modifications législatives. Alors, il a entre les mains, de même que son collègue de
la deuxième opposition, la rapidité du processus législatif. Mais nous
allons quand même faire un exercice valable, réel d'écoute, de consultation et
passer à l'action. Mais il n'est pas exact qu'il n'y a pas des gestes qui ont déjà
été posés. D'ailleurs, on voit, en passant, que le taux de chômage des nouveaux arrivants diminue au Québec,
mais je ne me satisfais pas de ça. Il faut aller beaucoup plus loin et
avoir de meilleurs résultats.
Pour
ce qui est de l'autre question, moi, je suggère d'utiliser le terme «neutralité
religieuse» de l'État plutôt que «laïcité».
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Il ne veut pas un vote unanime. Il y a des choses à
faire pour avoir un vote unanime : arrêter de traiter les autres d'intolérants, arrêter d'être rigide,
accepter les consensus. Je l'appelle à ça. Puis, sur la question des mesures
concrètes à prendre, bien, en mars dernier, on les lui a proposées. Il veut
encore consulter.
Il
ne le sait pas, qu'il y a des mesures à prendre maintenant pour améliorer la
situation des Québécois d'origine étrangère?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Oui, puis, bien sûr, il faut qu'elles soient faites dans le contexte du
Québec, selon les réalités de la société du Québec. Mais, si on veut que
ce processus soit complet, qu'il fasse l'objet d'un consensus au-delà de cette Assemblée, mais dans la population également et
nécessairement parmi les personnes qui sont au premier rang, au premier
chef visées par le phénomène, il faut trouver une façon de leur donner la
parole, il faut trouver une façon d'entendre publiquement
ce que certains experts ont à nous dire — ça n'a pas besoin d'être très long, ça peut
être fait de façon assez rapide — et, par la suite, oui, passer
à l'action.
Et
je vois déjà, et j'en suis heureux, que je pourrais compter sur sa
collaboration pour l'adoption de ces mesures.
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Bien, non seulement la collaboration, mais nous allons
déposer un projet de loi, au retour, qui serait dans la bonne direction. Mais là je comprends que le premier ministre
est en train de dire qu'il va y avoir une commission mais pas celle dont
il a parlé jusqu'à maintenant.
Est-ce
qu'il peut nous confirmer maintenant qu'il a abandonné l'idée de sous-traiter
la consultation à des groupes qui ont déjà déclaré que les Québécois
étaient islamophobes et xénophobes? Est-ce qu'il a abandonné cette idée-là?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : D'abord, ce qu'il faudrait que mon collègue abandonne, c'est le
raccourcissement, là. S'il voit la liste des groupes qui justement ont été
sélectionnés ou ont répondu à l'appel, il va constater la multiplicité des
points de vue et des situations
représentées. Il y a des groupes de défense de la population LGBT, il y en a
d'autres également qui n'ont rien à
voir avec ce dont il parle, là. Alors, la question de la discrimination, elle
s'applique de plusieurs façons et à l'endroit de plusieurs personnes.
Maintenant,
ceci dit, il n'y a rien de mal pour une société à tendre l'oreille, tendre la main et écouter ce que les gens ont à dire, écouter ce que les experts ont à
dire et d'agir par la suite. On a déjà agi, avec des résultats encore imparfaits mais des résultats qui sont visibles. On va
continuer à agir pour que chaque Québécois et Québécoise trouve sa place dans notre société.
Le Président :
Principale, M. le député de Rousseau.
Crédit d'impôt pour services de
production cinématographique
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : M. le Président, en vertu de l'entente entre Netflix et le fédéral, Netflix
n'aura pas à récolter la TPS au Québec ni dans le reste du Canada. Netflix
s'engage à investir dans des productions au Canada. Or, pour ces dépenses,
les fiscalistes ont calculé que Netflix va
être éligible à des crédits d'impôt fédéraux et provinciaux. Pour le Québec,
les experts évaluent que ça va être
des crédits d'impôt de 28 % à 43 %.
Le principe en fiscalité, le principe de base, c'est qu'une entreprise doit payer ses impôts, doit récolter
les taxes, dont les taxes de vente, et en contrepartie de cela l'entreprise est
éligible à des crédits d'impôt. M. le Président, dans le cas de Netflix, ce
n'est pas le cas.
Alors,
ma question est très simple : Est-ce que le ministre des Finances peut
nous confirmer que Netflix n'obtiendra pas de crédit d'impôt du Québec
tant et aussi longtemps qu'elle ne récoltera pas la TVQ?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão : Merci, M. le Président.
Alors, on revient sur la question de Netflix : Est-ce que l'entreprise
serait admissible à des crédits d'impôt pour la production cinématographique?
On verra bien. On n'a pas de projet concret. Comme vous le savez très bien, M. le Président, si
jamais ces choses-là se présentent, souvent c'est une compagnie associée qui est en charge de la production. Donc, ce n'est
pas si simple que ça, ce n'est pas si blanc et noir que ce que le collègue
essaie de faire paraître.
Mais,
je reviens à ce qu'on disait hier, l'activité de Netflix est clairement
taxable, et, d'ailleurs ce qu'on entend ici et là, l'entreprise, apparemment, serait tout à fait d'accord à intégrer
dans ses processus la perception de la taxe de vente du Québec ou une autre
taxe de vente. Donc, il n'y a rien de nouveau à cet aspect-là, sauf qu'on
aimerait bien, comme je l'ai dit hier
aussi, connaître les détails de l'entente fédérale-Netflix, si, entente, il y
en a, pour qu'on puisse, à ce moment-là, ajuster notre stratégie, notre
tactique.
Mais c'est clair que
cette activité-là est taxable, et on va le faire à l'intérieur de notre
capacité.
• (10 h 20) •
Le Président :
En terminant.
M. Leitão :
Pour ce qui est des crédits d'impôt, ça, c'est un autre dossier...
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : M. le Président, la réponse du ministre est,
malheureusement, évasive et ambiguë. Moi, je pense que c'est la moindre des choses de ne pas
permettre à une entreprise d'obtenir des crédits d'impôt quand elle ne récolte
pas les taxes de vente qui s'appliquent par
ailleurs à toutes les entreprises du Québec, hein, toutes les entreprises du
Québec qui produisent au Québec.
Moi,
évidemment, je n'ai pas confiance en Mélanie Joly pour se tenir debout sur la
question des crédits d'impôt. Je
demande au ministre des Finances de protéger les entreprises du Québec, de
protéger les entreprises du secteur culturel du Québec et de s'assurer
que Netflix ne recevra pas de crédit d'impôt.
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Bon. M. le Président, comme vous le savez très
bien, ces crédits d'impôt là existent pour encourager la production locale de produits
cinématographiques et télévisuels. Ils visent surtout à maintenir l'emploi des
artisans et des travailleurs québécois dans
cette industrie-là. Il ne faut pas commencer à mélanger toutes les choses, à
punir tout le monde. Il faut faire attention, faire très attention.
Comme
je vous l'ai dit, on n'a pas reçu quelque demande que ce soit. Si une telle
demande est reçue, on vérifiera son admissibilité et on le fera dans le
meilleur intérêt de tous les Québécois.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : M. le Président, on parle du futur, effectivement, et
on demande au ministre d'établir un principe simple et clair. Le principe, c'est : vous ne récoltez pas la TVQ,
alors vous n'avez pas droit à des crédits d'impôt. C'est très simple comme principe. J'aimerais bien voir,
moi, Revenu Québec, comment il se comporte devant une petite PME qui ne récolte pas la TVQ. Je pense qu'il n'y
aurait pas de complaisance comme celle que j'ai entendue dans la bouche
du ministre, M. le Président. Ça n'a pas de sens, ce genre de réponse.
C'est
deux poids, deux mesures entre les multinationales et les PME du Québec. Alors,
il faut que le ministre se lève et établisse clairement un principe puis
une ligne, et la ligne, c'est que...
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Bon. Alors, on rejoue peut-être dans les taxes rétroactives.
Écoutez, on parle, depuis le début, d'équité, de traiter les contribuables d'une façon équitable. Il ne faut pas
mélanger les choses. La taxe de vente, c'est une chose. Un éventuel — parce qu'on n'est pas là — crédit d'impôt pour une éventuelle
production cinématographique... On verra bien qui fait cette demande de
crédit d'impôt, et ça pourrait même nous donner une opportunité de faire
d'autre chose.
Donc,
il faut prendre les choses de façon ordonnée. On ne va pas se précipiter.
Justement, nos collègues souvent nous disent : Ah oui! Ils se
précipitent. On va analyser les choses comme il faut, on va prendre nos
responsabilités.
Le Président :
En terminant.
M. Leitão :
On n'a abdiqué de rien, M. le Président, et on agira dans le meilleur intérêt
du Québec.
Le Président : Principale,
Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
État
de situation des demandeurs d'asile au Québec
Mme Carole Poirier
Mme
Poirier : M. le Président, dans un premier temps, permettez-moi
de remercier et de féliciter le président du Conseil du trésor d'avoir accordé à sa collègue la ministre de
l'Immigration les crédits nécessaires pour que les 14 groupes qui
étaient pénalisés puissent avoir enfin les sommes nécessaires. Vous me
permettrez de le remercier.
Mais, par
contre, le premier ministre Trudeau et la ministre de l'Immigration nous
avaient assurés en août dernier qu'ils
allaient faciliter l'octroi des permis de travail pour les demandeurs d'asile.
Aujourd'hui, le temps d'attente a, au contraire,
M. le Président, doublé. Pire encore, certains demandeurs d'asile arrivés au
Québec cet été devront patienter jusqu'à
un an pour obtenir un permis. Hier, Mme Magdella Jean-Pierre Michel, arrivée au Québec cet été, nous a lancé un message clair : «Je veux voler de mes
propres ailes. Pas de l'aide sociale. [Je veux] participer, [je veux] payer des
taxes.»
Ma question
est simple, M. le Président : Est-ce que la ministre peut, oui ou non,
tenir son engagement et permettre
aux gens qui veulent...
Le Président : Mme la
ministre de l'Immigration.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil :
Écoutez, cette question, M. le Président, est fondamentale. Depuis le début,
bien avant que la députée d'Hochelaga-Maisonneuve
déclare publiquement qu'il fallait y porter attention, j'en avais déjà parlé
avec le ministre Hussen. Pourquoi? Parce que ces gens ne veulent pas
nécessairement vivre de l'aide sociale. Et les études le montrent, notre expérience le montre, et l'expérience du
gouvernement fédéral aussi, c'est des gens, la plupart, aptes à travailler, qui
veulent travailler, qui veulent subvenir à leurs propres besoins.
Donc, c'était
ma première demande, d'accélérer l'accès au programme de santé intérimaire et
accélérer le permis de travail. Ils ont accepté, évidemment, et répondu à cette
demande. Ils ont rajouté des ressources importantes, importantes, et d'ailleurs ça a été reconfirmé à
la dernière réunion du comité intergouvernemental. Donc, essentiellement, ils
sont en train de traiter tout l'inventaire des personnes qui sont arrivées
depuis le début de l'année, ils avancent. Ils ont
rajouté beaucoup de ressources et m'ont confirmé que ça demeure la priorité.
Mais l'équité est importante aussi dans l'ordre. Tous ceux qui sont rentrés depuis le mois de janvier... Le
principe d'équité, évidemment, est très important pour nous aussi, pour
le gouvernement fédéral aussi.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Carole Poirier
Mme Poirier :
M. le Président, la ministre fait partie du comité fédéral-provincial qui
s'occupe de cette question-là, elle vient de nous le dire. Elle a
amplement le pouvoir de demander des comptes au gouvernement fédéral et de
faire avancer ce dossier-là. On sait que ça
va prendre un décret ministériel fédéral pour permettre aux personnes d'obtenir
un permis de travail temporaire d'ici à ce que leur demande d'asile soit
acceptée. Alors, c'est simple, M. le Président.
Qu'est-ce
qu'elle fait, la ministre, pour que ces gens-là puissent travailler au lieu de
recevoir des chèques de...
Le Président : Mme la
ministre de l'Immigration.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil :
M. le Président, c'est essentiel et fondamental. Donc, on a plaidé, évidemment.
Ils sont convaincus, parce que c'est
dans l'intérêt aussi du gouvernement fédéral, c'est dans l'intérêt de la
collectivité québécoise et canadienne que
tous les demandeurs d'asile, de l'ouest en est, que toutes ces personnes-là
puissent travailler. Ça a toujours été une priorité pour le gouvernement
canadien et pour le gouvernement québécois. Donc, j'ai plaidé la cause. Je
n'avais pas besoin de les convaincre. Ils ont rajouté des ressources pour
traiter rapidement ces inventaires.
Il y a eu un
nombre plus important de personnes qui sont rentrées cet été, ce qui a créé
évidemment cette pression sur le système, et c'est pour ça qu'ils ont
rajouté...
Le Président : En terminant.
Mme Weil : ...donc, des
personnels pour traiter ces arriérés.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Carole Poirier
Mme Poirier :
M. le Président, je vais reprendre
les propos de la ministre : C'est fondamental, c'est une priorité. Il y a 8 000 personnes qui sont arrivées cet été
et qui veulent travailler d'ici à ce que leur statut de demandeur d'asile soit
étudié.
Qu'est-ce
que fait la ministre concrètement pour ces 8 000 personnes qui
attendent? Au lieu de leur donner des chèques d'aide sociale, peut-elle
se mettre au travail avec le fédéral et avoir des permis de travail
temporaires?
Le Président : Mme la
ministre de l'Immigration.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil : D'ailleurs,
les chèques d'aide sociale, c'était pour permettre à ces gens de trouver un
logement permanent, parce qu'on ne voulait
pas que ces personnes restent dans des logements temporaires, d'ailleurs une
mesure qui a été très, très, très
appréciée par le milieu et les organismes qui travaillent auprès des personnes,
des demandeurs d'asile.
Donc, c'est quoi, les priorités? C'est de
s'assurer d'une prise en charge qui respecte la dignité humaine, qui respecte
leurs droits fondamentaux, s'assurer que ces personnes puissent être logées
dans des appartements qui sont convenables
pour eux, donc, qu'on finance des organismes pour qu'ils les accompagnent,
qu'on s'assure que, ces personnes, dans
nos services publics, qu'on tienne en compte leurs besoins, qu'on accélère
évidemment et donne accès au programme fédéral...
Le Président : En terminant.
Mme Weil : ...de santé
intérimaire et qu'ils aient un permis de travail. Voilà les priorités de notre...
Le Président : Principale, M.
le chef du deuxième groupe d'opposition.
Écart de richesse entre
le Québec et les autres provinces
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, le Conseil du patronat a publié il y a quelques jours ce qu'il
appelle le Bulletin de la prospérité
du Québec 2017. Le conseil
conclut que le Québec a un écart de richesse négatif de 20 % avec
l'Ontario, de 24 % avec le
Canada. Donc, le Québec est plus pauvre que le reste du Canada. C'est pour ça
que le Québec reçoit 11 milliards par année de péréquation.
Ma question
au premier ministre est très simple : Est-ce que le premier ministre
reconnaît que le Québec a un écart de richesse important avec le reste
du Canada? Est-ce qu'il reconnaît que cet écart de richesse négatif oblige son gouvernement à surtaxer les Québécois? Et est-ce
que le premier ministre a un plan de rattrapage économique, un plan pour
éliminer cet écart de richesse?
• (10 h 30) •
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Alors, M. le Président, oui, bien sûr, il y a un
écart de richesse entre le Québec et le reste du pays, tout le monde le sait, à
différents niveaux, selon les régions du Canada avec lesquelles on se compare,
mais moi, je préfère nous comparer aux meilleurs. Donc, je veux qu'on aille
encore plus vite dans le rattrapage qui, en passant, est déjà pas mal
bien amorcé.
S'il regarde
la situation et les données, qu'est-ce qu'il va constater? Qu'en termes de
création d'emplois le Québec fait
très, très, très bonne figure au Canada et que la qualité des emplois également
est au rendez-vous, qu'on note également que l'écart de revenus hebdomadaires
diminue entre le Québec et les autres provinces. Donc, on est vraiment dans
la bonne direction, et moi, j'aimerais bien
un jour, puis je pense qu'il est d'accord avec moi là-dessus, qu'on n'ait plus
de péréquation, parce qu'on sera
tellement prospères qu'on n'aura pas besoin d'avoir de la péréquation. Mais
personne ici ne peut dire que ça va
arriver en un an, deux ans, trois ans, cinq ans. C'est un horizon beaucoup plus
long qu'il faut viser. Ce qui est important, c'est toujours faire des
progrès dans la bonne direction.
Mais ce que
le Conseil du patronat dit également, même s'il y a du chemin à faire, c'est
que des progrès importants ont été
réalisés. Ça a commencé par l'équilibre des finances publiques, auquel il s'est
opposé pendant deux ou trois ans ici même, mais également d'autres
mesures structurantes comme l'innovation, l'intelligence artificielle,
l'innovation en région maintenant, l'innovation dans le secteur de la forêt.
C'est comme ça qu'on va bâtir notre richesse collective et également en améliorant la réussite scolaire de
nos jeunes jusqu'au niveau postsecondaire. C'est comme ça qu'on va rétrécir
l'écart. Ça ne se fait pas de façon magique,
malgré ce que, parfois, on laisse entendre, ça se fait par un travail acharné
et continu.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, le gouvernement libéral est au pouvoir depuis 15 ans. Quand on regarde le rattrapage
pour réduire l'écart de richesse avec l'Ontario,
avec le reste du Canada, ça prendrait 50 ans au rythme du Parti libéral.
Donc,
les Québécois ont un choix clair maintenant : ou ils choisissent un gouvernement libéral qui veut y
aller lentement ou ils choisissent un gouvernement de la CAQ qui
reconnaît qu'il y a un grand rattrapage à faire, que c'est important de faire
ce rattrapage au cours des prochaines...
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Je passerais sur le
caractère très hypothétique de la question de mon collègue, mais il est clair qu'il y aura des différences importantes pour la
population lorsqu'elle aura à exercer son choix. Et nous, on le fera avec
humilité, on présentera ce qu'on a réussi.
Et je pense qu'on a réussi de très belles choses au Québec déjà depuis 2014,
et on va leur donner le choix entre une
équipe équilibrée, expérimentée, qui a fait ses preuves, plutôt que l'approche
de bricolage et de raccourcis que, malheureusement, on entend parfois du
côté de la deuxième opposition.
Maintenant,
le rattrapage, il se poursuit, M. le Président, le rattrapage des salaires se
poursuit au Québec. Il parle de la
fiscalité. On a déjà fait un bon bout de chemin pour les familles du Québec.
Une famille qui fait chacun 40 000 $... un couple qui fait chacun 40 000 $, avec
deux enfants, ont déjà 510 $ de plus dans leurs poches, et on va en
ajouter. Le ministre des Finances l'a dit...
Le Président : En terminant.
M. Couillard :...donc je peux me
permettre de le répéter. On va faire pas mal...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, le premier ministre manque d'ambition. Il nous dit : Ça
va bien. Il reste 24 % d'écart avec le Canada dans le niveau de
richesse, puis il dit : Ça va bien.
Ça fait 15 ans qu'il est là, quand va-t-il
se donner un vrai plan de rattrapage économique?
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : Bien, moi, je
sais que ça fait presque 20 ans que mon collègue est là. Je me souviens du
budget de l'an 1, mais, à part ça, je ne me souviens pas de
grand-chose.
Je vais lui
indiquer quand même pour l'éclairer, hein, dans sa question que la croissance
du salaire moyen, en 2016, a été de 3,3 % au Québec par rapport à
1,1 % en Ontario. Ça, ça s'appelle un rattrapage. On diminue l'écart, on
va continuer. Maintenant, la population qui nous écoute, elle sait très bien
que c'est un retard qui s'est accumulé sur des décennies, qu'on ne l'effacera pas du jour au lendemain malgré la magie
proposée par la CAQ. On y va plutôt de façon raisonnable, équilibrée et
prudente à la fois.
Le Président : Principale,
Mme la députée de Montarville.
Tenue d'une consultation sur la discrimination
systémique et le racisme
Mme Nathalie Roy
Mme Roy :
Merci, M. le Président. Comme l'ont dit hier les députés libéraux de Vanier-Les
Rivières et de Portneuf, la commission sur le racisme systémique cause
un véritable malaise dans la population. Naturellement, selon les libéraux, c'est parce que les citoyens ne
comprennent pas ce que c'est, hein? Comme d'habitude, on les regarde de haut.
Alors, je vous disais hier aussi qu'il n'y a
pas une journée qui passe sans qu'une autre voix s'élève contre cette commission
qui met les Québécois au banc des
accusés. Eh bien, maintenant c'est au tour de la députée de Chauveau d'ajouter
sa voix à celles de ses collègues. En entrevue hier sur les ondes d'Énergie Québec,
au 98,9, elle a dit au sujet de cette commission sur le racisme systémique — et je la cite ici : «Dans la région de
Québec, la consultation sur la discrimination systémique passe un peu
plus difficilement.» Fin de la citation.
Est-ce que la ministre de l'Immigration est
d'accord avec sa collègue? Va-t-elle annuler sa commission? Et, M. le premier
ministre, est-ce que votre ministre de l'Immigration est toujours la bonne
personne pour piloter cette consultation?
Le Président : Mme la
ministre de l'Immigration.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil :
Mais, M. le Président, je note que la députée a bien dit le nom correctement,
contrairement à pendant toute l'élection partielle où elle parlait de
racisme systémique bien intentionnellement. Alors, vous avez bien dit une consultation sur la discrimination systémique,
c'est le mot choisi parce que c'est l'expérience de la Commission des droits
de la personne. Les études sont sur la
discrimination systémique, et c'est un phénomène qui existe dans toutes les
sociétés.
Donc,
pourquoi c'est important, cette consultation? Parce qu'il y a trop de gens qui
vivent à l'écart du marché du travail,
trop de personnes qui ne réussissent pas à trouver un emploi à cause de leur
nom, le nom issu de la diversité, qui fait en sorte que ce sont des personnes qui ne sont pas appelées à faire des
entrevues. Et, oui, le Parti québécois a recommandé comme... Beaucoup de sociétés ont des C.V.
anonymes, mais les études montrent qu'il faut aller plus loin pour trouver la
bonne solution, car une étude en France a
démontré l'effet pervers si on enlève, tout simplement, le nom. Alors, c'est
pour ça qu'on fait une consultation...
Le Président : En terminant.
Mme Weil :
...pour creuser plus profondément, parce qu'on a besoin de ces talents. Nos
entreprises ont besoin de ces...
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Montarville.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy :
M. le Président, il y a quelques minutes à peine, le premier ministre, devant
les journalistes, a ouvert la porte à
l'annulation de cette consultation. On va y réfléchir, a-t-il dit. Trois de ses
députés ont déjà critiqué ouvertement cette commission sur le racisme
systémique.
Attend-il que
d'autres députés de son caucus sortent contre lui? Alors, pourquoi retarder
l'inévitable? M. le premier ministre, pour une ixième fois, allez-vous
annuler cette consultation sur le racisme systémique? La population vous...
Le Président : On s'adresse à
la présidence, madame, s'il vous plaît.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! Mme la ministre de l'Immigration.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil : Merci, M. le
Président. Je suggère que la députée de Montarville écoute les paroles du
premier ministre. Réfléchir, c'est bien,
hein? Voilà une très bonne recommandation, réfléchir, écouter, échanger,
discuter, écouter les chercheurs, écouter les chercheurs comme Paul Eid,
qui dit : Mieux vaut s'appeler Bélanger que Traoré.
Malheureusement,
c'est un phénomène, ça existe dans toutes les sociétés. Comme le dit le premier
ministre, le Québec n'est pas
meilleur ou pire que d'autres sociétés, mais le fait est que des gens sont
écartés du marché du travail, alors
qu'on vit des pénuries aiguës dans toutes les régions. Partout où je vais, les
gens me disent : On a besoin de talents...
Le Président : En terminant.
Mme
Weil : ...on a besoin de gens dans différents secteurs de
l'économie. Eh bien, c'est important d'avoir ce débat...
Le Président : Principale, M.
le député de Mercier.
M. Khadir : Merci, M. le
Président. Au cours des derniers jours, la désapprobation unanime de l'approche
fédérale...
Le
Président : Je pense que je vous ai reconnu trop rapidement, M.
le député de Mercier. Je vais vous reconnaître — inquiétez-vous
pas — un
peu plus tard. Mme la députée de Marie-Victorin, en principale.
Réforme du secteur
financier
Mme Catherine Fournier
Mme Fournier : Quand les Québécois
ont recours aux services d'un courtier en assurance, ils s'attendent, évidemment, à ce que leur courtier négocie pour
eux le meilleur prix possible auprès de plusieurs compagnies. M. le Président,
on savait déjà que les assureurs exercent
une influence grandissante sur les cabinets de courtage, mais, en plus, on
apprenait hier dans La Presse
que rien dans leur code de déontologie n'oblige un courtier à magasiner auprès
de plusieurs assureurs. Pire, il
n'est même pas obligé de vérifier s'il s'agit du meilleur prix sur le marché.
En raison du manque d'encadrement, bon nombre de Québécois paient donc leurs produits
d'assurance plus chers que ce qu'ils devraient. Au Parti québécois, nous
croyons qu'il faut rapidement corriger la situation pour remettre cet argent
dans les poches des consommateurs.
Le ministre des
Finances trouve-t-il normal que les courtiers ne soient pas tenus de négocier
le meilleur prix possible? A-t-il prévu de
corriger ces failles dans son projet de loi omnibus dont on annonce, justement,
le dépôt ce matin?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : M. le Président, c'est une très bonne question, en effet, et
ce n'est pas la première fois que la députée de Marie-Victorin pose une très bonne question. C'est un oui, la
réponse, c'est oui. Les courtiers, oui, en effet, doivent avoir comme direction, comme objectif, comme
obligation de donner les meilleurs services possible à leurs clients. C'est
pour ça, et d'autres raisons aussi, mais
c'est pour cela que nous avons entrepris une vaste réforme de tout l'encadrement de
l'industrie des services financiers, un travail qui se fait depuis déjà plusieurs
années et que... Vous avez peut-être remarqué dans les dossiers au feuilleton,
demain je vais déposer un projet de loi assez complet qui va adresser cette question et d'autres questions aussi, dont une
réforme majeure de tout l'encadrement des services financiers au Québec, à l'exclusion, bien sûr, du système
bancaire, qui, lui, est de juridiction fédérale.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Catherine Fournier
Mme
Fournier : Oui. Donc, je suis très contente d'entendre ça de la bouche
du ministre parce que plusieurs indépendants
dénoncent le fait qu'une part importante des courtiers au Québec est maintenant
détenue ou liée financièrement à des
compagnies d'assurance. M. le Président, plutôt que de travailler pour leurs
clients, ces courtiers travaillent en réalité pour les assureurs sans
que ce soit dit clairement aux clients.
J'en
comprends donc que cette mesure sera comprise dans le projet de loi omnibus du ministre des
Finances. Est-ce qu'il peut le
confirmer aujourd'hui en cette Chambre?
• (10 h 40) •
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : J'aimerais bien,
mais je pense que M. le Président ne souhaite pas que je fasse ça, puisque le projet de
loi va être rendu public, va être
déposé demain. Ce ne serait pas approprié que je commence à révéler des parties
de ce projet de loi aujourd'hui quand c'est demain, le jour du...
Une voix :
...
M.
Leitão : Même les indices ne
seraient pas appropriés. M. le
Président ne serait pas d'accord avec
ça. Je me fie à son jugement.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : M. le
Président, donc, sur 45 grands cabinets de courtage, il y en a 25 qui ont
des assureurs comme actionnaires. Ce
qu'on ne sait pas, c'est si l'Autorité
des marchés financiers a fait les
vérifications pour s'assurer que les courtiers
sont exactement totalement indépendants, malgré le fait que les pratiques
d'affaires ont évolué et que, désormais,
il y a des pratiques qui sont peut-être un peu douteuses. Or, depuis
12 ans, personne ne s'est fait prendre, personne.
La
question que je pose au ministre, c'est : Est-ce que lui s'est assuré que
l'autorité a fait les vérifications
nécessaires pour que l'actionnariat des assureurs dans les cabinets...
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Encore une fois, M. le Président, je pense que ça augure bien pour nos discussions
quand on va avoir la chance de discuter du projet de loi parce qu'en
effet ces choses pourraient très bien se trouver dans ce projet de loi. Vraiment,
je ne peux pas aller plus loin aujourd'hui, juste dire, de rappeler que l'Autorité des marchés financiers est un organisme indépendant, bien sûr, et
que le gouvernement... Je ne peux pas prendre le téléphone et appeler le P.D.G.
de l'AMF et dire : Fais ci, fais ça,
fais ça. Il serait le premier à me critiquer si je faisais ça. Donc, ce n'est
pas comme ça que les choses se passent. Il y a un projet de loi qui va
encadrer toute cette activité-là, et j'en suis sûr...
Le Président : En terminant.
M.
Leitão : ...qu'on en discutera amplement dans les semaines à venir.
Le Président :
Principale. Maintenant, c'est à votre tour, M. le député de Mercier.
Encadrement du commerce
électronique
M. Amir Khadir
M. Khadir :
Merci, M. le Président. Le gouvernement fédéral s'est mis à genoux devant
Netflix d'une bien navrante façon, et les
conséquences désastreuses de ce précédent ont été soulignées par tous les
acteurs — au
Québec, à tout le moins — parce que ça entraîne des conséquences
très graves, cette inéquité entre les géants du commerce électronique et
notre économie locale, nos commerçants, nos entreprises locales.
La
réponse du ministre pour percevoir des taxes sur les activités de Netflix est
une bonne réponse, mais je pense que ce n'est pas suffisant, il faut avoir le
tableau plus général. Google, Amazon, l'ensemble du commerce électronique,
ça inclut, bien sûr, Uber. Il ne faut pas
l'oublier, c'est, selon les estimations, tout près de 800 millions de
dollars d'activité économique en
2017. Il faut donc changer nos lois pour avoir une approche systémique. Voilà
un mot, hein, une approche systémique pour régler le problème de fond.
Qu'est-ce que compte
faire le gouvernement du Québec?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
M. le Président, oui, en effet, c'est un sujet qui est assez complexe et qui va
au-delà de Netflix, bien sûr, ce n'est pas seulement une entreprise. Ce que
nous avons dit depuis le début, c'est qu'il y a d'abord une question de manque d'équité si on donne un traitement de
faveur à une entreprise par rapport à d'autres entreprises. Donc, ça, c'est la
première chose. Et on a dit hier, et on le
répète, nous voulons savoir du gouvernement fédéral comment ils sont arrivés
à une telle décision et nous répondrons par
la suite à cette question-là. Comme j'ai dit tantôt, nous n'abdiquerons de
rien. Et nous pouvons le faire à l'intérieur des règles actuelles, nous
pouvons avancer, et c'est ce que nous allons faire.
Maintenant,
au-delà d'une entreprise, oui, il y a tout un secteur. Est-ce qu'on a besoin
d'un changement législatif? Peut-être.
Mais je pense que ce n'est pas ça vraiment le grand enjeu. Pour ces
entreprises-là, des grandes multinationales, la solution vient d'une approche multilatérale, approche multilatérale qui
est en train de se développer autour des projets de l'OCDE. Et,
d'ailleurs, cet été même, dans mes activités régulières dans les marchés
financiers, j'ai eu l'occasion d'en discuter avec M. Saint-Amans, de
l'OCDE, à Paris, on a eu des discussions très fructueuses. D'ailleurs, ils ont
reconnu...
Le Président :
En terminant... Première complémentaire, M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir :
M. le Président, on joue actuellement, là, sur le plan législatif, avec les
cartes de 1920. Notre législation n'est pas
adaptée aux nouvelles réalités du commerce numérique. Plusieurs de ses
collègues — je le
rappelle au ministre — à la Commission des finances publiques, avec
moi, on s'est penchés là-dessus, puis il y a un rapport. La troisième recommandation du rapport demande au
gouvernement de changer le cadre législatif pour permettre l'imposition
des transactions en ligne sur la base des cartes de crédit utilisées pour payer
des achats.
M. le Président,
j'invite le ministre à montrer plus d'ouverture à un changement...
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Bon, M. le Président, comme je disais tantôt, c'est une
question qui doit être adressée principalement par une activité multilatérale
concertée ou de concert avec un organisme comme l'OCDE. Une bonne partie de la
réponse à cette question vient déjà
de la nouvelle réglementation internationale qui est déjà en vigueur au sujet
des BEPS, donc les prix de transfert et les profits détournés. Ça, c'est
une partie. Il y en a d'autres, choses à faire aussi.
Pour
ce qui est spécifiquement des questions de commerce, commerce en ligne,
d'échange de produits, le changement de réglementation ou le changement
législatif est peut-être un petit peu moins urgent.
Le Président :
En terminant.
M. Leitão :
C'est une question de s'assurer que les règles actuelles soient appliquées, et
elles peuvent l'être.
Le Président :
M. le député de Mercier, en deuxième complémentaire.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Il faut une action de la part du gouvernement. Je comprends que
le ministre soit occupé à bien des choses, mais je pense que, là-dessus,
il doit accepter le fait qu'il faut que, oui, ça soit multilatéral, mais nous
avons nos responsabilités. Il faut aussi changer notre cadre législatif
et aussi il faut montrer une action cohérente. Uber, là, c'est dans le même tableau, hein? Si on se désole de
l'impact de Netflix sur nos artistes, il faut se désoler aussi de l'impact
d'Uber sur nos artisans du taxi.
J'invite le gouvernement à montrer de l'ouverture, à avoir une
approche cohérente sur le plan législatif.
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : M. le Président, oui, en effet, une approche cohérente, c'est toujours
ce qu'on doit faire, c'est ça. Bravo! Oui,
en effet. Uber est justement un exemple très
patent de cela, c'était une question de s'assurer que les règles actuelles
étaient appliquées et étaient suivies. Nous
avons donc discuté directement avec Uber et nous avons réussi. Et d'ailleurs, maintenant, au moment où on se
parle, Uber remet au gouvernement la TVQ qui est chargée à tous les
utilisateurs de services Uber. Donc, ça peut
se faire. C'est vrai que ça a demandé quelques changements législatifs relativement mineurs...
Le Président : En terminant.
M. Leitão : ...pour mieux définir
c'est quoi, un transport en taxi...
Le Président : Principale, M.
le député de Chambly.
Scolarisation à la maison
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, hier soir, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 144,
j'ai demandé au ministre de l'Éducation : Est-ce qu'un jeune peut décrocher un diplôme d'études
secondaires sans voir le programme du ministère?
Sa réponse, c'est non. Bonne réponse. Je lui
ai demandé : Est-ce qu'un jeune peut décrocher un DES sans passer
d'examens du ministère? Sa réponse,
c'est non. Bonne réponse, c'est correct. Le problème, c'est que le ministre a dit hier soir qu'il n'est pas d'accord pour inscrire dans la loi que l'enseignement du programme, même si on fait l'école à la maison, c'est
obligatoire; pas d'accord, non plus, pour obliger les élèves à passer les
examens ministériels qui vont les mener à un diplôme.
En gros, là, c'est : pas de programme, pas d'examens du ministère, pas de
diplôme. C'est ça, la vision du ministre pour les parents qui
choisissent de faire l'école à la maison.
Tout à l'heure, là, je vais déposer un amendement au projet
de loi pour garantir que l'ensemble
du programme soit vu par les parents qui font l'école à la
maison, pour garantir que les jeunes passent les examens qui vont les mener
à un diplôme reconnu, pour qu'ils prennent leur place.
Est-ce que le ministre va se ressaisir?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Sébastien Proulx
M. Proulx : Oui, M. le
Président. C'est dommage d'utiliser la période de questions, en quelques
secondes ou quelques minutes, pour faire le
travail qu'on fait sérieusement en commission
parlementaire. Très honnêtement, moi, je suis déçu. Maintenant, on verra ce qu'il en sera tout à
l'heure.
Deuxièmement, très honnêtement, l'enseignement à la maison ou l'école à la maison, les
apprentissages en famille, appelez ça
comme vous voulez, M. le Président, c'est très différent de l'école, ce n'est pas,
l'école à la maison... Ce n'est pas
ce qui se passe dans une école qu'on va faire à la maison. On n'aura pas assez
des quelques secondes qu'il va me rester pour pouvoir l'expliquer ici, mais il y a une chose qui est
claire, M. le Président, c'est que des gens qui font cette école à
la maison, des universitaires spécialistes de cette question, nos lois, nos
chartes, les décisions, ici et ailleurs, ont dit, M. le Président, qu'on ne
pouvait pas reproduire le même modèle d'encadrement. Quelqu'un
qui apprend chez lui, par lui-même, dans
un autre contexte, dans un contexte x, à
l'extérieur du pays ou de la province
ou dans un centre hospitalier, ne
peut pas passer l'examen qu'il a donné, lui, lorsqu'il enseignait à une
classe avec 25 élèves devant lui, M.
le Président.
Le Président : Première complémentaire,
M. le député de Chambly.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge : M. le
Président, il faut que je dise, je
suis allergique au nivellement par le bas, puis on dirait que ça me pique ce matin. À l'école, tous les enfants
sont obligés de suivre le programme. Les parents qui ont tenté de retirer leur enfant, même du cours d'éthique et culture religieuse,
ont perdu en cour. Mais, pour le ministre, si on fait l'école à la maison, les sciences, l'histoire, la
géographie, c'est optionnel. Même un parcours qui peut mener à un diplôme,
c'est optionnel. On verra. On verra.
Ça ne marche pas. Je vais déposer à 11 heures un amendement
qui va garantir un parcours qui mène à un diplôme.
Est-ce que le ministre...
• (10 h 50) •
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Sébastien Proulx
M. Proulx :
M. le Président, il utilise la période de questions pour me demander d'étudier tout
à l'heure un amendement qu'il va déposer. Alors, qu'il le dépose tantôt, puis
on prendra le temps d'en discuter. Un.
Deuxièmement, M. le Président, le collègue peut bien bricoler une question
aujourd'hui avec un sujet qui se trouve dans la consultation, mais l'étude article par article, ça sert à
ça, M. le Président. On a mis de l'avant des modifications à la Loi sur l'instruction publique. Pourquoi? Pour avoir un
encadrement de l'enseignement à la maison parce qu'il n'y en a pas actuellement. Je ne l'ai pas fait parce qu'il avait
soulevé des problèmes avec la première page du journal, je l'ai fait parce que je considère que c'est important
d'assurer une éducation de qualité à tous les enfants, mais de respecter
également le choix...
Le Président :
En terminant.
M. Proulx :
...et la condition de ces enfants, M. le Président, et des parents.
Le Président :
Principale, M. le député de Jonquière.
Accès à Internet haute vitesse
dans les régions
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault :
Oui. M. le Président, dans le programme du Parti québécois adopté au début du
mois de septembre, nous proposons
qu'Hydro-Québec offre sa bande passante pour que les régions aient accès à Internet rapide et à faibles coûts. Il faut croire, M. le Président, que le premier ministre a bien lu notre programme parce que,
la semaine dernière,
au congrès de la FQM, le premier
ministre a, effectivement, déclaré qu'il était en faveur
de l'utilisation de la fibre optique d'Hydro-Québec pour acheminer
Internet haute vitesse dans les régions éloignées, une demande que les municipalités du Québec ont exprimée depuis
plusieurs années. Il est inacceptable, encore aujourd'hui, que des villages,
des travailleurs de plusieurs régions soient
considérés comme des citoyens de seconde zone parce qu'Internet haute vitesse
ne se rend pas à leur domicile. Les régions attendent depuis trop longtemps.
Maintenant
que le premier ministre a pris position, qu'il a bien lu notre programme,
peut-il nous dire quand et comment il va passer à l'action le plus
rapidement possible?
Le Président :
M. le ministre de l'Énergie.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
Bien, d'abord, M. le Président, avant de commencer à répondre à sa question,
j'aimerais d'abord souligner en cette
Chambre un événement qui s'est produit hier à Ragueneau, sur la Côte-Nord, où
nous avons, à Ragueneau, annoncé le
fait que nous aurions maintenant notre 1 000e borne de recharge
électrique, ce qui est quand même, au Québec, un élément extrêmement
important.
Alors,
maintenant, M. le Président, nous voulons, bien sûr, faire le maximum.
Hydro-Québec possède, évidemment, un
réseau extrêmement important, et nous voulons, oui, favoriser, via la fibre
optique, le meilleur système Internet possible. Maintenant, les études sont en cours à cet effet. Nous voulons le faire.
Le député doit comprendre également qu'à l'intérieur du réseau d'Hydro-Québec il y a quand même des
normes de sécurité qui sont importantes et qui font en sorte qu'Hydro-Québec doit aussi correspondre — toutes ces normes-là — à des normes nord-américaines. Donc, une
partie, évidemment, de ce réseau va être utilisée...
Le Président :
En terminant.
M.
Arcand :
...mais nous ne disons absolument pas non, nous sommes enthousiastes...
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui. Bien, écoutez, pour la borne de recharge, c'était le
temps, M. le Président, c'est la première sur la Haute-Côte-Nord, là.
Mais
là il nous parle d'études pour les bandes passantes d'Hydro-Québec. Internet
haute vitesse se rend déjà à Manic-5, se rend déjà à Manic-5. Ce qu'on a
besoin, c'est d'avoir un échéancier. Est-ce que ça va être avant Noël? Est-ce que ça va être avant l'été indien, comme
disait mon collègue de Terrebonne? Ça va être quand que les gens dans
les régions vont avoir Internet haute vitesse avec Hydro-Québec?
Le Président :
Mme la ministre de l'Économie.
Mme Dominique Anglade
Mme
Anglade : Merci, M. le Président. Premièrement, j'aimerais rappeler
qu'il y a Québec branché, qui est un programme
qu'on a lancé, il y a 240 projets qui ont été déposés, et, oui, avant
Noël, nous allons avoir des réponses concrètes, puisque nous allons pouvoir déployer Internet haute vitesse dans toutes
les régions du Québec. Ça, c'est la première des réponses.
La
deuxième des réponses, c'est qu'on n'a pas attendu que le Parti québécois dise
qu'il fallait rencontrer Hydro-Québec, ça
fait des mois qu'il y a eu des discussions avec Hydro-Québec, justement, pour avoir un échéancier clair pour connecter ce qui ne serait pas encore connecté avec Québec
branché. On est à l'oeuvre, M. le
Président, et je peux vous assurer
que, d'ici Noël, il va y avoir des résultats très concrets pour toutes
les régions du Québec.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui. Ça fait déjà plusieurs années que des municipalités
négocient avec Hydro-Québec pour obtenir l'accès à Internet.
Est-ce
que le gouvernement, est-ce que le ministre, est-ce que la ministre peuvent
faire pression sur Hydro-Québec, sur le P.D.G. d'Hydro-Québec pour
accélérer les négociations? On veut savoir quand et où, M. le Président.
Le Président :
Mme la ministre de l'Économie.
Mme Dominique Anglade
Mme
Anglade : M. le Président, il y a eu déjà plusieurs rencontres sur ce
sujet, on est en train d'étudier les réseaux à l'heure où on se parle
pour établir l'échéancier concret.
Mais j'aimerais
rappeler une chose. Quand on parle d'Internet haute vitesse, il y a eu un appel
à projets pour toutes les régions du Québec, il y a eu 240 projets
déposés, et, avant Noël, M. le Président, dans toutes les régions du Québec, nous allons pouvoir annoncer les projets
qui ont été reconnus. Pour quoi? Pour brancher toutes les régions à Internet
haute vitesse. Parallèlement à ça, il y aura
en plus Hydro-Québec. Alors, on est en pleine action, M. le Président. Merci.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Repentigny.
Lutte contre l'exploitation
sexuelle
Mme Lise Lavallée
Mme
Lavallée : M. le Président, ce matin nous avons tenu une séance de
travail à ma demande concernant la lutte
contre la prostitution juvénile. Je demandais au gouvernement de lancer une
commission parlementaire sur cet enjeu important et préoccupant. Le
gouvernement a refusé ma demande.
La
situation est pourtant critique. Selon plusieurs intervenants et groupes
rencontrés, la prostitution juvénile est un phénomène qui va en s'aggravant. Nous devons mieux protéger nos filles
contre elles-mêmes et contre les proxénètes et les prostitueurs.
Ce
n'est pas une question, mais c'est vraiment une demande. J'aimerais que le
gouvernement puisse reconsidérer sa position et qu'il accepte notre
demande de commission parlementaire non partisane pour mieux lutter contre la
prostitution juvénile au nom de nos filles. Merci beaucoup.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Madame... S'il vous plaît! Mme la ministre responsable de la
Réadaptation.
Mme Lucie Charlebois
Mme
Charlebois : Évidemment, M. le Président, c'est une question
fort importante qui nous interpelle tous ici comme députés à l'Assemblée nationale du Québec, mais je dois vous dire
qu'on est déjà en action, et on aura un plan d'action pour contrer les
fugues.
Et je veux
dire à la députée que, dans le projet de loi n° 99, que son collègue de
Drummond a suivi, nous avons fait en sorte que l'exploitation sexuelle
soit prise en considération et devienne un motif de compromission comme exploitation sexuelle. Et
je dois vous dire, M. le Président, qu'on est très, très, très concernés par
cela. Et je dois vous dire que, quand
on va déposer le plan d'action sur les fugues, d'ici la fin de l'année, il y
aura certainement des mesures qui vont toucher cet aspect-là de la
question.
Je
veux dire à la députée que c'est la commission qui doit se prévaloir de cette
décision-là, mais je veux la rassurer que,
comme ministre déléguée à la Protection de la jeunesse, je suis très, très,
très sensible à ce dossier-là. Merci, M. le Président.
Le Président :
Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.
Votes reportés
Adoption du projet de loi
n° 99
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Et, comme annoncé précédemment,
nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de Mme la ministre déléguée à la Réadaptation, à
la Protection de la jeunesse, à la Santé publique et aux Saines habitudes de vie proposant que le
projet de loi n° 99, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse
et d'autres dispositions, soit adopté.
Alors, que les
députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
Le
Secrétaire adjoint : M. Couillard (Roberval), M. Fournier
(Saint-Laurent), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Blais
(Charlesbourg), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Leitão
(Robert-Baldwin), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Coiteux (Nelligan),
Mme David (Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. D'Amour
(Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier),
Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac),
M. Barrette (La Pinière), M. Drolet (Jean-Lesage),
M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Charlebois
(Soulanges), M. Moreau (Châteauguay), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Vien
(Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Fortin (Sherbrooke),
Mme St-Pierre (Acadie), M. Reid (Orford), Mme Nichols
(Vaudreuil), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey),
Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce),
M. Tanguay (LaFontaine), Mme Boulet (Laviolette), Mme Rotiroti
(Jeanne-Mance—Viger),
M. Carrière (Chapleau), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys),
M. Girard (Trois-Rivières), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine),
M. Auger (Champlain), Mme Vallières (Richmond), M. Rousselle (Vimont), M. Iracà
(Papineau), M. Simard (Dubuc), M. Matte (Portneuf), M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee), M. Boucher (Ungava), M. Bourgeois
(Abitibi-Est), M. Fortin (Pontiac), M. Giguère (Saint-Maurice),
M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy
(Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie),
M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides),
M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau), M. Busque
(Beauce-Sud), Mme Sauvé (Fabre), Mme Melançon (Verdun).
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Que les députés contre cette
motion veuillent bien...
Des
voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Pour.
• (11
heures) •
Le
Secrétaire adjoint : M. Lisée (Rosemont), M. Bérubé
(Matane-Matapédia), Mme Hivon (Joliette), M. Marceau (Rousseau),
Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. LeBel (Rimouski),
Mme Maltais (Taschereau), Mme Lamarre (Taillon), M. Bergeron
(Verchères), M. Leclair (Beauharnois), Mme Richard (Duplessis),
M. Rochon (Richelieu), Mme Poirier
(Hochelaga-Maisonneuve), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Therrien
(Sanguinet), M. Gaudreault (Jonquière),
M. Cousineau (Bertrand), Mme Jean (Chicoutimi), M. Ouellet
(René-Lévesque), M. Villeneuve (Berthier), Mme Fournier
(Marie-Victorin), M. Traversy (Terrebonne), M. Kotto (Bourget),
M. Turcotte (Saint-Jean), M. Roy (Bonaventure).
M. Legault (L'Assomption),
M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie),
M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière),
M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour),
Mme Roy (Montarville), Mme Samson
(Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Lefebvre
(Arthabaska), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée (Repentigny),
M. Lamontagne (Johnson), Mme D'Amours (Mirabel),
Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord),
M. Paradis (Lévis).
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin),
M. Khadir (Mercier), M. Surprenant (Groulx), Mme Ouellet
(Vachon), M. Sklavounos (Laurier-Dorion).
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Que les députés contre cette
motion veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? Sinon, pour le
résultat du vote, M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 112
Contre :
0
Abstentions :
0
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : En conséquence, le projet de
loi n° 99, Loi modifiant la Loi sur la protection de
la jeunesse et d'autres dispositions, est adopté.
Alors, le projet de loi est adopté.
Motions sans préavis
Nous en
sommes maintenant à la rubrique Motions sans préavis, et je cède la parole à M.
le chef de l'opposition officielle pour sa motion sans préavis.
Appeler au dialogue
entre la Catalogne et l'Espagne afin de
résoudre pacifiquement et de façon consensuelle
les différends qui les éloignent
M. Lisée :
M. le Président, c'est un moment important, et ce que nous allons dire
unanimement aujourd'hui doit être
entendu partout. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec le
premier ministre, le chef de la deuxième opposition, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, le député de Gaspé et la
députée de Vachon, la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale déplore l'attitude autoritariste du gouvernement espagnol
qui a mené à des gestes de violence à l'occasion du référendum sur
l'indépendance de la Catalogne et qu'elle déplore le nombre de blessés;
«Qu'elle
appelle au dialogue politique et démocratique entre la Catalogne et l'Espagne
afin de résoudre pacifiquement et de
façon consensuelle les différends qui les éloignent, dans le respect de la
démocratie et du droit, et avec une médiation internationale si les
parties y consentent, pour conduire les parties à une solution négociée.»
Merci, M. le Président.
(Applaudissements)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Quelle belle unanimité! M. le
leader adjoint, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Tanguay : Nous
proposons de l'adopter sans débat, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. M. le leader de l'opposition officielle.
M. Bérubé : Nous
demandons le vote par appel nominal.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, qu'on appelle les députés.
Que les députés en faveur de cette motion
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Lisée
(Rosemont), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Hivon (Joliette),
M. Marceau (Rousseau),
Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. LeBel (Rimouski),
Mme Maltais (Taschereau), Mme Lamarre (Taillon),
M. Bergeron (Verchères), M. Leclair (Beauharnois), Mme Richard
(Duplessis), M. Rochon (Richelieu), Mme Poirier
(Hochelaga-Maisonneuve), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Therrien
(Sanguinet), M. Gaudreault (Jonquière), M. Cousineau
(Bertrand), Mme Jean (Chicoutimi), M. Ouellet (René-Lévesque),
M. Villeneuve (Berthier), Mme Fournier (Marie-Victorin),
M. Traversy (Terrebonne), M. Kotto (Bourget), M. Turcotte
(Saint-Jean), M. Roy (Bonaventure).
M. Couillard (Roberval), M. Fournier
(Saint-Laurent), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Blais (Charlesbourg), Mme Charbonneau (Mille-Îles),
M. Leitão (Robert-Baldwin), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Coiteux (Nelligan), Mme David (Outremont), M. Proulx
(Jean-Talon), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley
(Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard
(Lotbinière-Frontenac), M. Barrette
(La Pinière), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Blanchette
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
Mme Charlebois (Soulanges),
M. Moreau (Châteauguay), M. Heurtel (Viau), M. Arcand
(Mont-Royal), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Fortin (Sherbrooke),
Mme St-Pierre (Acadie), M. Reid (Orford), Mme Nichols
(Vaudreuil), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette
(Chomedey), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme Boulet
(Laviolette), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière
(Chapleau), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys),
M. Girard (Trois-Rivières), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine),
M. Auger (Champlain), Mme Vallières
(Richmond), M. Rousselle (Vimont), M. Iracà (Papineau),
M. Bolduc (Mégantic), M. Matte (Portneuf), M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee), M. Boucher (Ungava), M. Bourgeois (Abitibi-Est),
M. Fortin (Pontiac), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Habel
(Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie),
Mme Montpetit (Crémazie),
M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), M. St-Denis
(Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau), M. Busque (Beauce-Sud),
Mme Sauvé (Fabre), Mme Melançon (Verdun).
M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby),
M. Caire (La Peltrie), M. Jolin-Barrette (Borduas),
M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy
(Montarville), Mme Samson (Iberville),
M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée
(Repentigny), M. Lamontagne (Johnson), Mme D'Amours (Mirabel),
Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord),
M. Paradis (Lévis).
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin),
M. Khadir (Mercier), M. Surprenant (Groulx), Mme Ouellet
(Vachon), M. Sklavounos (Laurier-Dorion).
Le Vice-Président (M. Ouimet) : Que les
députés contre cette motion veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions?
Sinon, pour le résultat du vote, M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 112
Contre :
0
Abstentions :
0
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : En conséquence, la motion, elle est adoptée. M. le leader de l'opposition officielle.
M.
Bérubé : M. le
Président, nous souhaitons que cette motion soit envoyée au gouvernement
espagnol, au gouvernement catalan, au président de la Commission
européenne, au secrétaire général de l'ONU et au premier ministre canadien.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, si telle est la volonté des parlementaires, ça sera fait.
Toujours
à la rubrique, maintenant, des motions
sans préavis, M. le député de Borduas, pour une motion sans préavis.
M.
Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. le
Président, je demande le consentement pour déposer la motion suivante, conjointement avec le député de
Groulx et avec le député de Mercier :
«Que
l'Assemblée nationale constate que les dépenses encourues quant à la décision
fédérale de légaliser la vente et la possession de cannabis seront
assumées par les gouvernements provinciaux;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de faire front commun
avec les autres provinces canadiennes
dans le but d'obtenir du gouvernement fédéral la pleine gestion du champ fiscal
reliée à la vente du cannabis et une pleine compensation financière pour
les coûts engendrés par la légalisation.» Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Borduas. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Tanguay : Pas de
consentement, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas de consentement. Je
cède maintenant la parole à M. le ministre de l'Éducation, du Sport et
du Loisir pour la présentation d'une nouvelle motion sans préavis. M. le
ministre.
Souligner la Semaine
pour l'école publique
M.
Proulx : Merci, M. le
Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la
motion suivante conjointement avec le
député de Lac-Saint-Jean, le député de Chambly, le député de Gouin, le député
de Laurier-Dorion, la députée de Vachon et le député de Groulx :
«Que
l'Assemblée nationale souligne la tenue, du 1er au 7 octobre, de la huitième édition
de la Semaine pour l'école publique dont le thème est l'alphabétisation;
«Qu'elle
souligne l'apport essentiel de l'école publique dans la réussite éducative de
nos élèves, jeunes et adultes, ainsi qu'au développement de la société
québécoise;
«Qu'enfin,
elle profite de cette occasion pour souligner le travail exceptionnel réalisé
par l'ensemble du personnel scolaire,
et plus spécifiquement de l'équipe-école, qui fait de ce lieu un milieu
d'apprentissage de très grande qualité.» Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
ministre de l'Éducation. Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion? M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Tanguay : Nous proposons
de l'adopter sans débat, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, cette motion est-elle adoptée?
• (11 h 10) •
Des voix : Adopté.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Adopté. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, pour la présentation d'une nouvelle motion, je vous cède la
parole.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre
de la motion suivante conjointement avec le député de Verchères et la députée
de Vachon :
«Que l'Assemblée nationale réitère le droit à
l'autodétermination des peuples;
«Qu'elle reconnaisse la légitimité du référendum
catalan; et
«Que l'Assemblée nationale s'engage à reconnaître la déclaration d'indépendance du Parlement catalan, si tel est son choix.».
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Tanguay : Pas de consentement.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas de consentement. Y
a-t-il d'autres motions sans préavis? M. le leader adjoint,
y a-t-il consentement pour déroger à l'article 84.1 pour la présentation
des nouvelles motions sans préavis? MM. les leaders de l'opposition officielle,
consentement? Alors, le sujet de la motion?
M. Tanguay :
...indiquer, vous avez tout à fait raison, indiquer à l'Assemblée que je
souhaite présenter une motion concernant la tenue de consultations
particulières sur le p.l. n° 107.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Consentement?
Veuillez poursuivre, M. le leader adjoint du gouvernement.
Procéder à des
consultations particulières sur le projet de loi n° 107
M. Tanguay : Merci, M.
le Président. Alors, je fais motion, conformément à l'article 146 du
règlement de l'Assemblée nationale, afin :
«Que la Commission des institutions, dans le
cadre de l'étude du projet de loi n° 107, Loi visant à accroître la compétence et l'indépendance du commissaire à la
lutte contre la corruption et du Bureau des enquêtes indépendantes ainsi
que le pouvoir du directeur des poursuites criminelles et pénales d'accorder
certains avantages à des témoins collaborateurs,
procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques les
17, 18, 19 et 24 octobre 2017 à la salle du Conseil législatif;
«Qu'à cette
fin, elle entende les organismes suivants : le Commissaire à la lutte
contre la corruption, l'Association des
directeurs de police du Québec, l'Association des policières et policiers
provinciaux du Québec, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, la Fédération des policiers
et policières municipaux du Québec, M. Claude Poirier, chroniqueur
judiciaire, la Fraternité des policiers et policières de Montréal, le
Protecteur du citoyen, le Service de police
de la ville de Montréal, le Service de police de la ville de Québec, la Sûreté
du Québec, le Barreau du Québec, le Bureau
des enquêtes indépendantes, le Directeur des poursuites criminelles et pénales,
la Commission de la construction, le
Comité public de suivi des recommandations de la commission Charbonneau, le
Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec;
«Qu'une
période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la manière suivante : 6 minutes au groupe parlementaire formant le
gouvernement, 3 minutes 30 secondes au groupe parlementaire formant
l'opposition officielle et 2 minutes 30 secondes au deuxième groupe
d'opposition;
«Que la durée
maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange
avec les membres de la commission
soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi : 17 minutes
30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement,
10 minutes 30 secondes pour l'opposition officielle et 7 minutes pour
le deuxième groupe d'opposition; [enfin,]
«Que le ministre de la Sécurité publique soit
membre de ladite commission pour la durée du mandat.».
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M.
le leader adjoint du gouvernement. Y a-t-il consentement pour débattre
de cette motion?
Mise aux voix
Cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Adopté. Y a-t-il d'autres motions sans préavis?
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Tanguay : Merci
beaucoup, M. le Président. Suivant une entente entre les groupes parlementaires
et les députés indépendants, je sollicite le consentement afin de présenter une
motion concernant la tenue de consultations particulières
sur le projet de loi n° 143, Loi visant à améliorer la qualité éducative
et à favoriser le développement harmonieux des services de garde éducatifs à
l'enfance.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, y a-t-il
consentement pour déroger à l'article 84.1? Très bien. Alors, M. le
leader adjoint du gouvernement, veuillez poursuivre.
Procéder à des
consultations particulières
sur le projet de loi n° 143
M. Tanguay :
Merci, M. le Président. Je fais motion, conformément à l'article 146 du
règlement de l'Assemblée nationale, afin :
«Que la
Commission des relations avec les citoyens, dans le cadre de l'étude du projet
de loi n° 143, Loi visant à améliorer la qualité éducative et à favoriser
le développement harmonieux des services de garde éducatifs à l'enfance,
procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques les
24, 25 [...] 26 octobre 2017;
«Qu'à cette
fin, la commission entende les organismes suivants : l'Association
québécoise des services de garde éducatifs
à l'enfance, le Conseil québécois des services éducatifs à la petite enfance,
l'Association des garderies privées du
Québec, le Rassemblement des garderies privées du Québec, la Coalition des
garderies privées non subventionnées, l'Association
des garderies non subventionnées en installations, l'Alliance québécoise des
garderies privées non subventionnées, la
Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec, la Fédération de la
santé et des services sociaux, l'Association des cadres des centres de la
petite enfance, la Commission de la santé et des services sociaux du Québec et
du Labrador, l'Ordre des psychoéducateurs et
psychoéducatrices du Québec, l'Association des éducatrices en milieu familial
du Québec;
«Qu'une
période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires,
répartie de la manière suivante : 6 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement,
3 minutes 30 secondes au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle et 2 minutes 30 secondes au deuxième groupe d'opposition;
«Que la durée
maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée
maximale de 35 minutes partagées ainsi :
17 minutes 30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes 30 secondes pour l'opposition officielle et 7 minutes pour le deuxième groupe d'opposition;
«Que[, enfin,] le ministre de la Famille soit
membre de ladite commission pour la durée du mandat.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci, M. le leader adjoint
du gouvernement. Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
Mise aux voix
Est-ce que la motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Adopté. D'autres motions sans préavis?
Avis touchant les
travaux des commissions
Aux avis touchant, maintenant, les travaux du gouvernement...
M. Tanguay : Merci, M. le
Président. Alors, j'avise cette Assemblée que la commission...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
...plutôt l'avis touchant les travaux des commissions.
M. Tanguay : Ah! vous avez
dit les travaux du gouvernement, je pensais...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Du gouvernement, oui. Les travaux des commissions.
M. Tanguay : Bien oui, parce que c'est un travail collectif,
c'est un effort collectif des 125 députés, vous faites bien de le
souligner.
Alors,
j'avise cette Assemblée que la Commission des transports et de l'environnement procédera,
conformément à l'article 87.2 de la Loi sur les véhicules hors
route, à l'étude du rapport sur l'immunité de poursuite fondée sur les inconvénients de voisinage et le processus
de traitement des plaintes, de la médiation et de l'arbitrage en matière de
véhicules hors route, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission des institutions procédera aux consultations
particulières à l'égard du projet de loi n° 139, loi regroupant l'Office Québec/Wallonie-Bruxelles pour
la jeunesse, l'Office Québec-Amériques pour la jeunesse et l'office
Québec, aujourd'hui, de 15 h 30 à 16 h 30, à la salle
Louis-Joseph-Papineau;
La Commission
de la culture et de l'éducation poursuivra l'étude détaillée à l'égard du
projet de loi n° 144, Loi modifiant
la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions législatives
concernant principalement la gratuité des services éducatifs et l'obligation de
fréquentation scolaire, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
13 heures et de 15 heures à 17 heures, à la salle du
Conseil législatif;
Enfin, M. le
Président, la Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude
détaillée à l'égard du projet de loi
n° 130, Loi modifiant certaines dispositions relatives à l'organisation
clinique et à la gestion des établissements de santé et de services
sociaux, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la
salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Merci à vous, M. le leader adjoint du gouvernement.
Pour ma part,
je vous avise que la Commission de l'administration publique se réunira
aujourd'hui, à la salle des Premiers-Ministres
de l'édifice Pamphile-Le May, en séance de travail, après les affaires
courantes, vers 11 heures, jusqu'à 13 heures, afin de préparer
l'audition du ministère du Tourisme sur sa gestion administrative et sur ses
engagements financiers; en audition, de
15 heures à 18 heures, afin d'entendre le ministère du Tourisme; et
enfin en séance de travail, de
18 heures à 18 h 30, afin de statuer sur les observations, les
conclusions et les recommandations à la suite de cette audition.
Renseignements sur les
travaux de l'Assemblée
À la
rubrique, maintenant, Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le
leader adjoint de l'opposition officielle. Et je vous reconnaîtrai par
la suite, M. le leader adjoint de la deuxième opposition.
M.
Rochon : Oui. Merci, M. le
Président. Le projet de loi n° 56 sur la transparence en matière de
lobbyisme a été déposé le 12 juin 2015. On aimerait connaître les
intentions du gouvernement à ce sujet.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, quelques commentaires, M. le leader adjoint du gouvernement?
M. Tanguay :
Alors, rapidement, évidemment, cela concerne ultimement la Commission des
institutions, qui a déjà des mandats
en route, en travaux. Et j'invite mon collègue, évidemment, à en discuter avec
le ministre compétent, le ministre concerné par le projet de loi. Voilà.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci. Complément d'information,
M. le leader adjoint de l'opposition officielle.
M.
Rochon : C'est sur une autre
affaire. Est-ce qu'elle est au feuilleton? Préférez-vous que je revienne après
le collègue?
Une voix : ...
M.
Rochon : Non? Alors,
l'audition du Commissaire au lobbyisme sur le rapport intitulé Étude sur
l'assujettissement de tous les
organismes à but non lucratif aux règles d'encadrement du lobbyisme, tel que
prévu au projet de loi n° 56, Loi sur
la transparence en matière de lobbyisme a eu lieu le 28 septembre 2016, M. le Président. Alors, on
souhaite savoir pourquoi le gouvernement n'est toujours pas apte à nous
indiquer ses intentions dans ce dossier.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Merci. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Tanguay :
Copier-coller. Même réponse que la précédente, en tout respect. Alors, je
l'invite à en discuter avec le ministre concerné.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. M. le leader adjoint de l'opposition officielle.
M.
Rochon : Le projet de loi
n° 96, M. le Président, Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure
civile et la Loi sur le curateur
public en matière de protection des personnes, a été déposé le 7 juin 2016.
Quelles sont les intentions du gouvernement?
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Merci. M. le leader adjoint du gouvernement.
• (11 h 20) •
M. Tanguay :
Très, très heureux de souligner,
donc, le désir de collaborer des oppositions. Et, encore une fois, il faut considérer l'ensemble des travaux des commissions
qui sont concernées. Et aussi je l'invite à avoir une discussion avec le ministre en question. Vous savez, on peut faire ces échanges-là, mais
ce qui est réellement... Et il le sait, le collègue,
là, il est élu depuis 2015, je crois,
les discussions avec les ministres concernés souvent permettent d'avoir des
indications plus précises en allant voir la personne qui pilote le
dossier. Alors, je l'invite à le faire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Autre question, M. le leader adjoint de l'opposition officielle?
M.
Rochon : Oui. Oui, M. le Président. En fonction d'une autre
chose que je sais, siégeant ici depuis mars 2015, c'est qu'il existe au
règlement l'article 86, qui s'appelle Renseignements par le leader du
gouvernement. On peut, n'est-ce pas, solliciter ces demandes de renseignement
devant porter sur des affaires inscrites au feuilleton. Et je fais respectueusement remarquer
à mon collègue d'en face que toutes ces affaires sur lesquelles je l'interroge
apparaissent en effet au feuilleton.
Le
projet de loi n° 128, M. le Président, celui-là déposé le 13 avril
2017, Loi visant à favoriser la protection des personnes par la mise en place d'un encadrement concernant les chiens,
nous aimerions savoir quelles sont les intentions du gouvernement quant au calendrier des
consultations sur ce projet de loi. Je suis certain que le collègue s'y est
penché.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci, M. le leader
adjoint de l'opposition officielle. Votre référence à l'article 86 est tout à fait juste, et la
réponse donnée également par le leader adjoint du gouvernement est tout à fait
appropriée pour la bonne marche des travaux. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Tanguay :
Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, ce projet de loi concerne la
Commission des institutions, qui a du
travail, les collègues sont à pied d'oeuvre. On vient de faire une motion sur
le 107, qui va concerner la
Commission des institutions aussi, alors, encore une fois... Et ajoutons à ça,
toujours, l'intérêt de voir le désir de collaborer des oppositions et l'invitation renouvelée d'aller
parler au ministre concerné. Beaucoup de choses peuvent être communiquées
comme information dans ce contexte-là, M. le Président. Alors, voilà.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci.
Une voix :
...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Une dernière? Alors, M. le leader
adjoint de l'opposition officielle, puis après ça sera votre tour, M. le
leader de la deuxième opposition, leader adjoint.
M. Rochon :
Je pense que nous ne pouvons pas mieux témoigner, M. le Président, que par ces
questions de notre volonté de
collaborer aux travaux. Alors, quand le gouvernement pense-t-il déposer une
réponse à la question inscrite au feuilleton
le 13 juin 2017 par le député de Jonquière? Cette question s'adressait à
la ministre responsable du Travail. Elle concernait un citoyen de
Saguenay, M. Claude Truchon.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Tanguay : Question
importante qui aura une réponse tout aussi importante et éclairante dans les
meilleurs délais.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. M. le
leader adjoint de la deuxième opposition, c'est à votre tour maintenant
pour les renseignements sur les travaux de l'Assemblée. À vous la parole.
M.
Caire :
Merci, M. le Président. Je serai bref. Le 3 mai dernier, mon collègue des
Chutes-de-la-Chaudière, pendant les études
de crédits, a posé une question sur les détenus qui reçoivent une indemnité de
remplacement du revenu de la Commission des normes, de l'équité et de la
sécurité du travail, question pour laquelle la ministre n'avait pas de réponse complète. Donc, on comprendra, à ce
moment-là, mon collègue, le 29 mai dernier, est revenu avec une question
écrite inscrite au feuilleton, donc, depuis cinq mois, toujours sans réponse,
M. le Président.
Est-ce
que le gouvernement entend répondre à la question — ou compléter la réponse — posée par mon collègue dans les plus
brefs délais? Je pense que cinq mois, c'est un délai raisonnable.
Le Vice-Président (M.
Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le leader adjoint de la
deuxième opposition. M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Tanguay : Merci, M. le Président. Alors, on prend bonne note du
point fait par le collègue, puis je pense que ce sera un élément,
évidemment, qui sera apporté à la connaissance du ministre concerné. Alors,
voilà. Merci.
Affaires du jour
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci. Alors, s'il n'y
a pas d'autre renseignement sur les travaux de l'Assemblée, la période des affaires courantes étant terminée, nous
allons maintenant passer aux affaires du jour. Pour la suite des choses,
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Tanguay :
Oui, M. le Président. Je vous demanderais, s'il vous plaît, d'appeler l'article 22.
Projet de loi n° 62
Prise en considération du rapport de la commission qui en
a fait l'étude
détaillée et des amendements de la députée de Taschereau
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, à l'article 22 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le
rapport de la Commission des institutions
sur le projet de loi n° 62, Loi favorisant le respect de la neutralité
religieuse de
l'État et visant notamment à encadrer les demandes d'accommodements religieux
dans certains organismes, ainsi que les amendements transmis en vertu de
l'article 252 du règlement par Mme la députée de Taschereau.
Mme
la députée de Taschereau présente 11 amendements au projet de loi
n° 62. Parmi ceux-ci, cinq amendements visent à modifier l'interprétation de la Charte des droits et libertés
de la personne pour qu'elle soit conforme au principe de laïcité et de la neutralité religieuse de
l'État. Ces amendements sont ceux qui proposent l'ajout des
articles 15.1 à 15.4 et un amendement de concordance au préambule
du projet de loi.
Notre
règlement prévoit que les amendements doivent se rapporter à l'objet du projet
de loi, ne peuvent aller à l'encontre
de son principe ni en introduire de nouveaux. Les modifications proposées par
ces amendements dépassent la portée
du projet de loi. En effet, les dispositions guidant l'interprétation de la
charte ont un effet global sur tous les droits garantis par la charte et sur toutes les personnes qui bénéficient de
ces droits. Par conséquent, ces amendements doivent être déclarés
irrecevables. Les autres amendements sont, quant à eux, déclarés recevables.
Et
je vais suspendre les travaux quelques instants pour convoquer une rencontre
des leaders pour la tenue des votes sur ces amendements.
Alors, nous
suspendons les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
11 h 26)
(Reprise à 11 h 34)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, toujours à l'article 22 de notre feuilleton, y a-t-il
des interventions sur le rapport ainsi que sur les amendements? Mme la
ministre de la Justice, je vous cède la parole.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
Alors, M. le Président, sur la prise en considération du rapport, parce que
c'est de ça dont il est question, je
nous amène à considérer tout le chemin qui a été parcouru sur la question du
vivre-ensemble, tous les enjeux, toutes les discussions que nous avons
eues ici, en cette enceinte, depuis les 10 dernières années.
En
juin 2015, j'ai déposé le projet de loi n° 62, projet de loi qui s'inscrit justement dans cette volonté
de mettre les bases d'un vivre-ensemble nécessaires au Québec. Et, bien
que ces questions-là soient des questions qui nous ont amenées ici à avoir des débats, comme je le mentionnais, parfois très colorés,
parfois très musclés, il est important d'avoir les
discussions que nous avons eues au cours des deux dernières années, de
poursuivre ces discussions pour en arriver à avoir minimalement un cadre
législatif important permettant de mieux diriger ceux et celles qui, au
quotidien, sont confrontés à ces questions,
ces questions qui sont celles de l'encadrement des accommodements pour motif
religieux, question aussi qui nous amène à nous questionner sur la
façon dont les services de l'État sont offerts, la façon dont on interagit avec nos collègues issus d'autres
cultures, d'autres croyances religieuses. Et c'est une question
d'une grande sensibilité. C'est le
devoir d'un gouvernement de se prononcer sur ces questions-là, aussi
délicates qu'elles puissent être.
Le
projet de loi que nous vous soumettons aujourd'hui et le travail qui a été fait lors de l'étude détaillée, lors de son
étude détaillée, à mon avis, est le fruit d'un consensus. J'entends déjà mes
collègues de l'opposition, qui me diront : Non, Mme
la ministre, nous souhaitions aller
plus loin. Nous souhaitions inscrire certains principes, certains éléments
dans ce projet de loi là. Je les
entends, mais, plutôt que de nous attarder aujourd'hui sur les éléments
qui nous divisent, sur les éléments
pour lesquels nous avons une interprétation différente ou une perception
différente, je nous invite, comme parlementaires,
à nous attarder sur les éléments qui nous unissent. Et, d'entrée de jeu, M. le Président, je dois dire... et je pense que c'est important de le rappeler parce
que, trop souvent, on oublie, dans la fougue de nos échanges à la période de
questions, on oublie le ton et le respect
qui est si présent lors du travail en commission
parlementaire. Je tiens à le
souligner, M. le Président, parce que, malgré nos opinions divergentes,
malgré le fait qu'on puisse exprimer des volontés divergentes sur la portée d'un projet de loi, tout le travail
qui a été fait depuis le 15 août dernier, lors de l'étude détaillée du projet de loi, s'est fait dans un climat
tout à fait serein, dans un climat de respect.
Puis
ça, je sais, on aura des discussions et on aura certainement des discours
enflammés au cours des prochains jours,
mais je tiens à le souligner. C'est important. C'est important qu'un projet
de loi sur le vivre-ensemble
s'inscrive dans un cheminement
sérieux et rigoureux. Puis je salue mes collègues de l'opposition
pour la façon dont nos échanges se sont déroulés au cours des derniers
mois.
Pour
moi, c'est un projet de loi qui rassemble. C'est un projet de loi qui ne divise pas la société
québécoise. C'est un projet
de loi aussi qui s'inscrit... Bien,
il rassemble puis il ne divise pas parce qu'il s'inscrit dans le respect des
droits et libertés fondamentaux et dans lesquels s'inscrivent certes la
liberté de conscience, la liberté de religion, d'opinion et d'expression. Et ça
inclut évidemment la liberté de manifester ses croyances ou ses non-croyances,
de manifester ses convictions et de
manifester aussi le droit, puis c'est très,
très important, le droit de ne pas
adhérer à une croyance et de ne pas
souhaiter se voir imposer une croyance parce que ça, ce principe-là, il est
aussi à la base de la décision de la Cour
suprême dans l'affaire du mouvement laïc. Cette décision de la Cour suprême là a reconnu la nécessaire neutralité de l'État et de ses institutions pour respecter autant les croyances religieuses
diverses qui s'expriment au sein de la société, mais aussi
pour respecter le droit de ceux et celles qui sont non croyants et qui ne
souhaitent pas se voir imposer quelconque diktat issu d'une croyance
religieuse ou d'une religion.
• (11 h 40) •
Alors, c'est
un projet qui, je le mentionnais, a fait suite à des débats qui parfois ont été
difficiles, qui nous ont amenés à
présenter le projet de loi n° 62 et qui nous ont amenés également,
à la suite des consultations, à présenter un certain nombre d'amendements. Donc, dès le 15 août, en toute transparence,
nous avons déposé une série d'amendements au projet
de loi qui nous ont été inspirés par les consultations.
C'est un
autre élément, M. le Président, qui est fort important. C'est que, lorsqu'on
dépose un projet de loi en cette Assemblée,
on invite les citoyens et les citoyennes à nous faire part de leurs
observations. Donc, le travail parlementaire,
c'est à ça qu'il sert. Les consultations qui se sont déroulées l'automne dernier, à l'automne 2016, ont amené
des groupes tout aussi diversifiés
les uns que les autres à nous faire part de leur lecture du projet de loi, nous faire part également, dans certains
cas, de leur souhait, dans certains cas, d'aller plus loin, ce qui est tout à fait légitime, ou, dans d'autres cas, de ne pas légiférer. Donc, nous
avons pris ces commentaires.
Nous avons
aussi été à l'écoute des commentaires qui ont été formulés à la suite des consultations par nos collègues de l'opposition parce que la volonté, c'était d'aller chercher ce sur quoi
nous pouvions nous entendre pour bonifier le projet de loi. Et là-dessus, M. le
Président, en cours de route, autant
ma collègue de Taschereau, ma collègue de Montarville et notre collègue
de Gouin ont présenté des propositions d'amendement. Toutes ces propositions d'amendement ont été étudiées
et analysées avec le plus grand sérieux. Et lorsqu'il était possible de le
faire, lorsque ces propositions d'amendement
s'inscrivaient justement
dans l'esprit du projet de loi, dans une véritable bonification du projet de loi, nous avons fait le travail ensemble pour les intégrer. Et je pense
que c'est important de reconnaître qu'à
l'intérieur de la version qui a été
soumise à cette Assemblée, qui fait suite à
nos travaux en commission
parlementaire, il y a
un peu de chacun d'entre nous, de
chacun des membres de la commission. Il
y a eu un effort soutenu de la part
de tous pour amener des questions parfois, encore une fois, pas toujours
simples et d'en traiter.
Le projet de loi, je le rappelle parce que c'est toujours utile de répéter, s'articule sur trois grands axes. Il s'articule sur l'affirmation du principe de la neutralité
religieuse de l'État, l'affirmation
du principe selon lequel les services sont donnés et reçus à visage découvert et l'encadrement des demandes
d'accommodements fondés sur un motif religieux.
En ce qui concerne l'affirmation de la neutralité religieuse, c'est un principe qui est
reconnu par les tribunaux, mais qui,
à ce jour, n'a jamais été consacré dans un texte législatif. Compte tenu qu'il existe au Québec, et c'est un fait, une séparation très claire entre l'État
et les institutions religieuses, il est important pour nous de
préciser que le respect du principe de
la neutralité religieuse de l'État comprend le devoir pour les membres du personnel
des organismes publics d'agir, dans l'exercice de leurs fonctions, bien entendu, de façon
à ne pas favoriser ni défavoriser une personne en raison de l'appartenance
de cette dernière ou non à une religion ni
en raison des convictions religieuses ou des croyances religieuses propres au
personnel de l'État.
L'État, ses institutions sont neutres. Les
individus qui constituent l'État, eux, ont droit au respect de leurs croyances.
Par contre, dans le cadre de leurs
fonctions, ils ne doivent pas privilégier ou favoriser un citoyen, une tierce
partie, ou défavoriser une tierce partie en raison de ses croyances.
C'est un peu, somme toute, le grand principe de la neutralité religieuse où l'analyse d'une demande est faite
non pas en raison d'un filtre de croyance ou de non-croyance, mais bien
de façon objective. Pourquoi? Parce que, lorsque l'État n'exprime aucune
préférence, l'État s'assure de préserver un espace public qui est neutre, un espace public qui est
exempt de discrimination puis un espace public à l'intérieur duquel tous
bénéficient également d'une véritable liberté de croire ou de ne pas croire et
tous sont ainsi valorisés.
Mais
évidemment, M. le Président, un espace neutre, comme je le mentionnais, ne
signifie pas une homogénéisation des
acteurs privés qui s'y trouvent. La neutralité, c'est bien celle de l'État mais
pas celle des individus. Un espace public neutre, qui est libre de contraintes, de pression et de jugement de la
part des pouvoirs publics en matière de spiritualité, protège davantage
la liberté et la dignité de chacun des individus.
Pour ce qui
est de l'exigence à l'effet que les services publics doivent être donnés et
reçus à visage découvert, cette exigence poursuit évidemment l'objectif
légitime de reconnaître l'importance d'avoir le visage découvert lors de la prestation de services des organismes qui
constituent l'État dans son sens large pour s'assurer, d'une part, de la
qualité des communications entre les
individus, de permettre la vérification de l'identité de ces individus, mais
aussi, dans certains cas, pour des
fins de sécurité. Dans le cadre de services publics, il est important de
communiquer, il est important de se reconnaître, de se connaître, de
pouvoir dialoguer sans aucune contrainte, sans qu'un obstacle soit présent.
Et, vous
savez, M. le Président, cet objectif-là s'inscrit très bien dans le cadre d'une
société libre et démocratique. On
voit mal comment nous pouvons dialoguer lorsqu'il est difficile, impossible de
distinguer le non-verbal d'une personne. Comment m'assurer que vous comprenez bien mon intervention, M. le
Président, si je ne vous vois pas sourciller, je ne vous vois pas sourire ou même froncer des
sourcils? Le non-verbal me permet de constater si ma collègue de Taschereau est
d'accord ou non avec mes propos. Son non-verbal est d'ailleurs très éloquent,
habituellement.
Mais, vous
savez, farce à part, M. le Président, cette obligation, cette consécration de
l'obligation d'avoir le visage découvert
dans notre société est pour moi tout à fait logique, s'inscrit dans justement
ces valeurs que sont le vivre-ensemble, cette importance d'assurer une
qualité dans nos communications. Puis on n'a qu'à voir... Tout récemment
encore, l'histoire nous a démontré à quel point il y avait un inconfort lorsque
des gens se cachaient volontairement le visage. Rappelons-nous, le 20 août dernier, les échanges qui ont eu... les
incidents qui ont eu lieu ici, tout près, à Québec, où on voyait les gens le capuchon par-dessus la tête,
les verres fumés, portant un foulard devant le visage, obstruant complètement
qui ils étaient. Ce n'est pas un signal
d'intégration à la société, au contraire. Et cette réalité-là... Certains de
ces gens-là ont utilisé les transports publics, et ça a suscité des
craintes. Alors, l'obligation d'avoir le visage découvert est tout simplement
une obligation qui s'inscrit dans le cadre du vivre ensemble et qui est tout à
fait légitime.
• (11 h 50) •
Puis, vous
savez, M. le Président, la communication pleine et ouverte, bien, c'est
essentiel, ça aussi, dans une société libre
et démocratique. S'assurer de la vérification de l'identité des gens qui
demandent un service public, aussi s'assurer qu'on rend les services à la bonne personne, s'assurer que les mesures
de sécurité soient respectées, ce sont des principes qui s'inscrivent très
bien dans une société libre et démocratique.
Pour ce qui est du troisième axe du projet
de loi, M. le Président, il vise évidemment à énoncer des critères qui seront pris en compte dans le traitement des
différentes demandes d'accommodement qui pourraient être présentées pour des motifs religieux. Vous le savez, ces demandes
ont souvent suscité, en raison parfois de la méconnaissance du contexte,
de la méconnaissance des enjeux, beaucoup
de controverse dans le passé, et je
pense qu'il est important
d'encadrer plus clairement
l'analyse de ce type de demandes pour aider ceux et celles
qui en sont saisis, pour les guider, pour les accompagner dans le cadre de cette analyse.
Il
y a eu certains amendements qui ont été adoptés lors des travaux en commission
parlementaire, justement, qui nous
permettent de clarifier les objectifs poursuivis par le projet, d'indiquer dans quel contexte le projet de loi s'inscrit et aussi pour permettre d'accompagner davantage les
organismes publics. Notre collègue de Taschereau a demandé que soit inscrite de façon très claire l'obligation
d'émettre des lignes directrices. Nous avions l'intention d'émettre ces lignes
directrices, mais, M. le Président, quoi de
plus clair que d'inscrire le tout à l'intérieur du projet de loi? Et je
comprends parce qu'on a souvent eu des
échanges, on a souvent dit que ce projet de loi là devait être suivi par une démarche pédagogique. On devait
expliquer, on devait accompagner les
différents intervenants. Et c'est dans cet esprit-là que nous avons donné suite à la proposition de notre
collègue de Taschereau parce qu'il y a, oui, un travail à faire. Et ces lignes
directrices, et c'est un petit peu
exceptionnel, feront l'objet d'une étude, une présentation devant la commission
parlementaire, fort probablement la
Commission des institutions, pour permettre aux collègues et aux collègues
parlementaires aussi de se familiariser avec le concept parce que peut-être que
plus nous aurons d'échanges sur ces questions-là, plus nous allons contribuer à atténuer les questionnements
qui mènent parfois à des débats, qui mènent parfois à des craintes, je vous
dirais, à l'égard de ces accommodements et à l'égard du traitement accordé à
ces accommodements.
Nous
avons aussi apporté un amendement qui a permis de clarifier le rôle et les
responsabilités de la plus haute autorité
des organismes visés par le projet de loi pour s'assurer de prendre les moyens
nécessaires pour assurer le respect des mesures contenues au projet de loi.
Alors, un des moyens préconisés était la désignation d'un répondant en matière d'accommodements qui verra à formuler des
recommandations sur ces questions aux membres du personnel qui auront à traiter les demandes, toujours,
évidemment, dans une visée de cohérence, dans une visée d'équité, et un peu de
façon similaire à la personne qui est
responsable, au sein des organismes, de traiter les demandes d'accès à
l'information. Donc, il y a une
personne vers qui cheminent les demandes, une personne qui voit à... qui
développe l'expertise, d'une part, mais qui voit aussi à assurer un
traitement équitable.
Donc, il a été aussi
convenu d'un commun accord, et ça, c'est important, que ce projet de loi
s'applique aux municipalités. Donc, il n'y a qu'un Québec, un citoyen. Donc, il
s'agit de principes généraux qui s'appliquent aux différentes municipalités partout sur le territoire. Donc, on évite de
créer un gruyère, évidemment. Et ça aussi, c'était une demande qui avait été formulée, si ma mémoire est
bonne, en novembre denier par notre collègue de Taschereau suite à
l'étude... à la fin des consultations.
Les
mesures qui sont proposées au projet de loi auront un impact majeur sur des
enjeux qui ont trop longtemps divisé
les Québécois. C'est un projet de loi qui respecte les droits et libertés
garantis par nos chartes. Et le projet de loi, je le crois sincèrement, représente un consensus qui
est survenu entre les partis puisque, suite aux travaux en étude détaillée...
et chaque parti a fait un pas de plus pour rejoindre l'autre.
Bien
sûr, il y a des valeurs très
différentes et il y a des volontés très différentes, et je le sens. D'ailleurs,
à preuve, les 11 amendements
présentés par notre collègue de l'opposition
officielle, amendements
dont nous avons eu la chance, pour la
plupart, de débattre en commission
parlementaire, on comprend qu'il y a
toujours cette volonté d'aller un peu plus loin, de pousser le projet de loi plus loin. Nous
avons un projet de loi qui est conforme, je vous le rappelle, à l'esprit
de nos chartes, qui est conforme
aussi aux engagements pris par le premier ministre du Québec,
tant dans la dernière campagne
électorale que lors de son discours
inaugural, et c'est un projet de loi qui, à mon avis, comprend des éléments sur
lesquels nous nous entendons tous.
Comme
élus, M. le Président, on a l'obligation de faciliter l'intégration des
nouveaux arrivants, on a l'obligation de
leur montrer les belles valeurs de notre société. On a aussi, entre nous, une
obligation de respect parce que ce projet-là, ce n'est pas seulement un projet qui... c'est un projet qui touche le vivre-ensemble,
notre vivre-ensemble au sein même de cette Assemblée. Nous sommes des
élus ayant des croyances religieuses diversifiées, parfois des élus qui sont
athées. L'important, c'est de respecter
cette diversité qui fait, en quelque sorte, la richesse du Québec. On doit...
Et je pense... je suis persuadée que ce projet de loi là est respectueux
de cette diversité.
Je
vous dirais un simple regret, simple regret et peut-être une perception qui
s'est dégagée d'un amendement qui avait été proposé, souhaitant que la
neutralité religieuse soit aussi... s'applique aussi aux élus. L'objectif...
Et, je tiens à le réitérer, jamais il
n'était question d'un amendement qui obligeait les élus à rencontrer qui que ce
soit, là, que ce soit très clair, pour les fins de ce projet de loi là.
C'était plutôt un amendement qui visait à assujettir les élus au principe de l'égalité, à l'obligation de neutralité. Nous
avons eu des échanges en commission parlementaire. Il y a eu des amendements
sur cet amendement qui ont été présentés, mais, M. le Président, soyez assuré
que l'objectif visé par le projet de loi
était d'assurer que la neutralité religieuse s'applique aux élus dans le cadre
de leurs fonctions, ce qui, en soi, n'est
pas un enjeu problématique. Assurer de ne pas favoriser ou défavoriser une
personne en raison de ses croyances ou de
ses non-croyances, c'est un petit peu aussi... c'est à la base de la décision
de l'arrêt Saguenay. Donc, il ne m'apparaissait pas déraisonnable que de l'inclure. Mais suite à nos discussions, la
semaine dernière, nous avons trouvé une voie de passage et nous avons simplement assujetti les élus à
l'obligation de service à visage découvert. Ça aussi, ça va de soi. Je pense
que c'est un constat qui se dégage et qui fait consensus au sein de cette
Chambre.
Donc,
je vous soumets le tout bien respectueusement, M. le Président. J'ose espérer
que nous pourrons poursuivre les
prochaines étapes de façon tout aussi respectueuse les uns envers les autres
dans le même esprit qui a guidé nos travaux lors de l'étude détaillée.
• (12 heures) •
Et
un dernier mot pour mes collègues du groupe parlementaire. Plusieurs des
collègues qui ont suivi avec beaucoup de
patience nos travaux sont ici, dans cette salle, M. le Président. Puis je tiens
à les remercier parce que, vous savez, porter un projet de loi comme ça, ça ne se fait pas seul. Et on a des acteurs
et des actrices qui, parfois, sont plus silencieux, mais leur présence et parfois les petites mains sur
l'épaule, bien, ça fait toute une différence dans notre approche et dans la
façon dont on aborde les dossiers. Et
puis souvent, parfois quand les vents étaient un petit peu plus forts, bien,
ils ont été d'un grand réconfort,
puis je tiens à les remercier, parce
qu'on ne le dit pas assez souvent, mais nos collègues parlementaires jouent un rôle très, très important. Au même titre
que j'ai remercié les collègues de l'opposition, collègues du caucus,
merci. Vous êtes de grands alliés, puis je vous apprécie énormément.
Alors, voilà, M. le Président, c'est ce que
j'avais à cette étape. On aura la chance de se reparler au cours des prochains
jours. Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la ministre,
pour cette intervention. Mme la députée de Taschereau, à vous la parole.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : Merci, M. le Président. Si je vais parler du projet de loi
n° 62 sur la neutralité religieuse de l'État, je vais quand même ouvrir sur un sujet qui y
touche de façon concomitante, un peu parallèle, et qui a aussi été abordé
souvent dans le projet de loi n° 59 qui
est apparu en même temps que n° 62, c'est-à-dire la liberté d'expression
et ses limites.
Hier, un
chroniqueur a parlé de la chasse aux séparatistes comme étant un rêve qu'il
avait et a rigolé après avoir fait
cette réflexion, c'est le chroniqueur de TVA Luc Lavoie. Je veux juste rappeler
aux gens qui écoutent que Denis Lortie est
rentré ici, il y a eu trois morts, 13 blessés, et il avait été — je vais le dire comme ça a été soumis — crinqué par des animateurs de radio et il voulait tuer René
Lévesque et son gouvernement. Je veux juste rappeler que Richard Henry Bain,
un autre qui a avoué qu'il était dans un
univers, fragile mentalement, probablement, où il voulait tuer les séparatistes
et tuer la première ministre, Pauline
Marois, quand elle est arrivée, le soir même de son élection, son arrivée au
gouvernement... qu'il y a des
collègues ici qui ont failli... Si une porte n'avait pas été fermée à temps, il
y a des collègues qui seraient décédés. Alors, ce que j'ai à dire, c'est que c'est inacceptable, de tels propos,
et qu'un chroniqueur chevronné comme ça ne peut pas se permettre de
faire ça, et que la sanction doit être à la hauteur du geste posé. Merci, M. le
Président.
Je vais parler du projet de loi n° 62 plus
précisément maintenant et je vais juste rectifier une chose.
La ministre a
dit avec raison que nous avons eu une entente, une collaboration extrêmement
respectueuse. On a vraiment cherché à
faire avancer cette loi dans le débat le plus serein possible. Évidemment,
puisqu'on parle d'événements tragiques,
les événements qui se sont passés, l'attentat au Centre culturel islamique, a
teinté aussi cette atmosphère. Nous avons
dit d'un commun accord : Baissons le ton, on s'est entendus là-dessus, et
on l'a fait en général très, très, très bien. D'ailleurs, tout le long, toutes les discussions qu'on a eues sur ces
sujets avec la ministre de la Justice, on a eu de très bons rapports, ainsi qu'avec les collègues libéraux,
parce que ce sont des sujets importants, parce que ce sont des sujets qui peuvent avoir un impact, quand on — je vais réutiliser l'expression que j'ai
utilisée tout à l'heure — crinque trop le monde, peuvent avoir des impacts négatifs
sur une partie de la population.
Alors, bien
sûr, ça a été respectueux. Bien sûr, nous avons eu quelques gains, j'en
parlerai. Mais est-ce qu'il y a consensus autour de cette loi? Je
m'inscris en faux totalement et je veux le dire. Il n'y a pas consensus.
La majorité
des amendements qui avaient une portée importante, là, je ne parle... ont été
rejetés par le gouvernement libéral,
par la ministre et son équipe. Ce n'est pas rien. Il y a des choses très
importantes, qui avaient été présentées longtemps d'avance, qui avaient été présentées... Nous aussi, dès
novembre 2016, nous avions présenté nos amendements d'avance à la commission parlementaire. J'ai fait
ce que je n'avais pas fait en 19 ans de vie politique, j'ai présenté des
amendements d'avance. Pourquoi? Parce que le sujet valait la peine d'être traité
de façon différente.
Maintenant,
est-ce qu'une majorité de nos amendements ou est-ce que des amendements majeurs
ont été adoptés au point de dire que
l'opposition fait consensus avec cette loi? Non, M. le Président. D'accord pour
le respect, d'accord pour certaines avancées, mais majeures, non.
En
l'occurrence, que fait le projet de loi? Puis, si on écoute bien les propos de
la ministre, elle l'exprime bien : l'intention du gouvernement, c'est d'enchâsser la jurisprudence dans une
loi, ce n'est pas d'aller beaucoup plus loin que ça. Et c'est ce qu'on a. On a une loi qui enchâsse la
jurisprudence à peu près et qui ne va pas plus loin, qui ne fait pas évoluer
suffisamment le Québec, elle ne fait pas avancer le Québec.
C'est
pourquoi nous en sommes rendus à la prise en considération du rapport. C'est
pourquoi nous ramenons ici, à l'Assemblée
nationale, pour vote les amendements qui nous semblaient importants, les
amendements majeurs, qui font encore
partie, pour nous, de ce que devrait être une véritable loi qui ferait avancer
le Québec en matière de laïcité — voilà, le mot est lancé — et en
matière de neutralité religieuse de l'État.
Le premier
amendement que nous déposons, et qui est considéré déjà, je le sais déjà, comme
irrecevable, mais j'en appelle au
gouvernement libéral de se joindre à toutes les oppositions, qui de façon
unanime demandent d'enchâsser la laïcité dans la Charte des droits et
des libertés... Je sais que, pour l'Assemblée nationale, de façon
administrative, clairement, dans nos règles,
c'est inadmissible, c'est irrecevable, mais nous avons le pouvoir de changer
les choses, nous sommes les élus de
l'Assemblée nationale. Toutes les oppositions sont d'accord, toutes. Québec
solidaire, Coalition avenir Québec
ont approuvé, appuyé, voté pour l'amendement du Parti québécois qui disait
d'enchâsser la laïcité dans la Charte des droits et des libertés de la
personne. C'était, là aussi, un moment historique.
La ministre a
souvent dit en commission parlementaire : Vous ne vous entendez pas sur la
laïcité, comment le gouvernement
pourrait-il légiférer si même le mot ne provoque pas chez vous un ralliement
autour de sa signification? Mais, dans l'amendement que nous avons déposé,
inspiré par deux personnes... bien, en fait, deux personnes... un mémoire
et un document... Le mémoire, c'est le
mouvement des juristes, qui avait été présenté par Me Julie Latour, qui
exprimait bien comment on pourrait enchâsser cette laïcité dans la
Charte des droits et des libertés, et l'autre, c'est le rapport Bouchard-Taylor lui-même. Nous avons écrit
l'amendement à partir du rapport Bouchard-Taylor pour être sûrs que la laïcité que nous proposions puisse correspondre au
maximum à la vision que nous avions tous. Alors, Bouchard-Taylor est là, quelques mots de Julie Taylor qui
proposait véritablement... Julie Latour qui proposait véritablement la forme,
et puis un ralliement unanime des
oppositions. C'était un moment historique, ça l'est encore. C'est possible.
Nous voterons cet amendement en prise
en considération... Non, nous ne le voterons pas, il est irrecevable. Mais, si
le gouvernement nous annonçait qu'il veut ajouter ce principe à sa loi,
ce serait réglé. On pourrait, on peut le faire, tout est possible à l'unanimité. Alors, j'en appelle encore au
gouvernement d'inscrire la laïcité dans la Charte des droits et des libertés de
la personne.
Un autre
argument qui a été jugé... Un autre amendement qui a été jugé irrecevable par
l'Assemblée nationale, c'était qu'on
dise simplement cette phrase, M. le Président — je comprends que l'Assemblée nationale ne
peut pas l'admettre, parce que la laïcité semble un mot honni par le
Parti libéral et par le gouvernement, il n'y a pas moyen de l'inscrire nulle part dans le corpus
législatif — c'était
d'inscrire tout simplement cette phrase dans un préambule qui a déjà été proposé par la ministre, où elle parle
de : «L'État québécois et ses institutions sont neutres.» Nous, ce qu'on
propose, c'est : «Considérant
que la laïcité de l'État québécois et ses institutions [est] le reflet du
parcours historique du Québec.» Ce
n'est pas très engageant. Ce qu'on proposait, nous, c'était de dire que
l'évolution nous a menés là. On ne parlait même pas de l'avenir, on
parlait du passé. Bien, le gouvernement a refusé ça.
C'est encore
possible si vous décidez d'ajouter le principe de la laïcité. C'est irrecevable
parce que ce principe n'est pas
présent, mais il suffirait d'inscrire le principe, et on y serait, on l'aurait.
Et je pense que les Québécois s'attendent à ça, je pense que les Québécois et Québécoises nous l'ont dit.
D'ailleurs, pendant la commission parlementaire, il y a eu 22 mémoires qui sont venus dire oui à cette
inscription de la laïcité : Mettez ça dans notre corpus législatif, et
seulement sept sont venus dire non.
Et les principaux regroupements qui travaillent justement avec l'État, tous les
grands syndicats, sont venus nous
dire : Oui, s'il vous plaît, inscrivez la laïcité. Alors, c'est un geste
important; qui est irrecevable dans nos règles, mais qui pourrait encore
être changé.
• (12 h 10) •
D'autre chose
que nous déposons encore en amendement parce qu'on croit qu'il est encore
possible de changer les choses :
interdiction des signes religieux, méthode Bouchard-Taylor. Ce fameux... ce
qu'on appelle le rapport Bouchard-Taylor, dans la tête des Québécois et
Québécoises, souvent se résume à ces mots : Interdiction des signes religieux chez les fonctionnaires de l'État, les
agents de l'État ayant un pouvoir de coercition. On le sait, on parle des
policiers, des juges... en fait, les
agents de la paix, les juges, les procureurs de la couronne. On le ramène
encore. On le ramène parce que c'était une demande fondamentale.
On le ramène aussi, et le chef du Parti
québécois en a parlé ce matin, on le ramène aussi parce qu'il y a eu un moment où on a senti qu'il était possible de
cristalliser quelque chose ensemble, c'était après l'attentat au Centre culturel
islamique. Il y a eu comme un moment de
pause, et tout le monde s'est dit : Quel bout de chemin je pourrais
faire pour arriver à apaiser les
tensions, à régler une partie... à trouver une solution qui fasse que les Québécois
se diraient : Mon État me
protège, peu importe l'opinion religieuse ou l'opinion politique,
rassembler autour de nous, les élus de l'Assemblée nationale, cette idée que les l'État est notre protecteur? Bien, on l'a échappé, parce que nous
avons déposé l'amendement qu'on dit
Bouchard-Taylor, et il a été rejeté, il a été rejeté. C'est pourtant quelque
chose de très simple, qui a été évalué en 2007, le rapport est sorti en 2008, il y a eu une immense consultation.
Et nous pourrions aujourd'hui corriger cette erreur qui a été de ne pas accepter la main tendue des
oppositions, c'est possible, encore une fois, d'ailleurs. Je pense aux députés
indépendants, qui se sont ralliés à cette
idée, alors qu'ils étaient contre au début. Ils se sont ralliés à l'idée en
disant : il faut un moment de
grâce. Ce moment, nous l'avions, mais le gouvernement n'a pas accepté, on
appelle ça, de fermer ça, d'en faire
quelque chose, une action, un geste. Ça nous a échappé, ce moment-là nous a
échappé, mais il est encore possible d'y revenir quand on va voter ces
amendements.
Une autre
chose que nous présenterons, c'est que tout accommodement au visage découvert
pour motif religieux doit être
refusé. Je sais que la ministre... D'abord, on parle de gains, la ministre a
accepté que... Avant, dans l'article tel qu'il était écrit avant, dans la loi, dans le projet de loi n° 62,
il y avait une exception. En fait, il y avait un article qui disait... c'était une immense ouverture aux accommodements,
cela disait, article 9, troisième alinéa : «Un accommodement qui
implique un aménagement [au visage
découvert] — je
traduis, je traduis nos règles législatives — est possible mais doit être refusé si
[pour] des motifs [de] sécurité, [identification] ou [...] niveau de
communication...» Donc, la prémisse, c'était :
Un accommodement est possible, ensuite on nommait des exceptions. Ça n'avait
pas de bon sens, là. On parle du visage
découvert, une notion de vivre-ensemble que la ministre a très bien décrite, a
bien compris le sens, a bien résumé les
explications qu'on s'était données, tous et toutes ensemble. Alors, nous, ce
qu'on propose, c'est de le dire : Tout accommodement au visage découvert pour motif religieux est
refusé. Nous allons le ramener. Je sais que la ministre dit... et je comprends,
là, elle dit : On ne peut pas dire
qu'un accommodement va être refusé... c'est-à-dire : On ne peut dire qu'un
accommodement ne peut pas être
déposé, les personnes peuvent demander un accommodement, mais, la façon dont
est libellé l'article, on pense que
ça va être refusé, mais nous, on pense qu'il faudrait... que les mots pour le
dire devraient être inscrits et que les gens devraient pouvoir les lire.
Si on avait inscrit la laïcité dans la Charte
des droits et des libertés de la personne, ce serait très facile ensuite d'inscrire cela. Vous voyez, un geste... Ce n'est
pas pour rien que j'ai commencé par la laïcité, l'un découle de l'autre,
parce qu'inscrire la laïcité dans la Charte
des droits et des libertés de la personne, c'est introduire une clause qui fait
que notre droit change, notre position s'affirme, il y a un sens à
donner à l'État et à la laïcité, qui ensuite provoquera une meilleure compréhension de la façon dont nous
voulons vivre ensemble. C'est ça, le sens de ces amendements-là. C'est une loi qui est importante, là, elle va gérer la
façon dont on introduit le religieux dans l'État — je pèse mes mots en disant ça — on introduit le religieux dans l'État puis
on donne des balises. Sans laïcité, si on ne parle que de neutralité
religieuse, on manque le bateau. La neutralité religieuse, c'est la façon dont
l'État doit gérer la présence de la diversité religieuse chez ses fonctionnaires et chez les gens qui
viennent chercher des services mais en toute neutralité, c'est-à-dire s'accommodant de tout et de rien selon le niveau
de pression sur l'organisme. La véritable laïcité, c'est de dire que l'État est
laïque et que l'État n'a pas à travailler en
fonction de l'opinion religieuse de ses fonctionnaires ou des gens mais à
travailler de façon extrêmement
ouverte, et claire, et neutre. La neutralité, ensuite, est une conséquence de
la laïcité, mais la laïcité, c'est la séparation claire entre l'Église
et l'État, et la protection de la liberté de conscience et de religion, et
ensuite la neutralité de l'État. Ces concepts-là sont très bien définis par
Bouchard-Taylor. Donc, ça aurait dû être écrit.
Ensuite, ça, c'est un concept un peu plus
compliqué, nous demandons de remplacer le critère de «contrainte excessive» par «contrainte plus que minimale». Ça,
c'est un peu plus compliqué. Si vous voulez savoir d'où ça vient, ça vient des
États-Unis, c'est appliqué aux États-Unis. Aux États-Unis, qui est un pays qui
est assez religieux, le «God Bless America»
est très, très connu, souvent les hommes et les femmes politiques finissent
leurs discours avec «God Bless America»,ce qui n'est pas le cas
chez nous, les États-Unis, pourtant, pour traiter des accommodements, des balises
en matière d'accommodement à motif
religieux, on ne fonctionne pas du tout comme au Canada ou au Québec — puis là on calque la jurisprudence
sur quelque chose qui a été décidé au Canada dans une autre cause et qui ne
correspond pas à notre vivre-ensemble. C'est
qu'aux États-Unis, quand quelqu'un demande un accommodement à une entreprise, à
l'État, et tout ça, il faut que l'employeur considère que la contrainte est
plus que minimale pour refuser. Donc, contrainte minimale, ça va. Contrainte plus que minimale, là l'employeur
dit : Ça commence à être lourd, faire la preuve, là, on arrête là, là.
Autrement dit, il y a comme une
espèce de... le fardeau de la preuve est beaucoup moins lourd pour
l'entreprise. Au Canada, et donc au Québec, avec cette loi-là, on va dire que,
la contrainte, il faut qu'elle soit excessive à l'entreprise, ou à l'organisme,
ou à l'État, une contrainte excessive, ça
fait qu'il faut prouver que... pour refuser, c'est un excès. Regardez à quelle
hauteur on monte la preuve pour l'organisme
pour refuser, là. Ce n'est pas une contrainte juste plus que le minimum, il
faut que la contrainte soit
excessive, il faut que ce soit un excès. Aux États-Unis, ils le gèrent très
bien. Pourquoi ils l'ont géré? Parce
qu'il y a eu des causes où l'excès s'est avéré réclamé, puis ils ont décidé de
descendre la barre parce que ça n'avait plus de bon sens pour les
entreprises et pour l'État.
Alors, nous
croyons que ça, ces petits mots là pourraient faire avancer le Québec beaucoup
plus. Là, on envoie un signal sur la
façon dont le Québec veut gérer les accommodements pour motif religieux. Là, on
envoie un signal qu'ici, au Québec,
on n'est pas dans un Canada multiculturaliste. Le multiculturalisme, c'est
là-dessus qu'est fondée la contrainte excessive.
Le multiculturalisme n'est pas le choix du Québec. L'interculturalisme, tous
ces mots-là sont différents de ce qui se passe au Canada. C'était le
temps d'inscrire la spécificité québécoise, la nation québécoise, notre
vivre-ensemble québécois. Là, à cet endroit-là,
dans ces mots-là, il y avait enfin la chance de sortir la jurisprudence
multiculturelle canadienne et
d'introduire des éléments québécois. Bien, on l'a raté, mais on le ramène en se
disant : Écoutez, pensez-y une dernière fois.
Ce plaidoyer
que je fais, normalement, à la prise en considération du rapport, la difficulté
d'un plaidoyer, c'est qu'on s'en va
vers l'adoption puis c'est fini. Là, on se donne une chance, on se donne une
chance une dernière fois de vous amener là où sont toutes les oppositions.
Toutes les oppositions se sont ralliées à ces amendements dont je parle aujourd'hui. Soyez avec nous, pensez à ça, il nous
reste peut-être un 24 heures pour décider ça enfin, pour faire évoluer
le Québec dans la bonne direction, dans
celle qui est notre évolution historique. L'évolution historique de la société,
c'est de se diriger vers une laïcité
de plus en plus affirmée. Ce projet de loi, en inscrivant dans une loi la
neutralité religieuse sans la laïcité, pourrait être un recul, on verra
à l'application, mais pourrait être un recul. Ce n'est pas une bonne idée.
• (12 h 20) •
Il y avait
aussi, dans les amendements qu'on propose, un article... on voulait enlever
un bout de phrase sur un article qui
concerne les règles sur les garderies. La Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance va être modifiée, on va y ajouter des éléments qu'on retrouvait à peu près
dans le projet de loi n° 60. D'ailleurs, il y a des inspirations entre
ce qu'on a appelé la charte des
valeurs et le projet de loi n° 60, tout le secteur... tout le segment sur les
accommodements religieux et tout le segment
sur les services de garde à l'enfance. Mais, dans celui sur les services de garde à l'enfance, il y a quelque
chose qu'on a remarqué, qui était probablement dans 60 aussi, c'était
qu'on voulait permettre... il ne fallait pas empêcher, c'est comme ça qu'on le dit, on est à la négative, on ne
voulait pas empêcher «l'établissement d'un programme d'activités visant
à refléter la diversité des réalités
culturelles — d'accord — et religieuses». Qu'est-ce que la religion
vient faire là-dedans? Vous voyez, la laïcité, la différence? Ça
sauterait, «et religieuses», automatiquement parce qu'il y aurait un principe. Respecter la diversité des réalités culturelles,
oui, culturelles, ethnoculturelles, oui, la diversité québécoise, elle est
belle. La voir être présentée dans les services de garde à l'enfance,
oui, bravo! «Et religieuses». Qu'est-ce que les religions viennent faire dans les services éducatifs à
l'enfance, éducatifs à l'enfance? Quand on sait comment est contesté le cours
d'éthique et culture religieuse, je me
demande comment serait interprétée cette idée d'ajouter «et religieuses».
Alors, on veut l'enlever, simplement.
Je pense que la religion n'a rien à voir là mais que la culture, les réalités
culturelles doivent être là. Je pense que ce serait un très bon
amendement.
Alors, on a
quand même eu des gains, je le dis, ils ne sont pas majeurs, mais il y a des
choses importantes qui se sont faites
et des demandes, là, qui ont été approuvées par le gouvernement. Évidemment, si
j'ai commencé par les refus puis les amendements qu'on proposait à
nouveau, c'est parce qu'ils ont été... ces refus ont été plus importants que
les acceptations, et c'est dommage. C'est ce
qui fait que nous ne pourrons pas voter pour cette loi, M. le Président, très
clairement.
Mais, voilà,
on a ajouté, parce que la... on a accepté la demande que nous avons faite, au
Parti québécois, que les élus municipaux... pardon, pas les élus municipaux,
c'est ça, les municipalités, on a accepté la demande à l'effet que les
municipalités soient couvertes aussi par la loi. Quel est l'argument qui a fait
que le gouvernement a accepté que les municipalités soient couvertes par la loi — je dis bien l'administration, là, pas les
élus municipaux mais les municipalités? C'est parce qu'on ne peut pas être géré à la pièce à travers le Québec.
Tu ne peux pas avoir quelque chose qui se passe à Gatineau puis quelque chose de différent qui se
passe à Montréal, quelque chose de différent qui se passe à Laval, à Québec,
il faut que les gens sachent se gouverner.
Imaginez. Tu te promènes d'une ville à l'autre, puis les règles changent à ce
sujet-là. Or, on est dans des règles qui
sont importantes, on est dans les droits et libertés. Alors, bon réflexe de la
part du gouvernement d'accepter cette
demande, qu'on avait eue dès le départ, nous. Il faut que les municipalités
soient couvertes par la loi, et elles le seront. Très bonne idée.
Là-dessus,
d'ailleurs, suite à des débats, on a clarifié des questions qui avaient été
posées sur les réseaux de transport, parce
que, par exemple, sur le visage découvert, si une personne prend un transport
en commun — parce
que les municipalités sont couvertes,
donc les transports en commun aussi, nommément, d'ailleurs — alors, si une personne prend... si quelqu'un
prend un transport en commun, qui est un
service de la municipalité, avec le visage couvert, eh bien, c'est pour toute
la prestation, la durée du service que le visage doit être découvert. On a
clarifié ces éléments-là pour que... parce que le débat faisait rage, à un moment donné, sur jusqu'à
quand dans l'autobus ou dans le métro. C'est tout le long de la prestation
de services, c'est clarifié par la ministre, on en a été satisfaits.
Toutefois,
nous avons fait enlever l'amendement qui est arrivé inopinément, à la dernière
minute, on n'en avait pas parlé, sur
les élus municipaux et les élus de l'Assemblée nationale. Ça paraissait
anecdotique, Raël, c'est vrai, hein, quand
on a dit : Oui, mais est-ce que nous, comme députés, on va pouvoir refuser
de rencontrer des gens des sectes, pas pour répondre à un service, un besoin
d'un citoyen, mais pour les rencontrer comme secte?, j'ai dit : Est-ce que
je serais poursuivable — condamnable, ça, d'accord, je suis habituée,
mais poursuivable — est-ce
que je serais poursuivable?, et que
la ministre nous a répondu oui. Ce n'est pas anecdotique. Raël a poursuivi
l'ex-première ministre, Mme Marois, devant le Tribunal des droits
de la personne. Ce n'est pas anecdotique, il faut le savoir.
Donc, c'était
bien de l'enlever, mais ce n'est pas une anecdote, c'est quelque chose qui s'est passé au Québec. Alors, il fallait gérer ça comme ça.
C'est bien, ça a été enlevé à notre demande.
Il faut
dire que mon collègue de Terrebonne a fait un travail extraordinaire quand il a
commencé à... pas de Terrebonne, pardon,
le collègue de Saint-Jérôme, qui, lui, s'est mis à parler des raëliens, des
pastafariens, a fait un travail extraordinaire
pour démontrer un peu le ridicule dans
lequel se retrouveraient... dans quelle situation se retrouveraient
les députés. Je les remercie d'ailleurs
de leur participation, je vais y revenir. Je vais me garder sûrement...
À l'adoption finale, je reviendrai sur la collaboration
des élus de tous les partis à cette réflexion.
Ce que nous
avons obtenu aussi, très important : les lignes directrices, on ne voulait
pas, nous, que ce soit comme c'était inscrit dans la loi actuelle, que les balises aux accommodements
religieux soient gérées directement par chacune des personnes qui
recevait la demande d'accommodement religieux. C'est ce qu'aurait provoqué la façon
dont était libellée la loi au départ,
c'est-à-dire que vous recevez une demande d'accommodement, vous prenez votre décision comme fonctionnaire, sans balise,
sans ligne directrice, vous prenez votre décision, puis, s'il y a
quelqu'un qui est poursuivable, bien, c'est vous. Si vous avez pris la mauvaise décision,
bien, c'est à vous... Si on conteste votre décision, c'est vous qui devez vous
justifier parce que vous avez pris une
décision. Tandis que, là, on a réussi à faire inscrire que c'est l'organisme. En fait, le gouvernement inscrit
des lignes directrices, envoie un guide aux organismes, à chaque secteur, et
les organismes sont responsables de
l'application des lignes directrices et du guide et donc de la décision de la
personne, du représentant, il y a une
délégation de pouvoirs. Donc, ça protège la personne qui a à gérer cet
accommodement. C'était très important, on ne pouvait pas laisser ça... tout le fardeau de la preuve sur les épaules
de la personne qui aurait reçu la demande d'accommodement. Comment est-ce que cette personne-là aurait pu
gérer une demande en ayant sur les épaules la pression qu'elle serait seule
à se défendre si elle refusait? Il devenait
beaucoup plus facile d'accepter que de refuser, parce qu'accepter n'avait
aucune conséquence ou à peu près,
mais refuser avait des conséquences sur la personne. Alors, il y a eu, de ce
côté-là, acceptation de notre demande
de faire que ce soit l'organisme qui gère la situation et qu'il y ait des
lignes directrices envoyées par le gouvernement.
Une autre
demande qui a été acceptée du gouvernement, et ça, on est très contents de ce
gain-là, c'est qu'une fois que ces
lignes directrices seront publiées sur le site du ministère de la Justice, dans
les 60 jours suivants, elles seront vues en commission parlementaire. Il y a plusieurs raisons à ça. Bien sûr,
c'est la continuation de nos travaux, nous verrons comment les lignes...
les quelques articles du projet de loi qui balisent les accommodements
religieux pourront être interprétés dans les
grands réseaux. Il y aura comme... On part de grandes balises, on va les mettre
dans un guide, donc on va dire dans
chaque secteur comment ça devrait être vécu, comment ça devrait être
interprété. Donc, il y a comme, là-dedans, une continuation du travail
de parlementaire.
Et,
deuxièmement, il y a aussi une possibilité éducative. On a tellement parlé des
accommodements pour motif religieux, cette idée de les voir en commission
parlementaire, d'en parler entre nous, de guider ensuite les députés qui
auront à gérer les plaintes de citoyens, qui
vont venir dire : Oui, mais pourquoi ça s'est géré comme ça... Pourquoi ça
s'est fait, ça? Pourquoi ils n'ont
pas refusé? Pourquoi ils ont accepté? C'est ça dont on va parler ensemble. Et
c'est en faisant référence au
vivre-ensemble dont a parlé la ministre de la Justice que je dis : Ceci
sera un bon moment, un beau moment ensemble,
comme parlementaires, probablement à la Commission des institutions, mais on ne
nomme pas l'institution de façon à ne
pas restreindre le leader parlementaire, mais l'idée, c'est d'en arriver à un
moment où tous ensemble nous regarderons comment ça pourra être appliqué,
puis on fera oeuvre d'éducation à ce moment-là.
Alors, M. le
Président, voilà un peu ce que j'avais à dire pour la prise en considération de
ce rapport... Ah! Le préambule de la
ministre, qu'elle a déposé — il me reste encore une minute, là — va trop loin, et ça aussi, il faut
l'enlever; ça aussi, il faut enlever ça, là. Dans le préambule, la
ministre décrit qu'est-ce que c'est que la liberté de religion, et sa description, qu'elle est allée chercher dans la
charte des droits de l'homme de l'ONU en 1945, ne correspond plus à où on en est rendus aujourd'hui et amène... Moi, j'ai
la perception... C'est peut-être une perception, mais j'ai l'impression qu'en amenant cette description-là, c'est comme si on débâtissait un petit peu le reste de la loi, en disant oui, mais en mettant la liberté de
religion et de conscience au-dessus des autres droits. C'est un peu un feeling
qu'on a. Ma collègue de Montarville a exprimé cette chose-là aussi. On est tout
à fait d'accord.
Alors, voilà.
Non, il n'y a pas consensus, M. le Président. Sur quelques articles,
oui. Sur cette loi, non. Tant que la laïcité
ne sera pas inscrite dans la Charte
des droits et des libertés de la personne, nous pensons, au Parti québécois,
que les Québécois et Québécoises ne
seront pas satisfaits et que notre corpus législatif ne reflétera pas
l'évolution historique du Québec.
• (12 h 30) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci. Merci à
vous, Mme la députée de Taschereau. M. le leader adjoint de l'opposition
officielle.
M.
Rochon : ...en vertu de
l'article 213 de notre règlement, M. le Président, souhaitant poser une
question à la députée de Taschereau. Vous me le permettez?
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, si la députée, elle est en
accord, la question doit être brève, et la réponse doit être brève
aussi. Alors, allez-y, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.
M.
Rochon : Oui. J'aurais été
très étonné que la députée soit fermée à la question que je souhaite lui poser.
Est-ce qu'elle peut nous expliquer...
revenir sur la différence — parce que c'est important, là — entre contrainte excessive et contrainte
plus que minimale à l'égard, là, des accommodements, s'il vous plaît?
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, réponse brève, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Oui, M. le Président. C'est dans le fardeau de la preuve pour l'entreprise ou
pour le fonctionnaire de l'État. Une
contrainte plus que minimale, c'est qu'il faut que la contrainte soit...
déborde d'un minimum, tandis qu'excessive, ça devient l'ouverture à beaucoup, beaucoup, beaucoup de contraintes
pour une organisation ou une entreprise. C'est terrible. Le refus doit être fondé sur quelque chose
d'extrêmement majeur. Alors, oui, il y a une grosse différence, qui est très
bien vécue aux États-Unis.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, Mme la
députée de Taschereau. Je suis prêt à céder la parole... Mme la députée
de Duplessis.
Mme
Richard : Merci, M. le
Président. Comme c'est un projet de loi extrêmement important, ça touche
l'ensemble des Québécois et des
Québécoises au Québec, moi aussi, je vais invoquer l'article 213 et je
vais demander à ma collègue la députée de Taschereau de répondre à cette
question : Est-ce qu'elle peut nous expliquer l'importance...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
...si la députée de Taschereau accepte.
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Mais, avant de le tenir pour
acquis, Mme la députée de Taschereau, acceptez-vous une question de
votre collègue de Duplessis? Alors, question brève.
Mme
Richard : Très brève. Est-ce qu'elle peut nous expliquer le concept de laïcité de l'État
dans nos lois, au lieu de neutralité
religieuse? Je pense que c'est le coeur même du projet de loi, là, où on ne
s'entend pas : laïcité, neutralité.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : M. le
Président, je serai brève, effectivement. Mais c'est très important, ça, de bien comprendre ça. C'est pour ça que j'en ai parlé. La laïcité,
c'est une affirmation de l'État comme quoi il se tient en dehors des religions.
Elles ne sont pas dans l'État.
La neutralité religieuse, c'est que l'État accepte de gérer les diversités religieuses à l'intérieur de l'État, chez ses
fonctionnaires comme chez la clientèle. C'est ça, l'immense différence.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, merci à vous, Mme la députée de Taschereau.
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : M. le député de Berthier, je soupçonne que vous allez invoquer l'article 213.
M.
Villeneuve : M. le Président, vous êtes très perspicace. Effectivement, M. le
Président, en vertu de l'article 213, j'aimerais, si elle accepte,
poser une question à la députée de Taschereau.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, Mme
la députée de Taschereau,
vous semblez très populaire pour informer les membres de l'Assemblée.
Vous acceptez? M. le député de Berthier.
M.
Villeneuve : Merci, M. le Président. Vous savez, M. le Président, qu'existe
dans notre fonction publique le devoir
de réserve pour les fonctionnaires sur le plan politique. Ma question à la députée de
Taschereau, M. le
Président, c'est : Qu'est-ce que l'ajout du
devoir de réserve aux fonctionnaires impliquerait, soit comme obligation
ou soit comme contrainte? Et est-ce qu'il implique l'interdiction de tous les signes religieux — ça sera dans sa réponse, probablement — dans la fonction publique ou non? Ce
devoir se limite-t-il à interdire de faire la promotion de ses croyances et
d'en parler ouvertement? Bref, j'aimerais avoir plus de détails par rapport
à... les différences qui doivent être...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci. Bien sûr,
les détails seront succincts. Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Comme toujours, M. le Président, je suis toujours le plus succincte possible à
l'intérieur des temps qui me sont
impartis. Alors, le devoir de réserve — merci, j'avais oublié d'en parler — c'est important. Non, ça ne veut pas dire nécessairement que les gens doivent avoir
une réserve sur leurs signes religieux portés physiquement, mais au moins qu'ils aient une réserve par rapport à l'expression de leurs religions dans les
milieux de travail, face aux citoyens qui
sont devant eux. Ce serait normal. Le devoir de réserve est appliqué en politique,
on nous impose de ne pas s'afficher, comme fonctionnaire. Pourquoi est-ce
que le devoir de réserve n'est pas appliqué face aux religions? C'est pour moi
inconcevable. C'est pour ça qu'on le ramène, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci, Mme la
députée de Taschereau.
M. le député de Rimouski.
M.
LeBel : Vous allez deviner qu'est-ce que je vais vous demander, probablement. J'en profite pour féliciter la députée de
Taschereau pour tout le travail qu'elle a fait en commission avec les collègues.
Des voix : ...
M. LeBel : J'arrive, là, j'arrive.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Allons-y avec la question, M. le député.
M.
LeBel : En vertu de l'article 213 de notre règlement, j'aimerais poser
une question à la députée de Taschereau,
que je félicite pour son travail...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
...vous acceptez? Veuillez poursuivre, M. le député de Rimouski.
M.
LeBel : Est-ce que
la députée peut nous éclairer sur l'impact réel du projet de loi, dans sa version actuelle, sur la
séparation entre l'État et les religions? Je pense que c'est important.
L'État, est-il suffisamment protégé contre l'influence religieuse ou est-il au contraire obligé de se
soumettre également à toutes les convictions religieuses présentes
dans notre société?
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Merci. Alors, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Clairement,
M. le Président, la séparation entre l'Église et l'État ferait
que nous serions en train, normalement, d'adopter un projet de loi sur la
laïcité... et que la neutralité n'assure pas, à notre avis, la séparation
réelle, factuelle entre l'Église et
l'État. La neutralité nous amène à ne plus... à oublier un peu la séparation
entre l'Église et l'État et à introduire l'Église dans l'État. C'est
vraiment quelque chose qui est dommageable à long terme, selon notre opinion.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci, Mme la députée de
Taschereau. Alors, prochain intervenant, Mme la députée de Montarville.
Vous disposez
de 30 minutes. En vertu de 213 ou en vertu de... Non. Alors, vous allez
faire une intervention sur le fond. Je vous cède la parole.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy :
Merci beaucoup, M. le Président. C'est un exercice intéressant. D'habitude, les
questions plantées, on les voit à l'étude des crédits, et c'est le
gouvernement qui les pose, mais c'était intéressant.
C'est une
petite blague, M. le Président. Mais là c'est sérieux. Le projet de loi
n° 62, c'est sérieux, c'est même très
sérieux. C'est un projet de loi qui a été déposé le 10 juin 2015, ça
fait plus de deux ans qu'il est au feuilleton, important de le
spécifier.
Donc, nous
sommes à l'avant-dernière étape de son adoption. Le gouvernement est
majoritaire, il sera adopté. Nous avons tenté, le deuxième groupe
d'opposition, de faire des amendements, plusieurs amendements, tout comme l'opposition officielle. Ce qui est intéressant,
cependant, peut-être pour les gens qui nous écoutent... Il faut que les gens
qui nous écoutent comprennent que,
lorsqu'on est en étude d'un projet de loi article par article, bien, c'est
toujours l'opposition officielle qui commence. Alors, j'aimerais
souligner que ma députée de Taschereau n'a pas la maternité de tous les
amendements qui ont été demandés, puisque nous avons des amendements
similaires.
Mais
le fond du problème demeure entier. Et, comme à mon habitude, ça peut déranger
certains, je serai très directe et très transparente. D'entrée de jeu,
M. le Président, je vais annoncer que nous allons voter contre le projet de loi
du gouvernement libéral, tout comme nous
avions voté contre à l'étape de l'adoption de principe, vous vous en souvenez
sûrement.
• (12 h 40) •
Maintenant,
je vais vous expliquer pourquoi. C'est un projet de loi qui nous inquiète au
plus haut point. Et il est très inquiétant... Je sais que, par les temps
qui courent, notre premier ministre aime bien utiliser le terme «inquiétant» lorsqu'il parle de ses adversaires politiques.
Dans le cas présent, le mot «inquiétant» s'applique à ce projet de loi
n° 62. Je vais vous dire
pourquoi. Mme la ministre a fait son plaidoyer, défend sa pièce législative,
soit. Ça fait deux ans que ça traîne,
et ils sont bien contents d'avoir quelque chose en main. Cependant, il y a des
choses qu'on dit, qui sont vraies, que le gouvernement n'aime pas entendre, particulièrement Mme la ministre. Mais
moi, je vais les dire pour les gens qui nous écoutent.
Les
conséquences de ce projet de loi... C'est une loi très sérieuse, et il y a des
choses très inquiétantes. Contrairement à ce que la population pense, lorsqu'on parle de neutralité religieuse
de l'État, ce n'est pas une loi sur la laïcité. Ça, même Mme la ministre le dit : Ce n'est pas une loi
sur la laïcité, oubliez ça. Elle a eu l'honnêteté de le dire. Dans l'esprit des
gens, cependant, «neutralité
religieuse», c'est un peu flou. Ce n'est pas une loi sur la laïcité, au
contraire, et là ça devient inquiétant, c'est une loi qui va valoriser
et privilégier la liberté de religion.
Et,
comprenez-moi bien, là, la liberté de religion, on est tous pour la liberté de
religion. Mais il y a, dans ce projet de
loi là, un article extrêmement important qui a été modifié, et j'y reviendrai
tout à l'heure, qui vient changer la donne.
C'est l'article 1. Et, dans son
libellé même, cet article 1, écoutez bien les mots, là, cet article 1
vient assurer la liberté de religion.
Et je vais y revenir puis je vais vous expliquer tout à l'heure pourquoi
on vient donner une importance supérieure à la religion.
Ce projet de loi aussi, il faut bien le dire, n'interdit absolument rien. Il n'interdit
aucun signe religieux, au contraire. Comme
il assure la liberté de religion, il va même valoriser et encourager tous les
signes religieux. Ça, c'est la réalité. Et, nous, selon nous, il y
aura une conséquence avec tant de valorisation. La conséquence, c'est qu'il y
aura plus de religieux dans l'État, plus de religieux même dans la
société. On ouvre les vannes. Vive la religion!
Je sais que
Mme la ministre n'a pas aimé mon exemple. Pourtant, je lui posais une question
bien simple. Je lui demandais si une policière, avec sa loi, pourrait porter un
voile tout en étant policière. Et j'ai souligné à Mme la ministre que c'est une question qui avait été posée par mon
chef, le chef de la Coalition avenir Québec, de la deuxième opposition, lors du débat des chefs qui avait lieu en 2014. Et
là Mme la ministre n'a pas aimé ça et m'a traitée d'intolérante, disant :
C'est ça, la CAQ, vous êtes
intolérants; le tchador, le tchador, le voile, le voile. Écoutez, c'est une
question légitime. C'est une question légitime.
Et, avec ce
projet de loi, ce qu'il est important de dire, avec ce projet de loi — Mme la ministre veut parler, je pense — avec ce projet de loi, une enseignante, elle
pourra porter un tchador. Vous savez, c'est cette grande robe noire avec le visage découvert. Elle pourra le porter.
Mme Fatima Pepin a d'ailleurs dit que ce projet de loi n° 62, c'était le
projet de loi du tchador, alors je
suis bien d'accord avec elle. D'ailleurs, une policière pourra porter aussi un
voile ou, un policier, un turban, ou
tout autre signe religieux, comprenez-moi bien, alors que des policiers, ce
sont des gens qui représentent l'État.
Mais il n'y a pas de problème, tous les signes religieux seront permis. C'est
ça, la réalité, avec ce projet de loi. Il faut seulement le dire, il faut seulement le dire. Là, Mme la ministre me
fait des petites grimaces, je ne comprends pas pourquoi.
Alors, cette loi...
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Ah! là, ça allait bien.
Adressez-vous à la présidence, Mme la députée. Et, pour l'ensemble des collègues, une seule personne qui a
la parole, c'est la députée de Montarville. Alors, veuillez poursuivre.
Mme Roy :
Merci, M. le Président. Alors, cette loi, elle va encourager les gens à
demander des accommodements pour des
motifs religieux, puisqu'elle valorise la liberté de religion, elle assure la
liberté de religion. L'emphase est mise sur ces termes, et ce n'est pas anodin. Et c'est ce que je vous dis qui
est inquiétant dans ce projet de loi, M. le Président, n'en déplaise à
la ministre. Ces termes sont là.
Le
gouvernement libéral a donc refusé d'interdire ce que nous considérons être des
accessoires de soumission. Même le
premier ministre l'avait déjà dit à une certaine époque : Le tchador, le
niqab, la burqa, nous voulions l'interdire pour tous les employés de l'État. Ça, pour nous, c'est inadmissible, ça
va à l'encontre de l'égalité entre les hommes et les femmes.
Naturellement, vous devinerez que cet amendement a été refusé.
Quant au
principe des services donnés et reçus à visage découvert, on est tout à fait en
faveur de ce principe-là, M. le Président. Mon problème, c'est que le
gouvernement va tout de même permettre qu'une personne demande un accommodement
pour un motif religieux pour pouvoir y déroger. Ça, c'est la réalité. De notre
côté, nous demandions qu'il n'y ait pas
d'accommodement religieux pour se cacher le visage. Vous devinerez,
naturellement, que ça nous a été refusé.
En fait, ce n'est pas compliqué, M. le Président, toutes les demandes que nous
avons faites nous ont été refusées.
La ministre,
à la sortie de l'étude article par article, se réjouissait, parlait d'un
consensus. Moi, je ne sais pas où elle voit un consensus. Il n'y a pas
eu de consensus. Et, oui, nous avons fait un travail méticuleux. Nous avons
posé des questions. Nous avons voulu
comprendre. Nous avons déposé des amendements. Mais il n'y a pas de consensus.
On est ici pour travailler de façon
rigoureuse, et on l'a fait, M. le Président. Vous n'avez qu'à aller lire ou
réécouter les discussions que nous avons eues entre nous.
Alors,
la ministre avait même dit en commission parlementaire — ça, c'était intéressant — avant même que nous procédions article par article, que ce projet de
loi, c'est un projet de loi libéral. Alors, c'est clair, il n'y a pas de
consensus.
Ce qui est
surprenant et inquiétant cependant, et on va le comprendre à l'application,
parce que le projet de loi sera
adopté, et c'est surprenant et inquiétant, c'est que la ministre de la Justice, avec ce projet
de loi, fait en sorte que, dans le corpus législatif du gouvernement, il
y aura un deux poids, deux mesures. Écoutez bien ça. La ministre refuse d'encadrer la liberté de religion, mais son
gouvernement ne se gêne pas du tout pour encadrer la liberté d'expression de
ses fonctionnaires en imposant, par exemple,
un uniforme aux policiers. Alors, vous savez que l'uniforme, le vêtement
que portent ces fonctionnaires de l'État en
position d'autorité, c'est un encadrement de la liberté d'expression. Mais,
quand on dit à la ministre :
Parfait, donc vous pouvez encadrer une liberté fondamentale, vous le faites
déjà, vous pouvez le faire, bien,
pour le gouvernement, il n'y a aucun problème, on peut toucher à la tenue
vestimentaire des fonctionnaires mais pas à leurs signes religieux.
Comprenez-vous? Donc, on peut encadrer une liberté mais pas la liberté de
religion, et c'est là que je vous dis
qu'il y a un deux poids, deux mesures qui, pour moi, est très inquiétant. Je
trouve ça aberrant. On va pouvoir
toucher au costume des policiers mais pas à leurs signes religieux. Ça, ça sera
une conséquence de ce projet de loi. Moi, ça me renverse.
Je reviens à l'article 1, M. le Président,
parce que... et les juristes pourront l'analyser et... nous, on en fait une interprétation qui est très différente de celle de
la ministre, et l'avenir saura nous dire et nous donner raison. Voici pourquoi.
L'article 1 de cette loi vise à assurer
la liberté de religion des fonctionnaires. Assurer la liberté de religion,
comprenez-moi bien, là, on est loin de la laïcité, à des années-lumière,
puis la neutralité religieuse, elle est pas mal pâle.
Et je vais
revenir à cet article 1 parce que, vous savez, je vous disais que ça fait
deux ans que ce projet de loi là est sur
la table, le projet de loi initial, en 2015, disait, à son article 1... M.
le Président, vous comprenez ce que je dis, vous... L'article 1 d'un projet de loi — vous en avez vu d'autres — c'est plus que son coeur, c'est sa tête,
c'est l'objet de la loi. Ça
dit : Voici où le gouvernement s'en va. Voici ce qu'on veut faire avec
cette loi. Alors, en 2015, l'article 1 nous disait : «Considérant la neutralité religieuse de l'État,
la présente loi a pour objet d'établir des mesures visant à en favoriser le
respect. À cette fin, elle impose notamment
aux membres du personnel des organismes publics le devoir de neutralité
religieuse dans l'exercice de leurs fonctions.» Alors, vous me suivez,
là, en 2015, son objet, là, c'était ça.
En août
dernier, 2017, deux ans plus tard, la ministre de la Justice nous arrive avec une
série d'amendements, et, oh surprise!
l'objet de la loi, l'article 1 a complètement changé, et là on nous
dit : «La présente loi affirme la neutralité religieuse de l'État afin d'assurer à tous un traitement
respectueux des droits et libertés qui leur sont reconnus, incluant la liberté
de religion des membres du personnel des
organismes publics.» Donc, les verbes à retenir, là, c'est «assurer» cette
liberté religieuse. Alors, on est
loin, là, on vient d'utiliser un verbe qui n'est pas anodin. Donc, on part de
«c'est une loi sur la neutralité
religieuse» à «c'est une loi pour assurer la liberté de religion». C'est grave.
On change l'objet de la loi, carrément.
Alors, pour
nous, cet article 1 en dit long sur les intentions du gouvernement, c'est
très inquiétant. Il y aura comme conséquence
qu'il y aura plus de religieux dans l'État, dans la société. Même les groupes
que nous avons rencontrés sont venus nous dire qu'avec ce projet de
loi... de façon générale, ils nous ont dit : On ouvre tellement grande la
porte aux accommodements religieux — parce que c'est même dans le titre,
«accommodements pour des motifs religieux» — on ouvre tellement grande la porte
qu'il y aura davantage de demandes.
• (12 h 50) •
Je tiens
aussi à vous citer un extrait du préambule qui a été adopté, pour lequel j'ai
voté contre, qui a été adopté par la
ministre de la Justice. Et, dans son préambule, il y a un «considérant», et là
aussi je m'étais objectée puis j'avais demandé
un amendement. Mais regardez jusqu'à quel point on valorise le religieux, il
est écrit : «Considérant que la Charte des droites et libertés de la personne prévoit que toute personne est
titulaire des libertés fondamentales, telles les libertés de conscience, de religion, d'opinion et
d'expression — je suis
tout à fait d'accord avec ça, on aurait pu arrêter là, mais là on en rajoute un petit peu — ce qui inclut la liberté de manifester sa
religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu'en
privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte [...] l'accomplissement
[des] rites.»
Je n'ai aucun
problème avec la première partie, quand on énumère les libertés. Mais là on nous
les définit : voici ce que
c'est. Alors, on ne se gêne pas, on manifeste sa religion en public, en privé,
dans l'enseignement, les pratiques, le
culte, alouette, ah! Donc, ce projet de loi, M. le Président, c'est l'ode aux
religions, l'ode à l'existence de la religion dans notre État, dans notre société. Dans notre société, pas de problème
avec ça, les gens font ce qu'ils veulent. Dans l'État... La population aurait beaucoup apprécié qu'on dise
que l'État québécois est laïque. Ce n'est pas le cas, et là on ouvre les
portes.
Donc, dans ce
considérant, elle vient définir, encadrer, favoriser une liberté, la liberté de
religion, pas les autres. Mais, vous
savez, des libertés, il y en a plusieurs, dans la Charte canadienne des droits
et libertés, on en énumère plusieurs. Même
elle, dans son considérant, elle nous énumère liberté fondamentale, liberté de
conscience, liberté de religion, d'opinion et d'expression. Je suis tout à fait d'accord. Mais là elle choisit la
liberté de religion, et là c'est ici qu'elle la définit, qu'elle
l'encadre, qu'elle la favorise, qu'elle la bichonne, qu'elle la minouche. Ça,
ça me dérange. Ça, ça me dérange.
Et ça nous
inquiète aussi parce que j'ai hâte de voir dans le pratico-pratique quel impact
aura réellement cette loi sur la vie des gens. Va-t-elle leur faciliter la vie
ou, au contraire, vient-on d'ouvrir toutes grandes les portes du religieux
partout, alors que l'État québécois est
devenu laïque historiquement avec le temps? Rappelez-vous, on a
déconfessionnalisé nos écoles, par
exemple. Les bonnes soeurs et les prêtres qui enseignaient n'enseignent plus.
Il y a eu Vatican II. Donc, on
s'est séparés, le peuple québécois, au fil des ans, s'est séparé de l'État, et
ici on valorise le religieux. Ça me dérange. Oui, ça me dérange. Et comprenez-moi bien, ce sont des libertés qui sont
toutes importantes, qui doivent toutes être respectées de façon égale, mais ici on met la liberté de
religion sur un piédestal. C'est notre interprétation, et le temps saura nous
dire que nous aurons eu raison. Donc, c'est une autre raison qui nous pousse à
voter contre ce projet de loi.
Pour notre
part, notre position est la même depuis 2013. On n'a pas bougé, on n'a pas
changé d'avis. Ce qui est important
pour nous, c'était Bouchard-Taylor. On a fait une foule d'amendements. Et j'ai
été claire et transparente dès le début avec Mme la ministre. Mme la ministre
savait que ces amendements, pour nous, devaient être acceptés pour que
nous acceptions le projet de loi, et naturellement aucun n'a été accepté, vous
le devinerez.
Pour nous, ce
qui était primordial, c'était d'inscrire que le Québec est un État laïque. J'ai
essayé. J'ai déposé des amendements,
ça a été refusé. Alors, oubliez ça, vous ne verrez pas le mot «laïque» dans ce
projet de loi, ça n'existe pas. On voulait que l'État soit guidé par
quatre fondements primordiaux. Ça faisait partie de notre amendement que l'État
québécois est laïque. La neutralité
religieuse de l'État, la séparation de l'Église et de l'État, l'égalité morale
des personnes et la liberté de conscience et de religion priment, mais tout ça,
ça prend le concept de laïcité. Ça a été refusé. Il faut que je vous
dise que ce que je viens de vous dire, c'était une recommandation-phare du
rapport Bouchard-Taylor. Refusé.
«Les services
de l'État doivent être reçus et donnés à visage découvert sans qu'aucune
exception ne soit accordée pour des motifs religieux.» Ça, c'était notre
amendement. Ça a été refusé. Donc, il pourra y avoir des demandes
d'accommodement pour se cacher le visage.
Nous avons
aussi demandé que le port de signes religieux doit être interdit aux employés
de l'État qui sont en position
d'autorité coercitive, comme l'avait décrit Bouchard-Taylor, soit les juges, le
procureur de la couronne, les policiers, les gardiens de prison.
Bouchard-Taylor nous disait ça. Refusé.
On a aussi
ajouté les enseignants du primaire et du secondaire. Pour nous, c'est important
qu'ils ne portent aucun signe religieux parce qu'ils sont avec des
mineurs, parce qu'ils représentent aussi... il y a une forme de délégation de l'autorité parentale, partielle, je veux bien,
mais il y a une forme de délégation de l'autorité parentale. Ils représentent
tous les parents, alors ils ne
peuvent pas représenter une religion, mais devraient être absolument neutres.
Et ça nous a été refusé.
Et là vous
devinez qu'un autre amendement que nous avons déposé a été refusé. Nous avons
soumis l'amendement que tout «membre
du personnel de l'État ne peut porter un tchador, un niqab ou une burqa dans
l'exercice de ses fonctions». Ça, les gens comprennent ça. Ils sont tous
d'accord. On nous a refusé ça, naturellement. Dommage! C'était d'ailleurs un amendement qui avait été proposé par l'ex-collègue de la ministre
et du premier ministre, la députée libérale Fatima Houda-Pepin. On en a essayé quelques-uns
qui proviennent de son projet de loi. Ils ont tous été refusés. Alors, vous voyez, M. le Président, que nous
avons travaillé, que nous avons déposé des amendements, et, pour nous, ça
ne laisse pas place à l'ambiguïté, il n'y a pas eu de consensus. On a
travaillé.
Il faut
dire qu'il y a des choses... Ça fait 10 ans, M. le Président, qu'il y a un débat sur la question sur les signes religieux, 10 ans. Il y avait une possibilité d'avoir un consensus
en février. Tous les partis étaient d'accord, sauf le premier ministre, qui a refusé. Et là on arrive avec ce projet de loi qui, selon nous, fera entrer plus de religieux, ouvrira tout grands
les bras à toute pratique religieuse, tout signe religieux partout dans l'État, multipliera
les demandes d'accommodement religieux.
Et nous croyons sincèrement que ce n'est pas ça que les citoyens veulent. Mais
c'est la décision du gouvernement et ce sera adopté.
Il y a
certaines choses... certaines victoires, cependant, parce qu'on a discuté, on a
échangé. Et les gens qui sont venus
nous rencontrer ont insisté sur le fait qu'ils voulaient avoir des balises pour
comprendre ce qu'était un accommodement raisonnable pour des motifs religieux. D'ailleurs, le mot «raisonnable»
est disparu. Vous savez, c'est la jurisprudence qui a créé les accommodements raisonnables pour des
motifs. Il y a toutes sortes de motifs. Mais là c'est devenu des accommodements
pour des motifs religieux. Le mot
«raisonnable», ça n'existe plus. Et ils avaient demandé des balises, ils
avaient demandé des guides. Entre
autres, on pense à tous ces fonctionnaires dans les écoles. Il y a plus de
500 demandes d'accommodement juste
à Montréal — ça vous
donne une idée — par
année. Et la ministre a accepté qu'il y ait des balises, qu'il y ait un guide,
et ça, je l'en félicite. Elle a entendu les gens à cet égard-là. Mais il faudra
colliger tout ça. Il faudra colliger toutes les demandes qui sont faites pour savoir ce qui est accepté, ce qui n'est
pas accepté, ce qui est possible, ce qui n'est pas possible.
La ministre a
aussi retiré son amendement qui souhaitait faire en sorte qu'un député ne
pouvait pas refuser, pour des motifs
religieux, quelqu'un qui voudrait le ou la rencontrer à son bureau parce que c'est
un religieux et pour des motifs religieux,
quelqu'un avec qui on n'a pas les mêmes idées, quelqu'un, par exemple, qui
prêcherait contre nos valeurs, contre l'égalité
entre les hommes et les femmes. Initialement, c'était prévu qu'on pourrait se...
qu'on aurait pu se faire blâmer, en tant
que député, pour ne pas l'avoir reçu. Alors, ça, Mme la ministre a retiré ça
parce que ça n'avait aucun bon sens, et je pense que le gros bon sens, ici, a prévalu. Probablement que ses
collègues du caucus gouvernemental lui ont parlé à cet effet.
Donc, on
attend les directives, les lignes directrices, qui devraient être prêtes avant
le 1er juillet, on se le souhaite. Mais, pour l'ensemble de ces motifs, nous
voterons contre à cette étape-ci, et je vous dis tout de suite qu'on votera
contre également à la fin. Pour nous,
c'est un mauvais projet de loi, qui envoie un très mauvais signal. On verra à
l'usure ce que ça donnera. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, merci à vous, Mme la députée de Montarville.
Une question de règlement?
Une voix : ...députée accepte
de répondre à une question?
Le
Vice-Président (M. Ouimet) :
Malheureusement, compte tenu de l'heure, je ne pourrai pas permettre... Oui?
Acceptez-vous de répondre à la question, Mme la députée de Montarville?
Mme Roy : ...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien.
Alors, compte
tenu de l'heure et afin de permettre cet après-midi le débat sur l'affaire
inscrite par les députés de l'opposition, le présent débat sur la prise
en considération du rapport de la Commission des institutions sur le projet de loi n° 62, loi favorisant le respect de la
neutralité religieuse de l'État et notamment visant à encadrer les demandes d'accommodements religieux dans certains
organismes, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252
du règlement par Mme la députée de Taschereau est ajourné.
Et je suspends les travaux jusqu'à 15 heures,
cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 15 h 2)
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, bon après-midi. Vous pouvez prendre place.
Affaires inscrites par
les députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée fixe à 21 ans
l'âge légal
pour l'achat de cannabis et de ses dérivés
Alors, aux
affaires inscrites par les députés de l'opposition, à l'article 90 du feuilleton, M. le député de Borduas présente la
motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale prenne acte que la Fédération des
médecins spécialistes, l'Association des spécialistes en médecine
d'urgence, l'Association des médecins psychiatres, l'Association médicale
canadienne et l'Association médicale du Québec proposent de fixer à 21 ans
l'âge légal pour l'achat de cannabis et de ses dérivés;
«Qu'elle rappelle l'importance de ne pas banaliser la
consommation de cannabis et d'envoyer un message clair quant à ses
risques sur la santé et sur le développement des jeunes;
«Qu'elle propose de fixer à 21 ans l'âge légal
pour l'achat de cannabis et de ses dérivés.»
Je vous
informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la
motion inscrite par M. le député de Borduas
s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la
motion pour sa réplique; environ 50 minutes sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement; environ 29 min 10 s
sont allouées au groupe parlementaire
formant l'opposition officielle; environ 20 min 50 s sont
allouées au deuxième groupe d'opposition; 10 minutes sont allouées aux députés
indépendants; six minutes sont réservées aux trois députés de Québec solidaire;
et la présidence répartira le reste de cette
enveloppe de temps entre les députés de Groulx, de Vachon
et de Gaspé selon le nombre de députés qui se seront
manifestés et sous réserve d'un maximum de deux minutes chacun.
Et, dans
le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par
l'un des groupes parlementaires sera
redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies
précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront
soumises à aucune limite de temps.
Et, enfin, je
rappelle aux députés indépendants qui souhaitent intervenir au cours du débat
qu'ils ont 10 minutes à partir de maintenant
pour en aviser la présidence. Et, sans plus tarder, je vais céder la parole à
l'auteur de cette motion, M. le député de Borduas.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, aujourd'hui, je vous présente la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale prenne acte que la Fédération des
médecins spécialistes, l'Association des spécialistes en médecine d'urgence, l'Association des médecins
psychiatres, l'Association médicale canadienne et l'Association médicale
du Québec proposent de fixer à 21 ans l'âge légal pour l'achat de cannabis et
de ses dérivés;
«Qu'elle rappelle l'importance de ne pas banaliser la
consommation de cannabis et d'envoyer un message clair quant à ses
risques sur la santé et [...] le développement des jeunes;
«Qu'elle propose de fixer à 21 ans l'âge légal
pour l'achat de cannabis et de ses dérivés.»
Alors, Mme la Présidente, vous savez, c'est une
question d'actualité. Le gouvernement fédéral a décidé de légiférer, de rendre légal le cannabis, la vente
de cannabis au Canada. Ça s'est fait de façon unilatérale, sans
consulter les partenaires fédératifs,
sans consulter les provinces. Le Québec doit encadrer la vente de cannabis. Ici, on est
face à une question, à un choix de société,
Mme la Présidente : À quel âge on va permettre la vente du cannabis,
une fois que le produit sera légalisé
par le gouvernement fédéral, au plus tard le 1er juillet 2018? Ça presse, il faut se préparer, il faut mettre en
place tous les paramètres qui vont gérer
cette vente-là, notamment au niveau de l'âge. Mais on est véritablement face à
un choix de société, Mme la
Présidente, est-ce qu'on veut, au Québec, permettre la vente de cannabis à
l'âge de 18 ans ou à l'âge de 21 ans?
Je vous soumets, Mme la Présidente... et ma formation politique, la CAQ, pense
que l'approche responsable à faire, c'est de fixer l'âge à 21 ans.
La question
qui se pose, Mme la Présidente, c'est : Voulons-nous banaliser la consommation de cannabis chez les jeunes? Voulons-nous vivre dans une société qui
dit : Ce n'est pas grave, la consommation de cannabis, il n'y a pas de
conséquences à ça? Est-ce que ça va être la
position du Parti libéral de dire : Il n'y en a pas, de problème de
consommer du cannabis ou est-ce qu'on va avoir l'approche responsable,
le message qui va dire à la jeunesse québécoise : Écoutez, il y a des dangers relativement à la consommation de cannabis,
il y a des conséquences à la consommation de cannabis? La question qu'on se pose aujourd'hui en Chambre, c'est :
Est-ce que le gouvernement libéral va prendre ses responsabilités et
faire la seule chose qui s'impose, de fixer l'âge légal pour l'achat de
cannabis au Québec à 21 ans?
Vous
savez, Mme la Présidente, il y a plusieurs associations, plusieurs corps
médicaux qui se sont exprimés suite à
cette décision du gouvernement Trudeau de légaliser le cannabis, notamment
l'Association des médecins psychiatres. L'Association des médecins psychiatres, ce qu'elle dit... Et, vous
savez, un psychiatre, c'est quelqu'un qui a étudié en médecine, qui a fait une spécialité en psychiatrie
et qui, dans son travail, quotidiennement, rencontre des gens qui vivent
avec une maladie mentale ou vivent avec un
épisode temporaire... c'est des gens qui soignent les personnes au niveau
de la santé mentale, ce sont des experts
dans leur domaine. Alors, qu'est-ce qu'ils disent? Ils soutiennent que la
marijuana peut causer des risques
importants pour la santé mentale si elle est consommée avant la fin de la
période de maturation du cerveau, à
25 ans. Jusqu'à 25 ans, le cerveau se développe. Jusqu'à 25 ans, vous
n'atteignez pas le plein développement de
votre cerveau, il est toujours en développement, il est toujours en croissance.
Les psychiatres nous disent : Écoutez, il y a des conséquences, si vous consommez du cannabis, sur le
développement du cerveau des jeunes. Ils ont expliqué que la consommation de cannabis augmente le risque
de développer des troubles psychotiques comme la schizophrénie, des troubles mentaux, des risques de psychose
toxique, des hallucinations, des délires, des comportements désorganisés.
Est-ce qu'on veut mettre à risque les jeunes
de 18 à 21 ans de subir ce genre de conséquences là par la consommation de
cannabis?
Tant que le
gouvernement libéral est en poste, il a une responsabilité, Mme la Présidente,
il a une responsabilité de protéger
la santé et la santé mentale des jeunes Québécois. Et, s'il choisit de fixer
l'âge légal à 18 ans, il mettra en péril cette santé mentale là et le développement aussi du cerveau, le
développement du corps humain des jeunes, qui est en cours de développement.
Vous savez, le risque de psychose augmente de 40 % chez tous ceux qui ont
consommé du cannabis au cours de leur vie. Donc, à partir du moment où vous consommez
du cannabis, 40 % de chances de développer une psychose en
augmentation. Ça augmente le facteur de prévalence, d'augmentation.
Un autre
chiffre, Mme la Présidente, qui est quand même troublant, une augmentation de
390 % de chances, chez les consommateurs intensifs, de développer
une psychose. Vous me direz : C'est des chiffres qui sont alarmants. Oui, Mme la Présidente, ce sont des chiffres qui sont
alarmants, et moi, je suis extrêmement mal à l'aise avec l'idée de fixer
l'âge à 18 ans, comme le premier ministre
semble proposer. On a eu un exemple cette semaine du ministre de la Santé, qui
s'est exprimé, il y a quelque temps, sur ce
dossier-là et qui, lui, avait une voix raisonnable là-dedans en disant que
c'était préférable de fixer à 21 ans.
D'autres
chiffres, Mme la Présidente. La consommation de cannabis peut précipiter le
déclenchement de la maladie, qui
survient, en moyenne, 2,7 ans plus tôt chez les consommateurs. Ça, ça veut
dire, Mme la Présidente, là, que, si vous risquez d'avoir un épisode psychotique
dans votre vie, bien, le fait de consommer du cannabis, ça va le devancer
de plus de deux ans et demi. Donc, lorsque
vous parlez aux psychiatres, là, ils disent tous : Il faut retarder le
plus tardivement possible la
consommation de cannabis idéalement chez les jeunes parce que la personne qui
fait une psychose, elle n'aura pas ce
vécu-là si elle consomme rapidement. Si vous consommez à 21 ans, vous faites
une psychose, vous allez déjà avoir eu
votre bagage de 21 années. Si vous le fixez à 18 ans, bien, à ce moment-là,
c'est 2,7 ans plus tôt. C'est troublant et c'est problématique, Mme la
Présidente.
• (15 h 10) •
Les
psychiatres ont également relevé que les données probantes démontrent que la
consommation régulière de cannabis
chez les jeunes se traduit par des déficits au niveau de l'attention, de la
mémoire, de la vitesse de traitement de l'information et de l'intelligence. Mme la Présidente, je vous le disais
tout à l'heure, c'est une question de société. Quel message on envoie aux
jeunes du Québec? Quel message, comme société,
on envoie? Qu'est-ce qu'on leur dit? Est-ce que la santé mentale, c'est important?
Est-ce que le développement de leurs connaissances, c'est important? Est-ce
que la motivation à l'école, c'est important,
Mme la Présidente? Nous, on pense que oui, à la CAQ, et c'est pour
ça qu'on propose de fixer l'âge à 21 ans.
Qu'est-ce que ça fait aussi, Mme la
Présidente, la consommation précoce
de cannabis? Qu'est-ce que ça fait? Bien, c'est possible de voir, au
niveau de l'imagerie médicale, les
lésions causées au cerveau par le THC. Vous savez, l'effet du THC, notamment ça fait la réduction du volume cérébral,
l'amincissement du cortex et le changement de la matière blanche. Le cerveau change, il est à risque, et il
risque d'avoir des conséquences. Je pense qu'on a la responsabilité comme parlementaires, là, lorsqu'on légifère... et c'est ce qu'on va faire avec la ministre
des Saines habitudes de vie au cours des prochaines semaines,
d'étudier un projet de loi, et j'espère très certainement qu'elle penchera pour
l'âge de 21 ans.
Les médecins
spécialistes du Québec, la Fédération
des médecins spécialistes, eux, qu'est-ce qu'ils disent? Ils indiquent que près de 72 % des médecins
spécialistes du Québec sont en désaccord avec la légalisation du cannabis dès
l'âge de 18 ans. Pour 43 % d'entre
eux, l'âge légal acceptable devrait être fixé à 21 ans. Pour 40 %
d'entre eux, il devrait être fixé à
plus de 25 ans. Ça, c'est des gens, Mme la Présidente, qui ont étudié dans
le domaine de la santé, qui traitent des milliers de Québécois
annuellement, qui font les suivis, qui travaillent à pied d'oeuvre dans les
hôpitaux, dans les centres de recherche et
qui disent au gouvernement québécois : Ce n'est pas une bonne idée de
mettre ça à 18 ans, vous devriez,
là, le mettre au minimum à 21 ans, au minimum à 21 ans, parce que ça
a des conséquences sur la santé populationnelle.
Le premier
ministre est médecin. Par le fait même, il est médecin spécialiste, il connaît
tous les risques associés en termes de santé mentale pour la population
du Québec, et particulièrement chez les jeunes. Vous savez, le premier ministre, là, son emploi antérieur, c'était
d'opérer au niveau de la tête, au niveau du cerveau. Le premier ministre, je
suis convaincu qu'il a sauvé de
nombreuses vies au Québec par son travail, il l'a fait dans sa vie antérieure.
Aujourd'hui qu'il est premier ministre, il faut qu'il poursuive sur sa
lancée et qu'il sauve d'autres vies. Il ne le fait pas de la même façon, Mme la Présidente. Maintenant, il n'ouvre plus la
tête des gens, il ne prend plus son scalpel, il n'opère plus, mais il a une
responsabilité encore plus grande. Parce que
peut-être qu'il voyait quelques centaines de patients par année, mais
aujourd'hui, avec sa fonction de premier
ministre, avec le pouvoir qu'il détient d'orienter l'orientation de son
gouvernement, il a le pouvoir de dire : Moi, comme premier ministre, je vais faire le
choix de fixer l'âge à 21 ans parce que je sais pertinemment qu'il y a des conséquences sur le développement du
cerveau, je sais pertinemment que la consommation de cannabis a des effets sur les jeunes Québécois et les jeunes
Québécoises, je sais que l'approche responsable à avoir, ce n'est pas de
favoriser la consommation de cannabis
et je sais que, pour le développement de la population du Québec, si on veut
bien outiller les jeunes, si on veut
prendre en compte leur santé et leur sécurité, il est de mon devoir, en tant
que premier ministre du Québec, de
fixer l'âge à 21 ans. C'est ça que le premier ministre doit faire,
conformément à ce que son ancienne fédération médicale dit.
Et,
vous savez, le ministre de la Santé, on est souvent pas d'accord avec ce qu'il
dit, Mme la Présidente, on est souvent
pas d'accord avec ce qu'il dit. Par contre, le ministre de la Santé, c'est
l'ancien président de la Fédération des médecins spécialistes. Et qu'est-ce qu'elle dit, sa fédération, à
laquelle il appartenait jusqu'en 2014, Mme la Présidente? Bien, elle
dit... il dit la même chose que sa fédération, soit de fixer l'âge à
21 ans.
Vous
savez, Mme la Présidente, dans son mémoire, la fédération a indiqué que
plusieurs spécialités se sentent directement interpelées par la
légalisation du cannabis, notamment en raison des effets appréhendés sur la
santé de la population en général et, en
particulier, sur celle des jeunes et les clientèles les plus vulnérables. C'est
le cas des pédiatres, des
pneumologues, des cardiologues, des otorhinolaryngologistes, des obstétriciens et gynécologues, des
anesthésiologistes, des
rhumatologues, des ophtalmologues et des infectiologues, entre autres. La
fédération estime le fait que de légaliser le cannabis et de mettre en
place un cadre formel pour en réguler la vente et la distribution le rendrait,
en théorie, plus accessible qu'il ne l'est
présentement. Cette accessibilité accrue pourra se traduire par une
augmentation de la consommation chez
les jeunes et chez les adultes. Ça, ça veut dire que le choix du fédéral va
faire en sorte que la population va probablement consommer davantage.
La
fédération souligne aussi dans son mémoire que, comparé au cannabis d'il y a 10
ou 15 ans, le cannabis d'aujourd'hui
présente un taux de THC nettement plus élevé, ce qui peut entraîner plus de
dépendance chez certains types de
consommateurs. Il y a des risques d'augmentation de cancers, Mme la Présidente,
et de maladies pulmonaires obstructives, des cas d'asthme et de bronchite.
Les médecins spécialistes s'attendent
également à une augmentation du nombre
de grossesses à risque, des cas d'enfants nés avec des problèmes de santé, des
infections transmises sexuellement et des interruptions volontaires de
grossesse.
Mme
la Présidente, la présidente de la Fédération des médecins spécialistes
soulignait lors d'une entrevue — Mme Francoeur — à la suite de la publication d'un article de
journal qui laissait sous-entendre que la position du gouvernement
libéral, elle était fixée, de fixer l'âge légal pour acheter du cannabis à 18
ans... Je vais la citer, Mme Francoeur, elle
dit : «Le premier ministre préfère contrer la contrebande, plutôt que de
protéger le cerveau de nos adolescents.»
C'est l'opinion de la présidente de la Fédération des médecins spécialistes.
J'espère, Mme la Présidente, que le premier ministre a entendu ces
experts du monde de la santé.
Et,
vous savez, tout à l'heure, je vous disais : Le ministre de la Santé
lui-même, lui-même milite vers l'âge de 21 ans. Pourquoi? Parce qu'il y a des risques. Et vous me permettrez de le
citer : «"La position des psychiatres est basée sur une littérature scientifique qui démontre clairement
qu'en termes de maturité, le cerveau, surtout celui du garçon, termine sa
maturité autour de 25 ans. Alors, il [en] va
de soi que, plus on retarde l'accès au cannabis, moins on prend de
risques", a poursuivi le
ministre. [Le ministre de la Santé et député de La Pinière] a insisté sur
la nécessité, pour le gouvernement, de
garantir la sécurité et la santé des personnes vulnérables. "Si vous me
demandez vers quel bord mon coeur penche, eh bien, mon coeur penche plus
vers le 21 ans", a-t-il confié.»
Mme
la Présidente, le propre ministre de la Santé du gouvernement libéral penche
vers 21 ans, lui qui est médecin, lui
qui connaît les risques. Le premier ministre connaît également les risques. On
n'est pas sans savoir qu'il y a un malaise, du côté du caucus libéral, de fixer l'âge à 18 ans. C'est important, Mme
la Présidente, qu'aujourd'hui les députés votent en fonction de la science, votent en fonction des données médicales
disponibles, votent en fonction de l'opinion du ministre de la Santé. Parce qu'il faut voter en fonction de
son raisonnement, de sa connaissance médicale, et non pas en fonction de
la ligne de parti. C'est fondamental, c'est un débat trop important.
L'Association des
spécialistes en médecine d'urgence, Mme la Présidente, nous dit également, au
niveau des urgentologues, qu'ils traitent
des psychoses induites par le cannabis tous les jours. Ils appréhendent une
augmentation de l'achalandage dans
les urgences avec la légalisation. Ils disent également que, pour protéger la
santé mentale des jeunes, il faut fixer à 21 ans l'âge légal.
L'Association
médicale canadienne dit de recommander de fixer l'âge minimal à 21 ans et qu'on
restreigne davantage les quantités et la
puissance de marijuana dans les cas des personnes âgées de moins de 25 ans.
Elle souligne également que les
éléments de preuve existants au sujet de la marijuana indiquent qu'il importe
de protéger le cerveau au cours de sa période de développement. Ce
développement prend fin vers 25 ans seulement. Il s'agirait d'un âge
minimal idéal, compte tenu des éléments de preuve scientifiques.
Vous
savez, Mme la Présidente, c'est fondamental que le gouvernement écoute les
spécialistes en médecine sur ce point-là.
C'est une question de société, mais c'est une question de responsabilité aussi.
Il ne faut pas banaliser la consommation de cannabis.
L'Association
médicale du Québec nous dit : «En refusant de fixer l'âge pour acheter du
cannabis à 21 ans, le gouvernement
banalise la consommation de marijuana. Il banalise les effets que la drogue
pourrait avoir sur l'avenir et la santé de la jeunesse québécoise.»
On
est vraiment face, Mme la Présidente, à une situation où il faut écouter les
Québécois. Parce que les Québécois sont
craintifs, et ils ont raison de l'être par rapport à cette légalisation du
cannabis là et, surtout, à l'âge de disponibilité. Il y a des maisons de sondage qui ont sondé les
Québécois, et, dans une très grande proportion, les Québécois sont inquiets,
mais surtout ne sont pas en accord avec le
fait de fixer l'âge à 18 ans. 65 % des répondants sont en faveur d'une
légalisation à 21 ans, à plus de 21
ans ou d'aucune légalisation. Et 56 % des répondants ont déclaré que
l'impact de la légalisation serait plutôt négatif pour la société
québécoise.
Mme
la Présidente, aujourd'hui, les libéraux ont le choix, le gouvernement a le
choix de voter en fonction de faits scientifiques
ou en fonction de la ligne de parti. C'est important que le premier ministre
comprenne, qu'il réalise... Le premier ministre a dit : Allo, la
Terre! Je lui dis : Revenez sur Terre et écoutez la population québécoise.
• (15 h 20) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le
député de Borduas. Maintenant, je suis prête
à reconnaître notre prochain intervenant et je cède la parole à Mme la ministre
responsable de la Réadaptation, de la Protection à la jeunesse, des
Saines habitudes de vie et de la Santé publique.
Mme Lucie Charlebois
Mme
Charlebois :
Alors, merci, Mme la Présidente. Pour moi, c'est important d'intervenir
aujourd'hui, ne serait-ce que pour
dire que le projet de loi que nous déposerons est un projet de loi majeur qui
va faire en sorte qu'on va se pencher
sur le futur de nos Québécois,
de nos jeunes Québécois, mais de l'ensemble de notre population
québécoise parce qu'on fait un virage, on rend quelque chose d'illégal
légal. Et ça, c'est le gouvernement
fédéral qui le fait, vous vous
souvenez de ça. Et ce projet de loi là a été déposé par le gouvernement
fédéral le 13 avril 2017.
Et on nous a
indiqué que le projet de loi du gouvernement
fédéral vise à légaliser le cannabis
récréatif, ce que les gens nous ont dit en commission qu'ils détestaient
entendre comme appellation. Alors, on va travailler à trouver d'autre chose que «récréatif» parce que ce n'est pas un
produit qui sert à la recréation. Mais ils ont annoncé aussi, le gouvernement fédéral, qu'il serait en vigueur au plus tard le 1er juillet.
Alors, dans notre tête, nous, ici, comme gouvernement responsable,
on se prépare à être prêts avant le 1er juillet et on va suivre l'évolution
de la législation du gouvernement fédéral.
Pour nous, il
est important de dire que le cannabis ne constitue pas un
produit de consommation ordinaire. C'est de la drogue, Mme la
Présidente, c'est clair que c'est de
la drogue, et tout le monde est conscient de ça ici, en cette Chambre. Le projet de légalisation doit être traité de
façon prudente et rigoureuse, et on doit tenir, Mme la Présidente, en compte
les expériences d'États qui ont déjà
légalisé le cannabis. Parce que ça existe ailleurs, des États où ça a
été légalisé, et on doit aussi tenir
compte des leçons apprises de ces pays-là, mais aussi, en matière d'alcool, de tabac et de cannabis
médical, qu'est-ce qui s'est fait et quels ont été les résultats.
On ne peut
pas faire de ce dossier-là, Mme la Présidente, un dossier de politique
partisane. Ici, là, on est en train de parler d'un méchant changement de
société. C'est quelque chose de très, très grand qu'on est en train d'implanter
à travers tout le Canada, mais, particulièrement en ce qui nous concerne, au
Québec. Et, en vertu du projet de loi du gouvernement
fédéral, celui-ci serait responsable de créer et de maintenir un cadre national
rigoureux qui détermine la réglementation
sur la production — ce qui
les concerne, là, c'est la production — l'adoption de normes de santé et de
sécurité et l'établissement d'interdictions criminelles. Ça, c'est dans leur
champ de compétence.
Pour ce qui
est des gouvernements provinciaux et territoriaux, nous avons, quant à nous, la
responsabilité de la distribution, de
la vente et du respect de la réglementation. Alors, qu'est-ce que ça veut dire,
ça, Mme la Présidente? On a plein
d'enjeux qui sont reliés à ça. Il n'y a pas que l'âge. Oui, il y a l'âge légal,
c'est vrai, mais il y a la possession, les lieux d'usage, la production
à des fins personnelles.
Mme la Présidente, on a tenu des consultations.
D'ailleurs, je veux en parler parce que vous savez quoi? Ces consultations-là ne sont pas tombées du ciel comme
ça, ça fait longtemps qu'on travaille là-dessus, nous autres, comme gouvernement. Parce que, quand on a entendu le
gouvernement fédéral se prononcer, on a dit : Mettons-nous au travail
et recueillons le maximum d'information.
Alors, dans notre façon de faire rigoureuse, nous avons donc réuni
12 ministères, et je vous les
nomme, Mme la Présidente, pour que les gens sentent à quel point on est touchés
par cette légalisation du cannabis là, et tous les ministères qui sont
impactés.
Il y a
12 ministères, deux secrétariats. Il y a le ministère de la Santé et
Services sociaux — vous
savez qu'il y a deux ministres dans ce ministère-là — le
ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation, le ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du
territoire, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
le ministère du Conseil exécutif, le
ministère de la Sécurité publique, le ministère des Finances, ministère de la
Justice du Québec, ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité
sociale, le ministère du Transport, de la Mobilité durable et de
l'Électrification du transport, le ministère de l'Éducation, du Loisir et du
Sport, le ministère de l'Enseignement supérieur,
Mme la Présidente, le Secrétariat aux affaires autochtones, parce que ça les
concerne grandement, et le Secrétariat aux affaires
intergouvernementales canadiennes.
Alors, tous
ces gens-là se sont réunis, les ministres, et nous avons décidé de faire des
consultations. Nous nous sommes dit
que, pour développer un bon projet de loi qui va encadrer le cannabis
correctement, nous devons nous baser sur :
un, les meilleures pratiques; deux, les connaissances scientifiques; trois, les
expériences des États qui ont déjà légalisé cette substance-là; et,
quatre, il faut répondre aux préoccupations de la population, pas juste celles
que ça nous tente d'entendre, là, l'ensemble de la population.
Alors, étant
donné qu'on est interpelés par une multitude d'acteurs et que nous avions à
coeur d'entendre les divers citoyens
et organisations, nous avons donc amorcé un processus de consultation. Et, dans
ce processus-là, ce qu'on voulait, c'est alimenter nos réflexions sur
l'encadrement du cannabis, qui relève de notre juridiction.
Alors, le
processus de consultation a été mis en place
par le gouvernement du Québec, d'abord a pris forme au Forum d'experts sur l'encadrement du cannabis, et ça s'est tenu à Montréal,
Mme la Présidente, les 19 et 20 juin 2017, et cet événement-là a réuni plus de 200 participants
provenant de différents secteurs d'activité, milieux universitaires, publics et privés. Si on avait pu faire plus que deux jours, ça aurait été curieux
d'entendre tout ce qui s'est dit parce
que ça a continué, les discussions, par après, Mme la Présidente. Mais, lors de ces deux journées-là, nous avons entendu passablement de
choses de différents endroits, dont ceux qui avaient déjà légalisé. Nous avons
entendu des experts concrètement sur l'encadrement fondé sur des principes de santé et de sécurité publique. C'est ce qui
nous guide, nous, ici, là, du côté du gouvernement, mais je pense que l'ensemble des parlementaires sont là aussi. Je ne peux pas croire qu'il n'y a personne qui veut
assurer la sécurité et la santé de la population ici, Mme la Présidente. Tous
les parlementaires que nous sommes souhaitons s'occuper de notre
population adéquatement.
Alors, suite
au processus avec le forum d'experts, nous nous sommes dit : Nous
n'arrêterons pas là, nous allons consulter tous les organismes qui
veulent nous donner leur point de vue, qui représentent la population, mais
aussi la population elle-même. Alors, nous avons tenu des consultations régionales dans plusieurs villes, qui ont regroupé les villes
attenantes — Rimouski,
Québec, Saguenay, Trois-Rivières, Granby, Montréal — et nous avons terminé
à Gatineau, Mme la Présidente.
Je m'en
souviens — petite anecdote qui n'a rien à voir avec le
cannabis — parce
que j'avais tellement mal dans le
dos — bien, le
député de Borduas ne peut pas s'en souvenir, il n'était pas là — j'avais
de la misère à marcher, j'étais pliée
en deux, et quelqu'un m'a même offert de l'huile de cannabis pour
guérir mon mal de dos, mais j'ai dit : Non, ça va aller, je vais passer ça par moi-même. Ça m'a fait sourire.
Alors, au
total, il y a eu 128 mémoires qui ont été déposés par les organisations, mais il y a 570 citoyens qui se sont inscrits aux
consultations publiques. Il y avait quand même pas mal de monde.
Les Québécois
ont été invités à répondre aussi, Mme
la Présidente... Parce qu'on s'est
dit : Ce n'est pas tout le
monde qui va avoir la chance de venir nous voir. Ça fait qu'on leur a
demandé : Si vous voulez donner votre opinion, vous pouvez vous
inscrire à une consultation en ligne, et ils ont pu le faire entre le
21 août et le 12 septembre. Savez-vous, Mme la Présidente, 12 600 personnes ont répondu au
questionnaire. Pas juste le début, pas 30 %, non, non, à plus de
80 %. Ils nous ont émis
des commentaires en plus. Alors, c'est donc dire que ça interpelle la population,
là. Et ils répondu directement au ministère de la Santé, là, c'est quelque
chose.
Alors, on a
aussi, Mme la Présidente... On ne s'est pas arrêtés là, on s'est
dit : Tant qu'à consulter, allons-y à fond la caisse. Nous avons consulté des municipalités. Nous avons
rencontré ces gens-là le 5 septembre dernier. Nous avons rencontré l'Union
des municipalités du Québec, nous
avons rencontré la Fédération
québécoise des municipalités, la ville de Québec, la ville
de Montréal et d'autres intervenants
dans le monde municipal, et ils nous ont fait part de leurs préoccupations.
Est-ce qu'on est arrêtés là? Non, Mme la
Présidente. Étant donné que ça
interpelle la jeunesse, ça nous intéressait de savoir ce qu'ils avaient à dire. Nous sommes allés à la rencontre du
Secrétariat à la jeunesse le 26 septembre dernier et nous avons eu la chance d'échanger et d'avoir une
présentation par un psychiatre. Ça a été assez intéressant de voir les nuances qu'il nous a apportées dans sa
présentation. Ça nous amène à réfléchir beaucoup, Mme la Présidente. Et le Secrétariat à la
jeunesse nous produira un rapport, mais j'ai déjà eu quelque vent de ce qui est
ressorti de cette consultation.
Parce que, malheureusement, je n'ai pas pu rester jusqu'à la fin de la journée, mais j'ai quand même
eu la chance d'échanger avec les jeunes et les gens qui les
représentaient, qui étaient là, et ça a été fort intéressant.
Mais
savez-vous quoi, Mme la Présidente? On s'est dit : Ça ne
peut pas arrêter là. Une population qui a besoin d'être consultée, c'est certainement la population autochtone. Alors, on les a rencontrés le
29 septembre dernier ici, à Québec, et ça a été fort intéressant d'entendre
leurs propos parce qu'eux aussi, ils ont des choses à dire sur le cannabis.
Alors, je
veux vous rassurer tout de suite, Mme la Présidente, dès que le ministère de la
Santé aura fini d'analyser et de
compiler toutes, toutes les données que nous avons, nous allons les rendre publiques pour que les gens sachent qu'est-ce qui
s'est dit dans toutes les consultations avec toute la transparence possible, on
aura un rapport sur ces consultations-là.
• (15 h 30) •
Et, lors des
consultations, Mme la Présidente, j'ai bien entendu que la recherche scientifique
a établi que le cerveau humain
continue de se développer jusqu'à 25 ans, j'ai entendu ça comme le député
de Borduas. J'ai aussi entendu la mise en garde sur les dangers liés à l'usage du cannabis par les médecins
psychiatres et divers autres ordres, organisations médicales, j'ai entendu ça. Je ne suis pas sourde, j'entends
la même chose que lui. Mais j'ai aussi entendu plusieurs organisations, pour
ne pas dire une multitude, soutenir que 18 ans devait être l'âge légal
pour l'achat et la consommation de cannabis, notamment la Société
canadienne de pédiatrie, l'association québécoise de santé publique et la Fédération
des cégeps. Par-dessus tout, Mme la Présidente, là, parce qu'on entend... C'est polarisé, là. On le sait qu'il y en a
qui sont sur le 21 ans, il y en
a qui sont sur le 18 ans, bien que la science démontre que c'est jusqu'à
25 ans, pas jusqu'à 21 ans, là, jusqu'à 25 ans que le cerveau se
forme. Mais il y a des groupes qui sont polarisés, et j'entends ça.
J'ai entendu
la principale préoccupation soulevée par les citoyens en ce qui concerne la
substance parce qu'il y a
plein de choses à entendre. Il n'y a pas juste l'âge, Mme la Présidente. Les
gens ne veulent pas qu'on banalise cette substance-là. Comment on fait pour que
la substance ne soit pas considérée banale par l'ensemble de la population?
J'ai entendu aussi que les organisations
réclament avoir accès à des informations justes, non biaisées, non dramatisantes sur la substance, sur ses effets,
sur ses bienfaits, sur ses risques et les conseils pour un usage responsable
et sécuritaire. J'ai entendu ça aussi. Lors
de ces consultations-là, j'ai compris que des gens, à l'unanimité,
souhaitent que nous mettions en place — c'était partout unanime, il n'y a pas une
personne qui m'a parlé qui ne m'a pas parlé de ça, c'est assez considérable — des activités de prévention,
sensibilisation, d'éducation sur la consommation de cannabis. Ce n'est pas tout de faire des capsules, là, il va falloir
aller dans les écoles, Mme la Présidente, aller s'adresser aux jeunes. Mais
ce n'est pas en leur faisant des campagnes
de peur, c'est en expliquant ce qu'est le produit, ce que seront ses effets,
positifs ou négatifs, mais il faut que les jeunes soient en mesure de
comprendre ce que c'est que le cannabis.
Moi, me faire
dire... Je me rappelle, jeune, on me disait : Ne fume pas, ce n'est pas
bon. Puis c'était mon père qui me disait
ça, mais il fumait, lui, à côté. Je me disais : Ce n'est pas cohérent,
l'affaire, là. Ça ne marche pas. J'ai commencé à comprendre quand j'ai eu de l'information, quand j'ai compris. Ne fume
pas, ce n'est pas bon, ce n'est pas une bonne... c'est erreur d'argumentation 101 en philo, hein? Mais, quand on a
le détail, le pourquoi que ce n'est pas bon, bien, c'est ça qu'il faut
dire aux jeunes, qu'ils fassent des choix éclairés.
Vous savez, Mme la
Présidente, quand on assistait aux consultations de façon assidue, on avait
l'occasion d'entendre les préoccupations des
citoyens sur bien des sujets, que ce soit en prévention, en information, en
sensibilisation, comme je viens de
vous dire, que ce soit concernant la qualité du produit, bref la traçabilité
des produits, l'interaction du cannabis et de l'alcool et d'autres
médicaments potentiels. On a entendu parler beaucoup de production, production commerciale, oui, mais production à des fins
personnelles. On a entendu parler de formation de corps professoral, tant les
policiers que les médecins, les infirmières, et tout. On a entendu parler de
ça. On a entendu parler du traitement des dépendances,
c'est intéressant. Puis ça a l'air que ça existe déjà, hein? On a déjà des
maisons de traitement de dépendance. Donc, il doit y avoir des gens qui
consomment déjà, là, je présume.
On a entendu
parler des lieux d'usage, où ça va pouvoir se consommer. C'est assez important,
là. Est-ce que je veux, moi, que mon
voisin de table au restaurant s'allume un joint — on va dire le mot, là — de pot? C'est ça que les gens nous ont parlé : Où pourrons-nous consommer
ce produit-là? Parce qu'il y en a qui veulent en consommer puis il y a en
a d'autres qui ne veulent rien entendre de
ça. La promotion, est-ce que ce sera permis et dans quelles mesures? Ça, c'est
dans notre champ de compétence. La
publicité, même chose. Le taux de THC cannabinoïdes, parce que ce qu'on
nous a dit, c'est que le cannabis des
années 70 puis le cannabis d'aujourd'hui... hi! méchante différence! Il
n'a pas le même taux de THC puis de
cannabinoïde. Mais, Mme la Présidente, savez-vous quoi? Il y en a qui n'en ont
pas, de THC. Savez-vous pourquoi?
Parce qu'il y en a qui utilisent ça à des fins médicales, puis c'est pour le
cannabinoïde, puis il y a même des enfants qui en consomment de façon
thérapeutique. Ça aussi, j'ai entendu ça. Or donc, il faut faire attention
quand on prend des positions, il faut nuancer nos affaires.
On nous a
parlé du modèle de vente. Est-ce qu'on met ça dans les mains d'un marché privé?
Est-ce qu'on met ça dans les mains d'une société d'État? Est-ce qu'on
met ça dans les mains des organismes communautaires? On a entendu plein de points de vue là-dessus, Mme la
Présidente. On a entendu parler des gens qui nous ont dit : Au-delà de la
prévention, de la sensibilisation, de
l'éducation et de tout, parlons donc recherche parce qu'en ce moment, là, les
recherches ne sont pas si concluantes que ça, là, la science n'est pas si
avancée que ça. C'est assez étonnant. Bien, ils nous ont dit : Il faudrait un budget, il faudrait établir de
la surveillance, une base de données, ramasser le plus de données possible et faire des recherches concluantes
pour pouvoir avancer dans ce segment-là.
On nous a
parlé des produits dérivés, et là j'ai entendu que le gouvernement fédéral
était pour nous revenir avec les produits
dérivés. Il avait des choses à nous dire à ce sujet-là. Les gens sont beaucoup
interpellés par ça parce qu'il y a consommer
par la fumée, puis il nous a parlé du cancer, le député de Borduas. Mais
savez-vous quoi? Vous pouvez manger un
muffin au pot, puis avoir peut-être autant de plaisir, sinon plus, parce que,
si vous en mangez deux, vous allez voir que le fun va être parti puis
vous ne sentirez plus grand-chose, là.
Il y a bien
d'autres sujets, Mme la Présidente, qu'on a entendu parler : sécurité,
santé. Eh bien, quand je vous parle de sécurité, ça peut être tant la sécurité
routière, la sécurité au travail, la sécurité tout court parce que, quand on
parlait tantôt de production
personnelle, il y a des gens qui sont venus nous dire : On fait quoi avec
les enfants dans une maison, là, qui
voient ça? Puis s'ils s'accrochent là-dedans? Puis, bon, comment faire pour
éviter que les enfants aient une consommation accidentelle? Comment
faire pour prêcher l'exemple, comment... en tout cas, j'en ai entendu, des
choses.
Mme la
Présidente, ce que je veux qu'on retienne, là, c'est que... puis je pense que
mes collègues, pour l'ensemble des
collègues de l'Assemblée nationale, je ne pense pas que les gens veulent qu'on
fasse un enjeu politique avec ce débat-là. Je pense que, comme pour le projet de la protection de la jeunesse qu'on
a adopté ce matin à l'unanimité, les gens souhaitent qu'on travaille en équipe pour le mieux-être de
l'ensemble de notre population. C'est ça que les gens nous demandent au
Québec.
Alors, dans
ce sens-là, Mme la Présidente, il ne faut pas agir de façon précipitée. Il est
de notre devoir d'utiliser et d'outiller
notre monde puis il faut qu'on prenne les meilleures décisions possible. Et
c'est ce qu'on fait en ce moment. Faire
dans la précipitation dans les dossiers comme ça, ce n'est pas responsable, Mme
la Présidente. Et moi, je veux vous dire
que je ne dévoilerai pas le projet de loi à petite pièce pour faire de la
petite politique avec. Moi, je souhaite que nous soyons tous ensemble unis
pour travailler au bien-être de la population et de notre jeunesse. Et, dans ce
dossier-là, Mme la Présidente, la priorité
de notre gouvernement, ça demeure toujours la protection de la santé et la
sécurité de notre population, particulièrement les jeunes.
Je veux vous
dire, Mme la Présidente, qu'on ne peut pas dire ça sans tenir compte du marché
noir. C'est impossible parce que,
quand on va sur le marché noir, Mme la Présidente, savez-vous quoi, on n'a
aucune idée de ce qu'on consomme. On a zéro idée. Je ne veux pas apeurer
personne, mais il commence à y avoir des drôles de produits justement dans le cannabis... qui est inséré, là. Il faut prendre
tout ça en considération. Alors, moi, Mme la Présidente, agir dans la
précipitation pour un projet de loi aussi important, je ne suis pas là,
pas plus que je ne l'étais quand on a bâti le projet de loi sur la protection
de la jeunesse qu'on a adopté à l'unanimité, je le rappelle, ce matin.
Alors, nos
orientations vont être connues lors du dépôt du projet de loi qui va encadrer
le cannabis. Et savez-vous quoi? Un
gouvernement responsable, c'est comme ça que ça agit sur l'ensemble de l'oeuvre
des dossiers dont je viens de vous
parler, pas sur une affaire, sur l'ensemble de l'oeuvre parce que tout est
interrelié, tout a un impact, Mme la Présidente. Et c'est trop important que nous faisions attention comment on va gérer
ce dossier-là. C'est l'avenir de notre population qu'on est en train de travailler. Et, Mme la
Présidente, ne faisons pas semblant que ça n'existe pas déjà, hein? Ça existe
déjà, des gens qui consomment, puis on ne
peut pas s'en occuper adéquatement en ce moment. La légalisation faite par
le gouvernement fédéral va nous permettre de
mettre un cadre qui va nous assurer la santé et la sécurité de notre monde
tout en contrant le marché noir.
Mme la
Présidente, je vais vous déposer un bon projet de loi qui va encadrer le
cannabis et j'implore les députés de l'Assemblée nationale d'attendre
pour que nous puissions travailler tous ensemble dans la même cause. Merci.
• (15 h 40) •
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la ministre.
Maintenant, je vais céder la parole à
M. le député de Saint-Jean, qui est aussi le porte-parole de sa formation
politique en matière de protection de la jeunesse.
M. Dave Turcotte
M. Turcotte :
Et services sociaux. Merci, Mme
la Présidente. Donc, aujourd'hui, nous avons à intervenir sur une
motion qui nous est présentée sur, notamment, l'âge qui serait prescrit pour la...
bien, l'autorisation et la légalisation, la consommation de la
marijuana.
Avant
d'aller plus loin, Mme la Présidente, j'aimerais amener un commentaire d'emblée. Ce sujet, je ne parle pas de l'âge, mais du sujet de la légalisation proprement dite de la marijuana,
est un enjeu qui nous est imposé à
l'heure actuelle. Il nous est imposé
par le gouvernement fédéral, qui, lors de la dernière campagne électorale, le Parti libéral du Canada,
avait comme engagement électoral de
légaliser la marijuana. Une preuve, Mme
la Présidente, de l'importance de
lire les programmes des partis politiques avant de voter à une élection.
Moi,
ce que je vous dis, Mme la Présidente, c'est qu'en ce moment au Québec
l'enjeu ne porte pas juste sur l'âge. Le
débat porte sur est-ce qu'on est pour ou contre la légalisation. Mais malheureusement nous ne pouvons pas faire ce débat-là sereinement parce que l'échéancier
qui nous est imposé par le gouvernement fédéral fait en sorte que nous sommes pratiquement dans la précipitation pour
essayer de mettre des balises à cette dite légalisation de la marijuana.
Puis
ce n'est pas que le Québec, l'ensemble des provinces canadiennes sont face à
cette situation, ce qui fait en sorte qu'on voit au goutte à goutte chacune des provinces, de jour en
jour, dévoiler une partie d'une solution, de dire : Bon, aujourd'hui, c'est... ou récemment, là, l'Alberta a dit : Bon, nous, ça va
être 18 ans. Il y a quelques jours, quelques semaines, l'Ontario a dit 19 ans. Nouveau-Brunswick a dit :
Bien, nous, on veut avoir un monopole d'État. Donc, jour à jour, au fil
du temps, chaque province dévoile une partie de sa pensée.
Je
crois que, Mme la Présidente, cet enjeu mériterait un réel débat de société
au même titre que mourir dans la dignité. Nous avons eu la chance, le
privilège, parce qu'on a dit ici, à l'Assemblée nationale, qu'on prenait le
temps, comme législateurs, comme
parlementaires, d'aller consulter la population dans l'ensemble des régions du
Québec, de faire des travaux ici, au
parlement, de prendre le temps qu'il faut pour faire le débat sereinement pour,
justement, améliorer le sort de notre
population et que, collectivement, il y ait un consensus sur cette question qui
a mené à un projet de loi puis, par la suite, qui a mené à une loi. Et,
par la suite, on voit que le gouvernement fédéral a emboîté le pas.
Donc,
ce débat-là, Mme la Présidente, nous avons été privés de pouvoir le faire dans
un temps normal, sain, serein, ce qui
fait en sorte que je comprends en ce moment... je comprends les craintes et les
inquiétudes des Québécoises et des Québécois par rapport à cet enjeu
parce qu'ils se sentent bousculés, ils se sentent pressés de prendre une
décision, même s'ils ne peuvent pas parce
que le gouvernement fédéral va arriver avec ses balises en disant : Mais
il y aura tel, tel, tel cadre. Et
là-dedans, bien, les provinces, trouvez un accommodement, là, pour que ça fasse
votre affaire. Malheureusement, Mme la Présidente, nous n'avons pas pu
faire ce débat correctement.
Mais,
quand je dis que le gouvernement a fait le choix de prioriser la légalisation
de la marijuana, le gouvernement fédéral
aurait pu décider de prioriser la réforme du mode de scrutin parce que c'était
aussi un engagement électoral lors de la dernière campagne électorale du
Parti libéral du Canada. Mais le Parti libéral a dit... du Canada : C'est
tellement compliqué à appliquer dans ce
mandat-ci qu'on ne pourra pas y arriver, donc nous allons le remettre. Comme si
la légalisation de la marijuana
n'était pas compliquée à appliquer puis n'était pas un débat de société,
justement, qui aurait peut-être
mérité de, ça aussi, le remettre à un autre mandat pour justement donner
l'occasion aux citoyens au Québec puis, dans ce cas-ci, dans l'ensemble
du Canada de pouvoir avoir ce débat sereinement!
J'en
ai parlé, Mme la Présidente, l'échéancier, et la ministre l'a mentionné aussi,
au plus tard le 1er juillet prochain, au plus tard. Donc, ça pourrait arriver
avant, et la ministre nous dit : On doit se préparer pour être prêts à
toute éventualité et... puis, si ça arrive avant le 1er juillet... donc,
qu'on soit prêts. Donc, Mme la Présidente, je pense que l'échéancier, à la base, démontre la précipitation dans cet enjeu-là.
Puis, on le voit dans tous les sondages, la population est divisée pratiquement 50-50 sur cette question-là,
et je crois que ce n'est pas dans la précipitation qu'on peut justement
faire en sorte qu'on crée un consensus respectueux de toutes les opinions.
Un
autre enjeu, Mme la Présidente, c'est la question des coûts, puis ça, je vais y
revenir plus attentivement, là, mais
il y a des coûts sociaux à la légalisation de la marijuana. Il y a des coûts humains pour les personnes, il y a
des coûts comme société
puis il y a des coûts financiers, bien entendu, aussi. Et,
encore là, cette facture-là, là, qu'elle soit sociale ou financière, bien, c'est le gouvernement du Québec qui devra l'assumer, sans nécessairement...
Puis, jusqu'à preuve du contraire... Encore hier dans La Presse,
le 3 octobre, on le voit, là, que l'offre qui est sur la table du gouvernement
fédéral n'est pas réjouissante, n'est pas réjouissante pour améliorer la situation.
Et, sur cette question-là, Mme
la Présidente, je dirais que le Québec, comme nation, comme
pays, aurait pu, pourrait prendre cette décision-là par lui-même
sans se faire rien imposer du gouvernement fédéral.
Dans Les actes du
forum... parce qu'il y a eu un forum d'experts, il y a eu des consultations
un peu partout. Encore là, Mme la
Présidente, nous aurions souhaité qu'elles soient plus nombreuses, qu'elles
soient plus inclusives, que les gens
puissent davantage avoir de temps pour se préparer, qu'ils puissent avoir
davantage de mémoires ou de consultations citoyennes dans cet enjeu important. Dans Les actes du forum
d'experts, on peut y lire : «Comme le cerveau n'est pas
complètement formé avant l'âge de 25 ans, il est davantage vulnérable aux
effets toxiques du THC, de sorte que les manifestations
psychotiques sont plus fréquentes chez les personnes qui ont commencé à
consommer régulièrement du cannabis à partir de l'âge de 15 ans ou
de 17 ans.
«[...]Il est particulièrement
important que les vendeurs soient formés au fait que le cerveau est en
développement jusqu'à l'âge de 25 ans et qu'il est donc [...] vulnérable
aux effets du cannabis. C'est d'ailleurs pourquoi la fixation de l'âge
légal à 18 ans ne fait pas l'unanimité.»
«La
légalisation du cannabis doit être accompagnée de messages clairs, univoques et
nuancés. Il ne faut ni dramatiser, ni
banaliser, et, en tout temps, miser sur la crédibilité. Il est également très
important de déstigmatiser son usage.
L'âge d'accès légal au cannabis doit être de 18 ans, en concordance au
Québec avec l'âge légal pour l'alcool et le tabac. Cet âge correspond à celui où la société reconnaît la personne
comme adulte apte à prendre des décisions éclairées.
«[...]Le
nouveau marché légal devrait donc donner accès aux jeunes de 18 ans et
plus, même en sachant que le cerveau continue à se développer après leur
majorité.»
Mme
la Présidente, dans cet acte du forum, moi, j'entends, je lis : «Il est
particulièrement important que les vendeurs soient formés au fait que le cerveau est en développement jusqu'à l'âge
de 25 ans...» Malheureusement, à l'heure actuelle, Mme la Présidente, la plus grande part de marché
de la consommation de la marijuana, bien, c'est les moins de 25 ans.
Et je ne pense pas que les vendeurs actuels,
qui sont dans le crime organisé, ça les fait beaucoup pleurer de savoir qu'ils
vendent des produits à des jeunes de moins
de 25 ans et que ça a un impact sur leur santé et sur leur avenir. Je ne
crois pas que ces vendeurs-là
actuels, qui sont du marché illégal, du marché occulte, prennent le temps de
sensibiliser ces jeunes. Je ne pense pas que ces vendeurs-là prennent le
temps d'informer les acheteurs.
Je crois qu'uniquement pour ça, Mme la Présidente,
s'il y a légalisation de la marijuana, comme ça nous est imposé du gouvernement fédéral, on n'a pas le choix de
tenter, de tenter de faire en sorte qu'on puisse le plus possible intervenir
pour aider davantage de gens à, un, sortir du monde de la drogue et, deux, de
faire en sorte que ceux qui font le choix de
continuer à consommer... mais le fassent en toute connaissance de cause et
soient informés des conséquences pour eux et peut-être réduire leur consommation, porter plus attention, mais aussi
que la qualité... et là c'est toujours étrange de dire ça parce que c'est un produit nocif de toute façon, mais au
moins que la qualité soit... ça soit de meilleure qualité que le marché
noir, le marché occulte, Mme la Présidente.
• (15 h 50) •
Donc,
pour toutes ces raisons, nous croyons que nous devons effectivement avoir, en
toute cohérence, autant que l'alcool et le tabac, qui ne sont pas plus
des produits meilleurs pour la santé à la consommation, puis je pourrais dire aussi le jeu, ce n'est pas pour la santé physique
autant, mais ça a un impact sur la santé psychologique et sur l'impact social aussi... C'est une dépendance, Mme
la Présidente. Bien, tout ce qu'on
vient de mentionner, l'alcool, le tabac et le jeu, c'est 18 ans. Donc, par cohérence, nous
devons choisir 18 ans parce que c'est un choix, selon moi, qui va nous permettre
d'intervenir plus rapidement pour justement, comme je vous ai dit,
assurer une meilleure qualité du produit pour ces consommateurs-là, mais
surtout d'inciter ces personnes-là à ne plus consommer ou à moins consommer.
Puis
le travail qui a été fait depuis toutes ces années au Québec sur
la consommation de tabac... On le voit, il y a une réduction
significative, importante de la consommation du tabac au Québec parce qu'il y a eu beaucoup de campagnes de sensibilisation, parce
qu'il y a eu de l'information, parce qu'il y a eu de la conscientisation, parce qu'il y a eu aussi de la mobilisation
sur le terrain un peu partout. Puis on l'a vu, on le voit partout à chaque
année avec les Relais pour la vie puis
toutes les conséquences nocives que le tabac a sur la santé des gens, avec l'augmentation du nombre de cancers, etc., bien, on le voit, il y a une
diminution de la consommation du tabac.
Mais,
si on donne l'outil, la façon... Selon moi, la meilleure façon de pouvoir avoir
un contact direct, personnalisé avec
l'acheteur, bien, c'est que l'acheteur l'achète avec un représentant qui est, comme l'acte le dit... un vendeur qui est formé au fait
que le cerveau est en développement jusqu'à l'âge de 25 ans, Mme la
Présidente.
Puis,
au Québec, à 18 ans on a le droit de voter, donc on
peut choisir le gouvernement qui va gouverner notre nation, qui va avoir des impacts et des répercussions
assez importants pour l'avenir du pays. Il peut même voter à
partir de 18 ans pour un parti
qui va décider de légaliser ou non la marijuana. À partir de 18 ans, on
peut consommer et acheter de l'alcool, on
peut consommer et acheter du tabac. Donc, il peut y avoir un message
contradictoire par rapport aux produits nocifs. Puis, oui, il ne faut pas banaliser la
consommation du cannabis, comme il ne faut pas banaliser non plus la
consommation de tabac, puis qu'il ne faut pas non plus banaliser la
consommation d'alcool, puis qu'il ne faut pas non plus banaliser l'utilisation
ou le recours à des jeux de hasard, Mme la Présidente.
Je
vous l'ai mentionné précédemment, l'Alberta vient de dévoiler leur volonté
d'aller pour 18 ans, l'Ontario,
19 ans, parce que leur âge de
majorité est 19 ans, donc en concordance avec l'argument que je vous ai
mentionné, l'Ontario étant la province voisine du Québec. Le Nouveau-Brunswick
n'a pas encore pris position sur l'âge, mais hésite beaucoup entre le 18 ou le 19 ans. Donc, ça a été aussi
mentionné dans le débat. Si une province voisine comme l'Ontario a recours au
19 ans, le Nouveau-Brunswick choisit le
18 ou le 19 ans et que le Québec choisirait le 21 ans, bien nos
jeunes peuvent traverser la frontière, et il n'y a pas de douanes, là,
du moins, encore, entre le Québec et le Nouveau-Brunswick, et ils peuvent passer puis aller en chercher de l'autre
côté. Et qui nous dit qu'ils ne peuvent pas le ramener au Québec? Donc, cet
enjeu-là aussi est important. Et, encore là, si ce jeune-là traverse en Ontario
ou au Nouveau-Brunswick, il peut avoir effectivement,
comme je vous ai mentionné, l'accompagnement ou l'information, mais, s'il n'est
pas de ladite province, quel est le
suivi qui en est fait? On peut se questionner sur les conséquences, Mme la
Présidente. Et, bien entendu, vous êtes
sûrement mieux placée, et je ne vous demanderai pas de prendre position, mais,
comme vous êtes une députée de l'Outaouais, vous voyez au quotidien les
impacts que ça peut avoir de traverser la rivière des Outaouais.
Mme la Présidente, on le sait, entre 18 et
24 ans, c'est, pour les consommateurs, la plus haute prévalence de consommation. Donc, il y a un risque d'augmenter
la clandestinité du produit, Mme la Présidente, parce que les jeunes qui consomment actuellement — et c'est illégal actuellement — même si on leur dit : Ça ne sera pas
légal pour vous, selon moi, vont quand même continuer à consommer. Puis
on le sait, Mme la Présidente, on ne doit pas faire l'autruche. Malheureusement, au Québec, il y a des jeunes de
moins de 18 ans qui consomment de la marijuana, malheureusement, Mme la Présidente. Et, pour ces jeunes-là, c'est
déjà compliqué de les rejoindre et de pouvoir les sensibiliser. Si, en plus,
tous les 18-21, nous ne pourrons pas les sensibiliser s'il y a
légalisation de la marijuana, bien, ça a aussi un impact pour ces jeunes-là. Donc, ils continueront à faire appel à
leur pusher et à aller dans le marché noir, Mme la Présidente. Et, je vous
rappelle, dans les actes du forum, bien, du
forum des experts : «Il est particulièrement important que les vendeurs soient formés au fait que
le cerveau est en développement jusqu'à l'âge de 25 ans...»
Donc,
Mme la Présidente, pour nos jeunes de 18-21 ans, bien, eux, pour
eux, ils pourraient continuer à aller dans le marché noir parce qu'on n'est pas capables de les empêcher actuellement avec les ressources qui sont en place, à moins qu'on me dit qu'on va investir davantage
pour la police, puis qu'on va suivre tous ces jeunes-là, puis qu'on va les
empêcher vraiment, là, puis que ça va réussir. Malheureusement, en ce moment, ça ne se fait pas, et on ne réussit pas. Et une
des raisons pourquoi le gouvernement fédéral veut aller vers la légalisation
de la marijuana, bien, c'est justement pour démanteler le milieu criminel, donc le marché noir, et faire
aussi un impact sur les acheteurs pour pouvoir les sensibiliser davantage.
Donc, c'est une des raisons pourquoi on légalise la marijuana. Puis il y a
d'autres juridictions à travers le monde qui ont fait ce choix-là. Donc, Mme la Présidente, selon moi, c'est de se priver
d'un outil pour convaincre les jeunes de moins consommer et de ne pas
consommer dans certains cas, dans le plus grand nombre des cas, nous le
souhaitons.
Et
l'autre chose, Mme la Présidente, comme je l'ai mentionné aussi précédemment,
c'est sur la question de la qualité ou
de la teneur en THC, dans la force du produit. Si le produit est légal, avec
les balises que nous allons décider, bien, etc., bien, on s'assure que ces jeunes-là vont, s'ils consomment, avoir un
produit qui est moins nocif pour eux que s'ils continuent d'aller dans
le marché noir.
Et
l'autre chose, Mme la Présidente, qui dit marché noir dit aussi illégalité,
mais aussi ça coûte de l'argent puis ça
se peut qu'ils n'aient pas les moyens de financer leur consommation. Et
malheureusement, on le voit trop souvent, des jeunes qui tombent dans l'enfer de la drogue et commettent des actes
illégaux pour pouvoir payer leurs drogues, mais aussi la prostitution... Puis on le voit, puis on en
entend parler, puis on a eu la discussion sur la question du projet de loi
n° 99, les conséquences que ça peut avoir. Donc, si on peut agir plus tôt
pour ces jeunes-là, je crois que, Mme la Présidente, ça pourrait être moins pire, et je vous le rappelle,
Mme la Présidente, sachant que nous sommes confrontés à l'obligation de
la légalisation de la marijuana par le gouvernement fédéral actuellement.
Un
autre acteur important, Mme la Présidente, lorsqu'on veut étudier des lois puis
qu'on veut s'assurer que nos lois soient conformes, c'est le Barreau du Québec.
Dans le cas du Barreau du Québec, Mme la Présidente, il mentionne :
«Dans la perspective de la légalisation du
cannabis, il est important de déterminer un âge minimal pour la vente, l'achat,
la possession et la consommation de
cannabis. La plupart des juridictions ayant légalisé le cannabis ont arrimé
l'âge minimal avec l'âge requis pour la consommation de tabac et
d'alcool.
«[...]un
âge minimal supérieur à 18 ans est susceptible d'être contesté sur la base
d'une discrimination fondée sur l'âge, [...]en vertu de la Charte [...]
des droits et libertés de la personne [du Québec].
«[...]Le Barreau du
Québec ne se prononcera pas sur [l'âge] minimal spécifique, tout en affirmant
que :
«Le
gouvernement fédéral et les provinces ont chacun la compétence respective de
déterminer un âge minimal;
«[Que]
les provinces ont le pouvoir d'harmoniser l'âge minimal avec celui relatif à
l'alcool, soit 18 ans pour le Québec;
«Il
y a absence de données probantes [relatives] à un âge auquel la consommation de
cannabis est sécuritaire; et
«Il ne faut pas
criminaliser ou indûment pénaliser les personnes n'ayant pas atteint l'âge
minimal.»
• (16 heures) •
Mme
la Présidente, moi, je crois aussi, à la lecture de cet avis... c'est qu'il y a
aussi une question de confiance. Mme
la ministre tantôt mentionnait que son père lui disait : Ne fume pas, ce
n'est pas bon. Moi, je crois que, s'il y a une confiance qu'on fait aux jeunes, je crois qu'il y a davantage de chances
que ces jeunes acceptent cette confiance-là et se conscientisent à l'importance de respecter cette
confiance-là, et peuvent se dire : Bien, on doit aussi s'assurer de poser
des gestes plus sains et plus responsables.
Et moi, je pense que c'est aussi un message envoyé aux jeunes du Québec que le
Québec leur fait confiance dans leur
capacité d'être raisonnables, d'être plus sages, d'être sensés dans leurs
habitudes de vie et, on le sait, avec
toute la promotion des saines habitudes de vie qui se fait partout au Québec,
je crois que ça peut s'inscrire dans ce sens-là, Mme la Présidente.
Il y a aussi un
communiqué qui a été émis par l'Association pour la santé publique du Québec,
l'Association québécoise pour la promotion
de la santé des personnes utilisatrices de drogues, M. Fallu, qui est
professeur agrégé à l'École de
psychoéducation de l'Université de Montréal, qui est un spécialiste sur cette
question, l'Association des intervenants en dépendance du Québec et l'Association québécoise des centres
d'intervention en dépendance, qui mentionne, par rapport à l'âge légal à 18 ans : «L'âge d'accès légal
au cannabis ne doit pas être incohérent avec celui pour l'alcool, ni encourager
le statu quo et le marché illégal, ni être
fixé en fonction d'un supposé âge de sécurité du cannabis, mais en fonction de
l'âge auquel on est apte à prendre
des décisions éclairées.» Donc, entre autres, au Canada, ce sont les jeunes qui
consomment le plus, à raison de
20 % chez les 15-17 ans et 33 % chez les 18-24 ans. Donc, ce
33 % là, là, si on veut le réduire, bien, une façon, je pense, efficace de le faire, c'est
d'avoir un contact privilégié avec ces jeunes-là lors de l'achat de la
marijuana pour pouvoir, avec la science, avec les arguments, avec
l'information, avoir un impact sur la diminution de ce...
L'autre question, Mme la
Présidente, qu'on pourrait se poser,
c'est : Pourquoi 21 ans? Pourquoi pas 25 ans?
Parce que les spécialistes nous
disent que, jusqu'à 25 ans, le cerveau est en formation. Donc, il y a un
choix là qui est fait, de dire :
Bon, ce n'est pas 25 ans, c'est 21 ans. Moi, je crois, Mme la Présidente, que, pour ces jeunes-là, oui, les chiffres sont alarmants,
puis, on le voit, là, 33 %, c'est inquiétant, puis, on le voit, même le
20 % chez les 15-17 ans, c'est aussi inquiétant. C'est très alarmant, ces chiffres-là, mais il faut
réduire ces chiffres-là. Puis la meilleure façon qu'il n'y ait pas de risque sur le cerveau, c'est en n'en consommant
pas du tout. Malheureusement, il y a encore de la consommation de marijuana au Québec puis partout sur la
planète, Mme la Présidente, malgré tout ce qui a pu être fait. Donc, si on
veut résoudre ce problème ou le
réduire, bien, je crois qu'il faut avoir un impact, et là ça passe par la
prévention, ça passe par l'éducation, Mme la Présidente. Plus tôt qu'on
intervient, plus tôt on peut réduire les risques, Mme la Présidente.
Et,
sur cette question-là, sur l'âge, je pourrais mentionner d'autres éléments,
mais je vois que le temps file, Mme la Présidente.
J'aimerais
aborder une autre question, parce que ce n'est pas que l'âge qui est un
enjeu dans cette question-là de la légalisation
de la marijuana, Mme la Présidente. Je pourrais parler de la question
du coût, parce que l'autre aspect important,
c'est que, si le coût du marché public n'est
pas compétitif avec le marché noir, bien, tout ce que je vous ai dit, Mme la Présidente, au préalable va tomber, ne tient plus, parce que
les gens vont continuer à en acheter au marché noir. Parce que ce n'est pas parce que le gouvernement fédéral dit : Nous allons légaliser la marijuana, puis que, le
1er juillet, c'est légalisé que
le marché noir va arrêter d'en vendre. Ils vont continuer à vouloir en vendre,
mais la pression va être forte sur les
citoyens pour aller au marché public. Et la meilleure
façon d'y arriver, c'est si le prix est compétitif, Mme la Présidente. Et qui dit compétitif... on ne parle pas de faire des soldes et de la publicité pour inciter les gens à en
consommer davantage. On ne parle pas
de ça. On parle de s'assurer qu'au moins le prix soit à peu près le prix dans
le marché noir actuellement.
Et,
quand le gouvernement fédéral nous dit qu'il veut imposer une taxe d'accise sur
la marijuana, bien, que, pour tout gramme de moins de 10 $, c'est
1 $ de taxe d'accise et que, là, ce soit réparti entre le gouvernement
fédéral et le gouvernement du Québec, mais,
Mme la Présidente, le gouvernement fédéral n'a pas un sou à investir dans la
légalisation de la marijuana et ne
paiera aucune conséquence de cette dite légalisation. Donc, eux vont ramasser
0,50 $, puis le Québec va
ramasser 0,50 $, puis, la facture, c'est tout le Québec qui va l'avoir,
puis, cette facture-là, Mme la Présidente, bien, c'est le réseau de distribution et de vente, c'est les campagnes de
sensibilisation, c'est le financement des organismes de prévention, c'est des investissements davantage
dans la sécurité publique, dans les services de police. Les municipalités
auront aussi une partie de la facture à
payer, Mme la Présidente. C'est des investissements au MAPAQ, au ministère de
l'Agriculture, parce que ce sera considéré comme un produit agricole, et il
faudra le baliser, s'assurer de la qualité des produits, etc. Donc, le
MAPAQ devra aussi faire des inspections comme il le fait pour d'autres produits
agricoles.
C'est
aussi des coûts sociaux importants avec la santé et les services sociaux, oui,
parce que, on le sait, puis ça a été
dit, puis on ne doit, comme je l'ai mentionné, pas faire l'autruche, il y a des
conséquences sur la santé des gens. Mais, actuellement, le gouvernement du Québec a cette facture-là, puis cette
facture-là va demeurer, à moins qu'on ait un impact significatif pour la réduction de la consommation
de la marijuana. Puis, encore là, comme je vous ai dit, bien, la meilleure
façon d'avoir un impact sur la réduction,
c'est d'avoir le contact direct avec l'acheteur pour pouvoir l'informer et
faire l'éducation. Bien, cette facture-là, Mme la Présidente, bien,
c'est le Québec qui va l'assumer, c'est le Québec qui va l'assumer, puis le gouvernement fédéral, bien,
lui, va empocher le 0,50 $ pour la taxe d'accise, en plus de la TPS, parce
que, là-dessus, il y aura la TPS, Mme la
Présidente, contrairement à Netflix, où, là, le gouvernement fédéral ne veut
pas augmenter le prix... le coût de
la vie, donc le fardeau fiscal des contribuables canadiens, mais là, sur la
marijuana, ça, ça ne leur dérange
pas, ça fait que, ça, ils vont mettre la TPS puis ils vont mettre aussi une
taxe d'accise. Pourtant, si on veut que
le prix soit compétitif avec le marché noir, qui, lui — Mme la Présidente, je pense que vous êtes au
courant — ne
charge pas de TPS ni de TVQ, donc est
beaucoup plus compétitif... si, en plus, on y met une TPS, une TVQ puis une
taxe d'accise — puis je ne dis pas qu'il ne faut pas mettre
la TPS puis la TVQ sur cette question-là, Mme la Présidente — mais cette discussion-là, ce débat-là, bien, je crois qu'on doit être
capables de les faire, au Québec, parce que c'est nous qui vont avoir
payé la facture puis l'impact social va être à Québec et non pas au
gouvernement fédéral.
Ça
fait que moi, je crois que la ministre, dans son projet de loi, doit aussi
avoir un pan sur cette question-là pour faire en sorte qu'on puisse avoir notre mot à dire et que tous les
profits qui pourraient en découler, bien, ça vienne au Québec pour pouvoir payer cette facture-là, parce que les
finances publiques du Québec vont s'en retrouver avec un coût important,
Mme la Présidente.
Mme
la Présidente — il reste
deux minutes — je crois
que le débat sur l'âge est important, mais ce n'est pas que le seul point. Je vous ai parlé du partage des coûts,
mais, Mme la Présidente, j'aurais pu vous parler de qu'est-ce qu'on veut
comme campagnes de prévention, de sensibilisation. Moi, je crois qu'il faut que
ces campagnes-là débutent avant la légalisation
de la marijuana pour avoir un impact. On aurait pu aborder toute la question du
réseau de distribution, de vente. Nous,
on propose que ce soient la SAQ, une filiale de la SAQ mais que les lieux de
vente soient dans des lieux distincts des locaux habituels qu'on voit de
la SAQ, mais nous aurions pu faire ce débat-là aujourd'hui. Sur les questions
des commandes en ligne, est-ce qu'on est
pour ou on est contre? Sur le nombre de plants qui sont permis, nous, on parle
de deux plants par maison mais aussi
de permettre aux propriétaires d'appartement de pouvoir dire non à leurs
locataires pour la consommation à
l'intérieur mais aussi pour la production avec des plants. On aurait pu parler
de la question des taxes, est-ce
qu'on veut un monopole ou pas, comme je vous ai mentionné. L'encadrement qui est
fait pour la production, est-ce qu'on
veut que ça soit produit au Québec? Est-ce qu'on veut que les agriculteurs
puissent en produire? Est-ce qu'on veut que ce soit le gouvernement qui
le produise?
Toutes ces
questions-là, nous avons dévoilé déjà un plan sur tout cet aspect-là, Mme la
Présidente. Mais nous aurions pu faire ce débat-là ici aujourd'hui, mais, non,
on a ciblé l'âge, qui est un enjeu important. Mais, à la base, Mme la Présidente, la meilleure façon qu'il n'y
ait pas d'impact pour les gens, c'est qu'il n'y ait pas de consommation,
mais il y a une consommation. Et, toutes ces
questions-là, nous aurions pu les faire si on avait eu le temps de faire le
débat respectueusement, mais, malheureusement, Mme la Présidente, le
gouvernement fédéral nous impose ce débat-là maintenant
dans son échéancier à sa façon, et, encore une fois, on doit payer les
conséquences de ça, mais il faut qu'on se
batte pour au moins que cette facture-là ne soit pas refilée à Québec sans
aucun revenu et que le gouvernement fédéral empoche l'argent, Mme la
Présidente.
• (16 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le
député de Saint-Jean. Maintenant, je vais reconnaître la prochaine
intervenante et je cède la parole à Mme la députée de Chauveau.
Mme Véronyque Tremblay
Mme Tremblay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Qu'on soit pour ou contre la
légalisation du cannabis, ça va se faire d'ici l'été prochain comme l'a
décidé le gouvernement fédéral.
Au
Québec, notre rôle, c'est d'encadrer tout ce qui touche le cannabis en visant
la sécurité, la prévention, la santé publique.
Et, oui, c'est dangereux, la marijuana, c'est une drogue, ça, c'est un fait,
mais en même temps on ne peut pas se mettre
la tête dans le sable, ça existe. Il y a déjà des gens, des adultes, des jeunes
qui consomment, même si c'est illégal. D'ailleurs,
au Canada, ce sont les jeunes qui consomment le plus, à raison de 20 %
chez les 15-17 ans et de 33 % chez les 18-24 ans. Ce que nous
voulons, c'est informer, sensibiliser, prévenir les dangers reliés à l'usage du
cannabis.
Ce
sera un projet de loi majeur, et il faut se pencher sur plusieurs enjeux :
la production, la distribution, la vente, la possession, l'emballage, le
coût, le taux de THC peut-être aussi, la publicité, les endroits où ce sera
permis de consommer, l'âge aussi, mais c'est
un élément parmi tant d'autres, l'âge. Et, non, contrairement à ce qu'avance la
CAQ, il n'y a pas de malaise au sein de notre gouvernement, mais,
contrairement à la CAQ, dans notre équipe, on n'a pas l'intention de se faire
du capital politique avec un dossier aussi sérieux, Mme la Présidente,
contrairement à la CAQ.
Des voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Oui. M. le leader de l'opposition officielle.
M.
Caire :
Il m'apparaît que ma collègue vient de prêter des intentions. C'était assez
évident.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Je vais demander
à Mme la députée de poursuivre.
Mme Tremblay : Contrairement à la CAQ, notre gouvernement n'a pas des oeillères, nous
prenons le temps de tout analyser.
Nous n'écoutons pas uniquement les spécialistes en santé mentale, nous écoutons
tout le monde. Et on sait que le
cerveau n'est pas complètement développé avant 25 ans. On l'a entendu, ça
aussi, on le sait très bien, mais nous tenions
à avoir une opinion beaucoup plus large, et ce n'est pas pour rien que nous
prenons le temps d'étudier tous les mémoires qui ont été déposés, qu'ils
soient publics ou privés.
Je
vais vous en nommer quelques-uns : l'Association pour la santé publique du
Québec; l'Association québécoise pour
la promotion de la santé des personnes utilisatrices de drogues; Jean-Sébastien Fallu,
professeur agrégé à l'École de psychoéducation, Université de Montréal;
l'Association des intervenants en dépendance du Québec; l'Association québécoise des centres d'intervention en
dépendance. Ils recommandent un encadrement basé sur les données probantes
et l'expérience terrain. Selon eux, la
légalisation aura lieu, qu'on soit en accord ou non, et nous devons être
proactifs et efficaces en matière de
prévention et de santé publique. Dans leur cas, leurs mémoires recommandent
l'âge légal de 18 ans. L'accès légal au cannabis ne doit pas être
incohérent avec celui pour l'alcool et l'âge auquel on est apte à prendre des
décisions éclairées, toujours selon ces mémoires que nous avons reçus.
Il
y a aussi la Fédération des cégeps : «Assurer une cohérence quant à l'âge
[...] de consommation avec les autres substances
psychoactives — comme
l'alcool et le tabac. [...]Il semble d'ailleurs qu'aucune donnée probante ne
conduise à statuer sur un âge
sécuritaire de début de consommation, si ce n'est que cette initiation doit
être la plus tardive possible.» C'est
ce que soutient la Fédération des cégeps. Mais on apporte une nuance en disant
que «les statistiques démontrent que
la prévalence de l'usage du cannabis est à son paroxysme chez les
18-24 ans» et que, «pour cette raison, il apparaît contre-productif de légaliser le cannabis
récréatif et d'en interdire l'accès légal à ceux qui s'approvisionnent
actuellement le plus sur le marché
noir». Et, «partant du principe que
la société québécoise reconnaît la majorité à l'âge de
18 ans, soit le moment où la personne cesse d'être sous l'autorité
parentale et a la capacité d'exercer tous ses droits civils[...], il serait
cohérent que l'âge à partir duquel l'achat de cannabis récréatif serait permis soit le même».
C'est également ce que les experts en santé publique
considèrent comme étant la meilleure approche.
Alors, nous, nous
tenons à écouter tous les points de vue et à les analyser. C'est important.
Je vais aussi me permettre de vous lire quelques
passages du rapport sur le Forum d'experts sur l'encadrement du cannabis au Québec, que nous avons
organisé en juin dernier. Il est mentionné : «"Démoniser" la
substance et annoncer une épidémie
probable de schizophrénie n'est pas justifié à la lumière des données scientifiques
actuelles. Banaliser les effets
négatifs possibles de cette substance et nier l'existence de l'association entre la consommation de cannabis et le risque accru de
développer une maladie psychotique est tout aussi inadéquat.» On ajoute un peu
plus loin : «...il est nécessaire de bien expliquer les motifs derrière la
légalisation du cannabis. Il est important de faire savoir que cette substance peut à la fois avoir des effets
"positifs" ou agréables, mais aussi nocifs dans certains contextes.
Des notions de base sur les
cannabinoïdes, notamment le THC et le CBD, devraient être accessibles et
communiquées.» On dit également que «le cannabis n'est pas légalisé parce qu'il est bon pour la santé, mais parce
que sa prohibition engendre
des conséquences négatives bien plus graves tant pour les individus que pour la
société» et on dit que «la légalisation du cannabis
doit être accompagnée de messages clairs, univoques et nuancés». Alors, on voit
très bien dans ce
cas-ci que tout n'est pas tout blanc et tout n'est pas tout noir.
Notre
gouvernement fait les choses dans les règles de l'art, Mme la Présidente, et
notre but n'est pas d'agir de façon
précipitée, loin de là. Nous regardons également ce qui se fait ailleurs au
pays et nous avons également consulté la population dans différentes régions du Québec parce que nous voulions
avoir le point de vue dans l'ensemble du Québec. Donc, au total, 128 mémoires ont été déposés par les organisations, 570
citoyens se sont inscrits aux consultations publiques. Les Québécois ont été invités à répondre à une
consultation en ligne entre le 21 août et le 12 septembre dernier à laquelle
plus de 12 500 personnes ont répondu.
Ce n'est pas rien. On les écoute aussi, ces gens-là. Nous avons aussi consulté
les municipalités,
le Secrétariat de la jeunesse également, qui a tenu des consultations auprès
des jeunes le 26 septembre dernier, et il y a aussi eu une consultation
auprès des communautés autochtones le 29 septembre dernier.
Donc,
Mme la Présidente, à la lumière de toutes ces informations-là, un projet de
loi, c'est un tout, et il n'est pas question
de l'égrener morceau par morceau sur la place publique uniquement pour faire
plaisir à la CAQ. Nous voulons faire les choses correctement, comme nous
avons l'habitude de les faire, et les faire dans les règles de l'art. Notre
position sur l'âge sera connue uniquement lorsque Mme la ministre présentera
l'ensemble de son projet de loi. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la
députée de Chauveau.
Maintenant, je vais céder la parole à Mme la députée de Repentigny et tout en vous indiquant que votre formation politique dispose d'un temps de parole de 6 min 15 s.
Mme Lise Lavallée
Mme
Lavallée : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'ai bien écouté les propos de la ministre de la Santé publique et les propos que vient de tenir la députée de
Chauveau. Je comprends que le projet de loi qui sera déposé sera un projet
de loi majeur, qu'il doit être traité de
façon prudente et rigoureuse, ça, je
l'ai bien compris et je suis en accord avec ça, et on ne peut faire de ce dossier un dossier de politique
partisane. Je pense que ce n'est pas ce qu'on a fait jusqu'à maintenant, on a été très sérieux dans notre démarche.
La
ministre de la Santé publique a dit
qu'elle ne dévoilera pas le projet de loi à la petite pièce — confirmé par la députée de
Chauveau — et
qu'un gouvernement responsable agit sur l'ensemble de l'oeuvre. On a très bien
compris. Le problème que j'ai avec ce qui
vient d'être dit, puis je ne doute pas du sérieux de la ministre, c'est avec
les propos du premier ministre la
semaine dernière. Je ne sais pas comment elle va ramasser, rattraper les propos
qu'a tenus le premier ministre, alors
qu'elle-même ne veut pas dévoiler l'âge auquel les jeunes vont pouvoir
commencer à consommer le cannabis. Est-ce
qu'elle va aller à l'encontre de ce que le premier ministre a avancé ou elle va
aller à l'encontre de la position de son
ministre de la Santé? Parce qu'on sent qu'il y a quand même deux positions très
tranchées à l'intérieur du caucus.
• (16 h 20) •
Là, il y a des
positions qui ont été sorties, puis ce n'est pas nous autres qui les avons
sorties à leur niveau. Est-ce que je dois comprendre qu'elle aura, malgré la sortie
du premier ministre, toute la latitude pour légiférer en tenant
compte des positions contraires à l'intérieur de son caucus? Je rappelle que le premier ministre, la semaine
dernière, s'est positionné pour l'âge de 18 ans.
La
semaine dernière, le premier ministre s'est amusé, s'est vraiment amusé — il
a trouvé ça drôle — dans
cette Chambre en lançant un «Allo, la
Terre!» au chef du deuxième groupe
d'opposition, qui lui demandait
d'établir l'âge de consommation à 21
ans. Quand j'ai entendu ces propos-là, ça m'a rappelé une expression qu'on
utilise beaucoup dans notre jargon juridique — puis
je sais qu'il y a beaucoup de juristes qui siègent ici, à l'Assemblée nationale — c'est
l'expression «d'agir en bon père de
famille». En droit, un bon père de famille, c'est une personne normalement prudente, attentive,
soigneuse et consciencieuse. Agir en bon père de famille, c'est d'agir avec
prudence, de façon attentive, soigneuse et de façon consciencieuse. Et, à mon avis, les propos du premier ministre ont failli au respect de ce que doit être un premier ministre, être un bon père de famille et tenir des propos
en bon père de famille, dans un dossier aussi sensible que la position
sur le cannabis.
Avec
de tels propos et en rejetant la proposition du deuxième groupe d'opposition,
le premier ministre a indiqué à la communauté médicale que la science n'était pas importante
à ses yeux, alors qu'il est lui-même médecin et que son ministre de la Santé est en faveur d'une légalisation à 21 ans. Les propos des différentes
associations médicales étaient, lorsqu'on a sorti notre position, suffisamment préoccupants pour qu'on détermine immédiatement
notre position, donc l'âge de 21 ans. C'est une proposition responsable.
Le
rôle d'un parent avec son enfant, c'est d'encadrer, d'établir des règles, de la
cohérence à l'intérieur de la maison mais
surtout de lui expliquer pourquoi on établit ces règles-là. Pour moi, le rôle
d'un parlementaire et surtout d'un premier ministre, c'est aussi ça, c'est de légiférer, d'encadrer et d'expliquer,
même si on sait que des jeunes vont fumer avant 18. Il y a des enfants qui prennent de la boisson
avant 18 ans, ce n'est pas légal. Il y a des jeunes qui fument avant 18 ans, ce
n'est pas légal. Donc, on a le droit, nous,
comme gouvernement responsable, de légiférer, de dire : La consommation va
être à 21 ans, mais d'agir de façon
responsable pour expliquer pourquoi notre position est 21 ans, pourquoi c'est
dangereux, parce qu'il y a des
positions de différents groupes médicaux qui ont établi la raison de ces
dangers-là. Donc, à ce moment-là, je ne comprends pas pourquoi on
banalise notre position, qui, à mon sens, est très sérieuse.
La motion dit : «Qu'elle rappelle
l'importance de ne pas banaliser la consommation [du] cannabis et d'envoyer
un message clair quant à ses risques...»
C'est notre position, et ça aurait dû être la position du premier ministre la
semaine passée au lieu de nous dire : «Allo, la Terre!»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Repentigny.
Je vais maintenant céder la
parole à M. le député de D'Arcy-McGee.
M. David Birnbaum
M.
Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'intervenir sur la motion du
député de Borduas sur l'âge légal de la consommation de cannabis.
Je nous invite à se rappeler, en quelque
part, à l'ordre, de comprendre
ce qui est devant nous.
Dans
un premier temps, on va se rappeler que c'est le gouvernement fédéral, qui est
responsable pour le Code criminel,
qui s'est tranché avec un projet de
loi maintenant dûment adopté
et un échéancier, et je crois qu'on va en convenir, que, dans ces deux
instances-là, ce n'est pas nécessairement deux actes qui font l'unanimité ici,
au Québec.
Dans un
premier temps, on est très conscients que le fardeau d'implanter un tel projet
de loi, en gros, reste sur nos épaules.
Et j'entends souvent qu'on utilise le mot «banaliser». Écoutez, est-ce qu'on
peut s'entendre, comme parlementaires, qu'on
parle de nos enfants, de leur santé, de leur sécurité et qu'on est en train, en
bonne foi, de chercher les modalités pour
encadrer cette légalisation, qui est un fait accompli, qu'on en train de
chercher à encadrer cette légalisation de façon responsable, réaliste,
transparente et cohérente?
En vertu du
projet de loi fédéral, de la loi maintenant, c'est le gouvernement fédéral qui
va être responsable de créer et de
maintenir un cadre national rigoureux en déterminant la réglementation, la
protection, l'adoption de normes de santé
et de sécurité et l'établissement d'interdiction criminelle. En tout ce qui a
trait à comment on va encadrer ça, comment on va assurer la santé, la sécurité de nos jeunes, il va revenir à nous
d'encadrer tout ça. Et, qu'on se comprenne, ce qui est devant nous, c'est une
réalité déplaisante, mais nous sommes maintenant, comme société, devant une
situation où nous avons, on va le dire comme il faut, à faire concurrence avec
le marché noir. C'est peut-être déplaisant. Voilà une des réalités devant nous maintenant. Si on veut
justement, et à juste titre, protéger nos jeunes, encadrer une réalité qui est
que la consommation existe, comment, dans tout ça, on peut justement ne pas
banaliser sa consommation, parce qu'on a des experts devant nous qui comprennent que l'utilisation habituelle, de
façon nonchalante, quand c'est fourni par le marché noir, entraîne
toutes sortes de dangers profonds surtout pour les plus jeunes?
Donc, ce que ça nous interpelle de faire
ensemble, c'est d'analyser comme il faut tous les enjeux et, de façon responsable, de trancher sur plusieurs questions,
dont une seule, une seule, c'est l'âge. Alors, sans porter d'intentions,
je connais comme plusieurs le député de
Borduas pour une certaine rigueur, cohérence dans ses interventions, et à juste
titre. Avec respect, je l'invite d'imposer
ces mêmes qualités dans le débat actuel. Comment on peut trancher sur une seule
question qui est interreliée avec toutes les autres? Dans un premier temps,
est-ce qu'on sait comment on va régler la distribution
de tout ça? Dans un deuxième temps, est-ce qu'on a vraiment, vraiment considéré
et complété — j'aurais
besoin des lunettes plus fortes que ça — complété notre analyse des gestes qu'on va
prendre pour prévenir l'utilisation irresponsable? Est-ce qu'on a fait
le tour? On est en train de le faire, comme gouvernement. La ministre continue
de s'imposer de façon admirable pour nous
assurer qu'on a toute l'évidence devant nous sur ces questions-là : la
consommation; la prévention; le
renforcement, quand il y a lieu, de nos forces policières pour continuer à
s'imposer selon les nouvelles règles
du jeu qui vont être devant nous; l'éducation. Est-ce que les intervenants au
sein de nos écoles, au sein de nos écoles primaires même, au sein des regroupements communautaires vont être
équipés pour s'adresser aux nouvelles réalités?
• (16 h 30) •
Tous ces
enjeux, tous ces facteurs sont interreliés, et de suggérer qu'on peut à la
pièce parler de l'âge et de trancher en isolation, c'est d'induire la
population... et c'est de nous empêcher d'analyser l'ensemble des facteurs.
Écoutez, nous
avons ensemble... Et voilà un des buts de notre consultation, de se soucier sur
les meilleures pratiques, oui, sur
les connaissances scientifiques, mais le tout équilibré. Les connaissances
scientifiques, comme plusieurs auraient mentionné, il y a des expertises qui suggèrent que le développement sain
du cerveau continue jusqu'à l'âge de 25. Bien, voilà, c'est une chose qu'on ne peut pas entendre et intégrer en
isolation. Il n'y a pas de réponse directe, avec ces constats-là, à la question : À quel âge est-ce qu'on
légifère?, il y a toutes sortes d'autres enjeux, parce qu'au bout de la ligne
ce qui compte, c'est qu'on ait le courage de se confronter aux réalités
des fois non plaisantes.
Est-ce
qu'on est contents de savoir qu'il y a un bon pourcentage de la population
entre l'âge de 13 à 18 qui consomme, plusieurs
de façon régulière? C'est illégal, évidemment, on sait que c'est illégal, mais
ça se fait, ça se fait. Est-ce qu'on est contents avec la réalité qu'il y a des jeunes et des moins jeunes qui se
procurent actuellement du cannabis contaminé, ce qui fait en sorte qu'on se trouve devant des crises énormes? Est-ce que
ça se peut que des adultes d'un âge mûr risquent de décider de commencer à consommer une fois que c'est légal? Ça se
peut. Est-ce que les adolescents et les jeunes adultes, disons, entre... Bon, pour fins de nos
discussions, est-ce qu'on peut se dire que les jeunes de 18 à 21... Voilà un
des enjeux, et moi, j'insiste qu'on ne le discute pas en isolation. Mais
est-ce qu'on sait, est-ce qu'on va examiner l'impact sur leur comportement — c'est ça qui compte — sur leur comportement suite à une décision
éclairée qu'on va prendre ensemble sur l'âge légal?
Voilà les
questions. De suggérer qu'on peut prendre une petite question en isolation,
c'est, avec tout respect, de faire fi
un petit peu à nos responsabilités collectives comme parlementaires, de
suggérer qu'ensemble... Oui, oui, oui, il y a un projet de loi qui s'en vient. Oui, il y avait des consultations
impliquant des milliers de Québécois et Québécoises. Oui, il y a des experts qui se sont prononcés. Avant de
se mettre, comme parlementaires, devant un projet de loi qui va se pencher
sur la totalité des questions qui nous
préoccupent, bien, on va scinder une petite affaire, qui risque peut-être, en
quelque part, de plaire à une cible
de la population, qui risque peut-être de faire quelques manchettes ici et là.
Et, comme je dis, je ne suggère
pas... je ne suis pas en train de faire un commentaire sur les intentions de
qui que ce soit, mais voilà ce qui risque d'être les faits.
Nous avons
collectivement, peu importent nos perspectives là-dessus, la responsabilité...
Avec toutes les différences musclées
qu'on va avoir, nous avons ensemble, comme parlementaires, à montrer un exemple
au public que ce débat, sur une
question très, très sérieuse, dont nous n'avons pas la marge de manoeuvre
totale, on va l'admettre — le fédéral, c'est leur
juridiction, le Code criminel — nous met devant deux faits accomplis qui
sont très difficiles, comme j'ai dit. Dans un premier temps, c'est
dorénavant légal. Deuxièmement, on est devant un échéancier très difficile.
Maintenant,
ensemble, ensemble, comment on va agir respectueusement, responsablement
ensemble? Et je vous soumets que les consultations qui ont déjà eu
lieu étaient exhaustives et rigoureuses, je n'ai pas à vous rappeler que le
processus de... le cheminement d'un projet de loi va être à la fois rigoureux
et sérieux aussi, ce qui nous interpellerait à entendre d'autre monde, oui, sur la question
de l'âge, sur la question de consommation, sur la question de lieu de vente, sur la question
de comment on va continuer à former et appuyer nos forces policières dans leurs
actions, qui vont en quelque part devenir davantage importantes. Je
comprends qu'ils n'auront plus à renforcer l'illégalité mur à mur du cannabis;
en quelque part, leur job va être plus difficile.
Nous avons à
nous pencher ensemble sur tous ces genres de questions.
Donc, je nous invite, comme parlementaires responsables,
de comprendre qu'il y a plusieurs étapes devant nous, qu'on sait déjà
qu'elles vont être offertes à nous sur une base très responsable et rigoureuse, dû aux actions et aux interventions de la ministre et de son ministère, donc on va avoir
pleinement l'opportunité de nous adresser à
la question de l'âge ainsi que toutes les autres questions,
de façon responsable et rigoureuse.
Et à la fois on aura aidé le public, les médias à comprendre qu'on a évacué les
grandes questions de façon cohérente, sérieuse et
responsable.
Alors, pour toutes ces raisons-là, je nous
invite à voter contre la motion. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, M. le
député de... Je vous remercie de votre intervention. Je
cède maintenant la parole, pour la
poursuite du débat sur cette même motion, au député de Maskinongé.
M. le député, à vous la parole.
M. Marc H. Plante
M. Plante : Bien, merci
beaucoup, M. le Président. Écoutez, M. le
Président, aujourd'hui, ce n'est pas avec joie que je prends la parole en cette Chambre
parce qu'on va parler d'un sujet très, très sensible dans la population, très sensible, je suis sûr, pour vous, je suis sûr,
pour l'ensemble des collègues ici. Et depuis tantôt j'entends les mots
«banaliser», j'entends les
mots : Il faut prendre ça au sérieux, mais en même temps on essaie peut-être
d'en faire un enjeu politique, et je
trouve ça un peu décevant, M. le
Président, parce que
c'est un enjeu qui est tellement important. Ni vous ni moi n'avons choisi de discuter de cet
enjeu à ce moment-là, ni vous ni moi n'avons été consultés avant le
dépôt du projet de loi fédéral. Et on rappelle qu'on parle aujourd'hui
de cannabis, en cette Chambre, suite à la décision du gouvernement fédéral de légaliser le cannabis. Voici donc la première
raison. M. le Président, je vous dirai aussi à quel point c'est important
d'en faire un enjeu global, un enjeu global qui doit être traité de façon
rigoureuse, cohérente et intégrée dans tout l'ensemble du processus gouvernemental.
Je vous
dirai, M. le Président, à quel point je suis surtout fier, fier d'avoir
eu une collègue qui a pris la balle au bond et qui a travaillé de façon sérieuse. Et je
vais vous revenir sur des éléments qu'elle a dits, mais juste avant
j'aimerais... pendant que mes collègues
sont encore ici, en cette Chambre, j'aimerais leur montrer... J'ai eu la chance
de mettre la main sur les cahiers de
notes de la ministre durant la consultation publique. Vous
savez, quand on prend un dossier au sérieux, quand on prend un dossier à coeur et qu'on fait le tour du Québec,
c'est important d'écouter les gens, M. le Président. Souvent, on va parler de
cynisme en politique puis on va dire : Bien, les gens ne
s'intéressent pas à la politique parce
que de toute façon, ils vont dire,
ce qu'on dit, bien, vous ne nous écouterez pas, mais, M. le Président, ce qu'on fait, nous, de notre
côté de la Chambre, ce que Mme la
ministre de la Protection de la jeunesse, de la Réadaptation et de la Santé publique... Il est très long, son titre. On va
dire Mme la ministre de la Santé publique pour aujourd'hui, parce que, je
pense, c'est surtout de santé
publique qu'on parle, qui est un enjeu important, aujourd'hui. Mais elle a
travaillé très, très fort, elle a écouté la population et elle veut
s'assurer que tout le monde est entendu au même pied d'égalité. Puis, je vous dirais, M. le Président, la chance qu'on a, au
Québec, qu'on soit avocat, médecin, notaire, chauffeur d'autobus, chauffeur
de taxi ou simple citoyen, ce qui est
important, c'est que notre gouvernement nous écoute de la même façon, peu
importe le statut social ou peu importe qui nous représentons.
Ce qui est
important, M. le Président, c'est de travailler aussi en cohérence avec
l'ensemble des organismes, et tout ça. La ministre tantôt vous a dit que, dès
le départ, ils ont mis un comité interministériel en place, où de nombreux
ministères travaillent déjà d'arrache-pied, travaillent à voir, justement, M.
le Président, pour avoir une cohérence gouvernementale et avoir un projet de
loi qui se tient.
• (16 h 40) •
Pourquoi qu'on fait ça, M. le Président? Bien, bien au
contraire, on ne veut pas banaliser. On est loin de vouloir banaliser le cannabis puisque, vous
comme moi, on ne connaît peut-être pas ça ou sûrement pas ça, M. le Président, mais on sait très, très
bien, on en a entendu parler, on sait que ça a des effets néfastes, oui, pour
nos jeunes, oui, pour les gens qui en
consomment, et on veut surtout être sûrs d'avoir un projet de loi, oui, qui va encadrer, mais qui va permettre surtout...
Tantôt, on
parlait de donner de l'information, la députée de Repentigny nous parlait d'agir
en bon père de famille. Moi, je vais
vous dire, M. le Président, on veut agir en bon père de famille et on veut
travailler. Mais je vais vous donner un exemple de ma vie personnelle à moi. Ma
mère a toujours eu peur... Puis je pense que j'ai eu des bons parents et que
j'ai été bien élevé quand même, dans la vie,
avec beaucoup de respect, et surtout que les gens, je pense, dans cette Chambre
doivent penser tous la même chose, beaucoup
de respect et beaucoup de cohérence. Elle n'a jamais voulu que je me casse
un membre puis elle a toujours fait
attention, elle disait : Quand tu vas en vélo, fais attention, sois
prudent; ne va pas vite, ne traverse
pas la rue. Mais un après-midi, M. le Président, malgré toute cette bonne
volonté, toute cette éducation, tous les bons conseils que ma mère m'avait donnés, à six ans, j'ai parti avec mon
vélo — et, je
vais vous avouer, je ne suis pas très
sportif, ça paraît maintenant physiquement, mais à cette époque j'étais
beaucoup plus mince — j'ai
traversé la rue, j'ai manqué la
chaîne du trottoir et je me suis cassé un bras. Est-ce que c'est de la faute
de mes parents, M. le Président? Moi,
je vous dirais que non. Ils m'ont donné tous les conseils, ils m'ont donné tout
l'encadrement disponible. Ils m'ont surtout
donné toutes les préventions, ils m'ont toujours dit : Si tu traverses la
rue avec ton vélo, c'est dangereux, tu peux te faire frapper et tu peux
avoir un accident. Malheureusement, ça m'est arrivé, M. le Président.
J'écoutais la députée de Repentigny,
tantôt, qui parlait des propos et... qui mettait en parallèle les propos de
notre premier ministre et du ministre
de la Santé. Je vais faire la même chose et je vais mettre en parallèle les
propos du député de Borduas et du
député de Saint-Jean, qui ont parlé pendant 20 minutes minimum chacun
tantôt et qui ont exposé chacun à
leur façon deux positions. Le député de Saint-Jean nous a expliqué pourquoi,
comme bon gouvernement, comme bon père
de famille, on devrait mettre la légifération à 18 ans, pourquoi, comme
gouvernement, on ne devrait pas être inconséquent avec l'âge de prendre de la boisson, l'âge de
voter ou l'âge de fumer — malheureusement, M. le Président, souvent ceux qui savent que j'ai un défaut, je suis encore un
fumeur de cigarettes — et, je vous dirais, il ne faut pas être incohérent, et le député de Saint-Jean a fait une très belle
exposition, tantôt, en montrant justement que, si on est inconséquent avec
toute la loi qui encadre déjà l'âge de la
majorité à 18 ans... que ça aurait des impacts négatifs. D'un autre côté, j'ai
écouté le député de Borduas, qui avec
éloquence, comme toujours, nous a parlé du pourquoi que, si on ne mettait pas
l'âge de 21 ans... Qui est un
âge un peu théorique, je vous dirais, M. le Président, parce que toute la
science s'entend que c'est 25 ans, l'âge de l'atteinte de la maturité du cerveau, mais ils se sont tous
tenus à 21 ans pour dire : Bien, il faut mettre un âge, puis on va dire 21. Mais j'ai écouté les deux et
je le mets en parallèle, et, je vais vous dire, il n'y en a aucun des deux qui
a tort, M. le Président, il n'y en a aucun
des deux qui a tort. Mais, peu importe la position qu'on prend, ce n'est pas
l'âge qui va faire qu'on va
banaliser, ce n'est pas l'âge, M. le Président, qui va faire que les jeunes
vont consommer plus ou moins et ce n'est pas l'âge, M. le Président, qui
va dire aux jeunes que le produit, il n'est pas bon.
M.
le Président, ce qui est important et ce qui est important pour notre
gouvernement, c'est de présenter un projet de loi cohérent dans son ensemble. Mon collègue de D'Arcy-McGee, tantôt,
vous parlait de la sécurité, effectivement, parce qu'un projet de loi qui va parler du cannabis doit parler de la
sécurité. On ne peut pas dire qu'on est pour la sécurité des enfants, de nos
jeunes quand on sait très, très bien, présentement... Parce que dire qu'il n'y
en aurait pas, M. le Président, qui
en consomment présentement, on n'aurait pas de centre de désintoxication, ça
fait qu'il ne faut pas se fermer les
yeux ou se mettre la tête dans le sable. Donc, de dire : On veut la
sécurité de nos jeunes, la sécurité de nos enfants, la sécurité de la population, totalement d'accord
avec ça. Et je vais vous dire un scoop, M. le Président, je suis convaincu
que l'ensemble des députés de ce côté-ci de
la Chambre sont d'accord avec ça et l'entièreté des députés de l'autre côté de
la Chambre aussi sont d'accord qu'on veut la sécurité de la population.
Mais on ne peut pas parler de prévention, de sécurité quand présentement on
sait que nos jeunes font affaire avec le crime organisé, quand présentement on
sait, M. le Président, que nos jeunes
prennent n'importe quoi, avec une qualité que je ne vous dirai pas, parce que
je ne connais pas ça, mais avec une
qualité un peu n'importe comment, et en plus sont exposés, M. le Président, à
d'autres types de drogues qui sont peut-être beaucoup plus dangereuses
qu'on peut en avoir connaissance.
Moi, M. le Président,
je connais des gens, j'ai eu des amis qui ont eu des problèmes de consommation;
pas parce que ce n'étaient pas des bons enfants, pas parce que les gens n'avaient
pas voulu bien les encadrer, bien leur dire, mais ils ont fait leurs expériences,
qui se sont avérées pas mal malheureuses à la fin de...
Par
contre, M. le Président, la seule différence entre vouloir, justement, encadrer
le cannabis dans un projet de loi
global et dire : On va s'arrêter juste sur un point, c'est la cohérence et
la rigueur, M. le Président. De notre côté, on croit qu'il est essentiel d'être rigoureux dans le processus et qu'il
est essentiel de ne pas politiser ce débat-là. Parce que, oui, M. le Président, on sait, la population est
polarisée, 18 ans, 21 ans, et il y en a même qui vont vous dire — et je fais partie peut-être de ceux-là : Bien, jamais, ce serait la meilleure
solution. Effectivement, M. le Président, mais on est mis devant un fait
accompli. On doit absolument en discuter de façon rigoureuse et cohérente.
Mais je veux juste
dire à mes collègues que, peu importe leur position sur l'âge de consommation,
ils doivent attendre de voir le projet de
loi. Et pourquoi je suis confiant, moi, que la ministre va déposer un projet de
loi qui est rigoureux, cohérent et
que dans son ensemble il correspond à toute la population qu'elle a rencontrée,
tous les groupes qui ont été rencontrés?
Parce que, M. le Président, Mme la ministre, c'est une mère, c'est une
grand-mère, c'est une citoyenne du Québec,
c'est une collègue avec beaucoup d'émotions et beaucoup de rigueur, c'est une
collègue qui en jase avec ses autres collègues,
qui est très, très ouverte et qui veut absolument, M. le Président, avoir un
projet de loi le plus encadrant possible et avoir un projet de loi qui
ne laisse pas de craque de plancher.
Une
craque de plancher, ça, M. le Président, vous savez, dans certaines lois, ça
arrive à tous les gouvernements, on
fait une loi puis on oublie quelque chose. Dans un projet de loi où on ne veut
pas banaliser la consommation, où ne veut pas, demain matin, s'apercevoir que... Parce que j'étais là, à la
consultation publique à Trois-Rivières, quand la ministre est venue, et j'ai entendu des choses, en
disant : Bien là, on va-tu pouvoir fumer ça, là, comme les fumeurs, à côté
du restaurant? Ou il y en a d'autres
qui disaient : Non, non, mais on va fumer ça juste dans nos appartements.
Puis il y en a d'autres qui nous ont
dit : Oui, mais attends un peu, là, si tu as des mineurs, là, toi, tu as
des enfants, tu ne peux pas fumer devant tes enfants. Et ça, M. le Président, ça doit faire partie du tout, parce que
dire 18 ou 21, ça ne dit rien. Ça ne dit pas qu'on va faire de la prévention, ça ne dit pas qu'on va
maximiser la sécurité puis ça ne dit pas non plus où, quand et comment les gens
pourront consommer.
Par
contre, ce qu'il est important de dire, c'est qu'il n'y a pas personne ici,
dans cette Chambre, qui veut banaliser la
consommation de cannabis, il n'y a pas personne dans cette Chambre qui n'a pas
à coeur notre relève de demain. Et moi, M. le Président, j'invite mes collègues à la prudence, à la prudence sur
un sujet qui va réformer la façon d'agir au Québec, à la prudence sur un sujet qui va amener le Québec
dans une position où on ne connaît pas, présentement, et on ne sait pas. Et j'invite les collègues de tous les partis
ici, dans cette Chambre, les députés indépendants, à travailler en collaboration
avec le gouvernement sérieusement justement,
M. le Président, pour nos enfants, pour nos petits-enfants mais pour la
sécurité de notre province qu'on aime tant, pour le Québec. Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de
Maskinongé. Et nous en sommes à la
réplique, à moins que vous vouliez utiliser... Alors, M. le député de Borduas,
pour votre réplique de 10 minutes. À vous la parole.
M. Simon Jolin-Barrette
(réplique)
M. Jolin-Barrette :
Merci, M. le Président. Écoutez, j'ai entendu les arguments de mes collègues de
la partie gouvernementale, notamment du
député de D'Arcy-McGee, qui nous dit : Pourquoi se concentrer uniquement
sur l'âge? Bien, écoutez, peut-être
qu'on n'a pas visionné l'annonce qu'on a faite il y a déjà trois semaines de ça
avec un plan concret, donc je vais
être heureux de l'offrir au député de D'Arcy-McGee, sur les différents aspects,
la vente, l'encadrement, les points
de vente, la culture à domicile, la taxation au niveau du champ fiscal aussi.
D'ailleurs, j'ai posé quelques questions en Chambre au cours des dernières semaines, notamment à la ministre,
pour s'assurer que tous les revenus générés par la vente de cannabis
soient à Québec et non pas à Ottawa, parce que toutes les dépenses vont être à
Québec et non pas à Ottawa, et j'espère,
là-dessus, que les collègues de la partie gouvernementale sont d'accord avec
nous. Et, vous savez, notre plan, M. le Président, bien, il vise à ne pas
banaliser la substance, à ne pas banaliser la consommation de cannabis. Et pourquoi on choisit l'âge de... L'âge pour
acheter du cannabis à 21 ans, pourquoi on le propose au gouvernement?
Parce qu'on considère que l'État, le gouvernement ne doit pas favoriser
la consommation de cannabis. On doit envoyer un message, un message clair.
• (16 h 50) •
M.
le Président, vous savez, nous, à la CAQ, on est allés aux consultations, on a
rencontré les gens, cet été, on a fait
les démarches et on est arrivés avec un plan concret, un plan responsable, un
plan qui est restrictif relativement à la distribution de cannabis sur le territoire québécois. Et on s'est mis à
l'oeuvre, on a présenté un plan qui est responsable, et on l'a fait rapidement, M. le Président, parce
qu'on considère que, dans le laps de temps qu'on a, bien, il faut se dépêcher
le plus rapidement possible.
L'Ontario,
notre province voisine, elle, a déjà déposé son plan il y a plus d'une semaine,
M. le Président, ils ont fait leur lit, ils ont choisi. J'entends la
ministre nous dire : Écoutez, on n'a pas encore pris nos décisions. Bien,
il est temps qu'ils prennent leurs
décisions, il est temps qu'ils prennent leurs responsabilités, M. le Président,
parce que ça urge.
Mais
aujourd'hui le débat de la motion, le débat de la motion, c'est sur l'âge,
parce que ça, c'est une des variables importantes
que nous allons devoir traiter. L'Ontario s'est prononcée sur son âge, sur son
réseau de distribution. Nous, on a
questionné le premier ministre, le chef du deuxième groupe d'opposition a
questionné le premier ministre à l'effet... est-ce qu'il était d'accord pour fixer l'âge à
21 ans. Il n'a pas répondu concrètement, mais on comprend de ses propos
qu'il veut aller vers l'âge de
18 ans. Nous déplorons cette approche et nous trouvons qu'elle est
irresponsable pour assurer la santé des jeunes Québécois et leur
sécurité physique également.
Vous savez, les
collègues de la partie gouvernementale, tout à l'heure, ont évoqué une litanie
de groupes qui militent en faveur de l'âge
de 18 ans, puis c'est vrai, je les ai entendus également, ces groupes-là.
Il y a plusieurs raisons qui les motivent pour dire : Écoutez, nous, on
privilégie l'âge de 18 ans. Il y a des arguments valables, d'autres
moins valables. Je les respecte.
Par contre, vous avez
d'autres groupes, dont ceux que je vous ai cités tout à l'heure, les
psychiatres, les urgentologues, l'Association médicale canadienne,
l'association médicale québécoise, la Fédération des médecins spécialistes, qui regroupent la majorité des
médecins au Québec, ceux qui travaillent dans les hôpitaux, ceux qui
travaillent dans les cliniques, ceux
qui travaillent au CLSC, ceux qui travaillent dans les cliniques de dépendance,
qui voient les patients et qui
exercent leur jugement clinique... Parce que ce n'est pas rien, M. le
Président. On s'est dotés, là, ici, à l'Assemblée nationale, là, d'une loi médicale, d'un Code des
professions qui dit que les gens qui peuvent exercer la médecine doivent
faire de longues études, quatre ans, huit ans
d'université. Le ministre de la Santé et le premier ministre sont passés par
là. On leur donne la possibilité de
prescrire des médicaments, prescrire des médicaments pour soigner les gens,
pour s'assurer que la population
québécoise soit bien lorsqu'ils sont malades. Et ce que ces individus-là nous
disent, ils nous disent : Écoutez,
attention, il y a un danger; le choix que vous allez faire, là, il est
important. La Fédération des médecins spécialistes, l'Association des médecins psychiatres prennent de
leurs ressources pour lever le drapeau blanc, dire : Allo! Attention,
il y a des conséquences à légaliser le
cannabis à l'âge de 18 ans. Vous devriez le fixer à 21 ans, parce que
la science nous indique que, s'il y a
une consommation entre 18 et 21 ans, ça a des impacts sur le développement
du cerveau, M. le Président.
Et
là ce qu'on est en train de faire, du côté du gouvernement, on est en train de
dire : Bien, écoutez, on n'a pas déposé notre projet de loi, on ne vous le
dira pas, ce qu'il y a dedans. Je ne demande pas aujourd'hui à la ministre
de nous dire les menus détails du projet de
loi. Je ne lui demande même pas de me parler du réseau de distribution, ou s'il
y a de la culture à domicile, ou si
elle va aller chercher les taxes et les impôts à Ottawa, s'ils vont se battre
pour ça. Je ne lui demande pas de
nous parler de la concentration de THC ou de cannabinoïdes à l'intérieur du
produit, ce n'est pas ça que je lui
demande aujourd'hui. Je lui demande une question plus fondamentale, une
question de société : À quel âge allez-vous fixer le fait de pouvoir acheter du cannabis? Est-ce que vous allez
faire le choix responsable de fixer l'âge à 21 ans parce que la science
nous dit qu'il y a des conséquences sur le développement du cerveau des jeunes,
sur la santé mentale des jeunes?
Moi,
M. le Président, là, je vais être très mal à l'aise s'il y a seulement un jeune
au Québec, dû à la consommation de
cannabis précoce, qui développe une maladie mentale ou qui se retrouve en
situation de psychose toxique. J'entends la ministre me dire :
C'est déjà le cas. Oui, c'est un produit qui est illégal, M. le Président, mais
vous savez quoi? Et je l'invite à aller dans
les écoles secondaires. Les jeunes de 12, 13, 14, 15, 16 ans,
17 ans... Que la ministre vienne à la Polybel, à Beloeil, qu'elle vienne à l'école secondaire
Ozias-Leduc ou au collège Saint-Hilaire, des écoles dans mon comté. Il y a
des jeunes qui sont aux prises avec des
dépendances, avec des difficultés. Ce qu'il faut faire, c'est travailler avec
eux, leur expliquer les conséquences
en matière de consommation, en matière de prévention. Mais, si la ministre
pense qu'il n'y aura pas de consommation, elle fait erreur.
M. le Président, il y
a une chose qui est claire...
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Adressez-vous à la présidence, ça va vous aider.
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
S'il vous plaît! Un instant!
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Non, non, je sais, je sais. Je le sais, c'est ce que je viens de dire.
Adressez-vous davantage à la présidence, ça devrait aller mieux. À vous.
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, les psychiatres nous ont dit : Le fait de consommer du cannabis,
lorsque vous êtes à risque de
développer une psychose, le fait de consommer, ça devance la première psychose
de deux ans et sept mois. Ça veut
dire que, si vous avez une prédisposition à faire une psychose, à avoir un
trouble mental, bien, le fait de consommer du cannabis, ça va le devancer. Alors, si le gouvernement libéral dit : Nous, on légalise à 18 ans, bien, il condamne
ces jeunes-là qui ont des
prédispositions à faire une psychose à ce qu'elle soit devancée, cette
psychose-là, et l'ensemble des psychiatres vous diront, l'ensemble
des psychiatres vous diront, M. le Président, qu'il est préférable dans tous
les cas de retarder cet événement
malheureux. Et ça, c'est la responsabilité de l'État, c'est la responsabilité du ministre de la Santé,
c'est la responsabilité de la ministre
des Saines habitudes de vie, de
prendre action pour que ça n'arrive pas, ce genre de situation n'arrive
pas.
Un autre aspect, M. le Président, sur cette
légalisation, au niveau de l'âge, là, il y a une étude canadienne qui a démontré que les étudiants qui consomment du
cannabis fréquentent leurs cours avec moins d'assiduité et qu'ils sont moins enclins à compléter leurs devoirs et à
valoriser l'atteinte de bons résultats. Une expérience canadienne, la science
nous le dit.
Une autre
étude, M. le Président, qui est intéressante, une étude européenne, hein, aux
Pays-Bas, en Hollande, qui dit que...
qui démontre que, lorsqu'on réduit l'accès des étudiants au cannabis
légal — parce
que, vous savez, là-bas, à Amsterdam,
le cannabis est légal dans des «coffee shops» — leur
performance scolaire s'améliore substantiellement, et ce, particulièrement chez les consommateurs les plus
jeunes, les femmes, les élèves en difficulté et les personnes inscrites
à des cours exigeant des habiletés
mathématiques. Ça, M. le Président, c'est de la science, c'est démontré. Et là-bas
c'était légal pour tout le monde, et ils ont restreint l'accessibilité, et on a vu chez les étudiants,
chez ces étudiants-là, une amélioration
de leurs notes.
Donc, il y a
un aspect sur la motivation. Bien, c'est le choix qu'on fait pour notre
jeunesse. Est-ce que, comme parlementaires, on veut faire en sorte d'envoyer le message... de
dire : On banalise le cannabis? 18 ans, ça va? Parce qu'on sait qu'à
partir du moment où le produit est légal et l'âge est abaissé, bien, on envoie
un message de dire : Bien, ce n'est pas grave, consommez. Ce n'est pas du tout ça qu'il faut faire, M. le Président, il y a un aspect important pour la santé des jeunes qui doit être
pris en considération par le gouvernement actuellement.
Et honnêtement, M. le Président, je suis déçu des réponses que j'ai eues aujourd'hui. Je me suis fait dire : Bien, écoutez, vous verrez dans le projet de loi, mais on semble indiquer que ce sera 18 ans. Moi, M. le Président, aujourd'hui, j'en appelle
aux députés du gouvernement d'appuyer la proposition de la CAQ, la proposition responsable
de fixer l'âge à 21 ans, parce que
c'est la seule chose à faire si on a à coeur la santé des jeunes Québécois,
la santé des jeunes, qui sont notre avenir et qui seront demain les leaders du Québec. Il faut faire en sorte d'envoyer un message clair, un message à la société québécoise, de dire : On ne banalise pas cette
substance-là. On revient sur terre, on revient sur terre et on fait en
sorte de prendre en compte les préoccupations des Québécois relativement à l'âge légal pour la consommation de cannabis.
C'est le temps d'agir, M. le Président. Le gouvernement doit se prononcer, les députés ont la chance de
le faire aujourd'hui. J'espère qu'ils appuieront notre motion,
qui vise à avoir un encadrement responsable.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci, M. le député de Borduas. Je vais maintenant mettre aux voix la motion de M. le député
de Borduas, qui se lit comme suit :
«Que l'Assemblée nationale prenne acte que la Fédération des
médecins spécialistes, l'Association des spécialistes en médecine
d'urgence, l'Association des médecins psychiatres, l'Association médicale
canadienne et l'Association médicale du Québec proposent de fixer à 21 ans
l'âge légal pour l'achat de cannabis et de ses dérivés;
«Qu'elle rappelle l'importance de ne pas banaliser la
consommation de cannabis et d'envoyer un message clair quant à ses
risques sur la santé et sur le développement des jeunes;
«Qu'elle propose de fixer à 21 ans l'âge
légal pour l'achat de cannabis et de ses dérivés.»
Est-ce que cette motion est adoptée? Oui, M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Tanguay : Je vous demanderais un vote par appel nominal et,
conformément à l'article 223 du
règlement, de reporter ledit vote à la séance des affaires courantes de
jeudi 5 octobre 2017.
Vote reporté
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Alors, tel que le règlement le prévoit,
ce vote sera reporté demain aux affaires courantes. Et ça dispose de la motion du mercredi. Alors, je cède à
nouveau la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
• (17 heures) •
M.
Tanguay : Je vous prierais d'appeler l'article 22, s'il
vous plaît.
Projet de loi n° 62
Reprise du débat sur la prise en considération du rapport
de la commission qui
en a fait l'étude détaillée et des amendements de la députée de Taschereau
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Alors, à l'article 22 du feuilleton
d'aujourd'hui, c'est :
L'Assemblée reprendrait le débat
ajourné plus tôt aujourd'hui sur la prise en considération du rapport de la Commission des institutions sur le projet
de loi n° 62, Loi
favorisant le respect de la neutralité religieuse de l'État et visant notamment
à encadrer les demandes d'accommodements
religieux dans certains organismes,
ainsi que sur les amendements transmis en vertu de l'article 252
du règlement par Mme la députée de Taschereau.
Je suis prêt à
entendre les interventions. Et je reconnais Mme la députée de... pas LaFontaine.
Voyons...
Une voix :
...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
...de Pointe-aux-Trembles, oui, Mme
la députée de Pointe-aux-Trembles pour son intervention. À vous, Mme la députée.
Mme Nicole Léger
Mme
Léger : Merci, M. le Président. Je sais que vous vous rappelez toujours de mon père, qui
était député de LaFontaine,
dont Pointe-aux-Trembles faisait partie d'ailleurs, mais là c'est tellement
rendu une grande circonscription
que LaFontaine et Pointe-aux-Trembles ont fait maintenant deux sociétés distinctes, disons, si on peut dire. C'en prend
deux pour en faire un. Alors, au plaisir, M. le Président.
Alors, oui,
j'interviens au projet de loi n° 62, la Loi favorisant... on revient à la
Loi favorisant le respect de la neutralité
religieuse de l'État et visant notamment à encadrer les demandes
d'accommodements religieux dans certains organismes. Donc, c'est un projet de loi que le gouvernement a déposé ça fait déjà un bon bout de temps,
depuis 2016. Il y a eu
beaucoup de pourparlers depuis ce temps. Ça a pour objet d'ailleurs d'établir
des mesures visant à favoriser le respect de la neutralité religieuse de
l'État. Il y avait des éléments principaux dans ce projet de loi là, quatre
éléments principaux qu'on doit
rappeler : l'introduction de la neutralité religieuse de l'État,
l'obligation de donner ou recevoir des services publics avec le visage
découvert, mise à l'écrit des principes développés par la jurisprudence pour
encadrer les demandes d'accommodement
raisonnable et modification à la Loi sur les services de garde éducatifs à
l'enfance. Vous comprendrez qu'on
aura beaucoup de choses à dire dans le peu de temps qu'on a, mais on va essayer
de faire ça le plus rapidement possible et de bien circonscrire cette
situation-là de ce projet de loi là.
D'abord,
on se rappelle l'historique aussi. Il faut quand même se... revenir en 2007, où
il y a eu, quand même, la commission
Bouchard-Taylor, qui a été, quand même, je pourrais dire, des éléments de base
de notre discussion et du débat
public par rapport à tous les accommodements et la neutralité. Mais je vais
revenir aussi sur la laïcité. Le gouvernement avait déposé à l'époque le projet de loi n° 94, en 2010, qui répondait — après trois ans, de 2007 à 2010 — à la commission Bouchard-Taylor, mais ne répondait pas vraiment,
parce qu'il y a eu tout un tollé. Ça a été tombé d'ailleurs au feuilleton,
comme on dit dans notre langage. Et là ils
arrivent avec une dernière tentative, le projet de loi n° 62 qui est
devant nous. Et ils tentent vraiment d'arriver... avec ce projet de loi
là, de répondre à certains éléments des enjeux que nous avons entourant, je
pourrais dire, cette situation-là et ce débat-là que nous avons tous ensemble.
On
parle souvent de vivre-ensemble, mais il faut quand même se dire qu'il faut
trouver, quand on dit qu'on parle de
vivre-ensemble... J'écoutais la ministre ce matin, le vivre-ensemble, bien, il
faut qu'elle soit capable de trouver aussi des consensus. Alors, ce n'est pas d'être têtu que... Ce gouvernement-là
reste têtu sur ses positions. Il fait quelques petits amendements, acceptés de peine et de misère. Parce
que je vais saluer ma collègue députée de Taschereau, qui, au nom de
l'opposition officielle, a vraiment mené les débats face à la ministre, essayé
de faire entendre raison à la ministre, essayé de faire avancer la ministre, essayé d'apporter des amendements,
que la ministre refusait. On en a deux, là, quelques-uns, des petits minimes... quelque minimes, mais deux bons que
j'aimerais rappeler, que ma collègue a réussi à faire avancer la
ministre.
Je
pense à toute l'opposition. Parce que ce n'est pas tout de penser que...
J'entendais la ministre dire ce matin qu'on s'entendait bien quand même dans les travaux, et tout ça. Bien, oui, ce
qui va bien va bien, mais ce n'est pas là, c'est dans les détails puis c'est dans les éléments qui sont
pas mal... des éléments pas mal importants où ça ne va pas. Ça a pris je ne
sais pas combien de temps à ma collègue
députée de Taschereau de lui faire entendre raison particulièrement sur la
partie, dans le projet de loi, qui
touche particulièrement les députés. J'y reviendrai tout à l'heure. Mais c'est
période de questions par-dessus
période de questions, commission parlementaire, débat sur la commission
parlementaire pour lui faire entendre raison,
puis, au bout de la ligne, elle a réussi, ma collègue, de lui faire entendre
raison. Mais je vous dirais que c'était quand même assez pénible.
Je
veux vous dire que, comme opposition officielle, il faut aussi, nous, de notre
côté, entendre la préoccupation des
gens, ce qu'ils nous disent. Parce que les gens nous interpellent
régulièrement. On est des députés. C'est 125 députés ici, c'est toute l'opposition officielle qui
essaie de... l'opposition et officielle, deuxième opposition et les autres
partis qui essaient d'intervenir
auprès de la ministre pour lui faire entendre raison. Alors, on a en tête, tout
le monde a en tête le bien commun, et
on essaie, à travers ça, de ramener l'enjeu avec ce qu'on est capable de faire,
comme législateur, dans l'intérêt public aussi.
Alors,
c'est comment ce gouvernement-là va donner des directives, et le projet de loi
permettait de placer certains éléments
importants pour faire avancer le débat puis donner des directives à l'ensemble
du Québec. C'est ça, le rôle d'un gouvernement.
C'est ça que nous essayons de faire entendre raison à ce gouvernement-là.
Alors, je salue toute la rigueur de ma collègue, qui a voulu apporter...
le plus possible de faire entendre raison à ce gouvernement-là.
Pour les élus particulièrement, avec le projet
de loi, bien là, ma collègue a réussi de faire enlever les élus de l'Assemblée nationale de l'application de ce
projet de loi là. Ils doivent quand même... cependant, exercer quand même
leurs fonctions à visage découvert. Parce
que ça a été ça, l'enjeu. Mais ça nous forçait à rencontrer des groupes
religieux dans nos bureaux, au
parlement ou... dans l'exercice de notre fonction. Sinon, si on ne les
rencontrait pas, on était susceptibles d'avoir des poursuites. Alors, je
peux bien rencontrer qui je veux bien rencontrer.
Alors,
évidemment, M. le Président, c'est... Ma collègue donnait l'exemple des
raëliens qui préparent l'accueil des
extraterrestres. C'est leur opinion, c'est leur désir, qu'ils veulent le faire,
qu'ils le fassent. Ça leur appartient, d'une façon, privément. Mais, moi, si je n'ai pas le goût de les rencontrer,
ça demeure ma prérogative. Et là, selon ce qu'on a entendu dans le projet de loi, bien, ça nous
amenait à avoir des poursuites si on décidait de ne pas rencontrer des types
de groupes religieux. Alors, vous
comprendrez que la ministre a réussi, de peine et de misère, d'entendre raison,
alors on n'a plus maintenant ce devoir et cette obligation-là de le
faire.
Il y a eu
d'autres gains aussi du Parti québécois, d'assujettir d'ailleurs les
municipalités, alors les municipalités, les sociétés de transport en commun, incluant tout le trajet en
transport qui devra se faire à visage découvert. On parle des métros,
autobus, trains de banlieue. C'est un deuxième gain qu'on a pu réussir à avoir.
Mais tous les autres gains... On n'a pas réussi,
M. le Président, à avoir tous les autres gains. La ministre et le gouvernement s'entêtent. On parle, entre autres,
de tous les principes... la laïcité dans son grand ensemble, que je pourrais
vous dire, d'inscrire la laïcité dans la
Charte des droits et libertés de la personne. C'est ce qu'on aurait aimé de la
ministre, qu'elle puisse inscrire...
pour démontrer que la laïcité est importante dans l'État québécois. Et elle n'a
pas voulu. Je pense que c'est demandé par toute l'opposition.
L'autre
principe, qui est pourtant important, celle de l'égalité entre les femmes et
les hommes, on a essayé, malgré tout,
de vouloir inscrire... on a apporté
un amendement, parce
que, là, actuellement, c'est... L'amendement que ma collègue avait apporté, c'est qu'«un membre du personnel de l'État
ne peut porter un tchador, un niqab ou une burqa dans l'exercice de ses fonctions au motif qu'ils représentent un
symbole d'oppression qui va à l'encontre du droit à l'égalité entre les femmes
et les hommes». Alors, le gouvernement a refusé cet amendement-là. Alors, ce
qu'on voulait, c'est vraiment qu'il y ait l'interdiction
expresse du port du tchador dans la fonction
publique. Alors, vous comprenez le
type de débat qu'on a pu mener, mais en vain, le gouvernement a refusé.
Tout l'aspect aussi du devoir de réserve des
fonctionnaires dans l'expression de leurs croyances religieuses, à l'article... qui n'implique pas une interdiction
des signes religieux, mais simplement une discrétion dans les débats et
opinions sur les enjeux religieux, actuellement, que nous avons, d'interdire les signes religieux pour les personnes en
possibilité d'autorité, on aurait
aimé que les policiers, les juges, les procureurs, gardiens de prison... Une
fin de recevoir, nécessairement, aussi avec le gouvernement.
Alors, M. le Président, il y a des aspects, de nombreux aspects... Je ne peux
pas énumérer tout ce qui s'est passé en
commission parlementaire et tous les débats que ma collègue députée de
Taschereau a menés au nom du Parti québécois, au nom de
toute notre formation politique, mais je peux vous dire que ce n'est pas terminé.
Alors, nous résistons encore, et peut-être
que le gouvernement va entendre raison encore. Alors, je sollicite
les collègues devant moi de faire entendre raison à la ministre et du gouvernement
pour qu'on soit capables de bonifier ce projet de loi là qui est devant nous présentement. Nous souhaitons toujours que le gouvernement entende raison et qu'il accepte les amendements
du Parti québécois.
Cela va vraiment dans le sens de vivre ensemble, du respect des
valeurs de base de notre société, M. le
Président, qui s'est construite par
ses femmes et ses hommes au Québec, et tout ça par l'accueil des personnes issues de
l'immigration, que nous voulons une meilleure intégration possible.
Alors, vous comprendrez que ce projet de loi là ne nous fait pas satisfaction présentement.
Alors, espérons qu'il va entendre raison. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, Mme la
députée. Et je reconnais le prochain
intervenant, qui... Il s'agit
du chef de l'opposition officielle, en vous rappelant que vous également,
vous avez 10 minutes pour vous exprimer. M. le chef de l'opposition
officielle, à vous la parole.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Oui. Un instant.
• (17 h 10) •
M. Tanguay : En
vertu de notre règlement,
je vous prierais, s'il vous plaît, de laisser le temps à la ministre,
son droit de réplique, pour
répliquer, elle a droit à un cinq minutes. Alors, je vous prierais de la
reconnaître, s'il vous plaît. Merci.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Tout à fait. Si elle est là, qu'elle le demande. Moi, à ma connaissance... Ce n'est pas grave, là,
c'est... Je vais lui donner son cinq minutes de réplique. Vous voulez répliquer
à l'intervention qui vient d'être faite? Vous avez le droit. À vous la
parole.
Mme Vallée : Alors...
Une voix : ...
Le Vice-Président (M.
Gendron) : Un instant. Oui. Oui, pourquoi?
M. Lisée : ...à la ministre de dire quelques mots, elle pourra être présente
pour mes mots à moi par la suite, si elle le désire.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, elle décidera. À vous, Mme la ministre, pour votre réplique suite à
l'intervention, qui n'est pas le droit de réplique final.
Mme Vallée : Non, non, tout à
fait, suite à l'intervention, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Je
le sais.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : M. le
Président, en fait, je me suis
questionnée à savoir si j'utilisais mon droit de poser une question à notre collègue en vertu de l'article 213, parce que j'aurais beaucoup aimé savoir en vertu de quel article
précisément... qu'elle nous le lise,
qu'elle le lise à voix haute, quel article obligeait textuellement un député de
cette Assemblée à rencontrer un groupe. L'interprétation de ma collègue
est quelque peu poussée.
Ceci dit, M. le Président, je ne lui pose pas la question, parce qu'elle pourrait
refuser, elle pourrait refuser. Mais j'aimerais ça, M. le Président... Et en fait le souhait que j'émets aujourd'hui, c'est que les parlementaires ici se concentrent sur les
éléments qui nous unissent plutôt que de tenter une fois de plus de nous diviser ou
de diviser le Québec. Et là je ne vise pas une personne en
particulier. Mais j'aimerais, M. le Président, que la...
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Demandez-le. Un instant. Alors, M. le leader de l'opposition officielle.
M.
Bérubé : ...prêter
des intentions, «diviser le Québec», c'est assez clair, notre règlement
l'indique assez clairement.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Là, oui, les mots pris dans leur sens... Mais écoutez... Non, mais je l'ai déjà entendu
souvent et moi, je prétends... C'est une question d'opinion, mais faites
attention, effectivement, au vocabulaire utilisé. Vous avez autant d'expérience, presque, que moi, là, ça fait
que faites attention au vocabulaire. Mais je ne crois pas, là, qu'il y
avait cette intention aussi formelle. Alors, veuillez poursuivre.
Mme Vallée :
En fait, M. le Président, j'aimerais que l'on poursuive nos échanges sur le
projet de loi de la même façon qu'on l'a fait lors de la commission, lors de
l'étude détaillée, où, à l'honneur de la députée de Taschereau, il n'y a
pas eu une utilisation des règles
parlementaires pour le simple plaisir, mais bien pour assurer un travail
respectueux et rigoureux, et une bonification du projet de loi. Alors,
M. le Président, je transmets le tout en toute amitié.
Et la
réplique à l'égard de l'allocution de notre collègue se situe au niveau d'une
interprétation du projet de loi. En fait, dans le projet de loi, dans la
version initiale du projet de loi, les élus n'étaient pas... ne faisaient pas
partie de l'application du projet de loi.
Suite aux consultations, on a étendu l'application du projet de loi aux élus,
dans le cadre d'un amendement — alors, soyons rigoureux — un amendement. Cet amendement a fait l'objet
d'une étude, M. le Président. Mais
j'invite ma collègue à en faire la lecture à haute voix. Je pense qu'elle lui
donne une portée qui va bien au-delà de l'intention qui était la mienne
lors du dépôt de cet amendement, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Merci, Mme la ministre, de votre
intervention. Comme le règlement le prévoit, je cède maintenant la parole au chef de l'opposition officielle, en lui
rappelant que vous disposez d'un temps de 10 minutes. À vous, M. le
chef de l'opposition officielle.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
M. le Président, on pourrait être en train de discuter d'un projet de loi qui
pourrait être adopté à l'unanimité
dans cette Chambre, sur un dossier qui traîne depuis 10 ans, celui des
accommodements religieux. Il était à portée
de main du premier ministre libéral du Québec de faire quelques pas vers le
Parti québécois, qui, lui-même, était prêt à en faire, et même le chef de la CAQ, dont je ne dis pas régulièrement
beaucoup de bien. Mais là je dois admettre qu'au moment des faits, c'est-à-dire en février dernier, il était prêt aussi à
faire quelques pas, et nous aurions pu avoir un projet de loi unanime.
Qu'est-ce que
cela nécessitait? Bien, d'abord, que le gouvernement libéral accepte ce mot
magnifique venu du Siècle des
lumières, le mot «laïcité». Il le refuse et lui propose le mot «neutralité». Ce
n'est pas le même concept, mais il
n'y a pas de guerre de religion à faire entre «laïcité» et «neutralité». Si le
premier ministre avait accepté le mot «laïcité», qui se retrouve dans des textes fondamentaux de plusieurs pays
démocratiques, nous serions d'accord. Et puis il y avait cette autre notion importante de dire que, bien,
il y a un rapport, commandé par un gouvernement libéral précédent, qui
disait : Écoutez, pour affirmer la laïcité de l'État, il faudrait que les
personnes qui ont un pouvoir de contrainte sur la liberté des autres,
c'est-à-dire les gardiens de prison, les policiers, les procureurs et les
juges, soient tenues de ne pas montrer de signe religieux, comme ils sont tenus de ne pas montrer de
signes politiques ou sociaux, ou leurs autres convictions. C'était un consensus tellement large que la majorité des électeurs du Parti libéral étaient favorables à ça. Il aurait fallu que le premier ministre accepte, et j'ai l'absolue conviction que son
caucus et son Conseil des ministres auraient accepté aussi.
Et, avec ces deux
éléments-là et un certain nombre d'autres éléments dont nous avons discuté
abondamment, il y avait un point de passage, en disant également
que les accommodements religieux devaient être refusés si... Sur la question
du visage caché, si c'était une demande de motif religieux, nous aurions dû dire :
Non, il n'y a pas de motif religieux qui
peut permettre ça. Il y avait là une possibilité d'être unanime. Et là le premier ministre a sorti toutes sortes de
raisons de refuser. D'abord, il a eu cette phase très désagréable où il a dit
que ceux qui étaient en faveur de ce large consensus, y compris la majorité
de ses électeurs, soufflaient sur les braises de l'intolérance. Ça ne l'a pas
grandi. Ensuite, il a eu cette idée
que c'était de la discrimination vestimentaire. Bien, écoutez,
on est saisis d'un projet de loi pour interdire aux policiers de mettre des pantalons de clown. On pourrait dire :
C'est de la discrimination vestimentaire. Mais vous savez qu'on peut
se faire arrêter partout au Québec si on n'est pas suffisamment habillés. C'est
de la discrimination vestimentaire qui existe dans nos lois. Alors, le premier
ministre a inventé cette idée qu'on ne pouvait pas faire de discrimination vestimentaire, alors que son projet
de loi lui-même demande aux gens de
ne pas avoir de vêtement sur leur visage
lors de la délivrance ou de la prestation de services. Alors, cet argument ne
tient pas la route, et d'ailleurs même Gérard Bouchard s'est fendu d'un
texte dans La Presse pour dire que cet argument était du
vent.
Et
on s'est demandé : Peut-être que le premier
ministre... Je comprends qu'il a des convictions, j'en ai aussi, et nous avions une possibilité de se rejoindre et
d'avoir un vote unanime qui aurait été extraordinairement apaisant, apaisant de deux façons, de dire à ceux qui sont aux
extrêmes de ce débat : Écoutez, il y a une voix de la modération et de la raison qui est englobée par l'ensemble
des partis politiques qui sont ici, et, même si vous n'êtes pas d'accord
avec la décision, ça clôt le débat. Il y a
une clarté dans l'unanimité, et c'était la chose la plus apaisante à faire, la
moins divisive, et ça valait la peine
de faire un compromis pour arriver là. Et nous disions au premier ministre, et j'en ai encore parlé aujourd'hui : Il faudrait accompagner ce geste sur les
règles du vivre-ensemble d'un autre geste fort sur le succès du vivre-ensemble,
c'est-à-dire des mesures fortes qui assurent l'intégration en emploi, et qui fait
reculer la discrimination et le racisme. Si on voulait rassembler,
c'est ce qu'on aurait dû faire.
• (17 h 20) •
Mais là je me suis
dit : Il y a peut-être une autre raison, au-delà des convictions, que je
respecte, peut-être qu'il a peur de se faire
lui-même traiter d'intolérant. Peut-être
qu'il a peur de ça. Bien, M. le
Président, c'est déjà
fait. Il y a deux semaines, l'éditorial principal du principal
quotidien canadien, le Globe
and Mail, a traité le premier ministre, son gouvernement, sa ministre de la Justice de «bigots», intolérants, xénophobes. C'est déjà
dans le système. Ils considèrent que le projet de loi n° 62 est, en
soi, de la xénophobie. C'est dans le Globe and Mail.
Et
il y a eu une course au leadership au NPD où les candidats, dans leur majorité,
ont dit : Ce projet de loi n'est pas acceptable, il ne respecte pas les valeurs canadiennes.
Et celui qui a gagné, il dit : De
toute façon, les cours vont dire non.
Ça a valu à la ministre
de sortir puis de dire : On pense que les cours ne diront pas non. Mais il
n'en reste pas moins que le chef d'un
parti important au Canada dit : Ce projet de loi, moi personnellement, je suis contre. Je considère que c'est un projet de loi intolérant. Et là on a hâte de voir ce que la ministre
fédérale de la Justice va dire et ce que le premier ministre va dire,
parce qu'eux, ils ont fait une campagne électorale récemment
en disant que la nouvelle frontière de la tolérance et des droits, c'est de permettre à une dame de
prêter serment au Canada, pour devenir citoyenne, avec le visage couvert.
Pour eux, là, c'est en ce moment le symbole de la Charte
canadienne des droits et libertés de
Pierre Trudeau, c'est le droit pour quelqu'un d'avoir le visage couvert
pour la prestation d'un serment de citoyenneté.
Alors,
je pense que le Parti libéral, en proposant le projet de loi tel qu'il est,
s'expose à se faire traiter d'intolérant par des gens au Canada anglais
qui ne tolèrent pas la vision plus laïque de la société québécoise.
Alors,
ça, on part avec ça, là. On sait ça. Une fois qu'on sait ça, pourquoi
ne pas être unanimes, puisque de toute façon le Globe and Mail va
dire que ce projet de loi est intolérant, puisque de toute façon il y aura des
gens qui vont aller devant les juges
fédéraux, nommés unilatéralement par Ottawa, pour appliquer unilatéralement une constitution
que nous n'avons pas négociée, que
nous n'avons pas approuvée, dans laquelle il y a le multiculturalisme, un
principe contre lequel tous les gouvernements du Québec se battent
depuis son apparition? De toute façon, ça va arriver.
Alors,
n'aurait-il pas été plus sage d'avoir un texte qui soit unanime? Je pense que
ça aurait été beaucoup plus sage. Et, lorsqu'on écrira l'histoire du
mandat libéral du premier ministre actuel, on verra que cette occasion manquée,
cette occasion manquée, elle est majeure,
puisque nous avions l'occasion de faire quelque chose de beaucoup
plus fort et qui aurait envoyé un signal apaisant à la société,
à la majorité francophone, aux Québécois d'adoption, qui se seraient dit, certains d'entre eux : On n'aurait pas adopté
ça, mais le signal qu'envoie la société est tellement fort qu'on va s'y conformer. Alors, c'est
triste que ce moment ait été gaspillé par le premier ministre.
Par
consentement, M. le
Président, vous le savez, on peut
tout faire, par consentement. Et donc aujourd'hui, à la période de questions, j'ai encore
une fois tendu la main. S'il veut qu'on se rencontre, qu'on regarde les textes,
qu'on revienne... Et je dois souligner que
la ministre a accepté plusieurs de nos amendements.
La députée de Taschereau a travaillé avec ses collègues de façon constructive, en essayant de limiter
les dégâts, de colmater les brèches, d'éclairer les zones
d'ombre. Et le projet de loi est meilleur maintenant qu'il ne l'était au début grâce au travail de la députée
de Taschereau et au travail de la ministre de la Justice et des
autres collègues, qui ont bien travaillé. Le problème, c'est
qu'il laisse énormément d'espace à la contestation, aux accommodements qui seraient donnés et qui feraient en sorte que, même sur
ce point central du visage couvert,
on pourrait bien se retrouver avec un jugement de cour, bientôt,
qui dit : Bien, à chaque fois que quelqu'un
demande un accommodement pour raisons
religieuses, on doit lui accorder, et le législateur ne nous a pas donné
d'indication. Alors, c'est pourquoi le projet de loi est loin d'être ce
qu'il devrait être. C'est peut-être encore le temps de le réparer, M. le
Président.
Le Vice-Président (M.
Gendron) : Alors, merci. Alors, merci, M. le chef de l'opposition
officielle, de votre intervention. Alors, je
cède la parole maintenant... Ah! droit de réplique. Alors, vous avez droit,
Mme la ministre, pour utiliser votre droit de réplique de
20 minutes.
Mme Vallée : Oui, ce sera
bref, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Allez. À vous la parole.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : Je voudrais
simplement rappeler à cette Assemblée les paroles du chef de l'opposition. Le 14 octobre 2016, lors d'un point de
presse, accompagné de la députée de Taschereau, le chef de l'opposition nous
disait : «Vous savez que ma
position, c'est : mieux vaut faire quelques pas que de n'en faire aucun.
Essayons de faire en sorte d'en faire
le plus possible immédiatement, mais donc on va accueillir ce projet de loi
dans un esprit d'amélioration [...] un esprit
constructif [...] il arrive [...]
qu'on veuille utiliser la totalité des instruments parlementaires à notre disposition pour interdire
l'adoption d'un mauvais projet de loi. [...]Le cas de
62 est complètement différent.» Et de poursuivre et dire :
«...il y aura des gens qui diront : Je suis capable de vivre avec ça.
C'est par là qu'on s'en va.»
M. le
Président, la neutralité religieuse de l'État, le visage découvert, les balises
pour les demandes d'accommodement, je
vous dis, c'est par là qu'on s'en va. M. le chef de l'opposition, s'il vous
plaît, soyez fidèle aux propos tenus le 14 octobre 2016.
Merci.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, Mme la ministre. Je
cède maintenant la parole à Mme la députée de Duplessis pour son
intervention. À vous la parole.
Mme Lorraine Richard
Mme
Richard : Merci, M. le
Président. Je le dis d'entrée de jeu, le projet de loi n° 62, dans la
forme qui est proposée par le
gouvernement libéral, ne tient pas la route. Il ne tient pas la route pour les
Québécois qui estiment que toutes les interactions
de l'État doivent impérativement se faire à visage découvert, car, il faut bien
l'avouer, M. le Président, ce projet
de loi est loin de mettre un terme à toute l'ambiguïté de cette question.
Également, il ne tient pas la route pour tous ceux qui, comme moi, comme députée de ma formation politique, défendent
le principe fondamental de la laïcité de l'État.
M. le Président, ça a pris deux ans, deux ans
pour arriver à prendre juste en considération le projet de loi, on va peut-être passer à une autre étape d'ici peu de
temps, là, mais deux ans. Pourtant, ma collègue de Taschereau a fait un excellent travail avec les collègues de notre
formation politique tout au long de ce processus, toujours dans un esprit
de conciliation, d'arriver... Vous savez,
quand on travaille un projet de loi, c'est pour l'améliorer pour avoir le
meilleur projet de loi possible.
Pourquoi ce projet de loi a-t-il pris autant de
temps, M. le Président? Mais à cause que la ministre, avec ses tergiversations, avec son peu d'écoute... Oui,
elle a fait un petit bout de chemin, elle a accepté quelques amendements
de ma collègue la députée de Taschereau, il
a fallu lui répéter très, très souvent, M. le Président, pour qu'elle accepte.
Combien de propositions sensées, de ses
collègues même, la ministre a-t-elle rejetées du revers de la main? Je pense,
entre autres, ici, M. le Président,
au port des signes religieux pour les personnes en autorité, et j'aurai
l'occasion d'y revenir.
Il reste que,
durant les deux dernières années, la ministre n'a pas su exercer le leadership
de ce qu'on s'attend d'une ministre
de la Justice et qui pilote un tel projet de loi. Elle a ignoré de nombreuses
propositions d'amendement qui auraient juste
fait en sorte de bonifier ce projet de loi, et on en avait grandement besoin,
M. le Président. Ça fait plus de 10 ans que ce débat est sur la
place publique. Aujourd'hui, nous nous retrouvons avec un projet de loi sur la
neutralité religieuse de l'État qui ne va
rien régler mais qui va faire, M. le Président, qu'on va avoir un net recul
pour tous ceux et celles qui ont à coeur le principe de la laïcité de
l'État. Ma collègue députée de Taschereau a fait un bon travail. Tout ce qu'on
voulait, je le dis, on voulait juste bonifier le projet de loi, avoir le
meilleur possible.
Vous savez,
M. le Président, tantôt je regardais un sondage où on dit que la plupart des
Québécois sont en faveur du projet de loi de la ministre. Puis il y
avait quelque chose qui me chicotait avant de faire mon intervention, puis je voulais en être sûre, puis ce matin on a eu
l'occasion, avec la députée de Taschereau, d'avoir un certain
éclaircissement : Quelle est la
différence entre laïcité de l'État et neutralité religieuse? On l'a eue, elle
nous l'a donnée. Elle nous l'a dit, qu'il
y avait une différence, et ça, M. le Président, M. et Mme Tout-le-monde,
ils ne le savent pas. Ils ne le savent pas.
Quand j'ai
appris, M. le Président, que la ministre, elle avait refusé l'amendement que je
vais vous lire, j'avoue que j'étais
estomaquée, là. Je vous le lis, là, ça vaut la peine. L'amendement, c'était ce
qui suit : «Un devoir de réserve aux
fonctionnaires dans l'expression de leurs convictions religieuses». Il me
semble que c'est clair, là. Ce qu'on demandait, c'est aux fonctionnaires de l'État de ne pas avoir de
vêtements, de signes religieux ostentatoires, parce qu'ils font partie de
l'État, et un État ne peut pas imposer des religions.
• (17 h 30) •
M. le
Président, vous savez, à une certaine époque au Québec, la religion, elle
occupait toute la place, ça faisait partie
de notre système de santé et de notre système d'éducation. Moi, j'ai travaillé
en santé avec des religieuses. Je suis allée
à l'école, c'étaient des frères, c'étaient des soeurs qui enseignaient. On a
décidé, collectivement, M. le Président... vous le savez, vous aussi, hein, on a changé la loi sur les commissions
scolaires puis sur les écoles, hein, puis ce n'étaient plus des écoles catholiques. On a fait ce
virage-là, puis on se retrouve en 2017, puis là ce n'est plus ça, on va
accepter toutes les religions. Y a-tu quelque
chose que je ne comprends pas, M. le Président? Puis là, en plus, on a un
premier ministre, quand on parle de laïcité, qui vient nous dire qu'on souffle
sur les braises de l'intolérance.
Pour
ceux qui nous écoutent à cette heure-ci, ils ne sont pas nombreux, M. le
Président, je ne nommerai pas les chaînes
de télévision sur lesquelles les auditeurs et auditrices doivent être en ce
moment, mais ceux et celles qui y sont, là, moi, je veux vous dire : Avec le gouvernement libéral, il y a un
net recul, et ce que la ministre s'apprête à faire avec le projet de loi n° 62, ce n'est pas d'interdire
les religions, c'est que toutes les religions vont être sur le même pied
d'égalité, puis il faut être ouverts
à tous. Est-ce que moi, je suis intolérante? La réponse, c'est non. Est-ce que
je suis pour qu'on accueille des
gens? Oui. Qu'on leur apprenne notre langue, qu'on leur apprenne nos valeurs.
La religion, c'est quelque chose de personnel, M. le Président, de
personnel. Ça n'a pas l'air que c'est compris de l'autre côté.
Quand
je vous dis, et le chef du Parti québécois en a fait mention, qu'un uniforme,
c'est important... C'est important, on
a passé un projet de loi pour que les policiers portent leurs uniformes. Ils
ont fait des moyens de pression, puis on n'aimait pas beaucoup ça, hein? Même, je vais vous le dire,
M. le Président, je vais en profiter
pour vous le dire : Moi, j'ai des gens
qui vont dans des hôpitaux puis ils disent : on ne sait plus si c'est un
moppologiste ou un radiologiste, hein? Ça fait que, hein, le médecin, là, on ne sait plus, là... on n'a plus
d'uniforme. Mais on avait au moins conservé, pour des personnes, entre autres les policiers, qu'ils aient un
uniforme. Il me semble que, comme État, tu as des fonctionnaires qui
travaillent pour l'État, tu te dois
d'avoir une certaine neutralité. Ce n'est pas ce qu'on retrouve dans le projet
de loi. Ce n'est pas ce qu'on trouve.
On
nous offre aujourd'hui, M. le
Président, je vous dirais, une
législation qui est vraiment,
vraiment en dessous du rapport
Bouchard-Taylor. C'est vraiment en dessous. Et pourtant moi, j'ai participé,
moi, aux consultations. Vous savez, c'est
rare qu'ils se rendent sur la Côte-Nord, hein? Des fois, ça coûte trop cher.
C'est trop long, la route. Bouchard-Taylor, la commission s'est déplacée. Ils sont venus chez nous. J'ai suivi ces
travaux-là. Parce qu'on dit, des fois : Vous savez, les gens des
régions, ils ne sont pas confrontés à ça, hein, au multiculturalisme à la
Trudeau, aux gens qu'on accueille, M. le
Président. On est un peuple accueillant au Québec. Puis, oui, on a besoin de
l'immigration. Pas à n'importe quel prix,
M. le Président, puis pas n'importe comment. Ça fait des années et des années
qu'on sent partout dans la population que
ça chatouille quand même un peu, ce débat-là. On se serait attendu à ce que la
ministre fasse preuve d'un peu plus d'ouverture
puis qu'on soit vraiment tous unanimes derrière un projet de loi, ici, tout au
moins, à l'Assemblée nationale. Parce que, vous le savez, il peut être
contesté, et ce n'est pas une mince affaire, M. le Président.
Moi,
je veux dire aux gens, là, que je suis convaincue, je suis convaincue. Puis je
regarde mes collègues en face. Je
suis convaincue. Et je le dis en toute sincérité que la très, très grande
majorité des Québécois sont pour que la religion soit du domaine privé, qu'ils sont pour la laïcité de l'État. Il faut
être clair, le projet de loi n° 62 ne répond pas du tout, du tout à
ça.
L'interdiction
des signes religieux pour les fonctionnaires en position d'autorité, on n'a pas
réussi. Un État laïc, c'est-à-dire
pas de religion dans l'État, c'est aussi simple que ça. Je n'emploierai pas,
là, M. le Président, un vocabulaire que vous ne me comprendrez pas,
hein, je veux être très, très claire. Bien, c'est le contraire qu'a fait la
ministre.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : ...
Mme Richard : Bien, merci, M. le Président, je sais que vous, vous me comprenez très,
très bien. Et je suis sûre que ceux
qui nous écoutent me comprennent très, très bien. La ministre n'a pas fait en
sorte d'avoir la laïcité de l'État, c'est toutes les religions. C'est
comme ça avec le gouvernement libéral, M. le Président. Je pourrais vous en
parler longuement, le temps me manque. On
avait une opportunité avec les partis d'opposition, que ce soit la Coalition
avenir Québec, même Québec solidaire,
Parti québécois, si on avait montré un peu d'ouverture du côté du gouvernement,
ce qu'on n'a pas fait... Mais je veux
dire aux Québécois et aux Québécoises que ce projet de loi ne réglera rien, et
on va encore en entendre parler
probablement encore pendant un petit bout de temps, jusqu'à temps que ce gouvernement-là continusse
de gouverner. Parce que, vous savez, entre
vous et moi, M. le Président, que, même si on voterait contre, ils sont
majoritaires. Puis on l'a vu, ça ne les chicote pas du tout, du tout, du
tout d'aller contre les voeux de la population. Merci.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, un instant, M. le député de Berthier. Mme la
ministre va exercer son cinq
minutes de réplique. Et elle a le droit. Alors, Mme la ministre, à vous la
parole.
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : Merci, M. le Président. Je vais inviter notre collègue
et les collègues présents ici qui souhaitent prendre parole à garder en tête les paroles de
leur chef, qui, encore une fois, le 14 novembre... 14 octobre 2016, pardon,
disait ce qui suit : Je n'ai pas l'intention
de bloquer ce projet de loi. «...on n'a pas l'intention d'empêcher son adoption, et donc on va bien doser.»
Et
à notre collègue qui prend parole, je lui rappellerais aussi,
concernant le port des signes religieux par les agents de l'État... Puis il ne faudrait pas qu'elle parte avant que j'utilise mon droit de
réplique. Mais son chef disait, le 14 novembre 2014, en parlant justement du port de signes religieux par les agents de l'État :
«Revenir sur le port de signes par les employés de l'État? Il me semble
qu'on[...] — en
parlant du gouvernement précédent — a un peu empoisonné le débat. Comme on a raté cette possibilité de faire un grand pas,
[...]je ne pense pas qu'on devrait revenir avec ça dans un avenir prévisible.»
Et le collègue de
Lac-Saint-Jean disait : «C'est évident que, là-dessus, nous sommes allés
trop loin. Ce n'est certainement pas une mesure que je souhaiterais voir
réapparaître.»
M. le
Président, je dirais, de façon très sereine, qu'on n'a pas de démonstration que
le fait, pour un agent de l'État, de
porter un signe religieux va remettre en cause sa capacité d'exercer ses
fonctions avec impartialité, avec professionnalisme. Et
donc, en l'absence d'une telle démonstration, M. le Président, je pense qu'il
est beaucoup plus sage d'adopter une présomption
de neutralité, tel que le mentionnaient Charles Taylor et Jocelyn Maclure dans
un ouvrage fort intéressant datant de 2010.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, Mme la
ministre, de votre réplique, et je cède maintenant la parole à M. le
député de Berthier pour son intervention, en sachant que vous avez 10 minutes.
À vous.
M. André Villeneuve
M.
Villeneuve : Merci, M. le Président. M. le Président, j'aime
bien entendre la ministre citer notre chef, elle fait la démonstration que notre chef est quelqu'un
d'ouvert et que nous sommes prêts, comme formation politique, à tendre la
main au Parti libéral, M. le Président.
Et moi,
j'invite le Parti libéral à saisir cette main tendue parce qu'elle n'est pas
seulement tendue par l'opposition officielle,
elle est aussi tendue par la deuxième opposition et les indépendants. Je sais,
je l'ai déjà dit, mais je vais le redire : 29,66 %, M. le Président, c'est le vote absolu que les libéraux ont
reçu en 2014 de la part de la population du Québec. Ce que ça veut dire, c'est que, quand les
oppositions, M. le Président, essaient de faire comprendre au Parti libéral
qu'ils sont dans la mauvaise
direction, ils parlent au nom de 70 % de la population du Québec. Ce n'est
quand même pas rien. Je pourrais
revenir, M. le Président, sur le message qu'ils ont reçu de la population de
Louis-Hébert. Je pourrais en rajouter, M.
le Président. J'invite la ministre à... Et je suis de ceux, M. le Président,
qui regardent le verre toujours à moitié plein et non pas à moitié vide. Et, à ce stade-ci, je ne
suis pas prêt à jeter la serviette et dire qu'ils vont s'obstiner, M. le
Président — je
leur porte des intentions, là, mais c'est quand même gentil — dans
la direction qu'ils prennent présentement.
• (17 h 40) •
M. le
Président, nous avons, sur la table, au Parti québécois et les oppositions,
ici, à l'Assemblée nationale, mis le
minimum. Et nous avons mis, sans jeu de mots biblique, M. le Président, mis de l'eau dans notre vin pour que, justement,
le Parti
libéral, les oppositions
votent de façon unanime cette loi-là. C'est ce à quoi s'attendent
les Québécois, M. le
Président. Et il n'y a
pas plus fort qu'une loi qui est adoptée à l'unanimité par les membres de cette Assemblée.
Il n'y a pas plus fort que ça, M. le Président. Pourquoi?
Parce qu'elle représente l'ensemble de la population du Québec.
Alors, moi,
j'invite la ministre. Moi, je veux bien, là, toujours jeter la pierre à
l'autre, c'est de la faute de l'autre. Parce
que c'est un peu ce que j'entends depuis tantôt, M. le Président, on se fait
accuser de... Bien, accuser? En tout cas, on se fait reprocher certaines choses de la part de la ministre. Bien,
M. le Président, ce n'est pas comme ça qu'on va arriver à bâtir l'unanimité. Ce n'est pas comme ça qu'on va
réussir enfin à mettre en place une loi qui va répondre aux aspirations des Québécois et des Québécoises. M. le Président,
depuis 2007 qu'on est là-dessus. On peut-u s'entendre, tout le monde? Ma collègue de Taschereau a fait un travail
remarquable dans ce dossier-là, la ministre aussi. Les discussions allaient
bien. Puis je pense qu'elles vont
toujours bien. Alors, arrêtons de s'accuser l'un et l'autre et tentons de
trouver un point de rencontre.
M. le
Président, parlant de point de rencontre, vous savez, ce qui achoppe dans le
projet de loi, là, Mme la ministre vient
de le citer, là, bien, ce n'est pas Bouchard-Taylor, c'est plutôt Bouchard et...
Taylor et... je ne me rappelle plus du deuxième
nom. Mais le rapport Bouchard-Taylor, M. le Président, un rapport qui a été...
Bon, il a coûté des sous, bien sûr, mais
c'est un rapport... Puis je pense qu'il y a eu un travail colossal qui a été
fait à l'époque. Ils ont fait quand même le tour du Québec. Ils ont
rencontré beaucoup de monde.
Et un des
éléments sur lesquels ça achoppe, M. le Président, c'est tout simplement que le
gouvernement libéral ne veut pas
inscrire le mot «laïcité» dans le projet de loi. Le mot «laïcité». Non, mais il
y a-tu de quoi de plus normal comme législateur
d'inscrire dans un projet de loi un terme, en fait, qui nous a été donné par
l'histoire du Québec. Ma collègue tantôt
en a parlé, dans les années 60, les religieuses, les religieux ont quitté
la sphère publique au niveau de l'éducation, au niveau de la santé. Et ça s'est fait, M. le Président, d'une façon
extraordinaire. Vraiment, là, extraordinaire. Alors, quand on regarde, là, le mot «laïcité», c'est carrément
le reflet du parcours historique du Québec. Pourquoi, M. le Président,
s'entêter?
J'ai une
demande à la ministre. Je sais qu'elle utilise beaucoup son droit de réplique,
j'ose espérer qu'elle le fera suite à
mon intervention. Et, M. le Président, je lui demande de me dire pourquoi,
pourquoi le mot «laïcité», elle ne veut pas le mettre dans la loi. M. le Président, Bouchard-Taylor... Écoutez
bien parce que, dans le projet de loi, actuellement, on parle de neutralité religieuse de l'État. Ça,
c'est le titre, hein, du projet de loi. Mais le rapport Bouchard-Taylor,
voici... et nous, on prend juste cette définition-là, là, on n'en prend pas 50,
mais je pense qu'elle est pas mal, hein? Je vous la lis. Alors, «régime fondé sur quatre principes
constitutifs, soit : deux finalités profondes — la liberté de conscience, [la liberté]
des convictions [...] — je pense que, jusque là, ça va — et deux principes structurants — la séparation de l'Église et de
l'État et la neutralité de ce dernier».
M. le
Président, c'est le parcours historique du Québec, la laïcité. Non, mais
j'allais dire... Je ne le dirai pas. J'allais dire : Bout de cierge! Mais ça se dit, hein? Pas de problème avec
ça. Bout de cierge, y a-tu de quoi de plus simple que ça à faire? Alors ça,
c'est un premier pas, M. le Président, qu'on n'a pas compris, là, ici, là,
honnêtement. Peut-être qu'il faut nous répéter pourquoi on n'a pas compris,
mais on n'a pas compris ça, comment ça se fait que la ministre s'entête à ne
pas vouloir mettre le mot laïcité dans un projet de loi qui, ma foi, va
de soi. Mais enfin. Mais moi, je ne perds pas espoir, M. le Président.
Donnons-nous la chance encore, hein? On est à l'adoption de principe, là — adoption
de principe, M. le Président?
Une voix : ...
M. Villeneuve :
Considération? Considération. Excusez-moi. Oui. On est à considération, M. le
Président.
Le Vice-Président (M.
Gendron) : ...
M.
Villeneuve : Considération du rapport. Et, comme l'ont dit si
bien mes collègues, plusieurs de mes collègues tantôt, avec le consentement,
on peut tout faire. On peut régler ça, on peut régler ça, M. le Président. C'est à portée de main,
c'est à portée de main de pouvoir enfin... Moi, j'interpelle — et
je vois que j'ai l'attention de plusieurs, là — les
collègues du Parti libéral. Parlez à votre ministre, parlez au premier ministre, allez le voir, dites-lui que c'est encore possible. Ce n'est pas vrai qu'on est à une étape, présentement, où plus rien n'est possible, ce n'est pas vrai. Faisons-nous, M. le Président... j'allais dire «ce cadeau». Faisons ce cadeau à
la population du Québec : entendons-nous, montrons-leur que nous sommes capables de s'élever, on est capables
de maturité. Il me semble, M. le
Président, que la population
du Québec, c'est là qu'elle nous attend. Faisons-le, M. le Président. Moi, je demande sincèrement et honnêtement, on peut le faire, et je pense qu'on doit
le faire.
Je parlais de
la laïcité, hein, le mot honni, comme disait la députée
de Taschereau, le mot qui semble honni du côté du Parti
libéral et qui, pourtant, est le reflet de notre parcours historique, donc,
qu'ils se refusent à mettre dans la loi.
M. le Président, on a demandé... Vous connaissez le devoir de réserve des
fonctionnaires sur le plan politique,
ça fonctionne, ça fonctionne très bien,
hein, le droit de réserve des fonctionnaires sur le plan politique.
Alors, en principe, les fonctionnaires ne doivent pas... souvent, on ne
sait pas, M. le Président, sont-ils péquistes, sont-ils libéraux, sont-ils caquistes? On ne sait pas, puis ça fonctionne
bien. Ils ont l'obligation de cette réserve-là. Et nous, on dit : Bien,
faisons-le pour la religion, hein?
Donc, on demande, ni plus ni moins, M.
le Président, donc, avoir le devoir
de réserve des fonctionnaires dans l'expression de leurs croyances
religieuses. Il me semble, ce n'est pas compliqué.
Voyez-vous,
les gens qui m'écoutent, là, voyez-vous, la laïcité, hein, c'est le
parcours du Québec, on demande de le mettre dans la loi, les gens qui nous écoutent, là, trouvez-vous ça
trop? Si vous ne trouvez pas ça trop, écrivez à la ministre, expliquez-lui que c'est facile, laïcité, ça ne compromet rien au projet de loi, puis on va de l'avant. Au
niveau du devoir de réserve
sur les croyances religieuses des fonctionnaires, ça se fait sur le plan politique,
faisons-le sur le plan religieux. Il est où,
le problème? Je le dis, M. le Président : Les
gens qui nous écoutent... Je lance un appel à tous, M. le Président. Écrivez à la ministre, envoyez des
courriels, allez voir vos députés libéraux, allez voir vos députés libéraux,
les gens qui nous écoutent, parce que la CAQ est d'accord, le Parti québécois
est d'accord. On représente 70 % de la population.
Parce qu'il y a
un système, M. le
Président, comme vous le savez, hein,
qui n'est pas un système proportionnel, qui fait en sorte qu'il y a carrément, là, un problème. Ça, on le réglera,
hein, M. le Président. Vous savez, encore là, que les oppositions ont demandé au gouvernement d'aller vers une
proportionnelle. On l'a demandé, et la population le veut, la
population le veut. Vous n'avez pas, présentement... On regarde, il y a plusieurs partis politiques qui naissent à gauche, à droite. Pourquoi? Parce que les gens, les Québécois,
ils veulent magasiner, les Québécois, ils veulent avoir le choix, et, si on ne le donne pas, et si les législateurs
que nous sommes ici, nous ne le faisons pas, bien, les Québécois,
par la force des choses, vont y
arriver eux-mêmes, à leur façon. Et on voit l'éclatement des partis politiques,
hein? La CAQ, branche du Parti
libéral — je pense qu'ils l'ont bien vu dans Louis-Hébert, là — la
CAQ, branche du Parti libéral, de notre côté, on peut parler de QS,
branche du PQ, bon... Je ne veux pas aller dans les détails, là, puis... Bon.
Mais, en tout cas, tout ça pour vous dire, M.
le Président, là, et je le demande à
nouveau... Il y a trois éléments, quatre éléments qui nous semblent, de notre côté, ici, autant la CAQ que
le Parti québécois, qui nous semblent des éléments fondamentaux qui doivent être insérés dans le projet de loi. Il n'est pas trop tard pour
le faire. On peut s'entendre, s'asseoir et régler la situation, M. le
Président, et enfin, et enfin passer à autre chose, M. le Président. Merci.
• (17 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de
Berthier. Et je cède maintenant la parole
à M. le député de Richelieu pour son intervention sur le rapport. À vous, M. le
député de Richelieu, en vous indiquant que vous avez 10 minutes.
M. Sylvain Rochon
M.
Rochon : Merci, M. le
Président. Je ne sais pas si vous avez entendu le député de Berthier regretter
de ne pas avoir droit à une réplique de la ministre.
Alors, M. le
Président, ce projet de loi sur la neutralité religieuse de l'État, bien, moi,
il me paraît bien neutre. Neutre au
sens où il ne fait pas avancer le Québec. Il faudrait peut-être vérifier, là où
l'Assemblée nationale conserve les objets
qui ont pu être perdus ici, si on ne trouverait pas le slogan du Parti libéral,
Ensemble, on fait avancer le Québec. Il faudrait regarder si le
slogan, ils ne l'ont pas perdu.
Écoutez, nous
voulions faire inscrire le principe de la laïcité de l'État dans la charte
québécoise des droits de la personne.
C'est rejeté par le gouvernement, qui favorise la neutralité religieuse. Le
choix du terme «neutralité», il n'est pas anodin. Il ne relève pas d'une assimilation sémantique. Et là je cite le
Mouvement laïque québécois : «...entre le concept de neutralité et celui
de laïcité. Neutralité et laïcité ne sont pas la même chose.» Ce ne sont pas
des synonymes. La laïcité, elle est
définie généralement à l'aide — et les collègues le disaient — de quatre grands principes. Ce n'est pas
inutile de le rappeler, là, parce
qu'on ne retient pas ce terme-là, et, pourtant, ce terme-là, bien, c'est celui
qui répond aux attentes des Québécoises
et des Québécois. C'est celui dont le Québec a été façonné, dans les faits,
hein? Le Québec a façonné, dans les faits,
un régime de laïcité qui lui est propre. On le voit, là, quand on observe le
parcours historique et sociologique du Québec.
Donc, la
laïcité, ce sont quatre grands principes : protection de l'égalité des
personnes, protection de la liberté de conscience
et de la liberté de religion, séparation des religions et de l'État, et
neutralité de l'État à l'égard des religions. Qui peut être contre ça?
La neutralité religieuse de l'État, c'est donc l'une des composantes de la
laïcité. L'une des composantes
de la laïcité. Parce qu'en dehors du champ de la laïcité la neutralité
religieuse, elle est — et je cite à nouveau le Mouvement laïque québécois — «orpheline
et sans grande portée».
Le
rapport Bouchard-Taylor, on en a beaucoup parlé ici également aujourd'hui. Il
définit comme suit la neutralité religieuse,
M. le Président : «Dans un contexte de pluriconfessionnalité[...],
philosophie politique qui interdit à l'État de prendre parti en faveur d'une religion ou d'une vision du monde aux
dépens d'une autre.» Aux dépens d'une autre. Ça, c'est essentiel de retenir ça,
parce que ça signifie qu'un État peut afficher un parti
pris favorable aux religions à condition de n'en exclure aucune. Par
exemple, accorder à toutes les
religions les mêmes exemptions fiscales, financer à même les fonds publics toutes les écoles privées
conventionnelles, accorder aux religions le droit de remplir des registres
civils de mariage, ce sont des pratiques qui sont compatibles avec le concept
de neutralité religieuse, alors que la laïcité commande plutôt de n'accorder aucune faveur à aucune
religion en les considérant toutes sur le même pied que n'importe quel autre
système idéologique.
Alors,
il y a plusieurs organismes qui sont venus demander au gouvernement que ce terme, «laïcité», soit intégré à la loi, la CSQ, par exemple, qui indique que le gouvernement devrait reconnaître clairement que l'État québécois est un État laïque. La CSQ dit que c'est
une distinction qui est importante, puisque la laïcité est un concept plus
large que la simple neutralité d'État, qui,
elle, ne vise qu'à empêche ce dernier de favoriser une religion par rapport à une autre. Alors, nous croyons
qu'il est temps que le Québec consacre, à même la Charte des droits et libertés de la personne, le caractère laïque de l'État québécois
et de ses institutions publiques.
Et
puis il y a également de surprenant ce refus de la part du gouvernement de reconnaître, de proclamer le devoir de réserve des fonctionnaires dans l'expression de leurs croyances
religieuses. On a demandé ça, et la ministre nous a dit non. Et l'article 4 du projet
de loi, là, dit ceci : «Un membre du personnel d'un organisme public doit
faire preuve de neutralité religieuse dans l'exercice de ses fonctions.
«Il
doit veiller à ne pas favoriser ni défavoriser une personne en raison de
l'appartenance ou non de cette dernière à une religion.» Et nous voulions que soit ajouté : «[Un membre] du
personnel d'un organisme [doit] aussi faire preuve de réserve en
ce qui a trait à l'expression de
[ses] convictions religieuses dans l'exercice de [ses] fonctions.» Il me semble
que c'est élémentaire, surtout que — et là, cette fois, je réfère au mémoire des
Juristes pour la laïcité et la neutralité religieuse de l'État — surtout que «la neutralité religieuse de l'État[, elle] n'est jamais
définie au sein du projet de loi ni ailleurs
dans le corpus législatif du Québec,
ce qui s'avère une omission législative à laquelle il faut remédier[...].
[Alors,] en ce qui a trait aux agents de l'État, leur obligation "de faire preuve de
neutralité religieuse" — nous
disent les juristes — n'est
assortie d'aucun devoir corollaire de réserve dans l'expression de leurs
croyances religieuses dans l'exercice de leurs fonctions, ce qui est étonnant si l'on compare avec les prescriptions
des articles 10 et 11 de la Loi sur la fonction publique en matière d'expression politique. La liberté d'expression politique
constitue une liberté civile fondamentale protégée elle aussi par les chartes des droits, au même titre
que la liberté de religion.» Mais refus d'inclure, donc, ce devoir de réserve
des fonctionnaires dans l'expression de leurs croyances religieuses.
La
ministre de la Justice, elle a dit qu'il s'agissait — elle a dit ça en commission — d'un projet de loi libéral. Bien, nous aurions voulu, M. le Président, nous, qu'il
se soit agi... et nous avons encore l'espoir que ça puisse devenir le cas...
nous souhaitons, nous, qu'il s'agisse
non pas d'un projet de loi libéral ou péquiste ou caquiste, ou solidaire, nous
souhaitons qu'il s'agisse d'un projet
de loi québécois qui donnera lieu à l'adoption d'une loi québécoise. C'est ça
qui serait heureux comme perspective.
Et ma collègue de Taschereau a beaucoup oeuvré à trouver une solution
consensuelle à l'enjeu de la laïcité de l'État et de l'encadrement des
accommodements raisonnables.
Alors,
pour que le projet de loi n° 62 réponde à ce besoin de consensus, il
faudrait qu'il soit bonifié par l'inscription explicite de la laïcité de
l'État; qu'il soit bonifié par l'élimination de l'exception prévue à
l'obligation de donner, recevoir les
services à visage découvert, et c'est élémentaire, ça aussi, me semble-t-il;
ensuite, qu'il soit bonifié par l'ajout de la position consensuelle du rapport Bouchard-Taylor sur
l'interdiction des signes religieux pour les fonctionnaires en position d'autorité, les juges, les policiers, les
gardiens de prison; qu'il soit bonifié, le projet de loi, par l'ajout de
balises plus claires pour encadrer
les demandes d'accommodements raisonnables, comme le réclament les intervenants
des milieux de l'éducation notamment; et qu'ils soient bonifiés par
l'interdiction explicite du tchador dans la fonction publique.
Nous
avons présenté une série d'amendements sur lesquels nous allons voter. La
chance existe encore, M. le Président, que
cette Assemblée nationale se dote, comme je vous le disais, non d'une loi
libérale, péquiste, caquiste ou solidaire, mais d'une loi québécoise qui
proclamera la laïcité de l'État.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : M. le député de Richelieu, je vous
remercie de votre intervention. Et je cède maintenant la parole à M. le député de René-Lévesque, en vous indiquant
qu'il vous reste une minute pour débuter votre intervention, et, après
ça, bien, on devra suspendre compte tenu du temps imparti. Vous avez une
minute. À vous.
M. Martin Ouellet
M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le
Président. Je vais utiliser cette
minute de façon judicieuse puisque la ministre de
la Justice a utilisé un droit
d'interrogation, un droit de question, suite aux discussions que nous avons
eues. Et elle a soulevé, dans un
point de presse, un engagement de notre chef, à savoir que nous allions, dans ce
projet de loi là, travailler à ne pas empêcher l'adoption,
M. le Président.
Alors,
je suis toujours surpris, et j'ai vécu le même
paradigme lors du projet de loi
n° 122, lorsqu'on se lève en
Chambre et qu'on fait valoir notre point et
qu'on débat, de se faire accuser de faire du ralentissement ou, du moins, de
retarder une étape prépondérante à l'adoption d'un projet de loi.
Alors,
M. le Président, moi, ce que je veux dire, en commençant,
c'est : Quand je viens à l'Assemblée
nationale, les citoyens,
citoyennes de ma circonscription me demandent de prendre la parole. Et malheureusement, dans le débat sur la laïcité, sur la neutralité, mais sur le projet
de loi en question, plusieurs médias ont parlé...
Ajournement
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
...mais je suis obligé... il est vraiment 6 heures pile, et nous devons mettre fin à
nos travaux compte tenu de l'heure.
Et je vous indique que les travaux de cette
Chambre, compte tenu de l'heure, sont ajournés à demain, jeudi, le 5 octobre, à
9 h 40. Les travaux sont ajournés.
(Fin de la séance à 18 heures)