L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 3 novembre 2016 - Vol. 44 N° 204

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Féliciter la ville de Montmagny, lauréate du prix Distinction du Groupe Entreprises en santé

M. Norbert Morin

Féliciter les lauréats de la Finale internationale du Challenge francophone d'entrepreneurship

M. François Gendron

Souligner le succès du Colloque intergénérationnel à Laval

M. Saul Polo

Féliciter MM. Philip Brault et Benjamin Joanis pour leurs performances au Championnat
québécois de wakeboard Bisson Chevrolet

M. Jean-François Roberge

Rendre hommage à M. Réjean Thériault pour ses 55 ans de carrière en tant que pompier

M. Jean D'Amour

Rendre hommage à Mme Monique Verschelden pour son engagement communautaire

Mme Françoise David

Souligner le Mois de la littératie financière

M. Sébastien Proulx

Souligner le travail de l'organisme Jeunes en santé

Mme Chantal Soucy

Rendre hommage à Mme Joyce Elizabeth Cobb Fennell pour son engagement politique
et social

M. Carlos J. Leitão

Féliciter les élus de la MRC de D'Autray de mettre en valeur la culture et l'histoire
du Québec

M. André Villeneuve

Présence de M. Jean-Martin Aussant, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Présence de M. René Blouin , ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Décision de la présidence sur la recevabilité de la demande de débat d'urgence concernant
les révélations relatives à la surveillance de journalistes et de sources journalistiques
par des services policiers


Dépôt de documents

Réponses à des pétitions

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

Lettre du ministre fédéral de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire en réponse à la motion
concernant le lait diafiltré

Lettre de démission de M. Marc Lacroix à titre de président de la Commission de la fonction
publique


Dépôt de rapports de commissions

Élection à la présidence de la Commission de l'administration publique

Étude détaillée du projet de loi n° 105 Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique

Élection à la présidence de la Commission de l'économie et du travail

Étude détaillée du projet de loi n° 70 Loi visant à permettre une meilleure adéquation
entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi

Élection à la vice-présidence de la Commission des finances publiques

Dépôt de pétitions

Commencer rapidement les travaux sur les ponts Lacaille et Brodeur dans la municipalité
de Saint-Jean-Baptiste

Autoriser la construction d'une école dans le secteur de la gare à Mont-Saint-Hilaire

Questions et réponses orales

Surveillance des journalistes par les services policiers

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

Présomption de fraude visant des collecteurs de fonds du Parti libéral du Québec

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Enquête sur une présomption de fraude visant des collecteurs de fonds du Parti libéral
du Québec

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Martin Coiteux

Mesures concernant la surveillance des journalistes par les services policiers

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

Présumée fraude impliquant des collecteurs de fonds du Parti libéral

M. Éric Caire

M. Martin Coiteux

M. Éric Caire

M. Martin Coiteux

M. Éric Caire

M. Martin Coiteux

Projet de loi sur la protection des divulgateurs d'actes répréhensibles

Mme Nicole Léger

M. Carlos J. Leitão

Mme Nicole Léger

M. Carlos J. Leitão

Mme Nicole Léger

M. Carlos J. Leitão

Transport des échantillons sanguins vers des laboratoires spécialisés

Mme Diane Lamarre

M. Gaétan Barrette

Mme Diane Lamarre

M. Gaétan Barrette

Mme Diane Lamarre

M. Gaétan Barrette

Présomption de fraude visant des solliciteurs de fonds du Parti libéral

M. Éric Caire

M. Martin Coiteux

M. Éric Caire

M. Martin Coiteux

M. Éric Caire

M. Martin Coiteux

Correctifs envisagés pour éliminer les disparités entre les comptes de taxe scolaire

M. Alexandre Cloutier

M. Sébastien Proulx

M. Alexandre Cloutier

M. Sébastien Proulx

M. Alexandre Cloutier

M. Sébastien Proulx

Mode de nomination des dirigeants d'organismes publics

M. Benoit Charette

Mme Rita Lc de Santis

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de réduire les seuils
annuels d'immigration et d'accentuer les efforts consacrés à l'intégration et à la francisation
des immigrants


Motions sans préavis

Féliciter les finalistes des prix Reconnaissance du Forum des jeunes de la fonction publique
québécoise

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. François Legault

Mme Françoise David

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Débat d'urgence sur les révélations relatives à la surveillance de journalistes et de
sources journalistiques par des services policiers

M. François Bonnardel

M. Martin Coiteux

Mme Véronique Hivon

Mme Manon Massé

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Carrière

Mme Martine Ouellet

M. Jean Rousselle

M. Pascal Bérubé

M. Patrick Huot

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon jeudi à tous et toutes. Vous pouvez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous allons débuter nos travaux avec la rubrique des déclarations de députés, et je vais débuter cette rubrique avec la déclaration de M. le député de Côte-du-Sud.

Féliciter la ville de Montmagny, lauréate du prix
Distinction du Groupe Entreprises en santé

M. Norbert Morin

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, j'aimerais offrir mes félicitations à la ville de Montmagny, qui a décroché le prix Distinction du Groupe Entreprises en santé. Cette distinction vise à reconnaître les employeurs ayant implanté des pratiques efficaces dans le domaine de la santé, du mieux-être et de la productivité du milieu de travail.

En 2012, la ville de Montmagny obtenait la certification Entreprise en santé élite. En mai dernier, l'organisation mettait de l'avant un autre projet rassembleur en participant au Grand Défi Entreprise Pierre-Lavoie aux côtés de quatre autres entreprises. Bilan de santé, programme de remise en forme, 20 employés de la ville, 20 citoyens se sont inscrits au grand défi pour un total de 265 personnes en provenance des quatre autres entreprises de la ville qui ont embarqué dans cette initiative d'une durée de trois mois.

Je tiens à souligner l'écoute, la sensibilité et les réels efforts de l'organisation pour améliorer le milieu de vie des employés. Bravo à tout ce beau monde!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Côte-du-Sud. Maintenant, je me tourne vers M. le député d'Abitibi-Ouest pour sa déclaration d'aujourd'hui.

Féliciter les lauréats de la Finale internationale du
Challenge francophone d'entrepreneurship

M. François Gendron

M. Gendron : Mme la Présidente, cet automne, trois jeunes étudiants du programme de technique de comptabilité et de gestion du cégep de l'Abitibi-Témiscamingue, mais campus d'Amos, remportaient la victoire lors de la Finale internationale du Challenge francophone d'entrepreneurship qui se tenait à Limoges, en France. Ce concours international vise à faire la promotion de l'entrepreneuriat et de la création d'entreprises.

Samuel Lynch, Anthony Dalpé et Nelson Groesenek-Lambert ont remporté ce prix grâce à leur projet Harrican'O, une application mobile qui, à l'aide d'une sonde, permet d'analyser la composition de l'eau et de déterminer rapidement si elle potable ou non. Par son accessibilité à la population mondiale, cette invention pourrait faire une réelle différence en contribuant à améliorer la qualité de la vie des communautés les plus vulnérables.

Alors, c'est avec énormément de fierté que je félicite Samuel, Anthony et Nelson et que je les encourage à poursuivre. Je souhaite qu'Harrican'O se concrétise et qu'on le retrouve très bientôt sur nos marchés partout dans le monde. Bravo, les gars!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci. Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Maintenant, je reconnais M. le député de Laval-des-Rapides.

Souligner le succès du Colloque
intergénérationnel à Laval

M. Saul Polo

M. Polo : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'ai eu le plaisir d'assister, vendredi le 21 octobre dernier, à la 19e édition du Colloque intergénérationnel organisé conjointement par la Maison des Grands-Parents de Laval et l'école secondaire Mont-de-La Salle à Laval-des-Rapides.

Placée sous le signe du dialogue et de la compréhension mutuelle et ayant pour thèmes l'éducation, le travail, la religion et la famille, cette édition s'est démarquée par un fort taux de participation mais également par une qualité d'organisation exceptionnelle que j'aimerais saluer. J'aimerais également rappeler l'importance de cette initiative qui permet aux plus jeunes de bénéficier du savoir, de la maturité mais surtout de la sagesse de nos aînés.

Je souhaite donc féliciter les organisateurs et les bénévoles de la Maison des Grands-Parents Laval ainsi que ceux de l'école secondaire Mont-de-La Salle pour cet événement réussi. Je souhaite également souligner la qualité de la conférence offerte par M. Marcel Tessier, un historien de renom qui a su captiver l'auditoire. Félicitations à toutes et tous! Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Maintenant, la parole est à M. le député de Chambly.

Féliciter MM. Philip Brault et Benjamin Joanis pour leurs performances
au Championnat québécois de wakeboard Bisson Chevrolet

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Mme la Présidente, le 27 août dernier avait lieu, à Thetford Mines, le championnat québécois 2016 de planche nautique. À cette occasion, deux jeunes de la circonscription de Chambly se sont démarqués. Philip Brault, un jeune Granbasilois de 15 ans seulement, s'est ainsi classé troisième dans la catégorie Professionnels, alors qu'il se mesurait à planchistes âgés d'une vingtaine d'années. Tout un accomplissement pour le jeune planchiste qui a accumulé les podiums tout au long de l'année. Depuis ses débuts dans ce sport, Philip impressionne d'ailleurs autant par ses performances que par son jeune âge.

De son côté, Benjamin Joanis, un jeune Carignanois de 11 ans, a lui aussi brillé lors de ce tournoi, dominant ses adversaires. C'était sa première compétition de planche nautique, et il a terminé en première position. Impressionnant!

Il me fait donc plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour souligner les performances de ces deux jeunes athlètes mais aussi pour leur souhaiter la meilleure des chances dans leurs projets à venir.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Chambly. Et maintenant je me tourne vers M. le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata pour sa déclaration d'aujourd'hui.

Rendre hommage à M. Réjean Thériault pour ses
55 ans de carrière en tant que pompier

M. Jean D'Amour

M. D'Amour : Alors, merci, Mme la Présidente. Il y a quelques semaines, j'ai eu l'occasion de participer au grand rassemblement des pompiers de l'Est du Québec. À cette occasion, j'ai eu l'opportunité, le privilège de rencontrer M. Réjean Thériault. M. Thériault a exercé son métier de pompier à Rivière-Bleue, au Témiscouata, pendant une période de 55 ans. Imaginons ensemble ce que ça représente, 55 ans de dévouement, d'être disponible le jour comme la nuit pour éventuellement sauver des vies, pour intervenir directement sur des incendies, être en première ligne et protéger ses concitoyens et ses concitoyennes.

55 ans, ce n'est peut-être pas un record, mais on va s'entendre pour dire que c'est une moyenne tout à fait exceptionnelle. Je tiens aujourd'hui à lui rendre hommage, à M. Thériault. Et je suis certain qu'entouré des membres de sa famille tout ce monde est très fier aujourd'hui de cette performance, de cet engagement sans bornes.

Et, par la même occasion, je parle de M. Thériault, mais il faut voir que la présence de nos pompiers, des hommes et des femmes sur le terrain, chez nous, dans nos régions, ça fait une grande différence. Alors, il faut les remercier, être conscients de leur implication, Mme la Présidente. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Maintenant, Mme la députée de Gouin, la parole est à vous.

Rendre hommage à Mme Monique Verschelden pour
son engagement communautaire

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à une femme d'exception qui vient tout juste de prendre sa retraite.

Depuis plus de 30 ans, Monique Verschelden est engagée dans le quartier Rosemont—La Petite-Patrie pour venir en aide aux plus vulnérables d'entre nous. Les actions qu'elle a menées dans le domaine de la réinsertion à l'emploi sont remarquables et inspirantes pour qui veut agir contre la pauvreté. Femme de coeur et de convictions, féministe et humaniste, Mme Verschelden a oeuvré dans différents organismes tels le Carrefour communautaire de Rosemont L'Entregens, la CDEC Rosemont—Petite-Patrie et Pro-Prêt, un OBNL qu'elle a mis sur pied avec deux de ses collègues pour aider des jeunes à sortir de la pauvreté par leur insertion en emploi.

C'est grâce à des citoyennes comme Monique Verschelden que le progrès social avance pas à pas vers un avenir plus égalitaire. Je salue donc sa carrière, son engagement et sa générosité. Merci, Monique.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée de Gouin. Alors, toujours à la rubrique des déclarations de députés, je reconnais maintenant M. le député de Jean-Talon.

Souligner le Mois de la littératie financière

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais que nous prenions quelques instants aujourd'hui pour souligner le Mois de la littératie financière, qui encourage l'acquisition de connaissances financières par l'ensemble de la population. En effet, comme le mentionne le thème de cette année, S'informer, c'est payant!, s'informer permet de gérer judicieusement ses dettes et ses économies et s'informer permet également de mieux comprendre ses droits et ses responsabilités.

Alors, à cet égard, le gouvernement a bien compris l'importance de l'éducation financière. Voilà pourquoi que nous souhaitons apprendre aux jeunes à prendre de bonnes décisions. J'annonçais d'ailleurs récemment que le cours d'éducation financière deviendra obligatoire pour la rentrée scolaire 2017. Ainsi, nous favorisons l'adoption de comportements qui sont responsables, nous nous assurons que les jeunes soient mieux préparés à gérer leurs finances personnelles et à faire des choix éclairés dans la vie. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci, M. le député de Jean-Talon. Mme la députée de Saint-Hyacinthe, c'est à votre tour de nous faire votre déclaration.

Souligner le travail de l'organisme Jeunes en santé

Mme Chantal Soucy

Mme Soucy : Récemment, nous avons appris — les données de l'Institut national de santé publique — que près de 25 % des jeunes Québécois seraient en surplus de poids. Les chiffres sont alarmants et nous démontrent l'importance d'agir. C'est pourquoi aujourd'hui je tiens à souligner le travail d'un organisme de Saint-Hyacinthe : Jeunes en santé. Depuis 12 ans, Jeunes en santé fait la promotion de l'activité physique et de la saine alimentation dans 31 écoles de ma circonscription. Au total, c'est plus de 6 000 étudiants qui bénéficient de ces services chaque année.

Malheureusement, à l'heure où l'on se parle, l'avenir de Jeunes en santé est mis en péril par la fin annoncée de son financement. Pourtant, les statistiques le démontrent, les organismes comme Jeunes en santé sont nécessaires dans nos écoles. Alors, je tiens à remercier toute l'équipe de Jeunes en santé, représentée aujourd'hui par son président, M. Gaétan Dion, et sa coordonnatrice, Mme Véronique Laramée. Je leur donne tout mon appui et je demande au gouvernement d'en faire autant pour garder cet organisme en vie. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup. Nous vous souhaitons la bienvenue à l'Assemblée nationale. Et maintenant, pour la prochaine déclaration, je reconnais M. le député de Robert-Baldwin.

Rendre hommage à Mme Joyce Elizabeth Cobb Fennell
pour son engagement politique et social

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Merci, Mme la Présidente. So, I'd like to take a minute today to pay tribute to Mrs. Joyce Elizabeth Cobb Fennell, who passed away at the tender age of 92 last September. Joyce dedicated 40 years of her life to politics into the community in the riding of Robert-Baldwin and was awarded the Prize Lucienne-Saillant in 2008. She was passionate about politics and was never afraid to debate ideas, to engage with people and to listen to the concerns of others.

Joyce was an exceptional woman. The Robert-Baldwin riding will always remember Joyce Fennell and her contribution to the betterment of Québec society. Joyce, you'll be greatly missed.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Maintenant, pour clore cette rubrique de déclaration de députés, je cède la parole à M. le député de Berthier.

Féliciter les élus de la MRC de D'Autray de mettre
en valeur la culture et l'histoire du
Québec

M. André Villeneuve

M. Villeneuve : Mme la Présidente, la MRC de D'Autray, c'est un territoire qui allie fleuve, plaines, montagnes, lacs et rivières, mais c'est surtout un territoire habité par des gens accueillants et chaleureux. Mais elle se distingue aussi sur un autre plan.

En effet, les élus des 15 municipalités qui en font partie ont résolument décidé de mettre en valeur notre culture et notre histoire. Ainsi, dans nos villes et villages, on voit se multiplier des oeuvres d'art qui s'intègrent au tissu urbain et à l'environnement, des monuments historiques sont restaurés, catalogués, des conférences et des expositions mettent en valeur des pans de notre histoire. À cela s'ajoute la mise en valeur de notre culture moderne. Ainsi, les festivals, les salles de spectacle, les salons d'artisanat et même les marchés publics offrent aux citoyens tout un éventail de possibilités.

Mme la Présidente, occuper le territoire et le développer passe aussi par la culture et la reconnaissance de nos racines. Par leurs gestes, les élus de D'Autray envoient le message que la culture est l'âme d'un peuple et que nous devons tous nous assurer de son rayonnement ici, chez nous, au Québec, et sur toute la planète. Je tiens donc à féliciter toutes les personnes, et plus spécifiquement les élus, qui ont choisi de mettre la culture et l'histoire du Québec au centre de nos vies ainsi qu'à les assurer de mon soutien et de toute mon admiration. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Berthier. Ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés, et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 heures)

Le Président : Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Présence de M. Jean-Martin Aussant,
ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Merci. J'ai reconnu dans nos tribunes notre ancien collègue Jean-Martin Aussant, ancien député de Nicolet. Je voudrais le saluer.

Présence de M. René Blouin, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale

Et, de l'autre côté, je vois René Blouin, ancien député de Rousseau.

Décision de la présidence sur la recevabilité de la demande de débat d'urgence
concernant
les révélations relatives à la surveillance de journalistes
et de sources journalistiques par des services policiers

Et j'ai reçu... Ah! vous pouvez vous asseoir, là. J'ai reçu, conformément aux dispositions des articles 88 et suivants du règlement, une demande de débat d'urgence de la part du député de Granby et leader du deuxième groupe d'opposition. Sa demande concerne, et je cite, «les révélations troublantes relatives à la surveillance de journalistes et de sources journalistiques par des services policiers. Cette demande s'inscrit dans le contexte où, en début de semaine, le Service de police de la ville de Montréal a reconnu avoir placé un journaliste sous surveillance électronique et effectué des vérifications sur trois autres. S'ajoute à cela le fait qu'hier après-midi la Sûreté du Québec a confirmé avoir scruté des registres téléphoniques de six journalistes de différents médias.»

Pour déterminer si une demande de débat d'urgence est recevable, la présidence doit examiner les critères prévus par le règlement et par la jurisprudence. Ainsi, une telle demande doit concerner un sujet précis qui relève de l'Assemblée et qui ne peut ou n'aurait pu être discuté autrement. Le sujet doit également concerner une crise aiguë et soudaine ou l'aggravement... excusez-moi, l'aggravation d'une situation existante.

Dans les circonstances, le débat soulevé par la présente demande relève, sans contredit, de la compétence de l'État québécois. En outre, le principal critère de recevabilité consiste à juger de l'urgence de tenir un tel débat. À cet égard, les circonstances doivent d'abord être exceptionnelles et le sujet, d'une importance telle qu'il justifie l'interruption des travaux législatifs de l'Assemblée. Compte tenu des récentes informations qui démontrent l'implication de plus d'un service policier et que cela touche plusieurs journalistes, je constate qu'il s'agit de l'aggravation d'une situation pour laquelle les parlementaires ont un intérêt marqué depuis le début de la semaine.

En les circonstances, je suis d'avis que cette question est d'une importance telle qu'elle justifie la tenue d'un débat d'urgence et l'interruption des travaux législatifs. Je déclare donc la demande de débat d'urgence recevable.

Nous poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Fournier : Oui, M. le Président. Je dépose la réponse du gouvernement aux pétitions présentées par la députée de Taillon le 22 septembre 2016.

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

Je dépose également les réponses du gouvernement aux questions inscrites au feuilleton le 18 octobre 2016 par le député de Chambly.

Le Président : Alors, ces documents sont déposés.

Lettre du ministre fédéral de l'Agriculture et de
l'Agroalimentaire en réponse à la motion
concernant le lait diafiltré

Pour ma part, je dépose une lettre que m'a adressée le ministre fédéral de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, M. Lawrence MacAulay, en réponse à la motion unanime adoptée par l'Assemblée nationale le 2 juin 2016 concernant le lait diafiltré.

Lettre de démission de M. Marc Lacroix
à titre de président de la Commission
de la fonction publique

Je dépose également une lettre que m'a adressée le président de la Commission de la fonction publique, M. Marc Lacroix, m'informant qu'il quittera ses fonctions à la suite de sa nomination à titre de sous-ministre des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports à compter du 7 novembre 2016.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le Président de la Commission de l'administration publique et député de Jonquière.

Élection à la présidence de la Commission
de l'administration publique

M. Gaudreault : Oui. Alors, M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de l'administration publique qui, le 2 novembre 2016, a procédé à l'élection d'une excellente présidence de la commission.

Le Président : Je pense que le président est un peu juge et partie sur ce dernier commentaire. Le rapport est déposé. Et je vous félicite, d'ailleurs.

Mme la Présidente de la Commission de la culture et de l'éducation et députée de Jeanne-Mance—Viger.

Étude détaillée du projet de loi n° 105

Mme Rotiroti : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission de la culture et de l'éducation qui, le 29 septembre, les 5, 6, 26, 27 octobre et le 1er novembre 2016, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Le Président : Ce rapport est déposé. M. le député de Saint-François.

Élection à la présidence de la Commission
de l'économie et du travail

M. Hardy : ...je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du travail qui, le 2 novembre 2016, a procédé à l'élection à la présidence de la commission.

Étude détaillée du projet de loi n° 70

Je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du travail qui, les 14, 15, 16, 17, 21, 22, 23 mars, 5, 7, 12, 27, 28 avril, 10, 11, 12, 17, 18, 24, 25, 26, 31 mai, 1er, 2, 7, 8, 9 juin, 23, 24 août, 20, 22, 28 septembre, 4, 19, 20, 25, 26, 27 octobre et 1er novembre 2016, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Le Président : Alors, ce rapport est déposé. Maintenant, M. le vice-président de la Commission des finances publiques et député de Beauce-Nord.

Élection à la vice-présidence de la
Commission des finances publiques

M. Spénard : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission des finances publiques qui, le 2 novembre 2016, a procédé à l'élection de la vice-présidence à la commission.

Le Président : Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député de Borduas.

Commencer rapidement les travaux sur les ponts Lacaille et Brodeur
dans la municipalité de Saint-Jean-Baptiste

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 243 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que le pont Lacaille à Saint-Jean-Baptiste est fermé depuis février 2016;

«Considérant que le pont Brodeur est partiellement fermé depuis septembre 2016;

«Considérant que les ponts Lacaille et Brodeur se trouvent au coeur du village de Saint-Jean-Baptiste et que des milliers de citoyens utilisent ces chemins tous les jours;

«Considérant le détour important provoqué par la fermeture du pont Lacaille;

«Considérant le délai d'attente causé par les feux temporaires installés sur le pont Brodeur;

«Considérant tous les inconvénients qui sont provoqués par la fermeture de ses ponts pour les 3 250 citoyens de Saint-Jean-Baptiste, les multiples commerçants locaux et les milliers de campeurs;

«Considérant que les détours des gros véhicules lourds et récréatifs rendent la circulation dangereuse autour de l'école et de la résidence de personnes âgées à Saint-Jean-Baptiste;

«Considérant l'impact économique pour les commerçants locaux;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec de commencer les travaux sur les ponts Lacaille et Brodeur le plus rapidement possible, et ce, afin de rétablir l'économie pour les commerçants locaux et de redonner une qualité de vie aux citoyens, campeurs et commerçants locaux.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. Je pense que vous avez une autre pétition, M. le député.

Autoriser la construction d'une école dans le
secteur de la gare à Mont-Saint-Hilaire

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 686 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que les écoles de Mont-Saint-Hilaire sont remplies à pleine capacité et que certains jeunes sont même déplacés dans les écoles des municipalités voisines;

«Considérant que ces jeunes peuvent, dans certains cas, être soumis à un temps de transport de près de deux heures par jour;

«Considérant que ce temps de transport excessif peut entraîner une fatigue accrue chez les enfants concernés et mettre ainsi en péril leurs résultats scolaires;

«Considérant qu'il n'y a aucune garantie pour les élèves de demeurer dans la même école pendant leurs études primaires;

«Considérant que plusieurs fratries doivent être séparées dans différentes écoles, causant une grande problématique pour les parents et les enfants;

«Considérant qu'il est primordial d'assurer une stabilité dans l'environnement des jeunes élèves afin de favoriser leur développement social et scolaire;

«Considérant que de grands développements domiciliaires doivent débuter en 2017 dans le village de la gare et dans les quartiers avoisinants, entraînant ainsi une augmentation significative des jeunes familles dans ce secteur dans les années à venir;

«Considérant que, suite au refus du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur de construire une nouvelle école primaire à Mont-Saint-Hilaire, plusieurs jeunes familles ont manifesté leur désir de quitter la ville;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'autoriser sans délai la construction d'une nouvelle école dans le secteur de la gare à Mont-Saint-Hilaire afin de répondre aux besoins de la population.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci.

• (10 h 10) •

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

Pour ma part, je n'ai pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de Mme la députée de Montarville débattue hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Surveillance des journalistes par les services policiers

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Merci, M. le Président. D'abord, je tiens à saluer la décision du gouvernement de nommer une commission d'enquête publique sur les événements qui nous préoccupent tous ces jours derniers. J'ai compris et j'aimerais entendre le premier ministre réitérer le fait que les experts, les commissaires qui seront nommés le seront en consultation avec les quatre partis de l'Assemblée nationale et j'espère aussi qu'il nous consultera quant au libellé du mandat qu'il décidera de désigner.

Maintenant, j'aimerais savoir aussi de la part du ministre s'il... du premier ministre, s'il va aller au-delà de ce que son ministre de la Sécurité publique a dit hier en parlant d'un cas en 20 ans. Or, il y a un cas il y a huit ans, lorsque l'ancien ministre Dutil, de la Sécurité publique, avait demandé une enquête sur des fuites et il avait spécifiquement refusé d'exclure les journalistes de l'enquête, en réponse à des questions. Et d'ailleurs la fédération des journalistes avait été outrée de son refus d'exclure les journalistes de cette enquête. Est-ce que ça fera partie du mandat de regarder cette affaire?

Et, deuxièmement, on sait depuis ce matin qu'un journaliste indique qu'il y a quelques mois une source policière lui a dit qu'un mandat aurait pu être délivré pour chercher le registre d'un journaliste par la SQ. Est-ce que l'enquête va aussi regarder ce fait?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, d'abord, je remercie mon collègue de souligner le geste qui vient d'être posé, je pense qu'il illustre la gravité de l'enjeu. Et je pense qu'on pourrait les résumer, ces enjeux, à deux grands principes de nos sociétés démocratiques : d'une part, la liberté de presse, ce qui inclut la protection des sources journalistiques; et, deuxièmement, l'indépendance des pouvoirs. Alors, il va falloir qu'on décide du mandat, qu'on le donne et qu'on le propose en tenant compte de ces deux éléments.

Oui, bien sûr, de la même façon que ce que j'ai dit hier avant qu'on fasse cette annonce ce matin, on va consulter les partis d'opposition pour les personnes qui seraient sur ce groupe qui sera maintenant nommé en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête. Mon collègue de la Culture et des Communications a déjà fait les premiers contacts avec le groupe de rédacteurs en chef qui s'est exprimé récemment. Les consultations et réflexions se poursuivent avec le milieu judiciaire pour s'assurer... il me semble adéquat que ce soit une personne de la magistrature qui occupe la présidence de ce groupe-là et, bien sûr, un représentant ou une représentante des corps policiers. Je pense que, là, on aura une composition qui est bien balisée, bien équilibrée.

Il faudra bien sûr porter un soin particulier à l'écriture et à la définition du mandat et s'assurer que les deux objectifs principaux, les deux principes de société que j'ai nommés au début de mon intervention, se retrouvent dans le mandat qui va être donné. Mais je pense qu'il y a plusieurs questions légitimes qui se posent sur ces deux enjeux, et le rôle de la commission sera d'y répondre. Et, bien sûr, on aura des échanges, je l'espère, le plus rapidement possible, après que ses membres aient été nommés, avec la commission de façon à bien s'accorder avec eux sur la suite des choses.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Bon, je comprends que des démarches sont déjà entreprises avec des membres de la magistrature, mais, pour l'instant, ni le chef de la deuxième opposition ni moi n'avons été consultés sur les membres qui devraient être approchés. J'espère que ça sera fait sous peu. Je comprends aussi que, pour ce qui est du mandat, nous serons consultés avant la décision gouvernementale, je l'espère.

Maintenant, on sait que, dans les dernières semaines, dans l'affaire Normandeau, il y a eu une volonté de quelqu'un de faire dérailler l'affaire. Est-ce que ça a été discuté au bureau du premier ministre?

Le Président : Est-ce que vous pourriez...

M. Lisée : ...question.

Le Président : Non. Bien, je vais vous demander de répondre à une partie de la question.

Une voix : ...

Le Président : Alors, répondez à votre question. Non, il ne restait pas de temps.

M. Lisée : Ces derniers mois, quelqu'un a voulu faire dérailler l'enquête sur Mme Nathalie Normandeau.

Est-ce que ça a été une préoccupation au bureau du premier ministre?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : On est préoccupés par toutes ces situations qui tournent du principe essentiel de la séparation des pouvoirs, M. le Président. Et je dois dire de façon très simple et en limitant le ton de mon intervention que certaines remarques du chef de l'opposition ont été inquiétantes à cet effet. Lorsqu'on apprend qu'il y avait des liens téléphoniques directs avec les forces policières et le cabinet du premier ministre ou de la première ministre de l'époque, on doit se poser de sérieuses questions.

Alors, il est clairement nécessaire de réfléchir à ces questions et réaliser que, dans un monde réel, on peut utiliser la presse pour, justement, comme il le dit, potentiellement faire dérailler des procédures judiciaires ou, inversement, les influencer. Je pense que les gens qui seront nommés là auront suffisamment d'expérience et de jugement pour en tenir compte.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Alors, cette commission d'enquête publique se posera-t-elle la question de savoir, lorsque, ce printemps dernier, quelqu'un a tenté de faire dérailler l'enquête sur la vice-première ministre libérale, Mme Normandeau, est-ce que cette préoccupation a été discutée au bureau du premier ministre, au bureau du ministre de la Sécurité publique? Y a-t-il eu des conversations avec la direction de la Sûreté du Québec ou de l'UPAC au sujet de cette préoccupation? Et de quelle nature étaient ces préoccupations, puisqu'elles pouvaient...

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Je crois qu'on passe un peu rapidement aux conclusions, là. Je voudrais quand même l'amener à une certaine prudence. Mais il est clair que, quand je parle du principe d'indépendance des pouvoirs, c'est ce genre de questions là qui doit être discuté, de même que les déclarations du chef de l'opposition des derniers jours. Je crois que ça doit faire partie de l'examen de cette commission. C'est très préoccupant, ce que j'ai entendu de sa part quant à la nécessaire indépendance entre les enquêtes policières, les forces policières et le gouvernement. Ceci pourra bien sûr être éclairci, et on le fera de façon correcte.

Maintenant, encore une fois, il s'agit de répéter qu'on veut s'adresser à deux enjeux fondamentaux de notre société, la liberté de presse et l'indépendance des pouvoirs, et c'est ce qu'on va faire.

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Je comprends que le premier ministre ne voudrait pas savoir si un de ses ministres sait qu'il est sous le coup d'une plainte pour viol. C'est sa position, ça lui appartient. C'était la nature de mon intervention, que le chef du gouvernement sache qu'un des membres de sa députation reçoit une plainte pour viol et le sait. S'il ne veut pas le savoir, c'est son problème.

Je veux savoir si, dans le mandat de cette commission d'enquête, ces événements-là seront couverts et si on pourra discuter du libellé.

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Le ton, et la nature, de la question du collègue est éminemment répréhensible, M. le Président, je voudrais le dire. Puis moi puis beaucoup de citoyens, on a été très inquiets d'apprendre qu'il y avait des conversations directes entre la Sûreté du Québec et le cabinet du gouvernement précédent. On a été très perplexes quand on a entendu notre collègue parler de trois cas. Alors, il parle de transparence; quels sont ces trois cas, quelles étaient les infractions? Bien, je pense qu'il devra l'éclaircir, d'une façon ou d'une autre.

Mais, ceci dit, M. le Président, je reviens encore sur les objectifs fondamentaux qu'on s'est fixés, qu'on va se fixer ensemble ici, de faire la lumière sur la question de la liberté de la presse et de la protection des sources journalistiques et également sur l'indépendance des pouvoirs, ce qui inclut les corps policiers.

Le Président : Principale, Mme la députée de Taschereau.

Présomption de fraude visant des collecteurs de
fonds du Parti libéral du Québec

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : M. le Président, un reportage de l'émission Enquête nous révèle que quatre grands libéraux auraient commis, entre 2004 et 2006, ce qu'on appelle la plus grosse fraude dans une société d'État de l'histoire du Québec.

Les accointances libérales sont encore à l'oeuvre. Marc-André Fortier, l'homme de main placé à la tête de la Société immobilière du Québec, accompagné, tiens, tiens, de Charles Rondeau et Franco Fava, grands collecteurs de fonds libéraux, les mêmes qui remplissaient les post-it pour se nommer des juges bien libéraux, et William Bartlett, collecteur de fonds de longue date et organisateur de la campagne du premier ministre en 2007, quatre dignes représentants du Parti libéral, impliqués jusqu'à l'os. Ensemble — tiens, quel beau slogan! — ensemble, ils auraient fraudé la SIQ pour 2 millions de dollars versés dans des paradis fiscaux.

Combien d'argent sale provenant de cette fraude historique de 2 millions s'est retrouvé dans les coffres du Parti libéral?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, le reportage, dont l'entièreté devrait être diffusée ce soir, si je ne me trompe pas, nous apprend également que l'UPAC fait enquête sur le dossier. Et, comme vous le savez, puis c'est un principe fondamental, là, de séparation des pouvoirs, de distance entre le politique et les corps policiers, c'est un principe fondamental, l'UPAC est une unité indépendante qui mène ses enquêtes de façon indépendante, sans que nous n'intervenions et sans que nous n'émettions d'opinion. Alors, je vais me contenter de dire cela. Cette indépendance, elle est très importante, et l'UPAC doit faire son travail.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Marc-André Fortier a déclaré en cour — en cour — avoir reçu des pressions du bureau du premier ministre d'alors pour rencontrer des entrepreneurs en lien avec la SIQ. Résultat : 2 millions de dollars dans des paradis fiscaux. Mais j'ai devant moi le chef du Parti libéral.

Quelle était la cote qui s'en allait dans le coffre du Parti libéral? Est-ce que le premier ministre va déclencher une vérification sur son parti, dont il est toujours le chef, à ce que je sache, aujourd'hui, pour savoir combien d'argent s'est retrouvé dans les caisses du Parti libéral?

• (10 h 20) •

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, ce n'est pas parce que j'aime particulièrement être un perroquet, mais je vais être obligé de le répéter : je vais être obligé de répéter que c'est un principe fondamental que celui de l'indépendance entre le pouvoir politique et les corps policiers. Et l'UPAC, qui, nous dit le reportage en question, ferait enquête là-dessus, serait en possession de documents sur ce dossier, est responsable de faire l'enquête. Et là on nous demande, nous, comme gouvernement, d'émettre des opinions et d'intervenir dans une enquête. C'est justement le genre de chose que, si jamais ça a déjà existé... j'espère que non, bien, ça ne devrait pas exister. Alors, je peux me relever une troisième fois et redire exactement la même chose.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : La fraude libérale de 2 millions de dollars s'est déroulée entre 2004 et 2006. L'année suivante, le premier ministre, alors ministre de la Santé, sera élu dans Jean-Talon notamment grâce à l'organisateur William Bartlett, qui aurait participé à la fraude. J'ai devant moi le chef du Parti libéral. Il n'y a aucun mur, il n'y a aucune indépendance entre le chef du Parti libéral et le Parti libéral.

Est-ce qu'il va déclencher une vérification pour qu'on sache s'il a été élu grâce à des fonds qui ont été amassés grâce à cette fraude?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Je vais redire avec un ton serein, M. le Président, que le reportage nous dit que l'UPAC est en train de faire son travail dans cette question-là. Et il est hors de question, hors de question qu'on intervienne dans le travail de l'UPAC. C'est le genre de chose qui ne doit jamais arriver.

Le Président : Principale, Mme la députée de Taschereau.

Enquête sur une présomption de fraude visant des collecteurs
de fonds du Parti libéral du Québec

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Le reportage d'Enquête nous révèle que la fraude historique — historique — de 2 millions de dollars aurait été commise par, ensemble, quatre collecteurs du Parti libéral, incluant William Bartlett, je l'ai dit, organisateur du premier ministre, alors député de Jean-Talon, en 2007.

Devant l'ampleur de cette affaire, qui implique directement un organisateur de ses propres élections, le premier ministre doit faire preuve de transparence et être à la hauteur. Toute autre ligne de conduite jetterait immédiatement le discrédit sur le chef du gouvernement, à mon avis. Le reportage révèle que la SIQ a mené des enquêtes internes et a commandé un rapport juricomptable d'une firme externe.

Est-ce que le gouvernement va rendre publics dès aujourd'hui les rapports d'enquête internes de la SIQ et le rapport juricomptable?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, non seulement l'UPAC a fait enquête, nous dit le reportage, mais le dossier a été déposé au Directeur des poursuites criminelles et pénales. Alors là, ce n'est pas seulement dans les enquêtes de l'UPAC qu'on nous demande d'intervenir, on nous demanderait d'intervenir auprès du DPCP. C'est ce genre de confusion dans les rôles et les genres dans une démocratie comme la nôtre qui ne doit pas être toléré et c'est contre ça qu'on doit tous ici, dans cette Assemblée, s'insurger.

Alors, je répète, on ne va pas intervenir dans un dossier qui a été déposé au DPCP suite à une enquête de l'UPAC conduite de manière indépendante.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : On ne demande pas les rapports d'enquête, on demande des documents administratifs qui sont actuellement entre les mains du gouvernement, donc du Parti libéral. Pourquoi est-ce que seul le Parti libéral a accès à ces documents? Moi, je pense que les Québécois ont le droit de savoir.

Pourquoi est-ce que vous ne rendez pas publics dès aujourd'hui les rapports d'enquête interne et les rapports du juricomptable, qui sont des documents administratifs? Les Québécois ont le droit de savoir.

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, pourquoi, puisqu'on me pose ce genre de question, pourquoi la députée de Taschereau insiste tant pour que nous, les politiques, on intervienne dans les enquêtes de l'UPAC, pour que nous, les politiques, on intervienne dans des dossiers qui sont déposés au DPCP? Pourquoi nous demande-t-elle de faire ça? C'est quoi, la... Je vais faire attention à ce que je vais dire, M. le Président. Je vais faire attention à ce que je vais dire, mais, en tout cas, ce n'est pas la culture que nous voulons défendre, de ce côté-ci de la Chambre.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : La culture que vous défendez en ce moment, c'est la culture libérale, pauvre vous, le manque de transparence, la vérité qu'on n'arrive pas à savoir. J'ai devant moi le chef du Parti libéral. Qu'est-ce qu'il attend pour livrer aux Québécois le rapport du juricomptable, les enquêtes?

Est-ce qu'il va accepter la motion qu'on a déposée, M. le Président, la motion qui veut qu'on entende ensemble les quatre grands organisateurs libéraux?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, honnêtement, je trouve ça pitoyable, je trouve ça pitoyable, parce qu'on est devant des principes absolument fondamentaux d'indépendance et de séparation des pouvoirs et on dit, en pointant du doigt comme ça : Mais allez-vous intervenir, allez-vous intervenir dans des enquêtes, allez-vous intervenir dans les dossiers qui sont présentés au DPCP? C'est inacceptable, M. le Président, et on ne va pas répondre à ce type de question autrement qu'en défendant nos institutions.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! La parole est au chef du deuxième groupe d'opposition, en principale.

Mesures concernant la surveillance des journalistes
par les services policiers

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, donc, après le service de police de Montréal, qui a espionné Patrick Lagacé, on sait maintenant que la Sûreté du Québec a surveillé pas moins de six journalistes. On sait aussi que l'ancien ministre de la Sécurité publique du gouvernement du Parti québécois a passé une commande politique au directeur de la SQ.

M. le Président, ça fait 48 heures que la CAQ demande une enquête publique. Évidemment...

Le Président : M. le leader de l'opposition.

M. Bérubé : M. le Président, je viens d'entendre le chef de la deuxième opposition parler d'une commande politique passée par un ministre. Ça m'apparaît fort de café ce matin. J'aimerais qu'il retire ses paroles.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Je suggère que mon collègue partage le café avec sa collègue qui est à gauche.

Le Président : Bon, bon, la machine à café, là, est complète ce matin. On va demander au chef du deuxième groupe d'opposition de continuer sa question en faisant attention de... Évitez d'imputer des motifs.

M. Legault : Oui. M. le Président, on sait que, le premier ministre, ça lui prend parfois 24, 48 heures pour comprendre la gravité d'une situation. Ce matin, il fait la moitié du chemin, il nous dit : Ma patente, là, avec un groupe d'experts, on va lui donner le pouvoir d'une commission d'enquête, mais ce sera eux autres qui décideront si c'est public ou non. M. le Président, c'est assez grave, là, pour que le premier ministre nous dise clairement qu'il y aura une enquête publique.

Donc, est-ce qu'il peut nous garantir ce matin que les travaux vont être publics?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Je suis un peu perplexe, M. le Président. C'est évident, là. Les membres sont nommés en fonction de la Loi sur les commissions d'enquête. Ils auront à tenir des audiences, puis le collègue pourra y aller.

Je ne comprends pas le sens de sa question. De toute évidence, il est déçu un peu, parce qu'on a interrompu son plan de période de questions, là, qu'on ait pris, au contraire, une décision qui a été rapide, une décision rapide, une décision appropriée et une décision proportionnelle aux enjeux qui sont devant nous, qui sont l'enjeu de la liberté de presse et de la séparation des pouvoirs. Je réitère pour lui également qu'il sera consulté pour la formation, notamment... la nomination de la personne de la magistrature qui siégera là.

Mais, clairement, M. le Président, on le sait tous ici, là — je ne sais pas pourquoi on veut enfoncer des portes ouvertes — si on nomme des gens en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête, bien, ils peuvent certainement, certainement faire des audiences publiques.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je suis content qu'après 48 heures le premier ministre se rallie à la demande d'enquête publique de la CAQ. Maintenant...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Ce qui inquiète la population, c'est la proximité du politique et du policier. Actuellement, le grand patron de la SQ, puis le grand patron de l'UPAC, est nommé par le premier ministre puis le Conseil des ministres.

À la CAQ, on propose qu'à l'avenir ces deux postes soient nommés par le deux tiers de l'Assemblée nationale. Est-ce qu'il est d'accord?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : D'abord, M. le Président, ce n'est pas tout à fait exact, là, il y a des comités indépendants qui font le travail pour recommander des candidatures. Ce n'est pas exactement comme ce que mentionne mon collègue.

Cependant, je dois dire qu'il soulève un point intéressant qui mérite une discussion : le mode de nomination des chefs de police. Mais pourquoi il mentionne juste deux services de police? Combien y a-t-il... quoi, une trentaine de services de police au Québec? Pourquoi il n'est pas préoccupé par les autres également? Mais je pense qu'il faut avoir une réflexion sur cette question. On va l'avoir, on va l'avoir, cette réflexion-là. Moi, je suis ouvert à ce qu'on agisse dans cette direction-là mais qu'on agisse après avoir réfléchi. Des fois, vous savez, réfléchir 24, 48 heures, ce n'est pas une mauvaise idée.

Alors, on va même prendre un peu plus de temps, si nécessaire, mais on va certainement prendre en compte cette question, M. le Président.

• (10 h 30) •

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, j'accepte qu'il y en ait qui pensent moins vite que d'autres, mais...

Des voix : ...

Le Président : Bon. Je pense que tout le monde a pris un peu trop de café, là, ce matin. M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : M. le Président, pour nous, là, c'est clair, la police n'a pas à être au service du gouvernement.

Donc, les chefs de police et l'UPAC, est-ce que le premier ministre est d'accord qu'ils soient nommés au deux tiers de l'Assemblée nationale, oui ou non?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Notre collègue aimerait qu'on pense plus vite. Ce n'est pas mauvais également de parler moins vite, et puis de réfléchir aux enjeux, puis d'avoir une bonne discussion démocratique. Ce qu'il soulève, c'est un enjeu démocratique très, très important, c'est un enjeu fondamental qui est révélé à la lumière de ce qu'on a vu au cours des derniers jours. Ceci dit, je veux le rassurer, j'ai la plus profonde admiration pour ses qualités intellectuelles.

Le Président : Principale, M. le député de La Peltrie.

Présumée fraude impliquant des collecteurs de fonds du Parti libéral

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, M. le Président. Quatre grands collecteurs de fonds libéraux pourraient bien être au coeur d'une des plus grandes fraudes non seulement de l'histoire du Québec, mais de l'histoire du Canada, M. le Président. L'un d'entre eux, William Bartlett aurait, à titre d'exemple, alors qu'il était au conseil d'administration de la CSST, prolongé indûment un contrat pour s'assurer qu'il y ait une petite ristourne pour lui, pour Charles Rondeau et pour Franco Fava. William Bartlett, bizarrement, c'est un hasard sûrement, était un organisateur du premier ministre dans son comté, donc un homme extrêmement important pour lui.

Est-ce que le premier ministre peut nous expliquer quelle était, quelle est la nature exacte de ses liens avec William Bartlett?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Je vais être obligé de me répéter, M. le Président, mais peut-être que j'y mettrai un peu moins de passion, puisque la question a été posée un peu plus posément que celle de la députée de Taschereau. En tout cas, avec moins d'emphase peut-être. Bon, regardez, M. le Président, je pense que vous m'avez entendu tout à l'heure, puis vous allez vous dire pourquoi je vous répète ça, puisque vous le savez déjà, il y a, selon le reportage de Radio-Canada, une enquête de l'UPAC là-dessus, il y a un dossier qui a été déposé au DPCP. Vous conviendrez, M. le Président, qu'on ne va pas commenter là-dessus.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de La Peltrie.

M. Éric Caire

M. Caire : M. le Président, la réponse du ministre de la Sécurité publique, qui sert donc de bouclier humain au premier ministre, elle est inquiétante parce que je comprends donc que les liens entre le premier ministre et William Bartlett sont sous enquête de l'UPAC. C'est ça, sa réponse?

Est-ce que le premier ministre peut nous confirmer qu'il a rencontré l'UPAC parce que l'UPAC s'intéressait à ses liens avec William Bartlett? Parce que c'est ça que son ministre vient de dire.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : M. le Président, le reportage nous dit qu'il y aurait enquête de l'UPAC et un dossier déposé au DPCP. Le bouclier dont parle le député de la seconde opposition, de La Peltrie, le bouclier dont on parle, c'est la distance, c'est la séparation des pouvoirs dans notre société entre la police, la justice et le gouvernement. C'est ça, le bouclier. C'est ça, le bouclier qu'on défend. C'est ça, le bouclier qu'on défend dans ce dossier-là. Et c'est ça, le bouclier qu'on va défendre aussi dans le cas de la préservation de la liberté de la presse et de la protection des sources avec les mesures qu'on a annoncées cette semaine. Ce boulier, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : ...est très important, et on va le défendre.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de La Peltrie.

M. Éric Caire

M. Caire : Je ne suis pas sûr que c'est nos institutions que vous êtes en train de protéger, M. le Président. M. le Président, la question, elle est simple, William Bartlett est un organisateur du premier ministre dans son élection en 2007 dans Jean-Talon. C'est un fait. Pas besoin d'enquête, c'est un fait. La seule question que je lui pose, elle est très simple et, jusqu'à preuve du contraire, elle n'est pas supposée être sous enquête : Quelle était la nature de ses liens avec William Bartlett?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Il y a eu des commentaires malveillants du député de La Peltrie, M. le Président, c'est comme ça qu'il a commencé sa question. Vous me permettrez de ne pas répéter, pour la énième fois, la même chose, mais de me concentrer là-dessus, hein? Oui, c'est vrai qu'on défend les institutions. Oui, c'est vrai qu'on défend la séparation des pouvoirs dans notre société. Oui, c'est vrai qu'on veut s'assurer de l'indépendance des pouvoirs dans notre société. Puis défendre ces institutions-là, défendre ces questions, qui sont fondamentales, c'est défendre la démocratie, c'est pour ça qu'on le fait.

Puis on est 125 députés à l'Assemblée nationale, puis on devrait tous avoir à coeur de défendre ces grands principes là. Et c'est ça qu'on défend, et c'est ça qu'on va continuer de défendre. Et j'espère, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : ...qu'on partage tous cette même vision.

Le Président : Principale, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Projet de loi sur la protection des divulgateurs d'actes répréhensibles

Mme Nicole Léger

Mme Léger : Les allégations de fraude impliquant les collecteurs de fonds du Parti libéral du Québec résonnent tout particulièrement ce matin avec le projet de loi n° 87 sur les lanceurs d'alerte. Hier, le ministre a refusé de protéger les lanceurs d'alerte qui désirent dénoncer des cas de corruption ou de fraude aux médias. Les seuls critères du ministre sont l'urgence et un risque grave pour la santé, la sécurité et l'environnement.

Est-ce que l'affaire implique un risque grave pour la santé, la sécurité ou l'environnement? Non, c'est de la fraude. Est-ce qu'il y a urgence? Non, les faits remontent à 10 ans. Est-ce que divulguer à l'interne aurait changé quelque chose? Non, c'est l'ex-président de la SQI qui est impliqué. Est-ce que divulguer à l'UPAC a donné lieu à des correctifs? Non, depuis 2011, aucune accusation au DPCP. Mais le ministre oblige le divulgateur à passer par l'UPAC ou la police. Bref, un lanceur d'alerte qui divulgue aux médias n'est pas protégé.

Est-ce que le ministre va modifier son projet de loi pour protéger les lanceurs d'alerte qui dénoncent aux médias?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, bon, on va reprendre là où on s'était laissés hier soir, M. le Président. Dans notre projet de loi n° 87, qui vise à favoriser la divulgation d'actes répréhensibles, nous avons choisi, comme canal plus efficace et le plus approprié pour l'analyse de divulgation et pour favoriser la divulgation et protéger les divulgateurs, de passer par le Protecteur du citoyen, M. le Président. Le Protecteur du citoyen, c'est l'organisme indépendant que nous respectons tous dans cette Assemblée et à qui nous allons donner les moyens et les pouvoirs de bien analyser et de bien s'occuper de ces actes de divulgation, de donner suite à ces choses-là, M. le Président.

Nous avons aussi ajouté une provision pour un cas d'urgence. Il y en a beaucoup qui parlaient de ça hier, un cas d'urgence. S'il n'est pas possible de rejoindre le Protecteur du citoyen, alors là les divulgateurs peuvent, en cas d'urgence, le faire publiquement. Mais seulement en cas d'urgence, M. le Président. Le moyen proposé par le projet de loi n° 87 de divulguer des actes répréhensibles, c'est de passer, en tout temps et en tous cas, par le Protecteur du citoyen, ce qui est très efficace, à notre avis, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Nicole Léger

Mme Léger : M. le Président, pourquoi ne pas leur ouvrir une porte supplémentaire pour augmenter les chances que la vérité éclate, pas seulement la voie du Protecteur du citoyen? Les lanceurs d'alerte n'ont parfois pas confiance dans la voie institutionnelle. Les médias sont, pour eux, le seul endroit où on va entendre leur cri du coeur, car ils ont peur. Le ministre doit avoir le sens de l'intérêt public et se mettre dans la peau du lanceur d'alerte. Pourquoi ne veut-il pas que les médias fassent partie des options pour les lanceurs d'alerte?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Encore une fois, M. le Président, c'est la même discussion que nous avons depuis déjà un certain temps. Vraiment, je ne comprends pas pourquoi la députée de Pointe-aux-Trembles s'obstine à ne pas faire confiance au Protecteur du citoyen, je ne sais pas pourquoi elle fait ça, M. le Président. Le Protecteur du citoyen est un organisme indépendant et qui a déjà des moyens, mais qui va avoir encore plus de moyens et d'outils pour recevoir les plaintes, M. le Président. Ça ne se fait pas nulle part d'autre ailleurs, nous sommes en train d'innover et de créer un moyen efficace, à notre avis, de favoriser les divulgations et de protéger les personnes qui divulguent. Le Protecteur du citoyen...

Le Président : En terminant.

M. Leitão : ...c'est le véhicule idéal pour faire ça.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Nicole Léger

Mme Léger : Il y a des gens, M. le Président, qui ne connaissent pas le Protecteur du citoyen et ne veulent pas le Protecteur du citoyen. Le gouvernement choisit de placer des obstacles sur le chemin vers la vérité.

Le premier ministre croit-il encore au rôle fondamental des médias et leur rôle dans une société démocratique? C'est parfois la seule voie qui s'offre pour les lanceurs d'alerte. Va-t-il rappeler à l'ordre son ministre et lui demander de protéger les lanceurs d'alerte qui divulguent aux médias?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Je pense que, dans cette Assemblée, des fois, on apprend des choses, M. le Président. Là, je viens d'apprendre, comme nous tous, que le Protecteur du citoyen, maintenant, est un obstacle à la divulgation d'actes répréhensibles. Il va falloir lui annoncer ça parce que je ne pense pas qu'elle est au courant qu'elle est devenue un obstacle à la divulgation.

C'est l'équilibre que nous voulons atteindre entre la divulgation efficace et protection des divulgateurs. L'équilibre que nous avons trouvé, c'est le Protecteur du citoyen On n'empêche personne d'aller au Protecteur du citoyen et de divulguer. Dans des cas très spécifiques d'urgence, là, on peut passer par les médias, oui, mais très spécifiques d'urgence. En général, c'est le Protecteur du citoyen, qui fait un très bon travail.

• (10 h 40) •

Le Président : Principale, Mme la députée de Taillon.

Transport des échantillons sanguins vers des laboratoires spécialisés

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : M. le Président, des travailleurs de la santé de toutes professions et de partout au Québec continuent de mettre en évidence les dangers et les failles du projet Optilab. Ce qu'ils craignent, ce sont des délais accrus pour les analyses, ce sont des pertes d'échantillons et des pertes de résultats de ces échantillons, ce sont des pertes d'expertise locale. Ce qu'ils craignent, ce sont les baisses de la qualité des soins, particulièrement en région. Un ministre de la Santé, c'est censé être là pour améliorer les soins, pas pour les détériorer. Et, dans un dossier aussi sensible, l'improvisation et la coercition s'apparentent à de la négligence. Jusqu'ici, le ministre de la Santé a refusé d'écouter le réseau de la santé.

Maintenant qu'il n'a plus qu'un rôle secondaire dans les négociations avec les médecins, va-t-il écouter les travailleurs sur le terrain, ceux qui sont proches des patients, qui ont des inquiétudes légitimes et majeures à propos d'Optilab?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Ce qui est déplorable, M. le Président, dans cette Chambre, c'est de voir à quel point les trois oppositions s'appliquent à alarmer la population avec une tonne d'insinuations non vérifées. C'est à tous les jours, c'est à chaque fois qu'on se lève, de leur bord, évidemment, et nous, on est heureux de se lever pour corriger la situation. Et, la semaine prochaine, ça va recommencer, M. le Président, parce que la seule et unique politique qui existe, particulièrement au Parti québécois, est celle de l'insinuation. On n'a pas d'idées à défendre, on n'a qu'à présenter des situations de façon les plus déformées possible pour qu'en la répétant ça devienne une réalité. C'est ça, la réalité, M. le Président, de cette salle, de cette Chambre.

Alors, M. le Président, cette semaine, par exemple, je rencontrais les acteurs principaux du milieu qui, supposément, sont représentés par la collègue qui s'est levée pour poser sa question, et eux sont venus me dire une chose très simple : C'est une bonne idée, Optilab. On y croit, on collabore et on propose de participer pour être sûrs d'apporter les ajustements nécessaires. Et, non, on ne m'a pas décrit cette situation.

Le Président : En terminant.

M. Barrette : Alors, où est la vérité? Peut-elle être celle...

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Le ministre aurait pu prendre 1 min 15 s pour rassurer. Au lieu de toujours décrier le travail des autres, qu'il rassure avec les secondes qu'il a en Chambre. M. le Président, c'est non seulement tout le réseau de la santé, mais ce sont 60 maires et préfets qui s'inquiètent d'Optilab. Aujourd'hui, les gens qui manifestent dehors, ce sont des personnes qui rencontrent un mur, un ministre insensible aux spécificités du terrain et des patients. Même message de l'Hôpital Sainte-Justine.

Est-ce que le ministre va écouter les gens qui connaissent vraiment les spécificités des hôpitaux et des régions?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, dans les dernières années... Parce que je vais le rappeler, c'est important, le projet Optilab avait été approuvé, lancé, confirmé en septembre 2013 par le Parti québécois. Je pense que c'est important de rappeler que la députée de Taillon se lève, encore une fois, pour nous dire que son propre parti a mis de l'avant dans le réseau le projet qu'elle dénonce aujourd'hui. C'est quand même extraordinaire de voir un parti politique qui, quand il est au pouvoir, dit qu'il fait la bonne chose et, quand il est dans l'opposition, vient dire que ce qu'il avait fait était mauvais.

Le Président : En terminant.

M. Barrette : Elle nous dit, M. le Président, qu'elle a amené le tort qu'elle me reproche...

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Une voix : ...

Le Président : M. le leader de l'opposition, on voudrait écouter Mme la députée de Taillon.

Des voix : ...

Le Président : Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : J'ai parlé d'un mur que les gens rencontrent. C'est ça que les gens déplorent, un mur, actuellement. Sur la Côte-Nord, Dre L'Espérance et la patiente Arlène Beaudin démontrent douloureusement ce qui arrive quand on tarde à analyser des échantillons. Les échantillons de femmes atteintes de cancer du sein sont envoyés en Ontario pour analyse, ce qui cause des délais supplémentaires de six à huit semaines, six à huit semaines quand on attend un diagnostic de cancer. Les gens de la Côte-Nord paient les mêmes taxes et impôts, mais, quand ils ont le cancer, ils n'ont pas droit aux mêmes services. De l'aveu même du...

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, est-il... oui, il est nécessaire de rappeler qu'il fut un temps où le Parti québécois envoyait des patients à Plattsburgh, M. le Président, hein, c'est ça qu'il faisait, et c'est aussi le parti qui a fermé des hôpitaux, M. le Président. Et, pour prendre le cas particulier de Sept-Îles, M. le Président, dans une quelconque vie antérieure, alors qu'il y avait un autre gouvernement que je pourrais appeler celui du Parti québécois, bien, à Sept-Îles, on envoyait les fameux prélèvements aussi en Ontario et à Rimouski. C'est drôle, M. le Président, encore une fois, la députée de Taillon dénigre ses propres actions de son parti dans le passé et elle se lève. Le mur, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Barrette : ...auquel la population fait face, c'est le mur de la désinformation...

Le Président : M. le député de La Peltrie, en principale.

Présomption de fraude visant des solliciteurs de fonds du Parti libéral

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, M. le Président. Franco Fava, à titre de collecteur de fonds du Parti libéral, a rapporté des millions de dollars à ce parti. Franco Fava a été mentionné à de nombreuses reprises non seulement pour sa rentabilité, mais pour les pressions qui étaient exercées dans certaines nominations. Fava a demandé en retour de services rendus, etc., et j'en passe, et des meilleures.

Franco Fava avait comme bras droit, depuis qu'il a fondé la compagnie Neilson, Gérald Larose. Qui est Gérald Larose, M. le Président, à part d'être un proche de Franco Fava, à part d'avoir été un partenaire d'affaires de Franco Fava? C'est aussi le directeur de l'organisation, pour l'Est du Québec, actuel du Parti libéral du Québec. Est-ce que le premier ministre peut nous dire si toutes les vérifications ont été faites pour s'assurer que M. Larose est un homme intègre?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Le député de La Peltrie revient pour poser la même question sur la même affaire, sur la même affaire. Et je répète que, hein, c'est Radio-Canada qui nous dit ça, là. Je dis ce que Radio-Canada dit. Ils nous disent que l'UPAC a conduit une enquête sur cette question-là, ils nous disent ça et ils nous disent qu'un dossier a été déposé au DPCP. C'est ce qu'ils nous disent. On va regarder le reportage ce soir, mais c'est ce qu'ils nous disent jusqu'à maintenant. C'est l'information publique, là, qui est donnée. Et le député de La Peltrie voudrait qu'on intervienne là-dedans, ça serait une grave erreur.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de La Peltrie.

M. Éric Caire

M. Caire : Bon, bien, coudon, il faut croire que l'UPAC est en train d'enquêter sur Gérald Larose? C'est ça que je comprends? C'est ça que le ministre de la... qui enquête sur les liens entre M. Bartlett et le premier ministre selon le ministre, et là il est en train d'enquêter sur Gérald Larose? C'est ça qu'on comprend? Est-ce que le premier ministre nous confirme ce que vient de dire le ministre de la Sécurité publique, l'UPAC enquête présentement sur son directeur de l'organisation, M. Gérald Larose?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Il revient sur la même affaire, il revient exactement sur la même affaire. Et, en ce qui concerne cette affaire, Radio-Canada nous dit que l'UPAC a conduit une enquête et Radio-Canada nous dit qu'il y aurait un dossier devant le DPCP, et il revient constamment là-dessus. Je veux dire, il faut aussi savoir écouter et entendre, il faut aussi savoir comprendre. Je peux bien me relever encore une fois, M. le Président, ça sera l'occasion d'un nouvel échange.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de La Peltrie.

M. Éric Caire

M. Caire : M. le Président, ma question s'adresse au chef du Parti libéral du Québec. Que je sache, le ministre de la Sécurité publique fabule ou alors il est au courant d'enquêtes de l'UPAC, puis là il va falloir qu'il nous l'explique prochainement.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de La Peltrie, je vais recommander de faire attention à vos propos. Je vous demanderais de retirer les derniers. Vous les retirez? Votre question, s'il vous plaît.

M. Caire : Bon. Donc, je retire, et donc il est au courant d'enquêtes policières, et là il va falloir qu'il s'explique un jour là-dessus.

Mais la question, elle est claire. Le directeur de l'organisation pour l'Est du Québec du Parti libéral, M. Larose, était un très, très, très proche de Franco Fava. Est-ce que des vérifications ont été faites sur cet individu?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Que d'insinuations, M. le Président! Que d'insinuations sur ce que je sais ou ne saurais pas! Je sais la même chose que lui, puisque c'est Radio-Canada qui nous le dit, hein? Il est possible, il est possible que le député de La Peltrie ne regarde pas ou n'écoute pas Radio-Canada. Il est possible qu'il n'y ait qu'un journal qui l'intéresse. À une autre époque, d'ailleurs, je n'avais qu'à lire Le Journal de Québec le matin pour savoir quelles questions le député de La Peltrie me poserait lorsque j'étais président du Conseil du trésor. Mais l'information, l'information dont il est ici question émane de Radio-Canada.

Alors, trêve d'insinuations, on n'a pas à intervenir dans un dossier comme celui-là...

Le Président : En terminant.

M. Coiteux : ...surtout si, comme le dit Radio-Canada, ce serait devant le DPCP.

Le Président : Est-ce que vous avez d'autres questions? M. le député de Lac-Saint-Jean, en principale.

Correctifs envisagés pour éliminer les disparités
entre les comptes de taxe scolaire

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : Oui. Je vous remercie, M. le Président. Alors, hier, M. le Président, j'ai eu un téléphone, Éric Fournier, citoyen de Saint-Jérôme, puis là il m'a expliqué son problème de taxe scolaire...

• (10 h 50) •

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! À ma connaissance, Saint-Jérôme fait encore partie du Québec. Alors, on va écouter la question. M. le député.

M. Cloutier : Ils doivent trouver ça drôle parce qu'en réalité ils sont au courant de la problématique depuis deux ans et demi. Un citoyen qui a une maison de 300 000 $ à Saint-Jérôme va payer 960 $ de taxes, M. le Président. Par contre, à 28 kilomètres de là, à Sainte-Adèle, donc juste à côté, savez-vous comment le même citoyen va payer? 320 $, une différence de 600 $, M. le Président.

Alors, le gouvernement est au courant depuis deux ans et demi. Même l'ancien ministre, celui qui n'allait pas visiter les écoles, le député de Charlesbourg, s'était engagé à corriger le problème. Je le cite : Le système est désuet, inéquitable, digne du XIXe siècle.

M. le Président, comment le ministre de l'Éducation explique qu'il n'a absolument rien fait dans le dossier?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît, Mme la députée de Saint-Hyacinthe! M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Merci, M. le Président. D'abord, peut-être rappeler au collègue qu'il y avait dans le passé une péréquation pour la taxe scolaire au Québec. C'est le gouvernement du Parti québécois qui a mis fin à la péréquation. Un.

Deuxièmement, M. le Président, avant de commencer à parler de la taxe pour l'ensemble du Québec, il fallait mettre fin à la péréquation, il fallait sortir de la péréquation, puis il fallait surtout s'assurer de voir quels seraient les effets de la fin de la péréquation. Et ça, c'est depuis cette année, M. le Président, qu'on est capables d'évaluer l'ensemble des effets. La raison pour laquelle le comité de travail qui avait été mis en place par le ministère de l'Éducation et des Finances travaillait à cette question-là... devait attendre la fin de cette péréquation-là et des effets. Aujourd'hui, nous y sommes, ils sont au travail. J'ai dit au député de Lac-Saint-Jean, comme à l'ensemble des concitoyens : On va faire des vérifications, on va faire des simulations puis on va voir quel sera le meilleur moyen pour assurer l'équité pour l'ensemble des Québécois.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : Bien, je veux bien, M. le Président, mais le ministre de l'Éducation a juste oublié une petite partie de l'historique, il a oublié de dire qu'il y a un rapport qui a été déposé au moment où il prenait place au gouvernement, le rapport Champoux-Lesage. Qu'est-ce qu'il disait, le rapport? Que la situation était intenable, amenait des situations qui étaient inéquitables, ce qui a fait dire à l'ancien ministre de l'Éducation que c'était digne du XIXe siècle.

Bref, il y a des gens de Saint-Jérôme qui paient de façon inéquitable parce que vous avez...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui. M. le Président, pas besoin d'être en élections partielles pour parler de taxes scolaires, pas besoin de prendre l'exemple seulement de Saint-Jérôme pour parler de taxes scolaires; dans l'ensemble du Québec, il y a des situations comme celle-là. Dans certains cas, c'est dans un sens; dans certains cas, c'est dans l'autre.

Ce que j'ai dit, M. le Président, c'est qu'il y avait une analyse qui se faisait, il y a des simulations qui se faisaient à l'égard de la taxe. Est-ce que c'est la solution du collègue de Lac-Saint-Jean de vouloir augmenter les taxes de certains pour peut-être les diminuer chez d'autres? Sa solution à lui, c'est quoi, M. le Président? Est-ce que c'est de faire en sorte que des citoyens devraient payer plus cher dans une grande région? Moi, je veux faire l'analyse, M. le Président, pour l'ensemble des régions. Je veux m'assurer que, s'il y a à avoir des modifications, il y ait de l'équité et, s'il doit y avoir des changements, M. le Président, qu'on ait discuté avec les gens, ce qu'il ne pense pas nécessaire de faire, manifestement.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, je le comprends, là, le malaise du ministre. Il partage le fait que la problématique, c'est vrai qu'elle n'est pas juste à Saint-Jérôme, mais c'est vrai que les gens de Saint-Jérôme sont particulièrement touchés par la problématique. Le problème, c'est que, quand on ne fait rien pour changer les choses, M. le Président, bien, ça se poursuit, cette inéquité.

Alors, deux projets de loi déposés pour modifier la Loi sur l'instruction publique, un rapport qui dort depuis deux ans et demi...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : M. le Président, j'ai eu l'occasion de le dire, le cas n'est pas unique à Saint-Jérôme, mais je comprends qu'il est présent à Saint-Jérôme. C'est ce que je lui ai dit. À chaque fois que j'ai l'occasion, M. le Président, je dis aux gens que nous sommes en train de regarder cette question-là à la lumière de la fin de la péréquation.

Deuxièmement, M. le Président, il y en a un, modèle, à Montréal, de régionalisation, par exemple. Est-ce que c'est le modèle qu'il faudra appliquer partout? La question se posera. Est-ce qu'il faudra voir à travailler avec des régions peut-être un peu moins grandes que nos régions naturelles actuelles avec les commissions scolaires, M. le Président? Puisque, dans une région naturelle, économique, il y a plusieurs commissions scolaires, cette question-là, elle se pose. Et, manifestement, je n'ai pas assez de 35 secondes pour lui expliquer tout ça, M. le Président.

Le Président : Principale, M. le député de Deux-Montagnes.

Mode de nomination des dirigeants d'organismes publics

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, M. le Président. Depuis quelques jours, les nouvelles troublantes se succèdent. On peine à croire ce que l'on apprend : des services de police espionnent les conversations téléphoniques des journalistes, des collecteurs de fonds du Parti libéral et l'ex-P.D.G. de la Société immobilière du Québec se seraient partagés près de 3 millions de dollars lors de transactions immobilières. Ces révélations sont, naturellement, troublantes et graves, car elles viennent toucher à la nécessaire indépendance entre le politique et la fonction publique.

À la tête de ces organisations, on retrouve souvent des personnes qui sont nommées de façon bêtement partisane par le gouvernement en place, peu importe sa couleur. Depuis trop longtemps, les libéraux et les péquistes préfèrent un système où nommer les gens de façon partisane est privilégié plutôt qu'à la compétence des personnes nécessaire pour occuper ces fonctions.

Ma question à la ministre responsable des Institutions démocratiques : A-t-elle entendu le premier ministre, un petit peu plus tôt, se dire ouvert de considérer que certaines nominations, notamment celles...

Le Président : Mme la ministre des Institutions démocratiques.

Mme Rita Lc de Santis

Mme de Santis : Je remercie mon collègue de m'adresser la parole. Je crois que c'est dans l'intérêt de tout gouvernement et tout participant à cette Assemblée nationale qu'on s'assure que les nominations soient toujours faites avec les meilleures personnes, et c'est le but qui est recherché. Et je crois qu'aujourd'hui on a entendu le premier ministre dire qu'il y a une réflexion à faire quant à la nomination de certaines personnes, et cela va être fait. Merci, M. le Président.

Le Président : Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de
réduire les seuils annuels d'immigration et d'accentuer les efforts
consacrés à l'intégration et à la francisation des immigrants

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de Mme la députée de Montarville débattue hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Et je vous rappelle que cette motion se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse les lacunes importantes du Québec en matière d'intégration, de francisation et d'employabilité des immigrants;

«Qu'elle demande au gouvernement de réduire à 40 000 les seuils annuels d'immigration, d'accentuer les efforts consacrés à l'intégration et à la francisation des immigrants et de mettre en place des cours obligatoires de francisation pour les nouveaux arrivants».

Et que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe : M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Lavallée (Repentigny), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Paradis (Lévis), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

• (11 heures) •

La Secrétaire adjointe : M. Couillard (Roberval), M. Fournier (Saint-Laurent), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Blais (Charlesbourg), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), Mme David (Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Charlebois (Soulanges), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), Mme St-Pierre (Acadie), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Reid (Orford), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Ouellette (Chomedey), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Ménard (Laporte), M. Tanguay (LaFontaine), Mme Boulet (Laviolette), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Girard (Trois-Rivières), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Rousselle (Vimont), M. Iracà (Papineau), M. Bolduc (Mégantic), M. Simard (Dubuc), M. Matte (Portneuf), M. Auger (Champlain), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Boucher (Ungava), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Fortin (Pontiac), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau), M. Busque (Beauce-Sud), Mme Sauvé (Fabre).

M. Lisée (Rosemont), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Hivon (Joliette), M. Marceau (Rousseau), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Maltais (Taschereau), Mme Lamarre (Taillon), M. LeBel (Rimouski), M. Bergeron (Verchères), M. Leclair (Beauharnois), M. Rochon (Richelieu), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Therrien (Sanguinet), M. Gaudreault (Jonquière), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), Mme Jean (Chicoutimi), M. Ouellet (René-Lévesque), M. Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Traversy (Terrebonne), M. Kotto (Bourget), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Roy (Bonaventure).

Mme David (Gouin), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire général pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  18

                     Contre :           85

                     Abstentions :     0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est rejetée.

Motions sans préavis

Maintenant, nous en sommes à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un membre du groupe formant le deuxième groupe d'opposition et je cède la parole à M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Mme la Présidente, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec le député de Matane-Matapédia et le député de Mercier :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement que la nomination du directeur général de la Sûreté du Québec ainsi que du Commissaire à la lutte contre la corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement. Je vais maintenant reconnaître...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Pardon, oui. M. le député de Mercier, vous voulez intervenir?

M. Khadir : Oui, Mme la Présidente. J'ai voulu entrer tout à l'heure après le vote... Malheureusement, il y a eu une confusion à la table et on n'a pas pu entendre ma demande pour que mon vote soit enregistré. Alors, je demande le consentement de la Chambre pour que mon vote soit enregistré.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Est-ce qu'il y a consentement pour que le vote de M. le député de Mercier soit enregistré?

Alors, vous êtes pour ou contre cette motion, M. le député?

M. Khadir : Contre, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Merci. Ce sera enregistré. Maintenant, je suis prête à reconnaître un membre du groupe formant le gouvernement et je cède la parole à M. le premier ministre.

Féliciter les finalistes des prix Reconnaissance du Forum
des jeunes de la fonction publique québécoise

M. Couillard : Merci, Mme la Présidente. Je vais solliciter le consentement de l'Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le chef de l'opposition officielle, le chef du deuxième groupe d'opposition de même que la députée de Gouin :

«Que l'Assemblée nationale félicite les finalistes de la 14e cérémonie de remise des prix Reconnaissance du Forum des jeunes de la fonction publique québécoise;

«Qu'elle souligne les qualités professionnelles de ces jeunes de 35 ans et moins, leur leadership ainsi que leur détermination à accomplir un travail exceptionnel au sein de la fonction publique québécoise;

«Qu'enfin, elle souligne la contribution des autorités des ministères et organismes, ainsi que celle des gestionnaires qui encouragent cette jeunesse à s'intégrer activement et à rayonner au sein de leur équipe de travail et de leur organisation.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le premier ministre. Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Tanguay : Oui, Mme la Présidente, et nous proposons des interventions d'une durée de trois minutes par intervenant et selon l'ordre suivant : d'abord le premier ministre, suivi par le chef de l'opposition officielle, le chef du deuxième groupe d'opposition et la députée de Gouin.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Alors, sans plus tarder, je cède la parole à M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Merci, Mme la Présidente. On vient de le faire, mais je vais à mon tour souligner la présence des finalistes avec nous, ici, aujourd'hui. Je veux les remercier pour tout ce qu'ils accomplissent quotidiennement et j'espère et je les encourage à conserver cette passion du service public qui les anime.

J'aimerais porter à l'attention de tous cette 14e édition des prix Reconnaissance du Forum des jeunes de la fonction publique québécoise. C'est un événement qui est consacré tout particulièrement aux jeunes de moins de 35 ans qui incarnent l'avenir de notre administration publique. Et, on l'a vu, on le voit avec un projet de loi ici, devant cette Assemblée, leur présence également aux conseils d'administration des sociétés d'État est recherchée.

Cette occasion permet de mettre en lumière des jeunes qui ont choisi de déployer leurs talents au profit de la société du Québec ainsi que la contribution exceptionnelle d'un ou d'une gestionnaire qui aura su intégrer et valoriser cette relève au sein de l'organisation.

Cette année, le forum des jeunes a reçu le plus grand nombre de mises en candidature depuis sa création en 2003. Cet enthousiasme confirme la nécessité de continuer à souligner et à encourager l'apport des jeunes dans la réalisation des projets qui leur sont confiés. Ce forum des jeunes est un lieu de réseautage et de réflexion privilégié qui réunit quelque 4 500 jeunes de 35 ans et moins. Il contribue à l'intégration et au développement des jeunes employés de la fonction publique tout en favorisant leur participation à l'évolution de l'administration publique.

Je tiens d'ailleurs à remercier la présidente, Mme Marianne Pépin, ainsi que le conseil d'administration du forum pour l'organisation annuelle des prix Reconnaissance. Tous les efforts investis contribuent à renforcer les liens entre les jeunes et la fonction publique.

Mme la Présidente, enfin, j'aimerais souligner de façon particulière le travail et les initiatives de cette relève engagée ainsi que le soutien indispensable de leurs gestionnaires. Je veux féliciter également chaleureusement les 21 finalistes et leur souhaite la meilleure des chances lors du dévoilement des lauréats du gala de remise des prix Reconnaissance 2016. À vous toutes et tous qui soutenez l'apport de la jeunesse au sein de nos institutions publiques ainsi qu'à tous les finalistes, bravo pour votre dévouement et merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le premier ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Mme la Présidente, comme beaucoup de citoyens, comme beaucoup de lecteurs de journaux et de chroniques, j'étais sous l'impression que la fonction publique, finalement, c'étaient des gens qui avaient des salaires, qui étaient bien chauffés, il y avait de la lumière dans leurs bureaux, et qu'ils n'en faisaient pas plus que nécessaire.

Et je suis devenu conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard et ensuite ministre et j'ai pu constater la qualité, la rigueur, la vaillance des membres de la fonction publique. J'ai pu voir comment cette réputation un peu molle est contraire aux faits et combien la fonction publique, québécoise en particulier, est méritoire. Et, lorsqu'on va dans des rencontres avec d'autres provinces ou avec des États américains, tout le monde nous le dit, et on se rend compte de l'extraordinaire qualité de la fonction publique québécoise, alors que, de l'autre côté, parfois, les notes sont mal écrites, les gens ne sont pas aussi bien préparés, il y a moins de propositions. Il nous est arrivé, Mme la Présidente, de prêter une proposition à un gouverneur d'un État américain, parce qu'ils n'avaient rien dans leurs poches, puis nous, on avait trois, quatre propositions préparées par notre fonction publique. Alors, on partage même, parfois, avec nos voisins et partenaires la qualité du travail qui est fait.

Alors, moi, je tiens à rendre hommage à cette fonction publique, rendre hommage à ceux qui l'ont construite, cette fonction publique : Jean Lesage, Jacques Parizeau, Michel Bélanger et plusieurs autres qui, au début des années 60, ont fait en sorte que la fonction publique québécoise soit à la hauteur. Et je tiens à dire à tous ces jeunes, qui sont aujourd'hui la relève de la fonction publique québécoise, que, oui, peut-être qu'ils pourraient avoir un meilleur salaire ailleurs, mais ils ne seront jamais à l'oeuvre du bien commun, du service public, et cette responsabilité et la satisfaction d'avoir cette responsabilité de servir le bien commun, de servir la nation, c'est, en soi, un enrichissement. J'accepte que ce n'est pas ce que leurs dirigeants syndicaux diront à la table de négociation, et c'est très bien, mais qu'il y a une respectabilité dans la décision de consacrer sa carrière au bien commun. Et je les remercie d'être là, je les remercie d'avoir fait ce choix-là et je les remercie d'être des pôles d'attraction pour les autres jeunes de qualité qui veulent servir leur nation. Merci.

• (11 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le chef de l'opposition officielle. Maintenant, au tour de M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : Merci, Mme la Présidente. Donc, dernièrement s'est tenue la 14e cérémonie du Forum jeunes de la fonction publique. Des prix Reconnaissance ont été donnés pour souligner la contribution exceptionnelle de jeunes fonctionnaires. C'est une activité qu'il faut saluer, encourager. Le forum jeune des fonctionnaires, que j'ai rencontré à quelques reprises, existe depuis une vingtaine d'années. À l'époque, les jeunes avaient senti le besoin de se regrouper, avec raison, pour s'impliquer, pour faire avancer les choses. Et aujourd'hui la fonction publique a d'importants défis à relever puis on a besoin de nos jeunes, on a besoin de la relève, on a besoin de leurs points de vue, de leurs talents, de leurs compétences, de leur enthousiasme, leur engagement. Et c'est un message qu'il faut envoyer, dans tous les ministères, à tous les étages, là, où il y a des fonctionnaires : Faites de la place aux jeunes, vous ne le regretterez pas.

Dans tous les postes de direction que j'ai occupés, que ça soit quand j'étais président d'Air Transat ou maintenant comme chef de la CAQ, j'ai toujours essayé d'avoir des jeunes autour de moi puis je ne l'ai jamais regretté, des jeunes à qui j'ai fait confiance, mais, éventuellement, qui ont pris du galon, dans certains cas se sont retrouvés à des postes importants. C'est important, oui, de leur faire de la place, c'est important et j'en suis fier, et c'est important pour la santé de l'organisation, c'est important pour la performance de l'organisation.

Donc, en mon nom, je voudrais saluer les gagnants qui se trouvent effectivement dans les tribunes. Bravo pour votre travail! Votre succès est inspirant. On compte sur vous pour la suite. On espère que plusieurs jeunes ne vont pas hésiter à faire comme vous, à se dépasser pour leurs concitoyens. Donc, vous avez tout notre respect puis toute notre reconnaissance. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci, Mme la Présidente. Bien sûr, je me réjouis, moi aussi, de voir ici, en cette Chambre, toute l'importance qu'on accorde à la fonction publique, à sa neutralité, à son impartialité, une fonction publique qui fait l'honneur du Québec. Je ne peux m'empêcher de dire cependant qu'elle a été bien malmenée, cette fonction publique, depuis 20 ans. J'entends des collègues s'exprimer et je voudrais rappeler qu'on a coupé dans ce qu'on appelait le gras, qui était souvent le maigre, très souvent, dans la fonction publique québécoise. Résultat : au ministère des Transports, je le rappelle, on a préféré faire affaire à de la sous-traitance plutôt qu'aux fonctionnaires et je ne pense pas que ça nous ait très bien servi.

Donc, je pense qu'il est vraiment temps, Mme la Présidente, justement de revaloriser la fonction publique québécoise, de lui donner toute son importance et de dire aux jeunes qui ont envie d'y venir de s'y engager : Oui, faites-le parce qu'on a besoin de vous. On a besoin des idées des jeunes, on a besoin de leurs analyses, on a besoin de leur audace, et je pense que c'est comme ça qu'on la renouvelle, la fonction publique. On a besoin aussi de leur assurer qu'ils peuvent et elles peuvent travailler en toute sécurité, que, s'ils ou elles constatent des anomalies, ils peuvent s'adresser à la police ou aux médias. Je pense que, dans les circonstances actuelles, c'est important aussi de leur dire ça.

Je souhaite donc à tous ces finalistes de continuer de travailler dans la fonction publique, d'y mettre tout leur coeur, toute leur générosité. Je sais que c'est déjà ce qu'ils font. Je leur dis : Bravo! Je souhaite, bien sûr, qu'ils remportent plein de prix, et je souhaite qu'ils continuent de travailler pour le bien commun, pour le bien-être de la société québécoise. Ils et elles sont des gens très importants pour nous. Merci, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Nous allons poursuivre avec les motions sans préavis. Et je suis prête à reconnaître un membre du groupe formant l'opposition officielle. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais : Oui, merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de La Peltrie et le député de Mercier, la motion suivante :

«Qu'afin de faire la lumière sur les allégations de fraude à la Société immobilière du Québec, la Commission de l'administration publique procède à l'audition des personnes suivantes : Marc-André Fortier, président-directeur général de la Société immobilière du Québec de 2003 à 2008; M. William Bartlett; M. Franco Fava; M. Charles Rondeau.

«Que la durée maximale de l'exposé pour chacune de ces personnes soit de 30 minutes et que l'échange avec les membres de la commission parlementaire soit d'une durée maximale de 240 minutes, partagées ainsi : 120 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 72 minutes pour l'opposition officielle et 48 minutes pour le deuxième groupe d'opposition;

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, réparties de la manière suivante : 6 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 3 minutes 30 secondes pour l'opposition officielle et 2 minutes 30 secondes pour le deuxième groupe d'opposition.

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques finales, partagée de la même façon que pour les remarques préliminaires;

«Enfin, que cette motion soit un ordre de l'Assemblée nationale.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la députée de Taschereau. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement. Je cède maintenant la parole pour la prochaine motion sans préavis à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la députée de Pointe-aux-Trembles et le député de La Peltrie.

«Que l'Assemblée nationale exprime sa plus vive préoccupation face aux récentes révélations d'espionnage de journalistes de la part du SPVM et de la Sûreté du Québec;

«Qu'elle réaffirme l'importance du travail des journalistes et la responsabilité du gouvernement du Québec d'assurer la protection de leurs sources pour la défense de l'intérêt public;

«Qu'elle déplore que l'article 6 de la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics force les lanceurs d'alerte à s'adresser d'abord à un corps policier ou au commissaire à la lutte contre la corruption;

«Qu'elle déplore également que l'article 6 ne leur offre aucune protection contre les représailles s'ils dévoilent des actes répréhensibles en lien notamment avec des actes de corruption, de collusion, de malversation ou de trafic d'influence;

«Qu'elle presse le président du Conseil du trésor de modifier l'article 6 du projet de loi n° 87 afin qu'il ne nuise pas au travail journalistique et à la dénonciation publique d'actes répréhensibles.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci. Merci, Mme la députée. Maintenant, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Il n'y a pas de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

Maintenant, nous en sommes à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions. Et je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'avise cette Assemblée que la Commission des institutions poursuivra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 62, Loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l'État et visant notamment à encadrer les demandes d'accommodements religieux dans certains organismes, aujourd'hui, à compter de 11 h 30, pour une durée de 1 h 30, et de 15 heures à 17 h 15, ainsi que le mardi 8 novembre 2016, de 9 h 45 à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 106, Loi concernant la mise en oeuvre de la Politique énergétique 2030 et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif, le lundi 7 novembre 2016 de 14 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, ainsi que le mardi 8 novembre 2016, de 10 heures à midi, à la salle des Premiers-Ministres de l'édifice Pamphile-Le May;

La Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 87, Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics, aujourd'hui, à compter de 11 h 45 jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Cette même commission entreprendra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 693, Loi modifiant la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État afin de favoriser la présence de jeunes au sein des conseils d'administration des sociétés d'État, le mardi 8 novembre 2016, de 11 heures à midi, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Et finalement, Mme la Présidente, la Commission de la culture et de l'éducation entreprendra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 114, Loi modernisant la gouvernance des musées nationaux, le mardi 8 novembre 2016, de 10 heures à 11 h 45, à la salle du Conseil législatif.

• (11 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors merci, M. le leader adjoint. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 143 du règlement concernant l'horaire des travaux des commissions? Consentement?

Une voix : Consentement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Consentement.

Maintenant, pour ma part, je vous avise que la Commission de l'administration publique se réunira aujourd'hui en séance de travail de 13 heures à 15 heures, à la salle RC.161, afin de préparer l'audition de la Société des alcools du Québec concernant le chapitre 4 du rapport du Vérificateur général du printemps 2016 intitulé Société des alcools du Québec : achat et vente de boissons alcooliques et performance, en auditions publiques de 15 heures à 18 heures, à la salle des premiers ministres de l'édifice Pamphile-Le May, afin d'entendre la Société des alcools du Québec, puis en séance de travail de 18 heures à 18 h 30, à la salle des Premiers-Ministres de l'édifice Pamphile-Le May, afin de statuer sur les observations, les conclusions et les recommandations à la suite de cette audition.

Je vous avise également que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 13 heures à 13 h 45, à la salle Louis-Joseph-Papineau, afin de discuter de l'opportunité de se saisir d'un mandat d'initiative portant sur la gestion et l'avenir de la centrale à gaz à Bécancour.

Enfin, je vous avise que la Commission des transports et de l'environnement se réunira aujourd'hui, à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de procéder à l'élection à la vice-présidence de la commission.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Et je vous rappelle que, lors de l'interpellation prévue pour le mardi 8 novembre 2016, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques s'adressera à M. le ministre des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports sur le sujet suivant : Le réseau électrique métropolitain et son impact global sur le développement et le financement des transports collectifs au Québec.

Je vous avise de plus que l'interpellation prévue pour le vendredi 11 novembre 2016 portera sur le sujet suivant : La hausse fulgurante de taxe que subiront les agriculteurs à la suite des changements apportés par le gouvernement libéral au programme de crédit de taxes foncières agricoles. M. le député de Berthier s'adressera alors à M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Affaires du jour

Et, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour.

Débat d'urgence sur les révélations relatives à
la surveillance de journalistes et de sources
journalistiques par des services policiers

Et l'Assemblée tiendra maintenant le débat d'urgence demandé par M. le leader du deuxième groupe d'opposition sur les révélations troublantes relatives à la surveillance de journalistes et de sources journalistiques par des services policiers.

Et je vais suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 24)

(Reprise à 11 h 27)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons maintenant reprendre nos travaux et ainsi tenir le débat d'urgence demandé par M. leader du deuxième groupe d'opposition sur les révélations troublantes relatives à la surveillance de journalistes et de sources journalistiques par des services policiers.

Je vous informe de la répartition du temps de parole établie pour la durée de ce débat : 57 minutes sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 33 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 23 min 45 s sont allouées au groupe parlementaire... le deuxième groupe d'opposition, pardon, et six minutes sont allouées aux députés indépendants. Dans ce cadre, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Enfin, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Et je cède immédiatement la parole à M. le député de Granby.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je suis très heureux que la présidence ait donné son aval à ce débat d'urgence. C'est un fait rare, de demander un débat d'urgence, parce que, bon, il faut que la situation soit extrêmement grave, sans précédent, et que la présidence ait donné son aval à une situation qui, depuis lundi dernier, me laisse croire que c'est une crise sans précédent pour le Québec, à savoir que des journalistes ont pu être sous écoute, épiés, espionnés. Et vous l'avez vu depuis lundi, je crois que c'est la pointe de l'iceberg, Mme la Présidente. Jamais je n'aurais cru, dans une société industrialisée et moderne comme la nôtre, qu'on puisse en arriver un jour, au Québec, à voir des corps de police, SPVM, la Sûreté du Québec, demander à un juge ou à un juge de paix d'avoir la possibilité pas juste d'enquêter, là, mais de mettre sous écoute ou de vérifier les appels, les textos de journalistes au Québec.

• (11 h 30) •

Quand je parle de crise sans précédent, Mme la Présidente, on voit ça au Québec depuis lundi dernier. On aurait imaginé, dans le pire des films, une situation comme celle-là dans les anciens pays du bloc de l'Est, c'est à peu près la seule chose, j'essaie de trouver une image pas trop forte, mais, quand même, tu te dis... le bloc de l'Est, dans le temps, gouvernement autoritaire qui vérifie, le gros Big Brother, hein, qui surveille à peu près toutes les allées et venues de ses citoyens à gauche et à droite... Et là, aujourd'hui, on surveille, on met sous écoute le quatrième pouvoir, le quatrième pouvoir qui sont les journalistes, qui relaient l'information aux Québécois, aux Canadiens jour après jour sur la situation politique, judiciaire du Québec.

Depuis lundi dernier, on apprend, donc. Ça a été l'affaire Lagacé, Patrick Lagacé, de La Presse, qui a été, encore une fois, mis sous écoute, si on peut le dire ainsi, par le SPVM. On apprend par la suite qu'il y a eu des journalistes comme Denis Lessard, de La Presse, Alain Gravel, de Radio-Canada, Marie-Maude Denis, Isabelle Richer, Éric Thibault, André Cédilot, et il y en a peut-être d'autres, des journalistes... Félix Séguin, de TVA, des journalistes qui font un travail incroyable pour débusquer des situations malhonnêtes, des situations où le politique n'a pas fait son boulot correctement, des situations qui n'auraient jamais amené, sans ce travail des journalistes, exemple, la commission Charbonneau. Sans ce travail des journalistes, la commission Charbonneau n'aurait jamais eu lieu. Tout le monde se souvient aussi de la commission Gomery à Ottawa. Alors, des journalistes qui sont surveillés épiés, espionnés, qui parlent aussi au politique. Il n'y a personne ici, dans cette Chambre, qui peut m'assurer, nous assurer, nous, comme parlementaires, que je n'ai pas déjà été sous écoute, vous, Mme la Présidente, ou un ministre, ou un député. Personne.

Est-ce que cette commission d'enquête publique, je dis bien «publique», fera la lumière sur tout ça? Je l'espère bien. Quand je parle d'une crise sans précédent, Mme la Présidente, on n'aurait jamais cru, encore une fois, en 2016, vivre une situation comme celle-là. Et j'ose croire, et j'ose croire, quand je parle d'une situation où on espère une enquête publique, que... Mon chef l'a mentionné tantôt, il a dit : Bien, commission d'enquête avec tous les pouvoirs pour contraindre des gens à venir témoigner, ce sera à la discrétion donc des commissaires de définir si c'est public ou non. J'ose croire qu'on ne baignera pas dans les ordonnances de non-publication, qu'on ne baignera pas dans le huis clos total et qu'on saura faire la lumière sur ce qui s'est passé depuis qu'on apprend que Patrick Lagacé a été espionné, que de multiples journalistes, près d'une dizaine, une semaine plus tard, ont été espionnés, que peut-être même le politique a été espionné.

Et, dans cette situation, Mme la Présidente, cette crise de confiance entre le politique, la police, la fameuse police politique qu'on ne veut pas entendre, bien, malheureusement, Mme la Présidente, avec un collègue qui perd son poste de secrétaire... pas de secrétaire mais de porte-parole à la sécurité publique, qui est un ancien ministre, qui, lui-même, a donné un coup de téléphone à la Sûreté du Québec lorsqu'il était en poste, en 2013... Vous comprendrez que, quand un ministre directement appelle le directeur de police pour lui demander : Qu'est-ce qui se passe?, parce qu'on a un président de syndicat qui était sous écoute, sous vérification, bien, c'est extrêmement embêtant pour le gouvernement de l'époque et extrêmement troublant, troublant pour la police elle-même, les citoyens, à qui on doit leur dire : Il y a une séparation des pouvoirs — et le ministre aime dire ça, puis j'y crois, moi aussi, là — il y a une séparation des pouvoirs qui doit être extrêmement importante entre la police et le politique. Bien, j'ose croire, Mme la Présidente...

Parce que je ne prendrai pas tout le temps qui m'est accordé, parce que je veux que mon collègue responsable, donc, de ce dossier aussi, de la justice, puisse intervenir, mais j'ose croire, après ce que le premier ministre a répondu au chef du deuxième groupe d'opposition, qu'on saura donner de nouvelles politiques, nouvelles façons de faire, faire de la politique autrement pour qu'un jour, je l'espère, d'ici à la fin de cette session-ci, on ne retrouve pas, à chaque fois qu'il y a un changement de gouvernement, un changement de chef de la police à la Sûreté du Québec. Quand on fait une demande, quand mon collègue de Deux-Montagnes le demande depuis très longtemps pour qu'on puisse revoir nos politiques, bien, de nommer aux deux tiers le chef de police de la SPVM, de la Sûreté du Québec, que l'Assemblée nationale elle-même et ses législateurs soient capables de se pencher, de dire : C'est un bon choix, et non le choix, la prérogative explicite du premier ministre, qui, plus souvent qu'autrement... On l'a vu, là. Le Parti québécois est arrivé au pouvoir, on change le D.G. de la SQ. Bien, ça, c'est extrêmement grave. Minimalement, j'espère que le gouvernement va donner son aval, va se pencher sur un petit groupe de travail rapidement pour qu'on soit capables de changer cette façon de faire qui mine la crédibilité de nos institutions, qui mine la crédibilité, encore une fois, du travail que nous faisons.

Il faut redonner confiance à la population, et j'ose croire que ce qu'on aura bien humblement amené fera son petit bout de chemin, son petit bout de chemin pour être capables de faire la lumière sur cette crise sans précédent pour le Québec, pour ce qui est de l'espionnage, donc, de journalistes d'enquête au Québec, et qu'encore une fois le gouvernement soit capable de nous donner des politiques qui vont, je l'espère — je l'espère, je l'espère — améliorer nos politiques, dans le futur, pour que le Québec, encore une fois, ne sorte pas noirci de cette situation qui est extrêmement grave pour elle-même. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le député de Granby. Maintenant, je vais céder la parole à M. le ministre des Affaires municipales, de l'Occupation du territoire et ministre de la Sécurité publique.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Le débat qu'on a aujourd'hui est un débat qui est extrêmement important. On est chanceux, Mme la Présidente, on est... on est chanceux de vivre au Québec, de vivre au Canada, dans une société démocratique. Et la démocratie, ce n'est pas seulement aller voter une fois tous les quatre ans ou tous les cinq ans. Bien sûr que la démocratie, c'est ça, bien sûr que ça en fait partie, mais la démocratie, c'est pas mal plus que ça. On est chanceux, Mme la Présidente, de vivre dans une démocratie et dans une société de droit, hein, où les droits et obligations de chacun sont précisés par des lois qui sont adoptées par des élus, avec une population qui a eu la chance, de façon démocratique, de choisir ses élus. Et le droit doit s'appliquer à tous, de façon égale, sans prendre partie pour l'un ou l'autre.

On est chanceux de vivre dans une telle société, on est extrêmement chanceux. Mais avec cette chance, Mme la Présidente, vient une grande responsabilité, et cette responsabilité, c'est de s'assurer que nous ne soyons pas les seuls à vivre dans une telle société démocratique, une telle société de droit, c'est-à-dire, par exemple, notre génération, mais de s'assurer que ça va être comme ça pour tous ceux et celles qui vont suivre, en plus de nous-mêmes qui vivons dans cette société aujourd'hui. Et donc ce n'est pas seulement une chance que nous avons, ce sont des devoirs. Nous avons un devoir impératif de faire tout ce qu'on peut pour défendre ces grandes valeurs de démocratie, de liberté, de justice, de droit, encadrées de façon impartiale pour tous et toutes.

Alors, c'est notamment pour ça, je dirais même que c'est beaucoup pour ça que les événements qui nous sont relatés depuis quelques jours nous ont tellement choqués, nous ont tellement ébranlés. Et puis je pense que ça transcende les divisions de partis, ici, honnêtement. Ce n'est pas une question partisane, ici, je pense. Je ne pense pas, je ne soupçonne pas un instant que quelqu'un, ici, ne voudrait pas défendre ces grands principes là.

Alors, on a tous été choqués d'entendre, par exemple, que des journalistes avaient été épiés dans leur travail, dans le travail qui est le leur, dans le travail normal qui est le leur, avaient été épiés alors que ne pesait aucun soupçon sur eux ou sur elles, alors que personne n'imaginait que le fait de faire son travail de journaliste pouvait constituer en soi une offense. Alors, on a été ébranlés par ça. On a été d'autant plus ébranlés que cette société libre et démocratique dans laquelle nous avons la chance d'exister, elle se nourrit aussi de la possibilité, pour l'ensemble des citoyens et des citoyennes, d'avoir une information de qualité et d'apprendre les choses.

• (11 h 40) •

Vous savez, à l'école, on cultive et on développe le sens critique — j'espère qu'on le fait aussi dans toutes nos familles — et l'école a ce rôle-là à jouer. Mais, pour exercer son sens critique, encore faut-il avoir l'information. Pas toujours l'information qu'on souhaiterait avoir, hein? Parfois, l'information nous interpelle. Parfois, l'information va nous dire les choses qui ne vont pas bien, pas seulement les choses qui vont bien. Parfois, l'information va nous dire qu'on a des déficiences comme société puis qu'on a un travail à faire pour s'améliorer.

Il peut arriver que certains membres de notre société qui exercent des responsabilités particulières parfois n'aiment pas lire dans les journaux certaines choses, n'aiment pas entendre à la télévision certaines... voir à la télévision certaines choses ou entendre à la radio certaines choses. Ça peut arriver. C'est correct, c'est légitime. Mais en même temps il faut que ça continue toujours d'être comme ça pour qu'on soit toujours confrontés à la réalité de notre société puis que ça nous interpelle toujours pour nous améliorer.

Et c'est ça que joue, au-delà du travail de journalistes individuel, de personnes, là, puis que, dans ce métier-là comme dans d'autres, il y a toutes sortes de talents qui vont s'exprimer... mais, au-delà des talents individuels, au-delà du reportage particulier d'un journaliste ou d'un autre, au-delà du fait qu'un ou une peut nous plaire davantage qu'un autre, ensemble ces journalistes font un travail qui est absolument essentiel, c'est un rouage de notre démocratie. Ils nous rendent le miroir de notre société et nous le rendent notamment — notamment — en ayant accès, en parlant à des gens qui vont leur révéler des choses qui, sans eux, sans elles, n'auraient peut-être été jamais révélées. Et, si, par nos façons de faire, on empêchait ce travail essentiel, dans la démocratie dans laquelle nous vivons, de s'exercer, de se faire correctement, bien, on serait en train de porter atteinte à notre démocratie, pas seulement au travail des journalistes. Or, c'est pour ça qu'on se sent tous interpellés par les révélations des derniers jours. C'est sérieux, c'est quelque chose de très sérieux.

Évidemment, obtenir un mandat pour éventuellement obtenir le droit, dans le cadre d'une enquête, d'intercepter des communications privées, il faut que ça soit balisé par des critères extrêmement sérieux, extrêmement exigeants, et notre système de justice en établit, de tels critères, il y a des barèmes. Il y a des barèmes qui ont été établis notamment par... en particulier par la Cour suprême : il faut satisfaire aux exigences du Code criminel, quant à la délivrance d'un mandat de perquisition. Il faut examiner les circonstances pour déterminer si le juge peut décerner un mandat, il faut s'assurer d'avoir bien pondéré l'intérêt de l'État. Il faut déterminer si l'affidavit présenté est suffisant pour permettre un bon exercice du pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne l'attribution d'un mandat de perquisition. Il faut s'assurer que l'affidavit indique s'il y a d'autres sources de renseignements raisonnables et, le cas échéant, s'assurer qu'elles ont été consultées. Il faut déterminer si le média a rendu publics, en tout ou en partie, les renseignements recherchés, et, si oui, cela favorisera donc l'attribution du mandat. Il faut examiner l'imposition de certaines conditions à son application, afin que le média ne soit pas indûment empêché de publier ou de diffuser des informations. Il faut tenir compte de la possibilité d'invalider un mandat après son attribution s'il ressort que les autorités ont omis de communiquer des renseignements pertinents qui auraient pu influer sur la décision de décerner le mandat. Il faut tenir compte de la possibilité d'invalider une perquisition effectuée de manière abusive. Et ça, c'est parmi des barèmes, mais il y a beaucoup d'autres choses encore qui encadrent.

Ce qu'on sait, c'est qu'intercepter des communications privées d'un citoyen, ça ne peut pas se faire sans que ça soit motivé par des circonstances très sérieuses, et il faut que ça soit balisé par le droit. Et ce qu'on sait aussi, c'est que, s'il s'agit d'un journaliste, il y a une autre dimension qui s'ajoute. C'est peut-être quelque chose sur lequel justement on est en train de travailler, ensemble, avec le débat que nous avons et les débats que nous aurons au cours des prochaines semaines et des prochains mois, il y a une autre dimension qui se pose : oui, communications privées d'une personne, mais qui exerce un travail qui est essentiel au fonctionnement de notre démocratie. Donc là, il y a une autre dimension qu'on doit... qui nous interpelle.

Alors, lorsqu'on a appris toutes ces choses-là, évidemment on s'est posé différentes questions, mais c'était important d'apporter une réponse rapide. C'est important d'apporter une réponse rapide parce que, s'il est vrai qu'on puisse... Et là on ne sait pas à quel point ça peut être facile, difficile, hein? C'est le genre de question qu'on peut avoir. On sait que c'est encadré par un juge de paix qui doit appliquer le droit, qui doit évidemment tenir compte des enseignements de la Cour suprême. Donc, en principe, ça ne doit pas être simple d'obtenir un tel mandat. Mais, s'il y a un certain nombre de ces mandats... puis c'est ce qu'on apprend ces jours-ci, c'est qu'il y a eu un grand nombre de ces mandats qui ont été consentis. Bien, si c'est le cas, bien, peut-être qu'il va falloir se poser des questions, à savoir : Est-ce qu'on a les bonnes pratiques? Est-ce qu'on a les bonnes façons de faire? Donc, il fallait agir de manière immédiate, avant de répondre comment on pourrait changer les choses dans l'avenir, comment on peut faire en sorte que... s'il y en a eu beaucoup dans un passé récent, éviter qu'il y en ait encore beaucoup d'ici à ce que nous puissions peut-être changer nos façons de faire, peut-être changer nos lois.

Alors, Mme la Présidente, le gouvernement a pris des décisions importantes cette semaine, a pris des décisions très importantes cette semaine. Et ces décisions sont à la hauteur de l'importance que l'on accorde à la défense de notre démocratie à l'intérieur de laquelle la liberté de presse, la protection des sources des journalistes est une valeur cardinale, une mesure importante dont il ne faut pas minimiser la portée.

Je ne pense pas d'ailleurs qu'on en minimise la portée. En tout cas, ce qu'on a reçu comme réception de la part de notre population par rapport à cette mesure-là, c'est que justement c'était à la hauteur des circonstances. C'est qu'on a pris la décision cette semaine que, dorénavant, dorénavant, lorsqu'un corps policier pense nécessaire d'obtenir un tel mandat, qui lui permettrait d'intercepter les communications privées d'un journaliste, bien, avant d'aller présenter sa preuve et ses arguments auprès d'un juge de paix, il va devoir d'abord rencontrer, donc... passer par le filtre du Directeur des poursuites criminelles et pénales, comme on le fait pour les avocats, comme on le fait pour les juges, comme on le ferait pour les députés de l'Assemblée nationale. Et ce n'était pas le cas des journalistes, mais dorénavant ça va être aussi le cas des journalistes.

Alors, voyez-vous, quand on parle de juges, d'avocats, de membres de l'Assemblée nationale, on est en train de parler de personnes qui exercent un rôle tout à fait particulier dans notre démocratie, qui oeuvrent dans des institutions qui sont les institutions clés du fonctionnement de notre État et de notre société collective organisée. Nous, on a jugé que, comme la liberté de presse est si importante pour la démocratie, bien, il fallait élever aussi les journalistes au même rang en ce qui concerne la façon et le passage par le DPCP avant d'obtenir éventuellement un mandat. On a posé ce geste-là.

Mme la Présidente, au Québec, il y a trois corps policiers qui peuvent demander de tels mandats. Ce n'est pas tous les corps policiers du Québec qui peuvent faire ça. Pour ceux et celles qui pourraient... qui peut-être ne le sauraient pas, on a différents niveaux de services policiers, et il faut être de niveau 4 et plus pour avoir ce pouvoir-là, cette possibilité-là. Alors, au Québec, ce sont les services de police de la ville de Québec, le Service de police de la ville de Montréal et la Sûreté du Québec qui ont ce pouvoir-là d'éventuellement obtenir de tels mandats. Et, en passant, l'UPAC, dont les unités proviennent de la SQ, du SPVM, est assujettie aussi à ces règles-là et donc fait partie de cet univers-là.

• (11 h 50) •

Alors, il a été décidé aussi, cette semaine... Avant même que ça arrive devant un juge de paix, il y a des politiques en place dans les corps policiers concernés, dans les trois corps policiers concernés. Il y a des processus en place dans les corps policiers concernés. Alors, ce qu'on va faire, c'est qu'on va aller vérifier, on va aller vérifier dans chacun de ces corps policiers quelles sont ces politiques, quels sont ces processus, comment sont-ils appliqués. C'est le rôle de l'inspection qu'on a confié à l'unité responsable de telles inspections, du ministère de la Sécurité publique : d'aller voir ça en portant une attention particulière aux cas impliquant des journalistes. On a décidé ça cette semaine, et c'est déjà en train de produire des résultats. Parce que, savez-vous, quand les corps policiers savent qu'ils vont être l'objet d'une telle inspection, ils commencent à fouiller leurs dossiers d'une façon beaucoup plus pressante et attentive, je dirais. Ils commencent à regarder : Qu'est-ce qu'on a fait, là, dans un passé récent? La SQ a commencé cet exercice-là, au point d'être capable de donner une première évaluation des choses pour une période de 20 ans, sans doute anticipant l'inspection à venir. Alors, c'est déjà en train de produire des effets.

C'est déjà en train de produire des effets avant même que les inspecteurs débarquent, on commence à apprendre des choses qui, en les apprenant, peut-être nous troublent davantage. Mais savez-vous quoi? C'est quand on va connaître l'ampleur du phénomène, c'est quand on va comprendre bien de quel phénomène il s'agit qu'on va être capables de le prendre, comme on dit... on parle de... bras par le corps ou le corps par le bras?

Une voix : À bras-le-corps.

M. Coiteux : À bras-le-corps. Pardon, Mme la Présidente, je cherchais l'expression.

Et on a posé un troisième geste, qui est important. On a annoncé la création, la mise sur pied d'un comité d'experts qui aura pour mandat de faire la lumière sur tout cela et de faire des propositions. Puis on a dit que les propositions seraient présentées à la Commission des institutions publiques. Pourquoi? Parce que c'est possible, Mme la Présidente, qu'il faille changer nos lois, et on veut que des experts se penchent sur le sujet.

Mais chaque jour apporte ses nouvelles révélations. Chaque jour apporte ses nouvelles révélations, et hier ce qu'on a appris, c'est que ce n'était pas une question qui ne touchait que le SPVM, il y avait eu une telle enquête visant des journalistes, à la Sûreté du Québec, en 2013. Il y avait eu une telle intervention, ce qui a tout de suite, sur demande de la Sûreté du Québec, déclenché une enquête administrative, qui est en cours, qui va se déployer prochainement, dans les prochains jours.

Mais ça nous interpelle sur une autre dimension de la question aussi, c'est : Mais comment de telles décisions sont prises? Comment de telles décisions sont prises? Quelle est la chaîne qui nous amène à prendre de telles décisions? Je comprends que, quand ça arrive à un juge de paix, le juge de paix a à faire son travail. On vient de réviser le processus en disant : Il va falloir aussi passer par le DPCP avant. Ça resserre drôlement le processus. On fait une inspection. Dans le cas de la Sûreté du Québec, on fait une enquête, mais qu'en est-il de l'ensemble de la chaîne décisionnelle? Parce que ça nous interpelle, ça nous interpelle à la Sûreté du Québec, ça va nous interpeller aussi dans les autres corps policiers. Ça va nous interpeller au SPVM aussi, forcément. Ça nous interpelle dans tous les corps policiers concernés.

Parce qu'il y a un autre principe sacro-saint d'une démocratie qui fonctionne bien, là, c'est que chacun doit être à sa place et qu'on ne doit pas entremêler les pouvoirs. Et on a souvent insisté là-dessus au cours des dernières semaines. La police a un travail très important à faire dans une société de droit. La justice, évidemment, a un rôle fondamental dans une société de droit. Le gouvernement a un rôle très important dans une démocratie comme la nôtre. Mais il faut maintenir une saine distance entre les différents pouvoirs pour avoir l'exercice plein et entier d'une démocratie qui aura toutes les caractéristiques d'une démocratie véritable mais en même temps qui pourra, devant nos citoyens, être digne de confiance. Et c'est là qu'on en arrive, c'est-à-dire que, d'une journée à l'autre, l'accumulation des nouveaux faits ébranle la confiance de nos citoyens. Elle ébranle la confiance de nos citoyens.

Alors, Mme la Présidente, on prend suffisamment la situation au sérieux pour ajouter aujourd'hui une autre dimension dans les gestes que nous avons déjà posés. On n'a jamais exclu la possibilité que les travaux du groupe d'experts soient publics. On ne l'a jamais exclue, mais on pense, à la lueur de toute cette accumulation de faits troublants, que ça devient nécessaire que ça le soit dès le début du processus. Il faut faire la lumière sur ça, il faut que les bonnes questions soient posées. Dans tous les cas spécifiques qui pourraient être portés à l'attention des personnes qui vont composer ce groupe d'experts et qui nous questionnent tous sur le pourquoi et le comment du fait que des journalistes aient vu leurs communications privées être interceptées, on a besoin de comprendre comment ces décisions-là ont été prises. Parce que ça fait partie aussi de la transparence dont on a besoin, parce que c'est avec ça qu'ultimement on va être capables, comme Assemblée nationale, si on doit se pencher notamment sur des nouvelles dispositions législatives... pour prendre les meilleures décisions et, le gouvernement, pour proposer les meilleures avenues pour le futur.

Alors, on a décidé aujourd'hui que les personnes qui vont composer ce comité d'experts vont être nommées sous l'égide de la loi sur les commissions d'enquête publique du Québec, avec tous les articles que comporte cette loi et donc avec tous les pouvoirs d'une commission d'enquête publique, de telle sorte que le travail des membres de ce comité va pouvoir se faire en interpellant toutes les personnes pertinentes pour poser toutes les questions pertinentes à l'examen des raisons, et du pourquoi, et du comment on en est arrivés à épier, dans une société libre et démocratique comme la nôtre, des journalistes qui font essentiellement leur travail, mais dont le travail est essentiel pour notre société démocratique. C'est ce qu'on a décidé aujourd'hui.

On prend la situation très au sérieux. Je pense qu'on prend tous la situation très au sérieux. Puis on est en train de se donner, là, une façon de travailler ensemble au Québec pour faire la lumière sur la question, la faire en toute transparence, puis ensuite être équipés pour prendre les bonnes décisions. Parce que c'est en faisant ça que justement on va remplir notre devoir, qui est la contrepartie de la chance que nous avons de vivre dans une société libre et démocratique, dans une société de droit, notre devoir de s'assurer que ça continue d'en être ainsi, notre devoir de mettre un pare-feu contre toute dérive qui peut-être serait en train de nous éloigner de ce type de société dans laquelle on a l'intention de toujours continuer de vivre. C'est la défense de la démocratie, c'est la défense de la liberté, c'est la défense d'une information libre qui dit toutes les choses qui ont à être dites à nos citoyens pour que nos citoyens soient capables d'exercer leurs propres devoirs démocratiques. C'est de ça qu'il s'agit, Mme la Présidente.

Alors, je ne veux pas prendre plus de temps, parce que je vais en prendre à certains de mes collègues qui vont vouloir s'exprimer sur le sujet, mais je pense que c'était important de situer ce qu'on a pris comme décision cette semaine dans le contexte général qui est celui que je viens d'exposer. Et, sur ce, Mme la Présidente, je vous remercie.

• (12 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le ministre. Maintenant, je vais céder la parole à Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je suis heureuse que nous ayons l'occasion d'avoir ce débat d'urgence, parce qu'effectivement, s'il y a des circonstances qui peuvent justifier un débat d'urgence ici, dans l'enceinte de notre démocratie, c'est bien les événements que l'on vit depuis lundi, qui sont mis en lumière et qui semblent prendre une ampleur qu'on ne pouvait pas soupçonner, même lorsque ça a commencé à être révélé, lundi dernier.

Mes collègues qui ont pris la parole précédemment l'ont bien soulevé : le pouvoir journalistique, l'indépendance de la presse et son corollaire, la protection des sources journalistiques, sont au coeur de notre démocratie. Et cette indépendance doit être préservée à tout prix, parce que la démocratie, pour qu'elle existe pleinement, elle doit aussi pouvoir vivre dans l'espace public, elle doit pouvoir être contestée, elle doit pouvoir être mise au défi d'informations qui plaisent et qui déplaisent mais qui nous font avancer tous collectivement.

La presse a un rôle clé, on le sait, c'est une vérité de La Palice, de dire ça, dans une démocratie. Et ce qu'on apprend depuis lundi est excessivement grave. Je pense qu'il n'y a personne ici, dans cette Assemblée, qui aurait pu penser qu'au Québec de tels mandats de surveillance pouvaient avoir cours auprès de journalistes d'organes de presse très réputés, qui font du travail très sérieux, et avec ce qui apparaît, du moins de ce qu'on voit jusqu'à maintenant, une facilité déconcertante. Et, comme certains l'ont dit, ce n'étaient pas des journalistes qui étaient directement sous enquête, c'étaient parfois leurs sources, parfois même pas. Et on a vu à quel point ces mandats-là ont été donnés, semble-t-il, facilement et avec une très grande ampleur.

Donc, je pense que, de tous les côtés de la Chambre, on convient que la situation est excessivement grave et qu'il faut agir très rapidement. C'est ce que nous, de notre côté, on a fait dès lundi en disant qu'il fallait, au Québec, se doter d'une loi sur la protection des sources journalistiques. Je comprends que le ministre n'est pas fermé à ça. On va voir les recommandations qui vont venir de la commission, mais je pense qu'il faut prendre ça très au sérieux. Et aujourd'hui même dans Le Devoir, l'éditorialiste... bien, je veux dire, le directeur, Brian Myles, disait dans un éditorial que, oui, il est grand temps de se doter d'une loi sur la protection journalistique. Et, s'il y a quelqu'un qui connaît l'enjeu, c'est lui, qui a déjà été président pendant de nombreuses années de la Fédération professionnelle des journalistes au Québec. C'est fondamental que ce geste-là soit posé.

Et, du même souffle, je dirais que, déjà, des gestes ont été posés par le gouvernement, comme, par exemple, de vouloir rendre la procédure pour l'obtention d'un mandat de surveillance ou d'écoute, quand il est question de journalistes, au même niveau d'exigence que pour ce qui est d'un avocat, d'un député, d'un juge. Je pense qu'aussi on pourrait se mettre au travail dès maintenant pour se doter ici, ensemble, collectivement, au-delà de toute partisanerie, d'une loi en bonne et due forme sur la protection des sources journalistiques, qui fait l'objet de débats depuis des années et qui a été réclamée périodiquement autant par la fédération des journalistes que le Barreau et d'autres instances importantes dans notre démocratie. Donc, ça, je pense que c'est quelque chose qui est fondamental.

On demandait aussi une enquête indépendante. Alors, oui, on se réjouit aujourd'hui que le gouvernement annonce que le mandat du comité d'experts qu'il avait annoncé, donc, mardi ne soit plus en fait qu'un simple comité d'experts mais bien qu'on va se doter d'une commission d'enquête en bonne et due forme.

Vous comprendrez, Mme la Présidente, que nous sommes un peu perplexes par rapport à ce qui a été dit ce matin, à savoir que ce seraient les commissaires qui décideraient du caractère public ou non de leurs travaux, alors que, dans la loi et dans... quand on regarde les précédents, c'est toujours dans les règles de procédure, dans le décret qui crée les commissions, que l'on pense à la commission Bastarache, que l'on pense à la commission Charbonneau. Si on se réfère aux règles qui ont été adoptées... Je réfère le ministre, le gouvernement à l'article 24 en ce qui concerne, donc, la Commission d'enquête sur le processus de nomination des juges. C'était clairement dit que les audiences allaient être publiques. Même chose, bien sûr, pour la commission Charbonneau, article 37 des règles de procédure qui est venu dire que ce devait être public. Donc, on s'attend évidemment à la même chose pour cette nouvelle commission d'enquête qui va être mise sur pied. C'est fondamental.

On dit à quel point, en ce moment, la confiance de la population est ébranlée. On sait qu'en ce moment, pour toutes sortes de raisons qui se sont produites au cours des dernières années, de manière générale, la confiance du public à l'égard de ses institutions est gravement ébranlée, et là on voit qu'elle est très préoccupée. Le sondage d'opinion qui a paru hier l'a montré, plus de 75 % des Québécois sont gravement préoccupés par ce qu'on apprend depuis lundi : que le SPVM et, depuis hier, que la Sûreté du Québec ont demandé et obtenu des mandats de surveillance très étendus à l'égard de journalistes qui ne faisaient que leur travail et, bien sûr, qu'ils ont eu accès ainsi à toutes leurs sources, donc avec une étendue, là, jamais vue et qui fait, comme on le sait tous — et ce n'est pas réjouissant pour nous — le tour du monde à l'heure actuelle. Donc, pour que cette confiance-là soit maintenue, il faut bien sûr que, dès aujourd'hui, il n'y ait aucune espèce d'ambivalence et d'ambiguïté quant au caractère public des travaux qui vont être menés, comme c'est toujours le cas, et qu'on ne laisse pas, là, un certain flou perdurer à cet égard-là.

Évidemment, comme le chef de notre formation, le chef de l'opposition officielle, l'a dit depuis le début, en fait, des annonces du gouvernement — et je prends au mot le ministre et je pense qu'on va être tous d'accord ici — c'est un dossier qui doit être traité sans partisanerie pour le bien supérieur de notre démocratie, de nos institutions, du maintien de ce lien de confiance là qui est si fondamental. Alors, oui, nous réitérons, aujourd'hui, notre volonté de pouvoir être associés et consultés, autant en ce qui a trait à la nomination des commissaires qui vont être à la tête, donc, de la commission d'enquête publique qui est annoncée aujourd'hui, et aussi pour la définition du mandat par le décret qui va être mis de l'avant.

Ce n'est pas banal de trouver le bon équilibre entre un mandat qui soit bien ciblé, qui nous permette d'aller au fond des choses et qui aussi puisse se réaliser en temps utile. Et on veut pouvoir être mis à contribution dans cet esprit de non-partisanerie parce que vous savez sans doute que nous avions demandé, dès mardi, que des experts désignés par l'ensemble des partis politiques puissent travailler ensemble. Le gouvernement a donné suite en partie à cette demande, mais dont il gardait le contrôle. On souhaite que, pour cette commission, donc, cette transformation-là de ce comité d'experts en commission d'enquête, nous soyons directement impliqués pour les nominations et pour la détermination du mandat, du spectre d'action de cette commission.

D'entrée de jeu, je pense que le ministre a bien dit l'ampleur des éléments qui vont devoir être regardés. C'est quoi, la chaîne de commandement? Comment ces processus-là sont mis en branle quand on veut obtenir de tels mandats? Pourquoi, même, on se tourne vers de telles demandes, alors que ce ne devrait pas être le réflexe premier, ce devrait être le dernier des réflexes? Et autre chose qui est préoccupante, c'est bien sûr tout le rôle... comment la police conçoit ces mandats, les gestes qu'elle peut poser dans de telles circonstances mais aussi comment les juges de paix exercent ces pouvoirs-là?

Et, bien sûr, il y a une indépendance judiciaire qui est fondamentale. Je pense qu'il y a beaucoup de Québécois qui viennent de découvrir, au cours des derniers jours, l'existence et les fonctions des juges de paix magistrats au Québec. Ce n'est pas banal. Ce sont des juges en bonne et due forme mais qui, on le conçoit aisément depuis les événements qui nous sont relatés depuis lundi, ont des pouvoirs très importants. Et, bien sûr, par le fait même de ce qui leur est demandé, ça se tient à huis clos, il n'y a pas de transparence a priori pour ce qui concerne l'émission de ces mandats-là. Et évidemment c'est très difficile d'avoir une prise pour savoir comment cet exercice-là, de pouvoir, se fait parce que la justice en elle-même, et c'est son corollaire, doit être publique, mais, dans ces cas-là, compte tenu évidemment des enjeux qui sont en cause, d'écoute électronique, de mandats de perquisition, les auditions se déroulent évidemment à huis clos.

Je pense que c'est un événement, tout en préservant, bien sûr, l'indépendance judiciaire, qui doit être regardé aussi. Les juges de paix magistrats, dans quel cadre exercent-ils leurs fonctions? Quelles balises sont données? Je pense aussi que c'est de nature à pouvoir vraiment augmenter le niveau de confiance puisque l'objectif qu'on doit se donner tous ensemble avec cette commission d'enquête, c'est que cette confiance-là, qui est gravement, mais gravement effritée à l'heure actuelle non seulement en ce qui concerne les journalistes, mais en ce qui concerne le public en général, soit rétablie le mieux possible.

Alors, en terminant, je nous souhaite de poursuivre dans l'esprit qui, je pense, nous a habités depuis le début de ces événements-là ici, au sein de l'Assemblée nationale, dans un grand esprit de collaboration, et que chaque geste qui soit posé le soit en pensant toujours à l'intérêt supérieur de notre démocratie et du respect de nos institutions. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

• (12 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée de Joliette. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, tout en vous rappelant que vous disposez d'un temps de parole de six minutes.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. Alors, effectivement, je crois, ainsi que ma formation politique, nous croyons que ce débat d'urgence était nécessaire, nécessaire parce que ce qui est en train de se passer, on avait l'impression, dans la vie, que ça se passait juste dans les films de fiction, ou sur les grandes dictatures, ou ailleurs dans le monde mais surtout pas chez nous. Alors, on est devant un fait, un fait où la police, avec l'assentiment des juges de paix, trouve légitime de pouvoir surveiller des gens qui ont un rôle majeur dans notre société, et j'entends ici, bien sûr, les journalistes.

C'est plus que nécessaire, cette commission d'enquête, pour ce qui s'est passé. Et donc, pour l'avenir, j'ai envie d'espérer et de croire que nous allons ensemble, comme parlementaires, ainsi que dans cette composition de la commission d'enquête, le mandat, etc., être en mesure de faire en sorte que tout ça ne se reproduise plus jamais.

Mais, en même temps, ce que je veux surtout porter à notre attention, c'est que je sens un grand assentiment face à la protection des sources journalistiques. Mon enjeu, c'est qu'on a présentement un projet de loi sur la table, le projet de loi n° 87, qui envoie un message complètement différent, qui dit à la population : Vous savez, si vous êtes témoin de corruption, collusion, malversation, vous ne pouvez plus passer par la voie des médias. Ce projet de loi là dit : On veut faciliter la divulgation, mais on n'est pas prêts à protéger pleinement les lanceurs d'alerte puisque, Mme la Présidente, à l'article 6 de ce projet de loi là, notamment, on dit : Les lanceurs d'alerte pourront aller voir les médias seulement s'il y a une urgence en santé, en sécurité et en environnement. Et, qui plus est, ils pourront aller voir les médias seulement s'ils vont voir la police avant.

Alors là, moi, je veux bien qu'unanimement on s'entende, et c'est ce que j'entends dans cette enceinte, que, pour l'avenir, il faut protéger. Ça, c'est la démocratie, c'est précieux, mais on est face à une partie gouvernementale qui refuse systématiquement les amendements qu'on apporte au projet de loi n° 87 pour nous assurer que les lanceurs d'alerte soient des gens qui soient protégés.

Et prenons M. Pereira, par exemple. Est-ce que M. Pereira, qui, grâce aux divulgations qu'il a faites, a permis au Québec de comprendre des mécanismes qui avaient des impacts majeurs pour la société québécoise, qui a été au coeur des révélations de la commission Charbonneau... Serait-il protégé par le projet de loi n° 87? Non, Mme la Présidente.

Alors, moi, j'ai bien envie de croire que cette commission d'enquête nous apprendra des choses. Et, j'entendais le ministre le dire tantôt, il est possible qu'il faille changer nos lois. Mais, Mme la Présidente, il y a des lois qui ne sont même pas adoptées, nous sommes en train de les étudier, et ces lois-là disent aux citoyens et aux citoyennes qui voudraient mettre au jeu des connaissances qu'ils ont concernant des actes répréhensibles... et ces gens-là, on leur dit : Non, non, non, n'allez surtout pas voir les médias. Allez voir la Protectrice du citoyen, allez voir votre comité de suivi interne mais surtout pas les médias. Et d'ailleurs, si vous voulez aller voir les médias, allez voir la police avant. Ce n'est pas rassurant, ça, Mme la Présidente. Ce n'est pas rassurant parce que ce qu'on voit, ce qu'on entend, ce qu'on pressent dans ce qui est en train de se passer, c'est qu'il y a une police politique, au Québec, qui oriente, qui oriente les enquêtes de façon non pas à nous aider à faire sortir l'information mais bien à mettre le couvercle sur des informations d'intérêt public. Et ça, c'est inacceptable.

Moi, je veux bien qu'on s'indigne de ce qui se passe, et nous en sommes, nous en sommes profondément indignés, mais je ne veux pas qu'en même temps qu'on est en train de s'indigner de ça, de l'autre côté, ça fait des heures que nous passons dans l'étude du projet de loi n° 87, et, minute après minute, amendement après amendement, la réponse systématique du président du Conseil du trésor, c'est : Non, non, non. Pas plus tard qu'hier soir on a démontré comment les médias vont être exclus du projet de loi n° 87 puisque... Et là je le dis, là, les lanceurs d'alerte qui ne vont pas voir la police avant ne seront pas protégés par ce projet de loi là. Alors, moi, je veux et je demande que le gouvernement se resaisisse, que le gouvernement mette ses bottines, que les bottines suivent les babines pour nous assurer que ce que nous sommes en train de faire maintenant va protéger les lanceurs d'alerte et non pas les vulnérabiliser. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Maintenant, j'ai un petit enjeu ici. Je sais que M. le député de Borduas avait fait la demande de pouvoir intervenir après Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Alors, est-ce qu'il y a consentement, puisqu'habituellement il y a une alternance avec les partis de l'opposition et du gouvernement? Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui, tout à fait, Mme la Présidente. Puis on tient... Donc, on va consentir, mais juste pour soulever qu'il est important de respecter ce principe. Donc, situation très, très exceptionnelle. Alors, de consentement.

• (12 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, M. le député de Borduas, je vous cède la parole.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Bien, je vais remercier mon collègue de Chapleau.

Écoutez, on a fait une demande de débat d'urgence aujourd'hui parce que c'est extrêmement préoccupant. Le leader de ma formation politique l'a dit, les sources journalistiques, les mandats sur les sources journalistiques pour épier les journalistes, pour connaître leurs sources, c'est extrêmement préoccupant. Puis c'est pour ça que, dès le départ, on a demandé une commission d'enquête publique, Mme la Présidente. Et il faut vraiment que ce soit écrit dans le décret de la tenue de la commission d'enquête que les audiences doivent être tenues publiquement, Mme la Présidente, parce que c'est comme ça qu'on va réussir à connaître le système, à connaître l'étendue de cette culture-là d'espionner les journalistes. Et, dans notre démocratie, c'est inacceptable, Mme la Présidente.

Ceci étant dit, j'entendais le ministre de la Sécurité publique nous dire à la période des questions : Nous, nous respectons les institutions. Nous, on travaille à respecter les institutions. Mais qu'est-ce que ça veut dire, Mme la Présidente, respecter les institutions? Parce que, dans une démocratie, on se dote d'institutions, mais, pour avoir des institutions fortes, il faut que ce soit l'ensemble du processus de l'institution qui soit garanti. Ça passe notamment par la nomination des principaux dirigeants.

Depuis le printemps dernier, on a déposé le projet de loi n° 597, Loi modifiant la Loi concernant la lutte contre la corruption afin que le commissaire à la lutte contre la corruption soit une personne désignée par l'Assemblée nationale. Qu'est-ce qui est arrivé depuis maintenant huit mois? Le projet de loi dort sur les tablettes parce qu'il n'est pas appelé par le gouvernement, Mme la Présidente. Dans ce projet de loi là, on propose une nomination aux deux tiers du directeur de l'UPAC. Le chef de la SQ devrait être également nommé par l'Assemblée nationale aux deux tiers. Pour un gouvernement qui dit qu'il respecte les institutions, pourquoi ne prend-il pas les moyens pour qu'on donne toute la crédibilité et l'indépendance requises aux institutions?

Je ne comprends pas que le ministre de la Sécurité publique, quand il nous dit : Nous, de ce côté-ci de la Chambre, on respecte les institutions, il ne prenne pas tous les moyens nécessaires qui sont à sa disposition pour mettre en place ces garanties d'indépendance là, cette garantie que nos institutions, ça va être des institutions fortes dans notre démocratie. Il a le pouvoir de le faire, il suffit juste qu'il bouge, Mme la Présidente.

Si on veut avoir une démocratie forte, Mme la Présidente, ça prend des pouvoirs mais des contre-pouvoirs. Actuellement, on constate qu'il y a des lacunes, et ça nous prend une crise, une crise pour un peu faire bouger le gouvernement. C'est malheureux, Mme la Présidente, parce que c'est comme ça que ça fonctionne, on dirait, du côté du Parti libéral. Sans crise, pas d'action. Et, quand il y a une crise, bien là les actions ne sont pas à la hauteur de la réponse qui doit être fournie.

Donc, j'invite véritablement le ministre de la Sécurité publique, qui est le ministre responsable de l'application de ces lois-là pour l'UPAC, pour la SQ, à modifier rapidement le processus de nomination parce que, s'il croit dans la force de nos institutions, il prendra tous les moyens, notamment sur le processus de nomination, pour faire en sorte que ça soit désigné ici, à l'Assemblée nationale, et qu'on ne se retrouve pas dans une situation où, à chaque fois qu'il y a un changement de gouvernement... Et le PQ n'est pas mieux, Mme la Présidente. L'expérience 2012‑2014 nous l'a très bien démontré, hein? Dès que le Parti québécois est arrivé au pouvoir, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ils ont montré la porte à l'ancien directeur général de la Sûreté du Québec.

Puis ça nous fait penser, Mme la Présidente, à l'époque pas si lointaine, lorsqu'un nouveau gouvernement rentrait au pouvoir, qu'est-ce qui arrivait? Tous les fonctionnaires perdaient leur emploi. Puis qu'est-ce qu'on a décidé, durant les années 60? Que maintenant la fonction publique aurait une permanence pour qu'elle soit indépendante, cette fonction publique là, pour qu'elle donne des services à la population dans l'intérêt de la population. Et là, ce qu'on discute aujourd'hui, on parle de la police. C'est encore plus important que la tête dirigeante soit désignée par l'Assemblée nationale et qu'il n'y ait pas de lien entre le politique et le policier, Mme la Présidente.

Et vous me permettrez de faire un point sur le travail des policiers, les policiers qui travaillent au jour le jour à lutter contre le crime. Il faut les supporter, les policiers, il faut leur donner tous les outils et toute la légitimité pour le faire parce qu'ils se dévouent à lutter contre les infractions criminelles, contre les criminels, Mme la Présidente. Et je tiens à m'adresser à eux pour dire : Ne lâchez pas votre travail de lutter contre le crime. On vous supporte.

Ceci étant dit, à l'intérieur de l'organisation, s'il y a des policiers qui parlent, c'est parce que, parfois dans l'organisation, il y a des enquêtes qui n'aboutissent pas, il y a des dossiers qui ne cheminent pas. Pourquoi ces dossiers ne cheminent-ils pas? Est-ce qu'il y a de l'intervention politique, Mme la Présidente? Il faut faire la lumière là-dessus et il faut s'assurer d'avoir un processus transparent lorsqu'on nomme les dirigeants de nos corps de police, de l'UPAC, de façon à leur donner toute l'indépendance requise. C'est fondamental dans une démocratie.

Donc, pour ce qui est des journalistes qui ont été espionnés, c'est extrêmement préoccupant, Mme la Présidente. Et on ne parle pas uniquement que d'un seul corps de police, du Service de police de la ville de Montréal où le directeur ne semble pas voir de problématique. L'autre élément : au niveau du directeur de la Sûreté du Québec, des enquêtes qui ont été autorisées en 2013 à l'endroit de six journalistes. L'ancien ministre de la Sécurité publique reçoit une lettre, appelle le directeur du service de police, reçoit une lettre du président de la FTQ, qui se plaint d'être sous surveillance.

La première des questions, c'est : Comment se fait-il qu'il est au courant qu'il est sous surveillance, le président de l'époque de la FTQ impliqué dans de multiples allégations, scandales de l'industrie de la construction? Est-ce que c'est à cause que l'ancien ministre des Finances Raymond Bachand l'a informé? Comment ça se fait qu'un membre du Conseil des ministres aurait informé un haut dirigeant d'une centrale syndicale qui traitait avec des individus qui sont accusés au criminel? Comment ça se fait qu'il l'avait informé? Comment ça se fait que cette information-là était disponible à quelqu'un qui était membre du Conseil des ministres? Comment ça se fait? Ce n'est pas normal, là. Quelqu'un qui est sous l'objet d'une enquête criminelle par la police, il n'y a personne qui l'appelle pour l'informer, Mme la Présidente. Comment ça se fait? Il faut faire la lumière là-dessus.

Et donc la personne qui est sous enquête reçoit un appel d'un ministre libéral pour lui dire : Il faut que tu arrêtes de parler parce que tu es sous enquête, écrit une lettre au ministre de la Sécurité publique du Parti québécois, le député de Verchères. Le député de Verchères prend le téléphone, appelle le chef de la police qu'ils ont nommé, et là il y a une enquête qui est déclenchée, et il y a des mandats d'écoute qui sont demandés. Vous conviendrez avec moi, Mme la Présidente, qu'il y a un lien, il y a une proximité, il y a peut-être un lien de causalité. Ça arrive pas mal de façon contemporaine et concomitante. Ça soulève des questions.

Mais on revient à la nature même. Pourquoi est-ce qu'on veut savoir avec qui les journalistes parlent? Parce qu'il y a des fuites policières? Pourquoi il y a des fuites policières, Mme la Présidente? Comment ça se fait que les enquêtes de l'UPAC ne cheminent pas? Comment ça se fait que, pour que le gouvernement libéral bouge, ça prend des révélations dans les médias? Comment ça se fait que, comme aujourd'hui, on apprend qu'il va y avoir un reportage de Radio-Canada sur la Société immobilière du Québec...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Je pense qu'on a tous été patients, mais je pense que le collègue va dans des zones qui laissent entendre des éléments qui, évidemment, remettent en question de façon non parlementaire... des accusations à peine voilées. Alors, je vous demanderais peut-être juste de le ramener dans le droit chemin.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Peut-être sur la question de règlement du collègue de LaFontaine, Mme la Présidente, je pense que la voie est très claire. Ça a un lien direct avec le débat d'urgence qu'on a aujourd'hui : les sources journalistiques, les enquêtes qui ont été arrêtées, l'espionnage des journalistes. Je suis vraiment sur le sujet, Mme la Présidente, et...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, bien, c'est correct...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Non.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, je vous ai fait signe. Peut-être, je devrais l'exprimer plus clairement. Je vous invite à la prudence, et vous pouvez poursuivre, mais... Oui, il y a de la pertinence, mais vous devez faire attention de la façon que vous présentez vos propos.

M. Jolin-Barrette : Bien, je suis content, Mme la Présidente, que vous disiez que mes propos sont pertinents parce que le député de LaFontaine ne semble pas trouver que c'est le cas. Mais je prends son offre de m'enseigner le droit parlementaire. S'il veut m'offrir des sessions, ça va me faire plaisir de collaborer avec lui. D'ailleurs, j'aurai peut-être aussi des enseignements à lui formuler. Donc, on pourra échanger des points de vue. Puis peut-être que je vais réussir à le convaincre aussi d'indiquer à son gouvernement que ça prend de la transparence et de l'intégrité, puis que le pouvoir politique doit être séparé du pouvoir policier, ça serait fondamental, puis qu'on devrait arrêter d'espionner les journalistes. Je pense que c'est la moindre des choses, surtout pour que l'ensemble des informations sur lesquelles les policiers travaillent lorsqu'ils mènent leurs dossiers puissent résulter en des accusations, s'il y a lieu, et qu'il n'y ait pas d'intervention politique, Mme la Présidente. C'est fondamental puis ça fait partie de notre démocratie, puis il faut que les journalistes qui font leur travail puissent consulter leurs sources sans être épiés.

Puis il y a un autre élément là-dedans aussi, Mme la Présidente, puis j'interpelle mes collègues aussi là-dessus. Il y a certains ministres qui discutent avec des journalistes, il y a certains députés qui discutent avec des journalistes. Vous-même, Mme la Présidente, vous avez peut-être discuté avec des journalistes. Peut-être que vous avez été sous écoute, Mme la Présidente, par la force des choses. Est-ce que c'est normal? Est-ce que c'est normal que des mandats soient accordés comme ça pour connaître qui sont les sources?

On parle de plusieurs mois dans le cas de Patrick Lagacé. On parle de journalistes bien connus : de Denis Lessard, de Marie-Maude Denis, d'Isabelle Richer, d'Alain Gravel, d'Éric Thibault, de Fabrice de Pierrebourg, Félix Séguin, Monic Néron, des gens dans la société qui renseignent la population, qui font éclater au grand jour des scandales qui ne sortiraient pas si ce n'était pas de leur travail. Il faut valoriser ça, Mme la Présidente, mettre en place des balises pour le travail des journalistes.

• (12 h 30) •

Donc, on a parlé du triangle FTQ-PQ-SQ, puis ça soulevait des questions. La commission d'enquête publique pourrait faire la lumière là-dessus, Mme la Présidente, pourrait faire la lumière également sur pourquoi est-ce qu'il y a des enquêtes qui sont arrêtées, pourquoi est-ce qu'il y a des black-out parfois sur la surveillance lorsque ça touche le politique. Les sources journalistiques sont fondamentales dans notre société.

Le ministre disait tout à l'heure, à la période des questions : Nous, on est en faveur de la séparation des pouvoirs. Cette conception libérale, la conception des pouvoirs, Mme la Présidente, elle est à géométrie variable. Vous savez, Mme la Présidente, j'ai un exemple parfait pour ça : le projet de loi n° 37, le gouvernement est intervenu directement dans un dossier devant la cour. Si ce n'est pas une atteinte à la séparation des pouvoirs, je me demande quelle est-elle.

Ceci étant dit, sur la séparation des pouvoirs, quel est le meilleur moyen pour avoir une séparation des pouvoirs, Mme la Présidente? C'est que les gens qui vont être nommés à la magistrature, les gens qui vont être nommés à la tête d'escouade de police le soient de façon indépendante, et que leur choix ne fasse l'objet d'aucune contestation. Et comment on fonctionne dans notre système? C'est par le biais de l'Assemblée nationale, par le biais de l'Assemblée nationale, ici, tous ensemble. Pourquoi? Parce qu'on ne veut pas que, lorsqu'il y a une enquête en matière de corruption, lorsque l'intégrité est en question, on ne veut pas que des enquêtes soient stoppées lorsqu'un suspect rencontre un ancien membre du gouvernement.

Ça prend une séparation complète, Mme la Présidente, complète. Les citoyens ont besoin d'avoir confiance à la fois dans le monde politique, mais aussi dans la police, et les policiers doivent pouvoir exercer leur travail à l'abri de toute intervention politique. C'est le message que je veux qu'on retienne, parce que les zones d'influence, Mme la Présidente, il ne doit pas y en avoir. Il n'y a personne au-dessus des lois, et ça doit être vraiment réel, Mme la Présidente.

Donc, j'invite le ministre de la Sécurité publique à vraiment mettre de l'action à ses paroles. Il est là, je sais qu'il m'entend, je sais qu'il m'écoute. Il peut rapidement changer la loi, sur la nomination du directeur de police de la Sûreté du Québec, de façon à ce que, lorsqu'il y a un nouveau gouvernement, il n'y ait plus de changement de chef de police au gré de la couleur politique du gouvernement. C'est fondamental. Même chose pour la corruption, avec l'UPAC, il faut s'assurer véritablement, Mme la Présidente, d'avoir un processus de nomination qui va faire en sorte de donner toute la légitimité à cette personne-là dans l'optique d'avoir une séparation des pouvoirs la plus complète possible.

Donc, Mme la Présidente, j'invite véritablement le gouvernement à vraiment prendre action pour vrai cette fois-ci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le député de Borduas. Maintenant, je reconnais M. le député de Chapleau.

M. Marc Carrière

M. Carrière : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis heureux aussi de prendre part à ce débat d'urgence. Je pense qu'il est fondamental, il est important que la séparation des pouvoirs soit une chose absolue dans notre société. Tout le monde, ici, y croit, je pense. J'entendais la députée de Joliette tantôt qui voulait faire de cet exercice et de tout ce que nous allons entreprendre quelque chose de non politique, non partisan, et j'y adhère, je crois que c'est important.

Vous savez, la liberté de presse, c'est un droit fondamental dans notre démocratie et est au coeur de ce que nous défendons tous. Les événements qu'on a entendus depuis quelques jours, depuis lundi dernier, que des journalistes ont été sous écoute, ou espionnés, ou peu importe le terme qu'on veut lui donner... À la SPVM, le Service de police de la ville de Montréal, c'était avec M. Lagacé, Patrick Lagacé. On a entendu tout dernièrement, tout récemment, il n'y a pas longtemps, qu'en 2013 et même après la Sûreté du Québec aurait mis sur écoute ou en tout cas enquêté sur d'autres journalistes, Mme Denis, M. Gravel, monsieur... Mme Richer, pardon, M. Thibault, M. Lessard, M. Richer, et il y en a d'autres, il y en a plusieurs autres. C'est assez inquiétant de savoir... un, que chacun des journalistes puisse protéger ses sources, et parce qu'il y va, un, de la protection de ces gens-là et du travail que les journalistes font au quotidien.

Effectivement, le gouvernement, nous ici ensemble qui mettons sur pied des lois, il y a une démocratie à laquelle on tient tous, et plein de pays à travers le monde envient de ce que le Québec et ce que le Canada ont comme démocratie. Il y a les services policiers, il y a notre service judiciaire également, et il y a les journalistes qui font un travail, qui ne nous plaît pas tous les jours. Ça fait 24 ans que je fais de la politique, ça n'a pas toujours été à mon goût, ce qu'on a dit ou ce qu'on a rapporté sur ce que j'ai fait, mais ils font un travail essentiel pour notre démocratie, et les citoyens en sont très bien servis. Et les gens qui informent les journalistes, je pense qu'il est important de protéger également, parce qu'il n'y a plus personne qui va vouloir parler à personne, et ça deviendrait dangereux.

Ce matin, le... dès mardi, pardon, le ministre de la Sécurité publique et notre premier ministre ont mis de l'avant trois nouvelles mesures importantes suite aux révélations qui ont été dévoilées. Il y avait, premièrement, la mise sur pied d'un comité d'experts indépendant présidé par un éminent juriste pour formuler des recommandations sur les meilleures pratiques à adopter. La deuxième mesure était... C'est une directive obligeant d'obtenir l'autorisation du DPCP, du Directeur des poursuites criminelles et pénales, avant que soit présentée une demande de mandat d'écoute électronique visant un journaliste comme c'est notamment le cas pour les juges, pour les membres de l'Assemblée nationale également. Donc, il était important, là, de s'assurer d'avoir une vérification additionnelle, si je peux utiliser ce terme. Et le DPCP aura l'obligation... ou les corps policiers, pardon, auront l'obligation de demander au Directeur des poursuites criminelles et pénales si le mandat qui est demandé est opportun, et, à ce moment-là, il y aura une autorisation qui sera donnée si c'est nécessaire. Et il y avait également comme troisième mesure la tenue d'une inspection portant notamment sur l'interception des communications privées auprès des corps policiers concernés.

Pour ce qui est des corps policiers concernés, tantôt, le ministre de la Sécurité publique, également ministre des Affaires municipales, a très bien démontré qu'il ne s'agit pas de tous les corps policiers du Québec, il s'agit de trois corps policiers. Et de là on parle des différents niveaux de services policiers que chacun des corps policiers doit desservir à sa population, et c'est des niveaux de service 4, donc plus élevés. Et là-dessus il y a trois corps de police au Québec qui ont ce niveau de service 4, 5 et 6, il s'agit du Service de police de la ville de Québec, Service de police de la ville de Montréal ainsi que la Sûreté du Québec, qui chapeaute avec un niveau 6, là, c'est très technique. Et, si je connais un petit peu la technique, c'est que, dans mon ancienne vie, je gérais, entre guillemets... parce que j'étais préfet d'une MRC où on avait un service de police de niveau 2, qui était beaucoup plus... beaucoup moins élaboré, si on veut utiliser ce terme, que les trois autres corps de police. Il y a également l'UPAC qui sera soumise aux mêmes dispositions que les autres trois corps de police.

Donc, ce matin, le ministre de la Sécurité publique, avec la ministre de la Justice, devant tout ce qu'on apprend depuis quelques jours, ont mentionné que le comité en question qui sera mis sur pied aura... Et ici je vais citer la ministre de la Justice : «Donc, en conséquence de ce que mon collègue vient de [nous] décrire, nous avons décidé que le mandat confié au groupe d'experts serait confié en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête avec tous les pouvoirs que cette loi donne au commissaire.

«Les nouvelles divulgations sont à ce point sérieuses, et, comme on le mentionnait, la confiance du public envers ses institutions publiques, envers toutes les institutions, elle est essentielle. [Donc,] la protection des sources journalistiques, la liberté de presse sont des droits qui sont consacrés, qui [font] l'objet de décisions de la Cour suprême. La liberté de presse, elle est consacrée à la charte canadienne, elle est essentielle, elle est [même] à la base [...] de la société démocratique, au même titre que l'indépendance des institutions le sont...»

• (12 h 40) •

Donc, ce matin, ce qui a été mentionné et ce que j'entends, ce qu'on a entendu depuis le temps, autant au niveau des médias, autant au niveau des différentes oppositions et dans l'opinion publique, je pense que tout le monde salue cette décision-là d'en faire une commission d'enquête publique, avec tous les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi. Donc, je pense que c'était une excellente décision, c'est une sage décision pour faire toute la lumière sur ce qu'on entend depuis quelques jours. Parce qu'effectivement, comme l'ont mentionné plusieurs des intervenants avant moi, je pense qu'on a tous intérêt à ce que la liberté de presse puisse être absolue et que les sources des gens qui vont communiquer de l'information aux journalistes soient également protégées.

Donc, là-dessus, cette décision-là, ce matin, elle est saluée de tous. Le mandat également de cette commission sera suffisamment large pour traiter de la liberté de presse, comme je disais, mais suffisamment précis pour enquêter sur l'étanchéité entre les corps policiers et l'autorité de qui ils relèvent. Puis il y a plusieurs informations complémentaires, il y a des barèmes qui sont mis, qui existent avant l'émission de mandats. Il y en a neuf, en fait, barèmes qui sont émis. Et ça doit satisfaire, premièrement, aux exigences du Code criminel quant à la délivrance d'un mandat de perquisition, et ça doit également examiner les circonstances et déterminer si le juge peut décerner un mandat.

Je pense qu'on l'a dit à plusieurs reprises tantôt : Il va falloir revoir la façon, lorsqu'un service policier va demander de faire de l'écoute ou d'intercepter des appels... Est-ce que c'est pertinent? Est-ce que l'information n'est pas déjà connue autrement? Donc, ces neuf barèmes-là pour l'émission d'un mandat seront drôlement importants. Et je crois que le comité d'experts devra ou pourra se pencher sur toute cette perspective-là.

Donc, tout ce qui est mis de l'avant, tout ce qu'on entend depuis quelques jours, tout ce qui est mis de l'avant par notre gouvernement fera en sorte que notre démocratie sera protégée. Donc, je suis heureux de voir que ce qui se produira dans les prochaines semaines va, premièrement, mettre à jour tout ce qui s'est produit, tout ce qu'on entend depuis quelques jours... et d'arriver avec les meilleures pratiques pour que ce qu'on a présentement ne puisse plus se reproduire. Alors, merci, Mme la Présidente. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Chapleau. Maintenant, je vais céder la parole à Mme la députée de Vachon.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Oui, merci, Mme la Présidente. En fait, la semaine a commencé un 31 octobre avec l'affaire Lagacé, l'affaire Lagacé qui était un suivi, une surveillance policière de la police de Montréal d'un journaliste, une surveillance qui allait sur son téléphone, tous les téléphones qu'il a faits, personnels et professionnels, mais plus que ça, Mme la Présidente, aussi ils ont activé son système de géolocalisation sur son téléphone, et une surveillance faite par la police de Montréal, mais — très troublant, Mme la Présidente — entérinée par une juge de paix magistrat.

Vous savez, c'est directement, avec l'affaire Lagacé, la liberté de presse qui est attaquée, la protection des sources journalistiques, et donc extrêmement grave. Mais l'affaire Lagacé s'est transformée en scandale de la surveillance policière parce que s'est ajouté à l'affaire Lagacé trois autres suivis par la police de Montréal : Félix Séguin de TVA, Monic Néron du 98,5 et Fabrice de Pierrebourg, qui est anciennement de La Presse.

Mais, Mme la Présidente, ça ne s'est pas arrêté là. Cinq cas, du côté de la SQ, se sont ajoutés : Alain Gravel, Marie-Maude Denis, Isabelle Richer de Radio-Canada, Éric Thibault du Journal de Montréal, Denis Lessard de La Presse et André Cédilot de La Presse, qui a été aussi à Radio-Canada.

Et là ce n'est pas seulement qu'un policier qui a été visé, et on le voit, là, avec les noms que je vous ai sortis : Alain Gravel, Marie-Maude Denis, Isabelle Richer, c'est le journalisme d'enquête qui est directement visé. Et c'est essentiel qu'ici, à l'Assemblée nationale, on agisse. Et d'avoir ce débat d'urgence là aujourd'hui, c'est essentiel.

Donc, je vous ai parlé de la police de Montréal, de la SQ, Mme la Présidente, mais on a aussi d'autres corps policiers qui agissent ici, au Québec : la GRC et le SCRS. Et, malgré que Justin Trudeau ait affirmé, qu'il ait promis même de faire tout ce qui est nécessaire pour défendre la liberté de presse, il a refusé, il a refusé de demander à la GRC et au SCRS à savoir si, eux aussi, faisaient de la surveillance de journalistes. Donc, M. Trudeau fils parle beaucoup, mais agit très peu. C'est facile de faire des belles paroles en l'air, mais, quand vient le temps de prendre des décisions et de demander à ce que les choses soient faites, il est absent. Il n'est plus là.

Et donc on a aussi, du côté de la GRC et du SCRS... et j'aimerais ça demander aujourd'hui ici, à l'Assemblée nationale, que l'Assemblée nationale demande, donc le gouvernement du Québec demande au gouvernement du Canada à ce que la GRC et le SCRS nous indiquent s'il y a également eu de la surveillance policière reliée à des journalistes. Ça serait essentiel de le savoir, parce qu'on sait, Mme la Présidente, qu'il y en a eu pas mal dans le passé. Donc, ce serait essentiel de le savoir, et j'aimerais ça que d'une seule voix nous demandions au gouvernement du Canada, donc à M. Trudeau, qu'il soit conséquent avec ses paroles et qu'il fasse la demande à la GRC et au SCRS.

Du côté de la police de Montréal, vous savez, le directeur de la police, Philippe Pichet... et contrairement à ce qu'affirme le maire de Montréal, M. Coderre, ce n'est pas une question de lynchage que de demander qu'il soit suspendu le temps de l'enquête. C'est juste normal, Mme la Présidente. D'ailleurs, je ne comprends pas, je ne comprends pas le maire de Montréal de continuer à appuyer son directeur de la police avec toutes les informations que nous avons aujourd'hui. Ce n'est pas seulement que Patrick Lagacé, c'est également trois autres journalistes qui ont été visés par la police de Montréal.

Donc, c'est juste normal que M. Pichet soit suspendu le temps de l'enquête et, en fonction des résultats, il sera réintégré à son poste ou non. Mais ce n'est pas normal qu'il reste en place pendant l'enquête. Et ça a été demandé. Ça a été demandé par la fraternité des policiers de Montréal et c'est une demande qui est tout à fait raisonnable de la part de la fraternité des policiers. Je pense qu'effectivement il n'y a pas de climat de confiance tant qu'on n'aura pas les résultats de l'enquête.

Et vous savez, Mme la Présidente, pour suspendre M. Pichet, bien, c'est une décision du gouvernement du Québec sur recommandation de la ville de Montréal à travers sa commission de la sécurité publique. Donc, je pense qu'il serait important que le maire de Montréal, Denis Coderre, demande au gouvernement du Québec de suspendre M. Pichet de ses fonctions le temps que l'enquête se réalise. Et, si l'enquête le blanchit, bien, il sera réintégré à l'intérieur de ses fonctions, et, si c'est jugé trop problématique, bien, à ce moment-là, il devra se retirer, Mme la Présidente. Mais il doit être suspendu le temps de l'enquête. Vous savez, c'est tellement grave, ce qui se passe, qu'un autre maire, celui de Québec, a parlé d'une espèce de viol. Donc, je pense, Mme la Présidente, que le maire de Montréal et le gouvernement du Québec devraient agir et suspendre M. Pichet de ses fonctions.

• (12 h 50) •

Du côté de faire la lumière, comme dit le ministre de la Sécurité publique, de faire la lumière sur tout ce qui s'est passé, vous savez, au début, le ministre de la Sécurité publique... parce que nous, au niveau du Parti québécois, nous avons toujours demandé une enquête indépendante. C'est essentiel. Et ce qu'on a vu dans les premières réactions du ministre de la Sécurité publique, c'est qu'il demandait une enquête administrative sur la surveillance des téléphones. Et le ministre de la Sécurité publique, il veut que les pratiques soient étudiées et qu'il y ait des sanctions, Mme la Présidente. Mais, pour avoir été aux premières loges du scandale du MTQ, où, par deux fois, une sous-ministre a menti aux parlementaires et n'a eu aucune sanction, elle est encore rémunérée plein salaire, au-dessus de 200 000 $, à faire pas grand-chose, alors qu'elle a menti deux fois aux parlementaires, j'ai un doute sur la volonté du gouvernement libéral d'imposer des sanctions, Mme la Présidente. Et une enquête administrative, bien, on l'a vu dans le scandale du MTQ, il y a eu des enquêtes qui ont été faites à l'interne, des questions qui ont été posées, des rapports qui ont été déposés que même la sous-ministre elle-même a dit ne pas avoir eu connaissance. Et donc les enquêtes administratives, clairement insuffisant.

Mais je suis contente de voir que le ministre de la Sécurité publique s'est rajusté aujourd'hui et a transformé son comité d'experts, qui avait le mandat de faire des propositions pour une loi sur les sources journalistiques, il l'a transformé en commission d'enquête. Et là il faudra s'assurer que ce soit bien public, parce qu'il y a eu, pendant une certaine période, une espèce de flou où et le ministre de la Sécurité publique et la ministre de la Justice n'ont pas trop voulu répondre, à savoir si c'était public.

Et même, j'ai entendu, de la part de la ministre de la Justice, que les commissaires... qui vont déterminer elles-mêmes si la commission d'enquête sera publique... Or, Mme la Présidente, elle irait à l'encontre de ses propres lois. Parce que, selon ce qui est sur le site du gouvernement du Québec... «Les procédures d'enquête de la commission sont-elles publiques? Par définition, les audiences d'une commission d'enquête se déroulent en public.» Par définition. Donc, j'espère qu'effectivement ils nous confirmeront que ce sera public, et c'est essentiel que la commission d'enquête soit publique si on veut rétablir la confiance. Donc, je crois que le fait que cette commission d'enquête là soit en place, c'est important et c'est essentiel.

Et finalement, au Parti québécois, nous avons demandé qu'il y ait une loi de protection des sources journalistiques parce que cette loi-là, vraiment... On l'a vu avec les dérives qu'on a eues actuellement : il doit y avoir un encadrement beaucoup plus strict que ce qu'on a actuellement, parce qu'avec la façon aussi facile que la juge de paix magistrat a émis les mandats de surveillance, on se rend compte qu'il y a une dérive très grave. Donc, il est essentiel qu'on puisse mettre en place une loi sur la protection des sources journalistiques parce que la liberté de presse est fondamentale dans la démocratie du Québec.

Donc, je crois que ce comité-là aura donc un rôle un peu bicéphale, là : et, d'un côté, de faire les enquêtes et, de l'autre côté, de faire des recommandations pour avoir une loi sur la protection des sources journalistiques. Et vous pouvez être certains qu'il va y avoir une grande collaboration de la part du Parti québécois pour travailler cette loi-là. Et nous souhaitons que le mandat de la commission d'enquête soit très restreint dans le temps pour que, rapidement, nous puissions avoir les résultats. Et nous souhaiterions, de la part du gouvernement, qu'il nous indique quels seront les délais qui seront en place.

Et, en terminant, j'aimerais rajouter qu'avec le projet de loi n° 87 sur les lanceurs d'alerte il faudrait qu'il y ait une ouverture de la part du gouvernement libéral pour que ça couvre tant le niveau municipal et les contractants privés, mais également que ça couvre la divulgation à des médias. Je pense que c'est essentiel. Sinon, on se rend compte que, d'un côté, on dit d'autres choses, et, de l'autre côté, on n'agit pas. C'est important d'agir aussi du côté du projet de loi n° 87. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de Vachon. Maintenant, au tour de M. le député de Vimont.

M. Jean Rousselle

M. Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Comme le disait tantôt le ministre de la Sécurité publique, je pense que moi aussi, je suis heureux de vivre au Québec, de vivre au Canada, dans une société démocratique. Par expérience — j'ai déjà travaillé aux Nations unies et j'ai eu la chance de me promener un peu partout dans le monde — je peux vous dire qu'il n'y a pas tous les pays qui ont cette chance-là. On parle de dictatures, on parle de toutes sortes de problèmes à l'extérieur du pays. Et je peux vous dire que je suis très heureux d'être un Québécois, un Canadien. Quand je me suis promené au Myanmar, au Bangladesh ou encore, comme je vous le disais tantôt, en Haïti, j'ai eu des appels, moi aussi, de journalistes demandant comment ça allait sur le terrain. C'était ma responsabilité de donner l'information qui ne mettrait pas en risque la sécurité des gens que je protégeais là-bas.

Je le sais, que les journalistes, c'est des gens professionnels. Et, effectivement, les faits qui ont été diffusés dans les derniers jours sont graves et ébranlent vraiment la confiance du public, et je trouve ça très malheureux. Il n'y a pas juste le public. Et, quand je parle du public, je parle en général. Je comprends même les juges, les policiers. Nous aussi, on fait partie du public. Et je pense que la démocratie est tellement importante, je pense, il faut vraiment tout faire pour la protéger. Et il ne faut pas s'en aller, comme j'ai vu ailleurs, justement, comme dans des États policiers... Effectivement, je peux vous dire qu'il n'y a personne qui y gagne, à aller dans ce sens-là.

Je pense que c'est important et puis je suis heureux que, dès mardi, on a parlé d'un groupe d'experts. On a parlé, justement, de faire une commission d'enquête. Oui, il faut effectivement éclaircir la chose, et ça, de manière non partisane. Tantôt, j'écoutais un peu mon collègue de Borduas, et il a tendance, des fois, à aller sur la partisanerie, mais j'ai été heureux d'entendre, justement, la collègue de Joliette, qui, effectivement, veut vraiment aller dans le sens, justement, de travailler ensemble, de faire que... Et ça, on a tous intérêt à le faire pour le bien-être de tous les citoyens et concitoyens qu'on représente ici.

Donc, on a décidé de mandater des gens, donc un comité d'experts, qui auront, justement, en vertu de la Loi des commissions d'enquête, avec tous les pouvoirs de cette loi qu'on donne aux commissaires... Parce que les nouvelles divulgations sont très sérieuses. Donc, nous donnerons au comité ce pouvoir supplémentaire, qui est important. Puis les commissaires auront toute l'indépendance de déterminer la façon que se tiendront ces audiences. Tous les articles de la loi s'appliquent. Et ça, c'est, encore une fois, très important. C'est une commission d'enquête publique. Oui, le mandat n'est peut-être pas encore déterminé, mais ça, ça viendra.

Mais je pense que l'objectif que l'on se dit depuis tantôt, et je pense qu'on est tous d'accord avec ça, c'est de protéger, justement, la liberté de presse parce que cette liberté de presse là est fondamentale, reconnue même par la Charte canadienne des droits. Les sources journalistiques font l'objet d'un encadrement déjà édicté par la Cour suprême.

Oui, le journaliste fait un travail... des fois ça nous bouscule, des fois ça nous secoue, mais c'est un travail vraiment important. Et c'est de cette manière-là que la population peut avoir confiance en nous comme députés, comme... Et pour moi, c'est vraiment important. Et il y a aussi des valeurs fondamentales dans notre société, puis il faut les débattre. Il faut prendre les actions appropriées pour ça. Et je pense que cet échange ou ce débat-là qu'on a aujourd'hui, je pense, ça en fait partie.

D'ailleurs, en mettant le comité d'experts indépendants, qui a été d'ailleurs aujourd'hui même annoncé par nous, le gouvernement... bien, il y a des directives aussi qui vont exister. Il va y avoir trois mesures concrètes qui vont être faites : la mise sur pied d'un comité d'experts indépendants, comme je viens de vous dire, mais aussi des directives bien précises, l'autorisation du Directeur des poursuites criminelles et pénales, le DPCP, dans notre langage, avant que soit présentée une demande de mandat d'écoute électronique visant les journalistes, comme c'est notamment le cas pour les juges, les membres de l'Assemblée nationale, et une directive obligeant aussi à consulter le DPCP avant de présenter à un juge toute autre demande de mandat pour avoir effet à révéler les sources journalistiques.

Il y a aussi le cas de la Sûreté du Québec qu'on a entendu. On l'a entendu, je l'ai vu aussi dans les journaux. C'est malheureux, mais, écoutez, il faut prendre action. Puis d'ailleurs le ministre a tout de suite regardé ça, et le directeur de la Sûreté du Québec en a pris acte. Je trouve ça troublant. Vous savez, quand je regarde des journalistes, tout ça... C'est sûr, comme ma collègue tantôt le mentionnait, ça a commencé avec l'affaire Lagacé. Et par la suite, bien, ça a déboulé, on a vu les noms sortir : Éric Thibault, Marie-Maude Denis, Isabelle Richer, Alain Gravel...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député, à ce point-ci, je me dois de vous demander si vous avez terminé votre intervention.

M. Rousselle : Non, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Parce que, compte tenu de l'heure, je dois suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, et vous pourrez poursuivre à ce moment. Alors, merci.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, veuillez vous asseoir. Merci. Bon après-midi.

Alors, s'il vous plaît! L'Assemblée poursuit le débat d'urgence demandé par M. le leader du deuxième groupe d'opposition sur les révélations troublantes relatives à la surveillance de journalistes et de sources journalistiques par des services policiers.

Avant de céder la parole au prochain intervenant, je vous indique qu'il reste 30 min 2 s. Alors, moi, ça va être 30 minutes, là, dont 19 min 23 s au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 min 30 s au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et... Voilà, je vous cède la parole, monsieur le prochain intervenant, M. le député de Vimont, à vous la parole.

M. Rousselle : Merci, M. le Président. Pour continuer mon intervention, je mentionnais tantôt que j'étais heureux de vivre dans une société démocratique, de vivre au Québec, de vivre au Canada, parce qu'il y a beaucoup de gens qui n'ont pas cette chance-là dans le monde. D'ailleurs, vous le savez comme moi, il y a tellement de gens qui viennent d'ailleurs pour venir s'établir au Québec, parce que justement on a cette chance-là d'avoir cette démocratie-là.

Par expérience de vie, j'ai vraiment voyagé sac à dos toute ma vie. J'ai visité beaucoup de pays, mais j'ai aussi travaillé pour les Nations unies en Haïti. Et je peux vous dire qu'avec toutes ces visites de pays un peu partout, on rencontre des dictatures, on rencontre... Écoutez, j'ai fait le Myanmar, le Bangladesh, la Chine, le Vietnam — je pourrais vous en nommer beaucoup comme ça — pour réaliser que, justement, les gens, ils n'ont pas la chance qu'on a ici, au Québec. Donc, c'est pour ça, il faut vraiment préserver cette société démocratique où on vit. C'est vraiment très important.

Moi, j'ai eu des téléphones, moi aussi, en Haïti, de journalistes qui voulaient savoir comment ça se passait sur le terrain. Ils font leur travail, c'est correct, parce qu'effectivement il y en a, des journalistes qui se promènent dans des pays où il y a la guerre, et ce n'est pas vraiment... pas facile de faire leur job, je peux vous dire, de faire leur travail. C'est un travail très dur, en mission un peu partout, et ce n'est pas nécessairement évident de le faire.

Donc, oui, j'ai parlé à certains journalistes, je peux vous le dire, mais... Et c'est là qu'on a une responsabilité civile. Tous et chacun, on a une responsabilité. Qu'on soit juge, policier, simple citoyen, député, journaliste, on a une responsabilité, et cette responsabilité-là, c'est la sécurité du public. Donc, dans les questions qui m'ont été posées, bien, j'avais la responsabilité de donner des matières... pour mettre en contexte le journaliste, mais c'est sûr que j'ai fait attention de qu'est-ce que j'ai dit, parce que ça aurait pu mettre des gens en danger avec qu'est-ce que j'aurais dit. Donc, c'est la responsabilité de tous et chacun.

Actuellement, oui, ça brasse un peu partout, dans les corps de police, et je peux vous dire que tous les policiers du Québec veulent juste, justement, que les gens aient toujours foi en eux. Ils font un travail exceptionnel et déjà pas facile. Mais justement il ne faut pas que la politique soit une police politique, là. Il ne faut pas que ça existe, mais d'aucune manière, parce que ça, ça touche la crédibilité de toutes nos institutions, pas juste les policiers mais de toutes nos institutions, et, je pense, c'est ça qu'il faut préserver le plus possible. Ce n'est pas normal, effectivement, que la politique se mêle de la police. Il faut vraiment que ça soit vraiment détaché.

Mais je ne suis pas prêt à aller jusqu'à... le collègue de Granby, tout à l'heure, qui disait que c'était juste la pointe de l'iceberg... Laissons la chance à ce comité-là de faire les études nécessaires, de faire leurs enquêtes nécessaires, puis par la suite on pourra en juger, mais moi, je ne suis pas prêt à... Moi, je veux donner la chance au comité qui va étudier, justement, qui va avoir le plein mandat, de pouvoir éclaircir, justement, la situation.

Oui, c'est l'affaire Lagacé qui a mis en lumière ce problème-là, et je pourrais vous dire que... Et bien d'autres ont suivi, là, on le sait. Éric Thibault, Marie-Maude Denis, Isabelle Richer, Alain Gravel, Denis Lessard, André Cédilot, pour ne nommer que ceux-là, ont fait part, justement, qu'ils ont eu à avoir des vérifications sur leurs allées et venues, et c'est vraiment déplorable parce qu'effectivement c'est ça qui... Le journaliste amène justement l'équilibre, des fois, dans la société, et je pense qu'on est tous très d'accord là-dessus. C'est pour ça qu'il y a la commission d'enquête, qui, dans le fond, va être donnée à un groupe d'experts qui vont pouvoir, justement, regarder, faire la lumière sur tous ces problèmes-là. Puis les commissaires, bien, auront toute l'indépendance de déterminer la façon que se tiendront ces audiences. Tous les articles de la loi, bien, vont s'appliquer, et ça, c'est bien, entendre ça. Et c'est une commission d'enquête publique. Le mandat, bien, comme vous le savez, c'est un mandat qui n'est pas encore défini, mais les ministres mentionnent comment le mandat sera suffisamment large pour nous permettre de faire la lumière.

Oui, mardi, justement, il y a trois mesures concrètes qui ont été données pour, d'ailleurs, la mise sur pied du comité d'experts indépendant, donc celui que je vous parlais, mais aussi des directives obligeant d'obtenir l'autorisation du Directeur des poursuites criminelles et pénales, qu'on appelle le DPCP, avant que ce soit présenté devant... un mandat d'écoute électronique visant un journaliste. Et ça, c'est la même chose qui... notamment on le retrouve au niveau des juges, des membres de l'Assemblée nationale. Donc, ça, au moins, on fait déjà des gestes. Déjà, le gouvernement, il est en action et vraiment pour... parce que c'est un problème sérieux, puis je pense que nos ministres, notre gouvernement l'a pris vraiment au sérieux. Et, je vous dirais aussi, le cas de la Sûreté du Québec, bien, suite à la demande du directeur de la Sûreté du Québec, le gouvernement a autorisé le ministère de la Sécurité publique, justement, de mandater la Direction de la vérification interne, des enquêtes et des inspections afin qu'ils procèdent à une enquête administrative. Donc, je pense que tous les éléments, tous les... on prend, justement, tous les moyens nécessaires pour, justement, faire la lumière, qui va, justement, être juste bénéfique et, je vous dirais, bénéfique pour nous, députés, parce que, je pense, c'est important que la population ait confiance en nous, mais aussi en confiance avec leurs corps de police, et, je pense, c'est très, très important. Parce que la liberté de presse, bien, c'est une valeur fondamentale, on le sait tous, puis c'est reconnu par la Charte canadienne des droits. Les sources journalistiques aussi font l'objet d'un encadrement édicté par la Cour suprême.

Donc, oui, effectivement, les faits qui ont été diffusés ces derniers jours sont graves, ébranlent la confiance du public mais du public en général, comme je vous disais tantôt. Que tu sois député ou policier, peu importe, là, tous les gens, on est ébranlés là-dessus. Donc, avec tous ces éléments-là, je peux vous dire que c'est pour ça, on confirme l'importance que le gouvernement porte à la liberté de presse et aux sources journalistiques. Et je suis très confiant que, justement, la commission d'enquête, par ce comité-là, va faire la lumière et puis va rétablir la confiance que les gens peuvent avoir envers les policiers et tous les gens de la base politique. Merci, M. le Président.

• (15 h 10) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député de Vimont, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat sur cette motion d'urgence, je cède maintenant la parole au leader de l'opposition officielle, en lui rappelant que vous avez 10 min 30 s. À vous.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, M. le Président. Alors, à titre de leader parlementaire de l'opposition officielle, à titre de porte-parole en matière de sécurité publique, à titre de citoyen, je suis, comme mes collègues, préoccupé par les situations qui nous sont exposées cette semaine. C'est une semaine où on réfléchit beaucoup, comme parlementaires, au rôle des journalistes dans notre démocratie, au rapport entre la police, le politique et les médias. Ça nous interpelle tous. Et cette semaine, elle ne sert pas à faire de la politique partisane, elle sert à voir ensemble comment on peut trouver les meilleures façons pour que ce qu'on apprend ne se reproduise plus, pour qu'on comprenne les mécanismes, qu'on comprenne les motivations et qu'on s'assure que les gens peuvent avoir confiance, les sources peuvent avoir confiance dans ce qu'ils confient à des journalistes professionnels, qui ont une tribune, qui sont des gens qualifiés et qui ont le rôle de nous questionner sur les décisions qu'on prend ici, des décisions importantes qui engagent leur argent, qui engagent leur confiance également.

Alors, c'est à ce titre-là que je vais intervenir aujourd'hui sur la responsabilité qu'on a. Je l'ai appelée tout à l'heure, sur une autre tribune, la semaine des journalistes, et elle est forte en rebondissements. Et, en ce sens, vous me permettrez de partager avec la Chambre une nouvelle qui vient tout juste de sortir à Radio-Canada concernant le journaliste Alain Gravel. Et ce qu'on vient d'apprendre n'est pas banal, et j'espère que les gens qui ont émis des commentaires très durs à l'égard de mon collègue de Verchères, que ça soit hier, que ça soit aujourd'hui, que ça soit sur des tribunes médiatiques ou que ça soit en Chambre, vont s'amender parce que ce qu'on vient d'apprendre et ce que la Sûreté du Québec vient de confirmer à Alain Gravel, qui était à l'émission Enquête, c'est qu'il était sous écoute depuis 2008, pas 2013, 2008. Alors, ça change considérablement les choses. Alors, je veux bien, moi, qu'on dise : Responsabilité ministérielle, le ministre était là, puis il y a eu une opération... D'ailleurs, dans le cas qui nous a occupés beaucoup, le cas de la FTQ, de Michel Arsenault, ça s'était produit en 2011, notre gouvernement n'était pas là. Puis après on a appris comment se sont faites des vérifications, que tout le monde condamne, d'ailleurs, qui impliquent des journalistes.

Alors, je veux juste dire que, si on interpelle le député de Verchères, on va interpeller d'autres personnes depuis 2008. On va interpeller l'ancien ministre Jacques Dupuis, qui était là, on va interpeller le député de Lotbinière-Frontenac, l'ancien ministre Dutil, la députée d'Anjou—Louis-Riel, le député de Nelligan, qui ont tous été là pendant cette période-là. Alors, l'ensemble des titulaires du ministère de la Sécurité publique vont être questionnés. Alors, je vous l'annonce, c'est ça qui est à RDI présentement, là. Alors, ce questionnement légitime, il s'adresse à tout le monde.

Commençons au début de l'histoire. Lundi, on apprend — c'est dans La Presse — que le journaliste Patrick Lagacé a fait l'objet, je dirais, de... comment on peut dire ça, ce n'est pas vraiment une écoute, mais ils ont obtenu les appels entrants, et les appels sortants, et de la géolocalisation de ses déplacements. C'est extrêmement grave. Moi, Patrick Lagacé, je le connais, M. le Président, j'ai participé à des entrevues avec lui à plusieurs reprises, notamment sur le dossier, ironiquement, de la police, des procureurs, de l'indépendance de la magistrature, de l'indépendance de l'UPAC, et ça fait un an, à peu près, jour pour jour, et on a parlé de ça. Et ça m'a rappelé, cette semaine, qu'il ne faut pas être naïfs sur ces enjeux-là, il y a des enjeux de pouvoir importants, c'est sûr, d'information, et que la police est un endroit où s'exercent également des rapports de pouvoir, c'est sûr, ça existe partout dans le monde.

L'important, c'est que, de un, la police soit là pour protéger le public, pas protéger des institutions, pas protéger des formations politiques, pas protéger un gouvernement, qu'il y ait une indépendance, qu'on ait confiance en notre système judiciaire, que ça soit la police, que ça soit les cours de justice. Ça, c'est important qu'on ait cette confiance-là. Et ce qu'on a appris avec Patrick Lagacé, et de la manière qu'il l'a traduit, c'est qu'il n'en fait pas une affaire personnelle, il dit : Pour ma profession, ça m'inquiète. Et là toute la classe journalistique a commencé la semaine en disant : Bien là, c'est inquiétant, est-ce qu'il y en a d'autres? On a appris que Fabrice de Pierrebourg, journaliste indépendant qui était à La Presse, Monic Néron, journaliste au 98,5, Félix Séguin, de TVA, eux aussi ont fait l'objet d'une attention particulière. Ça, c'est le SPVM qui, manifestement, a de la difficulté avec la gestion de ses sources. De l'affaire Davidson, à l'affaire Roberge, jusqu'à aujourd'hui, il y a un problème avec la gestion des sources au SPVM, hein? Ça, n'importe qui, là, à l'Assemblée nationale qui observe les questions judiciaires le sait.

On n'osait pas se poser la question. On s'est dit : La Sûreté du Québec, est-ce que ça pourrait arriver? Bien, oui. Alors, on a appris des cas, hier, puis, rapidement, le chef de l'opposition, l'ancien ministre porte-parole de la Sécurité publique ont donné leurs versions. Puis, ce matin, bien, dans un acte noble, le porte-parole, le député de Verchères, a dit : Écoutez, si je suis une distraction, posez-moi les questions, je vais participer. Tout le monde va participer, comme on a tous participé à la commission d'enquête sur la construction, et on va aller au fond des choses. D'ailleurs, on a dit que c'est une bonne chose qu'il y ait une commission, parce qu'au début on réfléchissait, tout le monde, à des moyens d'aller au fond des choses, puis il y a tellement de dossiers qu'il y aura une commission.

On va faire des propositions : on aimerait que ce soit une commission dans un esprit non partisan; on aimerait qu'on puisse baliser les années qui sont étudiées. On aimerait en savoir plus sur la divulgation du rapport : Comment ça va se faire? Sur la tenue des travaux, est-ce que ça va être public? Ça, c'est des questions que les gens vont se poser. Puis, imaginez, les journalistes vont vouloir que ça soit public évidemment, pas parce que ça les touche en conflit d'intérêts, parce que c'est ça, l'enjeu, aussi. Alors, on a tous intérêt à ce que ça se passe bien.

Moi, ce que je dis : Je n'accuse personne là-dedans, je pense qu'on va tous sortir grandis de cette expérience-là en se disant que les médias qu'on côtoie chaque jour, qu'on connaît... D'ailleurs, pas le droit de révéler ce qui se dit là. Là, ironiquement, on avait un grand rendez-vous avec des journalistes hier soir, ça les préoccupe. Ça les préoccupe parce qu'ils ont des sources, puis il y a des gens qui, au plan professionnel, au plan humain, je dirais, sont craintifs, prennent des risques. Des sonneurs d'alerte qui, même s'ils n'ont pas tout l'encadrement requis, disent des choses. Et ça arrive, les gens, souvent, tu sais, c'est pour bien faire, des fois, ils nous disent, à nous, comme députés... ils viennent nous voir puis ils disent : J'ai vu des situations, puis on est dépositaires de ça, comme députés. Alors là, collectivement, on a un exercice à faire pour les journalistes. Alors, je veux dire que cette indépendance-là, il y a moyen d'y arriver. La commission va faire un travail, on va y contribuer. Le Bureau des enquêtes indépendantes peut faire un travail aussi qui ne va pas aller à l'encontre, qui va permettre de voir s'il y a des bavures policières.

Le mode de nomination d'officiers, important, hein? Moi, j'ai fait la proposition en novembre 2015. Ce n'est pas la CAQ qui a inventé ça, là, j'ai proposé ça l'an dernier, que la nomination, aux deux tiers, du commissaire de l'UPAC puisse se faire. Alors, il y a une proposition qui est faite. Puis un peu comme dans d'autres Parlements dans le monde, on peut donner une appréciation et ça fait une instance plus forte, comme le Protecteur du citoyen, comme le Vérificateur général, comme le Directeur des élections.

Ça nous donne des situations un peu étonnantes. Moi, à l'étude des crédits au printemps dernier, je voulais parler au commissaire de l'UPAC. Là, je lui demande de s'approcher. Il s'assoit à côté du ministre. J'ai dit : Vous réalisez techniquement qu'il est possible que vous enquêtiez sur le gouvernement, il est possible que ça puisse arriver.

Deux minutes.

Donc, il vaut mieux que vous soyez indépendant. Donc, il y a un projet de loi qui est le n° 107, je pense, où on va demander plus d'indépendance de l'UPAC; mais l'indépendance de la police, il faut l'assumer.

Alors, ce que je veux dire, aujourd'hui, essentiellement, en terminant, c'est que, contrairement à ce que le ministre de la Sécurité publique a dit, il n'y a pas juste eu un cas en 20 ans, parce qu'il y a eu le cas Davidson puis il y a eu le cas avec le ministre Dutil, puis là on apprend, à Radio-Canada, que, depuis 2008, il y a eu d'autres cas aussi. Donc, c'était peut-être une bonne ligne de réponse, mais je ne veux pas pousser plus là-dessus parce que ce n'est ni moi, ni vous, ni mes collègues qui vont décider de l'issue de cette commission, puis on va y participer du mieux possible, mais je trouve qu'on a été très, très durs, rapidement, à pointer un individu, et que tous ceux qui vont être questionnés vont y aller en bonne foi pour qu'on trouve les meilleures réponses possible, et c'est le souhait que moi, j'exprime, qu'on puisse le faire correctement.

Mais d'apprendre, en terminant, que ce n'est pas en 2013 que ça a commencé, que ça a commencé en 2008, je pense que ça s'ajoute aux éléments de réflexion de cette commission.

Alors, les parlementaires, cette semaine, puis les gens qui nous écoutent, je pense, doivent retenir qu'on est tous engagés pour trouver la vérité puis s'assurer que les gens qui doivent couvrir nos travaux puissent le faire dans les meilleures conditions possible et avec la confiance, et je suis convaincu qu'on est capables, ensemble, d'y arriver, M. le Président. Merci.

• (15 h 20) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, je vous remercie, M. le leader de l'opposition officielle. Et je cède maintenant la parole à M. le député de Vanier-Les Rivières pour, probablement, le temps qu'il vous reste à votre formation politique. Et l'information que j'avais... Je l'ai écrit en quelque part... C'est combien?

M. Patrick Huot

M. Huot : Je vais vous le dire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Non. Moi aussi, je vais vous le dire : 11 minutes... 12, parce que c'est 11 minutes, et il manque six...

M. Huot : ...et 54.

Le Vice-Président (M. Gendron) : C'est ça. Alors, 12 minutes. C'est ça. Allez.

M. Huot : Merci, M. le Président. On m'avait informé que notre formation politique disposait de 11 min 54 s si on voulait utiliser le temps. On verra si je l'utilise au complet, M. le Président.

Avant d'aborder... Je m'étais promis de le faire dans un esprit totalement non partisan. Je n'ai pas le choix de faire une petite intro et je n'irai pas très loin dans la question. Ce n'est même pas de la partisanerie, mais réagir aux propos du leader de l'opposition officielle, qui disait que... Bon, on parle de 2008. Il nous parlait qu'il y a des choses qui circulent à RDI, à ce moment-ci, là, présentement. Donc, il disait qu'il y a d'autres cas avant qui... il disait donc que le député de Verchères n'était pas le seul. Mais je veux juste attirer son attention. Je ne crois pas que c'était le fait qu'il y ait eu de l'écoute de journalistes par la police quand le député de Verchères était ministre, mais ce qui a été reproché, c'est plutôt d'avoir fait un appel à la SQ pour savoir, pour avoir l'heure juste sur ce qui se passait. Donc, c'est cette intervention-là qui a été critiquée, ce n'est pas le fait que ça a été pendant qu'il était ministre. Donc, il faut juste faire attention à ce qu'on dit.

Ça alimente la réflexion si on dit que c'est depuis 2008. Effectivement, ça fait partie de la réflexion, là, je suis d'accord. Et je ne veux pas aller plus loin dans les questions, d'un côté ou de l'autre, de partisanerie, parce que je m'étais promis de faire ça complètement en dehors d'un esprit partisan, parce que je pense qu'on est dans quelque chose de fondamental dans notre démocratie.

Écoutez, à chaque fois que je me lève ou presque à chaque fois que je me lève, moi, je dis : C'est toujours un privilège de se lever ici, au salon bleu. Mais, aujourd'hui, je trouve que c'est un privilège encore plus important, parce que je veux rappeler... Je rencontrais, là, tout à l'heure, après la période de questions, des jeunes du cégep Limoilou. J'ai échangé un petit peu avec eux sur les notions de séparation de pouvoirs, entre autres. Mais je me suis dit aussi, avec les échanges que j'avais : On a un privilège ici, mais on a des privilèges collectifs, là, de pouvoir s'organiser nous autres mêmes, là, de pouvoir gérer le fonctionnement de l'Assemblée nationale. Mais on a quand même un privilège parlementaire, comme privilège individuel, de liberté de parole, ce qu'on appelle communément l'immunité parlementaire.

Ce n'est pas innocent de dire ça, M. le Président, parce que je vais vouloir faire un parallèle avec le secret professionnel chez les journalistes. C'est quelque chose qui est assez fondamental pour eux, la protection de leurs sources, et leur déontologie fait en sorte qu'ils doivent protéger leurs sources aussi. Donc, il y a un certain privilège à exercer la fonction de journaliste, et on a un privilège, nous, ici, de liberté de parole qui est fondamental. Et je ne crois pas qu'on accepterait qu'on s'attaque à notre privilège d'immunité parlementaire, à notre liberté de parole que nous avons ici.

Donc, il y a un certain parallèle à faire, et je suis content de le faire, même devant mon ancien prof de philosophie politique, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, parce qu'on retourne à des notions de Montesquieu qui étaient sans doute... Je vais faire attention à ce que je dis, parce que peut-être qu'il me corrigera par la suite. Mais on revient quand même à une notion assez fondamentale de séparation des pouvoirs entre le pouvoir exécutif et législatif.

Dans notre cas, dans notre régime parlementaire, on parle de collaboration des pouvoirs entre le pouvoir exécutif et législatif, mais une séparation très claire avec le pouvoir judiciaire, et ce, peu importent les régimes si on est dans une république avec une séparation beaucoup plus formelle de l'exécutif. Mais, quel que soit le régime, la branche judiciaire est totalement séparée des deux autres régimes.

Et on me donne une note. Je veux juste mentionner... Parce qu'on parlait d'Alain Gravel à RDI tantôt. On me donne une information qui me dit : M. Gravel confirme à RDI qu'on lui a dit que les mandats ont été émis à l'automne 2013 pour couvrir les années passées. Je veux juste... Simple parenthèse. Moi, on vient de me fournir cette information-là.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...point de vue...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, ça ne me dérange pas, là. Est-ce qu'il y a consentement? Mais je pense que c'est inapproprié. Pas contre, vous, là, mais ça...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : S'il vous plaît, là! C'est une information qui ne change pas le contenu, alors veuillez poursuivre.

M. Huot : Effectivement. Moi, j'avais fait une simple parenthèse pour réagir aux propos, mais ce n'était pas l'essentiel du propos que je voulais faire. Puis j'étais beaucoup plus sur la séparation des pouvoirs, qui est fondamentale dans notre système. Et, avec l'avènement des médias, principalement, bon, au XXe siècle, les médias écrits, et là avec tout ce qui est l'univers média, on parle, depuis plusieurs années, et ça a été documenté, de quatrième pouvoir, celui des médias, ou de contre-pouvoir, si on veut, qu'on peut appeler un contre-pouvoir face au pouvoir de l'État, si on veut. Donc, ce pouvoir-là des médias est fondamental. Mais est fondamental pourquoi? Parce qu'on a le droit au principe de protection des sources d'information des journalistes. Donc, je fais le parallèle avec notre immunité parlementaire, mais il y a ça qui est fondamental aussi pour les journalistes, leur secret professionnel. Et, comme je mentionnais, c'est documenté. Il y a eu des poursuites sur ces choses-là. Ils doivent prendre toutes les précautions — et on a eu des cas qui ont fait les manchettes — pour que leurs sources ne puissent pas être identifiées. C'est fondamental. Donc, on vient ébranler quelque chose.

Si je me mets à la place des journalistes — on a tous des connaissances ou des amis qui sont dans l'univers des médias — d'apprendre de la sorte que vos déplacements, vos conversations, vos textos, tout ce que vous avez fait pendant un certain temps a été examiné à la loupe, ça doit être assez troublant d'apprendre ça. Si j'apprenais... et, on ne sait pas, peut-être que c'est peut-être arrivé à quelqu'un, ici, d'avoir été suivi, d'avoir son téléphone sur écoute, peu importe, je serais troublé d'apprendre ça, M. le Président. Donc, je peux comprendre que, dans l'univers médiatique, on soit troublés d'apprendre quelque chose comme ça, parce qu'on parle d'un pilier fondamental de notre démocratie. La liberté de presse est fondamentale, et la protection de nos sources... Donc, on vient de s'attaquer à quelque chose de très... même plus qu'important, de fondamental dans notre démocratie.

Et je pense que ça a été dit par le premier ministre, par le ministre de la Sécurité publique, par la ministre de la Justice. Il y a toutes sortes de qualificatifs qu'on a évoqués, ça a été troublant, préoccupant parce qu'on s'attaque à quelque chose qui est fondamental; on s'attaque, en quelque sorte, à la séparation des pouvoirs dans notre démocratie et à l'importance du contre-pouvoir, qui est le média. Et on a dit, avec ça, ce qu'il y avait de fondamental à protéger, qui était troublant, préoccupant, on a dit : Le... M. le ministre de la Sécurité publique en a parlé ce matin, à quel point c'est important, la liberté de presse, la protection des sources journalistiques, comment que ça s'inscrivait dans la défense de notre démocratie et de nos libertés.

Donc, depuis le début de l'histoire, on a pris quand même très au sérieux, dès le départ... Lundi, avec ce qu'on a appelé, bon, l'affaire Lagacé, je pense que cette appellation, l'affaire Lagacé, va rester dans l'histoire du Québec parce qu'il s'est passé quelque chose de quand même assez grave. Et on a réagi tout de suite en mettant certaines mesures en place, et le premier ministre avait réagi quand même assez fortement dès mardi matin, dès le mardi 1er novembre dernier, en disant : «On fait face à un enjeu majeur pour une société démocratique.» Il a dit, je cite : «Je veux [...] assurer la population et les médias que je les soutiens [et que notre gouvernement les soutient] dans leur travail.» Je vais vous annoncer trois principes, le premier ministre a dit : «liberté de presse», «indépendance de la magistrature», fondamentale, et «le maintien de l'indépendance des enquêtes policières [...] supervisées par le pouvoir judiciaire». On est dans quelque chose de fondamental et, à la suite de ça, on ne peut pas se faire dire...

Et là, évidemment, je ne vous dirai pas que le gouvernement a mal agi. Sans faire de partisanerie, le gouvernement a bien réagi, je pense, et ça a été dit un peu par tout le monde, a réagi rapidement, assez fermement avec les éléments qu'on avait au départ. Parce qu'on avait, au départ, l'affaire Lagacé. Woups! Par la suite, on a rajouté des journalistes, il y avait trois journalistes qui ont été, semble-t-il, espionnés aussi. Par la suite, on a appris que la SQ... qu'il y avait eu des choses sous la SQ aussi. Et je ne veux pas rentrer dans le débat qu'il y a eu, un petit peu plus partisan, mais, quand le ministre de la Sécurité publique a appris que la SQ a aussi procédé à des enquêtes auprès de journalistes, qu'il a appris qu'une enquête avait été déclenchée dans la même journée où un ministre de la Sécurité publique aurait communiqué avec la SQ, lorsqu'on prend l'ensemble de ces faits-là, il fallait poser un geste supplémentaire. Ce qui a été fait. On a annoncé, dès mardi, trois mesures très concrètes, la mise sur pied d'un comité d'experts indépendants.

• (15 h 30) •

On a annoncé d'autres mesures aujourd'hui, à la suite de ça. Il y avait eu, à ce moment-là aussi, une directive obligeant d'obtenir l'autorisation du Directeur des poursuites criminelles et pénales, le DPCP, avant que ne soit présentée une demande de mandat d'écoute électronique, qui vise un journaliste, comme c'est le cas — je pense que tous les collègues l'ont répété — pour les juges, les membres de l'Assemblée nationale et les avocats. Donc, on a posé des gestes rapidement parce que, je le répète, la liberté de presse, c'est fondamental dans notre société. Et, comme gouvernement, c'est notre devoir de prendre des actions appropriées dans des cas comme ça, quand les colonnes du temple sont ébranlées de la sorte parce que les faits qui ont été diffusés sont graves. Les demandes d'enquête du politique aux services policiers créent un doute quant à l'indépendance des pouvoirs. La liberté de presse — je le répète encore, je pense qu'on ne pourra pas le répéter assez — est une valeur fondamentale reconnue par la Charte des droits, et les sources journalistiques, j'en ai parlé tantôt — oui, deux minutes — font l'objet d'un encadrement édicté par la Cour suprême. Donc, avec les nouveaux faits qu'on a vus, là, le... Je vous ai expliqué qu'est-ce qui avait été posé comme les trois premières actions. Avec les nouveaux faits qui impliquaient la Sûreté du Québec, on s'attend à voir peut-être d'autres faits sortir, d'autres éléments, le député de Matane-Matapédia en parlait tantôt. Mais, avec les nouveaux faits, le gouvernement a décidé de nommer les membres du comité d'experts initialement annoncé mardi, comme je vous mentionnais, on a décidé de les nommer en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête, donc avec les pouvoirs que donne cette loi aux différents commissaires. Le mandat de la commission va être assez large pour traiter de la liberté de presse, mais suffisamment précis aussi pour enquêter sur l'étanchéité entre les corps policiers et l'autorité de qui ils relèvent.

Il y aura plus d'informations sur la présidence de la commission, sur son mandat, sur son fonctionnement, ça sera rendu ultérieurement. Mais je veux rappeler que l'objectif fondamental derrière tout ça, c'est d'avoir, à l'intérieur du comité, pour la commission d'enquête, des gens avec des connaissances fines du milieu journalistique, de la sécurité publique, des milieux policiers et un magistrat ou une magistrate à la retraite. C'est ce qui a été mentionné par la ministre de la Justice aujourd'hui même. Et il y a eu avec ça un appel du premier ministre, de tout le monde, un appel à la collaboration. Je ne crois pas que ce sujet-là doit devenir un enjeu partisan. On est sur les fondements mêmes de notre démocratie, de notre société, donc il faut que tout le monde travaille sereinement, en collaboration pour que les choses se fassent correctement. Et je pense qu'on va réussir à s'entendre sur ces questions-là, mais je lance un appel à la prudence de tout le monde. Ce serait dangereux, dans un dossier comme celui-là, de vouloir à tout prix marquer des points politiques.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député de Vanier-Les Rivières.

Et cette dernière intervention met fin au débat sur les révélations troublantes relatives à la surveillance de journalistes et de sources journalistiques par des services policiers. Et je cède la parole à Mme la leader adjointe du gouvernement.

Ajournement

Mme Vien : Bien, M. le Président, vous seriez aimable d'accepter la motion suivante à l'effet d'ajourner nos travaux au mardi 8 novembre 2016. Ce sera à 13 h 40.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, madame. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : La motion étant adoptée, nos travaux sont suspendus tel qu'indiqué.

(Fin de la séance à 15 h 33)