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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mardi 23 février 2016 - Vol. 44 N° 145

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner le 10e anniversaire d'Artdramus Productions

Mme Karine Vallières

Rendre hommage à Mme Jocelyne B. Pouliot pour ses 50 ans d'engagement avec la Société
canadienne du cancer

M. Harold LeBel

Féliciter M. Alexandre Hardy et Mme Melanie L. Dion pour leur film sur la prévention du
suicide intitulé Sans toi

M. Michel Matte

Souligner la création d'une brigade de secouristes par le Service de sécurité incendie et
sécurité civile de Saint-Alexandre

Mme Claire Samson

Souligner le succès de la campagne de générosité de l'Alliance Affaires Côte-de-Beaupré

Mme Caroline Simard

Souligner le 50e anniversaire des Chevaliers de Colomb du conseil de Boucherville n° 5673

M. Stéphane Bergeron

Rendre hommage à M. Gabriel Buisson, entrepreneur et philanthrope

M. Pierre Giguère

Rendre hommage à M. Claude Ulysse Lefebvre, ex-maire de Laval

Mme Francine Charbonneau

Souligner la présentation d'excuses aux Franco-Ontariens par leur première ministre,
Mme Kathleen Wynne, concernant le Règlement 17 de 1912

M. Jean-Marc Fournier

Souligner le 20e anniversaire de l'Alliance québécoise des regroupements régionaux
pour l'intégration des personnes handicapées

Mme Agnès Maltais

Présence d'une délégation de l'État de New York représentée par la sénatrice Betty Little
et accompagnée des consuls généraux des États-Unis à Québec et à Montréal,
M. Hale VanKoughnett et Mme Nina Fite


Présence du consul général de Belgique à Montréal, M. Hubert Roisin

Dépôt de documents

Comptes de la santé 2013-2014 à 2015-2016

Réponse à une question inscrite au feuilleton

Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Dépôt de rapports de commissions

Consultations particulières sur le projet de loi n° 75 Loi sur la restructuration des régimes
de retraite à prestations déterminées du secteur universitaire et modifiant diverses
dispositions législatives


Dépôt de pétitions

Favoriser la tenue d'un référendum visant la défusion du secteur Lac-à-la-Tortue de la ville
de Shawinigan et son annexion à la MRC de Mékinac


Questions et réponses orales

Ententes entre le gouvernement et certaines entreprises en matière de sièges sociaux
et d'emplois

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

Projet de pompage d'eau des Grands Lacs vers une ville du Wisconsin

M. Mathieu Traversy

M. David Heurtel

M. Mathieu Traversy

M. David Heurtel

M. Mathieu Traversy

M. David Heurtel

Dossiers soumis au Directeur des poursuites criminelles et pénales concernant
le Parti libéral

M. Bernard Drainville

Mme Stéphanie Vallée

M. Pascal Bérubé

Mme Stéphanie Vallée

M. Pascal Bérubé

Mme Stéphanie Vallée

Poursuite judiciaire intentée par le gouvernement du Québec contre Air Canada

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

Investissement du gouvernement dans Bombardier inc.

M. François Bonnardel

M. Jacques Daoust

M. François Bonnardel

M. Jacques Daoust

M. François Bonnardel

M. Jacques Daoust

Accès à des logements de qualité à un prix abordable

Mme Carole Poirier

M. Martin Coiteux

Mme Carole Poirier

M. Martin Coiteux

Mme Carole Poirier

M. Martin Coiteux

Ressources allouées à la lutte contre l'exploitation sexuelle

Mme Carole Poirier

Mme Lise Thériault

Mme Diane Lamarre

Mme Lise Thériault

Mme Carole Poirier

Mme Lucie Charlebois

Tarifs de stationnement des hôpitaux

M. François Paradis

M. Gaétan Barrette

M. François Paradis

M. Gaétan Barrette

Financement des organismes s'occupant d'intégration et de francisation des immigrants

M. Maka Kotto

Mme Kathleen Weil

Mme Agnès Maltais

Mme Kathleen Weil

Mme Lorraine Richard

Mme Kathleen Weil

Projet de loi n° 76 modifiant l'organisation et la gouvernance du transport collectif dans
la région métropolitaine de Montréal

M. Claude Surprenant

M. Jacques Daoust

Motions sans préavis

Souligner le 75e anniversaire de la Délégation générale du Québec à New York

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. François Legault

Mme Françoise David

Mise aux voix

Substituer le nom et le titre de M. Sébastien Proulx à ceux de M. Pierre Moreau comme
parrain de certains projets de loi

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 89   Loi visant à assurer une meilleure concordance entre les textes français
et anglais du Code civil

Adoption du principe

Mme Stéphanie Vallée

Mme Véronique Hivon

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

Mise aux voix

Renvoi à la Commission des institutions

Mise aux voix

Projet de loi n° 70   Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi

Adoption du principe

M. François Blais

M. Dave Turcotte

M. Sébastien Schneeberger

Mme Françoise David

Motion de report

M. François Blais

Mme Carole Poirier

Débats de fin de séance

Accès à des logements de qualité à un prix abordable

Mme Carole Poirier

M. Martin Coiteux

Mme Carole Poirier (réplique)

Projet de loi n° 70   Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi

Adoption du principe

Poursuite du débat sur la motion de report

Mme Carole Poirier (suite)

M. Saul Polo

Mme Manon Massé

Mme Diane Lamarre

Mme Nicole Léger

M. Harold LeBel

M. Dave Turcotte

Mise aux voix

Poursuite du débat sur l'adoption du principe

Mme Monique Sauvé

Ajournement

Annexe

Membres du Conseil des ministres

Journal des débats

(Treize heures quarante et une minutes)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous souhaite un bon mardi. Veuillez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous allons procéder à la rubrique Déclarations de députés, et je suis prêt à entendre la première déclaration de ce jour, et je cède la parole à Mme la députée de Richmond pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous, madame.

Souligner le 10e anniversaire d'Artdramus Productions

Mme Karine Vallières

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Un bon début d'après-midi à vous!

J'ai envie de vous dire que j'ai hâte de commencer, déjà, le week-end bientôt. Le vendredi 26 février, j'aurai la chance d'assister à la première pièce de théâtre pour le 10e anniversaire d'Artdramus Productions. C'est un organisme culturel de l'arrondissement Rock Forest—Saint-Élie—Deauville de la ville de Sherbrooke et qui est, oui, dans le comté de Richmond.

Alors, membre de la fédération du théâtre amateur du Québec, cette troupe est animée de bénévoles passionnés. Que ce soit pour préparer la saison, promouvoir la programmation ou concevoir les décors, même jouer sur scène, tous donnent le meilleur d'eux-mêmes, à notre plus grand bonheur.

Alors, chers collègues de l'Assemblée nationale, je vous invite aujourd'hui à joindre votre voix à la mienne pour souhaiter une saison exceptionnelle à Artdramus Productions pour ce 10e anniversaire. Alors, Mme Couture, présidente, M. Roy, membre fondateur, et à tous vos collègues également, que le rideau se lève et bon 10e!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, Mme la députée, pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Rimouski pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous, M. le député.

Rendre hommage à Mme Jocelyne B. Pouliot pour ses 50 ans
d'engagement avec la Société canadienne du cancer

M. Harold LeBel

M. LeBel : Merci, M. le Président. Je tiens aujourd'hui à souligner toute ma reconnaissance à une femme d'exception, Mme Jocelyne B. Pouliot, pour ses 50 années d'implication au sein de la section rimouskoise de la Société canadienne du cancer.

Tous les printemps, Mme Pouliot dirige avec succès l'incontournable opération jonquilles, symbole d'espoir et de lutte contre le cancer. Les bouquets de jonquilles sont vendus et distribués par centaines chez les commerçants et les organismes de la région. C'est aussi avec tact et persévérance que Mme Pouliot a fait gonfler la compagne de financement du déjeuner des agents de la paix de près de 3 000 $ en vendant des espaces publicitaires imprimés sur des napperons. De plus, pendant plusieurs décennies, Mme Pouliot a orchestré le porte-à-porte, s'est impliquée dans le Relais pour la vie et elle a passé d'innombrables heures au téléphone pour recruter des bénévoles. Bref, la passion et la conviction de Mme Jocelyne B. Pouliot pour la lutte au cancer sont source d'inspiration pour des milliers de bénévoles et une richesse pour notre communauté. Merci, Mme Pouliot. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Portneuf pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député, à vous la parole.

Féliciter M. Alexandre Hardy et Mme Melanie L. Dion pour
leur film sur la prévention du suicide intitulé Sans toi

M. Michel Matte

M. Matte : Merci, M. le Président. Je suis fier de féliciter aujourd'hui Alexandre Hardy et Mélanie Dion, deux jeunes de Saint-Raymond dans Portneuf. Ces deux cinéastes ont reçu tout récemment le prix de Michael-Sheehan pour leur documentaire Sans toi qui porte sur la prévention du suicide. Cette reconnaissance pleinement méritée couronne un travail qui nous aide à comprendre et à rendre visible la souffrance des familles après un suicide.

Depuis sa sortie, en 2015, Sans toi est acclamé par tous ceux qui l'ont vu un peu partout au Québec et dans le monde. Il est important pour moi de rendre hommage à Alexandre et Mélanie pour leur dire combien leur message nous touche et nous interpelle. Ils sont aussi des exemples inspirants qui nous rappellent que cette jeunesse d'aujourd'hui peut véhiculer des messages émouvants qui nous aident à mieux comprendre ce phénomène de société qu'est le suicide. Bravo à ces deux jeunes Portneuvois pour leur initiative!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci de votre déclaration, M. le député de Portneuf. Je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Iberville pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous, madame.

Souligner la création d'une brigade de secouristes par le Service
de sécurité incendie et sécurité civile de Saint-Alexandre

Mme Claire Samson

Mme Samson : Merci, M. le Président. Je tiens à souligner aujourd'hui l'initiative du Service de sécurité incendie de la municipalité de Saint-Alexandre du comté d'Iberville. En effet, les citoyens pourront maintenant compter sur l'intervention de 18 secouristes qui répondront aux urgences vitales en attendant l'arrivée des paramédics.

Comme vous le savez, M. le Président, plusieurs municipalités, de par leur situation géographique, ont un temps d'attente des paramédics qui peut être assez long. L'intervention des premiers répondants permettra d'augmenter les chances de survie des citoyens dans une situation d'urgence. Cette brigade, qui était attendue depuis plus d'un an, a été créée grâce à M. Guillaume Abelfo, responsable de ce nouveau service, et M. Noël Dupasquier, directeur du service incendie de Saint-Alexandre.

Cette initiative démontre bien l'importance accordée aux citoyens, la débrouillardise et l'autonomie dont font preuve plusieurs municipalités de la province, dont certainement celle de Saint-Alexandre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci de votre déclaration, Mme la députée. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous la parole, Mme la députée.

Souligner le succès de la campagne de générosité
de l'Alliance Affaires Côte-de-Beaupré

Mme Caroline Simard

Mme Simard : M. le Président, je désire saluer aujourd'hui l'initiative en termes d'achat local de l'Alliance Affaires Côte-de-Beaupré, un regroupement indépendant de gens d'affaires dédié au développement économique. En effet, depuis octobre 2012, six campagnes majeures visant à sensibiliser la population à l'achat local ont été réalisées par l'Alliance Affaires, dont trois concours, la campagne Merci, la production d'un répertoire d'entreprises et la plus récente campagne de générosité, C'est à notre tour!, à laquelle sept groupes d'entrepreneurs ont participé, ce qui a donné naissance aux projets sociaux suivants : des cadeaux pour tous, le dépouillement de l'arbre de Noël de Saint-Tite-des-Caps, les activités de remerciement et de reconnaissance Merci et un dîner intergénérationnel, l'illumination du sapin de Noël à Château-Richer, la réalisation du parc à neige du collège des Hauts-Sommets, l'inauguration d'un nouvel espace famille pour Ressources familiales Côte-de-Beaupré.

Félicitations à l'Alliance Affaires Côte-de-Beaupré et à ses membres engagés, dont certains sont présents parmi nous aujourd'hui. Je priorise moi-même l'achat local depuis plusieurs années déjà et reconnais la pertinence, la qualité, l'originalité et, à nouveau, le succès de la stratégie d'achat local de l'Alliance Affaires. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, Mme la députée, pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Verchères pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous.

Souligner le 50e anniversaire des Chevaliers de Colomb
du conseil de Boucherville n° 5673

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : Merci, M. le Président. C'est le 18 avril dernier qu'on célébrait le 50e anniversaire du conseil 5673 des Chevaliers de Colomb de Boucherville, que j'ai eu le plaisir et l'honneur de représenter à l'époque où je siégeais à la Chambre des communes du Canada. Un demi-siècle dans l'histoire d'un peuple qui compte quelque 400 ans d'existence, voilà un événement qui mérite d'être souligné comme il se doit.

Portés par les valeurs colombiennes de charité, d'unité, de fraternité et de patriotisme, les membres du conseil 5673 apportent leur soutien aux gens de Boucherville et des environs qui traversent des difficultés ainsi qu'aux communautés chrétiennes du territoire, contribuant ainsi au dynamisme de leur milieu et à la qualité de vie qui le caractérisent. J'exprime donc toute ma gratitude aux membres de cette remarquable organisation bénévole pour le dévouement exemplaire dont ils ont su faire preuve afin d'assurer sa pérennité, son bon fonctionnement et son rayonnement pendant toutes ces années.

Longue vie au conseil 5673 des Chevaliers de Colomb de Boucherville et à ses membres!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député de Verchères, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Maurice pour la sienne. M. le député, à vous.

Rendre hommage à M. Gabriel Buisson,
entrepreneur et philanthrope

M. Pierre Giguère

M. Giguère : Merci, M. le Président. C'est avec une immense tristesse que j'ai appris le décès de M. Gabriel Buisson, fondateur de Société Laurentide. Avec un grand respect, je prends quelques minutes pour honorer la mémoire de cet entrepreneur visionnaire. M. Buisson a notamment fait partie de la toute première génération d'hommes d'affaires francophones du Québec. Chimiste de formation, il a accompli sa mission en bâtissant une importante corporation axée sur des valeurs familiales, humanitaires et environnementales. Grand philanthrope de nature, M. Buisson a soutenu de nombreuses organisations et a même créé un tournoi de golf afin d'amasser des fonds pour différents organismes de bienfaisance reliés au domaine de la santé.

J'offre mes plus sincères condoléances à toute la famille. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le député, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mille-Îles pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous, madame.

Rendre hommage à M. Claude Ulysse Lefebvre, ex-maire de Laval

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. J'aimerais rendre hommage à M. Claude Ulysse Lefebvre, quatrième maire de Laval, de 1981 à 1989, qui nous a quittés le 19 janvier dernier. D'ailleurs, aujourd'hui, c'est la date de son anniversaire, il aurait eu 87 ans.

M. Lefebvre avait à coeur le développement de la ville de Laval. Autant la promotion des arts et de la culture était importante pour lui, mais aussi la recherche et le développement. On lui doit plusieurs réalisations, dont la Maison des arts de Laval, le développement du Parc scientifique et de la haute technologie, qui vit le jour en 1989, ainsi que le principe de la consultation citoyenne.

Enfin, lors de ma dernière rencontre avec l'ancien maire de Laval, à la soirée organisée par Patrimoine Laval, soirée organisée pour les grands bâtisseurs de Laval, ce que je retiens de lui, c'est sa grande fierté pour Laval et ses citoyens. Aujourd'hui, au nom des Lavalloises et des Lavallois, je lui rends hommage pour tous ses accomplissements, M. le Président.

• (13 h 50) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, Mme la députée, pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Laurent pour sa déclaration d'aujourd'hui.

Souligner la présentation d'excuses aux Franco-Ontariens
par leur première ministre, Mme Kathleen Wynne,
concernant le Règlement 17 de 1912

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Merci, M. le Président. Hier, au nom de son gouvernement et de l'Ontario, la première ministre a présenté des excuses formelles aux quelque 600 000 Franco-Ontariens vivant sur son territoire suite à l'adoption, en 1912, du Règlement 17 qui interdisait l'usage du français dans les écoles primaires de l'Ontario. Mme Wynne et la ministre des Affaires francophones, Mme Madeleine Meilleur, et les partis d'opposition ont souligné le courage et la ténacité de la communauté et ont reconnu son apport comme partie intégrante des succès et de l'avenir de l'Ontario.

Les Franco-Ontariens ont su se tailler une place de choix au sein de cette francophonie, une place forte des batailles qu'ils ont menées avec vigueur et qui ont contribué à consolider la légitimité du français en Ontario. Ils offrent à notre langue la nécessaire résonance à l'émergence d'une nouvelle appartenance canadienne. Merci, M. le Président, et merci au gouvernement et à tout l'Ontario.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci. Merci, M. le député, de votre déclaration. Pour la dernière déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole maintenant à... à Mme la députée de Taschereau, excusez-moi. Mme la députée de Taschereau, pour votre déclaration d'aujourd'hui.

Souligner le 20e anniversaire de l'Alliance québécoise des
regroupements régionaux pour l'intégration
des personnes handicapées

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Alors, le 23 février 1996 est née l'association québécoise des regroupements régionaux pour l'intégration des personnes handicapées. Sa mission : promouvoir les intérêts et défendre les droits des personnes handicapées et de leurs familles. Aujourd'hui, jour de leur 20e anniversaire, saluons le travail de ces femmes et de ces hommes qui oeuvrent à travers le Québec pour l'inclusion sociale des personnes handicapées. D'ailleurs, la présidente, son accompagnante et la directrice sont dans nos tribunes, ici. Mme Morin, je veux vous dire que votre simple présence ici est une belle image de tous les progrès qui ont été parcourus au Québec. Alors, les groupes des milieux que vous représentez permettent à des milliers de personnes d'accéder à notre monde, à une vie normale, aux plaisirs de la vie en société, tout en combattant la discrimination à leur égard.

Alors, encore une fois, bon 20e anniversaire à l'AQRIPH, aussi aux 15 regroupements régionaux de l'association, et un grand merci pour votre engagement indéfectible envers cette cause. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, Mme la députée. Et on vous souhaite la bienvenue à l'Assemblée nationale au nom de la présidence.

Cette dernière déclaration met fin à la rubrique Déclarations de députés.

Les travaux sont suspendus pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 13 h 52)

(Reprise à 14 h 1)

Le Président : Mmes, MM. les députés, vous avez tous appris cette très mauvaise nouvelle pour nous tous hier. Les trois chefs de parti ont traité de la question de la maladie de Pierre, du départ de Pierre — bien, pour quelque temps — l'ont fait avec hauteur. Je pense que c'est à nous maintenant, quelques minutes, quelques secondes avant ce temps de réflexion qui nous est donné, d'avoir une pensée pour Pierre puis de lui dire, bien : Salut, Pierre, puis bonne chance, puis merde! On est tous là en arrière de toi.

Merci et veuillez vous asseoir.

Présence d'une délégation de l'État de New York représentée
par la sénatrice Betty Little et accompagnée des consuls
généraux des États-Unis à Québec et à Montréal,
M. Hale VanKoughnett et Mme Nina Fite

À l'occasion du 75e anniversaire de la Délégation générale du Québec à New York, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes d'une délégation de l'État de New York, représentée par Mme la sénatrice Betty Little. La délégation est accompagnée du consul général des États-Unis, M. Hale VanKoughnett, et de Mme la consule générale des États-Unis à Montréal, Mme Nina Fite.

Présence du consul général de Belgique à Montréal, M. Hubert Roisin

J'ai également le plaisir de souligner la présence du consul général de Belgique à Montréal, M. Hubert Roisin, à l'occasion de sa visite de prise de poste.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

À la rubrique Dépôt de documents...

Des voix : ...

Le Président : Ça va bien? C'est correct? Bon, parfait.

Dépôt de documents

Alors, à la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Comptes de la santé 2013-2014 à 2015-2016

M. Barrette : M. le Président, conformément aux exigences de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, je dépose les Comptes de la santé 2013‑2016.

Le Président : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.

Réponse à une question inscrite au feuilleton

M. Fournier : Je dépose la réponse du gouvernement à la question inscrite au feuilleton le 10 février 2016 par le député de La Peltrie et adressée au président du Conseil du trésor.

Le Président : Ce document est déposé.

Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Pour ma part, j'ai reçu un préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose copie de ce texte en préavis.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission de l'économie et du travail et député de Bertrand.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 75

M. Cousineau : Oui, M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du travail qui, le 1er décembre 2015 ainsi que les 18 et 23 février 2016, a tenu des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 73, Loi sur la restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur universitaire et modifiant diverses dispositions législatives.

Le Président : Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député de Nicolet-Bécancour.

Favoriser la tenue d'un référendum visant la défusion du secteur Lac-à-la-Tortue
de la ville de Shawinigan et son annexion à la MRC de Mékinac

M. Martel : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 535 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du secteur de Lac-à-la-Tortue.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant le taux de taxation élevé;

«Considérant le manque de réinvestissement de nos taxes dans notre secteur;

«Considérant la perte de notre identité avec le projet de toponymie;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, citoyens de Lac-à-la-Tortue, réclamons la tenue d'un référendum visant la défusion du secteur Lac-à-la-Tortue de la ville de Shawinigan, pour son annexion à la MRC de Mékinac.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Ententes entre le gouvernement et certaines entreprises
en matière de sièges sociaux et d'emplois

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Un marché de dupes, devrais-je même dire des marchés de dupes? M. le Président, c'est à se demander si le premier ministre ne prend pas un malin plaisir à se faire berner. Son gouvernement ne va nulle part. Son ex-ministre de l'Économie, la semaine dernière, déclarait qu'il n'était pas au courant de la mise à pied de 2 400 employés ici, au Québec, chez Bombardier, alors qu'il est prêt à injecter 1,3 milliard dans la compagnie. Sa ministre de l'Économie nous dit qu'elle compte sur Ottawa pour déterminer les modalités du maintien du siège social de RONA à Boucherville. Son ministre des Finances nous a dit que 400 emplois au siège social de Rio Tinto, ce n'est pas une catastrophe. Et, la semaine dernière, M. le Président, le premier ministre nous a dit faire affaire avec Air Canada pour l'établissement d'un centre d'excellence à quelque part au Québec. Est-ce utile de rappeler au premier ministre, M. le Président, que cette entreprise ne respecte pas la loi, qu'elle a été déclarée illégale à l'unanimité par la Cour supérieure du Québec ainsi que par la Cour d'appel du Québec?

Alors, ma question est simple, M. le Président : Est-ce que le premier ministre s'engage à rendre publiques les ententes signées avec Bombardier et avec Air Canada? Sinon, il aura failli à son devoir de chef d'État.

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Malheureusement, M. le Président, c'est mon collègue et son collègue de la deuxième opposition qui, par leur attitude sur ce dossier-là, mettent en danger tout le secteur aéronautique de Montréal. Et je veux bien expliquer pour que la population entende bien ce qui est en train de se passer ici.

Le secteur aéronautique de Montréal est critique pour l'économie du Québec, pour la grande région de Montréal et tout ce qu'on a d'innovations chez nous. Ce secteur aéronautique repose sur plusieurs entreprises, mais tout le monde sait qu'il est centré sur Bombardier Aéronautique. Tout le monde sait également, M. le Président, que ce secteur aéronautique chez Bombardier dépend presque exclusivement de la capacité à développer la série C et de la placer sur les marchés internationaux, notamment auprès des grandes compagnies aériennes.

Alors, ce que j'entends des chefs d'opposition, autant l'opposition officielle que la deuxième opposition, par leurs interventions que je qualifierais d'intempestives et de non raisonnées, c'est qu'ils sont prêts à abandonner, à faire échouer le projet d'acquisition de la série C et de mettre en danger non seulement les travailleurs de l'aéronautique directement reliés à la série C, mais l'ensemble des emplois de Montréal reliés au secteur aéronautique. Alors, je les amène à se resaisir, l'un et l'autre, et réaliser à quel point il est important que cette transaction se fasse avant tout.

Et je terminerai en disant que, dans le cas d'Aveos, nous n'avons pas levé notre recours judiciaire, il ne se fera qu'au moment où la transaction sera confirmée et la mise sur pied du centre d'excellence sera annoncée. C'est très important, M. le Président, de le rappeler. Et je veux encore une fois appeler à mes collègues à la retenue et qu'ils se rendent compte eux-mêmes, au-delà des points qu'ils pensent marquer ici, à cette Assemblée, qu'ils mettent en danger la transaction sur la série C et l'avenir du secteur aéronautique à Montréal.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Je cite le premier ministre lors de la cérémonie d'assermentation de son Conseil des ministres : Nous formerons «le gouvernement le plus transparent que les Québécois auront connu».

Alors, dans ces conditions, est-ce que le premier ministre s'engage à rendre publique l'entente avec Bombardier?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Je remercie mon collègue de me permettre de rappeler à quel point nous avons innové dans le domaine de la transparence et posé des gestes sans précédent. Eh oui, on rigole de l'autre côté parce qu'on n'a jamais été en mesure de faire même pas 10 % ou 25 % de ce qu'on a déjà fait, notamment dans la divulgation des choses, dans la publication des états financiers du gouvernement sur une base régulière, des agendas des ministres, et j'en passe. On est dans la bonne voie, M. le Président. Effectivement, nous sommes en train de donner aux Québécois un gouvernement très transparent.

Maintenant, je vais quand même encore une fois lui rappeler que, bien sûr, au moment requis, on pourra divulguer certains détails. On est devant une entreprise privée qui fonctionne dans un environnement excessivement compétitif, et il fait la même erreur qu'il faisait avec RONA...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...où il voulait nous faire intervenir dans les entreprises privées. Ce n'est pas comme ça qu'on fait croître l'économie, M. le Président.

• (14 h 10) •

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : M. le Président, je cite le premier ministre lors de la cérémonie d'assermentation de son Conseil des ministres : «Comme équipe ministérielle, nous allons obéir aux [...] principes suivants : [...]Transparence : c'est la meilleure prévention. Nous diffuserons les informations aux citoyens de manière proactive; c'est leur maison, ils ont le droit de savoir ce qu'il s'y passe...»

Est-ce que le premier ministre s'engage à diffuser et à rendre publique l'entente avec RONA?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, il s'agit d'une transaction d'acquisition entre deux entreprises. C'est quand même incroyable d'entendre ça, là. Je ne pensais pas un jour entendre quelque chose de semblable, M. le Président.

Je pense qu'on fait des grands progrès dans la transparence, dans le milieu politique québécois, notamment les chefs de parti qui divulguent leurs états financiers personnels, les intérêts qu'ils détiennent partout dans le monde sur tel ou tel enjeu. Alors, avant d'appeler la transparence, il est utile, M. le Président, de rappeler à chacun son devoir d'assurer une telle transparence.

Maintenant, je vais rappeler encore une fois, M. le Président, que cette transaction, bien sûr, implique un secteur majeur de l'économie du Québec, implique une entreprise privée qui était Air Canada, implique une transaction qui, sans...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...si elle ne se produit pas... Je vais revenir encore sur cette question parce qu'il y a énormément d'irresponsabilité...

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Je cite le premier ministre lors de la cérémonie d'assermentation de son Conseil des ministres : «Intégrité : ce sera notre vertu cardinale. Nous n'aurons rien à cacher.»

Alors, est-ce que le premier ministre s'engage à rendre publics les termes de l'entente avec Air Canada ou nous devrons conclure que ce sont des ententes secrètes?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, monsieur...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Couillard : De façon un peu... je le regrette, mais un peu légère, mais, quand même, il pourrait, notre collègue, dans sa poussée vers la transparence exemplaire, nous indiquer ce qu'il arrivera à Air Canada, siège social à Montréal, 7 500 employés, dans l'éventualité où son projet se réalisait. Alors, il est en train de mettre en jeu non seulement l'ensemble de l'économie aéronautique du Québec, de Montréal, mais toute...

Des voix : ...

M. Couillard : Oui, bien, M. le Président...

Des voix : ...

Le Président : Est-ce qu'on peut... La question a été posée dans le cadre de notre règlement. Parfaitement. Est-ce qu'on peut avoir la réponse aussi?

Une voix : ...

Le Président : M. le député de Sanguinet, là...

Une voix : ...

Le Président : Non, non, c'est Sanguinet. Je ne suis pas M. Pétrole non plus. M. le premier ministre.

M. Couillard : Non, M. Pétrole est de l'autre côté de la Chambre, M. le Président. Mais je vois que je soutiens... que je soulève un enjeu épineux, hein? C'est un enjeu qui est à la mesure de toute la perturbation que l'opposition officielle veut déclencher au Québec. Et je l'amène encore une fois, et son collègue de la deuxième opposition, à être responsables, à se souvenir qu'il y a littéralement des dizaines de milliers d'emplois en jeu.

Le Président : En terminant.

M. Couillard : Il faut que nous soyons responsables et veillions au succès de la série C.

Le Président : En principale, M. le député de Terrebonne.

Projet de pompage d'eau des Grands Lacs
vers une ville du Wisconsin

M. Mathieu Traversy

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Waukesha, une petite ville du Wisconsin, aux États-Unis, souhaiterait pomper chaque jour 40 millions de litres d'eau des Grands Lacs pour remplacer sa source actuelle contaminée. Les Grands Lacs se déversent dans le fleuve Saint-Laurent, M. le Président, c'est la source d'eau potable pour des millions de Québécois. L'Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent ont pris position contre le projet et veulent rencontrer le premier ministre à ce sujet. Qui sont ces membres de cette association? C'est Montréal, Trois-Rivières, Québec, Valleyfield, Sorel-Tracy et une vingtaine d'autres municipalités du Québec. Pourquoi? Parce que ce projet créerait un dangereux précédent pour notre fleuve Saint-Laurent. Questionné sur le sujet, le ministre préfère rester silencieux et ne semble pas être très pressé de répondre.

M. le Président, je lui offre l'occasion de le faire aujourd'hui. Est-ce que le ministre de l'Environnement peut nous indiquer si son gouvernement compte s'opposer à ce projet de pompage massif? Va-t-il assumer son devoir de protection de notre fleuve Saint-Laurent?

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : Merci, M. le Président. En vertu des ententes internationales — dont le Québec fait partie — sur le bassin des Grands Lacs et sur le fleuve Saint-Laurent, nous avons convenu, avec nos partenaires des États-Unis et d'autres provinces canadiennes, notamment l'État de New York, en vertu de ces ententes-là, de faire une commission d'examen sur la demande de Waukesha, et cette commission d'examen là a débuté le 7 janvier dernier et doit se terminer le 21 avril. Au moment où on se parle, il y a une période de consultation publique; les gens peuvent aller sur le site du ministère de l'Environnement et émettre leurs commentaires sur le projet. Une fois cette période de consultation terminée, il va y avoir une décision de prise entre les partenaires de l'entente internationale, de la commission d'examen, dont le Québec et les autres partenaires, tant les États américains qu'autres provinces canadiennes, et c'est ensemble qu'une décision va se prendre, en vertu des ententes conclues par l'entente régionale qui vise justement le bassin des Grands Lacs et le fleuve Saint-Laurent, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Terrebonne.

M. Mathieu Traversy

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. On aimerait savoir quelle est la position que le ministre va défendre autour de cette table. Le ministre doit comprendre que ce projet créerait un dangereux précédent s'il devait être autorisé par le gouvernement du Québec. Une décision favorable pourrait paver la voie à d'autres projets similaires. Déjà quatre villes y réfléchissent très sérieusement : on parle de Fort Wayne, St. John, Valparaiso, Muskego. Qu'attend le ministre pour se positionner contre ce projet et qu'est-ce qui le fait hésiter?

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : M. le Président, encore une fois, j'invite le député à étudier le mécanisme de coopération internationale qui est en place pour la gestion du bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. Il y a déjà un mécanisme en place d'examen environnemental de la proposition de Waukesha. Il y a plus de 3 000 pages présentement qui ont été déposées par la ville au soutien de son projet. Ces 3 000 pages là sont présentement à l'étude. Il y a une période de consultations publiques à l'échelle des États américains et des provinces concernés. On fait notre travail. Mais, avant de prendre position, laissez-nous évaluer le projet, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Terrebonne.

Des voix : ...

Le Président : Il n'y a que le député de Terrebonne qui a droit de parole ici, là.

M. Mathieu Traversy

M. Traversy : Merci, M. le Président. On aimerait savoir la position du ministre dans ce dossier. Le ministre parle de consultations publiques. Vous avez au moins déjà 25 villes québécoises qui s'opposent formellement au projet. Ce sont les principales concernées qui vous demandent de vous positionner contre ce dangereux projet qui pourrait créer des précédents. La décision du Québec dans ce dossier est primordiale. M. le ministre, on aimerait entendre votre opinion personnelle autour de cette table.

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : M. le Président, encore une fois, on a un exemple de l'incohérence du Parti québécois, parce que, dans certains cas comme celui-ci... Dans celui-ci, pas d'évaluation environnementale, tout de suite une décision; par contre, dans Anticosti, pas certain. Dans Anticosti, dépendant de quel député on parle de ce côté-là, il faut une évaluation environnementale, il n'en faut pas. Puis, de l'autre côté, dans TransCanada, quand vous étiez au pouvoir, pas d'évaluation environnementale; l'année dernière, un petit peu d'évaluation environnementale; puis là, maintenant, il faut toutes faire les évaluations environnementales.

Alors, est-ce qu'on pourrait juste avoir une cohérence sur c'est quoi que le Parti québécois veut sur la question des évaluations environnementales? Parce que nous, nous sommes cohérents. Nous faisons nos devoirs avant de nous prononcer.

Le Président : Principale, M. le député de Marie-Victorin.

Dossiers soumis au Directeur des poursuites criminelles
et pénales concernant le Parti libéral

M. Bernard Drainville

M. Drainville : M. le Président, le 11 décembre dernier, le Directeur des poursuites criminelles et pénales, le DPCP, annonçait qu'il allait désormais se justifier publiquement dans certains dossiers où aucune accusation n'est déposée. Ça fait maintenant plus d'un an que l'UPAC a déposé sur les bureaux du DPCP les conclusions des enquêtes Lierre et Joug.

Qu'est-ce qu'elles ont en commun, ces deux enquêtes, M. le Président? Elles visent toutes les deux le Parti libéral du Québec. Ça fait plus d'un an que ces enquêtes de l'UPAC sont bouclées et qu'elles dorment sur le bureau du DPCP, et il ne se passe rien, pas d'accusation, pas d'explication. Et pourtant, M. le Président, le DPCP peut fournir des explications en vertu de ses propres critères, c'est-à-dire que les enquêtes sont du domaine public et qu'elles ont marqué la conscience collective.

M. le Président, les Québécois, ils ont droit soit à des explications soit à des accusations. Actuellement, on n'a ni un ni l'autre. Est-ce qu'on peut savoir pourquoi?

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, de l'autre côté de la Chambre, on souhaite se mettre les deux mains dans les institutions démocratiques, on souhaite se mettre les deux mains dans les institutions qui doivent, doivent, pour la démocratie, demeurer indépendantes. Pourtant, on sait ce que c'est, l'indépendance, de l'autre côté, M. le Président.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales fait son travail d'une façon tout à fait indépendante, à l'abri de toute influence et ingérence politique. Nous sommes le gouvernement qui avons déposé une loi en ce sens, nous avons créé le DPCP et nous respectons cette indépendance, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire? Première complémentaire, M. le député de Matapédia-Matane.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, le DPCP s'est donné des lignes directrices permettant de publier les raisons de ne pas porter d'accusation. Alors, pour la gouverne de la ministre, l'objet d'enquêtes policières est du domaine public ou a marqué la conscience collective. Alors, dans les deux critères, les deux enquêtes, c'est du domaine public puis ça a certainement marqué la conscience collective que ce soit le parti qui est au pouvoir présentement. On n'a pas d'explication puis on n'a pas d'accusation.

Pourquoi c'est plus difficile quand c'est le Parti libéral du Québec?

• (14 h 20) •

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, le Directeur des poursuites criminelles et pénales, je le répète, est une entité indépendante, libre de toute influence politique. D'aucune façon le gouvernement ne s'ingère dans les dossiers qui sont entre les mains du directeur criminel et pénal.

M. le Président, la directrice, Me Annick Murphy, était présente ici, à l'Assemblée nationale, le 12 novembre dernier. Aucune question n'a été posée sur les enjeux. Mais par contre, M. le Président, Me Murphy est présente et sera présente à l'étude des crédits et pourra répondre, le cas échéant...

Le Président : En terminant.

Mme Vallée : ...aux questions du député.

Le Président : M. le député de Matane-Matapédia, en deuxième complémentaire.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Justement, M. le Président, selon la directrice elle-même, les lignes directrices sont là pour quoi? Contribuer à préserver la confiance du public envers l'administration de la justice criminelle et pénale.

Pendant ce temps-là, les dossiers Joug et Lierre dorment sur les bureaux des procureurs, on ne sait pas pourquoi. Accusation ou explication.

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, je le réitère, le Directeur des poursuites criminelles et pénales est un organisme indépendant. Il ne doit d'aucune façon faire l'objet de pression de la part du politique ni même des médias. Me Murphy l'a réitéré lors de son passage en commission parlementaire, le 12 novembre dernier. Les dossiers qui sont soumis au DPCP ne sont d'aucune façon transmis de ce côté-ci de la Chambre. Il n'y a pas un député, il n'y a pas un ministre qui est informé des dossiers qui sont déposés sur le bureau de la Directrice des poursuites criminelles et pénales. C'est à se demander, de l'autre côté...

Le Président : En terminant.

Mme Vallée : ...pourquoi et d'où détiennent-ils leur information.

Le Président : Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Poursuite judiciaire intentée par le gouvernement
du Québec contre Air Canada

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, dans le dossier d'Aveos, le gouvernement du Québec a entre les mains un jugement sans équivoque de la Cour d'appel. Air Canada n'a pas respecté la loi et doit réembaucher, donc, 1 800 employés pour faire l'entretien de ses 400 avions. Or, M. le Président, actuellement, les seuls avions d'Air Canada qui sont entretenus au Québec, c'est 45 Embraer à Trois-Rivières, chez Premier Aviation.

Donc, première question : Quand le premier ministre nous dit : J'ai peut-être une garantie pour créer un centre d'excellence avec 1 000 emplois, est-ce que ça inclut les 200 emplois qui sont déjà à Trois-Rivières? Les gens de Trois-Rivières sont inquiets.

Deuxièmement, pourquoi demander seulement 1 000 emplois? Pourquoi pas 1 800 emplois, comme le jugement le dit?

Troisièmement, M. le Président, on a un ministre à Ottawa, Marc Garneau, qui semble pressé de changer la loi. Or, si la loi d'Air Canada est changée, il ne pourra plus poursuivre Air Canada.

Donc, ma question est claire, on dépose une motion : Est-ce qu'il est prêt à accepter qu'on demande ensemble au gouvernement fédéral de ne pas amender la loi d'Air Canada? Et combien d'emplois va-t-il exiger en échange d'abandonner sa poursuite?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, c'est vraiment regrettable parce que notre collègue, comme son collègue de l'opposition officielle, je pense qu'il s'en rend compte, il a une grande expérience dans le milieu des affaires que je lui reconnais, mais il doit se rendre compte que les paroles qu'il prononce ici, à l'extérieur, mettent en danger le coeur même de cet échafaudage qu'est l'acquisition de série C par Air Canada.

Est-ce qu'il connaît un décret ou une législation gouvernementale qui peut être utilisée pour forcer Air Canada à acheter les série C, ce qui garantit la survie de bien plus que 1 800 emplois, de tous les emplois aéronautiques de Bombardier?

Ce qu'il est en train de faire, c'est mettre en danger cette transaction essentielle. On va, bien sûr, s'en tenir à la lettre de ce qu'on a dit, M. le Président. Il n'est pas question de lever le recours judiciaire tant que, d'une part, la commande n'est pas certifiée et que le centre d'excellence qui, en passant, n'implique pas qu'Air Canada, mais toutes les autres compagnies utilisatrices des série C — il relira les textes, le communiqué, il le verra — ...de façon à ce que, oui, au-dessus des emplois d'Embraer à Trois-Rivières, on maintienne d'abord l'activité aéronautique du Québec à Montréal, ce qu'il est en train de mettre en danger, j'espère involontairement, par ses propos.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, ma question est claire. Il parle de créer un centre d'excellence. La ministre l'a répété 17 fois dans une entrevue avec Paul Arcand : Centre d'excellence, centre d'excellence.

Combien va-t-il y avoir d'employés? Quel est l'engagement d'Air Canada? Combien d'employés dans le centre d'excellence pour sacrifier les 1 800 travailleurs d'Aveos. Combien?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, franchement, je trouve ça...

Une voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Couillard : M. le Président, je trouve ça... Je vais vous dire franchement, je trouve ça presque cruel de laisser penser aux travailleurs d'Aveos, dont beaucoup travaillent pour d'autres entreprises maintenant, mais dont certains ne travaillent pas encore pour des compagnies aéronautiques... de leur laisser penser que leur emploi éventuel est lié au succès ou non d'un processus judiciaire. Ce n'est pas vrai du tout, ce n'est pas vrai du tout et c'est une dangereuse illusion qu'il répand dans la population, et notamment auprès des employés... des ex-employés d'Aveos.

Maintenant, ce qui est absolument essentiel, c'est de ne pas faire ce qu'il fait, de ne pas mettre en danger la transaction d'acquisition des série C. Et je vais lui poser la question à laquelle il pourra répondre après : Et, si Air Canada nous disait : Bon, bien, on n'achète plus de série C, est-ce qu'il est prêt, lui, à laisser couler Bombardier? Pas nous. On va soutenir Bombardier, on va protéger les emplois à Montréal.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le premier ministre est très bon pour défendre les amis du Parti libéral, mais il est moins bon quand il s'agit de défendre les intérêts des Québécois, des travailleurs québécois.

Des voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : D'une part, je crois qu'il y a des intentions qui sont plus que prêtées, et, franchement, pas tellement conforme à ce qu'on avait dit, tous ensemble dans ce Parlement, qu'on tenterait de faire en vertu d'avoir plus de respect. J'imagine que vous pourriez rappeler cela au chef de la deuxième opposition et peut-être aussi au chef de l'opposition, qui a l'air à l'oublier en ce moment même.

Le Président : Ça va aller. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Bonnardel : Le premier ministre peut nier, oui, les liens de Daniel Johnson, Bombardier et lui-même?

Le Président : S'il vous plaît! M. le chef du deuxième groupe d'opposition, c'est à vous la parole. Je vous demanderais d'éviter d'imputer des motifs ou quoi que ce soit. M. le...

M. Legault : M. le Président, je répète ma question : Combien d'employés Air Canada va s'engager à embaucher au Québec? Combien d'employés? Je pose la question au premier ministre, pas au Capitaine Bonhomme, au premier ministre.

Des voix : ...

Le Président : M. le chef du deuxième groupe d'opposition, je vais vous demander de retirer le dernier terme.

Une voix : ...

Le Président : C'est ça, oui, c'est ça, oui. Enfin... Je voudrais juste... Je voudrais...

Des voix : ...

Le Président : J'avais compris et je comprends encore que c'était une comparaison. Ce n'est pas, évidemment, une bonne idée que de se comparer les uns les autres avec des personnages de la télévision d'il y a très longtemps. Ça fait que je vous demanderais strictement de retirer le dernier terme, puis on va continuer.

M. Legault : Bon, O.K.

Le Président : Parfait. M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, je pense que la population jugera. Quand on dirige un parti politique puis on aspire un jour à diriger le Québec, on ne se comporte pas de cette façon, on ne parle pas de cette façon. On ne parle pas d'un ancien premier ministre du Québec, honorable, intègre, respecté, admiré, comme il le fait, comme son voisin de gauche le fait.

Et, pour revenir à sa question, M. le Président, le centre d'excellence sera celui d'Air Canada et des autres transporteurs. Il ne connaît pas le dossier. C'est 1 000 emplois sur 15 ans. On espère avoir cette réalisation. Mais, d'abord et avant tout, il faut que les série C soient commandés. Il est en train de mettre en danger le secteur aéronautique de Montréal.

Le Président : Principale, M. le député de Granby.

Investissement du gouvernement dans Bombardier inc.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, depuis que le gouvernement a choisi de donner 1 milliard US à Bombardier, l'entreprise a coupé 2 400 emplois. Pourtant, ce n'est pas tout le monde qui négocie de la même manière en Amérique du Nord. Nos recherches ont permis de retrouver une entente signée entre Bombardier et Wichita, au Kansas, pour un projet d'expansion des installations. Bombardier s'est engagé à créer 450 emplois sur cinq ans en échange de subventions totalisant 30 millions de dollars. Ça, c'est le graphique : Bombardier, Québec et le gouvernement, 1 milliard, zéro.

J'ai une question fort simple au ministre, M. le Président : Est-ce qu'il était au courant de cette entente entre Bombardier et le Kansas? Est-ce qu'il va lui-même revoir, donc, et demander un plancher d'emploi à Bombardier?

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Merci, M. le Président. Alors, écoutez, je suis surpris, puis vous demanderez à votre chef, parce qu'il a une formation comptable, il pourra vous faire la différence entre un prêt, un investissement puis une subvention. Ce que vous avez dans le moment, c'est une subvention de 30 millions, 400 emplois. Zéro subvention, 2 200 emplois dans le CSeries. Je trouve ça mieux. Alors, je ne comprends pas exactement où vous vous en allez avec ça. Ce qu'on a, c'est le CSeries. Il va être fabriqué ici, au Québec. Le siège social va être ici, au Québec. L'ingénierie va être ici, au Québec. Il va appartenir à des Québécois, le droit de fabriquer cet avion-là et toutes les certifications qui viennent avec.

Alors, quand vous me parlez de Wichita, ça se peut que Wichita ait fait une transaction à 30 millions où ils garantissent 400 emplois on ne sait pas pendant combien de temps, mais je vous ferai remarquer aussi que, dans la transaction, cinq ans, c'est intéressant; 20 ans dans notre cas, monsieur. Alors, 20 ans, 2 200 emplois, pas de subvention, je vous mets au défi, je vous mets au défi de faire mieux, monsieur.

• (14 h 30) •

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Granby.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Bien, M. le Président, le premier ministre l'a dit tantôt : «"[On] n'a pas le pouvoir d'exiger que 1 000 emplois soient créés pour l'entretien des avions Bombardier CSeries qu'Air Canada a l'intention d'acheter", a déclaré le premier ministre...» Bien, qu'il aille chercher le négociateur au Kansas au PC, parce que lui, là, il a négocié 450 jobs pour 30 millions.

Alors, je vous demande une question fort simple : Allez-vous revoir l'entente et demander un plancher d'emploi?

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, on parle de 288 commandes fermes, on approche de 700 en incluant les options. On parle de milliards d'ouvrage pour des travailleurs ici, au Québec, à Mirabel, et je vous répète, M. le député : Sans subvention. On n'a pas donné de subvention dans ça, on a fait un investissement, un investissement à 49,5 %, si vous voulez, de propriété de ce bilan-là, qui a été nettoyé, dans ce produit certifié là, ce produit d'avenir là qui va donner des emplois aux Québécois. On investit au bon endroit puis on se le fait reprocher. Je ne le comprends pas!

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Granby. Et on s'adresse, dans les deux cas, à la présidence.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Facile à comprendre, c'est moins 2 400 emplois pour 1 milliard d'investissement au Québec. Ça, c'est Wichita — le Kansas : 30 millions pour 450. Saviez-vous, M. le ministre, que Bombardier compte déplacer son centre d'expertise de la CSeries de Mirabel à Wichita, puis c'est 75 emplois qui vont disparaître? Allez-vous les sauver, ces emplois? Allez-vous demander un plancher d'emploi et resigner cette entente entre Bombardier puis le Québec?

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, je pense que vous faites beaucoup d'amalgames actuellement, M. le Président. Je pense qu'on s'en va dans la mauvaise direction. On parle de 2 400 mises à pied, et vous remarquerez que, dans les 2 400 mises à pied au Québec, dans des avions qui sont des jets d'affaires, dans des avions où les milliardaires n'en commandent pas, pour le moment, parce que l'économie mondiale ne se prête pas à ça, bien, nous, on investit dans une place où on pourrait créer des emplois, on investit dans le CSeries.

Les 2 400 emplois, ils disparaissent dans d'autres secteurs; dans celui dans lequel on investit, il y a une croissance, M. le Président. Et ça, je le répète, parce que vous n'avez pas de l'air à le comprendre comme il faut : Zéro subvention, M. le Président. Zéro subvention, c'est facile à calculer, ça, hein? Merci.

Le Président : Principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Accès à des logements de qualité à un prix abordable

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Alors, le gouvernement libéral, enfermé dans son idéologie d'austérité, est en train d'abandonner l'habitation sociale et communautaire par le seul programme de logement social, le programme AccèsLogis. Le gouvernement est en train de faire mourir à petit feu notre programme de logement social. L'an dernier, le gouvernement a coupé le financement d'AccèsLogis de moitié, insidieusement. Vous savez que le gouvernement a coupé tous les programmes subsidiaires qui contribuaient à la réalisation des unités d'habitation.

Dans les dernières semaines, M. le Président, j'ai rencontré ceux qui construisent du logement social au Québec, ceux qui défendent le logement social au Québec, ceux qui habitent le logement social. C'est 27 000 ménages qui, au cours des dernières années, ont pu profiter... des femmes monoparentales, des personnes en situation d'itinérance qui ont bénéficié du logement social. Est-ce que le gouvernement va se reprendre en main et faire en sorte qu'on rétablisse le budget d'AccèsLogis?

Le Président : M. le ministre des Affaires municipales.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Bien, le gouvernement non seulement appuie le logement social au Québec, mais il appuie les gens qui ont besoin d'accéder à des logements à des prix qu'ils sont capables de payer, et on peut le faire en construisant des logements, ce qu'on fait. Donc, AccèsLogis a un financement de 126 millions cette année, ce n'est pas rien, mais surtout, en plus d'AccèsLogis, on a aussi un programme de supplément au loyer qui va bien plus qu'à 1 500 unités de logement puisqu'on est capables de rejoindre, avec 123 millions, 5 800 nouveaux ménages avec le Programme de supplément au loyer.

Alors, on vient en aide aux gens qui ont besoin d'accéder à un logement à un prix qu'ils sont capables de payer. C'est ce que le gouvernement fait et c'est ce qu'il va continuer à faire.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Alors, le gouvernement de l'austérité, M. le Président, c'est couper le programme Réno-Québec, aboli; c'est couper les budgets pour la décontamination des sols, parce que, quand on construit, il faut décontaminer, particulièrement dans les grands centres; couper le programme NovoClimat; couper les programmes novateurs; faire en sorte que les budgets actuels pour construire, c'est des budgets de 2009; des délais incroyables à la SHQ et aussi fini de payer l'ameublement dans tout ce qu'est le logement communautaire. Vous auriez voulu le couper, ce projet-là, vous n'auriez pas fait...

Le Président : M. le ministre des Affaires municipales.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : La députée d'Hochelaga a oublié de mentionner RénoRégion, qu'on a créé aussi. Alors, lorsqu'on fait la somme de toutes les aides au logement, de l'aide aux personnes à faibles revenus pour accéder au logement, le gouvernement est là pour les appuyer. On n'investit pas que dans la brique, M. le Président, on investit dans les personnes.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Vous savez, M. le Président, la Direction de santé publique à Montréal a déposé un rapport, en septembre dernier, pour dénoncer justement l'état d'insalubrité des logements, avec de la moisissure partout. Votre Programme de supplément au loyer, ça ne garantit pas des logements sains, ça ne garantit pas, justement, à des familles d'avoir des logements convenables.

de logement social au Québec?

Le Président : M. le ministre des Affaires municipales.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Je suis touché que la députée d'Hochelaga se préoccupe de l'état de mon esprit. Il va très bien, mon esprit, M. le Président. Il va très bien, puis c'est pour ça d'ailleurs qu'on va continuer d'appuyer le logement social, qu'on va continuer surtout d'appuyer les personnes qui ont besoin d'accéder à un logement. Il y a différentes façons de faire ça. Il y a la brique, et on met de l'argent dans la brique, mais on ne met pas que de l'argent dans la brique, on aide directement les personnes. On aide directement les personnes pour qu'elles accèdent à des logements de qualité à un prix abordable. C'est ça, le programme du gouvernement, et c'est dans ce sens-là que nous allons continuer.

Le Président : Principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Ressources allouées à la lutte contre l'exploitation sexuelle

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Alors, en matière de lutte à l'exploitation sexuelle, qu'est-ce qui s'est passé depuis trois semaines? Rien. Le bilan libéral est désastreux : un rapport tabletté; les budgets des centres jeunesse coupés de 20 millions, non rétablis; le programme pour la lutte contre l'exploitation sexuelle chez les adolescents, aboli; la demande du SPVM pour mettre sur pied une escouade mixte, refusée.

Tout ce que le gouvernement libéral a fait, c'est un coordonnateur, M. le Président, et un vérificateur. C'est ça qu'ils ont fait pour les jeunes filles qui sont en difficulté. Ils ont même dépêché trois ministres en catastrophe dans une conférence de presse pour annoncer des miettes.

Est-ce que le gouvernement va réinjecter les sommes nécessaires pour faire de la prévention et de l'aide pour nos jeunes filles qui en ont bien besoin?

Le Président : Mme la ministre responsable des...

Mme Lise Thériault

Mme Thériault : De la Condition féminine.

Le Président : ...de la Condition féminine, oui.

Mme Thériault : Merci, M. le Président. M. le Président, la question de la collègue, de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, est quand même assez intéressante sur le principe qu'elle sait fort bien qu'il y a eu plusieurs consultations avec ma collègue qui m'a précédé comme ministre de la Condition féminine, qu'à sa demande d'ailleurs on a entendu en Commission des relations avec les citoyens, on a été sur le terrain, on a été poser des questions aux femmes, et elle a fait des observations qui sont tout à fait justes sur le principe que l'exploitation sexuelle, oui, il y a un plan d'action qui est à l'intérieur du plan d'action égalité hommes-femmes.

On est en train de travailler sur un plan qui... ça dresse toutes les questions de violence faite aux femmes. Et la collègue, elle est la première à poser comme question aux gens qui viennent en commission, peu importe que ça ait été ici, au parlement, ou sur la route, en disant : Ne croyez-vous pas que nous devrions avoir un seul plan d'action qui regroupe toutes les actions du gouvernement en matière, notamment, d'agressions sexuelles, de violence sexuelle, pour traiter les questions aussi sur la traite qui est faite aux femmes, l'exploitation sexuelle des gens, M. le Président?

Donc, vous comprendrez, M. le Président, un peu ma surprise, parce que ma collègue, qui demande plus de consultations, sait très bien...

Le Président : En terminant.

Mme Thériault : ...qu'il reste encore du travail à faire, nous demande de déposer un plan. On le déposera, M. le Président, en temps et lieu...

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Qu'est-ce qu'il s'est passé pour garantir la poursuite du projet Mobilis à Longueuil? Rien. C'est pourtant un projet primé, un succès de collaboration entre un centre jeunesse et huit policiers, qui a obtenu un taux de réussite des enquêtes contre le proxénétisme de 100 %. La formule gagnante existe. Si le sort des jeunes filles exploitées préoccupe sincèrement le gouvernement, va-t-il, oui ou non, rétablir les sommes qu'il a supprimées dans Mobilis?

Le Président : Mme la ministre de la Condition féminine.

Des voix : ...

Le Président : Non, s'il vous plaît!

Mme Lise Thériault

Mme Thériault : M. le Président, regardez, je pense que la collègue doit très bien comprendre que, présentement, on est à travailler un plan d'action. À la demande de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, le plan d'action sortira plus tard parce qu'on doit prendre en considération plusieurs facteurs.

Je tiens par contre à préciser qu'on n'a pas attendu qu'il y ait des questions de l'opposition pour poser des actions concrètes sur le terrain pour lutter sur la violence qui est faite aux femmes, notamment l'exploitation sexuelle des jeunes. Ma collègue la ministre responsable de la DPJ a annoncé pas plus tard que voilà deux semaines qu'il y aurait des actions qui seraient prises sur le terrain avec le collègue de la Sécurité publique, M. le Président. Pourquoi? Parce qu'il est important de s'adresser à cette question-là particulière, où nos jeunes filles peuvent être vulnérables. Et le gouvernement déposera un plan d'action plus complet plus tard au...

• (14 h 40) •

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Vous savez, M. le Président, ce que ça prend, c'est de l'action. On n'attendra pas un autre drame, une autre conférence de presse en catastrophe.

La question est très simple, là : Allez-vous rétablir le programme qui vient en aide pour faire de la prévention en matière d'exploitation sexuelle chez les adolescents? C'est un programme de la Sécurité publique. Est-ce que le ministre de la Sécurité publique va rétablir les sommes? C'est simple, M. le Président.

Le Président : Mme la ministre de la Réadaptation.

Mme Lucie Charlebois

Mme Charlebois : M. le Président, là, honnêtement, le sujet est suffisamment important pour cesser la partisanerie immédiatement. Moi, je pense que c'est un sujet sur lequel nous devrions faire commun plutôt que de s'engueuler, je vais vous dire le mot comme ça, M. le Président.

De ce côté-ci de la Chambre, nous, là, ce qu'on a à coeur, c'est certainement la sécurité et la protection des jeunes filles et des jeunes garçons, et je suis certaine que, de l'autre côté, c'est la même chose. On ne peut pas nous dire qu'on n'a rien fait, là, parce que, d'entrée de jeu, quand on est arrivés puis qu'il y a eu ce dossier qui nous a interpelés tous, vous vous souviendrez que j'ai nommé un vérificateur pour savoir si les processus et toutes les procédures étaient respectés...

Le Président : En terminant.

Mme Charlebois : ...au centre jeunesse. On a ensuite... j'ai dit que je convoquais des gens pour entendre qu'est-ce qu'on pouvait faire de mieux.

Le Président : Principale, M. le député de Lévis.

Tarifs de stationnement des hôpitaux

M. François Paradis

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président.

Des voix : ...

Le Président : Et j'aimerais ça l'entendre comme du monde. M. le député de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Les Québécois qui se rendent dans les hôpitaux doivent payer de plus en plus cher pour se stationner. Au moins 12 hôpitaux du Québec exigent des frais de stationnement de 15 $ ou plus par jour. Au nouveau CUSM de Montréal, c'est 25 $ après 90 minutes, plus cher qu'un stationnement au Centre Bell. Au CHU de Québec, 16 $ après trois heures, plus cher qu'un stationnement au Grand Théâtre. Il y a actuellement une uniformisation à la hausse des tarifs dans plusieurs régions du Québec. Il y a même des endroits où le stationnement qui était gratuit ne l'est plus, exemple le CLSC de Fortierville. Des tarifs de stationnement trop élevés dans les hôpitaux sont une barrière à l'accès aux soins de santé. Plusieurs citoyens, patients, municipalités, associations et même la Protectrice du citoyen dénoncent les tarifs abusifs de stationnement dans les hôpitaux.

Est-ce que le ministre de la Santé trouve ça raisonnable que des patients qui n'ont pas le choix de se rendre à l'hôpital doivent payer 16 $, 20 $ ou 25 $ par jour pour se stationner?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Alors, M. le Président, évidemment, on comprendra que la gestion des stationnements de nos différentes institutions est une prérogative de l'administration de l'institution et n'est pas du tout sous notre juridiction directe.

Maintenant, M. le Président, malgré tout, il y a une circulaire qui donne des guides ou des orientations quand même à être observés qui a déjà été envoyée à notre réseau en 2006 et qui est en voie de révision actuellement. Pourquoi? Évidemment pour les raisons que le député de Lévis vient d'évoquer, et je le remercie de sa question. Alors, il est clair, M. le Président, que nous demandons aux administrateurs du réseau de faire en sorte que les patients, surtout ceux qui ont à venir de façon périodique ou de façon répétée, ponctuellement ou non, dans nos hôpitaux, ne soient pas pénalisés, et c'est la raison pour laquelle nous leur avons demandé de faire en sorte que leur grille tarifaire soit aménagée pour prendre cet élément-là en considération.

Ceci dit, M. le Président, je terminerai quand même en disant que l'argent qui vient de là, heureusement, est réinvesti complètement dans les services, dans la fondation de l'hôpital, et qu'on doit évidemment trouver un équilibre. Et c'est ce à quoi s'appliquent actuellement les directions des différentes administrations.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Lévis.

M. François Paradis

M. Paradis (Lévis) : M. le Président, l'équilibre n'est pas toujours facile à trouver. Je pense à Mme Tremblay, une mère monoparentale de Québec, qui doit payer 100 $ de stationnement par mois pour voir son médecin avec son bébé né prématurément. Et là c'est un tarif préférentiel, 100 $ par mois, un montant qu'elle trouve exorbitant. Elle ne peut pas se rendre à l'hôpital en autobus avec son enfant.

Que répond le ministre à ceux qui n'ont d'autre moyen que la voiture pour se rendre à l'hôpital? Est-ce qu'il faut comprendre que le ministre est prêt à revoir à la baisse la grille tarifaire des stationnements des établissements de santé?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Alors, M. le Président, je vais le répéter : Évidemment, c'est une question de prérogative locale. Je suis d'accord avec le député de Lévis qu'il faille aujourd'hui s'assurer que nos administrations proposent à leur clientèle des ajustements lorsque les circonstances le justifient, je comprends très bien l'exemple qui est donné ici, mais il n'en reste pas moins, M. le Président, que ça demeure la prérogative de l'administration locale de s'adresser à ça.

Je le répète, M. le Président : Nous sommes à revoir, au moment où on se parle, les directives qui sont envoyées dans le réseau. Informellement, tout le réseau a été avisé d'adapter les choses à la situation des patients...

Le Président : En terminant.

M. Barrette : ...et je pense que ça va dans le sens de ce que vient d'évoquer le député de Lévis.

Le Président : Principale, M. le député de Bourget.

Financement des organismes s'occupant d'intégration
et de francisation des immigrants

M. Maka Kotto

M. Kotto : M. le Président, l'austérité du gouvernement libéral met actuellement à risque le Service d'orientation et d'intégration des immigrants au travail, un organisme de la région de la Capitale-Nationale qui aide à recruter, orienter et intégrer les immigrants sur le marché du travail et, qui plus est, à les retenir dans une région qui, on le sait, recèle d'entreprises qui sont aux prises avec des problèmes de main-d'oeuvre.

Cet organisme, le SOIIT, recevait une subvention de 255 000 $ par année. Celle-ci transitait par la CRE depuis 2010‑2011. Or, les CRE ont été victimes du démantèlement orchestré par le gouvernement libéral en 2014. Résultat : la subvention du SOIIT, disparue.

 Alors, s'il est sincèrement préoccupé par l'intégration réussie des immigrants, qu'attend-il, ce gouvernement, pour restituer les 255 000 $ à cet organisme qui est dédié à cet objectif?

Le Président : Mme la ministre de l'Immigration.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Merci, M. le Président. Je tiens à remercier mon collègue pour la question parce que ça me donne l'occasion de clarifier la situation. Évidemment, ces organismes jouent un rôle fondamental, et je pense que mon collègue partage cette préoccupation de bien appuyer nos organismes qui s'assurent de l'intégration en emploi.

Alors, étant donné que l'entente avec les CRE vient à échéance le 31 mars, les discussions sont en cours actuellement avec la ville de Québec, vont bon train, mais je tiens à rassurer que le MIDI sera au rendez-vous. Mon ministère sera au rendez-vous pour financer cet organisme avec notre partenaire, la ville. Les discussions sont en cours actuellement, et donc on aura les résultats de ces discussions sous peu.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : M. le Président, l'entente était jusqu'en 2018. Je vous l'annonce, Mme la ministre. Pendant ce temps-là, malheureusement, pour le ministre responsable de la Capitale-Nationale, c'est un dossier, une boutade, un problème, une phrase creuse. C'est comme ça qu'il fait de la politique. En mai 2015, le ministre responsable de la Capitale-Nationale s'est engagé à ce que l'argent soit versé à l'organisme, mai 2015. Il dit, depuis ce temps-là, qu'il y a des discussions. Il n'y en a pas. Le SOIIT attend toujours, pas un sou de versé.

Quand est-ce qu'il va retenir...

Le Président : Mme la...

Une voix : ...

Le Président : Oui, ça, c'est sûr. C'est sûr. Mme la leader adjointe, je vous prierais d'éviter de blesser quand vous posez vos questions et éviter ce qui ressemblait être... on pourrait qualifier ça même d'insulte, éviter ce genre de propos là quand on vous... M. le ministre? Mme la ministre? Qui répond? Mme la ministre de l'Immigration.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Écoutez, il s'agit... c'est vraiment mon ministère qui a entamé les discussions, donc, avec d'autres partenaires parce qu'on est dans une... On aborde une année de transition, mais le MIDI a toujours dit que ces ententes seraient renouvelées avec de nouveaux partenaires, que c'est important qu'on soit au rendez-vous. Alors, je tiens à rassurer la députée que le MIDI est bien présent dans ces discussions, et on me confirme qu'il y a des échanges actuellement pour renouveler l'entente, donc, avec la ville de Québec.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Duplessis.

Mme Lorraine Richard

Mme Richard : Merci, M. le Président. J'aimerais savoir de la ministre : Quels partenaires? Parce qu'à Sept-Îles le Centre Alpha Lira, c'est la même chose : il leur manque 45 000 $ pour être capable de continuer. J'aimerais savoir, M. le Président, de la part de la ministre, où est l'argent? Parce que nous, on l'attend puis Alpha Lira, ils en ont besoin. Donc, vos partenaires, là, je ne sais pas c'est lesquels, mais ça ne fonctionne pas, Mme la ministre.

Le Président : Mme la ministre de l'Immigration.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Oui. Dans ces ententes, il y avait plusieurs ministères qui étaient des partenaires. Pour ce qui est de Mobilisation-Diversité, pour ce qui est du MIDI, le MIDI va renouveler les ententes avec les nouveaux partenaires. Mais là je pense que vous parlez de plusieurs ministères qui sont des partenaires dans ces ententes. Mais, pour le MIDI — moi, je réponds pour le ministère de l'Immigration — et, pour le Programme Mobilisation-Diversité, nous avons tout à fait l'intention de renouveler ces ententes avec les villes ou les MRC, dépendant de la situation. Souvent, c'est la même entité, la MRC et la ville.

Le Président : Principale, M. le député de Groulx.

Projet de loi n° 76 modifiant l'organisation et la gouvernance du
transport collectif dans la région métropolitaine de Montréal

M. Claude Surprenant

M. Surprenant : M. le Président, avec son projet de loi n° 76 sur la réforme de la gouvernance du transport en commun dans la région métropolitaine, le gouvernement libéral va étendre à l'ensemble des 88 municipalités de la CMM la taxe spéciale de 45 $ sur l'immatriculation des véhicules qui sert à financer le transport en commun sur l'île de Montréal depuis 2011.

En conséquence, plus de 1 million d'automobilistes qui résident dans le 450 vont devoir payer une nouvelle taxe annuelle d'au moins 45 $ en plus du 30 $ qu'ils paient déjà, une augmentation de 150 %, M. le Président. C'est donc 90 $ par famille en moyenne qui s'ajoute au 1 500 $ que les libéraux sont venus piger dans leurs poches depuis leur élection en 2014. Le gouvernement va-t-il retirer cette taxe injuste de son projet de loi, comme le demandent les citoyens du 450 et CAA-Québec, M. le Président?

• (14 h 50) •

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, M. le Président, je trouve le point, le moins qu'on puisse dire, un peu amusant. Voyez-vous, le projet de loi n° 76 comporte différentes parties et, actuellement, on est rendus, dans l'étude article par article, à la partie III. On a fait, au cours des dernières deux semaines, là, avec les collègues, le député de Groulx, la députée de Vachon... on a avancé d'une centaine d'articles. C'est considérable. On est rendus à l'article 126, la partie III.

Actuellement, ce dont nous parle le député de Groulx, il nous parle de l'article 71 de la partie V. On n'est pas rendus là. Et, à savoir si on est capables de faire des amendements puis si on est capables de faire des accommodements, je ferai simplement remarquer qu'au cours des 100 derniers articles on a été capables de faire, M. le Président, 21 amendements sur 100. Ça fait que, d'après moi, dans les 217 qui restent, on est capables d'en faire un autre. Merci, M. le Président.

Le Président : Cela met fin à la période des questions et réponses orales.

Des voix : ...

Motions sans préavis

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, les travaux ne sont pas suspendus, là, on voulait poursuivre aux motions sans préavis. Et, selon l'ordre établi, c'est le premier ministre qui a une motion sans préavis à nous présenter. M. le premier ministre, à vous la parole.

Souligner le 75e anniversaire de la Délégation
générale du Québec à New York

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je sollicite donc le consentement de l'Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le chef de l'opposition officielle, le chef du deuxième groupe d'opposition, la députée de Gouin de même que la députée d'Arthabaska :

«Que l'Assemblée nationale souligne le 75e anniversaire de la Délégation générale du Québec à New York, de même que la présence en cette Assemblée des consuls généraux des États-Unis à Québec et à Montréal, ainsi que de représentants de l'État de New York, dont la sénatrice du 45e district, venus appuyer cette commémoration;

«Qu'elle reconnaisse tout le travail réalisé par cette représentation au cours de ces 75 années, et qu'elle l'encourage à poursuivre son travail d'appui au développement du Québec;

«Qu'elle félicite et remercie tous les employés du réseau du Québec à l'étranger, qui se font les porte-étendards de la société [du Québec] à travers le monde.»

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Oui, M. le Président, il y a effectivement consentement. On parle d'une durée d'environ trois minutes par intervenant, à commencer par le premier ministre, l'auteur de la motion, suivi du chef de l'opposition officielle, du chef du deuxième groupe d'opposition et, finalement, Mme la députée de Gouin.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, tel qu'entendu, autant que possible, quand on se donne une limite comme ça, on essaie de la respecter tout en comprenant que, quand on a des invités... puis le caractère de la motion. Alors, M. le premier ministre, à vous.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Merci, M. le Président. C'est donc avec plaisir que je présente aujourd'hui cette motion à l'Assemblée afin de souligner le 75e anniversaire de la présence du Québec à New York. C'est notre plus ancienne représentation à l'étranger, M. le Président. On peut même remonter l'intervention du Québec bien avant sa fondation. J'apprenais, lors de mon séjour récent à Washington, que le Québec avait émis des obligations sur Wall Street en 1878. Donc, la présence québécoise, incluant dans le domaine financier, ne date pas d'hier.

Je tiens à mon tour à saluer chaleureusement les représentants de l'État de New York qui sont parmi nous aujourd'hui de même que les deux consuls généraux des États-Unis, respectivement à Québec et à Montréal.

J'en profite aussi pour souligner la présence de notre délégué général du Québec à New York, M. Jean-Claude Lauzon, dont on a pu certes apprécier l'énergie et l'ambition au cours des dernières heures, M. le Président.

Vous êtes nos invités aujourd'hui, mais vous êtes avant tout des partenaires et des amis du Québec. Je me fais l'écho des parlementaires pour vous remercier de travailler au quotidien avec nous au développement et au renforcement de nos liens. Votre présence aujourd'hui démontre l'importance et la qualité de notre relation avec l'État de New York et avec les États-Unis dans leur entier.

En 1940, l'ouverture du bureau de New York a représenté la première pierre d'assise de notre réseau à l'étranger. Depuis, notre réseau s'est enrichi de nouvelles représentations, est devenu un élément indispensable au déploiement de l'action internationale du Québec, qui s'exerce dans plusieurs secteurs, sur plusieurs continents, au moment même où nous ajoutons à notre réseau des représentations à Houston et Palo Alto.

Ainsi, des entrepreneurs, des scientifiques, des artistes de renom, des jeunes, des chercheurs reconnus mondialement, tous sont soutenus par les équipes des délégations qui, de par le monde, oeuvrent avec passion et dévouement à la promotion du Québec, de sa culture, de ses valeurs, de ses entreprises, de sa créativité et de sa diversité.

Première destination des exportations du Québec aux États-Unis, l'État de New York représente une plateforme incomparable et incontournable pour de nombreux Québécois et Québécoises qui souhaitent déployer leurs talents sur le marché américain de même qu'à l'échelle internationale. C'est dans cette logique que nous nous y rendons tous et toutes régulièrement pour les appuyer, pour promouvoir nos exportations, nos produits culturels, attirer les investisseurs, rencontrer les financiers de Wall Street, défendre nos politiques publiques en matière de lutte contre les changements climatiques, de soutien à la condition féminine et bien d'autres domaines encore, M. le Président.

Ce matin, j'ai pu assister à la signature d'une belle entente de collaboration entre trois acteurs clés du milieu économique du Québec et de l'État de New York, soit la Fédération des chambres de commerce du Québec, le Business Council of New York State et la North Country Chamber of Commerce. Cette entente permettra de bonifier et de faire grandir les relations d'affaires entre nos deux territoires et surtout de les étendre dans de nouvelles directions telles que les technologies vertes, l'économie numérique et d'autres encore, tout en veillant, M. le Président, à la fluidité et à la sécurité de nos frontières, et j'insiste toujours, et particulièrement aujourd'hui, sur la nécessité de faire progresser les dossiers de prédédouanement, autant à Québec qu'à Montréal, avec la collaboration du Congrès des États-Unis et de la Chambre des communes. La Délégation générale du Québec à New York appuiera les efforts déployés en ce sens, tout comme elle l'a fait au long de ses 75 ans d'activité.

Encore une fois, merci à ces belles équipes d'hier et d'aujourd'hui de montrer le chemin pour celles de demain alors que nous voudrons que cette collaboration se poursuive pour bien des années encore, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le premier ministre. Et, pour la poursuite des échanges sur cette motion, je cède maintenant la parole à M. le chef de l'opposition officielle. M. le chef de l'opposition officielle, à vous.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : Merci. Merci, M. le Président. Mme Betty Little, New York State Senator, Mme, M. les consuls généraux des États-Unis à Québec et à Montréal, M. le délégué général du Québec à New York, M. Lateef, président et chef de la direction du Foreign Policy Association, Mmes et MM. les représentants des milieux économiques et culturels du Québec et des États-Unis, c'est avec un très grand plaisir et beaucoup de fierté que nous soulignons, aujourd'hui, le 75e anniversaire de la Délégation générale du Québec à New York. Au nom de l'opposition officielle, je tiens à féliciter M. Jean-Claude Lauzon, délégué général du Québec à New York, et tous les membres de son équipe. Je tiens également à féliciter tous les anciens délégués et membres du personnel qui se sont succédé au fil de ces 75 dernières années et qui ont toutes et tous contribué au succès de la délégation.

Comme le rappelait M. Lauzon hier au CORIM, il y a 75 ans, le gouvernement du Québec devint l'un des premiers locataires du Rockefeller Center avec un loyer de 510 $ par mois, des débuts modestes centrés à l'époque sur la relation d'affaires entre un emprunteur et un prêteur. Mais, au fil du temps, la délégation du Québec a grandi, et son rôle a évolué au même rythme que l'amitié profonde qui unit Québécois et New-Yorkais.

Aujourd'hui, la Délégation générale du Québec à New York constitue la plus importante représentation du Québec à l'étranger, et son mandat s'étend à travers les huit États de la région du mid-Atlantic. La promotion économique demeure centrale, mais la délégation joue également un rôle clé dans le secteur de l'éducation en favorisant les échanges et les partenariats ainsi que la promotion de notre culture nationale. Si des milliers de New-Yorkais ont pu s'émerveiller devant le génie créatif de Robert Lepage, la virtuosité de l'Orchestre symphonique de Montréal ou les numéros à couper le souffle de Flip Fabrique ou des 7 doigts de la main, nous le devons au talent de ces artistes, bien sûr, mais aussi au travail des collaborateurs et des collaboratrices de la délégation. Acteur économique, agent culturel, partenaire du milieu de l'éducation, la Délégation générale du Québec à New York est tout cela, mais c'est surtout une grande fenêtre ouverte sur le Québec et sur une amitié entre Québécois, New-Yorkais et Américains qui ne cesse de grandir depuis les 75 dernières années.

Je souhaite un très joyeux anniversaire à la Délégation générale du Québec à New York et le meilleur des succès pour les 75 prochaines années. «Thank you. And long life for the friendship between Québec and New York!» Merci, M. le Président.

• (15 heures) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le chef de l'opposition officielle. Et, toujours sur cette même motion, je cède maintenant la parole à M. le chef du deuxième groupe de l'opposition. À vous.

M. François Legault

M. Legault : Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir, moi aussi, M. le Président, de célébrer le 75e anniversaire de la Délégation générale du Québec à New York. La délégation à New York, c'est la plus vieille délégation du Québec aux États-Unis. On sait l'importance des liens entre le Québec et les États-Unis, que ça soit aux niveaux culturel, éducation et, bien sûr, en affaires, c'est un partenariat qui est important.

Le Nord-Est américain, c'est probablement, sur toute la planète, le coin, là, où il y a le marché qui est le plus important au monde — en tout cas, pour le Québec — et donc c'est un réseau qu'il faut développer. Avec l'ALENA, on l'a développé. Il y a une opportunité qui se présente, et je veux le dire à Jean-Claude Lauzon : On a des grandes attentes au cours des prochains mois. Avec un dollar à 0,73 $, c'est le temps d'exporter des produits québécois aux États-Unis, donc on s'attend à une immense augmentation des exportations du Québec dans le Nord-Est américain au cours des prochains mois.

Donc, je voudrais bien sûr saluer Jean-Claude Lauzon, notre délégué général. Je voudrais saluer le consul général des États-Unis à Québec, celui à Montréal, la représentante aussi de l'État de New York, dont la sénatrice du 45e district. Votre présence ici montre qu'on a une belle amitié entre le Nord-Est américain, New York, et le Québec.

Évidemment, il y a eu des moments heureux là-bas, mais il y a aussi eu le 11 septembre 2001. On se souviendra tous qu'il y avait des activités qui étaient préparées par la délégation à cette époque-là, donc on a souffert avec vous durant ces attentats en 2001.

Donc, je voudrais, au nom de ma formation politique, vous saluer, tout le monde, puis vous dire : Joyeux anniversaire! Et on espère de pouvoir encore travailler davantage ensemble. Merci. Joyeux anniversaire!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le chef du deuxième groupe parlementaire. Et je cède la parole maintenant à Mme la députée de Gouin, toujours sur cette même motion. À vous, Mme la députée.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. À l'instar de mes collègues évidemment, je voudrais féliciter la Délégation générale du Québec à New York, reconnaître le 75e anniversaire, souhaiter la bienvenue à nos distingués invités.

Évidemment, oui, il faut rappeler le travail qui est fait par la Délégation générale du Québec à New York au plan commercial, au plan de la culture — mes collègues l'ont fait — de l'éducation, de l'entrepreneuriat. Mais je me permettrai, dans les quelques instants que j'ai, de rappeler que nous avons quand même, Québécois, Québécoises et Américains, Américaines, une histoire partagée. Qu'on le veuille ou non, c'est ça, la réalité. Puis il y a des moments importants dans cette histoire.

J'aimerais rappeler, par exemple, qu'à la fin du XIXe siècle, pas 10 000 ou 20 000, mais 1 million de Québécois sont partis travailler dans les États du Nord-Est américain, parce que, visiblement, à cette époque, le Québec n'arrivait pas à les faire vivre tous et toutes. Ils sont donc partis avec leurs familles, ce qui fait que, lorsque nous allons en vacances dans les États du Nord-Est américain, il n'est pas rare de trouver énormément de gens dont les noms sont à consonance française.

J'aimerais rappeler aussi les liens entre Montréal et New York, oui, qui sont, on l'a dit, de l'ordre de la culture, de l'éducation, du commerce, de l'entrepreneuriat, mais aussi que, par exemple, beaucoup de nos concitoyens d'origine haïtienne ont de la famille à New York et que les voyages sont fréquents. En fait, on est des voisins très proches géographiquement, mais je dirais que nous sommes aussi des voisins de coeur. On pourrait se parler longtemps du tourisme, nous, à Montréal, les Américains à Québec. Bon, tout le monde sait ça.

Je rajouterais aussi que beaucoup de débats sont les mêmes, des débats qui ont lieu ici même, au Québec, des débats qui ont lieu dans les États-Unis d'Amérique. Et là je pense à toutes sortes de projets de société. Disons que, ces temps-ci, il y a pas mal de discussions à la télévision; je pense à l'immigration, je pense à la lutte au racisme, je pense à l'environnement, je pense aux droits des peuples autochtones. Et j'ajouterais même que, pour plusieurs personnes ici, dans cette Chambre, une certaine déclaration d'indépendance des 13 États-Unis d'Amérique, le 4 juillet 1776, constitue quand même une source d'inspiration.

Alors, M. le Président, je veux tout simplement réaffirmer notre amitié, en tant que peuple québécois, avec le peuple américain, avec en particulier les États du nord-est dont nous sommes encore plus proches, et, encore une fois, remercier nos distingués invités pour tout le travail qu'ils accomplissent afin que nous soyons encore plus proches de peuple à peuple. Je vous remercie beaucoup.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, Mme la députée de Gouin. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, nous poursuivons toujours aux motions sans préavis. Et, s'il y a des gens qui doivent quitter, il faudrait le faire dans le silence pour qu'on puisse poursuivre. Et je reconnais un membre du groupe formant l'opposition officielle, et il s'agit du député de Terrebonne. M. le député de Terrebonne, à vous pour la présentation de votre motion.

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques et la députée d'Arthabaska, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement [du Québec] de s'opposer formellement au projet de transfert d'eau de Waukesha, qui prévoit puiser [près de] 40 millions de litres d'eau potable dans le bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent;

«Qu'elle rappelle au ministre de l'Environnement son devoir d'assurer la protection, la restauration, la mise en valeur et la gestion des ressources en eau, ainsi que les principes de transparence et de participation publique», M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Est-ce que, cette motion, on peut la débattre? Alors, on me dit qu'il n'y a pas consentement.

Un membre du deuxième groupe d'opposition, et je reconnais maintenant M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Allez pour la présentation de votre motion, M. le chef du deuxième groupe.

M. Legault : M. le Président, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec le chef de l'opposition officielle, le député de Mercier, la députée d'Arthabaska :

«Que l'Assemblée nationale rappelle le jugement rendu par cinq juges de la Cour d'appel du Québec le 3 novembre 2015 confirmant que les travaux d'entretien et de révision des avions d'Air Canada doivent être effectués à Montréal;

«Qu'elle exige du gouvernement du Québec de ne pas renoncer à ce recours judiciaire afin de préserver les 1 800 emplois de qualité ou d'obtenir des garanties équivalentes;

«Qu'elle exige du gouvernement fédéral qu'il maintienne dans son intégralité la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada.»

Le Vice-Président (M. Gendron) : Y a-t-il consentement de débattre de cette motion?

M. Sklavounos : ...affaire qui est devant les tribunaux, M. le Président, évidemment pas de consentement.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, j'ai compris qu'il n'y avait pas consentement. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques pour la présentation de sa motion, que je voudrais entendre. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, à vous.

Mme Massé : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la députée d'Arthabaska :

«Que l'Assemblée nationale rappelle au gouvernement du Québec l'urgence d'agir pour respecter ses engagements de protection de la biodiversité, tels que définis à Nagoya, ainsi que l'importance des aires protégées dans la lutte aux changements climatiques;

«Qu'elle rappelle l'objectif visant d'ici 2020 à ce que 20 % du territoire du Plan Nord soit constitué d'aires protégées, dont au moins 12 % en forêt boréale au nord du 49e parallèle; et

«Que l'Assemblée nationale prenne acte de la demande de la nation crie de Waswanipi de protéger l'intégralité de la forêt de la vallée de la Broadback et presse le gouvernement du Québec d'agir afin de soustraire cette grande forêt vierge aux activités industrielles.»

Le Vice-Président (M. Gendron) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Il y a présentement une consultation dans le dossier, il n'y a pas de consentement, M. le Président.

Des voix : ...

• (15 h 10) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Il n'y a pas de consentement. Alors, nous avons mis fin à la rubrique des motions sans préavis.

Je cède la parole à M. le leader adjoint pour les avis concernant les travaux des commissions. À vous.

Substituer le nom et le titre de M. Sébastien Proulx
à ceux de M. Pierre Moreau comme parrain
de certains projets de loi

M. Sklavounos : Juste avant, M. le Président, il y a une motion de substitution, si vous me permettez, M. le Président :

«Que le nom de M. Sébastien Proulx soit substitué à celui de M. Pierre Moreau à titre de parrain du projet de loi n° 72, Loi concernant la suspension des élections scolaires partielles, et du projet de loi n° 86, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance des commissions scolaires en vue de rapprocher l'école des lieux de décision et d'assurer la présence des parents au sein de l'instance décisionnelle de la commission scolaire, et que le titre de l'auteur de ces projets de loi soit remplacé par "ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport".»

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron) : Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement, pour la suite.

M. Sklavounos : Oui. Alors, je vais simplement déposer copie de la motion de substitution.

Oui, au niveau des avis touchant les commissions, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...

M. Sklavounos : ...j'avise cette Assemblée que la Commission des transports et de l'environnement poursuivra les consultations particulières et auditions publiques sur le document d'information sur le transport rémunéré des personnes par automobile aujourd'hui, après les affaires courantes, pour une durée de 2 h 15 min et de 19 h 30 à 21 h 00, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de l'aménagement et du territoire poursuivra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 83, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière municipale concernant notamment le financement politique, aujourd'hui, après les affaires courantes, pour une durée de 2 h 15 min et de 19 h 30 à 21 h 45, à la salle du Conseil législatif;

La Commission des relations avec les citoyens entreprendra, quant à elle, l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 77, Loi sur l'immigration au Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes, aujourd'hui, de 19 h 30 à 21 h 30, à la salle des Premiers-Ministres, 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May;

Finalement, la Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 74, Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 26 mars 2015, aujourd'hui, de 19 h 30 à 21 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : J'ai besoin d'un consentement de cette Chambre, parce qu'il y a une petite modification concernant les travaux. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour modifier l'horaire des travaux pour 15 minutes? On me dit que, oui, il y a consentement. Je ne vois pas de désaccord.

La présidence n'a pas d'avis.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes à la rubrique Renseignements sur les travaux. Alors, il n'y en a pas.

Là, je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Sanguinet. Cette motion se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale exige le dépôt des garanties contraignantes que le gouvernement du Québec a obtenues dans le dossier de la vente de RONA à Lowe's concernant le maintien des activités et des pouvoirs décisionnels du siège social, des commandes aux fournisseurs québécois, et des emplois dans les magasins au Québec;

«Que l'Assemblée nationale exige le dépôt des garanties contraignantes que le gouvernement du Québec a obtenues dans le dossier de l'investissement de 1 milliard de dollars américains dans la CSeries de Bombardier concernant le nombre d'emplois exigé au Québec ainsi que le maintien des fonctions décisionnelles et stratégiques au Québec, et de toute autre garantie que le gouvernement du Québec a obtenue;

«Que l'Assemblée nationale exige [également] le dépôt des garanties contraignantes que le gouvernement du Québec a obtenues dans le dossier de la lettre d'intention qu'Air Canada a signée avec Bombardier inc. pour l'acquisition de jusqu'à 75 appareils Cseries 300 de Bombardier concernant les travaux de révision et d'entretien lourds des cellules de ces appareils au Québec, par un fournisseur de services de maintenance reconnu, pour une période minimale de 20 ans à compter de la première livraison en 2019 dans la région de la communauté urbaine de Montréal.»

Affaires du jour

Les affaires courantes étant terminées, nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. Et je cède à nouveau la parole à M. le leader... Mme la leader adjointe du gouvernement pour les affaires du jour. À vous la parole.

Mme Vien : Des fois, ça change vite, hein, M. le Président?

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Vien : Il faut s'adapter rapidement. Alors, je vous prierais... Oui, je vous prierais d'appeler l'article 18, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...belle différence.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Vien : Vous faites ma journée, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ah! bien oui...

Mme Vien : Merci beaucoup. Article 18, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...c'est ce que je souhaitais, faire votre journée.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Vien : Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Allez... Vous l'avez fait.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, je n'ai pas écouté, j'ai été trop distrait par mon commentaire.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : J'ai été trop distrait par mon commentaire. Alors là, on va revenir au travail. Oui. Ah! là, ça va améliorer davantage.

Projet de loi n° 89

Adoption du principe

À l'article 18 du feuilleton d'aujourd'hui — soyons sérieux — Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 89, Loi visant à assurer une meilleure concordance entre les textes français et anglais du Code civil. Mme la ministre, à vous.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, je suis bien heureuse de pouvoir m'adresser à vous, M. le Président, concernant le projet de loi n° 89, la loi qui vise à assurer une meilleure concordance entre les textes français et anglais du Code civil, qui a été présenté à l'Assemblée nationale le 16 février dernier.

À quoi sert ce projet de loi? Qu'est-ce qui est derrière ce projet de loi? Et je crois, M. le Président, important de vous expliquer, de faire un retour en arrière et de vous expliquer l'objectif visé par le projet de loi et aussi tout l'historique derrière. Ce projet de loi, ce qu'il vise, c'est à modifier le texte anglais du Code civil du Québec pour en améliorer la concordance sur le fond du droit avec le texte français du Code civil du Québec. C'est un projet de loi qui répond à une demande qui est formulée et qui est constamment répétée par le Barreau du Québec, le Barreau de Montréal, qui souhaitent évidemment s'assurer d'une meilleure concordance entre les textes français et les versions anglaises des lois qui sont adoptées ici, à l'Assemblée nationale. Pourquoi? Pour assurer un meilleur rayonnement de notre droit mais aussi une plus grande stabilité de notre droit civil.

Le projet de loi n° 89 s'inscrit dans cette démarche et il démontre notre volonté d'en arriver rapidement à une amélioration de la qualité de certaines pièces maîtresses de la législation québécoise. Il y a un travail colossal qui a été mené par le ministère de la Justice du Québec en étroite collaboration avec le comité conjoint du Barreau du Québec et de la Chambre des notaires du Québec ainsi qu'avec les équipes de traducteurs de l'Assemblée nationale pour en arriver à la présentation du présent projet de loi.

Je vous parlais de l'historique tout à l'heure et je crois qu'il est opportun de faire un petit retour en arrière. Alors, vous vous rappellerez qu'en décembre 1991, oui, oui, 1991, le Code civil du Québec était adopté. Et, à cette époque, à cette époque déjà, on pouvait noter des discordances entre les textes français... entre le texte qui avait fait l'objet d'une étude détaillée en commission parlementaire et la version anglaise de notre Code civil. Donc, dès ce moment, il y a eu des modifications d'apportées au texte anglais. En 1992, la Loi sur l'application de la réforme du Code civil a modifié quelque 26 articles du code pour tenir compte de propositions qui étaient faites par les traducteurs de l'Assemblée nationale. Le ministère de la Justice a, dès l'automne 1993, entrepris des travaux en vue de répertorier l'ensemble des dispositions du code qui devaient être réajustées, notamment pour assurer une concordance juridique des textes français et anglais. Un certain nombre de correctifs ont été apportés au texte anglais du Code civil, notamment par le chapitre 19 des lois de 2002. Ces modifications visaient à corriger des discordances qui atteignaient l'efficacité normative du texte anglais. Fait important aussi, ces discordances avaient été notées par les Prs Jean-Maurice Brisson et Nicholas Kasirer dans leurs éditions critiques du Code civil.

• (15 h 20) •

Parallèment aux travaux menés par le ministère de la Justice, la communauté juridique anglophone, avocats, notaires, universitaires, à l'initiative et sous la coordination de Me Casper Bloom, se regroupaient dans un comité conjoint du Barreau du Québec et de la Chambre des notaires pour effectuer sa propre évaluation des correctifs qu'il convenait d'apporter au texte anglais du Code civil. Vous savez, le Code civil, c'est une pièce législative maîtresse de notre système de droit, il comporte 3 168 articles qui mettent les bases aux relations entre les personnes, les bases contractuelles qui vont toucher des enjeux de la vie de tous les jours. Au fil des ans, ce comité conjoint a transmis au ministère plusieurs rapports, lesquels contenaient des propositions de modification, et le dernier remontait en avril 2017, parce que, M. le Président, lorsque le texte anglais et le texte français diffèrent de façon importante, une interprétation différente peut en émaner et donc venir obstruer ou s'opposer à l'intention réelle du législateur, et donc tout ça pose un problème important et fragilise la stabilité de notre droit civil.

Donc, dès 2008, l'analyse des rapports du comité de Me Bloom a été entreprise par le ministère de la Justice. Le constat qui a été fait indiquait que les modifications proposées demeuraient essentiellement d'ordre technique. Alors, les travaux du ministère ont été envisagés dans la perspective que la plupart des modifications proposées pourraient être faites dans une mise à jour des textes du Code civil qui serait intégrée au Recueil des lois et des règlements du Québec. En application de cette loi, la mise à jour du recueil implique notamment le pouvoir d'apporter, si l'intention est par ailleurs manifeste, des corrections mineures au texte pour effectuer une concordance entre leur version anglaise et française.

Donc, dans cette optique, plus de 4 000 modifications dans 2 000 articles ont été revues. Le parachèvement des travaux de révision du texte anglais a été réalisé par deux juristes et un traducteur du ministère, soit Me Pierre Charbonneau, Me Lyne Martineau ainsi que par M. Donald Breen, un traducteur, avec l'étroite collaboration d'un juriste associé au comité conjoint Barreau notariat, Me Edmund Coates, et a été complété à l'automne 2012. Au terme de l'exercice, les modifications qui ne s'attachaient qu'à la forme des textes ont été intégrées dans les mises à jour du Recueil des lois et des règlements du Québec. Par contre, lorsque subsistait un doute, les légistes ont opté pour une modification intégrée au présent projet de loi afin de s'assurer d'une meilleure adéquation possible, et l'ensemble des modifications portant sur le fond du droit, qui visait à assurer une meilleure concordance du texte anglais avec le texte français, nécessitait une intervention législative.

Ce projet de loi, le projet de loi n° 89, s'inscrit donc dans une volonté que soit améliorée à brève échéance la qualité des textes anglais qui peuvent servir à interpréter la version française de nos lois. Un texte anglais erroné, comme je le mentionnais tout à l'heure, peut amener à mal interpréter la volonté du législateur et évidemment affectera la stabilité de notre droit. Je tiens à rappeler, M. le Président, qu'un comité verra également, en parallèle aux travaux que nous nous apprêtons à aborder, un comité verra à développer, de concert avec l'Assemblée nationale et le Secrétariat à la législation, des pistes d'amélioration ayant trait aux textes législatifs en anglais. L'apport du Barreau du Québec et de celui de Montréal sera sans doute très pertinent à cet exercice.

M. le Président, je tiens à remercier chaleureusement toutes les personnes qui ont mis leur expertise au service de ce travail rigoureux, qui ont participé aux échanges et aux consultations afin d'assurer la concordance entre les versions française et anglaise du Code civil, Me Casper Bloom, Me Edmund Coates, tous les membres qui ont participé aux travaux du comité conjoint du Barreau du Québec et de la Chambre des notaires du Québec, Me Lyne Martineau, Me Pierre Charbonneau et Donald Breen du ministère de la Justice.

Compte tenu de la qualité de la démarche réalisée et des consensus qui ont été obtenus à ce jour, évidemment, M. le Président, je ne peux faire autrement que de solliciter la collaboration de tous les parlementaires afin de permettre une étude de ce projet de loi qui se fera évidemment avec célérité et avec rigueur, comme toujours, pour le bénéfice de la communauté juridique et de nos concitoyens et concitoyennes appelés à se référer au texte anglais de notre Code civil. Donc, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, Mme la ministre de la Justice, de votre intervention sur le principe de ce projet de loi là et je cède la parole à la porte-parole de l'opposition officielle en ces matières, Mme la députée de Joliette. À vous la parole.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je suis heureuse à mon tour de prendre la parole sur le projet de loi n° 89, Loi visant à assurer une meilleure concordance entre les textes français et anglais du Code civil. Je pense que la ministre a très bien fait le tour des enjeux, et du sens, et des objectifs poursuivis par ce projet de loi qui, en fait, est de faire en sorte qu'il n'y ait pas de discordance ou, je dirais, de différences qui peuvent nuire à l'interprétation du texte du Code civil venant du fait d'erreurs, ou d'imprécisions, ou de la mauvaise utilisation de certains termes qui a pu se glisser dans la version anglaise du Code civil lors de la réforme sur laquelle, bien sûr, les élus de l'Assemblée nationale ont travaillé très fort à la fin des années 80, début des années 90 et qui a mené à l'entrée en vigueur du nouveau Code civil en 1994.

Juste pour vous donner une idée de l'ampleur que ces travaux-là ont pris et la durée dans le temps, lorsque j'étais attachée politique du ministre de la Justice Serge Ménard à la fin des années 90, un des premiers dossiers que j'ai eus dans mes premières semaines était une lettre de Me Casper Bloom, qui portait à mon attention les difficultés, donc, d'arrimage entre la version anglaise et française. Il avait déjà fait un certain examen. Alors, c'est juste pour vous dire à quel point il y a des gens qui sont tenaces et persévérants et à quel point il y a des membres, donc, de la communauté anglophone, notamment juridique, du Québec, qui se sont mobilisés pour améliorer la concordance entre les deux versions.

Alors, j'ai souri un peu quand j'ai vu que, finalement, en 2016, un projet de loi allait être déposé pour qu'on avance sur ce dossier-là et qu'on le règle. Et je pense que c'est une bonne chose parce que, vous savez, il ne faut pas attendre qu'il y ait des problèmes et des litiges importants où on pourrait invoquer la discordance entre les deux versions et créer, donc, une incertitude juridique pour agir. On est heureux quand même que les choses se soient faites assez bien au cours des dernières années, mais je pense que ça va être une avancée de pouvoir faire ces travaux-là.

Donc, vous aurez compris que nous sommes en accord avec le principe du projet de loi. Ceci dit, bien sûr, il y a eu tout un travail de moine qui s'est fait avec le comité, bon, Barreau, Chambre des notaires et les légistes du ministère de la Justice. Je comprends même qu'on a fait sortir un légiste qui était parti à la retraite, qui va venir épauler, donc, la ministre parce qu'il avait mis beaucoup, beaucoup de temps dans ces travaux-là, Me Pierre Charbonneau. Alors, c'est vous dire comment, je pense, que c'est une entreprise qui a été prise à coeur par les différents intervenants qui s'en sont préoccupés. Mais la meilleure chose, aussi, à faire ensuite, c'est que nous, comme législateurs, comme députés, nous, quand même, regardions ça attentivement parce que ce n'est pas tous les jours que l'on modifie le Code civil, surtout dans son essence, pour s'assurer que, bon, c'est les bons termes qui sont utilisés et que c'est les bonnes réalités de notre droit civil qui sont donc communiquées à travers ces termes-là.

On comprend que ce sont des changements de forme et non pas de fond, mais, justement, à travers ces changements de forme là, il faut s'assurer qu'on ne modifie pas le fond. Et je comprends qu'il y aura aussi, à travers l'exercice, certains changements, petits changements pour moins d'une dizaine d'articles, de ce que j'en comprends, à la version française parce qu'on s'est rendu compte qu'il pouvait s'être glissé des petites erreurs de forme en français. Alors, le travail, je pense, pourra être fait de manière exhaustive.

Alors, bien sûr, on offre toute notre collaboration à la ministre pour ce travail-là, que nous allons faire avec sérieux, avec assiduité, et pour que notre Code civil soit vraiment le plus juste et le plus adéquat, dans sa terminologie, possible. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci beaucoup, Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, de votre intervention.

Juste avant, M. le député de Borduas, c'est parce que j'ai oublié de vous indiquer, parce que je sais que vous attendez tous ça, là : Est-ce qu'il y aura un débat de fin de séance aujourd'hui? La réponse, c'est oui, le débat sur une question adressée par Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve au ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire concernant le financement du programme AccèsLogis. Et c'était le moment pour annoncer ce débat de fin de séance à la fin de notre séance des affaires du jour.

Je cède maintenant la parole à M. le député de Borduas pour son intervention, toujours sur le principe de ce projet de loi là. À vous, M. le député de Borduas.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur l'adoption du principe, M. le Président, du projet de loi n° 89, Loi visant à assurer une meilleure concordance entre les textes français et anglais du Code civil du Québec, M. le Président.

D'entrée de jeu, je vais vous dire que ma formation politique va appuyer le projet de loi au niveau du principe parce que, comme mes collègues l'ont mentionné tout à l'heure, en fait, le souci d'avoir une meilleure concordance entre les textes anglais et français, c'est une chose qui est recherchée parce que, vous le savez, M. le Président, nos lois sont adoptées dans les deux langues à l'Assemblée nationale, et c'est important que, lorsqu'un juge a à trancher un litige, qu'il doit évaluer l'interprétation, bien, que les deux versions soient sur la même longueur d'onde, si je peux dire, M. le Président, et ça va véritablement guider sur l'intention du législateur.

• (15 h 30) •

Et il faut dire, M. le Président, qu'au Québec c'est un peu une situation particulière en raison de notre caractère civiliste. On est la seule province canadienne à avoir un Code civil, la seule province à codifier ses rapports de droit privé entre les individus, entre les personnes morales dans un recueil. Donc, on s'inspire de la tradition française, M. le Président. Le seul autre État en Amérique du Nord à avoir un Code civil, c'est l'État de Louisiane, aux États-Unis, où on recense, dans le fond, la codification des lois dans le même esprit qu'on le voit au Québec, et je pense que ça démontre le caractère distinct du Québec, M. le Président, dans le cadre de notre législation.

Mais je pense que c'est important de faire le travail avec sérieux et de s'appliquer à le faire, parce que, vous savez, les dispositions du Code civil du Québec ne sont pas changées souvent, M. le Président. Le travail de la commission de réforme du Code civil du Québec s'est étalé sur environ 40 ans, donc, déjà à l'époque du premier ministre Duplessis, M. le Président, ça avait débuté, puis on a adopté le Code civil du Québec, le nouveau code, comme on dit, sous l'ancien ministre de la Justice, M. Rémillard. Donc, vous voyez qu'il y a eu beaucoup de travail qui a été fait.

Donc, je tiens à saluer le Barreau de Montréal, le Barreau du Québec ainsi que la Chambre des notaires, ainsi que les juristes au ministère de la Justice, qui ont travaillé. Parce que, vous savez, de revoir, dans le fond, certains éléments des textes de chacun des articles en anglais, donc sur la version de langue anglaise, ça demande un travail de moine. Puis, parfois, vous savez, le ministère de la Justice est parfois un parent pauvre de l'Administration gouvernementale, M. le Président. On le constate à plusieurs reprises, c'est un ministère sur lequel on doit attribuer des ressources, que ce soit au niveau des tribunaux, M. le Président, que ce soit au niveau du Directeur des poursuites criminelles et pénales ou que ce soit au niveau du ministère de la Justice. Une société qui évolue dans un État de droit, M. le Président, c'est important d'avoir un ministère de la Justice fort puis c'est important aussi d'avoir des ressources pour s'assurer que le droit des Québécois, dans lequel ils évoluent, dans l'environnement juridique dans lequel ils évoluent, bien, les règles, il y ait les moyens pour les appliquer.

Et vous me permettrez, M. le Président, et c'est d'actualité quand on parle d'un projet de loi comme le Code civil du Québec, de dire : Écoutez, on vient définir c'est quoi, un contrat, dans le Code civil du Québec, on vient définir... L'objectif du projet de loi, c'est, entre autres, de venir interpréter les versions anglaise et française pour qu'il y ait la même interprétation. Et on fait ça dans un souci de clarification. Puis, vous savez, le rôle du tribunal, le rôle du juge lorsqu'il est assis sur son siège et qu'il entend les partis, essentiellement, c'est de venir trancher un litige, et de venir donner une interprétation à la loi, et de venir statuer : Est-ce qu'une des parties a raison dans sa cause d'action ou c'est plutôt l'autre partie, ou comment je vais interpréter le litige qui m'est soumis?

Ça me fait penser, M. le Président, à la question du chef du deuxième groupe d'opposition aujourd'hui sur la question d'Aveos. Vous avez un jugement de la Cour d'appel, M. le Président, il y a un avis d'appel qui a été logé à la Cour suprême du Canada, et le Procureur général du Québec a accepté, avec l'appelant, Air Canada, de prolonger jusqu'au mois de juillet, M. le Président, l'avis d'appel. Ce qu'il faut dire, M. le Président, c'est que le droit était clair pour les citoyens, pour les employés d'Aveos. Il y avait un jugement unanime de la Cour d'appel, et le gouvernement a décidé de faire de la politique avec ça, M. le Président.

Donc, dans un souci...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui. Bien là, vous l'avez rappelé, je le rappelle, mais j'ai l'impression que notre collègue le savait aussi : il y a une fragilité, effectivement, il faut faire attention dans les propos quand un dossier est devant les tribunaux. Donc, il vous appartient de faire attention aux propos que vous utilisez pour éviter ce que vous savez. Alors, veuillez poursuivre en faisant attention.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, la pertinence, M. le Président... J'entendais le député de LaFontaine souligner la pertinence de l'intervention, vous savez, M. le Président, on en est justement... on vient clarifier le Code civil du Québec. Donc, lorsqu'on est en litige devant les tribunaux, c'est important de donner une interprétation claire à la loi. Donc, tout le monde le sait, ça n'a pas empêché, M. le Président, le gouvernement de venir intervenir directement dans un litige qui a cours devant la Cour suprême du Canada pour abandonner ces travailleurs-là.

Ceci étant dit, M. le Président, je reviens à la question du projet de loi n° 89. Ça va être important, M. le Président — et aussi dans un souci de maintien continu de la validité du Code civil du Québec au niveau des articles de langue anglaise — qu'on fasse l'exercice de s'assurer qu'il n'y a pas de discordance entre la version anglaise et la version française, M. le Président. Vous savez, c'est à la base de tout, le Code civil du Québec, dans les rapports de droit privé, surtout au niveau de l'exécution de jugement, M. le Président. C'est le Code civil du Québec, M. le Président, imaginez-vous, qui permet d'exécuter un jugement lorsqu'on obtient une décision, en collaboration avec le Code de procédure civile du Québec. Donc, on a notre base de droit sur le Code civil, et, par la suite, l'outil pour y arriver, c'est le Code de procédure civile. Donc, ça va ensemble. Et je pense que, dans l'exercice du respect de la loi, M. le Président, tous les citoyens doivent viser le respect de la loi et se basent sur notre droit pour faire valoir leurs droits. Donc, concrètement, M. le Président, je pense que, lorsqu'on est face à une situation juridique, il faut s'assurer de la respecter.

Donc, ma formation politique, M. le Président, va appuyer le principe du projet de loi n° 89. Et nous offrons notre collaboration à la ministre pour la suite des choses, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie. Et je reconnais M. le député de LaFontaine pour son intervention, toujours sur le principe du même projet de loi. C'est bien ça?

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup. Oui, tout à fait.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Allez, M. le député de LaFontaine. À vous la parole.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je serai bref, mais néanmoins je tenais à prendre la parole sur, justement, l'examen de principe ou l'analyse, l'étude de principe du projet de loi n° 89. Étant avocat moi-même, ayant eu à plaider devant différents tribunaux, je pense qu'il est important et il n'est pas anodin que de voir aujourd'hui, oui, après un long processus qui a débuté, comme l'a bien dit Mme la ministre, dès 1993, à venir apporter des corrections, des corrections dans la traduction notamment anglaise de certains termes utilisés au Code civil du Québec. Et ici, ça a déjà été souligné, on touche à un peu plus... ou à près de 370 articles du Code civil du Québec.

Important de savoir, M. le Président, et je pense qu'il faut le mentionner, que, par application de la Charte de la langue française, il y a au Québec une même valeur juridique accordée à un texte de loi français qu'à un texte de loi en anglais. Il s'agit donc d'une égalité d'autorité, et c'est l'article 7 de la Charte de la langue française qui nous l'enseigne.

Également, lorsque l'on cherche à découvrir... Parce que, lorsqu'il y a un débat, un procès devant une juge ou un juge, et qu'est plaidé le Code civil du Québec, lorsqu'il y a des termes qui ne semblent pas référer à la même réalité, un terme en français et un terme en anglais, nécessairement ça vient ajouter à la difficulté du justiciable, qui demande justice mais qui doit en plus essayer de réconcilier, selon l'interprétation normale et logique que l'on peut donner à l'intention du législateur, des versions et des traductions qui sont malheureuses. En ce sens-là, le débat juridique peut prendre beaucoup plus de temps, peut donc être beaucoup plus coûteux pour les parties, et c'est là où on peut voir un impact très tangible qu'aura ce projet de loi là de venir clarifier et simplifier ultimement, encore une fois, pour près de 370 articles du Code civil du Québec, des éléments qui vont aider les juges à dire qui, de bon droit, vient réclamer justice.

On a une loi d'interprétation, au Québec, qui, à son article 41.1 qui est intitulé Effet d'une loi... Et je le lis, M. le Président : «Les dispositions d'une loi s'interprètent les unes par les autres en donnant à chacune le sens qui résulte de l'ensemble et qui lui donne effet.» En ce sens-là, lorsque l'on cherche l'intention du législateur, il y a beaucoup — et je me suis fait sortir, M. le Président — de doctrine, beaucoup d'éléments. On parle ici, entre autres, de la deuxième édition du Précis d'interprétation législative. Et ça, là, c'est très tangible. Qu'a voulu dire le législateur? Et il y a différentes écoles de pensée. Je cite ici le Précis d'interprétation législative, par les auteurs Beaulac et Bérard, qui a été publié, deuxième édition, en 2014.

Et, M. le Président, pour les gens qui nous écoutent à la maison, lorsqu'il y a un débat juridique, quelle était l'intention du législateur, un texte en français, un texte en anglais, deux termes qui ne semblent pas référer à la même réalité, là le débat juridique s'enfonce ou s'avance, devrais-je dire — quoique le premier mot est une image, je pense, qui, dans certains cas, est juste — dans des théories d'interprétation qui peuvent être... Et il y a plusieurs écoles. Les méthodes formelles, imaginez, M. le Président, on ira... on aura recours à un argument de texte. Sinon, si ça ne fait pas, on aura un argument de contexte. Ça, c'est les méthodes formelles. Il y a les méthodes également informelles ou complémentaires, devrais-je dire, un argument historique ou un argument pragmatique.

• (15 h 40) •

Alors, M. le Président, le travail que l'on fait, nous, comme législateurs, lorsque nous sommes en commission parlementaire — par la suite, ça passe au salon bleu, comme vous le savez mieux que moi — bien c'est de traduire des réalités et de traduire ce que l'on veut, comme législateurs, comme étant une loi juste, traduire une solution à une réalité très tangible, et on utilise des mots. On doit, et c'est notre défi comme législateurs, les traduire en mots. Et nous avons un défi, et c'est une richesse, un défi additionnel de les traduire non seulement en français, mais en anglais également, traduire dans ces deux réalités, dans ces deux langues-là. Et forcément c'est un défi supplémentaire, mais encore une fois qui fait, et là j'y vais d'un commentaire un peu plus général, je dirais, M. le Président, le caractère assez exceptionnel des avocates et avocats au Québec, qui ont eu à apprendre le courant civiliste d'origine française et le courant de common law de la Grande-Bretagne. Et nous sommes donc imprégnés et baignés dans les deux courants juridiques. Et ça, ça fait une force et nous donne ce caractère tout à fait particulier et cette richesse.

Alors, M. le Président, on parle ici de termes français et anglais qui ne traduisent pas une même réalité, un même choix du législateur, appliqués au Code civil du Québec. Mon collègue l'a dit un peu plus tôt, le Code civil du Québec, on n'a qu'à lire le préambule du Code civil du Québec et on peut lire, M. le Président : «Le Code civil du Québec régit, en harmonie avec la Charte des droits et libertés de la personne [...] les principes généraux du droit, les personnes, les rapports entre les personnes, ainsi que les biens.» Alors, on a du droit de la famille, on a du droit des successions, le droit de la vente, les contrats de louage de même que la responsabilité civile qui peut être contractuelle ou extracontractuelle. C'est dans la vie de tous les jours. Si une loi précise de l'Assemblée nationale ne le précise pas, on va se rabattre au Code civil du Québec qui est le droit commun et qui va nous donner la solution.

Et, en ce sens-là, M. le Président, je pense que c'est un travail qui était... qui est à point, qui a bénéficié, oui, d'un long délai, mais qui nous permettra de mettre... d'harmoniser les deux versions des textes. Et je suis heureux de constater que les collègues des oppositions apporteront leur éclairage à nos débats. J'en suis très satisfait. Merci beaucoup, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je ne vois pas d'autre intervenant. Est-ce que le principe du projet de loi n° 89, Loi visant à assurer une meilleure concordance entre les textes français et anglais du Code civil, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vien : Oui, M. le Président. S'il vous plaît, appeler l'article 9.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Faites une motion de renvoi, madame. C'est pour ça que je vous donnais la parole, pour votre motion de renvoi.

Renvoi à la Commission des institutions

Mme Vien : Oui, oui. Alors, excusez-moi, M. le Président. Absolument. Alors, conformément à l'article 243 du règlement, je fais motion afin que ce projet de loi soit déféré à la Commission des institutions pour l'étude détaillée. Toutes mes excuses.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ah! il n'y a pas de problème. Est-ce que cette motion de renvoi est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté. Là, c'est le temps de nous indiquer ce que vous voulez faire pour la suite.

Mme Vien : Je serais bien enchantée d'entamer l'article 9. Merci.

Projet de loi n° 70

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Gendron) : Et là, à l'article 9, c'est M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale qui nous propose l'adoption du principe du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi. Je suis prêt à reconnaître les intervenants s'il y en a et je vois que M. le ministre veut intervenir. Je vous cède la parole.

M. François Blais

M. Blais : Merci, M. le Président. Je salue les collègues aussi d'en face qui ont participé aux commissions parlementaires, là, sur ce projet de loi. Donc, le 10 novembre dernier, mon collègue le président du Conseil du trésor, alors ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, a déposé le projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

Lors de consultations particulières, nous avons eu la chance d'échanger avec les représentantes et représentants de plusieurs organismes au sujet des éléments de ce projet de loi. Nos partenaires du marché du travail nous l'ont mentionné à plusieurs reprises, l'ensemble des parlementaires ici présents, tous partis confondus, le diront également, l'importance des phénomènes du vieillissement de la population et de la rareté de la main-d'oeuvre appelle à la nécessité d'agir. Des centaines de milliers d'emplois seront à pourvoir au Québec au cours des prochaines années. Quelque 50 % de ces emplois seront à combler par des jeunes qui sont actuellement sur les bancs d'école, quelque 15 % le seront par des personnes immigrantes.

La main-d'oeuvre actuelle et future doit être en mesure de pouvoir répondre aux besoins de recrutement des entreprises d'ici. Notre démographie ne doit en aucun cas constituer un frein aux projets de croissance de nos entreprises et au développement économique du Québec. C'est pourquoi nous avons décidé d'agir dès le début de notre mandat, dans un premier temps avec des mesures annoncées dans le cadre du budget 2015‑2016 puis avec le dépôt du projet de loi n° 70.

Le projet de loi n° 70 vise à favoriser une meilleure adéquation entre la formation et les compétences de la main-d'oeuvre et les besoins des entreprises. Le projet de loi ne constitue pas une réforme de l'aide sociale, il propose une série d'outils qui permettront d'agir afin de développer un meilleur arrimage entre les compétences de la main-d'oeuvre disponible et les emplois que les entreprises doivent combler et ainsi favoriser l'intégration en emploi du plus grand nombre de personnes possible.

Des modifications sont proposées à la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et sur la Commission des partenaires du marché du travail. D'autres concernent la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre, communément appelée la loi du 1 %. Fondées sur la contribution et la participation active des partenaires du marché du travail, elles visent à élargir le rôle et la portée de l'intervention de la CPMT en matière d'adéquation formation-emploi.

Les modifications proposées visent notamment : à renforcer le mandat de la CPMT à l'égard des politiques et orientations stratégiques en matière de main-d'oeuvre et d'emploi; de lui ajouter le mandat de définir les besoins en développement des compétences de la main-d'oeuvre future, en adéquation avec les besoins des entreprises et les perspectives du marché du travail, en plus de continuer de s'occuper du développement des compétences de la main-d'oeuvre actuelle; finalement, lui accorder le droit de demander aux ministères concernés une reddition de comptes notamment sur les recommandations qu'elle formule en vue de mieux répondre aux besoins du marché du travail en matière d'acquisition et de développement des compétences.

La portée de la loi sur le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre, ou la loi du 1 %, et le champ d'intervention de son fonds seraient ainsi élargis en faveur de la participation active des employeurs à la formation de la future main-d'oeuvre — j'insiste, de la future main-d'oeuvre — notamment par l'entremise de stages en milieu de travail, en plus de la formation des travailleurs en emploi qui sont actuellement visés par la loi.

Ces modifications visent à dresser un portrait juste de la situation du marché du travail et des besoins des employeurs. Elles permettront également de mettre en place des outils pour amener la CPMT, Emploi-Québec, le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur ainsi que le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion à agir de façon concertée pour identifier et mettre en oeuvre les solutions nécessaires pour accroître l'adéquation entre la formation et l'emploi dans le but de répondre aux défis du vieillissement et de la rareté grandissante de la main-d'oeuvre qualifiée.

La loi sur le développement et la reconnaissance des compétences et de la main-d'oeuvre serait également revue afin de s'assurer que les dépenses de formation déclarées par les entreprises répondent aux objectifs de la loi. La Commission des partenaires du marché du travail aurait aussi la capacité de prévoir une pondération à la hausse ou à la baisse du calcul des dépenses de formation admissibles pour certains types d'activités qu'elle détermine. Ainsi, le montant investi par un employeur dans certaines activités de formation comme les stages pourrait, par exemple, être comptabilisé à 125 % afin d'encourager les entreprises à proposer de telles activités structurantes.

Une modification législative est également prévue à la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles afin de permettre la création du programme Objectif emploi. Cette mesure a occupé une large place dans les échanges depuis le dépôt du projet de loi, occultant malheureusement son essence même. Chaque année, environ 17 000 adultes qui seraient en mesure d'entreprendre une démarche d'intégration en emploi déposent une première demande d'aide financière de dernier recours. Près de 60 % d'entre eux sont âgés de moins de 30 ans. Les données disponibles démontrent qu'une proportion importante, soit près de 40 % de ces jeunes adultes provient de familles ayant déjà reçu des prestations d'aide financière de dernier recours. En tant que société, nous devons soutenir ces personnes dans leurs démarches afin qu'elles puissent acquérir leur autonomie financière en intégrant le marché du travail.

Le programme Objectif emploi serait destiné aux personnes admissibles au Programme d'aide sociale qui déposent une première demande pour la première fois, qu'elles soient en mesure d'intégrer le marché du travail ou qu'elles aient besoin d'un accompagnement spécifique pour s'y rapprocher. Ce programme obligatoire vise à offrir un accompagnement intensif et personnalisé pour favoriser leurs démarches et leur intégration en emploi.

• (15 h 50) •

Nous conviendrons avec les participants d'un plan personnalisé d'intégration en emploi dans lequel leurs besoins, leurs objectifs qu'ils poursuivent seraient définis. Cette approche s'appuiera sur un bilan de leurs compétences face à l'emploi. De plus, les participants pourraient compter sur un accompagnement soutenu, personnalisé et axé sur leurs besoins. En effet, les personnes visées par le programme Objectif emploi bénéficieront d'une entrevue d'évaluation et d'aide à l'emploi. Cette rencontre constitue un moment privilégié pour dresser avec elles le bilan de leurs compétences, des forces, des ressources personnelles et sociales face à l'emploi, tout en tenant compte des obstacles qu'elles pourraient rencontrer en vue de leur insertion en emploi.

Par la suite, selon la situation de la personne, trois types de démarches pourraient être entreprises dans le cadre du plan d'intégration en emploi : la recherche active d'emploi, le développement des compétences et le développement des habiletés sociales. En plus d'une prestation de base équivalente à celle accordée au programme d'aide sociale, une aide financière additionnelle serait accordée en fonction de la démarche entreprise par le participant afin d'améliorer ses chances d'intégration à l'emploi.

Je vous rappelle que l'objectif n'est pas de forcer les gens à quitter leur lieu de résidence ou encore à déménager, l'objectif est d'amener les gens à développer un projet et entreprendre une démarche menant à l'élaboration de leurs conditions de vie par le travail, ce qui passe, dans beaucoup de cas, par le développement des compétences.

J'ai pris note des préoccupations à l'égard de modalités qui seront définies par règlement. Je tiens à rappeler que cette procédure permet également à toute personne ou toute organisation de se prononcer sur ces modalités lors de la prépublication dans la Gazette officielle.

En somme, je suis convaincu que l'ensemble des parlementaires ici présents sont d'accord sur l'importance de permettre une meilleure adéquation entre la formation de la main-d'oeuvre et les emplois disponibles, et de favoriser l'intégration en emploi d'un plus grand nombre de personnes.

L'adéquation formation-emploi, c'est miser sur le capital humain, c'est d'avoir les compétences pour occuper les emplois disponibles. Notre main-d'oeuvre future doit être adéquatement préparée à entrer sur le marché du travail. Nos travailleurs doivent être en mesure de développer leurs compétences de façon continue afin de suivre l'évolution des différents secteurs d'activité.

Nous devons éviter que les nouveaux demandeurs d'aide sociale sans contraintes s'y retrouvent, en leur offrant un accompagnement personnalisé leur permettant d'intégrer le marché du travail. C'est pourquoi j'invite mes collègues députés à appuyer ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le ministre. Je suis prêt à entendre le prochain intervenant, et je reconnais M. le porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. Alors, M. le député de Saint-Jean, à vous la parole pour votre intervention sur le principe de ce projet de loi là. À vous.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Nous sommes à l'étape de l'adoption de principe du projet de loi. J'aurai quelques interventions à faire de différents ordres. Le projet de loi, tout d'abord, concerne plusieurs aspects, plusieurs lois, hein, on le mentionnera.

J'aimerais aussi revenir sur certains commentaires de groupes que nous avons entendus en commission parlementaire lors de la consultation particulière que... Je rappelle, M. le Président, nous aurions aimé avoir des consultations générales sur cette question étant donné l'ampleur du projet de loi et des conséquences que ce projet de loi aura ou pourrait avoir sur un grand nombre de personnes et sur un grand nombre d'organisations et d'organismes. J'aurai le plaisir de... l'occasion d'y revenir.

J'aimerais aussi rappeler certains propos dans les mémoires de certains groupes qui, malheureusement, n'ont pu être entendus en commission parlementaire. Et j'aimerais tracer un portrait par la suite, M. le Président, de notes, ou de commentaires, ou de réflexions que j'ai eus ou que d'autres groupes ont eus lors des consultations particulières du projet de loi, mais aussi dans les médias, et autres. Nous avons eu l'occasion de débattre déjà de ce projet de loi là et de ce débat.

Donc, dans un... tout d'abord, peut-être, se mettre un peu à niveau, hein, expliquer les notes du projet de loi, qu'est-ce que le projet de loi n° 70 vise. Dans sa première partie... Je vous l'ai mentionné, hein, deux parties significatives. Donc, dans la première partie, le projet de loi modifie principalement la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre et la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et sur la Commission des partenaires du marché du travail.

En ce qui a trait à la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre, le projet de loi modifie notamment l'objet de cette loi et celui du Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre afin d'y préciser que le terme «main-d'oeuvre» vise tant la main-d'oeuvre actuelle que future.

En ce qui concerne la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et sur la Commission des partenaires du marché du travail, le projet de loi précise les rôles et les fonctions respectifs du ministre et la commission. Ainsi, il confie au ministre la fonction de préparer un plan d'action annuel et celle d'approuver les plans d'action régionaux en matière de main-d'oeuvre et d'emploi. Depuis, il prévoit que la mission de la commission consistant à définir les besoins en développement de la main-d'oeuvre s'appliquera aussi à la main-d'oeuvre future. Il confie également à la commission la fonction de formuler des recommandations aux ministères qui sont représentés en vue de répondre aux besoins du marché du travail.

Enfin, le projet de loi propose l'abrogation du chapitre III de cette loi, dont les dispositions créent une unité administrative autonome au sein du ministère, identifiée sous le nom d'Emploi-Québec. Dans sa deuxième partie, le projet de loi modifie la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles afin principalement d'instaurer le programme Objectif emploi, lequel vise à offrir aux personnes qui y participent un accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en emploi. Le projet de loi propose, par ailleurs, de mettre fin au programme Alternative jeunesse.

Le projet de loi apporte d'autres modifications à la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, notamment en permettant au gouvernement de prévoir des règles assouplies, applicables aux prestataires du programme de solidarité sociale, en ce qui concerne les avoirs liquides ainsi que les revenus tirés d'actifs reçus par succession. Le projet de loi habilite le gouvernement à prendre les mesures réglementaires nécessaires à l'application du programme Objectif emploi et contient des dispositions de concordance transitoires et finales.

M. le Président, ceci est les notes explicatives du projet de loi. Donc, on parle d'éléments assez diversifiés, comme je l'ai mentionné, mais, plus concrètement, selon notre analyse, hein, selon ce que nous avons entendu, ce que j'ai entendu en consultations particulières et aussi un certain nombre d'autres de mes collègues... D'ailleurs, je m'excuse, M. le Président, de ne pas avoir salué le ministre, effectivement, qui n'a pas déposé le projet de loi, mais qui a pris le relais, hein, si on peut dire, ainsi que nos collègues parlementaires de toutes les formations politiques qui ont participé aux consultations particulières.

Donc, selon notre analyse, le premier volet du projet de loi concerne davantage Emploi-Québec et la Commission des partenaires du marché du travail. Donc, dans cette partie-là, le projet de loi modifie principalement la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre et la Loi sur le ministère d'Emploi et Solidarité sociale sur la Commission des partenaires du marché du travail. Emploi-Québec est aboli. Donc, on pourra poser des questions, savoir exactement pourquoi l'abolition d'Emploi-Québec proprement dit, parce que vous savez, M. le Président, à l'époque, lors d'un autre gouvernement, il y avait eu des discussions, des négociations avec le gouvernement fédéral pour rapatrier une partie de la juridiction de l'emploi du gouvernement fédéral.

Donc, à l'époque, le gouvernement du Québec s'était entendu avec le gouvernement fédéral pour rapatrier ce champ de compétences là au Québec, au gouvernement du Québec, et ce qui a fait en sorte que nous avons créé, à cette époque, Emploi-Québec. Nous avons, à l'époque, décidé qu'Emploi-Québec devait être autonome du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Il y a des raisons à ça. Il y a aussi des raisons, sûrement, financières, administratives parce qu'une partie de cet argent-là vient du gouvernement fédéral dans les transferts. Donc, il y aura plusieurs questions, et nous espérons avoir des réponses, des éclaircissements de la part du ministre sur ses intentions à ce sujet, parce que force est de constater que, lors des consultations particulières, certains groupes ou organisations étaient un peu surpris de ça, mais la plupart de ces groupes-là n'avaient pas assez d'information ou d'éléments pour clairement mentionner : Bon, bien, c'est pour telle raison, donc nous sommes d'accord. Donc, un certain nombre de groupes pouvaient amener des questions à apporter sur l'abolition, si on peut dire, ou, du moins, la fin de l'autonomie d'Emploi-Québec et l'intégration d'Emploi-Québec au sein du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, maintenant Travail, Emploi, Solidarité sociale.

• (16 heures) •

Donc, ces responsabilités, comme je le mentionnais, sont rapatriées au sein du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, notamment quant à la mise en oeuvre de ces programmes et des mesures touchant la main-d'oeuvre. Cependant, la notion de prestation de services publics d'emploi, qui apparaissait dans l'énoncé de mission d'Emploi-Québec, donc à l'article 30 de la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, n'est pas reconduite dans le projet de loi. Ce que ça veut dire concrètement, prestation de services publics d'emploi... si ce n'est pas mentionné, est-ce que c'est parce que ça va de soi? Par expérience, M. le Président, les «ça va de soi», en termes de lois, ce n'est pas nécessairement un bon conseil. Donc, nous poserons des questions à ce sujet, et puis, d'ailleurs, je lance déjà quelques pistes de réflexion pour que le ministre, lors de l'étude détaillée, puisse déjà avoir en main quelques réponses ou quelques éléments de réponse à nos futures questions que nous aurons l'occasion de débattre.

Les modifications apportées à la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et sur la Commission des partenaires du marché du travail portent principalement sur le retrait de responsabilités à la commission et l'abolition d'Emploi-Québec, comme je l'ai mentionné précédemment, comme organisme autonome et emblématique du modèle québécois. Ce modèle s'appuyait sur la participation originale des acteurs de la société civile dans le développement et la mise en oeuvre des politiques et des services publics d'emploi.

Donc, d'un côté, Emploi-Québec perd en autonomie parce qu'il est intégré au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Pourquoi? D'un autre côté, la Commission des partenaires du marché du travail a une certaine réorganisation dans son travail, dans sa fonction, je pourrais aussi mentionner dans la composition, hein, de la commission, parce qu'elle est modifiée. Les membres, auparavant recommandés par les associations patronales et syndicales, six chacun, seront dorénavant nommés par le ministre après consultation des associations. On s'entend, une association, tant le côté patronal qu'association syndicale, qui nomme six personnes, ce n'est pas la même chose que d'envoyer sa liste au ministre et que le ministre décide qui sera dans cette liste-là, officielle, finalement. Donc, au fond, on peut se questionner. D'ailleurs, les groupes ont posé des questions à ce sujet. Nous aurons l'occasion d'y revenir.

Les membres issus des milieux communautaires et éducatifs perdent de leur importance dans les comités régionaux. On le voit, hein, il y a comme une tendance généralisée de la part du gouvernement actuel que, quand on parle de comités régionaux ou d'organisme régional, il y a comme un certain malaise. Donc, on se questionne et puis, malheureusement, on voit souvent que ces organismes-là sont abolis, hein, ou sont disparus. On l'a vu avec les conférences régionales des élus. On l'a vu avec les centres locaux de développement. On a failli le voir avec les carrefours jeunesse-emploi. On peut se poser plusieurs questions sur différents organismes régionaux, sur la pertinence. Nous considérons qu'ils sont importants. Et la conséquence d'autres décisions du gouvernement, comme l'abolition des directions régionales du ministère de l'Éducation et du ministère de l'Immigration, donc du MIDI, bien, ça fait en sorte que les deux représentants aux comités régionaux de ces deux ministères-là n'auront plus de siège parce qu'il n'y en a plus, de direction régionale.

Plusieurs organismes sont revenus à la charge à ce sujet pour proposer des solutions alternatives, entre autres, la Fédération des cégeps a mentionné de dire : Bien, nous, on pourrait avoir un représentant des cégeps aux comités régionaux, donc on pourrait faire en sorte d'avoir la voix de l'éducation. Je suis certain que la Fédération des commissions scolaires pourrait le mentionner, on le voit, le projet de loi n° 86, aussi en parallèle, que le ministre actuel de l'Emploi et de la Solidarité a déposé lorsqu'il était ministre de l'Éducation.

Donc, la question se pose pour l'éducation, la question se pose aussi pour le ministère de l'Immigration, parce qu'on s'entend, le projet de loi, M. le Président, c'est la loi visant une meilleure adéquation entre la formation ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi. Donc, pour nous, nous considérons qu'il est important qu'à la même table des gens qui oeuvrent au premier rang en éducation et pour l'immigration, quand on sait qu'il y a un enjeu significatif, un enjeu important d'intégration pour les Québécois issus de l'immigration, donc que les deux représentants de ces ministères-là... le fait de ne plus être au comité régional de la Commission des partenaires du marché du travail pose beaucoup de questions. On a eu la réponse : Parce qu'il n'y a plus de direction régionale. Mais moi, je crois, et nous croyons que, bien, il y a quand même d'autres personnes dans ces ministères-là ou sinon il y a des organismes ou des gens qui sont prêts à prendre le relais pour représenter le secteur de l'éducation et les Québécois issus de l'immigration.

La Commission des partenaires du marché du travail se voit dépouillée de plusieurs pouvoirs au profit du ministre, notamment celui de participer à la prise de décision quant à la mise en oeuvre et la gestion des mesures et programmes et celui de déterminer les critères de répartition des ressources. Avant, c'était la commission qui décidait de son plan d'action, de ses programmes et comment elle allait allouer ses ressources. Maintenant, c'est le ministre qui va le faire, sous, si on peut dire, recommandation ou forte suggestion de la Commission des partenaires du marché du travail, mais, M. le Président, vous conviendrez avec moi, avec l'expérience parlementaire que vous avez, que ce n'est encore pas la même chose, entre un organisme qui est autonome, qui fait son propre plan et alloue ses propres ressources, versus une proposition qu'on envoie au ministère et que le ministre, par la suite, décide.

En ce qui a trait à la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre, le projet de loi modifie notamment l'objet de cette loi et celui du Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre afin d'y préciser que le terme «main-d'oeuvre» vise tant la main-d'oeuvre actuelle que future. C'est un simple article, hein, dans le projet de loi c'est tout petit, mais ça amène toute une réflexion.

Pour réfléchir à ça, M. le Président, j'aimerais ça vous rappeler que, dans un autre projet de loi du gouvernement actuel, lors du dernier budget, de la présentation du budget, il y a une intention claire du gouvernement de faire en sorte que la contribution à ce qu'on appelle le 1 %, hein, le fonds du 1 %, c'est la Commission des partenaires du marché du travail qui a cette responsabilité-là. Donc, toute entreprise qui a une masse salariale de 1 million de dollars et plus doit cotiser ou fournir 1 % de cette masse salariale là, de ce montant de masse salariale là pour de la formation. Soit qu'elle organise elle-même cette formation-là dans son entreprise, dans son organisation, ou qu'elle envoie cette cotisation-là directement à la Commission des partenaires du marché du travail, et par la suite la Commission des partenaires du marché du travail organise des formations, organise des plans pour, bon, s'assurer que notre main-d'oeuvre puisse avoir les compétences suffisantes pour se maintenir en emploi et se trouver, bon, de meilleurs emplois — on résume. En ce moment, c'est comme ça que ça fonctionne. Dans l'intention du gouvernement, selon l'intention du gouvernement, le gouvernement veut passer de 1 million à 2 millions de masse salariale. Donc, ça a un impact sur l'ampleur du fonds national qui pourra être réinvesti en termes de formation.

• (16 h 10) •

Et à ça on ajoute, dans le projet de loi n° 70, que, là, maintenant, ce ne sera plus que la main-d'oeuvre actuelle qui pourra être éligible, disons ça, aux programmes de formation, mais bien la main-d'oeuvre future. Main-d'oeuvre future, c'est assez large. Plusieurs groupes sont intervenus. Le précédent ministre et le ministre actuel ont amené certains éclaircissements, hein, certains éclaircissements, lors des consultations particulières, mais on aura un certain travail à faire sur cette question-là. Notamment, la Fédération des cégeps a amené, là, un certain nombre d'analyses, hein, sur cette question-là, parce qu'on pourrait dire : Est-ce que ça voudrait dire... Dans la volonté, aussi, on sait que le gouvernement actuel veut implanter davantage ce qu'on appelle le modèle dual ou le modèle allemand en formation professionnelle. Bon, le modèle dual, le modèle allemand, pour tous les jeunes ou les moins jeunes qui sont en formation professionnelle et qui souhaitent s'inscrire dans ce parcours-là, bien ils sont, en quelque sorte, rémunérés, hein, pour leurs stages, ça fait partie du modèle. En ce moment, on peut se questionner. Je ne crois pas que toutes les entreprises du Québec sont prêtes à rémunérer tous les stagiaires ou tous les gens qui participeront à ce genre de formation là en entreprise. Donc, est-ce que le fonds de la Commission des partenaires du marché du travail pourrait servir à rémunérer ces stages? La question se pose, on aura des réponses, mais je vous rappelle, M. le Président, qu'on ajoute pas mal de monde dans un fonds qu'on a diminué ou qu'on veut diminuer en passant d'une masse salariale de 1 million à 2 millions.

On sait pourtant que la formation, M. le Président, est essentielle, est importante, tout au long de sa vie. Comme parlementaires, comme députés, on le voit, c'est toujours important de se renouveler. Les règles changent, la façon de faire. À une certaine époque, quand vous avez commencé, les médias sociaux n'existaient pas, même les ordinateurs, hein? Vous étiez sur la dactylo, bon. Maintenant, c'est une autre époque. Faire de la politique, c'est différent. Avec les médias sociaux, ça change complètement l'horaire, les chaînes d'information continue, etc.

La même chose sur le marché du travail, en usine ou en entreprise. Comment pouvons-nous assurer qu'un certain nombre de nos travailleurs qui, bon, sont de plus en plus âgés et arrive un moment où l'entreprise ferme, l'entreprise se délocalise, ouvre un nouveau marché à l'extérieur et déménage leur plan de l'usine dans un autre pays ou dans une autre région, ça fait en sorte que ça met des centaines, des milliers de personnes à la rue, sans emploi, d'un certain âge, avec peut-être pas toute la formation de pointe. Et, quand on sait qu'un certain nombre de notre population a des difficultés de lecture et d'écriture, et, bon, c'est sûr que, quand ça fait 20, 30 ans, 15 ans, 10 ans, peu importe, qu'on est sur la même tâche, qu'on a la même responsabilité, bien, on n'a peut-être pas autant évolué dans d'autres milieux, donc l'adaptation à se trouver un nouvel emploi est plus difficile.

Donc, en termes de formation, nous croyons qu'il est important d'avoir une véritable politique ou une stratégie de formation à long terme et de formation continue pour faire en sorte que nos gens qui sont en entreprise maintenant puissent avoir une formation pendant qu'ils sont en entreprise, pour faire en sorte qu'ils puissent être plus efficaces, plus productifs, donc une meilleure rentabilité pour l'entreprise dans un premier temps, aussi une meilleure valorisation, hein, comme individu, comme travailleur, parce que travailler, ce n'est pas juste de travailler puis de faire une tâche x, c'est aussi de se développer, comme citoyen, dans notre société. Donc, d'avoir l'occasion de recevoir une formation, ça peut nous ouvrir des horizons plus larges et aussi faire en sorte que cette personne puisse évoluer dans l'entreprise ou dans l'organisation, faire en sorte, au fond, que nos travailleurs d'aujourd'hui qui occupent un emploi puissent avoir un emploi supérieur, meilleurs revenus, meilleure qualité de vie, meilleure offre pour leur milieu familial, mais aussi faire en sorte que ces emplois-là libérés, parce qu'en passant d'un emploi inférieur à un emploi supérieur... Puis je n'aime pas ça dire ça comme ça parce que, dans les faits, tous les emplois sont importants, M. le Président. Mais, bon, en termes de tâche, de responsabilité, de salaire, bon, la vie fait en sorte qu'effectivement, bon, il y a différents niveaux de salaire et différentes tâches dans le marché du travail. Donc, en libérant des emplois inférieurs, disons ça comme ça, bien, ça fait en sorte que, pour les jeunes qui arrivent ou des gens qui sont peut-être plus éloignés du marché du travail, ils peuvent arriver dans une entreprise et s'adapter à leur nouveau milieu de travail et, eux aussi, par la suite, évoluer dans l'entreprise. Mais, pour faire ça, M. le Président, ça prend une formation, et la Commission des partenaires du marché du travail a cette responsabilité-là.

On a eu la discussion, pas assez longtemps à ma satisfaction parce que nous étions aux consultations particulières, nous n'étions pas encore rendus à l'étude détaillée, mais nous avons eu un peu, à mots couverts, la discussion avec le ministre sur le thème justement du programme Objectif emploi, hein, parce que la volonté du gouvernement, du ministre et du précédent ministre, c'était, bon, de prendre des gens qui sont à l'aide sociale, peut-être, bon, surtout les nouveaux demandeurs, hein, c'est de ça qu'on parle, des primo demandeurs, donc quelqu'un qui fait sa première demande à l'aide sociale, on l'embarque dans un parcours d'employabilité — on résume, là — et ça fait en sorte que cette personne-là, bon, bien, va se trouver un emploi ou embarquer dans un parcours de formation, etc.

Le terme a été choisi «programme Objectif emploi», bon. Certains groupes... puis, moi, je me questionne, on aurait peut-être dû mentionner «Objectif formation emploi» ou «programme Objectif emploi formation», peu importe. Pourquoi? Pour rappeler tout d'abord au gouvernement actuel l'importance de la formation et de l'éducation et d'investir et de réinvestir dans l'éducation au Québec, dans un premier temps. Peut-être que, si le programme du gouvernement s'appelle «Objectif emploi formation» ou «Formation emploi», peu importe, il y a un signal qui est lancé de la part du gouvernement que, oui, il y aura un investissement dans la formation puis dans l'éducation au Québec dans un premier temps, mais aussi pour lancer le message à la population, aux entreprises, aux organisations, à l'ensemble du Québec, finalement, qu'on prend la question de la formation et de l'éducation à bras-le-corps et que c'est un enjeu important et significatif pour notre prospérité économique, et notre développement régional, et le développement de nos entreprises. Et, pour y arriver, on a besoin, oui, de s'assurer que les personnes qui sont en ce moment à l'aide sociale puissent être accompagnées pour finir leur diplôme d'études secondaires V, avoir un D.E.P., pouvoir aller au cégep, s'ils le désirent, par la suite, poursuivre parce que, des fois, bon, à certains moments de leur vie, bon, arrive un certain point, et, au-delà de ça, de pouvoir poursuivre dans le marché du travail, avoir de la formation continue, formation en entreprise et, bon, comme je l'ai dit, monter dans les échelons. Donc, nous aurons cette discussion-là, lors de l'étude détaillée, pour ce qui est du nom du programme. C'était une petite parenthèse, mais qui découle du fait qu'on ajoute la formation de la main-d'oeuvre future.

Au sujet de la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre, il est important de noter que le gouvernement a annoncé dans son discours du budget... bon, bien, je viens de le mentionner, là, tout ça, je l'ai dit. Les dispositions entourant les modifications à la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre se retrouvent dans le projet de loi n° 74, c'est le projet de loi que je vous mentionnais tantôt, et qui passe de 1 million à 2 millions.

Concertant le programme Objectif emploi, M. le Président, dans sa deuxième partie, le projet de loi modifie la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles afin principalement d'instaurer le programme Objectif emploi, lequel vise à offrir aux personnes qui y participent un accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en emploi. Le programme Alternative jeunesse est officiellement aboli, son abolition a déjà été annoncée en octobre 2014, et le programme Objectif emploi est créé. Dans sa formule actuelle, le projet de loi stipule, à l'article 28, que le programme Objectif emploi est obligatoire pour les nouvelles personnes demandeuses. Le ministre établit un plan d'intégration en emploi d'une durée minimale de 12 mois, qui peut comprendre des mesures de formation, de recherche intensive d'emploi ou de toute autre démarche adaptée à sa situation.

Là, dans ce cas-là, M. le Président, ça a posé beaucoup d'interventions, puis je crois que le coeur du projet de loi est là, là, on est pas mal dans ça, là, hein? L'article 28, ce que ça veut dire, c'est qu'un nouveau demandeur, un primo demandeur, hein, comme il a été dit, qui nécessite l'aide sociale devra obligatoirement participer à un plan d'intégration en emploi et, de ce plan d'intégration en emploi, là, recherche d'un emploi intensif, si besoin est, formation, si besoin est, démarche d'accompagnement avec des organismes d'employabilité, que ce soient les carrefours jeunesse-emploi ou autres organismes, mais c'est une démarche obligatoire.

• (16 h 20) •

Donc, M. le Président, puis on pourra en faire la littérature un peu plus tard, un grand nombre de groupes et d'organismes qui sont venus en commission parlementaire se sont opposés à cette obligation-là, et nous pourrons y revenir plus tard, mais les principaux arguments, c'est concernant... Bon, est-ce qu'une mesure imposée est aussi efficace qu'une mesure qui est suggérée ou qui est recommandée? La question se pose. Est-ce qu'une mesure obligatoire peut amener des retombées aussi efficaces et faire en sorte que les gens ne soient pas pénalisés? Parce qu'on s'entend, là, une personne qui arrive à l'aide sociale, ce n'est pas par choix, là. Très peu de personnes au Québec ont comme objectif d'être à l'aide sociale, puis c'est leur fierté de leur vie d'être à l'aide sociale puis d'être acceptées à l'aide sociale. On s'entend, M. le Président, là, surtout à 623 $ par mois, hein, 623 $ par mois à l'aide sociale, c'est 45 % du seuil de faibles revenus selon l'indice des prix à la consommation, donc même pas la moitié du seuil de faibles revenus. Avec 623 $ par mois, quand on a payé notre loyer, il ne reste plus grand-chose pour la nourriture, il ne reste plus grand-chose pour les vêtements, il ne reste pas grand-chose pour des besoins quotidiens qui peuvent arriver, le réfrigérateur qui brise, les intérêts sur la carte de crédit, peu importe, là, bon, même si à l'aide sociale, la carte de crédit, tu n'en as pas, mais, tu sais, sachant qu'on ne peut pas avoir une grande somme dans notre compte bancaire, les imprévus sont vite mis sur la dette. Donc, avec 623 $ par mois à l'aide sociale actuellement, je ne crois pas qu'il y a un grand nombre de citoyens qui disent : Bien, moi, là, mon objectif de vie, c'est d'être à l'aide sociale et d'y rester.

Donc, la question de l'obligation pose problème parce que, si la personne arrive au moment où elle doit être à l'aide sociale, c'est peut-être parce qu'elle a d'autres problèmes, des problématiques de dépendance, toxicomanie, bon, alcoolisme, etc., des problèmes familiaux, des problèmes personnels, des problèmes, justement, on l'a mentionné tantôt, de formation, hein? Une personne qui a de la difficulté à lire et à écrire, bon, ça peut être difficile de se trouver un emploi, effectivement. Et malheureusement, bien, on a un certain nombre de Québécois qui, oui, ont un diplôme d'études secondaires, études collégiales, études universitaires, mais qui ne sont pas capables de se trouver un emploi pour différentes raisons, diverses raisons, et ça fait en sorte que ces gens-là puissent avoir besoin d'une aide ponctuelle à un moment donné de leur vie. Donc, l'obligation pose problème pour plusieurs personnes. Nous y reviendrons plus tard.

Les personnes participantes recevront une bonification à leurs prestations. Le montant sera établi par règlement. Le ministre, j'ai cru comprendre par son propos qu'il allait effectivement nous expliquer, nous dévoiler certains éléments du règlement. Il nous a aussi mentionné effectivement tout le mécanisme ou la façon de faire pour modifier un règlement ou présenter un règlement. Effectivement, il y a une publication du règlement, les gens peuvent donner leurs idées, bon, consulter, puis tout ça. Ça s'est fait dernièrement, hein, sur l'aide sociale, justement, et on a vu, bon, les résultats de ça. Mais, au-delà de ça, effectivement, les gens, les groupes, pratiquement unanimement, ont mentionné justement qu'ils auraient préféré que, pour des éléments significatifs, on puisse les retrouver dans le projet de loi et non dans un règlement qui sera connu après l'adoption de la loi.

Donc, les gens, oui, vont recevoir une bonification, pour les gens qui participent au parcours... moi, j'appelle toujours ça le parcours d'employabilité, là, mais le vrai nom, c'est le plan d'intégration en emploi. Donc, les gens qui y participent auront une bonification. Les gens qui n'y participent pas seront sanctionnés, et là on ne le sait pas, on ne sait pas de combien. L'ancien ministre a mentionné que ça pouvait aller jusqu'à la moitié du chèque d'aide sociale. Je vous rappelle, M. le Président, 623 $ par mois, un chèque à l'aide sociale. Coupez de moitié 623 $ par mois, on est aux alentours de 311,50 $. Ça ne fait pas beaucoup pour payer le loyer. Il n'y a aucun loyer qui est, au Québec, à 300 quelques piastres. Et là on sait très bien aussi...

Puis d'ailleurs il y a une modification dans le projet de loi, qu'on pourra étudier plus en détail, sur la question de la cohabitation. Quand on sait, au Québec, qu'une personne qui cohabite ensemble, actuellement, après un an, elle doit prouver qu'elle n'est pas en couple avec l'autre personne. Que ça soit deux personnes de sexe opposé ou de même sexe, elle doit démontrer, hein, aux gens du ministère, à leur agent, bon, qu'ils ne sont pas en couple. Et là, pour ça, qu'est-ce qu'on fait? Bien là, c'est l'enquête, là, hein, d'une autre époque, on pourrait dire l'enquête Jobidon, là, bon. On a entendu parler d'autres expressions tantôt d'une autre époque, là, bon, mais je connais quand même Les enquêtes Jobidon. Et là la personne va dire : Bien non, moi, j'ai mes factures d'épicerie, mon coloc a ses factures d'épicerie, comme si on ne pouvait pas se mettre ensemble pour économiser. Parce qu'on sait, le prix de l'épicerie, on n'en a pas parlé encore, mais le panier d'épicerie coûte de plus en plus cher. Puis après ça on dit aux gens : Vous devez avoir des saines habitudes de vie, bien vous alimenter, bien vous nourrir. Bon. Mais, quand on voit le prix des fruits et des légumes ou de la viande, on se dit : Bien, peut-être que... puis surtout pour des familles, quand on voit, bon, que, si tu mets du brocoli dans l'assiette, puis que l'enfant, bien, peut-être qu'il ne le mangera pas, bien, peut-être que le choix des pâtes va venir plus vite. Bon, bien, à la fin, le régime alimentaire n'est pas toujours évident.

Je n'élaborerai pas davantage sur cette question, vous vous y connaissez plus que moi en termes d'agriculture et d'alimentation, mais, M. le Président, je vous rappelle, 623 $ par mois pour le chèque d'aide sociale actuellement, et là on pourrait couper jusqu'à la moitié du chèque comme pénalité parce que la personne, à un moment x de sa vie, ne peut participer à ce plan d'intégration d'emploi, pas parce qu'elle ne veut pas, parce qu'elle a une situation qui fait en sorte qu'elle ne peut pas, soit qu'elle est éloignée ou elle a des problèmes, des difficultés. On l'a vu, on l'a mentionné, on pourra le mentionner plus tard, les Auberges du coeur ont fait un mémoire très détaillé sur cette question-là. Ils nous ont présenté des témoignages de gens, bon, qui ont recours à leurs services. On pourra y revenir sur cette question de la pénalité, M. le Président, de la sanction.

Donc, le plan d'intégration pourra mentionner que la personne participante aura l'obligation d'accepter tout emploi convenable qui lui est offert. «Emploi convenable», encore là, ça sera défini par règlement, on ne sait pas ce que ça veut dire, bon, de même que, dans le cas où la personne aurait trouvé un emploi, de maintenir son lien d'emploi pour la durée du programme. D'autres questions peuvent se poser, nous y reviendrons, M. le Président, mais effectivement une personne qui a un emploi dans une entreprise, et que ça ne fonctionne pas, soit d'un côté, soit de l'autre, ou de part et d'autre, la personne devra maintenir son lien d'emploi avec cette dite entreprise, sinon elle sera pénalisée ou sanctionnée dans son plan d'intégration en emploi. Des questions peuvent se poser, M. le Président, nous y reviendrons.

Les personnes qui se trouveraient en défaut de respecter leur plan d'intégration verront leurs prestations coupées, puis on l'a dit, bon, jusqu'à un seuil minimal qui sera fixé par règlement. Encore là, on ne sait pas, les modalités de ce projet de loi, comme la définition de ce qu'est un emploi convenable, les montants des sanctions imposées seront déterminés par règlement.

Finalement, ce projet de loi assouplit les règles pour les bénéficiaires de l'aide sociale qui ont des contraintes sévères à l'emploi et qui reçoivent un héritage. Les sommes reçues en succession ne seront pas comptabilisées dans le calcul des prestations, ce qui est une bonne nouvelle en soi. Effectivement, les groupes, les gens qui oeuvrent auprès des personnes handicapées au Québec ont mentionné que c'était effectivement une avancée, et nous devons saluer, d'ailleurs, cette décision-là du gouvernement, cette proposition dans le projet de loi, mais nous aurons des questions à poser : Quelle ampleur? Bon. Comment ça va fonctionner? Est-ce qu'il y a d'autres éléments qui pourraient être ajoutés dans cette question-là, entre autres, bon, toute la question des rentes, etc., mais aussi, quand on fait des comparables, entre ce qu'on peut faire et ce qu'on ne peut pas faire lorsque nous sommes sur la CSST versus que nous sommes à l'aide sociale? Donc, toutes ces questions pourront être posées.

• (16 h 30) •

Donc, si on reprend quelques éléments que nous avons entendus, soit du ministre actuel, de l'ancien ministre ou, du moins, qu'on sent que c'est le discours officiel du gouvernement, chaque année, environ 17 000 personnes demandent de l'aide sociale pour la première année. Près de 60 % des premiers demandeurs de prestations d'aide sociale sont âgés de 29 ans et moins. Objectif emploi fera en sorte que 85 % des 17 000 nouveaux demandeurs ne toucheront pas d'aide sociale, ce qui pourrait se traduire par des économies de 50 millions de dollars par année, une fois atteint le rythme de croisière. Ce bout-là, je l'avoue, M. le Président, c'est notre analyse, cette phrase-là, c'est notre analyse à nous parce qu'effectivement le budget ou, du moins, ce qu'on voit du projet de loi et ce qu'on entend, et ça a été répété à plusieurs occasions de la part plutôt de l'ancien ministre, il y aurait des économies de 50 millions de dollars avec l'implantation du programme Objectif emploi, parce qu'on peut le voir dans le projet de loi ou, du moins, dans l'analyse qui est faite qu'un certain nombre des personnes, le gouvernement prévoit qu'un certain pourcentage... 10 %, 15 % de ces gens-là n'embarqueront pas dans le programme Objectif emploi, donc seront pénalisés, sanctionnés. La question va revenir, M. le Président, puis on l'a mentionné, là. Puis, bon, vous n'étiez pas là quand je l'ai mentionné, mais j'aurai l'occasion d'y revenir. Mais pourquoi, pourquoi ces gens-là ne peuvent pas embarquer dans le programme Objectif emploi? Notre analyse : ce n'est pas que par choix, c'est aussi par obligation, tout dépendant où ils sont rendus dans leur vie, hein?

Je reviens aux positions, bon, du gouvernement. Selon le gouvernement, parmi les nouveaux assistés sociaux, donc, 6 200 jeunes qui proviennent d'une famille recevant déjà de l'aide sociale... À ça je pourrais mentionner, M. le Président, que, bon, c'est un peu une évidence, hein... je ne sais pas si vous avez des enfants, mais, dans l'optique où vous en avez... vos enfants ont 17 ans et 364 jours, ils n'ont pas d'emploi, arrive leur anniversaire, ont 18 ans, bien, du jour au lendemain, même s'ils habitent encore à la maison et qu'ils n'ont pas d'emploi, vous allez continuer à leur offrir le toit, l'alimentation, etc., payer leurs études, bon, peu importe. Lorsque nous sommes à l'aide sociale et que notre enfant atteint l'âge de 18 ans, bien, du jour au lendemain, bien, la personne, le parent, n'a plus d'enfant à charge, donc ça change significativement le montant qu'elle a droit à l'aide sociale, donc inévitablement ce jeune-là va être incité ou du moins pratiquement obligé à faire une demande d'aide sociale s'il n'a pas trouvé un emploi, etc. Donc, effectivement, le lien est rapide à faire, mais il faut aussi comprendre que c'est parce que le système est fait aussi comme ça pour inciter ces jeunes-là de parents à l'aide sociale d'embarquer immédiatement à l'aide sociale, parce que sinon les parents sont pénalisés et coupés sur leurs montants d'aide sociale.

Les demandeurs de prestations d'aide sociale n'ayant aucune contrainte particulière devront s'inscrire à une démarche de recherche d'emploi, sous peine d'une pénalité financière. Ça a été mentionné, on a vu que des gens, des organismes qui oeuvrent auprès des personnes handicapées, qui donc ont des contraintes sévères à l'emploi, ont dit : Nous voudrions pouvoir avoir recours au programme Objectif emploi sans la partie obligation, parce que même eux reconnaissaient que l'obligation n'était pas une bonne idée, pour la plupart. Ils ont dit : Nous, on aimerait ça pouvoir s'impliquer davantage dans notre société, faire en sorte qu'on puisse se trouver un emploi peut-être pas à temps plein, peut-être à temps partiel, peut-être de la maison, s'il y a des adaptations, mais pour pouvoir contribuer d'une façon, éventuellement, monétaire, en ayant un revenu, puis tout ça, pour pouvoir augmenter son pouvoir d'achat, dans un premier temps, mais aussi de pouvoir se remettre en mouvement et de contribuer soit par une aide dans une entreprise, dans une organisation, peu importe, parce que ces gens-là ont aussi des compétences et des qualités qui peuvent faire bénéficier toute la société. Donc, ces organisations-là nous ont dit : Ne nous oubliez pas et faites en sorte que nous aussi, on puisse avoir l'aide du programme Objectif emploi s'il n'y a pas l'obligation, parce que c'est sûr qu'ils ne veulent pas reculer en arrière, là, en ce moment ils ont... bon, tu sais, avec tout le débat sur la reconnaissance des contraintes.

Le ministre précédent, donc, le président du Conseil du trésor, a justifié la nature de son projet de loi en disant qu'il fallait briser le cercle vicieux de la pauvreté surtout lorsqu'il s'agit de jeunes aptes à gagner leur vie. On y reviendra, à cette affirmation, M. le Président. Le gouvernement souhaite intervenir tôt auprès des jeunes pour briser la culture de dépendance envers l'État, souhaite revoir le programme qui prévoit de consacrer 1 % de la masse salariale à la formation afin d'éliminer les programmes de formation professionnelle qui ne sont pas directement liés à l'emploi.

Lors du dernier remaniement ministériel, l'ancien ministre de l'Éducation est devenu ministre de l'Emploi... ou est redevenu ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale et il a remplacé, comme je le mentionnais, l'actuel président du Conseil du trésor. Ça devient compliqué quand on ne peut pas nommer les noms des ministres, hein, avec les fonctions, là, parce que, quand les fonctions changent, ça devient compliqué, mais, bon, on s'y fait. Donc, le ministre actuel se penchera... et là c'est une citation, ça, c'est le premier ministre qui a mentionné ça lors de l'assermentation, il lui a donné un mandat lorsqu'il l'a nommé ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, donc, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale «se penchera sur l'amélioration de nos outils de soutien du revenu dans la direction de l'instauration d'un revenu minimum garanti, domaine dans lequel il possède une grande expertise. Il poursuivra le travail déjà amorcé visant l'adéquation entre la formation et l'emploi.» Fin de la citation.

M. le Président, je ne peux pas m'empêcher de mentionner... puis je l'ai mentionné à quelques occasions, le ministre le sait aussi, hein, il a écrit plusieurs ouvrages sur la question du revenu minimum garanti... Je ne sais pas si j'ai été à l'origine de cette déclaration du premier ministre, parce que j'avais mentionné, la veille, en commission parlementaire... j'avais ressorti le livre du ministre, à ce moment-là, de l'Éducation — maintenant ministre de l'Emploi — et peut-être que le premier ministre, en entendant la commission parlementaire, a dit : Effectivement, c'est une bonne idée, il faudrait y réfléchir. Ou le ministre actuel a dit : Moi, j'ai déjà écrit là-dessus puis je voudrais travailler pour implanter ça. Parce que, sûrement, quand on fait de la politique ou on fait le choix d'embarquer en politique, c'est pour changer les choses, et effectivement c'est une idée qui mérite... hein, une idée qui mérite d'être débattue au Québec. Le problème, M. le Président, c'est que, selon notre lecture tant du livre que de l'enjeu, il est paradoxal de travailler sur l'implantation d'un revenu minimum garanti au même moment où on dépose un projet de loi et qu'on veut faire adopter un projet de loi qui, comme je le mentionnais, pourrait couper jusqu'à la moitié du chèque d'aide sociale d'une personne qui, rendue à un moment de sa vie, ne peut pas embarquer sur son cheminement, son plan d'intégration en emploi, et ce qui fait en sorte que son 623 $ par mois à l'aide sociale actuellement qu'elle a pourrait être coupé de moitié, donc 300 quelques dollars. Je verrais mal un gouvernement implanter un revenu minimum garanti de 300 quelques dollars par mois. On s'entend, ce n'est pas crédible, ce n'est pas sérieux.

Donc, il y a un peu une contradiction, d'autant plus, M. le Président, que dans son livre... on pourrait mentionner quelques extraits... Bien, je vais vous mentionner... c'est ici, donc, que «cette conception de la justice correspond grossièrement, sans s'y réduire complètement, à l'idée très ancienne de "justice commutative", selon laquelle on devrait toujours recevoir en proportion de ce que l'on donne. Aristote fut l'un des premiers défenseurs de cette idée, finalement encore assez répandue de nos jours. Nos voisins américains lui ont fait une grande place dans leur dernière réforme de la sécurité sociale et il est évident qu'elle joue un rôle central dans la justification éthique du "workfare". Malgré tout, je la considère inapplicable, incohérente et surtout profondément injuste.» À plusieurs occasions dans son livre, le ministre de l'Emploi mentionne qu'il considère cette façon de faire, le programme des mesures de type «workfare», qui avait été appliqué aux États-Unis largement à l'époque... que ce n'est pas acceptable. J'ai eu l'occasion, là, d'en parler par le passé. Je reviens là-dessus, M. le Président, parce que c'est assez important.

Ce que j'aimerais... pour le temps qu'il me reste, M. le Président : faire un peu la comparaison entre... Parce que, comme je l'ai mentionné, le projet de loi a été déposé par l'actuel président du Conseil du trésor lorsqu'il était ministre de l'Emploi et... modifié, et là en ce moment, bien, moi, comme député, là, de l'opposition... bien, comme député, puis je crois que l'ensemble de nos collègues députés puis aussi les groupes et les citoyens aimeraient savoir, bon, est-ce que le nouveau ministre a la même vision, la même orientation que le précédent ministre sur ce projet de loi là ou il a une autre position. La position du ministre — bien, du président du Conseil du trésor — à l'époque, c'était, bon, de couper, pendant quelques mois, jusqu'à 50 % du chèque du nouvel assisté social qui refuse un emploi jugé convenable, peu importe à quelle distance de chez lui.

« "Les contribuables — ça, c'est une citation — ne veulent pas payer pour des gens qui ne veulent pas", a affirmé le ministre. "Ils veulent payer pour des gens qui sont responsables." [...]Toutefois, si l'agent responsable du plan d'intégration d'une personne juge qu'il manque de sérieux, il serait autorisé à retirer sa prime. Si la situation se poursuit, il pourrait progressivement amputer son chèque jusqu'à la moitié. Au bout des 12 mois, toutefois, et s'il est toujours sans emploi, la personne intègre le système d'aide sociale normal, avec la totalité de sa prestation.»

• (16 h 40) •

Pour le président du Conseil du trésor, l'ancien ministre, l'éloignement n'est pas un motif suffisant pour refuser un emploi. Citation : «Si la personne a eu une offre d'emploi viable qui n'est malheureusement pas dans son périmètre de vie, je pense qu'elle devrait l'accepter si elle veut se sortir de la pauvreté.» On ferme la citation.

Donc, si on peut résumer, un assisté social qui décide de ne pas faire l'effort doit subir les conséquences de ça. Je vous rappelle, M. le Président, ce n'est pas toujours par choix, c'est aussi par obligation. On l'a entendu. Les Auberges du coeur, lorsqu'ils sont venus en commission parlementaire... Lorsque j'ai visité aussi une auberge du coeur à Montréal, ce qu'on devrait tous faire, là, ça nous ramène les deux pieds sur la terre... Quand on voit toute la difficulté de ces jeunes-là... Puis l'exemple qui a été donné en commission parlementaire, c'est le jeune qui arrive avec ses deux sacs verts. Ça, c'est ce qu'il a, puis il arrive à l'auberge du coeur, il n'a pas de toit, pas de famille. Ses amis, des fois, il est peut-être mieux de ne pas les fréquenter. Il arrive avec ses deux sacs, puis ce jeune-là, là, souvent pas mal poqué, là... problèmes de toxicomanie, etc., là, bien, ce jeune-là, on va lui dire : Tu as besoin de l'aide sociale? Bien, tout de suite, tu embarques dans un parcours puis on t'embarque en employabilité. Je ne suis pas certain, loin de là, M. le Président, que ce jeune-là avec ses deux sacs verts, premièrement, est prêt et a la tête à se trouver un emploi immédiatement. Premièrement, comment pourrait-il le faire? Il n'a pas d'adresse. Comment il va faire pour recevoir son premier chèque de paie, etc.? Communiquer avec les employeurs, ça prend ne serait-ce que le téléphone, Internet. Il peut aller à l'auberge du coeur, etc., puis tout ça, mais là, après ça, il faut qu'il s'organise. Mais aussi ce n'est pas toujours la meilleure option pour une entreprise. Puis on l'a entendu en commission, si je ne me trompe pas. C'est l'association des manufacturiers et exportateurs du Québec qui mentionnait que d'avoir une personne, un nouvel employé, de faire sa formation, de l'intégrer dans son emploi, dans son poste, hein... et que cette personne-là quitte l'entreprise après une courte période, quelques semaines, quelques mois, ça désorganise autant l'entreprise, sinon plus, que de ne pas avoir pourvu le poste, donc de ne pas avoir engagé ou employé la personne.

Bien, moi, je pense, M. le Président, que dans certains cas le jeune en question, de l'auberge du coeur ou... on parle souvent «le jeune», mais ça peut être aussi «la jeune» qui a des gros problèmes personnels à régler, qui n'est pas prête à aller en emploi maintenant... bien, peut-être que ça se peut qu'elle ne soit pas efficace, ça se peut peut-être que dans l'entreprise elle ne soit pas l'aide que l'employeur ou que les autres employés ont besoin et ça peut faire en sorte que ça désorganise cette entreprise-là effectivement, puis surtout sachant que la plupart des entreprises au Québec, malheureusement, ne sont que des très, très petites ou des petites... ou des petites, moyennes entreprises, donc ils n'ont pas tous un service de ressources humaines aussi développé que de grandes entreprises. Comment on gère ça? Pour avoir visité plusieurs carrefours jeunesse-emploi comme député mais aussi avant, le nombre de jeunes qui arrivent dans les carrefours jeunesse-emploi qui ont besoin d'aide puis qui ont un besoin d'accompagnement, ils sont référés dans des ressources communautaires, les CLSC, etc., hein? Bon. Mais tous ces jeunes-là qui arrivent... pas tous, un certain nombre, mais, ces jeunes-là, qui, des fois, dans certains cas, ont de la difficulté à se lever le matin, je pourrais dire, peut-être à se coucher le soir, ce qui fait en sorte qu'ils ont de la misère à se lever le matin, peut-être qu'ils ont des difficultés à se faire un budget, ce qui fait en sorte qu'ils ont de la misère à payer le loyer, parce que, bon, arrive la fin du mois, mais ils ont payé le loyer mais à moitié, puis là la bouffe... ils n'ont pas bien, bien d'argent, ils arrivent le ventre vide à la job, ils sont moins efficaces, etc., peu importe.

Même, on me parlait, quand j'ai visité, bon, le carrefour jeunesse-emploi chez nous : Quand il y a des spéciaux dans les grandes chaînes de restauration rapide, certains jeunes, bien, avec les coupons, vont s'acheter plusieurs sandwichs — je ne nommerai pas le nom pour ne pas faire de pub, mais on suppose de quel on parle — et mettent ça au congélateur puis réchauffent ça de temps en temps pour se faire de la bouffe parce qu'ils profitent du spécial. On part de loin, là, on part de loin, M. le Président. Mais ces jeunes-là, qui n'ont peut-être pas toute la formation, qui n'ont peut-être même pas fini leur secondaire V... Puis d'ailleurs, quand on est à l'aide sociale... assez difficile, merci, de finir son secondaire V, parce que, on s'entend, dans une période de 12 mois extensible à 24 mois, ça peut être assez difficile, assez difficile de pouvoir terminer ses études quand on sait très bien aussi qu'on ne peut pas être aux études à temps plein en même temps que de l'aide sociale parce que, bon, il faut aller au programme des prêts et bourses, donc, et que l'objectif du ministère n'est pas de faire en sorte que les gens terminent tout leur secondaire V puis puissent aller aux études par la suite, c'est de faire une formation d'appoint ou une formation spécifique pour se trouver un emploi x. Ce qui fait en sorte que, bien, si la personne part de plus loin, bien, ça devient compliqué pour elle. Donc, ce jeune-là... pas certain, M. le Président, qu'il est disposé et qu'il a toute la présence physique et mentale pour se trouver un emploi sur-le-champ. Sinon, il pourrait être coupé jusqu'à la moitié du chèque d'aide sociale, donc son chèque de 623 $ par mois, coupé de moitié.

Là, M. le Président, je vois le temps... Mon Dieu! Je ne pensais pas qu'il me restait aussi peu de temps que ça. Mais rapidement, M. le Président, là, en ce moment, c'est le moment le plus important, c'est-à-dire : la position de l'actuel ministre, ce n'est pas clair, ce n'est pas clair. Peut-être que le ministre, bien, devra nous clarifier, d'ailleurs, sa position, là, mais là... tout dépendant d'une journée ou d'une autre et puis de l'article... Et là je ne mets pas la faute sur le ministre, peut-être aussi qu'il a été mal cité ou... C'est un dossier quand même assez complexe. Mais, au-delà de ça, ça nous prend des explications d'où le nouveau ministre s'en va avec le projet de loi n° 70, notamment sur la question du débat de société sur le revenu minimum garanti. Comment peut-on faire ce débat-là en même temps que le projet de loi n° 70?

J'aimerais aussi avoir des précisions de la part du ministre. Comment peut-on faire un projet de loi qui va, selon nous, créer de la pauvreté, et non pas lutter contre la pauvreté, donc s'attaquer aux pauvres, dans ce cas-ci du projet de loi, en même temps que le même ministre organise des consultations sur le plan de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale? Comment peut-on faire ça en même temps? Au-delà de ça, j'aimerais savoir de la part du ministre... et il aura l'occasion de le mentionner... Nous aurions besoin d'un certain nombre d'amendements ou d'orientations qu'il veut prendre, parce que nous avons entendu plusieurs groupes — nous aurions aimé en entendre plus, nous en avons entendu un certain nombre — voir où il se loge par rapport à ces demandes de ces groupes.

La question de l'obligation. M. le Président, nous considérons qu'il est inacceptable, pour l'instant, dans le contexte actuel et dans tout le débat que nous avons, d'obliger... Parce que, on le sait, là, ça n'a pas fonctionné par le passé. On l'a vu, il y a eu des tentatives d'anciens ministres où d'anciens ministres ont fait le choix d'y aller avec l'obligation. Ils ont dû reculer. Ça n'a pas fonctionné. Donc, nous aimerions en savoir davantage de la part du ministre actuel, connaissant sa sensibilité justement pour ces questions-là et aussi, il faut le dire quand même, sa connaissance et sa contribution à la littérature sur la question.

Donc, M. le Président, en rafale, quelques commentaires de groupes. La plupart des groupes... beaucoup de groupes se sont opposés à l'obligation, comme on l'a mentionné. Le Collectif pour un Québec sans pauvreté a mentionné que... eux recommandent l'abolition «de l'approche punitive préconisée par le programme Objectif emploi. Le collectif encourage plutôt le gouvernement du Québec à conserver une approche de type volontaire pour tout ce qui concerne le développement de l'employabilité.» Le Réseau des services spécialisés de la main-d'oeuvre : «Les sanctions administratives ne doivent pas conduire à des [coupes] dans les prestations de base des bénéficiaires de l'aide sociale. Ces dernières ne couvrent qu'une fraction des dépenses nécessaires pour vivre dignement.» Regroupement des Auberges du coeur : «...le programme Objectif emploi démontre une profonde méconnaissance de la réalité des jeunes les plus vulnérables de notre société et de la façon de les soutenir pour leur assurer une participation sociale pleine et entière.» Front commun des personnes assistées sociales du Québec : «Il n'est pas utile de rappeler que la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, dans sa conception actuelle, oblige les personnes à avoir épuisé toutes leurs économies avant "d'avoir droit" à l'aide sociale. Moins de 623 $ par mois, alors qu'on n'a pas d'économies, place les personnes en situation de précarité injustifiée.»

• (16 h 50) •

Le Conseil du patronat, même le président du Conseil du patronat a mentionné que le montant d'aide sociale, ce n'est pas grand-chose actuellement au Québec. Les syndicats ont aussi dénoncé... la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse — citation : «"La commission n'a cessé de souligner l'importance d'aborder la pauvreté dans une perspective systémique", a déclaré Renée Dupuis, vice-présidente de la commission, en faisant allusion aux nombreux travaux sur la pauvreté et l'exclusion sociale réalisés par la commission au cours des 40 dernières années. "Le programme Objectif emploi n'adopte cependant pas une telle perspective et il risque d'accroître la discrimination systémique vécue par les personnes visées sur la base de leur condition sociale."»

Les groupes de personnes handicapées, je l'ai mentionné... Les carrefours jeunesse-emploi considèrent qu'on ne peut pas toucher au chèque d'aide sociale de base mais on doit avoir effectivement un programme; Force Jeunesse aussi a pris position un peu dans le même sens; Protectrice du citoyen : risque d'augmentation de plaintes à la Protectrice du citoyen; les regroupements d'organismes communautaires, d'employabilité... Je pourrais mentionner : Le Comité consultatif Femmes en développement de la main-d'oeuvre a pris un certain nombre de positions, notamment pour reconnaître davantage la place des femmes dans le projet de loi. M. le Président, je dois, bon, sauter un grand nombre de groupes, mais des groupes oubliés, selon nous : les groupes en itinérance, le RAPSIM à Montréal, le RSIQ, qui est le regroupement... le réseau national au Québec. On le voit, là, ce projet de loi là risque d'amener un certain nombre de gens à la rue, donc d'avoir des conséquences en matière d'itinérance.

Donc, en terminant, M. le Président, le ministre devrait retirer son projet de loi dans la forme actuelle, retourner à sa table à dessin. Nous ne sommes pas contre les objectifs du projet de loi, mais nous doutons des moyens proposés. Nous ne croyons pas que la méthode coercitive soit la bonne. Dans sa formule actuelle, nous ne croyons pas que le projet de loi permettra de briser le cercle de la pauvreté. Nous croyons plutôt qu'il alimente les préjugés envers les personnes assistées sociales. La grande majorité des groupes que nous avons entendus sont venus nous le confirmer, que les mesures coercitives n'étaient pas une avenue. Nous demandons davantage d'écoute de la part du ministre pour les groupes qui n'ont pas été entendus et pour les recommandations que nous allons faire. Et, M. le Président, nous aimerions avoir un véritable débat de société sur le revenu minimum garanti. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Saint-Jean, pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Drummond—Bois-Francs. Voilà.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Alors, merci, M. le Président. Alors, à mon tour d'intervenir sur le projet de loi n° 70. Ayant participé aux consultations particulières, je veux tout d'abord saluer le député de Saint-Jean, qui vient de terminer son allocution, aussi saluer le ministre et... nouveau ministre. Bien entendu, je saluerai aussi au passage l'ancien ministre qui est le nouveau ministre du Trésor, qui avait commencé le projet de loi, et la députée de Gouin, bien entendu, qu'on a pu aussi échanger et des fois... même qu'habituellement nous ne sommes pas toujours en concordance. Il y a parfois, justement, des approches qui sont similaires. Nous avons peut-être juste un moyen différent de le régler, mais souvent les problématiques qui sont soulevées... et ici on parle de problématiques qui touchent les plus démunis de notre société, alors c'est très, très important d'y faire attention, et il faut avoir une approche très méticuleuse au niveau des interventions que nous faisons.

Je tiens aussi à féliciter tous les gens qui sont venus présenter des mémoires, qu'ils soient pour ou contre, et surtout ceux des mémoires qui ont été, là, je dis... j'appelle ça, avec une approche constructive, avec des moyens. Il y en a qui étaient totalement contre, pour de bonnes raisons, il y en a qui étaient plus pour, et je vous dirais que, dans ce sens-là, c'était très constructif d'avoir une approche de différents milieux. Et, je voudrais aussi souligner, j'ai eu la chance de visiter plusieurs organismes dans mon comté particulièrement qui sont en lien avec les gens qui sont dans le besoin, les gens qui sont sur l'aide sociale ou autre problématique et je voudrais leur dire merci, à ces gens-là, parce qu'ils m'ont beaucoup informé. Et c'est des gens très près du milieu et c'est avec ces gens-là que je pense que le ministre doit dialoguer, parce que ces gens-là nous apportent de véritables solutions, et c'est des solutions concrètes. Ce n'est pas des grands discours, c'est la réalité et c'est cela qu'il faut prendre en compte et c'est toujours important de faire en sorte que ces gens-là soient écoutés, et, malheureusement, souvent, on les écoute, mais on n'applique pas les approches dont il faudrait. Et, quand je dis ça... ce n'est pas nécessairement que ces gens-là sont tous contre le projet de loi, il y a des bonnes choses dans le projet de loi, mais c'est vraiment de la manière que ce soit appliqué.

Grosso modo, le projet de loi, c'est vraiment deux volets. Le premier, c'est la CPMT et la création du nouveau programme qui remplace... le nouveau programme Emploi-Québec, qui remplace le programme Alternative. Au niveau de la CPMT, le ministre profite du projet de loi pour revoir son rôle. La CMT acquiert un rôle plus actif quant à la détermination des besoins du marché du travail. Cependant, à travers les articles, on remarque que la... CPMT, pardon, perd de son indépendance. En effet, alors qu'auparavant la CPMT agissait comme partenaire, en collaboration avec le ministre, en matière de détermination des besoins du marché du travail, à travers le projet n° 70, le ministre acquiert le pouvoir d'accepter et même de modifier les avis émis par la commission. Bien entendu, nous avons autrefois assisté à quelques dérives à la CPMT, notamment la reconnaissance de formation dans le cadre du 1 %, tel qu'on a vu... la rigologie ou des animations de clowns, et je pense que, pour le citoyen qui paie des taxes, quand il voit ça, bien, il y a de la frustration, et c'est normal. Alors, si ce n'était pas pour payer le party de Noël, des fois, ce n'était pas loin. Et ça, c'est... je pense que ça, là, actuellement, le projet de loi règle ce problème au passage, mais nous nous questionnons quand même à la perte d'autonomie de la commission, qui apparaît comme un corollaire à la... la solution avancée, pardon. Nous pouvons profiter de l'étude détaillée pour obtenir davantage d'éclaircissements de la part du ministre sur ce sujet. Également, il y a, dans le volet, la question des nominations des représentants des organisations ayant un siège à la CPMT. Pour la plupart, ces représentants étaient nommés sur recommandation... et chacun des organisations... chacune des organisations représentées, pardon. Avec le projet de loi n° 70, c'est désormais le ministre qui nommera ces représentants sur consultation, lorsque nécessaire. Et là nous, nous voyons mal comment un ministre pourrait voir mieux ce qu'une organisation... qui est le représentant idéal pour eux, c'est-à-dire, si les membres d'une organisation du travail qui est représentée... Nous, on dit au ministère : Nous nommons telle personne et que le ministre refuse... pour quelle raison? Je pense que ce sont des spécialistes, il faut les écouter avant tout. Alors, là-dessus, nous avons beaucoup de questions à ce niveau-là.

Concernant le programme volet Objectif emploi, vous avez eu l'occasion d'entendre plusieurs groupes sur le sujet, et, là-dessus, nous sommes très sensibles aux craintes exprimées. Et je veux faire un lien. Le projet de loi n° 70, actuellement, on parle d'une réforme au niveau de l'aide sociale. O.K., rien n'est parfait, on n'est pas contre le changement si les changements apportés peuvent régler les problèmes... ou, en tout cas, certains. La réalité, c'est que la première approche, c'est pour couper 50 millions. Moi, ce que j'aimerais, là, le 50 millions, qui est supposément coupé, est-ce qu'il pourrait être réinvesti justement dans l'approche pour venir en aide aux gens qui sont dans le besoin? Et là-dessus il n'y a rien qui nous dit ça. Il n'y a aucun lien qui fait apparence... aucun article qui vient nous dire au niveau du projet de loi qu'il y aura un réinvestissement au niveau de certains organismes communautaires qui sont en lien direct avec le projet de loi, rien là-dessus.

• (17 heures) •

Alors, actuellement, on s'en tient juste sur la bonne volonté du ministre et, encore ce matin, on voit : Fermeture du centre d'emploi à Châteauguay, Saint-Rémi, Contrecoeur, et, possiblement, peut-être, Granby et Boucherville vont suivre. Alors, quand le ministre nous dit actuellement : Nous allons accompagner ces jeunes-là... ces nouveaux demandeurs, oui, c'est bien beau, mais moi, si j'accompagne ma fille à l'école, je suis avec sur le trottoir jusqu'à l'école. La personne qui est à 100 kilomètres du bureau, l'accompagnement va se faire comment? Ça, c'est très questionnable. Alors, on dirait que, là, la volonté est là, mais les gestes n'y sont pas.

Maintenant, cela dit, nous, nous continuons à avoir une approche constructive parce que nous voulons améliorer ce projet de loi là. Nous sommes d'avis qu'il s'agit là d'une initiative importante pour accompagner des nouveaux demandeurs et les mettre hors de leurs difficultés actuelles, hors de l'aide sociale. Nous devons nous assurer du succès et de l'efficacité de ce programme Objectif emploi.

Nos changements. Là-dessus, nous avons plusieurs changements : nous pensons qu'il est essentiel de recalibrer le projet de loi en fonction des préoccupations des experts en employabilité entendus lors de la commission. La Protectrice du citoyen nous a présenté un mémoire éclairant et constructif qui rejoignait bien nos positions. Nous nous sommes donc inspirés de ses recommandations dans nos amendements. Nous proposerons donc plusieurs amendements au projet de loi : nous souhaitons retirer notamment la limite de temps pour l'intégration. Actuellement, le projet de loi, on parle de 12 mois qui pourraient se prolonger à 24.

Et moi, j'ai questionné, à plusieurs reprises, des gens qui sont venus déposer des mémoires. Prenez une femme qui retourne sur les bancs d'école et, elle, son but dans la vie est d'être infirmière. La formation au cégep, là, c'est minimum trois ans. Bien, du 24 à 36 mois, qu'est-ce qu'il lui advient? Je trouve que mettre un temps, si la personne, dans son cheminement, a un cheminement positif, a des bons résultats scolaires, ce n'est pas une approche qui est constructive, parce que, dans le fond, il est toujours, justement, comme une épée de Damoclès qui est au-dessus de sa tête, là, quand va s'achever le programme. Or, nous, là-dessus, on aimerait que le terme de temps soit modifié, justement, avec une approche qui est beaucoup plus proactive, c'est-à-dire : Est-ce que la personne chemine bien, peu importe le cheminement?

Nous croyons aussi essentiel le plan d'intégration construit dans un processus de rencontre collaborative entre les fonctionnaires et les participants. Là-dessus, une grosse question : Quand une personne voit le responsable chez Emploi-Québec, et qu'on nous dit : Temps alloué de 15, 20 minutes, je me questionne sur la capacité d'une personne, aussi bonne soit-elle, d'évaluer et de connaître une personne et surtout de connaître ses besoins.

Alors, je pense que là-dessus les organismes communautaires... parce que souvent c'est des gens... Là, on ne parle pas de la personne, là, que tout va bien, qui vient de perdre son emploi, qui est en recherche active et autres, c'est vraiment des personnes qui sont dans le besoin, qui ont des problèmes de maladie mentale, des problèmes psychologiques et où la vie n'est vraiment pas facile. Et ce n'est pas une personne qui est dans un bureau, et souvent même par téléphone, qui va pouvoir déceler les besoins de cette personne, mais, bien au contraire, ces personnes qui fréquentent souvent des places comme, mettons, carrefour jeunesse-emploi, on a vu certains, les auberges du coeur, comme à Drummondville, Habit-Action, ça, ces gens-là, là, c'est des gens qui vont se confier parce qu'il y a un lien de confiance. Alors, ces gens-là, ces organismes-là, au niveau du projet de loi, doivent jouer un rôle essentiel pour justement venir en aide à ces... ces jeunes-là qui ont... je voulais dire «enfants», mais parfois c'est ça.

Juste un exemple, vous prenez un jeune qui sort d'un centre jeunesse. Souvent, on voit ça, les règlements, là, 17 ans et demi, 17 ans trois quarts, 18 ans, il sort d'un centre jeunesse. Cheminement difficile. On a des fois des problèmes de toxicomanie, des problèmes psychologiques, des jeunes, malheureusement, qui n'ont pas eu une famille très responsable. Ce jeune-là, là, il n'est pas apte à retourner sur le marché du travail demain matin, il a besoin d'un cheminement personnel, et là-dessus, actuellement, le projet de loi, il n'y a aucun article qui vient nous dire... On parle d'intégration à l'emploi, mais on ne fait aucune allusion sur le cheminement personnel d'une personne. Et encore là nous avons de gros doutes là-dessus, et j'espère que le ministre apportera des précisions, apportera des amendements ou qu'il acceptera nos amendements qu'on aura à déposer là-dessus.

Au niveau des critères minimums, nous proposons donc des critères minimums à ce qui est un emploi convenable, soit qu'il tienne compte du plan d'intégration, qu'il ne force pas un participant à changer d'adresse et qu'il représente une évolution positive du revenu pour le participant par rapport à sa prestation personnelle. Concrètement, une personne, une jeune fille, jeune femme toute seule, 18 ans, 19 ans, 20 ans, c'est sûr que, si on lui propose un emploi au salaire minimum, ça peut convenir à ses besoins parce qu'il va augmenter son revenu, mais, dans le cas d'un père de famille, d'une mère de famille monoparentale, deux, trois enfants, on s'entend que le salaire minimum n'est pas adéquat, là, parce que, premièrement, il perd au niveau des médicaments et autres, et les enfants, bien, ils ont des besoins. Et ça, actuellement, encore là, aucune précision là-dessus. J'espère que le ministre saura amener des balises pour justement mieux encadrer et surtout rassurer actuellement ces gens-là qui, on le sait, ne roulent pas sur l'or, et c'est le cas de le dire.

Nous croyons aussi important de préciser et d'agrandir les recours du participant, compte tenu de la portée importante des décisions rendues par les fonctionnaires sur leur niveau de vie. Ce qu'on veut dire par là, c'est de permettre justement qu'il y ait un système de recours, étant donné que c'est des fonctionnaires qui jugent de ces personnes-là, qui ont un peu la vie entre les mains de ces gens-là. Il faut que, s'il y aurait des abus ou des excès, une personne puisse, justement, pouvoir se défendre.

Enfin, nous proposons une évaluation récurrente de la loi en commission parlementaire pour nous assurer du succès du programme et pour nous donner l'opportunité de proposer des réajustements lorsque le besoin se fera sentir. Là, actuellement, tout ce qui est fait est vraiment sur le bon jugement et la bonne volonté du ministre et de son ministère, mais, moi, ce que je veux, ce que nous voulons, pour ma formation, c'est soit que le programme soit évalué dans les deux prochaines années pour voir si vraiment le programme est pertinent et s'il y a des lacunes. Parce que, vous savez, quand on est dans le besoin, quand on vit avec 623 $ par mois, les journées sont longues, les mois sont longs. Et, s'il y a des problématiques qui persistent, imaginez un an, deux ans, trois ans... Alors, c'est un point, pour nous, qui nous paraît essentiel et qui amènera juste du positif pour tout le monde.

Alors, actuellement, en ce qui nous concerne, nous sommes pour le principe de cette approche. Par contre, je peux déjà vous dire que, si le ministre n'amène pas des précisions, des amendements ou qu'il n'accepte pas nos amendements, nous n'appuierons pas ce projet de loi à l'adoption finale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Je cède la parole maintenant à Mme la députée de Gouin pour son intervention. Mme la députée, à vous la parole.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais annoncer tout de suite que, dans les circonstances actuelles, nous allons, bien entendu, voter contre le principe de ce projet de loi. Et nous avons vraiment beaucoup de bonnes raisons de le faire, alors je vais tenter de les expliquer dans le temps qui m'est imparti, qui est d'une durée de 20 minutes, je crois, M. le Président.

D'abord, je voudrais signaler, et mon âge me le permet, que, depuis au moins 20 ou 25 ans, j'en ai vu passer, des réformes à la sécurité du revenu. En fait, je les ai à peu près toutes combattues parce qu'en général ces réformes finissaient par avoir un seul but : diminuer des prestations, diminuer des prestations supplémentaires, resserrer davantage les règles — et ça, ça faisait vraiment mal à plusieurs catégories de personnes — diviser les prestataires en toutes sortes de catégories, s'appuyer sur les préjugés qui font croire à bien des gens dans la population qu'on est presque à l'aide sociale par choix, sauf bien sûr pour les personnes très handicapées ou très malades, tout le monde en convient, mais au fond, les autres, bien, dans le fond, elles ont presque choisi d'être à l'aide sociale et elles s'y complaisent.

• (17 h 10) •

Et ça, M. le Président, je l'ai tellement entendu depuis 20 ans, depuis 25 ans, que je ne peux m'empêcher, face à la réforme actuelle, d'avoir non seulement des doutes, mais d'être assez convaincue que cette réforme s'appuie encore sur des préjugés, quelle que soit, par ailleurs, la sincérité ou non des personnes qui la déposent. Dans les faits, lorsqu'on veut sanctionner des personnes en disant soit qu'elles ne veulent pas aller sur une mesure ou soit qu'elles ont abandonné une mesure, c'est comme si on prenait pour acquis que ces individus font des choix, des choix faciles à faire, de participer ou de ne pas participer, ainsi va la vie, et, si vous ne participez pas, on pourrait couper votre chèque jusqu'à la moitié.

Tout ça nous en dit long sur l'état de notre société, je dirais, en rapport avec les personnes les plus pauvres vivant au Québec, des personnes que l'on veut aider à Noël, mais avec qui, le reste de l'année, on a parfois des problèmes, on a parfois des préjugés. Il faut arrêter ça, M. le Président. Il faut imprimer à une réforme de la sécurité du revenu une toute nouvelle manière de fonctionner. C'est ce à quoi j'invite le ministre.

La majorité des experts nous disent, et on avait pas mal d'experts dans la salle lors de la commission parlementaire, que l'approche coercitive ne fonctionne pas. Elle ne fonctionne pas, elle est inutile, elle est contre-productive. Il faut prendre les choses autrement, et je vais y venir.

Est-ce que je pourrais, au niveau des faits, simplement signaler que, pour 40 % des prestataires à la sécurité du revenu, l'aide sociale devient nécessaire parce qu'ils n'ont plus d'assurance-emploi et qu'ils n'ont pas réussi à se trouver un travail? On parle donc de gens qui ont travaillé et, dans plusieurs régions, on sait qu'il y a eu des pertes d'emploi importantes dans les dernières années. Les gens qui ont parfois 40 ans, 45 ans, 50 ans n'arrivent pas à se retrouver un emploi, ils sont donc sur l'aide sociale. Et, oui, parmi les nouveaux demandeurs, il y aura de ces personnes qui n'auront pas réussi à se trouver un emploi malgré tous leurs efforts.

Je voudrais souligner aussi qu'en 2014‑2015 88 000 personnes ont initié une participation volontaire à une mesure d'emploi et 28 000 ont poursuivi une mesure déjà commencée. Ça fait pas mal de monde, M. le Président, ça, pas mal de monde qui, au moment où on se parle, sont en train d'être formés, sont dans des entreprises d'insertion, dans des mesures d'employabilité, des gens qui veulent s'en sortir, qui font leur gros possible, aidés en cela par des dizaines et des dizaines d'organismes communautaires sur le terrain, mais ça, on n'en parle pas, c'est comme si ça, ça n'existait pas.

Je voudrais rappeler aussi, la ministre Courchesne l'avait déjà dit il y a plusieurs années, qu'à peu près 10 % des personnes qualifiées d'aptes au travail, parmi les personnes assistées sociales, dans les faits, là, pourraient occuper un emploi demain matin. Il y en a 90 % pour qui ce serait très difficile pour toutes sortes de raisons dont je vais parler un peu plus tard.

J'aimerais aussi souligner, M. le Président, parce qu'il y a peut-être des gens qui nous écoutent et qui ne sont pas au courant de ça, la prestation de base pour une personne seule à l'aide sociale, dite apte à l'emploi, c'est 623 $ par mois. Franchement, là, de penser qu'il y a des gens, au Québec, qui choisissent de vivre avec 623 $ par mois, bien, je ne comprends pas, en fait, cette pensée-là. Je ne sais pas. Est-ce que quiconque ici, dans cette Chambre, a déjà essayé de vivre avec 600 $ par mois? En tout cas, je ne voudrais pas me mettre au défi moi-même de le faire, parce que je ne sais même pas comment j'y arriverais et je pense que ce serait la même chose pour tous mes collègues ici, ce serait la même chose pour plein de gens dans la société. On ne vit pas avec 623 $ par mois, on survit à peine, on court les banques alimentaires, les friperies, on espère que le frigidaire ne lâchera pas, on n'a pas les moyens de se payer des transports collectifs, on mène une vie de misère. Ça, c'est la vraie situation qui se vit au Québec en ce moment. Alors, juste d'imaginer qu'on pourrait couper ce qui est déjà un chèque indécent, largement sous le seuil de faible revenu, même sous le seuil du respect du panier de consommation, pour moi, pour la formation politique que je représente, c'est juste inimaginable.

J'aimerais ça, maintenant, M. le Président, parler des personnes de qui on parle, que ce soient des nouveaux demandeurs ou que ce soient des personnes actuellement à l'aide sociale. De qui on parle quand on parle des personnes aptes au travail? Qui sont ces personnes? Quelles sont leurs caractéristiques? Eh bien, dans beaucoup de cas... pas nécessairement dans le cas des personnes qui ont occupé longuement un emploi et qui se retrouvent par malchance à l'aide sociale, ça, c'est une situation différente, donc 40 % des gens... Pour l'autre 60 %, très souvent, M. le Président, il s'agit de personnes qui ont des problèmes, des problèmes, des vrais problèmes, pas des problèmes inventés, des vrais problèmes : des problèmes de dépendance à l'alcool, aux drogues; des problèmes de détresse psychologique importants; des femmes qui ont vécu de la violence conjugale ou familiale et qui sont vraiment en détresse et en difficulté; des personnes très souvent seules, isolées, sans réseau, sans ressource; des personnes qui ne savent pas très bien comment y arriver pour s'en sortir; des jeunes qui arrivent du centre jeunesse, qui sont allés de familles d'accueil en foyers de jeunes, qui se retrouvent, à 18 ans, avec un sac vert dans lequel il y a toute leur vie et qui, non, ne savent pas très bien comment l'orienter, cette vie, et qui vivent de graves problèmes de manque d'estime de soi et de manque de confiance non seulement en eux, mais en la société dans laquelle ils vivent, des jeunes qui auraient de la difficulté à immédiatement s'impliquer dans un programme d'employabilité parce que, pour un temps, et Les Auberges du coeur nous l'ont tellement dit, ils n'en ont tout simplement pas la capacité. Ce n'est pas pour la vie, là, mais pour un temps, pour un temps, c'est d'autre chose qu'il faut faire avec eux et que beaucoup d'organismes font d'ailleurs très, très bien. Toutes ces personnes-là qui ont des problèmes de santé physique, de santé mentale, de détresse psychologique, d'isolement...

Je pourrais rajouter d'analphabétisme. Énormément de personnes à l'aide sociale ont de grandes difficultés de lecture et d'écriture, que ce soient des jeunes ou des moins jeunes. Il me semble que ça aussi, on devrait le prendre en considération. Ces personnes-là, n'importe quel employeur va leur demander d'être capable de comprendre des formulaires, des documents et tout, mais c'est très difficile pour ces personnes-là. Donc, un cours d'alphabétisation est un prérequis essentiel, alors il ne faut pas couper dans l'alphabétisation, il faut l'encourager. Beaucoup de gens, oui, qui savent lire et écrire n'ont pas complété un diplôme d'études secondaires ou un diplôme d'études professionnelles. Ils n'ont pas de métier, ils n'ont pas de qualification. Alors, quand le gouvernement nous dit : Il y a des emplois disponibles, il faut mettre les gens sur les emplois disponibles, bien je suis désolée, mais c'est parce qu'un certain nombre de ces emplois disponibles demandent immédiatement des qualifications que plusieurs des personnes à l'aide sociale n'ont pas immédiatement, et, dans plusieurs cas, ça pourrait prendre deux, trois, quatre ans peut-être. Il faut y arriver, on est d'accord, en fait on est tous d'accord avec ça, mais il faut prendre le temps.

• (17 h 20) •

Alors, il y a des qualifications pratiques qu'il faut avoir, il y a des études théoriques qu'il faut faire, et il y a aussi toute la dimension de l'estime de soi, de la confiance en soi qu'il faut restaurer. Ça, ça demande du temps, M. le Président, et ça demande des ressources. Alors, ce n'est pas le temps de couper dans les ressources, ce que le gouvernement a fait depuis quelques années, c'est le temps d'investir dans des ressources et d'améliorer toutes les mesures d'employabilité que nous connaissons, de les diversifier, de les adapter aux besoins de chacune des personnes qui se présentent au centre local d'emploi. C'est ça qu'il faut faire, mais pas d'avoir une approche punitive et coercitive.

À mon avis, le gouvernement n'a absolument pas analysé les impacts négatifs de la réforme qu'il propose. Et là tout le monde aura compris, M. le Président, que je parle de la partie du projet de loi qui porte sur l'aide sociale plus que la partie qui porte sur Emploi-Québec. Il me semble que vraiment, là, il n'y en a pas eu, d'analyse.

Un seul exemple. On sait que 70 % des retraits de mesure touchent une mesure qui est la formation générale pour adultes. Le ministre, qui était ministre de l'Éducation il n'y a pas si longtemps, devrait savoir que, de nos jours, la formation générale pour adultes rejoint beaucoup de jeunes de 16 à 18 ans qui en fait n'ont pas terminé leur secondaire, se retrouvent à l'éducation aux adultes et là sont seuls, ils se sentent seuls dans une classe. Tout ce qu'ils ont à faire, c'est de remplir un cahier. S'ils ont une question au professeur, ils mettent leur nom au tableau puis ils sont chanceux s'ils peuvent en poser deux par cours. Ils sont très seuls. À 16 ans, 17 ans, dans la plupart des cas, c'est totalement inadéquat comme modèle de formation aux adultes. Alors, est-ce qu'il faut s'étonner qu'il y en ait tant qui abandonnent? Mais le ministre, lui, il dit : Ah! il y a plein de gens qui abandonnent, alors on va les sanctionner. Bien, non, on va essayer de trouver les raisons pour lesquelles ils et elles abandonnent, on va régler les problèmes puis on n'aura pas besoin de les sanctionner. Moi, c'est ce que j'appelle faire une analyse sérieuse, documentée des causes des problèmes, et ce n'est pas du tout ce que nous avons devant nous.

J'ajouterais, M. le Président, que nous vivons dans une société de droit, nous avons une charte des droits et libertés de la personne. Le gouvernement canadien a souscrit au pacte international sur les droits sociaux et politiques... socioéconomiques, pardon. Nous avons, au Québec, une loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, qui prévoit l'instauration d'un barème plancher en dessous duquel on ne peut pas couper une prestation. Et donc ce que je veux dire au ministre, c'est : Tout ça, c'est seulement des bouts de papier? Je pense que non. Ce sont des lois que nous avons adoptées, ce sont des pactes internationaux auxquels nous avons souscrit et c'est une charte des droits et libertés de la personne que nous avons adoptée il y a déjà fort longtemps, mais qui doit absolument nous inspirer encore aujourd'hui.

Donc, pour des raisons à la fois de principe, mais aussi pour des raisons pratiques que je vais expliquer, on ne peut pas accepter, dans la formation politique que je représente et, j'espère, dans l'ensemble des formations politiques, que l'on sanctionne des personnes déjà tellement mal prises et qui vivent tellement en bas de ce qui devrait être, tiens, un revenu minimum garanti au Québec, hein? Pour le moment, là, on en est extrêmement loin.

De plus, M. le Président, cette réforme, si elle devait, malheureusement, un jour être adoptée — j'espère que non — elle va être contre-productive, elle ne servira à rien parce que, dans l'hypothèse où un nouveau demandeur, malgré la sanction, dirait : Je ne veux pas aller sur telle ou telle mesure en ce moment, cette personne va donc se voir couper un chèque, et ce qui va arriver, c'est écrit dans le ciel, bien, on va avoir d'autres problèmes. On va créer de nouveaux problèmes sociaux, itinérance, par exemple. Et, si on avait, d'ailleurs, accueilli les groupes qui travaillent en itinérance, ils nous l'auraient dit. On va avoir ce genre de problèmes là, on va avoir aussi plus de problèmes de santé mentale, plus de problèmes de détresse psychologique, plus de problèmes de santé physique. Alors, la pragmatique en moi vous dit, M. le Président, que, bien, tout ça, ce n'est pas très payant pour la société québécoise. Donc, peut-être qu'on pourrait éviter de faire ça.

Par ailleurs, des personnes qui se retrouvent non pas dans la pauvreté, mais là on parle dans l'extrême pauvreté, ce sont des personnes qui n'ont pas... ça ne leur donne pas plus de motivation pour aller sur une mesure, là, parce qu'ils sont en état de survie. Donc, c'est vraiment inutile et improductif, même, je dirais, au-delà des principes, là, sur un plan extrêmement pratico-pratique.

J'aimerais aussi souligner que, depuis 10 ans, les montants dévolus aux programmes d'employabilité au Québec ont diminué de 10 %. Alors, dans ces conditions-là, j'ai un peu de difficultés à voir comment on va pouvoir continuer à assurer à toutes les personnes actuellement à l'aide sociale qui veulent aller sur des mesures la possibilité de le faire, en plus soi-disant d'offrir des mesures à 17 000 nouvelles personnes par année. En fait, si c'est le cas, ça va vouloir dire un énorme réinvestissement dans tout ce qui s'appelle mesures d'employabilité au Québec. Sinon, je ne sais absolument pas de quoi on parle. Ou alors, on va privilégier les nouveaux demandeurs et laisser tomber les autres? Ça n'est franchement pas une bonne idée. Je pense que, quand on vit dans la pauvreté, on a les mêmes droits, que l'on soit à l'aide sociale depuis trois jours, depuis six mois ou depuis cinq ans. Je pense qu'on doit avoir les mêmes possibilités de s'en sortir.

J'aimerais rappeler aussi qu'actuellement — là, on parle d'Emploi-Québec — les entrevues avec les nouveaux demandeurs se font par téléphone. Il n'y a pas de rencontre. Il y aura rencontre si, finalement, la personne apprend qu'il y a des mesures à Emploi-Québec et là elle pourra avoir une rencontre avec un agent d'Emploi-Québec. Mais en fait le personnel n'y arrive tout simplement plus. Même avec Internet, même avec le téléphone plutôt que l'entrevue, le personnel n'y arrive plus. Alors, je ne sais pas, est-ce que le ministre a l'intention d'augmenter le personnel d'Emploi-Québec de façon considérable? Disons qu'avec les mesures d'austérité qu'on connaît ces temps-ci j'en doute un peu.

Alors, en fait, M. le Président, à mon avis, on est en train de créer de toutes pièces une sorte de fausse crise de l'aide sociale. Il n'y a pas de crise, il y a une diminution progressive et constante, depuis maintenant à peu près 20 ans, du nombre de personnes à l'aide sociale au Québec. Et il y a eu, à certains moments, de fort bonnes mesures qui ont permis — je pense ici aux mères de famille monoparentales — de diminuer grandement leur nombre à l'aide sociale. Puis c'est arrivé parce qu'on a injecté de l'argent dans les allocations familiales pour les enfants entre autres. Donc, en fait, c'est une réforme inutile à un moment où ce dont on aurait besoin, c'est d'une réforme qui aiderait vraiment les gens à sortir de la pauvreté. On aurait besoin d'un véritable plan de lutte contre la pauvreté. C'est ça qu'il faudrait faire, M. le Président. Ça, ça serait un travail sérieux.

Motion de report

En conséquence :

«Considérant que le projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, vient modifier en profondeur le régime d'aide financière de dernier recours;

«Considérant que l'article 20 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale prévoit l'obligation pour le ministre de produire une étude d'impact sur les revenus des personnes et des familles en situation de pauvreté, pour toute proposition législative ayant un impact;

«Considérant que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale n'a toujours pas rendu publiques de telles études d'impacts;

«Considérant que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale prévoit que l'action gouvernementale doit prendre en compte les réalités propres aux femmes et aux hommes, en appliquant notamment une analyse différenciée selon les sexes;

«Considérant que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale n'a toujours pas rendu publique une telle analyse différenciée selon les sexes;

«Que la motion en discussion soit amendée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la fin les mots "dans trois mois".»

C'est une motion de report, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, Mme la députée de Gouin. Cette motion de report est bien sûr déposée sous réserve de sa recevabilité.

Je vais donc suspendre les travaux de l'Assemblée quelques instants afin d'en vérifier la recevabilité.

(Suspension de la séance à 17 h 28)

(Reprise à 17 h 34)

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'Assemblée poursuit ses travaux. Mme la députée de Gouin, nous avons bien analysé la recevabilité de votre motion, et je la déclare recevable. En conséquence, Mme la députée de Gouin, votre motion de report est déposée. En vertu de l'article 240 du règlement, cette motion fait l'objet d'un débat restreint de deux heures. Je vous informe que la répartition du temps de parole pour ce débat restreint s'effectuera comme suit : 56 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement; 33 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle; 23 minutes sont allouées au deuxième groupe d'opposition; sept minutes sont allouées aux députés indépendants, sous réserve d'un maximum de deux minutes pour la députée d'Arthabaska. Dans ce cadre, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Enfin, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Je vois que M. le ministre est déjà debout et souhaite intervenir, je lui cède la parole.

M. François Blais

M. Blais : Merci, M. le Président. Donc, bien sûr, je trouverais regrettable, là, qu'il y ait un report de ce projet de loi. Je dirai pourquoi tout à l'heure, mais peut-être revenir, là, sur certains éléments que j'ai entendus. Donc, il n'est pas question d'entretenir des préjugés, de nourrir des préjugés. Ceux qui ont des préjugés, il faut les laisser avec leurs préjugés, si possible faire en sorte qu'ils s'en débarrassent.

Donc, il y a un enjeu réel, je dirais, qui repose sur deux principes qui sont complémentaires. Il y a un premier principe de réciprocité, un principe qu'il faut doser, je le reconnais, donc, hein, parce qu'il s'agit, en fin de compte, d'aider les gens, d'aider les gens à s'en sortir, mais il y a, bien sûr, un principe de réciprocité, là, dans Objectif emploi. Mais il y a un principe d'efficacité, et là c'est intéressant parce qu'il y a un différend avec ma collègue de Gouin sur ce principe d'efficacité. Mais encore faut-il s'entendre sur quels sont les objectifs, hein, d'Objectif emploi.

Le premier objectif, ce n'est pas que la personne prenne n'importe quel travail si elle n'est pas en mesure de trouver un travail, tout simplement parce qu'elle a un certain nombre de difficultés et je reconnais toutes les difficultés dont a parlé ma collègue de Gouin, hein? Il y a des personnes qui arrivent à l'aide sociale qui ont des problèmes de consommation, qui ont des problèmes d'analphabétisme. Tous ces problèmes-là sont reconnus, et nous les reconnaissons dans le projet de loi. C'est pour ça que nous disons très bien qu'il faut que la personne soit dans une démarche, qu'elle accepte... Pour reprendre l'expression que les agents d'aide à l'emploi, là, que je rencontre ces derniers temps utilisent souvent, il faut que la personne accepte de se mobiliser vers l'emploi, qui sait, vers les études — ce serait vraiment très bien — ou encore simplement, là, reprendre un peu le contrôle de sa vie sur certains problèmes, donc, d'ordre social que ces personnes-là peuvent vivre. Donc, il ne s'agit pas du tout de frapper... d'entretenir des préjugés, mais simplement de trouver la meilleure façon de les aider.

Le problème que nous rencontrons aujourd'hui, hein, il peut se présenter de différentes façons, mais je vais prendre trois chiffres qui sont éloquents. Récemment, là, un organisme d'aide à l'employabilité pour les jeunes a demandé à son CLE, hein, son centre local d'emploi, de lui remettre une liste de bénéficiaires pour pouvoir les rencontrer, hein? On a remis une liste de 100 bénéficiaires, il y en a cinq seulement qui ont pu être rencontrés et deux... contactés, pardon — il est un peu tard, M. le Président — contactés et deux seulement qui se sont présentés à une rencontre. Vous vous rendez compte, hein, deux seulement. Et ce que nous disent les agents d'aide à l'emploi, c'est qu'on a tellement de choses à leur offrir, des emplois, parfois simplement une formation, simplement des rencontres pour voir quels sont les problèmes sociaux qu'ils rencontrent. Il y a des jeunes là-dedans qui n'ont pas de logement, donc, avant de parler d'emploi, il faut commencer à les aider, à trouver un logement, à s'installer dans la vie, etc. Donc, les agences, ce qu'ils nous disent, c'est qu'on a tellement de choses que l'on pourrait leur offrir, mais ils ne viennent pas. Ils ne viennent pas, donc... Et, encore une fois, il s'agit simplement de les accueillir parce qu'ensuite il faut faire un parcours avec eux. Et ce qu'ils nous disent, c'est qu'ils abandonnent beaucoup, beaucoup trop rapidement.

Donc, ici, c'est le principe de réciprocité, faire en sorte que les gens viennent, acceptent d'être aidés. Et là on met en place des ressources financières pour eux, on met en place des ressources en termes de services pour eux, mais encore faut-il qu'ils viennent. S'ils ne viennent pas, on ne peut rien, rien, rien faire. C'est pour ça que les agents d'aide à l'emploi, quand nous les rencontrons, nous disent : Pour eux, Objectif emploi, c'est simplement un outil supplémentaire. Il ne s'agit pas de couper l'aide sociale, d'être coercitif, il s'agit simplement d'être dans une relation où la personne définit son projet. Et, si le projet, il est réaliste... Et ça, c'est important, hein, il ne s'agit pas d'imposer une vision des choses. Mais, si le projet, il est réaliste, si c'est possible, s'il est réalistement, disons, envisageable pour la personne de reprendre les études et, qui sait, de les terminer, à ce moment-là, bien sûr, on s'entend sur ce projet-là avec la personne et puis on l'aide à cheminer.

Le problème, c'est si, un mois plus tard, la personne ne vient plus et dit simplement : Écoutez, moi, je ne viens plus, ça ne m'intéresse plus. À ce moment-là, tous les efforts que l'on a mis, les ressources qu'on a mises à la disposition de la personne, tout ça tombe à l'eau. Et ça, c'est pour ça qu'il faut trouver une solution. La majorité des pays dans le monde, notamment les pays scandinaves, la Suède, la Norvège — j'y vais de mémoire — le Danemark, certainement l'Allemagne aussi, la France, huit provinces sur 10 au Canada utilisent des outils de réciprocité. Certainement pas pour entretenir des préjugés, mais pour faire en sorte qu'il y ait un pacte entre la personne et l'État, puis faire en sorte que ça puisse décoller dans leur vie.

• (17 h 40) •

Et je rappelle, hein, que le projet est extrêmement ciblé parce qu'il s'agit des nouveaux demandeurs à l'aide sociale. Pourquoi? Parce qu'on sait que c'est avec eux — et ça, les représentants d'Emploi-Québec nous le disent — qu'on a le plus de chances de les mettre en marche vers une autre vie, serait-ce les études, serait-ce un emploi ou simplement commencer à réorganiser leur vie parce que leur vie est trop désorganisée. Donc, sur quoi, à peu près, de mémoire, 400 000 bénéficiaires de l'aide sociale, on parle d'un tout petit nombre, hein, 17 000 répartis dans les centres locaux d'emploi. Parfois, ça peut faire une trentaine de demandes, une quarantaine de demandes par année qui seraient traitées spécifiquement avec plus de ressources immédiatement et plus aussi de services pour les aider à s'en sortir, bien entendu.

Depuis l'élection de notre gouvernement en avril 2014, nous avons affirmé à maintes reprises que nous travaillerons à améliorer l'adéquation entre les besoins de la main-d'oeuvre, la formation et la pleine participation au marché du travail. Notre développement économique, quand on y pense bien, repose sur deux choses fondamentales : une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi et, bien sûr, l'innovation. Depuis près de deux ans, nous tenons le même discours en toute transparence. Nous dialoguons avec les partenaires du marché du travail pour échanger avec eux sur les meilleures façons d'y parvenir. Ces partenaires sont les syndicats, les employeurs, les commissions scolaires, les réseaux collégiaux et universitaires, ainsi que le milieu communautaire et les organismes d'employabilité. Depuis près de deux ans, nous posons des gestes en ce sens, et l'un de ces gestes, nous l'avons posé en novembre, avec le dépôt du projet de loi n° 70, la Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

Surseoir à ce projet, comme on nous le demande aujourd'hui, serait nier les réalités du marché du travail québécois et les défis qui nous attendent. Moi, je me promène partout dans les régions, et ce que les gens me disent, hein, les entreprises me disent : On a besoin de travailleurs, on a besoin de travailleurs qualifiés, mais on a aussi des emplois non qualifiés pour lesquels, là, on aurait besoin de personnel, et c'est de plus en plus difficile à trouver.

Nous avons accepté avec ouverture que l'Assemblée nationale tienne des consultations particulières. Pendant quatre jours, nous avons échangé avec plusieurs groupes intéressés par ce projet de loi. Aujourd'hui, nous en sommes à l'adoption de principe. M. le Président, il m'apparaît inconcevable que des parlementaires en cette Chambre souhaitent reporter les travaux entourant le projet de loi n° 70, dont l'esprit est incontournable. Je me souviens encore, le dernier groupe que l'on a rencontré, c'est... le Secrétariat à la condition féminine... pas le secrétariat, mais...

Une voix : ...

M. Blais : ...le Conseil du statut de la femme, merci. Je me suis levé très tôt ce matin, M. le Président. Donc, le Conseil du statut de la femme, et ils nous ont dit de façon très, très, très forte : Il faut faire en sorte que nos filles terminent leurs études. Il faut les forcer, il faut les obliger, c'est trop important. Leur capital humain, hein, est en cause. Et, bien sûr, dans ce projet de loi là, il y a cette idée que, dans le jeune âge, c'est le meilleur moment ou peut-être c'est le seul moment pour pousser le capital humain et faire en sorte que, par la suite, les gens aient terminé leurs études, qui sait, occupent un emploi ou d'autre chose. Ensuite, c'est beaucoup, beaucoup plus difficile, et, là-dessus, encore une fois, les recherches sont très, très claires.

Alors, quand on a demandé au Conseil du statut de la femme : Bien, comment voulez-vous les obliger? Il n'y avait pas de solution, hein? Ils nous appelaient à trouver des solutions, mais c'est fondamental que l'on aide les jeunes en particulier, les premiers demandeurs de l'aide sociale en général, à trouver les ressources en eux, là, pour développer leur capital humain parce qu'ensuite il est trop tard.

Comment peut-on nier le contexte démographique actuel, qui, déjà, exerce une pression considérable sur le marché du travail québécois? Comment pourraient-ils dire aux partenaires — nos collègues d'en face — du marché du travail qu'ils ne veulent pas leur donner les leviers nécessaires pour améliorer l'adéquation entre la formation et emploi? Comment pourraient-ils dire aux entreprises de leur circonscription qui peinent à recruter de la main-d'oeuvre qu'ils refusent de discuter de ce projet de loi qui vise à les aider? Je peux vous dire que les entreprises, hein, sont très favorables au projet de loi, sont très favorables à l'idée de renforcer l'adéquation formation-emploi et sont prêtes aussi à accueillir des jeunes à l'aide sociale, bien sûr lorsqu'ils sont prêts, lorsqu'ils sont prêts à faire ce saut, hein, vers des perspectives, là, d'emploi. Comment pourraient-ils accepter que des citoyennes et des citoyens sans contraintes à l'emploi présents dans leur comté fassent une première demande à l'aide sociale sans que l'État leur apporte une aide personnalisée qui leur permet d'intégrer le marché du travail et de se sortir éventuellement de l'exclusion et de la pauvreté? Parce qu'on va tous s'entendre ici, un programme comme l'aide sociale, c'est un programme extrêmement stigmatisant et c'est un programme qui conduit beaucoup trop souvent à la marginalité sociale et la marginalité économique. Je pense que, là-dessus, tout le monde s'entend.

Du côté de cette Chambre, nous refusons d'abandonner les premiers demandeurs d'aide sociale, les entreprises, les partenaires du marché du travail parce que, M. le Président, en demandant d'abandonner ce projet de loi, c'est exactement ce que demandent les parlementaires de l'autre côté de la Chambre. Ce qui est paradoxal, M. le Président, dans cette demande de l'opposition, c'est que l'ensemble des parlementaires ici présents, tous partis confondus, disaient reconnaître encore récemment l'importance des phénomènes du vieillissement de la population et de la rareté de la main-d'oeuvre. Ils soutenaient aussi qu'il était nécessaire d'agir. Est-ce qu'ils ont aujourd'hui changé d'idée?

Est-ce que je peux rappeler à cette Assemblée qu'il y aura, au cours des prochaines années, d'importantes possibilités d'emploi dans toutes les régions du Québec? Aujourd'hui même, seulement sur le site Placement en ligne d'Emploi-Québec, aujourd'hui, 49 000 postes vacants, M. le Président, seulement sur le site d'Emploi-Québec — et Emploi-Québec, hein, ne recueille pas l'ensemble des postes vacants, on le sait bien, sur le territoire — dont 10 950 en Montérégie, 8 842 sur l'île de Montréal, 6 547 dans la région de Québec. Ce n'est là qu'une fraction des emplois actuellement disponibles au Québec. S'il y avait 12 % de chômage au Québec, 13 % de chômage au Québec, je comprends que nos collègues d'en face pourraient se poser des questions par rapport à Objectif emploi. On n'est pas du tout dans cette situation-là.

Au cours des prochaines années, plus de la moitié des emplois à pourvoir devront l'être par des jeunes de moins de 25 ans qui ne sont pas encore sur le marché du travail. Des personnes nouvellement immigrantes en occuperont 16 %; les actuelles chômeuses et chômeurs, 8 %; les personnes de 65 ans et plus, 7 %. L'emploi sera en croissance dans toutes les régions du Québec, et il faut être au rendez-vous dès maintenant. La main-d'oeuvre actuelle et future doit être en mesure de répondre aux besoins des entreprises d'ici. Notre démographie ne doit, en aucun cas, constituer un frein aux projets de croissance de nos entreprises, et au développement économique du Québec, et au développement social des individus, des concitoyens et concitoyennes. C'est pourquoi je demande aux parlementaires des autres formations politiques d'appuyer les démarches entreprises par notre gouvernement — je sais que c'est déjà fait pour certains de nos collègues — et favoriser une meilleure adéquation entre la formation et les compétences de la main-d'oeuvre et les besoins des entreprises.

Le projet de loi n° 70 ne constitue pas une réforme de l'aide sociale. Nous ne réformons pas l'aide sociale. Simplement, nous accordons une attention particulière, et une bonification des mesures qui seront offertes aux premiers demandeurs. À vrai dire, l'OCDE recommande à tous les pays qui veulent améliorer l'intégration des personnes qui sont exclues du marché du travail d'y aller avec trois types de mesures à la fois : tout d'abord, améliorer financièrement la condition des personnes pour qu'elles puissent, par exemple, se trouver un travail, se déplacer, assumer certains frais — c'est exactement ce que l'on fait; faire en sorte que les organismes d'employabilité — et il y en a plusieurs au Québec — à la fois les centres locaux d'emploi, mais qui travaillent avec tout un réseau d'organismes communautaires en employabilité, soient en appui, hein, à ces personnes — c'est exactement ce que l'on veut faire; et avoir, si nécessaire, des sanctions, mais des sanctions mesurées — j'insiste sur «mesurées» — et strictes à la fois pour s'assurer de la bonne continuité et de la participation du plus grand nombre.

Et c'est évident que, si quelqu'un a des problèmes d'ordre psychologique ou a des problèmes d'ordre familial importants, on ne lui demandera pas d'aller se trouver un emploi immédiatement, on va faire en sorte de le assurer, par rapport à ce problème-là, qu'elle s'en sorte ou qu'il s'en sorte, et, par la suite, on pourra développer un projet qui est davantage lié aux études ou aux emplois.

J'ai pris note des préoccupations exprimées lors des consultations particulières à l'égard de modalités qui seront définies par règlement. Je tiens à rappeler que cette procédure permet également à toute personne ou toute autre organisation de se prononcer sur ces modalités lors de la prépublication dans la Gazette officielle.

Je termine, M. le Président, en réaffirmant l'importance de poursuivre l'étude de ce projet de loi, qui vise une meilleure adéquation entre la formation de la main-d'oeuvre et les emplois disponibles, qui tend à favoriser l'intégration en emploi d'un plus grand nombre de personnes. L'adéquation formation-emploi, c'est miser sur le capital humain. Et tout l'enjeu de ce projet de loi, c'est bien sûr... c'est le renforcement du capital humain, hein, de ceux qui arrivent et qui sont des nouveaux demandeurs à l'aide sociale, c'est d'avoir les compétences pour occuper les emplois disponibles. C'est une question de dignité, c'est une question de liberté économique. Merci beaucoup, M. le Président.

• (17 h 50) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le ministre, pour cette intervention. Nous en sommes toujours sur le débat restreint de deux heures. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, je vous cède la parole.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour d'intervenir sur la motion de la collègue de Gouin. M. le Président, la collègue de Gouin nomme bien les choses dans sa demande. Vous savez, en matière de condition féminine, l'analyse différenciée selon les sexes apparaît souvent comme presque un mythe maintenant. Au cours des années, au cours des décennies, les gouvernements se sont donné des obligations de procéder à une analyse différenciée selon les sexes pour connaître l'impact des programmes, des mesures sur les hommes et les femmes et connaître, finalement, comment ces mesures-là auraient... je vais dire «impacter», mais je n'aime pas le mot «impacter», vont affecter la condition des femmes en tant que telles. Et, malheureusement, encore une fois, le gouvernement n'a pas procédé à ce type d'analyse. Alors, on n'est pas en mesure actuellement de connaître si les mesures vont affecter plus ou moins les femmes. Est-ce qu'elles vont affecter plus les femmes seules, plus les femmes monoparentales que les hommes seuls ou les hommes pères de famille? On ne le sait pas. On ne le sait pas du tout, du tout, et je pense que, dans la dynamique où le gouvernement souhaite arriver à ce qu'il appelle Objectif emploi, bien, je pense que de documenter les mesures qu'il veut mettre en place à partir de l'analyse différenciée selon les sexes est quelque chose qui serait bénéfique.

Le ministre a un passé qu'il a fait beaucoup de recherche, qu'il a fait beaucoup... qu'il a fouillé beaucoup le dossier, entre autres, on se rappellera, du revenu minimum garanti, il a même... J'ai lu son document qu'il a fait en 2003 avec celui qui est maintenant ministre au fédéral, M. Duclos. Ils ont coécrit une analyse sur l'allocation universelle, et, on le voit bien, c'est à partir de recherches de ce type qu'on est à même de se prononcer sur des concepts. Alors, aujourd'hui, force est de constater que nous n'avons pas ces éléments qui nous permettent de prendre position là-dessus, nous n'avons pas les données probantes qui nous permettent d'anticiper les résultats dont le ministre semble, lui, connaître. S'il les connaît, tant mieux, mais qu'il nous les partage parce que nous, nous ne les avons pas.

Et, dans tout ce dossier du projet de loi n° 70, vous savez, M. le Président, ce qui est toujours assez étrange, c'est de voir que le gouvernement arrive comme ça avec une loi, un projet de loi, le projet de loi n° 70, arrive avec un brassage de programmes et, finalement, n'attend pas le résultat de sa propre consultation. C'est quand même assez étrange, un gouvernement qui débute une consultation de lutte à la pauvreté dans une dynamique... Et je ne sais pas si vous étiez là, M. le Président, lorsque Christos Sirros avait fait adopter — je pense que c'est en 2002 si je me rappelle bien — la loi pour contrer la pauvreté. Vous étiez là, je pense, oui, hein? Alors, moi, j'étais là, mais pas assise dans un siège, je regardais ça de mon cabinet. Et, à ce moment-là, cette loi-là, une loi fondatrice, là, une loi importante, avec des objectifs clairs, très clairs, mais, malheureusement, si on reprend cette loi-là et on regarde l'action du projet de loi n° 70, ça ne se parle pas, M. le Président, il n'y a rien qui va dans le même sens, absolument pas. Et ça ne va pas du tout dans le sens des écrits passés du ministre actuel. Bon, je sais que ce n'est pas lui qui avait fait la loi, ce n'est pas lui qui a écrit la loi n° 70, c'est parfait, mais ça ne l'empêche pas de retourner à la table à dessin et peut-être, justement, d'influencer une réécriture de cette loi-là. Moi, je pense que j'aimerais bénéficier de sa science.

Moi, j'ai beaucoup aimé le document avec M. Duclos. J'ai beaucoup, beaucoup aimé ce document. J'ai trouvé ça très intéressant, dont, entre autres, une des phrases qui disait que l'allocation universelle n'était pas une mesure de lutte à la pauvreté. Ah! bien, ça, j'ai été très surprise d'apprendre ça parce que ça semble être un concept un peu miracle pour tout le monde. Et moi qui ai travaillé à l'époque à rapatrier la main-d'oeuvre du fédéral, bien, ils occupent, tous les deux, aujourd'hui des postes qui pourraient permettre, justement, de rapatrier des pouvoirs en matière de main-d'oeuvre pour faire en sorte que le Québec ait les meilleurs moyens. Moi, je le souhaite qu'il puisse utiliser son siège de ministre de la Solidarité sociale, comme Mme Harel utilisait à l'époque avec son collègue l'ancien ministre Pierre Pettigrew, et qu'on puisse rapatrier des pouvoirs en matière de main-d'oeuvre. Et pourquoi pas? Et pourquoi pas? Entre autres, toute la stratégie jeunesse. Parce que vous savez, M. le Président, que la stratégie jeunesse fédérale...

Une voix :

Mme Poirier : Est-ce que vous m'arrêtez là, là? Non? D'accord. Avec la stratégie jeunesse fédérale, ce que ça veut dire, c'est que ça nous permettrait d'avoir tous les leviers pour, justement, intervenir auprès de nos jeunes. Ce serait extraordinaire. En tout cas, moi, j'espère que les députés de Québec fédéraux, provinciaux vont se parler en matière de solidarité sociale parce qu'il y a là une occasion intéressante, il y a là un moment historique à réaliser. Et je souhaite au ministre de le réaliser parce que moi, je me rappelle, en 1997, que ça a été un moment fort enthousiaste que j'ai vécu entre ces deux ministres. Et de faire signer cette entente-là, c'était vraiment un mouvement important. Et c'est à partir de là qu'on a fait Emploi-Québec, c'est là qu'on a créé les CLE, c'est là qu'on a créé cette nouvelle organisation qui s'appelle Emploi-Québec maintenant.

Alors, la demande de ma collègue est tout à fait légitime, M. le Président. Et le ministre disait tout à l'heure quelque chose qui est très intéressant. Et, d'ailleurs, nous allons avoir un débat de fin de séance tout à l'heure avec le ministre des Affaires municipales, alors je reprends les paroles du ministre de la Solidarité sociale. Et, si le ministre des Affaires municipales écoute, j'espère qu'il va entendre, eh bien, le ministre disait : Vous savez, l'important, c'est de se trouver un logement, hein? Ça fait partie de la pyramide de Maslow, hein, c'est le socle où on établit les gens. À partir du moment où on a un logement convenable, eh bien, oui, on peut commencer à bâtir une vie. Et le ministre a tout à fait raison, si on trouve des logements convenables aux gens, on va être capable de bâtir leurs vies.

Mais moi, je regarde les jeunes qui sont dans les entreprises d'insertion, actuellement, je vais vous dire, M. le Président — et vous le savez, vous en avez, des entreprises d'insertion dans votre circonscription — nous avons un moratoire présentement, on ne peut plus en développer, et je ne vois pas rien dans le projet de loi qui va ouvrir le moratoire, qui va faire en sorte qu'on va augmenter le nombre de places. Si on veut insérer des jeunes à l'emploi, il ne faut pas les brimer, il faut les encourager, il faut leur donner des perspectives, il faut faire en sorte que ces jeunes-là soient encadrés, mais d'une façon positive, et non pas négative.

Le logement est un socle. Hier, nous étions en conférence de presse, nous étions à l'Avenue Hébergement, sur la rue Sainte-Catherine. L'Avenue Hébergement, c'est la plus grosse piquerie qu'il n'y avait pas dans Hochelaga-Maisonneuve. Le 3911, Sainte-Catherine, c'est une adresse connue pas par les bonnes gens. Mais, malheureusement, le 3911 a connu une période économique très, très forte parce que c'était devenu le repère de la petite criminalité et, naturellement, bien, de tous les revendeurs, qui avaient une place de choix. Des interventions policières ont eu lieu, un organisme comme l'Avenue a eu la chance, avec les programmes de logements, d'acheter la bâtisse. Et imaginez-vous donc qu'hier, à la conférence de presse, les journalistes disaient : On voudrait parler à des jeunes, et on a dit : Non, ce n'est pas possible, ils sont aux études, ils sont au travail parce que le logement qu'on leur a donné là a permis, justement, qu'on puisse agir sur eux. Alors, monsieur...

Une voix : ...

Mme Poirier : Alors, on arrête là? Bon, on arrête là, M. le Président, je continuerai plus tard.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Je suis désolée, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, de vous interrompre, mais, compte tenu de l'heure, je vais devoir suspendre les travaux sur le débat restreint. Je vais demander à Mme la députée si elle a l'intention de poursuivre son intervention à 19 h 30, au moment de la reprise.

Mme Poirier : Tout à fait.

• (18 heures) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : La réponse est oui. Donc, je suspends le débat restreint pour l'heure jusqu'à 19 h 30.

Débats de fin de séance

Et nous allons maintenant procéder aux débats de fin de séance. Alors, j'invite les députés qui doivent quitter de le faire en silence. Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux débats de fin de séance.

Accès à des logements de qualité à un prix abordable

Le débat qui se fera entre Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire concerne le financement du programme AccèsLogis.

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes. Et le député a ensuite un droit de réplique de deux minutes. Alors, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, vous disposez de cinq minutes.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, j'ai fait, durant les dernières semaines, une tournée dans plusieurs régions du Québec pour aller sur le terrain. Vous savez, M. le Président, il y avait une affirmation faite par l'ex-ministre des Affaires municipales, à qui je veux témoigner ma sympathie et tout, dans le fond, mon courage devant l'épreuve qu'il a à passer. Alors, l'ex-ministre des Affaires municipales avait fait une affirmation à l'effet qu'il y a 6 000 logements sociaux à réaliser. Pourquoi en ajouter 3 000 de plus? Parce qu'on n'est pas capables de les réaliser. Alors, moi, en partant de cette affirmation-là, je voulais aller sur le terrain pour voir pourquoi, pourquoi on n'est pas capables de réaliser les logements sociaux, pourquoi les groupes de logement ne livrent pas finalement ces logements.

Alors, premier constat, M. le Président, 6 000 unités de logements sociaux, c'est deux ans de programmation à 3 000 par année, tel qu'on le faisait avant la coupure que le gouvernement libéral a faite pour l'année 2015‑2016. Alors, il y a 6 000 logements qui sont en attente, parce que le gouvernement a décidé par une stratégie autre de couper tout ce qui permettait de réaliser des projets. Alors, M. le Président, je vous donne un exemple à Petite-Nation. J'étais à Gatineau dimanche matin rencontrer le groupe Logemen'occupe. Et, à Petite-Nation, eh bien, il y a un projet important pour lequel, on le sait, dans le montage financier AccèsLogis, il faut que la municipalité puisse mettre une contribution. Mais, à cause des coupures libérales d'austérité de ce gouvernement, eh bien, le projet ne pourra pas voir le jour. Il ne pourra pas voir le jour, parce que le gouvernement a coupé le programme Réno Québec. Le programme Réno Québec permettait de faire de l'achat transformation, donc prendre un bâtiment déjà en place et de le rénover.

Il y avait aussi le programme qui s'ajoutait à cela. Il y avait, dans le fond, tout ce qui était autour de Novoclimat, ce qui permettait aussi d'ajouter des sommes pour faire... Par exemple, à Montréal, il y a des endroits où ça prend des toits verts, à d'autres endroits, ça prend des toits blancs. Ça permettait de répondre à des critères énergétiques.

Ensuite de ça, M. le Président, il y avait aussi une demande qui est faite depuis longtemps par les groupes de logement, qui est de dire : Actuellement, les budgets sont faits sur les coûts de 2009. Bon, vous puis moi, on ne gagne pas le même salaire qu'en 2009, les gens de la construction non plus, les terrains, pour les acheter, ne sont plus aux coûts de 2009. Ça, le ministre le sait parfaitement parce que, comme ancien président du Conseil du trésor, il sait bien que ça ne coûte pas le même budget au Québec que 2009, mais, pour faire du logement social, on impose, on impose aux groupes les coûts de 2009. Alors, il est bien sûr que, lorsqu'on fait un montage financier actuellement, bien, on n'y arrive pas. On n'y arrive parce qu'on n'a pas les bons coûts pour réaliser les projets, parce que le programme Réno Québec a été aboli, parce que les budgets en décontamination des sols... Puis, je suis persuadée, dans votre circonscription, c'est comme dans la mienne, on est dans... On est en ville, on est à Montréal, et les terrains sont contaminés. Alors, il faut les décontaminer pour être capable de construire du résidentiel. Il n'y a plus d'argent dans ClimatSol, il n'y a plus moyen d'aller mettre des sommes là-dessus. En plus de ça, il y avait aussi un programme qui s'appelait les Projets novateurs : budget coupé, fini, merci.

Écoutez, M. le Président, on nous dit : Ah! on n'a pas coupé le programme AccèsLogis. Non, non, mais on a coupé tout ce qui permettait de faire du AccèsLogis. C'est ça, la réalité. C'est ça, la réalité. Alors, moi, ce que je demande au ministre aujourd'hui, c'est de prendre l'engagement, prendre l'engagement d'au moins rétablir les budgets à 2016 pour qu'on puisse réaliser les projets. Il y en a 6 000 en attente, 1 500 de la dernière cuvée, 7 500 unités à réaliser, à réaliser aux coûts de 2016. C'est la demande des groupes de faire en sorte d'ajouter des sous dans le programme de décontamination de sols pour qu'on puisse réaliser les projets et de faire en sorte que, s'il y a des demandes au niveau énergétique, au niveau environnemental... Particulièrement dans certains arrondissements à Montréal où on demande des toits blancs, on demande des toits verts, on demande des mesures de Novoclimat, est-ce qu'on peut donner les moyens aux groupes de ressources techniques qui agissent sur le terrain? Le logement social, c'est structurant, je viens de le dire au ministre de la Solidarité sociale. Ça permet à des femmes, à des jeunes de se réinsérer dans notre société.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, vous avez cinq minutes.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Oui. Merci, M. le Président. En fait, je suis content. Je suis content que la députée d'Hochelaga-Maisonneuve me pose des questions qui concernent le logement social parce que c'est un dossier qui me préoccupe tout autant qu'elle, tout autant qu'elle.

Alors, si on revient à la base de la problématique qui est ressentie sur le terrain, partout au Québec, de quoi il s'agit finalement, hein? Qu'est-ce qu'il faut atteindre comme objectif, compte tenu des problématiques qu'on observe? Il faut réussir à alléger le coût des loyers pour les ménages à faibles revenus. C'est ça, l'objectif qu'on poursuit ici.

Et, une fois qu'on comprend bien quel est l'objectif, bien, il y a différents moyens d'y arriver, il y a différents moyens d'y arriver. L'un de ces moyens, c'est effectivement le programme AccèsLogis, qui permet la construction de nouveaux logements sociaux. Et, d'ailleurs, dans le budget 2015‑2016, le gouvernement a fait l'annonce d'un investissement supplémentaire de 126 millions dans le programme, et ça, ça nous permet de construire 1 500 nouveaux logements dans le cadre du programme AccèsLogis. Maintenant, ces 1 500, mettons-les en perspective, là, ils s'ajoutent à ceux qui sont déjà en construction et ceux qui sont en préparation. Alors, à travers ce programme, c'est plus de 12 000 logements qui vont être livrés au cours des prochaines années, plus de 12 000 — 1 500, plus de 12 000. Et bien sûr on parle de construction. Alors, je pense que tout le monde va comprendre que, lorsqu'il y a des projets de construction, c'est un peu normal qu'il y ait un délai entre le moment où on annonce l'investissement puis le moment où on va livrer les nouvelles unités. C'est normal, il y a de la construction.

Alors, qu'est-ce qu'on fait dans cet intervalle, M. le Président, si effectivement on a l'objectif d'alléger le coût des loyers pour les ménages à faibles revenus? Parce que c'est ça, la problématique, là, qui existe sur le terrain. Puisque l'objectif, c'est de donner accès à un logement convenable au plus grand nombre de ménages à faibles revenus, ce qu'on a fait justement, justement, c'est d'annoncer, dans le budget 2015‑2016, une aide de 123 millions pour un programme d'aide directe, directement aux bénéficiaires. Ça s'appelle le supplément au loyer. Et ça, le supplément au loyer, ça s'ajoute à ce que je viens de dire, là, sur la construction des nouvelles unités. Ça va permettre, dans ce cas-ci, ce supplément au loyer, à des ménages à faibles revenus d'accéder à un logement tout en ne payant qu'à peu près, environ, 25 % de leurs revenus, comme d'ailleurs pour le programme des HLM. C'est ça que ça permet de faire. Alors, on atteint un plus grand nombre de personnes. On permet à un plus grand nombre de personnes d'accéder à un logement à un coût modique qui tient compte effectivement de leur situation de faibles revenus. C'est ça qu'on fait.

Alors, pourquoi on fait ça? C'est parce qu'on pense qu'en combinant les moyens comme, par exemple, en combinant AccèsLogis avec le supplément au loyer, on réussit de cette façon-là à aider plus de gens en difficulté plus rapidement, plus directement. C'est ça qu'on réussit à faire grâce à ça.

Alors, j'ai du mal, dans un contexte comme celui-là, à comprendre les doléances de l'opposition officielle. Je ne peux pas croire que l'opposition officielle est contre le fait qu'on puisse aider directement, qu'on puisse accélérer l'aide qui est acheminée aux ménages à faibles revenus pour accéder à des logements à un coût qu'ils soient capables de...

Et ça me fait... Puis je me permets de le dire, parce qu'on a souvent ce débat-là avec l'opposition officielle dans plusieurs dossiers. On l'a eu dans plusieurs dossiers depuis déjà plusieurs mois, depuis bientôt deux ans. Ce n'est pas les besoins des personnes qui sont défendus, très souvent, par l'opposition officielle, c'est les moyens qu'on utilise pour répondre aux besoins. L'opposition officielle s'intéresse plus aux moyens qu'on utilise qu'aux besoins des gens. Dans le fond, l'opposition officielle s'intéresse beaucoup plus au système qu'aux finalités du système.

Mais, nous, ce qui importe pour nous, là, que ça soit dans le domaine du développement régional, dans le domaine de l'aide à la famille, dans le domaine de l'accès au logement, c'est les personnes, pas le système qui entoure les personnes. C'est ça qu'on défend. C'est ça que je défends et c'est ça que je vais continuer à défendre. C'est la position du gouvernement, c'est d'aider le plus grand nombre de la meilleure façon possible et, souvent, ça veut dire pas un seul moyen, mais plusieurs moyens combinés pour atteindre les résultats. Merci, M. le Président.

• (18 h 10) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le ministre. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, droit de réplique de deux minutes.

Mme Carole Poirier (réplique)

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Alors, j'ai bien entendu la prise de parole du ministre, mais on va s'en parler, des suppléments au loyer.

Vous savez, M. le Président, les suppléments au loyer, ce n'est pas un nouveau programme, là. C'est un programme qui avait été mis en place dans les années 2000, au moment de la crise du logement. On avait sorti 5 000 suppléments au loyer. J'étais chef de cabinet quand je les ai faits, alors je ne peux pas dire que c'est un mauvais moyen, M. le ministre, je le sais, que c'est un moyen d'agir. Mais, quand on est dans une crise du logement, c'est un moyen d'agir.

Actuellement, on a un problème : ça prend de la disponibilité. Des logements de trois chambres, il n'y en a pas. Ce qu'il y a, c'est des taudis. Ce qu'il y a, c'est des logements mal chauffés. Alors, on a beau mettre des programmes de supplément au loyer sur la table, si ce qu'on offre aux locataires, c'est des mauvais logements, et c'est de ça dont on parle... Les personnes qui sont en situation d'itinérance, on ne peut pas les mettre dans un logement comme ça sans soutien communautaire. Bien, c'est ça que vous proposez actuellement.

C'est ce que même, aussi, votre collègue a signé avec le fédéral, dans le programme de la SPLI, la SPLI avec le Housing First. C'est des programmes de supplément au loyer qui font en sorte de mettre des gens en situation d'itinérance dans des logements privés sans soutien. C'est ça, votre formule, c'est ce qu'on dénonce. Ce n'est pas les moyens, ce n'est pas le système qu'on dénonce, c'est vos façons de faire, vos façons de faire qui sont de faire en sorte d'avoir des formules mur à mur ne tenant pas compte de la détresse des gens.

Le programme dans lequel on a été faire hier la conférence de presse en est la démonstration. Il faut du logement social et communautaire avec du soutien communautaire pour les clientèles vulnérables. Ça nous prend cela, pas 1 500 unités, 3 000, mais avec les bons budgets.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Cela met un terme à notre débat de fin de séance, et je suspends les travaux jusqu'à 19 h 30 pour la poursuite du débat sur le débat restreint.

(Suspension de la séance à 18 h 13)

(Reprise à 19 h 31)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Veuillez vous asseoir. Je vous souhaite une bonne soirée.

Projet de loi n° 70

Adoption du principe

Poursuite du débat sur la motion de report

Alors, on va poursuivre le débat sur la motion de report de la députée de Gouin, parce que c'est là que nous en étions. Il reste 41 minutes qui sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 24 min 37 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 23 minutes au deuxième groupe puis sept minutes allouées aux députés indépendants, sous réserve d'un maximum de deux minutes pour la députée d'Arthabaska, si elle décidait d'utiliser son droit de parole.

Alors, c'était Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qui avait commencé. Veuillez poursuivre pour votre formation. C'est toujours sur la motion de report. À vous la parole.

Mme Carole Poirier (suite)

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Alors, lorsqu'on s'est quittés pour la pause de souper, je disais que, si on veut insérer des jeunes, qu'on veut les retourner sur le marché du travail ou qu'on veut même les faire adhérer au marché du travail, parce que certains n'ont même jamais touché au marché du travail, il faut mettre les conditions optimales en place. Le ministre nous avait mentionné que, pour lui, il était important qu'un jeune puisse se trouver du logement, et je donnais l'exemple de la ressource que nous avons visitée hier, qui est la ressource de L'Avenue hébergement sur la rue Sainte-Catherine à Montréal, qui est dans une ancienne piquerie importante du quartier et qui, fort heureusement, a permis, grâce au programme AccèsLogis, d'être réhabilitée en 26 appartements pour des jeunes, 26 appartements meublés. Et ça aussi, M. le Président, c'est assez important, parce que, quand on sort de la rue, on n'a pas de meubles. Quand on sort de la rue... ça le dit, hein, on est dans la rue. Et, même si on a un chèque d'aide sociale, avec 616 $ par mois, comment voulez-vous vous loger, vous habiller, mais aussi vous meubler? Alors, les ressources au niveau du logement sont importantes dans ce cas-là.

Et c'est ce qui fait... M. le Président, quand le ministre dit qu'il faut que les jeunes se reprennent en main, bien, ça ne se fait pas tout seul. Ça ne se fait pas tout seul. Il faut mettre autour de la personne un ensemble de mesures. Et l'ensemble de mesures qu'il faut mettre auprès de cette personne-là, c'est des mesures qui vont l'amener plus loin, mais pas le pénaliser, qui vont amener la personne plus loin, qui vont être des mesures positives.

Et je vous rappellerai, M. le Président, et c'est quelque chose que j'avais proposé il y a maintenant plus d'un an, lorsqu'on a fait la réforme d'aide sociale en 1997-1998, on avait proposé une mesure, qui était la mesure de 200 $, pour permettre à une personne qui est sur l'aide sociale de gagner 200 $ pour... comme mesure de réintégration vers l'emploi. Mais, à ce moment-là, M. le Président, le salaire minimum était de 6 $. Aujourd'hui, le salaire minimum est à 10 $. C'est toujours le même 200 $. Alors, ça, c'est une mesure positive.

Si le gouvernement pouvait faire suivre justement cette mesure-là de retour sur le marché du travail... À l'époque, le 200 $ à 6 $ de l'heure, ça représentait au moins 30 heures travaillées. Aujourd'hui, si je prends le même 10 $ de l'heure puis je veux faire faire 30 heures travaillées, il faut que je permette des revenus supérieurs à 300 $. Ça, ce n'est pas une mesure pénalisante, c'est une mesure encourageante. Le but, c'est d'encourager les personnes qui sont exclues du marché du travail, pour toutes sortes de raisons, toutes sortes de raisons.

Et le ministre le dit, ce qu'on veut faire, c'est de prendre les gens qui arrivent à l'aide sociale. Mais quelqu'un qui arrive à l'aide sociale, ça a toutes sortes de couleurs, ça a toutes sortes de passés, ça a toutes sortes d'aventures dans sa vie, que ça soit quelqu'un qui arrive de l'itinérance et qui se raccroche tout doucement parce qu'on vient de lui donner un logement, parce qu'on vient de lui offrir justement de pouvoir travailler dans une entreprise d'insertion. Pourquoi le ministre n'ouvre pas plus de places, à la place, dans les entreprises d'insertion? Là, il y a quelque chose, c'est structurant.

Je vais vous donner un exemple, M. le Président : Le Boulot vers... Le Boulot vers..., ça existe depuis 1983, la première entreprise d'économie sociale et d'insertion à l'emploi, la première au Québec. Qu'est-ce qu'on a fait avec ces jeunes-là? On a dit : On va prendre votre chèque d'aide sociale puis on va le transformer. On va prendre votre chèque d'aide sociale, puis on va vous le verser en salaire, puis on va vous montrer un métier, on va vous montrer à construire des meubles, puis ces meubles-là, ils vont servir dans les garderies puis dans les maisons d'hébergement, que l'on fait au Québec. Une belle chaîne, en continu, intelligent, des meubles solides. Il n'y a personne qui passe au travers de ça parce que, justement, on les fait avec des méthodes de travail qu'on donne aux jeunes pour les former en ébénisterie.

Mais, vous savez, M. le Président, durant les premières semaines, quand ils arrivent à Boulot vers..., ces jeunes-là, ils n'en font pas, de meubles, ils n'en font pas, ils sont tellement loin du marché du travail. Ils sont loin parce qu'ils ont plein de choses à régler. Là, on leur dit : Il va falloir que tu arrives à l'heure, il va falloir que tu mettes des bottes de travail puis des lunettes de sécurité. Alors, quelqu'un qui est loin du marché du travail, qui n'a pas travaillé avec des contraintes à l'emploi, il faut travailler avec la personne. On va lui apprendre à gérer son budget. On va lui apprendre à ce qu'il ait assez d'argent jusqu'à la fin du mois pour se nourrir. On va apprendre à cette personne-là à fonctionner dans notre société. Mais on ne vient pas la pénaliser, M. le Président, on vient l'encourager, on vient la soutenir, on vient faire en sorte que, cette personne-là, on va travailler avec elle pour la sortir de l'aide sociale, pas lui couper 50 % de son chèque, non, non, non.

Alors, moi, la députée de Gouin a déposé une motion fort intéressante qui dit : Avez-vous des études? Moi, j'en ai, des études. Les entreprises d'insertion qu'on a mises en place, le Parti québécois, c'en est, des études. C'est les résultats les plus intéressants. On est reconnus dans le monde entier parce que nos taux d'insertion sont au-dessus de 70 %. Il n'y a pas de pays dans le monde qui fait des meilleurs résultats que nous, que ce soit Le Boulot vers..., que ce soit Les Ateliers d'Antoine, que ça soit Formétal, que ça... On en a, là, des centaines d'entreprises comme ça, d'économie sociale, d'insertion à l'emploi, que ça soit Le Chic Resto Pop qui prépare les dîners pour les enfants dans l'école par des gens qui apprennent, dans un premier temps, à couper des légumes, parce que juste... toute la concentration qu'ils ont besoin pour faire ce processus de réintégration sociale, dans un premier temps, avant de faire un processus d'intégration à l'emploi. On ne les pénalise pas, M. le Président, on les encourage, on les motive, on les soutient en bonifiant, justement, leurs chèques d'aide sociale, mais aussi en les encadrant. Et, quand ils finissent leur programme, bien, les organismes vont justement avoir des programmes de placement pour aider ces personnes-là à atteindre le marché du travail.

C'est drôle, ça fonctionne. 70 %, ça fonctionne. Il y en a que ça va en prendre plus qu'une fois, ça va peut-être en prendre deux fois, puis ils vont s'apercevoir que, s'ils vont au Chic Resto Pop faire de la cuisine, ce n'est pas pantoute leur domaine, ce n'est pas leur domaine, ils n'aiment pas ça. Ils vont finir, puis ils vont dire : Moi, je ne veux surtout pas aller travailler dans une cafétéria, ça ne m'intéresse pas de ma vie. Ils vont aller en faire un dans un autre domaine. Ils vont aller, exemple, au Boulot vers..., ils vont aller travailler dans le bois, ils vont construire des meubles, ils vont dire : Ah! ça, ça me plaît. Ça, je me retrouve là-dedans. Puis il y en a, des jeunes, qui ne travailleront dans rien de ça, M. le Président, mais ça va juste leur donner le goût de peut-être retourner aux études, retourner aux études.

• (19 h 40) •

Et ça, le ministre nous l'a mentionné tout à l'heure, on veut les mobiliser vers les études. Alors, moi, ça, je trouve ça positif. Ça, je trouve ça positif. Mais ça veut dire quoi, quand on est à l'aide sociale, aller aux études, quand on est une femme monoparentale? Moi, je me rappelle, M. le Président, on a fait un programme à l'époque qui s'appelait Ma place au soleil. Le ministre connaît sûrement le programme. C'est un programme qui était pour les femmes monoparentales, un programme qui faisait en sorte de prendre la personne et de l'aider, parce que, quand tu es une femme monoparentale, tu as besoin d'une garderie, tu as besoin d'un CPE ou d'une garderie en milieu familial, parce que peut-être que tu vas avoir un horaire atypique, et ça va être difficile de te trouver un service de garde. On faisait en sorte aussi de mettre la cuisine collective au service aussi de ces gens-là pour les aider à s'organiser pour avoir des repas toute la semaine et jusqu'à la fin du mois pour nourrir leurs familles. On leur fournissait leurs passes d'autobus pour justement les aider à finir leur secondaire.

Dans mon comté, M. le Président, il y a un projet qui s'appelle L'École hors les murs, parce qu'il y a des gens... Vous savez, on a vu des statistiques, 50 % des gens sont analphabètes. Alors, il y a bien des gens qui n'ont pas fini leur secondaire, il y a bien des gens qui n'ont pas fini leur primaire. Et moi, j'ai un programme, au carrefour familial, qui a démarré justement en lien avec notre CJE et qui fait en sorte de favoriser une école atypique totalement. Alors, c'est des gens qui arrivent là, troisième année, secondaire I, secondaire III, ils sont dans un vaste local avec du soutien, et on va les aider à cheminer. Bien, savez-vous qu'est-ce qu'on a fait, M. le Président, quand on était au gouvernement? Bien, on a fait en sorte qu'il y ait un CPE dans ces installations. Pourquoi? Parce que les femmes avaient besoin de faire garder leurs enfants. Bien, on a ajouté un CPE à l'intérieur des installations pour que le parent qui va à l'école finir son secondaire et son primaire, bien, puisse avoir une place de garde directement sur place, ne pas avoir à faire deux, trois arrêts le matin. Ça, c'est structurant. Ça, c'est aider les gens. Ça, c'est de mettre en place des conditions gagnantes.

Et moi, je suis très fière, je donne des bourses justement aux jeunes qui finissent. Je dis des jeunes, mais j'ai des 30, 35 ans là-dedans qui finissent leurs études et qui décident de, par exemple, aller faire leurs cours au cégep en service de garde, d'autres vont aller faire leurs cours services infirmiers au cégep Maisonneuve. Je suis tellement fière de voir que ces gens-là raccrochent à la vie. Puis souvent ils vont raccrocher à cause de leurs enfants, parce qu'ils veulent donner un meilleur à leurs familles. Pourquoi on veut les pénaliser, ces gens-là? Pourquoi on veut les brimer? Pourquoi on veut leur enlever les seuls moyens qu'on devrait mettre à leur disposition?

Malheureusement, et je le dis parce que je connais bien ce ministère-là, le ministère de l'Emploi, Solidarité est un ministère de contrôle. Il y a toute une kyrielle de fonctionnaires qui sont là, très compétents, qui sont même trop compétents des fois, et que le but est de trouver l'erreur. Ils sont bien plus... C'est bien plus facile couper un chèque que de le bonifier. Et ma crainte, M. le Président, ma crainte, c'est que, la personne qui va refuser le plan que le ministre souhaite lui proposer, eh bien, la première chose qu'on fasse, c'est : on va couper ton chèque. La première chose qu'on va faire, c'est rendre encore plus vulnérables ces personnes-là.

M. le Président, avez-vous pensé vivre avec 600 $ par mois? Avez-vous pensé cinq minutes vivre avec 600 $? Le loyer, en moyenne, dans d'Hochelaga-Maisonneuve, pour un trois et demi, c'est 650 $, dans d'Hochelaga-Maisonneuve, 650 $. Tu ne peux même pas te loger. Une personne seule à l'aide sociale ne peut se loger. Elle doit aller vivre en chambre, et on sait ce que ça veut dire. Alors, ils vont vivre dans des taudis. Ils vont vivre dans des endroits mal isolés, dans des endroits mal chauffés l'hiver. Et qu'est-ce que ça veut dire? Bien, on les isole encore plus. On les rend plus malades. On fait en sorte que, ces gens-là, on ne leur donne aucune condition pour retourner sur le marché du travail.

Pourquoi ne pas travailler positivement? Pourquoi ne pas travailler pour mettre autour de la personne les conditions gagnantes? Pourquoi ne pas faire en sorte qu'une personne qui veut retourner aux études, par exemple, universitaires, cégep... pourquoi on ne la soutient pas plus? Pourquoi il faut absolument quitter l'aide sociale pour aller sur le régime des prêts et bourses? Parce que c'est ça, c'est ça, notre régime actuel. Alors, si vous êtes une mère monoparentale, vous devez quitter le régime d'aide sociale qui permet d'avoir des soins pour vos enfants, qui permet d'avoir des soins pour vous gratuits, et de vous rendre encore plus vulnérable en tombant sur les prêts et bourses. Ça, c'est ce que le ministre propose aujourd'hui. Malheureusement, c'est le système dans lequel on vit, parce que vous ne nous proposez pas autre chose.

Moi, je vous le dis, M. le ministre, vous avez une occasion extraordinaire. La proposition de la collègue de Gouin vous donne du temps, trois mois, et moi, je sais que c'est possible en trois mois d'avoir de l'imagination, de faire stimuler le milieu, de demander au milieu qui est sur le terrain... Demandez aux CJE, demandez aux organismes communautaires, demandez à vos partenaires que sont les entreprises d'insertion, ils vont vous en trouver, des solutions. Ils vont vous trouver des solutions parce qu'ils travaillent avec ce monde-là, ils travaillent avec la population la plus vulnérable. Et, à mon avis, on est bien plus gagnants de travailler positivement avec les gens que de travailler à les pénaliser. Alors, le projet de loi, tout autour, est là pour... dans un but, et, ma lecture à moi, c'est un but pénalisant et non pas un but d'encouragement.

Alors, moi, je pense que la proposition de la députée de Gouin est tout à fait louable, devrait au contraire être regardée avec du positivisme. Trois mois, M. le Président, ça nous mène à peu près à la fin de la session. D'ici la fin de la session, le ministre aurait tout le loisir de revoir cette offre de service là qu'il veut mettre sur la table. Puis il y en a, des idées, j'en suis persuadée, je les ai lues dans ses écrits. Il y en a, des idées, il y a des choses qui existent. Il y a des choses qui existent. Les entreprises d'insertion sont prêtes demain matin à rencontrer le ministre et à dire : Donnez-nous des places, on va ouvrir le marché, on est prêts à y aller. Il y a des entreprises d'insertion qui sont même prêtes à faire des chiffres de nuit pour justement accepter plus de jeunes et faire en sorte de donner un coup de pouce aux jeunes.

Pourquoi on ne fait pas ça, M. le ministre, au lieu de pénaliser des jeunes, au lieu de ne rien leur offrir, au lieu de leur offrir du cheap labor, au lieu de les mettre dans ce qu'on appelle... ce que vous avez appelé, dans le projet de loi, des emplois convenables, qui finalement vont être des emplois au Dollarama à 10 $ de l'heure? Puis un emploi à 10 $ de l'heure, quand tu es une famille, ça fait quoi? Bien, c'est pénalisant, M. le ministre, parce que tu n'as pas les moyens, tu n'as pas les moyens de vivre à 10 $ de l'heure. Parce que, quand tu es une famille avec des enfants, qu'il faut aller porter les enfants, avec l'augmentation des services de garde qu'on vient de vivre, bien, c'est ça que ça veut dire, c'est ça que ça veut dire. Ça veut dire que ces gens-là, à 10 $ de l'heure, actuellement, sont où? Bien, ils sont dans les banques alimentaires. Est-ce que c'est ça, le projet du ministre? Non, je suis persuadée que non. Mais actuellement c'est ce qui est sur la table, c'est ce que vous a légué votre collègue.

M. le ministre, prenez les trois mois qui sont là, arrêtez le processus et faites en sorte de développer des mesures d'employabilité adaptées à la population, pas des mesures pénalisantes, des mesures encourageantes. Les femmes monoparentales, les personnes en situation d'itinérance, les personnes seules ont besoin d'encouragement, pas de pénalités. Et je souhaite que ce moment de réflexion que la députée de Gouin a prévu, de trois mois, vous permette de revisiter votre projet de loi, d'aller vers des mesures d'employabilité positives et de faire en sorte que l'on sorte vraiment ces gens-là de la pauvreté. Parce que je pense que... notre but, tous ici, je pense que c'est un but louable. On ne veut pas accepter... On ne veut pas avoir des gens en situation de pauvreté, on veut des gens qui adhèrent au marché du travail et qui réussissent bien leur vie. Et ça, M. le Président, je souhaite que c'est aussi l'objectif du ministre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, il restera environ huit minutes à votre formation. Merci, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Je suis prêt à entendre le prochain intervenant ou la prochaine intervenante. Je reconnais maintenant M. le député de Laval.

M. Polo : Laval-des-Rapides.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Que c'est qu'il dit?

Des voix : Laval-des-Rapides.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Laval-des-Rapides. À vous, M. le député de Laval-des-Rapides, pour votre intervention.

M. Saul Polo

M. Polo : Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Je vous remercie, c'est un énorme plaisir pour moi ce soir de prendre la parole sur un important projet de loi, qui est le projet de loi n° 70 visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

Tout d'abord, M. le Président, permettez-moi de revenir sur le bien-fondé de ce projet de loi qui a pour but de sortir les gens du cercle vicieux de l'aide sociale en leur donnant les moyens de retourner à l'emploi. Pour ce faire, le gouvernement poursuit deux objectifs concernant l'adéquation formation-emploi à travers ce projet de loi : tout d'abord, favoriser l'intégration en emploi d'un maximum de travailleurs, notamment des jeunes, des décrocheurs, des nouveaux arrivants et les travailleurs expérimentés, et, deuxièmement, ainsi que s'assurer que la main-d'oeuvre soit qualifiée et qu'elle puisse répondre aux besoins du marché du travail. Le projet de loi n° 70 est aussi nécessaire pour assurer une meilleure adéquation entre les qualifications des personnes disponibles à l'emploi et les besoins du marché du travail.

• (19 h 50) •

Le projet de loi n° 70, il s'agit d'une réponse concrète du gouvernement aux défis du marché de l'emploi. D'ailleurs, M. le Président, le portrait de l'emploi au Québec est positif et nous prouve qu'il faut aller dans ce sens. Le taux de chômage a diminué à 7,9 % en décembre 2015 et il était à 7,6 % en janvier 2016. Également, M. le Président, l'emploi à temps plein augmente, et le taux d'emploi des personnes âgées de 15 à 64 ans se situe à 73 %, un sommet historique. La tendance est claire et positive depuis notre arrivée au pouvoir : création nette de 67 200 emplois depuis le mois de mai 2014, et le précédent gouvernement a fait perdre 66 800 emplois à temps plein entre janvier 2013 et janvier 2014. Donc, il est inacceptable, M. le Président, qu'on laisse des gens sans ressource pour participer à cet essor économique et de prospérité au Québec.

Également, en raison du vieillissement de la population et de la croissance du marché de l'emploi, les défis seront importants au cours des prochaines années à venir afin de pourvoir aux emplois disponibles. Les opportunités seront au rendez-vous pour les personnes qui désirent justement participer au marché du travail. Les emplois disponibles nécessiteront autant des personnes possédant une formation universitaire avancée que ceux possédant des formations de niveau collégial, professionnel ou même technique. En effet, près de 1,5 million d'emplois seront à pourvoir au cours des prochaines années, faisant de l'adéquation formation-emploi un des grands défis du marché de l'emploi actuel. Il y a actuellement, M. le Président, au Québec, près de 50 000 postes affichés, en moyenne, mois après mois sur le site de Placement en ligne d'Emploi-Québec. De nombreuses entreprises me disent avoir des besoins de main-d'oeuvre pour ne pas être en mesure de... et ne peuvent être en mesure de les remplir.

À ce titre, je donne un exemple, une entreprise de mon comté, que j'ai visitée au mois de décembre, dans le recyclage des palettes industrielles, les palettes en bois, ayant des besoins, justement, en main-d'oeuvre. Et le P.D.G. de cette entreprise-là, M. Raed Bechara, a fait appel à mon bureau non seulement pour me faire part de ses besoins de main-d'oeuvre, mais également pour offrir, justement... dans le contexte actuel de l'arrivée des réfugiés syriens, d'offrir ces opportunités-là prioritaires à ces nouveaux arrivants lavallois, notamment à travers le programme d'accueil des réfugiés syriens. C'est un exemple parmi tant d'autres, compte tenu du fait que, sur le site Web d'Emploi-Québec, juste pour la région de Laval, si ma mémoire est bonne, on tourne autour de près de 2 000 emplois constamment disponibles, juste pour la région de Laval, une région où nous avons plus de 12 000 entreprises sur le territoire lavallois, une région très dynamique au niveau de l'emploi et au niveau, justement, du développement économique.

M. le Président, le marché du travail a beaucoup évolué au cours des 20 dernières années, et le projet de loi n° 70 est une réponse concrète du gouvernement au nouveau défi. Le projet de loi n° 70 est important également car il modifie le rôle d'une institution importante du marché du travail, soit la Commission des partenaires du marché du travail, notamment en renforçant son mandat à l'égard de sa participation à l'élaboration des politiques et orientations stratégiques en matière de main-d'oeuvre et d'emploi, ainsi que pour optimiser la prestation de services aux citoyens et aux entreprises. Mais également on souhaite qu'elle se voie confier le mandat d'identifier les besoins de développement de la main-d'oeuvre actuelle et future selon la réalité et les perspectives du marché du travail. On souhaite également lui donner un rôle de leadership en matière d'adéquation de formation-emploi en lui permettant d'émettre des recommandations auprès des ministères et organismes.

Également, le projet de loi n° 70, en plus de modifier la composition de la Commission des partenaires du marché du travail, il modifie également celle des conseils régionaux en y intégrant un membre représentant la Commission de la construction du Québec ainsi qu'un membre invité représentatif de la réalité économique des régions.

Tant au niveau national qu'au niveau régional, la Commission des partenaires du marché du travail joue un rôle essentiel dans l'adéquation formation-emploi. Je suis d'ailleurs heureux que le projet de loi n° 70 prévoie pour les conseils régionaux de la CPMT l'intégration d'un membre représentant la réalité économique des régions. Le gouvernement s'assure que les décisions prises au niveau régional s'appuient sur la réalité économique propre à chaque région.

Le projet de loi n° 70 assure une meilleure utilisation des leviers essentiels au développement de l'économie et de l'emploi au Québec, tant au niveau national que dans chacune des régions. Pour le bien des Québécoises et des Québécois, j'invite l'ensemble de mes collègues à poursuivre l'étude du projet de loi n° 70 intitulé Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Alors, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, allez-y pour... c'est sept minutes, je pense, qu'il vous restait. Alors, vous avez droit à sept minutes, sept minutes d'intervention.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Alors, je suis contente de pouvoir intervenir sur cette motion de report de ma collègue de Gouin, parce que je trouve que, dans le libellé, il y a des informations extrêmement importantes qu'il faut prendre la peine de se rappeler collectivement. Je ne parlerai pas du projet de loi n° 70 en général et en particulier. Considérant qu'on n'a que sept minutes, je vais rester centrée sur la motion de report présentée par ma collègue de Gouin.

Alors, le premier argument qu'on met de l'avant est à l'effet qu'il y a un jour, dans cette enceinte, nous avions décidé collectivement que la lutte à la pauvreté, c'était une préoccupation collective tellement importante, M. le Président — et vous y étiez — nous avions décidé collectivement de se donner... de se doter, pardon, d'une loi qui visait explicitement à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Et, là où notre collègue nous rappelle à nos devoirs, c'est que, cette loi-là, on l'a, premièrement, adoptée à l'unanimité, hein, en décembre 2002. C'est une loi qui s'est adoptée après un long processus de réflexion, de débat social. Je me souviens, il y avait des mères, des entreprises, des gens de la société civile, des personnes vivant de l'aide sociale qui s'étaient mobilisés pour dire un non à la pauvreté, et donc de donner naissance à cette Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Et, dans cette loi, à l'unanimité, nous avions convenu, à l'article 20, qu'il fallait, lorsqu'on voulait toucher notre filet social, notamment à travers la Loi de l'aide sociale... que nous devions absolument produire une étude d'impact. Pourquoi? Parce que nous étions conscients et conscientes collectivement à l'époque... Même si je n'y étais pas comme députée dans cette Chambre, j'ai participé à ce débat avec la société civile dans la rue. C'est que nous avions la conscience que, les gens qui vivent à l'aide sociale, ceux et celles qui y arrivent, ceux et celles qui y sont depuis un certain temps, peu importe la raison, c'est un filet social de dernier recours et que ces gens-là méritent notre respect à un tel point, M. le Président, que nous nous sommes entendus collectivement pour mettre à l'article 20 l'obligation d'une clause d'impact. Quels impacts allaient avoir les choix que nous allions faire concernant la situation de familles et de personnes au niveau de la lutte à la pauvreté?

Alors, je suis heureuse que ma collègue ait proposé cette motion de report, parce que je trouve important, M. le Président, que nous ayons en main les résultats de cette étude d'impact. Parce que les gens à l'aide sociale, c'est des gens qui méritent que nous portions... que nous mettions, pardon, l'ensemble de nos préjugés de côté et que nous mettions à leur service toute notre intelligence, y compris de l'impact des choix que nous allons faire. Et bien sûr, si on demande cette étude d'impact là, M. le Président, et je pense que ma collègue est venue le dire — et je viendrai aussi prendre la parole en temps et lieu au moment de l'adoption du principe — c'est que nous croyons que cette loi-là aura des impacts négatifs sur les personnes, ne serait-ce que d'entretenir le fameux préjugé que ces gens-là, ils sont capables de travailler, mais c'est parce qu'ils ne le veulent pas qu'ils ne le font pas.

• (20 heures) •

L'autre élément qui me... que je vois que ma collègue a inséré pour justifier ce report-là, c'est concernant l'analyse différenciée selon les sexes. M. le Président, j'ai travaillé pendant 35 ans auprès des personnes, parfois, à l'aide sociale, pas systématiquement, mais il y a une chose que j'ai vue durant ces 35 années là, c'est que, premièrement, il n'y a personne qui est heureux d'être à l'aide sociale. C'est un mythe, ça, M. le Président. L'aide sociale, je dirais même, pour certains et certaines, c'est surtout une honte. Le défi que j'ai surtout vécu en accompagnant ces personnes-là, et principalement des femmes, dans les dernières années, c'est que ces personnes-là étaient prêtes à bien sûr participer à des mesures de façon volontaire, mais l'enjeu, et c'est surtout ça qu'on a confronté, c'est que les mesures n'étaient pas au rendez-vous. M. le Président, il faut prendre conscience que... Je ne crois pas que c'est en... Mon expérience sur le terrain me fait dire que ce n'est pas en forçant les gens, en les pénalisant, mais bien en les encourageant que la réinsertion sociale fonctionne. Et j'ai vu plus souvent qu'autrement des gens se faire refuser... et là je pourrais en parler longtemps, mais je n'aurai pas le temps, que de plutôt être soutenus dans ce processus-là.

Alors, je suis contente et, à l'instar de ma collègue, j'invite vraiment le ministre et l'ensemble de mes collègues ici à se donner ce trois mois-là pour être capables d'avoir une vision sur bien sûr les clauses d'impact de façon générale mais, de façon toute particulière, sur l'analyse différenciée selon les sexes, parce que, M. le Président, ça touche particulièrement les femmes. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Et, pour la poursuite du débat, je voudrais juste indiquer qu'on a redistribué les temps impartis, parce qu'on a eu l'information que le deuxième groupe de l'opposition n'interviendrait pas. Donc, il reste au Parti libéral 46 min 30 s et il reste à l'opposition officielle 19 min 30 s. Alors, je suis prêt à reconnaître un prochain... ou une prochaine intervenante. Alors, je vous répète qu'il vous reste 46 min 30 s, puis, à nous, il nous reste... bien, pas à nous, mais à l'opposition officielle, 20 min 30 s.

Une voix : ...si le parti...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, normalement. Normalement, c'est la partie gouvernementale qui devrait intervenir, mais moi, je n'ai pas de fouet puis je ne peux pas forcer des gens... mais, normalement, l'alternance, à ce moment-ci, voudrait, compte tenu aussi du temps imparti, que ce soit quelqu'un du côté du gouvernement, parce qu'ils ont une banque de temps, le double de ce qu'il vous reste, et il n'y a plus personne d'autre.

M. Turcotte : ...de la part du gouvernement, donc on pourrait avoir une redistribution du temps.

M. Sklavounos : Je ne pourrais pas vous dire, j'ai... pour l'instant, là. Pour l'instant, on n'a pas d'intervenant. Je ne pourrai pas renoncer au temps en ce moment.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, ce que j'entends, c'est qu'il ne renonce pas au temps qui lui est imparti mais pour le moment il n'a pas d'indication pour un intervenant. Donc, moi, je suis ici jusqu'à 9 h 30, ça fait qu'il n'y a pas de trouble, mais, normalement, je vais donner la parole à quelqu'un qui va souhaiter la prendre, mais, qu'est-ce que vous voulez, moi, je ne peux pas fouetter personne, là.

Alors, Mme la députée de Longueuil voulait intervenir. À vous la parole.

Mme Lamarre : ...M. le Président, je suis la députée de Taillon.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ah! bien oui, je sais bien. Qu'est-ce que j'ai fait là?

Mme Lamarre : Mais c'est à Longueuil.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Là, ce n'est pas pareil. Je sais que vous êtes la députée de Taillon. Je m'excuse.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Alors, j'interviens dans cette demande de report de l'adoption de principe du projet de loi n° 70, qui vise à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

Parmi les arguments qui ont été présentés dans les considérants lors de cette demande de report, je vais m'intéresser particulièrement au troisième... au quatrième considérant, pardon, celui qui s'exprime comme suit : Considérant que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale prévoit que l'action gouvernementale doit prendre en compte les réalités propres aux femmes et aux hommes en appliquant notamment une analyse différenciée selon les sexes, que la motion à discussion soit amendée en retranchant le mot «maintenant» et en ajoutant, à la fin, les mots «dans trois mois».

Alors, c'est cette dimension différenciée au niveau des sexes que cette mesure, qui s'appliquerait à travers le projet de loi n° 70, sur lequel je veux me pencher... Et pourquoi je veux me pencher là-dessus? Parce que, dans ma circonscription de Taillon, j'ai eu énormément de réactions de groupes de femmes par rapport à l'introduction du projet de loi n° 70 par rapport aux enjeux qu'il prévoit au niveau de l'obligation d'amener, par exemple, des femmes qui seraient aptes au travail et qui seraient mères de famille monoparentale à devoir se déplacer, même si ce n'est pas un très grand nombre de kilomètres. On n'a jamais réussi à savoir, dans les questions nombreuses qu'on a posées, quel serait le nombre de kilomètres qui serait considéré comme raisonnable lorsqu'on offrirait un emploi à quelqu'un qui serait prestataire de l'aide sociale. Est-ce que c'est 50 kilomètres, est-ce que c'est 100 kilomètres, est-ce que c'est 200 kilomètres qui feraient en sorte que la personne, et, dans ce cas-ci, la femme, serait obligée d'accepter l'emploi?

Alors, il y a cette dimension qui est préoccupante. Et, je vous dirais même, dans mon environnement immédiat, quelqu'un qui habiterait Saint-Hubert et à qui on offrirait un poste à Brossard, par exemple... au niveau des moyens de transport en commun, puisque les prestataires de l'aide sociale ont souvent recours à ce mode de transport, eh bien, c'est très difficile pour quelqu'un de se déplacer, et ça prend probablement au moins une heure pour faire ce parcours-là, avec un contexte où, très souvent, on a un ou deux enfants à conduire à la garderie avant, le matin. Donc, il y a cette dimension-là, donc une difficulté, mais où je veux surtout mettre l'emphase, c'est dans l'obligation d'accepter cet emploi et d'y vivre. Et là je vais citer les organismes, donc trois organismes, de Longueuil qui m'ont apporté un éclairage et que j'ai visités et dont je peux témoigner des réalités des femmes qui sont exposées à des conditions difficiles et qui fréquentent ou qui bénéficient des services de ces trois centres-là : il s'agit du Centre des femmes de Longueuil, qui est un organisme d'entraide; il y a également le centre Carrefour pour Elle, qui héberge des femmes qui sont victimes de violence conjugale; et la Table de concertation des groupes de femmes de la Montérégie. Dans les trois cas, on s'est beaucoup inquiété de cette obligation pour les femmes de maintenir cet emploi dans un contexte où elles se sentent vraiment forcées de l'accepter. Et ce que ça génère, le projet de loi n° 70, c'est que, par exemple, et je cite la Table de concertation des groupes de femmes de la Montérégie, «une femme qui a le sentiment de ne pas avoir le choix de conserver son emploi, sous peine de se faire couper son chèque, acceptera des situations de harcèlement beaucoup plus longtemps, d'autant plus lorsque l'on sait à quel point porter plainte n'est pas synonyme d'obtention de justice dans le système dans lequel nous évoluons».

Alors, les femmes sont particulièrement vulnérables dans cette partie du projet de loi qui va les toucher et le fait que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale prévoie des exigences où on aurait fait une analyse différenciée des enjeux que ça comporte selon les sexes et, je vous dirais, entre femmes et hommes et entre hommes ou femmes monoparentaux qui auraient des enfants à leur charge, mais tout particulièrement on comprend qu'un employeur qui se saurait maintenant tributaire de donner un emploi à une femme et que cette femme verrait son revenu coupé de moitié si elle refusait son emploi... on comprend tout de suite le lien très malsain que cela engendre avec les risques de harcèlement sexuel, de harcèlement psychologique, d'obligations qu'on pourrait imposer à cette femme au niveau des heures de travail, au niveau de l'organisation de son travail.

• (20 h 10) •

Alors, une femme monoparentale qui n'aurait pas de voiture pourrait se retrouver à travailler à un endroit inaccessible en transport en commun, sans service de garde pour ses enfants, au salaire minimum, et juste les coûts seuls du transport et du service de garde grugeraient la majorité de son maigre salaire. Il lui resterait probablement moins d'argent à la fin du mois que le montant inscrit sur le chèque d'aide sociale. Or, on voit comment il y a nécessité, il y a besoin qu'on procède à une analyse d'impact en fonction de l'application de cette loi chez une femme, en particulier si elle est monoparentale, et chez les hommes.

Chez les hommes aussi ce projet de loi comporte plusieurs, plusieurs éléments, parce que, dans l'article 20 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, il y a l'obligation pour le ministre de produire une étude d'impact sur les revenus des personnes et des familles en situation de pauvreté, et je ne voudrais pas minimiser l'importance que ce projet de loi peut avoir, parce qu'à travers les prestataires de l'aide sociale on traduit beaucoup, beaucoup de manques de... très souvent, les facteurs qui sont responsables de cette récurrence au niveau de la prestation de l'aide sociale, de cette répétition générationnelle, eh bien, ça ne vient pas juste du manque de travail, ça ne vient pas juste de l'opportunité d'avoir un travail, c'est toute l'estime de soi, c'est toute la confiance en soi, c'est tous les liens de confiance qu'on a par rapport aux personnes qu'on côtoie qui sont problématiques, et, très souvent, ça s'est passé dans la petite enfance.

Alors, je me demande, dans un contexte où on a tellement coupé au niveau des CPE, où on avait vraiment un acharnement à faire en sorte que le modèle des CPE soit contraint à tant de restrictions, alors qu'on doit investir chez nos 0-6 ans... bien, on voit qu'il n'y a pas cette volonté-là, que ça ne se traduit pas, et, si on avait à investir de l'argent et de la formation, moi, je pense qu'on devrait le mettre davantage chez les 0-6 ans parce que c'est là qu'on est capable de récupérer les situations. Mais, demander à des adultes qui ont 20, 25, 30 ans de changer tout à coup leur dynamique juste parce qu'on leur donne accès à un emploi, il y a beaucoup d'autres éléments qui influencent.

Et je peux citer un cas dont je parlerai un peu plus longuement éventuellement mais dont j'ai été témoin, donc, d'une dame que j'ai rencontrée qui m'a exprimé le fait qu'elle était la troisième génération de prestataires d'aide sociale et qu'elle voulait absolument changer des choses pour que sa petite fille de six ans vive autre chose, qu'elle côtoie autre chose, qu'elle ait de la fierté de voir sa mère avoir un travail. Cette dame était dans une organisation qui a pu lui apporter un accompagnement et une formation pendant une période de six mois et la dame en question a été très, très fière parce qu'elle a réussi à avoir une entrevue, une entrevue chez Tim Hortons, et elle nous racontait comment... le frisson de fierté qu'elle avait le premier matin où elle a pris l'autobus avec son costume, son habillement de Tim Hortons et comment elle était fière d'aller travailler. Cependant, dans la première journée où elle a travaillé, on l'a laissée toute seule dans son travail, elle a été débordée, elle a fait des erreurs et finalement elle s'est elle-même ressortie du milieu en se disant : Je ne peux pas supporter ce stress-là. Et pourtant on avait quelqu'un qui était convaincu.

Alors, le fait d'imposer strictement une obligation de travail n'est pas approprié. Et cette femme, elle est revenue dans son milieu, il y a eu un autre accompagnement, et on va voir éventuellement... Mais ça nous donne la mesure de la douleur et de la profondeur des cicatrices que ces gens-là transportent avec eux dans leurs difficultés d'avoir de l'emploi. On ne peut pas évaluer ça avec des paramètres de quelqu'un qui n'a pas traversé ce que ces gens-là ont traversé tout au long de leur vie, et je pense sincèrement que l'analyse différenciée par sexes nous démontrerait que des femmes qui sont monoparentales sont certainement... les hommes sont dans un contexte difficile aussi, les prestataires de l'aide sociale, mais les femmes tout particulièrement seraient dans un contexte de très, très grande vulnérabilité par rapport à un employeur, puisque vraiment, au-delà de leur emploi, dépendrait vraiment la rémunération familiale déjà modeste qui leur reste, qui serait susceptible d'être coupée de moitié, M. le Président.

Alors, c'est un élément déterminant, et je pense que cette évaluation-là permettrait peut-être d'apporter au projet de loi n° 70 des nuances, des subtilités, des éléments qui apporteraient moins d'iniquités et qui feraient en sorte qu'on protégerait un peu mieux ces femmes, qui, de toute évidence, sont particulièrement susceptibles d'être exposées à différents abus, alors que l'objectif du projet de loi n° 70, on en convient tous, ce n'est certainement pas ça. Mais, malheureusement, une écriture qui n'est pas tout à fait adaptée peut très bien conduire à ce genre de situation là. Et actuellement, dans ma circonscription, trois organismes qui vivent, qui cohabitent avec des femmes, des femmes victimes de violence, des femmes qui côtoient la pauvreté et des femmes qui souhaitent s'en sortir... les trois organismes nous donnent une alerte très claire par rapport aux enjeux et aux risques que le projet de loi n° 70 dans sa forme actuelle représente.

Donc, pour toutes ces raisons, je suis convaincue qu'il y a lieu de reporter le projet de loi et l'adoption de principe du projet de loi, et de procéder à faire correctement les analyses socioéconomiques et également les enjeux au niveau des risques pour les différents sous-groupes qui vont être touchés par ce projet de loi, mais en considérant tout spécifiquement les femmes, les femmes monoparentales, qu'on met dans une grande situation de vulnérabilité, déjà qu'elles ont vécu des expériences souvent très douloureuses. Je pense qu'elles veulent toutes s'en sortir, elles veulent toutes offrir mieux à leurs enfants, mais le modèle qui est prévu dans le projet de loi n° 70 les expose à des menaces particulières, spécifiques, et on doit, je pense, sincèrement y réfléchir avant de procéder à l'adoption de principe. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, Mme la députée de Taillon, pour votre intervention. Je suis prêt à entendre le ou la prochaine intervenante. Oui.

M. Turcotte : ...l'intention du gouvernement, parce que, s'ils n'interviennent pas, nous allons pouvoir demander la répartition du temps.

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...que c'est ce qui va arriver. S'il n'y a pas d'intervenant, on va redistribuer le temps imparti, parce que moi, je vais être obligé de considérer que je n'ai pas d'indication s'ils parlent. S'ils ne parlent pas, on fait la répartition du temps pour ceux qui veulent l'utiliser. Alors, je pense qu'on est rendus là. Alors, c'est quoi, votre décision?

M. Sklavounos : ...si vous voulez répartir le temps, allez-y, je ne me sens pas bousculé. Mais je n'ai pas d'intervenant. Alors, allez-y.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ce n'est pas moi qui veux répartir le temps, c'est que je vous ai attribué du temps qui ne s'est pas pris. Le temps dans une motion de report, qui est un temps limité, c'est le règlement. Donc, moi, la présidence, elle applique le règlement. Alors, est-ce qu'il y a quelqu'un qui veut se lever pour poursuivre?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, pour vous, l'opposition officielle, il reste environ sept minutes... huit ou sept...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...6 min 37 s. Alors, s'il reste 6 min 37 s, c'est 6 min 30 s. Mme la députée de...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui.

Une voix : ...répartition du temps?

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...c'est clair. Là, on va finir le temps qu'il vous restait, puis, comme ils ne veulent pas utiliser le temps, vous avez 46 minutes de plus.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, oui. Mais moi, j'ai demandé à deux reprises au leader adjoint, puis il m'a répondu oui, qu'il n'utilisait pas sa banque de temps. Donc là, on va finir le temps imparti, il vous reste 6 min 30 s, et après ça on va rajouter 46 min 30 s de débat sur la motion de report.

Mme la députée — puis là vous pourrez prendre du temps dans votre intervention qu'il reste dans la banque — à vous.

Mme Léger : Merci, M. le président. Alors, avec l'élocution que j'ai, je n'en prendrai pas tant que ça, là...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...vous voulez, là.

Mme Léger : ...que je me permette de saliver un peu.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Vous prenez le temps que vous...

Une voix : ...

• (20 h 20) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Une minute! Vous prenez le temps que vous voulez, en sachant qu'au total l'opposition officielle a 53 minutes. Alors, allez.

Mme Nicole Léger

Mme Léger : Alors, oui, M. le Président, nous intervenons ici par rapport à la motion de report du projet de loi n° 70, dans le fond, la partie de l'adoption de principe. C'est une prérogative qui nous appartient dans la procédure parlementaire, de demander un report. On demande un report, il faut quand même se le dire.

D'abord, on est très déçus du projet de loi n° 70 qui est devant nous, d'une part. Il n'y a rien qui guide ce gouvernement-là par rapport à ce projet de loi là. Alors, le fait de vouloir le reporter, ça permet quand même, pendant trois mois, au gouvernement qu'on puisse lui dire, dans le fond, que ça ne va pas, que son projet de loi ne va pas pantoute, il doit aller refaire ses devoirs. Alors, ça appartient maintenant au gouvernement, je pense, d'alimenter les discussions et d'aller chercher les analyses qu'il faut pour essayer de nous convaincre, parce qu'il est très mal parti pour le moment.

Les exemples ne manquent pas... de ma collègue de Taillon, ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, qui a aussi fait une belle démonstration de tous les impacts de ce projet de loi là dans la vie de tous les jours, dans la vie des gens qui sont à l'aide sociale, qui nécessitent, dans le fond, beaucoup d'aide. Nous, comme députés, nous avons continuellement des situations de nos commettants qui ont des difficultés par rapport à leurs revenus et par rapport à leurs situations, qui méritent, dans le fond... des personnes qui sont plus démunies, mais moi, je vais vous rappeler quelques éléments. Je pense qu'il manque une vision de lutte contre la pauvreté et... de l'exclusion sociale, mots difficiles pour moi, de l'exclusion sociale par rapport à ce gouvernement-là. Je vous rappelle... Bon, écoutez, antérieurement, j'ai été ministre de la Lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. C'est une des premières fois qu'un gouvernement... c'était sous notre... l'honorable Bernard Landry, si on peut l'appeler ainsi, pour nous, qui avait décidé de faire de l'emploi un objectif majeur et, dans un autre temps, la lutte contre la pauvreté qui était, pour lui, essentielle. Nous avons mis sur la table à ce moment-là toute une stratégie de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Nous avons créé un comité consultatif, donc, fait avec les citoyens en collaboration avec l'action citoyenne. Je me rappelle, et encore aujourd'hui, la coalition, à l'époque, on l'appelait la coalition pour un projet de loi, dans le fond, pour l'élimination de la pauvreté, qui, aujourd'hui, est la coalition sur la pauvreté, et un observatoire avec un fonds d'initiatives sociales.

C'est un ensemble de mesures, d'actions qui faisait que la lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale était une priorité pour le gouvernement. On a même exigé... et ça existe toujours encore, M. le Président, on exige que tout projet de loi que le gouvernement doit déposer... doit toujours le faire sous la lunette de l'impact sur la pauvreté, l'impact sur les personnes et les familles plus démunies, plus vulnérables. Et, à chaque fois que le gouvernement dépose un projet de loi, avant de le déposer, il doit s'assurer qu'il n'y aura pas un impact, que l'impact ne sera pas important par rapport à ces familles. Je me rappelle, à l'époque... puis je pense que j'inviterais le ministre, M. le Président, à regarder voilà 15 ans, parce que c'était en 2002, qui sont très utiles encore aujourd'hui, cette... tout ce qui a soutenu, dans le fond, la stratégie de lutte à la pauvreté. On a eu 167 mémoires à l'époque, on en a entendu 132, il y a eu des centaines et des centaines d'heures d'écoute, on avait une participation citoyenne extraordinaire, des rencontres thématiques se sont faites sur des sujets pour des organisations soit syndicales, soit patronales, soit régionales, de différents partenaires.

Il y a eu une tournée à travers le Québec, dans toutes les régions du Québec, parce que chaque région a aussi ses propres initiatives. Je me souviens de la vôtre, M. le Président, en Abitibi, particulièrement, où les citoyens, on se... la rencontre qui s'est faite avec tous les leaders mais avec toutes les personnes aussi qui avaient des témoignages à apporter de leur vécu dans la région de l'Abitibi, entre autres, qui étaient... Je me rappelle de certains témoignages qui étaient éloquents, du fait que : Est-ce qu'on peut... vous pouvez, comme gouvernement, que cette stratégie-là soit aussi une stratégie régionale, qu'on puisse nous-mêmes avoir des initiatives locales, des initiatives régionales avec les vecteurs que nous avons dans notre région, qu'ils peuvent eux-mêmes identifier et qui sont les premiers, dans le fond, intégrateurs, les premières personnes, les premiers groupes, les premières organisations qui peuvent se dire : Nous, là, c'est comme ça qu'on voit les choses et c'est comme ça qu'on voit que, dans nos écoles, sur notre territoire, on a un problème plus de transport, on a un problème de haut taux de monoparentalité, on a tel et tel type de problème qui fait que localement on pouvait absolument accompagner les gens dans différentes mesures qui aidaient les gens dans leurs localités?

Donc, on peut avoir une stratégie nationale, mais il faudrait qu'elle s'adapte dans chaque région du Québec et qu'elle s'adapte avec l'aide et le fonds, particulièrement, parce qu'il y avait un fonds d'initiatives sociales qui, semble-t-il, n'existe plus vraiment, là. Ce fonds-là, on ne sait pas où il est là. Puis, en plus, en coupant dans les régions, puis dans les CRE, puis dans nos CLD, tous nos... C'est avec les CLD, d'ailleurs, que les initiatives pouvaient se faire à l'époque, et avec les CRE, où on pouvait... Ça ne s'appelait pas les CRE, c'étaient les CRD à l'époque. C'était encore mieux, parce que c'était vraiment une organisation, une structure, un organisme qui aidait vraiment à travailler d'une façon plus pointue les différents dossiers du gouvernement mais qu'on pouvait, par une initiative locale, être capables de rendre vivantes nos politiques.

Alors, M. le Président, il ne me reste pas beaucoup de temps, il ne reste que quelques secondes, je reviendrai en temps et lieu, si c'est possible, et...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...poursuivez, parce que, dans la banque, il reste à votre formation uniquement... Prenez le temps que vous voulez, en sachant que — je l'avais dit avant votre début de votre intervention — vous aviez 53 minutes au total et vous pouvez faire le temps que vous voulez sur cette question-là, puis, quand vous arrêterez, on passera la parole à un autre. Mais le temps qui reste est totalement à votre formation politique.

Mme Léger : M. le Président, alors je vais poursuivre, je vais être capable encore un petit peu. J'invite vraiment le ministre, M. le Président, à relire la loi n° 112, à l'époque, parce que la loi visait particulièrement à guider le gouvernement et l'ensemble de la société québécoise vers la planification et la réalisation d'actions pour combattre la pauvreté, en prévenir les causes, en atténuer les effets sur les individus et les familles, contrer l'exclusion sociale et tendre vers un Québec sans pauvreté. À cette fin, la présente loi institue une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, elle institue également un comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et un observatoire de la pauvreté en vue d'atteindre les buts poursuivis par cette stratégie. La présente loi aussi crée le Fonds québécois d'initiatives sociales, affecté à la lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale. Et, M. le Président, les considérants de loi étaient intéressants pour un ministre. C'est intéressant parce que ça donne, dans le fond, l'ampleur et la vision qu'un gouvernement doit avoir dans une stratégie de lutte contre la pauvreté.

Donc, instaurer un projet de loi comme ça, sur un bout de table, le projet de loi n° 70... qu'on instaure ça sur un bout de table comme ça, parce qu'on dit, bon : Pourquoi? Pour l'austérité? C'est parce qu'on n'a pas de vision? Parce que c'est un désengagement de l'État? Parce qu'il y a de l'incohérence? Il y a de l'improvisation? On met sur le bout de la table le projet de loi n° 70 sans voir l'impact de l'ensemble d'un gouvernement sur la stratégie de lutte à la pauvreté.

J'ai une lettre à vous lire que je pense qu'elle a été publiée mais que je trouve très intéressante, cette lettre qui a été hier... dans le Le Huffington Post, d'une madame Bélisle, qui est du Collectif pour un Québec sans pauvreté, d'ailleurs un groupe où j'ai longuement travaillé. On a eu nos moments de tension, des moments de diversion, des moments d'allégresse de toutes les formes, M. le Président, ça a été des moments intéressants parce qu'ils ont énormément contribué à la stratégie de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Je pense que, s'il y a une loi aujourd'hui, la loi n° 112, qui a été déposée en 2002, si cette loi-là existe... Je vois mon collègue le député de Rimouski, qui y a beaucoup contribué. On a travaillé ensemble à cette époque — ça ne nous rend pas jeunes, d'ailleurs — à cette époque. Et nous en sommes encore aujourd'hui très fiers. Où je suis moins fière, c'est qu'est-ce qu'on est en train d'engranger de tous bords tous côtés, on est en train de lui enlever des morceaux d'un bord et de l'autre.

Je comprends Mme Bélisle, que je vais vous... Je vais vous citer sa lettre, parce que je pense que ça vaut la peine que le ministre... il l'a sûrement lue — je l'espère : Un projet de loi humainement inacceptable.

«Comme nouveau ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, nous vous interpellons. Nous sommes un groupe qui réfléchit depuis trois ans sur les préjugés envers les personnes en situation de pauvreté du Québec. Les préjugés contre ces personnes, particulièrement contre les prestataires d'aide sociale, foisonnent dans notre société. Ils influencent même les décisions des gouvernements, comme c'est le cas actuellement avec le projet de loi n° 70. Mais qu'est-ce qu'un préjugé? Quels sont ses effets sur les personnes ciblées? Un préjugé est une attitude négative ou défavorable envers certains individus, membres d'un groupe donné, basé sur des généralisations abusives. Il renforce l'estime de soi de celui qui l'émet et le fait se sentir supérieur aux personnes visées.

• (20 h 30) •

«Une personne ciblée par un préjugé en souffre : elle vit un sentiment d'injustice, se sent rejetée et honteuse de sa condition sociale. Elle perd l'estime d'elle-même et finit par s'autoexclure d'une société qui se prive alors de la richesse qu'elle aurait pu apporter comme citoyenne à part entière.»

Ça rejoint ce que ma collègue députée de Taillon disait tout à l'heure de la commettante, de la dame qu'elle parlait.

Les préjugés s'attaquent aussi aux droits fondamentaux des personnes visées, tel le droit à un niveau de vie suffisant, à des mesures d'assistance financière ou à des conditions de travail justes et raisonnables. Ces droits sont formulés notamment dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Ces documents interdisent la discrimination et affirment l'égalité de tous les citoyens.

Le projet de loi n° 70, dans sa forme actuelle, fait fi de ces droits internationalement reconnus. Et, s'il est adopté, il obligerait les nouvelles personnes à l'aide sociale dites aptes à l'emploi, peu importe leur âge, à accepter tout emploi qui leur est offert. Par cette obligation, le gouvernement sous-entend que ces personnes sont paresseuses, dépendantes, profiteuses du système et qu'elles ne veulent pas s'en sortir. C'est sur la base de ces préjugés que, sous la menace de couper une partie importante de leurs prestations, elles devront accepter cet emploi, même si les conditions de salaire ou de travail sont inadéquates.

Il est pourtant clairement écrit dans le préambule de la loi visant la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, adoptée en 2002, que les personnes en situation de pauvreté sont les premières à agir pour transformer leur situation. La répression résultant du projet de loi n° 70 causerait à celles-ci un énorme stress, entraînerait de sérieux dégâts sur leur santé mentale et physique et les enfermerait dans un silence humiliant et culpabilisant. À nos yeux, il va de soi que les mesures coercitives associées à ce projet de loi sont inacceptables. Celui-ci est discriminatoire, entretient des préjugés déjà profondément ancrés dans la population et s'avère destructeur de vies humaines.

Connaissant le ministre, M. le Président, je suis certaine... connaissant, façon de parler, là, mais sachant un peu ses antécédents avant d'arriver en politique, je pense qu'il comprend très bien ce que veut dire le collectif contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Je m'arrête ici. La salive, je n'en ai plus, alors je vous remercie, je reviendrai, s'il y a lieu, mais je termine à ce moment-ci. Alors, non au projet de loi n° 70, et nous voulons le report.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bien, je vous remercie, Mme la députée. Merci, mais je vous indique que vous allez peut-être revenir, mais sur un autre sujet, parce qu'on ne peut pas le faire. M. le député de Rimouski, à vous la parole.

M. Harold LeBel 

M. LeBel : Merci, M. le Président. Comme ça, il me reste combien de temps, à peu près, là?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Il vous en reste en masse, je vais vous indiquer ça, mais à peu près...

M. LeBel : Bien, dites-moi-le...

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...à peu près 39 minutes.

M. LeBel : 39 minutes. O.K. Je viens appuyer la motion de report de ma collègue de Gouin. L'article 20, c'est la fameuse clause d'impact qui avait été amenée dans la loi n° 112 pour lutter contre la pauvreté, c'était vraiment un gain... c'est un gain important des citoyens et des citoyennes mobilisés à l'époque.

Moi, s'il y a un élément majeur dans ce projet de loi, c'est vraiment cet article-là qu'on doit tenir comme la prunelle de nos yeux. Mais moi, je suis certain que le gouvernement actuel n'a jamais pris en considération cet article-là. À un moment donné, j'ai participé à une commission parlementaire avec ma collègue de Taillon sur le projet de loi n° 10 ou n° 20, je ne me souviens plus trop, sur les frais accessoires... n° 20? N° 20. Et j'ai posé une question au ministre de la Santé, en disant : Est-ce que votre loi a passé par la clause d'impact? Est-ce que vous avez regardé un peu si ça avait un impact sur la pauvreté, entre autres, les frais accessoires? Là, bien, il cherchait, il dit : Oui, oui, sûrement, sûrement. Pose des questions, pose des questions, et on finit, à la fin, pour savoir, je lui ai posé la question : Est-ce que les frais accessoires vont être remboursés aux gens qui sont à l'aide sociale? Là, il me dit : Non, je ne pense pas. Mais là il me dit : S'ils veulent avoir des médicaments gratuits, ils peuvent aller à l'hôpital, là c'est gratuit. Bref, un système à deux vitesses : si tu n'as pas d'argent, tu vas à l'hôpital, si tu as de l'argent, tu peux aller au privé puis payer tes frais accessoires. Bref, j'ai bien compris que la clause d'impact n'avait pas été vraiment prise en considération dans ce projet de loi là et je vois que c'est comme la même chose aujourd'hui et dans plein d'autres projets.

Quand on touche les CPE, ça a un impact sur la pauvreté, c'est clair. Quand on touche les commissions scolaires puis on coupe l'aide au raccrochage scolaire, c'est sûr que ça a un impact sur la pauvreté, mais je suis convaincu que la clause n'a pas été respectée.

Je parlais de la loi. La loi, c'est la loi-cadre, c'est la loi qui donne les enlignements puis elle avait été adoptée unanimement ici, là, il faut se le rappeler. À partir de la loi-cadre, que tout le monde a acceptée, le gouvernement se donne des plans d'action. Puis, à partir des plans d'action, normalement, le gouvernement fait ses réformes. Mais actuellement on n'a pas analysé la loi, on ne sait pas l'impact sur la loi, on n'a pas analysé les plans d'action puis on se garroche dans une réforme de l'aide sociale. J'ai l'impression que ça ne marche pas. Puis en plus le premier ministre donne un mandat au ministre de travailler sur un mandat de revenu de base. Comme incohérence, on ne peut pas être pire que ça, là. S'il veut travailler sur un revenu de base, on devrait étudier la loi, puis on devrait insérer ça dans un plan d'action, puis s'en aller. Mais là, non, on s'enligne dans une patente de réforme de l'aide sociale sans avoir pris le temps de regarder l'ensemble du portrait. C'est ça que je ne comprends pas.

Puis ce qu'on fait, c'est qu'on remet sur le dos des gens à l'aide sociale, on dit : C'est à eux autres à faire des efforts. C'est à eux autres à se donner un coup de main. Là, on dit que ce n'est pas des préjugés, mais c'est clair que c'est facile quand on dit ça. Je ne dis pas, quand on dit ça, qu'on a des préjugés, mais c'est clair que les gens le reprennent à leur façon. Ils disent : Regarde, si tu veux t'en sortir, de la pauvreté, là, envoie, fais l'effort, vas-y, travailler. Vas-y, au Tim Hortons, comme on disait tantôt. C'est facile, vas-y, tu sais. Mais ce n'est pas si facile que ça.

Je rappelle un considérant de la loi. C'est : «Considérant que les personnes en situation de pauvreté et d'exclusion sociale sont les premières à agir pour transformer leur situation et celle des leurs — ça confirme ce que le ministre dit, et il y a un autre petit bout — et que cette transformation est liée au développement social, culturel et économique de toute la collectivité.» Bien, là, on a un problème. Quand le gouvernement coupe dans toutes les ressources communautaires, quand il coupe dans le Fonds québécois d'initiatives sociales, qui soutenait des initiatives dans chaque région du Québec... Ça, là, c'était pour travailler sur le développement social, culturel et économique de la collectivité, puis ça, ça venait aider les gens à se prendre en main. Ce bout-là, on coupe ça partout, dans toutes les régions du Québec, puis on se vire de bord, puis on dit : C'est à la personne à l'aide sociale de se débrouiller toute seule. Ce n'était pas ça, l'objectif de la loi. La loi, c'est que la personne doit faire son effort, mais toute la société, toute la collectivité, tous les groupes, les municipalités, les commissions scolaires, tout le monde devait aussi faire sa part et travailler dans un mouvement commun de mobilisation pour l'aider à se sortir de la pauvreté.

Pour sortir de la pauvreté, il faut créer de l'emploi, puis créer de l'emploi partout. Puis je viens d'une région où, dans le monde rural entre autres, c'est très difficile. Après avoir coupé dans la forêt, dans l'agriculture, on est en train de créer du chômage, créer moins de richesse. C'est moins de jeunes qui peuvent s'intégrer sur le marché du travail. Créer de l'emploi, il faut créer de l'emploi partout, s'assurer d'offrir des emplois, des vrais emplois. Mais ce n'est pas ça qu'on fait. On dit au jeune, à la personne à l'aide sociale : Tu t'en viens, puis toi, on va s'assurer que tu vas fitter dans l'emploi qu'on va te donner. On ne veut pas savoir à quoi tu penses, où tu es rendu dans ta démarche, on ne veut pas rien savoir de ça, on veut des statistiques, on veut t'intégrer à l'emploi, ça fait qu'on va te prendre, puis on va te pousser où il y a un emploi, puis tu vas fitter dans l'emploi.

Le ministre disait tantôt : Les gens ne viennent pas nous voir. Il dit : J'en ai envoyé une centaine, de demandes, il y en a une dizaine, il y en a juste cinq qui sont passées, puis il y en a juste une qui est venue. Bien, je comprends. Tu sais, comment vous... Avez-vous déjà suivi... Tu es à l'aide sociale, tu as déjà des difficultés à vivre avec ça, tu as plein de difficultés familiales, probablement, parce que tu n'as pas d'argent. Tu es complètement démotivé, démobilisé, et là il faut que tu t'enlignes dans des cubicules du ministère, puis des fois il n'y a même pas de personne, il y a une caméra qui accueille les gens. On ne va pas là. On ne va pas là. C'est sûr que ce n'est pas très attirant, mais ce qu'on fait, par exemple, on va dans des groupes communautaires qui sont là dans le coin, un centre femmes. On va dans un carrefour jeunesse-emploi un peu plus... avec un peu plus de latitude, mettons. On va dans les groupes d'insertion; chez nous, il y a un groupe qui s'appelle Je raccroche, il en ramasse du monde. Il n'y en a pas juste un, qui y va, je vais vous dire, il y a une liste d'attente ça de longue, parce que le gars qui les accueille, là, il les accueille, il a un peu d'écoute. Et c'est communautaire, ça fait partie de la communauté. C'est ça qu'il faut faire.

 • (20 h 40) •

Il y a des cas chez nous, j'en nomme un, parce que j'ai demandé... quand je savais que j'allais venir ici, j'ai dit : Envoyez-moi des cas. Comme un jeune, 21 ans, a quitté l'école à l'âge de 15 ans. Il est en colocation. Il a des problèmes avec ses parents. Il se promène d'un emploi à l'autre. Il a voulu terminer son secondaire. Il s'est réinscrit à l'école, mais trop compliqué pour lui, un peu comme la madame, que ma collègue de Taillon disait tantôt, il a été obligé de sortir. Qu'est-ce qu'il fait? Bien, il se revire de bord et là il travaille dans des groupes communautaires : Récupéraction à Rimouski, Les Maraîchers du coeur, l'organisme Je raccroche. Il pouvait être soutenu aussi par des programmes comme Alternative jeunesse, mais qui a été coupé au provincial. Ces mesures-là venaient aider, qu'il m'a dit quand il... Ces mesures-là venaient aider, venaient soutenir, puis venaient animer, puis venaient donner de la fierté à la personne à l'aide sociale, parce qu'elle est à l'aide sociale.

La pauvreté, ça gèle, ça gèle la personne. Quand tu es pauvre, quand tu n'as pas les moyens d'arriver, c'est difficile de faire la démarche, puis ce n'est pas une démarche gouvernementale administrative où... Le sous-ministre me disait en commission parlementaire à un moment donné qu'il n'y a pas un fonctionnaire qui connaît l'ensemble de la loi d'aide sociale, tellement elle est compliquée, qu'ils ont développé des silos de professionnels de bouts de loi, parce que la loi est trop compliquée. Un ministère qui a perdu le contrôle de sa loi... Ça fait qu'on dit au jeune ou à la personne à l'aide sociale : Viens-t'en, on va t'accueillir, on va te donner des services. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne.

Puis il n'y a plus juste du monde à l'aide sociale qui vivent la pauvreté, il y a des jeunes familles, des jeunes familles qu'il faut soutenir davantage, puis couper dans les CPE, ce n'était pas une bonne idée pour aider ces jeunes familles là.

Bref, vous ne me ferez pas croire que la clause d'impact a été prise en compte, vous ne me ferez pas croire ça, je suis certain que non. Puis je suis certain aussi que l'analyse différenciée selon les sexes n'a pas été prise en compte, parce que c'est vrai que les femmes qui vivent la pauvreté, c'est encore beaucoup plus difficile, surtout dans des régions comme chez nous.

Dans le temps des fêtes, je suis allé comme bénévole à Moisson Rimouski accueillir les gens. J'aidais des gens à remplir leur panier et j'allais les porter dans l'auto. Bien, je vais vous dire, j'ai vu des gens là courageux, ceux qui venaient, courageux, mais avec plein de difficultés, qui veulent juste être respectés, qui veulent juste participer à des mesures, à des groupes, reprendre leur fierté. Et c'est par là qu'il faut commencer, pas par un guichet impersonnel, mais par une communauté qui se prend en main puis qui vient aider son monde. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député de Rimouski, de votre intervention. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant et je reconnais M. le député de Saint-Jean pour son intervention. À vous la parole, M. le député de Saint-Jean.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Pourquoi une motion de report? Notre collègue la députée de Gouin nous fait la proposition de reporter l'adoption du principe, au fond, hein, du projet de loi n° 70 à une période de trois mois. Pourquoi? Elle n'a pas eu la chance de l'expliquer elle-même, parce que, bon, c'était... elle a fait la proposition, sa collègue, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques en a fait une présentation. Mais je crois que la raison pourquoi qu'elle a fait cette proposition-là, c'est parce qu'elle a écouté les groupes en consultations particulières lors de l'étude du projet de loi. Beaucoup de groupes, beaucoup de groupes ont demandé de prendre un temps d'arrêt et de voir l'impact de ce projet de loi là sur notre population, sur les femmes, oui, sur les jeunes. Parce que c'est le groupe cible, c'est le groupe que le ministre et le gouvernement ont dit : Nous, là, on va s'attaquer à la question des jeunes puis on va les... La proposition du ministre, c'est de les remettre en mouvement. On dit : C'est beau, ça, c'est... On les remet en mouvement.

M. le Président, j'aimerais ça qu'on se rappelle qu'est-ce qui s'est passé dans les derniers mois ou les dernières années. C'est le même ministre qui s'est attaqué ou a attaqué le modèle... un fleuron québécois qui est le carrefour jeunesse-emploi. Aujourd'hui, le ministre nous mentionne : Les jeunes à l'aide sociale ne viennent pas, on a envoyé 100 invitations, il y en a deux qui l'ont acceptée, puis tout ça.

Ce n'est pas tout à fait comme ça que ça se passe, M. le Président. Il y avait un modèle au Québec, les carrefours jeunesse-emploi, qui aidaient les jeunes, peu importe leurs statuts, peu importe leurs origines, leurs régions, leurs besoins. La seule question qu'on leur posait, c'est : Qu'est-ce qu'on peut faire pour toi aujourd'hui, le jeune? Et là on pouvait les embarquer dans un parcours, oui, d'employabilité, oui, un parcours de formation, un parcours d'entrepreneuriat. Les carrefours jeunesse-emploi pouvaient faire tout ça. Mais maintenant ils ne peuvent plus faire tout ça.

Le ministre et l'ancien ministre, actuel président du Conseil du trésor, répètent cette statistique-là, là, régulièrement, comme s'il n'y en avait pas d'autres, statistiques, hein, c'est la seule. Le 100 versus le deux, comme si c'était un carrefour jeunesse-emploi qui avait été ciblé et que les autres, là, bon, il n'en est pas question.

Mais, en termes de statistiques — je l'ai mentionné en commission parlementaire, je pourrai le répéter aujourd'hui — moi aussi, j'en ai, des statistiques, parce que moi, j'ai peut-être un avantage comparativement au ministre, c'est que j'ai visité des carrefours jeunesse-emploi. J'ai même visité le carrefour jeunesse-emploi de sa circonscription. Je ne sais pas si, maintenant, il l'a visité depuis qu'il est revenu ministre. Mais un autre carrefour jeunesse-emploi au Québec nous a transmis, hein, nous a transmis des données assez claires. En avril, 87 jeunes qui ont été obligés d'être refusés parce que la nouvelle directive du gouvernement, donc de la réforme de l'actuel ministre, fait en sorte que ces 87 jeunes ne peuvent plus être aidés. En avril seulement. En mai, 93; juin, 80; juillet, 32; août, 75; septembre, 53, octobre, 55; novembre, 36. L'année n'est pas terminée.

L'année n'est pas terminée, puis on est rendus à 511 jeunes qui auraient voulu avoir des services de leur carrefour jeunesse-emploi puis qui n'ont pas pu les obtenir. Pourquoi? Parce que ces jeunes-là ont le malheur d'être aux études, ont le malheur d'avoir un emploi précaire. Ces jeunes-là ont le malheur de ne pas être sur l'aide sociale. Au fond, c'est ça. Le problème, c'est que, M. le Président, nous, ce qu'on croit, c'est que tous les jeunes et tout citoyen doit pouvoir être aidé à, oui, terminer sa formation, oui, de se trouver un emploi, puis, oui, se trouver un meilleur emploi. Je l'ai mentionné précédemment dans l'intervention sur le fond du projet de loi, mais je crois qu'il faut revenir avec cette information-là ou cette affirmation, parce que, de nous faire dire que les gens ne se présentent pas, ce n'est pas vrai. Les gens se présentent. Ils ne peuvent pas être aidés. Pourquoi je dis ça, M. le Président? Parce qu'il y a des gens qui se présentent dans les organismes et se font dire : On pourrait t'aider, mais il faut que tu te rendes au carrefour... pas au carrefour, mais au centre local d'emploi. Et là eux vont faire une analyse de ton dossier et ils vont nous dire si on peut t'aider ou pas.

Mais ça fait quoi, ça, M. le Président? Ça fait en sorte qu'il y a des carrefours... pas des carrefours, pardon, des centres locaux d'emploi qui ont été fermés un peu partout. Saint-Rémi en Montérégie, fermé. Contrecoeur, aussi fermé. Ma collègue de Pointe-aux-Trembles ne l'a pas mentionné, mais son centre local d'emploi aussi chez elle, dans sa circonscription, fusionné avec un autre. Un peu partout au Québec, on voit des centres locaux d'emploi fermés ou fusionnés avec d'autres. Ça fait en sorte que les gens ne peuvent pas se déplacer.

Ma collègue la députée de Taillon l'a mentionné, la question du transport collectif, du transport en commun. Ce n'est pas parce qu'on habite la Rive-Sud de Montréal que le transport est automatiquement facile. Quelqu'un de Saint-Jean, le centre local d'emploi de Saint-Jean, une partie des gens, des fonctionnaires ont été transférés à Longueuil. Mais est-ce que vous savez, M. le Président, que nous sommes dans la même région administrative? Mais pour se rendre de Saint-Jean à Longueuil en transport en commun, il faut passer par Montréal. Ça fait en sorte que les gens qui sont à l'aide sociale déjà avec un statut précaire... Et, on l'a mentionné tantôt, 623 $ par mois, 623 $ par mois pour... Quand on a payé le loyer... ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve mentionnait que, dans sa circonscription, 650 $ par mois, un loyer... Il reste combien sur le chèque? Bien, on a une dette à la fin du mois. Est-ce que vous pensez que la personne est capable de se payer une passe d'autobus pour faire Saint-Jean-Montréal, Montréal-Longueuil? Bien non. Ce n'est pas sérieux, là, M. le Président. Donc, les gens ne se présentent pas.

Bien oui, les gens ne se présentent pas parce qu'il y a des contraintes administratives. Les gens ne se présentent pas parce que, on l'a mentionné, traditionnellement, les jeunes ont une moins grande connaissance du mécanisme des services de l'État. Hein? On le voit. Bon, le manque de flexibilité des programmes. Faire en sorte qu'on est dans un programme, mais peut-être qu'avoir l'autre programme à côté aussi et de faire une mixité des programmes, ça pourrait faire en sorte que le jeune ou le moins jeune pourrait vouloir embarquer davantage dans le programme d'employabilité. C'est toutes des choses qu'on a entendues en commission parlementaire, en consultation.

Je crois que le ministre devra réfléchir à ça parce que, s'il veut vraiment faire une adéquation entre la formation de la main-d'oeuvre et les besoins du marché du travail, c'est des pistes de réflexion très intéressantes, la mixité des programmes, qui existe et qui fonctionne déjà.

Le recrutement direct, on a des organismes qui offrent des services, comme je vous l'ai dit, ils doivent passer par la reconnaissance, ou l'approbation, ou l'aval du centre local d'emploi avant de pouvoir être reconnus. Donc, on ajoute de la bureaucratie, on ajoute de la complexité à des gens qui sont déjà dans des difficultés et qui, ont le sait, des fois, ont une certaine difficulté à lire et à écrire. On l'a mentionné précédemment.

• (20 h 50) •

Donc, M. le Président, sur la question de l'étude d'impact, le Syndicat de la fonction publique du Québec, étrangement, premier syndicat qui aurait dû être entendu dans ce projet de loi là... Nous avons entendu toutes les centrales syndicales : la CSN, la FTQ, la... d'autres centrales syndicales, mais on n'a pas entendu le Syndicat de la fonction publique du Québec, qui représente les agents de développements sociaux, économiques, qui sont les principaux... bien, ce qu'on appelle les agents d'aide sociale, là, hein, j'expliquais le terme scientifique, mais qui représente les agents d'employabilité qui seront aussi, bon, des agents qui seront interpellés dans le programme Objectif emploi. On ne les a pas entendus en commission parlementaire, comme si leurs points de vue n'étaient pas intéressants, c'est juste eux qui sont pas mal à temps plein sur le terrain pour recevoir les citoyens qui vivront les impacts de ce projet de loi là.

Mais, le Syndicat de la fonction publique, ce qu'il a fait, c'est qu'il a demandé d'avoir accès à toutes les études, aux documents qui démontrent l'impact de ce projet de loi là. Bien, M. le Président, il y en a 39, documents. Combien de documents le ministère a accepté de transmettre au Syndicat de la fonction publique sur 39? Combien? Un. Les 38 autres documents, et analyses, et études n'ont pas été remis au Syndicat de la fonction publique, mentionnant que ce n'était pas des documents pertinents. Donc, si ce n'est pas des documents pertinents, bien, M. le Président, moi, je constate qu'il n'y a pas eu assez d'études ou l'étude n'est pas vraiment documentée sur les impacts de ce projet de loi là.

Donc, M. le Président, nous appuyons la motion de report pour donner le temps au gouvernement. Il y a eu, je comprends, aussi, un changement de ministre, hein, l'actuel président du Conseil du trésor a déposé ce projet de loi là, il y a eu un remaniement, donc, le nouveau ministre est arrivé. Je comprends qu'il n'a pas été non plus au coeur des décisions sur les groupes qui ont été entendus en commission parlementaire, parce que c'était une décision qui avait été prise sous l'ancien ministre. Donc, peut-être qu'avec le nouveau ministre nous aurions pu entendre, par exemple, le Syndicat de la fonction publique du Québec. Mais ça, c'est un autre enjeu. Mais le Syndicat de la fonction publique mentionne... et la députée de Gouin, dans son intervention sur la motion de report a mentionné l'analyse différenciée selon les sexes.

Donc, c'est aussi, on l'a mentionné, un engagement du gouvernement, ou du moins des gouvernements, parce que, hein, il y a une continuité dans l'action gouvernementale au Québec, il y a une loi qui existe... Ma collègue députée de Pointe-aux-Trembles, nous avons eu l'occasion d'avoir son éclairage, son apport ici, à l'Assemblée nationale. Vous êtes le doyen de l'Assemblée nationale, M. le Président. Notre collègue la députée de Pointe-aux-Trembles est la doyenne, hein, du côté des femmes. Donc, comme ex-ministre qui a justement piloté le projet de loi n° 112, la loi n° 112, nous a fait une présentation de comment ça s'est passé à cette époque. Et la députée de Pointe-aux-Trembles nous a mentionné — et le député de Rimouski, qui était très actif à ce moment-là, il l'est encore, mais, à ce moment-là, il était actif sur ce dossier-là avec la collègue — que c'était une bataille citoyenne, un gain citoyen, c'est l'expression pratiquement qu'il a utilisée. Pas surpris d'entendre ça, moi, même si je n'étais pas là, pas surpris. J'ai lu ça, le ministre a certainement lu les mémoires qu'on a entendus, 82 mémoires, je crois, qu'on est rendus. Bon, dans le mémoire de LASTUSE du Saguenay, un organisme qui oeuvre principalement à Jonquière, à Chicoutimi, ils le mentionnent : combat citoyen, on a obtenu l'article 20 de la loi n° 112 après une longue bataille, puis les groupes ont considéré que c'était un gain important. Mais, M. le Président, ça sert à quoi si l'article n'est pas respecté? Ça sert à quoi si le gouvernement ne respecte pas sa propre loi? Je comprends que ce n'est pas le gouvernement actuel qui a fait adopter la loi n° 112, mais, peu importe, il y a une continuité dans l'action gouvernementale. Quand un gouvernement signe un contrat, il doit respecter le contrat. Ça, c'est un autre enjeu, M. le Président, mais on pourrait y revenir. Mais donc, dans ce cas-ci, je considère que la proposition que nous fait la députée de Gouin est forte, pertinente, très à propos pour nous donner le temps de voir l'impact, les impacts du projet de loi actuel. Combien de temps qu'il me reste, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oh! on va me l'indiquer. On a commencé à 30, vous avez 12 de faites. Donc, il reste à peu près 18.

M. Turcotte : Combien?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Pour un professeur de maths, là, 18 à peu près.

M. Turcotte : O.K. Merci beaucoup, M. le Président. Donc, d'autres groupes dans les mémoires qu'on a reçus ont parlé aussi de cette question du lien avec la problématique des femmes. Parce que c'est ça, quand on parle, là, d'analyse différenciée selon les sexes, là : c'est la préoccupation que nous devons avoir pour la réalité des femmes versus les hommes. Dans le cas de plusieurs mémoires que nous avons reçus, on peut voir qu'Emploi-Québec produit peu de données spécifiques aux femmes. Ça sera aussi un enjeu que nous pourrons débattre durant l'étude de ce projet de loi là. Nous pourrons se questionner pourquoi Emploi-Québec produit peu de ce type de données.

On voit cependant que de plus en plus de femmes sont scolarisées, mais un plus grand nombre de femmes demeurent concentrées dans un petit nombre de métiers ou de professions, qui est quand même un enjeu significatif. J'ai cru comprendre, de la part d'un député, un commentaire comme quoi ça n'avait pas rapport. Mais je considère que ça a tout à fait rapport avec de quoi on parle, parce que, si on a de plus en plus de femmes scolarisées, mais qu'on n'a pas nécessairement une diversité des métiers et des professions exercés par les femmes, ce que ça nous rapporte, c'est la question des métiers non trad, des métiers non traditionnels et là de l'action qui est posée et qui est mise en oeuvre par Emploi-Québec.

On le voit, les femmes sans diplôme secondaire sont plus à risque que les hommes de se retrouver au chômage ou à l'aide sociale. Ça, M. le Président, c'est aussi une autre donnée inquiétante... pas une donnée, mais un constat inquiétant. Donc, on a de plus en plus de femmes scolarisées, oui, celles qui ne sont pas scolarisées, qui n'ont pas de diplôme d'études secondaires, malgré qu'elles sont moins nombreuses, ont plus de risques que les hommes de se retrouver à l'assurance-emploi ou à l'assurance-chômage... à l'aide sociale, pardon. Quand on voit que la principale cause ou, du moins, les premiers demandeurs à l'aide sociale proviennent principalement des gens qui ont soit terminé leur assurance-emploi ou n'ont pas pu être reconnus par l'assurance-emploi comme étant acceptables... acceptés à l'assurance-emploi, ce que ça fait... on pourrait se questionner sur les impacts de la réforme de l'assurance-emploi à Ottawa par le gouvernement conservateur. Cependant, M. le Président, force est de constater les liens et les rapprochements entre la réforme de l'assurance-emploi et la réforme qui nous est proposée actuellement de l'aide sociale : emplois dits convenables; on ne met même pas de limite de distance; on ne sait pas c'est quoi, un emploi convenable; on ne sait pas c'est quoi, les pénalités; tout ça, ça sera dans le règlement; on ne connaît pas le règlement; le règlement va être déposé après l'adoption du projet de loi; si on est chanceux, peut-être que le ministre va nous dévoiler ou nous révéler quelques éléments du règlement sans nécessairement avoir l'assurance que ça sera vraiment le règlement qui sera adopté par le Conseil des ministres, parce que, bon, on ne siège pas au Conseil des ministres. Et la loi sera adoptée. Donc, plusieurs questions qui peuvent se poser.

Les activités de formation d'Emploi-Québec se limitent à des secteurs où les perspectives d'emploi sont considérées comme très favorables, même si, dans certaines régions, ces professions sont majoritairement masculines, et les femmes ne sont pas encouragées à s'y former. M. le Président, quand je vous ai mentionné tantôt la question... de plus en plus de femmes scolarisées, mais un grand nombre de ces femmes demeurent concentré dans un petit nombre de métiers, bien, c'est de ça que je faisais référence quand je parlais de l'action d'Emploi-Québec. Je ne pense pas qu'il n'y ait aucun agent, là, soit d'employabilité ou agent d'aide sociale, pour faire simple, qui se réveille le matin puis qui dit : Moi, là, je vais m'assurer que les femmes, là, on ne les réfère pas dans des programmes de formation dans des métiers non traditionnels. Il n'y a pas aucun agent au Québec qui veut le malheur des autres. Ce n'est pas ça, l'enjeu, M. le Président.

L'enjeu, c'est la question financière. Combien de fois, comme députés, nous avons des gens en fin d'année budgétaire — ça va commencer puis si ce n'est pas déjà commencé — qui viennent nous voir puis qui nous disent : M. le député, on voulait avoir une formation, on ne peut pas l'avoir parce qu'il n'y a plus d'argent à Emploi-Québec, parce que le budget est épuisé. Puis là il faut attendre au 1er avril ou quand le nouveau budget va commencer. C'est la même chose.

• (21 heures) •

L'objectif, en ce moment, du gouvernement, M. le Président, avec le projet de loi n° 70, c'est de diminuer le nombre de personnes à l'aide sociale. En soi, c'est une volonté louable. Tout le monde souhaite qu'il y ait de moins en moins de gens à l'aide sociale. Mais il ne faut pas que cette volonté-là se traduise par des actions qui font en sorte qu'on met des gens de côté, de l'aide sociale, parce que c'est plus compliqué y avoir accès, parce qu'on n'a pas le programme qu'on peut, parce qu'il y a moins de budget dans une région.

Même dans le projet de loi, M. le Président, je ne l'ai pas mentionné tantôt, ça m'est sorti de l'idée, dans mon intervention précédente, même dans le projet de loi, on mentionne que, par règlement, le ministre pourrait avoir le pouvoir de facturer les services d'employabilité des bénéficiaires. On s'entend que, M. le Président, c'est questionnant. Ça veut dire que quelqu'un va embarquer dans un parcours d'employabilité... Puis je comprends que ce n'est pas le vrai terme, là. Dans la loi, là, il y a un autre terme, mais moi, j'appelle ça le parcours d'employabilité. Je me suis habitué à dire ça, puis c'est bien difficile de changer de phrase maintenant. Mais on parle d'embarquer les gens dans le programme Objectif emploi. Bon, bien, ça se peut qu'on leur envoie une facture à la fin ou au début. Est-ce qu'on va leur dire d'avance? Puis ça, c'est par règlement. On ne le sait pas dans le projet de loi, puis on va voter pour ce projet de loi là, puis on ne le sait pas. Ça a un impact sur la situation de pauvreté que les gens peuvent vivre. Je crois que c'est des éléments très pertinents à avoir dans l'étude qui est demandée par notre collègue la députée de Gouin.

Les femmes arrivent à l'aide sociale pour des raisons différentes que les hommes : parcours professionnel interrompu. Pas besoin d'élaborer trop longtemps sur cette question-là, là, c'est assez évident. On l'a mentionné, plusieurs de mes collègues l'ont mentionné, la question des centres de la petite enfance, qui a effectivement aidé les femmes à retourner sur le marché du travail et qui, actuellement avec les coupes du gouvernement actuel, peut avoir un impact, justement, de faire en sorte qu'il y aura moins de femmes qui pourront rester sur le marché du travail. Mais c'est bien évident que, pour les femmes qui sont à l'aide sociale ça a aussi un impact. Et, pour des femmes qui ne sont pas à l'aide sociale, mais, comme elles ont dû interrompre leur parcours professionnel, elles ne sont pas rendues au même niveau. Tantôt, je mentionnais la question de la formation, peut-être que ça leur prend une formation peut-être plus élaborée ou une plus longue formation pour faire en sorte qu'elles puissent se trouver un emploi décent.

Les premières demandes sont à un âge plus avancé, inévitablement. On le sait, là, de plus en... bien, pas de plus en plus, mais on le sait que, traditionnellement, les femmes, c'est plus elles qui s'occupent des enfants, même si ça tend à changer, puis c'est une bonne chose de changer cette tradition-là. C'est normal... bien, pas normal, mais c'est un constat qu'on doit faire, effectivement, que les femmes demandent de l'aide sociale... sont plus âgées. Et c'est plus difficile. Et ça a été mentionné lors des consultations particulières par le Conseil du statut de la femme. J'ai posé les questions. D'autres groupes aussi l'ont mentionné, qu'effectivement il y a une difficulté pour les femmes rendues à un certain âge de se trouver un emploi, c'est plus difficile que pour un homme. Tous des éléments, des questionnements que nous aurions pu répondre avec la proposition de la députée de Gouin, M. le Président.

On a mentionné tantôt, M. le Président, Ma place au soleil, hein? Ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve a parlé de ce programme, hein? Mais, vous savez, M. le Président, bon, outre que c'est un programme qui a été adopté en 2000 sous un gouvernement du Parti québécois, ce programme-là, en ce moment, qui fonctionne très bien... Ça a été mentionné aussi, durant les consultations particulières, que ce programme fonctionnait très bien et que beaucoup de gens aimeraient avoir accès à ce programme-là. Ça a été aussi mentionné par des groupes, lors des consultations particulières, que les agents ne référaient pas souvent les femmes à ce programme.

Ce que ça fait, Ma place au soleil, c'est que ça permet — ce programme est destiné principalement aux jeunes mères chefs de famille monoparentale — d'avoir une approche... un accompagnement soutenu durant la formation, la mise en commun des ressources gouvernementales, institutionnelles et, dans certains cas, communautaires. Donc, une femme monoparentale qui désire se trouver un emploi ou retourner aux études, bien, on va l'accompagner, on va y trouver une place en CPE, on va y trouver un médecin de famille, on va y trouver des ressources, etc., qui fait en sorte qu'elle puisse vraiment s'en sortir, peut être accompagnée.

Ça a été mentionné que les agents ne référaient pas beaucoup les femmes à ce programme-là. Le ministre a semblé être un peu surpris de cette affirmation-là. Bien, je crois qu'on a une confirmation, et cette confirmation-là vient nul autre que du Syndicat de la fonction publique du Québec, donc qui représente les agentes et les agents à l'aide sociale, donc les principaux concernés. Et ce qu'on nous dit, ce que le Syndicat de la fonction publique nous mentionne : «Cette mesure, appréciée des participantes, est unanimement reconnue comme un bon programme. Malheureusement, un tel programme est en voie de disparition au Québec. Par exemple, en Gaspésie et au Bas-Saint-Laurent...» Région de mon collègue député de Rimouski. Donc : «Par exemple, en Gaspésie et au Bas-Saint-Laurent — ce programme n'est pratiquement plus offert. Au Centre local d'emploi de Baie-Comeau, le nombre de personnes participantes est passé de 30 en 2011 à huit en 2015. Un peu partout, nos membres d'Emploi-Québec observent que les programmes et mesures axés sur l'accompagnement sont en recul au profit de mesures à plus court terme et orientées vers l'intégration rapide en emploi.» Ce n'est pas moi qui dis ça, bien, c'est moi qui le dis, mais je le lis, hein, je cite le mémoire du Syndicat de la fonction publique, groupe que nous n'avons pas entendu et que nous aurions peut-être dû entendre, M. le Président.

Pourquoi je vous parle de ça? Bien, c'est pour la dernière phrase que j'ai mentionnée. Quand je dis que «les mesures axées sur l'accompagnement sont en recul au profit des mesures à plus court terme et orientées vers l'intégration rapide en emploi», ce que ça me dit, M. le Président, c'est que ça m'allume un voyant rouge. Je n'aime pas beaucoup le rouge en général, mais, quand c'est important, puis c'est urgent, puis que ce n'est pas une bonne nouvelle, souvent ça flashe rouge, hein? Et le voyant rouge qui m'allume, là, bien, ça me dit que le ministre, le gouvernement nous dit : Nous allons prendre tous les nouveaux demandeurs. Nous allons les accompagner dans le parcours d'employabilité. S'ils ont besoin d'une formation, on va les aider pour s'assurer qu'ils s'en sortent, puis qu'ils soient accompagnés, puis qu'on puisse aider puis diminuer le nombre de l'aide sociale, bon, entre parenthèses, économiser 50 millions de dollars, entre parenthèses. Mais, moi, ça me dit que, si les agents eux-mêmes mentionnent que l'aide et les mesures d'accompagnement sont en baisse et en diminution, je peux me questionner sur l'accompagnement qui sera offert dans le programme Objectif emploi.

Autre point, M. le Président, je pourrai revenir sur d'autres aspects, mais j'ai fouillé... J'ai lu pratiquement l'ensemble des mémoires qui nous ont été transmis par les groupes et les organismes, puis il y a un organisme qu'on connaît tous, parce que, pratiquement dans toutes nos circonscriptions, cet organisme-là est présent, et qui ne va pas tout à fait dans... va dans la même finalité que notre collègue la députée de Gouin dans sa motion, mais pour d'autres raisons, mais que je considère importantes de mentionner, parce que nous ne les avons pas entendus, eux non plus, en commission parlementaire, mais qui nous ont transmis un mémoire assez court, donc facile à lire, hein, ça ne prend pas trop de temps. Mais ce mémoire-là du regroupement de la Société Saint-Vincent-de-Paul, donc de la Société Saint-Vincent-de-Paul du Québec, et la Société Saint-Vincent-de-Paul du Québec mentionne, comme demande, leur première demande, «qu'un moratoire soit établi afin qu'aucune personne ne voie réduit le montant de l'aide sociale [des] derniers recours dont elle peut bénéficier, et ce, pour les deux prochaines années», et là, que le gouvernement, en partenariat avec les autres organismes, puis tout ça, développe une mesure concernée.

Donc, la mesure proposée par la députée de Gouin est très pertinente, et c'est pourquoi, au nom du Parti québécois, nous allons appuyer sa demande, pour nous donner le temps de bien faire les choses. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député de Saint-Jean. Alors, je vous remercie de votre intervention. Et cette dernière intervention met fin au débat restreint de deux heures sur la motion de report présentée par Mme la députée de Gouin. Moi, ma responsabilité, c'est de mettre aux voix la motion qui se lit comme suit, je vous demande de porter attention :

«Que la motion en discussion soit amendée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans trois mois."»

Alors, est-ce que cette motion est adoptée? Oui?

M. Sklavounos : Je demanderais un vote par appel nominal.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, le vote par appel nominal est demandé. Que l'on appelle les députés. Les travaux sont suspendus quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 10)

(Reprise à 21 h 21)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, s'il vous plaît, on prend place et dans le silence.

Mise aux voix

Alors, le vote qui est appelé, c'est sur le débat restreint de deux heures sur la motion de report présentée par... la motion qui est en discussion soit amendée en retranchant le mot «maintenant», et on ajoutait, à la fin des mots, «trois mois».

Alors, quels sont ceux qui sont favorables avec cette motion?

La Secrétaire adjointe : Mme David (Gouin).

M. Marceau (Rousseau), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Verchères), M. Gaudreault (Jonquière), Mme Maltais (Taschereau), M. LeBel (Rimouski), M. Lisée (Rosemont), M. Ouellet (René-Lévesque), M. Rochon (Richelieu), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto (Bourget), M. Roy (Bonaventure).

M. Khadir (Mercier).

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, quels sont ceux qui sont contre cette motion?

La Secrétaire adjointe : M. Couillard (Roberval), M. Fournier (Saint-Laurent), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Blais (Charlesbourg), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Coiteux (Nelligan), Mme David (Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Daoust (Verdun), Mme St-Pierre (Acadie), M. Fortin (Sherbrooke), M. Reid (Orford), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Morin (Côte-du-Sud), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Ouellette (Chomedey), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Girard (Trois-Rivières), M. Iracà (Papineau), M. Bolduc (Mégantic), M. Tanguay (LaFontaine), M. Simard (Dubuc), M. Matte (Portneuf), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Rousselle (Vimont), Mme Vallières (Richmond), M. Auger (Champlain), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Fortin (Pontiac), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau), M. Busque (Beauce-Sud), Mme Sauvé (Fabre).

M. Bonnardel (Granby), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Lemay (Masson), M. Surprenant (Groulx), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Jolin-Barrette (Borduas).

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, Mme la Secrétaire générale, pour... Y a-t-il des abstentions? Je n'en vois pas. Mme la Secrétaire générale, pour le résultat du vote.

La Secrétaire : Pour : 18

                     Contre :           73

                     Abstentions :     0

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, la motion est rejetée.

Alors, M. le leader adjoint, pour la poursuite de nos débats.

M. Sklavounos : Je suggère de poursuivre sur le principe du projet de loi.

Des voix : ...

Poursuite du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, bien, moi, je veux bien poursuivre sur le principe, mais dans l'ordre, dans le silence, alors ce qu'on ne peut pas faire tout de suite.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, s'il vous plaît, veuillez vous retirer. C'est votre leader qui voudrait qu'on poursuive. Alors, pour poursuivre, il faudrait se retirer.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, quel intervenant ou intervenante veut prendre les 3 min 30 s qu'il reste avant de fermer? Alors, je reconnais Mme la députée. Allez, pour votre intervention.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, chers collègues, c'est avec plaisir aujourd'hui que je prends la parole dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi. Il s'agit d'une étape importante dans notre processus parlementaire et démocratique, et je suis très heureuse d'y prendre part pour la première fois à titre de députée de Fabre et d'adjointe parlementaire au ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. le Président, comme vous le savez, le Québec fait actuellement face à certains défis importants par rapport au marché du travail. Le phénomène du vieillissement de la population, la rareté grandissante de la main-d'oeuvre appellent notre gouvernement à poser des actions concrètes, particulièrement dans un contexte où des centaines de milliers d'emplois seront disponibles au Québec dans les prochaines années. D'ici 2022, ce sont 1,4 million d'emplois qui seront à pourvoir au Québec. Il est donc important de donner à chaque citoyen les moyens d'intégrer le marché du travail en ne laissant tomber personne.

M. le Président, notre gouvernement, dès le début de son mandat, a mentionné son intention d'améliorer de façon prioritaire l'équilibre entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre sur le marché du travail, notamment en favorisant une plus grande intégration en emploi des nouveaux arrivants et des jeunes. M. le Président, avec le projet de loi n° 70, on veut donner des outils aux agents des centres locaux d'emploi, les CLE, pour qu'ils puissent mieux accompagner les prestataires d'aide sociale dans leurs démarches de réinsertion en emploi. Pour ce faire, le projet de loi propose d'apporter des modifications à la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles afin de rendre possible la mise en place du programme Objectif emploi, une approche responsable de notre gouvernement, qui vise à aider les gens à améliorer leur situation.

Dans un premier temps, le programme Objectif emploi sera obligatoire et destiné aux personnes admissibles au programme d'aide sociale qui présentent une première demande d'aide financière de dernier recours. Avec ses partenaires en employabilité, ses partenaires en employabilité, Objectif emploi offrira aux participants un soutien et un accompagnement personnalisé, par l'entremise d'Emploi-Québec. Le nouveau programme sera le lien transitoire entre la demande d'aide de dernier recours et le marché du travail en encourageant l'effort et l'intégration des participants. En fait, le programme créé par le projet de loi n° 70 présente une approche renouvelée de l'accompagnement vers l'emploi des personnes admissibles à l'aide sociale, dans le respect de la dignité des personnes. Il permet de mieux aider les premiers demandeurs, dont une majorité de jeunes et de nouveaux arrivants, dans leurs recherches d'emploi.

Avec Objectif emploi, les prestataires devront convenir obligatoirement d'un plan d'intégration en emploi adapté à leurs besoins respectifs. L'insertion pourra prendre la forme d'un nouvel emploi à court terme, mais aussi de la poursuite d'une formation. Le prestataire aura 12 mois pour aller chercher une formation menant à un nouvel emploi, et, dans certains cas, le délai pourra être prolongé jusqu'à 24 mois. Par exemple, si une personne va chercher un diplôme d'études professionnelles, un D.E.P., dans un secteur qui est en demande, le Québec pourrait certainement y bénéficier à moyen terme, et nous allons tout faire pour que notre projet de loi tienne compte, entre autres, de cette réalité.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, Mme la députée de Fabre, compte tenu de l'heure, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à demain, mercredi 25 février, à 9 h 40. Alors, les travaux sont ajournés.

(Fin de la séance à 21 h 30)