(Neuf
heures quarante et une minutes)
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, veuillez vous asseoir. Bon mercredi matin.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous
allons procéder aux déclarations de députés, et je suis prêt à entendre la
première déclaration de ce matin, et ce sera celle de M. le député des
Îles-de-la-Madeleine. À vous, M. le député.
Féliciter les élèves de
l'école polyvalente des
Îles qui participent au Parlement étudiant
M. Germain Chevarie
M.
Chevarie : Merci, M. le Président. Je veux aujourd'hui féliciter les étudiants et étudiantes de l'école
polyvalente des Îles qui furent
assermentés la semaine dernière en tant que membres du Parlement 2015-2016,
la première ministre, Julie Richard, ainsi que les ministres et députés
de son équipe. Ils se sont ainsi inscrits dans un processus démocratique qui se traduit par une mission, celle de représenter leurs pairs de
façon juste et équitable et viser le bien commun de leur école. Ils doivent être fiers et honorés d'avoir
la confiance de leurs pairs. Je suis convaincu qu'ils sauront relever le défi
avec brio et qu'ils vivront une expérience
enrichissante. Leur implication, dans le cadre du Parlement étudiant, est tout
à fait louable, elle est le reflet d'une jeunesse intéressée et
impliquée.
Bravo pour cette
volonté d'implication! Bon succès et, encore une fois, toutes mes
félicitations! Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député, de votre déclaration. Je cède maintenant
la parole à M. le député de Rimouski pour sa déclaration de ce matin. M.
le député, à vous.
Rendre hommage à M. Olivier
Cloutier,
lauréat du gala Forces Avenir
M. Harold LeBel
M.
LeBel : Merci, M. le Président. Je souhaite rendre hommage à un étudiant du cégep de Rimouski, Olivier Cloutier, qui a réalisé un projet de
recherche prometteur intitulé Chia : Une cure précolombienne, et qui a
remporté les honneurs à titre de projet par excellence au gala Forces
Avenir.
Passionné
de sciences et de recherche, ce jeune homme de 19 ans est inspiré par la
médecine évolutive. Il a ainsi orienté ses travaux sur une plante utilisée
depuis 5 000 ans, le chia.
Dans le but de créer une cure expérimentale pour des cellules de cancer colorectal, il a extrait les
composés polyphénoliques de la plante pour ensuite observer quel effet ils
auraient sur la croissance des cellules cancéreuses. Ce projet, qui s'est
retrouvé finaliste dans la catégorie Sciences et applications technologiques,
est une impressionnante démarche pour la recherche liée au cancer.
Je
salue donc le travail d'Olivier Cloutier, qui aura certainement un avenir très
prometteur dans le milieu de la science. Olivier, tu es une fierté pour
les gens de chez nous. Merci. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, M. le député de
Rimouski. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Hull pour sa
déclaration d'aujourd'hui.
Inviter la population de
l'Outaouais à participer à la
Campagne des monarques lancée par le Centre
d'intervention en abus sexuels pour la famille
Mme Maryse Gaudreault
Mme
Gaudreault :
Merci, M. le Président. Alors, aujourd'hui, j'aimerais souligner l'apport
exceptionnel du Centre d'intervention en
abus sexuels pour la famille de l'Outaouais, le CIASF. Chaque année, et ce,
depuis 28 ans, près de 500 personnes confrontées à l'agression
sexuelle d'enfants sont accompagnées par l'équipe du CIASF.
Pour la première fois de son histoire, le CIASF
lance une campagne de prévention, et ainsi l'organisme veut sensibiliser la
population au phénomène d'agressions sexuelles envers les enfants tout en
recueillant des fonds pour offrir de
nouveaux services. J'invite donc toute la population de l'Outaouais à participer
à la Campagne des monarques en se
procurant un noeud papillon fait main dans le but de le porter fièrement le
19 novembre prochain, Journée mondiale de prévention des abus
envers les enfants. Pour les enfants victimes d'abus sexuels, le monarque inspire
autant par sa vulnérabilité
que par sa grande résilience. Il est un bel exemple de transformation
intérieure empreinte de courage et de persévérance.
Alors, faites
comme moi le 19 novembre prochain, adoptez le style papillon et la cause.
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Repentigny pour sa déclaration de ce matin. À vous, madame.
Souligner le 25e anniversaire de l'organisme
Marraines Coup de pouce
Mme Lise Lavallée
Mme Lavallée : Merci, M. le
Président. Je tiens à souligner aujourd'hui le 25e anniversaire de
l'organisme Marraines Coup de pouce de
Repentigny. Cet organisme bénévole a pour objectif d'offrir un moment de répit
aux nouvelles mamans afin qu'elles puissent mieux vivre leur maternité.
Les marraines, triées sur le volet, vont à leurs domiciles trois heures par
semaine pendant 10 semaines et soutiennent les mamans dont le bébé est âgé
de moins de 12 mois.
Depuis sa
fondation, cet organisme vient en aide chaque année à environ 40 familles
avec des besoins divers. Je souhaite
féliciter toutes les marraines qui consacrent leur temps afin de rendre
possibles ces jumelages si appréciés par les familles de la région. De
fait, Marraines Coup de pouce regroupe pas moins de 75 membres, dont
22 marraines.
Je veux aussi
mentionner l'implication de La Maison de la famille La Parenthèse, qui héberge
l'organisme et apporte son aide au
niveau de la gestion. Grâce à eux,
l'organisme est en mesure de faire la différence dans la vie de ces familles.
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, on vous remercie de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Louis-Hébert
pour sa déclaration de ce matin. M. le député, à vous la parole.
Souligner la tenue du Sommet sur la culture
philanthropique organisé par l'Institut Mallet
M. Sam Hamad
M.
Hamad : Alors, bon matin, M. le Président. Je tiens à
souligner la tenue du Sommet 2015 sur la culture philanthropique, mis en oeuvre par l'Institut
Mallet, qui se déroule présentement à Montréal sous le thème Écosystème philanthropique : perspectives, perceptions
et échanges. Cette deuxième
édition, qui réunit de nombreux acteurs en matière de philanthropie, se
concentre sur deux volets : les besoins et les ressources.
Partout au Québec,
la culture de la philanthropie interpelle de plus en plus de personnes, de
groupes, d'entreprises privées
et d'institutions publiques de notre société.
Elle prend donc de multiples formes, revêt différents visages et s'articule
autour de nombreuses causes. Rappelons que
l'Institut Mallet souhaite contribuer à accroître la solidarité et l'engagement de l'ensemble de la société québécoise et ainsi favoriser l'entraide, l'action bénévole,
le don financier et l'innovation sociale dans l'intérêt général.
Je remercie
l'Institut Mallet pour l'organisation du sommet et, plus largement, son action au
quotidien. Je vous invite toutes et tous à vous engager sur le plan
philanthropique et le favoriser au sein de vos organisations.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Vachon pour sa déclaration d'aujourd'hui.
Rendre hommage à Mme Catherine Beauchemin-Pinard
pour ses exploits sportifs en judo
Mme Martine Ouellet
Mme
Ouellet : Merci, M.
le Président. Une jeune femme de
Saint-Hubert, Catherine Beauchemin-Pinard, s'est illustrée de façon remarquable sur la scène internationale en judo, et
je tiens aujourd'hui à saluer sa détermination et son courage.
En effet, seulement
cette année, Catherine a terminé en cinquième place aux Championnats du monde
seniors et aux Masters seniors, en troisième place au Grand Slam de
Russie, aux Championnats panaméricains et à la coupe continentale d'Autriche, en deuxième place aux Jeux panaméricains de
Toronto et, finalement, en première place à la coupe continentale du
Salvador.
Catherine est
une athlète de 21 ans qui s'entraîne depuis 10 ans pour réaliser son
rêve de participer aux Olympiques en
judo. Elle a commencé à s'entraîner au Club de judo de Saint-Hubert, où elle
vient encore pour soutenir les jeunes athlètes en développement.
Je tiens à
souligner que son palmarès est le plus étoffé de l'histoire du judo canadien
féminin, étant présentement au
cinquième rang mondial dans sa catégorie, et se classe actuellement en quatrième
place pour les qualifications des Jeux olympiques de 2016. Catherine est une
jeune Québécoise qui incarne la fougue, la passion et la rigueur...
Le Vice-Président (M.
Gendron) : Alors, merci, Mme la députée de Vachon pour votre
déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Gatineau pour sa
déclaration de ce matin. Mme la députée, à vous.
Souligner le 50e anniversaire du Conseil
interprofessionnel du Québec
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : Merci, M. le
Président. Alors, j'aimerais souligner aujourd'hui le 50e anniversaire du
Conseil interprofessionnel du Québec. Je
tiens à saluer la présence dans les tribunes du directeur général, des membres
du comité exécutif et de la
présidente du CIQ, Dre Diane Legault, qui a également représenté fièrement
la circonscription de Chambly ici, à cette Assemblée.
Créé en 1965,
le CIQ est le regroupement de 46 ordres professionnels qui comptent
ensemble 378 000 membres
oeuvrant dans les secteurs névralgiques de
la société québécoise : la santé, les services sociaux, l'agriculture,
l'administration et les affaires, le
génie, l'aménagement et les sciences appliquées. Le CIQ exerce, en vertu du
Code des professions, une fonction
conseil auprès de la ministre responsable de l'application des lois
professionnelles et de l'Office des professions.
Je tiens à profiter
de cette occasion pour exprimer ma vive reconnaissance pour le travail effectué
par le CIQ et je tiens à souligner sa
contribution importante dans l'importante réforme du Code des professions dans
laquelle nous nous sommes engagés
afin de mieux protéger le public. Au nom de la population, je tiens à les
remercier pour leur implication et leur participation à la création d'un
système...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci, Mme la députée de Gatineau. Je cède maintenant la parole à M. le
député de Beauce-Nord pour sa déclaration d'aujourd'hui.
Féliciter MM. Michel Rouleau et Louis Veilleux,
honorés par le Centre local de développement
de la Nouvelle-Beauce
M. André Spénard
M.
Spénard :
Merci, M. le Président. Le 4 novembre dernier, c'est avec un plaisir
renouvelé que j'ai assisté à la
37e édition du souper annuel des gens d'affaires du CLD Nouvelle-Beauce à
Sainte-Marie. Cette soirée fut l'occasion de rendre hommage à deux
personnalités d'affaires de mon comté devant plus de 400 invités.
Tout d'abord,
M. Michel Rouleau a fait son entrée au Club des bâtisseurs.
M. Rouleau a connu une carrière de près de 40 ans au sein du Mouvement Desjardins et, depuis le tout
début, il s'est engagé à faire avancer la cause d'organismes de nature économique et philanthropique. Cet
engagement a largement contribué au développement de plusieurs organismes
de La Nouvelle-Beauce. Pour souligner
son parcours, j'ai profité de cette soirée pour lui remettre la Médaille de
l'Assemblée nationale.
De son côté,
M. Louis Veilleux a reçu le titre de Personnalité d'affaires de l'année.
Président-directeur général de Métal
Bernard, une division du Groupe Mundial, l'entreprise, située à
Saint-Lambert-de-Lauzon, a reçu de nombreux prix pour ses pratiques
innovantes depuis son acquisition par M. Veilleux et ses associés.
À vous deux je dis merci de votre contribution
au développement de toute la communauté beauceronne.
• (9 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci. Merci, M. le député, de votre déclaration. Je cède maintenant
la parole à M. le député de Mont-Royal pour sa déclaration de ce matin. M. le
député, à vous.
Souligner l'arrivée du siège social de la Corporation
Sigvaris
dans la circonscription de Mont-Royal
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, en
tant que député de Mont-Royal, il me fait plaisir de souligner en cette Chambre
l'arrivée du siège social, dans ma
circonscription, de l'entreprise internationale d'origine suisse Sigvaris.
Permettez-moi d'ailleurs de saluer la
présence en cette Chambre du directeur général de l'entreprise, M. Craig
Miller, et également de Mme Sandra Bray, représentante aux ventes
pour l'Est du Québec.
Oeuvrant dans
le secteur médical de pointe, Sigvaris, qui a célébré l'an dernier son
150e anniversaire, a commercialisé
le premier bas médical de compression en 1961. Poursuivant sa stratégie de croissance internationale, elle exporte aujourd'hui dans plus de 70 pays et vend évidemment
des bas médicaux partout dans le monde. J'ai eu le plaisir de participer
à la grande ouverture du siège social canadien de Sigvaris en septembre
dernier. À cette occasion, le directeur
général m'a indiqué qu'un plus grand bureau pour Sigvaris Montréal
confirmait à la fois le sentiment d'appartenance au Québec ainsi que la
confiance en son environnement d'affaires...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci, M. le député de Mont-Royal, pour votre déclaration. Je cède maintenant
la parole à Mme la députée de Taillon pour sa déclaration de ce matin. Mme la
députée, à vous.
Souligner
la Semaine du médecin de famille au Canada
Mme Diane Lamarre
Mme
Lamarre : M. le Président, c'est avec grande fierté que j'ai accepté l'invitation du Collège québécois
des médecins de famille visant à souligner la Semaine du médecin de
famille du Canada.
En
soulignant cette semaine, qui se tient du 9 au 14 novembre 2015, je
désire rendre hommage à ces médecins qui
ont choisi une pratique proche des patients. Les médecins de famille
contribuent aussi à la formation des étudiants et à la recherche, et ce,
en lien avec les quatre facultés de médecine du Québec.
Je
veux également féliciter le récipiendaire québécois du prix du Médecin de
famille de l'année, le Dr Rénald Bergeron, à la fois médecin de famille
et doyen de la Faculté de médecine de l'Université Laval.
Les
médecins de famille jouent un rôle majeur dans la santé des Québécois. Ils
prodiguent des soins directs aux patients, tout en collaborant avec les
médecins spécialistes et tous les autres professionnels de la santé et des
services sociaux. Leur contribution est
intimement liée au mieux-être et à la santé des Québécois. Je les en remercie
sincèrement.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, Mme la députée de
Taillon, pour votre déclaration.
Et cette dernière
déclaration met fin à la rubrique Déclarations de députés. Les travaux sont
suspendus pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 9 h 53)
(Reprise à 10 heures)
Le
Président : Mesdames
messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants, en n'oubliant pas que c'est aujourd'hui
le jour du Souvenir.
Merci. Veuillez vous
asseoir.
Présence de Mme Diane Legault, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale
J'ai
reconnu, dans nos tribunes, Mme Diane Legault, qui a été l'ancienne députée de
Chambly. Je voudrais la saluer, en passant. Mme Diane Legault.
Nous poursuivons les
affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M. Fournier :
Oui. Bonjour, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article a, s'il
vous plaît.
Projet de loi n° 75
Le Président :
Eh bien, bien le bonjour, M. le leader. À l'article a du feuilleton, M. le
ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale présente le projet
de loi n° 75, Loi sur la restructuration des régimes de retraite à
prestations déterminées du secteur universitaire et modifiant diverses
dispositions législatives. M. le ministre.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi
prévoit que les régimes de retraite à prestations déterminées du secteur universitaire doivent être restructurés
au plus tard le 31 décembre 2017 dans le but de favoriser une meilleure
gestion de risques ainsi que le redressement
de la situation financière de certains de ces régimes afin d'en assurer la
pérennité.
Le projet de loi
oblige la préparation d'une évaluation actuarielle pour tous les régimes de
retraite en date du 31 décembre 2014.
Le projet de loi
prévoit des mesures générales de restructuration visant à partager, au plus
tard à compter du 1er janvier 2018, à parts
égales le total des cotisations à l'égard du service postérieur au
31 décembre 2014 entre l'employeur et les participants actifs. Le projet de loi leur permet également de
convenir d'un partage pouvant atteindre un minimum de 45 % pour la participation... actifs et
qui peut faire l'objet d'une réparation différente entre les divers types de
cotisations.
Le
projet de loi oblige les régimes de retraite dont le coût au 31 décembre 2014
excède 21 % de la masse salariale des participants actifs ou cette
limite majorée à faire l'objet de mesures particulières de restructuration. Le
projet de loi permet de modifier les
prestations à l'égard des participants actifs à compter du 1er janvier
2015 pour réduire le coût de ces
régimes à 21 % ou moins ou à cette limite ainsi majorée, et ce, tant à
l'égard du service postérieur au 31 décembre
2014 qu'à l'égard du service antérieur au 1er janvier 2015.
Le projet de loi prévoit par ailleurs, pour les régimes visés, une période de négociation d'une année, pouvant être prolongée pour une période de trois
mois renouvelable une seule fois. Il prévoit également que les parties peuvent recourir à la
conciliation, et, en cas d'échec des négociations, le différend est soumis à un arbitre. De plus,
dans le cas des régimes dont les modifications ne font pas l'objet de négociations avec chaque association d'employés, le projet de loi reconnaît les processus de modification
qui y sont prévus. Dans le cas des régimes n'ayant pas à faire l'objet de mesures particulières de restructuration, le projet de loi prévoit que les participants actifs doivent être consultés pour qu'une
modification à leurs prestations soit effective.
Enfin,
le projet de loi modifie la Loi sur les régimes complémentaires de
retraite pour permettre le versement de prestations variables, au titre des dispositions à cotisation
déterminée d'un régime de retraite, dans les conditions ou dans les
délais prévus par règlement.
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader
de l'opposition.
M. Drainville : M. le
Président, des consultations
particulières sur ce projet de loi, ça devrait être possible, hein? C'est
assez important pour ça, M. le ministre?
Le Président :
La question est posée. M. le leader du gouvernement.
M.
Fournier : Je pense, M. le Président, que ça pourrait être possible, et donc on aura des échanges sur le
sujet.
Mise aux voix
Le
Président : Alors,
est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Fournier :
Je vous demanderais d'appeler l'article b, M. le Président.
Projet de loi n° 72
Le
Président : Alors, à
l'article b du feuilleton, M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche
présente le projet de loi n° 72,
Loi concernant la suspension des élections scolaires partielles. M. le
ministre.
M. François Blais
M. Blais :
Merci bien, M. le Président. Ce projet de loi établit que toute vacance à un
poste de commissaire constatée plus de 12 mois avant la prochaine élection
générale devra être comblée par une nomination du conseil des commissaires
plutôt que par la tenue d'une élection partielle.
Le
projet de loi prévoit des règles particulières concernant le remboursement des
dépenses électorales engagées ou des
contributions effectuées dans le cas où la suspension de l'élection partielle
s'applique à une vacance à l'égard de laquelle
le président d'élection a déjà fixé le jour du scrutin à une date postérieure à
la sanction de la loi, M. le Président.
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader.
M. Drainville :
Vote par appel nominal, M. le Président.
Mise aux voix
Le
Président : D'accord. Est-ce que les whips sont prêts? Prêt?
Prêt? Prêt? Parfait. Quels sont ceux qui sont en faveur de cette motion?
Le Secrétaire adjoint : M.
Fournier (Saint-Laurent), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad
(Louis-Hébert), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M.
Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys),
M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier),
Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette
(La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel
(Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Daoust (Verdun), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M.
Blais (Charlesbourg), Mme St-Pierre (Acadie), M. Reid (Orford), Mme
Vallières (Richmond), M. Morin (Côte-du-Sud), M.
Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Charlebois (Soulanges), Mme
Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion),
M. Girard (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine),
M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme de Santis
(Bourassa-Sauvé), M. Rousselle (Vimont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Giguère
(Saint-Maurice), M. Fortin (Sherbrooke), M.
Fortin (Pontiac), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain),
M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Plante
(Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré).
Le Président :
Quels sont ceux qui sont en faveur?
Une
voix : ...
Le Président :
Vous êtes en faveur? En faveur?
Le Secrétaire adjoint : M. Bonnardel (Granby),
M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M.
Roberge (Chambly), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M.
Lemay (Masson), Mme Lavallée (Repentigny), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M.
Paradis (Lévis), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette
(Borduas).
Le Président :
Quels sont les membres de cette Assemblée qui sont contre cette motion?
Le Secrétaire adjoint : M. Péladeau
(Saint-Jérôme), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau),
M. Therrien (Sanguinet), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles),
Mme Lamarre (Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M. Lelièvre (Gaspé), M.
Bergeron (Verchères), M. Leclair
(Beauharnois), M. Gaudreault (Jonquière), Mme Maltais (Taschereau), M. LeBel
(Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M.
Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau
(Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M.
Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto
(Bourget), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).
Mme David (Gouin), M. Khadir (Mercier), Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques),
Mme Roy (Arthabaska).
Le Président :
Quels sont ceux... Est-ce qu'il y a des abstentions? M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 74
Contre : 31
Abstentions :
0
Le Président : Alors, la
motion est adoptée.
M. le député de Mercier.
M. Khadir : M. le Président,
j'aimerais demander au ministre sa collaboration pour qu'on puisse avoir des consultations
particulières en commission parlementaire sur son projet de loi.
Le Président : M. le leader.
M. Fournier : Je suis un peu
étonné, là. On a déjà voté sur la présentation, M. le Président. Mais on aura
des échanges, de toute façon.
Le Président : Alors, M. le
leader.
M. Fournier : ...d'appeler l'article
c, M. le Président.
Projet de loi
n° 216
Le
Président : Alors, à l'article
c, j'ai reçu le rapport de la directrice de la législation sur le projet de loi n° 216, Loi
concernant la vente d'un immeuble situé sur le rang Bois-Franc Ouest à
Notre-Dame-du-Sacré-Coeur-d'Issoudun.
La directrice de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement
des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.
En
conséquence, M. le député de Côte-du-Sud présente le projet de loi d'intérêt
privé n° 216, Loi concernant la vente d'un immeuble situé sur le
rang Bois-Franc Ouest à Notre-Dame-du-Sacré-Coeur-d'Issoudun.
Mise aux voix
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de
ce projet de loi?
Des voix : ...
• (10 h 10) •
Le Président : Adopté. M. le
leader.
Renvoi à la Commission
de l'aménagement du territoire
M. Fournier : Conformément
au premier alinéa de l'article 267 de notre règlement, je fais motion afin que
ce projet de loi soit déféré à la
Commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires
municipales et de l'Occupation du territoire en soit membre.
Une voix : Merci.
M.
Fournier : Ça me fait plaisir.
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.
Dépôt de documents
Modifications à la composition du
Bureau de l'Assemblée nationale
Je
dépose la lettre de M. le chef de l'opposition
officielle, dans laquelle il
m'informe que les députés de Berthier
et de Saint-Jean ont été désignés, par son groupe parlementaire, pour agir à
titre de membres suppléants du Bureau de l'Assemblée nationale. M. le
vice-président.
Motion proposant d'adopter les modifications
Le
Vice-Président (M.
Ouimet) : Alors, M. le Président, je propose que ces modifications à la composition du Bureau
de l'Assemblée nationale soient adoptées.
Mise aux voix
Le Président :
La motion est-elle adoptée? Adopté.
Dépôt de rapports de commissions
M.
le président de la Commission des
institutions et député de
Chomedey, au dépôt de rapports de commissions.
Étude détaillée du projet de loi n° 51
M.
Ouellette : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission des institutions qui, les 30 septembre, 6, 7, 8, 20, 21 et 28 octobre ainsi que les 3, 4,
5 et 10 novembre, a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la
justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives. La
commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.
Le Président :
Ce rapport est déposé.
Il n'y a pas de dépôt
de pétitions.
Il n'y a pas réponses
orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou
de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes donc
rendus à la période de questions et réponses orales. Je cède la parole à M. le
chef de l'opposition officielle.
Projet de loi visant à permettre une meilleure adéquation
entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser
l'intégration en emploi
M. Pierre Karl Péladeau
M.
Péladeau : Merci, M. le Président. Le gouvernement libéral déposait, hier soir, un projet de loi pour réformer l'aide sociale.
Le gouvernement libéral a décidé de faire porter tout le poids de
l'austérité aux plus démunis de la société. Ils en
sont rendus à cibler les jeunes, M.
le Président, à utiliser la
coercition de manière arbitraire, alors que les mesures d'accompagnement
actuelles donnent déjà des résultats et que le nombre de prestataires diminue.
Le modèle du gouvernement semblait être celui du gouvernement conservateur à Ottawa, qui a causé un tort immense aux chômeurs.
Est-ce que le gouvernement
exigera qu'une famille déménage sous la menace d'être coupée? Que feront les
parents qui ont des enfants à l'école s'ils sont contraints d'accepter un
emploi à des centaines de kilomètres? Le vrai problème, M. le
Président, c'est que nous avons un gouvernement qui compense ses lacunes économiques en s'attaquant aux plus
vulnérables. C'est d'un plan économique dont le Québec a besoin, pas le retour
des boubous macoutes.
Le ministre a annoncé
un simulacre de consultation derrière des portes closes. Et d'emblée il nous
annonce la solution : la manière
forte.
Est-ce que le ministre
de la Solidarité sociale peut au moins nous dire s'il prendra le temps
d'écouter, qu'il mènera une véritable consultation, qu'il chassera ses
préjugés avant d'aller plus loin dans le projet de loi?
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : M. le Président, en écoutant le chef de l'opposition, c'est drôle, je trouve qu'il a changé son
discours depuis quelques années. Je
me rappelle son article dans Le Devoir, il y a quelques années, où il
était exactement à la même position que nous avons aujourd'hui.
Maintenant,
pour répondre à la question du chef de l'opposition, M. le
Président, est-ce que quelqu'un ici,
dans la salle, accepterait, avec
notre société généreuse et solidaire, de laisser tomber 6 300 jeunes par année qui sont issus
d'une famille à l'aide sociale, qui
demandent l'aide sociale? Est-ce qu'il y a quelqu'un ici dans la salle, M. le
Président, et dans notre société
ambitieuse qui avait l'ambition, pour nos jeunes, de laisser tomber
8 000 jeunes de 29 ans et moins qui s'en vont à l'aide sociale, M. le Président? Est-ce
qu'on peut accepter de laisser tomber nos jeunes dans la pauvreté et dans la
tristesse? Notre réponse ici, c'est absolument non, M. le Président. Ce que
nous voulons, ce que nous voulons...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
M.
Hamad : ...c'est que nos jeunes, M. le Président, notre
grande richesse... qu'on s'en occupe, on donne leur dignité, on les aide à aller travailler, on les
aide à avoir une formation parce que c'est notre grande richesse, c'est notre
responsabilité de s'en occuper, M. le Président.
Le Président :
En terminant.
M.
Hamad : Notre responsabilité, c'est de ne pas laisser tomber
derrière nous puis laisser notre grande richesse...
Le Président :
Complémentaire, député de Saint-Jean.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : M. le Président, l'essentiel de la réforme du
ministre est : Si tu ne travailles pas, on te coupe. Au même moment, les libéraux coupent les programmes
qui visent à aider les gens et les jeunes à se trouver un emploi, donc il faut chercher l'erreur. Le ministre nous
dit : On veut les aider. Il les aide à aller dans la rue. C'est ce qu'il
fait, c'est ce que le gouvernement
libéral fait. M. le Président, tout est tout croche dans ce gouvernement. Le
seul plan, c'est le plan de l'austérité.
Est-ce que le ministre
peut tenir de véritables consultations?
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad :
M. le Président, bien sûr nous allons consulter, bien sûr. C'est normal, c'est
la démocratie.
M.
le Président, cette démarche-là, c'est la suite à plusieurs années d'efforts.
Je rappelle à l'Assemblée, en 2008‑2009,
nous avons mis une stratégie qui s'appelle Pacte pour l'emploi, où nous
avons investi, tous les contribuables du
Québec, 1 milliard de dollars. 2009, on a ajouté 500 millions de
dollars pour aider les gens sur une base volontaire. Pour ceux et
celles, les Québécois, qui veulent améliorer leur sort, le gouvernement était
prêt pour les aider.
Ça
a marché, M. le Président, mais il faut aller plus loin. Pourquoi il faut aller
plus loin? Parce qu'encore il y a une triste réalité. À chaque année, M.
le Président, est-il normal...
Le Président :
En terminant.
M.
Hamad :
...d'avoir 6 200 jeunes issus d'une famille à l'aide sociale qui
demandent l'aide sociale?
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Saint-Jean.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : Le gouvernement veut forcer les jeunes, les jeunes familles, à déménager, à se déraciner
de leur région pour un emploi convenable. Qu'est-ce qu'un emploi
convenable pour le ministre? Couper les jeunes, c'est les inciter et les forcer à aller dans la rue, c'est
les inciter et les forcer à aller dans la misère. Qui peut vivre avec seulement 600 $ par mois? Le ministre prétend lutter
contre la pauvreté, mais pourtant il va créer de la pauvreté. Pourquoi les
libéraux s'attaquent encore une fois aux jeunes du Québec?
Le
Président : M. le ministre de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : M. le Président, je veux rassurer l'Assemblée, nous
ne forcerons personne; nous allons compenser l'effort. C'est complètement différent. C'est-à-dire, M. le Président,
nous offrons aux jeunes qui viennent demander l'aide sociale de l'aide. Nous disons aux jeunes :
On va vous donner une prime additionnelle si vous participez à des démarches
qui vont vous aider à gagner votre confiance
et qui vont vous aider à avoir la formation dans le but de sortir de la
pauvreté. Évidemment, si ces
jeunes-là, M. le Président, n'acceptent pas l'aide, si eux n'acceptent pas
l'aide, M. le Président, nous, on ne forcera personne, on va les aider,
on va les accompagner...
Le Président :
En terminant.
M.
Hamad :
...et l'accompagnement, M. le Président, ça va être personnalisé, dépend chaque
cas.
Le Président :
Troisième complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Carole Poirier
Mme
Poirier : Ces jeunes que le ministre de la pauvreté veut
couper, ce sont aussi des femmes à statut précaire. Les femmes en ont assez des menaces de ce
gouvernement. Depuis l'arrivée des libéraux, ce sont les femmes qui sont
victimes de l'austérité. Les femmes vous disent : Non à l'appauvrissement.
M.
le ministre de la pauvreté, dites-moi comment faire pour payer un logement à
650 $ avec un revenu de 600 $ par mois.
Le
Président : Madame, avec l'expérience que vous avez, vous savez
comme moi qu'on ne peut pas ici, dans cette Chambre...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Je suis en train de lui parler, là. Vous savez, madame, qu'on
ne peut pas dire autrement des... appeler
autrement une personne ici autrement que par son titre. Et monsieur est membre
du cabinet, et son titre est connu. M. le ministre de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : M. le Président, s'il y a un gouvernement qui a
appauvri le Québec, là, c'est le Parti québécois en face. Et ça, on le sait. M. le Président, notre
objectif, c'est sortir les gens de la pauvreté; notre objectif, c'est de
travailler avec les gens. Mais
évidemment, M. le Président, quand le contribuable, le payeur de taxes investit
dans les gens qui en ont besoin, il y
a aussi l'autre partie, c'est que la personne qui participe, elle doit aussi
faire l'effort, M. le Président. Nous ne forcerons personne, nous allons
compenser l'effort, nous allons aider tous les jeunes qui arrivent à l'aide
sociale, M. le Président, pour briser le cycle vicieux de l'aide sociale...
Le Président :
En terminant.
M.
Hamad : C'est-à-dire, quand je suis un enfant d'une famille d'aide sociale, je m'en vais
demander l'aide sociale, c'est inacceptable.
Le Président :
Principale, M. le député de Terrebonne.
Déversement d'eaux usées de la ville de
Montréal dans le fleuve Saint-Laurent
M. Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Le déversement de 8 milliards de litres d'eaux usées a débuté
cette nuit à Montréal. Hier, j'ai posé une
question fort simple au ministre de l'Environnement, une question qui préoccupe
les municipalités riveraines du fleuve
Saint-Laurent : Qui va payer pour le nettoyage des déchets qui souilleront
les rives au cours des prochaines
heures et des prochains jours? Est-ce que c'est le fédéral, le gouvernement du
Québec, la ville de Montréal, les municipalités en aval ou les
riverains? Le ministre n'a tout simplement pas répondu.
Et, pendant
ce temps-là, M. le Président, rien n'est clair pour les municipalités. À Longueuil, la mairesse a décidé de prendre les choses en main. Elle dit qu'elle
entreprendra elle-même, de ses propres ressources, des démarches pour
faire face à ce déversement. Les maires de Sorel-Tracy et de
Sainte-Anne-de-Sorel affirment, quant à eux, que c'est Montréal qui va venir nettoyer
leurs berges, mais ne savent toujours pas qui va payer pour ces interventions. À Trois-Rivières, Bécancour, Louiseville,
Nicolet ou Wôlinak, en Mauricie et Centre-du-Québec, on ne sait toujours pas à quoi
s'attendre.
Que répond le ministre de l'Environnement, qui a eu 24 heures pour faire des vérifications? Qui va payer pour le nettoyage des berges?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Tout
d'abord, il faudrait savoir sur
quelle information scientifique le député se base pour affirmer
qu'il y aura ces conséquences-là, premièrement, parce qu'encore une fois ça
fait plusieurs semaines qu'on entend
le député de Terrebonne s'époumoner sur ce dossier, mais rien, en termes de
bases ou d'assises scientifiques, aucune solution de rechange, rien sur
les effets, aucune base scientifique, quoi que ce soit.
Nous
avons rendu public l'ensemble de nos démarches. Nous avons rendu publiques
également les exigences que le
ministère de l'Environnement a imposées à la ville de Montréal. Et, si le
député se donnait la peine de lire une fois de temps en temps, il
saurait depuis longtemps...
Des voix :
...
M. Heurtel :
...il saurait depuis longtemps, M. le Président...
Des voix :
...
Le
Président : La question a été posée dans l'ordre, il n'y a pas
de raison que la réponse ne soit pas aussi écoutée dans le même ordre.
M. le ministre de l'Environnement.
• (10 h 20) •
M.
Heurtel : Encore une fois, M. le Président, si le député de Terrebonne
se donnait la peine de lire une fois de temps en temps ce que nous avons
émis, il saurait très bien qu'une des conditions de nos autorisations comporte
le fait que la ville de Montréal soit responsable de tous les impacts reliés au
déversement. Alors là, encore une fois, au lieu
d'apeurer et de créer des situations qui n'ont aucune assise dans les faits...
Les faits sont clairs : nous avons imposé des...
Le Président :
En terminant.
M.
Heurtel : ...conditions à la ville de Montréal, et nous faisons un
suivi rigoureux, et les municipalités savent...
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Terrebonne.
M. Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci, M. le Président. Ce qui est clair dans
l'action du ministre, c'est son manque de leadership et son laxisme en matière, là, d'actions pour le
«flushgate». À l'heure actuelle, si ce dossier est rendu aussi gros et si la
crise prend autant d'ampleur, c'est parce qu'il n'a pas su bien la gérer.
Lorsqu'on regarde quel est son plan d'action pour faire face à celui-ci — parce que c'est le premier qui a demandé
l'autorisation pour un déversement, ça fait longtemps qu'il souhaite ce déversement dans le fleuve
Saint-Laurent — c'est
quoi, sa stratégie d'action? C'est une ligne 1 866. Si vous voyez passer une couche, appelez
sur ma ligne, on va vous aider. C'est ça, notre plan.
Nous, ce qu'on veut
savoir, c'est quelle...
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Franchement, M. le Président, de là... Là, on en est à dire que nous souhaitons ce déversement.
Depuis le début, nous avons dit clairement
que c'était le contraire totalement, que c'était loin d'être souhaitable, que ce
n'était pas la solution idéale. Mais on l'a analysée rigoureusement. Nos experts scientifiques se sont penchés sur la question.
Nous avons regardé tous les aspects. Nous
avons regardé s'il y avait d'autres solutions possibles. La science nous
indiquait que c'était la seule
solution possible. Nous avons imposé des conditions pour justement
minimiser les impacts. Pendant que le Parti québécois essaie d'inventer
de fausses peurs, nous, on a été sur le terrain...
Le Président :
En terminant.
M.
Heurtel : ...nous sommes
encore sur le terrain, nous échangeons avec les municipalités, et nos employés
sont sur le terrain aujourd'hui...
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Terrebonne.
M.
Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci, M. le Président. Écoutez, ce que je
comprends du ministre,
c'est que c'est Montréal qui va
payer pour les interventions et les dégâts qu'il y aura sur le littoral
du fleuve Saint-Laurent. C'est ce
qu'il vient de nous dire aujourd'hui. Il devrait comprendre aussi qu'il
y a beaucoup d'inquiétude au niveau des municipalités qui sont riveraines du Saint-Laurent. À Louiseville,
plusieurs personnes appellent le maire, notamment, à l'hôtel de ville pour dire
qu'ils ne viendront pas pêcher à cause du déversement. Ils sont inquiets, et je
pense qu'ils ont raison d'être inquiets.
Si le ministre de l'Environnement, là, ne peut
pas répondre à toutes les questions qu'on lui pose en Chambre, est-ce qu'il
peut nous dire s'il y aura des compensations pour les pertes touristiques...
Le Président : M. le ministre
de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Au moment où on se parle, M. le Président, les employés du
ministère de l'Environnement sont sur les berges. Nous faisons de la
surveillance aérienne, nous nous assurons que les conditions liées au
déversement sont suivies à la lettre par la
ville de Montréal. Nous sommes en contact étroit avec les municipalités. Et,
encore une fois, la science nous enseigne
clairement, parce qu'encore une fois ces peurs voilées qu'essaie d'envoyer le
député de Terrebonne ne sont pas
fondées, les experts du ministère de la Faune l'ont dit, il n'y aura pas
d'impact sur le lac Saint-Pierre, il n'y aura pas d'impact majeur sur
l'environnement et la faune. La science nous le dit, les expertises
indépendantes le disent, et aujourd'hui, au
moment où on se parle, nous sommes sur le terrain pour nous assurer que le
déversement soit contrôlé...
Le Président : En terminant.
M. Heurtel : ...et que toutes les
mesures de contrôle soient mises en place.
Le Président : Principale, M.
le député de Granby.
Hausse de la taxe sur
l'essence
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le
Président, hier, j'ai questionné le ministre des Finances sur son intention
d'imposer de nouvelles taxes et des tarifs
dans sa prochaine mise à jour économique. Malgré le flou évident dans ses
réponses, son intention est très claire, le gouvernement va encore
augmenter la taxe sur l'essence, cette fois au nom de l'écofiscalité.
Malgré tout,
le ministre continue de prétendre que le fardeau fiscal des Québécois a baissé.
Pourtant, la réalité, c'est que le
fardeau fiscal des Québécois a déjà augmenté et augmentera encore. La preuve?
Taxe sur l'essence, frais de garderie,
taxe scolaire, tarifs d'électricité, c'est 1 500 $ de moins que les
Québécois ont dans leurs poches depuis l'arrivée des libéraux. Même le
ministre des Ressources naturelles l'a confirmé au printemps dernier.
Donc, M. le
Président, question fort simple au ministre des Finances : Est-ce que, oui
ou non, il va augmenter la taxe sur l'essence lors de la mise à jour
économique?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : M. le Président, je ne suis pas un parlementaire très
expérimenté, mais il me semble que, si je vais avoir une mise à jour économique dans quelques semaines, je ne vais pas
commencer aujourd'hui à dire ce qu'il y a dedans, ce qu'il n'y aura pas dedans. Je vous demande un
petit peu de patience, ce ne sera pas très long, quelques jours, quelques
semaines, et vous allez voir ce qu'il y dedans et ce qu'il n'y a pas dedans.
Donc, je n'ai
pas d'autre nouvelle, d'autre chose à ajouter, sauf que j'aimerais quand même
mentionner... Parce que ça me chicote
souvent, cette histoire du fameux 1 500 $ d'augmentation qui traîne
depuis déjà un an et demi. Il faut une définition
assez, comment je dirais ça... une définition assez imaginative de ce qui est
la classe moyenne pour arriver à un tel chiffre, M. le Président. Ce
n'est pas déformer la vérité, mais c'est, à la limite, imaginatif.
Le Président : M. le député
de Granby, en complémentaire.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : Bien, M.
le Président, la réalité, c'est qu'en
2009 le gouvernement collectait 1,7 milliard en taxe sur l'essence. En 2013‑2014, c'est 2,3 milliards en taxe sur l'essence. Et, vous le savez déjà, les automobilistes ont
fait leur part, nous payons la taxe la plus élevée pour l'essence au Canada.
Alors, une question fort
simple encore une fois : Est-ce
que, oui ou non, vous allez augmenter
la taxe sur l'essence lors de la mise à jour économique?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M. Carlos J Leitão
M. Leitão : Lors de la mise à jour économique,
il y aura des choses qui seront là,
il y aura des choses qui ne seront pas là. C'est la seule chose que je
peux dire maintenant. Je ne vais pas commencer à faire des annonces à l'avance,
M. le Président.
Pour ce qui
est des taxes spécifiquement sur l'essence, comme j'ai suggéré hier au collègue
député de Granby, ce serait quand
même bien d'arriver au XXIe siècle, M. le Président. Il y a quelque chose
qui s'appelle le réchauffement climatique,
il y a quelque chose qui s'appelle l'écofiscalité, c'est un moyen de changer
les comportements. On va étudier toutes
ces questions-là, on a dit que ce serait d'ici l'hiver 2017 qu'on arriverait à
une politique cohérente d'écofiscalité. Alors, pour les prochaines
semaines...
Le Président : En terminant.
M. Leitão : ...on verra bien dans
les prochaines semaines. Surprise.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Granby.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel :
M. le Président, on a l'imagination fertile quand c'est le temps de trouver des
nouvelles taxes pour taxer les
Québécois. Et, dans l'article de samedi dernier, on parlait... Donc, Bientôt
de nouvelles taxes, on disait même que,
selon certaines personnes au ministère des Finances, «Québec songe aussi à
introduire de nouveaux péages routiers», péages routiers.
Est-ce que le ministre des Finances peut nous
confirmer, oui ou non, à la mise à jour économique, s'il entend imposer donc
des péages routiers sur les autoroutes au Québec?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : Je trouve vraiment ça désolant. Là, on part des rumeurs. On a
contacté un monsieur X, peut-être un «Deep Throat» quelque part, je
ne sais pas, là, et on sort toutes sortes d'affaires qu'on va...
(Interruption)
M.
Leitão : Vous voyez, on parle d'espions, et ça affecte nos... Bon, ce
que je voulais dire, M. le Président, c'est que... un peu de patience.
Le collègue va voir ce qu'il y a dans la mise à jour et ce qu'il n'y a pas.
Maintenant,
brièvement, j'aimerais aussi mentionner, puisqu'on va citer des journaux, il y
a un petit journal ici, M. le
Président, bien connu des milieux financiers internationaux, qui a des propos
très élogieux sur notre façon de financer...
Le Président : En terminant.
M. Leitão : ...les infrastructures
publiques de façon alternative. Je le...
Le Président : Je pense
que... ça venait de votre fond, hein?
Principale, Mme la députée d'Iberville.
Réorganisation à la
suite de l'achat
d'Astral Média par BCE inc.
Mme Claire Samson
Mme Samson : M. le Président, la
ministre de la Culture se fiche complètement que Bell Média s'apprête à congédier 110 artisans de la radio et de la télévision
à Montréal. Elle refuse d'intervenir et a même fait diversion, hier, en parlant du Gala de l'ADISQ. Son indifférence
trahit la position politique historique du Parti libéral, qui avait exigé
des garanties lors de la vente d'Astral à Bell.
Lorsque j'ai
posé la question, hier, à la ministre, elle m'a regardée comme un chevreuil
ébloui ou paralysé par les lumières d'un camion sur l'autoroute 20...
Des voix : ...
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M.
Fournier : Honnêtement, en toute amitié avec notre collègue,
là, je ne pense pas qu'on va vouloir commencer à savoir ce qu'on pense
des autres, de la physionomie. On pourrait dire bien des affaires, M. le
Président.
Le Président : M. le leader
du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel :
C'était, M. le Président, une image assez claire sans accuser la ministre de
certaines intentions...
Des voix : ...
Le
Président : S'il vous plaît! Je comprends qu'on est en pleine
saison de chasse, là, mais c'est quand même... Mme la députée d'Iberville, je vous demanderais d'éviter les propos qui
sont blessants. Mme la députée d'Iberville, évitez ce genre de propos.
Mme Samson : Loin de moi l'intention
de blesser.
Alors, en
2013, M. le Président, dans sa décision, le CRTC notait l'engagement de Bell à
ce que la programmation des activités
françaises reste à Montréal. Pourtant, plusieurs directeurs qui travaillaient à
la programmation ont été congédiés et l'on s'apprête à faire encore des
mises à pied.
J'aimerais
poser la question à la ministre : Quand va-t-elle finalement intervenir
auprès du CRTC pour vérifier si Bell respecte bel et bien ses
engagements?
Le Président : Mme la
ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme David
(Outremont) : Bien, en tout cas, c'est la première fois que je me fais
traiter de «chevreuil». C'est quand
même assez particulier, d'autant que je regarde le président en général, donc mes
yeux sont plutôt de ce côté-là.
Mais trêve de
plaisanteries — parce
que c'est quand même sérieux : commençons par dire un certain nombre de
choses. En juin 2013, achat d'Astral par
Bell Média : c'est clair, il y a des conditions qui sont demandées, qui ne
sont pas des conditions, qui sont des
attentes du CRTC. Attente, ce n'est pas une condition; ce sont des attentes.
J'en ai parlé hier, j'y ai fait
référence. Il y a deux attentes en
particulier. En fait, il y en a
trois. Il a nommé ce qu'ils ont appelé en français, mais que je n'aime pas beaucoup... j'aurais dit
«responsable», eux ont dit des «champions», alors un responsable de la programmation de langue française au Québec et un
responsable de la programmation de langue anglaise à Toronto. Ça a été fait et, en ce moment, c'est Gerry Frappier,
qui était président de RDS et qui maintenant s'occupe de la programmation
francophone à Montréal.
Après ça, il
y a eu une autre attente qui est très importante, c'est : Est-ce que les
producteurs médiatiques, dont ma collègue connaît très, très bien la
constitution puisque ça s'appelle AQPM, l'Association québécoise de production
médiatique... Elle y a...
• (10 h 30) •
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée d'Iberville.
Mme Claire Samson
Mme
Samson : Bon, encore une fois, M. le Président, là, on va à gauche, à
droite, mais ça ne donne pas des raisons, et ce qu'invoque la ministre n'est qu'un faux prétexte. Bell est une
entreprise privée, mais elle ne peut pas ne pas respecter ses engagements, les engagements qu'elle a pris
auprès du CRTC. C'est le CRTC qui fixe les règles, et, lorsque Bell ne
respecte pas ses engagements, la ministre a le devoir de réagir et
d'intervenir.
Devant ces arguments, la ministre de la Culture
comprend-elle qu'elle doit...
Le Président : Mme la
ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme David
(Outremont) : Alors, je vais continuer les explications. Donc, deux
attentes de la part du CRTC. La première, justement : Que le nombre
et la diversité des producteurs indépendants — je répète, elle était
directrice de l'Association québécoise de
production médiatique, elle connaît très, très bien ça — donc soient mis à contribution et qu'ils puissent produire autant qu'ils
produisaient. Et, à date, nous n'avons aucune preuve qu'il y a eu moins de
productions de producteurs indépendants chez Bell Média.
Deuxième
attente, c'est que les cotes d'écoute ne soient pas à la baisse, et nous
n'avons aucune preuve que les cotes
d'écoute sont à la baisse chez Bell Média. Donc, les deux attentes, supposément
dont je ne parle jamais, les voici, et nous n'avons jusqu'à
maintenant...
Le Président : En terminant.
Mme David (Outremont) : ...aucune
preuve qu'il y a diminution de ce côté-là.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée d'Iberville.
Mme Claire Samson
Mme
Samson : M. le Président, il y a une distinction entre des engagements
et des attentes. Enfin, c'est dans le langage
du CRTC. Deuxièmement, il y a des bénéfices tangibles importants qui découlent
de cette transaction-là, il faut s'assurer
qu'ils soient maintenus. Et, si la ministre ne me croit pas, là, elle peut
discuter avec son collègue juste derrière elle, il a été propriétaire d'un réseau de radio privée au Québec
pendant assez longtemps; ou sa nouvelle collègue dans Chauveau, qui a
oeuvré et fait sa carrière dans les salles de nouvelles. Ce genre de coupures
là...
Le Président : Mme la
ministre de la Culture.
Mme Hélène David
Mme David
(Outremont) : Je ne suis pas sûre qu'il y avait une question dans les
commentaires, alors je continue sur mes explications. Donc, la direction
opérationnelle des services de télévision francophone est toujours présente à
Montréal, au coin de la rue Papineau et René-Lévesque, dans les bureaux de Bell
Média. C'est de la programmation francophone.
Gerry Frappier, c'est un nom assez francophone, et que j'ai eu l'occasion de
rencontrer, et qui a dit à quel point il était là pour maintenir la
programmation à Montréal et la programme francophone. On a Mme Dany
Meloul, vice-présidente, programmation
télévision de langue française; M. Jean-Pierre Laurendeau, Mme Zoé
Gilbert-Crabtree, directeurs,
programmation télévision de langue française. Il me semble qu'on parle beaucoup de langue
française puis on parle beaucoup...
Le Président : En terminant.
Mme David (Outremont) : ...de
protection de production de langue française chez Bell Média au Québec.
Le Président : Principale, M.
le député de Chambly.
Processus de reddition de comptes des établissements
d'enseignement postsecondaire
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : Merci, M. le Président. Dans le cadre de ma tournée du réseau de l'éducation, je visite des écoles, des
cégeps, des universités pour prendre
le pouls de ce qui se passe vraiment sur le terrain. Mais tous les dirigeants
que je rencontre sont unanimes :
la bureaucratie trop lourde les condamne à l'inefficacité. En gros, là, ce
qu'ils me disent, c'est que c'est le bordel dans le réseau.
Il y a un
mois, j'ai déposé ce tableau, qui montre l'ampleur de l'inefficace reddition de
comptes dans le réseau universitaire.
À l'Université Laval, il y en a pour 800 000 $ de nos fonds qui se
perdent là-dedans. Mais le ministre m'a répondu qu'il travaillait sur un chantier pour réduire la reddition de
comptes, les recteurs m'ont dit que ce n'est pas vrai : il y a un
comité qui existe, mais ils ne se rencontrent jamais.
Quand le
ministre va s'attaquer pour vrai à la bureaucratie pour que l'argent, les
milliards qu'on met dans notre réseau
de l'éducation se rendent en services aux élèves, en services aux étudiants et
en tout ce qui peut entourer la réussite de nos jeunes?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. François Blais
M. Blais : Alors, M. le Président,
je remercie mon collègue pour la question parce que j'avais bien hâte de pouvoir y répondre. Il y a quelques semaines déjà,
il avait déposé ce tableau, hein, qui nous interpellait tous, compte tenu
de la taille du tableau. Nous l'avons
examiné. Sincèrement, M. le Président, là, il n'y a pas grand-chose dans ce
tableau-là, c'est-à-dire que, bien sûr, bien sûr...
Des voix : ...
M.
Blais : Si nous prenons le temps de l'examiner, on voit bien qu'il n'y
a pas grand-chose, c'est-à-dire que, bien sûr, les universités, comme les individus, sont soumises à des lois.
Bien sûr. Alors, on retrouve l'ensemble des lois. Certaines universités
sont soumises à certaines lois et d'autres, hein, sont soumises à d'autres
lois.
L'enjeu, là,
c'est de voir est-ce qu'on doit continuer à superviser, hein, les universités,
leur gestion, faire en sorte que les
sommes aillent au bon endroit. Et je l'ai annoncé, j'en ai parlé à ce
moment-là, je le répète, nous allons continuer, bien sûr, à s'assurer que les investissements que les Québécois font
dans les universités vont dans la bonne direction, vont au bon endroit,
et, si c'est possible de diminuer la bureaucratie, bien sûr, on va le faire.
Le
Président : Première complémentaire, M. le député de Chambly.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, il y a une déconnexion incroyable entre ce qui se passe
dans nos institutions et ce qui
se passe dans la tête du ministre. Les directeurs de cégep m'ont aussi confié
qu'ils doivent engager une part importante de
leur financement pour écrire des rapports, des rapports sur lesquels ils n'ont jamais
de rétroaction parce que personne ne les lit, au gouvernement. Au
cégep de Trois-Rivières, où j'étais il y a quelques jours, c'est 500 000 $
que ça coûte annuellement pour payer les salaires des gens qui ne font que des
rapports.
Quand le ministre va
réduire la bureaucratie?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. François Blais
M.
Blais : Alors, la bureaucratie, lorsqu'on peut la diminuer, M. le
Président, il faut le faire, mais, encore une fois, c'est extrêmement important, les Québécois investissent des sommes
et des sommes importantes dans le réseau de l'éducation, notamment dans les universités et dans les cégeps. Et, je
le dis à mon collègue, je sais parfois que certains dirigeants trouvent ça lourd. En ce moment, on
examine avec eux comment on peut changer les choses. Mais, sur l'essentiel,
les universités notamment jouissent d'une
très grande liberté, et c'est voulu. Cependant, sur le plan des finances, de
leurs finances et des finances publiques, il faut qu'elles comprennent
qu'elles ont aussi des comptes à rendre.
Le Président :
M. le député de Chambly, en deuxième complémentaire.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, au cours des dernières années, les
gouvernements péquistes et libéraux ont coupé sauvagement dans notre réseau collégial en augmentant la reddition de
comptes. La conséquence dans les cégeps, c'est qu'on coupe dans les services d'orientation, on coupe dans les heures
d'ouverture de la bibliothèque, mais jamais, jamais on ne touche la
bureaucratie.
Le
ministre doit s'engager à réduire la bureaucratie, à réduire la reddition de
comptes sans délai pour que l'argent aille dans les cours et dans
l'accompagnement des élèves pour qu'ils réussissent.
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. François Blais
M.
Blais : Alors, moi, là-dessus, je vais toujours être d'accord avec mon
collègue, hein, quand il s'agit de voir, là, si on peut diminuer la
bureaucratie. Comment on peut le faire, il faut le faire de façon intelligente,
s'assurer d'une bonne reddition de
comptes, aller moins... intervenir moins sur les moyens mais davantage sur la
reddition de comptes et les finalités.
On a réduit la bureaucratie. On s'était engagés par rapport à tout le secteur
régional, au niveau des commissions... au
niveau du secteur scolaire, donc on a aboli les directions régionales, M. le
Président. On continue toujours de travailler avec nos partenaires. Mais
il y aura toujours, aujourd'hui et demain, reddition de comptes.
Le Président :
Principale, M. le député de Sanguinet.
Hausse des tarifs
d'électricité et protection
des consommateurs à faibles revenus
M. Alain Therrien
M.
Therrien : M. le Président, hier, TVA nous apprenait que ce
sont des clients résidentiels d'Hydro-Québec qui casquent pour réduire la facture des autres clients. C'est
4 millions de clients résidentiels qui vont payer pour les autres. À cela s'ajoutent toutes les hausses de taxe et de
tarifs, qui ont été imposées par ce gouvernement et qui ont touché les familles, d'une valeur de 1 500 $. Donc,
à ce moment-là, on arrive, à Hydro-Québec, dans une situation où est-ce que les
gens ont de la difficulté à payer leurs
factures d'hydroélectricité. Cette année, c'est plus de
58 000 personnes qui seront débranchées.
C'est plus que le record de l'an dernier. Ce ne sont pas que des statistiques,
ce sont des drames humains. Lundi, un
immeuble de Limoilou a été ravagé par un incendie déclenché par des chandelles
qu'un locataire utilisait et qui avait été débranché par Hydro-Québec.
Alors,
la question est simple : Est-ce que le ministre de l'Énergie peut
s'engager, d'un côté, à ne pas hausser les tarifs d'hydroélectricité et,
de l'autre, d'arrêter de débrancher les familles vulnérables de façon abusive?
• (10 h 40) •
Le Président :
M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président,
d'abord, premièrement, je tiens à rappeler que, contrairement au Parti
québécois, notre gouvernement a
utilisé un décret de préoccupation qui demandait justement à la Régie de l'énergie,
dans ses décisions, de tenir compte
de la capacité de payer des Québécois. Et le gouvernement a clairement défini
également dans son mandat, la
politique stratégique et le plan stratégique d'Hydro-Québec, qu'il fallait
justement une hausse raisonnable des tarifs qui devait tenir compte de
l'inflation.
Alors, M. le Président, je tiens à rappeler
également qu'avant de procéder à une interruption de services, Hydro-Québec envoie de nombreux avis et propose
aux consommateurs, évidemment, d'étaler les paiements. Les paiements doivent être, évidemment, adaptés à leur situation
avant d'acquitter le solde. Alors, M. le Président, il y a déjà plus de 200 000 ententes de paiement qui
existent avec les clients résidentiels d'Hydro-Québec. Et Hydro-Québec a le
mandat de trouver vraiment les meilleures solutions, et le débranchement
est vraiment une solution extrême, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Sanguinet.
M. Alain Therrien
M.
Therrien :
M. le ministre, c'est lui-même qui nous a dit, dans une interpellation, qu'il
était d'accord avec l'idée qu'on
avait haussé les tarifs et les taxes de plus de 1 500 $ chez les
familles québécoises. Les Québécois sont pris à la gorge. Malgré ce qu'il dit, on a une situation où est-ce qu'on bat
des records de débranchement. Alors, on ne peut plus payer. Il faut
absolument que vous fassiez quelque chose.
Avez-vous...
prendre l'engagement de ne pas hausser les tarifs de façon plus élevée que
l'inflation, comme vous aviez promis lors de la campagne électorale?
Le Président : ...parle au
président, on s'adresse au président. Pour vous aussi, M. le ministre.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, les
hausses de tarifs... J'invite le député à relire, évidemment, tout ce qui
concerne les lois qui ont fait la
Régie de l'énergie. Ces hausses de tarifs, encore une fois, sont déterminées
par la Régie de l'énergie. Ce que
nous avons demandé à Hydro-Québec, c'est d'avoir un plan stratégique dans
lequel nous allions contrôler davantage, évidemment, les dépenses d'Hydro-Québec et de s'assurer également qu'au
niveau de ces dépenses le consommateur soit protégé.
Alors, M. le
Président, encore une fois, je tiens à rappeler que les gens peuvent toujours
appeler Hydro-Québec, faire des ententes de paiement.
Le Président : En terminant.
M.
Arcand : Mais je pense que,
par souci d'équité pour tous les Québécois, tous les Québécois doivent
également payer...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Sanguinet, en s'adressant à la présidence.
M. Alain Therrien
M.
Therrien :
Malgré les engagements avec Hydro-Québec, on bat encore des records de
débranchement. Je veux dire, j'ai beau écouter le ministre, je ne vois
pas de solution là-dedans, là.
Écoutez, hausse de tarifs des clients résidentiels,
hausse des tarifs au-dessus de l'inflation, là il y a une proposition d'une hausse des tarifs pour les grandes maisons. On ne sait pas c'est
quoi, une grande maison, encore, mais ils proposent ça. Décidément, le Parti libéral, ils sont extrêmement imaginatifs dans la façon de créer des taxes et des tarifs. Le
résultat, c'est des drames humains, M. le Président.
Il est temps
qu'il se réveille, le ministre, puis qu'il fasse en sorte de protéger les Québécois
parce que l'hiver arrive, puis c'est une situation
catastrophique qui arrive.
Le Président : M. le ministre
des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le
Président, je ne pense pas que les
ménages à faibles revenus ont de grandes maisons, premièrement. Deuxièmement, la surconsommation, depuis nombre d'années, et
même sous le Parti québécois, a un tarif spécifique dans des cas de
surconsommation. Donc, il n'y a pas de plan autre que ce qui existe depuis de
nombreuses années, M. le Président.
Et, encore
une fois, je sais que plusieurs députés, parfois, reçoivent certains
commentaires, des appels qui sont faits
par des citoyens, et, encore une fois, j'invite les citoyens à communiquer directement
avec Hydro-Québec. Hydro-Québec procède
à des ententes de paiement avec de nombreux citoyens, et, s'il y a une volonté
de la part des citoyens...
Le Président :
En terminant.
M.
Arcand :
...les gens sont raisonnables, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le député de Rosemont.
Services en toxicomanie
offerts aux prestataires
de l'aide de dernier recours
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Parlant de
pousser les gens dans la misère, l'hiver dernier, le gouvernement libéral a été
averti qu'il posait, au nom de
l'austérité, un geste grave qui allait enfoncer des milliers de toxicomanes
dans leur dépendance, un geste qui allait en envoyer des centaines à
l'itinérance.
La
Commission des droits de la personne l'a averti. Les experts
du ministère de la Solidarité sociale l'ont averti, les
intervenants en toxicomanie et le Parti québécois. Le gouvernement libéral a quand
même brutalement coupé les prestations des
toxicomanes qui veulent se réhabiliter. Dès le jour de l'introduction de la
réforme, 300 toxicomanes ont déserté leur thérapie. Quatre mois
plus tard, c'est 900 toxicomanes qui ont déserté leur thérapie.
Est-ce que le ministre
responsable voit le gâchis qu'il a créé et va-t-il corriger, nettoyer ses
dégâts?
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : M. le Président, lorsque nous avons proposé ce règlement-là, il y avait des principes
fondamentaux derrière ça. Premier
principe, c'était la justice sociale. Deuxième principe, c'était l'équité,
l'équité entre les personnes qui
suivent ces traitements-là et d'autres personnes à l'aide sociale, M. le Président. D'ailleurs, la Protectrice
du citoyen, dans sa lettre,
elle appuyait la majorité de nos recommandations.
Ce
que nous avons fait, M. le Président, nous avons offert aux centres de traitement en
toxicomanie, si jamais ils pensent
qu'avec... la mesure réglementaire peut affecter ces centres-là, nous sommes
prêts à donner un coup de main. Sur
75 centres, il y en a une vingtaine qui ont fait appel au ministère,
où on offrait un service de quelqu'un pour étudier la situation financière. Et
nous avons dit à ces centres-là : Si le règlement a un impact sur la
situation financière de l'organisation, nous
allons donner le support nécessaire. Sur 20 organismes qui ont demandé, M.
le Président, il y a juste quelques organismes qui vont avoir l'aide du
gouvernement...
Le Président :
En terminant.
M.
Hamad :
...parce que le règlement a affecté. Mais le reste, M. le Président, on n'avait
pas aucun impact là-dessus.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Rosemont.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Pour le ministre, il n'y avait pas aucun impact.
60 intervenants ont perdu leur emploi. C'est ça, l'impact. Je voulais la justice sociale, a-t-il dit; 900
toxicomanes ne sont plus en thérapie. On nous avise, à Montréal, qu'il y en a
qui sont sur la rue en ce moment, comme on lui avait dit. C'est un
désastre. Ça ne peut pas continuer.
Est-ce
qu'il va agir seulement quand il va y en avoir 1 100, 1 500,
2 000 qui vont se débrancher? Il ne voit pas que ça n'a pas de
sens?
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : M. le Président, est-il normal qu'une personne à
l'aide sociale paie plus un centre de désintox qu'une personne dans le
privé? Est-il normal, M. le Président? C'est les mêmes services.
Ce
que nous avons fait, d'abord, on n'a pas baissé le montant donné aux centres de
désintox, M. le Président. En plus,
nous avons prévu une allocation pour l'appartement si jamais le logement pour
la personne à l'aide sociale qui fait appel à ces services-là, M. le
Président... Alors, nous avons prévu des coûts pour la personne, M. le
Président.
Maintenant, je vois
que le député défend les centres, l'organisation. Parfait. Nous avons
dit : Si jamais...
Le Président : En terminant.
M.
Hamad : ...si jamais ces organismes-là ont besoin d'aide, on
fournit un expert en...
Le Président :
Principale, Mme la députée d'Arthabaska.
Publication du rapport final
de la Commission d'enquête
sur l'octroi et la gestion des contrats publics
dans l'industrie de la construction
Mme Sylvie Roy
Mme
Roy (Arthabaska) : M. le Président, c'est bien connu que,
pendant 926 jours, j'ai demandé d'avoir une commission d'enquête
sur la construction et le financement des partis politiques.
Le 19 octobre
2011, le gouvernement émettait un décret que mon collègue de Verchères avait
qualifié avec justesse de patente à gosses,
et puis ce décret permettait que... On demandait que le rapport soit rendu le
19 octobre 2013. Par la suite,
on a demandé un décret qui fonctionnait, celui qui a été émis le
9 novembre, le vrai décret. On a demandé une prolongation jusqu'au 19 avril 2015. Et aussi, maintenant, la
nouvelle date pour émettre le rapport, c'est au plus tard le
30 novembre qui s'en vient.
Est-ce qu'il y a
quelqu'un dans le gouvernement qui a le rapport entre ses mains?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Pour ce
qui est du retour sur l'histoire, M.
le Président, on peut même mentionner
qu'il y a eu un projet
de loi qui a été déposé pour donner
des pouvoirs supplémentaires aux commissions d'enquête ordinaires. Je m'en souviens, j'étais sur les lieux lorsque
ça s'est produit. Donc, la commission... À toutes les étapes, d'ailleurs.
Et donc je vais affirmer ici que la commission
a eu tous les moyens mis à sa disposition pour faire son travail, que, dans les
considérants qui accompagnaient ces mandats-là, il était important de
protéger les enquêtes policières aux fins de poursuite, parce qu'on
sait que ce sont deux types d'enquête différents. Et donc on a pu voir comment
l'UPAC a pu procéder, néanmoins, durant
cette période-là. La façon dont ils ont harnaché chacun leurs travaux a permis
de procéder sur l'ensemble de ce que nous voulions vérifier et enquêter.
Ceci
étant, je ne peux pas donner une information... Moi, tout ce que je peux dire, c'est qu'à ma connaissance il n'y a personne qui l'a. Et,
pour la présidente de la commission, je me doute bien que, le jour où elle va rendre
son rapport, elle va sûrement informer l'ensemble de la population,
alors on risque de l'apprendre tout le monde en même temps, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée d'Arthabaska.
Mme Sylvie Roy
Mme
Roy (Arthabaska) :
Vous savez, M. le Président, qu'il
y a d'autres commissaires qui ont été
blâmés pour avoir parlé aux médias,
et je pense que Mme Charbonneau ne le fera pas. J'aimerais avoir un
engagement que, si quelqu'un, la ministre de la Justice ou le premier
ministre, reçoit le rapport... qu'il
le diffuse dans les 24 heures et qu'il en donne une copie à tous
les députés.
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Ça me
semble bien raisonnable, M. le
Président. Je crois, d'une part, que,
lorsque la commission va terminer ses travaux, elle va sûrement
aviser qu'elle a terminé ses travaux. Ça, je suis bien persuadé que ça va
arriver, là. Je ne vois pas comment ça n'arriverait pas. Et je pense que
l'intention que nous aurons, ce n'est certainement pas d'attendre 24 heures, M. le
Président. Probablement même que la présidente ne le rendra peut-être pas public elle-même,
là. Alors, l'important ici, c'est qu'une
fois qu'elle l'a rendu public les Québécois l'aient en leur possession, et je pense
que 24 heures, c'est trop long.
• (10 h 50) •
Le Président :
Principale, M. le député de Labelle.
Révision des modalités pour la
création de
places en service de garde subventionnées
M. Sylvain Pagé
M. Pagé : Oui, merci, M. le
Président. Après s'être mis à dos son réseau de services de garde, après que
les deux principales associations, le printemps dernier, aient réclamé sa démission, on apprend ce matin
dans La Presse que la ministre
de la Famille est maintenant
en position de rupture avec ses partenaires. C'est terminé, ils ne veulent plus
lui parler parce qu'ils ont compris que son plan, c'est de poursuivre le démantèlement du
réseau afin de donner des places aux
garderies privées non subventionnées. Tous les gestes posés par ce gouvernement en font foi : rapport du développement
des places, augmentation des tarifs jusqu'à
174 %, coupe de
100 millions dans le réseau, augmentation de 45 % des coûts payés en installation et partenariat avec les
garderies privées non subventionnées. Pourtant, M. le Président, vous le savez
comme moi, notre réseau est apprécié par les Québécois et cité en exemple
partout dans le monde.
La ministre
réalise-t-elle qu'elle a perdu confiance avec ses partenaires, qu'elle est en
train de mettre à mal les centres de la petite enfance?
Le Président : Mme la
ministre de la Famille.
Mme Francine Charbonneau
Mme
Charbonneau : Merci,
M. le Président. Ça me fait plaisir
de me lever aujourd'hui pour pouvoir rassurer les familles du Québec, parce que
le ministère de la Famille, M. le
Président, travaille pour les
familles du Québec, ne travaille pas que pour les centres de
la petite enfance, ne travaille pas que pour un seul partenaire, mais travaille
avec l'ensemble de ses partenaires.
Si vous me
permettez, M. le Président, je vais déposer la lettre que j'ai fait parvenir
à l'ensemble des partenaires qui s'occupent du réseau de la famille avec nous pour les services de garde. Comme ça, mon collègue va pouvoir en prendre connaissance, puisque le dossier qu'il soulève a au moins... et presque un an qu'il
devrait en être... Il devrait le savoir, puisque ça fait un an qu'on a annoncé que trois projets étaient mis sur
pied pour moderniser et avancer tout ce qu'on a au niveau des services de garde.
Quels sont
ces projets? Bien, M. le Président, on a parlé à nos partenaires puis on leur a dit
qu'à partir de maintenant ils
pouvaient partager 50 % de la
facture pour la mise sur pied d'un service de garde dans certains milieux. On
leur a aussi dit que la location était favorisée, puisque la clientèle
bouge et ça peut leur permettre de bouger avec la clientèle.
Le Président : En terminant.
Mme
Charbonneau : Et
on leur a dit qu'on regarderait avec eux un principe de partenariat.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Labelle.
M. Pagé : Bien, M. le
Président, elle est...
Le Président : Juste une...
M. Pagé : ...
Document déposé
Le Président : Consentement
pour le dépôt?
Une voix : Oui.
Le Président : Consentement. M.
le député de Labelle.
M. Sylvain Pagé
M. Pagé : M. le
Président, la ministre
a beau laisser entendre qu'elle ne veut pas démanteler le réseau, mais les
faits sont têtus. Les partenaires ne la
croient plus. Les faits parlent d'eux-mêmes.
Jamais, jamais, depuis 15 ans, les CPE, les parents ne se sont sentis autant
abandonnés. Au lieu de convoquer les partenaires du réseau et qu'ils ne
viennent pas, moi, j'invite la
ministre à convoquer le président du Conseil du trésor afin de lui faire
comprendre qu'il doit cesser son opération comptable, pour le bien des
parents, des familles et de la prochaine génération.
Le Président : Mme la
ministre de la Famille.
Mme Francine Charbonneau
Mme
Charbonneau :
M. le Président, mon collègue parle des familles du Québec. La semaine passée,
il s'est levé pour me dire que les
familles n'avaient plus de problème à se trouver des places, que les familles
avaient le choix, dans le réseau, de
choisir la place qu'ils voulaient. D'ailleurs, il s'est levé pour le reprocher.
Donc, de ce fait, il ne peut pas dire que les familles du Québec sont
inquiètes. Elles le sont de moins en moins. On a fait en sorte que le tarif
leur ressemble, on a fait en sorte qu'ils
trouvent des places. On fait en sorte, de ce côté-ci, de faire que nos familles
ont des services, partout au Québec, de qualité, en sécurité et avec des
professionnels, M. le Président.
Le Président :
Principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Financement des organismes de lutte contre les gangs de
rue
Mme Carole Poirier
Mme
Poirier : Trois organismes d'Hochelaga-Maisonneuve luttent
contre les gangs de rue. Dopamine, le Centre des jeunes Boyce-Viau et J'ai cessé la violence étaient financés depuis
huit ans par le programme de partage des produits de la criminalité, qui récupère l'argent des
saisies faites par la police. Ils ont déposé, en avril, au ministère de la
Sécurité publique, deux projets
d'intervention directe pour les jeunes, aux abords des écoles, des maisons de
jeunes et des parcs, exactement là où les jeunes sont exposés à l'influence des
gangs de rue. Au mois d'octobre, le ministère
de la Sécurité publique a rejeté les projets C qui ta gang? et Travail
de milieu dans Hochelaga-Maisonneuve parce que semble-t-il qu'ils ne répondent pas aux objectifs. Dans
Hochelaga-Maisonneuve, ces ressources sont essentielles à l'équilibre de notre
quartier. Le gouvernement libéral ouvre la porte toute grande aux gangs de rue
dans l'est de Montréal.
Est-ce que le
nouveau ministre de la Sécurité publique va rétablir le financement et ainsi
lutter contre les gangs de rue dans Hochelaga-Maisonneuve?
Le Président : M. le ministre
de la Sécurité publique.
M. Pierre Moreau
M. Moreau : M. le
Président, j'ai bien écouté le
préambule et je dois dire une chose, là : Tout ce qui est exagéré devient insignifiant dans notre société.
Dire que le Parti libéral encourage les gangs de rue dans l'est de Montréal,
ça n'a non seulement aucun lien avec la réalité, là, mais c'est d'un
ridicule consommé. Quant au travail qui est fait... Et tous les partis politiques qui ont formé le gouvernement sont extrêmement préoccupés par la question des gangs de rue, notamment à Montréal, et ont fait en sorte que des programmes
existent justement à partir des produits de la criminalité. Mais
tous les programmes qui existent à partir des produits de la criminalité
imposent aux organismes qui veulent y souscrire de répondre à des normes et à
des standards. Dans sa propre question, la députée a indiqué que l'analyse qui
avait été faite par le ministère de la Sécurité publique indique que les
organismes en question ne répondent pas aux critères du programme.
Alors, lutter contre la criminalité, c'est une
chose, et on s'y consacre. Et d'ailleurs je veux en profiter, M. le Président,
pour remercier les hommes et les femmes dans les corps policiers, au Québec,
qui, tous les jours, mettent leur vie à risque pour s'assurer qu'on
lutte contre la criminalité. Mais répondre aux exigences...
Le Président : En terminant.
M. Moreau : ...d'un programme
pour pouvoir y souscrire, ça fait partie des normes administratives.
Le Président : Alors, cela
met fin à la période de questions et réponses orales.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, nous en sommes...
Des voix : ...
Motions sans préavis
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
S'il vous plaît! Alors, nous en sommes à la rubrique Motions sans préavis
et un membre du groupe formant l'opposition
officielle. Et je voudrais donner la parole à Mme la députée de Vachon
pour la présentation de sa motion. Mme la députée de Vachon, à vous.
Mme
Ouellet : Oui. Merci,
M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée...
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Moi, je n'entends pas, là. Alors, Mme la députée de Vachon, à vous.
Mme
Ouellet : Merci, M. le Président. Je sollicite le
consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter,
conjointement avec le député de Lévis, la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale souligne l'iniquité dans la
répartition des contrats qu'a octroyés le gouvernement canadien au cours
des dernières années, ce qui a eu pour effet de grandement — "grandement" — désavantager
le Québec, qui possède le
chantier maritime le plus grand et le plus performant du Canada;
«Que l'Assemblée nationale rappelle au gouvernement fédéral son engagement envers le chantier
maritime de la Davie quant à
l'octroi, avant la fin octobre, d'un contrat pour la conversion du navire MS
Astérix, évalué à 300 M$;
«Que l'Assemblée nationale demande une signature
ferme du contrat dans les prochains jours.»
Le Vice-Président (M.
Gendron) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Non, non, là, mais il faut l'affirmer. Si vous vous levez puis on n'entend
pas...
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Non, moi... Là, vous l'avez dit. Merci
beaucoup. Il n'y a pas de
consentement.
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Oui. Deuxièmement, un membre du deuxième groupe de l'opposition. M. le député
de Nicolet-Bécancour, pour la présentation de votre motion.
M.
Martel : M. le
Président, je demande le consentement pour déposer la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de déposer dans les plus brefs délais les modifications législatives et réglementaires nécessaires afin que les services
de traversiers soient considérés comme des services essentiels.»
Le Vice-Président (M. Gendron) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Merci.
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, un membre...
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
S'il vous plaît! Un membre du gouvernement, au nom du premier ministre.
Alors, M. le leader du gouvernement, à vous la parole.
Souligner le jour du Souvenir
M.
Fournier : M. le Président, pendant que les chefs de partis
sont présents à la cérémonie de commémoration, je sollicite le consentement des membres de
l'Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve, le leader du
deuxième groupe d'opposition, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques et enfin la députée
d'Arthabaska :
«Que
l'Assemblée nationale honore, à l'occasion du jour du Souvenir, ces femmes et
ces hommes qui ont donné leur vie afin de maintenir la paix et de
défendre la démocratie, la justice et la liberté;
«Et qu'elle observe un moment de recueillement
en leur mémoire.»
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du
gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui, M. le Président, il y a consentement pour
le débat. Nous proposons des interventions d'environ deux minutes par intervenant, dans l'ordre
suivant : au nom du premier ministre, notre ministre responsable de la
Réforme des institutions
démocratiques, suivi de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, le leader du
deuxième groupe d'opposition, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
ainsi que Mme la députée d'Arthabaska, qui prendra la parole. Merci, M.
le Président.
• (11 heures) •
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci, M. le leader. M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier :
Merci, M. le Président. Aujourd'hui, en ce 11 novembre, nous nous souvenons.
Nous nous souvenons de ces soldats
canadiens qui ont connu l'enfer des tranchées en France, durant le premier
conflit du XXe siècle. Nous nous
souvenons de ces soldats qui, quelques années plus tard, ont à nouveau traversé
l'Atlantique pour rendre à l'Europe sa
liberté. Nous nous souvenons de
toutes celles et de tous ceux qui depuis, partout dans le monde, ont défendu la
paix et la justice, qui sont allés
au-devant des dangers pour aider des populations qui leur tendaient la main. Ils ont été
nombreux, des Québécois
fiers de servir leur pays, fiers de servir sous un uniforme qui rappelle tant
de sacrifices offerts pour des causes justes.
Depuis 1919, le 11 novembre, à 11
heures, nous perpétuons ce devoir de mémoire. Et plus les années passent, plus les souvenirs des grands combats du siècle
dernier semblent s'éloigner, plus il nous est nécessaire de nous souvenir,
nous souvenir que cette liberté dont nous
jouissions est un privilège fragile que beaucoup nous envient, nous
souvenir que cette liberté n'est pas
abstraite, qu'elle forge notre quotidien. Nous avons la liberté de s'exprimer,
de penser, de voter, d'éduquer nos
enfants. Aujourd'hui, c'est un devoir de mémoire
que nous accomplissons en nous souvenant des nôtres qui sont morts au combat en nous recueillant avec
leurs familles et avec les anciens combattants qui étaient leurs compagnons d'armes, 100 000 Canadiens, souvent très jeunes, qui ont
péri au front. Des milliers de Québécois ont servi en temps de guerre et ont participé à de
nombreuses missions de paix durant lesquelles certains d'entre eux y ont laissé
la vie.
En
ce jour du Souvenir, nous nous souvenons de celles et ceux qui ont servi sous
les drapeaux, de celles et ceux qui
ont fait le sacrifice suprême. Nous saluons aussi l'engagement des hommes et
des femmes qui, encore aujourd'hui, n'hésitent
pas à aller au-devant du danger pour que l'avenir du monde soit meilleur, pour
que notre sécurité et nos libertés soient assurées. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le leader du gouvernement.
Et je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve
pour son intervention sur cette même motion.
Mme
Carole Poirier
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. Aujourd'hui, il importe de prendre un temps de recueillement
pour nous rappeler le sacrifice de nos militaires tombés avec courage au
champ d'honneur. Derrière les récits parfois épiques, parfois bouleversants qui ponctuent les livres d'histoire, il y a
les visages d'hommes et de femmes qui, un jour, ont choisi de s'engager au
péril de leur vie pour aller défendre ce en quoi ils croyaient.
La
devise du Québec est aussi celle du Royal 22e Régiment : Je
me souviens. À cet égard, vous me permettrez de souligner particulièrement la tradition de bravoure qui a marqué l'histoire
des régiments québécois, une tradition qui se poursuit aujourd'hui. Nous ne pouvons offrir notre gratitude aux
militaires sans avoir une pensée pour les familles des soldats qui ont dû faire le deuil d'un père, d'un
fils, d'une fille ou d'un conjoint. Cette journée est aussi celle des familles
des disparus.
Par ailleurs, nous avons tous en mémoire des images heureuses des militaires rentrant au
pays. Si nous avons un devoir de mémoire envers ceux et celles qui sont tombés, nous avons
également le devoir de soutenir ceux qui ont survécu
parce que les blessures les plus longues à guérir ne sont pas celles qui sont
les plus apparentes.
Aujourd'hui, prenons également un temps pour nous souvenir des valeurs de
liberté, d'égalité et de démocratie
que nos militaires continuent de défendre.
Rappelons-nous également les innombrables vies sauvées grâce à nos soldats
et la fierté qu'ils nous inspirent.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci,
Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Je cède maintenant la parole à M. le leader du deuxième
groupe parlementaire de l'opposition.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : Merci, M. le Président. Comme à chaque 11
novembre, nous célébrons aujourd'hui le jour du Souvenir en l'honneur
des soldats qui se sont sacrifiés pour défendre la démocratie. C'est une
journée d'autant plus importante que les
témoins qui ont assisté ou participé aux derniers grands conflits mondiaux sont
de plus en plus rares. Un homme de 24
ans qui aurait été enrôlé comme soldat en 1939 aurait 100 ans aujourd'hui.
Quelques-uns sont toujours parmi nous pour témoigner de ce qu'ils ont
vécu, et, si leur mémoire demeure, leur présence s'efface peu à peu.
Je
pense qu'on est plusieurs ici à se rappeler qu'il y a une vingtaine d'années
ceux qu'on appelle les vétérans, les anciens combattants étaient
beaucoup plus présents dans notre vie collective. Ils revenaient dans
l'actualité à chaque mois de novembre, ils
faisaient partie de notre vie. On les voyait régulièrement dans les lieux
publics dans les semaines précédentes
pour saluer les gens et distribuer des coquelicots, la fleur rouge qui
symbolise le jour du Souvenir. Comme parents,
on pouvait dire à nos enfants que le vétéran qu'ils voyaient devant eux a fait
quelque chose d'important pour la liberté,
et cet homme pouvait leur raconter son expérience dans ses mots à lui, la
fierté dans l'oeil. C'est un rituel qui était très apprécié de tous.
Malheureusement, pour
des raisons évidentes, cette tradition n'est plus vraiment possible
aujourd'hui, plus difficile. Il faut donc
trouver nos propres mots pour perpétuer la mémoire de ces soldats qui restent
des modèles de courage et de dignité.
C'est une façon pour nous de dire qu'on ne les oublie pas et qu'ils ne seront
jamais oubliés. Mais c'est aussi une
forme d'hommage qu'on rend à tous les hommes, à toutes les femmes qui,
aujourd'hui, s'inscrivent dans leurs pas pour défendre nos libertés et
nos valeurs partout dans le monde. Soldats du XXe et du XXIe siècle, ils ont
tous, sans exception, notre respect et notre admiration. Merci.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, merci, M. le leader du deuxième groupe
parlementaire. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
pour son intervention.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Alors, je joins ma voix et celle de
mes collègues à l'ensemble des députés de
cette Assemblée pour, bien sûr, souligner la journée du 11 novembre, jour
du Souvenir. Jour du Souvenir dans lequel, depuis déjà plusieurs décennies, on se rappelle
qu'il y a des gens qui sont allés à la guerre. Jour du Souvenir à laquelle
plusieurs Canadiens, Canadiennes, Québécois et Québécoises portent le
coquelicot rouge pour se rappeler.
Nous,
dans notre formation politique, nous avons choisi, un jour, bien sûr, de nous
rappeler, mais surtout de nous rappeler
que c'était assez, les guerres, nous rappeler de l'importance de cette culture
de paix qu'on doit, à chaque seconde de
notre vie, à travers des gestes d'affirmation, et non pas d'écraser, d'écraser
les autres... On a décidé de porter depuis toujours le coquelicot rouge et le blanc. Le blanc, pour nous rappeler
qu'entre la Première Guerre mondiale et les guerres d'aujourd'hui il y a bien des choses qui ont
changé. Et une des choses fondamentales, c'est que maintenant il y a plus de
civils, hommes, femmes, enfants, qui perdent
la vie dans les guerres que de soldats. Alors, on se fait aussi un devoir de
mémoire de ces gens-là parce qu'ils n'ont
pas choisi de porter l'uniforme pour défendre la liberté, mais parce qu'ils
étaient libres et qu'on leur a enlevé
cette liberté au nom de la guerre. Alors, je nous invite collectivement, bien
sûr, à saluer les gens qui ont porté
l'uniforme, mais aussi à nous rappeler que c'est dans les choix quotidiens
qu'on fait qu'on peut développer la culture de la paix. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, merci, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Arthabaska.
Mme Sylvie Roy
Mme
Roy (Arthabaska) : M. le Président, bien brièvement, parce que
tout a été dit dans les dernières interventions, je vous demanderais si vous êtes déjà allé à la place de Vimy. C'est un
champ de bataille de la Première Guerre mondiale, c'est en France. Si mes collègues ont l'occasion
d'aller voir, vous allez comprendre les sacrifices qui ont dû être faits.
C'est sur un promontoire, les soldats
devaient monter. Ils étaient des pigeons d'argile. Je m'excuse de l'expression,
mais ils étaient vraiment des cibles
faciles. Et, lorsque j'ai vu ça dans un monde contemporain, je me suis dit
qu'il fallait que je le montre à mes enfants.
Mon
second voyage en France, je les ai amenés aux plages de Normandie, je leur ai
fait rencontrer des personnes qui
avaient vécu plutôt la Deuxième Guerre, c'est plus facile à trouver. Les
masques à gaz, ils les ont vus. Le Musée de la guerre canadien à Caen a
été visité. Je voulais que mes enfants sachent que la paix, c'est précaire, que
ça peut arriver n'importe où, que ce n'est
pas une question exotique de pays moyen-orientaux ou en Asie. Et je voulais
qu'ils réalisent qu'on a du travail à
faire parce que, si tous les jours, on n'investit pas dans la paix, tout ça
peut chavirer, tout ça est très fragile. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Et, compte tenu du caractère de la motion, nous
allons observer une minute de silence.
• (11 h 10 — 11 h 11)
•
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, veuillez vous asseoir.
Nous
allons poursuivre aux motions sans préavis. Maintenant, je cède la parole à Mme
la députée de Gouin pour la présentation de la motion. Mme la députée de
Gouin, à vous la parole.
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de
la Chambre pour débattre de la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale souligne le succès de l'enquête du Directeur général des élections
qui a permis d'obtenir 220 plaidoyers de culpabilité pour des
contributions illégales faites en lien avec le financement sectoriel;
«Qu'elle
constate que 532 entreprises, identifiées par la DGEQ dans un rapport en
2013, ont versé près de 13 millions
au Parti libéral du Québec, au Parti québécois et à l'Action démocratique du
Québec entre 2006 et 2011;
«Finalement,
que l'Assemblée nationale déplore que nous ne puissions exiger le remboursement
des contributions illégales des années 2006 et 2007 le délai de
prescription étant dépassé.»
Le
Vice-Président (M. Gendron) : M. le leader du gouvernement.
M. Fournier : ...M.
le Président, je suis obligé de vous dire que nous n'avons jamais reçu ce
projet de motion. Et, peut-être pour
informer la Chambre et surtout ceux qui nous écoutent, un point
d'information — j'en
ferai une question de règlement si
vous voulez — il semble
assez important de préciser à ceux qui nous écoutent, M. le Président, que,
pour que les députés puissent voter,
encore faut-il qu'ils soient au courant, d'où l'importance de transmettre aux
différents caucus les motions avant. Alors, il serait préférable qu'on
respecte l'ensemble des députés.
Des
voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
S'il vous plaît! Il me semble que c'est assez évident, là. Il n'y a pas eu d'information, on n'a pas eu... Les parlementaires
concernés n'ont pas eu l'information, et, normalement, ça met fin à la
présentation.
M.
Khadir : ...il doit y avoir eu un bris technique dans les
communications...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, les explications ont été données. Alors,
ça met fin à la présentation des motions sans préavis. Merci.
Avis touchant les travaux des
commissions
Et
nous en sommes maintenant aux avis touchant les travaux des commissions par le
leader adjoint du gouvernement. M. le leader adjoint, à vous.
M.
Sklavounos :
Merci, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la Commission de l'économie
et du travail poursuivra les consultations particulières à l'égard du
projet de loi n° 67, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement de l'hébergement touristique, dès
maintenant, pour une durée de 1 h 30 min, à la salle
Louis-Joseph-Papineau;
La Commission de la santé et des
services sociaux, quant à elle, poursuivra l'étude détaillée à l'égard du
projet de loi n° 44, Loi visant
à renforcer la lutte contre le tabagisme, aujourd'hui, de 15 heures à
18 heures, à la salle du Conseil législatif;
Et
finalement le Commission de l'économie et du travail entreprendra l'étude
détaillée à l'égard du projet de loi
n° 57, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite
principalement quant au financement des régimes de retraite à
prestations déterminées, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau. Merci, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le leader adjoint du
gouvernement. Pour ma part, je vous avise que la Commission de
l'administration publique se réunira en séance de travail aujourd'hui, après
les affaires courantes jusqu'à
13 heures, à la salle des Premiers-Ministres de l'édifice Pamphile-Le May.
L'objet de la séance, c'est d'examiner les rapports annuels de gestion
des ministères et organismes et d'organiser les travaux de la commission.
Nous
en sommes à la rubrique Renseignements sur les travaux. Est-ce que... Je ne
vois pas de demande de renseignement, excusez.
Affaires du jour
La
période des affaires courantes étant terminée, on va procéder maintenant aux
affaires du jour, et je cède à nouveau la parole à M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Sklavounos : M. le Président, article 10, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 68
Adoption du principe
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Alors, à l'article 10 du feuilleton
d'aujourd'hui, c'est M. le ministre de l'Économie,
de l'Innovation et des Exportations qui propose l'adoption du principe du
projet de loi n° 68, Loi donnant suite aux conclusions du
Rapport du groupe spécial d'appel constitué en vertu de l'Accord sur le
commerce intérieur concernant
l'article 4.1 de la Loi sur les produits alimentaires. Alors, je suis prêt
à entendre les interventions s'il y en a. Je reconnais M. le ministre de
l'Économie et de l'Innovation. À vous, M. le ministre.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Merci, M. le Président. Alors, j'ai le plaisir de prendre la
parole dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi n° 68, donnant suite aux conclusions du
Rapport du groupe spécial d'appel constitué en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur concernant
l'article 4.1 de la Loi sur les produits alimentaires. Permettez-moi,
d'abord, de rappeler brièvement le contexte dans lequel s'inscrit
celui-ci.
Le commerce
interprovincial est essentiel pour l'économie québécoise. En 2013, le Québec a
exporté plus de 70 milliards de biens
et de services vers le reste du Canada. Ce chiffre représentait 43 % de
nos exportations totales et 19 %
de notre produit intérieur brut. Il ne fait donc aucun doute qu'un marché
canadien ouvert, stable et performant est essentiel à la vitalité
économique de notre province.
L'Accord
sur le commerce intérieur, communément appelé l'ACI, vise précisément à
éliminer, dans la mesure du possible,
les obstacles à la libre circulation des personnes, des produits, des services
et des investissements à l'intérieur du Canada. Cet accord, en vigueur depuis
1995, regroupe tous les gouvernements au Canada, à l'exception de celui
du Nunavut, facilite l'accès des entreprises
à des travailleurs québécois et des travailleurs québécois aux marchés des
autres provinces et territoires. En
contrepartie et pour son plus grand bénéfice, l'environnement d'affaires
québécois doit être exempt d'obstacles injustifiés afin de favoriser
l'attraction de travailleurs, d'entreprises et d'investisseurs d'ailleurs au
Canada.
Nous
jugeons qu'il est primordial de respecter l'ACI, un instrument qui encadre les
pratiques commerciales des provinces,
des territoires et du gouvernement fédéral. La volonté d'observer et de
respecter les engagements que le Québec a contractés dans le cadre de cet accord est à l'origine de ce projet de
loi. Tel que son titre l'indique, le projet de loi n° 68 vise à donner suite aux conclusions des rapports
du groupe spécial et du groupe spécial d'appel constitué en vertu de l'ACI.
Afin d'énoncer clairement l'objectif exact de ce projet de loi, je dois décrire
brièvement le processus ayant mené aux conclusions du groupe spécial et du
groupe spécial d'appel.
Il faut savoir que la commercialisation des
mélanges de produits laitiers et de succédanés était, jusqu'à tout récemment,
interdite en Ontario et au Québec. L'interdiction ontarienne, abrogée depuis, a
été contestée en 2010. En janvier 2012, la
Saskatchewan a également demandé au Québec de lever cette interdiction. En mai
2012, le Québec s'est engagé à
abroger les dispositions de la Loi sur les produits alimentaires qui
interdisaient la production ou la commercialisation des mélanges laitiers au cours de l'année
suivante. Devant l'incapacité du Québec à modifier sa législation dans les délais
impartis, la Saskatchewan a entrepris un
recours formel en vertu des procédures de règlement des différends de l'ACI en
juin 2013. Avec ce litige, elle contestait
non seulement l'interdiction de produire et de commercialiser des mélanges
laitiers et des succédanés, mais
également les règles d'étiquetage concernant ces derniers. La
Colombie-Britannique, l'Alberta et le Manitoba se sont joints aux
procédures à titre de parties intervenantes pour soutenir la Saskatchewan.
Il faut
savoir qu'en plus de celles interdisant la production et la commercialisation
des succédanés et des mélanges laitiers
certaines dispositions prévues à la Loi sur les produits alimentaires
interdisent actuellement la désignation d'un succédané de produit laitier par
le terme «lait», «crème», «beurre», «fromage» ou un dérivé de l'un de ces mots
sur le territoire québécois. Je précise au passage que de telles
interdictions ne sont plus appliquées ailleurs au Canada.
Conformément
aux procédures de règlement des différends prévues à l'ACI, un groupe spécial
de trois membres a été constitué. Ce
groupe spécial a reçu le mandat d'évaluer la compatibilité des mesures
québécoises avec les obligations contractées
dans le cadre de l'ACI. Le groupe spécial a statué que les mesures interdisant
la production et la commercialisation des
mélanges et des succédanés laitiers, de même que les règles d'étiquetage
n'étaient pas conformes aux obligations de l'ACI. Québec a abrogé les mesures concernant les mélanges et les
succédanés laitiers le 3 décembre 2014 mais a porté en appel la décision concernant les règles
d'étiquetage. Tout au long des procédures de l'appel, le gouvernement du Québec
a vigoureusement défendu la conformité de l'article de la Loi sur les produits
alimentaires régissant l'étiquetage des succédanés,
l'article 4.1, avec l'ACI. Toutefois, le groupe spécial d'appel a maintenu
la décision du groupe spécial en statuant
que les dispositions québécoises du paragraphe 4.1.1° concernant
l'étiquetage étaient non conformes aux obligations en vertu de l'ACI.
Nous devons agir de concert avec les décisions d'un groupe spécial et d'un
groupe spécial d'appel validement constitués qui exigent la mise en conformité
du paragraphe 4.1.1° de la Loi sur
les produits alimentaires.
• (11 h 20) •
L'abrogation
de l'article 4.1.1° ne laisse pas le Québec sans aucune possibilité d'encadrer
l'étiquetage, puisque l'article 4 de
la Loi sur les produits alimentaires permet également de le régir. Le milieu
agricole du Québec, bien que déçu des
décisions des groupes spéciaux, comprend la nécessité d'abroger l'article 4.1.1°.
Bien sûr, le gouvernement actuel pourrait
choisir d'ignorer les gestes posés par le gouvernement précédent et, du même
coup, sciemment omettre de respecter la décision rendue pas le groupe
spécial en mars 2014, mais ce serait agir de manière irresponsable et
incohérente. Irresponsable, parce que les
conséquences rattachées au non-respect d'une décision du groupe spécial peuvent
être importantes. J'y reviendrai dans
un instant. Incohérente, parce que notre gouvernement reconnaît l'importance de
respecter les règles établies en matière de commerce interprovincial.
Il existe un
contenu reconnu en matière d'accords de commerce selon lequel l'efficacité ou
la crédibilité d'un accord se mesure
à la robustesse de son mécanisme de règlement des différends. Pendant de
nombreuses années, l'Accord de commerce
intérieur a été décrit comme étant un accord politique sans dents et, par
conséquent, peu efficace, une partie pouvant
ignorer la décision rendue par un groupe spécial, et ce, sans conséquence autre
que le mécontentement de la partie adverse et une vague menace de
représailles.
Depuis 2009,
les choses ont bien changé, et l'ACI est devenu un accord hautement
contraignant. Si le Québec omet de
donner suite à la décision du groupe spécial, un groupe spécial de
l'observation des décisions est susceptible de lui imposer une sanction pécuniaire maximale de
5 millions de dollars. Cette sanction pécuniaire n'est pas de nature d'une
compensation monétaire liée aux dommages
subis par les parties plaignantes, il s'agit d'une sanction visant strictement
à punir la partie qui ne respecte pas une
décision. Dans l'établissement de cette sanction, il est prévu que les efforts
déployés de bonne foi pour se conformer sont pris en compte.
Au surplus de
la sanction pécuniaire, si le Québec persiste à ne pas respecter la décision du
groupe spécial et qu'un délai de 180 jours s'écoule suite au rapport
constatant ce défaut, son droit d'initier un différend ou de participer à un différend
en vertu de l'ACI lui sera entièrement retiré, de même qu'aux personnes et
entreprises qui résident sur son territoire.
Ces conséquences graves seraient susceptibles d'entacher indûment la réputation
du Québec à titre de partenaire de
l'ACI. D'autant plus que nous participons aux discussions intensives concernant
la modernisation de l'ACI, le Québec participe
activement à ces négociations visant à renforcer cet accord essentiel, la mise
en oeuvre des recommandations du
groupe spécial et du groupe spécial d'appel démontrera le sérieux et la
crédibilité du Québec en ses partenaires, ce qui renforcera sa position à la table des négociations. Nous devons
donc, dans ces circonstances, être conséquents avec nos engagements.
Conclusion,
M. le Président. Je sollicite l'appui de l'ensemble des membres de cette
Assemblée afin que le principe du
projet de loi n° 68 soit adopté. S'il est adopté, le projet de loi
permettra au Québec de se conformer à la décision du groupe spécial ayant été validement constitué en
vertu de l'ACI. Le Québec démontrera ainsi sa volonté de respecter le mécanisme institutionnel prévu à cet accord et il
protégera sa réputation à titre de partenaire commercial. Au surplus, l'offre
des produits alimentaires mis à la disposition des consommateurs québécois sera
élargie tout en laissant la possibilité au gouvernement du Québec de régir l'étiquetage
visant à flouer délibérément le consommateur. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le ministre, de votre
intervention. Et, pour la poursuite du débat
sur cette même question, je cède la parole au porte-parole de l'opposition
officielle en ces matières, M. le député de Sanguinet. À vous.
M. Alain Therrien
M.
Therrien : Merci, M. le Président. Alors, je tiens, d'abord, à saluer, comme le
veut la tradition, le ministre
qui est responsable du projet de loi qui a été déposé à l'Assemblée
nationale, le projet de loi n° 68, qui modifie la Loi sur les produits alimentaires afin d'y retirer les dispositions interdisant
d'employer, pour désigner un succédané de produit laitier, les mots
«lait», et «crème», et «beurre», «fromage» ou un dérivé de l'un de ces mots.
Écoutez,
ça découle du fait que le Québec, hein, fait partie de l'Accord du commerce
intérieur, évidemment, et on doit — je pense que le ministre l'a bien mentionné
tantôt — respecter
les règles qui vont gérer ou qui vont réglementer l'ensemble du commerce
entre les provinces canadiennes. On est encore une province, M. le Président,
aux dernières nouvelles. Alors donc, nous
devons réfléchir aux conséquences de nos gestes quand on est à l'intérieur
d'une entente comme ça.
D'abord, en janvier
2012, la Saskatchewan, le Manitoba et la Colombie-Britannique avaient manifesté
leurs réticences par rapport à la
réglementation québécoise sur les succédanés et la vente de certains de ces
succédanés-là et des mélanges de produits laitiers. Notre gouvernement,
à l'époque, M. le Président — vous êtes bien placé pour le savoir — avait
déposé un projet de loi, le projet
de loi n° 56, qui visait, tout simplement, à faire en sorte que cette épine-là dans le commerce intérieur
soit enlevée du pied du commerce canadien. Et, malheureusement, on connaît la
suite, le gouvernement a changé, le nouveau gouvernement est arrivé aussi avec un projet
de loi, le projet de loi n° 22, qui était, comme l'a mentionné le ministre
tantôt, qui était dans la même lignée que ce qu'on avait proposé.
Tout
ça est parfait, sauf qu'il y avait encore un problème lié, justement,
à l'utilisation des termes, des mots «lait», «crème», «beurre» et «fromage», et c'est suite à
un commentaire ou un... ce que le tribunal a commenté, a statué
pour dire qu'on devait modifier cet article-là.
Alors donc, avec raison, je pense que, suite à cet avis-là, on doit respecter
l'avis de ce tribunal-là. Alors, évidemment,
dans l'article 4.1, même les producteurs laitiers disent qu'ils
peuvent vivre avec, du moment que l'article... le deuxième paragraphe,
«utiliser, pour désigner un succédané de produit laitier, des mots, marques de commerce, appellations ou images
évoquant l'industrie laitière», soit conservé. C'est ce qu'on a eu
comme commentaire.
Alors
donc, écoutez, M. le
ministre, je vous dis que notre parti
va voter en faveur de ce projet de
loi. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci,
M. le député de Sanguinet,
de votre intervention. Et, toujours
sur cette même motion... pas même motion, même débat, je cède la parole à Mme
la députée Mirabel.
Mme Sylvie D'Amours
Mme
D'Amours : Merci, M. le Président. Effectivement, le projet de loi a
été déposé pour se conformer au jugement dans le cadre de l'accord de commerce intérieur. Concrètement, le projet de loi, là, supprimera l'article 4.1 de la Loi sur les produits
alimentaires, comme on l'a mentionné. Ça, ça date depuis 2009 que l'ACI a été adopté...
pour les mesures de l'ACI. Par contre,
il faut rappeler les nombreuses manifestations de milliers de producteurs
contre la signature de l'accord en 2009.
J'aimerais les citer
ici, M. le Président. Radio-Canada rapportait le
14 octobre 2009 : «Or, les agriculteurs du Québec
sont persuadés que cet ajout à l'ACI leur nuira, car il aura pour effet
d'anéantir les mesures qui font la spécificité des produits québécois :
les règles d'étiquetage, les normes de composition des aliments, la mise en
marché collective et ordonnée ainsi que la gestion de l'offre.»
Il
y avait un autre journal, le 24 heures, qui rapportait aussi le
14 octobre 2009 : «"C'est faux que l'ACI protège nos produits. Ce qui est vrai, c'est qu'on va
accepter un véritable nivellement [vers] le bas. On va accepter des produits
qui ne répondent pas aux normes agricoles du
Québec", [martelait] M. Lacasse», qui était président de l'UPA à l'époque.
J'ai
eu une interpellation vendredi dernier et, justement, j'ai parlé au ministre de
l'Agriculture des exigences qu'on a pour
nos propres producteurs agricoles. On veut qu'ils soient vraiment les premiers,
qu'on soit les premiers aussi au niveau de l'étiquetage, que nos
produits soient sains, de bonne qualité. Et je sais que le ministre doit
défendre l'industrie en transformation agroalimentaire, c'est son mandat, on en
convient tous, mais, malheureusement, cette modification législative ouvre une brèche de plus qui aura des
effets négatifs pour les producteurs de lait, et eux aussi, le ministre de
l'Agriculture doit les défendre de la même manière.
L'article
retiré n'existera plus pour les exportateurs américains, d'Europe et autres
pays aussi. Cela permet à de grands
industriels de concurrencer davantage les producteurs de lait du Québec. Les
producteurs de lait avaient averti le gouvernement
dès 2009 des conséquences négatives. Le gouvernement libéral a décidé d'ignorer
les avertissements, et nous nous sommes retrouvés devant le fait
accompli à la suite de la signature de l'accord.
Nous
n'avons, par contre, pas d'autre choix que d'appuyer cette modification
législative afin d'éviter au Québec des
pénalités compensatoires pouvant aller jusqu'à 5 millions de dollars.
C'est sans compter les mesures de rétorsion. Nous serons donc en faveur du projet de loi. Le gouvernement, qui dit
écouter les agriculteurs, devrait commencer à le faire de façon sérieuse
pour éviter de répéter des situations semblables dans le futur. Et j'espère
qu'ils vont écouter les producteurs agricoles dans le cadre de leurs discussions
pour renforcer l'accord. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron) : On vous remercie, Mme la députée de Mirabel, de
votre intervention. Et je ne vois pas d'autre intervenant. Donc, est-ce
à dire que le principe du projet de loi n° 59... excusez, ce n'est
pas vrai, ce n'est pas le 59, c'est le 68,
donnant... aux conclusions du Rapport du groupe spécial d'appel constitué en
vertu de l'Accord sur le commerce intérieur concernant
l'article 4.1 de la Loi sur les produits alimentaires... est adopté?
• (11 h 30) •
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la Commission de l'économie et du travail
M.
Sklavounos : M. le Président, conformément à
l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que ce projet
de loi soit déféré à la Commission de l'économie et du travail pour étude
détaillée, s'il vous plaît.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron) : Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement, à vous à nouveau.
M.
Sklavounos :
Oui. Article 5, s'il vous plaît, M. le Président.
Projet de loi n° 59
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président
(M. Gendron) : À l'article 5 du feuilleton de ce matin,
l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du principe du projet de
loi n° 59 — là,
c'est le cas — Loi
édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence
et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes. Et je suis
prêt à entendre un premier intervenant et je reconnais M. le député de
Bourget pour son intervention. M. le député de Bourget, à vous la parole.
M. Maka Kotto
M.
Kotto : Merci, M. le Président. Avec cette détermination avérée
du gouvernement libéral d'aller de l'avant avec son très contesté projet de loi contre les discours haineux, avec
cette volonté ici exprimée pour l'adoption du principe du projet de loi n° 59, Loi édictant la
Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les
discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes, il est fondamental de souligner, M. le Président, qu'au
volet 1 de ce projet de loi la ministre de la Justice n'a manifestement
pas refait ses devoirs, ce que bon nombre de
groupes et de personnes sont respectueusement venus lui demander lors des
auditions publiques tenues au cours des mois d'août et septembre derniers.
Nous
avons eu un espoir, M. le Président, en lisant l'article de Mme Jocelyne
Richer dans La Presse du 23 septembre dernier, nous avons eu un espoir, car elle nous
informait que le gouvernement libéral allait refaire ses devoirs et présenter une nouvelle mouture de son projet de
loi n° 59, un espoir qui avait d'ailleurs pris sa source à la fin du
mois d'août dernier alors que le
premier ministre lui-même, au terme d'une réunion de son caucus, disait que le
projet de loi sera revu et amendé et
qu'il n'était pas dans l'intention de son gouvernement de brimer la liberté
d'expression; espoir également bercé
quand la ministre de la Culture et des Communications, dans la dernière édition
du médium le Trente, magazine publié par la Fédération
professionnelle des journalistes du Québec, à la question de savoir si le
projet de loi n° 59 était une
menace contre la liberté d'expression, ce qui, cela soit dit en passant,
inquiète plusieurs journalistes, la
ministre a répondu, et je la cite : «C'est un projet qui a été demandé et
entendu, avec toutes les ramifications qui peuvent être dangereuses, dans un sens comme dans l'autre.
On a les forces en présence que sont la liberté d'expression versus l'encadrement qui est prôné à cause d'événements
qui ont pu se produire et qui sont inquiétants. La liberté d'expression, poursuit-elle, c'est quelque chose de
très important. J'étais à Paris quand Charlie Hebdo est arrivé, j'ai
vécu ça avec énormément d'émotion. Comme
tout le monde, on a tous été Charlie et on se dit que ça n'a pas de bon sens. Je
pense que le gouvernement est tout à fait dans cette mouvance-là. Les gens sont
venus s'exprimer sur le projet de loi. Heureusement, on a la démocratie et les commissions
parlementaires. Les gens doivent venir dire ce qu'ils pensent, et après les commentaires doivent être pris en compte. La
liberté d'expression doit être protégée mais tout en se préservant, comme
société, du pôle extrêmement radical supposé des propos haineux.» Fin de
la citation.
Mais voilà,
M. le Président, il semble que nous ayons encore aujourd'hui le projet
de loi n° 59 dépourvu de tout lien
avec les commentaires entendus dans le cadre de nos travaux en commission
parlementaire, projet de loi n° 59 tel qu'il fut déposé le 10 juin 2015. Nous nous serions donc attendus,
compte tenu des critiques exprimées, critiques parfois virulentes,
notamment d'éminents juristes, qu'à défaut d'abandonner le projet de loi des
amendements significatifs soient apportés et soumis à la connaissance des parlementaires avant
d'entamer l'étape qui nous occupe ici aujourd'hui, avant d'entamer l'étape de l'adoption du principe
de ce projet de loi, mais c'est en vain. Lorsque l'ancienne bâtonnière
du Barreau de Montréal, Me Julie
Latour, reproche à la ministre de la Justice, et je la cite, d'avoir «recours à
un canon législatif pour tuer une
mouche hypothétique», fin de la citation, eh bien, M. le Président, à ces
propos, il me semble que la cause est entendue. Pour l'avocat Julius
Grey, également un des juristes reconnus pour la défense de l'égalité et des
libertés fondamentales, cette loi est
inutile et néfaste pour la liberté d'expression. Si cette loi avait été adoptée
en 1955, a-t-il mentionné en
commission parlementaire, elle aurait été utilisée contre les Témoins de
Jéhovah, contre les communistes et les homosexuels. Me Grey, un ardent défenseur des libertés
individuelles, a également souligné qu'il n'hésiterait pas à défendre un
citoyen qui pourrait se sentir lésé par cette loi si elle était adoptée.
M. le
Président, comme l'on dit communément, qu'est-ce que la ministre n'a pas
compris dans le message des juristes
et qu'est-ce que la ministre a fait des nombreux commentaires entendus pendant
la commission parlementaire? Cela
nous apparaît une carence de respect envers toutes ces personnes, groupes et
associations qui, en très grande partie, ont jugé que ce projet de loi introduit des mesures très attentatoires
aux droits et libertés. À l'évidence, la ministre de la Justice n'est
pas dans une disposition consensuelle, car elle se situe à 180 degrés de
la cible.
Je rappelle,
M. le Président, que cette loi a été déposée dans la foulée d'événements très
médiatisés — pensons
notamment aux propos de certains religieux radicaux — projet
de loi qui a fait l'objet de critiques acerbes du monde juridique, je viens de le dire, mais aussi d'anciens députés libéraux
qui ont siégé avec nous dans cette Assemblée. Pensons à Mme Fatima Houda-Pepin, qui a siégé ici
même 20 années durant, de 1994 à 2014. Elle fut également vice-présidente
de notre Assemblée et la première femme
musulmane élue dans ce Parlement, le 12 septembre 1994. «Avec son projet
de loi n° 59 — confia-t-elle le 14 septembre dernier,
en marge de son témoignage en commission parlementaire — le gouvernement
[...] — elle
nomme le premier ministre — protège les islamistes radicaux, au lieu de protéger la société
contre eux.» Fin de la citation. Pour
Mme Houda-Pepin, une voix éclairée et éclairante sur les questions religieuses,
le projet de loi n° 59 ne règle
aucun problème, et, au contraire, elle dit craindre les dérives auxquelles
s'expose la société québécoise en limitant la liberté d'expression avec
ce projet de loi.
• (11 h 40) •
Je me
permettrais, M. le Président, de vous citer un extrait de son témoignage en
commission parlementaire, le 14 septembre dernier : «Si le
projet de loi n° 59 venait à être adopté tel quel, tel que libellé, on
bâillonnerait la liberté d'expression, la
liberté d'opinion, le droit à la dissidence et à la critique, y compris le
droit de critiquer les religions, qui ne sauraient être assimilées à un crime raciste. Je dois vous dire, M. le
Président, que je suis une personne qui a un immense respect pour les religions. Je suis très à l'aise
dans toutes les maisons de Dieu. Je n'ai pas de problème avec Dieu, j'ai
juste un problème avec ceux qui se prennent pour Dieu. Ça fait [toute] une
différence.» Fin de la citation. Se disant estomaquée
et jugeant ce projet de loi dangereux, elle a dénoncé dans une lettre ouverte
le fait que le Québec soit devenu le paradis de l'islamisme radical et que les leaders islamistes radicaux
y trouveraient des protections juridiques supplémentaires avec l'adoption
d'une telle loi.
Une autre
sévère critique est venue de M. Claude Trudel, qui fut député libéral de notre
magnifique circonscription de Bourget de 1985 à 1989 et un proche
collaborateur de M. Paul Gérin-Lajoie et de feu le premier ministre Robert
Bourassa. Dans un article paru le
22 septembre dernier, celui-ci invite le gouvernement à retirer
immédiatement le projet de loi n° 59, un projet de loi, selon lui, qui n'aurait jamais dû voir le jour et qui
est proprement, profondément, irréformable. «Je n'ai que faire — dit-il — d'un projet liberticide qui constitue une
forme inacceptable de censure [...] et offre aux radicaux de
tout acabit [...] la possibilité de faire taire tous ceux qui ne sont
pas d'accord avec leurs vues et osent le faire savoir. [...]Je ne peux imaginer mon Québec d'aujourd'hui aux prises avec une
police des idées. Je ne l'ai pas servi pendant près de 50 ans pour le voir reculer de
70 ans.» L'ancien député du Parti libéral du Québec conclut en invitant le
premier ministre et la ministre de la
Justice à avoir le courage de reconnaître qu'ils se sont trompés et qu'ils
doivent retirer cette mauvaise solution
à un problème délicat. M. le Président,
il s'agit en effet d'un problème délicat qui exige une
rigueur de tous les instants, et
c'est pour cela que nous avons proposé, par la voix de la députée
de Taschereau, la mise en place d'un observateur de l'intégrisme religieux qui aiderait justement
à mieux comprendre, à mieux documenter et à mieux prévenir ce phénomène, notamment la radicalisation de nos
jeunes. Nous l'avons dit et répété, il faut que le gouvernement agisse en prévention, et les intervenants de tous les
horizons doivent être outillés pour y faire face. Ma collègue de Taschereau et
plusieurs autres observateurs l'ont dit ad
nauseam, il n'est pas question, avec un tel projet de loi, d'instaurer un
tribunal des idées.
Le professeur
de droit Pierre Trudel a même parlé d'inquisition 2.0 pour décrire ce
projet de loi, qui, a-t-il écrit le 17 septembre 2015, «part d'une
intention louable[...]. Mais il institue une inquisition nouveau genre faisant
fi des exigences de la liberté
d'expression.» Et, pour cet expert, M. le Président, le projet de
loi n° 59 est une grave menace à la liberté d'expression : «En clair — dit-il — la loi propose d'instituer un mécanisme afin
de dénoncer et de faire investiguer sur les propos que tiennent les gens
et même des propos qu'on leur prête l'intention de tenir! On est [...] dans le
plus déplorable procès d'intention. [...]Le
problème — conclut-il — avec les dispositions [...] destinées à
lutter contre la haine, c'est
l'absence de souci de distinguer entre le propos désagréable, voire méprisant
et le discours qui vise effectivement à
provoquer la haine, celui qui est effectivement dangereux.» Fin de la citation.
Et c'est là, M. le Président, l'un des irritants de ce projet de loi,
qui justement ne définit pas ce qu'est un discours haineux.
Et, M. le
Président, parmi les groupes qui sont venus exprimer leurs avis sur ce projet
de loi, et nous les en remercions
tous, plusieurs ont émis de grandes réserves, et je pense aux Juristes pour la
défense de l'égalité et des libertés fondamentales, tel que souligné
plus tôt, à la Chaire de recherche contre l'homophobie, GRIS-Québec et le
Conseil québécois LGBT, à la Table ronde du
Mois de l'histoire des Noirs, à l'Association canadienne des libertés civiles,
à l'association des Nord-Africains pour la laïcité et au Centre
consultatif des relations juives et israéliennes.
Vous
me permettez... vous me permettrez, dis-je, de revenir sur certains de leurs
propos en commission parlementaire,
notamment le Centre consultatif des relations juives et israéliennes, le
20 août 2015, qui a souligné, par la voix de M. Luciano Del Negro, le vice-président de l'organisme,
que, «bien que ce soit tout à fait à l'honneur du gouvernement de tenter de
protéger les membres les plus vulnérables de la société contre les messages de
haine, il est nécessaire de veiller à ce que la législation trouve un juste équilibre entre la liberté
d'expression et la protection contre la haine. Faisant partie d'un groupe qui, historiquement et aujourd'hui encore, est la cible fréquente de crimes motivés par la haine — a
mentionné M. Del Negro — nous
sommes sensibles à la question et nous nous opposons catégoriquement aux
discours haineux sous toutes leurs
formes. Une législation de ce genre comporte cependant le risque inhérent
d'être détournée pour réduire au silence toute critique et étouffer le droit
légitime d'expression. Dans notre société démocratique, la liberté d'expression
est un droit fondamental inaliénable pour
tous ses citoyens. Le projet de loi n° 59, tel que présenté, aurait un
impact aussi négatif qu'involontaire sur la liberté d'expression, voire
un effet de censure. En effet, étant donné l'absence d'équité procédurale et de lourdes conséquences punitives
pour les personnes jugées coupables par le Tribunal des droits de la personne, il est à craindre qu'un climat d'autocensure
s'instaure au Québec. De plus, l'absence de règles et de directives
claires offertes par la loi au tribunal révèle une lacune évidente en matière
de justice procédurale.»
Plus loin, il dit : «...il nous paraît
périlleux de se servir du droit civil pour accomplir ce qui est traité de façon
adéquate par le droit criminel. Le projet de
loi n'établit pas un juste équilibre entre la garantie de la liberté
d'expression et la protection contre la haine et ne met pas en place les
garanties procédurales nécessaires pour assurer le respect des droits et libertés des citoyens. Dans sa forme
actuelle, le projet de loi risque de créer un climat d'autocensure indésirable
et incompatible avec les droits et libertés
fondamentaux. Nous estimons donc que le projet de loi n° 59 doit être revu de fond en
comble et amendé en profondeur et faire ensuite l'objet de nouvelles
consultations et auditions publiques présidées par cette même
commission.» Fin de la citation.
Pour leur
part, les représentants de l'Association québécoise des Nord-Africains
pour la laïcité, le 22 août dernier, ont soutenu que, face au discours
haineux et au discours incitant à la violence, une action ferme est certes nécessaire,
notamment en raison de la montée fulgurante
du groupe terroriste qualifié par les médias et les politiques occidentaux
d'État islamique, de la divulgation très facile du discours islamiste radical
et du discours haineux sur le cyberespace, mais
également par des prédicateurs islamistes qui prônent le djihad armé ici même,
dans des écoles, des mosquées, des centres
communautaires du Québec et des espaces apprenants mobiles. «Malgré cela — a souligné le porte-parole, M. Ferid Chikhi — nous nous inquiétons pour la liberté
d'expression au Québec. Notre crainte provient du flou qui règne autour
de la notion de ce qu'est un "discours haineux".»
«En ce moment précis de la vie politique,
culturelle et sociale du Québec — poursuit-il — une autre question nécessite une réponse claire et sans
ambiguïté : Dans un tel contexte, quelles solutions les élus et les
gouvernants du Québec pourraient-ils mettre en oeuvre pour amener toute
la société d'accueil à éviter les amalgames entre la majorité des musulmans comme partie citoyenne bien intégrée à
la société québécoise et refuser que la minorité des islamistes la représente et
impose ses visions, ses concepts et ses pratiques idéologiques?»
«...nous
doutons — conclut-il — que ce soit le bon cheminement pour
faciliter aux Québécois de diverses origines et notamment ceux de culture et de culte musulman une intégration et/ou
une inclusion diligente et bénéfique aussi bien [pour ceux] pour
eux — pardon — que
pour la société d'accueil.» Fin de la citation.
Nous partageons également les inquiétudes de la
communauté LGBT, M. le Président. J'en aurais pour une demi-heure encore, mais je vois que le temps file. Je me limiterai à
rappeler, M. le Président, que le grand défi est de changer les coeurs. Et ce n'est pas par des lois qu'on
change les coeurs, ce n'est pas par des motions non plus. Merci, M. le
Président.
• (11 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, M. le député de Bourget, de votre intervention. Je
suis prêt à reconnaître le prochain
ou la prochaine intervenante. Alors, M. le député de Verchères, à vous la
parole sur le principe du projet de loi n° 59. À vous.
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron :
M. le Président, je ne vous cacherai pas que j'ai le sentiment de me retrouver
dans un exercice qui peut, à
plusieurs égards, apparaître un peu surréaliste, surréaliste parce que nous
sommes actuellement réunis pour discuter, débattre et éventuellement
adopter le principe d‘un projet de loi dont on sait pertinemment que la
ministre elle-même a reconnu qu'il devait être réformé, modifié en profondeur.
Alors, de
quoi discutons-nous, M. le Président? De quoi discutons-nous? Nous discutons de
quelque chose qui n'aura peut-être
pas lieu d'être. Et, ce faisant, je m'interroge sur la judicieuse utilisation
du temps de ce Parlement, du temps des parlementaires, du temps de ces
innombrables groupes qui sont venus faire entendre leurs voix ici, en commission parlementaire, et qui ont fait savoir à
la ministre que son projet de loi, sous sa forme actuelle, était totalement
inacceptable, complètement à côté de ses
pompes, ce qui a amené, d'ailleurs, la ministre à dire qu'il fallait
éventuellement le modifier en
profondeur. Alors, nous débattons d'un principe sans même savoir si la version
finale de ce projet de loi là reprendra
les mêmes principes. Puis, puisqu'il est question des principes, M. le
Président, faisons un peu l'historique de ce qui nous a amenés à ce projet de loi. On s'est retrouvés, comme société
dite occidentale, dans une situation où, à la fois visés par des... je dirais, des intentions
terroristes et devenus, par la force des choses, une source d'approvisionnement
en main-d'oeuvre pour les groupes
terroristes, nous nous sommes retrouvés, comme société occidentale, devant
l'obligation de devoir réagir, de
devoir poser des gestes. Et je pense que nous n'avions pas pris conscience...
ou, du moins, certains d'entre nous,
certaines d'entre nous notamment en cette Chambre n'avaient pas encore pris
conscience de la nécessité d'intervenir jusqu'à ce que surviennent les
événements de Saint-Jean-sur-Richelieu et d'Ottawa.
Dès lors, on s'est dit : Bien, il
y a comme quelque chose qui ne fonctionne pas, puisque ce ne sont pas des gens,
entre guillemets, de l'étranger qui viennent
commettre des gestes terroristes sur notre territoire, ce sont des gens bien de
chez nous, M. le Président, qui soit décident de quitter notre territoire pour
aller joindre une cause à l'étranger pour y apporter
leur contribution ou qui, adhérant aux thèses de ces groupes, viennent sur
notre territoire poser des gestes éminemment
malheureux, M. le Président. Dès lors, on a interrogé le gouvernement, on a
demandé au gouvernement : Qu'est-ce
que vous allez faire? Il y a actuellement une montée de ce qu'on appelle
l'intégrisme religieux qui fait en sorte qu'on endoctrine littéralement de
nos jeunes hommes et de nos jeunes femmes jusque dans nos collèges pour les
amener, éventuellement, à quitter leurs familles et à s'embrigader dans
ce que d'aucuns appellent le djihad. Qu'est-ce que le gouvernement va faire?
Ma
collègue de Taschereau,
à plusieurs reprises, a posé la
question au gouvernement, et là on avait droit à des réponses convenues où on disait : Oui, oui,
c'est important comme problématique, mais, vous savez, c'est très complexe, puis nos policiers sont très attentifs à la situation,
puis on vous donne le numéro d'une ligne 1 800, je ne sais trop, là,
pour... si vous avez des cas, de nous
les souligner, de nous les signaler. Mais, M. le Président, ce n'est pas
ça dont il est question. Très
souvent, les familles ne voient même pas de signe avant-coureur de cette
radicalisation. Comment peut-on, dans de telles circonstances, prendre le téléphone et signaler le numéro que
nous indiquait ou que nous donnait en Chambre la ministre de la Sécurité publique si on ne voit pas venir la
radicalisation de nos proches? Bien sûr, on a donné, depuis, un certain nombre d'indices pour être attentifs, voir
éventuellement des manifestations de ce phénomène de radicalisation, mais il n'en demeure pas moins, M. le Président,
que ce qu'il aurait fallu faire, c'est, comme le suggérait l'ex-députée de La Pinière, de faire en sorte de pouvoir
être à l'affût, non pas simplement être à l'affût dans, je dirais, l'intimité
de notre foyer, de ce qui s'y passe, mais être à l'affût, comme société,
des mouvements qui viennent infiltrer jusque dans nos institutions, M. le Président. Et là on parle d'institutions
d'enseignement, puis inutile d'insister sur le cas de jeunes du collège de Maisonneuve qui ont quitté pour la
Turquie dans le but, éventuellement, de combattre aux côtés de l'organisation
armée État islamique, M. le Président.
Donc,
il nous faut être à l'affût, et c'est ce qui a amené, d'ailleurs, ma collègue
de Taschereau à présenter un projet de
loi sur l'observateur de l'intégrisme religieux, de telle sorte, effectivement,
de pouvoir, comme société, se doter d'un certain nombre d'outils pour faire en sorte de suivre ces mouvements, de
faire en sorte que ce ne soit pas simplement qu'une question policière. Un jeune, M. le Président, ou
une jeune qui adhère momentanément aux idées véhiculées par ces groupes,
bien, peut-être que ce jeune, M. le
Président, a davantage besoin de soutien, d'écoute que de l'intervention de la
police. Or, ce qu'on nous a offert,
jusqu'à présent, de la part du gouvernement, c'était la ligne 1 800 je ne
sais trop pour communiquer avec la
police, les forces policières. Ce dont on a besoin, M. le Président, ce n'est
pas de répression, c'est d'une meilleure compréhension du phénomène. Or, dans la foulée de cette amorce, je
dirais, plutôt mal barrée, le gouvernement nous est arrivé avec son projet de loi, un projet de loi
portant sur les discours haineux, non pas sur le phénomène de radicalisation,
non pas sur le phénomène d'intégrisme
religieux, non pas sur le phénomène du terrorisme, qui vient maintenant
recruter jusque chez nos jeunes
hommes et femmes dans nos collèges, mais sur le discours haineux. Alors, dans
un premier temps, il faut se dire : Bon, bien, O.K., c'est quoi, le
lien?
• (12 heures) •
Et
là on se retrouve avec un projet de loi qui, à l'instar de la tendance que
semble avoir adoptée le gouvernement dans un certain nombre d'autres
législations, prenant exemple du gouvernement conservateur, du non pas regretté
gouvernement conservateur à Ottawa, où on a un projet de loi qui inclut
toutes sortes de trucs... Donc, encore
une fois, reprenant cet exemple, ce mauvais exemple, le gouvernement nous arrive avec un projet de
loi qui se compose de deux
grandes sections, ce qui nous a d'ailleurs amenés à demander la scission du projet
de loi, scission qui nous a été accordée par la présidence, ou, du moins, la
présidence a jugé qu'il y avait matière à scission dans ce projet de loi, puisqu'il y avait effectivement deux parties qui
pouvaient très bien exister par elles-mêmes, l'une
indépendamment de l'autre.
Mais le gouvernement
a choisi, tel qu'il semble en avoir pris l'habitude, à l'image du défunt gouvernement
conservateur, de faire une espèce de
melting-pot, là, d'amalgamer toutes sortes de trucs qui ne vont pas nécessairement ensemble. Et là on se retrouve dans une situation, M. le Président, où la première partie du projet
de loi, bien, si on parle du principe, puisque c'est de ça dont il est question
aujourd'hui, M. le
Président, si on parle du principe,
même si on n'a pas la moindre idée
si, en bout de piste, le projet de
loi va ressembler à ce qu'il
ressemble actuellement... Donc, je reviens à mon intervention, au début de mon intervention, M. le Président, où je disais : Bien, on se livre actuellement à un exercice
un peu surréaliste dans la mesure où on doit se prononcer sur le principe d'un projet de loi dont on sait pertinemment, la ministre elle-même l'ayant dit...
Et
d'ailleurs j'ose espérer, M. le Président, vous me
permettrez d'exprimer un souhait à ce
moment-ci de mon intervention,
j'ose espérer que la ministre écoute très attentivement les interventions des collègues
en cette Chambre, puisque, si, d'aventure,
comme elle l'a indiqué, elle compte modifier substantiellement le projet de loi... J'espère qu'en plus de
nous livrer à un exercice un peu surréaliste nous ne nous livrons pas actuellement à un exercice totalement inutile. Donc,
j'ose espérer, M. le Président, que la ministre est très attentive à ce qui se dit présentement au salon bleu de la part des collègues qui s'expriment sur le projet
de loi.
Mais
je reviens sur la première partie, M.
le Président, du projet de loi, la première partie du projet
de loi qui vient octroyer, accorder
un certain nombre de pouvoirs à la Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse et surtout au tribunal
des droits de la personne et des droits de la jeunesse, des pouvoirs qui nous
font sourciller. Alors, je vous le
dis tout de suite, M. le Président, puis encore une fois je n'ai aucune idée si
la mouture finale du projet de loi ressemblera
à ce que nous avons sous les yeux, mais, si tel est le cas, je vous dis
d'emblée que la première partie du projet de loi nous apparaît
totalement inacceptable.
Alors,
pourquoi la première partie du projet de loi nous apparaît totalement
inacceptable? Bien, pour la simple et unique
raison, M. le Président, qu'on veut octroyer à un tribunal administratif des
pouvoirs dont disposent déjà les tribunaux en vertu du Code criminel, c'est-à-dire... Bien,
je sais... Je peux vous en parler abondamment, M. le Président, puisque je siégeais à la Chambre des communes du Canada
lorsqu'on a modifié le Code criminel de telle sorte de rendre les peines
pour des crimes commis pour des motifs
haineux plus lourdes et, de la même façon, d'introduire des dispositions visant
à prohiber les discours haineux.
Alors,
M. le Président, puisque les tribunaux sont déjà habilités à se prononcer, en
vertu du Code criminel, sur les
discours haineux, que viendra faire ce nouveau tribunal ou, du moins, ce
tribunal qui se voit tout à coup octroyer de nouveaux pouvoirs, des pouvoirs, pour ainsi dire, M. le Président...
bien, on va dire les choses telles qu'elles sont, des pouvoirs de censure, hein? C'est le tribunal de la
bienséance du discours, le tribunal, pour ainsi dire, de l'expression, un
tribunal de la libre expression. Et là on
peut se retrouver dans la situation complètement kafkaïenne, M. le Président,
où, voulant lutter contre le
phénomène de l'intégrisme, voulant lutter contre le phénomène de la
radicalisation, celles et ceux qui
seront visés par les tribunaux ne seront pas les intégristes, ne seront pas les
radicaux, ne seront pas les terroristes, mais ceux qui les dénoncent. Alors, on pourrait se retrouver dans une situation, M. le Président, où les intégristes, les radicaux, les terroristes pourront invoquer les dispositions de la loi de la ministre
pour dire : Hé, hé, hé! On vient de s'exprimer contre nous. C'est du discours haineux, ça, monsieur. Il
faudra donc qu'on statue puis qu'on pénalise celles et ceux qui auront
osé prononcer des paroles dites haineuses.
M. le Président, ce projet de loi, dans ses dispositions actuelles... Puis
encore une fois je vous réitère mon propos selon lequel on se livre peut-être
actuellement à un exercice totalement surréaliste, parce qu'on n'a pas la moindre idée de ce
que sera la mouture finale de ce projet
de loi, mais, si tant est que ces dispositions-là devaient demeurer, on va se retrouver avec des dispositions qui ne vont pas lutter contre la montée de la
radicalisation et de l'intégrisme religieux, mais qui, au contraire, risquent de s'attaquer à ceux qui dénoncent
l'intégrisme religieux, à ceux et celles qui dénoncent la radicalisation. Et là qui, qui, M. le Président, va se retrouver sous le coup des dispositions de cette loi? Les
journalistes? Les parlementaires, lorsqu'on prononcera des paroles à
l'extérieur de cette Chambre pour dénoncer la radicalisation, dénoncer l'intégrisme religieux? Les citoyennes
et les citoyens qui seront témoins et qu'on accusera à tort
d'entretenir la haine, l'islamophobie, M. le Président? C'est extrêmement
préoccupant. C'est extrêmement préoccupant.
Et,
puisque le gouvernement a choisi d'amalgamer cette première partie à l'autre,
qui nous apparaît, puis je vais y
revenir dans quelques instants, qui nous apparaît, elle, amendable,
travaillable, modifiable, améliorable, bien, parce que le gouvernement a choisi d'amalgamer deux trucs
qui ne vont pas ensemble, bien, on est obligés de dire non. Non, non, non, ça ne marche pas. Ça ne peut pas fonctionner,
parce que nous sommes en profond désaccord avec la première partie de ce
projet de loi.
Et encore une
fois — je
sais que je radote, mais pour moi c'est important, puis, comme le dirait le
leader parlementaire du gouvernement, ça
peut avoir une valeur pédagogique de répéter les choses, M. le Président, dans
l'espoir, bien sûr, que la ministre
porte attention à ce qui se dit actuellement — M. le Président, je ne sais pas quelle sera
la mouture finale de ce projet de loi
là. Je ne sais donc pas si cette première partie demeurera après que je me
serai prononcé contre ce projet de
loi là en raison de cette première partie. Vous voyez le caractère un peu
surréaliste de la situation dans laquelle on se retrouve, M. le Président. Est-ce que c'était la bonne façon de fonctionner?
Est-ce qu'on n'aurait pas dû au contraire piler un petit peu sur son orgueil, retirer le projet de loi, le
retravailler, puis ensuite nous revenir avec quelque chose qui aurait
fait en sorte qu'on n'aurait pas fait travailler le Parlement strictement
inutilement, M. le Président?
Alors, puisque j'y ai
fait référence il y a quelques instants, j'arrive à la deuxième partie, M. le
Président, deuxième partie qui nous apparaît
pouvoir constituer des éléments, comme je le disais, sur lesquels on peut
s'entendre. Il y a des éléments sur
lesquels on peut s'entendre dans la deuxième partie. On a bien sûr des
questions. Par exemple, on parle de
pouvoirs dont disposerait, par exemple, en vertu de la Loi sur l'instruction
publique et des modifications qu'on y
apporterait, qui accorderaient au ministre de l'Éducation un certain nombre de
pouvoirs d'enquête... Là, on a besoin de
savoir, M. le Président, de quels autres pouvoirs disposera le ministre de
l'Éducation. Parce qu'à notre connaissance le ministre de l'Éducation, par exemple dans le cas de la fouille à nu,
avait exercé un certain pouvoir d'enquête. Alors, où est-ce qu'on va
aller, là? Jusqu'où on va aller? Puis qu'est-ce qu'on a en tête précisément, M.
le Président?
• (12 h 10) •
Alors,
comme vous pouvez le voir, il y a des trucs qui peuvent être précisés. Il y a
des trucs sur lesquels on peut s'entendre
au niveau de la deuxième partie. Alors, ça, on verra ça d'une part une fois
qu'on aura une idée plus précise de
ce que le gouvernement voudra véritablement faire. Puis ça, bien, ça va se voir
au niveau des amendements. Et, si on se fie à l'expérience du projet de loi n° 20, là, qu'on a adopté il y
a de cela quelques heures seulement, bien, on a vu que le projet de loi
n° 20 avait été un peu mal ficelé au départ, un peu, je dirais, écrit à la
sauvette, à telle enseigne que le gouvernement a été obligé de présenter une
foule d'amendements et même d'amender ses propres amendements à quelques reprises. Alors, peut-être qu'on aurait
avantage à mieux peaufiner le travail en amont, ce qui éviterait ce genre
de situation là en aval.
Alors
là, encore une fois, on nous annonce des modifications en profondeur du projet
de loi dont on ne connaît pas la nature. Donc, on verra éventuellement
ce que le gouvernement nous amènera comme nouvelle mouture, puis, à partir de là, on pourra effectivement s'entendre
sur des éléments de cette deuxième partie, pour peu bien sûr qu'ils restent là,
parce que je n'ai aucune idée encore une
fois de ce qu'aura l'air cette deuxième partie une fois que la ministre en sera
arrivée avec ses modifications.
Alors,
tout ça pour vous dire, M. le Président, qu'en raison du fait que le
gouvernement a décidé d'amalgamer cette
première partie totalement inacceptable à nos yeux et cette deuxième partie sur
laquelle on peut travailler, que l'on peut améliorer... bien, je suis
obligé de vous dire que nous voterons contre le principe de ce projet de loi
là, sachant pertinemment, de l'aveu même de
la ministre, qu'il doit être remodelé en profondeur. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député de Verchères, de votre
intervention. Et, pour la poursuite
du débat, toujours sur le principe de ce projet de loi n° 59, je cède la
parole maintenant à M. le député de Borduas pour son intervention. M. le
député de Borduas, à vous la parole.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir, M. le
Président, sur le projet de loi
n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant
diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.
Ce
qu'on a pu constater, M. le Président, en commission parlementaire, et je pense
que ça a été exposé par ma collègue de
Montarville, qui est la porteuse du dossier pour notre formation politique,
c'est que les consultations particulières,
avec l'écoute de nombreux groupes, ont démontré qu'il y avait des lacunes dans
ce projet de loi là, M. le Président.
Et d'ailleurs je pense que, même du côté de la partie ministérielle, on a
constaté qu'il y avait des lacunes, parce que le premier ministre lui-même et député de Roberval a fait des
déclarations publiques relativement à ce projet de loi, à l'effet qu'il
y aurait certaines modifications, M. le Président.
Donc,
ça fait un certain temps que les consultations particulières sont terminées, M.
le Président, et que nous avons... En
fait, M. le Président, vous me permettrez de saluer le président qui siège sur
cette... et le député de Côte-du-Sud, donc ça fait grand plaisir de parler sous sa présidence actuelle. Et vous
savez, M. le Président, qu'il y a eu des consultations dans le cadre de ce projet de loi là.
Malheureusement, il n'y a pas encore eu d'amendements qui ont été déposés. Et
je pense que le collègue de Verchères, à juste titre, disait : On doit, en
fait, voter sur l'adoption de principe sans savoir ce que sera le contenu du projet de loi. Je vous
dirais, M. le Président, moi, je n'aime pas ça travailler de cette façon-là. Je
n'aime pas donner le bon Dieu sans
confession, M. le Président. J'aime, M. le Président, savoir où... en fait,
j'adhère à quoi, à quoi je signe.
Vous
savez, on enseigne aux gens de prendre leurs responsabilités et de dire :
Les choix que vous faites, vous allez en
être responsables. On parle d'imputabilité. Et là ce qu'on demande aux
parlementaires, M. le Président, c'est de donner un chèque en blanc, un chèque en blanc à la ministre de la Justice par
rapport aux futurs amendements qu'elle va déposer pour modifier son
projet de loi à la demande du premier ministre. Donc, l'intention qui a été
exprimée par le premier ministre
publiquement, qu'il allait y avoir des modifications dans le cadre du projet de
loi, je pense que c'est un élément à considérer
lors de l'adoption de principe. Parce que, vous vous souvenez, M. le Président,
depuis avril 2014, le premier ministre
a indiqué que les membres de son gouvernement doivent être en accord avec ses
propositions... ou de ne pas faire quelque
chose que lui ne ferait pas. Donc, prenons cet exemple-là a contrario, M. le
Président : si le premier ministre informe le public qu'il y aura des modifications dans le cadre du projet de loi
n° 59, nécessairement l'ensemble des parlementaires s'attendent à
ce qu'il y ait des modifications et des amendements.
On
décide d'appeler le projet de loi en Chambre à une étape subséquente, pour
l'adoption de principe, la deuxième étape
suite à la présentation du projet de loi, et on dit : Votons sur un projet
de loi qu'on sait qu'il va être modifié, mais on ne sait pas comment il va être modifié, M. le Président. Vous
conviendrez que, si vous achetez quelque chose, vous voulez en connaître la nature. Donc, pour susciter
l'adhésion des parlementaires à un projet de loi ou pour même se positionner, pour avoir un consentement libre et éclairé, M. le Président, il faut
savoir qu'est-ce que c'est, ce sur quoi on sollicite notre consentement
ou on sollicite notre approbation.
Et,
M. le Président, je vous le répète, cette façon de travailler
m'apparaît un peu inopportune, parce
que comment voulez-vous réussir à bonifier le projet de loi, et même sur les amendements, si, à l'adoption de principe, on n'a pas toutes les informations requises pour bien se prononcer et se faire une
tête, M. le Président. D'autant plus que les amendements
qui seront proposés... Bien, il y aura
l'étude détaillée, mais on est à une étape importante
sur la question du principe du projet de loi: Est-ce que vous
êtes en faveur ou non du principe? Et, à ce stade-ci, M. le Président, en raison des lacunes, en raison aussi de l'absence de transparence,
M. le Président, bien, on ne peut pas voter pour ce projet de loi.
Et la question de la transparence,
M. le Président, c'est important. On nous demande de voter sur un critère d'incertitude... Et j'ai entendu à de multiples
reprises les collègues parlementaires de la partie ministérielle dire : Nous
sommes le gouvernement le plus transparent de l'histoire. Bien, la transparence, M. le
Président, ça commence également dans
la transmission des amendements et d'informer cette Assemblée de qu'est-ce que
sera la modification législative proposée, parce qu'on sait
bien, M. le Président, qu'il va y en avoir, des modifications, et concrètement,
à ce jour, on ne sait pas quelles sont ces modifications.
Je
voudrais vous rappeler, M. le Président, qu'au mois de février dernier ma
collègue de Montarville a fait des propositions
concrètes pour lutter efficacement contre l'intégrisme religieux et la
radicalisation au Québec. On ne peut pas
nier que c'est une problématique du XXIe siècle à laquelle le Québec fait face,
M. le Président. On a eu des exemples au
cours des dernières années, des exemples malheureux, d'individus, sur le sol
québécois et sur le sol canadien, qui se sont radicalisés. Et je pense que c'est important d'adopter un cadre
législatif qui va venir éviter et éliminer toute cette possibilité, mais
ça passe notamment par l'éducation, M. le Président, et notamment par la
prévention.
Ce
qui est proposé dans le projet de loi n° 59 ne répond pas adéquatement à
la question de savoir comment fait-on pour
lutter efficacement contre la radicalisation et l'intégrisme religieux. Parce
que vous savez que c'est préoccupant dans notre société de droit, M. le Président, c'est important qu'on puisse
préserver la liberté d'expression mais que le tout soit également encadré, M. le Président, de façon à
lutter contre ces deux objectifs. C'est important, M. le Président, d'avoir
des balises pour assurer la sécurité morale
et physique des Québécois et, entre autres, M. le Président, d'assurer le
respect des valeurs inscrites dans la Charte des droits et libertés de
la personne.
M.
le Président, vous savez que le Québec, et le Canada, est un pays de droit,
mais, pour ce faire, c'est important que
les valeurs inscrites dans nos lois soient respectées et qu'on ait les outils
pour le faire. C'est important aussi, M. le Président, qu'on ne favorise pas... et puis qu'on réponde aux problèmes
à la source des agents de radicalisation, M. le Président, ces agents de radicalisation qui pourraient avoir
pour objectif d'inciter des individus à lutter contre notre démocratie et nos
règles de droit, M. le Président.
Par contre,
ce qu'on constate aujourd'hui, M. le Président, parce qu'on est à l'étape de
l'adoption de principe... On est à
l'étape de l'adoption de principe puis on n'a pas eu de modification
législative, tel qu'annoncé par le premier ministre. La ministre de la Justice, qui est porteuse du dossier, nous
dit : Votons sur le principe, sans avoir tous les outils pour voter efficacement sur ce projet de loi, sans
avoir l'information requise. On nous dit : Votez avec l'incertitude. Ce
n'est pas une façon de travailler acceptable, M. le Président.
• (12 h 20) •
Il y a un
autre élément important, M. le Président, en commission parlementaire, lors des
auditions particulières, qui nous a
frappés : le projet gouvernemental, M. le Président, ce projet de loi n'a
pas été capable de recueillir l'accessibilité sociale nécessaire pour en assurer
la légitimité. C'est un projet de loi qui a été énormément critiqué et qui
requiert des modifications. Donc, avant de ramener cette pièce législative sur le plancher de la Chambre, M. le
Président, c'est important qu'il y
ait des modifications qui soient faites. Sans ces modifications-là, ça sera
impossible pour ma formation politique d'appuyer le projet de loi, M. le
Président.
Vous ne pouvez pas exiger, M. le Président, des
parlementaires de se prononcer sur un projet de loi qui est incomplet et où l'intention du législateur ou
l'intention du gouvernement, c'est de le modifier, ce projet de loi là.
Pourquoi la ministre ne le fait-elle
pas maintenant? Pourquoi la ministre décide, par le biais du leader
parlementaire, d'amener le projet de loi sur le parquet sans faire les
modifications qui s'imposent?
Et, on l'a
déjà vu aussi, M. le Président, dans ce gouvernement-là, ce n'est pas la
première fois qu'on change d'idée en cours de route. Mais c'est
important que l'ensemble des parlementaires, lorsqu'on étudie la loi, sachent
quelle est l'orientation gouvernementale et
quelle est l'orientation du législateur. On l'a vu notamment avec la ministre
de la Famille qui a procédé à de
nouvelles consultations suite à des modifications à son projet de loi. Et je
dois dire, M. le Président, que c'était
la chose à faire, de consulter davantage. Parce que, lorsqu'on réalise que le
projet de loi, ce que l'on propose souffre de certaines lacunes, bien, c'est normal que la proposition suivante que
l'on fait, bien, elle retourne en consultation. Et c'est le principe
même de la démocratie.
J'entendais
le député de Louis-Hébert aujourd'hui, à la période des questions, suite à une
question du député de Saint-Jean,
dire : Écoutez, nous, on est à l'écoute des gens, on veut travailler en
collaboration. Bien, ça serait un bel exemple, présentement, de montrer
aux collègues de la Chambre qu'on dépose les amendements ou on dépose la
modification législative et que, par la suite, on fait l'adoption de principe,
M. le Président.
Ceci étant
dit, le projet de loi en consultation, au lieu d'apaiser les craintes, l'effet
qu'il a eu, ça a été d'en créer davantage.
Je vous dirais que, pour un projet de loi qui vise à lutter contre les discours
haineux, les discours incitant à la violence
et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection
des personnes, on pourrait dire qu'on a
frappé à côté de la plaque, comme on dit au baseball. On offre la possibilité,
M. le Président, à la ministre, d'apporter ses amendements avant l'adoption de principe, chose qui devrait être faite.
Ce que l'on constate, c'est que ce n'est pas le cas.
Un autre
élément, M. le Président, c'est que le projet de loi, ça constitue une cible
ratée. Pourquoi est-ce que la ministre
a déposé ce projet de loi là? C'est pour répondre à une problématique bien
réelle au Québec, tel que je vous l'ai exposé
précédemment. Mais concrètement, et on l'a vu en commission parlementaire, M.
le Président, avec la consultation de
différents groupes et d'éminents experts, c'est que le projet de loi ne répond
pas adéquatement. On ne met pas le doigt sur le bobo, on n'a pas la
bonne formulation législative pour venir corriger la situation et surtout pour
prévenir, M. le Président, lutter
efficacement contre l'intégrisme religieux et prévenir la radicalisation. Une
autre des problématiques dans le
projet de loi, M. le Président, c'est que cette problématique-là, et cette
menace-là, n'est pas clairement identifiée dans le projet de loi, et les
concepts clés relativement à ces deux problématiques ne sont pas clairement
identifiés.
Ce que l'on
doit souhaiter, M. le Président, c'est de lutter notamment contre
l'endoctrinement idéologique, qui mène
à la discrimination et au radicalisme violent. Vous savez, on s'est dotés d'une
charte en 1975, la Charte des droits et libertés de la personne, qui
garantit aux Québécois l'absence de discrimination en fonction de plusieurs
motifs, M. le Président. C'est important de
s'en souvenir et c'est important de travailler sur cette base-là pour assurer
que l'égalité entre les hommes et les
femmes, c'est une des valeurs qui constituent un de socles de notre démocratie,
M. le Président, puis une des valeurs
fondamentales de la société québécoise. Et je pense que, dans l'analyse de
notre législation, on doit le regarder
à travers ce prisme-là, à travers le prisme de l'égalité entre les hommes et
les femmes. Avoir une des sociétés les
plus égalitaires au monde, c'est un objectif que le Québec doit avoir et c'est un objectif
que l'on doit travailler, ensemble,
à atteindre.
Donc, sur la question
du discours haineux, M. le Président, il existe toujours un flou, et on l'a vu
en commission parlementaire,
ça ne fait pas l'unanimité. La consultation nous permet, M. le Président, de
dire : Il y a des correctifs à apporter.
Et là on est rendus à l'étape des correctifs à apporter avant de le ramener à
la Chambre. Ce n'est pas fait. Et vous me permettrez, M. le Président,
de rappeler que les consultations, dans notre système, sont fondamentales.
Parfois, la partie ministérielle décide de ne pas tenir de consultations, souvent à tort, M. le Président, je vous
dirais : Tout le temps à tort, parce
que, lorsqu'on consulte, ça nous
permet d'avoir une réflexion supplémentaire et de faire cheminer notre pensée. Et, vous savez, la vérité n'est pas détenue uniquement
par la partie gouvernementale, et je
pense que les oppositions peuvent
apporter des points intéressants dans l'analyse et l'étude des projets de loi,
on en a de multiples exemples. D'ailleurs, souvent,
les projets de loi sont amendés, M. le Président, suite à ce
que les groupes que nous avons entendus... suite à ce que les groupes
que nous avons entendus sont venus dire, ce qu'ils nous ont enseigné, ce qu'ils
nous ont informés.
Donc,
sur la question de discours haineux, il y a
des problématiques qui ont été soulevées par de nombreux groupes qui nous ont éclairés lors des consultations, notamment quant aux risques de plaintes frivoles, de
censure excessive et d'interprétations subjectives. C'est ce qu'entre
autres la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse
est venue dire. Ça risquerait de porter atteinte à la liberté d'expression.
Donc, c'est fondamental, M. le
Président. On doit prendre en compte l'avis des experts, mais, encore aujourd'hui,
malgré les commentaires qui ont été faits en commission parlementaire, on se
retrouve à voter sur le même projet de loi, qui n'a pas été modifié, malgré
l'avis et l'intention très clairs du premier ministre, qui a indiqué
publiquement que le projet de loi devrait être revu.
Et c'est un
peu choquant, M. le Président, pour notre Parlement, d'annoncer des
modifications législatives d'un
projet de loi qui est à l'étude et de tenir
les collègues parlementaires dans l'inconnu. Quelle est la difficulté, M. le
Président, de proposer un texte
amendé? Quelle est la difficulté de communiquer aux collègues les amendements?
Parce que de toute façon, M. le
Président, si la partie ministérielle souhaite amender, elle le fera lors de
l'étude article par article ou à une étape
ultérieure du processus. Mais cependant, M. le Président, pour faire
sérieusement notre travail, il faut savoir sur quoi on vote. Et là on
constate qu'on nous demande, encore une fois, de fermer les yeux et de ne pas
voter en toute connaissance de cause.
Le projet de
loi, M. le Président, également fait fi de certaines propositions, notamment au
niveau des exemptions fiscales de certaines
corporations religieuses qui diffusent des discours ou permettent des actes,
qui continueront d'être subventionnées
par les contribuables du Québec par l'entremise de généreuses exemptions
fiscales, des discours haineux qui incitent à la radicalisation ou qui
incitent à la violence, M. le Président.
Donc, vous
savez que nous avons proposé une façon de couper ces subventions à ce genre
d'organisation. Et je ne pense pas
qu'on puisse trouver quelconque individu sur le territoire québécois pour nous dire
et... justifier le fait que des agents
de radicalisation, des agents provocateurs, des agents qui incitent à la
violence, ils devraient être subventionnés par le biais de subventions municipales ou d'exemptions fiscales, à même des
deniers publics, dans le cadre de leur mission. C'est carrément
inacceptable.
Même le maire
de Montréal, M. le Président, qui est venu en commission parlementaire, a invité le gouvernement à lui définir les
termes utilisés dans son texte de loi et à doter les municipalités de véritables outils afin de lutter contre la radicalisation,
une demande de la plus grande municipalité du Québec, M. le Président.
Qu'est-ce qu'on a? Sa demande semble avoir été laissée lettre morte, parce qu'il n'y a
pas eu de modification, malgré
ce qui est annoncé par le premier
ministre. Donc, à l'étape de l'adoption de principe, M. le Président, c'est
important d'avoir les outils en main pour pouvoir connaître ce sur quoi
les parlementaires sont appelés à voter.
Mais, comme
je vous le disais, il n'est pas question de faire de chèque en blanc à la
ministre, surtout qu'elle doit modifier son projet de loi pour répondre
véritablement à la problématique en vigueur au Québec, soit de lutter contre
l'intégrisme religieux, la radicalisation et les discours haineux. Je vous
remercie, M. le Président.
• (12 h 30) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Je vous remercie, M. le député de Borduas, de votre intervention sur le
principe du projet de loi n° 59.
Et, pour la poursuite du débat, je cède maintenant la parole à M. le député de
Rousseau. M. le député de Rousseau, à vous la parole.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau :
Merci, M. le Président. Alors, écoutez, il me fait plaisir d'intervenir, même
si les propos que je vais tenir ne
seront pas favorables au principe du projet de loi. Il me fait plaisir
d'intervenir sur un sujet qui est important, sujet qui est même
fondamental et sujet pour lequel le gouvernement a magistralement raté son
coup, M. le Président.
Permettez-moi
d'intervenir tout d'abord sur la forme. Et je vais reprendre une partie de ce
que disait le député de Borduas lorsqu'il rappelait à cette Chambre que
la ministre n'a pas, à ce jour, présenté les amendements qu'elle apportera à son projet de loi, projet de loi qui,
à l'occasion des consultations, a été varlopé, M. le Président, par toute une
série d'intervenants et qui a été aussi varlopé par à peu près l'ensemble de
tous les chroniqueurs du Québec. Alors, unanimité
contre lui, le projet de loi. Et, malgré tout, là, on demande aux parlementaires
de se prononcer sur un projet de loi
avant même de voir la teneur des amendements, avant même de savoir de quelle
manière on réparera ce qui, à ce stade-ci,
en tout cas de notre côté, apparaît comme quelque chose qui est absolument
irréparable. Alors, très difficile pour nous, dans ce contexte-là, de se
prononcer pour le principe du projet de loi.
Je vais
aussi, sur la forme, vous dire que je déplore, même si c'est un débat que nous
avons fait la semaine dernière, je déplore qu'on en soit à voter le principe
d'un projet de loi qui en contient deux. On avait présenté une motion de
scission. Et je ne referai pas
l'ensemble des arguments devant vous, M. le Président. On avait présenté, donc,
une motion de scission qui aurait
permis de trier, de sortir de ce mauvais projet de loi certains éléments qui,
eux, étaient réparables, qui auraient pu
être corrigés, de façon telle qu'ils soient acceptables pour l'ensemble des
parlementaires. Alors, vous aurez compris que je parle ici de la deuxième partie du projet de loi, la partie qui
porte sur la sécurité des personnes. Sur celle-là, même si ce n'était pas parfait, même si ce n'est pas à
notre goût complètement, nous, on croit qu'avec la bonne collaboration
qui peut exister en commission parlementaire il y aurait eu moyen d'arriver à
quelque chose, d'arriver à un résultat acceptable pour tous les parlementaires.
Par contre,
sur la première partie, je le réitère et je le répète, je ne vois vraiment pas
comment on pourrait arriver à trouver
un terrain d'entente. Les bases même de ce qui est au coeur de ce projet de
loi, ces bases-là sont complètement problématiques.
Donc, je vais
me permettre de parler un peu du fond pour le temps qu'il me reste. Je vais
commencer par dire que, donc... Puis
je vais parler essentiellement, M. le Président, pour que vous me suiviez bien,
de la première partie du projet de loi, là, puisque c'est celle-là qui est
véritablement problématique puis qui contient des éléments qui sont
inacceptables. La première des choses
qu'il faut dire, puis je pense que ça, c'est élémentaire, là, et puis j'invite
les gens de l'autre côté à se
réveiller là-dessus, c'est que leur projet de loi ne répond pas aux attentes
des Québécois, d'aucune manière. Et, en fait, on se demande comment a pu germer dans la tête de certaines personnes de
l'autre côté l'idée qu'un tel projet de loi puisse répondre aux attentes
des Québécois. Il n'y a rien pour, par exemple, s'attaquer aux questions qui
ont préoccupé les Québécois dans la dernière
année, dans les dernières deux années. Rappelez-vous,
en fait, le projet de loi, c'était la réponse du gouvernement au phénomène de radicalisation qu'on a pu observer, malheureusement, dans notre société, au phénomène
du recrutement des jeunes, même dans des cégeps, dans nos cégeps, nos jeunes
qui partaient pour aller combattre.
Alors,
ça, ça a été la réponse du gouvernement. Alors, évidemment, quiconque sait lire est capable de constater
qu'en fait de réponse inadéquate ce n'est
pas possible de faire pire. Ils ont vraiment une réponse qui ne répond d'aucune manière au problème auquel ils devaient
s'attaquer. Et c'est tout l'opposé, en fait, d'une véritable réponse, par exemple, celle qui avait été proposée
par la députée de Taschereau... c'est-à-dire, elle a déposé ici, en cette Chambre, un projet de loi, projet de loi qui créerait l'observateur de l'intégrisme, qui,
plutôt que d'adopter une approche répressive, propose une approche préventive, une approche par laquelle on
s'informe, on comprend, on documente, on s'instruit, puis, une fois
instruit, on agit.
Mais,
M. le Président, moi, je vous annonce, là, que, depuis un an et
demi qu'ils sont là, on n'a fait aucun progrès sur ces questions-là, là. On n'en sait pas plus. Qui ici sait ce
qui se passe dans les cégeps puis dans les universités du Québec en
termes de radicalisation puis en termes de recrutement? Bien sûr, il y a une réponse policière, puis cette réponse-là
doit exister, mais, quant à ce qui se passe,
là, quant à ce que nos jeunes pensent, quant à ce que sont leurs valeurs, qu'est-ce qui pousse des jeunes à poser les
gestes comme ceux qui ont été posés, on n'en sait pas plus aujourd'hui. Pour
quelle raison? Parce que ce gouvernement en
face de nous n'est pas capable, pas capable de comprendre qu'il faut en savoir
plus. On ne sait pas ce qui se passe
et c'est... La base même, là, de l'intervention intelligente, c'est de
comprendre le problème, c'est de
poser le bon diagnostic, et l'observateur de l'intégrisme permettrait de faire
exactement ça, et j'espère que, de l'autre côté, on se réveillera un
jour et puis qu'on appellera le projet de loi sur l'observateur de
l'intégrisme.
Il
y a, dans la mouture de ce projet de loi, dans la rédaction de ce projet de
loi, des problèmes, là, très, très importants. J'en ai parlé un peu
l'autre jour, M. le Président. Je regarde le temps.
Il y a la question de
la définition de ce qu'est un discours haineux. Ma collègue de Taschereau me
disait tout à l'heure que la ministre a
annoncé qu'elle présentera des amendements pour définir ce qu'est un discours
haineux. Je dois vous avouer que j'ai
très hâte de voir ça, mais très, très hâte de voir ça, M. le Président. Disons
que j'ai un doute, disons que j'ai un
doute très grand qu'on arrivera à définir ça de façon intelligente. J'ai un
très grand doute. Puis vous comprendrez
aussi... Puis là je reviens sur la question du dépôt des amendements, vous
comprendrez qu'avant que je me prononce sur cette question-là je veux
voir les amendements. Puis, si j'avais eu droit...
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Qu'y a-t-il?
M.
Sklavounos :
...mais nous sommes en train de suivre...
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Bien, c'est ce que j'allais dire...
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Non, mais on ne peut pas interrompre lorsqu'il
n'y a pas de motif, et là je ne sens pas du tout que vous avez un motif
d'interrompre celui qui avait la parole de bon droit, sans commettre aucune
infraction au règlement. Donc, indiquez-moi sur quoi vous vous appuyez pour
couper son élan.
M.
Sklavounos :
...parler, je vais vous l'indiquer. On est en train d'accuser, d'imputer...
Une voix :
...
M.
Sklavounos :
On ne me permet pas de parler! On ne me permet pas de parler!
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Non, non, mais...
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Je ne ferai pas l'historique... Je pense être en
mesure de présider, là. Je ne ferai pas l'historique de l'un et de
l'autre, mais une chose qui est sûre, à ce moment-ci...
Une voix : ...
Le Vice-Président (M.
Gendron) : Alors, indiquez-moi quel article vous invoquez.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Oui.
M.
Sklavounos : ...de
m'exprimer?
Le Vice-Président (M. Gendron) : ...
M.
Sklavounos :
L'explication : on entend... et ce n'est pas la première fois, on entend
ici, en cette Chambre... on impute des motifs à la ministre d'annoncer
la venue d'amendements...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Oui. Vous avez raison, je regrette, et je veux juste expliquer pourquoi je vous
coupe la parole. C'est que la situation que
vous évoquez l'a été mille fois et ça n'a jamais été perçu comme une question
au règlement. Donc, je ne peux pas vous laisser continuer, ce n'est pas une
question de règlement. Alors, quand il n'y a pas de question de règlement, il faut que le discours de celui qui avait
la parole se poursuive. Je n'ai pas le choix. Alors, veuillez
poursuivre.
Une voix : ...
• (12 h 40) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
O.K. Là, je vais vous entendre, mais
soyez plus clair sur l'article que vous invoquez et où il y a des motifs
indignes ou incorrects que celui qui avait la parole vous impute.
M.
Sklavounos : Bien, laissez-moi compléter, par la suite, vous
rendrez votre décision. Je suis en train d'invoquer l'article
35.6. La raison pour laquelle j'invoque cet article, c'est parce qu'on reproche à la ministre de ne pas être transparente. Écoutez, permettez-moi... de ne pas
être transparente. Je vous dis qu'on suit la procédure normale, et que
donc on impute des motifs indignes à la ministre, simplement.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Bon, juste une minute. Là, on vous a laissé exprimer... Juste une seconde.
Que l'opposition dise, dans son discours, ce
qui a été dit n'égale pas, bien, ce qu'on appelle imposer des motifs, surtout
pas indignes. Parce qu'il faut que vous
continuez votre phrase. Dans le règlement que vous avez invoqué, c'est très
clair que, règle générale, il s'agit
de motifs impertinents, indignes, qui ne contribuent pas à ce que le débat se
déroule correctement. Ce n'était pas le cas du tout, du tout, du tout.
Donc, moi, je suis obligé...
Parce que je l'ai entendu, je peux bien vous
entendre, mais pour confirmer ce que je viens de dire. Allez.
Mme
Maltais : Vous
voulez m'entendre?
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Oui.
Mme
Maltais :
Article 36, interruption d'un député : «Aucun député ne peut interrompre
celui qui a la parole, sauf pour faire
un rappel au règlement...» Et, jusqu'ici, tout ce qu'il fait systématiquement,
le leader adjoint, c'est d'interrompre
les députés. Je vous demande de faire respecter le règlement et respecter mon
collègue qui essaie de prendre la parole.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Juste une seconde. Non, non, un instant, là.
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Un instant, là. Vous avez eu la parole, vous m'avez demandé de vous la laisser,
je l'ai laissée, ce n'était pas une question
de règlement. Parce que je vous ai laissé la parole, il est arrivé exactement
ce qui arrive tout le temps, en cette
Chambre, quand ce n'est pas une question de règlement, on donne la parole à
l'autre leader pour que, lui aussi,
ait le droit de s'exprimer. Elle vient de le faire et elle témoigne de la
décision que j'ai rendue, que vous n'aviez pas de question de règlement
à soulever, surtout pas sur ce que vous avez invoqué.
En
conséquence, il faut que je redonne la parole à celui qui l'avait, et laissez
poursuivre le débat, s'il vous plaît. M. le député de Rousseau, à vous
la parole.
M. Marceau :
Oui, M. le Président. Et puis je dois dire que j'ai beaucoup de difficultés à
comprendre, là, ce qui était
problématique dans ce que j'ai dit, j'ai parlé d'une ministre... Écoutez, de
deux choses l'une, en fait, M. le Président, on va faire un pas en arrière : ou bien elle ne veut pas en
présenter, des amendements, auquel cas, selon moi, elle ferait vraiment fausse route, là, ou bien elle veut en
présenter. Puis, si elle veut en présenter, bien, je suis forcé de constater
que je ne les ai pas entre les mains,
M. le Président. Puis ce que je veux ajouter à ça, c'est que, connaissant, en
sachant, ayant pu lire ce qui est écrit dans le
projet de loi... puis, écoutez, à quel point on s'est trompés en écrivant ce projet
de loi, permettez-moi d'être inquiet puis de
vous dire qu'il y a une probabilité
très forte que les amendements qui seront rédigés seront de la même eau, c'est-à-dire qu'ils seront
aussi mauvais que le projet de loi lui-même. Écoutez, je peux avoir cette
inquiétude-là, je pense.
Alors, une fois que j'ai dit ça, M. le
Président, je vais simplement vous dire que, donc, les amendements qui pourraient porter sur la définition d'un discours
haineux, disons que je n'ai pas très, très confiance qu'ils vont me satisfaire.
Dans le projet de loi, il y a... enfin, il y a
plein d'autres choses à dire... on n'a toujours pas su les raisons pour lesquelles il était nécessaire de créer une
infraction pénale, alors qu'il existe déjà une infraction criminelle, hein? On
ne sait toujours pas pourquoi ça prendrait
tout d'un coup... pourquoi on devrait confier au Tribunal des droits de la
personne la possibilité d'interdire
ou de freiner des propos, alors que ça existe déjà à la Cour supérieure. La
Cour supérieure est déjà responsable
de ça, M. le Président. Est-ce qu'il y a eu une démonstration qu'il y a eu une
dérive récemment? Est-ce qu'on a observé plus de propos haineux? Encore
faudra-t-il les définir, ces propos haineux, M. le Président.
Et, dans le
projet de loi, je vais le rappeler, M. le Président, il y a cette question de
liste, la liste de la honte, la liste de
la haine, la liste que les citoyens seront appelés à haïr, la liste des gens
qu'on demanderait aux citoyens de haïr. Alors, M. le Président, ça incarne une approche répressive, c'est de dire que
celui qui aurait pu commettre une erreur va avoir son nom sur une liste pour toujours. Alors, M. le
Président, je ne peux pas vous dire à quel point je trouve ça désolant,
j'ai l'impression qu'on est en train de faire une dérive assez importante.
Mais, M. le
Président, là, là, on a devant nous un projet de loi qui porte sur la question
des droits et libertés de la personne,
sur des libertés fondamentales. Il me
semble, là, qu'un minimum... qu'un gouvernement ne peut pas aller de l'avant sur des questions
comme celle-là sans avoir un certain consensus au sein de notre société.
Et je me suis
permis de passer à travers la revue de presse. Et, écoutez,
c'est dévastateur, M. le Président. Quand je
vous disais que le gouvernement s'était fait varloper, je pense que je vais vous
en donner quelques exemples. Je vais commencer.
Puis écoutez, les textes, pour la plupart, ont été rédigés en
août, récemment, au mois d'août 2015, parce
que c'est à ce moment-là que s'était tenue la commission parlementaire. Simplement donc, mardi 18 août 2015 : Une
loi inutile et néfaste, selon
Me Julius Grey — qui est un éminent juriste, M. le
Président — qui
dit : «Si cette loi avait été adoptée dans des termes exacts en
1955, elle aurait été utilisée contre les Témoins de Jéhovah, contre les
communistes et les homosexuels...» Ça, c'est
Julius Grey qui nous dit ça. Puis il nous dit : Cette loi-là «n'est pas
nécessaire». Et il n'hésiterait pas à
défendre un citoyen qui pourrait se sentir lésé par cette loi si elle est
adoptée. Et j'invite la partie gouvernementale, les gens de la partie gouvernementale à aller lire le mémoire de Me
Julius Grey. Je ne suis pas sûr que ça va être une lecture plaisante
pour eux, mais ça pourrait être une lecture instructive.
M. le Président, les éditorialistes et
commentateurs de toutes les couleurs politiques, de toutes les couleurs politiques, et là j'ai eu l'embarras du choix, M.
le Président, en me préparant pour cette intervention, l'embarras du choix.
Tous... enfin, j'ai beau chercher, tenter de
trouver quelqu'un qui était favorable au projet gouvernemental, M. le Président,
je n'y suis pas parvenu. Je ne dis pas que
j'ai pas essayé, là, j'ai essayé et je n'y suis pas parvenu. Ils sont tous
contre.
Et je vais
vous en lire quelques-uns. Alors, au Devoir, éditorial du mercredi 19
août, le titre de l'éditorial : Discours haineux — La mauvaise loi, c'est Josée Boileau qui écrit. Je lis :
«Que de confusion autour du projet de loi n° 59 déposé par Québec pour, notamment, lutter "contre
les discours haineux et les discours incitant à la violence"...» Elle nous
dit que c'est un sujet éminemment
délicat puisque c'est la liberté d'expression qui est menacée. Et elle nous
dit, un peu plus loin : «Pour les groupes — de
juristes, de transgenres, d'aide aux hommes violents — qui
défilent présentement en commissions
parlementaires, cet arrière-fond rend tout le débat assez mêlant. De quoi
est-il question au juste? Eux voient bien
que la définition de discours haineux est si floue que la loi [...] deviendra
inapplicable ou qu'elle ouvre la porte aux abus.»
Plus loin, vers la fin, elle nous dit : «Il
nous semblait que l'attentat de Charlie Hebdo avait été l'occasion de dénoncer la censure au profit du débat, du
boycott, de la critique, de la dénonciation. Mais de faire taire, non.» Alors,
ça, c'est ce que nous dit Josée Boileau dans Le Devoir.
Dans LeJournal de Québec, Lise Ravary, 19 août : Alerte — encore — à la liberté d'expression, je vous
cite quelques extraits. «"Le but
— donc, elle
nous parle de la ministre de la Justice, et, entre guillemets, on nous dit — est de sanctionner un discours qui n'est pas acceptable", [nous] dit la ministre de la
Justice [...] en commission parlementaire...» Et Lise Ravary qui pose la
question : «Acceptable pour qui?», et surtout : «Selon quels
critères?» Excellentes questions.
Elle nous
dit, un peu plus loin : «Que souhaite-t-on faire avec un tel arsenal de
contrôle de la pensée, alors qu'il existe
déjà une loi fédérale contre les discours haineux et l'incitation à la haine?»
Alors, c'est la même question que celle que je vous posais un peu plus tôt, la démonstration que la loi
fédérale, qui est sous la responsabilité de la Cour supérieure, ne fait
pas le travail, M. le Président, cette démonstration-là n'a pas été faite.
Denise
Bombardier, jeudi 20 août : La loi comme bâillon. Alors, Denise
Bombardier nous dit la chose suivante : «Parlons franchement. Ce projet de loi n° 59 est un écran de fumée, un
exercice de mystification dont la nécessité est loin d'être prouvée.» Plus loin, je la cite :
«C'est un secret de polichinelle que le Parti libéral et son chef avant tout se
sont laissé convaincre par des
groupes dont les idées ne sont pas entièrement dépouillées d'intérêts que
l'islamophobie s'est installée au
Québec.» Plus loin, et je la cite, c'est important : «La ministre de la
Justice [...] sera donc la fossoyeuse de la liberté d'expression en sanctionnant ce qui à ses yeux est "un
discours qui n'est pas acceptable". D'où il faut conclure que les
critiques deviendront la cible de tous ceux qui pourraient en être l'objet.»
Plus
loin : «La liberté d'expression
si vantée par ailleurs alors qu'elle est brandie comme l'étendard de nos
valeurs démocratiques, se voit
fragilisée par ce fumeux projet de
loi n° 59. En fait, dans le contexte occidental actuel, c'est à la
défense de la liberté d'expression qu'il faut se consacrer.»
Alors, écoutez, M. le Président, je vais
continuer...
• (12 h 50) •
Une voix :
...
M. Marceau : Combien?
Le Vice-Président (M. Gendron) : Une
minute.
M. Marceau :
Une minute seulement. Écoutez, je veux juste finir avec celui de Mathieu Bock-Coté,
écoutez, j'en ai tellement. J'avais Richard Martineau, Yves Boisvert, en
tout cas, j'en avais plusieurs autres, mais je vais finir par Mathieu Bock-Coté puis je vais finir par sa conclusion parce que je la trouve très
bonne. Il nous dit : «Chose certaine : le projet de loi n° 59, avec ou sans les enragés
qui veulent le radicaliser, est liberticide. Il permettra à n'importe qui se
sentant un peu offusqué de porter plainte au nom d'une communauté qui se
dira victimisée. Et n'importe quel propos un peu hors-norme pourra se faire
classer comme discours haineux. De peur de se faire épingler par les
commissaires de la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse et de se retrouver sur la liste
officielle des délinquants idéologiques,
chacun se tiendra coi.» Et ça, M. le Président, c'est le danger. C'est qu'avec
un projet de loi aussi mal écrit, mal rédigé, problématique, on va finir
par faire se taire des gens au Québec, ceux qui ont des opinions différentes.
Alors, M. le Président, je suis contre ce
principe-là.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci, M. le député de Rousseau pour votre intervention. Et, toujours
pour la poursuite du débat sur le même
projet de loi, c'est-à-dire le principe sur la loi n° 59, je donne la
parole à M. le député de Bonaventure. M. le député de Bonaventure, à
vous la parole.
M. Sylvain Roy
M. Roy :
Merci, M. le Président. Mon collègue de Verchères a dit qu'il avait
l'impression de vivre une situation surréaliste. Moi, j'ajouterais que
la situation actuelle est très paradoxale, pour ne pas dire qui frise la
bipolarité.
En ce jour du
Souvenir, notre devoir de mémoire est de saluer le courage de ceux et celles
qui ont donné leur vie pour la
démocratie, la justice et la liberté. Dans un contexte aussi symbolique, nous
en sommes à discuter d'un projet de loi qui, selon l'avis de nombreux acteurs, vise à affaiblir d'une certaine
manière la liberté d'expression et le sentiment de justice qui l'accompagne, et, par ricochet, peut
affecter la démocratie, hein, via la censure potentielle que porte ce projet
de loi en lui.
Donc, journée
très particulière et paradoxale. L'enjeu, c'est quoi? De quoi on parle? Mes
collègues l'ont dit tout à l'heure :
On parle de la problématique de l'endoctrinement, de la radicalisation, du
recrutement. Et là on arrive avec un projet
de loi qui parle de quoi? De discours haineux qui visent très large et qui
ciblent à peu près n'importe qui sur n'importe quel sujet. René Char disait : L'essentiel est menacé par
l'insignifiance. Quel est l'essentiel? Quel est l'enjeu principal? On est à côté. Et souvent, quand les profs de
socio enseignent les défis sociaux et de transformation des sociétés, hein,
les sociétés se transforment, on est face à
des défis, bien on a toujours des faux défis qui se présentent à nous. Et c'est
ce que j'enseignais moi, je disais :
Faites attention à ce qui est monté en épingle, mais qui n'est pas la réalité.
Ce sont des écrans de fumée, un peu
comme le projet de loi n° 20, où on nous a dit : L'accessibilité aux
médecins, mesdames messieurs, on va
tout vous régler ça, mais, par en arrière, on a passé quoi? Les frais
accessoires. Donc, l'enjeu, c'était ça. Ce n'était pas l'accessibilité
aux médecins.
Ici, on est
un peu dans la même dynamique, même rhétorique, même approche. Bon, on va
prendre ça au pied de la lettre, M.
le Président. Le projet de loi n° 59 est la réponse du gouvernement
libéral à plusieurs évènements. Bon, quantitativement,
est-ce qu'on peut définir que c'est un enjeu extraordinairement préoccupant,
les discours haineux, dans la manière qu'on le présente là? Pas sûr.
Donc, ayant défrayé la manchette depuis son arrivée au pouvoir avec... dont
l'affaire Charkaoui et la présence sur le territoire québécois d'imams tenant
un discours dit «haineux».
Bon, on dit que le projet de loi se divise en
deux. La partie un consiste en la création de la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux
et les discours incitant à la violence, dans laquelle on retrouve notamment...
Mais, bon, je n'irai pas plus loin, là. Moi,
quand on me parle de prévention d'un discours... J'ai lu les nombreux articles
dans les journaux, et l'aspect préventif est
hallucinant, dans le sens où on a presque l'idée d'être dans le monde Orwell,
ou de Huxley, ou de tous ces gens qui
parlaient de la police de la pensée, un programme de surveillance électronique,
etc. Quand on veut prévenir un discours, on créé quoi, là? On crée de la
censure?
Donc, la définition des concepts est fondamentale
dans n'importe quelle approche quelque peu structurée, professionnelle. Et là — et mes collègues l'ont signifié — on ne sait pas où on va, là. Un discours
haineux, c'est quoi? Puis ça, là,
même un étudiant au cégep se le ferait dire par son prof, que : Définis
tes concepts, sinon tu ne passes pas ton cours. Et là on est où? À l'Assemblée nationale, avec un projet de loi
extraordinairement dangereux pour la liberté d'expression, où on ne
définit à peu près rien. Ça fait que ça ne passe pas, hein? Désolé.
Donc, si on y
va par, bon, par élément : création d'une infraction pénale calquée sur
l'interdiction au Code criminel relativement
à la tenue et la diffusion de discours haineux ou incitant à la violence...
Bon. L'attribution à la Commission des
droits de la personne et des droits de la jeunesse de pouvoirs d'enquête dans
le cas de discours haineux ou incitant à la violence... Si eux ne savent pas c'est quoi, un discours haineux, si on
n'a pas balisé ce que c'est, toutes les dérives sont possibles. Donc, tenu publiquement, tant à l'égard
d'un groupe que d'un individu, et basé sur un motif de discrimination
interdit à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la
personne... Bon.
L'attribution au
Tribunal des droits de la personne du pouvoir de déterminer le montant des
sanctions civiles pécuniaires que devront
payer les personnes ayant tenu ou diffusé des discours haineux ou incitant à la
violence, de même que la durée de leur inscription sur une liste diffusée sur le site
Internet... Et là, tant qu'à beurrer, on peut beurrer épais, M. le Président. On accuse, on sanctionne puis on
diffuse. Non, mais, tu sais, le même organisme, c'est gros, là, hein? Une liste publique. Puis cette liste-là, est-ce
qu'elle existe pour les criminels économiques? Est-ce qu'elle existe pour les
criminels qui ont commis toutes sortes de
délits? Non. Ceux qui ont affirmé quelque chose qui ne faisait pas l'affaire de
quelqu'un qui les emmène ou qui les dénonce de manière anonyme vont se voir sur
une liste? Écoutez, Orwell serait jaloux, là, il aurait aimé penser à ça, lui.
Mais là quelqu'un d'autre y a pensé, hein?
Donc, l'attribution au Tribunal des droits de la
personne du pouvoir de délivrer des ordonnances pour faire cesser des discours haineux ou incitant à la violence...
Là, on fait quoi? On ferme des sites Web? On interdit aux journalistes d'écrire dans les journaux? Bon. Je ne le sais
pas, comment ça peut se matérialiser, tout ça, mais on est dans le flou
artistique et juridique.
Modification
de la Charte des droits et libertés de la personne afin d'interdire la
diffusion de discours haineux du...
Confirmer les nouveaux pouvoirs... Bon. Écoutez, c'est tellement large qu'on a
de la misère à comprendre comment on
peut opérationnaliser tout ça. Et là, encore une fois, on évacue complètement
les vrais enjeux, on est ailleurs, on est complètement en dehors des vraies problématiques que sont la radicalisation
et l'endoctrinement. On n'est pas là, on est dans une forme d'imposition ou de tentative d'imposition d'un cadre
juridique qui va définir ce qui peut être dit et non dit, et donc de censure. Et là je suis retourné
lire Hannah Arendt, sur Les origines du totalitarisme, pour voir s'il
n'y avait pas des éléments. On n'est pas rendus là, là, mais admettons
que ce n'est pas de bon augure.
Si je vais dans la
partie II, il y a des choses intéressantes aussi, là. Je vais sauter quelques
picots. C'est sûr qu'il y a des éléments
avec lesquels on est d'accord, c'est évident, là. Mariage forcé... Écoutez, là,
on ne peut pas être contre ça. Mais,
quand on arrive sur la DPJ, une modification à la Loi sur la protection de la
jeunesse, notamment par l'ajout à la liste des exemples de mauvais
traitements psychologiques la notion de contrôle excessif auprès des enfants.
Bon. Une modification à la Loi sur la protection de la jeunesse pour préciser
qu'aucune considération, qu'elle soit d'ordre idéologique ou autre, y compris
que celle qui serait basée sur une conception de l'honneur, ne peut justifier
que la sécurité ou le développement d'un
enfant soit compromis. Et là j'appelle ça la sécurité idéologique? On va
instaurer une nouvelle assurance santé, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : ...je me vois dans l'obligation, là, d'ajourner
le débat sur le projet de loi n° 68 et de suspendre les travaux
jusqu'à 15 heures cet après-midi.
Alors, les travaux
sont suspendus jusqu'à 15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13
heures)
(Reprise à 15 h 2)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, chers collègues, je vous souhaite un très bon après-midi.
Veuillez vous asseoir.
Affaires inscrites par les députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement
d'exercer ses compétences en matière d'environnement
et de refuser le projet Énergie Est de TransCanada
Nous
en sommes aux affaires inscrites par
les députés de l'opposition. Et, à l'article 46 du feuilleton, aux
affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le député de
Terrebonne présente la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale rappelle qu'elle a adopté une motion unanime exigeant
notamment que le gouvernement du
Québec assume sa compétence en environnement et renonce à déléguer ses
évaluations environnementales à l'Office national de l'énergie;
«Qu'elle rappelle au gouvernement du
Québec sa liste de sept conditions pour accepter ou non le projet Énergie Est
de TransCanada;
«Qu'elle souligne que 87 % des
Québécois désirent que le gouvernement du Québec ait le dernier mot pour
autoriser ou non le projet d'exportation de pétrole des sables
bitumineux;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'exercer ses compétences pleines
et entières en matière d'environnement, et exige qu'il refuse le projet
Énergie Est de TransCanada.»
Je
vous informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur
cette motion s'effectuera comme suit :
10 minutes seront réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique,
environ 51 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, environ
30 minutes sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, environ 21 min 30 s
sont allouées au deuxième groupe d'opposition, sept minutes sont allouées aux
députés indépendants sous réserve
d'un maximum de deux minutes pour la députée d'Arthabaska. Et, dans ce cadre,
le temps non utilisé par les députés
indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les
groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment.
Enfin, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.
Alors,
M. le député de Terrebonne, vous avez l'honneur de nous présenter cette motion.
Je vous cède la parole.
M. Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Depuis plusieurs
mois, voire années, vous entendez parler de ce projet de TransCanada, Énergie Est, à travers le territoire
québécois, un sujet qui suscite beaucoup de passion. Vous avez également pu avoir la chance d'écouter, au
cours de la dernière élection fédérale, ce thème revenir de façon quasi
récurrente à chaque semaine et qui a fait l'objet, dans le fond, d'une
attention médiatique hors de l'ordinaire.
Aujourd'hui,
nous nous retrouvons au salon bleu pour discuter de cet enjeu sur plusieurs
aspects, sur plusieurs volets, sur la
question, évidemment, de l'acceptabilité sociale, de l'environnement, de
l'économie, de l'actualité aussi, et voir où en est le gouvernement du
Québec dans sa prise de position pour la suite de ce projet, parce qu'il y a eu
des développements, M. le Président, au
cours des derniers jours et des dernières semaines, il y a eu des nouveautés
dans le cadre du projet de
TransCanada, Énergie Est, qui nous font remettre en question, en tout cas, du
moins certains argumentaires que le Parti libéral avait amenés à
l'avant-plan pour justifier et défendre l'application d'un tel projet.
Je vous rappelle, M. le Président, qu'au niveau environnemental il y a beaucoup d'inquiétude, beaucoup de questions autour de ce qui nous est présenté par
TransCanada. Vous vous rappellerez sûrement que ce projet passe au travers de plus de 600 cours d'eau à travers le Québec,
rivières, lacs, des réserves naturelles, des terres agricoles, des bonnes
terres agricoles, qui suscite évidemment
beaucoup d'inquiétude chez les agriculteurs qui sont
touchés par ledit tracé, tracé qui est reçu de façon préliminaire, mais
dont nous attendons toujours la finalité officielle.
Mais
vous avez également, M. le
Président, été sensibilisé au fait
des déversements qui sont possibles, évidemment, avec ce
type de transport. Nous avons parlé des tests qui sont actuellement en cours aussi au large des battures de Saint-Augustin et qui mettent donc en péril peut-être
certaines espèces endémiques, donc uniques au monde. Là-dessus aussi, nous avons beaucoup de questionnements
et sur les espèces que de telles actions peuvent engendrer.
Vous
vous rappelez que nous avons une sensibilité très fine à l'égard, justement,
des impacts que ça peut avoir sur
certaines espèces. Le député de Jonquière, qui est avec nous aujourd'hui, a fait une lutte
acharnée en ce qui concerne le port pétrolier à Cacouna, donc, qui était dans
une réserve, une pouponnière de bélugas qui, évidemment, a été sauvée,
en quelque sorte, par l'intervention de plusieurs
groupes de la société civile,
environnementalistes, mais aussi grâce au député du Parti québécois, de
Jonquière, que je remercie énormément.
Vous
dire aussi, monsieur, que le BAPE, qui est sur le point, peut-être un jour, de
commencer avec l'ensemble des données qui sont reliées au projet
d'Énergie Est, ne touchera que la partie québécoise et ne touchera pas, donc,
le projet global de TransCanada. On aurait souhaité qu'évidemment cette optique
soit évaluée par le Québec, parce que d'autres provinces canadiennes y ont
réfléchi. Nous avons donc des données qui nous expliquent un projet comme... TransCanada peuvent émettre à eux seuls
l'équivalent de 7 millions de véhicules à essence de plus sur les routes
du Québec en termes de gaz à émissions par effet de serre, et ce, par
année, M. le Président, ce qui... À quelques semaines de la conférence sur les changements climatiques de
Paris, nous avons comme objectif d'essayer de diminuer nos gaz à effet
de serre au cours des prochaines décennies.
Il y a un certain contraste qui est en train de se décider, donc je pense que
ça peut amener aussi dans la réflexion du gouvernement.
Au
niveau de l'acceptabilité sociale, évidemment, vous avez vu plusieurs groupes,
évidemment, environnementaux émettre
leurs réserves par rapport au TransCanada Énergie Est, notamment Greenpeace,
Équiterre, je ne les nommerai pas
tous, mais ils sont venus en commission parlementaire nous parler dans le cadre
du livre vert ou encore de la consultation pour les cibles de gaz à effet de serre que le ministre de
l'Environnement a mis sur pied au cours des dernières semaines. Donc,
beaucoup d'inquiétude de la part des groupes environnementaux et de la société
civile. Parce qu'il y a eu des manifestations un peu partout à travers le
Québec, il y a eu des revendications qui ont été faites. Je me rappelle notamment il y a quelques semaines à Mascouche, où
plus de 500 personnes s'étaient rassemblées pour dénoncer justement ce projet. Et, sans vouloir mettre l'emphase sur
les gens du 450, M. le Président, ce n'est pas à tous les jours qu'on a des
manifestations dans notre coin de pays, et
cet enjeu en a mobilisé plusieurs centaines. Donc, il y a une conscientisation
de la population qui est indéniable à l'égard de ce projet, j'en suis bien
fier.
Plusieurs
maires aussi de municipalité se sont affichés clairement contre ce projet dans
l'état actuel des choses. Je pense au maire de Laval, au maire de
Terrebonne, au maire de Mascouche, au maire de Lanoraie. Donc, plusieurs municipalités à travers le Québec ont levé leur
drapeau en signifiant leur très large réserve et leur objection à la poursuite
de ces opérations. Et, plus récemment, nous
avons eu également des nouvelles données concernant les retombées économiques, les retombées économiques qui sont de
plus en plus difficiles à cerner. Donc, environnement, acceptabilité
sociale, mais aussi retombées économiques.
Vous avez vu la
semaine dernière que TransCanada dit vouloir renoncer, donc, à la construction
de son port pétrolier. C'était là une
condition sine qua non pour le premier ministre du Québec afin de donner son
aval à ce projet. Vous vous
rappellerez que, le 14 juillet 2015 dernier, le premier ministre du Québec
avait affirmé à La Presse canadienne : Sans port pétrolier au Québec, pas de pipeline. Il
n'y avait pas d'ambiguïté, c'était un genre de PPP : pas de port, pas de
pipeline. C'était clair pour tout le monde,
il n'y avait pas de sous-entendu là-dedans. Et, quand on creuse un peu plus
dans l'article, on peut comprendre un
peu mieux ses arguments, il disait : «Cela ne m'apparaît pas suffisant»
que de voir le transport de pétrole
passer au travers les terres du Québec pour se rendre de l'Alberta au
Nouveau-Brunswick. Ça prend davantage pour voir des retombées fiscales
et économiques acceptables dans le cadre de ce projet.
• (15 h 10) •
Et
là, présentement, cet argument, la semaine dernière, semble s'être
volatilisé : plus de port pétrolier au Québec. Donc, on va regarder ce pétrole passer sur notre
territoire. Mais quelles seront les retombées économiques? Même à cet
effet, il y a des questionnements qui sont légitimes, qui sont majeurs.
Et
j'ai compris aussi le premier ministre du Québec d'être un petit peu perplexe,
là, lorsqu'il a appris la nouvelle en
même temps que tout le monde, M. le Président, tout comme le ministre de
l'Environnement, tout comme le ministre des Ressources naturelles : par voie de
communiqué, via les journaux nationaux, via les médias. Donc, TransCanada qui
annonce une nouvelle de cette ampleur, de
cette envergure, mais qui décide de
le faire sans en informer au préalable les principaux interpellés que sont
le gouvernement du Québec... Et là-dessus ça démontre aussi un peu la façon
avec laquelle la pétrolière collabore avec
les acteurs québécois, une pétrolière qui, comme vous le savez, a été souvent
pointée du doigt comme étant... du moins pas étant la plus
exceptionnelle en matière d'acceptabilité sociale, qui n'avait pas
nécessairement la plus grande expertise pour réussir à faire accepter ses
projets.
Et
d'ailleurs l'actualité politique nous a aussi appris, M. le Président, que,
depuis quelques jours aussi, un autre projet de TransCanada s'est vu
faire... donner une fin de non-recevoir par l'administration du président
américain, Barack Obama, le projet
XL Keystone, qui devait, donc, également transporter du pétrole à travers les États-Unis d'Amérique
jusqu'au golfe du Mexique. Quels sont les arguments qui
ont été utilisés par l'administration américaine, M. le Président, pour refuser
ce projet? Très simples : tout
d'abord, que les impacts étaient
négligeables sur leur sécurité énergétique; deuxièmement, que ça ne
conduirait pas à une baisse du prix de l'essence pour les consommateurs; et, troisièmement, que la contribution du projet proposé, face à l'économie américaine, était très marginale à long
terme. Donc, il n'y avait pas une
motivation à outrance de vouloir aller de l'avant avec un tel projet. Et, à cet
effet, ça vient donner aussi un son
de cloche au gouvernement du Québec qui peut rajouter cette cartouche dans leur
bandoulière pour parfaire leur position et évidemment rendre la décision
la plus réaliste dans l'état actuel des choses.
Puis
je parlais des États-Unis, M. le Président, mais également il faut vous rappeler qu'il y a d'autres projets qui
ont été refusés dans le reste du Canada, notamment aussi en Colombie-Britannique. Donc, il est tout à fait légitime de se
poser la question : Si autant de gens autour de nous disent non à ce genre de projets
pétroliers, pourquoi le Québec se sentirait-il forcé de dire oui, et quels sont les avantages qui nous forceraient à
dire oui? Parce qu'on le répète : au niveau environnemental, des inquiétudes; au niveau de l'acceptabilité sociale, vous l'avez
dit dans votre préambule de la
motion, une large majorité de Québécois ne se sentent pas motivés par ce projet. Et
l'actualité économique et politique nous démontre que la tendance n'est pas dans la construction d'un pipeline pour
transport de pétrole albertain, ou, du moins, pas de la façon dont c'est
proposé. À moins qu'évidemment mes données soient différentes de celles du gouvernement, tous les indicateurs du tableau de bord sont au rouge.
Nous avons donc posé
la question en Chambre cette semaine au ministre des Ressources naturelles.
Celui-ci semble avoir un plan. Il nous a
parlé d'un comité d'experts indépendants
qui allait se pencher sur la question pour la suite des choses. Nous avons hâte d'en apprendre davantage aujourd'hui
et surtout de bien comprendre pourquoi
le gouvernement du Québec
devrait-il s'entêter à poursuivre
avec TransCanada dans le projet d'Énergie Est. Il me semble que l'état de
la situation est clair : la
seule option viable qui s'impose, c'est de mettre un «halt» à ce projet et de
revoir quels sont évidemment les
arguments qui nous poussent à dire oui. J'ai bien hâte d'entendre nos collègues
du gouvernement, M. le Président. Merci beaucoup.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de
Terrebonne. Merci à vous pour cette intervention. Je cède la parole au
ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles. M. le ministre.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand :
Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux de prendre la parole
aujourd'hui pour pouvoir un peu
parler de ces enjeux qui sont extrêmement importants pour l'ensemble du Québec.
Je ne parlerai pas beaucoup aujourd'hui
du volet environnemental, je pense que mon collègue de l'Environnement aura
l'occasion d'expliquer en détail les différentes positions sur ces
questions-là.
Cependant,
je dois vous dire qu'en lisant la motion d'aujourd'hui, je suis très surpris,
étonné de voir cette position du Parti
québécois, qui est déjà contre le projet Énergie Est. Ça m'apparaît être
une position assez irresponsable dans le dossier parce que le projet n'est même pas le projet final, n'est même
pas déposé. Et c'est un projet qui n'est pas déposé, c'est un projet qui
est extrêmement complexe, et il est clair pour moi que le Parti québécois en
fait, en fait, un dossier politique en étant tout
à fait contre. C'est un dossier politique,
parce qu'on trouve le moyen
aujourd'hui de se dire : Bien, on
est contre l'Alberta, on est contre le gouvernement fédéral, on est contre, en
fait, le Nouveau-Brunswick, on est contre tout ce qui fait partie du
Canada. Alors, la position du Parti québécois, dans ce domaine, elle est
extrêmement claire.
D'ailleurs,
j'aimerais dire que, dans ce dossier-là, la position du Parti québécois a
évolué. Lorsqu'ils étaient au pouvoir,
j'ai ici un article d'Alexandre Shields, du Devoir, qui parlait, entre
autres, que le gouvernement Marois démontrait son ouverture au pétrole albertain : «La première ministre a
convenu lundi de mettre sur pied un groupe de travail avec le Nouveau-Brunswick [pour étudier le] projet
d'oléoduc...» Alors, ça, c'était une des choses qui avaient été mentionnées.
Par
la suite, il y a eu un nouveau chef du Parti québécois. «[Le chef du Parti
québécois], lisait-on dans un article au
mois de juin, n'a pas indiqué s'il est pour ou contre le projet Énergie
Est[...], quelques heures après que [le député de Jonquière] et [la députée de Vachon] ont affirmé
que les péquistes y étaient opposés, tout comme le Bloc québécois.» Autre article, le chef du Parti québécois, sur ce
projet-là, dit, bien : «Ce n'est pas aussi simple que ça», ce projet-là.
La situation des hydrocarbures au Québec, «c'est une situation
complexe».
Et
les commentateurs, évidemment, dans ces dossiers-là, ont dit : Bien,
encore une fois, c'est un changement de cap pour le Parti québécois.
D'ailleurs, le chef actuel, pendant la campagne à la direction du parti, avait
été le seul candidat à ne pas se prononcer
contre l'oléoduc. Il a évoqué la possibilité que le Québec négocie de
meilleures redevances et a répété l'importance pour les Québécois d'être
consultés.
Par la suite, évidemment, il y a eu d'autres
informations qui nous sont parvenues durant cette campagne au leadership. Je vous dirais que même la députée de
Vachon n'était pas très heureuse de voir le chef du Parti québécois,
pendant la campagne, faire cette espèce de valse-hésitation. Elle le lui avait
mentionné, d'ailleurs.
Et par la suite, évidemment, même la
semaine dernière, les questions ont été posées au député de Terrebonne sur
le projet Énergie Est, et on dit à
l'intérieur d'un article de Michel Corbeil : «[Le député de Terrebonne]
n'a pas voulu dire si le transport par pipeline de produits pétroliers, comme
le propose TransCanada, lui semble plus sécuritaire que d'utiliser le
rail ou encore des pétroliers naviguant sur le fleuve.» Il s'est limité à
répéter : «Il n'y a pas de solution magique.»
Ensuite, le député
s'est montré sceptique sur ce qu'acheminera TransCanada : Est-ce que ça va
profiter aux raffineries québécoises de
Valero, à Lévis, et Suncor, à Montréal? Énergie Est, dit-il, va transporter du
pétrole de l'Ouest «que ne peuvent
traiter les deux raffineurs». «Il a [même] accueilli avec autant de doute les
déclarations des deux entreprises qui
ont affirmé qu'Énergie Est pourra les approvisionner avec d'autres types de
[projets]. À ses yeux, les installations de deux entreprises ne peuvent recevoir du pétrole bitumineux à moins de
[faire des investissements importants].» Alors, peut-être qu'il a des
informations que je n'ai pas sur ces questions-là, peut-être qu'il a des
informations sur les visées financières, sur
les projets d'investissement de ces entreprises. Moi, en tout cas, je ne les ai
pas au moment où on se parle.
Je
pense que, quand on voit cette attitude-là, on s'aperçoit encore une fois que
notre gouvernement, notre gouvernement, a posé, dans ce dossier, depuis le début, les bons gestes. Ce sont des
gestes de rigueur, ce sont des gestes qui font en sorte que... C'est un environnement extrêmement
complexe, c'est un dossier complexe qui exige d'ailleurs énormément de rigueur
de la part du gouvernement.
• (15 h 20) •
Déjà
le 30 mai 2014, j'avais, avec mon collègue de l'Environnement, annoncé,
justement, le plan d'action sur toute
la question, évidemment, du pétrole, du transport des hydrocarbures au Québec.
Je pense que les Québécois comprennent que plusieurs industries
dépendent actuellement du pétrole, que ce soit l'agriculture, les minières, la
pétrochimie, le camionnage, les alumineries,
le transport maritime. S'il y a des approvisionnements qui sont nécessaires...
Il y avait même eu une commission
parlementaire sur le projet Enbridge, dans lequel, évidemment, on avait émis un
certain nombre de conditions. Notre
gouvernement, très rapidement, dans ce dossier, a émis sept conditions, sept
conditions, sept principes au regard du projet Énergie Est qui
concernent ces éléments-là, et j'aimerais rappeler, M. le Président, les
conditions.
D'abord,
on a dit : Ce projet, s'il doit être acceptable, doit être conforme aux
normes techniques les plus élevées en
matière de sécurité publique. Il doit disposer d'une planification d'urgence,
de programmes d'intervention d'urgence d'avant-garde.
Troisièmement, les promoteurs consultent de façon prioritaire les communautés
locales et s'acquittent de leur
obligation de consulter également les communautés autochtones. Quatrièmement,
doivent tenir compte des impacts en
matière d'émissions de gaz à effet de serre. Cinquièmement, offrir des
avantages économiques tangibles, en particulier dans le domaine de la
création d'emplois à court et à long terme. S'assurer, enfin, que les risques
économiques et environnementaux et les responsabilités incombent exclusivement
aux entreprises de pipeline, en cas de fuite ou de déversement, et fournir en ce sens des garanties financières. Enfin,
prendre en compte les intérêts des consommateurs de gaz naturel, parce
qu'à l'époque il y avait un débat, un enjeu avec Gaz Métropolitain dans ce
dossier.
Donc,
c'était là, M. le Président, l'ensemble des points qui étaient mentionnés par
notre gouvernement. Et c'est avec
beaucoup de rigueur que nous avons travaillé sur ce dossier. C'est un dossier
qui n'est pas simple, c'est un dossier qui
demande énormément d'études, et c'est pour ça qu'on a fait des études
environnementales stratégiques nombreuses sur toutes ces questions-là.
Et nous allons continuer, parce que le travail n'est pas terminé en ce sens-là.
Quand on regarde ce
qui se passe aussi dans le monde, on voit les grandes tendances. Par exemple,
on a des tendances, pour ce qui concerne le
pétrole, qui ont été mentionnées — d'ailleurs des tendances importantes que
j'aimerais peut-être partager avec
vous — par la
présidente du conseil de l'énergie, Conseil mondial de l'énergie, qui est une
ancienne vice-présidente
d'Hydro-Québec, Mme Marie-Josée Nadeau, qui a travaillé à un peu changer
les mythes, qui sont extrêmement nombreux dans ce domaine-là.
On
parlait, entre autres, d'une demande qui allait se stabiliser avec le temps, la
demande en énergie qui allait se stabiliser avec le temps. Elle dit que
la demande va continuer d'augmenter en raison de la croissance des économies émergentes.
Donc, ceux qui pensent que la demande va se stabiliser, c'est faux.
Deuxième mythe qui
est très important, c'est qu'on peut suffire à la demande uniquement avec les
énergies renouvelables. La réponse est : Faux. La demande augmente malgré
la contribution des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique.
D'ailleurs, on dit que, dans le meilleur des cas, au cours des prochaines
années, les énergies renouvelables vont doubler mais ne pourront pas suffire.
Alors, c'est le deuxième élément très important.
Le
troisième, on dit que, d'ici 10 à 15 ans, tous les gens dans le monde
auront accès à une forme d'énergie moderne. La réponse est : Faux. En fait, même s'il y a eu des gains en
Chine, en Amérique latine, les analyses démontrent que, dans 15 ans, encore entre 770 et 880 millions
d'habitants seront toujours privés d'accès à l'électricité, et également ce
sera le cas même peut-être jusqu'en 2050 dans plusieurs domaines.
Alors,
M. le Président, je pense que, dans ce dossier-là, il y a beaucoup d'enjeux. On
dit toujours, hein, que le domaine énergétique, c'est un peu comme un
cube Rubik, c'est assez complexe, et il faut être extrêmement prudent lorsqu'on
prend des décisions.
La
question, d'ailleurs, va se poser dans les prochaines semaines lors de la
conférence de Paris. C'est l'une des dernières
occasions de convenir d'un objectif, d'un échéancier de réduction de gaz à
effet de serre, et les questions sont nombreuses.
Est-ce qu'il y aura un accord international? Est-ce que cet accord va être contraignant?
Quelle en sera l'année de référence? Qu'en sera-t-il du prix du carbone?
Est-ce que l'accord qui... S'il n'y a pas d'accord, est-ce que ça signifierait la fin des conférences
internationales sur le climat comme on les connaît depuis 20 ans? Il y a beaucoup de questions.
On va être optimistes. On présume actuellement que les intentions des deux
grands joueurs que sont les États-Unis et
la Chine dans ce dossier sont positives. Et je pense qu'il est important de
bien comprendre, dans ce domaine, qu'il y va de l'intérêt de tous qu'on
ait finalement un accord à Paris. Soyons donc positifs.
Il
est clair également que l'industrie, de façon générale, se doit d'avoir un
encadrement réglementaire rigoureux qui
va lui permettre, au fil des années, d'effectuer cette espèce de transition
vers des énergies à faible intensité de carbone, de confirmer des investissements en infrastructures, d'établir des
recherches, du développement pour nous libérer, bien sûr, de ce carbone, de déploiement de technologies, de
capture, de stockage de CO2 et également des mesures beaucoup plus
importantes au niveau de l'efficacité
énergétique. Je pense que ce sont des choses que l'on va retrouver, bien sûr,
dans notre prochaine politique énergétique.
Je pense donc
que, lorsqu'on regarde la situation, on s'aperçoit que, dans ce dossier, il y
avait un élément qu'il était
important de noter, c'était toute la question du gaz naturel. Le gaz naturel,
on en a besoin au Québec au cours des prochaines
années. Et je dois vous dire qu'on avait mandaté, l'an dernier, la Régie de
l'énergie de nous faire un bilan, parce
que... Et une des conclusions de la Régie de l'énergie, au-delà de cette
question-là, c'était de dire que, si le projet ne se fait pas, il est clair que ça peut représenter,
ou ça va représenter même, une augmentation du prix du gaz pour l'ensemble
des clients du Québec. Donc, on doit tenir
compte de cet enjeu-là. Et nous étions quand même soulagés, nous l'avons dit,
de voir qu'il y a eu finalement une entente
entre Gaz Métro et TransCanada sur cette question, parce que je pense que
l'approvisionnement de gaz naturel au Québec est un élément qui est très
important.
Donc, ce plan que nous avons a été adopté en
2014, le 30 mai 2014. Déjà plus de la moitié des actions ont été réalisées, sont en voie de l'être, que ce soit,
entre autres, dans plusieurs cas, des mises en place, par exemple, d'unité de
vigilance... Il y a eu un dépôt de, je
pense, 62 études. Je pense qu'il y en a 50 quelques qui ont été déposées,
des études sur l'évaluation environnementale stratégique. Il va y en avoir
quelques autres qui vont être déposées au cours des prochaines semaines. Il y a un rapport également qui existe
sur l'ensemble de la problématique d'Anticosti, parce qu'on voulait avoir
véritablement un dossier tout à fait complet
sur toutes les questions d'hydrocarbures et de transport d'hydrocarbures. Mais
je pense également que, sur ces éléments-là,
il est important de rappeler que nous avons dit et redit à plusieurs reprises
que ce n'est pas au gouvernement du Québec
d'être le promoteur de ce projet-là. Nous l'avons dit depuis le début, c'est à
l'entreprise de nous faire la démonstration
que ce projet-là peut être bénéfique pour les Québécois. C'est donc une responsabilité particulière. Et déjà nous avons
hâte de savoir exactement quel va être le projet final sur cette question-là
parce que c'est un projet qui touche l'ensemble des Québécois.
Pour vous
montrer, d'ailleurs, le côté un peu particulier de la motion qui est présentée
ici, évidemment on parlait d'une
situation où il y a 87 % des gens qui veulent que ce soit... Je ne sais
pas où on a pris les chiffres exactement. Nous savons que, sur ce dossier-là, la population du Québec, elle est
divisée. Soyons clairs, elle est divisée sur cette question-là : certains sont en faveur, trouvent que c'est une
bonne chose; d'autres sont carrément contre. Nous sommes, comme gouvernement, parfaitement conscients de la
réalité qui est devant nous, et c'est pour ça qu'il est important, dans ce
débat-là, d'avoir toute l'information
nécessaire, toute l'information qui va nous permettre en fait de bien
comprendre cet enjeu qui est extrêmement complexe, qui est important
pour l'ensemble des Québécois.
• (15 h 30) •
J'ai eu
l'occasion de le dire et je pense que je l'ai mentionné au début, en fait, il y
a même, du côté de la Coalition avenir
Québec, le chef qui a dit, à un moment donné : Bien, ce projet-là, il est
important, on a besoin d'hydrocarbures au
Québec, on en a besoin de façon urgente, et puis c'est important. Et, par la
suite, bien, le chef a dit : Bien, il me semble que le projet n'est pas bien bon, je ne suis pas
sûr, etc. Et donc on va devoir voir
de quelle façon les choses vont évoluer au niveau de ce projet-là qui,
on l'espère encore une fois, va survenir au cours... À un moment donné, j'espère qu'ils vont déposer
ce projet-là. Le gouvernement n'a pas à juger, encore une fois, de ce qui
doit être bon ou pas bon dans ce projet-là. Nous avons à prendre une
décision qui va être réaliste sur toutes ces questions-là.
D'ailleurs,
un des points très importants pour nous donner, face à l'Office national de l'énergie qui entendra ces questions-là, je dirais, une stratégie
politique que nous avons prise comme gouvernement, c'est de travailler de concert avec l'Ontario. Il était important pour nous de
travailler avec l'Ontario, parce que ce fameux pipeline là, Énergie Est, passe également
à travers l'Ontario. Il quitte l'Alberta, s'en va dans différentes
provinces canadiennes et passe par l'Ontario. Et, avec le gouvernement ontarien — parce que nous, on travaille évidemment dans cet environnement canadien, nous voulons
travailler avec cet environnement canadien là — bien,
nous avons établi avec l'Ontario les sept conditions que j'avais mentionnées au
départ et qui faisaient en sorte, avec ces sept conditions-là, que le gouvernement de l'Ontario et le gouvernement du Québec forment ensemble une force de frappe extrêmement importante. Je
pense que... quand on va bien
comprendre que les deux gouvernements vont établir ensemble une position qui va
être définie à l'intérieur de ces sept
conditions-là, je pense que tout
le monde va reconnaître que ça va
représenter une force politique extrêmement
importante lorsqu'il va y avoir des audiences à l'Office national de l'énergie. Je
pense que c'est très clair de ce
côté-là. On ne peut pas, dans un
dossier aussi compliqué que celui-là, rester simplement à ne pas essayer de
forger comme telles des alliances sur ces questions-là.
Ainsi donc,
je vous dirais que nous avons analysé ces projets-là. Nous avons travaillé en
ce sens, des équipes de mon ministère.
Il y a des équipes du côté de l'Environnement également qui travaillent fortement à bien comprendre les
différents enjeux, à voir le pour et le
contre. Et je pense que les gens, de façon générale, ont salué la
rigueur du gouvernement depuis le début. Parce que cet enjeu-là n'est
pas un enjeu facile, c'est un enjeu qui est important pour l'avenir du Québec.
Alors, je
vous dirais que je suis extrêmement surpris, encore aujourd'hui, de voir comment
le Parti québécois a présenté
ça d'une façon un peu particulière. Comment peut-on être contre un projet, au
départ, dans lequel on n'a pas le résultat final de ce projet? C'est quand même
extrêmement particulier. Ça me rappelle, en fait, à l'époque
où j'étais sous d'autres cieux... En tant que ministre de
l'Environnement, je me rappelle, entre autres, que le Parti québécois, c'était fidèle à son habitude... Nous avons établi, à un moment donné, une cible de 20 % de
réduction de gaz à effet de serre d'ici 2020, et il y avait un plan très
défini, très rigoureux pour y arriver — et je pense que les derniers chiffres qui
sont devant nous montrent qu'on
avance dans la bonne direction, avec une série de mesures, une série de plans,
etc. Ils ont pris le pouvoir pendant 18 mois, on n'a pas beaucoup entendu
parler de cette lutte aux changements climatiques que le Parti québécois
avait faite, mais ils avaient une idée de
dire : Ah! nous, on sera meilleurs que les libéraux, on va faire
25 %. Ils vont faire 25 %? Et on n'a jamais su quelles étaient
les façons de faire, comment allaient-ils le faire.
Et
moi, je me rappelle très bien, à un moment donné, qu'il y avait un ancien
député du Parti québécois qui s'était ouvert, à un moment donné, là-dessus,
puis par la suite il est passé du côté de la Coalition avenir Québec, il a été défait,
à un moment donné, à une élection, puis il a
dit : Bien, écoutez, je pense qu'on va maintenant forcer les gens, là, à
avoir... on ne peut plus avoir maintenant deux automobiles, là, par
maison, là, il faut qu'il y en ait seulement une, ça va faire éventuellement partie... Et il avait été fortement
contesté, évidemment, à gauche et à droite, sur ces questions-là. Je pense
que c'était M. Rebello à l'époque, là, qui
était le député, à l'époque, qui était là. Alors, c'est ce qui s'est produit.
Mais ça a toujours été, donc, la façon de faire, que j'ai pu voir, en
tout cas.
Dans
des dossiers énergétiques aussi compliqués, il faut avoir une espèce de rigueur,
une rigueur très importante. Et je pense que l'on travaille... je travaille
avec le ministre de l'Environnement sur ces éléments-là. Je pense qu'également c'est un projet qui, à mon avis,
ne devrait pas être un projet de partisanerie, parce que c'est un projet économique
qui peut être important. On s'est posé la question
à un moment donné. Moi, du côté de l'Énergie, je regarde, d'abord
et avant tout : Est-ce qu'il y a des retombées économiques sur ce projet-là? Y a-t-il véritablement de bonnes retombées? Il y a eu une
étude, à un moment donné, qui a été faite par TransCanada. On parlait de milliards
de dollars de retombées. C'étaient les
chiffres de l'entreprise. Par la suite, on a eu une étude qui a été faite
et commandée par des groupes environnementaux, il y avait zéro retombée sur le plan économique.
Alors,
je pense qu'il est clair, suite au dépôt de certains éléments de ce
projet-là... Et j'ai eu l'occasion de commenter la semaine dernière, il
va y avoir un besoin réel pour avoir un comité indépendant qui va pouvoir
analyser d'une part ces retombées économiques.
Et la question également qu'on va devoir se poser, c'est : Qu'est-ce
qui peut être acceptable en termes de retombées économiques? Est-ce que
c'est 10 millions, 50 millions, 100 millions,
150 millions, 200 millions de
retombées économiques? Qu'est-ce qui
est acceptable en termes de retombées économiques, en termes de création d'emplois, pour
l'ensemble des Québécois? C'est un des éléments du dossier pour savoir si,
oui ou non, nous allons être pour ou
contre ce projet-là. Je pense que c'est la moindre des choses de pouvoir poser
ces questions-là. Et le gouvernement, dans un cas très précis et dans le cadre de ce
dossier-là, a besoin d'avoir des experts qui viennent de l'extérieur et qui
vont être en mesure d'analyser ces chiffres-là, et de s'assurer
également l'engagement de ces entreprises pour savoir si véritablement ce
projet-là est sérieux pour l'ensemble des Québécois.
La
semaine dernière, quand il y a eu le communiqué de TransCanada, on a dit :
Bien, il y a telle entreprise, telle entreprise
du Québec, telle autre entreprise qui va avoir des retombées économiques. Et,
très franchement, on n'avait pas beaucoup
de détails. Quel genre de contrat, quel type de contrat, combien ça va
rapporter? Et j'espère que la compagnie va être en mesure, lorsqu'ils
vont présenter le projet final, d'être infiniment plus précis sur ces
questions-là.
M.
le Président, je pense que, dans ce dossier, on ne peut pas être... Il y a une
expression, on disait toujours... On ne peut pas être un terrible simplificateur. Je pense que c'est important
de le dire, c'est un dossier qui est important. Et je pense que le Québec, à tout le moins, doit
s'assurer que ce projet-là soit étudié, encore une fois, avec la plus grande
rigueur. Je pense qu'il faut avoir
toutes les données, toutes les études sur ce projet. Il est clair, mon
collègue, sûrement, va parler d'un
BAPE. Mais il y a eu 62 études qui ont été faites, pour l'évaluation
environnementale stratégique, sur ces questions. Il y a eu un rapport de la Régie de l'énergie sur la question du gaz. Il
y a eu déjà et on va continuer à y avoir une vaste consultation du public. Et j'ai parlé tout à
l'heure du comité indépendant, également, qui va analyser les retombées
économiques.
Je
pense qu'à partir de ces données-là le Québec va pouvoir prendre une décision
éclairée sur ce projet, M. le Président, où nous n'avons pas encore à être les promoteurs mais simplement les
meilleurs juges d'un enjeu extrêmement important pour tout le Québec.
Merci, M. le Président.
• (15 h
40) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources annurelles... annuelles...
Ressources naturelles, plutôt. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Saint-Hyacinthe.
Mme Chantal Soucy
Mme Soucy : Merci, M. le
Président. Je vais profiter du temps qui m'est accordé pour expliquer aux
citoyens notre désaccord sur la
motion telle que libellée par l'opposition officielle. J'en profite pour vous
informer que nous allons déposer un
amendement à cette motion. Et, si l'opposition officielle fait preuve
d'ouverture, nous voterons en faveur de leur motion.
Vous savez, M. le Président, quand nous avons à
nous prononcer sur une motion, il faut être en accord avec tout le contenu, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Mais, si on est en accord avec une partie, alors on a le droit de demander
un amendement. C'est ce que nous avons fait.
Notre amendement demande de retirer la dernière phrase du dernier paragraphe,
qui se lit comme suit : «et exige qu'il refuse le projet [d']Énergie Est
de TransCanada».
Il faut que l'opposition officielle
cesse d'avoir une approche doctrinale. Ils jettent le bébé avec l'eau du bain. Ils sont contre tout : contre le transport du
pétrole en train, contre le transport du pétrole en bateau, et maintenant
contre le transport du pétrole par
oléoduc. Faudrait-il encore que le PQ
nous explique comment il compte transporter le pétrole.
M. le Président, on
refuse d'embarquer dans le jeu de l'autruche ou de l'hypocrisie, parce que les
Québécois consomment du pétrole, et tout
indique qu'ils le feront encore pour un bon bout de temps. Chaque jour, nous
consommons des produits dérivés du
pétrole. Je ne parle pas uniquement du carburant qu'on utilise pour faire
rouler nos voitures, mais ça passe
également par des produits de plastique, des produits de cosmétique que nous
utilisons ou tout simplement par le chauffage de
nos maisons ou de nos institutions. On ne peut pas prendre les choses à la
légère et refuser ce projet du revers de la main sans même avoir tous les
éléments en main pour prendre une décision responsable, tant sur le plan
environnemental que sur le plan économique.
Il
y a évidemment des sujets qui nous interpellent particulièrement, parce que,
oui, c'est primordial, la sécurité de la population, parce que, oui,
c'est important, la protection de notre environnement, mais il y a aussi l'économie.
M. le Président, le projet d'Énergie Est est un projet que nous surveillons de
très près, à la Coalition avenir Québec. D'ailleurs,
mon collègue le député de Masson et moi avons rencontré à plusieurs reprises
les gens du milieu, mais également les
acteurs locaux. Il est essentiel, aux yeux de ma formation politique, que les
municipalités qui seraient touchées par le passage des canalisations de TransCanada aient accès à toute
l'information disponible, que ça soit au niveau du tracé final, que ça soit au niveau des plans d'urgence ainsi
que sur les véritables retombées économiques pour les municipalités et
également pour le Québec.
Le
gouvernement a déposé il y a quelques semaines un rapport de Raymond Chabot
Grant Thornton sur l'acceptabilité
sociale des projets. Il est donc impératif que le gouvernement se penche sur
cette question, parce qu'il est évident
que l'acceptabilité sociale des communautés et des Québécois est primordiale
pour un projet d'une telle envergure. Et, pour y arriver, il me paraît
incontournable que les dirigeants de TransCanada s'impliquent et aillent
rencontrer la population, les élus touchés
pour leur expliquer concrètement en quoi ce projet peut leur être bénéfique et
quels sont les risques encourus et
les probabilités de ces risques, parce qu'évidemment on ne peut pas dire qu'il
n'y a pas de risque, mais il faut savoir quelles sont les probabilités
de ces risques-là.
Pour
parler des bénéfices, nous adoptons une approche pragmatique, réaliste, et on
refuse de faire de la partisanerie, particulièrement
quand il s'agit des dossiers avec un tel impact économique, et nous allons
continuer dans cette voie-là, M. le
Président. La CAQ a toujours exigé qu'il y ait des retombées économiques pour
le Québec dans ce projet. Le projet d'Énergie Est de TransCanada est un
projet complexe, comme le ministre l'a dit, imparfait, il faut le dire — il
l'est, imparfait — mais
qui mérite qu'on s'y attarde.
Je
déplore le fait que l'opposition officielle utilise une solution qui est
radicale et émotive dans ce dossier-là. Le fait de qualifier le projet d'Énergie Est de simple importation de
pétrole bitumineux, effectivement, c'est de ne pas comprendre les
spécificités du projet ou bien de refuser de collaborer à trouver des
solutions. Le projet d'Énergie Est interpelle
les citoyens sous plusieurs angles, et nous en sommes conscients, que ça soit
pour l'aménagement du territoire, la protection de l'environnement, la
sécurité, mais également l'économie, les retombées économiques que pourrait
avoir ce projet-là. On doit tenir compte de l'aspect économique,
particulièrement avec la fragilité de l'économie du Québec. Nous ne le répéterons jamais assez, mais le Québec se retrouve
quand même au 57e rang sur 61 États en Amérique du Nord.
Selon
ce qu'a présenté TransCanada, le projet permettrait d'acheminer
1,1 million de barils de pétrole par jour de l'Ouest du Canada, soit de l'Alberta et de la
Saskatchewan, vers des raffineries de l'Est du Canada, jusqu'au
Nouveau-Brunswick. Ce projet permettrait également d'acheminer le pétrole brut
vers des marchés internationaux par la côte Est. Le principe du projet repose sur des demandes de pétrole brut
nord-américain, surtout celles de pétrole brut de l'Ouest canadien. Ce pétrole est en forte demande dans les raffineries de l'Est du Canada parce que
c'est des matières qui sont moins coûteuses, qui offrent des approvisionnements
plus stables et plus durables que les sources de pétrole brut étranger actuellement
utilisées.
Il
serait irresponsable, M. le Président, de la part des élus, envers les citoyens
de refuser catégoriquement sans
même avoir tous les éléments en main. À ce
stade-ci, nous, à la Coalition avenir Québec, nous refusons de fermer la porte
à un projet énergétique de cette envergure.
Nous refusons pour plusieurs raisons. Parce qu'il ne faut pas ignorer l'apport
de la filière pétrochimique pour le Québec, parce qu'elle est capitale. C'est
quand même 51 000 emplois, dont la majorité sont à Montréal et à Lévis. Elle contribue pour
8,8 milliards à notre PIB. Aussi, rappelons que le pétrole représente plus
de 50 % du bilan énergétique du Québec.
Comme vous pouvez le constater, M. le Président, cette filière est importante
pour le Québec, et ignorer ce fait serait tout simplement irresponsable.
Ne
fermons pas la porte à Énergie Est, faisons l'exercice et profitons de
l'occasion pour se pencher sur des questions qui sont importantes. Par exemple, est-ce que ce projet permettrait de
réduire notre dépendance au pétrole provenant de l'étranger? Est-ce qu'il serait plus sécuritaire de faire voyager cette
molécule dans une canalisation que par train ou par bateau? Parce qu'on ne vit pas dans un monde imaginaire.
Soyons réalistes : Qui, dans cette Chambre, pourrait se lever et affirmer qu'il ne consomme aucun produit qui est
dérivé du pétrole? À l'heure actuelle, nous importons 100 % des ressources
d'énergie fossile consommées et raffinées ici.
Selon
la Fédération des chambres de commerce du Québec, année après année, nous
dépensons entre 11 et 15 milliards de dollars en pétrole que nous payons à des intérêts étrangers. On
s'entend pour dire que, du point de vue économique, cette dépendance que nous avons au pétrole
étranger pèse lourd sur notre balance commerciale, qui est largement
déficitaire. Ce n'est pas des
hallucinations, vous savez, de la Coalition avenir Québec, M. le Président, la
Fédération des chambres du commerce du Québec s'est déjà prononcée à ce
sujet.
M.
le Président, une question nous vient : Est-ce que le Parti québécois
préfère favoriser le marché international plutôt que notre marché? Parce qu'en créant et en favorisant un marché
national pour le pétrole canadien ça viserait à accroître la compétitivité des
raffineries d'ici, ça bénéficierait également au Québec en créant des emplois,
en ouvrant la voie à un
approvisionnement de pétrole sûr et stable. Nous sommes conscients que ce
projet n'est pas parfait, il est loin d'être
parfait. Nous allons continuer à questionner ses imperfections, mais nous ne
pouvons pas, à ce stade-ci, refuser de façon radicale le projet de
TransCanada. Je tiens à vous dire que nous ne mettrons jamais l'aspect sécurité
et l'aspect environnemental de côté, soyez-en assurés, mais on ne peut pas
ignorer le potentiel économique de ce projet.
Rappelons les retombées économiques. À
ce chapitre, TransCanada a peine à déposer des arguments solides, donc il faut être prudents. Certes, une étude de
Conference Board, en octobre 2014, commandée par TransCanada, évaluait à
1,2 milliard de dollars les revenus
fiscaux, à plus de 4 000 emplois lors des sept années de planification et
de construction de l'oléoduc. Par
contre, on apprenait la semaine dernière que TransCanada a fait une croix
définitive sur l'implantation d'un
port pétrolier au Québec. Par contre, des ententes auraient été signées avec
Valero, à Lévis, et Suncor, à Québec... à Montréal. Ces ententes
auraient pour but de faciliter la livraison du pétrole brut d'Énergie Est vers
leurs raffineries. TransCanada aurait également conclu des ententes avec plus
de 250 fournisseurs québécois pour une valeur totale dépassant 100 millions de dollars. Alors, ce
n'est pas quelque chose qu'on peut négliger, qu'on peut faire abstraction.
Pourtant, il nous est impossible d'en savoir
plus et de savoir concrètement comment le Québec sortira gagnant d'une telle
entente.
• (15 h 50) •
Il
y a des questions importantes qui restent sans réponse, notamment de la part du
gouvernement libéral. Comment le
gouvernement libéral compte, au juste, exiger des redevances pour le transport
de pétrole en sol québécois, surtout dans le cadre du projet d'Énergie Est? Il est du devoir du gouvernement de
s'assurer au minimum de négocier une forme de redevance avec TransCanada. Si le pétrole est acheminé pour des besoins
du Québec, c'est une chose, mais le pétrole qui ne sera que transité par
le Québec pour être exporté, ça, c'est une autre chose. Il faut absolument que
le Québec ait une redevance sur la molécule
transportée destinée à l'exportation. Et j'ai hâte d'entendre les propositions
du gouvernement à ce sujet.
Ce
qui m'amène à me questionner sur les négociations que mène le gouvernement
libéral. Il devient de plus en plus évident
que le premier ministre n'a pas su faire valoir les intérêts des Québécois. Il
est tout simplement incapable de négocier avec TransCanada depuis qu'ils ont mis de côté le port pétrolier à
Cacouna. Si on se fie aux ententes récentes conclues avec Bombardier, il n'y a rien de rassurant pour
les Québécois. D'ailleurs, j'invite le premier ministre à demander de l'aide
aux partis d'opposition. Je suis convaincue
que le chef de la deuxième opposition viendra lui porter main forte pour une
éventuelle négociation avec TransCanada.
Pour
toutes ces raisons, nous devons nous pencher sur le projet d'Énergie Est de
TransCanada. Plus que jamais notre économie est influencée par la
conjoncture internationale, les hauts, les bas du marché. Le Québec ne doit pas
tourner le dos à l'opportunité d'avoir des
nouveaux investisseurs et particulièrement au chapitre de l'énergie. Cependant,
il est important de savoir que mes propos...
n'est pas un appui définitif au projet d'Énergie Est de TransCanada, loin de
là.
Je tiens à rappeler
au premier ministre du Québec l'engagement de son ministre de l'Environnement
pris le 19 novembre dernier. Dans la
lettre adressée au président, chef de la direction de TransCanada, les libéraux
énuméraient clairement les sept conditions obligatoires pour que le
gouvernement accepte la portion québécoise pour le projet de l'oléoduc de
l'Énergie Est.
La
cinquième condition, que je voudrais porter à votre attention, stipule, et là
je cite : «Le projet [devrait] générer des retombées économiques et fiscales pour tout le Québec, notamment en matière
de création d'emplois dans les régions où il sera installé.»
Qu'en est-il de cette
condition aujourd'hui? Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de s'assurer des
retombées économiques? Le Québec a
l'opportunité, l'opportunité, ici, de faire valoir ses intérêts et de se battre
pour que le Québec retire une partie de ces profits-là.
Ainsi, M. le
Président, je pense avoir réussi à expliquer les raisons pour lesquelles ma
formation politique n'appuiera pas la motion
du Parti québécois telle que rédigée actuellement. Je les invite à accepter
notre amendement pour que nous puissions parler d'une même voix et voter
pour leur proposition. Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, Mme la députée de
Saint-Hyacinthe, j'imagine, vous souhaitez déposer officiellement votre amendement? Alors, on va
récupérer votre amendement. Bien sûr, nous le recevons. Et seul l'auteur
de la motion peut accepter ou non de
modifier son amendement. Alors, il nous indiquera, un peu plus tard dans le
débat, s'il accorde cette permission ou pas.
Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je vous cède la parole, en vous
rappelant que vous disposez d'un droit de parole de sept minutes.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci beaucoup, M. le Président. J'entends beaucoup, ici,
parler d'économie et pourtant je n'entends pas la voix de la science
s'exprimer. Je veux bien, l'économie joue un rôle, mais, quand on parle, au
sens de la loi de l'environnement, de
l'économie, on ne peut pas la dissocier de l'écologie puis on ne peut surtout
pas la dissocier du social. En ce
sens, la motion qui est devant nous aujourd'hui nous rappelle que, comme élus
et, dans le cas qui nous concerne, comme
gouvernement, on doit assumer des responsabilités et on ne peut pas regarder ça
juste par un bout de la lorgnette.
Ce
qui est impressionnant, c'est que — je n'entends pas faire de partisanerie
là-dessus — M. le
Président, tout choix économique est un choix politique. Je ne comprends
pas cette affaire-là, sinon que de vouloir faire un show de boucane. Bien sûr qu'il faut qu'on s'en préoccupe,
c'est majeur. Parce que, un, ça considère l'avenir de la planète, parce que ce n'est pas... TransCanada, ce n'est pas un
pipeline qui transporte de l'eau claire de la Saskatchewan, ça transporte
des sables bitumineux, le pétrole le plus
sale qu'il n'y a pas encore sur la planète. Alors, on ne peut pas se décrocher
de ça, M. le Président. Et, dans ce
sens-là, vous comprendrez — et vous le savez «anyway» depuis le début — que nous, on est en accord avec cette
motion-là.
Ce qu'elle nous permet de faire, cette
motion-là, aujourd'hui, c'est, d'une part, de nous rappeler que comme gouvernement québécois, au sens de notre loi sur l'environnement, nous avons des pouvoirs et, ces
pouvoirs-là, on peut les utiliser lorsqu'on pense qu'il est sain de le faire, notamment pour
la qualité de l'environnement qui nous entoure, qui est la nôtre. Mais, dans le cas des sables bitumineux,
dans le cas du pétrole, ce qui est problématique, c'est que ce n'est pas
rien que notre avenir qui est en jeu, M. le
Président, c'est l'avenir de la planète. Les scientifiques sont clairs :
il faut que ça reste dans le sol.
Nous autres ici, au Québec, on dit : Bien, tu sais, si ça passe, on
prendra des redevances. Ça ne marche pas,
ça. Alors, c'est clair que la motion nous permet de revenir dire encore une
fois, dans ma formation politique, que c'est important que le gouvernement du Québec utilise l'ensemble des leviers
qui sont les leurs, le leur, de pouvoir intervenir dans ce projet-là.
Alors, c'est sûr que...
Puis là, bon,
on voit la conférence de Paris arriver, conférence, d'ailleurs, M. le
Président, à laquelle j'assisterai dans
la délégation mais aussi du côté du collectif québécois des mouvements sociaux.
Parce qu'il n'y a pas d'unanimité. On
l'entend, là, on débat entre nous juste sur un projet, et il n'y a pas
d'unanimité au Québec. Alors, on ne peut pas permettre qu'en notre nom le gouvernement du Québec aille à
Paris et dise : Nous sommes les leaders mondiaux, nous sommes un des
leaders mondiaux au niveau des changements climatiques. Il y a quelque chose
qui ne fonctionnerait pas puisque, dans les faits, ce qu'on se rend
compte avec les choix qui sont faits au quotidien, il y a comme toute la...
Puis
restons-en aux oléoducs, puisque c'est de ça qu'on parle aujourd'hui, d'Énergie
Est. Toute la bataille contre les
oléoducs, Énergie Est mais Enbridge aussi, là, c'est un peu les mêmes enjeux
qui sont là, hein, face à ces oléoducs de
la honte, face à ces entreprises, ces industries milliardaires qui embauchent
des lobbyistes, chèrement payés pour finir par nous convaincre, et probablement les gouvernements aussi, que, dans
le fond, non, ça n'a pas trop d'impact. Alors, nous, on est préoccupés parce que, dans les faits, c'est de l'avenir de
la planète qu'on parle, c'est de nos enfants qu'on parle, c'est de notre eau qu'on parle, c'est de
nos terres agricoles qu'on parle et c'est de l'air qu'on respire qu'on parle.
M. le
Président, vous savez, le rôle que je vais jouer à Paris, pour moi, il est
simple, il y a une belle expression qui
dit : Être le caillou dans le soulier. Ce que je souhaite, c'est, grâce
aux éléments de compréhension que la société civile a développés, et moi aussi d'ailleurs... c'est
d'être une espèce de caisse de résonance pour se dire collectivement que, si
notre gouvernement va à Paris pour se qualifier de leader, il y a ici des gens
qui veillent au grain pour s'assurer de la cohérence.
Et il y a
deux tests, pour nous, qui se présentent par rapport à ça. Le premier, bien, il
est à débat aujourd'hui, c'est la
question de TransCanada. Cette bataille, cette bataille au niveau des
pipelines, elle est importante, parce que ce qu'on se rend compte, c'est que les gouvernements, les
uns après les autres, ont une certaine complaisance face à l'industrie pétrolifère. C'est comme s'ils n'acceptaient pas,
un après l'autre, de faire en sorte qu'on sorte de cette logique économique
qui est en train de, sans mauvais jeu de
mots, brûler la planète. Et ça, M. le Président, on est heureux de savoir qu'au
Québec on a du pétrole, c'est une
ressource naturelle extraordinaire. Ça fait des millénaires qu'elle est là. On
pourrait-u s'en garder un petit peu
puis, dans 250 ans, 300 ans, permettre donc à nos enfants, nos
arrières de pouvoir utiliser aussi cette matière première dans des composantes
qui seront au service... au lieu de le brûler dans le transport?
Alors, M. le Président, en conclusion, je vous dirais que — bien, vous l'avez saisi — on
est tout à fait en accord avec la motion qui est sur la table aujourd'hui. Cette motion nous
suggère que le Québec devrait avoir le dernier mot face au
projet du pipeline d'Énergie Est. À notre sens, M. le Président, il aurait dû
avoir le premier mot pour la génération présente et les futures, et ce mot-là
aurait dû être «non». Merci, M. le Président.
• (16 heures) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, pour cette intervention. M.
le ministre du Développement
durable, de l'Environnement et de la Lutte aux changements
climatiques, je vous cède la parole.
M. Heurtel : Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
...formation politique plusieurs minutes.
M. David Heurtel
M. Heurtel : Merci, M. le Président.
Je vais commencer par réitérer ce que mon collègue de l'Énergie et de
Ressources naturelles a affirmé plus tôt. C'est bien clair d'établir les bases
lorsqu'on parle du projet TransCanada : premièrement,
il faut le dire clairement, ce n'est pas un projet du gouvernement du Québec,
c'est un projet de TransCanada. Et,
au moment où on se parle, nous n'avons même pas les détails de la portion
québécoise du projet. Nous ne les avons pas.
Alors, dans
ce contexte, lorsqu'on nous parle, dans la motion du député de
Terrebonne : «Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement
d'exercer ses compétences pleines et entières en matière d'environnement», il
faut quand même faire un petit historique
dans ce dossier-là et même remonter à l'époque du gouvernement du Parti
québécois. Parce que, dans ce
dossier, lorsqu'on parle d'exercer les compétences pleines et entières du
Québec en matière d'environnement, il faut
immédiatement comprendre cela comme voulant dire : appliquer les lois
québécoises en matière environnementale. Et donc, dans ce cadre-là, ça veut donc dire d'appliquer la Loi sur la
qualité de l'environnement et appliquer la Procédure d'évaluation et
d'examen des impacts sur l'environnement au projet.
Or, ce qui
est étonnant, c'est qu'en 2013 et 2014, lors de la prise de pouvoir du Parti
québécois, on s'est retrouvés dans
une situation où TransCanada échangeait déjà avec le gouvernement du Québec sur
ce projet. Et qu'est-ce que le Parti
québécois a pris comme décision à l'époque? Et le député de Terrebonne faisait
partie de ce gouvernement, la députée de
Vachon était ministre dans ce gouvernement, ministre des Ressources naturelles
dans ce gouvernement. Eh bien, le gouvernement
du Parti québécois a convenu avec TransCanada qu'il n'y aurait pas de BAPE sur
la portion québécoise du projet et
donc que les lois québécoises ne s'appliqueraient pas. Alors, je trouve ça
particulier que, là, aujourd'hui, on vienne nous demander d'exercer pleinement les
compétences du Québec en matière environnementale, alors que, lorsqu'ils
étaient au gouvernement, les élus du Parti
québécois n'ont même pas fait le minimum, qui était justement d'appliquer
la Loi sur la qualité de l'environnement et
d'appliquer la Procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement
prévue en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement.
Or,
nous, ce que nous avons décidé de faire, et ce que j'ai moi-même annoncé le 8
juin dernier, c'est qu'il allait y
avoir un BAPE sur la portion québécoise du projet. J'ai donné un mandat au BAPE
sur cette question-là spécifiquement. Ça, ça s'appelle exercer
pleinement ses compétences en matière environnementale.
Mais
les contradictions avec le Parti québécois, ça ne s'arrête pas là. Si on
regarde ce que le chef de l'opposition officielle
a déclaré sur ce projet-là — mon collègue en a parlé tout à l'heure, mais
je crois que ça vaut la peine d'aller un
peu plus loin — alors,
le 27 novembre 2014, lors d'un discours devant des étudiants à l'Université de
Montréal, il dit, et je cite :
«Moi, je pense que nous devrions sérieusement considérer à s'asseoir avec eux
et dire : "Combien vous êtes prêts
à donner, là?" Commençons à négocier sérieusement!» C'est seulement par la suite qu'il a mentionné que ça serait
peut-être une bonne idée de consulter la population. Peu de temps après, le chef de l'opposition officielle a plutôt dit que personne ne voulait du
projet au Québec, avant de se raviser à nouveau pour dire qu'il ne savait pas
si les gens en voulaient ou non, du projet.
Puis
là, ensuite, le chef de l'opposition officielle, lorsqu'il a été rabroué par le
député de Jonquière sur cette question-là, a
qualifié la position du député de Jonquière de simpliste le 16 juin
dernier. Puis là, même durant la course à la chefferie au Parti québécois,
la députée de Vachon, qui était elle-même candidate, a accusé le chef de
l'opposition officielle d'utiliser la
responsabilité d'Ottawa, à qui revient la décision globale sur le projet, pour
éviter de se prononcer contre le
projet d'oléoduc. Difficile à suivre quand on compare toutes ces affirmations
avec la motion qui est devant nous aujourd'hui.
Mais là on va une étape un peu plus
loin par la suite, M. le Président. On nous explique que, là, non seulement
on n'applique pas du tout les lois
québécoises, il ne faut faire aucune étude, aucune analyse, il faut tout de
suite refuser le projet. C'est ça,
là, qu'on nous dit : «...et exige qu'il refuse le projet Énergie Est de
TransCanada.» Alors, on n'applique pas les lois, on ne fait pas un BAPE,
on va tout de suite à la conclusion et on refuse. Étonnant, parce que le député
de Jonquière, qui, au printemps était le
porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement et qui,
justement, est entré en conflit
direct avec le chef de l'opposition officielle sur la question de TransCanada...
Puis ce n'est pas juste moi qui le dis,
c'est La Presse qui titrait dans son article du 16 juin
2015 : Énergie Est : Péladeau n'a pas la même position
que deux de ses députés.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
...M. le ministre, vous devez utiliser le titre du député et non pas son nom de
famille. Veuillez poursuivre.
M. Heurtel : Le député
de Saint-Jérôme, le chef de l'opposition officielle. Mes excuses, M. le Président, j'ai lu
trop vite le titre de l'article.
Lors de l'étude des crédits du ministère de l'Environnement le 23 avril 2015, le député de
Jonquière, qui était à l'époque porte-parole de l'opposition
officielle en matière d'environnement, a dit, et je cite :
«...considérant — sur
le projet de TransCanada — que le BAPE ne peut pas se tenir parce qu'on
n'a pas encore l'étude d'impact, est-ce qu'il peut envisager au moins la
possibilité de tenir un BAPE générique pour commencer le travail, comme la loi
lui permet?» M. le Président, en avril de
cette année, le porte-parole de l'opposition officielle en matière
environnementale me demandait, comme
ministre de l'Environnement, de donner tout de suite un mandat au BAPE, malgré
le fait qu'on n'avait pas encore eu l'étude d'impact, chose que nous
avons faite le 8 juin dernier.
Là,
aujourd'hui, on ne parle même plus de faire un BAPE en vertu de
l'article 6.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement, ce que nous avons fait le 8 juin, on ne nous dit
même pas si on est véritablement pour ou contre, parce qu'on n'a pas encore clarifié la position du chef
de l'opposition officielle, là, sur cette question-là, là. Maintenant, on nous
dit : Bien là, on n'applique pas nos
lois, mais il faut exercer pleinement nos compétences. Et en même temps on
contredit complètement, dans cette
résolution, dans cette motion, M. le Président, la position du Parti québécois,
qui voulait, justement, qu'on fasse
un BAPE sur le projet. Et ça, là, ce n'est pas il y a un an, ce n'est pas il y
a deux ans, c'est à la fin avril. Alors là, encore une fois, c'est
n'importe quoi, du côté du Parti québécois, n'importe quoi.
• (16 h
10) •
On
continue, M. le Président. On nous parle maintenant que... Je crois que, la
motion, finalement, on en parle aujourd'hui,
c'est suite à la décision du gouvernement américain de ne pas aller de l'avant
avec le projet Keystone. Je me doute,
là... Parce que c'est ça qui est venu dans l'actualité puis là, paf! voici
la motion. Il y avait une question à la période de questions hier. Alors là, on a même pris la peine, du côté du député
de Terrebonne, de préciser les raisons pour lesquelles le président
Obama a justifié sa décision de refuser le projet Keystone de TransCanada. Il a
mentionné qu'une de ces raisons-là, c'est la
sécurité énergétique des États-Unis. Tout à fait d'accord, c'est exactement une
des raisons que le président Obama a mentionnée lorsqu'il a annoncé sa
décision.
Cela
dit, M. le Président, je trouve ça particulier que le Parti québécois se base
sur une décision des États-Unis pour
justifier, pour essayer de faire un lien avec le projet ici, au Québec, parce
que la sécurité énergétique des États-Unis, M. le Président, parlons-en un peu, elle est basée sur quoi? Les
États-Unis sont le plus gros producteur de pétrole au monde. Les États-Unis sont le plus gros producteur de gaz
de schiste au monde. Alors, si on essaie de suivre le raisonnement du
Parti québécois, bien là il faut dire : Ah! il faut faire comme les
Américains. Mais est-ce que les Américains sont un exemple à suivre pour le Québec en termes de sécurité énergétique? C'est
ça qu'on doit comprendre du Parti québécois?
Et,
pour pousser la contradiction davantage, il faut voir que ce n'est pas un
exemple isolé d'une autre contradiction du Parti québécois en matière d'hydrocarbure, parce que, lorsque...
Encore une fois, revenons à la course à la chefferie du Parti québécois, le
député de Marie-Victorin et leader de l'opposition officielle, qu'appuyait le
député de Terrebonne, a basé toute sa
plateforme électorale sur le fait qu'il fallait absolument exploiter Anticosti.
Il fallait aller de l'avant avec Anticosti.
Puis, à l'époque, le député de Marie-Victorin basait toute sa théorie, toute sa
thèse sur le fait qu'il y avait du pétrole,
mais du pétrole de schiste. Là, maintenant, on sait que ce n'est pas du pétrole
de schiste qu'il y a en abondance à
Anticosti, parce que nous, on a fait des études, contrairement au Parti
québécois qui n'a fait aucune espèce d'étude, qui a juste donné le feu vert pour l'exploitation d'Anticosti. Nous, on
a dit : Peut-être... on va prendre un peu de recul. On va faire une
évaluation environnementale stratégique puis on va essayer de voir vraiment
qu'est-ce qu'il en est.
Alors,
déjà, les premières études nous révèlent que c'est du gaz de schiste qui se
retrouve là. Alors, est-ce que je
dois comprendre encore là que le gouvernement du Parti québécois, qui était
pour l'exploitation d'Anticosti, qui a conclu une entente pour exploiter
Anticosti et, en plus de ça, une exploitation qui était appuyée par le leader
de l'opposition officielle lorsqu'il était
candidat à la chefferie du Parti québécois, candidat qu'appuyait le député de
Terrebonne... est-ce qu'on doit
comprendre de ce côté-ci, M. le Président, que, d'un côté, on nous parle
d'appuyer ou ne pas appuyer le projet TransCanada,
de faire un BAPE, mais là, finalement, non, on ne fera pas de BAPE, mais il
faut exercer nos compétences, mais
refuser tout de suite le projet, mais qu'en même temps aussi finalement, sur la
question des hydrocarbures, bien, peut-être que le gaz de schiste,
finalement, ce n'est pas pire à Anticosti? Difficile à suivre.
On nous parle aussi
de craintes, là, hein? On a peur au Parti québécois. On nous accuse de vouloir
créer des autoroutes du pétrole au Québec.
Nous, tout ce qu'on a fait à date, c'est qu'on a fait, comme mon collègue l'a
dit plus tôt... on a mis en place une
étude environnementale stratégique sur l'ensemble de la filière des
hydrocarbures. J'ai annoncé qu'on allait
faire un BAPE sur le projet TransCanada. Nous avons annoncé une évaluation
environnementale stratégique sur Anticosti,
c'est ce que nous avons fait, là, concrètement. On n'a pas donné le feu vert à
aucun de ces projets-là. Mais, quand on
regarde l'exercice du pouvoir par le Parti québécois, on a dit : On
conclut une entente pour exploiter Anticosti sans faire aucune forme d'étude environnementale.
Aucune. Et, en plus de ça, on a dit : Bien, on va stocker du pétrole
albertain à Sorel, c'est une bonne
idée, ça. On a autorisé ça. On a émis un certificat d'autorisation pour stocker
du pétrole albertain à Sorel. Puis on
a formé un beau comité de travail avec l'Alberta pour voir comment on pouvait
travailler ensemble, le Québec et
l'Alberta, pour mieux développer le pétrole albertain au Québec. Ça, c'est le
gouvernement du Parti québécois.
Mais
là, quand nous, on nous parle à nous puis on nous accuse, nous, de vouloir
établir une autoroute du pétrole, moi,
j'aimerais ça comprendre du député de Terrebonne comment, il pensait, lorsqu'il
faisait partie du gouvernement du Parti
québécois, ce pétrole-là allait se promener au Québec. D'Anticosti, comment on
allait transporter ce supposé pétrole, qu'on
sait qu'il n'est pas là? Comment il allait transiter de l'île d'Anticosti? Le
pétrole stocké à Sorel, que le PQ a autorisé à Sorel, comment il allait
se transporter? Comment il se rend là? C'est par bateau, c'est par train.
Mais là, aujourd'hui,
le Parti québécois, maintenant qu'ils sont de retour dans l'opposition, bien
là, c'est le scandale. Mais c'est drôle, quand ils étaient au gouvernement,
aucun problème. Le député de Terrebonne, député de Jonquière, députée de Vachon, aucun problème avec tout ça. Alors, comme
vous voyez, M. le Président, si on essaie de suivre le Parti québécois en matière d'hydrocarbures, vous voyez qu'on
se lance dans un exercice, là, qui nous amène dans un trou noir sans fin. Incapable de suivre la position du Parti
québécois en matière d'hydrocarbures. C'est au goût du jour. On
semble... on lit un article dans un journal : Ah! bien, ça va être ça,
notre position.
Nous,
ce qu'on a mis en place, c'est clairement un cheminement critique qui va nous
guider dans une prise de position par
rapport à TransCanada. La décision n'est pas prise. À cette enseigne, M. le
Président, je fais référence à une lettre
datée du 18 novembre 2014, que j'ai envoyée au président de
TransCanada, puis c'est une lettre que j'ai
déjà déposée en cette Chambre. Et, quand on parle d'exercice des compétences du
gouvernement du Québec, des compétences entières en matière
environnementale, je vais citer quelques extraits de la lettre : «Quant à
la portion québécoise de l'oléoduc, elle est assujettie à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement en vertu de l'article 2, paragraphe j, du Règlement sur l'évaluation et l'examen des
impacts sur l'environnement.» C'est assez clair, ça, M. le Président. «Il est
dans votre intérêt de respecter la volonté
des Québécoises et Québécois de faire la lumière sur l'ensemble de la portion
québécoise du projet en déposant sans délai,
au ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte
contre les changements climatiques, l'étude
d'impact sur l'environnement...» l'étude d'impact sur l'environnement, dis-je.
Première citation terminée.
Deuxième
citation, un peu plus loin dans la même lettre : «J'aimerais vous préciser
que, tel qu'annoncé par notre gouvernement amendé le
30 mai dernier, l'ensemble du projet qui se situe au Québec fera
l'objet d'une évaluation environnementale
complète, incluant une audience publique tenue par le BAPE. Le rapport du BAPE
ainsi que le résultat de l'évaluation
environnementale menée par le ministère serviront à éclairer la prise de
décision par le gouvernement du Québec...»
Fin de citation. Ça, si ce n'est pas exercer pleinement les compétences du
Québec en matière environnementale, je ne sais pas c'est quoi.
Puis,
en plus de ça, nous sommes allés plus loin, nous avons posé des gestes
concrets. Le mandat est donné au BAPE.
Nous n'avons pas attendu l'étude d'impact. Ne sachant pas si TransCanada va
coopérer ou pas, nous avons décidé d'aller
de l'avant et faire comme le suggérait le député de Jonquière et ancien
porte-parole en matière environnementale de l'opposition officielle en avril dernier : d'utiliser l'article
6.3 de la LQE et donner un mandat au BAPE, même si on n'a pas reçu l'étude d'impact. Alors, nous sommes
allés de l'avant et nous exerçons pleinement nos compétences. C'est ça, exercer pleinement ses compétences. Puis encore
une fois, je le répète, nous n'avons pas encore eu le projet, puis exercer
ses compétences, c'est exercer les lois du
Québec, puis nous le faisons. Puis encore, à cette enseigne, TransCanada nous
a demandé au printemps, nous a plutôt
avertis au printemps qu'elle allait présenter des demandes de certificats
d'autorisation pour faire des travaux exploratoires justement en vue
éventuellement de finaliser la portion québécoise du projet.
• (16 h 20) •
Bien, qu'est-ce qu'on a fait, M. le Président? On a agi avec circonspection, on a agi avec prudence. On a nommé
un comité d'experts scientifiques indépendant, validé par le BAPE, pour justement assister le ministère de l'Environnement pour établir les
conditions en vertu desquelles il fallait analyser ces demandes de
certificat d'autorisation. Alors, on agit avec prudence, on agit en
vertu de la loi. Et nous prenons très
au sérieux les préoccupations des citoyennes, des citoyens du Québec,
des groupes environnementaux, des municipalités parce
que ce sont des préoccupations, M. le Président, que nous partageons.
Encore une fois, je reviens à la lettre du
18 novembre 2014 envoyée au président de TransCanada :
«Enfin, je
vous informe que la décision gouvernementale sur l'ensemble du projet sera guidée par les conditions
suivantes — conditions,
en passant, M. le Président, qui sont partagées par l'Ontario, alors je
cite :
«1° Les communautés locales devront être
consultées [avant] d'assurer l'acceptabilité sociale du projet;
«2°
S'assujettir à une évaluation environnementale sur l'ensemble de la portion
québécoise du projet, comprenant une évaluation des émissions de gaz à
effet de serre;
«3° Le projet
d'oléoduc devra respecter les plus hauts standards techniques pour assurer la
sécurité des citoyens et la protection de l'environnement et seront, en
ce sens, suivis par une unité de vigilance permanente;
«4° Le projet
doit satisfaire à la loi en ce qui a trait aux Premières Nations, à leur
participation et à leur consultation, le cas échéant.»
Ensuite, les
conditions 5, 6, 7, mon collègue en a notamment traité, mais il y a
la condition 6 sur laquelle je veux revenir, M. le Président : «TransCanada devra garantir un plan
d'intervention et de mesures d'urgence selon les standards les plus élevés et assumer son entière responsabilité au niveau économique et environnemental en cas de fuite ou déversement terrestre et maritime incluant un fonds d'indemnisation et
une garantie financière prouvant sa capacité à agir en cas d'accident.»
M. le Président, encore une fois, ce que nous faisons et ce que nous avons fait
depuis le début, c'est appliquer et exercer pleinement les compétences québécoises
en matière environnementale. Nous avons annoncé nos couleurs le 30 mai 2014. Depuis ce temps-là, nous
agissons concrètement. Nous avons suivi... Chaque action que nous avons dit que
nous prendrions, nous les avons prises. Et,
encore une fois, nous agissons constamment avec un seul souci, le meilleur
intérêt des Québécoises et des Québécois,
tant d'un point de vue social qu'environnemental, qu'économique, et ça comprend
justement la sécurité et ça comprend
justement, en appliquant justement nos lois environnementales pleinement,
s'assurer qu'on approfondisse
l'ensemble des questions soulevées par ce projet. Et d'autant plus, M. le
Président, et je terminerai là-dessus,
que, dans l'analyse de ce projet, il va falloir s'assurer qu'il y ait une
cohérence, justement, avec l'ensemble de nos actions en matière de lutte
contre les changements climatiques.
Nous avons proposé une cible de réduction de gaz
à effet de serre ambitieuse, la plus ambitieuse au Canada, M. le Président, une des plus ambitieuses en
Amérique du Nord, une cible de réduction d'émissions de 37,5 % d'ici 2030
par rapport au niveau de 1990. Il est clair
que, lorsqu'on regarde l'avenir du Québec, l'avenir énergétique du Québec, il
va falloir justement s'assurer que nos choix, que ce soit en énergie, que ce
soit en planification urbaine, que ce soit en construction,
que ce soit industriel, on les prenne en cohérence avec l'ensemble de nos
actions en matière de lutte contre les
changements climatiques. Et c'est pour ça que, justement, on se donne les
outils, on se donne les moyens et on exerce pleinement nos compétences
en matière environnementale pour être certains que le Québec que nous léguerons
aux générations futures sera un Québec,
justement, dont on sera fiers, parce que les décisions qu'on prend maintenant
auront des impacts sur les
générations futures. Et, dans ce cas-ci, si on regarde les faits, M. le
Président, ce que nous faisons, c'est que nous exerçons pleinement nos
compétences en matière environnementale. Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
ministre du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques. Je
cède maintenant la parole à Mme la députée de Vachon, en lui rappelant
qu'il reste 18 minutes à sa formation politique. Mme la députée, à vous la
parole.
Mme Martine Ouellet
Mme
Ouellet :
Merci, M. le Président. En tout cas, c'est assez surprenant de voir à quel
point il y a une bonne entente entre
la CAQ et le PLQ. Donc, pas trop surprise de voir à quel point le PLQ a réussi
à attirer des candidats de la CAQ,
dernière en date dans Saint-Henri—Sainte-Anne, mais aussi d'autres candidats, parce
qu'ils parlent vraiment d'une même voix, et tous les deux nous disent
que nous n'avons pas assez d'information pour prendre une décision.
M. le
Président, c'était assez incroyable. Je veux dire, TransCanada a déposé à
l'Office national de l'énergie du Canada,
à Calgary, plus de 30 000 pages d'information : ce n'est pas
assez d'information ni pour la CAQ ni pour le PLQ. Il y a, du côté des États-Unis — je comprends que ce n'est pas le même tuyau,
mais c'est la même problématique — toute une analyse qui a été faite par l'Environmental Protection Agency,
particulièrement sur les gaz à effet de serre, ce que se refuse de faire le Parti libéral du Québec, ce que
se refuse de faire l'Office national de l'énergie du Canada. Il y a même
l'Ontario, par la Commission de l'énergie de
l'Ontario, qui a produit sa propre étude. Donc, de l'information, M. le
Président, nous en avons à boire et à manger suffisamment pour être
capables de prendre position.
En fait,
c'est quoi, le projet d'Énergie Est? Ce n'est pas tellement compliqué, c'est un
projet de pipeline. C'est un tuyau
entre l'Alberta, les sables bitumineux, et le Nouveau-Brunswick, l'entreprise
Irving, pour le passage du pétrole. Le premier
bout de tuyau, c'est une conversion. Actuellement, c'est un gazoduc qui va être
transformé en oléoduc. Donc, au lieu
d'avoir du gaz, ça sera du pétrole. Et, au Québec et du côté du
Nouveau-Brunswick, ça devra être de la construction. Donc, on parle de
1,1 million de barils par jour — c'est énorme — qui
va traverser des cours d'eau, des rivières, le Saint-Laurent.
Et, vous
savez, M. le Président, du pétrole bitumineux, ce n'est pas du pétrole
ordinaire. Ça a été dit un petit peu plus
tôt : c'est le pétrole le plus sale de la planète. C'est aussi du pétrole
très visqueux et, s'il y a une fuite dans un de nos cours
d'eau, par exemple dans le fleuve Saint-Laurent, qui est la source
d'approvisionnement d'eau potable de la majorité des Québécois et des Québécoises, bien, c'est seulement 15 % qu'on
peut récupérer. Il y a 85 % qui va rester dans l'eau. Donc, ça, c'est un risque extrêmement important du
côté de la santé. Pas juste un risque environnemental, mais du côté de
notre santé.
Et c'est un
projet essentiellement pour de l'exportation. Donc, on transforme le territoire
de l'Ontario et du Québec en
autoroute d'exportation des sables bitumineux. Ce n'est pas pour de la
consommation au Québec, c'est de l'exportation. En fait, c'est un projet pour faire plaisir à l'industrie pétrolière de
l'Alberta et pour faire plaisir à Irving, au Nouveau-Brunswick. C'est
essentiellement ça, le projet d'Énergie Est.
Vous savez,
M. le Président, ce projet-là a été préparé pour permettre l'augmentation de
l'extraction des sables bitumineux et, je le répète, un des pétroles les plus
polluants de la planète et qui génère le plus de gaz à effet de serre, alors qu'on sait que la planète doit réduire ses
émissions de gaz à effet de serre. Et de qualifier ce projet-là de
développement économique... En fait,
il faut voir à qui ça profite, parce que ce n'est pas un développement
économique pour le Québec. Pour le Québec, c'est un projet
d'appauvrissement économique, c'est très clair.
Et, lorsqu'on
parle d'économie... Parce qu'on peut bien en parler, de l'économie... Et
d'ailleurs la députée de la CAQ, de
Saint-Hyacinthe, mélange tout, parce que, lorsqu'elle dit qu'on est contre tous
les projets puis que, du pétrole, on
en consomme, ce projet-là d'Énergie Est, ce n'est pas un projet pour le Québec,
c'est un projet qui ne fait que passer, c'est de l'exportation. Donc, il
ne faut quand même pas tout mélanger.
Et, du côté
du potentiel économique de ce projet-là, je vais vous citer Mark Carney, qui
est le gouverneur de la Banque
d'Angleterre et président du Conseil de stabilité financière du G20. Donc, lui,
il cite le GIEC, qui dit qu'il y a de 1/5
à un tiers des réserves pétrolières de la planète qui devront rester enfouies
et, encore plus, celles de l'Alberta, étant donné qu'elles produisent le plus de gaz à effet de serre. Il dit qu'à
ce moment-là ça va coûter très cher aux pétrolières et à certains fonds d'investissement qui investissent
dans les produits pétroliers et que, donc, ça, c'est un risque extrêmement
important du côté de la planète.
Donc, le pétrole bitumineux est un pétrole
extrêmement polluant, et ce n'est pas un projet de développement économique pour le Québec, c'est un projet
d'appauvrissement économique. Et d'être contre ce projet-là, ce n'est pas
d'être contre le Canada, c'est d'être pour
le Québec. C'est sûr que, si le Québec était indépendant, nous pourrions
refuser, nettement et clairement, ce
projet-là. Toutefois, même si le Québec n'est pas indépendant, le Québec
possède plusieurs poignées pour être
capable de refuser ce projet-là. Mais malheureusement, de la part du Parti
libéral, au gouvernement du Québec, c'est une série d'erreurs.
Donc, le ministre de l'Environnement du Parti
libéral ne fait clairement pas sa job, et là je vais vous citer, Mme la Présidente... Premièrement, TransCanada
aurait dû demander un permis pour les levées sismiques du côté du port de Cacouna. Elle ne l'a pas fait. Ça a pris du
temps avant que le Parti libéral se réveille, mais, plusieurs mois plus tard, a
finalement émis une amende :
5 000 $. Une pénalité pécuniaire administrative, mais pas de
poursuite au niveau pénal, alors qu'on sait que ça avait un impact
direct du côté des bélugas et de la pouponnière des bélugas.
• (16 h 30) •
Le ministre de l'Environnement n'a pas fait sa
job, il a fallu que ce soient les groupes environnementaux qui aillent en injonction contre TransCanada. Parce
que le ministre de l'Environnement du Québec aurait dû exiger un certificat
d'autorisation pour les forages, donc il ne
l'a même pas demandé. Et là, ensuite, après que les groupes environnementaux
aient fait le travail du ministre de
l'Environnement libéral à sa place, le ministre de l'Environnement a décidé
d'émettre rapidement, rapidement un
certificat d'autorisation pour les forages, mais sans valider correctement. Il
a tellement mal fait sa job que les
groupes environnementaux sont retournés en cour et ont réussi à avoir, à ce
moment-là, un arrêt des travaux en invoquant que le ministre de
l'Environnement libéral n'avait pas fait son travail. C'est assez incroyable,
Mme la Présidente. Et, suite à ça, donc, le promoteur a décidé de ne pas aller
de l'avant du côté du port à Cacouna.
Et je
voudrais saluer — et je
crois que c'est important de le faire — tout le mouvement citoyen qui s'est vraiment
tenu debout à Cacouna et ailleurs au Québec
pour protéger la pouponnière des bélugas et aussi pour faire en sorte que le
Québec ne devienne pas une autoroute
d'exportation des sables bitumineux. Les comités citoyens ont réussi à gagner
une première manche en empêchant le
port à Cacouna, mais le problème reste important parce que maintenant c'est le
tuyau qu'il faut réussir à bloquer.
Et clairement on voit que le ministre de l'Environnement libéral n'a aucun
contrôle et ne sait pas du tout où
est-ce qu'il s'en va parce que c'est erreur après erreur du côté du ministre de
l'Environnement libéral. Et même,
encore dernièrement, il a autorisé des levés sismiques pour le passage de
Saint-Augustin-de-Desmaures jusqu'à Lévis alors qu'il n'y a aucune
autorisation sur ce projet-là, donc pas davantage concernant le projet.
Et, vous
savez, Mme la Présidente, de vouloir refuser un projet de pipeline, de
transformer le Québec en autoroute d'exportation
des sables bitumineux, on n'est pas tout seuls à refuser ce projet-là. M.
Obama, président des États-Unis, a
refusé le projet Keystone parce qu'effectivement il ne voulait pas que les États-Unis
ne servent, tout simplement, que d'autoroute d'exportation des sables
bitumineux, et tous les impacts environnementaux, incluant les GES, qui ont été
considérés par les États-Unis... Donc, à ce
moment-là, la volonté d'augmenter l'extraction des sables bitumineux du Canada
ne pourra pas passer par le Sud. Mais il n'y
a pas que le président Barack Obama qui a refusé, la Colombie-Britannique
aussi refuse, refuse le projet de Northern
Gateway. Et pourtant la Colombie-Britannique est une province, et donc il est
très clair que la province du Québec
pourrait aussi refuser. C'est sûr que, si nous étions un pays, ça serait bien
mieux — une
autre bonne raison de devenir indépendant — mais il y a des poignées,
quand même, que nous pouvons utiliser.
Et, du côté
de l'Ontario, l'Ontario a fait toute une étude du côté de la Commission de
l'énergie de l'Ontario, et voici
leurs conclusions : «La Commission de l'énergie de l'Ontario conclut que
le projet d'oléoduc Énergie Est comporte plus de risques environnementaux et — plus de risques — économiques que de bénéfices pour les
Ontariens et qu'il fera en plus
grimper le prix du gaz naturel...» Écoutez, Mme la Présidente, ça, c'est des
gros inconvénients économiques en plus des inconvénients environnementaux. Et le
tuyau qui passe en Ontario, c'est la même chose au Québec, sauf qu'au Québec c'est encore pire au niveau des
inconvénients parce qu'il y a de la construction, donc on va devoir passer sur
des territoires agricoles. Et ça,
c'est les poignées que le gouvernement du Québec a, il peut refuser des
certificats d'autorisation. Il aurait
pu refuser le certificat d'autorisation à TransCanada pour le levé sismique
qu'il a autorisé tout dernièrement entre Saint-Augustin-de-Desmaures et
Lévis. Il peut refuser du dézonage agricole pour faire passer le tuyau. Il en
a, des poignées, pour refuser ce projet-là, et nous l'invitons à utiliser les
différentes poignées qu'il a.
Il
faut aussi rappeler, Mme la Présidente, que le premier ministre libéral avait
dit lors d'une rencontre — parce qu'il aime bien
ça, faire des rencontres avec ses voisins ontariens — avec la première ministre ontarienne, que,
sans port au Québec, le projet
d'Énergie Est n'avait pas suffisamment de retombées économiques. Il
disait : Pas de port, pas de projet. Pas de port, pas de tuyau. Donc, ça a été confirmé par TransCanada qu'il
n'y aurait pas de port au Québec après leur échec à Cacouna. Donc, j'espère que les deux ministres qui
sont intervenus cet après-midi, tant celui de l'Environnement que celui des Ressources naturelles, ne sont pas en train de
contredire leur premier ministre. Et, si le premier ministre veut être logique
avec ce qu'il a dit et qu'il ne veut pas se dédire, il faudrait qu'il refuse ce
projet-là.
Donc,
je pense qu'on a toutes les informations pour pouvoir conclure qu'il n'y a
aucun intérêt économique et plein de
risques du côté de la santé publique et du côté environnemental avec le projet
d'Énergie Est. Et de dire non à ce projet-là, c'est de vouloir que le Québec s'enligne vers un nouveau développement
énergétique, refuser que le Québec se transforme en autoroute
d'exportation des sables bitumineux et faire en sorte que le Québec regarde
plutôt du côté des énergies renouvelables.
Le Québec est un leader mondial du côté des énergies renouvelables, 99 %
de notre électricité est verte. Le Québec
a une expertise incroyable en efficacité énergétique pour diminuer notre
consommation de pétrole, en électrification des transports. Ça, c'est
l'enlignement pour le Québec, Mme la Présidente.
Et
je suis assez surprise de voir que la députée de la CAQ appuie ce projet-là,
tout comme le fait le Parti libéral, alors
que, du côté économique, du côté environnemental, c'est clair, net et précis...
Et la position du Parti québécois, elle est très claire. Je ne sais pas comment ça se fait que le ministre de
l'Environnement libéral est encore aussi mêlé, elle est très claire, elle est inscrite dans la motion, le
Parti québécois refuse le projet d'Énergie Est parce que c'est un projet qui va
appauvrir les Québécois et les Québécoises
tant d'un point de vue économique que d'un point de vue environnemental et
de santé publique. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée de
Vachon. Et, pour la prochaine intervention,
je cède la parole à M. le député de Masson, tout en vous rappelant que vous
disposez d'un temps de parole de six minutes.
M. Mathieu Lemay
M.
Lemay : Merci, Mme la Présidente. Donc, comme ma collègue députée de
Saint-Hyacinthe, je vous rappelle qu'on
est largement en faveur de la motion déposée par le Parti québécois
aujourd'hui, mais, par contre, on est, malheureusement, contre les 11 derniers mots de la motion, et c'est
pour ça que nous avons proposé un amendement. On est contre le fait de refuser immédiatement le projet Énergie Est de
TransCanada. Ça serait, à notre avis, prématuré. Donc, c'est pour ça qu'on a déposé un amendement. Si le PQ, lui, il
refuse de modifier sa dernière partie, bien, au final, on devra voter contre
la motion.
Vous
savez, plusieurs étapes doivent encore être franchies, Mme la Présidente, avant
d'offrir aux Québécois une position
honnête, documentée et éclairée. La Coalition avenir Québec, on souhaite, nous
autres, de continuer à jouer notre rôle
d'opposition constructive. On veut analyser l'éventuel rapport du BAPE qui sera
fait. Le ministre de l'Environnement nous
a mentionné qu'il y aura son rapport du BAPE qui sera déposé éventuellement, on
veut prendre le temps de consulter ce
rapport-là, les avis et les constats, avant de dire si, oui ou non, on doit
refuser le projet Énergie Est. Comme la députée de Saint-Hyacinthe nous l'a mentionné, elle en a fait part tout à
l'heure dans cette Chambre, bien, on croit que nous, les parlementaires,
on doit garder notre esprit ouvert à ce moment-ci du processus.
Bon,
tout d'abord, si on revient à TransCanada, bien, eux, ils maintiennent pour le
moment que leur oléoduc va approvisionner les raffineries de Valero et
de Suncor, contrairement à ce que nous a mentionné la députée du Parti québécois. Bien, ça, ça va permettre de remplacer
une partie du pétrole qui provient de l'étranger. C'est une option de plus
qu'on va avoir pour nous, nos consommateurs
au Québec. Présentement, le pétrole, il nous arrive par bateau, il nous arrive
par train, mais cet oléoduc-là, c'est une option supplémentaire pour
approvisionner nos raffineries en sol québécois. C'est ça, nous, on accueille favorablement cette perspective d'un
approvisionnement canadien en hydrocarbures. Si on regarde la Stratégie canadienne de l'énergie, on a
eu une rencontre des premiers ministres cet été, bien, on regarde, on
dit : Si on accepte que le
pétrole vienne d'ouest en est, bien, pourquoi, d'abord, on ne pourrait pas,
nous autres mêmes, proposer que notre surplus d'énergie électrique,
notre énergie, nos lignes électriques ne pourraient pas partir d'est en ouest?
Ça
fait qu'il faut considérer ces options-là, Mme la Présidente, mais il ne faut
pas qu'on soit dogmatiques. On consomme
encore du pétrole ici, au Québec, puis encore pour plusieurs années. On veut
réduire notre consommation de pétrole,
il faut la réduire, on a besoin de réduire nos émissions de gaz à effet de
serre. Mais, pour le moment, c'est quoi, le meilleur choix pour nous au Québec? C'est de s'approvisionner du pétrole
qui vient du Venezuela, qui vient de l'autre côté de l'Atlantique, qui vient des États-Unis ou qui vient de
l'Alberta? C'est une option de plus, cet oléoduc-là. Il faut regarder la
sécurité du transport des hydrocarbures. Est-ce que c'est plus sécuritaire par
un oléoduc, par train, par bateau? Bien, pourquoi est-ce qu'aujourd'hui
on dit non à toutes ces options? Il faut avoir les options disponibles sur la
table.
• (16 h 40) •
Ceci
étant dit... Puis la partie essentielle de mon intervention, ça va rester sur
les impacts environnementaux, puis il y a
plusieurs impacts environnementaux possibles avec le projet d'Énergie Est. Il
faut qu'on soit intransigeants envers les éventuels déversements, il
faut qu'on ait des garanties fournies par TransCanada au Québec.
Il y a
trois éléments qui sont non négociables pour notre formation politique. Tout d'abord, il y a la sécurité de la
conduite. Il va falloir qu'elle réponde aux plus hauts standards de l'industrie
qui sont actuellement disponibles, puis spécifiquement
dans le cas où c'est qu'on traverse les cours d'eau. C'est ça, le nerf de la
guerre, c'est la sécurité, la protection de l'environnement.
Deuxième élément, la
vitesse de réaction en cas de crise. Il faut qu'on obtienne des garanties de la
part de TransCanada quant à sa capacité de
réagir en cas de bris puis de déversement, enfin de réduire au minimum les
risques d'une crise environnementale
sur le territoire québécois. Nos municipalités, nos services de sécurité
publique, nos services d'incendie doivent être formés, doivent pouvoir
agir en tant que premiers répondants, et pas seulement pour ériger un périmètre
de sécurité, mais aussi pour pouvoir intervenir.
Troisième
élément, la mise en place d'un fonds d'urgence. Il faut qu'on soit doté d'un
plan d'urgence, d'un fonds d'urgence
qui va permettre de minimiser les risques en cas d'une catastrophe
environnementale. C'est ça, nos trois éléments essentiels pour pouvoir
dire oui à un éventuel projet d'Énergie Est.
Mais
nous, si on revient au fédéral un peu, ils ont fait la loi C-46 qui propose une
responsabilité de 1 milliard de dollars.
Bien, on croit, Mme la Présidente, que nous, au Québec, nos exigences ne
doivent pas être moindres que celles demandées par le fédéral.
Je le répète, nos inquiétudes présentement face au
projet d'Énergie Est, elles sont grandes, on est préoccupés. On le sait, dans
nos circonscriptions dans Lanaudière, nos maires ont réagi fortement, le député
de Terrebonne l'a mentionné tout à
l'heure. Bien, il y a eu des études d'impact environnemental qui ont été
réalisées par la MRC de D'Autray, entre autres. Puis eux, ils se basaient sur des études, puis ils mentionnaient
que, si jamais il y avait un déversement avec une fuite inférieure à 1,5 % — parce que TransCanada nous a dit : Une
fuite inférieure à 1,5 %, on aurait de la difficulté de la détecter — bien, ça, ça pourrait représenter des fuites
de 2,6 millions de litres de pétrole par jour, et c'est énorme. Donc,
il y a des préoccupations. Par contre,
est-ce qu'on doit dire non au projet de TransCanada? Je ne crois pas. On a
proposé un amendement, il faut qu'on
y aille sur la sécurité, sur notre vitesse de réaction, sur la mise en place
d'un fonds d'urgence. C'est ça qui est le plus important, que le Québec
puisse intervenir, nos pleines compétences et entières en matière
d'environnement. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Masson. Et maintenant je
cède la parole à M. le député de Sanguinet. Vous disposez d'un temps de parole
de 6 min 45 s.
M. Alain Therrien
M.
Therrien : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, il y a sept
conditions qui sont exigées pour accepter ou non le projet de
TransCanada. Je vais insister davantage sur les retombées économiques.
Il
faut faire attention, quand on parle de retombées économiques, l'analyse
économique doit être plus profonde que ça. En économie, on ne fait pas nécessairement une analyse de retombées
économiques, on fait des analyses avantages-coûts. On regarde les avantages et on regarde les coûts.
À partir du moment où est-ce que les avantages sont supérieurs aux coûts,
on donne notre aval au projet, on est
d'accord avec ce projet-là. Alors, ce que je vous invite à faire maintenant
avec moi, c'est qu'on va regarder rapidement les avantages qu'on peut
avoir de ce projet-là et les coûts.
La
députée de Saint-Hyacinthe, tantôt, a mentionné des choses, et elle avait
raison sur quelques points. Elle disait : On ne peut pas vivre sans pétrole, que tout le monde ici consomme du
pétrole. C'est vrai, on doit s'assurer une sécurité d'approvisionnement. C'est vrai. Elle dit que le
Parti québécois, c'est un parti qui rejette tout. C'est faux. Pourquoi? Parce
que c'est justement pour ces deux premières
raisons que, quand on était au pouvoir, on a eu une commission qui s'est
penchée sur l'inversion du pétrole d'Enbridge... J'oublie.
Une voix :
...
M.
Therrien : Enbridge, oui, c'est ça. Donc, l'inversion du
pétrole d'Enbridge, le 9c. Et, justement, il y avait le député de Laurier-Dorion qui était là, je ne sais
pas s'il s'en rappelle. Il y avait des députés de la CAQ, mais là je ne me
rappelle plus c'était qui. Mais, décidément,
l'information ne s'est pas rendue à la députée de Saint-Hyacinthe parce que,
justement, on avait dit dans cette
commission-là — et tout
le monde était à peu près d'accord là-dessus — qu'on devait assurer, justement, la
sécurité d'approvisionnement pour nos deux raffineries au Québec parce qu'on
consomme du pétrole, et c'est pour ces
raisons-là qu'on avait donné notre accord. Est-ce que le Parti québécois est
contre tout? Faux, on est pour quand
il y a des retombées positives, et clairement des bonnes retombées économiques
au-delà des coûts que ça peut
engendrer, et c'est pour ça qu'on avait dit oui, sous des conditions,
évidemment, de sécurité, pour le projet d'Enbridge.
Par
contre, quand elle dit : On est d'accord avec ça si ça vient au Québec, ça
ne viendra pas au Québec. Ce qu'on est sûrs, c'est que ça va passer tout
droit parce qu'on est déjà... à 85 % par Enbridge, et donc on n'a pas
besoin de ce pétrole-là. Ça fait que ce qu'il va faire, le pétrole, il va
partir de l'Alberta puis il va s'en aller ailleurs, on va devenir l'autoroute du pétrole. C'est ça que vous voulez?
C'est ça que les gens, ici, veulent, qu'on devienne l'autoroute du pétrole
puis qu'on s'assoie avec une chaise, puis
qu'on regarde passer le pétrole sous risque d'avoir des problèmes
environnementaux? C'est ça qu'on veut? On ne mérite pas mieux que ça, les Québécois?
Parce que, comme dit le premier ministre, parce qu'on reçoit de la
péréquation, on va être obligés de dire oui? Parce que, pour lui, c'est un
avantage, c'est qu'on reçoit de la péréquation.
Quand je les regarde appauvrir le Québec, bien, je me dis : Bien, c'est
peut-être parce qu'ils veulent plus de
péréquation. C'est peut-être ça, c'est peut-être leur désir le plus profond
d'être davantage dépendants du reste du Canada.
Quand
on parle davantage de ce projet-là, création des emplois, temporairement, oui.
Combien? On ne le sait pas encore.
Création d'emplois permanents, avec un port, oui. Pas de port, pas bien, bien.
Ça fait que, là, on s'aperçoit, là, que les avantages commencent à
diminuer pas mal. Puis, en plus, c'est le Parti libéral qui va évaluer les
avantages probablement. Ça, c'est très inquiétant.
Coûts.
Les coûts, le MTQ nous dit : Au niveau des routes, il y aura des
problèmes, on va être obligés de refaire certaines routes. Coûts, Hydro-Québec dit : On va avoir des
problèmes d'approvisionnement, possiblement coûts. Il va y avoir des problèmes de déversement
potentiellement. Comment on fait pour analyser ça en économie? Tu arrives avec
une probabilité. Ça fait que tu arrives avec
une probabilité de comment ça va coûter, puis, à partir de ce moment-là, tu
es capable d'évaluer approximativement les coûts économiques liés aux dangers
que va apporter l'idée de devenir l'autoroute du pétrole. Ça se calcule, ça.
Au-delà
de tout, ce que la députée de Saint-Hyacinthe a oublié, puis la CAQ oublie
évidemment, c'est le malaise hollandais.
Quand elle disait : Ah! bien, c'est le fun, s'approvisionner du Canada,
parce que c'est un avantage parce qu'on est Canadiens, ce n'est pas un avantage pour le Québec. Arrêtez de
penser en Canadiens, puis pensez en Québécois, on est ici parce qu'on est l'Assemblée nationale du
peuple québécois. Arrêtez de penser au reste du Canada parce que, quand tu
exploites le pétrole de l'Alberta, qu'est-ce
que ça cause? Puis je vois le ministre des Finances rire, et il le sait très
bien, c'est un économiste, c'est le
malaise hollandais. Ça veut dire que plus tu exploites le pétrole de l'Ouest,
plus tu l'exportes, plus le dollar
canadien va être en hausse parce qu'il va être en demande pour payer le
pétrole. Plus le dollar canadien va être en demande, plus nos exportations vont
coûter cher à l'étranger. Ça veut dire qu'il y a des emplois manufacturiers
au Québec qui vont être perdus parce qu'on
exploite du pétrole en Alberta. Mme la Présidente, c'est ça qu'on veut? Ah! là,
ils vont dire : Ça, c'est le Parti québécois, ils sont contre tout, ainsi
de suite. Ils font de l'urticaire quand ils parlent du Parti québécois.
L'OCDE,
dans ses évaluations du malaise hollandais... Je vois le député de Vanier-Les
Rivières, je vais lui envoyer par courriel s'il le veut, l'OCDE, les
économistes de l'OCDE considèrent qu'au Canada on a perdu 200 000 emplois manufacturiers à cause du malaise hollandais. Si on fait le calcul rapidement,
c'est entre 75 000 et 100 000 jobs au Québec directement qui ont été perdus. Pourquoi?
Parce qu'une partie, une bonne partie
du tissu industriel canadien, il est ici, au Québec. Bien, ça, on n'en parle pas. Évaluez, M. le ministre,
évaluez, Mme la Présidente, comment coûtent 75 000 emplois récurrents, année après année, qu'on perd parce
qu'on exploite le pétrole de l'Alberta, un pétrole sale qui vient nuire à notre
économie. Et ces gens-là sont pour. La CAQ
est pour. La CAQ, les députés de la rive... Il y a des députés de la Rive-Nord,
là, ils vont voir passer ça, là, le pipeline, puis ils vont dire à leur
monde : Bien, nous autres, on n'est pas contre l'idée. Ils les voient
arriver avec des pépines, bien, on n'est pas contre l'idée. Oui, mais ça s'en
va ailleurs, ça, dans le monde, ça ne s'en
vient même pas au Québec, ça crée zéro job. Pas grave, on n'est pas contre
l'idée. Tassez-vous de là, amenez-vous des parapluies.
Alors,
madame, écoutez, Mme la Présidente, il faut comprendre qu'on est dans une
situation où on a un premier ministre
qui se considère plus Canadien que Québécois, malheureusement. Le premier
ministre réagit en fonction de ce que le
Nouveau-Brunswick va gagner, de ce que l'Alberta va gagner, mais rien au sujet
du Québec, rien au sujet du Québec...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : ...35.6°, Mme la Présidente, on doit éviter de
porter des qualificatifs sur le premier ministre, qui a reçu le mandat de la
population québécoise d'être leur premier ministre.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Très bien. Très bien, il ne reste...
Une voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vais vous demander de conclure,
il ne reste que quelques secondes, M. le député.
M.
Therrien :
Allez lui dire qu'il n'est pas fier d'être Canadien, puis on va s'en reparler.
Allez lui mentionner que... puis allez lui rappeler que c'est le
défenseur des Québécois, ça va lui faire du bien.
• (16 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, ceci met fin à votre
intervention, M. le député de Sanguinet. Et, maintenant, il est temps à l'auteur de cette motion de nous présenter
sa réplique, mais d'abord vous devez nous mentionner si vous autorisez l'amendement
qui a été présenté par Mme la députée de Saint-Hyacinthe.
M.
Traversy : Merci, Mme la Présidente. Alors, après lecture, évidemment,
on refuse la demande d'amendement
de la Coalition avenir Québec.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, vous pouvez intervenir. Vous disposez d'un temps de réplique
de 10 minutes.
M.
Mathieu Traversy (réplique)
M.
Traversy : Merci, Mme la Présidente. Après ces nombreux échanges, je cherchais toujours
à savoir quels étaient les arguments
du gouvernement pour vouloir continuer dans le projet de
TransCanada d'Énergie Est. On a parlé d'environnement, on a parlé d'économie, on a parlé de
sécurité, et, à chaque fois que le gouvernement venait pour justifier, là, certains poids lourds,
là, dans sa décision... certains arguments lourds, pardon, à chaque fois on
tombait dans des discours partisans, des discours, là, où, évidemment,
on rejetait la faute sur d'anciens gouvernements, la routine, le cynisme à l'Assemblée
nationale à cet égard.
Quand on écoute le fond des choses, on se rend
compte que le ministre de l'Environnement, le ministre des Ressources naturelles sont beaucoup plus sur la défensive que sur les réponses
claires parce qu'ils sont en
train d'étudier depuis des mois,
semble-t-il, les enjeux qui tournent autour du TransCanada Énergie Est et ne
sont pas encore arrivés aux conclusions
des travaux sur lesquels ils planchent depuis autant de temps. La députée de
Vachon a mentionné que déjà beaucoup
d'information avait été déposée à l'Office national de l'énergie à Calgary, que
beaucoup de positions avaient été
émises par la part des groupes environnementaux, par des groupes de la société
civile, par des citoyens, par des municipalités
et par différents acteurs politiques, mais, malgré toutes ces informations,
tous ces détails, le gouvernement ne semble pas vouloir changer encore
d'opinion.
La semaine
dernière, nous avons eu pourtant un son de cloche qui aurait pu éveiller des
consciences, aurait pu amener un changement de cap, nous avions l'information
la semaine dernière que TransCanada abandonnait son projet de port pétrolier, qui était, si vous voulez,
l'argument fort du gouvernement libéral pour justifier des retombées
économiques et des retombées en
emplois dans le secteur québécois. D'ailleurs, ça fait partie de la lettre
signée de la main même du ministre de
l'Environnement avec ses sept recommandations, envoyée à la pétrolière
TransCanada pour lui dire : Voici ce que nous vous demandons afin
de bien évaluer votre projet d'Énergie Est. Et un des arguments que le ministre
de l'Environnement demandait à l'égard de la
pétrolière, c'était des retombées économiques et fiscales pour tout le Québec,
notamment en matière de création d'emplois, et particulièrement en région.
Avec les nouvelles que nous avons eues la
semaine dernière, Mme la Présidente, je vois mal comment cette condition peut être remplie. Il y a d'autres
points dans la lettre du ministre de l'Environnement qui semblent aussi être
problématiques, notamment en ce qui concerne l'acceptabilité sociale. On vous
en a parlé longuement au cours des dernières
minutes, plusieurs villes, plusieurs citoyens de partout à travers le Québec,
surtout sur la Rive-Nord de Montréal, se
sont manifestés contre. Tout à l'heure, le député de la CAQ de Masson parlait
de la MRC D'Autray. La MRC D'Autray s'est
positionnée contre le projet devant une foule rassemblée au conseil de ville de
la MRC pour, justement, applaudir cette
résolution municipale des différents représentants de ce coin de pays, et,
évidemment, il y a un son de cloche qui est à tirer de ça. Puis je parle de la MRC D'Autray, mais il y a également
les gens de la MRC des Moulins qui se sont positionnés contre, Mme la Présidente, il y a des gens de
Laval. Laval qui est quand même très importante, là, dans l'échiquier de la
CMM, qui a décidé de prendre position sur ce
dossier en solidarité avec la couronne nord de Montréal, nous en étions
très fiers.
J'ai même vu,
Mme la Présidente, des gens membres de la Coalition avenir Québec participer à
des manifestations contre
TransCanada, notamment... Puis je ne nommerai pas les députés concernés, mais
c'était à la ville de Mascouche. Alors,
géographiquement parlant, il y a quand même, là, une certaine cohérence à
développer. Si on est pour, il faut le dire.
Si on est contre, il faut le mentionner. Là, je pense qu'il y a une certaine
contradiction, je ne peux pas dire le mot... Je ne peux pas dire certains mots antiparlementaires, mais je pense
qu'on gagnerait à une plus grande cohérence aussi, Mme la Présidente, en ce qui a trait à la position
de la coalition sur cette question parce qu'entre la couronne sud et la couronne nord il me semble y avoir une frilosité
qui est très différente dépendamment du porte-parole qui prend la défense
de ce dossier.
Là-dessus,
aussi je dois vous dire que les retombées économiques étant de moins en moins
claires, je m'attendais à ce que le
gouvernement libéral puisse peut-être défendre une nouvelle position. Parce que
le premier ministre — puis on l'a mentionné — avait
affirmé, pas en 1972, pas en 1984, qui est une très belle année parce que c'est
mon année de naissance, cet été, Mme la
Présidente, le 14 juillet 2015, avait dit : Sans port pétrolier au Québec,
pas de pipeline. Le premier ministre
du Québec. Et là j'entrevois mal comment le gouvernement libéral, une fois
qu'on apprend qu'il n'y a plus de port pétrolier,
va être capable de dire : Oui, mais on a dit ça, mais, finalement,
peut-être que ce n'est peut-être pas tout,
on va y réfléchir, on va étudier sur d'autres
enjeux. Ça devient vaseux, ça devient compliqué, ça devient dur à suivre. Il
n'y en aura pas, de retombées économiques, d'emplois permanents au Québec ou
très peu, si ce n'est que pour la construction d'un tuyau qui sera une
autoroute d'exportation de pétrole.
Le député
de Sanguinet en a fait une démonstration magistrale comme on
lui connaît à l'habitude, ce pétrole est voué à l'exportation à l'étranger. Les raffineries au Québec
sont déjà bien alimentées, la vaste majorité du pétrole qui
va être apporté va être pour
l'exportation, et qu'est-ce que le Québec en va retirer? Et là, bien, c'est sûr, Mme la Présidente, à titre de porte-parole en matière d'environnement, il y a
toute la question aussi des risques que ça occasionne sur des
espèces menacées, sur nos cours d'eau, qui sont notre or bleu au Québec,
qu'on tente de défendre du mieux possible avec les capacités et les pouvoirs que nous avons. Parce que
vous avez vu que, dans le cas du «flushgate», le pouvoir du Québec pour défendre ses cours d'eau et défendre ses
étendues est limité dépendamment des champs de compétence entre le fédéral
et le Québec, une autre bonne raison de devenir indépendant.
On a donc
cette difficulté à avoir des garanties sûres pour la sécurité environnementale. Vous l'avez vu vous-même
dans le dossier du port de Cacouna, vous
l'avez vu au large des battures de Saint-Augustin pour des espèces endémiques,
uniques au monde. Vous avez vu aussi toute
l'inquiétude qui est véhiculée par nos agriculteurs, qui ont des terres
agricoles, des fois, ancestrales qui
appartiennent à leur famille depuis fort longtemps, qui voient arriver
avec leurs gros sabots une pétrolière qui dit : À partir de maintenant, on voudrait passer
un pipeline à proximité ou, sinon, sur vos terres. Ça crée beaucoup
d'inquiétude.
Et
l'enthousiasme populaire est loin d'être au rendez-vous. Les sondages que
nous vous avons fait part au début de
cette discussion, c'est que 87 %
des Québécois voulaient que le Québec puisse avoir le dernier mot dans ce
dossier. Et c'est ce qu'on tente de
rappeler au gouvernement d'en face, c'est de dire : Assumez-vous et
défendez le territoire québécois. C'est
chez nous que ça va se passer, et est-ce que le jeu en vaut la chandelle?
Est-ce qu'assurer 100 % des risques sans aucune retombée économique
et sans acceptabilité sociale en vaut vraiment le coût?
Et, Mme la
Présidente, les événements à l'international nous forcent aussi à la réflexion
parce qu'on s'en va dans quelques
semaines à la conférence sur les changements climatiques à Paris, parce que les
yeux de la planète vont être tournés vers
la Ville Lumière pour voir quels seront les efforts qui vont être véhiculés par
les différents pays à travers la planète pour diminuer nos gaz à effet
de serre, et un projet comme celui de TransCanada Énergie Est est tout un
projet polluant : 7 millions de
voitures à essence de plus par année sur les routes du Québec pour vous le
figurer d'une façon un peu plus
visuelle. C'est énorme, ça vient plomber d'une façon assez dramatique les cibles
que nous pourrions nous fixer.
Et, lorsqu'on
regarde aussi ce que font les autres pays à travers le monde, ils sont en train
d'enclencher une transition énergétique
vers des énergies renouvelables, vers des énergies vertes, et est-ce que le
Québec ne devrait-il pas emboîter le pas dans cette direction et
assumer, justement, son rôle de leader en matière d'énergies renouvelables, en
matière d'électrification des transports?
Parce que nous avons le potentiel et nous avons la capacité sur le territoire
québécois de pouvoir s'imposer en la
matière? Quand on regarde les États-Unis, qui peuvent être critiqués de part et
d'autre dépendamment de leurs prises
de position, ils ont choisi de dire non à un transport de pipeline de
TransCanada à travers leur territoire. Lorsque
les États-Unis décident de lancer un tel signal, il est impossible pour le
Québec de l'ignorer, et il faut le prendre en considération, et il faut
que le gouvernement libéral finisse par nous dire le fond de sa pensée.
Rapidement,
Mme la Présidente, nous aimerions avoir un son de cloche clair de la part du
gouvernement en place pour le TransCanada Énergie Est. Nous sommes
toujours dans le vague, nous sommes en attente de leur décision, de l'évaluation du dossier. Je comprends que les
choses ne peuvent pas se faire de façon précipitée, mais ça fait des mois et des années que nous en parlons. Nous avons de
plus en plus de sons de cloche. Nous avons de plus en plus d'information
sur l'aboutissement de ce que va être ce
projet. Nous avons des déclarations du premier ministre qui sont très claires,
sans ambiguïté, avec des conditions
envoyées et signées de la main de la part du ministre de l'Environnement à
TransCanada qui ne semblent pas en
voie d'être respectées. Nous aimerions donc avoir la position du gouvernement
libéral sur ce projet, un projet qui,
je vous le rappelle, ne nous rapporte rien, que des ennuis, que des
emmerdes — comme
disait Charles Aznavour dans ses plus
belles chansons — jusqu'à
preuve du contraire. Mais, jusqu'à présent, ce qu'on a, c'est le pire côté de
la médaille et zéro côté positif ni
en matière d'environnement, ni en mesure d'acceptabilité sociale, et encore
moins en matière de retombées économiques.
• (17 heures) •
Alors, Mme la
Présidente, nous aimerions que le gouvernement revienne à la raison et prenne
le seul choix qui s'impose, voter contre le projet du TransCanada
Énergie Est et appuyer notre motion. Merci.
Mise aux voix
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, merci beaucoup, M. le député de Terrebonne. Alors, je vais maintenant
mettre aux voix la motion de M. le député de Terrebonne, qui se lit comme
suit :
«Que l'Assemblée nationale rappelle qu'elle a
adopté une motion unanime exigeant notamment que le gouvernement du Québec assume sa compétence en
environnement et renonce à déléguer ses évaluations environnementales à
l'Office national de l'énergie;
«Qu'elle rappelle au
gouvernement du Québec sa liste de sept conditions pour accepter ou non le
projet Énergie Est de TransCanada;
«Qu'elle souligne
que 87 % des Québécois désirent que le gouvernement du Québec ait le dernier
mot pour autoriser ou non le projet d'exportation de pétrole des sables
bitumineux;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'exercer ses compétences pleines
et entières en matière d'environnement, et exige qu'il refuse le projet
Énergie Est de TransCanada.»
Et cette motion est-elle adoptée?
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint...
Alors, on demande le vote par appel nominal. Alors, je suspends les
travaux...
J'appelle les députés et je suspends les travaux
quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 1)
(Reprise à 17 h 13)
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion de M. le député de Terrebonne, qui se lit comme
suit :
«Que l'Assemblée nationale rappelle qu'elle a adopté une motion unanime
exigeant notamment que le gouvernement du
Québec assume sa compétence en environnement et renonce à déléguer ses
évaluations environnementales à l'Office national de l'énergie;
«Qu'elle rappelle au
gouvernement du Québec sa liste de sept conditions pour accepter ou non le
projet Énergie Est de TransCanada;
«Qu'elle souligne
que 87 % des Québécois désirent que le gouvernement du Québec ait le dernier
mot pour autoriser ou non le projet d'exportation de pétrole des sables
bitumineux; [et]
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'exercer ses compétences pleines
et entières en matière d'environnement, et exige qu'il refuse le projet
Énergie Est de TransCanada.»
Et que les députés en faveur de cette motion
veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe : M. Péladeau
(Saint-Jérôme), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau),
M. Therrien (Sanguinet), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre
(Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M. Lelièvre (Gaspé), M. Leclair
(Beauharnois), M. Gaudreault (Jonquière), Mme Maltais (Taschereau), M. LeBel
(Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M.
Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau
(Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M.
Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto
(Bourget), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).
Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques).
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Maintenant, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe : M. Fournier
(Saint-Laurent), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad (Louis-Hébert),
M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M. Moreau (Châteauguay), Mme
David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata),
M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier),
Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette
(La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel
(Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M.
Blais (Charlesbourg), Mme St-Pierre
(Acadie), M. Reid (Orford), Mme Boulet (Laviolette), Mme Vallières (Richmond),
M. Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier
(Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Ménard
(Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard (Trois-Rivières),
Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger),
M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie
(Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme
de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Rousselle (Vimont), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Fortin
(Sherbrooke), M. Fortin (Pontiac), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Boucher
(Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Habel
(Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M.
Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil),
M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré),
M. St-Denis (Argenteuil).
M. Legault (L'Assomption),
M. Bonnardel (Granby), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson
(Iberville), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Lemay
(Masson), Mme Lavallée (Repentigny), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy
(Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Paradis (Lévis), M. Picard
(Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il
des abstentions? Alors, Mme la secrétaire générale, pour le résultat du
vote.
La
Secrétaire : Pour : 27
Contre : 77
Abstentions :
0
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la
motion est rejetée. Alors, pour la suite des choses, je cède la parole à
M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Article 5, Mme la Présidente, avec une courte suspension peut-être pour
permettre de...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Nous allons suspendre les travaux
quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 17)
(Reprise à 17 h 20)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, pour la suite de nos travaux, je vais céder la parole à M. le
leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui. Mme la Présidente, auriez-vous l'amabilité d'appeler l'article 5 de notre feuilleton,
s'il vous plaît?
Projet de loi
n° 59
Reprise du débat sur
l'adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien. À l'article 5 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt aujourd'hui
sur l'adoption du principe du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi
concernant la prévention et la lutte contre
les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant
diverses modifications législatives pour renforcer la protection des
personnes.
Et, au moment
de la suspension de nos travaux, à 13 heures, la parole était au député de
Bonaventure. Il vous reste, M. le député, un temps de parole de
12 min 10 s pour compléter votre intervention. La parole est à
vous.
M. Sylvain Roy (suite)
M. Roy :
Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je veux juste reprendre un élément
d'introduction que j'avais... bon, que
j'avais expliqué au début de mon intervention, en ce sens que c'était une
journée que mon collègue de Verchères avait considérée surréaliste, c'est-à-dire, de traiter de ce projet de loi là,
c'était un peu particulier. Mais moi, je rajoutais aussi l'élément que c'était une situation très
paradoxale, pour ne pas dire qui frisait la bipolarité, parce qu'aujourd'hui,
c'est le jour du Souvenir, c'est le jour où on salue le courage de ceux
qui ont donné leur vie pour la démocratie, la justice et la liberté, et dans un
contexte où on discute sur un projet de loi qui semble venir entacher la
justice, la liberté et la démocratie. De par
l'ensemble des mémoires qui ont été déposés, les avis ont été divers, mais, en
même temps, se centraient vers une remise en question fondamentale de ce
projet de loi là.
Lorsque j'ai
terminé l'intervention, nous en étions à discuter, et je cite, d'une certaine
sécurité idéologique, ce qui est un
concept assez particulier. Ce qui veut dire qu'un système d'idées, une
idéologie, pourrait être dangereux. Mais là dans un contexte comme ça, toutes les dérives sont possibles. Donc, j'en
étais dans la partie II, où, bon, on souhaitait qu'un ordre... bon, qu'on implique dans le projet l'analyse, la
sécurité idéologique dans le développement des enfants. Si on poursuit
l'analyse, on parle aussi d'une certaine sécurité morale. Donc, ce sont
des concepts qui, pour moi... je ne suis pas un spécialiste du droit, mais qui semblent assez nébuleux et qui peuvent
être porteurs, je dirais, de situations où on pourrait avoir des dérives
extrêmement dangereuses.
Je vais, bon,
prendre certains articles qui ont été publiés, bon, depuis le 17 août jusqu'à
tout récemment. Et je ne les prendrai pas tous parce qu'il y en a à peu près 95
pages, mais certains sont très explicites. Je commencerais par celui du
17 août, où on cite des juristes spécialisés, et j'ouvre la parenthèse :
«Le projet de
loi n° 59 confère à la Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse un pouvoir d'enquête sur les discours haineux ou incitant
à la violence ciblant un groupe de personnes, comme les femmes, les homosexuels, les minorités visibles, les groupes
religieux, les communautés ethniques, ou encore les militants d'un parti
politique, bref tout groupe formé de
personnes protégées par l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la
personne.
«Ces mesures sont "totalement
inconciliables avec les assises d'une société libre et démocratique",
selon Les Juristes pour la défense de l'égalité et des libertés fondamentales.
«L'ancienne
bâtonnière du Barreau de Montréal, Julie Latour, reproche à la ministre Vallée
d'avoir — et là je
cite — ...»
Une voix : ...
M. Roy : La ministre de la
Justice. Je reprends, je me reprends, madame.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je veux juste vous rappeler, M. le
député, qu'il faut nommer un membre de cette Assemblée par le nom de sa circonscription.
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
D'accord. Alors, soyez un peu plus vigilant. Merci.
M. Roy : Vous m'avez coupé
dans mon élan, Mme la Présidente. Je recommence.
«L'ancienne bâtonnière du Barreau de Montréal,
Julie Latour, reproche à la ministre [de la Justice] d'avoir "recours à un canon législatif pour tuer une
mouche hypothétique".» Et, ce matin, je parlais des enjeux, des défis
qu'une société a en évoluant, en se
transformant, puis des enjeux que l'on repère, puis je disais qu'il y a des
faux enjeux. Il y a des enjeux, des
fois, qu'on met en exergue, qu'on amplifie, mais qui sont des faux enjeux,
comme le fait de vouloir régler les problèmes
de radicalisation et d'islamisation par une loi sur les propos haineux. Et là
il y a comme une certaine disjonction.
Je reviens au
texte. Donc, «Mme Latour se questionne sur l'impact financier d'une brigade
d'enquête à la CDPDJ "en cette
époque d'austérité économique étatique, où d'importants programmes sociaux sont
supprimés ou significativement réduits".»
Et là ça me rappelle un concept en sociologie politique qui s'appelle : le
rôle d'un État régalien. Si on coupe dans
les programmes sociaux et on investit dans la judiciarisation des rapports
sociaux, dans les processus d'enquête, dans la régulation via une arme plutôt juridique et coercitive, on est dans
une forme d'État qui ne vise pas la persuasion, qui ne vise pas l'éducation, mais qui vise à utiliser
des outils extrêmement puissants, les outils de la police, les outils du
système juridique, pour réguler les comportements.
Et ça, c'est une problématique qui fait en sorte
qu'on va peut-être, comme certains autres articles le disent, soutirer de l'argent dans les programmes
d'éducation pour bâtir des prisons. Donc, le modèle de régulation ou de
contrôle de la société ou de contrôle
des rapports sociaux se fait d'une manière plus dure et utilise un arsenal qui
est différent de celui d'un État
démocratique digne de ce nom, où on utilise les outils de l'éducation pour
instaurer, je dirais, un climat social positif.
«"Rectitude politique."
«Loin de
"favoriser le vivre-ensemble et la cohésion sociale", comme le
prétend le gouvernement libéral, le projet de loi n° 59 créerait un
"climat social de suspicion aux effets délétères", selon Me Grey et
Mme Latour.
«"On
l'aurait adoptée, cette loi-là en 1947 ou en 1948 quand on a découvert le
réseau d'espionnage soviétique. On
aurait adopté une loi identique. Les Américains l'ont fait avec le
maccarthysme, et ce que ça a donné était terrible", souligne
l'ardent défenseur des libertés individuelles[, M. Grey.]
«[Donc,] la liberté d'expression est à la fois
la plus célébrée et la plus honnie des libertés fondamentales, poursuit Mme Latour, appelant, dans la foulée, à
limiter les exceptions à des "cas extrêmes et bien circonscrits".
"C'est pour dire des choses qui dérangent la société, qui sont à
l'encontre des idées reçues que l'on a besoin de la protection
constitutionnelle"...»
Et de poursuivre : «Les Juristes pour la
défense de l'égalité et des libertés fondamentales s'interrogent sur le prétendu "péril"...» Et je reviens à la
notion de défi, le faux défi, ou de défis qui sont réellement palpables dans notre société, donc «le prétendu "péril" que veut
éloigner le gouvernement libéral au moyen de son projet de loi n° 59. "Y
a-t-il en instance des exemples
concrets et documentés d'abus clairs qui constitueraient un danger pour le
caractère libre et démocratique de la société et [qui] nécessiteraient
la promulgation d'une loi antihaine au Québec?"»
Donc, on est
dans une loi antihaine, dans un contexte où ce qu'on voit comme problématique,
c'est l'émergence de, bon... je
dirais d'une certaine jeunesse qui se fait influencer par une certaine
islamisation qui veut, bon, les intégrer dans des processus, bon,
islamistes, etc.
Donc, ce que
je veux dire, donc, c'est que les discours haineux, l'analyse qu'on en fait, le
système juridique qu'on veut
implanter ou la loi qu'on veut promulguer via les discours haineux touchent à
peu près tout le monde. Ça touche les gens
qui vont émettre un discours ou un commentaire sur un groupe, et là les dérives
sont potentiellement spectaculaires.
Je reprends un autre article. Le Soleil,
mardi le 18 août, de Jean-Marc Salvet, deuxième paragraphe : «"Il y a
un danger."
«"Quand
on prohibe et punit les discours, il y a toujours un danger", postule
l'avocat Julius Grey.» Bon, on
revient encore au même discours que
j'ai émis tout à l'heure : «S'il y avait eu force de loi dans les années
50, les Témoins de Jéhovah, les communistes et les homosexuels auraient
fait les frais d'un tel projet, analyse-t-il.
«"Ce sont des mesures très attentatoires
aux droits et libertés pour un péril qui est inexistant"...»
Et là est-ce
qu'on est rendus à inventer des problématiques? Je ne dis pas que... Bon, j'ai
de la misère avec les concepts,
excusez-moi, là, il est tard, mais l'islamisation des jeunes n'est pas une
problématique, mais ce qu'on vise avec le projet de loi, ce n'est pas ça. Ce n'est absolument pas ça. Ce qu'on vise
avec le projet de loi, c'est de créer une police de la pensée.
On parle de
prévention au début du projet de loi, prévenir les discours haineux. Donc, on
veut anticiper la possibilité d'apparition d'un discours haineux.
Écoutez, comment on fait ça? L'écoute électronique? Le prochain échelon. Je ne
sais pas. C'est là que les dérives sont potentiellement dangereuses.
«Ce sont des
mesures très attentatoires aux droits et libertés pour un péril qui est
inexistant», je le répète. «"Est-ce que c'est pour prévenir la radicalisation? Pour prévenir
l'islamophobie?" Ce projet de loi "est tout et son contraire",
poursuit Me Latour en soulignant que le Code criminel canadien vise
déjà les discours haineux.»
Donc, déjà, on manque notre cible. On est
ailleurs. C'est un écran de fumée. Ce projet de loi là ne vise pas à régler des problématiques réelles, concrètes sur
le plancher des vaches, que nous avons. Ça vise tout autre chose. Écoutez,
par effet de détournement, par la mise en
exergue d'une pseudo problématique, on arrive avec un champ juridique
qui va faire une tentative pour brimer les
droits et libertés d'expression de la population, donc c'est inacceptable. C'est la fin de
mon intervention. Merci.
• (17 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le
député de Bonaventure, de votre intervention. Maintenant, pour la poursuite de ce
débat, je cède la parole à M. le député de Berthier.
M. André Villeneuve
M.
Villeneuve : Je ne
sais pas si je devrais vous dire bonjour ou bonsoir. Les deux peuvent se dire.
On est entre chien et loup, c'est le
cas de le dire. Mme la Présidente, bonjour, je vous salue. Je veux saluer les collègues
de l'Assemblée nationale, je
veux saluer aussi mon collègue qui vient de faire son intervention.
Mme la Présidente, pour les gens qui nous écoutent, peut-être relire le titre et
donner un peu le contenu du projet
de loi qu'on a devant nous, projet
de loi qui par ailleurs... je me demande de quoi je vais parler, honnêtement, là, parce que j'ai vu que le premier ministre avait annoncé
qu'il y aurait beaucoup d'amendements ou qu'il
y aurait des amendements
et là je ne sais plus de quoi ça va...
Mais j'y reviendrai plus tard, sur ce point-là, Mme la Présidente. Bon. Je
vais quand même parler de ce
que nous avons devant nous, comme parlementaires, un projet de loi qui est, je
pense, condamné finalement à être modifié de fond en comble. Et alors là c'est
pour ça que je vous dis que je ne sais pas trop de quoi je vais parler, mais j'y reviens plus tard. Donc, Mme la Présidente, pour les gens qui nous écoutent, le projet de loi n° 59,
donc Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant
diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes,
alors, quand on regarde ce qu'on a devant
nous, Mme la Présidente, d'abord, c'est un projet de loi qui a deux
parties : partie I, partie II. On commence à être un
petit peu habitué, là, quoiqu'on ne
s'habituera jamais à cette façon
de faire là, où on insère deux
principes dans un même projet de loi. Alors, ça nous place dans une drôle de situation, parce que,
pour ce qui est de la partie II, on pourrait être d'accord avec quelques amendements. La partie I,
c'est pas mal plus compliqué d'être d'accord avec ce qui est écrit là-dedans.
Et tantôt j'aurai l'occasion de vous faire une petite revue de presse. Je la
dis petite, mais elle est immense. Mais j'ai dû élaguer et choisir quelques extraits, parce qu'on pourrait y passer la nuit juste en
analyses qui ont été faites par les différents experts dans le domaine.
Donc,
Mme la Présidente, c'est un projet de loi qui, il faut le dire... il y a eu des
consultations. Est-ce qu'il y en aura d'autres,
consultations, quand les modifications seront apportées par le gouvernement ou
par la ministre? On verra. Mais il y
a eu des consultations. Ça s'est passé au mois d'août, septembre. 35 groupes
ont été entendus. Ce n'est quand même pas rien.
Donc,
dans la partie I, on parle de la création d'une infraction pénale calquée sur l'interdiction
au Code criminel relativement à la
tenue et à la diffusion de discours haineux ou incitant à la violence. Dans la
partie I toujours, on parle d'attribuer
à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse des
pouvoirs d'enquête dans le cas de discours
haineux et incitant à la violence tenus publiquement, tant à l'égard d'un
groupe que d'un individu, et basés sur un motif de discrimination
interdit à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne. Je
crois que mon collègue tantôt a parlé du
discours haineux. En tout cas, je m'en excuse si ce n'est pas lui. Mais c'est
quoi, un discours haineux, Mme la
Présidente? Qu'est-ce qu'un discours haineux? Comment on va définir ça? Qui va
interpréter c'est quoi, un discours
haineux? Ça, c'est une très, très grande question. Puis je ne veux pas vous
faire de grand débat, là, ou de grands discours
sur la démocratie, mais la démocratie, elle existe parce qu'à l'intérieur de la
démocratie il y a des gens qui ont des
discours différents, il y a des gens qui ont des discours opposés même. C'est
comme ça qu'elle vit, la démocratie. Alors,
pour le discours haineux, on a hâte de voir si, dans la deuxième mouture, donc,
du projet de loi... Je comprends, on s'entend
ici qu'il n'y aura pas une deuxième mouture mais qu'il y aura des amendements
qui vont faire en sorte pratiquement que ça va être une deuxième
mouture, là. Alors, j'ai hâte de voir comment on va baliser cela.
Donc,
attribution — je
continue toujours dans la partie I — attribution
au Tribunal des droits de la personne du pouvoir de déterminer le montant des sanctions civiles pécuniaires que
devront payer les personnes ayant tenu ou diffusé des discours haineux — on y revient — ou incitant à la violence, de même que la
durée de leur inscription sur une liste diffusée sur le site Internet,
bon, de la commission; instauration, par la commission, d'une liste
publique — une
liste publique — des personnes sanctionnées par le Tribunal
des droits de la personne pour avoir tenu ou diffusé des propos haineux ou incitant à la violence. On va créer une
liste, mais pourquoi on va créer une liste? Pour — et là je le dis entre guillemets, là — mieux haïr les gens qui vont être sur la
liste? C'est quoi, l'idée de créer une liste? On va publier ça, là, bon, et toujours en n'ayant pas la définition de
c'est quoi, des propos haineux et un discours haineux. Ça commence à être
compliqué, Mme la Présidente. L'attribution au Tribunal — toujours
dans la partie I — des
droits de la personne du pouvoir de délivrer
des ordonnances pour faire cesser les discours haineux ou incitant à la
violence; modification de la Charte
des droits et libertés de la personne afin d'interdire la diffusion de discours
haineux et d'y confirmer les nouveaux pouvoirs.
Ça, c'est la partie I. Il y a plus encore, là, mais, là, j'ai... pour les gens
qui nous écoutent, là, la partie I, ça ressemble pas mal à ça.
Partie
II, eh bien, là, on parle, Mme la Présidente, donc, de mariage forcé, on parle
d'ordonnance de protection, donc la
création d'un pouvoir d'ordonnance civile de protection qui peut être demandée
lorsqu'une personne croit que sa vie,
sa santé ou sa sécurité est menacée, etc. Donc, comme je le disais tantôt, pour
la partie I, ça va être très difficile... Puis — vous allez
voir tantôt la revue de presse — je pense que je vais réussir à vous
convaincre, Mme la Présidente, que ça va être très difficile d'arriver à
s'entendre là-dessus.
Par
ailleurs, pour la partie II, si le gouvernement avait mis un peu d'eau dans son
vin, si je peux me permettre cela, bien
on n'en serait pas là aujourd'hui, Mme la Présidente. Parce que, vous le savez,
ma collègue adjointe leader a déposé une motion de scission du projet de loi n° 59, et, écoutez, même vous,
Mme la Présidente... c'est la présidence qui a statué que la motion de scission
de ma collègue était recevable. Elle était recevable. À un moment donné, là,
moi, je veux bien, là, on a un
gouvernement, entre guillemets, dit majoritaire, puis on pourrait avoir des
discussions là-dessus énormément, mais, je veux juste le rappeler à mes collègues, là, pour ne pas qu'ils sautent
au plafond, là — de toute
façon, le plafond est très haut,
là — le Parti
libéral actuellement, là, il a une majorité de députés, mais, en chiffres
absolus, cette majorité-là, c'est 29,66 %.
Alors, il a moins qu'un tiers des Québécois qui ont voté pour les gens qui sont
assis devant nous. Ça commande, Mme
la Présidente, en démocratie, ça commande d'être à l'écoute des autres
parlementaires, parce que la plus belle des démocraties, ça serait
encore, Mme la Présidente, de pouvoir gouverner avec une grande collaboration
pour refléter davantage les aspirations de la population québécoise.
Alors,
ce faisant, refusant la motion de ma collègue, refusant de séparer le projet de
loi n° 59, on se retrouve dans une situation aujourd'hui où on
regarde les deux parties en même temps, bien évidemment, et je le regrette, je
trouve ça malheureux. Je ne veux pas vous lire... quoique ça me tente beaucoup
de le faire, là, je ne peux pas vous lire au complet la décision de la
présidence, là, mais c'est vraiment, là... la recevabilité de la motion de
scission au projet de loi n° 59, c'est
très bien fait, là, c'est très bien fait, et je trouve ça malheureux que le
gouvernement, que les députés libéraux ne
se soient pas sentis interpellés par cette décision-là de la présidence, dont
vous êtes, Mme la Présidente. Et c'est quand même basé sur une analyse fine, une analyse pointue de l'ensemble des
règles qui nous gouvernent, et on voit qu'il y a d'autres dossiers, il y a d'autres projets de loi
qui arrivent présentement, là, devant nous, les législateurs, qui comportent
plusieurs principes.
• (17 h 40) •
En tout cas, moi, j'appelle les députés du Parti
libéral à peut-être considérer davantage, la prochaine fois, Mme la Présidente, parce que, ce coup-ci, je pense
qu'ils en ont échappé une belle, de considérer davantage de travailler en collaboration. Nous ne demandons que cela, et
la population du Québec ne demande que cela, Mme la Présidente, que les
parlementaires travaillent en collaboration.
Mme la Présidente, ça m'amène, et je vous en ai
glissé un mot tantôt un petit peu, ça m'amène à... c'est le 28 août 2015, donc : Discours
haineux, le projet de loi sera revu, dit... et là j'ai un petit peu
modifié, là, parce que je ne veux pas
nommer le nom du premier ministre, donc dit le premier ministre. Donc, ce que
nous dit le premier ministre, c'est :
«Le gouvernement [libéral] modifiera le projet de loi sur la lutte contre les
discours haineux pour dissiper les critiques qui redoutent des entraves à la liberté d'expression. Il limitera sa
portée aux "appels directs à la violence".» Le premier ministre indique que la loi sera modifiée pour
apporter des précisions et répondre aux critiques. Où sont ces modifications,
Mme la Présidente? Nous, ici, là, on est des
législateurs, hein, on est des législateurs, puis, si on veut faire notre travail
comme il se doit... L'intervention que je
fais devant vous aujourd'hui, là, elle a quelle valeur par rapport à
l'information dont je ne dispose pas,
elle a quelle valeur? Et je pourrais comprendre, à la limite, si un projet de
loi qui se retrouve ici et que le
ministre ou la ministre nous annonce : Il y aura quelques... hein, étude
article par article, on va voir, il y aura quelques petits détails. On n'est pas sur le fond, là, tu
sais, on est vraiment sur, bon, des points techniques, là, hein, bien traduire
le français à l'anglais. Sur des points techniques comme ça, je n'ai pas de
problème, comme législateur.
Là où j'ai un
problème, comme législateur, c'est que le projet de loi, là, il a été, je vous
dirais, là, carrément, là, condamné
par l'ensemble des groupes ou presque, ou presque, puis là j'invite les gens à
aller voir sur le site Internet pour voir
les travaux de la commission, et ils constateront par eux-mêmes de quels
groupes dont je ne parle pas présentement... mais qui sont inscrits dans les travaux de la commission. Mais, pour
l'ensemble, là, sur le plan juridique, sur le plan de la défense de liberté d'expression, parce que c'est
de ça dont on parle aujourd'hui... Alors, sur le fond, présentement, j'ai un
problème, parce que les aménagements ou les
amendements qui vont suivre sur le projet de loi n° 59 vont être majeurs,
ils vont changer complètement la portée, et
là je présume que ça sera ça, je présume que ça sera ça si le premier ministre
prend la peine d'intervenir, et Dieu sait
que la ministre, Mme la Présidente, a défendu le projet de loi, tu sais, bon,
elle a défendu l'indéfendable, et
pour finalement que le premier ministre annonce que : Bien, écoutez, effectivement, sur le fond, ça ne marche pas, puis on va amener des amendements. Alors, pourquoi
qu'on ne nous soumet pas ces amendements-là?
Et qu'en
sera-t-il, Mme la Présidente, des gens qui sont venus en ici, en commission,
qui ont travaillé fort, qui ont
fait des mémoires? Il ne faut pas banaliser
ça, là. Les gens qui se déplacent qui viennent ici, en commission, là, pour
nous remettre le fruit de leurs
analyses, le fruit de leurs travaux sur des enjeux aussi importants, sur un
enjeu fondamental qu'est la liberté d'expression, qu'en restera-t-il,
Mme la Présidente, lorsque la ministre, le gouvernement libéral déposera ses amendements? Est-ce que ces gens-là auront le
droit à nouveau au chapitre pour pouvoir regarder de nouveau ce projet
de loi là, qui, fondamentalement, j'en suis assez convaincu, va avoir changé
pas mal, pas mal?
Alors, sur le
plan technique, je n'ai pas de problème, le projet de loi, on peut toujours
l'améliorer, mais, quand on touche à
des fondements mêmes du projet de loi et que le premier ministre annonce qu'il
y aura des changements en ce sens...
et là moi, je me retrouve ici, comme parlementaire, à discourir sur un projet
de loi dont je n'ai pas finalement les tenants et aboutissants sur le
fond, bien sûr.
Revue de
presse, et là, Mme la Présidente, on rentre vraiment dans le pourquoi le
premier ministre a décidé finalement de : Écoutez, finalement, oui, je
pense que la ministre, elle a défendu quelque chose qui, au final, était indéfendable, et donc nous allons apporter des
amendements. Revue de presse, écoutez, regardez, je vais juste... J'en ai
quelques-unes ici, là, et je ne voulais pas
non plus lire l'intégrale. Comme je vous disais tantôt, j'en aurai eu pour la
nuit. C'est vraiment, vraiment un
enjeu tellement important et majeur qu'on a vu, dans les journaux, à la télé, à
la radio... on a vu les gens, les
citoyens, les experts, les analystes... tout le monde a regardé le projet de
loi n° 59 puis ils se sont dit : Mais qu'est-ce que c'est que c'est ça? Parce que, là, ce dont on parle, c'est
la liberté d'expression. On ne parle pas, là, d'un détail, là, on parle
du fondement même de la démocratie, qui... D'ailleurs, je vous en parlerai
tantôt, c'est M. Grey et Mme Latour, je
pense... moi, j'appelle ça un peu un... je l'ai pris en note — oui, voilà — un duo improbable. C'est quand même assez extraordinaire. Moi, quand j'ai vu ça,
j'ai dit : Wow! Mais M. Grey et Mme Latour, un duo improbable, selon
moi. Et tantôt j'y reviendrai parce que
c'est fort intéressant, ce qu'ils ont fait dans leur mémoire, puis ils sont
venus en commission parlementaire
aussi, Mme la Présidente. Donc, on ne parle pas d'un enjeu banal. Et je pense
que quelqu'un a déjà dit un jour que
la liberté d'expression, c'était la mère de la démocratie, mais on y reviendra
tantôt, Mme la Présidente.
Je vous fais
lecture de quelques revues de presse. D'abord, LeDevoir,
24 septembre, M. Antoine Robitaille : «Le projet de loi n° 59 "concernant la prévention et la lutte
contre les discours haineux et les discours incitant à la violence", malgré les dénis de la ministre, met en danger la
liberté d'expression du Québec.» Ce n'est quand même pas rien, dire ça, là. «Or, une grande part des organismes et des
témoins qui sont venus en commission ont souligné le caractère risqué de ce projet de loi. Qu'est-ce qu'un discours
haineux?» Question ; et c'en est une parmi beaucoup d'autres. «Cette
notion clé n'étant pas définie dans
le texte proposé, les interprétations excessives, liberticides, sont légion.
Lorsqu'il est question du droit à
l'expression, l'excès de liberté vaut toujours mieux que [le contraire]. Dans
une nouvelle mouture, tout sera défini,
a laissé entendre la ministre. Elle a aussi avoué que l'idée de tenir une liste
noire "des personnes qui ont fait l'objet d'une décision du
tribunal [ayant enfreint la loi], et la rendre disponible sur son site
Internet" avait quelque chose d'excessif.» Bon, on avance, on fait des
progrès, Mme la Présidente, on fait des progrès.
«Mais
la première partie du projet de loi contient tellement d'autres dispositions
hasardeuses qu'il faudrait la revoir en
entier.» C'est ce que je vous disais tantôt en introduction, là. Qu'est-ce que
je fais, là, ici, comme législateur, moi? Qu'est-ce que je suis en train de faire,
là ? Je suis en train de parler de quelque chose que je n'ai pas vu, en
fait, là, parce que je ne l'ai pas vu
sur le fond. J'ai vu sur le détail, sur les... du côté technique, mais, sur le
fond, je ne l'ai pas vu, donc. Mais
la première partie du projet de loi donc... hasardeuse qu'il faudrait la revoir
en entier. «Pensez à la création de
cette brigade qui serait créée à la Commission des droits de la personne pour
recevoir et analyser les dénonciations anonymes
avant même la diffusion d'un prétendu discours. La pente est glissante.
Tellement qu'un député libéral [...] — qu'on
ne nommera pas — est allé en commission jusqu'à lancer l'idée de
rendre [...] des enquêtes sur les "conversations privées"!» Et là M. Robitaille, il y va en disant : «Tant qu'à y être,
recréons, en plus vigoureux encore, le Centre d'analyse et de documentation[...], police "politique" de
l'ère Bourassa!» Quand même, hein, comme on dit, il n'y va pas avec le dos de
la cuillère, mais il y a totalement raison.
Actualités, jeudi 17 septembre, Le Soleil : Loi
n° 59 : projet contestable, estime le Barreau, le Barreau du Québec, Mme la Présidente. «Le Barreau du Québec ajoute sa voix à tous ceux
qui prétendent que le projet de loi n° 59 constitue une menace potentielle à la liberté
d'expression[...]. [...]Le projet de loi défendu par la ministre de la
Justice [...] vise [...] à contrer le discours
haineux, un concept bien mal défini par le gouvernement — et
voilà, on y revient encore — a
fait valoir [hier] la présidente du Comité sur les droits de la personne du
Barreau, Mme Pearl Eliadis, dans le cadre de la consultation menée sur la pièce législative.
Mais il y a pire — comme si
ça se pouvait, Mme la Présidente. Le Barreau juge que le projet est contestable sur le plan constitutionnel,
puisqu'il contrevient à l'article 2 de la Charte canadienne des droits [et libertés]. [...]Le Barreau met aussi en
garde le gouvernement contre la tentation de rendre publique la liste des
personnes sanctionnées par le Tribunal des
droits de la personne pour avoir tenu ou diffusé des propos haineux ou incitant
à la violence. Par ce geste, Québec
s'apprête à bafouer les libertés civiles et à renier le droit à la vie privée,
"un grave problème"...»
Une voix :
...
• (17 h 50) •
M.
Villeneuve : Non, ça ne va pas bien. Lundi 31 août,
Joseph Facal, politicologue, sociologue, ex-député de du Parti québécois et ministre, il dit : «Au nom
de la lutte contre les discours "haineux", le premier ministre,
d'ordinaire si sourcilleux sur les
droits individuels, a laissé son infortunée ministre de la Justice piloter un
dossier inqualifiable — alors, ça vous donne une
idée, là, de... et je pense que ça reflète beaucoup, beaucoup, beaucoup les
auditions qui se sont tenues. Non seulement l'incitation à la haine est
déjà un crime punissable en vertu des lois actuelles, ce qui rendait le projet gouvernemental inutile, mais il s'agissait d'une
claire restriction à la liberté d'expression, ce qui est nettement pire.» Et
là il y va en parlant de l'article 3, qui
«permettrait la dénonciation anonyme d'un discours tenu ou sur le point d'être
tenu et qu'une personne jugerait haineux». Et : «Qu'est-ce qu'un
discours "haineux"?» Il revient avec la question.
On
va continuer un petit peu, Mme la Présidente, parce que je veux que les gens
puissent constater à quel point les
opinions se recoupent, convergent. Donc, Yves Boisvert, la chronique, samedi
22 août, alors, il dit : «Le projet de loi libéral contre les discours haineux n'est pas
seulement inutile, il risque d'être absolument néfaste. [...]Pourtant, inciter
publiquement à la haine, fomenter la haine
contre un "groupe identifiable" est déjà un crime punissable de deux
ans de prison au Canada. Comme c'est
une exception à la liberté d'expression, et comme c'est un crime, la preuve
doit être [...] forte, les cas, très clairs. À la demande de
la commission québécoise des droits, inquiète du harcèlement sur l'Internet, le
gouvernement [libéral] veut créer une
infraction civile équivalente, qui rendrait plus faciles les
condamnations — plus
faciles les condamnations, Mme la Présidente.»
Je
vais cesser la revue de presse, parce que je vois que le temps file. Mme la
Présidente, nul doute que nous avons devant
nous un projet de loi qui aurait dû être scindé — nul doute, nul doute — et même, à la limite, scindé, oui, et mettre
à la déchiqueteuse la partie I, le réécrire, le représenter ici, Mme la
Présidente, pour que les parlementaires mais aussi la société civile, hein... Je pense que, là, on est
en train d'essayer de faire un débat, Mme la Présidente, en écartant justement
la population du Québec de ce débat-là.
Pourquoi? Pour les raisons que je viens de vous énumérer, pour plusieurs
raisons, entre autres le fait que le
projet de loi va être amendé de façon considérable, et les gens qui sont venus
en commission parlementaire n'auront
pas droit au chapitre pour la suite des choses, et je trouve que c'est vraiment
antidémocratique.
Mme la Présidente, le
temps, le temps file, vous m'avez fait signe qu'il ne me restait pas beaucoup
de temps, juste vous dire peut-être :
Vous savez, une bonne idée, là, peu importe le parti politique, là, c'est une
bonne idée, et je vois que, dans le projet de loi, il n'y a pas d'observatoire,
hein, parce que ma collègue avait déposé un projet de loi, le projet de loi n° 395, justement pour créer un
observateur de l'intégrisme religieux. Une bonne idée, Mme la Présidente,
sera toujours une bonne idée.
J'invite
le Parti libéral, le gouvernement, dans sa nouvelle mouture, à intégrer cette
notion. C'est d'une importance capitale. Et je les invite à réfléchir, à
réfléchir à la façon dont ils ont procédé pour ce projet de loi là, de
s'assurer, de s'assurer qu'ils aient le
respect des citoyens du Québec en entier et de procéder de façon démocratique.
Il y va de notre démocratie, Mme la Présidente. Et vive la liberté
d'expression, Mme la Présidente! Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie de votre
intervention, M. le député de Berthier. Et, toujours dans la poursuite
de ce débat, je cède la parole à M. le député de Matane-Matapédia.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
Merci, Mme la Présidente. À mon tour d'intervenir sur le projet de loi
n° 59, Loi édictant la Loi concernant
la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant
à la violence et apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes.
Déjà,
les mots sont chargés, c'est le cas de le dire. C'est un projet de loi qui
n'est pas prématuré, assurément, en ce qui
a trait aux attentes du public, aux attentes de l'opposition quant à différents
événements qui sont arrivés. Je pense, entre autres, à
l'affaire Charkaoui ou aux discours haineux de certains imams, à une
radicalisation qui n'échappe pas le Québec,
Mme la Présidente. Alors, c'est le résultat des réflexions du gouvernement
libéral, c'est cette pièce législative qui
nous est soumise et qui, selon le gouvernement, est susceptible d'apporter des
réponses aux besoins qui sont exprimés par
la société québécoise. Quand je dis que ce n'est pas prématuré, c'est juste.
Depuis longtemps, le Parti québécois, que ce soit dans l'opposition ou au gouvernement, plaide pour qu'on
s'intéresse à ces questions et qu'on apporte une réponse adaptée et rigoureuse. En ma qualité de
porte-parole en matière de sécurité publique, évidemment que le sujet
m'intéresse, parce que, lorsqu'il y a
radicalisation, il y a potentiellement des gestes qui sont posés qui peuvent
avoir une incidence sur la sécurité
publique, sur la sécurité du public. Sur cette question ainsi que sur d'autres
questions qui sont liées, cette fois, à
l'identité, il apparaît difficile pour le gouvernement d'abord de s'intéresser
à ces questions, de les prioriser et ensuite de trancher. On voit
souvent une hésitation, des malaises, une division sur ces différents enjeux.
Lors
des interventions de l'ex-députée de La Pinière, Fatima Houda-Pepin, qui a
une réelle expertise dans le domaine, on
a pu constater qu'il y avait divergence importante avec son groupe
parlementaire. Pourtant, Mme Houda-Pepin est une sommité dans la matière, elle est reconnue. À tout le moins, elle a
un propos qui est unique, une expertise unique au sein du caucus libéral. Ce n'est pas l'expérience
professionnelle du premier ministre en Arabie saoudite qui lui a amené une... disons, une expertise, en ce domaine, qui a
été utile aux fins du débat, parce que ça ne paraît pas dans le projet de loi.
Alors, une députée aura envoyé des signaux
au sein de son caucus. Résultante : elle n'est plus là. Elle est remplacée
par l'actuel député de
La Pinière et ministre de la Santé. Alors, c'est à nous maintenant de
poser des questions, de réitérer les
valeurs sur lesquelles on se base et d'indiquer que ce n'est pas seulement
l'opposition qui se pose les questions, mais un grand ensemble de
groupes qui ne sont pas affiliés à aucune formation politique, dont d'éminents
juristes.
Alors,
tout au long des consultations particulières, qui ont commencé à la mi-août, il
y a eu des mémoires qui ont été déposés par des groupes intéressés à ces
questions, et nous, on a posé des questions importantes quant aux deux parties
du projet de loi — on y a fait référence — qui sont très différentes, qui devraient
être distinctes. Ça devrait être scindé. Et, parmi les questions qu'on se pose quant à la partie I, entre autres...
et la partie I, c'est la création d'une nouvelle loi, la loi concernant la prévention et la lutte contre le
discours haineux et les discours incitant à la violence, cette
partie I là, bien, les questions, elles seront assez
fondamentales, merci.
Est-ce
qu'on va assister à la création d'un tribunal des idées? Alors, quand le
nouveau premier ministre du Canada dit :
C'est parce qu'on est en 2015, là, j'espère que ce n'est pas le même type de
réponse : Parce qu'on est en 2015, il faudrait arriver à ça. Ça,
c'est une question qui est très pertinente. Un tribunal des idées, hein, une
nouvelle pièce législative. Souvent, on
trouve que la ministre n'intervient pas dans des dossiers où elle
devrait le faire, mais là elle intervient dans un dossier où on ne s'y attendait pas, un tribunal des idées. Ça n'a pas
été réclamé par personne... en fait, quelques groupes seulement, puis on indiquera lesquels. Deuxième question : Pourquoi créer une infraction pénale calquée sur une infraction
criminelle qui existe déjà,
qui est déjà prévue dans le Code criminel? Donc, il y a
là un dédoublement qui nous apparaît inutile,
à moins qu'on nous démontre clairement qu'il n'est pas applicable ou que la législation qui nous est proposée va faire en sorte de combler un trou juridique, un
vide juridique. Il nous apparaît que ce n'est pas le cas non plus. Troisième
question : Pourquoi confier un pouvoir
d'injonction alors que les tribunaux réguliers ont déjà ce pouvoir? Alors, il y
a de multiples juristes au sein du
groupe parlementaire libéral... en fait, il y en a un de moins depuis que
l'ex-député de Fabre a quitté, mais
il y a de nombreux juristes qui peuvent indiquer à la ministre qu'il existe
déjà des dispositions qui permettent d'atteindre l'objectif qui est
celui visé.
Puis pourquoi, enfin,
créer une liste de la honte, une liste de personnes qui, à vie, là, telle une
condamnation perpétuelle, se verraient
identifiées dans un registre où on indiquerait qu'elles ont tenu un propos, à
un moment donné, dans un contexte et
que leur vie personnelle, leur vie professionnelle peut en être
considérablement bouleversée. Il existe déjà des tribunaux, hein, où les
gens peuvent porter plainte, ils peuvent poursuivre. Ça s'est déjà fait au
Québec.
Alors,
le projet de loi pose de bonnes questions mais apporte de mauvaises réponses.
C'est une déception. Et, notre rôle, comme parlementaires, c'est d'améliorer
les pièces législatives. C'est toujours le travail qu'on a à faire, que ça soit ici, au salon bleu, que ça soit en
commission parlementaire, c'est le travail qui est attendu de nous. Ceci étant
dit, puis pour les citoyens qui nous
écoutent, là — je
m'adresse à eux — à partir
du moment où les gens se sont exprimés en
commission parlementaire, à partir du moment où les parlementaires se sont
exprimés dans les différentes tribunes qui sont les leurs, que ça soit
les médias, que ça soit au salon bleu, en commission parlementaire, ultimement,
c'est le gouvernement qui décide, hein? Dans un autre dossier, là, une
citoyenne que je connais viens de m'écrire en disant : Projet de loi n° 20, on peut-u faire quelque
chose pour renverser ça? Bien, la réponse, c'est : Non, le gouvernement
est majoritaire. Alors, pour le
projet de loi n° 59, est-ce qu'ils vont changer leur façon de voir? Bien,
en partie, parce que la ministre a
reculé. Est-ce qu'ils vont reculer davantage? Je ne le sais pas, mais il y a
des gens qui demandent à la ministre qu'elle puisse changer ce projet de loi
là, et c'est appuyé sur une expérience professionnelle mais sur une expérience
humaine qui est internationale. On est
capables de comparer ce qui se fait ailleurs et aussi de voir si c'est adapté
pour le Québec.
Alors, cette pièce
législative là, elle ne répond pas aux attentes du public, elle ne répond pas
aux attentes des experts, et certainement il
aura fallu attendre beaucoup de temps pour arriver à une loi qui est
incomplète. J'ai l'impression que présentement on perd du temps... en
fait, on réitère ce qu'on a déjà dit.
Lorsque
l'ex-députée de La Pinière, Fatima Houda-Pepin, parlait, entre autres,
d'un observatoire, je me souviens, j'ai
mon ex-collègue du Conseil des ministres qui était là, on était d'accord avec
ça. On l'a dit ici, bon, que c'était utile, parce que ça permet d'intervenir en amont, de prévenir les phénomènes,
de s'assurer qu'on a une expertise qu'on n'a pas présentement puis surtout de reconnaître une chose : de la
radicalisation au Québec, ça existe, Mme la Présidente. Pourquoi le
Québec serait à l'abri de ça? La suite demain, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est bien ça. Alors, à ce
point-ci, M. le député, je dois vous demander si vous avez terminé votre
intervention.
M.
Bérubé :
Mme la Présidente, j'aimerais poursuivre mon intervention demain.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, vous pourrez poursuivre lorsque le débat sur l'adoption du principe du projet
de loi n° 59 sera rappelé.
Ajournement
Alors, compte tenu de l'heure, je vais ajourner
nos travaux au jeudi 12 novembre, à 9 h 40.
(Fin de la séance à 18 heures)