(Neuf
heures quarante minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, bon mercredi matin. Vous pouvez prendre
place.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Et
nous débutons cette journée avec la rubrique des déclarations de députés, et, sans plus tarder, je
cède la parole à Mme la députée de Richmond.
Féliciter l'entreprise
Breuvages Bull's Head inc., lauréate
du prix Breuvage non alcoolisé de l'Association
québécoise des dépanneurs en alimentation
Mme Karine Vallières
Mme
Vallières :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Vous savez à quel point j'aime vous faire
découvrir des produits et des réussites du
comté de Richmond. Alors, aujourd'hui, je vous invite tous, collègues de l'Assemblée
nationale, à joindre votre voix à la mienne pour féliciter l'entreprise
Bull's Head de Richmond qui vient de remporter le premier prix des
boissons non alcoolisées au concours des produits de l'association des
dépanneurs du Québec.
Bull's Head,
c'est une entreprise qui a vu le jour en 1896 et qui a créé le fameux soda
gingembre qui est dégusté et savouré
depuis partout au Québec, et même servi ailleurs dans le monde, mais également
au Château Frontenac à une certaine époque, avant la plus grande commercialisation.
Permettez-moi donc de
féliciter et remercier l'homme d'affaires estrien, le Dr Peter O'Donnell,
d'avoir sorti cette fameuse recette de son
coffre-fort et de féliciter les frères Carl et Dominic Pearson qui, depuis
2009, eux, développent et
diversifient la gamme de produits, ce qui leur permet aussi d'élargir le
marché. Un très beau succès de chez nous que je vous invite tous à
découvrir. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de
Richmond. Et, pour sa déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole à M.
le député de Verchères.
Rendre hommage à Mme Diane
Duplin, récipiendaire
de la Médaille de l'Assemblée nationale
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron : Merci, Mme la Présidente. Le 13 octobre
dernier, nous avons procédé à l'inauguration officielle du nouveau bureau de circonscription dans
Verchères. C'était tout un changement puisqu'il avait auparavant eu pignon
sur rue à la même adresse pendant plus de 20 ans,
soit depuis que Bernard Landry y avait emménagé après son élection en
1994.
Il m'est donc apparu
important de souligner le travail remarquable d'une femme qui incarne
littéralement ces deux décennies de service
à la population, Mme Diane Duplin, à qui j'ai alors remis la Médaille de
l'Assemblée nationale. Ce faisant,
les quelque 300 personnes
présentes et moi-même avons rendu hommage au dévouement, au savoir-faire, à la
rigueur, à l'efficacité et à la
détermination dont elle a su faire preuve dans le traitement d'innombrables
dossiers, permettant ainsi, dans la
plupart des cas, leur dénouement heureux, et ce, au bénéfice des citoyennes et citoyens de même que des
municipalités, organismes et entreprises concernés.
Nous savons, Mme la
Présidente, à quel point nos collaboratrices et collaborateurs sont
indispensables pour nous permettre de bien nous acquitter de notre travail.
Diane Duplin en fut une des plus exemplaires. Bonne retraite, chère Diane, et merci de tout coeur, en mon nom et
au nom de toute la population de Verchères! Profite bien du temps passé
avec tes petits-enfants.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de
Verchères. Et maintenant, pour la prochaine déclaration, je cède la
parole à M. le député d'Ungava.
Féliciter Mme Allison
Coon-Come pour
son succès en tant que cinéaste
M. Jean Boucher
M. Boucher : Bon matin, Mme la
Présidente. «Ullaakkut.» «Wachya», chers collègues. «Good
morning».
Ce matin, je vais vous parler de Mme Allison
Coon-Come. C'est une jeune Crie originaire de la communauté de
Mistissini dans mon comté.
Allison
Coon-Come est une jeune cinéaste très douée réalisant des films avec le
Wapikoni mobile. Eddie, her most
recent film, was soon competing against eight other films and she may win the
grand prize, un honneur qui ne sera pas
son premier et certainement pas son dernier, Mme la Présidente. Entre autres,
elle a déjà reçu, en 2012, une mention spéciale pour un court métrage au
festival Présence autochtone, à Montréal.
Allison
wishes to study cinema and become a filmmaker. Alors, ma chère Allison,
j'ai une grande nouvelle à t'annoncer: Tu es
déjà une grande réalisatrice, et je ne suis pas inquiet pour ton futur, avec
déjà six films réalisés. «Meegwetch.» «Nakurmiik.» Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député d'Ungava. Et maintenant je cède
la parole à M. le député de Deux-Montagnes.
Souligner la tenue du mois de
l'achat local
dans la circonscription de Deux-Montagnes
M. Benoit Charette
M.
Charette : Merci, Mme la Présidente. C'est avec une immense fierté que
je souligne la tenue actuelle du mois de l'achat local dans la
circonscription de Deux-Montagnes. Cette initiative de La Brigade jaune, de la
Chambre de commerce et de l'industrie MRC de
Deux-Montagnes vise à sensibiliser la population à la consommation locale en
faisant la promotion des bienfaits de
cette dernière notamment sur l'économie, l'environnement et le maintien d'une
bonne santé.
Je
suis heureux de constater qu'à ce jour plus d'une trentaine d'entreprises et de
producteurs de ma région se sont mobilisés afin de faire de cette initiative
un franc succès. À nous tous maintenant de sensibiliser les consommateurs à développer un réflexe de consommation responsable
dans le but de faire prospérer la création d'emplois dans nos régions.
Ainsi, dans le cadre
du mois de l'achat local, j'invite tous les consommateurs à joindre les
citoyens de ma circonscription en posant un
geste solidaire face aux producteurs de leurs communautés, tout en faisant
prospérer l'économie de leurs régions. Mme la Présidente, achetons
local!
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Et, pour sa
déclaration d'aujourd'hui, je reconnais maintenant Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Saluer le travail du Cercle de
fermières
de Montréal-Nord inc.
Mme Rita Lc de Santis
Mme de
Santis : Merci, Mme la Présidente. Les Cercles des fermières du Québec
constituent la plus grande association de femmes de notre province. Elles célèbrent
cette année leur 100e anniversaire de fondation et sont toujours aussi actives dans leurs communautés
pour promouvoir le patrimoine culturel et artisanal.
Nous
avons la chance, à Montréal-Nord, d'avoir un cercle des fermières. Ces expertes
aux mains agiles perpétuent les
traditions de travail artisanal textile. Elles ont d'ailleurs
récemment exposé et offert des démonstrations de tissage sur métier et de dentelle au fuseau et initié les visiteurs
au tricot, à la broderie sur papier et la création d'accessoires à partir
de matières recyclables.
Je félicite et
remercie Mmes Pierrette Guérin, Louise Rheault, Louise Guay-Meunier et
Micheline Arsenault pour cette heureuse
initiative et souhaite encore beaucoup,
beaucoup de succès et longue vie au
Cercle des fermières de Montréal-Nord. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Et, toujours à la rubrique des déclarations de députés,
je cède la parole à M. le député de Jonquière.
Souligner le 10e anniversaire
du Challenger
Banque Nationale de Saguenay
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui. Mme la Présidente, c'est avec plaisir que je souligne aujourd'hui à l'Assemblée nationale le 10e anniversaire du Challenger Banque Nationale de Saguenay. Cet
événement, qui réunit de jeunes talents sportifs féminins, peut se vanter de présenter aux
Saguenéens et Saguenéennes, mais aussi à tous les amateurs de tennis au Québec,
des joueuses de tennis de haut calibre qui représentent des espoirs de niveau
international. Le challenger est donc un terreau
fertile de jeunes talents qui fait la promotion du sport, bien sûr, chez les
jeunes filles, mais elles peuvent, donc, s'illustrer chez nous et par la
suite rivaliser au sommet de hautes compétitions. Nous connaissons d'ailleurs
quelques vedettes, par exemple Eugenie Bouchard, qui sont passées par cette
épreuve sportive à Jonquière.
Je
tiens également à souligner l'excellent travaille des
organisateurs, celui des généreux bénévoles, qui réussissent à faire du Challenger Banque Nationale un événement
remarquable par sa qualité mais également une rencontre particulière entre les jeunes joueuses de tennis et la population.
Je souhaite donc longue vie au Challenger Banque Nationale. Merci aux
bénévoles, et encore au moins 10 ans! Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Jonquière.
Et maintenant je reconnais Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Souligner le 50e anniversaire
du Club
d'auto-neige Le Sapin d'or inc.
Mme Caroline Simard
Mme
Simard : Merci, Mme la Présidente. Le 7 novembre prochain, le
Club auto-neige Le Sapin d'or soufflera ses 50 bougies dans le cadre d'une soirée au centre des loisirs de
Saint-Hilarion. À travers les années, ce club a connu un succès continu. Il regroupe aujourd'hui près de
2 000 adeptes de décors majestueux présents sur 375 kilomètres
de sentiers. Parmi les réalisations
du club, soulignons que des bénévoles ont aménagé des sorties d'urgence pour
permettre aux ambulanciers d'accéder
aux sentiers lors d'accidents, une innovation
qui leur a valu le prix Blizz'Or lors du congrès des motoneigistes du
Québec en 2000.
Grâce à une
signalisation claire et efficace, le réseau est devenu un attrait
incontournable, recherché par les motoneigistes.
Le Club d'auto-neige Le Sapin d'or est un acteur important du tourisme hivernal
et participe activement à l'activité récréotouristique.
J'en profite pour
féliciter tous les membres et bénévoles impliqués dans cette belle organisation
et souligner l'accent particulier porté à la
sécurité, qui demeure essentielle dans la pratique de ce sport. Bon 50e! Et
merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je
cède la parole à Mme la députée
de Mille-Îles pour sa déclaration d'aujourd'hui.
Souligner la Semaine nationale
de la sécurité des aînés
Mme Francine Charbonneau
Mme
Charbonneau :
Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi, par cette déclaration, de souligner la
Semaine nationale de la sécurité des aînés qui se déroule du 6 au
12 novembre 2015.
Cette semaine est
organisée chaque année par le Conseil canadien de la sécurité. Ses objectifs
visent à sensibiliser la population afin de réduire le nombre de décès, de
blessures et de dégâts matériels qui peuvent être évités et élaborer et promouvoir des méthodes qui permettront une
meilleure sécurité pour tous. Le thème, cette année, traite de la
maladie d'Alzheimer et de ce qui peut être enfin fait pour rendre un domicile
plus sécurisant envers les personnes qui ont cette maladie.
Depuis plus de
60 ans, grâce aux contributions des entreprises et des citoyens qui en
sont membres, le conseil canadien répond aux
demandes de la population dans le but d'assurer la sécurité des citoyennes
et des citoyens de tous les
âges. Je tiens à exprimer ma reconnaissance envers tous les organismes qui ont à coeur la
prévention et la sécurité des aînés et qui font de cette semaine un
grand succès. Merci, Mme la Présidente.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Et maintenant je cède
la parole à votre voisin, M. le député de Mont-Royal.
Souligner le 25e anniversaire
du Centre
des aînés Côte-des-Neiges
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de
souligner en cette Chambre le 25e anniversaire du Centre des
aînés de Côte-des-Neiges.
Depuis plus de deux
décennies, cet organisme communautaire a pour mission de maintenir les aînés
actifs le plus longtemps possible dans la communauté, améliorant ainsi leur
qualité de vie. La promotion de l'autonomie des personnes âgées, le développement des habiletés pour assurer leur
mieux-être personnel, les activités de nature socioculturelle,
récréative et éducative représentent l'essentiel de la vie associative que
propose le centre des aînés.
En terminant, je
tiens à remercier M. Roger Risasi, le directeur général, de même que les
14 personnes qui composent son équipe
au Centre des aînés de Côte-des-Neiges, ainsi que les nombreux bénévoles qui
par leur implication et leur dévouement font en sorte que le centre est
rempli de succès. Alors que nous avons une forte croissance de nos aînés, je pense qu'un organisme comme le centre de
Côte-des-Neiges, évidemment, a plus que jamais sa pertinence. Merci, Mme
la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Mont-Royal.
Et, pour la dernière déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole à M.
le député de Labelle.
Souligner
l'importance de la route verte comme
moteur économique du Québec
M. Sylvain Pagé
M. Pagé :
Merci, Mme la Présidente. Alors, à titre de porte-parole en matière de sports,
loisirs et de saines habitudes de vie, je
tiens à féliciter Équiterre, qui a su mobiliser des partenaires de partout au Québec
afin de sauver la route verte.
L'idée de cette piste
cyclable de 5 300 kilomètres a pris naissance à la fin des
années 80 quand les principaux artisans
de Vélo Québec imaginaient le Québec cyclable de demain.
Inaugurée en 2007, la route traverse près de 400 municipalités dans
15 régions et 94 MRC. En 2008, Vélo Québec reçoit le prix mondial
Innovation en loisirs de l'Organisation
World Leisure. La même année, la route verte se classe première parmi les
10 plus belles véloroutes au monde,
rien de moins!
Une
pétition de 48 000 noms a été déposée la semaine dernière au ministre des Transports dans le but de sauver la route verte. Pour la région des Laurentides, il
s'agit d'un moteur économique essentiel avec des retombées de 68 millions de dollars, imaginez donc
pour l'ensemble du Québec!
Je
félicite Équiterre, Vélo Québec, les élus et les
48 000 pétitionnaires qui souhaitent sauver la route verte, et je
demande au ministre des Transports de donner suite à leur pétition. Merci, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Labelle.
Alors,
ceci met fin à la rubrique des déclarations
de députés, et je vais suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension à
9 h 52)
(Reprise à 10 h 1)
Le Président :
Bon matin. Nous allons nous recueillir quelques instants.
Merci. Veuillez vous
asseoir.
Mmes, MM. les
députés, nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a
pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique Présentation
de projets de loi, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel :
Oui. Oui, M. le Président, bonjour. J'étais en grande discussion avec le chef
de l'opposition officielle, c'est pour ça.
Le Président :
Bonjour à vous aussi.
M.
Bonnardel :
Alors, je vous demande d'appeler l'article a, s'il vous plaît, M. le Président.
Projet de loi n° 497
Le
Président : Alors, à l'article a du feuilleton, M. le
député de Beauce-Nord présente le projet de loi n° 497, Loi
visant à responsabiliser les détenus quant aux coûts de leur détention. M. le
député de Beauce-Nord.
M. André Spénard
M.
Spénard : Merci, M. le Président. En premier lieu,
permettez-moi de souhaiter prompt rétablissement à la vice-première ministre du Québec et à souhaiter la
bienvenue au nouveau titulaire de ce ministère dont je suis le critique.
Alors,
ça me fait plaisir de déposer à l'Assemblée nationale le projet de
loi n° 497, Loi visant à responsabiliser les détenus quant aux coûts de leur détention. Ce
projet de loi a pour objet de responsabiliser davantage les détenus quant
aux coûts de leur détention. À cette fin, le
projet de loi prévoit diverses mesures de contribution de la part des personnes
incarcérées.
D'une
part, la personne incarcérée doit, pendant la durée de sa détention, verser une
part de ses revenus au ministre des Finances à titre de remboursement
des frais engagés pour son hébergement et sa nourriture.
D'autre
part, tout fonds de soutien à la réinsertion sociale doit prélever de la
rémunération due à une personne incarcérée qui exécute un travail dans
le cadre d'un programme d'activités un montant qu'il verse au ministre des
Finances à titre de remboursement des frais engagés pour l'hébergement et la
nourriture de la personne incarcérée.
Enfin, la
personne incarcérée sans personne à charge qui bénéficie d'une indemnité de remplacement
du revenu versée par la Société de
l'assurance automobile du Québec ou par la Commission de santé et sécurité du
travail voit une partie de son
indemnité retenue pour le remboursement des frais engagés pour son hébergement
et sa nourriture. Merci, M. le Président.
Mise
aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, M. le ministre des Finances.
Rapport annuel et états
financiers du Bureau de décision et de révision
M.
Leitão : M. le Président, je dépose le rapport d'activité et des états
financiers 2014-2015 du Bureau de décision et de révision.
Le Président :
Ce document est déposé.
Dépôt de rapports de
commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission
de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles et député de Labelle.
Élection à la présidence de la
Commission de l'agriculture,
des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
M.
Pagé : Oui, avant tout. Alors, merci, M. le Président. Je
dépose le rapport de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles, communément appelée la CAPERN, qui, le 29 octobre 2015, a
procédé à l'élection à la présidence de la commission. Merci.
Le Président :
C'est un bon choix.
M. Pagé :
Je pense que oui.
Le Président :
Alors, ça va...
M. Pagé :
On laissera...
Le Président :
Alors, ce rapport est déposé.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt
de pétitions, Mme la députée de Taschereau.
Modifier le projet de loi édictant
la Loi concernant la prévention
et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à
la violence et apportant diverses modifications législatives
pour renforcer la protection des personnes
Mme
Maltais : Je
dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée
par 964 pétitionnaires. Désignation : citoyennes et citoyens du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Attendu
que les discours haineux et les
discours incitant à la violence sont sanctionnés par la législation criminelle du Canada;
«Attendu que le Québec
est une société laïque;
«Attendu que les
religions font partie du monde des idées;
«Attendu
que plusieurs acteurs de la société civile soulignent la menace à la liberté d'expression que constitue le projet
de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la
lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence
et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection
des personnes;
«Attendu que le projet
de loi n° 59 risque d'entraîner de longues, inutiles et coûteuses
procédures judiciaires;
«Attendu que le deuxième volet du projet
de loi n° 59 prévoyant
"diverses mesures pour renforcer la protection des personnes"
constitue quant à lui une avancée sociale;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Pour
ces raisons, nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec
qu'il modifie le projet de loi
n° 59 pour n'en conserver que le deuxième volet
prévoyant "diverses mesures pour renforcer la protection des
personnes".»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président :
Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. J'ai aussi M. le député de Bonaventure.
Annuler les augmentations de
loyer des baux de villégiature
pour les propriétaires présents sur les terres publiques
M. Roy : Merci,
M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par 5 087 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant que les terres publiques du Québec appartiennent
à l'ensemble des citoyens;
«Considérant que l'occupation dynamique et
accessible du territoire public du Québec contribue à l'essor des régions;
«Considérant
que l'accessibilité du territoire public permet la pratique d'activités
économiques rentables pour les communautés, comme la chasse et la pêche;
«Considérant que les citoyens du Québec qui
habitent le territoire public sont fiers de s'occuper du territoire, notamment
en y aménageant des chemins depuis plusieurs décennies;
«Considérant
que la hausse drastique des tarifs de location pour les propriétaires de
chalets compromet l'accessibilité des terres publiques aux citoyens du
Québec;
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'annuler les augmentations importantes de loyer des baux de villégiature pour les propriétaires
présents sur les terres publiques du Québec. Ces augmentations découlent de la nouvelle formule de calcul des valeurs de référence publiée dans
la Gazette officielle du Québec, le 15
juillet 2015.
«Nous demandons également au gouvernement du
Québec :
«Qu'il
affirme son intention de maintenir les terres du domaine de l'État
accessibles à l'ensemble des Québécois, peu importe le revenu;
«Qu'il tente,
par tous les moyens, d'éviter un retour aux clubs privés qui ont été abolis
dans les années 70, afin que l'ensemble des Québécois continuent à
avoir accès au territoire qui leur appartient;
«Qu'il
s'assure, par tous les moyens, de l'accessibilité des activités de villégiature comme la chasse, la pêche et
autres activités de plein air sur les terres publiques.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition.
Le
Président : Alors,
l'extrait de cette pétition est déposé. J'ai reçu de la part de M. le député de
La Peltrie une demande de dépôt
d'une pétition qui est non conforme. Est-ce que j'ai un consentement?
Consentement. M. le député, allez-y.
Revoir l'imputation des dépenses de l'agglomération
de Québec à Saint-Augustin-de-Desmaures
M.
Caire :
Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par 3 700 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes de Saint-Augustin-de-Desmaures.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant
le soutien de la population de Saint-Augustin-de-Desmaures contre l'imputation abusive des dépenses de
l'agglomération de Québec à Saint-Augustin-de-Desmaures;
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous, soussignés, demandons conjointement et
solidairement au ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du
territoire :
«D'établir un
moratoire sur la façon actuelle d'opérer de l'agglomération de Québec;
«Que toutes
nouvelles dépenses ne soient adoptées qu'après approbation du ministre;
«D'accélérer la mise
en place de la nécessaire vérification des dépenses de l'agglomération de
Québec.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président : Alors, l'extrait de cette
pétition est déposé. J'ai aussi reçu de la part de M. le député de Bonaventure
une demande de présentation d'une pétition
qui est non conforme. J'ai un consentement? Consentement. M. le député
de Bonaventure.
Annuler les augmentations de loyer des baux de
villégiature
pour les propriétaires présents sur les terres publiques
M. Roy : Merci, M. le Président.
J'aimerais, d'entrée de jeu, souligner la présence de villégiateurs et de gens
qui sont très actifs dans le domaine
de l'occupation du territoire et de la forêt publique au Québec. Donc, mes
salutations.
Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale, signée par 528 pétitionnaires. Désignation : citoyens et
citoyennes du Québec.
«Les faits invoqués
sont les suivants :
«Considérant que les
terres publiques du Québec appartiennent à l'ensemble des citoyens;
«Considérant que l'occupation dynamique et accessible du
territoire public du Québec contribue à l'essor des régions;
«Considérant que l'accessibilité du territoire public permet
la pratique d'activités économiques rentables pour les communautés,
comme la chasse et la pêche;
«Considérant que les citoyens du Québec qui
habitent le territoire public sont fiers de s'occuper du territoire, notamment
en y aménageant des chemins depuis plusieurs décennies;
«Considérant que la hausse drastique des tarifs de location
pour les propriétaires de chalets compromet l'accessibilité des terres
publiques aux citoyens du Québec;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous,
soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'annuler les augmentations
importantes de loyer des baux de
villégiature pour les propriétaires présents sur les terres publiques du
Québec. Ces augmentations découlent de
la nouvelle formule de calcul des valeurs de référence publiée dans la Gazette
officielle du Québec, le 15 juillet 2015.
«Nous demandons
également au gouvernement du Québec :
«Qu'il
affirme son intention de maintenir les terres du domaine de l'État accessibles
à l'ensemble des Québécois, peu importe le revenu;
«Qu'il
tente, par tous les moyens, d'éviter un retour aux clubs privés qui ont été
abolis dans les années 70, afin que l'ensemble des Québécois continue à
avoir accès au territoire qui leur appartient;
«Qu'il
s'assure, par tous les moyens, de l'accessibilité des activités de villégiature
comme la chasse, la pêche et autres activités de plein air sur les
terres publiques.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
• (10 h 10) •
Le Président : Alors, l'extrait
de cette pétition est déposé. Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni
d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes donc rendus à la période de questions
et de réponses orales. Je cède la parole à Mme la députée de Joliette.
Impact de la restructuration
du Directeur des poursuites
criminelles et pénales sur la lutte contre le crime organisé
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Depuis
plusieurs semaines, nous questionnons la ministre de la Justice sur la baisse du nombre de
procureurs qui découlera de la fusion des trois bureaux spécialisés du
DPCP : bureaux de lutte à la corruption et à la malversation, de lutte au crime organisé, de lutte aux produits de la
criminalité. Tel que ça a filtré, c'est une réduction de 40 % du
nombre de procureurs affectés spécifiquement à ces bureaux qui est appréhendée.
La
ministre s'est évertuée à répéter qu'il n'y aurait pas de baisse d'effectifs,
en allant jusqu'à déclarer ici même : «...il n'y a pas de
compression dans le nombre de procureurs chargés de s'attaquer au crime,
chargés de s'attaquer à la grande
criminalité, chargés de s'attaquer au crime organisé.» Or, le directeur de
l'UPAC a déclaré lundi qu'il avait été informé que le nombre de procureurs
dédiés à ces bureaux — actuellement, 110 — passeraient à 60 ou même à 50. Cette
contradiction est pour le moins troublante, M. le Président.
La ministre va-t-elle
nous dire que c'est le directeur de l'UPAC qui n'a pas transmis aux
parlementaires la bonne information ou est-ce plutôt elle qui a induit la
Chambre en erreur?
Le Président :
Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : M. le Président, il me fait plaisir de répondre encore
une fois à la question de la collègue, de faire de la pédagogie parce que ça semble manquer. Il y avait un certain
nombre de procureurs répartis dans un certain nombre d'équipes qui travaillaient en silo pour
s'attaquer au crime organisé. Ces 110 procureurs étaient répartis dans les
différentes équipes. Maintenant, un
bureau sera chargé de la haute criminalité et regroupera 60 procureurs.
Les 40 autres procureurs, M. le Président, sont répartis dans les
palais de justice, là où ils doivent travailler sur le territoire du Québec
pour accompagner les équipes généralistes
qui sont déjà en place dans ces palais de justice. Les 40 procureurs ont
une expertise et vont partager cette expertise avec leurs collègues
partout sur le territoire. Alors, M. le Président, on travaille de façon différente, mais on travaille afin de s'assurer
que, partout au Québec, on puisse s'attaquer à une criminalité qui change,
une criminalité qui nous fait mal.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : M. le Président, une chance qu'on a eu la
comparution du directeur de l'UPAC pour qu'enfin on ait un début de réponse par rapport à ça. Donc, je
comprends qu'enfin la ministre est en train de nous dire qu'effectivement
ce ne sera plus 110 procureurs dédiés
spécifiquement à la lutte contre la grande criminalité, mais bien 60. Donc,
j'aimerais qu'elle
nous explique d'abord comment elle a pu faire les déclarations qu'elle a faites
ici même, en cette Chambre, niant ce
fait-là. Et, deuxièmement, comment elle peut expliquer que ce n'est plus une
priorité pour ce gouvernement, la lutte à la grande criminalité?
Le Président : Mme la
ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
M. le Président, ce que je viens d'expliquer, je l'ai expliqué à maintes
reprises. Si, de l'autre côté, on ne
m'écoutait pas, ça, ce n'est pas mon problème. M. le Président, il y avait
599 procureurs en 2014... 597, pardon, en 2014, 599 en 2015. On a le même nombre — même bonifié — d'effectifs au Directeur des poursuites
criminelles et pénales.
Si la
Directrice des poursuites criminelles et pénales a choisi de revoir les choses,
c'est parce que le travail en silo nuisait
aux fonctions du DPCP et qu'elle souhaitait faire les choses différemment pour
être plus efficace. Le directeur de l'UPAC a notamment mentionné que le
travail en silo pouvait comporter des enjeux et qu'il ne pouvait...
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon :
Alors, M. le Président, ce qu'on comprend, c'est qu'effectivement le chat sort
enfin du sac. Il y en avait 110, il y
en a maintenant 60 dédiés spécifiquement. Là, on nous dit : Oui, oui, mais
on va réorganiser ça. Ils vont faire
une partie du travail de spécialiste, mais ils vont faire surtout du
généraliste. Bien, ce n'est pas ça, le but. Quand on fait une priorité de la lutte au crime organisé,
on maintient des équipes spécialisées. On en fait une lutte de tous les
instants, énergique.
Pourquoi ce gouvernement abandonne, ne fait plus
d'une priorité la lutte au...
Le Président : Mme la
ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
M. le Président, M. le Président, on veut, de l'autre côté, interpréter ce que
j'ai expliqué et, surtout, interpréter
les explications qui ont été données par Me Murphy, il y a de ça quelques
semaines, et qui a fait état de cette restructuration.
Il n'y a personne, personne qui a
changé l'histoire. Au contraire, si quelqu'un tente de rejouer dans les faits, c'est de l'autre côté. On a maintenu le
même nombre d'effectifs et on les répartit. Plutôt que d'être dans une tour
à bureaux à Québec, on est dans les palais
de justice. M. le Président, honnêtement, c'est du gros bon sens, cette
restructuration...
Le Président : En terminant.
Mme Vallée : ...et ça vise à
s'attaquer à la haute criminalité.
Le Président : Principale, M.
le député de Sanguinet.
Investissement du gouvernement dans Bombardier inc.
M. Alain Therrien
M.
Therrien : M. le
Président, on le sait, le premier ministre a signé un mauvais deal avec Bombardier. Il a été celui qui a mis à risque 1,3 milliard de dollars de l'argent des Québécois. On apprend ce matin que le premier ministre a laissé négocier ce mauvais deal par le ministre de l'Économie, et ce
dernier a fait ça tout seul sans s'adjoindre l'expertise d'Investissement
Québec.
On a des
experts négociateurs, des comptables, des gens chez Investissement dont c'est
le métier de négocier ce genre
d'entente, mais le ministre a préféré agir seul. On voit le résultat :
un deal où ce sont les Québécois qui assument tous les risques. S'il y avait eu de vrais experts autour de la table,
on n'en serait pas là aujourd'hui. Autrement
dit, le ministre de l'Économie a été frappé par le
principe de Peter.
M. le Président, pourquoi le ministre de
l'Économie a-t-il refusé de se servir de l'expertise des gens chez Investissement
Québec dans sa négociation avec Bombardier?
Le Président : M. le ministre
de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Alors, M. le Président, comprenons d'abord qu'Investissement
Québec gère ce qu'on appelle ses
fonds propres, et le député de Rousseau,
qui a été titulaire de la responsabilité de l'économie alors qu'il était ministre,
se souvient très bien,
ce qu'on appelle les fonds propres d'Investissement
Québec, c'est ce qu'Investissement Québec gère. On lui demande aussi d'administrer le Fonds
de développement économique.
On ne lui demande pas de le négocier, on
lui demande de le gérer. Ce sont des décisions qui sont prises par le
gouvernement, mais qui font appel à l'équipe au ministère. Et il y a une équipe importante qui est dédiée à accomplir ce
travail-là qui est une équipe aussi de spécialistes, mais qui vise un objectif nettement différent, qui
est celui purement du développement économique, alors que, dans les fonds propres d'Investissement Québec, ce qu'on
fait, c'est qu'on agit de façon complémentaire aux institutions financières.
Alors, la
pratique que vous annoncez ce matin, elle existe depuis toujours, elle a existé
sous tous les gouvernements, et,
lorsqu'on a besoin de faire appel à Investissement Québec pour un dossier
spécifique, on le fait. Et je vous ferai remarquer, M. le Président, que, dans ce dossier spécifique là, il y
avait un membre de la haute direction d'Investissement Québec...
Le Président : En terminant.
M. Daoust : ...qui nous a apporté
son expertise.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Sanguinet.
M. Alain Therrien
M.
Therrien : M. le
Président, l'expertise d'Investissement Québec aurait pu nous éviter ce genre de deal qui
met en conflit les contribuables québécois.
Les analystes économiques nous disent à l'unisson que c'est un mauvais deal.
Les gens du milieu des affaires nous disent
que c'est un mauvais deal. Investissement
Québec, aujourd'hui, nous dit :
C'est un mauvais deal. Il y a seulement deux négociateurs en culottes
courtes qui nous disent que c'est un bon deal.
Pourquoi avoir refusé l'expertise
d'Investissement Québec?
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le ministre de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Alors, je recommence. Je n'ai pas beaucoup de temps pour lui
expliquer ça, mais je recommence. Dans
un dossier de fonds de développement économique, c'est un dossier qui est
traité par les équipes compétentes du ministère.
Et, je répète, lorsque nous avons besoin de l'expertise d'Investissement Québec
dans un dossier comme celui-là, nous
faisons appel à Investissement Québec. Et, je le répète encore une fois, M. le
Président, dans ce dossier spécifique là on a fait appel à certains experts d'Investissement Québec, dont un
membre de la haute direction. Ce n'est pas le président, son expertise n'était pas requise, mais l'équipe
que nous avons mise en place pour réaliser le mandat que nous lui avons
confié a fait le bon travail selon la pratique normale.
Le Président : En terminant.
M.
Daoust : J'invite, en fait, le député à parler un peu avec son
collègue de Rousseau, qui va lui expliquer comment ça...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Sanguinet.
M. Alain Therrien
M.
Therrien :
Aujourd'hui, Investissement Québec nous dit : Ce n'est pas notre deal, on
n'est pas d'accord avec ça, on se
dissocie de ce deal-là. Alors, on se pose la question, M. le Président. Quand
on est rendu qu'Investissement Québec, qui
a une expertise évidente dans ce domaine-là, nous dit des choses comme ça, moi,
je me pose la question encore une fois :
Pourquoi le ministre de l'Économie n'a pas été chercher les ressources qui
étaient à sa portée pour, justement, négocier un deal qui aurait eu du
sens puis qui aurait été à l'avantage des Québécois?
• (10 h 20) •
Le Président : M. le ministre
de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : D'accord. Alors, je recommence. On a fait appel à l'expertise
d'Investissement Québec. On a fait appel
à un grand spécialiste qui fait partie de l'équipe de direction. Lui a eu à
faire appel à ses équipes à lui, il l'a fait. On a négocié une bonne transaction, on l'a négociée avec l'expertise qui
est en place à Investissement Québec. Et, selon le mandat que nous avons
donné à cette équipe-là, ils ont accompli le travail que nous leur avons
demandé.
Alors,
j'aimerais qu'on me trouve le document ou qu'on me montre la citation où
Investissement Québec a dit que ce n'était pas une bonne transaction. Je
serais très, très content que vous déposiez le document, M. le député.
Le Président :
Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Investissement gouvernemental dans
le développement des CSeries
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, le ministre de l'Économie a négocié une entente pour investir
1 milliard de dollars américains
d'argent des Québécois, pour investir dans une société en commandite qui va
gérer la série C de Bombardier. Cette entente a été mal négociée. M. le
Président, pour que ça soit une bonne entente, il aurait fallu quatre choses. Premièrement, Bombardier a besoin de
2 milliards. Moi, je n'ai jamais vu ça, là, de faire une entente pour
1 milliard sans savoir qui va mettre l'autre milliard puis à quelle
condition. Ça, c'est la première chose. Deuxième chose, il aurait dû demander des garanties sur les autres divisions de Bombardier. Troisième chose, le prix
d'exercice des options. Moi, je n'ai jamais
vu ça dans une transaction, là, un prix d'exercice qui est 40 % plus haut que le marché. Donc, pourquoi il
n'a pas demandé un prix plus bas?
Puis, quatrièmement, M. le Président, dans une entente aussi importante, je
pense que le ministre aurait dû
consulter l'opposition pour que le Québec parle d'une seule voix, d'une seule
voix en face, entre autres, d'Ottawa.
Donc, moi, je
voudrais savoir de la part du ministre de l'Économie, est-ce qu'il est trop
tard pour renégocier cette entente?
Le Président : M. le ministre
de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Alors, comprenons, M. le Président, que ce qu'on doit
regarder dans ce dossier-là, c'est l'objectif qui était poursuivi. En fait, la proposition que nous
fait le chef de la deuxième opposition est une proposition qui ne répond pas
aux objectifs que nous poursuivions. Mais je le rassure tout de suite, quand on
parle de dire : Je ne sais pas où est l'autre milliard, nous, quand nous débourserons — et nous le ferons en deux étapes — la société Bombardier mère devra nous
garantir qu'elle a les liquidités suffisantes, à notre satisfaction, pour
compléter le programme.
Alors,
l'objectif que nous poursuivions... Et, j'y reviens, M. le Président, ce que
nous voulons faire, ce que nous voulons
accomplir avec ça, c'est d'abord de s'assurer que le marché est rassuré. Moi,
si j'étais un propriétaire de compagnie aérienne et que j'avais besoin d'avions dans quatre ans — et vous l'avez été —je ne ferais pas affaire avec une entreprise
qui me dirait : Bien, regarde, c'est
intéressant que tu me fasses une commande, mais je ne le sais pas si je te les
fabriquerai. On a besoin de rassurer
le marché à l'effet que ces avions-là seront produits, et c'est ce que nous
avons accompli avec cette entente-là
qui a été faite avec le groupe Bombardier. Ce que nous voulons, ce n'est pas
aider l'industrie du chemin de fer en Allemagne, ce que nous voulons...
Le Président : En terminant.
M. Daoust : ...c'est aider
l'industrie aéronautique au Québec.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, le ministre de l'Économie vient de nous dire :
Le milliard des Québécois ne sera pas
déboursé tant que Bombardier ne nous assurera pas qu'il a trouvé le deuxième
milliard. C'est ça que j'ai bien compris? S'il l'avait, il ne le demanderait pas, il ne demanderait rien à Ottawa.
Et, s'il obtient de l'argent d'Ottawa avec des meilleures conditions,
est-ce que le Québec va aussi avoir droit à ces meilleures conditions?
Le Président : M. le ministre
de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M. Daoust : Alors, sans vouloir
rentrer trop profondément dans le détail, il est clair qu'on voudra avoir des conditions... on ne voudra pas que le fédéral,
s'il vient dans le dossier, ait des conditions différentes ou supérieures aux
nôtres. Ça, ça va de soi.
Mais la difficulté qu'on avait dans tout ça...
Parce qu'il y a eu toutes sortes de propositions qui ont été faites, notamment de mettre de la dette subordonnée.
Écoutez, regardez le bilan de la société. Je ne vous parle pas de sa valeur
marchande, mais je vous parle de sa valeur
aux livres. Vous êtes un CPA de formation, vous savez comme moi que, quand
le passif dépasse l'actif, on ne rajoute pas
de dette dans une entreprise. Ce qu'on a besoin, c'est de l'équité. C'est ce
qu'on a fait.
Mais de m'inscrire dans la société mère, pour
moi, je n'accomplissais pas ce que je veux accomplir dans la...
Le Président : En terminant.
M. Daoust :
...garder le CSeries au Québec, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, je veux être très clair, là. Habituellement, quand on signe
une entente, il y a ensuite une vérification diligente, hein, avant
d'avoir ce qu'on appelle le «closing».
Donc, je
voudrais savoir, être bien clair, là, est-ce que la transaction aujourd'hui est
«closée» ou elle n'est pas «closée»? Peut-on renégocier avec Bombardier,
oui ou non?
Des voix : ...
Le Président : Chut, Chut! S'il
vous plaît! M. le ministre de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Alors, M. le Président, le chef de la deuxième opposition a
tout à fait raison, c'est qu'il y a une entente de principe. Par la suite, il y a une vérification diligente qui est en
train de se faire, et la transaction se terminera le 31 décembre si le rapport de vérification diligente est à la
satisfaction du gouvernement, et dans laquelle on a mis des clauses qui sont
importantes.
Et je vous rappellerai une chose, c'est qu'on a
gardé non seulement la série C au Québec, mais on a gardé la propriété
intellectuelle, on en devient propriétaire. Là où il y a eu... On a effacé au
bilan 4 milliards de dollars, c'est quand
même considérable. On ne l'aurait pas fait s'il n'y avait pas eu cet
effacement-là. On veut un bilan propre. On veut un avion d'avenir. On
veut des emplois pour le Québec.
Le Président : En terminant.
M. Daoust : On veut sauver notre
industrie de l'aéronautique parce que notre locomotive aéronautique, c'est
Bombardier.
Le Président : Principale, M.
le député de Granby.
Frais médicaux accessoires
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel :
M. le Président, le gouvernement s'apprête à normaliser les frais accessoires
que les patients vont parfois devoir
payer avec leur carte de crédit lorsqu'ils vont consulter un médecin en dehors
des hôpitaux. Or, ces frais pourraient être aussi taxés par le
gouvernement. En effet, en commission parlementaire, mon collègue de Lévis a demandé au ministre de la Santé si les frais
accessoires seraient taxés. Voici sa réponse : «C'est un grand litige
juridique avec Revenu Québec qui
n'est pas encore résolu. Il y a des questionnements qui ont été soulevés dans
la dernière année par Revenu Québec, alors je ne sais pas ce que Revenu
Québec a pu conclure à cette date-ci.»
Bref, non
seulement le ministre de la Santé va imposer des frais accessoires, mais, en
plus, il ne sait pas si Revenu Québec va les taxer. La CAQ a proposé des
solutions pour éviter aux patients de payer des frais accessoires, et c'est
inacceptable aujourd'hui que le gouvernement songe à taxer aussi des services
médicaux essentiels.
Ma question est fort claire pour le ministre des
Finances : Est-ce qu'il s'engage à ce que les nouveaux frais accessoires
ne soient pas taxés?
Le Président : M. le ministre
de la Santé.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, c'est quasiment une question camouflage. On se croirait sur un champ de
bataille. Le député mon collègue de Granby se lève avec une introduction qui me vise et il
arrive avec une question très simple qui n'est pas en lien ou
presque avec son introduction.
Alors, M. le Président, je vais quand même rectifier certains éléments et je vais même me
référer à la position historique de la CAQ. La position historique de la
CAQ est de gérer... Oui, je la connais. Je l'ai même intégrée, M. le Président,
dans ma pensée puis je n'ai pas une distance qui est très longue, manifestement. Bon. Alors, M. le Président, la position traditionnelle de la CAQ est
celle d'un gouvernement qui gère de façon responsable, et gérer de façon responsable... Et d'ailleurs
je vais même prendre des propos que j'ai déjà entendus, peut-être
privément, là, mais, privément, dans
la CAQ, on considérait que les colonnes de revenus et de dépenses devraient
faire en sorte qu'il y ait un équilibre. Et ça, M. le Président, ça fait en sorte que, quand on gère l'État,
on doit prendre des décisions qui sont difficiles. Et, sur la question des frais accessoires, bien, cette
question-là, elle a été débattue parce
que ce sont des décisions qui nous amènent
là...
Le Président :
En terminant.
M. Barrette :
...pour faire en sorte que les soins nécessaires soient donnés à la population,
M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Granby.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le Président, le Parti libéral a
l'imagination fertile quand c'est le temps d'augmenter les tarifs et les taxes
au-dessus de l'inflation. Maintenant, il y a peut-être un petit mélange entre
le ministre des Finances et le ministre de la Santé.
Je
pose une question fort claire au ministre des Finances : Est-ce qu'il s'engage à ne pas taxer les frais accessoires
que le ministre de la Santé impose aux citoyens québécois? Je le demande au ministre
des Finances.
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette :
M. le Président, au moment où on se parle, il y a une pratique qui existe, elle
existe. Les frais accessoires, je vais me
permettre de le rappeler, c'est quelque
chose qui a été mis en place par le Parti québécois, qui a été mis en place par
le Parti québécois, et c'est quelque
chose que le Parti québécois avait prévu de baliser et d'encadrer, ce que nous faisons maintenant, contrairement
à ce que le Parti québécois voudrait faire, parce que le Parti
québécois change d'idée à tous
les six mois. Alors, ils ont pris cette position-là. Maintenant, dans la
pratique actuelle, M. le Président, il y a des frais qui sont facturés aux patients, il y a
une pratique qui existe, et ce que nous faisons, c'est venir normaliser
une situation, empêcher les abus et arrêter ce qui est illégal, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Granby.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : M. le Président, le ministre de la Santé a même déclaré que les frais accessoires seraient
le prix coûtant plus une marge de profit minimalement de 10 % à 15 %. Alors, en plus, on imposerait
une taxe.
Vous
n'avez pas le courage de vous lever aujourd'hui et de dire aux Québécois — le ministre des Finances, qui ne me regarde pas, là — de dire aux Québécois qu'il n'y aura pas de
taxe pour les frais accessoires? C'est une question fort simple. Je
demande au ministre de répondre à la question.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, le traitement fiscal de ce qui existait
sera le même ensuite, il n'y a pas de changement de ce côté-là.
Maintenant,
compte tenu du propos que vient de tenir le député de Granby, je ne peux
m'empêcher de le corriger. Il n'est
pas question qu'il y ait... Et je
n'ai jamais dit qu'il y ait un profit, ce n'est pas un mot que j'ai utilisé.
J'ai dit qu'il devait y avoir d'autres éléments, j'ai parlé de certaines contingences, des choses qui étaient afférentes
aux frais spécifiques. J'ai donné des
exemples comme, par exemple, de l'entreposage, de la gestion et ce genre de
choses là. Si j'achète une seringue...
Le Président :
En terminant.
• (10 h 30) •
M. Barrette :
...la seringue a des frais qui sont afférents, et c'est ce à quoi je faisais
référence.
Le Président :
Principale, M. le député de Beauce-Nord.
Coûts relatifs à la gestion de
la surpopulation carcérale
M. André Spénard
M.
Spénard : Merci,
M. le Président. La surpopulation est
un problème chronique dans les prisons du Québec.
Entre 2009 et 2014, le taux d'occupation
moyen est passé de 97 % à 104 %, et à 116 % si on tient compte
de la marge nécessaire pour assurer le respect de la capacité
opérationnelle et sécuritaire des services. En conséquence, le coût moyen
par détenu est passé de 173 $ en 2009 à
202 $ par jour en 2014. Les dépenses du système ont, quant à elles,
augmenté de 36 % en passant de 288 millions à 392 millions.
C'est 104 millions de plus par année. Avec un coût annuel de
76 000 $ en 2014, un détenu
coûtait donc près de 13 000 $ de plus aux contribuables qu'en 2009.
Le constat est clair et préoccupant.
Comment
le gouvernement compte-t-il contrôler ces dépenses? Comment
va-t-il trouver la place et les ressources nécessaires pour héberger les
personnes que lui confieront les tribunaux?
Le Président :
M. le ministre de la Sécurité publique, pour l'instant.
M. Pierre Moreau
M.
Moreau : Oui. Merci, M. le Président. À mon tour de saluer le député de
Beauce-Sud comme porte-parole
en matière de...
Des voix :
...
M.
Moreau : Ah! Beauce-Nord, O.K., Beauce-Nord. Et ça va rester comme ça pour un bon moment, O.K.?
Alors, je veux le saluer — son
chef m'empêche de le faire, là, en m'interpellant. Alors, je veux saluer le député et porte-parole de l'opposition et
l'assurer de toute ma collaboration.
La
question qu'il soulève est une question importante effectivement, soit la
question de la surpopulation dans les établissements.
Le ministère de la Sécurité publique travaille à l'heure actuelle à compléter
les ouvrages additionnels de détention,
les centres additionnels de détention qui seront à la disposition du ministère
de la Sécurité publique lorsque les vérifications
sécuritaires auront été faites et qui vont contribuer à réduire le phénomène de
la surpopulation, mais on doit agir
et rapidement, notamment dans le cas du centre de détention Tanguay, qui est à
ce point vétuste qu'il pourrait mettre en
risque la sécurité des femmes qui y sont détenues, lesquelles seront
transférées à l'institution Leclerc, qui est à moins de
50 kilomètres, et le travail se fait pour assurer le contrôle des coûts.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Beauce-Nord.
M. André Spénard
M.
Spénard : Avec la fermeture de la prison Tanguay en février
2016, la fermeture des bâtiments modulaires temporaires en 2018 et les effets de la loi C-10 sur les peines
minimales, la surpopulation va continuer à s'alourdir malgré l'ouverture de nouvelles prisons l'an prochain.
Une mise à jour des projections de la Direction des services correctionnels
du ministère porte le taux d'occupation à
114 % d'ici 2020, 128 % si on applique la marge opérationnelle et
sécuritaire.
Comment le ministre
entend-il contrôler les coûts liés à cette surcharge?
Le Président :
M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Pierre Moreau
M. Moreau :
Encore une fois, M. le Président, ce qui est fait à l'heure actuelle, c'est de
développer le plus rapidement possible des
places additionnelles, parce qu'il y a des projets qui sont lancés depuis fort
longtemps. Je me souviens, à une
époque, j'étais directeur de cabinet à la Sécurité publique, puis on parlait de
la prison de Roberval; bien, aujourd'hui, c'est passé d'un plan à une
réalisation concrète. Et il y a plusieurs établissements comme ça, notamment
Leclerc, qui vont bénéficier d'espaces additionnels.
Alors,
ce que nous faisons, c'est : nous tentons de réduire le phénomène de la
surpopulation. Et le contrôle des coûts
est intimement lié à l'ouverture des nouveaux établissements. Alors, il y a un
contrôle qui est fait. J'ai demandé au sous-ministre responsable des
établissements carcéraux...
Le Président :
En terminant.
M. Moreau :
...de me faire un rapport sur cette question-là, et c'est un dossier que nous
suivons de près.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Beauce-Nord.
M. André Spénard
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Au rythme actuel, le coût
journalier par détenu va atteindre environ 240 $ d'ici 2020, avec
un coût total de 520 millions par année, soit 120 millions de plus
qu'aujourd'hui. Parce que je suis inquiet
que l'alourdissement des coûts du système devienne insoutenable pour les
contribuables, j'ai déposé ce matin le projet de loi n° 497, qui
contient des propositions visant à responsabiliser les détenus quant au coût de
leur détention.
Le gouvernement
est-il prêt à travailler avec nous pour trouver des solutions? Car nous, nous
le sommes.
Le Président : M. le ministre
de la Sécurité publique.
M. Pierre Moreau
M. Moreau :
Oui, M. le Président. J'ai bien entendu le député déposer son projet de loi ce
matin. C'est une formule qui revient de façon épisodique.
Il faut savoir qu'il y a moins de 10 % des
détenus qui travaillent et qui reçoivent le tiers... Pour ceux qui travaillent — il y en a environ 480 dans l'ensemble du
système — ils
reçoivent le tiers du salaire minimum. Une partie du salaire retenu tombe dans le fonds
d'intégration et de réintégration des détenus, et on maintient et on conserve
50 % et parfois 80 % de
leurs revenus pour être en mesure de leur remettre au moment où ils vont être
réinsérés dans la société, pour ne pas qu'ils aillent commettre des vols
pour être capables de payer leur nourriture lorsqu'ils sont...
Le Président : En terminant.
M. Moreau :
...rendus dans la société. On est conscients de ça, on est prêts à travailler
avec vous, mais je pense...
Le Président : Principale, M.
le député de Bonaventure.
Hausse du prix des baux de villégiature
sur les terres publiques
M. Sylvain Roy
M. Roy :
M. le Président, les propriétaires de chalet et de camp qui louent des terrains
sur les terres publiques sont en
train de se faire imposer des hausses draconiennes, pour ne pas dire
prohibitives, de loyer par le gouvernement libéral.
Dans
certaines régions, les tarifs passent de 480 $ à 3 000 $ par
année pour un terrain en plein bois sans aucun service. Face à ces
hausses, plusieurs chasseurs et pêcheurs vont abandonner leurs campements, car
ils ne seront plus capables de payer. Le plan libéral, M. le Président, c'est
une expropriation déguisée des Québécois moins riches. J'ai demandé ici même au
ministre de reculer avec son projet inéquitable, il n'a rien voulu savoir. Nous
avons, dans nos tribunes, plusieurs villégiateurs qui seront touchés par les
hausses, et le ministre n'a même pas daigné les rencontrer. Depuis les années 70, le Parti québécois
s'est battu pour que tout le monde, et pas juste les riches, puisse profiter de
la forêt québécoise, et ce n'est pas aujourd'hui que nous allons arrêter.
Est-ce que
le ministre va enfin comprendre le bon sens et, par respect
pour les dizaines de milliers de gens lésés, annuler son projet, qui va
nous ramener aux années 60?
Le Président : M. le ministre
des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Merci, M.
le Président. J'aimerais d'abord rappeler les faits au député.
Quand on
regarde les faits comme tels, c'est 88 % des villégiateurs qui paient et
qui vont payer en fait un loyer équivalent
à moins de 2 $ par jour. Or, c'est ça, la réalité dont on parle
actuellement. Quand on regarde des familles au Québec, par exemple, qui vont en camping pendant deux semaines,
plusieurs paient à peu près, là, le prix qu'on va charger de... le loyer moyen pour les villégiateurs.
Maintenant, je tiens à rappeler qu'on a utilisé, M. le Président, la même
formule qu'en 2003, c'est-à-dire l'évaluation de la valeur marchande. Je
tiens à rappeler également que le Commissaire au développement durable nous avait bien avisés, il nous avait rappelé dans
un rapport de juin 2014 de réévaluer régulièrement la valeur marchande pour ne pas priver l'État, M.
le Président, de retombées financières et créer, disait-il, des iniquités
pour les autres locataires des terres de l'État.
Alors, c'est
ça, la réalité, M. le Président, à laquelle nous avons à faire face. Il y a des
endroits où il y a des augmentations plus importantes puis il y a des
endroits où il n'y en a pas, d'augmentation...
Le Président : En terminant.
M.
Arcand : ...parce
que la valeur marchande n'est pas là, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de...
M. Roy : Bonaventure.
Le Président :
...Bonaventure.
M. Sylvain Roy
M. Roy :
M. le Président, quand on fait référence à un terrain de camping, là, c'est
parce qu'on ne comprend pas que tu as
de l'eau, de l'électricité, tu as de l'égout, on ramasse les vidanges puis on
entretient ton chemin. Donc, je dirais, la comparaison est très faible,
hein? Les Québécois qui chassent, qui pêchent ou qui ne font que profiter de
notre magnifique
territoire, il y en a des centaines de milliers au Québec. Les forêts, les
rivières et les lacs du Québec sont une richesse collective qui appartient à tous les Québécois. Avec le projet
libéral, on va enlever l'accès à une grande partie d'entre eux.
Est-ce que le
gouvernement veut vraiment qu'on revienne à l'époque des clubs privés où seuls
les riches avaient accès aux forêts, aux lacs et aux rivières du Québec?
Le Président : M. le ministre
des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président, je
pense que les baux de villégiature, c'est une bonne entente pour l'ensemble des
citoyens, de façon générale. D'ailleurs, les
chiffres de notre ministère, M. le Président, démontrent qu'à chaque fois que
nous avons, au cours des dernières années, mis au tirage au sort certains
emplacements de villégiature, pour chaque emplacement,
il y avait une moyenne de 41 demandes. Donc, je pense qu'il y a une
demande extrêmement forte de ce côté-là.
Maintenant,
je tiens à rappeler au député, sur cette question-là, parce que, pour moi, je
pense que c'est important quand on
parle d'équité, il faut rappeler que, si on compare, par exemple, avec la
province de l'Ontario, eux, ils établissent un montant de 10 % de
la valeur marchande pour établir...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Bonaventure.
M. Sylvain Roy
M. Roy :
Écoutez, M. le Président, les hausses sont drastiques, et pour les gens c'est
une catastrophe, O.K.? Les conséquences
de ces hausses de tarifs, les gens qui vont les subir peuvent vous les
expliquer. Certains d'entre eux verront leurs baux passer de 480 $ à 3 000 $. 3 000 $,
c'est une urbanisation de l'évaluation en plein bois. Aujourd'hui, ils sont
ici avec nous, M. le ministre.
Est-ce que
vous pouvez annuler les hausses et consentir à une rencontre avec eux? Ils sont
prêts à vous recevoir après la période de questions.
• (10 h 40) •
Le Président : M. le ministre
des Ressources naturelles.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : M. le Président,
écoutez, encore une fois... je n'ai pas terminé tout à l'heure, mais je voulais
simplement dire qu'en Ontario c'est
10 %, c'est 5 % ici de la valeur marchande au Québec, donc je pense
que c'est encore une bonne entente.
Je dois vous
dire également que notre gouvernement a pris en considération ces questions-là.
Nous voulons réduire au maximum
l'impact, M. le Président, en étalant la hausse sur cinq ans, M. le Président.
Et, oui, je rencontrerai les gens après la période de questions. Il me
ferait plaisir de le faire. Merci infiniment, M. le Président.
Le Président : Principale, M.
le député de Labelle.
Développement du réseau des centres de la petite enfance
M. Sylvain Pagé
M. Pagé :
Oui. Merci, M. le Président. En augmentant, dans certains cas, jusqu'à
270 % le tarif en CPE, en freinant le développement des places et
en diminuant l'aide à la construction des installations, le gouvernement
s'attaque directement à ce joyau québécois
que sont les centres de la petite enfance. Bref, il est désormais plus
attrayant pour certains parents
d'envoyer leur enfant dans le système de garderies privées non subventionnées;
des effets pervers qui contribuent à
démanteler cette organisation, qui vise à donner une chance égale à tous les
enfants. Selon Louis Senécal, P.D.G. de l'AQCPE, c'est du jamais-vu. Selon lui, c'est une crise qui n'a jamais
été rencontrée depuis l'implantation de la politique familiale il y a
20 ans.
Est-ce que la
ministre de la Famille en est consciente? Peut-elle nous dire quelles mesures
elle va mettre en place afin de protéger nos CPE, ce service public
reconnu partout dans le monde?
Le Président : Mme la
ministre de la Famille.
Mme Francine Charbonneau
Mme
Charbonneau :
Merci, M. le Président. C'est un constat qui appartient à un regroupement, M.
le Président, puis c'est important de rappeler aussi à mon collègue que
je suis la ministre de la Famille et non la ministre des CPE.
Il faut
faire en sorte que nos familles au Québec aient des services partout.
D'ailleurs, je vous rappelle, M. le Président, qu'il y a à peine un an mon collègue se levait pour dénoncer... du moins,
ce n'était pas lui, mais mon collègue de Terrebonne, mais maintenant on a changé. Par
contre, il se levait pour dénoncer le fait que les parents manquaient de
places, qu'il fallait faire des places. Eh bien, M. le Président, c'est
6 600 places, depuis l'arrivée du gouvernement libéral au pouvoir, qui ont été faites. Et, en ce moment,
s'il y a des places partout au Québec, c'est parce que les parents ont un
choix.
Donc,
j'espère que mon collègue ne se lève pas en Chambre pour dénoncer le choix que
font nos parents, le fait qu'ils en
ont et le fait qu'ils peuvent choisir, proche de chez eux, proche de leur emploi, aux services et qu'ils peuvent
magasiner leurs places. Ce n'est pas une faiblesse au Québec, c'est une force.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Labelle.
M. Sylvain Pagé
M.
Pagé : Mme Josée
Charette, directrice du CPE Rayons de
soleil, nous dit : «...ce qui est aberrant, c'est qu'ils nous coupent l'herbe sous le pied avec [leur]
nouvelle tarification. Ça crée un marché parallèle au privé.» M. le Président,
avec les CPE, nous avions mis en place un
système parmi les plus progressistes en Occident. Aujourd'hui, on assiste à un
retour en arrière sans précédent.
Est-ce que la
ministre va, oui ou non, corriger le tir afin de protéger comme il se doit le
réseau public?
Le Président :
Mme la ministre de la Famille.
Mme Francine Charbonneau
Mme
Charbonneau :
Merci, M. le Président. L'objectif que nous avons au Québec, c'est d'avoir des
choix. D'ailleurs, mon collègue devrait le savoir, puisque
67 % des places qui sont subventionnées et privées ont été offertes par le Parti
québécois. Donc, qu'aujourd'hui il se lève pour dénoncer qu'il
y a des places partout... sachons
qu'il faudrait peut-être qu'il parle à certains de ses collègues, puisque des places ont été offertes
par son parti, au Québec, pour le privé subventionné, ce qui fait en sorte que nos parents ont des choix partout
au Québec pour des services pour leurs enfants.
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! La deuxième opposition a peut-être
une question? M. le député de Deux-Montagnes.
Allocations de transition des
ex-premiers ministres
M. Benoit Charette
M.
Charette : En mai dernier, des révélations concernant les dépenses des
anciens premiers ministres avaient grandement surpris et même choqué les
Québécois.
Rappelons
les faits révélés à l'époque : des dépenses de 370 000 $ pour
Jean Charest en 22 mois, des dépenses de 130 000 $ pour Pauline Marois en à peine huit mois. Hier,
nous avons vu un bel exemple du genre de dérive pouvant découler de
règles qui ne sont pas suffisamment contraignantes : 16 000 $
ont été accordés à une ancienne candidate péquiste
pour réaliser une étude bidon qui ne fait rien de moins que le procès des
radios de la région de Québec. C'est exactement
le genre de cas qu'il faut éviter. En mai, le premier ministre a dit qu'il
était au courant de ce dossier depuis longtemps
et qu'il avait même mandaté le secrétaire général pour proposer de nouvelles
règles. Il avait par contre refusé de fixer une échéance.
Ma
question est bien simple : Quand le gouvernement va-t-il présenter de
nouvelles règles afin de mieux baliser les avantages consentis aux
anciens premiers ministres?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Oui. Merci, M. le Président. Effectivement, notre
collègue rappelle des échanges qui ont eu lieu autour du 20 mai dernier, je crois, et le premier ministre, à
l'époque, avait effectivement identifié des coupures de presse qu'il rappelle qu'il fallait revoir les
privilèges, notamment l'étendue et même la durée des années de ces privilèges.
Je tiens à noter par contre qu'il
était assez précis sur l'importance de garder les mesures de sécurité pour les premiers
ministres qui sortent de fonction. Je pense que là-dessus il n'y a
personne qui va contester cet élément.
Au même moment, il
y avait d'ailleurs
eu une motion avec laquelle on était d'accord, il n'y
a pas eu de débat, il n'y a
pas eu de consentement pour d'autres raisons de la part du Parti québécois, mais on était d'accord. Je cite ou je lis la motion de l'époque, du 20
mai :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse la nécessité, en cette période de rigueur
budgétaire, de revoir et de mieux encadrer l'utilisation et les montants
de l'enveloppe annuellement dévolue aux anciens premiers ministres; et
«Qu'elle affirme
qu'il est inacceptable d'utiliser une partie de cet argent à des fins purement
partisanes.»
Tout
à fait d'accord avec ça. D'ailleurs, dans la foulée de cela, j'ai eu des
discussions avec le premier ministre, dans
mes fonctions de responsable des institutions démocratiques, M. le Président.
Nous travaillons à une loi sur l'Exécutif dans laquelle seraient
intégrées des dimensions...
Le
Président : En terminant.
M. Fournier :
...de cet ordre-là. La partie leader en moi souhaite que nous ayons un projet
de loi plus global.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Deux-Montagnes.
M. Benoit Charette
M.
Charette : Merci, M. le Président. Nous sommes tous d'accord pour
respecter ceux qui ont occupé la fonction de premier ministre. Nous sommes également d'accord, naturellement, pour
qu'il y ait une forme d'accompagnement pour d'anciens premiers ministres en transition. Par contre, nous devons
faire un constat : il y a actuellement des abus, et le cas d'hier
est aberrant. Financer une étude de piètre qualité, dans un esprit purement revanchard,
n'a rien à voir avec la transition d'un ancien premier ministre.
Quel
est l'échéancier du gouvernement pour revoir les règles en vigueur? Doit-on
comprendre que, depuis mai dernier, aucune action n'a été déposée?
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Non, ne comprenez pas ça, parce que ce n'est pas ça
que j'ai dit dans ma réponse. Évidemment, si vous l'écoutez, ça va aider à ce qu'on puisse avoir un
débat satisfaisant et sérieux. Ce que je dis, c'est : Dans la foulée de
ces échanges, il y a eu du travail qui est fait, mais, dans une loi sur
l'Exécutif, il y aurait aussi d'autres matières. Alors, la question de
l'échéancier, je sais que vous souhaitez que ce soit avant Noël, c'est
possible; comme c'est possible que ce ne soit pas le cas. Je ne peux pas
m'engager à ça.
Maintenant,
la question est la suivante : À quel ancien premier ministre vont
s'appliquer les nouvelles règles? Bien,
ça serait au premier ministre actuel, et je ne crois pas qu'il y a urgence de
le voir quitter sa fonction. D'abord, il a un mandat jusqu'en 2018, et
on espère que ça puisse être renouvelé encore plus longtemps.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Deux-Montagnes.
M. Benoit Charette
M.
Charette : Merci, M. le Président. Le ministre a fait état... ou a
révélé la conversation qui a eu cours en mai dernier. Je vais citer le premier ministre directement : J'ai
demandé au secrétaire général du gouvernement de nous fournir une recommandation des besoins normaux pour
quelqu'un qui quitte cette fonction-là, incluant la sécurité, que ce soit
prévisible et non pas ajusté à chaque fois qu'il y a une transition.
Encore
une fois, financer une étude qui s'attaque aux radios de Québec n'a rien à voir
avec les besoins normaux, encore moins avec des raisons de sécurité. On
a déposé une motion qui sera présentée un petit peu plus...
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Oui. J'ai déjà indiqué que la motion que vous avez
faite nous indique qu'on doit procéder à cela avant Noël. Je ne suis pas en
mesure de dire que je suis capable de le faire avant Noël, d'autant que je ne
crois pas qu'il y a une obligation de
le faire avant Noël. Et on a jusqu'en 2018 et, je crois, bien après. Si je vois
la façon dont la CAQ se comporte, M.
le Président, je ne suis pas sûr qu'il y a vraiment un défi à cet égard-là,
d'autant qu'à chaque fois qu'ils se
lèvent pour nous parler de ce genre d'investissement de fonds publics, M. le Président, ça me
rappelle toujours que, pour
cette législature-ci, ils ont insisté et fermaient le Parlement jusqu'à temps d'avoir 1,5 million
de plus pour eux alors qu'ils avaient trois députés de plus. Et, depuis
ce temps-là, il y en a deux qui ont quitté. Donc, un de plus.
Le Président :
En terminant.
M. Fournier :
Franchement, ils nous doivent 1 million, M. le Président.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Principale, Mme la députée de Taillon.
Encadrement des frais médicaux
accessoires
Mme Diane Lamarre
Mme Lamarre : M. le Président, le ministre s'apprête à faire
adopter envers et contre tous son projet de loi n° 20, dans lequel il
légalise sournoisement les frais accessoires. Ce n'est pas le statu quo, M. le
Président, le ministre multiplie les actes facturables et
le nombre de médecins qui va être autorisé dorénavant à facturer des frais
accessoires. Ce qui était l'exception va devenir la règle. Les médecins sont
déjà rémunérés pour ces soins et ces
services. C'est donc un extra, une prime supplémentaire, de 50 millions
que leur donne leur ministre en
cadeau. Le ministre pousse l'affront en prétendant que les patients vont être
contents de payer en double et en triple
pour les soins de santé. Les citoyens ont le droit de savoir sur quoi porteront
spécifiquement ces frais accessoires.
Le
ministre va-t-il déposer en cette Chambre, avant l'adoption du projet de
loi n° 20, la liste des frais accessoires que les patients
devront dorénavant payer, à partir de la semaine prochaine?
• (10 h 50) •
Le
Président : Mme la députée, permettez-moi de signaler que
lorsque... Dans le vocabulaire que vous utilisez, évitez d'utiliser des mots qui peuvent mettre en
lumière ou en matière... prêter des motifs à la personne à qui vous vous
adressez. M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette :
M. le Président, c'est sûr que la députée de Taillon a régulièrement une
approche extrêmement négative à mon endroit, on vient de le voir encore à
l'instant.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! On perd le temps sur votre prochaine question, là. Moi, hein,
je vous rappelle que, s'il y a une personne ici qui a le droit de parole, c'est
M. le ministre de la Santé.
(Interruption)
M.
Barrette : J'allais exprimer ma sensibilité, mais là je vais me
préoccuper de la vôtre et, je pense, de celle de votre genou. Alors, M.
le Président, est-ce que ça va?
Le Président :
...médecin.
M.
Barrette : Alors, M. le Président, encore une fois, je n'ai pas le
choix de réitérer le fait que les frais accessoires, mis en place par le Parti québécois et maintenus,
que le Parti québécois voulait encadrer dans son programme électoral, voulait baliser — c'est
ce qu'il voulait faire, M. le
Président — ces frais accessoires là, étaient, au moment où on
se parle, exercés dans le milieu médical. Les gens les payaient déjà.
Il y avait
des abus... c'est-à-dire qu'il y
a encore des abus. Le projet de loi n'est pas encore adopté. Il y
avait des abus, il y en a
encore. Il y a des choses illégales, il y en a
encore. Et notre objectif, M. le
Président, est de faire en sorte
qu'abus et illégalités soient éliminés, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Taillon.
Mme Diane Lamarre
Mme Lamarre : La question qu'il faut se poser, M. le Président,
c'est : Qui va profiter de la légalisation des frais accessoires? Ce n'est
pas les patients, ce ne sont pas les Québécois. Ça va leur coûter de l'argent,
à ces patients-là. On veut la liste des frais accessoires. Avant d'aller chez
le médecin, les patients devront maintenant passer au guichet automatique. Est-ce qu'ils vont devoir retirer
100 $, 200 $? Et ceux qui ne l'ont pas dans leur compte, qu'est-ce qu'ils vont faire? Endurer leur
mal à la maison, laisser leur enfant pleurer ou laisser la maladie s'aggraver?
C'est ça, les frais
accessoires légalisés par le ministre de la Santé, M. le Président.
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette :
Bien non, M. le Président. Ce n'est évidemment pas ça, parce que la députée de
Taillon laisse entendre qu'il va y avoir une
multiplication des frais accessoires, alors que ça va être exactement le
contraire, M. le Président. La
situation actuelle, mise en place par le Parti québécois, qu'ils voulaient
eux-mêmes baliser, va faire en sorte qu'après nos interventions les gens vont faire face à des situations qui vont
être marginales. Actuellement, c'est marginal, et ça va l'être encore
plus et ça sera encadré et contrôlé.
Les
frais qui existent actuellement, il n'y en aura pas plus, et il n'y aura plus
d'abus, et il n'y aura plus d'illégalité, malgré le fait que la députée
de Taillon, M. le Président, essaie de nous faire croire le contraire.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Vachon.
Projet
d'exportation de pétrole
de Chaleur Terminals Inc.
Mme Martine Ouellet
Mme
Ouellet : Merci, M. le Président. Des municipalités
représentant plus de 1,7 million de citoyens demandent au gouvernement du Québec qu'il se tienne de bout
et qu'il assume ses responsabilités face au projet insensé de Belledune.
Belledune,
c'est 86 000 wagons de pétrole bitumineux par année qui
traverseraient le Québec d'un bout à l'autre pour exportation. Donc, aucune consommation, aucune transformation au
Québec, une augmentation catastrophique du risque pour la sécurité
civile des citoyens le long des rails du CN. Les municipalités qui bordent la
voie du CN sont inquiètes, et avec raison.
Le gouvernement libéral ne peut plus se défiler en invoquant une étude
environnementale stratégique qui
n'est même pas indépendante. La ville de Montréal, Rimouski, Saint-Hyacinthe,
Amqui, Sainte-Florence et bien d'autres demandent un BAPE sur Belledune.
Est-ce que le
gouvernement va répondre à leurs vives inquiétudes en déclenchant un BAPE?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. La question du transport des
hydrocarbures est prise très sérieusement par notre gouvernement. On a déclenché une évaluation environnementale stratégique sur l'ensemble
de la filière des hydrocarbures le
30 mai de l'année dernière, 2014, et cette EES, justement, vise plusieurs
domaines, dont le domaine des
transports. Et, sur ces questions-là, on a fait plusieurs études, il y a
plusieurs études qui sont en cours, et également nous avons débuté un
processus d'audiences publiques. La population, les groupes vont pouvoir
s'exprimer sur ces questions-là, des
questions très importantes. Et nous, de notre côté, au gouvernement, on
s'assure justement de faire une étude
complète, d'étudier l'ensemble des questions, d'aller chercher les avis
scientifiques, d'aller chercher les avis de la population avant
justement de porter un jugement sur l'ensemble de la filière des hydrocarbures.
Alors,
on agit avec sérieux, on agit avec rigueur, on comprend les inquiétudes de la
population, puis c'est pour ça qu'au
cours des prochaines semaines on va aller partout au Québec pour entendre ces
inquiétudes-là puis afin d'informer le jugement final que va prendre le
gouvernement sur cette question très importante.
Le Président :
Première complémentaire... Complémentaire ou principale?
Une voix :
...
Le Président :
Complémentaire, M. le député de Terrebonne.
M. Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Le ministre sait
très bien qu'il détient le pouvoir de déclencher un BAPE générique en vertu de l'article 6.3 de la loi québécoise
sur l'environnement. Et, contrairement à une évaluation environnementale stratégique, un BAPE permet une
évaluation indépendante, et surtout cibler davantage des enjeux précis,
comme par exemple, dans ce cas-ci, le transport de pétrole par train.
Après
une tragédie comme celle de Lac-Mégantic, la population québécoise ne prend
plus ce genre de chose à la légère.
Le ministre l'a-t-il compris? Et, si oui, déclenchera-t-il un BAPE dans le
projet Chaleur Terminals à Belledune?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Comme je l'ai dit, M. le Président, le gouvernement a
enclenché une évaluation environnementale stratégique pour approfondir la question de transport des hydrocarbures.
On ne peut pas être plus clairs que ça à quel point on prend la question au sérieux. Il va y avoir des
audiences publiques, il y a des études scientifiques en cours. Mais, si on
parle, justement, de BAPE et d'étudier la
question des hydrocarbures en profondeur, il faut quand même rappeler, M. le
Président, que le gouvernement du Parti
québécois a déclenché un projet à Anticosti sans aucune étude environnementale,
a autorisé le stockage du pétrole de l'Alberta à Sorel sans aucune forme
d'étude environnementale...
Le Président :
En terminant.
M.
Heurtel : ...alors on reviendra sur les positions supposément bien
fondées du Parti québécois sur la question du transport des
hydrocarbures, M. le Président.
Le Président :
Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, puisqu'il n'y a pas de votes
reportés, nous allons passer à la rubrique
des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de
présentation, je vais reconnaître un membre du groupe formant
l'opposition officielle et je cède la parole à M. le député de Bonaventure.
M. Roy : Mme la Présidente,
je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter,
conjointement avec le député de Nicolet-Bécancour et la députée de Gouin, la
motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale demande au
gouvernement d'annuler la hausse de loyer prévue pour les baux de
villégiature.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député. Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint
du gouvernement.
M.
Sklavounos : Pas de
consentement, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a malheureusement pas de
consentement. Maintenant, un membre du deuxième groupe d'opposition. Et
je cède la parole à M. le député de Deux-Montagnes.
Presser le gouvernement de réviser les règles encadrant
les
avantages consentis aux ex-premiers ministres
M. Charette : Merci, Mme la
Présidente. Je demande le consentement pour déposer la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale prenne acte de
l'utilisation très discutable qui peut être faite des allocations et mesures de
soutien accordées aux anciens premiers ministres;
«Qu'elle rappelle l'engagement pris par le
premier ministre en mai dernier de présenter de nouvelles règles permettant de
mieux encadrer l'ensemble des avantages consentis aux anciens premiers
ministres; et
«Qu'elle presse le gouvernement de déposer le
plus tôt possible un projet de révision de ces règles.»
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Merci, M. le député. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M.
Sklavounos :
Mme la Présidente, suite à la modification du libellé, suite à la réponse du
ministre, il y aura consentement pour l'adoption sans débat, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, M. le leader du deuxième groupe de l'opposition.
M.
Bonnardel :
Mme la Présidente, avec le consentement de tous les partis, je demande le vote
nominal sur cette motion.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, que l'on
appelle les députés.
Je vais
suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 10 h 59)
(Reprise à 11 heures)
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons reprendre les travaux et, suite à la demande d'un
vote par appel nominal... Je n'ai pas le texte de la motion ici avec moi, peut-être
que ça serait plus simple.
Mise aux voix
Merci. Alors, nous allons procéder au vote sur
la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte de l'utilisation très discutable qui peut
être faite des allocations et mesures de soutien accordées aux anciens
premiers ministres;
«Qu'elle rappelle l'engagement pris par le
premier ministre en mai dernier de présenter de nouvelles règles permettant de
mieux encadrer l'ensemble des avantages consentis aux anciens premiers
ministres; [et]
«Qu'elle presse le gouvernement de déposer le
plus tôt possible un projet de révision de ces règles.»
Et que les députés en faveur de cette motion
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption),
M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme
Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M.
Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
Mme D'Amours (Mirabel), M.
Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M.
Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).
M. Fournier (Saint-Laurent), M.
Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Coiteux
(Nelligan), M. Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti
(Marguerite-Bourgeoys), M. Huot (Vanier-Les Rivières),
Mme Vallée (Gatineau), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette
(Rouyn-Noranda—Témiscamingue),
M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal),
Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Daoust (Verdun), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M.
Reid (Orford), Mme Vallières (Richmond), M.
Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme
Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard
(Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M.
Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf),
M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine),
M. Bolduc (Mégantic), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau),
M. Rousselle (Vimont), M. Fortin
(Pontiac), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger
(Champlain), M. Habel (Sainte-Rose),
M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit
(Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Plante (Maskinongé), M. Polo
(Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis
(Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau).
M. Péladeau (Saint-Jérôme), M.
Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau), M. Therrien (Sanguinet),
M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M.
Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Verchères), M. Leclair (Beauharnois), M. Gaudreault (Jonquière), M. LeBel
(Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Pagé (Labelle), M.
Cousineau (Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M. Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M.
Kotto (Bourget), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).
Mme
David (Gouin), M. Khadir (Mercier), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des députés contre cette
motion? Des abstentions? Alors, M. le secrétaire général, pour le résultat du
vote.
Le
Secrétaire : Pour : 97
Contre :
0
Abstentions :
0
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est adoptée.
Pour
la prochaine motion, je reconnais maintenant un membre du groupe formant le gouvernement. Et je cède la parole
à Mme la ministre des Aînés.
Souligner la Semaine nationale des proches aidants
Mme
Charbonneau : Permettez-moi,
avant de lire ma motion, de saluer les gens dans la tribune qui nous viennent
du Regroupement des aidants naturels du
Québec, Mme Johanne Audet, Mme Audet est présidente du regroupement; Mme Sonia Nadeau, de la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches;
Mme Édith Lachance, de l'organisme Nouvel Essor; et M. Jean-Claude Laporte et M. Mario Tardif, du
regroupement. Bienvenue chez vous.
Reconnaître les aidants naturels, ça
commence par ici, Mme la Présidente. Merci.
Je
sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion
suivante conjointement avec la ministre déléguée à la Réadaptation, à la
Protection de la jeunesse et à la Santé publique, le député de Richelieu, le
leader du deuxième groupe
d'opposition et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :
«Que l'Assemblée
nationale souligne la Semaine nationale des proches aidants au Québec, qui se
déroule du 1er au 7 novembre, sous le thème de la solidarité;
«Qu'à
cette occasion, elle reconnaisse à sa juste valeur le rôle inestimable que ces
proches aidants jouent auprès de leur famille ou de leur entourage;
«Enfin, qu'elle salue
les différentes activités réalisées au cours de cette semaine par les Appuis
régionaux, en collaboration avec l'Appui
national, afin de sensibiliser la population à l'importance du rôle des proches
aidants et des groupes communautaires [de] notre société.» Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M.
Sklavounos :
Nous proposons l'adoption, sans débat, Mme la Présidente.
Mise aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Adopté. Maintenant, pour la prochaine motion, je vais reconnaître Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente.
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse la contribution essentielle des organismes en
défense [de droits collectifs];
«Qu'elle
demande au gouvernement de leur accorder un rehaussement [de 40 millions]
de leur financement...»
Oh! pardon, Mme la
Présidente, ce n'est pas la bonne version. Je recommence ça. Alors :
«Que l'Assemblée
nationale reconnaisse la contribution essentielle des organismes en défense
[...] de droits;
«Qu'elle
demande au gouvernement de leur accorder un rehaussement de leur financement,
de financer de nouveaux groupes et d'indexer annuellement les
subventions;
«Qu'elle
demande au gouvernement d'octroyer des sommes supplémentaires afin de couvrir
l'ensemble des frais [...] à la pleine participation des personnes ayant
des limitations fonctionnelles;
«Finalement,
que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de signer des ententes de
financement avec les groupes de défense [de droits collectifs] d'une
durée minimale de 3 ans.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la
députée. Maintenant, M. le leader de l'opposition officielle, vous
souhaitez intervenir?
Des voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Oui, un instant.
M. Drainville :
Je voulais juste souligner que nous étions conjoints... nous sommes conjoints
dans la motion.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Très bien. Alors, M. le leader de
l'opposition officielle souhaite que nous ajoutions que... C'était déjà entendu. Très bien. Alors, merci, Mme
la députée. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M.
Sklavounos :
Pas de consentement, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement.
Avis touchant les travaux des commissions
Alors,
nous en sommes maintenant à la rubrique des Avis touchant les travaux des
commissions, et je cède la parole à M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. J'avise cette
Assemblée que la Commission de l'économie et du travail entreprendra les
consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 67, Loi visant
principalement à améliorer l'encadrement de
l'hébergement touristique, dès maintenant, pour une durée d'une heure, et
poursuivra de 15 heures à 16 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La
Commission des institutions, quant à elle, poursuivra l'étude détaillée à
l'égard du projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les
amendes aux mineurs plus dissuasives, aujourd'hui, après les affaires
courantes jusqu'à 12 h 45, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine;
Finalement,
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles poursuivra l'étude
détaillée à l'égard du projet de loi n° 54, Loi visant l'amélioration de
la situation juridique de l'animal, aujourd'hui, de 15 heures à
18 heures, à la salle du Conseil législatif. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le leader adjoint du gouvernement.
Et, pour ma part, je vous avise que la
Commission des finances publiques se réunira aujourd'hui, après les affaires
courantes, à la salle des Premiers-Ministres de l'édifice
Pamphile-Le May, afin de procéder à l'élection à la vice-présidence de la
commission.
Une voix :
...
Renseignements sur les
travaux de l'Assemblée
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : M. le leader de l'opposition officielle.
M. Drainville :
Sur la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, hein, j'aurais
une question à poser à mon honorable
collègue. Demain, nous allons entreprendre l'étude article par article de la
loi... du projet de loi, en fait, n° 44, qui concerne la lutte au tabagisme. C'est arrivé à plusieurs reprises,
Mme la Présidente, qu'on a signifié ouvertement et très publiquement en cette Chambre que nous
souhaitions débuter le plus rapidement possible l'étude de ce projet de loi.
Je vous rappelle, Mme la Présidente, qu'on a signifié qu'il était prioritaire
pour nous. Et il est tellement prioritaire, Mme
la Présidente, qu'on a fait connaître nos amendements, nous, déjà, à ce projet
de loi. On les a déjà annoncés, nos amendements, mais nous ne connaissons pas les
amendements qui seront apportés par la ministre responsable du projet de
loi n° 44, Mme la Présidente.
Alors,
dans un esprit de collaboration dont nous avons déjà fait preuve en présentant
nos propres amendements, Mme la
Présidente, et dans une volonté aussi
de procéder avec diligence à l'étude et à l'adoption éventuelle du projet de loi n° 44, j'aimerais, Mme la Présidente — je parle lentement parce que
j'espère que mon honorable collègue aura, d'ici la fin de ma question, la réponse à ladite question — avoir des indications de la part du leader
du gouvernement quant au dépôt des
amendements émanant de la ministre responsable du projet de loi n° 44,
dont on commencera l'étude demain. Et
j'espère que le leader a eu le temps de finir de lire le papier qui vient de
lui être acheminé pour qu'il nous donne une bonne réponse.
• (11 h 10) •
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le leader de l'opposition officielle. Je
cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Je remercie le collègue pour sa patience.
L'étude détaillée débute demain, Mme la Présidente, et, comme
d'habitude, nous allons montrer notre entière collaboration, et il aura la
réponse à sa question demain en commission
parlementaire. La ministre est prête et veut collaborer pour faciliter l'étude
de ce projet de loi, qui est aussi important pour nous, et nous l'avons
dit à plusieurs reprises. Donc, le collègue sera heureux demain de recevoir des
renseignements là-dessus.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le leader adjoint.
Vous voulez ajouter quelque chose, M. le leader de l'opposition
officielle?
M. Drainville :
Très, très brièvement. Je veux juste être sûr, Mme la Présidente, qu'on se
comprend bien. Donc, si je comprends bien le leader du gouvernement, vous nous annoncez que demain la ministre,
en commission parlementaire, va
déposer les amendements en question, donc les amendements
seront connus demain en commission
parlementaire. C'est ce que je
comprends?
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci. M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : ...je
ne peux pas dicter la conduite de la ministre. Cependant, il est de notre habitude, il est de notre tradition de collaborer avec l'opposition pour que l'étude puisse se faire bien. Donc, ce que je lui signifie,
c'est que nous allons continuer à
respecter cette tradition, et je pense que l'étude va bien se dérouler, avec
une très bonne collaboration, la collaboration que nous montrons d'habitude pour un projet de loi aussi important pour lequel nous avons la collaboration de l'opposition.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le leader adjoint du
gouvernement.
Affaires du jour
Nous en sommes maintenant...
C'est-à-dire que, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons
maintenant passer aux affaires du jour, et je vais céder la parole à M. le
leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Merci, Mme la Présidente. Je vous demande d'appeler l'article 5, s'il vous
plaît.
Projet de loi n° 57
Adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 5 du feuilleton, M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la
Solidarité sociale propose l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Loi
modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement
quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées. M. le
ministre, je vous cède la parole.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : Merci, Mme la Présidente. Et, le 11 juin dernier, on a présenté le projet de loi à l'Assemblée nationale, un projet de loi très important, Mme la
Présidente, parce que — tantôt,
je vais en parler — il touche beaucoup, beaucoup de monde au Québec, et presque 815 000 personnes touchées par ce projet de loi.
Nous avons travaillé, Mme la Présidente...
D'abord,
juste rappeler l'objectif principal de ce projet de loi : c'était de
favoriser la stabilité financière et d'assurer la pérennité de ce type
de régime de retraite. Et ça, c'est un élément important, Mme la Présidente. La
façon qu'on a travaillé, c'est qu'on a
invité les syndicats, les représentants des travailleurs, les représentants des
patrons pour travailler ensemble puis
arriver avec un consensus qui nous permet d'aller de l'avant avec un projet de
loi aussi important pour les travailleurs, les retraités et les
employeurs.
Mme la
Présidente, nous avons cinq objectifs dans ce projet de loi là. Le premier,
c'est stabiliser le financement des
régimes de retraite à prestations déterminées pour les employeurs du secteur
privé, premier objectif. Le deuxième, c'est freiner la conversion massive vers d'autres
régimes. On se rappelle, Mme la Présidente, avec la crise économique, avec la baisse de taux de rendement des régimes,
beaucoup d'employeurs et des travailleurs... évidemment, ça a menacé beaucoup de régimes par la suite, mais il y a eu
une conversion à d'autres régimes. Donc là, on veut rendre ces régimes à
prestations déterminées payants et... en
fait, payants et plutôt stabilisés, et donc c'est un deuxième objectif. Le
troisième objectif, c'est contrer le
fait de la baisse des taux d'intérêt obligataires et va améliorer la gestion
des risques des régimes. Parce que le
taux d'intérêt obligataire, lorsqu'il baisse, Mme la Présidente, il a un impact
immédiat sur les rendements des
régimes, un impact négatif. Donc, cet
impact-là, il faut vraiment contrer cet effet-là et en même temps aussi améliorer la gestion
des risques de ces régimes-là. Et le dernier élément, c'est diminuer les
répercussions qu'aura... à la fin des mesures d'allégement. En fait, celles-ci se termineront le 31 décembre. On
se rappelle, on a mis des mesures d'allégement pour aider les régimes à passer à travers la crise économique,
et les mesures d'allégement terminent le 31 décembre de cette
année. Donc, après ça, on tombe dans un vide, donc il faut agir.
Mme la
Présidente, un petit rappel. Il y a quelque 360 employeurs du secteur privé et
près de 500 régimes actuellement de
prestations déterminées au Québec, et on parle de 815 000 personnes
qui sont touchées. Donc, pendant la
consultation, il y a M. D'Amours, qui est venu présenter un mémoire, et il a
constaté, M. D'Amours, il l'a dit, que la majorité de ces recommandations
ont été réalisées.
Et, deuxième
élément, Mme la Présidente, avec... très humblement, pour notre gouvernement,
on a eu plusieurs présentations où les gens, ils disaient : On est
les précurseurs, au Canada, en matière de régime de retraite. On est le modèle
actuellement canadien pour tous les collègues canadiens en termes de régime de
retraite, parce qu'on est en avant-garde dans l'innovation, dans les mesures
qu'on va mettre en place.
Alors, vous
comprendrez, Mme la Présidente, aussi, bien sûr, n'importe quelle loi, avec mon
expérience — c'est
mon 27e... 28e loi — il y a toujours des modifications, c'est
normal. Le but, c'est bonifier les projets de loi, entendre les gens qui viennent nous faire des recommandations
et trouver le meilleur de ces recommandations-là pour les inclure dans le projet de loi. Donc, on a l'intention d'amener
des modifications, des amendements et on veut travailler avec l'opposition,
les deux oppositions pour bonifier ce projet
de loi. Et on a une très bonne idée où on s'en va, Mme la Présidente. Et je
souhaite la collaboration de l'opposition
officielle et la deuxième opposition, parce que c'est un projet de loi
important.
Évidemment,
l'adoption de ce projet de loi est importante aussi, parce que
815 000 personnes attendent après les députés de l'opposition pour voir qu'est-ce qu'ils vont dire, comment
ils vont agir, quel comportement ils vont prendre face à leur retraite. Et donc ces gens-là, ils
veulent que l'opposition, bien sûr, agisse d'une façon responsable pour qu'on
bonifie ce projet de loi et on aille de l'avant le plus rapidement possible.
Alors
donc, c'est un projet de loi très important dans l'économie du Québec, très
important pour les 815 000 Québécois au Québec qui ont un régime comme ça, qui, eux autres, attendent de voir
les réactions des députés de l'opposition, ils veulent voir qu'est-ce qu'ils vont faire, est-ce qu'ils vont travailler
d'une façon très sérieuse pour qu'on adopte ce projet de loi. Merci, Mme
la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le ministre du Travail,
de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Et maintenant, pour la prochaine intervention, je cède la parole à M. le
député de Sanguinet, qui est aussi le porte-parole...
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Non? Ah! excusez-moi. Alors, allez-y, la parole est à vous.
M. Alain Therrien
M.
Therrien : Merci,
Mme la Présidente. Alors donc, je suis heureux d'intervenir sur le projet de
loi n° 57 aujourd'hui. Je tiens d'abord
à saluer la ministre qui chapeaute ce projet de loi, saluer aussi les gens de
la partie gouvernementale qui ont assisté aux consultations
particulières, saluer mon collègue le nouveau porte-parole aux régimes de
retraite, le député de Beauharnois, qui va
faire un travail extraordinaire, j'en suis convaincu, et saluer aussi le député
de Chutes-de-la-Chaudière, de la seconde opposition.
Alors donc,
écoutez, des régimes de retraite, on le sait que c'est quelque chose
d'extrêmement important dans notre
société. C'est ce qui nous permet, nous, éventuellement, d'arriver et avoir une
retraite en quiétude au niveau financier. C'est de faire en sorte qu'on puisse un jour se retirer avec les
honneurs, comme on pourrait dire, et de s'assurer que, non, on ne
manquera de rien, et que nos besoins les plus légitimes seront comblés.
Évidemment,
pour ça, on considère toujours que les régimes à prestations déterminées, c'est
le meilleur véhicule pour justement
protéger les futurs retraités au niveau financier. Ça a commencé il y a un bout
de temps, la réflexion au sujet des prestations déterminées, ça a
commencé avec le rapport D'Amours. Le rapport D'Amours nous a suggéré plusieurs
avenues pour justement assurer la pérennité de ce genre de régime là.
Pourquoi on a
amené une réflexion dans ce sens-là? Bien, c'était à cause de la crise qu'on a
vécue en 2008, qui a vraiment hypothéqué la rentabilité de ces régimes de
retraite et qui a fait en sorte d'ébranler le socle sur lequel étaient assis ces régimes-là. Et donc cette réflexion-là,
en partie, est causée par ça, mais aussi à cause qu'on s'aperçoit que la
population vieillit, ce qui est une bonne
nouvelle en soi, mais qui cause des problèmes quant à la solvabilité des
régimes.
• (11 h 20) •
Alors donc,
on a eu évidemment, là, un chapelet de mesures qui a suivi, pour justement
s'assurer une pérennité de ce genre de régime là, pour s'assurer que les gens
ne passent pas des régimes à prestations déterminées aux régimes à
cotisation déterminée, qui sont une sécurité un peu moins grande au niveau financier.
Alors,
évidemment, on a eu le projet de loi n° 3 de ce
gouvernement-là, qui a été, d'après moi, une erreur fondamentale dans la façon de procéder. Pourquoi?
Parce qu'on n'a pas laissé la place à la négociation, on n'a pas fait confiance
aux gens qui étaient impliqués dans ce genre de dossier là pour justement
s'assurer la pérennité de leurs régimes; je parle des employés
municipaux.
On a eu
ensuite d'autres régimes de retraite qui ont été, si on veut, assainis par les
lois qui ont permis justement de s'assurer de la pérennité des régimes. On a
parlé des régimes interentreprises avec le projet de loi n° 34. Et
je vous ferai remarquer que, tout le
long de ces péripéties législatives, nous avons, nous, du Parti québécois, toujours prêté et tendu la main au ministre qui
était responsable de ces dossiers-là.
Et là on est
rendus aujourd'hui avec le projet
de loi n° 57, qui touche plus de
800 000 personnes, 500 régimes de retraite, dont à peu près 20 %
était en difficulté financière. Donc, c'est important. On touche les régimes
dans le secteur privé. Et il y a eu
des problèmes... il y a jadis, avec ces régimes-là... Et l'idée, c'était de
faire en sorte que ces régimes-là ne
disparaissent tout simplement pas. Parce que c'est une tendance lourde qu'on
s'aperçoit de plus en plus dans ce secteur de l'économie, c'est que les
régimes à prestations déterminées, même s'ils sont un avantage pour les
entreprises qui l'offrent... Parce que vous
savez bien qu'un individu qui va aller dans une entreprise qui offre un régime
à prestations déterminées, bien,
c'est extrêmement attractif pour lui. Il va considérer que cet emploi-là est
possiblement un emploi de qualité en partie à cause de cet avantage
indéniable.
Alors donc, on s'aperçoit que les employeurs
savent qu'il s'agit d'un avantage et ils veulent préserver cet avantage-là. Évidemment, les employés de l'autre
côté sont d'accord avec ça. Où ce que je veux en venir, Mme la Présidente, c'est que la table est mise pour la
négociation de bonne foi entre les gens qui avaient la responsabilité
financière de ces régimes-là, je
parle des employeurs, mais aussi ceux qui avaient des avantages indéniables à
ce que ces régimes-là persistent, et là je parle des employés.
Évidemment,
ce projet de loi là, c'est tout simplement un consensus social entre les
différents intervenants et c'est une des raisons pourquoi je considère
que le régime... le projet de loi est bien construit, parce qu'il a une assise
sur la négociation et sur la volonté des partis d'améliorer les régimes de
retraite.
Ce qui a fait
cruellement défaut quand on a regardé le projet de loi n° 3, bien, ça fait
la force du projet de loi n° 57 actuellement.
Alors, voyez-vous, l'approche que nous voulions au Parti québécois pour le
projet de loi n° 3, on l'a eu dans le projet de loi n° 57, et
ça nous a permis d'arriver justement à un projet de loi qui est solide.
Il va faire
en sorte de limiter justement le passage des régimes à prestations déterminées
à des régimes de cotisation déterminée,
ça, on va le voir de moins en moins, on l'espère, évidemment, mais aussi de
faire en sorte que les régimes de
retraite qui ont des difficultés financières fassent en sorte, à travers ces
outils-là offerts par le projet de loi n° 57... nous permettent justement d'atteindre la capitalisation
évaluée à 100 % pour... et même plus, parce qu'on va introduire, dans
ce projet de loi là, des provisions qui vont
être tout simplement là pour garantir que les régimes de retraite, à moins
d'une catastrophe sur le marché
financier comme on a vécu en 2008, bien, que les régimes de retraite ne soient
pas partiellement capitalisés. Alors donc, très intéressant pour les
gens qui seront impliqués dans ces régimes de retraite.
Chose importante : nous, où est-ce qu'on en
avait au sujet d'améliorations, potentiellement, de ce régime de retraite là, c'est au niveau des lettres de
crédit, de faire en sorte que les employeurs n'abusent pas de l'utilisation des
lettres de crédit. Puis ça, du côté des employés, ça les inquiétait beaucoup.
Mais je pense que là-dessus le ministre nous a offert une réflexion et une ouverture puis je pense que
le consensus allait pas mal dans ce sens-là. Je ne peux pas dire les mots à
sa place, évidemment, mais, quand même, je
pense que, là-dessus, il n'y aura pas, je pense, de volonté d'aller accroître,
là, l'utilisation des lettres de
crédit. Aussi, faire en sorte que les lettres de crédit, qui ne donnent pas de
rendement, évidemment, puissent faire
en sorte qu'on calcule des rendements potentiels à partir du dépôt des lettres
de crédit. Ça aussi, même les employeurs étaient d'accord avec ça.
Alors donc,
pour nous, c'est une avancée intéressante pour justement s'assurer que les gens
s'entendent et que les régimes de retraite soient pérennisés.
Dernier point
sur lequel je voudrais insister, puis j'en ai parlé au ministre lorsqu'on était
dans les consultations particulières,
et je pense que le ministre, il faut avouer, avait une écoute attentive, il
était positif dans son approche, et je suis convaincu qu'il va le demeurer, même si je ne suis plus le porte-parole
dans le dossier... Et donc — espérons-le — l'idée... Oui, il pleure, peut-être qu'on pourrait le mentionner... Non, mais
l'idée que, si on a une situation de faillite, il faut que les gens qui travaillent dans une entreprise qui
fait faillite, on puisse s'assurer que ces gens-là soient protégés. Et là il y
a différentes façons, il y a des gens qui nous avaient parlé d'un fonds
de garantie qui était existant en Ontario, mais les différents intervenants, je pense, il y en a un qui nous en a parlé,
puis les autres, en tout cas, je ne veux pas mettre les mots dans leur bouche, mais n'avaient pas l'air à être
trop encouragés par ce genre de solution là. On a peut-être davantage...
pour que ces gens-là se fassent chapeauter
par la Régie des rentes, qui sera Retraite Québec éventuellement, pour qu'on
puisse justement préserver une certaine santé financière à leur régime.
Pourquoi?
Bien, parce que la pierre angulaire de ce projet de loi là, c'est dans le
calcul de la capitalisation. Avant, on
utilisait l'approche de solvabilité, qui est généralement, dans la plupart des
cas, extrêmement sévère, qui va souvent sous-estimer la valeur réelle des régimes de retraite — ça, ce n'est pas moi qui le dis, mais c'est
le rapport D'Amours, entre
autres — et c'est
pour cette raison-là que les intervenants à peu près à l'unanimité ont salué
justement le projet de loi n° 57
qui nous disait qu'à partir de maintenant nous allons avoir une approche par
capitalisation plus sévère un peu que ce
qu'on retrouve ailleurs, mais quand même qui va jeter un peu de lest sur les
exigences apportées pour pérenniser et assurer la santé financière des
régimes de retraite.
Alors
donc, il me reste à saluer les gens qui sont passés en commission
parlementaire. On a eu une ambiance intéressante, les gens étaient
généralement — je
pense que je ne me trompe pas étant donné que c'est un consensus — d'accord.
Il y avait des petits points où est-ce que, et c'est normal, on voulait avoir
certaines améliorations, mais l'ensemble des intervenants disait : On a un consensus,
gardons-le. Gardons-le. Alors donc, pour ces raisons-là, moi, je considère que
nous devrions saluer les intentions du
ministre dans le projet de loi n° 57 et faire en sorte qu'on se retrouve
dans ce secteur précis à améliorer un
bijou, un joyau, que je pourrais dire, de toute la façon de gérer les régimes
de retraite, des régimes à
prestations déterminées. Et évidemment je salue le nouveau porte-parole de mon
parti, qui fera évidemment un travail extraordinaire. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député
de Sanguinet. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de
Chutes-de-la-Chaudière.
• (11 h 30) •
Une voix : ...
M. Marc Picard
M. Picard : Merci, M. le
ministre. Je suis votre meilleur, si j'ai bien entendu. C'est ça? Excellent.
Mme la Présidente,
je prends à mon tour une minute pour saluer mes collègues qui ont participé aux
consultations du projet de loi
n° 57, plus particulièrement le député de Sanguinet, et le député de
Beauharnois, ainsi que le ministre du Travail,
de l'Emploi et de la Solidarité. Également, je salue tout le personnel de
l'Assemblée nationale, dont le travail nous
permet, nous, les parlementaires, d'avoir un bon déroulement lors de nos
séances de travail. Je tiens à souligner une nouvelle fois l'esprit d'entente et de collaboration qui a régné lors de
cette commission parlementaire, lors de nos travaux. Enfin, je ne saurais faire l'économie de
salutations et de remerciements envers les nombreux intervenants qui ont pris
la peine de venir nous rencontrer
pour nous exposer leur point de vue et répondre à nos questions. Je crois qu'il
est également à propos de souligner
également le climat hautement consensuel, également, des différents acteurs
oeuvrant autour des régimes de retraite à prestations déterminées au
Québec.
En effet,
comme cela a été mentionné par mes collègues avant moi, ce projet de loi est né
d'une consultation entre syndicats et représentants du patronat. C'est
au comité consultatif sur la main-d'oeuvre et le travail qu'ont eu lieu les
échanges ayant mené au présent projet de loi. Le texte de loi est le résultat
de compromis de part et d'autre. Ce n'est d'ailleurs
pas pour rien que plusieurs groupes entendus en consultation nous disaient être
d'accord avec l'essentiel du projet
de loi n° 57. Chacun y allait ensuite de ses petits ajustements. Le texte à l'étude ici est, à notre avis, la
démonstration de beaucoup
d'efforts de la part du ministre afin de trouver l'équilibre, l'équilibre le plus
adéquat possible, soit un projet
de loi teinté d'une belle couleur. Certains voulaient une couleur légèrement
plus foncée, d'autres, légèrement plus pâle. Nous considérons bien sûr
que, d'ici à l'étude détaillée, ces nuances demandées par les groupes...
Le projet de loi accomplit un certain nombre de
choses importantes pour la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées. Plusieurs
avaient été recommandées par le rapport D'Amours déposé en juin 2013. Celles
qui ne se retrouvaient pas... M.
D'Amours lui-même est venu en commission parlementaire pour
nous confirmer que, dans le contexte
des changements proposés, les choix faits dans le texte qui nous occupe
s'inscrivent dans une continuité logique. Nous en concluons donc que le projet
de loi répond aux recommandations émises par le rapport D'Amours.
Le texte
actuel ajoute une série de paramètres aux régimes de retraite à prestations
déterminées afin d'en préserver la pérennité. Le financement se base maintenant
sur la capitalisation plutôt que la solvabilité, ce qui contribuera à maintenir des cotisations d'exercice acceptables
pour tous les employeurs. En échange, on leur demande de constituer une marge de stabilisation, on fait ensuite passer
la fréquence des évaluations actuarielles aux trois ans, sauf lorsque la
solvabilité sera inférieure à 85 %.
Cette mesure, Mme la Présidente, permet aux employeurs de s'éviter d'avoir à
retenir les services d'actuaires à
chaque année tout en conservant un oeil sur la capacité du régime à s'acquitter
de l'ensemble de ses obligations
contractées à ce jour. Cela permet donc une certaine flexibilité sans devoir
mettre en danger la sécurité des
économies cumulées dans le régime. Enfin, des dispositions de lissage
permettent de garder les cotisations d'exercice stables pour les
employeurs, ce qui contribue à la stabilité des régimes.
De l'aveu de
plusieurs groupes consultés, le projet de loi contribuera à ralentir sinon
stopper la tendance selon laquelle
les employeurs passaient de plus en plus souvent des régimes de retraite à
prestations déterminées à des régimes à cotisation déterminée. Même si le ministre a exprimé le souhait que le
texte de loi, une fois adopté, encourage les employeurs à revenir vers les régimes à prestations
déterminées, nous demeurons sceptiques. Si ce transfert s'opère, ce sera
probablement en raison d'autres
causes plus conjoncturelles telles que la diminution de la main-d'oeuvre
disponible sur le marché du travail.
Malgré cela,
Mme la Présidente, le texte actuel traduit de bonnes intentions du ministre par
rapport aux changements requis en
matière de régime de retraite. Nous appuyons donc le principe du projet de loi
n° 57. Nous tendons la main au ministre
afin de travailler à la bonification du projet de loi dans un esprit de
collaboration tel que ce fut le cas lors de nos récents travaux avec le
ministre. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Merci, merci beaucoup, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. Et maintenant je
cède la parole à M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, Mme la Présidente. Je prends
quelques instants, moi aussi, pour saluer et féliciter le nouveau
porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de retraite.
Pour Québec
solidaire, il est clair que, lorsqu'il y a un projet de loi qui part d'un
consensus avec ceux qui sont concernés
principalement — je pense
aux travailleurs — et qu'il
y a eu des discussions qui ont permis d'améliorer certaines dimensions du projet de
loi, pour nous, c'est une qualité démocratique et qui nous emmène donc à nous
joindre à l'ensemble des parlementaires
ici et d'appuyer le principe du projet de loi, ce qui ne présuppose pas que
tout est parfait dans ce projet de loi et qu'il n'y a pas place à
amélioration. Alors, nous allons voter en faveur du principe.
L'intérêt de
Québec solidaire pour la question des retraites ne date pas d'hier. C'est un
des plus grands enjeux socioéconomiques
pour toute social-démocratie qui se respecte. Pour tout gouvernement ou toute
vision de la politique dans laquelle le gouvernement doit assurer un
filet de sécurité sociale pour l'ensemble de sa population, les retraites viennent au-devant de la liste, et c'est le cas
dans nombre de pays qui ont d'ailleurs
un certain nombre de difficultés. Vous savez que la structure, l'architecture,
des revenus de retraite assurés aux citoyens québécois et canadiens dans l'ensemble est quand même
une architecture relativement enviable, qui est souvent citée en exemple dans plusieurs
pays à travers le monde, notamment en Europe.
Cependant,
il y a place à énormément d'améliorations, et surtout il faut éviter des reculs. Québec solidaire a fait donc des retraites une
priorité dès 2012, où nous avons insisté sur un élément qui rejoint la vision
aussi mise de l'avant par le comité D'Amours
qu'il faut approcher la retraite dans une vision d'ensemble
et commencer par le premier étage. N'importe
qui ici qui s'est penché sur le dossier des régimes de retraite s'est fait
souvent dire qu'au Québec le système de
retraite repose sur trois piliers, mais le premier pilier, la base de la
pyramide, est constitué par les régimes de retraite publics, donc, au Québec, par le Régime de rentes
du Québec. Et, dès 2012, nous avons mis de l'avant que la priorité dans toute réforme de régime de retraite devrait être
par l'amélioration du Régime de rentes du Québec. Et nous proposions même de permettre aux travailleurs qui le désirent
et aux cotisants qui le désirent d'augmenter leurs cotisations de 9 %
jusqu'à 13 %.
D'ailleurs,
c'est un élément maintenant qui est reconnu depuis, je pense, maintenant deux
ans par le gouvernement libéral
d'Ontario. Je ne sais pas pourquoi les libéraux du Québec ne s'inspirent pas
davantage de leurs correspondants dans
d'autres provinces ou même de leur correspondant fédéral maintenant : le
gouvernement, le nouveau gouvernement de M. Justin Trudeau, à Ottawa,
s'apprête aussi à améliorer le régime de pension public.
Et c'est là
le défaut des changements et des modifications à la pièce introduites par ce
gouvernement qui tantôt a favorisé
les régimes complémentaires de type REER avec le régime volontaire
d'épargne-retraite, a voulu niveler par le bas, on le sait comment, par des modifications apportées aux régimes de
retraite municipaux puis maintenant vient à la pièce... Oui, bien sûr, le projet de loi actuel n'est pas mauvais en
soi, mais c'est quand même une vision et une approche à la pièce qui ne répond pas, je dirais, à l'esprit
de ce qui avait été formulé comme recommandations par le comité D'Amours.
Un autre
problème qui surgit du fait qu'on n'a pas une approche cohérente et globale et
qu'on ne met pas assez l'accent sur
la protection publique, la couverture universelle, le Régime de rentes du
Québec, c'est que l'écart se creuse actuellement
entre une majorité de la population qui n'a pas de régime complémentaire et les
travailleurs et les travailleuses qui,
par leur propre contribution, par les batailles qu'ils ont menées, ont réussi à
obtenir des régimes complémentaires pour
pallier les insuffisances du régime de retraite universel. Alors là, il y a une
iniquité qui s'installe peu à peu, un écart qui se creuse, et un bris de
solidarité sociale est visible dans ce glissement de nos politiques publiques.
Bien sûr, ce
qui n'aide pas, c'est certains discours populistes, hein, qu'on a entendus de
la part de certains ministres. Je
n'en nommerai pas pour ne pas accabler mes collègues, mais, quand on insiste
sur le fait qu'une grande partie de la population
ne jouit pas de revenus de retraite suffisants pour demander qu'on baisse les
revenus de retraite de ceux qui disposent,
comme je le dis, en vertu des luttes qui ont été menées parfois sur des
dizaines d'années, de régimes de retraite complémentaires ou de revenus
de retraite adéquats, c'est un discours qui alimente le ressentiment et les
envies des uns et des autres au lieu de dire : Bien, puisqu'on sait qu'on
est capables d'offrir de meilleures retraites à notre population — voyez,
il y en a une certaine partie qui ont obtenu, grâce à leurs luttes, des régimes
de retraite dignes pour des revenus dignes
et honorables à la fin de leur vie active, de leur vie, je veux dire, de
travailleurs actifs — bien,
il faudrait le faire également pour
l'ensemble de la population et tabler sur la solidarité de l'ensemble donc pour
augmenter le revenu de retraite
assuré par le régime universel, d'où l'importance, je reviens encore,
l'importance de reconnaître qu'il faut améliorer le Régime de rentes du
Québec.
• (11 h 40) •
Souhaitons que le gouvernement libéral, les
députés ici du gouvernement, de la formation du gouvernement, se reconnaissent dans la grande vision libérale, qui
est supposée être la leur, d'appuyer la base de la social-démocratie qui
est d'assurer des revenus de retraite
adéquats pour l'ensemble de la population, exactement comme le font des gouvernements libéraux en Ontario et sur la scène
fédérale. On attend de voir le gouvernement actuel aussi, disons, se rapprocher de cette
vision, au minimum, je dirais, minimale dans la perspective d'un gouvernement
libéral, que je suis même capable de reconnaître comme député d'une formation
de gauche, c'est-à-dire Québec solidaire.
Donc, nous
espérons que le ministre est ouvert à l'idée, dans cette vision-là d'aussi
améliorer le projet de loi n° 57 pour
protéger des régimes à prestations déterminées. D'ailleurs, le ministre actuel
s'évertue à dire que ce qu'il fait avec ce projet de loi, c'est dans le but de protéger les régimes à
prestations déterminées. Alors, si c'est le cas, j'aimerais qu'il m'explique pourquoi son collègue du Conseil du
trésor... J'aimerais savoir comment il explique que son collègue du Conseil
du trésor s'attaque, veut s'en prendre au
principal régime de retraite à prestations déterminées, c'est-à-dire le RREGOP,
qui est déjà capitalisé à 98,4 %, qui est
donc parfaitement en santé. Suivant les discussions qu'on a eues déjà sur le
dossier de retraite, là, à
98,4 %, il n'y a aucune raison de tripoter là-dedans. Alors que
malheureusement il y a une incohérence dans
l'approche du gouvernement qui fait que, bien que le ministre nous dise, puis
on veut bien le croire, ce projet de loi n° 57, je dois avouer, est satisfaisant à cet égard-là...
mais il devrait en parler à un de ses collègues qui est en train, donc, de s'en
prendre au RREGOP.
Lors de
l'étude détaillée, nous verrons donc dans quelle mesure le gouvernement est
ouvert à bonifier le projet de loi n° 57. De nombreuses
propositions ont été formulées par des associations de retraités. Ça serait
bien que nous soyons
ouverts comme parlementaires à les entendre, à écouter les craintes de voir les
participants et les retraités perdre des acquis, hein? On a dit :
L'essentiel, c'est d'améliorer ce qui est là, la base de la pyramide, le Régime
de rentes du Québec, par exemple, mais aussi
de s'assurer que les régimes à prestations déterminées, les modifications qu'on
y apporte n'occasionnent pas des reculs, mais, disons, enregistrent la
volonté de l'État d'assurer de meilleures retraites pour l'ensemble de la population et donc de tirer vers
le haut, de niveler vers haut et non pas vers le bas la protection des revenus
à la retraite.
Parmi les
améliorations formulées, j'en cite une, pour le bénéfice de notre ministre,
c'est la demande de rendre permanentes certaines mesures qui sont
contenues dans la loi actuelle et qui donnent un rôle à la RRQ de prendre en charge le versement des rentes pour une période de
10 ans quand il y a un contexte d'insolvabilité ou de faillite, hein? C'est quelque chose qu'on a reconnu. On a besoin
d'offrir des protections lorsqu'il y a des problèmes majeurs, en cas de faillite notamment. Une deuxième mesure concerne
la valeur de transfert puisque le projet de loi n° 57 viendra réduire
les rentes versées aux participants. Donc,
ces propositions-là ont été formulées dans le but d'éviter toute forme de recul
par rapport à ce que l'État s'est engagé à
faire depuis des décennies. Merci beaucoup de votre écoute, Mme la Présidente,
ainsi que de mes collègues.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député
de Mercier. Et, pour la prochaine intervention,
je vais reconnaître le nouveau porte-parole de l'opposition officielle en
matière de régimes de retraite et député de Beauharnois. La parole est à
vous.
M. Guy Leclair
M. Leclair :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, permettez-moi tout d'abord, Mme la
Présidente, bien entendu, comme l'ont
fait mes collègues, de remercier les collègues députés qui se prêtent à la
commission parlementaire pour
apporter leur savoir puis tenter de faire raisonner notre bon ministre qui,
dans ce projet de loi, là a quand même devant lui un projet qui est très consensuel, et je pense que tout le monde le
reconnaît, mais c'est avec le travail quand même de chaque député qu'on peut faire valoir un projet de loi. Puis parfois
il y a des petits oublis, il n'y a rien de parfait dans ce monde, alors
je remercie les collègues de participer.
Je remercie,
bien entendu, Mme la Présidente, les gens qui prennent la peine d'écrire un
mémoire. On sait que, dans ces projets de loi là, c'est beaucoup de
chiffres comptables. Beaucoup d'actuaires mettent la main à la pâte pour s'assurer que tout balance lors des régimes de
retraite. Donc, je remercie les gens pour, premièrement, leurs mémoires et, deuxièmement, s'être déplacés pour venir
expliquer leurs mémoires qui étaient, un après l'autre, aussi clairs les uns
que les autres.
Alors, sur ce aussi, je ferais un petit clin
d'oeil, Mme la Présidente, bien entendu au secrétariat de la commission et aux gens de l'Assemblée
nationale qui travaillent avec nous
lors de ces commissions
parlementaires pour nous apporter de
l'aide, des services, que ce soit photocopies, et ainsi de suite. Alors, ces
gens-là sont d'une valeur inestimable pour nous, les députés à l'Assemblée nationale. Donc, je leur fais un petit
clin d'oeil en disant au Conseil du trésor : On remercie souvent les gens de l'Assemblée nationale, ils
sont présentement en négociation, faisons-leur un petit clin d'oeil qu'ils
pourront savourer aussi lors de leur négociation.
Alors, Mme la
Présidente, j'aimerais revenir un peu en arrière. On parle d'une crise
financière, en 2008, qui a déstabilisé
le monde financier, pas seulement qu'au Québec, un peu partout sur la planète,
surtout en Amérique du Nord. Mais on
a commencé à voir des régimes de retraite... des compagnies qui n'étaient plus
capables d'affronter, avec les pertes qu'ils ont eues dans leurs
placements, d'affronter la solvabilité de leurs régimes de retraite.
Alors, face à
ça, bien, il y a eu toutes sortes de choses dans le passé. On a donné la
chance, en cinq ans, de s'assurer que
le patronal adopte la solvabilité puis s'assure qu'il y ait une solvabilité
pour les fonds de retraite. Mais, à tort ou à raison, tout ça avec la crise financière, mêlé ensemble, bien, on s'est
aperçu que plusieurs compagnies ont dû fermer les portes pas seulement à cause des régimes de
retraite, mais... Bien entendu, les travailleurs qui y travaillaient, bien, ont
eu beaucoup de risques, et plusieurs
ont perdu leur fond de retraite ou se sont trouvés avec un fond de retraite si
peu capitalisé que... en ont ressorti avec quasiment rien. Alors, ça,
c'est très choquant.
Je pense que
toute la classe politique, on voit ce phénomène-là et cette problématique-là,
puis, bien entendu, face à ça, bien, le Parti québécois, face au rapport
D'Amours qui nous avait mis en garde sur le futur avec plusieurs bonnes
recommandations... Puis il nous disait à nous, les législateurs : Faites
quelque chose parce qu'on risque de mettre en danger
les régimes de retraite tels qu'ils sont conçus en ce moment au Québec. Donc,
suite à ça, bien, le Parti québécois, bien
entendu, avec Mme Marois ainsi qu'avec ma collègue ex-ministre du Travail,
avait décidé d'asseoir à une même table,
pour les régimes de retraite, les retraités, les travailleurs et le patronal.
On s'est dit : Bien, on a le choix de critiquer un ou l'autre, et la force d'un, la force de
l'autre, mais une chose est certaine, Mme la Présidente, si on continue comme
ça, excusez-moi l'expression, on va frapper un mur.
Donc, le
Parti québécois a réussi à asseoir les gens ensemble puis se mettre dans un
mode constructif pour la suite des
choses. Malgré que l'image, parfois, était affreuse, parfois, dans d'autres
cas, elle était quand même belle, mais, malgré tout ça, on devrait trouver un consensus. Donc, je félicite encore cette
initiative-là de ma collègue, avec Mme Marois, qui a dit : Il faut s'asseoir ensemble. Puis on se disait : Ça
va être impossible, ça va être impossible, mais on l'a réussi. On a
assis les gens, ça a parti avec un embryon, on a continué, on a continué.
Malheureusement,
malheureusement, quelques années plus tard, on arrive avec le premier projet de
loi sur les régimes de retraite, Mme
la Présidente, le projet de loi n° 3, qui touche les municipalités, et on
n'utilise pas ce consensus-là qui est en train de se bâtir. Alors, le ministre
le sait, les gens qui ont venu, qui ont participé au projet de loi n° 3
ont démontré leur
mécontentement. On brisait des règles de l'art sur la négociation et des
ententes prises légalement. Alors, tout le monde a critiqué en partie le
projet de loi n° 3. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas continué dans cette
veine de consensus.
Heureusement,
heureusement, Mme la Présidente, aujourd'hui, le projet de loi n° 57... le
ministre nous a donné raison, est
revenu sur ce consensus-là. Et vous devriez voir, Mme la Présidente, le
ministre en commission, c'est de toute beauté.
Vu qu'il y a consensus, les gens le félicitent, le saluent avec le gros
sourire, autant patronal, autant syndical, et le ministre est très content de ça. Et je le comprends bien, parce qu'il
était une fois, voilà juste quelques semaines, au projet de loi
n° 3, ce n'était pas le cas du tout parce qu'il n'y avait pas eu de
consensus.
• (11 h 50) •
Alors, cette
manière de procéder là, je la salue et j'invite tous les parlementaires,
lorsque c'est possible et même lorsqu'on
prétend que ce sera impossible, de tenter de faire ce consensus-là avec toutes
les parties. Une entente négociée, c'est
sûr que ce ne sera jamais à 100 %, mais c'est toujours mieux qu'une
entente qu'on oblige les gens. On doit s'asseoir et négocier. Le Québec est formé de gens intelligents. Je suis convaincu que, lorsqu'on prend le temps,
on arrive à des résultats tels que
celui-ci au projet de loi n° 57, que, bien
entendu, l'opposition, on n'a pas le choix, on est fiers de cette
démarche-là et on va appuyer. On va appuyer le projet de loi n° 57.
Bien entendu,
Mme la Présidente, il reste toute l'étape article par article, rien n'est
parfait dans ce beau monde là. Je ne
suis pas inquiet que mes collègues de la deuxième opposition qui siègent
studieusement avec nous vont apporter des
nouveaux points, on va tenter d'agrémenter quelques lignes sur le projet de
loi, mais toutefois une chose est certaine : sans défaire le
consensus, sans défaire ce consensus-là qui... pour une fois dans un programme
ou un projet de loi si complexe que les régimes de retraite, on a réussi à
impliquer des retraités, des travailleurs ainsi que le patronal.
Alors, si
vous n'avez pas compris mon message, Mme la Présidente, j'en suis très, très,
fier parce que, lorsqu'on parle de
consensus, bien entendu, ce qui est merveilleux de tout ça, Mme la Présidente,
c'est que personne, personne dans tout
ce beau monde là assis au coin de la table n'a perdu des droits, personne ne
s'est vu oublié dans ce consensus-là. C'est ça qui fait la beauté, parce que le lendemain de ce projet de loi là,
lorsqu'il sera adopté, bien les gens... puis ont déjà dit au ministre en commission parlementaire dans
plusieurs mémoires : M. le ministre, il ne faut surtout pas que ça
s'arrête là. On a ce bout de projet
de loi là, puis je pense que le rapport D'Amours, les gens ont venu le dire en
commission parlementaire, c'est un
début, on est sur une bonne ligne, ça représente le futur, il faut suivre ça.
Alors, M. le ministre, j'ose espérer... je vous le réitérerai en article par article tout au long de cette étude, bien
il va falloir continuer, parce qu'on est loin, loin d'avoir atteint la perfection sur les régimes de retraite
au Québec. C'est un pas vers l'avant, un pas consensuel, qu'on ne peut que
dire qu'on doit continuer dans cette
veine-là, mais, lorsqu'on parle, puis il y a plusieurs collègues qui le
disaient un peu plus tôt, que plusieurs travailleurs au Québec n'ont pas droit
à un régime de retraite décent à l'âge de leur retraite, soit à 60 ans,
62 ans ou 65 ans, tout dépendant des conventions collectives en ce moment,
bien, il y aurait un minimum, un minimum, Mme la Présidente...
Vous savez
tout comme moi, le coût de la vie étant... Bien, il y a beaucoup
de gens qui ont travaillé tout de
même depuis l'âge de 16 ans puis ils
sont rendus à 60 ans aujourd'hui puis ils reçoivent les maigres régimes des rentes
pour toutes sortes de raisons. Ils
n'ont pas eu la chance d'être dans une association où est-ce qu'il y avait une entente pour avoir un
régime de retraite. L'Ontario
vient de mettre en branle un régime
de retraite pour tous les Ontariens. Or, ça, ça l'a un prix à payer, bien entendu, Mme la Présidente, mais
j'invite le ministre à aller de l'avant, au moins s'asseoir, vérifier la
possibilité, le coût de ces régimes-là.
Est-ce que
c'est possible au Québec? Il faut regarder de long et en large, mais moi, j'y
crois. Moi, je crois qu'on peut
trouver un système où est-ce que tous les Québécois seront dignes d'une
retraite avec un minimum de fierté et pas une retraite où est-ce que les gens vont friser l'itinérance, parce
qu'il y a des cas, Mme la Présidente, puis je ne commencerai pas à faire la nomenclature de ça ici ce matin,
mais c'est épeurant de voir des gens qui ont travaillé puis ils se sont levés
à tous les matins toute leur vie puis que, rendus à 60 ans, c'est un déclin
total.
Alors, sur
ce, Mme la Présidente, bien entendu, je vais rappeler quelques points que les
gens nous ont spécifiés dans leurs
mémoires, sans vouloir toutefois défaire ce consensus-là. Bien entendu,
certaines gens tentent encore de faire entrer
des lignes qui n'étaient pas consensuelles; de dire que c'est impossible, nous
allons vérifier article par article, mais je voudrais quand même
apporter quelques ouvertures que le ministre a laissé entendre lorsqu'on a
écouté les groupes.
On parlait
aussi que le régime... le projet de loi, il intégrait une grille qui avait fait
consensus lors des négociations, que
les gens aimeraient voir cette grille-là dans le projet de loi. Le ministre a
bien écouté ces gens-là, leur a dit : Je ne vous dis pas oui, je ne vous dis pas non, il y a
une possibilité. Alors, c'est sûr que, sur ces points-là, on va revenir durant
l'article par article. Bien entendu,
d'autres gens nous disaient aussi : Bien, l'utilisation des surplus
futurs... Bien, en ce moment, les
règles telles qu'elles sont écrites, bien c'est le côté patronal, seulement lui,
qui peut utiliser les surplus futurs. Alors,
certains groupes nous disent : Est-ce que ça pourrait être aussi l'employé? Nous allons discuter de ces points-là
tout au long. Et, bien entendu, une recommandation qui avait été faite par les groupes... la Force Jeunesse, qui, eux,
disent au ministre
encore une fois : M. le
ministre, il faut continuer dans
cette veine-là. Lorsque le projet
de loi n° 57 sera fermé et signé, continuons avec la table de travail,
continuons à regarder. Ce n'est pas parfait parce qu'on a réussi à
s'entendre sur le projet de loi n° 57, il reste beaucoup de régimes qui sont
très variés. Alors, Force Jeunesse nous dit : Faites attention! On a encore beaucoup d'ouvrage à faire.
Alors, j'ose espérer que le gouvernement, avec aussi M. le ministre, on va
continuer dans cette veine-là pour
tenter de trouver quelque chose d'équitable pour que tous les gens aient une
bonne retraite un jour.
Alors, sur
ce, Mme la Présidente, bien, je
réitère mon engagement à cette commission parlementaire, et ce projet de
loi, nous allons le travailler, bien
entendu, toujours avec professionnalisme, je n'ai aucun doute. Nous allons
poser des questions adéquates. Même si
nous appuyons le projet de loi, bien entendu, il y aura des questionnements,
des questionnements de compréhension.
Et je tiens d'abord aussi à spécifier, Mme la Présidente, que je remercie le
ministre et le ministère.
Lorsque nous demandons ce qu'on appelle dans notre jargon les débriefings
techniques, bien, le ministre est toujours
ouvert à nos suggestions puis il nous apporte l'information nécessaire.
Alors, je tiens à remercier ce travail-là en collatéral avec les autres
collègues. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Beauharnois. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Jean-Lesage.
M. André Drolet
M.
Drolet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Salutations particulières à tous les collègues
qui ont travaillé au projet de loi. C'est un plaisir pour moi aujourd'hui de pouvoir prendre la parole sur un important projet de loi, qui est le projet de loi n° 57, Loi
modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement
quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées.
Mme
la Présidente, depuis la crise
financière de 2008, on observe une détérioration de la situation
financière de différents régimes de
retraite à prestations déterminées. Le degré de solvabilité des régimes du
secteur privé est passé d'un taux de capitalisation
de 92 % à un taux de 87 %
en seulement 12 mois, soit l'année 2013‑2014. De plus, les taux d'intérêt
extrêmement bas des dernières années ont
amené des rendements nettement inférieurs à ceux attendus, ce qui a entraîné
d'importantes variations dans le financement de différents régimes.
Le
nombre de régimes de retraite à prestations déterminées dans le secteur ne
cesse de décroître. En 2000, 11 % de ces régimes comportaient un volet à cotisation déterminée. En 2013, nous
en étions à 39 %. Les régimes à prestations déterminées se transforment en régimes à cotisation déterminée pour les
nouveaux employés parce que les promoteurs estiment que leurs coûts devenaient insoutenables. D'ailleurs, la
méthode de financement actuelle, basée sur la solvabilité, est coûteuse et imprévisible pour les quelque
380 employeurs du secteur privé qui offrent à leur personnel ces régimes
de retraite. Enfin, il faut mentionner que l'ensemble de ces régimes est sous
la gouverne de la Loi sur les régimes complémentaires
de retraite. C'est pourquoi, heureusement, notre gouvernement amène le projet
de loi n° 57, qui propose plusieurs
mesures pour corriger la situation, dont la plupart s'inspirent des
recommandations du rapport D'Amours déposé en 2013 dans le but de
pérenniser le système de retraite actuel.
Mme
la Présidente, quelques-unes de ces mesures présentées dans le projet de loi et
qui sont essentielles au maintien des régimes à prestations déterminées.
D'abord, la modification de la méthode de financement applicable aux
régimes de retraite à prestations déterminées. Le projet de loi n° 57 propose d'écarter le financement sur la base de
la solvabilité au profit d'un financement axé sur la capitalisation pour amener plus de stabilité aux
différents régimes. Par ailleurs, le projet
de loi n° 57 propose une mesure
intéressante : la cotisation d'une
provision de stabilisation pour pallier à différentes fluctuations économiques
et les impacts dus à l'allongement de l'espérance de vie. Cette
provision proviendra des gains actuariels et des cotisations.
• (12 heures) •
Une
autre mesure importante et proposée par le projet de loi vient encadrer
avec des règles claires l'utilisation
des surplus. En fait, aucune utilisation des surplus ne sera permise, à moins que la provision de stabilisation
ne soit capitalisée au moins à 5 % au-dessus de l'objectif de
capitalisation du régime et qu'un test de solvabilité soit respecté. Le test de
solvabilité d'un régime doit être égal à
105 % ou plus. Lorsque
ces conditions seront remplies, la création
d'une clause banquier pour les
entreprises, incluse dans le projet de loi, permettra aux employeurs de
récupérer une partie des sommes versées
pour capitaliser le régime, Mme la Présidente. Cette mesure innovatrice
contribuera à soutenir le développement de nos entreprises.
Le
projet de loi permettra également un meilleur suivi des régimes en difficulté.
En fait, chacun de ces régimes avec
un degré de solvabilité inférieur à 85 % devra transmettre à la Régie des
rentes du Québec une évaluation actuarielle tous les trois ans.
Enfin,
le projet de loi prévoit des règles modifiant le concept de la cotisation
patronale minimale. Un test assurera que le participant qui n'aurait pas
financé avec ses cotisations et ses intérêts plus de 50 % de la valeur de
ses prestations... En effet, des
cotisations d'équilibre sont versées pour rembourser un déficit, et la période
d'amortissement des déficits passera de 10 à 15 ans.
Lors
des consultations, plusieurs intervenants sont venus nous dire que les mesures
proposées dans le projet de loi correspondent
aux besoins, tant du côté des employeurs que du côté des employés. Je constate
qu'il se dégage un consensus clair
sur le fait que les régimes de retraite à prestations déterminées sont le
véhicule le plus soutenable à la fois au niveau de la planification de
la retraite pour un participant et pour l'économie en général.
Enfin,
ces régimes permettent de garantir, à la retraite, des revenus prédéterminés à
l'embauche. Il importe donc de
s'attaquer à des règles... les faiblesses du système actuel pour assurer aux
travailleurs d'aujourd'hui et aux générations futures des retraites
décentes. Il est de loin préférable d'en assurer la pérennité.
En
fait, pour les employeurs, ce genre de régime a un pouvoir d'attraction pour la
main-d'oeuvre de qualité, qui sera
plus fidèle et intéressée pour le genre de conditions qu'elle offre.
D'ailleurs, Mme la Présidente, justement, le projet de loi était très
attendu. Et, comme le ministre le disait tout à l'heure, c'est un modèle
canadien, et on se fait envier.
Alors,
c'est très intéressant pour moi de vanter le travail du ministre et de faire en
sorte aussi que tous les gens qui ont
été entendus avec leurs mémoires, que ça soit les syndicats, que ça soit les
employeurs, ont tous... et j'ai rarement entendu autant de consensus que cela lors d'une étude des mémoires.
Alors, je félicite toute l'équipe du ministre, le ministre particulièrement, aussi, pour le travail de
consensus comme ça qui a fait en sorte que ça a été, naturellement, d'un
plaisir d'écouter ces gens-là.
Alors, Mme la Présidente, pour les
employeurs, c'est une valeur ajoutée, comme je l'ai déjà mentionné, pour attirer et fidéliser la main-d'oeuvre de
qualité et assurer une retraite de qualité à nos jeunes. Et d'ailleurs, comme le collègue l'a dit, oui, Force
Jeunesse ont aussi été, je pense, impressionnés et très articulés lors de leur
prise de parole.
Mme
la Présidente, d'ailleurs, certaines études affirment que les régimes à prestations
déterminées parviennent à verser des
rentes de 20 % à 30 % plus élevées qu'un régime de type REER. Et il
en est ainsi car un régime à prestations déterminées se distingue par un horizon de placement plus long, une
tolérance au risque, aussi, supérieure, une mutualisation du risque de placement et des frais moindres pour
l'employé, sans oublier l'avantage marqué découlant de la répartition
des risques entre les membres qui participent au régime.
En
conclusion, Mme la Présidente, avec le projet de loi n° 57, loi
modifiant... sur les régimes complémentaires de retraite principalement quant au financement des régimes de retraite
à prestations déterminées, notre gouvernement comprend toute l'importance que revêt la santé financière des régimes de
retraite à prestations déterminées pour notre économie et pour notre
avenir. Les conséquences sont trop grandes pour qu'on laisse lentement agoniser
ceux-ci.
Employés,
employeurs, retraités, jeunes, syndicats, conseillers professionnels et
gouvernement doivent travailler de
concert pour rétablir la santé des régimes à prestations déterminées. C'est
pourquoi je recommande à mes collègues d'accepter
le principe de ce projet de loi et d'en permettre l'étude article par article
en commission parlementaire, il y va de
l'intérêt du système de pension du Québec, de la sécurité financière de
plusieurs Québécois et Québécoises et la bonne volonté de la santé
économique en général. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député
de Jean-Lesage. Alors, y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du
principe du projet de loi n° 57? Il n'y en a pas.
Mise aux voix
Alors,
est-ce que le principe du projet de loi n° 57, Loi modifiant la Loi sur
les régimes complémentaires de retraite principalement quant au
financement des régimes de retraite à prestations déterminées... est-il adopté?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Adopté. Maintenant, M. le leader adjoint du
gouvernement.
Renvoi à la Commission de l'économie et du travail
M.
Sklavounos : Oui, Mme la Présidente. Conformément à
l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que ce projet
de loi soit déféré à la Commission de l'économie et du travail pour étude
détaillée.
Mise aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, très bien. Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix :
Adopté.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Maintenant, pour la suite des choses, M. le leader adjoint
du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Oui. Article 6, s'il vous plaît, Mme la Présidente.
Projet de loi n° 59
Adoption du principe
Reprise du débat sur la motion de scission
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien. À l'article 6 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 3 novembre 2015 sur la motion de
scission présentée par M. le député de Jonquière dans le
cadre du débat sur l'adoption du
principe du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la
prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses
modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.
Lors
de l'ajournement des travaux, Mme la députée de Taschereau n'avait pas terminé
son intervention, et, avant de lui
céder la parole, je vous indique qu'il reste 41 min 43 s au
groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 min 12 s
au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, 23 min 30 s au deuxième groupe d'opposition et
sept minutes aux députés indépendants.
Alors, sans plus
tarder, je vais céder la parole à Mme la députée de Taschereau.
Mme
Agnès Maltais (suite)
Mme
Maltais :
Merci, Mme la Présidente. Effectivement, je n'avais pas eu le temps de
terminer, la dernière fois, d'expliquer
pourquoi je crois que nous devrions voter collectivement pour cette motion de
scission. Quelques minutes simplement pour compléter, puisque j'en étais
rendue à terminer mon allocution.
J'en étais à
un passage où j'expliquais aux membres de l'Assemblée nationale qu'il y a des
moments où il faut entendre
l'opposition, il faut l'écouter. Il y a des moments où il y a des mains
tendues, d'un côté à l'autre de l'Assemblée nationale, qui ne doivent pas se perdre ou, en tout cas, qui ne doivent
pas être vues, examinées et soupesées. C'est une main tendue, une main
tendue que je montre au gouvernement. Je tends la main au gouvernement.
Le projet de
loi, c'est clair maintenant, contient deux principes — l'Assemblée nationale a statué comme ça,
la présidence a statué — deux principes, et chacun de ces deux
principes peut vivre indépendamment. Un des deux principes, le deuxième, la deuxième partie, contient bien sûr
quelques difficultés, mais contient des... va rapidement, à notre avis, faire consensus, et il y a là-dedans des notions
importantes qui permettraient à la ministre de la Justice, d'ici à avant Noël
probablement, d'avoir un legs à la société.
Je pense, entre autres, à la lutte aux mariages forcés, je pense aux ajouts sur
le crime d'honneur. Je pense que ce sont des choses qui sont intéressantes.
Maintenant,
le problème, c'est que la première partie, ce qu'on veut... sur quoi on veut
scinder, il y a énormément de problèmes. Ça a été décrié en commission
parlementaire, ça a été ratiboisé. Alors, est-ce qu'on va étudier tout
ça en même temps? Mais, si on étudie tout ça
en même temps, ces deux principes différents, bien... j'ai eu tout à coup à
l'oreille une réplique de l'époque
qui disait : On s'engrange pour un deux belles grosses semaines. On
s'engrange pour une belle grosse session.
Je n'ai pas
peur de la difficulté. Nous n'avons pas peur de la difficulté, au contraire,
mais nous voulons avancer rapidement
sur certains éléments, sur ce qui devrait être une loi en soi, la deuxième
partie, les modifications qui s'intitulent «les modifications législatives pour renforcer la protection des
personnes», pour protéger les personnes. Mais il nous faut revoir véritablement ensemble, sérieusement, la
première partie, qui a été décriée, qui crée une nouvelle définition dans la
Charte des droits, une modification à la
Charte des droits et des libertés — je rappelle que le premier ministre plaidait
pour qu'on ne touche pas à la Charte des
droits et des libertés pour des offenses qui sont déjà balisées par le Code
criminel, sanctionnées par le Code
criminel — et crée
une nouvelle offense, crée un tribunal, crée des amendes, crée une liste noire,
enfin... et on touche à la liberté d'expression.
Donc, la
proposition, la main tendue que nous faisons, c'est : Acceptez cette
motion de scission. Nous pourrons ainsi
entreprendre le travail de façon harmonieuse et, je crois, d'une façon plus
logique qui nous permettra d'avancer les travaux d'une façon intéressante pour l'Assemblée nationale. Voici notre
main tendue, cette motion de scission est une main tendue, Mme la
Présidente. Merci.
• (12 h 10) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la
députée de Taschereau. Et, pour la prochaine
intervention, je vais céder la parole à Mme la députée de Montarville, qui est
aussi la porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de
laïcité.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Eh bien,
à ce moment-ci des discussions, je vais réitérer, pour le bénéfice des
gens qui nous écoutent, que nous sommes contre l'idée de scinder en deux le
projet de loi n° 59 et nous voterons contre cette idée. Et je vous
explique pourquoi, il y a une logique derrière ça.
Le projet de
loi n° 59 s'inscrit dans un vaste plan de lutte à la radicalisation
qui a été présenté par le gouvernement. Dans sa deuxième partie, comme le souhaitait l'opposition officielle, on
parle de mariage forcé, on parle de crime d'honneur, et c'est effectivement très important, et ce qui
est dit là est extrêmement intéressant, pertinent. C'est ce qu'on appelle les
vraies affaires ou ce qu'appelleraient les
collègues d'en face les vraies affaires. «Mariage forcé», on n'a pas entendu ça
souvent dans les lois au Québec. «Crime
d'honneur» non plus, on n'a pas entendu ça souvent dans nos lois au Québec,
on sait que c'est toute la tristement
célèbre affaire Shafia qui nous a ouvert les yeux sur ce qu'étaient les crimes
d'honneur, et ça se trouve, ça, dans le projet de loi n° 59.
Mais, pour
nous, ce projet de loi est un tout et doit être un tout. Je vous ramène à ce
vaste plan pour contrer la radicalisation.
Aussi forts soient les mots qui sont identifiés dans cette deuxième partie,
«mariage forcé», «crime d'honneur», et
j'en passe — ce qui
est excellent, là, c'est le temps que le gouvernement s'attaque à ça — aussi forts soient ces mots, aussi déçus sommes-nous du fait qu'on ne retrouve
pas les corollaires dans la première partie. Et ce que nous disons, c'est
qu'il faut qu'ils s'y trouvent, ces corollaires, dans cette première partie.
Là, je m'explique.
Dans la
première partie, on parle de lutter contre les discours haineux et les discours
incitant à la violence. Soit. Personne
n'est pour ça. Cependant, nous spécifions que c'est très, très large et pas
assez précis, et ce que nous souhaitons et ce que nous voulons du côté du gouvernement, c'est qu'on soit aussi
précis dans la première portion que dans la deuxième et que, les préceptes qui entraînent les mariages
forcés, les préceptes qui entraînent les crimes d'honneur, il faut dire les
vraies affaires. Ça ne vient pas, là... Ça ne vient pas d'une création de
l'esprit, là, ça vient, entre autres, de dérives religieuses, d'intégrisme religieux, de pratiques radicales religieuses,
et ces termes-là devraient également se retrouver dans la première
partie, parce qu'ils le sont dans la deuxième. Dans la deuxième partie,
comprenez-moi bien, Mme la Présidente, on nomme les vraies affaires, mais, dans
la deuxième, on ne les nomme pas, et nous disons au contraire : Nommons-les. Ne soyons pas aussi larges que la
ministre le fait, mais soyons plus précis. Parce que c'est bien à ça que
l'on s'attaque.
Je vous rappelle que le
p.l. n° 59 a été déposé pour s'attaquer à la radicalisation de nos
jeunes, au fait que des jeunes sont
endoctrinés, qu'on leur lave le cerveau, que ces jeunes se convertissent mais
qu'ils sont convertis dans un but précis, c'est de les amener jusqu'à
l'étape finale qui est, ô horreur! d'aller combattre à l'étranger contre les
propres valeurs québécoises et canadiennes,
en passant. Et, avant d'en arriver là, bien, il faut lutter contre les propos
qui mènent ces jeunes, de un, à se
convertir puis, de deux, surtout à se radicaliser, parce que c'est la
radicalisation, le problème. Et il faut donc s'attaquer aux propos qui sont livrés par ceux qui lavent le cerveau de
ces jeunes, qui peut-être sont plus vulnérables, qui peut-être, oui, sont sans emploi, qui peut-être,
oui, sont moins bien intégrés, mais, ces agents de radicalisation qui sont là
puis qui profitent de ces circonstances pour
radicaliser les jeunes, c'est à ces propos-là qu'il faut s'attaquer, les propos
que ces personnes, que ces agents disent,
disent, prêchent, répètent, en fait l'endoctrinement. Donc, c'est un tout, et
nous aimerions, nous souhaiterions
que, du côté du gouvernement, on ait le courage autant dans la première partie,
d'en avoir eu autant que pour la deuxième partie, parce que ça va
ensemble.
On
est ici pour se prononcer sur cette motion de scission. Le président a rendu sa
décision. Soit. De son avis, elle est
recevable, cette motion. Soit. Cependant, pour ce qui est de la recevabilité de
la motion, c'est aux législateurs de travailler ensemble pour voir quels sont ou les amendements, ou les arrangements,
ou les modalités qui seront pris en considération pour faire avancer le projet de loi. Alors, à cet
égard, nous, ce que nous disons, c'est : De grâce, gouvernement, soyez
aussi courageux que vous l'avez été dans la
deuxième portion puis nommez les vraies affaires dans la première également.
Et attaquons-nous au bon discours, ce
discours de radicalisation, dans la première également et on va éviter les
dérapages, on va répondre aussi... et
dérapages, comprenez-moi bien, dans la mesure où tous les intervenants qui sont
venus nous rencontrer nous ont dit
que c'est trop large, que l'interdiction, telle qu'écrite dans le p.l.
n° 59, porte trop grandement atteinte
à la liberté d'expression. Et ça, il ne faut pas le faire. Il ne faut pas le
faire, et c'est la raison pour laquelle nous devons être précis.
Donc,
pour ces raisons, pour ce souci de cohérence, parce qu'il y a ce souci de
cohérence, nous sommes contre cette
motion et nous voterons contre. Cependant, nous souhaitons et nous attendons ardemment de
voir quelles seront les modifications qui seront apportées, les amendements
qui seront apportés, puisqu'on sait que le premier ministre a lui-même demandé
à la ministre de la Justice d'apporter des modifications. Il a même laissé
entendre que toute la notion des discours
haineux pourrait être évacuée. Alors là, je ne sais pas où on s'en va. Donc,
j'ai hâte de voir avec quoi on pourra
travailler, mais il faut effectivement apporter d'importantes modifications à ce projet de loi. N'oublions pas que, l'objectif visé, nous le partageons tous, la lutte à la
radicalisation des jeunes, c'est extrêmement important. Merci,
Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée de Montarville. Et, pour la suite de ce débat, je vais
céder la parole à M. le député de Vanier-Les Rivières.
M. Patrick Huot
M.
Huot : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est à mon tour de m'adresser à vous sur cette
question-là dans le cadre de
l'adoption de principe du projet de
loi n° 59, la Loi édictant la Loi concernant la prévention et la
lutte contre les discours haineux et
les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes.
Et
là on est devant une proposition de l'opposition
officielle de scinder... d'une motion
de scission pour scinder le projet de loi en deux principes. Donc, il y
a eu des plaidoyers qui ont été
faits. Ça a été retenu, ça a été valide, ça ne veut pas dire qu'on est
tous d'accord avec ça. Nous, nous serons contre cette proposition du Parti
québécois.
Et
je veux tenter d'expliquer un petit
peu, même si je n'ai pas participé...
Vous savez, avec mes fonctions de whip adjoint,
je suis un petit peu moins souvent en commission parlementaire, mon
rôle est essentiellement ici. Je fais quelques remplacements, mais ça ne veut pas dire qu'on ne
suit pas les travaux qui ont lieu en commission
parlementaire, et celui-là particulièrement, qui nous a interpellés, tous. Donc, on a suivi ça. Et j'ai malheureusement manqué le plaidoyer de la députée de Taschereau hier pour
expliquer sa motion de scission, mais j'ai bien entendu son plaidoyer au moment
de l'adoption de principe. Elle a fait une
présentation, elle a fait son heure complète, et je suis même allé la voir
après pour lui dire qu'elle avait
fait un bon travail et qu'on n'est pas obligés d'être d'accord.
Mais elle avait fait un bon travail, un bon plaidoyer, beaucoup... c'était très préparé, très argumenté. Et je le
dis publiquement, je ne suis pas gêné, mais ça ne veut pas dire que je
suis d'accord nécessairement avec elle.
Donc, nous, ce qu'on
veut dire dans ce projet de loi là, à l'image de ce qui vient d'être dit par la
députée de Montarville, c'est un tout. Il a été présenté, en juin dernier,
un plan d'action : plan
d'action gouvernemental 2015-2018 La radicalisation au Québec : agir, prévenir,
détecter et vivre ensemble. Ça a
été présenté à la suite, donc, des événements qu'on connaît, Mme la Présidente. Ce qu'on voulait faire un peu... C'est
ensemble qu'on doit faire face à ceux et celles qui menacent notre
sécurité, nos droits et libertés et la démocratie au Québec. Et donc, on l'a
dit dans le titre, on voit quatre axes
principaux : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble. Et le défi dans
tout ça, c'est de savoir conjuguer notre identité d'accueil forte au
Québec et une diversité croissante qui nous arrive au Québec, qui est
nécessaire et qui est bénéfique. Donc, le plan d'action, ça vise la sécurité de
la population et le mieux-vivre ensemble, Mme la Présidente.
Donc,
ce qu'on veut faire, c'est renforcer nos interventions pour qu'on puisse se
doter de nouveaux moyens pour assurer
la protection des personnes, c'est sanctionner la diffusion de propos haineux
ou incitant à la violence. On veut élever
au rang de droits fondamentaux la protection individuelle contre les discours
haineux ou incitant à la violence en l'incluant
dans la Charte des droits et libertés de la personne. Donc, il y a une série de
mesures qui sont proposées afin de prévenir
et de faire cesser la diffusion de discours haineux et de sanctionner les
auteurs. Ça, c'est en termes de discours haineux.
Il
y a plusieurs choses qui sont dans le projet de loi aussi. Il y a des choses en
matière de protection de la personne, donc lutter contre le mariage
forcé, prévenir les crimes basés sur une conception de l'honneur, les crimes
d'honneur, implanter un outil de protection
immédiate pour les personnes dont la sécurité pourrait être menacée, mieux
protéger les élèves dans les établissements d'enseignement, etc.
• (12 h 20) •
Il y a des
choses qui ont été dites beaucoup sur la liberté d'expression. Là, on le
démontre. Tout le monde peut s'exprimer là-dessus. Il y a eu des consultations.
Évidemment, il y a eu des consultations qui ont été faites sur le projet
de loi, plusieurs groupes qui se sont fait
entendre. Et là ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'on n'est pas... Pour
ceux qui nous écoutent, entre autres,
là, ce qu'il faut bien comprendre : on n'est pas en train d'adopter le
projet de loi, là, on n'est pas à
l'adoption finale du projet de loi. Pour bien comprendre le processus démocratique... le processus
législatif plutôt, pour adopter un projet de loi, là on est à l'adoption
de principe. Il y a eu des consultations, comme j'ai mentionné,
on propose... Voici un projet de loi qui est proposé, on entend... il
y a plusieurs personnes qui ont
des choses à dire, plusieurs groupes, plusieurs individus, plusieurs regroupements qui
ont des choses à dire, ils sont venus le dire. Il y a des notes qui sont prises. Je serais curieux... il y a peut-être
des statistiques là-dessus, là, mais je serais curieux de savoir... Un projet de
loi qui a été présenté comme ça, qui
a eu des consultations, qu'on a fait une étude détaillée et qui est arrivé adopté tel quel qu'il avait été proposé au
départ, il ne doit pas y en avoir des tonnes, Mme la Présidente.
Donc là, ce
qui a été fait, une proposition... Il y a eu des commentaires, et la députée de
Taschereau en avait même parlé, avait
fait un lien beaucoup entre radicalisation et utilisation de la violence, elle
disait : On n'est pas d'accord avec la solution. Là, je résume très rapidement, elle avait fait une
intervention assez longue là-dessus. Et la réponse de la ministre à ça avait été qu'elle avait dit : J'entends
donc proposer des améliorations au projet de loi au moment de la reprise de
l'étude, donc en étude détaillée.
Et, je
répète, aujourd'hui on n'est pas à l'adoption finale ni à l'étude détaillée du
projet de loi, mais bien à l'adoption de
principe. Et, dans le cadre de l'adoption de principe, il y a une motion de
l'opposition, donc un débat restreint à l'intérieur de l'adoption de principe, pour séparer,
hein... — ce
qu'ils veulent faire, on n'est pas d'accord pour le faire — mais après ça on revient même à l'adoption de principe, ils auront encore
l'occasion, toutes les... tout le monde a l'occasion de parler au moment de l'adoption de principe, pour ensuite
l'envoyer en commission parlementaire en étude détaillée, ce qu'on appelle étude article par article. Et là, encore
une fois, on peut proposer toutes sortes d'amendements et de modifications.
Et la ministre a dit qu'elle arriverait avec
des amendements au moment de la reprise de l'étude des travaux. Et, au moment
que les oppositions verront ces
amendements-là, ils pourront les commenter, ils pourront en débattre et ils
pourront en proposer d'autres,
améliorer, bonifier. C'est ça, le principe, c'est ça que... c'est comme ça
qu'on fonctionne dans notre Parlement, et ça fonctionne bien. On arrive
régulièrement avec des consensus dans l'adoption de nos lois.
Donc, c'est
ce qu'on dit qui va être fait, Mme la Présidente. Donc, je pense que c'est
essentiel de le rapporter, de dire
qu'on n'est pas... ce n'est pas parce qu'on adopte le principe aujourd'hui que
la loi s'adopte de même, là, il va y avoir d'autres modifications,
d'autres propositions qui vont être faites.
Je sais
que ce qui a accroché beaucoup — et, dans le discours de la députée de
Taschereau aussi, on l'a entendu — c'est la question de discours haineux, entre autres. Et ça, le premier
ministre avait été assez clair, il avait dit... je pense que ça avait été rapporté beaucoup dans le cadre de notre
caucus présessionnnel qu'on avait eu un petit peu avant que la session commence, qui disait que «le but, ce n'est pas de
réduire la liberté d'expression au Québec, mais d'en indiquer la limite,
qui, à [son] avis — c'est
le premier ministre qui disait ça — requiert le consensus et va
recueillir [les] consensus des citoyens». Il
dit : «On peut dire des bêtises. On peut dire toutes sortes de choses,
mais on ne peut pas appeler à la violence.» Il y a une nuance qui est
là, donc, le projet de loi, on a une limite, il faut préciser la démarcation
entre l'acceptable et l'inacceptable. Ce qu'on dit : On doit être assez
explicites et définis.
Donc, il y a
trois conditions, et la ministre en a parlé en commission parlementaire. On
parle de trois conditions qui permettent de définir ce qu'on entend par
discours haineux, des conditions établies par la Cour suprême, Mme la Présidente. Donc, on a le critère de la personne
raisonnable qui estimerait que des propos exposent un groupe ciblé à la
haine ou à des gestes violents. Deuxièmement, on a des propos qui sont tenus ou
qui sont diffusés publiquement. Le projet de
loi ne vise pas les conversations privées — c'est important de le préciser — ne vise pas les conversations privées.
Il ne touche pas non plus aux médias qui
rapportent des faits dans leur devoir d'information. Donc, si on rapporte des
propos violents, on ne touche pas les
médias qui ont rapporté ce qui peut être dit par d'autres personnes. Et,
troisièmement, par «le groupe de
personnes visées», on entend celles ayant une caractéristique qui est commune,
qui est identifiée à la charte québécoise
des droits et libertés de la personne, soit la race, la couleur, le sexe, la
grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge, la religion, les
convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la
condition sociale ou le handicap.
Donc, ce
qu'on veut faire, Mme la Présidente, c'est d'agir sans porter atteinte, bien
sûr, à la liberté d'expression. Mais
le respect de ce droit fondamental, il ne doit pas servir à cautionner la libre
circulation de propos haineux ou incitant à la violence dans l'espace public. C'est donc de la responsabilité de
l'État de se porter garant du respect d'un juste équilibre entre la liberté d'expression des uns et la limite
à ne pas franchir pour que des propos soient qualifiés par les autres de
haineux ou incitant à la violence. Donc,
c'est ce qu'on veut faire, c'est ce qui va continuer à être débattre... on va
continuer à débattre de cette question-là au moment de l'étude
détaillée, avec des nouvelles propositions, des bonifications, des propositions d'amendement, et ce que le Parti
québécois comme la Coalition avenir Québec, les députés indépendants
pourront faire aussi.
Donc, je
répète qu'on est contre la motion de scission parce que le projet de loi
n° 59, c'est un tout qui découle du
plan d'action dont tout le monde parle. Donc, de scinder le projet ou de
retarder son adoption, on retarde les travaux. Et on a besoin de ça, c'est les suites du plan d'action, comme je vous
mentionnais. Donc, nous, ce qu'on veut, c'est de faire avancer le dossier. On veut que ça continue
à aller rondement. Ça ne se réglera pas en deux heures de commission
parlementaire. On a plusieurs heures de travaux, on en est conscients, à faire,
mais on veut avancer.
Puis je veux
rappeler aussi que, le PQ, récemment encore, sur la question de discours
haineux et de liberté d'expression,
c'étaient eux qui... Il y a eu question des blogueurs, des rappeurs qui
voulaient venir aussi... qui voulaient venir
au Québec. Dans leurs discours... On voulait les empêcher de venir diffuser
leurs discours haineux ou incitant à la violence. Entre autres, il y avait de la violence envers les femmes qui
était dans ces discours-là. Donc, on nous avait demandé d'agir là-dessus. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est
qu'on veut adopter des moyens pour empêcher ces personnes de diffuser leurs discours. Mais il y a un certain manque de
cohérence, parce qu'on nous empêche de vouloir... d'aller de l'avant avec
cette adoption-là.
Puis, je
rappelle la députée d'Hochelaga qui avait déclaré... entre autres, un blogueur
qui était venu, qui... et, à la suite des
propos d'un blogueur qui voulait venir ici, elle a dit : «[C'est] le
devoir du gouvernement de lancer un message pour indiquer que les propos haineux faisant la promotion de la violence
envers les femmes étaient inacceptables...» Donc, nous, ce qu'on veut, c'est aller de l'avant avec
ça. Donc, on est d'accord que c'est inacceptable. Donc, on veut protéger
les personnes et les groupes de personnes
les plus vulnérables notamment contre les discours haineux, les discours
incitant à la violence, et, pour ça, bien, il faut faire certaines
modifications législatives.
Donc, avec le
plan d'action qu'on a proposé, on a agi pour tous les Québécois. Ça fait partie
d'un plan d'ensemble. Nous voulons
dire non aux discours haineux et ceux incitant à la violence. On veut protéger
les mineurs contre les mariages forcés.
On veut protéger les personnes vulnérables en leur donnant la possibilité
d'obtenir des ordonnances de protection. Et nous voulons nous assurer, en terminant, Mme la Présidente, que, sur
le territoire du Québec, nous continuions de vivre dans un monde où le respect des différences fait
notre marque de commerce et qu'il se fasse sans violence et sans haine.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Vanier-Les
Rivières. Et maintenant je vais céder
la parole à Mme la députée de Gouin et je vous indique que vous disposez d'un
temps de parole de sept minutes.
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : Merci, Mme la Présidente. Alors, étant donné que nous
discutons, pour l'instant, essentiellement
de la motion de scission, je veux annoncer, au nom de ma formation politique,
que nous allons voter en faveur de
cette motion et je veux expliquer pourquoi. Je vais aussi apporter, évidemment,
chacun et chacune ici l'a fait, un certain nombre de considérations sur
l'ensemble de l'oeuvre, c'est-à-dire du projet de loi n° 59.
Très
rapidement, je pense que c'est une bonne idée de scinder ce projet de loi. Le
lien entre les deux parties du projet
de loi, dès le point de départ, m'est apparu extrêmement ténu, vraiment ténu.
En fait, on ne le voit pas très bien. Et,
pour cette raison, ne serait-ce que pour cette raison, je pense qu'il vaut
mieux discuter des deux questions indépendamment l'une de l'autre, la première question étant : Nous faut-il au
Québec un outil législatif supplémentaire pour contrer les discours haineux?,
la deuxième question étant : Avons-nous besoin d'outils supplémentaires au
Québec pour aider particulièrement, je
dirais, des jeunes, jeunes femmes, jeunes hommes, soit à contrer des tentatives
de radicalisation ou soit, dans le
cas de jeunes filles, à échapper à ce que dans le projet de loi on appelle la
contrainte excessive, échapper à la perspective
d'un mariage forcé, etc.? Et, sur cette deuxième partie, il y aura toutes
sortes d'amendements à apporter, toutes sortes de commentaires à faire, mais je sens qu'il y a une espèce de
consensus pour dire : Il faut avoir les moyens d'agir dans des situations où des jeunes — et je pense particulièrement aux jeunes
filles — sont
susceptibles de vivre des problèmes d'inégalité
profonde portant atteinte à leur santé, à leur intégrité et même parfois à leur
vie. Donc, je pense que c'est difficile, vraiment, intellectuellement, là — j'ai bien cherché — de comprendre le lien qui existe entre les
deux parties. Je pense que, vraiment,
on aurait des discussions plus intéressantes et plus efficaces si on prenait
chacune des parties comme un tout en elles-mêmes.
• (12 h 30) •
Pour ce qui est de la première partie, c'est-à-dire
celle portant sur les discours haineux, je pense qu'il va être impossible d'entreprendre cette discussion sans
qu'on ait une indication beaucoup plus claire que ce que nous avons en ce moment de la part de la ministre
des amendements qu'elle compte apporter à cette partie. Il y a
eu beaucoup de critiques qui ont été faites à cette
première partie, un certain nombre de critiques que je partage — pas
toutes, mais un certain nombre — et
j'ai été assez surprise de constater, au début de nos discussions sur le
principe du projet de loi n° 59, que la
seule indication nouvelle que nous avions de la part de la ministre
était à l'effet qu'il y aurait des clarifications de la notion même de discours haineux, ce qui est une
chose excellente, mais j'aurais souhaité que ça aille beaucoup
plus loin, et je pense que, si on
veut entreprendre des débats sur la première partie de 59, il va vraiment
falloir qu'on sache où s'en va la ministre.
Premièrement, les objectifs de la première partie devront être clarifiés. Ce projet de loi a été déposé le même jour qu'un
plan de lutte à la radicalisation, le même jour que le projet de loi n° 62 sur la neutralité religieuse de l'État, et
c'est comme si tout ça s'inscrivait,
doit-on comprendre, dans une sorte de plan, mais en fait on est dans des sujets
complètement différents. Dans
certains États parmi les plus laïques au monde, il peut y avoir montée de
discours haineux comme il peut y avoir montée de radicalisation des jeunes. Le
lien n'est pas toujours si évident que ça entre la laïcité de l'État,
essentielle à mes yeux, et comment contrer la radicalisation de certains
jeunes.
De la même
façon, on peut avoir un projet de loi fort intéressant, bien documenté, bien expliqué
sur la montée des discours haineux, ça n'a pas un grand rapport avec la
question de la laïcité, ou, en tout cas, il faut chercher, là. Autrement dit, ce qui a un peu, je pense, confondu bien des gens, c'est qu'on
présente tout ça le même jour, avec un plan de lutte à la radicalisation aussi, qui, lui, est
présenté à Montréal, pendant que le reste se passe à Québec. Ça n'est pas clair, Mme la Présidente, quels sont les objectifs
véritablement poursuivis par le projet de loi n° 59. Moi, je pense que
ça, on a besoin de le savoir.
Après, on
entre dans : si l'objectif; si l'objectif, et la ministre l'a quand même
exprimé l'autre jour, c'est de contrer des
manifestations de haine, d'intolérance, des manifestations graves, là, qui
portent atteinte à la sécurité des personnes, qui portent... à leur sécurité, je ne veux pas juste dire des questions
de vie ou de mort... Quand on parle de sécurité, c'est de se sentir bien, de se sentir en paix, dans un
Québec paisible, démocratique, où les opinions s'expriment, mais paisible.
S'il y a des gens et si c'est démontré qu'à
l'heure actuelle il y a des formes de montée d'intolérance, de xénophobie, de
discours haineux — à définir, «discours haineux» — un projet de loi peut être intéressant s'il
nous donne des outils efficaces, des
outils supplémentaires à ce qu'on a déjà dans le Code criminel. Là où je pense
qu'on a besoin d'une démonstration additionnelle,
c'est... beaucoup de gens demandent : Mais pourquoi une loi civile au
Québec et pourquoi tout ce processus mis
en branle avec la Commission des droits de la personne alors qu'on a déjà le
Code criminel? La ministre devra répondre à cette question.
De plus, et
je termine là-dessus, il y a beaucoup d'irritants dans la première partie du
projet de loi n° 59, et des irritants
sérieux. La fameuse liste : alors, j'espère un amendement qui va la faire
disparaître. Comment on travaille avec les jeunes, dans les écoles, qui
ne sont pas majeurs puis qui peuvent déraper à certains moments? Des
établissements viennent nous dire :
Laissez-nous travailler, on est capables. Est-ce qu'on est capables d'entendre
ça? Qu'est-ce que ça veut dire, la
sécurité morale des jeunes? Ça n'est pas clair. La contrainte excessive. Est-ce
qu'on donnera à la Commission des droits de la personne des moyens
d'agir?
Bref,
beaucoup de questions actuellement sans réponse et, pour l'instant, comme la
question, c'est la motion sur la scission, j'annonce que nous allons
voter pour, réservant tout le reste des débats pour l'ensemble de l'oeuvre.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de
Gouin. Et, toujours dans le cadre du
débat restreint sur cette motion de scission du député de Jonquière, je vais
céder la parole à M. le député de Rosemont.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
Merci, Mme la Présidente. D'abord, j'aurais une question pour vous. Est-ce qu'à
votre avis il y a d'autres intervenants d'autres partis?
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je pense qu'à ce point-ci je vais vous demander d'intervenir, puis on verra après la répartition du temps s'il reste du
temps des autres formations politiques. Alors, la parole est à vous, M. le
député.
M. Lisée : Très bien. Merci,
Mme la Présidente.
Donc, la
présidence a jugé recevable la demande de la députée de Taschereau, leader
adjointe du gouvernement de
l'opposition officielle, de scinder. Alors, pourquoi c'est important de
scinder? Parce qu'il y a deux parties qui sont très distinctes, donc, la présidence l'a reconnu :
une partie qui va directement sur les questions des discours haineux et de la
liberté d'expression et qui a suscité une
controverse considérable depuis le dépôt du projet de loi et une autre partie
sur les mariages forcés, sur les
crimes dits d'honneur et sur la sécurité morale des étudiants, qui soulève des
questions, mais, enfin, qui est
moins... moins mise à mal et dont la pertinence est davantage reconnue par la
plupart des intervenants. Et donc de
scinder ce projet, évidemment, c'est que nous, de l'opposition officielle, nous
aimerions que le projet qui porte sur les mariages forcés et les autres aspects soit suffisamment amélioré pour
qu'on puisse y consentir, mais, sur la première partie, on ne voit
vraiment pas, à l'heure actuelle, comment on pourrait y consentir.
Alors, sur
des questions comme celles-là, Mme la Présidente, c'est important que
l'Assemblée nationale parle de la façon la plus forte possible. Alors,
c'est dans le but d'avoir une législation qui aurait l'appui de la majorité et
de l'opposition officielle que nous offrons
au gouvernement de scinder en deux son projet, de façon à ce qu'une partie du
projet puisse avoir un assentiment plus
large. Je pense que c'est dans un esprit constructif. Sinon, dans les
dispositions que nous avons en ce moment, nous serons contraints de
voter contre le projet qui serait non scindé.
Alors,
pourquoi est-ce que la première partie sur les discours haineux est si
difficile? Pourquoi est-ce que... Ça part
d'une bonne intention, bien sûr. Et le collègue, tout à l'heure, disait :
Bon, bien, on n'aime pas ça que des gens viennent faire des prêches, des discours qui sont
discriminatoires, qui sont dérangeants, qui remettent en cause plusieurs de nos
valeurs, hein, c'est d'ailleurs une partie
de l'argumentation de la CAQ, mais en même temps il y a la question de la
liberté d'expression. Alors, où tracer la ligne?
Moi, je n'ai
pas vu de texte plus éclairant là-dessus que celui que nous a déposé Me Julius
Grey, bien connu au Québec comme
étant le défenseur des libertés d'expression, le défenseur des accommodements
raisonnables, le défenseur d'énormément
de causes qui parfois sont sujettes à controverse et qui était quelqu'un qui
était contre notre proposition de
charte des valeurs, et Me Julie Latour, ancienne bâtonnière de
Montréal, qui, elle, était favorable à la charte des valeurs. Ils se sont mis ensemble. Ils disent : Bien,
nous, là, qui étions des deux côtés d'un débat important sur l'identité et les
valeurs québécoises, on est ensemble pour dire que ce projet de loi ne
devrait pas exister.
Et pourquoi
disent-ils cela? Je vais les citer longuement, parce que je ne pense pas qu'on
puisse faire mieux que ce qu'ils ont indiqué. Alors, je les cite :
«Nous estimons que le projet de loi n° 59 générerait des entraves majeures
et injustifiées à la liberté d'expression de tous les citoyens du Québec et à
la liberté académique. Loin de favoriser le vivre-ensemble
et la cohésion sociale, nous croyons que les dispositions proposées
risqueraient de créer un climat social de suspicion, aux effets
délétères.
«En cette époque
d'austérité économique étatique, où d'importants programmes sociaux sont
supprimés ou significativement réduits,
l'idée que des deniers publics soient investis pour que la commission des
droits de la personne et de la jeunesse se dote d'une brigade
d'effectifs pour recevoir des dénonciations anonymes, avant même la supposée diffusion d'un discours, pour créer un
"comité des dénonciations" et tenir une liste à jour sur son site
Internet des coupables qui auraient fait l'objet d'une décision à leur
encontre, nous apparaît totalement inconciliable avec les assises d'une société libre et démocratique et nous heurte
profondément.» Alors, les mots sont forts, les mots sont forts, mais ils
s'appuient sur la proposition.
Ils
continuent : «Nous sommes également très inquiets de constater les
atteintes potentielles à la liberté académique qui y sont instaurées avec
l'avènement d'un pouvoir unilatéral et non balisé pour le ministre de
l'Éducation d'"enquêter — c'est ce que dit la loi, hein, le
projet — sur tout
comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique
ou morale des élèves".» Fin de citation. «Alors que nous célébrons avec une fierté légitime les 50 ans de la Révolution tranquille,
verrons-nous ressurgir l'index et la censure dans nos établissements scolaires afin de protéger une notion aussi floue et
tendancieuse que celle de la "sécurité morale" des élèves?
• (12 h 40) •
«Nous sommes
d'avis qu'il n'est pas souhaitable ni autrement requis, aux plans politique
et juridique, d'introduire la
prohibition de tenir ou diffuser un discours haineux ou incitant à la violence, pour l'un des motifs visés à
l'article 10 de la charte, en tant que principe juridique fondamental au sein de la constitution matérielle du Québec. Cet enchâssement
proposé ne répond à aucune nécessité juridique et n'est aucunement étayé au
plan factuel.»
Et là ils
introduisent une notion très importante — c'est
comme si on était dans une autre zone temporelle que le reste du Canada — sur
le débat sur les discours haineux. Alors, ils signalent : «Alors que le
législateur fédéral a abrogé en juin
2013 l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la
personne, relié aux discours haineux, [...]nous estimons que le projet
de loi n° 59 est présenté à contretemps, dans un contexte où de telles
dispositions, et la façon dont les institutions
canadiennes des droits de la personne traitent les plaintes anti-haine, sont
fortement remises en question à travers le pays.»
Alors, ce
qu'il nous dit, c'est que l'État actuel de la législation fédérale et la façon
dont les commissions des droits de la
personne, dans chacune des provinces, traitent la question du discours haineux
par rapport à la liberté d'expression, est en redéfinition. Il y a des
problèmes avec la façon dont on détaille les discours haineux par rapport à...
il n'y a pas de problème sur les
discours qui incitent à la violence ou qui appellent à la violence où, là, le
consensus est total. Ils disent :
Bon, on est en train de se reposer la question :
Est-ce qu'on est allés trop loin? Alors, ils disent : En ce moment, on est
en train d'aller dans le sens inverse de la discussion canadienne.
Vous voulez intervenir, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député. Je vais demander aux membres
de cette Assemblée, si vous avez des
discussions à avoir, peut-être de les avoir à l'extérieur, puisque la seule personne
qui a la parole en ce moment, c'est M. le député de Rosemont, puis on
aimerait l'entendre. Alors, merci. Merci.
D'ailleurs, je voudrais indiquer, pendant que je
suis debout, qu'il vous reste un temps de parole d'à peu près 10 minutes.
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Oui. Merci.
M. Lisée : Merci,
Mme la Présidente. Je sais que
certains de mes commentaires suscitent le débat, et c'est sain, le
débat. J'admets la liberté d'expression, mais chacun son tour, chacun son tour.
Alors donc,
je citais ce document très éclairant de Me Grey et Me Latour, d'abord
sur la liberté d'expression : «La
liberté d'expression est une source essentielle pour irriguer la démocratie. Chèrement acquise à travers l'histoire, elle peut être définie comme la
"liberté mère", car elle incarne la faculté pour chacun de formuler
une idée et de s'exprimer librement, ce qui distingue l'être humain.»
Citation :
«La liberté d'expression, qui inclut la liberté de s'exprimer, de publier,
d'informer, de manifester, de débattre,
est absolument fondamentale dans toute société
prétendant protéger les droits de l'homme. Sans liberté d'expression, il
ne peut y avoir de liberté d'opinion. L'une et l'autre font partie des libertés
de la pensée.
«Paradoxalement,
la liberté d'expression est à la fois la plus célébrée et la plus honnie des
libertés fondamentales. Alors qu'on
ne lui connaît aucun opposant au plan conceptuel, voilà qu'elle doit
constamment essuyer le feu nourri des critiques
et des tentatives de l'éradiquer au quotidien. La situation
semble toujours différente dans les cas qui soulèvent les
passions.
«Dans
l'affaire R. c. Guignard — en
2002 — [...] le juge Louis LeBel écrivait ce qui suit : "Notre cour attache
une importance particulière à la liberté
d'expression. Depuis l'entrée en
vigueur de la charte — canadienne
des droits — elle
a souligné à maintes reprises l'importance sociétale de la liberté d'expression et sa
position privilégiée dans le droit constitutionnel canadien. [Cette
liberté] protège non seulement les opinions acceptées, mais aussi celles qui contestent et parfois dérangent"». C'est ça,
l'idée. Les banalités n'ont pas besoin d'être défendues. C'est lorsqu'on
dérange que la liberté d'expression prend tout son sens.
«Dans
l'affaire Montréal[...] c. Cabaret Sex Appeal...» Hein, toutes ces questions
de pornographie et d'érotisme qui nous ont occupés pendant les années
70, 80, ça a été des questions liées à la liberté d'expression. Vous me
direz : Expression corporelle, mais
expression quand même. Alors, dans cette affaire, «le juge Jean-Louis
Baudouin s'inscrivait en faux contre la rectitude politique — déjà,
en 1994 — et
exprimait le fait, à l'instar de la juge [...] McLachlin dans l'affaire [...] précitée, que ce ne sont pas les
déclarations consensuelles ou doucereuses qui nécessitent la protection de
la charte, mais bien celles qui sont impopulaires et controversées — alors,
je cite le juge Baudouin :
«"Une
société libre et démocratique comme la
nôtre doit nécessairement faire preuve d'un haut degré de tolérance pour l'expression de pensées, d'opinions,
d'attitudes ou d'actions qui, non seulement ne font pas l'unanimité ou ne
rallient pas les vues de la majorité des citoyens, mais encore peuvent
être dérangeantes, choquantes ou même blessantes pour certaines personnes ou pour certains groupes — certains groupes. La liberté d'expression ne
doit pas être couchée dans le lit de Procuste du ΄political correctness΄. Ce
n'est que dans l'hypothèse d'abus clairs et donc de dangers pour le
caractère libre et démocratique de la société, qu'au nom de la
protection de certaines valeurs fondamentales, alors non négociables, on
peut imposer l'intervention légitime de la loi."»
Et
c'est là toute la question : Quel est ce danger? À partir de quel moment
on dit : Le danger est tellement grand que nous allons faire une
limite raisonnable à la liberté d'expression? Et c'est là où est le débat en ce
moment, parce qu'il y a eu tout ce débat sur des discours haineux.
Par
exemple, au Canada, on a décidé, pendant un certain temps, qu'il était illégal
de dire que l'Holocauste n'a jamais
eu lieu. C'était illégal. On ne pouvait pas le dire publiquement. Bien,
évidemment, l'Holocauste a déjà eu lieu. Évidemment, c'est une bêtise de
dire qu'il n'a pas eu lieu. Mais pourquoi est-ce que ça devrait être illégal de
le dire? Pourquoi? Parce que c'est une
grande question. Dans certains pays comme la France, c'est illégal de le dire.
Bien, il y a des gens qui
disent : Bien non! La meilleure façon de faire front contre des idées
absurdes, c'est de leur opposer des idées non absurdes dans le débat public. Et qu'il y a un genre de contresens à
l'interdiction de propos choquants, c'est qu'on en fait le fruit défendu. Et le fruit défendu est
toujours plus tentant que le fruit qui est en distribution libre. Mais là on
peut dire : Ce fruit est pourri. Il y en a d'autres qui sont
meilleurs.
Alors,
c'est un peu la discussion, donc, qui est en cours en ce moment parmi des
juristes canadiens, de dire : Bien, écoutez, il faut bien tracer la ligne entre ce qui devrait être interdit
et permis, et cette ligne-là... Justement, dans le rapport du juriste Richard Moon de 2013, qui a conduit à
ce que la législation fédérale soit relaxée sur certaines de ces dispositions,
il disait très clairement qu'il faut laisser au Code criminel la responsabilité
de s'attaquer à des propos qui — et c'est en anglais — «advocates,
justifies or threatens violence», c'est-à-dire qui fait la promotion, qui
justifie ou qui menace la violence.
Alors, dès qu'on s'approche de la violence, donc, il y a un danger qui est
réel, et là on peut intervenir pour interdire ou sanctionner le propos qui non seulement est désagréable,
discriminatoire et haineux, mais qui est à l'orée, à l'aube de la
violence elle-même.
Alors,
les juristes, sachant que ce débat a cours et sachant que la Commission des
droits de la personne et de la jeunesse du Québec est bien au courant de
l'état de ce débat, sont très surpris que la commission recommande au gouvernement et que le gouvernement reprenne à son
compte un déploiement législatif qui excède largement ce qui existe en ce moment ailleurs au Canada sur l'encadrement
du discours haineux et qui va à contresens du débat canadien sur le discours haineux. Alors, ce sont des raisons qui
motivent... nous, de l'opposition officielle, notre volonté de scinder les
deux pour faire en sorte, nous l'espérons, que cette initiative mal avisée ne
se traduise pas par une législation.
Mais
ce qui est intéressant, c'est que les juristes se disent : Mais d'où vient
la nécessité? Comment l'idée est venue à la Commission des droits de la
personne, et à la ministre de la Justice, et au gouvernement de proposer ça?
Alors, la commission répond en disant que...
en décembre 2014, donc, proposait d'ajouter cette disposition en
affirmant — et là on
cite la commission : «...la disposition
proposée ne vise aucunement à limiter la liberté d'expression, ni à empêcher
l'expression de quelques critiques que ce soit.» Alors, pourquoi nier
l'évidence?
Plus
loin, au sein de cette même lettre, la commission ne cite qu'un seul exemple
passé où elle n'a pas pu agir avec
ses droits actuels et qui pourrait justifier de lui en donner de nouveaux. La
commission dit : «Par exemple, au milieu des années 90, elle n'a pas eu la capacité de traiter la plainte d'une
personne dénonçant les gestes haineux de membres de groupes néonazis.»
Une fois. Pour le reste, elle ne s'appuie que sur des exemples hypothétiques.
Où
est donc l'objectif urgent et réel requérant de légiférer? S'il y avait, dans
le cas de cette plainte dont on ne connaît pas les détails, un danger pour la personne, c'est le 9-1-1 qu'il
fallait appeler, le 9-1-1. Ce n'est pas la Commission des droits de la
personne. Si la personne se sentait intimidée par un groupe néonazi, il faut
agir immédiatement.
Alors,
les juristes Grey et Latour disent : «En définitive, on ne sait pas contre
quel soi-disant péril les dispositions du
projet de loi n° 59 veulent nous protéger, ce qui est en soi inquiétant
quant aux assises de la législation qui risque de faire boomerang.»
• (12 h 50) •
Alors,
on le sait, à quoi ça voulait
s'attaquer. Ça voulait s'attaquer au processus de radicalisation en cours dans
la société québécoise comme dans toutes les autres sociétés mondiales en ce
moment qui fait en sorte que de jeunes Québécois, de jeunes Montréalais, en l'espace de quelques
mois, deviennent des djihadistes. C'est ça, le problème. Alors, ce
n'est pas un problème de discours haineux, c'est un problème de continuum,
d'embrigadement, d'aliénation, de radicalisation
et ensuite de passage à l'acte. Alors, de
toute évidence, ces propositions-là ne satisfont pas l'objectif que nous avons de traiter correctement
cette radicalisation-là, elles créent plus de problèmes. Et en fait un autre de
leurs arguments, c'est de dire :
Combien de plaintes anonymes aurons-nous sur le discours haineux, sur le
blasphème? Et nous avons eu des imams
qui sont venus nous dire : Bien, nous, on est d'accord,
parce qu'il y a des gens qui blasphèment, et donc on
va se mettre à déposer des plaintes contre le blasphème. Mais ce n'est pas ça,
l'idée, là. L'idée, c'est de dire justement aux jeunes Québécois : La liberté
d'expression, elle est plus importante que ce que des leaders religieux peuvent
vous en dire, alors que là on ouvre en fait
le champ pour que des leaders religieux se mettent à se plaindre qu'il y a
des gens qui font des blasphèmes.
Alors,
c'est pourquoi je plaide pour la scission, pour faire en sorte d'éviter au gouvernement
de devoir avoir l'opposition
de l'opposition officielle sur l'ensemble du projet
de loi. Il y a
une partie du projet de loi qu'on peut sauver. Celui-là, il n'est pas
sauvable, il devrait être retiré. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Rosemont. Alors, y
a-t-il d'autres interventions
sur ce débat restreint? M. le député de Rousseau, il n'y a plus de temps
imparti.
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : C'est-à-dire qu'on n'a pas encore...
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Un instant. Alors, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui.
Juste pour éclairer un petit peu, je peux vous dire, Mme la Présidente, que nous allons avoir une intervenante, mais elle ne pourra pas
être disponible pour tout de suite. Alors, nous réservons le droit d'appeler
l'intervenante cet après-midi, quand le débat va continuer.
Cependant,
vous savez bien, Mme la Présidente, la CAQ n'aura pas d'autre intervenant. Alors, je
vous invite, si nécessaire, à
répartir le temps de la Coalition
avenir Québec, qui nous a annoncé
qu'ils n'auront pas d'autre intervenant.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le leader
adjoint. Alors, est-ce que c'est le cas? Oui, c'est le cas.
Alors,
il reste quelques minutes avant la suspension de ce débat restreint, je ne sais
pas si vous voulez débuter votre
intervention immédiatement ou peut-être attendre... Écoutez, il reste six minutes,
c'est comme vous voulez. Oui? Alors, je vous cède la parole, M. le
député de Rousseau.
Mme
Maltais :
...vous poser une question?
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Oui, allez-y.
Mme
Maltais :
On voudrait connaître quel est le temps disponible puisqu'il n'y a pas
d'intervenant.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Oui. Il reste 8 min 40 s.
Mme
Maltais :
Avec le temps de la...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Du temps de la CAQ qui a été
réparti. Alors, M. le député de Rousseau dispose en ce moment...
Mme
Maltais :
Huit minutes. Et de l'autre côté?
M.
Sklavounos : ...un autre intervenant, comme j'ai indiqué à
Mme la présidente, mais cet après-midi, pour la continuation.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, pour ce matin, on peut
poursuivre avec l'intervention de M. le député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : Bien, écoutez,
Mme la Présidente, ça me fait plaisir d'intervenir sur cette motion
de scission qui a été déposée par le député de Jonquière, si je ne
m'abuse, motion tout à fait appropriée dans le contexte puisque le projet de loi n° 59, tel que présentement rédigé, comporte deux
parties bien distinctes, ce qui a été d'ailleurs reconnu par la présidence. Et, tel que l'a
été dit par mes collègues, les deux parties ne sont pas d'égale qualité. La
première partie portant sur le discours
haineux et les discours incitant à la violence est une partie qui, à notre avis, pose problème, avec laquelle
nous sommes profondément inconfortables, alors que la deuxième partie, elle, du
projet de loi, qui, elle, porte sur différentes mesures, différentes modifications de manière à
protéger les personnes, cette deuxième partie, bien qu'elle ne soit pas, à ce jour, parfaite, nous la croyons
améliorable, en tout cas suffisamment améliorable pour qu'un jour nous
puissions envisager de voter en faveur,
alors ce qui fait, Mme la Présidente, dans ce contexte, que nous croyons qu'il est
tout à fait judicieux... qu'il serait judicieux de scinder le projet de loi.
Dans sa décision de
recevoir la motion de scission du député de Jonquière, la présidence nous
rappelait qu'un certain nombre de critères
ou de principes guide la présidence dans l'établissement de la
recevabilité d'une motion de cette
nature. Et, tout d'abord, il fallait qu'il y ait plus que deux
principes... plus qu'un principe, pardon, et il fallait que les projets
de loi résultant de la scission soient à la fois cohérents, complets et qu'ils
puissent vivre indépendamment l'un de l'autre.
Et
la présidence, dans sa décision, a été extrêmement claire à ce sujet. Après avoir passé en revue
chacun de ces critères-là, la présidence
nous dit : Effectivement, la motion du député de Jonquière
est recevable parce qu'effectivement
les deux projets de loi qui résulteraient de
la scission seraient des projets de loi cohérents, autosuffisants, complets,
pouvant vivre indépendamment l'un de l'autre.
Or, Mme la Présidente, à partir du moment où tel
est le cas, à partir du moment où tel est le cas et dans la perspective où on doit avoir ici des débats les
plus intelligents possible, les plus sereins possible, des débats le plus
ordonnés possible, moi, j'invite le gouvernement, j'invite les députés
des banquettes gouvernementales à appuyer la motion de scission. De cela résultera un débat plus éclairé, un débat plus
intelligent et surtout, comme le mentionnait, juste avant moi, mon collègue de Rosemont, ça permettra aux
députés de l'opposition officielle, peut-être à d'autres députés de d'autres
formations politiques... ça nous permettra
d'appuyer la partie du projet de loi qui porte sur la protection des personnes
et sur laquelle, moi, je pense,
effectivement, nous devons parler d'une voix forte, d'une voix unanime si c'est
possible. Alors, j'invite le
gouvernement à y réfléchir sérieusement. Je sais que ce n'est pas la pratique
habituelle que de scinder des projets
de loi pour un gouvernement, mais, en même temps, l'importance du sujet fait en
sorte qu'on doit faire exception.
J'aimerais aussi rappeler, Mme la
Présidente — puis
j'ouvre une légère parenthèse, mais je pense que c'est important — j'aimerais
rappeler qu'on a assisté à une certaine dérive ces dernières années. Il y a eu,
évidemment, le projet de loi petit
mammouth, dont vous vous rappellerez, le projet de loi n° 28, qui était en
fait une dérive importante, inspiré des pratiques législatives du
gouvernement conservateur de M. Harper. De telles pratiques législatives ne
sont pas désirables, je pense que vous en
conviendrez avec moi. On a intérêt à avoir des débats éclairés sur chacun des
aspects des projets de loi. Et de
regrouper, à l'intérieur d'un même projet de loi, des principes différents, des
dispositions qui portent sur des principes différents, ça n'est pas
souhaitable.
Alors, on a
eu la dérive ici avec le projet de loi n° 28. Bien sûr, ici, l'ampleur du
projet de loi n'est pas la même, je suis prêt à en convenir. Bien sûr,
dans le cas du projet de loi n° 59, on parle d'un projet de loi de taille
raisonnable; il n'en demeure pas moins qu'on
mélange, qu'on combine, qu'on joint des principes qui sont différents. Et
surtout il n'y a pas, comme je vous
l'ai dit tout à l'heure, de confort, de notre côté, quant à la première partie,
dont on croit qu'il n'est pas
possible de l'améliorer, on pense que ça doit être mis au rebut et puis que le
gouvernement doit refaire ses devoirs sur cette première partie.
Je peux aller
sur le fond, si vous le voulez, parce que je vois que le temps passe et je...
enfin, je n'aurai pas beaucoup de temps pour aller sur le fond, mais je
reviendrais peut-être plus tard. Tout simplement vous annoncer puis vous
redire les inconforts qu'on a quant à la première partie du projet de loi qui
porte sur les discours haineux. Mon collègue
de Rosemont rappelait la difficulté qu'il y a à tracer la ligne, à établir ce
qu'est un discours haineux puis ce qui n'en est pas. C'est un concept,
évidemment, qui a évolué à travers le temps et puis, Mme la Présidente, je ne
vous apprendrai rien en vous disant qu'il va
continuer à évoluer. Les normes sociales, le caractère acceptable de certains
propos, ça change à travers le temps,
et, d'une certaine façon, c'est tout à fait normal. Mais on ne peut pas créer
un tribunal des idées, un tribunal du
bon goût sans avoir établi au préalable, au moins pour aujourd'hui, sans avoir
établi au préalable ce qui est un
discours haineux, ce qui est de bon goût, ce qui est acceptable et ce qui ne
l'est pas. Présentement, le projet de loi est tout à fait inadéquat à
cet égard.
Il y a aussi
la question de l'opportunité d'aller de l'avant avec cette partie I du projet
de loi n° 59, qui pose problème puisqu'on se demande encore à quoi
ça va servir que de créer une nouvelle infraction pénale alors qu'il y a
déjà...
Excusez-moi, Mme la Présidente.
• (13 heures) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, M. le député, compte tenu de l'heure, je dois interrompre le présent
débat. Alors, j'imagine que vous n'avez pas terminé votre intervention.
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant, là. C'est que M.
le député de Rousseau
disposait d'un temps de parole de
8 min 40 s, nous en sommes à 6 min 24 s. On nous
demande de poursuivre le débat encore deux minutes. Alors, oui, c'est
accepté? Vous pouvez poursuivre, M. le député.
M. Marceau : Merci aux collègues. Écoutez,
de toute façon, ce ne sera pas... Écoutez, je vais simplement
rappeler les raisons pour lesquelles
nous sommes inconfortables quant à la première partie du projet de loi n° 59. Et, sur le fond des choses, c'est la
raison pour laquelle on veut scinder.
Je rappelais
aussi, donc, qu'on a encore... enfin, quant à moi, en tout cas, je n'ai pas bien compris les raisons pour lesquelles on veut
créer une infraction pénale alors qu'il existe déjà une infraction criminelle
qui est interprétée par la cour, enfin, qui
est du ressort de la Cour supérieure. La Cour supérieure, à ce jour, a été
capable de faire le travail, alors on se
demande, encore une fois, les raisons pour lesquelles de l'autre côté on
a envisagé la création de cette infraction pénale, qui est essentiellement
calquée sur une infraction criminelle existante.
Il y a
aussi la question de la liste, là. J'entendais tout à l'heure... J'ai entendu mes collègues. Je crois que certainement, du côté des
oppositions, ça pose certainement un problème. Mme la
Présidente, pour empêcher les gens de
tenir des discours haineux, on
voudrait que la population puisse haïr des personnes dont les noms
apparaîtraient sur une liste, c'est un peu ça, là, qui est l'objet de cette liste. Je veux dire, quant à moi,
j'ai l'impression qu'on retourne à la loi du Far West. Je suis très, très
inconfortable avec une telle initiative et je m'explique très, très mal qu'on
ait pu envisager ça de l'autre côté. Cela étant, je ne comprends pas les
motivations, peut-être qu'on arriverait à me l'expliquer, mais à ce jour je
suis très, très inconfortable.
Alors, Mme la Présidente, pour moi, ce
serait impensable de pouvoir voter pour un projet de loi contenant ces dispositions-là, et donc je pense que, du côté du
gouvernement, encore une fois, de manière à faire en sorte que l'opposition
officielle puisse certainement appuyer, dans
la mesure où on apportera les changements adéquats, la deuxième partie du
projet de loi, j'invite le gouvernement à accepter la scission du projet de
loi, je crois que c'est à l'avantage de tous. Quant
à la première partie, de toute évidence, ni dans la société civile ni ici, au
Parlement, où c'est important d'avoir un appui important des parlementaires, il n'y a d'appui pour cette
partie I du projet de loi, alors je crois que le gouvernement a
intérêt à revoir cette partie.
Alors, Mme la
Présidente, merci pour votre écoute.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Rousseau.
Alors,
compte tenu de l'heure et afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une
affaire inscrite par les députés de l'opposition, le présent débat sur la motion de
scission présentée dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi
n° 59 est ajourné, et je vais
maintenant... suspendu puisqu'on va probablement pouvoir poursuivre cet
après-midi après le vote.
Alors, je vais
suspendre les travaux, pour le moment, jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à
13 h 3)
(Reprise à 15 h 5)
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, bon après-midi. Venez prendre place, chers collègues.
Affaires inscrites par les
députés de l'opposition
Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement
que la nomination du Commissaire à la lutte contre la
corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres
Et,
comme c'est prévu à l'article 43 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de
l'opposition, M. le
député de Matane-Matapédia présente la motion suivante :
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement que la nomination du Commissaire
à la lutte contre la corruption soit approuvée par les deux tiers de ses
membres.»
Je
vous informe que, comme d'habitude, là, il faut répartir le temps, parce que
c'est une motion limitée dans le temps.
Donc, 10 minutes sont réservées comme d'habitude,
51 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant
le gouvernement, 30 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, 21 minutes au deuxième groupe
d'opposition, puis sept minutes sont
allouées aux députés indépendants,
sous réserve de deux, max, par personne et la députée d'Arthabaska. Dans
le cadre du temps non utilisé, vous savez ce qui se passe, on verra ça tantôt.
Alors,
je cède immédiatement la parole à M. le député de Matane pour la présentation
de sa motion. M. le député de Matane, à vous.
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Non, je viens de la lire. Oui.
M.
Sklavounos : Avec
votre permission, comme je ne voudrais pas interrompre mon collègue qui prendra
la parole, est-ce que vous pourriez vérifier le quorum? Il me semble
qu'on n'est pas en situation.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Vous avez raison. Je savais en commençant qu'on ne l'a
pas...
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Juste une minute. Et on a toujours quorum s'il
n'est pas soulevé, sérieusement, parce
que... Mais là vous venez de vérifier le quorum, et je sais... Un, deux, trois,
quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, 10, 11. Il en manque un, à ma
connaissance, parce que c'est 12 ou 13, là...
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, c'est ça, il en manque un, on est 12.
Alors, qu'on appelle les députés, parce qu'on n'a pas quorum.
•
(
15 h 6
—
15 h 7)
•
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, oui, un instant, on commence, mais
on a quorum. Effectivement, si j'avais
eu... Je n'ai pas eu le temps de prendre connaissance, là, depuis qu'on
a perdu un collègue... Le quorum est 12. Alors, on avait
quorum, mais ce n'est pas grave, je ne le savais pas. Ça fait que le quorum est
12, j'en informe cette Assemblée.
Alors, M. le député de Matane-Matapédia, à vous
la parole pour votre intervention. À vous.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : Merci,
M. le Président. Cet après-midi,
un débat important pour la démocratie, pour nos institutions, pour leur indépendance.
Lundi
dernier, on a eu l'occasion d'accueillir, à la Commission des institutions,
le commissaire de la lutte à la
criminalité, l'Unité permanente
anticorruption, l'UPAC, et on doit ça, entre autres, au député de Chomedey qui
a un vif intérêt sur ces questions,
qui nous a permis d'accueillir Robert Lafrenière. Ce n'était pas prématuré
comme rencontre. C'est la première fois qu'on le rencontre depuis 2011
pour lui poser des questions, et on en a plusieurs.
D'abord, il faut savoir que la lutte à la
corruption, ça a toujours été un cheval de bataille important pour nous. On a demandé la commission d'enquête sur le crime
organisé, sur la construction. On l'a demandée plusieurs fois en cette Chambre. Une des réponses du gouvernement, ça a
été la création de l'UPAC. Alors, on a nommé un policier de carrière, M. Robert Lafrenière,
ex-sous-ministre de Robert Dutil, qui a été nommé pour un mandat de cinq ans,
et ce mandat, M. le Président, qui a commencé en 2011 se termine en 2016.
Alors, il est
toujours bon de pouvoir faire un bilan puis pouvoir se questionner sur les
meilleures pratiques possible dans
une démocratie, et c'est pour ça qu'on arrive aujourd'hui avec une proposition
à l'effet que, cette importante institution, soit celle, là, de l'Unité permanente anticorruption, son commissaire
puisse être nommé dorénavant par les deux tiers de l'Assemblée nationale, deux tiers des députés,
comme c'est le cas pour d'autres institutions, comme le Directeur général
des élections, comme le Vérificateur
général. Ça nous apparaît important de faire cette proposition, d'autant plus
qu'on a du temps d'ici le mois de mars pour pouvoir l'appliquer. Alors,
c'est la proposition qu'on fait à nos collègues parlementaires et notamment au
gouvernement du Québec.
• (15 h 10) •
Présentement,
c'est le ou la titulaire du ministère de la Sécurité publique qui décide, suite
à des discussions avec un comité, de choisir le commissaire ou de le
renouveler, parce qu'on a appris lundi que le commissaire souhaitait poursuivre son travail. Et on a appris également
qu'il n'est pas en faveur de notre proposition. Lui, il préfère être nommé
par le titulaire du poste de ministre de la
Sécurité publique. Et ce qui est d'autant plus particulier, c'est qu'il demande
des pouvoirs additionnels, M. le Président.
Il demande à ce que l'UPAC devienne la police des polices, qu'elle soit
distincte de la Sûreté du Québec,
qu'elle puisse faire des enquêtes, être la seule organisation pour faire des
enquêtes en matière de corruption,
entre autres, de malversations, en haut de la Sûreté du Québec, en haut du SPVM. Jamais, si d'aventure le gouvernement décide de lui accorder ce qu'il demande, jamais une personnalité n'aura
obtenu autant de pouvoirs dans le
domaine de la police dans l'histoire du Québec. Moi, j'avais évoqué hier que,
dans le domaine de la santé, jamais un ministre n'avait eu autant de pouvoirs, c'est maintenant
acquis avec le projet de loi n° 20 qui semble se destiner vers une adoption
de la part du gouvernement, mais, avec la police, ça serait incroyable. On a
appris que ce n'était pas tellement
avancé mais que l'intention demeurait.
Alors, pourquoi
qu'on demande ça? Parce qu'on considère que l'enquêteur des enquêteurs devrait
être totalement indépendant, puis devrait avoir les coudées
franches, et ne devrait pas avoir quelconque influence ou apparence d'influence. Or, la situation actuelle,
c'est : comme il relève de la ou du ministre de la Sécurité publique,
il y a un peu un malaise. Il peut
arriver qu'il ait à enquêter sur le gouvernement en place. M. le Président, c'est le cas.
C'est le cas et c'est connu. Il y a des enquêtes qui visent des
personnes reliées au gouvernement libéral. C'est connu. L'opération Lierre, l'opération Joug — j'imagine que je n'apprends peut-être pas
grand-chose aux gens du gouvernement — bien, c'est l'UPAC qui a enquêté là-dessus, le financement des partis
politiques, entre autres. Parce qu'on sait que la commission Charbonneau
ne peut pas tout faire. L'UPAC a un rôle aussi.
Alors, il est
assez particulier que le commissaire Lafrenière, qui veut être renouvelé en
mars, il nous l'a dit, doive obtenir
cette autorisation de la part des membres du Conseil des ministres, qui
appartiennent au gouvernement libéral, qui
appartiennent au Parti libéral et où il y a des enquêtes. Vous ne trouvez pas
que c'est une situation assez particulière? Cette indépendance, elle doit être totale. Et, même si le commissaire
nous dit qu'avec une indépendance face à la SQ il serait davantage
indépendant, ça ne change pas le processus de nomination.
M. le
Président, il est vrai que nous avons des inquiétudes, des inquiétudes quant à
la proximité qui peut survenir entre
le travail de l'UPAC et entre le gouvernement libéral. Je vais prendre deux
exemples. J'ai vu, moi, il y a quelques semaines, le commissaire de l'UPAC, M. Lafrenière, côte à côte avec le
président du Conseil du trésor pour une conférence portant sur les enquêtes dans le domaine
informatique. Donc, le commissaire de l'UPAC se retrouve avec un membre du
gouvernement qui aura à décider de son
renouvellement ou pas. Mais ce n'était pas la première fois, il l'a fait
également avec le ministère des Transports.
Puis, il nous
dit : Bien, j'étais heureux parce qu'il venait appuyer mes efforts. Bien,
je lui dis : Vous auriez pu faire
votre conférence de presse, et après les ministres auraient pu faire un
communiqué ou un point de presse pour dire : Bien, ça va dans le bon sens, on est heureux.
Alors, j'ai posé la question : Pourquoi, c'est arrivé, ça? Ah! bien, ils
me l'ont demandé. Donc, le président du Conseil du trésor a demandé au
commissaire de l'UPAC de venir s'asseoir avec lui, d'établir, là, que sa crédibilité était associée à celle du gouvernement
puis qu'on allait de l'avant. Bien, moi, j'ai dit au commissaire de
l'UPAC que c'était une erreur, que ça ne se faisait pas.
Moi, je n'ai
pas souvenir que le député de Verchères, alors ministre, ait fait un point de
presse en compagnie du commissaire de
l'UPAC. Et, comme le commissaire était nommé pour cinq ans, donc de 2011 à
2016, on a travaillé avec lui, ce qui ne nous empêche pas de faire un
certain nombre d'observations pour s'assurer que cette institution est
parfaitement indépendante.
Ce n'est pas
la première fois qu'on demande ça. On l'a demandé pour la Direction de la
Sûreté du Québec pour les mêmes
raisons. Et, même si la ministre s'était engagée à avoir un processus plus
transparent qui faisait en sorte de faire appel
aux parlementaires, moi, je n'ai jamais été questionné là-dessus. Finalement,
ça a été un comité et ça a été M. Martin
Prud'homme qui a été choisi. L'enjeu dans le cas de M. Prud'homme, ce n'est pas
sa personnalité. On a travaillé avec
lui puis on a été satisfaits de son travail. Moi, je me souviens, comme
ministre responsable de la région, de m'être rendu avec le ministre à L'Isle-Verte, puis on a travaillé avec lui,
puis on l'a félicité. Ça a été quelqu'un d'exceptionnel à la Sûreté du Québec. Même chose pour
Lac-Mégantic. Ces crises-là, on a réussi à bien les gérer de notre côté
notamment grâce à une belle
collaboration. Et je pense que Martin Prud'homme est une de ces raisons-là pour
laquelle on a bien fait. Alors, Martin Prud'homme, on a travaillé avec
lui.
Le
commissaire de l'UPAC, il a un travail vraiment essentiel dans une démocratie.
On l'a toujours dit, du côté du gouvernement, qu'il n'y avait pas d'impunité,
que toute personne qui aurait commis des gestes qu'elle ne devrait pas commettre n'est pas au-dessus des lois et pourrait
être accusée, voire condamnée. Bien, alors, c'est arrivé dans bien des cas.
C'est arrivé dans le cas de fonctionnaires.
Il y a même un fonctionnaire, dans le domaine informatique, qui a été arrêté
trois fois, M. le Président. C'est arrivé
dans le domaine municipal, dans plusieurs municipalités du Québec, où il y a eu
des réussites. Il y a eu un
échec : Saint-Constant. Mais, la plupart des cas, il y a eu des
accusations qui ont été portées, et puis il y a eu des condamnations, et puis il y a un travail qui a été fait
partout sur le territoire du Québec, on a tous entendu parler de
municipalités qui ont été visitées.
Mais le
public a des attentes importantes. Il y a des révélations sous serment qui ont
été faites à la commission Charbonneau
concernant le financement des partis politiques. Et il est permis de croire que
ça touche des membres de la classe politique provinciale, l'Assemblée
nationale, les formations politiques représentées à l'Assemblée nationale. Vous voyez bien que, comme dans le cas de la
commission d'enquête sur la construction, on n'a rien à se reprocher, on
est prêts à faire l'exercice pour tout le monde, on est prêts à aller de
l'avant.
Alors, les
gens qui ne sont pas... qui n'ont pas comparu devant la commission
Charbonneau — puis on
aura le rapport bientôt, après les élections partielles — bien,
on se dit : Peut-être que l'UPAC les a rencontrés puis peut-être que ça aurait pu nuire à des enquêtes, donc ils
vont peut-être les pogner. Puis Dieu sait que les médias nous ont fait part
d'allégations extrêmement graves! Puis les
noms sont connus. Il y a des noms de personnes clairement, clairement associés
au financement du Parti libéral de par leurs
fonctions : directeur général, entre autres, collecteurs de fonds, des
gens qui sont très près... Puis ça a
été reconnu, y compris par le gouvernement, que, si ces personnes ont mal fait,
bien, ils vont être arrêtés.
Bien là, il y
a deux ans, jour pour jour, donc lundi, à partir du moment où on a rencontré
M. Lafrenière... Je me suis
rappelé d'un texte de Brian Myles, qui n'est pas n'importe qui, qui a été
président de la fédération des journalistes du Québec et qui a indiqué que les accusations, les recherches, les
enquêtes sur le Parti libéral, il semble, ça n'avance pas. Il y a eu des choses quand même importantes. Je
vais être factuel — je vais
utiliser l'expression du député de Chomedey — il y a eu, à tout le moins, au moins une
perquisition au siège social du Parti libéral, sinon deux. Alors, il y a
des enquêtes qui se poursuivent.
Dans toute la
chaîne, il y a aussi le DPCP. Ça, c'est une autre question, on va l'aborder le
12 novembre, quand ils vont venir nous voir. Parce que l'UPAC
pourrait indiquer aussi qu'elle, elle fait son travail, mais, si le bras,
disons, juridique ne le fait pas, ce n'est
pas de sa faute. Ça, c'est un autre enjeu, que je n'aborderai pas aujourd'hui.
Mais, chose certaine, il y a là une
belle occasion d'améliorer nos institutions. On le fait régulièrement, on se
questionne sur les meilleures pratiques possible comme législateurs,
puis là on a une opportunité.
En mars, le
commissaire à la lutte à la criminalité, M. Lafrenière, bien, son mandat
viendrait à échéance, puis on sait déjà qu'il veut renouveler son mandat. Donc,
entre lundi, où il nous annonçait ça, et puis le mois de mars, bien là, le
gouvernement va évaluer son travail. Sur
quelles bases? Je ne sais pas quels sont les critères, mais il va décider si
c'est lui qui devrait être l'enquêteur des enquêteurs.
J'ai
confiance que le ministre, le gouvernement vont analyser sérieusement notre
proposition. Je suis assez convaincu, pour
avoir entendu les collègues de la CAQ, qu'ils vont nous appuyer pour les mêmes
raisons. Quant à Québec solidaire, comme
le débat de lundi, je ne le sais pas, je ne les vois pas. Mais je suis assez
convaincu que c'est susceptible d'améliorer la perception du public quant au fait qu'il n'y aura pas d'impunité.
L'avantage d'avoir une proposition qui relève de l'appui des deux tiers de l'Assemblée nationale, comme
c'est le cas d'autres institutions — je les rappelle à nouveau, Directeur général des élections, Vérificateur général — c'est que ce n'est pas seulement le
gouvernement qui décide de qui enquêtera ou pas sur son gouvernement.
Alors, moi, j'ai proposé ça à
M. Lafrenière : Vous n'aimeriez pas, vous, avoir vraiment l'assurance
que non seulement votre candidature va plaire au gouvernement en place, qui,
lorsqu'il sera réuni à huis clos en Conseil des ministres, décidera sur des critères qui ne sont pas connus... mais
qu'également il a la confiance de l'opposition du Parti québécois, de
l'opposition de la CAQ, de Québec solidaire? Il m'apparaît que c'est plein de
sens, ça a bien du sens.
Je rappelle
que les deux points de presse que M. Lafrenière a faits avec le ministre
des Transports et le président du
Conseil du trésor, bien, ça leur a fait plaisir. Ils ont demandé à
M. Lafrenière d'y aller, puis ça a fait une belle clip à la télévision puis des beaux articles dans les
journaux. Sauf que ces deux personnes-là vont être autour de la table quand
elles vont décider ou non de le renouveler.
Je trouve que c'était une imprudence à la fois de l'avoir invité, de la part
des ministres ou de leur entourage,
mais à la fois, aussi, pour M. Lafrenière, de l'avoir accepté. Ça, c'est
particulier. Ça, c'est quelque chose
que, dès que c'est arrivé, j'en ai parlé avec des collègues. Alors, c'est suite
à l'audition de M. Lafrenière qu'on a réfléchi là-dessus.
• (15 h 20) •
Je veux vous
citer Brian Myles à nouveau, qui a réécrit là-dessus dans L'Actualité le
3 novembre dernier. Et je pense
que son propos rejoint celui non seulement des analystes judiciaires, de la presse parlementaire, qui est
drôlement intéressée à savoir ce que
le gouvernement va décider sur la motion. Il dit, Myles :
«La situation n'est pas banale. L'UPAC ne traque pas les voleurs
de dépanneurs. Elle a le quasi-monopole des enquêtes sur la corruption des
titulaires de charges publiques au Québec. Depuis
plus de deux ans, l'unité enquête d'ailleurs, sans succès apparent, sur le financement illégal
du PLQ.» Brian Myles, 3 novembre. «Il
ne suffit pas d'affirmer que l'UPAC est à l'abri des pressions politiques
et que ses enquêtes ne souffrent
d'aucune ingérence. Les apparences de proximité, auxquelles le public est si
sensible, exigent la plus grande prudence.»
Qu'est-ce
que ça change pour la suite? À partir du moment où M. Lafrenière, fort de
son mandat, est capable de le présenter
devant les parlementaires, je suis convaincu qu'on saura faire les choix.
Si c'est seulement le gouvernement
qui décide, lui qui se retrouve dans une situation — puis
il n'y a personne qui va le nier — où
il y a des vérifications, des enquêtes
qui touchent le financement du Parti
libéral, il se place dans une
position où il choisit son enquêteur. Moi, je pense qu'il a à gagner à faire appel à la sagesse des parlementaires, qui sont là comme législateurs aussi pour porter des jugements
sur l'évaluation, qui vont... des personnes qui sont nommées non pas pour
n'importe quoi, là, pour être l'enquêteur en chef de la corruption au Québec.
Alors, on compte sur l'appui du gouvernement là-dessus.
Et
la question pourrait se poser sur d'autres institutions aussi. C'était une occasion manquée dans le cas de la SQ. On serait peut-être arrivé au même résultat, mais je pense
qu'il était imprudent de seulement confier ça au gouvernement. Là, on a
une autre occasion puis on a du temps pour le regarder, c'est en mars.
M. Lafrenière
nous a dit lundi qu'il était prêt à faire l'exercice chaque année, à venir nous
voir. Je trouve que c'est un gain, je
trouve ça intéressant. Il nous a appris ça, mais en même temps il dit : C'est une décision du politique. Alors, le politique, c'est notamment le gouvernement, puis, je le rappelle à chaque fois, vous en êtes
témoins, le gouvernement est
majoritaire, c'est lui qui va décider. Alors, pour les gens qui nous écoutent,
la décision qu'ils auront à prendre, le Parti
libéral, aujourd'hui, c'est : Est-ce qu'ils sont les seuls à choisir celui qui enquête
au Québec sur la corruption et la malversation, y compris sur des allégations sur
leur parti, ou ils vont décider d'avoir assez de confiance pour permettre
à l'Assemblée nationale de choisir ou de renouveler la personne
qui est une des personnes les plus clés au Québec pour s'assurer de l'intégrité de nos institutions et de notre démocratie? C'est ça, le défi qu'on a aujourd'hui, et c'est pour ça qu'on fait
une proposition constructive, qui, je l'espère, recevra
l'assentiment des parlementaires. Et je suis convaincu que le ministre,
qui est sensible à ces enjeux, aura au moins la sagesse de l'étudier comme il
faut et de nous faire part des arguments
qui, selon lui, militent en faveur ou contre, qui ne reposent pas sur, je
dirais, une négation idéologique mais sur
une volonté d'améliorer, d'améliorer nos institutions. Alors, on a une
chance unique aujourd'hui, elle est offerte au gouvernement, et on
compte sur ce dernier pour faire en sorte qu'on ressorte de ce débat, à
17 heures, grandis d'avoir amélioré une institution importante, c'est-à-dire
la lutte à la corruption. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Matane-Matapédia, de votre intervention
sur cette motion du mercredi. Je cède maintenant la parole à M. le ministre de la Sécurité publique ainsi que des Affaires
municipales et de l'Habitation. M. le ministre, à vous la parole.
M. Pierre Moreau
M.
Moreau : Merci, M. le Président. Je suis heureux de prendre la parole sur la motion du mercredi, qui
touche un enjeu lié au ministère de la Sécurité publique.
Vous
me permettrez sans aucun doute de commencer cette intervention en ayant une
pensée pour ma collègue qui présentement est en convalescence et à qui je
tiens à souhaiter de façon publique, au nom du gouvernement, et je suis
convaincu que sur cette question... au nom de l'ensemble de tous les
parlementaires, un prompt et rapide rétablissement. Nous lui souhaitons
de pouvoir revenir parmi nous rapidement.
Je
commencerai également en remerciant le premier ministre de la confiance qu'il
me manifeste en me demandant de
prendre la charge et la responsabilité de la sécurité publique, à un moment où
curieusement la question est brûlante d'actualité,
notamment en raison des événements malheureux que nous avons vécus au cours des
derniers jours. Mais il semble que ce
soit une caractéristique. Je me souviens d'avoir été assermenté à 4 heures
ministre des Transports, et, à 6 heures
le lendemain matin, il y avait un camion qui avait eu la mauvaise idée de
frapper un viaduc pour fermer l'autoroute 20.
Et
il semble que, lorsque j'arrive dans des fonctions, il y a quelque chose qui se
passe rapidement. Là, on a cette espèce
d'alerte qui a été faite et, je tiens à le dire, pour laquelle la Sûreté du Québec et l'ensemble des corps policiers ont fait un travail... font un travail remarquable pour poursuivre l'enquête
et essayer de découvrir qui serait à la base de ces menaces, qui, heureusement, heureusement pour l'instant, ne semblent pas fondées, mais il faut rassurer la population et leur dire à quel point les
forces policières sont à pied d'oeuvre pour assurer la sécurité de tous au Québec.
Ce
qui nous ramène donc à la question que soulève la motion du mercredi, à savoir
la nomination du commissaire de
l'UPAC. D'abord, il faut replacer les choses dans leur contexte. Le commissaire
de l'UPAC est nommé en vertu d'une loi
qui a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée
nationale, qui, à l'époque, était le projet de loi n° 15, la Loi
concernant la lutte contre la
corruption, qui a été présentée par notre collègue Robert Dutil, qui, à
l'époque, était ministre de la Sécurité publique.
Dans sa version de
présentation, le projet de loi n° 15 prévoyait, à l'article 5, la
nomination du commissaire à l'UPAC. Alors,
l'article 5, au dépôt du projet
de loi, se lisait ainsi : «Le
commissaire est nommé par le gouvernement, qui fixe sa rémunération, ses
avantages sociaux et ses autres conditions de travail.
«Le
mandat du commissaire est d'une durée fixe, qui ne peut excéder cinq ans. À
l'expiration de son mandat, il demeure en fonction jusqu'à ce qu'il ait
été nommé de nouveau ou remplacé.»
Et évidemment,
bien, comme tous les projets de loi, ce projet
de loi là a fait l'objet d'une commission parlementaire, de
consultations, d'étude article par article, et, lorsque les parlementaires en sont venus à
l'examen de l'article 5 sur la nomination du commissaire, je pense que le député
de Verchères, qui était à ce moment-là porte-parole de l'opposition en matière de sécurité publique, celui-ci a
proposé... a entamé une discussion avec le ministre Dutil et a fait un certain
nombre de propositions qui se sont avérées,
lors des remarques finales qui ont été faites lors de l'adoption du projet de
loi, comme un compromis qui avait été
fait par l'ensemble des parlementaires ayant participé à la commission
parlementaire dont il est question.
Alors, le texte final, par rapport au texte
déposé, est bien différent. Le texte final de l'article 5 indique :
«Le gouvernement nomme un commissaire qui
est choisi parmi une liste d'au moins trois personnes qui ont été déclarées
aptes à exercer la charge par un
comité de sélection formé pour la circonstance. Le commissaire doit notamment
satisfaire aux conditions prévues aux paragraphes 1° et 2° du
deuxième alinéa de l'article 12.
«Le
gouvernement fixe la rémunération du commissaire, ses avantages sociaux et ses
autres conditions de travail.
«Le mandat du
commissaire est d'une durée fixe, qui ne peut excéder cinq ans — et c'est un point sur lequel je reviendrai. À l'expiration de son mandat, il
demeure en fonction jusqu'à ce qu'il ait été nommé de nouveau ou remplacé.»
Et, pour ceux
qui suivent nos débats, quelles sont donc les conditions auxquelles on parle et
qu'un candidat doit respecter,
c'est-à-dire les conditions prévues aux paragraphes 1o et 2o
du deuxième alinéa de l'article 12? Bien, on dit : «Les
conditions minimales pour être embauché comme membre du personnel du
commissaire — donc
s'appliquent également à lui — [doivent demeurer] les suivantes:
«1° être de bonnes moeurs;
«2° ne pas
avoir été reconnu coupable, en quelque lieu que ce soit, d'une infraction pour
un acte ou une omission qui constitue
une infraction au Code criminel ou une infraction visée à l'article 183 de ce
code créée par l'une des lois qui y sont énumérées, ayant un lien avec
l'emploi.
«Les
exigences prévues aux paragraphes 1° et 2° du deuxième alinéa s'appliquent
également aux membres des équipes de vérification ou d'enquête désignées
par le gouvernement.»
Et, en
préparation du dossier, je me souviens d'ailleurs d'avoir lu un des
commentaires du député de Verchères à
l'époque, qui suggérait cette modification dans la procédure de nomination du
commissaire à l'UPAC, en disant s'être inspiré
de dispositions analogues que l'on retrouve dans d'autres lois du Québec pour
la nomination d'autres personnes qui occupent des fonctions non pas similaires,
mais des fonctions qui peuvent être associées à celles exercées par le
commissaire à l'UPAC.
• (15 h 30) •
Je rappelle
aussi que la loi finale, la Loi concernant la lutte contre la corruption, a été
présentée, donc, le 11 mai 2011 et qu'elle a été adoptée à l'unanimité des membres de l'Assemblée le
8 juin de la même année, donc le 8 juin 2011, ce qui en fait une loi qui est relativement récente et qui a fait l'objet d'un consensus
par l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale.
Qui d'autre a
un processus de nomination semblable? Bien, le directeur du Service de police de la ville de Montréal,
qui est nommé par le gouvernement après recommandation du conseil municipal,
qui, lui, a une procédure interne; le directeur de la Sûreté du Québec, qui est
nommé exactement de la même façon.
Alors, qu'est-ce qui explique cette demande — qui n'est pas la première — faite par le député de Matane sur cette
question-là? Qu'est-ce qui explique la
différence entre les nominations faites au deux tiers des membres de
l'Assemblée nationale et les
nominations qui sont faites sur la base d'une procédure différente pour des
gens qui occupent des fonctions aussi extrêmement importantes? Et
qu'est-ce qui assure, je dirais, l'impartialité, la marge de manoeuvre, la
sérénité nécessaire, l'indépendance, bref, requise pour exécuter la fonction?
Lorsqu'on
regarde les nominations faites par l'Assemblée nationale, on se rend compte
qu'on a la Protectrice du citoyen, le
Vérificateur général, le Commissaire au lobbyisme, etc., qui sont des fonctions
qui ne sont pas des fonctions policières
mais qui sont des fonctions d'un contrôle gouvernemental, contrôle de l'activité
gouvernementale soit dans l'adjudication
des contrats, soit dans les relations des membres du gouvernement avec les
tiers, soit encore dans la vérification et le contrôle financier, qui est un des trois rôles joués par les
législateurs en cette Chambre, c'est-à-dire contrôler les finances du
gouvernement, être des législateurs et assurer une reddition de comptes de la
part du gouvernement.
Ici, ce dont
on parle, ce n'est pas ça. On ne parle pas d'individus qui ont un lien unique
et spécifique ou direct avec l'activité gouvernementale, mais on parle
de gens et de fonctions qui s'appliquent à l'ensemble des citoyens du Québec, selon le vocable habituel voulant que
personne ne soit au-dessus des lois, les élus en font partie, évidemment,
et l'ensemble des activités non seulement du
gouvernement, mais des activités de la société sont mesurées selon la conformité par rapport à nos lois. Et les gens
dont on parle aujourd'hui... Et notamment le commissaire à l'UPAC a une marge de manoeuvre absolue, totale et nécessaire,
d'ailleurs, en fonction de sa loi, pour s'assurer du respect des lois et
aussi pour assurer le respect de cette institution et l'apparence
d'indépendance de cette institution.
L'Assemblée
nationale, en adoptant le projet de loi de façon unanime et en y insérant le
processus de nomination que l'on
connaît aujourd'hui, a donc posé un jugement sur l'indépendance que l'on veut
donner à la fonction. On peut toujours
se reposer la question sur ces questions-là. Et l'objet de mon intervention
n'est pas de faire grief au député de Matane de soulever le débat. Cependant,
l'objet de mon intervention est de dire : Dans sa forme actuelle, sur la
base du principe et de la procédure
de nomination qui est prévue à la Loi concernant la lutte contre la corruption,
on retrouve là les éléments
essentiels pour donner au commissaire l'ensemble des qualificatifs nécessaires
pour qu'il ait cette indépendance, ce recul, cette sérénité et cette
capacité d'interagir et d'exécuter correctement son mandat.
Un des
éléments — et
je vous ai fait lecture de l'article 5 tel qu'il a été adopté — un
de ces éléments-là, c'est : «Le
mandat du commissaire est d'une durée fixe, qui ne peut excéder cinq ans.»
L'existence d'un mandat à durée fixe fait
en sorte qu'il ne peut y avoir à
l'égard du commissaire une influence indue d'un tiers — et c'est ce que le principe de la loi sous-tend — d'influence indue qui empêcherait le
commissaire, à l'intérieur de son mandat, d'avoir toute la marge de manoeuvre requise pour
exécuter les fonctions qu'il a. Et donc on retrouve, dans les éléments de la
loi, au-delà de la stricte procédure de nomination, tous les éléments
d'indépendance et d'impartialité et toute la latitude que l'on souhaite qu'il
ait et qu'il doit avoir pour être capable de rencontrer les obligations et le
mandat que lui confère la loi.
Maintenant,
j'entendais le député de Matane, au début de son intervention, dire : Oui,
mais on a vu le commissaire avec un ministre — je
pense, c'était mon collègue le ministre des Transports — puis
après ça on l'a vu avec un autre ministre, le président du Conseil du trésor.
Écoutez, le fait d'être vu avec le commissaire à l'UPAC et un ministre du gouvernement, assermenté, moi, je pense qu'il
faudrait être bien mesquin pour voir dans une rencontre semblable le fait
que l'on veuille influencer ou que l'on
tente d'influencer le commissaire. Les ministres, d'abord, dans... Mon collègue
indique que ces rencontres-là ont été faites en public. Les ministres
rencontrent — du
gouvernement, quel que soit le gouvernement, quel que soit le parti au
pouvoir — régulièrement
les gens qui oeuvrent dans l'appareil de l'État.
D'ailleurs,
en préparant le dossier, je réalisais que le député de Verchères, alors qu'il
était ministre de la Sécurité publique,
ne s'est pas gêné pour aller rencontrer le commissaire à l'UPAC. Et je vais
vous faire une lecture de l'article du Devoir, un extrait,
c'était la journaliste Kathleen Lévesque qui, à ce moment-là, était au Devoir,
18 octobre 2012. Et vous allez voir que le ton de l'article,
là, c'est : Le ministre de la Sécurité publique, là, il va brasser le
pommier.
Alors :
«Le ministre de la Sécurité publique [...] — dont le nom est cité ici et que nous
connaissons bien, de l'époque évidemment,
qui est le député de Verchères — exige un redressement de l'Unité permanente
anticorruption dont le manque de cohésion
freine l'action. En entrevue au Devoir, le ministre a servi un
avertissement non équivoque, précisant qu'il n'exclut pas d'apporter des
changements "jusqu'aux plus hautes sphères" de l'organisme.»
La
plus haute sphère de l'organisme, je peux me tromper, mais je pense que c'est
le commissaire, dans le cas de l'UPAC. Alors, il dit, là, et c'est entre
guillemets, qu'il apporterait des changements, entre guillemets, «jusqu'aux plus
hautes sphères de l'organisme». Ça puis une
rencontre avec le président du Conseil du trésor ou le ministre des Transports,
je pense qu'il y a une différence, à tout le moins, ici, dans le ton, parce que
je n'ai pas entendu que la rencontre avec le président
du Conseil du trésor avait été assortie de menaces, non plus que la rencontre
avec le ministre des Transports.
«"À
l'heure où le patronage, le trafic d'influence, la collusion et les magouilles
de toutes sortes préoccupent le Québec
tout entier — je vais
continuer la lecture — l'UPAC ne peut se permettre d'être handicapée par un
dysfonctionnement interne", croit le ministre.» Et la
citation, ouvrez les guillemets : «"Aucun changement n'est exclu
d'emblée — on
va peut-être tous les faire sauter. On évalue
la situation et nous verrons s'il y a lieu d'apporter des ajustements jusqu'aux
plus hautes sphères. Le message est passé" — fin de la
citation — a
déclaré [le député de Verchères].»
Ça
fait que je veux bien, moi, qu'on ait des photographies de monde qui
rencontrent du monde qui font partie de l'appareil de l'État, mais je trouve que ça donne un drôle de double
standard au discours du député de Matane qui, lui, s'émeut d'une
photographie, alors qu'on voit que, lorsqu'ils étaient aux affaires de l'État,
ce n'était pas juste une photographie, là,
ils descendaient dans le coin puis ils brassaient le pommier jusqu'à la plus
haute sphère. Évidemment, sans le nommer, il s'agit bien de M.
Lafrenière, qui est le commissaire à l'UPAC.
Alors,
si la motion du mercredi sert à protéger l'opposition de sa propre turpitude ou
des actions qu'eux-mêmes ont posées alors qu'ils étaient aux affaires de
l'État...
Une voix :
...
M.
Moreau : J'ai bien écouté le député de Matane, M. le Président,
je l'entends encore. Il n'y a pas de difficulté, ça ne me déconcentrera
pas, j'ai cette capacité d'entendre le bruit et de continuer dans les actions.
Alors,
si l'objectif poursuivi par le député de Matane, c'est de faire en sorte de se
protéger de lui-même ou de son propre
groupe, bien, moi, je veux le rassurer, le député de Matane : Les lois du
Québec sont faites pour résister même au moment où, malheureusement, vous êtes
aux affaires de l'État. Et ces éléments-là, c'est quoi? C'est l'indépendance
qu'on a voulu donner au commissaire en le
nommant pour un mandat fixe à l'intérieur duquel personne ne peut, même
quand il y a une menace qui est faite, venir lui brasser le pommier.
Et qu'est-ce qui fait
que l'UPAC a continué son travail et qu'est-ce qui fait que l'UPAC fait un bon
travail? C'est précisément parce que, quand
le commissaire voit rentrer le ministre de la Sécurité publique qui lui dit
qu'il va lui brasser le pommier, il
est capable de dire au ministre : Merci beaucoup. J'ai entendu ce que vous
aviez à dire. Maintenant, la porte est là. Nous, on a du travail à
faire. Et c'est ce que...
Une voix :
...
M. Moreau :
Là, le député de Verchères... Si le député de Verchères...
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Oui. C'est ça. Ça aide...
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Gendron) : Non. Mais là, écoutez, c'est toujours la même
règle. Il n'y a pas de commentaire lorsque quelqu'un a la parole, parce
que ça donne ce qu'on voit, là.
Une voix :
...
• (15 h 40) •
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Non, là, les... Oui, bien, c'est très rare que, dans une intervention, il n'y a
pas d'intentions qui sont prêtées. J'ai rarement vu ça, mais il y a une
manière de le faire.
Une voix :
...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Ah! justement, mais là j'aime ce commentaire-là, «dans la manière de le faire».
C'est pour ça que c'est télévisé. Il y a du
monde qui entendent ça — parce qu'il y a du monde qui suivent ça — qui porteront un jugement.
Mais on ne
peut pas constamment, à chaque phrase, dire : Il y a là une intention.
Autant que possible, on demande aux
parlementaires qui ont la parole de faire attention aux propos qu'ils tiennent
pour éviter ce qui arrive. Ah! il avait une intention, il avait une
intention! Il n'y a plus de discours ici, là.
Alors, faites
attention, s'il y avait un prêt d'intention. Mais ce n'est pas ça qui a
commencé, c'est le commentaire quand
on n'a pas la parole. Alors là, vous l'avez, veuillez continuer en faisant
attention aux propos que vous tenez pour éviter les intentions.
M. Moreau :
Bien sûr. Alors, la longue mise en garde que vous avez faite ici, M. le
Président, pourrait se résumer par
nos cousins anglophones en disant : «If they can't stand the heat, get out
of the kitchen», hein? S'il trouve que c'est trop chaud, ce qu'on dit là, bien, qu'il n'apporte pas ces sujets-là et
surtout qu'il ne prétexte pas une motion du mercredi basée sur des photographies qui semblent bien
intéressantes, dans l'opinion du député de Matane, à exhiber. Mais, quand on va dans tout l'album photos et qu'on en a une,
nous, qui nous dit que Le Devoir... Et il y a eu, là, des entrevues
de données, là, par le député de Verchères alors qu'il était responsable
du portefeuille de la Sécurité publique. Bien, ça, je trouve drôlement plus parlant, drôlement plus parlant que
toutes les photos que le député de Matane pourrait nous sortir de son album.
Ce disant, je
l'entendais dire : Tous les observateurs experts estiment que ça doit être
changé. Ce n'est pas vrai, ça. Je regrette,
ce n'est pas vrai. Et les nominations qui sont faites, lorsqu'elles ont le
caractère d'indépendance en raison des
circonstances de l'exécution du mandat et de la protection, dans le cas de
l'exécution du mandat, valent tout à fait la procédure de nomination,
quelle qu'elle puisse être. À partir du moment où, ici, il y a... Et, si
M. Lafrenière voulait d'emblée
poursuivre son mandat, il devrait se soumettre à la procédure du comité de
sélection qui doit être mise en place en vertu des dispositions de
l'article 5 tel qu'il a été adopté.
D'ailleurs,
dans les observateurs en question, le député de Matane a fait grand état de
M. Myles qui serait un expert tout
crin en cette matière. Moi, je vais lui en citer un autre, commentateur, qui
est Rémy Trudel, hein? Il a été ministre dans un gouvernement péquiste.
J'imagine qu'à certaines époques ses conseils étaient pris en haute
considération, puisqu'il faisait partie du cabinet. Voici ce qu'il dit sur la
nomination du prochain commissaire par l'Assemblée nationale. Lorsqu'on dit : Vous devriez le nommer par l'Assemblée
nationale, il dit : «Je suis contre.» Mais il explique aussi pourquoi : «Ça ne doit être soumis à
aucun compromis politique.» Puis ça, c'est une phrase intéressante, et on va
voir ce que c'est que le compromis
politique. «Je préconise qu'en matière délicate il y a un ministre responsable
qui doit répondre à toutes les
questions et par ailleurs que les commissions parlementaires puissent examiner
le mandat.» Commissions parlementaires, on en a, elles examinent le
mandat. Le fait est : elles l'ont fait cette semaine. Et le président de la commission s'est assuré que toutes
les questions qui étaient correctes pouvaient être posées par tous les
partis qui ont participé aux travaux de la commission parlementaire.
Qu'est-ce
qu'il entend, Rémy Trudel, lorsqu'il dit : «Ça ne doit être soumis à aucun
compromis politique»? C'est parce que
les nominations aux deux tiers... Et là je vous le dis à vous, sachant très
bien, M. le Président, que vous savez mieux que quiconque ici comment ça
fonctionne, puisque vous êtes le doyen de notre Assemblée. Lorsqu'il y a des nominations aux deux tiers, il y a une proposition
qui est faite par le premier ministre, et tout ce qu'il y a à faire, c'est que l'opposition dit : Non, moi, je ne suis
pas d'accord avec cette proposition-là, selon la répartition des sièges, puis
on est dans une paralysie partielle, totale ou absolue, selon
l'évolution du dossier.
Dans le cas qui nous occupe, les gens qui
doivent occuper ces fonctions-là, qui sont des fonctions hautement spécialisées, doivent répondre à un certain nombre
de critères, on l'a vu, en vertu de la loi. Et la raison pour laquelle on
soumet ces candidatures à un comité, c'est
que le comité est formé d'experts dans les domaines précis dans lesquels le
candidat, s'il a la fonction ou s'il réussit
à se rendre sur ce qu'on appelle la courte liste... donc, des attributions qui auront fait l'objet de vérifications
par des experts.
Alors, dans
un contexte comme celui-là, M. le
Président, et je sais que j'ai
d'autres collègues qui veulent intervenir sur la question et qui ont une connaissance de ces situations-là,
je vais conclure ici en disant simplement qu'il n'y a pas, selon le gouvernement, lieu de modifier l'article 5 que nous
avons adopté à
l'unanimité, l'article 5
de la Loi concernant la lutte contre
la corruption, et qu'en conséquence nous allons voter contre la motion
présentée par le député de Matane. Je vous remercie de votre attention, M.
le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Je vous remercie, M. le ministre de la Sécurité publique. Et, pour la
poursuite du débat, je cède maintenant la parole à Mme
la députée de Marieville... pas
Marieville, voyons! Montarville, oui, oui, de Montarville. À vous la
parole, Mme la députée.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. Écoutez, effectivement, lundi dernier, nous avons eu le plaisir, pour la
première fois depuis sa création, de recevoir M. Lafrenière, le
Commissaire à la lutte contre la corruption — ça s'est
passé en commission parlementaire — pour examiner ses orientations, ses
activités, également sa gestion administrative.
Et c'était la première fois qu'il rencontrait les parlementaires, et on a
discuté. Il y a eu plusieurs échanges, et le commissaire nous a dit
qu'il estime qu'il est à l'abri de l'ingérence politique dans l'exercice de ses
fonctions.
Cependant, j'aimerais souligner ici qu'il y
a plusieurs personnes, dont les ministres des Transports et de la Sécurité
publique, qui avaient déjà émis quelques
bémols, et j'aimerais vous ramener dans le temps sur les bémols, à une époque
où M. Lafrenière était en poste. Mais, à cette époque-ci, on a eu d'autres
sons de cloche.
En
septembre 2013, on remonte un petit peu dans le temps, le ministre des
Transports, le député de Marguerite-Bourgeoys,
alors dans l'opposition, avait réagi à la rencontre impromptue de l'UPAC au
domicile de son chef, l'actuel
premier ministre. Il avait évoqué le manque d'indépendance de l'UPAC quant aux
enquêtes actuelles qui touchent le
Parti libéral. Selon lui, il n'y aurait aucun hasard dans le fait que la visite
de l'UPAC ait eu lieu la veille du début de la session parlementaire. Et là je vais le citer, les paroles que je dis
ici se retrouvent dans les revues de presse auxquelles vous avez accès, nous avons tous accès, donc je
cite : «...la cloison qui doit s'ériger entre la police et le pouvoir
politique n'est plus étanche»,
disait-il. Je vous rappelle qu'il s'agissait du député de Marguerite-Bourgeoys
de l'époque, en 2013. Et le chef du
Parti libéral avait également fait un lapsus révélateur à cette occasion en
utilisant l'expression «escouade politique» pour qualifier l'UPAC. On
avait bien ri, mais c'était un lapsus.
Autre
remarque, remontons dans le temps, en novembre 2014, la ministre de la
Sécurité publique soutenait, à juste titre,
que «l'étanchéité entre l'UPAC et la SQ est essentielle pour éviter la
"contamination" des dossiers. À l'heure actuelle, l'escouade Marteau constitue le bras policier de
l'UPAC, mais chacun des enquêteurs est un policier de la SQ. "Il faut
que les enquêteurs aient les coudées franches et qu'ils ne soient soumis à
aucune influence", [disait] la ministre.»
Cet
impératif explique les demandes actuelles du commissaire de doter l'UPAC de son
propre corps de police, comme il l'avait proposé, d'ailleurs on s'en
souvient tous, lors du dépôt de son mémoire auprès de la commission Charbonneau. En effet, le grand patron de l'UPAC
souhaite que l'UPAC puisse constituer un corps policier totalement
autonome et indépendant de tout autre service policier. Cette UPAC renforcée,
si je peux m'exprimer ainsi, aurait la responsabilité exclusive des enquêtes
qu'elle mène, lui permettrait aussi, à M. Lafrenière, d'avoir un accès
direct aux banques de renseignements et
faciliterait ses échanges avec les corps policiers nationaux et internationaux.
C'est ce qu'il nous a dit, d'ailleurs, lundi.
• (15 h 50) •
L'accroissement
de l'indépendance de l'UPAC passe peut-être par cette voie, peut-être,
peut-être. Mais, selon nous, c'est
important de le souligner, cette voie, si on va là, si le gouvernement décide d'aller
là et d'en faire un corps policier,
eh bien, il faut impérativement que cette voie soit accompagnée d'un
rehaussement de son imputabilité et de la reddition de comptes auprès des élus. En d'autres mots, ça prendra un
comité pour surveiller ce qui s'y passe, si d'aventure le gouvernement décide d'aller dans cette voie, mais la demande a été faite par M. Lafrenière. Alors, c'est très important
que, si ce corps policier est créé, il y ait
un organisme de surveillance au-dessus de lui. Ça se passe d'ailleurs au SCRS,
ça existe.
Revenons
à l'indépendance de l'UPAC. Cette indépendance de l'UPAC, elle doit également
et surtout, selon nous, être garantie
par la personne, la personne qui prend les décisions et qui choisit quels
dossiers feront ou ne feront pas l'objet d'une enquête. Comprenez-moi bien, l'UPAC a fait ses preuves, on le
voit. M. Lafrenière a fait un excellent travail depuis sa création, on le voit également. Je ne remets pas du
tout son intégrité en cause, bien au contraire, mais il demeure que seul le commissaire de l'UPAC prend la décision
d'envoyer un dossier en enquête ou non. Je l'ai questionné là-dessus.
Qui, ultimement, décide des cibles des enquêtes? C'est lui. Parfait, c'est
clair.
Maintenant,
je vous reviens à cette surveillance qu'il faut impérativement. Actuellement,
personne ne surveille le surveillant.
Vous me suivez? C'est pourquoi il nous apparaît nécessaire que la nomination à
ce poste si stratégique se fasse par un vote aux deux tiers des membres
de l'Assemblée nationale pour s'assurer de la plus grande probité, la plus grande indépendance et compétence possible de
la personne nommée à ce poste. C'est un poste de très, très grands pouvoirs. Le recours à ce processus est d'autant
plus important que le gouvernement s'apprête à remettre davantage de pouvoirs entre les mains du commissaire de l'UPAC
en dotant son organisme d'un corps de police autonome, comme je vous disais, si d'aventure il le fait, mais la
demande a été faite, et on attend de voir où va le gouvernement avec cette demande.
Alors, pour nous, c'est une question de transparence, de perception et
d'indépendance.
Mais,
pour l'instant, c'est le gouvernement qui procède à la nomination du grand
patron de l'UPAC, un mécanisme qui
n'est clairement pas à l'épreuve, malheureusement pas à l'épreuve des failles
ou peut-être de partisanerie et qui mine surtout la confiance de la population envers le processus de nomination.
L'échéance du mandat de M. Lafrenière arrive en mars prochain, nous
disait-il. Eh bien, cette échéance du renouvellement de son mandat, puisqu'il
en demande un nouveau, ça nous donne
l'occasion de saisir la balle au bond et de revoir nos façons de faire pour
s'assurer que la personne la plus compétente et la plus indépendante
soit nommée pour occuper ce poste. Cette personne, ça pourrait bien être M. Lafrenière. Comprenez-moi bien, le présent
débat ne porte aucunement sur ses capacités à poursuivre son mandat. Ce n'est pas de ça dont il est question, ni de son
bilan à titre de commissaire des dernières années. Mais un gouvernement responsable doit, doit et se doit de nommer ses
décideurs publics de façon responsable et transparente, surtout dans le
cadre d'une unité permanente qui doit faire la lutte à la corruption et à la
collusion.
Rappelons
à quel point le poste de commissaire à l'UPAC est névralgique pour la lutte à
la corruption. On le sait, c'est un
fléau qui gangrène le Québec, là, ça a duré depuis des années. Il a finalement
fallu avoir cette commission d'enquête, qui est tout à fait autre chose, mais également un corps particulier
dédié pour y faire face. La Loi concernant la lutte contre la corruption prévoit que le commissaire «a
compétence pour prévenir et réprimer le crime et les infractions aux lois et
d'en rechercher les auteurs». Il assure «la
coordination des actions de prévention et de lutte contre la corruption en
matière contractuelle dans le secteur public».
«9. Le commissaire a
pour fonctions — d'abord,
premièrement :
«1°
de recevoir, de consigner et d'examiner les dénonciations d'actes répréhensibles,
afin de leur donner les suites appropriées;
«2° de
diriger ou de coordonner les activités de toute équipe d'enquête formée de
membres de son personnel ou désignée par le gouvernement, selon le cas;
«3° de requérir, de sa
propre initiative, des enquêtes afin de détecter la commission d'actes
répréhensibles;
«4° de
formuler des recommandations au président du Conseil du trésor et au ministre
des Affaires municipales, des Régions
et de l'Occupation du territoire sur toute mesure concernant l'adjudication des
contrats dont les conditions sont déterminées par une loi dont [il est
chargé] de l'application;
«5°
[finalement] de formuler des recommandations au ministre ainsi qu'à tout
organisme ou toute personne du secteur public sur toute mesure visant à
favoriser la prévention et la lutte contre la corruption.»
Alors, ces
responsabilités sont trop importantes pour que la personne titulaire de ce
poste puisse être nommée par le
gouvernement sur une base potentiellement — il y a un risque, il y a un risque — partisane, ce que nous ne souhaitons pas. Le
processus de nomination que nous demandons au gouvernement d'adopter vise à
assurer que les choix d'enquête ne
soient teintés d'aucune partisanerie, notamment lorsqu'il s'agit des partis
politiques, et que les enquêtes soient menées sans entraves. L'intérêt
public et l'intégrité sont au coeur de cet enjeu.
Cela dit,
selon nous, un processus de nomination plus démocratique et transparent ne doit
pas seulement s'appliquer au
commissaire de l'UPAC mais à tous les emplois supérieurs au sein de
l'administration gouvernementale. D'ailleurs, mon collègue le député de Deux-Montagnes a présenté un projet de loi, le
projet de loi n° 393, encadrant la nomination de certains titulaires d'emplois supérieurs et uniformisant
certains aspects de nomination des juges et décideurs administratifs. Ça se passait en décembre 2014 et ça visait
justement à instaurer un tel processus plus transparent, un processus qui, nous
en sommes convaincus, rassurerait la
population. Il y aurait vraiment transparence et apparence de transparence si
nous changions la nomination.
Et je parlais
justement de mon collègue de Deux-Montagnes. Malheureusement, le gouvernement
n'a pas encore appelé notre projet de
loi. Mais j'aimerais céder la parole à mon collègue pour le temps qu'il nous
reste pour qu'il puisse parler et élaborer davantage des avantages d'un vote
aux deux tiers de l'Assemblée nationale pour nommer ces très, très hauts fonctionnaires qui sont dans des positions
d'autorité et d'importance ultime pour le Québec, pour ce Parlement et pour toute la société québécoise qui nous regarde
aller. Alors, j'aimerais céder la parole à mon collègue de Deux-Montagnes.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, merci, mais après la rotation, parce qu'il faut faire l'alternance, on
ne peut pas céder la... Alors, tout le monde
a compris que, oui, votre collègue pourra parler, parce qu'il reste du temps
dans votre banque. Alors, je cède maintenant
la parole à M. le député de Vimont pour son intervention, en lui indiquant
que vous n'êtes pas obligé de le prendre, mais il vous reste 24 minutes.
M. Jean Rousselle
M.
Rousselle : Merci, M. le Président. Quand je regarde cette
motion-là du mercredi qui parle de processus de nomination par le deux tiers, quelque part, c'est comme... ce n'est pas
égal sur le côté de l'opposition officielle, parce qu'effectivement, comme le
ministre le mentionnait, en 2011, quand qu'on a bâti, donc, cette unité-là
qu'est l'UPAC, c'est même le député de Verchères qui a même proposé un
amendement, justement, pour arriver à la manière qu'on fonctionne actuellement, donc qu'on choisisse de la manière qu'on
fonctionne, donc le processus de nomination, qu'il soit comme celui-là.
Je ne
comprends pas aujourd'hui le pourquoi de le changer. L'objectif de ça... En
tout cas, je ne veux pas envoyer des
allusions ou des choses qui... bien souvent, ils vont faire de l'autre côté,
mais moi, je ne le ferai pas, mais je trouve ça malheureux d'en arriver avec des motions de cette manière-là puis
d'amener auprès du public juste une allusion comme quoi que ce n'est pas... que
l'UPAC n'est pas transparente, que, l'UPAC, il y a quelque chose qui ne va pas
bien là-dedans. Parce que, veux veux
pas, les gens qui sont dans le salon, ils vont nous écouter, eux autres, ils
vont accrocher sur : Oups! O.K.,
si l'opposition a amené quelque chose, il y a quelque chose qui ne va pas bien.
Puis moi, je ne suis vraiment pas d'accord là-dessus.
Vous savez,
c'est un nouveau... L'UPAC, c'est une nouvelle unité, hein? Ça fait juste cinq
ans qu'elle existe. Ça fait cinq ans d'existence. Et c'est le
gouvernement du Québec qui l'a mise en place, donc le Parti libéral. La mission
comme telle, c'est de lutter contre la
corruption pour un système public intègre. Tout le monde ici veut avoir ça.
Tout le monde, et peu importe le
côté, je pense que tout le monde veut avoir ça. C'est un organisme qui est sous
la responsabilité d'un commissaire.
Oui, M. Lafrenière, c'est le commissaire qui est en charge de ça. C'est lui qui
est en charge justement pour... qui
s'occupe justement à ramener tous les autres... les professionnels dans le
domaine pour qu'ils travaillent ensemble. Parce que l'unité, c'est une
combinaison de plusieurs institutions, de plusieurs regroupements. On parle de
différents organismes et ministères, mais on
parle de la Sûreté du Québec, on parle aussi des corps policiers municipaux,
parce que les corps policiers municipaux, ils sont aussi à l'intérieur
de ça, là, Revenu Québec, la Régie du bâtiment, Service de police de la ville de Montréal, la Commission de
la construction du Québec, et le ministère des Affaires municipales et de
l'Occupation du territoire. Donc, ça touche tout le monde. Tout le monde est
responsable là-dedans.
• (16 heures) •
Même, on demande
au public, justement, quand qu'il voit quelque chose de pas correct, d'aviser,
de dénoncer, parce que ce n'est pas juste l'affaire justement du gouvernement,
mais c'est l'affaire de tout le monde.
Et, là-dedans,
bien, je pense qu'avec notre responsabilité là-dedans, bien, ça touche tous les gens qui sont, de près
ou de loin, dans le système public. Et ça, que ça soit les donneurs de
travail, que ça soit les fournisseurs de toutes sortes, ça comprend les employés municipaux, provinciaux, les ministres, les
députés, les maires, les conseillers, les commissaires d'école et toutes
les compagnies privées. Donc, quand on parle d'une nomination de cette
manière-là, nommé par le deux tiers, bien,
est-ce qu'on va demander, à ce moment-là, de nommer aux deux tiers les
directeurs de police? Est-ce qu'on va demander de nommer aux deux
tiers... Vous savez, à un moment donné, on arrête où?
Je
pense qu'ici, de la manière qu'ils fonctionnent, les gens qui sont nommés aux
deux tiers, c'est des gens désignés et
nommés par l'Assemblée nationale, donc des gens qui exercent une charge
publique, et puis qui ont une indépendance, et qui sont désignés par... impartialité dans l'exercice de leurs
fonctions. Et ça, il y a cinq personnes qui sont désignées. On parle du
Commissaire au lobbyisme, le Directeur général des élections, le Protecteur du
citoyen, le Vérificateur général ainsi que
le Commissaire à l'éthique et la déontologie. Donc, ces gens-là, c'est eux
autres qui sont là pour vérifier, voir
si, ici, tous les parlementaires, on fait notre travail correctement et dans
l'ordre, et les ministères aussi. Mais là on ne parle pas de la même
chose, là, là on parle des choses qui, bien souvent, qui sont criminelles.
Donc là, tout
à l'heure, on parle de M. Lafrenière, mais DPCP, c'est la même chose. Qui qui
le nomme, le DPCP? Je pense, c'est le
même système, un peu comme M. Lafrenière. Donc, si on commence à vouloir nommer
des gens... Comme M. Lafrenière dit : O.K. Ça va être aux deux
tiers. Bien, comme je le mentionnais tantôt, on va arrêter où?
Et cette
motion-là, encore une fois, je reviens toujours avec parce que l'objectif des
discussions aujourd'hui, c'est sur cette motion-là. Comme je le
mentionnais, c'est quelqu'un de l'opposition qui a amené cette proposition-là
de la manière qu'on fonctionne, et c'est ça,
le... Encore une fois, je reviens toujours avec l'objectif, pourquoi qu'on veut
changer ça aujourd'hui? Parce que je pense que, quand on regarde les
rendements, la manière de fonctionner du commissaire actuellement, il y a des bons rendements. Oui, la population voudrait
toujours avoir, je pense, des arrestations à chaque jour. Et, quand il y
a une période donnée qu'il n'y a pas d'arrestations, les gens : Bon, il
est arrivé quelque chose. Pas nécessairement
évident de faire des enquêtes. Vous savez, des enquêtes, c'est compliqué,
puis... Et, comme l'expliquait d'ailleurs
M. le commissaire quand on l'a rencontré dernièrement, il mentionnait que, des
fois, c'est compliqué, mais ils veulent
tellement avoir une bonne preuve à toute épreuve quand ils vont l'amener à la
cour, bien, justement, ça prend plus de temps.
Et, si eux ne
prennent pas le temps pour le faire correctement, vous pensez... quoi la
population va penser? Bon, ils l'ont fait rapidement ou ils ont tourné
les coins ronds, puis c'est pour ça, d'ailleurs, qu'ils ont perdu. Bien, moi,
je pense qu'ils sont bien mieux de prendre
leur temps, de le faire correctement, et les fautifs, bien, qu'on les prenne
puis qu'on les condamne à ce
moment-là. Parce qu'effectivement les gens veulent avoir, justement, les
fautifs... ils veulent que les
fautifs paient. Et, je pense, c'est comme je vous mentionnais tantôt, tous les
gens ici veulent que ces fautifs-là paient parce que, malheureusement, c'est eux qui mettent un ombrage sur notre
travail ici, mais qui mettent aussi un ombrage sur tous les maires et tous les conseillers municipaux dans les
municipalités, et puis... Et personne n'est à l'abri de ça, mais vraiment personne à l'abri. Parce que les
gens qui pensent qu'eux sont à l'abri, bien souvent, on peut aller creuser,
puis, des fois, on peut trouver des choses,
hein? Et, bien souvent, comme disait ma grand-mère, il ne faut pas que tu
craches en l'air parce que ça peut te
retomber dessus, hein? Donc, bien beau que les gens... Comme je leur disais
tantôt, les gens, ils pensent toujours que les enquêtes se font
rapidement, mais elles ne se font pas si rapidement que ça.
Je reviens
encore sur la manière de nomination des directeurs de police dans chaque
municipalité. Imaginez-vous s'il faudrait que ça soit nommé aux deux
tiers de l'Assemblée dans les municipalités, on n'en finirait plus. Je pense
que de la manière qu'on fonctionne, il y a un comité qui se penche, qui prend
les trois meilleurs candidats et puis... trois, quatre, mais, en tout cas, ils
prennent les meilleurs candidats, et, à ce moment-là, c'est là que c'est
choisi. Moi, je pense qu'il ne faut pas en venir à un système qu'à un moment
donné la politique embarque là-dedans, puis qu'on commence à faire de la politique ici, là-dedans, par la nomination. Je pense
qu'on est mieux de laisser ça à des gens qui connaissent ça, qui vont faire les vérifications, qui vont faire des suggestions,
et, de là, bien, le ministre concerné prendra la personne qu'il pense
être bonne. Là-dessus, je vais laisser mon collègue, moi aussi... Merci.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Merci, M. le député de Vimont, de votre intervention. Et je suis prêt à entendre
le prochain intervenant, et, M. le député de Deux-Montagnes, à vous la parole pour le temps qu'il vous reste,
8 min 50 s pour le deuxième groupe parlementaire. À vous
la parole.
M. Benoit Charette
M. Charette : Merci, M. le Président.
C'est un plaisir de me retrouver parmi vous cet après-midi. En fait, ma collègue de Montarville a fait une
éloquente démonstration un petit peu plus tôt de la nécessité de revoir notre
processus de nomination quant aux
nominations dites partisanes. Qu'est-ce qu'une nomination partisane, M. le Président? C'est tout simplement
une nomination qui est faite par la seule intervention de l'Exécutif sans que
le législatif ne soit consulté ou interpellé.
Et, à ce niveau, je veux être bien précis, on n'est pas contre cette
prérogative qui relève de l'Exécutif, mais, en même temps, il ne faut pas se leurrer, il est grand temps
que le législatif aussi puisse avoir un mot à dire parce que,
dans les faits — et
on n'est pas les seuls à le déplorer — la
question des nominations partisanes a fait beaucoup
jaser au cours des dernières
années, hein, ce n'est pas un sujet qui est nouveau.
Et, la
semaine dernière, on avait un débat, à la même heure d'ailleurs, sur la
question des primes de départ des députés démissionnaires. Selon moi, c'est
sans doute les deux sujets qui ont suscité le plus de réactions dans la
population au cours des dernières
années, soit, effectivement, les primes de départ et, ultimement, les
nominations partisanes. Ce sont deux
sujets qui, malheureusement, alimentent un cynisme déjà très ambiant dans la
population. Donc, oui, au rôle qui
revient à l'Exécutif, mais oui, il serait grandement temps que le législatif
ait à intervenir. Et, pour cette raison, on l'a dit, ma collègue l'a mentionné, je le répète d'emblée,
on appuiera la motion qui est déposée par l'opposition officielle aujourd'hui.
Cela dit, on
a tout de même une base sur la table. Il y a quelque temps, j'ai déposé le
projet de loi n° 393, qui visait, justement,
à rendre plus transparent le processus de nomination des nominations
partisanes. Et notre projet de loi n'est pas sorti de nulle part, en ce sens qu'on s'est basé beaucoup sur la
réflexion qui avait été conduite par deux spécialistes des questions qui ont amené le dépôt de deux projets
de loi, et je fais référence au rapport Noreau sur les juges administratifs
et le rapport
Perreault sur les nominations partisanes dans les emplois supérieurs. Donc, le
projet de loi que nous avons présenté
il y a quelque temps maintenant est déjà largement appuyé par une réflexion qui
a été conduite par des experts. Ce qu'il dit essentiellement, c'est que
c'est un processus qui se doit, dorénavant, d'être plus transparent.
Tout à l'heure, je faisais référence du cynisme,
mais ce cynisme-là n'est pas provoqué uniquement dans la population. Je m'explique. Au sein même de notre
fonction publique, de voir constamment de nouvelles nominations qui viennent, en quelque sorte, bouleverser la
hiérarchie de nos institutions, ça crée un profond sentiment de démotivation
et ça alimente aussi le cynisme dans notre
fonction publique, sur laquelle on doit compter, naturellement. Et le projet de
loi qu'on déposait, il avait différents volets, on parlait, dans
certains cas, de nominations qui devaient être adoptées aux deux tiers, un petit peu comme la motion de
l'opposition officielle le propose. Et aussi, pour certaines autres catégories
d'emploi, on proposait, ni plus ni moins, de
se référer à la CAP, à la Commission de l'administration publique, appuyée
par la Commission de la fonction publique, pour la nomination des emplois
supérieurs.
• (16 h 10) •
Et, encore
là, ce n'est pas un processus qui est né de nulle part ou qui est inventé de
notre part, c'est ce qui se produit dans
bon nombre de législatures, dans bon nombre de Parlements, que ce soit, dans
certains cas, au niveau du Parlement fédéral,
mais sinon on le voit régulièrement du côté du Congrès américain. Lorsqu'il y a
des nominations qui sont importantes,
lorsqu'elles sont proposées par l'Exécutif, le législatif a la possibilité de
mesurer un petit peu les motivations du candidat ou de la candidate.
Bref, il y a différentes avenues qui sont proposées par le projet de loi.
Et ce projet
de loi, on l'a dit d'emblée, il est perfectible. Et je l'admets d'emblée,
lorsqu'on l'a rédigé et lorsqu'on l'a présenté il y a quelques mois maintenant,
on n'incluait pas dans la liste des emplois ou des nominations celui du directeur de l'UPAC pour un poste nécessitant
l'approbation des deux tiers de la Chambre, ça ne faisait pas partie du projet
de loi initial. Mais, dès le moment du dépôt, on a eu l'occasion de réitérer
notre volonté de collaborer avec les autres formations politiques présentes à
l'Assemblée nationale pour, justement, le parfaire.
Et il y a un
engagement tout de même important qui a été pris auprès du leader du
gouvernement et devant cette Assemblée,
lors d'une prochaine motion du mercredi on va appeler ce projet de loi,
c'est-à-dire on va demander le vote. Et
le gouvernement s'est engagé à appuyer la démarche, et j'espère qu'on ne se
limitera pas uniquement à la période que nous garantit la motion du
mercredi pour étudier le projet de loi, qui est perfectible. On pourrait
ajouter une fonction supplémentaire très
certainement, mais il grand temps qu'on ait l'occasion de se pencher sur ces
questions. Et, naturellement, j'écoutais
les échanges un petit peu plus tôt, j'ai écouté l'intervention du député de
Matane, celle de mon collègue de Vimont également qui s'interrogeaient
un petit peu sur le pourquoi, aujourd'hui, de l'étude de cette motion.
Naturellement,
il y a eu la comparution la semaine dernière du responsable de l'UPAC, on
comprend le contexte. Mais ce que j'aime interroger de mon côté, c'est
que les deux rapports dont je vous faisais mention tout à l'heure, les rapports Noreau et Perreault, ont été déposés lors
de la précédente législature, sous la gouverne, donc, du gouvernement précédent. Donc, il y avait possibilité aussi
d'agir plus tôt. Ce ne sont pas des rapports qui viennent d'être déposés, ce
n'est pas une situation qui est
nouvelle. Donc, sans prêter d'intentions — parce que j'ai bien entendu votre remarque
tout à l'heure, M. le Président — je me questionne sur l'intérêt aujourd'hui
avoué de l'opposition officielle sur ces questions parce qu'il y avait
possibilité d'agir.
Mais peu importe — et je ne veux pas non plus attribuer de torts à qui que ce
soit — l'important, c'est de se saisir d'une
situation. On a un commissaire à l'UPAC dont la fonction arrive à échéance dans
les prochains mois, donc on a une très
belle occasion, à travers cette fin de mandat, de revoir un petit peu le
processus de nomination. Et autant ce que disait ma collègue que tous les autres collègues, on ne remet pas en question
la compétence de M. Lafrenière, mais, au moment où son contrat sera
renouvellé, on aimerait, effectivement, au niveau de l'Assemblée nationale, se
prononcer pour qu'ultimement il ait non
seulement l'appui du Parti libéral, donc du parti au pouvoir, mais ultimement,
si tel est le cas, l'appui de
l'ensemble des formations politiques pour qu'on ait un poste qui soit légitimé
par un appui réel de l'Assemblée nationale.
Donc, on est
à quelques semaines de la fin d'un mandat, je nous invite tous, naturellement,
à appuyer — et je le
dis sans réserve — la
motion qui est aujourd'hui présentée par l'opposition officielle, donc par le
Parti québécois. Et, oui, j'ai entendu
quelques propos de collègues du gouvernement, mais j'ai en souvenir
également... mémoire, plutôt, ce qu'a
dit le leader du gouvernement il n'y a pas si longtemps, lorsqu'on a réitéré
notre intention de présenter notre projet de loi. Ça semble être une question qui préoccupe le gouvernement. On va
le souhaiter, naturellement. Donc, non seulement on pourra le démontrer ou le vérifier lorsque notre
projet de loi sera appelé lors d'une motion du mercredi, mais on a tout de même une belle occasion aujourd'hui de démontrer
à la population notre intention de mettre fin à un cycle qui, malheureusement, nous affecte tous ou affecte
directement notre image comme parlementaires. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Et le temps attribué à votre formation
politique est terminé. Merci. Je cède
maintenant la parole à M. le député de LaFontaine pour son intervention, en
vous indiquant qu'il vous reste 15
min 30 s. Si vous le prenez, vous le prenez. Il reste 15 min 30 s à votre
formation politique.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le Président. Soyez assuré que je prendrai toutes les
minutes et secondes que vous allez me permettre d'utiliser. Et, d'entrée
de jeu, vous savez, il est important, évidemment, de préciser que nous allons voter contre cette motion. Pourquoi? Parce
que le processus actuel, mis en place en 2011, de nomination du Commissaire
à la lutte contre la corruption est un
processus qui assure l'indépendance et la compétence du commissaire. Et ça, ça
avait été confirmé, ce processus-là
qui est en place, par l'actuel député de Verchères à l'époque, qui était, à
l'époque, critique de l'opposition officielle,
porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité publique et qui
avait proposé lui-même ce processus en disant : Écoutez, M. le ministre de
la Sécurité publique, qui, à l'époque, était Robert Dutil, du Parti libéral du Québec... Il avait dit :
M. le ministre, ce processus-là, ce que vous proposez, moi, je propose autre
chose, ayez donc un processus où il y aura un comité indépendant qui va
identifier trois candidatures, puis vous choisirez, le gouvernement, à travers ces trois excellentes candidatures là. Puis, M.
le ministre... C'est toujours le collègue actuel de Verchères qui disait
ça en 2011 : Et ça, M. le ministre, ça va assurer un processus tout à fait
rigoureux, va assurer l'indépendance de la personne nommée et, évidemment, sa
compétence.
J'entends
aujourd'hui et je constate que ce n'est plus le collègue de Verchères qui est
porte-parole de l'opposition officielle
en matière de sécurité publique, c'est le collègue de Matane, mais il doit y
avoir un minimum de cohérence, je pense,
dans les propositions du Parti québécois, dans les propositions de l'opposition
officielle. Puis ce qu'on dit en 2011 sur
un sujet aussi fondamental, là — pas un crédit d'impôt, là, un sujet aussi
fondamental — on ne
doit pas, M. le Président, je vous le soumets bien respectueusement,
aller aux aléas et faire un 180 degrés là-dessus.
J'ai
écouté — vous me
permettez d'ouvrir une parenthèse — avec beaucoup d'attention d'abord la
collègue de Montarville, qui a
dit : Ah! changer le processus et nommer aux deux tiers de l'Assemblée
nationale non seulement pour le Commissaire à la lutte contre la
corruption, mais pour tous les hauts fonctionnaires, ça serait important.
Alors, première des choses, je pense qu'on ferait ça à la journée longue parce
qu'il y en a des centaines et des centaines.
Deuxième
élément, le collègue de Deux-Montagnes a dit : Il y a beaucoup de cynisme,
et il associe une nomination par le
gouvernement... Même si ça fait l'objet de trois rigoureuses recommandations
d'un comité indépendant, il associe, le
collègue de Deux-Montagnes, toute nomination du gouvernement à des nominations
partisanes. Et, en ce sens-là, j'ai de la misère à me réconcilier avec
ces propos-là quand je constate que le 24 août 2012, dans La Presse,
le chef de la Coalition avenir Québec
précisait, et je cite : «Si on veut faire un changement au Québec, il faut
remplacer les personnes qui font de
la politique, mais aussi les sous-ministres et les présidents de sociétés
d'État qui ne pensent pas comme nous, qui
ne sont pas d'accord pour faire ces virages.» Alors, en août 2012, le chef de
la Coalition avenir Québec voulait remplacer tous les présidents et présidentes de sociétés d'État, les
sous-ministres, tous les hauts fonctionnaires qui ne pensent pas comme
eux, mais il ne précisait pas qu'il voulait le faire aux deux tiers. Et il ne
l'aurait pas fait aux deux tiers parce qu'évidemment
ce ne serait pas des personnes autres qu'indépendantes puis qui ne pensent pas
comme eux, M. le Président, et là j'entends la collègue de Montarville
qui dit : Il faudrait, aux deux tiers, remplacer tout le monde.
Alors, je
ferme la parenthèse, M. le Président. Je pense que ce qui contribue bien
davantage au cynisme, c'est quand les élus exagèrent. Et, quand on dit,
M. le Président, qu'on va nommer aux deux tiers tous les hauts fonctionnaires,
je pense qu'on exagère. Et, quand le chef de
la Coalition avenir Québec précise en 2012 que lui, il va changer — pas aux deux tiers — tous
les hauts fonctionnaires, je pense qu'il exagérait également. Alors, M. le
Président, le cynisme, on l'alimente quand on exagère. Et, à cet effet-là, je
pense que c'était important de le souligner aux collègues.
Le député de Matane-Matapédia, bon, aujourd'hui,
c'est lui, là, qui est critique, qui est le porte-parole de l'opposition
officielle en matière de sécurité publique, ce n'est plus le collègue de
Verchères. Bien, évidemment, j'aimerais bien
l'entendre sur le 180 degrés qu'il nous propose aujourd'hui. Quand son
collègue, en 2011, nous proposait, proposait
à cette Assemblée nationale lors du débat sur la Loi concernant la lutte contre
la corruption, proposait, donc, en
mai 2011 que le processus... Et je le cite : Le processus, quel est-il, M.
le Président? Article 5 de la loi qui a été adopté à l'unanimité.
Alors, sur un
amendement du collègue de Verchères, du Parti québécois, critique à l'époque en
matière de sécurité publique... 2011,
le projet de loi est adopté. Il est parfaitement conscient et heureux que l'on
prenne, évidemment... que l'Assemblée
nationale prenne à son compte son amendement, qui fait en sorte que la
nomination, puis c'est le processus actuel... «...choisi parmi une liste
d'au moins trois personnes déclarées aptes à exercer la charge par un comité de
sélection formé par[les circonstances]...»
Le collègue de Verchères le soumet. Il dit que c'est un processus qui est
extrêmement rigoureux, assure la compétence et l'indépendance. L'Assemblée
nationale... Pas juste lui, là, que je pointe, tous les députés votent
unanimement ce processus de sélection.
• (16 h 20) •
Bien, M. le
Président, j'aimerais entendre mon collègue de Matane. Je veux bien croire
qu'on change de critique, mais il ne
faut pas qu'on change, sur un projet aussi fondamental, qu'on change notre
fusil d'épaule. Ce n'est pas un crédit d'impôt,
là, c'est quelque chose de fondamental. Et ce que disait le collègue de
Verchères, je prends pour acquis, M. le Président, qu'il le tient toujours pour
vrai. Puis je vais être curieux de voir comment il va voter là-dessus tout à
l'heure, M. le Président, parce qu'on
ne l'a pas entendu sur cette motion. Je suis persuadé qu'il sera présent puis
qu'il va voter contre parce qu'il ne peut pas se dédire sur un sujet
aussi fondamental.
Et il disait,
M. le Président, à l'époque — et je vais le citer — le 25 mai 2011 : «Mais je pense qu'il
conviendrait, à l'instar de ce qui
est fait pour d'autres officiers de l'État, de prévoir un mécanisme peut-être
un peu plus rigoureux de nomination
du commissaire. Il faut que le processus — toujours le collègue de Verchères — de nomination soit, hors de tout doute raisonnable, crédible dans l'esprit des
observateurs extérieurs.» C'était le processus proposé à l'époque, c'est
le processus actuel.
Je poursuis.
Le collègue de Verchères, du Parti québécois, disait... et qui est en
porte-à-faux avec son collègue de
Matane-Matapédia, il disait — et je le cite — en mai 2011 : «L'idée est
simplement de faire en sorte que de nous assurer, pour les parlementaires — ah! tiens donc — pour le public en général, mais pour le
ministre lui-même, au fond, d'avoir un processus
qui va permettre que la personne qui va occuper cette fonction soit au-dessus
de tout soupçon de nomination complaisante.»
Alors,
aujourd'hui, il se dédit, force est de constater. Et, en ce sens-là, il
précisait même que sa proposition, qui a été acceptée par le ministre de
l'époque, qui a été adoptée unanimement et qui fait en sorte que c'est le
processus en place aujourd'hui... il disait, le collègue de Verchères du Parti québécois,
qui est en porte-à-faux avec son collègue de Matane-Matapédia :
«On n'a pas tiré ça, là, de notre chapeau. C'est le processus qui est employé
pour la nomination du Directeur des poursuites criminelles et pénales.» Et il y
allait même de d'autres exemples : «Je ne vois pas — poursuivait-il — en quoi cette proposition d'amendement ne nous
assurerait pas d'avoir à la tête de l'UPAC une personne présentant l'ensemble
des compétences et l'expérience requise, bien au contraire, bien au contraire,
M. le Président.» Fin de la citation.
Alors,
aujourd'hui, on change de porte-parole, on change de position, et je pense que
c'est un dur coup pour notre collègue de Matane-Matapédia, d'être en
porte-à-faux, en contradiction flagrante avec, encore une fois, je le répète, M. le Président, un élément fondamental. Qu'on ne
vienne pas nous dire : Oui, bien, ça fait quatre ans, il a changé d'idée,
il a évolué, c'est un processus qui est perfectible, qui est bonifiable. Bien
non, M. le Président, en 2011, on avait une même réalité québécoise qui est la même en 2015, aujourd'hui, qui était
de s'assurer que le commissaire à la lutte à la corruption soit compétent, indépendant et soit nommé suite à un
processus rigoureux. C'était le cas en 2011, c'est encore le cas en
2015.
Qu'est-ce qui
a changé dans l'eau ou dans l'oxygène, M. le Président, pour que cette
position-là défendue de façon très
forte, très raisonnable et très justifiée, qui a permis d'amender le projet de
loi, qui est la loi aujourd'hui... Et je n'irai pas jusqu'à dire, M. le Président, ou à laisser entendre qu'il s'agit
des aléas politiques de courte échelle, de courte vue qui font en sorte
qu'aujourd'hui nous avons une proposition pour modifier tout cela. Et
d'entendre mon collègue de Matane-Matapédia
dire à hauts cris : On n'a pas un processus qui permet d'assurer
l'indépendance et la compétence, bien, je
veux dire, à chaque fois je trouve ça dur, je trouve ça dur pour mon collègue
de Verchères puis je trouve ça dur sur la crédibilité de son parti en
cette matière, qui, encore une fois, est fondamentale.
En passant, vous me permettrez, M. le Président,
de souligner — et
là, bon, j'imagine que c'est une erreur de rédaction — les mots ont leur sens, et, en la matière,
surtout sur une motion, une proposition de motion qui en contient peu, il est important de bien choisir les mots.
Vous savez, M. le Président, mieux que moi qu'il y a déjà cinq personnes,
cinq officiers qui sont nommés par
l'Assemblée nationale. Évidemment, il s'agit, M. le Président, du Vérificateur
général, du Protecteur du citoyen, du Directeur général des élections, du
Commissaire au lobbyisme et du Commissaire à l'éthique et à la déontologie. On dit : «Une personne
désignée est une personne nommée par l'Assemblée nationale pour exercer
cette charge. Ces personnes sont directement responsables devant elle.»
Alors, M. le
Président, quand on lit la motion, on ne dit pas qu'ils sont nommés, mais on
dit... On me dira : Ah! c'est
une erreur de rédaction. Mais, quand même, ça me surprend, connaissant la
rigueur de mon collègue, que l'Assemblée nationale approuve par les deux
tiers de ses membres. Est-ce que ça veut donc dire que le gouvernement... Parce
qu'«approuve» a un sens. L'Assemblée
nationale ne nomme pas. L'Assemblée nationale, dans ce contexte-là, l'Assemblée
nationale, avec les cinq autres, elle prend la candidature et elle nomme. Fin de
la discussion. Ici, il dit «approuve». Vous allez me dire : C'est anodin, c'est une erreur de rédaction.
«Approuve», ça veut dire que le gouvernement propose. Et, s'il n'y a pas d'approbation,
le gouvernement en propose un autre, le gouvernement en propose un autre, en propose un autre. Parce qu'il ne nomme
pas, il approuve.
Pourquoi
le mot est important? De un, pour ce que je viens de dire. Mais, de deux, les
cinq officiers, les cinq institutions, les cinq personnes qui sont nommées par l'Assemblée nationale relèvent de l'Assemblée nationale,
relèvent de la responsabilité des 125 députés. Ici, Rémy Trudel, qui a été cité par le ministre de la Sécurité publique, a dit... qui est un ancien ministre du Parti
québécois et, encore une fois, qui a eu l'occasion d'émettre son opinion au sein du parti, qui était, j'imagine, considéré à l'époque, comme
l'a bien dit le ministre de la
Sécurité publique... il a dit : Il y a
un ministre responsable qui
répond de toutes ces questions. Il y a en place un processus, un comité qui
choisit trois excellentes candidatures, et le gouvernement nomme la personne.
Et il s'agit
d'un processus qui avait même, M. le Président, été confirmé
par l'opposition officielle pas il
y a 10 ans, 15 ans, le 1er octobre 2014 le même collègue
député de Matane-Matapédia avait déposé pour la nomination du directeur
de la Sûreté du Québec... avait
proposé un processus où il y
avait un comité qui recommandait trois
candidatures. Et là, évidemment, il ne voulait que ce soit le gouvernement, mais il voulait que ce soit le comité parlementaire, la majorité
des groupes parlementaires qui le décide. Mais, s'il concevait qu'à
l'époque les comités, la commission parlementaire et l'Assemblée nationale
pouvaient décider à travers ces trois candidatures-là qui émanaient d'un comité
indépendant, force est de constater qu'il avait avalisé, il avait
confirmé qu'il s'agissait, là, d'un processus qui, au départ, nous permettait d'aboutir
avec trois excellentes candidatures.
C'est exactement
le même processus ici, M.
le Président, qui est en place que
celui qu'il proposait en octobre 2014, autrement
dit un comité indépendant dont
personne ne questionne, M.
le Président, la compétence. Les
membres qui le forment sont compétents, connaissent le domaine, sont
indépendants. Personne ne conteste ça, M. le Président, puis j'aimerais entendre le collègue
de Matane. S'il conteste ça, qu'il le
dise clairement. Donc, trois excellentes candidatures à travers
lesquelles le gouvernement utilise et le gouvernement met en application et est
responsable devant cette Assemblée
nationale. Trois excellentes candidatures. Le gouvernement choisit, et, en
vertu de l'article 73 de la loi adoptée en 2011, le ministre responsable, qui se fait questionner, M. le
Président, à tous les jours qu'on siège, est responsable, a la responsabilité ministérielle de s'assurer,
évidemment, que cette entité, qui demeure tout à fait indépendante, fasse sont
travail, ait les ressources nécessaires, ait
toute l'indépendance. Et c'est là, M. le Président, que se fait le véritable
travail qui fait en sorte, évidemment, de s'assurer que nous avons une
unité permanente anticorruption à l'oeuvre.
On a fait
grief à l'actuel commissaire d'avoir participé à une conférence de presse, et
le collègue de Matane a dit qu'il
avait un malaise, c'était une erreur, ça ne se fait pas. Il n'avait pas
souvenir que le collègue de Verchères, l'époque, quand il était ministre du Parti québécois de la Sécurité publique fait
une conférence de presse avec le commissaire... Bien, M. le Président,
mon collègue ministre de la Sécurité publique a eu l'occasion de soulever que,
pire que de faire une conférence de presse, publique par définition, a fait
état d'un article du Devoir du 11 octobre 2012 où le ministre du Parti québécois de la
Sécurité publique avait visité les locaux de l'UPAC et avait dit qu'il devait y
avoir des changements et qu'il envisageait même des changements jusqu'à
la plus haute sphère.
Donc,
ce qu'il disait, si vous me permettez de paraphraser, qu'il allait se
permettre, le cas échéant, s'il le jugeait bon, de se débarrasser de l'actuel commissaire puis de le changer si ça
ne faisait pas. Il n'avait pas précisé qu'il allait revenir à l'Assemblée nationale puis demander un vote des
deux tiers à ce moment-là, M. le Président. Bien non, parce qu'il le savait qu'il y avait un processus, il y avait un
processus qui était mis en place. Mais non seulement on vient faire grief
aujourd'hui, on vient dire : Il y a eu
conférence de presse avec le commissaire, conférence de presse publique, le
collègue de Matane a un malaise
énorme à ça, il dit : On attaque son indépendance. Et, de l'autre main,
d'un autre côté, lorsqu'ils étaient
au pouvoir, le Parti québécois, le ministre de la Sécurité publique avait été
faire une visite privée — pas publique, il n'y
avait pas de caméras, là, il n'y a eu de photos qui ont été prises — où il a dit : Ça a besoin de changer,
sinon, là, jusqu'aux plus hautes sphères, vous risquez d'être dégommés.
Et, en ce sens-là, M. le Président, on ne peut pas avoir deux poids, deux
mesures, on ne peut pas, à défaut... Sinon, on n'a pas la crédibilité
nécessaire pour venir attaquer un processus qui, en 2011, M. le Président,
était un processus extraordinaire, un processus qui nous assurait d'avoir une personne à la tête de l'UPAC, le commissaire
actuel, totalement indépendant, compétent, et, en ce sens-là, nous allons
voter contre la motion. Et j'ai bien hâte de
voir si mon collègue de Verchères... Je suis certain, M. le Président,
connaissant son honnêteté intellectuelle, que lui aussi, il va voter
contre cette motion. Merci, M. le Président.
• (16 h 30) •
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de
LaFontaine, de votre intervention. Le
temps étant écoulé au gouvernement, il reste du temps à l'opposition
officielle, 11 min 40 s. Alors, je cède la parole à M. le leader de
l'opposition officielle pour son intervention. À vous, M. le leader de
l'opposition officielle.
M. Bernard Drainville
M. Drainville :
Merci, M. le Président. Alors, 11 minutes, ce n'est pas beaucoup, je vais aller
à l'essentiel. M. le Président, le mandat du Commissaire à la lutte contre la
corruption, le commissaire à l'UPAC, c'est, et je cite : «...assurer,
pour l'État, la coordination des actions de
prévention et de lutte contre la corruption en matière contractuelle dans le
secteur public.» Ça, c'est tiré de la loi qui crée l'UPAC. «Le gouvernement
nomme [le] commissaire», dit la loi, M. le
Président. Bien, nous, ce qu'on soutient, à travers la motion du député de
Matane-Matapédia, c'est que ça ne doit plus être le gouvernement qui
doit nommer le commissaire, M. le Président, ça doit être l'Assemblée nationale
aux deux tiers, et pas juste, M. le
Président, parce que c'est une bonne idée sur le fond des choses, c'est une
bonne idée parce qu'on nomme déjà aux deux tiers un certain nombre
d'officiers : le Vérificateur général, le Directeur général des élections, le Commissaire au lobbyisme, le
Commissaire à l'éthique, la Protectrice du citoyen... Donc, sur le fond des
choses, on pense déjà que c'est une
bonne idée, mais aussi, M. le Président, parce que, dans le contexte actuel,
dans celui dans lequel nous nous
trouvons, c'est une bonne idée que le Parti libéral accepte cette idée que la
Chambre choisisse le prochain commissaire
à l'UPAC aux deux tiers parce que ça va envoyer un message clair sur sa volonté
d'assurer l'indépendance du
commissaire. Pourquoi? Parce que le Parti libéral, M. le Président, il est sous
enquête de l'UPAC. Le Parti libéral qui est actuellement au gouvernement est sous enquête de l'UPAC, M. le
Président. Alors, on leur donne dans le fond une belle occasion de démontrer leur volonté de faire le ménage et de nommer
quelqu'un qui pourra, en toute indépendance, faire la lumière sur toutes
les allégations et les enquêtes qui touchent directement le Parti libéral, M.
le Président.
Alors, j'ai quelques
exemples à vous citer. C'est des découpures de presse, M. le Président, c'est
du domaine public : Le Parti libéral
du Québec et son ex-argentier, Marc Bibeau, ciblés par l'UPAC. L'UPAC
vise l'argentier du Parti
libéral sous Jean Charest.
«Marc Bibeau est au coeur d'une enquête sur un système de financement
illégal du parti sur fond de
collusion.» L'UPAC : de la permanence du Parti libéral du Québec à
Schokbéton.Un lien avec les perquisitions au Parti
libéral du Québec, ça, c'est les perquisitions chez Schokbéton toujours. Un
député libéral réélu visé par une enquête de
l'UPAC, ça, c'est
Alain Gravel qui a sorti cette nouvelle-là, M. le Président, le
16 avril 2014, je cite : «Exclusif. Radio-Canada a appris qu'un député libéral, réélu
au sein de l'équipe de Philippe [...] — de l'actuel premier ministre — fait l'objet d'une enquête de l'UPAC. Outre ce député, trois ex-parlementaires sous
le gouvernement de Jean Charest sont visés par les enquêteurs.»
Alors, on parle des projets Lierre et Joug, «il y a aussi le projet Justesse,
dont les enquêtes portent essentiellement
sur des soupçons — et je
cite : d'abus de confidence, de corruption, de fraude, de transactions
illégales et de financement illégal
du Parti libéral du Québec», dit toujours Alain Gravel de Radio-Canada.
«Dans le projet Joug — je cite toujours — on retrouve entre autres le
nom d'un député qui vient tout juste d'être réélu.»
Alors,
M. le Président, ce n'est pas bien, bien compliqué, c'est une bonne idée que le
commissaire à l'UPAC soit nommé aux deux tiers par l'Assemblée nationale
parce que ça donne l'occasion au gouvernement libéral et donc au Parti libéral de dire : Nous, on n'a pas peur
des enquêtes de l'UPAC, on est animés d'une volonté de vraiment faire la
lumière sur toutes ces enquêtes, on veut que
ça aboutisse. S'il y a des gens qui ont des choses à se reprocher, on veut
qu'ils soient arrêtés et accusés
devant la justice. On veut tourner la page par rapport au passé du parti, on
veut montrer qu'on regarde en avant
et que, s'il y a eu des comportements délinquants ou même criminels par le
passé sous des administrations précédentes,
nous, ce n'est pas ce qu'on est maintenant, nous, au Parti libéral, on veut
donc montrer qu'on est sérieux. On
veut que le commissaire à l'UPAC aille au bout des choses, et c'est pour ça
qu'on est prêts à le choisir aux deux tiers. On n'a rien à cacher. On n'a peur de rien. On n'a pas peur de la vérité.
Puis, s'il y a des bandits qui ont fait du travail de bandit, bien,
qu'on les arrête puis qu'ils soient traduits devant les tribunaux.
Quelle
belle occasion, M. le Président, que le député de Matane-Matapédia offre aux
députés du Parti libéral de dire : On marque vraiment une rupture
avec le passé, avec toutes ces nouvelles que je viens de citer, M. le Président.
Dans le fond, M. le Président, actuellement, là,
dans la loi actuelle, le gouvernement nomme lui-même un commissaire qui peut
enquêter sur le gouvernement qui le nomme. On s'entend-u que ça n'a pas de bon
sens? Peu importe le
gouvernement, M. le Président. Aujourd'hui, c'est un gouvernement libéral. Que
demain ce soit un gouvernement péquiste,
ou que ce soit un gouvernement caquiste, ou que ça soit un gouvernement
solidaire, peu importe le gouvernement, M. le Président, ça n'a pas de
bon sens que le gouvernement qui est enquêté nomme le commissaire à l'UPAC qui
va l'enquêter. Voyons donc!
Pourquoi est-ce qu'on nomme aux deux tiers le
commissaire à l'éthique? Pourquoi est-ce qu'on nomme aux deux tiers le Directeur général des élections?
Pourquoi est-ce qu'on nomme aux deux tiers le Commissaire au lobbyisme? Bien, c'est justement pour envoyer un message de
crédibilité, d'indépendance. On veut que la personne soit au-dessus de tout soupçon. Parce que sincèrement, là, au
minimum, M. le Président, quand vous avez un gouvernement qui nomme quelqu'un qui pourrait enquêter sur le
gouvernement, quand vous avez un gouvernement libéral qui dit : Moi, je
veux nommer le prochain commissaire à l'UPAC, même si le commissaire à
l'UPAC va poursuivre des enquêtes sur moi, comme Parti libéral, on s'entend-u
qu'au minimum ça a un petit peu l'apparence de conflit d'intérêts? Au minimum.
Quel message
ça envoie, M. le Président, si le parti qui est sous enquête nomme le
responsable des enquêtes? Ça peut-u
être plus clair, comme question, ça? Quel message de crédibilité on envoie si
le parti qui est sous enquête nomme le responsable des enquêtes? Bien,
c'est une maudite bonne question.
Et là on
entend le commissaire Lafrenière, pour lequel j'ai beaucoup de respect, M. le Président.
Je l'ai interviewé plusieurs fois, à La part des choses, avant
qu'il devienne le personnage public serviteur de l'État qu'il a été. Je l'ai interviewé plusieurs fois, je dirais probablement
une dizaine de fois sur toutes sortes d'affaires. D'ailleurs, il n'était pas
connu du public avant de devenir un invité régulier de La part des choses,
M. le Président. Donc, je vous le dis : J'ai beaucoup de respect pour M.
Lafrenière.
M. Lafrenière
dit : Moi, je veux être le plus indépendant possible, hein? C'est ça qu'il
déclare. Il veut que l'UPAC soit la plus indépendante possible. Mais là,
M. le Président, ce qu'on lui répond : Si tu veux être indépendant,
accepte d'être nommé aux deux tiers. Puis,
si tu ne le veux pas — parce qu'il a fait des déclarations à l'effet qu'il ne le veuille
pas — bien là... C'est à nous, députés de
l'Assemblée nationale, M. le Président, de décider si le prochain commissaire à
l'UPAC doit être nommé aux deux tiers des députés de l'Assemblée. C'est à nous
de décider ça. On prend tous les avis,
on entend, bien entendu, les déclarations de M. Lafrenière et on le respecte,
encore une fois, mais on n'est pas obligés d'être d'accord avec lui.
Ultimement, on est ici pour représenter les citoyens, M. le Président. C'est à
ça qu'on sert.
• (16 h 40) •
Alors, nous,
ce qu'on dit, c'est : Qu'est-ce qu'on a à perdre, comme institution
démocratique, M. le Président, à nommer le commissaire à l'UPAC aux deux
tiers? Qu'est-ce qu'on a à perdre, comme institution, comme Assemblée nationale? Qu'est-ce qu'on a à perdre, comme
population, comme société, de décider, tout le monde ensemble, que le
prochain, on va le nommer aux deux tiers? On a rien à perdre et on a tout à
gagner, on a tout à gagner.
C'est
foncièrement une bonne idée, puis franchement, M. le Président, il n'y en a
pas, de bonne raison pour être contre
ça. Il n'y en a pas, de bonne raison pour être contre ça. Je veux dire, on ne
peut quand même pas faire valoir que l'Assemblée nationale aux deux
tiers aurait un moins bon jugement que si c'était fait seulement par le
gouvernement. On ne va pas soutenir ça, M.
le Président, parce que, si c'est ça, la logique, à ce moment-là, le
gouvernement va proposer quoi, que
les autres qu'on nomme aux deux tiers ne le soient plus parce qu'on prétend que
le seul jugement du gouvernement est
suffisant pour nommer des personnes de cette élévation, qui représentent ces
institutions? Bien non, M. le Président, ça a du sens que ce soit l'Assemblée nationale qui nomme le prochain aux
deux tiers parce qu'il s'en trouvera rehaussé dans sa crédibilité, dans sa légitimité. Il n'y a pas personne qui
pourra dire : Cet homme-là ou cette femme-là n'incarne pas une
espèce de consensus.
Puis moi, je
vous le dis, M. le Président, puis il me reste une minute, j'en suis
conscient : Le parti libéral et les élus libéraux qui siègent actuellement en cette Chambre ont tout à
gagner. C'est les premiers qui devraient se réjouir d'une proposition
comme celle-là parce qu'ils vont être capables de dire : Aïe! Aïe! Aïe! Il
a été nommé aux deux tiers. N'allez pas dire, là, que l'UPAC, là, est
influencée par la politique, que l'UPAC est une police politique, qui a eu une ingérence politique, qui a eu une influence
politique. Bien non, il a été nommé aux deux tiers par les députés de
l'Assemblée, pas juste par des
libéraux, mais aussi par des péquistes, puis, espérons-le, par des caquistes,
puis par des solidaires. La crédibilité
des enquêtes, le résultat des enquêtes, le travail de ces policiers-là s'en
trouvera grandi, rehaussé. L'institution de l'UPAC sera renforcée par
une décision comme celle-là, M. le Président.
Moi, je vous
le dis : C'est une excellente bataille qu'on a l'intention de continuer à
mener. Si on ne la gagne pas aujourd'hui
avec le vote d'aujourd'hui, on va continuer à la mener. Je félicite le député
de Matane-Matapédia pour son excellente initiative. Le Parti québécois
ne lâchera pas là-dessus, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le leader
de l'opposition officielle, pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de
Mercier en vous indiquant que vous avez un droit de parole de sept minutes.
À vous la parole.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, M. le Président. Pour Québec
solidaire, il est clair qu'il y a quelque chose de tout simplement logique dans la proposition qui est faite par la
motion inscrite par l'opposition officielle aujourd'hui, c'est-à-dire que le
Commissaire à la lutte contre la corruption
soit nommé et approuvé aux deux tiers des voix des membres de l'Assemblée
nationale.
D'abord, ceux
qui ont suivi tout le dossier de la lutte à la corruption, qui a été mené par
l'opinion publique d'abord, par les
journalistes d'enquête ensuite et les relais politiques à l'Assemblée nationale
depuis 2009... Le rôle qu'a joué Québec solidaire dans cette bataille est non négligeable.
Mon collègue de l'opposition officielle vient de mentionner de tout le dossier de Schokbéton et les enquêtes menées par
l'UPAC dans l'appareil du Parti libéral alentour des relations entre le
Parti libéral et Schokbéton.
Vous
vous rappellerez, M. le Président, que le premier à avoir jeté une lumière crue
sur le financement sectoriel et le
rôle central joué par Marc Bibeau à la tête de Schokbéton a été la tâche de
Québec solidaire. J'ai posé plusieurs fois la question, j'ai révélé notamment la participation tout à fait inattendue
d'un entrepreneur du béton aux côtés du premier ministre d'alors, du Québec, M. Jean Charest à une réception donnée en
l'honneur de George W. Bush à Ottawa en 2005, et comment, alentour de cette
table, Jean Charest et M. Marc Bibeau, en fait, alimentaient des discussions
sur des contrats gouvernementaux à donner et les orientations prises par
le gouvernement de l'époque.
Maintenant,
on ne rentrera pas dans ce débat,
mais ce que je voulais dire par là, c'est que j'ai quand même
été, à cause de ce qui s'imposait à
nous à ce moment-là, au coeur de cette réflexion depuis au moins cinq
ans, et il m'apparaît évident que,
pour le ministre de l'époque qui a institué l'UPAC — nous
nous rappellerons, c'était M. Robert Dutil qui assumait les fonctions du ministère
de la Sécurité publique — la création de l'UPAC était en réponse à une lutte plus large
dans tout le dossier de la corruption qui pouvait être liée dans l'octroi des
contrats publics. Et, comme cet enjeu était particulièrement
critique et a entraîné un débat houleux dans la société avec, si vous vous
rappelez, toute la campagne menée par
des initiatives populaires, les 250 000, 300 000 signatures qui ont
été réunies au bas d'une pétition à l'Assemblée nationale alentour de ça, ensuite l'initiative des
foulards blancs... On peut en penser ce qu'on peut en penser, mais c'était une
situation particulièrement critique, une crise de confiance au sein de
l'opinion publique et une situation qui exigeait une réponse urgente. Et, face aux demandes d'une commission d'enquête
publique, qui est venue plus tard à la suite de ces pressions, le gouvernement, de manière urgente, a
institué cette unité permanente anticorruption comme réponse intérimaire,
comme palliatif, en ne pouvant pas
immédiatement rencontrer la demande de l'opposition et de l'opinion publique
pour une commission d'enquête
publique, et donc, dans cette urgence-là, on n'avait pas les conditions
politiques réunies pour que le gouvernement puisse obtenir l'assentiment
des deux tiers de l'Assemblée nationale.
Cependant,
ceux qui étaient là s'en rappelleront, le gouvernement d'alors s'était bien
employé à nommer à la tête de l'UPAC une personne, en la personne de M.
Lafrenière, qui apparaissait aux yeux de tout le monde, y compris de l'opposition de l'époque, comme tout à fait
indépendante de toute filière politique. La raison était simple : c'est
que le ministre d'alors, M. Dutil,
était particulièrement soucieux, en plein milieu de ce débat-là, de ne pas
donner prise à aucune possibilité, à
aucun, je dirais, doute sur l'impartialité de la personne retenue, pour que les
perceptions soient au rendez-vous, c'est-à-dire
que la personne nommée jouisse de la plus grande crédibilité possible. Suivant
cette logique-là aujourd'hui, les
députés du Parti libéral devraient accueillir avec ouverture et, je dirais,
satisfaction une proposition qui vient compléter l'oeuvre de leur collègue d'alors, M. Dutil, qui était donc animé de
cette volonté de placer l'UPAC au-dessus de tout soupçon.
Quant aux propos
tenus par M. Lafrenière lui-même, je crois que ça émane d'une personne qui
lui-même est consciente de son indépendance.
C'est une personne que je respecte également, et je suis persuadé de son
indépendance. Là n'est pas la
question. Comme M. Lafrenière lui-même est confiant de cette indépendance, il
ne juge pas nécessaire d'avoir
l'assentiment des deux tiers de l'Assemblée nationale. Peut-être, de son point
de vue, mais, du point de vue de l'opinion
publique et pour la pérennité de cette institution qu'on voudrait voir
permanente, justement, et qui va exiger éventuellement d'autres
nominations, il m'apparaît tout à fait logique que l'ensemble des députés de
l'Assemblée nationale se rangent derrière
cette proposition. Et, à date, les arguments que j'ai écoutés qui ont été
employés, déployés par les députés de
la partie ministérielle sont loin d'avoir apporté, au minimum, une réponse
intellectuellement satisfaisante. Pourquoi
ils se refuseraient à quelque chose qui va de soi? On le fait pour tant
d'autres institutions qui nécessitent une neutralité au-dessus de toute
attaque, de tout soupçon, de toute critique.
Donc, c'est en vertu
de cet, je dirais, appel du bon sens et de l'esprit qui a guidé le ministre
Dutil, un ministre libéral, un de vos
collègues, à l'époque pour la création de l'UPAC que j'interpelle mes collègues de la partie ministérielle de revenir sur leur
décision, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, et de voter en
faveur de la motion qui est devant nous. Merci, M. le Président.
• (16 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
député de Mercier,
pour cette intervention. Nous en arrivons maintenant au droit de
réplique de M. le député de Matane-Matapédia, à qui je cède la parole.
M. Pascal Bérubé (réplique)
M.
Bérubé : Merci, M. le Président. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les
arguments du gouvernement quant à notre proposition qui vise à
protéger une institution importante, celle de la lutte à la corruption.
Depuis 2011, le
contexte a changé, et je vais le dire de la façon la plus directe
possible : Le Parti libéral qui forme
le gouvernement du Québec est sous enquête. Sur la rue Waverly à Montréal,
il y a eu perquisition de l'UPAC. Des personnalités importantes font
face à différentes allégations. Violette Trépanier...
Des voix :
...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Une seule personne a la parole, et c'est le
député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Oui,
merci — ça fait mal — Violette
Trépanier, Joël Gauthier, Marc Bibeau, des libéraux notoires bien connus font face à des allégations
importantes. Depuis plus de deux ans, de nombreux observateurs, dont Brian
Myles, que le ministre de la Sécurité publique s'est amusé à discréditer
tout à l'heure, ont remarqué ça : ça tarde à venir. Des opérations
importantes qui visent des élus libéraux, passés et actuels, l'opération Joug
et Lierre...
Une voix :
...
M.
Bérubé : Tu es qui,
toi?
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Un instant, M. le député. M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Simplement
parce qu'il me semble... on a une certaine tolérance, je démontre une certaine tolérance. Le collègue leader du gouvernement a fait cette mention plus tôt, je ne me suis pas levé. Là, c'est la
deuxième fois. C'est clair dans notre
règlement, M. le Président, que, si on veut attaquer la conduite d'un
député, il y a une procédure qui est prévue dans notre
règlement, il faut la prendre.
Là, on laisse
entendre... on ne nomme pas, mais on laisse entendre... Et c'est encore plus
dommage lorsqu'on laisse entendre sans nommer, parce qu'on
ne peut pas réfuter des allégations qui n'ont pas de détail. Alors, je vais
inviter... surtout, surtout lorsqu'on
nomme des personnes qui ne siègent pas, il y a une certaine tolérance
à avoir. Là, on est en train de dire qu'il y a
quelqu'un qui siège ici, des allégations, pas
particulières, pas de particularité, pas de personne. On ne peut pas réfuter des allégations qui n'ont pas de
détail. Je vais l'inviter à la prudence et je vais lui demander de retirer ses
propos concernant ce député, qui est à
quelque part ici, qui serait corrompu, mais on ne sait pas c'est qui, puis on
ne sait pas comment, puis on ne sait
pas où, puis on n'a pas de détail. Parce
qu'à un moment donné, l'énumération qu'il fait, de personnes... Je vous rappelle, M. le Président,
qu'il y a un parti politique qui a été condamné pour du financement politique
illégal, c'est le rapport Moisan, c'est le Parti québécois. Un détail plus, M.
le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, je vais vous
demander votre collaboration, M. le député de Matane-Matapédia. Le débat se déroulait relativement bien. Il ne faut
pas imputer des motifs à des personnes. Alors, je vous demande votre
collaboration, connaissant votre fair-play, M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Bien, on pourrait peut-être nommer son nom, M. le Président, à ce moment-là, s'il le souhaite, parce que lui, il connaît son identité, puis l'ensemble du caucus
aussi, M. le Président.
Continuons, parce qu'il est protégé présentement.
Des voix : ...
M.
Bérubé : Je peux-tu
parler?
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Juste un instant, juste un instant. J'ai bien compris les arguments,
là. Je vous cède la parole, M. le député de Matane-Matapédia. Je vous rappelle les propos du leader adjoint du gouvernement par rapport
à l'attaque de la conduite d'un député. Il y a des mécanismes prévus
dans notre règlement. Alors, je vous demande de faire attention et je
vous demande votre collaboration.
M.
Bérubé : M. le
Président, nous sommes en recherche
de la vérité, et on doit avoir confiance dans l'ensemble de la justice et
des mécanismes qui mènent à des accusations et à des condamnations. Que ça soit
l'UPAQ, que ça soit la direction des poursuites criminelles et pénales,
personne ne doit être au-dessus des lois.
Le problème
qu'on a présentement... Puis tout
à l'heure le leader ne s'est pas levé
quand mon collègue a indiqué qu'il y avait des enquêtes qui
visaient le Parti libéral, parce que c'est reconnu. Il ne m'apparaît pas normal
que le gouvernement soit le seul à choisir l'enquêteur en chef au Québec. Il
m'apparaît que le gouvernement a à gagner à ce qu'il n'y ait aucun doute quant
à l'indépendance nécessaire du commissaire de l'Unité permanente anticorruption.
J'ai dénoté tout à l'heure que le commissaire qui doit être renouvellé en mars prochain par le gouvernement, soit qu'il est renouvellé, soit qu'on nomme une autre personne.
Bien là, il sera évalué sur quelle base? Pas dans un débat public, dans une séance du Conseil des ministres
où moi, je n'aurai pas accès puis le député de LaFontaine non plus, à ma
connaissance, puis le député de Laurier-Dorion non plus, en tout cas,
pas dans un avenir prévisible, quant à moi.
Alors, ce que
je veux indiquer, c'est qu'on a tout à gagner à avoir un débat qui fait en
sorte que, lorsqu'il y aura des résultats d'enquête, par
exemple, ou des accusations qui seront portées, bien là, on pourra dire :
L'Assemblée, au même titre que d'autres institutions importantes comme le Directeur général des élections,
comme le Vérificateur général, sont à
l'aise avec le choix qui a été fait. Qu'est-ce
que le gouvernement a à perdre
d'accepter cette proposition qui est très susceptible de faire en sorte qu'il
n'y ait aucun doute? Sinon, l'alternative est la suivante : le
gouvernement libéral choisit celui
qui enquête sur l'ensemble des enjeux de corruption, mais y compris sur
l'action gouvernementale. C'est ça qui va demeurer, là, de cette motion
si vous ne l'acceptez pas.
Et j'ai écouté le ministre de la Sécurité
publique tout à l'heure indiquer qu'il était contre ça, puis ce n'est pas tellement clair. Quand j'ai indiqué qu'il y a deux
ministres qui ont participé à des conférences de presse avec le commissaire
de l'UPAC, ce n'est pas pour rien. D'abord, ce n'est pas lui qui a choisi, on
lui a demandé de venir participer à une conférence de presse. Je trouve ça
plutôt imprudent. Pourquoi? Bien, est-ce que le commissaire à l'UPAC aurait été
mal à l'aise de refuser? C'est l'impression
qu'il nous a donnée lundi dernier. Il dit : Ils étaient là pour m'appuyer.
Il aurait pu faire une présentation
dans un point de presse, dans une démonstration publique, puis ensuite le
gouvernement aurait pu dire :
Bien, on va suivre ses recommandations puis on va travailler ensemble. Ça a été
fait deux fois : le ministre des Transports,
le président du Conseil du trésor. Deux personnes qui auront le privilège, eux,
d'être autour de la table à huis clos quand
le choix sera fait de renouveler ou non M. Lafrenière. C'est ça, le problème.
Quand M. Lafrenière nous dit lundi
dernier que le plus grand gage d'indépendance, puis il rajoute une couche,
c'est d'avoir encore plus de pouvoir pour
être le seul à faire des enquêtes de corruption au Québec, en haut de la Sûreté
du Québec, de qui il serait indépendant, puis du SPVM et des autres
corps de police, c'est des pouvoirs exceptionnels, extrêmement importants, puis
ça milite encore plus pour que l'Assemblée nationale puisse être saisie d'une
proposition visant à lui assurer une totale indépendance.
Alors
là, le gouvernement libéral, ce qu'il nous envoie comme message, c'est :
Nous autres, là, le patron de la SQ, là,
on avait fait une proposition, c'est nous autres qui le nomment, puis le patron
de l'UPAC, c'est nous autres aussi, pas vous autres. C'est nous autres qui va faire le choix. Mais là on
dit : Oui, mais il me semble que ce qu'on ne savait pas en 2011, qu'on sait maintenant, c'est qu'il y a
des enquêtes en cours, des enquêtes en cours sérieuses sur le financement,
et la porte-parole du Parti libéral, Mme
Ringuette, ça, ce n'est pas une rumeur, elle l'a dit, elle l'a confirmé qu'il y
a eu une perquisition à l'édifice, le
siège social du Parti libéral sur la rue Waverly. À l'époque, à tout le moins,
il était là. Ça, elle l'a dit.
Alors,
moi, ce que je ferais si j'étais le gouvernement, je dirais : Parfait,
vous nous mettez au défi, on n'a rien à cacher — j'ai
entendu ça souvent ici — on va soumettre le bilan de M. Lafrenière à l'appréciation des
groupes parlementaires, on va faire
ce débat puis on va voter. Soit que les gens vont être en accord, soit que les
gens vont être en désaccord puis ils
vont expliquer pourquoi puis ça va être public. Le problème qu'on a, c'est que
le débat, il va se faire seulement entre quelques membres du caucus libéral,
ceux qui ont le privilège d'être au Conseil des ministres. Ça ne sera pas rediffusé. On n'aura pas la transcription;
bien que, des fois, en lisant le journal, on a des transcriptions du Conseil
des ministres, c'est arrivé samedi. C'est susceptible d'améliorer.
Pourquoi qu'on en
parle maintenant? Quelqu'un a posé la question. Parce que le mandat arrive à
échéance au printemps 2016, puis on n'est pas à la dernière minute, on a du
temps pour regarder ça ensemble, cette proposition. Et M. Lafrenière, s'il passe le test du choix de l'Assemblée nationale,
sa légitimité va s'en retrouver renforcée. D'ailleurs, il l'a dit lui-même dans Le Devoir du
17 septembre 2014. Il s'est dit ouvert à toutes les suggestions, y
compris de confier à l'Assemblée nationale le processus de nomination du
commissaire.
J'ai
parlé de Brian Myles tantôt. Moi, je trouve très téméraire de s'attaquer à son
jugement là-dessus. C'est un spécialiste.
On a évoqué un ancien ministre. Je pourrais évoquer un ancien ministre aussi,
M. Marc Bellemare, qui nous a parlé
amplement des risques d'associer des institutions importantes au politique.
Quand j'entends un député tantôt dire : Il ne faut pas que ça soit
politique, de soumettre ça à l'Assemblée nationale, c'est quoi quand c'est
seulement le ou la ministre qui décide de la nomination?
Alors,
ce que je dis au Parti libéral : Ne soyez pas les seuls à choisir qui va
enquêter, notamment sur vous, posez le seul geste susceptible
d'améliorer l'institution...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le député de
Matane-Matapédia.
Mise aux voix
Je vais maintenant
mettre aux voix la motion de M. le député de Matane-Matapédia, qui se lit comme
suit :
«Que l'Assemblée
nationale demande au gouvernement que la nomination du Commissaire à la lutte
contre la corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres.»
Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Alors, la motion...
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Le vote par appel nominal?
Qu'on appelle les
députés.
•
(17 heures — 17 h 12)
•
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Alors, nous allons maintenant procéder à la mise
aux voix de la motion de M. le député de Matane-Matapédia, qui se lit comme
suit :
«Que l'Assemblée
nationale demande au gouvernement que la nomination du Commissaire à la lutte contre la corruption
soit approuvée par les deux tiers de ses membres.»
Alors, que les
députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Péladeau
(Saint-Jérôme), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau), M. Therrien (Sanguinet), M. Bérubé
(Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M.
Traversy (Terrebonne), M. Lelièvre (Gaspé), M. Therrien (Sanguinet)...
pardon, M. Leclair (Beauharnois), M. Gaudreault (Jonquière), Mme Maltais
(Taschereau), M. LeBel (Rimouski), Mme Hivon
(Joliette), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Pagé
(Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M. Villeneuve (Berthier),
Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto (Bourget), Mme
Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).
M.
Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M.
Charette (Deux-Montagnes), M. Martel
(Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge
(Chambly), M. Laframboise (Blainville),
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
Mme D'Amours (Mirabel), M. Lemay (Masson), M. Surprenant (Groulx), Mme
Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Jolin-Barrette (Borduas).
Mme
David (Gouin), M. Khadir (Mercier).
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Que les députés contre cette motion veuillent
bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M.
Fournier (Saint-Laurent), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad
(Louis-Hébert), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys),
M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley
(Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel (Viau), M. Arcand
(Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles),
M. Daoust (Verdun), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M.
Billette (Huntingdon), M. Reid (Orford), Mme Vallières (Richmond), M.
Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme
Charlebois (Soulanges), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion),
M. Girard (Trois-Rivières), Mme Rotiroti
(Jeanne-Mance—Viger), M.
Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie
(Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay
(LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme
de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Rousselle (Vimont), M.
Giguère (Saint-Maurice), M. Fortin (Pontiac),
M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M.
Auger (Champlain), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M.
Merlini (La Prairie), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme
Tremblay (Chauveau).
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Y a-t-il des abstentions? M. le
leader du gouvernement
M. Fournier :
...avec le consentement de la Chambre, avant de faire le calcul des voix, M. le
Président. Il y a le député de
Nelligan qui s'est joint à nous et qui aimerait aussi pouvoir s'exprimer, avec
le consentement de nos collègues.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, y a-t-il consentement pour permettre au député de Nelligan d'exercer
son droit de vote?
Des
voix : ...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
M. le leader de l'opposition officielle, y a-t-il consentement pour permettre
au député de Nelligan... Alors, consentement.
Le
Secrétaire adjoint : M. Coiteux (Nelligan).
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Très bien. Alors, pour le résultat du vote.
Merci.
La
Secrétaire : Pour : 43
Contre :
54
Abstentions :
0
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, la motion est donc rejetée.
Je cède la parole à nouveau à M. le leader adjoint du gouvernement pour
la suite des choses.
M.
Sklavounos :
Je suggère la suite du débat qui avait suspendu à 13 heures, M. le
Président, l'article 6.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'article 6 du feuilleton.
Je vais suspendre quelques instants pour permettre aux députés de
quitter l'enceinte de l'Assemblée.
(Suspension de la séance à 17 h 17)
(Reprise à 17
h 18)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'Assemblée reprend le
débat, ajourné plus tôt aujourd'hui, sur la motion de scission présentée par M. le député de
Jonquière dans le cadre du débat sur l'adoption du principe du projet de loi
n° 59, Loi édictant la Loi
concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les
discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes.
Projet
de loi n° 59
Adoption du principe
Reprise du débat sur la
motion de scission
Je vous avise
qu'il reste 39 min 23 s au groupe parlementaire formant le
gouvernement, dans le cadre de ce débat. Et je cède maintenant la parole
à Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, pour moi c'est important d'intervenir sur la
motion de scission, bien que je sois intervenue lors du début de nos
échanges.
Le projet de
loi n° 59, c'est un projet de loi qui s'inscrit dans un contexte
particulier, qui s'inscrit dans le contexte du plan d'action qui a été déposé par notre gouvernement, du plan
d'action qui vise à s'attaquer à une problématique qui s'exprime dans
différents horizons, dans différentes façons et qui est la radicalisation. Et
ce projet de loi vise à lutter contre les discours haineux, contre les discours
qui incitent à la violence, des discours qui s'attaquent à des clientèles vulnérables, des clientèles qui sont déjà
protégées par la Charte des droits et libertés de la personne et des clientèles
qui sont trop souvent ostracisées par
des discours d'une portée telle qu'elles en sont marginalisées, elles en sont
mises à l'écart, et cette
marginalisation à l'extrême apporte des conséquences importantes. Le projet de
loi vise aussi, dans le cadre de cette
lutte à la radicalisation, à apporter un certain nombre de modifications qui
vont renforcer la protection des personnes.
• (17 h 20) •
Alors, M. le Président, c'est un tout. Les
personnes les plus vulnérables sont protégées, d'une part, contre les discours
haineux et incitant à la violence et, d'autre part, par une série de mesures
bien identifiées qui permettent une meilleure
intervention de l'État, une série de mesures bien identifiées qui ont
fait l'objet bien souvent de
recommandations au fil des années,
suivant l'actualité, notamment qui a fait l'objet de recommandations de la part
du Conseil du statut de la femme, de la commission des droits de la
personne et de la jeunesse. Et donc il s'agit d'un tout, et il faut prendre les
modifications, les dispositions législatives
dans leur ensemble. Et dissocier le projet de loi, M. le Président — ce n'est pas compliqué — ça retarde les travaux, ça retarde l'entrée en vigueur de
dispositions importantes pour la protection des plus vulnérables,
protection à l'encontre d'une forme ou d'une autre de radicalisation.
M. le
Président, on veut éviter des situations, notamment des situations telles que
celles que nous avons vécues cet été.
Rappelons-nous, M. le Président, cet été, la venue du rapper Roosh V, qui
tenait des propos incitant à la violence notamment à l'égard des femmes, des propos qui ont été dénoncés sur
toutes les tribunes, toutes les tribunes : Que va faire la ministre
pour empêcher l'intervention ou la venue de Roosh V au Québec? La collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve demandait à notre
gouvernement d'adopter des mesures pour sévir contre de tels propos, contre de
tels personnages. Elle nous l'a demandé par communiqué, d'ailleurs. Elle
nous a demandé d'agir rapidement. Le projet de loi n° 59 permet justement la mise en place de mesures pour venir
intervenir directement et pour permettre de contrer ce type de discours,
ce type de discours qui porte atteinte à
l'égalité hommes-femmes, ce type de discours qui peut s'inscrire dans une
certaine forme de radicalisation,
parce que la radicalisation, M. le Président, elle n'est pas que religieuse;
elle peut aussi être sociale, elle peut être culturelle.
Alors, on
nous a demandé d'agir. Bien, agissons. Ne scindons pas un projet de loi pour
retarder l'entrée en vigueur de
dispositions qui vont nous permettre d'agir contre des situations comme celle
que nous avons vécue cet été. Je vous parle
de celle-là, M. le Président, de cette situation, de ces propos, parce que,
lorsque j'ai lu le communiqué de ma collègue, je me suis dit : Bravo!
c'est exactement ce qui est prévu dans 59, c'est là que nous allons, nous
allons pouvoir obtenir une collaboration des collègues de l'opposition. Je vous
avoue, ma collègue n'a pas participé à nos échanges, mais la collègue de Taschereau, elle ne semble pas du
tout d'avis qu'on doive donner des outils pour contrer ce type de discours.
Ce n'est pas nouveau, M. le Président. On le sait, qu'on ne se parle pas
toujours, de l'autre côté de la Chambre.
Mais, vous
savez, c'est quand même assez impressionnant de constater que l'ancienne
ministre responsable de la Condition
féminine ne soit pas sensible à l'importance d'intervenir dans de tels cas.
Parce que la députée de Taschereau, avant
la dernière élection, occupait les fonctions de ministre de la Condition
féminine. Elle est très consciente des menaces du discours haineux, du discours incitant à la violence dont les femmes
sont victimes. Pourquoi n'est-elle pas solidaire, M. le Président? Pourquoi ne
travaille-t-elle pas à améliorer le projet de loi, mais travaille-t-elle pour
le retarder? C'est ça qui
m'interpelle, c'est ce qui me travaille, M. le Président, parce que, bien
honnêtement, est-ce qu'un projet de loi peut être bonifié? Oui. C'est le travail que nous faisons en cette Chambre,
que nous avons fait dans bon nombre de projets de loi. Je dois vous avouer, M. le Président, en huit
ans et demi de vie parlementaire, très peu, très peu et même très rares ou exceptionnels sont les projets de loi qui ne
font l'objectif d'aucune modification entre le moment de leur présentation
et le moment de l'adoption. Prenons, par
exemple, le projet de notre collègue la députée de Joliette sur les soins de
fin de vie, projet de loi qui a reçu plus de 80 amendements, et
c'est un projet de loi qui a été salué.
Alors, le
travail parlementaire nous amène à échanger, nous amène à écouter, nous amène à
bonifier. C'est la beauté de la
chose. Ce que je souhaite, M. le Président, c'est que ce travail puisse se
faire, puisse se continuer, parce que le projet de loi s'inscrit dans cette volonté commune de protéger les personnes
vulnérables. Et de proposer une motion de scission tel que l'a fait notre collègue de Jonquière nous
empêche justement de pouvoir nous pencher sur ces mesures, nous empêche de protéger davantage les personnes vulnérables.
C'est une réponse législative, le projet n° 59, à une problématique, à un
certain nombre de problématiques, je dirais, qui ont surgi, et c'est une
réponse qui est claire. Est-ce qu'on peut collaborer? Est-ce qu'on peut travailler ensemble pour le bien
de ceux et celles qui ont besoin de cette attention, qui auront besoin de
ces outils?
M.
le Président, lorsque j'ai pris parole, d'entrée de jeu, j'ai mentionné que des
amendements seraient déposés, parce
que j'ai été à l'écoute des citoyens. J'ai été, aussi, sensible aux questions
et aux interventions de nos collègues de l'opposition. La députée de Montarville a soulevé des enjeux importants
dans ses questionnements, et je pense qu'il est important d'apporter des réponses à certains questionnements soulevés
par notre collègue. Nous le ferons, M. le Président. Je serai à l'écoute des demandes aussi qui seront
formulées par les collègues parlementaires, des propositions d'amendement.
Ce travail-là, il doit se faire ensemble
pour contrer cette radicalisation, qui est montante et qui, malheureusement,
s'attaque, d'abord et avant tout, aux
personnes vulnérables. Briser, séparer, nous savons que c'est le motto de la
première opposition, mais je nous invite à aller au-delà de l'idéologie,
je nous invite à nous pencher sérieusement sur cet enjeu.
Comme
je le mentionnais, M. le Président, le projet de loi n° 59 fait partie
d'un tout, fait partie d'un plan de lutte global pour contrer la radicalisation. On souhaite dire non aux discours
haineux, non aux discours qui incitent
à la violence, on veut protéger les
mineurs contre les mariages forcés, on veut permettre... et protéger, plutôt,
les personnes vulnérables en leur donnant la possibilité d'obtenir des
ordonnances de protection.
C'est
un tout, M. le Président. Il y a un lien entre les dispositions prévues en
première partie du projet de loi et les dispositions qui s'ensuivent. On veut protéger les enfants en introduisant la
notion de contrôle excessif et assurer que, sur le territoire du Québec, nous puissions continuer de vivre dans un monde
où le respect de la différence fait notre marque de commerce, que ce respect se fasse sans haine et sans violence. M. le Président, il est important de travailler sur ce projet de loi là de
façon globale. Le scinder n'apportera
aucun élément positif, ne permettra d'aucune façon d'aborder les questions
de façon globale, ne permettra pas d'apporter rapidement une réponse aux préoccupations que la collègue d'Hochelaga-Maisonneuve
a soulevées le 4 août dernier. C'est malheureusement ce qu'entraînera
la scission de ce projet de loi là.
• (17 h 30) •
Alors,
M. le Président, je sais que, du côté du Parti québécois, on veut opérer dans la division, on le propose en faisant la
motion de scission, mais, au lieu de diviser, est-ce qu'on peut travailler
ensemble, travailler collectivement pour
nous permettre de faire avancer le Québec, pour nous permettre de lutter ensemble contre la
radicalisation et de le faire d'une façon ouverte? Les éléments soulevés par
notre collègue de Taschereau sont inexacts, M. le Président. Mais la
députée — je
relisais l'allocution de la députée
de Taschereau — la
semaine dernière, lorsqu'elle nous disait : On va créer
un nouveau tribunal... Le projet de
loi ne crée pas de nouveau tribunal,
là. Le Tribunal des droits de la personne, il existe. D'ailleurs, il y a deux semaines, nous avons souligné son 25e
anniversaire. Il existe. La Commission
des droits de la personne, là, elle n'est pas nouvelle, elle existe depuis fort
longtemps. D'ailleurs, nous allons fêter, en décembre prochain, les 40
ans, le 40e anniversaire, de la charte. Rien de nouveau dans tout ça, là, M. le
Président.
On
prétend qu'il y a une nouvelle définition du discours haineux. Il n'y a pas de
nouvelle définition du discours haineux.
Oui, est-ce que le projet de loi nécessite peut-être qu'une définition conforme
aux dispositions, aux enseignements de
la Cour suprême y soit inscrite à des fins notamment pédagogiques?
Possiblement, M. le Président. Puis là-dessus j'ai entendu les interventions en commission
parlementaire. Puis je pense qu'en effet, pour les fins d'acceptabilité
sociale, pour bien comprendre ce qu'est le discours haineux, pour éviter
qu'on dise et qu'on associe le discours haineux à ce qu'il n'est pas, nous avons le devoir de le définir. Nous allons le
faire, M. le Président, c'est important. Parce que c'est important de mentionner, M. le Président, que le
discours haineux, là, ce n'est pas le discours qui critique la religion, là.
De l'autre côté, on tente de nous dire qu'on
va empêcher la critique d'une religion. Pas du tout. La critique d'une religion,
c'est sain dans une société démocratique. La
critique d'une idée politique, c'est sain dans une démocratie, M. le Président.
On doit pouvoir continuer. Et notre liberté
d'expression, elle est essentielle. Il ne s'agit pas d'un projet de loi qui
vient porter atteinte à cette liberté d'expression. Ce n'est pas ça.
C'est un projet de loi qui reprend les enseignements de la Cour suprême, M. le Président, pas plus. La Cour
suprême, dès 1990, a eu à se prononcer sur la notion de discours haineux.
Ses décisions, au fil des ans, entre
l'affaire Taylor et l'affaire Whatcott ont permis de définir, de dégager une
définition de ce qu'est le discours
haineux. Cette définition, ce concept est celui du projet de loi. Donc, ce
n'est pas une nouvelle définition, ce
n'est pas un nouveau concept complètement, c'est un concept qui est tiré de la
jurisprudence, c'est un concept qui a été peaufiné et qui a fait l'objet
de plusieurs, plusieurs décisions.
On
nous rappelle, M. le Président, l'intervention de Me Grey, un juriste que
je respecte infiniment, qui est venu en commission parlementaire et qui
a manifesté certaines réserves à l'égard du projet de loi. Mais je vous dirais
que, quelques semaines plus tard, dans un
autre dossier qui a été fortement médiatisé, un dossier qui concernait le jeune
Jérémy, Me Grey disait en
entrevue dans La Presse que la liberté d'expression avait
ses limites. Lui-même, le même Me Grey qui, quelques semaines plus
tôt était devant notre commission.
Je
pense que c'est important qu'on en parle. C'est important qu'on dise les choses
telles qu'elles sont, qu'on ne fasse
pas de raccourcis parce que ce projet de loi là, il est important pour notre
société, M. le Président. C'est important qu'on comprenne sa vraie nature. C'est important qu'on explique ce qui
en découle. C'est important que l'on mentionne que le pourquoi de ce projet-là est vraiment de protéger ceux qui celles
qui sont les plus vulnérables de notre société à l'encontre, notamment,
d'une radicalisation qui est montante.
Et,
vous savez, on pourrait continuer et débattre pendant des heures de cette
question parce que l'allocution de ma collègue,
qui a été d'une durée de près d'une heure, comporte un certain nombre
d'inexactitudes qu'il est important de corriger. Nous avons la
responsabilité comme parlementaires de prendre le temps de bien lire les
projets de loi, de les comprendre, et
d'échanger de façon... avec une ouverture d'esprit, et de voir à ce que les
projets de loi qui sont déposés ici puissent cheminer d'autant que ces
projets de loi là visent à protéger les personnes les plus vulnérables et
visent à donner des outils pour protéger également les femmes.
Alors,
j'invite ma collègue ex-ministre de la Condition féminine à se rallier à notre
cause, à travailler en collaboration
avec les collègues et j'invite surtout, surtout les parlementaires de cette
Assemblée à ne pas adopter cette motion
de scission et à la mettre de côté pour permettre une étude complète d'un
projet de loi qui est un tout et qui vise à contrer une problématique
complexe, mais une problématique qui nous interpelle tous et qui nous
interpelle toutes. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, Mme la ministre de la Justice pour cette intervention. Y a-t-il d'autres interventions du côté
gouvernemental? S'il n'y a pas d'autre intervention, je vais répartir le temps
et je vais offrir le temps à l'opposition
officielle et à la deuxième opposition... Juste l'opposition officielle. M. le
leader adjoint... M. le leader de
l'opposition officielle, il reste du temps au débat. Je ne sais pas si vous
voulez vous en prévaloir. Sinon, je vais...
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, le prochain intervenant.
Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, désolé, vous n'étiez pas dans
mon champ de vision. Je vous vois maintenant. Alors, je vous cède la parole.
Mme
Carole Poirier
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour
d'intervenir en lien avec votre décision, M. le Président, concernant la recevabilité de la motion de
scission du projet de Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte
contre les discours haineux et les
discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes.
Alors, M. le
Président, je reprends votre décision en tant que telle où vous reconnaissez
qu'il y a là deux parties dans ce projet
de loi, où vous venez justement identifier qu'il y a une première partie où on
vient créer finalement une loi en
tant que telle et qui vient englober une partie de ce que la ministre vient de
nous tenir comme discours, toute la partie sur les discours haineux et les discours incitant à la violence. Ça,
effectivement, c'est un champ d'action en tant que tel que la ministre a tenté de couvrir avec son projet
de loi qui est très différent, très, très, très différent, M. le Président de
la deuxième partie.
Parce que la
deuxième partie, M. le Président, est à mon avis une partie qui n'a pas besoin
des mêmes... qui n'a pas les mêmes besoins que la première partie, je
vais le dire comme ça. Que l'on parle de mariage forcé, que l'on parle d'ordonnance de protection, que l'on parle de la
protection de la jeunesse, de sécurité physique ou morale des élèves et des
étudiants, c'est à mon avis un sujet tout à
fait différent que celui des discours haineux. Il ne s'agit pas du tout des
mêmes objets. Il ne s'agit pas non
plus des mêmes volontés pour les deux objets qui sont en cause. Je ne vois pas
ce que viennent faire les discours haineux dans les mariages forcés. Je
ne vois pas ce que viennent faire les discours haineux dans la protection de la jeunesse en tant que telle. Je ne
vois pas le lien et je pense que vous ne l'avez pas vu, vous non plus, d'où
votre décision d'accueillir cette motion de scission.
• (17 h 40) •
Alors, M. le
Président, il y a là, dans ce projet de loi là, des consultations qui ont été
tenues et je vais vous dire que j'ai
rarement vu un projet qui réussit à faire autant de personnes qui pourraient...
on pourrait penser qu'elles auraient été
vers le même sens de décision ou la même lecture du projet de loi, mais qui
n'en sont pas du tout. Quand je vois des personnes complètement
contradictoires entre elles, mais rejeter, tout le monde, le projet, il y a là
quelque chose qui m'interpelle. Quand je vois l'ex-collègue de la ministre,
la députée Fatima Houda-Pepin, qui
est venue en commission et qui nous
dit que le projet de loi aidera à stigmatiser les critiques de... Excusez, je
recommence. Elle dit que le gouvernement
Couillard favorise... le gouvernement du premier ministre, le gouvernement
libéral — je vais
interpréter ce qui est écrit — favorise les intégristes avec
le projet de loi n° 59 qui les aidera à stigmatiser les critiques de leurs
pratiques rigoristes. Elle continue en disant : «"Je suis estomaquée.
", [Mme Fatima Houda-Pepin dit] à l'issue de sa comparution en commission parlementaire au sujet du projet de loi
n° 59...» Et elle nous dit : «"C'est une revendication des intégristes depuis longtemps", estime
l'ancienne députée[...]. Grâce au projet de loi n° 59, un groupe
religieux, et non plus seulement une personne croyante, pourrait se dire
la cible d'un discours haineux...»
Il y a là, à
mon avis, M. le Président, une dérive importante que produit le projet de loi.
Et, à cet effet, je reprendrais les
propos de la ministre qui, semble-t-il, m'a citée à plusieurs reprises. Alors,
je vais tout simplement relire le propos de la ministre qui s'est tenu
en cette Chambre, qui dit : «...j'aimerais rappeler aux collègues ce que
disait la députée d'Hochelaga-Maisonneuve le
4 août dernier [à] la venue du blogueur Roosh V, reconnu pour ses propos haineux
envers les femmes.» Alors, déjà, là, il y a quelque chose de fondamental
dans ce que dit la ministre, c'est qu'elle dit qu'il est reconnu pour ses
propos haineux, donc, elle reconnaît qu'il avait des propos haineux.
«Elle a dit
que c'était — elle parle
de moi — le
devoir du gouvernement de lancer un message pour indiquer que les propos haineux faisant la promotion de la
violence envers les femmes étaient inacceptables.» Je pense que juste de
lire ça et de le dire, c'est assez clair.
Penser qu'un gouvernement accepte que des propos haineux soient tenus envers
les femmes... et un gouvernement qui
ne le ferait pas est, à mon avis, un gouvernement qui ne fait pas son travail
de protection envers 50 % de la population qu'il gouverne.
Et elle
continue en disant : «Je suis d'accord avec ma collègue[...]. C'est
exactement ce que nous entendons faire avec
le projet de loi n° 59.» Moi, je n'ai pas la même lecture, M. le
Président. Et elle continue en disant : «Mais, pour lancer ce
message fort que les propos haineux sont inacceptables, il faudrait que la
députée de Taschereau écoute sa collègue et qu'elle collabore avec nous afin de faire cheminer nos
travaux. J'espère [...] pouvoir compter sur son appui, pouvoir compter sur l'appui de la députée de
Montarville [aussi]i, pouvoir compter sur l'appui des collègues de l'Assemblée
pour permettre de faire cheminer rapidement cet important projet de loi.»
Alors, M. le
Président, je trouve ça assez particulier, les propos de la ministre,
m'utilisant pour justifier ce qu'elle veut
faire. Parce que, quand je dénonce Roosh V je dénonce exactement ce que
j'ai fait le 19 octobre 2011. Le 19 octobre 2011 — ça, la
ministre ne l'a pas repris — en période de questions, j'ai interpellé la
ministre de l'Immigration et je lui ai... Je vous lis au texte, M. le
Président, la question que j'ai posée à la ministre de l'Immigration :
«Cette
semaine doit se tenir à Montréal une conférence de l'Islamic Education and
Research Academy avec pour conférenciers
deux personnages aux opinions inacceptables. Comme d'autres avant eux, Hamza
Tzortzis et Abdur Raheem Green viennent au Québec pour déverser leur
flot de haine homophobe, antiféministe, antisémite et contre la liberté d'expression et tenter de présenter une image
inacceptable de l'islam... une image acceptable de l'islam politique radical.
Il n'y a pas de compromis possible avec de
tels personnages. Pourtant, depuis plusieurs jours, ces deux individus sont
entrés impunément au Canada, alors que
l'Allemagne et les États-Unis leur ont signifié qu'ils n'étaient pas les
bienvenus sur leur sol.
«Le ministre
de la Sécurité publique peut-il nous dire pourquoi le gouvernement du Québec
n'a rien fait pour exiger que le gouvernement fédéral interdise l'entrée
au pays de ces deux personnages? Va-t-il exiger...»
Alors, la
ministre de l'Immigration de l'époque, qui est toujours la ministre de
l'Immigration maintenant, était intervenue,
M. le Président, et nous avions adopté une motion, une motion unanime ici, pour
dire que des personnages comme ça, on
n'en veut pas. Pas eu besoin d'un projet de loi pour ça, là. Et, en plus, la
ministre était intervenue parce qu'ils
devaient faire leur conférence à Concordia. Et la ministre avait lancé un
message fort en disant : J'invite l'institution de l'Université Concordia à ne pas accueillir ces
personnages-là. C'est un message fort, ça. Moi, je n'ai pas entendu la ministre, cet été, faire la même chose pour Roosh
V. Je ne l'ai pas entendue dire qu'elle était intervenue pour demander à
l'institution qui accueillait Roosh V... Je ne l'ai pas entendue.
Alors, quand
elle m'utilise, quand elle utilise mes propos, il faudrait qu'elle les utilise
jusqu'au bout en disant ce qu'elle
n'a pas fait. Et elle n'a pas besoin de la loi pour faire une intervention,
elle n'a pas besoin d'une loi, comme ministre
de la Condition féminine, pour se lever debout et dire : Je vais
intervenir, je vais intervenir parce que je trouve ça inacceptable. Elle l'a dit, que c'était
inacceptable, je dois le lui reconnaître. Je suis honnête là-dedans, elle l'a
dit : C'est inacceptable, cet
été, Roosh V. Je pense qu'il n'y a pas personne sur la Terre qui n'a pas dit
que ce n'était pas inacceptable, et
ça, elle l'a dit. Mais elle n'est pas intervenue et elle s'abrite en arrière
d'une loi dont on n'a pas besoin pour faire ce que sa collègue a fait,
qui est d'intervenir.
Alors, M. le
Président, moi, quand je vois la ministre qui me cite, me disant que c'est
inacceptable, les propos de Roosh V...
Oui, c'est inacceptable, oui, c'est inacceptable, et il faut justement se lever
debout à ce moment-là et intervenir. Il
faut faire en sorte qu'il n'y ait pas de lieu pour recevoir ces gens-là, il n'y
ait pas de possibilité pour ces gens-là de se faire entendre, puisqu'ils
traitent...
Et moi, je me
rappelle très bien, M. le Président, suite à cette motion que nous avons
adoptée unanimement, moi, j'ai vu des
gens de la communauté gaie juive, des gens de la communauté gaie juive venir
ici, à l'Assemblée nationale, me remercier
d'avoir fait adopter cette motion-là. Pourquoi? Parce que ces deux islamistes
radicaux venaient porter un message homophobe radical. Je ne sais pas si
ça existe, même, «homophobe radical». Je me pose même la question si ça se dit, ces deux mots-là, un à côté de
l'autre. Mais c'était ça. Alors, ces gens-là, ces deux personnages qui étaient
connus, bien le Canada les a laissés
rentrer, M. le Président. Le Canada les a laissés rentrer sans se poser de
questions malgré que les États-Unis, l'Allemagne, eux, étaient
intervenus. Alors, M. le Président, le projet de loi de la ministre n'empêchera pas de laisser entrer ces gens-là. Le projet de loi de la ministre ne nous permettra pas, à part que de faire
des motions ici, à l'Assemblée nationale, d'interpeller la commission, parce
que son projet de loi, ce qu'il dit, c'est d'interpeller la Commission des
droits de la personne. Ça n'empêchera pas ces gens-là de rentrer au Canada.
Ce qu'il faut faire, c'est d'avoir justement...
Ma collègue avait proposé un observatoire précédemment. Bien, justement,
cet observatoire-là nous aurait permis d'être en alerte à la venue de ce genre
de personnages qui viennent tenir des propos absolument inadmissibles
chez nous, des propos que l'on ne peut accepter et que même d'autres pays ont
empêché justement d'entrer chez eux.
Bon, là,
c'est sûr que je peux avoir la note facile de mon côté parce que,
chez nous, nous, on y croit. Si nous étions un pays, on aurait pu intervenir sur nos frontières, mais on n'en est
pas là. Mais on peut au moins dire au Canada,
encore aujourd'hui, on peut leur
dire, au Canada, qu'on n'en veut pas, de ces gens-là chez nous. Et c'est ce
qu'on avait fait par une motion unanime,
on avait dit que ces gens-là, on n'en veut pas chez nous, et on peut encore et
encore le faire. Mais est-ce que le
projet de la ministre va fermer les frontières du Canada, et particulièrement
celles du Québec, parce que c'est celles-là
qui nous intéressent, à des personnages qui vont vouloir venir tenir des
discours haineux chez nous? Non, non, pas du tout.
Alors, M.
le Président, avant de citer des collègues, comme l'a fait la ministre, bien,
il faut faire l'histoire au complet. Mais,
encore là, M. le Président, je suis toujours surprise de voir des personnes qui
ne sont pas du tout de la même... des mêmes axes de pensée, je vais le
dire comme ça, se prononcer tous contre ce projet de loi là.
• (17 h 50) •
Je vous ai
parlé de votre ex-collègue la députée Fatima Houda-Pepin, la députée de
La Prairie, qui rejette le projet de
loi, mais, quand je vois Adil Charkaoui... Alors, on peut penser que ce sont
des personnes qui ne sont pas du tout dans la même ligne de pensée... Adil Charkaoui ne veut pas du projet de loi
n° 59. Bien, ce n'est pas pour les mêmes motifs, là. Alors, on voit bien que l'objectif du projet de loi
n'atteint pas sa cible puisque les gens qui pensent totalement un contraire
à l'autre rejettent tous les deux le projet de loi.
Alors,
je vous cite ce qui est paru dans Le Devoir le 16 septembre
dernier, M. le Président, sous la plume de Marco Bélair-Cirino, alors :
«Le
prédicateur Adil Charkaoui accuse des élus de l'Assemblée nationale de l'avoir
muselé dans la foulée de son passage mardi soir devant la Commission des
institutions.
«Le
porte-parole du Collectif québécois contre l'islamophobie a appelé la ministre
de la Justice [...] à "abandonner"
le projet de loi antidiscours de haine. À ses yeux, celui-ci ne contribuerait
pas à "résorber" ou à "réduire" l'islamophobie, au
contraire. Le projet de loi n° 59 — et je le cite — "cible
implicitement toute une communauté" en établissant
une "corrélation problématique entre l'islamophobie et la
radicalisation".» C'est assez incroyable, M. le Président, que M.
Charkaoui et Mme Fatima Pepin rejettent tous les deux le même projet de loi
mais pour des motifs totalement contraires. C'est assez parlant, à mon avis.
Mais
ce qui est le plus intéressant à cela, c'est le propos de Gérard Bouchard. Alors, Gérard Bouchard, qui, on le sait,
est le père de toute la consultation importante qu'on a eue en 2007‑2008, pour
lequel on a tabletté son rapport, eh bien, Gérard Bouchard nous dit dans La Presse
du 16 septembre, même jour : «S'il est permis de ridiculiser les convictions d'un agnostique, pourquoi celles d'un croyant devraient-elles être
exemptées?» Alors, il nous dit : «Récemment, Salam Elmenyawi est
intervenu, à Québec, devant la commission parlementaire sur le projet de loi n° 59
visant à combattre les propos haineux. À
cette occasion, le leader musulman — et, entre parenthèses, il est dit :
"Il est président du Conseil
musulman de Montréal" — a réclamé un amendement au projet de loi
pour que, à l'avenir il soit formellement interdit de se moquer de l'islam.»
Est-ce
que ça nous rappelle Charlie Hebdo? M. le Président, c'est assez
incroyable qu'un citoyen vienne en nos murs
après les événements de Charlie Hebdo et vienne tenir un tel propos.
Notre liberté d'expression, elle est extraordinaire. Mais M. Salam
Elmenyawi est venu dire ici qu'il demandait qu'il soit formellement interdit de
se moquer de l'islam. Est-ce qu'il a
mentionné «de toutes les religions»? Est-ce qu'il a mentionné «de la religion
catholique»? Non, l'islam. Alors,
pour M. Bouchard, que je continue à citer, «l'affaire mérite attention pour
deux raisons. D'abord, [...]il parlait au nom de son association,
[alors,] on suppose qu'il relayait une volonté exprimée par une majorité de ses
membres. En deuxième lieu, cette demande est
sans précédent; elle donne à penser qu'un mouvement d'idées pour le moins
troublant serait en cours parmi
certains milieux musulmans.» Et, un peu plus loin dans son texte, il nous
dit : «Il fut un temps au Québec
où il en était ainsi.» Et ça, il faut se rappeler notre histoire. «La religion
catholique était intouchable. C'était avant que notre société n'accède
pleinement au respect des différences, au respect des droits de chacun.»
On
se rappellera, M. le Président, qu'avant les années 60, qui aurait osé s'attaquer
à la religion catholique? Qui aurait
osé faire une caricature? Certains journaux plus libertariens l'ont fait. Et on
a vu comment l'Église catholique avait une
mainmise sur la société québécoise. Notre société est passée à autre chose,
notre société a évolué. La société québécoise
n'est plus dans ce dogme-là des religions. Et là, ici, en cette enceinte,
quelqu'un vient nous dire : Je ne vous permets... Je demande qu'il soit formellement interdit de se moquer de
l'islam. Est-ce que quelqu'un au Québec viendrait dire aujourd'hui : Il est formellement
interdit de se moquer de la religion catholique? Est-ce que quelqu'un viendrait
dire ça? C'est un discours d'un autre siècle, ce n'est pas un discours
actuel.
Alors, M. le
Président, je vais vous dire que votre décision d'accepter cette demande de
scission du projet de loi n° 59 nous
apparaît fort judicieuse. Nous sommes tout à fait volontaires à discuter de la
partie II du projet de loi, de parler
des mariages forcés — oui, il
faut en parler — de
parler de l'ordonnance de protection — oui, puis j'ai bien des choses à dire là-dessus — de la protection de la jeunesse, de la
sécurité physique ou morale des élèves et des étudiants. Oui. Et on peut démarrer des travaux très
rapidement. Je pense que la ministre, au cours des auditions, a pris le pouls
que la partie I de son projet de loi
n'est pas adéquate, n'est pas... Ce n'est pas prêt, ce n'est pas mûr. Ce
qu'elle nous a présenté n'est pas
mûr. Alors, pour faire avancer le Québec, M. le Président, pour protéger des
enfants, parce que, dans les mariages forcés,
on parle des enfants, pour protéger des gens ici, débutons donc des travaux
dans la deuxième partie. Et laissons la ministre continuer à travailler
sur la première partie.
Je
pense que le Québec, M. le Président, va en bénéficier, va bénéficier de faire
avancer la deuxième partie, parce qu'on
en a besoin. Mais, M. le Président, ce qu'on besoin actuellement, c'est de
s'assurer que la ministre retourne faire ses devoirs, que la ministre continue son travail. Elle peut agir sur les
discours haineux comme l'a fait sa collègue ministre de l'Immigration précédemment, comme l'ont fait
d'autres collègues lorsqu'ils étaient titulaires de charges publiques, pour s'assurer qu'il n'y a pas, dans nos
institutions qui relèvent de l'État ou subventionnées à majorité par l'État...
on ne peut avoir de radicalisme, de propos radicaux qui s'y tiennent.
Alors,
M. le Président, j'invite plutôt la partie gouvernementale aujourd'hui à
soutenir cette demande de scission du
projet de loi, et à faire en sorte que l'on puisse régler les mariages forcés
et la deuxième partie de ce projet de loi dans les meilleurs délais, et de faire en sorte que le débat sur la première
partie, qui est les discours haineux, soit retravaillé afin que l'on puisse justement avoir une loi qui
réponde vraiment aux besoins de notre société. Alors, merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve. Je vais maintenant mettre aux voix la motion qui se
lit comme suit :
«Qu'en
vertu de l'article 241 du Règlement de l'Assemblée nationale, le projet de loi
n° 59, Loi édictant la Loi concernant
la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant
à la violence et apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes soit scindé en deux projets de loi :
«Un premier intitulé
Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours
haineux et les discours incitant à la violence, comprenant l'article 1 et
l'article 43; et
«Un
second intitulé Loi apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes, comprenant les articles 2 à 43.»
Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Vote par appel nominal, M. le leader adjoint du gouvernement?
M.
Sklavounos :
Je vous demanderais, en vertu de l'article 223, M. le Président, de reporter le
vote à demain, aux affaires courantes.
Vote
reporté
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, conformément à la demande
du leader adjoint du gouvernement, le vote sera reporté à demain, après
la période des affaires courantes.
Ajournement
Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux à
demain, 9 h 40. Merci. Bonne fin de soirée.
(Fin de la séance à 18 heures)