(Neuf heures quarante-cinq minutes)
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, chers collègues, je vous
souhaite une très bonne séance. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous
en sommes à la rubrique de la déclaration des députés, et je cède la parole à
M. le député de Sherbrooke.
Souligner le succès de la collecte L'Estrie met
ses culottes de l'organisme Récupex
M. Luc Fortin
M.
Fortin (Sherbrooke) : Merci beaucoup, M. le Président. Récupex, un
organisme sans but lucratif de Sherbrooke,
est une entreprise d'insertion qui utilise le contexte de la récupération de
vêtements, tissus et accessoires pour
offrir différents plateaux de travail à ses employés. Depuis 19 ans, Récupex
tient son événement de collecte de vêtements L'Estrie met ses culottes, qui a permis, à ce jour, de recueillir pas
moins de 39 millions de livres de vêtements, évitant ainsi que
ceux-ci prennent la direction du site d'enfouissement.
Lors
de l'édition de 2015, qui se déroulait samedi dernier, plus de
250 000 livres de vêtements ont été recueillies, ce qui en
fait une année record. C'est pourquoi, M. le Président, je tenais aujourd'hui à
remercier toute l'équipe de Récupex pour son dévouement exceptionnel envers
notre communauté ainsi que pour sa contribution marquée au développement durable. Au nom de tous les
parlementaires, je lui adresse également mes félicitations pour cette
19e édition. Longue vie à Récupex! Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député.
M. le député de Matane-Matapédia, je vous cède la parole pour votre
déclaration.
Féliciter l'équipe de hockey les Ambassadeurs de la
Vallée,
gagnante de la coupe Dodge catégorie bantam CC
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
M. le Président, aujourd'hui, je désire souligner et féliciter les efforts du
club de hockey les Ambassadeurs de la
Vallée. Le club bantam CC porte bien son nom, plus que jamais depuis qu'il a
remporté la coupe Dodge remise à la
meilleure équipe du hockey évoluant dans le hockey double lettre. Avec un
dossier de 15 victoires et 10 défaites
en saison régulière, leur conférant le quatrième rang du classement de la
ligue, rien ne les prédestinait à cette belle victoire. Les Ambassadeurs de la Vallée ont réussi à vaincre
l'équipe qui fut leur bête noire tout au long de la saison régulière,
celle-ci a une fiche presque parfaite de 25 victoires, une seule défaite.
Ils ont remporté par un blanchissage de 2 à
0 en finale. Leur volonté et leur esprit d'équipe leur ont permis d'élever leur
niveau de jeu à un point tel qu'ils ont réussi à vaincre les favoris du
tournoi.
Je
désire féliciter tous les jeunes joueurs, qui ont fait preuve d'une
détermination hors du commun, ainsi que leur entraîneur-chef,
M. Martin Roy, et toute son équipe d'assistants pour cet exploit
formidable. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député. M. le député de
Côte-du-Sud, je vous cède la parole.
Féliciter les gagnants du Concours québécois en
entrepreneuriat de Chaudière-Appalaches
M. Norbert Morin
M. Morin :
M. le Président, aujourd'hui, j'ai le grand bonheur de souligner l'excellence
de deux entreprises gagnantes dans chacune
de leurs catégories au Concours québécois en entrepreneuriat, édition régionale
de la Chaudière-Appalaches.
Dans la catégorie
Secondaire adaptation scolaire, les élèves du CPC de l'école secondaire la
Rencontre de Saint-Pamphile, avec leur
compagnie Des Produits alimentaires en pots, ont imaginé une variété de
produits pouvant être offerts en
guise de cadeaux d'hôtesse : soupe dans de jolis pots, tasse comprenant le
nécessaire pour faire des petits gâteaux, biscuits et
brownies instantanés tenant dans des contenants soigneusement décorés.
Dans
la catégorie Formation
professionnelle et éducation
des adultes, avec leur projet de pièce de théâtre à vocation sociale, les élèves de l'éducation
des adultes de Montmagny—L'Islet-Nord
ont remporté les honneurs avec Le Bonhomme Carnaval rit jaune.
Cette pièce se voulait un outil de sensibilisation à la perte du contrat de
l'effigie du Bonhomme Carnaval, octroyé à une compagnie de la région, au profit
d'une compagnie chinoise.
Je tiens à
vous souhaiter bonne chance lors de l'édition nationale du grand Concours québécois
en entrepreneuriat. Bravo à vous tous, et la région vous aime!
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député. M. le
député de La Peltrie, pour votre déclaration.
Rendre hommage à M.
Gaston Cauchon, ancien
combattant, pour son engagement bénévole
M. Éric Caire
M.
Caire : Merci, M. le Président. Vous me permettrez de souligner la présence,
dans nos tribunes, de M. Beauregard, de la légion, qui représente M.
Cauchon, malheureusement retenu pour des raisons de santé.
Donc, malgré
son âge vénérable, M. Cauchon continue son implication bénévole depuis
maintenant 65 ans. Cet ancien
combattant des Forces canadiennes dans l'aviation poursuit encore aujourd'hui
son bénévolat au sein de plusieurs organismes, notamment au sein de la
Légion royale canadienne 265, Lt.-Col. J.-Charles Forbes.
M. Cauchon
fait partie chaque année de la campagne de financement du coquelicot et
s'implique activement lors des
services funéraires pour les anciens combattants. Ce type d'implication
représente évidemment un grand atout pour les citoyens de la circonscription de La Peltrie, dans laquelle
résident plusieurs anciens combattants ainsi que plusieurs familles de militaires. Je profite de la présence
de M. Cauchon et de son représentant afin de souligner l'importance de l'implication bénévole, qui tend malheureusement à
disparaître. C'est grâce à des hommes et des femmes comme M. Cauchon
qu'un petit geste peut avoir un impact collectif.
• (9 h 50) •
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de
La Peltrie. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, à vous la
parole.
Féliciter Mme Annie
Bouchard, handicapée visuelle,
pour l'obtention d'une bourse de la Fondation
de l'athlète d'excellence du Québec
Mme Caroline Simard
Mme
Simard : Merci, M. le Président. Alors, le 30 avril dernier,
Annie Bouchard, une athlète de paracyclisme de Baie-Saint-Paul, s'est mérité une bourse de la Fondation de l'athlète
d'excellence du Québec dans le cadre du programme de bourses de
Loto-Québec.
Le parcours d'Annie, avec qui j'ai fréquenté
l'école primaire et secondaire, est inspirant. Vivant depuis sa naissance avec un handicap visuel dégénératif,
elle s'illustre, depuis 2013, en paracyclisme en tandem avec sa pilote et
complice, Rachel Tremblay, toutes deux ici
présentes parmi nous. Leurs performances sont d'ailleurs tout aussi inspirantes
puisqu'elles ont terminé récemment au
contre-la-montre sur le Circuit Gilles-Villeneuve, se taillant ainsi une place
dans l'Équipe canadienne de développement.
Pour avoir
fait durant des années de la compétition de natation, avec Rachel justement,
sachez, M. le Président, que j'ai un
énorme respect pour ces athlètes en général, mais particulièrement pour les
athlètes avec handicap comme Annie.
Elle constitue pour plusieurs un exemple de persévérance, comme Rachel
d'ailleurs, qui dicte le tempo lors de chaque sortie. Je suis très fière
de rendre hommage à ces deux belles femmes déterminées de chez nous. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Merci à vous, Mme la députée. M. le député de Bertrand.
Féliciter M. Gérald
Cloutier, nommé personnalité
Richelieu par le Club Richelieu Ste-Agathe-des-Monts
M. Claude Cousineau
M.
Cousineau :
Merci, M. le Président. Le 25 avril dernier avait lieu, à Val-David, la
soirée reconnaissance pour la
personnalité Richelieu 2015. Je tiens à féliciter M. Gérald Cloutier,
récipiendaire de cet honneur pour ses 28 années de bénévolat au
Club Richelieu de Sainte-Agathe-des-Monts.
Une
communauté tissée serré a besoin d'hommes et de femmes dévoués, de personnes
d'exception, généreuses, impliquées
pour le bien commun, des personnes pour qui l'entraide, la solidarité, le don
de soi, l'altruisme, l'abnégation sont
des qualités intégrantes de leur personnalité. Sans tambour ni trompette,
Gérald Cloutier est l'une de ces personnes qui se donnent sans réserve, sans demander en retour. Gérald a une
feuille de route remarquable dans des domaines aussi variés que les affaires, le social, le
communautaire. C'est un travailleur de l'ombre indispensable. Il est de ceux
qui font arriver
les choses rapidement et efficacement. Il est un modèle d'efficacité. Avoir
Gérald Cloutier dans son équipe ou dans son organisation est un atout
indéniable, un gage de réussite et de dynamisme.
Merci,
Gérald, pour tes réalisations, ton implication au sein du Club Richelieu, au
sein de ta communauté. Tu es un modèle pour nous tous, un phare pour tes
enfants et tes petits-enfants.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député. Mme la députée de
Soulanges, à vous la parole.
Souligner la Journée
nationale de l'implant cochléaire
Mme Lucie Charlebois
Mme
Charlebois :
Merci, M. le Président. Depuis quelques années
maintenant, nous soulignons collectivement la Journée
nationale de l'implant cochléaire. L'événement se tiendra le 17 mai afin
de commémorer le jour où a eu lieu la première implantation cochléaire
au Canada, en 1984.
C'est
d'ailleurs grâce à l'Association des implantés cochléaires du Québec que cette
initiative a pu voir le jour. Cet
organisme a pour mission de défendre et de protéger les acquis des personnes
possédant un tel implant. Il fournit par ailleurs de nombreux services à
ses membres ainsi qu'à leurs proches et leur offre tout le soutien nécessaire à
leur épanouissement à la communauté.
Rappelons, M.
le Président, que quatre à six enfants sur 1 000 naîtront avec des
problèmes de surdité. Heureusement, plusieurs pourront bénéficier d'un
traitement médical pour y remédier.
Je tiens donc
à rendre hommage aux personnes qui contribuent de près ou de loin à améliorer
la qualité de vie des personnes aux
prises avec des problèmes de surdité et qui bénéficient d'un implant
cochléaire. Je salue également les
représentants de l'Association des implantés cochléaires qui sont ici
aujourd'hui pour nous sensibiliser à cette cause. Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Soulanges. M. le député de Louis-Hébert.
Souligner la Journée
mondiale de
l'angio-oedème héréditaire
M. Sam Hamad
M.
Hamad :
Merci, M. le Président. Nous soulignons aujourd'hui le fait que le 16 mai
prochain sera la journée internationale de l'angio-oedème héréditaire,
une maladie génétique grave caractérisée par des crises imprévisibles et récurrentes d'enflure de certaines parties du
corps pouvant parfois causer la mort, notamment lorsque l'enflure se situe au
niveau de la gorge. En plus de l'anxiété occasionnée par le fait de ne pas
savoir quand surviendra la prochaine attaque,
les personnes atteintes d'angio-oedème héréditaire souffrent de douleurs
intenses, en plus de subir de sérieuses déformations physiques qui
peuvent perdurer pendant quelques jours. Mais, grâce aux avancées de la
recherche, des traitements existent.
Classée
comme maladie rare ou orpheline, il y aurait environ 150 Québécois et
Québécoises atteints. L'angio-oedème héréditaire impacte non seulement
la vie de la personne touchée par cette maladie, mais aussi celles de leurs
proches. D'ailleurs, je tiens à souligner la
présence de Mme Marie-Claire Dumont, dont la fille est atteinte, ainsi que
de M. Jacques Daignault,
président de l'Association des patients immunodéficients du Québec, organisme
qui chapeaute la maladie de l'angio-oedème héréditaire.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, M.
le député de Louis-Hébert. M. le député de Verdun.
Rendre hommage à M.
Jean-Guy Desjardins, lauréat du
CFA Institute Professional Award for Excellence
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : M. le Président, c'est avec une immense fierté que j'ai
appris que M. Jean-Guy Desjardins, président du conseil d'administration et chef de la
direction de la Corporation Fiera Capital, recevra le 11 juin prochain le
prix de CFA Institute Award for Excellence, la plus prestigieuse
distinction mondiale offerte par l'Association des analystes financiers.
M. Desjardins
est le premier Québécois et le deuxième Canadien à recevoir cette
reconnaissance. Au cours des 25 dernières années, seulement
13 personnes ont obtenu cette distinction. Il joint un très petit groupe
d'investisseurs légendaires, dont Warren Buffett, John Bogle et Sir John
Templeton.
En remettant
ce prix d'excellence, le CFA Institute reconnaît le grand leadership, le
travail exemplaire, l'intégrité et
l'exceptionnelle contribution de M. Desjardins à l'industrie de la finance
depuis maintenant 46 ans. Je félicite donc chaleureusement M. Jean-Guy Desjardins. Le prix qui lui est
décerné, M. le Président, est un honneur qui rejaillit sur tout le
Québec. Merci.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci à vous, M.
le député de Verdun. M. le député de Rimouski.
Féliciter Mme Annick
Desjardins pour sa découverte
d'un traitement des tumeurs au cerveau
M. Harold LeBel
M.
LeBel : M. le Président, un médecin neuro-oncologue originaire du Bic,
Mme Annick Desjardins, et son équipe ont fait une découverte majeure dans le domaine du cancer à l'Université
Duke en Caroline du Nord. Le traitement qui utilise le virus de la polio
pour traiter les tumeurs au cerveau retient l'attention du monde scientifique
et médical en Amérique du Nord et dans le monde.
Fille de
Céline Langelier et d'Edmond Desjardins, du Bic, Mme Desjardins obtient son
diplôme de l'Université de Sherbrooke
en 2003, pour aller ensuite se spécialiser en neuro-oncologie à l'Université
Duke, où elle devient, en 2012, la directrice de la recherche clinique
du Centre du cancer du cerveau.
La quête
d'Annick Desjardins pour soulager et guérir ceux qui souffrent de ce cancer ne
date pas d'hier. Enfant, elle faisait du porte-à-porte avec ses parents
pour la Société canadienne du cancer à Rimouski. Aujourd'hui, toujours animée par la même volonté, elle apporte sa
contribution au mieux-être et à la santé de ses semblables et fait la fierté de
ses parents et de ses concitoyens et
concitoyennes. Félicitations, Mme Desjardins! Nous sommes fiers de vous. Merci.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Et merci à vous, M. le député de Rimouski.
Voilà qui met
un terme à la rubrique Déclarations de députés. Et je suspends les travaux de
l'Assemblée quelques instants.
(Suspension de la séance à 9 h 57)
(Reprise à 10 h 16)
Le Président : Alors,
messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.
Présence du consul
général du Japon
à Montréal, M. Tatsuo Arai
Merci.
J'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes du consul général du
Japon à Montréal, M. Tatsuo Arai, à l'occasion de sa visite d'adieu. Maintenant,
vous pouvez vous asseoir.
Alors, nous poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui,
il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets
de loi
À la rubrique Présentation de projets de loi, M.
le leader du gouvernement.
M. Fournier : Veuillez
présenter l'article a, M. le Président.
Projet de loi
n° 39
Le
Président : À l'article
a du feuilleton, M. le ministre des Finances présente le projet de loi n° 39, Loi
donnant suite à la mise à jour sur la
situation économique et financière du Québec présentée le 2 décembre 2014 et
modifiant diverses dispositions législatives. M. le ministre.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi prévoit la modification de diverses lois afin de
donner suite principalement à des mesures fiscales qui ont été annoncées à l'occasion de la mise à
jour sur la situation économique
et financière
du Québec présentée par le ministre des Finances le 2 décembre 2014 et dans des
bulletins d'information publiés en 2014.
Il modifie la
Loi sur les impôts afin d'introduire des... ou de modifier ou d'abolir des
mesures fiscales propres au Québec. Ces modifications concernent,
notamment :
1° la réduction du taux des crédits d'impôt pour
cotisations syndicales ou professionnelles;
2° le
resserrement des conditions d'admissibilité au crédit d'impôt remboursable
visant à accroître l'incitation au travail;
3°
l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable temporaire à l'égard des
intérêts payables dans le cadre d'un financement obtenu en vertu de la
formule vendeur-prêteur de La Financière agricole du Québec;
4° la bonification de la déduction additionnelle
pour les frais de transport des petites et moyennes entreprises manufacturières
éloignées;
5° la bonification de
800 000 $ à 1 million de dollars de l'exonération limitée des
gains en capital sur les biens agricoles et les biens de pêche;
6°
l'instauration d'un montant de frais exclus relatifs à un bien admissible pour
l'application du crédit d'impôt pour investissement;
7° l'augmentation de
la taxe sur le capital des sociétés d'assurances;
8°
la bonification temporaire du crédit d'impôt pour la production
cinématographique ou télévisuelle québécoise.
Ce projet de loi
modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec afin,
notamment :
1° de réduire le taux
de cotisation au Fonds des services de santé pour les petites et moyennes
entreprises des secteurs primaire et manufacturier;
2° de réduire
temporairement la cotisation au Fonds des services de santé des petites et
moyennes entreprises pour les emplois à plein temps créés dans le secteur des
sciences naturelles et appliquées.
• (10 h 20) •
De
plus, ce projet de loi modifie la Loi sur la taxe de vente du Québec afin de
prévoir l'application du taux général
de la taxe sur les primes d'assurance à
l'ensemble des primes d'assurance automobile et le maintien de la hausse
temporaire de la taxe sur l'hébergement dans la région touristique de Montréal
pour le financement du Grand Prix du Canada.
En
outre, ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin d'y apporter
des modifications semblables à celles qui
ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu par des projets de loi fédéraux
sanctionnés en 2013 et en 2014. À cet effet,
il donne suite principalement à des mesures d'harmonisation annoncées dans
divers bulletins d'information publiés en
2013 et en 2014 ainsi que dans le discours sur le budget du 4 juin 2014.
Ces modifications concernent notamment :
1° les frais
admissibles au crédit d'impôt pour frais médicaux;
2° le crédit d'impôt
pour les volontaires en recherche et sauvetage;
3° l'impôt minimum de
remplacement;
4° le calcul du
revenu des pilotes non résidents employés par des compagnies aériennes
canadiennes;
5° les règles de
capitalisation restreinte;
6° les opérations de
requalification;
7° la prolongation de
la période de nouvelle cotisation à l'égard d'un participant à un abri fiscal;
8° le report
prospectif des dons de biens ayant une valeur écologique indéniable;
9° le
traitement de certaines dépenses relatives à l'aménagement d'une nouvelle mine
avant son entrée en production;
10° les arrangements
de prêt de valeurs mobilières;
11° l'augmentation du
montant d'exonération cumulative des gains en capital et d'indexation en
fonction de l'inflation.
Il
modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'y
apporter des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la Loi sur la taxe d'accise par des projets de loi de loi fédéraux sanctionnés en 2014. À cet effet, il donne suite principalement à des mesures
d'harmonisation annoncées dans des bulletins d'information publiés en 2014
et dans le discours sur le budget du 4 juin 2014. Ces modifications
concernent notamment :
1° l'exonération visant les services de soins de
santé et la détaxation de certaines fournitures liées à la santé; et
2° le choix offert
aux personnes étroitement liées.
Enfin, ce projet de
loi apporte des modifications à caractère technique, de concordance ou de
terminologie à diverses lois.
Mise aux voix
Le
Président : Une
chance que c'était un résumé. Est-ce
que l'Assemblée accepte d'être saisie
de ce projet de loi?
Mme
Maltais : M. le Président, d'habitude, ce type de projet
de loi ne demande pas, en général, de
consultations, on en est conscients,
mais, depuis notre expérience
malheureuse du projet de loi n° 28, dit le mammouth, je pense qu'on se
réserve le droit, après lecture, d'aller voir ce qu'il y a dedans et de vous
demander des consultations si nécessaire.
Le Président :
M. le leader.
M. Fournier :
Je ne peux pas rajouter grand-chose d'autre, M. le Président.
Le Président :
O.K., oui. Alors, on continue. Je constate que c'est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Fournier :
Je vous demanderais d'appeler l'article b, M. le Président.
Projet de loi n° 46
Le Président : Alors, à l'article b du
feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du
territoire présente le projet de loi n° 48, Loi concernant l'élection au
poste de préfet de la Municipalité régionale de comté du Granit.
M. Pierre Moreau
M. Moreau : Oui, M.
le Président. Je présente le projet de loi n° 46, Loi concernant
l'élection au poste de préfet de la Municipalité régionale de comté du
Granit.
Ce projet de loi fait en sorte que
l'élection au poste de préfet de la Municipalité régionale de comté du Granit
qui devait avoir lieu en 2015 soit plutôt tenue le
5 novembre 2017.
Le
projet de loi prévoit également les règles particulières qui s'appliqueront si
une vacance au poste de préfet survient avant l'élection de 2017.
Mise aux voix
Le
Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet
de loi? Madame...
Mme
Maltais : Si jamais il y a
nécessité d'une rencontre ou deux... si jamais il y a
nécessité d'une consultation
ou deux, on en avisera le leader du gouvernement.
Le Président :
Ça va. Donc, je constate que c'est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Fournier :
L'article c, M. le Président, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 208
Le
Président : Alors, à l'article c
du feuilleton, j'ai reçu le rapport de la directrice de la législation sur le projet de loi
n° 208, Loi concernant la Ville de Saint-Félicien.
La
directrice de la législation a constaté que les avis n'ont pas été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé.
En conséquence, le projet de loi ne pourra être présenté sans le consentement
unanime de l'Assemblée.
Alors,
la question qui se pose, c'est : Y a-t-il consentement pour la
présentation de ce projet de loi?
Des voix :
Consentement.
Le Président :
Consentement. Alors, je dépose ce rapport.
En
conséquence, M. le député de Dubuc présente le projet de loi d'intérêt privé
n° 208, Loi concernant la Ville de Saint-Félicien.
Mise aux voix
Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Ça va? Alors, c'est adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission de
l'aménagement du territoire
M. Fournier : Oui,
M. le Président. Conformément au premier alinéa de l'article 267 de notre
règlement, je fais motion afin que ce
projet de loi soit déféré à la Commission de l'aménagement du territoire et
pour que le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du
territoire en soit membre.
Mise aux voix
Le
Président : Est-ce que la motion est adoptée?
Des
voix : Adopté.
Le
Président : Adopté. M. le leader du deuxième groupe
d'opposition.
M.
Bonnardel : M. le Président, je vous demande d'appeler
l'article d, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 207
Le Président :
Alors, à l'article d du feuilleton, j'ai reçu le rapport de la directrice
de la législation sur le projet de
loi n° 207, Loi concernant la Ville de Boucherville. La directrice de la
législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement
des projets de loi d'intérêt privé. Alors, je dépose aussi ce rapport.
En conséquence, Mme la députée de Montarville
présente le projet de loi d'intérêt privé n° 207, Loi concernant la
Ville de Boucherville.
Mise aux voix
Est-ce
que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des
voix : Adopté.
Le
Président : Adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire
M. Fournier :
Conformément au premier alinéa de l'article 267 du règlement, je fais
motion afin que ce projet de loi soit
déféré à la Commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre
des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire en soit
membre.
Mise aux voix
Le
Président : Est-ce que la motion est adoptée?
Des
voix : Adopté.
Le
Président : Adopté. M. le leader du deuxième groupe
d'opposition.
M.
Bonnardel : M. le Président, je vous demande d'appeler
l'article e, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 209
Le Président :
Alors, à l'article e du feuilleton, j'ai reçu le rapport de la directrice de la
législation sur le projet de loi
n° 209, Loi concernant la Ville de Mascouche. La directrice de la
législation a constaté que les avis ont été faits et publiés
conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé.
Je dépose ce rapport.
En
conséquence, M. le député de Masson présente le projet de loi d'intérêt privé
n° 209, Loi concernant la Ville de Mascouche.
Mise aux voix
L'Assemblée
accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?
Des
voix : Adopté.
Le
Président : Adopté. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la Commission de l'aménagement du territoire
M. Fournier :
Conformément au premier alinéa de l'article 267 du règlement, je fais
motion afin que ce projet de loi soit
déféré à la Commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre
des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire en soit
membre.
Mise aux voix
Le
Président : Est-ce que la motion est adoptée?
Des
voix : Adopté.
Le
Président : Adopté. M. le leader du gouvernement.
M.
Fournier : L'article f, M. le Président.
Projet
de loi n° 205
Le Président : Alors, à l'article f
du feuilleton, j'ai reçu le rapport de la directrice de la législation sur le
projet de loi n° 205, Loi
concernant la Ville de Sherbrooke. La directrice de la législation a constaté
que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de
fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Et je dépose ce rapport.
En conséquence, M. le député de Sherbrooke présente le
projet de loi d'intérêt privé n° 205, Loi concernant la Ville de
Sherbrooke.
Mise aux voix
L'Assemblée
accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté. M. le leader.
Renvoi à la Commission
de l'aménagement du territoire
M. Fournier : Conformément au premier
alinéa de l'article 267 de notre règlement, je fais motion afin que ce
projet de loi soit déféré à la Commission de
l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales
et de l'Occupation du territoire en soit membre.
Mise aux voix
Le Président :
Est-ce que l'Assemblée est d'accord avec cette motion?
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, M. le leader du gouvernement.
Réponses à des
pétitions
M. Fournier : Il me fait plaisir de
déposer la réponse du gouvernement aux pétitions présentées par le député
de Côte-du-Sud le 14 avril 2015 et par le député de Dubuc le 15 avril
2015.
Le Président :
Alors, ces documents sont déposés.
Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions
À la rubrique
Dépôt de pétitions, j'ai reçu, de la part de M. le député de Côte-du-Sud, une pétition qui est non conforme. Est-ce
que j'ai un consentement pour lui
permettre de la déposer? Consentement. M.
le député de Côte-du-Sud.
Rétablir un service
d'urgence et des services de
santé de proximité dans la MRC de L'Islet
M. Morin : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 3 123 pétitionnaires.
Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.
«Il n'y a pas de faits invoqués.
«Et l'intervention réclamée se résume
ainsi :
«Nous, soussignés, nous opposons à la coupure
d'heures au CLSC de Saint-Jean-Port-Joli :
«Nous demandons au CSSS de Montmagny-L'Islet,
ainsi qu'à l'Agence de santé et des services sociaux de Chaudière-Appalaches, de ne
pas considérer comme une possibilité la coupure d'heures au CLSC de
Saint-Jean-Port-Joli dans son plan de restructuration des services de
santé de la MRC de L'Islet;
«Nous demandons au CSSS de Montmagny-L'Islet,
ainsi qu'à l'Agence de santé et des services sociaux de Chaudière-Appalaches,
de rétablir un service d'urgence adéquat dans le secteur L'Islet Sud et L'Islet
Nord;
«Nous demandons au CSSS de Montmagny-L'Islet de
rétablir la quiétude dans la population, en annonçant publiquement que le conseil
d'administration du CSSS Montmagny-L'Islet travaille activement à trouver une solution pour rétablir des
services de santé de proximité sur la MRC de L'Islet.»
Je certifie que cet extrait est conforme à
l'original de la pétition.
Une
voix : ...
Le Président :
Bien oui. Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.
Il n'y a
pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions
portant sur une question de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales, et je
cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.
Pertes d'emploi chez Bombardier Aéronautique
et aux Chantiers Davie inc.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard :
Triste journée, M. le Président. On apprend ce matin que 1 000 emplois
seront supprimés chez Bombardier Aéronautique et jusqu'à 400 autres aux chantiers
maritimes Davie. C'est près de 1 400 familles qui sont inquiètes, M. le Président. Ça
survient au lendemain de l'annonce de
plus de 1 000 mises à pied au siège social de Rio
Tinto à Montréal. On peut parler, M.
le Président, d'un jeudi noir pour l'emploi au Québec parce que ce sont
évidemment des emplois de qualité qui disparaissent, et bien rémunérés.
Dans
le cas de Bombardier, le gouvernement regarde passer la parade depuis plusieurs
mois malgré les difficultés de
l'entreprise. Le ministre de l'Économie nous avait dit : J'ai fait ma job,
j'ai passé un coup de téléphone. On voit le résultat aujourd'hui, M. le
Président.
Dans
le cas de Chantiers Davie, le premier ministre nous avait dit, suite au dernier
budget fédéral, qu'il faisait un
cheval de bataille d'obtenir des contrats pour nos chantiers maritimes. C'est
ça, le problème, M. le Président, il faut faire des batailles pour
ramasser des miettes du gouvernement fédéral, de nos impôts. Et cette
injustice, bien... plutôt, l'incapacité du
premier ministre d'agir a fait en sorte qu'Ottawa retient cet investissement,
qui fait en sorte que 400 familles sont
face à cette réalité des pertes d'emploi et des mauvaises nouvelles, M. le
Président. Ça doit être ça aussi, le prix de la péréquation.
Ce
que je demande au premier ministre aujourd'hui : Qu'est-ce qu'il dit aux
pères et aux mères de famille qui ont appris cette semaine qu'ils
n'avaient plus d'emploi?
• (10 h 30) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président, je voudrais dire tout d'abord qu'on est
très préoccupés pour les travailleurs eux-mêmes,
elles-mêmes et de même que leurs familles, mais il faut différencier les deux
situations. En passant, il y a une erreur de chiffre sur Rio Tinto, mais
c'est un détail, le collègue pourra y revenir.
Commençons
par Bombardier. Ce qui arrive à Bombardier, c'est que la division d'avions
d'affaires, dans laquelle il y avait des achats importants de Russie et
de Chine, voit sa production revenir à des niveaux plus conformes avec l'historique de la compagnie. Il y a quand même
aujourd'hui plus d'employés à Bombardier qu'il y en avait avant la grande
crise financière de 2008‑2009 et il y a surtout un grand espoir pour la série
C, et le gouvernement du Québec, notre gouvernement,
comme d'ailleurs tous les gouvernements qui se sont succédé, est vraiment aux
côtés de Bombardier pour les soutenir dans cette grande entreprise qui,
certainement, va apporter de l'espoir pour des centaines et des milliers de travailleurs dans la région de Montréal, dans une grappe
essentielle à notre économie, qui est la grappe d'aéronautique.
Quant à Davie, on a
contacté les ministres concernés, les députés concernés, j'en ai parlé au premier
ministre du Canada. Là-dessus, je veux être bien clair et le répéter, là :
Les activités des chantiers maritimes de la Colombie-Britannique et des Maritimes
sont pleines, pleines de commandes de bateaux de la marine canadienne. On a le
meilleur chantier naval d'Amérique du Nord, tel que certifié par Lloyd, la Davie. Il m'apparaît normal que le Québec obtienne non pas un statut distinct
et particulier pour l'attribution des contrats, mais sa juste part des
activités, M. le Président, de la Défense
nationale. Et on va continuer à faire des représentations sur cette question, particulièrement auprès des
élus québécois qui sont à la Chambre des
communes et particulièrement les élus québécois qui sont au parti
gouvernemental.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard :
Ce que je veux dire au premier ministre, c'est : dans les derniers mois,
la réalité, là, c'est ces mauvaises
nouvelles à répétition. Alcan, le Cirque du Soleil, Bombardier, SNC-Lavalin,
Résolu, ce sont tous des fleurons qui
ont soit été vendus, soit en difficulté. Et la grande contribution du premier
ministre, du gouvernement libéral, dans le secteur de l'aéronautique, c'est la coupure de 20 % en recherche et
développement, qui a fait fuir les investissements. Ils nous avaient
avisés de ça. Ils nous l'ont dit. C'est ça, le résultat concret.
Ce que je demande au
premier ministre : Quel plan va-t-il mettre en place pour éviter cette
déstructuration de ce secteur...
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je
vais quand même demander à mon collègue un peu plus de mesure, là. Je suppose
qu'il ne propose pas que le gouvernement achète les avions d'affaires de
Bombardier qui ne sont pas achetés par les
Russes et les Chinois, là. C'est un autre dossier. Ça tient compte de la
fluctuation des marchés internationaux, et là-dessus il faut prendre
acte de cette tendance-là.
Maintenant,
je vais lui répéter que, pour ce qui est de Bombardier, il n'y a rien à voir
avec l'élément fiscal dont il a parlé
tantôt. Pour ce qui est de Bombardier, le dossier principal, le dossier
d'avenir pour Bombardier, c'est la CSeries qui a passé des étapes très
importantes au cours des dernières semaines, des derniers mois, et je vais
répéter ici que nous allons être aux côtés de Bombardier, comme le gouvernement
du Québec l'a toujours été.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : Je tiens à
rappeler au premier ministre qu'Aéro Montréal, qui représente tout le secteur
de l'aéronautique, a dénoncé les coupures
qu'a faites son gouvernement, des coupures paramétriques qui ont déstabilisé
tout ce secteur-là, qui ont fait fuir les investissements. Vous avez été avisés
de cela.
La réalité,
c'est que ces gens-là se sentent abandonnés, et toutes les dépenses en
recherche et développement, c'est 70 % qui sont faites à Montréal
et dans le... dans le secteur de l'aéronautique pour tout le Canada.
Que le
premier ministre se ressaisisse! Quelle politique ambitieuse va-t-il proposer à
notre secteur de l'aéronautique autrement que des pertes d'emplois, M.
le Président?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, les
mêmes politiques qui ont permis au Québec de créer 69 000 emplois
dans les 12 derniers mois, majorité à
temps plein, majorité dans le secteur privé. Il faut continuer. Et, moi, quand
je rencontre les gens d'Aéro
Montréal, de même que les collègues, c'est plutôt des félicitations qu'ils
apportent au gouvernement pour la rigueur de sa gestion des finances
publiques, la rigueur de sa gestion de la dette, le bien-fondé et la cohérence
de ses programmes de développement
économique. Et là également M. le Président, on en parle avec fierté, non
seulement de Bombardier, mais de l'ensemble de cette grappe, et là
également le gouvernement du Québec joue pleinement son rôle et va continuer à
le jouer.
Le Président : Troisième
complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : Il n'y
aura pas de félicitations des familles qui ont perdu leurs emplois.
Dans le cas du fédéral, c'est surréel, M. le
Président. 100 milliards d'investissement dans le Canada, et on ne ramasse rien. 13 millions sur
100 milliards d'investissement. La vraie stratégie maritime, ça serait
simplement d'obtenir notre juste part pour nos chantiers ici, mais on
n'a rien.
Comment le
premier ministre peut expliquer, dans le contexte économique qu'on vit, que le
Québec n'a pas sa juste part pour les travailleurs de Davie, mais pour
tous les travailleurs des chantiers maritimes au Québec sur notre part des
dépenses du gouvernement fédéral dans le secteur maritime?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je
suis certain qu'on va continuer tous ensemble ici, dans cette Chambre, de faire
ces représentations au gouvernement fédéral comme on l'a toujours fait et comme
on va continuer à le faire. Maintenant, il
faut quand même réaliser que le Québec
obtient plus que sa part de l'action économique et financière du palier fédéral de gouvernement.
C'est un autre débat et c'est facile à démontrer.
Maintenant,
M. le Président, je suis certain également que mon collègue,
qui a soulevé la question à de nombreuses reprises à d'autres époques, ne veut pas que le politique
s'insère dans les mécanismes d'appels
d'offres. Ce que je demande, M.
le Président, c'est que le gouvernement fédéral traite de façon équitable la proposition
de Davie, reconnaisse la qualité de cette entreprise également. Et, quant à la
stratégie maritime, M. le Président, elle approche. Je suis certain qu'elle
satisfera le collègue de l'opposition.
Je demanderais votre tolérance pour quelques
secondes, M. le Président, parce que c'est peut-être — on
verra les événements — la dernière fois que notre collègue se lève
comme chef de l'opposition officielle. Je veux lui dire que je suis conscient de la
difficulté du rôle qu'il a joué. Chef intérimaire pendant une course à la
direction, ce n'est pas évident, ce n'est
pas facile. J'ai un voisin, d'ailleurs, qui a connu la même expérience.
Peut-être, M. le Président, les militants du Parti québécois décideront-ils ou elles de prolonger le
plaisir, mais je veux lui dire que j'ai aimé échanger avec lui à
l'Assemblée.
Des voix : ...
Le Président : Oui, oui, oui.
On va replacer les horloges. Principale, M. le député de Rosemont.
Accès aux services de réadaptation dans
la région de la Capitale-Nationale
M. Jean-François Lisée
M. Lisée : M. le Président,
depuis un an, le gouvernement libéral tente de faire croire aux Québécois que
ses compressions n'auront, et je cite, «aucun impact sur les services sur les
citoyens». Aucun impact.
La réalité
dit autre chose, notamment à l'Institut de réadaptation en déficience physique
de Québec. Ce matin, on apprend qu'en plus des 21 postes abolis la
semaine dernière, 14 postes supplémentaires sont supprimés. Des postes administratifs? Non, M. le Président. Un
brancardier, deux infirmières, un instructeur coupés, six assistants en
réadaptation coupés, neuf éducateurs
spécialisés coupés. C'est, au total, 35 personnes de moins pour répondre
aux besoins de 14 000 gens de
la grande région de Québec qui se présentent à l'institut pour surmonter leur
déficience motrice, visuelle, auditive ou des déficiences de langage.
Je demande au
ministre de la Santé de respecter son engagement de ne pas couper les services
en annonçant le rétablissement des 35 postes coupés à l'institut de
Québec.
Le Président : Mme la
ministre responsable de la Réadaptation.
Mme Lucie Charlebois
Mme
Charlebois :
Merci, M. le Président. Ce que je veux mentionner à mon collègue, c'est qu'il
faut rassurer la population, là, plutôt que d'ameuter la population et
mentionner qu'une personne qui a besoin de services, qui y avait accès hier,
continuera de les recevoir, dans le futur, avec autant de détermination et
toujours à la mesure des besoins.
Ce qu'il faut savoir, là, M. le Président, c'est
que les changements qui ont été annoncés vont n'avoir aucune répercussion sur les services. Il s'agit ici d'une
réorganisation qui entraîne, oui, des changements dans le réseau de la
santé, mais l'objectif, là, c'est le même
objectif aussi qu'il y avait dans la création des CISSS et des CIUSSS. C'est
de, avec cette opportunité-là, revoir toute l'organisation des services,
éliminer les silos, M. le Président, permettre une meilleure répartition des
ressources. Toutes les modifications sont faites au bénéfice des personnes qui
ont besoin notamment de services de réadaptation.
Et, M. le Président, ce que je veux vous dire,
c'est que, concernant la réorganisation et la situation dont il est question, ce qu'il faut spécifier ici, c'est que
l'objectif, c'est de réorganiser les services afin que les professionnels
puissent travailler là où il y a des besoins. Alors, M. le Président, je veux
rassurer le collègue...
• (10 h 40) •
Le Président : En terminant.
Mme
Charlebois : ...et
je l'invite à rassurer, lui aussi, la population.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Rosemont.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
M. le Président, il y a quand même des limites à dire le contraire de la
réalité. Les besoins, là, c'est qu'il y
a des gens qui ont des difficultés physiques qui se sont fait apprendre comment
être autonomes pour aller aux toilettes chez eux. Il y avait un
brancardier à l'institut de Québec; il a été viré. Maintenant, on leur dit de
mettre des couches, Mme la ministre, plutôt
que d'avoir un brancardier pour les aider à aller aux toilettes. C'est ça, la
situation à l'institut.
Le temps
d'attente le plus long, c'est pour le langage. Ils ont mis à la porte trois
orthophonistes. Ça ne va pas aider, ça va nuire.
Le Président : Mme la
ministre responsable de la Réadaptation.
Mme Lucie Charlebois
Mme
Charlebois :
M. le Président, j'imagine que le collègue sait très bien que, selon les règles
qui sont en vigueur, il est important de
comprendre à ce moment-ci qu'il y a des postes qui sont abolis, mais il y a
aussi la réouverture de nouveaux
postes parce qu'on réorganise et on attribue les services là où il y a des
besoins. J'espère que le collègue ne s'oppose pas à la limitation des
silos, qu'on ne s'oppose pas à une réorganisation pour donner de meilleurs
services aux citoyens.
Il le sait très bien, que les postes qui sont fermés sont réouverts là où il y
a des besoins, et il faut rassurer la population absolument.
Alors,
je l'invite à la prudence, parce qu'on va continuer d'offrir les services; les
citoyens vont avoir ce qu'ils ont besoin. Et, dans un an, M. le député,
vous me reposerez les mêmes questions, vous allez constater l'amélioration.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Rosemont.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Donc, si je comprends bien, le brancardier qui était à
l'institut, maintenant il est ailleurs, et puis les gens qui allaient à
l'institut devront aller aux toilettes ailleurs à Québec, hein? Ça n'a pas de
sens, cette histoire de silo.
Il y a
30 patients de l'institut qui nous écoutent en ce moment dans la salle
Papineau. Je demande au ministre de la Santé
et à sa ministre déléguée de venir avec moi leur expliquer comment les gens qui
ont été coupés à l'institut vont être ailleurs. Mais c'est à l'institut
que les services sont donnés, c'est à l'institut qu'il y a 850 personnes
sur la liste d'attente et qu'il y a aura moins de services. Est-ce que...
Le Président :
Mme la ministre responsable de la Réadaptation.
Mme Lucie Charlebois
Mme
Charlebois :
Moi, M. le Président, j'aime mieux faire partie d'une équipe qui veut
réorganiser et briser les silos, donner de
meilleurs services aux citoyens. Et moi, M. le Président, je fais partie d'une
équipe qui va faire en sorte que, dans un an, nous pourrons nous
reparler, et vous serez contents des services qui sont offerts.
Ceci
étant, ceci étant, M. le Président, dans un an, là, je suis certaine qu'il va
être le premier à se lever pour me poser des questions sur d'autres
sujets parce qu'il va constater l'amélioration du réseau. Il le sait très bien,
il sait très bien qu'il y a des postes...
Une voix :
...
Le Président :
Oui, Mme la leader.
Mme
Maltais :
Article 79. La question posée est claire : Est-ce qu'elle est prête à
rencontrer les gens qui l'attendent en bas?
Le Président :
M. le leader.
M. Fournier :
Moi, j'ai entendu la question, et elle était beaucoup plus large, et on y
répond présentement. Alors, voilà.
Le Président :
Veuillez poursuivre, Mme la ministre.
Mme
Charlebois :
M. le Président, probablement que le député de Rosemont a oublié de me
mentionner ça, c'est pour ça que sa leader
se lève. Mais, ceci étant, moi, j'ai confiance aux équipes qui sont sur le
terrain et je sais qu'on a des équipes dévouées.
Le Président :
En terminant.
Mme
Charlebois :
D'ailleurs, le premier ministre les a visitées la semaine dernière, et nous
sommes très au fait comment ça se déroule.
Le Président :
Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Hausse de la taxe scolaire
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, les Québécois se rappellent d'un chef du Parti libéral,
pendant la dernière campagne électorale, qui promettait de ne pas augmenter les
taxes et les tarifs de plus que l'inflation, mais les Québécois ont vu aussi,
depuis les élections, un autre chef du Parti libéral qui a augmenté les taxes
et les tarifs de 1 400 $ en
moyenne par famille. C'est le même chef du Parti libéral, la même personne,
mais il a une personnalité pendant les campagnes électorales et
malheureusement une autre personnalité moins sympathique pour la classe moyenne
après les élections.
M.
le Président, la commission scolaire des Premières-Seigneuries, à Québec, a
augmenté, depuis deux ans, les taxes scolaires de 33 %. Vous avez
bien compris, 33 %. On sait, M. le Président, que les commissions scolaires,
au cours des prochaines semaines, vont envoyer les comptes de taxe scolaire
2015.
Donc, je voudrais savoir,
avant que les gens votent le 8 juin : Est-ce que le premier ministre
peut, oui ou non, s'engager à ce que les augmentations de taxe scolaire
n'excèdent pas l'inflation?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Alors, coïncidence
frappante, M. le Président : on revient encore une fois sur le comté de Chauveau,
où on a une excellente candidate qui vient de Chauveau, qui ne vient pas d'ailleurs.
Je comprends, d'ailleurs, il y a une pénurie de main-d'oeuvre à Québec,
ce qui a amené notre collègue à recruter ses candidats à l'extérieur de la
ville de Québec.
Mais, M. le Président...
Des voix : ...
M. Couillard : Cette candidate,
d'ailleurs, paie des taxes scolaires parce que ses enfants vont à l'école dans
la circonscription de Chauveau. Alors, les citoyens savent très bien
l'importance, M. le Président, de corriger ce qui malheureusement a été fait au
cours des dernières années; c'est d'annuler le programme de péréquation qui,
devant l'impasse budgétaire actuelle, ne
peut être remis. La bonne nouvelle, c'est que c'est la dernière année de cette
transition-là.
L'autre bonne
nouvelle, c'est que le gouvernement regarde avec beaucoup d'attention et de
sérieux le programme même de la
taxation scolaire, le fait qu'il soit toujours lié à la taxation des immeubles,
des maisons. La taxation foncière, on va s'en occuper, comme on s'est
occupés des finances publiques. C'est le même chef de la deuxième opposition
qui, lui aussi, voulait faire l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, qui, depuis
ce temps-là, est contre tous les gestes posés pour y arriver.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président,
les gens de Chauveau, incluant la candidate libérale, ne sont pas contents d'avoir eu une augmentation de taxe scolaire de
33 %. Oui au ménage, mais le plus gros ménage que fait le Parti
libéral depuis un an, c'est le ménage du portefeuille de la classe moyenne.
Je répète ma
question : Est-ce qu'il peut s'engager auprès des gens de Chauveau et
Jean-Talon à ce qu'on arrête d'avoir des augmentations folles de taxe
scolaire?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, je
prévoyais que ce serait le cas, mais le niveau d'inquiétude du collègue pour la circonscription de Chauveau me frappe à
chaque fois qu'il se lève sur cette question-là. Ça s'adonne que moi, je
suis allé dans Chauveau également rencontrer
les citoyens et les citoyennes avec notre candidate. Ces gens-là viennent
vers nous et disent : Ne lâchez pas, vous êtes sur la bonne voie. Merci de
faire le ménage dans les finances publiques. Merci d'avoir le courage de rétablir l'équilibre budgétaire pour la prochaine
génération. On est avec vous. Surtout, ne lâchez pas! C'est ça que
j'entends à Chauveau aussi.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault : M. le Président,
le premier ministre devrait se promener davantage. Les gens ne sont pas
contents d'avoir eu une augmentation de taxe et de tarifs de 1 400 $!
C'est de l'argent après impôt, M. le Président. Ils savent qu'il y a des
comptes de taxes qui s'en viennent dans quelques semaines.
Est-ce que ce
sera avant ou après le 8 juin? Ils ont le droit de savoir avant le 8 juin.
Est-ce qu'il peut dire aux gens de Chauveau puis de Jean-Talon, est-ce
que ça va être encore des augmentations de 10 %, 20 %, 30 %?
Est-ce qu'il peut le dire?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, le
ton du collègue me fait penser à cette annonce qu'on voit à la télévision sur
les compagnies d'assurance automobile, là. C'est un peu le même genre de style.
Mais d'ailleurs il a un peu de difficultés avec les chiffres, notre collègue...
Des
voix : ...
M. Couillard : Il a un peu de difficultés avec les chiffres, notre collègue. Hier, il
nous parlait de la croissance économique
de Québec. Chauveau, en passant, pour lui rappeler la géographie, ça fait
partie de Québec. C'est du monde de Québec
qui habite là puis qui vont voter là. Alors, à Chauveau et ailleurs, on
sait — et on
vient de le noter, le Conference Board
vient de l'annoncer : Jamais la ville de Québec n'aura eu une croissance
économique aussi forte, un niveau record de croissance économique à
Québec, dans notre capitale nationale! Et on va continuer de faire en sorte que
ça se poursuive, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le député de Johnson.
Politique de soutien à
l'industrie manufacturière
M. André Lamontagne
M.
Lamontagne : Oui. M. le Président, Bombardier Aéronautique annonce
qu'elle va supprimer près de 1 000
emplois de qualité, très payants, dans la région de Montréal. Et ces
suppressions s'ajoutent à des milliers d'autres postes abolis par Bombardier en janvier et juillet 2014. Ça, c'est sans
compter les répercussions chez tous les fournisseurs directs et indirects de Bombardier. L'annonce
d'aujourd'hui, c'est un coup dur pour les travailleurs, les familles,
pour l'économie du Québec tout entier, et c'est très préoccupant lorsqu'on
considère le poids du secteur aéronautique pour l'économie de la grande région
de Montréal.
Puis,
M. le Président, cette nouvelle nous rappelle à quel point le dynamisme du
secteur manufacturier est vital pour notre
économie. Et, dans ce contexte, il est difficile de ne pas constater l'absence
d'une véritable politique manufacturière pour développer l'économie du Québec par la création d'emplois de
qualité dans le secteur privé. Alors, M. le Président, quand le gouvernement va-t-il déposer un plan de
relance qui va mettre de l'avant une véritable politique manufacturière?
• (10 h 50) •
Le Président :
M. le ministre de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M. Daoust :
Dans la situation de Bombardier, je pense que je vais rappeler simplement ce
que disait notre premier ministre il y a quelques instants. C'est une situation
qui est une conjoncture mondiale, avec une diminution du nombre de commandes dans le jet d'affaires, dans la série 5000 et
6000 sur le Global Express. Et il y a des mesures d'atténuation qui ont
été prises pour faire en sorte que ces travailleurs-là puissent se replacer le
plus rapidement possible, notamment des
programmes de préretraite. On parle aussi de départs naturels dans l'ensemble
de l'entreprise avec le roulement des
employés, où il y a 300 personnes qui seront replacées au cours
de cette période-là, il y a
200 contractuels qui quitteront. Et,
comme on fait ça sur une période de neuf à 12 mois, il y a
lieu de penser que la plupart des gens pourront se retrouver un emploi. Mon collègue, d'ailleurs, du ministère de l'Emploi, le ministre de l'Emploi, mettra
ses équipes à la disposition des gens qui seront affectés par les mises
à pied, et on fera en sorte de les aider à se replacer.
Maintenant, il faut
comprendre, et le premier ministre le disait tantôt aussi, c'est qu'il y a une
disparition d'emplois, mais il y a aussi une création d'emplois dans ce
secteur-là, M. le député...
Le Président :
En terminant.
M.
Daoust : ...parce qu'il s'est créé des emplois dans le secteur manufacturier, il s'est créé des
emplois auprès de... chez Bombardier.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Johnson.
M. André Lamontagne
M.
Lamontagne : M. le Président, avec tout le respect pour mon collègue,
ma question porte sur l'absence de politique manufacturière de la part du gouvernement.
Puis s'en remettre à la baisse du dollar canadien puis à la baisse du prix du pétrole comme ils le font, c'est
sûr qu'à court terme ça peut être payant, mais ça ne garantit rien à
long terme. On le sait, la création de la richesse, ça va venir d'emplois de
qualité et bien rémunérés dans le secteur privé.
Alors, quand vont-ils
déposer une véritable politique manufacturière pour le Québec?
Le Président :
M. le ministre de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M. Daoust :
Simplement pour terminer sur les emplois, puis ne parlons que de Bombardier
pour un instant, en 2007, il y avait...
Il s'est créé depuis 2007, chez Bombardier, 3 500 emplois.
3 500 emplois, quand on aura baissé de 1 000, on aura
encore un résultat... une croissance nette de 2 500 emplois. Alors,
de dire que le secteur manufacturier ne fonctionne pas, il faut...
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît!
M. Daoust : De dire que le secteur
manufacturier ne performe pas, je pense que ce n'est pas tout à fait le cas. Chez Bombardier, on parle d'un retour à la normale
sur le rythme de croissance. Et justement parce qu'on appuie une
entreprise comme Bombardier...
Le Président : En terminant.
M.
Daoust : ...bien on veut que le CSeries s'envole, c'est le cas de le
dire, et ça va créer d'autres emplois, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Johnson.
M. André Lamontagne
M. Lamontagne : M. le Président, on
a une opportunité extraordinaire présentement dans le Canada, quelque chose qui n'était pas prévu, c'est la
baisse du dollar canadien. On n'a rien vu dans le dernier budget de
différent du budget d'avant, qui vient refléter ce changement-là dans la
conjoncture.
Quand est-ce que le gouvernement va déposer une
politique manufacturière qui reflète cette situation-là?
Le Président : M. le ministre
de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M. Daoust : Le PIB du Québec, M. le
Président... et mon collègue ministre des Finances et le président du Conseil du trésor pourront me corriger, mais le secteur manufacturier représente à peu près
13 % du PIB. Alors, c'est
un secteur qui est important, ce n'est pas
le seul. Et je rappellerai simplement qu'il s'est créé
69 000 emplois, il a dû s'en créer quelques-uns dans le
secteur manufacturier récemment, M. le député... M. le Président. Et le secteur
manufacturier n'est pas en reste, parce que justement ce sont des emplois dans
le secteur privé qui ont été créés, et il n'y a pas de mauvais emploi au
Québec, M. le Président.
Le Président : Principale, M.
le député de Groulx.
Construction d'un pôle logistique de
transport intermodal en Montérégie
M. Claude Surprenant
M.
Surprenant : M. le Président, de plus en plus de gens du milieu des
affaires sont inquiets face à l'implantation d'un pôle logisitique à Vaudreuil-Soulanges. Après le port de Montréal,
la Chambre de commerce du Montréal métropolitain,
bien le Canadien National s'inquiète de voir les transporteurs maritimes
abandonner le port de Montréal pour un trajet direct vers le port de
New York. Le président et chef de direction du CN, Claude Mongeau, a même
écrit au premier ministre à ce sujet. Selon lui, le pôle Vaudreuil-Soulanges
avantagera clairement la compagnie américaine CSX
et détournera vers New York les bateaux qui iraient autrement à Montréal.
«Le terminal de CSX à Valleyfield va devenir
une extension déguisée du port de New York», a-t-il déclaré, M. François
Hébert, président du CN... vice-président.
Alors, le ministre responsable de la stratégie
maritime est-il conscient que choisir Vaudreuil-Soulanges plutôt que Contrecoeur risque de renforcer une compagnie
américaine au détriment du CN et du port de Montréal? Pourquoi ne pas
prioriser des projets et d'abord implanter un port intermodal à Contrecoeur, M.
le Président?
• (11 heures) •
Le Président : M. le ministre
délégué aux Transports.
M. Jean D'Amour
M. D'Amour : Bien, M. le Président,
pour développer la stratégie maritime, on choisit de développer chacune des
régions du Québec. Et, nous, le choix qu'on fait, la vision qu'on a : pour
développer une région, on n'a pas besoin de
sacrifier les régions. Ce qu'on veut, c'est du développement économique. C'est
la raison pour laquelle nous avons reconnu Montréal, Contrecoeur et
Vaudreuil-Soulanges pour développer nos pôles logistiques, pour attirer en sol québécois des entreprises de partout qui nous
regardent et qui choisissent le Québec, qui veulent venir investir chez
nous. Alors, il y a de la place du côté de Contrecoeur, il y a de la place pour
le développement à Montréal, il y a de la place dans Vaudreuil-Soulanges.
Et
les réseaux ferroviaires, le réseau maritime, c'est complémentaire, M. le
Président, les compagnies ferroviaires n'ont pas les mêmes destinations.
Ce qu'on veut, c'est du transbordement de marchandises. Ce qu'on veut, c'est de
la transformation de
produits importés au Québec, et on veut exporter davantage. C'est l'objectif de la stratégie maritime qu'on va annoncer
au cours des prochaines semaines et nous allons créer des emplois dans chacune
des régions du Québec, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Groulx.
M. Claude Surprenant
M.
Surprenant : M. le Président, plutôt que de passer son temps à nous
vanter une stratégie maritime qui n'existe même pas, le ministre devrait être à
l'écoute du milieu des affaires. Alors, il y a clairement des avantages majeurs à renforcer d'abord le port de Montréal et
son réseau et implanter un pôle logistique à Contrecoeur. On sait que
Vaudreuil-Soulanges sont représentés par des libéraux depuis 35 ans, mais il
faut avantager l'économie québécoise avant d'avantager le marché américain.
Alors,
pourquoi ne pas prioriser clairement Contrecoeur comme pôle intermodal et s'en
servir ensuite comme levier de développement des autres pôles, M. le
Président?
Le Président :
M. le ministre délégué aux Transports.
M. Jean D'Amour
M. D'Amour :
Alors, si je comprends bien, M. le Président, l'approche caquiste, là, c'est
les deux pieds sur les freins. On développe
un territoire, mais on ne développe pas les autres. On voit leur attitude à
l'égard de la Gaspésie; eux ont
sacrifié la Gaspésie. Nous, on a choisi de développer l'ensemble des régions du
Québec, M. le Président. L'objectif de la
stratégie maritime, qui se retrouve dans le budget, d'ailleurs, à raison de
1,5 milliard, c'est de faire en sorte que chacun des territoires puisse recevoir sa part de
développement. On a un objectif ambitieux pour le Québec. Au cours des 15
prochaines années, M. le Président, on
veut créer 30 000 emplois dans le secteur maritime. Ça passe par des
initiatives et des gestes tels que ceux envisagés par le gouvernement :
développer Contrecoeur, développer Vaudreuil-Soulanges, développer Montréal, développer Québec, développer la
Gaspésie et le Bas-Saint-Laurent et l'ensemble des régions, M. le
Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Groulx.
M. Claude Surprenant
M.
Surprenant : M. le Président, ce gouvernement veut implanter un pôle
logistique à Vaudreuil, alors que le port de Valleyfield est fermé trois mois par année. En réalité, il va
avantager le marché américain et aider le port de New York.
Le ministre peut-il
reconnaître qu'en fait il veut surtout avantager les comtés libéraux depuis
1981? Est-ce qu'il peut arrêter de faire de la politique qui date d'une autre
époque et prioriser l'économie du Québec plutôt que de prioriser les comtés libéraux,
M. le Président?
Le Président :
M. le ministre délégué aux Transports.
M. Jean D'Amour
M. D'Amour :
M. le Président, est-ce que le député vient de nous dire que les exportations,
c'est mauvais pour le Québec? On veut
exporter, M. le Président. Qu'on exporte à partir de Sept-Îles, qu'on exporte à
partir de Montréal ou de Québec, on
veut exporter, parce que les emplois liés à l'exportation... L'emploi lié
à l'exportation, M. le Président, ça a un effet direct au niveau de nos
entreprises manufacturières de partout au Québec.
Moi, je suis dans un
comté, dans le Bas-Saint-Laurent, Rivière-du-Loup—Témiscouata, où on exporte une quantité astronomique dans le domaine de
l'agroalimentaire, dans le domaine de la viande du porc. Savez-vous ce
qu'on veut, M. le Président? On veut exporter davantage. C'est ce que veut la
Gaspésie, c'est ce que veut la Mauricie. Je ne sais pas sur quelle planète vit
le député, M. le Président.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Services pour les enfants
handicapés au Centre Louis-Jolliet
Mme Nicole Léger
Mme Léger :
Récemment, nous avons exigé que les services pour les jeunes lourdement
handicapés du Centre de formation pour adultes Louis-Jolliet et de tout le
Québec ne soient pas coupés. Le ministre de l'Éducation, pris au dépourvu,
avait alors opéré un premier recul en assurant que cela ne serait pas le cas.
Or, malgré ce que dit le ministre, les
parents de six nouveaux élèves qui devraient intégrer l'école en septembre ne
sont pas encore certains d'avoir leur place. Raison : les coupures
libérales.
Pourquoi
le ministre demande aux élèves tétraplégiques et aux autres jeunes très
lourdement handicapés du Québec de se sacrifier? Le ministre doit immédiatement
rassurer ces parents et ces enfants et leur dire qu'ils auront leur place en
septembre.
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. François Blais
M. Blais :
Alors, merci à ma collègue pour la question. Alors, je vais, bien sûr, les
rassurer, mais peut-être me permettre de
prendre l'occasion pour souligner... puis nous sommes tous parlementaires ici
et, comme parlementaires, nous avons
tous, dans nos circonscriptions, des associations étudiantes... des
associations, pardon, de parents, hein, qui épaulent des enfants qui
sont lourdement handicapés. Mais moi, je considère que, dans tout ce que j'ai
vu jusqu'ici comme parlementaire et en circonscription, ce qui m'a toujours
touché le plus, c'est de voir ces parents-là qui sont extrêmement dédiés, engagés, consistants dans leur engagement vis-à-vis
des enfants qui sont lourdement handicapés. Puis je sais que c'est le
cas pour tous les parlementaires qui sont ici aujourd'hui.
Alors,
je l'ai mentionné il y a deux semaines, ce problème-là était réglé. Je le réitère
aujourd'hui. J'ai pris des informations
ce matin, il y a une lettre de la commission scolaire qui est partie tout
récemment et qui informe les parents que les services auxquels ils ont
droit seront, bien sûr, disponibles encore l'an prochain.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger :
Alors, M. le Président, je veux m'assurer que la lettre indique clairement que
les six jeunes handicapés de cette école-là
auront leur place en septembre. Ils sont ici d'ailleurs avec nous. Alors, je
veux être sûre que vous vous engagez à ce que leur place soit bien
réservée pour ce mois de septembre.
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. François Blais
M.
Blais : Alors, je tiens à les saluer, d'abord. Et, encore une fois,
là, au nom de tous les parlementaires ici, je veux réitérer l'admiration que nous avons pour ces parents. Et, bien
sûr, l'engagement qui a été pris est formel, c'est un engagement pour
ces enfants, les six enfants.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme
Léger : M. le Président, est-ce qu'il va falloir que tous les
jeunes handicapés du Québec viennent à l'Assemblée nationale pour s'assurer de
leur place à l'école? Parce que, je lui dis tout de suite, je lui dis tout de suite au ministre, si c'est ce qu'il faut faire, je
vais les inviter jour après jour et poser une question pour chacun d'eux.
Alors,
est-ce que les coupures libérales vont affecter tous les jeunes handicapés du
Québec? C'est ça, la question. Et je veux qu'il rassure tous les parents
et tous les enfants handicapés du Québec.
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. François Blais
M.
Blais : Alors, j'aimerais dire tout d'abord que les parents du Québec
n'ont pas à se déplacer à l'Assemblée nationale.
Ils n'ont pas eu à se déplacer, la décision était déjà prise. La commission
scolaire a pris un certain temps pour envoyer la missive, la missive a
été envoyée. Les droits de ces enfants-là seront respectés l'an prochain.
Je
veux dire, là, que dans le cadre... Il y a eu un débat hier entre le chef de
l'opposition puis le premier ministre. Je veux rappeler une chose très simple,
le gouvernement du Québec investit 2,3 milliards cette année, hein, pour
aider les enfants handicapés, les
enfants qui ont des problèmes d'adaptation. C'est des sommes énormes, c'est des
sommes qui ont augmenté de façon très importante ces dernières années.
Le Président :
En terminant.
M. Blais :
Nous avons une considération pour cette mission et nous allons poursuivre notre
engagement.
Le Président :
Principale, Mme la députée de Gouin.
Impact
sur les femmes de la loi instituant
le Tribunal administratif du travail
Mme Françoise David
Mme David (Gouin) : M. le Président,
en étude de crédits, j'ai demandé au premier ministre s'il était prêt à
s'engager à effectuer une analyse différenciée selon les sexes pour les projets
de loi importants du gouvernement. Le premier
ministre m'a répondu par l'affirmative. Je viens donc lui demander qu'une ADS
soit effectuée sur le projet de loi n° 42,
loi regroupant la Commission de l'équité salariale, la Commission des normes du
travail et la Commission de la santé
et sécurité du travail dans une même nouvelle entité. Pourquoi est-ce que je
demande cela au premier ministre? Parce que les femmes québécoises sont encore loin derrière les hommes quant aux
revenus de travail gagnés dans une année, parce que la majorité des femmes est sous-payée et concentrée dans des ghettos
d'emploi, parce que trop de femmes sont des travailleuses à statut précaire à temps partiel au salaire minimum, et
c'est pire pour les femmes immigrantes. Il est donc urgent d'effectuer une analyse différenciée selon
les sexes pour bien comprendre les impacts du projet de loi n° 42 sur les
femmes.
Le premier ministre est-il prêt à leur donner?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président,
la question de ma collègue nous permet de rappeler les importants progrès qui
ont eu lieu dans le domaine de l'équité
salariale avec des actions de plusieurs partis politiques de cette Chambre,
d'ailleurs, et notre collègue,
maintenant, qui n'est plus en cette Chambre, Mme Jérôme-Forget, qui a mis en
place véritablement dans la fonction
publique du Québec l'équité salariale, qui progresse également dans le secteur
privé. Et elle a tout à fait raison de
dire, cependant, que les acquis ne sont pas garantis, puisqu'ils ne sont pas
complets, puisqu'il persiste, effectivement, un écart de rémunération,
comme elle l'a mentionné.
Nous avons eu cette conversation, et je l'ai
assurée que, par la suite, elle pourrait avoir des échanges avec ma consoeur la ministre responsable de la Condition
féminine pour déterminer à quel moment et dans quel projet de loi ce type d'analyse serait particulièrement utile. Je
retiens sa suggestion. Je l'invite à avoir ces échanges, M. le Président, mais
lui rappeler également que l'ensemble des
Québécois et des Québécoises, les hommes comme les femmes, bénéficient d'un gouvernement plus efficace, de finances
publiques bien gérées et d'une dette sous contrôle pour aider notre prochaine
génération, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Gouin.
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : M. le Président, le premier ministre ne sera pas surpris de
savoir que sa réponse ne me satisfait
pas entièrement. Je veux lui rappeler que la situation de nombreuses
travailleuses est difficile. 5 000 entreprises, 19 ans
après l'adoption de la loi, n'ont pas réalisé leur premier exercice d'équité
salariale. De nombreuses femmes, et souvent
immigrantes, travaillant dans des très petites entreprises ne sont même pas
couvertes par cette loi et n'ont que la
Loi sur les normes du travail pour encadrer leurs conditions de travail. Il
faut une analyse différenciée selon les sexes. Le premier ministre
est-il prêt...
Le Président : M. le ministre
de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad :
M. le Président, je peux rassurer la collègue, l'équité salariale, la
commission, elle est là pour rester. La
loi n'a pas changé. La mission n'a pas changé. Au contraire, M. le Président,
le fait d'avoir l'équité salariale avec la Commission des normes, avec
la Commission de la santé et sécurité permet aux gens qui font la surveillance
pour l'équité salariale d'avoir accès dans
toutes les régions du Québec. Par exemple, la Santé et sécurité, ils ont 20
bureaux dans toutes les régions du
Québec. Les Normes du travail, ils ont 17 bureaux dans toutes les régions du
Québec. L'Équité salariale, actuellement, ils ont deux bureaux. Avec
cette fusion-là, M. le Président, vont aller dans toutes les régions,
finalement, pour défendre l'équité salariale et appliquer la loi dans toutes
les régions du Québec.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Gouin.
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : M. le Président, je suis obligée de dire à mon collègue le
ministre du Travail que, justement, son
intervention me démontre qu'il y a une mauvaise compréhension, je pense, de ce
qu'est la Loi sur l'équité salariale. C'est
une loi fondamentale qui doit agir de façon collective au niveau de la
discrimination entre les sexes. C'est pour ça qu'on a besoin d'une commission, de personnes
expérimentées qui connaissent le dossier, mais, avant d'en discuter, avant
d'aller en étude détaillée, il faut une analyse différenciée selon les sexes.
Ça s'impose dans le cadre de cette loi.
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi.
M. Sam Hamad
M.
Hamad : M. le Président, je trouve ça vraiment, là,
décevant. Actuellement, nous sommes en consultation, et on n'a pas vu la députée dans la consultation
pour rencontrer les groupes et comprendre exactement de quoi nous parlons,
M. le Président. Elle, elle veut parler à
l'étude détaillée. J'aurais aimé ça la voir à la consultation. Il y a des
groupes qui ont pris la peine
d'écrire des mémoires, se déplacer, donner leur opinion, et la députée de
Gouin, malheureusement, n'est pas là
pour donner son opinion et participer avec nous, les parlementaires, sur
l'étude de projet de loi. Elle veut attendre l'étude détaillée, M. le Président. Je l'invite, après la période de
questions, il y a une consultation, je l'invite à venir voir, consulter
avec nous, poser les questions aux groupes...
Le Président :
En terminant.
M.
Hamad :
...avoir l'opinion avant la fin de l'étude détaillée.
Le Président :
Principale, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
Repas halal servis dans les établissements de
détention
M. Marc Picard
M.
Picard : M. le Président, pendant que l'on sert aux aînés qui
vivent en CHSLD des repas à moins de 2 $, on apprend dans les crédits du ministère de la
Sécurité publique que plus de 105 000 repas halal à 3,31 $ ont été
servis l'an dernier dans les prisons
du Québec. Entre 2013 et 2014, le nombre de repas halal offerts a augmenté de
16 % par rapport à une augmentation de 4,6 % l'année
précédente, et la facture globale a augmenté de 18 % cette année.
Ces
augmentations soulèvent des questions sur le processus qui permet de déterminer
les demandes des prisonniers réellement fondées sur des convictions religieuses
et celles fondées sur le désir de vouloir obtenir un repas de meilleure qualité. Comment la ministre de la
Sécurité publique explique-t-elle l'augmentation de 16 % du nombre de repas
halal servis dans les prisons du Québec?
Le Président :
Mme la ministre de la Sécurité publique.
Mme Lise Thériault
Mme
Thériault : Oui. M. le Président, d'abord, vous allez me
permettre de rectifier les chiffres dans Le Journal de Montréal, où on écrit qu'un repas régulier dans les centres de détention coûte
2 $. Ce n'est pas vrai, M. le Président; on parle de 3,12 $. Donc, la différence de coût entre une diète
régulière, un repas régulier, et une diète halal, entre guillemets, M.
le Président, on parle de 0,19 $ de différence, à peine 6 % de
différence au niveau des coûts.
Concernant
la quantité de personnes qui reçoivent des diètes religieuses, M. le Président,
ou particulières, ça me fait plaisir
de vous dire qu'au 11 mai 2015 il y a un détenu à Chicoutimi, pour 81 personnes
incarcérées, qui a une diète halal,
six à Hull pour 231 personnes, huit à Québec pour 664, 11 à Saint-Jérôme pour
441 personnes, 96 à Montréal pour 1 355, 48 à Rivière-des-Prairies
pour 585, une à Sherbrooke pour 291 et 10 à Leclerc, de Laval, pour 245
personnes. M. le Président, on parle de 181 personnes sur 4 074 personnes
qui sont dans nos centres de détention...
Le Président :
En terminant.
Mme
Thériault : Et vous comprendrez, M. le Président, que ce n'est
même pas 1/2 de 1 % de la population de nos centres.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Marc Picard
M. Picard :
M. le Président, la ministre de la Sécurité publique doit s'assurer que le
droit pour un prisonnier d'avoir un repas
religieux soit fondé. Il ne faut pas que les détenus adhèrent à une religion du
jour au lendemain simplement pour
obtenir un repas plus santé, plus généreux ou de meilleure qualité.
L'augmentation de 16 % des repas halal en une année est très
étonnante.
Est-ce que la
ministre peut nous assurer que les agents pastoraux responsables d'approuver
les repas dans les prisons n'en laissent pas passer?
Le Président : Mme la
ministre de la Sécurité publique.
Mme
Lise Thériault
Mme
Thériault : Oui. M. le Président, vous avez compris qu'aux
chiffres que je vous ai donnés, qui sont en date du 12, donc
d'avant-hier, on comprend qu'il y a très peu de personnes et que c'est un
phénomène qui est concentré particulièrement
dans la région de Montréal, où les gens de d'autres confessions sont
représentés. Ils sont aussi dans nos centres de détention.
Mais, M. le
Président, je veux rassurer le collègue, il y a une procédure qui a été mise en
place et qui est validée par la
Direction de la protection de la jeunesse et des droits de la personne ainsi
que la Protectrice du citoyen parce que, il faut quand même le dire, les centres de détention ont eu des plaintes,
il y a des jugements qui ont été rendus. Donc, on a fait valider nos
processus avec les différentes instances...
• (11 h 10) •
Le Président : En terminant.
Mme Thériault : ...et je peux
vous dire, M. le Président, qu'on surveille étroitement...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
M. Marc Picard
M. Picard :
Merci, M. le Président. Pendant qu'on demande aux Québécois de se serrer la
ceinture, le stratagème des
prisonniers pour obtenir des repas religieux est payé par les contribuables. La
facture pour les repas halal servis dans les prisons a augmenté de
18 % en une année seulement.
Comment la ministre explique-t-elle cette
hausse? Va-t-elle resserrer la procédure?
Le Président : Mme la
ministre de la Sécurité publique.
Mme Lise Thériault
Mme
Thériault : M. le Président, je vous ai mentionné les personnes
qui se prévalent des diètes halal. J'ai des centres de détention où il n'y en a pas. La réalité, c'est qu'à Québec
il y en a huit puis qu'à Chicoutimi il y a une personne.
Moi, là,
O.K., je peux vous dire qu'il y a une procédure, cette procédure-là a été
validée, et qu'il arrive qu'il y a des
gens qui invoquent des mauvaises raisons, et qu'il arrive également qu'il y ait
des refus, M. le Président. C'est ça, la réalité. Le collègue aura beau dire n'importe quoi, M. le Président, 1/2
de 1 % de la population carcérale va se prévaloir d'une diète
halal, M. le Président. C'est ça, la...
Le Président : M. le leader
du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel :
La ministre a eu trois fois la chance de répondre à la question, d'expliquer
pourquoi, pourquoi il y a eu une augmentation de 16 %. C'est tout.
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M.
Fournier : Elle a répondu deux fois avant la troisième
question, qui était la même. Si vous écoutiez la réponse, peut-être que vous ne vous relèveriez pas pour
répéter des questions que vous avez écrites avant la période de questions.
Le Président : Est-ce que
vous avez terminé, Mme la ministre? Vous avez terminé?
Mme
Thériault : M. le Président, regardez, là, on vérifie chaque
fois qu'il y a une demande. Si elle est justifiée, elle est accordée.
Le Président : En terminant.
Mme Thériault : Si elle n'est
pas justifiée, elle n'est pas accordée. Et c'est ça, la réalité, M. le
Président.
Le Président : Principale, M.
le député de Jonquière.
Évaluation
environnementale du projet
d'agrandissement du Port de Québec
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault : Oui. Merci,
M. le Président. Dans le dossier de l'agrandissement du Port de Québec, nous apprenons ce matin dans Le Soleil que
le ministre de l'Environnement veut tenir un BAPE, entre autres pour les
questions de qualité de l'air, de transport de pétrole, de sécurité.
Mais, revirement de situation à la toute dernière minute avant d'entrer à la période de
questions, le Port de Québec vient d'émettre un communiqué dans lequel il donne
une leçon assez importante au ministre.
Le Port de Québec dit qu'il ne veut pas assujettir son projet à un certificat
d'autorisation. Il déplore la sortie
prématurée du ministre, il déplore que le ministre crée de la confusion et il
affirme que seul, seul le fédéral aura juridiction sur le projet
d'agrandissement du Port de Québec.
Alors,
M. le Président, c'est très important, qui dit vrai? Est-ce le ministre? Est-ce
le Port de Québec? Est-ce que le ministre va tenir un BAPE pour protéger
la sécurité des citoyens de Québec?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Il est étonnant que le député de
Jonquière voie de la confusion lorsqu'un gouvernement du Québec cherche à appliquer ses lois en matière environnementale.
Notre position en matière environnementale
a toujours été très claire, que ce soit dans le dossier TransCanada, que ce
soit dans le dossier d'agrandissement du Port de Québec, les lois
québécoises en matière environnementale s'appliquent.
Et
ce que nous affirmons clairement, c'est que, dans le projet d'agrandissement du
Port de Québec, le BAPE va se pencher
sur le projet, va approfondir des questions sérieuses qui sont soulevées par la
population. Nous prenons nos responsabilités,
nous allons agir de façon responsable et sérieuse, et les lois du Québec vont
s'appliquer, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : M. le Président, c'est très important que le
Québec se tienne debout, que le Québec affirme ses compétences en matière d'environnement. C'est très
important pour notre candidat Clément Laberge, qui rencontre des
citoyens tous les jours dans le comté de Jean-Talon, où le train va passer avec
du pétrole.
Est-ce
que le ministre peut nous assurer également, en plus du BAPE, qu'il n'y aura
pas de certificat d'autorisation émis au Port de Québec avant que le
Port de Québec aille de l'avant avec son projet?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : M. le Président, se tenir debout au Québec, c'est appliquer
les lois du Québec, et c'est ce que nous faisons dans le cas du projet
d'agrandissement du Port de Québec, M. le Président.
Lorsque
le Parti québécois était au pouvoir, où était le BAPE sur Anticosti? Je le
cherche, M. le Président, je ne l'ai pas encore trouvé. Où était la demande de BAPE sur
TransCanada? Ils n'ont pas demandé aucun BAPE sur TransCanada, M. le
Président. Où est l'application des lois en matière environnementale quand le
Parti québécois est au pouvoir? Nulle part, M. le Président. C'est bizarre que,
durant une élection partielle, là on élève l'épouvantail du pétrole et on
essaie de faire peur aux électeurs,
alors que nous prenons nos responsabilités et on applique les lois
environnementales québécoises.
Le Président :
Principale, M. le député de Richelieu.
Transfert des activités des centres de jour pour
aînés aux organismes communautaires
M. Sylvain Rochon
M. Rochon :
M. le Président, le ministre des Finances disait il y a quelques mois, et je le
cite : Les organismes communautaires
peuvent livrer des services sociaux, ça coûte moins cher. Or, qu'apprenait-on
dans les pages du Devoir hier? Qu'un peu partout les
établissements de santé se déchargent des activités des centres de jour pour
aînés en les transférant aux organismes
communautaires. Les centres de jour, ce sont des soins de qualité pour les
aînés, du répit pour les familles,
une façon de sortir de l'isolement les plus vulnérables d'entre nous. Des
organismes communautaires déjà débordés
devront offrir un service supplémentaire sans les ressources, sans le
financement. Non seulement le réseau se délaisse de ses responsabilités, mais il ne faut pas que ça se sache, il
ne faut pas le dire. À Rivière-du-Loup, une infirmière et une technicienne en loisirs ont été suspendues une semaine sans salaire pour avoir supporté les
usagers et leurs familles dans leur démarche de maintien des services de
centre de jour.
Est-ce que
la ministre des Aînés peut s'assurer que la politique
du ministre des Finances ne soit pas appliquée...
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : Je vais laisser le député de Richelieu se remettre de ses
émotions. M. le Président, je tiens à rassurer la population, M. le
Président...
Des voix :
...
Le Président : S'il vous
plaît!
M.
Barrette : Puisque le député de Richelieu
a touché à plusieurs sujets, je vais essayer d'y répondre successivement. Premièrement, M. le Président, je tiens à rappeler au député
de Richelieu, s'il l'a oublié,
que, dans les crédits, nous avons
augmenté le financement aux organismes
communautaires de 521,4 millions de dollars à 527,9 millions
de dollars, M. le Président. Alors, il
n'y a pas de diminution dans les organismes communautaires. Dans la loi n° 10, nous procédons
évidemment, comme ma collègue ministre déléguée l'a bien dit tout à l'heure, à
une optimisation de nos ressources et nous maintenons les services.
Et, pour ce qui est, évidemment, de la situation qui
vient d'être portée à mon attention par le député de Richelieu, je suis
très étonné de cette situation-là, mais je pense que, certainement, les
employés en question ont des recours.
Le Président : En terminant.
M. Barrette : Et je suis désolé
d'apprendre cette situation si elle est réelle, évidemment.
Le Président : Alors, ceci
met fin à la période des questions et réponses orales.
Motions sans préavis
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, nous en sommes à la
rubrique des motions sans préavis, et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je
cède la parole à Mme la ministre de la Justice pour une motion sans préavis.
Mme la ministre.
Souligner la Journée
internationale
contre l'homophobie et la transphobie
Mme Vallée :
Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de
présenter la motion suivante conjointement avec le député de
Lac-Saint-Jean, la députée de Montarville et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :
«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée
internationale contre l'homophobie et la transphobie qui se tiendra le 17 mai
prochain;
«Qu'elle
dénonce toute forme de discrimination, intimidation ou violence à l'endroit des
membres des communautés LGBT;
«Qu'elle
réitère son soutien et sa solidarité envers ces communautés et qu'elle salue
l'engagement de tous ceux et celles qui contribuent à la lutte contre
l'homophobie et la transphobie;
«Que les
membres de cette Assemblée continuent d'unir leurs efforts pour lever les
obstacles encore présents, malgré les
progrès accomplis, pour faire du Québec une société ouverte et inclusive à
l'égard de toutes ses citoyennes et de tous ses citoyens afin
d'atteindre une réelle égalité des genres;
«Et
finalement qu'elle s'engage à poursuivre les efforts afin d'assurer la
sécurité, l'intégrité, la dignité et la liberté de tous les citoyens,
sans égard à leur orientation sexuelle ou à leur identité de genre.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la ministre de
la Justice. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le
leader adjoint du gouvernement.
• (11 h 20) •
M.
Sklavounos :
Oui, M. le Président. Il y a consentement pour des interventions de l'ordre
d'environ deux minutes par
intervenant dans l'ordre suivant : notre ministre de la Justice, suivie du
député de Lac-Saint-Jean, ensuite de la députée de Montarville et,
finalement, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, je comprends qu'il y a consentement
pour quatre intervenants, pour une durée d'environ deux minutes. Alors,
commençons avec Mme la ministre de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : Alors, M. le
Président, je suis très heureuse que l'ensemble des formations politiques de
cette Assemblée se joignent à moi afin de souligner la Journée internationale
contre l'homophobie et la transphobie qui se tiendra
dimanche le 17 mai prochain. Je tiens, d'ailleurs, à souligner la présence,
dans les tribunes, de représentants des différents groupes qui militent au quotidien afin que l'homophobie et la
transphobie soient des concepts mis derrière nous. Alors, mesdames
messieurs, merci d'être ici.
M. le
Président, nous arborons fièrement ce macaron, ce A pour les Alliés à la lutte
à l'homophobie et à la transphobie.
Partout à travers le monde, M. le President, la journée du 17 mai donne lieu à
de nombreuses activités pour sensibiliser
la population aux réalités des personnes gaies, lesbiennes, bisexuelles et
transsexuelles ou transgenres, ainsi que pour dénoncer la discrimination
et l'intimidation, ainsi que la violence à leur endroit.
Je profite de l'occasion pour réitérer
la solidarité du gouvernement du Québec envers les communautés LGBT et pour saluer toutes celles et tous ceux qui, par
leur engagement indéfectible, contribuent à faire échec à l'homophobie
et à la transphobie. D'hier à aujourd'hui,
cette Assemblée a vu nombre de mesures législatives adoptées pour l'avancement
des droits des personnes LGBT, faisant du
Québec un modèle de réussite à cet égard. Or, tout n'est pas gagné, il y a
encore bien du chemin à faire.
Nous
terminons, d'ailleurs, aujourd'hui les consultations sur le projet de règlement
relatif au Règlement sur le changement
de nom et d'autres qualités de l'état civil pour les personnes transsexuelles
ou transgenres. Je tiens à réitérer en
cette Chambre que nous avons abordé ces consultations avec une grande ouverture
et que l'ensemble des témoignages reçus m'ont beaucoup touchée.
Collectivement, nous
devons être à l'écoute de ces personnes et de leur réalité encore trop méconnue
tout en maintenant, évidemment, le sain
équilibre entre l'exercice des droits et la stabilité des actes de l'état
civil. Nous devons unir nos efforts
pour lever les obstacles encore présents malgré les progrès accomplis pour
faire du Québec une société ouverte,
inclusive à l'égard de toutes les citoyennes et de tous ces citoyens afin
d'atteindre cette réelle égalité de genre. De plus, nous devons assurer la sécurité, l'intégrité, et la dignité, et la
liberté pour ces personnes, sans égard à leur orientation sexuelle ou à
leur identité de genre.
À
titre de ministre responsable de la lutte contre l'homophobie, je m'engage à
poursuivre les actions en ce sens afin que notre société atteigne une
réelle égalité pour tous, peu importe l'orientation sexuelle ou l'identité de
genre. M. le Président, je vous remercie.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la ministre de
la Justice. M. le député de Lac-Saint-Jean, à vous la parole.
M. Alexandre Cloutier
M.
Cloutier : Je vous remercie, M. le Président. Alors, c'est avec
beaucoup de fierté que notre formation politique se joint pour souligner
cette importante journée internationale pour lutter contre l'homophobie et la
transphobie et de réitérer l'importance de dénoncer toute forme de
discrimination envers la communauté LGBT.
Permettez-moi
de souligner le travail de tous ceux et celles qui luttent pour que le Québec
lève tous les obstacles qui sont encore bien présents dans notre société et qui
travaillent pour que le Québec soit encore une société plus ouverte et
qui célèbre la diversité.
Les
manifestations de l'homophobie ne sont pas toujours éclatantes, bien visibles.
Pourtant, les manifestations, elles,
sont bien réelles. Espérons que cette journée internationale contribue à
permettre à des gais et lesbiennes de plus facilement dévoiler leur orientation sexuelle. Le Parti québécois
restera toujours solidaire des organisations qui luttent pour que
l'égalité juridique s'accompagne de l'égalité sociale.
Et
permettez-moi, en terminant, de souligner le travail exceptionnel qu'a fait
notre ancien ministre et collègue, l'ancien
ministre de la Justice Bertrand Saint-Arnaud, qui avait mis une importante campagne
publicitaire à l'époque pour lutter contre toute forme de
discrimination, contre l'homophobie. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, M. le député de
Lac-Saint-Jean. Mme la députée de Montarville, je vous cède la parole.
Mme Nathalie Roy
Mme Roy
(Montarville) :
Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, c'est avec grand plaisir et fierté
également que je joins ma voix ce matin à
celle de la ministre de la Justice pour souligner la Journée internationale
contre l'homophobie et la transphobie, qui se tiendra le 17 mai
prochain.
J'aimerais
profiter de cette occasion pour saluer les personnes qui sont présentes dans
les tribunes ce matin, des personnes courageuses qui peuvent témoigner
de la réalité parfois difficile et des traitements discriminatoires que subissent trop souvent les personnes
homosexuelles, bisexuelles, transgenres. En ce jour où nous élevons notre voix
contre l'intolérance et pour l'égalité, nous nous devons de saluer et,
surtout, de remercier toutes les personnes d'ici comme ailleurs qui luttent
contre la discrimination et l'intimidation à l'endroit des membres de la
communauté LGBT et qui oeuvrent à
sensibiliser la population et à faire la promotion de l'égalité des genres et
du respect des libertés relatives à l'orientation
sexuelle. Faisant preuve d'une impressionnante solidarité, ces personnes
contribuent à rendre notre société encore
plus ouverte et inclusive, notamment en participant aux débats que nous tenons
dans cette Assemblée. Mme la ministre
en a fait allusion, les membres de l'Assemblée nationale ainsi que tous les
Québécois et toutes les Québécoises doivent, effectivement, unir leurs efforts
afin d'assurer la sécurité, l'intégrité, la dignité et la liberté de tous les
citoyens sans égard à leur orientation sexuelle ou à leur identité de
genre.
Finalement,
j'aimerais profiter de cette occasion pour remercier et saluer les efforts de
M. Jasmin Roy pour contrer l'intimidation.
J'ai vu, il y a quelques jours à peine, M. le Président, le poignant témoignage
qu'il a livré lors d'une émission au
Canal Vie. Il nous rappelait que l'intimidation, ça commençait souvent bien
jeune, sur les bancs d'école, et nous avons tous l'obligation de faire changer les mentalités pour que cesse la
discrimination, qui est, malheureusement, encore existante. Alors,
merci, M. Roy. Merci, M. le Président. Merci à vous de nous sensibiliser.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Et merci à vous, Mme la députée de
Montarville. Enfin, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Alors, bien sûr, je suis très heureuse
d'être debout devant vous aujourd'hui pour,
avec vous, dire comment nous sommes soit LGBT — c'est mon cas — ou soit alliés. Le A que vous portez ici, ça
veut dire que vous êtes des alliés,
c'est-à-dire que vous comprenez, que vous êtes solidaires, que vous avez envie
que cesse l'homophobie et la
transphobie. Parce que, dans les faits, l'homophobie et la transphobie ne
touchent pas que les gens qui le
sont, LGBT. Elles vous touchent tous et toutes, elles touchent nos enfants,
elles touchent nos familles parce que, quand
quelqu'un se fait traiter de tapette, on est en train de dire à cette
personne-là : Tu n'es pas normal, et ça, tu n'as pas besoin d'être homosexuel pour te faire traiter
de tapette, tu n'as pas besoin d'être transsexuel pour te faire traiter de
quelqu'un qui n'a pas l'air d'une vraie femme ou d'un vrai homme.
Alors,
moi, je souligne qu'aujourd'hui, pour la première fois au Québec, on a ajouté
le mot «transphobie». Et ça, c'est
majeur parce que la transphobie, c'est comme si, tout d'un coup, il y aurait ce
à quoi devrait avoir l'air une vraie femme
ou un vrai homme, puis, si tu n'as pas l'air de ça, bien là on peut profiter
pour te dénigrer, pour t'intimider, hein? Bref, on entend des
témoignages tellement horribles au niveau de la commission parlementaire.
Et
donc je vous invite à porter le A si vous êtes des alliés. Portez-le pas si
vous ne l'êtes pas. Allez chercher plutôt le livre Modèles
recherchés, où moi et certains collègues témoignons dans le livre pour dire
qu'est-ce qu'on vit, qu'est-ce que ça nous
fait, vivre lorsqu'on vit cette discrimination. Et en plus la campagne du A,
c'est... Prenez-vous en photo avec
votre A et twittez-le. Vous avez tous des Twitter, des Facebook.
Allez-y, expliquez au Québec qu'au Québec on est fiers d'être contre
l'homophobie et la transphobie.
Et
d'ailleurs, M. le Président, je terminerais là-dessus, je suis à peu près
certaine que les gens qui sont ici, dans cette Assemblée, seraient d'accord avec moi pour qu'on vous demande,
encore cette année, de hisser sur le mât de l'Assemblée nationale notre
drapeau arc-en-ciel, mettons, jusqu'au 17 mai, minuit. Merci.
Mise aux voix
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Est-ce que cette motion est adoptée?
• (11 h 30) •
Des voix :
Adopté.
Le Président :
Adopté. Pour une nouvelle motion sans préavis, M. le chef de l'opposition
officielle.
Souligner la Journée nationale des patriotes
M.
Bédard :
M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée
afin de présenter, conjointement avec le premier ministre, le chef du deuxième
groupe d'opposition et le député de Mercier, la motion suivante :
«Que l'Assemblée
nationale souligne la Journée nationale des patriotes, qui se tiendra le
18 mai [prochain];
«Qu'elle
se souvienne de l'importance de la lutte des patriotes de 1837‑1838, d'abord pour
la reconnaissance de notre nation, mais aussi pour sa liberté politique
et pour l'établissement d'un gouvernement démocratique.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le chef de
l'opposition officielle. Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion? M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui, M. le Président, il y a consentement pour
des interventions d'environ deux minutes par intervenant, dans l'ordre suivant : le chef
de l'opposition officielle; suivi du chef du deuxième groupe d'opposition; le
député de Mercier; et finalement notre ministre.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, consentement,
quatre intervenants, durée d'environ deux minutes. M. le chef de
l'opposition officielle.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : Merci, M. le Président. Cette journée a été
instituée, souvenez-vous, c'était à la proposition du premier ministre Bernard Landry, à l'époque, qui
souhaitait voir cette journée des patriotes reconnue par tous les Québécois. Et
je suis content de voir qu'on le fait
aujourd'hui mais à l'unanimité de tous les parlementaires. Il est primordial
évidemment que ça soit dans cette
Assemblée, au salon bleu, qu'on se souvienne de ces femmes, de ces hommes, les
patriotes, au coeur même de notre démocratie parce que c'est ce qu'ils
défendaient, nos droits démocratiques.
Il
n'y avait aucun doute dans l'esprit des patriotes de 1837 quant à l'importance
de donner le pouvoir au peuple. Ils
étaient tous aussi convaincus du bien-fondé de l'idée de continuer à vivre et à
prospérer en français en terre d'Amérique. De Lorimier, Nelson, Papineau, Chénier, vos noms résonnent encore
partout au Québec, dans nos rues, dans nos places. Ils se sont levés, ont combattu, certains ont fait
le sacrifice de leur vie pour défendre nos libertés, d'autres ont été pendus,
condamnés à l'exil, M. le Président.
Rappelons-nous
aussi, et surtout, le texte les Quatre-vingt-douze Résolutions, très
avant-gardiste, qui s'inscrivait dans cette révolution mondiale des
droits démocratiques. Ils étaient ici, chez nous, à l'avant-garde de ces
droits. Ces résolutions
dénonçaient le système du gouvernement en place et présentaient des
revendications pour un gouvernement élu,
responsable et représentatif. Qualifié à l'époque, par la Gazette du Québec,de révolution dans toute la force du terme, les Quatre-vingt-douze Résolutions revendiquent évidemment, entre
autres, des institutions démocratiques qui représentent la réalité de l'époque du Bas-Canada, vous le
savez, accordant le droit d'élire nos membres au Conseil exécutif, une place
correcte et une reconnaissance, surtout, des
droits de la population d'origine française du Bas-Canada, entre autres, la
possibilité d'avoir une représentation
équitable et réelle de la majorité francophone dans la fonction publique.
Présenté en 1834 à l'Assemblée
législative du Bas-Canada, le texte fut débattu d'avril 1834 à la Chambre des
communes de Londres... puis rejeté trois ans plus tard en bloc par les
autorités britanniques. Cela mena, vous le savez, aux grandes assemblées
publiques des patriotes puis à la rébellion de 1837‑1838. Des centaines, des
milliers de gens, côte à côte, francophones,
anglophones, intellectuels, mais aussi menuisiers, forgerons, cultivateurs,
charpentiers, aubergistes, voituriers... la liste est longue, de ces gens réunis autour d'un même parapluie, celui
de revendiquer des droits démocratiques, de grands idéaux de ce siècle,
M. le Président.
Les Quatre-vingt-douze Résolutions
furent un véritable tournant et elles placent leurs actions dans ce qui est
pour nous le plus évident, la démocratie et la justice sociale. Ce fut
un des gestes fondateurs de notre État moderne, M. le Président, et nous devons
nous en souvenir.
Des
patriotes, par la suite, il y en a eu beaucoup. Quand on pense à celles qui ont
combattu pour obtenir le droit de
vote des femmes, elles aussi étaient patriotes, M. le Président. Notre histoire
nationale prend ici toute son importance et sa connaissance, surtout. Cette connaissance doit être transmise et
valorisée, c'est un devoir essentiel. C'est un élément clé de notre fierté collective comme peuple, comme
nation. L'histoire des Québécoises
et des Québécois, je le dis et je le redis, elle est
unique, elle nous influence, elle nous définit et elle nous unit. Soyons-en
fiers.
Aujourd'hui, c'est à notre tour de s'inscrire dans cette grande histoire et de
l'écrire à notre tour, mais évidemment
dans la suite des idéaux qui ont été
défendus par ces patriotes. C'est à nous à laisser une empreinte aussi
indélébile que ces hommes et ces
femmes qui se sont battus justement pour une des causes les plus nobles : la
démocratie et la reconnaissance du peuple comme sources de pouvoir de
notre nation. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le chef de l'opposition officielle.
Suivons avec M. le chef de la deuxième opposition.
M. François Legault
M. Legault : Oui. M.
le Président, comme nation, le Québec a
le droit et surtout le devoir de commémorer les moments fondateurs de
son histoire, une histoire parsemée d'épreuves, de combats, de défaites, de
victoires qui ont contribué à forger une conscience forte de notre identité.
Les
rébellions de 1837 et 1838 sont un événement majeur de ce parcours pour deux
raisons. D'abord, elles ont dessiné les contours de notre identité comme
nation, elles ont fait en sorte que le peuple canadien-français prenne conscience de lui-même, mais elles nous ont aussi
légué un héritage puissant qui a façonné notre démocratie actuelle avec
ses valeurs républicaines de tolérance, d'égalité et de liberté. Au cours de
ces rébellions, des patriotes de la minorité anglaise
et irlandaise ont largement combattu aux côtés de la majorité française. C'est
justement ce qu'évoque le drapeau des
patriotes avec ses trois couleurs distinctes : le vert, le blanc et le
rouge. Nous ne devons jamais oublier que le combat pour la démocratie et le gouvernement responsable,
ça a été l'affaire de tous. L'héritage des patriotes appartient donc à tous
les Québécois, et toutes les tendances politiques représentées dans cette
Chambre peuvent s'en réclamer.
Louis-Joseph Papineau et de Lorimier ont
été de célèbres patriotes, mais Georges-Étienne Cartier aussi. Nous devons aux patriotes le sens de la démocratie et
du pluralisme politique. Nous leur devons d'être ce que nous sommes aujourd'hui dans toute notre diversité et nos
contradictions. Le peuple québécois ne doit pas hésiter à assumer et à cultiver
cet héritage et à s'en inspirer dans ses combats actuels et à venir.
Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le chef de
la deuxièmement opposition. Poursuivons avec M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, M. le Président. Nous sommes
devant une motion pour célébrer, commémorer la mémoire collective des
patriotes.
Or, la
mémoire collective des peuples et des nations est, d'abord et avant tout, un
champ de bataille : un champ de bataille des idées, d'interprétations pour
en capter le sens, pour savoir qu'est-ce qui, dans notre passé... qu'est-ce
qui, dans la contribution de ceux qui
nous ont précédés, peut guider dans la détermination de notre futur, dans le
sens que vont prendre nos décisions,
dans les décisions que nous prenons pour nous, pour nos enfants, pour notre
peuple, pour notre territoire, pour notre nation.
Mes collègues
ont mentionné que, d'abord, c'était une bataille pour la démocratie, pour la
pluralité pour faire en sorte que la
voix de tous et toutes puisse compter de manière équitable, hein? On a parlé de
la représentation équitable. Alors,
si nous sommes d'accord sur cette interprétation à puiser ce sens dans l'oeuvre
des patriotes, il faut qu'on en déduise ce que ça veut dire aujourd'hui.
Alors, je
nous invite sereinement à réfléchir à ce que ça veut dire, aujourd'hui, la
représentation équitable de tous. En
2015, si on veut être conformes à l'esprit des patriotes, ça veut dire la
réforme immédiate du mode de scrutin pour une représentation proportionnelle. Toutes les
démocraties modernes qui se respectent ont évolué vers là. Première chose.
Deuxièmement, bien sûr, ont va s'entendre entre indépendantistes ici, en
Chambre...
• (11 h 40) •
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, écoutez, il y a un seul
député qui a la parole, c'est le député de Mercier. Pendant les interventions des deux autres
personnes qui ont pris la parole, il y avait un silence. Je demande le même
silence pour le député de Mercier.
M. Khadir : Je ne cherche à accabler personne,
M. le Président, j'ai dit : On est dans le champ d'une bataille des
idées. Ce n'est pas les individus ici, nous voulons en tirer des leçons.
Deuxièmement,
c'est l'indépendantisme, bien sûr, c'est la souveraineté du peuple, c'est le
pouvoir au peuple. Je reviendrai à la
fin. Mais il y a aussi le fait que les patriotes étaient, avant tout, des
progressistes. L'ensemble des mesures qu'ils voulaient mettre en oeuvre,
les demandes, les réclamations qu'ils avaient s'inscrivaient dans le courant le
plus progressiste du XIXe siècle, dans un
courant progressiste qui cherchait à résoudre les contradictions, les
insuffisances des institutions, qui
servaient surtout à protéger les intérêts, les intérêts des classes dominantes,
des élites dominantes, alliées avec
la monarchie britannique et surtout très attachées à un passé très
conservateur, à un passé conservateur qui se résume habituellement,
quelles que soient les époques, à protéger l'intérêt de ceux qui profitent du
statu quo. Et les patriotes s'érigeaient, se sont élevés contre le statu quo,
c'étaient de véritables progressistes contre le conservatisme économique,
social et politique.
Troisièmement,
et ça, c'est important de s'en rappeler... et mon collègue de la CAQ, lui, a
dit : L'ouverture, le pluralisme,
mais ce pluralisme allait aussi loin que de s'inspirer de l'étranger, des
autres, de l'Amérique, bien sûr, des États-Unis
avec sa révolution, mais, ce qui était encore plus présent — regardez tous les journaux de l'époque, La Minerve — les
mouvements indépendantistes d'Amérique latine, Simón Bolívar, celui qui
disait : Le rôle de l'État, c'est de protéger les plus faibles devant
l'abus des plus puissants, des possédants. Ça, c'est Simón Bolívar, qui
inspirait les patriotes du Québec.
Aujourd'hui, si on a une inspiration, ça pourrait être encore l'Amérique
latine. On construit des ensembles au bénéfice des peuples et une
véritable...
Une voix : ...
M. Khadir : ...je termine, M. le Président,
parce que mes collègues ont eu jusqu'à quatre minutes... un véritable appel à ce que l'indépendance soit construite sur
les intérêts des peuples et non sur l'intérêt des élites possédantes, du
1 %. Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
député de Mercier.
Très bien. Alors, la parole est à M. le premier ministre.
M. Couillard : Merci, M. le
Président.
Des voix : ...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : ...du premier ministre qu'on a accordé aux autres orateurs. Alors, M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : Merci, M. le Président. Et je suis heureux de joindre ma voix à celle de
mes collègues pour souligner cette
journée parce que, on le sait, on le répète, le Québec d'aujourd'hui, il est fort, fier et dynamique, empreint de justice, de liberté, du droit de chacun de conserver sa
langue, ses traditions. Tout ça est bien réel aujourd'hui, mais, cette
réalité, on la doit à la détermination et au courage de ceux et celles
qui nous ont précédés.
On dit toujours
qu'on construit sur les épaules des géants qui sont venus avant nous. En voilà
un bel exemple. Donc, nous devons nous souvenir du combat des patriotes
pour ce Québec moderne d'aujourd'hui et le Québec
de demain aussi.
La Journée
nationale des patriotes a lieu chaque lundi précédant le 25 mai de chaque
année, et ça vise à mieux faire valoir les évènements du printemps de 1837, et effectivement il faut les remettre dans leur contexte international. Celui qu'un grand historien a appelé l'âge des
révolutions, c'est un mouvement qui fermentait partout dans le monde qu'on
connaissait alors, dans le monde où il y avait des mouvements de masse, bien
sûr les événements qu'on souligne aujourd'hui. Mais en France, qui était pour beaucoup
d'entre nous à l'époque la mère patrie encore, à quelques années seulement du changement de régime, on était sous
Louis-Philippe et on était à quelques années de la révolution de 1848 et
de la première... de la Deuxième République,
pardon. Et, à ce moment, les patriotes tenaient une centaine d'assemblées
populaires afin de réclamer des réformes et
l'institution d'un véritable système de gouvernement démocratique et représentatif.
Oui, c'est
une quête d'affirmation certainement justifiée qui a eu lieu à l'époque, mais
c'est également une quête de justice
et de démocratie, il ne faut jamais l'oublier. D'ailleurs, notre collègue a
rappelé l'union, dans ce qu'on appelait à l'époque le Bas-Canada, les anglophones, Irlandais et Britanniques de
souche avec les francophones, mais également le mouvement qui s'est
fait, au même moment, dans le Haut-Canada, autour de William Lyon Mackenzie,
avec lequel Papineau
correspondait très fréquemment. D'ailleurs, c'est lorsque les troupes
britanniques ont été transférées en masse vers le Bas-Canada pour faire face à la rébellion naissante que la
rébellion du Haut-Canada, elle a pu commencer autour de Mackenzie. Et, aujourd'hui encore, on se
souvient de ces deux grands moments, de ces deux grands moments de l'histoire
de ce pays, parce que les militants des deux
côtés... On a parlé tantôt de l'exil, de l'exécution même de certains, des
privations ont également eu lieu au
Haut-Canada, qui ont également connu l'exil, l'emprisonnement et l'exécution.
Et cette mémoire du combat commun de
Mackenzie et de Papineau a été redite lors de la guerre d'Espagne, où le
bataillon canadien s'appelait le bataillon Mackenzie-Papineau. Donc, ça
doit rester dans nos mémoires.
Ces
événements, donc, ont permis d'unir les citoyens de langue française et de
langue anglaise autour d'un même idéal.
Je ne répéterai pas ce qu'a dit notre collègue, tout à fait justement, sur le
drapeau des patriotes, qui rappelle cette convergence des peuples de l'époque, qu'on appelait alors le
Bas-Canada. C'est le Québec d'aujourd'hui. Ça a permis d'unir les couches populaires dans un même esprit
de revendication contre les élites — effectivement, il a raison, notre collègue — les élites coloniales, économiques et, il
faut le dire également, ecclésiastiques de l'époque. Les revendications des patriotes étaient formulées dans les
Quatre-vingt-douze Résolutions, adoptées le 21 février 1834 — et je me souviens être passé par Saint-Ours, où on a là-bas une
mémoire, même encore aujourd'hui, d'une de ces assemblées — réclamaient la mise en oeuvre de réformes politiques et sociales qui assuraient le
transfert du centre du pouvoir vers le peuple et la démocratie représentative et affirmaient le droit
de la Chambre de l'Assemblée de cette colonie de l'époque d'avoir les mêmes prérogatives que le Parlement colonial à
Westminster. On connaît bien sûr la suite de l'histoire. C'est le rejet de
ces résolutions par ce qu'on appelait le
Colonial Office, qui en dit beaucoup sur l'époque dont nous parlons, qui a
conduit au soulèvement armé.
Donc, les
patriotes ont fait preuve, oui, d'un avant-gardisme remarquable, d'un esprit
d'unité qui les a mis vraiment au service d'une cause très noble dont
nous bénéficions encore aujourd'hui.
Et j'ai eu
l'occasion, lorsque je suis allé à Toronto, de rappeler une autre histoire qui
a suivi la rébellion, une autre histoire d'unité, celle de Baldwin et
La Fontaine, des réformistes modérés, qui se sont unis pour faire en sorte
que ce gouvernement représentatif, quelques
années plus tard, voit le jour, au point même où Baldwin est venu se présenter
à Rimouski, et La Fontaine est
allé se présenter à Toronto pour montrer que les idéaux de langue, de justice
et de représentation s'unissaient,
quel que soit l'endroit où on voulait représenter les citoyens. Ils ont été
élus, les deux. Ils ont été élus massivement, les deux, il faut le
rappeler.
Donc, la
lutte des Patriotes, ces grandes assemblées, ça fait partie de l'histoire du
Québec. Des gens courageux qui y ont
participé, plusieurs ont donné leur vie et ont contribué à façonner nos
institutions démocratiques. Nous avons envers
eux le devoir de nous rappeler de leurs sacrifices et de les souligner de façon
particulière. Cette année encore, j'invite donc les Québécoises et les
Québécois à se souvenir du rôle qu'ont joué les patriotes. Merci, M. le
Président.
Mise aux voix
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le premier
ministre, de cette intervention. Est-ce que la motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Adopté. Nous sommes toujours à la
rubrique des motions sans préavis, et je cède la parole maintenant à M.
le député de Granby.
M.
Bonnardel :
Merci, M. le Président. Je demande le consentement pour déposer la motion
suivante conjointement avec la députée de Gouin :
«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que les
nombreuses dérives de projets informatiques représentent un problème grave et
coûteux pour les contribuables québécois dont l'ampleur exige de poser des
gestes forts;
«Qu'elle
demande au gouvernement de déclencher dans les plus brefs délais une commission
d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans
l'industrie des technologies de l'information et des communications.»
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député
de Granby. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Il n'y a pas consentement. Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
pour une autre motion sans préavis.
Souligner l'Année
internationale des sols
Mme Massé : Merci, M. le Président.
Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante
conjointement avec le député de Berthier et la députée de Mirabel :
«Que
l'Assemblée nationale souligne l'année 2015, comme l'Année internationale des
sols, tel que décrétée par l'Assemblée
générale de l'ONU et souligne que des sols sains assurent la sécurité
alimentaire et contribuent à lutter contre les changements climatiques;
«Que
dans ce contexte, l'Assemblée nationale affirme que les terres agricoles au
Québec sont une richesse à protéger et développer en tout respect des
écosystèmes dont elles font partie [prenante].»
• (11 h 50) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci, Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques. Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint
du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Nous proposons l'adoption sans débat, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Très bien. Alors, cette motion est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Adopté. Y a-t-il d'autres motions sans préavis?
Avis touchant les travaux des commissions
Alors,
nous passons maintenant à la rubrique des avis touchant les travaux des
commissions, et je cède la parole à nouveau à M. le leader adjoint du
gouvernement.
M.
Sklavounos :
Merci, M. le Président. Alors, j'avise cette Assemblée que la Commission de l'économie et du travail poursuivra les consultations particulières à l'égard du projet de loi
n° 42, Loi regroupant la Commission de l'équité salariale, la
Commission des normes du travail et la Commission de la santé et de la sécurité
du travail et instituant le Tribunal
administratif du travail, aujourd'hui, après les affaires courantes pour une
durée de 2 h 15 min, et complétera de 15 heures à
18 h 45, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La
Commission des institutions complétera, quant à elle, les consultations
particulières sur le projet de règlement relatif au Règlement sur le
changement de nom et d'autres qualités d'état civil pour les personnes
transsexuelles ou transgenres aujourd'hui, après les affaires courantes pour
une durée d'une heure, à la salle du Conseil législatif;
La Commission des
finances publiques, elle, poursuivra les consultations particulières à l'égard
du projet de loi n° 38, Loi visant à
permettre la réalisation d'infrastructures par la Caisse de dépôt et placement
du Québec, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, ainsi que le
mardi 19 mai 2015, de 10 heures à midi, à la salle du Conseil
législatif;
La
Commission de l'économie et du travail poursuivra, finalement, elle, l'étude
détaillée à l'égard du projet de loi n° 37, Loi confirmant
l'assujettissement des projets de cimenterie et de terminal maritime sur le
territoire de la Municipalité de Port-Daniel—Gascons au seul régime d'autorisation de
l'article 22 de la Loi sur la qualité de l'environnement, le mardi
19 mai 2015, de 10 heures à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau.
Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le leader
adjoint du gouvernement. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à
l'article 143 du règlement concernant l'heure des travaux des commissions?
Des voix :
...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Consentement. Très bien.
Pour ma part, je vous
avise que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles se réunira à la salle Louis-Hyppolyte-La Fontaine
aujourd'hui, de 15 heures à 17 h 30, ainsi que le mardi 19 mai 2015, de 10 heures à midi, afin
de tenir des auditions publiques dans le cadre de l'examen des orientations,
des activités et de la gestion administrative de la Commission de
protection du territoire agricole du Québec.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
À
la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous rappelle
que, lors de l'interpellation prévue pour
demain, vendredi 15 mai 2015, M. le député de La Peltrie s'adressera
à M. le président du Conseil du trésor sur le sujet suivant : Les
dérives dans la gestion des projets de technologies de l'information du
gouvernement.
Je
vous avise de plus que l'interpellation prévue pour le vendredi 22 mai
2015 portera sur le sujet suivant : L'impact de l'austérité libérale sur les conditions de vie
de nos aînés. M. le député de Richelieu s'adressera alors à Mme la ministre
responsable des Aînés.
Affaires du jour
Alors
la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer
aux affaires du jour, et, à nouveau, je vous cède la parole, M. le
leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos : Oui.
Merci, M. le Président. Je vais vous demander d'appeler l'article 2 de
notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 20
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : L'article 2. C'est bien ça? L'article 2
du feuilleton?
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : L'article 2 du feuilleton.
L'Assemblée reprend
le débat, ajourné le 13 mai 2015, sur l'adoption du principe du projet de
loi n° 20, Loi édictant la Loi
favorisant l'accès aux services de médecine de famille et de médecine
spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière
de procréation assistée.
Au
moment de l'interruption du débat, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve avait
la parole. Il vous reste neuf minutes à votre intervention, Mme la
députée, et je vous cède la parole de nouveau.
Mme Carole Poirier (suite)
Mme Poirier :
Je vous remercie, M. le Président. Alors, hier, j'ai débuté mon propos
concernant le projet de loi n° 20, projet de loi qui vient, semble-t-il,
favoriser l'accès aux services de médecine de famille et de médecine
spécialisée et modifiant les dispositions législatives en matière de
procréation assistée. Hier, dans mon plaidoyer, j'ai longuement parlé des impacts de la... des mesures de... pour les femmes
que le ministre propose et qui vient faire en sorte de rendre les femmes
illégales si elles souhaitent procéder à la fécondation in vitro après l'âge de
43 ans.
Alors,
et je répète, M. le Président — et ce n'est pas moi qui l'ai dit, mais ça me
fait plaisir de le répéter — il s'agit là d'une mesure paternaliste. Et ce matin la collègue de Gouin a parlé
d'ADS. J'en ai parlé pendant huit minutes hier durant mon propos. Le gouvernement a décidé de ne pas
appliquer l'ADS, l'analyse différenciée selon les sexes, tant au projet
de loi n° 20, au projet de loi
n° 42, que nous avons présentement en commission parlementaire, au projet
de loi n° 10, que nous avons
adopté, que le gouvernement a passé dans le bâillon. Et je vous rappellerai
qu'un débat précédent sur un autre projet
de loi en lien avec les tarifs de services de garde, le projet de loi
n° 28, aussi adopté dans le bâillon... le Conseil du statut de la femme avait recommandé au
gouvernement de faire une analyse différenciée pour justement voir les impacts
d'une telle mesure.
Alors,
le gouvernement a définitivement pris la décision de ne pas tenir d'analyse
différenciée parce qu'on ne veut pas
savoir l'impact que ça aura sur les femmes. Et, encore là, dans le projet de
loi n° 20, qui est devant nous, eh bien, entre autres, au niveau des femmes médecins, si on avait pris la peine
de faire une analyse différenciée, eh bien, on aurait constaté... parce que ce sont des données
choquantes encore aujourd'hui. Vous savez, M. le Président, on a plus de femmes
que d'hommes dans nos facultés de médecine,
mais, encore aujourd'hui, par un phénomène assez extraordinaire, les femmes
médecins gagnent 75 % le salaire des
hommes. Alors, il y a là une vérité crue, il y a là une vérité très accablante
dans notre société, que même les
femmes médecins... Alors, une femme médecin qui a 10 ans et moins de pratique
gagne un revenu moyen de 167 000 $, versus un homme :
218 000 $, donc un écart d'environ 50 000 $. 11 à 19 ans,
187 000 $ pour les femmes,
251 000 $ pour les hommes, un écart de 64 000 $. 20 ans et
plus, 172 000 $ pour les femmes, 214 000 $ pour les hommes. Et là c'est là que l'écart se réduit,
après 20 ans. Et là il se réduit avec encore une différence de
42 000 $. Pourquoi, M. le
Président, il y a des écarts aussi importants? Ça s'appelle la maternité, hein,
c'est aussi simple que ça. Parce que les
femmes — c'est
nous qui les portons encore, les enfants — doivent se retirer du marché du travail,
doivent prendre leur congé de maternité. Eh bien, ça vient affecter
effectivement leurs revenus. Mais ça, le ministre, il n'en tient pas compte. Ça, le ministre, quand il vient nous
appliquer des paramètres qui sont égaux entre les hommes et les femmes,
il ne tient pas compte des paramètres qui font que les femmes médecins gagnent
encore aujourd'hui 75 % le revenu des hommes.
Alors, ça, M. le
Président, c'est inacceptable encore aujourd'hui, en 2015. Et c'est le fléau
des femmes au Québec encore aujourd'hui. On
a beau se parler d'égalité, on a beau se parler d'équité... Et, quand je vois
le gouvernement qui, encore
aujourd'hui, dans le projet de loi n° 42, vient assimiler la Commission de
l'équité salariale à la commission des
normes... à la Commission de la santé et sécurité au travail en faisant même
disparaître le nom d'«équité salariale» dans le nom de la nouvelle commission, en faisant en sorte que ce sera
dorénavant les employeurs, par les cotisations, qui vont faire les frais de la Commission de l'équité salariale...
alors, imaginez ce qu'auront l'air les décisions à l'avenir, imaginez l'énergie qu'on va mettre sur l'équité
salariale dorénavant si c'est les employeurs. Parce qu'on se rappellera...
Et nous étions là à cette époque, parce que
c'est la députée d'Hochelaga-Maisonneuve du temps qui été justement celle
qui a fait adopter l'équité salariale au
Québec. Et, cette équité salariale là, on l'a gagnée de chaude lutte. On l'a
gagnée avec une lutte difficile. Il
n'y a pas un groupe, présentement, qui vient en commission parlementaire, qui
vient de la partie patronale et qui
vient nous dire : Ah! non, non, non, ne faites pas ça. N'assimilez pas la
Commission de l'équité salariale aux autres commissions. Aucun. Aucun.
Bien au contraire. S'ils pouvaient voir disparaître la Commission de l'équité
salariale, ils seraient bien heureux.
Eh
bien, quand je vois dans le projet de loi n° 20 qu'on ne vient pas
respecter les femmes médecins dans ce qu'elles sont comme femmes, eh bien, je trouve ça regrettable, M. le Président.
Je trouve ça très regrettable. Et je crois, je crois sincèrement que le gouvernement vient faire une
forme de discrimination envers les femmes dans le projet de loi n° 20.
• (12 heures) •
En
plus, M. le Président, on le sait, on a eu tout un débat, une motion a été
adoptée ici, à l'Assemblée nationale, une
motion qui a fait un peu de controverse mais qui fait en sorte qu'encore
aujourd'hui on doit se lever ici, à l'Assemblée nationale, pour réaffirmer le libre choix des femmes à l'avortement. Je
pense qu'on est rendus à la 14e motion, M. le Président, comme Parlement ici, au Québec, de venir dire
qu'ensemble comme parlementaires... et, chaque fois, c'est toujours une motion unanime, on vient réaffirmer que les femmes
ont le libre choix à l'avortement. Mais, encore là, aujourd'hui, dans le
projet de loi du ministre de la Santé, ce libre choix là, il est menacé.
Le ministre a
beau se faire rassurant, en tout début de journée où la bataille a été faite
ici, en Chambre, il a beau eu se
faire rassurant, malheureusement, encore aujourd'hui, personne n'est rassuré.
Personne n'est rassuré parce que nous n'avons pas la preuve de ce qu'il
avance, nous n'avons pas eu la preuve sur papier des modifications qu'il
s'engage à déposer. Et, vous le savez, le
diable se cache dans les détails, et c'est sur la preuve papier que nous
pouvons statuer. Tant que le ministre
ne nous propose pas les modifications pour faire en sorte de protéger l'accès à
l'avortement, nous ne pourrons être rassurés.
À toutes les
années, dans le Parlement d'Ottawa, on a un député en quelque part qui nous
sort une menace qui vient remettre en
question le droit à l'avortement, et c'est pour ça qu'à toutes les fois, ici,
il faut se relever pour dire, tous ensemble,
de façon unanime : Non, non à toucher au droit à l'avortement. Alors,
quand je vois le ministre qui vient faire en sorte de boucher... de venir bloquer, finalement, des paramètres au
niveau des quotas, ça nous inquiète, puis ça nous inquiète fortement; et
ce sont des dizaines de médecins qui ont signé une lettre.
En finissant,
M. le Président, je voudrais juste m'assurer que... Et un message très clair.
La semaine passée, j'ai été visiter
mon médecin de famille, que je visite depuis 35 ans, il a décidé de
prendre sa retraite. Sa décision de prendre sa retraite, ça lui
appartient. Cependant, aujourd'hui, nous nous retrouvons sans médecin de
famille pour toute une clientèle, puisqu'il
n'y a pas justement d'assurance d'avoir un autre médecin après. Alors, s'il y a
une chose que le ministre de la Santé
doit faire aujourd'hui, c'est de s'assurer que chaque Québécois ait un médecin
de famille. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve, pour cette intervention. Je cède la
parole maintenant à M. le député de Rousseau pour son intervention. M. le
député.
M. Marceau : M. le Président,
est-ce que nous avons le quorum?
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Je vais vérifier. Il y a des commissions qui siègent.
Alors, qu'on appelle les députés.
• (12 h 3 — 12 h 4)
•
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'Assemblée poursuit
ses travaux, le quorum étant rétabli. Je vous cède la parole, M. le
député de Rousseau.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau :
Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi
n° 20. C'est un projet de loi,
je pense que tous en conviendront, qui est important, qui propose des
changements importants. Malheureusement, de notre point de vue, ce ne sont pas des changements qui vont dans la
direction souhaitée, mais il faut quand même convenir d'emblée qu'il
s'agit de changements importants.
M. le Président, je n'étais pas présent lorsque
les consultations sur ce projet de loi ont eu lieu, mais on m'a rapporté ce qui a été dit au sujet du projet de
loi au moment des consultations. Je vais me permettre de vous en faire part
pour que tous constatent à quel point le
projet de loi semble poser problème chez les gens qui sont les premiers
concernés par le projet de loi.
D'abord, la
Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, qui s'est dite stupéfaite et
choquée par le projet de loi. Alors, évidemment, les médecins
omnipraticiens sont les premiers touchés par le projet de loi.
La Fédération
des médecins spécialistes du Québec, elle, disait que le ministre procède dans
le cadre du projet de loi n° 20
comme il l'a fait avec le projet de loi n° 10, «en imposant ses vues
plutôt qu'en travaillant en concertation avec tous les intervenants
impliqués».
Autre groupe,
l'Association médicale du Québec, j'y reviendrai tout à l'heure, j'ai des
choses à dire... ils ont eu des choses
à dire importantes dans le passé, je vous en parlerai tout à l'heure, mais,
bon, l'Association médicale du Québec qui
nous dit : Une logique de volume au détriment de la qualité, et ils
nous disent aussi plus tard : Un meilleur accès aux soins de santé ne passe pas par le projet de loi
n° 20. Alors, là, M. le
Président, ça fait les omnipraticiens, les spécialistes, l'Association
médicale du Québec qui nous disent qu'ils ont de sérieuses réserves par rapport
au projet de loi n° 20.
Autre groupe, les Médecins québécois pour le
régime public juge que le projet de loi n° 20 va déstabiliser la première ligne et compromettre l'accès aux soins.
Et, en fait, les Médecins québécois pour un régime public demandent au ministre de retirer le projet de loi n° 20
et proposent en retour des solutions différentes pour améliorer la première
ligne.
Le Collège
des médecins qui, lui, dit qu'il y a beaucoup de questions mais très peu de
réponses dans ce projet de loi. Le
Collège québécois des médecins de famille qui nous dit qu'on... enfin, qui,
tout d'abord, endosse les objectifs poursuivis par le projet de loi, mais qui dénonce vivement les méthodes qui ont été
annoncées, les méthodes qui ont été identifiées dans le projet de loi
pour y arriver.
Alors, M. le
Président, là, je vais juste faire un résumé. Vous avez le Collège québécois
des médecins de famille, le Collège
des médecins, les Médecins québécois pour le régime public, l'Association
médicale du Québec, les spécialistes et
puis les omnipraticiens. Ils sont tous, tous, fortement en désaccord avec les
méthodes qui sont proposées dans le projet de loi.
La CSN — donc, on ne parle plus de médecins
maintenant — qui nous
dit que ce projet de loi reflète une vision étroite de l'accès aux
services de santé et de services sociaux.
L'Association
des médecins d'urgence du Québec qui dénonce le projet de loi n° 20 qui «compromettra
à court et à moyen terme la qualité et l'accès des soins dispensés dans
les salles d'urgence de la province».
Et,
vous savez, le projet de loi contient aussi un volet sur la fertilité in vitro,
sur les soins pour guérir des problèmes de fertilité. Là aussi, il n'a pas l'air d'y avoir grand monde qui est
favorable. Alors, la Société québécoise de fertilité et d'andrologie qui
nous dit que le projet de loi n° 20 remet en question l'accessibilité au
programme.
La
Fédération des médecins résidents qui nous dit que ça prend une réécriture
complète du projet de loi n° 20.
Alors,
M. le Président, je n'étais pas présent, je dois le dire, je n'ai pas entendu
dans le fin détail chacune des phrases qui
ont été formulées par les groupes qui sont venus au moment des consultations,
mais on est forcés d'admettre que des gens
compétents et des gens qui connaissent bien le système de santé ont de très
sérieuses réserves face au projet de loi. Alors, ça, c'est la première
chose que je voulais vous dire, parce que je pense que c'est important.
Deuxième
chose que je voudrais vous dire... Parce que je ne vais pas résumer, j'imagine
qu'à ce stade-ci vous avez entendu
parler pas mal du projet de loi, mais je vais quand même vous parler de
certains éléments qui ne se retrouvent pas
dans le projet de loi n° 20. Vous savez, le projet de loi n° 20 veut
augmenter l'accès par des mesures coercitives qu'on imposerait aux médecins. C'est l'approche du
ministre, qu'il a concoctée avec lui-même, sans consultation auprès des
différents intervenants, qui, vous venez de l'entendre, sont en désaccord avec
l'approche proposée. Et pourtant, M. le Président,
il y a tant à faire, il y a tant de réformes possibles qui pourraient être
menées, dont on sait qu'elles auraient un impact réel sur notre système de santé. Puis je vais simplement vous en
nommer quelques-unes, des mesures qui pourraient être mises en place, et sur lesquelles... et c'est des mesures sur
lesquelles le gouvernement n'agit pas, sur lesquelles le ministre de la
Santé n'agit pas.
• (12 h 10) •
Une
première qui est bien connue, c'est celle qui consiste à avoir recours à
d'autres professionnels de la première ligne,
de leur confier des tâches supplémentaires, de leur donner des responsabilités
plus grandes... — pardon,
M. le Président. On parle d'allergies
ici. Merci. Alors, écoutez, on peut penser évidemment à nos infirmières, les infirmières que ce soit
surspécialisées ou les infirmières tout à fait... qui n'ont pas de
qualification particulière mais qui ont développé une expertise et puis qui ont un champ d'intervention qui est quand même
réduit, au Québec, par
rapport à ce qu'on retrouve ailleurs.
On pense évidemment aux pharmaciens.
Et puis là vous allez
me permettre de souligner que le gouvernement ne va, de toute évidence, pas
dans la direction de confier plus de responsabilités aux pharmaciens, on le voit très bien par les choix qui ont été faits.
Je pense qu'il faut le répéter, le gouvernement a fait le choix d'augmenter encore
une fois, cette année, la rémunération des médecins. Cette rémunération augmente de 350 millions, dont, quoi... c'est plus de 200 aux médecins
spécialistes et plus de 100 aux médecins
omnipraticiens, et, pendant ce temps, les pharmaciens, eux, vont devoir
encaisser une baisse de leur rémunération
de rien de moins que 170 millions de
dollars. C'était dans le projet de
loi n° 28, vous vous en rappellerez
de triste mémoire, M. le
Président. Alors que tout le monde le fait, que tout le monde le sait, alors qu'il est évident qu'en confiant
des tâches supplémentaires aux différents professionnels qui oeuvrent
sur notre première ligne... le gouvernement a choisi de réduire les soins auxquels les Québécois ont droit chez leurs pharmaciens en révisant la rémunération des pharmaciens ou en leur
disant : Si vous posez des gestes supplémentaires, bien, merci, mais on ne
vous paiera pas. Alors, évidemment, ce n'est pas à même d'améliorer l'accès à
la première ligne.
Par ailleurs, le projet
de loi contient des dispositions... des quotas, différentes façons, là...
différentes mesures coercitives qui, selon
l'avis du ministre de la Santé, auraient pour impact d'améliorer
l'accès, mais il n'y a rien de tel, il n'y a aucune garantie qu'un tel accès va être obtenu.
Et j'y reviendrai tout à l'heure,
mais je vais vous parler de d'autres
éléments qui ne sont pas dans le projet de loi.
M. le Président, il n'y a pas, avec ce
gouvernement, de virage, de réel virage vers les soins à domicile. Le gouvernement auquel j'ai appartenu avait très,
très clairement établi cette nécessité. Il y a des pays avancés dans lesquels
l'essentiel, la forte majorité des soins
offerts aux personnes en perte d'autonomie... donc il y a des pays dans
lesquels la forte majorité de ces
soins sont offerts à domicile. Au Québec, de mémoire, là, la fraction des soins
offerts aux personnes en perte
d'autonomie qui est dispensée à domicile, de mémoire, c'est de l'ordre de
15 %, ce qui est très, très, très faible. Et mon ancien collègue, le ministre de l'époque,
Réjean Hébert... Et je sais que, de l'autre côté, on n'était pas d'accord avec
la manière d'y parvenir, mais je pense que tout le monde conviendra que l'idée
d'aller vers les soins à domicile, c'est une bonne méthode. Et mon collègue avait développé un programme d'assurance
autonomie qui avait pour objectif d'assurer que les soins offerts à nos
personnes en perte d'autonomie soient offerts à domicile.
M. le Président,
c'est une évidence que de soigner à domicile, c'est à l'avantage des patients,
puis c'est une évidence que de soigner à
domicile, ça coûte moins cher. Et pourtant moi, je vois un ministre de la Santé
qui n'a pour seule réforme que des réformes de structure puis des réformes
visant à imposer des mesures coercitives aux médecins, mais le réel virage vers les soins à domicile, il
se fait attendre. Et moi, je pense qu'il est urgent que nous allions dans cette
direction-là. Dois-je vous rappeler, M. le
Président, que nous sommes dans un contexte de vieillissement de la population,
un contexte, donc, dans lequel la proportion de notre population qui va perdre
son autonomie va grandir?
Autre
élément qui n'est pas dans le projet de loi puis qui me semble fondamental,
c'est d'accélérer et de réussir l'informatisation
de notre système de santé, de notre réseau de la santé. Là-dessus, il faut
rappeler que le projet de... le Dossier
de santé du Québec, c'est un projet qui... je pense que ça fait maintenant plus
de 10 ans qu'il a été lancé, et je me demande encore quand le jour va venir où tout ça va être opérationnel,
quand ça va fonctionner. Je ne peux pas blâmer le ministre de la Santé actuel, là, de... je veux dire, ce problème-là,
je ne peux pas le... parce que, bon, il est arrivé ça fait un an, alors je sais bien que ce n'est pas de sa
faute. Mais ça va venir, un jour on va pouvoir lui donner un blâme s'il ne
nous annonce pas que c'est une de ses priorités, que c'est quelque chose qui
doit se faire rapidement.
Moi,
je pense qu'il y a beaucoup de temps qui est consacré à nos structures puis il
y a beaucoup de temps qui est consacré à mettre en place des mesures
coercitives pour les médecins, mais pas beaucoup de temps qui est consacré à l'informatisation à la santé. Et je sais que le
temps de notre ministre est précieux, alors, moi, j'aimerais ça qu'il mette son
temps sur ça, j'aimerais ça qu'il mette son
temps sur ça. Puis, encore une fois, je ne le blâme pas, mais un jour viendra
où on pourra le faire si ça ne décolle pas puis ça ne finit pas, ce projet-là
d'informatisation. C'est un projet important.
Dernier point
qu'on ne retrouve pas dans le projet de loi... Évidemment, tout ne peut pas
être dans le projet de loi, mais je
veux simplement dire qu'on met les... Le ministre, par les choix qu'il a faits,
a révélé là où il mettait ses priorités. Et moi, je pense que la priorité, ça devrait être, entre autres, aussi à
la lutte au surdiagnostic puis au surtraitement. Ça, c'est quelque chose que le ministre de la Santé
connaît très bien. Je suis certain qu'il connaît bien ces choses-là, il connaît
évidemment les problèmes qui existent. Et ça
n'existe pas seulement au Québec, là, le surdiagnostic puis le surtraitement, ça existe partout, aux États-Unis
probablement plus qu'ici, mais dans le reste du Canada
aussi, puis au Québec, évidemment,
ça existe.
Ce problème,
il a maintenant été publicisé, si on veut, la population
en a été saisie. L'Association
médicale du Québec — je vous disais que je vous en
reparlerais — en avril 2013, publiait un document qui
s'appelle Optimisation de
la pratique clinique, et eux nous
disent — je vous lis ce qu'il y a sur la première page :
«En éliminant le surdiagnostic et le surtraitement à tous les niveaux
dans le système de santé, c'est environ 5 milliards de dollars qui
pourraient être économisés par le gouvernement québécois.» 5 milliards de
dollars, bon, évidemment, ce sont des sommes massives, considérables. Ça
représente, sur un budget de la santé de 35 milliards, là, un septième de
notre budget de la santé.
Évidemment,
il s'agit d'un chantier auquel le ministre doit s'attaquer. Et, dans le budget,
il y a déjà des travaux qui sont en
cours pour s'attaquer au surdiagnostic,
puis présentement on n'en est qu'à l'étape d'identifier ce que sont
les meilleures pratiques cliniques. Et j'imagine qu'un jour viendra
l'étape où on dira : Bien, voici ce qu'on va faire pour s'assurer que les meilleures pratiques cliniques
sont adoptées par nos médecins dans le quotidien de leur
pratique. Mais, M. le Président, je dois vous dire qu'à ce jour c'est extrêmement timide, ce qui est fait, et je pense qu'il y a véritablement de graves problèmes auxquels
on devrait s'attaquer.
• (12 h 20) •
Et je vais
simplement vous en dire un, puis je vais profiter du fait que le ministre de la Santé est là pour le porter à sa connaissance. Dans le rapport Thomson, qui a été publié en 2014, on faisait état du
coût moyen ajusté par cas en chirurgie d'un
jour au Québec, évidemment. Donc, on examinait le coût d'une chirurgie d'un
jour dans 74 établissements de santé québécois qui offrent des
services chirurgicaux, et le coût moyen était de 3 224 $, 3 224 $. Il y avait, parmi ces
établissements, des établissements
qui étaient, évidemment, très performants, disons, les meilleurs d'entre tous
ces établissements, qui avaient des
coûts, dans leurs cas, là, pour nos meilleurs, de 2 700 $,
2 700 $, M. le Président. Mais il y en avait d'autres qui n'étaient vraiment pas performants, qui
n'étaient vraiment pas bons puis qui avaient des coûts de 4 200 $.
Alors donc, ce que je suis en train
de vous dire, là, c'est que, pour une chirurgie d'un jour au Québec, parmi
74 établissements, en moyenne ça
coûte 3 200 $, puis qu'il y en a qui sont vraiment, vraiment bons
puis qui font ça à 2 700 $ — c'est 500 $ de moins — puis il y en a d'autres qui ne sont vraiment
pas bons, puis ils sont à 4 200 $. Ça, c'est un écart de
1 500 $, 1 500 $. M.
le Président, 1 500 $ par chirurgie d'un jour au Québec, c'est
beaucoup d'argent. Quand on multiplie ça, là, le ministre de la Santé
pourrait vous dire ce que ça représente comme somme, et ce sont des millions et
des millions de dollars, évidemment, qui sont en cause ici.
Alors là,
évidemment, ça, c'est un programme... c'est un domaine, c'est celui de la
chirurgie d'un jour, mais il y en a partout, de cela. Et, quand l'Association
médicale du Québec nous dit qu'il y en a pour 5 milliards, là, qu'on pourrait
obtenir en identifiant là où on fait
les bonnes affaires puis en demandant à ceux qui font les moins bonnes
affaires, les moins bonnes méthodes,
les moins bonnes pratiques de calquer puis de reproduire ce qui se fait de
bien, bien, ça, c'est du solide, c'est du sérieux. Encore une fois, je
pense que le ministre est très conscient de ça, mais moi, je l'invite à
s'attaquer à ça, puis s'attaquer plus fortement, plus vigoureusement à ça.
Puis les
méthodes coercitives qu'on s'apprête à mettre en place au Québec pour les
médecins, est-ce que c'est à même
d'amener nos médecins à adopter les meilleures pratiques, à collaborer puis à
faire en sorte qu'ils vont faire ce qu'on leur demande de faire? Moi, je suis désolé, mais j'ai des sérieux
doutes. Parce que, là, présentement, là, soyons bien clairs, on a tous les cadres du Québec, hein, toute, toute
la structure administrative qui est en place au Québec qui vient d'être ébranlée par le projet de loi n° 10. Ça,
c'est le premier groupe d'acteurs, là, à qui on a... Donc, on a licencié un
paquet de cadres, on a rebrassé les
structures. Bon, est-ce que ça sera payant à terme? On verra bien, M. le
Président. Mais une chose est
certaine, ce n'est pas à même de faciliter les changements puis d'amener des
changements aussi importants que, par
exemple, l'adoption des meilleures pratiques, parce qu'il y a des gens qui
doutent présentement dans le système de santé. Puis là il y a un autre groupe d'acteurs du système de santé, les
médecins, qui, eux aussi, se voient désormais imposer des mesures coercitives. Est-ce que ça va les
amener à collaborer puis à mettre en place les meilleures pratiques dont on a
besoin au Québec? Permettez-moi d'avoir des doutes.
Alors, M. le
Président, la question du surdiagnostic puis du surtraitement est une question
importante, et j'ose croire que, dans
le futur, on va aller vers un travail dans cette direction-là, que le ministre
va déposer... va travailler là-dessus puis va prendre à bras-le-corps ce
problème fort important. Moi, je pense que le projet de loi n° 10,
avec tous les problèmes qu'il va nous créer,
tous les problèmes, toutes les résistances qu'il va créer au sein de la
profession médicale, est un projet qui est contre-productif.
M. le
Président, j'aurais pu vous parler de tous les problèmes, parce que, là, je
vous ai parlé surtout de ce qu'il n'y avait pas dans le projet de loi puis que
j'aurais aimé voir dans un projet de loi. Évidemment, la liste des problèmes
a été faite par mes collègues, là, depuis
quelques... en tout cas quelques heures de discussion que nous avons eues ici.
Le projet de loi va consacrer
l'hospitalocentrisme de notre système de santé. Le projet de loi va mettre à
mal le... enfin, va avoir un impact négatif sur les femmes, sur les femmes médecins en
particulier. Le projet de loi aussi va imposer un certain nombre de reculs dans le traitement des problèmes
de fertilité. Alors, M. le Président, pour ce qu'il contient et pour ce qu'il ne contient pas, ce projet de loi est
inacceptable, et évidemment vous ne serez pas surpris d'apprendre que nous
sommes en désaccord et que nous allons voter contre le projet de loi.
Alors, je m'arrête là-dessus. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci. Merci à vous, M. le
député de Rousseau, pour cette intervention. Je cède maintenant la
parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger :
Merci, M. le Président. Alors, nous intervenons au nom de l'opposition
officielle concernant le projet de
loi n° 20, je rappelle que... la Loi édictant la Loi favorisant
l'accès aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée
et modifiant diverses dispositions législatives en matière de procréation
assistée.
Ce
projet de loi édicte, d'une façon sommaire, là, dans les notes explicatives,
d'abord la Loi favorisant l'accès aux services de médecine de famille et
de médecine spécialisée.
Cette loi a pour but
d'optimiser l'utilisation des ressources médicales et financières du système de
santé afin d'améliorer l'accès aux services
de médecine de famille et de médecine spécialisée, entre autres, avec différentes
autres dispositions.
Il
y a un volet particulièrement médecins. Le projet de loi permettra au
gouvernement, par voie réglementaire, d'imposer
à chaque médecin la prise en charge d'un nombre minimal de patients et en
établissant des paramètres stricts l'incitant
à voir ses patients sous peine de sanction pécuniaire. Pour les médecins de
famille, il prévoit un quota minimum, il prévoit aussi une pénalité.
Pour les médecins spécialistes, bien, il prévoit certaines obligations.
Mais
il y a aussi le deuxième volet, qui est celui de toute la procréation assistée.
Alors, c'est l'ajout de balises et retrait
de la fécondation in vitro de la couverture du régime, donc la fédération...
la fécondation, pardon, in vitro accessible seulement aux femmes âgées de
18 à 42 ans, c'est ça que le projet
de loi n° 20 vient déterminer, et d'une période minimale de trois ans de relations sexuelles ou
d'insémination artificielle exigée avant tout traitement de fécondation in
vitro. Des amendes pouvant aller
jusqu'à 50 000 $ seraient prévues pour toute personne qui
contreviendrait à certaines dispositions de la loi.
Alors,
M. le Président, vous pouvez être assuré qu'il y a beaucoup de commentaires
négatifs à ce projet de loi là. Je
vais citer quelques exemples d'articles de journaux. Dans Le Devoir,
le 2 février dernier : Le projet de loi 20 — Les patients laissés pour compte. «"Rien de bon pour les patients : le projet de loi n° 20
comporte des risques élevés d'effets pervers, notamment pour les plus
vulnérables", avertit l'avocat spécialisé en droit de la santé Jean-Pierre
Ménard.»
Un
petit peu plus loin : «"D'abord, le système de quotas [des] patients
que le gouvernement du Québec veut imposer aux médecins de famille
présente des risques importants", selon lui.
«Me
Ménard prédit que les médecins suivront moins de patients vulnérables et
complexes pour arriver à atteindre leurs
cibles, réduisant du même coup l'accès pour les vrais malades. De plus, il
craint que la cible des patients à suivre, qui se veut un seuil minimal,
ne devienne aussi un maximum au-delà duquel les médecins fermeront leurs
listes.»
Dans
La Presse du 15 décembre 2014 — parce que ça fait déjà un bout de temps
qu'on parle du projet de loi n° 20 : La réforme mal barrée du Dr Barrette... bien, du ministre de la Santé. C'est le titre de La Presse,
d'Alain Dubuc, qui dit : «La
réforme [...] risque d'avoir tellement d'effets négatifs qu'elle pourrait mener
au résultat contraire et nous éloigner du but recherché, l'accès à un
médecin de famille.
«On ne gère pas des
humains et un système complexe comme celui de la santé avec des règles de
trois.»
À
la conclusion de cet article, il disait : «En définitive, cette réforme,
peut-être attrayante sur papier, risque d'être compromise par une foule d'effet pervers, en rendant la médecine
familiale moins attrayante pour les jeunes diplômés, ou en poussant des
médecins à prendre leur retraite ou passer au privé.»
Un
autre article, au Soleil, 28 février 2015 : Quotas de
patients : les femmes médecins «seront plus pénalisées». «Les
quotas de patients aux médecins que veut imposer le ministre [...] pénaliseront
davantage les femmes médecins, selon le Conseil du statut de la femme.
«"En
disant que, le temps partiel ou de travailler moins d'heures, il y aura une
pénalité, les femmes seront plus pénalisées
que les hommes, puisque les chiffres montrent qu'elles travaillent moins
d'heures", a affirmé la présidente du conseil, [Mme] Julie
Miville-Dechêne, lors de son témoignage en commission parlementaire[...].
«Elle
a expliqué que le travail réduit des femmes médecins s'explique en bonne partie
par le temps consacré aux enfants.
"Les femmes s'occupent davantage des enfants bien que les choses
progressent. Elles prennent en majorité le congé parental et ensuite
elles s'en occupent plus en termes d'heures par jour."»
Les femmes prennent
en majorité le congé parental et ensuite elles s'en occupent plus, des enfants,
en termes d'heures par jour. C'est ce qu'essaie de dire la présidente du
Conseil du statut de la femme.
Dans Le Devoir
du 8 avril 2015, dernièrement : Le grand dilemme: entre
quotas et mission — Le projet de loi n° 20 met en péril l'existence même de L'Actuel. Vient du Dr Réjean Thomas, qui est le P.D.G. de la
clinique Actuel : «Lorsque la clinique L'Actuel est devenue un
groupe de médecine familiale en 2005, le ministre de la Santé et des Services sociaux [à] l'époque — qui est le premier ministre actuel — a reconnu qu'il s'agissait d'un groupe de
médecins de famille, GMF, spécialisé
dans le traitement du VIH, des hépatites et des infections [transmises]
sexuellement. Aujourd'hui, le projet de
loi n° 20 met en péril l'existence même de ce centre, et de plusieurs
autres, qui ont mis des années à développer avec succès une approche de la santé holistique et multidisciplinaire pour
les personnes vulnérables, discriminées, en marge [de] corridors institutionnels de soins, comme le
préconise l'Organisation mondiale de la santé depuis près de 20 ans...
L'approche de L'Actuel est reconnue internationalement. Et au Québec?»
• (12 h 30) •
«Le ministre
veut insuffler un renouveau dans la pratique médicale et décline la polyvalence
et la multidisciplinarité sous toutes
leurs formes. Mais la polyvalence, ce n'est pas simplement la diversité des
actes médicaux, c'est aussi la capacité de prendre en charge le patient dans sa globalité, de répondre à
l'ensemble de ses besoins. C'est à cela que nous tentons de former la relève. Comment peut-on former une
relève adéquate en médecine familiale si un jeune médecin doit inscrire des patients pour atteindre son quota tout en
suivant dans [les] établissements un large spectre de pathologies? L'impératif
d'activités en établissements s'applique à
tous les médecins ayant moins de 25 ans de pratique. Cette démarche fixe des
objectifs parfaitement inatteignables — selon Réjean Thomas.» Et je
poursuis avec une autre gorgée d'eau.
Dans La Tribune :
Le projet de loi n° 20 : un problème d'accès... à la démocratie,
de l'ancien ministre de la Santé Réjean Thomas :
«Le projet de
loi n° 20 sur l'accès à des services médicaux et à la procréation
médicalement assistée présente, par sa
forme, un certain nombre d'éléments inusités [sans] nos us et coutumes
démocratiques. Il couvre deux sujets distincts, [les] ententes dûment signées par le gouvernement, [et] il confère au
ministre des pouvoirs démesurés et il sert d'arme de négociation. Par ce
projet de loi, le gouvernement dénature le rôle du pouvoir législatif et [en]
brime la démocratie.»
Un peu plus
loin : «Aussi, tout comme ce fut le cas pour le projet de loi n° 10
sur la gouvernance des établissements, le projet de loi n° 20 confère au
ministre des pouvoirs démesurés. Pire, le projet de loi réfère surtout à des
règlements qui ne sont pas connus au moment de son étude en commission
parlementaire.» Il y a eu des ajustements depuis.
«Ce projet de
loi serait-il une stratégie pour augmenter le pouvoir de négociation de la
partie gouvernementale?»
Et j'en
passe, M. le Président, parce qu'il y en a eu énormément d'articles, sur le
projet de loi n° 20 plus particulièrement, mais il y a beaucoup de gens qui sont contre, et je veux quand même
dire... lorsqu'ils ont passé en commission parlementaire, et non les moindres : le Collège des médecins, Fédération
des médecins spécialistes du Québec, Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, Fédération médicale étudiante du
Québec, Médecins québécois pour le régime public, la Société canadienne de fertilité et d'andrologie,
l'Association des couples infertiles du Québec, l'Association des spécialistes en médecine interne du Québec,
Association canadienne de sensibilisation à l'infertilité, Association des
infirmières praticiennes spécialisées du
Québec, doyens des facultés de médecine de l'Université de Montréal, M. Miron,
M. Ménard, le CHU de Sainte-Justine, le
CHUM, le CUSM, le Conseil québécois des gais et lesbiennes, Réseau des soins
palliatifs du Québec, la Confédération des
syndicats nationaux, la CSN, et plusieurs personnes qui, individuellement, soit
des gens, des professionnels de la santé,
qui sont venus aussi en commission parlementaire : Mme Lavertu, Mme
Proulx, Mme Bertrand et plusieurs
autres. Je ne les nommerai pas tous, mais il y en a eu énormément, alors c'est
intéressant de voir les commentaires de chacun lorsqu'ils sont venus
déposer les mémoires en Chambre.
Évidemment,
j'ai aussi ma collègue la députée de Taillon qui a avisé le ministre depuis
bien longtemps, j'ai un communiqué au mois de novembre, je vais le
redire, parce qu'il est quand même très d'actualité.
«La députée
de Taillon et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé et
d'accessibilité aux soins, [...]juge
que le projet de loi n° 20, déposé par le gouvernement, est un nouveau
chapitre dans la quête [du] pouvoir qu'a entreprise le ministre de la Santé et des Services sociaux[...]. Portant
sur [les] deux sujets importants — la procréation assistée, d'une part, et l'accès aux services d'un
médecin de famille et [de] médecine spécialisée, [entre autres,] d'autre
part...»
26 mars
dernier, fin des consultations sur le projet de loi n° 20; le ministre,
critiqué de toutes parts, devrait écouter davantage. Au lendemain de la fin des consultations entourant le projet
de loi n° 20, la députée de Taillon et porte-parole de l'opposition officielle dresse un triste bilan
pour les patients du Québec. Je veux le dire, parce que notre collègue députée
de Taillon fait un travail remarquable pour
essayer de sensibiliser le ministre que son projet de loi n'a pas de bon sens.
Sur les 46
groupes que nous avons entendus, 36 nous ont dit que le ministre fait fausse
route. En effet, en imposant de façon
improvisée des quotas de patients et en resserrant les critères quant au
traitement de procréation assistée pour les femmes, le projet de loi n° 20 risque de réduire encore
davantage d'accès aux soins. Par ailleurs, le ministre, en traitant les patients comme des numéros, déshumanise la
pratique de la médecine. En proposant des mesures dictant aux médecins comment faire leur travail au lieu de regarder
d'abord les besoins des patients, il commet une grave erreur. Pour atteindre
ses objectifs, le ministre aurait avantage à
concentrer ses énergies du côté de l'informatisation du réseau et de l'interdisciplinarité. Il devrait aussi avoir le
souci d'offrir aux patients les services les plus appropriés, les plus proches
d'eux et au meilleur coût, de manière à diminuer les recours inutiles et
coûteux aux urgences des hôpitaux.
Alors, M. le
Président, ma collègue a émis énormément de réactions. J'espère que le
ministre, avant d'arriver à l'adoption de ce projet de loi, va être
sensible aux arguments de notre collègue et de notre formation politique.
Et évidemment
il y a tout l'aspect chez les femmes... s'il y a un impact assez important,
particulièrement chez les
femmes médecins, nous, du côté de l'opposition, nous disons que c'est une attaque directe face
aux femmes. Il est certain, de l'aveu
du Conseil du statut de la femme, que les contraintes et quotas proposés par le ministre,
imposés par le ministre, seraient
plus difficiles à respecter pour les médecins travaillant au-deçà d'un certain
nombre d'heures. Il est permis de penser
que les femmes médecins travaillent généralement un peu moins d'heures que leurs confrères puisqu'elles ont un revenu moyen
considérablement inférieur à celui de leurs collègues masculins, et ce,
peu importe le nombre d'années de
pratique. Je salue ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, qui en a élaboré davantage tout à l'heure et les autres journées. Les responsabilités familiales assumées davantage par les femmes médecins que par les hommes
médecins ainsi que les congés de maternité seraient à la source de cet
écart entre les sexes.
Selon une
étude réalisée au Québec, les femmes médecins consacrent en moyenne plus
de temps que les hommes à chaque
patient. Ainsi, pour un même nombre d'heures travaillées, le nombre d'actes
pourrait être inférieur pour les femmes médecins, ce qui aurait un impact sur leur rémunération, si le ministre insiste sur les quotas et sur le nombre d'heures,
parce qu'on
peut faire l'hypothèse que les femmes médecins travaillent généralement un moins grand nombre d'heures que
leurs confrères masculins, notamment pour des raisons de prise en charge des soins aux
enfants et aux proches en perte
d'autonomie, parce que plusieurs d'elles sont aussi des aidantes naturelles. Il
est à craindre que le modèle proposé pénalise davantage les femmes
médecins que les hommes médecins.
Alors, évidemment,
on a toujours insisté pour que chaque projet de loi puisse avoir vraiment une étude sur l'analyse différenciée des sexes, qui veut dire, dans le fond, de s'assurer que, s'il y a un impact particulièrement chez les
femmes... Alors, les femmes médecins...
ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve l'a quand
même dit d'une façon très
claire : Le salaire des médecins
femmes, le salaire des médecins hommes, la différence est très marquante, M. le Président. Alors, c'est des paramètres qu'il faut regarder. La situation
de maternité en est une évidemment.
Je vais
poursuivre, M. le Président, parce
que je veux aussi parler de toute l'interdisciplinarité que le ministre aurait
pu être plus sensible. Parce que je me souviens, pour le projet de loi...
particulièrement le projet de loi n° 28, qui, malheureusement, a été adopté... Je pense à tous les pharmaciens, tout
l'apport des pharmaciens au Québec. Je pense, je vais saluer d'une façon très claire aujourd'hui Mme Nguyen et M.
Bergeron, qui sont de ma circonscription de Pointe-aux-Trembles, qui ont fait un travail acharné, un travail ardu
pour faire entendre raison au ministre, leur perte... dans le fond, une baisse de leur rémunération de
170 millions pour les pharmaciens du Québec ne vient pas démontrer au ministre... ne vient pas donner, en tout cas,
au ministre le désir de faire de l'interdisciplinarité, de s'assurer que
d'autres professionnels de la santé puissent aussi apporter des
solutions au système de santé au Québec.
Alors, ce
sont des tâches complémentaires, ce sont des tâches qui peuvent aider la
première ligne au Québec. Je crois
que le ministre ne les a pas encore assez entendus, mais on aura l'occasion
d'en reparler évidemment à d'autres moments.
Je veux
parler aussi de la procréation assistée parce qu'évidemment ça a un impact...
J'ai ma collègue la députée de Taillon qui en a énormément parlé et je
prendrai une autre occasion pour en parler.
Mais je veux
vous parler de deux sujets importants dans le projet de loi, celui de la
transparence, qui est toujours absente
dans ce gouvernement, et l'absence de consultation, évidemment. Je le dis
régulièrement, même en éducation, il
y a une absence de consultations générales. Je demande des consultations, des
grandes consultations pour que les gens puissent être impliqués dans les grands changements que le gouvernement
veut faire. Là, on le fait à la Santé, c'est de même pour l'Éducation,
dont je suis la porte-parole. J'insiste fortement au ministre de l'Éducation de
s'assurer qu'il puisse faire une grande
consultation publique avant de faire tous les grands changements, mais c'est la
même chose à la Santé, que nous voyons aujourd'hui.
• (12 h 40) •
Le projet de
loi n° 20 est une coquille vide, de l'avis même de plusieurs groupes venus
en commission. Tout passe par les
règlements, et nous avons dû, avec l'appui de plusieurs groupes, talonner le
ministre pour qu'il dépose finalement un
projet d'orientations réglementaires. Il l'a fait le 18 mars dernier, soit
près de quatre mois après le dépôt du projet de loi, et surtout alors que plus de la moitié des groupes étaient déjà
venus en consultations sans avoir vu ces orientations. Ces orientations
ont soulevé des questionnements, notamment en ce qui concerne des quotas
maximums fixés par le ministre, par exemple,
pour le nombre d'avortements qu'un médecin peut réaliser par année. Au départ,
c'était 504. Au fil de la journée du 25 mars dernier, pressé de questions par les
journalistes, le ministre a augmenté le quota de 504 à 1 008 pour tenter de mettre le couvercle sur la marmite.
L'ambiguïté demeure pour les médecins qui pratiquent des avortements — 80 %
sont des médecins de famille et la majorité sont des femmes — car le ministre affirme que les quotas
ne les concerneront pas, malgré que son
document indique le contraire. Encore une fois, improvisation et cafouillage
pour tenter de minimiser les conséquences de son travail bâclé. Nous
aurions souhaité plus de transparence de la part du gouvernement quant au plan d'ensemble de la réforme en santé dans
laquelle s'inscrit le projet de loi n° 20 pour mieux en
apprécier les avantages et les inconvénients.
Également, absence de consultation comme dans le
cas du projet de loi n° 10, M. le Président. Le ministre a travaillé seul, sans collaborer avec les
professionnels du réseau. Il a choisi de leur imposer une approche
coercitive : quotas à respecter,
sinon coupe de salaire. C'est ce qu'on dit aux médecins : Si vous ne
respectez pas les quotas, il y aura pénalité, qui ne garantit évidemment aucunement une amélioration de l'accès aux
soins pour les patients. Le projet de loi dévalorise l'initiative et le
dépassement et incite à se conformer aux quotas, ni plus ni moins.
Il y a une
disproportion évidente entre ce qui est imposé aux médecins de famille et aux
spécialistes. On constate que le ministre est plus dur envers les
médecins de famille, pour qui les changements demandés sont plus grands et
officiellement contrôlables.
Je veux revenir sur la procréation assistée, M.
le Président. Alors, évidemment, dans ce projet de loi là, nous dénonçons les conséquences qu'aura le projet de
loi n° 20, notamment de créer un véritable frein à l'accès au
programme de procréation assistée.
Nous sommes d'accord, par contre, pour ajouter des balises au programme, mais,
dans son projet de loi, le ministre
va trop loin et outrepasse son champ de compétence. Non seulement le ministre
fait une erreur en retirant la
fécondation in vitro du panier de services payés par l'État, mais il erre
également en statuant dans un texte législatif sur les critères d'accès et les normes de bonne
pratique médicale à privilégier en matière de fécondation in vitro. Il
devrait laisser ces restrictions aux lignes directrices de traitement
produites par les experts.
Sur le crédit
d'impôt, il faudra que le couple n'ait aucun enfant pour pouvoir en bénéficier,
ce qui limite grandement le nombre de
personnes qui pourront y avoir accès. Si un des deux conjoints a déjà eu un
enfant avec un autre conjoint, il est automatiquement exclu. C'est ça,
les impacts. Tous les progrès réalisés, notamment en ce qui concerne la
diminution du taux de grossesses multiples et le taux de natalité, sont en
risque de régresser.
Alors, M. le
Président, on a eu le projet de loi n° 10, on a eu le projet de
loi n° 28, et là, maintenant, on a le projet de loi n° 20. Pour nous, c'est un
mauvais projet de loi. Il ne contient pas vraiment un réel virage vers les
soins à domicile. Il n'y a pas d'investissement
dans la prévention, qui est demandé par bien des gens. Il n'y a pas de mesure
pour favoriser l'interdisciplinarité
et le recours à d'autres professionnels de première ligne, M. le Président, des
exigences quant aux heures d'ouverture afin de garantir un accès des
patients à leurs médecins les soirs et la fin de semaine. Alors, M. le Président, les coupures libérales et l'arrogance
libérale sont déconnectés des besoins de la population, alors vous comprendrez évidemment notre désaccord au projet de
loi n° 20 que le ministre a déposé actuellement en Chambre, à
l'Assemblée nationale du Québec. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Merci à vous, Mme la députée de
Pointe-aux-Trembles. Je suis prêt à céder la parole à un prochain
intervenant et je cède cette parole à M. le député de Sanguinet.
M. Alain Therrien
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Je vais faire un accroc, si vous voulez bien, avec
votre permission, aux règles
parlementaires qui nous concernent. Lundi, c'est la fête des Patriotes. Je
prends la parole aujourd'hui, je suis le député de Sanguinet. J'aimerais
simplement vous rappeler que les frères Sanguinet ont été pendus au
Pied-du-Courant le 21 janvier
1839. Ils font partie des gens qui ont été pendus pour la liberté. Et
évidemment il n'y a pas seulement qu'eux, il y a aussi Joseph-Narcisse Cardinal qui a été pendu le
21 décembre 1838, qui était député de La Prairie dans le Bas-Canada
et natif de Saint-Constant, la ville où je
réside, alors permettez-moi... et il y a aussi Joseph Robert, qui était le
capitaine de la milice à
Saint-Mathieu de La Prairie, qui ont été pendus au Pied-du-Courant. Alors,
ils ont été pendus pour qu'on ait
plus de liberté, plus de démocratie, plus de responsabilité, et je demande aux
gens de s'en rappeler, que c'est un geste qui mérite d'avoir sa place dans l'histoire. Et j'honore la mémoire des
gens que je représente dans mon comté, qui sont les fils de cette grande
lignée de Patriotes.
Alors, ceci étant dit, je vais maintenant parler
de la façon dont on utilise cette responsabilité ministérielle, évidemment. Bien, écoutez, c'est la démocratie.
C'est intéressant. Le gouvernement nous arrive avec des solutions qu'il
imagine, et évidemment ces solutions-là ne plaisent pas à tout le monde, et
donc il y a des gens qui s'y opposent.
Mais, dans le cas du projet de loi n° 20,
on peut dire que beaucoup de gens s'y opposent. On peut s'entendre là-dessus. Disons que les propos ont été nombreux
à dire que ce projet de loi là était, selon certains, improvisé et, selon
plusieurs, inadéquat. Je tiens à saluer le
travail de notre porte-parole, la députée de Taillon, dans ce dossier, qui a
fait preuve d'une grande intelligence et d'une grande patience.
Écoutez, M. le Président, tout tourne autour de
ce qu'on a eu au départ comme annonce de la part de notre gouvernement actuel, c'est-à-dire de lutter contre
le déficit. Le premier ministre, le ministre des Finances, le président
du Conseil du trésor nous ont parlé à
maintes reprises de l'existence d'un déficit structurel. Ce n'est pas comme le
déficit potentiel; ça, ça n'existe
pas. Ça n'existe pas, puis on l'a bien vu dans les crédits que ça n'avait aucun
sens de parler de déficit potentiel. Mais là je pense que les gens
commencent... nos amis de l'autre côté commencent à comprendre ça. Il y en a
juste 69 au Québec maintenant qui croient encore à ça. J'espère que le
nombre va diminuer.
Mais le
déficit structurel, M. le Président, ça, ça a plus de sens. Un déficit
structurel, pour les gens qui ne le savent pas, c'est un déficit gouvernemental qui arrive dans une situation où la
conjoncture est assez bonne, mais qu'on a tout de même un déficit. Alors, on se dit que ce
déficit-là n'est pas dû à la conjoncture qui est difficile, mais plutôt à la
structure de l'économie qui pose
problème, ou la nature de l'intervention de l'État pose problème. Et c'est un
appel qu'on entend, à ce moment-là, pour améliorer ou faire les choses
autrement, faire attention.
Alors, ce
qu'on souhaite toujours, c'est que, quand on s'aperçoit que le chômage... il y
a un changement — voyons,
pardonnez-moi — un déficit structurel, on s'attend à faire
les choses autrement et on espère. Puis on va regarder plus loin que ce
n'est pas le cas.
Faire les
choses autrement en santé, ça aurait été, comme on a proposé, d'améliorer les
soins à domicile, de déplacer les soins vers les soins à domicile le plus
possible, quand c'est possible évidemment. Tout le monde aime mieux rester à la
maison et se soigner à la maison, on en convient. C'est quatre fois moins cher,
M. le Président, quelqu'un qui se fait
soigner à la maison que quelqu'un qui est en centre hospitalier. Mais il faut
que ça se développe, et ça prend de la bonne volonté, ça prend de la
vigilance, ça prend de l'intelligence.
Et donc, nous, ce qu'on avait proposé, c'était
justement de déplacer de façon très, très encadrée, pour ne pas qu'il y ait des gens qui soient oubliés dans le
processus, pour qu'on puisse, justement, arriver à des soins à domicile qui
soient efficaces et qui permettent,
justement, un changement structurel dans la façon de faire. Et c'était la voie
qui était saluée par à peu près tous les intervenants dans les soins de
santé.
On avait
également parlé — ça, ça
relevait aussi du rapport Thomson — de l'argent qui suit le patient, de faire
en sorte qu'on ait une certaine... une
concurrence saine entre les établissements pour des soins de santé bien précis.
Ça se fait beaucoup en Europe, dans les pays scandinaves. Alors, ce
n'est pas une question de jouer les matamores, mais simplement de faire en sorte que les hôpitaux soient encouragés à
devenir plus performants, et la comparaison, la concurrence auraient
justement permis cette amélioration de l'efficacité.
Le déficit
budgétaire qu'on a hérité, qui est actuellement de 2,3 milliards, il vient
d'où, M. le Président? Il vient de
l'augmentation des salaires des médecins, qui sont approximativement de
2,5 milliards par année. Ça veut dire que l'entente de l'actuel ministre de la Santé avec l'actuel premier
ministre, en 2006, fait en sorte de coûter, au trésor québécois,
2,6 milliards de plus par année, ce qui est l'équivalent du déficit
budgétaire, M. le Président.
Et, si on
rajoute à ça le fait que le gouvernement libéral, de 2003 à 2012, a augmenté de
30 % la dette publique, ça vient
aussi, ça, amener une conséquence du gonflement du service de la dette actuel,
qui est à des niveaux qu'on connaît actuellement.
• (12 h 50) •
Alors
donc, quand on cherche, là, quand on cherche une façon d'améliorer le solde
budgétaire du gouvernement, ce qu'on peut pointer comme difficulté,
c'est nos amis d'en face qui l'ont créé.
On parle
aussi du surdiagnostic. Le ministre des Finances... bien, le ministre des Finances...
l'ancien ministre des Finances,
le député de Rousseau, parlait du surdiagnostic, problème
de changer les méthodes, de faire en
sorte qu'on ait moins de
surdiagnostics ou qu'on n'en ait plus, dans le monde idéal. 5 milliards
par année, que ça coûte au trésor québécois; pas 5 millions, 5 milliards par année. Pourquoi ne pas améliorer le
soutien en première ligne? On n'a pas ça.
La solution
libérale, à la fois au déficit... Mais là, quand tu touches au déficit budgétaire,
il y a un éléphant dans la pièce,
là. Des soins de santé, il y a à peu
près la moitié du budget
total de l'État, ça fait qu'on ne peut pas arriver à un solde budgétaire
nul quand tu ne touches pas à ce... permettez-moi l'expression, je ne
sais si je peux le dire, un monstre, en termes de grosseur. Il faut
s'attaquer à ça.
Alors, la
solution libérale, c'est quoi? Bien, d'abord, le projet
de loi n° 10, qui a été passé en
bâillon. C'est jouer avec les
structures, alors que, depuis 1945, les gestionnaires qui remplissent les
écoles de gestion, que ce soit à l'UQAM ou
ailleurs dans le monde, que ce soit aux HEC, tout
le monde s'entend, à partir de 1945,
pour dire que la meilleure façon de
bien gérer une entreprise, bien gérer des grosses entreprises, bien gérer l'État à la limite, ça
passe par la décentralisation, ça
passe par la responsabilisation des gens qui sont sur le terrain en train de
faire, justement, les gestes, faire la production, avec lesquels ils sont censés obtenir des
résultats. Ça, c'est né du Japon, en 1945, qui a beaucoup axé sur la
décentralisation. Les autres pays ont suivi.
Mais notre ministre libéral, lui, il fait le
contraire dans la loi n° 10, il centralise. On vit une soviétisation des soins de santé. Alors, on est en train de
déresponsabiliser les gens qui font actuellement des gestes qui impliquent directement
les responsabilités des gens sur le terrain,
qui prennent des décisions et qui font de la gestion, qui sont tout près de ce
qui se passe. Et, sans leur consentement, sans leur réflexion, ce qu'on
dit : Non, à partir de maintenant, ce qu'on va faire, c'est qu'on va tout simplement remonter le pouvoir
décisionnel juste autour du ministre. Et ça, c'était pour faire des économies
de structure. Parce qu'il y en a qui
confondent structure et structurel. Il faut faire attention, ce n'est pas
nécessairement des synonymes.
Là, quand
j'ai posé la question au président du Conseil du trésor, je lui ai
demandé : Ça, là, le projet de loi n° 10, là, on économise combien,
là-dedans? Réponse obtenue : 55 millions. J'ai dit : Ça, est-ce
que ça inclut les primes de départs,
des fois, de 12 ou de 24 mois? On n'est plus trop sûrs. En tout cas, il y
a comme un écran, un peu, de fumée ou à
peu près, on a de la misère à savoir ce qui se passe à ce niveau-là. Et là le
ministre m'a dit : Bien, écoutez... Là, je parle du responsable, celui qui est assis sur le
coffre-fort du Québec, là. Là, je lui demande : C'est une épargne de
55 millions? Il dit : Je ne
suis pas sûr, il faudrait en parler au ministre de la Santé. Malheureusement,
je n'ai pas pu le questionner là-dessus.
Bon,
supposons que c'est vrai. Ce qu'il faut comprendre, c'est que l'année passée,
on a connu une croissance des dépenses
en santé de 4,2 %. Cette année, on aura une dépense des soins de santé de
1,4 %, c'est ce qui est prévu par le budget. Ça veut dire qu'au lieu... si
on avait, mettons, 4,2 % cette année, au lieu d'avoir 4,2 %, on a
1,4 %, ça veut dire que
l'augmentation, au lieu d'être de 1 360 000 000 $ dans les
soins de santé, va être de 461... — oui, c'est ça, oui — de 461 millions.
Ça veut dire que, dans le fond, on va couper 900 millions dans la
croissance des dépenses en santé. Là, tu dis : Bien, 900 millions, il faut trouver ce
900 millions là. Et là on entend fanfare et trompettes du bord du
gouvernement, dire : Bien, c'est
avec la loi n° 10. Bien, sur 900 millions, on en coupe 55. Puis en
plus, sur le 1,4 % qu'on donne d'augmentation cette année, il y en a plus du deux tiers qui va
aller dans la poche des médecins, deux tiers. Et, si on regarde le rapport
Thomson, le rapport Thomson nous dit que, si on veut seulement augmenter les
dépenses en santé pour compenser l'augmentation
normale de la population et le vieillissement de la population — ça a des impacts sur les soins de santé,
même le premier ministre s'est aperçu de ça,
parce que, là, il demande, justement, que le gouvernement fédéral compense
cette augmentation des dépenses et des
besoins liés à la démographie — c'est 3 %. Juste compenser
cette augmentation-là de démographie,
c'est 3 %. Si on ajoute les coûts liés à l'inflation dans le secteur de la
santé et aussi la modernisation de ce qui est utilisé en santé, ça monte
à 5,3 %. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le rapport Thomson.
Ce qu'on nous
offre, c'est 1,4 %, moins le deux tiers qui va dans les poches des
médecins. C'est ça qu'on offre à la population. Puis là tu te dis :
Bien, écoute, ça devrait être... il faut qu'il arrive de quoi si on veut...
Puis là ils nous disent qu'on ne coupera pas les services. Alors là, là, on a
un drôle de problème. On ne coupera pas les services.
Alors donc, face
à cette diminution-là extrêmement importante de l'argent que tu mets dans la
santé, il faut faire les choses
autrement. Ils ont essayé, ils ont utilisé la carotte, ils ont dit : On va
donner de l'argent aux médecins davantage. Bien oui, écoutez, vous allez voir. On va donner davantage d'argent aux
médecins, on va leur donner une carotte, puis ça devrait les stimuler à
offrir plus de services. Mais là ils se réveillent en 2014, ils disent :
Ah mon Dieu! La carotte ne fonctionne pas,
on a encore des listes d'attente, ainsi de suite. Et là il y a quelqu'un qui
dit : On va sortir le bat, on va sortir le bâton maintenant. Si la carotte
n'a pas fonctionné... Vous voyez le lien, là? Si la carotte n'a pas fonctionné,
on va sortir le bâton.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
M. le ministre des Transports, comme leader.
M. Poëti :
La carotte était... je peux l'accepter, là, mais le bâton a une connotation de
violence, et ce n'est pas la façon
dont on travaille, M. le Président. Je demanderais au député de faire attention
à ses propos. C'est complètement déplacé, en ce qui me concerne.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : J'entends l'argument, M. le
ministre des Transports, mais c'est une image que décide d'utiliser le
député de Sanguinet. Alors, il est maître de ses propos, et puis je lui demande
de poursuivre son intervention.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. On appelle ça une métaphore, c'est tout.
Alors, on a
finalement sorti le bâton, la loi n° 20, la loi n° 20, loi
édictant la Loi favorisant l'accès aux services de médecine de famille
et de médecine spécialisée en modifiant diverses dispositions légales...
législatives, pardon, en matière de
procréation assistée. Alors là, on arrive avec le projet de loi n° 20 qui
finalement doit correspondre à la solution ultime aux problèmes de la santé. C'est comme ça qu'on nous l'a
présenté, M. le Président, on nous le présente comme ça. C'était le deuxième morceau de toute la
transformation du système de santé, là, écoutez, là, c'était extraordinaire. On
vit un grand moment dans le système
de santé, sauf que tout le monde est mélangé, puis personne ne sait à quoi
s'attendre. Ce n'est peut-être pas l'idéal quand tu fais des
changements.
Alors, c'est
une vue d'en haut. Et donc là ce qu'on va faire, c'est que le ministre, avec
ses gens qui sont autour, ont pris des décisions. Ça, ce n'est pas
nouveau, ça, c'est une façon de faire du gouvernement. On est dans notre tour d'ivoire, on a la science infuse, on réfléchit, on
discute entre nous en mangeant des croque-monsieur, et là, à un moment donné, woups! on arrive à des solutions. Et là on
se dit : Écoutez, les solutions, ça vient de nous, c'est ce qu'il y a de
mieux. Alors là, on applique ces
solutions-là, mais il n'y a jamais d'étude d'impact, on ne sait jamais à quoi
s'attendre. Ça va-tu fonctionner ou
pas? On ne sait pas. C'est nous qui connaissons la vérité. Ça, on appelle ça du
dogme, du dogme, M. le Président, on fonctionne par dogmes dans ce
gouvernement-là. Alors, on ne se pose pas de question puis on y va...
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Je dois vous interrompre
là-dessus, M. le député de Sanguinet, compte tenu de l'heure. Et il va
rester environ quatre minutes à votre intervention. Avez-vous l'intention de
poursuivre?
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Très bien. Alors, la suite suivra à 15 heures.
Donc, je suspends les travaux de l'Assemblée
jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 15 h 7)
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, bon après-midi à tous et toutes. Vous pouvez vous asseoir.
Alors, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption
du principe du projet de loi n° 20, Loi édictant la Loi favorisant l'accès
aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée et modifiant
diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée.
Et, lors de
la suspension de nos travaux, la parole était donnée à M. le député de
Sanguinet, et on m'a dit que vous souhaitez
poursuivre votre intervention. Et je
dois toutefois vous dire qu'il vous reste un temps de parole de cinq minutes.
Alors, la parole est à vous.
M.
Therrien : Merci, Mme la Présidente. Alors, voilà, j'étais
rendu à la critique du projet de loi
n° 20 et j'étais rendu à l'idée principale du projet de loi, qui était de réformer, mais vu d'en haut, et d'aller à l'encontre de
toutes les théories de gestion qui
s'enseignent à travers le monde depuis la Seconde Guerre mondiale et qui ont
trouvé leur source à partir de
l'expérience japonaise, de 1945 en montant.
Bien, écoutez,
la réforme se fait d'en haut. On ignore, on ne veut pas savoir ce que les gens
en bas veulent faire et quels seraient leurs commentaires, leurs
suggestions. Même en fin de semaine, ils se sont réunis, et tout de suite le ministre, du revers de la main, a tout simplement
refusé d'entendre toutes les solutions proposées par les gens du milieu.
Et ça nous amène à des situations comme je
vais citer ici, un texte de Régys Caron. Alors, je vais lire un petit bout du
texte pour vous montrer qu'est-ce qui
arrive quand on fait, justement, des réformes, mais qui viennent d'en haut et
non pas d'en bas, qui sont silencieuses.
On laisse les gens d'en bas silencieux, et nous, en haut de notre tour
d'ivoire, remplis de nos dogmes, on
essaie de faire des changements qui ne correspondent pas du tout, du tout à la
volonté des gens du milieu, qui, eux, connaissent quels sont les niveaux
des besoins et comment les combler efficacement.
Qu'est-ce qui
arrive dans ce temps-là? Bien, les gens décrochent. Les gens qui font partie du
réseau sont découragés parce que,
quand vous travaillez au sein d'une communauté et que votre supérieur ne vous
écoute pas, bien, à ce moment-là, souvent, on va aller voir ailleurs. Et
c'est ce qui se produit.
«Les facultés
de médecine des universités québécoises risquent de se vider de leurs
professeurs comme de leurs étudiants si le projet de loi [...] du
ministre Gaétan Barrette [devait être] adopté.» Je suis désolé.
Une voix : ...
M.
Therrien : Je suis
désolé. Je citais, donc je vais...
Une voix : ...
• (15 h 10) •
M.
Therrien :
Oui, c'est ça, le ministre... Est-ce que je reprends? Non, ça va aller, oui.
«C'est le message sans équivoque
livré mercredi [au ministre de la Santé] par les doyens des quatre facultés de
médecine du Québec], alors que se poursuivait à l'Assemblée nationale
l'étude du projet de loi [...] imposant des quotas de patients aux médecins
sous peine de
pénalités financières.» Et il poursuit plus loin : «En trois jours, 500
médecins [...] qui font de l'enseignement ont signé une pétition dans
laquelle ils menaçaient de [s'en aller]...»
C'est comme
ça qu'on résout les problèmes de la santé. On fait en sorte que les gens qui
travaillent dans le système de santé vont s'en aller. Quand on ne les
traite pas adéquatement, c'est souvent ce qui va se passer.
Alors donc, ont signifié les doyens : «À l'Université de Montréal, des étudiants admis en médecine songent à se
tourner vers un autre champ d'études.
«"Nos
étudiants disent qu'ils sont moins attirés par la médecine familiale en raison
du projet de loi 20", a dit la doyenne Hélène
Boisjoly.»
Alors,
voyez-vous, ça, c'est un résultat direct de ce qui se passe quand on envoie les
ordres d'en haut sans se soucier de
qui va les accueillir et comment on pourrait améliorer le système,
mais en écoutant les gens qui composent ce système-là. Alors là, on va tomber dans la bureaucratie. Là, on arrive avec des quotas. Un patient vaut... selon son profil de
santé, va valoir 0,8, 1, 2, jusqu'à 25. Et donc on va évaluer.
Imaginez, actuellement, le système informatique
du réseau de santé n'est même pas capable de produire des dossiers médicaux pour un individu. Mais là, avec
cette révolution-là, on va être obligés en plus de gérer des quotas. Et là,
évidemment, les quotas sont... et c'est une
des grandes critiques du projet de loi : c'est presque arbitraire.
Pourquoi moi, je vaux 0,8, lui, il
vaut 2, l'autre, 25? Écoutez, c'est le festival du n'importe quoi. Et donc, en
plus des bilans de santé des citoyens,
on va gérer de cette façon-là les médecins, savoir s'ils travaillent
adéquatement ou non. Et, s'il y a une baisse du niveau de travail en bas d'un seuil, on va les punir. On va être
pénalisés. Et qui va se retrouver pénalisé davantage? Et ça, écoutez, c'est connu à travers tout ce que les
gens ont mentionné durant les périodes de consultations, bien, c'est souvent les femmes médecins qui ont des obligations comme
on a dans notre société. Écoutez, c'est une réalité : eh bien, les femmes
travaillent un peu moins d'heures, puis il y
a des chiffres qui appuient ça. Ça veut dire que, qui va être pénalisé à
travers cette coercition-là, bien, c'est les femmes qui sont médecins.
Et moi, je
vous dirais, j'ai un médecin de famille, heureusement, mais, quand je vais voir
mon médecin, je sens très bien que la volonté de mon médecin de famille,
c'est de prendre son temps, de me poser des questions, de voir si tout est O.K., et voir s'il n'y a pas des éléments
qui seraient problématiques éventuellement, et essayer de protéger ma
santé. Je l'en remercie, mais je ne sais pas si ça va demeurer comme ça. Je
suis contre le projet de loi n° 20, Mme la Présidente. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Sanguinet.
Et, pour la prochaine intervention, je vais céder la parole à M. le chef
de l'opposition officielle.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard :
Merci, Mme la Présidente. Projet de loi important, effectivement, pour lequel
il est important, pour chacun et
chacune d'entre nous, de parler, parce que c'est un projet de loi... Vous
savez, en matière médicale, c'est un domaine
pour les initiés où, souvent, les initiés se parlent entre eux pour trouver des
façons d'améliorer notre système de santé, l'accessibilité, d'améliorer
nos façons de faire. Donc, rarement dans le domaine médical, un projet de loi
va mobiliser de façon publique les gens. Dans ce cas-ci, c'est tout le
contraire.
D'ailleurs,
je ne compte plus le nombre d'heures et de rencontres que j'ai eues avec
différents médecins, hommes et femmes,
qui pratiquent à tous les jours auprès de nos concitoyens, qui sont venus nous
dire leur réprobation, au début leur
surprise et, par la suite, leur frustration, leur mécontentement par rapport
aux orientations qui ont été prises par le ministre de la Santé et par
le gouvernement libéral.
Ces gens-là, vous savez, c'est des gens qui
s'attendent à une chose minimale, Mme la Présidente, c'est d'être respectés. Et, dans le contexte actuel, ils ne se
sentent pas respectés. Au début, c'étaient des rencontres un peu individuelles
de gens qui m'accostaient sur la rue :
M. Bédard, on est face au projet de loi n° 20; est-ce que vous pensez que
ça va aller de l'avant? Et, par la
suite, ils ont bien vu que les intentions du ministre étaient claires, de
leur —comme on dit
en bon français — passer sur le corps sans les consulter.
Alors, cette inquiétude est devenue vraiment une profonde indignation de
ces gens de ne pas faire partie de la solution, mais d'être considérés par lui,
par le gouvernement, comme étant un problème,
alors qu'ils sont... elles et eux qui y travaillent, les médecins, mais on peut
ajouter à ça, sur l'accessibilité, les pharmaciens, les infirmières et
tous ceux qui oeuvrent dans le domaine de la santé.
Alors, on a
oublié un élément essentiel de ce projet de loi, c'est : consulter
les gens. Parce qu'en matière d'accessibilité
je ne pense pas qu'il y ait un seul gouvernement qui a voulu qu'il y ait moins
d'accessibilité au Québec. Donc, on
s'assure, peu importent les gouvernements en place, à améliorer cette
accessibilité en travaillant avec les gens. Eh bien, là, ça a été le contraire. Ça a été le contraire. Et ce qu'on
comprend maintenant : au moins, cette mobilisation a eu un impact. Le gouvernement, là, nous dit maintenant : Bien, on ne
veut peut-être pas l'appliquer, le projet de loi, on veut seulement
l'avoir comme outil de négociation contre les médecins. Bon, c'est peut-être
la première fois que je vois ça dans ma vie, Mme la
Présidente, qu'un gouvernement va déposer un projet de loi avec des impacts aussi importants
en disant : Bien, on va l'adopter, puis
je verrai si je vais l'appliquer, je verrai. Je pense qu'on n'est pas là.
Dans l'accessibilité, on a avancé dans, je vous dirais, les 20
dernières années, les 20 dernières années et même plus. Comment? En
mettant à profit tous les professionnels
de la santé. Entre autres, une belle initiative qui a été la formation
des groupes de médecine de famille.
Je crois que c'était à l'époque de la première
ministre Mme Marois ou même... Peut-être
même, il y avait aussi... À
l'époque, il a été ministre de la
Santé, le député de
L'Assomption, donc, et chef de la deuxième opposition.
Donc, on a mis en place les groupes
de médecine de famille pour assurer une plus grande accessibilité à tous les Québécois à un médecin de famille. Donc, on était en
marche vers une plus grande accessibilité.
Ce
qu'il fallait faire, le pas de plus important, je pense, c'est utiliser tous ceux et celles qui oeuvrent...
qui ne sont pas dans le corps médical proprement dit, mais qui peuvent
être mieux utilisés; les pharmaciens en font partie, les pharmaciennes. On sait, on peut voir nos
pharmaciens quand on veut. Ça, ils sont disponibles, accessibles, c'est des
gens qui sont compétents, qui veulent
être mieux utilisés, puis on constate qu'au Québec on est peut-être
l'endroit qui utilise le moins ces
grands professionnels de la santé. On les confine dans un rôle qui
pourrait être beaucoup mieux utilisé pour l'accessibilité. Alors, si le ministre
avait fait oeuvre utile, ça aurait été plutôt d'ouvrir cette pratique, de s'assurer que nos
pharmaciens aient une plus grande latitude
quant aux actes qu'ils peuvent poser. Ça a été exactement le contraire. En
plus de ne pas faire ça, on a trouvé
un moyen de les mobiliser contre lui, contre le gouvernement dans les
dernières mesures qu'il a adoptées dans le projet de loi n° 28.
Donc, c'est mettre à dos une partie des professionnels de la santé.
Puis, quant
aux infirmières, vous avez bien vu, dans le contexte qu'on vit actuellement, elles ne se sentent pas et ils
ne se sentent pas respectés. D'ailleurs, ils ont donné une belle occasion au ministre
de venir témoigner de ce qu'il propose et,
en même temps, de voir... Il y en a, dans le réseau, qui
oeuvrent, qui sont là depuis longtemps puis qui ont d'autres propositions beaucoup
plus structurantes, plus mobilisantes, et avec plus d'effets, j'en suis convaincu.
En fin de semaine passée, samedi, je crois d'ailleurs,
ROME a fait un forum où... Tout le
monde de la santé était là, tout le monde qui se sentait interpellé par ces questions. Nous, notre
critique était là, la députée de Taillon. Il manquait une personne. Pouvez-vous le croire? Il manquait le ministre de la Santé. C'est assez incroyable, hein? Il y a des gens qui prennent un
beau samedi pour dire... une ou deux journées pour venir parler de l'importance
de la santé et de son accessibilité, de l'interdisciplinarité,
puis, partout dans le monde, c'est la voie qu'on a empruntée. Alors, des gens
qui vivent ça à tous les jours, là,
qui ne sont pas confinés dans un secteur, qui ne sont pas dans une tour
d'ivoire, ils sont avec le monde, avec les
patients, avec ceux et celles aussi qui sont en attente de soins, qui sont dans
leurs maisons aussi, qui s'attendent à un suivi par rapport à leur
condition, ces gens-là disent : Voici ce qu'on devrait maintenant faire,
comment on pourrait améliorer. Bien, le ministre,
il n'est même pas venu les entendre. Je comprends qu'il n'est peut-être
pas venu parce qu'il aurait eu
un accueil plus difficile, mais c'est des gens respectueux, là, et le respect,
ça aurait été pour lui de venir au moins les
écouter. Alors, il a manqué encore une belle occasion, puis là tout ce qu'il
fait, c'est qu'il se sert de ce processus législatif là pour dire : Regardez, j'ai un gros bat, vous pouvez
tous avoir un bon coup sur la tête, donc écoutez-moi. On est rendus là.
C'est incroyable!
• (15 h 20) •
Puis on parle
de qui, là? On parle de nos médecins de famille. Dans le corps médical, des
spécialistes, on n'en voit pas
souvent puis on cherche à ne pas trop en voir. Ça, un radiologiste, tu ne vois
pas ça. Un chirurgien cardiaque, tu
essaies de ne pas le voir en général, puis tu es bien content quand tu n'as pas
de problème à ce niveau-là. Et là je pourrais nommer toutes les spécialités, mais il y en a un que tu vois
régulièrement, c'est un médecin de famille. Ça, c'est celui où tu as un
contact direct, lui, elle ou les infirmières qui travaillent avec ce médecin
qui, lorsqu'on a un enfant malade, lorsqu'on
a besoin de conseils, bien, qui va se montrer disponible et qui va intervenir
pour s'assurer de nous donner les bons
conseils, parfois pour nous éviter surtout... Vous savez à quel point ce n'est
pas ce qu'il y a de plus agréable, attendre des heures à l'urgence. Ça, on n'aime pas ça, en pleine nuit, avec un
enfant qui a un petit problème qui aurait plus être traité différemment, passer des heures à attendre notre tour. Ça, on n'aime pas ça. Donc,
les médecins de famille, c'est le coeur de notre système de santé, de notre approche. Bien, le ministre
a trouvé le moyen de tous se les mettre à dos puis, en plus, avec des
moyens très contestables.
Et là je
n'irai pas plus loin dans les chiffres qui ont été utilisés par le ministre
pour justifier cette massue qu'il met au-dessus
de chacun et chacune d'entre eux, mais ces chiffres ont été contestés à tous
égards. Je vous invite à aller lire, d'ailleurs,
le témoignage de M. Gladu, de l'Association des jeunes médecins, qui a repris,
au niveau statistique, ce que présentait
le ministre, puis il a dit : Votre base de décision n'est
pas la bonne. Alors, comment pouvez-vous nous orienter dans la bonne direction, parce que votre base
statistique n'est pas la bonne? Mais le ministre, il s'entête. Il a
été pris à cela et, au lieu de tenir
compte de cette réalité ou dire : Bon, bien, les chiffres ne sont pas ce
que je pensais, il a fait comme si ça n'existait pas. Ça, c'est malheureux
parce que ces gens-là, ils le faisaient en toute bonne foi, l'Association des
jeunes médecins, mais je pourrais vous
parler de tous nos médecins de
famille qui oeuvrent dans toutes les
régions du Québec, qui se
sentent littéralement mis de côté, qui ont développé une pratique différente,
là. Ce n'est pas vrai que c'est uniforme. Le ministre, il voudrait, là, que tout le monde ait sa case, tout le monde est pareil, qu'on pratique... peu importe l'endroit, on fait tous la même chose, on a les mêmes quotas,
puis là on va un pour deux, deux pour trois, tout dépendant des ratios.
C'est ça qui est important.
Or, la
pratique médicale, elle ne s'est pas développée comme ça. Les gens qui y sont
dedans, oui, ça a évolué, mais moi,
le fait qu'il y ait plus de femmes, c'est une très bonne chose. On a
l'impression que, parce que certains médecins ont décidé d'avoir des horaires qui sont plus conformes à une réalité
concrète qu'on vit, bien, eux autres, ils seraient un fardeau pour le réseau. C'est quand même assez
incroyable. Vous ne travaillez pas assez. Vous ne travaillez pas assez, vous autres, là. Moi, je n'en reviens pas. Comment
on peut aborder des gens aussi dévoués de cette façon-là? Puis ils ne réclament pas d'augmentation de salaire, là, actuellement, là, bien que le ministre, on le sait, dans le cadre des ententes pour les spécialistes, il en a donné... il en a
obtenu des salées. Dans ce cas-là, eux autres, tout ce qu'ils disent :
Laissez-nous, laissez-nous améliorer le
réseau, puis on est prêts, on en a des solutions. Puis on était dans cette voie
où les groupes de médecine de famille, avec une meilleure utilisation de nos ressources en santé, on arrivait
à une amélioration régulière de l'accessibilité.
Le ministre choisit l'affrontement dans un
dossier où, normalement, ça devrait être l'unité, la participation de chacune et de chacun à trouver des solutions. On
est ailleurs, dans un domaine où on n'a pas besoin de ça. Pensez-vous qu'au Québec on a besoin de vivre une confrontation où les
gens ne se sentent pas respectés? Puis je suis convaincu que ça a des impacts sur les choix de pratique des
jeunes, maintenant, des jeunes médecins qui ont le choix, oui, de
pratiquer au Québec,
mais ils peuvent pratiquer à l'extérieur, en Ontario, aux États-Unis.
Ils ont une mobilité, les médecins, là. Et je suis convaincu que, même sur la présence des médecins de famille, ça risque d'avoir même un impact sur la fréquentation. Puis on en forme beaucoup. Je regarde à
Chicoutimi, on est... Une des grandes réussites pour l'accessibilité, ça a été
le pavillon décentralisé de l'Université de Sherbrooke, qu'on a obtenu. La
dernière chose à faire, c'est d'avoir moins de ces grands professionnels
de la santé sur nos territoires. Donc, non, on veut les démotiver.
En bout de
ligne, est-ce que le monde va plus travailler? Est-ce qu'on va avoir des
meilleurs services? C'est drôle, ça
me surprendrait. Mais est-ce qu'on va avoir augmenté leur scepticisme? Est-ce
qu'on va avoir brisé leur motivation? Là,
je pense que oui. Quand quelqu'un ne se sent pas respecté, peu importe la
rémunération qu'il fait, ça a un impact sur son travail. Ça a un impact sur la façon qu'il aborde sa profession. Et
je suis profondément déçu parce que cette façon de faire là, elle n'est pas arrivée suite à une grande consultation,
elle n'est pas arrivée suite à, je vous dirais, un consensus. Non, non, elle est arrivée de la tête de quelqu'un
qui pense qu'il connaît le réseau de fond en comble, c'est assez incroyable, là, qui s'est confiné à une pratique en
particulier, qui a été président d'une association, qui a négocié des
conditions de travail pour le monde,
puis là il arrive puis il dit : Moi, je sais comment ça marche. Bien,
voyons! En quoi, là, ce qu'il a fait dans le passé peut arriver au
résultat que lui, il connaît mieux le système de santé puis l'accessibilité que
tout le monde au Québec? Moi, j'aimerais
bien le savoir. Mais dans le résultat que donnerait le projet de loi
n° 20, on constate malheureusement qu'on n'est pas sur la bonne
voie.
Donc, ce
qu'on souhaite, c'est que... Si le gouvernement pense qu'on va adopter le
projet de loi en disant : Bien, on
va attendre si, un bon matin, le ministre va se lever pas de bonne humeur puis
il va dire : Go! On rentre tout ça dans la gorge à tout le monde, des quotas... Vous n'avez pas de quotas? Voici la
conséquence. C'est sûr qu'on ne fera
pas ça, là, on ne doit pas faire ça.
Puis, si j'étais membre du Conseil
des ministres, je dirais : On
s'en va dans le dalot, là, avec une histoire
comme ça. J'espère qu'il y a des gens qui vont se lever au Conseil des ministres pour dire : Écoutez, là, je ne suis
pas sûr, moi. Je ne suis pas comme vous, là,
je n'ai pas été radiologiste, mais, du monde, je connais ça, puis, mes
médecins, je leur parle, puis, c'est
drôle, ils ont une pratique qui est beaucoup plus axée sur l'accessibilité. Eux autres, ils
voient des vrais patients, puis eux
autres, ils me disent que vous ne vous en allez pas à la bonne place. Mais il faut
que des gens aient le courage de la faire. Puis on peut avoir une personnalité,
on a tous notre personnalité, mais, à
un moment donné, il faut
se tenir debout, puis c'est ça, le rôle d'un Conseil des ministres, c'est
ça, le rôle d'un caucus, c'est de dire : On n'est pas dans la bonne
direction.
Moi, je pense
que, si c'était si vrai, ce que vous dites, il y aurait au moins un nombre
important de gens qui vous appuient. Or, ce qu'on constate en commission parlementaire — puis
ce n'est pas de la faute des Femen, ça — la
plupart des gens qui sont venus en commission parlementaire sont venus dire au ministre : Vous faites
fausse route. Ça doit être la faute
du PQ, j'imagine. Ça, c'était... Le ministre, quand ça ne fait pas
son affaire, il y a toujours une raison, il y a toujours quelqu'un qui n'est pas correct, à part lui. Tu sais, à un moment donné, il va falloir qu'il arrive à la conclusion que c'est peut-être
lui, là, c'est peut-être lui qui est dans le champ.
Alors, on
souhaite que cet exercice nécessaire qu'on fait aujourd'hui d'essayer de
convaincre ait un impact positif sur
la prise de décision finale. Puis il
n'y aura pas de chèque en blanc, il n'y aura pas de chèque en blanc parce que
c'est trop important.
L'historique qui s'est développé au Québec est
différent d'ailleurs, en plus. On peut prendre des modèles, on peut les regarder. Les médecins de famille chez
nous, 40 % de leur temps, on leur a demandé à une certaine époque de faire
une pratique en urgence. Moi, c'est le cas chez nous; ils l'ont fait, ils ont développé
leur expertise. C'est devenu, dans
les faits, des urgentologues, parce que la pratique, c'est la meilleure façon,
on le sait, la résidence, d'acquérir des connaissances, de développer des aptitudes. Puis là, à un moment donné,
il y a une nouvelle orientation, puis on dit : Ce que tu as fait dans les 30... dans les
20 dernières années, là, ce n'est plus bon. Là, tu sors de l'urgence, ce
n'est pas vrai, ce n'est plus toi,
puis là on t'applique un quota, maintenant, puis voici ce que tu dois faire. La
personne, elle dit : Bien, coudon, je suis un professionnel, moi,
là. C'est qui, lui? C'est qui?
Faire du
mur-à-mur, c'est la dernière chose à faire. Considérer que... D'essayer même de
stigmatiser les femmes médecins,
c'est une erreur, une profonde erreur, gênante, démotivante, sur laquelle nous
allons nous opposer férocement pour que le ministre retrouve la bonne
voie, celui de l'écoute et celui du consensus.
Autre
problème du projet de loi, et j'ai quelques minutes pour en parler, mais on
sait à quel point c'est important... Ce
projet de loi a deux éléments. Le deuxième, on n'a pas pu en parler. Pourtant,
il y a une motion de scission qui a été refusée, alors qu'on sait très bien que parler de procréation assistée
puis de parler des quotas que souhaite le ministre, c'est deux choses
complètement différentes, où on aurait dû en parler autrement.
Au Québec, on
a fait un choix sur la couverture. Ceux qui utilisent la fécondation in vitro,
on s'est dit, au Québec, qu'on était
assez riches pour permettre à ces femmes, à ces couples d'avoir
l'accompagnement de l'État. Le ministre, tout d'un coup, a décidé : Non, moi, je ne crois pas à ça, moi, c'est
non. Puis comme ça, hein, c'est arrivé du jour au lendemain. Personne n'en parlait, et là il nous le met dans le
projet de loi de façon à se dire... J'imagine sa stratégie. C'est que mon
projet de loi va tellement soulever le
mécontentement sur l'autre partie, qui est les quotas, que mon côté procréation
assistée va comme passer en dessous.
• (15 h 30) •
Or, c'est un choix qui est important, là, c'est
un choix littéralement de société. Moi, j'étais fier de dire qu'au Québec on permettait à ces gens-là d'avoir accès à
une fécondation in vitro qui était couverte. Puis, oui, il y avait des frais
connexes, parce que ça a beau être couvert,
il y a toujours des frais qui viennent avec ça, mais on oublie toujours,
toujours qu'avoir des enfants, c'est
un choix personnel qui profite. C'est le plus grand bonheur qu'on peut avoir
dans la vie, avoir des enfants, mais,
pour la société, c'est un apport qui est névralgique pour notre développement,
pour l'économie, qui fait en sorte
qu'un enfant, sur une base individuelle, va permettre à nous, plus tard,
d'avoir accès à une qualité de vie quand on ne
sera plus en âge de travailler. C'est comme ça que les sociétés restent fortes
et c'est pour ça que donner plus de possibilités
aux parents, aux femmes, c'était un choix qui, je pense, était le bon, j'en
suis convaincu. Et nous avions les moyens
parce qu'à terme c'est payant quand on sait en plus qu'on est une des sociétés
où le taux de fécondité est le plus bas,
Mme la Présidente. Il faut tenir compte pourquoi on l'a fait. Oui, à travers
ça, il y a de l'empathie, mais il y a aussi ce constat. Et de reculer tout d'un coup puis de le mettre dans un
projet de loi pour éviter qu'on en parle ouvertement en disant : Bon, je vais tout passer dans la
même mouture, et, comme ça, bien, le débat ne se fera pas, et ces gens-là ne
pourront pas crier assez fort pour qu'on les entende, je ne sais pas si c'est
habile, mais, encore une fois, ce n'est pas respectueux.
Ce n'est pas respectueux de ces femmes qui ont milité pour voir leurs droits
être reconnus. Ces gens-là, ces décisions
ont été prises tout seul dans une tour d'ivoire ici, à Québec, avec
on ne sait pas qui, d'ailleurs, un peu comme le projet de loi n° 28,
avec trois, quatre personnes autour d'une table. Puis, moi, le réseau de la
santé, là...
Une voix : ...
M.
Bédard :
10, projet de loi n° 10, pardon. Donc, moi, maintenant, je décide ça, puis
mon but, là, c'est avoir un contrôle. Parce qu'à travers ça le ministre,
qu'est-ce qu'il veut à travers le projet de loi, c'est le contrôle. Il veut le contrôle, là, c'est presque obsessif. La
décentralisation, je pense qu'il ne croit pas à ça. 32 milliards de
dépenses en santé, normalement on fait confiance à notre monde sur le
terrain. On est là plus pour les motiver, pour trouver des grandes orientations, mais pas pour les attendre avec un
bat au-dessus de leur tête puis leur dire : Écoutez, là, vous avez le
choix entre la carotte ou le bat, là,
allez-y. Ça ne fonctionne pas comme ça. La théorie du «big stick», là, ça a
peut-être marché pour les États-Unis
au début de l'autre siècle, mais ce n'est pas la bonne façon de faire avec des
professionnels, ça, j'en reste convaincu, Mme la Présidente.
Et en plus ce
qu'on sait, c'est que — et c'est peut-être l'impact le plus négatif — ça déshumanise. Le mur-à-mur, c'est ça. Imposer une vision, c'est ça. Donc,
quels seront les effets sur les soins palliatifs? Le ministre, ah! il
dit : On va voir au fur et à
mesure. Vous allez voir, telle chose, ça va valoir trois patients puis
peut-être quatre. C'est sûr qu'on va avoir
beaucoup de bureaucratie. Au moins, il va peut-être créer de l'emploi en
bureaucratie. Ça, j'en suis convaincu. Il va falloir calculer, hein,
c'est combien, puis combien de temps vous passez. Ça veut dire quoi, ça? Ça
veut dire deux ou trois sur une liste? Aucune idée. Le ministre, lui, il va
partir de ça.
Les soins à
domicile, alors qu'on devrait donner plus de moyens pour les soins à domicile,
bien, dans les faits, c'est qu'on affaiblit ceux qui font ce choix-là de
donner des soins à domicile.
Sur
l'avortement, on a vu les craintes réelles, puis pas de l'opposition, là, de
ceux et celles qui sont à tous les jours sur le terrain, qui
disent : Votre projet de loi, c'est un frein à l'accessibilité.
Alors, Mme la
Présidente, je souhaite, comme tous mes collègues ici, que le gouvernement
entende raison, qu'il écoute la voix
de ceux qui connaissent la santé et que nous revenions à la raison pour
permettre, effectivement, une plus grande accessibilité à nos
concitoyens et concitoyennes.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, merci beaucoup, M. le chef de l'opposition officielle. Et, toujours dans
le cadre du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 20, je
cède la parole à M. le député de Matane-Matapédia.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
Merci, Mme la Présidente. Je vais utiliser mon intervention pour donner la
parole aux médecins de chez nous. Si
le ministre ne veut pas écouter les parlementaires, j'espère qu'il écoutera
davantage les médecins. Alors, je vais
vous lire la lettre qu'ils m'ont envoyée après que j'aie sollicité l'ensemble
des médecins de ma circonscription sur le projet de loi n° 20. Alors, avec leur autorisation, je vous
transmets l'essentiel du contenu de la lettre qui provient de l'équipe
médicale du CSSS de La Matapédia.
Lettre du
26 février 2015 : «M. le député, au nom des omnipraticiens du CSSS de
La Matapédia, nous profitons de la
tribune que vous nous offrez afin de vous faire part de notre réaction au dépôt
du projet de loi n° 20 [déposé] par le ministre[...].
«Nous tenons
d'abord à préciser que notre équipe médicale est très engagée dans l'offre de
services proposée à la population matapédienne et extrêmement soucieuse
d'offrir des soins médicaux de qualité et accessibles à tous.
«Forts d'un
partenariat efficace entre les médecins et les gestionnaires, il nous a été
possible de consolider au fil du
temps un large éventail de services médicaux dans notre région. Ainsi, nous
sommes fiers de constater qu'outre les services
de base d'urgence, d'hospitalisation, d'obstétrique, de soins de longue durée
et de suivi en GMF nous offrons la continuité des services d'oncologie,
de petites chirurgies, de clinique des jeunes, de périnatalité, de
gériatrie[...], de clinique d'ITSS[...].
«Malgré la
période difficile de recrutement médical des dernières années, il nous a été
possible, en se serrant les coudes, de maintenir notre offre de services
en première ligne. Nous sommes fiers de constater que près de 85 % des Matapédiens ont un médecin de famille attitré et
que les services d'urgence et d'hospitalisation sont couverts à 100 %.
Pas mal pour une équipe qui ne compte que 78 % de son plan d'effectifs
médical en omnipratique! Il va sans dire que la solidarité qui unit nos membres est exceptionnelle et que nos familles
passent malheureusement souvent en deuxième.
«Nous vivons présentement une période de grande
réflexion en omnipratique au Québec. Cette réflexion est bousculée par la hâte et le manque d'écoute du
ministre[...]. Bien que nous sommes fiers de nos réalisations locales, nous
sommes conscients que la situation actuelle est d'optimiser notre offre de
services. Nous savons que le reste de nos collègues québécois le font tout autant. Nous souhaitons grandement
que nos efforts seront suffisants et reconnus par la partie ministérielle.
«La FMOQ
travaille à l'élaboration d'un plan d'accessibilité ayant comme objectif
de remédier aux difficultés que
vivent les Québécois en regard de l'accessibilité à la première
ligne. Ces travaux ont débuté il y a plus d'un an. Notre crainte est que le ministre fasse fi de ces pistes
de solution. Sachez que nous sommes tout
à fait conscients des lacunes de
notre système, mais nous croyons que les solutions avancées par le ministre
s'avèrent irréalistes. Plusieurs aspects méritent d'être expliqués pour
comprendre leur non-sens ou leur inapplicabilité.
«Premièrement, parlons du ton utilisé par le ministre et le manque de respect envers
les omnipraticiens. La façon [du ministre] n'est certainement pas dans
le guide du "bon travail d'équipe". Les omnipraticiens sont les
piliers de la prestation des soins de santé
du Québec : 80 %
des urgences québécoises sont desservies par les omnipraticiens contre
20 % seulement [pour les] médecins spécialistes. De ses 23 médecins
exerçant dans la vallée de la Matapédia, 20 sont des médecins de famille, ce qui reflète la place
essentielle des omnipraticiens en région. Nous demandons seulement d'être
respectés et écoutés dans ce rôle de partenaire incontournable au sein
de l'organisation des soins de santé au Québec.
«Le ministre
est passé maître... » J'utilise le terme qui est là, ils disent: «...la
démagogie mathématique lorsqu'il s'efforce
[de] dépeindre les omnipraticiens comme des travailleurs paresseux. Deux
exemples accablants du décompte injuste
des jours travaillés : aux yeux du ministre, lorsque nous faisons du
bureau le jour et un quart de garde à l'urgence le soir — donc, de
16 heures à 24 heures — une seule journée de travail est reconnue. De la même façon,
lorsque nous faisons une demi-journée
de bureau et consacrons le reste de la journée au suivi de laboratoires, nous
travaillons zéro jour. Le calcul d'une journée travaillée implique un
montant d'actes minimum facturé. C'est donc dire que tout travail
administratif — les
réunions, rappels de patients, appels à des spécialistes, comités locaux ou
régionaux, gestion des laboratoires
anormaux, formulaires à remplir, etc. — n'est pas comptabilisé dans les calculs
mensongers présentés à la population.
«L'essence même du projet de loi n° 20
repose...»
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Simplement, ce n'est pas parce que le collègue est en train de lire une lettre
qu'il peut faire indirectement... et traiter
de mensongères les paroles du ministre. Il doit retirer son propos. Même si ça
n'émane pas de sa bouche, mais il est en train de lire une lettre, il
doit retirer son propos et éviter de les prononcer.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui. Alors, M. le député, avec toute votre expérience, vous savez très bien qu'il n'est pas possible de faire
comme le mentionne M. le leader adjoint. Alors...
M.
Bérubé : ...les parlementaires d'en face, je m'en excuse et je tâcherai, à
mesure, de valider les termes qui sont peut-être inappropriés, mais qui
sont ceux des médecins de la Matapédia. Alors, je vais essayer de poursuivre.
«L'essence même du projet de loi n° 20 repose sur l'augmentation
de l'implication des omnipraticiens dans la prise en charge au bureau. Personne ne peut être contre la vertu!
Toutefois, il faut reconnaître que les médecins ne peuvent travailler à
deux endroits en même temps et que, pour atteindre ce but, d'autres services
devront inévitablement disparaître. En
effet, en imposant des quotas de patients aux médecins, ces derniers risquent
de devoir réduire leurs tâches connexes :
clinique d'oncologie, clinique des jeunes[...]. Des services à une population
vulnérable seront contraints de disparaître,
et les patients devront se déplacer vers Rimouski pour recevoir leurs
traitements de chimiothérapie ou choisiront de s'en passer pour les plus
vulnérables d'entre eux.
«Il est évident qu'avec la couverture des gardes
d'une urgence 24/7 et de deux équipes d'hospitalisation les médecins en auront plein les bras pour atteindre
les quotas imposés par la loi n° 20. Même si certains d'entre nous étaient
intéressés à travailler moins à l'urgence et faire davantage de prise en
charge, comme nous sommes déjà en manque d'effectifs à l'hôpital — urgence
et hospitalisation — ceci
[...] peut tout simplement [ne] pas être envisagé.
«Le ministre
n'a — pas — prévu aucune solution de remplacement à
court ou moyen terme à l'omniprésence des médecins de famille dans les hôpitaux et il se garde bien de s'en vanter
auprès de la population. Dans un même ordre d'idées, comme nous passons plus de la moitié de notre
temps en milieu hospitalier, comment est-ce possible d'avoir une assiduité
à 80 % auprès de notre clientèle? Le
ministre sait très bien que cela est impossible pour tous les omnipraticiens
travaillant en partie à l'hôpital et
fera subir une diminution de salaire injuste de 30 % à ceux... de par leur
polyvalence, tiennent à bout de bras un système de santé malade.
«La pratique en région comporte déjà bien des
contraintes. La preuve est que, malgré nos multiples efforts de recrutement, plusieurs de nos postes
d'omnipraticien restent vacants. L'ajout des contraintes inscrites dans la loi
n° 20 n'aidera malheureusement sûrement pas à la cause. L'attrait
de la pratique privée ne guette pas nos régions mais sera certainement importante dans les villes et est à
craindre sérieusement. La migration vers les autres provinces, pour l'instant
marginale, demeure imprévisible et sujet à réflexion pour certains.
• (15 h 40) •
«Bien que secondaire à nos yeux, la pénalité monétaire
imposée par la loi n° 20 aux médecins ne rencontrant pas les objectifs du ministre est profondément
injuste et discriminatoire. Tous les médecins de l'équipe du CSSS de La Matapédia
font leur juste part. Malgré ceci, plusieurs
d'entre nous risquons la pénalité pour ne pas s'être conformés à toutes les
règles imposées par le ministre.
Rappelons-nous que le salaire à l'acte vient déjà moduler notre rémunération
selon la quantité de patients vus. Aucun travailleur ne peut accepter une coupure de
30 % de son salaire pour des services rendus et les responsabilités
qui en découlent si les règles du jeu sont inatteignables et [...] dans des
règlements non dévoilés à ce jour.» J'ai
enlevé un mot, là. «Nous croyons que ceci risque d'augmenter l'écart de la
rémunération entre omnipraticiens et spécialistes et, donc, [de]
diminuer l'attrait pour la médecine familiale au sein des candidats médecins.
«Finalement,
sachez, M. le député — alors, ils s'adressent toujours à moi — que la consolidation et l'optimisation
de l'offre de soins de santé auprès de la
population matapédienne nous tient à coeur et que nous sommes plus que
disponibles pour faire partie de la solution.
«Nous
demeurons à votre disposition si vous désirez des précisions additionnelles ou
pour répondre à vos questions.
«Veuillez recevoir,
M. le député, nos salutations distinguées.»
Pour
l'équipe médicale du CSSS de La Matapédia, les médecins Catherine Poirier,
Patrick Charland et Manon St-Amant.
Donc,
j'ai reçu plusieurs lettres suite à l'appel que j'ai fait, et qu'est-ce que
nous disent les médecins? C'est que ce
n'est pas réaliste pour notre région, qu'il y a une méconnaissance du travail
des médecins dans les régions comme la mienne,
la Matapédia, la Matanie, la Métis, et qu'en matière de santé il faut faire
attention, il ne faut pas trop bousculer le réseau puis faire confiance aux médecins. On dit souvent que les
médecins sont issus d'une profession libérale, mais je peux vous dire
qu'avec l'adoption du projet de loi n° 20 ça va être pas mal moins le cas
avec ce qu'on entend.
En
matière de santé, le gouvernement actuel a essayé plusieurs réformes. Le
premier ministre, alors ministre de la Santé,
devait — alors,
c'est ce qui était annoncé lors de l'élection de 2003, j'étais candidat — régler les urgences dans les heures qui suivaient l'élection d'un gouvernement
libéral. Évidemment, ça n'a pas été le cas, c'est plus complexe que ça.
Ensuite
est arrivé Yves Bolduc, qui l'a remplacé comme ministre de la Santé, qui
arrivait avec une méthode pour les
urgences, la méthode Toyota entre autres. Cette semaine — cette semaine — on a appris ça, que la méthode qui a été
déployée pour les urgences a été un fiasco,
que le temps d'attente est encore de 17 heures. Donc, ça n'a pas fonctionné
non plus, malgré toute la place qu'on avait
faite à Yves Bolduc comme ministre de la Santé. Et je trouve que le
gouvernement a risqué beaucoup, il a misé beaucoup sur le ministre de la
Santé. C'est-à-dire que, jamais dans l'histoire moderne du Québec, un ministre de la Santé aura eu autant de
pouvoirs, à telle enseigne qu'il occupe tout le ministère au complet — il n'y
a pas deux responsables du ministère — qu'il a énormément de pouvoir au sein même
de l'appareil gouvernemental. C'est
l'impression que nous donnent les coudées franches qu'il a, donc, au Conseil
des ministres, qu'au sein de son groupe parlementaire il a un pouvoir
important que le premier ministre lui concède.
On
n'est pas tellement surpris, parfois, des intonations ou des... ou des coups
d'éclat du ministre — tiens,
je vais le dire comme ça — ça ne nous surprend pas tellement. Mais la question qui se pose à
partir du moment où on le laisse faire,
c'est le jugement du premier ministre. C'est le premier ministre qui l'a
recruté, connaissant le ministre, qui avait été représentant des médecins spécialistes, qui avait été candidat de la CAQ
aussi. On s'en souvient, là, de ce qu'il a dit sur le gouvernement
libéral.
Alors,
je ne doute pas de sa détermination à être ministre de la Santé, ce n'est pas
ça qui est en jeu. Je pense que c'est
un poste qu'il habite avec beaucoup d'intensité. Ça, je ne doute pas de ça.
Mais je me questionne sur toute la latitude qui lui est accordée par le gouvernement, par le premier ministre, et je
me demande même si certains de ses collègues n'ont pas parfois... parfois, ça leur effleure, cette réflexion que
c'est quand même beaucoup de pouvoirs à donner à un ministre.
Dans
la séquence de ce qui a été annoncé, il y a eu le projet de loi n° 10. On
s'est opposés au projet de loi n° 10, et là on ne savait pas tellement ce qui s'en venait après. Là, il y a eu le
projet de loi n° 20. Puis on se doute qu'il y a d'autres réformes qui s'en viennent, mais on ne connaît pas
la séquence. Le ministre, lui, il la connaît. S'il la rendait publique déjà,
on pourrait comprendre quel est l'ensemble,
peut-être qu'on aurait un éclairage différent. Mais, pour l'instant, malgré
que les deux tiers de la population du
Québec est contre la réforme, dont une majorité écrasante de médecins et de
praticiens du milieu, le ministre poursuit, ne nous dit pas quelle est
la suite, quelles sont les autres réformes à venir.
Ça
serait important parce que, jusqu'à maintenant, qu'est-ce qui est prévisible?
Les quatre universités qui ont des facultés de médecine au Québec sont
venues nous dire ici, à Québec, à l'Assemblée nationale, qu'il allait y avoir
un impact sur l'admission des médecins,
l'admission des médecins en médecine familiale, que, là, on a un équilibre qui
a été atteint et qu'il y aura un impact décisif. Donc, il y a des jeunes, des
jeunes femmes, des jeunes hommes, qui envisageaient d'être des médecins de famille qui vont décider de
faire autre chose de leur vie peut-être. Pour moi, ça, ça m'inquiète, donc, à l'entrée, mais aussi à la sortie parce
qu'il y a des médecins qui ont plus d'années de service qui nous indiquent
qu'ils vont peut-être quitter prématurément.
Et je suis sûr que ce n'est pas seulement à Matane, à Amqui, à Mont-Joli qu'on
dit ça, qu'on me dit ça, je suis sûr qu'il y
a d'autres collègues qui l'entendent aussi. Puis le risque est réel, puis ça va
bien au-delà de la politique.
Un médecin, là, c'est
une présence drôlement rassurante pour des parents qui ont des jeunes enfants,
pour des parents aussi qui ont des... pour
leurs parents qui ont des parents vieillissants eux-mêmes, en fait pour tout le
monde. Et l'accès à un médecin de
famille, c'est important, mais aussi, je dirais, la motivation des médecins à
exercer dans notre milieu, où il y a
déjà beaucoup de contraintes. Là, ce qu'on retrouve, c'est des médecins qui se
questionnent beaucoup sur le sens de
leur pratique médicale au début de leur carrière puis qu'est-ce que ça va
devenir. Ça, on l'entend beaucoup.
Il
y a eu des forums en fin de semaine, il y a eu un forum important qui s'appelle
le ROME. Tout à l'heure, le chef de
l'opposition indiquait que le ministre a décidé de ne pas y aller. C'est son
choix, mais il était tout de même disponible pour faire tous les plateaux de télévision en même temps un samedi.
Donc, il aurait pu se rendre là, puis quitte à avoir un débat. Puis il est capable de le faire. Je pense
qu'il faut éviter le point de rupture avec les médecins. Et il faut reconnaître
que, de l'idée initiale qui appartient au
gouvernement du Québec, c'est à lui... c'est lui qui a le sens de l'initiative,
c'est lui qui a
l'initiative législative. Il se peut que l'éclairage des médecins, de la
population, des praticiens, des infirmières, des spécialistes lui indique qu'il vaut mieux pour tout le monde, pour
lui comme ministre, mais pour nous tous comme Québécois, de faire des changements importants puis de prendre un peu
plus de temps pour consulter les médecins, entre autres. Je suis sûr
qu'on en sortirait grandis comme parlementaires.
Moi,
l'exercice que je veux faire aujourd'hui avec vous, c'est... D'une part, je
vous ai lu la lettre des médecins de
La Matapédia, mais c'est la même chose dans la Matanie puis dans
La Mitis. Je veux leur dire que ce n'est pas pour rien que je les ai consultés. Je pense que
d'autres collègues ont fait la même chose aussi, mais je leur ai écrit
systématiquement leur demandant un
retour. Je l'ai lue, cette lettre-là, puis je vais l'envoyer au cabinet du
ministre. Ce que je veux dire à mes
concitoyens, c'est que, sur des questions comme celle-là, on est vraiment des
représentants de nos milieux. C'est-à-dire que, oui, il y a des arguments nationaux, mais on va vraiment s'appuyer
sur ce qu'on nous dit dans nos milieux. Puis là ce n'est pas, tu sais : On nous a dit au centre d'achats, ou :
On nous a dit par courriel, ou : Quelqu'un qu'on a rencontré... Moi, j'ai des noms puis j'ai une lettre à déposer,
c'est très concret. Puis les médecins ne prennent pas souvent la plume publiquement pour faire ce genre d'exercice là,
alors moi, j'y vois un signe qu'ils sont vraiment préoccupés. Ils ont pris
une heure ou deux de leur temps, là, puis
ils se sont tous réunis au CSSS de La Matapédia pour m'écrire, à moi, pour
que je le transmette au ministre puis je le transmette au gouvernement.
Ce
que je dis à mes collègues parlementaires de la partie gouvernementale, c'est
que vous avez un impact, si vous le
souhaitez, de porter aussi votre message. Je suis convaincu que vous entendez
la même chose que moi, que, si, dans le cas des CHSLD, il y a eu des
interventions, j'en suis convaincu, de députés qui ont dit : C'est trop,
ça ne passe pas, ils peuvent le faire
aussi auprès du ministre, et que le ministre est un parlementaire parmi 125,
mais eux aussi ont une voix importante, puis ils ont des bons arguments,
puis ils sont capables de faire changer des réformes pour qu'elles soient
encore meilleures puis d'en être davantage fiers.
Tel
qu'il est présenté, le projet de loi n° 20, même si on ne disait pas un
mot, l'opposition, ce que les médecins disent — et les spécialistes de la santé — serait suffisant, je pense, pour faire
entendre raison au ministre. Puis, s'il ne nous écoute pas, nous, qu'il écoute ce genre de témoignage qu'on a ici,
qu'on retrouve fréquemment dans nos boîtes de courriels, ou de courrier,
ou dans les discussions qu'on a.
En matière de santé,
dans une région comme la mienne, qui est une des régions les plus âgées au
Québec, où il y a déjà, là, pénurie de plusieurs spécialistes, où on fait appel
à des médecins dépanneurs, où on a de la difficulté à maintenir nos infirmières, où il y aura bientôt pénurie de préposés aux
bénéficiaires, c'est un écosystème très, très, très fragile, oui. S'il faut en plus que les médecins
de famille, qui sont vraiment, là, au coeur, sur la première ligne de l'action,
soient démobilisés, que les jeunes ne
viennent plus dans notre région, que les plus anciens décident de quitter
prématurément, ça va être encore
pire, ça va être problématique. C'est très sérieux. Moi, je les ai tous
rencontrés personnellement, et c'est ce
qu'ils m'ont dit. En tout cas, pour ma région, là, ça ne fonctionne pas. Donc,
ça ne doit pas être tellement différent de la région du ministre responsable de ma région qui est à Rivière-du-Loup—Témiscouata, là, je suis convaincu que c'est la
même chose chez lui aussi. Donc, il entend
la même chose que moi. J'espère que c'est
ce qu'il vous dit au Conseil des
ministres ou au caucus, que ça n'a pas de sens. Je le souhaite. Je ne le saurai
jamais, mais je le souhaite.
• (15 h 50) •
Donc,
sur le projet de loi n° 20, deux choses. Le gouvernement peut décider
d'accorder tout ce pouvoir au ministre
de la Santé. C'est un choix qu'il a fait. C'est inédit dans l'histoire récente politique
du Québec. Il peut décider de nous dire : Bien, à terme, ça va
être un choix gagnant. Je suis convaincu qu'il a des doutes là-dessus,
mais ils ont décidé de le faire. Il
n'est pas trop tard pour changer le projet
de loi, pour mettre dans le coup les
médecins, tous les avis qu'on a eus pour
l'améliorer, ce projet de loi. Parce
qu'il n'est pas accessoire, là, c'est
sur la pratique des médecins. Puis la pratique d'un médecin, là, ça naît d'une vocation, de longues études, de beaucoup
de sacrifices, d'un engagement envers un milieu aussi. Parce qu'on choisit un milieu. Dans les médecins que je vous ai
parlé tout à l'heure, là, sur les trois, là, il y en a deux
qui ne viennent même pas de La Matapédia, qui ont choisi de venir dans notre
région, puis on en est très fiers, puis on se sent très privilégiés.
Mais c'est un engagement qui ne tient pas à grand-chose, dans le sens que, si
on change la pratique, il y aura des conséquences, c'est sûr.
Alors,
c'est le message d'un député, d'un député qui est inquiet, mais, en même temps,
qui sent qu'aujourd'hui, à travers
seulement 20 minutes, il peut quand même livrer un message qui... Vous le
sentez bien, Mme la Présidente, ce n'est
pas un message hostile, là. Ce n'est pas un message que je fais, là, de
politique opposition versus gouvernement. J'envoie des pistes, prendre plus de
temps, écouter les médecins, faire des distinctions entre les milieux, par
exemple, les milieux urbains, les
milieux ruraux. Tout ça, là, on serait gagnants à faire ça. Puis ça fait partie
de notre rôle d'opposition d'améliorer
des projets de loi. Les gens qui nous écoutent, qui vont se dire : Bien,
parce qu'ils ont présenté le projet de loi, ils sont contre. Pas nécessairement, il y a plusieurs projets de loi
avec lesquels on était en accord parce qu'on a contribué puis on a senti
qu'ensemble on pouvait les améliorer. On est capables de le faire, puis ça
s'est fait dans bien des cas.
On
a autant de légitimité comme parlementaires que tout député en cette Chambre
lorsqu'on est dans l'opposition. On a
été élus, puis les gens nous ont choisis pour qu'on aille porter ce message-là.
Alors, le message que je livre aujourd'hui, je suis convaincu qu'il ressemble à celui que vivent bien des députés
dans des régions, disons, plus rurales, par exemple, dans les différentes régions du Québec. Je suis
convaincu que ça a une résonnance, ce que je dis présentement. Et, si ça
n'en a pas une, bien, vos médecins vont vous dire la même chose.
En
conclusion, Mme la Présidente, je souhaite que, si l'opposition n'est pas écoutée,
à tout le moins les députés qui
représentent des populations qui ont des attentes importantes à l'égard des
médecins quant à leur place, quant à leur présence soient écoutés et que ce projet de loi là soit considérablement
modifié pour le bénéfice non pas le l'opposition, mais de l'ensemble des
citoyens et citoyennes du Québec, Mme la Présidente.
Document déposé
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député. Est-ce
que vous souhaitiez faire le dépôt de la lettre que vous nous avez lue
tout à l'heure? D'accord. Alors, il y a consentement pour le dépôt de cette
lettre? Consentement. Très bien.
Alors,
pour la prochaine intervention, je vais céder la parole à M. le whip de
l'opposition officielle et député de René-Lévesque.
M. Marjolain Dufour
M.
Dufour : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, à mon tour
d'intervenir sur le projet de loi n° 20, projet de loi édictant la
Loi favorisant l'accès aux services de médecine de famille et de médecine
spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière de
procréation assistée.
Alors, Mme la
Présidente, dans la mouture actuelle du projet de loi, à sa face même, quand on
décortique le projet de loi, il y a comme
deux lois distinctes à même ce document de projet de loi. À preuve, c'est qu'on
avait demandé de scinder par une
motion de la Coalition avenir Québec qui a été refusée par le gouvernement,
bien sûr. Mais, quand on regarde le
document, le projet de loi, alors il est, effectivement, scindé en deux. Alors,
on parle de la loi favorisant l'accès aux
médecins de famille, dont il y a 45 articles. Puis ensuite on voit dans le
projet de loi, qu'il y a une partie II qui est la Loi sur les
activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée. Alors,
ça me fait penser au projet de loi
n° 28, où est-ce qu'effectivement, dans le projet de loi n° 28, qui
était la mise en oeuvre du budget, on pouvait y retrouver comme cinq à six projets de loi. Alors, au-delà du
fait d'être capable de légiférer comme le législateur se doit de ce faire,
bien, on y va de cette façon-là. C'est
maintenant un genre de pratique que le gouvernement fait au niveau de la
législation actuelle.
Alors, dans les
grandes lignes, Mme la Présidente, du projet de loi n° 20, alors, il y a
le volet médecins, bien entendu. Alors, c'est un projet de loi qui permettra au
gouvernement, par voie réglementaire — je dis bien par voie réglementaire, là, ça donne beaucoup de pouvoir au
ministre, ça donne beaucoup
de pouvoir à l'Exécutif — d'imposer
à chaque médecin la prise en charge d'un
nombre minimal de patients et en établissant des paramètres stricts l'incitant
à voir ses patients, peine de sanctions pécuniaires.
Alors,
pour les médecins de famille — parce
qu'on les décortique — ça
prévoit un quota minimum, fixé aussi par règlement, de patients que
devra suivre chaque médecin de famille selon le nombre de pratiques qu'il
compte. Ça prévoit aussi une pénalité si un médecin ne respecte pas les
12 heures par semaine d'activités médicales particulières, l'AMP qu'il doit faire en établissement, hors de
son cabinet. Le taux d'assiduité de chaque médecin sera mesuré. Exemple,
le rapport entre le nombre de fois où un
patient voit son médecin de famille, où il est inscrit, le nombre de fois où il
a vu des médecins, le sien ou un
autre, à l'urgence, par exemple. Un taux d'assiduité sous les 80 %
entraînerait une baisse de salaire jusqu'à un maximum de 30 % de pénalité
pour un taux sous les 60 % — c'est bien décortiqué, là — sous les 60 %, idem si les
12 heures de l'AMP ne sont pas travaillées. Les pénalités seraient mises
en application à partir du 1er janvier 2016.
Pour les médecins
spécialistes, le projet de loi prévoit les obligations suivantes :
recevoir en consultation, c'est-à-dire hors
de l'urgence, un nombre minimal de patients référés par un médecin de famille,
tel que déterminé par règlement par
le gouvernement; s'assurer d'un suivi d'une consultation demandée à l'urgence
entre 7 heures et 17 heures dans
un délai prescrit par règlement, trois heures; assurer la prise en charge et le
suivi médical des patients hospitalisés à titre de médecin traitant lorsque la masse critique de médecins de
famille dans l'hôpital est insuffisante; assurer une gestion adéquate des listes d'attente chirurgicale en
priorisant les patients en attente depuis plus de six mois. La non-observance
d'au moins une de ces mesures entraînerait
la diminution de 30 % de la rémunération de l'ensemble de la pratique des
médecins visés.
Finalement, pour les
deux groupes, le projet de loi confère pour une période limitée au ministre le
pouvoir de déterminer dans certaines
circonstances de nouvelles conditions et de nouvelles modalités de rémunération
applicables aux médecins.
Au
niveau de ce que je disais tout à l'heure en entrée de jeu du volet au niveau
de la procréation assistée, donc, qui devrait se retrouver, normalement, dans
une autre loi, c'est l'ajout de balises et de retrait de la fécondation
in vitro de la couverture du
régime public; la fécondation in vitro accessible seulement aux femmes
âgées entre 18 et 42 ans, voilà le
changement; période minimale, trois ans de relations sexuelles ou d'insémination
artificielle exigée avant tout traitement de fécondation in vitro; obligation de suivre une séquence définie
commençant par la stimulation ovarienne, suivie de séquences d'insémination artificielle pour
accéder, en cas d'échec, à la fédération in vitro. Bref, vous voyez que
c'est bien balisé. On parle que des
amendes pouvant aller jusqu'à 50 000 $ seraient prévues pour toute
personne qui contreviendrait à certaines dispositions de cette loi.
Fin
de la couverture publique de ces actes. Toutefois, la gratuité sera maintenue
lorsque médicalement indiqué. Exemple,
fertilité compromise par des traitements de chimiothérapie, gratuité maintenue
pour les services d'insémination artificielle.
Seraient exclus du crédit d'impôt les ménages dont l'homme a été préalablement
vasectomisé ou la femme ligaturée et les gens qui ont déjà eu un enfant.
Alors, vous voyez que c'est bien synchronisé.
Au
niveau des arguments du gouvernement, alors les médecins ne travaillent pas à
pleine capacité, trop sont à temps
partiel et ils devraient voir plus de patients. Contre-argument : les
médecins, eux, travaillent trop. Certains pourraient probablement faire plus, mais ils pourraient
surtout faire mieux, car des problèmes persistent dans l'organisation du réseau
des soins. C'est là qu'il faut agir. De
plus, rien ne prévoit un étalement des heures travaillées et un accès assuré
tous les soirs ou toute la journée, les fins de semaine de manière à
diminuer le recours injustifié et coûteux de l'urgence.
Pour
susciter le changement de pratique, le temps de la carotte est révolu, on sort
le bâton. Les mesures coercitives ne
donneront pas nécessairement de résultat
et la carotte n'en donnerait pas non plus si on n'exige pas de résultat en
retour. Il serait beaucoup
plus efficace de mobiliser les gens autour d'une réforme ou d'un changement
pour solliciter l'adhésion.
• (16 heures) •
Le projet de loi a pour but d'optimiser l'utilisation des ressources médicales et
financières du système de santé afin
d'améliorer l'accès aux services de médecine
de famille spécialisés. Le ministre
propose aussi de nombreuses mesures visant à encadrer le programme de
procréation assistée mis en place en 2010.
Les recommandations du Commissaire à la santé et
du bien-être n'ont pas été prises en compte. Le ministre confond «accès à la gratuité et au financement»
avec «accès aux services et aux soins». Les balises proposées réduiront
l'accès au programme et à la fécondation in vitro. Il s'agit d'un recul majeur.
Beaucoup de pouvoirs entre les mains du ministre.
Encore une fois, le ministre se donne énormément de pouvoirs, notamment celui de
déterminer, dans certaines circonstances, de nouvelles conditions et modalités
de rémunération applicables aux médecins. Le
ministre passe carrément outre les ententes signées avec
la fédération médicale, s'octroie les mêmes pouvoirs, comme il l'a fait
dans le projet de loi n° 28 avec les pharmaciens, en coupant leur
rémunération de 177 millions pour atteindre l'équilibre budgétaire.
Au niveau du volet procréation assistée, le
projet de loi n° 20 restreint l'accès aux services. Des balises trop
restrictives et limitatives vont à l'encontre des recommandations, bien sûr, du
Commissaire à la santé et du bien-être —dont il y avait 12 recommandations qui étaient
extrêmement importantes, dans son rapport qui a été publié, dont il y avait 270 pages. Alors, les
recommandations étaient : établir des limites d'accès au programme et
prioriser le recours... techniques
aux moins invasives... invasisives, c'est-à-dire; favoriser un accès plus
équitable en région; mieux contrôler les
coûts du programme; évaluer les effets de la procréation assistée sur la santé
des femmes, plus des enfants; consolider la gouvernance du programme;
favoriser la pertinence et l'intégrité à la recherche en procréation assistée;
améliorer l'organisation et la continuité des services; mieux accompagner les
patients dans leur prise de décision; organiser l'évaluation psychosociale des parents d'intention; limiter le «magasinage» des services; en 11 :
reconnaître la légitimité de la quête
des origines par le remboursement équitable des gamètes; et en 12 : mettre
le sort des embryons surnuméraires à la gestation pour autrui...
Ce que le projet de loi ne contient pas, Mme la Présidente : des mesures pour favoriser l'interdisciplinarité
et le recours à d'autres
professionnels en première ligne; des exigences quant aux heures d'ouverture
afin de garantir un accès des patients à leur médecin les soirs et les fins de
semaine; des investissements en prévention et en santé publique pour prévenir et éviter les problèmes de santé avant
qu'ils n'apparaissent; un réel virage vers les soins à domicile, et des mesures
pour accélérer l'informatisation du réseau de la santé.
Mme la Présidente, oui, on est à l'opposition, ça peut arriver qu'effectivement on veuille améliorer un projet
de loi. Il n'y a pas juste les oppositions
puis il n'y a pas juste ceux qui légifèrent ici, les parlementaires, qui font
en sorte qu'ils ne sont pas d'accord
avec la mouture actuelle du projet de
loi n° 20. Vous savez que, quand on s'en va avec un projet de loi, il y a des consultations particulières, des
consultations générales. Il va y avoir bien sûr l'étude détaillée du projet de
loi. Il va y avoir ensuite la prise en considération de ce qui va s'avoir fait
en étude détaillée du projet de loi; là, on va pouvoir intervenir pour apporter
des amendements. Puis après ça tu as l'adoption finale.
Mais il n'y a
pas juste les oppositions qui s'opposent. Parce que, quand on a eu les
consultations particulières, au
niveau de ceux et celles qui ont été entendus en commission parlementaire, il y
en a 46 qui sont venus en commission parlementaire
pour se faire entendre. Sur les 46, il y en avait trois qui étaient en faveur
du projet de loi — trois
seulement, sur les 46.
Il y en avait
35 qui étaient contre; il y en avait aussi huit autres... Donc, ils disaient...
Bien, je donne des exemples, là : l'Association des cliniques médicales du
Québec, qui se disent sous-financées; la Fédération interprofessionnelle de la
santé du Québec, qui propose un nouveau
modèle; La Maison bleue, qui propose
un nouveau modèle privé non lucratif, périnatalité,
équipes pluridisciplinaires; Groupe Santé Concerto propose un nouveau modèle
axé sur une approche collective; le
Conseil du statut de la femme pour le volet médecins, contre le projet de loi pour le volet procréation assistée; Damien Contandriopoulos, plus
nuancé, propose que les quotas s'appliquent à un groupe de médecins.
Il y a
eu aussi 24 autres mémoires reçus en commission
parlementaire. Sur les 24, il y en a
19 qui étaient contre. Donc, quand je
fais le calcul, quand je fais le décompte, 65 étaient contre, trois étaient
pour et huit autres, comme je viens de les mentionner, avaient d'autres
raisons de ne pas appuyer le projet de loi dans sa mouture actuelle.
Alors, vous
comprendrez, Mme la Présidente, qu'il
n'y a pas juste ceux qui sont ici, de
ce côté-ci de la Chambre, qui sont
contre, il y a aussi ceux qui viennent donner leurs points de vue en commission parlementaire et espèrent — je dis bien «espèrent» — d'être
entendus par le ministre lorsqu'on va faire l'étude détaillée du projet de loi.
Oui, il y a
les groupes qui sont venus en commission
parlementaire, il y a
aussi, puis je pense que mes collègues en ont
fait la nomenclature, la lecture aussi... Tu as aussi les chroniqueurs, les
journalistes, ceux qui écrivent, qui donnent leurs jugements, qui
donnent leurs points de vue sur la réforme actuelle proposée par le ministre de
la Santé.
Alors,
dans des documents que j'ai fait sortir, exemple, La Presse le 15 décembre 2014 sous la plume d'Alain
Dubuc, qui parle d'une réforme, qui
est mal barrée, du ministre de la
Santé actuel. Il dit, j'en lis
quelques notes, j'en fais la lecture, en
faisant attention, bien entendu, de ne pas nommer le nom du ministre : «Est-ce que ça va bien fonctionner? C'est loin d'être évident. La réforme [du ministre de la Santé] risque d'avoir tellement d'effets négatifs
qu'elle pourrait mener aux résultats
contraires et nous éloigner du but recherché, [soit] l'accès véritable à un médecin de famille.» Il cite : «On ne gère pas des humains et un système
complexe comme celui de la santé avec des règles de trois.»
Encore une fois, Alain Dubuc, 28 janvier 2015 : «La partie patronale que
représente [le ministre de la Santé], c'est l'État québécois, et cela impose des contraintes dans le ton — "dans le ton" — [dans
la méthode et la stratégie] qu'il déploie.»
Il dit, en terminant son
article : «Il est possible qu'à court terme, sa façon d'attaquer tout ce
qui bouge — [exemple,]
les généralistes, les pharmaciens, le réseau
administratif soit politiquement rentable — "soit politiquement rentable" — dans
la mesure où on confond fermeté et
brutalité. Je crains plutôt que son approche — ses solutions carrées, sa propension à l'affrontement — soit contre-productive. Et qu'elle nuise à l'ensemble
du gouvernement si le premier
ministre [...] ne contrôle pas
son ministre.»
Je fais lecture, Mme
la Présidente, d'un autre document. Encore une fois, sous la plume de
M. Dubuc, le 11 mars 2015. Je ne
lis pas le titre parce que ça va être antiparlementaire, effectivement. Alors,
il cite que, «dans le cadre de cette
stratégie musclée pour faire bouger le monde de la santé, le rôle confié au
ministre serait mieux décrit par un autre mot, lui aussi emprunté à l'anglais — je m'en excuse — et lui aussi difficilement traduisible. Ce
rôle, c'est celui de[...] — je ne nomme pas ce qu'il y a dans
l'article — que l'on
traduit maladroitement en français par [soit] dur à cuire, bagarreur ou
homme fort.»
Il finit son article
en disant : «...comme président de la Fédération des médecins
spécialistes, comme candidat caquiste et maintenant comme ministre, le
[ministre] a fait du simplisme [même de] sa marque de commerce.»
Dans
un autre article : «Le ministre de la Santé dénonce des sondages qu'il a
lui-même [faussés]...» C'est l'article. Antiparlementaire?
Une voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Non, ça va. Merci. M. le leader
adjoint du gouvernement. Je vais vous demander,
M. le député, de ne pas imputer des motifs indignes à M. le ministre et de ne
pas faire indirectement ce qu'il n'est pas permis de faire directement.
• (16 h 10) •
Mme
Maltais : ...est-ce que citer un ministre est antiparlementaire quand lui-même
dit qu'il a faussé des données? Je vous pose la question.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Lorsqu'il y a un tel propos qui est prononcé au Parlement en lien avec le
ministre, c'est antiparlementaire.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Et puis l'ensemble des propos, là, qui ont été
rapportés dans vos dernières phrases portaient un peu... imputaient des motifs.
Alors, veuillez poursuivre.
M.
Dufour : D'accord, Mme la Présidente. Alors, dans cet
article — je
termine la fin de l'article : «De son côté, le président de la fédération des omnipraticiens, le Dr Louis
Godin, invite les 8 800 médecins de famille à écrire à leurs
députés pour communiquer "la véritable charge de travail des médecins de
famille québécois".» Et je pense que notre député de Matane-Matapédia,
tantôt, qui a fait la nomenclature et la lecture de la lettre, prouve
effectivement que les députés ont été sollicités par rapport à la réforme qui
est proposée par le ministre de la Santé actuel.
Dans un autre article
du Journal de Québec, sous la plume de M. Régys Caron, Les
facultés de médecine au Québec risquent de
se vider : «Les facultés de
médecine des universités québécoises risquent de se vider de leurs professeurs
comme de leurs étudiants si le projet de loi n° 20 du ministre de la
Santé devait être adopté.
«C'est le message
sans équivoque livré mercredi au ministre de la Santé par les doyens des quatre
facultés de médecine du Québec — ce n'est pas rien, là, les quatre
facultés de médecine du Québec — alors que se poursuivait à l'Assemblée nationale l'étude du projet de
loi n° 20 imposant des quotas de patients aux médecins sous peine de
pénalités financières.
«"Ce
qui nous menace, c'est le désengagement des 800 médecins qui enseignent.
Les médecins qui s'impliquent avec
nous pour former nous donnent le message qu'ils ne veulent pas s'investir dans
une telle démarche. Pour eux, le projet de loi n° 20 est une insulte", a prévenu le
Dr Rénald Bergeron, doyen de la Faculté de médecine de l'Université Laval.
«En
trois jours, 500 médecins qui font de l'enseignement ont signé une
pétition dans laquelle ils menacent de s'en aller, ont signifié les
doyens.»
Alors,
pour terminer, Mme la Présidente, je vous dirais que, dans la mouture actuelle
du projet de loi, qui devrait donc se
retrouver avec deux lois comme je l'ai expliqué au début, dans sa mouture
actuelle comme projet de loi, l'opposition officielle ne pourra pas
souscrire à la présentation actuelle du projet de loi. Voilà, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député
de René-Lévesque et whip de l'opposition officielle. Pour la prochaine
intervention, je cède la parole à Mme la leader de l'opposition officielle.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : Merci, Mme la Présidente. Dès mon jeune âge, j'ai
manifesté pour le droit des femmes à gérer leurs corps elles-mêmes. Je ne sais pas si on se souvient des slogans
qu'on utilisait à l'époque : Mon corps m'appartient. On
avait d'immenses manifs, les femmes du Québec se soulevaient, prenaient les
rues et disaient : Mon corps m'appartient,
c'est mon droit. Ne vous mêlez pas de mon corps, ôtez votre tête, vos mains de
là. Et c'était très fort. C'était un
mouvement, ça a été une révolution — je vois des collègues qui disent oui, puis
ça, on partage ça. C'est la révolution qui a probablement fait le plus avancer
le Québec.
Le projet de
loi n° 20, Mme la Présidente, est une infraction, pour moi, à cette
avancée québécoise et à cette posture des
féministes et des femmes québécoises parce qu'après cette posture — on ne touche pas à mon corps, mon corps m'appartient — cette posture, elle appartient maintenant
non seulement aux féministes, mais à toutes les femmes du Québec. Elles
ont toutes adhéré.
Article 10.1 :
«Aucune activité de fécondation in vitro ne peut être exercée chez une
femme âgée de moins de 18 ans ou
de plus de 42 ans.» De quoi je me mêle? De quoi je me mêle? L'Assemblée
nationale, là, est en train... va voter sur la capacité d'une femme d'avoir des
enfants après 42 ans, en fait son incapacité. Ce que ça dit, c'est
qu'après 42 ans la loi, la loi,
pas un médecin, pas un diagnostic
médical, pas un papier signé d'un médecin, là, la loi, nous, comme collègues,
là, on irait dire ça, là : «Aucune activité
de fécondation in vitro ne peut être exercée chez une femme âgée de moins de
18 ans ou de plus de 42 ans.»
Aucune, ça veut dire que tu ne peux même pas payer pour. Ça ne dit pas :
L'État ne paierait plus pour les activités
médicales et de fécondation in vitro, de procréation... de fécondation in vitro pour... ne paiera plus, et les femmes iront d'elles-mêmes, puis, si elles
sont en santé, mon Dieu, si elles ont le goût d'avoir un enfant, bien, qu'elles
se le paient. Non. On va dire, nous, les
députés de l'Assemblée
nationale : Vous n'avez plus le
droit. C'est ça, une loi, là, c'est ça, légiférer. C'est ça qu'il faut
comprendre des gestes qu'on pose ici, leur gravité, là.
Moi, je
m'inscris dans une histoire, une histoire de femmes fortes qui ont bâti ce
pays, et qui croient en l'avenir, et qui
ont considéré que c'étaient des décisions personnelles. Puis qu'elles doivent
être fondées sur un diagnostic médical, ça, c'est correct. Moi, qu'un médecin dise : Non, non, madame, non, on
ne peut pas vous donner une fécondation
in vitro, l'État
ne peut pas vous le rembourser parce
que vous n'avez pas la santé, vous
n'avez pas la forme, parce que vous n'avez pas la capacité, moi, je suis capable de vivre avec ça. Que l'État
ne rembourse pas après 42 ans, je suis capable de vivre avec ça. Mais que l'Assemblée nationale, l'État
vienne me dire : Tu ne peux pas, tu n'as plus le droit, même si tu es en
forme, même si tu es en santé puis même si
tu as cinq médecins, 12 médecins qui disent que c'est correct... Le Parti libéral nous propose, nous les législateurs — puis là je parle aux Québécoises qui sont
ici, là, Mme la Présidente, vous en êtes une — le Parti
libéral au pouvoir essaie de dire aux Québécoises : Vous n'avez plus le
droit de disposer de votre corps. Ça ne marche pas, les filles, là.
Réveillons-nous, là, ça ne marche pas. On ne peut pas déposer une loi de même.
Comment ça a
fait pour passer au Comité de législation? J'aurais été curieuse de voir ce qui
s'est dit au Comité de législation.
Comment ça se fait que la présidente du Comité de législation, qui est une
ministre responsable de la Condition féminine,
a laissé passer ça? Comment ça se fait qu'elle a laissé passer ça? Ministre de
la Justice, ministre responsable de
la Condition féminine, elle a laissé passer ça. C'est gênant. Moi, je suis
gênée. Je suis gênée parce que je pense qu'il n'y a pas une collègue qui aurait laissé passer ça dans mon parti, je
peux vous le dire, je peux vous le dire tout de suite, là. Quand on a vu passer cet article-là, là, on a
grimpé; puis il n'y a pas juste les femmes qui ont grimpé, les gars aussi, ils ont grimpé. C'est ridicule. Je vois le député de
Laurier-Dorion, il rit avec moi. C'est vrai que c'est ridicule, M. le député de
Laurier-Dorion, mais ce n'est pas drôle. C'est ridicule, mais ce n'est pas
drôle.
L'autre, à
cette heure, tant qu'à y être, je me suis battue pour les droits des gais. J'en
ai fait, là aussi, des manifs, des...
tu sais, j'en ai fait, des prestations, on me demande encore souvent
d'intervenir. 10.2, regardez ce qui est écrit dans cette belle loi, là, que vous assumez :
«Lorsqu'un projet parental comporte l'apport de forces génétiques d'une
personne qui n'est pas partie à ce
projet — deux
femmes, automatique, hein, il me semble, tout le monde comprend ça... entre
autres, il y en a d'autres, mais là
il y a un 100 % de cas, là — aucune activité de procréation assistée ne
peut être entreprise sans qu'une
évaluation psychosociale — tiens donc! — positive de la personne ou des personnes — les deux, en plus — formant le projet parental n'ait été transmise au médecin.» Tous les couples de
filles au Québec, on ne vous fait plus confiance. Vous n'êtes plus des parents, toutes les deux,
auxquels on accorde les mêmes droits, les mêmes pouvoirs et la même... avec lesquelles on leur fait face à la même
attitude. Non, non, non! On ne vous fait pas confiance. Vous êtes deux femmes?
Évaluation psychosociale. Il n'y a personne
qui a relevé ça? Ça ne vous tentait pas de regarder ça, au Comité de
législation? Ça s'appelle... C'est sur le bord, là, de la
discrimination.
Ce qui vous
sauve finalement, ce qui sauve les gens qui ont osé déposer ça, là, ce qui les
sauve, là, c'est qu'il y a d'autres
couples. Donc, ça ne discrimine pas seulement les couples de deux femmes gaies,
mais c'est 100 % des couples de femmes gaies qui sont discriminés.
C'est gênant, ça aussi.
Vous sentez
l'émotion? J'ai des amies qui m'ont appelée. On est gênés. L'Assemblée
nationale ne va pas décider ça, ce
n'est pas vrai, on ne va pas nous faire ça. J'espère que ça va être rayé, ces
articles-là, les deux, les deux, parce que, dans les deux cas, c'est nos droits qu'on attaque. Faire attaquer mes
droits, là, moi, non! Révisez cette loi, elle est inacceptable dans sa mouture, inacceptable, Mme la Présidente.
Vous m'avez souvent entendu parler dans cette Assemblée, m'avez-vous souvent vue être émue comme ça? Ça arrive. Là, je
suis le bord d'être choquée. Que le ministre de la Santé revoie sa loi.
• (16 h 20) •
Des voix : ...
Mme
Maltais : Mme la
Présidente, je n'accepterai pas qu'on m'interrompe à tout crin.
Une voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, je vais demander à Mme la leader de l'opposition officielle de poursuivre.
Merci.
Mme
Maltais : Parce
que ce que je dis est correct, je
donne mon opinion et je lis le texte, je lis le texte. Je l'ai lu, le texte. Je l'ai lu, le texte. Alors donc, ça
existe maintenant, le dépôt de choses comme ça. Alors, je pense
que j'en ai assez dit là-dessus,
je n'ai pas besoin d'en faire plus. Je
pense que tout le monde a compris le message, là : Vous allez revoir cette loi et vous allez
la rendre à tout le moins acceptable et non discriminante et pour les
femmes et pour les couples de femmes gaies.
Il y a
plus que ça, dans cette loi, qui est absolument particulier, mais d'un autre niveau, les quotas.
Les quotas. Le ministre de la Santé n'a pas consulté la Fédération
des médecins omnipraticiens du Québec
avant de déposer sa loi. Qui a-t-il
consulté? Je me le demande, Mme la
Présidente, je me le demande. Mais,
ceci dit, la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec, ceux et
celles qui sont le plus touchés par cette loi, n'a pas été consultée. C'est ce
qu'on pourrait appeler une première, Mme la Présidente. Un radiologiste,
qui a passé sa carrière en radiologie, qui ensuite a dirigé une fédération de médecins spécialistes, qui est allé chercher
le jackpot pour ses médecins spécialistes quand il était président de la Fédération des médecins spécialistes, qui est allé chercher des
augmentations de salaire pour sa gang très fortes, de très haut niveau, de très grosses augmentations de salaire
que nous allons payer pendant des années et des années, c'est déjà la moitié de tout... Enfin, la moitié
de tout le budget accordé à la santé, c'est les augmentations de salaire des
médecins spécialistes.
Or,
là, il n'a pas consulté la Fédération des médecins omnipraticiens. Résultat des
courses : Dans mon comté, dans ma
circonscription, il y a une organisation qui s'appelle MIELS-Québec. C'est
l'organisme qui aide les gens qui ont le sida, les gens qui ont de la
trithérapie. C'est une organisation qui est exceptionnelle, qui travaille très
bien, mais qui a besoin du support d'un
médecin parce qu'ils ont besoin d'aide particulière, puis c'est un... ça ne
prend pas 10 minutes, traiter des
gens qui ont de multiples problèmes, parce que, quand tu as le sida, c'est
probablement que tu as eu d'autres problèmes,
et souvent il y a eu des problèmes de toxicomanie, il peut y avoir des
problèmes de santé mentale, parce que trop
d'années en toxicomanie amènent souvent des problèmes de santé mentale. C'est
une roue, hein? Bien, le médecin qui
était affecté au service de MIELS-Québec, il a lâché. Il n'y a plus de médecin
à MIELS-Québec. Ça s'est passé il y a deux
semaines. Quoi qu'en dise le ministre, ça s'est passé, c'est parti. Il est
parti, le médecin. Puis il est parti pourquoi? Il est parti à cause du projet de loi n° 20. Il est parti à cause
du projet de loi n° 20. Pourquoi il est parti à cause du projet de loi n° 20? Parce qu'il a dit : Devant
les menaces de coupures de salaire si les gens vont à l'hôpital, à l'urgence au
lieu d'être suivis par moi, comment
je vais faire pour vivre ça? Parce que, moi, il dit, il faut que j'accorde
d'abord beaucoup de temps à mes
patients; puis ensuite, dans ces quotas-là, il va falloir qu'il accorde aussi
beaucoup de temps à d'autres types de
patients. Il va falloir qu'il commence à avoir une petite calculette à côté de
son bureau, là : Bon, là, je viens de donner tant de temps, tant de pourcentage de mon temps à mes patients,
je ne peux plus les recevoir, ça fait que, là, il faut que j'aille à tel autre pourcentage de patients parce
que, là, il faut qu'il atteigne les quotas du ministre de la Santé. Ça fait
qu'il a commencé à calculer ça puis
il a fait : Je n'y arriverai pas. Mais ce qui va arriver... D'abord, il a
une conscience, il voulait s'occuper
de ces patients-là. L'autre chose, c'est... Il dit : Si je n'ai plus le
temps de tous m'en occuper, ils vont aller à l'urgence; s'ils vont à l'urgence, je suis pénalisé. Il est pénalisé
pour s'en occuper puis il est pénalisé de ne plus s'en occuper. C'est ça,
l'espèce de casse-tête insoluble devant lequel des médecins, des hommes et des
femmes qui croient encore à la santé,
à la préoccupation des gens, au fait de prendre le temps de s'occuper des
multiproblèmes, des multiproblématiques qui peuvent toucher une personne...
C'est ça que ces gens-là sont en train de dire. Ils sont en train de
dire : On va être obligés de lâcher;
vous ne nous permettez plus d'accorder aux patients et aux patientes
l'attention qu'on doit leur donner. Puis le médecin de MIELS-Québec est
parti.
Ce
qui fait que, je suis obligée de dire, Mme la Présidente, j'écoute les discours
du ministre de la Santé depuis un bout
de temps, l'intention est noble, je dois le dire. L'article 1,
l'intention — parce
que l'intention d'un projet de loi, souvent, quand on a fait assez de législation, on le sait, c'est souvent écrit
dans l'article 1 : «La Loi favorisant l'accès aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée
[...] est édictée.» Donc, Loi favorisant l'accès aux services de médecine
de famille, on a perdu notre médecin de
famille à cause d'une loi sur l'accès aux médecins de famille. Expliquez-moi le
problème. C'est ça qui ne fonctionne pas, là.
Or,
pourquoi ça ne fonctionne pas? Parce que le ministre a concocté sa loi dans sa
tête, avec quelques personnes qu'il a
rencontrées, et il n'a pas consulté la Fédération des médecins omnipraticiens.
Maintenant, il est en train de négocier avec la Fédération des médecins omnis et il dit : Ça, c'est mon
épée de Damoclès. C'est lui qui dit ça, là, ce n'est pas nous, là, il l'a dit
dans des entrevues : Je négocie à côté, puis, si je réussis, je vais
retirer le projet de loi. Ah bon! Qu'est-ce qu'on fait ici, nous?
Qu'est-ce qu'on fait? On est en train de donner au ministre... Pendant qu'on
parle, les parlementaires, puis qu'on est à
l'Assemblée nationale, qu'on va avoir des commissions parlementaires, qu'il y a
des dizaines de groupes qui sont
venus discuter, débattre, c'était pour faciliter la négociation d'un ministre
qui n'est pas capable de négocier avant, qui se sert de la loi pour négocier après? C'est ça qu'il nous a dit?
Qu'est-ce qu'on fait ici? C'est à ça que ça sert? Vous auriez dû me le dire quand j'étais ministre que ça
servait à ça, l'Assemblée nationale. J'aurais peut-être travaillé autrement.
Si je comprends bien, on dépose une loi, on
fait peur au monde, puis après ça on s'en va négocier. Je ne pensais pas que
c'était ça, un État. J'ai une plus haute
idée de l'État, et du gouvernement, et d'une façon de travailler collective,
collégiale. On assoit le monde autour d'une table, on pose le problème,
on dégage des solutions. Puis tout le monde ne sera pas d'accord avec tes solutions à la fin, mais au moins on aura consulté les
personnes. Ce n'est pas une consultation qui s'est faite, c'est un coin de table, ça a été un coin de
table. Puis le résultat d'un coin de table, bien ça donne ça, ça donne ça :
les quotas, procréation assistée.
Procréation
assistée, j'en ai parlé tout à l'heure sur deux points qui me touchaient
particulièrement, mais il y a des gens
qui nous ont écrit, il y a des gens qui ont suivi. L'article de Patrick Lagacé,
l'avez-vous lu, le 23 mars 2015, Scier la branche sur laquelle on est assis? Dans l'article, il dit pour ce faire : «Me
semble que dans le grand ordre des choses, c'est comme scier la branche sur laquelle t'es assis, juste pour te faire
trois bûches.» Bien, c'est exactement ça. On est dans une société qui a besoin d'enfants, on le sait
tous, on est tous d'accord avec ça, principe partagé, unanimité. Notre taux
de fertilité est très bas, très, très, très bas.
Alors, le
Parti québécois — puis je
ne me gênerai pas de le dire — a mis en place une politique familiale.
C'était Mme Pauline Marois, la
première ministre, qui l'avait fait, à l'époque, en plein déficit zéro. En
pleine lutte au déficit zéro, nous avons mis en place une politique familiale.
Nous avons créé les centres de la petite enfance que la ministre de la Famille
est en train, actuellement... je ne peux pas
dire quoi, mais elle est responsable des centres à la petite enfance, des
garderies subventionnées. Et nous
sommes responsables, puis on en est fiers, tous et toutes, parce qu'après ça
avait été continué, ce sujet-là...
Nous sommes tous et toutes heureux de voir que le taux de fertilité a augmenté.
On est devenus le paradis de la famille.
• (16 h 30) •
Et une des dernières
pièces, des derniers morceaux qu'on a mis en place, ça a été la politique de
procréation assistée, et, ça aussi, on en
était fiers. 5 000 enfants sont nés grâce à la politique de
procréation assistée, grâce à ce programme, 5 000 enfants. Il est plus populaire que ce qu'on pensait. Les
Québécois étaient plus prêts qu'on pensait, 5 000 enfants. Mais il coûtait plus cher parce qu'il a marché
mieux que ce qu'on croyait, donc, puisqu'il coûtait plus cher, bien, ça veut
dire qu'il était plus accessible, ça veut
dire que ça marchait, ça veut dire que les parents réagissaient, puis il se
faisait des enfants au Québec, puis c'était le fun. 5 000.
Il
y a eu un rapport, je pense, c'est du Commissaire à la santé et du bien-être,
qui disait : C'est coûteux, il faudrait amener des balises. D'accord pour les balises, d'accord pour les
balises. On est d'accord pour les balises, mais les balises qui ont été émises par le Commissaire à la santé
et au bien-être ne sont pas les balises du projet de loi, c'est ça, le
problème. Il y a eu une réflexion par
des gens sur un accord à l'Assemblée, à peu près, à l'Assemblée nationale, tout
le monde disait : Oui, il
faudrait avoir des balises. Il y a un rapport qui donne des balises, des
balises qui ne touchaient pas au droit des femmes de procréer, ceci dit, qui disait que c'était un
diagnostic médical qui devait ou non t'enlever le droit de te faire payer la
procréation assistée, la fécondation in vitro. Mais là le projet de loi ne
correspond pas aux balises qui étaient dans le rapport. C'est ça qui ne
fonctionne pas, Mme la Présidente.
Alors,
il y a une consultation d'un commissaire à la santé et au bien-être sur un
programme de procréation assistée qui
donne des balises. Le ministre fait autre chose. Il n'y a pas de consultation
sur la façon de donner plus d'accès, avec la Fédération des médecins omnipraticiens, ceux qui sont en première
ligne avec les infirmières. Et le ministre, comme il n'y a pas de consultation, le ministre fait
autre chose que ce à quoi on s'attendrait, par exemple, par exemple, les
ententes collectives avec les
infirmières, par exemple, des cliniques d'infirmières, comme il y en a une dans
mon comté, la clinique SABSA. Ça,
c'est des gestes qui donnent l'accès, et ça, tout le monde applaudit, ça, tout
le monde salue, pas de décider tout à coup, tout seul dans son coin,
sans rencontrer les personnes concernées de ce qui doit être fait pour l'accès.
Alors,
c'est dommage, M. le Président, c'est très dommage. C'est une façon de procéder
qui n'est pas courante; c'est un
nouveau ministre, qui a été radiologiste dans le passé, qui a bien fait son
travail comme radiologiste, qui a peut-être un peu trop bien son travail comme président de la Fédération des
médecins spécialistes, puisqu'il nous coûte très cher, puis qu'aujourd'hui, nous, on a essayé de
renégocier parce que ça coûte une fortune. Mais une chose est claire : ce
n'est pas quelqu'un qui, à mon avis,
à mon avis, M. le Président, fonctionne de la façon dont devrait fonctionner
une Assemblée nationale. Ce n'est pas quelqu'un qui a compris quels sont
nos droits, qui devrait les respecter, et ce n'est surtout pas quelqu'un qui travaille dans l'harmonie, dans la
concertation. C'est quelqu'un qui, malheureusement, je le dis, M. le Président,
très respectueusement, qui, malheureusement,
travaille seul. Et le danger, c'est qu'on s'enfonce dans un mur, le danger,
c'est qu'on brise des choses qui seront très difficiles à réparer dans
l'avenir. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, Mme la leader de
l'opposition officielle pour votre intervention,
toujours sur le principe du projet de loi n° 20. Alors, je cède maintenant
la parole à M. le député de Rousseau pour son intervention...
Une voix :
...
Le Vice-Président (M. Gendron) : ...de Bertrand, bien oui, c'est clair. Il faut
quand même regarder. Alors, M. le député de Bertrand, à vous la parole
sur le projet de loi.
M. Claude Cousineau
M.
Cousineau :
C'est à peu près dans le même coin, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Non, je connais très bien votre coin.
M.
Cousineau :
Alors, M. le Président, à mon tour d'intervenir sur le projet de loi
n° 20, Loi édictant la Loi favorisant l'accès aux services de médecine de
famille et de médecine spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée.
Ce projet de loi, M. le Président, force est de constater, fait l'objet de
vives critiques par un très grand nombre d'intervenants, surtout ceux et
celles qui, tous les jours, oeuvrent au sein de notre système de santé. Médecins généralistes, médecins spécialistes,
infirmiers, infirmières, membres de comités d'usagers, radiologistes, spécialistes en procréation
assistée, travailleurs sociaux, tous s'unissent pour demander au ministre de
retirer ce projet de loi, qualifié de contre-productif, de coercitif et
de démotivant.
Ce projet de loi, M.
le Président, touche différents aspects pour lesquels nous devons nous
questionner. Par exemple, il menace les soins à domicile et les soins palliatifs. J'en ferai état un peu
plus loin dans mon exposé. Il change
la donne et les règles en ce qui a trait à la procréation assistée. Il impose aux médecins généralistes, les
omnipraticiens, des quotas
injustifiables sans prendre en compte les observations, les suggestions, les
mises en garde des professionnels de
la santé qui, tous les jours, M. le
Président, oeuvrent sans relâche pour
faire en sorte que les Québécois et les Québécoises soient en sécurité en ce qui a trait à
la santé.
M. le Président, dans un article publié dans Le Devoir le 13 avril
dernier, un médecin écrivait, et je cite : «Tout comme les avortements, les soins à domicile et les
soins palliatifs à domicile, considérés comme des priorités depuis
plus de 10 ans — faisant
partie d'un document de travail de novembre 2014 — ne
sont plus une priorité pour le gouvernement.
Les soins à domicile et les soins palliatifs à domicile sont retirés de la
liste des activités prioritaires reconnues.
«[Le projet de loi n°] 20, tel que proposé
[par le ministre], est une menace sérieuse pour l'accessibilité des soins pour les personnes suivies à domicile. Avec
la population vieillissante,
nous croyons que les soins à domicile devraient demeurer prioritaires
pour ce gouvernement.
«Le fait que
ces activités soient retirées de la liste des activités prioritaires aura comme
effet paradoxal de forcer les
médecins à diminuer ou à abandonner ce type de services pour aller travailler
en milieu hospitalier afin de se conformer aux nouvelles exigences du ministre. Le but recherché par ce projet de
loi est supposément de favoriser l'accessibilité en première ligne. La conséquence est tout à fait illogique! De plus, le
ministre restreint un médecin à un maximum de 100 patients en suivi à domicile et de 40 patients en soins palliatifs à
domicile, encore des quotas et des restrictions d'accès!
«La dévalorisation de ce type de pratique aura
des conséquences désastreuses pour nos patients, comme une réduction importante de suivi de patients à
domicile. Des milliers de [personnes] âgées et vulnérables seront obligées
d'aller plus souvent à l'urgence, il
en découlera une augmentation d'hospitalisations et la détérioration de la
santé des gens, déjà fragile. La continuité des soins est fortement compromise
par ce projet de [loi] qui semble improvisé et qui peut être complètement changé en 90 jours par d'autres
règlements, ce qui n'est pas cohérent avec une gestion stable de l'accès.
[Le ministre] a dit récemment que les activités médicales particulières — ce
qu'on appelle les AMT... les AMP, excusez-moi — n'ont pas d'importance pour lui, alors que
son projet de loi se base sur ce principe — renommé activités d'établissement. Si ce n'est pas important,
pourquoi le ministre ne la retire pas [tout simplement] de son projet de loi?»
M. le
Président, comme beaucoup de mes confrères et consoeurs députés, j'ai rencontré
et écouté bon nombre de médecins
durant les dernières semaines. Tous et toutes sont en complet désaccord avec ce
projet de loi n° 20 présenté par
le ministre de la Santé. Les opinions cinglantes et sévères contre ce projet de
loi proviennent de toutes les régions du Québec. Tous ont le même pas dans le peloton sauf un, le ministre. Les
médecins demandent au ministre de retirer son projet de loi et de s'asseoir avec eux afin de trouver des solutions
durables, sensées, lesquelles permettront un accès plus efficace au système de santé. La solution, M. le
Président, doit venir des professionnels de la santé, ceux et celles qui,
tous les jours, se donnent corps et âme pour
faire en sorte que les listes d'attente soient réduites, pour que les Québécois
et les Québécoises puissent avoir accès
rapidement à un médecin de famille. La solution résulte dans la collaboration,
non pas dans la coercition, non pas
dans la confrontation. Faisons confiance aux professionnels de la santé, ceux
et celles qui, au quotidien, sont confrontés aux difficultés que
présente le système de santé.
• (16 h 40) •
M. le Président, l'imposition du quota sans
consultation, sans discussion, décision unilatérale imposée par le ministre est un acte coercitif sans nuance. C'est
une décision purement quantitative, non qualitative. Le ministre, d'une façon froide et mathématique, fait une analyse
risquée en imposant des quotas de patients aux médecins sans prendre en compte
la qualité du suivi et la complexité des cas médicaux. Pour respecter les quotas, quels patients seront
laissés de côté? Comment faire en
sorte que les médecins puissent accomplir leur délicate tâche en consacrant le
temps nécessaire à chacun de leurs patients? Quelle complexité dans
la comptabilité du nombre de patients pour atteindre les quotas imposés?
Sans être médecins, nous savons tous que
chaque cas est différent en médecine. Nos consciencieux médecins ne peuvent
pas et ne doivent pas devenir des machines
calculatrices et ils ont raison de s'opposer fortement au projet de loi n° 20 déposé par
le ministre de la Santé.
M. le
Président, j'ai lu attentivement le mémoire du Comité des usagers du Centre de
santé et de services sociaux des Sommets à Sainte-Agathe. Je recommande au
ministre d'en faire une lecture attentive, ce mémoire intitulé Des
soins et des services de qualité aux usagers
avant tout : Avoir le courage d'une autre vision. M. le Président, laissez-moi vous lire la conclusion de ce mémoire : «Le Comité
des usagers du CSSS des Sommets dit non au projet de loi n° 20, projet
dit populiste et populaire, et ce, au
détriment d'un projet de loi axé sur les soins et services de qualité aux
usagers. Nous soumettons à votre
attention les propos tenus par Me Jean-Pierre Ménard dans son mémoire présenté
à la commission parlementaire.
"Pour régler le problème d'accessibilité aux soins médicaux, il faut aller
beaucoup plus loin et remettre en
question des approches aussi fondamentales que le mode de rémunération des
médecins, le contrôle et l'organisation de la pratique médicale par les établissements de santé, l'organisation
des soins à domicile, la prise en charge des clientèles vulnérables[...].
Enfin se doter d'une vision globale pour guider les réformes de fond
nécessaires... La réforme proposée...
présente des risques réels de ne pas améliorer l'accessibilité aux soins et
plus encore de la réduire pour certaines clientèles. Il faut repenser l'approche et les moyens sans perdre de vue
le diagnostic et l'objectif qui, eux, nous apparaissent
appropriés."
«Si, comme se
plaît à dire le premier ministre, [...]que "la réforme du réseau de la
santé est fait pour les patients", les usagers, il est plus que temps [que] le ministre de la Santé et des
Services sociaux [...] de le penser et de l'organiser dans ce sens. Nous croyons qu'il en est capable
s'il s'associe à toutes les instances et pas seulement les médecins pour
trouver rapidement des solutions.»
M. le
Président, revenons à la lettre du 13
avril 2015 signée par une trentaine de médecins. Cette opinion sévère reflète l'état d'âme de nombreux omnipraticiens au
Québec, et ce, dans toutes les régions du Québec. En voici quelques lignes :
«Nous croyons
que le ministre ne reconnaît pas les besoins réels de la population
et ne réalise pas la portée de ces "détails". Comment faire
confiance à un ministre qui manque [...] de rigueur dans la rédaction d'un
document si important et qui change son
discours constamment? Comment les Québécois et les Québécoises peuvent accepter qu'un gouvernement [change] au point qu'une personne
n'est reconnue que comme 0,8 d'une personne? Nous avons un ministre qui
a élaboré un projet de loi sans aucune consultation des médecins de la base
et qui change les modalités au gré du vent. Nous croyons qu'une analyse réfléchie avec une
vision éclairée à long terme est nécessaire, ainsi que la consultation de tous les
intervenants du réseau de la santé.»
M. le Président, la Dre Lianne Lamy-Monnot, dans
une lettre d'opinion intitulée le Le Summum du mépris, mentionnait, il y
a quelques semaines, que «les quotas imposés par [le projet de loi n°] 20
seront inatteignables pour beaucoup de médecins de famille». Je crois, M. le Président, qu'il est important que je vous cite quelques passages de cette lettre, qui est un cri du coeur d'une
médecin, mais qui reflète l'opinion de beaucoup de ses confrères et consoeurs, comme je vous le mentionnais auparavant, M. le Président. J'ai discuté avec de nombreux médecins dans les Laurentides dans les
dernières semaines. Tous et toutes avaient des propos allant dans le même sens
que ce que nous livre la Dre Lamy-Monnot. Ils implorent le ministre à
abandonner son projet de loi et de faire des médecins de véritables partenaires
capables de solutionner les problèmes.
Voici quelques extraits de sa lettre d'opinion. Elle dit : «Je suis médecin de famille depuis plus de 30 ans et j'ai rarement ressenti autant de mépris
dans les médias à l'endroit de ma profession.»
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Je ne sais pas ce qu'il y a, là, mais on va essayer d'écouter. M. le leader adjoint.
M.
Sklavounos :
Merci, M. le Président. Je comprends que le collègue est en train de lire une
lettre, là, mais il a employé le
terme «mépris», déjà, au moins à une reprise. D'après moi, c'est assez clair
que ça impute des motifs au ministre. Je vais lui demander, s'il veut
faire la lecture, peut-être d'épurer cette lettre-là.
M.
Cousineau :
...je vais laisser tomber le mot «mépris», d'ailleurs, c'est la dernière fois
qu'il est dans le texte.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Non, mais juste une seconde, c'est toujours la même histoire, là, je veux dire,
on ne peut pas parler sans utiliser de mots.
Le mot «mépris», comme tel, n'est pas dans le lexique. Et, s'il avait dit «les
propos du ministre», «mépris au ministre»,
le personnaliser, ça va. Et je sais tout ça, là, que, dans une lettre, il faut
faire attention aux éléments de la lettre qui imputeraient des motifs au
concerné, mais il ne peut pas citer une lettre puis ne pas la citer. Alors là, il y a toute la question
de l'analyse de l'esprit du propos avec lequel le concerné doit vivre. Et, si
on ne permet plus ça, si on ne permet plus ça, ça va être très difficile
de savoir c'était quoi, l'opinion de celui qui veut prendre son 20 minutes pour parler. Alors, mais, si c'est un message à
faire attention, ce n'est pas parce qu'on cite une lettre qu'on a le droit d'utiliser un langage non
parlementaire, alors là, vous avez raison, mais je ne crois pas que c'est
le cas présentement. Alors, veuillez poursuivre en faisant attention à l'usage
des mots dans une lettre.
M.
Cousineau : Je vous remercie. «Si j'étais un peu plus
vieille — c'est
toujours la lettre de la femme médecin — je prendrais ma retraite, et plus
jeune, je quitterais le Québec.
«Je travaille
au sein d'une [équipe formidable] de GMF à Laval, et la majorité de mes
collègues, moi comprise, ne pourront atteindre les quotas exigés par le
ministre.»
«[M. le Président,] tous et toutes travaillent
très fort et ont à coeur la santé de nos patients. Toutes les six à huit semaines, la plupart de mes collègues doivent
travailler une semaine au centre hospitalier. On parle de semaines d'au moins 70 heures et de disponibilité 24 heures
sur 24. Évidemment, avec ce type d'horaire, ils ne sont pas disponibles pour
les patients de leur bureau. Notre sans rendez-vous est ouvert 12 heures par
jour, sept jours [par semaine]. Nous travaillons avec trois infirmières et deux
infirmières praticiennes spécialisées.
«Malgré mes
semaines de 50 heures [et] 46 semaines par année, [...]1 000 patients, je
n'atteindrai pas les quotas.
«Les gens se
moquent du fait que notre salaire sera amputé de 30 %, car nous sommes
perçus comme des enfants gâtés.
«[...]Mon
fils de 18 ans désire faire carrière en médecine, et je ne l'encouragerai pas à
aller en médecine familiale, bien que
j'adore mon travail. Depuis 30 ans, j'accompagne les familles de la naissance à
la mort et me sens privilégiée de pouvoir apporter mon soutien.
«Mais j'ai
aussi vécu plusieurs réformes, et les médecins de famille ont été pénalisés
[pour] chacune d'entre elles.
«Alors, je
ferai comme le veut [le ministre]. Je continuerai à travailler cinq jours par
semaine, mais 40 semaines [au lieu de] 46...»
M. le
Président, la réalité quotidienne de cette médecin est la même pour des
centaines d'autres au Québec. Ceux et celles que j'ai rencontrés, à qui
j'ai parlé dans les dernières semaines sont découragés, démotivés. Le ministre
a la responsabilité de les écouter, de s'en faire des alliés plutôt que des
adversaires. Ils font partie de la solution.
M. le
Président, un important colloque regroupant 250 personnes a eu lieu cette
dernière fin de semaine à Montréal, réunissant
un grand nombre de professionnels de la santé. Toutes et tous ont consacré des
heures de discussion afin de trouver
des solutions efficaces et structurées. Ils ont proposé des solutions
constructives afin d'améliorer l'accessibilité aux soins de santé. Ils ont présenté 12 propositions réfléchies,
lesquelles, semble-t-il, n'ont pas impressionné le ministre de la Santé.
M. le
Président, le ministre doit retirer son projet de loi n° 20. S'il ne le
fait pas, il doit le mettre en veilleuse pour quelques mois et s'asseoir avec les professionnels de la santé et
appliquer rigoureusement les recommandations de ces derniers. Ces professionnels et spécialistes de la
santé ne sont pas des ennemis; ils font partie de la solution, et le ministre
doit leur faire confiance et travailler avec eux.
• (16 h 50) •
M. le
Président, le comité des usagers du
centre de santé les Sommets de Sainte-Agathe, toujours dans le même mémoire très instructif, mentionne, et je cite :
«Nous voulons avoir accès en temps opportun à un médecin et, de préférence,
à notre médecin de famille seulement
quand il est le seul à pouvoir intervenir. Nous demandons cet accès à un
médecin spécialiste
pour les mêmes raisons. La mise en place de quotas, de taux d'assiduité, de délais de réponse à des
consultations et les autres mesures du
projet de loi 20 ne répondent pas aux besoins que les usagers ont et à la façon
dont ils [souhaitent] avoir accès aux soins [de] services de santé
requis au moment opportun.»
M. le Président, ce projet de loi vient
resserrer les règles concernant l'important dossier de la procréation assistée. On se souvient tous de ce combat émotif
mené par des femmes et des couples afin que ces actes médicaux soient reconnus
pour fins d'aide et de suivi. Ce projet de loi n° 20 ne considère plus les
avortements comme des activités médicales
prioritaires, les AMP, ce qui provoquera nécessairement un accès limité aux
soins. Le ministre ouvre un débat sur
un dossier fermé et qui fait consensus dans la population québécoise. Ce débat
a été fait et a été accepté par une large proportion de la population,
et ce, depuis plusieurs années.
M. le Président,
la directrice du centre de santé des femmes, Anne Marie Messier, accompagnée
d'une trentaine de médecins et
directrices de cliniques d'avortement et de planification des naissances,
disait, dans Le Devoir le 25 mars dernier, que le projet de loi n° 20 est une
«"attaque" envers les droits des Québécoises». Voici un extrait de
ses propos : «En dévalorisant le
travail important des médecins — majoritairement des femmes — travaillant en avortement et de ceux offrant des services connexes en santé reproductive,
le gouvernement libéral mine sérieusement le droit des femmes à des
soins globaux de santé reproductive au Québec.»
M. le
Président, dans son projet de loi n° 20, le ministre vient remettre en
question des droits difficilement acquis par les femmes québécoises. Il doit les rassurer en retirant de son
projet de loi les articles annonçant ce recul malheureux en ce qui concerne, en ce qui touche le droit des
femmes québécoises. Le 26 mars, le ministre disait, dans Le Devoir :
«Il n'y aura pas, au Québec, de
limitation d'accès à l'avortement de quelque manière que ce soit...» Il doit
faire plus : il doit rassurer
tout le monde, il doit retirer de son projet de loi n° 20 les articles
touchant les limites imposées aux médecins en ce qui touche les avortements.
On lui demande de garantir l'accès à toutes sans restriction.
M. le
Président, ce projet de loi vient aussi insécuriser les parents voulant avoir
des enfants et qui doivent se diriger vers
le programme de procréation assistée. Pour un couple voulant avoir des enfants,
fonder une famille, des démarches de
procréation assistée sont longues et émotivement prenantes; après trois ou
quatre essais bien improductifs, beaucoup se tournent vers la fécondation in vitro. Le projet de loi
n° 20 vient créer des catégories de couples. Il établit des crédits
d'impôt en fonction du revenu. De plus, le ministre limite son programme aux
femmes de moins de 42 ans.
L'Association
des couples infertiles s'est prononcée contre le projet de loi n° 20; la
Société québécoise de fertilité et
d'andrologie, la même chose. M. le Président, le projet de loi n° 20 doit
être retiré par le ministre. Il doit mettre un terme à l'incertitude. Le
ministre doit prendre en considération les 12 propositions...
Malheureusement, je n'ai plus de temps.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, on vous remercie, M. le député de Bertrand, de votre intervention sur
le projet de loi n° 20. Et, pour la
poursuite du débat, je cède maintenant la parole à M. le député de Bonaventure
pour son intervention sur le même projet de loi. M. le député de
Bonaventure, à vous.
M. Sylvain Roy
M. Roy :
Merci, M. le Président. Bon après-midi à tous mes collègues. Le projet de loi
n° 20, écoutez, ça fait couler beaucoup
d'encre actuellement, et pour cause. En termes d'introduction, on peut dire que
c'est un projet qui va avoir des effets
extrêmement importants sur l'offre de soins de santé au Québec pour les
prochaines années, hein, si on pense juste à l'affaiblissement du
financement de la santé publique, qui est l'axe le plus opérationnel de la
production de la santé; la prévention, c'est toujours mieux que d'offrir, bon,
les soins après que la maladie apparaît. On parle d'une forme de
démoralisation, dans le système de santé, des acteurs, on parle d'une
déstructuration, d'une déstabilisation puis d'une bureaucratisation aussi, M. le Président, et ça, pour répondre aux
objectifs de contrôle, c'est clair. Si
on veut contrôler les actes... bon, le nombre de patients des médecins en
fonction de la gravité de certaines pathologies, etc., il y a une nouvelle bureaucratie qui va être obligée de se mettre en place, dans un contexte où on a éliminé les CSSS en disant que, bon, il
y a trop de structures, trop de
bureaucratie, etc. Donc, on parle d'une mutation du système de soins sans précédent, mais pas
nécessairement au bénéfice des citoyennes et des citoyens du Québec.
On va essayer
d'explorer certains impacts ou les différents effets potentiels de ce projet de
loi. Donc, on parle de 1 500
patients, des quotas de patients pour les médecins. Ça me rappelle le
taylorisme, c'est la production scientifique, bon, associée au monde du travail, de la production... c'est Ford qui
avait parti le bal avec son modèle de... je ne me souviens pas le nom de l'auto, là, etc., c'était là que ça
débutait. Donc, un système de production, de consultation à la chaîne qui va
être régulé par un système de sanction,
d'ordre et de contrôle. Mais ça, ça peut avoir des impacts extrêmement dommageables sur l'intérêt et l'attractivité de la
pratique, hein? On parle d'une potentielle désertion de la pratique de la
médecine familiale. Il va y avoir, si vous me permettez l'expression, une
paupérisation des conditions de travail; les conditions de travail vont devenir
intenables et ça va favoriser la prise de la retraite, du passage au privé.
Donc, ça va engendrer une pénurie
potentielle pour le système public. Il va y avoir de moins en moins de gens qui
vont s'orienter là, dans ce secteur de la pratique.
Ce qui est dommageable aussi, M. le Président,
c'est le ton de confrontation qui est accompagné de ce projet de loi là. On
parle d'une forme d'infantilisation et de paternalisme politique. Et ce qui est
triste, c'est que ça touche beaucoup les
femmes, celles qui... soit en majorité dans la pratique. Tout ça accompagné,
comme le disait mon collègue de
Sanguinet ce matin, d'une concentration du pouvoir, mais qui n'est pas un signe
d'efficience. La concentration, l'approche
pyramidale n'est pas un signe de maximisation de la production de la santé, ça
va être exactement le contraire, parce que plus on est près de la
réalité, plus on peut prendre des décisions en fonction, je dirais, du bassin
ou des problématiques
sociosanitaires en offrant les soins nécessaires, plus on est efficients. Et
mon collègue disait ce matin que le
meilleur modèle, c'est la décentralisation pour se rapprocher du processus
décisionnel, rapprocher le processus, je dirais, de l'action à poser.
La base
théorique qui a permis au ministre de définir l'imposition des quotas est
fortement critiquée. On parle de statistiques qui seraient peut-être
interprétées d'une manière orientée. Écoutez, ça vient légitimer les quotas.
Des statistiques qui seraient biaisées
viennent légitimer des quotas, et là je vais rentrer dans mon texte.
Donc : «Le portrait du nombre
d'heures travaillées par les médecins est biaisé selon les médecins, car il ne
tient pas compte de toutes les autres tâches
effectuées par les médecins de famille, tâches d'enseignement universitaire,
tâches cliniques non rémunérées, etc. À
noter...» Bon. Donc : «De plus, le calcul du ministre tient compte de
seulement 60 % des médecins travaillant le moins toute la journée de... sept heures ou moins ont
été considérées comme non travaillées et les journées de 24 heures ont toutes
été considérées comme une seule journée de travail par le ministre pour arriver
à ce chiffre de 117 jours travaillés en moyenne
pour les médecins de famille.» Donc, on n'ira pas trop loin dans les
statistiques, mais ce que ça veut dire, c'est que le paradigme de base, la posture théorique du ministre pour définir,
bon, les 1 500 patients, etc., est définie sur des statistiques qui
font bien l'affaire du ministre dans ce contexte-là.
• (17 heures) •
Bien, ça me
rappelle, M. le Président, une autre tactique de ce genre, qu'on a vue lors de
l'évaluation du déficit, là, de 7 milliards de dollars, sur lequel je ne
reviendrai pas, déficit potentiel qui est associé à l'ensemble du calcul de
tous les organismes du gouvernement
du Québec qui demandaient des choses et qui théoriquement, bon, on fait un tri
puis on priorise des choses, et on a
un déficit associé ou, à tout le moins, un investissement associé à notre
capacité de payer. Dans le cas, donc,
du déficit, on a coupé partout pour définir... Bon, on a coupé partout en
fonction d'un déficit potentiel, comme on a augmenté ou attribué un
quota de patients en fonction de statistiques qui sont très discutables.
Le pire, c'est que, dans son discours, le
ministre prétend que l'offre de services et l'efficience en santé vont s'améliorer.
Et, selon plusieurs, je dirais, acteurs du monde de la santé, c'est exactement
le contraire qui va se passer. Les
patients les plus vulnérables, les cas les plus lourds vont nécessiter de plus
en plus de temps... ou de plus de temps, donc de potentielles pénalités pour les médecins. Les cas lourds vont
pénaliser les omnipraticiens dans leur obligation d'atteindre un quota. C'est
ce qu'on appelle une ostracisation des pathologies lourdes. Ça veut dire que
les gens qui ont des grands problèmes
de santé qui nécessitent un suivi rigoureux vont peut-être se ramasser, je
dirais, sans médecin ou, à tout le moins, vont avoir des problématiques
pour consulter un médecin.
Je cite un
article du Devoir du 2 février : «M. Ménard prédit que les
médecins suivront moins de patients vulnérables et complexes pour arriver à atteindre leurs cibles, réduisant du même
coup l'accès pour les vrais malades. De plus, il craint que la cible de patients à suivre, qui se veut un
seuil minimal, ne devienne aussi un maximum au-delà duquel les médecins fermeront leurs listes.» Donc, ils vont être
accotés à 1 500 patients, ils n'iront pas au-delà, parce qu'ils vont prendre
ça comme une insulte, une ingérence dans leur pratique professionnelle.
Financièrement,
ça veut dire quoi? Ça veut dire que les coûts vont exploser. S'il y a plus de
consultations, il va y avoir plus de facturation. Donc, on va assister à
des surconsultations des biens portants.
Selon encore
M. Ménard, «le mode de paiement à l'acte favorise le volume. De plus, en
forçant les médecins à travailler
davantage, le projet de loi n° 20 risque de gonfler la facture, puisque
plus d'actes seront effectués. M. Ménard craint que d'autres services doivent être coupés pour payer cette
facture.» Donc, on parle de l'explosion des coûts dans un contexte de
limitation de croissance.
J'aimerais...
Bon, O.K., limitations de croissance, limitations qui sont amenées à
1,4 %, comme vous le savez, dans
un contexte où la santé réquisitionne une augmentation de... bon, mon collègue
disait 5,4 %, il y a des anciennes directions d'agences qui me
disaient 6 %. Cette diminution, je dirais, du financement de la croissance
associée à une augmentation des actes
médicaux, associées à un certain abandon des cas les plus lourds ne peuvent
résulter que par une augmentation
très significative des coûts de santé, mais dans un contexte d'attrition. Donc,
si on sait compter, ce qui va se passer, c'est qu'il va y avoir des
coupures très importantes en santé publique au Québec.
Et là je cherche mes statistiques, M. le
Président. Je vais y aller de mémoire. Pour la Gaspésie, on parle de 1,4 % d'augmentation sur un budget de
330 millions, et, ce 330 millions, si on a 5 %, on parle de
16,5 millions de dollars qui
sont essentiels au maintien de... je dirais, à la stabilisation de l'offre de
soins. Si on réduit ça à 1,4 % au lieu de 5 %, on tombe
à 4,6 millions pour la Gaspésie, mais il y a
0,8 % qui s'en va en salaire pour les médecins
spécialistes, bon, on le sait, ce qui
fait en sorte qu'il va rester 2 millions
de dollars pour, je dirais,
l'indexation des coûts de système, l'augmentation
des salaires, parce que, bon, les gens
changent de bracket, etc., l'électricité augmente, le prix des médicaments. On parle
d'un déficit potentiel, juste en Gaspésie,
de 14,5 millions de dollars pour le système
de santé, pour le CISSS, qui va faire
en sorte qu'il va y avoir des coupures
inévitables, une diminution de l'offre de soins. Il va y avoir des choix qui
vont être au désavantage de la
population, et ça, c'est clair. Donc, facturation de services, forme de
privatisation, tout est possible dans cette situation-là.
On parle
aussi des facultés de médecine qui risquent de se vider, pour les professeurs
comme pour les étudiants. Encore une
fois, ici, un article du Journal
de Québec,
26 février 2015, page 24 : «Les facultés de médecine des
universités québécoises risquent de se vider de leurs professeurs comme
de leurs étudiants si le projet de loi n° 20 du ministre Gaétan Barrette devait être adopté.» Bon. «C'est
le message sans équivoque livré mercredi au ministre de la Santé», etc.
Donc, on parle de... Bon, j'ouvre les
parenthèses : «"Ce qui nous menace, c'est le désengagement des
800 médecins qui enseignent. Les
médecins qui s'impliquent avec nous pour former nous donnent le message qu'ils
ne veulent pas s'investir dans une telle démarche. Pour eux, le projet
de loi n° 20 est une insulte..."» Je ferme la parenthèse, M. le
Président.
Le ministre
a aussi émis des commentaires un peu cinglants par rapport à la médecine
familiale, donc, dans un article de journal, et je cite : «La médecine
familiale ne peut plus être considérée comme un milieu où l'on maximise la
qualité de vie et l'on
minimise la responsabilité sociale.» Et là, bien, la suite, c'est quoi? C'est
qu'on cible qui? On cible les femmes.
On dit que les femmes minimisent leur responsabilité sociale, parce
que, théoriquement, la médecine
familiale, c'est moins demandant. Mais
c'est parce que les femmes ont des enfants depuis que le monde est
monde, et leur responsabilité première, c'est de s'occuper, inévitablement, de
leurs enfants. Quand elles décident de prendre un congé ou d'aller
s'occuper des enfants, bien, écoutez, c'est tout à fait normal, bon, qu'elles
décident que, dans leurs valeurs personnelles,
une de leurs priorités, une de leurs responsabilités sociales, ce soit d'éduquer et d'élever leurs
enfants, quand il est dans l'âge tendre, si vous me permettez
l'expression.
Donc, c'est
une attaque contre une philosophie de vie, contre une catégorie de médecins qui
pratiquent autrement, qui a une approche holiste. En santé publique,
c'est une approche qui est multifactorielle, qui prend en considération l'environnement socioéconomique, bon, les habitudes de vie, etc., et qui ne met
pas toute l'emphase sur l'axe de la guérison ou l'arsenal thérapeutique,
la médicamentation, etc.
Et, quand on
met des quotas, on oublie et on évacue un aspect essentiel à la santé publique,
qui est la pédagogie. Un patient, ce
n'est pas juste un client, c'est quelqu'un qu'on accompagne dans le processus
de guérison ou de construction de sa
santé. J'ai sorti un document d'information de l'Université de Montréal qui
parle du patient partenaire, O.K.? Bon, on dit que «le patient partenaire est une personne progressivement
habilitée, au cours de son cheminement clinique, à faire des choix de santé libres et éclairés. Ses savoirs
expérientiels sont reconnus», etc. Donc, ce qui... Bon, je ne définirai pas
tous les picots qu'il y a,
là, mais ce que ça veut dire, c'est que, pour accompagner un patient, ça prend
du temps. Ça prend du transfert, ça prend du dialogue, ça prend une
proximité entre le soigneur et le soigné. C'est ce qu'on appelle la coconstruction de la santé. Et là on évacue ça complètement. C'est le «timer», c'est production à la chaîne. Dis-moi ce que tu as, posologie, merci, bonsoir. Et ça, les médecins adorent ça,
parce qu'ils voient une évolution dans la santé ou dans la gestion de la
problématique de santé d'un individu. Mais là, quand tu te ramasses à faire de
la quantité, inévitablement il n'y aura pas de qualité. Ça ne se peut pas.
Parce que le processus est plus complexe qu'un simple diagnostic biomédical
accompagné d'une prescription, ou d'un test, ou de ce que vous voulez.
Autre
dimension très importante, c'est au niveau des risques d'erreur, M. le
Président. C'est ce qu'on appelle les maladies
nosocomiales ou iatrogènes, ça dépend du contexte, là. On parle vraiment, là...
On dit que le quota peut être un facteur
de stress très important chez, bon, les médecins, hein? Une étude démontre que...
Bon, Martin Moisan, médecin, nous dit
que «45,7 % des médecins québécois ont des symptômes d'épuisement, sans
compter que, pour cette profession, le
taux de dépression et de suicide est considérablement plus élevé que dans la
population en général». Écoutez, je ne devrais pas le dire ici, là, parce que c'est triste à mort, mais ma bru étudie
en médecine actuellement à l'Université Laval, puis il y a eu des suicides il n'y a pas longtemps, là,
des étudiantes. Puis il y a une pression extraordinaire. Bref, écoutez, je
ferme la parenthèse.
• (17 h 10) •
Donc, on
parle de problèmes de santé associés au stress chez une partie du corps
médical. Donc, ce que ça veut dire,
on augmente les quotas, on augmente... on oblige à une production industrielle,
je dirais, de consultations, et c'est inévitable
qu'on va voir augmenter le nombre d'erreurs médicales. Et il y a beaucoup de
théories qui nous disent que le... Bon.
J'ai lu ça en quelque part. Je ne peux pas... Je n'ai pas vérifié la validité
de l'énoncé, mais on nous parle de 500 000 cas d'erreurs médicales au Québec par année. Ce n'est
pas rien. Et ça engendre de la pathologie. Ça fait qu'imaginez le stress
supplémentaire d'obliger à la production de
diagnostics. Ça peut engendrer un système pervers où le système de santé
va devenir lui-même producteur de faux
diagnostics qui vont engendrer des erreurs de prise de médicament, des erreurs
de consultation ou non-suivis, etc., qui peut être très dommageable
pour, je dirais, la population.
J'aimerais
terminer, si j'ai le temps, par une lettre qui a été adressée au Dr Barrette,
bon, des médecins du centre hospitalier
de Maria. Le ministre, excusez-moi. Ministre, c'est bon. «M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux, nous, les
médecins du département de médecine générale du CSSS Baie-des-Chaleurs, qui
exerçons en service de première ligne
au centre d'hébergement de l'unité d'enseignement de médecine familiale au
maintien à domicile, avons consulté votre
projet de loi n° 20. Nous partageons les objectifs d'amélioration de
l'accès aux médecins de famille de même que de réduire les délais de réponse aux demandes de consultation en
médecine spécialisée. Toutefois, nous rejetons l'ensemble des moyens que ce projet de loi entend imposer. En
effet, en tant que médecins de famille au front sur toute la première ligne,
nous sommes en mesure de juger que les moyens que vous êtes seuls à proposer
n'atteindront pas les objectifs d'amélioration de l'accessibilité, sur lesquels
nous sommes pourtant d'accord.
«L'application
de cette loi déstabilisera notre offre de service médical, particulièrement
celle dédiée aux populations vulnérables.
Nous craignons des impacts négatifs sérieux sur la qualité des soins aux
patients sans garantie d'amélioration réelle de l'accessibilité,
particulièrement pour les patients en ayant le plus besoin.
«De plus, en
tant que région éloignée, nous portons sur nos seules épaules la responsabilité
de l'ensemble des soins, tant hospitaliers que dans les CHSLD et les
CLSC, le domicile, les bureaux et l'unité de médecine familiale. Nous sommes un
milieu fragile soumis aux fréquents départs de médecins. De plus, la
distribution des patients sur ce large territoire
rend impossible l'application des quotas, que ce soit en termes de quantité
qu'en termes d'assiduité. En conséquent, nous sommes très inquiets que la menace de la perte de rémunération de
30 %, qui annule nos mesures incitatives, entraîne un exode de nos médecins ainsi que le retour aux
difficultés majeures de recrutement que nous avons déjà connues. Aussi, notre réalité régionale fait en sorte que
l'ensemble des médecins qui exercent l'anesthésie dans notre centre hospitalier
sont des médecins de famille.
«La
profession de médecin de famille évolue constamment, elle se définit au
quotidien par ceux qui en maîtrisent l'art
complexe de demeurer à l'écoute, proches de leurs patients et qui s'adaptent à
leurs besoins également en évolution. Elle
ne peut être définie politiquement. Or, votre projet de loi, politique, en
appliquant une méthode simpliste et fausse — une règle de trois — à un problème complexe vient distordre
violemment la nature de la profession et, plus dangereusement, vient la fixer dans un carcan
rigide incompatible avec les besoins individuels et locaux des patients et le
développement à la profession.
«D'autre
part, au-delà de leurs maux corporels, les patients nous réclament du temps
pour que l'on s'attarde à qui ils
sont, à leur âme et aux difficultés qu'ils traversent. Nous voulons leur
accorder pour les comprendre, pour les aider. C'est aussi notre travail.
Dans l'usine que vous bâtissez, vous transformerez les...»
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Je vous remercie, M. le député de Bonaventure, pour votre intervention. Et,
pour la poursuite des débats, je cède la
parole maintenant à M. le député de Terrebonne pour son intervention, toujours
sur le principe du projet de loi n° 20. À vous, M. le député.
M. Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Vous allez devoir
me pardonner d'entrée de jeu : je suis attaqué de toutes parts, là,
par des allergies printanières violentes. Alors, il se peut, là, que, dans mon
timbre de voix, il y ait quelques
changements. J'ai la tête comme un bourgeon qui menace d'éclater à tout moment.
Alors, il se peut que je sois un petit peu plus zen qu'à l'habitude.
Alors, je
suis très content d'être avec vous aujourd'hui pour vous parler du projet de
loi n° 20, loi édifiant la loi favorisant l'accès aux services de
médecin de famille et de médecine spécialisée et modifiant diverses
dispositions législatives en matière de procréation assistée.
Donc, M. le
Président, ce que je veux faire avec vous aujourd'hui, bien, c'est vous
réexpliquer brièvement, là, quelles
sont les grandes lignes du projet de loi n° 20, parce que c'est un projet
de loi qui est quand même assez complexe, qui vient changer plusieurs
choses et qui touche directement, évidemment, le service aux patients et les
médecins en particulier. Vous parler aussi
de mes souhaits par rapport au ministre de la Santé. Parce qu'au-delà des
échanges qui sont faits en ce salon
il y a aussi, comment je pourrais dire, la volonté d'avoir un sentiment
d'écoute, de la part du ministre en poste, dans ce projet. Et j'ai eu
l'occasion, là, de pouvoir côtoyer le ministre par d'autres expériences
électorales antérieures. J'aimerais lui
rappeler certaines de ses déclarations, aussi l'amener à vouloir peut-être
réfléchir à peut-être assouplir un peu son dialogue très agressif qu'il
a actuellement avec les oppositions mais aussi avec bon nombre de partenaires de la société civile, et, à cet égard,
je pense que ce sera très constructif. Et finalement, M. le Président,
également vous mentionner les groupes qui sont venus en commission nous
témoigner de leurs opinions par rapport au projet de loi n° 20, soit en
faveur ou en défaveur, évidemment, de ce qui nous est proposé.
Alors, tout d'abord, qu'est-ce que le projet
de loi n° 20? Bien, c'est un
projet qui va permettre au gouvernement,
par voie réglementaire, d'imposer à chaque
médecin la prise en charge d'un nombre minimal de patients en établissant
des paramètres stricts l'incitant à voir ses
patients sous peine de sanctions pécuniaires. Qu'est-ce que ça veut dire? Pour un médecin de famille, ça veut dire qu'on va prévoir un quota minimum,
fixé par règlement, de patients qui devra suivre chaque médecin de
famille, selon le nombre d'années et de pratique qu'il compte. Ça prévoit aussi
une pénalité si un médecin ne respecte pas les 12 heures-semaine
d'activités médicales particulières qu'il doit faire en établissement, c'est-à-dire hors de son cabinet. Le taux
d'assiduité, également, de chaque médecin de famille sera mesuré. Le rapport
entre le nombre de fois où un patient voit
son médecin de famille où il est inscrit versus le nombre de fois où il a vu
son médecin de famille, les siens ou
un autre, par exemple à l'urgence, va donc devoir être comptabilisé. Un taux d'assiduité
sous les 80 % entraînera notamment, pour ces médecins de famille, une baisse
de salaire — on
parlait tout à l'heure de sanctions
pécuniaires — jusqu'à
un maximum de 30 % de pénalité pour un taux sous les 60 %. Idem pour
les deux heures de pratiques particulières médicales qui ne sont pas
travaillées. Les pénalités seraient mises en application à partir du
1er janvier de l'année prochaine, soit le 1er janvier 2016.
Ce projet de
loi signifie aussi, pour les médecins spécialistes, les obligations suivantes,
c'est-à-dire de recevoir en
consultation, en dehors des urgences, un nombre minimal de patients référés par
un médecin de famille tel que déterminé par le règlement du
gouvernement. Ça signifie aussi assurer le suivi d'une consultation demandée à
l'urgence entre 7 heures et
17 heures dans un délai prescrit par règlement, une consultation,
évidemment, de trois heures; assurer la prise en charge et le suivi médical des patients hospitalisés à titre de
médecin traitant lorsque la masse critique de médecins de famille dans
l'hôpital est insuffisante; et finalement, M. le Président, assurer une gestion
adéquate des listes d'attente chirurgicales en priorisant les patients
en attente depuis plus de six mois.
Donc, on voit
que, M. le Président, ces deux groupes, pour le projet de loi n° 20,
nous... leur confère une période limitée
pour essayer de réussir à se défendre ou, en tout cas, de faire entendre leur
voix pour un problème qui est aussi concret et qui vient les toucher
aussi directement et aussi violemment.
• (17 h 20) •
Il y a tout
un aspect aussi du projet de loi qui touche à la procréation assistée. On vient
ajouter des balises et on fait
également le retrait de la fécondation in vitro de la couverture du régime
public. On souhaite également que ce volet puisse être accessible seulement aux femmes âgées entre 18 et
42 ans et qu'il doit y avoir une période minimale de trois ans de relations sexuelles ou d'insémination
artificielle exigée avant tout traitement de fécondation in vitro. Il y a
également une obligation de suivre
une séquence définie commençant par la stimulation ovarienne, suivie de
séquences d'insémination artificielle,
pour accéder, en cas d'échec, à la fécondation in vitro. Il y a également des
évaluations psychosociales de parents qui
sont requises à leurs frais, un seul transfert autorisé chez les femmes de
moins de 37 ans et deux pour les 38-42 ans. Il est interdit
aux professionnels de la santé de diriger une personne hors du Québec pour y recevoir
des services qui ne sont pas conformes aux
normes prévues par le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui, le projet
de loi n° 20. Des amendes
pouvant aller jusqu'à 50 000 $ seraient prévues pour toute personne
qui contreviendrait à certaines dispositions de la loi. Et finalement la fin de la couverture
publique de ces actes suivrait. Toutefois,
la gratuité serait maintenue lorsque
médicalement indiquée, un exemple : fertilité compromise par des
traitements de chimiothérapie. À ce moment-là, la gratuité serait maintenue
pour les services d'insémination artificielle.
Le crédit d'impôt
remboursable à la hauteur de 80 % des coûts liés au traitement serait
octroyé aux familles ayant un revenu de
50 000 ou moins jusqu'à concurrence de 20 % pour les familles ayant
un revenu de 120 000 $ et plus. Donc, vous comprendrez, M. le Président, que plusieurs personnes
seraient touchées par cette bracket. Et seraient exclus, donc, du crédit d'impôt, les ménages dont l'homme
a été préalablement vasectomisé ou la femme ligaturée, les gens qui ont déjà un enfant. Il y a plein de personnes qui
seraient donc exclues de ce genre de crédit d'impôt dans la proposition
qui nous est donnée.
C'est
certain, M. le Président, que... Évidemment, vous comprendrez qu'il y a plusieurs
points qui ne font pas notre satisfaction, en commençant tout d'abord
par l'histoire des quotas. Les quotas qui sont imposés par le ministre auront donc, selon nous, plusieurs effets pervers,
notamment la déshumanisation de la médecine, parce que la relation entre
le patient et le médecin serait complètement transformée et passerait, là,
d'une relation beaucoup plus humaine, beaucoup plus personnalisée à une
relation de calculs et d'atteinte de quotas, une question logistique et
clairement mathématique. Juste pour vous
indiquer que chaque personne qui viendrait fréquenter, dans le fond, leur
médecin de famille se verrait imposer une pondération pouvant aller de
0,8 à 25 pour un et selon, évidemment, la classification de leurs maux ou de
leur situation médicale. Donc, quand le médecin regarde un patient rentrer dans
son bureau, il va devoir maintenant lui attribuer, M. le Président, une valeur,
c'est-à-dire, exemple, une personne qui est en soins palliatifs vaudrait très fort dans la pondération, soit 25,
une personne qui a une situation dite normale vaudrait pour 0,8. Donc, pour
réussir à atteindre ses quotas, le médecin
devrait constamment calculer par jour quel serait, dans le fond, le nombre de
patients adéquat à rencontrer. Ce qui nous
emmène, donc, à une logique beaucoup plus comptable, beaucoup plus
mathématique.
On
n'a aucune garantie que cette façon de quotas va engendrer un plus grand
nombre, dans le fond, de prises en charge
de toute la population. Il n'y a aucune référence à aucun modèle, là, dans le
document qui nous a été transmis pour le calcul des quotas. On l'impose
de façon arbitraire, donc on dit : Avec cette nouvelle méthode, on va
régler tous les problèmes, ça devrait
augmenter, mais on n'a pas fait d'étude d'impact, on n'a pas de comparatif dans
le monde à nous soumettre pour nous démontrer, dans le fond, la
validité, là, d'une telle pratique.
Puis
également, M. le Président, on doit vous dire que le projet de loi accentue
aussi la perte de responsabilité populationnelle, parce que les médecins
ne feront que remplir des commandes de tâches sans égard au nombre de Québécois qui demeureront sans médecin de famille.
Donc, aucun calcul populationnel n'a été fait. Tous les médecins
pourraient donc démontrer qu'ils respectent les quotas et qu'il pourrait encore
rester des millions de personnes sans médecin
de famille ou sans garantie d'en avoir un au cours des prochaines années.
Alors, on passe aussi à côté d'un problème assez important.
Et
donc il y a des éléments, dans le projet de loi, qui suscitent évidemment une
indignation de l'opposition, mais de
plusieurs groupes de pression, que je pourrai vous énumérer dans quelques
minutes, mais vous dire que nous aurions aimé que le projet de loi puisse traiter de certains points, notamment
des mesures pour favoriser l'interdisciplinarité et les recours à
d'autres professionnels en première ligne, ce qui n'est pas présentement
l'enjeu du projet de loi. On aurait aimé y
voir également des exigences quant aux heures d'ouverture afin de garantir un
accès, aux patients, à leurs médecins les
soirs et les fins de semaine. Il n'en est pas question dans le projet qui nous
est demandé. Des investissements notamment, aussi, en prévention et en santé publique pour prévenir et éviter les problèmes de santé avant
qu'ils n'apparaissent, on a toujours préconisé cette logique, on aurait
souhaité également y voir quelques mots. On aurait également, au niveau de l'opposition officielle,
aimé voir un réel virage vers les soins à domicile. Vous savez que ça a été un
enjeu très défendu et très discuté au
cours des dernières années au Québec, notamment avec l'ancien ministre de la
Santé, M. Réjean Hébert. Donc, on
aurait voulu poursuivre davantage dans cette voie. Et des mesures pour
accélérer évidemment l'informatisation du réseau de santé, qui vit, M.
le Président, un fiasco assez lamentable.
Alors,
vous parler du ministre de la Santé. Maintenant que je vous ai dit ce que
j'aurais aimé voir dans le projet de
loi et qu'on a tracé les grandes lignes, j'aimerais vous parler un peu de la
suite des choses et voir le ministre de la Santé peut-être changer d'attitude ou, du moins, tendre la main vers les
oppositions et vers les groupes qui se sont manifestés dans le cadre du projet de loi n° 20. Moi, je
connais un peu le ministre de la Santé, M. le Président. Dans un passé pas si
lointain, le député de La Pinière s'était présenté dans une élection dans le
comté de Terrebonne, et j'ai eu l'occasion, donc, de dialoguer avec lui durant
tout le cadre d'une campagne électorale. Déjà, à cette époque, il était très
confiant, M. le Président, il était avec la
Coalition avenir Québec, là, qu'il qualifiait, là, de meilleure invention
depuis le pain tranché, à cette
époque. On voit qu'il a changé d'idée. Et déjà, à cette heure, il disait avoir
le secret, là, de la Caramilk médicale en main pour pouvoir, là, transformer le système de santé, corriger les
erreurs et être capable d'aller de l'avant. Au cours de la campagne
électorale que nous avions eue à Terrebonne, bon, il nous avait fait quelques
propositions, mais il avait surtout fait des
déclarations concernant notre milieu et il avait notamment dit, M. le
Président, qu'à ses yeux cette circonscription était un
quasi-laboratoire pour mettre en oeuvre les réformes en santé dans la province,
parce que nous avons un CSSS, un hôpital qui
sont très dévoués et très actifs. Et donc, à cet égard, il avait manifesté le
fait que la circonscription pouvait
être, donc, un élément de stimulation, en tout cas de réflexion qui pourrait
l'aider à transformer le système de santé ou, du moins, aller prendre le
pouls.
Et
moi, j'aimerais vous dire, M. le Président... Puisque le ministre de la Santé
connaît bien ma circonscription et
qu'il y voit, dans le fond, un quasi-laboratoire, je me demande s'il a consulté
les gens de ce quasi-laboratoire de ma circonscription.
Parce que, moi, ils sont venus me voir, et ce quasi-laboratoire du Québec qui
est chez nous nous lance des cris du coeur, là, désespérés en ce qui
concerne le projet de loi n° 20, là.
J'ai ici un
article de mon journal local, La Revue, le titre s'appelle : Vers
une paralysie du réseau de la santé, et le président des médecins et pharmaciens de l'Hôpital Pierre-Le Gardeur, ne va pas, tu sais, de main morte envers
le ministre de la Santé pour essayer justement de
l'amener à réfléchir. Il dit notamment : «Les médecins veulent prendre
plus de patients — c'est une réalité — mais ils n'ont pas les outils nécessaires
pour le faire. [Et donc] "une entrave majeure est le système informatique qui tombe en panne et la
mise en place de l'informatisation du réseau de la santé, qui n'est pas terminée mais qui a déjà englouti 1 milliard
de dollars". [...]En ajoutant à cela le projet de loi n° 20, sur les
quotas de patients et l'imposition de
pénalités aux médecins, on vient complexifier la mise en place [d'une]
réforme.» Et, selon M. Duong, qui est
le représentant de cette association, il dit : Au nom des médecins et des
patients qui écoperont, nous réclamons que le ministre ralentisse la
cadence et nous écoute visiblement davantage.
Je me demande si le ministre de la Santé a
contacté M. Duong pour lui demander son opinion sur la suite des choses. Au contraire, on a l'impression que le
bulldozer est à vitesse maximum présentement et qu'on décide de défoncer
toute résistance pour y aller avec une
décision unilatérale, sans consultation, sans dialogue avec les partenaires du milieu.
On a ici, M. le Président, dans un autre journal local de ma circonscription, Le Trait
d'union, le titre évoque la chose
assez clairement, Des médecins réorienteront leur pratique. Selon un sondage à l'interne à l'Hôpital
Pierre-Le Gardeur, c'est près du tiers
des médecins qui réfléchissent à peut-être changer de domaine de carrière ou de profession,
de spécialisation. Le Dr Robert, de l'établissement, s'inquiète encore davantage pour la relève en médecine familiale. Il dit
notamment que les étudiants en médecine ont d'ailleurs signifié leur opposition
en tenant des journées de débrayage en
ce qui a trait au projet
de loi n° 20 et que la médecine
familiale devrait être davantage revalorisée et reconnue. Présentement, avec le projet de loi n° 20, si les contraintes laissent plus le temps et
les moyens nécessaires à... ne laissent plus le temps et les moyens nécessaires à une pratique de
qualité, il a peur que les étudiants en médecine familiale décident de se
réorienter vers d'autres choix. Donc,
son message est très clair au ministre
de la Santé : «Il est médecin
spécialiste, il n'est pas sur le terrain,
il aligne des statistiques [...] des chiffres dans un bureau... Nous avons
pourtant des solutions depuis longtemps, mais, pour cela, il faut nous parler,
discuter et surtout nous écouter!»
Et là-dessus,
M. le Président, je continue à plaider pour que le ministre
puisse assouplir un peu le dialogue, qui est très tendu, très agressif à
l'heure actuelle, dans le projet de loi n° 20, pour essayer de prendre en compte une plus
large coalition de gens. Présentement, dans les acteurs qui sont venus se positionner sur ledit projet de loi, il y en a 46, là, qui sont venus en commission
parlementaire, 35 sur 46 sont fermement contre, fermement contre. Il y en a seulement trois qui sont en faveur, là, très clairement en faveur du projet de loi n° 20, et plusieurs
autres qui donnent beaucoup de nuances. Donc, là-dessus, je pense que
le ministre de la Santé devrait ouvrir le jeu et essayer d'atténuer les inquiétudes.
• (17 h 30) •
J'ai ici un autre médecin de l'Hôpital
Pierre-Le Gardeur à Terrebonne, M. Darques, qui dit que le projet de loi n° 20 pourrait avoir des conséquences très graves au niveau des urgences : «On va avoir des morts qui auraient pu être évitées», dit-il dans une entrevue. Alors, il faudrait, à
ce moment-ci, peut-être, que le ministre de la Santé puisse entretenir
un dialogue plus constructif avec l'ensemble des partenaires du réseau.
Vous dire
peut-être un autre commentaire d'une personne, qui est Dre Esther Laroche,
qui dit : «Moi, ce qui me fait
peur, c'est qu'on mette tous les omnipraticiens dans le même moule, alors que
certains font plein d'autres choses : ils sont plus impliqués à l'hôpital, donnent des services dans des
résidences de personnes âgées en plus d'être en clinique. Il faut donner
des équivalences.»
Donc, tout le monde a des recommandations à
faire, mais encore est-ce que le ministre souhaite les écouter?
Le dialogue
est très important, M. le Président, en cette Chambre. Il y a plusieurs
ministres, là, qui sont à l'écoute, là,
de différents groupes, à l'écoute des porte-parole de l'opposition. Moi, j'ai
la chance de pouvoir dialoguer de temps à autre avec la ministre responsable du dossier dont je suis le
porte-parole officiel, et puis on s'écoute. Est-ce qu'elle fait... est-ce que ça donne des résultats? Pas tout le
temps, mais au moins on s'écoute puis on est capables d'amener des solutions
constructives dans certains cas puis de
travailler à améliorer certaines choses, de laisser tomber la partisanerie.
Alors, moi, évidemment, je ne peux
que plaider pour que le ministre de la Santé puisse essayer d'ouvrir davantage
vers une attitude plus profitable ou,
en tout cas, du moins plus favorable à la création d'un dialogue beaucoup plus
large et beaucoup plus consensuel.
D'ailleurs,
l'attitude du ministre de la Santé lui a valu, M. le Président, par le passé,
énormément de critiques. Je ne reviendrai pas, là, sur l'ensemble des
choses qui auraient pu être dites, parce que je veux rester dans les propos parlementaires que cette Chambre nous donne, mais rappelez-vous l'affaire Castonguay,
ce que M. Castonguay avait dit de
l'attitude de M. Barrette. Je ne
le dirai pas de nouveau, mais je pense que ça vaut la peine de s'en souvenir.
Rappelez-vous également ce que
certaines personnes avaient dit, notamment M. Patrick Lagacé, dans un
de ses blogues intitulé Note de service pour l'actuel ministre de la Santé. Je pense qu'il y aurait avantage à se souvenir de
ce qu'une attitude de confrontation
et agressive peut provoquer, là, comme désagréments dans le cadre de réformes
et de changements qui doivent être, je pense, si on les souhaite
durables, le plus consensuels possible pour l'avenir.
Donc, le ministre doit écouter davantage. Je ne citerai pas
Alain Dubuc, j'ai vu que plusieurs de mes collègues avaient notamment, là, passé au travers une revue
de presse, mais juste le titre, M. le Président : Le «goon», le «bully»,
bref, la réforme du ministre mal barrée, etc., démontre que l'attitude
de celui-ci est beaucoup plus, là, confrontatrice que conciliatrice. Et là-dessus, bien, évidemment, je
lui demande, là, de réviser un peu, là, sa position. Ça ne veut pas dire,
M. le Président, que l'opposition officielle aura toujours raison dans ses
recommandations, mais au moins, si on en a quelques-unes de bonnes, il serait
intéressant que le ministre de la Santé puisse être ouvert à les écouter. Et de
toute façon c'est ce qu'est la démocratie. À
quoi sert de discuter dans cette salle cet après-midi? Puis je regarde mes
collègues du gouvernement et j'ai
déjà été à leur place il y a quelques mois. À quoi sert de dialoguer si
personne ne s'écoute, et s'il n'y a aucun changement, et si tout est
déjà, dans le fond, décidé arbitrairement?
Alors, si on veut donner un peu de sens à nos instituions,
si on veut donner un peu de sens à la démocratie, il faut quand même y aller avec un certain dialogue, une
certaine ouverture, et c'est ce que je demande au ministre de la Santé pour les prochains
jours : davantage d'ouverture pour le bénéfice des patients du Québec et
des jeunes familles, qui en ont grandement besoin. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député de Terrebonne, de
votre intervention. Et, pour la poursuite
du débat, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Joliette, toujours
sur le projet de loi n° 20. Mme la députée de Joliette, à vous la
parole.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Merci beaucoup, M. le
Président. Alors, à mon tour de prendre la parole sur cet important projet
de loi, qui nous occupe en cette Chambre
depuis déjà un bon moment, et ce n'est pas pour rien, M. le Président, que ça
nous occupe comme ça depuis plusieurs semaines, c'est parce que cette
réforme-là, qui est anticipée, qui est envisagée par le ministre de la Santé, elle ne répond tout simplement pas aux
objectifs certes louables, que nous partageons tous ici, en cette
Chambre, j'en suis convaincue, de favoriser l'accès, d'avoir un accès beaucoup
plus adapté et beaucoup plus fluide, d'avoir
une possibilité, en partant, d'avoir un médecin de famille. On sait qu'il y a
des centaines de milliers de Québécois
qui n'ont pas accès à un médecin de famille. Juste dans la région de
Lanaudière, il manque près 50 médecins, 48 médecins omnipraticiens,
simplement pour arriver à la moyenne du Québec. Donc, on ne parle même pas pour
répondre à tous les besoins, mais simplement
pour arriver à la moyenne québécoise de la disponibilité des médecins sur
l'ensemble du territoire, puis j'espère avoir le temps d'y revenir.
C'est un réel enjeu, c'est un réel enjeu d'équité aussi. Il
y a plusieurs citoyens qui, comme vous et moi, paient des taxes et des impôts et qui, malheureusement, n'ont
pas accès à un médecin de famille, même des parents de jeunes enfants,
avec tous les contrecoups qui en découlent : de voir ces gens-là
fréquenter l'urgence, de voir des urgences débordées,
de voir des maladies aussi se compliquer, des situations médicales devenir plus
difficiles à gérer, entraîner plus de coûts à long terme.
Donc, on est bien conscients qu'il y a certainement
des problèmes. Et on doit aussi faire le constat que ce gouvernement-là, qui a été au pouvoir de 2003 à 2012, n'a pas réussi, bien évidemment, à régler la situation. Et
là on a le gouvernement qui revient
après 18 mois et qui arrive avec toutes sortes de réformes pour corriger les
problèmes qu'il a, en bonne partie, créés, sauf que le problème, c'est
qu'on peut bien s'entendre sur l'ampleur des problèmes, mais encore faut-il mettre de l'avant les bonnes solutions
pour que ce soient les bons résultats qui apparaissent. Or, ce n'est pas du
tout ce qui est présenté dans le projet de loi n° 20.
Mais, avant
de m'arrêter spécifiquement à l'ensemble des problèmes que soulève le projet de
loi n° 20, j'aimerais d'abord
parler, je dirais, des vices démocratiques, des vices législatifs, des
problèmes de respect, je vous dirais, de nos institutions, de ce respect le plus élémentaire qu'on devrait avoir
lorsque l'on présente un tel projet de loi, surtout lorsque c'est un
projet de loi qui a une telle portée, qui a une telle ampleur, qui risque de
bouleverser autant la pratique médicale et
l'accès aux soins et qui va toucher les citoyens dans quelque chose qui leur
tient à coeur profondément, bien sûr,
c'est leur santé. Et c'est aussi le traitement de la maladie, de leurs maladies
potentiellement, de celles de leurs enfants, de celles de leurs parents, de leurs proches. Donc, ça touche absolument
tout le monde. C'est loin d'être banal, le propos du projet de loi, la
réforme qui l'amène.
Or, on
assiste à un projet de loi qui est en fait une coquille. Le projet de loi qu'on
a devant nous n'a pas le contenu qui
nous permet de connaître le détail de comment on va en venir à appliquer cette
réforme-là. Donc, oui, c'est un projet de loi qui vient imposer des
quotas, c'est à peu près ça qu'on apprend dans le projet de loi, qui vient
bouleverser complètement la pratique de la
médecine de famille au Québec en implantant des quotas, en implantant donc des
seuils de pratique, avec des pénalités énormes, financières, mais c'est
juste ça. Après, pour ce qui est du détail, tout ça va se faire par voie réglementaire. Et vous n'êtes pas
sans savoir, M. le Président, avec toutes vos années d'expérience, qu'on
ne peut pas demander aux parlementaires, aux
députés, aux élus de la population, pour quelque chose qui est si fondamental
un chèque en blanc. On ne peut pas leur
dire : On va complètement revoir la pratique de la médecine au Québec,
mais faites-nous confiance, on va
arriver, là, avec une série de règlements qui vont venir détailler les choses.
Non seulement c'est un affront à
notre vie démocratique ici, comme Assemblée législative, mais c'est un affront
aussi à tous ceux qui pratiquent la médecine, à tous ceux qui
s'efforcent, au quotidien... qu'ils soient médecins ou qu'ils soient
infirmiers, travailleurs sociaux,
inhalothérapeutes, nutritionnistes, tous ceux qui sont mis à contribution... de
ne pas être capables de mesurer,
avant que ce projet de loi là soit décortiqué en une multitude de règlements...
de pouvoir savoir vraiment ce qu'il va en être. Donc, ça, c'est un
premier vice démocratique très, très important.
• (17 h 40) •
Bien sûr, ce
qui est aussi très grave, c'est l'absence complète... et mon collègue en
parlait, et j'ai le sentiment, pour
avoir entendu plusieurs de mes collègues, qu'à peu près tous les collègues de
l'opposition officielle ont abordé cette question-là, c'est l'absence de consultation. Ça, évidemment, c'est un
problème récurrent que l'on voit depuis l'arrivée de ce gouvernement au pouvoir il y a un petit peu
plus d'un an. Et il y a quelque chose là-dedans qui m'échappe profondément. On l'a vécu avec le projet de loi
n° 10, avec lequel tout le réseau en ce moment est en train de se dépêtrer.
Toutes les énergies du réseau, plutôt que
d'être à soigner des gens en ce moment et essayer d'améliorer les choses pour
les personnes qui sont malades, pour les personnes qui sont handicapées, pour
les personnes qui ont un problème de toxicomanie,
pour les personnes qui ont une déficience... Plutôt que d'être en train de
focusser sur les bonnes priorités, ils
sont en train de gérer une réforme majeure du réseau de la santé et des
services sociaux, des changements de chaise, des gens qui perdent leur expertise, qui s'en vont dans un autre domaine
pour lequel ils n'ont aucune expertise, parce que, bon, ils ont plus
d'expérience, des chaises qui sont abandonnées. On me racontait, chez nous,
qu'on a réussi à développer une expertise en soins palliatifs dans Lanaudière,
au cours des deux dernières années, avec des gens qui se sont dédiés, qui ont vraiment développé les soins palliatifs à
domicile. Or, les personnes qui ont l'expertise ou bien doivent toutes quitter
ou bien doivent changer de chaise. Donc, on
va recommencer avec des gens qui n'ont aucune espèce d'expertise dans le
domaine.
Donc, bref,
c'est ça en ce moment qui occupe tout notre réseau, avec des contrecoups
énormes pour l'efficacité des services,
pour l'accès aux services. Et pourquoi on en est dans cette situation-là, qui
est si difficile? Bien, c'est, entre autres,
parce qu'on n'a pas mis le réseau dans le coup. On n'a pas mis les gens qui
sont aux premières loges de cette offre de services, de soins, au quotidien,
qui connaissent le fonctionnement de toutes ces entités et de tous ces services
comme il faut... on ne les a pas mis
dans le coup, donc là on vit des contrecoups, on vit une désorganisation
complète de notre réseau de la santé
et des services sociaux avec des impacts qui risquent d'être excessivement
néfastes. On le voit déjà à plusieurs égards.
Alors là, on
aurait pu se dire : Bien, le gouvernement a appris, le gouvernement ne
refera pas la même chose, le gouvernement va essayer, cette fois-ci,
d'être en phase et de bénéficier des lumières, de l'expertise des gens qui travaillent au quotidien avec les patients, des
gens qui travaillent au quotidien avec les personnes vulnérables, des médecins,
les premiers concernés. Eh bien, non, c'est
exactement la même recette. Et il semble bien que la recette, s'il n'y a pas un
coup de barre qui est donné et que nous ne
sommes, malheureusement, pas entendus... Mais j'ai espoir, parce qu'il faut
toujours garder espoir, M. le Président. Eh bien,
force est d'admettre que, s'il n'y a pas de coup de barre qui est donné,
on risque bien de se retrouver dans la même situation où on va réformer
complètement le système, l'organisation des services
de médecine familiale de première ligne pour finalement n'avoir aucun résultat
et, même pire, avoir des contre-résultats,
des effets négatifs. Donc, c'est excessivement troublant, et je ne suis pas
capable de m'expliquer ce que ce
gouvernement et le ministre de la Santé ne comprennent pas dans l'intérêt de mettre
les gens qui sont concernés au premier
chef dans le coup. Moi, en tout cas, ma conception de la gouverne de l'État est
aux antipodes de ce que nous offre le
gouvernement, parce que je pense qu'il faut s'appuyer sur cette expertise-là
pas pour dire oui à toutes les demandes, pas pour n'être jamais critique, pas pour ne pas vouloir faire de
réforme, mais pour vouloir travailler, se nourrir, écouter et, après,
décider.
Là, ce qu'on
nous sert, et ça fait plusieurs fois que c'est la recette qu'on nous sert, on décide, puis après on détricote. On l'a vu, là, encore au cours des derniers jours
pour la hausse des tarifs dans les CHSLD. C'était évident que ça ne passait
pas la route, la hausse des tarifs dans les
CHSLD. Alors là, on est en train de refaire la même chose, comme on a fait
avec le projet de loi n° 10, comme on a fait avec les carrefours jeunesse-emploi, comme on fait avec les forums jeunesse des
différentes régions. Alors là, on aimerait
ça à un moment donné que le cran d'arrêt, là, il puisse s'appliquer du
côté du gouvernement pour des réformes qui sont mal entreprises et là on
en a, malheureusement, une devant nous.
Donc, une coquille, pas de contenu, tout va se
décider par voie réglementaire. Deuxièmement, une absence complète de consultation des principaux
concernés. Pire que ça, les exercices de consultation qui se font... On
l'a vu la fin de semaine
dernière... le ROME, qui a tenu une consultation interdisciplinaire très intéressante qui a débouché sur plein de recommandations constructives, qui avait été précédé, il y a
plusieurs mois, par une autre forme de consultation très intéressante, encore une fois, avec l'AQESSS, l'Institut du
Nouveau Monde, qui avait réuni des experts du milieu pour justement
dégager des pistes de solution, comment on pouvait revoir la pratique de la
médecine au Québec, comment on pouvait mieux dispenser les soins, favoriser l'accès, et, deux fois plutôt
qu'une, c'est une fin complète de non-recevoir du ministre de la Santé. Donc, ça, c'est une attitude qui, personnellement et, je pense, collectivement, de ce côté-ci de la Chambre, nous laisse complètement perplexes et qu'on a beaucoup,
beaucoup de mal à s'expliquer quand il me semble que le but de gouverner un État, c'est d'en arriver aux meilleures décisions
et non pas d'avoir raison à tout prix et de rester dans une voie, même
si tout le monde nous dit que c'est la mauvaise voie.
Un autre problème majeur, c'est d'avoir deux
lois dans une seule loi. C'est deux réformes majeures, parce qu'il y a toute la
réforme sur la procréation assistée, qui en elle-même... Et ce n'est pas pour
rien que les groupes qui défendent la procréation assistée sont si fâchés en ce
moment, c'est qu'on jumelle cette réforme-là, qui en soi aurait bien sûr mérité
une attention de premier ordre avec un projet de loi distinct, avec une autre
réforme majeure qui, là, concerne tous les
médecins et qui évidemment fait énormément de bruit, ce qui fait en sorte que ça occulte la
réforme, tout aussi importante,
qui touche les couples infertiles, qui touche toute la question
de la procréation assistée. Et donc c'est quoi, la logique? Pourquoi on fait ça? Pourquoi on ne se donne pas le
temps de bien faire les choses et de se dire : Bien non, on va
faire deux projets de loi parce que ce sont deux sujets majeurs? Donc, un autre
vice important.
Et mon
quatrième problème démocratique et,
je dirais, d'instrumentalisation, carrément, de l'Assemblée nationale, c'est de se faire dire, il y a deux semaines, je
pense, maintenant : Bien, ce projet de loi là, peut-être que finalement on
ne le mettra pas en vigueur. Déjà,
dans le projet de loi, c'est l'approche du bâton qui est mise de l'avant, mais
là ce n'est pas juste le projet de
loi, de par son contenu, qui a l'approche du bâton, c'est l'ensemble de la
démarche législative, c'est : Bien,
si on est capables de s'entendre, bien peut-être que, le projet de loi, on va
l'avoir adopté mais qu'on ne le mettra pas
en vigueur ou qu'on va retarder certaines parties qui pourraient être mises en
vigueur plus tard, puis on va attendre de
voir comment la négociation va aller. Mais là ça n'a aucun sens. À quoi on
sert, nous, ici? Est-ce qu'on est en train de débattre d'un projet de loi, de vouloir améliorer un projet de loi
qui, dans les faits, n'est qu'un épouvantail qui va être agité devant
les médecins et que, s'ils ne rentrent pas dans le rang... ou que, si on
n'arrive pas à s'entendre, bien là on le mettra en vigueur? Mais de
toute façon on va l'avoir dans notre
petite poche d'en arrière parce qu'on va l'avoir adopté.
Ça, bien franchement, M. le Président, je n'ai
pas l'expérience que vous avez, je n'ai pas l'expérience non plus de la leader de l'opposition officielle, mais c'est la première fois en tout cas que je vois ça de ma vie de parlementaire.
Et je trouve que c'est un précédent
excessivement troublant qui est un manque de respect grave à l'égard
de notre institution fondamentale
démocratique qu'est l'Assemblée nationale et de tout le pouvoir législatif, je
vous dirais.
Donc, ça, c'est pour les problèmes, je
dirais, démocratiques du projet de loi. Je pense que c'est déjà pas pire pour
qu'on puisse plaider que ce serait peut-être
un bon moment de revoir notre manière de faire les choses. Mais là on rentre
dans le fond du dossier, et là il y a
énormément de problèmes, mais surtout, avant les problèmes, c'est qu'il n'y a
pas de vision. Ce projet de loi là
n'est pas accompagné d'une vision globale qui nous dirait où on veut aller au
Québec, comment on va améliorer les choses en matière d'accès en santé
et services sociaux et, je vous dirais, de manière générale, en matière de santé. Donc là, on vient de faire une
mégaréforme des structures avec, selon moi, des impacts qui vont être
excessivement négatifs plutôt que positifs, et puis là on nous amène une autre
mégaréforme avec aucune espèce de vision qui accompagne ça.
• (17 h 50) •
Alors,
moi, ce que j'aurais aimé, c'est qu'on me dise qu'on va prendre le virage vers
la prévention, parce que vous savez
que tout dollar qui est investi en prévention en fait économiser au moins cinq
en curatif. Donc, elle est où, la vision du gouvernement en prévention? Elle est complètement absente. Donc, on
attend toujours le début du commencement d'une politique en prévention. Ensuite, où en sommes-nous dans
l'augmentation des heures d'ouverture? Augmenter les plages de disponibilité, faciliter l'accès, c'est
aussi ça, c'est aussi permettre que les gens puissent avoir accès à différentes
heures, bien entendu, aux services de première ligne.
Autre
gros problème : Quelle est la vision du gouvernement en matière
d'interdisciplinarité? Moi, j'ai travaillé très fort sur le projet de
loi n° 52 sur les soins de fin de vie. Tout le monde qui est venu nous a
dit à quel point l'interdisciplinarité,
c'était fondamental en médecine maintenant pour traiter les gens, à quel point
on pourrait faire des progrès, à quel
point on pourrait faire des petits miracles au quotidien si les infirmières
étaient plus mises à contribution... les auxiliaires, les travailleurs
sociaux, les psychologues. Parce que vous savez qu'il y a énormément de
problèmes qui pourraient être réglés en
amont aussi si on avait davantage accès à la psychothérapie, si on avait
davantage accès aux services sociaux
de première ligne. Tout ça est complètement occulté. Tout ça, en ce moment,
toute la vision passe par le médical, l'hospitalocentrisme.
Donc, une autre grave lacune. Elle est où, la vision sur l'interdisciplinarité
au gouvernement puis chez le ministre
de la Santé? Elle est où, la vision sur les soins à domicile, les soins à
domicile, qui, eux aussi, coûtent beaucoup moins cher, on le sait, que
les soins institutionnalisés? Donc, on la cherche encore. Elle est où, la
vision sur l'informatisation du réseau?
Comment on va s'en sortir, du bourbier du Dossier santé Québec? Quand est-ce
qu'on va voir la lumière dans ce dossier-là, alors, que, oui, ça
pourrait faciliter grandement les choses?
Donc, cette vision-là, on la cherche. Et, pendant
ce temps-là, on a un projet de loi qui vient fixer des quotas, où on va
venir minuter le temps de rencontre avec les patients. Donc, on vient changer
dramatiquement la pratique de la médecine. Et je n'ai pas besoin de répéter ce
que tous mes collègues ont dit. Moi, je n'en ai pas rencontré un... je n'ai rencontré aucun omnipraticien qui était en
faveur de la réforme et, bien sincèrement, j'ai rencontré plusieurs mères Teresa,
j'ai rencontré des gens qui ne calculent pas
leurs heures, qui travaillent excessivement fort, qui ont des approches
novatrices, qui rencontrent des
personnes vulnérables, qui ont des pratiques alternatives. Ce n'est pas des
gens qui ne pensent qu'à l'argent et à leurs portefeuilles. Et pourtant je n'ai
rencontré personne qui m'a dit : Ah! enfin, une réforme qui va favoriser
l'accès. Personne. C'est quand même
incroyable. On se dirait : Peut-être que je vais en rencontrer une, deux sur les
dizaines de personnes médecins à qui
j'ai pu en parler. Aucune. Aucune dans Lanaudière. De ce que je comprends, c'est une denrée aussi rare
dans les autres régions du Québec. Donc, ça, c'est excessivement troublant, puis il me semble que ça devrait faire s'allumer, sur le tableau de bord de ce gouvernement,
quelques signaux lumineux.
Et
moi, je dois vous dire que je suis excessivement préoccupée pour les personnes vulnérables parce que j'ai été
ministre déléguée aux Services sociaux. Et déjà qu'on sait que, les personnes
vulnérables, les personnes qui ont une déficience physique ou intellectuelle,
les personnes autistes, les personnes toxicomanes, on détecte beaucoup moins facilement, chez ces personnes-là, des problèmes
de santé, parce qu'on dirait qu'on est tout absorbé par leur déficience. Ce
sont des personnes qui s'expriment moins facilement, ce sont des personnes qui souvent
ont de multiples conditions médicales.
Et là que va-t-il arriver? Moi, je veux bien qu'on me dise : Il va y avoir
un système de points, puis on va tout calculer
ça. O.K. Comment on va calculer, là? Les personnes vont devenir des numéros,
puis là on va cocher les cases, puis
là ça va s'additionner, puis il y a un chiffre magique qui va sortir avec une
rémunération, avec une durée approximatives?
Donc, ça, je trouve
que c'est excessivement préoccupant. Et, au lieu de favoriser la pratique
médicale de ces mères Teresa, de ces gens
qui sortent des sentiers battus, qui s'occupent des personnes qui ont des
problèmes de santé mentale, qui sont
toxicomanes, qui ont des déficiences, qui sont autistes, de ces personnes, de
ces médecins qui s'occupent de ces
cas lourds, au lieu de les aider, de les soutenir, bien on va venir jouer de
différentes manières dans leur pratique. Je trouve ça inacceptable. Et j'espère que le ministre de la Santé et
son gouvernement vont se ressaisir. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, Mme la députée de
Joliette, pour votre intervention. Et,
pour la poursuite du débat, je cède maintenant la parole à M. le député de
Beauharnois. À vous la parole, toujours sur le projet de loi n° 20,
M. le député, pour, maximum, cinq minutes, compte tenu de l'heure.
M. Guy Leclair
M.
Leclair : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, ce que nous
vivons en santé est le résultat, malheureusement, de déjà quelques années, déjà trop longtemps, M.
le Président. On se souviendra que le ministre Bolduc, dans ses belles années, n'a pratiquement pas fait avancer les
dossiers en santé. J'ai des dossiers que je pourrais parler personnellement,
de mon coin. Je n'embarquerai pas là-dessus tout de suite.
M. le
Président, je veux juste vous faire un portrait : le gouvernement a, à sa
tête première, un médecin premier ministre;
après ça, comme ministre de la Santé, qui d'autre que le représentant de
l'ordre des médecins... Imaginez ça, là, M. le Président,
là. On se dit : Bon, bien, les gens n'ont pas trop confiance aux
politiques, on se dit : Là, ce n'est plus un médecin avec sa spécialité, il représente l'ordre,
là. Lui, là, il voit grand ça fait des années, il parle à tous les médecins,
il voit ce qui se passe. Bien, on espérait
qu'il voyait ce qui se passe, on espérait qu'il comprenait ce qui se passe dans
le monde de la santé. On le sait, là,
pour le commun des mortels, là... Pas obligé d'être député, pas obligé d'être
ministre de la Santé. On sort dans la rue, on pose des questions aux
gens, aux citoyens du Québec. Le gros problème que nous avons... un des gros problèmes, parce qu'on en a de plus en plus dans
les derniers mois, mais un des gros problèmes a toujours été la santé.
Alors, on se
dit : En ayant un ministre de la Santé qui fait partie de... il représente
l'ordre, c'était le négociateur... donc,
tu te dis : Au minimum, on va peut-être lui donner une chance. On va lui
donner une chance. Il doit connaître le dossier plus qu'un médecin avec
sa propre spécialisation. Lorsqu'on négocie, M. le Président, pour un ordre,
bien, quelque part, on doit avoir certaines
qualités. On ne peut pas devenir un négociateur fin sans connaître ce qui se
passe dans le monde de la santé.
Donc, notre ministre actuel de la Santé doit vraiment connaître c'est quoi, les
problèmes dans les urgences; c'est
quoi, les problèmes dans les chirurgies; c'est quoi, les problèmes dans les
chirurgies; c'est quoi, les problèmes
de nos personnes âgées qui n'ont pas de soins à domicile encore. Il doit avoir
entendu depuis les dernières années, avant qu'il soit, bien entendu,
ministre de la Santé, un paquet de solutions. Est-ce qu'elles tenaient toutes
debout? Peut-être que non, mais, au minimum,
en rassembler quelques-unes pour s'assurer qu'on mette de l'avant au moins une
pointe d'espoir pour les gens du Québec face au système de santé.
Pire que ça,
M. le Président, lorsqu'on représente un groupe puis on négocie pour un groupe,
une des forces qu'on doit avoir, une qualité première, au-delà de
comprendre le système — permettez-moi
d'en douter, M. le Président, aujourd'hui — il faut être capable de régler des conflits,
il faut être capable d'être une personne rassembleuse, trouver des solutions, suggérer une solution à la partie
de gauche, suggérer une solution à la partie de droite pour finir à la fin de
la journée... dire : Bon, bien, on se rapproche, tout le monde, on prend
cette décision-là, même si elle n'est pas parfaite. On avance comme ça. Puis au moins on avance.
Croyez-le ou non, M. le Président... je crois que vous avez entendu mes
collègues depuis déjà plusieurs jours...
un total manque de consultation de la part du ministre de la Santé envers tous
les gens, tous les acteurs de la santé. On les revire du rebord de la main, puis on se dit : Moi, ministre de la Santé, je fais un projet de loi,
je sais où est-ce que je m'en vais. Je n'ai
jamais vu ça, M. le Président. Excusez-moi,
je n'ai jamais vu ça, quelqu'un avec supposément
autant de compétences même pas capable d'avoir une partielle de groupe derrière
lui pour s'assurer au moins qu'il y ait quelque chose qui tienne dans un
de ses projets de loi.
Là, ici, on
parle du projet de loi n° 20, M. le Président, mais dans tous les autres
projets de loi il a fallu aller en bâillon.
Je n'ai jamais vu le monde de la santé être aussi en rogne. Imaginez-vous les
services en bout de ligne. On n'a
pas encore parlé du citoyen qui attend toujours,
lui, là. Il attend toujours à l'urgence. Si son jeune enfant a une grippe, il
va attendre à l'urgence encore. On n'a pas
trouvé de solution dans les CLSC. On avait supposé, un jour, faire une entente
avec les pharmaciens pour s'assurer peut-être
qu'on pourrait renouveler les prescriptions. On avait tout mis ça de l'avant
sans le mettre sur papier. Malheureusement, nous n'étions que minoritaires dans ce temps-là. Mais aujourd'hui on fait face à quoi? Absolument rien, M. le Président, rien.
Le Vice-Président (M. Gendron) :
Compte tenu de l'heure, je me vois dans l'obligation...
M. Leclair : ...
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Oui, oui, il va vous rester 15 minutes. Il va vous rester 15 minutes sur votre
intervention.
Ajournement
Alors, compte
tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée nationale sont ajournés à mardi 19 mai 2015, à
13 h 45. Les travaux sont ajournés.
(Fin de la séance à 18 heures)