(Neuf
heures quarante-six minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, bonjour, tout le monde. Vous pouvez prendre
place.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Alors,
pour débuter cette journée, nous débuterons avec la rubrique des déclarations de députés, et, sans plus tarder, je vais reconnaître
la députée de Richmond.
Rendre hommage au hockeyeur
Joseph Conrad Étienne «Connie» Dion
à l'occasion de son décès
Mme Karine Vallières
Mme
Vallières : Merci, Mme la Présidente. Ma déclaration d'aujourd'hui en est une de
reconnaissance, où j'invite mes
collègues de l'Assemblée nationale à rendre hommage à M. Joseph Conrad Étienne
Dion, un grand homme de chez nous,
décédé le 7 novembre dernier. Né en 1918, celui qu'on appelait
affectueusement Connie a connu une brève carrière militaire, a travaillé à la mine d'Asbestos, qu'il
a quittée pour jouer au hockey dans la Ligue nationale. Ayant appartenu,
entre autres, aux Canadiens de Montréal, c'est avec les Red Wings de Détroit que ce
fougueux gardien de but, du haut de ses 5 pieds 4 pouces,
s'est illustré.
Cependant,
au-delà de ses exploits sportifs, je
veux souligner ici sa passion à faire découvrir et à faire aimer notre sport national, mais surtout sa persévérance à
doter la ville d'Asbestos d'un aréna couvert, l'un des premiers au Québec.
Le 8 décembre, l'aréna Connie-Dion fêtera ses 60 ans d'existence.
Au nom de tous les
hockeyeurs, de leurs parents et de la communauté, M. Dion, merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la
députée. Pour la prochaine
intervention, je reconnais M. le député d'Abitibi-Ouest.
Féliciter Mme Mariette Davidson,
lauréate du prix Hommage Aînés
M. François Gendron
M.
Gendron : Oui, Mme la Présidente. Le 6 novembre dernier, une citoyenne de ma circonscription, Mme Mariette Davidson, recevait le prix Hommage Aînés pour
la région de l'Abitibi. Cet hommage souligne l'engagement et la contribution à l'amélioration du bien-être des
aînés, de leurs conditions et de leur place dans la société. À mon tour, je
veux témoigner le dévouement de Mariette, une femme pour qui le soutien des
aînés est vraiment une seconde nature tellement elle s'investit au sein de sa
communauté locale et auprès des organismes régionaux.
Pour
commencer, Mariette ne sait jamais dire non. Les aînés peuvent toujours compter
sur elle, elle est disponible, efficace
et d'une écoute facile. Elle donne son temps, beaucoup de son temps, de son
énergie et de son amitié. Elle dispense des soins et son attention avec
une très, très grande générosité.
Engagée,
discrète, mais combien déterminée, Mme Davidson ne ménage aucun effort lorsqu'il
s'agit d'améliorer et de défendre les
droits des aînés et des personnes vulnérables. À titre de député, je remercie profondément Mariette pour
ce précieux don de soi.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député. Pour
la prochaine déclaration, M. le député de Fabre.
Souligner le travail du regroupement
Forme ta vie à l'occasion de la Journée
internationale des droits de l'enfant
M. Gilles Ouimet
M.
Ouimet
(Fabre) : Merci, Mme la Présidente. En lien avec la Journée
internationale des droits de l'enfant, j'aimerais
souligner l'engagement et le dévouement des employés du regroupement Forme ta
vie, secteur ouest de Laval. Ces
femmes coordonnent les actions d'une trentaine d'organismes provenant de divers
milieux et qui ont tous pour but de favoriser
l'égalité des chances et le développement des jeunes. Avec l'aide de leurs
partenaires, elles offrent divers ateliers parents-enfants, des ateliers culinaires ainsi qu'une formation
d'animateur certifié pour les adolescents de 12 à 17 ans. Elles
fournissent également à la communauté des trousses pour bouger, pour socialiser
ou pour résoudre des conflits.
Au nom de nos familles et de nos jeunes
qui bénéficient de vos actions, j'exprime un grand merci à Mme Sabrina Lapalme, agente de projet, à
Mme Samira Benaissa, agente de liaison, et à Mme Natasha Patry,
accompagnatrice et formatrice.
Continuez à promouvoir de saines habitudes de vie et à créer un sentiment
d'appartenance envers notre vie de quartier auprès de nos jeunes. Merci,
Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Toujours à la
rubrique des déclarations, je reconnais maintenant M. le député de Granby.
Rendre hommage à M. Fernand Bélanger, intronisé
au Temple de la renommée de l'Association
régionale de soccer Richelieu-Yamaska
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : Merci, Mme la Présidente. Le 15 octobre
dernier, lors du 13e Gala annuel de l'Association régionale de
soccer Richelieu-Yamaska, un ex-journaliste de La Voix de l'Est de
Granby a été intronisé au Temple de la renommée de l'association à titre de bâtisseur média, Fernand
Bélanger, un des pionniers des Cosmos de Granby, un homme d'exception qui, pendant
plus de 26 ans, a tout mis en oeuvre pour aider au développement de ce
sport très prisé par nos jeunes, le soccer.
M. Bélanger n'en
est pas à ses premières reconnaissances du monde du soccer. Il a notamment déjà
reçu la Médaille du centenaire de
l'Association régionale de soccer Richelieu-Yamaska, la Plume d'or de la
Fédération de soccer du Québec, et, depuis 2011, il est membre du
panthéon du soccer de Granby.
Fernand, tu es un
exemple pour nous tous. Ton implication auprès des jeunes, ta façon de les
mobiliser est inspirante. Je te remercie
pour ta persévérance et ton dévouement pour la communauté de soccer granbyenne.
J'en profite pour faire un clin
d'oeil aux joueurs et aux entraîneurs des Cosmos de Granby, qui ont remporté
huit prix lors du gala annuel, dont celui de Club de l'année. Donc,
merci, Fernand. Et félicitations à tous!
• (9 h 50) •
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Et, pour sa déclaration du
jour, je reconnais M. le député de Côte-du-Sud.
Rendre hommage à la Ferme
ancestrale Landry inc.
M. Norbert Morin
M.
Morin : Merci, Mme la Présidente. Je désire aujourd'hui
souligner un événement de marque en cette Année internationale de l'agriculture familiale. M. Jérôme Landry et sa
conjointe, Mme Émilie Fortin, est, depuis la semaine dernière, la huitième génération à la tête de la
Ferme ancestrale Landry, établie à Cap-Saint-Ignace depuis 1771. Bien que l'agriculture familiale comporte plusieurs
défis, le couple entend bien perpétuer la tradition en élevant leurs trois
enfants sur la ferme.
Les
nouveaux propriétaires de l'entreprise vieille de près de 250 ans sont
également impliqués dans leur milieu et
dévoués à leur profession. En effet, Jérôme est président de la coopérative
agricole de Montmagny et Émilie fait partie des conseils
d'administration de la coopérative alimentaire IGA et des agricultrices de la
Chaudière-Appalaches Est.
Félicitations
à vous pour le renouvellement de cette magnifique tradition, et que cette terre
reste la vôtre pour encore plusieurs générations. Mes félicitations!
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. M. le député de Mercier, à
vous la parole.
Souligner le travail du Centre québécois
du droit de l'environnement
M. Amir Khadir
M.
Khadir : Merci, Mme la Présidente. Je veux vous parler du
Centre québécois du droit de l'environnement. En fait, en août dernier, la compagnie TransCanada a reçu un certificat
du ministère de l'Environnement l'autorisant à opérer des travaux de forage
dans l'estuaire du Saint-Laurent, à la hauteur de Cacouna. Cette portion du
fleuve est un écosystème unique présentant
une telle diversité qu'il en devient un pôle touristique naturel pour la région
et contribue à la réputation du Québec.
Le ministère a donné à cette compagnie le permis de forer au
milieu de ce que les spécialistes désignent
comme la pouponnière à bélugas, une des 18 espèces qui figurent sur la liste québécoise
des espèces menacées.
Alors,
il me fait plaisir aujourd'hui de souligner le travail formidable du Centre québécois
du droit de l'environnement, qui fêtait, mardi dernier, ses 25 ans d'existence.
Ce regroupement a fait partie de l'initiative citoyenne qui a su plaider
l'arrêt des travaux de forage devant les
tribunaux, une leçon pour le ministère et le gouvernement en faveur du respect de l'environnement et
de nos lois. Alors, longue vie au Centre québécois du droit à l'environnement!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Maintenant, au tour du député de Portneuf
pour sa déclaration.
Féliciter
trois citoyens honorés lors de la
cérémonie de l'Hommage au civisme
M. Michel Matte
M.
Matte : Merci, Mme la Présidente. Lors de la 29e cérémonie du prix Hommage au
civisme, la ministre de la
Justice, Mme Stéphanie Vallée, a remis la Médaille du civisme à Mme Annick
Lajoie et à M. Stéphane Fraser en reconnaissance
de leurs actes héroïques sur deux scènes d'accidents différents. Ils ont fait
preuve d'un grand courage pour extirper
les conducteurs des véhicules. Annick Lajoie, de Saint-Raymond, a procédé aux
gestes de la première intervention et de réanimation en attendant
l'arrivée du secours lors d'un accident survenu en juin 2013.
Une mention
d'honneur du civisme a également été décernée à M. David Gauvin, de Deschambault,
alors qu'il s'affairait à éteindre
les flammes dans le même accident. Pour sa part, M. Fraser, de
Saint-Raymond, est venu en aide, en décembre dernier, à un conducteur
prisonnier dans sa voiture en flammes. Il a, lui aussi, au moyen de la neige,
réussi à maîtriser l'incendie. Ces trois Portneuvois ont assurément permis de
sauver des vies. Je veux leur dire toute notre reconnaissance et combien, à
titre de député de Portneuf, je suis fier du courage dont ils ont fait preuve.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le
député. Et toujours
à la rubrique des déclarations
de députés, je vous cède la parole, M. le député de Deux-Montagnes.
Sensibiliser les citoyens
à la maladie de Crohn
M. Benoit Charette
M.
Charette : Merci, Mme la Présidente. Dans
le cadre du Mois de la sensibilisation aux maladies inflammatoires de l'intestin, je voudrais prendre quelques
instants pour vous sensibiliser à une maladie peu connue du grand public, la
maladie de Crohn.
La maladie de
Crohn est une maladie chronique et incurable. Elle s'attaque principalement aux
parties du tube digestif.
Malheureusement, encore aujourd'hui, les médecins ne sont toujours pas en
mesure d'expliquer les causes exactes de la maladie. Au Canada, ce sont
plus de 200 000 personnes qui en sont atteintes. Au Québec seulement, on
parle de 30 000 personnes, dont 11 000 jeunes de moins de 25 ans.
Vous comprendrez qu'avec des chiffres aussi
importants nous devons continuer de sensibiliser et de faire connaître cette maladie puisque le nombre de cas
est en constante progression. Nous comptons sur le support de la population pour faire avancer la recherche pour
qu'un jour nous puissions y trouver un remède. Et enfin, Mme la Présidente,
vous me permettrez de saluer deux personnes
dans nos gradins, Mme Catherine Lescelleur et M. Nicolas Delisle, tous
deux bénévoles à la fondation Crohn et Colite Canada. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député. Et,
pour la prochaine déclaration, je cède la parole au député de
Huntingdon.
Souligner le travail
des pompiers volontaires
de Howick et Très-Saint-Sacrement
M. Stéphane Billette
M.
Billette : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'aimerais profiter de
cette tribune pour souligner le travail exceptionnel des pompiers
volontaires de Howick et Très-Saint-Sacrement.
Le travail des pompiers volontaires est
essentiel dans nos vies. Ils sont de véritables figures de bravoure et de courage. À tout moment du jour ou de la nuit, ils
sont sur le qui-vive, prêts à répondre à l'appel en cas d'urgence et à assurer
la sécurité de nos concitoyens. Certains des pompiers volontaires de Howick et
Très-Saint-Sacrement sont en poste depuis plus de 20 ans. En mon nom et celui
des citoyens de mon comté, j'aimerais les féliciter personnellement. Messrs. Robert, Cullen,
MacFarlane, Tannahill, Raithby, Elliott, Lavoie, Templeton, McRae et Lacoste, I
want to express my thanks for your hard work, intense
courage and remarkable dedication for the last 20 years. Your commitment
to our community, which is
to save lives at the risk of your own, is spectacular. Congratulations and
thank you very much to all of you!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Maintenant, M. le
député de Matane-Matapédia.
Souligner le dévouement
des employés
pour maintenir les services aux
étudiants du cégep de Matane
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : Mme la
Présidente, la semaine dernière, le gouvernement libéral a confirmé de nouvelles compressions budgétaires
au sein du réseau collégial. Pour le cégep de Matane, ça signifie 350 000 $
de coupes additionnelles dans le cadre de l'exercice financier en cours. Cette semaine, afin de
signifier clairement leur opposition à l'application de ces compressions et dans le but de sauvegarder les
services offerts aux étudiants, les employés du cégep de Matane se sont entendus sur une mesure de solidarité sans
précédent : tous les groupes d'employés se sont unanimement engagés à
verser deux jours de leur salaire
dans un fonds qui permettra de maintenir les services aux élèves et d'organiser
deux jours de réflexion et d'étude en
collaboration avec les étudiants sur les thèmes de développement régional et de
solidarité sociale. On est rendus là, Mme la Présidente : les
employés mettent leur argent en jeu pour sauver les services.
Les
membres de la communauté collégiale de Matane ont à coeur le maintien des
services de qualité aux élèves et le
développement de nos communautés. Tout comme eux, je souhaite rappeler au
gouvernement libéral que l'éducation n'est pas une dépense, l'éducation
est un important investissement pour l'avenir de nos régions et du Québec.
Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député. Et ceci
met fin à la rubrique des déclarations de députés, et je suspends les
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 58)
(Reprise à 10 h 19)
Le Président :
Bon jeudi matin, mesdames messieurs. Nous allons nous recueillir quelques
instants.
Merci. Veuillez vous
asseoir. Ou presque, ou presque.
Présence de la consule générale des États-Unis
d'Amérique à Montréal, Mme Nina Maria Fite
J'ai le plaisir de
souligner la présence dans nos tribunes de la consule générale des États-Unis
d'Amérique à Montréal, Mme Nina Maria Fite, à l'occasion de sa visite de prise
de poste.
Présence de l'équipe féminine de soccer du
Rouge et Or de l'Université Laval,
accompagnée du recteur, M. Denis Brière
J'ai
également le plaisir de souligner la présence des membres
de l'équipe féminine de soccer du Rouge et Or de l'Université Laval,
récipiendaire du trophée Gladys Bean...
Des voix :
...
• (10 h 20) •
Le
Président : Votre
enthousiasme délirant m'a empêché de vous dire qu'ils avaient gagné, ils
étaient récipiendaires du trophée Gladys Bean 2014 et qu'elles sont
accompagnées du recteur de l'Université Laval, M. Denis Brière.
Présence de M. Yvon Picotte, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale
Et
on a aussi un autre de nos anciens membres ici, M. Yvon Picotte, député de Maskinongé,
qui a été député avec nous pendant plusieurs années.
Alors, nous
poursuivons les affaires courantes.
Déclarations ministérielles
Nous
avons, à la rubrique Déclarations
ministérielles, une déclaration de Mme la ministre de la Famille. Vous avez cinq minutes pour
faire votre déclaration, Mme la ministre.
Politique familiale du
gouvernement
Mme
Francine Charbonneau
Mme
Charbonneau : M. le Président, M. le premier ministre, chers collègues, je suis très heureuse aujourd'hui de profiter de l'occasion d'une déclaration ministérielle pour réitérer l'engagement de notre gouvernement de soutenir les familles du Québec. Comme vous le savez, notre nation s'est dotée,
au fil du temps, de nombreuses mesures législatives et fiscales avantageuses et profitables à nos
concitoyens qui veulent fonder une famille. Ces mesures appréciées de nos
familles constituent le fondement de notre politique familiale. L'assurance
parentale, le soutien aux familles les plus vulnérables
et les services de garde éducatifs subventionnés sont d'ailleurs
au coeur de cette politique qui a pour objet de soutenir nos familles, M.
le Président. D'entrée de jeu, je joins ma voix à celle du ministre
de l'Emploi et de la Solidarité sociale pour vous informer et rassurer nos concitoyens
que nous préserverons le programme québécois d'assurance parentale, programme qui
suscite d'ailleurs l'envie partout au Canada.
Je
souhaite également les informer que nous poursuivrons notre mission
de soutenir les familles les plus vulnérables. Comme vous le savez, nous avons pris l'engagement de moderniser et
d'assurer la pérennité de l'ensemble de nos services publics.
Nos services de garde éducatifs subventionnés ne font pas exception. Pour cette raison, je
souhaite informer cette Assemblée de
notre intention d'assurer la pérennité du programme des services de garde éducatifs subventionnés et la poursuite
de ces grands enjeux sociaux. Pour ce faire, nous déposerons sous peu à l'Assemblée nationale des projets
de loi qui feront état de notre proposition gouvernementale et qui se déclinera comme suit : la
révision de la contribution payée par
les parents, l'optimisation du financement des services de garde, la révision
des modalités en ce qui a trait à la
création des places à contribution réduite.
Cette
proposition s'appuie sur les principes fondamentaux suivants : assurer un
accès universel et équitable à des services de garde de qualité à un
coût respectueux de la capacité de payer de chaque famille, assurer
l'incitation et le soutien de la présence
des femmes sur le marché du travail, favoriser l'égalité des chances pour les
enfants dans les milieux défavorisés
et pour ceux ayant des besoins particuliers, miser sur l'accès à un programme
éducatif de qualité pour tous les
enfants qui fréquentent les services de garde, rétablir l'équilibre entre la
part payée par les parents utilisateurs et celle assumée par l'ensemble des contribuables, assurer la poursuite de la
création de nouvelles places selon les besoins en misant sur une offre diversifiée de services de garde de qualité à meilleurs coûts et assurer l'utilisation
optimale des places en service de garde déjà existantes, qu'elles soient
subventionnées ou non.
Nous
proposerons que tous les parents du Québec continuent à payer 7,30 $ par jour pour la place de leur enfant.
Cette contribution serait indexée
annuellement à compter du 1er janvier 2016. Par ailleurs, une contribution
additionnelle, modelée selon les
revenus, serait payable lors de la déclaration des revenus et serait aussi
indexée. Ainsi, les tarifs de garde seraient maintenus à 7,30 $ par
jour pour tous ceux ayant un revenu familial de moins de 50 000 $ et
atteindraient un maximum de 20 $ par
jour pour un revenu familial de 150 000 $ et plus. À titre d'exemple,
les tarifs seront modulés à 8 $ par
jour pour un revenu familial de 75 000 $, à 11,75 $ par jour
pour un revenu familial de 100 000 $ et de 15 $ par jour
pour un revenu familial d'autour de 122 000 $.
D'autre part,
le soutien aux familles nombreuses. Nous proposons qu'il n'y ait aucune
contribution additionnelle à compter
du troisième enfant inscrit en service de garde simultanément. Parallèlement à
la modification de la contribution parentale,
nous proposerons de moderniser et optimiser les services de garde au Québec en
révisant certaines dépenses, tout en
assurant le bien-être des enfants et la qualité du programme éducatif. Nous
souhaitons ainsi améliorer le modèle d'organisation du travail et
ajouter des exigences qui viseraient à maximiser l'utilisation des places
subventionnée…
Des voix : …
Le Président : S'il vous
plaît! Est-ce que j'ai un consentement pour dépasser le cinq minutes?
Des voix : …
Le Président : Consentement.
Madame.
Mme
Charbonneau :
… — merci — et le renforcement de la surveillance de la
présence réelle des enfants tant en milieu familial qu'en installation.
À ce moment-ci, je tiens à rassurer tous les
parents et les futurs parents de notre intention de poursuivre la création de places à contribution réduite. Par
ailleurs, nous proposerons que les centres de la petite enfance contribuent
dorénavant aux coûts d'immobilisation à la
hauteur de 50 % ou optent pour la location d'espaces. Des projets
pourraient aussi se réaliser par des partenariats avec les garderies non
subventionnées.
En terminant,
nos propositions permettront d'assurer que nos services de garde éducatifs à
l'enfance subventionnés soient de
qualité, accessibles, équitables pour l'ensemble de nos familles. M. le
Président, je tiens à réitérer l'intention de notre gouvernement de soutenir toutes les familles du Québec en
assurant la pérennité des services qui leur sont offerts. Notre
engagement envers tous les parents du Québec est sans équivoque, M. le
Président. Merci.
Le
Président : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la
parole à M. le député de Terrebonne, porte-parole de l'opposition
officielle en matière de famille et de lutte contre l'intimidation, pour ses
commentaires. M. le député.
M.
Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci, M. le Président. Cette journée du 20 novembre ne sera pas nécessairement
très positive dans l'histoire de la
famille au Québec. Aujourd'hui, c'est la
Journée internationale des droits de l'enfant, et c'est
cette journée que la ministre
choisit pour sabrer dans la politique familiale et sabrer également
dans l'accès des services de garde de qualité auxquels nous avons droit
depuis de nombreuses années.
C'est une trahison pour la classe moyenne, M. le Président, ce qui nous a été annoncé ce matin, une trahison à la fois pour celle-ci, mais aussi pour l'ensemble des
partenaires du réseau, qui étaient en large
partie contre toute modulation selon les revenus dans l'accessibilité
aux services de garde.
Dimanche,
le 9 novembre dernier, près de
50 000 personnes se sont
déplacées partout à travers le Québec pour lancer un cri du coeur à la
ministre. Aujourd'hui, voici le message qu'elle nous lance : Gens du Québec, je vous ai compris. Et paf!
On décide d'augmenter selon le salaire les tarifs en service de garde de
4 $ à 8 $ par jour pour la classe
moyenne, une augmentation, M. le Président, entre 1 000 $ à
2 000 $ par année par enfant. C'est
scandaleux! C'est le bon vieux réflexe de taxer du Parti libéral. On peut voir que, malgré
le temps, ce réflexe perdure et est toujours bien présent dans la
mentalité de nos parlementaires d'en face.
Le PLQ brise
carrément aujourd'hui, M. le Président, sa promesse électorale qui a été faite
au cours du printemps dernier. Vous
vous rappelez, M. le Président, cette promesse qui disait à tous que
seulement indexer les tarifs en service de garde serait suffisant, que, si on
les augmentait de 1 $ ou 2 $ au fil des prochaines années, ça créerait un choc tarifaire incroyable pour les familles, ça serait terrible,
M. le Président, jamais le Québec ne serait capable de s'en relever. Aujourd'hui, regardez l'action du gouvernement.
Comprenez le cynisme qui règne face à nos politiciens lorsqu'on voit de telles décisions. Et je dois mentionner, M. le
Président, que le Parti libéral en est une cause principale, malheureusement.
Si, M. le
Président, la question ou la promesse avait été claire par rapport aux tarifs
en garderie lors de la dernière élection, pensez-vous que nous aurions
eu le même résultat? Pensez-vous, M. le Président, que nous aurions eu le même score dans La Prairie, dans
Saint-Maurice, dans Charlevoix, aux Îles-de-la-Madeleine? Pensez-vous que les Québécois de partout à travers la province
auraient dit : Oui, j'accorde ma
confiance, je fais confiance à ce premier ministre, à son équipe, qui
me dit la vérité? Je suis convaincu que non, M. le Président. Je suis convaincu
que le résultat aurait été très différent.
Et pourtant
on aurait dû s'en rendre compte, M. le Président, parce que l'histoire,
souvent, nous rappelle certaines leçons.
Et rappelez-vous du premier ministre Jean Charest, rappelez-vous
ce qu'ils nous avaient dit en 2003, ils
avaient dit :
Jamais on ne touchera aux tarifs à 5 $, jamais.
Si vous me faites confiance comme premier ministre, jamais nous ne l'augmenterons. Qu'est-ce qu'ils ont fait, M. le
Président, les libéraux, une fois rendus au pouvoir? Ils
ont augmenté les tarifs de 5 $ à
7 $. Et qu'est-ce qu'on a vécu aujourd'hui, en 2014? Exactement le même
film, le jour de la Marmotte. Nous avons décidé, M. le Président, d'augmenter les
tarifs selon les revenus, malgré la promesse de seulement les indexer. C'est un
«running gag», mais qui entretient largement le cynisme de la population face à
nos politiciens et à nos institutions,
que vous représentez, M. le Président.
Le premier
ministre disait : Personne ne se
scandalisera que quelqu'un qui gagne mon salaire, par exemple, paie 10 $ par jour. M. le Président, combien de
jeunes familles, au Québec, gagnent autour de 180 000 $ de revenu
familial? Est-ce que vous en connaissez
beaucoup? Moi, j'ai 30 ans, M. le Président, et je regarde les jeunes
parents qui m'entourent, qui sont à
l'heure de créer et de fonder une famille, je
n'en connais pas beaucoup qui gagnent 180 000 $ de revenu familial
puis qui vont être enthousiasmés de payer
10 $ par jour par enfant par année, M. le Président. J'appelle ça taxer la
classe moyenne.
• (10 h 30) •
Les gens qui
ont des enfants en garderie, ce sont des jeunes familles, c'est elles qui ont le plus de misère à arriver.
Les parents sont souvent en début de
carrière, comme on le mentionnait, puis ce n'est
pas eux qui ont les plus gros salaires. C'est sur la classe moyenne que le
fardeau va encore reposer. On a fait des choix collectifs, M. le Président, au
cours des dernières années, ces choix
sont remis en question aujourd'hui par le gouvernement libéral. C'est un
réseau, c'est des principes qui vont tomber
au cours des prochaines semaines et des prochains mois, des principes qui
étaient fondés sur l'égalité des
chances, sur la justice sociale, sur la solidarité, des mots que le Parti libéral, M. le Président, ne comprend pas, parce que les seuls mots qu'il comprenne, M. le Président, c'est celui du rapport de force, c'est celui de l'argent, mais
jamais des gens.
Lorsqu'on
regarde le réseau des services de
garde que nous avons au Québec,
c'est un réseau qui est admiré, qui est désiré par l'ensemble de
d'autres États du monde mais aussi de provinces canadiennes qui le citent en
exemple, M. le Président. Certains partis fédéraux le citent même
comme étant un modèle qu'on pourrait exporter partout à travers le Canada. Et aujourd'hui ce qu'on voit, c'est que le premier ministre décide de le sabrer et de le modifier et pas nécessairement pour
le mieux, comme vous avez pu le voir.
J'ai
l'impression, M. le Président, qu'on retourne en arrière. J'ai l'impression, M. le Président, que nos acquis disparaîtront. J'ai l'impression que les
familles de la classe moyenne devront payer pour…
Le Président : Est-ce que
j'ai un consentement… Consentement.
M.
Traversy : Bien, je
vais conclure, M. le Président, parce
que je pourrais vous en dire long
puis pendant pas mal d'heures aujourd'hui. Mais je me rappelle le premier
ministre, dans son discours
d'ouverture, qui nous disait, M. le
Président : Aucun enfant ne sera laissé derrière. Il avait peut-être
oublié de mentionner que le portefeuille des parents non plus.
Le
Président : Je vous remercie, M. le député. J'invite maintenant à prendre la parole Mme la députée de Repentigny,
porte-parole du deuxième groupe d'opposition pour la famille et la lutte contre
l'intimidation, pour ses commentaires.
Mme Lise Lavallée
Mme
Lavallée : Merci beaucoup, M. le Président. Après leur entrée en fonction et après plusieurs
ballons lancés dans les médias, la ministre de la Famille et son gouvernement nous dévoilent enfin leur plan. Même si
la ministre nous disait attendre le
rapport de la commission de révision des programmes, nous comprenons aujourd'hui que tout était déjà décidé, les choix étaient faits. Cependant,
les parents, les éducateurs et éducatrices, les différents acteurs du réseau
ont enfin l'heure juste. Depuis plusieurs
semaines, l'incertitude règne partout au Québec. Maintenant,
les dés sont jetés, tout semble plus
clair : ce gouvernement va encore piger dans la poche des familles. Cependant,
le scénario du gouvernement nous déçoit au plus haut point. La ministre
fait sourde oreille aux demandes des contribuables, qui sont déjà
surtaxés. Son annonce
d'aujourd'hui s'appuie fortement sur une modulation des tarifs
en lien avec le salaire des parents, une nouvelle façon de venir chercher de l'argent dans les
poches des familles. Cette nouvelle hausse pour les familles québécoises
s'ajoute à la hausse des tarifs
d'électricité, la hausse des taxes scolaires, le maintien de la taxe santé,
et j'en passe. Encore une fois, qui paie? Le contribuable.
Nous sommes contre
une hausse des tarifs et nous avons toujours été clairs à ce sujet. D'ailleurs,
je croyais posséder un allié à ce niveau,
puisque, dans le discours sur le budget du 4 juin dernier, le ministre des Finances disait ceci : «Les contribuables québécois sont maintenant parmi les plus imposés en Amérique du Nord, et cette imposition a atteint ses
limites.» Aujourd'hui, le gouvernement renie son engagement du 4 juin et
vient ajouter une autre couche supplémentaire. D'ailleurs, la ministre devra nous dire combien d'argent ira-t-elle
récupérer dans la poche des contribuables avec sa nouvelle politique.
Nous croyons qu'il aurait fallu opter pour une modernisation de la gouvernance
des garderies avant de demander aux parents de faire un effort
supplémentaire.
Par ailleurs, nous croyons que la ministre devrait nous présenter ses intentions concernant
l'utilisation des places dans les
garderies privées non subventionnées. La ministre a-t-elle l'intention
de subventionner les garderies privées qui ne le sont pas et qui ont actuellement des places disponibles? De plus, la ministre
devra nous dire clairement comment compte-t-elle
faire l'attribution des places dans l'ensemble de réseau, quel sera le ratio
entre les centres de la petite enfance, les garderies privées subventionnées
et les garderies en milieu familial.
Je suis heureuse cependant
que certaines revendications de la Coalition avenir Québec portent enfin fruit.
La ministre m'a enfin écoutée lorsque j'ai dénoncé la perte de plus de 15 millions d'argent pour des places inoccupées et des places fantômes. D'ailleurs, la ministre devra nous dire ce qu'elle va mettre en place afin que le gouvernement arrête de
subventionner ces places. La ministre nous dit qu'elle compte réviser certaines
dépenses; nous avons hâte de voir quelles seront les dépenses en question.
Cependant,
je rappelle que la Coalition avenir
Québec ne fera aucun compromis sur des
hausses de taxes supplémentaires. Le gouvernement recule…
Des voix :
…
Mme
Lavallée : Le gouvernement recule et renie sa promesse. Voilà la
réalité. Voilà le plan de match de la ministre. Je compte, au courant des prochaines semaines,
travailler dans un esprit de collaboration afin que le projet de loi soit réellement efficace et place les familles au
centre des décisions. Dès demain, dans le cadre d'une interpellation, je questionnerai la ministre sur l'avenir du réseau des
garderies. Mais aujourd'hui nous tenons à rappeler que seule la Coalition
avenir Québec, dans tout ce débat, prend le parti des familles. Merci.
Le
Président : Je vous remercie. Je vous remercie, Mme la
députée. Est-ce que
j'ai le consentement pour permettre à Mme la députée de Gouin de prendre la parole? Pour deux minutes? Deux
minutes. Mme la parole… Mme la parole! Mme la députée de Gouin, nous
vous écoutons.
Mme Françoise David
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Honnêtement, là, la ministre, elle a vraiment réussi à me mettre en colère ce matin. Les mots ont un sens. On est en train de parler d'optimisation, d'améliorer le modèle de l'organisation du travail dans les services
de garde. Ça veut dire quoi, ça? Ça
veut dire enlever les parents des conseils
d'administration? Moi, je sais que le gouvernement y pense parce qu'il pense que les parents ne sont pas capables de diriger des garderies.
Donner des services à meilleur coût, ça veut
dire quoi, ça? Que les éducatrices en service
de garde, dans le fond, ne devraient pas être trop
payées, comme c'était le cas il y a 20 ou 30 ans? Moduler selon les revenus, ça veut
dire quoi? Bien, ça veut dire, évidemment, que la classe moyenne va payer. Demander aux centres à la petite
enfance de contribuer à 50 %
pour de nouvelles immobilisations,
va-t-il falloir qu'ils organisent des lotos, des ventes de charité? Comment ils
vont faire, les CPE, pour réussir à faire ça?
Au
fond, là, ce que le gouvernement est en train de faire, c'est d'établir
clairement, une fois pour toutes, selon ses désirs, le principe de l'utilisateur-payeur, parce qu'il nous dit
qu'en plus il faudrait que les parents contribuent plus. Les autres contribuables, là, il ne faut pas leur
en demander trop. Bien, moi, je regrette, ce n'est pas ça, le modèle que le
Québec s'était donné. Le Québec s'était
dit : Les services de garde, c'est aussi essentiel que l'école, que la
santé, toute la société va y
contribuer. Moi qui n'ai plus d'enfant en service de garde, je vais payer pour
que mes petits-enfants puissent aller
en service de garde à tarif réduit et avec une bonne qualité dans des centres à
la petite enfance. Et les familles qui ont
des enfants vont contribuer pour que les personnes âgées puissent avoir des
services de maintien à domicile. Ça, c'est un modèle qui table sur la
solidarité sociale, et c'est ce que le gouvernement, M. le Président, est en
train de détruire. J'aimerais ça qu'on y porte une grande attention pour la
suite des choses.
• (10 h 40) •
Le
Président : Je vous remercie, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre de la Famille pour son droit de réplique de cinq minutes.
Mme Francine Charbonneau
(réplique)
Mme
Charbonneau : Merci, M. le Président. Permettez-moi de nous
rappeler le modèle d'aujourd'hui. Puisque la députée de Gouin nous a parlé du modèle du Québec, permettez-moi de
lui rappeler le modèle d'aujourd'hui, celle que certains d'entre nous appellent universelle. Il n'en est point le cas,
M. le Président, puisque nous avons des familles qui paient 7,30 $, mais on en a, des familles qui
paient jusqu'à 60 $ par jour. Donc, le modèle que la députée de Gouin voit
dans sa lorgnette, je veux bien, mais il n'existe pas.
Il
y a aussi, M. le Président, des parents qui attendent toujours des places; ce
modèle-là existe actuellement. Et, dans la volonté qu'on a, M. le
Président, et dans l'engagement qu'on a pris, au Parti libéral du Québec...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Mme
Charbonneau : ...c'est d'être un gouvernement qui a fait des
promesses pour soutenir les familles du Québec, les soutenir, aller un peu plus loin que de promettre sans avoir
l'argent pour soumettre la promesse. Parce que c'est ça que le PQ a fait, et c'est là-dessus qu'on s'est
fiés, nous, le gouvernement, quand on est arrivés, en se disant : Les
crédits sont là, on va être capables
d'avancer. Eh bien, non, M. le Président, les crédits n'étaient pas là,
l'argent n'était pas au rendez-vous.
Et je nous rappelle, puisqu'ils aiment bien nous citer l'histoire, qu'en 1997
le parti qui a coupé dans l'allocation familiale,
ce n'était pas le Parti libéral, c'était le Parti québécois, qui a choisi de
couper dans l'universalité de ce qu'on donne à nos familles.
Permettez-moi
de vous dire, M. le Président, aussi ceci : 107 000 familles du
Québec vont payer moins de 9 $ par
jour. Rappelons-nous l'écho des
élections, puisqu'on aime s'en parler, qu'on parlait d'un modèle jusqu'à
9 $ par jour pour l'ensemble de nos familles, ceux dans les
milieux défavorisés, ceux à qui on devrait s'arrêter et donner plus de
services. Eh bien, non, le PQ, lui,
il mettait la facture à tout le monde pareil : Tout le monde paie, pas de
pitié, go! Les familles défavorisées aussi.
Dans
le modèle qu'on vous propose, il y a 107 000 familles, au Québec, qui vont
payer moins de 9 $, et ça, c'est jusqu'en
2016, M. le Président. Ça ne s'arrête pas juste ce mois-ci, ça s'en va jusqu'en
2016. Donc, dans le principe des promesses
brisées puis des mauvaises promesses, rappelons-nous que les promesses du PQ
n'étaient pas plus au rendez-vous.
Je suis, par contre,
fort intéressée à partager...
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît! J'aimerais entendre la fin, la conclusion de
Mme la ministre.
Mme
Charbonneau : Merci, M. le Président. Je suis, par contre,
très encouragée de savoir que je vais pouvoir m'asseoir avec ma collègue de Repentigny pour pouvoir échanger et faire
avancer l'amélioration qu'on veut mettre en place, au niveau du Québec, pour les familles du Québec, pour les
enfants du Québec et pour s'assurer que le service rendu sera d'équité
pour l'ensemble de la famille.
Dernière
remarque, et je pense que tous les citoyens du Québec se le disent en ce
moment : C'est étonnant que Québec
solidaire nous reproche de trouver une gratuité pour les familles défavorisées
et de demander un peu d'efforts pour les familles un peu mieux nanties.
Merci, M. le Président.
Le Président :
Merci, Mme la ministre.
Il n'y a pas de
présentation de projets de loi.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt
de documents, Mme la ministre de la Justice.
Rapports annuels de certains
ordres professionnels
Mme Vallée :
Alors, M. le Président, permettez-moi de déposer les rapports annuels 2012‑2013
des ordres professionnels suivants :
acupuncteurs, agronomes, chimistes, chiropraticiens, comptables professionnels agréés,
conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agréés,
conseillers et conseillères d'orientation, denturologistes, diététistes, ergothérapeutes, ingénieurs
forestiers, médecins vétérinaires, orthophonistes et audiologistes, Ordre professionnel
de la physiothérapie du Québec,
psychologues, sages-femmes, technologues professionnels, travailleurs sociaux,
thérapeutes conjugaux et familiaux et urbanistes.
Le Président :
Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre de l'Enseignement supérieur.
États financiers, état du
traitement et rapport sur la
performance et les perspectives de développement
de l'Université du Québec à Montréal
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de déposer le rapport annuel 2013‑2014
de l'Université du Québec à Montréal, incluant les états financiers,
l'état de traitement, le rapport de performance et les perspectives de
développement.
Le Président :
Alors, ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.
Réponse
à une question inscrite au feuilleton
M.
Fournier : M. le Président,
permettez-moi de déposer la réponse du gouvernement à la question inscrite au feuilleton du 21 octobre 2014 par le député de Nicolet-Bécancour et
adressée au ministre du Développement durable, de l'Environnement et de
la Lutte aux changements climatiques.
Le Président : Alors, ce document est déposé.
Dépôt de rapports de
commissions
À
la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le Président de la Commission
des institutions et député de Fabre.
Étude détaillée du projet de
loi n° 17
M.
Ouimet (Fabre) : Merci, M.
le Président. Je dépose le rapport de la Commission des institutions qui a procédé, les 18 et 19 novembre 2014, à l'étude détaillée du projet de
loi n° 17, Loi modifiant la Loi sur le Barreau, la Loi sur le notariat et le Code des professions, conformément
au mandat de l'Assemblée. La commission a adopté le texte du projet de
loi avec des amendements.
Le Président : Alors, ce document est déposé.
Dépôt de pétitions
À la rubrique Dépôt
de pétitions, M. le député de Bertrand nous demande de déposer une pétition qui
est non conforme. Est-ce que j'ai un
consentement pour le dépôt? Consentement. M. le député de Bertrand, nous vous
écoutons.
Ajouter un véhicule ambulancier sur le territoire de
Sainte-Agathe-des-Monts pour le quart de nuit
M.
Cousineau : Merci, M. le
Président. M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale, signée par
2 246 pétitionnaires. Désignation :
citoyens et citoyennes du Québec. M. le Président, je salue les
paramédics de la région de Saint-Agathe qui
sont avec nous dans les tribunes.
«Les faits invoqués sont les suivants :
«Considérant que le secteur [de] Sainte-Agathe-des-Monts ne dispose que d'un
véhicule ambulancier durant la nuit;
«Considérant que la
région se trouve régulièrement à découvert donc sans aucune ambulance de libre
sur le territoire la nuit;
«Considérant
que la seule ambulance libre la nuit doit également assurer le transport de
patients entre les différents centres hospitaliers vers ceux de
Montréal;
«Considérant
que le territoire à desservir est étendu à huit municipalités : Sainte-Agathe-des-Monts, Saint-Adolphe-d'Howard,
Val-Morin, Val-David, Ivry-sur-le-Lac, Lantier,
Val-des-Lac et Sainte-Lucie-des-Laurentides;
«Considérant que la
région connaît une croissance démographique [très
importante];
«Considérant
qu'environ 26 000 résidents permanents doivent être desservis, sans
compter le tourisme;
«Considérant
que les paramédics trouvent inacceptable une gestion du risque qui [met] en péril la
sécurité de la population;
«Considérant
que l'ajout d'une ambulance la nuit — équipe et véhicule — est estimé à moins de 300 000 $
par année;
«Et l'intervention
réclamée se résume ainsi :
«Nous
réclamons du ministère de la Santé et des Services
sociaux l'ajout d'un véhicule ambulancier sur le territoire de
Sainte-Agathe-des-Monts pour le quart de nuit.»
Je certifie que cet
extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
question de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales. Et je
cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.
Financement des services de garde
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : Merci, M. le Président. Honnêtement,
je pense que je n'ai pas le goût de me lever aujourd'hui.
Ce qu'on ressent tous, c'est un malaise profond, de la gêne et même de
la honte par rapport à ce qu'on vient d'annoncer. Vraiment, honnêtement… Et la déclaration de la
ministre est à la hauteur, je pense, des attentes du Parti libéral, mais pas
de la population.
Vous
savez, c'est une de nos plus grandes réussites au Québec, cette politique familiale. Elle fait l'envie de tous
les pays à travers le monde. Elle nous
réunit autour de ce qui est le plus précieux, la famille, imaginez-vous. Le
gouvernement, lui, a décidé de
s'attaquer à sa pièce angulaire, à son aspect le plus important. Le premier
ministre, ce matin, et son gouvernement ont annoncé une nouvelle taxe
famille pour la classe moyenne.
Honnêtement,
M. le Président, c'est une trahison que vivent les Québécois et les familles,
car, il faut bien le dire, et c'est
clair, si le premier ministre avait dit la moitié de ce qu'il annonce ce matin,
il n'aurait pas été élu. Il a fait pire que ça,
il s'est même attaqué à ce que nous, nous proposions honnêtement et de
façon transparente aux Québécois.
Ce
choix d'imposer les familles du Québec est un mauvais choix pour la politique
familiale, pour l'avenir de vos enfants, pour l'avenir des femmes, mais
c'est aussi et surtout un grand recul pour la classe politique, M. le
Président. Concrètement, ceux qui vont vivre le résultat de cette infamie,
c'est les familles.
Alors,
je pose une question très simple au premier ministre, qui semble… pour lui,
tout ça est normal et correct : Dans quel poste budgétaire
vont couper nos familles pour, eux, équilibrer
le budget? Est-ce que c'est dans le manger? Est-ce que c'est dans les soins? Dans quoi
devront-elles couper pour satisfaire le premier ministre?
• (10 h 50) •
Le Président : M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, notre collègue fait des
hypothèses sur le résultat électoral, qu'il
aurait probablement voulu différent.
Je lui dirais également que, s'il avait dévoilé aux Québécois l'état réel des
finances publiques, la taille des déficits devant nous, je pense que sa
défaite aurait été encore plus massive, M. le
Président, certainement.
Mais
je vais lui demander, moi… je vais lui retourner la question : Où pense-t-il que les familles les plus défavorisées, qui gagnent 50 000 $, 55 000 $,
60 000 $, auraient pris l'argent pour payer sa hausse de 7 $ à
9 $? Ce que nous faisons, M. le
Président, c'est la véritable justice sociale, ce n'est pas le simulacre de
justice sociale. C'est faire en sorte
que les familles défavorisées soient protégées, faire en sorte que la vaste
majorité des coûts de services de garde demeurent payés par l'impôt de
tous les Québécois.
Je
rappelle, pour information à nos concitoyens, concitoyennes et membres de cette
Assemblée, que le coût réel d'une
place est de 60 $, en CPE, par jour. C'est encore une petite fraction qui
est assumée par les parents. C'est socialement juste, c'est équitable. M. le gouvernement, c'est une chose de faire des
grands discours sur la social-démocratie et la justice sociale, c'est
une autre chose de l'appliquer. C'est ce que nous faisons.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : Ils applaudissent des nouvelles taxes, des nouveaux
impôts avec l'appui de la CAQ. Bravo! Bravo! Dans les faits, M. le
Président, il était au gouvernement…
Des voix :
…
Le
Président : S'il vous plaît! On va écouter la fin de la
question… écouter la fin de la question, s'il vous plaît.
M.
Bédard :
Le premier ministre était au gouvernement quand les libéraux, souvenez-vous,
ont concédé des hausses faramineuses aux
médecins, qu'on paie encore, qui ont perdu le contrôle sur des infrastructures
qui nous coûtent cher, qui se sont
détournés de la lutte à la corruption. Bien, qui paie, aujourd'hui, pour cette
incompétence? Ce sont les familles du Québec.
Alors, moi, je
demande encore au premier ministre : Dans quoi nos familles de la classe
moyenne vont-elles couper? Quelles femmes n'auront plus accès à l'emploi à
cause…
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président, notre collègue essaie de faire dévier le
débat de l'essentiel qui est : Comment définissons-nous
«universalité»? Comment définissons-nous la justice sociale? Bien, moi, je vais
lui suggérer la définition.
L'universalité
d'un programme public, ce n'est pas que tout le monde paie la même affaire,
c'est que tout le monde ait accès à un programme abordable. C'est ça,
l'universalité. Et, en passant, tous les pays européens et scandinaves développés utilisent cette méthode-là; c'est le
Québec qui se met maintenant au diapason. M. le Président, l'universalité,
c'est ça. Il y a plein de familles qui n'ont pas accès à des places de
garderie, qui paient le gros prix actuellement…
Des voix :
…
Le Président :
Est-ce qu'on peut avoir suffisamment de silence pour être capables d'entendre
et les questions et les réponses? La question a été bien posée,
j'aimerais entendre la réponse.
M. Couillard : M. le Président, dire que je suis surpris de la réaction de nos
collègues, ce serait être à l'écart de la vérité. On s'y attendait très bien. D'ailleurs, c'est le simulacre de
social-démocratie qu'ils livrent aux Québécois depuis des années.
Ce que nous faisons,
M. le Président, c'est mettre en place, au Québec, pour nos enfants…
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : Ma question est simple, au premier ministre. Tout
ce qu'il a à faire aujourd'hui, au moins, c'est de s'excuser puis
d'expliquer aux Québécois pourquoi il a menti, à la dernière campagne
électorale.
Le
Président : M. le chef de l'opposition, vous savez très bien,
avec l'expérience que vous avez, comment on ne peut pas, évidemment, utiliser le terme que vous avez utilisé. Est-ce
que je pourrais vous demander de trouver le moyen de corriger cette
affirmation? Commencez…
Des voix :
…
Le Président :
Commencez par… Je vous écoute, M. le chef de l'opposition.
M.
Bédard : Honnêtement, peu de termes me viennent à part
celui-là. Alors, M. le Président, je vais le retirer, mais
malheureusement la vérité demeure.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : Je vais pardonner, dans son énervement, monsieur, et sa frustration,
ces propos à notre collègue.
Je
voudrais juste rappeler que, lorsqu'on promet des places de garde aux familles,
puis qu'on n'a pas les moyens de les
payer, puis qu'on sait qu'on n'a pas les moyens de les payer parce qu'on n'est
pas capables de faire de crédit, ça, c'est d'induire la population en
erreur, M. le Président.
Lorsqu'on dit à la
population qu'on a un programme universel de services de garde qui demeure,
après les changements que nous suggérons, le
plus généreux au Canada et de loin et qu'on n'a pas d'universalité parce qu'on
n'a pas les moyens et on n'est pas
capables de créer les moyens pour financer les nouvelles places, là on induit
la population en erreur.
Alors,
M. le Président, on voit que c'est chatouilleux pour eux. Ce n'est pas des
social-démocrates. Ils sont complètement déconnectés des gens à faibles
revenus.
Le Président :
Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : La réalité concrète, puis le premier ministre,
il doit le savoir, au moins il en parlera peut-être à son président du Conseil du trésor, ce qui impacte le
plus le gouvernement actuellement, puis on a été pris avec ça, c'est la hausse que lui a concédé aux médecins,
2,6 milliards, concédés aux médecins
annuellement, de plus. On n'avait pas les moyens de faire ça. Ça, c'est
la réalité concrète. On a endetté les Québécois par-dessus la tête. On a refusé
de lutter contre la corruption, c'est
ça qui a coûté cher aux familles. De faire porter leur incompétence aux
familles du Québec, je trouve ça inacceptable. Le premier ministre
devrait s'excuser, tout simplement.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président, quand on n'est pas...
Des voix :
...
M. Couillard : M. le Président, s'il vous plaît! Je vous ai écouté, écoutez-moi. M. le
Président, quand on n'est pas capable
de répondre au problème fondamental qui est devant nous, à la vraie question,
on change de sujet. C'est ce que vient de faire le chef de l'opposition
officielle.
Alors, moi,
je le ramène sur la question essentielle. L'universalité, c'est que tous les
Québécois et les Québécoises, nos
enfants et leurs enfants gardent l'accès au programme de garde subventionné le
plus généreux, et de loin, au Canada; c'est ce que nous faisons. La véritable justice
sociale, c'est que les familles à bas revenus et, M. le Président, près de
60 % des familles qui
bénéficient des services vont payer moins que ce que le PQ leur mettait sur la
tête avant de faire l'élection. Ça,
c'est la justice sociale, c'est le véritable progressisme. Il faut créer la
richesse pour la distribuer et s'assurer qu'elle soit distribuée
équitablement, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le chef de l'opposition.
Fermeture possible de la mine de fer de
Cliffs Natural Resources
au lac Bloom
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : Je tiens à rassurer le premier ministre, il n'y a
plus personne qui le croit, de toute façon, M. le Président.
Mais c'est une
mauvaise journée pour les familles, effectivement, mais c'est aussi,
malheureusement, une triste journée pour l'emploi au Québec. On a annoncé,
hier, la fermeture imminente de la mine du lac Bloom, M. le Président. C'est 600 emplois perdus à Fermont qui
s'ajoutent aux centaines d'emplois déjà perdus sur la Côte-Nord, lorsque
Cliffs avait annoncé la fermeture définitive
de la mine Scully il y a quelques semaines seulement. C'est encore, évidemment,
un bilan qui s'ajoute aux 82 000
emplois à temps plein qui ont été perdus. Les travailleurs de la mine
résumaient bien la situation, hier, en disant qu'à Fermont c'est la mort
du Plan Nord.
Au
lendemain des élections, le premier ministre avait reconnu que sa promesse d'investir
15 milliards de plus dans le
béton était abandonnée. Aujourd'hui, on voit que le Plan Nord est devenu un
synonyme de pertes d'emploi. C'est toute
la recette libérale qui s'écroule, M. le Président.
Est-ce
que le premier ministre peut dire aux gens de la Côte-Nord puis aux employés de
Cliffs que va-t-il faire pour relancer leur emploi, pour relancer la mine,
qu'est-ce qu'il fera pour les familles touchées sur la Côte-Nord?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, la première chose que je vais dire aux citoyens et
citoyennes de la Côte-Nord, c'est
que, justement, il y en a beaucoup, de projets, sur la Côte-Nord. Il y a
FerroAtlántica qui s'est installé, il y a d'autres projets miniers sur
la Côte-Nord, il y a beaucoup à faire.
Maintenant,
je comprends leur déception, parce que tout le monde s'est rendu compte, M. le
Président, au Québec et ailleurs, que
c'était une erreur massive de leur part de tuer le Plan Nord, et là, bien sûr,
ils essaient de récupérer ça puis de
tourner ça différemment parce qu'il y a des fluctuations des prix du fer qui,
de toute façon, vont remonter avec les années. À ce que je sache, cette compagnie n'a pas annoncé sa fermeture. Elle
est dans une situation financière difficile, nous en sommes conscients. Nous voulons agir en
partenaire, nous voulons faire partie de la solution, si c'est possible et
responsable pour les contribuables québécois de le faire, cependant.
Cependant,
nous avons également un grand nombre d'autres projets. Il y a des minerais de
fer dans le Plan Nord, sur le
territoire du Nord-du-Québec, il y a d'autres minerais, il y a plein de projets
à faire. Nous, on fait avancer le Québec. On ne tue pas le Plan Nord, on
le met vers l'avant, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.
M. Stéphane Bédard
M.
Bédard : M. le Président, là, je parle de 600 emplois, là.
Le premier ministre, il doit être au courant de cette situation-là. Pourquoi les travailleurs disent que
le Plan Nord est mort? Parce qu'eux, ils perdent leur emploi, effectivement.
Puis lui, son plan économique, c'est quoi,
sa litanie? Le Plan Nord. Alors, c'est sûr qu'il n'est plus crédible
actuellement.
Mais,
pour ces travailleurs — il nous dit que ce n'est pas une fermeture — alors j'aimerais savoir concrètement qu'est-ce
qu'il a proposé à cette entreprise, qu'est-ce qu'il a proposé pour les
installations portuaires. Concrètement, qu'est-ce qu'il offre aux travailleurs
puis aux familles de la Côte-Nord, M. le Président?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard : M. le Président, nos collègues, il y a quelques mois, ils devaient être
au courant des fluctuations du prix
du fer, ils devaient être au courant un peu de la situation de la mine Cliffs
là-bas. Je ne me souviens pas d'aucune déclaration de préoccupation de
leur part à l'époque, bizarrement.
Alors, ce qu'on sait,
c'est que l'entreprise, M. le Président, et c'est important de le dire, est à
la recherche de financement parce que les
coûts du minerai sont à tel niveau et leurs coûts d'opération de fonctionnement
sont à un niveau difficile pour faire face à ces coûts diminués.
Je répète, il faut qu'ils fassent un
travail de recherche de partenaires. Si on peut faire partie de la solution, on
en fera partie. Et par ailleurs l'action que le gouvernement a
actuellement entreprise et va continuer d'entreprendre pour donner l'accès à
toutes les minières aux installations portuaires de Sept-Îles, elle va se
poursuivre, M. le Président.
• (11 heures) •
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Duplessis.
Mme Lorraine Richard
Mme Richard : Merci, M. le Président. J'ai entendu la réponse du premier ministre, puis je peux vous dire que les travailleurs, présentement, ils
sont dans l'inquiétude parce qu'ils n'auront pas d'emploi bientôt.
Qu'est-ce que le ministre de l'Économie, de
l'Innovation et de l'Exportation a
fait pour régler l'accès au port? Quand
le premier ministre dit que le Plan Nord va bien, je
regrette, le prix du fer est sous les 80 $ la tonne, et, même quand il va reprendre, vous n'avez
même pas accès au port de Sept-Îles. Le Plan Nord, il est mort. C'est
complètement faux.
Le Président :
M. le ministre de l'Économie.
M. Jacques Daoust
M.
Daoust : Alors, M. le Président, on est bien conscients que le quai de
la Pointe-Noire est une situation qui est difficile, et sur laquelle on négocie actuellement, et qu'on est en
train de régler. En fait, vous ne l'aviez pas réglée, on avait fermé le
Plan Nord par le quai de la Pointe-Noire, et on est en train de l'ouvrir. Ça,
c'est le premier point.
Le deuxième point,
quand vous me parlez des travailleurs chez Cliffs, naturellement on est préoccupés
de ça, nous aussi, mais d'imputer au Parti
libéral du Québec l'effondrement du prix des métaux à travers la planète,
madame, vous nous donnez énormément de pouvoir actuellement, vous savez…
Une voix :
…
Le Président :
Mme la députée de Duplessis…
Une voix :
…
Le
Président : Non, non, non. Mme la députée de Duplessis, on
reprend son calme. M. le ministre de l'Économie, veuillez terminer, s'il
vous plaît.
M. Daoust :
Et, comme le disait notre premier ministre, on a des discussions actuellement
avec Cliffs pour essayer de voir comment on
peut devenir partenaires de la solution. Partenaires, ça ne veut pas dire
devenir propriétaires. Comme je l'ai déjà dit, on n'a pas l'intention de
nationaliser le système minier ici.
Le Président :
Principale, M. le député de Jonquière.
Conditions imposées à
TransCanada concernant
le projet d'oléoduc Énergie Est
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui. M. le Président, dans une lettre à
TransCanada, le ministre de l'Environnement a enfin, enfin fixé des conditions à la compagnie, mais,
pour ça, ça a pris des pressions des citoyens, des pressions des groupes
environnementaux, ça a pris une gifle de la Cour supérieure, ça a pris la
motion unanime de l'Assemblée nationale.
Pourtant,
pourtant, TransCanada Énergie continue de dire que c'est l'Office national de
l'énergie du Canada qui aura le
dernier mot sur le projet. Du côté de Colombie-Britannique, par exemple, le
gouvernement a fixé la barre beaucoup plus haute pour le projet de
Northern Gateway.
La
question au ministre de l'Environnement est bien simple, M. le Président :
Si TransCanada ne respecte pas les conditions, comment le ministre peut-il garantir
aux Québécois et aux Québécoises que la décision finale sur ce projet
reviendra au gouvernement du Québec?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. La lettre que j'ai fait parvenir le
18 novembre dernier à TransCanada, qu'il me fera plaisir de déposer en cette Chambre avec consentement suite aux
questions du député de Jonquière, cette lettre résume la position du gouvernement du Québec qui a été clairement
déclinée depuis le 30 mai dernier. Nous avons clairement dit le 30 mai dernier que nous
allions faire une évaluation environnementale complète sur la portion
québécoise du projet, nous avons
établi nos conditions clairement. Et ce que nous faisons depuis la lettre du
18 novembre, M. le Président, c'est
de dire clairement à TransCanada, aux Québécoises et aux Québécois que le
gouvernement du Québec va exercer pleinement ses compétences en matière d'évaluation
environnementale, va défendre les intérêts des Québécoises et des Québécois et va s'assurer que, si le projet va de
l'avant, il sera fait avec l'accord du gouvernement du Québec, dans le
meilleur intérêt des Québécoises et des Québécois. Merci, M. le Président.
Document déposé
Le
Président : Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt de la
lettre du ministre? Consentement. M. le ministre, veuillez déposer votre
lettre.
En complémentaire, M.
le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui. M. le Président, je ne suis pas sûr que le
ministre comprend bien, là, la question, qui est extrêmement importante. Si, par exemple, sur la condition n° 1, il
n'y en a clairement pas, d'acceptabilité sociale, mais que l'Office national de l'énergie donne quand
même son autorisation au projet, comment le ministre va faire pour garantir
aux Québécois que Stephen Harper n'ira pas à l'encontre de la volonté claire
des Québécois et des Québécoises?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M. Heurtel :
M. le Président, nous, on a exprimé clairement les conditions de réalisation
d'un tel projet, on a clairement dit que nous allions affirmer clairement
les compétences du gouvernement du Québec en
matière environnementale. Lorsqu'il
était du côté du gouvernement, le député de Jonquière, qui était ministre des
Affaires municipales et des Transports,
où était-il et où était son gouvernement lorsqu'ils ont autorisé le stockage et
la réception de pétrole albertain à Sorel-Tracy?
Nulle part. Où était son gouvernement lorsqu'ils ont accepté d'aller de l'avant
avec le projet d'Anticosti sans
aucune évaluation environnementale? Nulle part. Où était son gouvernement
lorsqu'ils ont fait un comité de travail avec l'Alberta pour développer l'industrie pétrolière albertaine? Nulle
part. Où était son gouvernement, où était le Parti québécois en matière
environnementale? Nulle part, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : M. le Président, le ministre est incapable de
défendre clairement les Québécois et le territoire du Québec dans ce projet-là. C'est ça qu'on a
devant nous. Si le BAPE évalue les changements climatiques et les gaz à effet de serre du projet, mais que l'Office
national de l'énergie ne le fait pas et qu'en bout de ligne l'Office national
de l'énergie décide d'aller de l'avant avec le projet, comment il peut
s'assurer, comment il peut garantir aux Québécois et aux Québécoises qu'en bout de ligne c'est le
Québec, ultimement, qui va décider de ce qui se passe sur son territoire et
des impacts sur l'environnement du Québec?
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : M. le Président, la lettre que nous venons de déposer dit
clairement que nous allons défendre les compétences du Québec, et la position du gouvernement du Québec a été
reprise avec approbation par des groupes tels qu'Équiterre, WWF Canada, l'AQLPA, tous des groupes que le député de
Jonquière cite régulièrement à l'appui de ses prétentions. Le gouvernement du Québec va défendre l'intérêt des
Québécoises et des Québécois jusqu'au bout en s'assurant que nos compétences soient respectées et en
s'assurant que le projet de TransCanada respecte l'ensemble des compétences
québécoises en matière environnementale. Merci, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Tarification des services de
garde
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, le chef du Parti libéral a écrit
noir sur blanc dans son programme électoral, et je veux le citer : «Les familles bénéficieront […] de
l'indexation des tarifs des services de garde à 7 $ à partir du 1er
janvier 2015. Elles éviteront ainsi
le choc tarifaire découlant de la décision du Parti québécois de porter à
8 $, puis à 9 $ les tarifs de garde.» Fin de la citation.
M. le
Président, le premier ministre, après avoir pris connaissance de la situation
des finances publiques, dans son discours
inaugural, a dit : Nous allons mettre les familles à l'abri d'un choc
tarifaire et de hausses d'impôt. Ça, c'est après qu'il a appris les
résultats des finances publiques que le Parti québécois a laissés.
Alors,
ce matin, M. le Président, on apprend que le premier ministre annonce un choc
tarifaire pour les familles par des
hausses d'impôt, en pleine contradiction avec ce qu'il a promis durant la
campagne électorale. M. le Président, la première grande annonce du
gouvernement libéral, c'est une augmentation des tarifs, des impôts pour les
familles.
Est-ce que le premier ministre peut, au moins,
ce matin avouer qu'il manque à sa parole?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président,
il y a au moins une chose exacte dans ce que le collègue nous dit, c'est
qu'effectivement il a fallu prendre connaissance de l'état des finances
publiques. Et puis je voudrais lui répéter que notre intention — de même qu'à l'ensemble des collègues de cette Chambre et à la
population qui nous écoute — notre intention, c'est de préserver
le système de garde au Québec à contribution réduite non seulement pour les
Québécois d'aujourd'hui, mais ceux et celles de demain et ceux et celles
d'après-demain, M. le Président.
Alors, ce que
nous faisons, en fait, c'est qu'effectivement — M. le Président, je suis très heureux de lui
répondre parce qu'il a abordé la
question de la bonne façon — nous protégeons les familles,
particulièrement les familles à bas revenus,
de l'impact tarifaire qu'aurait été l'annonce et la mise en place de ce que le
Parti québécois proposait. Il y a plus de
100 000 familles — ça fait du monde, ça, M. le Président — qui sont protégées de ça et qui vont
continuer à payer beaucoup moins que
ce que le Parti québécois proposait. Ça va être indexé à chaque année, ça va
être exactement ce qui va se
produire. Et on veut surtout préserver ce système-là, le préserver et
l'améliorer parce que je crois, M. le Président, que c'était une bonne politique publique, le système
de garde à contribution réduite. Mauvais déploiement, mauvaise structure tarifaire,
il est encore temps de réparer ça pour les prochaines générations. C'est ce
qu'on fait.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, pendant 33 jours, le chef du Parti libéral s'est promené
partout au Québec, a dit à toutes les familles : Il n'y aura pas de
hausses de taxes et de tarifs qui vont augmenter de plus que l'inflation.
Or, il arrive
au pouvoir, il augmente les taxes scolaires de plus que l'inflation, il
augmente les tarifs d'électricité
de plus que l'inflation, maintenant les tarifs de garderie.
Est-ce qu'il peut avouer aux Québécois, au moins
avec un certain respect, là, qu'il n'a pas respecté ses…
• (11 h 10) •
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président, je vais répéter aux Québécois et aux Québécoises, c'est que notre gouvernement, l'ensemble de la députation du Parti libéral du Québec, va faire tout en son pouvoir et utiliser tous les
outils possibles pour préserver les
acquis sociaux du Québec, qui sont fondamentalement minés — minés
est un mot faible, M. le
Président — par l'état
des finances publiques, l'endettement chronique du Québec. Alors, on veut, bien sûr,
M. le Président, préserver ces services-là.
Je répète
qu'on protège plus de 100 000
familles qui restent à l'abri du choc tarifaire proposé par le Parti québécois.
J'ai posé la question à laquelle il est
impossible de répondre pour eux, à l'opposition officielle, quant à leur
définition de la justice sociale. Quelle est la définition de la justice
sociale du chef de la deuxième opposition?
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, est-ce que le premier ministre peut s'excuser? Durant la
campagne électorale, il a dit à
toutes les familles — pas
seulement les familles qui gagnent moins de 50 000 $, toutes les
familles — qu'il
n'y aurait pas d'augmentation de plus que l'inflation. Il ne respecte
pas son programme électoral.
Est-ce que la parole du premier ministre a
encore une valeur?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. Philippe Couillard
M.
Couillard : M. le Président, il y a une énorme faiblesse dans ce que nous dit le
collègue parce qu'il tient à la
main un document — il pourrait peut-être nous le remontrer tantôt — sur lequel il est écrit deux mots : «cadre
financier», cadre financier basé sur les chiffres que le gouvernement
précédent avait déposés et qu'il a utilisés…
Des voix : …
M.
Couillard : …M. le
Président, et qu'il a utilisés, lui également, dans son cadre financier à lui.
Il n'y avait pas d'autre référence.
Non, personne ne savait, au Québec, qu'il y avait 5 et 7 milliards de
déficit devant nous, M. le Président. Personne
ne savait qu'il y avait 5 et 7 milliards devant nous. Eux autres, ils le
savaient, mais on ne le savait pas, nous autres, puis vous autres non
plus, vous ne le saviez pas.
Alors, ce qu'on veut faire, M. le Président,
c'est…
Des voix : …
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît!
Des voix : …
Le Président :
Arrêtez de vous interpeller d'un côté comme de l'autre, là. De toute façon, ça
ne nous mène nulle part.
Des voix : …
Le Président : S'il vous
plaît! On se calme. M. le premier ministre, veuillez poursuivre.
M.
Couillard : M. le Président, c'est dans un débat comme ça — c'est
un débat important pour le Québec, c'est un
débat où des problèmes, les enjeux fondamentaux sont sur la table — que les véritables personnes se révèlent et,
surtout, leurs outils préférés...
Le Président : Principale, M.
le député de Chambly.
Révision de la gouvernance, du rôle et de
l'organisation des commissions scolaires
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, le ministre de l'Éducation a décidé qu'il
voulait maintenir les élections scolaires, les taxes scolaires, les commissions scolaires. Il les aime tellement
qu'il veut les fusionner pour qu'elles soient encore plus grosses, plus de bureaucratie, mais pas
d'économies à l'horizon. Il n'a rien compris du message envoyé par 95 %
des électeurs qui ne sont pas allés voter aux dernières élections scolaires.
Finalement,
ce que le ministre est en train de dire aux parents, aux contribuables, aux
intervenants ce matin, c'est qu'il ne sait pas quoi faire, ça fait qu'il
va faire des fusions, il crée encore plus d'incertitude. Quand on regarde ce qu'il a fait, ce qu'il a dit depuis quelques mois,
c'est inquiétant. Avant de se raviser, il nous a quand même dit qu'il n'avait
pas besoin de livres dans les écoles, qu'il
fallait couper dans l'aide aux devoirs et qu'il fallait baisser les exigences
dans les cégeps. Il nous a dit ça. Là, il nous dit qu'il veut donner
plus de pouvoirs aux écoles, mais comment le croire?
Comment
peut-il donner plus d'autonomie pédagogique aux écoles en maintenant intacte la
lourde structure des commissions scolaires?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, le plus important, c'est la
réussite scolaire. Moi, je suis allé visiter des écoles — d'ailleurs,
j'invite le député de Chambly à faire de même — puis il y a des modèles, au
Québec, de décentralisation, c'est
l'enseignante ou l'enseignant, dans la classe, qui fait le programme
pédagogique, et il y a un bon taux de
réussite scolaire. Ce que l'on veut, M. le Président, c'est décentraliser,
remettre le pouvoir au bon endroit, dans l'école, dans la classe, avec l'enseignant supporté par d'autres professionnels.
L'objectif, ce n'est pas d'avoir des petites ou des grandes commissions scolaires, c'est de se ramener à la base. On
sait qu'on peut avoir des économies en faisant du regroupement, du regroupement logique, territorial. On va aller de
l'avant avec cela. Il y a des discussions qui sont avec la Fédération
des commissions scolaires.
Mais, M. le Président, j'aimerais que le député
revienne à la base. La réussite scolaire, ça passe par une décentralisation,
plus de pouvoirs dans la classe, plus de pouvoirs dans l'école.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Chambly.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : M. le Président, le ministre nous répète ses principes, mais
il ne sait toujours pas comment il va faire
ce qu'il veut faire. Je pense que le ministre est également incapable de nous
dire s'il va réaliser des économies en fusionnant
les commissions scolaires. Et je vous rappelle que l'administration scolaire,
c'est plus de 500 millions de nos taxes et impôts à chaque année.
M.
le Président, est-ce que le ministre peut nous dire combien d'argent les
Québécois sont supposés économiser avec ces fusions de commissions
scolaires?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, les montants vont être
quantifiés en temps et lieu, lorsque nous aurons fini de faire l'évaluation des fusions. Mais, une chose qui est
certaine, à toutes les fois qu'on diminue les coûts administratifs, à toutes les fois qu'on a moins de directeurs, à
toutes les fois qu'on a moins de commissaires, M. le Président, c'est des
économies directes. Prenons cet argent, mettons-le directement dans la classe.
J'ai visité
des classes, M. le Président, ils ont des tableaux blancs ordinaires, ils ont
des tableaux blancs interactifs, ils ont des livres également. Mais ce
qu'on voit surtout, là, c'est l'organisation de la classe par l'enseignante.
M. le
Président, ce qu'il faut revenir, c'est à la base, c'est-à-dire avoir une
structure, oui, mais le plus important, c'est de décentraliser...
Le Président : En terminant.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
...donner plus de pouvoirs à l'école, donner plus de pouvoirs à la classe.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Chambly.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : Combien on va économiser? On ne sait pas. Quand? En temps et
lieu. Avec ses incohérences et son improvisation,
le ministre s'est carrément disqualifié pour mener à bien l'importante réforme
qui s'en vient. Il a perdu la confiance des gens. Le ministre de l'Éducation
n'est clairement, clairement pas l'homme de la situation. Le premier
ministre ne peut pas attendre le prochain remaniement, il doit immédiatement
lui retirer ce dossier pour le confier à quelqu'un d'autre.
Combien de
temps le premier ministre va-t-il tolérer autant d'improvisation et
d'amateurisme dans quelque chose d'aussi crucial?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, que le député
de Chambly retourne voir des écoles. C'était un enseignant, qu'il retourne dans les classes, qu'il aille voir
qu'est-ce qui se fait au Québec. Nous sommes dans ceux qui ont les meilleurs
résultats au monde au niveau de la scolarisation,
et également nous avons une réussite scolaire qui est une des meilleures
au Canada.
M. le
Président, je le dis encore au député, l'important, ce n'est pas la structure.
Il faut faire des réformes, mais le
plus important, ce n'est pas la structure, c'est ce qu'on va faire avec les
enseignants, avec les écoles. J'ai rencontré des représentants des écoles, et ce qu'ils veulent :
plus de pouvoirs pour pouvoir mieux enseigner, pour avoir une meilleure réussite
scolaire.
Le Président : Principale,
Mme la députée de Taillon.
Surfacturation dans les
cabinets de médecins
Mme Diane Lamarre
Mme
Lamarre : Merci, M. le Président. Chaque semaine, des citoyens doivent
payer chez leur médecin pour des services qui ne sont pas couverts par
l'assurance maladie, par exemple des gouttes pour les yeux ou des substances
anesthésiantes. Certaines cliniques vont jusqu'à leur charger 10 fois le prix
que coûtent ces produits.
Deux rapports
ont été tablettés par le Parti libéral : le premier, par l'actuel premier
ministre en 2007, et le second, par
l'actuel ministre de l'Éducation en 2010. En neuf ans de pouvoir, aucune action
sur les frais accessoires. Pourtant, le 13 juin 2013, le Parti libéral a
voté en faveur d'une motion demandant de mettre fin à cette pratique.
Le ministre
de la Santé, alors président de la FMSQ, dénonçait en 2011… Et je le
cite : Le public est pris en otage par le gouvernement libéral, qui s'en lave les mains et qui attend que
quelqu'un chiale dans les médias pour agir. C'est un scandale, nous
disait-il. Le gouvernement bafoue ses propres lois par lâcheté. On reconnaît le
style.
Le ministre de la Santé est-il toujours du même
avis sur le gouvernement libéral?
Le Président : M. le ministre
de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, je peux affirmer aujourd'hui que je suis
toujours du même avis sur mon prédécesseur, qui, lui, avait annoncé à
plusieurs reprises, et dès son entrée en fonction, qu'il allait abolir les
frais accessoires.
Et
on se rappellera, M. le Président, que l'opposition officielle qui est devant
nous aujourd'hui, lorsqu'elle était au
gouvernement, a fait exactement zéro chose à ce sujet autrement que de faire
comme d'habitude, annoncer des choses qui
étaient soit irréalisables et non réalisées. Alors, je pense, M. le Président,
que la députée de Taillon devrait regarder dans sa cour avant de
regarder dans celle des autres.
Ceci
dit, M. le Président, la responsabilité qui incombe, dans ce sujet-là, au
Collège des médecins, qui, d'ailleurs, a
agi, M. le Président… Le Collège des médecins est intervenu auprès des
fédérations médicales pour faire en sorte que les fédérations ajustent leur tir en fonction de ce qui est raisonnable
dans le cadre légal actuel. Ce sont ces organisations-là qui ont la
responsabilité de ça, et, pour ce qui est de notre…
• (11 h 20) •
Le Président :
En terminant.
M. Barrette :
…intention, M. le Président, je pense qu'elle est assez claire, nous allons nous
occuper de…
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Taillon.
Mme Diane Lamarre
Mme
Lamarre : M. le Président, permettez-moi de rappeler qu'en seulement
18 mois, au Parti québécois, nous avons rapatrié des services dans
les établissements publics, dont les services d'échographie sur lesquels il y
avait ces surfacturations, pour éviter que les patients aient à débourser des
frais disproportionnés.
Le
ministre a les moyens d'agir maintenant. Un projet de loi avait été inscrit au
feuilleton en février pour donner plus de mordant à la RAMQ pour
intervenir.
Qu'attend le ministre
pour mettre fin à ces frais exagérés et pour protéger les citoyens des abus?
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : Ça me fait toujours plaisir, M. le Président, de prendre
l'occasion de rectifier les faits lorsque la députée de Taillon prend la
parole. L'opposition officielle, lorsqu'elle était au…
Des voix :
…
Le Président :
S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Restez chacun sur votre
côté, ça va être moins dangereux. M. le ministre, s'il vous plaît, veuillez
continuer.
M.
Barrette : Merci, M. le Président. Pour ce qui est de l'énervement, M.
le Président, je dirais à la députée de Taschereau qu'elle n'a pas de
leçons à donner à personne.
M. le Président, je
rectifie les propos de la députée de Taillon, il n'y a pas eu d'examen rapatrié
dans le système public. Dans le système
public, il y a eu de l'épuration des listes d'attente et il y a eu une certaine
augmentation de la capacité…
Le Président :
En terminant.
M. Barrette :
…minimale, M. le Président…
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taillon.
Mme Diane Lamarre
Mme
Lamarre : La réalité, M. le Président, c'est qu'actuellement les
citoyens paient des frais exagérés, qu'ils n'ont pas la capacité d'évaluer si ces frais sont justifiés ou non. Le
ministre doit prendre ses décisions, ses responsabilités. Il a des actions concrètes à portée de main et il
doit les appliquer sans se réfugier auprès du Collège des médecins. S'il a
des actions communes à poser, qu'il les pose, mais il y en a qui sont
directement dans son territoire.
Le Président :
M. le ministre de la Santé.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette : M. le Président, M. le
Président, clairement, la députée de Taillon expose ici la confusion qui existe au Parti québécois. Alors, je ne sais pas
si elle se lève au nom de son parti ou en son nom elle-même, mais je lui
rappellerai que, récemment, très récemment, le futur chef
du parti a dit publiquement qu'il était en faveur du privé et qu'il n'a pas l'intention, manifestement, de se
rétracter parce qu'il est le Lucky Luke du Twitter, et, d'habitude,
quand on lui parle…
Des voix : …
Le Président : Je vais faire
mon propre Lucky Luke ici…
Des voix : …
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre de
la Santé, la dernière intervention était peut-être… Peut-être que quelques-uns l'ont trouvée drôle,
mais elle était certainement inappropriée ici. Je vous demanderais de la
retirer.
M.
Barrette : Ah! je vais le retirer, M. le Président, mais il n'en reste
pas moins que, l'ayant expérimenté, j'ai constaté que, lorsqu'on s'adressait au sujet du député de Saint-Jérôme,
la réponse arrivait vite sur Twitter et sur Facebook. Et,
sur le sujet du privé en santé…
Le Président : En terminant.
M. Barrette : …M. le Président…
Le Président : Mme la leader
de l'opposition.
Mme
Maltais : L'article 79. Il n'est pas obligé de nous
arroser de son mépris, il est obligé de répondre aux questions.
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M. Fournier : Je pense que je
pourrais aussi invoquer l'article 35 pour demander à ma collègue
d'utiliser un langage plus posé et plus nuancé et laisser notre collègue
continuer sa réponse, qui était tout à fait dans l'ordre.
Le
Président : En partie, en tout cas. Mais il reste une seconde,
ça fait qu'on va passer à une autre question si vous voulez. Est-ce
qu'il y a d'autres questions? Est-ce qu'il y a d'autres questions?
Une voix : …
Le Président : Oui, oui.
Principale, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Écoles ne détenant pas de permis du ministère
de l'Éducation, du Loisir et du Sport
Mme Nicole Léger
Mme Léger : M. le
Président, le ministre de l'Éducation ne semble toujours pas comprendre
pourquoi l'entente qu'il a signée
avec l'académie Yeshiva Torath Moishe est totalement inacceptable.
Yonanan Lowen, un ancien élève d'une école
illégale qui poursuit maintenant la DPJ et une commission scolaire pour
négligence le résumait ainsi : «Tout
le monde sait que l'entente est une blague, une entente qui légalise les
écoles illégales sans régler le fond du problème.»
Ça fait trois
semaines qu'on lui demande. Le ministre peut-il nous dire aujourd'hui qui va enseigner
l'histoire, le français et les sciences aux enfants de cette académie?
Qui enseigne le français à ces enfants aujourd'hui? Qui enseigne
les sciences à ces enfants aujourd'hui? Qui donne ces notions de base québécoises
aujourd'hui?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, d'abord, je ne ferai aucun commentaire sur une poursuite parce que c'est une entente qui est ici, au
niveau de l'Assemblée, on n'a pas à commenter là-dessus.
Pour ce qui s'agit de l'entente, la commission
scolaire anglophone va s'organiser pour évaluer les enfants, va s'organiser
également pour faire le suivi pédagogique, et je peux assurer la députée que la
scolarisation à la maison va se faire.
M. le
Président, actuellement, ces enfants ne suivent aucunement leur régime
pédagogique, n'ont aucune formation, et, on en convient tous, une école
illégale ne donne pas le contenu pédagogique requis pour respecter la Loi sur
l'instruction publique. Par contre,
la nouvelle entente, c'est de donner une chance à ces enfants, et notre
responsabilité, c'est de s'assurer, avec les commissions scolaires, que
l'évaluation soit faite, que le régime pédagogique soit suivi. Et, encore là,
je le rappelle, l'importance de la réussite scolaire pour ces enfants,
pour nous, est un incontournable.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger :
M. Lowen, M. le Président, affirme qu'en refusant d'aider les jeunes dans les
écoles illégales — et
je cite — «l'État porte atteinte de manière illicite
et intentionnelle aux droits à l'éducation prévus à la Charte des droits
et libertés de la personne et encadrés par la Loi sur l'instruction publique».
Le ministre
peut-il nous assurer qu'il ne répétera pas la même erreur et signer des
ententes similaires avec les autres écoles illégales?
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, la scolarisation à la maison
est légale. D'ailleurs, je l'ai rappelé à la députée cette semaine, il est possible, au Québec, qu'on puisse avoir de
la scolarisation à la maison. Ce qu'on doit avoir, c'est une entente avec le
ministère, et cette entente doit être respectée par les parents pour s'assurer
que les enfants suivent le régime
pédagogique et également qu'il y ait des évaluations par entente avec une
commission scolaire. Nous allons respecter
ces règles. Si une des façons de pouvoir scolariser des enfants qui,
auparavant, ne l'étaient pas est la scolarisation à la maison, je pense
que c'est une solution qui est acceptable.
Pour ce qui s'agit de l'avenir, on verra pour
les autres enfants...
Le Président : En terminant.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : …mais, je tiens à le dire, M.
le Président, on ne tolérera pas les écoles illégales au Québec.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger :
M. le Président, l'entente du ministre ne tient pas la route. Il veut les
rendre légales avec cette entente. Les
parents qui envoient leurs enfants à cette académie ne se convertiront pas par
magie au programme obligatoire du ministre
de l'Éducation du Québec, surtout qu'on sait que la plupart d'entre eux sont
unilingues anglais et ne pourront donc pas spécifiquement enseigner le
français.
Est-ce qu'il va étendre cette échappatoire avec
d'autres écoles illégales? C'est ça, la question.
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation.
M. Yves Bolduc
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, il y a une possibilité, au
Québec, d'avoir une scolarisation à la maison. Ce qui est important, c'est de suivre le régime pédagogique. Il y a une
entente signée avec les membres de la communauté et avec l'école disant
que ce ne serait plus une école, mais qu'on favoriserait la scolarisation à la
maison.
Pour ce qui
s'agit du suivi, on s'attend à ce que la commission scolaire anglophone de
Montréal puisse avoir un suivi avec
ces enfants et également leur offrir le support pédagogique — ça veut dire également des enseignants — qui va se faire dans un contexte
d'enseignement à la maison.
• (11 h 30) •
Le Président : Principale, M.
le député de Chutes-de-la-Chaudière.
Quotas de contraventions imposés aux policiers
M. Marc Picard
M. Picard :
M. le Président, un des secrets les moins bien gardés au Québec est l'existence
de quotas de contraventions par les policiers.
En juillet dernier, le service de police Richelieu—Saint-Laurent exigeait une augmentation des constats d'infraction émis par les
patrouilleurs à 1,3 à l'heure. La directive interne prévoyait même l'obligation
de respecter cette moyenne et des conséquences pour les policiers. On
savait déjà que le SPVM impose des quotas de contraventions
à ses policiers et qu'il avertit et rencontre ceux qui n'atteignent pas les
cibles. La pression qu'exercent certaines
villes pour mettre les contraventions au service de leurs finances est nuisible
pour la sécurité publique et altère le pouvoir discrétionnaire des
policiers.
Est-ce que le
gouvernement reconnaît l'existence de ces quotas et est-il d'avis qu'il devrait
être interdit d'évaluer des policiers sur la base de leur contribution
financière plutôt que la contribution à la sécurité publique?
Le Président : Mme la ministre
de la Justice.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée : Alors, M.
le Président, évidemment,
ma collègue prendra connaissance des demandes de la Fraternité des
policiers et policières de Montréal ainsi que des demandes formulées par la
Fédération des policiers et policières municipaux
du Québec. Cette demande sera analysée par ma collègue en fonction des
comparables, notamment, sur lesquels ils basent leur argumentaire.
Vous savez,
M. le Président, avant de prendre quelque décision que ce soit, c'est la
sécurité des citoyens et des citoyennes
du Québec qui doit primer et qui doit nous guider. Alors, évidemment, c'est ce
critère, et c'est basé sur ce critère que l'analyse des demandes
formulées par les deux, la fraternité et la fédération… seront analysées.
Évidemment,
la loi prévoit le type d'activités policières qui doivent être rendues. Elle ne
prévoit pas, et c'est clair de le préciser, la façon dont les services
doivent être rendus. Il faut faire une nuance également sur la question…
Le Président : En terminant.
Mme Vallée : Mais soyez
assurés que cette demande sera prise en considération.
Le Président : Première
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M.
François Legault
M. Legault :
Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il est d'accord avec les
quotas qui sont imposés aux policiers?
Le Président : Mme la
ministre de la Justice.
Mme
Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
M. le Président, je pense que la réponse a été assez claire, la demande qui a
été formulée par la fraternité et la
fédération sera analysée. Mais ce qui importe, c'est d'abord et avant tout la
sécurité des citoyennes et des citoyens du Québec, et c'est ça qui doit
primer sur toute autre considération.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M.
François Legault
M. Legault :
M. le Président, la question s'adresse au premier ministre. C'est lui qui est
le ministre de tous les ministres.
Donc, est-ce
qu'il peut nous dire… Est-ce qu'il a une opinion? Est-ce qu'il est d'accord
avec ça, les quotas de contraventions?
Le Président : Mme la
ministre de la Justice.
Mme
Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
Alors, M. le Président, nous allons réitérer la réponse, puisqu'il est de
commune… c'est commun à la CAQ de
nous poser plusieurs fois la même question, bien que nos réponses soient très
claires. Alors, nous allons…
Le Président : M. le leader
du deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel : M. le
Président, l'article 79 : Le ou les ministres doivent répondre à la
question. Ils ont eu trois chances, trois chances. Il y a peut-être quelqu'un
que ça leur tente de répondre, à savoir si, oui ou non…
Le Président : M. le leader
du gouvernement.
M.
Fournier : Encore une fois, je me permets… Ça me permet de le réitérer encore une fois : Bien qu'on appelle ça la période de questions, il
arrive qu'il y a une question, et en tout temps il y a une réponse. Alors, il
faut écouter les réponses.
J'ai compris
que, ce matin, parfois, on ne les entend pas. C'est important de les écrire.
Une fois qu'elles sont lues, ils finissent par les entendre, M. le
Président. Il y a eu des réponses d'offertes. Peut-être que vous n'aimez pas le
fait qu'il doit y avoir du contenu. Pour vous, un slogan, c'est assez. Nous
autres, le fondement est…
Le Président : Ça va, ça va.
Mme la ministre, veuillez terminer, s'il vous plaît.
Mme Vallée : M. le Président,
je pense qu'il est bon de rappeler…
Des
voix : …
Le Président :
Je vous ai demandé un peu plus tôt d'éviter de vous interpeller. J'aimerais
entendre la conclusion de Mme la ministre.
Une voix :
…
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M.
Fournier : Vous nous
invitez à éviter ce genre de situation. Je vous invite à nommer ceux qui ont ce genre
de comportement pour que l'ensemble du Québec voie le genre de comportement
qu'ils ont ici…
Le Président :
Monsieur… M. le…
Des voix :
…
Le Président :
Veuillez terminer votre réponse, Mme la ministre.
Mme
Vallée : M. le Président, je pense qu'il est bon… c'est important
de rappeler que les différents efforts des policiers en matière de
sécurité routière, ça a porté fruit, parce que le bilan routier ne cesse de
s'améliorer depuis les sept dernières années. Ça, c'est des faits, c'est quelque
chose qui est important.
Le Président :
En terminant.
Mme Vallée :
Et l'analyse de la demande sera formulée en considération…
Le Président :
Alors, cela met fin à la période de questions et réponses orales.
Motions sans préavis
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, puisqu'il n'y a pas de votes
reportés, nous sommes à la rubrique
des motions sans préavis, et…
Des voix :
…
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un peu de silence, s'il vous
plaît! S'il y a des gens qui doivent
quitter, veuillez le faire dans le silence, s'il vous plaît.
Alors,
je suis prête à reconnaître un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) :
Mme la Présidente, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement
avec la députée de Gouin :
«Que
l'Assemblée nationale reconnaisse la nécessité de travailler, dans les
plus brefs délais, sur les divers enjeux touchant la neutralité et la
laïcité de l'État;
«Qu'elle
demande au gouvernement de donner suite à la recommandation du rapport Bouchard-Taylor déposé en 2008 d'interdire aux magistrats et procureurs de la couronne, aux
agents de la paix et agents des services correctionnels de porter des signes religieux dans l'exercice de
leurs fonctions.» Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée. Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M.
Sklavounos :
Pas de consentement, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de
consentement. Maintenant, je suis prête à reconnaître un membre formant
le gouvernement. M. le ministre responsable de la Capitale-Nationale.
Féliciter l'équipe de soccer féminin Rouge et Or,
gagnante du Championnat de soccer féminin
de Sport interuniversitaire canadien
M.
Hamad : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le
consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Labelle,
le député de Drummond—Bois-Francs et
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :
«Que
l'Assemblée nationale félicite l'équipe de soccer universitaire [féminine] du
Rouge et Or de l'Université Laval qui
a remporté, pour la première fois de son histoire, le trophée Gladys Bean, lors
du dernier championnat canadien universitaire de soccer féminin, le
dimanche 9 novembre dernier.»
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion? M. le leader du gouvernement.
M.
Sklavounos :
Oui, Mme la Présidente, il y a consentement pour débattre. Nous vous proposons
des interventions de deux minutes,
débutant par le ministre responsable de la Capitale-Nationale, suivi du député
de Labelle, et du député de Drummond—Bois-Francs, et finalement la députée
de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
• (11 h 40) •
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup. M. le
ministre responsable de la Capitale-Nationale, la parole est à vous.
M. Sam Hamad
M.
Hamad :
Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi, au début, de saluer le recteur de
l'Université Laval, M. Brière, et M. Lépine,
de l'organisation sportive, une des meilleures organisations sportives au
Québec, universitaires, Mme la Présidente.
Et,
le 9 novembre dernier, l'équipe de soccer féminin de Rouge et Or de
l'Université Laval inscrivait une nouvelle page de l'histoire du sport universitaire en remportant le championnat
canadien universitaire de soccer féminin ici même, à Québec. Il s'agit, en fait, de la première équipe
du Québec à remporter le championnat et le trophée Gladys Bean en 28 ans
d'existence. Le Rouge et Or a d'autant plus
de mérite qu'il a affronté en finale la meilleure équipe au pays. En effet, son
adversaire, l'équipe de la Colombie-Britannique,
Trinity Western, a remporté ce championnat quatre fois lors des cinq
dernières années.
Il
faut ici souligner que l'équipe Rouge et Or a connu une saison exceptionnelle
en remportant 18 des 19 parties qu'elle
a disputées au cours de la dernière saison. Elle a d'ailleurs terminé celle-ci
en beauté, avec les grands honneurs, en remportant une victoire
éclatante au compte de 5-0, Mme la Présidente. 5-0, pour nous, les
parlementaires, c'est comme une victoire
d'un gouvernement 125 sièges sur 125. Alors, il s'agit là du deuxième plus
grand écart de buts entre deux finalistes dans l'histoire du soccer
interuniversitaire canadien.
Je tiens à mentionner
tout particulièrement le travail de celui qui dirige cette équipe depuis sa
création, il y a maintenant 20 ans, M. Helder Duarte. Je tiens également à
souligner le tour de chapeau réalisé par l'étudiante-athlète Mme Joëlle Gosselin et le titre de recrue de
l'année du Canada décerné à l'étudiante-athlète Mme Mélissa Roy. Je souhaite
également féliciter toutes les personnes qui ont contribué à la saison
exceptionnelle de l'équipe de soccer féminin du Rouge et Or.
Un
tel succès est le fruit d'importants efforts, d'une solide discipline. Ayant moi-même été joueur du Rouge
et Or au soccer, Mme la Présidente, et ancien président de ce club, je
comprends… — il
y a longtemps, comme il dit, mon collègue le
ministre de l'Agriculture — je
peux témoigner de la dure préparation nécessaire pour parvenir à ce niveau. Mme la Présidente, nous sommes très fiers de ce qu'ont accompli ces jeunes femmes
athlètes. Je souhaiterais vous dire, Mme
la Présidente, et vous, mesdames, que
vous êtes des ambassadrices de la capitale
nationale pour vos succès. Vous contribuez à la renommée et à la
notoriété de Québec comme ville sportive d'élite.
Enfin,
je souhaiterais rappeler le rôle incontournable de l'Université Laval dans le
succès de l'accomplissement de nos
jeunes sportifs grâce notamment au programme Rouge et Or. Celui-ci est connu et
reconnu à l'échelle nationale et même
internationale depuis plus de 60 ans. Il offre un tremplin unique aux
400 athlètes étudiants issus de 14 disciplines sportives. Le slogan du programme Rouge et Or, De
gloire et d'excellence, c'est exactement ce que vous avez… ce que
vous nous inspirez aujourd'hui, mesdames. Bravo! Félicitations!
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le
ministre. Je suis prête à céder la parole maintenant à M. le député de
Labelle.
M. Sylvain Pagé
M. Pagé :
Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, si mon collègue disait que c'est
l'équivalent de 125 circonscriptions
sur 125, vous imaginez jusqu'à quel point c'est rare. Parce que ce n'est jamais
arrivé dans l'histoire du Québec, et je ne pense pas que ça va arriver.
Alors, effectivement,
la performance de nos athlètes est vraiment une performance totalement
historique, non seulement d'avoir gagné ce
prix pour une première fois… ce grand tournoi pour une première fois depuis
28 ans, mais c'est de la façon
dont ils ont gagné. 5-0, ce n'est pas rien. Je pense que c'est le travail… Bien
sûr, c'est un travail d'équipe. Que ce soit le hockey, le soccer, le
football, le volleyball, le basket ou tous ces sports d'équipe, on ne peut
faire fi de l'ensemble des joueurs et des
joueuses d'une équipe. Mais il y a deux personnes… je vais me permettre
effectivement de les mentionner,
particulièrement Joëlle Gosselin, qui est la recrue de l'année. Trois buts, je
vais vous dire, au soccer c'est énorme, c'est beaucoup, je pense qu'au
hockey ça équivaut à cinq buts. Alors, je veux la féliciter d'une façon toute particulière. Féliciter aussi… et là, bien sûr,
c'est le père d'un gardien de but de hockey qui va parler, mais féliciter la
gardienne de but qui a permis, Marie-Joëlle
Vandal, non seulement de mériter cette victoire, mais un blanchissage, un
blanchissage. Et, vous savez, on dit
toujours au hockey : Quand un gardien fait un très gros arrêt, souvent
ensuite notre équipe va marquer. Et c'est un peu ce qui est arrivé. Ils
menaient 1-0, elle a fait l'arrêt du match coup sur coup à la 39e minute.
Quatre minutes après, 2-0. Et vous connaissez la suite, une victoire de 5-0.
Alors, je veux les féliciter mais
féliciter l'ensemble des joueuses de l'équipe, féliciter aussi
l'entraîneur-chef — mon
collègue l'a dit tantôt — après 20 ans à être à la tête de cette
équipe. Et l'entraîneur-chef disait : «20 ans, ça a été très long,
mais c'est incroyable. Gagner de cette
façon, contre la meilleure équipe au pays, c'est fantastique.» Mais vous n'avez
pas gagné contre la meilleure équipe au
pays, vous êtes maintenant la meilleure équipe au pays. C'est vous, la
meilleure équipe. Alors, je veux les
féliciter, leur dire, avec ma collègue, également, députée de Taschereau — qui tenait absolument que je fasse ces félicitations en son nom et au nom
également de notre formation politique — leur dire qu'elles sont des exemples pour toutes les jeunes filles, les jeunes
garçons au Québec. Vous êtes des modèles. Alors, merci pour ce que vous
êtes, merci de ce résultat extraordinaire et merci de nous offrir cette belle
fierté québécoise.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député
de Labelle. Maintenant, M. le député de Drummond—Bois-Francs, à vous la
parole.
M. Sébastien Schneeberger
M.
Schneeberger :
Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir, au nom de ma formation politique,
de joindre ma voix à celles de mes
collègues afin de rendre un hommage à l'équipe de soccer universitaire féminin
du Rouge et Or de l'Université Laval.
Ceci me fait encore plus plaisir, car nous rendons hommage à la détermination,
à la volonté de jeunes femmes brillantes de se propulser au sommet de
leur sport.
Mme
la Présidente, le Rouge et Or est une institution au Québec au niveau du
football. Je suis donc très heureux de
constater qu'une autre discipline telle que le soccer universitaire féminin
fait sa marque et remporte pour la première fois le trophée Gladys Bean.
Également,
la performance de l'équipe passera à l'histoire, pour toujours les membres de cette
équipe se souviendront de ce match et
de cette victoire. Elles pourront raconter, dans plusieurs années, à leurs
enfants et petits-enfants qu'elles étaient les premières de toute l'université. Vous êtes une source d'inspiration pour votre génération, merci pour
votre contribution au développement du sport universitaire.
Et,
en finissant, Mme la Présidente, je dirais que l'histoire fait bien les choses parce qu'aujourd'hui les championnes
remplacent les champions. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de
Drummond—Bois-Francs.
Je vois Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques qui court vers son
siège. Alors, la parole est à vous.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente. Parfois, c'est comme une game de
soccer ici, quand on est juste trois. On n'est pas 11, alors c'est plus
compliqué.
Alors, la victoire de
l'équipe féminine du Rouge et Or de l'Université Laval est une belle et grande
victoire. Comme féministe, de voir une
équipe de filles gagner contre toutes les autres filles à travers le Canada, ça
me fait plaisir. Les conditions
n'étaient pas évidentes. Faire face à une équipe championne, comme on l'a dit,
en titre depuis deux ans et gagner par la marque de 5-0, ce n'est pas rien. C'est
d'autant plus une belle victoire que le titre du championnat canadien revient à
une équipe québécoise pour la
première fois en 28 ans. 28 ans, j'imagine que plusieurs d'entre vous
ne l'avez même pas.
Mesdames,
c'est une très belle réussite que vous avez accomplie en équipe. Cet élément-là
est important. Les médias ont
souligné la belle performance de Joëlle Gosselin qui a marqué ses trois buts,
j'en suis avec les médias, mais, sans rien enlever à Mme Gosselin, elle n'aurait pas pu les compter seule. Les
sports d'équipe nous démontrent très bien l'importance de la solidarité. Chacun et chacune y jouent un
rôle important, et c'est ensemble qu'on peut arriver à faire des exploits.
Je veux donc féliciter l'équipe de soccer
féminin du Rouge et Or dans son ensemble mais surtout pour son travail acharné
durant pas seulement cette année, mais
plusieurs années. Alors, sa contribution… l'ensemble des joueuses, la
contribution à l'équipe était importante. Vous pourrez toujours porter
la fierté de cet accomplissement. Et rappelez-vous que... Et rappelez-vous
toujours que c'est ensemble que vous y êtes arrivées. Merci.
Mise aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Adopté.
Merci
beaucoup. Maintenant, je suis prête à reconnaître un membre formant
l'opposition officielle. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Féliciter l'équipe de football les Carabins de
Montréal, gagnante de la coupe Dunsmore
Mme
Poirier : Alors, Mme la Présidente, je sollicite le
consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le ministre de
l'Éducation, du Loisir et du Sport, le député de Granby et le député de
Mercier, la motion suivante — et comme Montréalaise je peux
vous dire que j'en suis très fière :
«Que
l'Assemblée nationale souligne la victoire historique de l'équipe des Carabins
de Montréal en finale de la coupe
Dunsmore du football universitaire québécois — j'ai un de nos collègues qui quitte, je ne
comprends pas pourquoi;
«Que
l'Assemblée nationale félicite toutes les équipes pour leur parcours exemplaire
pendant la présente saison; et
«Que
l'Assemblée nationale souligne l'apport essentiel du sport au développement de
saines habitudes de vie.»
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, merci beaucoup, Mme la députée.
Mise aux voix
Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion?
M.
Sklavounos : Une
excellente motion, Mme la Présidente, que nous proposons d'adopter sans débat.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, merci beaucoup. Je crois maintenant que Mme la députée Sainte-Marie—Saint-Jacques
voulait intervenir à ce point-ci.
Mme Massé : Oui. En fait, j'aimerais
demander le consentement à cette Chambre pour pouvoir déposer une deuxième motion dans ce cycle-ci, parce que
Mme David a dû quitter à cause de la réunion des leaders, et, encore là,
on ne peut pas se séparer en deux.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée. M. le
leader, y a-t-il consentement?
M.
Sklavounos :
Consentement, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Il y a consentement. Alors, vous pouvez lire la motion.
• (11 h 50) •
Mme
Massé : Merci. Mme la Présidente, je demande donc le consentement de
la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la
députée de Taillon :
«Que
l'Assemblée nationale exprime sa vive préoccupation pour la surfacturation des
frais accessoires imposés par des médecins en clinique privée, qui ont
occasionné des coûts dépassant 100 millions de dollars pour des patients [et patientes] souvent vulnérables et mal informés
qui en subissent des conséquences financières occasionnant un accès
inéquitable aux services médicament requis;
«Que
l'Assemblée nationale, tenant compte
des impacts de cette surfacturation, presse le gouvernement du Québec de
revoir le mode de financement des frais en cabinet et de clarifier la
couverture publique des produits et services concernés, de mieux
combattre et d'informer le public sur ces pratiques illégales.»
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci
beaucoup, Mme la députée. Y a-t-il consentement pour
débattre de cette motion?
M.
Sklavounos : Pas de consentement pour le débat,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci
beaucoup. Il n'y a pas de consentement.
Avis
touchant les travaux des commissions
Nous en sommes maintenant à la rubrique des avis
touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M.
Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Alors,
j'avise cette Assemblée que la Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du
projet de loi n° 3, Loi favorisant la santé financière et la pérennité des
régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
13 heures et de 15 heures à
18 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, le vendredi 21 novembre,
de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, ainsi que le mardi 25 novembre, de 10 heures
à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
La Commission
de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
poursuivra l'étude détaillée du
projet de loi n° 11, Loi sur la Société du Plan Nord, aujourd'hui, après la période des affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle des Premiers-Ministres, 1.38, de l'édifice
Pamphile-Le May, et de 15 heures à
16 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, ainsi que le lundi 24 novembre, de 14 heures à
16 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission
de l'économie et du travail entreprendra
l'étude détaillée du projet de loi n° 22, Loi donnant suite aux conclusions du Rapport du groupe spécial
constitué en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur concernant les articles 7.1 et 7.2 de la Loi sur les
produits alimentaires, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la
salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, ainsi que le mardi 25 novembre, de 10 heures
à midi, à la salle du Conseil législatif;
La Commission
des finances publiques poursuivra, quant à
elle, l'étude détaillée du projet de loi
n° 15, Loi sur la gestion et le
contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des réseaux du secteur
public ainsi que des sociétés d'État,
aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 13 heures et de 15 heures à
16 h 30, à la salle du Conseil législatif;
Finalement,
la Commission des institutions procédera à des consultations particulières à
l'égard du projet de loi n° 21, Loi
concernant principalement la mise en oeuvre d'ententes en matière de travail
entre le gouvernement du Québec et le
Conseil Mohawk de Kahnawake, le 25 novembre, mardi, de 10 heures à 12 h 15, à
la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci,
Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, merci beaucoup, M. le leader. Alors, y a-t-il un consentement pour déroger à l'article 143.1 du règlement concernant l'horaire des
travaux des commissions? Consentement? Merci.
Alors, pour ma part,
je vous avise que la Commission de l'administration publique se réunira
aujourd'hui en séance de travail, de 13 heures à 15 heures, à la salle
RC.171 de l'hôtel du Parlement, afin de préparer l'audition portant sur le chapitre du rapport du Commissaire au
développement durable intitulé Fonds vert :
gestion et aide financière; en séance publique, de
15 heures à 18 heures,
à la salle des Premiers-Ministres de l'édifice
Pamphile-Le May, afin d'entendre le ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte
contre les changements climatiques et le ministère des Transports du Québec;
et en séance de travail, de 18 heures à 18 h 30, à la
salle des Premiers-Ministres, afin de statuer
sur les observations, les conclusions et les recommandations à la suite de
cette audition.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
À la rubrique
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, Mme la leader de l'opposition
officielle.
Mme
Maltais : Mme la
Présidente, on va avoir besoin d'information de la part du gouvernement, ce matin, pour
le suivi de nos travaux. Je pense que c'est important. Dans une mêlée de presse ce matin,
le ministre de la Santé et des Services
sociaux a annoncé, carrément, a annoncé un
bâillon sur le projet de loi n° 10. J'ai les
mots devant moi, là. C'est très clair, ce
qu'il nous dit : Bon, vous envisagez donc un bâillon. C'est certainement possible, c'est… ta, ta, ta… Il
continue comme ça.
Voilà. Et il accuse, il accuse l'opposition de vouloir bloquer le projet
de loi, faire de l'obstruction, et il annonce un bâillon.
Mme la Présidente, j'ai beaucoup de respect pour les leaders de l'autre
côté. Je pense qu'ils sont de bons parlementaires. Ça fait longtemps qu'ils sont ici. Je pense qu'ils
vont avoir besoin de faire un cours de
législation 101 au ministre de la Santé, sinon on ne saura
plus, nous, comment travailler.
Je
rappelle que les consultations viennent de se
terminer. Nous avons eu un… Il y a eu des échanges, en tout cas de notre part, assez
exemplaires. Et après ça on a commencé,
hier, l'adoption de principe. Hier. Ça a
commencé hier. Il y a trois personnes,
de notre côté, seulement qui ont pu prendre la
parole sur ce projet de loi qui est fort important.
Aujourd'hui,
le ministre nous annonce un bâillon. J'ai cru comprendre, j'ai cru comprendre
que peut-être le leader, de l'autre
côté, mais on ne l'a pas entendu, nous… que peut-être le leader aurait dit
qu'il n'y en aurait pas. Alors, pour la bonne suite des travaux... Parce qu'on ne peut pas entreprendre une
étude de principe, d'adoption de principe — imaginez l'étude détaillée! — sans enlever cette épée de Damoclès sur la tête. Est-ce que, oui
ou non, le gouvernement nous annonce un bâillon? Et, si c'est le cas,
est-ce qu'il pourrait expliquer au ministre de la Santé qu'il n'est pas roi et
maître en ce Parlement et que ce Parlement doit débattre, discuter des enjeux
de notre société?
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup. Alors, c'est
une demande d'information au gouvernement. Alors, M. le leader du
gouvernement.
M.
Sklavounos :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je prends bonne note des commentaires de la
leader du gouvernement. Il n'y a pas de
décision prise à ce sujet. Alors, j'avise la leader de ce qu'elle savait
déjà : Il n'y a aucune décision prise à cet égard-là.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors... Allez-y.
Mme
Maltais : Mme la Présidente, là, si je comprends bien, le
gouvernement ne nie pas les propos du ministre de la Santé qui annonce
un bâillon. Je veux qu'on nous enlève cette épée de Damoclès sur la tête, qu'on
soit clair. On commence l'adoption de
principe. Qu'on nous dise ce qui se passe, là, ici, dans l'Assemblée. Il y a un
ministre de la Santé et des Services
sociaux qui, le jour... le lendemain du début du débat, dit : Il y aura un
bâillon. Alors, je veux qu'on nous enlève
ça, là, puis qu'on continue les travaux comme d'habitude. Puis ça va bien se
passer, mais qu'on nous enlève cette épée de Damoclès. C'est
complètement ridicule, ce qui s'est dit.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Merci. Alors, M. le leader adjoint.
M.
Sklavounos : Je vais répéter à la collègue leader de
l'opposition officielle qu'il n'y a pas de décision prise à ce
niveau-là. On peut continuer à travailler selon la bonne entente qui existe en
commission.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup.
Alors,
pour ma part, je vous rappelle que, lors de l'interpellation prévue pour
demain, vendredi 21 novembre 2014, Mme la députée de Repentigny s'adressera à Mme la ministre de la Famille
sur le sujet suivant : Le manque de vision du gouvernement libéral
concernant l'avenir du réseau des services de garde.
Affaires
du jour
La période
des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux
affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.
• (12 heures) •
M.
Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Je vous demande de
rappeler l'article 1 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet
de loi n° 10
Reprise du débat sur
l'adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 1,
l'Assemblée reprend le débat ajourné le 19 novembre 2014 sur l'adoption du principe de projet de loi
n° 10, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux
notamment par l'abolition des agences régionales. Alors, y a-t-il des interventions?
Alors, je suis prête à reconnaître notre premier intervenant, M. le député de
La Peltrie.
M.
Éric Caire (suite)
M.
Caire : Merci, Mme
la Présidente. Je vais donc poursuivre sur la lancée que j'avais entreprise
hier.
Dans un premier temps, je pense qu'il était
important de faire un bilan de la précédente réforme libérale pour deux raisons : d'abord voir le chemin qui
avait été parcouru et fondamentalement s'assurer qu'on ne répète pas les
erreurs du passé. Et j'en étais, Mme
la Présidente, à la question qui a été soulevée de façon légitime et qui est
fondamentale : Est-ce que la
réforme qui nous est proposée… Au moment où on se parle, est-ce qu'elle est
pertinente? Est-ce qu'elle est à propos? Et est-ce que c'est la bonne
chose à faire dans le contexte actuel?
Alors, je veux simplement reprendre, Mme la
Présidente, certains reproches qu'on a faits à la réforme et pour lesquels je ne peux pas me taire. On a notamment
accusé le projet de loi n° 10 de faire une plus grande ouverture ou en
fait d'ouvrir la porte toute grande
au privé. Mme la Présidente, il y a plusieurs choses, je pense, qu'il est
fondamental de dire là-dedans.
D'abord, moi
non plus, je ne vois pas dans ce projet de loi là une ouverture au privé. Je
vois une possibilité, je dis bien une
possibilité, de rendre le public plus performant. Et j'aimerais dire à tous
ceux pour qui c'est une hantise, pour qui les mots «performance», «bonne
gouvernance», «saine gestion» sont pratiquement blasphématoires, que c'est au contraire un objectif qu'on devrait viser quel que
soit l'organisme, qu'il soit privé ou public. Et, de rendre le système de
santé public plus performant, d'être capable
de l'évaluer, de mesurer sa capacité à livrer des services, d'installer, qui
sait, une certaine concurrence, une
saine concurrence, je ne vois là-dedans rien de mal. Au contraire, ce sont des éléments qui, ailleurs et… à plusieurs
endroits, en fait, ont prouvé leur efficacité.
Mais je dis et je répète toujours la même chose
pour ceux qui ont peur du privé, et je n'en fais pas partie : La meilleure
façon de fermer la porte à double tour au privé en santé, c'est de rendre le
système public performant.
Mme la Présidente, j'ai eu l'occasion d'interroger des représentants syndicaux qui sont
venus nous faire part de cette
préoccupation-là, en leur demandant : Oui, mais vous, là, demain matin,
là, vous avez un enfant qui a besoin d'un examen, et on vous dit : Au public, c'est 12 mois d'attente, alors
qu'au privé on vous dit : C'est cinq jours, dans cinq jours, vous avez… Qu'allez-vous faire? Qu'est-ce que vous feriez? Allez-vous mettre votre enfant sur la liste d'attente ou
vous allez aller au privé? Et, Mme la Présidente, je n'ai pas eu de réponse. Pourquoi? Parce
que la réponse, elle est évidente :
N'importe quel parent digne de ce nom va
tout faire pour que son enfant reçoive les soins dans des délais raisonnables.
Et là je parle d'enfants; on peut parler de conjoints, de frères, de soeurs, de
grands-parents. Mme la Présidente, si aujourd'hui le privé a la cote, puis là-dessus
on pourrait avoir une longue discussion, est-ce que ce n'est pas un peu beaucoup
parce que fondamentalement le public échoue à donner des
services dans des délais raisonnables? Pensez-vous sincèrement qu'un
individu sain d'esprit qui pourrait, avec sa carte d'assurance maladie,
recevoir un traitement dans un délai
raisonnable, pour quelque raison que ce soit, préférerait sortir sa carte de
crédit? Pensez-vous sincèrement que quelqu'un qui pourrait, à l'hôpital
ou à une clinique publique, recevoir un soin va se dire : Non, moi, je
préfère payer 300 $, 400 $, 500 $, 600 $ de
plus? Je ne pense pas, Mme la Présidente. Je pense que n'importe quel individu
normalement constitué qui se fait
offrir un soin dans le public dans le même délai que le privé va aller au
public. Justement, parce que nous
sommes tellement imposés, taxés, et un peu plus à chaque fois, et un peu plus à
chaque changement de gouvernement, si on peut recevoir un service au
public dans des délais qui sont raisonnables, n'importe quel individu
normalement constitué va choisir d'aller au
public. Mais c'est le système public qui pousse les gens vers le privé, c'est
son incapacité à donner des soins
dans des délais raisonnables. C'est parce que les gens n'ont pas des heures, et
des heures, et des heures à attendre dans une salle d'urgence qui n'a d'urgence
que le nom, trop souvent, parce qu'on a d'autres choses à faire dans la vie que d'attendre que le médecin se libère. Il
n'y a personne qui a envie de croupir sur une liste d'attente ou de moisir
dans un corridor d'hôpital, dans leurs
superbes jaquettes, en attendant qu'on veuille bien nous donner les soins
requis.
Alors, Mme la
présidente, que ceux qui ont tellement peur du privé se le tiennent pour
dit : Travaillons à rendre le
système de santé publique à ce point performant que le choix du citoyen va
devenir évident. Et ce n'est certainement pas en brandissant des épouvantails et ce n'est certainement pas en se
lançant dans des psychodrames qui n'existent que dans la tête de ceux
qui veulent bien les vivre qu'on va arriver à ça.
Or, Mme la
présidente, une autre chose, pour moi, qui est évidente, c'est que le statu quo
est inacceptable. Et je dois dire que
tous ceux qui sont venus en commission parlementaire partageaient deux
opinions. La première, c'est que je n'ai entendu personne, personne verser quelque
larme que ce soit sur l'abolition des agences de santé. Je pense qu'on peut
prendre pour acquis que l'ensemble des gens qui sont venus nous parler n'avait
aucune, aucune objection à ce qu'on abolisse les agences de santé. Ça, c'est
une première chose. Et j'ai entendu tous ceux qui sont venus en commission parlementaire dire ceci : Nous partageons les
objectifs de la réforme. Donc, pour tout le monde, Mme la Présidente, le
statu quo était inacceptable. On peut ne pas s'entendre sur les moyens, on peut
avoir des divergences sur les moyens, mais on
s'entend sur une chose : l'administration du réseau de la santé échoue à donner les soins
dans des délais raisonnables, des
délais auxquels nos concitoyens sont en droit de s'attendre. Et ce n'est pas un
échec des professionnels de la santé, Mme la Présidente, j'ai
eu l'occasion de le dire hier et je veux le répéter. Nous avons une qualité de
soins exceptionnels, mais l'accessibilité n'est pas l'affaire du professionnel, de la qualité du soin du professionnel.
L'accessibilité, c'est
l'affaire de l'organisation, de la structure à travers lesquelles ces professionnels-là
oeuvrent et c'est à ça qu'il faut
s'attaquer.
Alors, quand
on me dit : Le projet de loi
n° 10, c'est juste du brassage de structures, non, pas du tout, c'est
faux. C'est faux parce que ce n'est pas la qualité de la médecine, ou de la
pratique infirmière, ou des autres professionnels de la santé qui est en problème, c'est notre capacité
à y avoir accès. C'est un parcours du combattant, avoir accès à un
professionnel de la santé, Mme la Présidente, dans le réseau de la santé. Et, parce que la structure, parce que
cette organisation-là échoue à rendre ces professionnels-là accessibles, c'est la raison pour
laquelle on doit s'attaquer à cette structure-là. Alors, est-ce que la réforme de la santé qui nous
est proposée est pertinente? Bien, la réponse à ça, c'est, évidemment, oui, c'est
évidemment oui. Est-ce que les objectifs
visés par la réforme sont les bons? Bien, la réponse à cette question-là,
c'est, évidemment, oui. Et tout le
monde est venu nous dire qu'ils partageaient les objectifs de la réforme, Mme
la Présidente.
Donc, on a
devant nous une réforme dont on partage les objectifs, qui s'attaque aux
structures, ce qui est ce qu'on doit faire si on veut rendre le système
plus performant quant à l'accessibilité. Alors, comment peut-on dire non à ça? Comment peut-on refuser ne serait-ce que de le
regarder, de l'étudier et de l'amender? Oui, l'amender, parce qu'effectivement
il est loin d'être parfait. Oui, il y a des
lacunes qui sont majeures, et, oui, il amène son lot de solutions mais son lot
de problèmes. Mais de fermer la porte
aux solutions ne règle pas le problème. De refuser de travailler sur ce projet
de loi là, de le bonifier, de le
rendre meilleur et de faire en sorte que les moyens rejoignent les objectifs,
ce n'est pas une solution. Le statu
quo n'est pas une solution, la fermeture n'est pas une solution, l'obstruction
n'est pas une solution, Mme la Présidente. Donc, à la question :
Est-ce que le projet de loi est nécessaire?, bien c'est clair que oui, c'est
clair que oui.
Mme la
Présidente, on va, si vous voulez bien, aborder quels sont les avantages du
projet de loi. Il y a des avantages là-dedans.
D'abord,
l'abolition des agences. Je l'ai mentionné précédemment, les agences de santé
sont une structure qui, malheureusement,
a été maintenue en place par l'actuel premier ministre, alors qu'il avait
promis de les abolir. Puis on constate
au fil des ans que ce n'est pas la première fois qu'il revient sur sa parole,
mais, bon, au moins celui-là a l'avantage de respecter sa parole, il va abolir les agences de santé, une structure
qui a été décriée par à peu près tout le monde dans le réseau de la santé comme étant, pour ses plus
chauds partisans, d'une utilité un peu floue et, pour ceux qui étaient
carrément contre, totalement inutile.
Alors, c'était clair, Mme la Présidente, que cette structure-là devait être
abolie, devait être abolie parce
qu'elle… D'abord, sa fonction, effectivement, et même le Vérificateur général
l'avait dit dans un rapport, son utilité était à démontrer, sa structure était floue et ses responsabilités
l'étaient encore plus, ce qui a donné le fait que plusieurs ressources
financières et humaines étaient accaparées par cette structure-là et donc n'allaient
pas en services. Parce que ça, c'est une
autre chose, Mme la Présidente, qu'il faut dire. Quand on dit : Ah! on
s'attaque aux structures, qu'on fait du brassage de structures,
attention! Ces structures-là nécessitent des ressources humaines et financières,
et les ressources humaines et financières
qu'on met dans les structures inutiles ne vont pas dans celles qui sont utiles,
celles qui donnent des services. Donc, il y a du détournement de
ressources, et refuser de s'attaquer à ça, c'est d'accepter le gaspillage.
• (12 h 10) •
Alors, dans
un réseau qui échoue aussi clairement à donner les services auxquels on est en
droit de s'attendre, tolérer le
gaspillage, ça m'apparaît hautement questionnable. Donc, l'abolition des
agences, un bon point pour le projet de loi.
La création des CISSS, qui est pourtant
l'élément le plus contesté du projet de loi. Je pense que l'intérêt de la création des CISSS, c'est l'intérêt
de l'intégration des services. Et, Mme
la Présidente, j'ai dit : Le
réseau échoue dans l'accessibilité. Et on fait souvent référence à la première ligne, à
raison. C'est vrai que l'accès à un médecin
de famille est extrêmement problématique. C'est vrai. Mais cette réalité-là ne doit pas nous faire
oublier une autre réalité, c'est qu'entre la consultation du médecin de
famille et un examen et/ou une consultation avec médecin spécialiste, là aussi,
Mme la Présidente, il y a de grandes difficultés d'accessibilité. Et, si le projet de loi ne règle pas le problème de la première ligne… On en convient tous, le projet de loi n° 10, là, je
pense que ce n'est pas une grande
révélation, ne va pas nécessairement
bonifier, améliorer l'accès aux services de
première ligne. Par contre, il
faut avoir la même honnêteté et
dire qu'il s'adresse d'une façon assez claire aux problèmes qui existent
entre la première puis la deuxième ligne et les autres services spécialisés et
surspécialisés.
Et je vous
donne un exemple, Mme la Présidente. J'ai besoin d'une IRM. Qu'est-ce que je fais actuellement? Je prends
le téléphone, j'appelle à tel centre
hospitalier, à telle clinique, à tel
autre centre hospitalier. Puis là je les fais tous comme ça, je les magasine parce que
j'ai besoin de l'IRM et je leur faxe ma prescription. On m'inscrit sur une liste d'attente à chaque endroit. Alors là, je viens gonfler artificiellement les listes d'attente, sans compter que moi-même, j'ai plusieurs
démarches à faire au lieu d'une seule. Bien,
la création des CISSS va me permettre de faire un téléphone, d'être inscrit sur une
liste d'attente et de recevoir le service au premier endroit qui se libère, qui
sera en mesure de me donner le... C'est ça, l'intégration. Ce n'est pas que ça. Mais c'est un
exemple de l'intégration des services, Mme
la Présidente, que le projet de loi
n° 10 pourrait, je dis bien
«pourrait», je le mets au conditionnel, mais pourrait permettre. Et ça, Mme la Présidente, ça veut dire quoi? Ça veut dire une augmentation du volume de soins. On
limite, mais on pourrait amoindrir les pertes de temps, on pourrait faciliter le parcours du patient à l'intérieur du
réseau de la santé, on pourrait avoir une plus grande fluidité, moins
d'administration, moins de bureaucratie, plus de soins.
Mme la Présidente,
difficile d'être contre ça, difficile de dire : Non, on n'en veut pas.
Non, on veut plus de bureaucratie puis, non,
on n'aime pas ça, soigner notre monde. Je ne pense pas qu'il y ait personne en
cette Chambre, et ailleurs, qui
tienne un tel discours. Et, en toute bonne foi, je pense que le projet de loi
n° 10 s'adresse à cette problématique-là de façon très directe. Et, dans ce sens-là, c'est une bonne chose, c'est
une bonne chose. Le projet de loi n° 10 pourrait, et, encore là, je dois le mettre au conditionnel,
Mme la Présidente, pourrait aussi réduire la bureaucratie. Or, évidemment,
si vous avez 93 ou 95 CSSS, bien vous avez
autant de directeurs généraux, vous avez autant de directeurs des ressources
humaines, vous avez autant de postes
administratifs qui se multiplient, qui ne sont pas nécessaires. Le service de
la paie, qu'il soit traité ici ou
dans une autre ville, aujourd'hui, avec les moyens technologiques dont on
dispose, de la façon dont on peut
gérer les services de paie, bien, Mme la Présidente, ça importe peu. Ce qui est
fondamental, c'est qu'à la date prévue, au jour prévu, la paie de
l'employé rentre dans son compte de banque. On s'entend? C'est ça, l'objectif.
Or,
si, pour faire ça, on est capables d'être tout aussi efficaces, peut-être même
plus, en ayant moins de personnel, bien,
bravo, parce que, le réseau de la santé, je le rappelle, son objectif, c'est de
donner des soins de santé, c'est de soigner des gens. Et, si on peut réduire l'administration, si on peut réduire la
bureaucratie, augmenter l'efficacité administrative, bien c'est autant de marges de manoeuvre qu'on
dégage et qui vont permettre de financer des soins à la population. On ne
peut pas être contre ça. C'est difficile d'être contre ça. Je vois
difficilement comment on pourrait plaider le contraire.
Mme
la Présidente, j'ai, sur les économies, une petite déception dont je fais part
au ministre. Les objectifs des économies
générées par les regroupements ont été chiffrés à 220 millions. Je crois
comprendre… et le ministre pourra me corriger
si je me trompe, mais je crois comprendre qu'on met la barre pas tellement
haute pour être sûrs de ne pas manquer la cible. Mais je réfère au rapport qui avait été déposé ici, en cette
Chambre, par l'ancien ministre des Finances au gouvernement libéral, Raymond Bachand, qui, lui, faisait état d'économies
aux alentours de 600 millions. Alors, on est pratiquement multiplié par trois par rapport à ce
qui est prévu, Mme la Présidente. Compte tenu du nombre d'employés administratifs qui quitteront le… dans le réseau
de la santé toujours, là, qui vont quitter le réseau dans les prochaines
années, compte tenu de la taille des
CISSS, parce qu'on fait quand même des organisations d'une taille assez
importante, donc, on peut s'attendre
à des regroupements importants et donc à des diminutions d'emplois… ou de
postes, je devrais dire, je vais faire
la nuance, des diminutions de postes importantes aussi. Et j'espère que les
économies générées par cette réforme-là seront supérieures aux 220 millions, qui m'apparaît être
minimaliste comme objectif, vraiment minimaliste. Et je crois comprendre des prévisions faites par les
fonctionnaires au niveau de l'emploi… je crois comprendre que c'est
effectivement le cas, c'est
effectivement le cas. On a fait des prévisions qui étaient très minimalistes
pour se dire : Bon, bien, cette cible-là, on est sûrs de l'atteindre. Mais la vérité, c'est qu'on a des ambitions
un peu plus grandes. Et j'espère que le ministre pourra… si je me
trompe, que le ministre pourra me corriger.
Un
autre élément, Mme la Présidente. Il m'apparaît fondamental que… Et on comprend
tous, là, les contraintes budgétaires.
On comprend tous que le réseau de la santé, dans les dernières années, a été
vorace. Le réseau de la santé a accaparé
beaucoup de ressources financières. Il y a beaucoup d'argent qui a été investi
dans le réseau, j'en ai parlé dans mon
intervention d'hier, avec des résultats plutôt décevants, et on comprend que le
réseau doit faire maintenant sa part pour atteindre l'équilibre
budgétaire. Et on est d'accord avec ça, là, on est d'accord avec ça.
Ceci
étant dit, j'espère que le ministre va être vigilant sur le fait que les marges
de manoeuvre qui seront libérées une
fois l'effort budgétaire complété… Les marges de manoeuvre libérées, ces marges
de manoeuvre là, doivent rester dans
le réseau de la santé parce qu'il faut que cette réforme-là se fasse
véritablement au profit des patients, il faut que cette réforme-là se fasse au profit des patients.
Et, si on veut augmenter, pas maintenir, Mme la Présidente, augmenter le volume de services, il est clair, il est clair
qu'on peut, oui, limiter la croissance des dépenses, mais on ne peut pas aller
sur le chemin des coupures. Et il y a une énorme différence, Mme la
Présidente, entre limiter la croissance des dépenses, c'est-à-dire augmenter le budget mais d'une façon contrôlée, ce qui n'a
jamais été fait précédemment, et couper dans les budgets de la santé. Ce n'est pas l'objectif, ça ne doit pas l'être non
plus, et je pense que là-dessus le ministre de la Santé et moi serons d'accord. S'il y a des marges de
manoeuvre une fois l'effort budgétaire complété, ces marges de manoeuvre là
doivent aller en soins directs à la population.
Alors,
Mme la Présidente, le projet de loi n° 10, oui, est un projet pertinent.
Oui, le projet de loi n° 10 a des éléments intéressants pour améliorer le réseau de la santé, l'accessibilité et la
fluidité dans les soins et les services. Pour nous, ça, c'est très
clair.
Maintenant,
le projet de loi n° 10, Mme la Présidente, il n'est pas parfait, on
s'entend. Il y a plusieurs éléments qui
nous dérangent, et là-dessus, Mme la Présidente, je veux être très clair. On a
dit, et je répète : Nous allons voter en faveur du principe du projet de loi. Notre assentiment au projet de loi
n° 10, à ce moment-ci, s'arrête là, s'arrête là. Je ne peux pas garantir au ministre que, si on le
maintient dans sa forme actuelle, nous voterions de façon finale et définitive
pour le projet de loi n° 10. Pourquoi?
Bien, parce qu'il y a des éléments là-dedans qui nous apparaissent dangereux et
qui seraient, à mon avis, contraires…
ou, à notre avis, je dois dire, contraires aux objectifs qui sont visés par le
projet de loi n° 10.
• (12 h 20) •
J'ai
eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises, au niveau de la gouvernance, il
m'apparaît fondamental qu'un conseil
d'administration, si tant est qu'on doive responsabiliser nos administrateurs…
Et je pense que c'est un des objectifs du
projet de loi n° 10 d'avoir des administrateurs qui sont compétents et
qui, par la rémunération, auront un certain niveau de professionnalisme, ce qui est souhaitable. Je
pense que, si on veut les responsabiliser, il y a deux éléments fondamentaux
qui doivent leur revenir.
Le premier,
c'est de nommer le P.D.G. Mme la Présidente, il est usuel dans toute
organisation que le président-directeur général relève de son conseil
d'administration. C'est une formule qui fonctionne bien. C'est une formule qui
fonctionne bien quand
on a un conseil d'administration qui fonctionne bien. Alors, je ne vois pas la
pertinence pour le ministre d'être
celui qui le nomme directement, parce que c'est le conseil d'administration qui
va travailler avec son P.D.G. Donc,
il doit y avoir une certaine chimie aussi à l'intérieur de ça, il doit y avoir
une certaine complicité, il doit y avoir une certaine... c'est ça, une complicité, Mme la Présidente, entre le
conseil d'administration et son P.D.G., une certaine confiance, une certaine confiance. On ne peut pas
partir une organisation avec un conseil d'administration, d'un côté, qui se
fait imposer un P.D.G. La méfiance s'installe, et là on n'est pas à pied
d'oeuvre pour faire avancer l'organisation. Pour les mêmes raisons, il
m'apparaît fondamental que le P.D.G. puisse nommer lui-même son adjoint. Qu'on
impose des barèmes, j'en suis, je n'ai pas
de problème avec ça, mais qu'à l'intérieur de ça le P.D.G. dise : Bien,
moi, j'ai envie de travailler avec telle ou telle personne parce qu'on a
des affinités, on a une vision commune, on ne va pas passer notre temps à se chicaner parce qu'on ne voit pas les
choses de la même façon, mais pas du tout, puis lui va me jouer dans le dos, puis moi, je vais faire plus de politique que
de gestion… moi, je pense qu'à sa face même, Mme la Présidente, cette
demande d'amendement là, elle se défend parfaitement. Il y a aussi un danger
réel et clair de politiser le réseau. Et, honnêtement, je ne pense pas que ce
soit l'intention du ministre de la Santé, pas du tout. Mais, comme moi et comme
n'importe qui, il n'est pas éternel. Il est
actuellement ministre de la Santé, mais il y aura d'autres gouvernements,
d'autres ministres de la Santé, et
éventuellement la tentation de faire de la place à un ami… on l'a vu dans le
passé, cette tentation-là pourrait
être forte. Et est-ce que la compétence primera toujours sur l'allégeance? Mme
la Présidente, il est permis, hein, quand on regarde ce qui s'est fait
dans le passé, il est permis d'en douter.
Alors, moi,
j'invite le ministre à écarter cette possibilité-là. Je l'invite à écarter
cette possibilité-là notamment au niveau
des conseils d'administration en s'assurant que, oui, le ministre nomme les
membres d'un conseil d'administration, mais
qu'il le fasse comme c'est déjà prévu par la loi, selon un profil de compétence
déterminé, donc en s'assurant que les gens
répondent à ce profil de compétence là, ce qui est déjà prévu dans le projet de
loi, mais aussi en restant à l'intérieur de la liste qui lui sera soumise. Et il y a une disposition de la loi
qui permet au ministre de s'écarter de ça, et, à mon avis, ce n'est pas souhaitable. À mon avis, ce n'est pas
souhaitable. Je pense que le ministre devrait amender cette possibilité-là…
en fait, la retirer du projet de loi pour s'assurer que le ministre de la Santé
travaille à l'intérieur des listes qui lui sont soumises par les comités d'experts qui auront constitué ces listes-là.
Et, avec ces deux mesures-là, Mme la Présidente, je pense qu'on se donne une certaine marge de manoeuvre pour éviter une
politisation du réseau et s'assurer que ce sera toujours la compétence
avant l'allégeance et jamais le contraire.
Un autre
élément qui a été soumis et qui m'apparaît fondamental, c'est la taille des
CISSS. Bon, il y a eu des débats sur
cette question-là, et je pense que l'avis qui nous a été donné, qui nous a été
donné par plusieurs organisations, qui est le plus clair, le plus probant, c'est de dire qu'une organisation qui va
au-delà des 500 000, ça commence à être difficile à gérer, et la possibilité de voir la bureaucratie
exploser, elle est décuplée de façon exponentielle. Et je pense qu'il faut prendre…
ne serait-ce que dans un premier temps, il
faut prendre avis de cette recommandation-là et s'assurer que les CISSS qu'on
va créer ne dépasseront pas cette limite-là
qui nous a été notamment suggérée par la Protectrice du citoyen. L'IGOPP a
aussi parlé de ces possibilités-là. Puis il y a différentes organisations, là,
qui nous ont fait part de ça. Et donc, pour nous, ce serait, je pense,
extrêmement important que le ministre respecte cette limite-là dans les
différentes régions où ça s'applique.
Puis je pense aussi, Mme la Présidente, qu'il
serait opportun pour le ministre de tenir compte de certaines réalités
régionales. Par exemple, bon, Mauricie‑Centre-du-Québec, de toute évidence,
cette union-là est loin de faire l'unanimité,
et les gens qui ont soumis les arguments, puis je pense que le ministre les a
entendus comme moi, avaient de bons
arguments. C'est une question de fluidité des soins, c'est une question
d'organisation des soins. Souvent, on a l'impression que, bon, bien, on
dessine un peu arbitrairement des limites administratives puis on pense qu'on a
fait la bonne chose, puis finalement, sur le
terrain, les gens nous disent : Bien non, les liens naturels qu'on a créés
ne vont pas dans le sens de la carte
que vous avez dessinée, les liens naturels se sont faits plutôt dans une autre
direction. Puis je pense qu'il faut
être en mesure de respecter ça, Mme la Présidente. Et je prends l'exemple du
Centre-du-Québec parce qu'avec la Mauricie,
visiblement, il n'y a pas d'affinité, il n'y a pas de liens naturels qui se
font là, et je pense qu'on pourrait parfaitement,
d'abord, respecter une réalité du gouvernement du Québec, c'est-à-dire deux
régions administratives connues et reconnues et qui sont aussi, sur le
terrain, très distinctes.
Une préoccupation
qui nous a été transmise par les comités d'usagers, et je la fais mienne comme
un amendement que je vais demander au
ministre, c'est d'avoir une représentation locale. C'est vrai que, dans une
hyperstructure, pour M. et Mme
Tout-le-monde qui est malade, donc qui est déjà en situation de vulnérabilité,
d'être en mesure de... je dirais, de
comprendre, de faire valoir ses besoins, d'avancer dans le réseau, ce n'est pas
évident, ce n'est pas clair, et les comités d'usagers ont cet avantage de pouvoir aider les gens à cheminer dans le
réseau. Et je pense que de garder une dimension locale à ces comités d'usagers là, ce serait de nature à humaniser la
réforme, à lui donner une dimension humaine, à la garder proche des
gens. Si je disais tout à l'heure que le service de la paie, ça n'a pas besoin
d'être dans chacun des établissements, je le
pense sincèrement. Par contre, la relation avec l'individu et le patient, ça,
ça ne peut pas faire partie d'un
mégaensemble. Il faut garder une taille humaine à ce qu'on fait, il faut garder
une dimension humaine à ce qu'on fait,
Mme la Présidente, parce qu'au final, je le répète, et le ministre l'a dit à de
nombreuses reprises, cette réforme-là, elle est pour les patients d'abord et avant tout. Donc, préoccupons-nous des
patients d'abord et avant tout qui sont déjà dans une situation de vulnérabilité et qui n'ont pas
besoin d'être dans une situation où c'est complexe et où on s'y perd un peu.
Puis on sait que, le réseau de la santé, c'est assez facile de s'y perdre.
Quand j'ai
regardé le projet de loi, Mme la Présidente, j'ai regardé les profils de
compétence. Puis je pense qu'on a
ciblé les bons profils de façon générale, mais ce qui m'est apparu évident,
c'est qu'il en manquait un. On aurait besoin, je pense, d'un profil d'un
gestionnaire, mais au sens plus large du terme. Donc, il y a différentes
personnes qui sont habilitées à faire de la
gestion ou de la microgestion, puis ça, les ressources humaines… les éléments
comme ceux-là qui sont vraiment très
pointus. Mais, un gestionnaire, quelqu'un qui a une vue d'ensemble, à mon avis,
je pense que ça manque au projet de loi. Et on
aurait intérêt à élargir les profils de compétence qui sont dans le projet de
loi puis se doter d'un gestionnaire, Mme la Présidente, qui a un profil de
gestion plus généralisé. Et ça, je pense que le ministre devrait être sensible à cette demande-là parce que l'objectif
de professionnaliser le conseil d'administration va dans le sens d'avoir
des gestionnaires qui sont aguerris mais
aussi qui sont capables d'embrasser les différentes perspectives de la gestion.
Mais ça va prendre un chef d'orchestre
là-dedans. Et je pense que ça, c'est quelque chose qui manque au conseil
d'administration.
Les
deux fédérations… bien, en fait, trois fédérations médicales sont venues nous
dire : Écoutez, le CMDP va se noyer
dans un ensemble qui est très large, et ça, c'est un petit peu dangereux,
compte tenu de sa mission, notamment, de s'assurer de la qualité de l'acte médical. Et je pense effectivement
que, sans commander la forme… je pense que, sur le fond, il serait important qu'on puisse, comme on le fait
pour les usagers, au niveau des CMDP, donner une emprise locale, garder une dimension humaine qui permet aussi, au niveau
médicoadministratif, d'avoir une certaine prise de décision puis une certaine influence sur la gestion au quotidien de
tout ce qui touche le médicoadministratif. Donc, là-dessus j'invite le ministre
aussi à apporter des modifications au projet de loi.
• (12 h 30) •
Je
vais accélérer, Mme la Présidente, parce que je vous vois et je vois l'horloge.
Et puis je pourrais vous parler encore
pendant des heures. Malheureusement, je ferai ça sur d'autres tribunes.
J'implore le ministre de nous présenter un plan d'intégration des systèmes informatiques. Je le dis sans
arrière-pensée, sans animosité. Je suis convaincu que c'est un élément
clé qui a manqué à la réforme que le premier ministre a initiée. Je suis
convaincu que ça explique en partie l'échec
de sa réforme, le DSQ entre autres, on l'a tous en tête, Mme la Présidente. La
Protectrice du citoyen est venue nous
le dire, il y a un danger de dérapage, il y a un risque financier incroyable.
C'est d'une complexité que, je pense, le ministre comprend. Et ça va prendre un plan très clair, très précis, des
échéanciers et des budgets alloués de façon aussi très claire et très
précise. Sinon, moi, je pense que cette réforme-là a peu de chance de réussite.
Si on n'est pas capables, comme prémisse,
de procéder à cette intégration-là, c'est comme de dire : On va construire un beau bateau, mais il n'y aura
aucun instrument pour se diriger, aucun instrument, on ne sait
pas combien il nous reste de fioul, on ne sait pas à quelle
vitesse on va, on ne sait pas dans quelle direction on va. On ne peut pas faire
ça. C'est impossible. Il n'y a pas un gestionnaire,
aussi compétent soit-il, qui est capable de voler à vue tout le temps, tout le
temps, tout le temps. C'est impossible.
Donc,
ça, c'est fondamental, fondamental. Les fameux articles transitoires, Mme la
Présidente. Le dire, c'est une chose, puis je pense
qu'on est à l'étape de l'écrire. Qu'est-ce qui est transitoire et dans quels délais ces
articles-là seront-ils caducs? Donc,
ajouter des clauses crépusculaires, Mme la Présidente, je pense que c'est fondamental, se
doter d'objectifs. Quels sont les
objectifs de réduction de la bureaucratie? Quels sont les objectifs de
réduction de la paperasse? C'est clair, net et précis. Quels sont les objectifs d'augmentation de la
performance? Et un gestionnaire qui n'a pas d'instrument de contrôle puis qui n'a pas
d'objectif, Mme la Présidente, je ne pense pas qu'il soit condamné au
succès. Au contraire, je pense qu'il se met dans une situation
potentielle d'échec probant.
Et
la Coalition avenir Québec souhaite que cette réforme-là aille de l'avant, dans la mesure où le ministre est ouvert à nos amendements. Et je
le dis, là… je le dis puis je ne veux pas négocier sur la place
publique, Mme la Présidente, mais notre
accord est acquis pour le principe, et pour le principe seulement. De la façon
dont le ministre va conduire la suite des
choses va dépendre de notre accord à nous et de notre façon à nous de se
gouverner. Je vois, nous voyons, dans ce
projet de loi,
un potentiel. Mais, dans sa forme actuelle, il ne livrera pas la marchandise.
Il manque trop d'éléments, des éléments
que j'ai brièvement décrits et pour lesquels nous sommes ouverts à collaborer
avec le ministre. Nous sommes ouverts
à la discussion. Nous sommes ouverts à le bonifier. C'est ce que nous
souhaitons. Nous souhaitons l'adopter sur le principe. Nous souhaitons l'amender, le travailler et faire en sorte que
le réseau de la santé, une fois pour toutes, se lance dans une réforme
qui va être au bénéfice des patients et des patients seulement. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de
La Peltrie. Et, pour la poursuite du débat… Là, je vois Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Je croyais qu'il y avait eu une
entente pour permettre à M. le député de Bertrand de… Non?
Des voix :
…
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bon. Alors, est-ce qu'il y a un de
vous deux qui pourrait permettre à l'autre d'intervenir en premier?
Des voix :
…
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Pile ou face?
Des voix :
…
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Voilà! Alors, le sort en est jeté,
c'est M. le député de Bertrand qui va intervenir. Merci.
M. Claude Cousineau
M.
Cousineau : Merci,
Mme la députée de Saint-Jacques. D'accord. Alors, Mme la Présidente, comme mes confrères et consoeurs députés, j'ai suivi
attentivement les travaux de la Commission de la santé et des services sociaux
portant sur le projet
de loi n° 10, loi modifiant
l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux
notamment par l'abolition des agences de santé et des
CSSS.
D'entrée de jeu, Mme
la Présidente, permettez-moi de féliciter la députée de Taillon, critique de
l'opposition officielle en matière de santé
et services sociaux, pour le magnifique travail qu'elle a accompli depuis des
semaines, lors des auditions des quelque 64 mémoires présentés en commission
parlementaire. Sa grande connaissance des dossiers
touchant la santé est un gage d'excellence, de crédibilité, d'efficacité et de travail bien fait.
La
gouvernance. Mme la Présidente, le réseau de la santé est encore confronté à des changements de structure. Je dis «encore», Mme la Présidente, puisque
l'on se souviendra qu'en 2004 le ministre
de la Santé d'alors, l'actuel premier ministre, avait présenté une réforme majeure, la loi n° 83,
qui visait à permettre d'assurer un meilleur accès aux soins et aux
services pour les usagers. Cette réforme, Mme la Présidente, visait l'uniformisation
des soins et des services tout en facilitant
l'échange d'information clinique entre les professionnels du réseau et la
communauté locale. Les intervenants y
ont cru. Ils ont mis l'épaule à la roue et, durant les 10 dernières
années, ont mis en place une approche axée sur les usagers et sur la
communauté. Pourquoi encore changer alors que dans beaucoup de régions du Québec
des gestes concrets et performants ont été posés, amenant des résultats extrêmement
significatifs et bénéfiques pour les populations locales et régionales?
Mme la Présidente, pour la région des Laurentides — je
vais parler pour la région des Laurentides parce que la circonscription de Bertrand est en plein coeur des Laurentides — plus
précisément le CSSS des Sommets, les CSSS des Sommets et Pays-d'en-Haut, un comité des usagers a été mis en place avec
l'intégration des comités des résidents des trois CHSLD, les centres
hospitaliers de soins de longue durée. Cette action faisait suite à la mise en place du
CSSS des Sommets par l'intégration des CLSC, des CHSLD et du centre
hospitalier.
Mme la Présidente,
cette intégration devait aussi permettre de mieux répondre aux besoins
régionaux des professionnels en santé et services sociaux. Cet objectif
a été atteint dans notre belle région, mais il semble que tout sera à recommencer avec le projet de loi n° 10. On
retrouve aujourd'hui une grande richesse de partenariat interne et externe
entre le CLSC, le CJE, les OSBL oeuvrant dans le domaine communautaire, la commission
scolaire, les municipalités desservies
par le CSSS des Sommets et le CSSS des Pays-d'en-Haut. Ce magnifique
partenariat, Mme la Présidente, a été rendu
possible grâce à la concertation. La communauté s'est prise en main. Elle s'est
donné des outils de gestion, des outils de surveillance, des balises et
des indicateurs de performance.
Mme la Présidente, des outils de communication ont
été développés afin que la population se sente en sécurité. Les usagers du CSSS des Sommets et des
Pays-d'en-Haut, dans les Laurentides, sont conscients que les moyens mis en
place dans leur région par les partenaires
sont pour eux et prennent en compte les spécificités de leur communauté et de
leur environnement social.
Mme
la Présidente, le projet de loi n° 10 fait table rase de cette belle
symbiose qui s'est installée au fil des dernières années par les intervenants du milieu. En
concentrant les décisions vers un organisme centralisateur unique pour la
région des Laurentides, basé à
Saint-Jérôme, ce projet de loi, malheureusement, bafoue tout le travail fait
depuis 10 ans par et pour les communautés locales.
Mme
la Présidente, ce travail colossal a donné des résultats formidables. Ces
changements ont été mis en place afin
de mieux répondre aux besoins locaux et régionaux des populations des
Laurentides. Les mandats régionaux de certains établissements en santé et services sociaux sont clairement définis,
tout en exigeant la création d'ententes et de corridors de soins et de
services. Mme la Présidente, cette belle dynamique s'est réalisée selon des
prédictions, avec beaucoup d'efficacité.
Alors, pourquoi encore un nouveau réenlignement? Ce sont les services à la
population qu'il faut bonifier, non
jouer dans les structures et faire disparaître ce qui fonctionne bien. Nous
savons tous que le rodage d'une réforme prend des années. La dernière date de 10 ans, voire… puis, dans
notre région, bien, tout fonctionne très bien, voire même très bien.
• (12 h 40) •
Mme
la Présidente, ce que je décris pour ma région, cette mise en situation
provient d'une réflexion portée à mon attention
par les membres du comité des usagers du centre de services sociaux des
Sommets, à Sainte-Agathe-des-Monts. Je
me dois, Mme la Présidente, de vous citer quelques extraits de leur document de
réflexion. Le constat est sévère face
au dépôt du projet
de loi n° 10. Ils axent leurs
opinions essentiellement sur les usagers de soins et de services avec
comme cible la protection des populations locales.
Avant
de vous lire ces extraits, je dois rappeler, Mme la Présidente, que la
région des Laurentides est un immense territoire de 220 kilomètres de la rivière des
Mille Îles à Mont-Laurier. Elle se divise en trois sous-régions très
distinctes, très différentes les unes
des autres, ce qui demande une attention particulière en ce qui a trait à la dispersion des services à la
population. Vous avez les Basses-Laurentides, une population
en pleine croissance démographique, avec des jeunes familles demandant des services adaptés à leurs
besoins et à leurs préoccupations. Dans les Basses-Laurentides, on retrouve
les municipalités au sud de Saint-Jérôme : on parle
de Mirabel, on parle de Deux-Montagnes, on parle de
Boisbriand, on parle Lorraine, toutes ces municipalités qui sont en
pleine effervescence au niveau de la croissance démographique.
Nous retrouvons, au
centre de cette belle région… communément appelée les Moyennes-Laurentides,
région extrêmement touristique, avec une population
permanente vieillissante. Par exemple, la municipalité de Saint-Sauveur, c'est la municipalité, au Québec, où la population est la plus âgée. Les soins demandés par les
usagers sont nombreux et demandent un
suivi constant. Cette région étant, comme je l'ai mentionné, très touristique,
la pression est constante sur l'urgence
et les transports ambulanciers, et ce, durant toute l'année. Mais on comprendra
que, dans une région touristique, avec
le ski l'hiver, la motoneige et puis avec les sports d'été, alors il y a
une pression très, très forte qui s'exerce sur les services de
santé. Donc, on doit conjuguer avec ça dans cette région mitoyenne.
La troisième
région, bien qu'aussi très touristique, est caractérisée par une population
travaillant dans des secteurs aussi
variés que la foresterie, les services de... le plein air. Notre troisième
région, plus au Nord, les municipalités éloignées sont très éloignées les unes des autres, soutenant
une occupation dynamique du territoire. Leurs besoins et services en santé sont très variés et demandent, Mme la Présidente, un palier décisionnel de proximité. Par exemple, Mont-Laurier
est à 181 kilomètres de Saint-Jérôme, où, selon le projet de loi
n° 10, le CISSS sera installé,
centre décisionnel. Ça n'a tout
simplement aucun sens. On fait fi des disparités régionales et de
l'éloignement, par exemple, de la municipalité de Mont-Laurier. Mme la
Présidente, je suis sûr que mon confrère le député de Labelle va abondamment en
parler.
Cette
grande diversité caractérisant la
grande région des Laurentides demande une concertation, un travail d'équipe,
de proximité. Le projet de loi n° 10
fait le contraire. Il concentre les décisions au sein d'une instance régionale
en abolissant la toile de décision efficace qui a été mise en place
depuis 10 ans afin de créer cette symbiose indispensable au bon fonctionnement d'une région en pleine mutation, en
plein développement, caractérisée par des sous-régions magnifiques, mais combien différentes, dont les réalités sont
totalement différentes les unes des autres en ce qui a trait aux demandes
de soins et services.
Mme
la Présidente, la disparition de nos instances décisionnelles locales au
détriment d'une instance régionale basée
à Saint-Jérôme viendra, à mon avis, hypothéquer grandement les services directs
à la population. Les CSSS bien ancrés
dans la région des Laurentides ont, avec les années, créé une dynamique
efficace et rassurante pour la population. Ils ont une connaissance fine des besoins de la communauté, des
communautés locales et de leur population. Les offres de service sont adaptées à la réalité terrain. Le
projet de loi n° 10, par sa centralisation à Saint-Jérôme, fait fi du
travail immense effectué depuis des
années par les CSSS pour le bien de la population. On éloigne par ce projet de
loi les décisions des populations
locales en centrant l'action sur une vision plutôt régionale. C'est ce que nous propose le projet de loi n° 10. Beaucoup de questions, Mme la Présidente, sont
soulevées par les intervenants du milieu en santé et services sociaux et
par les nombreux partenaires que j'ai
nommés tantôt.
Pourquoi encore
changer la structure opérationnelle, surtout dans une région où ça fonctionne quand
même relativement bien? Pourquoi défaire ce qui a été mis en place et qui
fonctionne très bien chez nous? Comme je l'ai mentionné
auparavant, Mme la Présidente, voici quelques extraits du document de réflexion
du comité des usagers du Centre de
santé et des services sociaux des Sommets. Le constat, pour le
CSSS des Pays-d'en-Haut, est le même. Cette
réflexion s'ajoute, Mme la Présidente, aux 64
mémoires présentés en commission parlementaire,
en rappelant que 48 organismes sont contre le projet de loi n° 10, trois sont en
faveur et 13 sont ambigus. Le signal est clair au
ministre : ce changement de
structure proposé ne passe tout simplement pas.
Les
régions, principalement les Laurentides, veulent conserver leur expertise et
poursuivre le travail des 10 dernières années. Voici, Mme la Présidente,
des extraits de cette réflexion du comité des usagers :
«Force est de constater que, plusieurs années plus tard — nous parlons de la réforme de 2004 — cette réforme ne semble pas avoir donné les
résultats escomptés. De fait, le
ministre de la Santé [...] présente en 2014 à nouveau
les mêmes enjeux qu'en 2004 pour justifier cette importante
transformation administrative. Il
semble que, sous le couvert de l'élimination d'un palier de gouvernance — l'Agence de santé et services sociaux, par exemple, des Laurentides — le ministre procède plutôt à une
centralisation sans précédent avec
pouvoirs et mainmise quasi totale du ministre
allant jusqu'à la nomination des administrateurs
des centres de santé régionaux et
suprarégionaux en plus du président du conseil d'administration, du P.D.G. et
du P.D.G.A. À première vue, l'on peut se poser la question à savoir si nous ne
sommes pas en train de perdre de vue les principes de base d'une saine gestion et, ce qui est plus important, une perte de
représentation démocratique. Au niveau des usagers, ceci aura certes un
impact important et peut-être la perte de leurs voix au milieu des
superstructures créées.»
Perte
de représentation démocratique, Mme la Présidente, voilà, selon ces
intervenants, une faille majeure du projet de loi n° 10. Je poursuis avec l'extrait suivant : «Les usagers sont en accord avec les enjeux
identifiés tout en demeurant très
perplexes quant à la solution proposée d'un établissement pour la [grande] région des
Laurentides. Les [...] usagers, leurs cultures, leurs [besoins] caractéristiques au sud et au nord et la densité variable des populations des MRC nous interpellent au plus
haut point eu égard à la représentation des usagers et de l'organisation
juste, équitable et continue des soins
et des services dans chaque territoire. Le
pari d'une si importante centralisation sera-t-il garant des objectifs
poursuivis de centrer les décisions
sur le patient? L'accès et les parcours seront-ils simplifiés? Quelle garantie
avons-nous d'avoir enfin un dossier unique évitant de recommencer [notre histoire] de
santé [à chaque fois]?
«Nous constatons — Mme la Présidente — que nous serons dorénavant des patients et
non des usagers. Il existe une énorme
différence entre les deux appellations. Le premier — le patient — fait référence à la
personne comme un être passif eu égard à sa santé, qui se fie entièrement aux
intervenants pour agir, il ne se prend pas en
main en quelque sorte. La notion
d'usager est plutôt une appellation qui prône la prise en charge, la
responsabilisation face à sa santé et au droit de décider et de
revendiquer le respect de ses droits fondamentaux.
«Est-ce à dire que nous retournerons à des soins et
des services centrés sur les centres hospitaliers?
Sommes-nous à dire non aux soins et aux services de première ligne tant attendus par les usagers notamment en ce qui
concerne l'accès en tout temps à un
médecin de famille, à des soins à domicile
accessibles et complets, des soins pour les
personnes en perte d'autonomie hébergées, des soins de fin de vie adaptés aux besoins des usagers, la prévention et la
promotion de la santé auprès des enfants, des jeunes [familles et des
jeunes], les soins dans la communauté pour les
personnes présentant des problèmes de santé mentale, des soins hospitaliers accessibles au moment
opportun, l'accès à des services de réadaptation et de soutien aux familles?
•
(12 h 50) •
«Concrètement,
aurons-nous accès à des infirmières cliniciennes responsables des suivis des
usagers avec [les malades] chroniques afin
de permettre aux médecins de prendre des cas complexes et de les traiter [plus]
rapidement et au moment opportun?
Aurons-nous plus de médecins qui feront des visites à domicile? L'attente pour
un diagnostic, un traitement, une chirurgie sera-t-elle diminuée? Les
personnes en perte d'autonomie auront-elles accès à tous les soins d'hygiène que leur état exige? Les services
sociaux seront-ils au rendez-vous dans la communauté? Économiserons-nous
réellement des argents qui seront réinvestis dans l'amélioration des soins et
services aux usagers?»
Mme la Présidente, «ce projet de loi
menace au plus haut point la sauvegarde des droits des usagers par les comités
des usagers, la reconnaissance par une
instance décisionnelle des préoccupations des usagers en matière de qualité de
soins et de services et la perte de l'espoir des usagers de voir les
choses changer localement».
Mme la Présidente,
voici un dernier extrait du document de réflexion du comité des usagers :
«Nous sommes d'avis que ce projet de loi ne
répond pas aux questions et aux préoccupations des usagers au regard de l'accès
et de la continuité des soins et […]
services. Ce projet [de loi] propose exclusivement une modification
administrative qui veut répondre à
l'abolition des agences de santé et diminuer la [démocratie] en éliminant un palier
de décision et en confiant au ministre de plus grandes responsabilités…»
Pour
toutes ces raisons, Mme la Présidente, nous espérons que des modifications
seront apportées à ce projet de loi en
ce qui concerne la représentation des usagers par les comités des usagers et
leurs comités de résidents aux soins des instances décisionnelles responsables. Le comité des usagers qui a fait
cette réflexion propose, Mme la Présidente, pour la grande région des Laurentides, deux CISSS pour les Basses-Laurentides
et pour les Hautes-Laurentides. Ça améliorerait sensiblement la pilule,
si on peut s'exprimer ainsi.
Mais moi, je crois
sincèrement que, compte tenu de ce que je vous ai mentionné tantôt concernant
la grande diversité au sein du territoire
des Laurentides, vraiment, il y a trois sous-régions pour lesquelles il faut
apporter une attention particulière.
Alors, je vous ai parlé des Basses-Laurentides, des Moyennes-Laurentides et des
Hautes-Laurentides. Moi, comme député, pour les Laurentides, je
préconise l'installation... si le ministre veut bien prendre en considération
l'ensemble des représentations que j'ai faites, je préconise trois CISSS :
un pour les Basses-Laurentides, un pour les Moyennes-Laurentides
et pour les Hautes-Laurentides, ce qui permettrait de ramener les décisions
tout près de la population.
Alors,
dans ce sens-là, Mme la Présidente, moi, c'est une recommandation, puis
probablement que mon confrère le
député de Labelle, dans les Laurentides, va faire une recommandation semblable.
Mais il faut absolument faire en sorte que
cette grande région de 210 kilomètres, à partir de la rivière des
Mille Îles jusqu'à Mont-Laurier, soit efficacement représentée, efficacement représentée, et puis
qu'on apporte une attention aux populations locales et qu'on prenne en compte
tout ce qui a été fait pendant les 10 dernières années. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député
de Bertrand. Alors, je suis prête à reconnaître le prochain intervenant.
M. le député de Saint-Jean, à vous la parole.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je ne peux pas
dire qu'il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi là, comme la plupart de mes collègues, mais je dois le
faire parce qu'on a été élus par la population, dans mon cas depuis
maintenant depuis trois mandats, pour défendre notre population.
Hier,
en commission parlementaire, j'avais l'occasion de rappeler la mémoire de ma
collègue, une de nos anciennes collègues,
la députée de Matapédia, qui nous disait que, comme députés, on est des
ombudsmans, des gens qui défendent notre monde, hein? Bien, c'est ce que
je fais aujourd'hui, vous savez, comme député de Saint-Jean, mais j'ai aussi la
responsabilité d'être président du caucus
des députés du Parti québécois de la Montérégie. On est très interpellés comme
caucus. Mon collègue le député de Verchères,
qui est avec moi aussi, on a eu beaucoup de discussions dans nos rencontres
de caucus à ce sujet. Même si on ne doit pas dire les sujets de nos caucus habituellement,
le sujet de la santé est assez important qu'on a fait une sortie régionale sur
cet enjeu.
Je
pourrai amener le sujet sur ma circonscription par la suite, mais je vais commencer sur cet
aspect-là qui est très important du projet
de loi n° 10. Le projet de loi n° 10, par son nom, dit «l'abolition
des agences», mais, dans les faits, ce n'est
pas l'abolition des agences, c'est l'abolition des décisions locales, du
pouvoir de décider localement de ce qui est bon pour nous, de ce qui est
bon pour notre réseau de santé. Dans le cas de la Montérégie… Et je vous
rappelle, Mme la Présidente, que la
Montérégie, c'est 1,5 million de Québécois, c'est la deuxième région la
plus populeuse du Québec après la
région de Montréal. Mais pourtant la région de la Montérégie, avec la réforme
proposée par le ministre de la Santé, par le projet de loi n° 10, ne sera gérée que par un bureau à
Longueuil. Pourtant, pourtant, la Montérégie, ce n'est pas qu'une petite région, c'est une immense région avec des
réalités territoriales et des réalités des citoyens qui est complètement
différent. C'est une grande ville, Longueuil, qui dit bonjour à chaque matin à
la ville de Montréal, mais c'est aussi des municipalités d'une taille assez importante dont j'ai le plaisir d'être
député, Saint-Jean-sur-Richelieu. Mais je pourrais vous parler de
Saint-Hyacinthe. Je pourrais parler aussi de Salaberry-de-Valleyfield, je
pourrais vous parler aussi de Sorel-Tracy.
Il y a des municipalités qui sont d'une taille aussi importante puis qui
doivent être entendues, qui ont des besoins
particuliers. Je pourrais parler de Marieville. Je pourrais parler d'une ville
dans la circonscription de mon collègue, la ville de Varennes par exemple. Je pourrais parler de Châteauguay. Je
pourrais parler de municipalités rurales qui ont peu de population, mais que cette population-là a aussi
des besoins, dans ma circonscription, Saint-Blaise-sur-Richelieu, dans la circonscription voisine, Saint-Valentin, ou
d'autres petites municipalités, Calixa-Lavallée, d'autres petites municipalités
qui ont des besoins aussi.
Mme
la Présidente, la région de la Montérégie, c'est de Sorel-Tracy jusqu'à la
frontière de l'Ontario en longeant la
frontière américaine, en se rendant jusqu'aux montagnes des Cantons-de-l'Est.
C'est ça, la Montérégie. Puis même, dans
certains cas, bien, on dépasse, parce qu'on traverse l'île de Montréal pour la
région de Vaudreuil-Soulanges. C'est immense.
Penser sincèrement être capable d'avoir la vigilance et un oeil avisé pour
gérer l'ensemble des hôpitaux, des CLSC,
des CHSLD, de toutes les autres organisations de santé et services sociaux de
notre territoire en Montérégie, tout ça à Longueuil, c'est pratiquement
impensable.
Avec
le projet de loi n° 10, on parle de regrouper, de fusionner l'agence de
santé qui est la régionale, Centre de santé
et de services sociaux du Suroît, celui du Haut-Saint-Laurent, celui des
Jardins-Roussillon, celui du Haut-Richelieu—Rouville,
celui de Champlain—Charles-Le Moyne. On fusionne Les Services de
réadaptation du Sud-Ouest et du Renfort, on fusionne le Centre jeunesse
de la Montérégie, le Centre montérégien de réadaptation, le Centre de
réadaptation en dépendance Le Virage, le Centre de réadaptation Foster, le CSSS
Pierre-Boucher, Pierre-De Saurel, Haute-Yamaska, La Pommeraie, Richelieu-Yamaska, le Centre de réadaptation en
déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement
de la Montérégie-Est et l'Institut Nazareth et Louis-Braille.
Mme la Présidente, Mme la Présidente, ce n'est pas sérieux, ce n'est pas sérieux. Tellement
pas sérieux que le ministre lui-même l'a vu et a décidé que, pour Montréal,
il allait y avoir… Si je ne me trompe pas, c'est cinq CISSS sur le territoire
de l'île de Montréal pour 500 000 de populations différentes. Je ne conteste pas pour l'île de Montréal. Ce que je
dis, c'est que la Montérégie, c'est
différent. Le gouvernement libéral précédent avait tellement
vu ça, quand ils ont mis en place ce
qu'on appelle les conférences
régionales des élus — que maintenant ils vont abolir — la Montérégie a un statut particulier, a
trois conférences régionales des élus.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, M. le député de Saint-Jean, je dois, à
ce moment-ci, vous demander si vous souhaitez poursuivre votre
intervention cet après-midi.
Une voix : …
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bien, on va poursuivre cet
après-midi. Alors, est-ce que
vous consentez à revenir cet après-midi?
Une voix : …
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Dès 15 heures. Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les
travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 1)
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, bon après-midi, chers collègues. Veuillez vous asseoir.
L'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption de
principe du projet de loi n° 10, Loi modifiant l'organisation et la
gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par
l'abolition des agences régionales.
Lors de la
suspension des travaux, la parole était au député de Saint-Jean. Et donc, M. le
député de Saint-Jean, il vous reste exactement
14 min 13 s pour compléter votre intervention. Je vous cède la
parole.
M.
Turcotte :
Merci beaucoup, M. le Président. Donc, comme j'ai mentionné précédemment, en
plus d'être député de Saint-Jean à
l'Assemblée nationale, j'ai l'occasion de présider le caucus des députés du
Parti québécois de la Montérégie qui
est le plus gros caucus de notre formation. Donc, c'est à titre de député de
Saint-Jean mais aussi à titre de président du caucus de la Montérégie que j'interviens sur ce projet de loi, le
projet de loi n° 10, parce qu'il concerne tout le Québec, bien
entendu, mais la Montérégie particulièrement.
Quand on a
quitté précédemment, je mentionnais que l'ancien gouvernement libéral avait
analysé l'ampleur des régions
administratives du Québec, et, lorsqu'ils ont décidé de mettre en place ce qui
est maintenant… risque d'être aboli ou
aboli déjà, les conférences régionales des élus, la Montérégie a eu un statut
particulier. C'est la seule région au Québec où il y a trois conférences régionales des élus. Pourquoi? Parce que la
Montérégie est immense sur le plan géographique, et des réalités socioéconomiques sont très différentes. Comme je
mentionnais tantôt, la Montérégie, c'est… on parle de Sorel-Tracy, jusqu'à Vaudreuil-Dorion, jusqu'à la
frontière de l'Ontario, et en longeant la région de Montréal, mais aussi,
de l'autre côté, la région des
Cantons-de-l'Est et, plus au sud, la frontière américaine. Donc, c'est
1,5 million de Québécoises et de
Québécois qui forment la Montérégie, 500 000 de moins que la région de
Montréal, mais pourtant la région de Montréal a plusieurs CISSS qui sont
formés par ce projet de loi là, par le projet de loi n° 10. Nous, dans
notre cas, on en a un.
Et, comme je
mentionnais, c'est tous les CSSS de la Montérégie qui seront regroupés. Puis,
je crois que vaut la peine d'être, je
vais le répéter parce que ça nous démontre l'ampleur du temps que ça
nécessitera pour fusionner toutes ces
organisations-là. Bon, je l'ai dit tantôt, le projet de loi n° 10, le
titre dit : Abolition des agences de santé. Ce n'est pas tout à fait vrai, là, c'est les CSSS qui sont abolis,
puis on agrandit les agences. Donc, encore là, tout sera décidé à Longueuil.
Et qu'est-ce qui sera décidé à Longueuil? Bien,
c'est la gestion du Centre de santé et des services sociaux de
Vaudreuil-Soulanges, celui du Suroît, du Haut-Saint-Laurent, des Jardins-de-Roussillon,
Haut-Richelieu—Rouville,
Champlain et Charles-Le Moyne, celui de
Pierre-Boucher, Pierre-De Saurel, Haute-Yamaska, La Pommeraie, Richelieu-Yamaska. Et en plus, comme si ce n'est
pas assez de déterminer toute la gestion de nos hôpitaux, de nos CLSC, de nos CHSLD, tout ça à Longueuil, peu importe où
est-ce que c'est sur le territoire de la Montérégie, mais on y ajoute le Centre jeunesse de la Montérégie, le Centre
montérégien de réadaptation, le centre de réadaptation en dépendance Le Virage,
le centre de réadaptation Foster ainsi que
le Centre de réadaptation en déficience intellectuelle et troubles envahissants
du développement de la Montérégie-Est et l'Institut Nazareth et Louis-Braille.
Donc,
tout ça sera déterminé de Longueuil. Moi, je n'ai rien contre Longueuil, je
suis né à Longueuil. C'est une très belle ville, je n'ai pas de problème
avec Longueuil. Cependant, je crois que, si on veut être cohérent et on veut s'assurer…
si on veut s'assurer que les soins de santé soient offerts à proximité, bien la
meilleure instance, c'est nos communautés locales qui vont pouvoir déterminer.
M. le Président, j'ai reçu, sur l'heure du dîner, une lettre, une correspondance d'une
citoyenne, Mme Bachand, qui est
une cadre du réseau de la santé. Je vais lire quelques extraits de sa lettre.
C'est une lettre qu'elle a adressée au premier
ministre du Québec et qu'elle m'a envoyé copie, je suis en copie conforme. Donc,
je trouve que c'était pertinent, avec tout
ce que j'ai nommé comme organismes, l'ampleur du travail pour fusionner ces
organismes-là, ce qu'elle a à dire.
«Ayant été vous-même ministre de la Santé et des
Services sociaux — elle
s'adresse au premier ministre actuel — vous êtes en mesure de saisir
l'ampleur et la complexité de notre réseau.
«En 2004,
vous nous avez invités à participer à une réforme de notre réseau en vue de
fusionner certaines missions afin
d'assurer une meilleure trajectoire pour le patient et ainsi garantir une
approche populationnelle de la part des CSSS. Bien qu'il ne s'agissait pas de la première réforme de notre réseau,
nous avons mis l'épaule à la roue dans le but d'assurer la mise en place de cette réforme structurelle et
administrative. Pour certains CSSS, la fusion commence à porter ses fruits,
alors que, pour d'autres CSSS, il reste encore du travail à faire pour y
parvenir.
«Nous avons cru en votre projet de CSSS. Nous y
avons mis temps, énergies afin d'arrimer leurs diverses missions et soutenir
l'engagement des gens qui les composent.
«En 2010, le projet de loi n° 100 est entré
en vigueur et avait comme effet de ne pas remplacer un cadre sur deux qui quittaient pour la retraite dans les
services administratifs et de support. Depuis 2010, plusieurs cadres ont donc
quitté le réseau sans être remplacés.»
Un peu plus
loin dans la lettre, elle mentionne : «Considérant l'ampleur du projet de
loi n° 10, la négociation des conventions
collectives provinciales, la négociation des ententes locales, la fusion des
multiples unités d'accréditation, la gestion
du changement auprès du personnel ainsi que le sous-financement et le nombre
réduit de cadres en mesure de mettre en
place une telle réforme, je vous demande de reconsidérer ce projet de loi afin
d'en diminuer l'ampleur. En tant que cadre
au quotidien, je vous confirme que le réseau de la santé et des services
sociaux n'a pas la capacité d'absorber une telle réforme. Je vous demande de procéder par étapes et non d'une façon
globale afin d'assurer une meilleure transition et surtout de nous
permettre de rendre les services à la population.
«La réforme pourrait maintenir les
établissements actuels mais permettre la fusion de façon régionale des services
de la paie, des achats, de l'informatique, de la gestion des immeubles et des
baux.
«Par
ailleurs, vous devriez également vous assurer d'un mécanisme de contrôle et de
suivi des dépenses du système médical.
Selon les données de la RAMQ, pour 2012, les médecins ont reçu
5 557 000 000 $ en honoraires ou salaires pour
lesquels il n'existe aucun mécanisme de contrôle.
«Vous devriez
aussi nous permettre d'encadrer les médecins dans nos établissements afin de
garantir une meilleure continuité des
services et d'assurer une délégation concrète des actes médicaux et à d'autres
professionnels de la santé très bien formés.
«Depuis
40 ans, des réformes administratives sont imposées dans le système de
santé. Je crois qu'il est plus que temps qu'une reddition de comptes
soit également imposée aux médecins.»
La lettre
se continue. Mais, M. le Président, ce que je veux vous mentionner, c'est
l'ampleur de tous ces organismes-là qui devront être fusionnés. Donc, il
y a un travail incroyable et en peu de temps.
Je vais vous
donner un exemple concret parce que tantôt j'avais dit : Je vais commencer
par la région puis je vais terminer mon intervention plus localement,
parce qu'au fond c'est ce pour quoi qu'on est ici comme députés de nos
circonscriptions, pour défendre notre population. Donc, à l'hôpital du
Haut-Richelieu—Rouville,
un hôpital qui est actuellement géré par le
Centre de santé et de services sociaux Haut-Richelieu—Rouville… Donc, à l'Hôpital du Haut-Richelieu, il y a eu des décisions qui ont
été prises par l'administration, par la direction générale du CSSS suite à des
décisions du gouvernement libéral, au fond, de demander des compressions dans
le système de la santé, et aussi des décisions
passées, CHSLD en PPP, et autres, qui ont fait en sorte… qui ont coûté de
l'argent à notre CSSS, donc qui fait en sorte qu'à notre CSSS il y a un
déficit de 5,5 millions de dollars.
• (15 h 10) •
Pour résorber
ça, ce que les gens du CSSS ont décidé, c'est d'abolir 82 postes
d'infirmières et infirmières auxiliaires et de fermer 42 lits. La première annonce, on parlait de
39 lits. Maintenant, nous sommes rendus
à 42 lits depuis maintenant quelques semaines. Il y a plus de lits qui ont été annoncés… qui allaient
fermer. La raison, c'est qu'on me dit : Il y a trop
d'hospitalisations à l'Hôpital du Haut-Richelieu.
Bon, M. le Président, ici, selon les documents du ministère
de la Santé, on voit qu'à l'exception
de la catégorie des nouveau-nés le pourcentage de séjours excessifs à
l'Hôpital du Haut-Richelieu est inférieur à celui observé pour l'ensemble des hôpitaux de la Montérégie.
Une autre donnée : en 2011‑2012, l'Hôpital du Haut-Richelieu présente un coût par cas pondéré, pour les hospitalisations,
de 2 811 $, soit le
deuxième plus bas en Montérégie. Je pourrais continuer à mentionner des particularités de l'Hôpital du
Haut-Richelieu. Quand on calcule le taux d'hospitalisation, mais l'hôpital
du… Je vais reprendre. L'Hôpital du
Haut-Richelieu a deux particularités. La première, une des bonnes pratiques sur
le plan médical, c'est : tous les gens qui ont besoin de soins pour la
psychiatrie doivent… mis à l'écart, donc pas à l'urgence, donc ils sont admis au quatrième, donc ce qui fait en
sorte que c'est des admissions et non pas des observations. Donc, ils sont
considérés dans nos statistiques d'hospit.
La même chose pour l'unité de décision clinique qui est en marge de l'urgence,
donc, qui aussi augmente le nombre d'hospits
à notre hôpital — hospit;
hospitalisation, M. le Président — donc, ce qui fait en sorte que, pour deux bonnes décisions qui ont
été prises par le passé, notre hôpital est considéré avoir trop
d'hospitalisations, et pour ça, bien,
on dit : Bien, on va fermer des lits. Mais en même temps il y a des
décisions qui sont demandées depuis très longtemps par les médecins chez nous. Elles
ne sont pas prises. Par exemple, un médecin qui m'écrit : «L'Hôpital
du Haut-Richelieu est...» Bon. «Saviez-vous
qu'il est impossible de donner un rendez-vous externe à un patient hors des
heures ouvrables — donc 8 à 16 heures en semaine? Ça fait des
années que je dénonce ça. Donc, si je souhaite organiser un suivi externe pour un patient que je vois à l'urgence la
fin de semaine, je n'ai aucune autre façon de m'assurer efficacement que ça ne tombera pas entre deux chaises.
Peut-être qu'en effet ce patient sera hospitalisé seulement parce que je veux
que le suivi indiqué soit bien effectué.» Donc, ça, c'est une solution concrète
pour diminuer le taux d'hospitalisation.
Il y a
d'autres décisions comme ça qui peuvent être... Le problème, c'est que la
décision a été prise, en quelque sorte,
assez rapidement. D'ailleurs, à la fin de l'application du plan stratégique du
CSSS, dans les derniers mois, et pourtant ça fait quand même quelques années que le plan stratégique est connu…
Donc, ce n'est que pour des raisons financières que cette décision-là a été prise à ce moment-ci, ce n'est pas pour
améliorer les soins. Mais pourtant les gens du CSSS chez nous sont très conscients des difficultés
liées à tout ça. Ils sont conscients de la particularité de notre hôpital.
Mais, sérieusement, M. le Président, sérieusement, est-ce que des gens,
bien intentionnés soient-ils, de Longueuil peuvent connaître toutes les particularités et la réalité de tous nos hôpitaux,
de tous nos CLSC, de tous nos CHSLD de l'ensemble du territoire de la Montérégie? Moi, je ne crois
pas à ça, M. le Président. Donc, c'est pour ça que moi, le projet de loi
n° 10, j'ai beaucoup de craintes sur le fait que c'est de la
centralisation de décisions, la centralisation de décisions au niveau régional. Malgré que le projet de loi porte le nom
«abolition des agences régionales de santé», au-delà du titre, les mots qui sont contenus dans ce projet de loi là nous
démontrent que c'est une centralisation au niveau surrégional, donc ce n'est
même pas dans nos communautés, mais aussi une centralisation des pouvoirs entre
les mains du ministre.
D'ailleurs,
si on fait le décompte, hein, si on fait le décompte dans le projet de loi, on
voit que le mot «patient» n'est pas
souvent mentionné, pas souvent mentionné dans le projet de loi. Le mot
«ministre» est souvent mentionné, par exemple,
hein? Donc, je n'ai rien contre le ministre personnellement, je crois en sa
bonne foi. Cependant, ce que moi, je veux, c'est m'assurer que nos citoyens ne
soient pas pénalisés, ne soient pas pénalisés par une réforme administrative
qui, en ce moment, n'est que des structures. Mais qu'on perde de vue la mission même de nos hôpitaux, de nos
CLSC, de nos CHSLD, de nos services
sociaux, c'est-à-dire d'offrir des services de santé, d'offrir des
services sociaux à notre population, à notre
monde qui en ont besoin… Il y a des décisions qui sont prises, des fois,
ailleurs, mais, quand on a un pouvoir local qui peut contrebalancer des décisions régionales ou des décisions
nationales, ça peut faire toute la différence, faire en sorte que notre monde puisse encore décider ce qui est
bon pour eux. Moi, je pense que c'est eux qui sont les mieux placés pour
faire ces choix-là.
Je comprends,
M. le Président, qu'il ne me reste pas beaucoup
de temps, mais c'est les mots que j'avais à dire pour les gens de Saint-Jean.
Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le
député de Saint-Jean,
pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Lévis.
M. François Paradis
M. Paradis
(Lévis) : Merci, M. le
Président. Projet de loi n° 10, chapitre I, objet 1 : Favoriser et
simplifier l'accès aux services pour
la population, contribuer à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des
soins et accroître l'efficience et
l'efficacité de ce réseau — noble
objectif. J'aborderai la vision
sociale du projet parce qu'on en a beaucoup parlé à travers les groupes
que nous avons rencontrés en commission parlementaire.
D'abord et
avant tout, je rappelle certains propos tenus par mon collègue député de
La Peltrie un peu plus tôt ce matin
parce qu'il a abordé des points importants : l'importance de l'abolition
des agences dans le contexte d'un projet de loi comme celui-ci, la pertinence de la création des CISSS en favorisant
une meilleure circulation de l'information entre la première et la deuxième
ligne. Il a parlé, à juste titre, de la réduction de la bureaucratie, des
économies qui en résulteraient, de la
taille des CISSS, des territoires couverts, bref de bonnes choses, un projet
essentiel. L'objectif ultime de la réforme :
l'amélioration des services à la population, l'accessibilité aux soins,
diminuer la complexité du parcours des usagers. En fait, trois mots, au centre
de tout ça, trois mots, et je parle à ceux qui nous regardent et nous écoutent,
ceux qui souhaitent que le système soit meilleur : Le patient
d'abord. Trois mots. Est-ce qu'on atteint l'objectif?
D'abord, la réforme est-elle nécessaire?
Évidemment. Tous s'entendent pour dire qu'on doit faire quelque chose. Pourquoi? Parce que la précédente réforme,
vieille d'il y a à peu près 10 ans, n'a pas donné les résultats escomptés.
Comment le savoir, comment le déterminer
au-delà des chiffres? Par la voix des usagers, des clients, des utilisateurs,
des patients, parce qu'en commission
tous ces termes ont été utilisés, mais à la même enseigne : c'est le même
individu qui a besoin de soins. Quand
je vous dis : Par la bouche des utilisateurs… quelques exemples. La
preuve, le récit d'une jeune femme de
39 ans que je rencontre il y a une semaine et demie à peine… 39 ans, qui me
raconte son histoire humaine, triste, tragique d'une dame qui
découvrira, en s'autoexaminant, des masses sur chacun de ses seins, décide, à
39 ans, d'aller consulter, d'exiger, de tenter un examen. On lui dira : À
39 ans, tu n'es pas dans la portion d'âge où ce doit être fait rapidement, tu n'es pas au-dessus de la liste,
au-dessus de la pile. Cette dame vivra l'attente, l'anxiété, le stress à
quelques reprises, pour être ensuite
évaluée. On découvrira, chez cette femme de 39 ans, 13 tumeurs dans les deux
seins. Mastectomie complète,
chimiothérapie. Elle est en répit depuis un an. Elle a encore neuf ans de
traitements et d'observations à venir, jusqu'en 2024. Est-ce que la
réforme que l'on a connue il y a 10 ans fonctionne? Force est de constater que non.
Autre exemple, plus près, celui-là, parce que
beaucoup de gens nous ont dit : Vous savez, c'est une réforme administrative, mais, à travers ça, il y a
l'humain et il ne faut pas l'oublier. D'ailleurs, les gens, ces gens qui nous
le disaient, disaient : On a l'impression que la machine va nous
avaler, on n'a plus notre place ce matin. Deux personnes âgées, deux aînés, 90 ans, 88 ans, 65 ans de vie
commune — quand on
dit que l'administratif fait peur à l'humain — risquent d'être séparées parce que le système de santé ne pourrait
plus les héberger au même endroit. C'est tout récent, c'est aujourd'hui.
On doit penser à l'humain d'abord.
• (15 h 20) •
Autre
exemple. Cet été, une dame que je connais personnellement fait une chute, se
frappe la tête au sol, se rend à l'urgence.
Elle rencontre un médecin. Il lui diagnostique une coupure qui demande des
points de suture. Ce n'est pas un infarctus,
ce n'est pas un anévrisme. Certains diront que c'est assez banal comme
blessure, mais on réclame des points de suture. Cette dame dit : D'accord. Et on lui dira : Le traitement, attendez à peu près
cinq heures, ça ne saigne pas tant que ça. La dame a quitté. Elle n'a
pas eu son traitement, elle n'a pas complété le traitement.
C'est notre système actuellement. À cette première réponse, la réforme est-elle nécessaire? Bien évidemment, aux yeux et au vu de ceux qui traversent le système, qui empruntent le
parcours du combattant, comme cette jeune femme de 39 ans qui,
encore une fois, devra vivre avec le spectre du cancer pour les neuf prochaines
années. Notre système, actuellement, c'est
20 000 patients, et je sais que je répète des choses qui ont été
dites, mais qu'on le sache,
20 000 patients qui attendent
depuis plus de six mois leur chirurgie, 7 000 qui attendent depuis
plus d'un an. Ce qui est étonnant dans tout ça, c'est qu'on
dit que cette situation est sensiblement la même qu'en 2009‑2010. Nous sommes
en 2014, les choses ne changent pas : listes d'attente interminables, des
centaines de milliers de Québécois, près de 2 millions… sans médecin
de famille, des patients qui quittent les urgences sans avoir été vus, des
opérations qui sont reportées.
Est-ce que le
système de santé est perfectible? Et là on
tombe dans le projet qui nous est proposé. Assurément. Eh bien, tant mieux. Le ministre disait d'ailleurs hier
être conscient qu'il faudra retravailler le projet de loi n° 10 parce que, dans
sa forme actuelle, la question est légitime :
Permettra-t-il l'accès à des services de qualité plus rapidement, cette fluidité que l'on
espère? Pas certain. Mais le ministre, je le rappelle, dit : Nous sommes conscients qu'il faudra
retravailler le projet. Il s'est même
engagé formellement, a-t-il dit, à apporter des modifications pour répondre aux
inquiétudes et aux critiques. Je
salue son ouverture, et ça tombe drôlement bien parce que nous aurons et nous
avons plusieurs changements à lui
proposer. Comme le disait mon collègue le député de La Peltrie, la recette, elle est bonne. Le problème, c'est qu'il ne
faut pas que ça colle au fond, parce que le
meilleur des spaghettis, si ça colle au fond, ça ne goûte pas pareil. Et
remarquez que l'analogie à la nourriture est peut-être un peu surprenante. Mais nous avons reçu, en
commission parlementaire, aussi l'ordre
des diététistes qui parlait de nourriture en centre hospitalier, alors ça
trouve son sens. Le statu quo n'est pas une
option. Tous nous l'ont
dit, ça ne peut pas rester comme ça. En ce sens, nous serions disposés à
adopter le projet sur le principe, mais des modifications devront être
apportées pour aller plus loin.
M. le
Président, revenons à ceux qui se sont fait entendre. Une soixantaine de
groupes se sont présentés devant la commission
parlementaire; 88 mémoires reçus. Je vous le disais, je vais m'attarder à
l'aspect social de la réforme versus son
aspect santé. Parce que, du côté social, plusieurs intervenants, pour ne pas
dire la grande majorité, sinon la totalité,
nous ont indiqué craindre que la mission
sociale du réseau soit menacée. Ils ont dit :
Nous craignons que le préventif soit avalé
par le curatif, aspiré par le curatif, cette espèce de proximité extrêmement
importante entre le client et le personnel aidant… je ne dis pas «personnel soignant», je dis
«personnel aidant»… et ça, malgré le
fait que tous s'entendent pour dire
que le volet préventif est essentiel. Une intervention bien menée de façon
préventive pourrait éventuellement et peut éventuellement éviter un épisode de soins pour
le moins… en tout cas, permettre à l'individu qui en a besoin de mieux
s'en sortir, de ne pas atteindre le fond du baril.
Plusieurs groupes se sont présentés, des groupes
représentant des clientèles bien précises, des clientèles, pour certains, particulièrement vulnérables, et ça me
touche. J'étais extrêmement attentif à ces audiences. J'ai prêté une oreille,
une réception totale pour saisir le sens des
craintes exprimées et tenter de savoir, au
bout du compte, comment y répondre et
comment faire en sorte que les gens soient rassurés. Parce que les gens avaient
besoin et ont besoin d'être rassurés. Je
parle toujours de
l'être humain, des clientèles particulièrement vulnérables et là je
pense aux personnes vivant avec un handicap,
je parle du spectre de l'autisme, des centres de réadaptation en dépendance,
des groupes qui, pour plusieurs, se sentaient et se sentent exclus du
processus décisionnel, qui se sentent loin de cette réforme importante, qui
craignent que les délais d'attente qu'ils vivent aujourd'hui... Et on l'entend
fréquemment, hein? Interventions pour un jeune qui vit des difficultés majeures;
des listes d'attente qui peuvent être de deux ans; recours à des
services spécialisés, orthopédagogie, ou
le reste, ce sont des histoires communes pour
bien des parents qui s'inquiètent et qui nous entendent. Ces gens-là s'inquiètent que les délais d'attente pour obtenir
de l'assistance, dans la nouvelle réforme, soient aussi importants qu'ils ne le sont maintenant. Il
faut travailler à rassurer.
Et, je rappelle, est-ce que cette réforme est
essentielle? Je continue à dire oui. Le projet de loi n° 10 contient de
bons principes, de bons principes généraux. Il faut comprendre qu'entre les
principes et l'action il y a tout un monde. Il
faudra travailler aussi à ça pour satisfaire l'attente des clients, du client
d'abord. Réduire la taille projetée de certains CISSS, on en a parlé.
Assurer une représentation locale des usagers, ô combien de fois cela a été
exprimé en cours de commission
parlementaire. La représentation citoyenne; on nous a parlé de la place du
citoyen, du profil de compétence exigé
pour la composition des conseils d'administration. Assurément que ça prendra de
bons gestionnaires. La structure est
importante. Le but de l'exercice, c'est d'économiser et, dans le meilleur des
mondes, économiser davantage. Et le but ultime : de réinvestir ces économies dans de meilleurs services, le
service aux citoyens. Mais on craint que ça devienne une affaire de gestionnaires. Alors, les groupes
qui sont venus nous voir, pour quelques-uns d'entre eux, les organismes communautaires, le réseau de la FADOQ, les aînés,
la Fédération québécoise de l'autisme, le Regroupement des aidants naturels, ils craignent, de fait, d'être loin des
interrogations, des préoccupations — soyons plus précis — des préoccupations des membres du conseil d'administration qui
seraient nommés par le ministre, celui-ci ayant dit que ce n'était que
transitoire, qu'il n'aurait pas ce plein pouvoir que certains dénoncent
ou craignent.
Le
gigantisme de la structure fait peur. Prévoir une place pour l'usager, faire en
sorte que, dans le profil de compétence,
on puisse retrouver des gens qui sont soucieux du quotidien des hommes et des
femmes, des Québécois et des Québécoises qui traversent des épreuves, qui ont
besoin de soutien, d'être reconnus dans leurs besoins également dans une mégastructure qui peut faire un peu peur, et
c'est légitime. Qui sont ces gens? Ce sont des bénévoles, je vous le disais,
des proches aidants, des aînés qui
souhaitent être entendus, qui auraient souhaité être consultés, qui souhaitent
faire partie de la solution. Tout ça
met en perspective quelque chose de bien important, et on l'a abordé également,
l'obligation, dans le projet de loi, de
mettre en place des indicateurs de performance, des objectifs, des cibles à
atteindre, des propos dont on a
beaucoup parlé ces temps-ci, cibles, objectifs permettant de juger des
résultats d'un projet comme celui-ci, parce qu'il n'est pas question ici de donner une carte blanche, ou de signer
un chèque en blanc, ou de dire : On fait ce que l'on veut, comme on veut également, avec l'intention de
faire en sorte qu'éventuellement on ne puisse qu'économiser. Je le rappelle, objet 1, chapitre I : le
client d'abord. Fluidité, accessibilité, changer les choses, des choses qui
aujourd'hui ne sont plus… des choses
qui ne sont plus acceptables, des listes d'attente qui s'étirent, des patients
qui se questionnent, des patients qui se laissent, seuls.
Je
fais une parenthèse et je reviens sur l'histoire de cette dame, parce que c'est
tout récent, de 39 ans. Tout est perfectible,
hein, dans le système également, parce qu'elle me disait : Savez-vous,
M. Paradis, j'aimerais vous donner un mandat éventuellement de faire en sorte qu'à l'intérieur du système
on puisse aussi avoir une relation privilégiée entre le personnel soignant et le patient dans les cas
de cancer, par exemple, souhaitant être accompagnée davantage, comprendre
ce qui va se passer, laissée un peu à elle-même.
C'est sa vision des choses, nous devons la respecter. C'est pour elle, c'est
pour lui que le réseau existe, qu'on peut
faire en sorte et qu'on souhaite faire en sorte qu'il soit meilleur. Donc,
obligation d'être vigilant, bien sûr,
de mettre en place des indicateurs de performance, des objectifs pour juger des
résultats de la réforme en cours
d'application. Juger de ces résultats, de la réussite, de l'échec du chemin
emprunté. Est-ce qu'on dérape, on va
bien droit? Peut-on aller plus vite? Doit-on ralentir? Toujours en ayant en
tête cet aspect social de la réforme, celui dont je parle
davantage : le client d'abord.
Vous
savez, M. le Président, plusieurs groupes ont également dit craindre cette
fameuse phase de transition, ça a aussi
été abordé, que suppose l'application de la réforme. On a entendu des groupes
représentant des travailleurs nous dire
qu'actuellement on vivait une démotivation du personnel, la crainte de ne pas
savoir où on va : Où sera-t-on relocalisés? Rassurer les gens à ce
chapitre également.
• (15 h 30) •
Ceci
dit, il est important de le dire, hein, notre système de santé, lorsqu'on y
a accès, lorsqu'on contacte, lorsqu'on a un contact privilégié avec le
personnel soignant, pas seulement les médecins, les infirmières, les
techniciens, les accompagnateurs, il est
exceptionnel. Les gens sont d'une empathie extraordinaire. Vous le savez,
M. le Président, dans le
système de santé, le patient, le client, l'usager, l'utilisateur,
il est vulnérable. Nous faisons face à ce que l'on ne connaît pas. On doit laisser à ceux qui connaissent mieux
que nous le soin de nous rassurer, de faire en sorte que notre vie, qui
nous semble ne tenir qu'à un fil, puisse reprendre un sens. Notre personnel, il
est extraordinaire. Notre personnel, le personnel du réseau, a manifesté
certaines inquiétudes, on aurait tort de ne pas les écouter également.
Comment
tout cela va-t-il s'appliquer? Une grande majorité nous ont dit craindre que
soit oublié le contact de proximité,
essentiel pour assurer… et rassurer ceux qui s'adressent à ceux qui ont besoin
du système, pour rassurer ceux pour qui est faite cette même réforme. M. le Président, le ministre
disait récemment que le projet de loi
n° 10 servait à déployer
la structure qui permettra par la suite de placer les patients au coeur de
toutes les décisions. Nous aurions peut-être aimé que, dans le
projet tel que présenté, nous en sachions un peu davantage. Des choses devront être faites. Le ministre disait :
Dans une deuxième étape, ce sera fait. On parle, d'abord et avant tout, de
réformes administratives, de structures à modifier. Nous aurions peut-être aimé, j'aurais peut-être aimé avoir davantage de
précisions sur la place du citoyen,
davantage qu'il ne l'a été mentionné, dans ce mégaprojet,
dans cette réforme obligatoire, mais qui doit avoir son sens et
atteindre ses objectifs.
En
début d'intervention, M. le Président, je vous parlais de recette, on faisait
un peu de la cuisine ensemble, la cuisine
d'humains, hein, c'est comme ça que j'appelle ça. Je vous dis, à l'instar de
mon collègue, que la recette n'est pas mauvaise, loin de là, qu'on aura
des propositions, des ingrédients à proposer
pour faire en sorte que le plat soit plus comestible, agréable à mastiquer. Parce qu'un bon chef, là, ça doit prendre un soin
jaloux à bien sélectionner ses ingrédients. Il suffit d'un mauvais ingrédient, d'un débalancement pour que la recette
ne tienne plus. Mais il n'y a pas rien que la recette.
Si on propose des ingrédients, que le ministre est ouvert à ces propositions, ça risque d'être intéressant, mais encore
faudra-t-il ensuite faire le service, parce
qu'un bon critique en restauration — il faut croire que j'ai faim
un peu à ce moment-ci — espérera aussi recevoir le plat de belle
façon, et c'est sur l'ensemble de l'oeuvre
qu'on notera aussi l'action et, dans ce cas-ci — revenons à la santé — l'action du
gouvernement avec le projet de loi n° 10.
Je
réitère ce que j'ai dit plus tôt, je reprends des propos de mon collègue : D'abord, nous serons
à l'écoute de vos attentes, madame, monsieur, nous tenterons de faire en sorte que ce
projet vous ressemble et qu'on ne perde pas l'objectif ultime, que vous soyez au centre, au coeur de l'action, que vous ayez votre
place pour parler, pour intervenir, pour être compris. Le volet social, le préventif, ne doit pas être aspiré par le
volet curatif. Le lien entre la première, deuxième
ligne, l'information, la
fluidité, tout ça doit faire partie de cette vaste réforme, qui va prendre le
temps qu'il faut pour se mettre en
place. Ça ne se fera pas en deux temps, trois
mouvements, c'est un vaste chantier. Le statu quo, aujourd'hui, n'est
pas une option. Nous devons avancer,
modifier les choses à notre façon, en bonifiant
pour que nous ayons réponse à nos questions. Je le rappelle, en ce sens, et ça a été dit, nous serions disposés à adopter le projet sur le
principe, encore faut-il qu'on bonifie et qu'on arrive à une
recette qui satisfasse la clientèle québécoise. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, M. le député de Lévis, pour cette intervention. Je cède
maintenant la parole à M. le député de Matane-Matapédia.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir, à mon tour,
d'intervenir sur la Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux
notamment par l'abolition des agences régionales. C'est
de ça qu'il s'agit. Chaque fois que les
parlementaires parlent de santé, les gens nous écoutent, à tout le moins ont
des attentes importantes quant aux
décisions qu'on prend collectivement, comme
parlementaires, à plusieurs égards, d'abord parce
qu'il y a énormément d'argent de l'État qui
est investi dans la santé. Je dis bien «qui est investi», c'est nécessaire,
parce que, chaque fois que ça touche un de nos proches, on est
préoccupés, puis encore plus quand c'est nous.
L'autre
engagement qu'on doit prendre comme parlementaires, c'est de prendre les
meilleures décisions possible pour
les patients. Et ce qui devrait être au centre de toute réforme en matière de
santé, c'est le bien du patient. Il se trouve que, dans ce projet de loi, on ne retrouve nulle part le mot «patient»,
mais on retrouve à bien des égards le mot «ministre», constamment.
Je vais
concéder au ministre de la Santé un volontarisme certain. Et il est
probablement celui qui, au Conseil des ministres,
à travers ses réformes, a les intentions les plus claires. On a l'heure juste
rapidement avec le ministre; on sait sa volonté d'aller de l'avant avec un certain nombre de réformes. Le
problème qu'on a pour l'instant, c'est qu'on a la première étape, et cette première étape est celle qui va
ouvrir les autres réformes à venir. Le premier ministre a indiqué, dans la
revue L'Actualité, qu'il y aurait un certain nombre de réformes
importantes, et que la première était celle-ci.
Ce que je
vous dis, M. le Président, c'est que cette réforme-là ne vise pas les objectifs
qui sont ceux qu'on souhaite, c'est-à-dire
le patient. Je vous dirais que, dans mon comté, essentiellement, le résultat
qui est obtenu, c'est qu'on va perdre les
conseils d'administration locaux, que des gens, des bénévoles ne pourront plus
intervenir dans leurs milieux, qu'il y a des craintes sur les fondations, entre autres, qui ramassent de
l'argent, qu'il y a des attentes sur des dossiers déjà en cours. Chez nous, c'est les paramédics, entre autres,
c'est le recrutement des médecins, c'est la qualité des soins, la qualité de la
nourriture, les soins pour les personnes
âgées, l'hébergement. Tout ça, là, ce sont des dossiers actuels qui ne sont pas
réglés par la structure.
Jamais on
n'aura vu autant de pouvoirs entre les mains d'un seul homme. C'est la volonté
du ministre. Il l'assume, il le dit.
Je soupçonne même que c'était une des conditions de sa candidature, d'avoir ces
pouvoirs-là pour mener à bien les réformes qu'il considère comme étant
nécessaires.
C'est la
prérogative du gouvernement d'arriver avec ces réformes. Et l'opposition, dans
ce cas-ci, se fait l'écho de la
population dans toutes les circonscriptions du Québec, y compris les
circonscriptions occupées par des députés de la formation gouvernementale, le Parti libéral du Québec. Ce qu'on dit,
c'est : En quoi le réseau sera plus performant avec la réforme? Nous ne le voyons pas. En quoi on va
sauver des coûts? On ne le voit pas non plus. Je peux vous dire qu'il y aura
des pertes importantes dans nos régions,
dans une région comme la Matanie, comme La Mitis, comme la Matapédia. À terme, les cadres du réseau de la santé qui
s'occupaient de notre région ne seront plus là, ça sera centralisé probablement
dans la capitale régionale. Ce n'est pas une
bonne nouvelle pour nous. Donc, ni cadres locaux ni conseils d'administration
locaux qui pourront intervenir pour les soins locaux.
Une autre
inquiétude qu'on a avec la centralisation de l'administration, par exemple,
dans la capitale régionale : Est-ce
qu'on va revoir, par exemple, l'offre de services dans les hôpitaux, ce que
j'appelle un peu un patrimoine médical, là, pour chacun des hôpitaux? Est-ce qu'on va spécialiser, par exemple,
toutes les chirurgies à Rimouski? C'est un des enjeux qui nous
préoccupent.
Alors, cette
réforme, elle est voulue par le ministre. On sent qu'il a besoin de la voir
adopter. Il a même évoqué le bâillon. Alors, ça nous montre sa
détermination pour arriver avec d'autres réformes.
J'aurais aimé
que, tout de suite, le ministre puisse nous expliquer la séquence à venir.
Donc, cette première étape permet au
ministre de faire des changements qu'il considère importants; l'autre étape,
c'est, par exemple, sur l'organisation des
soins. Donc, on aurait pu voir le plan du ministre. Le problème qu'on a,
c'est : Dites oui au projet de loi n° 10, puis, vous allez voir, je vais arriver avec d'autres choses.
Ça manque de perspective. Peut-être que, dans sa tête à lui, du ministère,
c'est clair, mais, pour les parlementaires, il nous manque de garantie.
Quelle est la
contrepartie? On accorde énormément de pouvoir au ministre, mais qu'est-ce
qu'on obtient en retour? Le seul
bénéficiaire, quant à moi, de cette réforme, c'est le ministre. Lui, il gagne.
Puis, jusqu'à maintenant, l'arrivée en politique
du ministre de la Santé a essentiellement été une série de mesures pour
l'accommoder, pour faire en sorte qu'il puisse faire ce qu'il veut
faire. Je vous le répète, c'est énormément de pouvoir.
On avait même
évoqué, dans les rumeurs lors de la nomination du gouvernement, que la Santé
pourrait être scindée en deux, avec
deux titulaires : un pour les structures et l'autre pour les soins,
disons, de première ligne. Je trouvais que c'était une idée qui était intéressante dans le sens qu'elle assurait un
contrepoids puis des échanges dans un ministère aussi important. Là, il n'y a pas ces contrepoids. Le
ministre a vraiment, là, les coudées franches pour l'ensemble des réformes
qu'il souhaite faire.
• (15 h 40) •
Les gens qui seront nommés sur les conseils d'administration régionaux ne sont pas davantage
nommés par les milieux. Moi, je n'ai
pas de garantie que, pour chacune des MRC du Bas-Saint-Laurent, il y aura un responsable nommé par le milieu. On nous dit que c'est des gens qui
seront des spécialistes dans le domaine de la santé, et je présume que le
mode de nomination pourrait s'apparenter,
par exemple, à celui des membres d'un conseil d'administration de l'Université
du Québec, par exemple, où, dans un conseil des ministres, à chaque fois, il
faut nommer la personne qui nous est recommandée. Sauf que, là, le problème,
c'est que ça ne sera pas recommandé comme dans le cas d'une université : l'université fait une recommandation au
gouvernement, puis le gouvernement décide. C'est vraiment le ministre, sur des
critères qu'on ne connaît pas, qui va choisir les administrateurs.
Dans notre région, celle du
Bas-Saint-Laurent, celle que j'ai le privilège de représenter, le seul écho
positif que j'ai entendu, c'est celui
de la P.D.G. de l'agence de santé et de services sociaux qui va se retrouver
dans la structure après, et elle est
payée par le ministère. Ceci étant dit, je pense que l'ensemble de mes
collègues seront d'accord pour dire que c'est une des très grandes gestionnaires de la santé qu'on a au Québec,
Mme Malo, mais comprenez qu'elle n'aurait pas pu dire le contraire.
Les
gens, par contre, qui ont la liberté de dire le contraire et qui ne font pas de
politique avec ça, les gens des conseils d'administration — je pense à M. Tremblay à Mont-Joli, je pense à
M. Pelletier à Matane, à Mme Voyer à Amqui — bien eux, ils aimaient ça s'impliquer. C'était du temps, mais ils sentaient
qu'ils représentaient la population. Alors, ça, ça n'existe plus. Je
peux vous dire que, dans les milieux que je représente, ça ne passe pas très
bien.
Alors,
pourquoi ils nous enlèvent la possibilité d'intervenir? Est-ce que le ministre,
à partir de Québec, peut faire mieux
que nous? Est-ce qu'il va faire de la microgestion? On a déjà vu ça, hein,
l'ancien ministre de la Santé, député de Jean-Talon, il faisait de la microgestion. Il écrivait le matin au D.G.
du réseau de la santé puis il regardait les chiffres. Mais, encore là,
c'était…
Une voix :
…
M.
Bérubé :
Oui, avec les codes de couleurs. Et puis c'était sa façon de procéder.
Mais
il allait dans les milieux beaucoup. Ça, je l'ai apprécié. Il faisait des
visites des hôpitaux puis il invitait les députés de l'opposition, puis on avait des échanges là-dessus. Et, quand
il venait dans les... à l'Hôpital des Monts, par exemple, qui était autrefois dans mon comté, ou au Centre hospitalier de
Matane, il faisait la tournée avec les députés de l'opposition puis il demandait à rencontrer le
conseil d'administration. Puis qu'est-ce que le conseil d'administration lui
disait? Bien, voici les problèmes qu'on a,
voici les marges de manoeuvre, voici les suggestions qu'on a. Puis, dans bien
des cas, c'était suivi. Moi, je me souviens
qu'à l'Hôpital des Monts on avait une demande pour que les bureaux des
médecins, par exemple, puissent être
à même l'hôpital, pour éliminer des frais d'administration puis rendre ça plus
facile pour les médecins puis le
recrutement, puis il l'avait accepté, puis il l'a fait. Alors, je trouvais que
c'était une formule intéressante.
Ça ne sera plus
possible avec la nouvelle structure parce que, si le ministre décide de venir
visiter un centre hospitalier dans ma
région, bien là qui va l'accueillir à la porte? Alors, il n'y a plus de D.G.
local, il n'y a plus de président du
conseil d'administration. Ça sera les gens qu'il croisera, et il sera
accompagné probablement de la ou du P.D.G. du CISSS. Alors, je ne trouve pas que c'est un gain qui, dans ma région,
est pertinent. Je suis convaincu que c'est comme ça partout au Bas-Saint-Laurent, que l'ensemble des
huit CSSS sont… des bénévoles sont contre ça. Puis, je le sais, ils nous le
disent, même ceux qui ne sont pas de mon comté. Alors, j'invite même les
parlementaires du gouvernement à réfléchir à l'appui qu'ils accordent à un projet de loi qui va concéder énormément
de pouvoir à un seul de leurs collègues. Est-ce qu'ils auront une influence plus grande envers le ministre qu'on ne
pourra en avoir? Je ne le sais pas, mais, chose certaine, le milieu, lui, ne l'aura plus, cette voix-là.
Est-ce qu'il va se développer des comités de citoyens ad hoc qui vont essayer de se faire entendre tant bien que mal à travers
des pétitions, à travers des envois, des communiqués? Il n'y a pas de structure
formelle pour se faire entendre.
Puis,
avec cette structure-là, on vient taire toute velléité de dire : J'ai une
légitimité comme administrateur du réseau, je le connais. Je ne suis pas
membre du Parti québécois, je ne suis pas membre du Parti libéral, mais moi,
comme représentant des usagers du réseau, j'aimerais vous livrer ce que mon
milieu vit. C'est souvent salutaire. Les gens qui sont sur les conseils d'administration de CSSS, on les connaît, c'est
des gens qui sont consciencieux. Souvent, c'est des gens qui ont une
vaste expérience, des gens qui considèrent que cette implication-là est
importante dans leur milieu parce que, les patients, on les rencontre puis on a
l'heure juste assez rapidement sur des choses très précises parfois.
Je prends l'exemple
de la nourriture. J'y ai fait référence tout à l'heure, lorsque le CSSS de
Matane a décidé d'instaurer ce qu'on appelle
la liaison froide — c'est un
nom très particulier, c'est la nourriture qu'on fait réchauffer — et puis
il y avait énormément de craintes et puis de doutes, et puis il y a essais et
erreurs, puis on réduisait les coûts, puis on ne voulait pas perdre sur la qualité. Alors, c'est le CSSS qui a
écouté les citoyens puis qui a livré son opinion au ministre, puis il y a eu des échanges, puis finalement le
changement a été accepté. Mais ça s'est fait de façon coordonnée. C'était le
cas pour tous les ministres qui ont précédé.
C'était le cas pour Réjean Hébert,
c'était le cas pour le député de Jean-Talon, c'était
le cas pour Jean Rochon, pour le premier
ministre actuel lorsqu'il était à la Santé. C'était une formule qu'on acceptait.
Il y avait vraiment des gens impliqués dans le milieu.
Alors,
moi, je me retrouve, comme parlementaire, à me positionner face à un projet où
je dis à mes commettants : Bien
là, je suis intervenu dans le domaine de la santé. Ah oui? Puis est-ce que tu
as obtenu une réponse sur les paramédics? D'ailleurs, je me permets de
le souligner à ce moment-ci, il y a un rapport sur les soins préhospitaliers,
qui a été commandé l'an dernier et qui
devait sortir ce printemps, qui n'est toujours pas public. Il y a même une
pétition que j'ai déposée en Chambre
pour rendre le rapport public parce que ça a une incidence sur le temps de
réponse partout au Québec lors d'une urgence. Alors, non, je n'aurais
pas eu cette réponse-là avec le projet de loi.
Est-ce
que je vais avoir une structure qui va me permettre d'être plus attractif pour
recruter des médecins dans les CSSS? Comme l'a dit le député
d'Abitibi-Ouest, la réponse, c'est non. Est-ce qu'on a des mesures qui vont
nous permettre de faire face au choc
démographique qui fait en sorte que la question de l'hébergement, des soins à
domicile, des soins en CHSLD, du
personnel, de sa capacité d'intervenir de façon humaine avec les gens va être
abordée? Non plus. Ça va mal, là.
Est-ce qu'on va se
pencher sur les soins qui sont déployés sur le territoire, dans des petites
antennes de CLSC ou dans les coopératives de santé comme à Sainte-Félicité,
dans mon comté? Non plus. Bon.
Est-ce qu'on
va se pencher sur les conditions de travail des gens qui sont épuisés dans le
réseau de la santé puis qui nous le
disent? Moi, je vais... tous les jours, je suis dans mon comté, je dois me
rendre en CHSLD pour voir un proche, il m'en parle. Non plus. Mais je leur dis : Le
ministre a besoin de ça pour faire des changements qui vont modifier la structure
de la santé, O.K. Puis est-ce que les soins
vont être meilleurs? Je ne le sais pas, peut-être, je le souhaite, mais, en
même temps, le ministre de la Santé a
choisi le Parti libéral pour faire de la politique. C'est son deuxième choix.
Il fait partie d'une équipe qui a créé beaucoup d'attentes dans le
domaine de la santé.
Moi, j'ai été
candidat en 2003. La santé, c'est notre grande priorité. Il me semble que
j'entends encore le slogan. Dans les
jours qui suivront notre élection, vous verrez des changements notables dans le
temps d'attente dans les urgences. C'est
correct. Les gens ont voté pour le parti... en démocratie. Ils ont choisi le
Parti libéral avec ces attentes, puis on s'est rendu compte que ce n'est pas magique. Ça ne se fait pas du jour au
lendemain, mais le discours a porté. Alors, est-ce qu'il y a eu des différences notables dans le
temps d'attente dans les urgences? Pas vraiment. Dans le temps d'attente pour
une opération mineure, dans un territoire comme le mien, genou, cataracte, hanche?
Non. Est-ce qu'il y a davantage accessibilité
à un médecin de famille? Non plus. Ce n'est pas facile, quel que soit le
gouvernement qui est là. On ne peut pas créer des attentes démesurées. Mais
chaque dollar qui est investi dans le réseau de la santé, il faut faire en
sorte qu'il soit tourné le plus possible vers les patients.
Le ministre ne nous dit pas, dans la structure,
comment on va sauver, parce que là, essentiellement, on peut s'imaginer que, par attrition, quand les cadres
vont prendre leur retraite, ils ne seront plus dans le réseau. J'ai un exemple
très concret : Nicole Morin, qui est la
directrice générale du CSSS de la Matanie, va quitter. Elle a annoncé qu'elle
allait quitter. Mais là j'ai appris
par lettre de la part d'un attaché politique du ministre que ce sera la
dernière D.G. de l'histoire du CSSS
de Matane. Donc, lorsqu'elle quittera, elle ne sera pas remplacée. Bien, ça,
c'est une manifestation très concrète pour
le milieu. Alors là, les gens réalisent qu'il n'y a pas quelqu'un en autorité
qui habite le territoire qui va être là pour les écouter quand on aura besoin de plaider une situation particulière. Ça,
c'est un impact concret. Si d'aventure des gens de ma circonscription nous écoutent, je leur
dis : Première indication, peut-être que vous ne le savez pas tant que ça,
mais il y a des gens qui sont dans
les conseils d'administration, puis qui vous représentent, et puis qui ont à
coeur votre santé, puis qui sont des
partenaires, mais là ils ne seront plus là. Eux, ils veulent continuer, puis on
leur dit non. Alors, moi, j'ai entendu
pour la première fois de ma vie des gens qui ne s'occupent pas de politique
partisane dire : Écoutez, là, nous, notre implication en politique, ce n'est pas vraiment politique, c'était
la santé, puis là on nous enlève ça. Ça a intérêt à être bon, ce qui va suivre,
parce que, si Québec ou le ministre a la prétention de mieux savoir ce qui est
bon pour notre milieu que nous, c'est tout un défi, tout un défi. Puis
évidemment on sait que la réponse, c'est non.
• (15 h 50) •
Alors, moi,
je me retrouve à signer... même pas à
signer un chèque en blanc, à... On ne fait pas
confiance à cette volonté-là du ministre
d'améliorer les soins à travers le projet
de loi n° 10. Mais, même si on
dit ça, même si on porte les préoccupations de l'ensemble du Québec là-dessus,
le gouvernement est majoritaire, alors il va le faire adopter, son projet de loi, que ça soit par l'échéancier régulier ou par un bâillon. Ça, ça sera sa prérogative, mais, chose certaine, il
l'a choisi. Et puis les autres
réformes, ça va être la même chose. Le gouvernement est majoritaire.
Ça a un sens, hein? Les gens nous
disent, des fois : Qu'est-ce que vous allez faire? Allez-vous les empêcher? On va porter votre écho à l'Assemblée nationale, c'est ça qu'on va faire, puis
on va le dire, ce que vous nous avez dit,
mais, à terme, ils vont le voter, donc il y a une certaine impuissance face à ça.
Moi, j'ai fait une opération dans mon comté, M. le Président, j'ai dit… Vous pouvez bien dire : On n'écoutera pas le député de Matane-Matapédia, il est dans l'opposition, ça fait qu'il va s'opposer officiellement.
Correct. J'ai demandé aux gens de la circonscription... l'opération...
je pense que c'est 6 742, j'ai appelé ça
comme ça. Pourquoi? Il y a 6 742 personnes, dans mon comté, qui ont voté pour le Parti libéral. Je m'adresse à
ces personnes-là. Je leur dis : Est-ce
que vous êtes d'accord avec cette décision-là du projet de loi
n° 10? Si vous n'êtes pas d'accord,
dites-moi, écrivez-moi : J'ai voté
libéral puis je suis contre ça. Alors là, c'est
les gens qui ont fait confiance au Parti libéral.
Alors, le premier message que j'ai eu — puis elle me permet de le rendre
public — c'est Geneviève Laroche, qui a choisi de venir dans
notre région pour travailler dans un CSSS, puis s'impliquer aussi, puis fonder
sa famille. Elle dit : Pour la
première fois de ma vie, elle dit, je décide
d'écrire à mon député et lui dire que je suis déçue
d'avoir voté libéral — avoir su! — et que ça me démotive sur la capacité de
m'investir dans le milieu. Puis, dans les minutes qui
vont suivre ce débat, je vais
la placer sur Internet, cette lettre-là, pour démontrer son authenticité. Puis
on est plusieurs qui sont déçus. On
est déçus qu'on ne nous fasse pas confiance,
que, dans nos milieux qui se sentent éloignés géographiquement de
Québec, on se sente éloignés politiquement également de Québec, puis ce n'est
pas un bon signal à envoyer.
Dans notre
région, là, on se penche sur toutes sortes de façons de se prendre en main puis
de décider de nos affaires. Dans
Matapédia, il y a un projet d'écoterritoire habité, qui est une proposition du
gouvernement du Québec pour gérer nous-mêmes
nos affaires, de se faire confiance puis d'être responsables de nos réussites
avec des moyens. On veut, nous aussi,
fournir un effort pour définir des modèles qui se rapprochent davantage des
milieux. Bien, ça va exactement dans le sens contraire, et c'est ça qui est décevant.
Alors, des
6 700 quelques citoyens qui ont voté pour le Parti libéral, ils sont
nombreux à m'écrire. Alors, si on ne
m'écoute pas, moi, comme député du Parti québécois légitimement élu avec
presque les deux tiers des voix dans mon comté, qu'on écoute les gens qui ont
voté pour le Parti libéral, qui sont plus près idéologiquement de ce
gouvernement et qui disent : On n'a pas
voté pour ça, mais, en même temps, c'est-u
vraiment nécessaire? Ça passe-tu par ça, les réformes que vous voulez
faire?
Puis, je vous
le dis, puis je vais terminer là-dessus, mon inquiétude, c'est que j'aurais aimé voir la perspective du
ministre, quelle est la deuxième étape,
quelle est la troisième étape. Lui, il le sait, puis son sous-ministre, il le
sait. D'ailleurs, je me permets de
lui dire que c'était une grande fierté pour moi, sous notre gouvernement, de
voir une citoyenne de ma circonscription devenir
sous-ministre à la santé, Mme Verreault,
et une femme d'une grande probité, d'une grande compétence, qui était sous-ministre, et ça démontre qu'on est capables d'arriver à des grandes choses avec
la vision qu'on
a puis dans nos
régions. Mme Verreault,
Lise Verreault, c'est quelqu'un qui a
travaillé... qui a commencé dans un CLSC, puis à s'impliquer localement, puis dans des comités de mobilisation,
puis à l'hôpital, puis à l'agence. Puis elle a monté pas par ambition, par une telle volonté
d'améliorer le réseau et d'être utile pour sa région. C'est
une grande fierté de la voir là, puis je me dis :
Elle est issue de mon milieu, puis je suis tellement fier. Puis j'ai des gens que je connais qui s'impliquent, qui
ont des choses intéressantes à proposer, puis là on ne les entendra plus.
Alors, c'est ça, ma crainte.
Et
je termine en indiquant, par votre entremise, au ministre que… je lui demande
d'ouvrir sur les autres réformes à
venir : Quelle est la deuxième et la troisième? Ça nous donnerait une
perspective qui serait intéressante, parce que je suis convaincu que même son caucus ne le sait pas. Et
je lui demande à partager, partager ce pouvoir très précieux que lui a
confié le premier ministre...
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Très bien. Merci
à vous, M. le député de Matane-Matapédia, pour cette intervention. Je suis prêt à céder la parole au prochain intervenant et
je reconnais Mme la leader de l'opposition officielle et députée de
Taschereau. Je vous cède la parole.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais : Merci, M. le
Président. C'est avec beaucoup de bonheur que j'ai entendu mon collègue le
député de Matane-Matapédia nous faire
sa… nous expliquer sa compréhension du projet de loi n° 10. Je pense qu'il
a extrêmement bien expliqué ce qu'on
ressent dans les régions, où on est en train de perdre, à l'heure actuelle,
tout pouvoir local. Il y a une déconstruction
du pouvoir local et régional. Il y a une démobilisation des acteurs du milieu,
des partenaires, qui se voit à plein
de niveaux, qui se voit… On dépossède les territoires des centres locaux de
développement, on dépossède les territoires des conseils régionaux en environnement. La ministre du Tourisme nous a
annoncé à demi-mot qu'elle déposséderait les régions des associations
touristiques régionales, l'autre fois, en débats de fin de séance, autre chose
qui est apparue. Et là, maintenant, on
dépossède le pouvoir local de la gestion de son système de santé. On dit aux
gens des régions : Vous ne
connaissez pas ça, vous ne connaissez pas l'univers de la santé. Le ministre,
du haut de sa tour d'ivoire, à Québec… Moi,
je suis une fille de Québec, là, qui dit ça : Le ministre, du haut de sa
tour d'ivoire, à Québec, va décider pour vous parce qu'il pense mieux que vous, parce qu'il agit mieux que vous, parce
qu'il connaît mieux votre réalité que vous. Je ne pensais jamais
entendre ça.
Évidemment, je parle
de cet environnement-là qui est l'environnement de la perte du pouvoir local.
L'autre environnement, c'est les propos du ministre ce matin, très inquiétants.
Imaginez-vous, le ministre de la Santé, M. le Président,
n'est tellement pas habitué à se faire critiquer qu'à la simple idée, à la
simple phrase, que l'opposition officielle donne son opinion et dise ce matin dans un journal : Bien oui, on
va s'opposer au projet de loi, on était là… On s'oppose, mais on discute, on débat. Ça arrive qu'on
s'oppose au début puis qu'à la fin ça soit tellement bon qu'on approuve. Ça
arrive, parce que l'opposition fait
son travail; quoique, dans ce cas-là, je ne vois pas trop comment on réussirait
à s'entendre, très honnêtement.
Mais
le ministre dit : Bâillon, je veux un bâillon. Ils sont en train de me
faire de l'obstruction. Écoutez, une simple critique devient de l'obstruction. Je pense qu'un petit cours de
parlementarisme 101 serait intéressant pour le ministre de la Santé et des Services sociaux et qu'il
comprenne que, dans le mot «Parlement», il y a «parler». On est supposés se
parler. On a commencé hier le débat sur le
projet de loi n° 10, et le ministre, aujourd'hui, dit qu'il veut un
bâillon. Alors, voyez-vous, là, dans
quel état d'esprit le ministre de la Santé et des Services sociaux aborde cette
discussion si importante sur la santé et les services sociaux, et qui
connaît… qui doit agir en matière de santé et de services sociaux.
Et
le ministre de la Santé nous dit : J'aurai des amendements, et il y aura
d'autres lois. Bien sûr, déposez-les, qu'on les voit, qu'on les regarde, quels sont ces amendements. Au moins, s'il
ne veut pas nous déposer les amendements, s'il ne peut pas parce qu'il est en train de faire
travailler le ministère, qu'il nous dise sur quels sujets seront ces
amendements. Qui a réussi à
convaincre le ministre de la Santé et des Services sociaux de l'aberration, des
aberrations nombreuses qui sont dans
cette loi? Aucune idée. Lui, il est dans sa tête, puis, si on n'écoute pas
quand il dit qu'il a des amendements qui s'en viennent, bien, il veut un bâillon. Si on n'écoute pas quand il dit qu'il
y a d'autres lois qui s'en viennent, qu'il faut lui faire confiance, bien, il veut un bâillon. C'est ça,
l'atmosphère dans laquelle on est à l'Assemblée nationale aujourd'hui autour
du projet de loi n° 10. Je trouve cela
dommage. On ne m'a pas habituée à ça ici. Je l'ai toujours dit, il y a
d'habitude un respect mutuel autour
de ces enjeux-là. Au niveau de la santé, entre autres, il y a eu des
collaborations extraordinaires ici sur
des projets de loi sur lesquels parfois on n'était pas d'accord, mais on a
réussi à faire évoluer la loi. Et, dans ce cas-ci, il va falloir faire
évoluer cette loi qui, à mon sens, est une aberration. C'est une aberration.
• (16 heures) •
Cette
loi va à l'encontre de toute la littérature en matière de santé et de services sociaux :
rapprocher le citoyen de la décision,
rapprocher le soignant de la décision sur la donation du service, la livraison
du service, rapprocher les gens des régions,
qui connaissent intimement, finement leurs institutions, leurs territoires. Y
a-t-il, oui ou non, beaucoup de services à donner? Est-ce que les gens sont plus âgés, moins âgés? Tout ça, ils
vont en être dépossédés, M. le Président, dépossédés. La loi est une concentration de pouvoirs entre les mains d'un ministre.
Vous savez, M. le Président, on disait souvent… il y a
un mot qui existe, qui est bien connu, qui peut tout à fait s'appliquer à
cette loi-là, qui s'appelle «l'hospitalocentrisme». L'hospitalocentrisme
a toujours été décrié et est une erreur pour tout le monde. Tout le monde le
sait maintenant. L'hospitalocentrisme, c'est
faire tourner des décisions, amener tout
le monde autour de l'hôpital. Parce que
l'hôpital, c'est l'endroit le plus
coûteux. Hein, pour ceux qui s'inquiètent des factures aux contribuables,
l'endroit le plus coûteux, c'est la livraison du service à l'hôpital.
Donc, quand tu mets tout autour du centre hospitalier, tu fais de
l'hospitalocentrisme.
Eh bien, M. le Président, je vais inventer un nouveau terme, «le ministrocentrisme». C'est du
ministrocentrisme. C'est un ministre
qui veut tout installer autour de lui, tout contrôler, tout ramasser. Déjà
qu'il contrôle 49 % du budget
du Québec, il veut, en
plus, le contrôler dans ses moindres détails. Ça va à l'encontre de toute la
littérature. Ce qui est étonnant, c'est
qu'alors que, depuis neuf ans… Ça a pris neuf ans, là. On n'a été là que
18 mois, entre les deux, on a eu un petit
intermède, mais, pendant neuf ans, le Parti libéral a été au pouvoir et n'a
jamais réussi à améliorer le système de santé et des services sociaux, jamais réussi à faire abaisser les temps
d'attente. Nous, en un an et demi, on les a baissés d'une heure, en un an et demi. Eux, au Parti libéral, ils l'ont
augmenté systématiquement. On a vu le temps d'attente augmenter dramatiquement.
Ça, ce sont des sujets importants pour les citoyens des régions. Mais le Parti
libéral, au lieu de s'attaquer à ça,
puis de dire : Je vais continuer le travail puis je vais essayer de
m'occuper des patients, des listes d'attente, de tout ça, ont dit :
Non, on va s'attaquer aux structures, semblable en cela à la CAQ, parce que la
CAQ aime ça aussi beaucoup s'occuper des
structures, pas s'occuper du monde, des patients, des usagers, non… des
pouvoirs locaux, leur donner… non, s'occuper des structures.
La dernière
fois que j'ai vu quelqu'un s'occuper des structures en santé, c'était le
premier ministre actuel, qui était ministre
de la Santé à l'époque. Lui, il a changé le mot «régie de la santé et des
services sociaux» pour le mot «agence de la santé et des services sociaux». Puis là, là, ça a duré des années. Il
a fallu tout changer, changer les conseils d'administration, changer, tiens, le papier, qui a l'air si
important… Le coût du papier a l'air bien important pour le ministre de
l'Économie, de l'Innovation et de l'Exportation, c'est pour ça qu'il
veut fermer les CLD, c'est à cause du coût du papier. Bien, imaginez-vous donc, le coût du papier quand le
premier ministre actuel, anciennement ministre de la Santé, s'est amusé à
changer les régies pour les agences. Bien là, aujourd'hui, encore une fois, on
s'attaque aux structures en arrivant au pouvoir.
Encore une fois, on s'en vient jouer dans les structures et immobiliser le
réseau, immobiliser le réseau dans un changement
structurel, au lieu de l'amener à travailler sur les soins aux patients. C'est
une chose qui est un peu aberrante.
D'ailleurs,
si on veut le résultat de la dernière opération structurelle sous la
responsabilité du premier ministre actuel,
c'était le projet de loi n° 25 du premier ministre. Il visait… le titre,
c'était… à rapprocher les services de la population et à faciliter le cheminement de toute personne
dans le réseau. Bel objectif! C'était un bel objectif. Résultat des courses,
M. le Président : l'impact fut de
multiplier le personnel administratif dans le réseau. En 10 ans, après cette
merveilleuse transformation des
structures, le nombre de cadres a augmenté de plus de 30 %, passant de
9 518 en 2004 à 12 500 en 2013. C'est ça, le résultat des réformes libérales. C'est ça, le résultat des
changements de structures au Parti libéral. La dernière fois que le
premier ministre et un ministre de la Santé libéral a joué dans les structures,
c'est ça que ça a donné.
Et, pendant ce temps, le temps d'attente dans
les urgences a augmenté. Il y a certains endroits, Laurentides-Lanaudière — j'y vais de mémoire, M. le Président — je pense que c'est 22, 23, 24, 25 heures
d'attente. Ça, c'est un vrai problème.
Si vous voulez parler des vrais problèmes, là, allez-vous-en dans Laurentides-Lanaudière,
allez leur parler du temps d'attente
dans les urgences. Puis je ne compte même pas les unités de débordement, qui
permettent de cacher qu'il y a du monde qui attend dans les urgences.
22, 23, 24, 25 heures, ça, c'est un problème.
Mais non,
pendant ce temps-là, le ministre de la Santé a décidé de jouer dans les
structures. Ce qui est étonnant aussi,
M. le Président, c'est que… j'ai parlé de la littérature, c'est que cette
littérature, elle contient des noms assez étonnants qui expliquent à quel point il ne faut pas donner
tous les pouvoirs entre les mains du ministre. Je vais vous citer quelqu'un,
ici, qui dit : «Est-ce que c'est
vraiment une bonne chose que le ministre de la Santé soit le dirigeant ultime
du système de santé lui-même, ou est-ce qu'il ne devrait pas, comme élu,
être parmi ceux qui évaluent les résultats du système et également
posent des questions par
rapport aux objectifs
que lui, comme homme ou femme politique, aura déterminés?» Ça c'est une vision qui essaie d'être à la hauteur. Qui est-ce? L'actuel premier ministre qui a dit ça. Et
ça ne fait pas 10 ans, là. 2011,
un grand discours devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le
premier ministre du Québec, responsable
du ministre de la Santé actuel, il y a à peine trois ans, disait aux Québécois
et aux Québécoises, dans un grand discours :
Ne faites pas ce que je fais. Ça n'a pas de bon sens, là! Ça fait trois ans! Ça
fait trois ans! Comment pouvez-vous expliquer un tel revirement? Comment
pouvez-vous expliquer une telle incohérence? Ça ne marche pas.
L'actuel
ministre de l'Éducation était ministre de la Santé. On a eu bien des débats. Il
était tout fier, à l'époque, en commission
parlementaire, de voir que moi aussi, comme lui, j'étais contre l'abolition des
agences de la santé. L'actuel ministre de l'Éducation a... On a des
citations, là, à remplir la salle, ici, de papier, jusqu'à cette hauteur-là, de
l'actuel ministre de l'Éducation qui se
vante du fait qu'il ne faut pas abolir les agences de la santé comme le
demandait la CAQ. Coudon, il y a
combien de caquistes dans la salle, M. le Président? Est-ce qu'il y a en ça
plus ça? Il y a combien de caquistes dans la salle aujourd'hui?
Qu'est-ce qui s'est passé?
Je vais vous lire la citation du député de
Jean-Talon, à l'époque ministre de la Santé. Quand on disait que les agences de la santé étaient... la CAQ disait que
les agences de la santé n'étaient pas bonnes. Il disait : «Il n'apporte
rien de nouveau dans notre
transformation du réseau de la santé.» «L'idée d'éliminer les agences de la
santé était une proposition adéquiste
ridicule.» Et il disait le problème : «Dans un premier temps, il y a la
sécurité d'emploi, ils ne pourraient pas congédier les gens comme ça le lendemain matin.» Bien non! Bien non, le
gouvernement libéral ne pourra pas congédier les gens du jour au lendemain, sauf quelques P.D.G. d'agences. «Ils ne
comprennent pas comment ça fonctionne», disait le ministre de l'Éducation. Bien, aujourd'hui, si je
cite ses propos, il dit du ministre de la Santé : Vous ne comprenez pas
comment ça fonctionne. «C'est inquiétant
pour le Québec et les Québécois de voir des gens comme ça qui vont venir
brasser et démolir le réseau de la
santé.» Citation du ministre de l'Éducation quand il parlait de l'abolition des
agences. Comme incohérence totale,
vous êtes champions! Champions, championnes! C'est assez magnifique. En si peu
de temps, M. le Président, en si peu de temps, voir des gens
s'autodéfaire, montrer tant d'incohérence, je suis ébahie.
L'article 1 de la loi — hein,
continuons dans les incohérences totales — l'article 1 de la loi
dit : Nous allons améliorer l'accès. Il
nous parle d'accessibilité au réseau de la santé. Le ministre de la Santé
explique ingénument, en point de presse, que ce projet de loi là n'est
pas là pour améliorer l'accès, il n'améliorera pas l'accès aux soins de la
santé. Comment on va faire pour,
l'article 1, le croire quand on va en débattre en commission
parlementaire? Comprenez-vous que, le ministre de la Santé, on va le
citer à tour de bras? Il nous dit que l'article 1, dès le départ, le
premier article, si important dans un projet de loi...
L'article 1 d'un projet de loi, c'est l'objet du projet de loi. Le
ministre de la Santé a démoli lui-même
l'article 1. Est-ce qu'il va l'amender? Est-ce qu'il va le retirer? Il n'y
a plus de projet de loi s'il le retire. Il dit : Mon article 1, que j'ai écrit, que je pilote, n'est
pas bon. Ça va mal! C'est le départ du projet de loi. Quelle incohérence!
Comment on va faire pour travailler
l'article 1? Expliquez-moi ça. Ça va être le fun, en commission
parlementaire, entendre le ministre nous expliquer que ce qu'il a dit en
point de presse, ce n'était pas vrai. J'ai hâte d'entendre ça.
• (16 h 10) •
Dans le fond, ce qu'il y a derrière ça, c'est,
bien sûr, la disparition des agences, c'est la disparition du palier régional, mais c'est plus que ça, c'est la
disparition du palier local, c'est la disparition des CSSS tels qu'on les
connaît. L'Idée des CSSS, qui était
d'ailleurs tirée très proche des CLSC, là… Ils sont proches des CLSC, ils sont
ensemble. Le CSSS, c'est le palier le
plus près de la population et ce sont des services de première ligne, ils sont
dédiés à ça, ils sont dévoués à ça.
Il y a des conseils d'administration. Ces conseils d'administration sont formés
de gens de la localité. Ils sont présents. C'est des gens d'affaires, c'est
des gens du milieu. Il y a des médecins, il y a des infirmières, mais il y a aussi
des bénévoles, il y a des gens qui s'intéressent au réseau de la santé,
il y a des retraités. Puis ils se questionnent sur : Dans la rue, ici, dans mon coin, comment ça va?
Quel est le… Ils connaissent finement leur région, leur localité. Ce qu'on
fait, c'est : on les fait disparaître.
Pire, M. le Président, et ça, c'est important.
Moi, dans mon CSSS ou dans mon agence, il y a une assemblée publique mensuelle. Tout le monde peut venir poser
des questions, comprendre. Des fois, il y a
des manifs. Moi, j'ai déjà été présidente d'une régie de la santé, donc d'une
agence. J'avais des 300 personnes dans la salle. Ils venaient m'expliquer
des choses. J'écoutais. Puis ils avaient le
droit. La population a le droit de parler. Les députés ont le droit de
parler, ça, le ministre de la Santé est en
train de l'apprendre, même s'il veut
nous bâillonner, mais la population a le droit
de parole sur son système
de santé, a le droit d'avoir une
prise sur son système de santé. On veut abolir la prise de parole des citoyens.
On veut abolir le lieu de rencontre autour
de la santé et des services sociaux. On veut abolir la zone de dialogue. Ça n'a
pas de sens. C'est d'une incohérence avec
tout ce qui se fait comme amélioration du réseau de la santé à travers le
monde. Ça n'a pas de sens.
Puis qu'on ne
me revienne pas avec le Kaiser Permanente. C'est un autre système
que le ministre nous cite tout le temps, où les médecins sont salariés. Ce n'est pas
comme le… Tu ne peux pas coller une idée d'un autre, puis rien changer de ton environnement, puis la rentrer dans le système.
Ça ne marche pas comme ça, la vie. C'est un grossier amalgame.
Dans la Capitale-Nationale particulièrement, la
proposition qu'on a sur la table n'a aucun sens, elle a été décriée par les… par toute la région, dans la
Capitale-Nationale. Ça va bien dans le monde de la santé dans la
Capitale-Nationale. Pourquoi vous allez nous immobiliser pendant trois
ans dans un changement de structures qui ne rapportera rien, ni financièrement,
ni en services? C'est déjà connu. Pourquoi vous nous sortez du réseau?
Les gens
étaient choqués quand ils sont venus en commission parlementaire. Ça a chauffé
dans la salle. Ce n'est pas
l'opposition qui a chauffé, c'est les citoyens, des gens d'affaires, des gens
qui s'impliquent dans leur communauté, dans
leur fondation puis qui disaient : Aie! Pourquoi vous faites ça? Et la
seule réponse qu'on a est une réponse qui nous dit : Pour sauver 220 millions. Alors, pour, à terme, sauver
supposément 220 millions, on va immobiliser, démobiliser, démotiver le réseau de la santé et des services
sociaux, les partenaires locaux, pour des années. Puis ça, ça coûte cher.
Alors, votre économie… M. le Président, le
ministre, son économie, elle va disparaître bien vite. Et savez-vous comment
elle va disparaître? Elle va disparaître en
perte de soins et de services de santé. Elle va disparaître en motivation. Elle
va disparaître en disparition de l'implication locale dans la recherche
de solutions innovantes.
J'ai trouvé…
Il y a des perles, dans ce projet de loi, qui sont… Écoutez, je vais vous
donner le genre d'exemple de pouvoir
que le ministre veut se donner. Il aura le pouvoir de décider si les conseils
d'administration pourront se pourvoir de
comités consultatifs à des fins particulières telles la représentation des
régions éloignées. Il va fixer… Il va interdire toute permutation des sommes prévues dans les programmes, les programmes
services, qui pourraient prendre en compte certaines particularités
régionales. Il dit, dans son projet de loi : Je ne veux plus que vous
fassiez des particularités régionales, je veux un univers mur à mur. Ça n'a pas
de sens.
Une des
perles que j'ai trouvées : La plupart des décisions seront reportées au
niveau du ministre et du ministère. Exemple,
le financement des programmes de perfectionnement professionnel provenant des
organismes communautaires devra dorénavant être approuvé par le
ministre. Il va aller… Il va falloir que, si un organisme communautaire veut un
programme de perfectionnement professionnel,
ça va lui prendre l'approbation du ministre. Mais le ministre, il va crouler
sous les demandes. C'est du ministrocentrisme après de l'hospitalocentrisme. Ça
n'a pas de sens.
Les
organismes communautaires ne sont pas contents, les centres hospitaliers ne
sont pas contents, les infirmières ne
sont pas contentes, les médecins… Il n'y a personne à peu près au Québec qui
approuve cette loi. Il n'y a personne qui
approuve cette loi. Alors, oui, nous disons une chose au gouvernement et au
ministre de la Santé : Cent fois sur le métier remettez votre
ouvrage. C'est un bon vieux slogan qui permet parfois d'améliorer les choses.
Il devrait reprendre ses marques, nous
présenter quelque chose qui touche aux soins de santé, qui permette d'améliorer
un réseau qui en a besoin. Et on sera
contents, à ce moment-là, de le voir revenir avec quelque chose de plus
intéressant. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Ouimet) :
Alors, merci à vous, Mme la leader de l'opposition officielle et députée de
Taschereau, pour cette intervention. Je cède la parole, maintenant, à M. le
député de Rimouski. À vous la parole.
M. Harold LeBel
M.
LeBel : Merci, M. le Président. Dans une autre vie, il n'y a
pas si longtemps, j'ai travaillé dans des groupes communautaires, des regroupements
d'organismes communautaires. J'ai appris à connaître beaucoup de groupes qui travaillent dans plusieurs domaines : les soupes
populaires, de l'aide aux aînés, de l'aide aux chômeurs, aux assistés sociaux. Tout ce monde-là travaillait ensemble.
Et c'est assez dynamique, c'est des gens qui ont un projet de société,
qui ont des idéaux, un idéal pour leur communauté.
Mme
Maltais :
Pardon, pardonnez-moi, M. le député. M. le Président…
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Mme la leader adjointe de l'opposition.
Mme
Maltais : Il faudrait simplement, avant que le député rentre
vraiment dans son allocution, qu'il y ait un quorum.
Le Vice-Président
(M. Ouimet) : Très bien. Nous allons le vérifier. Alors, qu'on
appelle les députés.
• (16 h 16 — 16
h 17) •
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'Assemblée poursuit ses
travaux, le quorum étant rétabli. Je vous cède la parole de nouveau, M.
le député de Rimouski.
M.
LeBel : Merci, M. le Président. Comme je disais, j'ai travaillé
longtemps dans des groupes communautaires. Les gens qui participent à ces groupes-là, autant les intervenants qui
donnent des services à différentes clientèles, je parlais de soupes populaires, de personnes aînées, des
gens à l'aide sociale, les démunis, les personnes handicapées, les groupes
de femmes, il y a plusieurs groupes qui existent, il y a des intervenants qui
donnent des services, mais il y a aussi des conseils
d'administration, des gens qui se réunissent, qui donnent les directives, qui
donnent les… qui font les plans d'action, qui réfléchissent sur les interventions à faire dans chacunes de leurs
communautés. Ces groupes communautaires, souvent c'est des petits salaires, les gens qui travaillent là-dedans sont à
plus petit salaire, ils travaillent beaucoup d'heures. Les bénévoles qui se
réunissent en conseil d'administration, c'est des bénévoles qui prennent le
temps d'étudier leurs dossiers, d'étudier les situations que chacun peut
vivre.
Ces
groupes-là changent notre société. Et c'est beaucoup à partir de ces groupes-là
qu'on a aujourd'hui connu certains avancements, comme… on ne le sait
pas, mais l'aide juridique. Les bureaux d'aide juridique, c'est parti de groupes communautaires qui se sont mobilisés, qui
ont créé ce service-là, et l'État a trouvé ça intéressant et éventuellement
a appuyé les bureaux d'aide juridique. Les
centres de la petite enfance, c'est une belle journée pour en parler, avec ce
qui s'est passé aujourd'hui, mais les
CPE, c'est parti des garderies populaires, de femmes, de familles qui ont
décidé de se regrouper, de partir des coopératives ou des organismes
communautaires pour donner des services aux jeunes, et les haltes-garderies,
les…
Ça
fait qu'il s'agit de regarder un peu autour de nous, au Québec, le modèle
québécois, il y a beaucoup d'interventions, beaucoup de services qui sont donnés aux citoyens, qui sont partis
autour de citoyens qui se sont regroupés, qui ont décidé d'inventer des choses, qui ont amené des
initiatives. Ça fait que les groupes communautaires, où je veux en venir, ce
n'est pas que des groupes
dispensateurs de services, c'est des groupes qui sont des gens qui provoquent
le changement, qui emmènent des changements, qui emmènent l'amélioration
de nos conditions de vie. Et actuellement ce que je vois du gouvernement, c'est
qu'on voit les groupes communautaires plutôt comme des dispensateurs de
services.
Il n'y a pas si
longtemps, en mai 2013…
Le
Vice-Président (M. Ouimet) : J'entends des bruits de fond à ma
droite. Alors, il y a un seul député qui a la parole, c'est le député de
Rimouski. Veuillez poursuivre.
• (16 h 20) •
M.
LeBel : …le député de Rivière-du-Loup devrait être très intéressé. Je
vais me concentrer. O.K. Le 14 mai 2013, ici, à l'Assemblée nationale,
il y a eu une proposition, une motion qui a été adoptée, je vais la lire :
«Que l'Assemblée
nationale demande au gouvernement de rehausser le financement des organismes
d'action communautaire autonome en santé et services sociaux;
«Que
l'Assemblée nationale souligne l'apport des organismes d'action communautaire
autonome au développement social et économique du Québec.»
Cette
motion a été acceptée à l'unanimité, c'est-à-dire que les partis politiques,
ici, ont chacun adopté cette motion-là, les libéraux, le Parti québécois
et la CAQ.
Qu'en
est-il devenu plus tard? Au gouvernement du Parti québécois, on avait pris
certains engagements. On avait prévu,
dans le cadre du pilier de solidarité, une hausse de financement de
162 millions pour le milieu communautaire, un programme pour l'acquisition et rénovation
d'immeubles de 10 millions destiné à ces groupes, ainsi que des mesures de
soutien au personnel des 4 000
organismes communautaires concernés. On s'était engagés à suivre ce que la
motion nous disait. Aujourd'hui, ces
augmentations de budget des groupes communautaires, ça s'est évanoui dans les
mesures ou dans la politique d'austérité du gouvernement.
Et,
en plus, le ministre des Finances a fait une déclaration assez surprenante et
qui nous donne une bonne idée de la
vision du gouvernement par rapport aux groupes communautaires. Ce qu'il disait…
«Au cours d'un bref point de presse,
il a suggéré que certains groupes communautaires pourraient par exemple prendre
le relais de certains services actuellement
dispensés par le ministère de la Santé et des Services sociaux. "Il y a
énormément d'organismes communautaires qui
peuvent fournir ces services, a dit M. [le ministre des Finances]. Ça coûte
moins cher quand il s'agit d'un réseau étatique. [Ce réseau] pourrait être capable d'aller dans des endroits plus
éloignés."» Il dit : «…[les] organismes communautaires
pourrait s'avérer plus flexible et moins coûteux pour l'État.»
Bref, ce qu'on pense : que notre vision des
groupes communautaires, c'est plutôt une vision de gens qui vont continuer comme ça, là, ils sont habitués à ne pas
être payés très cher, ils sont habitués à donner des services, à travailler
des grosses semaines,
bien on va les laisser comme ça, puis qu'ils livrent les services pour l'État,
ça coûte moins cher. C'est ça leur
vision d'un groupe communautaire : ce n'est pas des groupes qui peuvent
proposer des changements, amener des initiatives, non, ils sont là pour
livrer des services à bon marché. Et ça, ça me… je pense qu'il faut se… il faut
le dénoncer. Si on veut rapetisser l'action
communautaire autonome que… par de la livraison de services décidés par l'État,
je pense qu'on est en train de mettre
en danger beaucoup de… on est en train de mettre en danger certaines évolutions
par rapport au Québec, là, mettre en danger notre capacité d'inventer des
choses.
Et,
dans le projet de loi n° 10, le communautaire… Tous les groupes
communautaires qui sont venus en commission parlementaire se sont montrés très inquiets sur le projet de loi
n° 10. Il ne fait pratiquement pas mention du communautaire. La centralisation des pouvoirs risque d'aggraver
la sensibilité du réseau à la pression politique, et la composition des C.A. fera que des groupes importants, des groupes
communautaires ne seront plus représentés, dont effectivement le milieu
communautaire.
Le projet de loi
n° 10 n'accorde aucune place à la voix des représentants du milieu
communautaire pour faire valoir leur
identité, leurs façons de faire différentes. Aucun siège ni instance n'est
identifié dans la gouverne pour permettre aux milliers d'organismes communautaires de faire part aux décideurs des
besoins exprimés sur le terrain. Certains groupes recommandent, d'ailleurs, l'ajout à un article des
conseils d'administration prévu par le projet de loi n° 10 que des compétences communautaires des personnes élues
représentantes de la population parmi les membres indépendants des C.A. afin d'assurer la présence du milieu
communautaire, de l'idée du milieu communautaire au sein des décisions, des
instances décisionnelles.
L'aide
aux organismes communautaires pour des activités de perfectionnement — comme disait ma collègue — de leurs
membres serait approuvée ou accordée par décision du ministre. C'est assez
particulier que le ministre, du haut de sa sagesse, pourrait décider, dans tous les coins du Québec, décider, bien,
quel organisme communautaire a besoin de certains perfectionnements, d'activités de
perfectionnement. C'est lui qui autoriserait, qui pourrait autoriser tout ça,
alors que les groupes, de leur côté,
demandent que ces fonctions soient exercées par l'instance régionale.
Actuellement, c'est des agences.
On
ne peut pas faire abstraction des déclarations dans ce sens-là… de ce que le
ministre des Finances disait tantôt. Quand
on voit ce genre de décision qui est portée par le projet de loi n° 10, on
voit que le ministre des Finances, même s'il avait été corrigé par le
premier ministre, a quand même donné, je pense, la vraie ligne des visions… la
vision du gouvernement par rapport au soutien des groupes communautaires. Les
groupes communautaires craignent pour leur autonomie.
La mission des organismes ne pourra jamais répondre à ce type d'exigence
puisque sa raison d'être n'est pas celle
de fournir à la population les services relevant de la mission des
établissements, mais d'offrir des activités à partir de leur mission
propre et des besoins de la communauté au sein de laquelle ils oeuvrent.
Le premier ministre a
d'ailleurs rabroué son ministre, mais, comme je le répète, je pense que le
ministre avait donné l'heure juste. Il y a
beaucoup de… Puis il y a vraiment un danger. Les groupes communautaires vont
probablement essayer de faire des
contorsions pour essayer de… dire : On va livrer le service, on va essayer
de trouver du financement pour notre
mission autrement, on va essayer de… Mais, tranquillement, à force de faire ça,
ce qui va arriver, c'est qu'ils perdent
le focus sur leur mission, ils perdent… C'est des groupes qui pourraient être
amenés à perdre leur vocation
première, et c'est très dangereux. On
a vu beaucoup de groupes fermer leurs portes parce qu'on les poussait à faire certains services, mais en même temps on
coupait leurs budgets pour leur mission de base.
Puis ça, je pense
surtout aux groupes de défense des droits, qui effectivement viennent défendre
les droits des personnes, et ce n'est pas vu
souvent par le gouvernement comme une belle… comme une chose intéressante. Je me rappelle d'une
discussion avec le ministre de la Solidarité sociale, à l'étude des crédits, sur le financement des groupes de défense des droits, et le ministre me disait : Vous
ne trouvez pas que ces groupes, des fois, ils servent des fois à monter la tête
des gens, à leur dire qu'ils ont
droit à choses, mais pas vraiment… Il
voyait ces groupes-là comme des
groupes qui pouvaient pousser les gens à en demander plus puis peut-être
pas nécessairement pour les bonnes raisons. J'ai trouvé ça assez particulier. Et il y a beaucoup
de groupes, surtout actuellement, avec ce qu'on vit au Québec, il y a beaucoup de populations qui sont comme laissées pour compte. Et, s'il
n'y a pas de ces groupes qui viennent défendre leurs droits, qui va les défendre? Et je continue à dire — puis
on va le vérifier, dans la suite des choses pour le projet de loi n° 10 — qu'il
faut s'assurer de garder le tissu et l'activité
des groupes communautaires partout au Québec, dans toutes les
régions du Québec. Ce
sera de plus en plus, avec ce qui nous arrive… ce sera de plus en plus important
pour l'avenir des régions et la santé socioéconomique des populations.
Parlant
de régions, ce qu'amène aussi le projet
de loi, c'est une énorme
centralisation des pouvoirs. En vertu
des pouvoirs que lui consent le projet
de loi, le ministre
décidera désormais de la composition des conseils d'administration de tous les établissements. Il dressera
lui-même le profil de leurs membres, dits indépendants, et nommera lui-même l'ensemble
des administrateurs, tout en se
donnant le pouvoir de les démettre s'il le juge nécessaire. Un genre de
ministre omnipotent qui pourrait intervenir un peu partout puis qui aura
le pouvoir d'intervenir partout.
Pour
chaque établissement, il nommera également la personne qui présidera le conseil
d'administration, tout en se donnant,
d'une part, le loisir de la désigner plus d'une fois à cette fonction et, d'autre
part, le pouvoir de la renvoyer selon son
bon vouloir. Il procédera à la nomination du président-directeur général et du
président-directeur général adjoint, tout en se réservant le droit de le
mettre à pied s'il en décide ainsi.
Il
décidera de la structure organisationnelle. Il produira lui-même le plan
stratégique et non seulement imposera au
conseil d'administration de l'adopter en l'état, mais aussi le pouvoir
d'émettre toute directive portant sur les objectifs, et les orientations, et les actions de
l'établissement. Il aura le pouvoir de décider si les conseils d'administration
pourront se pourvoir de comités
consultatifs à des fins particulières, telle la représentation des régions
éloignées. Dans l'affirmative, il nommera lui-même les membres des
comités et pourra ultimement en déterminer les ordres du jour.
Ça, je pense,
entre autres, à tout ce qui est… Dans nos régions, on voit beaucoup… les
communautés se sont prises en main
pour monter des fondations. Il y a des familles qui se sont impliquées, il y a
des… Et l'avenir des fondations est beaucoup remis en cause. Les fondations sont
souvent liées à un CSSS. Actuellement, qu'est-ce qui va arriver avec la… plusieurs de ces fondations-là? C'est une question
qui pourrait se poser. Et, si la question se pose, comment on va faire pour déterminer qu'est-ce qu'on fait avec ça? On
pourrait mettre en place un comité. Mais le comité va être nommé par le ministre. Les objectifs de l'étude du comité,
c'est le ministre qui va décider, et il va suivre le processus jusqu'au bout.
Ça fait que, je trouve, encore là, le ministre se donne beaucoup, beaucoup,
beaucoup de pouvoirs.
Il pourra
juger de la qualité des corridors de services existants et exiger qu'ils soient
modifiés s'il considère qu'ils ne
sont pas adéquats. Plus encore, si les changements n'ont pas été exécutés à
l'intérieur d'un délai qu'il établira lui-même, il pourra les modifier ou en imposer de nouveaux. Il
fixera, sur la base de programmes-services, les enveloppes budgétaires des établissements et interdira toute permutation
des sommes prévues à ces enveloppes, qui pourraient prendre davantage compte de certaines particularités régionales. Il
assurera lui-même la coordination des activités des établissements au sein des
régions. Il déterminera lui-même s'il existe des difficultés d'accès aux
services dans des régions. Il établira lui-même les plans régionaux en
matière de planification de la main-d'oeuvre et du développement des ressources
humaines et décidera même si des activités
de perfectionnement du personnel et des membres du conseil d'administration…
comme il va le décider aussi pour les gens des groupes communautaires.
• (16 h 30) •
Le
gouvernement a fait le choix de la centralisation à outrance dans la
réorganisation qu'il a annoncée. Désormais, d'immenses pouvoirs et presque 50 % du budget de l'État québécois
seront concentrés entre les mains d'une seule personne, le ministre de la Santé et des Services sociaux du
Québec. Je le répète, je pense que ça vaut la peine : Désormais, d'immenses pouvoirs et presque 50 % du budget
de l'État québécois seront concentrés entre les mains d'une seule personne,
le ministre de la Santé et des Services
sociaux du Québec. La plupart des décisions seront reportées au niveau du
ministre et du ministère. Le risque
est grand, en effet, d'un effet
entonnoir, où les demandes vont se bousculer et leur traitement, retardé.
Exemple, on peut penser au financement des programmes
de perfectionnement professionnel provenant des organismes
communautaires qui devra dorénavant, comme je le disais tantôt, être approuvé
par le ministre.
Et il y a aussi un danger de politisation. Le ministre
nomme tout le monde, P.D.G., P.D.G. adjoints, tous les membres des C.A., et
tous les pouvoirs qu'accorde le projet de loi à une seule personne sans
garde-fou démocratique mèneront à une
politisation du système de santé et des services sociaux. Habituellement, dans plusieurs de ces organisations-là, c'est le Conseil des ministres qui
commande. Ça reste quand même que c'est le même parti politique, c'est le même gouvernement, mais au moins il y a quelques personnes autour de la table qui peuvent
remettre à l'ordre le ministre s'il veut trop prendre la place. Mais là,
non, il n'ira même pas, même pas devant le Conseil des ministres, il va décider
ça lui-même, dans son bureau, dans son
cabinet. Il va décider de nommer tout
le monde. Tout lui qui décide, des
pouvoirs omnipotents.
La question
d'indépendance du processus de nomination des membres du conseil d'administration est préoccupante, puisque les candidats seront recommandés au ministre
par un groupe d'experts dont les membres auront été eux-mêmes choisis
par le ministre sur recommandation d'un organisme reconnu en matière d'organisation
publique sur lequel le ministre aura lui-même jeté son dévolu. Dans un tel
contexte, les membres de conseils d'administration pourront-ils, oseront-ils manifester leur désaccord ou tout simplement émettre des commentaires critiques, par exemple, sur le plan
stratégique ou la structure organisationnelle
de leurs établissements alors que l'un et l'autre leur seraient imposés
en vertu d'une loi et sachant que le ministre
peut les démettre de leurs fonctions sans aucune formalité? Dans le même ordre
d'idées, le président-directeur général et
le président-directeur général adjoint, tous deux nommés par le ministre
en l'absence de processus connu de
sélection et d'évaluation et tous deux soumis à son arbitraire eu égard à
leurs emplois, pourront-ils, oseront-ils
émettre des réserves à l'égard des directives ou d'une orientation ministérielle? Le ministre reconnaît lui-même qu'il ne cédera jamais ces pouvoirs — c'est assez spécial — ne cédera jamais ces pouvoirs de cette ampleur à qui que ce soit,
même à son successeur.
La représentation citoyenne maintenant. Plusieurs
sont venus nous en parler. Le projet de loi évacue toute présence citoyenne des C.A. qui gèrent les établissements
de santé et de services sociaux. Elle crée un énorme déficit de représentation
citoyenne et sera indéniablement synonyme
d'une réduction du pouvoir et de l'influence des acteurs locaux sur la prise
de décision en matière de santé et de services sociaux pour la population et
les patients de leurs régions.
Ça me
rappelle une discussion qu'on a eue récemment sur les CLD, les centres locaux
de développement, et le ministre nous
disait que les bénévoles, les conseils d'administration, ça coûtait cher, ça
coûtait cher en papier et en imprimante.
C'est un peu la même chose. Ce qu'on vient nous dire, c'est : Trop de
monde qui viennent décider, trop de monde
qui viennent donner leurs opinions, ça ne fait que coûter cher et il faut aller
couper là-dedans. C'est du papier puis c'est...
Pourtant, c'est des gens qui veulent venir donner leurs points de vue, donner
leur temps, donner leurs visions de l'avenir de leurs communautés.
Au lendemain de l'adoption du projet de loi, le
ministre démettra en effet tous les membres bénévoles des conseils d'administration du réseau, et ils sont
plus de 3 000, pour les remplacer par des personnes qu'il aura lui-même
choisies et jugées plus compétentes. Il
fallait les voir, les gens de ces réseaux-là, venir en commission
parlementaire. Ils étaient vraiment
outrés et ils se sentaient... C'est comme si on leur disait, si le ministre
venait de leur dire : Tout le monde, vous êtes des incompétents, vous n'avez pas d'affaire là. Si le réseau
ne va pas bien, c'est à cause de vous autres. Et c'est des gens impliqués dans
plusieurs CSSS un peu partout. C'était assez triste à voir, et c'étaient des
gens qui en avaient gros sur le
coeur. Il s'agit là d'un message inacceptable qu'on a envoyé à des gens qui se
sont dévoués et ont travaillé pendant des
années dans leur milieu respectif pour créer des réseaux locaux de services qui
fonctionnent bien, dans une large majorité des cas, et qui permettent de mieux répondre aux besoins des patients et
de la population. À terme, cela ne pourra qu'entraîner une perte
d'engagement des communautés locales envers le système et pourrait même
donner... sonner le glas de la participation citoyenne en santé et services
sociaux.
Même
chose pour les comités d'usagers. Le projet de loi n'aborde le statut des
comités d'usagers qu'à l'égard de la
composition du conseil d'administration du CISSS. Le projet de loi prévoit que
le ministre nommera un usager — un usager — au conseil d'administration des CISSS. Il
choisira parmi une liste de quatre noms proposés par le comité des usagers du CISSS, dans le fond. Le nombre
d'usagers au conseil d'administration est réduit de deux à un. De plus, c'est
le comité des usagers qui désigne actuellement ces deux personnes, sans
que ces derniers n'agissent au conseil comme représentants du comité. Ils
pouvaient quand même véhiculer... comme il y avait un lien avec le comité, ils
pouvaient quand même véhiculer au conseil
d'administration l'ensemble des préoccupations des usagers et s'assurer que
l'établissement agisse dans l'intérêt
de ces derniers. Une réduction de moitié dans la représentation des usagers au
conseil d'administration associée à
une nomination par le ministre, qui échappe complètement au comité des usagers,
affaiblit clairement l'influence déjà
très modeste des usagers au conseil de chacun de ces établissements. Le projet
de loi ne permet certainement pas d'anticiper
que les conseils d'administration seront davantage préoccupés par les droits des usagers. La seule
véritable imputabilité des conseils d'administration sera envers le ministre, toujours
envers le ministre, qu'envers le ministre. Les membres qu'il nommera à partir d'une liste fournie
par le comité des usagers seront donc imputables au ministre,
non au comité. Plusieurs
groupes ont demandé qu'au moins un représentant en santé et un autre aux services sociaux y soient nommés d'office. Le ministre a exploré à plusieurs
occasions la possibilité que les usagers choisissent entre une place au C.A. ou la création d'un comité national des
usagers — là, je
parle national — qui
éliminerait potentiellement les C.A. des usagers un peu partout. La plupart des
groupes étaient pris au dépourvu, et plusieurs ont dit qu'ils trouvaient cela
gros, un comité national.
En
conclusion, ce qu'on voit, c'est tous les pouvoirs aux mains du ministre et une
centralisation à outrance. Je pense qu'il faut le dire tout haut et il
faut le dire à tout le monde. Merci.
Le
Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député de
Rimouski, pour votre intervention. Et, pour la poursuite du débat, je reconnais maintenant M. le député de
Bonaventure pour son intervention sur le projet de loi... sur le
principe du projet de loi n° 10. M. le député de Bonaventure, à vous la
parole.
M. Sylvain Roy
M. Roy :
Merci, M. le Président. J'ai le goût de débuter par une réflexion, bon, d'une
professionnelle de la santé d'un CSSS
chez nous qui nous a envoyé ça en vrac, certaines réflexions, commentaires par
rapport au projet. Donc, ça vient du terrain, ça vient de ceux et celles
qui sont directement touchés par le projet de loi.
Donc, c'est
une amie médecin. Actuellement, elle travaille sur un territoire de
200 kilomètres, mais, avec le projet de loi, son terrain de jeu augmente à 600 kilomètres. Donc, elle
prévoit des déplacements sur un territoire de 600 kilomètres. Et sa réflexion, c'est : Elle va travailler
où? Va-t-on lui imposer de travailler à Sainte-Anne-des-Monts si elle demeure
à Maria ou à Carleton? Et elle et sa famille
ne savent pas s'ils vont être pris pour déménager. À moyen et à long terme, ça
peut empêcher de nouveaux médecins de
venir s'installer en Gaspésie. Donc, première réflexion des
professionnels : instabilité par rapport aux conditions de travail.
Avec la
centralisation et la politisation des décideurs, où sera la voix de la santé
publique? Encore une réflexion.
Aujourd'hui,
les administrateurs des CSSS sont bénévoles. Avec la loi, les administrateurs
nommés seront payés. Où est l'économie?
Un aspect que
je n'avais pas vu : beaucoup de professionnels de la santé ont certains
égos. Éloignés d'un pouvoir décisionnel,
ça aura comme conséquence une prise de pouvoir illégitime de professionnels à
l'interne. Donc, il va y voir des petites guéguerres pour prendre le
contrôle de certains processus décisionnels à l'intérieur du système de santé.
La prise de
décision est plus éloignée du patient. La distance est une barrière supplémentaire
à la discussion. Cela se transformera
en bureaucratie et de temps d'attente pour la prise de décision. Sur le
plancher, plusieurs travailleurs sont d'avis
que le ministre fait tout pour que le système de santé ne fonctionne plus et
ainsi justifier l'ouverture au privé. Les rencontres entre intervenants, décideurs, C.A., beaucoup plus de
déplacements, moins de qualité de vie, plus de frais. Bref, plus de gens
à payer pour se promener.
Et je vous
rappelle que c'est une réflexion d'une amie médecin qui travaille dans un CSSS.
Le CSSS est intégré dans la
communauté, peut travailler avec le monde municipal et la communauté sur la
prévention. Ça existe, la prévention. Elle
peut partager son expertise seulement si elle est décentralisée. Les besoins ne
sont pas tous les mêmes en Gaspésie. Le
ratio prévention versus traitement curatif sera-t-il adapté en fonction des
problématiques sociosanitaires vues sur le terrain?
Les gens
n'aiment pas se faire imposer des choses. Ils ont tendance à se braquer, et ce
n'est pas productif. Au contraire, si
on demande leurs points de vue… quand on demande leurs points de vue, les gens
sont stimulés, ils deviennent des acteurs intéressés au projet.
Autre
réflexion, M. Barrette et M. Couillard, quand ils étaient médecins, devaient
aimer le fait que les décisions soient
prises rapidement. Ils devaient vouloir que le pouvoir décisionnel soit proche
d'eux. Donc, réflexion d'acteurs du domaine de la santé.
• (16 h 40) •
J'aimerais
peut-être faire une petite introduction sur les grands déterminants de la
santé, juste pour se rappeler que le modèle, je dirais, hospitalocentriste n'est pas le
seul déterminant de la santé d'une population, il y a d'autres choses.
Les quatre grandes variables qui déterminent
l'état de santé des individus sont les suivantes : premier déterminant,
les caractéristiques biologiques de l'individu.
C'est rattaché à la constitution systémique, organique, physiologique et
génétique. On ne peut pas changer
grand-chose, à moins de subir une manipulation génétique, mais ça, c'est un des
déterminants sur lequel on a le moins de contrôle.
Le
deuxième déterminant de la santé, un des plus puissants, ce sont les habitudes
de vie. Ça implique des décisions des
individus qui ont, à court et à long terme, des incidences sur leur propre
santé et celle de leurs proches. On parle de l'alimentation, l'activité
physique, le sommeil, consommation de drogue et d'alcool, comportement de la
route.
Troisième
déterminant : l'environnement. On a l'environnement physique et l'environnement
social. Au niveau de l'environnement
physique, on a le quartier, qualité de l'eau, de l'air, le milieu de travail,
le bruit, l'appartement, etc. Et l'environnement
social : la culture et ses représentations, le réseau social individuel et
familial. C'est prouvé qu'un individu qui
a un réseau social riche vit... riche dans le sens «diversifié», avec des gens
avec qui on a des discussions de qualité, de l'entraide, c'est prouvé que ces gens-là vivent plus vieux, en meilleure
santé, que des gens qui sont isolés. La vie communautaire, le statut social. Le statut social, en général, nous
donne un indicateur sur l'«empowerment», la capacité de prise en main de l'individu, s'il a vécu ou non
des réussites et il a été exposé à des réussites dans sa vie. Composition
sociodémographique du milieu. C'est sûr que, quand on vit dans un milieu où il
y a plus de personnes âgées, bien, les problématiques
de santé sont différentes. Situation économique fondamentale, contexte
politique. Bref, ce sont des éléments qui contribuent à façonner le
milieu social dans lesquels évoluent les personnes, imposent des contraintes à
la santé.
Donc,
l'environnement politique, par exemple, dans un contexte d'austérité crée un
climat quand même qui vient affecter
la santé mentale de certaines personnes. Mais là on va faire un calcul. Selon
nous ou selon certains spécialistes, les
gens qui ont perdu leurs emplois vont avoir... ils vont réquisitionner de
l'aide. Ils vont être en état de détresse mentale puis ils vont réquisitionner des soins. Puis on
peut même voir... Bon, le fait de vivre de l'incertitude, on peut voir même des
maladies émerger. Donc, le calcul n'est pas
compliqué. On pensait sauver 220 millions en santé publique, mais le
climat d'austérité provoqué et entretenu avec la détresse et l'incertitude que
ça crée chez nombre d'individus vont faire en sorte de réquisitionner des soins de santé qui vont
coûter cher, et ça, c'est un calcul qu'on pourra faire éventuellement. Donc,
le troisième, c'est l'environnement.
Et le quatrième
déterminant de la santé, c'est l'organisation des soins de santé. Ça correspond
donc à l'organisation des soins de
santé et à la mise en place de services et d'institutions qui permettent
l'accès à un nombre suffisant de professionnels
pour répondre aux besoins des individus. Là, on parle de la nature, de la
quantité, de la qualité, de l'agencement des soins, rapport entre la population et les ressources engagées dans
la distribution des soins. Donc, ça touche la pratique médicale, les soins infirmiers, les hôpitaux, les
services pharmaceutiques, d'hygiène publique, santé communautaire, etc.
Quatre
déterminants, mais qui n'ont pas le même impact sur l'espérance de vie de
l'individu. Ici, j'ai un graphique qui
a été fait aux États-Unis, qui traite des déterminants de la santé et de
l'affectation des ressources. Ce que ça veut dire, c'est : Quel est l'impact des investissements
en santé sur l'amélioration de l'espérance de vie des individus? Donc, on
parle ici… Le graphique est divisé en
quatre. On parle de la biologie humaine, l'environnement, style de vie puis
système de soins : Où l'État met-il son argent dans le système...
dans l'amélioration de la santé? Comment l'État affecte ses ressources pour
améliorer la santé? Et quel impact ça peut avoir?
Premier déterminant : biologie humaine. On
nous dit qu'il y a 8 % des ressources qui ont une contribution potentielle
de 27 % d'amélioration ou de réduction de la mortalité, chez 27 % des
cas. On met 1,6 % du budget dans l'environnement, la qualité de l'environnement. Pourtant, l'environnement augmente de 19 %...
contribue à 19 % à la réduction de la
mortalité. Le style de vie. Actuellement, dans la prévention, dans la volonté
d'améliorer l'alimentation, par exemple,
selon le graphique qu'on a ici, on met 1,5 %, mais ça améliore... Dans
43 % des cas, il y a une réduction de la mortalité. Et le système
de soins réquisitionne 90 % des budgets mais n'apporte une réduction de la
mortalité que dans 11 % des cas. Donc,
ce que ça veut dire, c'est que les investissements sont orientés non vers la
prévention, non vers, bon, le style de vie, l'environnement, mais
vraiment vers le système de soins, mais la contribution réelle à la réduction
de la morbidité est minimale par rapport aux autres déterminants, et ça,
je crois que c'est important de le rappeler, parce que ça fait partie quand
même de la discussion que nous allons poursuivre.
Si on revient
au projet de loi, les arguments du gouvernement, on parle de réduire le nombre
d'établissements de 182 à 28. Donc,
on parle d'une réduction de la bureaucratie. On parle de 172 rapports
annuels de gestion et états financiers en
moins à chaque année. On parle d'économies de 220 millions, d'ici 2017, en
coupant 1 300 postes de cadre par attrition, en abolissant les
agences et en coupant dans les budgets de santé publique.
Et je réitère
ce que j'ai dit tout à l'heure, cette pseudo-économie là va être rattrapée par
le malaise généralisé et la détresse
qui est provoquée par les mises à pied, par de l'incertitude et par des gens
qui perdent leurs emplois. Il y a un sociologue
qui disait : «L'espérance de vie est directement reliée à l'espérance en
la vie.» Si j'ai de l'espoir en la vie, je vais avoir une meilleure espérance de vie, donc je suis dans une
position où je crois que je vais avoir ma place dans la société, la société va être inclusive, et le
discours est positif, on est dans une société où ça va bien. Le discours
actuellement, il est très négatif.
Donc, quelles
sont les problématiques qui sont soulevées par le projet? Bon, c'est évident
qu'on parle de centralisation. Mais,
en vertu des pouvoirs que lui consent le projet de loi, le ministre décidera
désormais de la composition des
conseils d'administration de tous les établissements, dressera lui-même le
profil de leurs membres dits «indépendants» et nommera lui-même l'ensemble des administrateurs, tout en se donnant
le pouvoir de les démettre s'il juge nécessaire. Donc, il peut les
mettre à la porte quand il veut, il les nomme, et ils lui sont redevables.
On n'est pas
dans une posture où il va y avoir de la réquisition d'une spécificité d'offre
de soins pour un milieu, bon, qui
demande des soins particuliers, là. Donc, ce que ça veut dire, c'est que les
structures d'opposition, les structures de négociation, les structures de revendication sont anesthésiées,
annihilées par la possibilité d'être assis sur des sièges éjectables.
Donc, le courant va être juste dans un sens, il ne sera pas dans deux sens.
Et là on a une méchante problématique, parce que
le Québec, ce n'est pas juste, je dirais, une catégorie de problématiques,
c'est des catégories de problématiques. Le Québec vit… Bon, le Québec, dans
toutes ses régions, vit différentes réalités
sociosanitaires : l'espérance de vie est différente, les revenus sont
différents, la consommation de drogue, la pédophilie, mettez-en, toutes les problématiques
qui existent ne sont pas pareilles sur tout le territoire. Et là il va falloir qu'on ait des gens qui soient en mesure de
négocier une spécificité d'offre de service, mais ils ne pourront pas le faire
parce que, s'ils se mettent le ministre à
dos, ils perdent leurs jobs. Donc, perte d'efficience de l'offre en santé
publique au Québec dans un contexte comme celui-là.
• (16 h 50) •
Mais
ça, c'est grave, parce que les coûts de santé vont exploser, et la qualité de
l'offre va se détériorer, et là on va
dire : Oh! il faut aller vers le privé, ce n'est plus bon dans le public.
Ce n'est pas bon. C'est une vieille stratégie, là, c'est… Écoutez, ce n'est pas
dur à décrypter, qu'il y a une volonté, à quelque part, je dirais, de
déstabiliser le système pour en faire
un système peu efficient et par la suite de proposer des solutions :
Regardez, vous allez voir, dans le privé,
ça va bien aller. Écoutez, je pense que, ça, on le voit.
Bureaucratie.
Le ministre nous dit que le simple fait d'abolir les agences
permettra de réduire la bureaucratie. Or, l'abolition des agences ne
règle pas tout. En fait, si l'on s'en remet à la littérature scientifique sur
le sujet, tel que formulé actuellement, le projet risque de produire
l'effet inverse. Donc, on va... Parce que, là, on parle d'un ministre qui veut contrôler l'ensemble de l'appareil, donc il va y
avoir des mesures de contrôle. Et qui va appliquer les mesures de contrôle?
Les fonctionnaires. Donc, on est dans une situation
où on peut voir exactement l'effet inverse, bon, se manifester, par la
volonté d'avoir des redditions de comptes, des rapports, etc., parce qu'on ne fait pas confiance aux administrations locales.
Politisation
de la machine. Le ministre nomme tout
le monde : P.D.G.,
adjoints, tous les membres du C.A., et tous les pouvoirs qu'accorde le projet
de loi à une seule personne sans
garde-fou démocratique mèneront à une politisation du système de santé et des services sociaux. Donc, comme je le disais tout à l'heure, dans un tel contexte, les membres d'un C.A. pourront-ils ou oseront-ils manifester leur désaccord ou tout simplement émettre des commentaires critiques par rapport à un plan
stratégique ou une structure
organisationnelle de leurs établissements, alors que l'un et l'autre leur seraient imposés en
vertu de la loi et sachant que le ministre
peut les démettre de leurs fonctions sans aucune formalité? L'application de programmes mur à mur, c'est bien facile, mais ce n'est pas efficient
si on ne comprend pas la nature même, je dirais, du climat
sociosanitaire ou des enjeux sociosanitaires.
Transparence.
L'article 161 soulève beaucoup de préoccupations. Alors que la portée du premier alinéa de cette disposition s'avère substantielle en prévoyant que «le gouvernement peut, par règlement, prendre toute mesure nécessaire ou utile
à l'application de la présente loi ou à la réalisation efficace de son objet»,
son second alinéa soustrait un tel règlement à l'obligation de prépublication
et au délai d'entrée en vigueur prévus aux articles 8 et 17 de la Loi sur
les règlements. Il autorise, de plus, que le gouvernement... de
plus, le gouvernement à édicter un règlement à portée rétroactive. Quelque chose, ça! On publie un règlement, mais il
est rétroactif, là, il rentre en vigueur trois semaines, un mois, deux mois
avant qu'on le publie. Donc, ça peut avoir
des effets assez pervers. Cela constitue une entorse aux principes de
prépublication des règlements et de transparence de l'action gouvernementale.
Donc, on peut pénaliser énormément de gens avec ces affaires-là, puis c'est... Donc, c'est encore une fois un genre de
déni de l'état de droit, hein, puis des règles démocratiques qu'on se
donne, de transparence, d'équité, de prévisibilité. C'est dur à battre.
Représentation
citoyenne. Le projet de loi évacue toute présence citoyenne des C.A. qui
gèrent les établissements de
santé et de services sociaux. Il crée un énorme déficit de représentation
citoyenne et sera indéniablement synonyme d'une réduction du pouvoir et de l'influence des acteurs locaux sur la
prise de décision en matière de santé et de services sociaux pour la
population et les patients de leurs régions. Un système de santé, ce n'est pas
une affaire virtuelle, désincarnée, ça existe dans un milieu où il y a des gens
qui ont fait du bénévolat, qui ont soutenu le système de soins ou, bon, les centres hospitaliers, etc., parce
que, bon, ils ont été reconnaissants d'avoir été sauvés du cancer, etc. Et là
on exclut la population au processus décisionnel de l'offre de soins. Qui
va s'occuper des levées de fonds? Vous venez de... Écoutez, là, on vient d'anesthésier la volonté de
gens de s'impliquer bénévolement auprès du système de santé pour soutenir
leurs institutions, pour soutenir des levées
de fonds et permettre à des projets concrets de se réaliser. Donc, c'est du
dénigrement.
Visée
hospitalocentriste du projet de loi. La fusion d'établissements dans les
missions sont différentes... dont les missions
sont différentes favorise certaines
missions au détriment d'autres. Des grosses structures en santé et services
sociaux créent plus de bureaucratie qu'ils ne l'allègent et augmentent
l'hospitalocentrisme. Plusieurs groupes se sont montrés très inquiets quant à
la prévention de la santé publique, à la protection de la jeunesse, à la
réadaptation en dépendance, aux services pour les personnes ayant une
déficience physique, intellectuelle ou un trouble du spectre de l'autisme. Donc, lorsqu'on oriente l'offre de
soins vers le système hospitalier, vers la réquisition d'arsenal
thérapeutique pour guérir, et qu'on
ne fait pas de prévention pour empêcher la maladie d'apparaître, bien, les
coûts explosent, c'est clair et net.
Donc, on s'en va vers une médecine technico-scientifique où la machine…
l'immense technologie va être déployée pour soutenir la
guérison.
J'ai
encore une autre page, ce n'est pas drôle puis… — 15 secondes? C'est bon. Bien, écoutez,
Merci, M. le Président. Je tiens quand
même à dire que c'est un des projets
les plus dangereux pour l'avenir de la santé publique au Québec,
puis il va falloir que les gens se mobilisent. Merci.
• (17 heures) •
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, M. le député de Bonaventure, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat, toujours
sur le même projet
de loi, le projet de loi n° 10, le principe, je cède
maintenant la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. À vous la
parole, Mme la députée.
Mme Carole Poirier
Mme
Poirier : Alors, merci, M. le Président. Alors, à mon tour
d'intervenir à l'étape de l'adoption de principe du projet de loi n° 10,
Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des
services sociaux notamment par l'abolition des agences régionales.
Alors, M. le Président,
d'entrée de jeu, puisque je suis députée de la région de Montréal, je vais à
peu près concentrer mon propos sur Montréal,
mais particulièrement sur l'est de Montréal, parce que le projet de loi n° 10
vient créer cinq centres intégrés de santé et de services sociaux à
Montréal : un pour le territoire de l'ouest de l'île, un pour le centre de l'île, un pour le sud-est de l'île,
un pour le nord-est de l'île et l'autre pour l'est de l'île de Montréal,
territoire pour lequel mon comté est concerné.
M. le Président, pour être capable de parler de
ce territoire-là, je ferai référence à un document que le CSSS Lucille-Teasdale a produit dans le cadre des
travaux que nous menons dans l'est de Montréal, dans un comité qui s'appelle
le Comité de développement de l'Est de
Montréal, qui est d'ailleurs un comité dirigé par la députée de
Pointe-aux-Trembles, et qui réunit
environ 80 acteurs socioéconomiques, tant du milieu institutionnel, du
milieu communautaire, des affaires, syndicales,
et dans lequel, je dirai, j'ai un sous-comité de travail qui s'appelle qualité
de vie. Et, dans ce comité, on s'est donné
comme mandat de faire le portrait de la santé dans l'est de Montréal. Alors, ça
nous a permis de faire le portrait pour
les territoires visés, entre autres dans le territoire du CSSS de… du futur
CSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal, pour les CLSC Mercier-Est—Anjou,
Saint-Léonard, Saint-Michel, Hochelaga-Maisonneuve, Olivier-Guimond,
Rivière-des-Prairies et Pointe-aux-Trembles. Parce que ce sont ces
territoires-là qui seront visés dans le CISSS de l'est de Montréal.
Vous
savez, ce CISSS là, selon le projet de loi, va regrouper des institutions aussi
importantes que l'Institut Philippe-Pinel de Montréal, le Centre de santé et de services sociaux de la
Pointe-de-l'Île — donc le
CLSC Pointe-de-l'Île — l'Institut universitaire en santé mentale de Montréal — donc,
pour le commun des mortels, Louis-H.-Lafontaine — l'Hôpital Santa Cabrini, l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, le
CLSC Saint-Léonard—Saint-Michel…
excusez-moi, le CSSS Saint-Léonard—Saint-Michel, le CSSS Lucille-Teasdale, l'Institut
canadien-polonais du bien-être ainsi que le Centre jeunesse de Montréal. Bon, on nous dit qu'il y
avait des discussions concernant le Centre jeunesse de Montréal, on va laisser aller. Et dorénavant l'ensemble de ces
institutions se nommeront le Centre intégré de santé et de services sociaux
de l'Est-de-l'Île-de-Montréal.
Et on nous dit que cet établissement, ce nouveau
CISSS aura pour objet d'exploiter :
«Un centre
local de services communautaires — il y en a… je vous ai fait la liste, il y en
a déjà cinq sur le territoire;
«Un centre hospitalier appartenant à la classe d'un
centre hospitalier de soins généraux et spécialisés — l'Hôpital Santa Cabrini et l'Hôpital
Maisonneuve-Rosemont répondent à ce critère;
«Un centre hospitalier appartenant à la classe d'un
centre hospitalier de soins psychiatriques — alors,
Louis-H.-Lafontaine y répond et l'Institut Philippe-Pinel aussi;
«Un centre de protection de l'enfance et de la
jeunesse — alors,
c'est le Centre jeunesse de Montréal;
«Un centre d'hébergement et de soins de longue durée — on en a pas mal plus qu'un dans notre
territoire, alors ça veut dire qu'on va regrouper la gestion de
l'ensemble de ces centres d'hébergement, ces CHSLD, comme on appelle;
«Un
centre de réadaptation appartenant à la classe d'un centre de réadaptation pour
les jeunes en difficulté[...] — alors, c'est Gabrielle-Major;
«Un centre de réadaptation appartenant à la classe
d'un centre de réadaptation pour les mères en difficulté d'adaptation.»
Et le territoire, c'est celui de
Rivière-des-Prairies—Mercier-Est/Anjou—Pointe-aux-Trembles/Montréal-Est,
Saint-Léonard—Saint-Michel,
Hochelaga-Maisonneuve—Olivier-Guimond
et Rosemont.
Alors, il faut
savoir de qui on parle, de quoi on parle pour être capable de savoir à qui cet
organisme-là, dorénavant, va s'adresser. Alors, au niveau
statistique, M. le
Président, eh bien, ce territoire-là,
là, il est composé, entre autres, de 37 %
des familles avec enfants
monoparentales. C'est une donnée qu'il faut prendre en compte parce que, dans
l'offre de services, il va falloir en
tenir compte. D'ailleurs, sur ce territoire-là, en 2011, il y a eu près de
8 000 naissances — c'est un territoire en explosion au niveau des naissances — comparativement à 23 000 pour
l'ensemble de l'île. Alors, un quart des naissances ont eu lieu sur le
territoire de ce futur CISSS.
Au niveau de l'espérance
de vie en bonne santé sur ce territoire, quant à la moyenne montréalaise, pour
un homme, c'est 65 ans; pour une
femme, 67 ans. L'espérance de vie en bonne santé. Eh bien, imaginez-vous
que, dans Hochelaga-Maisonneuve, ce
n'est pas 65 ans, l'espérance de vie en bonne santé, c'est 59,8 ans,
c'est près de 60 ans. Alors, c'est cinq ans de moins, cinq ans et demi de moins qu'on va vivre en bonne santé dans
Hochelaga-Maisonneuve pour un homme. Et, pour une femme, c'est sept ans de moins, sept ans de moins. Alors, ce
n'est pas un débat de structure, M. le Président, qu'on a besoin, c'est
des soins sur notre territoire.
Au niveau de
l'espérance de vie à la naissance, alors un bébé qui naît actuellement dans
Hochelaga-Maisonneuve sur le
territoire de Rosemont, sur le territoire de Saint-Léonard, eh bien, ça veut
dire, sur une moyenne montréalaise pour les hommes de 79,8 ans, eh bien, sur le territoire…
particulièrement dans Hochelaga-Maisonneuve, c'est deux ans de moins. C'est deux ans de moins pour un homme et trois ans
de moins pour une femme. Alors, c'est des données qui parlent, M. le Président.
Entre autres, dans l'enquête qu'on appelle
l'enquête Topo, qui y va sur des particularités de dynamiques différentes en lien avec des problématiques,
alors, quand la moyenne montréalaise est de 6,8 sur les troubles de l'humeur
pour les 15 ans et plus, bien, sur le
territoire de Lucille-Teasdale, qui est Hochelaga-Maisonneuve‑Rosemont,
c'est 8,3, nettement supérieur. Quand
au niveau des maladies cardiques, pour les 45 ans et plus, c'est 13,9 à
Montréal, eh bien, c'est 16,7 à
Pointe-de-l'Île, ce qui est Pointe-aux-Trembles. Alors, sur ce territoire-là,
M. le Président, il y a des problématiques importantes et il y a un besoin
de services important.
Je vais continuer
la statistique parce
qu'il faut savoir de quoi on parle lorsqu'on regroupe des institutions. Alors, sur le territoire de ce futur CISSS — et je vous fais la liste du nombre
d'intervenants communautaires — il y a cinq organismes en alcoolisme,
toxicomanie et autres dépendances; un pour le cancer; 11 centres de femmes; 12,
communautés culturelles — des organismes qui s'adressent aux
communautés culturelles; six qui s'occupent de contraception, allaitement,
périnatalité; 10 qui s'occupent de
déficience intellectuelle; neuf, de déficiences physiques; 30, jeunesse,
maisons de jeunes, maisons d'hébergement communautaires pour les jeunes; 22 organismes
s'occupent de maintien à domicile; trois maisons d'hébergement pour
hommes en difficultés; un organisme de justice alternative; 14 organismes pour
les personnes démunies; 22 organismes en
santé mentale; trois en santé physique; un en troubles envahissants du
développement; et trois pour le VIH-sida.
Alors, M. le
Président, dans cette réorganisation, qui est, finalement, un pieux mensonge,
il faut le dire, puisque le titre de
la loi, qui nomme… qui me semble être une aberration… On vient dire ici
l'abolition des agences. Quand je remplace une agence à Montréal par
cinq CISSS, il me semble que je ne viens pas de réduire la structure, je viens
de l'augmenter parce que cinq miniagences au
lieu d'une grosse agence, ça demeure des agences. Et actuellement, sur le
territoire de Montréal, celui qui décide des
budgets pour le programme de soutien aux organismes communautaires, c'est
l'agence de Montréal, qui répartit les
budgets à travers la ville. Alors, je comprends que, dorénavant, ça va être
cinq CISSS qui vont répartir
l'enveloppe qu'un faisait présentement. Donc, on vient de multiplier la
structure d'une organisation en cinq organisations. Alors, qu'on ne
vienne pas me parler d'économies, d'efficacité et de rentabilité.
En plus, M.
le Président, vous savez, il y a des organismes là-dedans… Et je vais prendre
l'exemple de la Fondation de la
Visite. Fondation de la Visite est un organisme qui opère sur l'ensemble du
territoire de Montréal, organisme reconnu au PSOC, mais qui ne reçoit d'argent actuellement. Parce que son siège
social est dans Montréal-Nord, on ne reconnaît pas le fait qu'il offre des services, que ça soit à NDG, que ça soit
dans Hochelaga-Maisonneuve, à Saint-Michel, et c'est un organisme de mères visiteuses et de pères
visiteurs, et qui s'adresse tout particulièrement aux communautés culturelles dans un souci d'intégration. Ils font un travail
magnifique, M. le Président, mais à qui va s'adresser, à qui va s'adresser
la Fondation de la Visite pour avoir son
programme de soutien aux organismes communautaires? Est-ce que, dorénavant,
il va s'adresser au CISSS de l'Ouest-de-l'Île pour NDG, au CISSS du
Centre-de-l'Île pour Saint-Michel, au CISSS de l'Est-de-l'Île pour Hochelaga-Maisonneuve? Alors, on ne sait plus. On ne
le sait pas parce qu'on n'a pas eu d'indication là-dedans qui nous permettra de dire à un organisme communautaire :
Bien, toi, ta demande, dorénavant, elle sera traitée par le CISSS de l'Est-de-l'Île, mais avec les
crédits seulement que de l'Est-de-l'Île, et tu devras multiplier tes demandes dans chacun des
CISSS. Efficacité égale zéro, M. le Président. Zéro. Zéro plus une barre.
Dans un
deuxième temps, pour continuer le portrait que je vous élaborais, il faut
regarder ça veut dire quoi en termes d'argent, tout ça. Alors, nous, chez nous,
dans l'est de Montréal, je vous ai dit, au niveau du CLSC, du territoire
du CSSS actuel, CSSS qui disparaît pour
dorénavant s'appeler un CISSS, une miniagence — il faut vraiment l'appeler comme ça — alors, au niveau des dépenses par programme
service, au niveau du CSSS Saint-Léonard—Saint-Michel, on parle de 58 millions. Au niveau de Lucille-Teasdale, 141 millions.
Au niveau de Pointe-de-l'Île, on parle de 102 millions. 300 millions
qui sont investis en santé par ces trois territoires-là.
En plus de
ça, M. le Président, on a les institutions publiques :
l'Hôpital Santa Cabrini, 102 millions
de budget; Hôpital
Maisonneuve-Rosemont, 325 millions. L'Hôpital Rivière-des-Prairies, on ne
l'a pas vue là-dedans, on ne sait pas où
elle est, celle-là. Elle n'est pas dans l'est. Pourtant, elle est située dans
l'est, mais elle n'est pas dans le territoire. Et pourtant elle, elle a un budget de
34 millions. L'Institut Pinel, qu'on a vu, qui, lui, était là, a un budget
de 42 millions; et Louis-H.-Lafontaine,
142 millions. Ce qui fait que, M. le Président, là, c'est autour… au
niveau des institutions, près de 700 millions.
• (17 h 10) •
Ce qui veut
dire que, sur le territoire de l'est, là, c'est 1 milliard de dollars que
cette nouvelle organisation, cette miniagence…
le CISSS va gérer 1 milliard de dollars en services de santé. Et là mon
inquiétude, M. le Président, quand il
y a 1 milliard sur la table, qu'il y a l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont sur
le territoire… Vous savez, M. le Président, l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, ça dessert 600 000 personnes dans
l'est. Ce n'est quand même pas rien. Ici, à Québec, ils sont 600 000, puis, des
Maisonneuve-Rosemont, ils en ont au moins quatre. Nous, dans l'est, on en a une
pour le même territoire que la ville
de Québec. Équité régionale, on pourra repasser parce que l'Hôpital
Maisonneuve-Rosemont, elle est seule dans l'est de Montréal pour
desservir la population. Et ça, c'est la réalité de tous les jours.
Alors, il y a
1 milliard d'argent. Alors, dans une visée hospitalocentriste, il n'y a
pas, là, un danger, ne croyez-vous pas, que la direction de ce CISSS-là,
voulant, justement, mieux répondre aux besoins d'un hôpital comme celui de
Maisonneuve-Rosemont, vienne rediriger des budgets vers l'hôpital et moins vers
le citoyen? Parce que l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont
et l'Hôpital Santa Cabrini, eh bien, ça veut dire, au niveau des patients à
l'urgence en 2012‑2013, 100 000
patients. 100 000 patients, c'est ça que ça veut dire, ces deux
hôpitaux-là. Et ça veut dire entre autres, au niveau des séjours à
l'urgence, 32 heures de moyenne. Ça va bien. Tout va bien. Tout va bien. Ça va
très, très bien.
Mais ce qui
est pire, M. le Président, c'est les 65 ans puis les 75 ans. Alors, les 65 ans,
ils ont été 33 000 à venir à l'urgence
et pour une moyenne, à Santa Cabrini, de 29 heures d'attente et, à
Maisonneuve-Rosemont, 47 heures d'attente. Belles statistiques. Au niveau des 75 ans et plus, on parle
de Santa Cabrini, 30 heures, et Maisonneuve-Rosemont, 49 heures. Avez-vous pensé à ça? 75 ans, vous attendez 49
heures en moyenne. Ça veut dire qu'il y en a que c'est plus, M. le Président,
la moyenne, 49 heures.
Alors, au
niveau de l'approche qu'on a, il faut regarder aussi la livraison locale des
services parce que ce qu'on veut
maintenir, c'est des services à domicile, ce qu'on veut s'assurer, c'est qu'il
y aura des services à domicile encore et que ce n'est pas tous les sous qui vont être concentrés vers l'hôpital.
Parce que, sur notre territoire, nos CLSC actuellement, eh bien, ça a
été 1,2 million d'interventions, ce qui représente 42 % de toutes les
interventions de tous les CSSS de l'île de Montréal. 42 %, et pourtant on
n'est qu'un territoire sur cinq.
Au niveau des soins à domicile, c'est
800 000 interventions, ce qui représente 43 % des interventions sur l'ensemble du territoire de l'île. Alors, vous
comprendrez notre inquiétude. Et, quand je vous disais tout à l'heure que,
le territoire, on nous dit qu'il y aura un
CHSLD, eh bien, sur notre territoire, c'est 3 260 lits d'hébergement, et
ce ne sera qu'une organisation qui va
gérer les 3 260 lits. Alors, M. le Président, vous comprendrez mon
inquiétude, vous comprendrez que cette réforme, avec une miniagence dans l'est,
ne pourra pas répondre aux services de la population de l'est, les besoins
sont trop grands.
Et vous me
permettrez, M. le Président, d'être la porte-parole pour un organisme qui n'est
pas sur mon territoire, mais qui est
sur le territoire du CSSS Lucille-Teasdale, mais qui est surtout une
institution pour une communauté pour laquelle
je suis très proche et qui, dernièrement, m'ont nommée membre à vie de leur
communauté, et c'est la communauté polonaise.
Il y a, sur le territoire que je vous ai décrit, l'Institut canadien polonais,
qui est un CHSLD. Il me racontait, le directeur…
la directrice de ce CHSLD, à chacune des réformes, ils doivent venir ici pour
venir plaider leur différence. Et ce
n'est pas la première fois parce qu'à toutes les fois ils ont dû venir ici.
Alors, je veux leur dire que je vais me faire leur porte-voix parce que les instituts, particulièrement les CHSLD à
vocation suprarégionale, pour des communautés particulières, dans lesquels
on est capable, justement, de donner des soins dans la langue de ces gens-là,
qui sont des personnes âgées en perte
d'autonomie lourde, eh bien, je veux leur dire qu'il n'est pas question que
l'on laisse le ministre… Le ministre
qui veut centrer l'ensemble de l'organisation sur le coin de son bureau, il
n'est pas question de laisser à cette communauté… de les laisser en
danger.
Et, M. le Président, en toute fin, je vous
dirais ma crainte, ma crainte pour les services en français dans nos organisations parce que, on l'a vu, il n'y aura
pas de protection pour assurer les services en français lorsqu'il y une des
organisations qui bénéficie de l'exclusion de la loi sur la langue, et ça, M. le Président, c'est inadmissible, au Québec,
que l'on ne puisse pas se faire servir en français
dans nos institutions, institutions qui sont payées par l'ensemble
des taxes de tous les Québécois.
Je veux bien qu'une personne anglophone puisse recevoir des services dans sa
langue, mais une personne francophone doit être assurée de les recevoir
dans sa langue. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Je vous remercie, Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve, pour votre intervention sur le principe du
projet de loi n° 10. Je cède maintenant la parole à M. le député de
Bourget pour son intervention sur le même principe du projet de loi. M. le
député de Bourget, à vous la parole.
M. Maka Kotto
M. Kotto :
Merci, M. le Président. D'emblée, j'aimerais porter à votre attention la
contribution de notre collègue de Taillon,
qui, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé et
d'accessibilité aux soins, a fait un travail remarquable lors des consultations particulières sur le projet de loi
n° 10. Elle l'a fait avec rigueur et, surtout, dans le plus grand respect des opinions émises par les 59
groupes qui ont été défendues. Notre collègue a écouté attentivement, elle a
échangé et permis, par ses interventions
toujours judicieuses d'ailleurs, des éclairages nouveaux sur ce projet de loi.
Au total, ce sont 90 mémoires qui ont été reçus dans le cadre de ce projet de
loi, intitulé Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau
de la santé et des services sociaux notamment par l'abolition des agences
régionales.
Vous le
savez, M. le Président, la santé, et plus précisément l'accessibilité aux
services de santé, est une préoccupation majeure pour l'ensemble de la
population québécoise, un souci constant pour celles et ceux — environ
25 % de la population — qui n'ont pas de médecin de famille. Dans
quelques semaines, à la période des fêtes, en famille et entre amis, nous nous souhaiterons bonne santé, un
souhait sincère que nous répéterons et qui est, certes, le plus pertinent de
tous les voeux que nous puissions, dans ces
circonstances, offrir à nos proches et à nos concitoyennes et nos concitoyens.
La santé, c'est aussi une préoccupation au
chapitre budgétaire. Lorsqu'on sait que le secteur de la santé et des services sociaux accapare près de 43 % du
budget de l'État québécois, c'est plus de 30 milliards de dollars sur un
budget total de 74 milliards de dollars. Aussi, lorsqu'un
gouvernement ou un ministre de la Santé, en l'occurrence, décide de modifier l'organisation et la gouvernance du
réseau de la santé et des services sociaux, comme le stipule l'article 1 du
projet de loi, on s'attend à ce que tout
soit mis en place pour améliorer l'accès aux soins, non pour jouer dans les
structures et sûrement pas pour
abandonner tous les pouvoirs de ce vaste et complexe réseau entre les mains
d'un seul individu. Nous savions tous
que le député de La Pinière rêvait depuis longtemps d'être ministre de la
Santé, mais nous ignorions qu'il voulait être le ministère de la Santé.
• (17 h 20) •
M. le
Président, les grandes réformes sont généralement portées par une vision, par
une volonté réelle de répondre
aux attentes, voire aux aspirations de la population.
En fait, ce projet de loi n'est pas déposé pour les bonnes raisons. Il
s'inscrit plutôt dans la foulée des politiques
d'austérité du gouvernement libéral dans un cadre idéologique bien précis. Il ne s'incarne pas dans la définition même de ce
qu'est une réforme. Le petit Robert définit une réforme comme étant un
changement apporté dans la forme d'une institution afin de l'améliorer, d'en
obtenir de meilleurs résultats. En somme, M. le Président, dans une
réforme, on additionne, on ne soustrait pas.
Nous nous
attendions donc à un projet de loi qui favoriserait de meilleurs services, plus
d'accessibilité, comme le réclame la
population, plus de proximité avec le réseau de la santé et des services
sociaux et, bien sûr, plus en phase avec le milieu de la santé et la population. Sur ce point, notre collègue de
Taillon a bien résumé la situation en disant, et je la cite : «Ceux
qui soignent ou qui accompagnent les usagers, ceux qui protègent et défendent
les patients, les spécialistes en gouvernance
et en protection de la jeunesse, le milieu communautaire… toutes ces personnes
et tous ces groupes refusent d'adhérer
à cette réforme et sont inquiets des conséquences qu'elle aura. Le
ministre — a-t-elle
dit — doit
obtenir l'appui du milieu de la santé
et mobiliser le personnel plutôt que de leur imposer une réforme à laquelle ils
ne croient pas.» Fin de la citation.
Et ce sont
d'autres voix éclairées qui ont été parmi les plus virulentes, les plus sévères
vis-à-vis de cette réforme des
structures telle que proposée par le ministre de la Santé et les Services
sociaux. J'en citerai quelques-unes. D'abord, celle de l'ancien ministre libéral de la Santé M. Claude Castonguay, un
ex-collègue de cette Chambre qui n'a pas besoin de présentation. Voici ce qu'il disait le 3
novembre dernier dans une lettre au premier ministre du Québec au sujet de ce
projet de loi, et je le cite : «Selon
tous les témoignages, il ne fait aucun doute que le projet va déresponsabiliser
et démotiver tous ceux qui, à un
titre ou à — un — autre, travaillent dans des conditions déjà
difficiles à offrir les soins et les services dont la population a besoin. Il va aussi écarter des milliers de
Québécois et de Québécoises qui apportent leur aide au bon fonctionnement de nos hôpitaux. Enfin, les
changements proposés ignorent l'apport considérable et essentiel des organismes
communautaires et des aidants naturels
auprès des malades chroniques et des personnes aux prises avec des problèmes
de santé mentale.» Fin de la citation.
M.
Castonguay, un homme modéré, a aussi mentionné que ce projet de loi est «digne
des ex-régimes socialistes de
l'Europe de l'Est». C'est tout dire, M. le Président. Les propos de M.
Castonguay viennent rejoindre ceux de la Coalition des tables régionales d'organismes
communautaires — plus de
3 000 groupes oeuvrant majoritairement en santé et en services sociaux — qui se dit sceptique quant aux gains
possibles d'une telle réforme et s'inquiète des dérives pouvant en découler. Comme plusieurs, la coalition s'est
dite étonnée de découvrir l'ampleur des pouvoirs du ministre advenant
l'adoption de ce projet de loi tel que libellé.
Une
deuxième voix forte, celle de Me Jean-Pierre Ménard, un avocat spécialisé en
droit de la santé, va dans le même
sens, celui-ci soulignant dans Le Devoir du
29 octobre 2014 que «le réseau n'appartient pas au ministre»,
ajoutant qu'«il y a des valeurs et des manières de faire dans ce réseau
qui ne correspondent pas à l'approche coup de poing du ministre». Et je le cite : «Ça va beaucoup plus loin qu'une simple
réforme de structure», a-t-il déclaré. «On recule en matière de
transparence, d'indépendance du réseau et d'imputabilité…» Fin de la citation.
Quant
à la Fédération des médecins spécialistes, qu'a déjà dirigée le ministre de la
Santé, elle a qualifié ce projet de loi d'irrecevable, soulignant qu'un
projet de loi est censé améliorer le réseau, non le mettre en péril.
M.
le Président, au plan local, le conseil d'administration du Centre de santé et
de services sociaux Lucille-Teasdale, qui couvre une partie importante
de la circonscription de Bourget, la mienne, a fait parvenir ses
recommandations au ministre. Afin d'assurer
la transition souhaitée par le ministre, ce CSSS souhaite avant tout que les
nouvelles structures puissent maintenir la connaissance du milieu,
puissent assurer l'ancrage dans la communauté, un acquis important à conserver. Et le conseil d'administration
souligne, et je cite : «Le risque d'une perte de points de repère forgeant
l'identité, voire le sentiment
d'appartenance d'une population envers son établissement de santé et de
services sociaux, est un enjeu qui
nous préoccupe énormément.» Fin de la citation. J'aimerais, M. le Président,
donc, déposer ce document du conseil d'administration du CSSS Lucille-Teasdale
intitulé Un CSSS bien ancré dans sa communauté : préoccupations
et propositions.
Le Vice-Président (M. Gendron) : Pas de problème. Mais je vais vérifier s'il y a
consentement pour le dépôt. Y a-t-il consentement pour le dépôt de ce
document?
Une voix :
…
Document déposé
Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, il y a consentement. Alors, vous pouvez
déposer, M. le député, et poursuivre votre intervention sur le principe.
Merci.
M.
Kotto : Merci, M. le Président. Il s'agit là d'une réflexion
constructive de la part d'un groupe de personnes qui connaissent les besoins de leur milieu et qui, forts d'une
planification stratégique pour les prochaines années, ont bien campé les enjeux pour les 172 000 personnes
qu'ils desservent avec dévouement, que ce soit en termes de prévention,
d'accessibilité, de qualité des soins et des services ou de soutien à
l'autonomie dans un secteur où la population est vieillissante.
M.
le Président, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière
d'immigration et de la Charte de la langue française, vous me permettrez
de revenir sur la présentation du mémoire de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal fondée en 1834 par Ludger Duvernay, qui a siégé dans notre Parlement
en 1837. La Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal oeuvre depuis 180 ans à la défense et à la promotion du français.
Elle a joué et joue toujours un rôle
important dans notre histoire culturelle, sociale et économique, tout comme
dans la définition de notre identité nationale. Dans son mémoire intitulé
Pour une société unie et des services à la population efficaces — Mettre un terme à la bilinguisation du système de santé au Québec, la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal s'est
dite inquiète en ce qui a trait au statut des établissements fusionnés, aux
conditions d'embauche qui seront en vigueur dans ces établissements et à l'identification des usagers anglophones.
En fait, son inquiétude réside dans l'intention du ministre de la Santé d'exiger… L'article 65 du
projet de loi est clair là-dessus, et je le cite : «Tout établissement
doit élaborer un programme d'accès
aux services de santé et aux services sociaux en langue anglaise pour les
personnes d'expression anglaise à qui il dispense [ses] services.» Fin
de l'article 65.
Nous
partageons cette inquiétude que le nouveau cadre de référence proposé par le
ministre, notamment avec les fusions
d'établissements, soit un véritable outil d'anglicisation du réseau de la santé
et des services sociaux. Pour respecter l'esprit de la loi 101, il faudrait donc parler des personnes de langue
anglaise maternelle, et non des personnes d'expression anglaise. On fait pratiquement de l'anglais la
langue par défaut de tout allophone non francisé, ce qui contredit le principe
voulant que le français soit la langue commune et la langue des services
publics au Québec.
• (17 h 30) •
Tout comme la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal, je considère que la langue française est un de nos principaux vecteurs d'unité et de cohésion sociale.
Une avancée majeure a été l'adoption de la loi 101 le 26 août 1977. Dans son article premier,
la Charte de la langue française déclare le français langue officielle du
Québec. L'intention du législateur était claire, le Québec est une
société de langue française, et cela doit porter à conséquence. Mais, dès son adoption, la loi 101 a été soumise aux aléas des
contestations judiciaires, qui ont eu des impacts sur la langue de l'État
québécois, sur la langue de l'enseignement,
la langue du commerce et des affaires et sur la langue de travail. Ces 37
années de contestations judiciaires
ont fait leur oeuvre, si bien que les dernières statistiques indiquent
clairement un recul de la place du français au Québec depuis une
quinzaine d'années.
Aussi, je
vous invite à lire l'étude de l'Institut de recherche en économie contemporaine
publiée ce mois-ci qui démontre
comment le gouvernement québécois, en 1986, en institutionnalisant le droit des
personnes d'expression anglaise de recevoir leurs services de santé et
leurs services sociaux en anglais, a laissé se développer tout un dispositif et
des pratiques minant la loi 101. En fait, en
laissant à l'usager le choix, le choix de la langue dans laquelle il reçoit ses
services, l'État, le nôtre, l'État
québécois ne sert pas l'intégration en français des nouveaux arrivants, lui ne
fait que générer l'ambiguïté. On peut donc penser, avec le projet de loi
n°10, qu'on accentue cette bilinguisation du système de santé, laquelle aura nécessairement un impact sur l'intégration des immigrants. Autrement dit, si ces derniers peuvent recevoir leurs services de santé et leurs services sociaux en anglais,
c'est une motivation de moins pour eux d'apprendre la langue officielle
de la société d'accueil.
Le mémoire
de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et les études sur lesquelles elle
s'appuie viennent donc rappeler au gouvernement que la Charte de la langue française porte sur l'ensemble de la vie en
commun et qu'elle se caractérise par
l'élaboration d'un aménagement de droit linguistique qui respecte la
minorité historique de la communauté
anglo-québécoise.
Aussi, alors
que la situation exige que le gouvernement se mobilise pour renverser la tendance du
déclin... au déclin du français,
dis-je, nous nous attendons à mieux du ministre
de la Santé et des Services sociaux pour renverser la vapeur et
respecter l'esprit de la Charte de la langue française, une charte qui s'est
inscrite dans l'histoire du Québec moderne comme
porteur d'un véritable projet de société. En ce sens, la loi n° 10, comme toutes
les autres lois qui émanent de l'État,
doit passer l'épreuve de la Charte de la langue française, à l'instar de tous
les actes de la vie publique au Québec.
Sur ces
paroles, M. le Président, j'ai bon espoir que le ministre de la Santé, malgré son apparente insouciance, prendra note, prendra acte du contenu de tout ce que mes collègues
et moi-même, ici, aujourd'hui et
hier, avons exprimé. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, Merci, M. le député de Bourget, de votre
intervention sur le principe du
projet de loi n° 10. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Joliette pour son intervention sur le même projet de loi. Mme la députée
de Joliette, à vous la parole.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon :
Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je suis heureuse, à mon tour,
d'avoir l'occasion de prendre la
parole au sujet du projet de loi n° 10 concernant une restructuration
majeure, sans précédent, de cette ampleur-là de nos structures dans le domaine de la santé et des services sociaux.
Je suis heureuse parce que je pense qu'on est vraiment à un moment charnière, et il ne faut surtout pas
minimiser ce qu'on nous demande d'adopter, ce que le gouvernement nous
demande d'adopter via cette réforme, via ce projet de loi n° 10.
Mais, avant
d'aller plus loin dans le détail, donc, des enjeux du projet de loi — particulièrement, dans mon cas, je vais vous parler des enjeux en matière de services
sociaux — il y a
d'abord des enjeux, je vous dirais, de nature démocratique qui sont liés à cette réforme qui est
proposée. Des enjeux démocratiques, parce que, tout d'abord, est-ce que
quelqu'un a entendu parler, pendant
la dernière campagne électorale, d'une telle volonté de réformer les
structures, de complètement centraliser
les structures dans chacune des régions en créant une mégastructure, en
éloignant le pouvoir décisionnel du local, des réalités locales, de
vouloir créer de nouveaux pans de pouvoirs excessivement larges pour le
ministre de la Santé et des Services
sociaux? Est-ce que quelqu'un a entendu parler de cette volonté de fusionner
absolument tous les établissements d'une région donnée, qu'importe leur mission, qu'importe qu'ils soient
de première ligne, de deuxième ligne?
Donc, on fait face non pas seulement à une intégration verticale par mission, donc
première ligne, deuxième ligne sur un
service donné, mais aussi horizontale, donc pour mettre tout ensemble, toutes
les missions ensemble. Est-ce que
quelqu'un a entendu parler de ça pendant la dernière campagne électorale?
Eh bien, poser la question, c'est y répondre, et
je vous dirais qu'aujourd'hui, alors qu'on nous annonce des changements énormes qui vont avoir des effets
catastrophiques en matière, donc, de
politique familiale pour l'accès aux services
de garde, on est en droit de se demander : Mais quelle espèce de volonté
démocratique, de valeurs démocratiques porte
ce gouvernement quand, autant pour les services de garde, autant pour le milieu
scolaire, autant pour le milieu de la santé
et des services sociaux, on fait face à des bouleversements majeurs, à des
réformes majeures sans qu'on nous ait dit quoi que ce soit à cet effet pendant la dernière campagne électorale?
Donc, je pense qu'il y a là un enjeu qu'on ne peut pas passer sous
silence.
L'autre enjeu qui m'apparaît important, avant
d'entrer dans le fond du sujet, c'est toute la question de la consultation et de l'implication des principaux
concernés de cette réforme, donc autant, bien sûr, les usagers, les
associations d'usagers, les
représentants, donc, des patients, des personnes handicapées, des personnes en
difficulté, des jeunes, des familles
qui sont dans des situations précaires, des médecins, des infirmières, des cadres,
des gens aussi qui travaillent dans le réseau en ce moment jour après jour. Ce
qu'on a constaté, c'est que personne de ces gens-là n'avait été consulté
pour cette réforme à laquelle ils vont
devoir adhérer vraiment de manière totale pour que ça soit un succès. Tout
le monde sait à quel point les enjeux de gestion du changement sont
énormes dans une organisation. Bien là, les enjeux sont absolument
monstrueux, parce qu'on est face à une réforme d'une ampleur, comme je le
disais d'entrée de jeu, jamais
vue. Et, plutôt que de dire : On va
partir de la base, non seulement de la base, des besoins de la population, puis essayer de répondre à
ça, parce que ce n'est pas
du tout ce que fait le projet de loi, mais non seulement on n'est pas parti des besoins et de la base, en termes de citoyens et
d'usagers, mais en plus on n'est pas parti du travail avec les gens du réseau,
avec les gens qui, au quotidien, vont
devoir vivre avec cette réforme-là, l'implanter, faire les changements tous
azimuts qui vont s'imposer au cours des prochains mois et des prochaines
années.
• (17 h 40) •
Donc, il y a quelque chose qui m'échappe complètement dans cette logique de mettre en place une réforme
dont le succès va être directement tributaire de l'adhésion des gens du milieu, donc qui travaillent dans
nos établissements, qui
travaillent dans les CLSC, qui travaillent dans les centres jeunesse, qui
travaillent dans les centres de réadaptation, qui travaillent auprès des
familles, qui travaillent auprès des patients, les médecins, les cadres, les
directeurs. Tout ce monde-là va devoir vivre des changements absolument
incroyables, mais on ne les a pas embarqués, on ne leur a pas demandé ce qu'ils en pensaient, comment ils
voyaient les choses. Alors, d'entrée
de jeu, qu'importe ce qu'il pourrait
y avoir de bon ou de moins bon dans
le projet de loi, c'est un enjeu majeur pour s'assurer par la
suite du succès de l'entreprise
qu'on nous propose via le projet de loi n° 10.
Il y a évidemment
énormément d'enjeux de fond, de contenu dans le projet de loi n° 10, des enjeux sur l'importance de garder une relation de proximité entre nos établissements de santé et de services
sociaux et les milieux qu'ils
desservent en créant ces structures
monstres, évidemment des enjeux aussi de reddition de comptes, des enjeux de représentativité.
Les comités d'usagers sautent; on va avoir
un comité d'usagers par mégastructure. Mais qu'est-ce qu'on va faire pour les
personnes qui ont des problématiques
particulières en matière de jeunesse, en matière de déficience, en matière de
handicap? Qu'est-ce qu'on va faire?
Comment on va être capables de garder cette voix-là forte qui, en ce moment,
était portée dans chacun des
établissements? Alors, un autre, bien sûr, enjeu significatif : enjeu de
centralisation, parce que le ministre se donne des pouvoirs absolument
exceptionnels de pouvoir nommer absolument tout le monde, autant sur les
conseils d'administration que les P.D.G. de chacun de ces établissements.
Mais je vous
dirais qu'au-delà de toutes ces questions, puis mes collègues qui ont pris la
parole depuis quelques heures sur le
sujet en ont parlé abondamment, mais, au-delà de tous ces enjeux, je vous
dirais, plus précis, il y a un enjeu fondamental,
il y a une question fondamentale qui se pose, c'est : Pourquoi miser
aujourd'hui sur une réforme de structure? Quelle est l'urgence? Pourquoi mettre toutes nos énergies, mobiliser
tout le réseau, tous les gens du réseau, les travailleurs au quotidien, les cadres, les directeurs, le
ministère de la Santé et des Services sociaux au complet vers une réforme de
structure, alors que les problèmes
d'accès aux soins et aux services sont criants, alors que nos urgences
continuent à déborder, alors que les
listes d'attente pour donner des services aux jeunes autistes, aux personnes
déficientes, aux personnes vulnérables continuent
d'être imposantes? Comment ça se fait qu'on nous arrive avec une réforme de
structure? Et je dois vous dire que je
n'ai pas entendu de réponse convaincante à cette question-là, qui est la
question, je pense, qui est posée par la très grande majorité des intervenants qui sont venus, qui ont
pris le temps de déposer des mémoires, de venir pendant les auditions,
les consultations particulières. Pourquoi, à ce moment-ci, une telle réforme?
Les
objectifs, les objectifs qui sont allégués — je dirais «allégués» et non «prouvés», bien
sûr — c'est de
dire : On va s'assurer d'un
meilleur accès, on va s'assurer de services plus fluides, plus efficients. Bien
sûr que tout le monde adhère à ça,
mais le problème, c'est que les moyens n'ont aucune corrélation avec les
objectifs qui sont mis de l'avant. Donc, pourquoi s'attaquer à cette
réforme de structure?
Et je pense
qu'on devrait être excessivement prudents quand on prend acte de la dernière
réforme, de la réforme, donc, de
l'actuel premier ministre, alors qu'il était ministre de la Santé et des
Services sociaux. C'est une réforme qui est venue en 2005 et dont les effets ne sont pas encore aujourd'hui
complètement absorbés, presque 10 ans plus tard, dans le réseau de la
santé et des services sociaux. Et je pense que c'est très important de
rappeler, en matière de services sociaux — et,
pour les prochaines minutes, je vais parler davantage de ce secteur, donc,
d'activité dans le réseau — c'est
très important de savoir que cette
réforme-là, et c'est malheureusement ce qui se dessine pour l'actuelle réforme qui est
proposée, elle n'a pas été pensée, la
réforme de 2005, pour les services
sociaux. Elle a été pensée pour le
secteur de la santé, mais on l'a
appliquée mur-à-mur pour les services
sociaux, ce qui a créé une très, très
grande désorganisation, et encore aujourd'hui il y a énormément de gens
qui regrettent cette réforme en 2005. Pourquoi? Parce qu'en 2005 on a décidé — je
vais vous donner un exemple parmi d'autres — qu'on allait spécialiser les
centres de réadaptation, par exemple, en
déficience intellectuelle et en trouble du spectre de l'autisme, appelé avant
«trouble envahissant du développement»,
donc on a décidé qu'on allait les spécialiser et qu'on allait envoyer les
services, je vous dirais, plus de première ligne, dans les CLSC.
Or, les
budgets n'ont pas nécessairement suivi, ça s'est fait de manière complètement
différente d'une région à l'autre. Il
y a des régions qui ont décidé qu'elles allaient se parler entre la première
ligne, la deuxième, qu'il allait y avoir des budgets de transférés entre le centre de réadaptation et le CLSC et
donc d'essayer de pouvoir travailler en collaboration. Il y a des régions qui, sans donner un sou, ont
décidé du jour au lendemain de se délester, parce que c'était la directive
du ministère, donc de tout ce qui concernait
davantage, soi-disant, la première ligne désormais : donc, le suivi auprès
des familles, les services un peu à
domicile plutôt que les services plus spécialisés qui se donnaient en centre de
réadaptation. Donc, il y a des
régions qui, du jour au lendemain, se sont délestées, puis il y a même des
régions où la transformation n'est
pas encore faite, elle n'a pas encore abouti parce qu'il y a des régions qui
ont résisté, en disant : Ça n'a aucun sens, on va se retrouver à délaisser nos clientèles
vulnérables, nos familles, les parents qui en ont déjà énormément sur les
épaules. Donc, c'est une situation
qui n'est toujours pas réglée, neuf ans après la réforme qui devait améliorer
les services, mais qui malheureusement n'avait pas du tout été conçue…
ça, c'est un exemple parmi d'autres, mais qui n'avait pas été conçue pour le
domaine des services sociaux.
Puis il y a quelque chose de
paradoxal, je pense, qu'il est important de faire ressortir, c'est qu'alors
qu'en 2005 on voulait spécialiser,
donc sortir les éléments plus de première ligne des centres de réadaptation,
dire : On va envoyer les gens au
CLSC pour tel type de services, on va les garder au centre de réadaptation pour
tel autre type de services, bien là, aujourd'hui, la réforme, elle
propose exactement l'inverse : là on va ramener tout ça dans une seule
structure. Donc, comme je le disais tout à l'heure, la première ligne et la
deuxième ligne ensemble, mais aussi toutes les missions : les missions
santé, santé publique, les missions, donc, de santé physique, les missions de
santé mentale, les missions de réadaptation
en dépendance, réadaptation en déficience, le communautaire, et même la
protection de la jeunesse, puis je vais
y revenir. Donc, on ramène tout ça ensemble. C'est exactement la logique
inverse de ce qui avait été mis de l'avant en 2005, et là on dit :
Non, là on va tout mettre ça ensemble.
On dit que les
missions vont rester, mais il va y avoir une seule structure. Qu'est-ce que ça
veut dire pour les services sociaux, bien
concrètement? Ça veut dire qu'alors qu'elles avaient des entités, des conseils
d'administration, des comités d'usagers
qui étaient capables de vraiment porter la voix des personnes qui ont une
problématique particulière, des personnes, évidemment, qu'on entend très
peu dans la société... parce
que vous êtes bien conscient, M. le Président, que ce ne sont pas les personnes qui ont une déficience intellectuelle,
ou les jeunes en difficulté, ou les personnes toxicomanes qui sortent dans la rue pour revendiquer des
services et une fluidité de services. Ce sont des gens qui ont déjà assez dans
leur vie, même chose pour leurs familles,
pour se dire qu'elles vont se concentrer sur leur réadaptation, leur
réhabilitation, sur les difficultés
déjà énormes qu'elles doivent vivre au quotidien. Donc, ce sont des clientèles
très vulnérables, qui ont besoin de
toute cette place dans ce système déjà très hospitalocentriste. Puis on le comprend
parce que la santé, c'est un enjeu majeur, ça préoccupe les gens, ça préoccupe énormément
de gens, avec une population vieillissante en plus, mais on ne peut pas
délaisser ces populations vulnérables qui, au moins, dans le système actuel,
bénéficiaient, à travers leurs établissements,
de conseils d'administration bien au fait de leurs réalités, de comités
d'usagers qui pouvaient clairement porter leurs voix.
Alors,
je pense qu'on peut tous convenir que les inquiétudes qui sont véhiculées par
ces différents groupes de la société sont légitimes, et c'est important qu'on puisse y
répondre avec une loi qui va être clairement adaptée aux services sociaux, ce qui, malheureusement, n'est pas le
cas. Et, quand on la lit, la loi, on voit qu'il n'y a rien de différencié pour
le secteur des services sociaux, et ça,
c'est inquiétant, parce qu'on ne peut
pas s'enligner dans une réforme qui pourrait laisser toute la place, et même plus de place que ce qu'on vit à l'heure
actuelle, à ce qui est de la santé physique, à ce qui est hospitalier et puis,
on le sait, pourquoi il y a toujours cette pression d'aller vers ce qui est
hospitalier, bien, c'est parce que c'est ce qui crie, c'est ce qui
saigne, c'est ce qu'on voit à la une des journaux, alors que toutes ces
personnes qui souffrent en silence, qui ont
des déficiences, bien, on les entend, malheureusement, et on comprend pourquoi
très peu.
• (17 h 50) •
Je
voudrais vous lire, peut-être pour résumer, une lettre que j'ai reçue,
justement, aujourd'hui d'un père d'un jeune autiste, qui fait partie d'une organisation et qui dit : «Nos plus
grandes inquiétudes sont celles-ci : l'orientation médicale que prend le projet de loi, le choix des mots, les
discours du ministre, la composition des conseils d'administration des futurs centres intégrés. Cela laisse beaucoup de
place aux programmes de santé, au détriment des programmes sociaux. L'intégration de tous les centres de réadaptation
aux mégastructures des CISSS risque de toucher la qualité des services. L'objectif de la réforme de 2003, comme celle qui
est actuellement devant nous, visait à faciliter le cheminement de toute
personne dans le réseau et elle a échoué.
Comment une structure encore plus grosse pourrait-elle y arriver et combien de
temps nos personnes autistes et nos familles devront-elles patienter sur des
listes d'attente pendant que cette grosse structure se réorganisera après la
fusion?»
Parce
qu'il faut être conscient de ça, c'est les mêmes personnes dans le réseau qui
vont devoir gérer ce changement majeur
de structure, qui sont les personnes qui doivent améliorer les services, qui
doivent trouver les meilleures manières d'améliorer l'accès. Donc, quand
toute une organisation est concentrée sur l'absorption d'une réforme de
structure, évidemment, elle ne peut pas
mettre toutes ses énergies pour améliorer les soins et les services aux
personnes, dont les personnes les plus vulnérables.
La
représentation des usagers est fortement diluée dans le projet de loi n° 10.
Un seul comité d'usagers par région pour
l'ensemble des missions ne pourra jamais faire reconnaître les besoins en
services de toutes les clientèles, et leur présence n'a absolument aucun
poids dans la composition des conseils d'administration qui est proposée.
L'autre
chose, évidemment, qui inquiète beaucoup le milieu, c'est toute la nomination
des P.D.G., donc, de ces nouvelles
mégastructures. Est-ce qu'on va avoir des représentants des services sociaux?
Est-ce qu'il va y avoir un équilibre des
forces pour que cette voix puisse être portée? Donc, ça, c'est une autre, je
dirais, préoccupation très concrète des milieux des services sociaux.
Et,
évidemment, il me reste peu de temps, mais je voudrais dire quelques mots sur
la spécificité de la mission des centres
jeunesse, des jeunes en difficulté. Je sais que ma collègue la ministre
déléguée à la Réadaptation, à la Santé publique et à la Protection de la jeunesse partage ces préoccupations-là, je n'en
doute pas. Mais il faut être certains que la réforme qui est sur la table, elle va permettre à la
spécificité de la mission qui est loin d'être banale... la protection de la
jeunesse va pouvoir être intégralement maintenue. Et il y a Dr Nico
Trocméqui est venu, qui a fait un plaidoyer, je pense, très éloquent, tout le monde doit en convenir, et qui a
fait ressortir à quel point, évidemment, il y a toujours des difficultés
dans un système, mais le système québécois
est bon et à quel point il a une mission spécifique en protection de la
jeunesse parce qu'on doit gérer le
risque au quotidien. Et, si la protection de la jeunesse est noyée dans un
ensemble de missions multiples très
larges, l'espèce de chemin de commandement, de ligne de direction, va être
beaucoup plus diffus, avec des risques
importants d'échapper des cas et de moins bien gérer ce risque au quotidien.
Donc, c'est une préoccupation aussi qu'on doit garder à l'esprit.
Et, en
conclusion, M. le Président, parce que, malheureusement, le temps me manque, le
souhait que nous avons, c'est qu'on
prenne un moment — il n'y a
pas une urgence nationale, cette réforme-là n'est pas attendue, au
contraire — et
qu'on se concentre sur
les besoins des personnes, de répondre aux besoins des personnes, dont les
personnes vulnérables, et non les besoins des structures. Merci, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Gendron) :
Alors, je vous remercie, Mme la députée de Joliette, de votre intervention
sur le principe du projet de loi n° 10.
Et je cède la parole au prochain intervenant. Et je reconnais maintenant M. le
député de Verchères pour le début de son intervention.
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron :
Oui, M. le Président. Et je vous signale à l'instant que je souhaiterai
poursuivre cette intervention lorsque
l'occasion m'en sera donnée, si tant est que le gouvernement rappelle ce projet
de loi au cours des prochains jours. Je
voudrai évidemment terminer mon allocution à ce moment et finir de dire tout ce
que j'ai à dire, si tant est qu'il est possible, en 20 minutes, d'exposer
tout ce que j'ai à dire sur ce projet de loi, M. le Président.
D'abord,
peut-être simplement vous dire que je suis attentivement, j'écoute
attentivement les remarques qui sont formulées
en cette Chambre par rapport au projet de loi n° 10. Et j'ose espérer, M.
le Président, que nos collègues du côté ministériel, et plus particulièrement le ministre de la Santé et des
Services sociaux, sont tout aussi attentifs que je le suis. Parce que,
lorsqu'on entend des arguments et des présentations aussi éloquentes que celle,
par exemple, que vient de compléter ma collègue de Joliette, on ne peut faire
autrement que de se dire qu'il importe éventuellement d'en tenir compte dans le
projet de législation que nous avons sous les yeux présentement.
M. le Président,
je vous dirai simplement d'entrée de jeu que nous avons connu, sous un
précédent gouvernement libéral, sous
un précédent ministre de la Santé et des Services sociaux qu'on connaît bien,
puisque c'est maintenant le premier
ministre du Québec, un tel brassage de structures. L'objectif était, disait-on
à ce moment-là, de rapprocher les services
de la population, de réduire la bureaucratie, de rendre les services plus
efficaces. C'est lorsque l'actuel premier ministre a décidé de procéder à la création des agences et puis le
regroupement des services, que ce soit CLSC, que ce soit CHSLD et
services hospitaliers dans des centres de services de santé et services
sociaux, M. le Président.
Et ce qu'on a
constaté dans les mois, les années qui ont suivi, ce n'est pas nécessairement
une amélioration des services.
D'abord, il y a eu toute une adaptation qui a été consécutive à ces brassements
de structures... ce brassage de structures,
M. le Président. Et cette adaptation a fait en sorte que les effets escomptés
n'ont pas été au rendez-vous, du moins n'ont pas été au rendez-vous de
façon très rapide.
Et, lorsqu'on
regarde le bilan des neuf années de gouvernement libéral, en termes de liste
d'attente, que ce soit pour les
chirurgies, que ce soit pour les urgences, bien, force est de constater, M. le
Président, que ce parti qui se disait prêt,
en 2003, à prendre la relève et qui promettait presque la disparition des
listes d'attente en l'espace de 24 heures après la... On croyait encore... On croyait déjà, à ce
moment-là, M. le Président, à un effet libéral. Mais, l'effet libéral, il
devait se faire sentir dans les
urgences : en moins de 24 heures, il n'y aurait plus de listes
d'attente. Or, ce n'est pas ce qui s'est passé. En fait, le temps d'attente pour les chirurgies et pour
l'urgence, d'une façon générale, s'est allongé, s'est allongé entre 2003 et 2012, M. le Président. Donc, ce
brassage de structures n'a pas donné les résultats escomptés, et il est à se
demander, M. le Président, si on n'est pas
en train de jouer dans un film dont on connaît ou dont on peut se douter de
l'issue, de la conclusion.
Et il faut
être conscient, M. le Président, de l'importance des modifications qui sont
demandées ou qui vont être demandées
au réseau par le projet de loi que nous avons sous les yeux et, effectivement,
qui va demander au réseau de devoir
répondre à ces modifications en profondeur. Puis on ne peut pas s'attendre à ce
que les effets soient très rapides. Et
il y a lieu de craindre, M. le Président, que, tout comme dans le cas du
précédent brassage de structures que nous avions connu après l'élection
de 2003, les résultats ne soient pas au rendez-vous.
Alors,
qu'est-ce qu'on espère, M. le Président, à travers ce projet de loi? Et je
constate que mon temps, malheureusement,
s'achève pour aujourd'hui. J'aurai l'occasion de poursuivre plus tard, mais à
quoi s'attend-on? À une amélioration des services? À une économie, M. le
Président? À des économies? Ou est-ce qu'on ne s'attend pas, tout simplement, à pouvoir augmenter, accroître le
contrôle pouvant être exercé par Québec sur le réseau de la santé et des
services sociaux?
Pour les raisons que j'évoquais il y a quelques
instants, je doute que ça se traduise par une amélioration des services, je doute que ça se traduise par une
économie au niveau financier, mais ça va se traduire par une centralisation
et un accroissement des pouvoirs à Québec.
Ajournement
Le Vice-Président
(M. Gendron) : Alors, compte tenu de l'heure, les travaux de
l'Assemblée sont ajournés au mardi
25 novembre 2014, à 13 h 45. Alors, bonne fin de semaine à tous.
Les travaux sont ajournés.
(Fin de la séance à 18 heures)