(Neuf heures quarante-sept minutes)
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Bon matin. Veuillez vous asseoir.
Affaires
courantes
Déclarations
de députés
Alors, nous en sommes à la rubrique Déclarations de députés. Je débuterais
la séance avec la députée de Vachon.
Rendre
hommage à M. Normand Gosselin,
enseignant en musique
Mme
Martine Ouellet
Mme
Ouellet : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais rendre
hommage aujourd'hui à M. Normand Gosselin, enseignant
en musique à l'école secondaire André-Laurendeau à Saint-Hubert. Depuis 27 ans,
cet amoureux de la musique, trompettiste
de talent, compositeur et arrangeur, transmet sa passion aux jeunes. Il
favorise chez les élèves leur estime de soi et leur apprend la persévérance, l'entraide et la tolérance. En
1988, suite au succès remporté par ses élèves dans les activités
parascolaires, M. Gosselin met sur pied le programme musique-études Jazz-Pop,
qui est maintenant reconnu internationalement.
Ce programme propose une formation musicale complète. L'objectif est d'ouvrir
les portes vers des études
supérieures, que ce soit en musique ou dans une autre discipline. M. Gosselin
en est le coordonnateur depuis le début.
De 1996 à 2000, il a été coordonnateur du Jazzfest des jeunes du Québec, qui
réunit, le temps d'une journée, près de 100 orchestres de jazz en
provenance de partout au Québec et même de l'extérieur.
J'offre
donc toutes mes félicitations à M. Normand
Gosselin pour son implication et son dévouement. Merci, M. Gosselin, de faire
une différence dans la vie et l'avenir de nombreux jeunes.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, Mme la députée. Je
céderais la parole au député de Marquette.
Rendre
hommage à M. Serge Boisvert, photographe au
Messager Lachine Dorval, à l'occasion de sa retraite
M.
François Ouimet
M.
Ouimet
(Marquette) :
Alors, merci, Mme la Présidente. Je veux rendre hommage aujourd'hui à M. Serge Boisvert, notre
cher photographe qui a oeuvré pendant plusieurs années au sein du Messager de
Lachine & Dorval, et qui, après une belle carrière de plus de 20
ans, a décidé de prendre une retraite bien méritée.
Au
fil des années, j'ai découvert un homme attachant, d'une grande gentillesse,
passionné par son travail, un homme patient, persévérant et professionnel et,
surtout, un homme proche des gens. Serge était toujours présent pour photographier, avec son œil vif et bien aiguisé,
les événements politiques, sportifs, sociaux et culturels qui ont marqué
notre communauté, et cela, peu importe si l'événement était tôt le matin ou
tard le soir, le samedi ou le dimanche.
Serge
et sa conjointe, Marie Farré, sont parmi nous aujourd'hui. Je les salue et, mon
cher compagnon, je te souhaite une bonne retraite pleinement méritée. Profite
pleinement de la vie.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Bravo, M. Boisvert. Alors, je
céderais maintenant la parole au député de Bourget.
Souligner
le 25e anniversaire de L'Étincelle de l'amitié inc.
M.
Maka Kotto
M. Kotto : Mme la
Présidente, je veux aujourd'hui souligner les 25 ans d'un organisme de la
circonscription de Bourget, qui se dévoue sans relâche auprès des personnes vivant un
problème de santé mentale. Et c'est par le biais des arts que cet
organisme au nom évocateur, L'Étincelle de l'amitié, favorise l'entraide, la
prévention et la réinsertion sociale de ces personnes atteintes de troubles
mentaux.
Je
tiens à saluer toute l'équipe de Mme Solange Lemieux, la directrice générale,
et les membres du conseil d'administration, sous la présidence de Mme Lisette
Aubut, pour leur inlassable dévouement auprès des centaines de personnes qui
fréquentent L'Étincelle de l'amitié.
Mes plus vifs remerciements à tous les
bénévoles ainsi qu'aux artistes en arts visuels qui contribuent quotidiennement à maintenir l'espoir par la créativité
auprès de toutes ces personnes et de leurs familles. Merci, Mme la Présidente.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député de Bourget.
J'accueillerais maintenant le député de Papineau.
Rendre hommage à Mme Jade
Trudel-Sabourin,
athlète en lancer du marteau, pour son parcours exceptionnel
M. Alexandre Iracà
M. Iracà :
Merci, Mme la Présidente. Je désire souligner le parcours exceptionnel de
l'athlète Mme Jade Trudel-Sabourin de Ripon. La spécialiste du lancer du
marteau monte régulièrement sur les podiums.
En
janvier dernier, lors d'une compétition à Sherbrooke, elle s'est mérité
l'argent au lancer du marteau avec un jet de 12,7 mètres chez les séniors. Elle a récidivé
la semaine suivante au Rouge et Or, en lançant le marteau à 12,91
mètres, un record personnel. Ce lancer lui a valu la médaille d'argent.
Jade
a participé à plusieurs finales provinciales des Jeux du Québec en athlétisme.
En 2013, elle est la récipiendaire de la bourse Jacques-Caron et récipiendaire de la
bourse d'excellence académique de la fondation Alliance Sport-Études; en 2012, récipiendaire de la bourse TVGo de la
Fondation Sport-Études pour sa persévérance scolaire; en 2010, lauréate d'une bourse à titre d'athlète ayant le plus
rayonné aux Jeux du Québec selon Radio-Canada; en 2009, gagnante du
trophée Émilie-Mondor lors du gala Athlètas
de la Fédération d'athlétisme du Québec. Elle a aussi remporté plusieurs
médailles au gala méritas de la Petite-Nation. De plus, Jade est une excellente
chanteuse. Bravo, Jade!
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci, M. le député. M. le député de Beauce-Nord.
Rendre hommage au Club de l'âge
d'or, Saint-Joseph de Beauce inc.
M. André Spénard
M.
Spénard : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je veux
souligner aujourd'hui le club de l'âge d'or de Saint-Joseph-de-Beauce.
Alors,
au début des années 60, suite à de nombreux changements dans notre société, nos pratiques religieuses de nos familles, un profond besoin de se regrouper se manifeste chez nos aînés. C'est alors qu'apparaissent les
premiers clubs de l'âge d'or du paysage
québécois. Des quelque 500 clubs et 50 000 membres que comptait la
Fédération de l'âge d'or du Québec en
1970, le réseau FADOQ, comme on doit l'appeler aujourd'hui, regroupe maintenant
plus de 800 clubs et 275 000
membres. Depuis sa fondation, on ne compte plus les batailles que le réseau
FADOQ a menées sur la place publique pour défendre le droit des aînés et
venir en aide aux plus démunis. De plus, le mouvement a mis sur pied une foule de services,
de programmes et d'activités sportives ou de loisirs afin de faire du
vieillissement une étape de vie sous le signe de la santé et de l'épanouissement.
Une belle preuve du dynamisme qui
anime nos aînés : la présence, dans nos tribunes aujourd'hui, d'une
quarantaine de membres du club de l'âge d'or de Saint-Joseph-de-Beauce qui sont de passage dans la Vieille Capitale et que je
tiens à saluer amicalement. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci, M. le député. M. le député de Mercier.
Souligner le 30e anniversaire de
l'Association
québécoise des personnes aphasiques
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, Mme la Présidente. J'invite mes
collègues de l'Assemblée nationale à rendre hommage aujourd'hui à l'Association
québécoise des personnes aphasiques, l'AQPA,
qui célébrait hier, le 23 octobre, son 30e anniversaire. Au cours d'une cérémonie
qui réunissait, à Montréal, 200 personnes, on a souligné les réalisations de cet organisme de mon
comté.
En raison d'une lésion dans
l'hémisphère dominant du cerveau, les personnes aphasiques perdent, en tout ou en partie, une de leurs
capacités langagières : la parole, l'écriture, la lecture ou la
compréhension. L'AQPA accompagne ces personnes
dans leur développement et leur intégration sociale et contribue à faire reconnaître l'aphasie comme handicap.
Véritable
milieu de recherche et de formation, l'AQPA accueille de nombreux étudiants et
permet l'innovation dans le domaine. L'organisme mène aussi des initiatives communautaires
prometteuses, dont
le projet d'une maison de l'aphasie pour permettre d'accueillir les personnes
aphasiques et leurs familles dans un milieu de vie stimulant et protecteur. Les personnes atteintes d'aphasie et
l'AQPA méritent notre appui. Elles ont aussi besoin d'un système de
santé bien organisé, bien financé et
accessible, toute chose…
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci, M. le député.
M. Khadir : Merci beaucoup.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Alors, je cède la parole à la députée de Richmond.
Souligner
le 30e anniversaire de la maison
des jeunes Au Point 14-18 de Danville inc.
Mme
Karine Vallières
Mme
Vallières : Merci, Mme la Présidente. Le 5 octobre, c'est avec la communauté que la maison des jeunes Au Point de Danville a célébré son 30e anniversaire. Je réitère «avec la communauté», Mme la Présidente, parce que la mission de la maison des jeunes, c'est un élément
essentiel de vitalité et de dynamisme pour nos municipalités.
Alors, des jeunes de 12 à 17 ans qui fréquentent la maison des jeunes apprennent à devenir des citoyens actifs,
et c'est un de mes chevaux de bataille en
politique.
À Danville, on les met à contribution pour différentes activités dans le
milieu, mais on les aide également à faire
leurs devoirs et on leur offre différents cours. J'aimerais donc profiter de ce 30e anniversaire
pour remercier toute l'équipe de Judith, qui
permet aux jeunes de se retrouver entre eux, mais également, parfois, de se
retrouver eux-mêmes. Merci de faire en sorte que ces jeunes soient si
bien outillés pour devenir les adultes de demain. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, Mme la députée. Mme la
députée de Crémazie.
Rendre
hommage à M. Martin Longchamps pour
ses 20 ans de bénévolat au sein de l'Association
de hockey mineur des Braves d'Ahuntsic
Mme Diane
De Courcy
Mme
De Courcy : Mme la Présidente, chers collègues, je
souhaite souligner l'engagement d'un citoyen de Crémazie qui, depuis plus de 20 ans, fait bouger les jeunes de la circonscription.
M. Martin Longchamps,
président de l'Association de hockey mineur
des Braves d'Ahuntsic, célébrait cette année deux décennies de bénévolat au sein
de cette organisation. En 2004, Martin Longchamps a été intronisé au Temple de la
renommée du hockey à titre d'artisan du hockey
local. M. Longchamps a aussi reçu le prix Claude-Masson pour l'hommage au
bénévolat du gouvernement du Québec,
et, plus récemment, en
août dernier, M. Longchamps a été reconnu comme personnalité de la semaine. Je souhaite remercier chaleureusement M. Martin Longchamps pour cet engagement
constant permettant aux jeunes de Crémazie de
pratiquer notre sport national. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, Mme la députée. M. le député de Jacques-Cartier.
Souligner
le 30e anniversaire de la Société de
communication Atikamekw-Montagnais inc.
M.
Geoffrey Kelley
M.
Kelley : Merci, Mme la Présidente. Il me
fait plaisir de souligner le 30e anniversaire de la Société de communication Atikamekw-Montagnais, la SOCAM. Au
fil des ans, la SOCAM a réussi de créer un système decommunication efficace en tant de radios
communautaires en regroupant au sein d'un même réseau les nations
attikamek et innue. En tout, ce sont
14 stations à travers le Québec et le Labrador. La SOCAM contribue à favoriser le développementdes communautés
autochtones et à établir les liens permanents entre les communautés, et surtout
à préserver et valoriser les langues et la culture autochtones.
Je
félicite Bernard Hervieux, directeur général de la SOCAM et pionnier, ainsi que
son équipe qui sont ici, à l'Assemblée
nationale, ce matin.
J'attends avec impatience la prochaine édition du gala de musique Teweikan, qui
a connu un
succès en 2011 et qui représente une plateforme extraordinaire pour les artistes autochtones tels
que CerAmony, Elisapie Isaac, Florent Vollant,
Laura Niquay. Pour garder une langue vivante, elle doit être parlée et elle
doit être chantée. Merci à la SOCAM. (S'exprime
dans une langue amérindienne).
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci, M. le député. Bienvenue à vous. M. le
député de Terrebonne.
Féliciter
les organisateurs et participants du
Relais pour la vie de Terrebonne, classé
premier au Canada pour les fonds amassés
M.
Mathieu Traversy
M. Traversy : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. J'aimerais
souligner, aujourd'hui, l'incroyable exploit réalisé par la
cinquième édition du Relais pour la vie Terrebonne en juin dernier.
Effectivement, Mme
la Présidente, ils ont non seulement réussi à se hisser au
sommet du palmarès québécois pour une deuxième année consécutive en termes de fonds
amassés pour les relais pour la vie, mais ils ont également terminé premier
dans tout le Canada avec près de 600 000 $
d'accumulés.
Depuis maintenant cinq ans, le Relais pour la
vie Terrebonne se démarque par sa créativité, son dynamisme et surtout la qualité
de son organisation. Je sais que c'est un modèle pour le Québec, mais c'est
également un Québec d'un océan à l'autre, Mme la Présidente.
J'offre
donc toutes mes félicitations à M. André Shatskoff, président d'honneur, et son président du comité organisateur de l'événement, M. Simon Paquin,
qui nous font l'honneur d'être ici présents, dans les tribunes, sous
bonne garde, bien entendu, de ce que je peux
voir… féliciter toute leur équipe, féliciter également leurs bénévoles, et
surtout les marcheurs, qui font partie de la
réussite du Relais pour la vie, année après année. Grâce à vous, les gens
atteints de cancer pourront donc compter sur une aide, un soutien
précieux, mais surtout de l'espoir pour l'avenir. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député. Alors,
ceci met fin aux déclarations de députés.
Je
suspends nos travaux pour un court moment.
(Suspension de la séance à 9 h 59)
(Reprise
à 10 h 10)
Le
Président : Bon jeudi matin,
chers collègues.
Nous allons nous recueillir, mais, avant de nous recueillir, c'est avec
tristesse que j'ai appris le décès de l'ancien député
de Taschereau, M. Irénée Bonnier. Je voudrais que vous y pensiez. Et j'ai aussi appris ce matin le
décès de l'épouse d'un ancien ministre de la Justice, qui a siégé ici longtemps, et qui est la mère du président du Conseil du trésor et ministre responsable de l'Administration publique et qui siège avec nous, le député de Chicoutimi. Et je pense que nous devrions avoir ces deux personnes
dans nos pensées pour cette période de recueillement.
Merci.
Veuillez vous asseoir.
Je
m'excuse. M. le leader de l'opposition.
M. Moreau : M. le Président, compte
tenu de la triste
nouvelle dont vous avez fait part ce matin, j'aimerais, en mon nom personnel et au nom de l'opposition officielle,
offrir à la famille de mon collègue le député de Chicoutimi toutes nos sympathies et lui dire, leur dire, que nos
pensées les accompagnent.
Le
Président : Merci beaucoup. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Deltell : Oui, M. le Président. Alors, également, au nom
du deuxième groupe
d'opposition, je tiens à offrir mes plus
sincères condoléances à notre ami député de Chicoutimi, à son père, à ses proches et à sa
famille. On sait que c'est une famille qui est
très tricotée serré, comme on dit au Québec, et que c'est une grande source d'inspiration aussi pour
tous ceux qui s'engagent en politique de voir que, de père en fils, on se transmet la tradition.
Nos bonnes pensées les accompagnent.
Le
Président : Merci. Mme la députée de Gouin.
Mme David : M. le Président, j'aimerais tout simplement
joindre ma voix à celle de mes collègues pour vraimentsignifier nos plus grandes sympathies et
condoléances à notre collègue. La perte d'une maman est toujours quelque chose de très triste. Donc, je
pense qu'il est normal que nos pensées soient
avec lui.
Le
Président : Mme la première ministre.
Mme
Marois : M. le Président, d'abord, je veux vous remercier d'avoir
souligné ce triste événement. Je me
sens un peu membre de cette famille puisqu'ils sont de notre grande famille politique. Je veux
remercier les oppositions d'avoir pris la peine d'offrir leurs condoléances à
cette famille éprouvée. Et, en mon nom personnel et au nom de ma formation politique, évidemment, j'offre toute ma solidarité à la
famille de Stéphane
Bédard, à son père, Marc-André, qui a siégé aussi avec nous. Merci, M. le Président.
Le Président : Merci. J'ai eu l'occasion de parler à notre collègue ce matin et
d'offrir moi-même noscondoléances. Et il y a des choses qui doivent se faire, bien, elles se feront,
et nous en aurons probablement connaissance dans les jours qui viennent, préparation, et tout.
Alors, nous poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles. M. le
leader du deuxième groupe d'opposition.
M.
Deltell : Merci, M. le Président. Je
vous invite à appeler l'article d de notre feuilleton.
Le
Président : Ah, bien, vous
allez vous reprendre parce que je n'étais pas
rendu à la rubrique Présentation des projets de loi.
Présentation de projets de loi
Projet de loi n° 397
À
la rubrique Présentation des projets de loi, je comprends que M. le leader du
deuxième groupe d'opposition voudrait que je
lise l'article d, ce que je vais faire.
Alors, à l'article d
du feuilleton, M. le député de Beauce-Nord présente le projet de loi n° 397,
Charte des municipalités. M. le député de Beauce-Nord.
M. André Spénard
M.
Spénard :
Merci, M. le Président. Alors, à l'aube des élections municipales dans tout le
Québec, c'est un honneur, pour moi, de déposer, au nom de la
Coalition avenir Québec, le projet de loi n° 397, Charte des municipalités.
Alors,
ce projet de loi a pour objet de reconnaître la municipalité comme une instance
démocratiquement élue et de lui conférer les compétences, les pouvoirs, les
ressources et l'autonomie nécessaires afin de répondre, au plan local,
aux besoins divers et évolutifs de sa population.
Le
projet de loi établit que la municipalité est l'instance politique la plus
appropriée pour répondre, au plan local, aux
besoins de ses citoyens.
Le projet de loi énonce
les principes de gouvernance que doivent respecter la municipalité et ses élus et auxquels les décisions, directives et
politiques établies par la municipalité doivent se conformer. Il énumère les compétences accordées à la municipalité
et lui attribue des pouvoirs réglementaires et non réglementaires dans les domaines touchés par celle-ci.
Le
projet de loi encadre les relations du gouvernement du Québec et des
municipalités en énumérant les principes dont
le gouvernement du Québec doit tenir compte. Il spécifie que tout nouveau
pouvoir en matière municipale doit être délégué aux municipalités.
Le projet de loi
prévoit une procédure de modification pour les lois, règlements, programmes,
politiques ou directives concernant ou affectant les municipalités.
Le
projet de loi indique que le ministre des Affaires municipales, des Régions et
de l'Occupation du territoire doit, avant le
31 décembre 2015, déposer à l'Assemblée nationale un rapport sur la mise en
oeuvre de cette loi.
Enfin, le projet de
loi prévoit plusieurs dispositions interprétatives. Merci, M. le Président.
Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. Sur la même
rubrique, j'ai Mme la députée de Gouin.
Mme David : …Président. S'il vous plaît, veuillez appeler l'article e du feuilleton.
Projet de loi n° 493
Le
Président :
Alors, à l'article e du feuilleton, Mme la députée de Gouin
présente le projet de loi n° 493, Loi
proclamant le Mois du nanisme. Mme la députée de Gouin.
Mme Françoise David
Mme
David : Merci, M. le Président. Permettez-moi d'abord de souligner, dans nos banquettes, la présence de trois représentantes de l'Association québécoise des personnes de petite taille. Elles tiennent d'ailleurs un kiosque dans
le hall de l'Assemblée aujourd'hui. J'espère que mes collègues iront les voir.
Tout simplement, ce projet de loi prévoit que
le mois d'octobre est proclamé Mois du nanisme. Merci.
Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.
Dépôt de documents
À la rubrique Dépôt de documents, Mme la ministre
responsable de la région de la Capitale.
Rapport annuel de la Commission
de la capitale nationale
Mme
Maltais : Merci. M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 2012‑2013 de la Commission
de la capitale nationale.
Le
Président : Alors, ces
documents sont déposés. M. le ministre des
Relations internationales.
Entente
entre le gouvernement du Québec et le California Air
Resources Board concernant l'harmonisation et l'intégration
des programmes de plafonnement et d'échange de droits
d'émission de gaz à effet de serre, et Protocole portant
amendement de l'Accord sur les marchés publics de
l'Organisation mondiale du commerce, et notes explicatives
M. Lisée : M. le
Président, en vertu de l'article 22.2 de la Loi sur le ministère des Relations
internationales, je dépose deux
documents : en premier lieu, l'Entente entre le gouvernement du Québec et
le California Air Resources Board concernant
l'harmonisation et l'intégration des programmes de plafonnement et d'échange de
droits d'émission de gaz à effet de
serre ainsi qu'une note explicative sur le contenu et les effets de cette
entente; en deuxième lieu, le Protocole portant amendement de l'Accord
sur les marchés publics de l'Organisation mondiale du commerce ainsi qu'une
note explicative sur le contenu et les effets de ce protocole.
Le Président : Ces
documents sont déposés. Mais vous avez un autre objet, M. le ministre des
Affaires internationales.
M.
Lisée : Oui. J'ai deux motions qui ont un rapport direct avec
les dépôts de documents.
Motion proposant d'approuver le protocole
M. le Président, en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations
internationales, je fais motion pour que «l'Assemblée nationale étudie, dans le délai prescrit par la
loi et en vue de son approbation, le Protocole portant amendement de l'Accord sur les marchés publics de l'Organisation mondiale du commerce».
Motion proposant d'approuver l'entente
Seconde motion. M. le Président, toujours en vertu de l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales, je fais
motion pour que «l'Assemblée nationale étudie, dans le délai prescrit par la loi et en vue de son approbation, l'Entente entre le gouvernement
du Québec et le California
Air Resources Board concernant l'harmonisation et
l'intégration des programmes de plafonnement et d'échange de droits d'émission
de gaz à effet de serre».
Le Président : Alors, je vous avise qu'en vertu de l'article 22.3 de notre règlement, ces deux dossiers ne pourront pas être étudiés avant les 10 prochaines
journées. Ça va? Alors...
Une
voix : ...
Le Président : Les motions seront adoptées après avoir été étudiées. Il faut attendre au moins 10
jours pour les étudier.Puis, après les avoir étudiées… après les avoir
lues et étudiées, comprises, assimilées, vous les adopterez — probablement.
Dépôt des documents. M. le ministre du Développement durable.
Rapports annuels de la Société
des établissements de
plein air et du ministère du Développement durable,
de l'Environnement, de la Faune et des Parcs
M.
Blanchet : M. le Président, j'ai
l'honneur de déposer le rapport annuel 2012‑2013 de la Société des établissements de plein air du Québec et le rapport annuel de gestion 2012‑2013 du ministère du
Développement durable, de l'Environnement, de
la Faune et des Parcs.
Le
Président : Ces documents sont déposés. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Réponse à une pétition
M. St-Arnaud : Oui, M. le Président. Je dépose la réponse de la ministre responsable de la Charte de la langue française à la
pétition déposée le 12 juin dernier par la députée
de Gouin.
Le
Président : Alors, ces
documents sont déposés.
Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions
À
la rubrique Dépôt de pétitions, j'ai reçu une demande de M.
le député de Robert-Baldwin pour une pétition non conforme. Est-ce que j'ai un
consentement pour le dépôt? Consentement?
Consentement. M. le député de Robert-Baldwin, nous vous
écoutons.
Améliorer
les services et l'accès aux soins
palliatifs sans inclure dans la définition
la notion d'aide médicale à mourir
M.
Marsan : Merci, M. le Président. Je
dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale, signée par 264 pétitionnaires.
Désignation : résidentes et résidents de Montréal.
«Les faits invoqués sont
les suivants :
«Considering
that we strongly oppose Bill 52;
«Et l'intervention réclamée
se résume ainsi :
«We, the undersigned, expect our elected MNAs to improve access and
service to palliative care in Québec
without introducing “terminal palliative care and medical aid in dying” as part
of the current and accepted definition on the practice of palliative care in Québec.»
Je certifie
que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.
•
(10 h 20) •
Le
Président : Alors, cette
pétition est déposée… L'extrait de cette pétition est déposé.
Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales, et
j'invite M. le chef de l'opposition officielle à poser la première question.
Situation économique et
financière du Québec
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier : Merci, M. le
Président. Le budget du PQ est un échec. Il devait y avoir un déficit zéro en 2013‑2014
et en 2014‑2015. Les chiffres du ministère annoncent un déficit de près de
2 milliards cette année, un manque
à gagner de 2 milliards l'an prochain. On est déjà à 4 milliards, M.
le Président, c'est 1 000 $ par
travailleur québécois.
Mais l'histoire ne s'arrête pas là. En novembre dernier, le budget n'indiquait pas non plus un plan
panique, avec une dépense
additionnelle d'un autre 2 milliards, le tout avec moins d'emplois que ce
qui était prévu en novembre. Lorsque lesagences de notation ont
évalué la cote de crédit du Québec, elles
avaient devant elles un engagement ferme pour l'équilibre budgétaire cette année et, l'an prochain, un plan de contrôle des
dépenses et des prévisions pour la création d'emplois. Or, devant la situation que nous avons aujourd'hui, rien n'est au rendez-vous : pas d'équilibre en 2013‑2014, pas d'équilibre
en 2014‑2015, une dépense additionnelle de 2 milliards avec un plan
panique qui n'était pas prévu au budget et moins d'emplois que prévus.
Ma
question à la première ministre est très simple : Est-ce que la première
ministre s'est posé des questions sur l'effet qu'aurait son fiasco budgétaire
sur l'évaluation des agences de crédit?
Le
Président : Mme la première ministre.
Mme Pauline Marois
Mme
Marois : Alors,
merci, M. le Président. Est-ce que le chef parlementaire de l'opposition
officielle s'est posé, lui, des questions, lorsque nous sommes allés en élections en 2012,
alors que son gouvernement nous laissait un fiasco de 1,6 milliard
de dollars à quelques mois de la fin de l'année budgétaire, M. le Président?
Or, nous avons agi de façon responsable, nous
avons résorbé ce déficit. D'ailleurs, le dépôt des comptes publics, d'ici quelques
jours, ou une semaine, ou deux, rendra compte de la très bonne gestion de notre
gouvernement, puisque, pour la première fois en 10 ans, neuf ans,
M. le Président… les neuf ans où le gouvernement a été formé par le Parti libéral, M. le Président, jamais, jamais ils n'ont
atteint la cible prévue de la croissance des dépenses budgétaires, M. le
Président, alors que nous sommes non
seulement sur la cible, et le chef parlementaire de l'opposition pourra le
constater, nous sommes même en deçà de la cible et nous atteignons l'objectif
que nous nous étions fixés quant au déficit prévu, à quelques centaines
de millions près.
Nous sommes, M. le Président, un gouvernement
responsable et nous avons respecté les engagements pris. Nous allons continuer d'agir de cette façon, M. le
Président.
Le
Président : Première complémentaire, M. le chef de
l'opposition.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier : Vous aurez
constaté qu'elle n'a pas parlé du budget de novembre dont je parlais et de la situation actuelle dont je parlais. Complètement à côté de
la question.
Les agences de crédit, mais Fitch, parmi l'ensemble,
le 1er mai 2013, disait que le facteur clé d'évaluation, the Key Rating Drivers, le premier, c'était le «commitment to
balance». Le premier
facteur important d'évaluation, c'est l'engagement
à l'équilibre. Il n'y a pas d'équilibre, le plan de dépense est rompu, les
cibles d'emploi sont manquées.
Est-ce
qu'elle se pose des questions?
Le
Président : Mme la première ministre.
Mme Pauline Marois
Mme
Marois : M. le
Président, moi, j'ai entendu le critique officiel de l'opposition en matière
d'économie nous dire qu'il souhaitait que nous adoptions un plan d'action solide,
complet pour mieux soutenir l'économie québécoise et en particulier sous
l'angle de l'emploi. Non seulement nous avons répondu à cette attente, mais
au-delà des espérances exprimées par le député de Brome-Missisquoi, M. le
Président. Alors, je m'excuse auprès du chef parlementaire de l'opposition
officielle, qui parle de mesurettes, ce sont au contraire des mesures très
structurantes, qui supportent l'économie, qui supportent ceux et celles qui
investissent, M. le Président, parce que c'est de ça dont il s'agit, qui vont
supporter les familles qui voudront faire des rénovations, soutenant ainsi et
l'environnement, et l'économie, et l'emploi, M. le Président.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de
l'opposition.
M. Jean-Marc Fournier
M.
Fournier : Je regrette que, pour une deuxième fois, elle ne
réponde pas à la question. La question est la suivante : Il y a eu une
évaluation par les agences lors du dernier budget. Il y avait des engagements à
l'équilibre 2013-2014, 2014-2015. Il y avait
un plan de réduction de contrôle des dépenses, éclaté complètement avec
2 milliards de dépenses non prévues et
non budgétées. Il y a moins d'emplois prévus avec ce plan que ce qui était
prévu en novembre.
Est-ce
qu'elle s'interroge sur ce que pensent les gens à New York, oui ou non?
Le
Président : Mme la première ministre.
Mme Pauline Marois
Mme
Marois : Alors,
nous connaissons bien, très bien les attentes des agences de crédit, M. le
Président. Sous tous les gouvernements — d'ailleurs, il devrait s'en
souvenir — ce sont exactement les mêmes critères qui sont attendus de nous, comme c'était
le cas pour l'ancien gouvernement. Il y a deux critères majeurs qui préoccupent
les agences. C'est le contrôle des
dépenses. Ça, c'est fondamental parce que c'est la façon de dire : Vous
prenez un engagement, vous le respectez, vous êtes des gens sérieux, vous êtes des gens responsables. Ce ne fut pas le
cas du gouvernement libéral qui nous a précédés, M. le Président. Un. Deux, le
fait qu'on s'attaque à la réduction de la dette, ça, c'est le deuxième critère,
M. le Président. Et, dans tous les cas, nous allons… nous avons…
Le
Président : En terminant.
Mme
Marois :
…respecté et nous allons respecter les engagements pris à l'égard de la
population québécoise.
Le
Président : Troisième complémentaire, M. le chef de
l'opposition.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier : Bien, je
note qu'elle n'a rien dit sur le premier engagement qui a été noté par les
agences de crédit, c'est l'engagement à l'équilibre. Elle n'a aucun mot là-dessus, M. le
Président. Elle parle du contrôle des dépenses. Dans les trois premiers
mois, il y a une perte de contrôle de 40 %, mais, pire encore, pire :
2 milliards de dépenses non budgétées à novembre, annoncées dans le plan
panique.
Je lui pose la question : Est-ce qu'elle
a discuté avec son ministre des Finances de la cote de crédit du Québec devant ce changement de cap et ce fiasco budgétaire?
Le
Président : Mme la première ministre.
Mme Pauline Marois
Mme
Marois : Je
crois que la mémoire du chef parlementaire de l'opposition officielle est un
peu courte, hein, parce que non seulement nous
sommes arrivés au gouvernement en constatant que nous avions malheureusement à
résoudre un problème de 1,6 milliard laissé par l'ancien gouvernement,
mais en plus la dette sous le gouvernement libéral qui nous a précédés a
augmenté de 30 %, M. le Président. Ils sont responsables d'un tiers de
toute la dette accumulée depuis 40 ans, M. le
Président. Ça, c'était la gestion, la gestion d'un gouvernement du Parti
libéral. Nous avons agi de façon responsable…
Le
Président : En terminant.
Mme
Marois : …nous allons continuer à le faire, j'en prends
l'engagement, M. le Président.
Le
Président : Principale, M. le député de Brome-Missisquoi.
Information sur les revenus et les
dépenses des
organismes autres que budgétaires et des fonds spéciaux
M. Pierre Paradis
M.
Paradis : M. le Président, ce que l'on sait maintenant,
c'est que le déficit pour l'année en cours s'élève à quelque 2 milliards de dollars. Ce que l'on ignore, c'est l'effet
aggravant sur ce déficit des résultats réels des 62 organismes gouvernementaux dits non budgétaires. À titre
d'exemple : l'agence des transports, l'Agence du revenu,
Infrastructure Québec, etc.
Le 2 octobre dernier, la Commission des
finances publiques a demandé au ministre des Finances de luicommuniquer ces
informations. Hier, le député de Lévis a déposé la lettre de refus signée par
le chef de cabinet du ministre. De toute évidence, hier, le ministre
n'était pas au courant.
Maintenant qu'il l'est, va-t-il donner suite
à la demande de la commission et lui transmettre l'état financier réel, au 30 juin, des 62 organismes gouvernementaux?
Le
Président : M. le ministre des Finances.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : M. le Président, j'invite le député de
Brome-Missisquoi à un peu de patience, de deux façons. La première, c'est
qu'évidemment je ferai avec plaisir... j'irai rencontrer les membres de la
Commission des finances publiques pour
discuter de l'état des finances publiques. Et, deuxièmement, je veux aborder de
front la question qu'il me pose, c'est sur la question, donc, des
organismes autres que budgétaires et puis des fonds spéciaux.
Maintenant, vous n'êtes pas sans savoir
qu'entre autres du côté des organismes autres que budgétaires plusieurs de ces
organismes sont dirigés par des conseils d'administration qui sont imputables,
et de demander à ces organismes de fournir
sur une base régulière des informations de cette nature imposerait un fardeau
extrêmement lourd. En fait, ce qu'il faut
comprendre, c'est que l'exercice de reddition de comptes des organismes autres
que budgétaires et des fonds spéciaux, depuis deux ans, se fait au
moment des crédits. J'ai promis, lorsque nous étions en commission
parlementaire, d'améliorer la reddition de
comptes, et c'est ce qui sera fait aux prochains crédits, aux mois de mars et
avril prochains.
Cela étant, de fournir ces informations-là
sur une base mensuelle imposerait un fardeau complètement démesuré. Et, par
ailleurs, je veux terminer en disant : L'état des finances publiques sera
rendu public au moment de la mise à jour...
Le
Président : En terminant.
M.
Marceau : ...et vous en saurez un peu plus sur chacun de ces
éléments. Merci.
•
(10 h 30) •
Le
Président : Première complémentaire, M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Pierre Paradis
M.
Paradis : Oui,
M. le Président. Les membres de la Commission des finances publiques savaient
tout ça, y inclus les membres péquistes qui
ont voté en faveur de ladite motion.
Ce que l'on sait, M. le Président, est
inquiétant. Les revenus des sociétés d'État ne sont pas au rendez-vous, ni chez Hydro, ni à la Société des alcools, ni à
Loto-Québec.
L'échec du ministre de la Santé quant à la
révision de l'entente avec les médecins a coûté quelque 100 millions de dollars. La hausse de la taxe sur le
tabac, qui devait rapporter 130 millions, a plutôt fait augmenter la
contrebande, aux dires même du secrétaire général du gouvernement.
Combien
d'autres mauvaises nouvelles économiques...
Le
Président : M. le ministre des Finances.
M. Nicolas Marceau
M.
Marceau : Il faut quand même le faire, M. le Président, de la
part d'un gouvernement... d'un membre de l'ancien
gouvernement libéral qui a effectivement signé des ententes qui imposent
aujourd'hui des pressions gigantesques sur nos finances publiques. Il
faut quand même le faire, M. le Président. Ça n'a aucun sens.
Et, pour le reste, écoutez, on a des procédures de reddition
de comptes qui font du gouvernement du Québec
un des gouvernements les plus transparents
en information. La qualité de l'information qui est fournie par le
gouvernement du Québec est parmi les
meilleures qu'on puisse trouver. Et nous allons publier, en temps et lieu, la
mise à jour qui fera l'état sur les finances publiques.
D'ici là, il y aura la
publication des comptes publics qui donneront un aperçu qui...
Le Président :
En terminant.
M. Marceau :
...vérifié de l'état des finances publiques pour 2012‑2013, et j'ai hâte d'en
discuter avec mes collègues, M. le Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre Paradis
M.
Paradis : Oui, M. le Président. Vous vous souviendrez que
c'est le même ministre des Finances qui a
utilisé à peu près tous les trucs pour bloquer l'intervention du Vérificateur
général à son ministère.
Maintenant,
il utilise toutes les excuses, les prétextes, les faux-fuyants, les stratagèmes
pour éviter de donner suite à une demande légitime
d'une commission parlementaire.
Pourquoi le ministre
des Finances fait autant d'efforts pour ne pas rendre ces chiffres publics, autant que la FTQ en a fait pour ne pas rendre
l'écoute électronique publique?
Le Président : M. le ministre
des Finances.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau : M. le Président,
les grands champions des trucs, des subterfuges, ils sont l'autre côté, M. le
Président. Le député de Brome-Missisquoi, pas plus tard qu'il y a deux, trois
semaines, nous a dit qu'il y avait de la comptabilité créative chez eux et
qu'ils l'avaient fait lorsqu'ils étaient au pouvoir, M. le Président. C'est le
député de Brome-Missisquoi. Je vous
trouverai les informations dans les galées que nous avons des travaux de notre
Assemblée.
Alors, écoutez, M. le Président, nous sommes
transparents, nous allons fournir les informations. Puis je vais finir sur le
Vérificateur général en disant que nous collaborons pleinement avec le
Vérificateur général pour qu'il puisse vérifier les processus et la mise à jour
que nous allons déposer prochainement. Merci.
Le Président : Principale, M.
le député de Lotbinière-Frontenac.
Décentralisation des pouvoirs
décisionnels en matière municipale
M. Laurent Lessard
M.
Lessard :
Dans le milieu municipal, la confiance des élus envers le gouvernement péquiste
s'effrite sans arrêt. Le constat est désolant.
Le ministre
des Finances a été incapable de conclure une entente d'autonomie fiscale pour
les sept prochaines années. Conséquence annoncée : augmentation de
taxes en janvier prochain pour le monde municipal.
La ministre
des Ressources naturelles a saccagé six projets de minicentrales… des projets
structurants pour les milieux locaux,
pourtant un bel exemple de collaboration avec les communautés autochtones. Elle
a tourné le dos aux citoyens de Baie-Comeau et de Sept-Îles en
localisant le secrétariat nordique à Québec.
La première ministre et la ministre de
l'Éducation, elles, ont décidé de mettre sous examen la gouvernance décentralisée des commissions scolaires sous la
menace de les démanteler parce qu'elles ne se plient pas à leur volonté.
Quelle
crédibilité reste-t-il au ministre des Affaires municipales pour aller vers une
décentralisation des pouvoirs quand
son gouvernement pose des gestes, au quotidien, de rupture avec des élus
locaux, brisant leurs espoirs et réduisant à néant leurs efforts?
Le Président : M. le ministre
des Affaires municipales.
M. Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui, M. le Président, je remercie le député de
Lotbinière-Frontenac pour sa question parce que ça me permet de rappeler que, dans l'histoire du Québec, les
gouvernements de la décentralisation ont toujours été des gouvernements du Parti québécois. Ai-je besoin de
rappeler ici la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme du gouvernement
Lévesque? Ai-je besoin de rappeler la création des MRC, également sous le
gouvernement Lévesque, qui ont marqué le
territoire de façon très importante en matière de décentralisation et qui sont
des richesses exceptionnelles au Québec, aujourd'hui?
Dans cette foulée, le gouvernement
actuel, M. le Président, s'inscrit dans la même logique, dans la même
tradition. C'est pour ça que, pour la
première fois, on a un sous-ministre associé à la décentralisation, ce qui est
quand même assez exceptionnel, M. le
Président. Et par ailleurs, comme le député de Lotbinière-Frontenac le
sait très bien, lors des dernières assises
de la FQM, j'ai annoncé des projets, des initiatives en matière de décentralisation,
autant en transport collectif… C'est
une des richesses, d'ailleurs, d'avoir à la fois le ministère des Transports et
des Affaires municipales. On va faire des projets de décentralisation
très concrets en matière de transports.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Frontenac-Lotbinière.
M.
Laurent Lessard
M.
Lessard : La loi sur la vitalité des territoires indique que
le ministre des Affaires municipales doit faire rapport de l'action des
ministères en matière de régionalisation et de décentralisation. Dans le
rapport du ministre, déposé récemment, aucune modulation de programmes de
logements sociaux pour les petites communautés,
aucune adaptation de la politique de
transport collectif pour stabiliser le financement malgré les baisses de clientèles, aucune régionalisation du
financement pour le branchement des communautés rurales non desservies.
Le ministre des
Affaires municipales, lui, a-t-il encore confiance dans les élus des régions?
Le Président :
M. le ministre des Affaires municipales.
M.
Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : Oui, M. le Président, j'ai extrêmement confiance
envers les élus des régions. Je suis moi-même un député issu d'une région. Je peux vous dire que je travaille en collaboration
étroite avec les élus des régions. Mais ce qu'il est très important de
dire, c'est que le député qui vient de se lever a été ministre pendant
plusieurs années des Affaires municipales,
des Régions et de l'Occupation du territoire, et il n'y a eu aucun, aucun effort en décentralisation,
concret, de fait. Nous, depuis un an, on est en action à cet égard.
D'ailleurs,
j'ai annoncé également, lors des assises de la FQM, un programme
spécial pour adapter la réalisation des
infrastructures pour les municipalités de 2 000
habitants et moins. Ça, c'est un geste fort de décentralisation, M. le
Président.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Frontenac-Lotbinière.
M.
Laurent Lessard
M.
Lessard : J'ai une citation. Je cite : «…il est pour le
moins difficile d'avoir confiance aux élites régionales dans leur quête de l'objectif ultime : la
décentralisation des pouvoirs décisionnels en matière de ressources
naturelles. Je vous le dis tout net :
je n'ai aucunement le goût de confier à Bernard Généreux, Serge Simard ou, pis
encore, Jean Tremblay, la gestion des forêts et des cours d'eau de la
région.» L'auteur, en 2006, l'actuel ministre des Affaires municipales.
Avez-vous le bon gars
à la bonne place, Mme la première ministre?
Le Président :
M. le ministre des Affaires municipales.
M.
Sylvain Gaudreault
M.
Gaudreault : M. le Président... M. le Président, je suis
extrêmement convaincu de la décentralisation. J'ai toujours eu
l'occasion de l'affirmer et je vais continuer de le répéter. Nous sommes en
action avec les associations municipales
pour rédiger une loi-cadre sur la décentralisation, ce qui sera une première,
ce qui sera une première dans l'histoire
du Québec, M. le Président. Nous travaillons en concertation avec les acteurs
du milieu pour avoir des gestes concrets, pas juste des belles paroles
comme c'était le temps... comme c'était la situation dans le temps des
libéraux, M. le Président.
Le Président :
Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
Protection des sièges sociaux
des firmes de génie-conseil
M.
François Legault
M.
Legault : M. le Président, le Québec a la chance d'avoir des
firmes de génie-conseil qui sont parmi les plus grandes au monde. Malheureusement,
certaines de ces firmes ont participé à des activités illégales et se
retrouvent aujourd'hui en difficultés financières. La présidente de
l'Association des ingénieurs-conseils du Québec nous dit, ce matin, et je la
cite : Les firmes québécoises de génie «risquent de toutes être avalées
par des entreprises étrangères».
M. le Président, vous savez ma grande
préoccupation pour préserver les sièges sociaux au Québec. Je pense que le nationalisme, ça passe d'abord par le
nationalisme économique, et le plus grand gain de la Révolution tranquille,
c'est d'avoir repris le contrôle de notre économie.
Or,
au cours des dernières années, on a perdu plusieurs grands sièges sociaux sans
que le gouvernement libéral lève le
petit doigt. M. le Président, c'est pour sauver ces sièges sociaux qu'à
plusieurs reprises, dès le printemps dernier, on a proposé au gouvernement de s'asseoir immédiatement
avec les grandes firmes de génie, de demander un remboursement des sommes volées pour qu'on puisse recommencer à
soumissionner, qu'on puisse sauver des milliers d'emplois de qualité.
Donc, ce matin, ma
question, très simple, à la première ministre : Est-ce qu'elle peut nous
dire si, enfin, aujourd'hui, son gouvernement est en négociation avec les
grandes firmes de génie québécoises?
Le Président :
Mme la première ministre.
Mme
Pauline Marois
Mme
Marois : Nous ne sommes pas en négociation avec les grandes
firmes de génie québécoises, M. le Président, pour répondre à la
question directement du chef du deuxième groupe d'opposition. Cependant, nous
sommes à étudier des façons de mieux
soutenir nos grandes firmes de génie-conseil, comme les grandes sociétés
québécoises, parce que je partage essentiellement
le même point de vue que le chef du deuxième groupe d'opposition quant à
l'importance de conserver au Québec nos sièges sociaux. Et, en particulier,
quand on pense à ces grandes firmes de génie-conseil qui font travailler des
milliers de personnes à travers le Québec, qui ont développé des compétences
exceptionnelles, qui travaillent sur tous les continents du monde, je crois que
nous avons tout intérêt à travailler dans cette perspective-là.
Cependant,
évidemment, malheureusement, l'ancien gouvernement a laissé traîner une
situation qui a généré de la collusion
dans le domaine de la construction et comportant… concernant entre autres, pardon, des firmes de génie-conseil.
Notre
premier geste a été d'adopter la loi n° 1 pour nous permettre d'introduire
de l'intégrité dans la gestion des contrats
publics, M. le Président. On a vu le témoignage de certains représentants
de ces firmes devant la commission Charbonneau,
qui se sont incriminés eux-mêmes quant au fait qu'ils ont participé à des activités
de collusion. La loi n° 1 s'applique maintenant. Elle est très
exigeante à l'égard des firmes de génie-conseil. Nous croyons que c'est
essentiel d'agir en ce sens-là. Cependant,
l'AMF exige de la part de ces entreprises qu'elles nettoient leurs bilans,
qu'elles posent des gestes pour corriger la situation…
• (10 h 40) •
Le Président :
En terminant.
Mme
Marois :
…et, sur cette base-là, évidemment, elles
retrouveront leur réputation, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M.
François Legault
M. Legault :
M. le Président, soyons bien concrets, là, on n'est plus au moment des comités.
Ce matin, on apprend qu'il y a deux firmes hors Québec qui veulent acheter
Dessau, une des plus grandes firmes québécoises, un fleuron québécois.
Donc,
qu'est-ce que la première
ministre attend pour que son gouvernement s'assoie avec Dessau pour rembourser les sommes volées pour
qu'ils puissent commencer à soumissionner sur les nouveaux contrats?
Le Président :
Mme la première ministre.
Mme
Pauline Marois
Mme
Marois : Bon. D'abord, nous
avons fait les choses dans l'ordre. Je rappelle au chef du deuxième
groupe d'opposition, nous avons adopté la
loi n° 1. Nous avons été plus exigeants, et très exigeants vis-à-vis les
firmes qui avaient été associées à des gestes impliquant de la
collusion, M. le Président.
Nous avons indiqué
quelles étaient — et c'est l'Autorité des marchés financiers
qui l'a fait, évidemment — quellesétaient les exigences auxquelles devaient répondre ces firmes de
génie-conseil pour justement leur donner la possibilité de s'amender et d'être capables de retrouver la
capacité de soumettre pour des contrats dans le domaine public,
parapublic ou autre, M. le Président.
Et,
troisièmement, à la question spécifique du chef du deuxième groupe
d'opposition…
Le Président :
En terminant.
Mme
Marois :
…nous travaillons sur cet enjeu et, d'ici quelques jours, nous déposerons un
projet ici, à l'Assemblée nationale…
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, ma question est claire, là. Pendant que la première ministre
travaille sur sa charte, on risque, dans les
prochains jours, de perdre des sièges sociaux
importants. Est-ce qu'elle peut comprendre que l'indépendance, ça
passe d'abord par l'indépendance économique? C'est quoi, son plan de match?
Le Président :
Mme la première ministre.
Mme
Marois :
Je suis, encore une fois…
Des voix :
…
Le Président :
S'il vous plaît! Mme la première ministre.
Mme
Pauline Marois
Mme
Marois : Je suis, encore une fois, d'accord avec le chef du deuxième groupe d'opposition. Nous sommes pour l'indépendance du Québec, M. le Président,
et, je veux le rassurer, nous sommes capables de faire deux ou trois
choses en même temps, M. le Président.
Alors,
je le redis au chef du deuxième groupe d'opposition, nous sommes à préparer un
projet de loi pour permettre aux entreprises de pouvoir verser dans un
fonds des sommes leur permettant, dans le
fond, de corriger les gestes qu'ils ont
posés en matière de collusion, un. Deuxièmement, il y a un groupe de travail
qui a été mis en place sur la protection des sièges sociaux, M. le
Président.
Le Président :
Principale, M. le député de Lévis.
Demande de publication des
revenus
et des dépenses des organismes autres
que budgétaires et des fonds spéciaux
M.
Christian Dubé
M.
Dubé : Alors, M. le Président, j'apprécie beaucoup
l'intervention de mon collègue député de Brome-Missisquoi sur la
question et, en fait, la demande qui a été déposée
hier.
Des voix :
…
M. Dubé :
Est-ce que je peux avoir un peu de silence, M. le Président, s'il vous plaît? O.K., merci.
Alors, très clair, le ministre des Finances a eu 24 heures pour
regarder comme il faut la lettre. Je veux apporter deux précisions, M. le Président. Tout à l'heure,
ce qu'il a déclaré, ce n'est pas exact, ce n'est pas une demande qu'on a
faite à tous les mois, il faut qu'il relise
la lettre. On a demandé de l'information aux trois mois sur les organismes
budgétaires et fonds spéciaux qui représentent à peu près 30 milliards du 90 milliards du budget.
Je
vais être très clair, M. le Président, il a lu la lettre, il a eu
24 heures, est-ce que c'est oui ou non s'il va fournir les
documents la semaine prochaine?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M.
Nicolas Marceau
M.
Marceau : Bien, je pense que le député de Lévis a déjà reçu une
réponse. J'ai répondu tout à l'heure au député de Brome-Missisquoi et je
reréponds la même chose. Le fardeau que ça imposerait de demander à nos
organismes autres que budgétaires de fournir
cette information, que ce soit sur une base mensuelle ou trimestrielle, est un
fardeau qui serait beaucoup trop exigeant.
En
fait, il faut voir les progrès qui ont été faits quant à la reddition de
comptes ces dernières années, et progrès que je me suis engagé à
poursuivre lorsque nous étions en commission parlementaire.
Lorsque
nous ferons les crédits en mars, avril prochains, ou après le dépôt du budget,
j'aurai l'occasion… nous aurons
l'occasion de fournir un rapport détaillé sur l'évolution des dépenses et des revenus de nos fonds spéciaux, de nos
organismes autres que budgétaires. Il faut voir qu'il n'y a pas besoin de
remonter très, très loin dans le temps pour trouver une époque où ces
informations-là n'étaient pas du tout disponibles.
Et
je comprends la soif d'information du député de Lévis. Maintenant, je lui
dis : Il y a des informations qu'on peut obtenir sur une base
régulière, mensuelle ou trimestrielle, d'autres pour lesquelles le fardeau
serait vraiment trop imposant. Ça imposerait aussi des difficultés parce qu'il
y a des conseils d'administration qui doivent autoriser la divulgation
d'informations. Donc, ça imposerait des contraintes. Et je pense qu'il vaut
mieux attendre une fois par…
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Lévis.
M.
Christian Dubé
M.
Dubé : M. le Président, je me permets d'insister, pour une
raison très simple. Tout à l'heure, j'ai entendu la première ministre
qui dit qu'ils respectent les cibles — vous l'avez tous
entendue — qu'ils
vont respecter les cibles budgétaires des
dépenses. Le problème qu'on a, c'est qu'ils ne donnent pas la finance complète.
Lorsqu'on regarde les organismes budgétaires, ils sont à l'extérieur de
ce…
Alors,
ce qui arrive, c'est que la première ministre, comme le ministre des Finances
et les autres ministres disent : On respecte nos engagements. Mais
on ne donne pas l'image complète. Alors, ce qui est important, c'est de
dire : Donnez-nous l'image complète. Et, M. le Président, je vous demande
d'insister au niveau…
Le Président :
M. le ministre des Finances.
M.
Nicolas Marceau
M.
Marceau : Écoutez, M. le Président, l'information que le
gouvernement du Québec fournit est une information de qualité. Nous sommes transparents, nous allons
continuer dans cette direction. À chaque mois, il y a un mensuel des opérations financières qui est publié, il y a des
comptes publics, il y a une mise à jour économique une fois… enfin, il y
a un budget puis, six mois plus tard, il y a une mise à jour économique. M. le
Président, nous faisons des…
Nous
nous améliorons toujours. Je suis toujours favorable à ce que nous nous
améliorions. Cependant, il y ades limites à ce que nous pouvons faire. Et fournir
une information régulière sur ce qui se passe dans nos organismes autres que…
non… pardon, nos organismes autres que budgétaires, ça imposerait un fardeau
démesuré, M. le Président. Je pense que…
Le Président :
En terminant.
M. Marceau :
…ça ne peut pas être plus simple que ça. Je suis désolé pour le député de
Lévis, il va falloir attendre en…
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Lévis.
M.
Christian Dubé
M.
Dubé : M. le Président, je vais terminer là-dessus. Cette
information-là, elle est disponible. J'ai déjà rencontré des
fonctionnaires qui me disent qu'elle est disponible.
Et
je compléterais sur le point suivant. Comment peut-on dire aux citoyens, aux
députés et surtout à tous les députés qui étaient en Commission des
finances publiques que cette information-là va être donnée? Moi, je vous le
demande. La lettre que j'ai déposée hier,
elle est signée par le directeur du cabinet. Qui décide au ministère des
Finances, le directeur du cabinet ou le ministre des Finances?
Le Président :
M. le ministre des Finances.
Des voix :
…
M.
Nicolas Marceau
M. Marceau :
O.K…
Des voix :
…
M. Marceau :
Pardon?
Des voix :
…
M. Marceau :
Non, je l'ai, la lettre. Je l'ai, la lettre. M. le Président, la réponse a été
signée par mon chef de cabinet, après consultation, et…
Des voix :
…
M. Marceau :
…je ne vois pas ce qu'il y a à dire de plus que cela. Je réitère ce que j'ai
dit. Le processus de reddition de comptes, pour nos organismes autres que budgétaires,
pour nos fonds spéciaux, est un processus qui s'est… ça s'est amélioré
et ça doit continuer. Maintenant, il y a des limites à ce que nous pouvons
faire.
Nous
allons par ailleurs dresser un état des finances publiques complet
lorsque nous déposerons la mise à jour d'ici la mi-décembre. Et, jusque-là, M.
le Président, je suis prêt à
comparaître devant la commission pour discuter avec le député de Lévis. Je pense qu'il va falloir que je lui explique
un certain nombre de choses…
Le Président : En terminant.
M. Marceau :
…sur le fardeau que ça pourrait imposer d'aller dans…
Le Président : Principale, Mme
la députée de Bourassa-Sauvé.
Nouvelle politique de partage des
renseignements personnels chez Bell Canada
Mme Rita de Santis
Mme de Santis : M. le
Président, ma vie privée
m'appartient, mes renseignements
personnels m'appartiennent. On apprend que Bell va collecter et partager
les données de navigation Internet ainsi que notre historique d'appels
téléphoniques. La Commission de l'accès à l'information a soulevé des
inquiétudes concernant cette pratique. Le consentement demandé par Bell ne correspond pas à ce qui est
spécifié par la loi québécoise, un consentement
manifeste, libre, éclairé et donné pour des fins spécifiques.
Bell veut
modifier unilatéralement le contrat qui le lie avec ses clients. Comme
citoyenne, je suis inquiète que mes renseignements puissent être collectés et partagés sans mon consentement explicite. Et ces informations pourraient bien se retrouver entre les
mains de personnes avec qui je ne veux pas partager mes renseignements
personnels.
M. le Président, dans l'absence du ministre
responsable de l'accès à l'information, est-ce que le ministre de la Justice
peut nous assurer comment va être protégée la vie...
• (10 h 50) •
Le Président : Oui. Alors,
pour notre collègue, on ne mentionne jamais l'absence d'un collègue ici, à
l'Assemblée. Mais...
Une voix : …
Le
Président : Non, non, je sais. C'est pour ça que je n'en prends
pas outrage. Mais je vais demander au ministre de la Justice de répondre
à votre question. M. le ministre de la Justice.
M. Bertrand St-Arnaud
M.
St-Arnaud : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président,
c'est une question importante. Cela dit, effectivement, comme l'a dit la
députée, c'est une question qui relève de mon collègue ministre responsable des
Institutions démocratiques qui est responsable de la Commission d'accès à
l'information.
Même si j'ai
eu, dans un passé pas si lointain, la responsabilité, dans l'opposition, d'être
notamment le porte-parole eu égard à
la Commission d'accès à l'information et d'avoir des échanges fort intéressants
avec l'actuel leader parlementaire de l'opposition sur toutes ces
questions, je pense qu'il serait préférable, M. le Président, d'attendre la présence du ministre responsable de cette question
pour aborder ce sujet extrêmement sérieux, extrêmement important.
Et, en conséquence, M. le Président, nous allons
prendre avis de la question, et mon collègue pourra répondre à la députée à la
prochaine séance, mardi prochain, M. le Président.
Le Président :
Complémentaire, M. le député d'Orford.
M. Pierre Reid
M.
Reid :
Merci, M. le Président. Il s'agit de matière contractuelle du droit civil de
responsabilité québécoise. Les organismes Option Consommateurs et Union
des consommateurs s'inquiètent de la nouvelle pratique de Bell. Philippe Viel de l'Union des consommateurs
dit : On est très déçus de la façon de faire de Bell. La collecte et le
partage des données doivent se faire dans le cadre des lois, mais il faut que
ces pratiques soient dans le meilleur intérêt des consommateurs québécois.
M. le
Président, par quel geste concret le ministre de la Justice, responsable de la
protection des consommateurs, va-t-il s'assurer de protéger les
consommateurs québécois?
Le Président : M. le ministre
de la Justice.
M. Bertrand St-Arnaud
M. St-Arnaud : Il va sans
dire, M. le Président, que nous allons assurer la protection des consommateurs québécois. J'aurai l'occasion... nous aurons
l'occasion, la semaine prochaine, M. le Président, lors de la réponse que
mon collègue des Institutions démocratiques répondra sur toute cette
problématique qui a été mise de l'avant par la députée de Bourassa-Sauvé dans la question principale, nous aurons
l'occasion de donner une réponse plus élaborée. Nous avons pris avis de la question de la députée de
Bourassa-Sauvé, et fera partie de cette réponse une partie... une
réponse à la question du député d'Orford, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député d'Orford.
M.
Pierre Reid
M.
Reid : M. le Président, il s'agit de la protection de
consommateurs, et, sur le terrain, les consommateurs sont inquiets. La Presse cite M.
Lucien Trudelle, un client de Bell, et qui dit : «Je ne veux pas que mes
informations personnelles soient
partagées, mais je ne sais pas comment le dire à Bell. L'option pour se retirer
n'est pas tellement explicite — il y a
deux choix, mais on n'explique pas ce qu'ils impliquent.»
M.
le Président, je veux être certain que le ministre de la Justice pose des
gestes bien concrets pour s'assurer que M. Trudelle et tous les
consommateurs québécois soient protégés.
Le Président :
M. le ministre de la Justice.
M.
Bertrand St-Arnaud
M. St-Arnaud :
M. le Président, je remercie à nouveau le député d'Orford de sa question. Nous
aurons l'occasion… et j'ai eu l'occasion de le dire précédemment, nous avons
pris avis de cette question et nous aurons l'occasion de revenir là-dessus, de
donner une réponse élaborée en long et en large à la question de la députée de Bourassa-Sauvé et aux deux questions
complémentaires du député d'Orford à la fin de la période des affaires
courantes, mardi prochain.
Le Président :
Principale, M. le député de La Peltrie.
Contamination de l'air au
nickel
dans le quartier Limoilou, à Québec
M.
Éric Caire
M.
Caire :
Merci, M. le Président. On apprend, ce matin, par Mathieu Boivin, au FM 93, que
le certificat de non-conformité émis contre Arrimage Québec repose sur un
rapport qui est faux.
Au
mois de mars, des échantillons sont pris chez Arrimage Québec et Xstrata,
échantillons de nickel. En avril, un rapport assassin est déposé par le
ministère, qui pointe nommément Arrimage Québec comme le seul responsable de la poussière de nickel dans Limoilou. Or, quand on
demande au ministère s'ils ont fait l'étude de la provenance du nickel,
la réponse est non. Pire, on apprend que l'échantillon de Xstrata ne s'est
jamais rendu au laboratoire. Donc, en pleine connaissance de cause, le
ministère continue son opération de sabotage contre Arrimage Québec.
On
demande au ministère de refaire les échantillons. Mme Boiteau, par lettre,
s'engage à le faire. Deux semaines plus
tard, quand on lui demande : Est-ce que c'est fait? Est-ce que votre
engagement écrit a été respecté?, elle répond : Vous savez, ce n'est
pas parce qu'on l'écrit qu'on le fait.
M. le Président,
devant ce déferlement d'incompétence...
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M.
Yves-François Blanchet
M.
Blanchet : M. le Président, l'épisode auquel réfère le
député de La Peltrie est un épisode supplémentaire dans une longue saga d'une relation extrêmement tendue
entre le ministère de l'Environnement et le Port de Québec, dont le plus
récent épisode était de restreindre l'accès aux inspecteurs du ministère de l'Environnement au site du Port
de Québec.
Or,
il est évident que, pour tirer au clair tous les aspects de la situation,
il faut avoir accès au site, il faut que les inspecteurs puissent aller
rencontrer les entreprises. Je m'explique mal, je
m'explique mal que des entreprises qui font des sorties
publiques de ce type-là ne fassent pas simplement preuve de bonne foi en ouvrant leurs portes, en recevant les inspecteurs et en échangeant des données avec eux, qui permettront, le
cas échéant, si c'est bien la réalité, de dédouaner qui que ce soit qui ne
devrait pas être pointé.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de La Peltrie.
M.
Éric Caire
M.
Caire : M. le Président, les inspecteurs du ministère ont eu plein accès aux compagnies en question.
Par contre, ce qu'on devrait peut-être
savoir, c'est que Xstrata est la seule
compagnie minière avec laquelle le gouvernement du Québec a réussi à
s'entendre, et bizarrement c'est l'échantillon qui a
été égaré.
Ce
qu'il faut savoir, c'est que Mme Lalande,
qui a démarré toute cette histoire-là, c'est la fille de Suzanne
Lalande, une ancienne attachée politique
de la ministre du Développement
économique. Ce qu'il faut savoir,
c'est que la porte-parole d'Arrimage Québec, c'est Johanne Lapointe, une
ancienne candidate de la Coalition avenir Québec…
Le Président :
M. le ministre de l'Environnement.
M.
Yves-François Blanchet
M.
Blanchet : J'ai malheureusement
moins de disponibilité que le député de La Peltrie pour écouter et
reproduire des séries policières américaines et avoir des complots de cette
envergure-là.
Mais moi, je vais dire de façon encore fort simple : Ce qu'il faut savoir, comme il dit si bien, c'est que le 8 octobre deux
inspecteurs du ministère de
l'Environnement se sont fait refuser
l'accès au site du Port de Québec
prétextant une juridiction fédérale,
ce qui est, d'après moi, tout à fait ridicule. Est-ce que le Port de Québec refuserait l'accès à son site à une
ambulance parce que l'ambulance relève du ministère de la Santé du Québec et
que le port est fédéral? C'est ridicule, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de La Peltrie.
M. Éric Caire
M.
Caire : M. le
Président, le ministre
sait très bien que, dans les opérations d'environnement, tous les inspecteurs ont plein accès au Port de Québec. Cette cause-là pour les inspections
administratives est devant les tribunaux.
M. le Président, est-ce quec'est la faute d'Ottawa
s'ils ont perdu l'échantillon de Xstrata? Est-ce que
c'est la faute d'Ottawa s'ils refusent de faire une reprise des
analyses? Est-ce que c'est la faute d'Ottawa si on s'essuie les pieds sur un fleuron québécois qui travaille dans
27 ports et qui emploie plus de 1 800 personnes? Encore une fois, est-ce que c'est une
opération politique?
Le Président : M. le ministre
de l'Environnement.
M. Yves-François Blanchet
M.
Blanchet :
M. le Président, c'est la faute d'Ottawa s'ils ne donnent pas une directive
claire, une directive claire à l'autorité du Port de Québec de donner
accès aux inspecteurs du ministère de l'Environnement. Il n'y a rien de fictif et d'imaginaire dans les épisodes de poussière
rouge, dans la pollution par la poussière à Québec, il n'y a rien de
fictif là-dedans. Et la preuve que ça se peut, c'est que le port de Montréal a dit, lui, à nos gens : Vous
venez chez nous quand vous voulez, nous
allons collaborer avec le ministère de l'Environnement. Si ça se peut à
Montréal, ça se peut à Québec, M. le Président.
Le Président : Principale, M.
le député de Chomedey.
Conflit de travail dans l'industrie de la construction
M. Guy Ouellette
M.
Ouellette :
M. le Président, il y a deux semaines, j'ai interpellé ici, en Chambre, la
ministre du Travail au sujet des
impacts négatifs que la grève de la construction de juin dernier a eus sur l'économie du Québec. Fidèle à ses
habitudes, la ministre du Travail n'a même pas daigné se lever pour répondre à
ma question, montrant par le fait même son indifférence ainsi que celle de son
gouvernement face aux travailleurs de la construction.
Je tiens à
redire à la ministre que les deux semaines de grève
ont coûté aux Québécois 205 millions. Les mises en chantier ont baissé de façon dramatique.
L'économie est en panne. Le Québec a contribué au recul de la construction au
pays.
Est-ce que la ministre du Travail peut enfin
prendre son rôle au sérieux et nous confirmer le retour à la table de
négociation des deux parties, patronale et syndicale?
Le Président : Mme… M. le
ministre du… M. le ministre des Finances.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau : Le collègue a
évoqué la question de l'impact économique de la grève,
et je pense que c'est nécessaire d'y
répondre. Pas plus tard qu'hier, M. le Président, l'Institut de la statistique
du Québec a publié les résultats pour
le mois de juillet, et ce qu'on a pu voir, c'est que l'économie du Québec a
progressé de 1,4 %, en juillet, tel que nous l'avions dit, d'ailleurs — je crois que nous avions été très clairs
là-dessus — ce qui
est meilleur qu'au Canada. Même chose du côté des exportations. Les
exportations, on a appris, pour le mois d'août, ont
augmenté de 6,6 %.
Des voix : …
M. Marceau : Bien, regardez, non, mais je…
Le Président : M. le leader
de l'opposition.
M. Moreau : M. le Président,
l'article 79…
Des voix : …
M. Moreau :
Est-ce que je peux terminer? L'article…
Des voix : …
M. Moreau : L'article…
Des voix : …
Le
Président : Il n'y a qu'une
personne, là, qui a le droit de parole. Vous avez demandé
une question de règlement. M. le
leader de l'opposition.
• (11 heures) •
M. Moreau :Merci. M. le Président, article 79. Il
n'a pas adressé un seul mot qui touche à la question qui lui a été posée. C'est
le retour aux négociations par les gens des syndicats, il est en train de nous
parler...
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M. St-Arnaud : M. le Président, sur l'intervention du leader
parlementaire de l'opposition, au contraire, M. le Président,
la question portait sur la situation économique découlant de la grève de la fin
juin, et mon collègue parle des chiffres de
juillet qui ont été révélés hier et qui démontrent que le Québec a
une performance exceptionnelle, M.
le Président.
Le Président :
Bon, M. le ministre des Finances, s'il vous plaît.
M. Marceau :
Et, M. le Président, j'ajouterais que, pour juger de la qualité de la réponse
que je formule, il faudrait attendre que je
l'aie terminée, me semble-t-il, parce que peut-être, peut-être que les 15
dernières secondes porteront plus précisément sur l'impact de la grève.
Et c'est là-dessus que j'aillais.
Des voix :
...
M.
Marceau : Parce que ce que j'allais dire, ce que j'allais dire,
et que nous avons déjà dit, et qui... c'est qu'il est encore trop tôt,
il est encore trop tôt pour évaluer l'impact de la grève parce que des
constructions qui devaient se réaliser fin juin vont se réaliser en juillet, en
août, en septembre, et ainsi de suite, jusqu'à la fin de l'année.
Le Président :
En terminant.
M. Marceau :
Ce qu'on sait d'ores et déjà, c'est que l'économie du Québec se portait très
bien en...
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Chomedey.
M. Guy Ouellette
M.
Ouellette : M. le Président, il est vraiment navrant de voir
l'insouciance de la ministre du Travail. J'ai ici en main une lettre du 25 septembre, et reçue par les
syndicats, demandant à la ministre le retour, le plus vite possible, à
la table des négociations. Je vais la déposer pour en informer la ministre.
M.
le Président, je vais, encore une fois, répéter ma question : Pourquoi
refuse-t-elle d'agir? Est-ce que ce serait pour aider ou pour protéger
certains de ses amis, les syndicats de la FTQ-Construction?
Document déposé
Le Président :
Consentement pour le dépôt? Consentement pour le dépôt? Consentement pour le
dépôt. Mme la ministre de l'Emploi.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais :
On sait que le Parti libéral n'aime pas les associations de travailleurs,
puisque, d'ailleurs, le porte-parole a déjà
accusé ceux-ci d'avoir — à mots couverts — fait un appel à la bombe au CUSM, alors que
c'était un entrepreneur. Il n'a toujours pas fait ses excuses.
Dès
le mois d'août, la Direction générale des relations de travail du ministère du
Travail a contacté les deux parties et
a fait des rencontres avec et les associations syndicales d'un côté et les
associations patronales de l'autre pour préparer la table de
négociation. Comme ça avait été très tendu, au point que ça se rende jusqu'à
une grève, ce qui ne s'était pas vu depuis 20 ans, les deux parties ont demandé
d'avoir un délai avant de reprendre les négociations.
Le
Président : En terminant.
Mme
Maltais : À cet effet, j'ai nommé le médiateur spécial, M. Normand
Gauthier, pour qu'il fasse reprendre les négociations de...
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député...
Une voix :
...
Le Président :
Principale? Principale. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
Commission spéciale d'examen
des
événements du printemps 2012
M. Robert Poëti
M. Poëti :
M. le Président, tout le monde était d'accord, sauf le ministre de la Sécurité
publique. La création de la commission bidon
Ménard est partisane, sans pouvoir autre que celui de blâmer les autres, comme
ce gouvernement le fait à répétition depuis qu'il est en place. Cette
commission n'aurait jamais dû commencer. Délai inattendu dès le début du supposé mandat. On devait commencer en
juin, mais, voilà, les deux seules personnes qui avaient hâte d'y aller n'y sont pas : Gabriel est en voyage, Martine
est à la plage. On reporte en septembre le sérieux comité. Il travaillera
cet été quand même, parcourant rues et ruelles de Montréal pour trouver
quelqu'un qui veut se plaindre.
Les
travaux ont commencé en septembre, et le président Ménard a déjà un
questionnement important, et je le cite : Comment se fait-il qu'il n'y a pas plus de toilettes chimiques dans les
postes de police? N'ayant pas encore de réponse, il demande une
prolongation du mandat.
M. le Président, le
ministre de la Sécurité publique peut-il nous dire combien cette comédie
burlesque a coûté aux citoyens québécois?
Le Président :
M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron : M. le Président, le seul, ici, à se livrer à une
comédie burlesque, c'est le député de Marguerite-Bourgeoys. M. le
Président, je trouve extrêmement dommage que le député de Marguerite-Bourgeoys
se livre à une telle diatribe contre les
travaux qui ont cours présentement au niveau de la commission spéciale d'examen
des événements du printemps 2012
parce que, s'il s'était donné la peine d'écouter les audiences depuis quelques
jours, il aurait vu qu'il y a des propos extrêmement pertinents qui s'y
disent.
Alors,
moi, j'ai confiance dans le travail de cette commission, dans le travail des
membres de cette commission, et on va attendre les conclusions avant de
présumer de ce que seront ces conclusions.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Robert Poëti
M.
Poëti : M. le Président, c'est intéressant de voir que le
ministre a confiance, mais il a refusé la
prolongation du mandat, par exemple. Et ce qu'il y a d'intéressant également, M. le Président, c'est que cette commission et mes propos relatifs à la façon dont on en parle, l'ensemble des citoyens du Québec,
l'ensemble des policiers du Québec, l'ensemble des intervenants du Québec ont
dit non, M. le Président, et le ministre dit encore qu'on s'amuse. Mes propos
sont à la hauteur du sérieux de votre commission, M. le ministre.
Le Président :
M. le ministre de la Sécurité publique.
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron : M. le Président, pour qui se prend le député
de Marguerite-Bourgeoys pour
venir dire ici, en cette Assemblée, que l'ensemble des intervenants du Québec
sont contre cette commission, alors que, depuis plusieurs jours, plusieurs intervenants font part de leurs points de vue sur ce qui s'est passé au printemps 2012? Peut-être,
est-ce simplement parce que le député de Marguerite-Bourgeoys ne veut
pas les entendre, M. le Président.
Le Président :
Cela met fin à la période des questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous en sommes maintenant
à la rubrique des motions sans
préavis, et, en fonction de nos règles, je cède la parole
à un membre du deuxième groupe de
l'opposition. M. le député de Granby.
Exiger du gouvernement qu'il
donne suite à la motion
adoptée le 13 mars 2013 en rendant public le rapport
de la firme Price Waterhouse sur les dépenses effectuées
à Gentilly-2 avant l'annonce de la fermeture de la centrale
M.
Bonnardel : Merci, Mme
la Présidente. Je demande le consentement pour déposer la motion suivante
conjointement avec la députée de Laviolette, le député de Mercier, le député de
Blainville :
«Que l'Assemblée
nationale exige du gouvernement qu'il donne suite à la motion adoptée de façon unanime le
13 mars 2013 en rendant public le plus rapidement possible le rapport de
la firme Price Waterhouse concernant ses vérifications des dépenses effectuées
à Gentilly-2 avant l'annonce de la fermeture de la centrale.»
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?
M. Traversy : Mme la
Présidente, il y a consentement sans débat pour cette motion.
Mise aux voix
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Alors, je reconnaîtrais
maintenant un membre formant legouvernement,
M. le ministre responsable de la région… Madame? Madame, excusez-moi. Mme la
ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale.
Souligner le 100e anniversaire de la
création du Royal 22e Régiment
Mme
Maltais :
Mme la Présidente, ce n'est pas parce qu'on parle du Royal 22e Régiment que ça
doit nécessairement être un homme. Parce qu'aujourd'hui les femmes font
partie du Royal 22e Régiment, on en a la preuve dans les tribunes.
Alors, Mme la Présidente, je sollicite le
consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement
avec le député de Châteauguay, le député de Chauveau et le député de
Blainville, la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale souligne l'année du
centenaire de la création du Royal 22e Régiment;
«Qu'elle souligne l'héritage et la contribution
de cette institution au rayonnement et à la protection de la langue française;
«Qu'elle
souligne également le courage et le sens du devoir des hommes et des femmes qui
ont fait sa renommée.»
(Applaudissements)
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Alors, suite à ces applaudissements, est-ce qu'il y a consentement pour
débattre de cette motion?
M. Traversy :
Mme la Présidente, comme vous pouvez voir par l'enthousiasme de cette Chambre,
il y aconsentement pour débattre de
cette motion pour un temps de parole d'approximativement une minute par
intervenant, en commençant, bien sûr, par notre ministre responsable de la
Capitale-Nationale, suivie du député de Châteauguay, et en terminant par le
député de Chauveau.
• (11 h 10) •
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Alors, Mme la ministre responsable de la Capitale-Nationale.
Mme Agnès Maltais
Mme
Maltais :
Merci, Mme la Présidente. Connaissant votre attachement personnel envers cette
institution, vous allez me permettre de présenter d'abord les personnes
présentes dans les tribunes : le colonel Richard; le lieutenant-colonel
Jourdain, qui est commandant du 3e Bataillon du Royal 22e; le major Wellwood, la
commandante adjointe du 1er Bataillon, 22e Régiment; l'adjudant-chef
Godin, le sergent-major régimentaire du Royal 22e; le caporal Malboeuf, qui est
fantassin au Royal 22e; et M. Carignan, l'officier de liaison pour le
centenaire du régiment.
Alors, le
Royal 22e Régiment souligne le début de l'année de son centenaire sous le thème
100 ans de patrimoine militaire francophone. Le
21 octobre 1914 est créé le premier bataillon exclusivement francophone,
ce qui fut l'acte de naissance du
22e Régiment. Installée dans la Citadelle, à Québec, en 1920, cette
institution représente bien l'affirmation et l'épanouissement du fait français en Amérique. Surnommés les
Van Doos très affectueusement par les anglophones, les hommes et
les femmes du 22e se sont illustrés à de nombreuses reprises par leur courage
et leur détermination.
Lorsqu'on
pense aux faits d'armes du 22e, on pense immédiatement à la bataille de
Vimy et à la bataille de la Somme
durant la Première Guerre mondiale ainsi qu'au débarquement de Sicile durant la Deuxième Guerre mondiale. Il y a eu également plusieurs missions sous l'égide de l'OTAN
et des Nations unies, comme l'intervention en Bosnie dans les années 90, l'Afghanistan,
et les Québécois se souviennent, bien
sûr, de leur aide suite au terrible tremblement de terre qui a eu lieu
en Haïti en 2010. Le 22e Régiment est intervenu également ici pour aider les
Québécois et les Québécoises à surmonter des
catastrophes naturelles comme la crise du verglas ou les inondations en
Montérégie en 2011.
Votre présence ici,
mesdames, messieurs, dans notre capitale nationale, est un honneur. Et, au nom
du gouvernement, je tiens à vous remercier pour votre contribution à la
protection de la langue française et pour votre engagement dans la communauté
de Québec. Bienvenue et merci.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : M. le député de Châteauguay.
M. Pierre Moreau
M.
Moreau : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de
joindre ma voix à celle de la ministre responsable de la
Capitale-Nationale pour souligner l'héritage et le 100e anniversaire de la
création du Royal 22e Régiment. Étant moi-même
issu d'une famille de militaires — mon père est allé à la guerre, était dans
l'aviation canadienne, mon oncle également,
mon parrain était membre du Royal 22e lors de la Deuxième Guerre mondiale — c'est donc avec énormément de fierté
que j'interviens sur cette motion ce matin.
Le
18 octobre dernier, les festivités du 100e anniversaire de la création du
Royal 22e Régiment ont été lancées pour l'année à venir. Il s'agit d'un événement important non seulement pour
cette institution, mais également pour toute la société québécoise et canadienne.
La formation du 22e Bataillon est, en effet, le seul bataillon d'infanterie
francophone du Canada qui a participé aux
combats de la Première Guerre mondiale. L'usage du français est, en fait, la
raison d'être de ce corps militaire,
car sa création résulte directement des revendications de la population
québécoise de l'époque. Depuis ce temps,
le fait francophone a toujours été défendu avec ténacité au sein du bataillon.
Le Royal 22e Régiment a grandement milité pour faire du français une
langue opérationnelle à tous les niveaux et dans tous les domaines, que ce soit
à l'intérieur des Forces canadiennes et dans la fonction publique canadienne.
Au cours de son
histoire, les faits d'armes de ce bataillon sont des plus reluisants et des
plus éloquents. Il a reçu 18 honneurs
de bataille pour sa bravoure durant la Première Guerre mondiale, 25 pour
ses accomplissements durant la Seconde Guerre mondiale ainsi que
l'honneur de bataille pour sa participation dans la guerre de Corée.
En
terminant, je tiens à souligner le courage exceptionnel et le sens du devoir
des femmes et des hommes qui se sont engagés et de ceux qui, au-delà de
cet engagement, ont combattu, et risqué leur vie, et, dans certains cas, perdu leur vie au sein du Royal 22e Régiment au cours
des 100 dernières années. Mesdames, messieurs, vous faites la
fierté non seulement de la ville de Québec, mais également du Québec tout
entier et du Canada. Vous nous laissez un héritage bien vivant et une réputation enviable à l'échelle internationale. Votre
courage et votre bravoure rejaillissent sur tous les Québécois et tous
les Canadiens. Merci.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : M. le député de Chauveau.
M. Gérard Deltell
M.
Deltell :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, au nom de ma formation politique,
c'est avec beaucoup de respect et de reconnaissance pour le travail, le
professionnalisme et le sérieux que manifeste le Royal 22e Régiment que nous nous joignons donc pour célébrer, l'année
prochaine, les 100 ans de la création du Royal 22e Régiment.
Il
faut savoir, Mme la Présidente, que c'est au déclenchement de la Première
Guerre mondiale qu'un mouvement populaire est né pour que l'on crée une
unité canadienne-française. Et c'est l'idée de l'ancien premier ministre Sir Wilfrid Laurier, qui a été reprise
par le gouvernement conservateur de l'époque, de créer cette unité
qu'on appelait à l'époque le 22e
Bataillon. Il a donc été dépêché dès 1915 sur les terrains de l'Europe et s'est
distingué de façon très brillante lors d'une des batailles
les plus importantes de la Première Guerre mondiale, soit la crête de Vimy, la
conquête de la crête de Vimy.
Et
il faut savoir, Mme la Présidente, qu'à la fin de la Première Guerre mondiale, on
s'est demandé si le bataillon 22e allait survivre à la suite de la fin
de la guerre, et c'est parce que la population a demandé que l'on maintienne cette unité militaire, sous l'égide, d'ailleurs,
du maire de Québec, M. Samson, qui a fait le mouvement populaire pour
que l'on soutienne nos militaires, que, finalement, le gouvernement canadien a
reconnu et a créé le Royal 22e Régiment en 1920.
Depuis, Mme la
Présidente, eh bien, ce corps militaire s'est couvert et nous a couverts
d'honneurs, que ce soit lors de la Deuxième
Guerre mondiale, où, entre autres, ils ont participé à la conquête de l'Italie,
à la bataille d'Italie, et là où mon père, d'ailleurs, qui, à
l'époque, servait sous la responsabilité du général Juin, de l'armée
française, a rencontré ses premiers
Canadiens. Donc, il y a eu la Deuxième Guerre mondiale, il y a eu la guerre de
Corée, il y a eu différentes missions
de paix, des missions de paix partout à travers le monde et, encore tout
récemment, avec l'Afghanistan, et, de façon encore plus récente, l'aide
qui a été apportée à Haïti.
Mme
la Présidente, c'est donc avec beaucoup de fierté que nous reconnaissons,
depuis 100 ans, l'extraordinaire effort
de ces centaines de milliers de Québécois qui ont servi sous les drapeaux, qui
ont servi avec le Royal 22e Régiment. Donc,
beaucoup de respect, beaucoup de reconnaissance et surtout le fait que nous
avons un devoir de mémoire pour tous ces gens qui ont servi et qui,
malheureusement, sont morts au combat. C'est 100 ans de courage, 100 ans de
fierté, 100 ans d'honneur et 100 ans de bravoure que l'on célèbre aujourd'hui.
Merci, Mme la Présidente.
Mise
aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Cette motion est adoptée?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Adopté. Alors, je reconnaîtrais maintenant la
députée de La Pinière.
Rendre hommage à la jeune
militante
pakistanaise Malala Yousafzai pour son
engagement en faveur de l'éducation des filles
Mme Houda-Pepin :
Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de
présenter la motion suivante conjointement avec le ministre des Relations
internationales, de la Francophonie et du Commerce extérieur, la députée de
Montmorency, le député de Blainville et le député de Mercier :
«Que
l'Assemblée nationale rende hommage à Malala Yousafzai, jeune militante
pakistanaise qui a survécu à une tentative
d'assassinat des talibans il y a un an, lesquels l'avaient ciblée à cause de
son engagement en faveur de l'éducation des filles;
«Et que l'Assemblée
salue son courage et sa détermination qui lui ont valu de nombreuses reconnaissances internationales;
«Qu'elle félicite
Malala Yousafzai qui a reçu, le 10 octobre dernier, le prestigieux prix
Sakharov.»
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de
cette motion?
M.
Traversy : Mme la Présidente, il y a consentement pour débattre
de cette motion. J'allais vous dire environ une minute, mais, comme c'est la députée de La Pinière, je vais dire approximativement
deux minutes, et on va la laisser débuter
pour donner l'exemple, suivie, par la suite, évidemment, par la députée de
Montmorency, le député de Mercier et en terminant, bien sûr, par le
ministre des Relations internationales et de la Francophonie.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Alors, Mme la députée de La Prairie.
Mme Houda-Pepin :
La Pinière.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : La Pinière, excusez-moi.
Mme Fatima Houda-Pepin
Mme
Houda-Pepin : Alors, Mme la Présidente, d'abord, je remercie
mes collègues députés qui se joignent à moi pour souligner unanimement
le courage et la détermination d'une jeune militante des droits de la personne,
Malala Yousafzai, qui se bat depuis l'âge de
12 ans pour l'éducation des petites filles au Pakistan, dans une région sous
contrôle taliban. À travers son combat, je
tiens à saluer le courage inouï de millions d'hommes et de femmes qui, dans les
pays musulmans, se battent quotidiennement au péril de leur vie contre les
régimes théocratiques et autoritaires et contre la montée des intégrismes sous
couvert de religion, pour la démocratie, pour l'égalité des hommes et des
femmes et pour la justice sociale.
Malala
Yousafzai est de cette trempe-là. Le 9 octobre 2012, elle a été tirée à bout
portant et a reçu une balle dans la tête
alors qu'elle se rendait à l'école en autobus. Son crime : elle prêchait
par l'exemple pour l'éducation des filles. Par miracle, elle a survécu. Loin de se laisser intimider, elle a repris le
combat et porté son message sur toutes les tribunes, notamment aux
Nations unies. Elle a été récompensée par plusieurs organisations nationales et
internationales. C'est ainsi qu'elle a été
nominée pour le prix Nobel de la paix malgré son très jeune âge de 16 ans. Le
Canada lui a octroyé la citoyenneté d'honneur, un privilège rare octroyé
à quelques personnes, dont Nelson Mandela.
Le
10 octobre dernier, Malala a reçu le prix Sakharov 2013 pour la liberté de conscience,
de l'Union européenne, décerné par le Parlement européen, qui a souligné
le combat de Malala, qui nous rappelle qu'il y a 250 millions de filles dans le
monde qui ne peuvent aller librement à l'école et qui nous rappelle que nous
avons la responsabilité, comme parlementaires, de garantir aux enfants le droit
à l'éducation. Amnistie internationale lui décerna le prix Ambassadeur de la conscience 2013. Et, également
en 2013, la France lui décerne le prix Simone de Beauvoir pour la
liberté des femmes pour son combat en faveur de l'éducation des femmes dans le
monde. Merci, Mme la Présidente.
• (11 h 20) •
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le ministre des Relations
internationales et du Commerce extérieur? On m'a indiqué que vous étiez
en deuxième lieu. Alors, vous changez...
Une voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Vous l'avez gardé pour la fin.
Alors, Mme la députée de Montmorency.
Mme Michelyne C. St-Laurent
Mme
St-Laurent :
Merci, Mme la Présidente. Malala Yousafzai semblait bien petite le vendredi 12
juillet dernier dans la grande salle remplie
à craquer au moment de l'Assemblée générale de l'ONU. Toute de rose vêtue, la
jeune Pakistanaise venait de fêter ses 16 ans, et elle avait un message à
livrer au parterre composé de personnalités, dont Ban Ki-moon, secrétaire
général de l'Organisation des Nations unies.
Voici son message : «[Un enfant, un
professeur], un livre, un stylo peuvent changer le monde», mesdames et messieurs. Il faut dire que celle qu'on appelle
affectueusement Malala a marqué l'imaginaire du monde entier le 9
octobre 2012. Ce jour-là, des talibans ont
tenté de la tuer alors qu'elle rentrait de l'école. Son crime : elle
revendiquait le droit des filles à l'éducation. Après l'attentat, lorsqu'elle a rouvert ses yeux dans un hôpital
britannique, elle a tout de suite
prouvé qu'elle était très forte. «J'ai vu la mort en face et je n'ai pas eu
peur», déclara-t-elle.
Malala a maintenant sa journée décrétée par
l'ONU, c'est le 10 novembre. Elle est devenue le symbole d'une éducation libre et obligatoire à chaque enfant
dans le monde. Pendant qu'elle s'exprimait comme une adulte à l'ONU, on oubliait que Malala est encore une enfant. La
force de son message était tellement impressionnante : «Les
extrémistes ont peur des livres et des stylos, le pouvoir de l'éducation les
effraie.»
Au nom de ma formation politique, j'aimerais, ici, joindre ma voix à celles de tous mes collègues pour
rendre hommage à Malala Yousafzai, une battante de l'ère moderne. Puisse cette
jeune femme continuer de nous inspirer, nous
qui prenons trop souvent pour acquis que le droit à l'éducation est universel. Victor Hugo affirmait que la liberté commence où
l'ignorance finit. Chers collègues, Malala est maintenant une femme libre.
Merci.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
M. le député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, Mme la
Présidente. D'abord, je tiens à féliciter la députée de Montmorency pour son hommage très,
très senti, dont les paroles, en
fait, je fais totalement miennes, dont les paroles je fais aussi totalement les paroles de Québec solidaire dans l'hommage que nous voulons ensemble, aujourd'hui, souligner et rendre à cette brillante, intelligente et courageuse jeune femme, Malala — Malala
Yousafzai — pour
ce qu'elle a accompli déjà par son intelligence et par son courage, par sa défense du droit des femmes et des enfants
d'avoir accès à une éducation — entendons-nous
bien — à
une éducation libre de toute influence religieuse. Parce que ce qui est en jeu
ici et qui rend cette coïncidence qu'on discute… Qu'on rende hommage à
Malala au moment même où, au Québec, on discute d'une charte des valeurs québécoises
et qu'on le place sous l'égide de la laïcité et de la défense de l'égalité des
hommes et des femmes rend donc cet hommage riche de sens.
C'est justement
le message qu'il y a derrière l'action de Malala, qui nous dit, dans
le travail qu'elle a accompli, le combat
qu'elle a mené, que l'émancipation des femmes passe, d'abord
et avant tout, par l'éducation, ensuite par l'éducation et, finalement,
par l'éducation. Je mets l'accent là-dessus parce que, bien sûr, on ne s'entend
pas tous sur les moyens d'assurer la laïcité de l'État québécois et de
s'assurer que l'égalité des hommes et des femmes est toujours respectée. On
mène un combat tous dans la même direction, mais pas avec les mêmes moyens et,
parfois, avec une mésentente sur les conséquences de ce qu'on propose.
J'attire
finalement votre attention sur une autre jeune femme, dont l'expérience a été
rapportée par Mme Petrowski dans une chronique d'hier. Elle s'appelle
Natasha, elle a grandi au Québec. Elle a porté pendant plus de 10 ans le voile, puis elle l'a abandonné. Elle s'appelle Natasha
et elle dit qu'elle trouve que le débat sur la charte peut être
dangereux parce que, quand on attaque le voile, dit-elle, on nourrit
l'intégrisme : «Plus on attaque le voile, plus on nourrit
l'intégrisme. Les musulmans se disent : Ils nous détestent, [...]ce n'est
pas grave, Dieu est avec nous.» Alors, elle dit, elle nous recommande :
«Avant de s'en prendre aux femmes voilées, on devrait plutôt se pencher sur les
écoles religieuses...»
Alors, je dis
à mes collègues : Il est temps qu'on mette fin à ce tabou. Il est temps
qu'on considère qu'avec l'argent des contribuables, aujourd'hui, alors
qu'on parle de la charte de la laïcité, nous subventionnons les écoles
religieuses, et qu'il est temps, si on est consistants…
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci, M. le député. Merci.
Une voix : …
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
M. le député, merci. M. le ministre des Relations internationales et du
Commerce extérieur.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée : Merci,
Mme la Présidente. D'abord,
je tiens à remercier la députée de La Pinière d'avoir déposé cette motion, sur laquelle
nous sommes d'accord. Et nous sommes d'accord sur un certain nombre de sujets
aussi, j'aime le souligner devant cette Chambre.
La députée
de Montmorency a livré un texte remarquable. Nous ne pourrons
faire mieux, ni le député de Mercier ni moi. Alors, nous sommes admiratifs sur ce que vous avez dit. Et je ne
veux pas répéter, mais simplement pour dire que cette jeune fille, c'est
l'incarnation du courage devant l'obscurantisme, devant la menace physique. On
ne peut pas, nous qui
profitons ici de la démocratie, de la liberté, de la liberté d'aller à l'école,
nous qui avons fait de si grands progrès dans l'égalité des hommes et des femmes, on ne peut pas se mettre dans
la tête de cette jeune Pakistanaise entourée de talibans qui veulent lui
interdire le droit à l'éducation. On ne peut pas mesurer le courage qui a été
le sien de non seulement braver les obscurantistes, de subir leur
violence, de se relever et de décider de leur faire face devant le monde
entier, jusqu'à l'Assemblée générale des Nations unies.
Le
gouvernement canadien a décidé de faire de Malala une citoyenne honoraire. Je
dis ici aujourd'hui qu'elle est chez elle au Québec. Elle est déjà dans
nos esprits, dans nos cœurs. Elle a toute notre admiration. Merci.
Mise aux voix
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : La motion est adoptée?Adopté.
Avis touchant les travaux des
commissions
Alors, nous en sommes
maintenant à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Traversy :
Merci, Mme la Présidente. Alors, j'avise cette Assemblée que la Commission des
institutions poursuivra l'étude détaillée à
l'égard du projet de loi n° 28, Loi instituant le nouveau Code de
procédure civile — voilà, je l'ai
bien dit — aujourd'hui,
après les affaires courantes jusqu'à 13 heures ainsi que de 15 heures
à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.
Et je vous avise que, mardi le 29 octobre, de 10 heures à midi, à la
salle Louis-Joseph-Papineau, cette même commission siégera pour
poursuivre l'étude détaillée;
La Commission de la
santé et des services sociaux poursuivra les consultations particulières et les
auditions publiques sur le document intitulé
L'autonomie pour tous, qui n'est pas une position constitutionnelle mais
bien le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie — et je
voulais voir si mon collègue de Chauveau m'écoutait, ce qui est le cas — aujourd'hui, après les affaires courantes,
pour une durée de deux heures, ainsi que de 15 heures à
18 heures, et mardi le 29 octobre prochain, de 10 heures à midi,
à la salle du Conseil législatif.
Alors, je vous
souhaite une bonne journée.
• (11 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, pour ma part, je vous avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira aujourd'hui en séance de travail, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du
Parlement, afin de préparer l'audition de la Société de télédiffusion du Québec,
Télé-Québec; en séance publique, de 15 heures à 18 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, afin de procéder à l'audition de la Société de télédiffusion du Québec dans le cadre de l'étude
de son plan stratégique 2012-2016 et de
l'examen de ses orientations,
de ses activités et de sa gestion administrative; en séance de
travail, de 18 heures à
18 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, afin de déterminer, le cas échéant, les
observations, conclusions et recommandations de la commission suite à
l'audition.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Demande de directive concernant des déclarations
dans le contexte de l'étude du projet de loi n° 45
sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la
Recherche, de la Science et de la Technologie
Je suis maintenant à
la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader de
l'opposition officielle.
M. Pierre Moreau
M.
Moreau : Merci, Mme la Présidente. Je souhaite, sous cette
rubrique, intervenir relativement à la procédure qui entoure l'étude du projet de loi n° 45, Loi
sur le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la
Science et de la Technologie, qui a été présenté le
15 mai 2013.
J'aurai deux
questions, Mme la Présidente,une première que j'adresserai à mon collègue le leader adjoint du gouvernement, la deuxième vous sera adressée, et j'entends vous
demander de statuer sur l'application de notre règlement. Je vous avise
immédiatement pour que vous puissiez prendre en compte les éléments
d'argumentation.
Alors,
sur ce projet de loi, nous avons entrepris l'étude détaillée en commission en
toute fin de session, en juin dernier. Et la commission...
Des voix :
…
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Excusez-moi, M. le leader de
l'opposition. Est-ce que je peux vous demander que les discussions se passent derrière, s'il vous plaît?
J'apprécierais. M. le leader de l'opposition, je veux vous entendre.
M. Moreau :
Merci, Mme la Présidente. Alors, nous avons entrepris, donc, l'étude en
commission... l'étude détaillée en commission à la toute fin de la session, en
juin, de ce projet de loi, et la Commission de la culture et de l'éducation a été appelée à poursuivre l'étude du projet de
loi à quelques séances. Il y a eu, à l'heure actuelle, 23 heures, et je pense que c'est
important que vous le notiez, 23 heures
d'étude qui ont été faites. Il s'agit d'un projet de loi de plus de 200 articles, et, à ce jour,
146 articles ont été adoptés par la
commission à l'étape de l'étude article par article. 62 articles
seulement restent à adopter.
Ce projet de loi, je
le rappelle, modifie 51 lois et 36 règlements. Or, depuis le début de la session,
le 17 septembre
dernier, le leader du gouvernement n'a appelé le projet de loi n° 45 qu'à
quatre reprises. Or, malgré ces
faits, c'est-à-dire la progression du projet de loi lorsque l'étude en est
faite et le peu de fois où ce projet de loi a été appelé, le ministre de
l'Enseignement supérieur a imputé, par déclaration publique et par communiqué
de presse, le 10 octobre dernier, des
motifs indignes, à l'opposition officielle, et contraires à notre règlement en prétendant que
l'opposition bloquait l'étude du projet de loi,
et allait jusqu'à dire que l'opposition officielle et le deuxième groupe
d'opposition filibustaient, pour emprunter ses termes.
Je dépose, Mme la
Présidente, le communiqué émis par le ministre de l'Éducation supérieure,
lequel parle de lui-même. Je me permettrai
cependant de vous en lire certains extraits : «De toute évidence, les
libéraux et les caquistes se livrent
à un filibuster en règle pour des raisons que je ne
comprends pas»; «je n'ose croire que le
but recherché par les libéraux et les
caquistes est de nuire le plus possible aux réformes que nous voulons mettre en
place, largement appuyées sur les
consensus qui se sont dégagés lors du sommet de l'hiver dernier. Je n'ose
croire que les oppositions se sont donné un agenda électoraliste.» Fin
de la citation. Le communiqué est déposé.
Par
la suite, des communiqués des syndicats FTQ, CSQ et CSN ont été émis, reprenant
les propos du ministre, erronés, accusatoires et contraires à nos
règlements. Vous me permettrez de vous en citer de courts extraits : «La Fédération des travailleurs […] du Québec déplore
l'attitude de l'opposition parlementaire à Québec qui semble s'être [concentrée] pour faire retarder autant
que possible l'adoption du projet de loi n° 45 qui prévoit la création du
ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la
Technologie.»
«La Centrale des
syndicats du Québec dénonce l'obstruction systématique dont font preuve les
deux partis d'opposition pendant les travaux de la Commission de la culture et
de l'éducation à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 45.»
Et, pour la CSN, «ces délais seraient dus à
l'obstruction des partis d'opposition,
libéraux et caquistes, contre le projet
de loi n° 45 présentement à l'étude en commission parlementaire.»
Je dépose les communiqués de ces centrales syndicales.
Documents déposés
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Du moment que j'ai le consentement pour le
dépôt, là, alors... pour les deux documents. Merci.
M.
Moreau : Mme la Présidente, il est impossible de ne pas voir
une relation de cause à effet entre les déclarations du ministre en commission
parlementaire, l'émission volontaire
et préméditée d'un communiqué par le ministre et les communiqués
qui s'en sont suivis des centrales syndicales, lesquelles
interprétaient la situation à la lumière des propos du ministre,
lesquels, je le répète, sont tout à
fait contraires à notre règlement. Mme la Présidente, nous déplorons vivement ce dérapage de langage qui va à
l'encontre de nos dispositions réglementaires.
Dans
ce contexte, et n'ayant d'autres recours, le porte-parole de l'opposition officielle, le député
de Mont-Royal, a adressé deux correspondances, les 11 et
15 octobre, à la présidente de la Commission de la culture et de
l'éducation, la députée de Duplessis, l'enjoignant de corriger le tout en écrivant une
lettre aux syndicats afin de leur rappeler notamment les privilèges et les règles parlementaires.
De
consentement, je dépose lesdites lettres et la réponse de la présidente de la commission,
la députée de Duplessis. Je
vous lis l'extrait de la réponse de la présidente de la commission, qui est
datée du 23 octobre 2013 et dans
laquelle elle dit : «Après réflexion — s'adressant au député de
Mont-Royal — je
vous informe que je ne donnerai pas suite à votre demande.»
Ma première question
s'adresse au leader adjoint du gouvernement : Dans ce contexte, est-ce que
le leader peut nous expliquer pourquoi
les députés de l'opposition se font reprocher de débloquer… de bloquer, pardon, l'avancement
des travaux de l'étude du projet de loi n° 45, alors que ce projet de loi
n'a pas été rappelé cette semaine par
le gouvernement, se privant ainsi de plus de 15 heures de débat
additionnelles qui auraient permis de
continuer l'étude article par article?
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Traversy :
Merci, Mme la Présidente. Alors, évidemment, je prends les informations que le
leader de l'opposition a déposées en cette
Chambre, je vais aller les regarder tout à l'heure. Et je veux le rassurer
déjà, d'entrée de jeu, que le projet de loi
n° 45 — parce
que je vois le député de Mont-Royal qui évidemment a
hâte de reprendre le débat — sera rappelé la semaine
prochaine, mardi prochain, là, pour continuer ces discussions.
Évidemment, à
l'intérieur de tous ces échanges, il y a parfois,
peut-être, de l'animation qui fait en sorte
que certaines fois on peut interpréter les propos
de part et d'autre. Je vais donc prendre le temps d'analyser les
documents qui sont déposés aujourd'hui. Mais je tiens à le rassurer : la
semaine prochaine, il y aura donc dialogue à cet effet, sur ce projet de loi.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le leader adjoint. M.
le leader de l'opposition officielle.
M.
Moreau : Mme la Présidente, il est difficile d'interpréter
«filibuster», il est difficile d'interpréter «opposition systématique». Ce sont les mots du ministre de
l'Éducation supérieure. Ces mots-là sont antiparlementaires, ne devraient
pas être prononcés et posent un problème encore plus sérieux, qui est celui d'imputer des motifs à l'opposition officielle.
Dans
ce contexte-là, et compte tenu particulièrement de la réponse donnée par la
présidente de la commission aux demandes qui ont été justement formulées
par le député de Mont-Royal, Mme la Présidente, et compte tenu du paragraphe 8° de l'article 2 de notre
règlement qui indique que la présidence «exerce [tous] les [...] pouvoirs
nécessaires à l'accomplissement de ses
fonctions et au maintien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses
membres» et comme les droits et
privilèges des membres de cette Assemblée sont ceux de pouvoir débattre de
façon sereine et constructive des projets
de loi qui sont déposés en cette Chambre et de faire exactement le même
exercice en commission parlementaire, comme notre règlement s'applique
également en cette Chambre et en commission, la question que je vous adresse, Mme la Présidente, est : Comment
entendez-vous faire respecter les droits de l'opposition officielle et donner
suite aux demandes qui ont été faites par le député de Mont-Royal dans
ces lettres? Je vous invite à prendre cette question en délibéré et, à la
lumière de mon intervention, des documents déposés, de l'argumentaire, de nous
rendre une décision écrite sur cette question. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Alors, M. le leader de l'opposition, je vais
effectivement prendre votre question en
délibéré, à la lumière des documents, effectivement, que vous avez déposés et
des lettres du député de Mont-Royal,
et je vous reviendrai à une session ultérieure pour répondre effectivement par une décision
écrite.
• (11 h 40) •
M.
Moreau : Mme la Présidente, nous vous remercions d'avoir pris
la question en délibéré. Je sais que vous avez une habitude de répondre
avec célérité à nos demandes. On ne souhaite pas retarder davantage l'étude du
projet de loi n° 52, qui doit suivre la
présente rubrique. Et, en ce qui nous concerne, si le projet de loi n° 45
est rappelé en commission la semaine prochaine, avant que votre décision
ne soit rendue…Je
lance un appel au leader adjoint de l'opposition, à qui je suggère de prendre
connaissance des documents que j'ai déposés.Et nous apprécierions recevoir les excuses publiques
du ministre de l'Enseignement supérieur avant le début des travaux. Merci, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Traversy : Mme la Présidente, j'aurais une question également à adresser à l'opposition officielle concernant justement les renseignements
aux travaux. Vous savez que le ministre des Finances a très hâte de comparaître
devant la Commission, là, des finances publiques pour discuter de l'état des finances publiques, conformément au mandat conféré par
l'article 292 de notre
règlement. Cependant, ce que nous constatons, c'est que l'opposition officielle
semble indécise quant à une date, là, pour justement entamer les travaux et officialiser la séance de
travail. La deuxième opposition et nous-mêmes
avons suggéré quatre moments différents pour tenir une séance de travail sans
jamais avoir un retour positif de la part du Parti libéral du Québec. On
aimerait savoir ce qui se passe, Mme la Présidente, parce que ça a été une
question qui a été soulevée à de multiples reprises.
Le
ministre a eu un conflit d'horaire pour le 29, nous avons proposé une date pour
le 30, le lendemain. Est-ce qu'aujourd'hui, en cette Chambre, le leader est
prêt à nous dire que cette date pourrait être conforme et que nous
puissions faire cette séance de travail? 10 minutes
et c'est réglé, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci, M. le leader adjoint. M. le leader de
l'opposition officielle.
M.
Moreau : Mme la Présidente, vous avez suffisamment d'expérience
pour savoir qu'il ne m'appartient pas de répondre à cette question et
que l'avancement des travaux doit être déterminé par le leader du gouvernement.
Nous serons disponibles pour continuer les travaux dès que ces travaux seront
appelés par la commission.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Alors, merci de votre collaboration.
Alors, je vous avise
que l'interpellation prévue pour le vendredi
1er novembre 2013 portera sur le sujet suivant : Le refus du
gouvernement péquiste de rendre publics tous les avis juridiques concernant les orientations gouvernementales sur son projet de charte
des valeurs québécoises. M. le député de Fabre s'adressera alors à M. le
ministre de la Justice.
Affaires du jour
La période des
affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires
du jour. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.
M.
Traversy : Merci, Mme la Présidente. Pour la poursuite de nos
travaux, nous sommes, depuis le début de cette semaine, en discussion
sur un projet de loi très important qui
concerne les soins en fin de vie. J'aimerais donc que
vous appeliez l'article 11 de notre feuilleton.
Projet de loi n° 52
Reprise du débat sur l'adoption du principe
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, merci. Alors,
l'Assemblée reprend le débat ajourné le 23 octobre 2013
sur l'adoption du principe du projet de loi
n° 52, Loi concernant les soins de fin de vie. Alors, le prochain
intervenant, M. le député de Sherbrooke.
M. Serge Cardin
M.
Cardin :
Merci, Mme la Présidente. Effectivement, pour moi, c'était important de prendre
la parole sur le projet de loi n° 52. Nous sommes ici justement pour
procéder à l'adoption du principe de ce projet de loi.
La
question peut se poser, Mme la Présidente : Comment en sommes-nous arrivés
aujourd'hui avec un projet de loi semblable,
au projet de loi n° 52? Pour moi, à la base, la réponse est relativement
simple. Le tout, je crois, a commencé par des sentiments nobles et dignes comme seul l'être humain en est capable.
C'est ainsi que la population, les proches des personnes et les personnes en fin de vie qui vivent des moments
difficiles face à la maladie sont guidés et portés par de merveilleux sentiments que sont évidemment
l'amour, l'espoir, la compassion, le respect des personnes et le respect
des choix que la personne en fin de vie peut faire. En
fait, pour résumer tout ça — mais mon discours ne sera pas pour autant
terminé — pour résumer tout ça,
le projet de loi, c'est un peu comme un hymne à l'amour envers les
personnes qui souffrent, qui sont en fin de vie.
Ainsi,
je... C'est ainsi que les expériences de l'ensemble
de la population… car je crois que mes collègues, autant que la population en général, ont vécu des
situations probablement pour le moins difficiles avec des proches ou des connaissances, j'en suis persuadé, et de vivre ces
événements amène une réflexion profonde qui... à toutes les personnes touchées et aussi aux personnes ou la population qui n'ont pas connu ces
situations-là, mais qui, aussi, les vivent à travers différentes autres personnes.
Moi,
j'ai eu trois expériences différentes, que je peux vous résumer quand même
assez rapidement, qui démontrent aussi que le choix de la personne qui
est en fin de vie pouvait et pourrait encore mieux s'exprimer avec le projet de
loi n° 52. Pour ma part, je me souviens très bien,
comme si c'était hier, mon père, après une vie quand même assez ardue de travailleur, un ouvrier, à 63 ans décide de prendre sa
retraite et, quelques mois après le début de sa retraite, a
commencé à faire des ACV de façon
régulière et additionnant à chacun d'eux un handicap supplémentaire. Donc, évidemment, nous étions tous partis de la maison, mon père demeurait, bien sûr,
dans sa maison, avec ma mère. Donc, ma mère, qui était devenue une
aidante naturelle aussi, a eu des difficultés par la
suite. Mais quand même mon père additionnait
des handicaps; et s'est mêlé à tout ça, s'est mélangé à tout ça, bien, l'alzheimer.
Donc,
on a vu mon père s'en aller tranquillement. On savait que la fin de sa vie
approchait, on ne pouvait pas savoir exactement quand, quelle période ça
pourrait prendre, parce que mon père, en plus d'avoir un grand cœur au niveau sentimental, avait un coeur physique très fort.
Donc, l'agonie, si je peux m'exprimer ainsi, a été relativement longue.
Mais j'avoue aussi, en passant, que les
soins qui lui ont été administrés, les soins palliatifs, étaient de qualité, et
on sentait aussi, à travers les
membres… le personnel médical, cette compassion-là. Et bien sûr les techniques
que l'on connaît ont été appliquées, mais, je vous le dis, étant donné
ce cœur fort qu'il avait, ça a quand même duré assez longtemps. Donc, c'est une situation spécifique, vous allez me
dire, et qui… À ce moment-là, on ne parlait pas beaucoup des demandes
qu'on pouvait… qu'un malade aurait pu avoir,
s'imaginant finir de cette façon-là, aurait pu avoir et exprimer, et donc le
cours normal des choses était quand même respecté.
Quand… Et, plus tard,
ça a été mon beau-père. Nous avions, à l'époque, une maison intergénérationnelle,mon beau-père vivait à l'étage.Et, à un moment donné…Dès l'annonce d'un cancer, il savait
approximativement la fin, le moment
où la fin arriverait. Donc, il a été en mesure
d'exprimer des choix, comme par exemple le maintien à domicile,
ce à quoi nous avons contribué. Ce que nous avons eu, de la part des services, dans un
temps record, lorsque sa volonté leur fut transmise, ça a été… du jour au lendemain, on avait toute l'installation à proximité et qui servait justement à prendre
soin de mon beau-père à l'époque. Donc, il
avait fait un choix, du maintien à domicile, et c'est ce qu'il a eu. Mais,
encore là, on était à une époque où on ne pouvait pas nécessairement
procéder à l'exécution de ces volontés qu'il aurait pu exprimer.
• (11 h 50) •
La
dernière expérience que j'ai eue, c'est mon frère qui, en 2008, novembre 2008,
a un simple accident, très banal, qui, pour la plupart des gens qui sont
ici, n'aurait pas affecté. Mais lui,
considérant les médicaments qu'il prenait à l'époque,
a subi une hémorragie interne au cerveau et, six heures après son incident,
tombait dans un coma profond et duquel il ne sortirait jamais, avec les
conclusions des différents neurologues. Ils étaient cinq et ils se sont
exprimés unanimement dans ce sens-là. Donc, on savait que c'était un départ
sans retour, parce qu'il… à toutes fins pratiques, même si son cœur battait toujours, lui n'était
plus là d'aucune façon. Et il n'y avait aucune directive non plus de sa part, étant
relativement jeune.Et d'ailleurs c'était le
10 décembre 2008, c'était 10 jours après son mariage au
Brésil avec une charmante
Brésilienne, qui lui a quand même donné un fils. Donc, on voit, c'est des situations différentes.Et mon frère est
décédé en janvier dernier. Et ce sont des situations différentes, mais
c'est quand même des situations où on doit remédier à
tout ça.
Si on prend l'exemple
de mon frère, entre autres, c'est… le deuil, sans se faire totalement, le deuil
se répète à chaque visite qu'on fait de la personne qui est affectée par cette
situation-là. Donc, c'est une souffrance, je dirais, totale pour la famille, et qui se répète pendant, dans ce cas-ci, plus de quatre ans.
Tout ça, c'est des expériences différentes et qui n'appellent pas, quand même, la même
réflexion, si je pourrais m'exprimer ainsi. Mais, à partir de ces expériences-là, que ce soit moi,
dans mon cas personnel, que ce soit dans le cas de d'autres
collègues députés, que ce soit aussi dans le cas de
la population en général, je crois qu'il y a eu une réflexion, à un moment donné, qui s'est approfondie, et ce qui a donné
naissance à ce que l'on pourrait appeler le long processus démocratique rigoureux et
respectueux qui s'est initié avec, effectivement, la période qui s'échelonne
sur 30 ans, bien sûr, mais plus
précisément avec la commission qui avait été créée avec notre collègue députée
de Joliette.
Donc, c'est à peu près
ça, Mme la Présidente, que… Depuis une trentaine d'années, c'est une question et un débat… C'est une question
qui appelait à un débat, et cette question-là refaisait surface de façon
continuelle dans l'actualité. On peut
prendre exemple avec Nancy B., Sue Rodriguez et
G. Leblond. Ce sont des réflexions qui se faisaient de
façon, je dirais, complète,dans la société, régulièrement.
Il y a eu des
étapes, comme en 2009, un tournant important avec le
Collège des médecins qui concluait qu'il existait des circonstances exceptionnelles où l'aide médicale à mourir
pourrait être une étape ultime dans le continuum de soins appropriés de
fin de vie. Et, de plus en plus, dans cette
période-là, bien, il y a eu des sondages,
effectivement,de toutes les fédérations de médecins omnipraticiens et des médecins
spécialistes, qui ont démontré un appui important à une ouverture à l'aide médicale à
mourir dans des circonstances exceptionnelles.
C'est ainsi,
Mme la Présidente, qu'avec des appuis constants de la population, depuis bientôt 20 ans, tel qu'en… témoignages,
les sondages pendant ces années-là. C'est aussi à l'initiative
que je mentionnais tantôt, de la députée de Joliette, que les parlementaires, l'Assemblée nationale ont adoptée, le 4 décembre 2009,
une motion créant une commission spéciale
afin d'étudier la question de mourir dans la dignité.
Il faut… Je crois que mon temps est de 14… 15 minutes, Mme
la Présidente, hein?
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
20, 20 minutes.
M.
Cardin :
20 minutes? Ah! Là, j'ai… je crois que… On
me dit que c'était… d'autres personnes m'ont dit que c'était 15. Donc, je vais devoir… plus rapidement,
parce que, comme moi, je leur mentionnais, j'en
aurais eu pour 30 ou 40, effectivement, ça n'aurait pas été un très grand problème.
Peut-être pour ceux qui écoutent, oui, mais pour moi, non.
Ça aurait été
quand même… Il faut…
Pour arriver rapidement, parce qu'il me reste
très peu de temps, les recommandations,
Mme la Présidente, il faut le souligner, de cette commission, étaient unanimes, et ce qui faisait en sorte qu'on était prêts à présenter, comme gouvernement, un projet de loi qui allait dans le sens des propositions. Et les principes forts qui
ont guidé ce projet de loi, bien, c'est le
respect de la personne en fin de vie et la reconnaissance de ses droits
et libertés qui devaient être exprimés,
chacun des gestes posés à son endroit. La personne en fin de vie doit en tout temps être traitée avec
compréhension, compassion, courtoisie et équité, dans le respect de sa dignité,
de son autonomie, de ses besoins et de sa
sécurité. Les membres de l'équipe de soins responsable d'une personne en fin de
vie doivent établir et maintenir avec elle une communication ouverte et
honnête.
Ce qui est
important dans le projet de loi n° 52, c'est qu'il offre une reconnaissance formelle des soins palliatifs et prévoit qu'ils doivent être offerts aux personnes dont l'état le
requiert, et ce, dans les établissements de santé, les maisons de soins palliatifs ou à son domicile. Le projet de loi n° 52 vient consacrer ce droit aux soins palliatifs.
Les soins palliatifs sont la réponse par excellence aux souffrances de
la majorité des personnes. Mais évidemment il y a aussi l'autre élément important, qui est l'aide médicale à mourir, parce que
toutes les situations des personnes en fin de vie ne sont pas
pareilles, et l'expression d'une volonté de la personne qui vit ces moments-là
est importante, et sa condition aussi. Donc,
pour ceux qui auraient des doutes, je les
invite à regarder les articles, du projet de loi, 26 et 27. Je ne vois aucun problème à
l'effet d'appliquer cette loi-là quand elle le sera devenue.
Donc, Mme la Présidente, pour terminer, bien, je dirais, comme
je l'ai dit d'entrée de
jeu — que
j'aurais aimé
étayer encore plus — que,
pour moi, le projet de loi n° 52, face à ce que j'ai vécu à travers mes proches,
c'est comme un hymne à l'amour, et
c'est dans un grand respect et des sentiments, évidemment, de compassion envers
ceux qui vivent des moments difficiles, comme leurs proches aussi. Merci, Mme la
Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député. Est-ce
qu'il y a un autre intervenant?
Alors, Mme la députée de Groulx.
Mme
Hélène Daneault
Mme
Daneault : Merci,
Mme la Présidente. Alors, je suis
très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui pour parler de l'adoption de principe du projet
de loi n° 52, projet de loi n° 52 qui concerne effectivement les soins en fin
de vie et qui a pour but d'assurer
aux personnes en fin de vie des soins respectueux de leur dignité et de leur
autonomie. À cette fin, il précise
les droits de ces personnes de même
que l'organisation et l'encadrement des soins de fin de vie de
façon à ce que toute personne ait accès, tout au long du
continuum de soins, à des soins de qualité, adaptés à ses besoins, notamment
pour prévenir et apaiser ses souffrances. De plus, la présente loi reconnaît la
primauté des volontés relatives aux soins exprimées clairement et librement par
une personne, notamment par la mise en place du régime des directives médicales
anticipées.
D'entrée de jeu, Mme la Présidente, je voudrais
vous dire que nous sommes d'accord avec l'adoption de principe du projet de loi n° 52 et saluons le courage de tous les parlementaires qui ont eu à traiter de ce sujet aussi sensible qu'est le passage
de la vie à la mort. Je voudrais souligner aussi la façon dont a été traité ce
sujet, de façon tout à fait respectueuse et de façon
non partisane. J'ai eu le plaisir de participer à la commission et, sincèrement, je pense qu'elle s'est faite dans le plus grand des respects,
autant des individus qui étaient favorables à l'adoption de ce projet de loi
que ceux qui l'étaient moins.
Ce
projet de loi vise à améliorer la fin de vie d'individus qui malheureusement,
malgré l'avancement de la médecine, demeurent encore dans un état de
souffrance, en fin de vie, qui est parfois intolérable.
Ce
projet de loi permettra aussi un meilleur encadrement des soins palliatifs, les soins
palliatifs qui sont, au Québec, d'une
grande qualité et qui sont prodigués
par des gens qui sont d'une… quasiment une sainteté, là, qui sont au
quotidien auprès de ces gens-là et les supportent énormément. Par
contre, il a été relevé à plusieurs reprises que l'accessibilité à
ces soins palliatifs là n'était pas toujours au rendez-vous. Et ce, comme parlementaire, nous devons le recevoir et s'assurer que,
dans l'avenir, tout le monde pourra avoir accès à ces soins
palliatifs. Et, on le sait, avec le
vieillissement de la population, ces
demandes-là ne feront que s'accroître. Alors, je pense qu'il sera prioritaire,
pour l'ensemble des parlementaires, de s'assurer
de l'accès aux soins palliatifs de la même qualité qu'ils le sont, mais d'avoir une plus
grande qualité. On ne peut pas
laisser, en 2013, des gens qui sont en fin de vie dans des corridors d'hôpitaux.
Malheureusement, ça se produit, ça nous a été témoigné.
Alors, je pense que nous devons le prendre et s'assurer que ça ne se reproduise
plus.
• (12 heures) •
Nous
avons aussi mentionné, ce projet de
loi là va aussi encadrer la sédation
terminale continue. C'est un acte, c'est un soin qui se prodigue depuis
des années, les gens qui font des soins palliatifs le savent. Par contre, il
n'y avait pas d'encadrement législatif à cet effet, ce que le projet de loi nous permettra de faire et de mieux
clarifier certains de ces actes et ces soins-là qui sont prodigués
actuellement au Québec. On a senti qu'il y avait une certaine méconnaissance de
la sédation terminale, et je pense que la commission a permis d'éclairer la
majorité des gens. Pour certaines personnes, les
gens croyaient que l'aide médicale à mourir était l'équivalent de la sédation
médicale continue qui estactuellement
prodiguée en soins palliatifs. Et je pense que, ça, on a réussi à mieux le
définir, mais il y aura des définitions, je pense, à retrouver dans le projet de loi n° 52, qui auront à être
améliorées, et ça, certains témoignages nous ont demandé… certains
témoins nous ont demandé de mieux le clarifier.
Évidemment aussi, le
projet de loi nous éclaire davantage sur les directives médicales anticipées.
On sait qu'actuellement au Québec on a le
choix de donner des directives médicales anticipées. Par contre, au
quotidien, et ça, les gens nous
l'ont dit, les gens de terrain nous l'ont dit, malheureusement, les
directives médicales anticipées, souvent, ne se retrouvent pas dans le
dossier médical, et, malheureusement, on retrouve de l'acharnement
thérapeutique souvent par manque de directives médicales anticipées qui n'ont
pas été transmises et qui ne sont pas apparentes suffisamment dans le dossier
médical. Et ça, je pense que, comme parlementaires, nous devrons nous assurer,
dans le futur, que les directives médicales anticipées soient facilement
accessibles à l'équipe médicale qui reçoit le patient en fin de vie et aussi
aux proches pour qu'on élimine la confusion entre les différents acteurs.
La
notion d'aide médicale à mourir, je pense qu'elle est essentielle dans ce
projet de loi là et est un enjeu majeur et une introduction d'un nouveau
soin qui est très peu prodigué à travers le monde et qui pourrait être
disponible au Québec. Et là je pense que la commission a permis de bien
rassurer la population sur le fait que cette aide médicale à mourir là ne sera disponible que pour des gens qui sont en
fin de vie et pour des gens qui seront aptes
à choisir librement cette option, parce que la médication, les traitements
n'arriveront pas à soulager leurs souffrances. Et malheureusement, je
l'ai dit d'entrée de jeu, malgré les avancements médicaux actuels, on a encore
des cas où les souffrances ne sont pas soulagées, où certaines personnes
désirent avoir le libre choix de pouvoir mettre fin à ces souffrances-là et en
ayant recours à l'aide médicale à mourir.
On
a eu des débats, et je pense que ça a été un débat majeur, concernant les gens
qui sont aptes et les inaptes à le faire.
Puisque le projet de loi actuel ne permet pas à quelqu'un qui est inapte, au
moment d'arriver en fin de vie… ne lui permet
pas, par des directives médicales anticipées,
d'avoir recours à l'aide médicale à
mourir, certains intervenants nous ont
signifié qu'il pourrait même s'agir de discrimination par rapport à certaines
personnes qui sont aptes à donner leurs directives médicales anticipées mais qui ne seraient pas respectées
parce qu'au moment de leur fin de vie ne seraient plus inaptes. Pour
l'instant, je pense qu'on aura à débattre, à l'adoption article par article, de
ces demandes-là qui nous ont été faites, et je pense qu'ils ont été accueillis
par l'ensemble des parlementaires de façon tout à fait respectueuse.
Je
pense que nous avons la maturité, au Québec, de pouvoir discuter, dans un
respect mutuel de nos droits, de ces options-là.
Je pense qu'actuellement le débat s'est fait sans dérapage, et je peux vous
dire, pour ma part, j'espère qu'il en continuera ainsi. Je pense que
l'ensemble des Québécois a eu le loisir, tout au long de la commission de
mourir dans la dignité, de faire part de ses inquiétudes et de ses demandes à
l'ensemble des parlementaires. Et je tiens à remercier l'ensemble des participants qui se sont joints à nous pour nous faire
part de leurs demandes et de leurs inquiétudes. Je tiens à remercier
l'ensemble des gens qui ont produit des mémoires d'une qualité exceptionnelle,
et ce, dans le plus grand respect qu'il se doit.
Je tiens aussi à
remercier l'ensemble des parlementaires. Je l'ai dit d'entrée de jeu, ce fut
une commission où le respect et la non-partisanerie étaient d'emblée à l'ordre
du jour. Alors, je ne ferai que poursuivre ma collaboration à l'adoption
article par article de ce projet de loi. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Alors, je cède
maintenant la parole au député de Saint-Laurent et chef de l'opposition
officielle.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier :
Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je tiens à vous dire que c'est
vraiment le député de Saint-Laurent qui va
prendre la parole et je vais faire fi d'autres responsabilités parlementaires
qui sont les miennes. Et c'est vraiment
à ce titre de député, évidemment représentant de mon comté, mais aussi dans le
sens le plus personnel que je peux donner aux propos que je vais
tenir sur ce projet de loi excessivement important, projet de loi sur les soins
de fin de vie, ou un projet de loi sur l'aide médicale à mourir, ou…
Quand
on commence à y réfléchir, on se demande : Est-ce que ce n'est pas un
projet de loi sur la vie? Est-ce que ce
n'est pas un projet de loi sur le sens qu'il faut donner à la vie, sur la
qualité de la vie? De quel projet de loi parle-t-on? De quoi parle-t-on
essentiellement dans ce projet de loi? Et, lorsqu'on commence à y réfléchir, on
peut le regarder de l'aspect technique, on
peut le regarder… Et je vais en parler tantôt sur les protections à
assurer dans la rédaction pour qu'il n'y ait pas de dérive, ce qui me
semble, tant qu'à moi, un élément excessivement important.
Mais, au-delà
de ça, de quoi parle-t-on? Lorsqu'on commence à imaginer un projet de loi qui
pourrait s'intéresser notamment à
l'acte médical à mourir, donc à un geste positif entraînant la mort, il faut se
demander : Pourquoi? Pourquoi la mort? Pourquoi la vie? De quelle
vie parle-t-on, de qui parle-t-on qui a cette vie? Et aussi, puisque ma
collègue a abondamment parlé d'une
expérience… enfin, de son passé, de son expérience professionnelle dans le
domaine de la santé, aussi de ceux
qui sont en proximité constante, outre la famille, les médecins et tout le
corps de la santé… Donc, un projet de loi,
qui, dans le fond, est sur le passage vers la mort. Et je n'en dirai pas plus
que vous faire un clin d'œil sur la réflexion que cela nous fait sur ce que chacun d'entre nous peut
concevoir de ce qu'est la vie et de ce qu'est la mort et de la vie après
la mort. Et je n'entrerai pas ici dans les
débats qui pourraient mettre en doute la neutralité de l'État, Mme la
Présidente, mais cela fait partie de
chacun d'entre nous. Nous avons une âme, une conscience, personne ne peut la
toucher. Et c'est armé de cette âme et de cette conscience que j'ai
tenté de me faire une idée sur le projet de loi qui est à l'étude.
• (12 h 10) •
D'abord, le
premier thème que je veux aborder, c'est certainement celui du fait que chacun d'entre nous sommes différents. Nous avons des expériences
différentes, avons reçu et parfois offert des témoignages différents. Et cela
peut nous amener à offrir une réponse différente. J'espère que, peu importe
comment nous allons nous exprimer sur le vote du principe et pour la suite, que nous serons, en tout temps, respectueux
des opinions diverses non seulement de chacun d'entre nous, mais de chacun d'entre nous dans notre capacité de représentant de chacun des Québécois. Je
crois que toutes les opinions sont légitimes, parce qu'elles sont
fondées sur des expériences différentes, sur une conscience personnelle, sur une liberté de conscience personnelle, et
qu'on ne peut pas, dans ce débat, catégoriser les uns de progressistes et
les autres de traditionalistes, pour garder
des termes positifs. On ne peut pas créer un «nous» et un «eux». Il y a, dans
ce débat, une place pour toutes les
opinions. Il arrive — la
démocratie nous y condamne — qu'une décision doive être prise,
mais la qualité de la décision, la qualité
du débat qui amène la décision, le respect que l'on porte les uns par rapport
aux autres dans nos opinions demandent, surtout dans cette question-ci,
le plus grand des respects.
Et vous
comprendrez donc que d'apporter un vote personnel — je le dis par opposition à ce qu'on tente
parfois de nommer le vote libre, le vote de conscience — il
arrive, dans nos usages parlementaires, que nous avons des caucus. Nous formons des partis. Il est normal d'avoir un
vote par le caucus. Ça existe depuis que le parlementarisme existe. Les
caucus sont là pour arbitrer, c'est normal, on n'a pas à s'en cacher. En
certaines matières, j'appellerais cela le vote personnel, c'est un vote qui vient nous permettre d'offrir à la
population la diversité de nos opinions avant l'arbitrage du caucus. Et
je pense que la société mérite certainement que nous lui offrions cette
diversité de nos opinions. Et je remercie le chef de notre parti, M. Couillard,
d'avoir permis, ouvert cette possibilité à ce que nous exprimions, par la
différence de nos points de vue, une certaine forme de multiplicité d'opinions
qu'on retrouve dans la société.
Je ne vous cacherai pas que, lorsqu'on regarde
les notions qui interviennent à nous lorsqu'on réfléchit à cette question-là, il y en a quelques-unes sur
lesquelles je veux m'arrêter. Certainement l'importance de la liberté de
choix, qui est une notion qui intervient
dans la réflexion, qui amène celle de l'autonomie, celle de la compassion, qui
nous met en position de réaction face
à l'autre, comment notre vie à nous, c'est bien, mais la vie de l'autre... et
comment notre vie se guide par rapport à celle de l'autre. Cet élément
de compassion joue un rôle important.
Et il y a
cette question qui s'appelle le respect de la vie. Je vais le dire, Mme la
Présidente, il y a, pour moi, en tout cas,
une expression que je veux utiliser : le caractère sacré de la vie. On ne
m'en voudra pas d'utiliser cette expression. Je pense qu'on doit un respect le plus fondamental à la vie. Lorsque j'ai
mi ces notions, évidemment, on commence à les voir opérer dans le projet
de loi et on voit qu'ils se bousculent et s'affrontent.
Un autre
élément que je veux aborder, c'est celui du nouveau. Lorsqu'il y a quelque
chose de nouveau, quelque chose qui
change, automatiquement, il y a une certaine crainte, tout à fait légitime, qui
arrive avec. Est-ce que nous avons prévu toutes les suites? Est-ce qu'il
n'y a pas des risques de dérapage ou de dérive? Est-ce qu'on a tout prévu ce
qui pouvait découler, surtout en ces
matières? Et je crois que l'aspect le plus important pour la suite du débat,
c'est d'assurer les gens que nous
représentons que nous allons nous prémunir jusqu'à la limite du possible pour
nous donner les garanties contre la dérive. Je m'aperçois... je m'en
suis aperçu, lorsqu'on discute avec des gens de notre entourage, des gens qu'on représente, de ce sujet-là, avant même qu'on
ait le temps vraiment d'entrechoquer les notions de liberté et de
respect du sacré de la vie… intervient tout
de suite : Oui, mais ça va
arriver dans tous les cas. On ne donnera plus de services de santé, on
va faire ce choix-là, ça va être le nouveau choix maintenant. Tout le monde est
en fin de vie. On est même rendus à se
demander : La fin de vie commence quand? Alors, je crois que cet
élément-là me semble assez important, de garder à l'œil ce que je dirais une préoccupation constante pour
qu'on encadre de façon très précise les cas dont on veut parler.
Il a été dit,
et je n'y m'arrête presque pas : S'assurer d'une véritable couverture en
soins palliatifs. Ça a été dit, je n'en dis pas plus.
Ma collègue a
déjà eu l'occasion… critique en la
matière, a déjà eu l'occasion d'insister sur l'importance des
définitions, et je pense qu'on doit… ne serait-ce que pour bien se faire
comprendre sur ce que voudra dire notre vote,
que ce soit à cette étape-ci, en le qualifiant, ou au final, en reposant sur
ces définitions, que les gens sachent ce qu'on a fait. Que ce soit pour les personnes elles-mêmes les plus vulnérables,
que ce soit pour leurs familles, pour les médecins dans leur pratique,
il est important que chacun comprenne ce dont on parle.
Je fais un aparté.
Sur l'aide médicale à mourir, vous savez qu'il y a de nos concitoyens — et
j'aurais presque tendance à m'inclure — lorsqu'on pense à la santé ou
aux médecins, à la médecine, à tous ceux qui oeuvrent dans ce domaine-là, j'ai plutôt tendance toujours à penser à la vie,
j'ai plutôt tendance à penser que c'est une profession, une vocation presque totalement dévouée à la vie, qui
ne fait pas de place… enfin, qui est en lutte constante contre la mort. Alors, dans le mot de l'«aide médicale à mourir»,
évidemment, dans le mot «aide», il y a une forme d'accompagnement, et,
dans le «médicale», il y a une notion de vie à tout prix. Alors, pour certains,
l'aide médicale à mourir, ça peut être l'accompagnement médical vers la mort et
non pas un accompagnement médical qui donne la mort. Et, juste cette expression-là, juste de s'arrêter un peu, quand on
parle avec des gens, ils peuvent, et il
faut le respecter, ils peuvent
ne pas avoir le même
sens donné au mot. Et, lorsqu'il a été dit qu'il fallait s'assurer, dans le projet de loi, que la rédaction permette une meilleure compréhension des
termes, je pense que c'est d'une importance capitale.
Le
projet de loi, dans sa rédaction, devra peut-être
se distinguer d'autres projets de loi que nous adoptons ici, à l'Assemblée. Vous savez qu'il y a des habitudes de légiste d'être très particulier
sur… Par exemple, évitons la redondance. Assurons-nous d'une législation la plus conforme à
nos principes, où on ne répète pas l'idée. Si on la répète, il est
possible que ce soit interprété de façon
contradictoire : on n'a pas nécessairement utilisé les mêmes mots. Je nous
conseillerais, dans la rédaction, d'être
redondants, s'il le faut, de faire œuvre pédagogique plutôt
qu'essentiellement juridique. Je nous conseille d'être clairs, d'avoir des définitions qui se comprennent et parfois de
prendre la ceinture et les bretelles, surtout si on veut s'assurer d'exposer à nos commettants que nous
serons, dans ce projet de loi et dans sa rédaction finale, en lutte
contre la dérive, que nous allons prendre
tous les mécanismes de protection, de garantie, que, pour ceux pour qui nous
voulons que cela s'applique, cela
s'applique, mais pas à personne d'autre, parce que le caractère le plus important
que je tiens à dire, ce qui me motive
dans mon vote, outre le fait que je veux éviter la dérive, c'est qu'à toute
règle il y a des exceptions, et le caractère sacré de la vie m'amène à ce que, si je
dois accepter l'exception — permettez-moi
la redondance — elle
sera vraiment exceptionnelle. Et, pour moi, l'étape de la rédaction doit nous assurer
que ce qui est prévu comme l'exception ne deviendra pas une règle généralisée — j'exagère — quasi
généralisée — j'exagère — une
exception qui serait un tant soit peu plus grande que l'exception
envisagée. Je ne veux pas d'une exception un tout petit peu plus grande que l'exception envisagée. Si la règle du sacré de la vie doit nous guider,
l'exception doit être exceptionnelle, et on doit y porter une attention
exceptionnelle dans la rédaction.
• (12 h 20) •
Cela
m'amène à dire qu'on pourrait aussi imaginer, dans cette rédaction, l'entrée en vigueur par étape, parce qu'on
a bien dit, à plusieurs reprises, l'importance que cette offre ne devienne pas
un sauf-conduit pour d'autres services de santé. Donc, il faut s'assurer que l'ensemble
de la couverture en santé est réellement offert et offert partout avant
d'arriver à cette étape-là, encore une fois, le principe étant que l'exception
à cette règle du sacré reste exceptionnelle.
Ce
projet de loi est, quant
à moi, un projet de loi sur la vie, et il faut s'assurer qu'aucun compromis ne sera fait
pour soutenir la vie. Mais il y a
des cas, il y a des gens, il y a des personnes pour qui
la vie n'a plus de sens, la vie n'est que souffrance, pour qui nous devons la plus grande écoute. Ce sont les plus
vulnérables des plus vulnérables. Peut-on,même pour des principes sacrés, refuser la compassion que nous leur
devons, l'accompagnement que nous leur devons? J'oserais penser que l'aide
médicale à mourir est, dans le fond, une aide à regret, mais une aide qu'on doit porter presque au nom du sacré de la vie. Lorsque
ces gens témoignent ou lorsqu'on voit des images… Et je vous réfère au témoignage
de mon collègue de Jacques-Cartier, qui relatait, de façon illustrée, un de ces cas, lorsqu'on
pense à ces personnes prisonnières d'une
souffrance sans fin, le caractère sacré de la vie devient, jusqu'à
un certain point, comme une lumière qui nous dit : Mais, attention, quel est donc ce sens de la vie
que vous donnez à la vôtre, à votre vie et à celle des autres? Parfois, il
faut aussi se mettre dans les souliers de ces personnes.
Par chance, par la
plus grande des chances, moi, député de Saint-Laurent, qui parle au nom de mon
titre de représentant de Saint-Laurent, je suis en pleine santé. Je suis chanceux.
J'entendais des gens parler de leurs familles, des gens… J'ai mes parents, mon épouse a ses parents,
nous sommes chanceux. Mais il faut être capable, dans nos fonctions, de se mettre dans les souliers des autres, il faut
être capable de se dire : Mais, si c'était moi, que ferais-je de mon
discours du sacré? Si c'était moi, cette
exception exceptionnelle… Et je pense que je demanderais au député de Saint-Laurent de penser à moi et je lui dirais : Ce qu'il y a
de plus important, ce n'est pas que
tu parles, mais que tu m'écoutes. Ce qu'il y a de plus important, c'est
que tu me regardes. Ce qu'il y a de plus important, c'est que tu comprennes que
la vie, c'est la mienne, c'est de la mienne dont tu parles.
Alors, Mme la
Présidente, vous comprendrez que ces notions éminemment émotives m'amènent à
conclure, d'abord, en saluant le travail des
parlementaires et en espérant que la couverture qui est faite de nos débats
démontrera que la classe politique sait aborder des sujets avec respect et sait
avancer des idées dans le respect des idées des autres et qu'en cela peut-être
que nous serons vus comme étant un peu plus constructifs que ce qu'on dit de
nous parfois.
Mais
je termine en disant que je vais
voter pour le principe de ce projet
de loi, en demandant à nos collègues
qui vont participer à l'étude article par article du projet
de loi à nous donner toutes les
garanties, à nous dessiner les ceintures, les bretelles qui vont faire
en sorte que l'exception sera exceptionnelle et que, de ce projet de loi, on
dira qu'il est surtout un projet de loi sur la vie qu'un projet de loi sur la
mort. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci, M. le député de Saint-Laurent. Mme la
députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Et,
avant de vous céder la parole, j'aimerais seulement vous informer que le
délai étant écoulé pour les débats de fin de séance, nous n'avons reçu
aucune demande.
Mme Marguerite Blais
Mme
Blais : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. C'est très difficile de parler après le député de Saint-Laurent. J'avais l'impression d'être
dans une église, un dimanche, c'est vrai, et d'écouter quelqu'un qui nous
donnait conseil. Je
n'ai jamais entendu le salon bleu aussi silencieux depuis que
je siège ici, pas seulement pour le
député de Saint-Laurent, pour les députés qui ont pris la parole. Je n'ai jamais
entendu le salon rouge aussi serein. Je n'ai jamais vu des parlementaires
travailler ensemble pour tenter de trouver des solutions à une question aussi
complexe, aussi difficile.
J'ai hésité beaucoup,
Mme la Présidente, avant de prendre la parole. Je ne voulais pas
parler. Je ne voulais pas parler parce que j'ai eu le privilège —j'appelle
ça un privilège — de
faire partie de la commission parlementaire qui étudiait… qui recevait les représentants des groupes qui ont eu le courage de développer
un mémoire, une idée et de nous en faire
part ici, au salon rouge. C'est un grand, grand, grand privilège que de pouvoir
écouter ces gens. Et j'ai été remuée tout le temps : j'ai été
remuée le matin, j'ai été remuée l'après-midi, le soir, dans la nuit; ça me touche
profondément. Et, après avoir entendu le député de Saint-Laurent, je
suis encore remuée dans mon propre questionnement.
Je suis une
personne extrêmement ouverte, Mme
la Présidente, sur toutes sortes de questions; j'ai toujours
été ouverte. Mais, lorsque j'ai entendu des gens arriver avec des arguments qui
étaient différents les uns des autres, j'ai trouvé
que ce n'était pas une question facile à traiter. Même ici, j'ai entendu des
députés qui ne comprennent pas tout
à fait la finitude du projet de loi pour des personnes aptes, et lorsque la fin
de vie est imminente, et que veut dire la fin de vie imminente. Je pourrais, Mme la Présidente, être totalement prisonnière de mon corps et ma fin de vie ne
serait pas imminente et je ne pourrais pas me prévaloir de ce projet de
loi.
J'ai entendu
des gens qui représentent des organismes qui ont une très grande crédibilité
nous dire : Mais pourquoi ça ne peut pas toucher les mineurs, les
personnes inaptes? Et là j'ai vu cette espèce d'ouverture, alors que d'autres
demandent qu'il y ait beaucoup plus de soins palliatifs, une pratique qui est relativement
récente, une pratique qui n'est pas répandue partout.
• (12 h 30) •
J'ai entendu
des personnes nous dire : Vous devriez peut-être scinder le projet de loi. Le député de Saint-Laurent
mentionnait : Peut-être que le projet de loi devrait y aller par étapes.
Les gens nous disaient : Commencez par mettre partout des soins
palliatifs. Je sais que la ministre déléguée aux Services sociaux et à la
Protection de la jeunesse est très, très, très sérieuse dans sa démarche, dans
son projet de loi. Et je lisais un article récemment où on mentionnait que les
soins palliatifs étaient pratiquement couverts partout, mais ce n'est pas ce
que j'ai entendu pendant la commission parlementaire où les gens nous
disaient : Est-ce que vous pourriez vous assurer que, sur tout le
territoire du Québec, les personnes puissent recevoir des soins palliatifs et
non seulement les personnes atteintes de
cancer, mais toutes les maladies. Et, par la suite, on pourrait peut-être
parler de l'aide médicale à mourir, que certains appellent euthanasie, qu'on
appelle différemment.
Et la députée
de Gatineau a eu raison pendant la commission parlementaire : il faut définir les termes. J'ai senti le
besoin, Mme la Présidente, de faire
une consultation dans mon comté, à titre de députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. J'étais tellement interpellée que c'était la première fois que je
faisais une consultation de cette nature, et j'ai senti le besoin de demander à un médecin de m'accompagner pour
être certaine que les définitions qui étaient pour être données seraient
les bonnes définitions, tellement que, durant la consultation, nous n'avions
pas les bonnes définitions. C'est-à-dire que les gens arrivaient avec toutes
sortes de définitions différentes.
Cette
consultation a duré plus de deux heures, et il y avait une cinquantaine de
personnes. Et on m'a demandé de faire
des consultations dans deux, trois, quatre endroits différents dans mon comté,
là. Je pourrais faire des consultations partout, là, je pourrais faire une miniconsultation sur les soins de fin de vie
seulement dans Saint-Henri—Sainte-Anne tellement que c'est un sujet qui touche. Et vous savez quoi? Durant
cette miniconsultation dans mon comté, c'était aussi silencieux que dans
le salon bleu. Ce n'est pas une question qu'on traite à la légère. Ce n'est pas
un projet de loi comme les autres. Ce n'est
pas un projet de loi qui touche… C'est important, la réforme du Code
civil, mais ça, là, ça touche la vie d'une personne.
Et, quand le
député de Saint-Laurent a dit : Je suis qui, moi, pour décider pour quelqu'un
d'autre?, c'est une question qu'on
doit se poser. Et vous vous imaginez? Ce sera la première fois, à titre de
députée, que je vais voter librement. Une grande question se pose :
Est-ce que c'est la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne qui vote ou celle qui
représente les citoyennes et les citoyens de Saint-Henri—Sainte-Anne?
Vous le
savez, j'ai été ministre responsable des Aînés, et je m'occupe des aînés, et je
reçois, de partout à travers le Québec, des lettres. Je pourrais faire de la
correspondance tout le temps de personnes âgées qui m'écrivent, qui sont
mes amis Facebook, qui me
téléphonent, et qui sont aussi préoccupées par cette question, et qui me
demandent : Pensez-vous que ce projet de loi, c'est pour nous éliminer parce
qu'on coûte trop cher à la société?
Je sais que ce n'est pas le but du projet de loi, mais on sait, vous
comme moi, que la perception, c'est aussi la communication. On vit dans un
monde de communication. J'ai comme l'impression qu'on ne comprend pas encore
tous les tenants et tous les aboutissants.
Je trouve que
ça prend du courage pour se lever dans cette Chambre pour parler de la vie et
de la fin de la vie. Personnellement,
j'ai perdu ma mère... mon père aussi, mais ma mère où on l'a accompagnée vers
la fin de sa vie. Et j'ai compris,
j'ai compris, maintenant, que c'était une sédation palliative terminale,
qui va possiblement s'appeler continue, mais j'ai compris que c'était ça. Mais je ne le savais pas à l'époque.
Et ma belle-maman, récemment, a vécu la même situation. Et là les enfants autour disaient : Mais il
faut que ça se termine. Ce n'est pas possible. Il faut qu'elle parte, elle
souffre. Et là on nous disait : Non,
elle ne souffre pas, elle est dans le coma. Et là quelqu'un
a dit : Mais moi, je souffre. Moi, je souffre. Moi, je veux la voir partir. Comprenez comment c'est complexe. C'est complexe quand
on commence à parler de fin de vie. Est-ce que ce sont les enfants qui
souffrent? La vie, là, et la mort, là, la personne qui part, elle est partie,
mais ceux qui restent vivent aussi des
petites morts, ce sont les endeuillés. Et c'est une
question éminemment complexe dans une société où on veut vraiment que
les choses aillent très rapidement.
Et j'ai eu aussi le
privilège de travailler de très près avec l'Association québécoise de
prévention de suicide, où on a mis en place
le premier programme au Québec pour accompagner les personnes vieillissantes
qui se suicidaient. On ne parlait pas de ça, le suicide chez les
personnes âgées. Ah non! Les personnes âgées ne sont jamais maltraitées,
ne se suicident pas. Or, ça existe. Pas autant que chez les jeunes, mais un
suicide, c'est un suicide de trop.
Et
je suis encore toute remuée et je n'ai pas encore ma réponse quant à l'adoption
du principe, pour ma part, et je suis
devant vous. Et je considère que c'est correct que je puisse parler, que je
puisse m'exprimer, parce que j'aurai à
voter mardi sur l'adoption de principe et j'aurai encore un temps de réflexion
durant la fin de semaine pour peser tout cela, pour peser les questions que mes
citoyennes et mes citoyens m'ont dites, dans mon
comté.Parce qu'il y en a qui sont arrivés,
qui m'ont dit : Je suis pour; ils sont
repartis : Je suis contre. À l'intérieur
de deux heures, à l'intérieur de deux heures. Moi qui suis si ouverte sur toutes les questions, moi, la première,
Mme la Présidente, j'ai toujours rêvé… Je souhaite un jour pouvoir partir quand je voudrai partir, selon mon choix et à mon heure. Et je suis devant
vous et je n'ai pas de réponse, parce que le projet de loi, ce n'est pas le
suicide assisté, ce n'est pas : Je m'en vais chez moi, je prends un médicament et
je mets fin à ma vie. C'est un médecin qui devra poser l'acte, un acte
médical qui met fin à ma vie immédiatement, comparativement à la
sédation palliative, continue ou terminale, qui fait en sorte que la personne
part de façon naturelle à l'intérieur de deux, trois, quatre, cinq jours,
autour de ça.
Donc,
c'est une question difficile, et je crois que les parlementaires qui devront
étudier, par la suite,
le projet de loi article par article devront continuer de le faire de
façon aussi sereine pour faire avancer ce débat,
parce que c'est vrai que l'ensemble de
l'Assemblée nationale a eu le courage de parler de cette situation avec autant
de maturité, et c'est vrai aussi que la ministre a déposé son projet de
loi, que la commission parlementaire s'est bien faite, et je vais voir
la suite des choses, comment, article par
article, le projet de loi va évoluer, pour
être en mesure, à la fin, de me prononcer, étant donné que je vais vivre quelque chose d'unique dans ma vie :
un vote libre, un vote libre. Et un vote libre à l'Assemblée nationale, ça va passer à l'histoire, mais c'est
un vote que je vais prendre pour les générations présentes et les
générations futures. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : Merci, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme la députée de Saint-Lambert.
Mme Nicole Ménard
Mme Ménard :
Merci beaucoup. Vous avez dit Saint-Lambert?
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) : J'ai dit
Saint-Lambert. Mon Dieu!
Mme Ménard :
C'est Laporte.
La Vice-Présidente
(Mme Poirier) :Laporte. J'étais dans
la ville, la ville de Saint-Lambert.
• (12 h 40) •
Mme
Ménard : Mais c'est... Mon
bureau de comté est à Saint-Lambert. Non, c'est au fédéral, Saint-Lambert,
Mme la Présidente.
Alors,
écoutez, Mme la Présidente, j'éprouve aujourd'hui vraiment
le besoin de m'adresser à mes concitoyens de Laporte sur un projet de
loi que je trouve extrêmement délicat.
Vous
savez, Mme la Présidente, à toutes les fois que je me lève en cette Assemblée pour aborder une question, je le
fais avec respect et je dois, en tous les cas, considérer les meilleures
options pour l'avenir des citoyens que je représente. Et je peux vous
assurer, Mme la Présidente, que chacune de mes décisions sont motivées par le
plus grand intérêt de mes concitoyens.
Alors, comme je viens
de vous le mentionner, aujourd'hui, j'aborde un sujet très sensible et délicat.
Je pense qu'avec toutes les interventions
que nous entendons nous le sentons. C'est comme cela que je l'ai toujours
senti, d'ailleurs, et traité. Alors, je parle du projet de loi
concernant les soins de fin de vie.
Nous
le savons tous, de nombreuses étapes ont été franchies, un rapport qui a été
déposé, il y a eu un comité de juristes
qui a aussi, à son tour, rendu public son rapport. Il y a eu de multiples, en
fait, consultations, un travail extraordinaire qui s'est fait sur le terrain. Et, quand je parle
de ça, ça a l'air très simple et ça a l'air d'une courte période, là, mais on
parle de plus de trois ans d'écoute et de
travail. Et je veux aussi, Mme la
Présidente, saluer le travail de tous
les parlementaires, un travail qui a
été vraiment non partisan, et c'est remarquable, et je veux le
souligner. D'ailleurs, plusieurs collègues se sont levés
et ont parlé de leur vécu, ce que je trouve très touchant. Et je veux les
saluer parce que je les trouve très courageux d'apporter
leur expérience personnelle.
Donc, ce projet de
loi, qui a pour objectif de rendre disponibles aux personnes en fin de vie les
soins qu'elles souhaitent obtenir, notamment
les soins palliatifs, la sédation palliative terminale et l'aide médicale à mourir... Depuis le dépôt du projet de loi, j'ai reçu plusieurs courriels,
téléphones, lettres. Et tous les gens avaient un grand questionnement, questionnement
sur l'éthique, social, médical, juridique. Nous savons tous que ce projet de
loi interpelle les valeurs fondamentales des individus.
J'ai
écouté attentivement tous mes commettants et je dois vous dire que je les ai
écoutés aussi avec mon coeur. La grande majorité des interventions se
sont avérées opposées au projet de loi tel que présenté. J'ai fait ce constat,
mais je devrai voter, Mme la Présidente, selon ma conscience, et l'adoption de ce principe de loi va contre mes valeurs.
Alors, je serai obligée de voter contre l'adoption de principe du projet de
loi. Je suis consciente que ma décision ne fera pas l'unanimité, que ce soit ici ou que ce soit chez mes électeurs.
Cependant, je veux leur garantir que je le fais en abordant la question avec
beaucoup de respect et compassion. Pour moi, Mme la Présidente, un médecin est
là pour soulager la souffrance des gens et de voir à leur bien-être.
Alors,
je sais qu'il y a beaucoup de travail qui a été déjà
accompli afin d'améliorer la
disponibilité, la diversification et
la consolidation des services offerts en fin de vie. Les efforts doivent être
dirigés, Mme la Présidente, vers les soins palliatifs, et nous devons tous, tous, mettre nos énergies à améliorer
le bien-être des patients. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci, Mme la députée de Laporte. Je céderai
maintenant la parole au député de Mégantic.
M. Ghislain Bolduc
M.
Bolduc
(Mégantic) : Merci, Mme la Présidente. Nous nous adressons aujourd'hui… projet de loi
n° 52, Loi concernant les soins
de fin de vie. Je pense que mes collègues l'ont illustré abondamment, de la
difficulté que nous avons, vous le
savez, de prendre une décision qui va affecter la vie des gens, qui va affecter
la façon dont on termine notre vie. Et c'est
vraiment le sujet de fond de ce projet de loi là,
qu'il faut prendre avec le plus grand sérieux. Les collègues l'ont très bien mentionné, nous
avons, dans un cas comme ce projet de loi là, une opportunité
extraordinaire de prendre une position
personnelle. Et non seulement cette position-là, elle est personnelle,
on a le choix d'y réfléchir en considérant notre électorat, notre milieu, notre environnement et nos valeurs
personnelles. Je crois que personne ne peut rester indifférent quand on fait face à une situation comme ça. Et
tous et chacun ici ont vécu dans leurs familles des
situations très difficiles.
Donc, je
pense qu'on va faire un petit tour de table et essayer
de positionner la situation pour en arriver à ma propre position, pour exprimer, ici, à l'Assemblée, Mme la Présidente, la position dans
laquelle nous pourrions travailler,
avec quelques exemples si possible. Donc, il
est très, très important que, dans la substance de
ça… Le respect de la personne est quelque chose de fondamental, la reconnaissance de nos droits et
libertés. Et la personne en soins de... fin de vie doit être traitée
avec compréhension, compassion, courtoisie, équité, dans le respect de sa
dignité, de son autonomie, de ses besoins et
de sa sécurité. L'établissement d'une communication ouverte et honnête entre la
personne et les membres de l'équipe de soins est primordial pour en
arriver à terminer sa vie d'une façon… le plus
paisiblement possible.
Je voudrais
aussi parler que… Vous savez, quand on arrive à la fin de vie, il y a une… On
est en train d'établir un projet de loi qui réduit, si l'on veut, la
distance qui existe entre terminer sa vie de façon naturelle et l'acharnement thérapeutique, qui est un peu à l'opposé du projet
de loi, dans le sens où on maintient la vie
artificiellement à tout prix. Et cette ligne-là se rétrécit de plus en
plus. Et les enjeux que l'on met sur la table aujourd'hui amplifient, si l'on
veut, la délicatesse de la terminologie et
des textes que l'on va devoir analyser à l'intérieur du projet de loi pour en
arriver à faire un débat qui va
vraiment représenter la meilleure solution pour les gens qui se retrouvent dans
une situation de fin de vie.
• (12 h 50) •
Je voudrais
ici illustrer certains éléments, O.K., où le domaine de la santé, qui est
principalement de compétence provinciale...
Écoutez, notamment,
on parle du consentement à la mort, l'obligation de fournir les
choses nécessaires à la vie,
l'obligation des personnes qui pratiquent des opérations
dangereuses, l'obligation des personnes qui s'engagent à accomplir un acte… la négligence criminelle, de
manière plus importante pour notre propos, l'interdiction de
l'homicide, du meurtre et de l'aide au
suicide. Donc, comme vous voyez, on entre dans une sphère qui devient un peu
compliquée :
«Toute personne est inviolable et a droit à son
intégrité — dans
le Code civil.
«Sauf dans les cas prévus par la loi, nul ne
peut lui porter atteinte sans son consentement libre et éclairé.»
J'ai eu le
malheur de devoir assister à plusieurs fins de vie dans les maisons de fin de vie. Et on
a même, dans le cas de mon comté,
fait l'ouverture officielle d'une maison de vie, il y a moins d'un mois, qui
est le résultat d'un travail colossal
par toute la région. Donc, ce que je veux illustrer ici, c'est l'importance que ça revêt aujourd'hui dans la vie de tout le monde d'en arriver
à pouvoir avoir un endroit où est-ce qu'on peut terminer notre vie dans la
meilleure des possibilités qui peut se présenter à nous.
Donc, comme
vous le savez très bien, aujourd'hui, quand on arrive à une maison de fin de
vie, il est très, très rare que l'on
reparte de là pour faire des vacances, O.K.? Malheureusement, ces résidences-là sont conçues et structurées pour recevoir des gens qui sont, pour vraiment
bien le dire, en phase terminale, sans espoir de retour. Donc, on les amène dans des résidences où on leur fournit
le meilleur encadrement possible pour les aider à vivre cette période
de leur vie. Et non seulement on a encadré le malade, mais aussi une structure très importante
qui est aussi pour la famille des gens qui se rencontrent dans cette résidence. Donc, l'encadrement revêt une
complexité, comme ma collègue l'a si bien mentionné, où la famille, le malade
et un ensemble de bénévoles et de structures se rencontrent pour
terminer la vie de la meilleure façon possible.
Il faut donc
aussi regarder le projet de loi. Et, vous savez, quand on se met à regarder l'ensemble
de l'activité, je crois qu'il faut
prendre un peu de temps pour regarder la terminologie du projet de loi. Parce que je suis en train de vous décrire un peu ce que la maison de fin de vie a
pour objectif, on peut aussi parler de soins palliatifs terminaux; encore là, on arrive dans une ligne très, très mince.
Donc, je vais
terminer mon exposé de la maison de fin de vie. Et, vous savez, quand la
douleur devient permanente chez le patient et qu'on lui donne le bouton
de morphine, on commet un acte pratiquement irréversible. Parce qu'une fois que le malade a ce bouton-là on sait très bien,
O.K., que la morphine va faire son œuvre pour apaiser la douleur,
mais elle a aussi un impact extrêmement négatif sur le cycle de vie et la nature dans son environnement. Encore là, on se met dans
une position de la ligne imaginaire où on dit au patient : Nous te donnons
cette discrétion-là d'agir en
fonction de tes besoins de la
meilleure façon possible. Donc, on crée ici la ligne imaginaire encore où on
passe d'un côté à l'autre avec le consentement et l'action même du malade, mais c'est quand même
un acte dont tout le monde connaît la conséquence, O.K.? Donc, il
faut bien le protéger, cet acte-là, parce que c'est le malade, c'est le malade lui-même
qui prend la décision entre la douleur et la durée du cycle dans lequel il est
pris.
Donc,
Mme la Présidente, les maisons de soins de vie ont pour objectif
de faciliter... et d'enlever la douleur au maximum chez les gens qui
sont dans une période critique.
Je voudrais
aussi parler un petit peu des soins palliatifs terminaux. Encore là, on est
dans une ligne extrêmement mince où est-ce qu'une fois qu'on arrête l'hydratation et
l'alimentation, vous savez, on se met, encore là, dans une ligne où il n'y a pas grand solution à long terme. Donc,
les soins palliatifs terminaux, le bouton de morphine, quand on arrive à
ces endroits-là, nous disons à un patient, nous disons à sa famille : Les
alternatives se réduisent de façon dramatique.
On arrive
aussi, puis c'est là où il faut un peu réfléchir… Parce que je n'ai pas
beaucoup de temps pour faire mon exposé. Et quand est-ce qu'on arrive à
l'acharnement thérapeutique? Et, pour moi, l'acharnement thérapeutique, c'est
quand on prolonge la vie et que, mécaniquement, on la supporte sans espoir de
retour et qu'on la maintienne.
Il faut donc
parler vraiment que, dans le projet de loi n° 52, non seulement nous avons
ici un projet de loi d'une délicatesse
infinie, nous avons un projet de loi d'une sensibilité extraordinaire face à
nos responsabilités sociales, face au respect de la vie dans sa plus
grande intégrité.
Et il va
falloir dépenser un temps important à bien définir la terminologie du projet de
loi, parce que, dépendant de la façon
dont on va structurer les articles et la définition des vocabulaires, comme je
vous l'ai illustré précédemment, on a vraiment
une ligne qu'il est très, très, très difficile de trancher sans vraiment se
donner, comme je dirais, une conscience vraiment bien positionnée.
Et je crois
que, vous savez, la difficulté des familles à la fin de vie de nos proches est
déjà une situation extrêmement difficile. Il faut donc s'assurer que
l'ensemble de ces paramètres-là sont très bien définis.
Donc, je
voudrais en arriver à vous dire que moi, je suis d'accord avec le principe du
projet de loi, mais je mets une mise
en garde sur la structure et la définition des articles tels qu'ils vont être
produits pour en évaluer les conséquences lors de la position finale et de l'adoption du projet de loi, car, selon moi,
cette ligne-là, elle est loin d'être évidente, et il va falloir tout le professionnalisme et la clarté du débat
pour en arriver à la meilleure solution possible, mais il faut en
maximiser la clarté. C'est fondamental pour
l'ensemble des gens qui vont pouvoir regarder le projet de loi. Et, comme vous
le savez, ces projets de loi là ont
une durée généralement longue. Et il faut s'assurer que, même dans les progrès
technologiques qui vont pouvoir être faits, on va essayer de garder une
définition qui est claire.
Et moi, je demande à la population de
s'exprimer, de donner à leurs députés leur point de vue pour essayer d'enrichir
le débat au maximum, pour que l'Assemblée législative fasse le meilleur travail
possible et arrive à une conclusion qui représentera vraiment la population du
Québec pour tous les Québécois et toutes les Québécoises. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Poirier) :
Merci, M. le député de Mégantic.
Alors, compte tenu de l'heure, nous allons suspendre
nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15
heures)
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Bonjour à tous et à toutes. Veuillez vous asseoir.
Alors,
l'Assemblée reprend le débat ajourné le 23 octobre 2013 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 52, Loi concernant
les soins de fin de vie. Y a-t-il des interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce,
à vous la parole.
Mme Kathleen Weil
Mme Weil : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, à
mon tour, M. le Président, de m'exprimer sur le projet de loi n° 52, Loi concernant les soins
de fin de vie, un projet de loi qui traite des soins à prodiguer aux personnes en fin de vie et
qui propose pour la première fois au Québec, et plus largement dans une
juridiction canadienne, l'option, pour un patient
mourant et souffrant, de demander et de se voir accorder le droit de mourir
avec l'aide d'un médecin et du système de santé pour mettre fin à sa
souffrance et à sa vie.
L'enjeu
devant nous, c'est le rôle que nous… et le rôle que nous sommes appelés à
jouer, et la responsabilité
que nous portons sur nos épaules comme
parlementaires est très littéralement sans précédent ici, au Québec,
ou ailleurs au Canada, mais non sans précédent, sous différentes formes,
dans quelques juridictions dans le monde occidental. Je dois vous admettre que,
depuis le déclenchement des travaux de la Commission spéciale sur la question
de mourir dans la dignité, ce fardeau et
cette responsabilité pèsent lourd chez moi. En effet, comme l'écrivait
si justement Antoine
Robitaille dans Le Devoir du 13 juin dernier, et je cite : «L'idée de pouvoir précipiter la fin d'un être humain, lequel possède
une dignité peu importe sa condition, ne doit évidemment pas être prise à la
légère.»
Nous
avons tous, je crois, ou presque tous une expérience avec la mort d'un être
cher. Certains d'entre nous ont pu accompagner un être cher, généralement un
parent, lors de ce que l'on appelle dans ce projet de loi la fin de vie. C'est une
expérience qui est difficile mais en même temps très précieuse, car cette
expérience nous accompagne toute notre vie comme un rappel de la valeur de la
vie humaine et de l'importance de mourir dans la dignité, avec l'appui d'un système de santé qui démontre compétence et
compassion et évidemment aussi avec
l'entourage de ses proches pour recevoir les derniers gestes et paroles
d'amour. Mais, aujourd'hui et dans
les jours qui suivent, la question est de savoir quelle est la meilleure
façon, le meilleur moyen d'assurer collectivement, comme société, une fin de vie digne à tous nos concitoyens. Voilà la question qui m'ébranle, je vous admets,
M. le Président, depuis le début des travaux de la commission spéciale.
J'ai
suivi comme nous tous, élus et autres citoyens, le débat, les témoignages
douloureux et touchants, le plaidoyer pour la liberté de choix, pour une nouvelle vision
des actions à poser en fin de vie, d'une part, et le plaidoyer tout
aussi vibrant de ne pas prendre ce chemin
qu'est celui de poser un geste avec intention de mettre fin à la vie d'un être
humain. Je veux saluer en tout premier lieu le travail de tous ceux qui ont
siégé à la commission et qui ont fait
le tour du Québecpour écouter nos concitoyens désirant s'exprimer
sur cet enjeu. Je nous félicite collectivement, comme élus, d'avoir mené
ce débat sans partisanerie, avec une ouverture d'esprit remarquable. Je salue
tout particulièrement le travail du
premier président de la commission, le député de Jacques-Cartier, et de la présidente qui a pris sa relève, la députée de Hull, ainsi que
le travail de la vice-présidente de la commission, la députée de Joliette et maintenant la ministre qui pilote ce dossier.
Cette
question des soins de fin de vie, telle qu'elle est articulée dans le présent projet de loi, lorsqu'elle évoque la sédation palliative terminale et l'aide médicale à
mourir, elle interpelle justement la conscience de chacun desparlementaires et de chaque Québécois. Confrontés à un enjeu aux conséquences aussi énormes
que celui-ci, il m'apparaît tout à fait normal que des positions divergentes émergent dans la société, fondées sur des faits, des vécus, des valeurs, des principes et l'analyse
qu'en fait chacun d'entre nous. L'Assemblée nationale
se veut le reflet de cette diversité d'opinions, et je
suis extrêmement fière que le chef du
Parti libéral du Québec, notre chef,
M. Philippe Couillard, ait convenu qu'il revenait à chacun des députés
de notre formation politique de voter en son âme et conscience sur cet enjeu.
Je ne sais pas encore de quelle façon
sera déterminé le vote des membres des autres formations politiques, mais je
suis très heureuse que, de notre côté, l'approche non partisane qui a
marqué les travaux sur cette question depuis le tout début s'incarne dans un
vote libre.
M. le Président, tout comme mes collègues qui
l'ont exprimé au cours de ces débats, j'ai, à titre de députée, personnellement
rencontré de nombreux citoyens de ma circonscription pour discuter de ce sujet
des soins en fin de vie et du projet de loi
plus particulièrement. Évidemment, j'ai aussi discuté de cet enjeu avec des
professionnels de la santé : des
médecins, des infirmières, du personnel soignant et aussi, évidemment, avec des
amis et des membres de ma famille. J'ai
aussi reçu de très nombreuses lettres, courriels et appels téléphoniques. Il
s'agit d'un sujet qui touche profondément les gens, et, en tant que parlementaire, j'ai fait mon devoir d'être à
l'écoute de mes concitoyens et de leur donner l'occasion de s'exprimer.
Les opinions que j'ai recueillies, je les retrouve dans celles qui ont été
émises lors des consultations sur le projet de loi.
M. le Président, il y a de nombreux enjeux
imbriqués dans ce projet de loi, que l'on songe ici à la clarté des termes employés. Et, ma collègue la députée de
Gatineau a eu l'occasion de l'expliquer en détail, il y a aussi des
enjeux de définition de ce qu'est la fin de vie, il y a des enjeux médicaux
précis soulevés par les médecins, notamment au sujet de la sédation palliative terminale et de l'aide médicale à mourir et
des questionnements très, très sérieux des médecins, surtout les
médecins spécialisés en la matière.
Pour ma part, j'aimerais aborder un aspect de
cette grande et importante question de soins prodigués à une personne en fin de vie, un aspect qui est très
important pour moi et qui a été au cœur des nombreuses rencontres que
j'ai tenues, soit l'accessibilité aux soins
palliatifs. J'ai une connexion toute personnelle avec l'essor des soins
palliatifs au Québec, puisque mon père
était médecin interniste à l'Hôpital Royal Vic et qu'il a été témoin de
l'implantation des soins palliatifs
au Québec par le Dr Balfour Mount, qui, en 1975, a mis sur pied le premier
service de soins palliatifs au Québec. Le
Dr Mount, qui a d'ailleurs été décoré de l'Ordre national du Québec et de
l'Ordre du Canada, est, à juste titre, reconnu comme le père des soins
palliatifs en Amérique du Nord.
Et, vous savez, M. le Président, j'ai aussi des
connexions par rapport à mon propre vécu. Mon père avait... interniste,
plusieurs spécialités, dont la gériatrie, et il a littéralement accompagné des
centaines et des centaines de personnes en
fin de vie. Et c'était à l'époque des visites à domicile, et je me souviens
qu'à tout moment, au milieu de la nuit
ou n'importe quand, la semaine, la fin de semaine, souvent, mon père, bon,
recevait un appel et il allait accompagner ces personnes.
Ma mère aussi
a travaillé à l'Hôpital Royal Victoria. Malgré sept enfants, elle travaillait à
temps plein. Et je me souviendrai toujours le tout début de ces
discussions sur les soins palliatifs. Ils rentraient à la maison très
intéressés. Ma mère, c'était relations
publiques, donc elle faisait des reportages sur les soins palliatifs et surtout
le Dr Mount, et ils étaient vraiment
animés par cette question. Ils trouvaient ça formidable qu'on ait ce nouveau
champ d'action pour aider les personnes
souffrantes en fin de vie. Et je vous dirais que l'approche de traitement
global, on la voyait déjà à ses débuts, et moi, je trouvais ça intéressant
de pouvoir en discuter.
Donc, je dois
vous dire que... Et mon expérience personnelle aussi, c'est que j'ai eu
l'occasion, parce que mon père, par ailleurs, a travaillé dans un centre
de longue durée, comme le directeur de la médecine, j'ai eu à travailler dans un centre, aussi, de personnes
âgées, en tant qu'adolescente, à l'âge de 16 ans, 17 ans, lors des fêtes de
Noël et aussi l'été. Et j'ai eu l'occasion
de côtoyer des personnes en fin de vie... pas dans le secteur hospitalier, mais
souvent, quand je retournais, après la fin
de semaine, la personne avait décédé. Donc, je dois vous dire, les grandes
discussions qu'on a eues à l'époque, je vous dirais, n'étaient pas
tellement différentes — et
on parle des années 70 — de
ce qu'on discute maintenant. Mais, depuis ce
temps-là, évidemment, il y a plusieurs juridictions dans le monde qui ont
développé ces soins.
Donc, j'ai
donc grandi dans une famille dont les parents valorisaient beaucoup ce qui
était, il y a près de 40 ans, un nouveau domaine de spécialisation de la
médecine, soit les soins palliatifs, qui préconisent une approche de soin
globale et active, qui sont dispensés aux personnes atteintes d'une maladie
avec un pronostic terminal.
L'objectif des soins palliatifs est d'obtenir,
pour les personnes malades et leurs proches, la meilleure qualité de vie
possible. Ces soins mettent véritablement l'accent sur l'atténuation de la
douleur et de tout autre problème psychologique, psychique que vivent les personnes en fin de vie.
Malheureusement, malgré le statut de pionnier du Québec dans le développement des soins palliatifs, beaucoup de
témoignages entendus en commission et que j'entends depuis
des années nous rappellent que ce type de soins essentiels n'est
pas systématiquement disponible au Québec et certainement pas disponible dans
toutes les régions du Québec. C'est un état de fait qui est fondamental et
incontournable dans le cadre d'un projet de loi qui
traite de la fin de vie.
• (15 h 10) •
Il s'agit
d'une réalité qui a été confirmée lors des consultations sur le projet de loi. En effet, l'Association médicale du Québec, dans son mémoire, mentionne, et je cite :
«Ce qu'il faut surtout retenir, c'est le désir profond des
médecins de voir une amélioration de la qualité et de l'accessibilité des soins
palliatifs.» L'association poursuit d'ailleurs en mentionnant que, et je cite à
nouveau : «S'il est un point qui fait l'unanimité au sein de la profession
médicale, c'est l'absolue nécessité d'améliorer l'accessibilité à des soins
palliatifs de qualité partout au Québec.»
On apprend, par
ailleurs, à la lecture de ce mémoire, que l'Institut
canadien d'information sur la santé révèle qu'actuellement seulement de 16 % à 30 % des Canadiens décédés
ont eu accès à des services de soins palliatifs et de soins en fin de
vie, selon l'endroit où ils demeuraient. Même son de cloche du côté de la
Protectrice du citoyen, et je cite Mme Saint-Germain : «Par ailleurs, le projet de loi prévoit qu'un
établissement doit diriger une personne en fin de vie vers un lieu répondant à
son besoin s'il ne peut lui offrir les soins palliatifs à domicile. Il
s'agit d'un autre défi de taille à relever
dans le contexte où l'accès aux soins palliatifs fait défaut dans plusieurs
établissements de diverses régions. Des données publiées en 2010 font
état de lacunes importantes dans l'offre de services
en soins palliatifs dans au moins 10 régions
du Québec. [...]Selon le témoignage de
certains experts, entre 20 % à 60 % seulement des besoins en
soins palliatifs de fin de vie seraient comblés,
selon les régions et en fonction des diverses pathologies.»
M. le Président, si j'ai présenté ces données
concernant l'acceptabilité aux soins palliatifs, c'est parce que
j'éprouve un malaise à mettre dans un même
projet de loi, d'une part, l'accès à ces soins
et, d'autre part, l'aide médicale à mourir et la sédation palliative terminale. Il est essentiel, et je le répète,
essentiel que l'on développe un réseau de soins palliatifs partout au
Québec pour que chaque personne puisse,
justement, mourir dans la dignité. Si l'on
parle d'un droit de mourir dans la dignité, il faut, dans un premier temps,
s'assurer que tous ceux qui souhaitent avoir accès à ces soins palliatifs puissent y avoir accès, à ces soins, que ce droit ne soit pas un droit
seulement sur papier, dans une loi, dans
une annonce gouvernementale, mais un droit dans les faits, dans le vécu, sur le
terrain, partout.
Je partage
donc les doutes de tous ceux qui sont venus dire que ce droit serait difficile
dans l'application, actuellement, comme
en témoigne d'ailleurs le Conseil pour la protection des malades, qui évoque que l'accès
à des soins de fin de vie est déjà difficile
au Canada et au Québec pour la grande majorité des patients qui en ont besoin.
Il soulève d'ailleurs une incohérence entre
l'article 1 du projet de loi, qui
vient, d'une part, accorder un droit à tous d'avoir accès aux soins palliatifs et ensuite, dans
l'article 5, vient amoindrir ce droit lorsqu'il dit… qu'il vient limiter ce droit en fonction
des ressources humaines et matérielles dont disposent les établissements. Cette
garantie de soins palliatifs, de nombreux
médecins me l'ont confirmé, elle est illusoire jusqu'à ce que l'on puisse la constater
dans les faits, sur le terrain. Les soins palliatifs et l'aide médicale à
mourir ne sont pas deux mesures qui peuvent s'évaluer en tandem, selon moi.Un accès
complet, réel et effectif aux soins palliatifs est l'enjeu dont nous devrions discuter en premier.
Si nous parvenons à combler ces lacunes en
matière d'accessibilité et à la lumière des progrès constants en médecine, en
recherche — et j'inclus des progrès pour contrer de façon médicale la souffrance — nous serons à même de mieux
déterminer si notre société doit permettre ou non l'aide médicale à mourir, à la vue de l'expérience accumulée dans des conditions de plein accès aux soins
palliatifs. Pour être bien claire sur ce point : l'accessibilité aux soins
palliatifs doit être réalisée avant que nous
prenions la décision de légaliser ou non l'aide médicale à mourir. Notre décision sur cette deuxième
composante risquerait d'être passablement modifiée par la réalité d'une accessibilité
complète aux soins palliatifs toujours
en développement, pas juste de façon quantitative, mais aussi de
façon qualitative. Il m'apparaît périlleux de présenter les deux enjeux en
même temps, en promettant l'accessibilité d'un côté et en plaçant des patients devant le choix de l'aide
médicale à mourir, alors que l'accès aux soins palliatifs est inégal partout
sur le territoire du Québec.
C'est essentiellement le point que fait Ariane Krol dans son article dans La Presse du 13 juin dernier, lorsqu'elle mentionne, à propos de l'accès aux soins
palliatifs, et je cite : «Il faut absolument corriger cette lacune avant d'implanter l'aide
médicale à mourir. Autrement, cette solution radicale risque de devenir, dans
les établissements incapables de répondre
aux besoins en soins palliatifs, le seul soulagement offert aux malades en fin
de vie. Difficile de parler d'un choix libre et éclairé quand il n'y en
a pas d'autres!» Fin de la citation. Je dois dire que ce raisonnement fait écho
à mes préoccupations.
Alors, M. le Président, vous aurez constaté que je n'ai pas vraiment abordé les questions
de définition, mais je vous dirais
que de nombreux, nombreux médecins, surtout des médecins qui sont spécialisés
en soins palliatifs, et j'inclus mon père et les membres de ma famille dans cette catégorie… Évidemment, il
n'est plus vivant pour me donner ses conseils, mais il m'a souvent parlé de cet enjeu il y a plus de 30 ans. Mais
surtout les médecins… Je dois vous dire que j'ai une grande préoccupation,
alors que tellement et tellement de médecins spécialisés dans ce domaine ont
une si grande préoccupation…
Je suis
juriste, mais je viens d'une famille de médecins, mais je viens en particulier
d'une famille de médecins qui connaissent ce domaine. Donc, c'est
évident que je suis beaucoup influencée par ces discussions que j'ai eues. Par ailleurs, j'ai rencontré, évidemment, des
pédiatres en soins palliatifs et des médecins qui sont en soins palliatifs pour
adultes. J'ai rencontré des médecins de famille qui traitent de ces enjeux et
je vous dirais que tous avaient le même message et surtout une grande crainte,
au-delà de définitions, évidemment, que d'autres se sont déjà adressés à ces
questions de confusion, mais je pense qu'il y a une volonté de clarifier
certaines de ces choses.
Notre fonction de parlementaire
nous place parfois devant des décisions difficiles à prendre. Nous sommes
devant un projet de loi qui traite d'un enjeu de la plus haute importance, qui
affecte la vie de nombreux Québécois et Québécoises dans
le présent, mais aussi dans le futur. C'est avec un profond respect pour les
témoignages humains et sincères qui ont été
exprimés, avec une grande compassion pour la souffrance des personnes en fin de
vie et en pleine conscience de la responsabilité sociale qui revient aux législateurs que nous sommes que je prends aujourd'hui la décision de voter contre l'adoption du principe de ce projet
de loi, sur la base que l'accessibilité aux soins palliatifs doit être
renforcée et élargie afin de s'étendre à tous les Québécois avant que nous nous
prononcions sur la légalisation de l'aide médicale à mourir.
Et
je dois dire, comme je l'ai dit, M.
le Président, que je demeure très mal
à l'aise devant le malaise exprimé par un si grand nombre de médecins, surtout des médecins qui accompagnent les
patients en fin de vie. Quel que soit le résultat du vote sur ce projet de loi, il s'agit,
selon moi, d'une discussion qui continuera à animer notre société, un enjeu sur
lequel nous devrons continuer à réfléchir. Les soins en fin de vie sont un des
grands sujets qui transcendent les générations et font partie de la discussion constante et toujours en évolution
qu'entretient une société libre et démocratique, soucieuse du bien-être
et du respect des droits de tous ses citoyens. Je vous remercie, M. le
Président.
• (15 h 20) •
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Alors, je cède la parole au député de Fabre.
M. le député.
M.
Gilles Ouimet
M.
Ouimet (Fabre) : Merci, M. le Président. À mon tour de prendre la parole à l'occasion
de cet important débat, ce débat sur ce projet de loi, et, comme à peu près
tous mes collègues qui m'ont précédé l'ont souligné, c'est un projet de
loi qui se rattache à un débat, un enjeu de société, un enjeu qui touche des
considérations éthiques, des enjeux sociaux, médicaux
et juridiques. Et, comme vient de le mentionner ma collègue
de Notre-Dame-de-Grâce, l'examen, le débat que nous faisons en ce
moment n'est qu'une étape dans ce long processus, ce long débat, ce long
discours, cette réflexion collective que
nous menons au Québec, et nous avons aujourd'hui cette étape à
franchir, qui est l'examen de ce projet de loi, ce projet de loi qui s'inscrit, comme tout le
monde l'a souligné, dans la continuité
du travail entrepris par la commission spéciale
Mourir dans la dignité, qui était un travail remarquable fait par les parlementaires de la précédente législature, que je tiens à saluer à mon tour et à remercier le travail de tous ceux qui
y ont été associés de près et de loin. Et je ne veux pas… de crainte d'oublier des noms, mais on a souligné
à plusieurs reprises les membres qui sont étroitement associés à ce
projet, évidemment la ministre responsable du projet de loi, de même que les
collègues de ma formation politique. Alors, je tiens à les remercier pour avoir
mené cette discussion, pour le plus grand bénéfice de la société québécoise.
Ceci
dit, il m'apparaît important, avant d'aller plus loin, M. le Président, de
souligner et de rappeler à quel point il est important, lors d'une discussion comme celle-là, de respecter le
point de vue contraire. Nous sommes… Nous avons tous des opinions, nous avons… c'est même notre devoir, comme
parlementaires, d'exprimer nos opinions et de prendre des décisions sur
la base de nos opinions, et il est fondamental que nous fassions preuve d'un
profond respect pour ceux qui ne partagent
pas notre point de vue. Et mes collègues de l'opposition officielle l'ont
mentionné, vous le savez, M. le Président,
nous avons fait le choix, de ce côté-ci de la Chambre, de participer à ce débat
sur la base de notre conscience personnelle, donc ce qu'on appelle dans
le jargon un vote libre, plutôt que de respecter une ligne de parti. Et mon commentaire sur le respect de l'opinion contraire
s'avère, je pense, encore plus pertinent dans ce contexte-là. Ceci dit,
je tiens, en tant que nouveau parlementaire…
À ma première expérience, dans ma première année ou presque d'expérience
parlementaire, c'est pour moi un plaisir, c'est une lourde responsabilité mais
également une responsabilité plaisante que
de participer à un débat aussi important et que le chef de notre parti
politique nous autorise à y participer sur la base de notre conscience, bien que je vous avoue, M. le
Président, que, depuis mon arrivée en politique, je n'ai jamais été
confronté à une situation où mes convictions, mes valeurs s'éloignaient des
décisions prises par mon parti.
Et je reviens au
débat qui nous occupe aujourd'hui, le projet de loi n° 52, et nous en
sommes à l'étape de l'adoption du principe. J'aime rappeler, pour ceux qui nous
écoutent qui ne le connaissent pas, mais c'est en vertu de l'article 239 de notre règlement, nous
débattons de l'objet du projet de loi, de son opportunité et de sa valeur
intrinsèque. Et il est important de rappeler qu'à cette étape du projet de
loi — et
j'y reviendrai plus tard — nous
pouvons être en faveur d'un projet de loi,
de son principe, et, au terme de l'exercice, s'il devait se poursuivre à
l'étude article par article, tout de
même exprimer notre désaccord avec le résultat final. Et ça aussi, c'est
important de le rappeler, parce qu'on peut, et les membres seront appelés à voter sur cette base-là…
Voter pour le principe ne veut pas nécessairement dire que nous serons d'accord
avec le résultat final de la loi. Et, parce que plusieurs de mes collègues
l'ont souligné, il y a des éléments importants
sur lesquels nous devrons nous pencher, si l'Assemblée décide de poursuivre
l'examen de ce projet de loi, et des bonifications seront apportées, et
ce n'est qu'au terme de cet exercice, lorsque le projet de loi sera complété,
que nous serons… nous serions appelés une
nouvelle fois à nous prononcer. Et les membres pourront voter, à ce
moment-là, à cette étape du projet de loi, à la loi telle qu'elle serait,
comment nous l'aurions fait évoluer.
Il
est clair pour moi, et c'est la raison pour laquelle je tenais à m'exprimer sur
le projet de loi n° 52, que ce qui est au coeur du débat, ce qui
est au cœur du principe de ce projet de loi, c'est la notion de dignité de la
personne, de son autonomie, de sa liberté.
Ces éléments, que l'on retrouve énoncés à l'article 2 de la loi, vous me permettrez de les citer :
«Les principes
suivants doivent guider la prestation des soins de fin de vie :
«1°
le respect de la personne en fin de vie et la reconnaissance de ses droits et
libertés doivent inspirer chacun des gestes posés à son endroit;
«2°
la personne en fin de vie doit, en tout temps, être traitée avec compréhension,
compassion, courtoisie et équité, dans le respect de sa dignité, de son
autonomie, de ses besoins et de sa sécurité;
«3° les
membres de l'équipe de soins responsable d'une personne en fin de vie doivent
établir et maintenir avec elle une communication ouverte et honnête.»
Il s'agit là, M. le
Président, à mon point de vue, de ce qui est l'essence de ce projet de loi, de
ce qui est sa valeur intrinsèque. Et c'est la raison pour laquelle, M. le
Président, je suis favorable à l'adoption de ce principe, et donc je voterai en
faveur de ce projet de loi.
Vous
connaissez, M. le Président, mon… mes… j'allais dire «mes antécédents» :
je suis associé à ce projet depuis que
le Barreau du Québec a pris la
décision, en 2008, si je me rappelle bien, de créer un groupe de travail pour
se pencher sur cette question qui
émergeait à l'Assemblée nationale. Au tout début de la création de la
commission spéciale, le Barreau du
Québec, par l'entremise ou à l'initiative du bâtonnier Michel Doyon, avait
proposé qu'on crée un groupe pour examiner s'il était de la mission du
Barreau de se prononcer sur cette importante question.
Il est
important de rappeler que le Barreau ne fait pas de politique. Le Barreau, qui
représente 24 000 avocats, donc couvre toutes les tendances, tous les points de vue. Et c'est dans la
poursuite de sa mission de protection du public que le Barreau du Québec a choisi, à cette époque, de
créer un groupe de travail, qui a, par la suite, fait des représentations
devant la commission spéciale Mourir dans la
dignité et qui a, encore lors des consultations particulières, fait des
représentations, devant l'Assemblée
nationale, devant les parlementaires, sur le projet de loi n° 52. Et, de
façon générale, comme je le fais aujourd'hui, le Barreau du Québec
s'était prononcé en faveur du principe de ce projet de loi. Le Barreau du
Québec, fidèle à sa mission, a également
fait des suggestions, des critiques à l'égard de certains aspects du projet de
loi, ce qui sera, à mon point de vue, le défi auquel nous serons
confrontés si l'Assemblée décide de poursuivre l'étude détaillée du projet de
loi en étude article par article.
Je pense, M.
le Président, que le débat auquel nous nous livrons aujourd'hui, sur l'adoption
du principe du projet de loi
n° 52, participe au devoir d'éducation et d'information fondamental de
notre société. Parce que, depuis le début des travaux de la commission,
depuis qu'on a déposé le projet de loi n° 52, il est clair, M. le
Président, par les réactions des citoyens
que nous représentons tous et chacun dans nos comtés, qu'il y a des questions,
qu'ils ont besoin d'être éclairés sur
ce qu'est le projet de loi n° 52, ce qu'il vise, ses modalités. Et nous
avons tous une obligation de les informer à cet égard, et je pense que
le débat sur le principe participe à cette obligation que nous avons.
Je crois, M.
le Président, que, malgré le défi de taille auquel nous sommes confrontés, nous
avons une obligation d'agir. Et, dans
ce sens, je reviens à ce que je disais au début, je souligne le courage, la
détermination des membres de l'Assemblée nationale qui ont initié ce
débat, qui l'ont poursuivi depuis plusieurs années et qui a mené, aujourd'hui, à l'examen de ce projet de loi. Parce que nous
avons, dans la société, un besoin de clarifier les règles quant à cette
période importante… auquel nous serons tous confrontés un jour, c'est-à-dire la
fin de notre vie.
• (15 h 30) •
De nombreuses personnes et de… nombreux de mes
collègues, lorsqu'ils ont pris la parole, ont souligné les aspects déchirants, les aspects humains, les
aspects très difficiles que cela fait
vivre aux personnes qui sont confrontées lorsqu'un proche, lorsqu'un
patient qu'on soigne traverse ou est confronté à cette période de sa vie. Ceci
dit, et malgré les défis et malgré les difficultés,
je pense que nous avons une obligation, comme législateurs, de tenter de baliser mieux
les règles de cette situation, qui, que nous adoptions un projet de loi ou non, va continuer à se répéter, à se vivre dans les hôpitaux,
dans les maisons de soins palliatifs. Et je crois que nous avons une obligation
d'agir pour aider la société québécoise, aider ceux qui sont confrontés au
quotidien avec ces réalités, avec ces situations difficiles, nous devons les
accompagner, nous devons les aider, et je crois que l'Assemblée nationale a, à
cet égard, un devoir d'agir.
Mes collègues
l'ont souligné. Particulièrement, ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce vient de
le faire de façon éloquente, a
souligné ce qui peut être un piège et ce qui peut être même le danger d'adopter
ce projet de loi parce qu'il est, je
pense, absolument évident pour tous que nous devons, avant tout, nous assurer
d'améliorer la prestation des soins palliatifs partout au Québec. Et ce
n'est qu'en ayant accompli cette première étape que nous pourrons nous assurer que nous aurons aidé nos concitoyens qui en sont à
leur fin de vie et qui ont besoin de ces soins palliatifs pour éviter
que ce qu'on appelle l'aide médicale à mourir, la sédation palliative terminale
devienne un moyen d'éviter une situation inacceptable
en raison d'un manque de soins palliatifs. Et je pense qu'on n'insistera jamais
assez sur cet aspect, que nous devons absolument traiter pour éviter
cette dérive potentielle.
Je partage ce point de vue avec ma collègue de
Notre-Dame-de-Grâce, mais je suis tout de même favorable à l'adoption du principe du projet de loi parce que
je pense que nous serons capables de relever ce défi. Parce que — et
pour revenir à ce que je mentionnais tantôt — je crois que nous avons une
obligation d'agir tout de même, parce que nous
savons tous qu'il y a des situations où de l'aide médicale à mourir, qu'on le
définisse comme ça ou qu'on le définisse comme de la sédation palliative
terminale, ces situations-là existent. Et, pour moi, ce n'est pas que
d'encourager une situation inacceptable que d'essayer de la baliser plutôt que
de dire : On ne peut pas faire comme si cette situation-là n'existait pas.
Ce qui m'amène à favoriser la poursuite du débat sur le projet de loi malgré,
malgré les craintes que je partage, qui ont été exprimées de façon éloquente
par ma collègue il y a quelques instants.
Un dernier point, une mise en garde que je nous
fais comme législateurs, qui devrait, de mon point de vue, qui devrait nous encourager à poursuivre cette
démarche, c'est-à-dire qu'en toutes circonstances il est impossible,
comme législateurs, de prévoir l'adoption ou de viser l'adoption d'un projet de
loi qui ne comportera aucune faille, qui va répondre
à tous les cas d'abus potentiels. Je ne crois pas que nous devrions éviter
d'adopter un projet de loi en nous disant que, cette loi, certaines personnes pourraient en détourner le sens.
Nous devons, je pense, comme législateurs, favoriser l'adoption d'une loi en encourageant le respect de
cette loi, et non pas refuser d'agir sur la base que certaines personnes
vont contrevenir à cette loi. Alors, je nous
encourage à examiner ce projet de loi, à travailler aux nécessaires
améliorations.
Et je ne ferai pas
la… je n'ai pas la prétention de connaître suffisamment les détails des
difficultés qui ont été abondamment soulignées par mes collègues. Il y a de
nombreuses lacunes, des difficultés très sérieuses, et la prochaine étape, si
l'Assemblée décide de poursuivre l'étape de ce projet de loi, va révéler que
nous avons des défis importants, comme législateurs, auxquels nous serons
confrontés. Mais, tout de même, M. le Président, je crois que nous avons une obligation d'agir, et je suis d'accord avec
le projet de loi à cette étape du débat, et je voterai donc en faveur de l'adoption
du principe. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de
Fabre. Je cède maintenant la parole au député de Verdun. M. le député.
M. Henri-François Gautrin
M.
Gautrin : Je vous remercie, M. le Président. Et je vais
essayer de vous faire part, à l'heure actuelle, del'ensemble de la problématique dans laquelle je
suis actuellement. Le vote n'est pas aujourd'hui, donc on a encore le
temps de réfléchir et de voir d'ici la date du vote.
Dans
ma réflexion, il y a un premier élément. Il y a eu un rapport qui a été fait
par des collègues que je respecte énormément,
que ce soit le député de Jacques-Cartier, que ce soit la députée de Hull, le
député d'Orford, la députée de Mille-Îles et, surtout, la députée de
Joliette, que je connais depuis un certain temps et que j'ai vue agir dans
d'autres sphères. J'ai, par exemple,
souvenance de sa prestation lorsque j'avais présidé une commission
parlementaire, lorsqu'on avait établi
le mariage… Parce qu'il n'y avait pas, à l'époque, de mariage qui était permis…
c'était l'union civile qu'on avait
établie… À l'époque, elle était présidente du centre de droit de McGill… Je ne
sais plus l'autre terme qui était… Donc,
ce sont des gens que je respecte énormément. Et ils ont produit un document sur
lequel je ne suis pas nécessairement d'accord, mais je dois quand même
respecter les gens qui ont produit ce document. Ça, c'est le premier élément
dans ma réflexion, M. le Président.
Le second élément est vraiment que, dans ce projet
de loi, il y a vraiment — et la collègue de Notre-Dame-de-Grâcel'a rappelé avec beaucoup d'éloquence — deux notions. Il y a le principe d'établir
et de soutenir les soins palliatifs pour l'ensemble des personnes qui sont en fin de vie, tout en étant conscient
que la fin de vie, ce n'est pas évident, ce que ça veut dire, mais le principe de pouvoir donner des
soins palliatifs à l'ensemble de nos concitoyens. Et j'ai vu, dans le
cadre qu'on s'est établi, à quel point ça
peut être un élément qui est positif. Donc, cette partie du projet de loi,
c'est-à-dire les articles de 1 à 25,
ne posent, à mon sens… — ou 24, plutôt — ne posent aucun problème et, au contraire,
nécessitent d'être adoptés. Alors, vous
voyez la difficulté dans laquelle un parlementaire peut être. Et je sais — je connais assez la procédure, M. le Président — qu'on aurait pu faire des motions de
scission, puis etc., mais je pense qu'on est ici dans un débat qui est un débat de fond, qui n'est pas un
débat qui est basé sur… qui ne suscite pas, en quelque sorte, l'utilisation
de la procédure. Donc, les premières
parties, c'est-à-dire la nécessité d'offrir à tous nos concitoyens, à toutes
nos concitoyennes la possibilité
d'avoir accès aux soins palliatifs, c'est quelque chose que j'appuie, sur
lequel je suis d'accord et sur lequel la rédaction du projet de loi me
satisfait sans aucun problème.
• (15 h 40) •
Je
rentrerai néanmoins, M. le Président, sur un concept de fin de vie. Il faut
être conscient que la fin de vie, ce n'est
pas… il y a un concept de temps derrière. Et, le temps, il y a un temps qu'on
mesure qui est le temps physique, qu'on peut mesurer, et il y a le temps
aussi qui est le concept de durée. Et je suggérerais aux personnes qui vont
avoir à débattre article par article de relire Bergson, Henri Bergson, sur la
question durée et simultanéité parce que le même intervalle de temps, mesuré physiquement par un mécanisme mécanique, est
perçu différemment suivant la manière… ou la conscience de chaque
individu. Donc, le concept de dire qu'on a peu de temps, on est en fin de vie,
peut être bien différent suivant la personne
qu'il est… et je voudrais, à ce
moment-là, que ce concept de temps,
qui est sous-jacent un petit peu sur le concept de fin de vie derrière, soit mieux
précisé et qu'on n'arrive pas à des analyses purement mécaniques de ce qu'est la fin de vie. Alors, M. le Président, je vous suggère, à ce
moment-là, de revenir sur... et aux
rédacteurs, et je suggère aussi à la ministre de revenir, qu'elle relise
un peu ce concept de temps intérieur, le concept qui a été développé, comme
vous le savez, par Henri Bergson assez brillamment. Je ne voudrais pas vous
refaire le débat entre Bergson et Einstein. Si vous allez voir, ça date de 1922,
c'est assez intéressant à lire comme document.
J'en arrive maintenant
sur la deuxième partie du projet de loi. Je vais vous expliquer mes difficultés
avec la deuxième, qui est ce qu'on appelle
l'aide médicale à mourir. Soyons clairs, l'aide médicale à mourir, c'est un
droit au suicide, c'est-à-dire le fait, par exemple, qu'une personne… Et
on dit : Une personne qui est en fin de vie peut mettre fin à sa vie, bien, d'une manière tout à fait correcte, mais elle se suicide. Alors, la question qu'on a à répondre
à… Est-ce que, comme société,
on doit pouvoir permettre le suicide ou est-ce qu'on ne le permet pas? Je vous
dis très franchement, je n'ai pas répondu à cette question. Et, bon,
vous connaissez, bien sûr, Le mythe de Sisyphe, M. le Président, Albert Camus, Le mythe de Sisyphe, la première phrase qui commence : «Il n'y a
qu'un problème philosophique important, c'est le suicide.» Et, à ce
moment-là, il développe, à ce moment-là, toute la théorie du raisonnement par
l'absurde et tout l'absurde, actuellement, qui est présent dans Le mythe de
Sisyphe, somme toute.
Alors,
je ne réponds pas, moi, à cette question aujourd'hui. Je sais qu'il va
falloir y répondre jeudi. Aujourd'hui, je
ne répondrai pas. Je ne sais pas, à
l'heure actuelle, est-ce qu'on doit permettre
aux gens de se suicider? Est-ce que le suicide
est quelque chose… Théoriquement, nos lois ne le permettent
pas, mais on est en train, peut-être, d'évoluer au niveau législatif. Est-ce que le suicide peut être
permis? J'aurais tendance à répondre non. Et, une fois que je réponds
non, je vais encore remettre en question un principe qui est quand même assez
important, c'est-à-dire jusqu'à quel point on
doit respecter aussi les choix individuels. Est-ce qu'individuellement les gens
ne peuvent pas choisir de se suicider, même si, normalement, une société
ne doit pas permettre qu'on puisse mettre fin à la vie?
Ceci
étant dit, lorsque je pose la question du suicide, j'ai, à ce moment-là, une
opposition formelle avec l'article 26, actuellement, du projet de loi et
je vais m'expliquer, M. le Président. Si on refuse le principe du suicide, il
est clair qu'on doit
refuser l'aide médicale à mourir. Si, par contre, on accepte le principe du
suicide, on ne doit pas uniquement le limiter,
d'après moi, aux personnes atteintes d'une maladie grave et incurable, on doit
pouvoir aussi l'étendre aux gens sur
lesquels le corps ne suit plus, ne peut plus supporter, à ce moment-là, leur
esprit. Autrement dit, jusqu'à quel point il se trouve dans un corps qui
est en voie dégénérative et est en voie de ne pas pouvoir supporter leur
esprit… Il existe des gens qui ne seront pas
d'une maladie incurable, c'est-à-dire d'une maladie qui n'amène pas à la fin de
vie, mais qui, aussi, puissent avoir
accès, à ce moment-là, à dire : Je ne peux plus supporter ce corps qui
supporte mon esprit. Il y a réellement des
réflexions importantes à faire autour de cette question-là., de savoir, à ce
moment-là, est-ce que, si on ouvre la porte, si on ouvre la porte, actuellement, à l'aide médicale à mourir, pourquoi
cette aide médicale à mourir ne serait restreinte que seulement aux gens atteints d'une maladie grave et
incurable? Pourquoi une personne qui est atteinte d'une déficience majeure
qui ne lui permet pas de vivre une vie qu'elle considérerait comme normale
n'aurait-elle pas le droit, actuellement, à l'aide médicale à mourir? Alors, vous voyez, M. le Président, la question de fond à répondre, pour moi, est la
suivante : Est-ce que, oui ou non, on reconnaît le droit au suicide?
Alors,
je ne sais pas répondre encore à cela et je sais que je vais devoir répondre
d'ici mardi à la question. Mais, pour l'instant, je vous signale que
c'est vraiment, d'après moi, une question qui est de fond, à l'heure actuelle,
et qui entraîne, évidemment,
soit une restriction et une suppression des articles 26, 27 et 28 du projet de loi… Le projet de loi pourrait tenir sans… sur les questions des soins
palliatifs ou devrait demander : Si on répond positivement, et non
pas négativement, par rapport au droit au suicide,
il faut qu'on puisse l'étendre à d'autres cas que strictement les
maladies incurables. Alors, j'ai ce problème.
Troisième
élément de réflexion, M. le Président, il est... Évidemment, nous sommes
ici — et le
collègue de Fabre l'a rappelé tout à l'heure — nous
sommes dans ce qu'on appelle la deuxième lecture. Si nous votons contre — et on
peut voter contre — alors, à mon sens, il y a trois hypothèses.
On peut voter pour unanimement, dans cette Chambre, pour poursuivre le
débat. On peut voter contre, et la Chambre refuse le projet de loi. Alors là,
on peut se poser la question ou on peut
voter contre individuellement en espérant que les voisins votent pour de
manière qu'on puisse poursuivre aussi le débat. Vous voyez, donc il y a trois solutions. Je n'ai pas encore
choisi, hein? On peut voter pour et, à ce moment-là, on poursuit le débat. Ou la Chambre, ici, tout le
monde peut voter contre, et, à ce moment-là, on enterre cette question,
ce qui, à mon sens, serait probablement malheureux. Ou on vote contre parce
qu'on satisfait nos interrogations qu'on a, particulièrement
sur la dimension qui touche l'aide médicale à mourir et les articles 26, 27 et
jusqu'à 31, et en pensant qu'on puisse reporter dans le débat article
par article.
Le
problème qu'il y a, M. le Président, dans le mécanisme ici, c'est qu'on est
aussi regardés par nos concitoyens. Il est clair que les gens qui sont
venus nous voir, nous rencontrer sont plus des gens qui sont contre le projet
de loi. Pourquoi? Ça ne veut pas dire que la
majorité des gens sont contre. Ça veut dire que ceux qui sont contre sont plus
amenés de se manifester que ceux qui sont
pour. De mon expérience de parlementaire, M. le Président, depuis longtemps,
j'ai remarqué que les gens qui sont pour quelque chose ne viennent pas,
généralement, frapper à nos portes pour dire : Vous savez, je suis pour ceci, et c'est très bon. En général, on ne
vient pas nous dire ça. Par contre, on vient nous voir pour dire : Je trouve que ce n'est pas bon et...
Donc, il faut faire attention lorsqu'on dit : On représente nos
concitoyens. On aurait tendance à dire : Bon, il y a plus de gens
qui sont contre qui sont venus s'exprimer que des gens qui sont pour, ce qui ne
veut pas dire que l'ensemble de la population serait ni pour ni contre.
Alors,
je résume ma proposition, M. le Président, pour dire : Je ne sais toujours
pas, aujourd'hui, comment je vais voter.
Et je résume pourquoi. Pourquoi? Je ne pense pas qu'il faut mettre fin au
débat. Je pense qu'il est important que la société québécoise se donne
dès maintenant des mécanismes et des règles quant aux soins palliatifs, et
l'obligation des soins palliatifs, et le
droit aux soins palliatifs pour l'ensemble de la population. Autrement dit, je…
L'ensemble des articles qui sont les articles 1 à 24 et les articles qui
seront subséquents à l'article 30, c'est-à-dire les articles 32 à la fin, sont
des articles sur lesquels... ils sont nécessaires.
• (15 h 50) •
Je répète à l'heure
actuelle, je repose la même question : À l'heure actuelle, à partir du
moment où je pose la question sur le
suicide, si on a le droit et si on considère que, moralement, on doit
reconnaître le droit au suicide, ce qui est essentiellement… ce qui est reconnu, d'après moi, dans ma lecture de
l'article 26, actuellement, je dois dire, à ce moment-là, si on reconnaît
ce droit au suicide, il faut étendre l'article 26
à plus de personnes que les gens qui sont inclus dans la liste de l'article 26 et, en particulier, l'étendre à d'autres
personnes que les personnes qui sont atteintes de maladies incurables. Par contre, si ma conclusion
est de dire : Je ne crois pas qu'on puisse arriver… et, moralement, je ne
pense pas qu'on puisse avoir droit au suicide et avoir comme société… permettre à des gens dans la société de se
suicider, ça, à ce moment-là, je me retrouve à devoir rejeter les articles 26 à 31.
Alors,
vous voyez le dilemme dans lequel je suis, M. le Président? Je veux le trancher parce que je vais être
obligé de me lever ou de rester assis, d'une
manière ou d'une autre, mardi prochain, au
moment du vote, mais j'ai essayé de vous expliquer,
à l'heure actuelle, quel est le dilemme dans lequel on se trouve.
Je terminerai quand même en félicitant ma collègue la
députée de Joliette pour le travail qu'elle a fait dans ce document. Mais, évidemment,
elle ne peut pas répondre dans un texte de loi à cette question, qui est une
question aussi fondamentale : A-t-on ou n'a-t-on pas le droit, comme individus,
comme société, de permettre le suicide? C'est une question sur laquelle
il nous reste une fin de semaine pour tâcher d'y répondre individuellement. Je vous remercie, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Verdun.
Je suis prêt à entendre un autre intervenant. M. le député de Vimont, à vous la parole, M. le député.
M.
Jean Rousselle
M.
Rousselle : Merci, M. le Président. Le projet de loi
n° 52, Loi concernant les soins de fin de vie, un sujet très émotif.
Moi, je suis heureux que notre formation politique, ainsi que notre chef, Philippe Couillard, nous donne l'opportunité de nous exprimer librement sur ce sujet parce que c'est un sujet, justement, avec
trop d'émotion, trop… C'est trop personnel, et
je pense que c'était la bonne direction, donc une approche non partisane.Et j'espère, justement,
que les autres formations politiques vont faire la même chose. Le caucus
libéral reflète véritablement, je pense, l'esprit général de la population, avec des
opinions différentes. Et, sur ce sujet, là où je trouve intéressant, c'est là
qu'il est important de respecter les opinions
des uns et des autres.
Parce que, bien souvent, notre opinion vient, souvent, de notre expérience de vie.
On a tous des expériences de vie différentes soit par une perte, ou d'une maladie d'une personne chère, ou encore par notre fonction, soit étant médecin, infirmière, policier ou ambulancier. Moi,
personnellement, j'ai travaillé comme policier
pendant 29 ans et j'ai aussi
travaillé aux Nations unies en Haïti, et ce,
dans une période assez sombre de ce pays. Oui, j'ai
côtoyé la mort, et ce, sur une base régulière, et j'ai certaines images, effectivement,
dans ma tête que j'aimerais même oublier. Ma
conjointe, moi, est infirmière, est
infirmière aux soins intensifs de l'Hôpital Sacré-Coeur,
pour ne pas le nommer.Pas besoin de vous dire qu'à la fin du travail, les deux, on avait
des discussions sur notre travail, notre journée, puis, je veux dire, des fois,
c'étaient des sujets, justement, pas nécessairement roses. C'est sûr que, si on
aurait travaillé à l'impôt ou ailleurs, ça aurait été des sujets différents,
mais, dans notre cas, c'étaient des sujets qui
côtoyaient toujours la mort.
La
rencontre des personnes impliquées, soit les
victimes, les familles, ça fait de ces
rencontres-là des rencontres remplies d'émotion, mais aussi ça
fait réfléchir régulièrement sur la vie. Parce qu'on parle de la mort, mais il y a la vie
avant. Aujourd'hui, je ne vous apprendrai rien, un jour on va
mourir — c'est
sûr qu'on espère tous que ça va être le plus tard possible — ça, c'est
sûr et certain. Et, quand tu parles de la mort, bien,
pas tout le monde est à l'aise de parler de la mort. Un
exemple, je suis un ancien président de la fondation des
maladies du rein, on parlait de dons d'organes.
Quand on approchait les familles puis on
parlait, justement,
de mort, de dire : Écoutez, après votre mort, ça
serait intéressant, vous allez sauver des vies, je peux vous dire que
l'émotion qui touche les familles à ce moment-là dans
les hôpitaux, c'est incroyable, c'est… Ouf!
les frissons viennent sur le corps, je vous le
dis.Ce n'est pas évident, vraiment pas
évident.
Moi,
dans ma circonscription, j'ai fait des rencontres. Et ça, j'en fais d'une
manière régulière, mais j'en ai fait sur le sujet dans ma circonscription de Vimont, qui est exactement à Laval, et ça comprend le secteur
Vimont-Auteuil, et, oui, les gens
diffèrent d'opinions bien souvent. On commence, des fois, des rencontres, des
rencontres de 10, 20, 30 personnes, on commence… Premièrement, des fois, ils pensent que tu t'en vas les
rencontrer en faisant la promotion de pour ou contre, et je les informe
que, justement, non, je m'en viens juste cueillir des données. Je viens juste
cueillir qu'est-ce que vous, vous pensez parce que
je vous représente. Donc, c'est ça qui est important. Et, bien souvent, les
gens, au commencement de la rencontre, vont commencer à dire : Ah!
moi, je suis pour, ou : Je suis contre. Mais, des fois, après avoir entendu un témoignage ou deux
témoignages, woups — et
ça, en dedans d'une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure — nos
opinions changent. Alors, c'est pour ça que je vous dis que c'est vraiment
émotif. Puis les gens, bien souvent, ils ne connaissent pas vraiment le projet
de loi et ils ne peuvent pas vraiment avoir une idée correcte sur le projet de
loi.
J'ai
lu la grande majorité... Et tous ces gens-là, d'ailleurs, ils veulent tous
mourir dignement. Ça, on s'entend tous là-dessus. Vous savez, s'éteindre paisiblement, entouré de ses proches et, tout simplement, mourir dans son sommeil, c'est qu'est-ce que la majorité des
gens voudraient. Malheureusement, mourir, parfois, est synonyme d'une lente
agonie, d'une longue déchéance. Puis, en effet, au cours des dernières années,
les progrès remarquables de la médecine, de la pharmacologie ont contribué à l'espérance de vie, mais parfois au prix
de la qualité de vie. Que répond notre société à la souffrance
exprimée par certaines personnes en fin de vie? Comment assurer à tous une mort
dans la dignité?
J'ai
lu la grande majorité des mémoires et le rapport d'une consultation qui a duré près de trois ans. Il
y a une équipe de mes collègues qui
se sont promenés, qui ont été faire des consultations itinérantes, je pourrais
vous dire, dans d'autres pays, voir comment... Est-ce que ce projet de
loi existe ailleurs? Donc, pourquoi réinventer? Pourquoi ne pas aller voir ailleurs qu'est-ce qui se fait? Et nous,
bien, chez nous, on a eu des consultations itinérantes, comme je vous
disais, à Montréal, Trois-Rivières, Saguenay, Québec.
En
passant, je voudrais féliciter tous mes collègues qui ont participé à ce beau
travail, et un travail pasnécessairement
évident, que… Comme je vous dis, parler de la mort, parler fin de vie, ce n'est
pas nécessairement évident. Donc,
j'aimerais féliciter la députée de Hull, le député de Jacques-Cartier, la
députée de Mille-Îles, d'Orford et Mme la ministre, députée de Joliette, de son travail parce qu'effectivement ce
n'est pas évident de parler de ce sujet. Avec mes consultations, je peux
vous dire que ça n'a pas été évident.
Mais,
avec ces consultations-là qu'il y a eu, j'ai remarqué qu'il y a beaucoup
d'interrogations. Et ça, là-dessus, on a-tu assez réfléchi? Il se passe
quoi avec une personne qui est malade ou qui a eu un accident sur la route ou
de travail puis qui est prisonnière de son
corps dans son lit? Je sais que ce n'est pas dans ce projet de loi là, mais
est-ce qu'on y a réfléchi? Mais est-ce qu'on est rendu là aussi?
Comprenez-vous?
Le projet de loi
contient 66 articles. D'abord, le projet de loi établit certains principes
qui devraient guider la prestation des soins
de fin de vie : le respect de la personne, la reconnaissance de ses droits
et libertés. La personne en fin de vie
doit être traitée en compréhension, compassion, courtoisie, équité, dans le
respect de sa dignité, de son autonomie, de ses besoins et de sa sécurité. L'établissement d'une communication
ouverte et honnête entre la personne et les membres de l'équipe de
soins…
• (16 heures) •
L'aide
médicale, premièrement, ça prend une loi très encadrée. Et est-ce que les
70 articles sont assez clairs? Je ne le sais pas, mais il va falloir,
justement, le regarder d'une manière très sérieuse parce qu'une telle loi il
faut qu'elle soit vraiment très bien encadrée.
L'aide
médicale, dans la section portant à l'aide médicale à mourir, édicte les
conditions d'une personne qui puisse obtenir
des soins de fin de vie : être majeur, être apte à consentir aux soins,
être une personne assurée aux sens de la loi au niveau de l'assurance
maladie, être atteint d'une maladie grave et incurable. Est-ce que, ça, on
pourrait modifier ça? Peut-être, mais,
encore là, les réflexions, comme je vous dis, est-ce qu'on a eu… Est-ce qu'on a
assez réfléchi sur le sujet? Avoir
une situation médicale qui se caractérise par un déclin avancé et irréversible
et éprouver des souffrances physiques ou psychiques constantes
insupportables et qui ne peuvent être apaisées à des conditions que la personne
juge tolérables.
Mais,
bon, je pense qu'en acceptant le principe de cette loi nous aurons, comme
législateurs, le devoir de corriger, d'améliorer ce projet de loi, et
ce, article par article, pour que cette dernière reflète vraiment la volonté de
la majorité de la population du Québec. Par la suite de cet exercice, bien,
nous aurons fait… Une fois qu'on aura fait tout cet exercice-là puis que, moi,
j'aurai continué à faire mes consultations dans mon monde, chez nous, qui est
dans la circonscription de Vimont… Et
d'ailleurs je demande à la population, s'ils ont d'autres choses à m'envoyer et
d'autres réflexions, de toujours continuer à me les envoyer à mon bureau de
circonscription.
À la fin, bien, je me
garderai le droit de voter selon ma conscience au moment de ce vote. Donc, une
fois que le projet de loi sera terminé, bien
je pourrai, à ce moment-là, avec ma population et, moi, ma conscience, pouvoir…
Donc, je ne pourrai pas vous dire si je vais
voter pour la loi à la fin. Par contre, je peux vous dire que je vais voter
pour le projet de loi… la loi de principe, et après ça, bien, on verra.
Merci.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le député de Vimont. Alors, je cède
maintenant la parole au député de Côte-du-Sud. M. le député.
M. Norbert Morin
M.
Morin : Merci, M. le Président. À mon tour d'intervenir pour
l'adoption du principe du projet de loi n° 52, Loi concernant les
soins de fin de vie, présenté à la séance du 12 juin dernier par la ministre
déléguée aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse, la députée de
Joliette.
M. le Président, la
mort d'un proche ou d'un ami est toujours une étape particulière où le
soulagement des souffrances et la tristesse de la perte d'un être cher se
côtoient. Malheureusement, ce n'est guère sans émotions contradictoires que nous devons passer au travers de ce deuil. J'ai
personnellement assisté à la mort de quelques-uns de mes êtres chers, mon père, mon beau-père, mon
beau-frère et, tout dernièrement, ma belle-sœur, et, à chaque fois, M.
le Président, mes proches nous ont quittés
dignement, entourés de leur famille et fiers de leur parcours. Voilà pourquoi,
pour moi, la dignité d'une personne est mise
en cause dans les revendications autour de l'euthanasie et de l'aide au
suicide.
Un
ami à moi, professeur retraité de l'Université Laval, rejoignait mes pensées en
disant que la dignité naturelle de tout être humain demeure, quelles que
soient ses conditions de vie. Notre dignité à nous ici, en cette Chambre, M. le
Président, dans ces circonstances, consiste
à aller au-delà de notre sentiment de détresse afin de connaître la requête
réelle de la personne souffrante.
Par
ailleurs, M. le Président, je crois beaucoup en l'accompagnement des gens en
soins palliatifs, soins où le malade et
la famille peuvent être en mesure de vivre plus sereinement la fin d'une vie.
Accepter l'aide médicale à mourir pourrait amener la fin de ces soins
palliatifs. Ici, d'une manière imagée, la fondation de La Maison Michel
Sarrazin affirmait que cette aide équivaudrait — j'ai de la misère un
petit peu avec ce mot, mais il l'a dit — à tuer ce type de soins.
Nous
avons déjà en place des soins qualifiés de palliatifs. Ces soins de confort en
fin de vie sont, pour ma part, plus acceptables puisqu'ils sont
éthiquement et légalement reconnus. De plus, ces soins permettent déjà
d'atténuer les symptômes d'une maladie. Une
loi légalisant l'aide médicale à mourir aurait probablement un impact majeur
sur l'acte médical de fin de vie. Et il est facilement envisageable que cela
pourrait ajouter au patient une pression afin qu'il accepte cette
solution citoyenne dans le but d'éviter des coûts ou afin de se plier à des
pressions venant, par exemple, des membres de sa famille.
Pourquoi
ne pourrions pas opter pour plus de soins palliatifs, une diversification de
l'offre? C'est-à-dire, M.
le Président, pourquoi ne pas ajouter, par exemple, des espaces réservés dans
les hôpitaux, développer des cliniques spécialisées
en soins palliatifs, comme nous en ouvrons, M. le Président, en urgence
pour des situations particulières? Cela est en lien direct
avec mes propos sur la sérénité.
En
effet, si un climat plus serein était offert, cela éviterait la projection des
angoisses et de l'inconfort des membres de la famille sur le malade. Des
soins palliatifs adéquats avec l'aide de personnes compétentes favoriseraient
donc une ambiance plus saine et seraient à la fois bénéfiques aux personnes
malades et à leur entourage.
Pour toutes ces
dernières raisons, M. le Président, je vais voter contre le principe de ce projet
de loi, car il va à l'encontre de mes
valeurs personnelles, mes valeurs de vie. Je serais davantage
pour l'accroissement de l'offre en soins palliatifs, soins à développer
encore davantage et qu'il faut appuyer.
Toutefois, M. le
Président, je m'engage à demeurer diligent dans mon écoute. Si le projet de loi
passe l'étape d'adoption de principe, je demeure ouvert à la possibilité
d'appuyer l'adoption finale du projet de loi n° 52. L'étude article par
article devrait bien camper les termes usités pour éviter un glissement du
vocabulaire et ainsi me conforter dans mes perceptions. D'autant plus, M. le
Président, que je me veux à l'écoute de mes citoyens et citoyennes de Côte-du-Sud
et qui sont, comme moi, partagés dans leur âme et conscience. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de Côte-du-Sud. Alors, je cède maintenant
la parole au député de Lotbinière-Frontenac. M. le député.
M. Laurent Lessard
M.
Lessard : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Donc, ça me fait plaisir, aujourd'hui, d'intervenir sur le projet de loi n° 52, intitulé, donc, Loi
concernant les soins de fin de vie.
M. le Président, je
viens de Thetford Mines, d'East Broughton, East Broughton. Comme carrière,
j'étais un infirmier en psychiatrie pendant
de nombreuses années, pour devenir par la suite non pas médecin parce que je me
suis retrouvé sur les listes d'attente, mais j'ai pu faire un parcours plutôt
juridique pour devenir notaire. Donc, pendant près
d'une dizaine d'années, j'ai signé beaucoup d'actes, de mandats d'inaptitude,
de testaments, suivi des familles, fait de la planification testamentaire. Mais ça m'a gardé quand même proche d'un
parcours de la famille. J'adresserai la question sur ma position sur
l'adoption de principe dans un parcours de vie, M. le Président.
J'ai pris au sérieux
le projet de loi déposé par la ministre responsable, autant comme juriste,
comme individu, comme député du comté de Lotbinière-Frontenac. J'ai fait mes
devoirs. J'ai, à ce moment-là, pris les documents bien présentés par la ministre. J'ai fait une consultation publique en ligne
avec une documentation que j'ai fournie à différents groupes. J'ai interpellé des groupes, autant dans
le comté de Frontenac que dans le comté de Lotbinière. J'ai partagé
cette information. J'ai eu de la rétroaction.
J'ai
fait une démarche particulière auprès du centre de santé, donc, de la région de
Thetford. J'ai donc rencontré, à cette
étape-là, le chef de l'unité de médecine des soins palliatifs, la directrice
adjointe à la Direction du Programme de perte d'autonomie liée au
vieillissement, chef d'unité, chef du Programme de perte d'autonomie liée au
vieillissement, les infirmières de soins à domicile, travailleuses sociales,
infirmières pivot en oncologie, conseillère-chef programme Soins à domicile;
intervenant en soins spirituels ainsi qu'un médecin responsable des soins
palliatifs.
D'entrée de jeu, j'ai
pris la peine de lire le document qui nous amène ici, aujourd'hui, après une
large consultation faite par les collègues
de l'Assemblée nationale, déposé ici. Lorsqu'on lit puis qu'on fait le parcours
à travers la vie… Parce que c'est la
vie, M. le Président. C'est-à-dire, on naît, on grandit, on fait une famille,
on fait des choixprofessionnels, des
choix de vie. Et, dans notre parcours de vouloir vivre, limité dans le temps,
sur un espace d'environ 100 ans, il
arrive que la maladie s'installe. Évidemment, dans la maladie, on peut choisir
son médecin, on ne peut pas choisir sa
maladie. On peut choisir ses traitements, on peut accepter des traitements, on
peut refuser des traitements, ce qui est l'ordre de ce qu'on va
entreprendre tout à l'heure.
• (16 h 10) •
On
n'a pas beaucoup parlé, dans la vie,
de refus de traitement. On peut donc dire, devant une certaine maladie…
On peut être dans les conditions placées aujourd'hui, une maladie grave,
incurable. On peut aussi, donc, choisir, donc, de refuser des traitements, de la chimiothérapie, de l'alimentation, de
l'hydratation. Donc, on peut refuser ces traitements-là et faire en
sorte que la maladie va nous amener,
donc, vers la fin de la vie mais avec des souffrances, des douleurs, etc.,
donc, tel que prévu. Donc, c'est pour ça que
la médecine est venue, au fil des années… donc, a évolué, a trouvé des
solutions à des problèmes qui existaient. On prolonge la vie maintenant, on le
sait.
Et
j'ai rencontré, en général, dans ma vie, comme tout autre, des gens qui veulent
vivre. Partons du principe qu'ils veulent
vivre et ils choisissent le choix de la vie. Dans leur parcours de vie, lorsqu'ils
seront confrontés à leur maladie, lorsque l'ensemble des maladies qu'on
peut appeler, souvent, là… donc, quand on est… le cancer, quand on ne réussit pas à le combattre, il se peut que, dans
notre parcours, on ait à prendre des décisions plus difficiles, M. le Président, devant ce combat inégal
qu'est la maladie contre le corps humain.
J'en
arrive à ce moment-là. Parce que c'est ça, le projet de loi nous place
devant ce choix-là. Ce n'est pas pour quelqu'un qui est handicapé à la maison, ce n'est pas pour quelqu'un
qui est né, à la naissance, avec une… bon, avec un handicap, avec une malformation physique, etc.
Donc, ce n'est pas fait pour des enfants. On parle d'adultes consentants
à une étape de leur vie, déterminante,
occasionnée par la maladie qui déclenche une série de décisions à prendre
comme être humain.
En lisant le document
de consultation, bien fait, tous adhèrent aux choses suivantes. Quand tu as la
maladie, quand tu vis de la chimiothérapie,
de la prise de médicaments importante, des traitements, je comprends le document
qui dit : Écoutez,
on ne veut pas se retrouver sur la civière dans le passage à l'urgence. Le projet de loi, ce n'est pas ça qu'il règle. On ne veut pas avoir à raconter
notre histoire quand on passe de l'Hôtel-Dieu de Lévis à l'hôpital général de Thetford, sachant qu'on est déjà un
patient traité à Lévis en soins
palliatifs, et raconter notre
nouvelle histoire parce que je
suis arrivé dans un changement de quart de
service à Thetford, en expliquant au personnel soignant : Écoutez,
là, elle est due ou il est dû pour recevoir son médicament, son
traitement, voici les pilules qu'il reçoit, ne changez pas toutes les pilules,
c'est celles-là qu'il prend, il est dû pour les recevoir, je ne veux pas qu'il
souffre, etc.
Ça,
le «day-to-day», je pense que le document l'a bien présenté. Puis, quand je
rencontre ma population, dans
mes groupes, les «focus groups», ils sont
tous d'accord avec ça. Ils ne veulent pas qu'on se retrouve
encore dans le corridor. Ils veulent
que les deux organisations se soient parlé puis que, si elle est en phase
terminale, qu'elle se retrouve à… pas à domicile mais dans cet établissement-là,
ils veulent qu'elle occupe la place appropriée, c'est-à-dire la salle des soins
palliatifs qui a été bâtie au fil du temps, à coups de subventions et de contributions
personnelles, de contributions du public.
Puis on veut que la famille soit là, comprenne puis accompagne la personne qui vit
une phase, donc, plus difficile. Et on veut surtout que tout le
personnel qui l'accompagne soit formé dans cette compréhension-là. Les soins
palliatifs, je n'ai pas trouvé encore personne qui est contre.
Donc, le but de ça,
c'est identifier les craintes, les douleurs et les peurs, être capable de leur
donner assistance morale, matérielle pour
qu'on puisse suppléer à cette douleur, cette détresse-là, vers un horizon connu
qui est l'horizon de la fin de vie. Et, quand on travaille puis qu'on voit, donc, qu'au fil des
années, il y a eu l'hôpital, oui, il
y a eu la médecine qui a évolué pour remplacer des cœurs, des têtes, des
jambes, des bras, en enlever une partie pour faire en sorte que la vie persiste parce que les gens veulent vivre… Il y a
eu des établissements comme Michel-Sarrazin qui ont formé du monde en disant : Il y a une compréhension à avoir, il
y a des soins à donner différemment lorsqu'on veut accompagner quelqu'un
vers la terminaison de sa vie.
Basé
là-dessus, le projet de loi prend une partie du travail qui avait été fait par
le groupe de consultation. Tout le monde est d'accord, je tiens à le
mentionner, sur le fait qu'il y ait plus de soins palliatifs. Puis en général
on peut s'apercevoir que, du domicile à la maison de transition, à l'hôpital,
ce n'est pas égal, on ne recevra pas les mêmes services. On n'est pas à
ce niveau de préparation là. Tous souhaitent d'avoir à choisir, M. le Président,
d'avoir une option de : Si je veux vivre à
domicile et terminer ma vie, je veux que le personnel qui viendra m'encadrer et
que la formation de la famille puisse
me permettre de vivre le mieux possible cette terminaison-là. Si je suis dans
une maison de transition, Michel Sarrazin, exemple, ils très bien formés pour
ça.
Quand j'arrive à
l'hôpital, c'est moins évident. Donc, même en rencontrant mon hôpital, donc les
gens, les responsables de l'hôpital… Je veux remercier
Martin Lord, le directeur général, qui, depuis
un an, a vu vers où le gouvernement s'en va, vers où la société
s'en va, a monté le niveau de préparation, a fait une évaluation dans le
réseau de la santé et des services sociaux de
la région de Thetford pour s'apercevoir qu'il y a une inégalité dans la
prestation de services, comment monter la
préparation et comment arriver, à la fin, à donner le meilleur service dans les
circonstances du choix qui est fait par l'individu
qui vit cette période-là.
Le
projet de loi retient un élément, un
volet de la consultation et de l'encadrement, c'est-à-dire la fin de la
vie. Il y a deux aspects principaux. Parce qu'on pourrait dire : On lit la
loi, on ne voit pas qu'est-ce qui a changé. On est tous d'accord au fait que l'hôpital est mieux organisé, que
l'encadrement est mieux fait, qu'il y a une
commission qui établit dans
quelle façon ça va se passer, le consentement à la personne de façon mieux
éclairée. On comprend tout ça. Parce que,
quand on arrive là, même quand il n'y avait pas de loi, M. le Président, puis
qu'on se retrouvait dans la décision d'avoir
à débrancher notre mère ou notre père ou
d'avoir à ne plus lui donner, hein, les soins, le traitement actif pour
passer dans une phase où la maladie va l'emporter sur la personne, il y a bien des discussions de famille puis il y a autant de décisions qu'il y a d'enfants. Puis
on n'est jamais préparé. J'entendais mon collègue,
tout à l'heure, en parler. On ne se prépare jamais aussi bien à mourir qu'à
vivre, et c'est normal. La phase accélérée dans laquelle ça nous plonge.
Chacun n'y met pas tout le même temps. Puis,
à la fin, quand on a une décision aussi forte à prendre : Est-ce que
j'arrête sa vie? Est-ce que je prends
l'acte? Est-ce que je mets sur mes épaules le fait de cesser le traitement?,
là, toutes les questions… ta vie est remise en question.
Alors,
moi, je partage beaucoup tous les objectifs de la loi, mais je me suis posé la
question dans ma propre vie et dans celle… dans les commentaires
recueillis par les autres, j'ai un peu migré
là-dedans, à savoir que, pour les soins palliatifs,
je suis complètement d'accord, la mise à niveau doit
se faire au Québec. Doit-on atteindre… avoir un niveau à 80 %, 90 %, un
peu partout dans les établissements, du domicile jusqu'à l'hôpital, pour adresser la question qui
est dans le projet de loi?
Et
qu'est-ce qu'il y a de changement dans le projet de loi n° 52? Bien, c'est
la chose suivante. Jusqu'à maintenant, quand on est malade, puis on a un médecin
favorable qui regarde, puis l'équipe de soins s'occupe bien de la
personne, on voit que, comme l'appréciation
de la douleur, elle est personnelle, on voit qu'avec certains protocoles, quand
c'est bien connu, compris et
appliqué, on peut donc diminuer la souffrance des personnes. Mais, ce faisant,
la médication viendra donc faire
d'autres dommages collatéraux, c'est-à-dire souvent des
dépressions respiratoires. On voit qu'au niveau des reins, ils
vont cesser de fonctionner. La personne va
accepter de ne plus être alimentée, hydratée, ce qui veut dire que tous ses
systèmes vont faire en sorte qu'on va comme atteindre un niveau de saturation
dans notre corps, de toxicité qui va faire en sorte qu'on va décéder.
Mais,
la différence dans le projet de loi sur l'aide médicale à mourir, il y a deux
éléments importants : la sédation palliative terminale et l'aide
médicale à mourir. Sédation palliative terminale, c'est un élément important à
donner. En général, ça arrive, c'est-à-dire,
dans les circonstances où la douleur ne peut pas être calmée, après avoir
expliqué à la personne qu'on ne veut pas qu'elle souffre, on va donc la
placer dans ce qu'on appellerait un coma qui
va faire en sorte que ce sera donc
définitif, elle ne se réveillera plus, elle n'aura plus cette période de phase éveil, phase endormie.
On va la placer dans une phase qui va
l'emmener à la fin de sa vie, sachant que la maladie aura gagné. Mais elle
n'aura plus connaissance et elle ne
souffrira plus. C'est souvent la décision qui est faite parce qu'on voit la
personne souffrir et la médication
régulière ne pallie pas à ça. Donc, c'est un élément important, et le monde, en
général, sont d'accord avec ça.
• (16 h 20) •
Quel
est l'élément nouveau de ce projet de loi là? C'est l'aide médicale à mourir.
Puis, quand on veut l'exprimer le mieux
possible… Dans mes consultations, ce que j'ai pu faire, c'est… L'aide médicale
à mourir, c'est assez simple, puis je pense qu'il faut l'exprimer comme
ça : À un moment de ma vie où est-ce que je remplis les conditions… Puis,
je tiens à le rappeler, là, c'est des personnes majeures, c'est des personnes
qui ont un diagnostic, un «déclin avancé et irréversible».
Donc, «avancé et irréversible», ce n'est pas la journée où on dit : Aïe!
M. Lessard, vous avez telle maladie, donc, ça, en général, ça meurt.
Puis là je me retourne puis je dis : Ah bien, c'est là que je veux mourir.
Donc,
il y a quand même une phase, il y a donc un espace-temps, il y a une condition
qui se détériore. «Elle éprouve des souffrances physiques ou psychiques
constantes». Donc, ça se peut que les… donc, ce n'est pas que ça se peut, mais il précise bien, le projet de loi, que l'évaluation
de la douleur et de la souffrance est une évaluation personnelle. Ce n'est pas ce que généralement on écrit dans les
livres, que, quand une personne a le cancer des os, en général c'est aux
trois heures qu'on donne la médication, aux deux heures, etc. Il arrive cette
phase où est-ce que l'évaluation personnelle
fait en sorte : Tu as beau me le donner aux deux heures, ça ne me soulage
pas, je souffre. Et là je le veux au besoin, donc ce qui sera indiqué
par la suite.
Donc,
la différence… Puis, pour bien expliquer à la population qui m'écoute, de
Lotbinière et de Frontenac, c'est que
le projet de loi dit maintenant : Dans ces circonstances, sachant qu'il me
reste trois jours, trois mois ou trois semaines, sachant que la maladie
va m'emporter, je prends la décision personnelle de mettre fin immédiatement à
ces semaines qui peuvent m'appartenir en
demandant à un médecin de m'aider à mettre fin à ma vie, à cesser tout
traitement. Donc, je vais lui demander d'intervenir dans mon parcours
pour que cesse immédiatement et dans les quelques minutes qui vont suivre son
passage…
Puis je
l'exprime comme ça : Je suis assis avec ma conjointe, je connais qu'il me
reste trois heures, trois jours ou trois mois à vivre, je suis dans les
circonstances exprimées par le projet de loi, j'ai fait ma demande au médecin,
qui est consentant puis qui établit bien que
je suis dans les critères après m'avoir évalué, que je suis bien consentant,
donc je suis bien orienté dans le temps, ma
décision, elle est éclairée, je lui demande de prendre… de m'administrer la
charge finale. Donc, il va aller voir un
autre médecin — hein, il
y a un protocole bien établi — pour voir si tout a été respecté.
L'hôpital est avisé. Il y aura un rapport de
ça. Et, dans cet après-midi-là, M. le Président, je suis assis avec ma
conjointe, les enfants sont alentour de moi puis je dis au
médecin : Maintenant, c'est le temps, c'est dans les minutes qui suivent
que je veux que ça se termine. Et le médecin
aura l'autorisation et le matériel nécessaire pour m'administrer une dose qui
va mettre fin immédiatement à ma vie et à
mes souffrances. C'est ça, le grand changement. Puis, par la suite, il y a
l'équipe qui ramasse puis qui passe dans une autre phase, funéraire, etc.
Il y a un
changement significatif dans la fin de la vie qui est déterminé par lui qui
souffre et qui est administré par un spécialiste de la médecine. Bon,
vous allez me dire : Tous les médecins ne voudront pas le faire. Il y aura
toujours des médecins qui veulent le faire.
J'ai rencontré l'équipe qui était contre, en passant. Il y a des gens qui
disent : On est contre, contre,
contre tout, etc. J'ai rencontré du monde qui était pour, pour, pour tout.
Mais, quand on arrive à la fin de la loi,
s'il y avait un article là-dedans qui est un changement majeur… Là, on aura
beau dire : Ils vont être poursuivis parce que c'est criminel,
c'est de l'euthanasie. On se rappelle donc que, dans le cas des avortements,
dans le temps, quand le procureur a décidé
de ne plus poursuivre, donc ça n'a pas été un acte qui a été porté, donc, à des
accusations. Je n'embarque pas
là-dedans parce qu'on est capables de surmonter ça. Je reste sur l'aspect que,
lorsque le médecin que je parlerai de la mort sera passé, lorsqu'il sera passé à la chambre 323, alors que j'étais
dans une chambre de soins palliatifs, les minutes qui vont suivre, à sa sortie,
je serai décédé. Et c'est le changement fondamental qui est au cœur de cette
loi-là.
J'ai migré, M. le Président. Au commencement, je me disais pour tout cet accompagnement-là. Mais, à la
fin, quand je regarde le moment précis et le niveau de préparation, je
dirais même, des hôpitaux, qu'on pensait que c'est eux autres les plus préparés, ils n'en sont pas rendus là. Ils ne sont pas
rendus là. Même que, lors de mes consultations, les médecins pensaient même que ça pouvait être un
acte délégué. Ils pensaient même qu'on pouvait déléguer ça à
l'infirmière responsable ou l'infirmier responsable du département. J'ai
dit : Non, c'est inscrit dans la loi, c'est le médecin qui l'administre,
puis, si ce n'est pas lui qui l'administre, l'organisation de l'hôpital aura à
trouver un autre médecin pour administrer la
charge létale. Puis je pourrai toujours changer. Je
pense que le projet de loi, il est bien fait, il est bien expliqué. Il y a des définitions, à savoir : Qu'est-ce que tu me donnes pour que je meure tout
de suite? On peut se poser la
question. Est-ce que c'est comme ailleurs?
D'autres préoccupations que j'ai sur la fin de
la vie : Est-ce que c'est proche de l'euthanasie, M. le Président? On
pourrait peut-être le dire. Ça vient de la personne dans des conditions
particulières. Je n'embarquerai pas sur ce volet-là.
Toutefois, je devrai, à cette étape-ci, me prononcer, je
serai contre cet aspect-là, à ce
moment-ci. Je pense, c'est
assez… On n'est pas rendus là. Il y aura d'autres…
Je pense
que, sur les soins palliatifs, on aura à mettre à niveau les soins palliatifs
au Québec, à mieux expliquer ce volet-là, à… je ne dirais pas de le tester, parce que
tu ne peux pas faire un projet pilote là-dessus, là, en disant : On va en administrer
dans six régions du Québec puis on va voir comment ça marche. J'ai entendu des
débordements, à savoir qu'on pourrait même l'offrir aux personnes inaptes. Je
suis complètement contre, M. le Président.
Déjà, la question qui est adressée est une
question difficile, mais, pour l'instant, à cette étape-ci et dans mon cheminement avec ma population, je devrai donc me
prononcer contre cet aspect-là, ce que le chef de notre formation politique
nous a autorisés à, donc, prendre une décision selon notre conscience. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Lotbinière-Frontenac. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
Donc, s'il
n'y a pas d'autres informations, je vais passer la parole à la ministre
déléguée à la Santé et
Services sociaux, Protection de la jeunesse, pour votre réplique, Mme la
ministre, de 20 minutes.
Mme Véronique Hivon (réplique)
Mme
Hivon : Oui. Alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je me permets de faire une réplique parce que je pense que c'est un projet de
loi qui est très important, tous les intervenants qui ont pris la parole l'ont
souligné.
C'est un projet de loi évidemment qui est en cours, je dirais, depuis presque
quatre ans. Parce que, même si ce n'était pas un projet
de loi qui était en élaboration,
c'était une démarche, une démarche qui a été très, très importante, qui a
réuni des parlementaires des quatre
formations politiques et énormément de dialogue avec la population
dans ce que, je pense, on peut offrir
de plus beau du parlementarisme et de la démocratie, une démarche non
partisane, d'ouverture, de dialogue.
Et pourquoi
le faire à l'Assemblée nationale? Parce
que, justement, c'est à l'Assemblée nationale, c'est avec la population et avec les élus
qu'on doit faire de tels débats. Je ne pense pas que ce sont des débats qui
devraient se trancher devant les
tribunaux. J'en suis convaincue. C'est ce qui m'avait motivée, à l'époque, à
déposer la motion, et c'est ce qui m'a motivée très fortement à élaborer
le projet de loi.
Je
veux rappeler que c'est un projet de
loi sur les soins de fin de vie.
Donc, c'est vraiment… ce qui a retenu vraiment l'attention de la très
grande majorité des interventions, c'est l'aide médicale à mourir. Puis je veux
y revenir parce que ma réplique va essentiellement être sur ce
sujet-là qui retient le plus l'attention. Mais, quand on a présenté le projet
de loi justement, beaucoup ont été très surpris de voir que c'était un projet
de loi global sur les soins de fin de vie. Toute la philosophie du projet de
loi, c'est un continuum de soins, c'est de dire qu'on traite la personne dans
toute son individualité, dans toute sa
spécificité, mais aussi dans toute sa globalité en fin de vie
pour pouvoir l'accompagner le mieux possible
en respectant ses besoins, en lui offrant tous les soins dont elle a besoin et
même un soin tout à fait
exceptionnel si elle est dans des circonstances tout à fait exceptionnelles de
souffrances exceptionnelles.
• (16 h 30) •
Et, c'est
très important de le rappeler, le chef parlementaire de l'opposition officielle
a dit tout à l'heure, dans son allocution,
que, pour lui, c'était un projet de loi sur la vie. Et je suis d'accord, parce
que la fin de vie, c'est une étape très importante de la vie, c'est une étape qui est très riche, c'est une étape qui est souvent révélatrice de beaucoup
de choses, avec ses proches, avec sa
famille, parce que, à la fin
de la vie, quand on est malade et qu'on est mourant, on n'est plus dans les artifices, on va au coeur des
choses, on discute des vraies choses. Et c'est ce qui peut en faire une
période très, très riche de la vie. Mais c'est aussi ce qui peut en faire une
période excessivement difficile quand on sait que la mort s'en vient, et quand on souffre, et qu'il
n'y a pas de réponse à nos
souffrances, et qu'on se demande pourquoi cette agonie doit perdurer, pourquoi ces souffrances doivent m'être imposées et, par
ricochet, à mes proches aussi, qui évidemment
souffrent avec moi, mais c'est vraiment la personne qui est au coeur de ça.
Et
donc une des questions
centrales, c'était bien sûr de se questionner : Que dit-on aux personnes
en fin de vie qui souffrent, et qu'on n'arrive pas à soulager, et
qui n'arrivent pas à avoir de réponse, malgré les meilleurs soins palliatifs qu'on peut leur offrir? Parce
que, je le dis d'entrée de jeu, même Michel Sarrazin, même l'équipe d'infirmières expertes, dans la grande région métropolitaine, de l'entraide
Ville-Marie, qui est maintenant la société des soins palliatifs du Grand Montréal, sont venues nous
dire qu'il y a de 5 %
à 8 % des gens qui, avec les meilleurs soins palliatifs, n'arrivent
pas à recevoir des réponses adéquates à leurs souffrances. On appelle ça des
souffrances réfractaires. La médication ne peut
pas agir correctement, ils sont donc dans une voie
sans issue. Alors, c'est une question qui est fondamentale quand
on aborde cette question-là, quand on aborde tout ce débat-là. Quelle réponse
peut-on offrir?
Et c'est la
question que nous soumettait le Collège des médecins, je le rappelle, à
l'automne 2009, en nous disant :
Nous, comme médecins, comme soignants, on est confrontés, en fin de vie, à des
situations sans issue. Et, comme
société — et c'est
une question, je pense, fondamentale — comme société démocratique, mais comme
société faite de solidarité et de compassion, que répond-on à ces gens-là qui,
malgré les meilleurs soins, sont dans des situations sans issue?
Et, bien sincèrement, je dois dire que je suis
très impressionnée par la qualité des interventions qui ont eu cours depuis le début de la semaine, du caractère
très respectueux des interventions qui ont été faites, du grand respect
qui anime ce débat-là et qui l'anime depuis
le jour 1. Tout le monde a voulu travailler ensemble dans un esprit de
collégialité, d'une manière constructive, pour essayer, avec le plus d'humanité
possible, de répondre à ces difficiles questions là.
Et, tout au long des consultations, c'est ce
qui m'a animée, c'est ce qui a animé tous mes collègues des quatre
formations politiques, c'est d'être toujours dans le respect, dans l'ouverture,
dans l'écoute vers l'autre et vers ce que les citoyens avaient à nous dire.
Et ces consultations-là ont été d'une ampleur sans
précédent. Il y a eu plus de 300 personnes, groupes qui sont venus se faire entendre,
et un intérêt incroyable partout au Québec — et les collègues qui ont mené des
consultations dans leurs
circonscriptions l'ont certainement vu
aussi — un
très grand intérêt, des histoires très personnelles que les gens ont eu la générosité et l'ouverture de nous
communiquer, ce qui nous a permis de très bien cheminer. Et il y a eu, donc,
de très larges consultations et qui ont été très étendues. Il y a eu
6 000 personnes qui ont répondu au questionnaire, il y a eu 16 000 commentaires qui ont été envoyés.
Et, une fois le projet de loi déposé, bien, on a décidé, évidemment, de
faire encore de larges consultations, quatre semaines intensives de
consultation.
Et je vais me permettre, à cet égard-là, juste
de rappeler une chose, parce que certains collègues ont dit qu'il y avait eu certains groupes qui n'avaient pas été
entendus,et
je veux juste rappeler que, le processus de
consultation, je pense qu'il a été exemplaire. La commission spéciale a
fait des consultations pendant plus d'un an, on a entendu plus de 300 personnes. Lors du dépôt du projet de
loi, on a décidé encore de faire une consultation importante, on s'est
entendusavec
la députée, ma vis-à-vis, la députée de Gatineau,
sur les groupes qui seraient entendus. On a entendu 55 groupes. En
cours de route, il y a eu des demandes supplémentaires, on a accueilli
plusieurs de ces demandes supplémentaires. Et
il y a quelques groupes qui, c'est vrai, n'ont pas
été entendus.
Et, je pense que
c'est important de le dire, il y avait eu une entente, donc, entre les partis,
sur les groupes qui allaient s'entendre...
qui allaient être entendus. Et les groupes qui n'ont pas été entendus, c'était
pour des raisons très objectives,et je vais vous les dire.
C'était soit, en fait... Les quelques qui n'ont pas été entendus étaient
soit des personnes, et donc pas des groupes... Et évidemment vous
comprendrez facilement que, de réentendre
toutes les personnes qui souhaitaient être entendues,
après en avoir entendu plus de 300, je pense
que ça aurait été laborieux.Et les groupes qui n'ont pas été entendus
sont soit parce que c'étaient des groupes canadiens, donc dont la place
d'affaires, le siège social était à l'extérieur du Québec et qui n'avaient pas de
division Québec, parce
qu'on a entendu des groupes
pancanadiens mais qui avaient une division Québec, ou c'étaient des
groupes, au contraire, qui étaient très, très locaux, donc qui étaient le
groupe de la Mauricie ou de la région de Québec. Et c'est certain que ces groupes-là n'étaient pas des groupes, non
plus, qui avaient manifesté un intérêt lors de la très vaste consultation. Et je pense que c'est important de le rappeler, on
a fait un travail de consultation sérieux, sur la base d'une entente qu'on a eue, sur la base des
groupes. Donc, de part et d'autre, on voulait entendre, en permettant,
en plus, d'en entendre plusieurs autres,mais évidemment on ne pouvait refaire une consultation d'une autre année sur un dossier qui est en
débat, au Québec,
et en consultation avec la population depuis bientôt quatre ans. Donc, ça, je
pense que c'est très important de le dire.
Et on est
même allés très loin dans les consultations. Il y a plusieurs groupes qui sont
très proches, autant dans les pour que
dans les contres. Il y a des groupes qui avaient des membres qui étaient les
mêmes sur les conseils d'administration, mais nous, on s'est dit :
Dès que c'est un groupe qui a une vie associative, qui est basé... qui est au Québec, qui a un rayonnement, on va les entendre,
justement parce que, oui, il faut favoriser le débat et justement pour jamais
ne se faire accuser d'avoir voulu restreindre le débat. Mais, ceci étant dit,
je ne pense pas qu'on pouvait recommencer à
écouter des centaines et des centaines de groupes et de personnes. Il fallait
donc être capables d'avoir des critères
objectifs. Et donc on a fait, encore une fois, une très belle étape de
consultation, quatre semaines intensives de consultation qui m'ont grandement
enrichie, comme, je pense, tous les
parlementaires qui ont participé.
J'aimerais
donc aborder la question... différents arguments qui ont été soulevés par des
collègues qui nous ont annoncé qu'ils
pensaient voter contre le projet de loi, contre l'adoption de principe du
projet de loi. Écoutez, être au-delà de la partisanerie, être dans, je
pense, le respect le plus total et la collaboration, c'est très important dans
ce débat-là. En même temps, tout le monde
ici a des convictions très fortes, et c'est certain que j'en ai aussi, pour
avoir évolué dans ce dossier-là depuis quatre ans. Et aujourd'hui je
trouve que c'est important, pour moi, de répondre à ces arguments-là et aussi,
peut-être, d'alimenter une réflexion encore davantage.
Les grands
éléments qui sont soulevés pour s'opposer au projet de loi, c'est d'abord la
question des soins palliatifs. Est-ce
que les soins palliatifs sont assez disponibles? Vous savez, en matière de
santé, je pense que la perfection ne sera jamais de ce monde. On y tend tous, comme dans tous les domaines de
notre vie, mais la perfection ne sera jamais de ce monde. Mais la
qualité, et l'offre,
des soins palliatifs au Québec, elle est quand même
excellente.
Et j'entendais la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, un petit peu plus tôt aujourd'hui,
dire que j'avais prétendu, cette
semaine, que tous les besoins étaient comblés. Ce n'est pas ça du tout. Alors,
je veux rétablir les faits. Je n'ai pas dit que tous les besoins étaient
comblés. Ce que j'ai dit, c'est qu'on était en voie d'atteindre le ratio d'un
lit de soins palliatifs pour 10 000 de
population, qui est la norme dans la politique sur les soins de fin de vie qui
a été adoptée par le précédent
gouvernement en 2004, mais qui rallie vraiment
tout le monde, tout le milieu des soins palliatifs, nous aussi, parce qu'on y avait travaillé; mais il y a eu un
changement de gouvernement, et le travail s'est poursuivi avec le nouveau gouvernement. Donc, ce que j'ai dit, c'est que ce
ratio-là est en voie d'être atteint parce qu'on a atteint 98 %. Et en
plus on investit,
parce que c'est un chantier très important pour nous. On investit, on a investi
15 millions au printemps pour les soins
palliatifs, en grande majorité pour les soins palliatifs à domicile, et ces
efforts-là continuent. Et donc l'offre, elle est quand même très bonne,
et je pense que c'est important de le rappeler.
• (16 h 40) •
Mais, ce
qu'il est surtout, aussi, important de rappeler, c'est que, même avec les
meilleurs soins palliatifs, il reste ce pourcentage de gens là, comme je
l'ai dit tout à l'heure, de 5 % à 8 %, — et c'est les experts
eux-mêmes, c'est La Maison Michel Sarrazin qui est venue nous le dire — qui n'arrivent pas à avoir un soulagement à
leurs souffrances en fin de vie. Et d'ailleurs je dois vous dire que,
pendant les consultations, les gens qu'on a entendus, qui sont venus nous faire des cris du cœur pour un proche qui était
décédé dans des circonstances très difficiles souvent — je pense à Mme Gobeil, notamment, au Saguenay, à laquelle mon collègue
d'Orford a fait référence dans son allocution — c'étaient des proches de gens qui avaient eu des soins palliatifs, qui
étaient dans des unités de soins palliatifs mais qu'on n'arrivait pas à
soulager, parce qu'il n'y a rien, malheureusement, de parfait, et les soins
palliatifs, malgré que ce soit extraordinaire… Et je suis une tenante des soins palliatifs, pour aussi avoir vu très
concrètement comment ils se déploient, très forte tenante des soins palliatifs, mais, oui, il y a des limites
aux soins palliatifs comme il y a des limites à toute science et comme il y
a des limites à toute spécialisation en médecine. Donc, premier élément.
La deuxième
question, évidemment, c'est de dire : Il y a des dérives, les risques de
dérive, les risques de dérapage, et ça, je dois vous dire qu'évidemment
c'est la préoccupation la plus importante, et cette préoccupation-là ne m'a pas
lâchée pendant quatre ans et elle ne m'a pas
lâchée pendant toute l'élaboration du projet de loi. Et, toutes les
personnes que j'ai pu entendre qui avaient
des craintes, qui avaient ces craintes, qui avaient ces peurs, je dois vous
dire qu'elles m'ont accompagnée tout
au long de l'élaboration du projet de loi, parce qu'évidemment il faut avoir le
projet de loi le mieux fait, le plus encadrant possible, qui réponde
vraiment à la question de base des personnes qui sont en fin de vie et qui souffrent. Alors qu'elles sont dans une situation
irrémédiable, une maladie grave et incurable, qu'il n'y a plus aucun
espoir d'améliorer leur situation et qu'elles ont des souffrances constantes et
intolérables, que leur répond-on?
Donc, c'était vraiment dans cette optique-là et
d'avoir une réponse très claire, très ciblée, très encadrée, et je pense qu'avec les articles 26 et suivants on
y arrive. C'est la loi la plus contraignante de toutes les législations qui, à
ce jour, ont été développées dans différents États,
en lien avec la fin de vie, parce qu'elle allie le critère de la souffrance,
qui est le critère dans certaines
juridictions comme en Europe, qui est le critère dominant, mais avec celui de
la fin de vie, qui est le critère aux États-Unis, dans certains États,
mais qui n'est pas lié à la souffrance nécessairement. Donc, nous, il nous faut
les deux conditions. C'est ce qui fait que c'est très contraignant.
Et, vous
savez, on entend souvent des épouvantails se brandir en disant : Oui,
mais, en Belgique, aux Pays-Bas, c'est
terrible. Bien, je dois vous dire qu'on est allés, la commission, on est allés
voir sur le terrain. On a rencontré plusieurs dizaines de personnes et
on a vu des gens qui étaient, à l'origine, contre aux
Pays-Bas, contre en Belgique, et je dois vous dire qu'ils nous disent
que, même s'ils peuvent avoir gardé leurs convictions — il y
a une grande question de convictions
là-dedans — ils
sentent à quel point il y a un consensus et ils sentent à quel point la loi s'est bien
appliquée et que des dérives, la
pente glissante que certains appellent, ne se sont pas concrétisées. Parce que
de quoi les gens ont peur, c'est
qu'il puisse y avoir des gens qui reçoivent l'aide médicale à mourir sans leur
consentement, des gens, par exemple, qui seraient vulnérables, des aînés
ou des personnes handicapées. Et ça, c'est une crainte réelle, que je partage à
200 %,
évidemment. Et donc c'est beaucoup ça, l'idée des dérives
ou de la pente glissante.Mais les
études montrent qu'il n'y a pas une disproportion de personnes âgées ou
de personnes vulnérables qui ont eu recours à l'aide médicale à mourir, pas du tout. En fait, même, c'est un peu
l'inverse. Alors, je pense que c'est important aussi de remettre ça dans
le contexte, comme c'est important de remettre dans le contexte que, dans ces
pays-là où la législation est moins contraignante,
et je le rappelle, c'est de 0,2 % à 2 % des décès qui sont donc liés
à une aide… un acte d'aide médicale à mourir. Donc, c'est très limité. Et la moyenne de
réduction du temps de vie, c'est 10 jours. En Belgique, c'est
10 jours.
Donc,
qu'est-ce que ça nous dit? Ça nous dit que c'est vraiment dans des situations
sans issue. Et évidemment il y a quelques cas qui sont ressortis de ces
pays où les personnes n'étaient pas en fin de vie, et, oui, ça soulève des
questions très sérieuses; une personne, par
exemple, à la suite d'une opération de changement de sexe, une personne, par exemple, qui était en dépression majeure, mais
ce ne seraient pas des cas admissibles ici, jamais, parce qu'on est dans
une situation de fin de vie.
Et je veux juste vous
raconter une anecdote. Lundi, je rencontrais, dans ma circonscription,
quelqu'un, un entrepreneur qui est belge
d'origine et qui me disait : Ah! votre
débat, hein, ça, tout le débat qui a cours au Québec, c'est un débat
qu'on a vécu en Belgique, ça m'intéresse énormément. Puis il m'a dit : Je
pense que je vais écrire dans les journaux — c'est quelqu'un qui n'a jamais fait ça de sa
vie — parce
qu'il dit : Moi, ma mère, elle vivait en Belgique et, il y a
quelques années, elle est décédée par aide médicale à mourir. Et il dit :
Elle avait 90 ans, elle était excessivement croyante, mais elle avait un cancer du cerveau excessivement pénible et douloureux, et elle a eu
recours, en toute sérénité, avec sa famille autour d'elle, qui l'a soutenue
là-dedans, à l'aide médicale à mourir. Et il a dit : Quand j'entends ici
les histoires qu'on raconte sur la Belgique…
Il dit : Vous savez, en Belgique, ça fait
consensus, et puis il dit : j'ai le sentiment qu'on est en
train de nous traiter comme si on n'était pas une démocratie capable de faire
les choses correctement. Il dit : S'il
y avait de telles dérives, de tels abus, ne pensez-vous pas que ça ferait la
une des journaux? Et justement, quand il y a des cas difficiles, comme
on en a entendu parler, ça fait la une des journaux, et la société se pose des
questions. Et, nous, ça nous permet
d'évoluer aussi et d'avoir une loi encore meilleure, beaucoup
plus contraignante, pour éviter ces éléments-là. Donc, je pense que ça,
c'est très important.
Et,
vous savez, la plus grande des balises, et je le répète souvent, mais c'est la
force de vivre. La force de vivre, elle est là, elle est présente et, en fin de vie,
pour la majorité des gens, elle est tout aussi présente, donc il faut en tenir
compte. Puis, quand on parle du devoir de
mourir… La députée de l'Acadie a invoqué ça : Oui, mais les gens vont se
sentir obligés, obligés de mourir. Mais,
voyons, ce n'est pas ces gens-là qui sont concernés, ce n'est pas des gens
vulnérables ou aînés. Ce sont des gens malades, qui ont des maladies graves et
incurables, qui sont dans une situation sans issue, médicalement parlant. Ce ne sont pas des gens isolés, seuls, qui n'ont
pas le soutien affectif dont ils ont besoin. Les critères sont
excessivement stricts. Donc, ça, je pense que ça aussi, c'est très important de
le dire.
Et,
vous savez, j'ai entendu mon collègue de Jacques-Cartier invoquer la situation de Ghislain Leblond qui l'avait habité tout au long de sa réflexion. Moi aussi, ça
m'a habitée beaucoup, M. Leblond, comme Mme Gobeil, comme Georges C., qui
nous a interpellés récemment dans les médias, comme Mme Gladu, comme
Laurence Brunelle-Côté. Ils nous ont tous dit : Au nom de quel principe,
au nom de quel principe, pour quelle raison on ne pourrait pas avoir une
aide en fin de vie pour mettre fin à des
souffrances inapaisables? Et je dois vous dire que je l'ai posée et je n'ai
jamais eu de réponse. Et je pense que
c'est très important de se dire, comme société de compassion et de
solidarité : Qu'est-ce qu'on répond à ces personnes-là, à ces
exceptions, mais qui sont présentes, qui sont
une minorité de personnes… mais qui peuvent prouver notre solidarité?
Alors,
en terminant, j'aimerais simplement dire que j'ai espoir que nous serons à la
hauteur de la confiance et de l'espoir que les citoyens mettent en nous
et que nous allons largement voter en faveur du principe de ce projet de loi.
Et j'invite les collègues qui ont encore quelques réserves à lire au cours des
prochains jours, avant le vote...
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : En terminant.
Mme
Hivon :
...le rapport de la commission pour avoir un éclairage supplémentaire. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Alors, merci, Mme la ministre déléguée à
la Santé et Services sociaux, Protection de la jeunesse.
Le principe du projet
de loi n° 52, Loi concernant les soins de fin de vie, est-il adopté?
M. Traversy :
M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Oui.
M.
Traversy : M. le Président, écoutez, en vertu de notre nombre
de députés, je demanderais donc un vote par appel nominal et, selon
l'article 223 de notre règlement, j'aimerais le reporter, donc, à la
prochaine séance, suivant les affaires courantes, mardi prochain.
Vote
reporté
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Alors, conformément à la
demande du leader adjoint du gouvernement, le vote sur la motion de Mme la députée... la ministre déléguée aux
Services sociaux et à la Protection de la jeunesse
proposant l'adoption du principe du projet de loi
n° 52, Loi concernant les soins de fin de vie, sera tenu à la prochaine
période des affaires courantes.
M. le leader adjoint
du gouvernement.
• (16 h 50) •
M.
Traversy : M. le Président, vous avez une petite voix
aujourd'hui. J'ai cru le remarquer même si c'est très subtil. J'aimerais vous demander d'appeler, pour la suite
de nos travaux, l'article n° 40 de notre feuilleton, pour bien
compléter cette journée.
Motions du gouvernement
Motion proposant que l'Assemblée approuve la Convention
pour le règlement des différends relatifs aux investissements
entre États et ressortissants d'autres États
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Alors, à l'article 40, l'Assemblée
procédera maintenant au débat sur la motion
inscrite à l'article 40 du feuilleton, faisant
suite au dépôt par M. le ministre des Relations internationales, de
la Francophonie et du Commerce extérieur, le 12 juin 2013,
d'un engagement international. Cette motion se lit comme suit :
«Que
conformément à l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations
internationales, l'Assemblée nationale étudie, dans le délai prescrit par la
loi et en vue de son approbation, la Convention pour le règlement des
différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d'autres
États.»
Je
vous rappelle qu'en vertu de l'article 22.3 de
la Loi sur le ministère des Relations internationales cette
motion donne lieu à un débat restreint de deux heures. Conformément à ce qui a
été énoncé antérieurement par la présidence, la
répartition des temps de parole, dans le cadre de ce débat, s'effectuera comme
suit : 51 min 18 s sont allouées au groupe parlementaire
formant le gouvernement; 45 min 36 s sont allouées au groupe parlementaire
formant l'opposition officielle; et 17 min 6 s sont allouées au
deuxième groupe d'opposition; six minutes sont allouées aux députés
indépendants. Dans ce cadre, le temps non
utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué aux groupes parlementaires en proportion de
leur représentation à l'Assemblée nationale. Enfin, mis à part les consignes
mentionnées précédemment, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.
Je cède maintenant la
parole à M. le ministre des Relations internationales, de la Francophonie et du
Commerce extérieur. M. le ministre, la parole est à
vous.
M. Jean-François Lisée
M.
Lisée : Merci, M. le Président. Je propose aujourd'hui à cette Assemblée
l'approbation de la Convention pour le
règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d'autres États, plus communément
désignés comme la Convention du CIRDI ou la
Convention de Washington. C'est en voulant pallier aux lacunes existant en
matière de règlement des différends relatifs aux investissements que la Banque
mondiale a pris l'initiative d'élaborer ce nouvel instrument au début des
années 60.
Comme son nom l'indique, la Convention du CIRDI établit des règles d'arbitrage et de conciliation pour les
différends relatifs aux investissements entre États et investisseurs privés. Elle
crée aussi le Centre international pour le règlement des différends relatifs
aux investissements, le CIRDI, responsable de la mise en oeuvre de la convention.
En instaurant un
régime impartial et efficace de règlement des différends qui peuvent survenir
entre les investisseurs et les États, la Convention du CIRDI favorise les investissements
internationaux privés. À ce jour, 149 États
ont ratifié celle-ci, dont les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et la France.Ce
sont les quatre premiers partenaires
économiques du Québec. Le Canada l'a signée en 2006 et s'apprête à la ratifier.
Pourquoi le Canada n'a-t-il pas encore ratifié
la Convention du CIRDI alors que la
plupart des États l'ont déjà fait? Pour qu'un État
puisse devenir partie à la Convention du CIRDI, il doit être en mesure
de faire exécuter les sentences rendues sur
l'ensemble de son territoire. Or, au Canada, la propriété, les droits civils,
l'administration de la justice, trois domaines souvent concernés par les
investissements, relèvent, comme vous le savez, de la compétence exclusive des
provinces et des territoires. Par conséquent,
pour respecter ce critère, les États et les territoires doivent adopter des
lois de mise en oeuvre de la convention afin que toute décision relative à un différend auquel un gouvernement
au Canada est partie puisse être exécutée n'importe où, même dans une
province ou un territoire non lié au litige en
question.
Par ailleurs, la
convention prévoit pour les États fédérés la
possibilité de se faire désigner comme collectivité publique afin d'assumer
pleinement leur rôle en regard de la convention lorsqu'ils sont partie à un
différend avec un ressortissant étranger.
Pour respecter cette obligation de sentence exécutable par tout tribunal
compétent sur l'ensemble du territoire canadien, le gouvernement fédéral
a dû convaincre les provinces et territoires d'adopter des lois de mise en oeuvre.
Il a d'abord fallu que les gouvernements s'entendent sur le rôle respectif en
regard de son application. Les représentants
fédéraux et les fonctionnaires ont donc eu des échanges avec leurs homologues provinciaux et
territoriaux au cours des années, assez
longs, avec d'assez longues pauses parfois,
afin d'arrêter les modalités de collaboration concernant le suivi et la gestion de la convention. Le
Québec, l'Alberta et l'Ontario ont notamment insisté pour que les
provinces et les territoires puissent être représentés directement aux réunions
internationales portant sur la Convention du
CIRDI. Le Québec et ses alliés ont également
demandé à ce que la compétence de leurs tribunaux soit reconnue pour
l'exécution des sentences émises par le CIRDI.
Il fut certes ardu de
conclure, mais les discussions ont finalement abouti,
et les modalités ont été arrêtées. Il s'agit maintenant pour les gouvernements
provinciaux et territoriaux d'assurer la mise en oeuvre de la convention, si ce n'est déjà fait. Le gouvernement fédéral ainsi que plusieurs
provinces, dont l'Ontario et la Colombie-Britannique, ont déjà adopté de
telles lois. À l'occasion de son dépôt à la Chambre des communes, le projet
fédéral de loi de mise en oeuvre a d'ailleurs reçu l'appui du Parti libéral et du Bloc québécois.
Aussi, me permettrais-je, M. le Président, de
rappeler l'importance de l'investissement étranger comme outil de développement économique, car c'est de cela dont
il est question ici. Une large majorité d'études démontrent que, grâce à
des politiques adéquates dans des pays d'accueil et un certain niveau de développement, l'investissement direct étranger a des retombées économiques
importantes. Il contribue à la formation du capital humain, facilite
l'intégration aux échanges internationaux,
entraîne parfois des transferts technologiques,
favorise la création d'un climat plus compétitif pour les entreprises et
améliore leur développement.
Bref,
l'investissement étranger est l'un des principaux catalyseurs du développement.
Il n'est pas le seul, mais il est
bénéfique autant pour les pays investisseurs que les
pays d'accueil et fait partie intégrante d'un système économique
international ouvert. Il faut être conscients
que les investissements transfrontaliers ont passablement augmenté ces dernières
décennies et continueront sans doute dans cette voie. Il est donc peu surprenant
que les États se fassent concurrence pour attirer ces investissements et
cherchent à créer des conditions générales favorables à leur attraction. Le
climat d'investissement d'un pays est conditionné par des facteurs économiques
et politiques comme l'accès aux marchés, la
disponibilité et le coût des facteurs de production, la fiscalité, la présence
d'infrastructures et une administration publique efficace.
En
plus des facteurs économiques et politiques, la structure juridique encadrant
les investissements étrangers joue un rôle important pour le climat
d'investissement. Un aspect particulièrement important de la protection
juridique des investissements étrangers est
le règlement des différends entre les États hôtes et les investisseurs
étrangers. Le règlement impartial et
efficace des différends est un élément essentiel dans la protection des
investisseurs. En l'absence d'autres dispositions,
un différend entre un investisseur étranger et un État hôte est généralement
réglé par les tribunaux nationaux de celui-ci.
C'est l'essentiel d'un règlement de ces différends. Je regarde mon collègue,
essentiellement, ça se passe comme ça,
ça se passe comme ça dans un État qui a un État de droit très développé comme
le Québec. Mais, à tort ou à raison, les tribunaux de l'État hôte sont souvent perçus comme insuffisamment
impartiaux en cette situation, et la perception joue un rôle crucial dans les décisions relatives à
l'investissement. C'est pourquoi les investisseurs étrangers préfèrent
parfois recourir à un mécanisme international de règlement des différends
reconnu plutôt qu'au système judiciaire des pays.
La Convention
du CIRDI est l'un des mécanismes internationaux existants relatifs au règlement
des différends en matière d'investissement. Il est reconnu comme un
système d'arbitrage et de conciliation garantissant un traitement impartial et efficace. En approuvant la convention
et en la mettant en œuvre, le Québec enverra, si l'Assemblée le désire,
un signal clair quant à son ouverture et se doterait d'un atout supplémentaire
pour attirer les investisseurs.
J'insiste,
M. le Président, sur le fait que la Convention du CIRDI ne crée pas de
nouvelles obligations pour les États en ce qui concerne le traitement à
accorder aux investisseurs étrangers. Elle offre simplement une procédure pour parvenir à régler un différend entre États
contractants et des ressortissants d'autres États. Elle propose des règles
relatives à l'arbitrage, la constitution du tribunal, son fonctionnement et
tout ce qui est relatif à la requête, la preuve, les témoins et la sentence.
En
outre, la procédure du CIRDI repose exclusivement sur le consentement
volontaire des parties à faire arbitrer un différend. La simple
ratification de la convention n'oblige aucunement l'État à recourir à
l'arbitrage du CIRDI. L'Assemblée, en adoptant la convention, ne fait aucune
cession de souveraineté de cette Assemblée à
un tribunal international, aucune. À chaque
fois, dans chaque cas, il appartiendra au ministre de la Justice du
gouvernement d'accepter ou non qu'un
différend aille au CIRDI plutôt que dans les tribunaux nationaux, et cette
décision relève du gouvernement. Donc, il ne s'agit pas, comme dans
d'autres mécanismes, par exemple dans l'ALENA, de mécanismes automatiques et
ouverts. Il s'agit, cette fois-ci, d'un mécanisme au cas par cas.
• (17 heures) •
Cette obligation naît
seulement après que l'État contractant ait consenti par écrit à soumettre un
différend particulier ou une catégorie de différends à l'arbitrage du CIRDI. Le
recours à cette procédure spécifique est donc toujours
conditionnel au consentement des parties, dont le gouvernement québécois, à
chaque différend. Par exemple, si le Québec
adopte une loi de mise en oeuvre et qu'il décide de se faire désigner comme
collectivité publique, il pourra, dans l'éventualité d'un différend
relatif à l'investissement avec un ressortissant étranger, choisir de le
soumettre ou non à l'arbitrage du CIRDI, au cas par cas. Le Québec devra alors
transmettre son consentement par écrit, à moins que ce consentement ne fasse
déjà partie d'une entente ou d'un contrat. Ce double assentiment constitue une
garantie solide pour permettre au gouvernement de conserver sa pleine faculté
de recourir ou non, dans un dossier précis, à ce mécanisme de règlement.
On
peut se demander quelles règles de droit un tribunal constitué par le CIRDI
applique aux différends s'il n'offre qu'une procédure. Le tribunal
statue sur un différend conformément aux règles de droit adoptées par les
parties et habituellement précisées dans le
contrat ou dans l'entente qui les lie. En l'absence de règles convenues à
l'avance, le tribunal applique le droit de l'État contractant partie au
différend — dans
notre cas, le droit québécois. Voilà une assurance additionnelle pour le Québec, s'il choisit de recourir au CIRDI, de ne pas se
faire imposer l'arbitrage d'un différend avec un investisseur étranger
selon des règles qu'il ne reconnaît pas.
L'originalité
et l'efficacité de ce système résident dans l'obligation faite aux États
contractants de reconnaître les sentences
arbitrales du centre. Les sentences peuvent ensuite être exécutées comme s'il
s'agissait de jugements définitifs et sans
possibilité pour l'État d'accueil d'invoquer un quelconque
motif pour annuler ou refuser de reconnaître la sentence devant un tribunal national. En effet, une
sentence arbitrale doit habituellement être examinée par un tribunal
national avant d'être exécutée, et, dans ce
cas, une sentence du CIRDI est simplement déposée au greffe d'un tribunal
national en même temps qu'une demande de son exécution dans les meilleurs
délais.
L'éventuelle violation par les autorités étatiques d'une règle de droit
interne leur interdisant de compromettre, c'est-à-dire de consentir à
l'arbitrage, est un problème récurrent. Cette difficulté est résolue grâce à la
convention du CIRDI, qui insère
définitivement l'arbitrage dans l'ordre juridique domestique. Cette
particularité de la force d'exécution des
sentences explique en grande partie la popularité dont jouit désormais le CIRDI
comme mécanisme d'arbitrage en matière
de règlement d'investissement international, mais ce n'est pas son seul
avantage. 47 ans après l'entrée en vigueur dela convention, force est de constater son succès,
comme en témoignent son large membership — 149 États contractants — l'augmentation
du nombre de cas qui lui ont été soumis depuis les années 90 et la
référence fréquente qui y est faite dans les
engagements commerciaux, bilatéraux ou multilatéraux tout comme dans les
ententes de protection des investissements.
Un
autre avantage reconnu au CIRDI est la transparence. En effet, le CIRDI se
distingue par le fait qu'il publie la liste complète des arbitrages
effectués sous son égide, contrairement à ce que prévoient les autres
mécanismes de règlement. Détail qui a son importance, vous en
conviendrez : certains États, dont la Chine, ne reconnaissent que les sentences rendues par le CIRDI en matière de
règlement des différends relatifs à l'investissement. Nous le savons
tous, la Chine est de plus en plus présente dans les échanges économiques. Au Canada,
la part des investissements directs provenant de la région de l'Asie et de
l'Océanie a plus que doublé, passant de 4,5 en 2001 à 11,4 en 2011. L'un des principaux
pays à l'origine de cette hausse est la Chine, qui investissait 10 milliards
de dollars au Canada en 2011, comparativement à seulement 200 millions il y a
10 ans.
Pour
le Québec, appuyer la ratification et, à terme, s'y
déclarer lié, c'est aussi s'assurer de la reconnaissance de la
compétence de nos tribunaux pour l'application des sentences rendues. Puisque
la propriété et les droits civils, ainsi que
l'administration de la justice relèvent de la compétence exclusive du Québec,
les tribunaux compétents pour le dépôt des
sentences du CIRDI à l'encontre des investisseurs canadiens sont, pour
l'essentiel, les cours supérieures du Québec et des provinces. Mais, pour que celles-ci exécutent ces sentences, encore
faut-il que le Québec ou les autres provinces aient adopté une loi de mise en oeuvre de la convention.
Nous jugeons important, vous vous en doutez, M. le Président, que ce
soit nos cours qui fassent appliquer la
sentence. Si le Québec n'adoptait pas la loi de mise en œuvre de la
convention, nous courrions le risque d'élargir par inadvertance la
compétence de la cour fédérale, ce que personne ne souhaite ici, j'en suis
certain.
Enfin,
selon plusieurs experts, en plus d'assurer une meilleure protection aux
entreprises québécoises investissant à l'étranger, par exemple en Chine, la possibilité de recours au CIRDI
diminuera les coûts de leurs investissements, compte tenu de la plus
grande sécurité que procure la convention.
Dans
ces circonstances, on comprend facilement que les milieux d'affaires et
juridiques, ainsi que plusieurs de nos partenaires commerciaux réclament
depuis longtemps la ratification de la convention par le Canada. Tous savent
que c'est une action rentable à poser, autant pour renforcer une image d'État
ouvert aux investisseurs potentiels que pour protéger les droits de nos
entreprises investissant à l'étranger.
Pour
toutes ces raisons, M. le Président, je
pense qu'il serait hautement
souhaitable que l'Assemblée
nationale approuve la convention du CIRDI, que le gouvernement du Québec donne
son assentiment à la ratification de la convention
par le gouvernement fédéral, qu'il se déclare lui-même lié à la convention et
qu'il adopte une loi pour assurer sa mise en œuvre. Je vous remercie.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le ministre. Je cède… Merci, M.
le ministre. Je cède maintenant la parole au député
de Mont-Royal, porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations internationales et
de commerce extérieur. M. le député.
M. Pierre Arcand
M.
Arcand : Merci
beaucoup, M. le Président. Je pense qu'on a presque une première aujourd'hui à
l'Assemblée nationale. Je pourrais pratiquement reprendre le discours du
ministre et faire mien ce discours tellement nous avons les mêmes vues sur cette question-là. Je peux vous dire que le Centre
international pour le règlement des différends relatifs aux investissements, le CIRDI, c'est un accord
qui, pour nous, est très important puisqu'il est sous l'égide de la
Banque mondiale, dont le siège social est à Washington.
Vous savez que cette
convention est importante. Le Canada a effectué, depuis de nombreuses années,
des démarches. Le CIRDI est entré en vigueur
le 14 octobre 1966. Le Canada a effectué de nombreuses démarches,
pendant plusieurs années, afin d'y adhérer. Il l'a signé effectivement le
15 décembre 2006, mais, pour que le traité soit ratifié et prenne
effet, évidemment, nous devons, en tant que gouvernement provincial, comme
autorité, ici, à l'Assemblée nationale, adopter ces législations en ce sens.
Le Canada, c'est le troisième plus récent
signataire. Il ne l'a toujours pas ratifié, mais devrait le faire prochainement,
car toutes les provinces ne l'ont pas encore entériné, et c'est donc pourquoi
nous sommes ici aujourd'hui. Et il y a actuellement
158 pays signataires, dont 149 l'ont ratifié. Donc, je pense que mes chiffres
sont passablement concordants avec ceux du ministre des Relations
internationales. Bien que la grande majorité des partenaires commerciaux du Québec en soient parties, quelques autres n'en
sont toujours pas signataires. On me mentionne entre autres que, parmi
ces pays qui ne le sont pas, il y aurait le
Brésil, l'Inde et le Mexique. Je ne sais pas si j'ai la bonne information, mais
ce serait, entre autres, trois des pays avec lesquels le Québec
entretient des relations importantes et qui ne sont pas signataires.
L'objectif, donc, de ce centre, c'est d'instituer, justement, ce mécanisme de
règlement des différends internationaux en matière d'investissements.
Je pourrais
vous dire que, pour le Québec, c'est quelque chose de très important, parce
que, oui, ce mécanisme fonctionne, parce que ce mécanisme respecte,
justement, la souveraineté de notre nation. Et, en ce sens-là, je pourrais vous dire que les moyens
de conciliation et d'arbitrage pour régler ces différends relatifs aux
investissements qui opposent des
États qui ont ratifié la convention, eh bien, c'est quelque chose qui nous
apparaît particulièrement majeur. Je regardais, entre autres, certains
des éléments que l'on peut voir dans certaines causes actuellement. Je crois
qu'il y en a une actuellement en Colombie-Britannique qui implique entre autres
une société de pâtes et papiers qui accuse, entre autres, le gouvernement de la
Colombie-Britannique de ne pas offrir des tarifs compétitifs équivalents en
matière d'investissements. Et je pense qu'ils ont porté leur cause, justement,
devant le centre international pour le règlement de ces différends.
Donc, le
CIRDI sert habituellement dans des cas qui sont, par exemple, les cas d'expropriation,
de nationalisation, comme par exemple, si un gouvernement étranger
prenait le contrôle d'une entreprise québécoise exploitant des ressources naturelles sur son territoire. C'est un
mécanisme de dernier recours et, comme l'a mentionné le ministre tout à l'heure, eh bien, cet organisme n'a de compétence
que si tous les recours ont été pris et ont échoué au niveau national
par l'investisseur qui n'est pas dans son
pays d'origine. Alors, je pense que, même si ça nous apparaît quelque chose qui
est particulièrement technique, il est clair
que la compétence des tribunaux du CIRDI se limite actuellement à
l'interprétation et à l'exécution de traités ou d'accords bilatéraux ou
multilatéraux ayant des clauses relatives à l'investissement.
• (17 h 10) •
Évidemment, nous venons de signer récemment
l'accord de libre-échange entre, par exemple, différents… l'accord de libre-échange Canada-Europe. Mais il
existe actuellement l'Accord de libre-échange nord-américain, qu'on appelle l'ALENA, l'accord économique… Le vrai nom de l'accord Canada-Europe, on appelle ça
l'Accord économique et commercial
global avec l'Union européenne. Eh
bien, ces deux accords-là, qui sont très importants pour les exportations du Québec,
disposent, M. le Président, de telles clauses. Le Canada a également signé
24 accords bilatéraux sur la promotion et la protection des
investissements étrangers. D'ailleurs, ces accords peuvent varier d'un pays à
l'autre, mais ils recèlent généralement trois grands principes
fondamentaux : premièrement, la clause du traitement national, cette clause qui interdit aux gouvernements d'accorder un traitement moins favorable aux investisseurs étrangers
que celui accordé aux investisseurs
nationaux. Il y a une deuxième clause, qu'on appelle la clause de
la nation la plus favorisée, qui interdit aux gouvernements d'accorder
un traitement moins favorable à un investisseur étranger qu'à celui octroyé à tout autre investisseur étranger dans des
circonstances similaires. Autrement
dit, ce qui est accordé à un étranger
est accordé à tous les étrangers, et ce, sans discrimination. Il y a
enfin la clause de la norme minimale de traitement, M. le Président. Cette
clause interdit aux gouvernements de ne pas accorder un traitement défini par
le droit international coutumier comme étant juste et équitable, tout en
assurant une protection et une sécurité intégrales aux investisseurs.
Alors, M. le Président, un des aspects les plus importants, d'ailleurs, de la convention tient
à ce que les sentences qui sont rendues par les tribunaux du CIRDI sont
exécutoires pour les États parties à la convention, lesquels doivent assurer l'exécution des sentences financières
imposées par les tribunaux du CIRDI comme si elles étaient contenues
dans le jugement définitif d'un de leurs propres tribunaux. D'ailleurs, une
sentence qui arriverait à ce moment-là ne peut être révisée que par un tribunal
du CIRDI.
Une autre
particularité de cette convention tient au fait que seuls les États fédéraux
peuvent être parties à un tribunal du
CIRDI. Ainsi, si un investisseur étranger est lésé par un gouvernement provincial — ça
peut être un gouvernement régional ou
municipal — c'est le gouvernement fédéral qui doit
assumer la défense et défrayer la compensation monétaire imposée par une sanction. Ainsi donc, le CIRDI vise à renforcer la prévisibilité et la
transparence du climat d'investissementau sein des pays qui en sont membres. Et je pense que, lorsqu'on regarde
l'importance pour le Québec d'être présent sur la scène
internationale… On se rappelle toujours que nous sommes un peuple
d'exportateurs, que notre marché de 8 millions n'est toujours pas assez suffisant, et on a besoin d'exporter beaucoup,
et les exportations du Québec, c'est un élément majeur. Je pense que la confiance, ici, dans ces exportations,
c'est l'élément clé, car elle est cœur de toute décision d'affaires, M. le
Président. C'est elle qui détermine si un investisseur choisit un site plutôt
qu'un autre, s'il retient ou dépense ses fonds, ou s'il crée des emplois ou
non.
D'ailleurs,
je peux vous dire que je suis heureux de voir, M. le Président, que nous nous
entendons aujourd'hui sur l'importance de faire ratifier cette entente.
Cette confiance, d'ailleurs, est importante, à un moment où le Québec est dans une situation économique qui est plus difficile que jamais. On
se rappellera, entre autres, l'abandon, actuellement, du Plan Nord, la
saga des redevances financières, la taxation rétroactive des gains en capitaux,
des dividendes, les différents moratoires,
l'espèce d'incertitude que nous avons sur l'atteinte du déficit zéro, et j'en
passe, M. le Président. L'adhésion, donc, nous semble être enfin une bonne
nouvelle en matière économique, et ça, je pense que c'est quelque chose
qu'il faut souligner.
Je vous dirais également que le flux des
capitaux internationaux ne sont pas nécessairement, M. le Président, des choses qui sont très visibles dans le
quotidien des Québécoises et des Québécois, même si plusieurs de plus en plus, me dit-on, lisent tous les journaux qui parlent
d'affaires de façon plus importante. Il n'en demeure pas moins que cette importance est capitale pour la prospérité
de notre économie et pour celle de nos partenaires économiques.
D'ailleurs, dans un... nombreux débats,
j'écoutais, entre autres, Lucien Bouchard nous dire qu'il fallait encore
plus d'investissements privés au Québec,
que c'était quelque chose qui nous manquait. Et une des choses qui nous
apparaît aussi particulières, vous
savez qu'il y a eu, pendant des années… Je
pense encore que les chiffres doivent
se ressembler. Il y a toujours
plus d'investissements publics que privés au Québec.
Et je pense que le problème,
ce n'est pas le montant des investissements publics, mais c'est, d'abord et avant tout, l'importance qu'il faut pour
qu'il y ait des investissements privés au Québec.
En fait, lorsque je
regarde certains chiffres... Eh bien, vous savez qu'en 2012 ce sont près de
712 milliards de dollars que les
Canadiens... Et, dans le Canada, il y a les Québécois, donc bon nombre de
Québécois ont investi à l'étranger. Le chiffre, maintenant, pour le
Canada, parallèlement, c'est 634 milliards de dollars qui ont été investis
au Canada par des étrangers en 2012, créant
ainsi plusieurs centaines de milliers d'emplois. Et cette préoccupation, M. le
Président, lorsque
nous étions au gouvernement, nous l'avons toujours eue à l'esprit. Nous n'avons
jamais cessé de supporter nos entrepreneurs québécois dans leurs projets
d'expansion à l'étranger, notamment en mettant à leur disposition nos nombreuses missions commerciales ainsi que le
réseau de délégations à l'étranger, réseau que le ministre connaît très
bien.
Nous n'avons ménagé
aucun effort pour faire valoir les attraits du Québec à l'étranger et pour
défendre l'image ainsi que la réputation de
notre nation comme terre d'accueil à d'éventuels investisseurs. Et je peux vous
dire qu'entre autres nous avions mis, à ce moment-là, un programme qui était
particulièrement important, c'est-à-dire le Programme immigrants investisseurs,
et nous avons conduit, M. le Président, une foule de missions commerciales. Je pense que, si l'on doit reconnaître les efforts
qui ont été faits par l'ancien gouvernement, et je sais que le ministre des
Relations internationales l'a reconnu au niveau du premier ministre,
M. Jean Charest, je pense qu'il y a eu beaucoup d'efforts qui ont été faits également sur le plan des relations
internationales. Il y a eu des missions en Inde, en Chine... On a ouvert
les portes de plusieurs délégations pendant cette période-là. Et, à l'époque où
j'étais en fonction à titre de ministre des Relations internationales, nous
avions également ouvert les portes à Moscou, entre autres, où nous avons
maintenant une délégation qui fait, j'en suis certain, un excellent travail.
Une
des choses, d'ailleurs, dont je me rappelle le plus lorsqu'on se rendait dans
ces pays-là, c'est que les Russes nous
disaient : Vous avez un immense problème au Québec. Nous aimerions acheter
vos exportations, mais votre porc, il est de trop bonne qualité. On
voudrait avoir un bien meilleur prix et un porc qui est de moins bonne qualité.
On n'est pas habitués à avoir un porc de
cette qualité-là. Lorsque j'ai expliqué ça aux gens de la Fédération des
producteurs de porcs, ils m'ont dit : On ne commencera pas à
baisser la qualité, il faut que les Russes acceptent de vivre dans la qualité
québécoise, M. le Président.
Alors,
je pense très sincèrement que nous avons devant nous une très bonne nouvelle,
une très bonne mesure. Je pense que l'adoption de cette entente
internationale par le Québec va contribuer, sans aucun doute, et je pense qu'on
l'espère tous, à renforcer notre économie de
diverses manières. Et, en ce sens, M. le Président, nous nous en
réjouissons.
Je
dois vous dire, en terminant, que j'ai eu l'occasion de parler à quelques
reprises de l'importance de maintenir les
plus hauts standards pour le Québec sur la scène internationale et de faire
partie, évidemment, intégrante des grandes conventions internationales. Et ce, là-dessus, je pense, M. le
Président, que, s'il y a une chose où il n'y a pas vraiment d'enjeu partisan entre nos collègues d'en face et
nous, c'est sur cette question-là. Et je terminerais donc en vous
disant, M. le Président, que, pour cela, nous supportons sans réserve
l'adhésion du Québec à cette convention. M. le Président.
• (17 h 20) •
Le
Vice-Président (M. Cousineau) : Oui, merci. Merci, M. le député
de Mont-Royal, porte-parole de l'opposition officielle en matière de
commerce extérieur et de relations internationales.
Alors, je passe maintenant
la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de
relations internationales et de commerce extérieur, M. le député de La Prairie.
M. le député.
M. Stéphane Le Bouyonnec
M. Le Bouyonnec :
Merci, M. le Président. C'est aussi sans restriction aucune que le deuxième
groupe d'opposition va supporter la motion,
déposée par le gouvernement le 13 juin
dernier, visant à entériner la ratification
par le gouvernement canadien de la convention sur les différends relatifs aux investissements
entre États ressortissants et d'autres États, le CIRDI.
Afin
de mettre ça, M. le Président, dans une perspective plus large, j'aimerais
souligner le fait qu'on a vu dans les dernières années une accélération
de ces ententes multilatérales et bilatérales dans lesquelles le Québec est
davantage impliqué et pour lesquelles le Québec n'est pas simplement qu'un
spectateur, mais est aussi un acteur.
Le ministre
l'a bien souligné, et, lorsque je regarde ce qui s'est passé depuis 1966, le
moment auquel la Banque mondiale a lancé cette initiative, effectivement, avec du recul, on peut s'interroger. Pourquoi a-t-il fallu, par exemple, attendre 2006 avant que le Canada
adopte la convention sans l'avoir encore ratifiée? Pourquoi n'a-t-il commencé
les négociations avec les provinces qu'en 1978? Pourquoi
même, au moment où ça devenait un petit peu plus urgent,
entre 2000 et 2013, il n'y a eu un signal positif envers les provinces et le gouvernement
du Québec qu'en octobre 2012?
Ce
que je remarque, c'est que, comme nous l'avons vu d'ailleurs
avec l'accord de libre-échange avec l'Europe, dorénavant, que l'État fédéral le veuille ou non, les partenaires
internationaux avec lesquels le Québec transige exigent que des juridictions comme celle du Québec
soient de plein droit parties prenantes des discussions. Dans le cas du CIRDI, comme le ministre et mon collègue de l'opposition
officielle l'ont souligné, il était
clair que, pour le Canada,
contrairement à d'autres ententes
multilatérales précédentes, il ne pouvait pas simplement signer en
disant : On verra pour la suite. Donc, l'adoption de la convention exigeait, au niveau de la ratification, que
l'ensemble des juridictions sous-jacentes puissent faire exécuter, finalement, les
jugements du CIRDI. Évidemment, ça pose un certain nombre de contraintes. Ça a forcé le gouvernement fédéral à s'asseoir à la
table de négociation et ça a forcé les provinces à se demander, entre
autres, qu'est-ce qui était important pour elles, pour le Québec dans ces
ententes.
Évidemment,
la question de faire en sorte que soit reconnu... Et,
juste d'en parler, ça semble être un non-sens, mais nous voyons ces temps-ci des non-sens, nous voyons... comme la
nomination du juge Nadon à la Cour suprême, par exemple. Nous en voyons, de ces non-sens, qui, pour le commun des
mortels, ont l'air, éventuellement, de petites chicanes, alors qu'en réalité ce sont des chicanes
importantes. Nous voyons, donc, des paliers de… le
palier des tribunaux québécois, éventuellement, se faire
considérer comme n'étant pas véritablement responsables de leur pleine
juridiction, alors que nous savons qu'en
droit civil, qu'en propriété la Cour
supérieure du Québec a pleine juridiction.C'est une compétence exclusive du Québec. Mais, encore une fois, il a fallu que le gouvernement du Québec rappelle ce fait au gouvernement fédéral
pour nous permettre, finalement, d'avoir une entente,
comme il a fallu aussi demander qu'au moins le quart des juristes
qui soient proposés par le Canada dans le cadre,
éventuellement, des arbitres ou des
conciliateurs du CIRDI soient des juristes civilistes
venant du Québec. Et là je refais mon parallèle avec nos trois juges de la Cour
suprême venant du Québec,
qui a toujours été, finalement, dans les dernières années, respectée, et, dernièrement, un petit peu remise en question par le gouvernement
fédéral. Ces éléments sont d'une importance extrême.
Donc, on peut se
réjouir aujourd'hui que le Québec ait pu tenir son bout afin de faire en sorte
que cet accord respecte la base de notre Constitution et aussi respecte la
capacité du gouvernement à contribuer au débat en étant invité directement à ces rencontres internationales pour permettre de
trouver des points de convergence et faire en
sorte que le Canada et les provinces puissent parler d'une seule voix et de
manière cohérente et coordonnée.
Maintenant,
si on dit que c'est important et que c'est très bien de pouvoir signer cette
entente, ce traité, on doit rappeler que... et c'est sur une base
volontaire, avec plein consentement mutuel de l'une et l'autre des parties, que
les différends peuvent être amenés à être traités par le CIRDI. Évidemment, une
fois que c'est fait, les parties ne peuvent plus…
n'ont pas de droit d'«opting out», les parties ne peuvent plus se retirer, et
donc, en bout de course, oui, effectivement, ça devient un mécanisme de
résolution de conflits qui peut être fort utile.
Maintenant,
comme on l'a dit tout à l'heure, il y a d'autres ententes, multilatérales, bilatérales,
et nous avons nos ententes de libre-échange, entre autres l'ALENA et avec l'Europe, pour laquelle nous
n'avons pas encore, évidemment, les textes finaux, mais on peut présumer
qu'il y a dans cette nouvelle entente là aussi des mécanismes de règlement, et
pas nécessairement, à ce moment-là, des mécanismes de règlement qui sont
simplement laissés au bon vouloir des deux parties impliquées mais des
mécanismes de règlement qui sont plus coercitifs. Et, dans ce sens-là, il
m'apparaît important, si je me recule un peu, M. le Président, puis je prends quelques
minutes, que le gouvernement du Québec analyse tout ça dans un cadre plus large, parce que
le ministère des Relations
internationales et du Commerce
extérieur, historiquement : quelques délégations des relations
internationales pour être en bon voisinage avec nos voisins, pour préparer éventuellement des changements de cadre constitutionnel, mais
les questions de commerce extérieur n'étaient pas au
centre des préoccupations de ce ministère. Maintenant, on réalise bien que ce ministère
a une responsabilité transversale, allant dans tous les ministères qui peuvent
avoir une incidence économique.
Prenons,
par exemple, le ministère
de l'Agriculture. On est tous
conscients ici que, dans les derniers milles de la négociation avec l'Europe, notre système de gestion de l'offre au niveau du lait et des produits laitiers a été un élément de discussion important,
entre autres causé par le fait que les Européens ne comprenaient pas vraiment
notre système. Notre système est un peu particulier. Il a été créé, en fait,
pour stabiliser notre production. Ça convient au Québec, ça convient aux agriculteurs, ça convient aux Québécois,
mais, d'un point de vue international, ça a posé la question : Le Québec est-il trop
protectionniste?, sachant, M. le
Président, pertinemment que, dans
tous les pays du monde développés, il y
a un support à l'agriculture. Mais, lorsque vient le temps de négocier ces ententes et de prévenir
d'éventuels conflits, il y aurait
avantage à ce que le Québec puisse peut-être… Et j'invite le ministre à songer
à cette proposition. Je sais qu'il devra bientôt,
la semaine prochaine, déposer sa politique de commerce extérieur, mais
on voit très clairement quel'importance
du commerce extérieur, et donc l'importance du ministère des Relations internationales et du Commerce extérieur,
n'est plus à faire afin d'avoir des politiques holistiques et intégratrices de l'ensemble
de notre commerce dans tous les ministères qui peuvent avoir une incidence.
Ainsi, par exemple,
si on veut vraiment être cohérents et nous réjouir en cette Chambre du fait que
nous soutenons le CIRDI parce que nous voulons donner un signal positif aux
investisseurs, nous devrions, par souci de cohérence,
faire attention lorsque nous promulguons de nouvelles lois, comme par exemple le p.l. n° 43 — donc,
je ne vous parle pas d'une vieille
loi adoptée mais d'une loi qu'on va bientôt,
normalement, traiter — où
clairement des articles de cette
loi seraient en contradiction — et
je nomme l'article 304, l'article 251 et l'article 252 du p.l. n° 43 — avec
l'ALENA. Autrement dit, si on commence à avoir des possibilités que l'on donne
au gouvernement du Québec d'exproprier, de manière directe ou indirecte, dans
le cas du p.l. n° 43, des compagnies sur des claims miniers ou
l'exploitation de ressources sans que ces
investisseurs étrangers n'aient pu avoir pleine compensation, nous sommes en
pleine contradiction de l'article 1110 de l'ALENA.
• (17 h 30) •
Alors, si on veut
être pleinement cohérents et si on veut éviter, nous-mêmes, de nous mettre en
position, en signant l'accord du CIRDI, de
se faire interpeller… Et un gouvernement comme le gouvernement du Québec n'aura pas d'autre choix, il devra être
bon joueur et de bonne foi. Autrement dit, dans le cas d'un litige, bien, évidemment,
si jamais… Pourquoi le gouvernement du Québec signerait cet accord et, dans le cas d'un litige,
refuserait de donner son consentement pour qu'il y ait un arbitrage? D'accord?
Alors, à ce moment-là, si on s'expose — parce que, là, on s'expose — ne
faisons pas des lois, par ailleurs, où déjà dans le libellé de la loi, comme gouvernement
et comme Québécois, nous nous exposons, parce que, si on parle de signal
positif, c'est très, très clair qu'aujourd'hui, sur la scène internationale, en ce
qui a trait aux investissements étrangers, et lorsqu'on va à
Toronto, par exemple, qui est la plus grande bourse de ressources au
monde, il est très clair qu'aujourd'hui le Québec est sur la sellette, entre
autres en regard de ces articles de loi que je viens de mentionner dans le
p.l. n° 43.
Ceci,
M. le Président, pour moi, ce n'est qu'un exemple, un exemple qui me dit que
des fois, et ce n'est pas… ça arrive
dans les meilleures familles, dirais-je, il est important que la main gauche
puisse donner un signal, oui, positif aux investisseurs étrangers, mais
d'éviter éventuellement que la main droite donne le signal contraire. Et en ce
sens je pense, et je me trompe peut-être, je pense que c'est la responsabilité
du ministre des Relations internationales et du Commerce extérieur, à
l'intérieur même du gouvernement, d'indiquer clairement quels sont les gestes
qui sont posés afin d'encourager ou de décourager les investisseurs étrangers.
Je
vous rappellerais que la mobilité des capitaux est quelque chose de
fondamental. Et cet élément-là aussi a fait l'objet de discussions assez fortes dans l'entente avec les Européens.
Pourquoi c'est important? C'est parce que, même si nous avons un réservoir de capital important au
Québec, au Canada, nous connaissons nos puissances financières, soit la Caisse de dépôt, les différentes banques, etc., il
n'est pas possible pour ces réservoirs de capitaux de miser simplement sur des investissements au Québec ou au Canada. Par gestion
du risque, obligatoirement, ces gens, qui prennent à coeur nos intérêts,
souhaitent être en mesure d'investir ailleurs. Donc, toute la notion de
réciprocité est extrêmement importante. Et
au niveau de la gestion du risque, contrairement à ce que les gens pensent, les
grands financiers ne cherchent pas à
faire le plus d'argent possible le plus rapidement possible. Parce que,
lorsqu'on prononce ces paroles-là, généralement, la cote de risque est
énorme.
Ce
que veulent les financiers, généralement, surtout ceux qui sont gestionnaires
de grands réservoirs de capitaux qu'ils
ont donc de la difficulté à déployer, qu'ils veulent déployer sur des projets
importants comme pourrait le faire la Caisse
de dépôt, c'est de faire un rendement acceptable, correct, éventuellement même
un petit rendement, sur une longue période
de temps dans des environnements qui sont complètement stabilisés. Et c'est
pour ça que, même avec le CIRDI, il n'est pas complètement rassurant
pour des investisseurs québécois, par exemple, d'avoir comme seul garde-fou, au
cas où ils investiraient dans une
juridiction étrangère, à un endroit où le régime d'État n'est pas véritablement
un État de droit, où, même s'il y a eu une ratification de cette
entente, il n'est pas dit que, de manière automatique ou quasi automatique, le
pays en question va accepter de bon gré de passer par les mécanismes
d'arbitrage du CIRDI…
Donc,
bien que ce soit une étape importante, il est important que ces ententes
puissent évoluer à un niveau où les mécanismes
sont des mécanismes davantage automatiques, des mécanismes qui permettent
d'enlever le côté arbitraire. Et j'entendais
le ministre dire tout à l'heure... je souscris à ce qu'il disait, à
savoir : C'est le ministre de la Justice qui en toutes
circonstances déterminera si oui ou non on accepte d'aller au CIRDI. Par
contre, pour le gouvernement du Québec, si,
par exemple, il devait y avoir un investisseur étranger qui investit, je ne
sais pas, moi… l'autoroute 25, l'exemple qui me vient en tête, et puis soudainement, pour
x raisons, on décide de ne plus faire le projet — celui-là est fait, donc c'est un mauvais exemple, mais peu importe — ce serait très difficile pour le Québec de
se soustraire aux mécanismes. Et justement on veut que ces mécanismes-là
soient là pour donner aux investisseurs des formes d'automatisme.
Il
y a donc une obligation morale au-delà de l'obligation juridique, et cette obligation morale signifie
que le Québec, pour ne pas se retrouver un peu coincé par moments, ne
doit pas avoir des politiques contradictoires et doit avoir une vision complète
de ce qu'il juge être une saine politique de développement du commerce
international et des ententes bilatérales ou multilatérales.
Donc,
je conclus, M. le Président, en vous disant que, malgré le fait qu'une motion
comme celle-là n'est pas une motion
partisane, notre groupe d'opposition, la Coalition avenir Québec,
considère que beaucoup de choses se font en matière de commerce
international et en matière d'ententes, mais que, de manière sous-jacente à
tout ça, nous avons des enjeux partisans,
nous avons des enjeux sur le rôle de l'État dans l'économie, nous avons des
enjeux sur la capacité ou non d'être invitants et de créer un climat de
confiance pour les investisseurs.
Et j'inviterais le ministre à user de tout son leadership,
comme il le fait déjà, pour faire
en sorte que son gouvernement, suite à cette motion, réalise pleinement l'importance des investissements étrangers au Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le député de La Prairie, porte-parole
du deuxième groupe d'opposition en matière de relations internationales et de
commerce extérieur.
Mise aux voix
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Donc, s'il
n'y a pas d'autre intervenant, nous allons maintenant procéder à la mise
aux voix de la motion de M. le ministre des Relations internationales, de la
Francophonie et du Commerce extérieur, proposant :
«Que
conformément à l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations
internationales, l'Assemblée nationale étudie, dans le délai prescrit
par la loi et en vue de son approbation, la Convention pour le règlement des
différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d'autres
États.»
Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Adopté. En conséquence, cet engagement
international est approuvé par l'Assemblée nationale. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Ajournement
M. Traversy :
M. le Président, écoutez, je vais donc, à ce stade-ci de la journée, vous
demander d'invoquer l'article 105 de notre règlement et je fais donc motion
pour ajourner nos travaux au mardi 29 octobre 2013, à 13 h 45, en
vous souhaitant une très belle soirée et en prenant soin de vous, M. le
Président.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Cette motion est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le Vice-Président
(M. Cousineau) : Adopté.
En conséquence, nous
ajournons nos travaux au mardi 29 octobre 2013, à 13 h 45. Bonne fin
de semaine.
(Fin de la séance à 17 h 37)