(Dix heures sept minutes)
Le Président: Bon matin, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Je voudrais, au nom de tous nos collègues, souhaiter un bon anniversaire de naissance, ce matin, à M. le leader du gouvernement et député de Saint-Laurent.
Espérons que ce sera une bonne journée.
Des voix: Ha, ha, ha!
Affaires courantes
Le Président: Mes chers collègues, ceci étant fait, aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Dépôt de documents
Dépôt de documents. M. le ministre de l'Environnement.
Avant-projet de loi
sur le développement durable
M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je suis honoré de pouvoir déposer un avant-projet de loi intitulé Loi sur le développement durable.
Cet avant-projet de loi a pour objet d'instaurer un nouveau cadre de gestion au sein de l'Administration afin que l'exercice de ses pouvoirs et des responsabilités s'inscrive dans la recherche d'un développement durable.
Les mesures prévues par l'avant-projet de loi concourent à mieux intégrer la recherche d'un développement durable dans les politiques, les programmes et les actions de l'Administration, ainsi qu'à assurer, notamment par l'adoption d'une stratégie de développement durable, la cohérence des actions gouvernementales en ce domaine.
Dans le cadre des mesures proposées, le «développement durable» s'entend d'un processus continu d'amélioration des conditions d'existence des populations actuelles qui ne compromet pas la capacité des générations futures de faire de même et qui intègre harmonieusement les dimensions environnementale, sociale et économique du développement.
L'avant-projet de loi prévoit la nomination d'un vérificateur général adjoint, qui porte le titre de commissaire au développement durable, pour assister le Vérificateur général dans l'exercice de ses fonctions relatives à la vérification en matière de développement durable.
L'avant-projet de loi prévoit de plus la création du Fonds vert affecté au financement de mesures ou d'activités que le ministre de l'Environnement peut réaliser dans le cadre de ses fonctions. Ce fonds vise notamment à appuyer la réalisation de mesures favorisant le développement durable, plus particulièrement en regard de son volet environnemental, de même qu'à permettre au ministre, dans le cadre prévu par la loi, d'octroyer un soutien financier à des personnes, dont les municipalités et les organismes sans but lucratif oeuvrant dans le domaine de l'environnement.
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(10 h 10)
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Enfin, l'avant-projet de loi contient d'autres dispositions modificatrices et de concordance. Il ajoute notamment un nouveau droit dans la section des droits économiques et sociaux de la Charte des droits et libertés de la personne afin d'affirmer le droit de chacun de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi.
Le Président: Alors, ce document est déposé. Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la Commission de l'économie et du travail.
Mme Lemieux: M. le Président.
Le Président: Oui.
Mme Lemieux: M. le Président, est-ce que je peux demander au leader...
Le Président: Excusez-moi. Mme la leader de l'opposition officielle.
Mme Lemieux: Est-ce que je peux demander au leader du gouvernement s'il a l'intention de convoquer la Commission des transports et de l'environnement afin de procéder aux consultations au sujet de cet avant-projet de loi?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Alors, M. le Président, pour ce qui concerne l'avant-projet de loi que le ministre de l'Environnement vient de déposer, il y aura, dans un premier temps, des consultations par le ministre, qui fera une tournée régionale. Il y aura ensuite, bien sûr, un suivi sous la forme d'un projet législatif que nous présenterons à l'Assemblée nationale. Et bien sûr il y aura des consultations au moment où le projet de loi sera présenté, où les gens pourront se faire entendre et où l'opposition aussi pourra se faire entendre. Ça va?
Mme Lemieux: M. le Président.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Mme la leader de l'opposition officielle.
Mme Lemieux: M. le Président, je mets en garde le leader du gouvernement. Il a une vilaine habitude de consultation à l'extérieur du Parlement. Ça a été le cas pour les services de garde, la conciliation travail-famille, l'accessibilité au régime d'aide juridique. Je pense qu'il est important que ces consultations se fassent en ces murs. Sinon, fermez donc le salon bleu.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le leader du...
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Vous conviendrez avec moi, M. le Président, et tous les parlementaires qui sont présents en cette Chambre et qui étaient ici lors de la précédente législature, que la mauvaise habitude de ne pas consulter, c'est plutôt le gouvernement précédent qui l'avait, notamment dans le dossier des fusions municipales.
Ce que j'ai indiqué à la Chambre ? et là je réponds directement au commentaire de la leader de l'opposition ? ce que j'ai indiqué à la Chambre, c'est qu'il y aurait, dans un premier temps, des consultations par le ministre de l'Environnement qui cherche à entendre et qui va chercher à savoir quelle opinion la population a. Et c'est bien sûr que, dans le respect total des parlementaires, il y aura une action législative qui sera suivie, et cette action législative se fera en vertu des règles qui nous gouvernent. Et bien sûr il y aura des consultations qui se feront au sein du Parlement, et l'opposition pourra faire valoir bien sûr tout ce qu'elle voudra faire valoir à ce moment-là.
Le Président: Alors, j'ai permis cet échange, ça aurait pu se faire à la période de questions, donc j'y mets fin.
Dépôt de rapports de commissions
Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la Commission de l'économie et du travail et député de Drummond.
Étude du projet de règlement sur l'équité
salariale dans les entreprises
où il n'existe pas de catégories d'emplois
à prédominance masculine
M. Jutras: Oui. M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du travail qui a siégé le 24 novembre 2004 afin d'étudier le projet de règlement intitulé Règlement sur l'équité salariale dans les entreprises où il n'existe pas de catégories d'emplois à prédominance masculine.
Le Président: Merci, M. le député. Ce rapport est déposé.
Dépôt de pétitions
Dépôt de pétitions. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, au nom de Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Copeman: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de l'Assemblée afin de déposer une pétition non conforme au nom de notre collègue Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne qui malheureusement, pour cause familiale, ne peut pas la présenter aujourd'hui.
Le Président: Consentement? Consentement. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
Rétablir la gratuité des médicaments
pour les personnes à faibles revenus
M. Copeman: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 3 451 pétitionnaires. La désignation de ces pétitionnaires: présentée par l'Organisation d'aide aux sans-emploi de Montréal au nom de citoyennes et citoyens du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants:
«Attendu que le droit à la santé est un droit inaliénable;
«Attendu que tous les Québécois et Québécoises devraient avoir accès gratuitement à un régime d'assurance médicaments public universel;
«Attendu que le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec a, le 21 mai 2004, affirmé, en marge du Symposium sur l'utilisation optimale du médicament, qu'il n'avait pas les moyens de rétablir la gratuité des médicaments pour les personnes à faibles revenus, faisant ainsi fi de la promesse électorale ferme à cet effet que l'on retrouve dans la dernière plateforme électorale du Parti libéral du Québec;
«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale de bien vouloir rétablir la gratuité des médicaments, à titre de mesure urgente et immédiate, pour l'ensemble des personnes à l'aide sociale et les personnes âgées de 65 ans et plus recevant le supplément du revenu garanti partiel ou maximal, ainsi que pour les personnes âgées de 60 à 64 ans ayant un carnet de réclamation du ministère de la Solidarité sociale du Québec.» Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.
Le Président: Merci, M. le député. Cette pétition est déposée.
J'informe les membres de cette Assemblée que la présidence rendra sa décision demain sur la demande d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège transmise hier par M. le député de Beauharnois.
Questions et réponses orales
Nous en sommes maintenant à la période des questions et réponses orales, et je reconnais M. le chef de l'opposition officielle.
Annonce d'une augmentation
de l'exportation d'électricité
M. Bernard Landry
M. Landry: M. le Président, tout le monde sait qu'on a un gouvernement qui est passé maître en matière d'improvisation, mais, en fin de semaine, il s'est surpassé. En affirmant que le Québec pouvait faire avec son hydroélectricité ce que l'Alberta fait avec son pétrole, le premier ministre s'est discrédité purement et simplement. En effet, selon Hydro-Québec elle-même, seulement 250 millions de dollars de profits à l'exportation pourraient être réalisés dans huit ans. L'Alberta, en huit mois, pas en huit ans, fait des ventes d'exportation de pétrole de 10 milliards. 10 milliards en huit mois, peut-être 250 millions dans huit ans. Il me semble que le premier ministre aurait dû faire ses calculs avant de se lancer dans une telle aventure verbale.
Ce qui est plus inquiétant, M. le Président, c'est que, pendant ce temps-là, on a cancellé le projet d'investissement de modernisation d'Alcoa, à Baie-Comeau. Alors, on parle de précarité énergétique, on dit ça aux gens de Baie-Comeau, on agrémente un voyage à Boston et un congrès libéral d'abondance énergétique et de ventes mirobolantes aux États-Unis.
Ma question: Est-ce que le ministre des Richesses naturelles pourrait nous expliquer, et également à la population de Baie-Comeau et à leur valeureux maire, comment il va disposer, dans huit ans, de milliers de mégawatts à vendre aux États-Unis d'Amérique et qu'il n'aura pas 175 MW pour la brave ville de Baie-Comeau?
Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Sam Hamad
M. Hamad: M. le Président, j'inviterais le chef de l'opposition d'écouter, de temps en temps, ce que la députée de Taillon... ce qu'elle a dit à TVA. Alors, la députée de Taillon, ce qu'elle a dit à TVA... «Celle qui était ministre des Finances sous le dernier gouvernement péquiste a déclaré que l'entente conclue à l'époque avec l'aluminerie Alcoa, visant à lui donner certains tarifs d'électricité préférentiels, une erreur.» Alors là je demanderais de se parler ensemble un petit peu avant de... Alors, l'improvisation puis les contradictions, je pense qu'on en a des exemples de l'autre côté, M. le Président.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Bernard Landry
M. Landry: Le ministre n'est pas fort en calcul ni en géographie, parce que Baie-Comeau, c'est à l'Est, et puis l'ancienne ministre des Finances parlait de Deschambault, qui est à l'ouest de la ville de Québec. Et elle l'a écrit.
Des voix: ...
M. Landry: Un instant, là, la comédie, là. Elle l'a écrit.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Vous avez une question de règlement? En vertu de quel article?
M. Dupuis: Question de règlement. Ma question de règlement...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Dupuis: Ma question de règlement est faite en vertu du décorum que vous devez assurer en Chambre. Le chef de l'opposition est admis à poser sa question; qu'il la pose tout simplement, on va répondre. Ce n'est pas nécessaire de faire ça. Ce n'est pas nécessaire.
n(10 h 20)nLe Président: Je rappelle à tous les membres de cette Assemblée que vous êtes en question complémentaire. Si vous voulez poser votre question, M. le chef de l'opposition, ou si vous voulez poser une question principale.
M. Landry: Oui. J'ai dit ce que j'ai dit puis j'aurais pu m'appuyer aussi sur une citation du Devoir, ce matin, de Michel David qui parle du ministre: «À partir du moment où les jeux sont faits, on peut se demander à quoi va servir la commission parlementaire[...], sinon à enlever au ministre des Ressources [naturelles] le peu de crédibilité qu'il lui reste.» Alors, je lui repose ma question. Je la pose au nom des gens de Baie-Comeau mais aussi de l'économie du Québec: Comment peut-il soutenir qu'il va vendre, dans huit ans, des milliers de mégawatts à la première puissance du monde, les États-Unis d'Amérique, et qu'il n'en aura pas 175 pour la sympathique ville de Baie-Comeau?
Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Sam Hamad
M. Hamad: M. le Président, je veux déposer l'article pour le bénéfice du chef de l'opposition. Et je ne lirai pas tout parce qu'il ne sera pas de bonne humeur avec ça.
M. le Président, à notre stratégie énergétique qu'on va déposer au printemps 2005, il y a trois étapes importantes. La première, c'est la sécurité énergétique. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire répondre aux demandes de tous les Québécois et s'assurer qu'il y a de l'électricité pour tout le monde. Pourquoi qu'on fait ça? Parce que vous n'avez pas fait votre job comme il faut, et on va le faire. Ça, c'est un.
Deuxièmement, M. le Président, une fois qu'on est assurés qu'il y a une sécurité énergétique du Québec, on va continuer de développer notre potentiel pour créer la richesse au Québec. Comment on crée la richesse au Québec? L'exportation, c'en est une. Et j'aimerais savoir encore une fois: Êtes-vous pour ou contre l'exportation, M. le Président?
Le Président: En question complémentaire? Complémentaire, M. le député de René-Lévesque.
M. Marjolain Dufour
M. Dufour: M. le Président, est-ce que le ministre des Ressources naturelles comprend qu'en dénigrant l'industrie de l'aluminium, comme son gouvernement l'a fait depuis un an et demi, ce n'est pas la richesse qu'il a créée sur la Côte-Nord, c'est du chômage et de la désolation? Qu'est-ce qu'il répond au maire de Baie-Comeau, porte-parole de la coalition régionale, qui s'est dit floué par le gouvernement et qui se demande pourquoi Hydro-Québec est devenue, aujourd'hui, un tiroir-caisse pour le gouvernement plutôt qu'un outil de développement économique et régional?
Document déposé
Le Président: Avant de céder la parole à M. le ministre, est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document dont le ministre des Ressources naturelles a fait part tantôt?
Des voix: Consentement.
Le Président: Consentement. Le document est déposé. M. le ministre du Développement régional et économique.
M. Michel Audet
M. Audet: Merci, M. le Président. Je pense qu'il faut placer les choses en perspective, en réponse à la question du député précisément de la Côte-Nord, dont je comprends la situation avec ce qui s'est passé à Baie-Comeau. Ce qui s'est passé dans le cas de la signature qui a été signée par le gouvernement précédent, tant à Baie-Comeau qu'à Deschambault, c'est que le gouvernement précédent a signé pour vendre de l'énergie qui n'existait pas, et c'est exactement ce que l'on veut corriger avec la décision qu'a annoncée le premier ministre de faire du développement et de faire en sorte que l'on redevienne les exportateurs d'énergie qu'on était sous le gouvernement Bourassa et que ce gouvernement-là a dilapidé... dont il a dilapidé le patrimoine.
Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Landry: Non, complémentaire.
Le Président: Complémentaire? Complémentaire.
M. Bernard Landry
M. Landry: Très simplement, M. le Président, si 175 MW pour Baie-Comeau n'existent pas et ils ne sont requis que dans huit ans, pourquoi le premier ministre a-t-il promis que des milliers de mégawatts seraient exportés aux États-Unis d'Amérique?
Le Président: Alors, M. le ministre des Ressources... M. le ministre du Développement économique et régional.
Des voix: ...
Le Président: Je vous demande votre collaboration, s'il vous plaît. M. le ministre.
M. Michel Audet
M. Audet: M. le Président, ce qui a été... Je rappelle, parce que c'est important de le rappeler, que le gouvernement actuel a négocié de façon très sérieuse et jusqu'à la limite dans le cas de l'aluminerie d'Alcoa, de la rénovation de l'aluminerie d'Alcoa à Baie-Comeau. Ce qui a été mis sur la table, c'est ce qu'on considérait comme étant extrêmement généreux, en raison de ce qui avait été offert précédemment. Mais ce qu'on ne voulait pas et ce qu'a reconnu d'ailleurs la députée de Taillon, c'est de donner l'énergie du Québec. On a dit: Non, nous, on n'est pas dans ce bail-là. On l'avait dit en campagne électorale, notre énergie, elle a une valeur, et on veut que les Québécois en tirent profit.
Le Président: En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Projet de construction d'un hôpital
universitaire francophone à Montréal
Mme Louise Harel
Mme Harel: Oui. Alors, M. le Président, le 23 juin dernier, le ministre de la Santé et des Services sociaux annonçait l'abandon du site du 6000 Saint-Denis pour la construction du futur hôpital universitaire francophone. Pourtant, ce site faisait largement consensus entre tous les intervenants, dont l'Université de Montréal, la direction du CHUM, la régie régionale, la ville de Montréal.
Et, suite au rapport Mulroney-Johnson, le ministre invoquait lui-même les raisons suivantes pour enterrer un projet abondamment documenté: d'abord, des inquiétudes quant à la sécurité à cause, disait-il, et je cite, «de cette fameuse voie ferrée qui achemine des produits potentiellement toxiques; à cause, ajoutait-il, de la proximité d'une seule station de métro; à cause des coûts de décontamination; à cause du dépassement de l'enveloppe budgétaire prévue».
Comment le ministre de la Santé et des Services sociaux peut-il maintenant considérer favorablement le nouveau projet de la cour de triage d'Outremont, qui présente les mêmes supposées caractéristiques négatives que le 6000 Saint-Denis: même voie ferrée du port de Montréal, mêmes produits potentiellement toxiques, mêmes coûts de décontamination, dépassement budgétaire accru, plus important encore dans ce projet...
Le Président: Si vous voulez conclure, Mme la députée.
Mme Harel: ...et sans aucune accessibilité par une station de métro? Comment le ministre peut-il expliquer ce revirement?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: D'abord, M. le Président, la décision du gouvernement n'a pas été annoncée et n'est pas prise encore. Cependant, ce que j'ai indiqué et ce qui explique le fait que nous avons décidé d'examiner le projet déposé par l'Université de Montréal, c'est qu'en plus d'un projet hospitalier s'y greffe une vaste vision stratégique du développement du campus de l'Université de Montréal, institution de la plus grande importance pour le Québec et les francophones, développement d'ailleurs qui est également possible sur le campus du 1000 Saint-Denis. Alors, le gouvernement analyse les deux projets selon les mêmes critères, incluant l'aspect de sécurité publique et des voies ferrées, incluant le cadre budgétaire et incluant les problèmes d'accessibilité liés aux voies de transport. Tous ces critères-là n'ont pas changé, ils sont en train d'être analysés, et, le moment venu, le gouvernement annoncera sa décision.
Le Président: En question complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, M. le Président, pourquoi ces mêmes critères, qui ont permis au ministre d'enterrer un projet qui faisait consensus, qui était celui du 6000 Saint-Denis, au coin du boulevard Rosemont, pourquoi maintenant ces mêmes critères sont-ils analysés de façon favorable par le ministre?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: Pour la bonne et simple raison, M. le Président, que, un, le consensus était loin d'être aussi unanime que ce que soulève ou ce que suppose la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Et, deux, si le projet était de mettre le CHUM seulement à la gare de triage d'Outremont, la réponse aurait déjà été donnée, pour les raisons qu'exactement la députée vient de mentionner.
Mais je répète que la valeur ajoutée... ou la particularité du projet, tel que présenté par l'Université de Montréal ? et je répète que le gouvernement n'a pas pris sa décision ? est d'y ajouter la possibilité de développer le campus de l'Université de Montréal, particulièrement dans le domaine des sciences de la santé, possibilité qui existe, je le répète, dans les deux projets actuellement à l'étude, et le gouvernement fait un travail assidu et approfondi d'analyse et annoncera sa décision le plus rapidement possible.
Le Président: En dernière question complémentaire, Mme la députée...
Mme Harel: Principale.
Le Président: En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
État de la situation à la Résidence
Saint-Charles-Borromée, à Montréal
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, M. le Président, en regard de la situation à Saint-Charles-Borromée, à l'évidence le ministre de la Santé et des Services sociaux a pris des risques. D'abord, il a mis fin à la tutelle pendant l'été, alors que le tuteur lui-même lui recommandait le prolongement de la tutelle pour une période additionnelle. J'ai ici le rapport du tuteur à cet effet. Puis, il a choisi de prioriser sa réforme de structures en fusionnant l'établissement Saint-Charles-Borromée avec six autres établissements pendant l'été, contrairement à l'avis que l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec lui a soumis sur la qualité des soins, rapport que l'ordre lui a soumis le 18 mai dernier, qui dit ceci:
«Que le site Saint-Charles-Borromée soit exclu d'une fusion dans le cadre de l'instauration des réseaux locaux de services, compte tenu du caractère complexe et unique de sa clientèle provenant de toutes les régions du Québec.» Pourquoi le ministre a-t-il pris de tels risques pour les patients de Saint-Charles-Borromée?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: M. le Président, connaissant bien la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, je suis certain qu'elle ne veut pas participer à la diabolisation de Saint-Charles-Borromée, tel qu'on essaie de la remettre à l'avant-scène au cours des derniers jours. Il s'agit d'un milieu très malade depuis longtemps, qui lutte pour s'améliorer, autant le personnel que la direction, qui est en train de s'améliorer et qui va continuer de le faire.
Maintenant, pour ce qui est de la fin de la tutelle, une tutelle, c'est une mesure d'exception qui plus elle se prolonge, moins elle devient exceptionnelle. Et effectivement le tuteur, dans sa première recommandation à la fin de la tutelle, nous a recommandé fortement de transférer l'administration de Saint-Charles-Borromée au niveau du nouveau conseil d'administration créé dans... Avec ça, nous avons mis en place une direction autonome pour Saint-Charles-Borromée. Donc, il existe un mécanisme de direction autonome, un mécanisme de suivi, un mécanisme de reddition de comptes.
Je rappelle que la première des visites des CHSLD de cette année s'est déroulée sans préavis, il y a une semaine, à Saint-Charles-Borromée. Cette visite était encourageante, M. le Président, et nous devons continuer de lutter pour que les soins donnés à la population à Saint-Charles-Borromée continuent de s'améliorer.
n(10 h 30)nLe Président: En question complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, M. le Président, je crois être bien placée pour témoigner du dévouement et du professionnalisme du personnel du quatrième étage de Saint-Charles-Borromée et je demande à nouveau au ministre: Comment peut-il parler d'amélioration, alors que l'Ordre des infirmières et infirmiers lui avait fortement recommandé de ne pas fusionner Saint-Charles-Borromée avec six autres établissements et qu'il a priorisé sa réforme de structures aux changements nécessaires qu'il fallait pourtant donner le temps de se réaliser à Saint-Charles-Borromée?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: Je rappelle, M. le Président, que Saint-Charles-Borromée bénéficie d'une direction autonome dans le réseau et également de mécanismes de suivi particuliers, et que c'est justement pour faire bénéficier l'administration du concours de ces partenaires de ce réseau-là que nous avons pris cette décision. Et d'ailleurs l'Ordre des infirmiers et infirmières fait partie du consortium de suivi qui regarde de façon très détaillée et très régulière ce qui se produit à Saint-Charles-Borromée.
M. le Président, nous ne pouvons pas laisser tomber Saint-Charles-Borromée. Nous devons continuer à faire tous les efforts nécessaires pour leur assurer l'amélioration des services requis et surtout, dans une certaine mesure, la paix requise également pour faire ces changements.
Le Président: En question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.
Défense des intérêts des producteurs de bovins
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Alors que le Québec est dans... Les producteurs agricoles du Québec vivent la crise de la vache folle depuis 18 mois. Hier, le député de Beauce-Nord révélait que les actionnaires et la famille de l'abattoir, qui est le principal bénéficiaire de la crise, un bénéficiaire majeur de la crise, avaient versé 54 000 $ au Parti libéral du Québec dans les trois dernières années. Aujourd'hui, je peux ajouter qu'avec un peu plus de recherche au niveau des principaux dirigeants et de la famille des principaux dirigeants, c'est un 10 000 $ de plus, sur les mêmes années, qui porte à près de 65 000 $ la contribution de cette entreprise au Parti libéral du Québec.
Or, ce qui était une crise de la vache folle ressemble de plus en plus à un scandale politique et financier d'un gouvernement...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, je vous demande votre collaboration. M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Dumont: ... ? oui ? d'un gouvernement, M. le Président, d'un gouvernement qui a agi... d'un gouvernement qui a agi en spectateur pendant que les producteurs ont été acculés au pied du mur, pendant que les consommateurs ont été floués et qu'on a fait un seul gagnant: un abattoir libéral.
Ma question...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, je demande votre collaboration. M. le député de Rivière-du-Loup.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Si vous voulez poser votre question immédiatement.
Des voix: ...
Le Président: Je n'ai pas entendu, M. le député. Je suis loin de votre... mais je n'ai pas entendu.
M. Dumont: Écoutez, M. le Président...
Le Président: Je n'ai pas entendu. Votre question.
M. Dumont: M. le Président, alors qu'aujourd'hui plusieurs producteurs de bovins et producteurs laitiers sont à l'Assemblée nationale, est-ce que la ministre peut nous expliquer, après son absence de vigueur à défendre l'entente avec le fédéral parce qu'elle voulait protéger le gouvernement fédéral, après son absence de vigueur à défendre... à protéger le monopole, à quel moment... à quel moment...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le député...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Rivière-du-Loup, vous êtes rendu à 1 min 28 s. Alors, je vous demanderais de conclure immédiatement.
M. Dumont: J'allais poser ma question: À quel...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration, M. le député. Si vous voulez poser votre question immédiate, de la poser directement.
M. Dumont: Je ne demande que ça.
Le Président: Allez-y.
M. Dumont: À quel moment la ministre va commencer à protéger les producteurs agricoles du Québec?
Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Moi, si j'étais à la place du député de Rivière-du-Loup, M. le Président, je serais gênée aujourd'hui. Je lui conseille de lire un certain livre dont le titre est le suivant: Le temps des hypocrites, et rédigé, M. le Président, par un ex-chef de cabinet, n'est-ce pas, un nommé Néron, qui a été très associé au parti politique que préside l'actuel député de Rivière-du-Loup, et dans lequel livre, M. le Président, on parle de méthodes contraires aux lois électorales pour financer ce parti. Alors, si j'étais le député de Rivière-du-Loup, je serais le dernier à me lever dans cette Chambre pour parler de contributions étranges à mon parti politique.
Le Président: Alors, je vous rappelle le contenu de l'article 79: Il faut se rattacher à la question. M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Je vous remercie...
Une voix: ...
M. Dumont: Je vous remercie pour votre rappel au...
Le Président: Oui.
M. Dupuis: Je suis d'accord avec vous, je suis d'accord avec...
Des voix: ...
M. Dupuis: Si vous avez écouté sa question...
Des voix: ...
M. Dupuis: Si vous avez écouté sa question, elle était truffée d'insultes et de mensonges.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député, je vous demanderais de retirer ces propos, vous savez qu'on ne peut pas les utiliser. Alors, votre question... en question complémentaire, vous posez votre question immédiatement, M. le député.
M. Dumont: Oui, certainement, M. le Président. Je vais reposer la même question, la réponse ne portait pas sur l'agriculture. À quel moment...
Des voix: ...
M. Dumont: À quel moment...
Le Président: S'il vous plaît!
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Votre question, M. le député.
M. Dumont: Ma question, elle est fort simple: À quel moment la ministre de l'Agriculture du Québec va cesser d'agir en spectateur d'une situation où les producteurs sont acculés à la faillite pendant que les consommateurs paient plus cher qu'avant leur viande? À quel moment le gouvernement...
Des voix: ...
M. Dumont: ...à quel moment le gouvernement va poser des gestes plutôt que de protéger un abattoir libéral?
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Merci, M. le Président. À vrai dire, M. le Président, si j'étais le député de Rivière-du-Loup, non seulement je serais le dernier en cette Chambre à parler de financement de parti politique, mais je serais aussi le dernier en cette Chambre à me lever pour parler de défendre les intérêts du Québec. Rappelez-vous votre discours à Toronto, M. le député.
L'objectif que nous pourchassons, M. le Président, l'objectif que nous défendons avec les producteurs agricoles, avec les Québécois et les Québécoises, M. le Président, c'est de trouver une solution où nos producteurs vont être gagnants. Je le répète, M. le Président, je le répète, M. le Président, faire un prix plancher qui serait applicable seulement sur le territoire du Québec, ce sont nos producteurs qui seront pénalisés. Manifestement, M. le Président, il faut trouver une solution à l'effet que c'est une crise qui est canadienne, il faut que le prix plancher s'applique à travers le Canada. Est-ce que c'est si difficile que ça à comprendre, M. le Président?
Le Président: Alors, dernière question complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Est-ce que la ministre réalise que ce qui est surtout facile à comprendre pour tous ceux qui observent la situation, c'est que, pendant que la situation perdure, pas depuis une semaine, depuis 18 mois, il y a des gens qui ne sont pas perdants, il y a des gens qui s'enrichissent de cette crise-là, et ce sont des gens qui ont enrichi son parti politique, et qu'aujourd'hui partout dans le Québec il y a de plus en plus de gens... il y a de plus en plus de gens qui, devant un tel scandale, vont demander sa tête, à la ministre, parce qu'elle n'a pas réglé cette crise-là pour les producteurs du Québec?
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: L'article 35, l'article 35 du règlement est clair, l'article 35 du règlement est clair, vous devez lui demander de retirer ses paroles, et, dans le cas du député de Rivière-du-Loup, ça veut dire de retirer sa question complètement.
Le Président: Alors, la question a été posée. Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: M. le Président, il est en train de s'installer dans cette Chambre des mauvaises habitudes. S'il a des accusations à porter, qu'il ait le courage, le député de Rivière-du-Loup, de sortir, après la période de questions, avec moi et de m'accuser de malveillance, de pratique illégale. Faites-le! À ce moment-là, vous aurez du courage, on pourra respecter ce que vous dites.
n(10 h 40)nLe Président: En question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Stratégie visant l'établissement d'un prix
minimum pour la viande de boeuf
M. Maxime Arseneau
M. Arseneau: M. le Président, la ministre de l'Agriculture a demandé aux producteurs bovins et aux producteurs laitiers de prendre leurs responsabilités et de se prévaloir de la décision de la Régie des marchés agricoles qui leur permettait de fixer un prix plancher pour la vache de réforme. Alors, les producteurs se sont exécutés, et, dès lundi prochain, il y aura un prix plancher à 0,42 $.
Que va faire la ministre pour faire respecter le prix plancher autorisé par la Régie des marchés agricoles, décrété par les producteurs qui vivent une crise exceptionnelle?
Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: M. le Président, à chaque fois que le député des Îles-de-la-Madeleine se lève pour poser une question sur l'agriculture, je me demande: Il faisait quoi, lui, quand il était ministre de l'Agriculture? Il connaît-u ses lois?
Des voix: ...
Mme Gauthier: M. le Président, M. le Président...
Des voix: ...
Le Président: Mme la ministre.
Une voix: ...
Le Président: M. le député de L'Assomption, s'il vous plaît!
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande de vous abstenir de commentaires. La parole est à la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Mme Gauthier: M. le Président, s'il se donnait la peine de lire la décision qui a été donnée par la régie au mois de juin, cette année, la décision de la régie dit clairement qu'on n'a pas le pouvoir d'attribuer de volumes. C'est ça, la difficulté. C'est pour ça qu'on demande un prix plancher pancanadien, M. le Président.
Je voudrais juste dire aussi au député des Îles-de-la-Madeleine, M. le Président, que, nous, on travaille avec nos partenaires. Justement, cette semaine, j'ai eu une conférence téléphonique avec tous les ministres de l'Agriculture pour travailler à une solution...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le député de L'Assomption, je vous donne, avec politesse, un premier rappel à l'ordre. Je vous demande votre collaboration. Mme la ministre.
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît!
Mme Gauthier: Il faut trouver des solutions, M. le Président, parce que manifestement ce que nous cherchons, nous, comme gouvernement, c'est une solution où nos producteurs seront gagnants, M. le Président.
Le Président: En question complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Maxime Arseneau
M. Arseneau: Est-ce que la ministre peut nous dire quel est son plan de match, quelle est son alternative, qu'est-ce qu'elle mettra en application à compter de mercredi prochain, lorsque son homologue fédéral sera ici, à Québec, et que peut-être il n'y aura pas justement de prix plancher canadien? Quelle est son alternative, quel est son plan de match pour les agriculteurs? Ça fait 18 mois qu'ils attendent. Ils sont à bout de souffle. Quel est son plan de match?
Le Président: Alors, Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Encore une fois, M. le Président, j'invite l'opposition officielle à nous appuyer dans nos démarches. La solution passe par un prix plancher.
Je voudrais juste dire, M. le Président, qu'en vertu de la loi canadienne sur la commercialisation des produits agricoles ce que je demande au ministre de l'Agriculture fédéral, c'est, si tant est que vous ne voulez pas appliquer un prix plancher pour l'ensemble du Canada, donnez-moi les pouvoirs. Parce que l'article 2 de la loi le prévoit. Donnez-nous, comme gouvernement du Québec, le pouvoir d'établir un prix d'achat pour l'ensemble des viandes... puis des vaches qui viendront se faire abattre au Québec, et, nous, on va l'appliquer, M. le Président. Mais je demande au gouvernement fédéral de le faire. Appuyez-nous donc au lieu de critiquer.
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! En question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Incidence du tracé retenu
pour le parachèvement de l'autoroute 30
sur la disponibilité de terres agricoles
M. Maxime Arseneau
M. Arseneau: Merci, M. le Président. «Il n'est pas dans notre agenda de modifier la Loi sur la protection du territoire et ni de réduire le territoire agricole. Au contraire, on veut le renforcer.» Ce sont les propos qu'a tenus la ministre de l'Agriculture le 16 novembre dernier, ici même, à l'Assemblée nationale.
Peut-elle nous dire alors si elle a gagné la bataille au Conseil des ministres à l'égard du projet libéral de l'autoroute 30 qui menace la destruction de plus de 500 hectares des meilleures terres agricoles du Québec?
Le Président: M. le ministre des...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre des Transports.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: Merci, M. le Président. Je pense que nous savons que l'autoroute 30 est une artère importante, et je voudrais simplement vous rappeler, M. le Président, que l'opposition aurait peut-être intérêt à relire les recommandations du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, de juin 2002, et qui disait justement: «Le tracé sud, un choix préférentiel.» Et justement d'ailleurs on indiquait que la commission ? donc le BAPE ? avait considéré l'impact à long terme d'options, des déplacements, de la sécurité, le territoire, le milieu et l'économie.
M. le Président, nous avons toujours été conséquents avec ce que nous avons dit depuis le début, c'est que nous suivrions les recommandations du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. C'est ce que nous avons annoncé, c'est ce que nous allons faire, en respectant le plus possible, également ce que nous avons indiqué, les intérêts des agriculteurs dans cette région-là. Nous suivons les recommandations du BAPE. Nous allons les suivre, et l'autoroute 30 va se terminer, M. le Président.
Le Président: En question complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Maxime Arseneau
M. Arseneau: M. le Président, que doit-on comprendre du fait que ce soit le ministre des Transports qui se lève pour répondre à une question à la ministre de l'Agriculture sur la protection des terres agricoles du Québec? Et comment la ministre, M. le Président...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît, s'il vous plaît! Voulez-vous poser votre question, M. le député, en question additionnelle, et le gouvernement décide qui y répond.
M. Arseneau: Comment, M. le Président, comment la ministre peut-elle entériner ce projet alors qu'elle a en main deux avis de la Commission de protection du territoire agricole qui rejettent le projet libéral du tracé sud puisqu'il passe dans les terres agricoles, très propices au développement durable, justement, M. le Président?
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous savez très bien la règle, que lorsqu'une question...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Lorsqu'une question est posée, c'est le gouvernement qui décide qui va répondre. M. le ministre des Transports.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux:. M. le Président, je suis surpris de constater que l'opposition aujourd'hui nous dit qu'elle ne voulait pas respecter les recommandations du BAPE. Nous avons depuis le début, et ça, ce n'est pas d'hier, indiqué que nous allions suivre les recommandations du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. C'est ce que nous avons annoncé, c'est ce que nous allons faire.
Et j'en profite pour vous dire: Vous savez qu'il n'y avait rien de fait sur l'autoroute 30 quand je suis arrivé, au mois de mai 2003. Maintenant, l'autoroute 30, ce n'est plus seulement un projet, M. le Président, c'est un chantier.
Le Président: En question principale, M. le député de Blainville.
Cadre législatif applicable à l'exercice
de compétences municipales
dans certaines agglomérations
M. Richard Legendre
M. Legendre: Oui. Merci, M. le Président. Alors, il y a quelques jours, le ministre des Affaires municipales a déposé le projet de loi n° 75, qui donne suite à la loi n° 9 mais qui surtout et malheureusement vient concrétiser le gâchis libéral des défusions municipales. Au cours des derniers mois, le ministre avait été clair, il avait déclaré 100 fois plutôt qu'une que le cadre de la loi n° 9... le contenu de la loi n° 9 ne devait pas changer après la tenue des référendums.
Alors, ma question, M. le Président: Pourquoi le ministre a-t-il reculé? Pourquoi le ministre a retiré du projet de loi n° 75 les dispositions sur les règles de fonctionnement du conseil d'agglomération? Pour se donner le pouvoir de tout décider par décret, derrière des portes closes? Pourquoi le ministre a-t-il changé d'idée, M. le Président?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Je dois vous dire, M. le Président, que la question ne me surprend pas. J'ai vu le communiqué de presse du député lorsqu'on a déposé le projet de loi n° 75. Ce qui m'avait étonné à la lecture du communiqué, c'est qu'il croyait que j'allais reculer à un moment donné ? là, il dit que je l'ai déjà fait ? à propos des décisions du conseil d'agglomération, ce qui est pourtant répondu de façon très claire à l'article 57 du projet de loi n° 75 ? puis je l'invite à le lire d'ailleurs ? qui reprend les dispositions... les principes qui guidaient la consultation du projet de loi n° 9. Et, M. le Président, il n'y a rien de plus clair, notamment au deuxième alinéa, sur les capacités décisionnelles et les modes de fonctionnement décisionnels du conseil d'agglomération. Donc, je l'invite peut-être à lire l'article 57, qu'on passe à d'autres questions. Il pourra revenir en additionnelle peut-être après, une fois qu'il l'aura lu. Merci, M. le Président.
Le Président: En question complémentaire, M. le député de Blainville.
M. Richard Legendre
M. Legendre: Oui. Est-ce que le ministre pourrait se rendre un petit peu plus loin dans le projet de loi et lire l'article 133 et 134, où il se donne tous les pouvoirs, par décret, de justement changer les règles de fonctionnement? L'article 134, M. le ministre: Le décret d'agglomération prévoit que vous pouvez changer la façon pour le conseil et le fonctionnement de ce conseil dans chacune des agglomérations, et ça, ce n'était pas prévu.
Alors, pourquoi vous avez changé d'idée? Vous avez fait le contraire de ce que vous avez dit, M. le... M. le Président.
n(10 h 50)nLe Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Oui. Oui, M. le Président, je l'ai lu. Notre collègue de Rousseau qui glissait, suite à la question de son collègue de Blainville, «si je l'avais lu». Je pourrais retrouver dans mes notes, ici, les passages de son pamphlet sur l'importance de la démocratie et de consulter les citoyens, ce qu'on a fait avec le projet de loi n° 9 et qui donne la suite de 75.
Mon collègue de Blainville serait bien avisé de lire les dispositions les unes avec les autres. Et les pouvoirs à l'égard des décrets qui sont prévus dans la loi n° 75... le projet de loi n° 75 sont les dispositions du même genre de celles que son parti, lorsqu'ils formaient le gouvernement, avait incluses dans les dispositions envers les fusions pour la mise en place de ces nouvelles organisations là. Bien évidemment, ces dispositions doivent être lues avec les autres dispositions.
Et, encore une fois, on ne peut pas être plus clair, à l'article 57. Les décrets qui vont suivre ne peuvent pas aller à l'encontre de l'article 57, M. le Président, et j'invite mon collègue à ce que nous puissions continuer cette discussion peut-être tout de suite ou plus tard. On va parler de 75 plus tard aujourd'hui.
Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député de Blainville.
M. Richard Legendre
M. Legendre: Oui, M. le Président. Est-ce que, comme à l'habitude, le ministre réalise, là, qu'il ne répond pas à la question? Et je vais en essayer une autre. Un autre élément qui a changé dans le projet de loi n° 75: la liste des équipements d'intérêt collectif, sur laquelle le ministre insistait qu'elle apparaisse. Là, elle a disparu du projet de loi n° 75, alors qu'on la retrouvait dans le projet de... dans la loi n° 9. Qu'est-ce que le ministre répond à cet autre changement?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Parce que, M. le Président, certaines dispositions de la loi n° 9 sont toujours en vigueur, vont rester en vigueur pour l'installation de la nouvelle organisation. Les décrets vont reprendre ces dispositions-là.
Comme vous voyez, il faut non seulement lire les articles du projet de loi n° 75 avec d'autres articles du projet de loi n° 75, mais aussi 75 avec 9, parce que 9, c'étaient les principes guidant la consultation; 75, ce sont les règles qui guident la constitution.
Alors, une fois qu'on est capables de comprendre qu'il y a deux lois et certains articles à lire ensemble, c'est un peu plus long à lire, mais, quand on fait le tour, M. le Président, on comprend ce qu'on veut dire.
Le Président: En question principale...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! En question principale, M. le député de Drummond.
Aide à l'industrie aéronautique
M. Normand Jutras
M. Jutras: Alors, M. le Président, une politique de l'aéronautique est attendue et demandée au Québec depuis près de deux ans. Il y a aussi, présente dans l'actualité depuis plusieurs mois, la construction du nouvel avion de Bombardier: Où sera-t-il construit? Nous convenons tous qu'il faut qu'il soit construit au Québec. Par ailleurs, il y a d'autres États qui font des offres des plus alléchantes à Bombardier pour que Bombardier le construise ailleurs. Le ministre du Développement économique et régional dit qu'il attend après Ottawa, Jean Lapierre lui répond qu'il n'achète pas un cochon dans un sac et lui dit que c'est au Québec en premier à faire sa part, de sorte qu'on ne sait plus qui attend après qui. Mais c'est ça, le fédéralisme.
Est-ce que, M. le Président, en fait ce qui retarde tant l'annonce de Bombardier... est-ce que ce n'est pas le fait que c'est une nouvelle en faveur du Québec, que ça déplaît au reste du Canada et que la politique qui s'en vient, ça va être une politique qui va envoyer l'argent un peu partout à travers le Canada puis qui va diluer la place du Québec dans le domaine de l'aéronautique? Est-ce que ce n'est pas ça, la vraie raison?
Le Président: M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.
M. Michel Audet
M. Audet: Je pourrais avoir une réponse brève, c'est: La réponse, c'est non. Mais je vais expliquer un peu parce que c'est important pour les travailleurs et pour les gens qui oeuvrent dans ce secteur-là. Il y a au Québec 36 000 personnes qui travaillent dans le secteur de l'aéronautique, c'est très important, et effectivement je pense que je vais donner quelques explications qu'ils méritent absolument, tant dans le comté d'ailleurs de Saint-Laurent que dans d'autres comtés du Québec, particulièrement dans la région de Mirabel.
Le Québec a défendu depuis le début ? et je pense que le chef de l'opposition le reconnaîtra ? l'industrie aéronautique. C'est une industrie majeure au Québec, l'aéronautique est au Québec ce que l'industrie de l'automobile est à l'Ontario. Là-dessus, on partage tout à fait ce point de vue là et on attend du gouvernement fédéral justement qu'il fasse à l'égard de l'industrie aéronautique... qu'il soit aussi généreux qu'il l'a été à l'égard de l'industrie de l'automobile. C'est très clair. Ce que nous avons demandé à Ottawa, c'est d'avoir une politique de support à cette industrie-là et que le Québec ne soit pas le seul à la supporter. On a dit qu'on ferait notre part, mais c'est une industrie qui doit être d'abord supportée par le gouvernement fédéral.
Le Président: En question complémentaire, M. le député de Drummond.
M. Normand Jutras
M. Jutras: Est-ce que le ministre se rappelle qu'il s'est fait dire dernièrement par le même Jean Lapierre que le bar n'était pas ouvert pour le Québec? Par contre, le bar était ouvert pour l'industrie de l'automobile en Ontario, et, en un temps, deux mouvements, l'opération s'est faite, il y a eu 1 milliard de dollars pour l'industrie de l'automobile. Pourquoi ça se fait si vite en Ontario puis ça prend autant de temps au Québec?
Le Président: M. le ministre...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre du Développement économique et régional.
M. Michel Audet
M. Audet: M. le Président, compte tenu de l'importance des collègues du Bloc québécois, de vos collègues qui sont à Ottawa, j'espère qu'ils feront toutes les pressions voulues auprès du gouvernement fédéral précisément pour qu'il fasse cette démarche-là. Je l'espère. Ce que...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. M. le ministre.
M. Audet: Je comprends que votre maison mère à Ottawa aurait certainement des choses importantes à demander à Ottawa là-dessus. Je voudrais dire ceci, M. le Président: Nous sommes en négociation avec le gouvernement fédéral. J'ai rencontré déjà le ministre Emerson, j'ai rencontré Jean Lapierre, la négociation se poursuit entre nos fonctionnaires là-dessus. La décision de Bombardier ne sera pas prise avant le début de l'an prochain, donc on ne négociera pas sur la place publique. On sait qu'il est de bonne guerre, là-dedans, de faire des pressions sur les gouvernements, mais, nous, on veut aussi protéger les contribuables québécois. Merci.
Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député de Drummond.
M. Normand Jutras
M. Jutras: Plutôt que d'attendre encore après le fédéral, pourquoi il ne fait pas comme son homologue ontarien qui, lui, dans le domaine de l'industrie automobile, a pris les devants, a mis l'argent en premier sur la table? Parce que la seule garantie qu'on a à date, c'est qu'il y a 2 000 emplois de perdus chez Bombardier au cours des dernières semaines. Pourquoi ne pas prendre les devants, puis le fédéral, bien, il suivra quand ça lui adonnera, comme d'habitude?
Le Président: M. le ministre du Développement économique et régional.
M. Michel Audet
M. Audet: M. le Président, je pense que, si on... je comprends la façon de... Si la façon de prendre des décisions était celle-là que vous aviez dans le gouvernement du Parti québécois, je comprends pourquoi ils nous ont laissé un trou de 4 milliards, M. le Président. Ce n'est pas notre façon de gouverner.
Des voix: ...
M. Audet: Nous allons, nous allons, nous allons...
Des voix: ...
M. Audet: Qu'est-ce qu'il y a? Vous avez...
Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Si vous voulez conclure, M. le ministre.
M. Audet: On pourrait faire une longue énumération, n'est-ce pas, en partant de la SGF, de la Gaspésia, Montréal Mode, etc. On ne la fera pas. On va dire ceci: L'industrie aéronautique, on ne veut pas justement lui faire payer le prix de discussions, de négociations et d'un enjeu politique, comme on veut le faire dans d'autres dossiers. On veut surtout faire en sorte que ce soit un dossier qui permette à Montréal de maintenir sa place. Plus de la moitié des emplois de ce secteur-là sont dans la région du... au Québec et dans la région de Montréal, et, M. le Président, on va se battre pour les maintenir.
Le Président: En question principale, M. le député de Bertrand.
Aide à la recherche et développement
M. Claude Cousineau
M. Cousineau: Merci, M. le Président. M. le Président, il est de plus en plus évident et vérifiable que le gouvernement libéral actuel est nuisible pour la recherche et le développement au Québec. C'est le constat d'un grand Québécois du domaine de la recherche, M. Camille Limoges, ex-sous-ministre, lauréat, cette année, du Grand Prix du Québec en sciences.
M. le Président, tous constatent que les suppressions de plusieurs mesures d'encouragement à la recherche et au développement, depuis 18 mois, handicapent énormément l'avenir du Québec: coupures dans l'aide aux organismes de promotion de la science; coupures dans les fonds boursiers pour les étudiants et les chercheurs; coupures dans les crédits d'impôt aux entreprises pour la recherche et le développement ? c'est ce qui fait le plus mal; coupures de 7 % au niveau des trois grands fonds subventionnaires québécois.
Ma question, M. le Président: Après toutes ces coupures effectuées par le gouvernement libéral, est-ce que le ministre responsable de la Recherche peut nous garantir qu'il va respecter son engagement d'atteindre 3 % du PIB pour les sommes investies en recherche et développement, en lui rappelant que, en 2001, c'était 2,7 %, sous notre gouvernement?
Le Président: Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.
M. Michel Audet
M. Audet: M. le Président, j'ai déjà, en commission parlementaire, expliqué clairement jusqu'à quel point cette question-là était prioritaire pour le Québec, et je suis d'accord avec le député à l'effet qu'il faut maintenir l'importance de la recherche et développement dans l'économie. C'est le coeur de l'innovation.
Cependant, je lui ferais remarquer, puisqu'il citait Camille Limoges, à qui on a remis un prix l'autre jour, je soulignerais que, dans L'actualité du 4 novembre 2004... Qu'est-ce qu'écrivait Camille Limoges? Il a dit ceci: «À la fin du mandat du gouvernement Landry, on s'était désintéressé de la question [de la recherche et du développement] en rattachant artificiellement la recherche, la science et l'innovation au ministère des Finances, ce qui n'avait aucun sens. Le gouvernement actuel les a rapprochées de l'industrie, ce qui est beaucoup plus logique.»n(11 heures)nDes voix: ...
Le Président: Je vous rappelle qu'en citant des articles vous devez nommer le nom du député et non le nom du ministre. En question complémentaire, M. le député de Bertrand.
M. Cousineau: Oui, M. le Président. J'invite le ministre à lire complètement l'article, l'entretien du ministre dans L'actualité de 2004...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! En question principale, M. le député.
Mise à jour de la politique scientifique
M. Claude Cousineau
M. Cousineau: Ma question, ma question, excusez, est de lire aussi ce que M. Limoges dit: «Depuis 18 mois, plusieurs mesures d'encouragement à la science ? oui, c'est une principale; depuis 18 mois, plusieurs mesures d'encouragement à la science ? et à l'innovation ont été supprimées, ce qui a généré une incertitude très nuisible dans les entreprises et les milieux de la recherche.» Qu'on lise l'article au complet.
Alors, ma question, M. le Président: Maintenant que la politique scientifique, qui faisait pourtant l'unanimité en cette Chambre en 2001 des trois partis politiques, a été mise sur les tablettes par ce ministre, qu'attend-il pour déposer sa politique, sa vision de la recherche qu'il avait promise lors de la première année de son mandat?
Le Président: M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.
M. Michel Audet
M. Audet: M. le Président, je suis heureux de dire au député que j'ai déjà entrepris une consultation avec les différents groupes effectivement de la recherche et du développement, que nous aurons l'occasion, en temps et lieu, et je... Non, mais, écoutez, est-ce que ça vous intéresse?
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. La question a été posée dans l'ordre et la réponse doit être dans le même ordre. Or, M. le ministre.
M. Audet: Nous avons appuyé et continué d'appuyer tous les... par les fonds subventionnaires, les bourses aux étudiants, et c'est eux qui sont au coeur, les bourses aux étudiants, oui, gradués et postgradués dans les universités. Les fonds subventionnaires ont maintenu leur budget l'année dernière et ils le maintiendront l'an prochain parce que c'est fondamental pour les étudiants et les chercheurs.
Deuxièmement, nous procédons avec les institutions à une consultation pour mettre à jour la politique pour les prochaines trois ou quatre années.
Le Président: Alors, ceci met fin à la période des questions et réponses orales.
Motions sans préavis
Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.
Souligner la Journée internationale
pour l'élimination de la violence
à l'égard des femmes
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, j'aimerais:
«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, qui se tient aujourd'hui, le 25 novembre 2004.»Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Consentement sans débat. Est-ce que cette motion... Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.
Mise aux voix
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Oui. M. le Président, je souhaiterais, je souhaiterais présenter une motion concernant des consultations particulières. Alors, je dépose la motion suivante, M. le Président.
Des voix: ...
Le Président: ...M. le leader. Je vous demanderais un peu votre collaboration, là. L'Assemblée se poursuit. Alors, M. le leader du gouvernement.
Procéder à des consultations particulières
sur le projet de loi n° 69
M. Dupuis: Alors donc, je souhaite déposer la motion suivante, M. le Président:
«Que la Commission de la culture, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec, la Loi sur les archives et d'autres dispositions législatives, procède à des consultations particulières et tienne des audiences publiques le 1er décembre 2004, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, et qu'à cette fin elle entende les organismes suivants, et ce, selon l'horaire ci-après indiqué:
«1er décembre 2004, 15 heures à 15 h 30, les remarques préliminaires; 15 h 30 à 16 h 15, Bibliothèque nationale du Québec; 16 h 15 à 17 heures, l'Association des archivistes du Québec; 17 heures à 17 h 45, l'Association nationale des éditeurs de livres; et 17 h 45 à 18 heures, les remarques finales.» Évidemment, M. le Président:
«Que la ministre de la Culture soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion? Consentement.
Mise aux voix
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Avis touchant les travaux des commissions
Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Merci, M. le Président. J'avise donc cette Assemblée que la Commission des affaires sociales poursuivra et complétera les auditions dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 17 h 30, à la salle du Conseil législatif;
Que, d'autre part, la Commission de l'économie et du travail entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale concernant l'établissement de programmes distincts, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Je vous remercie.
Le Président: Ces avis sont déposés.
Pour ma part, je vous avise que la Sous-commission permanente de la réforme parlementaire se réunira en séance de travail aujourd'hui, jeudi 25 novembre 2004, après les affaires courantes, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, afin d'entreprendre les discussions dans le cadre du processus de réforme parlementaire.
Est-ce qu'il y a des renseignements sur les travaux de l'Assemblée?
Affaires du jour
Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons passer maintenant aux affaires du jour. Mme la leader adjointe du gouvernement.
M. Dupuis: ...une suspension très, très courte.
Le Président: À votre demande, je vais suspendre les travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 6)
(Reprise à 11 h 8)
Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, j'attire votre attention à l'item 11 de notre ordre du jour.
Projet de loi n° 75
Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Cusano): À l'article 11, M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir propose l'adoption du principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. Y a-t-il des interventions?
Une voix: ...on ne vous entend pas.
Le Vice-Président (M. Cusano): Il n'y a pas de... On me dit qu'il n'y a pas de son.
Une voix: On vous entend très bien.
M. Fournier: On va essayer le mien. Oups! le mien fonctionne. Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, je recommence. Merci. M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir propose l'adoption du principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. Alors, y a-t-il des interventions? M. le ministre.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Merci, M. le Président. Oui, je vous en offre une, intervention sur le principe du projet de loi n° 75. Avant d'entrer dans le coeur du projet de loi n° 75, peut-être qu'il serait utile de faire un peu le cadre contextuel dans lequel ce projet de loi s'inscrit. Vous vous souviendrez que, depuis l'an 2000, le Parti libéral du Québec formant alors l'opposition et maintenant le gouvernement, nous nous étions engagés à ce que les citoyens puissent être consultés plutôt que de se voir imposer une structure d'organisation politique de leur communauté par Québec sans qu'ils n'aient rien à dire. C'est l'engagement qu'on a pris, que nous avons maintenu durant la campagne électorale.
n(11 h 10)n Durant la campagne électorale d'ailleurs, c'est l'opposition actuelle qui a fait de cet engagement un enjeu presque présent à chaque jour durant la campagne électorale, et le vote des citoyens, à la dernière élection, donnant le mandat au Parti libéral du Québec, a fait de cet engagement, devenu un enjeu, un mandat de la population à ce gouvernement de nous assurer que les citoyens allaient être consultés.
Dans la foulée de cette élection, dans les jours qui ont suivi, le député de Verchères, dans un testament qui a quand même fait couler beaucoup d'encre, disait qu'il y avait là une erreur fondamentale de la part du parti formant l'opposition actuellement, d'avoir bousculé, imposé, passé dans la gorge, disait-il, cette réforme qui visait à imposer des structures à des communautés de citoyens qui n'avaient alors rien à dire. Il a été rejoint, un peu plus tard, par le député de Rousseau, enfin, il y a quelques semaines. Le député de Rousseau a commis un texte pour faire connaître sa vision, dans lequel texte il dit qu'il devrait y avoir plus de démocratie qu'il n'y en a eu lorsque, formant le gouvernement, son parti avait imposé ces structures.
Mon critique actuel en matières municipales, le député de Blainville, dans la journée qui a suivi le pamphlet en question du député de Rousseau, a dit qu'il partageait les points de vue émis par le député de Rousseau. Donc, je suis un peu plus convaincu maintenant que, si le projet de loi n° 9 n'a pas reçu l'aval de l'opposition, fort des avis maintenant du député de Verchères, qui a été relu, j'en suis persuadé, par ses collègues du caucus et du député de Rousseau qui aurait même saisi les membres du Parti québécois, lors d'un conseil national, par la distribution main à main d'un document sur l'importance de la démocratie de la consultation des citoyens et que le critique actuel supporte, je sens que ce projet de loi n° 75 risque, M. le Président, de recevoir l'appui du parti formant l'opposition, et j'en suis très heureux.
Tout ça pour nous rappeler que cette consultation, que nous avons menée alors que l'ancien gouvernement aurait dû le faire, s'est aussi établie... les principes guidant cette consultation ont aussi été établis dans un cadre lui-même de consultation. Dois-je rappeler qu'il y a un an, c'était quelques semaines après la formation du Conseil des ministres de ce gouvernement, M. le Président, quelques semaines après, le projet de loi n° 9 avait été déposé. Il avait été évidemment distribué à tous ceux qui y portaient un intérêt, et une commission parlementaire s'est tenue où plus de 90 mémoires, groupes donc et représentants sont venus faire des représentations, ont été donc consultés et entendus; une loi en a découlé. De cette loi-là ont découlé des études, des registres, un référendum. S'il y a quelque chose qui a fait une consultation, c'est bien ce sujet-là, M. le Président, et donc c'est avec beaucoup de plaisir que maintenant nous disons que nous voulons donner suite à cette consultation.
Donc, le projet de loi n° 75 donne suite aux résultats de la consultation des citoyens qui s'est terminée le 20 juin dernier. Jusqu'ici, c'est la loi n° 9 qui a encadré la consultation. À cette étape-ci, les grands principes qu'elle énonce pour guider la consultation doivent se transformer en règles guidant la reconstitution découlant des résultats de cette consultation. Le projet de loi n° 75 reprend les principes de la loi n° 9 en apportant à l'occasion certaines précisions, loin, loin, loin des questions que tentait d'amener le critique député de Blainville ce matin.
En premier lieu, le projet de loi octroie au gouvernement le pouvoir d'adopter divers décrets pour procéder à la reconstitution des 31 anciennes municipalités visées. Pour chacune des 11 agglomérations où sont réparties ces municipalités, on parle d'abord de décret pour reconstituer les municipalités comme telles. S'ajoute le décret modifiant la charte ou le décret consécutif de la municipalité résiduaire...
Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant.
M. Boulerice: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Je vais vérifier, M. le député de Sainte-Marie. Effectivement, qu'on appelle les députés.
Pardon? Excusez-moi. Merci. On m'informe qu'il y a des commissions qui siègent présentement. Alors, nous avons suffisamment de députés. Alors, M. le ministre, vous pouvez continuer.
M. Fournier: Merci beaucoup, M. le Président. C'est sans compter tous ceux qui nous suivent par les voies électroniques. Vous savez qu'on est sur Internet aussi et à la télévision. J'en suis convaincu, que nous sommes très nombreux à suivre ces débats excessivement intéressants.
Pour chacune des 11 agglomérations, si on répartit les municipalités, on parle d'abord de décret pour reconstituer les municipalités comme telles. S'y ajoute le décret modifiant la charte ou le décret constitutif de la municipalité résiduaire, dite municipalité centrale dans le projet de loi.
Les décrets de reconstitution préciseront le nom et les limites du territoire des municipalités reconstituées; le cas échéant, son statut d'exception linguistique et d'autres dispositions particulières applicables; la division en districts électoraux; la liste des employés transférés de la ville centrale ou engagés par le comité de transition. À ce sujet, le décret prévoira que les titulaires des postes de directeur général, greffier, trésorier ou secrétaire-trésorier ne pourront être destitués avant l'expiration d'un délai de six mois après la reconstitution.
Les décrets de modification des chartes ou décrets constitutifs existants indiqueront les modifications aux territoires de la municipalité, y compris des arrondissements s'il y a lieu, et la suppression des dispositions spécifiques qui ne sont plus applicables à la suite des reconstitutions.
Enfin, un troisième type de décret précisera la nature, la composition, les règles de fonctionnement du conseil d'agglomération dans le respect des trois principes suivants déjà énoncés dans la loi n° 9 et qui sont repris, comme je le disais plus tôt, à la période de questions et de réponses, M. le Président, à l'article 57 du projet de loi n° 75.
D'abord: «1° toute municipalité liée doit être représentée au conseil d'agglomération;» 2° le poids décisionnel d'une municipalité au sein du conseil d'agglomération est proportionnel à sa population;
«3° les séances du conseil d'agglomération doivent être publiques.» Toutefois, les règles relatives à l'information des conseils municipaux sur les sujets traités par le conseil d'agglomération sont améliorées. Tel que prévu dans la loi n° 9, lors d'une séance du conseil de ces municipalités, un maire doit informer les élus des sujets à l'ordre du jour d'une prochaine séance du conseil d'agglomération. De plus, il doit exposer les positions qu'il entend prendre sur ces sujets et en discuter avec les autres membres du conseil.
La nouveauté, c'est que le conseil de ville adoptera une orientation ? pas un mandat, M. le Président, mais une orientation ? pour la délégation représentant la ville au conseil d'agglomération. Lorsque le maire et les autres représentants participeront aux délibérations et au vote sur une question dont est saisi le conseil d'agglomération et au sujet de laquelle le conseil des municipalités a préalablement pris une orientation, ils devront prendre une position conforme à cette orientation. Le maire devra aussi faire rapport au conseil de la municipalité des décisions prises par le conseil d'agglomération.
Les décrets d'agglomération définiront par ailleurs les pouvoirs du comité exécutif de la municipalité centrale à l'égard des compétences d'agglomération. Le pouvoir du conseil d'agglomération est de créer des commissions; la liste des équipements d'intérêt collectif, des voies artérielles et des conduites d'aqueduc et d'égout relevant de l'agglomération; le partage des actifs et passifs entre l'agglomération et les municipalités reconstituées et les règles particulières aux régimes de retraite.
Le projet de loi n° 75 apporte aussi des précisions en matière de finances et de fiscalité. Il définit les modalités qui assureront la rigueur et l'équité dans la répartition des dépenses de la municipalité centrale entre celles qui sont à la charge de l'ensemble de l'agglomération et celles qui sont à la charge du territoire de la ville centrale. Le conseil d'agglomération pourra imposer sur l'ensemble de l'agglomération toute taxe ou tout autre moyen de financement dont dispose une municipalité locale afin de financer des dépenses faites dans l'exercice d'une compétence d'agglomération. Cela comprend les dépenses faites par un organisme municipal, par exemple une société de transport en commun, à condition que ces dépenses visent strictement le territoire de l'agglomération.
Le projet de loi précise les dépenses qui sont réputées constituer des dépenses d'agglomération. Il prévoit en outre le moyen par lequel sera déterminée la répartition des dépenses mixtes, c'est-à-dire des dépenses qui servent à la fois à l'agglomération et à la municipalité locale. Dans ce cas, la municipalité centrale devra établir par règlement des critères permettant de distinguer entre les dépenses qu'elle effectue dans l'exercice de ses compétences d'agglomération et celles qu'elle fait dans l'exercice de ses autres compétences.
D'ailleurs, le compte de taxes ou... la partie du compte de taxes établie aux fins du financement des compétences d'agglomération et transmise aux contribuables de chaque municipalité devra être détaillée. Tout document de la municipalité centrale comportant à la fois des éléments d'agglomération et de proximité devra être divisé pour présenter ces éléments séparément: on parle par exemple du budget et du programme d'immobilisations autant que du compte de taxes.
n(11 h 20)n Le mandat du vérificateur de la municipalité centrale comporte aussi la certification des finances d'agglomération. Le vérificateur sera chargé de valider les taux globaux de taxation se rapportant à chacun des deux paliers de responsabilité de la municipalité centrale. Il aura à se prononcer du même coup sur le respect des règles qui auront été établies concernant le partage des dépenses mixtes entre ces deux paliers.
Le projet de loi prévoit aussi des dispositions visant à assurer que les rôles d'évaluation des municipalités liées soient établis de façon à constituer, lorsqu'on fait leur somme, une base d'imposition uniforme sur l'ensemble de l'agglomération. Cette mesure assurera une répartition équitable du fardeau fiscal d'agglomération sur ce territoire.
J'ajouterai, M. le Président, que le projet de loi reprend les dispositions de la loi n° 9 qui continueront de s'appliquer au-delà de la reconstitution des anciennes villes. En effet, la loi n° 9, qui servait à la constitution, sera abrogée à l'issue du processus, la plupart de ses dispositions n'ayant plus d'application dans l'avenir, certaines le pourront. Il ne faut donc pas se surprendre d'y retrouver l'ensemble des compétences déjà conférées à l'agglomération dans la loi n° 9, avec l'ajout de quelques précisions.
Dans le domaine de l'eau et des voies de circulation notamment, il s'agissait de distinguer les infrastructures relevant de l'agglomération de celles relevant de la responsabilité locale. Cette distinction sera illustrée par une carte à même le décret d'agglomération.
Le projet de loi reprend les dispositions de la loi n° 9 qui accordaient au conseil d'agglomération le pouvoir de modifier, sur approbation du ministre, la liste des équipements, infrastructures et activités d'intérêt collectif, laquelle sera intégrée au décret d'agglomération.
Le projet de loi reprend aussi le pouvoir de prescrire des règles portant sur la gestion de tout équipement, infrastructure ou activité qui intéresse à la fois la municipalité centrale et au moins une municipalité reconstituée, ainsi que le pouvoir de prescrire des règles sur le financement collectif des dépenses relatives à l'équipement, à l'infrastructure ou à l'activité et sur le partage des revenus produits par celui-ci.
Le conseil d'agglomération aura par ailleurs le pouvoir de déléguer l'exercice d'une compétence aux municipalités liées, à l'exclusion de ses pouvoirs réglementaires et de taxation. À leur tour, les municipalités liées pourront aussi, le cas échéant, subdéléguer aux arrondissements.
La loi n° 9 prévoit un mécanisme par lequel toute municipalité pouvait contester auprès du ministre certains règlements adoptés par le conseil d'agglomération. Le ministre pouvait alors refuser le règlement. Ce mécanisme a été reconduit en y ajoutant la possibilité pour le ministre de confier à une personne le soin d'approuver ou non le règlement. Tout refus devra être motivé par écrit. Une municipalité pourra s'opposer à quelque type de règlement d'agglomération, en plus de ceux déjà mentionnés dans la loi n° 9. Les municipalités liées pourront s'opposer à tout règlement du conseil d'agglomération à l'égard de la gestion, du financement et du partage des revenus des équipements d'intérêt collectif.
C'est aussi le cas des règlements établissant des règles pour éviter des inconvénients inutiles et favoriser la cohérence des interventions lorsqu'une compétence d'agglomération et une compétence locale sont exercées à l'égard des mêmes personnes ou des mêmes biens. Pensons, par exemple, au cas où une conduite d'aqueduc ou d'égout de nature locale requiert des réparations, alors qu'elle est située sous une voie artérielle relevant de l'agglomération.
Enfin, le droit d'opposition est également accordé à l'égard des règlements établissant des critères permettant de déterminer quelle partie d'une dépense mixte constitue une dépense d'agglomération et ceux imposant l'établissement d'un rôle de la valeur locative à une municipalité liée.
Enfin, certaines précisions à la loi n° 9 portent sur le partage de l'actif et du passif. Par exemple, un comité de transition ou une personne ayant le même mandat peut, selon la loi n° 9, déroger aux principes qui y sont édictés en matière de partage de l'actif et du passif si le résultat de l'application de ces principes lui apparaît inapproprié.
Le projet de loi n° 75 ajoute comme motif de déroger à ces principes le respect de directives ministérielles qui pourront lui être adressées en cours de mandat et qui viseront à assurer une certaine uniformité dans les règles de partage adoptées par les différents comités de transition.
D'autres dispositions du projet de loi n° 75 sont essentielles au bon déroulement de la reconstitution. Il sera possible pour une personne de cumuler deux mandats d'élus municipaux entre l'élection anticipée et la reconstitution d'une municipalité. Elle pourra alors être payée pour son mandat au conseil de la municipalité reconstituée pendant cette période si ce conseil adopte un règlement à cet effet. Cette rémunération sera toutefois réduite du montant reçu pour le mandat à l'autre conseil.
Ces dispositions sont identiques à celles que prévoyait la loi n° 170 au moment des regroupements municipaux forcés, afin de pourvoir à la période de transition entre l'élection municipale et l'entrée en vigueur des dispositions constitutives des nouvelles villes.
La Loi sur le régime de retraite des élus municipaux est modifiée pour qu'un participant au régime continue d'en bénéficier si, par suite de la reconstitution d'une municipalité, il est élu à son conseil. Les obligations en découlant sont partagées entre le participant et la municipalité reconstituée.
Enfin, le projet de loi contient diverses dispositions particulières à certaines villes. Il modifie, entre autres, les chartes des villes de Montréal, de Québec et de Longueuil pour notamment consacrer le fait que le conseil des arts de ces villes a une compétence de plein droit dans l'agglomération entière et est financé par des revenus d'agglomération.
Voilà, M. le Président, l'essentiel du projet de loi n° 75. J'en recommande l'adoption de principe afin de permettre à la volonté des citoyens qui ont voté en nombre pour la reconstitution de leur ancienne municipalité d'être respectée. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le ministre des Affaires municipales. Je reconnais maintenant le député de Blainville et porte-parole des affaires municipales. M. le député.
M. Richard Legendre
M. Legendre: Oui. Merci, M. le Président. Nous en sommes évidemment à cette étape importante de l'adoption de principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. Et, M. le Président, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales, j'aimerais bien vous dire que c'est avec plaisir que je m'exprime sur ce projet de loi n° 75 au moment de l'adoption de principe. Malheureusement, ce n'est pas du tout avec plaisir, et je pense que je vais, et que l'on va décevoir le ministre qui avait l'air de s'attendre à ce qu'on approuve ce projet de loi. Bien, c'est beaucoup plus avec consternation, aujourd'hui, M. le Président, que je m'exprime sur le projet de loi n° 75. Avec consternation, puisque ce qu'on retrouve dans le projet de loi n° 75, M. le Président, est essentiellement désolant, tout à fait désolant. On parle ici de l'avenir de 11 villes, de ce qui était 11 villes, 11 villes qui étaient en train de grandir, de devenir de plus en plus fortes, de plus en plus solides et qui vont maintenant en devenir 42. Et je pense, M. le Président, que c'est important pour la compréhension de nos auditeurs, nos auditrices... Et je le dis tout de suite, la compréhension de nos auditeurs et de nos auditrices aujourd'hui, au cours des prochaines minutes, ce ne sera pas facile, parce que ce n'est pas facile à comprendre, le projet de loi n° 75, M. le Président. D'ailleurs, ce n'est pas facile à comprendre, ce que le gouvernement a fait.
Mais situons tout de suite quelles sont les 11 villes dont on parle. Alors, d'abord, ce n'est pas rien, les trois plus grandes villes du Québec, en tout cas en termes de population. Les trois villes les plus populeuses du Québec qui aujourd'hui sont touchées par ce projet de loi. Et «touchées», le mot est faible. Alors, il y a Montréal. Montréal qui maintenant va s'appeler l'agglomération de Montréal. On reviendra là-dessus. Il y a Québec, notre capitale nationale. Il y a Longueuil, Longueuil qui, suite au regroupement des différentes villes, soit dit en passant, était devenue la troisième municipalité en importance de population au Québec. Et plusieurs autres villes importantes... non seulement les trois plus grandes, mais plusieurs autres villes importantes, en commençant par Mont-Laurier. Je vois mon collègue député de Labelle; s'il y a une ville importante dans son comté, c'est bien celle de Mont-Laurier. Mont-Laurier va être affectée. La Tuque, les Îles-de-la-Madeleine, les superbes îles de la Madeleine qui, elles aussi, vont être affectées aujourd'hui par le projet de loi n° 75. D'autres villes dans les Laurentides, Sainte-Agathe-des-Monts, Mont-Tremblant, une autre ville dans le comté de Labelle, là aussi une ville extrêmement importante. Cookshire-Eaton, Rivière-Rouge et finalement Sainte-Marguerite-Estérel.
n(11 h 30)n J'utilisais, M. le Président, le terme «désolant». Bien, je vais vous dire pourquoi c'est désolant. C'est désolant si on est le moindrement préoccupés par l'efficacité de nos gouvernements. Si on est préoccupés par l'efficacité de nos gouvernements, bien ce qui se passe aujourd'hui, à l'Assemblée nationale va nous préoccuper considérablement. Si on est également préoccupés de simplifier les structures, hein, d'alléger l'État, de moderniser l'État ? on a entendu ça beaucoup, depuis un an et demi, supposément; on en a juste entendu parler, ce n'est pas dans cette direction-là que ça va du tout, pas du tout dans la direction de la simplification des structures ? et si on est également préoccupés de vraie démocratie, de vraie démocratie, c'est-à-dire celle qui fait avancer nos populations, bien, là aussi, on est extrêmement préoccupés et on le sera suite à la présentation et à l'adoption de principe de ce projet de loi.
Le projet de loi n° 75, M. le Président, et tout ce processus de défusion dans lequel le gouvernement actuel nous a embarqués, a embarqué le Québec, est essentiellement un véritable fiasco. Le résultat... Et on va le voir dans le projet de loi n° 75, parce que le projet de loi n° 75, bien c'est la suite des choses, malheureusement, c'est la concrétisation du gâchis libéral. Bien, ce projet de loi est un méli-mélo incroyable, M. le Président, et vous aurez compris ? je tiens à l'affirmer tout de suite ? que nous allons voter contre l'adoption de principe du projet de loi n° 75. Et c'est tout à fait cohérent, tout à fait logique, malgré les attentes du ministre. Il avait oublié notre cohérence. Nous avons voté contre, nous étions contre les défusions, nous avons voté contre la loi n° 9, et évidemment que nous allons voter contre le projet de loi n° 75.
D'abord, M. le Président, compte tenu qu'on a un petit peu de temps, ce matin, à cette étape-ci, j'aimerais mettre en contexte, situer le projet de loi n° 75, toujours avec l'objectif que les gens qui nous écoutent puissent comprendre. Donc, le projet de loi n° 75, bien on peut dire que c'est la conséquence législative, c'est la suite malheureuse de ce qui s'est passé le 20 juin 2004, lors des référendums sur les démembrements, sur les défusions. On le sait, il y a eu, au Québec, 89 référendums. Le résultat: 31 villes, 31 villes qui étaient à l'intérieur des 11 villes dont je vous ai parlé au début, 31 villes ont décidé de quitter, de défusionner.
C'est important aussi de dire que le projet de loi n° 75... Et on a eu un petit échange là-dessus ce matin, lors de la période de questions, M. le Président, échange où les réponses du ministre, on va aller les relire attentivement, mais ne nous semblent pas satisfaisantes ? parce qu'il faut les relire attentivement pour bien les comprendre, soit dit en passant.
Alors, la loi... le projet de loi n° 75, bien c'est la suite de la loi n° 9. Et ça, d'ailleurs le ministre avait insisté beaucoup là-dessus, il avait dit: Quand on arrivera avec le projet de loi n° 75, il faudra évidemment respecter ce qu'on avait dit dans la loi n° 9. Mais il a également insisté sur le fait que la loi n° 9, celle qui a préparé les référendums, qui a conduit aux référendums... il avait bien dit: La loi n° 9, c'est une loi essentiellement pour faire cette consultation. Donc, ce n'est pas la loi qui décidait du projet de loi n° 75. Mais en même temps il nous disait: Le projet de loi n° 75 devrait refléter ce qu'il y avait dans la loi n° 9. Et effectivement le projet de loi n° 75, il faut quand même le dire, reprend un certain nombre d'éléments de la loi n° 9, mais il y a des différences, et on y reviendra plus tard.
Alors, juste pour essayer de situer c'est quoi, ce projet de loi n° 75, bien je vais vous lire un petit bout, un tout petit bout des notes explicatives. J'y reviendrai, là, aux notes explicatives, il y en a trois pages. Alors, ne vous inquiétez pas, je vais lire le premier paragraphe, qui quand même situe ce que le projet de loi cherche à faire: Le projet de loi rend juridiquement possible la reconstitution... Donc, on veut reconstituer chaque ancienne municipalité à l'égard de laquelle les résultats du scrutin référendaire révèlent que la majorité requise des personnes habiles à voter s'est prononcée en faveur d'une telle reconstitution. Ce sont les 31 villes qui ont choisi de défusionner. En conséquence, le projet de loi n° 75 crée 11 agglomérations ? on avait 11 villes, là on va avoir 11 agglomérations, et là, écoutez bien ? dont chacune comprend le territoire de toute municipalité ainsi reconstituée et celui, diminué en conséquence, de la municipalité actuelle visée par la réorganisation.
Je vais vous dire, on est très optimiste en utilisant le mot «réorganisation». Je regarde mon collègue à ma droite, qui me regarde un peu incrédule parce qu'il a essayé de comprendre déjà ces premières lignes, et ce n'est pas évident. Ce n'est pas clair, comme on dit. Et «réorganisation», effectivement, c'est être optimiste. C'est plutôt de désorganisation que l'on parle.
Alors donc, M. le Président, c'est ainsi que 11 villes qui devenaient de plus en plus fortes se décomposent en 42 municipalités. Et là suivez-moi bien, et je demande aux gens à la maison d'essayer de bien suivre, là, pendant à peu près 30 secondes. Écoutez bien ceci. 42 municipalités qu'on va désormais appeler des municipalités liées, qui forment ensemble une agglomération, dans laquelle agglomération on retrouve désormais une municipalité centrale qui enfin est la municipalité actuelle dont le territoire est diminué, et bien sûr on ajoute à tout ça les municipalités défusionnées. Ça, ça nous vient, M. le Président, d'un gouvernement qui dit qu'il veut simplifier les structures au Québec. Bien, je vais vous dire, échec total. Je vous ai perdu, M. le Président, j'ai perdu les gens qui nous écoutent. Je peux comprendre votre et leur incompréhension.
Les notes explicatives, j'en ai parlé. Certains de mes collègues, et je ne sais pas si on pourrait attester ça, certains de mes collègues me disent que c'est peut-être un record, c'est peut-être un record, trois pages, trois pages de notes explicatives. Je vais vous dire, M. le Président, quand on s'explique longtemps, là, c'est comme dans les choses courantes de la vie, ça, quand on donne de longues explications... tu sais, quand on revient tard le soir, là, et qu'on donne de longues explications, qu'on ne finit plus, qu'on se perd en explications, c'est suspect. C'est très suspect, M. le Président. Et là, bien, les notes explicatives puis le projet de loi n° 75, je vais vous dire, il est au mieux suspect.
M. le Président, le projet de loi n° 75 traite donc supposément de reconstitution de 31 villes en décomposant des parties des 11 villes initiales. Il reconstitue 31 villes, mais rappelons-nous ce que disait le ministre, et ça, c'est extrêmement important. Le ministre, il l'a dit, ça, ad nauseam ? ça, ça veut dire qu'on ne voulait plus l'entendre là-dessus ? il a dit: Les municipalités en question qui vont défusionner, ils ne reviendront pas au statu ante. Alors, ils ne reviendront pas à ce qu'ils voulaient, ils ne reviendront pas à ce que c'était avant. Ça, c'est le plus qu'ils ont essayé de faire, le gouvernement actuel, pour les convaincre de ne pas défusionner. Ils ont dit: Vous ne reviendrez pas comme c'était avant. Donc, le projet de loi n° 75, c'est la reconstitution en quelque chose d'autre qu'on essaie d'expliquer.
Et j'aimerais faire une parenthèse ici, M. le Président. Ça ne fait pas très longtemps que j'ai le plaisir d'être porte-parole des affaires municipales pour l'opposition, et ça aussi, ça va mettre les gens qui nous écoutent en contexte. Ce qui m'a frappé, la première chose qui m'a frappé en regardant l'information sur les affaires municipales, c'est évidemment la très, très grande diversité de municipalités au Québec, très grande diversité de situations locales, mais aussi, je dois vous dire, le très, très grand nombre de municipalités, le très grand nombre de municipalités. Il y a présentement 1 113 municipalités au Québec, 1 113, dont 67 % ? un petit instant, M. le Président, je m'excuse ? dont 67 % ont moins de 2 000 habitants, 67 % ont moins de 2 000 habitants. Alors, 1 113 municipalités, ce n'est pas rien, ce n'est pas comme si on n'en avait pas assez, hein?
n(11 h 40)n Avant les regroupements, avant que notre gouvernement procède aux différents regroupements, il y en avait encore plus, il y en avait 1 306. Grâce aux regroupements, bien, là, on a créé neuf très grandes villes au Québec, neuf villes fortes, solides qui peuvent développer, et je les nomme parce que c'est important qu'on les replace toutes: évidemment, je l'ai mentionné tout à l'heure, Montréal, Québec et Longueuil, mais à ça il faut ajouter évidemment Laval, Gatineau, Saguenay, Sherbrooke, Trois-Rivières et Lévis. Et ces neuf grandes villes regroupées représentent plus de 50 % de la population du Québec, donc une force remarquable.
Et là, avec ce qu'on nous présente aujourd'hui, avec le projet de loi n° 75, quelle direction on prend? On prend le sens inverse. On s'en va dans le sens inverse. On va dans le sens inverse du bon sens et on remonte à 1 144 municipalités. On rajoute des municipalités. Que voulez-vous, M. le Président? Une question de vision. Le gouvernement libéral, lui, rajoute des municipalités. Nous, de notre côté, ce qu'on souhaiterait, c'est rajouter un pays, rajouter un pays au concert des nations. Question de vision différente. Eux, ils veulent rajouter des municipalités. Nous, on voudrait rajouter un pays.
Donc, le projet de loi n° 75 ? et je ferme la parenthèse ? a aussi pour objet évidemment de déterminer les compétences de cette structure dans laquelle on va rentrer tout à l'heure, de déterminer les compétences municipales, d'essayer d'organiser le fonctionnement des municipalités liées ? un nouveau terme ? des municipalités défusionnées, des municipalités centrales dans le conseil d'agglomération, le conseil d'agglomération, c'est important de le rappeler, M. le Président, qui évidemment devient une structure additionnelle.
Ce qui m'amène, M. le Président, dans les prochaines minutes, à essayer d'expliquer aux auditeurs comment cette réorganisation ou désorganisation va essayer de fonctionner, comment, M. le Président, ça va marcher, le conseil d'agglomération et ces nouvelles villes: des villes défusionnées, des municipalités centrales, enfin on ne sait même plus comment les appeler, là. Soit dit en passant, là, par exemple, Montréal, est-ce qu'il va y avoir l'agglomération de Montréal puis il va y avoir aussi la ville de Montréal? Parce que l'agglomération de Montréal, c'est la ville de Montréal plus les 15 autres. Alors, est-ce qu'on reste dans l'agglomération de Montréal ou dans la ville de Montréal? Enfin. Alors, on va essayer d'expliquer ça. Je ne suis pas sûr ? je le dis tout de suite aux auditeurs ? je ne suis pas sûr que je vais réussir, je ne suis pas sûr que je vais réussir à l'expliquer. Le ministre de la Santé a l'air d'avoir plus confiance en moi que moi-même. Mais, je vais vous dire, je pense que le doute dans ce cas-ci est tout à fait justifié.
Alors, le projet de loi n° 75 crée donc, M. le Président, 11 villes démembrées qui vont s'appeler 11 agglomérations, là où il y a eu la défusion. Alors, ça veut dire quoi, ça? Si je prends, par exemple, Montréal, Québec et Longueuil et que je regarde à nouveau la liste, M. le Président, bon, bien, Montréal maintenant, l'agglomération de Montréal va être formée par les territoires de la ville de Montréal ? ça, c'est une bonne chose, ça concorde ? mais, après ça, s'ajoutent les 15 autres villes qui ont choisi de défusionner. Québec, l'agglomération de Québec est formée par les territoires de la ville de Québec plus L'Ancienne-Lorette et Saint-Augustin-de-Desmaures qui ont décidé de défusionner. Longueuil, l'agglomération est formée par le territoire de la ville de Longueuil plus Boucherville, plus Brossard, Saint-Bruno et ville de Saint-Lambert, ainsi de suite. Alors donc, c'est ça maintenant, l'agglomération; c'est l'addition de ces villes-là.
On crée, pour chacune des agglomérations, un conseil d'agglomération qui va prendre des décisions, donc des compétences d'agglomération. Mais c'est quoi, les compétences d'agglomération? C'est quoi, les compétences de cet ensemble-là? Bien, c'est à peu près tout, M. le Président. Les compétences d'agglomération, là, elles sont nombreuses, et ça couvre à peu près tout. Je vous les nomme rapidement: c'est l'évaluation municipale; c'est le transport collectif; c'est les voies de circulation qui forment le réseau artériel; c'est le lieu destiné à recevoir de la neige; c'est l'alimentation en eau et l'assainissement des eaux; c'est la gestion des matières résiduelles; ce sont les cours d'eau municipaux; la sécurité publique; la cour municipale; le logement social, le développement économique et les équipements, les infrastructures et activités d'intérêt collectif. Tout ça, c'est de compétence d'agglomération. Je vais vous dire, ça laisse peu d'autre chose, entendons-nous là-dessus.
Alors, toutes ces compétences d'agglomération vont être exercées par qui? Qui va gouverner l'agglomération pour l'ensemble du territoire puis de l'agglomération? Eh bien, ça va être gouverné par la municipalité centrale. La municipalité centrale, dans le cas de l'agglomération de Montréal, bien c'est Montréal, le Montréal restant. Le Montréal restant représente quand même 87 % de la population, là, mais il y a 15 autres villes qui ont décidé de défusionner, et ça, c'est les 13 villes défusionnées. Et qui va gérer, qui va décider, qui va s'occuper des compétences, la longue liste que je viens de donner? La municipalité centrale. Ça laisse quoi, ça, aux villes qui ont choisi de défusionner? Ça laisse évidemment très peu.
Une voix: Tant mieux.
M. Legendre: Alors, oui, et tant mieux, je suis d'accord là-dessus. Sauf qu'on a fait tout ça pour ça. Par contre, et je le mentionne tout de suite parce que, là, on a l'air de dire: Ah, bien, pas si mal, la municipalité centrale...
M. Boulerice: Bon, M. le Président, je vous demanderais, s'il vous plaît, de bien vouloir faire respecter le règlement...
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Sainte-Marie. Effectivement, je demanderais à nos collègues de part et d'autre de bien se rendre à leur place et d'écouter la personne qui a la parole. Alors, M. le député de Blainville, vous pouvez continuer.
M. Boulerice: M. le Président, je suis obligé de constater qu'on n'écoute pas vos ordres.
Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant, là, M. le député de Sainte-Marie, là, je pense que les députés sont en train de se rendre à leur endroit, à leur place, alors le député de Blainville peut continuer.
M. Legendre: Merci, M. le Président, et merci à mon collègue qui m'a permis de prendre une gorgée d'eau. Alors, ce qu'on disait, c'est que la municipalité centrale, là, évidemment va avoir à gérer toutes... à gouverner au niveau de toutes les compétences que je vous ai mentionnées. Donc, ça donne évidemment une impression que la municipalité centrale va pouvoir tout contrôler. Mais par ailleurs, pour être bien sûr que ça n'aille pas bien, le projet de loi n° 75 donne un droit d'obstruction systématique à la plus petite composante. Ceux qui n'auront pas le pouvoir, pour qu'ils ne soient pas trop fâchés, on leur donne un droit d'obstruction systématique.
C'est l'article 112 du projet de loi ? je me permets de le lire, M. le Président ? qui dit ceci: «Dans les 30 jours qui suivent [l'adoption d'un règlement par le conseil d'agglomération], toute municipalité liée ? je vous rappelle qu'une municipalité liée, bien c'est une municipalité défusionnée, entre autres ? peut faire connaître au ministre son opposition au règlement.» Et ça, c'est dans les 30 jours qui suivent chacune des adoptions de règlement dans chacune des compétences. «Dans le cas [en question], le règlement requiert l'approbation du ministre ou de la personne que celui-ci désigne pour examiner le bien-fondé du règlement et rendre une décision à sa place.» Je vais y revenir un petit peu plus loin, à cette situation-là, M. le Président, mais ça donne juste une idée de ce dans quoi on s'embarque.
Il faut aussi comprendre, M. le Président, dans ce nouveau charabia municipal libéral, que la municipalité centrale va tout devoir faire en double sur le plan décisionnel. Comment ça? Elle va tout devoir faire en double. La ville de Montréal, dans son conseil municipal, dans son conseil municipal régulier, va prendre les décisions. Le parti au pouvoir, l'opposition vont prendre des décisions et vont décider ce qu'ils doivent faire pour justement donner un mandat au maire en question qui, là, va devoir aller au conseil d'agglomération pour refaire tout ça, pour refaire en double ce qu'ils viennent de décider.
n(11 h 50)n Et d'ailleurs les articles 59 et 60 sont éloquents à ce sujet, M. le Président. Regardez ce que ça dit: «Lors d'une séance du conseil de toute municipalité liée, le maire: [...]informe le conseil des sujets qui doivent faire l'objet de délibérations lors [de la] prochaine séance du conseil d'agglomération; [il] expose la position qu'il entend prendre sur tout sujet visé au paragraphe [en question], discute de celle-ci avec les autres membres présents et propose l'adoption d'une résolution établissant l'orientation du conseil.» Alors, au conseil municipal, il va chercher son mandat par résolution, et là, après ça, il fait rapport des décisions prises par le conseil d'agglomération d'une séance précédente.
Donc, le conseil municipal normal, élu, là est obligé de prendre des décisions, mais là, après ça, il est obligé d'aller le refaire, le refaire en double au niveau du conseil d'agglomération. Et, au niveau du conseil d'agglomération, comme dans le cas de la ville de Montréal, et c'est la plupart des cas, la municipalité centrale en question, elle a le pouvoir, elle a le poids démocratique qui fait qu'elle gagne tous les votes. Alors, elle va le refaire en double mais pour rien.
Je comprends, M. le Président, que ce n'est peut-être pas facile pour les gens de comprendre ce méli-mélo. Mais c'est facile de comprendre par ailleurs, quand on écoute tout ça, M. le Président, qu'on vient complexifier au plus haut point le fonctionnement municipal de ces 11 villes qui étaient, elles, en train de se bâtir, de se renforcer et de se développer.
Mon prochain sujet, M. le Président, bien c'est justement de comparer le projet de loi n° 75 à son point d'origine, la loi n° 9. Et là-dessus, là, on ne semble pas être en accord, le ministre et moi. Le contraire m'aurait un peu surpris.
La loi n° 9, M. le Président, c'est de là que part le projet de loi n° 75 qui est devant nous. La loi n° 9 était déjà, M. le Président, puisqu'elle permettait les défusions, elle était déjà désastreuse. Nous avons voté contre. Mais là, le projet de loi n° 75, il est pire. Il est pire. C'est un autre pas en arrière dans une véritable course à reculons, M. le Président.
Pourtant, le ministre avait répété à plusieurs reprises que le contenu de la loi n° 9, puisque c'est ça qui servait à la consultation, c'était ça, la base, devait être maintenu après les défusions. Mais on voit des différences importantes, des différences importantes, en commençant par le mode de défusion du conseil d'agglomération.
Vous conviendrez avec moi que le mode de défusion du conseil d'agglomération, c'est extrêmement important. La loi n° 9 empêchait le principe de ce qu'on peut appeler la double majorité ? et je vais y revenir un petit peu plus tard; la double majorité étant, pour que quelque chose se décide, qu'il y ait et la majorité de la municipalité centrale et la majorité des villes défusionnées. La loi n° 9, avec l'article 112, faisait en sorte que ça empêchait cette possibilité-là. Mais là ça revient, la possibilité.
Elle n'est pas nommée, elle n'est pas nommée dans le projet de loi n° 75, je le comprends bien, mais les articles 133 et 134, et je me permets de les lire, M. le Président, parce qu'ils sont extrêmement importants ? et c'est là-dessus, là, qu'on ne s'est pas entendu, ce matin, lors de la période de questions ? regardez ce que ça dit, là, sous le chapitre Décret d'agglomération: «Le gouvernement peut, pour chaque agglomération ? alors pour chacune des 11 ? prendre un décret désigné "décret d'agglomération".» Bon. Qu'est-ce qu'il y a dans le décret...
M. Boulerice: Je m'excuse, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
M. Boulerice: Je constate que malheureusement il n'y a pas quorum. Il n'y a pas quorum, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, je constate... Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.
n(11 h 54 ? 11 h 55)nLe Vice-Président (M. Cusano): Nous avons effectivement quorum. M. le député de Blainville, vous pouvez continuer.
M. Legendre: Oui. Alors, le décret d'agglomération, M. le Président, pour chacune des 11 agglomérations, qu'est-ce que le ministre, par décret, peut faire à l'égard de chacune des agglomérations? Je vais vous dire, il peut en faire pas mal.
Il y a neuf items, je ne vous les nomme pas tous, mais le décret d'agglomération prévoit des règles portant sur une série de choses, mais surtout des éléments essentiels, fondamentaux: l'attribution de voix à chaque membre de ce conseil, la façon pour ce conseil de prendre des décisions et le fonctionnement de ce conseil. Et là, ce matin, le ministre m'a référé à l'article 57, où on établit quelques principes, mais ces principes-là ? je vais lui demander de les relire ? n'excluent pas, ne l'empêcheraient pas de pouvoir donner un principe de double majorité dans les décrets d'agglomération pour les villes défusionnées.
Autre différence, M. le Président, entre le projet de loi n° 75 et sa loi d'origine, la loi n° 9, bien, c'est sur ? et on s'en est parlé également ce matin, à la période des questions ? c'est sur la liste d'équipements collectifs qui se retrouvait en annexe dans le projet de loi n° 9... dans la loi n° 9, pardon. Et ça, ce n'est pas rien. Les équipements d'intérêt collectif, on sait de quoi on parle quand on est dans le secteur municipal, alors c'est de définir, sur un territoire, quel équipement est d'intérêt collectif, c'est-à-dire la municipalité centrale plus une municipalité, et qui donc va être géré par la municipalité centrale. Et ça, bien, le ministre à l'époque tenait à ce que la liste soit clairement indiquée dans la loi n° 9 pour que les gens sachent à quoi s'attendre. Et là, bien, cette liste-là, elle n'est plus là. Ce matin, il nous a dit qu'il fallait lire le projet de loi n° 75 en se souvenant ou en regardant la loi n° 9, mais là il va falloir être plus précis là-dessus, là. Et actuellement ce qu'on comprend, nous, c'est que, par décret, le ministre pourra décider de la liste en question. Donc, par décret, c'est la décision du ministre.
On voit donc qu'il y a des changements, des reculs par rapport à la loi n° 9. Et aussi notre inquiétude, c'est que ces changements-là ne soient pas en faveur des municipalités centrales, ce qui m'amène à mon point suivant, sur lequel je voudrais revenir, c'est le risque très élevé, M. le Président, du blocage systématique qui pourrait être fait par les municipalités qui ont défusionné. J'ai lu tout à l'heure l'article 112 qui donne un droit d'opposition aux villes défusionnées par rapport aux règlements qui seront adoptés au conseil d'agglomération. Et ça, ce droit d'opposition là, il est dans tous les champs de compétence, ou à peu près, et pour des choses extrêmement importantes, que ce soit pour le secteur de l'alimentation ou de l'assainissement des eaux, que ce soit pour les parcs industriels. Imaginez, l'agglomération prend une décision sur le parc industriel, prend un règlement, évidemment passe un règlement, et là il pourrait y avoir une opposition de la part des villes défusionnées. C'est le même cas pour les centres locaux de développement, c'est la même chose pour les équipements collectifs, c'est même le cas au niveau de la fiscalité, au niveau des taxes.
Alors, moi, j'ai parlé à quelques maires, puis ils m'ont dit: On a un nouveau maire, on a un maire omnipuissant, omniprésent, omnipotent, partout au Québec; le nouveau maire, c'est le ministre des Affaires municipales, qui va être à tout bout de champ à une position où il doit trancher, où il doit décider. Parce que là, d'un côté, évidemment on a le poids démographique qui fait que la municipalité centrale, et à raison, est décisionnelle, mais il y a un instrument, il y a un outil pour que ceux qui n'ont pas le poids démographique puissent bloquer systématiquement.
n(12 heures)n Et, M. le Président, quand on voit les réactions des défusionnistes ou plutôt, je m'excuse, des défusionnés, bien on peut s'inquiéter très, très sérieusement, car ce blocage systématique, M. le Président, pourrait fort bien arriver. Et je me permets quelques découpures de journaux récentes: Le conseil d'agglomération jugé invivable ? ça va bien. La nouvelle créature du gouvernement Charest... pardon, du gouvernement libéral, le conseil d'agglomération qui regroupera les 16 villes de l'île de Montréal est, je cite, «antidémocratique, exagérément compliqué et engendrera des disputes sans fin». C'est du moins l'avertissement lancé hier par les élus des villes défusionnées, ce n'est pas nous qui le disons, c'est ceux et celles pour qui tout ça a été fait. Ceux et celles pour qui tout ça a été fait, disent: Antidémocratique, exagérément compliqué et engendrerait des disputes sans fin.
Les élus en question ont tiré à boulets rouges ? vous avez la bonne couleur, toujours ? pendant près d'une heure sur le projet de loi n° 75: «Il n'y aura pas un seul succès, c'est invivable pour nous et pour Montréal.» Ils ont quand même, il faut le reconnaître... ils disent: Non seulement ça va être invivable pour nous, les villes défusionnées, mais ça va être invivable en plus pour la ville centrale, pour Montréal. «Il y aura une bureaucratie énorme. Même une des nouveautés censées être favorables aux villes reconstituées ? ah, nouveautés favorables aux villes reconstituées ? la possibilité d'en appeler auprès du ministre n'a pas trouvé grâce aux yeux du comité.» Alors, ce que je vous décrivais tout à l'heure, que M. le ministre est devenu le maire de 11 municipalités, ça ne fait pas leur affaire non plus. «Cela supplante le rôle des élus, alourdit le processus et déclenchera plusieurs chicanes.» Il vaudrait mieux, M. le Président, créer des structures démocratiques dès le début. Et ça continue comme ça dans d'autres journaux: Défusions, le ton monte, Les villes retrouvées, une lutte de pouvoir s'engage. Et à ce groupe vient s'ajouter un autre groupe, une autre agglomération, une autre série de villes défusionnées. Après l'intervention du regroupement des villes à reconstituer de l'île de Montréal, c'est au tour des comités pour la reconstitution des quatre villes de la Rive-Sud de réclamer des amendements au projet de loi n° 75, on parle ici de Boucherville, Saint-Bruno, Saint-Lambert et Brossard. Et les comités de la Rive-Sud appuient la position des ex-villes montréalaises qui menacent, qui menacent, M. le Président, de recourir aux tribunaux si le gouvernement n'accorde pas plus de pouvoirs aux futures entités municipales; menacent de recourir aux tribunaux, M. le Président.
Alors, ceux que je viens de vous citer, M. le Président, ce sont ceux... j'ai choisi ceux qui pourraient être le plus favorables au gouvernement, là, je n'ai pas voulu être trop sévère ce matin. Ceux que je viens de citer, ce sont ceux qui devraient être contents, c'est pour eux que le gouvernement a fait tout ça. Or, M. le Président, force est de constater que le projet de loi n° 75 ne fait que des mécontents. Ce n'est pas ça, M. le Président, l'exercice de la démocratie. Et malheureusement c'est ce qui arrive quand un gouvernement essaie de plaire à tout le monde et n'agit pas de façon responsable. Agir de façon responsable, M. le Président, ça aurait été de continuer, de continuer à bâtir ces nouvelles villes plutôt que de permettre qu'on les affaiblisse avec le résultat du projet de loi n° 75.
C'est d'ailleurs ce que le premier ministre actuel avait dit en plein débat, M. le Président, mais on a un problème avec ce gouvernement, c'est que ce gouvernement ne fait pas ce qu'il dit. Alors, on se retrouve avec ce gâchis, gâchis malheureusement dont on ne voit pas la fin, là, gâchis qui ne fait que commencer. Comment ces villes, ces agglomérations vont faire pour fonctionner de façon efficace? D'ailleurs, M. le Président, on se retrouve avec des situations aberrantes. J'en ai mentionné quelques-unes et j'y reviens.
Montréal. Montréal, c'est 87 % de l'agglomération. La ville de Montréal, à l'intérieur de l'agglomération de Montréal, c'est 87 % de l'agglomération. Alors, la ville de Montréal, elle va être forcée à tout faire en double, comme je disais tout à l'heure. Mais en même temps elle va risquer le blocage systématique par le 13 % des villes qui ont défusionné, et qui ont, on l'a vu, ce droit d'obstruction, et qui... On leur donne un droit d'obstruction, et elles sont insatisfaites. Ça va être beau. Ça va être beau pour le fonctionnement de Montréal.
À Québec, dans la capitale nationale, un petit peu différent, seulement deux municipalités ont décidé de défusionner. Alors, à Québec, on se retrouve avec un conseil d'agglomération pour évidemment accommoder L'Ancienne-Lorette et Saint-Augustin-de-Desmaures. Et d'ailleurs c'est intéressant de voir... Je pense que, dans les deux cas, il y a des gens qui commencent à parler, qui commencent à dire: On devrait peut-être y retourner.
À Longueuil, une autre situation assez spéciale. Longueuil, c'est 60 %. Et les quatre autres municipalités ? on sait que c'était virulent de ce côté-là: Brossard, c'est 18 %; Boucherville, 10 %; Saint-Bruno, 6 %; Saint-Lambert, 6 %. Alors, Longueuil va facilement toujours avoir une forte majorité. Vous pensez que Saint-Bruno, Boucherville, Saint-Lambert vont être contents de cela, vont vivre avec cela?
Aux Îles-de-la-Madeleine, bien là, aux Îles-de-la-Madeleine, je vais vous dire, c'est assez particulier. Et d'ailleurs j'ai eu le plaisir d'y aller récemment, et les gens sont découragés. Découragés parce qu'aux Îles-de-la-Madeleine ? écoutez bien ça, là ? c'est la ville-centre qui se défusionne de la municipalité centrale. Ça fait mal, ça. Quand le centre part de la municipalité centrale, là, ce n'est pas évident. Et là toutes les autres municipalités autour, qui, elles, voulaient conserver les Îles-de-la-Madeleine unies, évidemment sont toutes déçues, et ça, bien c'est juste 80 %, 85 % de la population des Îles-de-la-Madeleine.
Autre situation aberrante, mon collègue député de Labelle est là, Mont-Tremblant. À Mont-Tremblant, M. le Président, la municipalité de Lac-Tremblant-Nord a choisi de défusionner. Lac-Tremblant-Nord, M. le Président, c'est 35 résidents permanents. Alors, pour 35 résidents permanents à Lac-Tremblant-Nord, Mont-Tremblant, qui avait regroupé Saint-Jovite, Saint-Jovite village et Mont-Tremblant, non sans certaines difficultés, et qui devenait une force, là, il y a un conseil d'agglomération à cause de Lac-Tremblant-Nord et de 35 résidents permanents. Je pense que c'est un nouveau slogan, là, M. le Président, peut-être du gouvernement libéral: Un citoyen, une ville, hein? Un citoyen, une ville. C'est ça, M. le Président, la démocratie libérale? La majorité qui voit son avenir compromis et décidé par une toute petite minorité. Beau résultat, M. le Président!
Alors donc, la structure qui s'alourdit considérablement, voilà c'est quoi, le résultat: complications, contradictions, insatisfactions. Et, parlant de contradictions, M. le Président, j'aimerais citer le ministre en novembre 2003, en conférence de presse, qui disait ceci: «On veut qu'il y ait une agglomération qui se tient, quand même ? bonne idée. Comment on les fait vivre ensemble? Alors, on a différents choix. On a le choix de dire: C'est la ville centrale qui va tout décider, donc on applique le principe que tu paies, mais que tu n'as rien à dire. Nous, d'habitude, le principe, c'est "no taxation without representation". Alors, c'est plutôt celui-là qu'on prend. Si tu paies, tu as quelque chose à dire.
«Donc, les mêmes parties qui partent ont quelque chose à dire. Donc, on a mis de côté la formule "[la] ville centrale décide de tout". Il faut [...] créer une autre formule.»n(12 h 10)n Bien, l'autre formule, là, on ne l'a pas vue, M. le Président, ou en tout cas elle ne fonctionnera pas, parce que, là, d'une part, le projet de loi n° 75 donne le poids démographique aux villes centrales qui vont pouvoir tout décider ? bon, jusque-là, je pense que c'est normal ? mais en même temps on donne un droit d'obstruction, et il y a cette notion de décret où le ministre peut décider de toutes sortes de choses. Alors, c'est le contraire qui va arriver, M. le Président, et évidemment on se retrouve avec le système parfait du mécontentement.
Et j'aimerais vous citer une autre personne importante, M. Yves Ryan, le président du comité de transition qui est chargé de la reconstitution des municipalités qui ont décidé de quitter la ville de Longueuil. Et là écoutez bien ce que M. Ryan nous dit: «Selon la loi, le conseil d'agglomération devra fonctionner selon la représentation au niveau de la population.» C'est ce que je viens de vous dire. «Quand il faut regarder cela de plus près, et c'est pour cela qu'il faut réfléchir beaucoup, on pourra être en présence éventuellement de la pire pomme de discorde qui n'aurait pu jamais avoir lieu.
«J'ai l'expérience du milieu municipal.» Et ça, on le sait bien. M. Ryan rajoute: «J'ai l'expérience du milieu municipal. Avec la formule de double majorité, le plus petit étant protégé», en ce sens que ça prenait un consensus beaucoup plus que le poids du vote. Et là M. Ryan de rajouter: «Il ne faudrait pas que ce soit une formule strictement imposée par la loi.» La formule n'est pas strictement imposée par la loi, M. le Président, mais je prétends qu'elle peut être imposée par le ministre, en vertu de la loi... en vertu de l'article... Je m'excuse, M. le Président, en vertu de l'article 134. Alors donc, il y a encore cette possibilité de double majorité qui est un élément extrêmement important dans le dossier municipal.
Alors, M. le Président, on se retrouve, comme vous pouvez le voir, avec le projet de loi n° 75, avec un gâchis de haut niveau, un gâchis que je qualifierais d'irréparable. Peu importe, peu importe de quel côté on regarde, on a l'impression d'être dans un cul-de-sac. Enfin, c'est comme un double cul-de-sac. Au moins, normalement un cul-de-sac, on est capable d'en sortir. Mais là c'est comme un double cul-de-sac. C'est comme un cul-de-sac bout à bout. Deux culs-de-sac bout à bout, le projet de loi n° 75: on sait comment on est entré, mais là on ne sait plus comment sortir. Et comment est-ce qu'on est entré dans le cul-de-sac? Ça aussi, M. le Président, ce serait important de le dire: C'est le fruit d'une promesse irresponsable, là, le fruit d'un calcul politique, lors du congrès libéral en 2000, où les libéraux ont adopté d'urgence une résolution pour s'engager à promettre des référendums sur les défusions. Mais, si on sait, M. le Président, comment on est entré, encore une fois je le répète, on ne trouve pas la porte de sortie tellement, tellement ce nouveau modèle est d'une complexité rare et surtout inacceptable.
Effectivement, M. le Président, ce nouveau modèle, avec les réformes du gouvernement libéral, maintenant, pour Montréal et Québec, il y aura cinq, je dis bien cinq niveaux de gouvernance. Cinq niveaux de gouvernance locale: le conseil d'arrondissement, le conseil municipal, le conseil d'agglomération, la communauté métropolitaine et la conférence des élus. Ça, c'est la simplification libérale, M. le Président. En région, il va y en avoir quatre: le conseil municipal, le conseil d'agglomération, la MRC et la conférence régionale des élus. Tout ce que l'on fait, et ce n'est pas la première fois qu'on le dit en 19 mois, là, tout ce que l'on fait, c'est de créer de nouvelles structures.
Et d'ailleurs je voudrais vous citer la journaliste Michèle Ouimet dans La Presse, en novembre 2003, qui disait: «Dans les amendements au projet de loi sur les défusions déposés hier, le ministre [...] a concocté une structure, un machin, une patente ? choisissez le mot qui vous convient ? compliquée qu'il appelle le conseil d'agglomération.» C'est ce que j'ai essayé de vous expliquer tout à l'heure. «Il est étonnant de voir le gouvernement se jeter dans l'aventure des défusions ? et maintenant c'est la réalité ? avec un projet de loi aussi mal ficelé. En essayant de faire plaisir à tout le monde et à son père, il a engendré une structure qui a toutes les chances de se transformer en monstre», M. le Président. Bien, voilà, aujourd'hui, avec le projet de loi n° 75, bien on assiste malheureusement à la naissance du monstre.
Alors, à titre de porte-parole aux affaires municipales, je dois le reconnaître, j'avais offert au ministre ma collaboration pour une critique constructive au cours des prochains mois. Mais là, M. le Président, je dois vous avouer que ce ne sera pas possible. Dans le cas du projet de loi n° 75, ce ne sera pas possible de vouloir construire tellement les fondations sont mal foutues, M. le Président. Et justement une des grandes faiblesses ? une des grandes faiblesses ? de ce projet de loi, en plus de sa complexité et de son inefficacité, c'est le recul démocratique qu'il constitue. Et, tout à l'heure, vous avez entendu les citations des villes défusionnées qui le disaient également. Les conseils d'agglomération vont être comme de grosses assemblées qui vont fonctionner de façon très mécanique, là, très mécanique, parce qu'ils ont le mandat d'une résolution, le vote est quasiment décidé à l'avance, alors il n'y aura pas beaucoup de débats réels là-dessus. Et je recite à nouveau Michèle Ouimet qui dit: «Qui va talonner les maires, leur demander des comptes, poser des questions, contester leurs décisions? Personne.» En parlant du conseil d'agglomération, elle dit: «Le conseil d'agglomération va fonctionner comme un gros conseil d'administration. C'est un recul démocratique inacceptable.» Et pourtant, M. le Président, c'est dommage parce que les nouvelles villes, elles étaient en train de se construire. Et là on a jugé les nouvelles villes avant qu'elles soient arrivées à maturité, et on est arrivé avec cette ouverture à des défusions possibles. Et je rappelle que le gouvernement libéral, à une autre époque, en avait fait, des regroupements, des regroupements qui ont fort bien fonctionné. On n'a qu'à penser à Laval. Personne ne veut plus défusionner, à Laval, bien entendu; c'est une des grandes villes du Québec. Mais, si on avait permis, deux ans après le regroupement de Laval, si on avait permis, à ce moment-là, à Laval, aux citoyens de Laval de défusionner, bien je suis à peu près certain que les gens auraient choisi de défusionner, M. le Président.
Alors, voilà. Voilà comment ça va fonctionner. Ou plutôt, voilà comment ça ne fonctionnera pas, M. le Président. D'un côté, la municipalité centrale, avec le poids du nombre, donc une majorité permanente, donc on votera pour rien parce qu'à chaque fois qu'on va voter on va savoir le résultat à l'avance. Et cette municipalité centrale, elle va être liée par la résolution du conseil municipal. Alors donc, on va parler pour rien. On va parler pour rien au conseil d'agglomération. Ce n'est pas là que ça va se passer. Ils vont arriver avec une résolution qui les engage. Et la municipalité centrale va venir redire au conseil d'agglomération ce qui aura été décidé dans son conseil municipal. Donc, elle va tout faire en double. Voter pour rien, parler pour rien, et tout faire en double, M. le Président, voilà le résultat de la démocratie libérale, voilà la démocratie libérale à l'oeuvre, M. le Président.
n(12 h 20)n De l'autre côté, du côté de la municipalité défusionnée, bien, elle, elle est assurée de perdre tous ses votes. Elle aussi, elle est liée par résolution. Donc, elle est liée par résolution, mais elle est assurée de perdre tous ses votes. Donc, par définition, elle est insatisfaite, ça va de soi. Et là on lui donne... on donne à un groupe de gens très insatisfaits ? on l'a vu dans les découpures de presse ? on donne à des gens très insatisfaits une arme de destruction incroyable vis-à-vis la municipalité centrale, c'est-à-dire un droit systématique d'obstruction. Et ça, M. le Président, c'est avant les négociations. C'est avant les négociations, on parle de recours aux tribunaux. C'est avant les négociations, ça. Qui sait ce que le gouvernement va céder de plus aux villes défusionnées dans tous ses décrets à venir, décrets évidemment qui sont pris derrière portes closes? Jusqu'où le gouvernement libéral ? qui jusqu'à maintenant n'a pas beaucoup hésité ? jusqu'où le gouvernement libéral va-t-il aller dans le démembrement, la désorganisation municipale?
Et c'est quand même paradoxal, M. le Président, je dirais même presque loufoque, c'est un recul démocratique supposément au nom de la démocratie. Vous vous souvenez, le gouvernement libéral ? vous vous en souvenez sûrement, M. le Président ? les libéraux parlaient de fusions forcées. Un gouvernement démocratiquement élu, le nôtre, qui vient améliorer, bâtir, développer des villes plus fortes, qui vient faire ce qui était souhaité, souhaité depuis une quarantaine d'années par l'ensemble du Québec, et les libéraux parlaient de fusions forcées. Bien, je vais vous dire, M. le Président, c'étaient des fusions forcées par le temps et par le gros bon sens. Or, les libéraux, qu'est-ce qu'ils font avec le projet de loi n° 75? Ils imposent, ils imposent un modèle. Le projet de loi n° 75 qui est devant nous, il impose un modèle ? un modèle tout croche, mais c'est un modèle quand même ? il force ce modèle. C'est vrai qu'ils le rentrent dans la gorge des villes, de toutes les villes et des villes défusionnées. Ils leur rentrent tellement dans la gorge que justement, depuis la présentation du projet de loi n° 75, bien on entend hurler les villes défusionnées.
On sait très bien, M. le Président, que les villes défusionnées veulent retourner à leurs anciennes municipalités, à leur statu ante. C'est ça qu'elles veulent. Le modèle du projet de loi n° 75, M. le Président, il n'a rien à voir avec le statu quo ante, on en convient. Mais le gouvernement l'impose, le gouvernement le force. Ce sont des agglomérations forcées, M. le Président. Alors, j'ai bien l'impression que même les villes défusionnées, même les villes défusionnées vont dire: Le 14 avril 2003, on n'a pas voté pour ça. Ça va bien, M. le Président.
Alors, voilà ce qui arrive, voilà ce qui arrive, M. le Président, quand on promet une chose et son contraire. Quand on promet une chose et son contraire, on ne peut pas livrer marchandise malgré tous les efforts du ministre. Et, là-dessus, je dois saluer le ministre. Je pense que, si jamais le ministre quitte la politique, je lui suggère le Cirque du Soleil, le Cirque du Soleil soit comme funambule, M. le Président, de marcher sur un fil, ou même mieux, comme contorsionniste, M. le Président. Sauf que, là, le contorsionnisme, ça va avec un ministre mais pas avec un projet de loi tordu comme ça, M. le Président, là. Et là le produit final qu'on nous livre, bien c'est la contradiction, c'est la complexité faite loi. C'est ça, le projet de loi n° 75.
Car il faut rappeler ce qui s'est passé dans la dernière campagne électorale, M. le Président, en plein débat, en plein débat, le premier ministre actuel a pris un engagement solennel. Je le cite: «Moi, je souhaite que les nouvelles villes réussissent, ce qui, à mon avis, ne peut se faire qu'en respectant la démocratie. Comme contribuable, j'ai un préjugé favorable aux nouvelles villes.» Qu'a retenu la population de cette confession du premier ministre en plein débat? Qu'a retenu la population? Elle a retenu une chose: la réussite des nouvelles villes, M. le Président. Qu'est-ce que le premier ministre voulait que la population retienne avec cette confession? Il voulait que la population retienne ce qu'elle a retenu, la réussite des nouvelles villes, mais avec un astérisque. En relisant la citation, il y avait effectivement un astérisque, la petite phrase sur la démocratie pour pouvoir procéder aux défusions tout en faisant la confession. Mais ça, personne ne s'en est souvenu, évidemment, M. le Président. Une chose pour se faire élire au Québec, la confession, et une autre chose, son contraire, pour se faire élire dans les villes défusionnées, M. le Président. Le résultat? Une structure beaucoup plus complexe qui affaiblit, paralyse les grandes villes, un recul démocratique qui insatisfait au plus haut point ceux pour qui on a fait cette erreur. Car, M. le Président, il s'agit bien, ici, d'une erreur, une erreur historique.
Voilà le triste héritage, le triste héritage que le gouvernement nous laisse après seulement 19 mois. Il n'est pas encore mort, le gouvernement, que déjà on a un triste héritage. Et il faut juger l'action d'un gouvernement à ses résultats. Bien, en voilà un qui est pitoyable, M. le Président, avec lequel malheureusement 11 agglomérations, dont nos trois plus grandes villes, vont devoir vivre.
Malheureusement, justement, M. le Président, ce sont les villes qui vont devoir payer les pots cassés par le gouvernement libéral. Et, parlant de pots cassés, ce n'est pas facile de réparer des pots cassés, à moins que les morceaux du pot reviennent dans le pot d'eux-mêmes. Mais ça, dans l'histoire des pots cassés, ça ne s'est pas fait souvent, M. le Président. Alors, voici donc le gâchis libéral des défusions qui est maintenant fait loi, le projet de loi n° 75.
Je le répète, M. le Président, en terminant, nous avons été et nous sommes vraiment pour la construction des villes plus fortes au Québec. C'est ce qui nous a guidés, au gouvernement, un seul intérêt, l'avenir du Québec, et non pas l'avenir de notre parti politique. Nous sommes contre les défusions, nous avons voté contre la loi n° 9 sur les défusions, nous voterons contre l'adoption de principe du projet de loi n° 75, car le projet de loi n° 75, M. le Président, c'est une nouvelle page de l'histoire du Québec, une des pages les plus tristes, celle de l'erreur municipale du gouvernement libéral, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Blainville. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, je veux joindre ma voix à celle de mon collègue de Blainville, le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales, à l'étape de l'adoption de principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations, M. le Président.
Ça va mal parce que, juste à l'étape de l'adoption de principe, M. le Président, on mentionne notre désaccord, notre grand désaccord, particulièrement pour les citoyens qui ne sont pas contents, d'une part. Les fusionnistes, les défusionnistes, les élus, personne n'est en accord, M. le Président, avec ce projet de loi n° 75 que nous avons devant nous. Je rappelle que ce projet de loi là, on n'y voit qu'un projet de loi électoraliste avec beaucoup d'improvisation, M. le Président. On veut plaire à tout le monde et on plaît à personne.
Je rappelle le communiqué que nous avons émis, de la part de mon collègue le porte-parole de l'opposition officielle, le député de Blainville, qui donne, je pourrais dire, dans un premier temps, les éléments de contradiction que nous voyons dans le projet de loi n° 75.
D'abord: «Nous savions depuis longtemps que l'aventure des défusions était un immense recul pour les municipalités québécoises. Toutefois, en plus de marquer la consécration de ce regrettable cafouillage, le projet de loi n° 75 démontre que le gouvernement ne sait pas où il s'en va, puisqu'il se donne la marge de manoeuvre pour changer de cap au fur et à mesure que les problèmes s'empileront. Malheureusement, la confusion municipale libérale se poursuit», de dire mon collègue.
Et je poursuis dans ce qu'il énonçait: «Nous disons depuis longtemps que le conseil d'agglomération est une structure qui alourdira le processus décisionnel municipal et qui enlèvera une partie de leur pertinence aux conseils municipaux. Mais, comme il y a une pression de la part de certains leaders défusionnistes, notamment à Longueuil, pour ramener une forme de règle de "double majorité" au conseil d'agglomération comme celle qui paralysait anciennement la Communauté urbaine de Montréal, nous nous attendions à ce que le projet de loi n° 75 ferme définitivement la porte à cette éventualité. Malheureusement, le projet de loi ouvre la voie à cette possibilité en repoussant à plus tard le choix du mode de prise de décision par le truchement d'un décret d'agglomération.»n(12 h 30)n Il poursuit, M. le Président: «De plus, à l'article 126 du projet de loi, le gouvernement souhaite se donner le pouvoir de modifier par décret toute charte d'une municipalité centrale victime d'un démembrement. Pourtant, plusieurs de ces chartes sont des lois votées en bonne et due forme par l'Assemblée nationale. "Nous connaissons trop bien la propension de ce gouvernement pour l'improvisation lorsqu'il mène ses dossiers. Il est inquiétant de constater qu'il souhaite se donner toute la latitude pour improviser sans se préoccuper de justifier ses actions. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le gouvernement [...] reconnaît là implicitement que les défusions seront un panier de crabes pendant longtemps et qu'il est mieux pour lui de pouvoir agir sans le regard scrutateur de l'opposition et des médias"», M. le Président.
Je peux vous parler particulièrement, M. le Président, des conséquences de ce projet de loi n° 75 mais aussi des derniers mois comme députée de Montréal. J'ai une circonscription montréalaise, M. le Président, vous le savez bien, comme vous d'ailleurs, dans l'extrême est de Montréal. Dans l'est particulièrement de Montréal, il n'y a qu'une ville qui s'est défusionnée, et c'est la ville de ma circonscription qui se nomme la ville de Montréal-Est. Bien que cette municipalité a été fusionnée, maintenant elle a fait le choix, le 20 juin dernier, de se défusionner. Je respecte leur décision, M. le Président, mais je ne crois pas qu'ils seront bien desservis avec tout ce cafouillage de la dernière année que nous avons devant nous et par le dépôt de ce projet de loi n° 75.
Actuellement, tout le monde est dans le doute, personne n'est rassuré, on ne sait pas trop ce qui se passe, M. le Président. On s'imaginait que le projet de loi va venir régler des choses. Actuellement, j'ai beaucoup d'appels concernant cette suite d'événements qui se poursuivront d'ici les prochaines semaines. Les gens sont inquiets. J'ai le ministre, ici, M. le Président, il serait important qu'on puisse au moins penser aux citoyennes et aux citoyens qui ont cette grande inquiétude. Les citoyens de Montréal-Est ont le droit de réclamer une meilleure qualité de vie, et je les soutiens dans ce sens, comme tous les citoyens du quartier aussi de Pointe-aux-Trembles, avoisinant aux quartiers de Montréal-Est particulièrement.
Comment les citoyens pourront tirer le meilleur? C'est ça, la préoccupation. On pourrait adopter des projets de loi, on pourrait amender des projets de loi, ce qu'il est important de se rappeler, M. le Président: que, les élus que nous sommes, il faut être capables de se préoccuper avant tout de ce que les citoyens vivent au jour le jour, M. le Président. Alors, ils sont inquiets présentement. Et j'invite, M. le Président, j'invite le ministre à pouvoir éclaircir ses positions et nous enlever de ce cafouillage et de cette improvisation-là. On voit, juste par le conseil d'agglomération ? puis j'y reviendrai tout à l'heure ? c'est assez, je pourrais dire, cafouilleux de voir ce qu'on retrouve dans le projet de loi.
Je voyais, ce matin, la réponse du ministre par rapport à mon collègue, à la période de questions, ce matin, il nous parlait de l'article 57, qu'on avait toutes les réponses dans l'article 57. On regarde l'article 57, puis il y a trois alinéas, la réponse n'est pas nécessairement si claire que ça, parce que, plusieurs de ces articles-là, il faut quand même comprendre qu'ils sont reliés. Alors, mon collègue lui a rappelé l'autre article plus loin qui ne venait pas nécessairement clarifier la chose, M. le Président.
Outre ça, M. le Président, il reste quand même, comme municipalité de Montréal-Est, l'inquiétude que les citoyens vivent actuellement et en même temps que la grande ville de Montréal. Alors, comme députés de Montréal, on voit un peu ce qui se passe, on le voit dans les journaux, on lit, tous, toutes les discussions qu'il y a à la grande ville de Montréal présentement, autant de l'opposition, les réactions de l'opposition que les réactions du maire et des gens au pouvoir présentement, ça s'en va de tout bord tout côté.
Les gens parlent particulièrement de la discussion actuellement du nombre d'élus. Les élus, on ne sait plus combien d'élus on va avoir. Si les propositions de la ville s'en vont avec beaucoup d'élus... Actuellement, nous en avons quatre dans la circonscription de... dans le quartier et arrondissement Pointe-aux-Trembles?Montréal-Est?Rivières-des-Prairies. Il semblerait que, là, s'il y avait un maire qui serait élu d'une façon universelle, on a la possibilité d'avoir six conseillers et que nous en avons trois, présentement, à quatre. Bon. C'est ce genre de discussion là, là, que les citoyens vivent, là. Ça fait qu'on a beau avoir le projet de loi qui est là, là, c'est le genre de discussion entre les intentions du ministre et les intentions de la ville même, qui prend des décisions et qui aura à prendre des décisions. Vous imaginez, rendu au citoyen, comment que le citoyen est tout mêlé dans la situation qu'il peut vivre dans sa petite municipalité.
La municipalité de Montréal-Est, je dois le rappeler, c'est 3 488 personnes. Alors, ce n'est pas nécessairement beaucoup de personnes dans ces millions-là qu'il y a à Montréal, mais ils ont le droit de vivre, d'avoir une qualité de vie aussi importante que les gens de l'autre bout de l'île ou que les gens qui se retrouvent, soit en Abitibi ou à Sherbrooke. Tout le monde a droit à son bonheur au Québec, on le sait bien.
Mais j'aimerais rappeler, M. le Président, que les libéraux particulièrement aiment bien dire que le Parti québécois a imposé des nouvelles villes et que leur gouvernement donne le choix particulièrement aux citoyens. On va rappeler certaines choses, M. le Président. On sait que le premier choix des défusionnistes était un retour intégral aux anciennes municipalités. Le gouvernement n'a pu leur offrir ce choix. Il a dû leur imposer une fiscalité d'agglomération, ce qui démontre bien la nécessité de la réforme municipale entreprise par le Parti québécois, d'une part. Le choix était le suivant: faire partie d'une grande ville où l'on peut voter pour le maire qui prend les décisions, ou se défusionner et être à la merci d'un conseil d'agglomération qui pourra taxer les citoyens et dépenser leur argent comme bon lui semble, sans avoir leur approbation, M. le Président.
Les défusionnistes ont déjà promis au ministre, M. le Président, une bataille juridique en règle contre le gouvernement et contre les grandes villes. Alors, on n'a pas fini, M. le Président, de se retrouver devant les cours. Les défusionnistes ont aussi promis de bloquer le fonctionnement du conseil d'agglomération, ce que le projet de loi est en train aujourd'hui, lorsqu'il est déposé... dernièrement par le ministre, est en train de donner la composition, le fonctionnement, la création du conseil d'agglomération. Alors, avec une grande ville, le maire et son administration ont intérêt à être au-dessus de la mêlée lorsqu'un différend surviendra entre deux secteurs particulièrement. Le maire cherche les compromis les plus satisfaisants pour tout le monde car sa base électorale est à la grandeur de la ville. Les maires des villes défusionnées n'auront pas de souci de compromis nécessairement. C'est le retour aux poursuites judiciaires en série, M. le Président, tout le monde le dit. Je ne sais pas si le ministre le sait, mais tout le monde le dit, ce n'est pas fini.
On a jugé déjà les nouvelles villes avant qu'elles soient déjà rendues à maturité. À l'époque où les gouvernements libéraux avaient un sens des responsabilités plus élevé, ils ont effectué des regroupements municipaux par voie législative eux-mêmes. Ces regroupements ne se sont pas toujours faits sans heurts ? sans heurts, h-e-u-r-t-s ? mais le gouvernement est allé de l'avant parce qu'il avait l'intérêt commun en tête, à l'époque, M. le Président. Dans plusieurs des cas, si on avait offert un outil de démembrement à ces communautés, deux ans après les regroupements, elles l'auraient peut-être choisi tant les émotions étaient encore présentes à ce moment-là. L'appartenance de la nouvelle ville ne s'était pas encore développée et la nouvelle ville n'avait pas encore pu récolter le fruit de ses efforts.
Alors, M. le Président, on va revenir à la petite histoire des regroupements telle quelle. Les historiens nous rappellent souvent que de lire l'histoire nous fait mieux comprendre notre présent. Au Québec, depuis 40 ans, 16 législations de regroupements ? entre autres, celle portant sur la ville de Mirabel par l'Assemblée nationale ? ont été adoptées. De ce nombre de 16 législations de regroupements, 13 l'ont été par les gouvernements libéraux. De tout temps, les regroupements par législation ont été la règle plutôt que l'exception, M. le Président.
Je vais vous rappeler, dans la liste des municipalités fusionnées sans consultation par les gouvernements libéraux: 1961, Chomedey; 1962, Alma; 1965, Bécancour; 1965, Laval; 1971, Percé; 1971, Gaspé; 1971, Mirabel; 1974, Jonquière; 1974, La Pêche; 1974, Pontiac; 1974 encore, Gatineau, Buckingham; 1975, Beauport; 1975, Charlesbourg; 1975, Saint-Hyacinthe, Chicoutimi, La Baie, M. le Président. Voilà des regroupements qui se sont faits sous le gouvernement libéral de l'époque et jusqu'à aujourd'hui, M. le Président.
Donc, cette petite histoire, il faut se la rappeler, parce qu'on peut bien parler des regroupements... Et je me souviens, lors du projet de loi que nous avions adopté, toute la montée d'esclandres qu'il y avait de l'autre côté, par rapport aux regroupements. Et de penser, M. le Président, au bien commun du Québec...
n(12 h 40)n Là, avec le projet de loi n° 75 et le projet de loi n° 9, avant, qu'on avait adopté, il faut se rappeler, en bâillon, hein, en bâillon, l'année passée, ça fait déjà un an de ça... Voilà un an, en bâillon, on a eu plusieurs projets de loi. «Bâillon» veut dire que c'est un choix gouvernemental qui se fait et, au-delà du temps accordé pour faire les consultations et au-delà du temps accordé dans le processus parlementaire, on nous impose un projet de loi en l'espace de peu de temps... et nous dire que c'est comme ça qu'on gouverne. Et puis, à travers tout ça, M. le Président, on nous reprochait de ne pas assez écouter, de ce côté-ci de la Chambre. Alors, évidemment, on n'a pas de leçons à recevoir de la façon que le gouvernement libéral fonctionne de ce temps-ci.
Au niveau du projet de loi n° 75 tel quel, M. le Président, cette loi-là qui est sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations, on retient particulièrement quatre éléments d'importance: les compétences d'agglomération; la gouvernance d'agglomération; les finances et fiscalité d'agglomération; et les pouvoirs pour le gouvernement d'adopter sans décret. Si je regarde particulièrement les compétences d'agglomération, on parle particulièrement d'alimentation en eau, assainissement des eaux, la gestion de voies artérielles. Alors, on rentre vraiment dans le quotidien du fonctionnement d'une ville, M. le Président. Ce n'est pas un sujet qui a été... qui n'a pas été très couru. C'est tout le contraire. Très courues ont été les fusions municipales.
Je regarde, les dernières semaines, M. le Président, voici ici une liste d'articles de journaux sur le projet de loi n° 75, d'une part, et sur le projet de loi n° 9, juste la fin du projet de loi n° 9, avant que le ministre dépose son projet de loi. En peu de temps, M. le Président, voici tous les articles de journaux qui ont comporté particulièrement sur les affaires municipales et sur la volonté du gouvernement de voir déposer ce projet de loi là n° 75, et qu'on retrouve...
Je vois des titres, M. le Président: Les villes retrouvées, une lutte de pouvoir s'engage. Le conseil d'agglomération jugé «invivable». Les bonnes intentions: «Si on ne réagit pas vite, on va se retrouver avec les meilleures intentions du monde, avec un système politique qui mettra en péril la démocratie municipale.» Et ainsi de suite, M. le Président. Le pari de la démocratie. L'alternative aux démembrements. Le comité du Oui et du Non, ça va bien, M. le Président, on se comprend bien. Montréal pourrait devenir ingouvernable. «Un conseiller et des observateurs tirent la sonnette d'alarme à propos de la démocratie montréalaise», entre autres, et etc., M. le Président. On en a, on en a des centaines de communiqués et d'articles de journaux qui sont devant nous en cette période par rapport à ce projet de loi là, ce qui veut dire, ce qui dénote, M. le Président, que c'est un sujet fort important, puisqu'il touche le quotidien des gens dans chacune de nos circonscriptions mais dans chacune des villes et des municipalités du Québec.
Mon collègue rappelait le nombre de municipalités et le nombre de petites municipalités à travers le Québec. Donc, ce sentiment, ce sentiment de s'approprier les décisions de leur administration municipale est loin de faire consensus présentement. Dans les 11 villes démembrées, particulièrement que... lors du projet de loi n° 9, le projet de loi prévoit la création maintenant d'un conseil d'agglomération qui prendra les décisions concernant les compétences suivantes. Donc, c'est maintenant le conseil d'agglomération qui va prendre les décisions sur l'évaluation municipale, sur le transport collectif des personnes, sur les voies de circulation constituant le réseau artériel à l'échelle de l'agglomération, sur tout lieu ou toute installation qui est destinée à recevoir la neige ramassée sur le territoire de plusieurs municipalités liées, de l'alimentation en eau et l'assainissement des eaux, de l'élimination et la valorisation des matières résiduelles ainsi que l'élaboration et l'adoption du plan de gestion de ces matières, des cours d'eau municipaux, des éléments de sécurité publique que sont les services de police, de sécurité civile et de sécurité incendie, le Centre d'urgence 9-1-1, l'élaboration et l'adoption du schéma de sécurité civile et du schéma de couverture de risques en matière de sécurité incendie, aussi la cour municipale, le logement social et l'aide destinée spécifiquement aux sans-abri, les éléments du développement économique que sont la promotion du territoire de toute municipalité, l'accueil des touristes, tout centre local de développement, tout centre de congrès, port ou aéroport, tout parc industriel ou embranchement ferroviaire, toute aide destinée spécifiquement à une entreprise. Ce n'est pas rien, M. le Président. On voit bien qu'il s'agit de certaines des compétences municipales les plus cruciales qui seront décidées au conseil d'agglomération.
Les décisions se prendront dans ces domaines-là, un, par les différents conseils municipaux des villes qui vont former l'agglomération. Ils auront à informer le conseil des sujets qui doivent faire l'objet des délibérations. C'est le maire qui devra faire ça au préalable, d'exposer la position qu'il entend prendre, discuter de celle-ci avec les autres membres présents et faire rapport des décisions prises par le conseil d'agglomération lors d'une séance précédente. Alors, vous imaginez, M. le Président, on a déjà hâte de voir les séances passionnantes des conseils municipaux impliqués à ce moment-ci.
On dit aussi que le gouvernement libéral s'est fait le grand défenseur de la réduction de la taille de l'État. Voilà qu'il crée une nouvelle structure qui ne servira qu'à dédoubler les débats qui se feront lors des conseils municipaux. Tout ça, ne l'oublions pas, M. le Président, que les libéraux ont défait la seule vraie solution équitable et démocratique: une seule ville unifiée, avec des conseillers de tous les districts et un maire qui prennent des décisions s'appliquant à l'ensemble du territoire, et financée par les impôts approuvés par l'ensemble des élus, M. le Président.
En soi, les défusions sont néfastes pour le développement de nos collectivités. Voilà pourquoi l'opposition officielle s'est opposée à l'adoption de la loi n° 9 qui mettait en branle la mécanique de démembrement, M. le Président. Toutefois, la loi n° 9 avait le mérite d'être plus précise et plus complète que ne l'est le projet de loi n° 75 actuel.
Tout d'abord, la nature, la composition et les règles de fonctionnement du conseil d'agglomération seront décidées ultérieurement par le gouvernement, derrière des portes closes, par décret gouvernemental. Pourquoi le gouvernement agit ainsi, alors que toutes ces questions étaient déjà prévues dans la loi n° 9, M. le Président? Le ministre des Affaires municipales a répété ad nauseam qu'il fallait que les citoyens connaissent... dans le cadre sur lequel ils étaient appelés à voter. Tout à coup, le cadre change.
On voit bien, M. le Président que, dans le projet de loi n° 75, la marque des libéraux, c'est l'électoralisme, le cafouillage et l'improvisation. Depuis le début de la mésaventure des défusions municipales, les libéraux ont laissé les calculs politiques à courte vue prendre la place de la recherche du bien commun. On connaît la propension du gouvernement libéral pour l'improvisation en se donnant le pouvoir de décider de plusieurs enjeux majeurs par décret, M. le Président. Le gouvernement veut pouvoir imposer jusqu'à la fin. Et la fin justement, c'est pour quand, M. le Président? Grâce aux bons soins du Parti libéral, on peut, sans prendre de risque, affirmer que l'on entendra parler longtemps de cette décision désastreuse et que les gouvernements qui se succéderont se demanderont pourquoi un gouvernement a si volontairement nui aux municipalités du Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, je vais le faire, mais étonné. J'aurais souhaité entendre Mme la députée de La Peltrie, M. le député d'Iberville, qui a eu des propos d'ailleurs fort intéressants sur le sujet, M. le député de Saint-Jean, d'ailleurs qui a vécu une expérience tout à fait exceptionnelle dans sa municipalité et sa région. Donc, vous comprendrez que je suis un peu abasourdi de voir qu'aucun député conservateur... libéral, pardon, se lève pour défendre la vision du ministre des Affaires municipales.
M. le Président, ma collègue a bien fait de rappeler tantôt les propos éminemment vertueux qui ont été tenus par le ministre des Affaires municipales lorsqu'il parlait de démocratie, etc., en citant avec une abondance ? j'essaie d'ailleurs... parce que j'avais la même liste ? citant le nombre de municipalités qui, durant les années où le Québec a été gouverné par un Parti libéral qui était libéral, ce qui n'est plus le cas actuellement, c'est un parti conservateur... Mais, à l'époque où le Parti libéral était libéral et qu'il était dirigé par une figure aussi éminente que Jean Lesage, et après Robert Bourassa, à qui on a reproché peut-être bien des choses, mais l'histoire jugera finalement, donc il y a eu des fusions municipales dites forcées.
Donc, je suis un peu étonné, j'étais étonné et je suis toujours encore étonné, M. le Président, de voir que, quand le ministre a proposé sa loi n° 9 à l'époque, il ne l'a pas rendue rétroactive de façon à réparer ce tort considérable, ce déni, ce déni de démocratie que le Parti libéral à l'époque avait pratiqué à l'égard de plus de 60, 70 villes du Québec qu'il avait regroupées, donnant place d'ailleurs à la ville de Gatineau. J'aurais aimé entendre d'ailleurs le député de Gatineau à ce sujet-là. Mais malheureusement, M. le Président, le ministre n'a pas donné une loi à portée rétroactive de façon à réparer ces crimes contre la démocratie ? puisque c'est le vocabulaire qu'il a employé à notre égard ? ces crimes contre la démocratie qui ont été commis sous des gouvernements dont il se réclame, à mon point de vue, à tort et à travers, puisqu'il n'y a plus rien de ressemblant entre ce qui se passe aujourd'hui dans cette formation politique et ce qu'il y avait avant 1998, M. le Président, avec l'arrivée d'un chef conservateur comme chef de ce parti.
n(12 h 50)n M. le Président, quand on regarde très attentivement ce que le ministre nous promet... enfin ? le ministre nous promet ? le ministre nous soumet, dis-je, et que nous n'avons pas du tout l'intention d'accepter, on s'aperçoit d'une chose. La première est que ciel que ça a coûté cher, cette histoire-là. Ciel! que ça a coûté cher. Alors qu'on se voit régulièrement coupés de partout, qu'un nombre incroyable d'organismes assaillent nos bureaux, M. le Président, cherchant de façon désespérée le moindre sou pour leur permettre de compléter des activités où ils aident les gens qui sont dans le besoin, celles et ceux de nos compatriotes qui sont malheureusement les plus démunis, on voit mais comment de millions de dollars ont été dépensés dans cette furie, pour ne pas dire folie défusionniste. 100 000 $, le référendum pour Saint-Hyacinthe, M. le Président, 100 000 $. Vous imaginez que ce n'est pas quelque chose, ça? 100 000 $. Si je regarde aussi, c'est 1 million et quelques à Longueuil, 1 million et quelques à Laval. Vous imaginez, M. le Président, ce que cela peut représenter comme argent? Des frais énormes. Il y en a tellement que j'ai un peu de difficultés à les retrouver tellement les chiffres sont astronomiques.
Mais on pourrait facilement dire que c'est près de 20 millions de dollars sans aucun doute, ce que cela a coûté. Je veux dire, le prix de la zizanie instaurée et institutionnalisée au Québec par le ministre des Affaires municipales avec son gouvernement, eh bien, c'est au moins deux douzaines de millions de dollars qui auraient été bien mieux placés ailleurs. Je suis persuadé que le député de Mont-Royal, ministre de la Santé, aurait bien aimé les avoir, ces 20 millions de dollars là. Il aurait bien aimé les avoir, ces 20 millions là. Mais ça a été dépensé dans cette histoire où là d'ailleurs les gens veulent revenir. Ça m'apparaît intéressant.
Tantôt, j'exprimais mon regret de ne pas entendre la députée de La Peltrie. Ah, elle dit que c'est formidable. Mais par contre, là, on s'entend bien que, dans les deux parties qui la concernent dans sa circonscription, eh bien, ça ne va pas. L'Ancienne-Lorette dit: Bien oui, mais il faudrait peut-être, puis etc. Et donc on est en train, M. le Président, de voir dans quelle mesure on ne devrait pas redevenir Québécois, dans le sens de citoyens de la grande ville de Québec, alors qu'on se retrouve isolés. C'est pour ça, M. le Président, que j'aurais aimé entendre ? je suis persuadé qu'il va le faire parce que c'est un honnête homme, c'est un honnête homme ? le député d'Iberville qui disait: Mais la fusion a été merveilleuse chez nous, notamment au niveau du transport en commun. Il s'en félicitait. Alors, j'ose espérer que sa formation politique va le laisser s'exprimer, qu'il nous dise le bien-fondé du geste qu'avait posé le gouvernement précédent en imitant les actions que le gouvernement libéral, dans le vrai sens du terme, parce que, je le répète, ce n'est malheureusement plus le cas au Québec... Le gouvernement libéral avait privilégié l'intérêt commun et non pas, et non pas, M. le Président, les petits intérêts mesquins. Vous voyez?
Mais qu'est-ce que ça donne, tout cela? Eh bien, là, dans le cas qui me préoccupe plus particulièrement, M. le Président, c'est la région de Montréal, où là reprennent des comportements que jadis je n'ai pas hésité à qualifier de rhodésiens, de rhodésiens. Quelle étonnante chose d'apprendre, M. le Président, quelle étonnante chose d'apprendre, en plein été, en plein été... Et je suis persuadé que la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration ? c'est elle qui, au premier chef, est chargée de l'intégration et de l'harmonie entre les citoyens du Québec ? va être préoccupée par la chose. Eh bien, un club de rugby qui pratiquait depuis 128 ans sur un terrain de la ville de Westmount s'est fait dire: Vous n'êtes pas assez Westmontais, donc vous devez quitter, il n'y a pas assez de citoyens de Westmount qui font partie de ce club pour que vous utilisiez ce terrain. Ces gens-là, n'ayant pas tous les moyens d'habiter ces petites mansardes qu'on retrouve sur Upper Grosvener et etc., avaient quand même le privilège de pouvoir jouer sur un terrain qui somme toute est un terrain public, pour tout le monde, eh bien, ils se sont fait expulser.
Ça me rappelle un peu d'ailleurs ? je suis persuadé que le député de Mont-Royal se rappelle ? où malheureusement on avait voulu interdire à ces pauvres enfants de Parc-Extension de traverser la clôture de ville Mont-Royal, la journée de l'Halloween. On avait tenté d'empêcher ces pauvres petits vampires et ces petits monstres adorables d'aller chercher quelques bonbons et quelques sous pour l'UNICEF. Heureusement, le maire de ville Mont-Royal à l'époque avait donné raison et blâmé son conseil municipal d'avoir agi de la sorte. Alors, M. le Président, on revient à des comportements que je n'hésite pas à qualifier de rhodésiens, de rhodésiens. Eh bien, il y avait une magnifique bibliothèque à Côte-Saint-Luc. Eh bien, Côte-Saint-Luc maintenant se dit: Mais c'est épouvantable, il y a des gens d'ailleurs qui osent venir chez nous, qui osent venir chez nous, qui osent venir chez nous!
Mais, si nous avions, nous, dans la grande ville, la même attitude qu'ils ont depuis quelques mois, mais que se passerait-il, M. le Président? J'en suis au point où j'ai envie de demander au ministre des Transports de modifier le système d'immatriculation des véhicules et d'imiter certains pays européens où on voit très clairement, dans la plaque numérologique, de quelle ville ils sont originaires. Ce qui fait que, quand les gais de Westmount ? parce qu'il y en a, il y en a sans aucun doute, opulents, mais il y en a ? viennent dans les bars de mon quartier prendre un verre, eh bien, on va les pourchasser en disant: Mais qu'est-ce que vous faites dans les rues de notre ville, prendre nos places de stationnement? Eh bien, avec un comportement comme celui-là, vous vous imaginez la réaction, le tollé qui existerait un peu partout, hein, le tollé qui existerait un peu partout. Nous acceptons tout le monde. La ville est à tout le monde. Nous n'avons pas de comportements rhodésiens, M. le Président, comme il semble vouloir s'en pratiquer à Westmount. Nous n'avons pas cette attitude-là.
Et puis, si je regarde, en plus, bon, de toute façon, M. le Président, cette loi, ça a été un concoctage de toute dernière minute qui ne fonctionne pas, un concoctage pour des avantages à court terme électoraux. La prochaine élection dira bien ce que ça va donner. Mais ça ne règle rien et cela entrave le développement de la métropole du Québec, M. le Président. Heureusement, la capitale nationale en sort moins écopée, mais la métropole, elle, en sort profondément divisée là-dessus, avec une confusion au niveau des pouvoirs, et tout cela. Et, on le sait, on le dit, on le répète, c'est de toute évidence, le phénomène est mondial, la concurrence, l'émulation se fait maintenant à partir des grands ensembles urbains. Si vous le permettez, M. le Président, je reprendrai cet après-midi.
Le Vice-Président (M. Cusano): Pardon?
M. Boulerice: Si vous le permettez, je reprendrai cet après-midi, puisqu'il est 13 heures.
Le Vice-Président (M. Cusano): Oui, oui. Justement, M. le député de Sainte-Marie, j'étais en train de me lever pour justement suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 6)
La Vice-Présidente: Alors, Mmes, MM. les députés, l'Assemblée poursuit, cet après-midi, le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 75 ? vous pouvez vous asseoir ? Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. Alors, au moment de la suspension du débat, la parole était au député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, et on m'informe qu'il lui restait environ 12 minutes de son temps, c'est exact. Alors, immédiatement je vous cède la parole, M. le député.
M. Boulerice: Alors, Mme la Présidente, je ne vais pas entreprendre des négociations. J'avais 12 min 5 s de fait, donc il reste environ sept minutes. Sept minutes, si le projet de loi avait été bon, Mme la Présidente, ça aurait été beaucoup trop court. Mais sept minutes, quand un projet de loi est aussi atroce, mal fagoté que celui-ci, eh bien, c'est long. C'est long parler de quelque chose qui est vraiment à la limite de...
Mme la Présidente, on va résumer pour le bénéfice de celles et ceux qui nous écoutent, nombreux d'ailleurs, je le sais, par le truchement de la télévision des débats. Ce projet de loi est un projet qui vient encadrer les villes qui avaient été fusionnées qui se sont défusionnées et qui peut-être se refusionneront. Donc, c'est une loi qui découle de la première, qui avait été présentée par le gouvernement conservateur du Québec, qui, reniant les principes des gouvernements libéraux qui ont gouverné au Québec et qui avaient permis la fusion de ce qui est maintenant devenu de grandes villes et des villes solides, on en a nommé plusieurs tantôt: la ville de Laval, la ville de Chicoutimi, la ville de Gatineau, etc., qui sont maintenant des agglomérations municipales importantes et qui jouent leur rôle, et surtout un rôle de pôle économique dans le développement de leurs régions respectives... Ce projet de loi, il faut que nos compatriotes en soient conscients, découle d'un petit calcul politique fait par les gens d'en face qui, croyant que le vieux principe de diviser pour régner était universel et qu'il fonctionnait... Il a partiellement fonctionné, ils règnent, ils ont été élus au gouvernement. Mais là ils s'aperçoivent fort bien qu'ils ont mis le doigt dans l'engrenage, et qu'est-ce qu'ils ont proposé, ça ne tient pas, ils ne savent pas comment s'en sortir. Ils ont réussi à mécontenter tout le monde, y compris leurs pairs, et là comment s'en sortir? Eh bien, la seule chose qu'ils ont trouvée, c'est le projet de loi n° 75.
Eh bien, nous, nous disons, de l'opposition officielle: Vous avez, pour des ambitions aussi viles que le feu ? pour paraphraser Talleyrand, pour des ambitions aussi viles que le feu, qui se nourrit de toutes matières, ajoutait-il ? eh bien, vous avez voulu faire ce geste, vous avez fait un calcul petit, un calcul petit, votre élection: Si on les divise, etc., on va peut-être réussir à gagner des votes à tel, et tel, et tel endroit, sans oublier l'intérêt supérieur de la nation, et malheur à celui dont les intérêts ne sont pas les intérêts supérieurs de la nation... Eh bien, vous avez posé ce geste, vivez avec. Vivez avec, ce n'est pas nous qui allons vous dépêtrer du... ? trois points, Mme la Présidente, le langage ne serait pas parlementaire ? dans lequel vous vous êtes empêtrés et dans lequel vous avez placé le Québec en entier, et notamment de grandes villes comme notre capitale nationale, ici, et comme Montréal, puisque je suis montréaliste.
n(15 h 10)n Vous connaissez, Mme la Présidente, la différence entre un Montréalais et un Montréaliste: un Montréalais est quelqu'un qui vit à Montréal, un Montréaliste est quelqu'un qui vit Montréal. Donc, comme tous mes collègues, dont la leader de l'opposition officielle, députée de Bourget, nous vivons Montréal, nous aimons notre ville, nous souhaitons son développement et nous étions de tout coeur avec le maire de Montréal, M. Tremblay, pour faire de cette grande ville une réussite. Cet ancien ministre libéral devenu maire de Montréal a été honteusement poignardé dans le dos par le gouvernement conservateur qui est au Québec actuellement. C'est là qu'est le problème. Donc, M. le Président, Montréal est dans une situation où le maire est désespéré, et ? madame, pardon ? que de temps perdu, que d'argent gaspillé. Je l'ai dit, ce sont des dizaines de millions de dollars qui ont été dépensés dans tout ce mouvement de fusions, défusions, comités de transition, comités de ci, comités de ça, alors que bien des gens affamés viennent devant les portes du parlement réclamer de l'aide. Mais on préférait investir là-dedans. C'est le choix que vous avez fait, vivez avec. Je vous le répète, il n'est pas question pour l'opposition de cautionner le projet de loi que vous nous avez présenté.
Nous aimons notre ville, nous, nous aimons Montréal et nous savons pertinemment, Mme la Présidente, que les grandes confrontations, dans le sens le plus noble du terme, se font maintenant à partir de ces grandes villes: c'est New York contre Boston, Boston contre Chicago, Chicago contre Détroit, Détroit contre Toronto, Toronto contre Montréal, etc. Ce n'est pas un remake d'une partie de hockey mais presque, Mme la Présidente.
Donc, nous voulions un Montréal fort comme nous voulions d'autres agglomérations fortes à l'intérieur du Québec, et vous avez saccagé tout cela. Mais maintenant la façon dont vous voulez que Montréal soit administrée nous apparaît inacceptable. Je suis en constant contact avec le maire de l'arrondissement Centre de Montréal, l'arrondissement Ville-Marie, M. Martin Lemay ? je le salue d'ailleurs ? et, tous les jours, nous cherchons quels sont les moyens de contrer la situation difficile dans laquelle vous placez Montréal et les boulets que vous avez attachés aux pieds du maire de Montréal, qui méritait beaucoup mieux que cela, si vous étiez restés libéraux, mais vous êtes tous virés conservateurs. Si vous êtes des adeptes de Harper, je m'étonne que le député de Verdun, lui qui a déjà été au Nouveau Parti démocratique, continue de siéger dans un gouvernement conservateur. Mais ça, c'est son choix, que voulez-vous? Je ne perds pas espoir de le convertir un jour de venir vers un monde meilleur et plus progressiste.
Donc, c'est un projet de loi, je vous le répète, qui a été une perte de temps, qui nous a distraits de l'essentiel, qui a coûté de l'argent, qui sème la zizanie, Mme la Présidente, et qui va à long terme, puisque malheureusement nous pourrons en mesurer les impacts sociaux et économiques, coûter très cher à l'ensemble de la population du Québec. Vous vous êtes mis dans ce pétrin, sortez-vous-en! Vous avez mis les bâtons dans les roues pour Montréal, eh bien, je regrette, c'est à vous de réparer les erreurs que vous avez commises au nom de petits calculs politiques partisans. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Alors, je vous remercie, M. le député. Alors, je céderais maintenant la parole à la députée de Bourget et leader de l'opposition officielle. Mme la députée.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, nous sommes à l'étape de l'adoption de principe du projet de loi n° 75 qui a été déposé il y a quelques jours et qui est la conséquence législative des référendums sur les défusions du 20 juin dernier, ces référendums étant la conséquence d'un engagement électoral du Parti libéral que tout le monde connaît bien, qui a été pris quelque part dans les années 2000, un engagement qui, depuis, je crois, a été largement décrié comme étant un des engagements les plus irresponsables concernant l'organisation territoriale du Québec.
M. le Président, le ministre des Affaires municipales actuel, qui est ministre depuis 2003, peut-être que, dans quelques années, dans les livres d'histoire... Mme la Présidente, pardon. Venant de moi, une erreur comme ça, c'est vraiment impardonnable. Je m'en excuse. Alors, le ministre des Affaires municipales, qui est ministre depuis 2003, dans les livres d'histoire, dans quelques années, peut-être qu'on dira à son sujet qu'il a démembré, défusionné Montréal, Québec, Longueuil, Mont-Laurier, La Tuque, les Îles-de-la-Madeleine, Sainte-Agathe-des-Monts, Mont-Tremblant, Cookshire-Eaton, Rivière-Rouge et Sainte-Marguerite-Estérel. Ce sera la contribution, malheureusement, du député de Châteauguay, qui est un chic type, je dois le dire, mais ce sera sa contribution à l'histoire du Québec. Et, honnêtement, je sais que nos amis libéraux aiment bien se plaire et dire que le gouvernement du Parti québécois, lorsqu'il a procédé aux fusions, a fait, à ses yeux, une erreur terrible. Je vais vous dire, moi, j'aime mieux qu'on nous reproche d'avoir posé un geste pour réunir des villes que le reproche, qui est fait actuellement et qui sera fait dans le futur, que le gouvernement libéral aura «défusionné», «démembré», «fait éclater» des communautés naturelles, que ce soit comme Montréal ou comme Québec. Alors, entre deux mots, le mot qu'ils auront à supporter est pas mal plus lourd à supporter dans l'histoire du développement du Québec.
Par ailleurs, Mme la Présidente, les gens savent... D'abord, je suis une députée de Montréal et j'ai, à titre de critique en matière d'affaires municipales jusqu'à tout récemment, été très vigilante et très présente dans la première partie de la réalisation de cette démarche de défusion au moment où la loi n° 9 a été déposée. Et je constate, et j'ai eu l'occasion d'en discuter avec mon collègue député de Blainville, porte-parole des affaires municipales, j'ai vraiment pu constater à quel point il y a, et je n'utiliserai pas de mots antiparlementaires, mais, Mme la Présidente, il y a quelque chose qui s'est passé entre la parole et les gestes.
Le ministre... Et, moi, j'ai été présente à toutes les consultations, et il y en a eu plusieurs jours, il y a eu au moins 80, 90 groupes-mémoires qui se sont présentés, la plupart du temps au salon rouge ? et je ne sais plus combien de fois le ministre des Affaires municipales a dit: Nous avons pris un engagement, voici le cadre dans lequel cet engagement va se réaliser.
Ça, c'était la loi n° 9. Alors, dit en d'autres mots: Les gens voteront, et voici le cadre dans lequel ils voteront, et voici le choix qu'ils auront à faire: ou bien ils sont dans une ville unifiée ou ils sont dans une ville démembrée, et voici le fonctionnement futur de cette ville démembrée. C'était ça, la loi n° 9, et c'était ça, le propos du ministre.
Or, avec le dépôt de la loi n° 75, qui est, malgré ce que le ministre peut en dire, pas juste un machin opérationnel, là, le ministre fait des choix et il est en train de changer le cadre de la loi n° 9, le cadre sur lequel les gens se sont prononcés au moment des référendums sur les défusions. Alors, je n'utiliserai pas de mots antiparlementaires, mais je dis qu'il n'a pas fait ce qu'il avait dit qu'il ferait. Une phrase comme ça, ça veut tout dire.
Alors ça, c'est assez incroyable, Mme la Présidente, parce que, malgré les propos du ministre... et on aura l'occasion amplement, à l'occasion de cette adoption de principe et au moment des autres étapes de ce projet de loi n° 75, de démontrer justement qu'il ne fait pas ce qu'il a dit qu'il ferait.
Et c'est encore plus étonnant... Et je vais, d'ici les prochains jours, certainement retrouver cette citation, mais je me rappelle même avoir entendu le ministre des Affaires municipales dire: Écoutez, si on change les règles du jeu en cours de route, c'est-à-dire d'ici à ce que ces villes défusionnées soient redevenues des villes, ce ne serait pas correct parce qu'on a demandé aux gens de se prononcer dans un cadre x. Je n'ai pas le droit, a-t-il dit dans ses mots à lui, de changer en cours de route. Mais c'est exactement ce qu'il fait avec le dépôt de ce projet de loi n° 75.
n(15 h 20)n Et le meilleur exemple est le suivant, et sans entrer dans la technique mais ça l'illustre très bien. On sait que, dans la loi n° 9, il y avait un article, l'article 104, qui prévoyait que les municipalités défusionnées qui participent à des réunions du conseil d'agglomération peuvent s'opposer lorsqu'il y a un certain nombre de décisions qui sont prises par le conseil d'agglomération. Et pour s'opposer, ces villes-là doivent signifier au ministre le fait que justement elles s'opposent à une décision prise par le conseil d'agglomération. Ça, c'est dans la loi n° 9, à l'article 104. Les sujets à partir desquels ces villes-là pouvaient s'opposer se limitaient à quatre ou cinq sujets. Or, article 112 de la loi n° 75 actuelle: on augmente le nombre de sujets à propos desquels les villes défusionnées, membres du conseil d'agglomération, pourront s'opposer. La loi le dit et le ministre l'a dit ce matin.
Et je me permets de le citer, Mme la Présidente. J'ouvre les guillemets ? propos du ministre des Affaires municipales: «La loi n° 9 prévoit un mécanisme par lequel toute municipalité pouvait contester auprès du ministre certains règlements adoptés par le conseil d'agglomération. Le ministre pouvait alors refuser le règlement. Ce mécanisme a été reconduit ? dans ceci ? en y ajoutant la possibilité pour le ministre de confier à une personne le soin d'approuver ou non le règlement. Tout refus devra être motivé par écrit. Une municipalité pourra s'opposer à quelque type de règlement d'agglomération, en plus de ceux déjà mentionnés dans la loi n° 9.» Fin de la citation.
Alors, il y a deux ajouts là-dedans. Non seulement les municipalités défusionnées qui font partie du conseil d'agglomération pourront s'opposer et exprimer leur opposition au ministre, le ministre, il pourra confier le pouvoir à quelqu'un d'autre d'approuver ou non le règlement ? ça, on pourrait parler au moins une demi-heure là-dessus. Le ministre pourra confier à quelqu'un d'autre son boulot: premier problème. Deuxième problème: on ajoute les sujets à partir desquels il peut y avoir de l'opposition.
Mme la Présidente, le gouvernement libéral nous a cassé les oreilles ? cassé les oreilles ? avec: On va faire mieux; on est prêts; on va simplifier; la réingénierie; et tatati et tatata. Est-ce qu'on peut imaginer qu'est-ce que veut dire le fonctionnement d'une ville sous un conseil d'agglomération alors que des composantes de ce conseil d'agglomération pourront s'opposer à presque tout et que ce sera confié au ministre? Est-ce qu'on peut s'imaginer un instant comment ça va être compliqué, paralysé?
Mme la Présidente, il faut savoir qu'une ville, là, une ville saine et normale, là, c'est des élus, c'est un conseil de ville, c'est un maire; les décisions se prennent selon les règles démocratiques. Mais là ce n'est plus de ça dont il s'agit dans ces villes défusionnées. Et ce n'est pas des petites situations qui ne seront pas fréquentes. Ce fonctionnement que je décris, bien il va se produire à Montréal, il va se produire à Québec, il va se produire à Longueuil, à Mont-Laurier, aux Îles-de-la-Madeleine. Est-ce que les Îles-de-la-Madeleine avaient besoin d'être défusionnées, Mme la Présidente?
Alors, c'est ce fonctionnement-là que le gouvernement libéral nous propose aujourd'hui, propose aux Québécois, propose aux défusionnistes. C'est vraiment une trouvaille extraordinaire, pour des gens qui ont plaidé la réingénierie et qui étaient plus fins que les autres, qui étaient capables de faire fonctionner mieux le Québec que les autres. Bien, je vous le dis, là, dans trois ans, dans quatre ans, dans cinq ans, là, on portera tous un jugement sur ce sur quoi ils nous ont tous entraînés. Alors ça, c'était une première remarque qui m'apparaissait importante.
L'autre remarque, c'est ce nouveau va-et-vient que la loi n° 75... Je le rappelle, le ministre a dit: Le cadre, ça va être la loi n° 9, je ne changerai pas les règles du jeu. Bien, il les change. Là, on vient d'introduire tout un nouveau va-et-vient d'un maire, lorsqu'il va aller au conseil d'agglomération, il faut qu'il aille se chercher une orientation à son conseil de ville. Mais c'est complètement dysfonctionnel. Et, dans une certaine mesure, c'est aussi une mise en tutelle des maires dûment élus des grandes villes. Est-ce que vous vous imaginez qu'un maire devra aller chercher une orientation avant d'aller à une réunion à un conseil d'agglomération? C'est mettre les maires en tutelle, Mme la Présidente. Alors, deuxième élément sur lequel le ministre n'a pas rempli et n'a pas fait ce qu'il avait dit qu'il ferait. Il a introduit des nouvelles règles du jeu, Mme la Présidente.
Par ailleurs, je souligne également... puis là je sais qu'au moment de l'étude détaillée du projet de loi on va avoir plein de surprises. Par exemple, dans la loi n° 9, le ministre avait fait une liste des équipements, qu'est-ce qui serait géré par le conseil d'agglomération, qu'est-ce qui serait géré par les villes défusionnées, qu'est-ce qui serait géré par la ville qui reste. Et là, tout d'un coup, oupelaïe! la liste d'équipements collectifs, ça va être géré ailleurs, ce sera statué par décret. Encore là une possibilité, Mme la Présidente, de faire en sorte que ce que le ministre avait dit qu'il ferait ne se ferait pas. Il change les règles en cours de route.
Mais, Mme la Présidente, ce que je viens d'exprimer là est dans un certain sens assez technique, parce que le fond des choses ? technique mais important ? parce que le fond des choses... Et je ne suis vraiment pas la première à le dire. Et j'écoutais, ce matin, mon collègue député de Blainville qui disait: On voudrait bien essayer de trouver une solution, et c'est insoluble, cette affaire-là. Et mon collègue député de Sainte-Marie?Saint-Jacques l'a un peu exprimé en disant: Bien là il va falloir que vous vous arrangiez avec ça pendant des années. J'ai même entendu des maires dire: On a maintenant un nouveau grand maire au Québec, le ministre lui-même. Alors, il voulait être ministre des Affaires municipales, il va en faire, des affaires municipales.
Mais toujours est-il que, oui, c'est technique, ce que j'ai expliqué tout à l'heure, mais ça démontre, ça témoigne du fait que nous avions collectivement misé sur des villes unies et fortes, tournées vers l'avant, et qu'un projet de loi comme celui-là qui consacre ces défusions fait en sorte que nous allons au minimum, si tout va bien, faire du sur-place, mais on sait bien que ça va reculer. Parce que, pendant le temps que tout le monde va se démêler... Puis là je n'ai même parlé des échéanciers puis des problèmes techniques que ça va poser: le transfert du personnel, les chicanes sur la route, c'est-u la municipalité défusionnée ou c'est le conseil d'agglomération qui gère ça? Je ne veux même pas envisager ça à ce moment-ci. Mais on peut imaginer.
Ce n'est pas difficile à comprendre, on n'a pas besoin d'avoir un grand cours en sciences politiques ou en organisation territoriale pour savoir que, dans les prochaines années, je ne parle même pas des mois, dans les prochaines années, ces villes, Montréal, Québec, Longueuil, Mont-Laurier, Îles-de-la-Madeleine, et bien d'autres, qu'est-ce qu'elles vont faire, elles vont tourner vers quoi?, vers tout ça: qui fait quoi, puis on envoie-tu nos positions au ministre; puis, non, ce n'est pas vous autres à décider ça; puis, non, vous n'avez pas vraiment demandé une orientation à votre conseil de ville; donc, le maire, vous n'étiez pas légitimé d'intervenir de telle et telle manière au conseil d'agglomération. Écoutez, les problèmes, ils sont à l'infini, on ne voit pas la fin. Puis le mérite des fusions, c'est qu'il y avait une fin. Puis, après l'organisation qui était en train de se compléter, on regardait en avant.
Alors là, on peut comprendre que ce gouvernement libéral, qui a été un grand gouvernement à des moments critiques de l'histoire du Québec, qui a mis ses culottes, comme on dit en bon français, pour faire en sorte que les villes soient organisées... Je ne referai pas l'historique, je ne reparlerai pas de Laval. Mais c'est quand même le bel exemple et c'est un exemple qui est tributaire de ce que le gouvernement libéral a fait dans le passé. Ce gouvernement, qui a posé des grands gestes dans le passé, bien, il pose des gestes petits, très petits pour plaire à une clientèle défusionniste. Il faut se le dire.
Puis les défusionnistes, je ne leur reproche rien. Ils avaient le droit de ne pas aimer ça, la fusion des villes, ils avaient le droit de l'exprimer. Mais, quand on est un parti qui prétend vouloir gouverner, on n'a pas le droit de céder à cela. Le problème, ce n'est pas les défusionnistes. Le problème, c'est: ce parti-là les a écoutés puis a décidé de ramasser des votes.
Et ça a comme résultat aujourd'hui qu'on est embourbés, que Montréal ne sera pas ce que Montréal devrait être, que Québec ne sera pas ce que Québec devait être, que les Îles-de-la-Madeleine... les Îles-de-la-Madeleine, Mme la Présidente, est-ce que les Îles-de-la-Madeleine avaient besoin de ça, être défusionnées? Pas plus, pas moins qu'ailleurs, mais c'est quand même une situation, c'est un microscope, c'est un joyau, les Îles-de-la-Madeleine. Est-ce qu'elles avaient besoin d'être défusionnées? Savez-vous les chicanes, là, qui se vivent, ça, dans cette communauté-là? C'est des petites communautés.
n(15 h 30)n Puis Montréal, ça a beau être des grandes communautés, c'est guère mieux, les chicanes que ça crée entre ceux à l'ouest... Moi, je suis une députée de l'est. Je suis fâchée que l'ouest ne veuille pas travailler dans le sens de Montréal, ça me déçoit. Mais ce qui me déçoit encore plus, ce n'est pas que des citoyens n'aient pas le goût de ce Montréal, c'est que le Parti libéral soit embarqué là-dedans, Mme la Présidente, c'est ça qui est désolant. C'est ça, l'héritage du gouvernement libéral en matière d'organisation du Québec; eux qui ont plaidé un tas de choses, ça n'a aucun sens.
Ça n'a aucun sens, faire croire aux gens: Nous sommes prêts puis on va faire de la réingénierie, quand, dans ces gestes-là, dans ce quotidien... L'organisation municipale, c'est le premier niveau de notre organisation de vie au Québec.
Alors, ils ont beau plaider tous les changements qu'ils voudront quant à l'organisation du Québec, s'ils n'ont pas été capables d'encaisser les changements que le Québec devait vivre quant à l'organisation municipale, bien, ils ne mériteront pas d'être là longtemps, Mme la Présidente. Et l'histoire va retenir, et du ministre des Affaires municipales et du premier ministre actuel, que c'est tout ce qu'ils auront fait: brisé, éclaté en petits morceaux des grandes villes comme Montréal et Québec, des joyaux comme Mont-Tremblant et comme les Îles-de-la-Madeleine. Alors, Mme la Présidente, je suis convaincue de ce que je dis, puis c'est rare que je monte le ton à ce point-là. Mais c'est vraiment désolant, désolant, et nous ne participerons pas à cette opération-là.
Et mon collègue de Sainte-Marie?Saint-Jacques, il a raison. Ils se sont mis dans le trouble, bien, qu'ils s'en sortent. Puis ne vous attendez pas à une collaboration pour trouver des petites entourloupettes pour améliorer l'article machin-chouette d'un projet de loi comme celui-là.
Puis, autant, Mme la Présidente, vous le savez, de la part de l'opposition officielle, quand arrivent des sujets de fond qui touchent les gens, où on a besoin de trouver des solutions légales qui ont des impacts sur la vie des gens, on est au rendez-vous, mais pour ça, jamais, Mme la Présidente.
Nous allons nous opposer à l'adoption de principe, nous allons nous opposer à l'adoption de chaque ligne de ce projet de loi. J'espère qu'on s'entend bien parce que nous avons, nous... Nous, c'est une fierté qu'on peut avoir. Et on a eu des inconvénients. Mais, moi, définitivement, je préfère avoir donné une chance à Montréal d'être une vraie ville forte en Amérique, à Québec d'être une vraie capitale nationale, à Mont-Tremblant de pouvoir faire face à la musique, et aux Îles-de-la-Madeleine... J'aime mieux avoir ça dans le curriculum de notre parti que le gâchis qu'ils nous ont donné, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Alors, comme prochain intervenant, je vais reconnaître le député de Joliette. À vous la parole.
M. Jonathan Valois
M. Valois: Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'interviens à mon tour sur l'adoption de principe du projet de loi n° 75, le projet de loi visant certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. J'interviens à mon tour, après ma collègue de Bourget, qui fut inspirante certainement, et à mon tour partager plusieurs considérations apportées par non seulement la leader de l'opposition, mais aussi l'ensemble des collègues qui, jusqu'à maintenant, sont intervenus sur ce projet de loi et qui auront à intervenir aussi, là, dans le courant des prochains jours sur ce projet de loi.
L'angle que je vais prendre, Mme la Présidente, est un angle au niveau de nos responsabilités ici, dans ces institutions démocratiques, par rapport à la société que nous représentons, tous et toutes. Ici, à l'Assemblée nationale, la question que nous nous posons tous les jours et à laquelle nous essayons de donner une réponse, c'est: Comment voulons-nous vivre ensemble? Et les réponses qu'on donne, bien, se situent dans les projets de loi, dans les projets de loi qui sont déposés aujourd'hui par ce gouvernement, jadis par le nôtre, qui étaient des réponses à cette question: Comment voulons-nous vivre ensemble?
Ici, les valeurs, de ce côté-ci de l'Assemblée, sont partagées par plusieurs personnes par contre, mais qui sont réellement ancrées dans notre parti. C'est de répondre de façon responsable à cette question et de comprendre que, lorsque nous prenons ces décisions, nous sommes responsables ici, dans cette Assemblée, d'orienter le vivre-ensemble des citoyens, comme je vous en parlais, la répartition de la richesse entre ces citoyennes et ces citoyens du Québec et la participation de tous et de toutes au développement du Québec. Et, lorsque je parle du développement du Québec, je ne parle pas strictement du développement économique, mais je parle aussi du développement culturel, du développement social.
Alors, c'est un peu dans cet angle que je vais regarder et analyser le projet de loi n° 75, un projet de loi qui, comme tous les autres projets de loi, tente de répondre à cette question: Comment voulons-nous vivre ensemble et quelle est la valeur qui anime, quelles sont les valeurs qui animent le dépôt d'un tel projet de loi?
Je vais parler de ce projet de loi, le projet de loi n° 75, en regard aussi aux impacts qu'il aura sur Montréal, Montréal que, de ce côté-ci de l'Assemblée, nous ne voyons pas comme une grande ville d'une province, mais bien comme la métropole de tout un peuple. Et, à partir du moment où est-ce qu'on considère que Montréal n'est pas simplement une grande ville provinciale, mais une métropole d'une réalité et d'une démocratie francophone en Amérique, bien on ne peut pas traiter Montréal de la même façon que plusieurs autres agglomérations.
Il faut avoir une certaine considération pour cette ville-là notamment, et c'est pour ça que je vais intervenir aussi en regardant et en discutant avec Montréal. Parce que Montréal, lorsque nous la considérons, nous comprenons que c'est notre antenne internationale, que c'est notre ouverture sur le monde et que c'est l'image que finalement nous voulons envoyer au reste de la planète.
Lorsque nous pensons à Paris, lorsque nous pensons à Londres ou à New York, ces villes nous donnent l'image ou nous renvoient l'image des pays qui sont concernés. Et c'est par ce qui se passe dans ces villes-là, desquelles nous avons de l'information, que nous jugeons un peu, peut-être trop rapidement, mais que nous jugeons ce qui se passe dans ces pays-là et l'information que nous en avons. La question, c'est que les gens de partout ailleurs ont une information de ce qui se passe au Québec bien souvent par ce qui se passe à Montréal, et cette question devient donc: Comment serons-nous jugés? Alors, réfléchir sur Montréal, c'est oser proposer un vivre-ensemble qui finalement sera notre signature à l'international. Ce n'est pas rien, ça.
Je vais vous citer quelques passages d'un auteur qui pense la mondialisation, qui pense les relations internationales, pour vous faire comprendre toute l'importance et toute la considération qu'on doit avoir lorsqu'on touche aux affaires municipales, lorsqu'on touche à une ville comme celle de Montréal, où on essaie, tant bien que mal, là ? ce que je comprends, plus mal que bien ? d'organiser cette ville-là. C'est Ricardo Petrella qui nous dit: Ce vivre-ensemble, c'est simplement l'accès au droit de participer pour tout le monde. C'est accepter notre responsabilité collective. Le vivre-ensemble signifie établir des liens. La solidarité ne signifie pas générosité ni même amour, c'est la responsabilité par les liens: on fait quelque chose et on en est responsable collectivement.
«Est-ce que nos villes sont importantes dans cette réflexion? La perspective locale signifie se construire un vivre-ensemble au niveau local, assumer la responsabilité collective et établir des liens. Au fond, travailler sur soi-même, être innovateur au niveau local par rapport à la reconstruction du vivre-ensemble, réaffirmer ou inventer la responsabilité politique et imaginer concrètement dans le vécu du quotidien, voilà des choses qui permettent de faire avancer les choses. Le premier grand champ d'innovation n'est-il pas l'identification des biens communs que nous avons et que nous voulons au niveau de nos villes?» Alors, à ce niveau-là, on doit comprendre que c'est l'ensemble... Tout à l'heure, je vous disais qu'ici, dans cette Assemblée, la réflexion de base doit être celle qui se situe au niveau du vivre-ensemble, du comment voulons-nous vivre ensemble. Bien, la matérialisation de ce vivre-ensemble et des valeurs que nous voulons, et qui sont à la base de ces choix, et que nous voulons qui se concrétisent, bien souvent c'est par les décisions que nous faisons au niveau municipal et au niveau local que les citoyennes et citoyens du Québec peuvent le vivre tous les jours.
Alors, imaginez une ville sans bien commun, imaginez une ville où ces valeurs ne transcendent pas. Bien, on se retrouve avec une ville où est-ce qu'on ne fait que marchander, où est-ce qu'on ne fait que privatiser. La ville devient donc un lieu d'organisation et d'échange à partir de la propriété privée à l'égard des éléments nécessaires et indispensables pour vivre. Une réflexion s'impose: de quelle manière voulons-nous organiser Montréal pour que cette dernière puisse répondre à notre volonté de vivre ensemble et à cette image, ces valeurs que nous voulons protéger et projeter sur le monde entier?
n(15 h 40)n Les gens auront l'idée du Québec par sa métropole; les gens jugeront de notre vivre-ensemble de la façon dont il s'organise, le vivre-ensemble, disons, s'il s'organise, à Montréal. Et, avec le projet de loi n° 75, Mme la Présidente, bien on a un projet de loi qui réamène et qui réintroduit, et de façon assez systématique et voire même formelle, le retour des chicanes. Évidemment, du côté des défusionnistes, on a déjà promis une bataille en règle, une bataille juridique contre les grandes villes. Alors, déjà, de ce côté-là, les jeux sont clairs. On sait déjà que tout sera mis de l'avant par les défusionnistes pour en découdre dans les tribunaux par rapport à ces grandes villes, ces grandes agglomérations là, et que ce n'est pas, non, le projet de loi n° 9 qui a réglé quoi que ce soit par rapport aux défusionnistes.
Les défusionnistes ont aussi promis de bloquer le fonctionnement des conseils d'agglomération dans le but de forcer le changement de ses structures. Parce que ce qu'il faut bien comprendre dans ce projet de loi, Mme la Présidente, c'est que, d'un côté, on a des défusionnistes qui nous disent que toutes les décisions qui seront prises par ces grandes villes, par Montréal, par l'agglomération de Montréal seront contestées, et donc on aura un Montréal qui ne pourra pas avancer, un Montréal qui, à chaque fois que les décisions seront prises, ces décisions-là seront contestées, mais, d'un autre côté, on doit aussi regarder ce Montréal, tel que construit par le projet de loi n° 9, où nous avons, du côté des défusionnistes, des gens qui paieront des taxes sans avoir réellement droit aux décisions de l'agglomération. Alors, d'un côté, on a un glissement démocratique, et, de l'autre, on a une incapacité de construire un vivre-ensemble. C'est ça, l'héritage, et c'est ça présentement, lorsqu'on parle de bourbier, c'est ça présentement que nous avons entre les mains.
Alors, c'est ça qui va être l'étiquette du Québec à l'international. Le Montréal international, notre antenne internationale sera ce Montréal-là, un Montréal où une agglomération fait fi de certains principes démocratiques pour prendre des décisions. Il y aura donc des citoyennes et des citoyennes qui devront contribuer, par des taxes et des impôts, à une agglomération de laquelle la seule façon de contester ou d'influencer sera justement celle des tribunaux, celle de la contestation auprès du ministre. Alors, on est loin de donner des outils qui pourront permettre à terme le développement de cette métropole; on est loin de donner des outils qui donneront à l'ensemble du monde une idée de nos grandes valeurs de base, ces valeurs-là que nous avons.
Écoutez-moi bien. Lorsque je vous parle, depuis tout à l'heure, de cette importance de considérer Montréal comme une métropole, comme une métropole d'une démocratie francophone en Amérique, j'essaie de faire comprendre et d'amener une réflexion dans cette Assemblée sur l'importance de nos décisions à l'égard de cette ville, de cette métropole.
Je vais continuer dans le même ordre de citations pour justement mettre en position certains questionnements qui sont quand même assez fondamentaux, parce qu'à partir du moment où est-ce qu'ici, dans cette Assemblée nationale, nous avons de grandes réflexions, là, sur l'organisation, sur l'administration, sur le comment les votes seront pris, ailleurs dans le monde, leur réflexion sur les grandes villes ne se situe pas sur comment nous allons administrer quelque chose, sur comment quelque chose sera géré, mais bel et bien sur quel sera l'apport de notre société par rapport à l'humanité.
Et autant ici, lorsque j'amène ce type de concept, certaines personnes peuvent penser que j'arrive d'une autre planète, autant les discussions entourant la construction de l'Europe, les discussions qu'on a même au Parlement canadien quelquefois, les discussions qu'on a par rapport... dans la démocratie américaine sont essentiellement tournées vers le même raisonnement: Quel est l'apport de notre société envers l'humanité?
Je comprends que ces questions-là sont peu discutées ici: des provinciaux nous gouvernent. Mais, à partir du moment où est-ce qu'on comprend qu'au-delà de faire de l'administration provinciale nous sommes aussi responsables d'une société francophone en Amérique, la réflexion de Montréal devient une tout autre réflexion et notre responsabilité collective devient aussi une tout autre responsabilité.
En ce sens-là, je vous citerai encore des passages, comme dans la suite de ce que j'avais commencé: «Le "village global" n'existe pas. La vérité est [qu'on assiste], sous le vocable de "mondialisation", à [l'instauration d'une oligarchie] mondiale dont on commence à entrevoir le mode de fonctionnement. Ceux [qu'on] appelle "les gens de Davos" ont construit, ces 30 dernières années, une sorte d'"archipel capitaliste mondial", formé d'"îles" où sont concentrées près de 90 % des capacités scientifiques, technologiques, informatiques de la planète [...] représentent à la fois l'infrastructure, le cerveau et [les échanges] de cet archipel: de New York à Singapour, de Los Angeles à Shanghai, de Chicago à Stuttgart, de Londres à São Paulo[...] ? voire même ? de Paris à Montréal. On y trouve localisés les principaux centres d'affaires, les noyaux des réseaux de communication et d'information, les sièges sociaux des grandes multinationales industrielles, financières et commerciales.
«La libération, la déréglementation, la privatisation, la "compétitivité" ont davantage resserré [ces liens entre ces 30 villes-là] ? dont certaines, comme [...] Silicon Valley, ont été élevées au rang de paradigme universel ? que les liens entre elles et le reste du monde.» C'est-à-dire que ces grandes villes là parlent plus entre elles qu'elles ont d'impact ou de discussion avec les villes du reste du monde.
Alors, pour ces mêmes gens là, «la seule option réaliste, pour les autres régions de la planète, consisterait donc à tenter de s'accrocher à l'une de ces îles, [en amenant cette société, une] "société de la connaissance", les nouveaux savoirs, l'univers de la richesse dématérialisé. Ceux qui ne réussiraient pas dans cet ancrage ne seraient même pas cantonnés dans des périphéries» mais autour.
Alors, ce que ce passage veut dire, Mme la Présidente, c'est que... dans les faits, c'est qu'aujourd'hui on a de plus en plus... nos sociétés sont, comme je parlais d'antennes internationales, sont de plus en plus représentées par ces mêmes antennes internationales. Et, aujourd'hui, on a un projet de loi qui vient réellement empêcher au Québec d'avoir une antenne internationale forte, mais bien intégrer, à l'intérieur de cette métropole qui s'appelle Montréal, une chicane permanente où les uns, choqués contre les autres, empêcheront cette métropole de pouvoir faire vivre à l'international un vivre-ensemble qui nous ressemble. Et, à ce moment-là, Mme la Présidente, comment pourrons-nous, nous mêmes, ici, amener toutes les valeurs qui sont des valeurs québécoises qu'on voudrait voir partagées à l'extérieur du Québec et contribuer à cette mondialisation de façon un peu plus sociale?
Regardez, est-ce qu'on veut réellement contribuer à faire apparaître nos sensibilités sociales dans le monde à l'égard du logement digne des humains, du droit du travail et à un revenu digne des citoyens, du droit des enfants, du droit de grève et des libertés syndicales, du droit à l'éducation et de la sécurité minimale en cas de maladie, de la démocratie, de la vie en commun, du respect de la reconnaissance des droits des immigrants, des réfugiés, et, aujourd'hui, du développement durable, ce qu'on nous a parlé? Est-ce que ces valeurs-là qu'on se donne pour nous, ce ne sont simplement que des valeurs qu'ils vont gérer et faire en sorte qu'ici, dans cette Assemblée, ce sera quelque chose qui dicte nos projets de loi certes, mais que jamais nous ne nous permettrons, comme Québécoises et Québécois, de faire vivre ces valeurs-là à l'international, de contribuer avec ceux et celles qui partagent nos valeurs, à amener un peu plus d'humanité dans cette mondialisation.
Si Montréal était notre antenne et qu'on lui donnait les moyens d'être cette antenne-là, plutôt que de, pour des raisons strictement partisanes et politiques, intégrer une constante... et un constant conflit à l'intérieur de cette ville-là, sur des bases administratives, sur des bases de glissement démocratique interne... Empêcher... s'empêcher collectivement de pouvoir partager avec le reste du monde nos valeurs, bien c'est un peu ça aussi que le projet de loi n° 75 nous démontre, un projet de loi qui est beaucoup plus tourné vers une réponse à des particularités spécifiques plutôt qu'une réponse à la hauteur d'une métropole comme celle de Montréal et de ce que nous voulons avoir et proposer au reste du monde.
Vous comprenez que cette façon de voir là, cette façon de voir où non seulement Montréal ne doit pas être considérée comme une grande ville de province, mais bien comme une métropole, comme je vous dis, d'une démocratie, ne se retrouve pas dans le projet de loi n° 75. Comme je vous dis, ce qu'on voit dans le projet de loi n° 75, c'est beaucoup plus l'instauration de chicanes internes permanentes, beaucoup plus que d'un envol, d'une antenne internationale qu'on pourrait se donner.
n(15 h 50)n Alors, il s'agit ici de penser le bien commun et de faire des choix qui auront une importance majeure sur le sens que nous voulons de nos relations internationales. Encore faudrait-il que certaines personnes de ce gouvernement aient des réflexions sur les relations internationales, aient des réflexions sur nos responsabilités internationales. À partir du moment où les réflexions sont de l'ordre de la province et de la gestion de province, on ne peut pas blâmer ce gouvernement, sauf que, d'un autre côté, on doit souhaiter et espérer que les dommages qui seront faits par ce type de prise de décision, comme celui du projet de loi n° 75, ne soient pas permanents.
Alors, vous comprenez que le gouvernement en place, en traitant une ville comme Montréal de la sorte, fait passer la construction du vivre-ensemble et l'antenne internationale de Montréal avant quelques considérations politiques. On concède, du même souffle, le rôle de métropole à Toronto. On banalise l'importance du Québec d'avoir une antenne internationale et on ne prend aucune responsabilité internationale face à une mondialisation équitable, qui est pourtant l'un des grands pans d'une logique de développement durable.
Aujourd'hui, penser le développement durable simplement dans nos structures internes, c'est avoir une bien mince et courte vision du développement durable. Penser le développement durable, c'est savoir aussi que les décisions qui sont prises ici par rapport à notre environnement, par rapport à notre société, par rapport à nos individus, par rapport à notre culture ne peuvent avoir réellement de prise que si elles sont mondialement partagées.
Quels sont les outils que nous nous donnons pour partager avec ceux et celles qui ont cette idée de développement durable par rapport à l'humain, par rapport à l'environnement, par rapport aux sociétés et aux cultures? Quels sont les réels outils que nous nous donnons à l'international? Aucun. Montréal aurait pu être cet outil. Le projet de loi n° 75 dit: Je préfère la chicane interne, à Montréal, qu'une antenne internationale. C'est la décision qui est prise par ce projet de loi. Et vous comprenez que, dans ce sens-là, comme la députée de Bourget l'a déjà dit, je ne pourrais pas appuyer ne serait-ce qu'une ligne de ce projet de loi. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Joliette. Alors, comme prochain intervenant, je reconnaîtrai le député de L'Assomption. M. le député, à vous la parole.
M. Jean-Claude St-André
M. St-André: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, à mon tour, je vais intervenir sur le projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations, projet de loi qui est la conséquence des référendums tenus, le 20 juin dernier, dans plusieurs municipalités regroupées au Québec, mais qui est surtout la conséquence aussi bien sûr du projet de... de la loi n° 9 qui a été adoptée par cette Assemblée, contre l'avis de l'opposition officielle, et surtout qui est la conséquence d'un engagement irresponsable qui a été pris par le Parti libéral du Québec, par le premier ministre du Québec alors qu'il était chef de l'opposition officielle, lors de la dernière campagne électorale, et qui trouve sa source dans une résolution qui a été adoptée par un congrès du Parti libéral, en 2000, à l'instigation du député de Hull.
Et, à ce moment-là, en 2000, on se souviendra que le gouvernement en place avait proposé, avait soumis un ensemble de projets de loi à l'Assemblée nationale pour favoriser le regroupement de plusieurs municipalités au Québec, basé sur un principe d'équité, d'équité fiscale et afin également de favoriser une meilleure concertation pour le développement économique au Québec.
Mme la Présidente, je vais vous dire d'emblée que, sûrement que dans tout ce processus-là à l'époque, il y a eu des maladresses. Cependant, les gens d'en face, les gens d'en face ont profité de l'occasion pour prendre des engagements irresponsables. Ils ont cherché à profiter de l'insatisfaction d'une partie importante de la population, on va le reconnaître, pour se faire du capital politique et ainsi favoriser leurs intérêts électoraux et partisans.
D'ailleurs, Mme la Présidente, suite à l'engagement que les libéraux ont pris et suite à leur victoire électorale d'avril dernier, rarement on aura vu au Québec une telle... une unanimité se dégager dans l'ensemble des commentaires des analystes, des chroniqueurs de toutes sortes pour demander au nouveau gouvernement de renoncer à cet engagement-là qu'il avait pris en campagne électorale.
Il faut admettre, Mme la Présidente, que c'est en soi assez exceptionnel, hein? Ils prennent un engagement électoral de faire des référendums sur les défusions, et, aussitôt qu'ils sont élus, aussitôt qu'ils sont élus, plusieurs commentateurs leur ont demandé de renoncer à cet engagement-là qui était, à sa face même, irresponsable. Puis je pense que, dans l'ensemble de tout ce que j'ai pu lire à l'époque puis qui a duré au moins un an, un an et demi, on n'a pas vu beaucoup de notes discordantes au Québec. Et pourtant, et pourtant les gens d'en face ont décidé d'aller de l'avant avec, avec cet engagement électoral qui était, à sa face même, irresponsable.
Pourtant, il y a d'autres engagements électoraux qui ont été pris par les gens d'en face, qui, eux, n'ont pas été respectés. Je vous en mentionne un qui me vient à l'esprit, qui touche les familles particulièrement, c'est l'engagement de maintenir les tarifs en services de garde à 5 $ par jour. Celui-là, ils ne l'ont pas respecté. Je ne comprends pas, Mme la Présidente. Pourquoi respecter un engagement qui était, à sa face même et dans un beau concert d'unanimité, à sa face même, irresponsable, et ne pas respecter, ne pas respecter les tarifs de services de garde à 5 $? Pas de réponse. Et puis celui-là, je peux vous dire que, les familles, elles le paient cher. Mais enfin. Bon.
Mme la Présidente, le projet de loi n° 75 aussi constitue un net recul pour la démocratie. Puis il y a de nombreuses voix qui se sont levées pour le dénoncer également. D'ailleurs, c'est un peu paradoxal de constater que les libéraux, qui se sont gargarisés avec le principe de la démocratie tout au long de ce processus-là, en viennent à présenter un projet de loi qui, à sa face même, constitue un recul pour la démocratie municipale.
On crée, par le projet de loi n° 75 ? c'était déjà dans la loi n° 9 ? ce qu'on appelle les conseils d'agglomération, et les conseils d'agglomération vont avoir des responsabilités importantes. J'énumère certains pouvoirs qui vont relever du conseil d'agglomération: il y a l'évaluation municipale; le transport collectif des personnes, le transport en commun; les voies de circulation constituant le réseau artériel à l'échelle de l'agglomération; tout lieu ou toute installation qui est destiné à recevoir la neige ramassée sur le territoire de plusieurs municipalités liées; l'alimentation en eau et l'assainissement des eaux. Enfin, j'en ai une liste de 11 comme ça. Ce sont des pouvoirs importants.
Dans la ville de Montréal, on a vu, entre autres, que le conseil d'agglomération va vraiment gérer jusqu'à 60 % du budget de la ville de Montréal. Ce n'est pas rien, ça, Mme la Présidente. Et pourtant, au conseil d'agglomération, il n'y a que le maire de Montréal qui va y siéger, en plus des maires évidemment des villes défusionnées, qui vont représenter 13 % de l'ensemble des citoyens de la ville de Montréal, qui n'auront donc que 13 % des voix à ce conseil-là. C'est donc le maire de Montréal tout seul qui va décider. Et puis c'est 60 % du budget de la ville de Montréal qui va se gérer là. On appelle ça un progrès pour la démocratie? Mme la Présidente, je pense que ça soulève des questions qui sont importantes.
Et en plus on introduit un ensemble de mécanismes, de dispositions qui vont faire en sorte que, pour les municipalités qui sont membres du conseil d'agglomération, bien, comme c'est le maire qui va en être membre, il va falloir d'abord qu'il aille dans son conseil municipal demander un mandat à son conseil, il va falloir que toutes les questions de fond se discutent là d'abord, et il va être lié par résolution, par résolution de son conseil de ville, des positions qu'il va devoir défendre au conseil d'agglomération.
n(16 heures)n Mais d'avance, d'avance il s'agit, à sa face même, de discussions bidon, parce que le maire de Montréal, pensez-y, là, au conseil d'agglomération, lui qui va avoir 87 % des votes à cette table-là, quand bien même les maires des villes, des villes dites défusionnées vont argumenter, bien le maire de Montréal, il va décider tout seul. Et en soi ça n'a aucun sens, Mme la Présidente. Et d'ailleurs il y a des conseillers municipaux de Montréal qui ont mis cette question-là sur la table: Quelles vont être les responsabilités du conseil de ville de Montréal dans un tel contexte? C'est quoi, les responsabilités des arrondissements? Quelles sont les responsabilités du conseil... de la CMM également, Mme la Présidente?
Là, on se retrouve... on se retrouve avec une espèce de grosse bête, là, où on ne sait plus trop qui va faire quoi dans tout cela. Et, alors que ce qu'on voulait, c'est favoriser la concertation de l'ensemble des partenaires sur le territoire métropolitain, là on se retrouve avec une bête multiforme, à plusieurs têtes, puis on ne sait pas qui là-dedans va prendre des décisions. On ne sait pas comment la concertation va se faire puis on ne sait pas surtout comment ça va favoriser le développement économique, social et culturel de la ville de Montréal, par exemple, puis de l'ensemble des autres villes également.
Puis l'autre question évidemment qui se pose là-dedans, Mme la Présidente, c'est: Le citoyen, là, comment voulez-vous qu'il s'y retrouve dans tout ça? Où il va aller s'adresser? À son conseil d'arrondissement? À son conseil de ville? Au conseil d'agglomération? À la CMM, pour ne parler que de la ville de Montréal? Qui va être imputable auprès du citoyen? On ne le sait pas. Je pense que, dans un contexte où de plus en plus de citoyens sont désabusés par rapport aux politiciens, je ne vois pas en quoi, je ne vois pas en quoi ce que vous proposez va favoriser justement la participation démocratique de l'ensemble des citoyens aux décisions, aux décisions qui les concernent. C'est un immense gâchis que vous êtes en train de créer.
Moi, Mme la Présidente, je vous avoue franchement que je suis conscient peut-être qu'il y avait des choses à améliorer dans les grands regroupements municipaux qui ont été faits. Mais là, franchement, avec ce que vous êtes en train de faire, vous amplifiez les problèmes. Vous êtes en train de créer un immense fiasco qui va prendre des années à régler. Ce n'est pas très motivant, ça, je pense. Ce n'est pas motivant pour l'ensemble de la population. Pour les gens qui nous regardent aller, là, ils doivent se demander franchement ce qu'on est en train de faire ici. Tout ce que vous avez réussi à faire est de favoriser vos intérêts partisans et électoraux. Mme la Présidente, l'ensemble des municipalités, surtout celles où il y a des défusions, vont être ingouvernables avec le projet de loi n° 75.
Je voudrais revenir aussi sur une question qui a été soulevée par la députée de Bourget, par beaucoup de mes collègues. Le projet de loi n° 75, il change les règles qui avaient été fixées par la loi n° 9. Je me souviens du ministre des Affaires municipales, pendant les débats entourant le projet de loi n° 9 ? puis après surtout ? puis avant les référendums sur les fusions, qui disait: Tout est clair, ce sur quoi on vote, c'est le contenu de la loi n° 9, et puis, s'il y a des citoyens qui décident de se défusionner ou de démembrer, bien, ce qui va se passer après, là, regardez la loi n° 9, c'est là-dedans. Or, avec le projet de loi n° 75, vous changez les règles.
Alors, ce n'est donc pas vrai que les citoyens, le 20 juin dernier, ont voté sur la loi n° 9, parce qu'aujourd'hui, avec le projet de loi n° 75, s'il est adopté, on change les règles. Est-ce que c'est ça qu'on appelle de la démocratie? Ces gens-là sont venus nous répéter pendant des mois qu'on allait tenir un exercice démocratique en votant par référendum le 20 juin dernier puis que c'était clair, ce sur quoi on allait voter. Là, maintenant qu'on a voté, maintenant que les citoyens se sont exprimés, ils changent les règles par le projet de loi n° 75. Bien, si c'est ça, de la démocratie, Mme la Présidente, on va repasser. En tout cas, nous, ici, de ce côté-ci, ce n'est pas notre conception de la démocratie.
Si vous voulez en changer les règles, vous allez vivre avec les conséquences, mais manifestement vous essayez de rafistoler des affaires qui ne fonctionnaient pas dans la loi n° 9 puis là vous nous proposez d'autres rafistolages qui vont empirer la situation et qui vont faire en sorte que les villes seront encore plus ingouvernables.
Mme la Présidente, qu'est-ce qui doit être à la base d'une législation, d'une loi? Mon collègue de Joliette l'a dit, c'est d'abord et avant tout le bien commun. Lorsque les différents gouvernements, d'ailleurs, au Québec, depuis une quarantaine d'années, ont présenté des projets de loi sur des regroupements municipaux, c'était le bien commun qui était à la base de ces projets de loi là. Et plusieurs projets de loi, plusieurs lois qui ont décrété des regroupements municipaux ont été adoptées par des gouvernements libéraux. J'aimerais ça vous rappeler ce que disait, entre autres, le ministre des Affaires municipales au moment du regroupement municipal de la ville de Laval, Pierre Laporte, ce qu'il disait. Je le cite, Mme la Présidente: «Ce n'est pas la popularité ou l'impopularité d'un projet de loi qui sert de critère au gouvernement dans la préparation de la législation, mais le bien commun.» C'est ce que Pierre Laporte, ministre des Affaires municipales, a déclaré alors qu'il défendait le projet de loi sur le regroupement des 14 municipalités de ville de Laval dans les années soixante. C'est assez clair, ça.
Le 29 mai dernier, un ministre du gouvernement libéral, le député de Chapleau, disait ceci: «Gouverner le Québec, ce n'est pas nécessairement prendre la mesure qui soit la plus populaire, c'est prendre celle qui selon nous va dans le sens du bien commun et de l'intérêt de l'ensemble de la population. Et parfois ça fait en sorte que nous prenons des mesures qui sont impopulaires.» Or, on doit comprendre, Mme la Présidente, de la part des gens d'en face que, lorsqu'on dépose des lois à l'Assemblée nationale pour faire des regroupements municipaux, lorsque c'est un gouvernement du Parti libéral qui le fait, c'est bon, dans l'esprit des gens d'en face, puis quand c'est nous qui le faisons, ce n'est pas bon. Il va falloir que vous nous expliquiez cela. Vous en avez fait plusieurs, de l'autre côté, beaucoup plus que nous d'ailleurs, je dirais, au fil des ans, des regroupements municipaux. Et vous avez évoqué à chaque fois l'argument du bien commun. Mais, quand c'est un gouvernement du Parti québécois qui a fait des regroupements municipaux, bien là ça allait à l'encontre du bien commun. Je ne suis pas sûr que c'est le genre d'argument, je ne suis pas sûr que c'est le genre d'argument qui va susciter la confiance de l'ensemble de la population pour le gouvernement en place.
Mme la Présidente, j'aimerais ça conclure mon intervention en mettant en évidence quelque chose qui m'apparaît profondément choquant dans l'attitude des gens d'en face. À l'issue des référendums du 20 juin dernier, il est apparu clairement qu'il y avait un clivage économique et linguistique qui est apparu à l'issue des résultats de ce vote-là, un clivage linguistique et économique qui a été mis en évidence par beaucoup de commentateurs; et d'autres analystes, d'ailleurs, l'ont étudié plus à fond. Les gens d'en face, le ministre des Affaires municipales puis le premier ministre du Québec d'ailleurs ont complètement balayé cette réalité-là du portrait: Non, ce n'est pas vrai, il n'y a pas de clivage linguistique, il n'y a pas de clivage économique. Bernard Descôteaux, dans un éditorial qui a paru deux jours plus tard, le 22 juin, a mis en évidence cette réalité-là. Il disait ceci: «Le ministre des Affaires municipales [...] a pourtant pudiquement fermé les yeux hier sur ce phénomène ? le clivage linguistique et économique ? soulignant que de tous les arrondissements qui ont opté pour la défusion, moins de la moitié sont anglophones. Vrai, mais la réalité dit aussi que le West Island a voté en bloc pour la défusion alors que les villes à majorité francophone demeurent unies, sauf exceptions.»n(16 h 10)n Je vais également citer l'analyse qui a été faite par Pierre Drouilly et Alain Gagnon, qui a été publiée le 2 juillet dernier dans Le Devoir et qui est assez claire. «Clivage économique[...]. Des 10 villes les plus riches du Québec, huit ont défusionné. [...] Le clivage linguistique. [...] les municipalités les plus anglophones ont massivement appuyé le oui: les appuis varient de 38 % dans Dollard-des-Ormeaux à 74 % dans Baie-d'Urfé et Senneville. Mais ce sont bien les anglophones favorisés qui ont fait sécession de Montréal», et MM. Drouilly et Gagnon poursuivent plus loin en disant que le gouvernement en place a raté une occasion.
Quand le premier ministre et le ministre des Affaires municipales s'obstinent à déclarer contre toutes les évidences qu'il ne s'agit pas d'un clivage linguistique, on a l'impression, s'ils sont vraiment sincères, qu'ils ignorent encore quel génie ils ont libéré de la lampe magique. Les défusions ont été l'occasion, pour les riches et pour les anglophones, de refuser le vouloir-vivre-ensemble. Dans les banlieues de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, les deux phénomènes se sont conjugués et ont donné aux riches anglophones l'occasion d'exprimer une fois de plus le refus de vivre en commun avec le reste du Québec.
De tout temps, le refus de reconnaître les vrais enjeux n'a jamais été garant de paix constitutionnelle et sociale mais a plutôt conduit à distancer les communautés et à délaisser le terrain de l'émergence d'une citoyenneté commune et pluraliste, conduisant les uns et les autres à construire des villes trop étanches aux besoins de la ville-centre. C'est ça que vous avez fait de l'autre côté et c'est ce que le premier ministre et le ministre des Affaires municipales refusent de reconnaître, alors que, nous, nous avons cherché à construire des grandes villes pluralistes, ouvertes, généreuses. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Alors, merci, M. le député. Comme prochain intervenant, je reconnais le député des Îles-de-la-Madeleine. À vous la parole.
M. Maxime Arseneau
M. Arseneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je pense que les citoyens des Îles-de-la-Madeleine auraient été extrêmement déçus que je ne me lève pas à ce moment-ci pour présenter leur opinion et leur point de vue sur le projet de loi n° 75 et ce qui attend la région, la municipalité et le comté des Îles-de-la-Madeleine avec cette loi, ce projet de loi n° 75, puisque la réalité, qui a été fort bien décrite par le député de L'Assomption, en regard des problématiques des grandes villes, de la grande ville et des grandes cités, on les retrouve aussi, ces problématiques, dans les petites municipalités, et c'est le cas de la municipalité des Îles-de-la-Madeleine.
Or donc, Mme la Présidente, le projet de loi n° 75 aurait des impacts majeurs sur le territoire des Îles-de-la-Madeleine. Et, dans tout ce dossier de l'organisation municipale, Mme la Présidente, personnellement j'ai toujours dit que l'organisation du territoire, c'est une responsabilité première du gouvernement du Québec; le pouvoir ultime, le pouvoir final en ce qui concerne l'organisation territoriale relève du ministère des Affaires municipales et du gouvernement du Québec.
Je pense que même le projet de loi n° 75 vient confirmer cet état de fait, puisque, quand on regarde attentivement le projet de loi n° 75, on va se rendre compte que c'est derrière des portes closes, c'est secrètement que le gouvernement va concocter des décrets. Des décrets, c'est donc sa responsabilité, c'est donc... ça relève de lui, c'est lui qui va décider ultimement de l'organisation ou de la désorganisation qu'il va donner à l'organisation municipale sur le Québec, et c'est ainsi que lui-même, ce gouvernement, va décider et préciser la nouvelle organisation municipale dans plusieurs des régions du Québec.
Or, la loi n° 9 a été présentée au nom de la démocratie, en tout cas selon le gouvernement libéral et selon les gens d'en face. Je pense, Mme la Présidente, que le cas des Îles-de-la-Madeleine mérite d'être présenté ici, dans cette Chambre, comme étant un cas tout à fait particulier, un exemple du contraire de ce que le gouvernement voulait faire et de ses effets pernicieux et dangereux pour la démarche qui avait été initiée sur le territoire des Îles-de-la-Madeleine.
À l'origine, Mme la Présidente, nous retrouvions sur cet archipel huit municipalités pour à peu près 14 000 de population; c'est donc dire que nous retrouvions plus d'une cinquantaine d'élus municipaux pour le territoire des Îles, qui partaient pour les associations, ou les rencontres, ou congrès d'associations de structures municipales. On retrouvait aussi sur l'archipel un esprit de clocher immanquable, puisque chaque municipalité voulait attirer chez elle projets, structures, etc. On avait une MRC qui était face à des problèmes majeurs d'organisation des services, comme par exemple la gestion de l'eau ou encore les déchets.
Il y avait donc une organisation difficile au niveau de certains services et une iniquité très grande et majeure en ce qui concerne les en-lieu de taxes et les perceptions que faisaient certaines municipalités. Et tous ceux qui connaissent les Îles-de-la-Madeleine savent qu'il y a... au niveau de l'île centrale, il y avait à l'époque trois municipalités, sur cette île centrale, et une toute petite municipalité qui avait l'essentiel des services, des centres administratifs, des bureaux gouvernementaux, de l'hôpital, etc., ce qui apportait à cette toute petite municipalité des moyens disproportionnés et un poids très important au niveau de la MRC et des décisions.
Le processus de regroupement, aux Îles-de-la-Madeleine, a pris plus... ou près d'une dizaine d'années au total. C'était regardé depuis très longtemps, mais c'est une démarche qui a été longue, en termes de réflexion, en termes de cheminement, de la part des différentes municipalités et des différents groupes des Îles-de-la-Madeleine, quant à la nécessité, face aux défis auxquels sont confrontées les grandes mais aussi les petites municipalités en termes de développement. Quand on pense à la mondialisation et à tous ces sujets, je pense qu'il était évident que, pour un si petit territoire, huit municipalités, c'était beaucoup trop.
Alors, ce processus, Mme la Présidente, a cheminé de commissions en rapports, en référendums, en groupes de travail, en recommandations, et finalement, d'année en année, nous avons évolué vers un concept de communauté maritime et de plus en plus vers un regroupement global, total de l'ensemble des municipalités des Îles-de-la-Madeleine.
Au moment où le gouvernement précédent a pris ses responsabilités et a adopté des décrets, a pris des décrets, comme le gouvernement s'apprête à le faire bientôt avec la loi n° 75, comme c'est prévu ? le député de Hull devrait écouter jusqu'à la fin ? au moment où le gouvernement précédent a pris ses responsabilité et a adopté les décrets en ce qui concerne les Îles-de-la-Madeleine, il restait deux municipalités, Mme la Présidente, qui avaient refusé ou qui refusaient de cheminer vers ce regroupement.
Une est une municipalité d'à peu près 600 individus anglophones, qu'on appelle Grosse-Île, qui font partie de la population des Îles-de-la-Madeleine, qui sont aux Îles depuis aussi longtemps que des francophones, qui ont acquis des droits, qui ont acquis aussi, je dirais, certains droits qu'ils avaient. Et nous nous sommes assurés, Mme la Présidente, avec toute la précaution, de faire en sorte que ces services et que ces droits leurs soient garantis à l'intérieur de la nouvelle municipalité. Ça a pris du temps, ça a pris de la discussion, mais ça s'est fait finalement, en cheminant. Et il y avait une autre municipalité, c'est la municipalité de Cap-aux-Meules, qui est aussi une petite municipalité, en bas de 1 000 habitants, mais qui avait toute la richesse foncière sur son territoire.
Et le gouvernement, à ce moment-là, a pris ses responsabilité et a adopté un décret constituant la municipalité des Îles-de-la-Madeleine. Il y a eu des élections, il y a eu un maire qui a été élu, il y a eu... au suffrage universel de l'ensemble des citoyens madelinots, et il y a eu, après ça, un conseiller par localité, incluant l'arrondissement de Grosse-Île qui, lui, avait un statut particulier, avec un conseil d'arrondissement, avec des gens élus aussi au suffrage universel. Et tout le monde avait la volonté de travailler à la construction, au défi que représentait la construction de la nouvelle municipalité des Îles.
n(16 h 20)n C'était sans compter sur la promesse des libéraux en campagne électorale, Mme la Présidente. Une promesse électorale à cause, disaient les libéraux, des fusions forcées, à cause, disaient-ils, du manque de démocratie. Mme la Présidente, je dis que la démocratie, c'est lorsque chacun assume ses responsabilités. Et dans ce cas-ci, je l'ai précisé en introduction, la responsabilité de l'organisation territoriale et municipale au Québec relève du ministre des Affaires municipales et du gouvernement du Québec.
Or donc, quel était l'intérêt ou l'intention des libéraux en regard de la question municipale? Leur intérêt était électoraliste, clientéliste, à l'effet de laisser planer la possibilité pour certaines municipalités fusionnées de retrouver leurs structures. Il n'y a aucun doute, Mme la Présidente, dans mon esprit en ce qui concerne cela.
Et les libéraux effectivement ont pris le pouvoir. Ils ont dit: Nous avons un mandat. Ce que je réclame, Mme la Présidente, ce que je dis dans cette Chambre, c'est: Quel était le mandat du gouvernement libéral en regard du démembrement possible de la municipalité des Îles-de-la-Madeleine? Et je répète: Ce gouvernement a la responsabilité de gérer l'organisation territoriale au Québec. Alors donc, Mme la Présidente, si chacun avait assumé ses responsabilités, peut-être que les Îles auraient pu être exclues de cette loi n° 9.
Parce que, Mme la Présidente, il faut bien voir, est arrivée cette loi pour la démocratie, adoptée dans un bâillon magistral, fort complexe...
Une voix: ...
M. Arseneau: Oui, le plus gros bâillon de l'histoire du Québec. Prenons le cas de la signature des registres, Mme la Présidente, prenons le cas de la signature des registres. Aux Îles, six des huit anciennes municipalités n'ont pas signé le registre, donc se sont prononcées, se sont prévalues pour le maintien de la municipalité des Îles-de-la-Madeleine. Donc, il n'y a pas eu suffisamment de signatures au registre pour que ces gens-là se prononcent sur l'avenir des Îles: six des huit anciennes municipalités. Elles se sont donc exprimées contre le démantèlement.
Alors, ce sont donc deux petites municipalités et au total à peu près 12 % de la population des Îles-de-la-Madeleine qui vont maintenant décider ce recul et ce démembrement des Îles-de-la-Madeleine. Comment se fait-il que deux petites municipalités, une riche mais de façon relative, Mme la Présidente, qui ne représentent qu'un pourcentage minime de la population des Îles-de-la-Madeleine, au nom de la démocratie, puissent procéder au démembrement des Îles-de-la-Madeleine? La question soulevée par le député de L'Assomption et par mes collègues, c'est qu'une loi doit veiller au bien commun. Et est-ce que le bien commun de l'ensemble de la population des Îles est bien protégé, est bien défini par ce processus et par ce cheminement? La réponse à cela, c'est non.
La loi n° 9, Mme la Présidente, était déjà complexe, confuse. J'ai d'ailleurs demandé, et je me suis levé dans cette Chambre pour poser la question au ministre des Affaires municipales à l'époque, pour qu'il envoie des fonctionnaires du ministère des Affaires municipales aux Îles-de-la-Madeleine pour bien faire en sorte d'expliquer aux citoyens de Grosse-Île et de Cap-aux-Meules quelles étaient les implications de la loi n° 9, quel était... de quoi il en retournait de cette loi, puisqu'il était question de ne pas retrouver intégralement les pouvoirs des anciennes municipalités, et surtout quels étaient les impacts des études qui avaient été commandées par ce gouvernement pour voir quel était le résultat ou comment se présentait l'état financier de ces municipalités au lendemain d'un démembrement.
Et l'étude, qui avait été faite par la firme Roche, faisait en sorte d'amener des chiffres quant aux réalités en fonction d'un démembrement complet des Îles-de-la-Madeleine. Or, Mme la Présidente, il n'y avait que deux municipalités qui s'étaient exprimées et qui s'exprimaient pour le démembrement. Donc, l'étude même, l'étude même était passée due, n'était pas réaliste en regard de la situation financière des municipalités qu'on appelait à ce moment-là résiduelles et des municipalités reconstituées. C'est donc que les citoyens de Cap-aux-Meules et de Grosse-Île ont voté sur des chiffres qui n'étaient pas exacts. La réponse du ministre à ma demande a été: Non, pas de fonctionnaires qui pourront aller aux Îles pour expliquer la loi n° 9 au nom de la démocratie, parce que semble-t-il qu'il aurait fallu qu'ils s'inscrivent dans un cas du oui ou un cas du non. Mais les municipalités n'avaient pas nécessairement, dans toutes les localités des Îles-de-la-Madeleine, des comités, forcément, puisque ce ne sont qu'une minorité qui se sont exprimés dans ce sens-là.
Donc, je dis: Ce gouvernement était peut-être préoccupé de démocratie mais aveugle en regard des réalités vécues localement dans des petites municipalités, dans des petites localités. Alors, les gens ont voté sans connaître les conséquences réelles de la loi n° 9, de toute évidence, et du sens que prenait un oui au référendum.
Mme la Présidente, nous avions mis 10 ans, je l'ai expliqué, à cheminer avec les Madelinots vers le regroupement. Et le gouvernement actuel, à moins d'un revirement, ce que je souhaite, Mme la Présidente... Ce que je souhaite sincèrement: Que le gouvernement réalise l'erreur qu'il s'apprête à commettre aux Îles-de-la-Madeleine et fasse en sorte de revenir sur cette décision et conserve la municipalité des Îles.
Mais que risque-t-il de se passer? Depuis le référendum, la situation est de plus en plus confuse aux Îles-de-la-Madeleine. Même, écoutez, je pourrais vous lire des articles de notre hebdo, duquel nous sommes extrêmement fiers, qui s'appelle Le Radar, ce qui est très pratique lorsqu'on est dans la brume: «L'alternative au démembrement, le comité du Oui dit non.» C'est parce que là ils ont commencé à réaliser que, même en votant oui au référendum et en votant pour le démembrement, que ce n'était pas certain que ce serait une bonne chose pour les citoyens de la petite localité de Cap-aux-Meules. Parce que, dans les petits milieux, le climat social, c'est extrêmement fragile, et il y a eu une réaction dans les six municipalités qui ne s'étaient pas exprimées sur le démembrement en voulant s'exprimer pour le maintien. Elle est assez complexe, la loi n° 9, Mme la Présidente.
Alors, il y a eu des boycotts en regard du centre d'affaires de Cap-aux-Meules, il y a eu des gestes qui ont été posés, des choses qui se sont dites, et ils ont dit: Ce n'est peut-être pas si bon que ça. Alors là, le comité du Oui dit non, puis il demande au gouvernement d'étudier des possibilités d'aménagement de façon à ne pas justement démembrer les Îles-de-la-Madeleine. Cap-aux-Meules ne sait plus donc s'il veut défusionner, oui ou non. C'est assez tragique. Mais ça ne se passe pas seulement aux Îles-de-la-Madeleine, ça s'est passé dans la région de Québec aussi.
Qu'a fait la municipalité, puisque le maire des Îles, jusqu'au démembrement, parle au nom aussi de toute la population des Îles-de-la-Madeleine? Et, quand le conseil municipal des Îles parle, il parle au nom de l'ensemble des citoyens des Îles-de-la-Madeleine. Qu'est-ce qu'il a fait, le conseil municipal? Il a fait parvenir un mémoire extrêmement complet, avec, là, le fin détail du fait qu'on retirait deux municipalités, une qui a la richesse foncière. C'est donc l'inverse de ce qui se passe ailleurs au Québec, où la ville-centre, en se retirant ? c'est elle qui se retire ? elle se retire avec la richesse foncière. Que restera-t-il pour la grosse municipalité, la municipalité résiduelle ou la municipalité d'agglomération, ou je ne sais plus toujours comment l'appeler parce qu'il y eu beaucoup de termes et de mots qui ont été ajoutés à cela? C'est pathétique, c'est tragique.
Alors, la municipalité a envoyé un mémoire extrêmement complet au gouvernement, où on prévient le gouvernement de l'iniquité qu'il s'apprête à créer en recueillant ces deux municipalités et la municipalité résiduelle. Il fait référence aux particularités des Îles, à la détérioration du climat social. On met en place... C'est ça, la réaction du gouvernement, ça a été de mettre en place un comité de transition sur lequel ne siège aucun Madelinot, qui va coûter 1 million de dollars. Ce n'est rien peut-être dans les grandes cités, Mme la Présidente, mais, chez nous, pour une petite municipalité comme Grosse-île qui a 500 habitants, de devoir assumer une facture de 275 000 $ sur le million pour faire vivre le comité de transition sans savoir si ça va être correct, c'est une facture salée. Puis là ils la repoussent puis ils disent: Non, on va la retourner au gouvernement, puis ils disent: Non, on va la retourner à l'ensemble des Îles. Ce n'est pas réglé, ça. Mais la loi est très claire... était très claire à ce sujet: ce sont les municipalités reconstituées qui doivent assumer cette facture.
n(16 h 30)n Je pense que le gouvernement libéral devrait allumer certaines lumières pour mieux comprendre cette réalité. Le premier ministre s'est déplacé aux Îles-de-la-Madeleine, il a été questionné là-dessus. Il a dit: Effectivement, s'il y a une situation particulière... Mais on ne la voit pas encore dans la loi n° 75. Voilà pourquoi nous sommes extrêmement déçus de cette loi-là.
Et le comité de transition a remis un rapport préliminaire qu'on peut consulter sur le site. Ou bien ce comité de transition, Mme la Présidente, est complètement déconnecté de la réalité des Îles, ou bien on a édulcoré, ou on a dilué, ou on a travaillé un peu. Je ne sais pas si mon mot était correct, là. Il faudrait que je le vérifie, Mme la Présidente, mais en tout cas ? je n'ai presque plus de temps ? mais une chose qui est certaine, c'est que ce rapport ne décrit pas adéquatement la réalité vécue aux Îles. Or, Mme la Présidente, il me reste une minute pour vous expliquer que cette loi n° 75, non seulement elle est encore plus complexe, elle est encore plus brumeuse que la loi n° 9. Mais il y a des reculs démocratiques qui ont été très bien expliqués par mes collègues dans les interventions précédentes. On va avoir des séances extrêmement déchirantes dans les petites communautés, comme ce qui va se passer après qu'on aura décidé de quelle façon vont se prendre les décisions puis où vont aller les mandats.
Mme la Présidente, de toute évidence, plus ce gouvernement chemine, plus ce gouvernement avance ? ...
Une voix: ...
M. Arseneau: ...oui, M. le Président, excusez-moi; dans mon emportement, je n'avais pas remarqué le changement, mais là je le vois très bien, M. le Président, je le vois très bien ? et plus ce gouvernement présente des projets de loi dans ce dossier du démembrement, plus cela ressemble à un fiasco. Et vous savez le pire, M. le Président? C'est que, dans les deux dernières années, depuis l'élection du gouvernement libéral, les deux années ont été complètement perdues en termes de développement économique, en termes de questionnement, en termes d'unité, d'union pour le développement de la communauté des Îles-de-la-Madeleine. Et j'ai peur que ça encore dure plusieurs années avec la loi n° 75. Voilà pourquoi je m'y oppose, M. le Président. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci beaucoup, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Je reconnais maintenant le prochain ou la prochaine intervenante. Je reconnais maintenant M. le député de Rousseau sur le même principe du projet de loi. Alors, M. le député de Rousseau, pour votre intervention.
M. François Legault
M. Legault: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir ? attendez une minute, on va juste s'installer rapidement ? ça me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi n° 75. Mais en même temps je peux vous dire que ça ne me fait pas plaisir par contre de voir le gouvernement libéral venir poursuivre ce gâchis qu'on vit au Québec, M. le Président, dans plusieurs municipalités, entre autres dans des grandes villes, dans des plus petites villes, comme mon collègue vient de le dire, entre autres aux Îles-de-la-Madeleine, mais aussi à Montréal, M. le Président. Et je pense qu'il faut se rappeler du pourquoi des regroupements municipaux.
Le gouvernement du Parti québécois, de façon très courageuse, a décidé de fusionner certaines villes, entre autres certaines grandes villes, pour atteindre essentiellement deux objectifs: le premier objectif, c'est un objectif d'efficacité; et le deuxième objectif, c'est un objectif d'équité. Et, M. le Président, d'abord, si on parle d'efficacité, on va tous convenir, là, que, si on prend, par exemple, la ville de Montréal... Si la ville de Montréal veut poursuivre son développement économique, elle a besoin, quand elle va, par exemple, rencontrer à l'étranger des entreprises qui souhaitent peut-être s'établir dans cette municipalité, elle doit être capable d'être en contrôle de tous ses outils.
Je me rappelle, M. le Président, d'avoir participé à des missions économiques à l'étranger, entre autres au Mexique, en Argentine, au Chili, avec des représentants municipaux. Par exemple, je me souviens très bien, entre autres, d'avoir fait une mission avec celui qui était, à ce moment-là, le maire de Verdun, Georges Bossé, qui est maintenant dans l'équipe du maire Tremblay. Et M. Bossé était obligé d'expliquer qu'il était maire de la ville de Verdun mais que dans le fond Verdun, c'était dans le Grand Montréal mais que ce n'était pas tout à fait Montréal. Et c'était la même chose quand on parlait de ville Saint-Laurent où il y a un parc industriel, quand on parlait finalement de tout le Grand Montréal. Et je peux vous dire, là, que les maires de ces municipalités autour de Montréal, quand ils vont à l'étranger, là, ils utilisent, je m'excuse, mais ils utilisent le nom de Montréal en disant que, pour un étranger, là, ce qu'on parle, c'est vraiment de venir s'établir dans le Grand Montréal.
Donc, c'est un exemple, le développement économique, mais il y a plein d'exemples où tout le monde va comprendre qu'avec plus de 1 000 municipalités au Québec, avec des petites municipalités qui ont quelques centaines ou quelques milliers de personnes, bien ça devient parfois, je dis bien «parfois», difficile de donner des services d'une façon efficace.
Il y a aussi, M. le Président, un problème d'équité. Vous savez, j'ai personnellement passé les 31 premières années de ma vie à Sainte-Anne-de-Bellevue. Sainte-Anne-de-Bellevue, c'est une petite municipalité qui va défusionner dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal. Or, pendant ces premières années de ma vie, je peux vous dire que j'ai souvent utilisé les services du centre-ville de Montréal, souvent passé du temps sur la rue Sainte-Catherine, sur la rue Sherbrooke, sur des rues qui sont, l'hiver, déneigées par la ville de Montréal mais, il faut bien l'avouer, sans toujours payer directement, via les taux de taxes, ce qu'il fallait payer pour couvrir ces frais. Donc, il y avait comme, si on veut, là, une petite passe gratuite pour nous autres à Sainte-Anne-de-Bellevue. On n'avait pas besoin de payer toutes les taxes nécessaires pour les services qui sont donnés à Montréal, mais on en profitait. Donc, vous voyez qu'il y a un problème d'équité. Ah, je peux comprendre. Et puis, vous savez, ma mère, qui habite toujours à Sainte-Anne-de-Bellevue, bien je vais la visiter de temps en temps puis je parle avec les gens de Sainte-Anne-de-Bellevue. C'est certain que, les gens de Sainte-Anne-de-Bellevue, si on leur dit: Pouvez-vous garder le meilleur des deux mondes, pouvez-vous en même temps me laisser mon taux de taxe, qui n'est pas trop élevé, mais la possibilité d'aller utiliser les services qui sont à Montréal?, ils vont vous dire: Bien sûr, j'aime mieux ça, ça a des avantages des deux côtés puis ça n'a aucun inconvénient.
Et, M. le Président, je m'excuse de le dire ? puis il faut peut-être faire attention, là, comment on va le dire ici, en Chambre, là ? mais le Parti libéral du Québec a laissé croire à la population de Sainte-Anne-de-Bellevue qu'elle pourrait, si elle votait pour le Parti libéral, retrouver l'ancienne municipalité avec tous les avantages. Or, c'est là qu'il y a un problème, M. le Président, parce qu'on l'a vu très bien, dès l'arrivée au pouvoir du Parti libéral du Québec, bien le discours a beaucoup changé. On s'est rendu compte ? je ne peux pas prétendre, là, qu'on n'avait pas vu ça avant, mais en tout cas on ne peut pas prêter des intentions à qui que ce soit ? mais ils se sont rendu compte, là, que ce n'était pas équitable, ce n'était pas équitable, là, de dire: Si vous voulez garder le meilleur des deux mondes, vous pouvez le garder. Et, plutôt que d'expliquer à la population que, dans un élan, à un conseil du Parti libéral où le député de Hull avait forcé le jeu un petit peu ? puis il est ici, là, aujourd'hui... Plutôt que d'essayer de reculer en disant: On a fait une erreur avec cette promesse-là, bien ils ont accéléré. Ils ont pesé sur l'accélérateur en disant: Bien, on va préparer un référendum, des référendums très rapidement où les citoyens, sans être trop, trop informés des enjeux, bien ils vont pouvoir voter.
Et je peux vous le dire, là, puis je peux vous le confirmer. J'ai rencontré plusieurs personnes ? je reviens à mon exemple de Sainte-Anne-de-Bellevue ? qui, durant cette courte campagne, me disaient: Nous, ce qu'on vote, c'est pour la défusion parce qu'on veut ravoir notre ancienne municipalité. Or, ce n'est pas ça. Ce n'est pas ça qui est prévu par le Parti libéral du Québec. Ce qui est prévu, c'est une structure compliquée où on va avoir des agglomérations, des conseils d'agglomération qui vont être contrôlés par la ville de Montréal, qui vont prendre des décisions sur le territoire des municipalités défusionnées, qui vont taxer les citoyens des municipalités défusionnées sans que les citoyens des municipalités défusionnées aient le contrôle sur ces décisions-là.
Donc, les citoyens, les citoyennes, par exemple, de Sainte-Anne-de-Bellevue se retrouvent, aujourd'hui, un peu avec le pire des deux mondes: ils vont avoir des nouvelles taxes puis ils n'auront même pas la chance d'essayer d'influencer ce qui se passe à la ville de Montréal. Ils ont perdu le contrôle, mais ils paient. Donc, c'est certain qu'ils se disent aujourd'hui: On a été floués. On a été floués. C'est ce qu'ils me disent quand ils me rencontrent. Ils me disent: Si on avait su, si on avait su. Et, M. le Président, je suis convaincu que, si les citoyens et les citoyennes avaient été bien informés du réel choix qu'on leur offrait, c'est-à-dire, d'un côté, de rester dans la grande ville de Montréal ou, de l'autre côté, de payer, d'être défusionnés mais que les services les plus importants soient gérés par Montréal, ils auraient dit: Bien, j'aime mieux rester fusionné dans la grande ville de Montréal. Mais cette information-là n'a pas été donnée.
n(16 h 40)n Pourquoi? Parce qu'on n'a pas donné le temps justement aux nouvelles villes de démontrer ce qu'ils pouvaient avoir comme avantages. Tout s'est fait très vite, dans la confusion ? je pense qu'il faut bien dire les mots comme ils sont ? dans la confusion à cause justement de cette promesse libérale qui a été faite par calcul politique lors d'un congrès, lors d'un conseil. Et cette résolution d'urgence, on s'en souviendra, en 2000, où on disait: On va permettre la tenue de référendums qui vont permettre l'annulation des fusions. Et évidemment que, dans un premier temps, ça a donné, ça a joué un mauvais... le chef du Parti libéral s'est retrouvé dans une drôle de position parce qu'il y a des gens qui ont commencé à comprendre le petit manège qui s'en venait et ont commencé à s'opposer à ces défusions. Et là on se souviendra tous, hein, entre autres au débat des chefs, la grande déclaration solennelle du chef du Parti libéral du Québec qui a dit: Moi, là, je souhaite que les nouvelles villes réussissent. Il n'a pas agi par la suite. Ça s'est arrêté là.
Dès qu'il est arrivé au pouvoir, il a mis en marche la machine des défusions. Gaspillage d'énergie, M. le Président, parce qu'on le voit partout, imaginez-vous, là, on va être obligés de reséparer les employés; il y a des comités de transition; il va falloir partager les actifs; il va y avoir des poursuites. Les seuls qui vont gagner, c'est les bureaux d'avocats, M. le Président, les bureaux d'avocats, là, qui vont avoir du travail, là, pour plusieurs années. Mais qui va payer pour ça? Les contribuables du Québec. Donc, on a vu les défusionnistes promettre des batailles juridiques, on a vu des défusionnistes promettre de bloquer le travail des conseils d'agglomération, et, M. le Président, comme je le disais tantôt, les citoyens vont être perdants, les citoyens vont se retrouver avec un modèle imposé. Alors que le Parti libéral nous accusait d'avoir imposé un modèle, bien, là, il y a un modèle imposé avec un conseil d'agglomération imposé, un conseil d'agglomération qui pourra taxer les citoyens et dépenser leur argent comme bon leur semble, sans avoir leur approbation. C'est ça que ça veut dire, M. le Président.
Et je pense qu'il faut être capable de dire, là, que la démarche libérale a transformé finalement un débat sur l'avenir et sur le développement des collectivités en une compétition, là, où ce serait celui qui promettrait, surtout à la veille d'élections municipales l'année prochaine, le plus bas compte de taxes possible. C'est rendu, là, ils n'ont plus aucune vision de développement à long terme.
Donc, M. le Président, ce qu'on dit aussi dans le projet de loi, c'est que toute municipalité défusionnée insatisfaite d'un règlement qui est adopté par le conseil d'agglomération ? imaginez-vous, puis il va y en avoir pas à peu près ? bien il va pouvoir faire connaître son opposition au ministre, et l'entrée en vigueur du règlement va être conditionnelle justement à l'approbation du ministre. Ça fait qu'imaginez-vous ça, là, vous allez avoir des piles. Écoutez, il n'y a personne, là, qui va souhaiter avoir la job de ministre des Affaires municipales. Ça va être l'enfer. D'ailleurs, le ministre des Affaires municipales... Et on le voyait dans un article de Denis Lessard dans La Presse, qui disait: «Le titulaire des Affaires municipales [...] ne se cache [...] pas pour marquer sa déception en fin de parcours. Essentiellement, du début à la fin, il aura été laissé seul au front dans ce dossier délicat. Il veut désormais quitter les Affaires municipales "le plus vite possible" [...] pour obtenir le portefeuille qu'il convoitait avant les dernières élections, celui des Transports. [Le ministre actuel] ? donc, je ne nommerai pas son nom ? estime avoir tenu parole [...] en tentant de concilier des promesses quasi contradictoires.» Et on termine cet article en disant que le titulaire «n'en demeure pas moins déçu ? déçu ? d'avoir été laissé à lui-même par son patron». Ça, son patron, c'est celui qu'on appelle, aujourd'hui, le premier ministre du Québec. Et on disait ici: «Encore hier[...], des collaborateurs du premier ministre soulignaient qu'il n'y avait pas péril en la demeure, personne ne cesse de respirer.» Et le titulaire encore une fois sera envoyé en première ligne. Et le premier ministre ne prévoyait commenter que plus tard. Et on disait ici: «À l'Assemblée nationale, [le premier ministre] a eu 1 000 occasions de plaider en faveur ? entre autres ? du Grand Montréal. À 1 000 reprises, il a plutôt martelé la nécessité de permettre aux citoyens des villes fusionnées de force de se prononcer.» Et on disait d'ailleurs, on commençait, dans cet article de M. Lessard de La Presse, on disait: «Ironiquement, tout en vivant au coeur de la métropole, [le premier ministre du Québec] bientôt ne sera plus Montréalais. Résidant de Westmount, il aura depuis un an appuyé du bout des lèvres les fusions municipales.» Et le titulaire actuel du ministère des Affaires municipales l'a appris à ses dépens. Il est déçu. Et aussi le maire de Montréal, Gérald Tremblay, lui, s'en souviendra longtemps.
Donc, c'est ce qu'on disait là de l'attitude du premier ministre qui ne s'est pas mêlé du dossier, qui s'est lavé les mains. Puis le titulaire du ministère des Affaires municipales, bien, lui, il a juste hâte de sacrer son camp de ce ministère-là parce que, M. le Président, ça va être invivable. Imaginez-vous: à chaque fois que les municipalités défusionnées ne seront pas contentes d'une décision du conseil d'agglomération, ils vont pouvoir faire un genre d'appel au ministre. Je ne sais même pas s'il va avoir le temps de venir ici, en Chambre, M. le Président, pour répondre à nos questions à la période des questions. Je lui prédis qu'il va être occupé à temps plein.
Donc, M. le Président, on a vu tous les articles qui ont été publiés. On dit, par exemple, que la nouvelle créature du gouvernement libéral qui regroupa les 16 villes de l'île de Montréal est «antidémocratique», «exagérément compliquée», «engendrera des disputes». Entre autres, la mairesse de Westmount, M. le Président, qui disait: «Nous avons été surpris...» Westmount, c'est la nouvelle municipalité où réside le premier ministre. Et elle nous disait: «Nous avons été surpris et très déçus qu'aucune de nos recommandations n'ait été incorporée, a déclaré Karin Marks, mairesse de Westmount, présidente du Comité des villes à reconstituer. Le modèle ? de conseil d'agglomérations ? ne marchera pas ? c'est ça qu'elle dit ? ni pour la ville centre ni pour les villes autour.» Et elle ajoute: «On perd complètement le droit de gérance. Il n'y aura [plus] un seul succès, c'est invivable pour nous et pour Montréal. Il y aura une bureaucratie énorme.» Ça, c'est la mairesse de Westmount, c'est la mairesse du premier ministre qui nous dit ça. Et le premier ministre fonce quand même: Ce n'est pas grave, on va aller de l'avant.
Et, M. le Président, je pense que, pour voir le ridicule, il faut regarder la nouvelle carte de Montréal. On se retrouve avec une situation, M. le Président, où certaines municipalités comme Mont-Royal, Hampstead, Côte-Saint-Luc, Westmount vont se retrouver entourées par la ville de Montréal, par la nouvelle ville de Montréal. Il va y avoir des quartiers tout autour. Et même chose dans l'est de Montréal, M. le Président, on va se retrouver avec une nouvelle municipalité, Montréal-Est, qui va être entourée par la ville de Montréal. Je veux dire, c'est complètement ridicule. Une chance que le ridicule ne tue pas. Donc, M. le Président, on l'a vu un petit peu partout, on nous dit que la défusion est devenue un casse-tête colossal. Les comités de transition se creusent la tête. On dit, par exemple, que le comité de transition à Montréal a dit et il a affirmé que «le redéploiement des effectifs est une source d'inquiétude chez les employés». M. le Président, j'en connais personnellement, des employés des municipalités qui vont être défusionnées dans l'Ouest-de-l'île de Montréal, et effectivement il y a de l'inquiétude. On ne sait pas où on s'en va. C'est une perte d'énergie totale de ce côté-là.
Donc, M. le Président, on a vu. Et je veux peut-être quand même revenir, là. Il y avait aussi d'autres déclarations. L'ex-présidente de la Communauté urbaine de Montréal, Vera Danyluk, qui dit que «le gouvernement libéral a accouché d'un canard boiteux avec le conseil d'agglomération. "Je me demande comment ça va fonctionner et comment les gens vont travailler ensemble"».
n(16 h 50)n Même, M. le Président ? je vous parlais tantôt de la ville de Saint-Anne-de-Bellevue ? l'ex-maire de Sainte-Anne-de-Bellevue, Bill Tierney, qui était devenu conseiller municipal, dit, et je le cite, là, parce qu'il y a des gens qui ont encore des espoirs ? et c'est là, là, qu'on voit que le dossier est loin d'être clos ? donc l'ancien maire de la ville de Sainte-Anne-de-Bellevue qui dit: «Quand on dit que la loi ne changera pas, on se trompe. On avait la loi n° 170 forçant les fusions municipales, elle a changé. Maintenant, on a la loi n° 9, et elle va changer. Les politiciens aussi peuvent changer.» Vous voyez l'attitude, là. Ça, là, c'est l'ancien maire de Sainte-Anne-de-Bellevue. Et c'est la même chose un petit peu partout dans toutes les municipalités, M. le Président.
J'avais aussi le maire de Pointe-Claire, une autre ville qui va défusionner, M. Bill McMurchie, qui dit: «Nous sommes frustrés. Les gouvernements précédent et actuel sont convaincus que la solution réside en une ville de Montréal plus grande. Nos citoyens ne sont pas contents de la manière dont les libéraux ont traité ce dossier.» Ça, M. le Président, là, je peux vous dire, ce sont tous des anciens partisans du Parti libéral du Québec. Pourquoi sont-ils mécontents aujourd'hui, si ce n'est parce que justement ils n'avaient pas compris la même chose de ce qui avait été effectivement prévu, ce qui est maintenant prévu dans le projet de loi n° 75?
Donc, M. le Président, en conclusion, on voit bien, là, que le projet de loi n° 75, ça veut dire quoi? C'est électoraliste, cafouillage, improvisation. On a laissé, M. le Président, des calculs politiques à courte vue prendre la place de la recherche du bien commun. Et, M. le Président, je pense qu'on n'a pas fini d'entendre parler de cette décision désastreuse qui va nuire ? qui va nuire ? M. le Président, au développement des municipalités, en particulier au développement de la grande ville de Montréal. On le voit actuellement. En plus, il y a des élections qui s'en viennent l'année prochaine. Donc, on est pris, en même temps que cette campagne électorale, on est pris à essayer de gérer la répartition nouvelle des actifs, des employés. Tout le monde n'est pas content.
Donc, M. le Président, je pense qu'on va tous être d'accord pour dire que ce projet de loi n° 75 devrait être rejeté. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Rousseau. Pour la poursuite du débat toujours sur l'adoption du principe de ce projet de loi n° 75, je reconnais maintenant Mme la députée de Champlain. Alors, à vous la parole, Mme la députée de Champlain, pour votre droit de parole.
Mme Noëlla Champagne
Mme Champagne: Merci, M. le Président. Or, écouter et intervenir à ce moment-ci sur le projet de loi n° 75 qui est la suite du projet de loi n° 9, c'est à la fois facile et difficile. Facile, ce n'est pas parce que les arguments nous manquent, mais difficile, c'est parce qu'on sent comme un cul-de-sac.
Puis je relisais plein de notes de ce que le ministre avait dit de ce qui a été fait sur le projet de loi n° 9 et le projet de loi n° 75 qui vient d'être déposé. Et j'ai toujours une phrase qui me revient à l'esprit puis je vais vous la partager, là: Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? Alors, tout est compliqué dans ça. On multiplie les structures, on multiplie les étapes, et, j'ai l'impression, c'est un petit peu le bordel dans chacune des petites municipalités qui vivent présentement la défusion.
À l'exemple de mes collègues, on a tous été, malheureusement, dans chacune de nos régions, attaqués par ce projet de loi là, le 9 d'abord et maintenant le 75. Quand je regarde dans le petit coin de La Tuque, au nord de ma région, La Bostonnais et Lac-Édouard, La Bostonnais, 528 personnes habitent La Bostonnais, et Lac-Édouard, 145 personnes. On leur a demandé. On leur a proposé, c'est-à-dire. On leur a suggéré la défusion en leur mettant un baume autour de ça. Or, ces petites municipalités là se sont réveillées, puis ils ont eu une vilaine surprise. Ils ont eu une surprise d'environ 750 000 $. Ça devait leur coûter quelque 20 000 $ chacune pour la défusion, et là ils vont avoir à assumer une facture de 750 000 $. J'aime autant vous dire que l'écart est difficile à porter. Et ça ne me surprendrait pas qu'elles aient le goût de refusionner. Mais là il paraît que le ministre est ouvert là-dessus. Mais quel dommage et quel dégât vont avoir été faits dans le cadre des défusions. À part ces deux petites municipalités là, j'aime autant vous dire que la région de la Mauricie comptait deux autres grosses, grandes agglomérations que sont Shawinigan et Trois-Rivières. Trois-Rivières l'a échappé, je dirais même, de peu, même si les gens ne sont pas allés voter beaucoup; désintéressement, écoeurement, peu importe. Je pense que les gens ne savaient plus où s'en aller.
Et, moi, ce que j'aurais souhaité, M. le Président, là, dans ce cadre-là, à part un paquet d'exemples que je pourrais vous donner, que mes collègues ont déjà donnés et que d'autres vont faire après moi, c'est que le ministre des Affaires municipales ait la sagesse d'aller à l'encontre d'une promesse électorale irréfléchie, irresponsable et, à la place, et j'en conviens, propose, insiste, force, s'il le faut, certaines municipalités qui ne reconnaissaient pas des services de proximité acceptables, les oblige un peu, avec la complicité de la population, à respecter les décrets que notre gouvernement avait proposés aux municipalités.
Il y a des municipalités qui ont livré la marchandise, d'autres ne l'ont pas fait. Il y a des municipalités qui ont possiblement eu chaud et qui justement, présentement, au moment où on se parle, parce qu'elles n'ont pas de défusion, sont en train de mettre en place des mesures fort intéressantes pour les citoyens et les citoyennes.
Une voix: ...
Mme Champagne: Alors, moi, ces municipalités-là ? parce que je pense que le collègue d'en face m'approuve largement ? ces municipalités-là, M. le Président, sont tout à fait contentes d'avoir évité l'impair de la défusion. Défusionner, c'est se retarder, c'est reculer en arrière.
Ces municipalités-là qui n'ont pas défusionné ont quand même vécu une année, je dirais, d'inquiétude, d'insécurité, et il n'y a personne qui a fait un pas en avant. Ça allait bien, M. le Président, parce qu'il n'y avait pas grand projets sur la table. Il n'y avait pas d'argent, pas de programmes d'infrastructure, donc ils se sont penchés sur la complexité de savoir combien d'électeurs devraient ou ne devraient pas voter. Alors, tout ce travail-là inutile perdu, M. le Président, on en a les conséquences présentement.
Alors, si je reviens à mes deux petites municipalités, La Bostonnais et Lac-Édouard. Le maire de La Tuque, M. Réjean Gaudreault, disait, le 22 juillet 2004, là: C'est un drame social qui s'en vient. Quand on vit dans une petite communauté un petit peu plus éloignée et qu'on a à vivre un coût de transition ? comme je le disais tout à l'heure ? de 750 000 $, bien on ne la trouve pas nécessairement drôle. Et le conseiller municipal, M. Michel Garceau, disait, dans le même texte du Nouvelliste du 22 juillet dernier, qu'il était estomaqué de constater dans quel bourbier les contribuables qui l'avaient élu lors des élections du mois de novembre précédent se sont embarqués, malgré les doléances formulées par les autorités municipales de la nouvelle ville de La Tuque. C'est un drame social qui s'en vient dans ces deux communautés.
M. Gaudreault lui-même dénonçait Québec en disant, et je le cite, parce que je pense que ça traduit le drame vécu par nos toutes petites municipalités: Répétant que le gouvernement n'a pas suffisamment donné d'information à la population sur les conséquences des défusions, le maire de La Tuque, M. Gaudreault, estime que c'est le manque de renseignements pertinents qui est à la base de la situation présente. On a laissé, dans les mains de petites municipalités et de grandes, l'odieux à porter. Vas-y mon grand, défend-la, la fusion, si tu y tiens. Alors, il était trop tard pour faire ce genre de chose là, mais, malheureusement, on l'a fait, M. le Président. Puis, aujourd'hui, tout ce qu'il nous reste à faire comme élus qui ne partageons pas la défusion, c'est de tenter de dire aux populations: Reprenez-vous en main, il y va de votre avenir économique.
Le maire de La Tuque, M. Gaudreault, estimait que c'était le manque de renseignements, comme je le disais tout à l'heure. Et il dit, et je le cite textuellement: Si on avait su toutes ces choses, lorsque nous avons fait les rencontres d'information, que le gouvernement n'a pas voulu faire, on aurait pu avertir les gens. Dans le meilleur des scénarios, ils ne s'en tireront pas à moins de 300 000 $ chacune ? et le chiffre que j'ai donné tantôt est le bon. Pour des municipalités comme Lac-Édouard et La Bostonnais, ça pourrait se traduire par une hausse de taxes de 0,20 $ du 100 $ d'évaluation pendant 20 ans, et ce, si le gouvernement accepte que la dette soit répartie bien sûr sur cette période de temps.
Alors, M. le Président, selon le maire de La Tuque, il aurait encore souhaité, dans le temps, qu'on puisse inverser la machine, qu'on puisse revenir en arrière, qu'on puisse réinformer ces gens-là de l'écueil dans lequel ils se retrouvaient, mais ça n'a pas été fait. Or, on se retrouve avec un projet de loi, le n° 75 ? c'est bien ça ? qui vient en partie défaire le n° 9 ou du moins apporter des améliorations. Parce que, comme le disaient les collègues cet après-midi, il y a beaucoup de pression de faite par les défusionnistes des grandes villes, pression énorme sur le gouvernement. On veut faire, on veut convenir avec...
Des voix: ...
Mme Champagne: On veut convenir avec le gouvernement... M. le Président, je suis très distraite quand j'entends des gens se déplacer en Chambre et faire des discussions.
n(17 heures)nLe Vice-Président (M. Gendron): Oui, vous avez raison. C'est le privilège de chaque parlementaire. Il y en a qui sont moins affectés que d'autres, mais la meilleure façon de garantir à tous les parlementaires la capacité de s'exprimer, c'est que chaque parlementaire soit à son fauteuil, parce qu'il n'y a que vous qui êtes censée avoir la parole. Alors, je solliciterais, là, la collaboration de tous les collègues parlementaires pour que Mme la députée puisse s'exprimer très, très sereinement et librement.
Et je crois que vous avez bien fait de le mentionner. Le président tente d'interpréter. Il y a des gens qui ont moins de difficultés, mais, quand ça commence à se distribuer un peu partout, ce n'est pas le protocole qui permet ça. Alors, allez.
Mme Champagne: Merci. Merci, M. le Président. De toute façon, ce que je dois vous dire, c'est que, comme j'enseignais et que je l'ai dit plusieurs fois, ce sont des choses que je ne tolérais pas. C'est une question de respect. Or, je fais partie de celles qui respectent les autres et qui les écoutent quand ils parlent, en passant.
Alors, je reviens à mon histoire et justement je vais faire de l'histoire ? c'est la matière que j'enseignais, M. le Président ? la petite histoire des regroupements. On nous a accusés de tout et de rien. Vous savez, les campagnes électorales, là, ça a du bon quand c'est bien fait. Mais, quand le charriage se met de la partie, j'aime autant vous dire que, la population, tu peux la perdre facilement. Malheureusement, c'est ainsi fait. Il faut vivre avec les conséquences de ça. Or, la petite histoire des regroupements, là, bien les libéraux l'ont commencé, le débat.
Dans les années, si je ne me trompe, soixante-dix, au Québec, il y a eu... en tout cas depuis 40 ans, là, il y a 16 législations de regroupements, entre autres celle portant sur la ville de Mirabel et celle portant sur la ville de Laval qui avaient fait les manchettes à l'époque. Il y en a sept dans le temps qui s'opposaient, M. le Président, farouchement au regroupement, et c'était le ministre Pierre Laporte qui était là. Et je crois que j'ai un de mes collègues qui l'a cité, mais, dans l'enseignement, la répétition étant effectivement la mère de l'enseignement, je vais la répéter. Voici ce que disait le ministre en question, le ministre Pierre Laporte: «Ce n'est pas la popularité ou l'impopularité d'un projet de loi qui sert de critère au gouvernement dans la préparation de la législation, mais bien le bien commun.» Alors, quand le gouvernement du Parti québécois, M. le Président, a décidé d'aller de l'avant avec sa réorganisation en 2000, il a fait un geste de courage, il a d'abord consulté.
Et je vais faire quelques petits rappels pour les gens qui sont en face de nous et, aujourd'hui, M. le Président, je dois vous dire que, s'il y a des collègues qui ne sont pas d'accord, ils ont encore beaucoup d'heures, ce soir, jusqu'à minuit pour intervenir. Je les écouterai avec beaucoup de joie.
Alors, cette réforme-là qui a été orchestrée par le gouvernement du Parti québécois, et je viens du monde des villes, M. le Président, je l'ai connue de l'interne. Ça ne s'est pas fait du jour au lendemain. Et, même s'il y a des ajustements qu'on peut toujours faire entre de la démobilisation, de la désincarnation, il y a moyen de faire de l'ajustement.
Alors, le regroupement, il avait d'abord été demandé sous une forme volontaire, une base volontaire pour les villages et les paroisses. Malheureusement, les gens n'y ont pas vu de bon. Ça n'a pas donné les résultats qu'on voulait. Comme les résultats escomptés n'étaient pas là, on a décidé d'y mettre le dernier jalon et on a fait ce qu'on avait à faire, M. le Président, on a fait notre devoir et on a fait des rencontres par-dessus des rencontres.
J'ai fait partie, M. le Président, de ces rencontres-là avec certaines municipalités, dont l'ancienne ville de Cap-de-la-Madeleine, l'ancienne ville de Saint-Louis-de-France, l'ancienne ville de Sainte-Marthe-du-Cap-de-la-Madeleine. On est allés rencontrer les conseils de ville puis expliquer. Puis, c'est drôle, hein, quand on expliquait, les gens semblaient comprendre, les gens semblaient voir l'importance qu'on voulait donner aux regroupements, parce qu'on avait des raisons majeures de le faire.
On parlait d'équité, M. le Président, on parlait d'équité entre les populations locales parce que les petites municipalités dépendaient en partie des grandes municipalités, mais il n'y avait pas d'équité fiscale. Vous savez, demandez à quelqu'un: Veux-tu m'aider à payer ma juste part? La réponse, ce n'est pas toujours oui, M. le Président.
Et les désavantages de la fragmentation, le fait d'avoir autant de petites municipalités locales ? 1 306, M. le Président... Je regarde en éducation ou autrement, on se compare souvent à l'Ontario. Mais on était loin d'eux autres, hein, l'Ontario, où l'on ne retrouvait que 537 municipalités, en janvier 2000, pour 11,5 millions d'habitants. Même si tout n'est pas parfait et que la comparaison est parfois boiteuse, il demeure qu'on vivait cette espèce de fragmentation de plusieurs petites municipalités. Alors, qu'est-ce que ça donne, ça, cette fragmentation-là? Absence de vision, coordination déficiente, difficulté à prendre en charge des enjeux qui sont territoriaux, régionaux, concurrence stérile qui nuisait au développement économique ? je l'ai vécu dans mon petit coin de pays ? dédoublement de services, surabondance de structures, importantes limites pour offrir des services de qualité.
Tout le monde voulait le transport en commun. Il y a même un collègue, collègue d'Iberville, maire, qui disait, dans un journal ? j'en ai lu quelques notes hier ? qu'il était très heureux parce que le regroupement avait permis enfin d'avoir le transport en commun. Bien, ça a été écrit en pleine page de journal. Alors, je le félicite, de cette façon-là, de voir le regroupement. Il n'y a pas que du mauvais.
Et enfin je pourrais en ajouter, là: favoriser la multiplication des effets de débordement, disparité fiscale inéquitable. Alors, M. le Président, c'est pour ces raisons-là, et je voulais le rappeler, aujourd'hui, que le gouvernement du Parti québécois, en 2000, a souhaité une réorganisation municipale. J'étais là à l'époque, j'étais très près des villes, M. le Président. J'ai été conseillère près de 10 ans et je savais l'importance d'un regroupement, parce qu'on s'entredéchirait. Il n'y avait pas de réussite possible, il n'y avait pas de volonté. Or, les municipalités, ce sont des créatures du gouvernement. Elles ont été faites, mises en place ? ce n'est pas une insulte que de dire ça, au contraire ? afin de donner des services de proximité. Or, les regroupements municipaux n'ont pas enlevé ces mesures-là de proximité.
Alors, M. le Président, mon collègue de Blainville, porte-parole aux affaires municipales depuis peu, disait, dans un texte ? c'était même le titre, c'était titré comme ceci: Un projet de loi sanctionnant la confusion municipale. Bien, je pense que ça dit tout. On est en train d'en ajouter à la confusion déjà existante, puis tout le monde a l'air heureux de ça et tout le monde a l'air de se réjouir de ça, en face. Par contre, va-t-en sur le terrain, promène-toi un peu puis tu vas te rendre compte que les conséquences... Même les villes qui n'ont pas défusionné, elles ont eu le malheur de le vivre pendant un an de temps, et ça a déjà des conséquences, même si elles font tout pour replacer le tout.
Ce projet-là, M. le Président, qui a été déposé le 11 novembre dernier, c'est la conséquence bien évidemment d'une démesure incroyable dont le gouvernement du Parti libéral aura à porter l'odieux avec les années. Ça crée des agglomérations nouvelles, puis, pour la suite des choses, bien, j'aime autant vous le dire, j'aimerais autant ne pas être le maire de ces nouvelles entités là, parce que, comme le disait mon collègue des Îles-de-la-Madeleine tout à l'heure, on multiplie les structures. Il y a la petite municipalité qui va devoir se positionner, elle a des réponses à donner à l'agglomération, l'agglomération dans la grande structure. Alors, pour la structure, M. le Président, on repassera.
J'aime autant vous dire que notre positionnement ne changera pas, et, ce projet de loi là qui amène de la confusion, qui va permettre au gouvernement de se donner une latitude inquiétante ? nous, on nous accusait de faire du mur-à-mur ? bien j'aime autant vous dire qu'avec les décrets qui s'installent à l'intérieur du projet de loi n° 75 le gouvernement du Parti libéral va pouvoir sanctionner plein de choses, ça va lui revenir sur sa table. Je pense que le ministre va avoir du travail à faire.
Et on dit, et ce n'est pas moi qui le dis, c'est dit en pleine page de journaux: Au lieu de simplifier, le gouvernement du Parti libéral va compliquer le tout. Et ce projet de loi là, bien c'est malheureusement l'aboutissement, je dirais, d'une promesse électorale malheureuse qui entraîne le Québec dans un retard incroyable. Alors, ces défusions-là ? je résume dans les grands thèmes parce qu'on ne peut pas répéter ce que tous les autres disent, même si ça a une certaine valeur ? c'est un incroyable gaspillage d'énergie, c'est une promesse bien sûr irresponsable. Le débat empoisonne l'existence même des nouvelles villes et des villes qui n'ont pas défusionné parce qu'elles sont touchées par le tout.
La Mauricie, là, est en train de se mettre en branle, la Mauricie est en train de prendre sa place, là, puis on a deux petites municipalités qui sont comme dans le champ, puis les autres essaient de se relever de la grande saga des consultations dites populaires. Alors là, il faut faire des efforts inverses, et puis là c'est le retour aux chicanes qui vont recommencer. Je connais moins le milieu de Montréal, même si j'y ai vécu quelque temps, mais, quand je regarde de mes amis qui habitent là, je pense qu'ils ne savent même plus de quelle agglomération ils font partie, ils ne savent même plus à qui se fier, à qui référer. Alors, le débat, eux autres, se vit intensément, et ils ont les deux pieds dedans.
Alors, le modèle que les libéraux imposent, bien c'est un modèle imposé. Alors, un modèle imposé, ce n'est pas un modèle souhaité. Alors, M. le Président, ce que je disais en début de propos, c'est qu'on aurait souhaité que le gouvernement, tel que demandé par le maire de la ville de Trois-Rivières et ses collègues des huit ou sept autres grandes villes du Québec... C'était d'attendre que nos villes soient rendues à maturité. On aurait souhaité qu'on laisse porter ce qui avait été fait tout en convenant qu'il y avait des choses à améliorer, M. le Président. On le voulait, on le souhaitait.
n(17 h 10)n Les huit grandes villes sont venues s'asseoir, en plein été, avec le ministre des Affaires municipales et l'ont supplié d'attendre en 2005, à l'occasion des élections municipales, pour provoquer la question face aux citoyens. Or, le ministre, il dit: Non, j'ai fait des promesses, je vais les régler. Alors, à l'époque où les libéraux avaient un sens des responsabilités, là, ils avaient fait des regroupements municipaux par législation. C'est du temps de M. Pierre Laporte. Ces regroupements se sont faits parfois avec difficulté, non sans heurts, mais il y avait une responsabilité au bout de ça. Alors, M. le Président, sans attendre que les nouvelles villes se soient donné un sentiment d'appartenance, sans vouloir attendre que ça puisse donner une réussite, au cas où il aurait été difficile, pour le gouvernement d'en face, de dire que le gouvernement du Parti québécois avait eu non pas seulement tort, mais peut-être raison, eh bien, on a embarqué le Québec dans un bourbier incroyable.
Et, quant au recul démocratique, là ? mon collègue, tout à l'heure, en a parlé ? je pense qu'on n'a pas à en parler. Écoutez, on soumet aux conseils d'agglomération une série de nouveaux mandats, ils ne sont pas prêts à prendre ça: évaluation municipale, transport collectif, voies de circulation, alimentation en eau, assainissement des eaux. Tout ça va être sanctionné par la grande ville. C'est un fouillis, là, incroyable. Et, moi qui ai vécu dans un conseil de ville où on avait à gérer une petite municipalité de 8 000 habitants, aujourd'hui cette municipalité-là est regroupée, là, puis retrouve tout à fait sa place puis ses services de proximité. Puis même la petite paroisse de Saint-Louis-de-France, samedi soir, va faire la dernière activité dans ses 100 ans d'existence, puis il va y avoir plein de monde, puis les gens se retrouvent parce qu'en quelque part il y a des gens qui se sont pris en main. Eh bien, j'ai hâte de voir les séances passionnantes des conseils municipaux impliqués. Ça va être beau à voir, ça, monsieur, j'aime autant vous le dire. Alors, pour financer ça, là, les citoyens chanceux qui vivent dans une ville démembrée auront droit à un deuxième compte de taxes municipales, gracieuseté du Parti libéral du Québec.
Alors, M. le Président, je termine mon propos d'aujourd'hui en vous disant que les défusions sont néfastes pour le développement de nos collectivités, et voilà pourquoi l'opposition officielle a voté contre, pour le projet de loi n° 9, et votera contre le projet de loi n° 75. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Champlain. Et je reconnais le prochain intervenant pour la poursuite de ce débat, M. le député d'Iberville. Alors, M. le député, à vous la parole.
M. Jean Rioux
M. Rioux: Le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir, M. Jean-Marc Fournier, a déposé, le 11 novembre 2004, à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. Ce projet de loi donne suite aux résultats de la consultation terminée le 20 juin dernier en vertu de la Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités. Il confirme les dispositions de la loi n° 9 qui permettront la constitution des 31 municipalités issues de la consultation du 20 juin 2004, la modification des chartes ou décrets constitutifs des municipalités résiduaires et la création de 11 agglomérations.
Ce projet de loi permet de franchir une nouvelle étape vers la constitution en municipalités des secteurs où les citoyens ont répondu positivement au référendum du 20 juin 2004. Il met en place le cadre légal et établit le pouvoir du gouvernement d'adopter, en conformité avec ce cadre, les décrets nécessaires à l'achèvement du processus enclenché par la loi n° 9.
La loi n° 9 était devenue nécessaire pour permettre aux citoyens et citoyennes de décider à quoi ils voulaient que leur communauté ressemble. Le gouvernement précédent n'avait pas respecté les citoyens en leur imposant un cadre municipal sans les consulter. Le député de Blainville parle de gâchis et de fiasco quand il fait allusion à la loi n° 9 et au projet n° 75, mais en réalité c'est davantage la situation que nous avons héritée par les fusions forcées qui correspond au gâchis et au fiasco.
Ce qu'il y a de plus précieux pour nous, parlementaires, c'est la démocratie, parce qu'elle soutient la responsabilité, la liberté de choix et l'égalité, ce que le précédent gouvernement du Parti québécois a nié aux citoyens et aux citoyennes. Il a créé une situation indigne du processus démocratique auquel les Québécois et les Québécoises sont habitués. Je tiens à souligner le travail et le sens du doigté du ministre des Affaires municipales pour réparer la situation délicate dans laquelle l'ex-gouvernement nous avait laissés.
Je tiens à citer une partie de l'allocution du ministre, lors de l'adoption du projet de loi n° 9 le 16 décembre 2003, pour démontrer la complexité de la situation qui prévalait: «Nous avons choisi une formule qui, encore là, est bien reçue autant par des représentants du camp fusionniste que défusionniste. Je ne dis pas que ça fait l'unanimité, je viens d'admettre que, de part et d'autre, on [avait] choisi une optique différente: ceux qui veulent qu'il n'y ait pas de défusion choisissaient qu'il n'y ait pas de consultation non plus, et ceux qui [souhaitaient] la défusion auraient voulu que ce soit dans des règles qui auraient facilité le tout. Mais, en bout de ligne, qu'est-ce qui est important ici? Ce qui est important, c'est que les citoyens puissent s'exprimer, que ça se fasse dans un cadre qui est sérieux, qui fasse émerger une légitimité pour l'ensemble et qu'en même temps on ne recule pas, qu'en même temps on puisse envisager le développement de cette agglomération, pour le bénéfice de ceux qui sont dans l'agglomération mais aussi pour le bénéfice de l'ensemble du Québec, quand on considère qu'énormément de nos concitoyens se retrouvent à l'intérieur de ces agglomérations.» Ce processus est le fruit de 90 mémoires présentés à la Commission de l'aménagement et du territoire. Le résultat aujourd'hui: là où les citoyens ont dit non au démembrement, ils ont du même coup confirmé leur adhésion et donné la légitimité qu'il manquait pour construire une ville, une agglomération forte. C'est le cas de la ville de Saint-Jean-sur-Richelieu, dans mon comté, qui est, aujourd'hui, la 11e ville en importance suite à la fusion. Effectivement, il y avait un problème de consensus avant le registre, et le référendum qui a eu lieu le 20... Une des municipalités s'en est prévalue, et finalement les citoyens ont décidé d'adhérer en bonne cause, disant: On ne refera pas un démembrement, revivre une situation où il n'y a pas de consensus. C'est un choix qui a été fait, et, aujourd'hui, il y a une légitimité.
La député de Champlain parlait de la région de Trois-Rivières. Effectivement, les gens maintenant vivent et sentent qu'il y a une légitimité et ne se sentent pas se l'être fait imposer, et c'est ça qui est différent et que notre gouvernement a changé comme situation, enlever cet élément que les gens se sentaient avoir été forcés de faire la fusion... en fait pas de faire, ont été imposés, tout simplement.
Là où les citoyens ont dit oui au démembrement, ils se sont donné une organisation politique de proximité propre à eux mais aussi conforme à leur inclusion et à leur participation au financement et au développement de toute l'agglomération. Le projet de loi va dans la continuité, car il est conforme à ce que les citoyens et citoyennes ont voté pour le 20 juin dernier. Nier le projet de loi n° 175, c'est de nouveau nier le processus démocratique. L'opposition a une chance de se reprendre mais signe de nouveau son opposition de reconnaître aux communautés de déterminer leur milieu d'appartenance.
Qu'est le projet de loi n° 75? C'est: les décrets de modification des chartes ou décrets constitutifs existants indiqueront les modifications au territoire de la municipalité, y compris des arrondissements s'il y a lieu, et la suppression des dispositions spécifiques qui ne sont plus applicables à la suite des reconstitutions. La composition et les règles de fonctionnement du conseil d'agglomération, dans le respect des trois principes suivants déjà énoncés dans le projet de loi n° 9, seront les suivantes et démontrent la transparence et l'imputabilité dans les décisions:
1° toute municipalité liée doit être représentée au conseil d'agglomération;
2° le poids décisionnel d'une municipalité au sein du conseil d'administration est proportionnel à sa population; et
3° les séances du conseil d'agglomération doivent être publiques.
n(17 h 20)n Les règlements relatifs à l'information des conseils municipaux sur les sujets traités par le conseil d'agglomération: tel que prévu dans la loi n° 9, lors d'une séance du conseil de sa municipalité, un maire doit informer les élus des sujets à l'ordre du jour d'une prochaine séance du conseil d'agglomération. De plus, il doit exposer les positions qu'il entend prendre sur ces sujets et en discuter avec les autres membres du conseil. La nouveauté, c'est que le conseil de ville adoptera une orientation pour la délégation représentant la ville au conseil d'agglomération. Lorsque le maire et les autres représentants participeront aux délibérations et au vote sur une question dont est saisi le conseil d'agglomération et au sujet de laquelle le conseil de la municipalité a préalablement pris une orientation, ils devront prendre une position conforme à cette orientation. Le maire devra aussi faire rapport au conseil de la municipalité des décisions prises par le conseil d'agglomération.
Les décrets d'agglomération définiront par ailleurs les pouvoirs du comité exécutif de la municipalité centrale à l'égard des compétences de l'agglomération: le pouvoir du conseil d'agglomération de créer des commissions, la liste des équipements d'intérêt collectif, des voies artérielles et des conduites d'aqueduc et d'égout relevant de l'agglomération, le partage des actif et passif entre l'agglomération et les municipalités reconstituées, et les règles particulières au régime de retraite.
Finances et fiscalité. C'est un point qui m'intéresse énormément, vous allez comprendre pourquoi. Le projet de loi n° 75 apporte aussi des précisions en matière de finances et de fiscalité. Il définit les modalités qui assureront la rigueur et l'équité ? je répète bien, l'équité ? dans la répartition des dépenses de la municipalité centrale entre celles qui sont à la charge de l'ensemble de l'agglomération et celles qui sont à la charge du territoire de la ville centrale. Et ça, c'est quelque chose que la municipalité de Saint-Jean, les cinq municipalités, aujourd'hui, qui la constituent, c'est-à-dire Iberville, à l'époque où j'étais maire, Saint-Athanase, L'Acadie et Saint-Jean-sur-Richelieu... Ces municipalités-là désiraient avoir finalement un projet qui leur ressemble.
Effectivement, un an avant le projet de fusions forcées, les maires et leurs conseils de ville se sont rencontrés à chaque semaine pour bâtir un projet de regroupement et aussi qui était conditionnel à être présenté à la population. Pendant un an, nous avons fait le partage des infrastructures régionales à l'image du projet de loi n° 175. Croyez-le ou croyez-le pas, mais le précédent gouvernement a nié tout ce travail-là et nous a imposé une fusion forcée, à l'image de toutes les municipalités. Imaginez-vous la reconnaissance qu'on pouvait avoir d'une communauté qui s'était prise en main. Ce que l'on s'était dit, c'était clair: Avant qu'on nous force, nous allons le régler, le problème. Sauf qu'on n'a pas respecté, à ce moment-là, la communauté de Saint-Jean-sur-Richelieu et les autres villes avoisinantes, dont Iberville. En effet, le conseil d'agglomération pourra imposer, sur l'ensemble de l'agglomération, toute taxe ou tout autre moyen de financement dont dispose une municipalité locale afin de financer des dépenses faites dans l'exercice d'une compétence d'agglomération. Cela comprend les dépenses faites par un autre organisme municipal, par exemple une société de transport en commun, à condition que ces dépenses visent strictement le territoire de l'agglomération.
Le projet de loi précise les dépenses qui sont réputées constituer des dépenses d'agglomération. Il prévoit en outre le moyen par lequel sera déterminée la répartition des dépenses mixtes, c'est-à-dire des dépenses qui servent à la fois à l'agglomération et à la municipalité locale. Dans ce cas, la municipalité centrale devra établir par règlement des critères permettant de distinguer entre les dépenses qu'elle effectue dans l'exercice de ses compétences d'agglomération et celles qu'elle fait dans l'exercice de ses autres compétences. D'ailleurs, le compte de taxes établi aux fins du financement des compétences d'agglomération et transmis aux contribuables de chaque municipalité devra être détaillé.
Le projet de loi reprend les dispositions de la loi n° 9 qui continueront de s'appliquer au-delà de la reconstitution des anciennes municipalités. En effet, la loi n° 9, qui servait à la consultation, sera abrogée à l'issue du processus, la plupart de ses dispositions n'ayant plus d'application dans l'avenir. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que, quand les gens ont voté lors du référendum du 20, ils n'ont pas juste voté pour le démembrement de leur ville... de retrouver leur ancienne structure, mais aussi pour une formule d'agglomération qu'on leur a précisée. Donc, qu'est finalement le projet de loi n° 175? C'est tout simplement de reconnaître ce que les gens ont voté, et ça, ça fait partie du processus démocratique que tend à refuser l'opposition. Il ne faut donc pas se surprendre d'y retrouver l'ensemble des compétences déjà conférées à l'agglomération dans la loi n° 9, avec l'ajout de quelques précisions.
Dans le domaine de l'eau et des voies de circulation notamment, il s'agissait de distinguer les infrastructures relevant de l'agglomération de celles relevant de la responsabilité locale. Cette distinction sera illustrée par une carte à même le décret d'agglomération. Le projet de loi reprend les dispositions de la loi n° 9 qui accordaient au conseil d'agglomération le pouvoir de modifier, sur approbation du ministre, la liste des différentes compétences. Voilà, M. le Président, l'essentiel du projet de loi n° 75.
Je recommande l'adoption de son principe afin de permettre à la volonté des citoyens et citoyennes qui ont voté en nombre pour la reconstitution de leur ancienne municipalité d'être respecté, et tout ça, dans le processus démocratique.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député d'Iberville. Et je reconnais, pour la poursuite de l'adoption du principe de ce projet de loi là, Mme la députée de Marie-Victorin. À vous la parole.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, nous sommes en train de débattre du projet de loi n° 75 qui vient à la suite du projet de loi n° 9 où on s'était fait dire, à maintes et maintes reprises, ici, en cette Chambre, que jamais on ne modifierait le projet de loi n° 9 et que jamais on ne reviendrait de l'arrière par rapport à ce qui était inscrit dans le projet n° 9. Mais, comme nous savons que, ce gouvernement, ce qu'il ne peut pas faire directement... Il se trouve toujours un moyen de faire indirectement ce qu'il ne peut pas faire directement. Donc, comme il s'était engagé ici, en cette Chambre, à ne pas modifier le projet de loi n° 9, il fait un nouveau projet de loi qui s'appelle le projet de loi n° 175 et qui se confère, par voie de décret, beaucoup de pouvoirs en ce qui concerne les modifications, en ce qui concerne l'aménagement des nouvelles agglomérations et aussi en ce qui concerne l'avenir des nouvelles villes qui pourront se reconstituer, M. le Président.
Donc, j'aimerais vous parler un peu de ce qui avait été écrit par le chroniqueur Jean Cournoyer, à l'effet que modifier la loi n° 9 serait un affront bien plus grave à la démocratie, d'après ce que veulent proposer les libéraux en disant que nous n'avons pas été démocrates parce que nous avons passé un projet de loi pour fusionner des gens et que finalement ça ne faisait pas partie du rôle d'un gouvernement que d'aller de l'avant avec des fusions, mais que c'était plutôt finalement absence de démocratie. Et là je suis heureuse d'entendre une personne qui a déjà participé à un gouvernement libéral, qui s'appelle Jean Cournoyer. Et lui-même n'a pas hésité une seconde à dire que modifier la loi n° 9 serait un affront bien plus grave à la démocratie. Et pourquoi ce serait un affront bien plus grave à la démocratie? C'est que maintenant la nouvelle donne, c'est que toutes les entités municipales vont avoir droit au chapitre par l'agglomération, mais parce qu'elles vont dépendre aussi de l'importance de chacune d'entre elles directement. Elle sera liée directement, proportionnellement à l'importance de sa population. Donc, est-ce qu'elles vont retrouver leurs pouvoirs? Non. Est-ce que ça va être plus démocratique? Probablement pas, puisque c'est les pouvoirs d'agglomération qui prendront une décision sur l'ensemble des actions importantes, notamment la fiscalité, en ce qui concerne les nouvelles entités qui seront reconstituées.
Où se trouve ce beau principe qu'on n'arrête pas de nous affubler ici, en cette Chambre, en nous disant: Plus de démocratie maintenant, avec la loi n° 75, sera attribuée aux nouvelles entités? Moi, je me demande, M. le Président. Quand on est obligé, au niveau d'une petite municipalité, de débattre de ce qu'on veut discuter au niveau du conseil d'agglomération et quand on va arriver au conseil d'agglomération, ce ne sera que la répétition de ce qui aura été décidé dans une petite entité, dans les nouvelles villes, au niveau de la mairie de la ville reconstituée, et là ils vont aviser le conseil d'agglomération de ce dont ils vont discuter au conseil d'agglomération. Alors, vous voyez un petit peu la lourdeur en fait du procédé et du système. Et là c'est le conseil d'agglomération qui, eux, vont décider, en fait, après... voir comment les choses devront se comporter et dans quelle direction on devrait aller pour l'ensemble des villes de l'agglomération.
n(17 h 30)n Est-ce que ces villes qui... Leurs populations n'auront pas le nombre... En tout cas, chez moi, si je regarde ça, les nouvelles entités, Boucherville, Saint-Bruno et Brossard, n'auront pas le nombre de l'entité, de l'agglomération qu'on appelle Longueuil. Je me demande, moi, si la population était bien au courant de ce qui les attendait lorsqu'ils sont allés voter, si c'était le sort qu'on leur préservait. Parce que, moi, je me souviens très bien que certains ténors disaient: Ah! On va faire amender la loi n° 9. On va faire amender la loi n° 9, puis il va y avoir des changements dans la loi n° 9, puis on va reprendre nos pouvoirs, puis on va revenir, les villes, comme on était constitué antérieurement.
Et c'est vrai qu'on les a questionnés là-dessus de ce côté-ci, en Chambre, pour dire: Écoutez, on veut s'assurer que vous ne toucherez pas à la loi n° 9. Parce que, moi, si je me souviens bien, en tout cas, le maire, chez nous, nous disait: Écoutez, la loi n° 9, elle ne fait pas notre affaire, mais il y a un bon périmètre là-dedans dans lequel on peut peut-être fonctionner. Mais là la loi n° 175, c'est ce qu'on me dit, bien, là, on va marcher sur des capots de roue. Alors, ce n'est pas tout à fait ce que les gens, dans l'ensemble du monde municipal, s'attendaient. C'est qu'on complique l'existence des gens. Que ce soit dans les nouvelles entités ou au niveau des gens de l'agglomération, on complique le processus décisionnel et on fait qu'en sorte le citoyen, qui était supposé d'être un des objectifs majeurs de la réforme puis de respecter le citoyen, bien le citoyen va être très, très, très loin de tout l'ensemble de ces discussions et de ces décisions.
Donc, on n'a rien accompli, en fin de compte. Tout simplement, ce qu'on a fait, c'est qu'on a mêlé les cartes. Ça devient un vrai cafouillage et, en fin de compte, avant que le citoyen s'y retrouve, bien ça va prendre du temps, puis son compte de taxes va être augmenté. C'est à peu près ce qui va se passer, M. le Président. Moi, je sais que, nous autres, à Longueuil, pour le prochain budget, les taxes de ces nouvelles entités n'augmenteront pas, mais c'est pour un an. Parce que, selon la nouvelle loi, il y aura deux comptes de taxes, le compte de taxes de l'agglomération puis le compte de taxes pour l'entité, deux. Bonne gestion, ça, on multiplie, en fin de compte, des... on multiplie au niveau de la gestion, de la paperasserie encore une fois. On multiplie tout ce qu'il faut pour faire en sorte que le citoyen, lui, là, c'est de plus en plus complexe, compliqué. J'ai un compte là, j'en ai un autre, compte, là, il faut que je paie là, il faut que je paie là. Bon. Et là je dois-tu, c'est-u... Qui doit me donner mon service? C'est-u l'agglomération ou bien ça va être ma nouvelle ville? Je ne suis pas trop sûr à qui je vais aller cogner à la porte, qui finalement va pouvoir me renseigner à un certain niveau. On n'a pas amélioré en tout cas le sort du concitoyen. Ça, c'est clair. Mais par contre on a fait plaisir à certains groupes de pression et d'opinion qui, pour eux, c'était important de maintenir les entités telles quelles.
Et ce pour quoi je vous disais, M. le Président, qu'effectivement la loi n° 175, c'est une façon détournée de faire ce qu'ils ne pouvaient faire directement parce qu'ils s'étaient trop engagés ici, en cette Chambre, de ne pas modifier la loi n° 9, bien tout va se faire par décret. Alors, quand ces gens d'en face nous parlent de transparence, puis finalement de grande démocratie, puis qu'il faut consulter la population via des référendums, c'est pour mieux manipuler, en fin de compte. Cette information, c'est pour mieux manipuler les décisions et c'est pour mieux, en fin de compte, faire en sorte qu'on arrive à obtenir ce qu'on n'aurait pas pu obtenir, parce que, si on avait mis trop ça en évidence, qu'on aurait été d'une façon trop claire, l'ensemble probablement des citoyens n'auraient pas favorisé ces référendums-là.
Chez nous, à Longueuil, en Montérégie, la nouvelle ville constituée, qui s'appelle la ville de Longueuil à ce moment-là, commençait, commençait finalement à se donner une certaine consistance et commençait aussi, entre les différentes villes intéressées, à développer une complicité, une harmonie. On commençait simplement. Là où on avait un certain problème, c'était sur le nom. Personne n'acceptait ce nom. Les trois... les villes qui se sont défusionnées avaient énormément de difficultés à se faire imposer le nom de la ville de Longueuil. C'était vraiment, monsieur... Mais on n'est pas sur le fond, là. C'est sur une forme, un nom. On aurait pu finalement arriver à faire des compromis, à faire en sorte qu'on puisse arriver à faire une modification. Mais pas changer complètement l'essor et l'avenir, dans le fond, des concitoyens et des concitoyennes de cette région, M. le Président.
La ville, la nouvelle ville constituée devenait la troisième ville au Québec en importance. Ce qui veut dire finalement, pour une ville, quand elle est de cet ordre-là, une force d'attraction intéressante pour son développement économique, et favoriser aussi le développement de l'emploi, développement, l'essor de cette région-là à bien des égards, et jouer un rôle important, pas juste pour le territoire montérégien, Rive-Sud, mais aussi pour l'ensemble du Québec. Parce qu'on est très bien situé, en Montérégie. On est près des États-Unis. On a toutes les routes nécessaires pour se rendre, si la 30 arrive évidemment, vers l'ouest, s'en aller vers Ottawa. Et puis finalement on est près des routes de Québec et puis on peut s'en aller partout. On est très bien situé. Donc, pour avoir cet effet de rétention, au niveau des grandes entreprises, pour les attirer chez nous, bien c'était très intéressant d'avoir le nombre, le volume de population nécessaire pour avoir cet effet d'attraction.
Mais, peine perdue, maintenant, là, nous sommes en train de nous crêper le chignon à savoir qui va avoir plus de services et qui va donner les meilleurs services, puis en fin de compte on oublie qu'en quelque part il faut faire du développement pour donner des services à la population, il faut faire du développement économique et que l'union fait la force. Quand on travaille tous ensemble, on a plus de chances encore de mettre en commun nos ressources et de faire en sorte qu'on devient des gens avec une expertise intéressante.
Alors, on a passé complètement à côté. Et puis le président du comité de transition aussi a beaucoup insisté sur les compromis. Et j'aimerais vous mentionner qu'en fait le choix du gouvernement était sur Yves Ryan, que tout le monde connaît parce qu'il s'est impliqué beaucoup dans le milieu municipal, puis qui semblait très heureux d'être à la retraite, mais il dit: Moi, ils ont bien insisté. Ils ont tellement insisté que ? bah! ? il dit, je me suis dit: Pourquoi pas? Je suis aussi bien d'y aller, finalement, ils insistent. Et, pour lui, ce qui était le plus problématique, en fin de compte, c'est que... les épreuves des ressources humaines et le conseil d'agglomération. Ça, là, c'était bien compliqué. Parce qu'effectivement il faut se rappeler aussi qu'à chaque fois qu'on déplace des êtres humains, hein... Parce qu'on avait regroupé les gens. Donc, il y a des gens qui avaient perdu des emplois ou en tout cas on avait fait de l'attrition ou on avait trouvé des moyens de remettre en emploi des gens, mais on... c'était avec les syndicats, tout le monde avait travaillé. Ce n'est pas facile, arriver à trouver les solutions dans le domaine des relations de travail. Mais ça s'était fait, et tout le monde commençait, après un an, de s'ajuster, de s'adapter.
Et là on le rapporte, et on le reprend, puis on leur dit: Écoutez, là, maintenant, vous avez des familles, vous avez des enfants, vous êtes installés, ça n'a pas tellement d'importance, on refait des villes. Puis là, bien, là, on ne sait pas si vous allez avoir encore de l'emploi ou si vous allez être encore capables de rester sur le territoire. Ça n'a aucune espèce d'importance, ça. Pour nous, là, c'est qu'on s'est donné comme mandat, nous, quand on s'est fait élire, là, qu'on changeait ça puis qu'on revenait de l'arrière, indépendamment des conséquences humaines que ça pourrait provoquer dans l'ensemble des gens qui sont visés par ces changements-là, les travailleurs et l'ensemble des travailleurs. Et là ça inclut aussi des professionnels, là, ce n'est pas juste des cols bleus: cols blancs, cols bleus.
Alors, M. le Président, je pense qu'effectivement, quand on vient nous faire la leçon sur la démocratie, sur la transparence, sur être au service du citoyen, on est loin du compte, en tout cas, en ce qui me concerne. Parce que ce qu'on a fait, c'est tout simplement du cafouillage et puis finalement ce qu'on a tout simplement... s'est aperçu, c'est que ce gouvernement s'était donné un cadre, avec cette loi-là, pour régler les problèmes au fur et à mesure qu'ils vont apparaître parce qu'ils n'ont pas le courage de dire tout de suite ce dont ils voudraient faire.
n(17 h 40)n Non. Par décret, derrière des portes closes, on va décider, nous, ce qui va être bon. Puis, quand les municipalités, les nouvelles entités vont venir nous voir puis ils vont dire: Aïe, là, ça suffit, l'agglomération a bien trop de pouvoirs, puis on est tannés de l'agglomération, tu vas nous donner un petit peu plus de pouvoirs, ils vont aller voir le ministre, parce qu'ils le connaissent bien, généralement ils se sont très bien entendus antérieurement, donc ils vont aller vouloir mettre une petit peu de pression au niveau du ministre puis ils vont dire: Écoute bien, tu ne passerais pas un petit décret, là, hein?
Et vous savez qu'un décret, ce n'est jamais discuté en Assemblée nationale. On n'est pas concerné par un décret. Ça se passe comme ça, puis on ne le voit pas aller. Alors ça, on appelle ça, pour eux, de la transparence. Pour le gouvernement libéral, ça s'appelle de la transparence. Ça, ils sont très, très démocrates quand ils font des choses comme ça, puis, eux, ils respectent la population puis eux sont des gens qui savent consulter surtout la population.
M. le Président, je trouve ça assez particulier que ces gens-là, ils vont jusqu'à s'applaudir eux-mêmes dans leur, je vous dirais... je vous dirais, dans leur incapacité à prendre en considération le bien commun. Ils se trouvent bons. Ils se trouvent bons parce qu'ils ne respectent pas la population. Ils se trouvent corrects parce qu'ils ne consultent pas la population puis parce qu'ils n'ont pas de transparence. Ils se trouvent corrects. Puis ils se trouvent corrects aussi que finalement, pour eux autres, ils sont comme un peu la tour de Pise: ils penchent toujours du bord, en fin de compte, des gens qui sont capables de les supporter le plus puis de leur donner le plus finalement de contributions financières pour le parti.
Ce qui fait que, M. le Président, moi, j'ai de la misère avec ça. Parce que, quand on regarde actuellement les besoins, au niveau municipal de la population, de nos contribuables, ce qu'ils veulent savoir, c'est des règles claires, des règles où on s'en va... où on sait ça va être quoi, les règles du jeu. Mais là, à l'heure actuelle, on ne peut pas rien dire qu'est-ce qu'il sera vraiment, parce que le ministre se réserve le droit d'intervenir, en fin de compte: au moment où apparaîtront les problèmes, il va faire du cas par cas puis il va régler ça par des décrets.
Et là, M. le Président, c'est pour ça que la loi n° 175 ne fait pas, ne fait pas du tout notre affaire. Non pas parce qu'on est un parti politique, puis il faut s'opposer, puis parce que, nous, on a proposé quelque chose de différent. Mais parce que ça ne respecte pas les règles démocratiques et ça ne respecte pas les parlementaires, M. le Président, qui sont ici, à l'Assemblée nationale. Parce que les choses qui concernent nos contribuables, tout ce qui change la vie de nos contribuables, et surtout en ce qui concerne les compétences que la nouvelle agglomération aura pour les contribuables, bien je pense que ça nous concerne, nous autres aussi, comme députés, parce que nous avons été élus pour défendre les intérêts de l'ensemble d'une population, et là nous ne serons pas capables de le faire parce que ça va se faire par décret.
Donc, M. le Président, est-ce que les nouvelles entités seront plus heureuses? Est-ce que les nouvelles entités pourront accepter tel quel finalement ce qu'on leur propose? J'en doute, M. le Président. Parce que, si on se souvient bien, au moment où on a déposé la loi n° 9, on se souviendra de toutes les pressions que ces nouvelles entités ont fait subir au gouvernement libéral et au ministre des Affaires municipales pour qu'il puisse changer, modifier la loi n° 9, parce que ce dont ces nouvelles entités voulaient, c'est retrouver leurs pleins pouvoirs. Ils ne veulent pas tout simplement des pouvoirs partagés. Ce qu'ils veulent, ce sont les pleins pouvoirs des anciennes villes. Et ça, M. le Président, bien là ça nous fait peur. La loi n° 175 nous fait vraiment peur à cause de cet aspect de décret qui est dans ce projet de loi là et qui nous laisse présager le pire, M. le Président, c'est-à-dire que finalement les décisions seront prises derrière des portes closes, où on n'aura plus à pouvoir débattre ici, en cette Chambre, de ces réalités-là.
Donc, M. le Président, moi, je pense que la vraie démocratie, la vraie démocratie et le respect de la population, ce n'est pas quand un gouvernement se tient debout et est capable de faire des choix, mais c'est... et pour le bien commun et pour favoriser aussi le plus grand nombre d'une population dans une région donnée, pour répondre aux nouvelles exigences de la modernité, mais c'est quand... mais c'est... Pour moi, la vraie démocratie, c'est respecter et être capable de prendre vraiment... avoir le courage politique d'aller jusqu'au bout de ses actions et d'aller jusqu'au bout aussi de ce qu'on propose, et non pas de faire indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement ou de jouer avec des lois pour les changer et faire en sorte qu'on se donne des pleins pouvoirs pour agir derrière des porte closes, M. le Président.
Alors, M. le Président, vous me voyez venir, vous serez convaincu que j'ai essayé de convaincre, en fin de compte, et de faire la démonstration ici, en cette Chambre, que le projet n° 175 n'est pas ce dont nous nous attendions, et, je suis convaincue, non plus ce n'est pas ce que la population, qui ont voté au niveau des référendums d'une façon la plus honnête possible... à faire en sorte qu'aujourd'hui ces gens-là se retrouvent avec un projet de loi sur lequel ils n'avaient pas voté lors du référendum. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Et, pour la poursuite du débat sur le principe du projet de loi n° 75, je reconnais maintenant Mme la députée de Taschereau. À vous la parole, Mme la députée de Taschereau.
Mme Agnès Maltais
Mme Maltais: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis heureuse d'être ici, ce soir, pour prendre la parole sur le projet de loi n° 75, qui est nommé Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. J'aurais pu l'intituler, M. le Président, loi sur la suite du grand cafouillage libéral, loi sur la suite du grand cafouillage électoral, loi sur la suite de l'embrouillamini, M. le Président, qui continue à embêter tout le Québec avec cette idée, cette idée qu'a eue le gouvernement sur un coin de table pendant un conseil national du Parti libéral, de décider de réouvrir le sujet des défusions, alors que, M. le Président, nous avions eu le courage de faire ce que 20 ans, 20 ans d'enseignement municipal, 20 ans de travail avec les maires, 20 ans de rêves dans les municipalités, 20 ans de concertation dans les grandes villes désiraient, c'est-à-dire faire les regroupements municipaux. Nous l'avions fait, M. le Président. Nous en avions payé le prix. Mais les libéraux ont décidé, le gouvernement a décidé de continuer le cafouillage libéral. Alors, c'est la suite du grand démantèlement, c'est la suite du grand démembrement, M. le Président. Acte III, on continue.
Pendant ce temps-là, pendant ce temps-là, nous, nous de l'opposition officielle, nous du Parti québécois, M. le Président, rêvons de parler de développement, de parler de grandes villes, de parler de villes à la hauteur du monde entier parce que la compétition, maintenant, M. le Président, se passe entre les villes.
Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant, s'il vous plaît, là! Chaque parlementaire, s'il veut prendre la parole, doit être d'abord à son siège, il faut demander le... Mais il y a une personne présentement qui a la parole, là, et c'est la députée de Taschereau. Je voudrais qu'elle puisse l'exercer très sereinement et correctement. Alors, Mme la députée.
Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, je répète, c'est la fin... pas la fin, c'est la suite d'un débat qui est un débat qui est dû à un électoralisme désolant, à un calcul politique qui a été pris et qui a été mis au-dessus du bien commun. C'était du bien commun dont il était question, M. le Président, et on se retrouve à la merci d'un électoralisme désolant. Et qu'est-ce qu'il arrive à la fin? Personne n'y trouve son compte. Quand on ne pense pas au bien commun, à la fin personne n'y trouve son compte. Nous avons devant nous des villes divisées, M. le Président, nous avons devant nous des villes morcelées. J'ai le droit de trouver ça désolant, même s'il y a des collègues qui font des commentaires de l'autre côté.
Je trouve que nos villes sont en attente maintenant, M. le Président, de l'acte final qu'on ne voit pas venir parce que les défusionnistes, M. le Président, ont déjà dit qu'ils se battraient sur les conseils d'agglomération, qu'ils iraient pour faire des blocages dans ce nouvel embrouillamini. Parce qu'il y a un député qui semblait ne pas connaître le mot «embrouillamini». L'embrouillamini, c'est ce qu'on nous offre. C'est comme un chat qui court dans un écheveau: à la fin, il est lié lui-même. C'est ça qu'on a devant nous: un gouvernement qui s'est empêtré dans un écheveau de fils et qui à la fin ne sait plus comment s'en dépêtrer. C'est le Québec qui paie pendant ce temps-là, M. le Président. Les villes sont en attente de l'acte final de cette pathétique promesse libérale.
n(17 h 50)n Je parlerai bien sûr de Montréal plus tard dans mon intervention, M. le Président, mais je veux parler de la Capitale-Nationale. Justement, le ministre responsable de la Capitale-Nationale m'écoute, je le sais. Je veux lui dire ceci: Québec, Capitale-Nationale, une ville que nous avions laissée dynamique, ça pétait le feu ? ce sont les mots d'Alain Dubuc, le chroniqueur du Soleil, à l'époque, M. le Président: Ça pétait le feu, une ville dynamique; une ville que nous retrouvons morose, en attente de décisions.
Encore une fois, qu'est-ce qui se passe? Au lieu d'être en train de parler de développement de cette grande ville, nous parlons de démembrement, nous parlons d'une Capitale-Nationale qui est en train d'être réingénierée aussi. On sait tous les impacts qu'a la présence de ce gouvernement libéral sur la Capitale-Nationale: coupures au Fonds de développement économique; zéro dollar au Fonds de développement touristique, qui était de 2 millions; 40 % des fonds de développement économique, de diversification économique qui ont été coupés. On sait qu'on attend pour les Fêtes du 400e anniversaire; il n'y a toujours rien qui se passe. On sait qu'on attend pour les Jeux policiers et pompiers. Une ville qui est en attente de projets de développement et qui maintenant est en attente de son morcellement, de son démantèlement. Une ville qu'on a laissée saine et en santé économique; une ville que nous retrouvons, aujourd'hui, M. le Président, désenchantée et morcelée.
Le grand outil dont tous les décideurs, tous les partenaires, économiques, sociaux, régionaux, rêvaient, une ville unie, une ville qui pouvait travailler en concertation, une ville qui pouvait travailler de façon démocratique ? et je reparlerai de démocratie, M. le Président ? une ville qui pouvait enfin être au monde, être en compétition avec les autres villes du monde, cette ville que nous nous étions offerte, que, comme population, nous nous étions offerte, maintenant nous allons en payer le prix. C'était fait, nous en avions payé le prix. Adjugé! Maintenant, c'est toute la population qui en paie le prix. Et le premier coût inutile, M. le Président, c'est 2 millions de dollars que ça a coûté, ce référendum qui est arrivé à la défusion de deux villes: L'Ancienne-Lorette et Saint-Augustin, 2 millions de dollars qui ont déjà... premier coût de la défusion.
Maintenant, quels sont les autres coûts de la défusion? Justement, la députée de La Peltrie est ici, je pense que je vais lui rappeler ses paroles. Je pense qu'il faut faire attention quand on est parlementaire. On est très surveillé par les médias. Il faut peser ses paroles, surtout dans un... Mais je peux comprendre, c'était un débat émotif que ce débat des défusions. Alors, le mercredi 7 juillet, Journal de Québec, la députée de La Peltrie nous dit: Saint-Augustin et L'Ancienne-Lorette deviendront des modèles. «Si l'on en croit la députée de La Peltrie, les villes de Saint-Augustin et de L'Ancienne-Lorette ne souffriront pas de leur défusion, devenant même des modèles pour la région.» Alors, ce que je veux vous annoncer comme blocage, M. le Président...
Des voix: ...
Mme Maltais: M. le Président, les députés libéraux viennent d'applaudir le fait que l'aréna, le terrain de soccer, le garage municipal, la bibliothèque de L'Ancienne-Lorette sont des dossiers remis aux calendes grecques, M. le Président. Bravo! Une belle solidarité que vous venez d'avoir, parce que ça, c'est ce qui arrive. Le PTI, Programme triennal d'immobilisations, vient d'être déposé à la ville de Québec. Or, qu'a dit le comité de transition? Il a dit: Ils ne veulent pas que la ville prenne des décisions sur des sommes qui impliqueraient la ville de L'Ancienne-Lorette. Même le conseiller municipal de L'Ancienne-Lorette, qui sait bien, lui, que sa ville est désavantagée actuellement, le conseiller voulait procéder par protocole d'entente sur certains dossiers, et bien sûr ça a été refusé par le comité de transition. Pourquoi, M. le Président? Parce que la nouvelle ville n'existe plus, elle ne peut plus prendre de décision sur l'intégralité du territoire avec les taxes des gens, parce que les gens de L'Ancienne-Lorette et de Saint-Augustin ne font plus partie de la ville de Québec à partir de ce projet de loi, M. le Président.
Alors, les dossiers sont actuellement bloqués. L'aréna que les gens attendaient, la députée de Chauveau est responsable actuellement, parce qu'elle est membre de ce gouvernement, du fait que les gens de L'Ancienne-Lorette n'auront pas actuellement, dans le PTI, l'aréna. Elle est responsable du fait que le terrain de soccer va aller ailleurs, O.K., donc que le terrain de soccer ne se fera pas. Pourquoi? Parce que, M. le Président, ça ne peut pas être dans le PTI, ils ne font plus partie de la ville de Québec. Or, comme ils n'existent pas encore, ils ne peuvent pas se faire de plan d'immobilisations. Le garage municipal, le garage, c'est un plan d'entretien pour l'arrondissement. Alors, ils ne rénoveront pas une bâtisse sur l'arrondissement qui ne sera plus sur le territoire de l'arrondissement. Qui paie? Qui paie? C'est la population qui paie. C'est la population de L'Ancienne-Lorette qui paie actuellement, et je trouve cela désolant, M. le Président. La bibliothèque est en négociation encore, il y a encore un faible espoir. J'espère, M. le Président, j'espère qu'on trouvera une solution, parce que les citoyens et citoyennes du comté de Chauveau n'ont pas à payer pour l'embrouillamini libéral, n'ont pas à payer pour les gestes électoralistes désolants, franchement désolants qui ont été posés par ce gouvernement qui préfère des promesses électorales au bien commun.
M. le Président, la loi n° 75 est aussi quelque chose d'assez... d'assez désolant pour la région de la Capitale-Nationale, pour la ville de Québec. J'appellerais ça la loi du retour, vous savez, comme dans les films d'horreur, quand il y a quelque chose qui revient. Tout le monde avait craint cette affaire-là. C'était, mettons, dans le film, le bordel total, et tout à coup ça revient. On dit, dans ce temps-là, vous savez ? les jeunes connaissent l'expression populaire: «He's back!» Qu'est-ce qui...
Une voix: ...
Mme Maltais:«He's back», M. le Président. Le blocage, la loi du blocage. Alors, c'est revenu. On se souvient des défuntes communautés urbaines. Il y avait la Communauté urbaine de Québec où chaque maire devait ? et ce n'était pas une question de personne, là, c'était une question de mandat ? défendre le mandat de ses électeurs sur son territoire. 20 ans de chicanes, 20 ans de chicanes auxquels on avait mis fin.
Alors, qu'est-ce qui est contenu dans la loi n° 75? Le blocage, M. le Président. Article 112, je crois... 52... Le blocage est là, M. le Président. Qu'est-ce que ça donne? Ça veut dire que, comme c'est une loi absolument antidémocratique, comme c'est un système absolument incohérent au niveau de la démocratie ? j'aurai le temps d'en reparler, M. le Président ? ce qui est en train de se passer, c'est que les maires de L'Ancienne-Lorette et de Saint-Augustin, eux, comme ils sont... chacun est à peu près 16 000 à 18 000 voix, chacun sur son territoire, sur un conseil d'agglomération de 500 000 personnes, vont n'avoir qu'une voix. Donc, leurs citoyens, qui enverront au moins 60 % de leurs taxes au conseil d'agglomération, n'auront qu'une voix sur un grand conseil d'agglomération, donc très peu de pouvoir sur la gestion de leurs taxes. Ces gens-là, là, ils ont perdu un pouvoir démocratique.
Alors, qu'est-ce qui va arriver? Quand ils ne seront pas d'accord, qu'a trouvé le ministre? Il a trouvé... Bien, il ramène un blocage. Qu'est-ce qui va arriver au conseil d'agglomération quand ces deux maires-là ne seront pas d'accord? Et ça peut arriver parce que c'est leur mandat, ils doivent s'occuper de leurs commettants. Bien, le ministre leur a dit: Bien, vous me demanderez de bloquer les décisions du conseil d'agglomération. Mécanisme de blocage qui revient. Je trouve cela incroyable. C'est antidémocratique, mais c'est surtout, M. le Président, au moment où enfin on faisait des grandes villes, et toute la région célébrait, M. le Président, enfin cette ville unique de Québec, cette ville passionnante que nous désirions voir enfin en compétition avec le monde, cette ville que nous aimons profondément, tout le monde... J'en suis convaincue, tout le monde ici, eh bien, adore cette ville, ils y vivent, ils y travaillent, ils sont bien. Mais tout le monde maintenant voit le retour des frais. Alors, au lieu d'avoir un projet de loi qui serait intéressant, au lieu que ce gouvernement nous propose des projets de loi qui font avancer la société québécoise, au lieu de nous proposer des projets de loi qui nous font nous développer, qui nous font rêver, qui nous font avoir de la vision, qui feraient que les gens reprendraient dans Québec, dans cette ville, un peu de dynamisme, on a un projet de loi qui nous ramène en arrière et qui nous ramène des mécanismes de blocage. Je trouve cela encore une fois ? c'est le meilleur, je pense, terme que je puisse trouver pour ce projet de loi ? je trouve cela désolant. Nous le déplorons. La mécanique est condamnable et elle doit être dénoncée, M. le Président.
Il y a un vide démocratique extrêmement fort dans ce projet de loi maintenant parce qu'il est l'aboutissement des défusions. Il y a deux petites villes, de très belles petites villes, L'Ancienne-Lorette et Saint-Augustin, qui ne font plus partie de la ville de Québec, où les gens ne contrôleront plus démocratiquement l'utilisation, la gestion de leurs taxes, de leur territoire, et ces gens-là, M. le Président, vont... D'ailleurs, il y a eu plein, plein, plein de débats où il y a plein de gens qui ont dit: Oui, mais on ne pensait pas qu'on se retrouverait comme ça. On aimerait ça refusionner. C'est désolant, la situation dans laquelle on se retrouve, pour ces gens-là, parce que démocratiquement c'est inacceptable.
Ce projet de loi en plus, M. le Président, contient des chicanes. Articles 25, 26 et 27: il va falloir qu'on s'entende sur les bouts de tuyaux, M. le Président, avant d'arriver. Parce que là il va falloir qu'on arrive avec des dessins pour savoir quel bout de tuyau appartient à la localité, quel bout de tuyau appartient à l'arrondissement. Articles 25, 26, 27. Alors, il va falloir que les gens se chicanent, là. Oh! Les avocats vont avoir du plaisir dans l'avenir. Est-ce que ce bout de tuyau là est un bout de tuyau local ou un bout de tuyau du conseil d'agglomération? Articles 53, 54: les compétences. De quel niveau, cette compétence? Article 112: la chicane permanente, le blocage, les sujets qui vont au local et à l'agglomération.
Le Vice-Président (M. Gendron): Excusez-moi, Mme la députée de Taschereau. Compte tenu de l'heure, moi, j'ai une seule alternative, c'est de vous indiquer qu'il vous restera six minutes pour votre intervention et de suspendre les débats jusqu'à 20 heures, ce soir.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 3)
Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre! Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Alors, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations.
Au moment de la suspension des travaux, il restait six minutes à l'intervention de la députée de Taschereau. Mme la députée, vous avez la parole.
Mme Maltais: Merci, M. le Président. Je vois que certains députés apprécient la qualité de mon intervention qui est assez, je pense, documentée sur le projet de loi n° 75, Loi sur l'exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations. Je pense que le député de Verdun, qui se félicitait de me réentendre à nouveau, a apprécié sûrement que j'aie été chercher dans notre région, dans la région de la Capitale-Nationale, les impacts de ce qu'ont amené les défusions dans la région. Alors, évidemment, je ne reviendrai pas là-dessus, M. le Président, je ne reviendrai pas sur le fait que j'ai donc annoncé aux gens que, par exemple, dans L'Ancienne-Lorette, des projets sont retardés, l'aréna, le terrain de soccer, le garage municipal, on espère que la bibliothèque se négociera. Je ne reviendrai surtout pas là-dessus. Je ne reviendrai pas sur les impacts sur la capitale, qu'on voulait enfin unie, qui se retrouve divisée, sur le mécanisme de blocage, M. le Président. Je pense que j'ai déjà élaboré là-dessus et que mes exemples étaient assez significatifs.
Toutefois, M. le Président, j'avais annoncé d'entrée de jeu qu'en plus de la capitale nationale, de la ville de Québec, qui vit encore une fois un démantèlement, je parlerais un peu de la région de Montréal... de la ville de Montréal. J'y tiens, M. le Président, j'aime cette ville. Parfois, les gens pensent qu'on a des combats Québec-Montréal. Pas du tout. On est fiers de nos grands centres urbains, on est fiers de nos villes, on est fiers de leurs différences mêmes. On est fiers bien sûr de voir le Rouge et Or de l'Université Laval gagner contre les Carabins ? mais ça, c'est un autre sujet. Mais on est donc fiers de ces grandes villes que nous avons bâties et qui se voient aujourd'hui faire face à un démembrement.
Un des gros problèmes du projet de loi et du démembrement qui est proposé, c'est la façon dont va être traitée la démocratie dans ces villes maintenant. Certains commentateurs trouvent... Je vais reprendre les termes, je pense que ce sont des termes qui viennent d'un M. Antoine Robitaille, qui disait: «Le conseil municipal se vide actuellement à la fois par le haut et par le bas.» En fait, c'est Bernard Jouve, qui est professeur à l'Université du Québec à Montréal, qui disait cela. Qu'est-ce que ça veut dire? Voyez-vous, on crée un conseil d'agglomération; il faut le faire, puisque ça prend maintenant un organisme unificateur. Au conseil d'agglomération, 60 % du budget de la ville de Montréal, de la grande ville de Montréal, sera traité. Et pourtant les gens qui sont dans les villes qui vont être défusionnées n'enverront pas... n'auront pas de gens pouvant prendre des décisions directement sur ce 60 % du budget, puisque c'est la ville-centre qui prendra les décisions. D'autre part, dans ces villes, il y aura une opposition, M. le Président. Dans notre système démocratique, il y a des oppositions même à l'intérieur des villes. Or, l'opposition ne se retrouvera pas au conseil d'agglomération, puisque ce seront les maires des villes qui seront au conseil d'agglomération. Il y a là un vice démocratique important, M. le Président, et nous devons le porter à l'attention des parlementaires.
Nous sommes, nous, dans cette Assemblée nationale, dans ce salon bleu, les porteurs de la démocratie, les premiers défenseurs de la démocratie, M. le Président. Or, il y a un vice démocratique important, il y a une opposition qui n'existera pas. D'autre part, l'autre chose, la composition de ce conseil d'agglomération, si importante, sera décidée par le ministre, par un décret. Elle n'est pas dans le projet de loi actuel, M. le Président. Ça, c'est un deuxième vice démocratique, à mon sens.
Au conseil municipal des villes, pas de pouvoir de décision, donc, sur 60 % du budget, sauf dans la ville centrale, et surtout, pour les petites villes, pas de pouvoir d'examen sur ces décisions, donc aucun pouvoir, aucune possibilité de faire faire de la reddition de comptes sur 60 % du budget, sauf dans la ville centrale. Alors, il y a là un autre vice démocratique, M. le Président, que je dois souligner et aux gens de l'Ancienne-Lorette et de Saint-Augustin, qui sont les deux petites villes maintenant qui vont exister à Québec.
Mais c'est aussi ce qui va se passer sur le territoire de Montréal, et là-bas c'est majeur. Une immense partie de la population de la ville de Montréal n'aura pas de mécanique d'imputabilité, de reddition de comptes, ne pourra pas demander à ses conseillers, à son opposition, de faire son travail. C'est majeur. Le conseil d'arrondissement, lui, aura tous les pouvoirs services publics, de services directs aux citoyens. Donc, on vide le conseil municipal... on vide les conseils municipaux par le haut et par le bas. Ce n'est pas comme cela, M. le Président, qu'une démocratie devrait s'exercer. D'autre part, on passe de 80 conseillers, sur le territoire de la ville de Montréal, à 121 conseillers municipaux.
Je parlais tout à l'heure d'embrouillamini. Des députés se sont demandé: Mais qu'est-ce que c'est que ce terme ? qui est utilisé effectivement beaucoup dans la littérature du XIXe siècle? Je pense que c'est le projet de loi n° 75... ce terme s'applique bien à ce projet de loi. Ce que signifie «embrouillamini», M. le Président? Je l'annonce aux collègues: «méli-mélo», «confusion», voilà ce que cela signifie. Voilà les termes qui sont utilisés dans un dictionnaire, si vous voulez y aller. Alors, c'est vraiment un sérieux problème démocratique: problème de reddition de comptes, problème de surcharge administrative, problème d'imputabilité. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Taschereau. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, à ce moment-ci, conformément à l'article 100 de notre règlement, je fais motion pour que nous ajournions le débat sur le projet de loi n° 75.
Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, cette motion est recevable. Vous avez un droit de parole. Vous désirez l'exercer?
n(20 h 10)nUne voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Non? Est-ce que vous exercez votre droit de parole? Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Cusano): La motion est adoptée. Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Puis-je vous référer à l'article 4 de notre ordre du jour... 3, M. le Président, excusez-moi. C'est mon erreur.
Projet de loi n° 61
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci. À l'article 3, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 24 novembre 2004 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec. Y a-t-il des interventions? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: M. le député, vous pouvez m'indiquer le temps qu'il me reste? Parce que j'avais commencé un certain nombre de minutes...
Le Vice-Président (M. Cusano): Je vais vérifier à la table, madame, avant que vous commenciez. Il vous reste... Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, vous disposez de 10 min 54 s.
Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, effectivement, nous entreprenons le débat sur le projet de loi n° 61. Je rappelle le projet de loi n° 61, M. le Président, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, les PPP dans le jargon actuel. M. le Président, j'avais commencé mon intervention hier, alors il me reste quelques minutes aujourd'hui, alors je vais aller un petit peu, bien, particulièrement, en tout cas, sur des éléments du projet de loi n° 61.
On se rappelle que, le projet de loi n° 61, beaucoup de gens sont en désaccord, particulièrement des gens qui sont chargés de protéger l'application des principes démocratiques au Québec dans des institutions de contrôle. On parle de la Protectrice du citoyen, de la Commission d'accès à l'information, de la commission au lobbying, le Vérificateur général, M. le Président. Donc, ce n'est pas les moindres de ces institutions de contrôle qui sont actuellement très inquiètes par rapport à des éléments, dont l'éthique et la transparence.
Mais j'aimerais revenir, M. le Président, aux employés du secteur public tels quels. Actuellement, le gouvernement du Québec et ses employés sont en négociation en vue du renouvellement des conventions collectives. Mis à part les considérations salariales, d'autres enjeux majeurs sont débattus, parmi lesquels se retrouvent les PPP. Si des services gouvernementaux actuellement offerts par des fonctionnaires sont impartis à l'entreprise privée, inévitablement se posera la question du transfert des employés vers d'autres secteurs ou encore vers l'entreprise privée qui assumera le service.
Quelles seront les protections assurées pour les travailleurs cédés au privé? Est-ce que des conditions de travail équivalentes seront garanties? Si oui, est-ce que seulement jusqu'à l'expiration de la convention collective? Est-ce que l'employé transféré au privé bénéficiera d'un droit de retour dans la fonction publique? Est-ce que le fonctionnaire qui refuse un transfert à l'entreprise privée sera indirectement forcé de le faire malgré son statut d'employé permanent? Des questions importantes, M. le Président, où nous n'avons pas de réponse actuellement par le projet de loi n° 61. Plusieurs de ces questions seront répondues par la négociation des aspects normatifs de la prochaine convention collective peut-être.
Mais, par exemple, de combien de temps disposera un employé pour sa réaffectation? À l'expiration de ce délai, le gouvernement se permettra de réaffecter l'employé dans un rayon de combien de kilomètres? Est-ce qu'au bout du processus un employé aura le choix d'accepter un travail très loin de sa localité ou de se résigner à un transfert au privé? Quelles seront les normes applicables, M. le Président? Et d'autres questions comme celles-ci peuvent être mises à jour pour connaître l'intention de la ministre par rapport à ces questions-là sur les employés du secteur public principalement, M. le Président.
J'aimerais apporter aussi à votre attention, M. le Président, d'autres aspects. Parce qu'on parle souvent que l'implication en tout cas d'avoir un partenariat avec le privé ou le public serait peut-être bon pour l'État du fait que ce serait moins de charges au niveau de l'État. Ce n'est pas nécessairement la démonstration que l'on peut faire. Et je vais vous en faire quelques démonstrations.
D'abord, si des immobilisations telles quelles sont financées en mode PPP sur une durée moyenne de 30 ans ? c'est ce qu'on entend dans le partenariat ? il faut comprendre que le nombre de factures à payer augmentera sans cesse pendant 30 ans jusqu'au jour où le premier PPP sera complètement remboursé et retiré de la liste des comptes payables. Dans ce contexte, le fardeau financier augmente donc avec les années. L'expérience britannique montre que, pour se dégager de ce fardeau financier qui croît sans cesse, les gouvernements ont eu tendance à allonger les termes de financement jusqu'à 50 ans même et encore jusqu'à 60 ans, hypothéquant du même coup les générations futures.
Toujours pour assurer l'intérêt général, il serait approprié de dissocier deux missions de l'agence qui viennent clairement en contradiction l'une avec l'autre. D'une part, il est mentionné que l'agence devra analyser les projets qui lui sont présentés afin de déterminer quelle formule, PPP ou conventionnelle, serait la plus appropriée à la réalisation du projet. Par ailleurs, il est mentionné dans le texte de présentation du projet de loi que l'agence a pour mission de faire la promotion de la formule PPP auprès des organismes gouvernementaux et de la société civile. Pour assurer de façon adéquate la protection du public, M. le Président, il apparaît clairement que ces deux fonctions qui viennent en contradiction devraient être séparées.
L'agence, de par sa structure appréhendée, risque de proposer uniquement le mode de financement conventionnel lorsque les projets étudiés seront trop risqués pour l'entreprise privée ou encore sans grande opportunité de profits. Il nous apparaît donc que le Secrétariat du Conseil du trésor devrait lui-même assurer l'étape préliminaire qui consiste à définir quel sera le mode de prestation le plus rentable du point de vue du citoyen, du point de vue du contribuable, M. le Président.
Un autre enjeu qui est celui de l'endettement tel quel. Les partenariats public-privé sont souvent présentés comme étant une solution au manque de liquidités du gouvernement ou encore comme solution au problème de l'endettement public. Cette proposition repose sur le fait que le financement privé d'un projet d'immobilisations n'entraîne pas d'inscription directe à la dette publique, donnant ainsi faussement l'impression que l'endettement public se stabilise ou diminue. Par contre, si le niveau de la dette publique est intact, les engagements financiers du gouvernement sont gonflés. En effet, le partenaire privé qui aura assuré le financement viendra facturer périodiquement le gouvernement sur une longue période. Ce phénomène peut être assimilable à la création d'un deuxième service de la dette composé de nouveaux engagements financiers et qui se constituera progressivement avec les années.
C'est que, dans cette logique, les premières années du cycle sont marquées par les dépenses et les dernières années du cycle, par les remboursements, le poids de l'accumulation de ces engagements financiers ne se faisant sentir qu'au bout d'un long moment. Cette situation est analogue à celle d'une personne endettée qui se commande une nouvelle carte de crédit: les problèmes viendront à la fin du mois.
L'autre alternative de mode de prestation PPP est le financement privé combiné à la tarification des usagers. Ici, le fardeau financier est simplement déplacé de l'État vers le citoyen. La grande question latente dans cette situation est la suivante: Est-ce que, nous, nous payons ce service collectivement par le biais des impôts ou individuellement par le biais de la tarification? Deux impacts sont reliés à cette décision. D'une part, la tarification peut encourager l'utilisation responsable d'un service public, alors que la voie de l'imposition peut sembler plus équitable, puisque l'impôt est basé sur une contribution proportionnelle au revenu.
D'autre part, la tarification amènerait nécessairement des iniquités entre les régions, puisque des projets attrayants pour l'entreprise privée dans un centre urbain peuvent ne représenter aucun intérêt à ses yeux dans un environnement rural. Par exemple, la construction d'autoroutes à péage est envisageable dans un milieu urbain où la masse critique nécessaire à la rentabilité est présente, mais, en milieu rural, cette masse critique n'existe évidemment pas, ce qui rend tout projet d'autoroute à péage inimaginable. Voilà des exemples, M. le Président, intéressants pour regarder un peu plus précisément les problèmes d'immobilisations, les problèmes d'endettement, les problèmes de services à moindre goût... à moindre coût, pardon, les dépassements de coûts, etc.
Si je parle particulièrement des dépassements de coûts. Régulièrement, nous avons entendu la présidente du Conseil du trésor présenter les partenariats public-privé comme étant une solution à la problématique des dépassements de coûts. La logique serait la suivante: une entreprise sur laquelle repose une part de risque financier associée à un projet sera plus disciplinée au niveau des coûts et des échéances. Suite à un examen des antécédents, observés particulièrement en Grande-Bretagne, il appert que les dépassements de coûts surviennent également dans les projets de PPP, mais simplement plus tôt dans le processus, puisque les paramètres doivent être entièrement fixés avant la signature du contrat. Entre le montant prévu à l'appel d'offres et le montant réel à la signature du contrat, l'inflation des coûts est monnaie courante en mode PPP. Plusieurs centres hospitaliers britanniques ont vu leurs coûts exploser, allant jusqu'à 256 % d'augmentation entre l'appel d'offres publié par le gouvernement et le contrat final.
n(20 h 20)n Alors, vous voyez, M. le Président, qu'il y a des éléments importants dans le projet de loi PPP, projet de loi n° 61, des éléments qui sont très, très questionnables et où nous n'avons actuellement pas de réponse, puisqu'il n'y a pas eu vraiment un grand débat sur les partenariats public-privé. Tout ce qu'on a vraiment dans cette Chambre, c'est le dépôt de ce projet de loi là, où nous en sommes actuellement à l'adoption de principe. Alors, vous comprenez, M. le Président, qu'il y a beaucoup de questionnement sur l'éthique, sur la transparence, mais aussi au niveau des coûts, au niveau des préjugés qu'on peut avoir et au niveau de la pratique courante qui existe, pas juste chez nous mais qui existe particulièrement ailleurs dans le monde.
Alors, M. le Président, si je regarde l'ensemble du projet de loi n° 61, nous sommes contre ce projet de loi, évidemment, M. le Président. Je rappelle un peu certains articles donc, celui de la ministre, qui nous a dit qu'elle a bien écouté en commission parlementaire et qu'elle apportera des amendements. On ne connaît pas les amendements, on ne connaît pas l'ouverture qu'elle aura pour les amendements dans le projet de loi PPP, mais il nous apparaît de ce côté-ci absolument nécessaire d'avoir des amendements très, très balisés, un encadrement très encadré, comme on peut dire, pour l'agence parce qu'une agence n'enlève pas à la ministre nécessairement son droit de regard et toute sa responsabilité. Alors, si tous les ministres n'ont plus de responsabilités parce que tout va s'en aller dans une agence, je ne pense pas que c'est bien gérer l'État de cette façon-là.
Alors, ce que nous créons, c'est tout un secteur où des dizaines de milliards de dollars seraient dépensés et ce serait totalement opaque à tout accès à l'information. C'est un manque de transparence flagrant, un manque d'éthique véritable, un projet de loi qui vend le Québec à petit feu. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Marc Picard
M. Picard: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 61, sur la Loi sur l'Agence des partenariats public-privé. M. le Président, nous avons entendu, en commission parlementaire, plus de 40 témoins présentant différents mémoires. Nous avons entendu des groupes qui demandaient le retrait unilatéral de la loi. Nous avons aussi reçu des groupes appuyant sans réserve les partenariats public-privé. Nous avons aussi reçu beaucoup de recommandations et de demandes de modifications au projet de loi n° 61.
Les partenariats public-privé peuvent représenter un axe majeur du projet de modernisation de l'État québécois proposé par le gouvernement actuel s'il est utilisé à bon escient et surtout avec l'aval de la population. Je m'explique. La population doit être assurée qu'il s'agit de la meilleure manière d'offrir des services de qualité, et ce, à un coût raisonnable. Il doit y avoir une plus-value pour l'utilisation de ces partenariats, et je crois que nous devons profiter des expériences heureuses et malheureuses vécues en Angleterre et au Royaume-Uni.
Notre groupe parlementaire croit que les partenariats sont justifiés dans le contexte actuel des finances publiques de l'État québécois et des dépassements de coûts de plus en plus fréquents au Québec. Avec des dossiers tels que la Gaspésia et le métro de Laval, nous devons rétablir notre réputation sur la scène internationale. Je ne crois pas qu'un consortium de partenariats public-privé pourrait oublier un kilomètre de route ou un kilomètre de rame de métro. Nous croyons que les partenariats seront en mesure de répondre aux besoins majeurs d'immobilisations sur l'ensemble du territoire québécois. Les partenariats devront nous assurer une mise à jour constante des immobilisations.
Il est bien de vouloir construire de nouvelles infrastructures, mais il est surtout primordial d'en garantir l'entretien et le renouvellement. La gestion à courte vue des différents gouvernements pourrait être contrée par ces partenariats. À titre d'exemple, un partenariat régissant la fourniture d'un hôpital sur une base de 30 ans pourrait prévoir que les promoteurs doivent fournir l'équipement de fine pointe pour toute la durée du contrat. On éviterait ainsi d'avoir de beaux édifices qui deviennent des coquilles vides.
Nous devons cesser de gérer nos infrastructures dans la logique des grands projets ponctuels liés à la conjoncture politique, c'est-à-dire à courte vue ou selon le cycle électoral. Les partenariats public-privé nous permettent d'envisager les grands travaux au Québec différemment. À travers les ententes public-privé, nous allons pouvoir assurer une constance allant plus loin qu'un mandat de quatre ans.
Un des défis majeurs pour l'avenir du gouvernement du Québec est d'accroître l'efficacité et la qualité des services rendus à la population. Le partenariat avec le secteur privé nous offre une opportunité de reconsidérer nos façons d'agir auprès de nos concitoyens. En effet, M. le Président, notre groupe parlementaire défend depuis plusieurs années une autre façon de gouverner où l'objectif principal reste les services rendus aux citoyens et non aux groupes de pression les mieux organisés. À cet égard, les partenariats public-privé offrent des avantages intéressants.
Toutefois, M. le Président, le projet de loi n° 61 ne porte pas directement sur les partenariats public-privé. Non, le projet de loi n° 61 porte sur l'agence qui aura le mandat d'instaurer et gérer les partenariats. Nous ne pouvons que constater le caractère évasif de ce projet de loi. En effet, ce projet de loi comporte beaucoup trop de zones grises au niveau de la teneur réelle des partenariats. Beaucoup de groupes qui sont venus s'exprimer en commission parlementaire nous l'ont signalé. Il est clair que ce projet de loi est inachevé, incomplet et nécessite de sérieuses révisions et corrections.
Nous déplorons aussi le fait accompli devant lequel, aujourd'hui, nous nous retrouvons. Jamais, M. le Président, nous ne pourrons avoir le point de vue des différents témoins sur un véritable projet de loi traitant des partenariats public-privé. En effet, des groupes désirant se faire entendre sur les amendements ne pourront pas s'adresser directement aux élus de l'Assemblée nationale. Malheureusement, ils n'ont pu se faire entendre que sur une ébauche de projet de loi.
En tant qu'élus, nous avons tous une responsabilité accrue qui devrait transcender les luttes partisanes et nous devrions mettre tous les efforts pour scruter à la loupe les amendements promis, et ce, afin d'analyser sérieusement un véritable projet de loi sur les partenariats public-privé. Je demande ici, M. le Président, la collaboration de tous les groupes parlementaires pour analyser sérieusement tous les amendements qui seront proposés par le ministre...
Une voix: ...
M. Picard: ... ? collaboration, excusez, Mme la députée, j'avais la tête ailleurs ? la collaboration de tous les groupes parlementaires pour éviter de passer rapidement ce projet de loi dans une soirée ou dans une nuit, tout simplement.
Il est essentiel de soulever plusieurs lacunes de ce projet de loi. Premièrement, le manque de transparence dans l'établissement et la gestion des partenariats public-privé et l'ambiguïté du texte sont les principales faiblesses du projet de loi. Dans les 40 témoins qui sont venus en commission parlementaire, nous avons reçu les quatre... je vais les appeler les quatre gardiens de la démocratie québécoise, qui nous ont lancé de sérieux avertissements, soit la Protectrice du citoyen, la Commission d'accès à l'information, le Commissaire au lobbyisme et le Vérificateur général.
La Protectrice du citoyen, Mme Champoux-Lesage, présente cinq valeurs fondamentales absentes du projet de loi. Ces valeurs sont celles de la transparence, de l'équité, de la qualité des services, de l'imputabilité et de la protection de l'intérêt public. Il est impossible, M. le Président, de faire l'économie de ces valeurs auxquelles toute la population du Québec adhère. La Protectrice du citoyen a aussi constaté que, si ce projet de loi est accepté tel qu'il nous est présenté, elle ne pourra pas réaliser son mandat confié par l'Assemblée nationale. Elle écrit, et je la cite: «Le projet de loi devrait spécifier que le Protecteur du citoyen conserve sa compétence.» Voilà un amendement majeur que Mme la ministre devra inscrire avant même d'étudier en commission le projet de loi article par article. Même si nous appuyons l'idée des partenariats public-privé, il est clair que cela ne doit pas se faire au détriment du respect des droits fondamentaux des citoyens.
Également, il est essentiel que le projet de loi inclue un mécanisme d'encadrement déontologique visant à contrer l'apparition des conflits d'intérêts ou d'apparence de conflits d'intérêts dans la réalisation de ces partenariats, comme la Protectrice du citoyen le propose dans son mémoire.
n(20 h 30)n Le Vérificateur général du Québec devra également avoir un accès complet aux activités de l'agence et de ses filiales. Au même titre que le Protecteur du citoyen, le Vérificateur général du Québec doit conserver sa compétence fondamentale d'étudier rigoureusement la gestion financière d'un organisme public et de ses filiales. À cet égard, M. le Président, le projet de loi reste beaucoup trop imprécis quant aux responsabilités du Vérificateur général dans le cadre des partenariats public-privé.
De son côté, le Commissaire au lobbyisme a fait, entre autres, deux recommandations majeures afin d'assurer la transparence dans la gestion des partenariats public-privé. D'emblée, le Commissaire note, et je le cite: «Les partenariats public-privé ramèneront progressivement dans l'ombre des activités que le législateur a pourtant voulu rendre transparentes.» Fin de la citation.
Afin d'éviter cet écueil, M. le Président, il nous recommande que soit adoptée une mesure législative ou, à défaut, une règle administrative obligeant tout lobbyiste intervenant au stade de la création d'un partenariat public-privé à fournir une preuve aux autorités auprès desquelles il agit qu'il s'est inscrit au registre des lobbyistes. Autrement dit, il nous demande de lui donner les moyens légaux de pouvoir effectuer correctement son travail.
Ensuite, il nous demande d'arrimer son mandat à celui de l'agence, en souhaitant que soit modifiée la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme afin d'assimiler les représentants des entreprises privées qui oeuvrent dans les cadres des partenariats public-privé à titre de titulaires de charge publique aux fins de cette loi. M. le Président, en plus de nous demander de reconnaître son travail au niveau des partenariats, il nous demande d'élargir son mandat, prévu dans la loi constitutive du Commissaire au lobbyisme, aux différents partenaires des PPP, soit le secteur public et le secteur privé.
Quant à elle, la Commission d'accès à l'information nous a posé une question fondamentale à laquelle nous n'avons pas eu de véritable réponse. La commission nous a demandé quel sera l'impact des partenariats sur la protection des renseignements personnels. J'aimerais rappeler que nous attendons toujours une réponse à cette question et je souhaite que nous l'aurons dans les amendements promis par Mme la présidente du Conseil du trésor.
Mme la ministre nous a rappelé que le gouvernement reste maître d'oeuvre dans le cadre des partenariats public-privé. Si tel est le cas, il est essentiel d'y inclure toutes les remarques des personnes désignées par l'Assemblée nationale, soit la Commission d'accès à l'information, la Protectrice du citoyen, le Vérificateur général et le Commissaire au lobbyisme. Ne pas inclure toutes les remarques de ces quatre gardiens de la démocratie québécoise dans le projet de loi constituerait un précédent ouvrant la voie à de nouvelles formes de gestion où ils n'auront plus leur mot à dire. Je ne suis pas certain que c'est cela que nous voulons faire.
Autre point, M. le Président. La nomination des membres du conseil d'administration de l'agence pose aussi un problème quant à la provenance des responsables de cette nouvelle entité. Vous savez, M. le Président, que le gouvernement actuel n'est pas un modèle dans le processus de nomination. Au contraire, depuis l'élection d'avril 2003, plus d'un millier de nominations ont été réalisées, dont beaucoup de ces nominations furent des nominations partisanes. Ces nominations politiques nous font craindre que l'Agence des partenariats public-privé ne devienne qu'un nouvel organisme où le gouvernement actuel pourra remercier certains amis. Fondamentalement, nous devons nous demander quelle place occuperont les intérêts des citoyens dans la nomination des membres du conseil d'administration de l'agence. Le projet de loi n° 61 reste évasif sur ces questions, le mode de nomination reste mal défini et mal circonscrit par le projet de loi n° 61.
Finalement, nous souhaitons éclaircir les liens entre les ministères, organismes et l'agence en précisant davantage la portée de l'article 8 du projet de loi n° 61. Beaucoup d'intervenants ont relevé l'étendue des pouvoirs de cette nouvelle agence. Il est essentiel que cette agence ne devienne pas une nouvelle barrière bureaucratique qu'auront à franchir les ministères et organismes publics avant de pouvoir prendre une décision et surtout agir. L'objectif des partenariats public-privé doit être de maximiser l'efficacité de l'Administration publique. À cette fin, il est essentiel que l'agence, qui aura à instaurer cette nouvelle approche, ne contrevienne pas à l'objectif d'efficacité recherché par ces partenariats.
En conclusion, M. le Président, nous sommes en accord avec le principe des partenariats public-privé pour offrir des services de qualité dans la transparence la plus totale, et ce, pour obtenir un large consensus sur ce nouveau mode de gestion des deniers publics. La population doit être informée, convaincue qu'il ne s'agit pas d'un tour de passe-passe du bien collectif. Il va de soi que, pour rassurer la population, nous devons tenir compte de toutes les modifications souhaitées par la Protectrice du citoyen, le Commissaire au lobbyisme, la Commission d'accès à l'information et le Vérificateur général.
M. le Président, nous serons très attentifs aux amendements proposés par la ministre lors de l'étude en commission article par article, et je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Je vous remercie, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Je suis prêt maintenant à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Masson.
M. Luc Thériault
M. Thériault: Merci, M. le Président. Vous savez, M. le Président, dans l'étude du projet de loi... Parce que je présuppose, M. le Président, que... Même si d'entrée de jeu je vous dis que je suis contre cette adoption de principe, je présuppose, compte tenu de nos règles parlementaires et compte tenu de la majorité de l'autre côté, je présuppose donc que ce projet de loi sera adopté. Mais, M. le Président, on n'en sait rien, puisque, si je viens parler ce soir, c'est peut-être effectivement pour essayer de convaincre mes collègues d'en face.
La seule chose que je vous dis, par exemple, c'est que je suis un peu déçu de voir que, répétition après répétition, hein... Parce qu'en pédagogie c'est la répétition qui est la règle de tout. Plusieurs de mes collègues sont venus répéter, même le député de Chaudière-Appalaches... des Chutes... Chutes-de-la-Chaudière ? excusez-moi, M. le député, à chaque fois, je massacre votre dénomination de comté. Bon. Mais, M. le Président, je disais donc que j'ai quand même espoir de convaincre les gens. Même si les arguments ont été plusieurs fois répétés, bien je vais en répéter encore un certain nombre, pensant que peut-être, de l'autre côté, quelqu'un se lèvera tantôt et voudra finalement signaler que nous les avons convaincus et qu'en quelque part ils acceptent un certain nombre des arguments qui sont livrés de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président.
Je commencerais donc mon commentaire en disant... Quant à l'adoption de principe de ce projet de loi sur l'Agence des partenariats privé-public, le projet de loi n° 61, je dirais: La seule chose, pour paraphraser la présidente du Conseil du trésor, la seule chose qui est claire, c'est que ce n'est pas clair. La seule chose qui est claire, c'est que ce n'est pas clair, M. le Président, et «clair» au sens d'«opacité», hein, et «clair»... «pas clair» donc au sens «d'opacité», et «pas clair» au sens de «transparence».
«Transparence» faisant référence ici à ce qu'entre autres le comité d'éthique de l'INRS disait à propos de ce projet de loi, M. le Président. Alors, le Laboratoire d'éthique publique de l'Institut national de la recherche scientifique disait donc: Dans le débat qui entoure la création de l'agence, le gouvernement semble vouloir évacuer les questions éthiques avec lesquelles cette agence devra composer, tout comme il a évacué toute la question du pourquoi des PPP. En bout de piste, cela entraînera des répercussions inévitables ? et dans certains cas graves ? sur l'étendue et la qualité des services rendus à la population québécoise. J'aurai l'occasion d'y revenir, M. le Président.
n(20 h 40)n Mais, lorsque nous sommes à l'adoption de principe et lorsqu'un législateur veut pouvoir jouer son rôle de législateur éclairé, il faut qu'il regarde aussi le contexte et dans quel axe l'intention du législateur donc qui propose ce projet de loi peut apparaître. Dans quel contexte donc ce projet de loi là apparaît-il? Il apparaît dans une volonté initiale, préélectorale, de réinventer le Québec. Rappelons-nous, M. le Président, les divers documents qui invitaient les gens, hein, sous le slogan Ensemble, réinventons le Québec. Et, M. le Président, ensuite on a compris que réinventer le Québec, pour les gens d'en face, c'était la réingénierie de l'État. Et quand on a vu que la réingénierie de l'État avait une connotation de plus en plus péjorative, M. le Président, on a décidé de parler de la modernisation de l'État.
Toujours est-il, M. le Président, que, peu importe, réinventer, réingénierie ou moderniser, le slogan électoral, c'était: Nous sommes prêts. Nous sommes prêts à quoi, M. le Président? À un peu plus d'improvisation, de confusion, d'incohérence? Parce qu'en quelque part, M. le Président, il est clair, et ça a été relevé par plusieurs groupes qui sont venus en commission parlementaire, que la pièce maîtresse de la modernisation de l'État, eh bien, c'est, entre autres choses, les PPP. La clé de la modernisation ? j'allais dire: livrer au Québec la modernisation clé en main ? c'est effectivement... ça passera, selon ce gouvernement, par les PPP.
En même temps, M. le Président, qu'on dépose un projet de loi, dont je vais relever un certain nombre d'écueils qui ont été relevés par des organismes qui ont la responsabilité de protéger les citoyens, en même temps qu'on fait ça, on nous dépose, ce matin, un avant-projet de loi pour mettre en place un projet de loi sur le développement durable, un projet de loi sur le développement durable, M. le Président, dont l'un des objectifs de ce plan de développement durable est de favoriser l'équité sociale et permettre le plein épanouissement de tous les citoyens et de toutes les citoyennes. Mais je pourrai y revenir.
Si je dis «incohérence», «improvisation», c'est qu'en quelque part, M. le Président, si tel était le cas, compte tenu de la portée de ce que peut représenter un projet de développement durable, il eût fallu le déposer au lendemain du 13... du 14 avril 2003, M. le Président. À la suite de cela, nous aurions pu mesurer quel type de modernisation était acceptable. Parce que, M. le Président, si on regarde l'échéancier de cet avant-projet de loi, on s'aperçoit que ça n'aboutira pas avant 2007. Ça veut donc dire que le projet de loi dont on me demande, moi, d'adopter le principe aujourd'hui sera, lui, mis en place possiblement, M. le Président, avant les Fêtes. Alors, j'ai un peu de difficulté à comprendre la cohérence de ce gouvernement. Mais je pourrai y revenir, M. le Président.
Si effectivement les PPP sont la clé de la modernisation de l'État, M. le Président... On se rappellera d'ailleurs, avant les Fêtes, l'an dernier, que le prélude de ces PPP, ça a été, entre autres choses, l'adoption de l'article 45 du Code du travail, concernant la sous-traitance, et je pourrai y revenir tout à l'heure.
Alors, voilà, M. le Président, un plan de développement durable, un avant-projet de loi qui est déposé, qui doit tenir compte de trois axes, de l'équilibre de trois axes, qui doit finalement trouver l'équilibre parfait entre trois axes, là, qui représentent le noyau dur d'un plan de développement durable, c'est-à-dire l'économique, le social et l'environnemental. Donc, puisque telle semble être l'intention de ce gouvernement, d'aller de l'avant, on serait tout à fait légitimés aujourd'hui et justifiés de poser la question suivante: En quoi le projet de loi n° 61 rencontre-t-il les principes et la stratégie du développement durable déposés ce matin, M. le Président? Et je dirais que le fardeau de la preuve est du côté du gouvernement et précisément de la présidente du Conseil du trésor.
Mais, M. le Président, il y a certains groupes qui ont une bonne idée là-dessus. Notamment, je voudrais soumettre à votre attention ce qu'André Bouthillier, président de la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau, Eau secours, a écrit au premier ministre le 18 novembre dernier.
La Coalition donc envoyait une lettre au premier ministre, et M. Bouthillier la signe, et je vais vous en lire un certain nombre de passages, là. On dit: «L'intérêt du plus grand nombre doit prévaloir sur l'intérêt de quelques-uns. Après avoir pris connaissance des projets de loi nos 61 et 62, la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau, Eau Secours, considère qu'il est temps de vous le rappeler. Nous faisons appel aux valeurs qui vous animent. N'est-il pas vrai que l'eau qui circule dans le corps constitue le sang qui nous fait vivre? N'est-il pas vrai que cet organisme qui supporte notre intellect et nos valeurs ne peut survivre sans l'eau en qualité et en quantité suffisantes? N'est-il pas vrai que de garantir l'accès à une eau de qualité pour tous les Québécois et les Québécoises contribue à long terme à minimiser la pression sur le système de santé, et ce dernier vous tenant tant à coeur?
«C'est avec cette vision en tête que j'interviens au nom de la coalition et que je vous demande, M. le premier ministre, de retirer la gestion de l'eau des projets de loi nos 61 et 62, débattus lors de la présente session parlementaire. La communauté scientifique demande que l'eau soit gérée de façon écosystémique, dans l'intérêt des humains, de la faune, de la flore pris en compte, et la privatisation de cette gestion ne rencontre d'aucune façon les préceptes de ce mode de gestion durable de notre environnement. Il n'y a que l'État, par le biais de ses institutions, qui puisse assurer la protection de ce bien commun.» Alors, M. le Président, je pourrais lire encore d'autres passages. Je pense que je vais en lire encore un petit autre, là, le dernier: «M. le Président, au nom des citoyens et citoyennes qui risquent de devenir les otages des multinationales de l'eau et des traités commerciaux sur les services publics, nous réclamons que vous posiez un geste dans le sens du respect de l'éthique, de la gestion publique, du bien commun et du principe de précaution, pour que les générations futures de citoyens et citoyennes reconnaissent que nous avons contribué à assurer la pérennité de leur droit fondamental en une eau potable de qualité.»
On reconnaîtra là un certain nombre de principes qui se retrouvent, entre autres choses, énumérés dans cet avant-projet de loi sur la question du développement durable de ce gouvernement. Alors, M. le Président, l'enjeu présentement... Il y a des enjeux qui sont sous-jacents à cette décision de l'instauration des partenariats public-privé. Il y a deux modèles de gestion qui s'opposent, il y a deux finalités qui finalement sont en opposition et qu'on essaie de marier ou d'arrimer.
Mais, M. le Président, il y a aussi un article intéressant, que je recommande à mes collègues d'en face de lire, dans Le Devoir du lundi 20 septembre, quant à la question de la gestion de l'eau par des partenariats public-privé. Alors, l'article s'intitule Des PPP dans le domaine de l'eau: «pourquoi payer plus»?, et c'est signé par Sylvie Paquerot et Jacques Boivin, chercheuse au Centre d'études et de recherches internationales à l'Université de Montréal, vice-président de l'Association québécoise pour un contrat mondial de l'eau.
Et je poserais à mes collègues d'en face la question suivante, qui est aussi posée à la fin de cet article, de ce long article dont je vous...
Une voix: ...
M. Thériault: Pardon?
Une voix: ...
M. Thériault: Je vais faire en sorte de ne pas vous...
Le Vice-Président (M. Cusano): Non, non. Vous pouvez poursuivre, M. le député, là.
M. Thériault: M. le Président, vous êtes bien gentil. Alors, la citation est la suivante: «Souhaitez-vous que soit instauré au Québec un mode de gestion de l'eau qui coûtera plus cher, dont les tarifs menaceront la capacité de payer des ménages à revenu modeste, dont le taux de profit permettra d'enrichir des firmes multinationales étrangères, le tout dans un contexte de déficit démocratique?» Et, sur le déficit démocratique, M. le Président, j'aurai sûrement l'occasion d'y revenir tout à l'heure.
n(20 h 50)n Alors donc, enjeux, secteur public. Quand le secteur public gère, M. le Président, un projet, ce qu'il recherche, ce par quoi il est animé, c'est la recherche du bien commun. Évidemment, lorsqu'il y a un projet qui est amené par le secteur privé, en principe, ce que l'on cherche, c'est le profit, la marge bénéficiaire; c'est tout à fait normal, M. le Président. Or, les PPP devraient permettre d'arrimer cela. Mais est-ce possible effectivement de l'arrimer? À quel prix, M. le Président? Une lecture attentive et des exemples à travers le monde, notamment à propos de la gestion de l'eau, démontrent qu'un certain nombre de mythes sont partagés par les gens d'en face, notamment quant au fait que, par exemple, les PPP pourraient nous donner des services à moindre coût, qu'il y aurait un contrôle du dépassement des coûts, M. le Président.
Alors, là-dessus, sur le dépassement des coûts, on pourrait regarder les choses ensemble. D'abord, PPP et services à moindre coût. M. le Président, il n'y a personne dans cette Assemblée qui peut penser que le secteur privé est animé d'une volonté philanthropique. Il est tout à fait normal, lorsqu'on s'engage à mettre en place un projet, qu'on puisse aller se chercher une marge de profit, une marge bénéficiaire. Alors, M. le Président, habituellement, ça joue autour du 15 %.
Alors, si on veut qu'un PPP puisse faire en sorte que la gestion se passe à moindre coût et qu'on sait qu'en quelque part la marge doit être de 15 %, si on ajoute à ça qu'habituellement l'entreprise, M. le Président, privée est financée à des taux beaucoup plus élevés que l'appareil gouvernemental ? parce qu'un gouvernement ne ferait pas faillite, M. le Président, il est solvable, alors les institutions prêteuses prêtent toujours avec des taux beaucoup plus privilégiés ? si on ajoute à ça, pour penser que ça pourrait être à moindre coût, où est-ce qu'on peut faire, justement, des profits? Bien, ce n'est pas sur l'emprunt, ce n'est pas sur le projet en tant que tel, parce que ce n'est pas l'intérêt commun qu'on vise seulement, s'il y a un intérêt commun qui est visé, c'est la marge bénéficiaire. Alors, M. le Président, où est-ce que va se faire ce moindre coût? Il pourrait effectivement, comme plusieurs le prétendent, se faire sur finalement le dos des travailleurs, M. le Président, au niveau de la main-d'oeuvre. Et c'est la raison pour laquelle tout à l'heure je disais que l'article 45, sur la sous-traitance, était le prélude à l'instauration des PPP, M. le Président.
Or, lorsque l'on dit que l'on veut mettre en place un objectif de développement durable qui consiste à favoriser l'équité sociale et permettre le plein épanouissement de tous les citoyens et de toutes les citoyennes, M. le Président, comment pouvons-nous penser que la précarisation de l'emploi, la diminution des revenus puissent aller dans le sens du développement durable, M. le Président? Poser la question, c'est y répondre. L'activité principale des individus en société, hein, c'est le travail. Alors, en quoi pouvons-nous penser que l'épanouissement des travailleurs passerait nécessairement par une modulation, une refonte, par exemple, de leurs conditions de travail? Alors, moi, M. le Président, je pense qu'il y a un problème à ce niveau-là.
Dans un autre ordre d'idées, il y a eu quelques feux rouges qui ont été mis en place, M. le Président, au niveau de l'éthique et de la transparence ? et je vois qu'il me reste à peine deux minutes ? un certain nombre d'organismes sont venus faire des déclarations et mettre un holà à ce projet de loi qui devraient en quelque part permettre au gouvernement de réfléchir, voire même, comme plusieurs groupes le mentionnaient, voire même l'amener à retirer ce projet de loi là, le retravailler et le représenter, M. le Président. La Protectrice du citoyen, la Commission d'accès à l'information, le Commissaire au lobbying, le Vérificateur général, tous ont apporté des arguments de fond laissant entendre effectivement que ce projet de loi tel qu'écrit posait de sérieux problèmes, M. le Président, sérieux problèmes de transparence, sérieux problèmes d'équité, alors que, M. le Président, dans le plan d'action d'un prochain gouvernement libéral, sous la plume du premier ministre actuel, on pouvait y lire: Je m'engage, au nom de tous les députés et candidats du Parti libéral du Québec, à diriger un gouvernement transparent, aux règles d'éthique strictes, M. le Président.
Quand on voit, M. le Président, que certains groupes ont amené la difficulté que ce prochain conseil d'administration, constitué de gens provenant de l'entreprise privée qui en même temps pourraient avoir des intérêts, M. le Président, dans l'instauration de PPP... seraient ceux-là mêmes qui géreraient, définiraient, analyseraient et feraient la promotion des PPP, M. le Président.
Alors, sur ces cinq secondes qu'il me reste, je vous dirai: C'est, entre autres choses, les raisons pour lesquelles je pense que ce gouvernement doit retirer ce projet de loi et que, en quelque part, je ne vais pas voter pour l'adoption de ce projet de loi, de façon favorable...
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Masson. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de LaFontaine.
M. Tony Tomassi
M. Tomassi: Merci. Merci, M. le Président. Et, pour répondre à notre cher collègue de Masson, je ne me lève pas parce qu'il m'a convaincu au-delà de tout. C'est impossible.
Mais avant tout, M. le Président, je voudrais saluer votre élection à la vice-présidence de l'Assemblée nationale. Vous savez, vous nous faites honneur. Vous êtes de la même communauté que moi, et je sais que la communauté italienne a été très fière de vous voir à ce poste-là quand la nomination est arrivée.
Et je prendrais ce moment aussi pour saluer, ici présent, notre collègue des Ressources naturelles, qui a participé à l'élaboration aussi du plan de développement durable qui est déposé par notre ministre de l'Environnement. Plan ambitieux qui va porter le Québec à une autre dimension où est-ce que l'autre gouvernement n'avait jamais eu l'audace d'y aller.
Mais je reviendrais sur plusieurs questions. On est en étude d'avant-projet de loi, sur le projet de loi n° 61, sur l'Agence des PPP, et je commencerais un peu mon intervention à essayer de répondre aux questionnements que l'opposition a pris durant deux, trois jours ? ça fait deux, trois jours qu'on est sur ce projet de loi là. Et, même dernièrement, là, quand le député de Masson a fait son intervention, il me parlait de lumières rouges; il y a eu le député de Richelieu qui a parlé aussi de lumières rouges qui s'allumaient sur le tableau de bord, concernant différentes choses.
On est au courant d'une chose, M. le Président: que l'ancien gouvernement en a allumé pas mal, de lumières rouges. Et, pendant ces neuf ans là, ils n'ont pas fait comme tout bon conducteur aurait dû faire. Vous savez, quand on conduit puis une lumière rouge s'allume sur notre tableau de bord, on s'en va vérifier de temps en temps à savoir qu'est-ce que c'est qui se passait. Eux ont laissé la lumière s'allumer, ils l'ont laissée là.
Et les exemples sont nombreux, M. le Président. On peut passer de la Caisse de dépôt, de la Société générale de financement, le métro de Laval, Gaspésia ? on a eu une interpellation ici, la semaine dernière ? Métaforia, un autre dossier où est-ce qu'il y a une tonne d'argent qui est disparu, M. le Président, et on ne sait pas de quelle manière.
Mais, au-delà de tout, cet ancien gouvernement, M. le Président, a pris des décisions non réfléchies qui nous ont amenés dans une position très précaire: finances publiques désastreuses. Et je vois mon collègue ministre de la Santé, ici, qui en fait toujours mention: des décisions qui n'ont aucun sens politiquement, économiquement, dans le sens des ressources humaines. Ils ont mis au-dessus de 1 000 médecins à la retraite, au-dessus de 5 000 infirmières à la retraite et, par-dessus tout, ils fermaient, d'une certaine manière, ils n'ouvraient pas des places à l'université pour former plus de médecins, plus d'infirmières; c'était interdit. Pour eux, là, il n'y avait pas de problème: on mettait les gens à la retraite, et il n'y avait aucun problème, on n'en avait pas besoin.
Aujourd'hui, on vit une situation très difficile. Le ministre de la Santé fait un travail remarquable, fait un travail remarquable.
Une voix: ...
M. Tomassi: Situation dramatique ? on me fait mention ? et c'est vrai. Et par chance qu'on a un excellent ministre de la Santé, qui fait un travail remarquable et qui trouve...
Des voix: ...
M. Tomassi: ...et Services sociaux, et...
Une voix: Il faut l'applaudir.
M. Tomassi: Bien, exactement. Il faut une bonne main d'applaudissements.
Des voix: ...
M. Tomassi: Mais, M. le Président, M. le Président, comme bon chauffeur, la population du Québec, le 14 avril dernier, a fait le bon choix. On vérifie les lumières, les supposées lumières. Elle les a toutes changées.n(21 heures)n On est arrivés au pouvoir puis on a mis en place des changements qui vont s'imposer. Et je me permettrais d'ouvrir une grande parenthèse, M. le Président, parce que c'est assez important. On a eu le député de Masson et les autres intervenants qui ont parlé concernant le sujet de l'Agence de partenariats public-privé, et ils ont fait mention, tout au long de leurs débats, de leur interprétation, des problèmes d'éthique, de transparence, de sources de conflits d'intérêts possibles. Et je vois le député de Vachon qui est ici et qui hoche de la tête, mais...
Des voix: ...
M. Tomassi: Non, non, Vachon. Vachon, il était là. Mais, M. le Président, ces gens n'ont pas de leçons à donner. Ils n'ont pas de leçons à donner. Le député de Berthier, qui a fait une intervention hier, je crois, disait: «Un des principaux problèmes aussi: il y a quand même une certaine odeur... Lorsqu'on lit ce projet de loi là, il y a une certaine odeur qui nous monte au nez. Et je vais vous parler de la première, la première odeur un peu bizarre, un peu malodorante qui nous monte au nez.» Or, il parlait du projet de loi. Il disait: «...et ça me fait penser à d'autres problèmes qu'on a vus ailleurs justement de cette proximité entre entreprises privées, entre firmes et gouvernement.» Moi, je dirais au député de Berthier que la seule odeur qui lui monte au nez actuellement, hein ? puis il y en a une, odeur ? c'est l'odeur qu'on retrouve au sein de son caucus, odeur qui a été mise en place par sa collègue la députée de Taillon, stratégie qu'on a vue, hein, on ne peut pas se le cacher, M. le Président, ça a été public.
Et je lui dirais même autre chose, M. le Président. Il vient d'un comté, Berthier. Le comté de Berthier, si vous vous souvenez bien, M. le Président, moi, je n'étais pas là, mais il a été représenté par un certain Gilles Baril, si je ne me trompe pas, ex-député, ministre qui a eu... Et, s'il ne s'en souvient pas, il a dû quitter son poste pour différentes raisons, et la principale raison, ce n'était pas une apparence de conflits d'intérêts, pas une apparence d'amitié et de donnage de contrats à un ami, c'était réel, Oxygène 9. Il y a eu Raymond Bréard, M. le Président, Hyacinthe Auger, LG 2, Yves Duhaime. Ce n'est pas des supposés conflits d'intérêts, c'est des conflits d'intérêts réels, M. le Président. Et ces gens-là, à tous les jours, se lèvent sur ce projet de loi là et nous disent: On peut avoir apparence de conflits d'intérêts. C'est pousser la chose, M. le Président, pousser la chose énormément.
Quand un gouvernement a mis en place, avec ses amis, un système qui fonctionnait extrêmement bien, pas pour les citoyens du Québec, M. le Président, mais pour eux, pour leurs amis... Et je fais mention à un article dans La Tribune du 12 février 2002. Le titre révélateur: La main dans le pot à biscuits..., M. le Président ? terrible, ça, comme titre ? et qui dit: «Qui plus est, le grand bénéficiaire de cet apparent conflit d'intérêts n'est pas un obscur militant du PQ mais un ami personnel de Bernard Landry ? excusez, le chef de l'opposition...
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de LaFontaine, vous savez fort bien qu'on doit s'adresser aux membres de cette Assemblée par leur titre.
M. Tomassi: ...je m'excuse, M. le Président, parce que je lisais, j'ai fait un... ? et le directeur général du Parti québécois, M. Raymond Bréard. Cela est inquiétant puisque M. Bréard est le fondateur d'une firme de lobbying qu'il a vendue par la suite à un autre ami du régime, M. [Desrochers], ami de Gilles Baril, lieutenant de [l'ancien chef de l'opposition]. Et pour bien s'assurer que cette firme de lobby puisse être bénéficiaire des largesses de l'État[...], elle peut compter sur l'appui bienveillant de certains ministres dont le nouveau titulaire du ministre de l'Éducation» d'alors, le député de...
Le Vice-Président (M. Cusano): Oui, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques?
M. Boulerice: Oui. M. le Président, deux choses: en vertu de notre règlement, vous connaissez l'article aussi bien que moi, la pertinence; et la deuxième, le décorum, que les gens soient assis à leurs places.
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques... Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Lamquin-Éthier: Est-ce que vous me permettez d'intervenir sur l'article invoqué? L'article 239 de notre règlement reconnaît que, lorsque le débat porte sur un projet de loi dans le cadre de l'adoption du principe qui nous occupe, il peut être très large. Évidemment, la jurisprudence a retenu plus particulièrement comme étant interdites les digressions abusives et d'autres paroles qui s'y apparenteraient. Donc, dans le cadre du débat sur une adoption de principe, ça doit être interprété largement en faveur de l'orateur. 239.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. Je veux seulement rappeler à tous qu'il y a une personne qui a la parole, c'est le député de LaFontaine, et j'aimerais que tous portent attention et qu'on se comporte comme on le doit à l'Assemblée nationale.
M. Boulerice: ...de faire appliquer l'article 38 et je vous prierais, si cela est possible, de relire l'article 219 que la leader adjointe du gouvernement vient de lire. Elle va voir que malheureusement, malheureusement, le député de LaFontaine... Je dis: Malheureusement, il me déçoit.
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, je vous ai bien entendu.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Je vous ai entendu. Il est d'usage que, lorsque la personne qui parle... Si cette personne-là ne se sent pas dérangée par l'ensemble des députés, il y a une certaine tolérance. Maintenant, si vous exigez qu'on applique l'article 32 à la lettre, je vais le faire. Alors, je vais demander...
Mais je vois et je remarque que tout le monde est à leurs places. Vous pouvez continuer, M. le député de LaFontaine.
M. Tomassi: Merci, M. le député. Mais, avant de continuer, j'espère que l'intervention du député de Sainte-Marie?Saint-Jacques n'a pas été prise sur mon temps, parce qu'il y a un médicament, Flex-O-Flex, où ça fait mal... On pourrait en appliquer, M. le Président.
M. le Président, pour continuer sur mon temps d'intervention...
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
M. Boulerice: En vertu du règlement que la leader adjointe...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! C'est quoi, votre question de règlement, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques?
M. Boulerice: En vertu de l'article que vous a cité la leader adjointe du gouvernement, M. le Président, 219, vous remarquez que les propos du député ne sont pas conformes au sujet qui doit être discuté. On lui demande...
Le Vice-Président (M. Cusano): Bon. C'est une question d'interprétation. Vous pouvez continuer, M. le député de LaFontaine.
M. Tomassi: Merci, M. le Président. Et je lui ferais part, au député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, d'un autre article dans La Voix de l'Est et le titre, un texte de Jacques Pronovost, qui dit: Odeur de scandale. Alors, il dit: «Ce n'est pas tant ce que ces hommes, en affaires, font ou ont fait qui crée l'embarras. C'est plutôt comment les membres d'un gouvernement, connaissant bien ces gens, acceptent de subir leur influence. Ou pire, comment ils suggèrent à d'autres d'utiliser leurs services afin d'obtenir plus d'argent de leur gouvernement.» Or, M. le Président, quand ces gens-là viennent nous dire à nous, ici, en cette Chambre, sur un projet de loi qui va moderniser l'État québécois, hein ? ce n'est pas difficile à comprendre ? quand ces gens-là viennent nous dire qu'il faut faire attention parce que, là, c'est un conflit d'intérêts, ils n'ont pas vraiment de leçons à nous donner, M. le Président, d'aucune façon.
n(21 h 10)n Et, vous savez, je pourrais débattre encore plus. Un autre exemple, M. le Président, et ça, c'est un exemple qui est frappant, c'est l'exemple des OSBL qui avaient été créés par l'ancien... le chef de l'opposition d'alors, qui était ministre des Finances, OSBL où est-ce qu'on a ponctué... ou siphonné 700 millions de dollars, de l'oeil averti du Vérificateur général du Québec et des parlementaires, pour faire autre chose, hein? Lysiane Gagnon, dans La Presse du 16 février, disait: «Le vrai problème, c'est sur le plan politique qu'il se trouve, pas chez les lobbyistes. Le vrai problème, c'est le système mis en place par l'ancien ministre des Finances [...] pour faire transiter les subventions par huit OSBL. Selon le Vérificateur général ? on parlait beaucoup du Vérificateur général; lui, il disait, ici ? Guy Breton, qui s'en inquiétait, ce système a permis au gouvernement de soustraire quelque 700 millions à l'examen des élus et du public. Comme le relevait jeudi Le Devoir, l'OSBL qui a distribué 30 millions aux grands festivals ? SEMI, ou Société des événements majeurs internationaux ? [...]. Les subventions de la SEMI ont ensuite transité par Oxygène 9, la désormais fameuse firme péquiste dont la principale utilité semble avoir été d'enrichir les copains du régime en prélevant des millions de dollars en commissions.» Alors, quand le député de Berthier, hier, nous disait, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant. M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
M. Boulerice: Deux choses, M. le Président, et je vous demande de bien vouloir m'écouter et surtout m'entendre. La première chose, c'est que je vous ai demandé à deux reprises que le décorum soit respecté. Je ne savais pas que Mme la députée de Jean-Talon portait une cravate rouge, d'une part. Et la deuxième chose, rappeler une dernière fois à l'ordre le député de LaFontaine quant à ses propos qui ne sont pas dans la limite de notre discussion.
Le Vice-Président (M. Cusano): En ce qui concerne votre première proposition, je demanderais aux députés de bien prendre la place qui leur a été assignée. Quant à la deuxième, Mme la leader du gouvernement, vous avez...
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Non? Ça va?
Lorsqu'on parle de la question de pertinence, M. le député ? ça fait assez longtemps que vous siégez ici ? le député, il a une marge pour expliquer ses propos. M. le député de LaFontaine.
M. Tomassi: Alors, merci. Merci, M. le Président. Vous savez, j'ai eu l'habitude lors de mes dernières interventions ici, il y avait le député de Gouin qui aimait monter sur les rideaux. Je me suis fait un autre copain en le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
Mais, pour revenir un peu, M. le Président... Et ça me fait rire quand ces gens-là nous font la morale à chaque fois qu'on dépose un projet de loi. Ils viennent nous parler d'éthique, apparence de conflit d'intérêts quand, eux, au-delà de l'apparence, c'étaient des faits réels. On ne peut pas se le cacher, là. C'est des faits réels qui ont été déposés en Chambre. Il y a des accusations, un ministre qui a perdu son emploi, qui a dû démissionner, un directeur général de parti qui a dû démissionner, remplacé par un autre candidat qui, lui aussi, a dû démissionner parce qu'il était à l'emploi de la même firme. Alors, M. le Président, absolument aucune manière que ces gens-là vont venir nous dire à nous, aujourd'hui, qu'il y a apparence de conflit d'intérêts sur un projet de loi qu'on va déposer.
Par-dessus tout, M. le Président, la présidente du Conseil du trésor a fait 10 jours, je crois, de commission parlementaire. Elle a été très claire à ce sujet, M. le Président, dans son discours de clôture qui disait: «Je l'ai dit au cours de nos travaux et je le répète sans gêne, j'accorde énormément d'importance aux discussions que nous avons eues et j'ai le plus profond respect pour celles et ceux qui ont fait l'effort de venir jusqu'à nous, nous éclairer, la réflexion du gouvernement ainsi que pour l'institution qui a accueilli leurs témoignages. Nous allons tenir compte des commentaires des citoyens du Québec, M. le Président.» Et, la présidente du Conseil du trésor a été très claire, il va y avoir des amendements qui vont être apportés s'il y a des améliorations à faire à un projet de loi, et selon moi la job de l'opposition, c'est justement ça, d'apporter des modifications au projet de loi.
Alors, M. le Président, le projet de loi sur les projets privés en partenariat, c'est ça qui va permettre au Québec de franchir l'autre phase. On a des finances publiques qui sont très difficiles, il faut se serrer la ceinture. Alors, tous ces projets-là, de cette manière, vont nous permettre, M. le Président, d'être capables de mettre en branle des projets. Et, il ne faut pas se le cacher, on n'est pas le seul, là. Je lisais un article, ce matin, dans La Presse qui annonçait que la ville de Montréal, avec l'archevêché de Montréal et la FTQ, allait mettre en place, en collaboration, les trois paliers pour la construction de 1 000 logements sociaux. Alors, c'est ça, des partenariats public-privé, M. le Président. Il ne faut pas se le cacher.
Alors, toutes les peurs que cette opposition-là nous font, c'est avec leurs amis, M. le Président, leurs amis les syndicalistes. Ils sont tellement en manque de membres, M. le Président, qu'ils veulent même syndiquer le Bonhomme Carnaval. Il faut le faire! Moi, je leur dirais qu'ils devraient faire attention à cette opposition-là, parce que bientôt ils vont leur vendre, ici, à eux, des cartes de membre pour devenir syndiqués, M. le Président.
Mais, au-delà de tout, M. le Président, la peur qu'on a eue sur l'article 45, les gens ont manifesté dehors: On va perdre de la job, on va avoir du «cheap labor». Un an après, M. le Président, l'économie va extrêmement bien, on n'a jamais eu le taux de chômage le plus bas depuis 1976 ? il faut le faire, là ? 1976, année, je pense, que vous vous rappelez très bien, M. le Président, hein, et les investissements privés ont accru d'une façon remarquable.
Alors, M. le Président, je suis pour nécessairement le projet de loi et je souhaite que tous les membres de cette Assemblée puissent voter en faveur de ce projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de LaFontaine. Je suis prêt à reconnaître la prochaine intervenante, Mme la députée de Deux-Montagnes. Mme la députée, c'est votre tour.
Mme Hélène Robert
Mme Robert: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que je suis un petit peu...
Une voix: Émue.
Mme Robert: ...émue, oui ? vous avez raison de me suggérer ce mot-là ? étonnée en même temps par l'intervention sur le projet de loi n° 61 qui a été juste avant la mienne. Je dois vous dire qu'à travers cette allocution je n'ai pas trouvé beaucoup d'arguments pour me convaincre de voter pour la loi n° 61. En tout cas, je vais reposer mes interrogations, peut-être que quelqu'un d'autre pourront à leur tour...
Peut-être que ceci a déridé plusieurs personnes des collègues de l'Assemblée, mais il reste que, le travail de l'opposition, sérieux, appliqué, je pense qu'il doit être respecté sans charriage sur des faits personnels à travers un débat d'une loi. Alors, je le déplore grandement.
Alors, M. le Président, si j'interviens à mon tour dans ce débat, c'est pour joindre ma voix au concert de toutes les autres qui dénoncent vertement, et non sans raison, les tenants et les aboutissants de ce projet de loi n° 61. Les partenariats privé-public procèdent en ligne droite du vaste, ambitieux et contestable choix de la réingénierie de l'État. Plus précisément, il s'inscrit dans le sillage de l'amendement de l'article 45 du Code du travail et de l'offre patronale qui fait de la mobilité de la main-d'oeuvre gouvernementale vers l'entreprise privée une pièce importante de ses négociations.
Quand on sait le tollé général provoqué par ce contexte nouveau, il y a largement matière à y regarder de plus près, avec cette Agence des PPP. Je m'interroge sérieusement, et je ne suis visiblement pas la seule, sur la prétention voulant que l'avènement des PPP contribue à la modernisation de la gestion de l'État. La présidente du Conseil du trésor entretient une vision idyllique, voire angélique du privé.
n(21 h 20)n Faut-il, à l'instar de la Centrale des syndicats du Québec, appréhender ici une dilapidation du bien commun, une transformation des biens publics en biens privés? Faut-il, comme le soutient l'Alliance du personnel professionnel et technique en santé, appréhender que ces partenariats permettraient à des intérêts privés, en quête d'une simple course au profit, de faire main basse sur des services essentiels au coeur de la vie des citoyens? On a véritablement ici l'impression d'assister à la mise en place pure et simple d'un processus organisé de privatisation, celle aussi qu'avec cette Agence des PPP l'on teste le modèle québécois dont on sait pourtant qu'il a fait ses preuves et de façon éclatante en maints secteurs.
Faut-il enfin, aux côtés de la FIIQ, s'inquiéter des intentions du gouvernement de transformer l'État du Québec en un État marchand au service du capitalisme mondial? Ce modèle ne peut que nuire au Québec dont le développement repose avant tout sur la petite et moyenne entreprise. Que cherche-t-on réellement à obtenir avec cette main honteusement tendue aux gens du privé?
Je rappellerai que ce concept de partenariat public-privé ne bénéficie guère d'une définition claire dans le libellé du projet de loi n° 61, ce qui n'augure rien de bon pour en saisir les objectifs. Il pourrait désigner la simple association des secteurs public et privé dans la livraison de biens ou de services publics, et il serait alors question de concepts dits de privatisation, de sous-traitance et de gestion déléguée.
Cela nous ramène à sa définition restreinte inscrite à la politique-cadre du gouvernement en 2004, à l'effet qu'il s'agirait d'un contrat à long terme conclu entre un organisme public et une entreprise privée. Selon ce contrat, l'entreprise privée se voit associée à la conception, à la réalisation, à l'exploitation et généralement au financement d'un projet émanant de l'Administration publique et implique un partage de responsabilités, un partage des risques et des bénéfices entre les partenaires public et privé. Je répète, un partage des risques et des bénéfices entre les partenaires public et privé. Or, rien n'est plus faux.
Le partage de risques est ici inexistant parce que la firme privée prendra toujours le soin de verser à son offre de service et, partant, de refiler à l'État à la fois le risque et sa marge bénéficiaire. Ainsi, dans le cas d'une faillite de l'entreprise privée, il est clair que c'est l'État qui se ramassera avec la dette, comme quoi l'agence pourrait bien ne proposer que le mode de financement conventionnel lorsque les projets étudiés apparaîtront comporter un trop grand risque pour l'entreprise privée ou présenter une mince opportunité de profit pour elle. Dans ce cas, est-ce que le Conseil du trésor ne devrait pas lui-même assumer l'étape préliminaire du processus, à savoir définir le mode de prestation le plus rentable du point de vue du citoyen?
Avant de poursuivre, je voudrais faire remarquer que cette voie qu'entend emprunter le gouvernement du Québec procède essentiellement des quelques expériences européennes, britanniques et néo-zélandaises menées en matière de PPP depuis une quinzaine d'années seulement, expériences, M. le Président, qui nous font défaut ici. Il convient donc de bien les évaluer avant d'en faire une véritable bible à l'échelle québécoise. Le parti ministériel s'est amusé à relever que le gouvernement du Parti québécois avait lui-même, en décembre 2000, fait adopter la loi n° 164, laquelle portait sur les partenariats en la seule matière d'infrastructures de transport. Sa portée était fort restreinte et ne concernait que la construction des autoroutes 25 et 30. Quand on pense au spectre très large que va couvrir le projet de loi n° 61, notre inquiétude et celle de nombreux organismes ayant participé à la commission apparaissent fondées.
Côté inquiétude, il en reste une autre non négligeable qui pointe. Voici en quoi. Le début du processus menant au dépôt du projet de loi n° 61 aura permis à 13 firmes privées de voir retenir leurs services pour définir et élaborer la fameuse réingénierie de l'État. Plusieurs d'entre elles comptent pour être proches du Parti libéral. Le bouquet, c'est que, parmi ces mêmes firmes de consultants, plusieurs sont maintenant sur les rangs afin d'obtenir des contrats dans le cadre des PPP. Il y a tout lieu de nous étonner, M. le Président, et d'entretenir les doutes les plus sérieux quant à la transparence de l'ensemble du processus, puisque, dans ce mandat de redéfinition du rôle de l'État, ces mêmes firmes-conseils sont donc à la fois juge et partie. Il n'est pas exagéré, M. le Président, de voir là-dedans une grave atteinte à l'éthique.
Le projet de loi n° 61 dont nous débattons ici porte sur la création de l'Agence des partenariats public-privé, responsable de conseiller le gouvernement sur toute question relative aux PPP. Il ne fait aucun doute qu'il a une portée très large. L'agence y est décrite comme devant être impliquée non seulement dans la sélection et l'établissement de la priorité des projets, mais aussi dans la négociation, la conclusion et la gestion des contrats de PPP. Le projet de loi prévoit de plus que les ministères et les organismes du gouvernement, les établissements du réseau de l'éducation, de la santé et des services sociaux et les organismes municipaux seraient tenus de recourir aux services de l'agence. Ainsi, selon ce que soutient ce projet de loi, l'agence aurait pour rôle rien de moins que de susciter, accueillir, évaluer et proposer des projets de PPP, aussi bien au niveau des infrastructures que dans la livraison des services publics.
L'article 6 dudit projet de loi le prévoit explicitement, et c'est ici, M. le Président, qu'apparaît le deuxième problème majeur soulevé par le projet de loi n° 61. Si l'opposition officielle fait preuve d'ouverture face au recours aux PPP pour la réalisation de certains grands projets d'infrastructures ou dans le domaine de l'acquisition et de l'entretien d'équipement spécialisé désigné, elle n'approuve absolument pas que les PPP se retrouvent dans la livraison directe des services publics.
Parmi les grands enjeux que soulève le projet de loi n° 61, il en est un majeur qui se situe au coeur de toute gestion, à savoir l'éthique. Cet enjeu est si stratégique que le premier ministre lui-même avait explicitement formulé l'engagement suivant dans son discours inaugural, à l'effet que chaque Québécoise et chaque Québécois auront le droit de savoir ce que fait le gouvernement de chaque dollar qu'il perçoit. Cet engagement, qui s'applique tout particulièrement à ces ententes gouvernement-secteur privé, est, dans le cas qui nous occupe, resté lettre morte, puisque la présidente du Conseil du trésor a décidé de ne pas en tenir compte.
Pourquoi, se questionne la Protectrice du citoyen, le projet de loi n° 61 se fait-il si peu explicite quant aux cinq grands principes qui doivent guider toute administration, à savoir la transparence, l'équité, la qualité des services, l'imputabilité et la protection de l'intérêt public? D'autres parlent de mutisme, de culture du silence et de non-accès à l'information pertinente, et ce, pour raison de clauses concurrentielles, leur soutient-on, face aux principes de base et à la transparence qui doivent impérativement guider les activités des PPP. Et, cette inquiétude, M. le Président, je la partage avec eux parce qu'à l'évidence quelque chose cloche avec la transparence que tout le monde attend dans un dossier comme celui-là.
Tournons-nous maintenant vers un autre enjeu qui fait obstacle: l'endettement public. Sans entrer dans les détails, nous aurons été nombreux, de ce côté-ci de la Chambre, à comprendre que la présidente du Conseil du trésor présente ces PPP comme la panacée au manque de liquidités du gouvernement ou à l'endettement public. On sait que le financement privé d'un projet d'immobilisations n'entraîne pas d'inscription directe à la dette publique. On sait aussi qu'il donne de la sorte l'illusion que, situé hors des paramètres comptables, l'endettement public se stabilise ou diminue. L'explication bienheureuse fournie par la présidente du Conseil du trésor apparaît dès lors bien boiteuse et perd beaucoup en pertinence.
Une autre hypothèse de fonctionnement veut que le financement privé se voie combiné à la tarification des usagers. La conclusion s'impose, l'on se retrouve avec un simple glissement de l'État vers le citoyen. C'est la porte ouverte à l'iniquité entre des régions ou des milieux urbains et ruraux, par exemple, là où des projets seraient jugés plus intéressants par le privé dans un environnement donné plutôt qu'un autre. Cette approche n'est pas plus acceptable que la précédente.
n(21 h 30)n Un troisième enjeu des PPP a trait aux coûts. Les prétentions veulent que les PPP soient synonymes de services à moindres coûts. Or, M. le Président, rien, dans l'état actuel d'études disponibles, ne permet de confirmer la chose. Bien entendu, l'entreprise privée a pour mission première de dégager une marge bénéficiaire, sans quoi elle ne trouverait aucun intérêt dans la formule des PPP. L'on admettra sans difficulté que cette préoccupation du privé n'est pas toujours compatible avec la mission gouvernementale, qui est de fournir des services qualité aux citoyens. De plus, il est de notoriété publique qu'une entreprise privée n'arrivera jamais à un financement à un taux égal ou inférieur à celui consenti par les institutions financières au gouvernement du Québec, pour ne prendre que lui. Pour l'institution prêteuse, le caractère permanent du gouvernement et la garantie qu'il ne peut y avoir de faillite éliminent tout risque de mauvaise créance et entraînent l'octroi de taux privilégiés inaccessibles aux entrepreneurs privés.
Devant cet état de choses, il apparaît que la principale source d'économie se situe au niveau de la main-d'oeuvre et de la qualité du produit. C'est seulement en coupant dans les salaires, et dans les conditions de travail, et sur la qualité des matériaux, par exemple, que le secteur privé peut prétendre à un service à un moindre coût. Mais, M. le Président, céder sur une main-d'oeuvre à bas prix pour satisfaire au privé est tout à fait inacceptable.
Toujours au chapitre des coûts, la présidente du Conseil du trésor priorise l'abondance sur le contrôle du dépassement des coûts, tel que le permettraient les PPP. Rien n'est moins sûr que ces voeux pieux voulant qu'une entreprise, sur laquelle repose une part des risques financiers relatifs à un projet donné, fasse preuve de plus de discipline au niveau des coûts et des échéances. De plus, le favoritisme, le népotisme, le gain personnel direct ou le simple espoir d'un retour d'ascenseur risquent de favoriser l'intérêt particulier au détriment de l'intérêt public dans un régime de PPP.
Dans tout projet interviennent les trois variables suivantes: le temps, la qualité du travail et les coûts. Or, il est clair que, dans un système de PPP, l'impératif budgétaire gomme littéralement les deux autres, avec la conséquence que l'entreprise privée voudra toujours se protéger, dire qu'elle aura fixé sa marge bénéficiaire en fonction du risque. Mais du même souffle les observateurs ont relevé qu'en matière de situation réelle de risque...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Excusez-moi, Mme la députée de... Excusez-moi. Excusez-moi de vous interrompre. Je vous demanderais votre collaboration, s'il vous plaît, là, il y a quelqu'un qui a la parole, il y a seulement qu'une personne qui a le droit de parler ici, en cette Chambre. Et je demanderais à tout le monde de respecter les individus qui ont le droit de parole. Mme la députée.
Mme Robert: Mais du même souffle les observateurs ont relevé qu'en matière de situation réelle de risque l'entreprise privée n'est pas au rendez-vous. L'éventualité pour une compagnie d'avoir à assumer des frais additionnels dans un projet donné ne saurait être retenue à cause d'une possible décote boursière, en plus de devoir supporter le fardeau du dépassement de coûts. Dans ce contexte, l'entreprise privée fuira ses responsabilités en laissant au gouvernement le poids de la facture ou encore en la transférant aux citoyens par le biais d'une tarification supplémentaire. La population ne sort jamais gagnante d'une telle situation.
Contrairement à ce que soutient la présidente du Conseil du trésor, nous estimons qu'un régime de PPP n'aurait entraîné aucune économie significative dans le cas du métro de Laval, tout au plus une meilleure indication des coûts dès le début.
Si l'entreprise privée fait appel à de nombreuses stratégies pour diminuer son risque financier, la prévention des dépassements peut se bien faire dans le cadre d'un projet de type conventionnel grâce, par exemple, à un contrat comportant une clause relative au niveau des responsabilités de l'entrepreneur et incluant une marge bénéficiaire accrue en fonction du risque potentiel.
La question de la main-d'oeuvre compte à mes yeux au nombre des enjeux les plus délicats que soulèvent les PPP. En effet, une vaste zone grise s'ouvre ici, dont nous ignorons les aboutissants, et c'est ce qui rend périlleux l'exercice des PPP dans la situation actuelle caractérisée par un manque dramatique de réflexion et de balises. Plusieurs PPP promettent de faire épargner le secteur public. Un des principaux moyens permettant d'y arriver consiste à réduire le personnel de même que les salaires et les avantages sociaux. J'estime que cette manière de faire comporte un coût social bien gros à payer.
Si, comme le prévoit le projet de loi n° 61, des services gouvernementaux actuellement offerts par des fonctionnaires sont impartis à l'entreprise privée, la délicate question se posera du transfert des employés vers d'autres secteurs ou vers l'entreprise privée. Qui sera choisi pour livrer le service? A-t-on la moindre idée de la légion de questions que la chose soulève?
De nombreux organismes estiment que les PPP sont le canal privilégié pour satisfaire aux exigences de l'Accord de libre-échange sur les marchés publics et ainsi transformer les règles de gouverne pour établir de nouvelles relations avec le secteur privé, comprendre des contrats à l'interne pour assurer la conception, la réalisation et l'exploitation de projets de l'administration publique.
L'ouverture aux marchés internationaux amène également le risque de voir des entreprises étrangères spécialisées dans la construction et la gestion d'hôpitaux, d'écoles ou de prisons devenir propriétaires de plusieurs de nos institutions publiques. En effet, puisque la particularité des PPP consiste, entre autres, à financer la construction d'immobilisations avec des capitaux privés, peu d'entreprises québécoises pourront se mesurer aux multinationales étrangères, qui ont des capacités financières très importantes. Comme l'a démontré l'exemple récent d'une prison privée envisagée par le ministère de la Sécurité publique, les entreprises spécialisées dans ce type de PPP ne se contenteront pas de construire et de gérer les immobilisations.
Le sens de ces grands accords internationaux ne doit pas nous échapper. En effet, la création de l'Agence des PPP au Québec apporte une réponse aux exigences de ces mêmes accords bien avant que de constituer une stratégie pour appréhender les difficultés budgétaires du gouvernement québécois et encore moins une réponse au changement démographique de la société québécoise. Alors, comme le temps devient court, mais quand même il me restait près d'une minute, et, parce qu'ils parlaient, j'ai perdu une trentaine de secondes, alors, s'il vous plaît... En effet, en ouvrant au secteur privé des pans complets de services publics, nous courons le risque de voir s'appliquer à ces services des dispositions du commerce international, avec pour conséquence un perte de contrôle dans les services névralgiques, comme la santé ou l'éducation, par exemple.
Alors, j'aurais beaucoup d'autres commentaires et d'inquiétudes à souligner. Donc, en terminant, avant d'instituer une telle agence, il faut un vaste débat public, assorti d'une véritable campagne d'information sur ce que recouvre le concept de partenariat public-privé, un bilan des expériences tentées ailleurs et dans le monde afin que la population...
Le Vice-Président (M. Cusano): Mme la députée, Mme la députée, je vous remercie, votre temps était écoulé. Alors, merci, Mme la députée de Deux-Montagnes. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Marguerite-D'Youville.
M. Moreau: M. le Président, je voudrais savoir si la députée de Deux-Montagnes accepterait, en vertu de l'article 213, de répondre à une question suivant son intervention.
Le Vice-Président (M. Cusano): Mme la députée de Deux-Montagnes, en vertu de l'article 213, le député vous demande si vous êtes prêt à accepter une question. La réponse est non. C'est non, M. le député. M. le député de Beauharnois.
Une voix: ...
M. Boulerice: M. le Président. M. le Président, je m'excuse, mais, en vertu de notre règlement, en vertu de notre règlement, le député est libre d'accepter ou de ne pas accepter, et l'autre député, malgré sa liaison mal à propos, n'a pas à...
Le Vice-Président (M. Cusano): Écoutez, non, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, il y a eu une demande en vertu de 213, la députée a dit non, alors on procède au prochain intervenant, qui est le député de Beauharnois.
M. Serge Deslières
M. Deslières: Merci, M. le Président. Alors, j'interviens, ce soir, dans le cadre du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats privé et public du Québec, présenté par la collègue ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor.
M. le Président, je crois qu'il ne faut pas, comme tente de le faire la présidente du Conseil du trésor, minimiser l'importance de ce projet de loi parce qu'il touche fondamentalement à la mission de l'État. Les Québécois et les Québécoises, M. le Président, ne veulent pas moins d'État, ils veulent un meilleur État. Ici, on est en face de deux conceptions: en face, des gens qui veulent réduire l'État québécois, qui veulent rapetisser l'État québécois, qui veulent sabrer dans les services publics, c'est ça, la vision qui est sous-jacente au projet de loi, M. le Président, au projet de loi n° 61; un autre côté, de ce côté-ci, et les Québécois et les Québécoises l'ont exprimé, beaucoup de Québécois et de Québécoises veulent plus d'État, veulent plus d'État, veulent même un État national.
n(21 h 40)nDes voix: ...
M. Deslières: Voilà! Voilà! Ça les fait réagir. Ils se contenteront, eux, d'un État provincial, c'est ça, d'un petit État provincial. C'est l'ambition qu'ils ont, M. le Président: Québec, État provincial, une province, un État minimaliste, M. le Président, minimaliste. Voilà. C'est ça, la conception qu'ils ont pour le Québec. On rapetisse les choses. On a...
M. Boulerice: M. le Président. M. le Président, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques sur une question de...
M. Boulerice: ...que mon collègue a droit à son opinion, je vous demanderais de rappeler à l'ordre...
Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant! Un instant, là! Je demande... M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, il y a le règlement et il y a aussi, comme vous le savez, la tradition, ici. Lorsque les gens sont dans cette salle, hein, et qu'ils écoutent attentivement la personne qui a la parole, normalement, même s'ils ne sont pas assis à leurs places, ils peuvent... il n'y a rien qui change et personne ne semble être dérangé. Je ne me suis pas aperçu que le député de Soulanges était dérangé. Alors, je vous donne la parole, M. le député. Excusez, M. le député de Beauharnois.
M. Boulerice: ...vertu de l'article 32, je vous dis, je vous répète, «ils doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui ou au bon fonctionnement de l'Assemblée». Qu'ils ne soient pas à leurs places, je...
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, j'écoutais attentivement le député de Beauharnois et je l'écoute... je l'écoutais et je l'écoute et je n'ai pas entendu des personnes qui le dérangeaient dans son discours. M. le député de Beauharnois, vous pouvez poursuivre.
Mme Maltais: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Oui, Mme la députée.
Mme Maltais: ...une question de règlement, article 32, sur ce qu'a évoqué le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques. Et il était pertinent qu'il invoque l'article 32, bien respectueusement, puisque nous étions à l'extérieur, au salon, et nous entendions les commentaires qui empêchaient le député...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant! Un instant! Un instant! Je sais que...
Mme Maltais: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Non, non. Je vous ai entendue, Mme la députée. Je cède la parole au député de Beauharnois.
M. Deslières: Merci. Merci, M. le Président. Alors, je disais donc que les Québécois et les Québécoises, M. le Président, ne veulent pas moins d'État, ils veulent plus d'État. Et pour preuve, M. le Président, 49 % des gens, 49 % des gens... 49,5 %, en 1995, ont voté oui à un État national. Ça, que ça leur plaise ou pas, aux gens d'en face, c'est la réalité.
Aujourd'hui, dans le cadre de ce projet de loi, M. le Président, la présidente du Conseil des ministres... du Conseil du trésor, excusez-moi, la présidente du Conseil du trésor, le gouvernement libéral néo-conservateur offre à la population rien de moins que de réduire les services publics, rien de moins que de réduire les services publics. Belle ambition pour les Québécois, belle ambition pour les Québécois et les Québécoises, M. le Président.
Le rôle de l'État québécois, qu'est-ce que c'est? La mission fondamentale de l'État québécois, bien sûr c'est la répartition de la richesse, c'est la promotion de la justice sociale, c'est la protection des droits des citoyens. Et ça, c'est au coeur même de la mission d'un État. Qu'est-ce qu'on leur offre aujourd'hui? On leur offre que ce gouvernement-là, que l'État fasse en sorte de se délester de ses responsabilités. On coupe dans la mission de l'État, de l'État québécois, M. le Président. C'est ça qui est au coeur de l'enjeu, là, du projet de loi n° 61.
La présidente du Conseil du trésor a beau tenter de vouloir réduire, de minimiser la portée de ce projet de loi, M. le Président, c'est un projet majeur qui vient de changer le rôle, la mission fondamentale de l'État québécois. Peut-être que les collègues ne s'en rendent pas compte, là. Il serait bon qu'ils lisent leur projet de loi présenté par des membres de l'Exécutif. Ils se font poser des questions pour savoir ce qui se passe, par leurs citoyens et citoyennes. On ne vous a pas élus pour ça. On ne vous a pas élus pour ça. On ne vous a pas élus pour vous délester de vos responsabilités. On vous a élus pour prendre des responsabilités.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant! Excusez-moi, M. le député de Beauharnois. Je vous demande votre collaboration, s'il vous plaît. Il y a un député qui a la parole et il a le droit de se faire entendre. M. le député.
M. Deslières: Merci, M. le Président. Je ne sais pas ce qu'il y a de drôle là-dedans. Franchement, là!
Des voix: ...
M. Deslières: S'ils ont quelque chose à dire, ils vont se lever, à un moment donné.
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Beauharnois, là, je vous ai accordé la parole, continuez.
M. Deslières: Or, M. le Président, il ne faut pas, comme je viens de le dire, minimiser l'importance de ce projet de loi. C'est un projet de loi majeur qui va venir changer les règles du jeu, qui va faire en sorte d'amoindrir la mission de l'État québécois.
Je reviens quelques instants au contenu de ce projet de loi qui instaure une agence des partenariats public et privé et qui lui confère des pouvoirs très étendus. Vous me permettrez de prendre quelques minutes, M. le Président, pour en énumérer quelques-uns. On confie à l'agence les pouvoirs suivants: «Conseille le gouvernement sur toute question relative au PPP, notamment en ce qui concerne la sélection et la priorité de réalisation des projets; [...] suscite, accueille, évalue et propose des projets de partenariats susceptibles de favoriser la réalisation de projets d'infrastructures, d'équipements et de prestation de services publics.» On ne parle pas, ici, M. le Président, juste de partenariats au niveau de grands projets, on ne parle pas uniquement de partenariats public et privé, M. le Président, au niveau des immobilisations, on touche même la prestation des services publics. Malgré ce que la présidente du Conseil du trésor veut bien nous dire, le coeur de ce projet de loi là, ça va bien au-delà.
On faisait une comparaison, M. le Président, avec la loi 164 que nous avions adoptée, la Loi sur les partenariats en matière d'infrastructures de transport, où il était, de façon très claire et très nette, circonscrit à deux projets de loi d'immobilisations pour la construction d'autoroutes, de deux autoroutes, soit la 25 et la 30. On ne parle pas de la même chose ici, M. le Président, là, on parle de prestation des services publics, de prestation des services publics, pas de projets d'infrastructures au niveau des transports, on ne parle pas de la même chose, ici.
Quels sont les organismes qui sont assujettis? Regardez l'ampleur que ça prend. Le projet de loi prévoit que tous les ministères et les entreprises du gouvernement, les universités, les cégeps, les commissions scolaires, les centres hospitaliers, les CLSC, les municipalités et tout autre organisme désigné par le gouvernement ont l'obligation, M. le Président, ont l'obligation de recourir aux services de l'agence pour les études de faisabilité, le choix des partenaires, la négociation et la conclusion des contrats. Ce n'est pas que la petite affaire, M. le Président.
On ne nous a pas dit ça lorsqu'il y a eu campagne électorale, en mars, avril 2003. Ce n'était pas, ce n'était pas dans le discours, ce n'était pas dans le discours du Parti libéral, M. le Président. Woop! Aujourd'hui, on nous annonce une chose énorme, là, énorme! Il faut en comprendre toutes les conséquences, M. le Président, il faut en comprendre toutes les conséquences de ce projet de loi là, d'autant plus, M. le Président, que ce projet de loi est décrié par à peu près tout le monde. Personne n'en veut, M. le Président, personne n'en veut de ce projet de loi là.
n(21 h 50)n Il y a eu des consultations publiques, des gens, des organismes qui sont venus faire leurs représentations, de tous les domaines, M. le Président, de la santé, de l'éducation, des affaires municipales. Tous l'ont rejeté. Tous l'ont rejeté et ont demandé au gouvernement, ont demandé à la présidente du Conseil du trésor de retirer son projet de loi. Quelques éléments, M. le Président.
L'Association des hôpitaux du Québec: «Devant l'étendue des pouvoirs consentis à l'agence dans le projet de loi et l'imprécision des objets sur lesquels s'exercent ces pouvoirs, l'AHQ ne peut que recommander le retrait de ce projet de loi [...] dans sa forme actuelle.» La Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, même situation, recommande que le gouvernement retire le projet de loi n° 61. Coalition des médecins pour la justice sociale: «...le partenariat du public et du privé ne représente donc aucun avantage pour le système de santé public, tout en faisant en sorte d'augmenter les coûts pour des services autrement diminués.» La critique est assez sévère, M. le Président. Unanimité en santé.
Même chose du côté des municipalités. Métropole, Montréal qui dit: «La ville de Montréal, en tant qu'organisme municipal visé par le projet de loi n° 61 instituant l'Agence de partenariats publics [et] privés du Québec, souhaite faire connaître ses nombreuses préoccupations concernant certaines dispositions de celui-ci et exprimer sa vive opposition à l'approche contraignante retenue par le gouvernement à l'endroit des organismes municipaux dont la ville de Montréal [...] serait assujettie sans égard à sa qualité de métropole du Québec.» Le maire de ville de Québec: «C'est ce genre de tutelle qui risque de nous coûter cher.» Éducation, même registre, M. le Président, même registre: rejet global.
Ce n'est pas un atout de plus dans la gestion du Québec, c'est rejeté par le monde municipal, le monde de l'éducation, le monde de la santé. À peu près tous et chacun qui sont venus ont soit demandé le retrait de ce projet de loi là ou montré une ferme opposition aux différents articles contenus dans ce projet de loi.
Mais, au moins, M. le Président, si, ce projet de loi, la naissance de cette agence se faisait dans la transparence, dans la clarté, mais c'est tout le contraire qui se produit. Je veux rappeler à la présidente du Conseil du trésor que, fait inusité dans les annales du parlementarisme québécois, de la présentation d'un projet de loi, les quatre organismes chargés de surveiller ? écoutez bien, M. le Président, je suis sûr que ça va vous intéresser ? les quatre organismes chargés de surveiller l'ensemble des projets de loi au Québec et l'ensemble de l'activité gouvernementale, soit la Commission d'accès à l'information, la Protectrice du citoyen, le Commissaire au lobbyisme et le Vérificateur général, sont tous extrêmement critiques, opposés, sévères quant à tous les aspects majeurs de ce projet de loi, notamment en ce qui touche la transparence, l'imputabilité, l'information, la vérification, dans le cadre de ce projet de loi, de la naissance de cette agence de partenariats public et privé. M. le Président, juste avec ça, là, ce projet de loi, si on est encore à l'écoute de la population, du côté gouvernemental, si la présidente du Conseil du trésor est à l'écoute, elle n'a qu'un choix, retirer ce projet de loi.
Mais j'entends, depuis des semaines et des mois, des années, la présidente du Conseil du trésor nous vanter les mérites de ce genre de formule là et je me disais: C'est rendu une obsession, M. le Président, c'est rendu une obsession de sa part. Puis je me disais: D'où tient-elle ça? C'est une forme d'idéologie, c'est son idéologie, et ça, je peux respecter ça. Clair et net, elle a fait son nid. Et ça vient de loin, M. le Président, ça vient de loin. Dans une ancienne vie, notre collègue la présidente du Conseil du trésor était présidente de l'institut de recherche sur les questions de politiques publiques avec son conjoint, M. Claude E. Forget. Elle a fait paraître, en 1998, Qui est maître à bord? Projet de réforme du système de santé canadien. Ils ont fait des conférences de presse, ils ont présenté ce projet de... ce livre, cette étude, et la conclusion des journalistes qui ont couvert cette... disait ceci, faisant référence à cette étude: «Il ne s'agit pas d'une privatisation du financement mais bien d'une privatisation de la gestion des services qu'ils prônaient», la collègue du Conseil du trésor et son conjoint. Même chose, Isabelle Paré, 2 septembre 1998: «Ces derniers ? en pensant à notre collègue et à son conjoint ? proposent un changement radical du système de santé dont le coeur serait le transfert au privé de la gestion des soins.» Alors, voilà, M. le Président, ce projet de loi que nous avons devant nous, c'est clair et net, cohérence idéologique de la présidente du Conseil du trésor, ce projet de loi n° 61, c'est l'antichambre de la privatisation. Elle veut bien minimiser la portée de ce projet de loi là, mais personne n'est dupe de son objectif: on passe par les PPP et on se dirige directement vers la privatisation avec toutes les conséquences que ça amènera, pour le bien public, l'intérêt commun des Québécois et des Québécoises, M. le Président. C'est clair aujourd'hui, il est clair, le passé étant garant de l'avenir, elle nous le montre exactement, ce qu'elle a dit, elle l'applique aujourd'hui, ce qu'elle a dit en 1998, elle l'applique aujourd'hui dans ses fonctions: réduire l'État québécois, privatiser ça puis dire aux gens: Débrouillez-vous, nous autres, c'est trop fort, c'est un État trop gros, ce n'est pas ça qu'on veut, c'est une petite province, c'est un petit État provincial, et c'est de ça qu'on va s'occuper, M. le Président. Je vous remercie.
Et, pour terminer, il est clair et net que nous allons nous opposer sévèrement et d'une façon déterminée à ce projet de loi qui est devant nous. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Beauharnois. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Cusano): Pardon?
Une voix: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Cusano): Question de règlement. Oui, quel...
M. Blackburn: En vertu de l'article 213 du livre des règlements, est-ce que le député de Beauharnois accepterait de répondre à une question?
Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, M. le député de Beauharnois, en vertu de l'article 213, il y a une demande de la part d'un député qui veut vous adresser une question. Alors, je vous rappelle que la question doit être brève. M. le député.
M. Blackburn: Alors, M. le Président, à ma connaissance, le député de Beauharnois était député à l'époque de 2000. Est-ce qu'il était favorable à la loi n° 164 qui a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale?
Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député de Beauharnois.
M. Deslières: Merci, M. le Président. Si le député avait écouté ? je comprends qu'il était dérangé ? on a clairement fait la différence, au moment où on a présenté et adopté la loi n° 164, que ça contenait un élément de projet de construction de routes, 20 et 25, deux autoroutes... 25 et 30, excusez-moi, et c'était sur les immobilisations. On ne parle pas de la même chose, là, M. le Président. Il faut comprendre, lisez votre projet de loi, vous allez comprendre que ce n'est pas du tout la même chose.
n(22 heures)nLe Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Beauharnois. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de L'Assomption.
M. Jean-Claude St-André
M. St-André: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, je veux intervenir sur le projet de loi n° 61, le projet de loi qui crée l'Agence des partenariats public-privé. Il me fait plaisir d'entrée de jeu de joindre ma voix à celle de mon collègue de Beauharnois pour dénoncer ce projet de loi là, pour insister, comme l'a fait brillamment mon collègue de Beauharnois... pour dire qu'à sa face même ce projet de loi là, dans son objectif et dans sa finalité, ne cherche qu'à réduire et à rapetisser l'État du Québec. Et ça, il va de soi que, pour nous, de ce côté-ci, c'est tout à fait inacceptable. L'État du Québec, depuis les années soixante, a joué un rôle capital dans le développement économique, social, culturel du Québec et l'État du Québec doit rester maître de ses moyens d'intervention pour continuer à développer notre plein potentiel économique, social, culturel et politique. Et, à sa face même, on se retrouve devant un grand mouvement qui ne cherche qu'à privatiser l'ensemble des services publics au Québec.
M. le Président, je pense qu'il faut situer ce courant... Mme la Présidente, pardon, je pense qu'il faut situer ce courant-là à l'intérieur de ce qui se passe partout à travers la planète. La mondialisation explique en partie le courant idéologique qui anime nos amis d'en face, et le premier ministre du Québec le premier, de toute sa carrière politique, s'est clairement inscrit dans cette approche néolibérale, conservatrice, qui vise à rapetisser, à diminuer les capacités de l'État.
Depuis 20, 25 ans, le néolibéralisme fait rage partout sur la planète. Lorsque ce mouvement-là est né, quelque part au début des années quatre-vingt, on a essayé de nous faire croire qu'il était... qu'il nous promettait une meilleure répartition de la richesse, qu'il allait créer la richesse et assurer ainsi une meilleure répartition de la richesse. Or, à sa face même, la mondialisation et le néolibéralisme n'ont pas tenu leurs promesses, et d'ailleurs de plus en plus de scientifiques et d'économistes commencent à en prendre conscience. D'ailleurs, on en faisait état cette semaine, pas plus tard qu'hier, dans un article qui est paru dans Le Devoir et qui donnait le compte rendu d'un colloque qui était tenu à l'Université du Québec à Montréal, où plusieurs économistes participaient, et qui démontre que les écarts de richesse entre les pays les plus riches et les pays les plus pauvres n'ont cessé d'augmenter et qu'à l'intérieur même des pays les plus riches les écarts entre les plus riches et les plus pauvres ont aussi augmenté. Et c'est le cas notamment au Québec.
Mme la Présidente, il me semble que, devant un tel mouvement, on devrait prendre un temps de recul pour mieux comprendre ce qui se passe. Mais manifestement les gens d'en face, malgré des expériences répétées à travers le monde, où il y a eu des échecs, s'obstinent dans une direction manifestement... Nous allons continuer à appauvrir l'ensemble de nos concitoyens.
La mondialisation puis le néolibéralisme comportent comme prémisse de base la privatisation de pans entiers de secteurs d'activité de l'État et de services publics. Et, dans de nombreux États, notamment des États occidentaux récemment, dans les 20, 25 dernières années, on a procédé à des privatisations, notamment en Grande-Bretagne, un exemple que la présidente du Conseil du trésor ne cesse de nous répéter.
M. le Président, j'aimerais ça citer un extrait d'un ouvrage que j'ai lu récemment, Les nouveaux maîtres du monde, dont l'auteur est Jean Ziegler, un acteur important dans son domaine. Il est reporter spécial, entre autres, aux Nations Unies. C'est un observateur attentif de ces questions-là. Écoutez ce qu'il nous dit à propos de la privatisation: «Dans plusieurs États occidentaux, les moyens de transport public, la poste, les télécommunications sont déjà privatisés. Une deuxième vague de privatisations se prépare. Elle concerne les écoles, les collèges, les universités, les hôpitaux, [les] prison[s], bientôt la police.
«Un État qui démantèle volontairement ? et c'est le cas qui nous occupe ici; un État qui démantèle volontairement ? ses services publics les plus essentiels et transfère au secteur privé les tâches relevant de l'intérêt collectif, les soumettant ainsi à la loi de la maximalisation des profits, constitue, pour reprendre l'expression d'Eric Hobsbawm, [...] un "État en défaut". Aux yeux de ses citoyens, sa valeur s'approche de zéro.
«Une économie qui génère (et célèbre) la concurrence individuelle à outrance, la précarité de l'emploi, la fragilité des statuts sociaux, le salaire au mérite, est une économie génératrice d'angoisses.
«Un citoyen livré sans protection à des risques sociaux majeurs perd sa qualité de citoyen. Un homme qui a constamment peur pour son emploi, son salaire et ses droits n'est [pas] un homme libre. La privatisation de l'État détruit la liberté de l'homme. Elle anéantit [la] citoyenneté.» Je pense que c'est un propos qui devrait inspirer les gens d'affaires, qui devrait inciter les gens d'en face à réfléchir avant d'adopter le projet de loi n° 61, qui vise manifestement à privatiser des pans entiers du secteur public et parapublic québécois.
Mais bien sûr le premier ministre du Québec est un apôtre de la privatisation. Et d'ailleurs Michel Venne, dans une chronique qu'il a écrite pas plus tard que lundi de cette semaine, l'illustre bien: «Dans son discours inaugural de juin 2003, il affirmait d'emblée ? le premier ministre ? [...] que "c'est [la] réussite individuelle qui permettra une meilleure répartition de la richesse et une plus grande justice sociale".» Mme la Présidente, pardon. Mme la Présidente, ce sont de grandes ambitions collectives et des réussites collectives, dont sont faites notamment des réussites individuelles, qui vont faire en sorte qu'on peut mieux répartir la richesse. Hydro-Québec est un de ces exemples-là. Hydro-Québec, c'est une de nos plus belles réussites collectives, et, grâce à Hydro-Québec, on a pu créer de la richesse au Québec. Bien, c'est le secteur public québécois, c'est l'État du Québec qui a fait cela. Ce n'est pas une entreprise privée.
Quelques obsessions reviennent sans cesse dans les discours du premier ministre portant sur l'initiative individuelle, l'apport du secteur privé pour livrer les services publics et la réduction bien sûr du fardeau fiscal. «Le [Parti libéral du Québec] ? c'est toujours Michel Venne qui écrit ? a publié, pour son congrès de fin de semaine, un document encore plus étonnant intitulé Mieux vivre au Québec et qui trace des perspectives pour la société québécoise dans 20 ans. Les marottes libérales y apparaissent: réduction du fardeau fiscal comme objectif suprême de la société, partenariats public-privé, flexibilité de la main-d'oeuvre, accroissement des libertés individuelles... Je note qu'à aucun endroit dans ce document on ne propose comme objectif principal la réduction des inégalités au Québec alors que tous les experts font la démonstration que les inégalités sont justement en hausse chez nous.» Mme la Présidente, je pense que nos amis d'en face devraient réfléchir avant d'adopter un projet de loi qui va appauvrir l'ensemble de nos concitoyens, qui va réduire et rapetisser la capacité de l'État québécois d'améliorer les conditions de vie de nos concitoyens et concitoyennes.
Il y a bien d'autres intervenants qui sont intervenus sur ces questions-là aussi, Mme la Présidente, et qui ont mis en garde le gouvernement d'en face, le gouvernement conservateur, le gouvernement néolibéral avant d'adopter un projet de loi aussi néfaste pour la qualité de vie des Québécoises et des Québécois. Des universitaires, à titre d'exemple. Dans Le Devoir du 11 novembre dernier, on faisait état d'une synthèse qui a été publiée par des universitaires québécois et qui critique la réingénierie de l'État, telle que proposée par les gens d'en face. Cette synthèse-là s'intitule La réingénierie de l'État: vers un appauvrissement de la gouvernance québécoise. Qu'est-ce que ces chercheurs-là nous disent? Bien, voici ce qu'ils nous disent: «Nous croyons au contraire que ce dernier ? le gouvernement libéral ? fait toujours preuve de la même rigueur dans son fanatisme: ce plan ? les PPP ? comporte une volonté ferme de reconfiguration radicale de la gouverne québécoise qui est également présente dans la politique-cadre sur les partenariats public-privé ainsi que dans le projet de loi n° 61 qui fait actuellement l'objet d'audiences publiques devant la Commission des finances publiques.»n(22 h 10)n Les auteurs nous mettent en garde contre plusieurs dangers devant la création de cette agence-là, puis j'en cite quelques-uns. On y parle, entre autres, d'hypertrophie, d'hypertrophie bureaucratique. Alors: «En tant qu'intermédiaire additionnel entre les ministères et les firmes privées ainsi qu'en qualité de maître d'oeuvre des PPP, cette agence ajoute à la complexité contractuelle déjà élevée des PPP, ce qui risque à son tour d'amenuiser l'imputabilité respective des différents partenaires. Loin d'améliorer les façons de faire, comme le prétend le gouvernement libéral, l'Agence des partenariats public-privé est un facteur de confusion organisationnelle: elle ne correspond pas à une diminution des processus redondants ? ce qu'on appelle le "red tape" ? mais nourrit au contraire l'hypertrophie bureaucratique.» Ça ne nous permettra pas d'être plus efficaces, c'est ça que les universitaires nous disent. Évidemment, je vois le ministre des Affaires intergouvernementales qui se moque probablement d'anciens collègues.
Le mythe du marché concurrentiel. Ces universitaires-là traitent également de ce que le gouvernement libéral, de ce que nos amis d'en face disent que l'Agence des PPP va nous permettre d'être plus concurrentiels. Alors, voyons ce qu'ils nous disent à ce sujet-là. «L'expérience de nombreux pays nous enseigne que l'offre de PPP demeure toujours déterminée par le processus politico-bureaucratique et non par le marché concurrentiel: l'impératif budgétaire y est [dans] la plupart du temps déterminant, au détriment de la qualité, du temps de réalisation et de l'impact environnemental.» Il me semble que ce n'est pas rien, ça. Il me semble que c'est des considérations à prendre en ligne de compte. Bien non, nos amis d'en face balaient ça du revers de la main. Les PPP, c'est efficace, ça va nous permettre d'être plus concurrentiels, alors que des spécialistes nous disent: Bien non, ce n'est pas vrai.
Autre chose. On nous dit aussi que «les conventions comptables permettent à la firme privée d'amortir certains coûts sur plusieurs années, alors que l'organisation publique doit les inclure au complet dès la première année budgétaire. Autrement dit, on compare des pommes et des oranges et on s'étonne de trouver des différences.» Ça, d'ailleurs, il y a eu des beaux exemples. La construction du pont de la Confédération, au Nouveau-Brunswick, en est un bel exemple, où, entre autres, par le PPP qui a été fait là-bas, bien, en fait, on a payé 45 millions de dollars de plus en intérêts, et ça, ça a été démontré par la Vérificatrice générale au gouvernement fédéral. Donc, il est faux de prétendre que les PPP vont nous permettre d'économiser de l'argent et d'être plus concurrentiels.
«La chimère du partage du risque. Le gouvernement libéral avance que l'intérêt des PPP repose aussi sur un partage du risque entre l'État et les firmes privées, tant en matière de dépassement des coûts et de temps nécessaire à la réalisation d'un projet que de la non-atteinte de la qualité visée. Pourtant, plus le risque d'un projet est élevé, plus grande est la marge d'autonomie demandée par la firme privée pour sa réalisation et, sans surprendre, plus celle-ci tentera d'accroître sa marge bénéficiaire et ses bénéfices nets.» Ça, évidemment, c'est toujours le contribuable qui va payer au bout du compte. «Autrement dit, le risque est estimé et escompté progressivement par la firme privée au fur et à mesure que se définit le projet; son coût est donc invariablement refilé à l'État.
«Ce n'est pas le coût public du risque qui diminue avec les PPP mais plutôt sa transparence. L'opacité du calcul de coût de la firme privée n'est certes pas synonyme d'une imputabilité accrue ni d'un contrôle politique supérieur. Le partage du risque entre l'État et les firmes privées est donc tout à fait chimérique: peu importe le contrat qui lie les partenaires, l'expérience internationale démontre la grande difficulté pour l'État de mettre un terme à une relation partenariale qui se dégrade progressivement au fur et à mesure que se concrétise l'expérience, lorsque d'importantes ressources multiformes ? financières, humaines, logistiques et autres ? y ont déjà été consacrées.
«Parce qu'il s'agit la plupart du temps de projets d'envergure, un PPP franchit rapidement le seuil à partir duquel le coût ? financier, politique ? d'abandon est si élevé qu'il constitue ni plus ni moins un facteur de complaisance et de tolérance démesurées envers la firme privée. C'est toujours l'État ? donc le contribuable ? au bout du compte, qui demeure imputable envers les citoyens, et certains gouvernements, notamment britannique et néo-zélandais, ont dû payer à grands frais la provision de services d'urgence en guise de compensation d'un partenaire qui leur a fait défaut.
«En définitive, l'Agence des partenariats public-privé ne représente en rien un progrès pour l'administration publique, pas plus que les PPP n'en représentent un pour l'État québécois. Malgré ce que n'a de cesse de répéter le [gouvernement libéral], la "réingénierie" ne permet en rien de "soutenir l'épanouissement de la société québécoise".
«Elle se traduit plutôt par un appauvrissement de sa gouverne qui illustre bien que le [gouvernement libéral], jusqu'à maintenant du moins, semble satisfait de conjuguer l'entêtement à l'amateurisme. Du coup, il s'éloigne encore plus du pragmatisme duquel il se réclame et qu'il n'a pourtant jamais approché pour mieux nourrir son fétichisme pour la gestion privée.» Puis il y a d'autres auteurs, Mme la Présidente, qui ont écrit également sur les PPP. Gérard Boismenu, Pascale Dufour, Denis Saint-Martin, tous trois professeurs de sciences politiques à l'Université de Montréal et membres du Centre de recherche sur les politiques et le développement social. Et pour eux, c'est clair: les PPP, c'est un concept dépassé. Et ils affirment que la plupart des expériences de réingénierie à travers le monde ont échoué.
L'utilisation de ce concept, mis par la suite de côté par le gouvernement au profit du terme modernisation, est néanmoins étrange quand on sait que, dans le monde des affaires et les écoles de gestion, l'enthousiasme pour la réingénierie n'est plus ce qu'elle a été au début des années quatre-vingt-dix. Une étude publiée par l'École des HEC, en 1999, conclut que la réingénierie est trop simpliste, la réalité sur les terrains est plus difficile, 70 % des expériences échouent. 70 %, Mme la Présidente, des expériences échouent. Il me semble que c'est là une donnée qui devrait faire réfléchir encore une fois nos amis d'en face.
Et ça continue. Le gouvernement est obsédé par la taille de l'État. Cette fixation est une réminiscence de la rhétorique néolibérale des années quatre-vingt alors que le débat politique portait sur la question de plus ou moins d'État. À cet égard, il n'est pas sans intérêt de mentionner que celle qui mène le projet de restructuration du secteur public, la présidente du Conseil du trésor, aime bien se faire comparer à Margaret Thatcher, la dame de fer, qui a gouverné la Grande-Bretagne dans les années quatre-vingt. Dans un article à son sujet paru dans L'actualité, les proches de la présidente du Conseil du trésor disent d'elle que sa phrase fétiche, qu'elle sert à tout bout de champ, est celle de l'économiste anti-interventionniste Milton Friedman: «Less government is better government.» De nos jours cependant, le débat ne porte plus que sur le moins d'État, mais davantage sur le mieux d'État.
Même si elle ne correspond plus à la réalité actuelle, c'est une vision que les consultants du secteur privé qui entourent actuellement le gouvernement n'ont pas intérêt à tenter de transformer. Dans la réingénierie, l'appel aux consultants vise, en théorie, à surmonter les résistances des travailleurs touchés par les réformes. Le raisonnement est le suivant: ces travailleurs ne sont pas neutres, car ils sont dans une situation de conflit d'intérêts. De ce fait, on ne saurait s'attendre à ce qu'ils participent de façon objective et désintéressée à une réforme qui risque de bousculer leurs habitudes. On doit donc conclure que le recours aux consultants privés est justifié non seulement par leur expertise, mais aussi par leur externalité.
n(22 h 20)n Dans la mesure où ces consultants sont externes aux organisations ciblées par la réforme, on les estime plus objectifs, davantage capables de faire preuve d'indépendance d'esprit en comparaison à ceux et celles qui font partie de l'organisation. L'externalité est considérée équivalente à objectivité et à indépendance d'esprit. Or, ces deux termes ne vont pas forcément ensemble. Les consultants externes ne sont ni plus ni moins désintéressés que les ressources internes. Les consultants...
La Vice-Présidente: En conclusion, M. le député.
M. St-André: ...dont la survie dépend de leur capacité à générer des profits, et cette dépendance aux profits, dans un marché concurrentiel et incertain, où chacun cherche à stabiliser ses revenus en préservant ses clients, conduit souvent des consultants à dire à leurs clients que c'est...
La Vice-Présidente: Alors, je vous remercie, M. le député.
M. St-André: ...
La Vice-Présidente: Certainement, M. le député. Alors, je vous remercie. Comme...
M. Boulerice: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Oui, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
M. Boulerice: J'ai peur qu'on n'ait pas quorum.
La Vice-Présidente: Alors, je vais vérifier le quorum. Nous avons quorum, M. le député.
Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant. Mme la députée de Duplessis... Mirabel, je m'excuse. Mme la députée de Mirabel, à vous la parole.
Mme Denise Beaudoin
Mme Beaudoin: Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui concernant le projet de loi n° 61, qui instaure l'Agence des partenariats public-privé et lui confère des pouvoirs très étendus.
J'ai eu le privilège, Mme la Présidente, pendant près de trois semaines, d'entendre de nombreux mémoires, une quarantaine, et je suis arrivée à la conclusion que ces gens-là étaient très renseignés. C'étaient des gens qui se déplaçaient de très loin pour venir exprimer vraiment leur désarroi parce qu'ils sont très inquiets, Mme la Présidente.
Vous aviez, d'un côté, les gens qui représentaient, disons, des intérêts économiques: vous aviez le patronat qui était favorable, évidemment, vous aviez des ingénieurs, des architectes, tous avec des intérêts particuliers sur le plan financier. Et, de l'autre côté, vous aviez des gens, des Québécois et des Québécoises qui n'approuvaient pas ce projet-là. Et, si j'avais les mémoires devant moi, vous auriez une pile comme ça des gens qui étaient contre et une petite pile à côté des gens qui étaient pour.
Alors, c'était très intéressant de les entendre, et tantôt je vais vous commenter certains mémoires qui m'ont vraiment, vraiment... je ne pourrais pas dire émue, là, mais quand même ces gens-là sont inquiets, et il faut les écouter.
Alors, Mme la Présidente, il faut toujours se rappeler l'engagement du premier ministre lors de son discours inaugural. Il disait: «Les Québécois ont le droit de savoir ce que fait leur gouvernement de chaque dollar qu'il perçoit.» Alors, il faut absolument qu'on les écoute.
Quand j'ai entendu les gens qui étaient inquiets, j'ai vu la réaction de la présidente du Conseil du trésor. Elle tentait à chaque fois de les convaincre, mais sans succès. Elle tentait de leur dire: Il n'y a pas de problème avec ce projet de loi, tout est sous contrôle. Elle minimisait la portée, d'abord, du projet de loi. Elle leur disait qu'ils avaient mal compris le projet de loi. Elle leur disait que seuls quelques grands projets d'infrastructures seraient envisagés en mode PPP, et cela, elle l'a répété à maintes reprises. Elle leur disait que l'agence ne serait pas la structure obligée et omniprésente qui est décrite dans le projet de loi. Pourtant, l'article 6 du projet de loi est clair, et je cite: «Un tel contrat ? PPP ? peut avoir pour objet la prestation [des services publics].» Alors, quels sont, Mme la Présidente, les milieux concernés? Eh bien, ce sont tous les milieux. On a entendu les milieux du domaine municipal, et je peux vous dire qu'ils étaient contre le projet de loi; on a entendu en particulier le maire L'Allier, le maire de Québec. On a entendu plusieurs intervenants dans le domaine de la santé; ils étaient tous contre. On a entendu de tous les ministères, des entreprises du gouvernement, les universités, les cégeps, les commissions scolaires, les centres hospitaliers, les CLSC, les CHSLD. Alors, il serait plus facile de nommer ceux finalement qui n'étaient pas contre. Ceci va sûrement intéresser le ministre de la Santé parce que, dans le domaine de la santé, je peux vous dire qu'il n'y avait pas grand monde qui était pour ce projet de loi.
J'ai fait un petit inventaire de certains mémoires que je trouvais intéressants puis que je pense qu'il faudrait mentionner. Mais, avant de continuer, j'aimerais quand même faire un bref historique. En quoi ça consiste, le projet de loi, surtout concernant l'agence?
Alors, le projet de loi n° 61 instaure l'Agence des partenariats public-privé et lui confère des pouvoirs très étendus ? et je dis bien très étendus. L'agence conseille le gouvernement sur toute question relative aux PPP. L'agence met à la portée des personnes intéressées un centre de connaissances et d'expertises sur toute question afférente au partenariat public-privé; l'agence informe les organismes publics, le milieu des affaires et le public en général sur le concept de gestion publique en mode de partenariat public-privé; l'agence élabore et met en oeuvre des stratégies de promotion en vue de favoriser les partenariats public-privé; l'agence suscite, accueille, évalue et propose des projets; l'agence fournit aux organismes publics tout service d'expertise.
C'est énorme, Mme la Présidente, c'est énorme. On tentait de minimiser les pouvoirs de l'agence, mais la présidente du Conseil du trésor ? et j'étais témoin parce que ça a duré trois semaines et on a entendu plus de 40 mémoires ? elle a toujours essayé de minimiser les pouvoirs de cette agence.
Ensuite, on a parlé aussi du nombre des employés de l'agence. Au départ, on disait: Les affaires de l'agence sont administrées par un conseil d'administration composé d'un directeur et d'au plus huit autres membres nommés par le gouvernement.
Le projet de loi ne précise pas le milieu d'origine ou les compétences exigées des membres du conseil d'administration. Par la suite, la présidente du Conseil du trésor a stipulé que le nombre des employés de l'agence se situerait entre 12 et 15 personnes. Alors, changement déjà, au départ.
Alors, dans sa forme actuelle, le projet de loi n° 61 ouvre tous azimuts la porte à la privatisation des biens et des services publics, et ça, c'est clair. Aucune balise n'est mentionnée pour en réduire la portée ou l'application. Aucune disposition, Mme la Présidente, assurant la transparence et l'éthique n'apparaît au projet, et la ministre s'étant engagée à faire connaître de telles propositions par la suite.
Alors, au cours de ces trois semaines de consultation, là, on a reçu une quarantaine de groupes, puis ils se sont vraiment exprimés; ils étaient inquiets, et je répète, inquiets. Ils ont parlé de manque de clarté, ils ont parlé des ambiguïtés contenues dans ce projet de loi, et je vais vous citer quelques-uns de ces mémoires qui, je suis certaine, vont intéresser les gens d'en face.
Premièrement, il y a eu un mémoire, présenté par le Regroupement des ressources alternatives en santé mentale, à la Commission des finances publiques, là; c'était dans le cadre de cette consultation. Qu'est-ce qui était intéressant, c'est que, à la première page de leur mémoire, on marque: «Un projet prématuré et dangereux.» On ne ménage pas nos mots.
Et, dans ce mémoire-là, ça regroupe quand même des ressources alternatives en santé mentale, là, ça concerne pas mal de monde, Mme la Présidente. Ils ont reçu l'appui de deux autres regroupements nationaux et de 15 tables et regroupements régionaux auxquels il a été présenté lors d'une réunion qui les regroupait à Québec, le 8 septembre. Alors, vous avez tous les regroupements ici, là; j'ai une page au complet. C'est du monde!
Et, dans ce mémoire-là, ce qui est intéressant, c'est que, dans leur conclusion, Mme la Présidente, ils disent: «Le projet de loi n° 61 sur l'agence [...] nous apparaît prématuré compte tenu du faible niveau des connaissances sur la rentabilité et l'efficacité de ce mode d'intervention étatique dans nombre de domaines d'intervention. En plus et au dire même des membres importants de ce gouvernement, celui-ci crée une institution dont les cibles et les limites d'action ne sont ni fixées ni connues ? c'est très inquiétant. On y réfléchira plus tard!», qu'ils disent. Alors, ça, ça concerne pas mal de monde.
Il y a un autre mémoire que j'ai trouvé très intéressant, et je suis certaine que ça va intéresser les collègues d'en face, c'est un mémoire présenté par des chercheurs, pas n'importe qui. Des chercheurs, ce sont des... Groupe d'étude sur les réformes de l'État, GERE; ça s'appelle GERE, leur association. Vous avez quatre professeurs d'université et non les moindres, des chercheurs. Alors, vous aviez Christian Rouillard, de l'Université d'Ottawa; Isabelle Fortier, École nationale d'administration publique; Alain Gagnon, Université du Québec à Montréal; Éric Montpetit, Université de Montréal.
n(22 h 30)n Qu'est-ce qui caractérise ce mémoire? Ils disent que le projet de loi n° 61 est porteur d'effets pervers nombreux et substantiels. Ils ne ménagent pas leurs mots. Ils disent au départ, dans leur mémoire: Ce «projet de loi [...] et la vision gouvernementale qu'il reconduit implicitement sont l'un et l'autre porteurs d'effets pervers nombreux et substantiels. Simplement dit, non seulement notre analyse suggère-t-elle que le projet de loi sur les PPP n'accomplira pas ses objectifs, mais encore suggère-t-elle qu'il risque d'entraîner l'exact contraire, à savoir un appauvrissement de la gouvernance québécoise ? c'est clair. En définitive, bien que le gouvernement se réclame du même pragmatisme que tous les gouvernements soucieux de gommer la dimension politique de la modernisation de l'État, la démarche qu'il privilégie avec les partenariats public-privé tient plutôt, à notre avis, du fétichisme.» Alors, ce serait intéressant pour les gens d'en face s'ils veulent lire ce mémoire-là. Et, lors de l'audition, quand ils sont venus présenter leur mémoire, eh bien il y a un membre de la Commission des finances publiques qui s'est permis de ridiculiser ce mémoire. Il reste quand même que vous avez des chercheurs de quatre universités au Québec, et non les moindres, et ils se sont permis de les ridiculiser.
Il y a une autre association qui sont venus, et ça aussi, c'est intéressant, parce que ces gens-là, pour la plupart, c'étaient des personnes âgées et des anglophones qui venaient de Montréal. Ils ont présenté leur mémoire très tard parce qu'on avait déjà trois heures de retard. Et ces gens-là, ils tenaient absolument à dire qu'est-ce qu'ils pensaient de ce projet de loi. Qu'est-ce qui caractérise ce mémoire-là? C'est soumis par le Projet Genèse, et c'est un organisme communautaire, et cet organisme communautaire a été fondé en 1977. Ils disent: «Nous intervenons dans le quartier Côte-des-Neiges, à Montréal, dans une perspective de défense des droits individuels et collectifs, de prise en charge et d'amélioration, par les résidents-es de notre quartier, de leurs conditions de vie.» Là, on parle des gens, là, qui connaissent le terrain, puis tout ça. Ils disent même: «Les personnes qui ont eu recours à nos services, provenant de 137 pays d'origine au cours de l'année passée, sont à l'image de notre quartier tout comme nos membres et bénévoles d'ailleurs. C'est pourquoi nous sommes reconnus comme lieu d'accueil et d'intégration des nouveaux arrivants...» Je trouve ça important de le mentionner parce que ces gens-là sont venus s'exprimer avec un état d'âme qui faisait qu'on ne pouvait pas demeurer indifférents, Mme la Présidente. Certains se sont exprimés en anglais et disaient: Don't touch our public system. Ils étaient très fiers du système qu'on avait puis ils disaient: On ne veut pas que vous changiez quoi que ce soit, parce que, nous, on considère que ce projet de loi n° 61 est inacceptable. Et, un après l'autre, ils ont exprimé avec beaucoup d'émotion qu'ils étaient contre et ils étaient très, très inquiets.
Il y a un autre mémoire aussi que je trouve très intéressant, qui va sûrement intéresser les gens d'en face, ça se trouve à être le mémoire présenté par les infirmières et les infirmiers, la fédération évidemment qui est une fédération syndicale qui regroupe, depuis l'été 2004, 45 000 infirmières québécoises. Alors, ça représente 72 % de toutes les infirmières du Québec. Et, si on regarde l'en-tête de leur mémoire, ce qui est intéressant, c'est qu'ils disent: Un projet de loi ? ils parlent toujours du projet de loi n° 61 ? dévastateur, déloyal, grossier. C'est le titre de leur mémoire. Et, c'était quand même très intéressant, ils arrivaient à la conclusion que finalement, avec ce projet-là, on veut faire un État... ils appellent ça un État marchand.
Alors, je vais citer quand même quelques conclusions de leur mémoire. Ils disent qu'«en plus de permettre au secteur privé d'encaisser l'argent du public, ce type d'ententes dépouille l'État de ses expertises et de ses passifs. Ainsi, il appauvrit le citoyen qu'il est supposé servir.» Ce sont des infirmières qui viennent dire ça au gouvernement. J'espère que le gouvernement va les écouter.
Le temps presse, alors je voudrais mentionner d'autres mémoires, là, rapidement. Il y a un autre mémoire, on en a parlé antérieurement, mais ça concerne les médecins spécialistes du Québec. Il reste que les médecins et la Fédération des médecins résidents du Québec sont venus témoigner aussi, disons, leurs inquiétudes parce qu'ils sont contre ce projet de loi n° 61. Ils disent que ce projet de loi, Mme la Présidente, c'est une réduction du panier de services. Ce n'est pas n'importe qui, là, les spécialistes au Québec qui viennent dire ça. J'espère que le ministre de la Santé va les écouter aussi.
Alors, quand ils ont commencé leur mémoire, ils disent: «Nos deux fédérations ont convenu de soumettre un mémoire commun faisant état de nos préoccupations générales et de nos questionnements plus spécifiques soulevés par l'étude du projet de loi en raison de son impact possible sur les soins de santé à la population.» On parle de santé, là, et ils disent: «Compte tenu du fait que 95 % des médecins spécialistes oeuvrent en milieu hospitalier, où ceux-ci passent plus de 75 % de leur vie professionnelle, et que les médecins résidents complètent leur formation postdoctorale dans [les secteurs et] les centres universitaires, les centres universitaires affiliés et les instituts universitaires, toute législation touchant l'organisation et la prestation des soins médicaux en établissement comporte des aspects qui peuvent avoir un impact direct et important sur le mode de dispensation des soins, sur la pratique médicale et sur la formation médicale. [Et] c'est dans cet esprit que les commentaires qui suivent sont présentés.» Et, à la conclusion, eh bien, ils sont contre, Mme la Présidente, ils sont contre ce projet-là. J'espère qu'on va les écouter. Ils disent ? et je cite simplement les entêtes, là, de la conclusion: Des effets pervers possibles; ils disent: Réduction du panier de services. C'est surtout ça, là, qui est intéressant: Réduction du panier de services, des médecins qui viennent dire ça au gouvernement: «La réduction des coûts liés à la prestation des services publics ne doit pas cautionner une réduction de ces derniers.» Et c'est pour ça qu'ils sont contre ce projet-là.
Le temps presse aussi, alors je vais terminer avec, et non le moindre... ça se trouve à être le mémoire des syndicats des professionnelles et professionnels du Québec. Et aussi, l'entête de ce mémoire, ils disent Les PPP: un terrain miné. C'est le titre de leur mémoire. Inutile de vous dire qu'ils sont contre. Ils disent: «L'utilité des PPP n'a pas été démontrée.» Alors ça, c'est clair. Et ils représentent quand même beaucoup, beaucoup de monde. Ils comptent trois des... ils comptent près de 18 000 membres faisant partie de la fonction publique, des sociétés d'État, du secteur de l'éducation et du secteur de la santé. Ils sont contre et ils ont mentionné, dans leur conclusion... eh bien, ils considèrent que «la volonté de recourir aux PPP, maintes fois exprimée par la présidente du Conseil du trésor, tient davantage de l'idéologie que d'un sain pragmatisme».
J'espère, Mme la Présidente, que le gouvernement va écouter tous les gens qui se sont présentés devant la Commission des finances publiques. Comme je l'ai dit, il y avait beaucoup plus de gens qui étaient contre que des gens qui étaient pour. Je suis très inquiète, et je suis très inquiète concernant aussi le domaine de la santé.
Le ministre de l'Environnement, aujourd'hui, nous a présenté, là, toute une politique concernant le développement durable. Eh bien, moi, je pense qu'avec les PPP c'est très dangereux parce que, nous, au Québec, on a quand même quelque chose qui vaut de l'or, on l'appelle l'or bleu, c'est l'eau. Et, avec qu'est-ce qu'ils veulent faire avec les PPP, les gens sont très, très inquiets.
D'ailleurs, on a reçu une lettre du président d'Eau Secours, M. Bouthillier, André Bouthillier, qui est très inquiet, et il a écrit au ministre puis au premier ministre, et je cite simplement quelques phrases, et je pense que c'est très important de le mentionner. Il dit: «L'intérêt du plus grand nombre doit prévaloir sur l'intérêt de quelques-uns.» Ou à l'autre paragraphe: «Nous faisons appel aux valeurs qui nous animent.» Il dit: «...j'interviens au nom de la coalition et que je vous demande, M. le premier ministre, de retirer la gestion de l'eau des projets de loi 61 et 62 débattus lors de la présente session parlementaire.» Il dit: «La communauté scientifique demande que l'eau soit gérée de façon écosystémique ? intérêts des humains, de la faune et de la flore pris en compte ? et la privatisation de sa gestion ne rencontre d'aucune façon les préceptes de ce mode de gestion durable de notre environnement. Il n'y a que l'État, par le biais de ses institutions, qui puisse assurer la protection de ce bien commun.»n(22 h 40)n Alors, Mme la Présidente, pour conclure, c'est évident que nous voterons contre ce projet de loi. Pourquoi? Parce que, dans d'autres pays, on sait que les bilans sont extrêmement critiques. Mme la présidente du Conseil du trésor essayait de convaincre les intervenants que ça allait bien dans d'autres pays. Mais, malheureusement pour elle, c'est que les gens qui sont venus présenter des mémoires étaient très renseignés et ils savaient qu'est-ce qui se passait dans d'autres pays, ils l'ont mentionné. Je vous invite à lire tous les mémoires. Ils ont dit: Mme la présidente, ce n'est pas ce qu'on a lu, parce qu'en Angleterre, en France, puis dans d'autres pays, ce n'est vraiment pas beau. Ils sont pris avec des problèmes épouvantables. Et puis, à ce moment-là, les premiers bilans sont extrêmement critiques. Les PPP ont été expérimentés dans d'autres pays, et puis ça n'a pas fonctionné. On compte de nombreux échecs dans divers secteurs et des coûts extrêmement élevés pour les gouvernements. Et c'est la raison pour laquelle, nous, de notre formation politique, nous représentons les citoyens et citoyennes qui veulent que finalement on les écoute, parce que, si tous les gens qui avaient présenté un mémoire étaient ici, devant l'Assemblée nationale, là, bien, Québec serait bloquée parce que ce sont des milliers et des milliers de gens qui sont venus dire non aux PPP. On ne pourrait même pas passer sur l'autoroute parce que tous les mémoires, ça représentait des milliers de gens. Alors, dans les circonstances, il faut absolument que ce projet de loi, Mme la Présidente, soit retiré. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Alors, comme prochain intervenant, si je veux respecter la règle de l'alternance, je vais, d'abord, reconnaître le député de Laval-des-Rapides et, ensuite, je vous reconnaîtrai, Mme la députée de Rimouski. À vous.
M. Alain Paquet
M. Paquet: Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis très heureux d'intervenir ici, aujourd'hui, dans le cadre du débat sur l'adoption de principe du projet de loi n° 61. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt, entre autres, les propos de ma collègue membre de la Commission des finances publiques et députée de Mirabel qui a émis beaucoup d'hypothèses, beaucoup d'opinions. Mais malheureusement on dit: Il y a beaucoup d'exemples, ça a été une catastrophe ailleurs dans le monde. On remarquera et les auditeurs qui ont écouté certainement avec beaucoup d'attention ont remarqué que malheureusement il n'y avait pas grand fait, il n'y avait pas beaucoup d'évidences, sauf des opinions. Et malheureusement on le retrouvait beaucoup dans beaucoup de mémoires, dans la majorité des mémoires, je dois dire. Il y a beaucoup d'opinions, qu'on a écoutées, et il y avait des remarques aussi constructives qui ont influencé ou qui vont influencer la présidente du Conseil du trésor dans les amendements que nous allons présenter au projet de loi. Mais très clairement on va en parler, de la réalité, dans les prochaines 20 minutes, Mme la Présidente.
En tant que chercheur, en tant que personne intéressée à la chose publique, il y a longtemps que je m'intéresse à voir ce qui se fait ailleurs, et comment on peut tirer avantage des leçons et des expériences vécues ailleurs dans le monde, et les adapter à la réalité québécoise du XXIe siècle. Est-il nécessaire de rappeler que, lorsqu'on compare le Québec aux 50 États américains et 10 provinces canadiennes, en termes de PIB par habitant, une mesure du niveau de vie, une étude d'Industrie Canada démontrait que le Québec était au 52e rang sur 60? Est-il nécessaire de rappeler, dans une autre étude, Mme la Présidente... une étude de Statistique Canada en août 2000, la même année, qui démontrait que, lorsqu'on comparait le revenu moyen disponible, c'est-à-dire le revenu moyen après impôts, ou enfin le revenu médian même, disponible après impôts et transferts, des familles québécoises, le Québec se situe au 53e rang sur 60?
Et ce n'est pas tout: une étude publiée, hier, par l'Institut de la statistique du Québec ne comparait pas les États et les provinces mais comparait différents pays, et mettait le Québec, pour fins de comparaison, et concluait que le Québec, en 2003, est au 37e rang, comparativement au 11e rang pour le Canada dans son ensemble et au premier rang pour les États-Unis. Et l'écart entre le Canada et le Québec ? et, malheureusement, dans ce cas-ci, je dois dire, le Canada, la moyenne du PIB par habitant est baissée parce que le Québec est plus bas ? on avait un écart de 14 %, 13,7 % plus exactement, et, quand on se compare aux États-Unis, l'écart est de 34,8 %. C'est ça, le retard de productivité, le retard de salaire des travailleurs du Québec, le retard du revenu pour l'ensemble des Québécois.
Pour faire face au défi démographique et au défi des finances publiques, il n'y a pas de doute qu'une condition incontournable nécessite davantage une augmentation de la croissance économique québécoise et de la création de richesse. Et je prends pour exemple mon collègue député de Roberval, et moi-même, et l'ensemble de nos collègues qui avons un rêve. Le député de Roberval a un rêve pour ses enfants, nous avons tous un rêve, nous partageons tous un rêve pour nos enfants, un rêve d'un Québec plus prospère où plus de Québécois et de Québécoises participent à la création de richesses et en retirent les fruits et qui nous permet de partager aussi de plus grandes richesses. C'est ça, le rêve que le gouvernement du Québec et que le premier ministre du Québec font pour l'ensemble des Québécois.
Et, dans le contexte d'un plan de croissance économique, de création de richesse, un des éléments, et ce n'est pas le seul, mais un des éléments, c'est des infrastructures en meilleur état. Et on doit avouer ici objectivement, parce que la présentation que je fais est objective... En 1981, j'avais eu l'occasion de faire une conférence de presse, à la salle de presse de l'Assemblée nationale, où, à l'époque, je déplorais et je disais que c'était une grave erreur que le ministre des Finances de l'époque, M. Jacques Parizeau, avait réduit substantiellement les investissements publics de 1976 à 1981. Par la suite, il y a eu certains programmes ponctuels fédéraux-provinciaux-municipaux qui ont fait des choses bien, mais malheureusement la tendance n'avait pas été infléchie sur la mise à niveau des infrastructures publiques, tous partis confondus, et je le dis objectivement. Mais, aujourd'hui, on évalue que ça prendrait 15 milliards de dollars pour remettre à niveau ces infrastructures. Il faut donc se donner des outils pour affronter cette problématique, et, un des outils, qui n'est pas une baguette magique, qui n'est pas une panacée, ce sont les partenariats public-privé.
Et c'est quoi donc, un partenariat public-privé? C'est d'abord un contrat à long terme, par lequel un organisme public, j'ai bien dit «public», associe une entreprise du secteur privé à la conception, à la réalisation, à l'exploitation et généralement au financement d'un ouvrage public. Et ce contrat stipule aussi les résultats à atteindre et établit un partage de risques, un partage des responsabilités, des investissements et des bénéfices, dans un objectif d'amélioration de la qualité des services offerts aux citoyens.
Et il est important de préciser que, contrairement aux prétentions et aux confusions de l'opposition officielle, un partenariat public-privé n'est pas de la privatisation, ce n'est pas de la sous-traitance, ce n'est pas de l'impartition. Il n'y a personne qui peut sérieusement soutenir cela, à moins d'être confus sur la compréhension des enjeux et la compréhension de ce qu'est un partenariat public-privé. Encore une fois, les PPP, ce n'est pas une panacée. Je le dis: Ce n'est pas une baguette magique, mais c'est un outil extrêmement valable dans des cas précis.
Les idéologues du statu quo et de l'opposition officielle, aujourd'hui, nous annoncent pratiquement la fin du monde après l'adoption du projet de loi n° 61. Il faut se rappeler que ces mêmes intervenants ont tenu le même discours, l'an dernier, sur le projet de loi n° 31 qui modifiait le Code du travail, et pourtant, comme le titrait La Presse, le 13 novembre dernier, La catastrophe n'a pas eu lieu. D'ailleurs, au contraire, «la croissance de la rémunération hebdomadaire ? hein, du salaire moyen hebdomadaire ? au Québec a été supérieure ? depuis le début de 2004 ? à la moyenne canadienne». Elle a même été trois fois et demie plus élevée au Québec qu'en Ontario depuis janvier 2004. Au contraire aussi, le taux d'emploi a augmenté au Québec, en 2004, alors qu'il diminue en Ontario. On est donc très, très loin des vues apocalyptiques auxquelles on était habitués d'entendre de la part de l'opposition officielle.
Il est donc aussi utile de rappeler que l'opposition officielle a déjà, lorsqu'elle était au gouvernement, mis sur pied le bureau des partenariats public-privé, au Conseil du trésor. Le même gouvernement avait aussi adopté la loi sur les partenariats en matière de transport. C'est le gouvernement du Parti québécois qui avait fait cela.
Et je vais vous lire une citation, vous pourrez deviner qui l'a dite. J'ouvre les guillemets: «Je suis tout à fait ouvert aux partenariats public-privé. On retrouve ça autant dans des pays très capitalistes que dans des pays socialistes. Je n'ai rien contre ça à la condition que, s'il y a un transfert de personnel de la fonction publique à l'entreprise privée, les conditions de travail soient respectées. Il ne faut pas aliéner les biens publics. Le patrimoine public doit rester public.» Bien, c'est ça, un partenariat public-privé, c'est exactement ce que nous avons dans le projet de loi n° 61, M. le Président... Mme la Présidente, pardon. Et qui a fait cette citation? C'est le chef de l'opposition officielle, le député de Verchères, en février 2003, avant l'élection où la population a rendu un jugement sur sa gouverne. Quand on regarde donc le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, quand on écoute le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques et ses collègues de l'opposition officielle, clairement, dans leur argumentation, le jupon dépasse.
Et il se fait des PPP ailleurs dans le monde. La formule existe depuis une douzaine d'années au Royaume-Uni; elle existe en France, en Allemagne, en Australie, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas, au Portugal, et j'en passe.
Déjà, en 1997, j'écrivais, dans un document intitulé Agir pour la croissance, le comité de travail que j'avais présidé, j'écrivais que le Québec avait pris beaucoup de retard par rapport aux autres provinces dans ce dossier. «Le développement et la modernisation des infrastructures publiques par un partenariat public-privé ont déjà permis ? on était en 1997 ? la réalisation au Canada, en excluant le Québec, d'environ 134 projets.» Et là j'étalais: dans le domaine des transports, 25 %; 27 % en environnement; 48 % sur des équipements d'utilité publique. Le Québec était déjà en retard en 1997.
Et un exemple récent de réussite de PPP: le pont de la Confédération, qui relie le continent à l'Île-du-Prince-Édouard. Bien, Claude Picher, dans La Presse du 9 septembre dernier, disait ? j'ouvre les guillemets: «...les contribuables épargnent au moins 8 millions par année pendant 35 ans, et, au bout de cette période, le gouvernement prend la responsabilité de l'exploitation, et les profits viennent avec», au secteur public donc, Mme la Présidente.
n(22 h 50)n Alors, quels sont les avantages des PPP? D'abord, ça constitue une alternative à explorer et à comparer au mérite d'autres formes de réalisation de projets avec les PPP. On pourrait regarder, avec le projet de loi n° 61, qu'est-ce que le PPP peut offrir dans certains cas, qu'est-ce que le PPP offre et comment ça se compare en termes de qualité de services, les standards auxquels le public... le gouvernement du Québec établit et le coût pour réaliser le projet comparativement à différentes formes traditionnelles. Et, si les formes traditionnelles sont moins coûteuses et donnent de meilleurs résultats, c'est clair qu'on va prendre les formes traditionnelles. Par contre, s'il est démontrable que les PPP, dans ce cas précis, donnent un meilleur service et en donnent plus pour leur argent, bien le choix pour le gouvernement libéral est clair, nous allons choisir ce qui est le meilleur pour la population du Québec. On ne sera pas enfermés dans des dogmes, comme l'est l'opposition officielle.
Dans certains cas, les PPP permettent à l'État de réduire les coûts et les délais qu'il doit assumer pour la réalisation de travaux d'infrastructures. Ainsi, avec la même quantité d'argent, on peut faire plus de travaux. De plus, une fois que l'État a identifié les besoins ? j'ai bien dit: l'État qui identifie les besoins ? élaboré les avant-projets, un autre grand bénéfice des PPP est d'intégrer les différentes étapes de la conception, en passant par la construction, la surveillance des travaux ainsi que la réalisation, et donc l'entretien et l'exécution pour s'assurer la pérennité de l'ouvrage. Ça, c'est de la saine gestion, Mme la Présidente. Mais, en intégrant ces différentes phases du début jusqu'à la fin, en établissant clairement les conditions et les standards auxquels le gouvernement exige pour ses citoyens, pour la population, cette intégration de la conception initiale à l'entretien permet de dégager une synergie entre les partenaires publics et privés et d'avoir donc... d'en avoir plus pour notre argent.
Et parlons des expériences étrangères, Mme la Présidente. Ces expériences démontrent qu'on peut atteindre une meilleure efficience dans la production en améliorant la qualité des services selon des standards de qualité fixés par le gouvernement, par l'État québécois, pas par le secteur privé. Ainsi, grâce aux PPP, l'État conserve la possession de l'infrastructure ainsi que le contrôle sur ses conditions et sa sécurité.
On va dire: Oui, mais attention, le coût de financement d'un projet par PPP est généralement moins cher quand c'est le gouvernement qui emprunte plutôt que le secteur privé. C'est vrai qu'il peut y avoir une différence à l'avantage du secteur public dans bien des cas, malgré que ce n'est pas dans tous les cas, parce que lorsqu'un consortium de financement est suffisamment large, il peut emprunter pratiquement au même taux que le gouvernement. Mais, même si c'est le cas, même en acceptant qu'il y a une différence de prix, le gain net provient du fait que la principale source d'économies, c'est le partage de risques. C'est de là que se dégagent les économies réelles qui sont plus grandes souvent que la différence qu'il peut y avoir sur le coût de financement.
Un autre avantage: PPP peuvent garantir le financement adéquat de l'infrastructure durant une longue période de temps. Donc, on peut être assuré au départ de quel est l'argent dont on a besoin, quels vont être les coûts qui devront être défrayés et qui va les payer. Ça veut dire, Mme la Présidente, que, lorsqu'on entreprend un projet, on peut savoir d'avance, avant de décider qu'on l'entreprend véritablement, quels vont être les coûts, quelle est la responsabilité de chacun. Et, si ces coûts sont trop élevés, si on pense que ce n'est pas ce qui est mieux pour la population, on peut dire: On ne le fait pas. Et j'avoue que c'est très différent évidemment de la gestion habituelle à laquelle nous avait habitués l'opposition officielle, dans laquelle les dépassements de coûts, c'était chose commune, la mauvaise gestion, c'était chose commune. Et je leur donne tout le bénéfice pour cette réalisation qu'ils ont faite, l'évidence parle par elle-même, ce sont des faits, mais pas des prétentions.
Alors donc, qu'on puisse comparer qu'est-ce que le PPP coûte, est-ce que le projet en vaut la peine, et, si on décide qu'il en vaut la peine, là, à ce moment-là, on peut le réaliser. Si ce n'est pas le cas, on peut amender le projet ou décider de ne pas le faire. Au moins, on le sait d'avance. C'est ça, la saine gestion, Mme la Présidente. Donc, planifier avec les bons chiffres, comparer différentes alternatives et décider à l'avance ce que l'on fait, et ce que cela va coûter, et si ça vaut la peine de le faire.
Un exemple de cela: le métro de Laval. Ce n'est pas le projet qui était un problème, mais la gestion, la mise en place pour le développement du projet a eu extrêmement un gros problème, de graves lacunes, et on l'a documenté, entre autres à la Commission de l'administration publique, en se basant sur des rapports objectifs et indépendants du Vérificateur général ainsi que d'un groupe d'experts qui a analysé la situation.
Mais l'opposition va nous dire: Oui, mais, écoutez, il y a eu des exemples où les PPP n'ont pas donné les résultats escomptés. C'est vrai, et j'en parlerai dans un instant. Mais j'entends, entre autres, un exemple qu'on peut entendre: Oui, mais écoutez, lorsqu'on a construit les hôpitaux, il y eu des exemples d'hôpitaux en Angleterre où ça a coûté plus cher que prévu. C'est vrai. Et pourquoi ça a coûté plus cher? Est-ce que c'est la formule des PPP qui était la cause? La réponse est clairement non quand on regarde les faits, pas juste des observations générales, mais quand on regarde ce qui s'est passé. Bien, dans les cas où il y a eu dépassement de coûts, ce qui s'est produit, c'est qu'après que le projet ait été enclenché le gouvernement décide: Bien, maintenant, je ne veux pas juste 15 étages, j'en veux 16, étages pour l'hôpital; je change les devis du projet.
Évidemment, quand on change, qu'on a mal planifié d'avance... Mal planifier avec les PPP donne les mauvais résultats. Mal planifier sans PPP ? et l'opposition officielle l'avait démontré souvent, au gouvernement ? ça donne de très mauvais résultats. Ce n'est pas mieux une façon que l'autre dans ce cas-là. Il faut savoir gérer, il faut être responsable, il faut planifier correctement. Mais ce n'est pas la formule des PPP qui est en cause, c'est de la mauvaise planification et de la mauvaise gestion.
Encore une fois, pour ce qui est de la mauvaise planification, je reconnais sans aucun doute l'expertise de l'opposition officielle à cet égard-là. On se souviendra de Montréal Mode, de la SGF, Cité du multimédia, la gestion du projet du métro, et j'en passe.
Une voix: ...
M. Paquet: La Gaspésia aussi effectivement. Mais qu'est-ce qu'ailleurs on pense des PPP? Parce qu'on regarde ailleurs, on va se comparer, on va parler des faits, pas juste des opinions. Bien, l'Institute for Public Policy Research, l'Institut de recherche en politique publique, qui est un institut progressiste, en Grande-Bretagne, a publié, l'été dernier, une étude très intéressante qui a été financée savez-vous par qui? Par un des syndicats les plus puissants du Royaume-Uni, dans le secteur de la santé, l'Unison. Cette étude très fouillée propose constructivement certaines critiques et certaines améliorations que l'on peut apporter à la formule des PPP, au Royaume-Uni, basées sur l'expérience qu'ils ont vécue.
Mais qu'est-ce qu'ils rapportent aussi? Il y a certaines critiques constructives qu'il faut tenir compte. Mais ils nous disent que... ils rapportent, entre autres, les chiffres tirés du rapport de l'équivalent du Vérificateur général de Grande-Bretagne, qui montrent que les PPP permettent de construire des infrastructures dans le temps prévu initialement dans 76 % des cas, alors que, dans les modes traditionnels, ils sont construits en temps seulement dans 30 % des cas. Ça, c'est l'évidence empirique. De plus, les coûts de construction, dans les projets avec PPP, demeurent dans les budgets prévus dans 78 % des cas avec les PPP, comparativement à seulement 27 % dans le cas des modes traditionnels.
Ça, ce n'est pas des opinions à dire: On a peur, on a peur, on a peur. La réalité, c'est que les PPP globalement il y a eu des choses qui n'ont pas fonctionné, mais c'est une formule qui peut être gagnante dans des cas précis, et majoritairement ce l'est pour les délais et les coûts de construction dans l'exemple de Grande-Bretagne.
Et quelle est la conclusion de l'étude d'Unison? J'ai dit qu'il y avait ces commentaires constructifs pour des améliorations, mais leur conclusion est fort claire, et je cite: «Bien qu'en aucune façon ce ne soit le seul mécanisme pour atteindre cette fin les partenariats public-privé sont un élément important dans un programme de réforme des services publics.» C'est un syndicat qui conclut ça, Mme la Présidente.
Alors, je crois qu'au Québec les intervenants du monde syndical ont peut-être intérêt à regarder puis aller voir ce qui se passe ailleurs et d'amener des remarques constructives à cet égard-là, mais de ne pas... pour des raisons pratiquement fétichistes, de dire: On est contre tous les PPP; de toute façon, au Québec, ça ne peut pas aller. Il n'y a rien génétiquement, au Québec, qui fait qu'on n'est pas capable d'en faire là où ça s'applique. Et, si on parle de PPP, dans le fond ce sont des partenariats publics pour la population. Dans le fond, on devrait peut-être parler de 4P plutôt que de 3P.
Et, quand on parle, par exemple, de projets auxquels ça pourrait s'appliquer au Québec, on pensera au pont de la 25, qui reliera éventuellement l'est de Montréal à Laval. Et ce pont-là, construit en PPP, pourra être un des jalons qui permettra de construire une voie de contournement, autour de l'île de Montréal, pour le transport, et puis il y aura un impact positif pour le développement économique mais aussi pour l'environnement. Parce que, quand on regarde l'état de nos routes, les Québécois savent très bien que... On n'a pas besoin de leur rappeler le mauvais état souvent qu'on a, général, du réseau routier. Je parle des neuf dernières années et même avant. Et, bien qu'on n'y songe pas toujours, ça a bien des répercussions. Ça occasionne des réparations plus fréquentes et plus onéreuses des voitures, des risques additionnels d'accidents, des coûts plus élevés pour livrer les marchandises à travers le Québec et à l'extérieur du Québec. Donc, c'est des coûts en productivité et en salaires pour nos travailleurs, des coûts de pollution plus élevés à cause de la congestion. Et ces problèmes entraînent donc une productivité économique et un niveau de vie plus bas pour les Québécois. Et, même si on ne voit pas de guérite, tous ces coûts sont en fait des péages hypocrites, mais non moins réels pour la population québécoise. Et vraiment, lorsque je vois l'opposition officielle dans le fond défendre par le fait même implicitement ces péages hypocrites, je me dis: Vraiment, ils ont besoin de refaire leurs devoirs, parce que ce n'est pas ce à quoi les Québécois s'attendent de nos gouvernants et de leurs gouvernants.
n(23 heures)n Alors, le rôle de l'Agence des PPP va être de développer une expertise, de se donner les moyens de garantir l'intégrité, la cohérence et la transparence du processus. Et je vous référerais à M. Joseph Facal, ancien ministre du Parti québécois, qui, le 27 septembre dernier, disait: «Si on regarde à l'extérieur du Québec, des PPP, il y en a maintenant partout dans le monde. Certains pays en comptent des centaines. Il n'y a pas une société, sauf peut-être la Corée du Nord, qui n'expérimente pas ces nouvelles formules. Donc, on est bien au Québec de commencer à regarder un petit peu ce que c'est, les PPP.» Fin de la citation.
Et j'ai beau connaître les alliés naturels pro statu quo, enfermés dans le conservatisme du passé du Parti québécois, je n'ose pas croire que la Corée du Nord compte maintenant parmi la liste des alliés objectifs du chef de l'opposition officielle et de sa formation politique. Même si le prédécesseur du président actuel de la Corée du Nord a maintenant le titre de président éternel et que ce titre pourrait faire rêver le chef de l'opposition officielle, ça ne peut pas être le cas.
Et M. Facal nous dit: Fondamentalement, il faut regarder ce qui se passe ailleurs. Oui, les coûts semblent baisser et, oui, il est plutôt bon que l'État ne soit plus seul à assumer les risques. Et comme dit le député de Rousseau, «il faut aussi qu'on modernise notre façon de donner des services à la population. Il y a beaucoup de travail à faire au PQ pour moderniser», je suis d'accord avec ça. Alors, en Grande-Bretagne, c'est seulement 11 % des investissements en infrastructures qui sont faits sous forme de PPP; le reste, sous forme traditionnelle. Il n'y a pas de raison qu'au Québec on reste à 0 %.
Et Claude Picher, le 9 septembre dernier, c'est ma conclusion, nous disait: Je vous laisse juger, chers lecteurs ? je dirai chers auditeurs ? qui êtes aussi les contribuables les plus taxés, les plus endettés en Amérique du Nord, si le temps n'est pas venu de s'inspirer des expériences menées ailleurs, parfois avec beaucoup de succès, ou bien, si vous préférez, comme semble le souhaiter la CSN ? et j'ajoute le Parti québécois...
La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le député, votre temps est écoulé. Je regrette, votre temps est écoulé. Alors, je vous remercie.
Une voix: ...
La Vice-Présidente: Comme prochaine intervenante, je reconnaîtrai la députée de Rimouski. À vous la parole.
Mme Solange Charest
Mme Charest (Rimouski): Merci, Mme la Présidente. Alors, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux, ma préoccupation première, lorsqu'on me présente un projet de loi, c'est de vérifier quelle est l'apport particulier à la société québécoise de ce projet de loi. À partir de quelle vision de la société québécoise ce projet a-t-il été conçu, préparé et proposé? Ce projet de loi recherche-t-il le bien commun? Quelles sont les valeurs mises de l'avant qui sous-tendent ce projet de loi?
C'est en ayant en tête ces préoccupations et bien d'autres que j'ai examiné le projet de loi n° 61 sur l'Agence de partenariats public-privé. C'est clair que le partenariat d'affaires que nous propose le gouvernement via l'agence prévue par le projet de loi n° 61 s'inspire d'expériences britanniques des années quatre-vingt-dix, qui se sont d'ailleurs avérées catastrophiques dans bien des cas.
Mais rappelons que l'objectif ultime du partenariat public-privé signifie n'importe quelle participation de l'entreprise privée à la réalisation des missions qui relèvent de l'État. Ainsi avec la création de l'agence, l'État confierait à des entrepreneurs privés la construction, la gestion, la livraison de services tels que des écoles, des hôpitaux, des prisons et pourquoi pas des soins cliniques.
Rien n'est exclu, il suffit de relire l'article 6 du projet de loi n° 61 pour comprendre que la ministre qui propose cette avenue ne connaît pas les conséquences prévisibles de cet article. D'ailleurs, et de façon tout à fait candide et de son propre aveu, la présidente du Conseil du trésor dit qu'elle n'a pas réfléchi à ce qui devrait être absolument exclu de cette loi. Pourtant, l'article 6.1 du projet de loi n° 61 dit, et je le cite textuellement: «Un contrat de partenariat public-privé est un contrat à long terme par lequel un organisme public associe une entreprise du secteur privé, avec ou sans financement de la part de celle-ci, à la conception, à la réalisation et à l'exploitation d'un ouvrage public. Un tel contrat peut avoir pour objet la prestation d'un service public.» J'avoue, Mme la Présidente, que ce n'est pas très rassurant de savoir que la présidente du Conseil du trésor n'a pas mesuré les effets de cet article. Dans le fond, ce que nous propose la présidente du Conseil du trésor, c'est d'institutionnaliser, par l'adoption d'une loi, un modèle idéologique qui n'a pas été sérieusement étudié par le gouvernement, qui n'a pas été non plus entériné par la très grande majorité des personnes qui sont venues en commission parlementaire débattre de ce délestage de l'État vis-à-vis ses principales responsabilités.
Pourquoi le gouvernement libéral est-il si pressé d'adopter ce modèle de gestion qui remet en question nos choix de société basés sur la solidarité, l'équité et la justice sociale? Pourquoi? Je voudrais bien le comprendre.
Le gouvernement libéral s'imagine qu'il va faire des économies substantielles, d'abord en confiant la construction des infrastructures publiques à des entreprises privées parce que les coûts associés à cela n'augmenteraient pas, selon lui. En regard de la dette publique, toujours selon le gouvernement, il y aurait réduction des risques financiers encourus. Et toujours selon le gouvernement libéral, c'est le privé qui emprunte et c'est le public qui devient locataire de l'infrastructure, que ce soit pour une école, un hôpital ou une prison. C'est tout un arrangement. C'est à croire que le gouvernement actuel veut que le peuple du Québec soit un peuple de locataires.
Le gouvernement veut faire des économies sur les salaires de sa main-d'oeuvre. Le gouvernement ne peut faire ce qu'il veut avec la main-d'oeuvre du secteur public et parapublic. Le privé, lui, il peut engager qui il veut, au salaire qu'il le désire et, pour cela, le gouvernement a tout prévu pour faciliter cette situation future en abolissant l'article 45 du Code du travail, en adoptant les lois n° 7 et 8. Le gouvernement libéral postule que le privé fait mieux avec moins. Le présent gouvernement oublie qu'une entreprise privée n'a pas les mêmes objectifs et les mêmes responsabilités qu'un État. La question à poser: Jusqu'où peuvent se concilier les intérêts du public avec ceux du privé alors que l'État a la responsabilité de la répartition de la richesse collective et des ressources et que le privé est d'abord préoccupé de faire des profits qu'il peut retirer de la vente de biens et services dans des marchés en fluctuation? Les motifs humanitaires ne sont pas l'apanage des entreprises qui doivent faire des profits pour survivre.
L'application des partenariats public-privé aux activités de l'État n'est pas sans risque. Un des risques premiers et parmi tant d'autres, c'est celui de transformer des biens et des services communs comme la forêt, la faune, la santé, l'eau, les ressources naturelles, l'éducation, et j'en passe, en marchandises vendues au gré des marchés sans tenir compte de l'aspect humanitaire, de l'aspect social.
Une autre dérive possible avec les partenariats public-privé, c'est la non-transparence dans la gestion, la distribution et le renouvellement des biens et des services publics. La présence des partenariats public et privé dans les missions de l'État font craindre à plusieurs la transformation de la nature même de l'État et la réduction de l'État à un type d'entreprise privée. Au lieu d'être l'arbitre du bien commun, l'État se plierait à la logique du profit et n'aurait plus la responsabilité de l'intérêt commun de la population. À titre d'exemple, dans le secteur de la santé et des services sociaux, le gouvernement libéral ne sait pas ce que la main gauche fait alors que la main droite intervient à droite et à gauche. À cet effet, la position de l'Institut des partenariats public-privé dans le secteur de la santé est très claire. Permettez que je cite leur déclaration. Selon l'Institut des partenariats public-privé, «il s'agit de cesser de voir le privé comme une menace, mais plutôt de voir le système de santé comme une entreprise capable de saisir les opportunités pour générer des bénéfices qui profiteront à tous les citoyens». À tous les citoyens? Permettez-moi de vous dire que j'en doute beaucoup.
Mme la Présidente, vouloir réduire les coûts, augmenter l'efficacité et l'efficience des services de santé et les services sociaux, nous sommes tous d'accord; personne n'est contre la vertu. Par contre, ces éléments ne peuvent être les seuls critères pour mesurer les interventions de l'État vis-à-vis sa population, et en particulier dans ces secteurs. Les partenariats public-privé relèvent d'une rationalité économique à courte vue. Les services sociaux et les services de santé doivent être un tout et non pas vus comme des marchandises disparates que l'on peut offrir aux plus offrants. Nous ne pouvons croire ce gouvernement. C'est pourtant le même gouvernement qui oblige l'intégration des services sociaux et de santé pour soi-disant rendre le tout plus cohérent et assurer la continuité des services. Pourquoi alors introduire un loup dans la bergerie, un loup dont l'intérêt premier est le profit?
Ce soir, Mme la Présidente, je vous ai exprimé mes réticences d'ordre éthique, déontologique et philosophique à voter en faveur du projet de loi. Je ne suis pas la seule à avoir des réticences sérieuses vis-à-vis ce projet de loi. À titre de référence, je vous parlerai de quelques organismes et de quelques autorités qui sont venus nous dire en commission parlementaire leurs réticences vis-à-vis ce projet de loi. Et ce qu'il faut souligner en regard du projet de loi n° 61, c'est que l'un des enjeux majeurs dans le dossier des partenariats public-privé et dans la mise en place de l'agence que la présidente du Conseil du trésor veut instaurer pour encadrer les prochains partenariats public-privé est celui de l'éthique. En effet, un bref survol de la littérature portant sur la question a vite fait de nous mettre en garde contre les nombreux pièges inhérents à la prolifération des partenariats public-privé.
n(23 h 10)n Par exemple, l'Organisation de coopération et de développement économique, l'OCDE, qui regroupe l'ensemble des grands pays industrialisés, fait de sévères mises en garde quant à la multiplication des partenariats public-privé en affirmant que le recours au secteur privé risque d'aboutir à une augmentation de la corruption et de l'affairisme. L'OCDE en arrivait à cette conclusion dès novembre 1997 alors que, dans le cadre d'un colloque sur l'éthique, la formule des PPP retenait l'attention, et c'était rapporté dans l'atelier sur l'éthique préparé par le professeur John Langford de l'Université de Victoria, en Colombie-Britannique. Et la principale recommandation de l'OCDE aux organismes gouvernementaux était dès lors de définir des règles claires au niveau de l'éthique et de la transparence avant de s'engager dans la voie des PPP. Visiblement, la présidente du Conseil du trésor n'a pas cru bon de suivre cette consigne.
Plusieurs éthiciens se sont également prononcés sur la question et ont fait connaître leurs inquiétudes. Par exemple, du côté de l'École nationale d'administration publique, le professeur Yves Boisvert disait que le programme fédéral de commandites et l'idée du gouvernement actuel de réinventer le Québec relèvent de la même logique: il s'agit d'un transfert de la gestion d'une activité gouvernementale entre les mains du secteur privé.
Par ailleurs, la Protectrice du citoyen déplore le mutisme du législateur quant au rôle qu'elle sera appelée à jouer dans le contrôle de l'Agence des partenariats public-privé. Lors de la consultation générale sur le projet de loi n° 61, la Protectrice disait, et je la cite: «Pour le citoyen, cinq principes m'apparaissent primordiaux: ce sont les valeurs de transparence, d'équité, de qualité de services, d'imputabilité et de protection de l'intérêt public à propos desquels, je dois le dire, le projet de loi est peu explicite, pour ne pas dire quasi silencieux.» De son côté, la Commission d'accès à l'information a déjà noté la culture du secret qui entoure certains contrats récents liant l'État et le secteur privé, contrats qui demeurent inaccessibles au public en raison de clauses concurrentielles qui ne servent pas les contribuables québécois. Face au mutisme du projet quant à l'accès à l'information, le président de la CAI mentionnait que le projet de loi n° 61 dont l'objet premier est la création d'une nouvelle agence est muet quant aux principes qui devraient sous-tendre les activités de partenariat public-privé. Le législateur devrait s'assurer que des règles précises sur les obligations de transparence des partenaires seront adoptées.
Quant à lui, le Commissaire au lobbying formulait également un message très clair à la présidente du Conseil du trésor, et je le cite encore parce que je pense que c'est la meilleure façon de transmettre la pensée de ces personnes, c'est de dire textuellement ce qu'ils ont déclaré. Alors, le Commissaire au lobbying déclarait: «Il serait malsain d'accorder moins d'importance d'un point de vue déontologique aux démarches visant à infléchir des décisions d'intérêt public du simple fait qu'elles ont été confiées aux entreprises privées en exécution d'un partenariat public-privé. Le besoin d'assurer un encadrement déontologique pour ces démarches est aussi sinon plus criant dans le contexte de ces partenariats que dans celui ou ces démarches sont effectuées directement auprès de titulaires de charges publiques.» Le Protecteur ajoutait: «Les partenariats public-privé ramèneront progressivement dans l'ombre des activités que le législateur a pourtant voulu rendre transparentes. De plus, les règles déontologiques destinées à encadrer ces activités deviendront lettre morte.» Lors de la dernière journée des consultations générales sur le projet de loi n° 61, j'étais là, en commission parlementaire. C'est le Vérificateur général du Québec qui faisait parvenir une lettre à la présidente du Conseil du trésor, et le Vérificateur général exprimait ses craintes en ces termes. Ce que le Vérificateur général dit, c'est: «Je crois opportun de rappeler que cet accès du Vérificateur général à l'Agence des partenariats public-privé et à ses filiales ne permet pas nécessairement une vérification complète. Si elles le désirent, l'agence et ses filiales pourront fort probablement m'empêcher de mener les travaux de vérification de l'optimisation des ressources, vérification de gestion, que je jugerais nécessaires.» Il y a donc, Mme la Présidente, unanimité chez les institutions de contrôle chargées de protéger l'application des principes démocratiques dans les activités du gouvernement du Québec. Autant le Vérificateur général, la Protectrice du citoyen, la Commission d'accès à l'information que la Commissaire au lobbying se sont inquiétés de l'absence de dispositions assurant l'éthique et la transparence dans le projet de loi n° 61.
Il est également opportun de rappeler à la présidente du Conseil du trésor l'engagement formulé par le premier ministre au moment du discours inaugural, engagement qui consacrait le droit des Québécoises et des Québécois de savoir ce que fait leur gouvernement de chaque dollar qu'il perçoit. Cette phrase très explicite du premier ministre s'applique tout particulièrement à ces ententes entre le gouvernement et le secteur privé, des accords sur des projets d'immobilisations qui auront tôt fait de totaliser des milliards de dollars que les contribuables auront déboursés de leurs poches.
Et, dans le cadre de l'Agence des partenariats public-privé, la transparence prendra une importance toute particulière puisque les milliards de dollars qui appartiennent en fait aux citoyens et aux citoyennes du Québec seront confiés à des personnes sûrement qualifiées, nul doute là-dessus, mais des personnes qui ne sont pas nécessairement issues de la fonction publique. Il ne faut surtout pas sous-estimer les risques que sous-tend la décision de confier l'argent du public à des gestionnaires qui proviennent d'entreprises privées candidates à l'obtention de contrats gouvernementaux. À ce sujet, nous ne savons pas si les compagnies qui maintiendront un lien d'emploi ou un lien d'affaires avec un ou des membres du conseil d'administration de l'agence, ou encore un ou des membres des groupes d'experts qui seront constitués par l'agence, pourront soumissionner sur les appels d'offres publics. Le cas échéant, ces personnes se retrouveraient en situation de conflit d'intérêts.
Vous savez, les écritures comptables constituent également un autre élément de transparence qui doit être considéré. Rien dans le projet de loi ne garantit qu'une information pleine et entière sur les partenariats public-privé sera disponible dans les documents budgétaires du gouvernement. Les PPP reposeront plus souvent qu'autrement sur le financement privé de projets d'immobilisations. En contrepartie de ce financement, l'entreprise privée pourra instaurer une nouvelle tarification ou encore facturer périodiquement le gouvernement. Cela résultera en une succession de nouveaux engagements financiers à long terme pour l'État, qui pourraient être assimilés à un deuxième service de la dette.
À ce sujet, l'exemple de la Grande-Bretagne, quoi qu'en dise certains collègues d'en face, est particulièrement explicite. Je les encourage à lire l'article dans la revue L'actualité, à ce sujet; de nombreux exemples ont été démontré de la faillite de cette expérience. En Grande-Bretagne, les partenariats public-privé étaient vus comme une solution miracle à l'endettement public. Et, pour éviter une levée de boucliers, on inscrivait aux livres que les sommes impliquées pour l'année en cours, en omettant de présenter l'impact total du financement qui, lui, s'échelonnait sur plusieurs dizaines d'années. Alors, je pense que, là-dessus, Mme la Présidente, lorsqu'il est question d'éthique, de déontologie, le projet de loi n° 61 ne fait rien pour nous rassurer.
J'aimerais rappeler aussi que le Laboratoire d'éthique publique de l'Institut national de la recherche scientifique, ce qu'il dit par rapport au projet de loi n° 61 est encore quelque chose qui doit alimenter notre réflexion. Et je les cite, ils disent que, «dans le débat qui entoure la création de l'agence, le gouvernement semble vouloir évacuer les questions éthiques avec lesquelles cette agence devra composer, tout comme il a évacué toute la question du pourquoi des PPP. En bout de piste, cela entraînera des répercussions inévitables et, dans certains cas, graves sur l'étendue et la qualité des services rendus à la population».
n(23 h 20)n Alors, Mme la Présidente, je dois vous dire que j'ai de nombreuses réticences, tout comme plusieurs, et pour ne pas dire l'ensemble de mes collègues de l'opposition officielle, et des nombreuses personnes qui sont venues en commission parlementaire exprimer leurs craintes, leurs appréhensions et leur désaccord par rapport à la création de cette agence sur les PPP. Donc, tout comme eux, Mme la Présidente, je serai obligée de voter contre ce projet de loi. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée. Alors, comme prochain intervenant, je reconnais le député de Bertrand. À vous la parole.
M. Claude Cousineau
M. Cousineau: Merci, Mme la Présidente. Je vais continuer sur la lancée de ma consoeur de Rimouski.
Mme la Présidente, pourquoi s'opposer au projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec? Eh bien, Mme la Présidente, pour plusieurs raisons dont nous ont fait part avec justesse le Protecteur du citoyen, le Vérificateur général du Québec, beaucoup d'intervenants rencontrés lors des audiences de la Commission des finances publiques sur ce sujet, comme par exemple le mémoire du Commissaire au lobbyisme du Québec ou encore les témoignages d'intervenants, plus de 40, qui nous ont parlé des expériences douteuses sur les plans de l'efficacité, de la rentabilité et de l'impact sur les citoyens, expériences tentées dans d'autres pays et qui se sont avérées des échecs ou des expériences à ne pas répéter.
Mme la Présidente, prenons tout d'abord l'opinion du Protecteur du citoyen, déposée le 3 septembre 2004. Il dit clairement à la page 2, et je cite: «Pour le citoyen, cinq principes m'apparaissent primordiaux: ce sont les valeurs de transparence, d'équité, de qualité des services, d'imputabilité et de protection de l'intérêt public, à propos desquels le projet de loi n° 61 me paraît silencieux.» Pour nous, de l'opposition officielle, il est clair que l'encadrement proposé dans le projet de loi n° 61 actuel est déficient. Il ouvre la porte au favoritisme et soulève beaucoup d'interrogations.
Le Protecteur du citoyen doit conserver, Mme la Présidente, sa compétence pour permettre au public de se faire entendre, surtout en ce qui a trait à des dossiers spécifiques, comme par exemple la gestion des centres de détention. Ça a fait l'objet de certaines discussions. Il faut que le Protecteur du citoyen ait les coudées franches pour qu'il puisse intervenir en tout temps, surtout pour l'évaluation des projets.
L'article 13 du projet de loi, Mme la Présidente, affaiblit énormément les pouvoirs et les devoirs des ministères et des ministres concernés parce qu'il transfère des responsabilités aux partenaires privés. Il faut rappeler que ces pouvoirs ont été attribués par loi ou règlement dans un esprit bien précis du législateur, lequel, par sa sagesse, voulait protéger la prestation de services aux citoyens. Comment, Mme la Présidente, concilier, d'une part, un transfert de pouvoirs vers le privé avec tout ce que ça peut entraîner de suivis, de vérifications en ce qui a trait aux services rendus aux citoyens, services dont ils ont droit et, d'autre part, le fait que le projet de loi enlève des pouvoirs au Protecteur du citoyen, pouvoir de surveillance, pouvoir de contrôle? Il y a ici quelque chose qui ne fonctionne pas ou du moins qui paraît curieux, pour le moins très questionnable.
Prenons, par exemple, Mme la Présidente, certaines fonctions de l'État particulièrement sensibles comme le recouvrement des créances fiscales de l'État ou des dettes des prestataires d'aide sociale. Le Protecteur du citoyen en parle abondamment dans son mémoire et s'interroge sur le fait que les droits fondamentaux des citoyens pourraient être bafoués, la confidentialité des dossiers, érodée. Le transfert au privé des dossiers personnels ouvrirait la porte à des glissements dangereux. Le cas échéant, quels seraient les recours auprès de l'État des citoyens lésés ou insatisfaits des décisions par un arbitre privé? Quels seront ses recours? Aura-t-il accès à un tribunal administratif indépendant? Pourra-t-il demander une contre-vérification indépendante ou devra-t-il se soumettre à la décision du privé?
Mme la Présidente, le Protecteur du citoyen se pose beaucoup de questions concernant les filiales de l'agence et leur contrôle. Comme le Vérificateur général, pourra-t-il les vérifier? Est-ce que ce sera possible? Comment se fera la nomination des membres du conseil d'administration de l'agence? Est-ce qu'on ouvre la porte à des nominations politiques ou partisanes? Voilà une situation où le gouvernement marche sur des oeufs.
Les recommandations du Protecteur du citoyen, à la page 5 ? et ce n'est pas l'opposition officielle qui l'a dit ? dans son mémoire, nous semblent sages à l'effet de mettre en place des mécanismes de consultation auprès des groupes intéressés telles les associations patronales et syndicales avant de procéder à quelque nomination que ce soit. Nous ne retrouvons pas ces dispositions dans le projet de loi n° 61. Quelles seront les règles en matière d'éthique et de déontologie? À qui s'appliqueront-elles? Comment éviter du partenariat-favoritisme, népotisme, des conflits d'intérêts, des retours d'ascenseur, les intérêts particuliers, le coulage d'information, les discussions entre petits amis sur des dossiers en traitement, des projets à l'étude? Comment s'assurer que l'agence jouera un rôle efficace puis que ses administrateurs, son personnel, les filiales de l'agence soient contrôlés, vérifiés et sanctionnés sévèrement advenant un manque au code d'éthique ou de déontologie? Toutes ces questions restent en suspens.
Mme la Présidente, beaucoup de questions sont posées par le Protecteur du citoyen qui devraient donner au gouvernement un signal clair en ce qui a trait au projet de loi n° 61. Ce projet de loi est dangereux et ouvre de dangereuses portes qui pourraient placer le gouvernement dans des situations gênantes.
Que nous dit, Mme la Présidente, le Vérificateur général du Québec qui a déposé, le 11 novembre 2004, une lettre à la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor. Dans sa lettre, le Vérificateur met en garde la ministre sur la faiblesse que le projet de loi n° 61 démontre en ce qui a trait à l'importance des vérifications et de la reddition de comptes. Cet extrait de la lettre du Vérificateur général, Mme la Présidente, parle de lui-même, et je cite: «Cependant, je crois opportun de rappeler que cet accès ne permet pas nécessairement une vérification complète. Si elle le désire, l'agence et ses filiales pourront fort probablement m'empêcher ? c'est le Vérificateur général qui parle ? de mener les travaux de vérification de l'optimisation des ressources, vérification de gestion, que je jugerais nécessaires.» Nous voyons, Mme la Présidente, que ces propos concordent très bien avec les appréhensions du Protecteur du citoyen décrites auparavant de mon exposé.
En ce qui a trait au Commissaire au lobbyisme, ce dernier, tout comme le Protecteur du citoyen et le Vérificateur général du Québec, met en garde la ministre et son gouvernement des dangers qui planent au-dessus de ce projet de loi n° 61. La conclusion du mémoire parle d'elle-même, et je cite: «Dans un contexte où l'on envisage de privilégier le recours aux partenariats public-privé, il apparaît de bien évaluer l'importance d'intégrer à cette démarche les valeurs qui lui conféreront la crédibilité nécessaire pour en assurer le succès. L'adhésion des citoyens ne peut être acquise sans que leur soit garantie la transparence des processus liés à l'implantation et à la mise en oeuvre de ces partenariats. En ce sens, il est clair qu'un partenariat public-privé ne devrait d'aucune façon signifier moins de transparence dans la prise de décision qui doit être guidée avant tout par l'intérêt public.» Mme la Présidente, les tenants du partenariat public-privé nous donnent toutes sortes de raisons pour privatiser. Par exemple, on dit: Confier la gestion des aqueducs et la vente d'eau au privé ferait économiser beaucoup d'argent de l'État. Mme la Présidente, cette affirmation est facile, mais pas très évidente dans les faits. Plusieurs exemples démontrent le contraire ou du moins placent des bémols à cette affirmation.
n(23 h 30)n Prenons l'exemple concret de la privatisation de l'eau en Grande-Bretagne. Ça a été mentionné à plusieurs reprises par mes confrères. Le gouvernement britannique a reçu 11,2 milliards de dollars canadiens lors de la privatisation de l'eau. Toutefois, les compagnies privées ont été renflouées à même les coffres de l'État pour 3,2 milliards de dollars. Des réserves de liquidités de 6,8 milliards ont été transférées au privé, et l'État a effacé des dettes de 10,7 milliards du bilan des compagnies privatisées. Bref, dans les faits, les contribuables anglais ont payé 9,5 milliards de dollars pour voir leur service d'eau passer aux mains du privé. Ces informations, on les tient de Louis-Paul Lauzon. Entre 1992 et 1996, les subventions reçues par les quatre premières compagnies anglaises ont dépassé les impôts qu'elles ont payés de 240 millions de dollars canadiens.
Plus près de nous, Mme la Présidente, un autre exemple ici, au Québec: la privatisation du Mont-Sainte-Anne. Le centre de ski avait un déficit de 2 millions de dollars annuellement. Avec la vente du mont... ski au privé, l'État a assumé de 30 à 40 millions de dollars de dettes, donc autour de 3 millions de dollars d'intérêts annuels. Il s'est aussi coupé de 1,5 million de dollars de revenus annuels. Donc, la perte annuelle de 2 millions par année s'est transformée en un décaissement de 5 millions par année, ce qui a creusé le déficit du Québec plutôt que de renflouer l'État.
Autre exemple, Mme la Présidente: en 1995, Gaz métropolitain a reçu 35,8 millions de dollars de subventions de la part du programme Québec-Canada Travaux d'infrastructures pour des investissements totaux de 82 millions. Donc, 44 % des investissements d'infrastructures de Gaz métropolitain ont été financés directement à même les taxes et les impôts des contribuables québécois.
Autre raison, Mme la Présidente, évoquée pour privatiser: des investissements importants seront nécessaires, lors des prochaines années, afin de maintenir et d'améliorer les réseaux de distribution d'eau. Le privé serait un partenaire nécessaire pour trouver et fournir ces investissements. Les faits sont tout autres, Mme la Présidente. Les entreprises privées sont davantage intéressées à augmenter leurs marges de profit qu'à investir dans l'entretien et la réfection des réseaux de distribution d'eau. Par ailleurs, la capacité du privé à lever rapidement du capital n'est pas nécessairement plus grande que celle de l'État, qui peut facilement émettre des obligations d'épargne et qui possède d'excellentes cotes de crédit auprès des agences de cotation. Ainsi, l'État emprunte à bien meilleur marché que les compagnies privées. Finalement, les entreprises bénéficient d'allégements fiscaux ainsi que d'avantageux programmes de subventions de la part de l'État pour leurs investissements en infrastructures et en recherche et développement. Cela signifie qu'en bout de ligne les contribuables paient pour les investissements des entreprises.
D'autres cas concrets, Mme la Présidente, qui illustrent les faiblesses des PPP: entre 1992 et 1996, les investissements en immobilisations des quatre premières entreprises d'eau anglaises ont constamment diminué, alors que les dividendes aux actionnaires augmentaient, toujours selon le Pr Lauzon. Par ailleurs, l'exemple du Yorkshire, où des consommateurs ont pâti du mauvais entretien des canalisations lors de la sécheresse de 1995, nous incitent à penser que la réfection, l'amélioration et l'entretien des réseaux n'est pas la priorité des entreprises privées.
Autre raison évoquée pour privatiser, Mme la Présidente: le privé est plus efficace et efficient que le public et pourrait rendre de meilleurs services à la population. Dans les faits, l'idée voulant que les entreprises privées soient plus efficaces et efficientes que les administrations publiques est loin d'être vérifiée. La théorie veut que la compétition entre les entreprises forcent ces dernières à être performantes. Or, les entreprises de distribution d'eau, par exemple, sont, de par leur nature, des entreprises monopolistiques. Les incitations à la performance sont donc absentes, puisque, premièrement, l'eau est un produit qui ne peut être substitué par un autre et les gens sont obligés d'en consommer, ce qui assure aux vendeurs des ventes constantes.
Deuxièmement, les consommateurs sont captifs et ne peuvent changer de distributeur. Les entreprises vendant de l'eau n'ont donc pas à offrir de bons services et des prix compétitifs pour s'attirer plus de clients. Par ailleurs, les consommateurs devront payer, à l'intérieur de leurs factures d'eau, les coûts administratifs de la perception des factures ainsi que les profits de l'entreprise.
Une fois encore, la seule façon pour les entreprises monopolistiques d'augmenter leurs marges de profits sera de couper dans les processus de traitement des eaux et des conditions de travail des employés ou encore d'augmenter les prix. Finalement, les entreprises privées répondant à la logique du marché n'ont pas intérêt à fournir des services optimums à la population éloignée des grands centres à cause des coûts supplémentaires que cela entraîne.
Revenons, Mme la Présidente, au projet de loi n° 61. Beaucoup d'intervenants ont mis en garde la ministre concernant les partenariats public-privé. En France, beaucoup d'actes illégaux ont été mis à jour suite à la privatisation de l'eau: corruption des politiciens et des fonctionnaires, contributions occultes à des partis politiques, vente d'eau impropre à la consommation, collusion illégale entre les entreprises oligopolistiques lors d'appels d'offres, évasion fiscale. Ces compagnies françaises sont Suez, Bouygues et la compagnie Générale des Eaux et elles sont toutes intéressées à faire affaire au Québec pour privatiser l'eau et avoir le contrôle sur cette richesse abondante mais combien fragile.
Mme la Présidente, un des enjeux majeurs dans le dossier des partenariats public-privé et dans la mise en place de l'agence que la présidente du Conseil du trésor veut instaurer pour encadrer les PPP est celui de l'éthique. En effet, un bref survol de la littérature portant sur la question a vite fait de nous mettre en garde contre les nombreux pièges inhérents à la prolifération des PPP.
Par exemple, l'Organisation de coopération et de développement économique, l'OCDE ? ma consoeur de Rimouski en a parlé ? qui regroupe l'ensemble des grands pays industrialisés, fait de sévères mises en garde quant à la multiplication des PPP en affirmant que le recours au secteur privé risque d'aboutir à une augmentation de la corruption et de l'affairisme. Mme la Présidente, l'OCDE, et ce n'est pas l'opposition qui le dit, en arrivait à cette conclusion, dès novembre 1997, alors que, dans le cadre d'un colloque sur l'éthique, la formule des partenariats public-privé retenait l'attention. Atelier sur l'éthique préparé par le Pr John Langford de l'Université de Victoria, Colombie-Britannique. La recommandation principale à ce moment-là de l'OCDE aux organismes gouvernementaux était dès lors de définir des règles claires au niveau de l'éthique et de la transparence avant de s'engager dans la voie des PPP. Visiblement, la présidente du Conseil du trésor n'a pas cru bon de suivre cette consigne, Mme la Présidente.
Voilà pourquoi le projet de loi n° 61 est dangereux. Il ouvre la porte à des partenariats douteux, questionnables. Un contrôle serré s'impose. Je suis d'accord avec le député de Verdun lorsqu'il dit, et je cite ? très intéressant: «Il me semble qu'il serait normal que, lorsqu'une entente de partenariat est passée avec des partenaires, elle puisse être rendue publique et disponible aux parlementaires que nous sommes. Et je souhaiterais ? Mme la Présidente ? M. le Président ? parce qu'il parlait au président à ce moment-là ? que ce soit l'un des principes qui nous guident en ce qui a trait à la transparence de la gestion du bien public.» Alors, on voit que le député de Verdun est très sage.
Mme la Présidente, prenons quelques cas concrets qui m'ont été soulevés, dans ma circonscription, par des citoyens qui se questionnent sur la pertinence d'un tel projet de loi qui ouvre la porte du transfert des biens collectifs vers le privé. Comment le secteur privé pourra-t-il, dans certains domaines, offrir la même qualité de service, la même prestation, sans augmenter les tarifs aux usagers? Il est évident que l'entreprise privée est là pour faire des profits. Jusqu'à un niveau décent, on est d'accord, mais pas sur le dos des citoyens en ce qui concerne les services essentiels. L'exemple de la privatisation de l'eau en Europe est un exemple flagrant.
Mme la Présidente, un organisme public qui veut aller en sous-traitance, par exemple pour l'entretien des bâtiments pour des services de soutien, doit-il aller en soumissions publiques ou simplement sur invitation? Ce type de partenariat public-privé doit être encadré pour éviter l'appel aux amis ou aux firmes connues, trop connues de certains membres du conseil d'administration ou de certains membres du personnel, ou encore de partis politiques municipaux et nationaux. Qu'arrivera-t-il aux centaines d'employés du secteur public qui seront tassés par le privé qui, en quête de profits, coupera inévitablement dans le personnel ou encore offrira des emplois à rabais?
Un privé qui veut construire un CHSLD le fera-t-il dans le respect des normes de sécurité, avec des matériaux de qualité? Qui inspectera la conformité des plans et devis et la conformité de la construction? Quels seront les coûts de location par l'État à long terme? Qui contrôlera la hausse du coût des loyers? Est-ce que l'Agence de partenariats public-privé créée par la Loi n° 61 rendra des comptes au public concernant les choix des entreprises ou si, par souci de transparence envers les autres firmes, ils seront écartés du processus? Toutes ces questions, Mme la Présidente, sont légitimes et démontrent très bien les craintes que ce projet de loi soulève dans la population.
n(23 h 40)n Alors, Mme la Présidente, je me dois de souligner certaines grandes lignes, mais je vois qu'il me reste uniquement 45 secondes. Alors, je vais vous dire que, nous, de l'opposition officielle, nous allons voter contre ce projet de loi pour toutes les raisons que j'ai mentionnées. Il y a trop de questions que nous nous posons. Il y a trop de questions qui sont restées sans réponse. Alors, en conclusion, Mme la Présidente, nous allons nous prononcer, et je vais me prononcer contre le projet de loi n° 61. Merci.
La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant. Je suppose... Le député de Saint-Hyacinthe. Alors, à vous, la parole, M. le député.
M. Léandre Dion
M. Dion: Merci, Mme le Présidente. Il arrive souvent, Mme la Présidente, que nous avons le plaisir de commencer une intervention en disant: Je suis très heureux de prendre la parole sur tel projet de loi. Ce soir, Mme la Présidente, je ne peux pas dire cela, et ce n'est pas parce qu'il est 11 h 40. Même s'il est tard, Mme la Présidente, ça me fait plaisir d'être ici, d'être avec vous, d'être avec les collègues, mais ça ne me fait pas plaisir de parler sur la loi n° 61 parce que je pense qu'il y a, dans cette loi-là, un piège important, Mme la ministre... Mme la Présidente. Vous voyez, ce n'est pas la première fois que je fais l'erreur, Mme la Présidente. Ça doit être annonciateur de quelque chose. Mais, quoi qu'il en soit, je reviens à mon propos.
En fait, est-ce qu'on est absolument contre le partenariat public-privé? Est-ce que c'est une religion à laquelle on se dévoue corps et âme? La réponse, c'est non, Mme la Présidente. On ne dit pas qu'il soit absolument impossible que le partenariat public-privé, dans certains projets spéciaux, par exemple, construction de routes peut-être, peut-être... Je dis bien «peut-être», Mme la Présidente. Ce n'est pas prouvé, ce n'est pas démontré. De toutes les lectures que j'ai faites sur le projet de loi, je n'en ai pas trouvé un, exemple. Mais je dis: On n'est pas dans l'absolu, on est dans le relatif. Peut-être. Peut-être que c'est possible de trouver des projets qui seraient bénéfiques, qui seraient utiles pour la société et qui coûteraient moins cher. Peut-être. Je ne sais pas. Je n'en ai pas trouvé.
Mais, face au projet de loi n° 61, je suis inquiet. Je suis inquiet parce que je trouve que ce projet de loi là est basé sur des postulats qui ne tiennent pas la route. Il est basé plus sur des préjugés que sur des postulats. Par exemple, on dit: Ah! mais on va... J'ai entendu quelque chose d'absolument extraordinaire. On a dit: On va pouvoir faire plus de travaux avec le même argent. Mme la Présidente, c'est fort, ça. C'est fort. On va pouvoir faire plus de travaux avec le même argent. Comment on va faire ça? On va prendre le même montant d'argent, mais il va y avoir plus de travaux après. C'est pas mal fort, ça.
Est-ce que ça veut dire que le privé, dans le partenariat public-privé, apporterait des économies? Le privé serait moins cher? C'est ça que ça voudrait dire, Mme la Présidente? Le privé, on s'entendra, son objectif, c'est de faire des profits. Personne ne conteste ça. On n'est pas contre les profits légitimes. D'après ce que j'ai lu, dans ce domaine-là, les profits seraient considérés comme à peu près suffisants entre 15 % et 20 %. Mettons 15 %, mettons 15 %, Mme la Présidente. Donc, il faut faire des profits. Donc, s'il faut faire des profits, ça coûte 15 % de plus dans le même projet, en principe.
Bon. Et ensuite de ça on sait qu'une entreprise privée, ça peut faire faillite. Ça peut faire faillite, Mme la Présidente. Donc, prêter à une entreprise privée, c'est plus risqué. Si c'est plus risqué, il faut le faire payer, ce qui fait que, de toutes mes lectures, j'en déduis que ça coûte au bas mot 17 % plus cher avec l'entreprise privée.
Donc, on ne peut pas dire que ça coûte moins cher, à moins que... à moins que l'entreprise privée paie moins ses employés que l'entreprise publique. Mais, si on regarde les études faites par Statistique du Québec, le salaire dans la fonction publique est comparable au salaire dans le privé à très peu de chose près. Là où ça coûte beaucoup plus cher, c'est au niveau des municipalités, où ça coûte beaucoup plus cher. Mais, dans les grands travaux qui sont sous l'autorité du gouvernement et dans les fonctions publiques, ça coûte à peu près le même prix. Mais il se peut que, dans certains cas, l'entreprise privée paie moins cher ses employés. Mais, en conséquence, Mme la Présidente, l'employé paie moins d'impôts. Donc, l'État, à la fin, ne se retrouve pas dans de meilleures conditions pour assurer les services.
Alors, Mme la Présidente, dire qu'avec le privé c'est moins cher, je n'ai pas trouvé, dans tout ce que j'ai lu, je n'ai pas trouvé d'indices de cela. Je n'ai pas trouvé de preuve de ça, Mme la Présidente. J'ai plutôt trouvé des preuves du contraire. Avec l'entreprise privée, puis c'est normal, ça coûte plus cher. C'est tout. Ça coûte plus cher.
Ah! mais on dit: Vous savez, le privé, c'est meilleur. C'est meilleur que le public. C'est mieux administré que le public. Il y a une meilleure planification que le public. Ça voudrait dire que les gens qui sont dans le privé sont d'une qualité professionnelle et morale supérieure et les gens qui sont dans le public seraient d'une qualité professionnelle et morale inférieure. Bien, au niveau de la moralité, je pense qu'on va s'entendre, c'est assez également réparti dans la société. Je pense que ça, je n'ai pas envie, moi, de classer une catégorie de la société comme étant moralement supérieure et l'autre catégorie, comme étant moralement inférieure. Je pense qu'on s'entend là-dessus. Bon. Donc, on ne peut pas dire que c'est ça qui est le coup, qui est la réalité.
Donc, pourquoi ce serait mieux? Les professionnels? Les professionnels dans le public sont triés sur le volet, sont triés sur le volet, hein? Parce que, même si, dans le public, souvent le salaire n'est... est comparable au privé, mais les possibilités d'avancement souvent sont moins élevées... C'est plus facile pour quelqu'un qui réussit à tirer son épingle du jeu d'avoir des salaires beaucoup plus considérables dans le privé. Alors donc, est-ce que vraiment il y a une meilleure planification, une meilleure compétence professionnelle dans le privé que dans le public? Je ne pense pas. Je ne pense pas. Parce que, dans le public, les gens ont la permanence, ils ont la stabilité. Et, pour beaucoup de gens, avoir la stabilité et pouvoir être tranquilles mentalement et pouvoir consacrer son temps à sa famille... Ils ont plus de stabilité dans la fonction, mais ils ont plus de stabilité dans l'endroit où ils travaillent aussi. Alors, c'est plus simple pour élever une famille. Et, pour beaucoup de gens, c'est extrêmement important, Mme la Présidente. Alors, je pense qu'on ne peut pas dire qu'il y a une meilleure planification, que les gens sont plus professionnels, qu'ils vont mieux planifier dans le public... dans le privé.
Même, Mme la Présidente, on pourrait penser qu'objectivement, sans juger personne, il pourrait y avoir un intérêt dans le privé à planifier moins bien. Pourquoi? Parce que le privé pourrait être intéressé, face à un projet qu'on ne sait pas trop si le gouvernement va décider d'aller de l'avant, on pourrait être intéressé à planifier puis à prévoir des coûts moindres, sachant qu'on pourra faire ajuster ces coûts par après. Vous savez que, dans le transport, ça existait, ça, à une époque. Ça a été aboli, ça. Ça existait, l'idée de présenter une soumission avec 10 % à 15 % en bas du coût puis, après ça, faire augmenter les coûts. Et c'était augmenté automatiquement, et puis les gens... tout le monde allait chercher son profit. Mais ça, ça a été aboli, ça, Mme la Présidente. Ça n'existe plus, ces choses-là, là.
Alors, dans ce cas-là, une entreprise privée pourrait être intéressée pour faire sortir une décision politique à planifier un peu plus bas puis, après, quitte à ajuster les coûts. Alors, dire que la planification va être meilleure dans le privé, il y a un intérêt objectif à ce qu'elle ne le soit pas. Ça, c'est une réalité objective. Bon.
Ensuite de ça, bien, une compagnie, vous allez dire: Mais elle ne peut pas faire ça parce qu'à ce moment-là, si on lui refuse, elle va être prise pour réaliser le projet, réaliser un projet qu'elle a planifié avec des revenus insuffisants. Bien, il y a un truc qui existe, et c'est rapporté dans toutes les lectures que j'ai faites, je ne l'invente pas, il s'agit simplement qu'une compagnie mère fonde une filiale spécifique pour un projet, une filiale spécifique pour un projet. C'est la filiale qui est responsable du projet. Si ça ne marche pas, tous les employés de la compagnie qui font partie de la filiale ont été grassement payés, la filiale fait faillite, ça vient de finir. Puis le gouvernement se retrouve avec un éléphant blanc, un demi-hôpital, un deux tiers de prison, un petit bout de chemin qui n'est pas fini puis il est pris avec ça. Qu'est-ce qu'il fait avec ça, hein?
Alors, Mme la Présidente, ce n'est pas vraiment sûr que l'entreprise privée va mieux planifier. Il n'y a pas de certitude. Il n'y a pas de garantie. Et l'expérience ne montre pas que c'est une voie sécuritaire. Vous allez dire: Oui, mais qu'est-ce que vous faites des dépassements de coûts? J'ai parlé tout à l'heure de la façon pour l'entreprise privée de s'en tirer.
n(23 h 50)n Mais je vais vous lire ici un petit passage qui va vous intéresser: «Le gouvernement libéral laisse entrevoir que la construction du métro de Laval...» Tiens! le métro de Laval. «Le métro de Laval n'aurait pas connu de hausse des coûts reliée à sa construction si le projet avait été réalisé en partenariat public-privé. Comme les coûts de construction du métro de Montréal se comparent à ceux du métro de Toronto ? ça, c'est établi, donc il ne semblerait pas qu'il y ait eu des coûts exorbitants, c'est comparable ? et sont inférieurs à ceux du métro de Lyon, par exemple ? donc, il ne semblerait pas qu'il y ait là de choses exorbitantes ? nous pouvons présumer qu'un partenariat public-privé n'aurait pas généré d'économies, au contraire, mais simplement une meilleure indication des coûts avant le début des travaux.» Ah! Meilleure indication des coûts avant le début des travaux! Peut-être.
«Cependant, comme la construction d'un métro fait place à beaucoup d'imprévus, le risque associé au projet était considérable. Rien ne prouve qu'un partenaire privé aurait été prêt à en assumer la responsabilité. De plus, même dans l'éventualité où un partenaire aurait été disponible, il est assuré que sa marge bénéficiaire initiale aurait été fixée en fonction du risque plus élevé.» Donc, il aurait pris une marge bénéficiaire plus élevée, ce qui est logique.
«Un tel projet aurait également nécessité une préparation extrêmement longue et coûteuse.» Prenez, par exemple: «La construction du métro de Londres en partenariat privé-public a donné lieu à un contrat de 183 000 pages. Les frais juridiques associés au projet ont dépassé les frais de conception, et le coût des études préliminaires s'est élevé à 475 millions de livres sterling, près de 1 milliard de dollars.» Et c'est payant. Ça semble être payant. Ça semble être payant de faire passer par le privé.
Moi, je ne comprends pas. Je ne comprends pas que le gouvernement aille dans ce sens-là. Moi, je... Vous savez, je ne dis pas, pour un projet précis, dire: On l'essaie. Pour un projet précis, on contrôle les coûts, puis, si ça réussit, tant mieux, on en essaiera un autre. Ah! Ça, c'est une autre histoire. Peut-être qu'on pourrait passer une loi pour un projet précis, bien encadré, puis tout ça. Là, on pourrait prendre le risque. Au moins, ce serait un risque limité et contrôlé, tandis que le projet de loi qu'on a là, ce n'est tellement pas contrôlé et limité que le gouvernement va se délester de sa responsabilité et va confier ça à une agence, puis, nous autres, on n'aura rien à dire. On aura à assumer la responsabilité des coûts devant l'opinion publique, mais on n'aura rien à dire quant à la gestion de ces choses-là, de ces constructions-là, de ces travaux-là, Mme la Présidente. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement réagit comme ça, pourquoi il pousse sur une loi comme celle-là.
D'ailleurs, j'ai une autre preuve, Mme la Présidente, comme quoi les coûts sont beaucoup plus élevés dans le privé que dans le public. Prenez par exemple... On va prendre un exemple. Au Québec, on a un système de santé universel, public, gratuit pour tout le monde. Ça coûte cher, ce système de santé là, ça coûte très cher. Aux États-Unis, ils n'ont pas ça. Ça leur coûte le double. Ils paient deux fois plus pour les services de santé, aux États-Unis. C'est tout privé. Ce n'est pas une preuve que c'est moins cher au privé.
Prenez un autre exemple, Mme la Présidente, un exemple qui est plus près de nous. On dit: Le Québec paie trop d'impôts. On paie trop d'impôts, au Québec. On paie plus d'impôts en Ontario. Est-ce vrai? La réponse: si on calcule les taxes scolaires, les taxes municipales, les taxes fédérales et provinciales, les impôts provinciaux et les impôts fédéraux, on paie un 2,5 milliards à peu près de plus de taxes qu'en Ontario, vous voyez, pour le même nombre de personnes, pour le même nombre de personnes. Mais, si on regarde un peu plus de près et qu'on regarde... on évalue qu'est-ce qu'on a, parce qu'on a un tas de choses qu'ils n'ont pas, par exemple, l'assurance médicaments publique, les garderies ? c'est public ? un tas de services qu'on a au Québec, qu'ils n'ont pas en Ontario, et qu'on calcule ce que ça coûterait si on payait ces services-là au prix qu'ils sont payés en Ontario, eh bien, c'est 4 milliards de plus. Ça coûterait...
Une voix: ...
M. Dion: Les frais de scolarité en plus. Un tas de choses qu'on a, qu'ils n'ont pas. Alors, ça nous coûterait 4 milliards de plus si c'était privé. Donc, ça nous coûte 1,5 milliard de moins parce que c'est public. Mme la Présidente, ce n'est pas vrai que ça coûte moins cher dans le privé. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas exact.
D'ailleurs, il y a un autre... Puisque ce n'est pas vrai, comment on s'y prend pour vendre ça à la population? Bien, on dit à la population: On va diminuer la fonction publique, ça va coûter moins cher puis vous allez avoir des remboursements d'impôts, vous allez payer moins d'impôts.
Mme la Présidente, quand on fait un contrat avec l'entreprise privée, qu'est-ce qui se passe? Ce qu'on met au budget de l'année, c'est ce qu'on va payer pendant l'année alors à la compagnie qui fait le projet. Admettons qu'on a un projet de 1 milliard, hein, c'est important, un gros hôpital à Montréal, 1 milliard, alors l'entreprise privée... Si on le mettait au budget de l'État, ce serait un endettement de 1 milliard, hein? Mais, on le donne à l'entreprise privée, alors, c'est l'entreprise privée qui s'endette. Nous, on ne paie que, mettons, 50 millions par année, 50 millions par année, mettons. Bien, non, ça peut être 60 millions, mais un montant modeste. C'est ça qui va aux livres du gouvernement. Donc, ça permet de ne pas faire de déficit puis le gouvernement a l'impression de ne pas grossir sa dette. Mais, la dette, elle est cachée, M. le Président. C'est une entreprise de camouflage de la dette.
Une voix: ...
M. Dion: Mme la Présidente, excusez-moi, Mme la Présidente, oui. Je m'incline. Alors, vous voyez, je me suis laissé emporter, parce que c'est troublant, c'est troublant l'entreprise de camouflage qu'il y a là-dedans, le camouflage d'une dette qui va porter lourdement sur les épaules de nos enfants, Mme la Présidente. Moi, j'ai dit aux jeunes: Prenez garde, prenez garde, vous avez voté pour ça, là, peut-être, là. Prenez garde, ça va être sur vos épaules pendant longtemps. Moi, je vous le dis, là. C'est ça, la réalité. Je ne voudrais pas que ce soit ça.
Alors, Mme la Présidente, je me dis: c'est ça, la réalité. Pourquoi ouvrir ça? Sans compter qu'avec le partenariat public-privé on va aller en soumissions selon les règles de l'ALENA. La compagnie, là, bien, elle sera peut-être une compagnie américaine basée aux Barbades ou une compagnie canadienne basée aux Barbades. On connaît ça, hein? Ne paie pas d'impôts aux Barbades puis ne paie pas d'impôts ici. Alors, voyez-vous, le gouvernement se retrouve avec une compagnie, qui va prendre son profit, 17 % en gros de plus, qui va payer moins ses employés, donc les employés vont payer moins d'impôts au gouvernement, et la compagnie ne paiera pas son impôt. Et sans compter que, même si elle payait des impôts, on sait que l'impôt sur les profits des compagnies, c'est moins que l'impôt sur le salaire d'un privé, hein?
Alors là, le gouvernement se retrouve avec moins d'impôts, ça coûte plus cher, moins d'impôts, moins capable de payer. Mais tout ça est camouflé, et la dette est reportée sur 50 ans. Belle entreprise, hein? C'est ça qu'on vous prépare, les jeunes, là. Ceux qui m'écoutez, là, c'est ça qu'on est en train de vous préparer. Nous, on est contre ça. On est contre ça, parce qu'on est contre le fait qu'on vous endette pour l'avenir.
Alors, moi, je ne comprends pas pourquoi le gouvernement va de l'avant avec ça. Je me pose la question: Pourquoi il fait ça? Quelle pourrait être l'intention? Quelle pourrait être... Je ne veux pas parler de son intention. Mais quelle pourrait être sa visée. Il dit: Il faut avoir moins d'États. On a trop d'États. Il faut avoir moins d'États. Est-ce que son intention, ce serait de déstructurer l'État du Québec? Est-ce que ce serait d'affaiblir le Québec, entre autres, face au fédéral? Est-ce que ce serait diminuer sa fonction publique, parce qu'ils savent, eux... Ils ont eu un premier ministre, Jean Lesage, un homme extraordinaire, qui a mis en place la Caisse de dépôt et placement, qui a nationalisé Hydro-Québec et qui a fait en sorte de lancer le Québec dans le développement économique, social et intellectuel, un homme extraordinaire. Alors, ils le connaissent, c'était un de leurs premiers ministres. Et là ils se rendent compte que ça a renforcé le Québec. Mais un certain nombre parmi eux ne veulent pas le Québec soit fort; ils veulent qu'il soit faible, qu'il soit à la merci d'Ottawa, qu'il soit à la merci du fédéral.
Ajournement
La Vice-Présidente: Alors, compte tenu de l'heure, je vais devoir malheureusement ajourner nos travaux à demain, vendredi 26 novembre, à 10 heures, et, en protégeant votre droit de parole, il vous restait une minute, un peu plus qu'une minute de temps, M. le député.
(Fin de la séance à minuit)